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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Monday, September 29, 1986 - Vol. 29 N° 18

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière sur l'avant-projet de loi sur les forêts


Journal des débats

 

(Quinze heures dix minutes)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission parlementaire de l'économie et du travail reprend cet après-midi sa consultation particulière sur l'avant-projet de loi sur les forêts. Avant de débuter, je demanderais au secrétaire de la commission de nous indiquer s'il y a des remplacements.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Bélanger (Mégantic-Compton) est remplacée par M. Gauvin (Montmagny-L'Islet). M. Cannon (La Peltrie) est remplacé par M. Poulin (Chauveau). M. Filion (Taillon) est remplacé par M. Perron (Duplessis). M. Gobé (Lafontaine) est remplacé par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata). M. Leclerc (Taschereau) est remplacé par M. Middlemiss (Pontiac). M, Lefebvre (Frontenac) est remplacé par M. Paradis (Matapédia). M. Paré (Shefford) est remplacé par M. Jolivet (Laviolette). M. Parent (Bertrand) est remplacé par M. Desbiens (Dubuc). M. Rivard (Rosemont) est remplacé par M. Audet (Beauce-Nord).

Le Président (M. Charbonneau):

D'accord. Je vais donner l'ordre du jour pour aujourd'hui. À quinze heures, donc, immédiatement après nous allons commencer à entendre l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides. Par la suite, nous entendrons l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec. En soirée, nous entendrons la Fédération des travailleurs forestiers du Québec et l'Ordre des technologues des sciences appliquées.

S'il n'y a pas de question ou de demande de précision... M. le député de Laviolette.

Mémoire du collectif "Au nom de la forêt"

M. Jolivet: Oui. Tel qu'il avait été entendu lors de la discussion sur les gens qui voulaient intervenir en cette commission mais qui n'ont pas pu le faire parce que l'ensemble de l'horaire a été émis par la décision majoritaire des membres de la commission, j'ai un document qui vous sera remis ici à tous les membres de la commission et qui est fait par le collectif "Au nom de la forêt". J'ai les copies nécessaires pour les dépôts tel qu'on s'était entendu.

Le Président (M- Charbonneau): En vertu de l'article 168, je pense qu'on va faire ce qu'on a fait la semaine dernière. Le secrétaire de la commission va y voir. Est-ce qu'il y a d'autres interventions préliminaires? M. le député de Duplessis, vous m'avez signalé...

M. Perron: Oui. La semaine dernière, nous avons eu un organisme qui s'est présenté devant la commission parlementaire qui avait pour nom l'Association forestière québécoise. En date du 27 septembre 1986, à la suite des questions que j'ai posées et aux réponses qui furent données par le ministre délégué aux Forêts se rapportant à la subvention de 170 000 $ du gouvernement à l'Association forestière québécoise, il était mentionné ceci dans un article du journal Le Soleil, sous la plume de M. Raymond Gagné: "L'Association forestière québécoise et son mouvement de jeunesse les Clubs 4-H ont fermé leurs portes lundi dernier faute d'argent nécessaire au fonctionnement des deux organismes.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis...

M. Perron: Je voudrais savoir si le ministre pourrait nous donner une réponse aujourd'hui...

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: ...en rapport avec l'affirmation qu'il a faite la semaine dernière.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis, ce n'est pas la période des questions, malheureusement. Peut-être pour vous ou pour plusieurs de nos collègues, mais le fait est que nous avons un mandat et c'est d'entendre des organismes. Je pense que, la semaine dernière, vous avez réussi à intervenir et à poser quelques questions au ministre dans le cadre de la présentation et de la discussion de certains mémoires. Peut-être y aurait-il lieu d'utiliser le même procédé - si le ministre était d'accord - lors de la présentation et de la discussion d'un mémoire et, à ce moment-là, de voir dans

quelle mesure vous pouvez insérer de façon pertinente la question que vous voulez soulever. Le mandat de la commission n'est certainement pas de commenter l'actualité et de permettre ici une période de questions comme il s'en déroule à l'Assemblée nationale lorsque nous siégeons de façon régulière. Est-ce que cela va?

M. Perron: Merci, M. le Président, admettons que j'accepte votre verdict. J'y reviendrai sûrement au cours de la séance d'aujourd'hui, lors d'une occasion spéciale où je pourrai poser les questions qui s'imposent au ministre en rapport avec cet article de journal concernant l'Association forestière québécoise. Il en va de l'importance...

M. Théorêt: M. le Président, s'il vous plaît...

M. Perron: ...et de la bonne marche... M. Théorêt: ...question de règlement.

M. Perron: ...de nos travaux, ainsi que de la bonne marche des affaires.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que cela va? Concernant les remarques préliminaires, est-ce qu'il y en a d'autres? M. le député d'Ungava...

M. Théorêt: M. le Président, j'ai demandé la parole avant le député d'Ungava.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Vimont, c'est vrai.

M. Théorêt: M. le Président, je réfère le député de Duplessis à l'article 211 qui est la règle de la pertinence. Je pense que vous avez établi clairement que ce n'était pas une période de questions mais qu'on devait, par respect pour les groupes qui sont présents, ne pas retarder les travaux de la commission parlementaire qui a comme objectif de les écouter et non pas les discours du député de Duplessis.

Une voix: C'est bien cela.

Le Président (M. Charbonneau): Je pense que le point avait, déjà été bien marqué, M. le député de Vimont. M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Je voudrais juste dire que la question de mon collègue de Duplessis se réfère à une affirmation qui a été faite par le ministre, ici même en cette salle, durant la même commission parlementaire.

M. Théorêt: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre! À l'ordre! D'accord. Je voudrais signaler à tous les membres de la commission que nous avons un mandat et qu'en vertu de celui-ci nous devons entendre des organismes. Le mandat de la commission ne permet pas, ne vise pas, d'une certaine façon, à commenter l'actualité ou à permettre, finalement, des mises au point, des corrections d'événements ou l'interprétation d'événements qui pourraient s'être déroulés depuis l'audition de cet organisme, même si cela peut avoir un lien. Je peux convenir qu'il peut y avoir un lien très étroit, sauf que ce n'est pas dans le mandat de la commission. Si on était, per exemple, en session régulière, vous pourriez très bien utiliser la période de questions pour poser ce genre de question. En commission parlementaire, on exécute le mandat qui nous a été confié. La seule façon, à ce moment-ci, pour le député de Duplessis d'aller de l'avant dans le genre de question qu'il voulait poser au ministre, c'est qu'il y ait consentement unanime.

Une voix: II n'y a pas consentement. Une voix: Non, non, pas question.

Le Président (M. Charbonneau): Dans ce cas-là, je pense que, de part et d'autre, vous connaissez maintenant mieux l'interprétation qui peut être faite à la fois du mandat et du règlement. S'il n'y a pas d'autres questions préliminaires, je vais maintenant inviter les représentants de l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Lauren-tides. Le président de cet organisme, c'est M. Léandre Meilleur, si mes informations sont exactes. Dans ce cas-là, M. Meilleur, si vous voulez prendre place avec vos collègues. Je voudrais d'abord vous demander de présenter les gens qui vous accompagnent et vous rappeler ce que sans doute le secrétaire de la commission vous a indiqué précédemment, savoir que vous avez douze minutes pour la présentation de votre mémoire et que, de chaque côté, les groupes parlementaires qui sont représentés à la commission ont 24 minutes pour engager la discussion avec vous sur les points de vue que vous aurez émis précédemment.

Alors, M. Meilleur.

Auditions

Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides

M. Meilleur (Léandre): Ceux qui m'accompagnent aujourd'hui sont le vice-président de l'association, M. Yves Latour, qui est directeur général de la Coopérative des Hautes-Laurentides, et Mme Julien, qui agit avec nous comme secrétaire de l'association.

M. le Président, M. le ministre Côté, M. le ministre Ciaccia, M. Damien Hétu, M. Perron, M, Jolivet et MM. les députés, permettez-nous de vous remercier de donner à notre association l'occasion de venir vous entretenir de notre forêt du Québec, celle qui n'est pas exclusivement ou très majoritairement résineuse. Nous n'avons pu vous apporter la splendeur de notre région à cette époque-ci de l'année. Nous avons donc décidé de vous remettre un échantillon de la variété et de la qualité des essences forestières qui forment le couvert forestier des Hautes-Laurentides.

Depuis de nombreuses années, tous les intervenants tant politiques qu'économiques de la région des Hautes-Laurentides réclament une révision du mode actuel de gestion et de tenure des forêts publiques du Québec. Nous ne pouvons donc que nous réjouir de voir le gouvernement passer aux actes dans ce dossier.

L'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides est fondamentalement en accord avec les principaux éléments d'orientation qui sous-tendent le projet de toi sur les forêts. Nous nous questionnons toutefois quant aux modalités d'application de cet avant-projet de loi dans le cas des forêts publiques feuillues et mélangées du sud-ouest du Québec.

Le Québec est un pays nordique. Les résineux dominent largement le couvert forestier sur les forêts publiques, mais dans les forêts du Témiscamingue, de l'Outaouais comme dans celles des Hautes-Laurentides, les feuillus dominent le couvert forestier à plus de 50 %. C'est la zone des bois de sciage et de déroulage de haute qualité; bouleau jaune, érable, hêtre, chêne, tilleul, arme, mais aussi les pins, les cèdres et la pruche.

La problématique des bois feuillus et des pins blancs et rouges comporte essentiellement deux éléments: une surabondance de bois de trituration; - une disparition progressive des stocks exploitables de bonne qualité.

Cet héritage est imputable aux modes de tenure et de gestion qui ont été appliqués à ce territoire. L'avant-projet de loi sur les forêts modifie les modes de tenure des forêts publiques et les règles de gestion qui devront s'y appliquer. En ce sens, nous l'appuyons fortement.

Toutefois, pour qu'il s'applique avec bonheur aux forêts feuillues et mélangées, il faut que le gouvernement, tout en privilégiant la filière fibre, reconnaisse l'intérêt des produits feuillus et résineux de qualité et la spécificité des forêts feuillues et mélangées du sud-ouest du Québec.

Notre mémoire se veut une analyse de l'avant-projet de loi sous l'angle des forêts feuillues et mélangées.

Mme Denise Julien va maintenant vous résumer les grandes lignes de ce mémoire.

Mme Julien (Denise): J'espère qu'on ne sera pas trop longs, parce que c'est un sujet complexe et on voudrait vraiment en faire le tour d'une façon complète.

Dans un premier temps, notre mémoire se divisait en trois parties. La première était une présentation de l'association et surtout de l'importance du secteur des forêts feuillues et mélangées, de leur importance au niveau économique autant pour notre région que pour tout le reste du Québec. Deuxièmement, on voulait regarder l'avant-projet de loi sous l'aspect des forêts feuillues et mélangées et, dans un troisième moment, on voulait simplement soulever deux aspects qui nous semblaient ne pas apparaître dans le nouveau projet de loi, celui de la formation de la main-d'oeuvre, de la formation professionnelle, et celui de la recherche.

Dans un premier temps, si on veut vous présenter notre association, celle-ci regroupe sur une base volontaire huit industriels et deux coops forestières, c'est-à-dire tous les utilisateurs de matière ligneuse en provenance de la forêt publique des Hautes-Laurentides qui aménagent ou transforment cette matière première en régions. Notre but est de travailler à l'amélioration de la ressource et de l'industrie forestière dans la région des Hautes-Laurentides.

Notre forêt et notre industrie se ressemblent, c'est une industrie et une forêt très variées. La forêt publique des Hautes-Laurentides est une forêt à très haut potentiel, un immense territoire, 11 000 kilomètres carrés, majoritairement feuillue, mais concédée à 77 % à deux compagnies papetières. On la considère comme !a zone climatique la plus propice au bouleau jaune. Le mode de gestion qu'on y a appliqué a empêché le développement de l'industrie du sciage résineux et il a freiné celui de l'industrie du sciage et du déroulage des feuillus; 94 % des résineux chez nous sont récoltés et sont destinés aux usines de pâte situées hors région. À peine 5 % des allocations de sapin, d'épinette et de pin gris sont destinés au sciage et ce, depuis fort peu longtemps, malgré la dimension des tiges.

Au niveau des industries de transformation des feuillus, celles-ci n'ont jamais pu avoir un accès direct à la ressource, ce qui a signifié pour elles une insécurité d'approvisionnement, l'impossibilité d'obtenir un financement bancaire garanti par une garantie d'approvisionnement puisque ici l'industrie ne pouvait compter que sur des allocations de bois révocables à tout moment, l'impossibilité de planifier à long terme leurs interventions d'exploitation sur le territoire, l'impossibilité d'investir au niveau

de l'aménagement, l'obligation d'intervenir selon des normes de gestion centralisées et non adaptées à la diversité de la forêt, des coûts d'approvisionnement élevés puisqu'à la redevance gouvernementale il a fallu ajouter depuis toujours la redevance du concessionnaire sans contrepartie et en sus des coûts normaux d'exploitation. Il ne faudrait donc pas venir ajouter à cette situation l'obligation du rachat des infrastructures sur les territoires qui devraient être révoqués.

Les scieries de bois franc, les scieries de résineux constituent les usines de déroulage ou de composantes de bois dur. Donc, c'est la seule transformation manufacturière de la matière ligneuse sur notre territoire. Pour nous, le secteur forestier est le secteur vital au niveau économique. On a même des perspectives de développement fort intéressantes: l'usine PANFIBRE en est un exemple. On peut aller dans le secteur des matériaux composites avec la fibre de feuillu; cette fibre est surabondante et elle peut permettre de nombreux nouveaux projets.

Les bois feuillus sont importants aussi dans l'économie du Québec et du Canada puisque les valeurs de livraison des feuillus au Québec a été de plus de 256 000 000, sous forme de placages et de bois d'oeuvre, en 1983. Le marché des bois feuillus est principalement un marché d'exportation vers les États-Unis, mais aussi vers l'Europe, le Japon et la Corée.

C'est une production limitée en volume, mais élevée en qualité, concentrée essentiellement dans certaines régions du Québec et de l'Ontario, l'essence la plus recherchée demeurant le bouleau jaune.

La problématique de ces forêts se situe dans l'approvisionnement des usines de sciage et de déroulage en tiges de qualité, et ceci, en quantité suffisante. La forêt s'est appauvrie, mais elle n'est pas dégradée. Les tiges de qualité et de fort diamètre des essences les plus recherchées sont de plus en plus rares, mais les tiges jeunes de qualité sont nombreuses et la régénération excellente quand on aménage la forêt de façon convenable. Les forêt feuillues et mélangées au Québec sont mal connues, et leur aménagement encore plus. Consciente de cette problématique, la Coopérative forestière des Hautes-Laurentides a financé entièrement, depuis quatre ans, l'aménagement de la forêt expérimentale de Sainte-Véronique. Les résultats sont probants. Seul l'aménagement pourra permettre d'éviter les ruptures de stock envisagées.

Quant à l'aménagement des résineux, on y a également développé un "know-how", tant sur le terrain, que dans la production des semis forestiers en récipients.

Finalement, la richesse de la ressource assurant la richesse de la faune, le potentiel touristique de ces forêts est fort important. Le territoire des Hautes-Laurentides compte la plus forte concentration de ZECS et de pourvoiries de la province. Pour notre région, il s'agit là d'un apport économique de taille.

Si on regarde l'avant-projet de loi sous l'angle de ces forêts, on y est fondamentalement d'accord, mais on voudrait reprendre quelques-uns des grands éléments d'orientation.

D'abord, la modification du rôle de l'État. On dit que l'État veut redonner aux utilisateurs des responsabilités en matière de planification des interventions en forêt et leur donner de nouvelles responsabilités en matière de mise en valeur des forêts publiques dans une perspective de rationalisation dans l'utilisation des ressources disponibles.

Dans cette perspective, l'État demeure propriétaire de la ressource et responsable de son utilisation maximale au profit de l'ensemble de la collectivité. Là-dessus, on est fondamentalement d'accord. Toutefois, selon nous, il faut insister sur l'importance du rôle de l'État dans le maintien et le développement du patrimoine forestier et des économies régionales. L'État a une responsabilité autant face à la ressource, qu'elle soit feuillue ou résineuse, que face aux populations des arrière-pays qui veulent continuer à en vivre. Il a donc une responsabilité face aux PME forestières de ces régions, car ce sont elles qui ont assuré l'ancrage de ces populations, ce qui signifie qu'il doit, dans les faits, leur permettre un accès juste et équitable à cette ressource et une sécurité d'approvisionnement. Cela signifie, en clair, qu'aucun utilisateur ne devra être jugé prioritaire dans l'établissement des contrats d'aménagement.

Une des questions qui nous préoccupent énormément est la question de l'arrérage ou du "backlog". Selon nous, on le définit de façon très étroite comme étant un territoire qui ne se régénère pas ou qui n'a pas été régénéré de façon adéquate après coupe. On fait donc uniquement référence au volume de matière ligneuse sur un hectare. On pense que l'on doit y ajouter* la notion de qualité. En forêt feuillue, il y a toujours une repousse; il n'y a pas nécessairement une repousse de qualité. On a l'impression que là-dedans aussi il y a un héritage du passé et que cet héritage-là doit être assumé par le gouvernement.

Or, dans le programme de remise en production des forêts - et c'est là que cela nous inquiète - le ministère a prévu une répartition des efforts financiers du gouvernement de 1986 à 1992 pour la remise en production de l'arrérage. Aucune somme n'y est prévue pour la remise en production des forêts feuillues, ni pour s'assurer d'une expertise au MER, ni pour la réalisation de travaux de remise en production.

Pour l'utilisation polyvalente de la forêt - autre grand élément de l'avant-projet de loi - nos forêts connaissent déjà une utilisation polyvalente. Selon nous, il n'y a pas antinomie entre forêt productrice de bots et forêt appréciée par le public.

Au sommet socio-économique des Laurentides tenu en avril dernier, la filière Bois a obtenu l'appui de la région pour demander "que le gouvernement reconnaisse officiellement l'utilisation polyvalente des terres publiques, quelles que soient la définition et la vocation des unités territoriales, résultat de l'affectation de ces terres." Nous tenons à vous souligner notre accord avec cette orientation.

Maintenant, si on arrive à la question de l'introduction de nouvelles règles de gestion, le principe du rendement soutenu, nous sommes absolument d'accord avec l'introduction de ce principe. Nous voudrions toutefois souligner la difficulté d'en apprécier les modalités d'application en forêt feuillue et mélangée. Ni le ministère ni l'industrie dont l'approvisionnement provient majoritairement de territoires concédés ne peuvent définir pour le moment et de façon sûre la possibilité et la disponibilité des feuillus en fonction des produits recherchés. Pourtant, en ce qui concerne les résineux, le ministère dispose de toutes les informations nécessaires concernant la possibilité et la disponibilité des essences et des produits, le rendement des travaux d'aménagement qu'il a réalisés, celui escompté des travaux d'aménagement que devra faire l'industrie pour s'assurer d'un approvisionnement stable et même une évaluation des coûts de remise en production des différents territoires selon les régions. C'est à partir de cette donnée qu'il a pu faire des choix et établir des règles claires de gestion, Au niveau des forêts feuillues et mélangées du sud-ouest du Québec, c'est la zone grise.

Dès le point de départ, la situation nous semble inéquitable. En effet, le principe du rendement soutenu prend en considération la capacité de production de la forêt évaluée en tenant compte des travaux d'aménagement réalisés. Or, le ministère n'a jamais accepté d'investir de façon importante dans les essences nobles. De plus, cette inéquité semble vouloir se perpétuer. L'État s'engage à venir compenser par des travaux d'aménagement la différence entre la disponibilité actuelle des résineux et le volume moyen des coupes au cours des cinq dernières années. Le gouvernement veut corriger ses méthodes de gestion pour permettre à l'industrie forestière de garantir maintenant ses investissements par un approvisionnement stable et à long terme. Qu'en sera-t-il dans le cas des industries reliées aux feuillus et aux résineux de qualité? Devra-t-on envisager la fermeture d'usines ou la liquidation de certaines essences? Comment pourra-t-on compenser pour la perte des investissements et des emplois reliés à la liquidation des volumes alloués? Nous pensons qu'il y a de l'espoir, que cet espoir passe par l'aménagement et qu'il passe également par l'association des intervenants du ministère avec les membres d'associations qui ont développé une expertise sur le territoire. Il est urgent de réaliser qu'il faut intervenir, parce qu'au niveau actuel des allocations de déroulage et des coupes actuelles, on hypothèque dangereusement l'alimentation des usines, non seulement des usines de déroulage en feuillu mais également des usines de sciage.

Dans les sources d'approvisionnement... Je vais aller très rapidement pour le reste.

Le Président (M. Charbonneau): Parce que votre temps est écoulé. Quand vous dites que vous allez faire rapidement, il vous resterait combien de temps?

Mme Julien: Peut-être une minute. D'accord?

Le Président (M. Charbonneau): Une minute. Je pense que tout le monde conviendra que c'est raisonnable.

Mme Julien: D'accord.

Le Président (M. Charbonneau): Cinq minutes, ce serait friser un peu...

Mme Julien: Non, non.

Dans les sources d'approvisionnement, on parle des autres sources d'approvisionnement. Nous, on aimerait y voir ajouter ta notion de bois de sylviculture pour alimenter les usines de fibres feuillues. Dans le manuel d'aménagement, on demande que le ministère s'associe avec les intervenants en région pour définir les règles d'implantation en forêt feuillue et mélangée. Dans le nouveau contrat d'approvisionnement, lorsqu'on parle du volume alloué, on aimerait qu'on ne tienne pas compte dans nos régions de la moyenne des cinq dernières années. C'est inacceptable pour les résineux, puisqu'on vient tout juste d'accéder à la possibilité d'en faire du sciage. C'est surtout inapplicable pour les feuillus, parce que les allocations sont déjà beaucoup trop hautes et qu'on n'arriverait pas à avoir une intervention qui soit rationnelle à ce niveau.

Dans la durée du contrat, on aimerait que le contrat soit fixé sur un retour de coupe et non pas de façon arbitraire. Dans les droits et obligations du ministre, on voudrait qu'il s'engage face au "back-log" feuillu, comme il s'engage face au "back-log" résineux. Dans la tarification, on aimerait y voir ajouter la notion de qualité, de produits de qualité. (15 h 30)

Finalement, on aimerait qu'on se préoccupe de la santé financière des entreprises quand on va voir la tarification pour qu'elle demeure bien compétitive. Dans le domaine de la recherche et de la formation de la main-d'oeuvre, comme je l'ai dit tout à l'heure, tout ce qu'on regrette c'est qu'elles ne paraissent pas dans le nouveau projet de loi.

Le Président (M. Charbonneau): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le Président. Bonjour, M. Meilleur, Mme Julien, M. Latour. Vous avez raison de dire que, de ce temps-là, la forêt feuillue et mélangée présente un bel aspect. C'est pourquoi, probablement, vous parlez de l'aspect touristique qui est essentiel dans votre région.

Depuis que je suis en poste, j'ai maintes fois manifesté mon inquiétude quant aux efforts consentis envers la forêt feuillue. Je suis allé à quelques reprises dans votre région évidemment, pour, discuter avec vous, mais surtout pour qu'on regarde de près les travaux qui ont été exécutés par la Coopérative forestière des Hautes-Laurentides en ce qui concerne les travaux de recherche appliquée pour favoriser la régénération en bouleaux jaunes et autres. J'ai trouvé cela très intéressant et soyez assurés que pour ma part, je tiendrai compte de toutes les régions du Québec et les Hautes-Laurentides comme te Témiscamingue, l'Outaouais, les Cantons de l'Est. Ce sont des sols, ce sont des climats qui favorisent la venue de forêts mélangées et feuillues et il faudra nécessairement en tenir compte dans nos projets pour l'avenir. Ce que vous me signalez, je l'ai senti quand je suis arrivé au ministère en regardant les efforts financiers qu'on faisait. J'ai insisté auprès de mes fonctionnaires et auprès du sous-ministre pour qu'on consacre plus d'efforts du côté de la recherche en feuillus, qu'on consacre plus d'efforts aussi du côté de la recherche pour favoriser la venue de feuillus de qualité, de bois noble, d'essences nobles.

C'est un fait que, historiquement, la forêt feuillue n'a pas été tellement favorisée étant donné que les gouvernements passés ont toujours accordé beaucoup d'importance aux grandes papetières et que les intervenants en forêts feuillues étaient obligés de payer une double redevance, c'est-à-dire celle du ministère ainsi que celle imposée par les grands concessionnaires dont vous faites mention dans votre rapport.

Évidemment, cette méthode-là n'a pas permis peut-être de générer les profits qu'était en droit de recevoir l'industrie du feuillu pour les efforts que vous avez faits et pour les risques que vous avez pris. Tout de même, je vous félicite, parce qu'au fil des ans vous avez tout de même manifesté beaucoup d'intérêt pour la forêt feuillue et vous avez aussi développé une connaissance de ces forêts qui nous servira certainement au ministère. Je vous remercie de nous offrir votre collaboration pour parler davantage de la forêt feuillue.

Une question que je voudrais poser aux industriels dans votre groupe qui... Avec les années, vous le mentionnez, de 1965 à 1978, la transformation des résineux a augmenté beaucoup dans votre région. Est-ce que c'est dû à l'épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette principalement, parce que vous avez dû, au cours de ces années-là, modifier vos usines pour faire cela, parce que ce n'est pas le même type de machinerie que vous avez pour transformer le résineux, comme l'épinette, le sapin - et non pas le pin blanc - que le feuillu, s'il vous plaît?

M. Meilleur: L'effort n'a pas été fait à cause de la tordeuse des bourgeons de l'épinette, parce qu'on parle ici évidemment de feuillus. Dans notre rapport, on s'en tient strictement aux feuillus. L'augmentation du volume de sciage est en partie due aux dégradations des forêts où, à un moment donné, pour aller chercher une quantité donnée de déroulage, on est obligés d'abattre beaucoup plus d'arbres et de couvrir beaucoup plus grand de territoire, ce qui dégage évidemment beaucoup plus de sciage. À ce moment-là, surtout depuis les trois dernières années, la pression a été extrême sur la forêt, la pression a été très forte sur la forêt pour aller chercher ce déroulage qu'on a de la difficulté à trouver. Par contre, on dégagea un sciage qui, dans certains cas, dépasse les allocations qui avaient déjà été données.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. Meilleur, ce que vous nous dites en somme, c'est que vous avez fait un peu d'exploitation intégrée pour être capable d'aller chercher les produits dont vous aviez besoin pour alimenter vos usines.

M. Meilleur: II y a eu exploitation intégrée, mais surtout une forte pression de coupe sur l'essence merisier pour aller chercher surtout et avant tout - c'est ce que l'industrie recherchait - le déroulage.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous remercie. Pour mon édification, quelles étaient à peu près les redevances que vous étiez obligés de payer au concessionnaire en surplus de celles que vous payez au ministère pour aller chercher du bois de feuillus? Est-ce que c'était le double, le triple qu'on vous demandait?

M, Meilleur: C'est plus que le double. C'est à peu près une fois et demie les

redevances du ministère. Cela varie un peu selon les essences, mais en moyenne cela se situe à environ une fois et demie les redevances du ministère.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci. À la page 4, vous parlez de la sous-utilisation de la fibre feuillue, mettons, de qualité de trituration. Que feriez-vous avec un projet comme celui de l'usine PANFIBRE à Mont-Laurier qui a annoncé il n'y a pas tellement longtemps qu'elle va prendre des feuillus de trituration? Quelle intervention voyez-vous en forêt à la suite de ce développement*?

M. Latour (Yves): Pour ce qui est de l'usine PANFIBRE, la majorité de son approvisionnement proviendra des copeaux qui viennent des scieries. Donc, il n'y aura pas beaucoup d'impact sur la forêt. Il y aura un grand impact, par contre, si le ministère de l'Énergie et des Ressources, lorsqu'il approvisionnera l'usine à laquelle allaient les copeaux, voit à ce que le bois vienne de notre région. À ce moment-là, il y aura un impact très significatif, parce que c'est absolument nécessaire pour passer notre pâte feuillue de trouver un débouché pour ces bois, sinon c'est très difficile de faire de l'aménagement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. Latour, vous me parlez de copeaux. Vous ne parlez pas de rondins de pâte, là.

M. Latour: Je m'excuse. Je vais mieux m'expliquer. Les copeaux qui iront à l'usine PANFIBRE, normalement étaient destinés à l'usine de McClaren à Thurso. C'est une usine de pâte feuillue. Maintenant, les copeaux proviendront de la région, resteront dans la région. Si cette usine de McClaren à Thurso vient chercher son rondin dans notre région parce qu'il va falloir compenser pour ce manque en approvisionnement, à ce moment il y aura un grand impact pour l'aménagement de nos forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous remercie. Je pense bien qu'il faudrait profiter d'une intervention semblable pour revaloriser les forêts de votre région. Votre but c'est de donner des emplois, évidemment, mais c'est aussi de revaloriser la forêt, la restaurer.

M. Meilleur: C'est ce qu'on cherche à faire, M. le ministre, mais ce dont on a un peu peur dans le fond, c'est qu'il y ait un déplacement de l'approvisionnement à ce moment-là. S'il y a un déplacement de l'approvisionnement, on n'aura pas atteint le but qui est visé actuellement par le ministère en implantant cette usine à Mont-Laurier.

Mme Julien: II y a eu une bataille qui a été menée par l'association justement pour la mise en place de cette usine parce qu'elle nous rattacherait à tout le grand secteur des matériaux composites qui deviennent une spécialité dans la région des Laurentides. Nous on pense que PANFIBRE, ce n'est qu'un début, c'est-à-dire que cette usine a un volume actuel, mais que les possibilités sont énormes. Pour nous, cela ouvre la porte à l'utilisation de la fibre feuillue. Cela nous semble vraiment très important dans ce sens.

M. Côté (Rivière-du-Loup): J'ai dit que j'étais très conscient de cela, Mme Julien. C'est pourquoi j'ai appuyé le projet. On m'a dit au Conseil des ministres: À même votre budget pour les imprévus. Vous dites aussi dans votre mémoire: "La forêt s'est appauvrie, mais elle n'est pas dégradée. Les tiges de qualité et de fort diamètre des essences les plus recherchées sont de plus en plus rares, mais les tiges jeunes et de qualité sont nombreuses et la régénération excellente quand on aménage la forêt de façon convenable." Est-ce qu'en faisant cela, on peut espérer allouer les feuillus sur une base de rendement soutenu en l'aménageant de façon convenable, comme vous le mentionnez? Vous mentionnez un peu plus loin dans votre rapport que la cause des feuillus n'est pas désespérée. Est-ce qu'on peut espérer cela? Pouvez-vous expliquer davantage, s'il vous plaît?

M. Latour: Les expériences de la forêt de Sainte-Véronique démontrent très clairement que les tiges de jeune qualité, après un grand échantillonnage, sont de très bonne qualité. On peut espérer des feuillus de qualité de sciage et de déroulage dans un terme de 30, 40 ans, peut-être, ou même peut-être 15 ans. Donc, c'est possible d'éviter les ruptures de stock si on concentre beaucoup nos efforts sur ces tiges, bien sûr, en plus de la régénération de ces essences. De plus, par différentes méthodes de coupe on peut provoquer une régénération abondante dans les essences recherchées sans nécessairement mettre des arbres en terre. Cependant, il faut tenir compte que c'est possible, mais seulement aux frais d'un budget qui est sûrement considérable, comme c'est le cas pour les résineux.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous dites... Oui.

Mme Julien: Ce dont on est certain, c'est de pouvoir assurer à très long terme l'alimentation des usines de sciage de feuillus. Ce qu'il faudra certainement faire, c'est réviser le niveau d'allocation du déroulage pour équilibrer ces deux choses; mais, en fonction de cela et en respectant l'aménagement tel qu'il est là, et en se fiant

surtout sur les jeunes déjà en place, on pense qu'on est capable d'éviter les ruptures de stock.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mais c'est pour autant que, par exemple... Vous semblez mettre de côté la mise en terre de plants feuillus, le reboisement feuillu artificiel.

Mme Julien: Non, on ne la remet pas en cause, mais le problème, c'est qu'avec la mise en terre de jeunes plants on doit considérer un cycle qui doit aller de 70 à 90 ans. Notre perspective de rupture de stock est plus courte que celle-là. Alors, on se dit qu'il va falloir jouer sur les deux tableaux: d'abord, aller avec des arbres "plus" pour ce qui est de la régénération, ce qui peut nous permettre de raccourcir cette période de 90 ans de production; d'un autre côté, faire le dégagement des tiges ayant déjà atteint une certaine grosseur, qui ont déjà passé le cap le plus difficile pour un feuillu, celui des 20 premières années et qui, à ce moment-là, peuvent prendre une croissance assez phénoménale lorsqu'on les dégage.

Actuellement, le problème de la forêt feuillue, c'est le ménage; c'est le problème du stress à l'intérieur pour ces essences. On fait toujours la comparaison avec notre fameux poisson rouge qui, dans son bocal, demeure à une longueur comme cela et, quand on va faire un tour à l'Aquarium de la ville de Montréal, on s'aperçoit que c'est une carpe qui est comme cela. C'est que le feuillu, c'est un arbre extrêmement résistant; si on ne le dégage pas, il ne meurt pas, mais il ne croît plus non plus. Pourtant, si on le fait, on s'aperçoit qu'il prend une bonne croissance.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Comme cela, Mme Julien, vous nous encouragez à continuer de faire de la recherche du côté de la génétique des arbres, surtout des feuillus.

Mme Julien: Exactement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Et des autres aussi, des résineux, mais pour compenser un peu, avec la régénération naturelle.

Mme Julien: C'est cela. Dans une planification qui fait qu'on puisse, pour éviter la rupture de stock, jouer sur deux tableaux: celui des jeunes déjà en place, qui vont nous permettre, d'ici à 30 ans, d'alimenter nos usines et celui des essences "plus" qui vont nous permettre de prendre un élan.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Avez-vous pris connaissance des expériences qui se font au Jardin botanique de Montréal?

Mme Julien: Oui. Et exactement de ce qui se fait aussi en France; actuellement, il y a des choses extrêmement intéressantes qui se font à ce niveau.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous remercie et, pour l'instant, cela va suffire.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, dans un premier temps, bien sûr, remercier les représentants et la représentante de l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides pour le mémoire qui, à mon sens et de l'avis des députés de l'Opposition, est très bien articulé. Si l'on tient compte de tous les mémoires qui nous ont été présentés jusqu'à présent, celui-ci nous a permis, en fait, de découvrir certaines lacunes qui s'ajoutaient à toutes les autres qu'il y avait à l'intérieur de l'avant-projet de loi du ministre délégué aux Forêts qui a été déposé le 19 juin dernier.

J'aurais certains commentaires à faire, dans un premier temps, en rapport avec votre mémoire et les informations que vous nous y donnez dès le début. Je trouve très intéressant de voir que l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides regroupe plusieurs intervenants du milieu, en particulier les huit industriels et les deux coopératives forestières qui sont utilisateurs de matière ligneuse en provenance de la forêt publique.

D'autre part, les membres de l'association emploient actuellement plus de 400 travailleurs et travailleuses dans les 8 usines de sciage de résineux et de feuillus, ainsi que dans une usine de déroulage et de placage et une usine de composantes de bois dur. Je trouve important ce regroupement qui a eu lieu parce que cela vous permet, en somme, de fournir un apport économique très intéressant dans la région que vous couvrez. (15 h 45)

D'autre part, je pense qu'on est en droit de dire bravo à la façon dont vous avez travaillé au cours des dernières années comme regroupement, puisqu'on sait que vous travaillez sur des forêts qui, à 77 %, sont concédées à deux papetières. Pour moi, c'est une dynamique qui s'est dégagée malgré les sévères contraintes que vous avez dû subir sûrement au cours des dernières années.

Quant à la question que vous mentionnez, à la page 5, au début de votre mémoire, où vous dites que les scieries, principalement de bois franc, et les usines de déroulage et de composantes sont les seules entreprises de transformation installées dans cette région pourtant essentiellement forestière, là-dessus, j'en conviens. Ce que vous ajoutez est, pour nous, de l'Opposition,

une chose très intéressante, lorsque vous mentionnez en ajout à cela que ce sont des PME qui sont modernes, qui sont efficaces et qui sont bien capitalisées, dynamiques et créatrices d'emplois. D'ailleurs, on peut remarquer que, dès le début de votre mémoire, vous mettez l'accent sur le fait que vous avez procédé à la création d'emplois et au maintien d'emplois dans votre région. On ne peut faire autrement qu'être d'accord avec vous sur cela. Nous souhaitons que vous continuiez à vous impliquer dans votre milieu pour qu'il y ait encore plus de création d'emplois et même plus d'usines de transformation qui puissent effectivement être poussées par vous ou par d'autres que vous allez sûrement appuyer au cours des prochaines années.

Il y a une chose que le ministre se plaît à dire - je ne m'adresse pas à vous, je m'adresse surtout aux ministériels - au sujet de l'usine PANFIBRE de Mont-Laurier, mais il oublie toujours de dire que cette question fut réglée et autorisée par l'ancien gouvernement, donc l'ancien Conseil des ministres qui a eu lieu le 27 novembre 1985 et qui a fait en sorte d'impliquer REXFOR dans le domaine de l'usine PANFIBRE au rythme de 50 % quant au financement.

Bien sûr, il y a une question que vous soulevez à la page 4, lorsque vous mentionnez que les volumes de fibres feuillues disponibles permettraient d'alimenter plusieurs nouveaux projets tout en assurant un aménagement plus efficace et une exploitation plus rationnelle de la forêt. Il y a une partie sur laquelle vous avez répondu au ministre tout à l'heure, mais j'entends revenir sur cette question. Remarquez que je prends votre parole quant a l'affirmation que vous faites, mais j'aimerais cependant qu'éventuellement vous puissiez clarifier cette question qui permettrait d'alimenter plusieurs nouveaux projets en rapport avec l'approvisionnement que vous détenez ou qui est dans votre région.

Maintenant, à la page 5 de votre mémoire, lorsque vous parlez de la problématique des forêts feuillues et mélangées du Québec, vous mentionnez que la problématique fondamentale de ce secteur se situe dans l'approvisionnement des usines de sciage et de déroulage en tiges de qualité et ceci en quantité suffisante. Plus loin, vous mentionnez ce qui suit: Ce nouveau régime forestier vient se concrétiser par la signature entre le ministère de l'Énergie et des Ressources et les utilisateurs d'un contrat d'approvisionnement et d'aménagement, et il devra en être de même au niveau de la tarification qui constitue le deuxième élément majeur de ce nouveau régime forestier. Essentiellement, il s'agit d'y ajouter la notion de qualité des produits. Encore plus loin, lorsqu'on regarde votre mémoire, vous mentionnez ce qui suit, à la page 13, troisième partie, et c'est sur cela que va porter surtout ma question: "...le gouvernement, s'il veut vraiment favoriser l'aménagement forestier et l'intégration des coupes sur un territoire où il y aura plusieurs utilisateurs - là, vous faites référence à l'article 31 de l'avant-projet de loi - devrait accepter de négocier avec les membres d'une association qui décident, sur une base volontaire, de se concerter pour remettre en production un même territoire."

J'en viens à ma question qui est la suivante: On sait très bien qu'il y a plusieurs intervenants qui se sont présentés devant nous ou qui n'ont pas pu se présenter devant nous et qui avancent le fait que le ministre devrait avoir le pouvoir de désigner un maître d'oeuvre dans différents secteurs forestiers. Ce que je voudrais savoir, c'est ce que vous pensez de cette question de maîtrise d'oeuvre. Quel est votre opinion sur le fond concernant la présence d'un maître d'oeuvre concernant le domaine forestier?

Mme Julien: Je crois que les industriels chez nous sont intéressés à continuer à avoir un accès à la forêt publique parce qu'ils ont développé des méthodes d'intervention et des connaissances. C'est une forêt extrêmement variée qu'on a chez nous. Vous montez une montagne, c'est une chose, et vous descendez de l'autre côté, dans l'autre vallon, c'est une autre chose. Alors, c'est très varié. On a déjà plusieurs utilisateurs qui ont appris à travailler ensemble et qui sont d'accord sur une planification globale, mais ils ne seraient pas d'accord avec l'intervention d'un intervenant qui, lui, aurait à prendre en charge toutes les manières d'intervention sur ce même territoire. Les gens veulent vraiment que l'association se fasse sur une base volontaire, que le ministère vienne s'asseoir avec les gens pour qu'il y ait une planification qui respecte tous les utilisateurs. Chez nous, il y a du cèdre, de la pruche, du bouleau jaune, du sciage, du déroulage, de l'érable, du hêtre, du tilleul, du pin, il y a de tout. Ce n'est pas chaque utilisateur qui est intéressé par chaque chose. Quand vous, dans votre vie, ce qui vous intéresse, c'est la pruche et que vous faites faire vos travaux par un gars qui cherche de la fibre résineuse, il n'est pas évident que la pruche va revenir en très forte quantité après qu'il y aura eu un premier passage d'aménagement. Nous pensons que tous les utilisateurs, sur une base volontaire, devraient être regroupés pour pouvoir faire valoir leur point de vue, faire un consensus au niveau des approches d'intervention avec le ministère de l'Énergie et des Ressources, et la, faire les interventions.

On a déjà essayé de faire ce regroupement dans la société forestière et cela a été une chose extrêmement complexe. On n'avait

pas le nouveau projet de loi entre les mains à ce moment-là et on n'a jamais été capable d'arriver à une entente avec de très gros concessionnaires. On pense que, si on regroupe différents utilisateurs intéressés par des produits de qualité, ils pourront négocier avec un utilisateur intéressé par des produits de fibre et que, là, on pourra faire une intervention sur la forêt qui sera rationnelle et aussi souple, parce que c'est une forêt très variée. Comme je vous le dis, il faudra une intervention qui va tenir compte de beaucoup d'éléments.

M. Perron: Madame, je vous remercie énormément.

Mme Julien: Peut-être que M. Meilleur pourrait compléter.

M. Perron: Oui, allez-y, M. le président.

M. Meilleur: Tout ce que j'allais dire, c'est que nous avons déjà vécu un système où, en fin de compte, d'autres personnes pouvaient décider pour les industriels. Si le gouvernement retenait la formule qui est déjà demandée depuis longtemps où on veut garder le statu quo par les forestières, c'est-à-dire avoir un maître d'oeuvre sur le territoire, il est certain qu'au point de vue de la petite industrie ou de l'industrie moyenne, celle qu'on représente ici, l'industrie des Hautes-Laurentides, l'industrie feuillue, if est impossible de pouvoir garder une dynamique, il est impossible de vraiment intéresser, et sur une base à long terme, les gens de cette industrie à l'aménagement de la forêt. Tout ce qui va rester, c'est qu'on va accepter ce qui nous vient tout simplement, et c'est une industrie qui va s'éteindre à long terme.

