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(Seize heures trente minutes)
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): À
l'ordre, s'il vous plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources se réunit pour étudier la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour l'année 1984.
Les membres de la commission sont M. Beaumier (Nicolet), M. Bordeleau
(Abitibi-Est), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Fortier
(Outremont), M. Kehoe (Chapleau), M. Lavigne (Beauharnois), M. LeBlanc
(Montmagny-L'Islet), M. Middlemiss (Pontiac), M. Tremblay (Chambly), M.
Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M.
Bisaillon (Sainte-Marie), M. Desbiens (Dubuc), M. Dussault (Châteauguay),
Mme Harel (Maisonneuve), M. Leduc (Saint-Laurent), M. Mathieu (Beauce-Sud), M.
Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Perron (Duplessis), M. Vallières
(Richmond).
M. le ministre, auriez-vous une suggestion pour nommer un rapporteur,
s'il vous plaît?
M. Fortier: Des substitutions, M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Des
substitutions?
M. Fortier: J'aimerais que M. Bourbeau (Laporte) remplace M.
Ciaccia (Mont-Royal).
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. Ciaccia
(Mont-Royal)...
M. Fortier: Remplacé par M. André Bourbeau
(Laporte).
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Oui.
M. Fortier: M. Mathieu (Beauce-Sud) remplacé par M.
Ghislain Maltais (Saguenay). On va avoir deux autres députés
cette semaine. Alors...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
Maintenant, si ces changements sont acceptés, M. le ministre,
auriez-vous une suggestion pour nommer un rapporteur?
M. Duhaime: D'habitude, c'est M. LeBlanc. Il fait bien cela.
Une voix: Ah oui, M. LeBlanc. M. Duhaime: M. LeBlanc.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, M.
LeBlanc (Montmagny-L'Islet) sera rapporteur de la commission.
M. Duhaime: C'est pour assurer la continuité.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
ministre, est-ce que vous avez des remarques préliminaires?
Remarques préliminaires M. Yves Duhaime
M. Duhaime: Oui, M. le Président. Si mes collègues,
membres de cette commission étaient d'accord, j'aurais l'intention de
faire un très bref exposé. J'imagine bien que quelqu'un de
l'Opposition, sans doute le député d'Outremont, va vouloir faire
un exposé aussi. Et ensuite, nous pourrions entendre le président
du conseil d'administration d'Hydro-Québec, M.
Bourbeau, et le P.-D.G. de l'entreprise, M. Coulombe, de même que
toute autre personne d'Hydro-Québec dont les présidents
pourraient juger le témoignage utile pour l'information des membres de
la commission.
M. le Président, j'aborderai bien brièvement quelques
points au début des travaux de notre commission parlementaire qui,
normalement, porte essentiellement sur la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour 1984. Or, c'est bien connu qu'au cours des travaux
de cette commission qui doit normalement faire l'étude d'une proposition
tarifaire, nous avons toujours - et je dirais presque par bonne habitude -
débordé de la proposition tarifaire pour parler également
du plan d'équipement d'Hydro-Québec ou de tout autre' sujet
relatif aux questions d'énergie. Et je pense que c'est souhaitable que
l'on puisse poursuivre de cette manière.
Je crois également pouvoir vous dire que nous avons rempli un
engagement important. Nous avons acheminé, en temps utile je crois, tout
document demandé par l'Opposition pour lui permettre de se
préparer à aborder les travaux de la commission
d'aujourd'hui.
Donc, les propositions tarifaires qui ont été rendues
publiques par la direction d'Hydro-Québec au cours de la semaine
dernière recommandent au gouvernement d'accepter une hausse moyenne de
l'ensemble des tarifs pour les onze mois de 1984, c'est-à-dire à
compter du 1er février, une hausse moyenne de 3,4%. C'est donc dire que
cette hausse varie, suivant la catégorie d'abonnés, de 0%
à un maximum de 5,5%.
Je voudrais tout de suite souligner que la hausse demandée par
Hydro-Québec est inférieure au taux de l'inflation prévu
-prévu aujourd'hui en tout cas - pour l'année 1984 et que, par
ailleurs, la proposition d'Hydro-Québec implique un gel effectif du prix
de l'électricité utilisée à des fins de chauffage
dans le secteur résidentiel. Ce qui signifie en tout état de
cause une diminution du coût du chauffage, si on tient compte de
l'inflation.
J'ajouterais peut-être au tout début de nos travaux que,
traditionnellement, les hausses tarifaires à Hydro-Québec - parce
qu'à ma connaissance il n'y a jamais eu de baisse tarifaire - ont
toujours été proposées au gouvernement pour prendre effet
à compter du 1er janvier. À la réflexion, je crois que
nous aurions intérêt à entendre Hydro-Québec
là-dessus, mais il n'est pas écrit dans le Nouveau Testament que
la hausse tarifaire doive nécessairement se produire le 1er janvier; la
preuve c'est qu'en 1984, ce sera le 1er février. Je crois que si cette
hausse arrivait en dehors du contexte de nos travaux - d'une année
à l'autre, c'est la même chose - fin novembre ou encore en
décembre, il serait plus sage de songer à un nouveau calendrier,
c'est-à-dire songer qu'une hausse tarifaire d'Hydro-Québec
pourrait entrer en vigueur durant l'été, le 1er juillet par
exemple, ou le 1er juin, ou le 1er août. Le débat est ouvert
là-dessus et si l'Opposition a de sages conseils et des suggestions
à nous faire dans ce sens, on l'écoutera très
attentivement. Je ne dis pas que cela pourrait prendre effet automatiquement
dès l'an prochain sans ajustement. Encore faudra-t-il voir l'impact sur
les équilibres financiers d'Hydro-Québec et ses revenus
escomptés. Je dis au début de nos travaux que c'est un sujet qui
mériterait discussion pour que, dès l'an prochain, on puisse -
pour 1985, bien sûr - envisager un scénario comme
celui-là.
Bien sûr que toute demande tarifaire d'Hydro-Québec
s'inscrit nécessairement dans un plan de développement dont
Hydro-Québec nous a fourni les grands paramètres. Ces documents
ont été rendus publics et ils sont disponibles; le plan de
développement d'Hydro-Québec 1984-1986 sur l'horizon 1993. Toute
la question des investissements d'Hydro-Québec et ses tarifs revêt
une importance que j'ai à peine besoin de souligner d'une façon
plus particulière dans la conjoncture de reprise économique que
nous souhaitons vivre de la façon la plus marquée possible. Lors
des récents travaux de cette commission, sous le thème:
"L'énergie, levier de développement économique", dont les
dernières séances ont eu lieu en octobre, il est très
clairement apparu qu'Hydro-Québec détenait, selon sa vocation
même, une place centrale dans la stratégie de développement
économique du Québec, que ce soit en raison des effets directs
des investissements consentis par Hydro-Québec ou encore de
l'utilisation de nos disponibilités électriques pour attirer de
nouvelles implantations industrielles. Le poids relatif d'Hydro-Québec
dans l'économie du Québec n'a jamais été aussi
considérable et l'attention que nous devons apporter aux orientations de
la société d'État est à la mesure, bien sûr,
de cette importance.
Un rapide rappel de l'impact des politiques de développement
appliquées au cours des dernières années par
Hydro-Québec fournit une illustration assez saisissante de la place qu'a
prise la société d'État dans la construction au
Québec. Au cours des cinq dernières années,
Hydro-Québec a consenti des investissements de 13 200 000 000 $, soit en
moyenne 21% de tous les investissements publics et privés
effectués durant cette même période au Québec.
Grâce à ces investissements, la puissance installée
d'Hydro-Québec est passée de 13 000 mégawatts à 19
100 mégawatts, soit une augmentation de sa capacité de production
de 47%. Les actifs globaux d'Hydro-Québec ont été
portés - en chiffres arrondis - de 13 000 000 000 $ à 23 000 000
000 $, soit pratiquement le double sur cinq ans. En 1985, une fois les travaux
en cours à LG 3 et LG 4 terminés, la puissance installée
disponible d'Hydro atteindra 24 200 mégawatts. Si l'on ajoute à
ce total la capacité installée chez les autoproducteurs, comme
Alcan, comme Reynolds, comme Quebec North Shore et d'autres, ainsi que la
capacité de Churchill, à la fin de 1985, les
Québécois disposeront d'équipements de production
électrique d'une puissance installée de 32 800 mégawatts,
à 95% hydroélectrique.
Donc, au cours des dernières années, nous avons pu
assister à une mise en valeur extrêmement rapide des richesses
hydroélectriques du Québec, grâce à un effort
assumé entièrement par l'ensemble des Québécois.
Les conditions techniques et financières dans lesquelles cet effort a
été consenti sont plus que satisfaisantes. Hydro est, depuis
quatre ans, la première compagnie canadienne sur le plan des actifs
comme des revenus nets. Pour les neuf premiers mois de l'année 1983, les
revenus nets d'Hydro-Québec se sont élevés à
584 000 000 $, soit 17 000 000 $ de plus que durant la période
correspondante l'an dernier. Et tout récemment, la compagnie d'analystes
financiers, Kidder Peabody, dans un rapport publié le 8 novembre - c'est
donc tout récent - considère qu'aucune autre compagnie
d'électricité des États-Unis ou du Canada ne peut
être comparée à Hydro-Québec, que l'on fasse
référence à ses performances financières ou
à sa situation sur le marché énergétique, et par
voie de conséquence, je crois que Kidder Peabody indiquait
qu'Hydro-Québec mériterait AAA comme cote sur les marchés,
ce avec quoi je suis parfaitement d'accord.
Grâce aux investissements massifs consentis, le Québec
dispose donc maintenant d'un outil de développement exceptionnel qu'il
nous appartient d'utiliser d'une façon optimale.
Indépendamment des effets directs que les investissements d'Hydro
ont eus sur l'activité économique - on peut citer pour
mémoire le développement à Montréal de firmes de
génie-conseil parmi les plus importantes du monde - la mise en valeur de
nos richesses hydroélectriques nous donne maintenant une marge de
manoeuvre que nous pouvons utiliser d'au moins trois façons.
D'abord, Hydro est en mesure d'offrir des blocs d'énergie et de
puissance à des conditions particulièrement avantageuses et cela
aussi bien à des entreprises déjà installées au
Québec qu'aux compagnies souhaitant venir s'implanter sur notre
territoire. Les offres d'Hydro ont été rendues possibles
grâce à la disponibilité d'importants excédents, qui
résultent eux-mêmes en grande partie du décalage existant
entre l'accroissement rapide de la capacité de production et
l'évolution de la demande. Un tel décalage est inhérent
à la nature même des équipements mis en service par Hydro.