Mme Julien: On a une problématique très complexe. Quand vous savez que le bouleau jaune peut être un produit d'une extrême qualité parmi un volume qui serait majoritairement résineux,- si l'on retient - et l'on faisait référence à cela - la notion d'essence principale, entre autres dans le déroulage, votre approvisionnement va surtout venir de la disponibilité des autres. Alors, comment allez-vous être capables de penser qu'à long terme, vous allez avoir un approvisionnement qui va venir dans vos usines, si on détermine des essences principales sur un territoire et qu'on dit: on va remettre ce territoire en fonction des essences principales? Ce que nous disons, c'est qu'est-ce qu'une essence principale? Comment allez-vous assurer à long terme des produits de qualité? Pouvez-vous faire cela sans que !es utilisateurs de ces produits de qualité soient présents et aient un mot à dire? Comprenez-nous? Ce sont ces questions-là qu'on se pose.

M. Perron: Merci, M. le président et

Mme Julien.

À un autre endroit de votre mémoire, vous faites allusion à l'héritage du passé. Je voudrais relever quelques passages de votre mémoire, par exemple, se rapportant à l'arrérage. "Mais la définition qu'il donne de l'arrérage, soit un territoire qui ne se régénère pas ou qui n'a pas été régénéré de façon adéquate après coupe est inapplicable en forêt feuillue et mélangée." Plus loin, vous mentionnez: "Selon nous, en forêts feuillues et mélangées, l'arrérage doit être défini en fonction d'un volume minimal de produits de qualité à l'hectare."

Plus loin, vous mentionnez aussi, toujours quant à cet héritage, ce qui suit: "Pour cela, il faut que le gouvernement s'implique face à cette industrie comme il le fait face à l'industrie de transformation des résineux et qu'il assume l'héritage du passé."

Ma question est la suivante: Est-ce que je comprends bien lorsque vous écrivez ce que je viens de mentionner dans votre mémoire, à savoir que la définition d'arrérage doit être faite en fonction d'un volume minimal de qualité à l'hectare et ce, pour l'ensemble de votre région ou pour l'ensemble du Québec ou pour les deux?

M. Meilleur: De notre région. Maintenant, Yves Latour pourrait peut-être vous donner plus de détails.

M. Latour: Pour ce qui est des forêts feuillues, on parlera de l'ensemble du Québec dans la mesure où il y a des feuillus à certains endroits. Il y a des régions où il n'y a presque pas de résineux.

Quand on parle de normes, d'un volume minimal de tiges de qualité, il y a des forêts où l'on a un volume très satisfaisant si on l'exploite pour la fibre. Il n'y a pratiquement aucune bille de sciage et de déroulage. À ce moment-là, on comprend mal que des industriels du sciage devraient aménager ces forêts complètement à leurs frais. Dans le cas de résineux, les budgets sont de l'ordre d'une centaine de millions de dollars et, dans le cas des feuillus, les budgets sont pratiquement inexistants dans les prévisions du MER.

M. Perron: Merci, monsieur, de votre réponse. Je voudrais me reporter à la page 5 de votre mémoire, dans la deuxième partie, lorsque vous parlez de Sainte-Véronique. Dans cette forêt expérimentale de Sainte-Véronique, vous soulignez qu'il y a eu des résultats probants en rapport avec la problématique de fond. La question que je voudrais vous poser est la suivante: Est-ce que vous pouvez préciser davantage les enseignements que vous retirez de l'expérience qui a été faite à Sainte-

Véronique quant à l'aménagement de la forêt?

M. Latour: Cela soulève d'abord la problématique de l'entretien des plantations feuillues. Avec cette méthode, on peut éviter des problèmes d'entretien de plantations feuillues. Quand vous allez en forêt pour trouver un petit bouleau jaune dans une forêt de toutes sortes d'essences de dix pieds de haut, je vous assure que l'on peut prendre dix minutes pour trouver un seul arbre. À ce moment-là, la méthode proposée à Sainte-Véronique permet une régénération avec un couvert moins dense de ces essences qui viennent concurrencer les essences voulues. C'est déjà un grand problème de réglé. De plus, je pense que ce qui est le plus important pour l'industrie, c'est que cela permet d'aménager les tiges qui ont déjà atteint un volume de huit ou dix pouces et qui seront donc disponibles pour l'industrie, comme je le disais tantôt, dans environ quinze à trente ans. C'est à cette époque-là que l'on va vivre notre rupture de stocks. Donc, c'est pour cette époque-là qu'il est très important d'aménager notre forêt. Comme le disait Mme Julien, il faut travailler sur les deux plans, mais la méthode prouve qu'il y a moyen de travailler sur cela sans tout casser, avec la mécanisation que l'on a actuellement dans nos forêts. C'est cela que prouve principalement l'expérience de Sainte-Véronique.

M. Perron: Merci, monsieur. Aux pages 3 et 4 de la troisième partie de votre mémoire, vous soulignez d'abord le sommet socio-économique des Laurentides tenu en avril dernier et, plus loin, au bas de la page, vous mentionnez le fait suivant: "Nous voudrions également souligner qu'un partage des activités dans le cadre d'une ressource de propriété collective devra entraîner d'une façon ou d'une autre un partage équitable de la responsabilité face à cette même ressource." D'ailleurs, Mme Julien et vous-même, ainsi que le président, avez déjà soulevé cette question du partage non seulement de la ressource, mais d'autres facteurs quant aux responsabilités. Est-ce que vous pourriez donner davantage de détails sur ce partage des coûts des modalités d'intervention, par exemple, avec les pêcheurs et les chasseurs qui sont mentionnés plus loin dans votre document? On parle toujours de coûts, de l'utilisation en ce qui a trait aux coûts eux-mêmes.

Mme Julien: Nous n'avons pas une position fixe sur le partage des coûts comme tels. Sauf que l'on sait qu'on a une utilisation qui est déjà très forte. On a une habitude de vie, entre chasseurs, pêcheurs et forestiers, dans notre région, et l'on sait qu'il peut être très coûteux pour des exploitants forestiers de voir utiliser leur chemin à un moment donné, ou certaines choses semblables. Cela peut être fait à plusieurs niveaux. On n'a pas, comme telle, une idée précise du coût que l'on voudrait voir imputer. Cela peut être bien plus au niveau de l'éducation des gens. Cela peut être une manière de se comporter. Cela peut être plus d'attention pour que le feu ne soit pas mis dans les forêts. Cela peut être de toutes sortes de façons. On n'a pas déterminé de choses là-dessus. (16 heures)

M. Perron: Merci, Mme Julien. C'est la dernière question pour le moment en ce qui me concerne, parce que des collègues de l'Opposition voudront poser certaines questions aussi. Compte tenu de ce que vous venez de mentionner quant au partage des coûts, croyez-vous que, dans ce cas précis, concernant le partage des coûts, le gouvernement devrait se prévaloir du mécanisme de concertation que nous avons actuellement et qui s'appelle les MRC ou encore l'Union des MRC?

Mme Julien: On n'a pas de difficulté à vivre avec les MRC.

M. Perron: Pardon?

Mme Julien: J'ai dit: On n'a pas du tout de difficulté à vivre avec les MRC. Chez nous, la MRC, c'est un outil absolument indispensable. Si vous regardez la grandeur du territoire chez nous, c'est deux fois le Liban et, juste le territoire municipalise, chez nous, c'est grand comme l'Île-du-Prince-Édouard. On forme 23 municipalités et cela comprend 30 000 personnes. Il y a des villages qui partent de 300 personnes et d'autres qui montent et, quand on a atteint notre maximum, on est rendu à 10 000 personnes. La seule façon que l'on a de survivre, c'est de se concerter. L'exemple, c'est l'association où il y a plusieurs utilisateurs. Ils sont dynamiques et intéressants, mais pour arriver à faire des choses sur une forêt aussi vaste, ils sont obligés de se rencontrer, de se parler et de se concerter. Alors, la concertation est une chose à laquelle on est habitué et avec laquelle on travaille. Vous allez régulièrement voir des gens de tous les ministères et de tous les types d'intervention, tant l'entreprise privée que la fonction publique, s'asseoir autour d'un problème pour le régler. Comme on le dit, si on est en chicane avec un, on n'a plus de place pour aller prendre une bière le samedi soir. Donc, il faut se parler; on n'a pas le choix. Alors, la MRC, c'est pour nous un lieu de concertation. Chez nous, elle a une conscience très vive de l'importance économique de la forêt, autant sur le plan touristique que dans son utilisation... Quand je vous ai dit qu'il n'y

avait pas chez nous antinomie entre l'utilisation de la forêt pour la faune et l'utilisation de la forêt pour la foresterie, c'est que c'est profondément ressenti. Les gars savent bien chez nous que pour les chevreuils, si on ne fait pas d'exploitation forestière, il n'y a pas de régénérescenee; s'il n'y a pas de régénérescence, ils manquent de nourriture. Alors, on vit du bois dans le bois et avec le bois. Comprenez-vous? Cela n'est pas séparé. La MRC, pour nous, c'est le lieu de concertation. Donc on n'a pas de difficulté à vivre avec la MRC. Si vous nous demandez notre opinion, eh bien, pour le Québec en entier, on n'a pas d'opinion.

M. Perron: Mme Julien, je suis très heureux que vous ayez donné votre position en tant qu'entité régionale. Effectivement, vous avez fait allusion à votre MRC et je comprends très bien que vous ne puissiez pas répondre pour l'ensemble du Québec.

Pour le moment, c'est terminé en ce qui me concerne. Je reviendrai plus tard ou encore un de mes collègues. Merci de vos réponses.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis, je vous signale qu'il reste deux minutes pour votre formation politique.

M. le député de Laviolette, je vous les accorderai immédiatement après le député de Labelle.

M. Hétu: Merci, M. le Président. Je voudrais vous féliciter pour votre mémoire, messieurs et madame les intervenants. Puisque vous êtes tous les trois de mon comté, je vous souhaite la bienvenue à la commission parlementaire.

En page 4 de l'introduction, je vois qu'en aucun moment la population de ces régions, les industriels et les travailleurs de ce secteur n'ont été impliqués dans la gestion de ces territoires. Ce sont pourtant eux qui ont développé au fil des ans un intérêt et une connaissance de ces forêts dont l'exploitation et l'aménagement posent des difficultés fort différentes de celles que l'on rencontre en forêt de résineux. Pourriez-vous expliquer un peu l'implication que vous voudriez que cela prenne?

M. Meilleur: Lorsqu'on affirme qu'il n'y en a pas eu, il n'y a effectivement jamais eu de concertation. On tenait tout simplement pour acquis ce qui était déjà décidé pour la gestion de la forêt. Les forêts étaient contrôlées en partie par les concessionnaires, même pour les feuillus. À ce moment-là, les gens de la région n'étaient pas ou ils ne sont pas consultés encore ou très peu.

Maintenant, avec la nouvelle politique forestière, effectivement, la consultation commence à apparaître et nous espérons qu'elle se poursuivra. Je suis certain qu'actuellement dans la région il y a suffisamment d'expertise pour pouvoir en arriver à des conclusions très intéressantes et à des politiques qui vont régir cette gestion de la forêt, qui pourraient être inspirées par des gens de la région et auxquelles les gens de la région pourraient participer activement.

M. Hétu: On a eu l'occasion de visiter la forêt expérimentale et j'aimerais qu'on donne peut-être un peu plus d'explications aux gens sur les différentes coupes qui se font, parce qu'on a vu qu'il y avait des coupes sélectives, des coupes par bandes. Je crois que M. Yves Latour serait en mesure de nous donner la façon dont le reboisement se fait naturellement. Je pense que cela serait une bonne explication à donner. Êtes-vous favorable à des coupes sélectives ou à des coupes à blanc? De quelle façon et à quel endroit serait-il préférable que cela se fasse?

M. Latour: On est tout à fait favorables aux coupes sélectives, c'est certain, mais le problème qu'on rencontre, ce sont les débouchés pour la fibre feuillue. Si on exploite des arbres et qu'on les laisse par terre, cela fait un gaspillage épouvantable et il y a beaucoup de gens qui s'opposent à cela. Le problème, c'est qu'une forêt feuillue, c'est un peu comme un rang de carottes. Si tu ne l'éclaircis pas, les carottes restent toutes petites et personne ne peut les manger. C'est pour cela qu'on est quand même heureux de la venue de l'usine PANFIBRE.

Pour ce qui est du reboisement, dans le cas des résineux, chez nous, c'est comme partout ailleurs, malgré qu'il y ait beaucoup de problèmes parce que les sols sont fertiles et qu'il y a beaucoup de compétition. Pour ce qui est des reboisements feuillus, nous sommes pour dans le cas où il y aura de l'amélioration génétique; sinon, on croit que c'est problématique.

M. Hétu: C'est donc dire que l'usine PANFIBRE, qui était prévue par l'ancien gouvernement, depuis 1981, mais qui n'était pas décidée, nous autres, cela nous a pris six mois pour décider parce qu'on était conscient d'un besoin dans le comté. L'usine PANFIBRE va venir aider, normalement, à nettoyer la forêt.

M. Jolivet: Bravo, bravo, pour le message publicitaire.

M. Hétu: Comme vous autres, d'ailleurs.

Mme Julien, tout à l'heure, j'ai compris un peu dans la présentation du mémoire que

les allocations étaient peut-être trop hautes. Que pensez-vous que l'on doive faire avec les allocations qui sont trop hautes?

Mme Julien: Ce que nous avons demandé, dans un premier temps, c'est qu'un inventaire soit fait et qu'il tienne compte de la notion de qualité. Dans le fond, tout ce qu'on demande, c'est de mettre la notion de qualité dans toutes ces choses, de faire une gestion qui soit peut-être un peu plus fine, un peu plus raffinée par rapport aux bois de qualité. Pourquoi? Parce que, quand on fait du bois résineux, il y a peut-être trois qualités, on arrive sur le marché avec trois qualités différentes de résineux. Dans le bois feuillu, on peut aller jusqu'à 17 grades. La production de bois feuillu s'adresse à un marché qui est très exigeant au niveau de la qualité et cette qualité commence en forêt. Elle doit se faire dans l'exploitation forestière, on doit en tenir compte dans l'exploitation forestière, on doit en tenir compte dans le mesurage, en tenir compte dans la tarification, en tenir compte dans la transformation. Les gens de chez nous sont déjà très spécialisés dans la transformation. Les produits de sciage et de déroulage demandent déjà une attention aux produits de qualité qui est déjà très présente. Nous, on voudrait que cette attention se transporte également en forêt parce qu'on pense que le succès d'une usine de transformation de bois est directement lié à la ressource forestière comme telle.

Ce qu'on pense, c'est qu'on devrait faire un inventaire sérieux en tenant compte de ces normes de qualité, s'asseoir avec les intervenants, ne pas augmenter les volumes actuels, partir de ces volumes de base et refaire une définition rationnelle en fonction des besoins des usines et en fonction des possibilités de la forêt.

M. Hétu: Plusieurs personnes sont venues en commission et nous ont suggéré un emblème pour le Québec, un arbre-emblème. Je vous demanderais, en terminant, si vous avez une idée à cet effet. Vous pourriez nous faire une suggestion?

Mme Julien: Vous ne devriez pas nous demander cela. On va tous dire la même chose.

M. Meilleur: On aime mieux ne pas se prononcer là-dessus.

M. Hétu: Comme le bois feuillu est rare, ce serait peut-être du feuillu?

Mme Julien: On aurait une grosse tendance vers le bouleau jaune. Alors, vous ne pouvez pas nous demander cela,

M. Hétu: Alors, j'ai terminé.

Le Président (M. Charbonneau): Alors, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, avant que quelqu'un du gouvernement nous indique que, malheureusement, les intervenants n'ont pas pu être questionnés trop longtemps parce qu'on a manqué de temps, je vais vous dire que le temps qui nous a été alloué a été déterminé par le parti ministériel. Je pense que c'est important de vous le dire. Je n'ai que deux minutes pour vous adresser un petit mot.

Dans la partie 3, à la page 13 - je reviens sur une question de mon collègue -on dit: "Finalement, !e gouvernement s'il veut vraiment favoriser l'aménagement forestier et l'intégration des coupes sur un territoire où il y aura plusieurs utilisateurs, devrait accepter de négocier avec les membres d'une association qui décident sur une base volontaire de se concerter pour remettre en production un même territoire." Dans le livre blanc, nous avions proposé la mise sur pied d'un conseil permanent de la forêt. On avait proposé aussi en même temps que cette ramification se fasse au niveau régional. Je ne comprends pas, d'abord, pourquoi le ministre ne l'a pas mis dans son avant-projet de loi et, deuxièmement, pourquoi il n'accepterait pas de le remettre dans la mesure où il va s'éviter beaucoup de pressions sur lui comme ministre. Il va permettre aux intervenants régionaux de régler leurs problèmes entre eux avec l'aide du ministère.

La proposition qui a été faite est un peu dans le sens que les régions sont différentes les unes des autres. Comme elles sont différentes les unes des autres, il faut donc des solutions différentes à des problèmes différents. Dans ce contexte -votre région confine à la mienne par le nord, par le secteur Parent - je dois vous dire que vous avez intérêt à faire cette rencontre régionale. Est-ce que vous seriez d'accord que le ministre change d'opinion - puisqu'il dit qu'il tient une commission parlementaire dans le but de changer d'opinion - et permette la mise sur pied de cette proposition que vous faites, que je trouve très intéressante et qui était déjà contenue dans le livre blanc?

M. Meilleur: Mais ce qu'on propose, c'est la concertation des associations dans des régions spécifiques comme la nôtre où il y a de nombreux petits intervenants. On croit que cela devrait être possible de le faire. Ce qu'on ne veut pas, c'est se faire imposer une association. On veut que ce soit une association sur une base volontaire pour, effectivement, défendre nos intérêts, mais aussi pour nous concerter quant à l'intervention en forêt. Il est évident que tous les industriels de l'association tiennent à

garder la possibilité d'intervenir en forêt si nécessaire. Si ce n'est pas absolument nécessaire, cela nous permettrait d'avoir une force de négociation face aux papetières, parce que, évidemment, c'est là qu'elles arrivent. Au moins, cela ferait un rapport de forces permettant de négocier avec les plus gros Intervenants. C'est pour cela qu'on tient à maintenir l'association. Je crois que cela devrait être possible même si... Au point de vue juridique, il devrait y avoir quelque chose qui nous permette de le faire. Pour nous, cela va de soi.

M. Jolivet: Juste une petite dernière question.

Le Président (M. Charbonneau): Avec le consentement, parce que votre temps est écoulé.

M. Côté (Rîvière-du-Loup): Oui, M. le Président, pour autant que le député de Laviolette nous assure que sa question sera très courte, parce que sa formation politique a épuisé le temps qui lui était alloué.

M. Jolivet: Que vous nous avez alloué.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Laviolette, vous pouvez y aller.

M. Jolivet: Je n'aime pas qu'on me fasse la charité. Donc, je n'utiliserai pas mon droit de parole.

Des voix: Ah!

Le Président (M. Charbonneau); Alors, il reste huit minutes du côté ministériel. M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le Président. D'abord, je veux mentionner que le décret du 27 novembre concernant PANFIBRE réglait partiellement le dossier. Tout ce que j'ai mentionné, M. le député de Duplessis, c'est que c'était pour les imprévus qu'on a fait appel au budget du ministère. Si vous aviez écouté...

Quand on parle de Sainte-Véronique, je croyais que le ministère et le gouvernement fédéral contribuaient financièrement à l'expérience de Sainte-Véronique avec la coopérative.

M. Latour: Le ministère de l'Énergie et des Ressources assure l'encadrement technique. Pour l'aspect écologique, le chercheur est fourni par le ministère de l'Énergie et des Ressources, M. Zoran Majcen. Le martelage du terrain, les plans d'inventaire, cela a été fait par le MER. La coopérative assure l'encadrement technique des travaux, la prise de données sur les coûts d'exploitation, et le gouvernement fédéral fournit les budgets pour la main-d'oeuvre, c'est-à-dire la portion de la main-d'oeuvre qui reste à combler entre une opération normale et une opération d'aménagement. C'est la partie pour laquelle le gouvernement fédéral a compensé.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Cela représente un montant de 50 000 $ de la part de chacun des gouvernements?

M. Latour: D'année en année, les budgets ont varié. Je crois que les budgets du ministère de l'Énergie et des Ressources, au départ, on été assez élevés, parce que les frais d'inventaire ont été pas mal élevés. Je ne pourrais pas dire exactement le montant du budget. C'est un budget de fonctionnement. On n'est pas au courant de ces budgets.

Mme Julien: Au début, c'est moi qui ai commencé à négocier ces choses. Ce qui est arrivé, c'est que le ministère voulait faire de la recherche, mais ne trouvait pas d'intervenant qui voulait passer aux actes. Nous, à la coopérative forestière, comme notre intention était de vraiment ramener notre monde au travail dans la région -parce que lors de la crise, à partir de 1980 jusqu'à 1982, cela a été une situation absolument épouvantable chez nous - on a pris cette chose en en assumant les risques au départ, parce que les budgets étaient fixes et venaient compenser pour la différence entre l'exploitation et la vente des bois. Et, au début, quand personne n'avait l'expertise, ce n'était pas facile de budgétiser à ce niveau. C'est dans ce sens qu'on dit qu'on l'a financé. Au début, on en a assumé une partie. (16 h 15)

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci. Vous mentionnez à la page 3: "Or dans son programme de remise en production des forêts, le MER a prévu une répartition des efforts financiers du gouvernement de 1986 à 1992 pour la remise en production de l'arrérage. Aucune somme n'y est prévue pour la remise en production des forêts feuillues."

Actuellement, on reboise 600 000 arbres en forêt feuillue. Malheureusement, ce n'est pas dans votre région. J'espère qu'on y arrivera. On en fait du côté du feuillu. Évidemment, dans votre région, j'en suis, j'espère qu'on y arrivera.

Vous parlez d'inventaire, de tenir compte de la qualité des arbres dans le déroulage, le sciage et les autres. Actuellement, vous dites que c'est un début. Est-ce que vous souhaitez qu'on applique les règles de Petro ou si vous aimez expliciter cela'? Parce que si cela peut être fait pour vous donner satisfaction, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas.

M. Meilleur: Ce qu'on aimerait, évidemment, c'est pouvoir différencier comme il faut à partir des inventaires forestiers la disponibilité en déroulage et, au niveau du sciage aussi, la qualité des sciages qui vont là. Tantôt, le ministère nous revient avec un coût de la valeur de bois sur pied. Évidemment, il faudra, si on compare quelque chose, pouvoir comparer des pommes avec des pommes. Lorsque nous achetons du bois qui vient des États-Unis ou qui vient de l'extérieur de notre région, qu'on pense juste à l'érable qui est pris dans notre région par rapport à l'érable de l'Outaouais, ce n'est pas la même valeur. C'est impossible, s'il n'y a pas la notion de qualité, de savoir exactement ce qu'on compare.

Nous autres, on calcule que c'est une question d'équité, c'est une question normale. C'est impossible de gérer ces forêts sans connaître les qualités. À ce moment, il faut que ce soit ajouté et que les normes de Petro soient ajoutées au niveau du sciage et les autres normes que je connais au niveau du déroulage, que toutes ces normes soient connues et soient appliquées aux inventaires forestiers.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Dans votre mémoire, M. Meilleur, vous parlez d'une matrice d'utilisation des feuillus, c'est un début. Cela n'est pas Petro.

Mme Julien: Ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait des qualités de tiges debout. On a dit: un A, un B, un C et ensuite il y a eu des gens chez vous qui sont allés faire des tests. Ils ont abattu des arbres de différentes tiges et ils ont établi des choses en fonction de certaines normes. Sauf que nous, on vient juste d'avoir cette documentation. Là, la jonction de l'inventaire, le mariage, si vous voulez, avec la matrice de qualité n'est pas encore sorti. On n'a pas encore tes données. C'est pour cela qu'on vous dit: C'est un début, mais nous, étant donné que les normes de Petro s'appliquent surtout au niveau de l'industrie, là on aimerait pouvoir comparer les normes qui vont rentrer à partir de l'inventaire avec les normes qui sont utilisées en usine pour savoir si on arrive à une jonction qui est intéressante.

C'est pour cela qu'on suggérait que vos fonctionnaires qui ont développé des méthodes puissent venir s'asseoir en régions avec des gens qui, eux, ont des méthodes développées du côté de l'industrie pour voir comment on fait le mariage de cela.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci. À la page 13, je reviens là-dessus, on dit: "Finalement, le gouvernement s'il veut vraiment favoriser l'aménagement forestier et l'intégration des coupes sur un territoire où il y aura plusieurs utilisateurs, devrait accepter de négocier avec les membres d'une association qui décident..." Il n'y a rien qui nous empêche de le faire, mais il faut trouver un véhicule qui va se rendre responsable. Est-ce que vous avez une suggestion à ce sujet? L'association comme telle ne peut pas prendre la responsabilité, disons, solidairement, conjointe pour chacun des intervenants.

M. Meilleur: Nous, on croit que l'association au niveau de l'aménagement pourrait très bien répondre à ce moment. L'association peut assumer des responsabilités concernant l'aménagement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): L'association peut se porter garante de chacun des industriels?

M. Meilleur: II faudrait trouver un mécanisme...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui.

M. Meilleur: On n'a pas tellement discuté à ce niveau, à savoir quelle mécanique on mettrait en place pour faire fonctionner cela. On voudrait vraiment regarder la possibilité de travailler à ce moment, mais sans que ce soit coercitif, éviter, autrement dit, de former une association, comme je le disais tantôt, où cela serait l'association seulement qui a la possibilité d'intervenir en forêt. Il s'agit de regarder les deux places, mais que l'association ait une certaine responsabilité vis-à-vis du plan d'aménagement et aussi de la surveillance du plan d'aménagement, je croîs que c'est possible.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Est-ce que vous regrouperiez les territoires de tous vos membres de sorte que l'association se rendrait responsable de l'aménagement sur le territoire regroupé de tous les industriels?

M. Meilleur: II y aurait certainement une possibilité, sur le territoire regroupé de tous les industriels, que l'association prépare les plans en concertation avec les industriels, qu'elle puisse aussi surveiller une partie des travaux qui seront faits là, sans que l'association soit obligée d'être maître d'oeuvre sur ce territoire.

M. Côté (Rivière-du-Loup): II me reste peu de temps, mais, lorsque vous demandez que des coûts de fonctionnement de l'entreprise, les coûts d'investissement ou d'aménagement, soient considérés comme des dépenses, du point de vue du Revenu...

M. Ciaccia: On a suivi les précédents que vous avez établis.

M. Côté (Rivière-du-Loup): ...ce que

j'en sais, c'est que c'est reconnu en partie, ici au Québec également, grâce à l'intervention du ministère du Revenu qui a donné son opinion là-dessus.

M. Meilleur: Je pense que c'est une erreur que l'on doit admettre à ce niveau. Les dépenses, on pense qu'elles sont reconnues; il s'agissait pour nous de trouver un mécanisme en matière de fiscalité pour diminuer le coût de cette intervention en forêt.

Le Président (M. Charbonneau): Cette réponse termine le temps de discussion alloué à votre mémoire. Je demanderais au député de Duplessis de faire les remerciements d'usage.

M. Perron: M. le Président, si vous me permettez un commentaire avant de remercier les intervenants...

Le Président (M. Charbonneau): Un bref commentaire.

M. Perron: Un bref commentaire. D'abord, la qualité du mémoire m'aurait permis de poser plusieurs questions additionnelles sur plusieurs secteurs d'activité qui sont touchés par l'avant-projet de loi. On a beau rire du côté des ministériels, cela ne me dérange pas plus qu'il ne le faut, M. le Président.

M. Jolivet: II n'y a pas grand feuillu dans Trois-Rivières!

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre! À l'ordre!

M. Perron: M. le Président, lorsque les représentants de l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides parlent du rendement soutenu, du volume alloué, de la tarification, de la capacité concurrentielle, de la fiscalité et de la formation de la main-d'oeuvre, vous comprenez sans doute que nous aurions eu plusieurs questions à poser aux intervenants qui sont devant nous. Compte tenu de ce qu'a dit le député de Laviolette, paroles que j'endosse entièrement, mais que je ne voudrais pas répéter, je voudrais informer les représentants de l'Association des intervenants forestiers des Hautes-Laurentides, que, lors des débats qui vont se faire sur le projet de loi final qui sera déposé par le ministre, comme plusieurs éléments que vous avez apportés dans votre mémoire sont des éléments nouveaux, dont on ne tenait pas compte, dans un certain sens, dans le livre blanc de juin 1985 - je suis honnête en le disant - mais dont on devra tenir compte maintenant, notamment les feuillus, et en particulier les feuillus nobles que nous avons au Québec et ceux de votre région, nous allons faire notre devoir en tant que membres de l'Opposition et nous allons essayer d'amener le gouvernement à mettre dans son projet de loi certaines recommandations que vous avez faites dans votre mémoire. On va s'en servir, soyez-en assurés, pour mener à bon port, comme le diraient les gens de Port-Cartier, dans mon comté, l'avenir de notre forêt québécoise.

En terminant, je tiens à vous remercier énormément de la qualité de votre mémoire et à vous assurer de notre collaboration quant à la teneur de la grande majorité des recommandations que vous faites à l'intérieur de votre mémoire. Merci, madame, M. le président, ainsi que votre collègue.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Duplessis. M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, j'ai beaucoup apprécié votre mémoire. Soyez assurés que nous en tiendrons compte, dans la mesure du possible, dans la rédaction du projet de loi, je vous le garantis. C'est pourquoi, comme le signalait M. le député de Laviolette, nous vous avons invités. C'est un mémoire de qualité, tout comme les travaux que vous exécutez sur le terrain par le biais de la coopérative ou autrement. J'ai été agréablement surpris et enthousiaste de voir le résultat de vos travaux lorsque je suis allé à Sainte-Véronique. J'espère que vous m'inviterez encore, et soyez assurés que je ferai l'impossible pour y aller. Encore une fois, merci de votre intervention, et je vous souhaite un bon voyage de retour.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, " M. le ministre. Madame et messieurs, merci beaucoup.

M. Meilleur: Merci et nous espérons vous avoir sensibilisés au problème du feuillu. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Très bien, merci. Bon retour et à la prochaine peut-être. J'invite maintenant l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec à se présenter à la table.

M. Jolivet: M. le Président, pendant que les gens s'installent est-ce qu'on peut faire une petite intervention?

Le Président (M. Charbonneau): On peut toujours, oui.

M. Jolivet: Vous allez voir, c'est très intéressant.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Laviolette, allez-y.

M. Jolivet: M. le Président, pour ce mémoire, en termes d'horaire, nous devons -si je calcule bien - avoir la valeur de deux heures et trente. Nous sommes, au moment où l'on se parle, à presque 16 h 30, il y a une décision qui doit se prendre. Je crois que nous devons vous le faire parce que l'horaire qui nous a été imposé nous indique qu'il devait y avoir consentement unanime pour terminer à 18 h 30. Au moment où on se parle, on a des risques de terminer à 19 heures. Vu que les intervenants qui sont devant nous sont de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec et que je sais que des personnes doivent quitter pour être ailleurs ce soir, comme ces intervenants méritent notre attention la plus spéciale, ils auront la permission de l'Opposition pour continuer un peu plus tard que 18 h 30.

Le Président (M. Charbonneau): Très bien, M. le député de Laviolette. Cela étant dit, tout ie monde est conscient que, par ailleurs, ça diminuera d'autant le temps du souper parce que nous devrons reprendre à 20 heures pour pouvoir terminer à 22 heures dans la mesure du possible et selon...

Une voix: Cela va faire du bien pour la ligne!

M. Perron: Quant à nous, M. le Président, on peut se rendre à 22 heures.

Le Président (M. Charbonneau): Très bien, M. le député de Duplessis. Qu'à cela ne tienne! Très bien. Je demande maintenant au porte-parole de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, je ne sais pas si cela sera M. Deschênes ou Mme Saucier, en tout cas l'un ou l'autre, de présenter les personnes qui font partie de la délégation de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec. Je vous indique dès maintenant ce qui a vous a sans doute été souligné par le secrétaire de la commission préalablement, que la durée de présentation de votre mémoire sera de trente minutes et que, par la suite, il y aura une heure de discussions pour chaque côté ou chaque formation politique appartenant à la commission parlementaire. Alors, si je comprends bien, c'est M. Deschênes, c'est cela?

Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec

M. Deschênes (Guildo): C'est cela, M. le Président. Je vous présenterai les membres de notre comité exécutif et une autre personne qui n'est pas dans le comité exécutif, ainsi que deux permanents de notre association. Tout d'abord, je commencerai à mon extrême gauche, M. Gilles Côté, membre du comité exécutif de l'AMBSQ et directeur général de Scierie Leduc Division Papeterie Reed Ltée; ensuite, Mme Guylaine Saucier, présidente ex officio de l'association et présidente des Produits forestiers Saucier Ltée; ensuite M. Richard Lacasse, directeur général de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec; à mon extrême droite, M. André Tremblay, vice-président de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec et directeur général des Scieries Saguenay Ltée; M. Fred Burrows, administrateur de l'AMBSQ et vice-président, opérations forestières et usines de Normick-Perron Inc.; et moi-même, Guildo Deschênes, président des Industries Georges Deschênes Ltée et président de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec. Je m'excuse il y a aussi M. Florent Milot, directeur des services forestiers de l'AMBSQ. M. le Président, si vous me permettez, avant de commencer la présentation, on devra peut-être excéder de quelques minutes notre présentation étant donné l'importance du document.

Le Président (M. Charbonneau): Si tout le monde est consentant, je n'ai pas de problème. La seule chose que je vous indique, c'est qu'il ne faudrait pas doubler le temps de présentation.

M. Deschênes: On ne doublera pas le temps, M. le Président. C'est quelques minutes.. (16 h 30)

Le Président (M. Charbonneau): Cela va.

M. Deschênes: ...étant donné l'importance du document On a retranché quelques questions, mais disons qu'il est important de prendre quelques minutes de plus.

Le Président (M. Charbonneau): Allons- y.

M. Deschênes: M. le Président, MM. les ministres, chers membres de la commission, je commencerai en vous lisant l'introduction du document et, ensuite, je passerai aux considérations et j'enlèverai le deuxième paragraphe à la page 5. Je vous ferai grâce de l'évolution du dossier.

L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec remercie le ministre délégué aux Forêts, M. Albert Côté, de l'occasion qu'il lui fournit d'exprimer son point de vue sur le contenu et les modalités d'application de l'avant-projet de loi sur les forêts déposé en juin dernier devant l'Assemblée nationale.

L'AMBSQ voit dans cet avant-projet de loi et dans la convocation des intervenants

du milieu forestier à une commission parlementaire une volonté bien arrêtée du MER de mener à terme son projet d'instaurer dans un proche avenir un nouveau régime forestier au Québec. L'association y perçoit aussi le souci du ministre, M. Côté, de consulter et de concilier les opinions des principaux intervenants du secteur forestier. Elle veut donc féliciter le ministre de ce geste.

Si vous voulez passer à l'article 3, Considérations générales. Depuis plusieurs années déjà, le besoin d'opérer un virage dans le monde forestier se fait sentir. Avec son avant-projet de loi, le MER manifeste clairement son intention de procéder à ce virage par l'instauration d'un nouveau régime forestier. L'AMBSQ et les membres qu'elle représente voit le bien-fondé du régime proposé, en acceptent la majorité des éléments et en appuient les principes directeurs. Toutefois, les vrais problèmes et le défi forestier ne résident pas dans l'élaboration d'un nouveau régime ou d'une nouvelle loi, mais dans son application et sa mise en oeuvre. C'est pourquoi l'association voit dans les modalités qui encadreront la mise en place du nouveau régime les sujets majeurs de contrainte qui pourraient rendre précaire la situation de l'industrie des sciages. C'est sur certains de ces sujets qu'elle veut préciser sa position dans ce mémoire.

Toutefois, avant d'exposer ses recommandations, l'AMBSQ déplore que le MER, pour assurer la mise en place du régime forestier, n'ait pas senti le besoin de présenter plus d'un scénario montrant une implication plus ou mains intensive de l'industrie dans des travaux d'aménagement. Pour établir sa base de calcul des frais d'aménagement que se répartiront l'État et l'industrie, le MER a surtout considéré des demandes d'allocation de l'Industrie sans accorder suffisamment de poids au niveau actuel de coupe. Ainsi, la seule hypothèse retenue s'appuie sur l'impératif de rendre la forêt capable de produire annuellement 30 000 000 de mètres cubes de bois (essences résineuses et feuillues) alors que le niveau moyen de la récolte au cours des dix dernières années et même des cinq dernières années se situe aux environs de 22 500 000 mètres cubes,

II est connu, pour plusieurs raisons, que les allocations accordées par le MER dépassent, depuis plusieurs années, de 35 % les volumes ligneux récoltés. Ce pourcetage pourrait être encore plus élevé si la forêt pouvait permettre au MER de satisfaire encore davantage les demandes de l'industrie qui, c'est naturel, cherche à obtenir la meilleure sécurité d'approvisionnement pour ses besoins futurs. L'association doute que l'utilisation de ce volume de 30 000 000 de mètres cubes comme base de calcul des frais d'aménagement soit réaliste. S'il ne l'est pas, on a ainsi gonflé de beaucoup les montants à débourser par le MER et l'industrie.

Je passe un paragraphe.

L'atteinte d'un tel objectif va exiger, selon les données fournies, qu'une large portion des travaux à effectuer repose sur la réalisation du programme de reboisement déjà mis en branle et qui, d'ailleurs, aura surtout pour objet d'augmenter la possibilité des essences épinette, sapin et pin gris à 26 000 000 de mètres cubes. Faut-il penser que le MER doit absolument réaliser ce programme de reboisement et que les objectifs de production ont été fixés en vue de cette réalisation? S'il en est ainsi, l'aménagement de la forêt du Québec va être très coûteux, car le reboisement est la mesure sylvicole la plus dispendieuse. D'autre part, on s'écarte ainsi de l'opinion de la plupart des grands aménagistes qui suggèrent de n'y avoir recours que dans des cas très spéciaux. Existe-t-il des mesures sylvicoles alternatives qui, tout en étant moins coûteuses, permettraient l'atteinte des mêmes objectifs de production? L'AMBSQ aimerait savoir si le MER a étudié certaines de ces solutions et pour quelles raisons elles n'ont pas été retenues dans un programme d'aménagement.

D'autre part, l'association croit que l'atteinte des objectifs fixés pourrait se faire selon certaines étapes, d'où la possibilité d'étaler sur une plus longue période les frais d'aménagement et l'occasion pour le MER de s'impliquer davantage dans le financement des travaux d'abord jugés nécessaires. En outre, il n'y a pas lieu de croire qu'un aménagement de la forêt, si intense soit-il, va empêcher que ne se produisent à plus ou moins long terme les ruptures de stock prévues dans certaines régions.

Dans un autre ordre d'idées, l'AMBSQ remarque qu'à maintes reprises, dans le contenu de l'avant-projet de loi, le ministre se réfère à de nombreux règlements. Cette attitude laisse croire à un manque de confiance évident envers les gens de l'industrie. Veut-on les encadrer dans une loi et des règlements qui limiteront tous leurs gestes et ne laisseront place à aucune initiative? II faudrait penser qu'un surplus de contraintes pourrait avoir des effets néfastes jusque sur la compétitivité internationale de l'industriel. L'AMBSQ espère que le ministre saura comprendre qu'en ce temps favorisant la non-réglementation il lui faudra s'appliquer à ne pas noyer la future loi sur les forêts dans une multitude de règlements ne laissant place à aucune flexibilité.

Si vous me le permettez, je vais sauter la fin de ce paragraphe pour continuer.

L'AMBSQ voudrait aussi souligner que la venue d'un nouveau régime forestier ne sera pas la panacée capable de résoudre tous les problèmes du monde forestier. Il n'empêchera certainement pas les ruptures de stock, surtout celles à court terme, de se

produire dans certaines régions, malgré les efforts d'aménagement qu'on pourrait y consentir. Ainsi, un nouveau régime forestier ne pourra éviter des fermetures d'usines. II pourra même les accélérer si, par l'octroi d'allocations trop élevées, une augmentation du niveau de coupe est plutôt favorisée, réduisant d'autant la période précédant la rupture de stock prévue dans une région. Le gouvernement devra donc être très prudent dans son rôle de distributeur de la ressource. Il devra étudier toutes les solutions qui aideront l'industrie, durant la période de restriction occasionnée par ces ruptures de stock, jusqu'au moment où les travaux d'aménagement auront produit une nouvelle forêt exploitable que, d'ailleurs, il ne faudra pas cependant récolter trop rapidement car elle ne produirait que du bois à pâte.

L'AMBSQ s'attend, dans les années futures, en particulier à cause des ruptures de stock, à une consolidation et à une rationalisation plus accélérées de l'industrie des sciages. Selon l'association, le gouvernement devra encore une fois être circonspect et laisser plutôt les forces jouer entre elles. Une industrie plus forte devrait en résulter, les interventions gouvernementales se faisant discrètes et respectant le sens des responsabilités du monde de l'industrie.

M. le Président, pour continuer, si vous le permettez, Mme Guylaine Saucier va lire une partie des recommandations. Ensuite, on va se partager la charge du reste des recommandations. On a fait quelques coupures. On vous mettra au courant au fur et à mesure.

Mme Saucier (Guylaine): Premièrement, l'importance de l'industrie des sciages. L'AMBSQ recommande que l'industrie des sciages, établie dans les faits comme un secteur vital de l'économie de la province, soit aussi reconnue par le gouvernement comme agent déterminant de la mise en valeur des richesses forestières.

Dans son avant-projet de loi, le ministre indique qu'il entend prendre des mesures spéciales "pour favoriser une utilisation optimale des bois disponibles suivant leur qualité et leurs caractéristiques." L'industrie des sciages voit dans cette affirmation un souci du ministre d'utiliser le mieux possible les bois des forêts croissant sur les terres publiques. Pour les industriels du sciage, tous les bois devraient être orientés vers les usines de sciage pour atteindre l'objectif d'une utilisation optimale. D'ailleurs, vu son rôle d'exploitant dominant des forêts publiques, l'industrie des sciages s'impose déjà comme agent déterminant de l'utilisation des ressources forestières et, conséquemment, de leur mise en valeur.

Au deuxième rang de l'industrie forestière, le secteur des sciages a effectué des livraisons dont la valeur a été estimée à plus de 1 500 000 000 $ au cours de l'année 1985 tout en procurant des emplois directs et indirects à près de 70 000 personnes. Par cet apport économique, l'industrie des sciages s'inscrit sans consteste comme un secteur vital de l'économie de la province. D'ailleurs, elle joue cet important rôle dans toutes les régions du Québec auprès d'environ 125 communautés. Elle est, pour ces agglomérations, non seulement un soutien économique indispensable, mais aussi, et peut-être davantage, le pôle autour duquel gravite la majorité de leurs activités.

À noter que l'industrie des sciages, bien qu'installée depuis de nombreuses années dans l'ensemble du Québec, a particulièrement connu une expansion au cours des quinze dernières années. Au début des années soixante-dix, une politique gouvernementale a vraiment favorisé le développement de l'industrie des sciages. Le gouvernement a alors mis à la disposition des scieries des volumes ligneux considérables provenant de vastes étendues de forêts rendues à maturité. Pour la première fois de son histoire, l'industrie des sciages avait droit à des garanties d'approvisionnement accordées dans le cadre de l'instauration d'un nouveau mode de tenure, la forêt domaniale. Ces garanties d'approvisionnement, il faut le souligner, ont, de plus, grandement aidé les industriels dans la recherche du financement nécessaire à la bonne marche de leurs entreprises. Ces derniers n'ont pas manqué de profiter de l'occasion offerte et, animés d'un dynamisme remarquable, ils ont su donner à leurs entreprises l'essor qui a amené leur industrie au premier rang de l'économie québécoise. C'est ainsi, d'ailleurs, qu'en récoltant 68 % des bois sur forêts publiques elle occupe présentement le rôle de premier exploitant forestier au Québec.

C'est à ce titre d'ailleurs que l'industrie des sciages agit de façon déterminante sur l'utilisation de la ressource forêt. Productrice de plus de 4 000 000 de tonnes de copeaux en 1985, le secteur des sciages oriente ainsi surtout vers l'autre principal secteur de l'industrie forestière, les pâtes et papiers, une matière première qui constitue la moitié de sa consommation de fibres. Cette source d'approvisionnement est d'autant importante pour les papetières que les prix consentis aux scieries pour les copeaux leur permettent de maintenir leur coût de matière première au plus bas niveau. L'existence de l'industrie des sciages assure ainsi aux papetières une meilleure situation financière et la disparition soudaine du secteur des sciages pourrait jusqu'à attaquer sérieusement la viabilité de l'industrie des pâtes et papiers.

Ainsi, par les activités qu'elle crée, tant au niveau de ses exploitations en forêt qu'au niveau de la transformation du bois

dans ses usines, l'industrie des sciages s'est affirmée comme un des principaux secteurs de l'économie de la province. Le nouveau régime forestier que le Québec s'apprête à instaurer doit donc maintenir et réaffirmer le râle primordial de l'industrie des sciages comme secteur de mise en valeur des richesses forestières et de développement économique.

Le financement de l'aménagement forestier. Les considérations de l'AMBSQ sur ce sujet sont basées sur des augmentations de possibilité forestière à atteindre et découlent de l'hypothèse proposée par le MER lors des rencontres qu'il a tenues avec l'industrie. Ces considérations sont nécessairement techniques et sont peut-être plus difficiles à saisir.

Nous voulons, parce que le temps à notre disposition est limité, résumer notre position sur le financement en ce qui concerne nos deux premières recommandations.

Tout d'abord, I'AMBSQ recommande que le MER soit financièrement responsable des travaux d'aménagement qui rendront la forêt apte à produire sur base de rendement soutenu le volume actuel de coupe, soit environ 22 000 000 de mètres cubes résineux et feuillus. (16 h 45)

Le MER devrait donc assumer les frais des travaux d'aménagement à faire réaliser pour augmenter la possibilité naturelle à 22 500 000 mètres cubes. De plus, l'AMBSQ demande que le MER produise annuellement un plan détaillé des travaux qu'il prévoit réaliser sur les territoires des bénéficiaires, soit ceux concernant la régénération des superficies de "backlog" dont il sera responsable et ceux à effectuer pour augmenter la possibilité selon l'objectif prévu. Il serait aussi très utile que le MER prépare un plan quinquennal montrant ses interventions d'aménagement au niveau de chaque territoire désigné à un bénéficiaire. Ces plans devraient être joints aux plans annuels et quinquennaux que devront préparer les bénéficiaires.

Deuxièmement, l'AMBSQ recommande que les frais des travaux d'aménagement permettant d'augmenter le niveau actuel de coupe au niveau fixé par le MER dans son hypothèse soient à la charge de l'industrie forestière et que la portion de ces frais à être assumée par l'industrie des sciages corresponde au volume ligneux qu'elle transforme en bois de sciage. Ce volume ligneux représente environ 22 % des bois récoltés sur forêts publiques.

Pour votre information, nous sommes rendus à la page 19, au troisième paragraphe.

Malgré une situation financière peu encourageante, l'industrie des sciages est prête à faire tous les efforts voulus pour payer sa portion des frais d'aménagement, mais elle tient à ce que cette portion représente le volume ligneux retenu comme bois de sciage, selon ce qui a été indiqué ci-avant.

D'autre part, l'AMBSQ désire attirer l'attention sur la situation financière peu enviable de l'industrie en faisant mention d'une étude qu'elle a fait produire au début de 1986. Cette étude démontre qu'au cours des années 1980 à 1984 les entreprises de sciage s'approvisionnent en grande partie sur forêts publiques - 98 % des usines échantillonnées - ont présenté un profit net avant impôt de 0,5 %, soit l'équivalent de seulement 0,21 $ le mètre cube de bois récolté. Il est à noter que les usines échantillonnées récoltent actuellement 33,4 % des bois provenant des forêts publiques, ce qui donne à notre échantillonnage une grande crédibilité.

Cependant, l'industrie du sciage serait dans une bien meilleure situation financière si les scieurs pouvaient récupérer au moins ce qu'il leur en coûte pour produire leurs copeaux. Selon une analyse de cette production à l'automne 1985, il a été établi que le coût moyen de production d'une tonne métrique de copeaux par l'industrie des sciages était de 102,80 $ alors qu'au cours des années 1980 à 1984 le prix de vente moyen pour un tel volume était de 70,81 $, laissant un déficit de 32 $ la tonne. Quand on considère que tes scieries de la province ont produit plus de 4 000 000 de tonnes de copeaux en 1985, on peut facilement conclure que cette industrie aurait certainement plus de capacité de payer sa quote-part à l'aménagement forestier si elle récupérait ces 32 $ pour chaque tonne de copeaux vendue; toutefois, malheureusement, tel n'est pas le cas. Pour votre information, nous avons annexé ces deux études dont on vient de parler au mémoire que nous vous présentons.

M. Deschênes: Si vous permettez, M. le Président, M. Gilles Côté va continuer à lire les recommandations.

M. Côté (Gilles): 2.3. Volumes additionnels produits par des travaux plus intensifs. L'AMBSQ recommande que les volumes additionnels produits deviennent sa propriété lorsqu'un bénéficiaire, avec l'approbation du ministre, aura effectué à ses frais des travaux plus intensifs d'aménagement dont le rendement escompté aura pour effet de dépasser les objectifs de production prévus au contrat.

Cette recommandation montre l'Intérêt des membres de l'industrie des sciages à accroître le rendement de la forêt québécoise de façon à la rendre plus apte à répondre aux besoins de l'industrie dans le futur.

En devenant propriétaire de ces volumes additionnels, le bénéficiaire pourra les utiliser à son gré, soit pour augmenter son allocation annuelle, soit comme réserve a utiliser selon les besoins d'une usine. L'industrie pourra aussi monnayer ces volumes advenant la vente de l'usine ou tout simplement sa fermeture. Cette mesure se présente au bénéficiaire comme une incitation valable à aménager plus intensivement la forêt de son territoire. Il est certain qu'étant propriétaire de ces volumes le bénéficiaire n'aura pas à payer de droits de coupe au moment de leur récolte. 2.4. Considérations sur les quotes-parts à l'aménagement forestier des utilisateurs de la forêt autres que ceux de la matière ligneuse. L'AMBSQ recommande que les utilisateurs de la forêt autres que ceux de la matière ligneuse paient aussi leur contribution à l'aménagement de la forêt.

Le MER devra veiller à récupérer les montants de cette contribution évaluée à plus de 13 000 000 $ dans le but de contrôler son application à l'aménagement de la forêt. Pour être conséquent, cependant, il lui faudra la déduire de la quote-part de l'industrie forestière et surtout de celle de l'industrie des sciages qui, comme exploitant le plus important, doit débourser la majorité des dépenses supplémentaires occasionnées par les exigences des usagers récréatifs de la forêt.

En définitive, si l'aménagement forestier doit respecter les exigences d'une utilisation polyvalente du milieu forestier, il est normal que tous les utilisateurs directs ou indirects de la forêt participent financièrement à son aménagement.

L'article 3, la tarification des droits de coupe. La méthode de calcul de la valeur marchande doit être connue du bénéficiaire. L'AMBSQ recommande que la base de calcul de la valeur marchande du bois sur pied soit établie de concert avec l'industrie.

Je poursuis à la page 27, au paragraphe 3.2. Le droit de coupe appliqué sur te volume récolté. L'AMBSQ recommande que les tarifs des droits de coupe établis dans une zone soient appliqués sur le volume de bois récolté par chaque bénéficiaire et non sur le volume alloué selon la base d'une allocation annuelle.

Par cette recommandation, l'AMBSQ demande au MER de tenir compte des conditions prévalant au niveau des opérations d'une entreprise au cours d'une année et de ses capacités de payer.

Lorsque la conjoncture est favorable, que la demande est bonne et que les prix de vente des produits sont intéressants, une entreprise sera normalement en mesure de s'acquitter de ses droits de coupe, même si la coupe a dépassé l'allocation annuelle établie. Au contraire, si des conditions défavorables ont prévalu au cours d'une année, soit par grève, incendie ou autres obstacles à une production rentable, une entreprise pourra alors avoir beaucoup de difficultés ou être tout simplement incapable de payer ses redevances de droits de coupe au MER, surtout s'ils sont appliqués sur un volume alloué.

C'est pourquoi l'AMBSQ demande que les droits de coupe soient perçus en tenant compte du volume récolté. D'autre part, l'AMBSQ veut souligner que l'acceptation de payer un tarif similaire de droits de coupe, peu importe l'utilisation des bois, devrait toutefois amener le MER à prôner davantage l'utilisation optimale des bois et à favoriser la désignation aux industriels du sciage de territoires forestiers contenant les bois de meilleures dimensions et offrant des potentiels de rendement aptes à les produire. Ainsi, l'association veut croire que les termes de l'article 10 de l'avant-projet de loi expriment bien que le ministre a le souci d'en arriver à une utilisation optimale des bois.

De plus, l'association veut faire remarquer que, même si elle accepte un tarif similaire de droits de coupe, il restera toujours que dans certaines régions du Québec, et même au niveau des territoires qui seront accordés aux bénéficiaires, il y aurait lieu de considérer la possibilité d'établir des droits de coupe particuliers tenant compte justement de certains facteurs négatifs qui se présenteront de façon plus localisée.

L'article 3.3. Remboursement dans certaines zones. L'AMBSQ recommande que le MER accorde un remboursement aux entreprises concernées lorsque dans une zone donnée les coûts de remise en production sont plus élevés que la valeur marchande du bois sur pied établie pour cette zone.

Je vous réfère à la page 30. L'allocation de la ressource. Les volumes de la zone pâte et de la Basse-Côte-Nord. L'AMBSQ recommande que les volumes ligneux de la zone pâte et de la Basse-CÔte-Nord soient exclus du calcul de la possibilité et qu'ils soient alloués sous forme de disponibilités; qu'une aide financière soit prévue pour l'exploitation de ces volumes et que les utilisateurs qui les récolteront ne soient pas responsables de l'aménagement prévu pour ces régions.

Je vous réfère au bas de la page 31, à 4.2. La possibilité de réaliser les travaux d'aménagement prévus sur d'autres superficies de son territoire. L'AMBSQ recommande que, dans certaines régions et pour des secteurs de coupes qui ne pourront se régénérer naturellement de façon satisfaisante, il y ait possibilité pour un bénéficiaire, à l'intérieur de son unité d'aménagement, d'effectuer des travaux d'aménagement sur une autre superficie -

possiblement en arrérage - capable de répondre avec plus de succès à l'aménagement prévu.

M. Deschênes: M. le Président, nous allons maintenant continuer avec M. Fred Burrows.

M. Burrows (Fred); Je fais référence à la page 33, 4.3, le découpage de la forêt publique. L'AMBSQ recommande que la réallocation des territoires publics par le MER se fasse en toute équité et en respectant les exigences du nouvel utilisateur. Il est prévu que le découpage de la forêt publique en vue de délimiter les territoires des bénéficiaires de contrats va libérer des superficies qui, actuellement, font partie de concessions. Le redécoupage du territoire forestier va certainement amener à assigner à un bénéficiaire un territoire qu'il ne connaîtra pas. Les scieurs bénéficiaires seront sans doute le plus souvent dans cette situation contrairement aux papetières, anciens concessionnaires.

Ainsi, un scieur pourra se retrouver dans l'obligation de faire beaucoup plus de travail qu'un ancien concessionnaire, par exemple, lorsque viendra le temps de préparer les plans annuels et quinquennaux d'intervention. Il est à espérer que le MER saura alors fournir un maximum de données et de renseignements afin de faciliter le travail. Ainsi, l'opération découpage des territoires demandera au MER d'agir avec le plus d'équité possible. Il pourra arriver qu'un bénéficiaire éventuel ne soit pas en mesure d'accepter un certain territoire, surtout si on lui demande, pour les infrastructures en place, d'investir au-delà de ses capacités financières. Qu'a prévu le MER dans de tels cas?

D'autre part, même s'ils recherchent normalement un territoire offrant des billes de bonne dimension, certains industriels de sciage pourront préférer se voir attribuer une forêt contenant des tiges de plus faible dimension, mais situées près de leurs usines. Il est à prévoir que la désignation des territoires - unités d'aménagement - aux bénéficiaires ne sera pas une mince tâche, mais le MER devra autant que possible veiller à ne pas favoriser davantage un secteur de l'industrie.

Cinquième point, la priorité d'approvisionnement des papetières. L'AMBSQ recommande que les papetières s'alimentent en priorité des copeaux des scieries et que les bois de leurs territoires publics constituent un apport résiduel à leurs besoins.

L'AMBSQ doit refaire au ministre cette recommandation. À quoi servirait au gouvernement et à l'industrie de dépenser plus de 200 000 000 $ annuellement dans l'aménagement de la forêt publique, si on n'assure pas un écoulement complet des copeaux sur une base annuelle? II est impensable que l'on puisse laisser des tonnes de copeaux de grande valeur se détériorer à terre et qu'au même moment on permette de continuer d'abattre des arbres. Cette recommandation part de la logique la plus élémentaire et elle vise à éviter un gaspillage de la matière première. Cette exigence pour les papetières de s'alimenter prioritairement en copeaux ne serait pas un fait nouveau, elle existe au Nouveau-Brunswick, une province que le MER et les pâtes et papiers aiment bien utiliser comme modèle et à titre de référence.

Je fais maintenant référence à la page 37, le point 6, l'utilisation variée de l'allocation annuelle établie et la récupération des volumes non récoltés, L'AMBSQ recommande que, pour toute période quinquennale, le bénéficiaire ait le loisir d'utiliser son allocation annuelle au rythme de ses besoins à la condition de ne pas dépasser cinq fois le volume correspondant à cette allocation, à laquelle cependant pourra s'ajouter tout volume non utilisé dans une période quinquennale précédente, et que le bénéficiaire qui ne récolte pas le volume alloué pour une période de cinq ans puisse récupérer le volume manquant au cours de la période quinquennale suivante.

À la page 38, point 7, la juridiction du ministère de l'Energie et des Ressources. L'AMBSQ recommande que le gouvernement reconnaisse au MER une juridiction non équivoque en matière de gestion et d'aménagement de la ressource forêt et retire aux MRC toute juridiction portant sur les territoires non organisés. (17 heures)

Je me réfère maintenant à la page 40, le point 8, l'usage des phytocides. L'AMBSQ recommande que le MER fasse reconnaître, dans les plus brefs délais, l'indispensable besoin d'utiliser des phytocides pour l'entretien et le suivi des plantations. Il importe...

Le Président (M. Charbonneau): Voilà maintenant 30 minutes que vous avez entrepris la présentation de vos points de vue. Je voudrais simplement avoir une indication, à ce moment-ci, du temps dont vous pensez avoir encore besoin pour terminer.

M. Deschênes: Environ de cinq à dix minutes, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Président (M. Charbonneau): Allez-y.

M. Burrows: Merci. À la page 41, il importe donc que le MER s'assure très rapidement du concours du ministère de l'Environnement dans le but d'établir, dans les plus brefs délais, une politique d'utilisation des phytocides. Le succès du programme de reboisement en dépend.

Le point 9, la voirie forestière. l'AMBSQ recommande que le MER établisse clairement sa politique de voirie forestière et rende disponible le programme de développement de cette voirie sur une base d'au moins cinq ans.

Je me réfère à la page 43, le point 10. La protection de la forêt contre le feu, les insectes et les maladies d'arbres. L'AMBSQ recommande que le service actuel de protection contre les incendies forestiers soit maintenu et que le MER continue à assumer la responsabilité de la protection des forêts contres les épidémies d'insectes et les maladies d'arbres. L'AMBSQ exprime ainsi le statu quo concernant la protection de la forêt.

La page 45, le point 11, les essences feuillues. L'AMBSQ recommande que le MER fasse les études nécessaires pour évaluer, dans un proche avenir, les moyens permettant d'utiliser davantage les essences feuillues de nos forêts; qu'il prépare aussi un programme d'aménagement de ces essences dans te but de produire une forêt feuillue de qualité répondant adéquatement aux besoins des nombreux utilisateurs de feuillus.

Selon le document "Possibilités et disponibilités en matière ligneuse des forêts publiques du Québec", je cite le paragraphe, "la coupe annuelle permissible d'essences feuillues est de 8 000 000 de mètres cubes alors que la coupe moyenne des années 1980 à 1984 n'atteint pas les 2 000 000 de mètres cubes".

Le fait que la forêt feuillue du Québec a, depuis longtemps, été exploitée pour ses tiges de meilleure qualité a grandement réduit la concentration de ces dernières et la récolte des seules tiges de qualité valable ne représente pas souvent une opération justifiable financièrement. Il faudrait être en mesure d'exploiter davantage les tiges de mauvaise venue pour la pâte, ou autres utilisations à étudier. Ceci permettrait d'atteindre de vastes étendues de forêt et d'y effectuer les travaux sylvicoles appropriés. Il est prouvé que ces territoires situés principalement dans la partie sud du Québec possèdent des sols ayant un très bon potentiel forestier. Il y a donc lieu de vouloir aussi développer notre forêt feuillue.

D'autre part, sans oublier de porter les plus grands efforts sur les essences feuillues de qualité, il serait bon de favoriser la meilleure venue possible de certaines essences pionnières ou de transition de plus en plus utilisées dans l'industrie, tel le peuplier faux tremble.

Le point 12, à la page 47, le transfert de la technologie et la formation. L'AMBSQ recommande que, vu l'importance des travaux d'aménagement prévus dans l'avenir, le MER s'assure d'en obtenir les meilleures chances de succès. Qu'en ce sens, il veille à ce que tous les gens qui y seront affectés soient en mesure de comprendre et de bien exécuter leur travail.

Page 48, point 13, la forêt privée. L'AMBSQ recommande que le MER favorise l'établissement d'une forêt privée capable de produire des tiges de dimensions sciage.

Je passe à la page 50, point 14, le manuel d'aménagement. L'AMBSQ recommande que le manuel d'aménagement soit préparé de concert avec l'industrie et qu'on s'efforce de ne pas en faire un document de directives et de règlements stricts, ne laissant aucune place à la souplesse.

Point 15, les relations du travail. L'AMBSQ recommande que les nouvelles réalités mises en place par le régime forestier soient traduites dans les lois pertinentes du travail (le Code du travail) sans que soient perturbées les relations entre les parties et tiennent compte des spécificités propres à chacune des obligations nouvelles qu'imposent désormais aux utilisateurs de nos nouveaux régimes forestiers.

M. Deschênes: M. le Président, à l'article 16, en ce qui concerne la rédaction même de l'avant-projet de loi, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec constate que certains articles auraient avantage à être clarifiés afin d'en assurer une meilleure compréhension et d'éviter de créer des situations ambiguës. Donc, je voudrais, si vous me le permettez, que M. André Tremblay nous donne le texte qu'on devait vous présenter.

M. Tremblay (André): M. le Président, ce texte vous a été remis ce matin en annexe au mémoire. Les quatre recommandations sur lesquelles on voudrait attirer l'attention de la commission sont les suivantes: La première est relative à l'article 5 en ce qui a trait à la propriété du bois coupé en vertu d'un permis d'intervention. L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec recommande "que le bois loué au bénéficiaire d'un contrat d'approvisionnement et d'aménagement devienne sa pleine propriété dès qu'il est coupé; qu'il en soit de même pour celui qui paie les droits de coupe sur le volume récolté; de plus, que l'on maintienne un privilège en faveur de la couronne sur tout le bois coupé pour assurer le paiement des droits prescrits, ce privilège s'assortissant d'un droit de suite tel que celui déjà prévu au troisième alinéa de l'article 5 de l'avant-

projet."

La deuxième recommandation concerne la pertinence du droit de regard du ministère de l'Énergie et des Ressources sur l'avis corporatif d'un bénéficiaire de contrat, plus particulièrement les articles 20 et 84 de l'avant-projet,

Concernant ces articles, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec recommande "que le premier alinéa de l'article 20 soit modifié de façon que l'obligation soit faite de dénoncer au ministre toute transaction de nature à modifier le fonctionnement normal d'un établissement. Il en va de même pour ce qui est de l'article 84."

La troisième recommandation est relative à l'article 89. Il s'agit des amendes imposées lorsque des arbres sont coupés sans permis de coupe.

Relativement à cet article, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec recommande que le détenteur d'un permis d'intervention soit exclus de l'application de l'article 89; que la sanction d'une telle infraction par un détenteur d'un permis d'intervention prenne une autre forme telle que la réduction du volume autorisé pour l'année suivante, réduction qui serait égale au volume coupé en trop."

Finalement la quatrième recommandation est relative à qui devrait supporter les coûts de régénération de la forêt dans le cas de désastres naturels et même dans le cas de désastres causés par l'homme. On fait référence à un incendie ou aux problèmes d'épidémies quelconque. Relativement à ces problèmes, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec recommande "que la loi prévoie que le bénéficiaire du contrat ne peut être tenu de réaliser à ses frais des travaux sylvicoles prévus au plan d'aménagement dans le but de régénérer la forêt détruite par suite d'un désastre naturel ou par suite d'un désastre causé par l'homme."

Il y a d'autres recommandations qui sont d'ordre technique et qui se retrouvent à l'annexe.

M. Deschênes: En conclusion, M. le Président, si vous le permettez. L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec remercie le ministre délégué aux Forêts, M. Albert Côté, ainsi que les membres de la commission de lui avoir permis d'exprimer sa position sur les principaux sujets contenus dans l'avant-projet de loi ainsi que sur les modalités d'application d'une nouvelle loi sur les forêts qui aurait pour objet de mettre en place un nouveau régime forestier. Merci.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le Président. Je vous rappelle que vous pouvez référer à l'un ou l'autre de vos collègues les questions qui pourraient vous être posées. Je cède maintenant la parole au ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le Président. MM. de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec et votre équipe, bonjour. Il me fait plaisir de vous voir. Comme d'habitude vous avez mis beaucoup de soin à présenter votre mémoire. C'est un mémoire volumineux parce qu'il présente aussi un secteur important de notre économie et de notre industrie au Québec. Je pense bien que c'est proportionnel à toutes vos préoccupations et aux nôtres également. Je l'ai parcouru avec beaucoup d'intérêt et, évidemment plusieurs questions me sont venues à l'esprit, comme vous pouvez vous l'imaginer, parce que j'ai été impliqué dans le secteur du sciage tout au cours de ma carrière. Encore une fois, par votre dynamisme et votre compétence... Vous les avez développés avec les années aussi. Il n'y a pas si longtemps, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec ne regroupait pas autant de membres et aujourd'hui vous représentez 70 % de la production de sciage au Québec. C'est très important et plus que significatif comme échantillonnage, on ne peut pas en demander plus, quoique je pense que vous avez encore l'intention de recruter des membres.

Si vous voulez, je vais commencer à poser quelques questions et on continuera avec d'autres intervenants. Certains collègues voudraient vous poser également des questions.

Au tout début de votre mémoire, vous mentionnez que vous auriez souhaité que le MER, pour assurer la mise en place du régime forestier, ait présenté plus d'un scénario montrant une implication plus ou moins intensive de l'industrie dans les travaux d'aménagement. Voulez-vous dire par là qu'on devrait se traîner les pieds dans l'aménagement ou si on devrait continuer à couper ou à restreindre les allocations? Si on présente des scénarios, c'est du maximum, c'est de l'idéal ou rien. Voulez-vous commenter, M. le président?

M. Deschênes: À cette question, M. Gilles Côté va répondre, M. le ministre, si vous permettez.

M. Côté (Gilles): Quand on mentionne d'autres scénarios d'aménagement, c'est que l'avant-projet de loi, à ce qu'on a senti en l'examinant, a été principalement basé sur le fait qu'on allait faire une utilisation assez extensive en employant 200 000 000 de plants par année, donc une utilisation du reboisement artificiel très intense. Quand on mentionne qu'il y aurait peut-être eu d'autres scénarios d'aménagement, on ne le

sait pas si d'autres scénarios ont été prévus. Il aurait peut-être - on dit peut-être - été aussi raisonnable de prévoir un scénario de 150 000 000 de plants avec d'autres techniques ou de 100 000 000 de plants avec d'autres techniques. Premièrement, on n'a pas eu le temps ni, deuxièmement, la possiblité d'explorer s'il y avait eu effectivement d'autres scénarios d'aménagement. On s'est demandé si le MER avait bien regardé différentes autres combinaisons de scénarios d'aménagement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est un scénario qui a voulu prendre soin des projections futures, pour quelques années à venir. Quand on parle de projection, évidemment, on peut s'agiter un peu. C'est le scénario qui a été envisagé. C'est ce que vous voulez dire, M. Côté, quand vous dites: "L'atteinte des objectifs pourrait se faire selon certaines étapes." C'est un peu cela que vous mentionnez aussi. Non?

M. Côté (Gilles): II est évident qu'actuellement on ne connaît pas non plus le succès des opérations. On présume qu'on va avoir un certain succès dans cinq, dix ou quinze ans. Évidemment, il faut faire un acte de foi et partir avec cette présomption. On présume que toutes nos actions vont être profitables dans une certaine mesure. Il est difficile d'envisager que, par exemple, en plantant 200 000 000 de plants par année, si on avait un taux d'insuccès qui était aussi élevé que 50 %, dans cinq ou dix ans, cela pourrait évidemment avoir un effet assez considérable sur le scénario qu'on a actuellement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, j'en suis. Vous parlez principalement de reboisement, mais il y a d'autres interventions en forêt qui feront en sorte d'augmenter notre productivité qu'il ne faut pas négliger non plus. Je parle de coupe de conversion, de peuplement, etc., il y a d'autres interventions importantes qui vont aussi favoriser la régénération naturelle. Il est sûr, comme vous le dites, que si les résultats dans cinq ans ne sont pas ce à quoi on s'attend, on aura fait des efforts et gaspillé de l'argent. Par contre, il y a eu des expériences au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick avec des climats semblables; en Finlande, on a un climat semblable à celui du Lac-Saint-Jean. Quand on sème, on s'attend de récolter et de prendre soin du jardin. On peut escompter des retombées qui sont, à mon avis, conservatrices quand on se compare aux autres.

M. Deschênes: Je demanderais à Mme Guylaine Saucier de compléter, s'il vous plaît.

(17 h 15)

Mme Saucier: Je pense, M. le Président, que quand on évalue aussi différents scénarios, il faut tenir compte de l'aspect forestier et de la demande éventuelle des différents industriels concernés. Il faut aussi accoler à ces différents scénarios forestiers des scénarios financiers. À ce qu'on croit comprendre, ni le gouvernement ni les industriels n'ont, à l'heure actuelle, une capacité de payer illimitée. Je pense que, idéalement, et avec raison, le gouvernement voudrait probablement une forêt qui réponde aux besoins de tous les industriels forestiers. C'est ce que nous désirons aussi. Il faut peut-être tenir compte, comme je l'ai mentionné dans notre exposé, que nous avons une capacité de payer limitée. Peut-être qu'il serait bon d'évaluer des scénarios forestiers conjointement avec des scénarios financiers que l'on est capable de soutenir financièrement et de faire une évaluation beaucoup plus précise de ces différents scénarios.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mme

Saucier, tout tourne autour du partage des coûts. C'est pourquoi, au ministère, nous avons formé un comité sur cette question. C'est évident que l'on va tenir compte des obligations et de la capacité de chacun, du gouvernement comme de ceux de l'entreprise et des industries. On ne veut pas créer de marasme en faisant cela; on veut seulement s'améliorer.

À la page 7, quand vous dites que l'on devrait vous faire confiance parce qu'il y a trop de règlements, je vous dirai que les règlements dont il est question dans la loi existent déjà à 90 %. Je pense bien que si on regarde ce qui s'est passé dans l'histoire des ZEC, on a donné notre confiance dans le passé, et on n'a pas eu des succès trop énormes. Je pense que c'est la responsabilité du propriétaire de voir à ce que cela se fasse suivant des directives acceptables et pour le plus grand intérêt.

Vous parlez aussi de l'article 45 qui manque de flexibilité. Si quelqu'un ne fait pas honneur à ses obligations quant aux droits de coupe ou autres, est-ce qu'il est équitable de laisser porter, de tolérer et de l'exiger des autres? C'est seulement une question d'équité. Je ne sais pas ce que vous voulez dire par "manque de flexibilité", à l'article 45.

Mme Saucier: Je pense que quant à la réglementation, M. le Président, nous reconnaissons qu'en grande partie elle existe déjà. Par contre, nous avons cru comprendre que le gouvernement actuel désire déréglementer. C'est, d'une part, dans ce contexte que nous avons inscrit ces commentaires.

D'autre part, nous reconnaissons que vous êtes propriétaire de la forêt et que

vous avez des objectifs à atteindre. Nous aimerions que vous nous indiquiez ces objectifs et que, par contre, nous puissions discuter des moyens avec vous et qu'ils ne soient pas décrits en détail. C'est un peu une gestion par objectif, tout en gardant la possibilité d'administrer et d'évaluer notre performance à un moment donné, dans le temps.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mme Saucier, j'en suis pour la question des objectifs: avoir la liberté du choix des moyens pour atteindre les objectifs. C'est ce que vous demandez que l'on vous transmette, les objectifs. À mon avis, on doit vous concéder une grande liberté là-dessus, mais non pas en ce qui concerne les résultats des objectifs que l'on se fixe. Êtes-vous d'accord avec cela?

Mme Saucier: Oui.

M. Côté (Rivière-du-Loup): En ce qui concerne votre première recommandation, à savoir que le gouvernement reconnaisse votre industrie comme un agent déterminant de la mise en valeur des richesses forestières et que pour vous, industriels du sciage, tous les bois devraient être orientés vers les usines de sciage pour atteindre l'objectif d'une utilisation optimale, voulez-vous me dire ce que l'industrie des pâtes et papiers pense d'une recommandation semblable?

M. Deschênes: Je demanderais à M. Lacasse de répondre à cette question.

M. Lacasse (Richard): II faudrait peut-être lui demander ce qu'elle pense de cette proposition. On ne se fait pas d'idée, naturellement. On sait qu'au Québec on est dans une forêt nordique, une forêt de petit bois. On a beau se comparer avec la Suède ou la Finlande, cela ne veut pas dire que les conditions sont exactement les mêmes. Je mets le ministre et ses fonctionnaires en garde contre l'utilisation de recettes d'autres régions du pays pour les appliquer ici, pensant que cela va donner les mêmes résultats.

Ceci dit, il est sûr que dans certains endroits, notamment lorsqu'on fera la réallocation des territoires, il pourra y avoir des portions de territoire, à ce moment-là, qui pourraient être attribuées au sciage en raison de la dimension des tiges alors que pour d'autres, ce sera plutôt du bois propre aux pâtes et papiers. Par contre, comme on l'a dit dans le mémoire, il y a des industriels qui s'accommodent de transformer des bois de petit diamètre parce que la distance peut être plus courte et, à ce moment-là, ils préféreront te statut quo plutôt que d'aller chercher des billes de plus fort diamètre à des distances plus grandes. Il reste aussi que cela a été la politique de votre ministère et une politique de plusieurs de vos prédécesseurs de faire un effort pour utiliser la plus grande partie de la forêt publique, d'abord par l'industrie du sciage et également, autant que possible, en la favorisant de tiges qui sont réellement propres au sciage.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. Lacasse, il faut mentionner tous les bois. Il y a des usines qui utilisent du petit bois et d'autres de plus gros bois. Vous dites: Tous les bois. Qu'est-ce qui va arriver de l'industrie des pâtes pour se garantir? Cela lui prend une garantie, un contrat quelconque.

M. Lacasse: Est-ce que vous voulez que je parle des copeaux tout de suite ou...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Non, plus tard.

Vous dites également à la page 11: "Au début des années 1970, une politique gouvernementale a vraiment favorisé le développement de l'industrie des sciages. Mais le gouvernement avait mis à la disposition des scieries des volumes ligneux considérables." Est-ce que ce n'est pas parce qu'on en a trop donné, comme vous nous le dites à certains endroits, qu'on a des problèmes comme cela aujourd'hui, en plus de celui de la tordeuse des bourgeons de l'épinette, parce que les grands concessionnaires avaient des frigidaires, c'est-à-dire qu'ils en avaient beaucoup plus grand qu'ils n'en avaient besoin? Ce n'est pas eux qui ont fait que la situation est comme cela parce qu'ils en avaient beaucoup plus que pour leurs besoins.

M. Lacasse: Je pense, M. le ministre, que si on avait accru l'exploitation de la forêt québécoise au rythme qu'avait décidé de le faire l'industrie des pâtes et papiers, on ne couperait pas les volumes qu'on coupe aujourd'hui et on ne serait peut-être pas en commission parlementaire, parce qu'on n'aurait pas une pression aussi grande sur la forêt. Je pense que c'est le ministère qui a réalisé, un jour, qu'au rythme où on allait, la forêt qui était à maturité serait, tout à l'heure, passée maturité. En termes de foresterie, vous savez comme mot qu'il est inutile de vouloir s'attarder à couper des forêts qui sont trop vieilles parce qu'à ce moment-là la récupération est beaucoup plus difficile et le rendement à l'usine en est d'autant diminué parce qu'il y a de la pourriture, il y a des arbres en mauvaise santé, il y a des chablis. On rencontre dans le nord-ouest, plus spécialement, de telles forêts passées maturité et les pertes par chablis sont énormes. Même, on les sous-estime souvent dans les calculs.

Il arrive aussi qu'il y a une région du

Québec qui s'appelle le Nord-Ouest où il y a eu pendant une certaine période d'années des allocations énormes à l'industrie du sciage parce qu'il y avait un projet hydroélectrique dans la région et qu'on a accordé des volumes très importants. On a demandé à l'industrie de couper ces bois au plus vite parce que ces volumes seraient inondés. On connaît ce qui est arrivé. Les projets ne se sont pas réalisés ou on pensait les réaliser et les industriels se sont retrouvés avec des garanties qui dépassaient à ce moment-là leurs besoins. Ce n'est pas entièrement la faute de l'industrie. Il est évident qu'on en a toujours demandé pour se sécuriser aussi, comme on l'a dit à un endroit, parce qu'on était de loin "insécure" par rapport à l'industrie des pâtes et papiers.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est parfait. Merci, M. Lacasse.

Mais en vue de favoriser l'utilisation optimale du gros bois par l'industrie du sciage et le petit bois par l'industrie des pâtes et papiers, qu'est-ce qu'on peut considérer comme diamètre d'arbre pour faire du bois de sciage? Quelle est la définition d'un arbre pour le sciage? Ce n'est pas facile à faire.

M. Lacasse: C'est sûr que c'est difficile de déterminer ce qu'est une bille apte au sciage, mais ce qui existe présentement, c'est quelque chose à quoi on peut se référer. Il y a des régions qui ont des technologies plus avancées que d'autres. On peut se permettre l'utilisation, mais il ne faudrait pas produire des forêts, avoir une rupture de stock et ne pas être capable de continuer, éventuellement. Produire des billes de sciage, cela veut dire acheminer aux bons endroits ce qui serait apte au sciage.

Mme Saucier: Si vous permettez, M. le Président, les gens du ministère des Forêts se plaisent souvent à nous dire que, dans le Nord-Ouest, de toute façon, on coupe du bois à pâte. Il est évident qu'on ne peut pas faire des catégories par diamètres globalement dans tout le Québec, dire, par exemple, que des bois de six pouces et plus sont des bois aptes au sciage. Prenons l'exemple du Nord-Ouest. Effectivement, on scie à partir de 2,8 ou de 2,9 pouces. Ce qui arrive, c'est qu'on a adapté notre technologie à la forêt que nous avons. Il est évident que, lorsqu'on parle de bois apte au sciage, il faut être très prudent et régionaliser, si vous me permettez l'expression, la définition de ce terme.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci. C'est pour cela que je dis qu'il y a des forêts au Québec et pas seulement une forêt; c'est régional, comme vous dites.

Sur quelle base voudriez-vous que le ministère paie les travaux d'aménagement concernant la possibilité de 18 000 000 $ à 21 000 000 $, la différence entre les deux? Vous dites à la page 15: L'AMBSQ croit que l'octroi d'allocations trop élevées par le ministère dans le passé est la cause du dépassement de la possibilité naturelle établie à 18 000 000 $. Le MER, en effet, n'a pas accordé suffisamment d'importance à ce facteur de possibilité naturelle qui exprime la capacité biophysique de la forêt québécoise. Vous m'avez fourni une partie de la réponse en ce qui concerne les travaux de NBR dans le Nord-Ouest, concernant le projet de la baie James mais, dans d'autres endroits, il n'y a pas eu de travaux semblables et, là aussi, on fait face à des difficultés d'approvisionnement.

M. Deschênes: ...au Québec, M. le ministre, qu'il y a eu un gros problème de maladies. La tordeuse de bourgeons, par exemple, est un facteur qui a empiré la situation. Tous ces facteurs... Disons que les industriels du sciage ne sont pas responsables de toutes ces choses. Il y a eu des allocations mais, par contre, il y a eu toutes sortes d'autres éléments naturels qui ont fait en sorte qu'on prévoit des ruptures de stock.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous savez toutes les difficultés que le ministère a rencontrées. Je ne veux pas l'excuser, parce que le ministère a dit au cours de ces années: On va se charger de l'aménagement - il a dit cela à toutes les compagnies - ne vous en faites pas, on va le faire et vous nous dites qu'on n'a pas pris les moyens de compenser par un aménagement forestier adéquat. C'est ce qui est arrivé? Mais vous connaissez les difficultés qu'on a rencontrées avec les arrosages, difficultés qu'on aura peut-être encore. Si on veut être capable de faire un aménagement... Ce n'est pas le seul moyen d'aménager la forêt, mais c'en est un aussi longtemps qu'on n'en trouvera pas de meilleur. On doit l'utiliser avec beaucoup de précautions, mais c'est un moyen qu'on devrait être capable d'utiliser. Je voudrais avoir votre opinion là-dessus.

M. Deschênes: Vous voulez parler des phytocides?

M. Côté (Rivière-du-Loup): Les phytocides et les arrosages; les insecticides aussi.

M. Deschênes: En ce qui concerne l'Association des manufacturiers de bois de sciage, on pense qu'on n'a pas besoin de régimes forestiers si on n'a pas la possibilité de les entretenir et de les maintenir s'il y a des problèmes. Il y aura toujours des maladies quelconques. Si on n'est pas prêt à intervenir contre les incendies ou contre les

maladies et qu'on ne peut pas utiliser des phytocides, on pense qu'on met en péril tous les investissements qui auront pu être faits. C'est pour cette raison qu'on revendique ces choses.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Allez-vous jusqu'à suggérer de ne pas faire les investissements?

M. Deschênes: Non. On suggère d'utiliser des moyens pour prévenir ces problèmes.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mais si on n'obtient pas la permission d'utiliser ces moyens?

M. Deschênes: J'aimerais que M, Tremblay réponde.

M. Tremblay (André): M. le Président, on s'interroge grandement sur l'opportunité d'investir dans un programme d'aménagement, comme on s'apprête à le faire, si on n'a pas la possibilité de sauvegarder les investissements qui auront été faits dans ces forêts par l'utilisation des phytocides et d'autres procédés chimiques d'arrosage.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Moi aussi, je m'interroge sur cette question. Mais je vous demande si vous suggérez de ne pas faire les investissements et de laisser aller les fermetures d'usines prévues, les pertes d'emplois et d'autres fléaux. (17 h 30)

M. Tremblay (André): À notre sens, le programme d'aménagement et l'utilisation des phytocides et autres produits vont de pair. Ils devraient faire partie d'une même politique d'aménagement de nos forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): L'un ne va pas sans l'autre.

M. Tremblay (André): C'est ce qu'on recommande dans notre mémoire.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous souhaitez que le ministère vous fasse part de son programme de régénération des superficies, de l'héritage du passé qui n'a pas été régénéré adéquatement. Là-dessus, on peut établir un programme, mais cela ne veut pas dire qu'on aura les sommes pour le réaliser. Les budgets sont adoptés tous les ans à l'Assemblée nationale et je ne demande pas mieux que d'avoir les appuis pour obtenir les budgets adéquats pour le faire. Je peux compter sur vous pour cela?