Les développements hydroélectriques des dernières
années sont effectués à partir de grands projets qui
arrivent sur le marché sur une très courte période de
temps. Par exemple, depuis cinq ans, la mise en service des centrales du
complexe La Grande signifie l'addition de 1500 mégawatts en moyenne
chaque année.
C'est pour cette raison qu'en même temps que les nouvelles
unités de production ont été mises en service,
Hydro-Québec élaborait plusieurs programmes visant à
écouler rapidement les surplus momentanément disponibles et cela
en vue de favoriser à terme le développement de nouveaux
marchés.
Et je voudrais tout simplement, pour mémoire, les mentionner au
passage, en tenant pour acquis que, par des questions ou autrement, les
dirigeants d'Hydro-Québec pourront revenir là-dessus. D'abord, en
1982, Hydro-Québec mettait en place un premier programme d'installation
de chaudières industrielles à l'électricité avec,
bien sûr, des subventions à la conversion et un tarif de quatre
ans. De même, en 1982, Hydro a offert aux consommateurs
résidentiels un programme biénergie. Et ici, c'est important de
le rappeler, il s'agit de déplacer du pétrole. Les objectifs
initiaux d'Hydro-Québec ont été dépassés; je
parle essentiellement du programme biénergie pour les consommateurs
résidentiels. Lors du lancement du programme, Hydro-Québec
comptait procéder à l'installation de 100 000 systèmes
biénergie dont 28 000 en 1983 et 48 000 en 1984.
Au 1er octobre 1983, environ 65 000 demandes de subventions
étaient déjà enregistrées, soit plus du double de
l'objectif initial. Dès juin 1983, Hydro-Québec rendait public un
programme de rabais tarifaire s'adressant aux industries déjà
existantes, qui accroîtrait leur consommation d'énergie
électrique par rapport au niveau des trois dernières
années. Ces rabais peuvent aller jusqu'à 50% durant les
premières années et s'étendre jusqu'en 1990. La
disponibilité des surplus a permis au gouvernement et à Hydro de
provoquer, en outre, la réalisation d'investissements majeurs dans le
secteur de l'aluminium. (16 h 45)
En raison même des avantages tarifaires consentis à partir
d'excédents prévisibles de production, la compagnie Reynolds a
décidé d'un investissement d'un demi-milliard pour
accroître sa capacité de production, de même que la
compagnie Pechiney Ugine Kuhlmann a commencé ses premiers travaux pour
l'implantation d'une aluminerie sur le site de Bécancour pour un
investissement d'un milliard et demi de dollars.
Enfin, nous nous trouvons ici devant un phénomène tout
à fait nouveau, je dirais, par son ampleur, c'est que nous assistons
à la relocalisation de la capacité de production mondiale suite
à la hausse phénoménale des prix de
l'électricité de certains pays producteurs.
Nous croyons que cette situation qui s'offre au Québec nous donne
des possibilités pour attirer d'abord chez nous des investissements
majeurs, de grande taille dans d'autres secteurs industriels tels que
l'électrométallurgie, l'électrochimie et la chimie
minérale.
L'objectif de notre gouvernement est donc de faire en sorte que ce que
nous avons observé dans les investissements dans le secteur de
l'aluminium se reproduise dans les autres secteurs d'activité où
nos disponibilités hydroélectriques nous confèrent un
avantage comparatif déterminant.
D'autres programmes tarifaires sont actuellement sur le point
d'être lancés. C'est le cas notamment du programme de conversion
à la biénergie des édifices des secteurs public et
parapublic.
Comme le premier ministre l'annonçait lui-même le 13
novembre dernier, Hydro offrira également un nouveau tarif aux usines
d'épuration des eaux construites et gérées par les
municipalités. C'est une réduction très importante de
l'ordre de 50% des tarifs pour les usines dont la charge d'alimentation est
supérieure à 35 kilowatts.
Pour les autres usines, le tarif appliqué sera le tarif G
diminué de 25%, ce qui, en éliminant le jargon, ramène le
prix de l'énergie à un niveau comparable aux meilleurs tarifs
industriels pratiqués par Hydro-Québec.
Également, Hydro-Québec travaille à mettre au point
un programme de stabilisation tarifaire applicable au secteur industriel.
Ici, M. le Président, je souligne que c'est grâce aux
investissements consentis par Hydro pour accroître sa capacité de
production que nous sommes aujourd'hui en mesure d'offrir des conditions
d'approvisonnement électrique qui commencent à avoir des
incidences significatives sur le développement manufacturier du
Québec. Et c'est là notre première priorité.
Les capacités installées d'Hydro-Québec nous
permettent également d'envisager de vendre sur le marché
américain d'importantes quantités d'électricité qui
réduiraient d'autant le déficit de notre balance
énergétique.
En 1982, les exportations québécoises
d'électricité nous ont rapporté 476 000 000 $, soit 100
000 000 $ de plus que l'année précédente. Durant cette
même année, le Québec a exporté 18 000 000 000 de
kilowattheures, soit 13,2% de la production totale d'électricité
disponible sur notre marché.
Au cours des prochaines années, nos ventes
d'électricité sur le marché américain
connaîtront un développement supplémentaire. Dès
1984, Hydro-Québec commencera à livrer à New York de
l'énergie électrique à la suite de l'entente signée
en mars 1982 et qui prévoit la vente de 111 000 000 000 de
kilowattheures sur une période de 13 ans.
En 1986, d'autres livraisons seront faites en Nouvelle-Angleterre; il
s'agit du contrat conclu en mars 1983 avec le New England Power Pool et qui
prévoit la livraison de 13 000 000 000 de kilowattheures sur une
période de 11 ans.
Au cours des cinq prochaines années, Hydro-Québec estime
être en mesure de vendre, sur le marché américain, environ
80 000 000 000 de kilowattheures d'énergie électrique et
encaisser ainsi les revenus de 3 600 000 000 $.
Je rappelle essentiellement que le total des deux contrats de vente
d'énergie excédentaire, le contrat de New York et le contrat de
la Nouvelle-Angleterre, soit un total de 144 000 000 000 de kilowattheures,
devrait rapporter au Québec 12 000 000 000 $, en dollars courants bien
sûr.
Je voudrais aussi rappeler de nouveau le contenu de la politique de
notre gouvernement en matière d'exportation d'électricité
et comment, selon nous, ces exportations doivent être reliées au
plan de développement d'Hydro-Québec. Pour le gouvernement, il
est essentiel que l'on fasse d'abord porter nos efforts sur la
négociation et la signature de contrats d'exportation avant d'ajuster le
plan de développement et les investissements aux ventes ainsi conclues.
Procéder à l'inverse serait à la fois hasardeux et
téméraire et aurait pour effet de nous faire perdre le
bénéfice de notre position privilégiée
actuelle.
C'est en conformité avec cette stratégie que le
gouvernement a obtenu la signature des deux ententes avec le New York Power
Authority et le New England Power Pool. Notre objectif est maintenant de
conclure des contrats d'exportation d'énergie ferme. C'est d'ailleurs
à cette fin que j'effectuais la semaine dernière une
tournée dans quatre États de la Nouvelle-Angleterre et que nous
recevrons vendredi prochain la visite du gouverneur de l'État de
New-York, M. Cuomo. Ce n'est qu'une fois ces contrats conclus que l'on pourra
apprécier l'ampleur des investissements effectués et des
modifications à apporter au plan de développement
d'Hydro-Québec. Une fois ces contrats d'énergie ferme
signés et négociés, nous pourrons envisager des contrats
d'exportation de puissance ferme vers les États-Unis.
Grâce à la mise en valeur de notre potentiel
hydroélectrique, nous avons ainsi la possibilité de limiter le
déficit de la balance commerciale du secteur énergétique.
En 1982, et pour la première fois depuis dix ans, le déficit des
échanges énergétiques n'a pas augmenté se
stabilisant à environ 4 400 000 000 $. Ce résultat est d'autant
plus encourageant qu'il s'est produit alors que les prix du pétrole brut
importé par les raffineurs augmentaient de 21%. Le développement
de nos richesses hydroélectriques agit, en fait, de deux façons
sur notre balance commerciale. Directement et comme on vient de le voir, ce
développement permet d'accroître nos exportations
d'électricité et donc de financer une partie de notre facture
énergétique. Mais c'est également grâce à nos
disponibilités en hydroélectricité que nous avons
été en mesure, au cours des dernières années, de
réduire considérablement la place relative des formes
d'énergie importée en remplaçant le pétrole par
l'électricité.
Je termine, M. le Président, en indiquant une troisième
série d'actions qui
ont été rendues possibles grâce aux efforts
consentis dans la mise en valeur de notre potentiel hydroélectrique. Je
veux parler ici des politiques visant à modifier directement la
structure de notre bilan énergétique afin de réduire
l'importance relative des produits pétroliers.
Je voudrais simplement rappeler que le Québec connaît
depuis le milieu des années soixante-dix une mutation rapide de sa
consommation énergétique. En six ans, la part de
l'électricité dans le bilan énergétique du
Québec est passée de 22% à 32% alors que cette part
était restée pratiquement constante au cours de la
décennie précédente. Simultanément, l'importance
relative du pétrole a décru considérablement.
Actuellement, cette forme d'énergie, le pétrole,
représente moins de 60% du bilan énergétique
québécois contre 75% de ce même bilan en 1972. En valeur
absolue, la consommation québécoise d'électricité a
augmenté de plus de 50% en dix ans tandis que la consommation de
pétrole retrouvait, l'année dernière, son niveau de 1966.
Sur le plan strictement énergétique, les investissements
d'Hydro-Québec ont donc eu pour résultat de renforcer
significativement la situation du Québec, d'accroître notre niveau
d'autosuffisance et d'améliorer sensiblement la fiabilité de nos
approvisionnements en énergie. Ce phénomène de
pénétration d'électricité devrait se poursuivre au
cours des prochaines années, en raison, notamment, de l'impact qu'auront
les programmes spéciaux dont je parlais tout à l'heure. Je
rappelle que l'objectif poursuivi par notre gouvernement est de faire en sorte
que l'électricité représente, en 1990, 40% de notre bilan
énergétique et 50% du bilan en l'an 2000.