M. Deschênes: Sûrement.

M. Lacasse: M. le Président, je m'aperçois que M. le ministre trouve qu'il est dans la même situation que nous. Nous aussi avons affaire à un Conseil du trésor qui est notre banquier.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est un fait. M. le Président, je passe la parole à quelqu'un autre.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Si vous permettez, je voudrais remercier les représentants et la représentante de l'AMBSQ pour la qualité du mémoire qui nous a été présenté. Nul doute que tout le monde comprend qu'il y a à l'intérieur de ce mémoire plusieurs recommandations drôlement intéressantes. Bien sûr, les informations qui sont données en annexe et dans certains tableaux sont aussi un bagage très net d'informations qui va éventuellement nous permettre de regarder plus à fond, d'abord, l'avant-projet de loi, à la suite des représentations faites par les organismes, ainsi que le projet de loi qui doit être présenté par le ministre délégué aux Forêts et qu'il veut faire adopter d'ici au 31 décembre prochain.

Avant de passer directement au mémoire, j'aimerais poser une question au président ou à un des représentants de l'Association des manufacturiers de bois de sciage en regard de ce qui se passe au niveau de l'éducation par rapport à notre forêt québécoise. On sait que tout le monde chérit ce qu'on connaît bien - c'est ce que vous faites à titre de représentante et de représentants de votre association - et, à cet égard, la forêt a beaucoup de rattrapage à faire, car il y a aussi beaucoup d'incompréhension quant au rôle de l'industrie forestière face à l'aménagement forestier lui-même. En ce sens, est-ce que votre association et vos membres soutiennent financièrement un organisme voué à l'éducation et à l'information du grand public, soit l'Association forestière québécoise?

M. Deschênes: Je demanderais à M. Richard Lacasse de répondre à la question.

M. Lacasse: M, le Président, M. le député, justement, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec a peut-être pris conscience tardivement de l'importance du rôle joué par l'Association forestière québécoise. Nous avons le plaisir de vous répondre que, récemment, l'AMBSQ a versé une contribution assez substantielle à l'Association forestière pour l'aider dans son travail d'éducation populaire. On reconnaît que son rôle est primordial au Québec et on souhaiterait qu'il n'y ait pas seulement l'AMBSQ, qui représente 70 % de l'industrie

du sciage au Québec, mais qu'il y ait également les autres 30 % qui contribuent à l'Association forestière.

M. Perron: D'ailleurs, à titre de critique de l'Opposition en matière forestière, je voudrais vous remercier pour votre apport tout à fait nouveau, je crois, en subventionnant, en quelque sorte, l'association dont il vient d'être fait mention.

Ma question s'adresse directement au ministre délégué aux Forêts. On me donne l'occasion ici de poser cette question: Est-ce que le ministre peut confirmer si, oui ou non, le Conseil du trésor l'autorise à verser la subvention de 170 000 $ à l'Association forestière québécoise?

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Duplessis, je vous rappelle la décision rendue par le président qui présidait la séance de travail du début, qui vous a mentionné que ceci n'est pas une période de questions, mais que le temps est alloué pour écouter les recommandations et les propositions des organismes qui se présentent devant nous. À moins que... Je dois refuser la question, M. le député de Duplessis. Si vous voulez continuer, s'il vous plaît, à interroger les organismes.

M. Perron: Sur cette question, je voudrais vous souligner que celui qui était là auparavant a aussi ajouté que, si l'occasion se présentait au cours de la présentation des mémoires, je pourrais adresser des questions à qui de droit se rapportant à cette question précise. À moins que le ministre veuille répondre à la suite de la décision que vous avez prise, M. le Président, je respecte quand même votre décision.

Le Président (M. Théorêt): Merci. Si vous voulez continuer, M. le député de Duplessis. Je vous rappelle que ceci n'est pas la période de questions, que la règle de pertinence doit porter strictement sur le sujet, et que le fait que vous utilisiez le temps de la présentation d'un mémoire pour bifurquer et poser une question directement au ministre ne peut être accepté par la présidence.

M. Perron: Merci.

M. Claveau: II avait même "digressé" la semaine passée en annonçant une subvention.

Le Président (M. Théorêt): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Perron: J'ai mentionné, tout à l'heure, que le mémoire de l'AMBSQ était un mémoire très intéressant sous plusieurs aspects. J'aurais quelques commentaires avant d'en venir directement aux questions à l'Association des manufacturiers de bois de sciage. À la page 10 de votre mémoire, vous dites, avec raison, que l'industrie du bois de sciage a connu une véritable expansion au cours des quinze dernières années et, d'ailleurs, c'est confirmé lorsqu'on se donne la peine d'étudier le tableau I de la page 11 de votre mémoire. Je trouve drôlement intéressant que l'association nous ait remis certaines informations en rapport avec l'économie forestière qui nous touche de près.

L'industrie du sciage ne fait pas d'argent à cause des cycles de la construction, à cause des bois de plus en plus petits, à cause des bois situés de plus en plus loin. Vous récoltez près de 70 % du bois de la forêt publique, mais en revendez plus de la moitié aux papetières sous formes de copeaux. D'ailleurs, vous n'obtenez pas de prix satisfaisants, et, là-dessus, nous sommes parfaitement d'accord ici du côté de l'Opposition, et ce, dans une large mesure. Avec l'abolition des droits exclusifs conférés aux papetières par le régime des concessions forestières, l'industrie du sciage sera sur le même pied que les papetières. À plusieurs égards, cela nous semble, à nous de l'Opposition, un genre de cadeau empoisonné. Tel que nous comprenons l'avant-projet de loi, le sciage, qui récolte près de 70 % du bois sur la forêt publique, devra payer plus des deux tiers des frais annuels d'aménagement qui sont évalués à 103 000 000 $ en 1986, sans posséder aucune expertise dans le domaine sylvicole et alors qu'elle est dans une situation financière peu enviable.

Nous sommes d'accord avec vous lorsque vous dites à la page 18 de votre mémoire: "D'un autre côté, concernant la répartition des frais d'aménagement à faire entre les secteurs de l'industrie, l'AMBSQ croit qu'elle devrait être basée sur le volume ligneux finalement retenu pour chaque secteur au niveau de ces produits finis." Certains mettent en doute la représentativité de votre étude, citée en page 19 de votre mémoire, laquelle démontre que, de 1980 à 1984, 18 usines de sciage s'approvisionnent à même la forêt publique ont présenté un profit net avant impôt de seulement 0,21 $ du mètre cube.

J'aurais deux questions. D'abord, avec le premier volet lorsque vous dites "d'un autre côté". Le ministre parle d'un comité quelconque en réponse à une affirmation que vous avez faite dans votre mémoire. Je voudrais connaître l'opinion du ministre délégué aux Forêts en rapport avec le comité en question, c'est-à-dire celui dont il a parlé et le comité que vous recommandez en tant qu'organisme. Cette première question s'adresse au ministre délégué aux Forêts.

Le Président (M. Théorêt): M. le député

de Duplessis. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: J'entends tous les jours l'Opposition se plaindre qu'ils n'ont pas assez de temps pour écouter les intervenants, poser des questions aux intervenants. Est-ce que je pourrais demander au député de Duplessis, puisqu'on a un temps limité, vous aurez certainement beaucoup de temps durant la période de questions à l'Assemblée nationale, de poser toutes les questions au ministre... Le but de ces auditions est d'entendre nos invités, d'être respectueux envers eux et de leur poser des questions plutôt que de prendre leur temps pour poser des questions au ministre.

M. Jolivet: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Avant de poser sa question, mon collègue a bien fait mention que te ministre nous a dit qu'il mettait un comité sur pied. On veut juste savoir pour assurer notre question... Je pense qu'il n'y a rien qui empêche, dans nos délibérations sur l'avant-projet de loi qui est devant nous, de poser ces questions au ministre, lequel est prêt à répondre, j'en suis assuré, afin que notre question ait de la pertinence.

Le Président (M. Théorêt): M. le député de Laviolette, si le ministre veut répondre à l'Opposition, dans le temps qu'il aura pour poser des questions aux représentants qui sont devant nous, il pourra le faire à son gré. Le ministre n'est aucunement obligé, en commission parlementaire, de répondre à une question d'un député. Je pense que les remarques faites par le ministre de l'Énergie et des Ressources sont tout à fait à point et, de ce fait, je demande au député de Duplessis de bien vouloir continuer, s'il vous plaît!

M. Perron: M. le Président, je vais procéder selon vos propres désirs et je peux vous assurer d'une chose, c'est qu'on remarque ici que les ministériels, en particulier le ministre délégué aux Forêts et le ministre de l'Énergie et des Ressources ne sont pas prêts à répondre aux questions de l'Opposition.

D'autre part, je voudrais poser la question, maintenant, directement aux représentants de l'organisme puisque les ministériels refusent de répondre...

Une voix: Bravo!

M. Perron: Est-ce que vous pourriez nous rassurer sur la représentativité de l'étude que j'ai mentionnée tout à l'heure et dont vous parlez à la page 19? Pourriez-vous nous rassurer sur la représentativité de cette étude et nous dire si les profits nets n'auraient pas été supérieurs au cours des dix dernières années?

M. Deschênes: On ne pense pas qu'ils auraient été supérieurs. Peut-être qu'il aurait pu y avoir des changements, mais on pense que, sur une base de cinq ans, si on avait commencé à faire les aménagements cinq ans plus tôt, de toute façon, on n'aurait pas pu payer la facture, cela est sûr. L'étude a été faite d'une façon très sérieuse par une firme reconnue, elle est très véridique. Cinq ans avant, on n'a pas fait l'expertise pour les dix dernières années. Je demanderais à Mme Saucier de compléter.

Mme Saucier: Je pense, M. Perron, que j'ai mentionné tout à l'heure que l'étude avait porté sur 33 % des bois récoltés par le sciage, d'une part. Nous avons essayé de la rendre la plus représentative possible. Elle a été faite par une firme sérieuse et reconnue de comptables agréés. Elle a tenté d'appliquer les bons principes comptables généralement reconnus par l'Institut de comptables agréés. Je pense qu'il est évident que les 0,21 $ du mètre cube représentent des résultats pendant une période qui a été relativement difficile pour l'industrie du sciage. Il est à espérer que ce ne seront pas nos résultats pour les dix prochaines années, parce que notre proposition, à l'heure actuelle, de financement de l'aménagement forestier demande un peu plus que les 0,21 $ du mètre cube que nous déclarons comme profits pour les années 1980 à 1984.

Il faut quand même tenir compte que notre industrie... Je ne pense pas qu'il soit absolument nécessaire de faire un long discours sur la pertinence de garder notre compétitivité à l'échelle internationale, surtout dans le contexte des tarifs compensatoires. Mais il faut aussi quand même considérer que non seulement il faut être de temps en temps un petit peu rentable, de temps en temps avoir de l'argent pour payer l'aménagement forestier, mais aussi il faut être capable, technologiquement, de se garder à date pour rester compétitif.

Le 0,21 $ le mètre cube a été fait sur les bases les plus raisonnable possible. Vous pouvez capitaliser que ces données sont représentatives d'une période, comme je le dis, relativement difficile. Il faut quand même capitaliser sur le fait qu'on a besoin de fonds de roulement et d'argent pour immobiliser dans le futur, sans parler de l'aménagement et des tarifs compensatoires qui nous pendent au bout du nez.

M. Perron: Merci, M. le président et

Mme 5aucier. Je vous fais remarquer en passant que ce n'était pas moi comme critique ou encore l'Opposition qui remettait en question cette étude, mais des personnes qui sont, soit ici présentes ou à l'extérieur. (17 h 45)

À la page 34 de votre mémoire, il y a une recommandation que je vais lire tout à l'heure. Tout le monde sait que le livre blanc annonçait l'intention du gouvernement précédent d'accorder la priorité au bois des forêts privées et au copeaux des usines de sciage. Par contre, l'avant-projet de loi livre le marché de la matière ligneuse libre de toute contrainte aux papetières. Je l'ai mentionné dans mon discours d'ouverture, à la page 2. Ma question est la suivante: Avez-vous des exemples où une telle priorité devrait être accordée et quels effets cela aurait-il sur les prix, sur les volumes et sur le niveau de coupe en forêt publique?

M. Deschênes: Premièrement, si vous permettez, M. le Président, présentement, au moment où l'on se parle, il y a des amoncellements de copeaux d'environ 150 000 tonnes au Québec. Donc, si l'on considère que c'est un produit périssable, on se demande comment l'industrie forestière, notre secteur qui est le sciage, peut supporter d'une façon inconcevable d'aussi importants montants de matière ligneuse? Je donnerais la permission à M. Fred Burrows de continuer l'intervention, puisqu'il est au fait de certaines accumulations à certains endroits.

M. Perron: M. le Président, remarquez que je fais allusion à ce moment à la question des copeaux à cause de votre recommandation de la page 34 qui se lit comme suit: "L'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec recommande que les papetières s'alimentent en priorité des copeaux des scieries et que les bois de leurs territoires publics constituent un apport résiduel à leurs besoins". Nous sommes d'accord. Mais la question que j'ai posée est en fait sur trois aspects différents. Elle est en un volet, mais sur trois aspects très différents. Voulez-vous que je répète la question?

M. Deschênes: S'il vous plaît, une précision.

M. Burrows: En trois volets, c'est difficile à suivre.

M. Perron: Oui, d'accord. Avez-vous des exemples où une telle priorité que vous mentionnez dans la recommandation, à la page 34, devrait être accordée et quels effets cela aurait-il sur les prix, sur les volumes et sur le niveau de coupe en forêt publique?

M. Deschênes: Si M. Burrows veut répondre.

M. Burrows: Oui, c'est pas mal en détail. Je ne pourrai pas répondre à tous les volets que vous avez touchés. D'ailleurs, selon la position de l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec, les copeaux sont des approvisionnements d'une autre sorte de fibre pour les usines de pâtes et papiers au Québec. Si une usine de pâtes et papiers est capable d'utiliser des copeaux, elle ne devra pas pouvoir couper du bois rond qui est effectivement en banque tant et aussi longtemps que l'arbre est debout, s'il y a des copeaux disponibles sur le marché. Quel effet cela pourrait-il avoir? Évidemment, cela va varier d'une région à l'autre, je présume. Dans notre région du Nord-Ouest, par exemple, il y a trois usines de pâtes et papiers qui s'alimentent à 100 % avec des copeaux; il y en a une qui possède une scierie qui lui est attachée, comme une espèce - le terme en anglais c'est "wood room" - de chambre d'alimentation du moulin de pâtes. On prétend qu'il y a probablement des bois ronds qui sont mis directement en copeaux alors qu'on devrait passer en premier par les copeaux. II y a des usines de pâtes et papiers au Québec et surtout des usines de papier qui ont besoin de rondins, surtout les anciennes usines qui utilisaient le système de meules pour défibrer le bois. Notre argument ne concerne pas évidemment ces usines parce qu'elles ont besoin d'un certain volume de bois rond pour alimenter les meules. Il y a de ces usines qu'on est en train de convertir - et on applaudit à cela -au système de pâtes thermomécaniques qui leur permettront d'utiliser les copeaux pour s'alimenter. On applaudit à cela.

J'ai touché à un ou deux aspects que mes collègues vont peut-être...

M. Deschênes: Et aussi, M. le Président, si vous le permettez, l'utilisation optimale de la matière ligneuse au Québec. Étant donné qu'on prévoit dans certaines régions qu'il y aura peut-être des ruptures de stocks, notre association pense qu'en faisant utiliser prioritairement les copeaux par les papetiers, cela va peut-être faire en sorte que les terrains privés vont acheminer leur bois vers les sciages. De cette façon-là, on va faire d'une pierre, deux coups. Certains de nos membres sont vraiment préoccupés par le fait de prioriser certaines autres possibilités d'approvisionner les papetiers. C'est une raison très importante de faire en sorte que, de plus en plus, les gens de la forêt privée, les scieurs utilisent ces matières ligneuses pour autant qu'ils sont aptes à faire du sciage naturellement. Cela permettrait une meilleure utilisation de la fibre au Québec si, d'abord prioritairement, les papetiers s'approvisionnaient de copeaux.

M. Perron: Avez-vous eu connaissance que certaines provinces canadiennes ont pris la décision de mettre l'accent sur l'achat des copeaux qui proviennent des usines de sciage ou encore des boisés privés pour le Québec, comme le mentionnait d'ailleurs le livre blanc.

M. Deschênes: Je demanderais è M. Lacasse de répondre.

M. Lacasse: M. le Président, M. Perron, le Nouveau-Brunswick est une province qui a eu l'audace d'inclure un tel ordre de priorité dans sa loi. Ce n'est pas au niveau de la réglementation ou des contrats d'aménagement, c'est dans la loi. Il est sûr que le système n'est pas le même; la tenure là-bas n'est pas la même qu'ici; ils appellent cela des licenciés qui sont des papetières neuf fois sur dix; une scierie a une licence et il y a des sous-licenciés. Les papetières doivent s'approvisionner tout d'abord dans leurs propres forêts privées, ce qu'on appelle les franc-alleux. Elles doivent ensuite s'approvisionner des bois de la forêt privée, ensuite du bois à pâte qui provient des scieries parce que, dans les opérations d'arbres en billots, on a toujours un peu de bois à pâte et ensuite des copeaux. Lorsqu'il en manque, si la papetière a besoin de plus de matière première, à ce moment-là, elle a le droit de couper sur sa forêt publique.

Mme Saucier: Si vous le permetttez, M. le Président, j'aimerais ajouter un mot. Il est évident quand même que l'on est conscient de l'importance de la stabilité des approvisionnements des pâtes et papiers. Nous, des industries du sciage, sommes prêts à signer des contrats à long terme avec le secteur des pâtes et papiers, de façon à lui assurer un approvisionnement le plus stable possible. Je pense que nous avons quand même fait nos preuves dans le passé, d'une part.

Par contre, d'autre part, je ne pense pas que cela ait des effets immédiats sur le prix des copeaux. Il faut quand même être conscients que nous sommes une multitude de vendeurs qui négocient avec quelques acheteurs. Généralement, il est normalement un peu plus difficile pour nous de négocier à la hausse, du fait de la m.ultitude de nos membres. Je pense que, de façon générale, cela répond peut-être en partie à votre question. Je tenais à souligner le fait que nous sommes conscients de l'importance de l'approvisionnement, à long terme, des pâtes et papiers.

M. Perron: Merci, Mme Saucier. Est-ce que vous pourriez nous donner des informations à savoir ce que vous pensez des garanties de suppléance liées aux ententes à long terme mentionnées dans le livre blanc, à la page 61, que vous connaissez sûrement?

M, Deschênes: En ce qui concerne ce sujet précisément, nous avons pensé - nous, de l'association - le laisser tomber, considérant que, dans un contexte de rareté de fibres... On a fait beaucoup de réunions avec notre comité de la forêt et d'autres intervenants, et l'on se demande où le ministre aurait pu trouver cette quantité de fibres pour faire des réserves, éventuellement, en cas de besoin. Dans un contexte de rareté, on a pensé que cette intervention de notre part était peut-être un peu biaisée.

M. Perron: Merci, M. le président. C'est la dernière question, pour le moment, en ce qui me concerne. Est-ce que vous pourriez nous expliquer plus à fond l'évolution des prix des copeaux en rapport avec la page 44 du Profil de l'offre et de la demande, document publié en 1984 par le gouvernement du Québec et se rapportant directement aux copeaux de bois.

M. Deschênes: Je demanderais è M. Lacasse de répondre.

M. Lacasse: M. le Président, j'aimerais qu'on précise la question, s'il vous plaît!

M. Perron: C'est que dans le document que je viens de mentionner, "Profil de l'offre et de la demande, copeaux de bois au Québec" de novembre 1984, il y a le tableau 21 qui parle de l'évolution du prix des copeaux, Québec-Canada, de 1970 à 1984. Est-ce que vous pourriez, en donnant des exemples concrets, donner des explications en rapport avec le tableau en question?

M. Lacasse: M. le Président, j'ai un peu de difficulté. Je n'ai pas le tableau entre les mains. Est-ce qu'on démontre dans ce tableau-là qu'il y a une évolution des prix comparable au Québec par rapport a ceux du Canada ou si les copeaux au Québec sont plus chers ou moins chers que ceux des autres provinces?

M. Perron: Si vous me le permettez, M. le Président, vous pourrez peut-être répondre plus tard à la question après que vous aurez regardé le tableau que je mentionne, c'est-à-dire le tableau 21.

M. Lacasse: Ce que je constate, M. le Président, c'est qu'en 1971 les prix des copeaux au Québec, du moins d'après ce que dit ce tableau du ministère, en dollars courants, la tonne métrique anhydre, en 1971 étaient de 22 $ en dollars constants et qu'en 1984 ils étaient de 20 $. Par contre, on remarque entre ces deux années qu'il y a eu un sommet à 24 $ et un creux à 19 $. Mais je dois dire, en toute honnêteté, que le

sommet de 24 $ était pour l'année 1982. On remarque un amollissement des prix en dollars constants pour 1983 à 22 $ et, en 1984, à 20 $. Donc, il y a eu un affaiblissement des prix pour ces années-là. On peut difficilement comparer avec le reste du Canada, parce qu'on n'a pas les données pour 1983 et 1984. Ce serait la seule constatation que je peux faire. Je dirais globalement, si on veut, que durant la période de treize ans le prix des copeaux n'a à peu près pas fluctué en dollars constants.

M. Perron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député de Duplessis. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais de mon côté féliciter l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec pour la qualité de son mémoire et de sa présentation. Au début de votre mémoire, vous parlez des modalités d'encadrement, de mise en place du nouveau régime. Vous soulevez certaines questions en ce qui concerne le volume de 30 000 000 de mètres cubes comme base de calcul des frais d'aménagement. Vous semblez un peu mettre en question le volume que le ministère semble vouloir mettre de l'avant pour pallier les problèmes qui existent. Est-ce que, pour vous, il y a une distinction entre le niveau de reboisement, le niveau du plan d'aménagement et les coûts que votre industrie peut subir? Autrement dit, est-ce qu'il y a une distinction entre ces deux facteurs? (18 heures)

M. Deschênes: Est-ce que vous voulez dire notre capacité de payer par rapport au coût pour se rendre à 30 000 000?

M. Ciaccia: Non, pas nécessairement, pas le coût pour se rendre à 30 000 000. La raison d'un nouveau régime, c'est que, dans le passé, il y a eu des abus, il n'y a pas eu de reboisement, il n'y a pas eu de régénération. On a accordé plus de droits de coupe que la forêt ne pouvait en régénérer. Alors, pour pallier cela, il faut arriver à un certain niveau de reboisement afin qu'on se trouve dans une situation où l'industrie va toujours avoir assez de produits pour safisfaire à ses objectifs. Pour arriver à cela, il y a un certain niveau de reboisement, un certain niveau d'activités que le ministère doit se donner. Y a-t-il une différence entre le niveau qui est nécessaire pour pallier les difficultés, les manques d'avoir fait ces choses dans le passé, et la capacité de votre industrie de payer sa part pour ce niveau?

M. Deschênes: Je vais faire répondre

M. Lacasse. On a compris la question.

M. Lacasse: M. le Président, on a parlé tout à l'heure de scénarios - je pars peut-être d'un peu loin, M. Ciaccia - on a parlé de scénarios... C'est aussi dans le contexte des scénarios que... Avec le ministère, on s'est fait donner... On constate dans les données qu'ils nous ont fournies tout au cours de l'élaboration de ce projet de loi et la participation, la collaboration de l'industrie pendant plusieurs semaines et plusieurs mois... On s'est demandé pourquoi le ministère établissait le coût global de l'aménagement forestier sur la base de 31 000 000, qui est le niveau actuel d'allocations. Quant à nous, le niveau actuel d'allocations, même si c'est la sommation des désirs de l'industrie depuis plusieurs années, il reste que c'est un chiffre un peu aléatoire. Le seul chiffre que l'on reconnaisse - et encore on le reconnaît sur la base de données qui sont plus ou moins précises, avec le ministère, on reconnaît l'imprécision des données - c'est le chiffre de 18 000 000 de mètres cubes qui était avancé par le ministère comme étant la possibilité biophysique sans travaux d'aménagement. Autrement dit, c'est le statu quo, on continue comme on fonctionne dans le moment. C'est un chiffre. Le ministère nous a lancé plusieurs chiffres par la suite. Il a parlé, je dirais, d'étapisme un' peu. Il nous monte, par étapes, à 21 000 000, 26 000 000, 31 000 000... On peut aller plus loin que cela aussi. En l'an 2020, 2050, on aura besoin probablement de plus de volume.

Alors, on a de la difficulté à savoir du ministère quels sont les travaux qu'il faudrait faire en forêt pour justement monter à 21 000 000, pour monter à 25 000 000. C'est un mélange de travaux. On constate que le ministère, lorsqu'il prétend que la forêt peut produire 25 000 000 ou 26 000 000, prétend qu'il faudra utiliser le reboisement à outrance. Je ne sais pas si c'est parce que le ministère est pris avec un paquet de plants qui sont en production, qui sont dans les tunnels un peu partout, et qu'il se demande où on va les placer. C'est un peu ce qui nous apparaît: on est pris avec des plants et il faut trouver un endroit.

On dit, dans notre mémoire, que le reboisement est une solution très coûteuse, très dispendieuse. D'ailleurs, c'est reconnu dans le monde entier par les grands aménagistes. On essaie... C'est une solution de dernier recours, le reboisement, du moins lorsqu'on examine la façon dont on doit remettre une forêt en état.

Cela dit, il va falloir que le ministère, au cours des années qui viennent, au cours de l'implantation... Vous avez commencé votre question en parlant de modalités... Justement, au sujet des modalités d'application, il va falloir que le ministère

ne soit pas trop rigide. Il y a le fameux manuel d'aménagement où on connaîtra de quelle façon on va remettre la forêt en état et de quelle façon on va vérifier aussi si l'industrie a bien fait son travail de remise en état. On demande que ce manuel soit préparé conjointement par le ministère et l'industrie.

Le niveau de coupe actuel que l'on connaît, de 21 000 000 ou 22 000 000, on pense qu'il est possible de continuer comme cela, mais avec des travaux mineurs. On ne parle pas de reboisement pour garder ce même niveau. C'est la raison pour laquelle on pense que le ministère pourrait défrayer les coûts qui permettraient de continuer à fonctionner sur une base de 21 000 000.

Maintenant, vous me demandez ce que cela prendrait pour satisfaire tous les désirs de l'industrie ou, du moins, pour empêcher qu'avec l'implantation du nouveau régime il n'y ait aucune fermeture d'usines; j'ai un peu de difficulté à répondre à cela. Le ministère nous dit que cela prend 26 000 000 pour empêcher cela. Même à 26 000 000, on se rend compte que dans une région comme le Nord-Ouest il va y avoir quand même des chutes d'emplois, des réductions de production. Ce qu'on a dit souvent au ministère durant nos délibérations, c'est que, sur une base provinciale, c'est dangereux de lancer des chiffres comme 18 000 000, 21 000 000, 25 000 000, 31 000 000; sur une base régionale, on sait fort bien qu'en certains endroits on ne pourra pas adapter ou utiliser ces chiffres.

M. Ciaccia: Je dois comprendre alors -si vous le dites - que, malgré le fait que l'on sait que dans le passé il n'y a pas eu de plans de reboisement adéquats, aujourd'hui on ne peut pas s'entendre, l'industrie et le ministère, sur ce qu'est le minimum requis pour s'assurer que l'on ait une industrie qui puisse satisfaire aux besoins de matière ligneuse. Il n'y a pas de chiffres - admettons que c'est 100 000 000, 200 000 000 ou 300 000 000 d'arbres de reboisement par année - on ne peut pas s'entendre, c'est une différence d'opinion entre l'industrie et le ministère.

M. Lacasse: M. le Président, cela me fait penser un peu à quelqu'un qui a un potager et qui se demande combien cela prend de plants de tomates pour nourrir une famille de douze enfants. Il est probable que, la première année, il y ait trop de tomates ou pas assez de tomates; s'il y a trop de tomates, c'est peut-être qu'il avait quand même le bon nombre de plants; mais, il a fait tellement soleil, cela a tellement produit qu'il a trop de tomates. Une année, il peut manquer de tomates; peut-être qu'à ce moment-là il va constater qu'il aurait dû planter plus de plants de tomates. Comme le dirait ma grand-mère, toute comparaison cloche, mais ce que je veux illustrer par cela, c'est qu'il va falloir que...

M. Ciaccia: Cela prend moins de temps pour faire pousser des tomates que des arbres, par exemplel

M. Lacasse: II va falloir qu'on ajuste notre tir régulièrement, II va falloir faire un acte de confiance, je pense, mutuellement, faire confiance aux forestiers avec les principes que l'on reconnaît, mais ne pas trop être optimistes non plus, ni trop conservateurs.

M. Ciaccia: Alors, passons à un autre sujet, la juridiction du ministère de l'Énergie et des Ressources sur l'aménagement. À la page 38 de votre mémoire, vous recommandez que soit reconnue une juridiction non équivoque en matière de gestion et d'aménagement et que toute juridiction portant sur les territoires non organisés soit retirée aux MRC.

En ce qui a trait à l'aménagement, je pense que vous contestez très fortement le rôle actuel des MRC. D'autre part, vous affirmez que le rôle du ministère de l'Énergie et des Ressources est primordial. J'aimerais que vous précisiez un peu le sujet, que vous situiez quel pourrait être le rôle des MRC et quelles seraient les juridictions respectives du ministère de l'Énergie et des Ressources et des MRC. Et l'intérêt additionnel que j'ai dans ce sujet, c'est parce que je dois déposer, prochainement, un projet de loi sur le régime des terres. Dans cedit projet de loi, il y a justement le rôle du ministère de l'Énergie et des Ressources sur les terres publiques. Nous avons aussi la loi 125 qui accorde certains pouvoirs aux MRC. Alors, nous essayons de démêler un peu le rôle des deux organismes. C'est pour cela que je serais intéressé de connaître exactement votre position.

M. Deschênes: Je demanderais, M. le Président, à M. André Tremblay de préciser ce point.

M. Tremblay (André): M. le Président, on convient, comme tous les intervenants, qu'il doit y avoir une consultation entre tous ceux qui ont affaire au milieu forestier. On pense évidemment au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aux MRC, ainsi qu'au MER. Là où, à un moment donné, on est pris dans certaines contraintes, c'est lorsque ces juridictions viennent se concurrencer et que, finalement, il y a différents intervenants à qui l'on doit rendre des comptes. Ce que l'on propose, c'est que, bien sûr, il y ait consultation, qu'il y ait un schéma d'aménagement et que ce qui concerne l'aménagement forestier soit sous la

responsabilité finale du ministère de l'Énergie et des Ressources; que le décideur, en dernière instance, soit le MER, que ce soit lui qui tranche, en cas de litige, entre le MLCP ou entre les MRC.

On a l'exemple d'un de nos membres qui, dernièrement, s'est vu aux prises avec un problème vis-à-vis d'une MRC qui voulait faire une réserve écologique d'une partie de territoire sur lequel il avait fait des plantations. Évidemment, la forêt était belle, mais il y avait eu des sommes de déboursées pour la plantation. On a voulu, considérant que c'est un coin privilégié, en termes de qualité de forêt, en faire une réserve écologique, ce qui ne faisait pas tout à fait l'affaire du membre en question qui avait, évidemment, encouru des frais importants dans le reboisement.

Donc, en termes de juridiction, on voudrait que, lorsque quelqu'un a à intervenir de façon finale, ce soit le MER.

M. Burrows: Si chaque MRC avait son mot à dire ou la main haute sur son territoire, une entreprise, entre autres, pourrait avoir un territoire d'approvisionnement qui touche à deux ou même à trois MRC, alors qu'une pourrait vouloir une certaine sorte de modalité, l'autre à côté, une autre et la troisième, une autre. L'entreprise forestière aurait à convenir avec trois niveaux d'intervention différents. C'est pour cela que l'on dit que le dernier mot devrait rester au ministère, afin d'uniformiser la réglementation touchant les secteurs de coupe, si vous voulez.

M. Ciaccia: Je vous remercie. Je vais utiliser vos arguments dans mes discussions avec mon collègue, le ministre des Affaires municipales. Je vais essayer de...

M. Deschênes: Si vous le permettez, M. le Président, j'aimerais que M. Florent Milot complète cela, s'il vous plaît, afin de donner plus de renseignements à notre ministre.

M. Ciaccia: Certainement.

M. Milot (Florent): M. le Président, je pourrais peut-être apporter des exemples assez frappants. Il convient de dire que l'on remarque que dans le document préparé par le ministère des Affaires municipales sur les orientations et les projets du gouvernement... Il y a plusieurs de ces documents, à l'heure actuelle, qui ont été produits. On retrouve régulièrement un article qui s'intitule "Les objections du gouvernement". Régulièrement, parmi ces objections, il y en a qui montrent que les MRC s'attaquent à la gestion du ministère. On les énumère ici: les permis de coupe, les coupes de bois, les modalités de coupe, le reboisement et l'activité sylvicole. Dans ce texte, le ministère des Affaires municipales prend soin, lorsqu'il parle du principe de responsabilité partagée avec les MRC à l'égard de l'aménagement...

Nous trouvons qu'essayer de séparer la gestion et l'aménagement d'une ressource, c'est très difficile. Il va toujours y avoir affrontement et mésentente. C'est tellement vrai et c'est tellement peu clair qu'on puisse en arriver à des ententes que le gouvernement a cru bon d'instituer un comité interministériel pour essayer d'éclaircir les points sur le plan de l'aménagement. Si on a tellement de difficulté à retrouver de la limpidité, à l'heure actuelle, dans ce qui existe, je pense que c'est évident qu'il y aura des accrochages possibles dans l'avenir, surtout si l'on maintient ce qui existe présentement. Nous pensons que, si le ministère de l'Énergie et des Ressources avait la juridiction sur l'aménagement et la gestion de la ressource forestière, ce serait clair. Cela n'empêcherait pas, en même temps, la collaboration avec les autres ministères. (18 h 15)

M. Ciaccia: Je pense que les points que vous soulevez sont assez pertinents parce qu'il y a 78 ou 94 MRC et, si chacune prend des décisions sur le plan d'aménagement, cela peut rendre difficile une politique globale cohérente à travers tout le territoire. Comme je vous le dis, je vais utiliser vos arguments pour essayer de convaincre mon collègue, le ministre des Affaires municipales.

M. Deschênes: Notre association ne met pas en doute le bienfait des MRC, au contraire. On trouve qu'à plusieurs niveaux c'est une très bonne chose. Mais, pour des territoires non organisés, on pense que...

M. Ciaccia: On parle strictement du plan d'aménagement et du rôle du ministère.

À la page 47 de votre mémoire, vous faites part de vos préoccupations concernant la formation de la main-d'oeuvre dans le but d'assurer le succès des travaux d'aménagement. Vous affirmez aussi qu'il revient au ministère de l'Énergie et des Ressources de veiller au transfert des technologies. Pourriez-vous élaborer un peu plus sur le rôle que vous aimeriez que le ministère de l'Énergie et des Ressources joue dans le domaine de la formation et le rôle du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu? Est-ce que vous pourriez me donner quelques exemples concrets des mesures qui devraient être prises?

M. Deschênes: Je demanderais à M. Lacasse de répondre, s'il vous plaît!

M. Lacasse: Je pense que c'est une question très importante que vous soulevez. Si on n'a pas les ressources humaines pour

réaliser tout ce que comportent les travaux d'aménagement qui seront nécessaires dorénavant avec le nouveau régime forestier, je pense qu'il y a des organismes en place comme l'Ordre des ingénieurs forestiers, les techniciens, les technologues, il y a quand même des gens en place qui peuvent assurer avec une certaine aide financière de l'État, je dirais, le transfert de connaissances malgré que, personnellement, je trouve qu'on a bien peu de connaissances en aménagement. On a fait de la coupe et on s'est fait reprocher d'avoir fait de la coupe à blanc pendant longtemps. Il reste qu'on peut aller voir ailleurs ce qui s'est fait en matière d'aménagement et peut-être qu'on peut transférer assez rapidement des recettes qu'on a vu ailleurs et qui pourraient être adaptées ici.

Si le ministère a à coeur l'implantation d'un nouveau régime forestier, il doit veiller â ce qu'il se fasse quelque chose. Je pense qu'il est le moteur dans ce dossier. II est la plaque tournante et les autres ministères, tant provinciaux que fédéraux, vont attendre une indication, une espèce d'orientation de la part du ministère sur les besoins éventuels. Il est urgent qu'il y ait ce transfert de connaissances partout dans les régions. À notre avis, il faudra développer une expertise régionale. Il faudra impliquer vos différents agents qui sont dans les régions du Québec parce qu'il n'est pas sûr... D'abord, la forêt n'est pas quelque chose d'homogène. Il y a des conditions qui varient d'une partie à l'autre de la province. Il faudra développer des expertises régionales. Je pense que le ministère devra jouer un rôle. Il devra aussi perfectionner son monde. Il y a quand même des gens qui oeuvrent dans le domaine, qui ont côtoyé l'aménagement, je dirais, qui ont, au cours des dernières années, élaboré des directives pour l'industrie, certaines directives comme les coupes par bandes, ce qui est de l'aménagement. C'est une forme d'exploitation. On s'est aperçu que l'apport de l'industrie vis-à-vis des fonctionnaires est un apport valable. Je pense qu'il y a une espèce d'osmose qui doit se réaliser entre les deux. Je pense que l'industrie et le ministère doivent se respecter aussi. Comme je le disais récemment dans un congrès, il ne faudrait pas que le ministère s'attende que dans l'orchestre il n'y ait pas quelques fausses notes à un moment donné, que les chefs d'orchestre soient tous au ministère. S'ils acceptent certaines fausses notes dans l'industrie, il ne faudrait pas que tous les fonctionnaires pensent que les chefs d'orchestre sont uniquement de leur côté.

M. Ciaccia: Merci. Le dernier sujet que je voudrais aborder concerne les relations du travail. À la page 51 de votre mémoire, vous proposez que soit modifié le Code du travail sans que soient perturbées les relations entre les parties et en tenant compte des spécificités propres à chacune des nouvelles obligations.

D'autres mémoires - je pense particulièrement à la Fédération des travailleurs forestiers - font aussi connaître leurs préoccupations en ce sens, mais du côté syndical. J'aimerais que vous précisiez un peu plus la question, principalement le point de l'accréditation. Entre autres vous dites: "Si, historiquement, le législateur québécois avait cru bon de doter le secteur forestier d'un régime particulier d'accréditation, il faudra tout au moins s'interroger sur la nécessité de maintenir de telles dispositions." Doit-on comprendre que vous préconisez une remise en cause en profondeur du régime des relations du travail dans le domaine forestier? Tout en considérant, naturellement, que mon collègue, le ministre du Travail, a juridiction en ce domaine, j'aimerais que vous m'expliquiez quelle est votre conception des unités d'accréditation et ce qu'elles devraient être.

M. Deschênes: M. André Tremblay va répondre à cette question si vous le permettez, M. le Président.

M. Tremblay (André): M. le ministre, je pense qu'il y a deux volets dans votre question. Dans le premier on recommande de ne pas perturber les relations du travail présentement existantes et de faire les amendements nécessaires au Code du travail. Évidemment, l'avant-projet de loi établit de nouveaux concepts par rapport à la loi actuelle. On pense à la notion de concessionnaire forestier, à la notion d'opérations forestières qui ne se retrouvent pas dans l'avant-projet de loi. À ce niveau-là, notre recommandation est simple, c'est d'uniformiser les dispositions actuelles du Code du travail avec lequel on vit, selon lequel nos accréditations sont émises pour que ne soient pas perturbées ces accréditations.

Dans un deuxième temps, lorsqu'on parle des obligations nouvelles qui s'imposeront à nous, on parle, évidemment, particulièrement du reboisement. Nos accréditations couvrent les activités de récolte. Si on examine la définition d'"opérations forestières" prévue au Code du travail, on définit "opérations forestières" comme étant les activités de récolte de la forêt. On ne parle pas d'activités de reboisement. C'est dans ce sens-là qu'on veut que la définition d'"opérations forestières" ne soit pas étendue aux activités de reboisement comme telles, ce qui permet de reconduire la situation actuelle.

Dans un troisième temps, il s'agit de la notion d'accréditation qui est particulière au milieu forestier. Vous savez sans doute que l'article 2 prévoit que les employés de nos

sous-traitants sont réputés... Ce n'est ni plus ni moins qu'une application automatique de l'article 45 du Code du travail, c'est-à-dire que les conventions collectives sont réputées leur être applicables.

Cette situation s'est développée. Lorsque le législateur a introduit cette notion-là, il y a déjà plusieurs années, les opérations forestières étaient différentes de celles que l'on connaît aujourd'hui et la notion d'entrepreneur indépendant était beaucoup moins développée que celle qui existe actuellement. Compte tenu de la modernisation du travail en forêt où de plus en plus la majorité - une grande partie - des opérations s'effectuent par des entrepreneurs qui sont de réels entrepreneurs, on s'interroge sur la nécessité de conserver cette disposition de l'article 2 qui fait du régime d'accréditation en milieu forestier un régime très particulier, même unique dans le Code du travail. Ce sont les deux points qu'on soulevait.

M. Ciaccia: Je vous remercie.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, je vais essayer d'aller rapidement parce qu'il nous reste quelques minutes de notre côté et qu'on voudrait les utiliser le mieux possible. Si dans mon langage habituel, direct, que vous connaissez, vous sentez que je me fais de temps à autre l'avocat du diable, ne vous détrompez pas, c'est fort probable.

Je vais vous poser une première question qui a trait à la position actuelle et à celle qui est prévue pour les années quatre-vingt-dix. Il y a un laps de temps entre les deux. Est-ce que vous croyez que le ministre ou les deux ministres, parce qu'on ne sait pas lequel des deux a la tutelle du ministère, devraient donner de nouvelles garanties d'approvisionnement ou bien si, au moment où on se parle, avec le dépôt de l'avant-projet de loi, vous préféreriez qu'à l'avenir, il n'y ait plus de garantie d'approvisionnement ou de contrat d'approvisionnement de donné à qui que ce soit?

M. Deschênes: Je demanderais à Mme Saucier de répondre, s'il vous plaît!

Mme Saucier: M. le Président, je pense qu'il est absolument essentiel pour toute l'industrie de perpétuer son approvisionnement jusqu'au moment où il y aura un nouveau contrat en vigueur. Je plains l'industriel qui aura à se financer à long terme entre le moment de l'abolition des contrats actuels et la signature des nouveaux contrats. Je pense que cet aspect est non seulement pour nous de savoir où on s'en va - c'est toujours utile - mais aussi il ne faut quand même pas oublier cette capacité de financement qui est absolument nécessaire. Si on dit que, dans l'industrie du sciage, on va avoir beaucoup d'incertitudes de créées fort probablement dans les prochains mois et peut-être dans les prochaines années à cause de l'imposition possible de tarifs compensatoires, on va avoir besoin de tout l'appui des organismes concernés, financièrement, d'une part. D'autre part, on a besoin de votre appui pour être capable d'avoir le maximum de sécurité à leur offrir. Je pense que le gouvernement, s'il ne prête pas attention à ce laps de temps, pourra mettre en péril certaines entreprises.

M. Jolivet: Est-ce que vous croyez que cela va jusqu'à ne pas donner à des gens déjà dans le secteur, peu importe lequel, des contrats d'approvisionnement additionnels vu les besoins qu'ils pourraient avoir dans ce laps de temps?

Mme Saucier: Vous parlez des quantités additionnelles par rapport à ce qu'ils ont actuellement?

M. Jolivet: Oui.

Mme Saucier: J'imagine qu'à l'heure actuelle le gouvernement se doit, comme organisme responsable, de faire un bilan le plus précis possible avant d'accorder quoi que ce soit d'additionnel. Je pense qu'on nous dit dans certains secteurs qu'il va y avoir rupture de stocks. Mais tant que tout cela n'est pas clairement établi, je ne vois pas comment le gouvernement pourra donner de façon responsable des approvisionnements additionnels.

M. Jolivet: Ma question suivante s'adresserait de façon spécifique, vu son apport à la commission, à M. Côté, de Reed Paper. À la page 12, j'essaie juste de voir -et là je me fais la partie dont je vous ai fait mention tout à l'heure, soit l'avocat du diable - vous dites qu'il y a des problèmes, que le sciage agit de façon déterminante sur l'utilisation de la ressource forêt; on dit qu'elle produit la moitié des fibres pour le besoin des pâtes et papiers. "Cette source d'approvisionnement est d'autant importante pour les papetières que les prix consentis aux scieries pour les copeaux leur permettent de maintenir leur coût de matière première au plus bas niveau. L'existence de l'industrie des sciages assure aux papetières une meilleure situation financière et la disparition soudaine du secteur des sciages pourrait jusqu'à attaquer sérieusement la viabilité de l'industrie des pâtes et papiers." Est-ce que vous ne croyez pas que le moyen de régler votre problème pour les scieurs serait - cela s'adresse effectivement aux papetières

l'intégration verticale?

M. Deschênes: Je ne pense pas, M. le Président, que c'est le mémoire des papetières qu'on étudie présentement, c'est le mémoire du sciage. Est-ce que la question se pose à un papetier ou à M. Gilles Côté?

M. Jolivet: Ce que je veux dire, c'est ceci: Est-ce qu'un des moyens de régler le problème qu'il y a dans la vente des copeaux ne serait pas qu'effectivement il y ait intégration ou s'il y a d'autres moyens que ceux-là? Je veux vous entendre parler plutôt des autres moyens.

M. Côté (Gilles): Pour répondre à M. Jolivet, je n'ai pas d'opinion précise à exprimer là-dessus, ni personnelle, ni de la part de mon entreprise puisque je fais partie de l'exécutif de l'AMBSQ.

M. Jolivet: D'accord. Ce que je posais comme question, c'est ceci: Dans ce contexte-là, est-ce que cela serait passer de l'intégration verticale... Je vais vous poser la question suivante: Est-ce qu'il ne serait pas mieux d'avoir des contrats à plus long terme entre les scieurs, les représentants du secteur des boisés privés et les papetières plutôt que d'avoir le libre marché dont on fait mention?

M. Deschênes: Je demanderais à M. Lacasse de répondre, s'il vous plaîtl (18 h 30)

M. Lacasse: M. le Président, M. le député de Laviolette, j'ai de la difficulté à comprendre. Il y a des choses qui se passent en ce bas monde depuis quelque temps. Votre question peut être prise dans les deux sens. Vous parlez d'intégration. La définition traditionnelle d'intégration dans le secteur forestier, c'était le scieur qui se faisait acheter par les papeteries. Si on lit les journaux depuis un certain temps, cela semble être l'inverse. Laquelle des options voulez-vous?

M. Jolivet: D'accord, je comprends bien. Oui, M. Burrows.

M. Burrows: M. le député de Laviolette, vous êtes sans doute au courant qu'un de vos concitoyens de Shawinigan, M. Mallette, de Timmins, de l'entreprise Waferboard Corporation, Mallette Lumber, a récemment acquis une usine de pâtes et papiers en Ontario. La situation était assez difficile et il en sera de même pour un certain temps dans le Nord-Est de l'Ontario, aussi bien qu'au Québec, en ce qui concerne les copeaux et le marketing de copeaux aux usines de papiers. Dans ce cas-ci, M. Mallette a pris l'initiative de s'intégrer verticalement, comme vous le suggérez. Il a fini par acheter l'usine qui appartenait anciennement à Abitibi-Price.

L'industrie du sciage dans le Nord-Est de l'Ontario est très heureuse de ceta parce que ce faisant elle ferme tout de suite une usine de sciage qui était connectée comme chambre d'alimentation de cette usine de pâtes et papiers - de pâtes surtout - ce qui crée un meilleur marché pour les copeaux produits par les autres scieries de la région du Nord-Est de l'Ontario. Je cite cela en exemple. C'est complet, c'est une intégration verticale qui est, je croîs, très positive et qui aide certainement le problème cité. Merci.

M. Jolivet: D'accord. Je vais prendre les pages 14 et 16 pour relier les deux recommandations. On sait que la capacité actuelle des forêts est de 18 000 000 de mètres cubes. On en coupe en moyenne 21 000 000 de mètres cubes et on parle de descendre ou de remonter - cela dépend où on se situe - à cette moyenne de 21 000 000 de mètres cubes, alors qu'on veut avoir plus tard, avec tous les travaux d'aménagement, le reboisement, une capacité de 26 000 000. On note donc deux choses dans vos deux recommandations. On dit: Si on part de la capacité actuelle de la forêt de 18 000 000 et qu'on veuille la remonter à 21 000 000 en termes de capacité de coupe moyenne des cinq dernières années... Vous dites que la différence entre les 18 000 000 et les 21 000 000, c'est le gouvernement qui devrait, parce qu'il n'a pas pris ses responsabilités dans le passé... On pourrait prendre cela à l'inverse, c'est parce que le gouvernement n'a pas obligé les industriels à le faire. À ce moment-là, vous dites que c'est le ministère qui devrait prendre en charge cette portion.

La deuxième, c'est de 2] 000 000 à 26 000 000. Vous dites dans votre deuxième recommandation que cela devrait être partagé. Vous faites toujours mention de votre proposition initiale qui a toujours été la même, c'est-à-dire que, comme vous coupez plus mais qu'une bonne partie s'en va aux papetières, on devrait vous en payer une partie ou, du moins, le ministère devrait forcer les papetières à payer cette partie de l'aménagement.

Ne croyez-vous pas qu'il y a un danger, entre la forêt dont on connaît la capacité actuelle, ce qu'on permettra de couper selon le projet, et la forêt électronique, si l'on peut dire, de 26 000 000, que quelqu'un accapare la différence entre les deux pour faire des aménagements ou des propositions d'usines nouvelles ou des propositions nouvelles d'accélération de machines?

M. Deschênes: D'abord, la différence entre les 18 000 000 et les 21 000 000, on dit dans notre mémoire qu'on veut que ce

soit le ministère qui l'assume complètement. On pense qu'il y a des sommes d'allouées pour cette partie-là et qu'avec un aménagement de base, comme M. Lacasse le mentionnait plus tôt, soit des coupes par bandes ou autre chose qu'on pratique depuis un certain temps, on voudrait que le ministère assume cette partie-là. À partir de 21 000 000 et plus, on est prêt à partager, mais cela ne veut pas dire que la partie de l'industrie forestière serait, globalement, de quelque 100 000 000 $. On a imputé à la partie de 18 000 000 à 21 000 000 ou 22 000 000 un certain montant d'argent qui, on pense, n'est pas tout à fait ce qui est exprimé à certains endroits. Donc, la partie de 21 000 000 à 26 000 000, c'est un scénario dont on se demandait s'il aurait pu se produire à un certain moment donné; il aurait pu y avoir différents scénarios avec différentes factures à payer. Je demanderais à M. Lacasse ou à Mme Saucier de compléter.

Mme Saucier: Si vous me permettez, ]e vais revenir à la fois compléter le commentaire de M. Deschênes et revenir à la question de M. Ciaccia tout à l'heure sur le calcul des possibilités relié à notre capacité de payer. Je pense que ce qui est important à l'heure actuelle c'est que nous reconnaissions, d'une part, le besoin d'aménagement forestier au Québec. D'autre part, et cela est peut-être relié à mon aspect comptable de temps en temps, c'est qu'on n'est pas capable, on a de la difficulté à dire: D'accord, pour passer de 18 000 000 è 21 000 000, cela va coûter tant, pour passer de 21 000 000 à 23 000 000, cela va coûter tant, et de 23 000 000 à 26 000 000 cela va coûter tant. C'est vrai qu'on peut se payer une "Cadillac" d'aménagement forestier au Québec et faire de l'expansion fantastique dans l'industrie forestière, mais est-ce qu'on a la capacité de se payer cela autant comme gouvernement que comme industrie? À l'heure actuelle, on dit: D'accord, l'industrie du sciage est prête à payer 20 % de la quote-part de l'industrie, donc, cela veut dire que l'industrie des pâtes et papiers aura à payer quelque chose autour de 75 %. Il faut faire attention aussi. L'industrie des pâtes et papiers doit rester concurrentielle sur le marché international. Alors, on a de la difficulté à relier les scénarios d'aménagement avec les montants à dépenser et les montants réels qui vont être nécessaires pour le futur. On sait qu'aujourd'hui on coupe en résineux 21 000 000 de mètres cubes. C'est de cela qu'on a besoin.

Après cela, on fait quoi? Comme je vous dis, c'est quoi les scénarios forestiers reliés aux scénarios financiers? C'est quoi notre capacité réelle de payer comme collectivité autant comme État que comme industrie tout en restant concurrentiel sur le marché international? Je trouve qu'on a beaucoup de difficultés à relier cela dans un tout cohérent et à prendre les décisions. C'est ce pourquoi l'AMBSQ recommandait l'établissement de plusieurs scénarios qu'on pourrait discuter avec le ministère.

M. Jolivet: Mais quand la proposition a pour effet de faire payer par le ministère l'ensemble des arrérages dont on fait mention, ordinairement, en millions d'hectares, est-ce que vous dites qu'il y aurait une deuxième sorte d'arrérages entre les 18 000 000 et les 21 000 000? C'est ce que je comprends bien. Vous faites les deux distinctions de l'une à l'autre.

M. Deschênes: Je demanderais à M. Florent Milot de compléter.

M. Milot: Je n'ai pas saisi votre dernière question. M. Milot

M. Jolivet: Ce que je veux dire, c'est qu'actuellement le ministère s'est engagé dans le livre blanc à faire l'ensemble des arrérages. D'accord? Maintenant, la discussion qui a été amorcée, c'est de savoir à quel rythme il devrait le faire. La deuxième, sur les 18 000 000 à 21 000 000, est-ce une deuxième sorte d'arrérages dont vous faites mention ou si ce sont les mêmes dont vous parlez?

M. Milot: Justement, c'est quand on a eu la proposition, l'hypothèse qui a été émise par le ministère, à ce moment, on aurait aimé savoir quel serait l'impact sur la possibilité de faire les 16 000 hectares par année en arrérages. Cela va augmenter la possibilité de combien de faire les arrérages? Ensuite, lorsqu'on parle de l'adaptation des méthodes de coupe, de combien cela va-t-il se répercuter sur la possibilité d'appliquer des méthodes de coupe nouvelles ou ainsi de suite? Ensuite, on aurait aimé quand même savoir ce que la plantation dans un secteur donné de la province de 50 000 000 de plants va faire sur la possibilité dans ce secteur, et ainsi de suite. À ce moment, on aurait pu se situer beaucoup plus pour évaluer d'abord les frais et ensuite voir nos besoins dans les différentes régions de la province. Il y a un point que je voudrais amener ici. Lorsqu'on parle de 30 000 000, on parle d'un écart de 33 % avec la coupe actuelle. Quand on prend les données du ministère, depuis dix ans, on s'aperçoit que la coupe est à peu près stable. On regarde cela ici. Je prends les moyennes de 1975 a 1979, on a 20 817 000 pour la récolte de résineux, épinettes, sapins, pins gris. Je prends de 1981 à 1985, on a 20 415 000, alors, on a même diminué un peu.

J'essaie de m'expliquer pourquoi on est allé à 33 % d'écart à un moment donné,

alors que depuis dix ans on est resté à peu près stable. C'est pour cela qu'on a proposé de le faire par étapes. On aurait pu calculer avec des scénarios et dire: Bien, dans les quinze prochaines années on va augmenter de 15 %. Je ne sais pas, on aurait pu faire plusieurs scénarios et en même temps, à la suite de ces scénarios, on aurait proposé différents bilans, si l'on veut, des frais d'aménagement et on aurait vu aussi en même temps les capacités de payer de l'industrie.

M. Jolivet: Je vais revenir à la page 37 de votre mémoire où vous recommandez que le bénéficiaire ait le loisir d'utiliser son allocation annuelle au rythme des besoins à la condition de ne pas dépasser, etc. La proposition a toujours été à 10 % plus ou moins par rapport à 100 %. On dit 500 % sur cinq ans, mais cela peut être une année 110 % et une autre année 90 %. La proposition que vous semblez faire me semble un peu dangereuse dans la mesure où vous permettez à une personne, eu égard à ce maximum de 10 % en plus, d'aller même peut-être à 120 %, à 130 % et à 140 % et, au bout de quatre ans, se retrouver à 500 % de sa moyenne de fait, c'est-à-dire son pourcentage global de 500 %. À la cinquième année, vous donnez quoi? Vous lui permettez de faire du lobby pour qu'elle ait encore plus, c'est quoi? Cela donne quoi? Je trouve cela dangereux. Je veux savoir si j'ai raison.

M. Deschênes: Cela est peut-être dangereux mais, selon les marchés, étant donné qu'on est dans un marché fluctuant, cela permettrait aux industriels d'avoir une certaine liberté à certains moments - dans des années moins bonnes autant que dans de bonnes années - de couper un peu moins dans des années moins bonnes et couper un peu plus lorsque le marché reprend. C'est la fluctuation des marchés qui fait qu'on vaudrait que nos industriels aient une certaine flexibilité à ce sujet.

M. Lacasse: M. le Président, il m'apparaît peu probable que pendant quatre années de suite on dépasse de beaucoup les 100 %, qui est une moyenne des cinq dernières années. Il faudrait qu'on soît dans une période euphorique au point de vue du volume, en espérant que les prix suivraient aussi; c'est peu probable que cela arrive.

M. Jolivet: Je la relie à une autre proposition à la page 27, elle peut être différente quant au texte. Il y a une chose certaine c'est qu'il y a un danger. Quand on prend la proposition du ministre... Là je suis en désaccord avec celle du ministre maintenant, quand il dit: c'est sur le volume alloué et non pas sur le volume récolté. Effectivement, quand on avait placé la question du volume récolté, cela avait un but principal, soit de dire: II y a une année où cela va être plus, il y a une année où cela va être moins. Il y a aussi une autre chose c'est que selon certaines années il serait peut-être plus profitable d'aller les chercher dans les boisés privés, ou d'aller les chercher chez les scieurs plutôt que dans son propre territoire. À ce moment, si l'on parle du volume alloué, on risque dans les creux et les hautes vagues de mettre en péril une industrie qui, en certaines circonstances, serait en crise. Dans ce contexte je serais plus en accord avec votre proposition qui est là qu'avec l'autre.

M. Deschênes: C'est absolument cela notre crainte, le cas de personnes qui auront payé entièrement leur droit de coupe et qui savent qu'au cours de l'année, que le marché soit bon ou pas, les gens vont exploiter... J'ai payé, donc je le coupe, je le transforme, je le vends et je fais baisser les prix encore plus. C'est notre crainte à ce niveau. On pense qu'en payant la récolte cela va mettre moins de pression sur les marchés à certains moments et la personne pourra récupérer un peu plus tard avec sa flexibilité.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'aurais d'autres questions, mais je vais laisser la chance à mes collègues d'en poser.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député de Laviolette. J'aurais une ou deux questions très rapides à vous poser, M. le président. D'une part, le MER propose de calculer les possibilités forestières ou les niveaux de récolte future selon le principe du rendement soutenu. À moins d'avoir mal lu votre mémoire, je saisis mal votre posi-. tion sur cela. Pourriez-vous préciser cela rapidement, s'il vous plaît?

M. Deschênes: Florent, s'il vous plaît!

M. Milot: Nous avons mentionné au début de notre mémoire que l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec était d'accord avec les principaux principes directeurs de l'avant-projet de toi, et nécessairement on faisait référence au principe de rendement soutenu. Or, l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec conçoit très bien que le fait d'établir une possibilité sur une base de rendement soutenu procure, si l'on veut une sécurité d'approvisionnement, à condition que, pour la possibilité que l'on aura établie, on fasse les travaux d'aménagement nécessaires pour l'obtenir et rendre la forêt apte à produire cette possibilité. (18 h 45)

Maintenant, j'aimerais attirer un peu l'attention du ministre à ce moment-ci. C'est que, sur un ensemble provincial, on peut

assez facilement reproduire une possibilité, mais on pense que cet exercice va devenir beaucoup plus difficile lorsqu'on va le faire au niveau de chaque territoire. C'est pourquoi on espère que le futur inventaire va nous apporter vraiment des données beaucoup plus précises. Nos gens, comme on l'a déjà mentionné dans notre mémoire, qui vont se retrouver en face d'un territoire qu'ils ne connaîtront pratiquement pas vont souvent devoir se fier automatiquement à ce qu'ils vont recevoir du MER, ni plus ni moins, comme données. Or, il va devenir très important qu'on fasse confiance a ces chiffres-là, mais on aimerait aussi en même temps que le ministère nous fournisse les explications voulues pour qu'on puisse vraiment voir et discerner si vraiment, sur un territoire donné, on va avoir la bonne possibilité établie en fonction de ce qu'on va récolter.

Le Président (M. Théorêt): Merci.

Ma dernière question. Dans votre mémoire, à la page 16, vous indiquez que l'industrie des sciages devrait payer 22,4 % de frais d'aménagement à être défrayés par l'industrie forestière. Sur quoi vous appuyez-vous pour parler cPun tel pourcentage?

M. Deschênes: C'est assez facile à établir. C'est que le domaine des sciages au Québec exploite un certain pourcentage de la forêt, mais par contre il y a seulement 22,4 % de notre exploitation qui est transformé en produits finis et qui est vendu sur les marchés sous forme de produits finis. C'est à partir de cette base qu'on a fait les calculs. Chaque secteur industriel forestier devrait payer sa consommation, selon la fibre vendue en produits finis. Je demanderais à Mme Saucier de compléter, s'il vous plaît!

Mme Saucier: Si vous me le permettez, M. le Président, nous nous sommes référés à une étude faite par le Dr Jean-Paul Nadeau, qui est économiste forestier au MER, et qui a déterminé effectivement que, d'après les études qu'il a faites, l'industrie du sciage coupait 64 % de la forêt publique, mais qu'il y en a le tiers qui produit effectivement du sciage. Le reste produit des copeaux ou d'autres sous-produits. Alors, c'est une étude qui est faite par le MER et qui dit que 22,4 % des bois coupés sur tes forêts publiques aboutit en sciage.

Le Président (M. Théorêt): Merci, Mme Saucier. Je cède maintenant la parole au député de l'Ungava.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Mme Saucier disait, à juste titre, tout à l'heure, qu'elle plaignait tout industriel qui aurait à se financer à partir des prémisses qu'on a actuellement en ce qui concerne les permis d'approvisionnement. On a d'ailleurs des cas actuellement d'industriels qui sont pris devant le problème, parce que les délais sont jusqu'en 1990. Ils n'ont plus de garanties après. Ils doivent se financer au moment où on se parle. Il est bien évident que dans l'industrie du sciage - vous le savez sûrement mieux que moi - il y a beaucoup d'aléas. D'ailleurs, dans le livre blanc de l'ancien gouvernement, en page 51, on pouvait lire qu'il y aurait dans les allocations des usines, usine par usine, des facteurs externes qui seraient pris en considération au moment des allocations des droits de coupe, soit les marchés, les relations du travail, les conditions climatiques, les conditions de terrain, les feux de forêt, etc. Or, dans l'actuel projet de loi, si ce n'est, peut-être, un mécanisme d'arbitrage qu'on effleure rapidement à l'article 48, personnellement, je ne retrouve rien qui garantisse qu'il y ait de telles mesures qui soient prises afin de permettre aux industriels de suppléer ou de se défendre advenant d'éventuelles circonstances malheureuses. Quelles seraient vos propositions face à ce problème-là?

M. Deschênes: La question est assez dure... Est-ce que vous voulez parler du conseil permanent que vous aviez proposé dans un certain...

M- Claveau: Je veux dire que, lorsqu'on fait une moyenne sur cinq ans, on parle beaucoup de la capacité de scier. Mais cette capacité est souvent en fonction d'un certain nombre d'inconnues, tels les feux de forêt, les relations du travail, problèmes de marché, problèmes de capacité de pénétrer la forêt pour toutes sortes de raisons. À mon avis, dans le projet de loi, on ne prévoit aucun mécanisme qui prenne en considération ces facteurs externes qui ne sont pas directement reliés à la capacité des entreprises mais plutôt dépendants de circonstances externes. J'aimerais savoir si vous avez des revendications spécifiques face à cette situation.

Mme Saucier: Premièrement, est-ce que vous vous référez dans un premier temps à la question des critères de performance qui sont établis pour chacune des usines? Notre compréhension est qu'effectivement la nouvelle allocation que nous devrions avoir va être basée sur la moyenne des coupes des cinq dernières années, mais normalisées, c'est-à-dire qu'on va tenir compte s'il y a eu des problèmes de marché, de relations de travail, pendant cette période de cinq ans.

M. Claveau: D'accord. Alors, la proposition qui est faite vous satisfait? C'est cela que je veux savoir.

Mme Saucier: Si notre compréhension

est exacte, c'est un des éléments qui peuvent servir, effectivement, comme base d'allocation.

M. Claveau: D'accord. Une autre question rapide puisqu'on n'a pas beaucoup de temps. C'est au sujet, justement, encore la, de l'approvisionnement que vous demandez ou que vous revendiquez envers les papetières. Je me mets dans la peau d'une papetière. Étant donné tous les aléas dont on a fait mention, toutes les variations qu'il peut y avoir dans les coupes, dans le niveau de la coupe, pour toutes sortes de raisons qui peuvent vous échapper, quelle serait, finalement, l'approche, ou quelles seraient les garanties que vous pourriez donner aux papetières afin de leur assurer leur approvisionnement dans une structure telle qu'on la connaît actuellement, de contrats à moyen ou à court terme avec les papetières?

M. Deschênes: En aucun moment, l'industrie n'est prête, je pense, à signer des contrats à long terme avec les papetières pour assurer leur approvisionnement. De plus, on pense que cela n'endommage d'aucune façon la viabilité ou la rentabilité des papetières advenant le cas où il y aurait une priorité donnée aux copeaux pour approvisionner ces industries, étant donné... Si on regarde le passé, l'évolution à ce niveau-là, les gros investissements faits par ces gens-là, l'avenir est aux copeaux et je pense que ces gens-là veulent dorénavant s'approvisionner de plus en plus en copeaux. Donc, cela ne change rien. Nous autres, on ne veut plus qu'il y ait des amoncellements de copeaux, des tas de copeaux énormes qui se perdent. Il arrivera éventuellement dans ce secteur des problèmes économiques, il y en a déjà eu et il y en aura encore. Mais, à ce moment-là, si l'industrie du sciage est dans un moment où il y a vraiment des bons marchés, les premiers à endurer les problèmes, c'est toujours les copeaux parce que c'est plus facile du jour au lendemain de dire: Ne livre plus de copeaux, j'ai une fermeture de deux jours, ou des choses comme cela.

Je pense que l'industrie du sciage devrait continuer d'évoluer et de créer des emplois et, à ce moment-là, on ne touchera pas les deux secteurs. On pense que cela n'endommage d'aucune façon et que ce serait peut-être plus rentable économiquement. Je demanderais à M. Tremblay de continuer l'intervention.

M. Tremblay (André): Peut-être pour compléter, cela me paraît peut-être un faux problème parce que, dans la mesure où les papetières ont déjà un volume d'alloué sur forêts publiques, qu'elles coupent elles-mêmes, et dans la mesure où les scieurs produisent un certain volume de copeaux annuellement, qu'il y ait priorité ou non d'utilisation des copeaux, s'il y a une crise sévère qui frappe l'industrie du sciage et qu'il y ait une diminution importante de la production de copeaux, les papetières vont être dans la même situation, qu'il y ait ou non priorité. Elles seront obligées de se retourner et d'aller couper sur les territoires qui leur sont accordés, que cette priorité existe ou non. Donc, je ne pense pas que la priorité que l'on demande justifie que l'on s'engage plus loin dans les garanties formelles de volumes sur une longue période qu'on n'est pas capable de donner, compte tenu l'évolution cyclique du sciage.

M. Claveau: Une dernière petite question rapide. Quand vous dites, a la page 22 de votre mémoire, que tous les utilisateurs devraient payer pour l'utilisation de la forêt, étant moi-même originaire d'un comté où la forêt est à peu près l'attraction ou la source de distraction principale de toute la population, j'aimerais savoir ce que vous entendez par bénéficiaire de la forêt.

M. Deschênes: On pense aux utilisateurs sportifs, entre autres. On pense aux travailleurs forestiers. On pense aux exploitants forestiers qui l'utilisent pour le sciage, les pâtes et papiers. Tous ceux qui l'utilisent, en fin de compte.

M. Claveau: D'accord.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député d'Ungava. M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le Président. Je voudrais revenir à l'étude du Dr Jean-Paul Nadeau, que je ne conteste pas. Si on a marié les deux industries, pâtes et papiers et sciage, on arrive avec 22,4 % qui sont transformés en bois de sciage. Vous savez aussi que dans vos usines vous avez un rendement supérieur à cela, directement. Pourquoi avoir choisi 22,4 %? Parce que cela faisait votre affaire, ou si c'est 30 % ou 32 % qu'on devrait mettre? Je sais que Mme Saucier a un rendement de beaucoup supérieur à celui-là dans ses usines.

M. Deschênes: Je demanderais à M. Milot de vous répondre, M. le ministre.

M. Milot: La raison pour laquelle on s'est référé à l'étude de M. Nadeau, c'est qu'on a jugé que M. Nadeau avait fait les recherches voulues pour établir son étude. Maintenant, on sait que M. Nadeau parle d'une récolte pour le sciage d'environ 64 %, si on se réfère à cela. Cela veut dire qu'à l'heure actuelle on parle de 68 %.

On a cherché à trouver un ordre de grandeur de ce que serait notre participation

et on s'est référé à cette étude. Si on coupe 70 %, le pourcentage pourra monter d'environ 2 % ou 3 %.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, mais dans vos usines, quand vous rentrez X mètres cubes de bots rond, vous produisez environ 50 % de copeaux, 30 % de bois de sciage, un pourcentage de planches et de 2 par 4 et le reste est constitué de sciure et de perte,

M. Milot: Selon une étude qui a été faite par Forintek et qui répartit sous la forme d'une tarte l'utilisation de la tige, Fonntek établissait à 27 % ou 28 % ce qui s'en allait en sciage comme tel. Donc, à partir d'une tige complète, si on commence à répartir cela sur l'ensemble de nos opérations, on retrouve un pourcentage qui s'établit autour de 25 %, 26 % ou 27 %.

M. Côté (Rivière-du-Loup): 28 %, 30 %.

Une voix: Ha! Ha! Ha!

M. Milot: Maintenant, on doit tenir compte d'une chose. On n'est pas les seuls à exploiter... Quand on vient pour faire la répartition de tous les bois sur forêts publiques, ce pourcentage diminue.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Évidemment, si on prend tous les bois, cela baisse votre moyenne.

M. Milot: Nécessairement, parce que...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mais il n'y a pas une industrie du sciage qui va vivre a 22,4 %.

M. Deschênes: Ce n'est pas à 22,4 %. C'est 35 % ou 30 % des 68 %. C'est cela qui fait 22,4 %.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est cela. D'accord.

Mme Saucier: Je pense, M. le ministre, que vous ne chercherez sûrement pas à nous pénaliser parce qu'on est un peu plus performant.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Au contraire! Ce sont les moins performants qui devraient peut-être être réduits.

Mme Saucier: Remarquez que je pense qu'effectivement, que ce soit 22 %, 23 % ou 20 %, ce qu'on a cherché, c'est un ordre de grandeur qui pouvait être acceptable. Mais, comme c'était une étude officielle, on s'est servi de la donnée.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci. Vous faites allusion au gouvernement fédéral à la page 23. On sait que le gouvernement fédéral retire cinq fois plus sur chaque mètre cube de bois transformé, en taxes directes. Vous dites que le gouvernement fédéral devrait faire un effort supplémentaire. On sait que, en taxes directes et indirectes, le gouvernement fédéral retire et épargne 33 $ le mètre cube, alors que le Québec retire et épargne environ 20 $ le mètre cube. Croyez-vous que l'intervention du gouvernement fédéral en aménagement forestier devrait se transposer pour réduire la facture de l'industrie?(19 heures)

M. Lacasse: M. le Président, je pense que c'est mentionné dans notre mémoire que la participation fédérale devrait être plus élevée et que, dans le moment, la participation fédérale bénéficie sûrement au ministère parce qu'il utilise une partie de l'entente auxiliaire pour financer sa quote-part de l'aménagement, chose que nous ne pouvons pas faire. On se rend bien compte aussi que, si on veut impliquer davantage le fédéral en aménagement forestier, le fédéral va vouloir regarder si les autres provinces veulent faire la même chose ou si c'est applicable. On rentre dans un processus assez complexe.

M. Côté (Rtvtère-du-Loup): J'écoutais parler tout à l'heure des 25 000 000 de mètres cubes que l'on se fixait comme objectif, mais votre association semble douter de cet objectif. Mais, évidemment, chacun de vos membres, quand il transmet une demande d'augmentation au ministère, ne vous le dit pas. J'ai de la misère à concilier votre position avec le fait qu'au ministère, actuellement, nous avons plus de 4 000 000 de mètres cubes de demandes supplémentaires aux 21 000 000 actuels. Nous sommes déjà rendus à 25 000 000 avec les demandes qui sont faites par vos membres.

M. Deschênes: C'est connu depuis toujours, M. le ministre, que l'agressivité des scieurs québécois est très forte, et je pense que vous devrez avoir une politique assez étanche pour que des gens qui n'ont plus de possibilités de faire augmenter leurs droits de coupe ou leurs contrats d'aménagement... Vous devrez avoir une politique ferme et, je pense, qui devra prévoir ces choses dans l'avenir. Vous devrez aussi, par certains incitatifs, provoquer de la consolidation chez nos industriels éventuellement pour apaiser l'appétit de certains.

M. Côté (Rivière-du-Loup): On a déjà mentionné qu'il y aurait une consolidation ou une intégration, et cela rejoint un peu la question du député de Laviolette.

Un dernier mot sur le volume alloué. Auriez-vous autre chose à proposer en ce qui

concerne les redevances à être payées sur !e volume alloué plutôt que coupé? Je sais que vous avez proposé de le faire sur le volume coupé, mais, sur le volume alloué, cela réduit un peu les appétits, peut-être que les 4 500 000 supplémentaires dont je vous parlais ne seraient pas là... Y aurait-il une formule mixte, une formule qui tiendrait compte des deux obligations, c'est-à-dire des deux intérêts?

M. Deschênes: Disons que cela pourra se discuter éventuellement, mais, pour le moment, ce sont des choses pour lesquelles il n'y a pas eu de scénarios... Peut-être que Richard ou Florent auraient des idées à exprimer là-dessus.

M. Milot: À l'heure actuelle, la formule que nous proposons est mixte. On dit que, sur cinq ans, on devra s'en tenir au volume alloué, mais qu'à l'intérieur des cinq ans on jouera sur le...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mais je parlais des redevances, M. Milot. À l'intérieur de cinq ans, vous parlez des volumes? Je parlais des redevances payables sur le volume alloué plutôt que...

M. Milot: C'est justement. On dit que, si on récolte au rythme de l'industrie, on doit payer sur ce qu'elle récolte chaque année parce qu'on tient compte des conditions qui prévalent dans l'industrie à ce moment-là.

M. Deschênes: Ce qui me frappe, M. le ministre, c'est aussi le fait que vous dites qu'on devra payer sur le volume alloué durant cinq ans. Et, si tu n'as pas pu couper ton volume alloué, tu ne peux plus jamais y retoucher par la suite. C'est cela qui a amené ces questions.

M. Côté (Rîvière-du-Loup): C'est pourquoi je vous demande si vous n'avez pas une formule.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Dubuc pour lui rappeler qu'il lui reste une minute et trente secondes.

M. Desbiens: Je reviens sur le sujet qui a été soulevé déjà en bien des occasions, à la page 20 du mémoire, et sur votre participation aux frais d'aménagement. On sait que l'avant-projet de loi prévoit que c'est le coupeur qui a à payer pour la production d'au moins un arbre pour chaque arbre coupé, et on parlait tantôt de 64 %, de 70 %, en tout cas, peu importe le pourcentage. Tout ce que vous voulez, et je suis d'accord avec vous, c'est de payer strictement une part équitable, bien sûr, mais seulement votre part du bois coupé qui est utilisé par l'industrie du sciage, sauf que... C'est le seul point pour lequel je n'ai pas saisi la réponse, ou vous ne l'avez pas donnée. Qui va payer cela? Si vous récupériez ces 32 $ de chaque tonne de copeaux vendus, évidemment cela vous faciliterait la capacité de payer votre quote-part. Vous ne recommandez pas non plus, en tout cas à ma connaissance... Entre le 22 %, le 64 %, le 42%, voulez-vous que ce soit le MER qui paie ou que ce soit strictement sur le prix des copeaux, donc refilé aux papetières?

M. Deschênes: On a une réponse, M. le Président. Si vous le permettez, je vais accélérer pour avoir le temps de répondre.

Le Président (M. Théorêt): Je vous ferai remarquer, M. le président, que vous pouvez prendre le temps nécessaire pour y répondre...

M. Deschênes: D'accord.

Le Président (M. Théorêt): ...mais c'est la dernière réponse que vous aurez à donner.

M. Deschênes: D'accord, J'ai bien compris la question: le 20 %, le 80 % et le 22 %, te 35 % et le 68 %, et tout cela, cela vient non seulement du fait qu'on vend 22 % de nos produits forestiers sous forme de produits finis au Québec... Il y a non seulement cela, mais l'industrie du sciage vend 20 % de la forêt québécoise en bois d'oeuvre, en "studs", en 2 par 6, 2 par 10, etc. Les autres secteurs vendent 80 % de la forêt québécoise en produits finis. Cela vient de là aussi.

M. Desbiens: Mais cela ne me dit toujours pas qui paie, qui doit payer.

M. Deschênes: Ces gens-là devraient payer leur quote-part par rapport à la consommation de fibres sur leurs produits finis vendus.

M. Desbiens: Merci.

Le Président (M. Théorêt): M. le président, je cède maintenant la parole au député de Duplessis pour les remerciements d'usage.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je pense que l'Association des manufacturiers de bois de sciage comprend très bien que le mémoire qui a été présenté présente beaucoup d'intérêt et qu'il y a plusieurs questions qui auraient pu être posées. J'en ai relevé moi-même dix-sept qui auraient pu être posées en rapport avec différents sujets comme, par exemple, la forêt de banlieue, la

remise en production parcelle par parcelle, etc. Bien sûr que le temps qui nous est alloué... On aurait dû avoir à peu près cinq ou six heures avec vous pour pouvoir parler de votre position en rapport avec certains sujets. Je tiens cependant à vous souligner que l'ensemble des recommandations que vous faites va sûrement porter l'Opposition à prendre en considération la grande majorité de vos recommandations pour pouvoir travailler au projet de loi qui sera déposé éventuellement. Je remercie énormément le président de l'association, ainsi que ses collègues et Mme Saucier, pour leur présence en commission parlementaire, sachant très bien que l'ensemble des intervenants que vous êtes, allez continuer de travailler d'arrache-pied pour faire passer vos recommandations ainsi que vos revendications. Alors, merci à tout te monde qui représente l'Association des manufacturiers de bois de sciage.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le député de Duplessis. M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, pour faire plaisir à mon collègue de Duplessis, je lui dirai que la question de la subvention devant être attribuée à l'association forestière, c'est chose réglée et j'en profite pour inviter les Québécois à soutenir cette association, étant donné qu'un Québécois ou une Québécoise sur dix profite de la forêt du Québec et que cette association ne devrait jamais être en difficulté financière.

Une voix: Combien?

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je félicite l'association des manufacturiers d'avoir fait sa part et j'invite les Québécois et Québécoises à en faire autant.

Sur l'autre question, le comité qui a été formé au ministère pour la question du manuel d'aménagement et des coûts, il est formé de l'Association des manufacturiers de bois de sciage, de l'AIFQ, des syndicats, de l'université, etc., et la semaine dernière j'ai invité un autre organisme à en faire partie. Si on a des suggestions, on est ouvert à ces suggestions-là.

Je voudrais, en terminant, remercier les membres de l'Association des manufacturiers de bois de sciage, son président et ses collègues de leur présentation. Comme on l'a dit, c'est très court pour discuter d'un sujet aussi vaste, mais soyez assurés que nous tiendrons compte de vos recommandations et on vous reviendra au moyen d'un comité ou autrement, de façon à parfaire nos discussions sur le sujet et de façon aussi à avoir le meilleur régime forestier qui soit. Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Théorêt): Merci, M. le ministre délégué aux Forêts. Madame et messieurs, merci au nom des membres de la commission de votre présence ici. Nous vous souhaitons un bon voyage de retour.

Je suspends maintenant les travaux de la commission de l'économie et du travail qui reprendront, attention! à 20 heures précises au même endroit et, pour votre information, le Mini-débat est ouvert jusqu'à 22 heures.

(Suspension de la séance à 19 h 10)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président (M. Théorêt): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de l'économie et du travail poursuit sa consultation particulière sur l'avant-projet de loi sur les forêts.

Fédération des travailleurs forestiers du Québec

Nous allons maintenant entendre le mémoire de la Fédération des travailleurs forestiers du Québec et j'appelle sans plus tarder les représentants de cet organisme. Je pense que son président est M. Guillemette. Si vous voulez bien, M. Guillemette, nous présenter les collègues qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous avez, pour la durée de présentation de votre mémoire, 18 minutes. De chaque côté de la table, nous aurons 36 minutes d'échanges avec vous, tel qu'il avait été convenu préalablement. M. Guillemette.

M. Guillemette (Ghislain): Je vais commencer à ma gauche, M. Serge Théberge, vice-président de la fédération. À ma droite, M. Louis-Albert Duguay, secrétaire de la fédération, et M. Wilbrod Dufour. Mon nom est Ghislam Guillemette.

Je cède la parole à Louis-Albert Duguay pour commenter notre mémoire.

M. Duguay (Louis-Albert): Messieurs, après un souper très rapide qui nous fait penser un peu au travail en forêt... Les travailleurs forestiers doivent toujours manger d'une façon très rapide pour pouvoir reprendre leur travail. Cela nous a fait penser à cela cet après-midi quand le président...

Le Président (M. Charbonneau): C'est là que les mythes sur la vie parlementaire tombent.

M. Duguay: Ah bon! Une voix: Ha! Ha! Ha!

M. Duguay: Messieurs les membres de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi sur la forêt au Québec, la

Fédération des travailleurs forestiers du Québec a accepté avec plaisir l'invitation reçue de la commission de l'économie et du travail afin de vous faire connaître notre point de vue sur l'avant-projet de loi sur les forêts au Québec et, comme pour les années antérieures lorsque nous nous sommes présentés devant une commission parlementaire, notre document n'aura pas l'épaisseur d'un dictionnaire Larousse, mais il représentera de façon concise et précise les préoccupations des travailleurs que nous représentons et qui se retrouvent tous dans l'exploitation forestière, donc avec beaucoup de problèmes.

Cet avant-projet dont nous avons pris connaissance avec un peu de retard, à cause de l'insuffisance de documents disponibles nous apparaît être le plus détaillé des avant-projets dont il nous a été donné de prendre connaissance, et ceci n'est pas un compliment pour de futures faveurs politiques, car il est de bonne guerre que l'on se serve des documents déjà publiés et des préoccupations déjà émises pour rédiger un avant-projet de loi qui correspond en bonne partie à certaines attentes que nous avons déjà manifestées dans le passé avec d'autres organismes. L'on doit ajouter également que, sur certains points, cet avant-projet de loi ne correspond pas aux programmes du parti au pouvoir.

Cependant, malgré le vieux dicton qui dit "vaut mieux tard que jamais", nous pouvons quand même affirmer qu'il aura fallu des années avant qu'on puisse penser avoir un jour une politique forestière cohérente et à la mesure des besoins de tous les Québécois si, toutefois, l'avant-projet de loi n'est pas trop chambardé en cours de route. Nous admettons qu'une loi de ce genre n'est pas électorale, mais il y va de notre avenir forestier au Québec. On peut dire qu'à la lumière de toutes les statistiques transmises par le MER cet avenir est un peu compromis même si déjà, depuis quelques années, on se rendait compte qu'il y avait de plus en plus un consensus qui se dégageait face aux problèmes forestiers au Québec Évidemment, les moyens pour remédier à la situation variaient selon le siège que l'on occupait. Il devenait donc nécessaire que le gouvernement prenne la responsabilité d'établir les règles du jeu. Il restera, bien sûr, à combler le retard important que nous avons présentement.