M. le Président, je crois vous avoir brossé à
grands traits les orientations. Je pense que cette année,
Hydro-Québec nous présente un tarif avantageux pour les
consommateurs, spécialement pour les abonnés des secteurs
résidentiels pour ce qui est de la deuxième tranche, donc la
partie chauffage. Nous aurons l'occasion de discuter du plan
d'équipement. Et je pense qu'on va noter avec bonheur que les
projections d'investissements d'Hydro-Québec, en termes
d'investissements nets pour l'année 1984, sont à la hauteur de 1
700 000 000 $ et que l'objectif pour 1985 est de maintenir ces investissements
au même niveau. Cela veut dire que, pour 1983, 1984 et 1985 il y aura eu
une continuité dans l'effort d'investissement d'Hydro-Québec.
J'ai tenu à rappeler, M. le Président, parce qu'on en
parle beaucoup, de ce temps-ci, d'un brunch à l'autre, que nous n'avons
pas changé nos priorités. Nous voulons donner la priorité
absolue au développement économique du Québec en offrant
aux entreprises déjà existantes comme à celles qui veulent
s'installer au Québec un politique tarifaire concurrentielle et de
longue durée.
Le dossier des exportations reste, pour nous, prioritaire, bien
sûr. Je crois que le premier ministre a rappelé, le 13 novembre,
à l'aide d'un tableau fort éloquent que ces exportations
d'énergie, à peu près inexistantes avant 1976, ont connu
une croissance très rapide. Nous allons nous retrouver en 1988 - si ma
mémoire est bonne - avec un volume d'exportations d'environ 800 000 000
$.
Je rappelle aussi que le jour où l'Opposition, entre deux
brunchs, aura eu l'occasion d'établir ses grandes orientations, à
savoir si on privilégie le mazout, le gaz naturel, Hydro-Québec,
le soleil ou la tourbe, je pense qu'on pourra discuter de façon un peu
plus sérieuse. Quant à nous, j'ai tenu à faire ces
remarques préliminaires peut-être un peu longues, mais qui vous
permettent de vous faire une bonne idée où nous allons. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Merci, M.
le ministre de l'Énergie et des Ressources. Maintenant, le critique
officiel de l'Opposition, M. le député d'Outremont pour les
remarques préliminaires.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: C'est bien cela, M. le Président. Au nom de
l'Opposition, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue au président
du conseil, au président d'Hydro-Québec et aux nombreux cadres
qui l'accompagnent. Je suis certain que nous aurons des échanges
fructueux et je les en remercie à l'avance. Je les remercie d'ailleurs
de nous avoir permis des échanges, la semaine dernière, qui nous
ont permis de saisir de plus près l'information contenue dans les
documents qu'on nous a remis il y a quelque neuf jours.
Nous avons eu peu de temps pour étudier l'information plus
détaillée qu'à l'accoutumée fournie par
Hydro-Québec. Nous les en remercions. Comment le gouvernement et le
ministre peuvent-ils espérer que nous, parlementaires, puissions faire
une étude approfondie des conséquences économiques,
financières et politiques des modifications extrêmement
importantes apportées au plan de développement
d'Hydro-Québec ainsi qu'à sa politique tarifaire en une semaine.
Demander aux membres de cette commission parlementaire de faire un tel travail
en quelques jours, alors que le gouvernement a eu toute cette documentation et
même plus depuis le 29 septembre, c'est faire peu de cas du
système parlementaire et cela démontre le mépris dans
lequel il tient le public en général ainsi que les divers agents
économiques.
En effet, ces derniers ont demandé à
plusieurs reprises d'être entendus ou, à tout le moins,
d'avoir le temps d'examiner les demandes d'augmentation de tarifs
d'Hyro-Québec pour pouvoir faire connaître leurs commentaires et
leurs représentations. Mais non, ce gouvernement, qui est de plus en
plus coupé de la population, continue de faire fi de ces
doléances. Au contraire, depuis le 29 septembre, il a tenu, semble-t-il,
sa propre commission parlementaire en catimini au point où on se
demande, M. le Président, si l'exercice qui commence aujourd'hui n'est
qu'une parade avant d'officialiser les décisions qui ont
déjà été prises par le Conseil des ministres.
On est loin de la transparence et de l'engagement du public dans les
questions énergétiques que nous promettait le livre blanc de M.
Joron, en 1978. À cause de cette attitude, il ne faut pas se surprendre
si la population québécoise, chaque fois qu'elle en a l'occasion,
fait connaître d'une façon péremptoire son rejet de ce
style de gouvernement.
D'ailleurs, il n'y a pas que la population qui ne fait plus confiance au
gouvernement. En effet, de façon très discrète, comme il
se doit, mais, néanmoins éloquente pour quiconque sait
interpréter les indices économiques, on se rend compte que
même Hydro-Québec ne fait pas confiance au gouvernement pour
assurer la relance de l'économie. Ceci est extrêmement
sérieux et grave de conséquences pour les milliers de
chômeurs, des jeunes en très grand nombre. (17 heures)
En effet, je me dois de souligner, M. le Président, que les
études très poussées faites par Hydro-Québec
concluent à un développement économique pour les
prochaines années qui est plus faible que celui prédit par le
Conference Board dernièrement. Hydro-Québec, pour sa part,
prévoit une croissance réelle du Québec inférieure
à celle du Canada en 1983, 1984 et 1985.
Ce n'est, en fait, qu'en 1986, qu'Hydro-Québec envisage pour le
Québec, un taux de croissance conforme à l'objectif fixé
le 13 novembre dernier par le premier ministre, à savoir, et je cite:
"susciter un élan et donner ainsi, pas seulement cette année mais
de façon permanente, un rythme de croissance supérieur à
la moyenne canadienne".
Cette vision pessimiste de l'action gouvernementale et de
l'économie du Québec transparaît encore davantage dans le
graphique no 1 du document traitant de la demande d'électricité
au Québec jusqu'en l'an 2001 et intitulé "Produits
intérieurs réels du Québec de 1966 à 2001".
Quoique toutes les données produites par les experts
d'Hydro-Québec pour pouvoir construire ce graphique n'aient pas
été rendues publiques, on peut quand même en tirer des
informations très précieuses. On y constate que c'est à
partir de 1976 que les experts d'Hydro-Québec ont commencé
à réduire le rythme de croissance du potentiel de notre
économie. C'est également à partir de cette date que s'est
creusé, d'après eux, un écart de plus en plus important
entre le niveau potentiel et le niveau réel d'activité
économique.
Après la récession de 1982, chute de 6,5% du produit
intérieur réel, l'écart avec le potentiel pourtant revu
à la baisse serait de l'ordre de 8%.
De plus, on y constate que nous terminerons l'année 1983 à
un niveau d'activité économique comparable à celui de
1977.
D'ailleurs on ne devrait pas s'en surprendre puisque les investissements
totaux qui seront faits par le secteur privé au Québec en 1983,
seront de 1 000 000 000 $ de moins qu'en 1976 lorsqu'on fait la comparaison en
dollars constants de 1971.
La crise économique de l'an dernier n'explique pas tout, loin de
là, puisque ces mêmes investissements totaux du secteur
privé ont chuté depuis 1976, année où ils avaient
atteint un maximum de 3 800 000 000 $.
Il n'est pas douteux que ces véritables désastres
expliquent, en partie, les révisions à la baisse de la demande
électrique au Québec et que, par voie de conséquence,
l'existence des surplus, la piètre performance du gouvernement dans le
domaine économique explique une bonne partie des surplus
d'électricité.
Enfin, il convient de noter le jugement sévère que pose
indirectement Hydro-Québec sur l'impact des efforts de relance du
gouvernement. Il faudra attendre, selon ces projections, jusqu'en 1991, avant
que ne se résorbe l'écart de potentiel qui s'est ouvert en 1982.
Ce n'est qu'à partir de cette date que l'économie du
Québec retrouverait un niveau d'activité en gros compatible avec
un niveau d'emploi plus raisonnable.
Dans l'analyse de sensibilité sur la demande
énergétique faite par Hydro-Québec, il ressort très
clairement que la demande électrique suit de très près le
développement industriel du Québec. En effet, au tableau 21,
Hydro-Québec nous dit qu'une croissance forte de la demande
d'électricité par rapport au scénario de base
dépendrait, dans une proportion de 70%, de la demande dans le secteur
industriel.
Devant la piètre performance économique du Québec
depuis 1976 et comme on vient d'en faire l'analyse, il ne faut pas se
surprendre outre mesure si, d'optimiste qu'elle était il y a quelques
années, HydroQuébec est devenue pessimiste dans ses
prévisions énergétiques.
Mais peut-être Hydro-Québec est-elle devenue trop
pessimiste? Selon l'avis de nombreux experts dans le domaine des
prévisions énergétiques, il serait dangereux
d'extrapoler à partir de l'expérience vécue des
dernières années et de croire que la baisse de la consommation
énergétique est permanente et en très grande partie due
aux économies d'énergie d'autant plus que les consommateurs ont
réagi tout naturellement à des hausses de prix ■
extrêmement importantes alors que l'avenir prévisible nous annonce
des prix stables et même plus bas que l'inflation.
En effet, le professeur Antoine Ayoub, directeur du groupe de recherches
en économie d'énergie à l'Université Laval et
président du conseil d'administration de SOQUIP jusqu'à tout
récemment, dans une présentation qu'il faisait le 20 septembre
dernier devant cette commission parlementaire, nous faisait part de ses
interrogations face à cette question. "Peut-on affirmer, disait-il, que
nous sommes installés définitivement et irrévocablement
dans une société moins énergivore, que la
frénésie de la consommation ne démarrera pas suite
à une reprise de l'économie car, s'il est indéniable que
la hausse des prix internes du pétrole et des produits
dérivés a joué un rôle dans la baisse de la
consommation l'exemple de la consommation d'essence est éloquent
à cet égard - il serait quand même erroné d'admettre
que la totalité de cette baisse lui soit attribuable ou qu'elle soit
attribuable aux mesures d'économie d'énergie étant
donné la récession qui sévit pratiquement depuis
1979."
Après une analyse de la consommation énergétique en
rapport avec le développement économique, il concluait que le
ratio de ces deux indices de développement devrait se situer tout
près de 0,7. D'ailleurs, ce sujet avait été discuté
abondamment lors du colloque international tenu à Québec au
début de septembre, où le point de vue du professeur Ayoub avait
reçu l'aval de nombreuses sommités, dont celui du
secrétaire général de l'Agence internationale de
l'énergie, le Dr Ulf Lautzke.
Or, je constate, M. le Président, à la lecture de la
documentation que nous a remise Hydro-Québec, que non seulement
Hydro-Québec est pessimiste quant à nos chances de sortir
rapidement de la crise, mais qu'en plus, celle-ci adopte des prévisions
énergétiques globales très pessimistes. En effet, le ratio
utilisé par Hydro-Québec pour la période de 1981-2001
s'établit à 0,3, soit la moitié du chiffre proposé
par le professeur Ayoub et par d'autres experts de la conjoncture
énergétique.