Cela dit, messieurs de la commission, nous allons dans les pages qui suivent vous faire part de nos préoccupations et de nos suggestions, car dans l'avant-projet de loi qui nous est présenté la main-d'oeuvre ne semble pas faire partie du décor et, selon nous, elle est très importante dans la réalisation des objectifs qui sont visés. En effet, nous ne voudrions pas que les travailleurs forestiers deviennent les boucs émissaires des erreurs passées et qu'ils soient tenus de reverdir nos forêts dans des conditions pénibles, pour ne pas dire inacceptables.

Notre première préoccupation se situe au niveau de la rétrocession et des garanties d'approvisionnement qui, selon l'article 98, sont toutes reprises en main ou abolies à l'adoption de la loi. Évidemment, sur le principe, nous sommes d'accord et cela depuis longtemps. Cependant, devant un changement de cette envergure qui va occasionner sans doute des déplacements de secteurs d'activités pour certaines compagnies ou utilisateurs, qu'adviendra-t-il des accréditations syndicales qui sont la base du syndicalisme dans le secteur forestier, puisque dans certains endroits elles sont rattachées à un territoire donné? Vous vous imaginez facilement le fouillis que pourrait occasionner cette mesure si elle n'est pas accompagnée d'un changement au Code du travail qui assurera le maintien de l'accréditation pour les travailleurs concernés. Il devrait en être ainsi pour les entreprises qui, actuellement, ont des garanties d'approvisionnement, mais qui, en vertu de la nouvelle philosophie du ministère, pourraient ne plus en avoir si elles peuvent s'approvisionner en résidus des usines de sciage environnantes. De ce fait, le territoire de coupe qui leur est actuellement attribué servirait d'approvisionnement pour une autre entreprise. Donc, selon la loi actuelle, cette accréditation ne serait plus valable. Selon nous, l'accréditation devrait être maintenue et les travailleurs concernés devraient conserver leurs droits acquis.

Ces situations se sont déjà produites et nous vous donnons le cas de Produits forestiers Domtar, sur la rivière Jacques-Cartier, dont la concession avait été rétrocédée et une garantie d'approvisionnement donnée à une autre entreprise sur le même territoire. Le deuxième cas est celui de la compagnie Price Limitée, à Price, comté de Matane, où là également il y a eu rétrocession de territoire et garantie d'approvisionnement consentie à une entreprise qui a remplacé la compagnie Price Limitée dans le même village. Dans les deux cas, l'accréditation a été annulée alors que les mêmes travailleurs ont continué les opérations.

Toujours en ce qui concerne le Code du travail, l'article 1, paragraphe 6 n) devrait être amendé pour y inclure l'aménagement forestier. Le paragraphe 6 o) devrait également être amendé en ce qui concerne la définition de "concessionnaire forestier" pour y inclure le terme "bénéficiaire d'un contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier."

Les articles 8 et 9 du chapitre 2 devront également être amendés pour tenir compte de la nouvelle loi. Il en est ainsi pour le "règlement sur l'accréditation dans

les exploitations forestières et sur les permis d'accès à des campements forestiers" et pour tout article du Code du travail qui entrerait en contradiction avec le nouveau régime forestier.

Nous recommandons également que le rôle des coopératives forestières soit défini dans la prochaine loi lorsqu'elles interviennent comme contractantes pour une compagnie forestière où il y a déjà une accréditation et des travailleurs en place ou sur une liste d'attente.

Nous demandons qu'elles soient soumises à l'accréditation et à la convention collective existante et qu'elles respectent les droits acquis des travailleurs.

Ceci n'a pas pour but de critiquer ou d'abolir le système coopératif, mais nous croyons que leur rôle n'est pas celui d'un contractant ou d'un sous-contractant et qu'elles doivent surtout concentrer leurs efforts dans l'exploitation forestière, bien sûr, mais aussi dans la transformation, ce qui leur permettrait de justifier leur soi-disant efficacité. De plus, lorsque le MER décide de confier à tel ou tel organisme l'exploitation forestière pour une compagnie en particulier, il devrait tenir compte des structures établies et des conventions collectives existantes et ne pas décider unilatéralement ou sur pression politique, comme ce fut le cas pour l'exploitation forestière de Produits forestiers Domtar, à Girardville, comté de Roberval.

Nous demandons également qu'avant d'accorder des contrats d'approvisionnement et d'aménagement à de nouvelles entreprises une étude sérieuse soit faite pour ne pas mettre en danger des emplois qui existent actuellement et dont la survie pourrait être affectée si le présent employeur se voit dans l'obligation de changer de territoire de coupe, ce qui pourrait affecter son aspect concurrentiel.

Mesurage. Avec la mise sur pied d'un nouveau régime forestier, nous croyons qu'il serait nécessaire que le MER devienne le responsable du mesurage sous quelque forme qu'il soit, car présentement nous ne croyons pas que le système actuel donne justice et au propriétaire des forêts du Québec, soit l'État, et aux travailleurs qui sont payés sur une base de rendement, donc selon le volume du bois abattu.

Il nous est impossible de croire que, dans un système où l'utilisateur est juge et partie, il puisse y avoir une entière objectivité malgré toute la bonne foi des gens en place. Nous ne mettons pas en doute l'honnêteté des mesureurs ou des vérificateurs, mais, en l'absence de vérificateurs neutres, il nous est difficile de croire que nos membres, comme l'État d'ailleurs, retirent 100 % des fruits de la récolte forestière.

Nous recommandons donc que le MER prenne charge du mesurage du bois récolté au Québec ou qu'à tout le moins il établisse un système de vérification efficace.

Nous avons mentionné au départ que la main-d'oeuvre ne semblait pas faire partie du décor dans le présent avant-projet de loi, sauf que, lors des rencontres d'information auxquelles nous avons assisté, l'on nous avait mentionné qu'il était question d'entente avec le ministère du Travail pour la formation de la main-d'oeuvre nécessaire à l'aménagement forestier.

Nous ajoutons un deuxième volet à la formation professionnelle, soit celui des travailleurs actuels qui ont besoin d'être recyclés afin de faire face à la nouvelle mécanisation et qui ont également besoin de formation en industrie.

Pour revenir au premier volet, soit la formation nécessaire à l'aménagement forestier, nous demandons qu'elle soit donnée en premier lieu aux travailleurs forestiers qui ont perdu leur emploi dans les dernières années à cause de la mécanisation des opérations forestières. Ces travailleurs ont pour la plupart encore des droits acquis pour les employeurs concernés. De plus, leur expérience comme travailleurs forestiers est un facteur particulièrement important pour en faire une main-d'oeuvre qualifiée et intéressée à la forêt. De plus, ils sont rompus aux différents inconvénients du travail en forêt, tels que mouches, pluie, neige, isolement, etc. Nous sommes convaincus que la formation donnée à ces travailleurs serait des plus efficaces afin d'avoir une main-d'oeuvre très qualifiée dans l'aménagement forestier.

Le deuxième volet de notre demande consiste dans la formation ou le recyclage de la main-d'oeuvre actuelle. Depuis le début des années quatre-vingt, l'exploitation forestière est devenue très mécanisée. Cependant, nous constatons une carence au niveau de la formation de la main-d'oeuvre autant au niveau des cours de base qu'au niveau de la formation en industrie ou de la spécialisation. Cette situation étant due en très grande partie au fait que la machinerie appartient aux travailleurs forestiers, donc la formation s'est faite par les moyens du bord et, sans nous tromper, nous pouvons dire que les travailleurs ont appris par eux-mêmes. Mais cette situation cause de nombreux problèmes et rend parfois "l'opération" d'une machine très dispendieuse à cause d'un manque de formation de base.

Depuis quelques années, cependant, il se donne de plus en plus de cours de formation sur ce genre de machine, mais, cependant, ils devraient être suivis d'une période de spécialisation en industrie, étant donné que le travailleur n'a pu acquérir pendant son cours de base une bonne maîtrise de fonctionnement de l'abatteuse, ébrancheuse ou autres. Ils ont de la difficulté à se

trouver un emploi pour ces raisons, parce que le propriétaire de la machine exige un rendement immédiat, question de rentabilité, bien sûr.

Nous demandons donc une meilleure spécialisation à ce niveau et ceci pourrait se faire en industrie sous diverses formes qui n'affecteraient pas la rentabilité de la machine et permettraient à plusieurs individus d'accéder à ces métiers.

Nous croyons également que l'aménagement forestier auquel devront se conformer les utilisateurs devrait être complémentaire à l'exploitation forestière, ce qui permettrait dans presque tous les cas, en plus de consolider les emplois actuels et d'en ajouter d'autres, de prolonger davantage la saison de travail des employés concernés qui dans bien des cas est très restreinte.

Transport des travailleurs. De plus en plus, avec l'exploitation forestière concentrée dans te nord, les distances de déplacement que les travailleurs ont à parcourir de leur résidence au lieu de travail vont en augmentant considérablement pour atteindre parfois jusqu'à 200 à 250 kilomètres de la municipalité la plus proche. Les travailleurs dans la plupart des cas ont à se déplacer à toutes les semaines pour revenir dans leur famille et ces déplacements sont dans la plupart des cas également à leurs frais et sans aucune compensation. Pour d'autres travailleurs qui se transportent soir et matin, encore là, ils ont des distances assez importantes à parcourir qui peuvent aller jusqu'à 80 à 90 kilomètres pour l'aller seulement et vous admettrez avec nous que les chemins forestiers ne sont pas toujours de macadam, rendant ainsi l'utilisation d'un véhicule assez dispendieuse.

Nous demandons qu'un montant déductible d'impôt soit fixé pour chaque travailleur afin de compenser pour les dépenses encourues pour se rendre de sa résidence au lieu de travail et cela, sur une base mensuelle.

Nous demandons également que, par règlement, l'on établisse une distance maximale pour les travailleurs itinérants et que, lorsque ces distances sont dépassées, l'employeur soit tenu de construire des camps selon les normes de l'hygiène et des règlements industriels et commerciaux. Comme maximum, nous suggérons 72 kilomètres de la dernière municipalité. Ces dispositions s'appliqueraient également pour l'aménagement forestier, puisque, actuellement, les travailleurs qui ont à faire de la plantation le font dans des conditions de travail et de logement qui sont très pénibles et qui ne respectent sûrement pas la dignité humaine. De plus, il est presque impossible pour ces travailleurs de se faire un salaire qui au moins compenserait pour les problèmes encourus.

Nous joignons en annexe A une lettre ouverte qu'un groupe de ces travailleurs a fait parvenir au ministre de l'Énergie et des Ressources dernièrement et qui représente la dure réalité du reboiseur actuel. Tel que mentionné précédemment, nous ne voudrions pas que les travailleurs soient soumis à des conditions de travail et de salaires insuffisantes parce que nos gouvernements n'ont pas légiféré assez rapidement afin de doter le Québec d'une vraie politique forestière.

Nous recommandons donc que les salaires payés pour le reboisement des terres publiques, là où il n'y a pas d'accréditation, soient l'équivalent des salaires payés dans l'industrie forestière où il y a des conventions collectives de travail et que, si nécessaire, le gouvernement légifère par décret.

Fonds d'indemnisation. Depuis environ 20 ans, le contexte de l'exploitation forestière a subi de profondes transformations et l'avènement de la mécanisation qui s'était fait de façon progressive à partir des années 1966-1967 s'est accentué très rapidement à partir des années quatre-vingt alors que la grasse mécanisation a fait son apparition avec les ébrancheuses, les abatteuses, les transporteurs, etc.

Cette mécanisation rapide des exploitations forestières n'aurait rien de particulier en soi si elle avait été faite par les exploitants eux-mêmes, mais ce ne fut pas le cas et cette machinerie a été achetée à 99 % par les travailleurs et pas toujours dans des conditions de liberté complète alors que, dans bien des cas, le travailleur devait le faire pour sauver son emploi. Donc, il n'était pas nécessairement préparé pour gérer des budgets aussi importants, puisque le prix de ces machines va de 80 000 $ à 500 000 $ en plus des autres équipements nécessaires à leur bon fonctionnement, tels que petit camion, outils, etc.

Certains travailleurs ont bien réussi sans faire de fortune, comme semblent vouloir nous le démontrer les compagnies forestières, mais d'autres travailleurs y ont presque laissé leur chemise et les faillites sont encore plus nombreuses dans ce domaine. Ce qui complique davantage le tableau, c'est que, depuis deux ou trois ans, l'on a développé parallèlement à cela le système des sous-contractants et des sous-sous-contractants qui, selon les endroits, ont la responsabilité entière de la récolte forestière jusqu'au chemin de camion et doivent, par conséquent, payer leurs travailleurs et faire les déductions qui s'imposent. Cette situation a causé beaucoup de problèmes et en cause encore particulièrement lorsqu'il y a faillite d'entreprise et que les travailleurs concernés font des pertes importantes d'argent gagné à la sueur de leur front.

Devant l'état de la situation, nous demandons qu'un fonds d'indemnisation spécial soit créé pour pallier aux pertes de salaire dues à une faillite d'entreprise. Ce fonds d'indemnisation pourrait même aider également le propriétaire d'une machine qui lui est nécessaire pour son travail.

Ce fonds d'indemnisation serait alimenté par une cotisation spéciale provenant des bénéficiaires d'un contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour qui la planification de leurs opérations forestières est devenue secondaire dans certains cas à cause de ce système.

Rapport Beaudry. En 1984, le gouvernement du Québec avait mis sur pied la Commission consultative sur le travail qui avait pour but d'étudier les problèmes des relations du travail dans l'entreprise privée au Québec et aussi d'étudier les différentes lois ouvrières qui gouvernent les entreprises et les travailleurs. 5on rapport final fut déposé le 31 octobre 1985. Sur le travail en forêt, il recommandait ce qui suit: Recommandation 11-7, conditions de travail en forêt: "Compte tenu des nombreuses demandes faites à la Commission consultative sur le travail et du rapport d'étape du groupe de travail sur l'exploitation forestière, que le ministre du Travail ouvre, dans les plus brefs délais possible, une enquête sur l'ensemble des activités en forêt. Cette enquête devrait cerner tous les sujets susceptibles d'influencer les droits et les conditions de travail de la main-d'oeuvre forestière et notamment l'influence de la planification de la production sur les besoins et les conditions de travail des ressources humaines, les effets de la mécanisation sur la santé, la sécurité et la rémunération du travailleur forestier, la quantité et la qualité de la formation des ouvriers, la pratique de la sous-traitance et ses représentants sur les conditions de travail et sur le droit d'association, la qualité de la vie en forêt, les effets des divers modes de rémunération sur les revenus nets des travailleurs en forêt, les coûts de production, la productivité et les effets sur l'accréditation et sur son droit de suite lors de la rétrocession d'une concession ou de changement de territoire de coupe pour des raisons incontrôlables."

En conséquence, nous demandons que, tel que formulé par le rapport final de la Commission consultative sur le travail, le ministre du Travail autorise l'enquête telle que préconisée dans le rapport et cela dans les plus brefs délais, car il y a sûrement des problèmes et nous croyons qu'il est temps que l'on tente de trouver des solutions.

Recherche. Il nous apparaît difficilement acceptable qu'un avant-projet de loi sur les forêts soit muet sur la recherche, surtout que, selon un document de réflexion du parti au pouvoir de septembre 1984, l'on attachait une très grande importance à la recherche.

Nous reproduisons cette partie de réflexion du Psrti libéral. Article 6.3, la recherche: "La recherche forestière existe depuis plusieurs décennies au Québec. Elle est du plus grand intérêt, mais trouve peu d'application dans la forêt publique à cause du manque de capitaux. Elle offre encore moins d'intérêt pour le secteur privé en raison du poids des taxes foncières et du peu d'égards dont les perspectives à long terme de la ressource forestière font l'objet. "Sans but précis, sans mission concrète, la recherche est disparate et souvent diffuse. Elle doit devenir partie intégrante des mandats de gestion. Les utilisateurs sauront y découvrir rapidement leur propre intérêt. Mais, pour lui donner une impulsion irréversible, il est opportun d'élaborer un système avantageux de crédits fiscaux pour garantir le développement rapide et les applications les plus nombreuses possible de la recherche. "La dégénération est l'un des problèmes majeurs de la forêt du Québec et il importe de miser sur les aspects de la recherche susceptibles d'y apporter une solution: la génétique et l'amélioration des essences. Dans cette optique, les connaissances actuelles doivent être appliquées le plus rapidement possible et la recherche, déjà trop en retard dans ce domaine, doit être prioritairement stimulée. "Au bas mot, il faut arriver à décupler la production des pépinières provinciales au cours des cinq à dix prochaines années. Pour arriver à ce résultat, les pépinières industrielles privées devront avoir accès sans délai aux possibilités qu'offre la recherche. Les contraintes bureaucratiques et juridictionnelles doivent céder le pas à l'urgence d'agir."

Nous demandons en conséquence que la loi prévoie la mise sur pied d'un centre de recherche complet à partir de la génétique forestière, des méthodes d'exploitation, de l'utilisation complète de l'arbre, de la biomasse forestière, de l'aménagement forestier, des épidémies d'insectes, etc.

Nous vous soumettons d'autre remarques et suggestions que nous croyons importantes sur certains autres articles de cet avant-projet de loi: Section 3, construction et utilisation des chemins forestiers. Le ministre devrait établir les normes de construction des chemins forestiers en tenant compte de la circulation qu'il y aura et qui respectent un certain degré de sécurité et de qualité, ce qui n'est pas toujours le cas présentement. Nous demandons également que le transport lourd soit sous l'autorité du ministère des Transports. Présentement, la plupart des charges dépassent de beaucoup les normes et cette situation met en danger la sécurité des utilisateurs et celle des camionneurs eux-mêmes.

Article 31. Nous aimerions savoir si cet

article signifie qu'un seul bénéficiaire fera la coupe et l'aménagement forestier. Sinon, nous demandons que cet article soit changé pour qu'un seul bénéficiaire fasse la coupe de toutes les essences comprises dans le même territoire, ainsi que l'aménagement, et que les frais soient partagés au prorata di. volume des essences forestières garanties à chacun des bénéficiaires.

Ce sont là, messieurs de la commission, les commentaires que nous avions à formuler sur cet avant-projet de loi et nous espérons que son adoption, avec certaines modifications, se fasse dans les plus brefs délais, ce qui sera sûrement un gros pas er avant face à nos nombreux problèmes forestiers.

Tel que mentionné au départ, ces commentaires et ces recommandations sont ceux des travailleurs forestiers qui sont membres de notre fédération et qui se sont penchés à maintes reprises sur les problèmes forestiers au Québec.

Ils seront heureux de participer à la mise en place d'un nouveau régime forestier au Québec, mais il n'accepteront sûrement pas que cela se fasse à leurs dépens. Leur coopération sera acquise pour autant que l'État et surtout les employeurs forestiers du Québec les considèrent comme la base de cette grande industrie, si nécessaire à notre économie autant nationale, provinciale que régionale, car un très grand nombre de municipalités au Québec, et plus particulièrement dans les régions périphériques, dépendent directement de la forêt, et une forêt en santé signifie beaucoup pour eux. La Fédération des travailleurs forestiers.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, M. le Président. Je vous remercie, M. Duguay et M, le président Guillemette. Bienvenue et j'espère que nous aurons des échanges qui nous aideront à établir un meilleur régime forestier.

Évidemment, si l'on propose quelque chose de semblable aujourd'hui, c'est dans une approche d'utilisation polyvalente de la forêt. Cela concerne ceux qui en profitent, qui vont se récréer en forêt et également ceux qui y trouvent des emplois. C'est votre préoccupation majeure et, je le comprends, c'est votre mandat. Si nous le faisons, c'est pour cela. Nous le faisons pour les employés actuels et ceux qui viendront plus tard.

Votre mémoire est orienté principalement du côté des travailleurs, évidemment. C'est parfait et c'est ce à quoi on s'attendait. Vous parlez un peu de concurrence avec d'autres comme les coopératives forestières. Vous voudriez que ces coopératives, lorsqu'elles travaillent dans un endroit où il y une accréditation, soient soumises à la convention collective existante. Voulez-vous m'expliquer comment vous pourriez faire cela d'une façon légale, si c'est possible de le faire, à moins de statuer sur les coopératives comme cela?

M, Duguay: En fait, ce que nous demandons, c'est qu'elles soient soumises aux mêmes règles du jeu qu'un contractant ou qu'un sous-contractant. Actuellement, l'employeur, le concessionnaire d'une forêt ou le détenteur d'un permis de coupe demeure l'employeur des travailleurs à l'emploi d'un contractant ou d'un sous-contractant. Quand les coopératives travaillent dans le même sens, c'est-à-dire quand les coopératives ont un contrat en tant que contractant ou sous-contractant, nous disons qu'elles doivent être soumises aux même règles du jeu que les autres. Les employés, s'ils veulent agir comme contractants, doivent respecter l'accréditation qui est là et ils doivent respecter les employés qui ont des droits acquis.

J'étais présent lorsque la Conférence des coopératives a présenté son mémoire la semaine dernière. J'ai relu son mémoire après. Elle a insisté énormément sur les droits acquis en ce qui concerne ce qui se passe actuellement dans le secteur forestier au Québec. Des droits acquis, cela n'est pas à sens unique. On réclame également que, pour nos travailleurs qui ont des droits acquis, on respecte également ces droits acquis. Si les droits acquis doivent être respectés pour les membres des coopératives forestières, ils doivent être également respectés pour les travailleurs forestiers qui sont membres d'un syndicat quelconque.

M. Côté (Rivïère-du-Loup): L'accréditation pour un membre d'une coopérative, faire partie d'un syndicat, cela devrait être volontaire, comme chez vos membres. Volontairement, ils vont former un syndicat et ils vont être accrédités suivant les normes. Cela ne serait-il pas un peu entraver la liberté que de dire: Vous allez obligatoirement faire partie d'une accréditation syndicale?

M. Duguay: M. le ministre, ce dont on parle, c'est dans un endroit où déjà les travailleurs ont une accréditation, une convention collective de travail. À un moment donné, une coopérative, peu importe le nom, obtient un contrat de coupe et de transport pour la même compagnie et pour remplacer les. mêmes travailleurs qui sont déjà accrédités. On ne parle pas d'un territoire où il n'y a pas d'accréditation et où il n'y a pas de convention collective de travail.

Là où il n'y a pas de convention collective de travail et là où il n'y a pas d'accréditation, les coopératives ont tout

privilège d'aller oeuvrer dans ce secteur. Mais ce que nous disons et ce que d'autres syndicats vous diront également, c'est que, lorsque le territoire est déjà accrédité, déjà couvert par une convention collective de travail et qu'une année ou l'autre la compagnie en question décide de confier son exploitation forestière à une coopérative, à ce moment-là, pour nous, il n'est pas question que les membres d'une coopérative viennent remplacer nos travailleurs. Nous demandons tout simplement que nos travailleurs continuent à faire leur travail. S'ils veulent agir comme contractants ou sous-contractants, c'est leur décision, leur problème.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Ce qui veut dire que c'est le territoire qui est accrédité, puis tous ceux qui vont travailler dans ce territoire-là devraient faire partie d'une entité syndicale?

M. Duguay: C'est cela. Nous demandons qu'ils respectent les organismes en place, comme nous les respectons lorsqu'il n'y a pas d'organisme en place. Lorsque les coopératives font de l'exploitation forestière pour ieur usine de transformation, on ne syndique pas ces travailleurs, ils n'ont jamais été regroupés en syndicat. On respecte cette façon d'agir.

M. Côté (Rivière-du-Loup): On a dit à maints endroits que les gens et coopératives travaillaient dans des conditions de travail inacceptables comparés à des gens qui bénéficient ou adhèrent à une entité syndicale. Avez-vous constaté cela au cours de votre expérience?

M. Duguay: À plusieurs reprises, M. le ministre, je l'ai constaté. Peut-être que dans les dernières années il y a eu une certaine amélioration, mais autour des années 1980, 1982, 1983 et dans l'année 1976, j'ai eu à visiter certains chantiers coopératifs où nécessairement les conditions de travail et les conditions de vie dans les camps, etc., étaient inférieures à ce que nous négocions comme conditions de travail et conditions de salaire pour les travailleurs forestiers en général.

Les seuls endroits où il y avait un peu d'homogénéité avec nos salaires et nos conditions de travail, c'était les endroits où, parallèlement, les chantiers coopératifs oeuvraient dans un secteur accrédité, mais où ils avaient déjà été implanté il y a plusieurs années et côtoyaient des exploitations forestières de la même compagnie. (20 h 30)

À ce moment-là, ils devaient en quelque sorte respecter les règles établies. Ils négociaient leurs contrats avec l'employeur en tenant compte de la convention collective existante. Mais, dans les endroits où cela n'existait pas, les conditions de salaire et les conditions de travail étaient très différentes et, au point de vue de la santé et de la sécurité des travailleurs, on mettait souvent la santé et la sécurité des travailleurs en jeu dans certaines coopératives au Québec.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Avez-vous assisté à la présentation du mémoire des coopératives, de la conférence des coopératives? Un de mes collègues a posé cette question, mais il ne l'a pas avoué aussi franchement que vous le faites. Vous souvenez-vous de cette question?

M. Duguay: Oui. Il ne l'a pas... M. Côté (Rivière-du-Loup): Allez-y.

M. Duguay: Ils n'ont pas intérêt à l'avouer de la même façon que nous le voyons. Pour ce qui est de la plantation, je pense qu'ils ont avoué que, dans certaines circonstances, ils donnaient des conditions de travail inférieures à ce qui pouvait se donner normalement. C'était dans la partie des 50 % ou des soumissions sont émises.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je ne voudrais pas reprendre le débat, mais connaissez-vous des coopératives qui sont syndiquées?

M. Duguay: Non, je n'en connais pas, sauf une dans le Nord-Ouest québécois. Une décision d'un commissaire du travail l'a obligée à respecter les droits acquis de la convention collective existante, soit l'accréditation. Il y a une seule jurisprudence à ce niveau.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Mais c'est la raison pour laquelle vous avez perdu l'accréditation dans le parc, quand Domtar s'est retirée et qu'il y a eu un autre exploitant par la suite.

M. Duguay: Non.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Cela n'a pas été reconnu

M. Duguay: Non, ce n'est pas une coopérative...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Ce n'est pas une coopérative, mais vous avez perdu l'accréditation.

M. Duguay: Disons que notre syndicat n'était pas en cause; c'était un syndicat affilié à la CSN.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous le citez dans votre mémoire.

M. Duguay: Oui, ce sont des cas qu'on ne voudrait pas voir se répéter avec un éventuel régime forestier. Tout simplement, on vous le cite à titre d'exemple, pour que cela ne se répète pas à l'avenir. Ce n'est pas parce que... On asuivi avec un très grand intérêt le débat sur cette accréditation, mais...

M. Côté (Rivière-du-Loup): Dans le parc, probablement que les délais étaient expirés. C'est peut-être pour cela que l'accréditation est tombée.

M. Duguay: Ce n'est pas la raison. C'est plutôt parce que la compagnie a changé d'employeur. La concession forestière appartenait à Domtar. On a rétrocédé la concession forestière et on a accordé un permis d'approvisionnement à M. Leduc qui a continué l'exploitation forestière à peu près dans le même territoire. Mais, comme l'accréditation prévoyait que c'étaient les travailleurs forestiers de la compagnie Domtar qui étaient couverts par elle, le débat a été très long; il s'est rendu en Cour d'appel et il a gravi tous les échelons du Code du travail.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Avant de céder la parole à l'un de mes collègues, je voudrais vous dire, relativement au mesurage, que nous vérifions de 2 % à A %, disons 3 %, du volume coupé au Québec. On voudrait peut-être en faire plus, mais est-ce que vous voulez aller plus loin que la vérification des mesurages qui se font? Voulez-vous que le ministère fasse tout le mesurage de tous les bois coupés, sous quelque forme que ce soit, que ce soit en bois rond ou en copeaux, que le ministère se charge du mesurage? Mais qui paiera la note?

M. Duguay: Le coût du mesurage sera imposé aux utilisateurs des forêts du Québec. Cela revient au même. Actuellement, ils ont des systèmes de mesurage et ils sont obligés de payer leurs mesureurs. À ce moment-là, c'est le ministère qui le ferait et non les utilisateurs.

Ce que nous trouvons injuste dans le système actuel, c'est que vous dites qu'on vérifie environ 2 % à 4 % et, pour nous, c'est insuffisant. Dans le passé, on avait un système de vérification par le ministère des Terres et Forêts du temps qui permettait à tout travailleur insatisfait de son mesureur, de recourir au vérificateur du ministère des Terres et Forêts d'alors. Mais, aujourd'hui, cela n'existe plus et on ne vérifie que ce qu'on veut bien vérifier. On ne fonctionne plus sur plainte.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oh! J'ai l'impression que cela existe encore, sauf que parfois on déplace le bois plus rapidement. Mais c'est dans les chantiers où on mesure beaucoup d'arbres en longueur et on les mesure au diamètre plutôt que de les mesurer comme avant, au p.m.p., à la corde.

M. Duguay: Je suis bien d'accord, M. le ministre. Vous vérifiez pour vous assurer que les données qu'on vous transmet pour les droits de coupe sont bonnes. Mais vous ne vérifiez plus le mesurage bille par bille, ce qui constitue la paye des travailleurs forestiers.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vais vérifier cela, M. Duguay. Je cède la parole à M. le Président pour l'instant.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier votre organisme pour la présentation de votre mémoire, puisqu'il touche l'impact sur les relations du travail, le tout se rapportant au régime forestier, qui a été déposé, le 19 juin dernier, par le ministre délégué aux Forêts. Les modifications au régime forestier, et plus particulièrement celles touchant la remise en production du territoire vont sûrement avoir des impacts sur l'organisation du travail en forêt, comme vous l'avez d'ailleurs souligné dans votre mémoire. On constate que ces impacts seront assez négatifs par rapport à ce qui existe actuellement. Cela concerne la question d'adaptation des procédés de récolte, la définition du territoire d'allocation et surtout l'abolition des limites des concessions forestières prévue dans l'avant-projet de loi, abolition avec laquelle nous sommes d'accord, nous de l'Opposition, surtout que ces concessions forestières existent depuis de trop nombreuses années.

Il avait été mentionné dans le livre blanc qu'on devait procéder à la création d'un groupe interministériel dans le but d'étudier le travail en forêt. On sait que ce groupe a été mis en place par l'ancien gouvernement et qu'il est maintenu par le gouvernement actuel. Par contre, nous n'avons, du côté de l'Opposition et probablement de votre côté, puisque vous avez présenté un mémoire qui ne le confirme pas, aucune information sur les résultats de ce comité interministériel quant à la question des travailleurs en forêt. Bien sûr, dans votre mémoire, vous mentionnez que, sur certains points, l'avant-projet de loi ne correspond pas au programme du parti lorsqu'il avait été annoncé. Là-dessus, nous sommes parfaitement d'accord. De plus, il faut dire que, contrairement à ce qu'on avait laissé entendre dans le passé, il y a plusieurs

éléments qui ne sont pas inclus dans le projet de loi. On peut parler de la création d'un conseil consultatif sur la recherche forestière. D'ailleurs, j'ai souligné que l'avant-projet de loi n'incluait pas non plus une étude ou encore une position précise se rapportant au régime forestier versus les relations du travail et la formation des travailleurs et travailleuses de la forêt.

Vous mentionnez à la page 2 de votre mémoire: "Cela étant dit, messieurs de la commission, nous allons, dans les pages qui vont suivre, vous faire part de nos préoccupations et de nos suggestions, car dans l'avant-projet de loi qui nous est présenté, la main-d'oeuvre ne semble pas faire partie du décor...". Je mentionnais que je l'avais souligné, mais je voudrais signaler le fait que, dans le rapport du groupe Dulude de 1982, commandé par l'ancien ministre Marois, et dont vous avez certainement obtenu copie, ou vous avez au moins eu la chance de le consulter, il est mentionné, à la page 60, ce qui suit: "Les membres du groupe de travail ont plutôt perçu chez leurs interlocuteurs une préoccupation surtout axée sur le développement économique de la ressource faisant généralement abstraction d'un souci d'harmonisation des relations du travail et des questions relatives à la main-d'oeuvre. Somme toute, ces différents aspects relatifs au travail en forêt ne semblent pas être perçus comme étant de la compétence du ministère de l'Énergie et des Ressources et de ses représentants. Plus précisément, on semble concevoir les relations du travail comme étant strictement l'affaire des intervenants en forêt, soit l'entreprise et les travailleurs et leurs organisations." En fait, c'est le groupe de travail Dulude qui mentionne cela dans son mémoire.

Voici la question que je voudrais vous poser, puisqu'il est question du ministère de l'Énergie et des Ressources et de ses représentants. Est-ce que vous avez l'impression qu'actuellement ou depuis un certain nombre de mois, le MER a une plus grande sensibilité face aux aspects relatifs au travail en forêt concernant les travailleurs et travailleuses qui sont reliés au travail en forêt?

M. Duguay: Je pense que cette sensibilisation, on l'a peut-être sentie un peu plus depuis la parution de l'avant-projet de loi, alors qu'on a rencontré le ministre à deux reprises. Il y a eu un comité informel qui a siégé il y a environ trois semaines sur la possibilité d'analyser la formation de la main-d'oeuvre quantitativement et qualitativement. Depuis peut-être un mois et demi, on sent une préoccupation plus grande du ministère de l'Énergie et des Ressources en ce qui a trait à la main-d'oeuvre. Nous espérons que cette sensibilisation s'accen- tuera.

M. Perron: Est-ce que des contacts ont été établis entre votre organisme qui représente les travailleurs forestiers ainsi que le ministère du Travail se rapportant à certaines améliorations au Code du travail en vue justement de permettre des améliorations à même l'avant-projet de loi que nous avons devant nous?

M. Duguay: Non, il n'y a eu aucune discussion avec le ministère du Travail jusqu'à maintenant sur l'avant-projet de loi pour certaines modifications au Code du travail advenant un changement au régime forestier. Nous espérons et comptons également sur le ministère de l'Énergie et des Ressources pour demander au ministre du Travail de voir à apporter les modifications. Nous croyons que le ministère de l'Énergie et des Ressources est bien placé pour passer cette commande au ministère du Travail.

M. Perron: Je peux vous dire que, quant à nous, nous appuyons entièrement les dernières paroles que vous venez de mentionner. Nous espérons, tout comme vous, que le ministère de l'Énergie et des Ressources, par le biais du ministre délégué aux Forêts, puisse faire en sorte que le ministre du Travail se rende compte, dans de très courts délais, qu'il faut apporter des amendements au Code du travail par le biais de la future loi pour permettre justement de régler un problème qui existe ou qui existera éventuellement au cours des prochaines années.

D'autre part, à la page 12 de votre mémoire, vous mentionnez le rapport Beaudry sur les conditions de travail en forêt. Je voudrais vous poser une question sur cette partie-là. Je cite: "Compte tenu des nombreuses demandes faites à la Commission consultative sur le travail et du rapport d'étape du groupe de travail sur l'exploitation forestière, que le ministre du Travail ouvre, dans les plus brefs délais possible, une enquête sur l'ensemble des activités en forêt."

Vous avez mentionné tout à l'heure que, selon vos connaissances, il n'y avait aucune enquête - à moins que je ne me trompe, je ne voudrais pas induire en erreur les membres de la commission ou vous-même - d'entreprise puisque, dans votre mémoire, vous mentionnez qu'il devrait y avoir une enquête.

Est-ce que dans ce cas précis se rapportant à la recommandation faite par les représentants de la commission Beaudry, vous avez établi des contacts, ne serait-ce les plus minimes, avec le ministère du Travail et se rapportant à cette question précise soulevée par le rapport Beaudry lui-même?

M. Duguay: Non. Nous avions, à l'occasion de la rencontre avec le ministère de l'Énergie et des Ressources, soulevé ces points. Nous avons rencontré M. Duhaime du temps qu'il était ministre de l'Énergie et des Ressources et ensuite M. Jolivet lorsqu'il a été ministre délégué aux Forêts - nous l'avions rencontré à Chicoutimi - nous avons soulevé ces points. Nous sommes toujours restés dans la même ligne de pensée. Nous pensions que le ministère de l'Énergie et des Ressources avait la possibilité ou, du moins, le pouvoir de demander au ministre du Travail de remplir les recommandations du rapport Beaudry. C'est pour cela que nous n'avons jamais fait de démarche auprès du ministère du Travail comme tel, pour !es mêmes raisons qu'on vous a données tout à l'heure.

M. Perron: Une dernière question pour le moment en ce qui me concerne. À la page 4, vous mentionnez: "Nous recommandons également que le rôle des coopératives forestières soit défini dans la prochaine loi lorsqu'elles interviennent comme contractantes pour une compagnie forestière où il y a déjà une accréditation et des travailleurs en place ou sur une liste d'attente." Est-ce que votre syndicat a entrepris, à la suite ou avant l'avant-projet de loi, des consultations avec les coopératives forestières et avec le ministère de l'Énergie et des Ressources ou encore avec le ministère du Travail parce qu'il est toujours question du ministère du Travail et du ministère de l'Énergie et des Ressources... Selon ce que je peux comprendre par rapport à ce que vous venez de dire, vous préférez de loin que ce soit le ministère de l'Énergie et des Ressources qui intervienne auprès du ministère du Travail pour faire en sorte que cela se fasse plutôt que vous-même intervenir auprès du ministère du Travail ou du ministre du Travail. (20 h 45)

M. Duguay: Oui, c'est la même réflexion, M. le député de Duplessis. Nous préférons que ce soit le ministère de l'Énergie et des Ressources qui intervienne dans ces cas-là pour définir aux coopératives forestières quels sont leurs rôles. Nous savons que depuis, même le gouvernement précédent et l'actuel, ont tendance à favoriser les coopératives forestières. On n'a rien contre cela. Nous savons qu'actuellement elles ont une cote d'écoute très forte au niveau de l'aménagement forestier, de la production de plants. Encore là, nous croyons qu'elles font un bon travail. Mais nous ne voulons pas les voir intervenir comme contractants lorsqu'elles viennent brouiller les cartes dans les opérations forestières là où il y a déjà des accréditations et des structures en place.

M. Perron: Merci, pour le moment.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Duplessis. M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci. Une petite question. M. Duguay, vous avez mentionné tout à l'heure qu'un certain travail exigé par les coopératives mettait en danger la santé et la sécurité des travailleurs. Ma question aurait deux volets. Premièrement, pourriez-vous préciser cette question de danger au travail et, deuxièmement, avez-vous des statistiques pour appuyer cette affirmation?

M. Duguay; Quand j'ai mentionné cela tout à l'heure, M. le député, j'ai mentionné que c'était il y a quelques années. J'étais allé visiter les exploitations forestières. J'avais constaté que très peu de travailleurs portaient leur casque de sécurité, ce qui était obligatoire pour toutes les compagnies forestières, sauf les coopératives. Très peu portaient des genouillères pour se protéger contre les accidents de scie mécanique. Certains ne portaient pas non plus de bottes avec une protection spéciale pour les objets lourds qui peuvent tomber sur les pieds. C'est la constatation que j'avais faite entre 1978 et 1980.

Depuis quelques années, je vais un peu moins dans les exploitations forestières. Je ne peux pas vous l'assurer, mais je pense qu'il y a eu amélioration de ce côté. À ce moment, j'avais trouvé un peu pénible cette situation et je l'avais signalée à certains dirigeants de coopératives.

M. Cusano: Merci. C'est tout.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci. Dans votre document, vous faites mention de gens qui depuis un laps de temps pas tellement long, mais quand même assez long, ont été obligés d'acheter de façon presque obligatoire de la part des compagnies productrices de bois de grosses machines. Je pense qu'il y a eu une enquête, un document qui est sorti sur cela -je ne sais pas si c'est vous autres qui en étiez responsables - qui indiquait un peu ce qui en était. J'ai plusieurs cas dans mon propre comté. On a de la difficulté à regrouper ces gens qui ont subi quand même des pressions. Il y en a qui sont acculés à la faillite. D'autres ont été tellement pris à la gorge qu'avec les conflits qui ont existé, cela a amené beaucoup de difficultés. Y a-t-il un document qui compile un peu ce qui se passe dans le Québec pour ces gens?

M. Duguay: Non. J'avais participé à une enquête en 1976-1977 dans le cadre du

Conseil de la main-d'oeuvre forestière qui existait à ce moment. On avait visité un certain nombre de compagnies au Québec, rencontré les travailleurs afin de connaître un peu pourquoi un gars s'achetait une machine, etc. Malheureusement, cette enquête n'a jamais eu de rapport parce que le Conseil de la main-d'oeuvre a été aboli. C'est resté sur les tablettes. Il n'y a jamais eu de rapport à la suite de ces questionnaires qu'on était allé remplir avec les travailleurs en forêt, chez les compagnies, CIP, Consolidated, partout dans la province.

M. Jolivet: Êtes-vous au courant s'il y a eu des difficultés à remplir ces documents parce qu'il y en a plusieurs qui avaient peur de répondre à ces questions?

M. Duguay: Au moment où on les a remplis, non, nous n'avions eu aucune difficulté. Il y avait une disponibilité. Même, dans certains endroits, les compagnies coopéraient et nous donnaient des locaux pour rencontrer les travailleurs en toute quiétude et sans qu'ils aient à se préoccuper de ce qui pourrait survenir après.

M. Jolivet: D'accord. Dans les conditions de travail dont vous faisiez mention tout à l'heure, il y a l'ensemble des travailleurs forestiers qui vont à ce qu'on appelle la coupe d'abord, mais il y a tous les autres - vous avez certainement des statistiques sur ceux-là - qui souvent nous font mention des problèmes qu'ils ont avec de petits entrepreneurs pour la préparation du terrain, la partie plantation. Je ne parlerai pas des coopératives pour le moment. J'y reviendrai. Je parle des autres contrats qui sont donnés en forêt à des sous-contractants, par de grosses compagnies dans bien des cas. Dans d'autres cas, par des formules de soumissions.

M. Duguay: Disons que particulièrement dans les territoires où nous avons des accréditations syndicales, il y a très peu de travailleurs qui font de la plantation présentement. Il y en a un peu quand même qui se fait et il y a beaucoup de travailleurs qui nous rencontrent pour nous mentionner leurs conditions de travail qu'ils trouvent inacceptables, disant qu'ils sont quand même obligés de travailler pour gagner leur vie. Dans certains cas, c'est un pis-aller, ce qu'on a toujours vécu en forêt, en fait. C'est ce qu'on voudrait qui change. Mais, présentement, avant que le nouveau régime forestier entre en vigueur, il y a très peu de travailleurs dans notre juridiction qui font de la plantation ou de la préparation de terrain.