Compte tenu de l'impact considérable d'une divergence de points
de vue aussi profonde sur l'économie du Québec, il faudra bien
qu'Hydro-Québec justifie ses prévisions d'énergie totale
pour le Québec, lesquelles ont un impact direct sur l'apport de
l'électricité dans le bilan énergétique, sur le
niveau de ses investissements et, par voie de conséquence, sur les
niveaux de l'activité économique de cette province.
En conclusion, nous devons constater, à la lumière des
chiffres avancés, ici que le développement industriel de notre
province a un effet marqué sur la demande d'énergie
électrique d'Hydro-Québec et que la faiblesse du
développement économique depuis 1976 a amené,
au-delà des économies d'énergie, une baisse des
investissements de cette société d'État qui, eux aussi,
ont un impact négatif sur l'économie.
Disons un mot maintenant des surplus et de l'exportation
d'énergie. Malgré les objectifs que s'était fixés
Hydro-Québec l'an dernier pour se débarrasser de ses surplus
d'électricité, force nous est de constater qu'ils ont presque
doublé sur l'horizon 1984-1987. Le plan de développement
d'Hydro-Québec, l'an dernier, indique cette année des surplus de
52,3 térawattheures alors que l'an dernier ils étaient de 29,3.
Ces surplus représentent donc une perte sèche de 1 500 000 000 $.
Comme les réservoir hydrauliques d'Hydro-Québec sont
déjà pleins, alors que l'hydraulicité est
supérieure à la moyenne, il se pourrait fort bien que de larges
quantités d'eau ne soient nullement comptabilisées et que les
surplus réels soient plus importants que les chiffres publiés. En
effet, comment emmagasiner de l'eau alors que les réservoirs sont
déjà pleins?
Devant une telle conjoncture, plusieurs se demandent si le gouvernement
et HydroQuébec ont fait dans le passé tout leur possible pour
exporter notre énergie. Il est permis d'en douter puisque les
résultats témoignent du peu d'attention donnée à
l'exportation d'énergie par le gouvernement du Québec. En effet,
les exportations d'énergie ont tendance à plafonner depuis 1976.
Ainsi, selon Statistiques de l'énergie au Québec, édition
1982, qui est une publication du ministère de l'Énergie et des
Ressources du Québec, le Québec a augmenté ses
exportations d'électricité de 6,4 térawattheures en 1970,
pour atteindre 15,9 térawattheures en 1976. Celles-ci ont donc
augmenté de 9,5 térawattheures en six ans. Depuis 1976, elles
n'ont augmenté que de 2 térawattheures pour atteindre 17,9
térawattheures en 1982. Ces données historiques, plus que
n'importe quel discours, illustrent le peu d'attention donnée à
l'exportation de notre énergie par le gouvernement du Québec. De
toute évidence, le gouvernement a manqué le bateau il y a de cela
cinq ou six ans. D'ailleurs, cette grave négligence de la part du
gouvernement nous a été révélée par l'un des
dirigeants d'Hydro-Québec, qui a pris sa retraite récemment.
M. le Président, je voudrais rendre hommage ici à M. Guy
Monty, qui a
consacré 37 ans de sa vie à Hydro-Québec, où
il a joué un rôle extrêmement important. Je vous rappelle
que M. Monty fut commissaire d'Hydro-Québec à partir de 1976 et
que, par la suite, il fut membre du conseil d'administration
d'Hydro-Québec jusqu'à il y a quelque temps, en plus de diriger
les activités d'Hydro-Québec International.
Dans une entrevue qu'il donnait récemment au journal d'entreprise
Hydro-Presse, à l'occasion de son départ, M. Monty disait: "II
reste que nous avons manqué une bonne occasion, il y a cinq ou six ans,
quand les Américains étaient prêts à nous acheter
plusieurs milliers de mégawatts sur une période de cinq à
dix ans. On aurait pu faire financer l'avancement des travaux à la Baie
James avec un tel contrat."
Voilà, M. le Président, le témoignage de M. Guy
Monty, un ingénieur et administrateur d'Hydro-Québec. Il aura
fallu attendre son départ pour que soient révélées
au public les possibilités manquées d'exportation
d'énergie et les graves lacunes du gouvernement dans ce domaine. Je
crois que le public serait bien intéressé à en savoir
davantage sur cette occasion manquée. Est-ce que le ministre peut nous
dire s'il s'agissait là d'une décision du cabinet des ministres
ou d'une négligence du ministre de l'Énergie et des Ressources de
stimuler une initiative qui méritait d'être encouragée?
Une autre question que la population est en droit de se poser est
celle-ci: Est-ce que le gouvernement et Hydro-Québec font
présentement tout ce qui leur est possible pour augmenter nos
exportations dans l'avenir, surtout vers les États-Unis, et quelle est
l'importance de ce marché? Si on examine le tableau neuf du plan de
développement donnant la prévision de production
d'électricité dans le Nord-Est des États-Unis, on constate
que la production d'électricité à partir du mazout et du
charbon s'élèvera en 1991 à 48,6 térawattheures
pour la Nouvelle-Angleterre et à 67,6 térawattheures pour
l'État de New York.
Il s'agit donc là d'un marché potentiel de 116,2
térawattheures, soit l'équivalent d'à peu près 16
000 mégawatts. De plus, sur le même horizon, de nouvelles
centrales nucléaires viendront ajouter l'équivalent de 6000
mégawatts. Il faut donc s'acharner à exploiter ce marché
et arrêter de voir uniquement les difficultés d'une telle
entreprise. Bien sûr, une exportation importante d'énergie
électrique vers les États-Unis soulève des
problèmes réels. Qui les a niés?
Cependant, il faudra arrêter de considérer presque
uniquement les aspects négatifs pour poursuivre les marchés
d'exportation avec plus de vigueur encore. Qu'on se rappelle que le
véritable objectif n'est pas de se débarrasser de nos surplus, ce
qui est l'objectif minimum, mais bien de faire redémarrer les projets de
construction de centrales hydroélectriques.
J'aimerais maintenant dire un mot des effets dévastateurs de la
suspension des travaux à la Baie James. Malgré toutes les
explications qu'on peut nous donner, il est bien évident que
l'arrêt pendant les dix prochaines années de la construction de
centrales hydroélectriques aura des effets dévastateurs sur notre
économie. Les membres de cette commission ont entendu des
témoignages éloquents en septembre dernier de la part de
l'Association des manufacturiers d'équipement électrique et
électronique du Canada, de l'Association des constructeurs de routes et
de grands travaux du Québec, de l'Association des
ingénieurs-conseils du Québec et aussi de la
Fédération des travailleurs du Québec. Tous ces
témoignages nous ont dit à peu près la même chose:
Les travaux qu'entreprendra Hydro-Québec dans le domaine de la
distribution ne sauraient compenser l'arrêt des travaux d'étude,
de fabrication d'équipement et de construction de barrages
hydroélectriques ainsi que de lignes de transport à haut
voltage.
D'après ces témoignages, les équipes
d'ingénieurs et de techniciens possédant le "know-how" et la
technologie propres à ce genre de travaux seront dispersées faute
de ressources financières et/ou de motivation pour continuer à
travailler dans un secteur sans avenir. Le Québec perdra, dans les
années quatre-vingt, les technologies qu'il avait réussi à
développer dans les années soixante-dix. C'est là le
message des représentants des industries qui comptaient sur le programme
d'Hydro-Québec pour assurer la survie et l'épanouissement de
leurs entreprises.
Disons maintenant un mot des augmentations de tarifs pour 1984. Coupable
d'avoir ralenti le développement économique depuis 1976 par des
politiques indépendantistes et d'avoir négligé
jusqu'à tout récemment les exportations d'énergie, le
gouvernement propose maintenant une vente de feu pour permettre à
Hydro-Québec d'écouler une partie de ses surplus. Sans
égard pour sa propre politique de pénétration du gaz, le
gouvernement nous propose maintenant une politique tarifaire qui mettra
sûrement en difficulté les distributeurs de gaz, qui se verront
obligés de revoir à la baisse leur objectif de
pénétration du marché et, conséquemment, leur plan
de développement. Voilà où nous conduit
l'inconséquence péquiste dans la gestion des affaires de
l'État.
En effet, la vente de feu des tarifs industriels donnera le signal
à ceux qui pourront en profiter que le choix de
l'électricité s'impose à tout prix. C'est ce
que le ministre de l'Énergie et des Ressources appelle une saine
concurrence entre le gaz et l'électricité. Par ailleurs, il est
assez curieux pour un gouvernement qui se dit social-démocrate de
favoriser une augmentation des tarifs domestiques qui favorise davantage les
bien nantis que les plus démunis. Comment un tel gouvernement peut-il
favoriser une tarification régressive? En effet, ceux qui n'ont pas les
moyens de se payer une conversion à l'électricité ou au
gaz se verront infliger une augmentation de tarif de 5,5% alors que les bien
nantis pourront bénéficier d'une augmentation de leur facture qui
ne sera que de 1%. (17 h 15)
Force nous est de constater que le gouvernement de fin de régime
est bien loin des principes et des théories qui l'ont porté au
pouvoir.
Bien plus, après avoir, par tous les moyens, depuis quatre ans,
découragé l'utilisation de l'électricité pour le
chauffage domestique et après avoir pénalisé les grands
consommateurs industriels en leur infligeant des tarifs à la hausse avec
l'accroissement de leur consommation, voilà que le gouvernement fait
marche arrière et met aux rebuts le livre blanc de 1978. On n'en finira
plus avec ce gouvernement de défaire, en fin de régime, les
erreurs commises au début du mandat. Mais à quel prix? Baisse
accentuée de la consommation électrique, surplus d'énergie
électrique invendue qui coûtera aux Québécois, 1 500
000 000 $ et arrêt des travaux de la phase 2 de la Baie James.
M. le Président, à la lumière de ces remarques,
nous aurons plusieurs questions à poser à Hydro-Québec et
au ministre de l'Énergie.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Merci, M.
le député d'Outremont. Maintenant, peut-être que le
ministre a des remarques à faire.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais féliciter
le député d'Outremont parce que c'est la première
année que nous avons un texte écrit sauf que, pour la bonne
compréhension, je vais référer à la page 9 quand on
parle des exportations, pour ne pas que nos collègues de la presse
partent avec de telles données.