M. Jolivet: Est-ce que vous ne croyez pas, justement, qu'une des transformations que va amener le régime forestier va demander aux travailleurs, s'ils veulent avoir un laps de temps plus long en forêt, d'agir non seulement, maintenant, sur la partie coupe - là, je fais allusion au fait que la grosse machinerie qui va peut-être, dans certains cas, devenir une moyenne machinerie ou une petite machinerie - mais sur d'autres genres de travaux que de travailler au "tumberjack" ou avec d'autres grosses machines comme celle-là; donc, cela peut aller de la préparation de terrain, plantation, travaux de coupe et ce qui s'en suit?

M. Duguay: Oui, je pense que nous le mentionnons dans notre mémoire. C'est que le travail d'aménagement forestier soit complémentaire à l'exploitation forestière; c'est-à-dire que nous demandons que les travailleurs en place soient d'abord formés pour être - appelons cela ainsi - des aménagistes forestiers ou des travailleurs sylvicoles, peu importe le terme; mais c'est un peu la raison qui a motivé la rencontre que nous avons eue dernièrement pour essaver de voir quelle était la formation nécessaire afin que nos travailleurs forestiers soient en mesure, lorsque le nouveau régime forestier sera mis en place, d'accomplir le travail qui sera exigé d'eux.

M. Jolivet: La question qui va se poser pour les grosses industries forestières, maintenant - parce qu'il faut revenir à celles-là - c'est que la main-d'oeuvre qu'elles peuvent employer, soit par l'intermédiaire de certaines coopératives dans certains cas, soit par des formules de sous-contractants ou par rapport à ceux qui sont syndiqués... Parce que dans la question que vous posez, vous dites. Si un autre employeur vient dans le secteur nouvellement réunifié ou changé, que l'accréditation soit automatiquement, avec convention collective, transportée chez l'employeur. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y aurait certaines difficultés pour des employeurs de pouvoir y arriver, compte tenu des conditions de la convention collective, des salaires à être payés, alors que, dans certains cas, ils peuvent l'avoir par des sous-entrepreneurs et par des coopératives à meilleur coût?

M. Duguay: La difficulté va sûrement survenir. Il n'y a aucun doute là-dessus Les compagnies forestières préféreraient j'espère que c'est non - ne plus avoir d'accréditation au Québec et être capables de faire ce qu'elles veulent avec la main-d'oeuvre. C'est peut-être leur plus grand désir, mais j'espère que cela ne se réalisera pas. Il ne faudrait pas que, par un nouveau régime forestier, on leur donne l'occasion justement de réaliser cette chose.

Pour ce que vous mentionnez, il nous apparaît clair que le territoire qui est

accrédité devrait le demeurer, et la compagnie qui reprend les opérations forestières, généralement, demeure dans le même secteur d'activité. Il y a le sciage et les pâtes et papiers. Aujourd'hui, de plus en plus, on vise une égalité dans les salaires ou dans les conditions de travail. Or, s'il existait déjà une usine de sciage et qu'elle avait des conditions de travail dans lesquelles elle pouvait être concurrentielle malgré tout cela, nous ne voyons pas pourquoi une autre industrie de sciage qui arriverait ne pourrait pas être concurrentielle.

M. Jolivet: Dans le passé, lorsqu'il y a eu les premières rétrocessions de concessions forestières, il y avait des gens qui travaillaient pour des organismes syndicaux dans ce milieu. Quand il y a eu le transfert, l'histoire nous a appris que ces gens sont disparus du secteur et que d'autres sont venus les remplacer. Ce que vous demandez, en fait, c'est un changement radical de cette mentalité.

M. Duguay: Oui. Si je prends l'exemple qu'on donne dans notre mémoire pour ce qui est de la compagnie Price, à Rimouski, ce sont exactement les mêmes travailleurs qui continuent à faire l'exploitation forestière pour ce qu'on appelle la scierie Métis aujourd'hui. II n'y a eu aucun changement de main-d'oeuvre, il y a seulement eu rétrocession. Le ministère a accordé une garantie d'approvisionnement à la scierie Métis dans le même territoire et au même endroit, mais les commissaires du travail ont décidé que le syndicat en place n'était plus accrédité.

Dans la région de Québec, c'est un peu différent, sur la rivière Jacques-Cartier, là où c'était... Il y a eu peut-être un petit changement de secteur de coupe, la destination des bois n'était plus la même. Mais, pour ce qui est de Rimouski, la compagnie Price, c'était exactement la même chose qui se faisait.

M. Jolivet: Quand on est plus éloigné dans la forêt, on arrive à des camps forestiers... Je vais parler de mon coin, Windigo, le camp Jean-Pierre ou des choses semblables. Parce qu'on est éloigné dans le territoire avec les formulés de convention collective pour les sept jours, pour le transfert à la maison avec les congés, dans la mesure où vous mettez 72 kilomètres, si j'ai bien compris, de distance entre la dernière municipalité - et cela ne veut pas dire nécessairement la ville d'où provient l'industrie parce qu'il peut y avoir un secteur d'asphalte de 20 kilomètres à faire - ne croyez-vous pas que cela va obliger à mettre en forêt plus de camps qu'on en a actuellement et qu'il peut y avoir un danger additionnel que les compagnies, au lieu d'installer des camps, insistent plutôt pour désyndiquer leur monde, si je peux employer le terme?

M. Duguay: Désyndiquer, encore là, j'espère que non. En fait, ce que nous voulons, c'est le bien-être et le confort du travailleur. Un individu qui a à parcourir des distances aussi grandes que 72 kilomètres, c'est déjà passablement loin dans le chemin que vous connaissez, M. Jolivet.

M. Jolivet: Oui.

M. Duguay: Alors, pour nous, s'il n'y a même pas compensation, nous croyons qu'il y a de la place pour compenser, d'une certaine façon, le travailleur. 72 kilomètres, je crois que c'est déjà quand même une distance très appréciable pour que l'individu se transporte chez lui soir et matin. C'est justement pourquoi l'on demande que le ministère établisse des règlements à ce niveau et, bien sûr que les travailleurs... C'est le cas dans certaines régions présentement, les travailleurs, à cause de la très grande distance, s'organisent des campements de fortune et mettant leur santé et leur sécurité en danger en demeurant dans ces camps de fortune. J'ai actuellement en mémoire le cas de deux travailleurs forestiers dans la région de Roberval qui sont morts asphyxiés dans un minibus, un autobus de transport scolaire qui avait été réinstallé en forêt et dans lequel on avait installé un Delco. Il y eut une émanation de gaz et les deux gars, en allant dîner ou manger le soir à minuit, sont décédés. On les a retrouvés seulement le lendemain matin.

Ce sont des choses qu'on voudrait éviter. On voudrait éviter également des rapports comme on en a vus de la CSST qui nous montraient des camps de fortune, avec des toilettes de fortune, où oblige le travailleur à manger des choses qui, pour son travail, ne sont sûrement pas salutaires. On sait qu'un travailleur forestier dépense beaucoup d'énergie et qu'il a besoin d'une nourriture très bonne autant en quantité qu'en qualité. C'est pour cela que nous souhaitons et que nous espérons qu'il y ait un changement à ce sujet et qu'on réinstalle les camps forestiers dans des endroits accessibles et où c'est possible, et non pas à des distances de 100 kilomètres ou 125 kilomètres du lieu de résidence. C'est pour cela qu'on met un maximum de 72 kilomètres. Comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, cela peut vouloir dire pour d'autres individus 100 kilomètres, 72 kilomètres, parce que tous les travailleurs forestiers ne résident pas dans la même municipalité.

M. Jolivet: Une dernière question. À la page 15, vous parlez de la construction et de

l'utilisation des chemins forestiers. Vous dites: Le ministre devra établir les normes de construction des chemins forestiers en tenant compte, etc. Je ne lirai pas tout. Il y a toujours une difficulté pour un ministre quelconque de mettre des normes dans la mesure où il se rend responsable d'un chemin où il ne participe souvent que par l'aide d'une subvention. Je m'explique en disant que les ministères n'ont pas intérêt, quels qu'ils soient et de quelque gouvernement que ce soit, à avoir davantage de chemins à entretenir. Souvent, les gens disent: Vous avez commencé à travailler dedans et vous avez mis des normes, vous allez payer pour. On sait très bien qu'il y a peut-être de la part des entreprises la construction d'un chemin, si l'on parle du grand chemin principal d'accès aux plateaux de coupe ou encore des chemins secondaires... J'aimerais vous entendre parler davantage sur la façon dont vous voyez l'implication d'un ministère qui, en l'occurrence, pour vous, est le ministère de l'Énergie et des Ressources, secteur forêts. J'aimerais savoir davantage comment vous voyez cela. Le danger qu'il y a toujours, c'est que le ministère vous dise: Écoutez, moi, je ne veux avoir aucune responsabilité. Je veux quand même fournir une aide de subvention même si on sait qu'actuellement, en ce qui concerne le fédéral, la personne responsable de la surveillance des dépenses publiques a dit que plus jamais le fédéral ne devait investir dans les chemins pour laisser cela aux compagnies. J'aimerais un peu connaître votre opinion.

M. Duguay: Plus particulièrement, si vous dites que le ministère donne des subventions pour la confection des chemins forestiers, je pense qu'avec ces subventions il pourrait poser certaines exigences en ce qui a trait aux courbes, aux pentes, etc. Aujourd'hui, c'est une circulation très dense qu'il y a sur les chemins forestiers. Le dravage est un moyen de transport en voie de disparition dans bien des régions. Alors, on se tourne du côté du transport par camion. (21 heures)

II faut penser qu'une circulation très lourde se fait sur les chemins où l'on fait le transport par camion. En plus, il y a les travailleurs forestiers qui se déplacent pour aller à leur lieu de travail. Il y a des chemins forestiers qui, aujourd'hui, sont très bien organisés. Les courbes et les pentes sont bien pensées et ont été bien tracées. Par contre, il y en a trop encore, malheureusement, qui sont presque des tueries pour les travailleurs qui ont à les fréquenter ainsi que pour les camionneurs eux-mêmes. Il y a des camionneurs qui se promènent sur ces routes avec de très grosses charges parce que, de plus en plus, on grossit le camion et l'on grossit la charge. C'est un peu comme dans toute chose, même si on dit qu'on va acheter un gros camion pour être un peu plus à l'aise sur la route. On grossit la charge, on élargit à nouveau la portée de la charge et on en met plus sur la longueur et les chemins sont très dangereux. C'est pour cela que l'on veut qu'il y ait une législation dans ce domaine. Il n'y a pas d'année qui s'écoule sans qu'il y ait des morts sur les routes forestières, au Québec. Je pense qu'il faut en être conscient. Le ministère devrait légiférer dans ce domaine.

M. Jolivet: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Laviolette. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. M. Duguay, vous soulevez dans votre mémoire deux questions qui ont déjà été soulevées par un autre intervenant, notamment l'Association des manufacturiers de bois de sciage, c'est-à-dire la question des unités d'accréditation et la formation de la main-d'oeuvre.

En ce qui concerne les unités d'accréditation, est-ce que vous pourriez expliquer davantage ce que devraient être les unités d'accréditation et les conséquences de garder le statu quo pour faire des changements?

M. Duguay: Pour ce qui est de l'unité d'accréditation, certaines conventions collectives ou certaines accréditations existant en forêt sont très bien pourvues, si vous voulez, sur le plan de la loi. Elles sont larges au point de vue de l'application.

Par contre, certaines autres accréditations sont délimitées par des cantons. On accorde une accréditation pour une compagnie quelconque délimitée par des cantons où elle doit faire son exploitation forestière.

Il est bien sûr que l'on ne voudrait pas profiter d'une commission parlementaire pour demander au ministre d'élargir l'accréditation Si les travailleurs le désirent, ils le feront. Ce que nous voulons cependant, c'est que les accréditations qui sont définies par canton ou par territoire demeurent définies par territoire, mais, s'il y a un changement d'utilisateur, qu'elles restent en place.

Pour ce qui est des autres accréditations dont je vous ai parlé, elles ne représentent effectivement pas tellement de problèmes, étant donné la largeur de leur champ d'application. Je peux vous donner un exemple. La compagnie Price, pour tous les travailleurs à son emploi - travailleurs au sens du Code du travail - et pour l'approvisionnement d'une usine quelconque,

une usine à Alma, une usine ici ou une usine là, je pense qu'une accréditation de ce genre ne complique pas la situation pour ce qui est d'un changement de territoire de coupe parce qu'elle n'est pas rattachée à un territoire, justement. Elle est rattachée à l'approvisionnement d'une usine. Elle est rattachée à l'approvisionnement d'une entreprise. Même si l'entreprise change de nom, on sait que l'article 45 s'applique et, à ce moment-là, il n'y a pas de problème.

M. Ciaccia: En ce qui concerne la formation de la main-d'oeuvre, vous parlez du reboisement, pourriez-vous nous dire ce que vous attendez du gouvernement? Parlez-vous uniquement de la formation de la main-d'oeuvre ou si vous parlez aussi d'une qualification?

M. Duguay: Je pense que les deux sont incluses. Quand on parle de formation, c'est bien clair que cela amène une qualification supplémentaire de la main-d'oeuvre. Pour la formation de la main-d'oeuvre, il est clair dans notre esprit que l'on ne voudrait plus que se répète ce qui a été longtemps fait dans le passé: un travailleur forestier fait quelque chose parce que le contremaître lui dit de le faire ou parce que la compagnie lui dit de faire telle chose. Pour nous, c'est plus important que cela, surtout lorsqu'on va vers un nouveau régime forestier et que l'on va demander à des travailleurs d'être, comme le terme que j'ai mentionné tout à l'heure, des aménagistes. On veut savoir pourquoi ils vont faire telle chose et eux veulent savoir pourquoi ils vont faire telle chose. Alors, on veut qu'ils soient formés dans ce sens-là.

Evidemment, cela va impliquer également... Là, on parle seulement des travailleurs que l'on représente et des travailleurs qui ont un emploi actuellement, mais cela va aussi concerner le ministère de l'Éducation et à partir du secondaire on devra avoir des moyens de former des travailleurs ou à tout le moins de les informer de ce qu'est la forêt, ce qui n'a pas été fait souvent par le passé. Je ne sais pas si je répands bien à votre question, M. le ministre.

M. Ciaccia: Merci.

Le Président (M. Charbonneau); Cela va? M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Combien y a-t-il maintenant de travailleurs forestiers syndiqués au Québec?

M. Duguay: À mon avis il reste à peine 8000 employés syndiqués au Québec en forêt. Je suis peut-être un peu...

M. Desbiens: Quel pourcentage?

M. Duguay: Sans jeu de mots, je suis peut-être un peu libéral. On parle d'environ 65 % de travailleurs syndiqués dans le secteur de l'exploitation forestière. Ce qui est très fort comme pourcentage comparativement à l'ensemble du Québec,

M. Desbiens: Ma question porte surtout sur le reboisement. Vous parlez beaucoup des reboiseurs et des reboiseuses qui font aussi ce travail, j'ai constaté cela. Une partie des plantations est accordée aux coopératives à 50 % directement par le ministère et le reste par soumissions. Certains petits entrepreneurs présentent des soumissions et ces contrats sont accordés évidemment à des prix très bas et ce que le regroupement des coopératives nous a dit la semaine dernière, c'est que le contrat étant accordé à des montants très bas, soit 0,10 $, 0,11 $ le plant, c'est beaucoup trop bas pour assurer une rentabilité à l'entreprise ou à la coopérative d'une part, et d'autre part, pour donner des conditions de travail, un minimum, à ces travailleurs et travailleuses. Êtes-vous d'accord avec ce que le regroupement des coopératives a énoncé à ce sujet?

M. Duguay: Ce que l'on peut dire à ce sujet, c'est qu'il faut absolument que le ministère de l'Énergie et des Ressources s'organise pour que les personnes qui ont à faire du reboisement, que ce soit par le biais des coopératives ou 50 % par soumissions, ou encore par le biais des entrepreneurs... Il faut que cela se fasse dans le respect des travailleurs qui le font. Pour cela, nous ne croyons pas que la formule de soumissions -et je rejoins un peu ce qui a été dit la semaine dernière et le ministre a été en partie d'accord sur cette position des coopératives... Ce n'est pas en allouant des contrats sur une base annuelle que l'on va faire progresser ce genre de travail. On ne peut pas se permettre, même s'il y a urgence ou s'il y a des problèmes dans le reboisement au Québec, de faire faire cela au noir ou encore par le "cheap labour". Il faut que le travail soit bien exécuté et j'ai souvent dit que c'était un encouragement à la médiocrité que de faire faire des travaux à un aussi bas prix alors que, dans bien des cas, les travailleurs, la seule sortie qu'ils ont, c'est de camoufler des arbres qu'ils ne plantent pas. Cela s'est fait et je ne suis probablement pas le premier à le dénoncer, mais lorsqu'on a seulement ce moyen pour se faire un salaire viable, il faut à ce moment-là réagir et s'organiser de façon que cette situation change et que l'on donne les possibilités à ces travailleurs de vraiment avoir le salaire qu'ils méritent pour les encourager à faire un travail pour lequel ils auront à se féliciter plus tard et non pas à camoufler des centaines d'arbres dans des endroits où le contremaître ne pourra pas

les trouver, pour avoir à la fin de la journée un salaire décent.

M. Desbiens: Est-ce que vous croyez que ce seul élément de contrat sur une période de trois ans peut résoudre le problème? Le cas échéant, le montant alloué par le ministère pour la plantation de chaque plant serait-il suffisant?

M. Duguay: Non, il ne serait certainement pas suffisant. Qu'importe qu'on l'alloue sur une période de trois ans, celui qui a le contrat n'a pas le prix pour le faire. Il va continuer à payer ces gens à un salaire ridicule. Je pense que cette politique doit être révisée et qu'on devrait établir des barèmes. Dans notre mémoire, on dit que ces travailleurs devraient recevoir le salaire équivalent à celui d'un travailleur en forêt. Je pense qu'ils le méritent bien quand on sait dans quelles conditions ils font la plantation, les grandes parties qu'ils ont à parcourir et les marches qu'ils ont à faire dans des conditions... On connaît le terrain du Québec, on n'est sûrement pas dans le Sahara quand on plante des arbres, donc c'est très difficile dans tous les domaines.

M. Desbiens: Je comprends que la situation décrite par les chantiers coopératifs la semaine dernière, est exacte. Vous corroborez donc ce qu'ils nous ont dit. Au moins tout de suite, quelque chose pourrait être modifié; les 50 % alloués par le ministère de l'Énergie et des Ressources pourraient l'être à des prix supérieurs immédiatement.

Vous avez dit tantôt que vous avez travaillé durant quelque trois semaines dans un comité avec le cabinet du ministre ou avec le ministère de l'Énergie et des Ressources sur le livre blanc pour l'avant-projet de loi.

M. Duguay: Non.

M. Desbtens: Ce n'est pas cela? Vous n'aviez pas un comité consultatif?

M. Duguay: Non, on a rencontré le ministre à deux reprises pour des explications concernant le projet de loi et on a rencontré un groupe de travail sur la formation et la qualification des travailleurs, pour pouvoir jeter les bases de rencontres qui pourront se répéter dans l'avenir.

M. Desbiens: Je comprends que cette situation des reboiseurs et rebotseuses n'a pas été soulevée lors de ces rencontres.

M. Duguay: Non. On attendait la commission parlementaire pour faire valoir notre point de vue à ce sujet, et je pense qu'un peu tout le monde faisait la même chose.

M. Desbiens: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, M. Duguay, l'article 88 de ['avant-projet de loi stipule ceci: "Le gouvernement peut par règlement - on dit qu'il y a trop de règlements, mais il faut bien en faire un peu - établir des normes et conditions concernant la circulation des véhicules tant en forêt que sur les chemins forestiers, la pesanteur et la dimension de ces véhicules, l'arrimage de leur chargement et la signalisation, et rendre applicables à l'égard de la circulation sur les chemins forestiers les dispositions du Code de la sécurité routière qu'il détermine;".

Vous suggérez qu'on transpose cela au ministère des Transports, est-ce bien cela?

M. Duguay: M. le ministre, si votre ministère est capable de le faire, nous n'avons aucune objection pour autant qu'il ira selon les règles établies par le ministère des Transports et ce que vous venez de nous lire à l'article 88. Nous sommes entièrement d'accord. Si votre ministère est capable de le faire, il n'y a aucun problème. Ce n'est pas une question de ministère.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je ne vous dis pas qu'on va le faire selon les normes du ministère des Transports, car vous savez que plusieurs chemins forestiers sont faits pour permettre le transport de charges plus larges et plus lourdes que sur les chemins publics construits par le ministère des Transports. Dans certains cas, cela représente presque la rentabilité de l'entreprise, sur de longues distances, si les camions transportent des charges, non pas de huit pieds comme sur les routes publiques, mais plutôt de dix et de douze pieds de largeur. Est-ce contre cela que vous en avez?

M. Duguay: Non. Cps endroits que vous mentionnez, il y en a très peu au Québec d'ailleurs. Si je puis prendre le cas de Domtar, a Dolbeau, un chemin est très sécuritaire et de très gros camions y circulent. Ce n'est pas ce genre de transport. C'est dans des routes où les courbes et les côtes n'ont pas été pensées en fonction du transport qui s'y effectue. Je pense qu'ils sont très nombreux au Québec dans les exploitations forestières.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Les chemins subventionnés par le ministère ou pour lesquels le ministère contribue sont construits selon des plans et devis approuvés par le ministère. Au quatrièmement de l'article 88, on dit que le gouvernement peut établir des

normes relatives à la localisation, la construction, l'amélioration, l'entretien, la classification et l'utilisation des chemins forestiers. C'est ce qu'on fait actuellement. Peut-être que les chemins dont vous parlez n'ont pas été construits selon les normes du ministère ou subventionnés par le ministère, (2] h 15)

M. Duguay: Les chemins auxquels je fais référence, M, le ministre, j'en suis sûr, ont été construits selon les normes du ministère ou subventionnés par le ministère. Je ne sais pas si le ministère ne devrait pas les réviser, parce qu'il y a eu beaucoup de changements dans le transport forestier.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous suggérez des améliorations ou des modifications aux chemins déjà construits à la suite des changements dans le transport.

M. Duguay: Si ce que vous me dites est vrai, je pense qu'il y aurait lieu de réviser vos normes.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quant aux vérifications de mesurage, vous me dites qu'à la suite d'une directive qui date de deux ou trois ans, les vérifications sont faites sur plaintes seulement lorsque jugées opportunes. Cela ne vous satisfait pas?

M. Duguay: Elles ne le sont plus.

M. Côté (Rivière-du-Loup): II n'y en a plus du tout?

M. Duguay: Très difficilement. Il n'y a aucune plainte qui fasse en sorte qu'un vérificateur de votre ministère monte dans les forêts. On a eu des lettres à ce sujet. Nous sommes catégoriques là-dessus. On en a déjà parlé à M. Duhaime, ministre de l'Énergie et des Ressources à l'époque. Je peux vous donner la réponse qu'il nous avait donnée. Il savait que le mode de vérification actuel n'était pas adéquat. Je vais vous dire les termes qu'il avait employés: "On se fait voler, le gouvernement le sait, mais cela nous coûte moins cher de nous faire voler que de mettre des sytèmes de vérification en place." J'ai des témoins pour le confirmer.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Nous, on ne dit pas cela.

Une voix: L'ancien gouvernement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): On ne dit pas cela. Vous parlez de la protection du travailleur. On ne parlait pas du gouvernement qui se faisait voler.

M. Duguay: Oui, mais c'est dans ce cadre qu'on lui avait présenté. Si les travailleurs se font voler, c'est peut-être un peu exagéré. Mais on sait que, dans le système de mesurage actuel, un mesureur peut être deux et demi en bas comme deux et demi en haut de 100; il peut être à 97,5, comme il peut être à 102,5. S'il est toujours à 97,5, le travailleur n'a pas les moyens de faire vérifier si c'est vrai qu'il est toujours à 97,5... S'il est toujours à 97,5, il peut être aussi à 96 ou à 95. On n'a pas de moyens efficaces. On dit dans notre mémoire que ce qui se passe, c'est l'utilisateur qui est juge et partie, parce que votre ministère, encore une fois, M. le ministre, ne fait plus de vérifications.

M. Côté (Rivière-du-Loup): On me dit qu'on a donné une directive semblable à la suite d'abus de demandes de vérification; on ne fournissait pas à la tâche. Je ne sais pas si vous avez eu connaissance de cela.

M. Duguay: Dans les régions les plus forestières que je connaisse, je n'ai jamais entendu dire qu'on ne suffisait pas à la tâche. Je pense que, lorsqu'il y a quelqu'un qui fait un peu le chien de garde, on se surveille un peu plus. Mais quand personne ne le fait, on est porté à l'exagération. C'est précisément dans ce but qu'on veut un système de vérification efficace. Cela me surprend que les vérificateurs aient eu des demandes très fréquentes pour ce que je viens de vous dire.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vais continuer mon enquête. En ce qui concerne le comité sur la formation, est-ce que vous êtes satisfait de la composition du comité?Est-ce que vous avez des suggestions à nous faire là-dessus, parce que vous en faites partie aussi?

M. Duguay: Oui, j'en fais partie. Si j'avais une suggestion à faire au ministère du Travail concernant la composition du comité, je pense qu'il y aurait possibilité de changer les personnes pour la formation professionnelle. Je pense que... Évidemment, dans les rencontres ultérieures, il n'y avait pas beaucoup de représentants des travailleurs. Nous espérons que les autres centrales syndicales qui s'occupent des travailleurs forestiers seront présentes lors d'une prochaine rencontre. Pour une première rencontre, je l'ai trouvée très objective et positive.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quand vous dites à la page 14 de votre mémoire qu'au bas mot, il faut arriver à décupler la production des pépinières provinciales au cours des cinq ou dix prochaines années, est-ce que vous voulez dire les pépinières

publiques?

M. Duguay: Ce n'est pas nous qui parlons. C'est la réflexion de votre parti. Nous avons pris cela dans les pages de réflexion de votre programme. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est le Parti libéral.

Une voix: Est-ce que je pourrais en avoir une copie?

M. Duguay: II n'y a pas de problème. Je l'ai ici.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Évidemment, un partage se fait entre les pépinières publiques. Je me demandais si vous disiez cela parce que vous trouviez que les employés des pépinières publiques étaient mieux payés que ceux des pépinières privées.

M. Duguay: Ce n'est pas dans cet esprit-là, c'est dans l'esprit du problème de recherche dont vous faisiez mention dans votre cahier de réflexions. Nous ne l'avons pas analysé de cette façon-là.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quant aux ajustements au Code du travail, à l'article 2, en ce qui concerne le remplacement du mot "concessionnaire" par le mot "bénéficiaire", ils seront faits. Je n'y vois pas de problème. En voyez-vous?

M. Duguay: Non, je n'en vois pas.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Cela devrait se faire automatiquement,

M. Duguay: On voyait, dans l'élaboration de la politique, qu'il était nécessaire que ces mots soient changés.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quand vous demandez, par exemple, de prendre soin de la sous-traitance et des coopératives, c'est un problème qui existait avant que le nouveau régime forestier soit implanté.

M. Duguay: Oui, c'est un problème qui existait avant le nouveau régime, les coopératives comme contractants, oui. On pense qu'il serait de rigueur, en faisant une réflexion et en refaisant un nouveau régime forestier, qu'on mette tout à jour et qu'on définisse les règles du jeu pour tout le monde. Pour nous, des syndicats, les règles du jeu sont très bien définies, d'ailleurs.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quand on dit que le reboisement et l'aménagement se feront au même taux, aux mêmes conditions que les employés qui bénéficient d'une convention collective, ce n'est pas ce qui se passe actuellement. Pensez-vous que cela nous coûtera pas mal plus cher ou si ce sera acceptable?

M. Duguay: J'ai l'impression que cela coûtera certainement plus cher, mais, comme on vous l'a dit tout à l'heure, on ne peut pas accepter que le reboisement du Québec se fasse dans des conditions inacceptables pour les travailleurs forestiers ou les travailleurs à la plantation. On pense qu'on est peut-être en retard dans l'élaboration d'une politique ou d'un régime forestier, mais on ne commencera pas à faire des procès d'intention ou quoi que ce soit. Cependant, on ne voudrait pas, quant à la main-d'oeuvre nécessaire à cette reprise en main par l'État du problème de la forêt, que ce soient uniquement les travailleurs qui en paient la note. On est bien d'accord que cela coûtera pas mal plus cher, mais tout dépend de la façon dont cela fonctionnera et de l'intérêt qu'on donnera aux travailleurs qui seront en place. Des moyens sont pris et des moyens peuvent être pris pour intéresser les travailleurs à reboiser le Québec, mais on vous dit: Pas dans les conditions actuelles, surtout dans la partie accordée par soumissions. Car cela, c'est encourager la médiocrité.

M. Côté (Rivière-du-Loup): On me dit, et je le crois, que tous les contrats de reboisement sont vérifiés concernant la qualité et le nombre de plants et que c'est payé suivant cette base. Vous avez mentionné tout à l'heure que leur seul souci était peut-être de cacher des plants, étant donné les conditions de travail désavantageuses.

M. Duguay: Ce sont les réflexions qu'on a entendues de la part d'entrepreneurs ou de sociétés d aménagement qui, justement, avaient déjà eu ce problème dans le Bas-Saint-Laurent. Les employeurs nous ont dit qu'ils avaient eu ce problème-là et qu'ils étaient obligés de vérifier, jour après jour, si cela ne se reproduisait pas. On pense que c'est une vérification quand même assez difficile et qui, en plus, occasionne sûrement des coûts. On préférerait que les sommes nécessaires pour le contrôle soient plutôt dépensées pour donner aux travailleurs de meilleures conditions. Peut-être que les contrôles seraient moins nécessaires à ce moment-là.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous mentionnez également qu'un seul bénéficiaire fasse la coupe de toutes les essences comprises dans un territoire quand il y aura plusieurs intervenants sur le même territoire. S'il y avait des coupes de feuillus, de résineux, de pin, etc., qui désignera le maître d'oeuvre?

M. Duguay: À notre avis, c'est le

principal détenteur, celui qui ira chercher le plus dans le territoire, le plus gros utilisateur dans le territoire devrait avoir la responsabilité de faire la coupe complète. Cela se fait présentement dans certains endroits où le principal utilisateur coupe les essences secondaires. Tout se fait en même temps. À notre avis, il y a intérêt à faire cela parce que c'est beaucoup plus rentable que de retourner par la suite sur les mêmes territoires trois, quatre, cinq ans de suite pour ramasser telle ou telle essence.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je suis d'accord avec vous. Je voudrais bien que tout le monde le comprenne de même. C'est plus rentable que de retourner, mais cet après-midi, nous en avons parlé avec les gens des Hautes-Laurentides et on a eu une discussion sur le principal parce que tout le monde, les intervenants du même secteur, c'est important pour chacun d'eux. Ils sont tous des principaux, dans le fond. Si cela se faisait sur une base volontaire, ce serait bien souhaitable, car cela fait de l'exploitation intégrée. Ce serait plus facile pour tout le monde. Les ouvriers auraient de l'ouvrage sur une base plus longue.

M. Duguay: En plus, pour ce que je vous disais tout à l'heure, c'est que le travailleur en forêt qui a à abattre les arbres, bien souvent, il est obligé d'abattre des essences secondaires pour être capable de faire son travail habituel. Dans des conditions comme cela, il abat tout et, à ce moment, je pense que pour lui, autant que pour tous les autres, c'est un gain.

M. Côté (Rïvière-du-Loup): Parlez-moi donc du fonds d'indemnisation spécial que vous aimeriez créer pour pallier les pertes de salaire dues à une faillite d'entreprise. Cela ne s'applique pas seulement en forêt?

M. Duguay: Oui, mais cela a été un problème majeur dans les années 1983-1984. J'ai encore des écrits, mais je ne les ai pas ici, disant que les travailleurs forestiers dans certaines régions étaient les champions des faillites. On ne voudrait pas que cela revienne, cette chose-là. On sait, présentement, qu'il y a des faillites, peut-être moins nombreuses que dans cette période, mais il y a encore de faillites et, présentement, les faillites qui se font sont beaucoup plus considérables parce que la machinerie qui est achetée est de plus en plus dispendieuse et, également, c'est de la plus grosse machinerie.

Encore aujourd'hui, on vient de me dire qu'un de ces sous-sous-contractants dont on vous parle dans notre mémoire vient de faire faillite, il vient d'abandonner et ses employés seront mis à pied cette semaine. Ce sont des choses qui sont assez fréquentes dans le secteur de la forêt. Évidemment, je n'ai pas fait de statistiques comparatives. Je sais que, durant les années 1983-1984, les travailleurs forestiers, propriétaires de machinerie, étaient parmi les premiers au niveau des faillites personnelles ou de compagnies. C'est dans ce sens. On le dit dans le mémoire, les travailleurs n'ont pas tous fait le choix librement d'accepter de s'acheter une machine. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de monde qui pourrait venir contredire cela. Ils ne l'ont pas tous fait aussi dans des conditions acceptables. Quand on veut garder sa "job", la plupart du temps, on fait des efforts pour la garder. Beaucoup de gars ont été obligés de le faire dans des conditions comme cela. Beaucoup de travailleurs forestiers ont été obligés de le faire dans des conditions comme cela.

Nécessairement, cela a apporté ce dont on vous parle, des faillites, et on croit qu'une meilleure planification aurait pu éviter certaines faillites. À ces conditions, c'est le détenteur ou l'employeur principal qui, à notre avis, est responsable de ces faillites. C'est pour cela que nous préconisons un fonds spécial d'indemnisation, surtout et plus particulièrement pour les travailleurs qui font des pertes de salaires.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Avant d'acheter une machine, un de vos syndiqués ou un travailleur ne devrait-il pas apprendre à gérer sa machine. Vous suggérez aussi qu'il y ait de la formation pour cela. Le risque serait moins grand.

M. Duguay: C'est ce qu'on souhaite depuis longtemps, mais ce n'est pas comme cela que cela se fait.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Est-ce que le fonds d'indemnisation servirait à remplacer pour payer les salaires? Parce que dans une faillite, il y a un ordre de priorité pour les dettes.

M. Duguay: Ce dont vous parlez peut prévaloir dans un endroit où l'employeur est solvable et où il y a certaines choses qui peuvent rester de la faillite. Cela entre dans les créanciers privilégiés, je suis d'accord avec vous. Dans des faillites qu'on a connues, de 200 000 $, 300 000 $, 400 000 $, s'il y a à peine 15 000 $ ou 20 000 $ de solvabilité, comment voulez-vous que les travailleurs récupèrent ce qu'ils ont perdu comme salaires? Je pense que c'est à peu près impossible dans ce secteur. C'est ce que nous espérons. Évidemment, s'il n'y avait jamais eu de faillite ou s'il n'y avait pas eu de problèmes majeurs à ce niveau, on ne l'aurait pas souligné, mais il y a eu des problèmes majeurs.

M. Côté (Rîvière-du-Loup): Je vous remercie, M. Duguay.

Le Président (M. Charbormeau): M. le député d'Ungava. (21 h 30)

M. Claveau: Merci, M. le Président. Je vais sortir un peu de votre texte, dans une première question. Vous n'êtes pas sans savoir que les travailleurs de la forêt sont, règle générale, de grands utilisateurs de forêt en termes de loisirs; du moins, c'est le cas dans les villes nordiques et les villes isolées, comme celles du comté d'Ungava.

Alors, qu'est-ce que vous pensez de la proposition qui a été mise sur la table, à plusieurs reprises depuis une semaine, à savoir que tous les utilisateurs de la forêt devraient payer pour le reboisement ou l'aménagement?

M. Duguay: Je ne pourrais pas répondre à votre question parce que c'est un problème que nous n'avons pas étudié. Lorsque vous me dites que les travailleurs forestiers sont de grands utilisateurs de loisirs en forêt, cela dépend sûrement des régions. Dans certaines régions, lorsqu'ils ont passé cinq jours par semaine en forêt, il n'y en a pas beaucoup qui tiennent à y retourner. Évidemment, dans les pays nordiques, ou les loisirs sont peut-être moins variés, le problème que vous soulevez peut être vrai. Les gens retournent peut-être faire de la pêche ou de la chasse en fin de semaine.

Pour ce qui est de votre question, si j'y réponds personnellement, je dirais, toutes proportions gardées, oui. Mais je ne peux pas répondre au nom de la Fédération des travailleurs forestiers du Québec, puisqu'on ne l'a pas regardé dans ce sens-là.

M. Claveau: Merci. Une deuxième question. On a parlé de la recherche, de la modernisation, de la modification des techniques de coupe, etc. Mais est-ce qu'il n'y a pas là un problème par rapport, entre autres, aux entreprises, aux forestiers, aux travailleurs en forêt qui sont devenus des entrepreneurs par la force des choses avec la machinerie qu'ils ont dû acheter à des prix faramineux? Est-ce que le fait d'appliquer de nouvelles techniques de coupe, en tout cas si on ne modifie pas les conditions de contrat entre les grandes entreprises et ces travailleurs, cela ne serait pas, encore là, leur compliquer la tâche et rendre leur entreprise de plus en plus fragile sur le plan financier, étant donné que cela augmente les coûts de déplacement et que cela enlève de la rapidité au prélèvement de la matière ligneuse?

M. Duguay: C'est bien sûr que cela compliquerait davantage, mais les travailleurs forestiers qui sont propriétaires de machines actuellement, sont un peu habitués à ce genre de chose. En effet, lorsqu'un employeur décide de changer sa méthode d'exploitation d'une année à l'autre, il avise les travailleurs qu'ils devront avoir telle ou telle machinerie pour travailler chez lui l'an prochain. Alors, c'est un peu dans ce système qu'on vit et cela devient facile, à ce moment-là, pour un employeur de changer sa mécanisation parce que, dans le contexte dans lequel nous sommes actuellement, on dit: L'an prochain, on y va uniquement avec la mécanique; donc, tu devras avoir une abatteuse ou une ébrancheuse. Alors, s'il arrive des changements avec le nouveau régime forestier, qui feront en sorte que la façon de récolter les arbres changera, on est sûr d'une chose: ce sont les propriétaires actuels de la machinerie qui vont écoper. Ce ne seront pas les utilisateurs parce qu'ils n'ont plus de machinerie, elle appartient toute aux travailleurs. Il est bien clair que, si l'on doit changer de machinerie, ce sont les travailleurs qui vont en écoper.

M. Claveau: Est-ce qu'il n'y aurait pas, à votre avis, des mécanismes, auxquels vous auriez pensé, qui pourraient faciliter ces modifications ou ces changements pour les travailleurs?

M. Duguay: Non. C'est peut-être là que devient encore plus en évidence notre fonds d'indemnisation.

M. Claveau: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est ma dernière question, M. Duguay. Quand vous suggérez qu'un montant déductible d'impôt soit fixé pour chaque travailleur afin de compenser pour les dépenses encourues pour se rendre de sa résidence au lieu du travail, cela sur une base mensuelle, est-ce que vous avez une limite des frais de transport que vous aimeriez suggérer?

M. Duguay: Oui. On avait fait une évaluation en 1975, encore au Conseil de la main-d'oeuvre forestière, qui existait dans ce temps-là et qu'il faudrait peut-être remettre sur pied. On avait déterminé, en 1975 - là, je n'ai pas les chiffres exacts - combien cela pouvait coûter à un travailleur de se déplacer de sa résidence au lieu du travail. Il s'agirait peut-être d'actualiser ces chiffres en argent de 1986. Cela a été fait. Il y a une enquête qui a été faite en 1975 ou 1976 par le Conseil de la main-d'oeuvre forestière.

M. Côté (Rivière-du-Loup): D'accord. Si vous êtes capable de m'en envoyer une copie, j'aimerais bien cela, M. Duguay.

M. Duguay: C'est qu'au ministère du Travail ils ont réclamé tous mes dossiers

parce qu'ils avaient perdu les leurs. Alors, mes dossiers sont au ministère du Travail et M. Pierre Roy en est le dépositaire présentement. Vous pourriez toujours demander au ministère du Travail de demander à Pierre Roy de vous reproduire les copies de mes dossiers. Il sont tous là et je dois les récupérer d'ici quelque temps. Cette recherche a été faite et on a très bien défini cela selon les régions, si quelqu'un demeurait sur la rive sud et travaillait sur la rive nord dans le comté de Saguenay, par exemple. Tout cela a été fait. Il s'agirait tout simplement d'actualiser ces chiffres.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je vous remercie.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Je crois que...

M. Perron: Une minute et demie.

Le Président (M. Charbonneau): Ou presque.

M. Perron: Trois questions en vrac. La première concerne le comité dont vous faites partie qui s'intéresse à la question de la formation professionnelle des travailleurs de la forêt. En tant qu'entité syndicale, est-ce que vous avez l'intention de mettre l'accent sur la formation dans les régions où l'industrie forestière est prédominante?

La deuxième, est-ce que vous seriez d'accord, quant aux aménagements, avec le fait que le gouvernement procède au reboisement dans les forêts de banlieue au lieu de procéder dans d'autres endroits, ce qui, à mon sens, permettrait et aux travailleuses et aux travailleurs forestiers d'être plus près de leur lieu de résidence et d'avoir moins de contraintes, soit au niveau de la sécurité ou autres?

Une dernière - je me fais un peu l'avocat du diable - est-ce que vous seriez intéressés, en tant qu'entité syndicale, à ce que le gouvernement vous donne par négociation des contrats d'aménagement et même d'approvisionnement à partir du domaine forestier?

M. Duguay: Quant à la première question sur le comité de formation, je crois qu'il est bien évident qu'on doit y aller dans les régions forestières, parce que je vois très mal former des travailleurs de la rue Sainte-Catherine pour venir faire de l'aménagement forestier. Tel qu'on l'a mentionné dans notre mémoire, déjà les travailleurs forestiers ou les gens qui demeurent dans les régions forestières ont des notions très bonnes de la forêt et de tous les problèmes qu'elle génère. Il est certain que l'on ferait fausse route si on commençait à former des gens venant des grandes villes pour venir travailler en forêt. Cela serait à peu près comme ce qu'on a déjà vu. On sait qu'au Saguenay, c'est la région des bleuets. On avait envoyé des gens de Montréal ramasser des bleuets avec des échelles. Cela serait à peu près la même chose qui se produirait.