M. Fortier: M. le Président, question de règlement.
Je croyais que l'on avait convenu que c'était Hydro-Québec qui
parlait après que chacun d'entre nous ait...
M. Duhaime: Si vous ne voulez pas que je vous réponde tout
de suite, cela ne me dérange pas. On va attendre. Je le ferai ce
soir.
Le Président (M. Champagne, Mille--
Îles): Non, mais voici...
M. Fortier: Si vous voulez commencer un débat maintenant,
vous pouvez le commencer. Mais on va s'engager dans un débat de deux
heures, alors qu'on avait dit qu'Hydro-Québec aurait la chance de
s'exprimer.
M. Duhaime: Il n'y a pas de problème, M. le
Président. Comme vous le savez, je suis toujours de bon compte à
cette table sauf que l'on compare des bananes avec des oranges. Alors, cela ne
peut donner un résultat très très éloquent et, si
M. le député d'Outremont le permettait, à moins que je
sois obligé de rencontrer les journalistes à six heures, cela ne
me dérange pas. Mais si vous ne me donnez pas deux minutes maintenant,
ne me demandez pas d'autres deux minutes ce soir ou demain. La réponse
sera non. Ce sera très clair.
M. Fortier: M. le Président, si le ministre veut faire une
correction de deux minutes, mais s'il veut s'engager dans un débat qui
va durer deux heures, je crois qu'on avait promis à nos invités
de se faire entendre. S'il veut faire une correction de deux secondes, qu'il la
fasse maintenant. Je ne voudrais pas qu'on parte un débat maintenant.
J'oserais espérer que ses remarques seront très courtes.
M. Duhaime: Je vous remercie.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): On pourrait
s'entendre au point de départ, peut-être, pour deux à cinq
minutes et vous aurez aussi deux à cinq minutes après, comme
réplique.
M. Fortier: J'aimerais mieux, M. le Président, que le
ministre fasse sa remarque et qu'immédiatement après, l'on
entende Hydro-Québec et on engage un vrai débat avec
Hydro-Québec par la suite.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): D'accord.
Alors, M. le ministre.
M. Duhaime: Alors, à la page 9 de l'exposé du
député d'Outremont, puisqu'on voudrait appuyer les dires du
député d'Outremont avec une publication du ministère de
l'Énergie et des Ressources qui, soit dit en passant vient d'être
rendue publique, les Statistiques de l'énergie au Québec et qu'on
compare les térawattheures de 1970 à ceux de 1976, je ne sais pas
à quelle page on fait la référence mais je vais indiquer
tout de suite à ceux qui nous écoutent que, à la page 28,
au bas de la page, le total en dollars des exportations pour l'année
1971 à 1982 s'y retrouve. Et, à moins que ma petite machine
à calculer ne
soit pas correcte, de 1971 à 1976 - on est de bon compte, je vous
donne toute l'année 1976 - le total des exportations en millions est de
346 et de 1977 à la fin de 1982, - je ne compte pas 1983, mais cela va
faire six ans aussi - le total est de 1 601 000 000 $. C'est simplement cela
que je voulais vous dire.
Une voix: Une petite erreur.
M. Fortier: C'est de bon compte.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors,
merci, messieurs. Maintenant, M. le président, j'aimerais que vous vous
présentiez et que vous présentiez le collègue qui vous
accompagne et ensuite, nous allons écouter votre mémoire.
Auditions M. Joseph Bourbeau
M. Bourbeau (Joseph): Merci, M. le Président. Je suis
accompagné de M. Guy Coulombe, le président-directeur
général d'Hydro-Québec.
M. le Président, M. le ministre et membres de la commission,
chaque année, Hydro-Québec se présente devant la
commission permanente de l'énergie et des ressources pour faire rapport
de sa gestion et de l'évolution de ses affaires au cours de
l'année écoulée.
C'est également l'occasion de soumettre au gouvernement et
à la population ses prévisions et ses orientations pour
l'avenir.
Aussi, avant de vous indiquer les grandes lignes du plan de
développement de l'entreprise pour les années 1984-1986, je
m'arrêterai quelques instants pour dégager les résultats de
l'année 1983 qui s'achève.
Depuis un an, deux priorités ont guidé l'ensemble de
l'activité et du personnel d'Hydro-Québec: la commercialisation
et la productivité. Bien sûr, ce n'est pas la première fois
dans son histoire que l'entreprise est appelée à faire preuve
d'un grand dynamisme commercial et à soutenir une situation de
concurrence, mais depuis une dizaine d'années, l'entreprise ayant eu peu
de difficulté à écouler l'électricité
produite, elle s'était plutôt mobilisée vers l'expansion de
ses installations de production pour répondre à temps à la
demande croissante des consommateurs. Pour reprendre une image familière
des économistes, elle s'est concentrée davantage sur les
activités en amont de son produit que sur les activités en
aval.
Comme vous le savez, les grands bouleversements
énergétiques et économiques des dernières
années ont amené le conseil d'administration et les dirigeants
d'Hydro-Québec à remettre au premier plan la vocation commerciale
de l'entreprise en tenant compte de l'intérêt des consommateurs.
Il s'agit maintenant de conserver les marchés acquis, d'en
pénétrer de nouveaux au Québec comme à
l'extérieur, ce qui n'est possible qu'en gardant les tarifs
d'électricité hautement concurrentiels avec ceux du gaz naturel
et du mazout.
Actuellement, c'est une organisation d'environ 600 personnes qui
travaillent activement aux programmes commerciaux qui s'adressent à la
clientèle québécoise, y compris Énergain, ainsi
qu'à la prospection des marchés américains et canadiens.
Les résultats des nouveaux programmes mis en route depuis un an,
résultats que M. Coulombe vous donnera tout à l'heure, sont
à la hauteur des objectifs visés. Tous ces efforts commerciaux
ont fait progresser la part de l'électricité dans le bilan
énergétique québécois, qui se situe actuellement
à 30%, tout en favorisant la conservation et l'utilisation rationnelle
de l'énergie en conformité avec les objectifs
énergétiques du Québec.
Au plan économique, ces programmes ont eu des retombées
importantes, soit du côté des biens et services liés aux
usages de l'électricité, aux économies d'énergie et
aux équipements d'interconnexion, soit encore en faisant entrer des
devises américaines très utiles dans nos activités
financières.
Passons maintenant à la seconde priorité établie
depuis un an, soit la productivité. Un effort remarquable de compression
des frais de personnel a été demandé à l'entreprise
au cours de l'année et cet effort s'est accompagné d'un
contrôle non moins rigoureux des autres dépenses d'exploitation.
En même temps, l'organisation et les structures étaient
réaménagées de fond en comble au siège social et
dans les régions dans la perspective d'une adaptation rapide de
l'entreprise à ses orientations nouvelles.
Enfin, cette année, le grand changement a été
couronné, au début de décembre, par des ententes avec les
principaux syndicats et la signature de nouvelles conventions collectives
concernant tout près de 16 000 employés. C'est la première
fois, depuis l'implantation de syndicats des employés de bureau, de
techniciens et de métier, que la convention collective provient d'un
accord entre les syndicats et l'entreprise à la table même des
négociations. Il convient donc de féliciter les deux parties en
présence d'avoir su mener cette tâche à bonne fin.
Est-il nécessaire de dire que cette austérité
budgétaire et cette rigueur administrative ont exigé
énormément de tout le personnel de l'entreprise et de sa filiale,
la Société d'énergie de la Baie James? Mais cet accent mis
sur la productivité a heureusement produit des résultats
tangibles.
Ainsi, la croissance annuelle des dépenses d'exploitation,
déjà ramenée à 14% en 1982 par rapport à 24%
au cours des quatre années précédentes, a
été contenue à 6% pour l'exercice 1983. Ces pourcentages
deviennent peut-être plus parlants si j'ajoute qu'une variation de 3%, en
plus ou en moins, dans les dépenses d'exploitation se répercute
par une hausse ou une baisse d'un point dans les tarifs.
Tout compte fait, l'accent mis par Hydro-Québec depuis un an sur
la productivité et la mise en marché a bien servi l'entreprise et
profité directement à sa clientèle. C'est pourquoi le
conseil d'administration propose pour les années 1984 à 1986 un
plan de développement en continuité avec les orientations, les
objectifs et les programmes décidés l'an dernier. Pour les trois
prochaines années, Hydro-Québec va continuer à accorder la
priorité à l'élargissement des marchés de
l'électricité, tant au Québec qu'à
l'extérieur, et à la productivité dans la gestion de ses
ressources.
Cela signifie aussi que le plan de cette année ne comporte aucune
décision définitive concernant de nouvelles installations de
production. Bien sûr, Hydro-Québec se tient prête et pourra
faire face à tout changement de conjoncture, par exemple, à la
manifestation de besoins nouveaux de la part de clients québécois
ou étrangers. Il ne faut pas déduire de la prudence que nous
montrons actuellement dans nos investissements que nous n'envisageons pas
d'autre scénario. Hydro-Québec pourrait lancer sans délai
plusieurs grands travaux de construction dès que la situation le
justifierait. Le conseil d'administration est d'avis qu'il n'est pas opportun
de le faire pour le moment.
Si le plan de cette année est dans la foulée de celui de
l'année dernière, il comprend cependant des
éléments nouveaux, notamment une orientation visant
l'amélioration et la modernisation du réseau.
Hydro-Québec, au cours des années 1984-1986, va s'efforcer
d'augmenter la fiabilité du réseau en vue de garantir une plus
grande continuité de service aux différentes catégories de
clients.
Depuis une dizaine d'années, l'ampleur des investissements
consacrés aux barrages et aux centrales n'a pas permis d'investir en
même temps dans l'amélioration du réseau de transport et de
distribution. Avec l'achèvement de la phase I de la Baie James,
l'entreprise dispose d'une période de répit qui sera mise
à profit pour améliorer la qualité du service. Près
de 1 000 000 000 $ seront investis dans un programme spécial
d'amélioration du réseau, ce qui portera le total des
investissements de transport et de distribution à près de 3 500
000 000 $ d'ici la fin de 1986.
C'est dire qu'en trois ans seulement,
Hydro-Québec dépensera au Québec pour le transport
et la distribution de l'électricité des sommes supérieures
à tous les investissements reliés au transport et à la
distribution du gaz naturel en 30 ans, soit depuis l'introduction du gaz au
Québec jusqu'à la fin des travaux annoncés pour 1987.
En outre, la fiabilité du service est un atout indispensable au
succès des programmes commerciaux. Dans le marché du chauffage
domestique et dans celui des procédés industriels
électrifiés, la continuité du service est une
considération très importante pour les usagers. À
l'exportation, l'intérêt des importateurs dépend en grande
partie de la fiabilité avec laquelle le réseau
d'Hydro-Québec peut les approvisionner sans perturbations
sérieuses. L'accent que nous mettons à compter de maintenant sur
les services à la clientèle se traduira aussi par
l'amélioration des outils de travail et des systèmes de
communications à la disposition du personnel affecté aux
relations avec les abonnés.
Les clients d'Hydro-Québec pourront profiter de ces
améliorations de la qualité du produit en plus de se voir offrir
soit des rabais tarifaires, soit des subventions. En effet, l'entreprise
maintient ses divers programmes commerciaux et en ouvre de nouveaux comme la
biénergie dans les habitations collectives et dans les
établissements industriels et commerciaux.
Sans donner tous les détails, disons tout de suite que ces
programmes entraîneront, pendant les trois années visées
par le plan de développement, des investissements de 630 000 000 $ dont
40% seront subventionnés par Hydro-Québec. Ces programmes
devraient créer plus de 3000 emplois par année au cours de la
même période. (17 h 30)
Toutefois, pour les clients d'Hydro-Québec, la meilleure nouvelle
du plan de développement concerne les tarifs. Pour les trois prochaines
années, les hausses tarifaires devraient être inférieures
à l'inflation, c'est-à-dire que les tarifs
d'électricité vont diminuer en termes réels. Bien
sûr, pour cela il faudra que nos hypothèses se confirment, mais
nous ne pensons pas avoir péché par excès d'optimisme.
À compter du 1er février 1984, l'augmentation moyenne totale sera
de 3,4% pour l'ensemble de nos abonnés.
Les clients des secteurs commercial et industriel connaîtront,
pour leur part, des hausses variant entre 3,4% à 4,8%. C'est le tarif
domestique qui augmentera le moins, avec une majoration de 3% seulement.
La redevance d'abonnement et la première tranche de 900
kilowattheures par mois, qui correspond aux usages captifs de
l'électricité, augmentent à un rythme inférieur
à l'inflation. La deuxième tranche
de consommation, la tranche de chauffage, comme nous avons coutume de
dire, ne subira aucune majoration.
Cette proposition tarifaire s'agence très bien avec les
orientations de base d'Hydro-Québec. D'une part, la modération
des hausses tarifaires est rendue possible par la productivité accrue de
l'entreprise et, d'autre part, elle permet à l'électricité
de soutenir la forte concurrence à laquelle elle fait face sur les
divers marchés.
Hydro-Québec doit élargir sa part du marché si l'on
veut augmenter l'effet au Québec des dollars que les consommateurs
consacrent à leurs besoins énergétiques. L'entreprise
prendra donc toutes les mesures en son pouvoir pour offrir à ses clients
un produit de qualité à des prix très compétitifs,
car l'électricité est encore, et de très loin, la
véritable énergie d'ici, celle qui est produite ici, celle qui
appartient aux Québécois, bien sûr, mais surtout celle qui
leur profite le plus.
Je vous remercie, M. le Président. Avant de passer la parole
à M. Coulombe, j'aimerais soulever un point que le député
d'Outremont a abordé tout à l'heure, lorsqu'il a parlé de
la déclaration de M. Guy Monty, un ancien employé
d'Hydro-Québec, ingénieur de renom. Je ne veux pas remplacer les
paroles que M. Monty a prononcées il y a quelques semaines, mais je peux
vous dire, M. le Président, que moi-même je suis ingénieur,
j'ai fait 35 ans à Hydro-Québec, et il y a quatre ou cinq ans,
c'est bien vrai, nous avons parlé aux Américains. Moi-même,
je faisais partie du comité de négociation.
Nous avons parlé à PASNY et nous avons parlé
à NEEPOOL. Nous avons proposé, non pas la vente de la Baie James,
mais nous avons proposé aux Américains d'établir des
centrales sur deux rivières du Québec, la George et la
Caniapiscau. Ces propositions aux Américains ont été
accompagnées d'une demande d'un versement de fonds, pour faire des
études préliminaires, de 30 000 000 $, de la part des
Américains, et ces derniers ont refusé.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles):
D'accord. M. Coulombe.
M. Guy Coulombe
M. Coulombe (Guy): Nous sommes très heureux de
présenter le plan de développement d'Hydro-Québec pour la
période 1984-1986. Comme vous le savez, la première version du
plan a été transmise au ministre de l'Énergie et des
Ressources à la fin du mois de septembre. À ce moment-là,
le gouvernement mettait la dernière main à la préparation
d'un nouveau plan d'action visant à intensifier la relance de
l'économie du Québec.
En ce qui concerne le secteur de l'électricité, le
gouvernement a demandé à Hydro-Québec de réexaminer
certains aspects de son plan de développement pour maintenir les
investissements nets des deux prochaines années au même niveau que
ceux de 1983 et faciliter la réalisation d'autres mesures de relance
prévues dans le plan d'action gouvernemental.
À la suite de ces discussions, nous avons apporté au plan
les modifications suivantes. Hydro-Québec devancera de six mois la mise
en service de la cinquième ligne du réseau de transport de la
Baie James et amorcera immédiatement les travaux préliminaires de
la sixième ligne ce qui entraînera des investissements
supplémentaires de l'ordre de 100 000 000 $ en 1984.
Nous construirons, sous peu, avec d'autres partenaires, l'usine de
fabrication d'hydrogène liquide d'environ 50 000 000 $, dans laquelle
Hydro-Québec détiendra un capital-actions de l'ordre de 7 000 000
$ et nous travaillons activement, à l'heure actuelle, à la mise
sur pied d'un centre de recherche en électrochimie.
Nous accélérerons la réalisation d'un programme de
réfection des centrales qui représente des investissements
supplémentaires de l'ordre de 240 000 000 $ concentrés dans les
trois prochaines années.
Nous intégrerons au nouveau règlement tarifaire
d'Hydro-Québec, un tarif spécial, un tarif "S" applicable aux
installations municipales d'assainissement des eaux pour soutenir le programme
gouvernemental d'accélération de projets municipaux
d'assainissement des eaux.
Enfin, nous prolongerons de deux ans le programme de rabais tarifaires
offert aux industries qui font des investissements en capital augmentant leur
consommation d'électricité.
Pour le reste, et comme l'a mentionné M. Bourbeau, il y a un
instant, nos objectifs et nos actions prévus pour les trois prochaines
années s'inscrivent dans le prolongement de ceux adoptés l'an
dernier puisqu'il n'y a pas eu de bouleversements majeurs dans l'environnement
de l'entreprise au cours des douze derniers mois.
Notre priorité demeure la même en situation
d'excédent, soit stimuler les ventes sur tous les marchés afin de
rentabiliser les investissements déjà réalisés dans
les équipements de production et éviter des déversements
coûteux pour l'entreprise et pour la collectivité
québécoise.
Alors, les orientations du plan. La première consiste à
accroître les ventes d'électricité sur les marchés
internes et externes et réorienter la recherche et le
développement technologique vers de nouveaux modes d'utilisation de
l'électricité tout en respectant l'objectif d'utilisation
rationnelle de l'électricité.
Au cours des prochaines années, la concurrence des formes
d'énergie autant sur le marché interne que sur le marché
externe sera plus vive qu'elle ne l'a jamais été. En effet, les
programmes de remplacement du pétrole amèneront probablement un
grand nombre de consommateurs à remplacer leurs sources
d'approvisionnement en énergie et leur choix sera définitif dans
la plupart des cas. Par conséquent, si nous voulons accroître nos
ventes et rentabiliser les investissements déjà faits, il faudra
offrir aux consommateurs le meilleur produit au meilleur prix possible.
Évidemment, cette conjoncture oblige Hydro-Québec à
faire certains compromis dont le plus important - et vous l'avez vu dans le
plan - est sans doute celui qui touche le bénéfice net de
l'entreprise. Afin de soutenir notre stratégie commerciale et de
maintenir le prix de l'électricité le plus bas possible, nous
avons choisi de laisser diminuer le bénéfice net d'exercice des
trois prochaines années. Si nous avions visé à maintenir
ce bénéfice au même niveau que par le passé, il nous
aurait fallu des hausses de tarifs beaucoup plus fortes. Or, cela n'est pas
vraiment nécessaire dans la conjoncture actuelle. D'abord parce que les
hausses que nous proposons sont suffisantes pour préserver les
principaux critères financiers de l'entreprise et aussi parce que, la
situation d'excédent étant provisoire, nous pourrons revenir,
dans les prochaines années, à un meilleur équilibre des
revenus et des dépenses et à des bénéfices nets
d'exercice plus conformes à ceux du passé.
Sur le plan concret, l'action commerciale de l'entreprise est
déjà très bien engagée aussi bien au Québec
que sur les marchés extérieurs même si, pour l'essentiel,
les efforts commerciaux ont vraiment démarré il y a à
peine 18 mois.
Le programme de chauffage biénergie connaît d'excellents
résultats. Nous prévoyions, l'an dernier, 28 000 conversions pour
l'année 1983 et nous en avons réalisé plus de 50 000, de
telle sorte que l'objectif total de 100 000 conversions d'ici la fin de 1984
dans les habitations individuelles seulement sera sûrement
dépassé. Ce programme s'étend maintenant aux habitations
collectives et aux établissements publics. Au cours de 1984, nous
espérons l'étendre également aux secteurs commercial et
industriel.
Quant au programme d'électrification des chaudières
industrielles qui n'a pas de précédent dans les autres
entreprises d'électricité, il a remporté un immense
succès. À lui seul, il comptera pour plus de la moitié de
la croissance de nos ventes d'électricité en 1984. C'est
appréciable si l'on songe que ce programme a été
lancé en décembre dernier et qu'en mars, nous avions
déjà dépassé l'objectif initial.
De plus, nous avons signé avec Reynolds et Pechiney au cours des
derniers mois des ententes tarifaires particulières en vue de susciter
de nouveaux investissements dans l'important secteur de l'aluminium.
Côté exportations, les contrats de vente d'énergie
excédentaire conclus le 21 mars par Hydro-Québec avec NEEPOOL
pourraient rapporter au Québec des revenus d'exportation de plus de 5
000 000 000 $, au cours des onze années suivant 1986. Le contrat avec le
NEEPOOL est une opération extrêmement fructueuse et ce n'est qu'un
début. Hydro-Québec a entrepris et poursuit actuellement des
négociations pour des exportations régulières
d'électricité à long terme.