Quant à la deuxième question sur le reboisement des forêts de banlieue, dans un mémoire qu'on avait déjà présenté à M. Duhaime, nous préconisions également que les forêts de banlieue soient en premier lieu reboisées pour que nos travailleurs soient à proximité de leur résidence autant pour l'aménagement que lorsque viendra le temps de la récolte. Ils sont suffisamment loin de leur foyer pour qu'on n'aggrave pas le problème.

Troisièmement, en ce qui concerne l'entité syndicale, je ne crois pas que ce serait une bonne chose, en tant qu'entité syndicale, qu'on devienne des contractants -on est contre cela - ou des sous-contractants. Pour nous, ce n'est pas une de nos préoccupations et je ne crois que cela le soit dans l'avenir, non plus.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Duplessis, si vous voulez remercier nos invités.

M. Perron: M. le Président, au nom de l'Opposition, je tiens à vous remercier pour votre mémoire, ainsi que pour la qualité de vos réponses. Dieu sait qu'au cours des prochains mois on va avoir besoin de vos documents, ainsi que des réponses que vous avez données aujourd'hui, à la suite des questions qui ont été posées face au projet de loi qui sera éventuellement déposé à l'Assemblée nationale par le ministre délégué aux Forêts. Je tiens à vous souhaiter la meilleure des chances possible quant aux travailleurs forestiers que vous représentez, ainsi que toute la chance du monde à votre syndicat des travailleurs forestiers.

Le Président (M. Charbonneau): Je vous remercie. M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le président, en mon nom et au nom de mes collègues, je vous remercie de l'échange de vues que nous avons eu ce soir et de la présentation de votre mémoire. C'est certain que votre préoccupation la plus importante est celle du bien-être des travailleurs. Il faut commencer à penser aux personnes avant de penser à autre chose. Et puis, cela va par ordre de priorités. Si l'on peut établir des priorités, c'est bien en pensant en premier lieu aux ouvriers forestiers et, ensuite, à la forêt. Au nom de mes collègues et en mon nom, je vous remercie de votre mémoire. Soyez assuré que nous tiendrons compte de vos recommandations et que nous aurons

recours à vos services comme on vous l'a fait voir encore dernièrement. Merci beaucoup.

M. Duguay: Je vous remercie.

Le Président (M. Charbonneau): Messieurs, merci et bon retour. J'invite maintenant les représentants de l'Ordre des techno-logues des sciences appliquées.

M. Perron: M. le Président, en attandent que les représentants de l'Ordre des technologues des sciences appliquées viennent devant nous, je vous confirme tout de suite que l'Opposition n'a aucune objection à ce que l'on dépasse l'heure prévue, 22 heures, en vue d'entendre le mémoire en question, ni même, s'il y a lieu, à dépasser la demi-heure qui nous a été imposée pour cet organisme.

Ordre des technologues des sciences appliquées

Le Président (M. Charbonneau): Très bien, M. le député, j'en prends bonne note. Alors, je crois que le président de l'Ordre des technologues des sciences appliquées, c'est M. Jacques Mercier. C'est bien cela?

M. Mercier (Jacques): C'est bien cela.

Le Président (M. Charbonneau): M Mercier, voulez-vous nous présenter les collègues qui vous accompagnent? D'autre part, je vous rappelle que vous avez dix minutes pour la présentation de votre mémoire. Normalement, il y a dix minutes prévues, de chaque côté, pour la discussion de vos points de vue. Cela va?

M. Mercier: Je vous remercie, M. le Président. Je vous présente à ma gauche M. Gilles Hamel, qui est notre vice-président à l'administration; à mon extrême gauche, M. Denis Dubois, qui est le directeur général et le secrétaire de l'ordre et, à ma droite, M. Serge Leblanc, qui est administrateur de l'ordre. Mon nom est Jacques Mercier.

M. le Président, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, M. le ministre délégué aux Forêts, cela me fait plaisir de vous présenter le mémoire de l'Ordre des technologues des sciences appliquées.

Distingués membres de la commission, en premier lieu, l'Ordre des technologues des sciences appliquées du Québec félicite M. Albert Côté, ministre délégué aux Forêts, pour le dépôt de cet avant-projet de loi sur les forêts et le remercie de procéder à une commission parlementaire pour entendre les commentaires des principaux intervenants du domaine forestier au Québec.

L'ordre des technologues est d'avis que cette loi sur les forêts est la bienvenue et que tout le Québec attend avec impatience son adoption par l'Assemblée nationale.

Nous souhaitons que ce projet de loi fasse l'unanimité à l'Assemblée nationale afin que la nouvelle loi sur les forêts soit mise en application le plus rapidement possible car le Québec a un urgent besoin d'une telle réforme en profondeur de son secteur forestier.

Le mémoire de l'ordre des technologues comprend trois volets. En effet, l'ordre des technologues vous fera part de son appui sur plusieurs des principes qui sous-tendent le projet de loi. De plus, l'ordre fera des recommandations et soulèvera des questions ou des inquiétudes sur certains de ses articles.

Examinons, d'abord, le premier volet qui traite de l'appui de l'ordre aux principes de l'avant-projet de loi. Premièrement, le volume de bois alloué annuellement au bénéficiaire ne pourra dépasser le volume par l'addition de la possibilité annuelle à rendement soutenu et de la disponibilité. Ceci dénote un intérêt de la part du ministre à vouloir sauvegarder et maintenir l'approvisionnement des utilisateurs. C'est un pas dans la bonne direction. C'est un principe auquel il ne faudra jamais plus déroger. L'ordre des technologues est totalement en accord avec ce principe

Deuxièmement, l'ordre approuve que l'on incite les bénéficiaires à faire des travaux d'aménagement dont le rendement escompté aura pour effet le dépassement des objectifs de production prévus au contrat.

Troisièmement, un contrat d'une durée de 25 ans, avec la possibilité de prorogation de cinq ans à tous les cinq ans, incitera les bénéficiaires à se conformer aux directives du ministre, car ceux-ci pourront être assurés que les efforts fournis dans la remise en production de la forêt leur reviendront. On récolte ce que l'on a semé, ce qui est un excellent principe. (21 h 45)

En plus de ce qui précède, l'ordre des technologues désire faire dans un deuxième volet certaines recommandations. Première recommandation: le ministre peut donner des directives sur toute autre modalité technique d'intervention, lesquelles directives seront colligées dans un manuel d'aménagement forestier publié par le ministre. Nous souhaiterions que ces directives ne soient pas qu'un guide, mais qu'elles fassent partie intégrante du contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier. Deuxième recommandation: pour les chemins forestiers, il serait important de maintenir certains axes routiers en bon état afin de permettre un accès en tout temps pour une meilleure protection des sites aménagés. Troisième recommandation le ministre devrait décréter à l'avance avec les divers intervenants les aires non affectées à la production de

matière ligneuse pour ne pas avoir à modifier le territoire en cours d'opération. Quatrième recommandation: lors de désastres naturels, le ministre devrait prendre en charge tout le processus de récupération et de mise en valeur des territoires affectés, Cinquième recommandation: la reconnaissance du statut du producteur forestier est un autre incitatif de grande importance dans le secteur de la forêt privée, mais il faudrait aussi inclure la mise en valeur des superficies propices au reboisement et également les terres agricoles abandonnées. Sixième recommandation: au niveau de la fiscalité, le producteur forestier pourrait déduire de ses impôts le montant des travaux exécutés pour la mise en valeur de son territoire. Cela serait une façon d'alléger le fardeau que le nouveau régime forestier donnera aux producteurs. Septième recommandation: la forêt privée sera privilégiée. C'est une bonne chose, mais il faudra que celle-ci participe également aux coûts de protection et de mise en valeur du territoire forestier. Huitième recommandation: il faudrait que la loi donne l'entière responsabilité des forêts à un seul ministère, car il y a présentement trop d'intervenants d'autres ministères. De plus, nous recommandons la création d'un ministère des Forêts. Neuvième recommandation: l'avant-projet de loi ne traite pas de la recherche et du développement. Pourtant, on sait à quel point la recherche et le développement sont d'importants facteurs dans la réussite de toute industrie. Le projet de loi devrait donc inclure des éléments qui inciteraient à la recherche et au développement, la survie dans notre industrie forestière en dépend.

Dixième recommandation: il est important de remettre la forêt dans les mains des professionnels de la forêt. Cependant, nous recommandons une certaine prudence dans la réglementation qui suivra le projet de loi. Certains groupes de professionnels peuvent tenter d'accaparer l'exclusivité de certaines interventions et ce, au détriment des autres professionnels tout aussi compétents. Il ne faudrait surtout pas que la foresterie devienne comme le secteur de la construction où les privilèges de tous et chacun ont fait monter en flèche les coûts d'exploitation sans pour autant mieux protéger le public et le patrimoine québécois.

Dans un troisième volet, l'ordre des technologues soulève les questions et les inquiétudes suivantes: Premièrement, le titulaire d'un permis d'intervention devra payer des droits qui seront établis sur la base de la valeur du bois sur pied dans le cas d'un permis ayant pour objet la récolte de bois à des fins commerciales. Que devraient payer ceux qui profitent d'un même couvert forestier pour d'autres fins que la récolte de bois (chasse, loisirs, parcs, etc.)? Ces utilisateurs profitent d'un couvert forestier sur pied et ils ne participent nullement à la remise en valeur du territoire. Deuxièmement, le titulaire d'un permis d'intervention qui a du bois à flotter devra indemniser certains propriétaires lorsque celui-ci causera des dommages. Qu'en sera-t-il si ces dommages sont causés à l'environnement ou à la qualité de l'eau et qui sera indemnisé? Troisièmement, les objectifs de production sont bien définis pour les essences sapin, épinette et pin gris, mais ils le sont moins dans le cas des autres essences. Quatrièmement, lorsqu'un bénéficiaire n'exécute pas au cours d'une année les travaux prévus au plan, le ministre en assume l'exécution, mais, dans ce cas, on retarde aussi la remise en valeur du territoire et on passe à côté des objectifs poursuivis. Cinquièmement, il existe une multitude de terres agricoles abandonnées un peu partout au Québec. Pourquoi ne pas reboiser les terres qui sont à proximité des usines de transformation? Sixièmement, la période de transition nous a semblé un peu longue. Pourquoi ne pas la réduire de deux années?

C'est, M. le ministre, l'ensemble de nos commentaires sur l'avant-projet de loi et, en terminant, l'ordre des technologues désire faire ressortir les principaux points suivants: Premièrement, de façon générale, l'ordre des technologues appuie l'avant-projet de loi sur la forêt et nous sommes en accord avec les principes énoncés. La forêt québécoise a un urgent besoin de ce nouveau régime forestier. Deuxièmement, l'ordre recommande que le principe du rendement soutenu soit appliqué à tout le territoire et que tous les utilisateurs du couvert forestier participent à sa mise en valeur en proportion des avantages qu'ils en retirent. Troisièmement, l'ordre des technologues recommande que l'application de la Loi sur les forêts soit sous la responsabilité d'un seul ministère, un ministère distinct. En d'autres mots, nous recommandons la création d'un ministère des Forêts. Quatrièmement, l'ordre recommande la reprise en main de la forêt par les professionnels de la forêt sans toutefois donner des exclusivités d'intervention à un type de professionnels ou à un autre. Cinquièmement, l'ordre des technologues recommande que le projet de loi comporte des articles qui traitent de la recherche et du développement pour s'assurer qu'il y aura de la recherche au Québec.

Cela termine, M. le ministre, le mémoire de l'Ordre des technologues des sciences appliquées du Québec. L'ordre espère que la nouvelle loi sur les forêts permettra de donner à tous les Québécois et Québécoises le goût d'un Québec forestier grandeur nature. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Merci,

M. Mercier. M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Merci, M. le Président Merci, M Mercier. Tout comme vous, je souhaite que le projet de loi fasse l'unanimité à l'Assemblée nationale lorsqu'il sera déposé. Grâce à des interventions du genre de celle que vous faites ce soir et à vos recommandations, je suis convaincu que nous pourrons améliorer le projet de loi de façon qu'il satisfasse aux objectifs de tous les Québécois. Je vous remercie de votre présentation. Vous avez pas mal analysé toutes les questions. Vous faites des recommandations précises au titulaire d'un permis d'intervention. Vous nous dites qu'il devra payer des droits qui seront établis sur la valeur du bois sur pied. J'aurais une question à vous poser. Est-ce que vous croyez qu'on doit facturer des redevances sur un volume alloué plutôt que sur le volume coupé?

M. Mercier: Vous me permettrez de céder la parole à M. Leblanc.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, M. Leblanc

M. Leblanc (Serge): Je pense que le fait d'attribuer des droits sur le volume sur pied est un peu plus opportun que sur le volume du bois coupé. Le volume de bois coupé au Québec peut être un peu surestimé compte tenu du bris et des déchets de coupe qui peuvent rester sur les parterres Le volume récolté n'est pas nécessairement tout ce qui est sur pied auparavant. Il serait plus facile de donner des droits sur le bois sur pied, à la valeur marchande du bois debout, pour qu'on puisse faire un peu plus attention au territoire et l'aménager plus convenablement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous croyez que de facturer des redevances sur le volume alloué va faire en sorte qu'il y aura moins de gaspillage en forêt, s'il y en a.

M. Leblanc: J'ai l'impression, oui.

M. Côté (Rivière-du-Loup): J'ai de la difficulté à voir le rapport.

M. Leblanc: Si vous attribuez des droits sur le volume sur pied, j'ai l'impression qu'on n'ira pas chercher du bois un peu partout. On va prendre soin des bordures et de l'approvisionnement un peu plus, donner des techniques d'aménagement et faire des travaux de dégagement, même des travaux sylvicoles à l'intérieur du territoire. Les bois coupés sont payés uniquement en bordure de route et ce qui reste un peu en forêt est délaissé. C'est sûr que ce n'est pas payé mats, par contre, c'est une perte pour l'avenir.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous suggérez également que tous ceux qui profitent de la forêt ou du couvert forestier pour d'autres fins que la récolte contribuent à l'aménagement forestier. Une recommandation comme celle-là, ce n'est pas populaire parce que les pourvoyeurs et les ZEC ne croient pas qu'ils doivent contribuer. Ils pensent que l'industrie fait tellement d'argent qu'elle devrait supporter tout cela.

M. Leblanc: C'est vrai que ce n'est pas une recommandation qui fait plaisir à tout le monde mais tantôt le député d'Ungava a dit que le pêcheur et le chasseur pourraient quand même défrayer les travaux de plantation, de remise en production des forêts du Québec. Je pense que c'est de l'intérêt de tous les Québécois et Québécoises d'avoir une saine forêt et de la remise en production. C'est sûr que cela ne fait pas l'unanimité, mais il va falloir mettre la main à la pâte et redonner le statut forestier au Québec qui a perdu un peu de son intérêt.

M. Côté (Rivière-du-Loup): L'Ordre des technologues des sciences appliquées au Québec regroupe également des techniciens forestiers.

M. Mercier: C'est bien cela.

M. Côté (Rmère-du-Loup): Vous avez 8000 membres?

M. Mercier: Nous avons près de 5000 membres.

M. Côté (Rivière-du-Loup): II y a également des techniciens forestiers au sein de votre groupe?

M. Mercier: Oui.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Nous avons entendu les techniciens forestiers nous présenter un mémoire également.

M. Mercier: D accord. Le technologue de la foresterie chez nous est justement M. Leblanc qui est notre représentant, notre administrateur.

M. Côté (Rivière-du-Loup): D'accord. Quand vous parlez des objectifs de production qui sont bien définis pour les essences sapin, épinette, pin gris - c'est 87 % ou 90 % des opérations forestières au Québec - mais qui le sont moins bien dans le cas des autres essences... Cet après-midi, nous avons eu les intervenants des Hautes-Laurentides qui sont spécialistes dans le feuillu qui ont fait des expériences de la

recherche appliquée. On nous a dit un peu cela aussi. Que suggérez-vous?

M. Leblanc: Le fait pour lequel j'ai avancé cela, c'est que dans le cadre de l'avant-projet de loi, on mentionne la possibilité pour les essences sapin, épinette, pin gris, c'est assez bien déterminé... Par contre, an n'en parle pas beaucoup du côté des feuillus, quand on sait que les essences feuillues sont abondantes dans le Québec actuellement mais que, par contre, d'autres ont été surutilisées, surexploitées et on ne les retrouve plus aujourd'hui. C'est une carence que j'ai trouvée à l'intérieur de l'avant-projet de loi, c'est-à-dire qu'on ne mentionnait pas le calcul de possibilité pour les autres essences que les résineux.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Les intervenants des régions de l'Outaouais, des Hautes-Laurentides, des Cantons de l'Est, du Témiscamingue pensent comme vous, mais on va essayer de faire une correction de façon à tenir compte de la qualité des arbres, et pas seulement du stock ligneux. Dans le cas des feuillus, il faut aller du côté de la qualité beaucoup; dans le cas des essences nobles aussi. Pour l'instant, cela va M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci. À l'organisme qui vient de nous présenter ce court mémoire, qui est tout de même assez étoffé pour le temps que vous avez eu pour le préparer, d'ailleurs, je voudrais poser quelques questions afin d'éclaircir certains points. Depuis combien de temps existe votre Ordre des technologues des sciences appliquées du Québec?

M. Mercier: L'ordre des technologues existe au Code des professions depuis 1980, mais c'était auparavant l'ancienne Corporation des techniciens professionnels qui a vu le jour en 1927, chose que beaucoup de monde ignore.

M. Perron: Vous venez de m'en apprendre une bonne. Maintenant, en rapport avec les 5000 membres dont vous avez fait mention, est-ce que vous pourriez nous dire en gros quelles sont les différentes qualifications par rapport aux membres que vous avez? Je ne vous demande pas de prendre les 5000 un par un, mais, en gros, quelles sont les qualifications de la majorité de vos membres?

M. Mercier: D'accord. Vous me permettrez de passer la parole à M. Dubois à ce sujet.

M. Perron: Parfait, monsieur.

M, Dubois (Denis J.): M. le député, lorsque vous parlez de qualifications, est-ce que vous voulez qu'on vous fasse part des prérequis pour devenir membre ou des différentes disciplines que l'on regroupe?

M, Perron: Non. Ce sont effectivement les différentes disciplines que vous regroupez. C'est surtout cela que je veux toucher. (22 heures)

M. Dubois (Denis J.): Voici. Nous regroupons 24 ou 25 secteurs technologiques issus du milieu collégial, entre autres la foresterie, le bâtiment et les travaux publics, la mécanique, l'électrotechnique, la chimie, les techniques physiques, les techniques maritimes, l'aéronautique et plusieurs autres. Vous me pardonnerez d'en oublier quelques-uns.

M. Perron: Oui. Merci de la réponse. De toute façon cela identifie pas mal l'ensemble de votre ordre, ce que vous venez de dire.

Par rapport aux ingénieurs forestiers et aux techniciens, est-ce que vous pouvez nous situer le travail de votre ordre sur le fond?

M. Dubois (Denis J.): Écoutez, étant personnellement issu du milieu du bâtiment et des travaux publics, M. Leblanc serait plus qualifié que moi pour vous faire le parallèle entre les deux professions.

M. Perron: Oui. En passant, M. le Président, je pense qu'il est de règle générale, lors d'une commission parlementaire, lorsqu'un groupe se présente devant nous, que l'on puisse se passer la parole de l'un à l'autre, il n'y a aucune objection là-dessus, c'est la coutume.

M. Leblanc: M. le député, concernant le rôle que doit jouer l'ingénieur forestier par rapport au technologue en foresterie et même - vous en avez fait mention tantôt, M. le ministre délégué aux Forêts - au technicien, l'ingénieur forestier, c'est un professionnel régi par le Code des professions au même titre que les technologues. Par contre, on peut attribuer à l'ingénieur forestier la conception et la préparation de prescriptions relativement au domaine forestier. Le technologue des sciences appliquées, entre autres en foresterie, ce serait un professionnel de l'application de ces prescriptions, dans le cadre de la protection du public également. Ce sont des membres qui sont accrédités au niveau professionnel, régis par le Code des professions.

Lorsque l'on se rapporte aux techniciens forestiers, ce sont des membres potentiels de l'ordre des technologues qui sont issus des collèges publics, des cégeps, qui ont fait un

cours professionnel en techniques forestières. Alors, ils sont admissibles à l'ordre des technologies. Actuellement, il y a des discussions à ce sujet.

Les professionnels forestiers, au Québec, c'est l'ingénieur forestier concepteur et puis le professionnel de l'application qui est le technologue des sciences appliquées en foresterie.

M. Perron: Merci de la réponse. Maintenant, j'aurais une question à vous poser d'ordre général qui, selon moi, n'est pas mentionnée dans votre mémoire.

Au cours des discussions que nous avons eues avec certains organismes qui se sont présentés devant nous, il fut question des sociétés de conservation du Québec, qui couvrent l'ensemble du territoire quant à la protection forestière concernant les feux de forêt. Il y a deux écoles de pensée qui existent, à savoir qu'il devrait y avoir aussi un organisme quelconque au Québec pour s'occuper, dans le même sens que la société de conservation, des maladies des arbres et des insectes. Est-ce que vous avez une opinion concernant la formation de cette société ou si vous pensez plutôt que ce genre de travail devrait être fait par les sociétés de conservation que nous avons?

M. Dubois (Denis J.): Je m'excuse, M. le député. Je n'ai pas... C'est un problème sur lequel, à ma connaissance, on ne s'est pas penché. Est-ce que M. Leblanc...

M. Leblanc: Concernant les sociétés de conservation, ce sont des organismes qui sont déjà implantés depuis au-delà de dix ans. Elles ont fait leurs preuves dans le domaine de la protection contre les incendies et ont participé à des études sur les récoltes, les maladies et les insectes. Dans le cadre de l'avant-projet de loi, on mentionne également la protection des forêts par un organisme qui devra .. Je ne vais pas le lire... Ce serait de bon augure que les sociétés de conservation puissent quand même participer à la recherche et aux travaux sur les maladies, en entomologie et pathologie également. Elles ont déjà une structure assez établie. Il y aurait un petit problème, peut-être, pour ce qui est des effectifs en place, lors des grosses périodes de combat contre les incendies de forêt au Québec, qui sont assez courtes au printemps. Il y aurait peut-être lieu, dans ce cas, d'avoir une duplication de personnel, si toutes les activités sont regroupées en même temps. Compte tenu de l'expertise que les sociétés de conservation ont développée au cours des dernières années, ils seraient capables, je pense, d'assumer la responsabilité.

M. Perron: Merci. M. le président, à la fin de votre exposé, vous avez mentionné - si je ne m'abuse, et je voudrais que vous complétiez parce que je n'ai pas pris l'ensemble de ce que vous avez énoncé - que seuls les techniciens forestiers devraient être les personnes qui recommandent ou quoi? Je n'ai pas vu la conclusion parce que nous n'avons pas le texte final de ce que vous avez dit.

M. Mercier: Au quatrième point, je mentionnais que l'ordre recommande la reprise en main de la forêt par les professionnels de la forêt, sans toutefois donner des exclusivités d'intervention à un type de professionnel ou à un autre. Lorsque vous parlez des techniciens forestiers, à notre sens, M. le député, ce ne sont pas des technologues. Ce ne sont pas des membres de chez nous, mais ce sont des membres potentiels, remarquez bien. Nous regroupons tout ce qui est de niveau collégial, les diplômes du secteur professionnel...

M. Perron: Monsieur...

M. Mercier: ...ou les équivalences.

M. Perron: D'accord, M. le président. Si je vous ai posé la question, c'est parce que je voulais avoir le terme exact que vous aviez employé à la fin de votre exposé, à la quatrième recommandation, d'ailleurs. Vous parliez des professionnels de la forêt.

À ce moment-là, j'aurais une question à vous poser qui se rapporte, bien sûr, au livre blanc sur la politique forestière de juin 1985 qui parlait de la création d'un conseil consultatif de la recherche forestière. Est-ce que votre organisme a étudié cette question, dans un premier temps? Dans un deuxième temps, est-ce que vous êtes d'accord pour que, dans le projet de loi, on inclue un article se rapportant à ce conseil consultatif de la recherche forestière?

M. Leblanc: M. le député, actuellement, nous sommes réunis en comité, à l'intérieur de l'ordre, pour discuter justement d'un comité consultatif sur la recherche et le développement. Dans notre mémoire présenté aujourd'hui, on mentionne également que le projet de loi devrait comporter un article qui traite de la recherche et du développement. Actuellement, on est en étude pour présenter quelque chose à ce sujet.

M. Perron: Maintenant, puisque l'on parle de ce conseil, est-ce que vous pourriez nous dire quels seraient les organismes qui devraient en faire partie, en tant que conseil consultatif?

M. Leblanc: J'ai l'impression, M. le député, qu'on devrait intervenir. Tous les intervenants du domaine forestier devraient quand même faire partie ou avoir une

opinion à donner sur ce comité consultatif, autant dans le domaine de l'industrie que dans celui de la formation, que ce soit universitaire ou collégiale.

M. Perron: Des représentants de votre ordre...

M. Leblanc: Également, oui.

M. Perron: ...et d'autres associations existantes qui font peut-être, en parallèle, le même travail que vous ou...

M. Mercier: Des gens concernés par la foresterie, oui, d'accord.

M. Perron: Merci. Lorsque vous dites, dans votre mémoire, que vous souhaiteriez que ces directives ne soient pas qu'un guide, mais qu'elles fassent partie intégrante du contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier, je peux vous dire que, de notre côté, on est parfaitement d'accord avec cela. Plus loin, vous dites que le volume de bois alloué annuellement au bénéficiaire ne pourra dépasser le volume par l'addition de la possibilité annuelle à rendement soutenu et de la disponibilité et, là-dessus, nous sommes parfaitement d'accord aussi.

Cela m'amène à une autre question. Je fais référence, par exemple... Lorsque l'on parle de l'application pratique des principes que vous énoncez, le gouvernement peut choisir, selon nous, entre deux voies: Ou il redéfinit les plus petits territoires en surestimant les objectifs de remise en production, ou il délimite de plus grands territoires en escomptant graduellement au mérite les résultats de travaux de remise en production du territoire. Ici, je fais référence - je pense que vous l'avez compris - à ce que l'on appelle communément la forêt électronique. Là-dessus, nous avons pris une position à savoir que cette forêt électronique devrait demeurer dans les ordinateurs du ministère jusqu'à preuve du contraire. D'autre part, nous avons fait une recommandation au gouvernement pour répartir le volume initial sur la base de la possibilité actuelle de 19 300 000 mètres cubes, et attendre les résultats du deuxième inventaire décennal et le premier rapport quinquennal sur l'état de la forêt prévu pour 1990, avant d'escompter les résultats au mérite.

Êtes-vous d'accord avec ce que je viens de dire, comme ordre? Je sais que les membres du gouvernement, les ministériels, ne le sont pas, mais c'est à vous que je le demande.

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre! ...calmez-vous!

M. Leblanc: M. le député, concernant cette question, actuellement le plan décennal n'est pas terminé. Je pense qu'on peut se fier aux études antérieures, à l'ancien plan décennal. Aujourd'hui, je pense qu'il sera accéléré pour en venir à savoir exactement où on s'en va.

La possibilité actuelle de 19 300 000 qui est calculée, je pourrais poser une question à savoir si c'est réellement le bon chiffre, si on parle d'électronique... Cela peut être un peu plus ou un peu moins. Si c'est un peu plus, lorsque le plan décennal sera terminé, j'ai l'impression qu'on sera en meilleure position. Si c'est un peu moins, on prendra les mesures nécessaires. Mais je ne crois pas qu'on puisse attendre encore jusqu'en 1990 pour appliquer des solutions à court terme.

M. Perron: D'accord. Là-dessus, on est d'accord tous les deux.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député...

M. Perron: II y a une chose. Je parlais de la forêt électronique qu'on incluait.

M. Leblanc: Je ne saisis pas, la forêt électronique...

M. Perron: Écoutez, il semble que je n'aie plus de temps. C'est ce que vient de me dire M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre. À moins d'un consentement. Je sais que le député d'Ungava voulait poser quelques questions.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui. M. Leblanc: On va s'entendre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quand vous parlez des chemins forestiers, vous dîtes qu'il serait important de maintenir certains axes routiers en bon état afin de permettre un accès en tout temps pour une meilleure protection des sites aménagés. L'entretien des chemins forestiers dépend des utilisateurs, des bénéficiaires. Si c'est à l'intérieur d'un territoire ou d'une unité de gestion qui a été confiée ou réservée à un détenteur d'un contrat d'approvisionnement et d'aménagement, cela devient sa responsabilité, sauf que, s'il n'en a pas besoin, il ne l'entretiendra pas. Souhaitez-vous que le ministère le fasse?

M. Leblanc: M. le ministre délégué, concernant cette recommandation, on sait qu'il y a remise en production des forêts au Québec après coupe, sous quelque façon que ce soit, que ce soient des plantations

naturelles ou artificielles. On sait qu'il y a des travaux de regarnissage et de dégagement. Toutes sortes de travaux peuvent suivre une plantation.

Si on fait des travaux de remise en production dans des secteurs plus ou moins accessibles où actuellement il y a des chemins, si on veut y retourner dans dix ans pour y faire une couple de dégagements et que le chemin est brisé et n'est plus utilisable, cela représente des coûts supplémentaires dans les travaux de dégagement et d'aménagement. C'est un peu la raison de cette recommandation. Cela devient la responsabilité du bénéficiaire de voir à ce que les travaux soient exécutés par le ministère ou par d'autres organismes pour que le chemin soit accessible en tout temps.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui, mais vous savez, M. Leblanc, que lorsqu'il y a des feux de forêt, 80 % des feux sont causés par des personnes et 20 % par la foudre. Disons que, depuis les dix dernières années, 35 % de ces feux ont été causés par des gens qui allaient se récréer en forêt: des chasseurs, des pêcheurs ou d'autres. Plus il y aura de chemins, à moins qu'on devienne de plus en plus respectueux de la forêt et conscient des dangers - c'est ce que je souhaiterais - plus on prendra de risques.

M. Leblanc: Je suis d'accord sur ce point. Mais, autrefois, on interdisait l'accès aux forêts au simple mortel qui ne pouvait pas aller se récréer en forêt. Il y avait des barrières sur les chemins et on en fermait l'accès. Il y avait quand même des feux et toutes sortes de choses qui arrivaient On a ouvert les barrières, on a ouvert les forêts aux Québécois et aux Québécoises pour qu'ils aillent se récréer. C'est sûr que le risque est plus grand, mais, quand même, il ne faudrait pas revenir en arrière et dire aux personnes: Restez chez vous. On peut aller voir cette forêt pousser. Lorsqu'il y a des travaux d'aménagement qui sont assez bien exécutés, on peut même entendre les arbres pousser, comme on l'a mentionné lors d'une rencontre récemment. On peut laisser les Québécois voir ce qui se passe dans le domaine forestier. (22 h 15)

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je dirais que, de ce côté, il y a eu amélioration. Il se fait de l'éducation, il y a plus de gens qui circulent en forêt qu'auparavant même si le taux est resté assez élevé... Je souhaite que, graduellement, avec toute la publicité qu'on fera autour et les discussions qu'on aura sur la forêt partout au Québec, on la protégera comme il faut et que ce fort taux diminuera.

Lorsque vous parlez de la continuité, vous dites qu'on retarde la mise en valeur du territoire et qu'on passe à côté des objectifs poursuivis, quand le ministère est obligé d'intervenir pour assumer l'exécution des travaux d'aménagement dans certains cas. C'est une question que je pose depuis plusieurs mois: Comment faire pour assurer la continuité sans perte de temps? Si on y va, c'est parce qu'on aura perdu du temps. Est-ce que vous avez une proposition à faire? J'aimerais cela, parce que cela m'a inquiété.

M. Leblanc: M. le ministre, je n'ai pas de solution à vous apporter de ce côté. Il est mentionné dans l'avant-projet de loi que, lorsque le bénéficiaire ne peut pas satisfaire aux objectifs de remise en production, c'est le ministère qui va en prendre charge, mais on vient de perdre une année ou plus. Alors, la solution... C'est une observation que j'ai pu constater à ce sujet.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quand vous parlez de désastres naturels, vous dites que le ministre devrait prendre en charge tout le processus de récupération et de mise en valeur des territoires affectés. C'est le mandat original de REXFOR. Est-ce que vous voulez le confier à REXFOR, parce qu'il y a un comité qui sera formé pour évaluer REXFOP à la suite de diverses recommandations? Est-ce que vous verriez qu'on revienne à cet objectif de départ?

M. Leblanc: L'idée de cette recommandation, provient des désastres causés par les épidémies d'insectes, les feux, etc. Je voyais cela dans le même sens que le back-log - excusez l'expression anglaise -qui va être remis en production par le ministère. J'entrevoyais que ce ne soit pas les industries forestières ou les bénéficiaires qui remettent en production ces aires ou ces surfaces qui sont affectées par des désastres naturels.

M. Côté (Rivière-du-Loup): À votre avis, c'est une orientation que nous pourrions donner à REXFOR.

M. Leblanc: Si ce n'est pas REXFOR, cela pourrait être un autre organisme ou encore des bénéficiaires de contrats d'approvisionnement à l'extérieur de leurs contrats habituels.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Vous souhaitez également que les terres agricoles abandonnées qui ne sont pas trop propices à l'agriculture fassent partie de la révision de la Loi sur la protection du territoire agricole. Sur le principe, on est d'accord pour préserver le territoire agricole, mais il y a des endroits où, probablement, cela aurait dû rester des terres forestières. C'est ce que vous mentionnez dans votre mémoire.

M. Leblanc: Excusez-moi, M. le ministre, je n'ai pas compris la dernière partie de votre question.

M. Côté (Rivière-du-Loup): La révision de la Loi sur la protection du territoire agricole, est-ce que vous souhaitez qu'elle tienne compte des terres agricoles abandonnées qui ne sont pas tellement, qui sont éloignées des grands centres, si vous voulez, et qui ne sont pas tellement aptes à l'agriculture? C'est pour cela qu'elles ont été abandonnées.

M. Mercier: C'est cela.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est ce que vous souhaitez?

M. Mercier: Oui.

M. Leblanc: En circulant au Québec, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de terres qui sont abandonnées, des terres de culture, qui sont laissées en friche. Habituellement, elles sont près des grands centres, des villes, des usines de transformation. Il ne pousse rien là-dessus à part des fardoches, tout ce qu'on veut, des aulnes. Si ces terres étaient mises en production au même titre qu'une forêt privée ou que des zones de banlieue, j'ai l'impression qu'on pourrait en profiter un peu plus. Cela pourrait quand même faire partie de la loi du zonage agricole que les terres agricoles impropres à l'agriculture - on en connaît, on en a vu quelques-unes - soient mises en reproduction forestière. Lorsqu'on parle d'agriculture, on peut parler de sylviculture aussi.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Oui.

M. Leblanc: Planter une pomme, une patate ou un arbre, le geste est presque le même.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Est-ce que c'est votre intention de faire des représentations auprès de M. Pagé...

M. Leblanc: On pourrait...

M. Côté (Rivière-du-Loup): ...ou du comité qu'il a mis sur pied?

M. Leblanc: On pourrait se donner le mandat de...

M. Mercier: On en prend bonne note, M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Quant au producteur forestier, vous savez qu'on prévoit un remboursement de 85 % de ses taxes foncières s'il fait des travaux reconnus par le ministère et qu'il se soumet à un plan de gestion. Je ne sais pas si je me trompe mais vous en voulez plus que cela. Ses travaux d'exploitation sont considérés comme des dépenses. Cela vient contre ses revenus. Quant aux travaux d'amélioration ou d'aménagement, le producteur forestier est éligible à un crédit d'impôt qui représente 85 % de la taxe foncière. Cela est nouveau de cette année.

M. Leblanc: C'est 85 % de la taxe foncière, mais dans le cadre qu'on a discuté ici, on voulait peut-être aller plus loin un peu dans les déductions d'impôt concernant l'application des phytocides, les travaux d'élagage, les travaux de scarification ou toutes sortes de travaux qui entraînent des dépenses pour les producteurs. Cela pourrait être déductible, comme pour une petite entreprise privée qui pourrait déduire... C'est un investissement en fin de compte.

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est comme quelqu'un qui est à son propre compte et qui déduit ses dépenses.

M. Leblanc: Exactement.

M. Côté (Rivière-du-Loup): Je pense que c'est admissible du point de vue de la déduction d'impôt.

Je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le ministre?

Si vous le permettez, avec le consentement de tout le monde, le député d'Ungava aurait quelques brèves remarques ou questions à formuler. Je pense avoir été souple pour le temps de ce côté-ci. Est-ce qu'on pourrait permettre la même chose, à la condition que cela ne s'éternise pas?

M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais faire une petite rectification. Dans sa première intervention tout à l'heure, M. Leblanc a fait référence à ce que j'aurais dit en posant une question au Syndicat des travailleurs forestiers du Québec. Le but de mon intervention était de demander ce qu'ils en pensaient. Je ne me suis jamais prononcé là-dessus. Loin de moi l'intention d'ailleurs de me prononcer, pour le moment en tout cas. J'aurais quand même une question dans la même ligne de pensée. C'est un point qui me préoccupe personnellement beaucoup étant donné que je représente un comté dont la principale source de divertissement est la forêt, à toutes fins utiles. Quand vous parlez des gens qui profitent du couvert forestier à des fins récréatives, j'aimerais savoir exactement ce à quoi vous pensez. Est-ce que vous parlez des gens qui se promènent sur le mont

Royal? Est-ce que vous parlez de ceux qui vivent en forêt à l'année dans de petits villages ou de petites villes isolées et qui n'ont que la forêt pour s'amuser? Est-ce que vous parlez des gens de la ville qui se rendent en avion dans nos grandes forêts pour en extirper quelques orignaux et quelques truites? De qui parlez-vous?

M. Leblanc: Je parle nécessairement des personnes qui profitent du couvert forestier. Une personne qui demeure sur la rue Mont-Royal, à Montréal, et qui va à la chasse en avion profite d'un couvert forestier. Le couvert forestier naturel est là actuellement, mais si on projette cela dans 20 ou 30 ans, le couvert forestier aura été implanté par des méthodes artificielles ou naturelles. On aura investi des sommes de ce côté-là. Il en profitera donc autant que le travailleur forestier.

M. Claveau: Est-ce que vous n'êtes pas en train de nous dire que celui qui utilise la forêt à des fins récréatives et qui ne l'endommage pas du tout, du moins qui ne fait qu'une intervention très minime, doit payer et être pénalisé finalement? En lui enlevant le couvert forestier on le pénalise. Je fais référence surtout... À mon avis les gens de Montréal ont beaucoup d'autres distractions mais les gens de mon comté n'en ont pas beaucoup d'autres. Du fait qu'ils sont pénalisés parce qu'on leur a enlevé un couvert forestier, ils doivent payer en plus pour pouvoir le récupérer éventuellement, pour que leurs petits-enfants puissent retourner dans la forêt?

M. Leblanc: La personne qui demeure dans votre comté d'Ungava est une personne qui travaille en forêt durant la semaine. Même en fin de semaine elle profite quand même du couvert forestier. Elle ne profitera pas du couvert forestier lorsqu'elle l'aura coupé. Si on veut qu'un couvert revienne sur ce territoire, il va falloir faire des travaux, il va falloir investir. La personne doit quand même investir également. Je ne sais pas si...

M. Claveau: Je ne suis toujours pas satisfait de la réponse. On ne s'éternisera pas là-dessus. Il y a sûrement d'autres intervenants qui vont en parler. J'aurais une dernière question. Quand vous parlez de créer un ministère de la forêt, vous avez fait référence tout à l'heure au fait de reboiser certaines terres agricoles abandonnées, il y a aussi toute la question de la gestion des terres. Il ne faut pas oublier que les gens qui vont en forêt paient toutes sortes de redevances, que ce soit pour un camp de chasse, que ce soit pour un permis de chasse ou de pêche, etc. Il y a des contribuables qui paient par le fait même à partir du moment où le gouverne- ment intervient dans le reboisement, la reforestation. Quand vous nous parlez d'un ministère des forêts, est-ce que vous incluez là-dedans aussi tout le mode de gestion des terres? Est-ce qu'on parle d'un ministère des terres et forêts ou si on parle uniquement d'un ministère des forêts?

M. Leblanc: Vous venez de séparer le ministère des terres et forêts et le ministère des forêts. J'ai l'impression que le ministère des forêts... À l'intérieur des forêts, il y a quand même des terres qui sont, soit agricoles, soit forestières. On pourrait quand même inclure la gestion des terres à l'intérieur d'un ministère des forêts qui n'est pas propice à l'agriculture mais à l'intérêt forestier. Ce à quoi on fait allusion, c'est aux intervenants d'autres ministères qui viennent morceler le territoire forestier. La gestion est faite uniquement par ces ministères. Il y aurait peut-être une gérance autonome, distincte du ministère des forêts qui pourrait inclure la gestion des terres également.

M. Claveau: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va? M. le député de Duplessis, si vous voulez remercier nos invités.

M. Perron: Merci, M. le Président. Un court commentaire, pas de question. Dans votre mémoire, vous mentionnez que vous approuvez l'incitation à ce que les bénéficiaires fassent des travaux d'aménagement dont le rendement escompté aura pour effet... Quant à nous, nous sommes parfaitement d'accord avec une formule d'incitation. Par contre, nous ne sommes pas d'accord pour permettre à l'industrie forestière de ne pas payer de droits de coupe sur l'accroissement de la possibilité. Je pense qu'on se comprend lorsqu'on parle d'accroissement de la possibilité.

Je tiens en terminant à vous remercier de la présentation de votre mémoire ainsi que d'avoir répondu à nos questions qui, à mon sens, ont reçu de très bonnes réponses. Je vous souligne en passant que nous avons un énorme travail à faire au cours des prochains mois et que nous tiendrons sûrement compte de certaines recommandations de votre mémoire pour faire des recommandations au gouvernement actuel. Merci, M. le président, ainsi qu'à votre équipe.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le président, je vous remercie de votre intervention et du mémoire que vous vous êtes donné la peine de rédiger ainsi que de

votre souci pour la forêt. Étant donné que vous représentez plusieurs disciplines, c'est tout à votre honneur de prendre soin d'une discipline qui n'est peut-être pas majeure chez vous mais qui l'est pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Je vous félicite de votre intervention et je vous remercie de l'échange de propos que nous avons eu; cela a été très agréable.

Le Président (M, Charbonneau): Merci, M. le ministre. Messieurs, merci de votre présence et bon retour. Sur ce, les travaux de la commission et de la consultation particulière en cours sont ajournés à demain matin, 10 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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