Dans l'ensemble, les ventes et les revenus découlant de nos
programmes au Québec et des exportations devraient doubler en trois ans.
Les ventes additionnelles passeront, de 20 térawatts, en 1983, à
41 térawatts, en 1986, et les revenus de 545 000 000 $ à 1 100
000 000 $. Ces nouvelles ventes compteront pour les deux tiers de la croissance
totale de nos ventes, croissance qui s'établira à 11,7, l'an
prochain, soit un taux deux fois et demie plus élevé que celui
prévu par les autres producteurs canadiens.
Passons maintenant à la deuxième orientation du plan qui
consiste à réaliser, d'ici à 1985, les investissements
déjà engagés et à limiter les engagements
financiers à plus long terme. Comme nous l'avons annoncé, l'an
dernier, nous terminerons la construction et la mise en service des centrales
de La Grande 3 et La Grande 4 d'ici à la fin de 1985. Quant aux autres
projets de centrales, nous n'avons pas à prendre de décision
maintenant, étant donné les excédents que nous devons
d'abord écouler. Les investissements des trois prochaines années
seront donc concentrés sur les éléments qui ont un lien
stratégique avec nos programmes commerciaux au Québec et à
l'étranger, savoir l'amélioration et la fiabilité du
réseau et les interconnexions qui seront terminées à un
rythme accéléré.
Il va de soi que le plan des installations que nous retenons
dépend de l'évolution de la demande d'électricité
régulière au Québec et qu'il pourrait être
modifié advenant un rythme de croissance différent de celui
prévu. À titre indicatif -je pense que cela peut donner un
exemple des problèmes de prévision - le congrès
américain, au mois de mai prochain, va avoir une commission
parlementaire - oui, son équivalent exactement comme aujourd'hui -sur
les prévisions de construction dans l'hydroélectricité ou
dans l'électricité aux États-Unis.
Il y a deux organismes américains qui ont fait une
prévision sur la demande
d'électricité aux États-Unis, d'ici à la fin
du siècle, qui diverge - je demande de prendre note du chiffre - de 311
000 mégawatts. Le département de l'énergie,
c'est-à-dire le ministère américain de l'Énergie,
estime qu'il faudra, en plus des projets d'installation déjà
approuvés, une puissance additionnelle de 438 000 mégawatts,
alors que le service de recherche du congrès évalue les
mêmes besoins de puissance additionnelle à seulement 127 000
mégawatts. L'écart représente une puissance suffisante
pour satisfaire les trois quarts des besoins actuels des États-Unis.
Au Québec, heureusement, les divergences de prévisions
sont moins grandes. Mais si de nouveaux facteurs économiques ou
énergétiques accéléraient la
pénétration de l'électricité dans les nouveaux
marchés ou de la croissance des marchés acquis,
Hydro-Québec pourrait puiser à même ses excédents ou
mettre rapidement en chantier de nouvelles installations dont les études
sont déjà terminées. Du point de vue des installations,
l'entreprise dispose d'une grande flexibilité.
La troisième orientation du plan vise à assurer à
l'entreprise une plus grande souplesse d'adaptation aux changements
imposés par la conjoncture en réorganisant ses activités.
Nous avons entrepris, il y a à peine 18 mois, une réorganisation
complète des activités du siège social et des
régions qui vient tout juste de se terminer. Cette réorganisation
visait à redéployer nos ressources humaines en fonction des
nouvelles priorités de l'entreprise, à accroître leur
productivité et à réduire les dépenses
d'exploitation par une compression des effectifs globaux, notamment au niveau
des cadres. Les résultats obtenus sont significatifs.
L'interruption de l'embauchage extérieur, associée
à un programme d'incitation au départ volontaire, a
déjà permis de réduire le personnel permanent d'environ 20
000 à 19 000 employés. Cela représente une diminution de
5% et ces effectifs devraient rester stables au cours des trois prochaines
années.
L'effectif des cadres a été réduit du tiers, soit
de plus de 1000 postes. Quant à la réaffectation des
employés devenus excédentaires, à la suite de la
diminution du travail dans certaines activités, 715 employés ont
été réaffectés à d'autres postes depuis mai
1982 et nous prévoyons en réaffecter 2000 autres d'ici à
la fin de 1986. (17 h 45)
Enfin, c'est là un élément très important.
Ces mesures nous ont permis de contenir la croissance des dépenses
d'exploitation et d'administration de 1983 en deçà du pourcentage
visé et de modérer ainsi les augmentations de tarifs
nécessaires.
La quatrième et dernière orientation du plan qui a
été ajoutée cette année vise à augmenter la
fiabilité du réseau en vue d'assurer une meilleure
continuité du service aux différentes catégories
d'abonnés. Je pense que M. Bourbeau l'a souligné. Ces
activités changeront la nature globale de nos investissements qui
toucheront désormais au plus grand éventail d'industries
québécoises dont les effets sur l'économie seront
peut-être supérieurs à ce qu'ils étaient avant.
D'une part, en effet, nos investissements seront beaucoup plus
décentralisés et profiteront à l'ensemble du
Québec, étant donné que l'on retrouve des installations de
transport et de distribution dans toutes les régions.
En outre, les investissements en transport et en distribution
créent plus d'emplois que ceux réalisés dans les grands
travaux de construction. Par exemple, 1 000 000 $ dépensés
à la Baie James en 1983 créaient, en moyenne, cinq emplois
indirects dans l'industrie manufacturière au Québec tandis que le
même million dépensé en transport et en distribution,
créera sept emplois et demi.
Ainsi, au chapitre de la distribution en particulier, nous allons
moderniser les installations sur l'ensemble du territoire
québécois afin que nos abonnés jouissent d'une meilleure
continuité de service. Nous avons notamment conclu avec la ville de
Montréal, une entente visant à accélérer la
réfection du réseau de distribution du centre-ville
montréalais. Cette entente prévoit des investissements conjoints
de 538 000 000 $ au cours des six prochaines années et ces 538 000 000 $
s'ajoutent au programme spécial de 1 000 000 000 $. Ces travaux
réduiront les pannes, hélas trop fréquentes sur
l'île de Montréal.
Voilà les orientations et les objectifs du plan de
développement 1984-1986. Grâce à une bonne coordination des
actions dans tous les domaines d'activité et à une politique de
commercialisation dynamique, Hydro-Québec entend soutenir l'essor de
l'électricité au Québec et continuer à faire
profiter les consommateurs, des avantages indéniables de cette
richesse.
Avant de répondre aux questions de la commission, j'aimerais, en
terminant, évoquer deux points sur lesquels Hydro-Québec
concentre actuellement une réflexion et certaines études. Le
premier concerne la tarification et le second, la recherche et le
développement. Du côté des tarifs, nous étudions un
nouveau programme de stabilisation des tarifs pour les entreprises fortes
consommatrices d'électricité. Nous avons déjà un
programme de rabais tarifaires mais ce programme est temporaire et s'applique
exclusivement à la consommation issue de nouveaux investissements. Or,
les abonnés existants, pour qui l'électricité pèse
lourd dans les coûts de production, nous ont
dit à plusieurs reprises que leur planification serait beaucoup
plus facile s'ils connaissaient d'avance et à long terme leurs
coûts d'approvisionnement en électricité. Dans cette
optique, nous étudions un mécanisme qui permettrait à
Hydro-Québec et aux industries, de définir conjointement les
balises des hausses de tarifs à long terme. En vertu de ce
mécanisme, Hydro-Québec pourrait, par exemple, garantir sur dix
ans un plafond d'augmentation à une industrie si cette industrie consent
à garantir à Hydro-Québec un plancher d'augmentation. Un
tel programme présente certains risques financiers mais ces risques
seraient partagés par Hydro-Québec et les industriels.
Enfin, pour les gros consommateurs comme pour les petits consommateurs
d'électricité, il ne suffit pas de disposer d'un
approvisionnement en quantité suffisante et à des prix
intéressants si ces avantages ne sont pas combinés à des
technologies d'utilisation efficace d'électricité.
Hydro-Québec entend donc favoriser les investissements dans ses
activités de recherche, de développement et de
démonstration d'une part, parce que les perfectionnements technologiques
nous permettent de réduire davantage nos coûts de fourniture de
l'électricité et d'autre part, afin d'appliquer, dans certains
secteurs en particulier, dans l'industrie forte consommatrice d'énergie,
de nouveaux procédés d'utilisation d'électricité
qui, compte tenu de leur meilleure efficacité, permettraient
d'accroître la compétitivité de nos industries.
Avec la commercialisation, la recherche nous apparaît aujourd'hui
comme l'une des voies privilégiées par laquelle passera le
renouveau de l'électricité au Québec et avec lui, une
partie importante de notre santé ou de notre essor
économique.
Alors, maintenant nous sommes prêts à répondre aux
questions.
Période de questions
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Merci, M.
Bourbeau et M. Coulombe, pour votre exposé préliminaire.
Maintenant, M. le ministre, y a-t-il des questions?
M. Fortier: Une question de règlement. La
présentation qui nous a été faite et les documents qui
nous ont été remis nous ont permis de nous faire une idée
de la situation et nous avons préparé nos questions à
partir de cette information.
Le ministre a fait état d'une visite, la semaine prochaine, et
Hydro-Québec a fait état de la possibilité d'un ajustement
rapide s'il y avait des engagements. Est-ce qu'il y a une information que les
membres de la commission devraient connaître? Est-ce que l'information
qui est sur la table est toute l'information, ou est-ce que nous faisons un
effort de discussion qui pourrait être modifié rapidement la
semaine prochaine? Autrement dit, nous cachez-vous de l'information, M. le
ministre, ou est-ce que l'information sur la table est toute l'information qui
devrait être disponible aux membres de la commission?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
ministre.
M. Duhaime: Je me demande un peu pourquoi vous me posez pareille
question, parce que j'ai mentionné que le gouverneur de l'État de
New York, M. Cuomo, venait vendredi.
M. Fortier: Vous avez dit qu'il pouvait...
M. Duhaime: J'ai dit qu'il viendrait vendredi, je n'ai pas
annoncé autre chose. Il devait venir il y a quatre ou cinq semaines, je
crois, je ne me souviens pas de la date. Son voyage a été
décommandé pour des raisons de santé, quant à lui,
mais si vous craignez une grosse nouvelle, il n'y en aura pas.
M. Fortier: Alors l'information que nous avons est
l'information...
M. Duhaime: Je trouve cela très délicat de votre
part de me demander si j'ai fourni toute l'information. La question s'adresse
également à Hydro-Québec. Je pense que non seulement on
vous donne toute l'information concernant le dossier de l'énergie, mais
on est toujours assis autour de la table ici en train d'en parler. Il y a
à peine une semaine, on a rendu public un document, Statistiques de
l'énergie au Québec, édition 1982, que vous avez mal
interprété, d'ailleurs; deuxièmement, on vous
envoyé, il y a plusieurs jours, toute la documentation possible et
imaginable en répondant, point par point, à chacun de vos
desiderata. Vous l'avez eue il n'y a absolument rien de caché.
D'ailleurs, je m'étonne que vous demandiez tellement d'information
concernant Hydro, parce que, quand on écoute votre chef, vous avez l'air
de tout savoir là-dessus.
Soyez assuré que le gouverneur Cuomo vient ici rencontrer le
premier ministre dans le cadre d'échanges que tiennent et que devraient
tenir plus fréquemment, à mon point de vue, les dirigeants des
États de la Nouvelle-Angleterre et de New York sur des questions qui
portent, par exemple, sur l'énergie, le transport, l'environnement, etc.
Ne vous excitez pas outre mesure.
M. Fortier: Ecoutez, M. le Président, je posais la
question pour avoir l'assurance que c'était là toute
l'information. Je comprends qu'Hydro-Québec nous a donné
l'information qu'elle avait, mais, étant donné que c'est le
ministre qui a fait la visite la semaine dernière, je voulais
avoir l'assurance que lui...
M. Duhaime: Si vous voulez que je vous raconte mon voyage.
M. Fortier: ...n'avait pas conclu un rapport ou une entente qu'il
dévoilerait la semaine prochaine...
M. Duhaime: Si vous voulez que je vous raconte mon voyage.
M. Fortier: ...parce que cela rendrait notre commission
parlementaire caduque. Maintenant, j'ai la confirmation que l'information que
nous avons est la plus pertinente.
M. Duhaime: Vous savez, contrairement à ce que votre chef
peut penser, ce n'est pas un vol par jet de 55 minutes puis un autre vol de 55
minutes au retour qui permettraient de bâcler une transaction qui se
discute depuis plusieurs années et qui porte sur plusieurs milliards de
dollars. Ce n'est pas notre façon de faire. D'autant plus, M. le
député d'Outremont, que je suis allé passer trois
excellentes journées en Nouvelle-Angleterre. J'ai pu rencontrer les
gouverneurs, les lieutenants-gouverneurs et les présidents de compagnies
de services publics. J'étais d'ailleurs en compagnie de M. Bourbeau.
Alors, si vous avez des informations à demander, vous pouvez les
demander à M. Bourbeau.
Moi, ici, aujourd'hui, techniquement parlant, je peux bien
répondre à vos questions, mais on est ici pour entendre
Hydro-Québec. Vous avez développé, depuis deux ou trois
semaines, la mauvaise habitude de poser des questions à tout un chacun
à l'Assemblée nationale sur le dossier de l'énergie quand
je suis absent.
M. Fortier: C'est notre faute!
M. Duhaime: Si vous posez des questions... Bien, j'ai
été absent trois jours en Nouvelle-Angleterre et vous avez
posé cinq questions au premier ministre concernant mes dossiers. Je
trouve cela un peu affligeant, franchement. Surtout vous, vous étiez au
courant du dossier du fer. On vous avait même invité...
M. Kehoe: C'est seulement là qu'on a de bonnes
réponses.
M. Duhaime: ...sur la Côte-Nord. Si vous avez des questions
là-dessus, vous pouvez les poser à M. Bourbeau.
M. Scowen: Est-ce que je peux poser une question à M.
Bourbeau?
M. Duhaime: Bien sûr, mais j'avais demandé la parole
avant vous.
M. Scowen: Voilà!
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Voici. Pour
avoir de l'ordre dans cette commission parlementaire, je pense que chacun des
députés aura la chance, pendant 20 minutes, et par alternance
comme l'habitude le veut, de s'exprimer pendant ces heures de session.
M. Scowen: Je suis prêt à poser quelques
questions.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): La parole
est au ministre. M. Bourbeau avait une réponse à l'une des
questions?
M. Bourbeau (Joseph): Oui, sur la question posée par M.
Fortier, au nom d'Hydro-Québec, je puis dire que nous avons ici toute
l'information disponible. Il n'y a aucun lien, je crois, entre la visite de M.
Cuomo, vendredi prochain, et des ententes possibles. Il y a actuellement des
négociations qui sont en cours mais cela n'a rien à voir avec la
visite de M. Cuomo.
M. Fortier: C'était une question préalable et je
vous remercie de la réponse.
M. Duhaime: C'est aussi précis que cela. On
l'apprécie beaucoup.
J'aurais une brève question, soit à M. Coulombe ou
à M. Bourbeau. Ayant eu toute l'information aussi...
M. Fortier: Depuis trois ou quatre mois.
Le gaz naturel et le mazout
M. Duhaime: Je voudrais faire porter ma question sur un sujet qui
est d'actualité. Comment Hydro-Québec perçoit-elle la
présence du gaz naturel au Québec et comment est-ce que vos
efforts de pénétration de marché sur le mazout, bien
sûr, s'harmonisent? Parce que, en regardant des chiffres récemment
dans le secteur résidentiel, dans le secteur des constructions
nouvelles, j'ai cru lire quelque part que c'était à un rythme
au-delà de, je crois, 80% ou 85% et même davantage
qu'Hydro-Québec abonnait ces nouvelles résidences. C'est
là un premier élément.
Deuxième élément, il m'est apparu que, sur le
marché de l'énergie au Québec, il y avait deux
données nouvelles qu'il nous fallait prendre en
considération.
Premièrement, les distributeurs de gaz naturel ont, semble-t-il,
mis au point une nouvelle chaudière efficace à 95%.
Deuxièmement, les pétrolières ont réagi
également. J'imagine que c'est à la suite des
efforts de marketing d'Hydro-Québec - qui méritent
d'être soulignés dans le bon sens -que les
pétrolières auraient réagi pour offrir des rabais
significatifs à leurs abonnés pour ce qui est des
approvisionnements en huile à chauffage. Sur ces points, est-ce que vous
avez une réaction quelconque ou une stratégie à venir dans
les semaines, dans les mois prochains?
M. Bourbeau (Joseph): De quelle façon Hydro-Québec
perçoit-elle le gaz naturel? Je crois que, pour nous, c'est un acteur
sur la scène énergétique, un acteur qui prend de
l'importance, mais nous avions autrefois un autre acteur qui s'appelait le
pétrole et qui, je pense, consommait ou plutôt produisait 75% de
l'énergie ici au Québec.
C'est un acteur avec lequel nous sommes en concurrence. Je crois que le
résultat de tout ceci, c'est que le consommateur retire les bienfaits de
cette concurrence entre non seulement le gaz naturel mais aussi le
pétrole et l'électricité. Si M. Coulombe veut
continuer.
M. Coulombe: Je pense que à propos la présence du
gaz, évidemment, comme M. Bourbeau vient de le dire, le gaz est un
acteur présent et qui est le plus dynamique possible pour vendre son
produit. La réaction à Hydro-Québec - revenons aux
chiffres que je vous ai donnés tantôt - ne s'est pas fait
attendre. Les programmes de vente qu'on a mis sur pied ont beaucoup de
succès et nous espérons que les prochains qu'on va mettre sur
pied auront autant de succès. Comme M. Bourbeau l'a affirmé, je
pense que c'est exact, c'est le consommateur, qu'il soit industriel ou
domestique, qui en profite. Donc, en termes économiques, ce n'est pas
négligeable.
Évidemment, la pénétration du gaz au Québec
est survenue à un moment où il y avait des surplus
d'énergie, que ce soit dans le pétrole, dans
l'électricité ou dans le gaz, peut-être pas au
Québec, mais, dans le gaz, de façon générale au
Canada. Probablement que personne ne pouvait prévoir cette conjoncture
dans la fin des années soixante-dix. C'est évident que faire
pénétrer une nouvelle forme d'énergie lorsqu'il y a des
surplus, soit dans le domaine du pétrole ou du mazout lourd ou un autre,
cela donne à la situation des paramètres qui sont
différents de ceux qui avaient été prévus au
début.
J'ai l'impression que tout le monde cherche à s'ajuster à
ces nouveaux paramètres mais, finalement, à Hydro-Québec,
on y fait face et on a l'intention d'y faire face, parce qu'on reste
persuadé que, comme le disait M. Bourbeau à la fin de sa
présentation, l'électricité demeure quand même la
seule forme d'énergie qui est produite au Québec. L'exploration
de cette forme d'énergie se fait au Québec, la production de
cette forme d'énergie se fait au Québec, de plus en plus à
80% par les Québécois. On pense qu'il s'agit là d'un
levier qui a été mentionné souvent, qui est en soi une
richesse énorme pour le Québec et on a l'impression que la
conjoncture actuelle va finir par s'éclaircir lorsque l'état de
disponibilité ou de surplus va s'estomper.
En ce qui nous concerne, la stratégie fondamentale qui est
expliquée dans le plan et dont je vous ai donné certains
chiffres, la baisse de nos coûts d'exploitation, l'augmentation de la
productivité, une certaine prudence pour ne pas construire et se
réveiller avec des surplus encore plus grands - là, ce ne seront
plus des ventes de feu, mais des ventes que je ne pourrais même pas
qualifier... Je pense que, si on peut avoir une stratégie claire
là-dessus, Hydro va continuer à jouer son rôle, non
seulement de producteur d'électricité, mais d'explorateur
d'énergie, de distributeur d'énergie. Je pense que c'est la seule
compagnie au Québec qui peut se permettre de dire ce genre de
choses-là. Je pense que, finalement, cela va profiter non seulement
à l'économie mais aux consommateurs d'électricité.
Nous sommes persuadés qu'Hydro peut, dans les prochaines années,
avec certaines conditions, avoir des tarifs qui vont être de plus en plus
concurrentiels et avec des augmentations de tarifs qui vont être
limitées - du moins, nous le pensons -dans la conjoncture actuelle.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, on
vous remercie. La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources suspend ses travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise de la séance à 20 h 8)
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): À
l'ordre! La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources poursuit son étude de la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec pour l'année 1984. Lorsque nous avons
quitté, la parole était au ministre. Est-ce que vous avez
d'autres questions, M. le ministre?
Plan d'équipement
M. Duhaime: Oui, VI. le Président. J'ai annoncé que
j'avais deux questions pour le moment. On a répondu à une; la
deuxième, ce serait plus une question de clarification qu'autre chose
parce que j'ai l'occasion de parler avec nos amis de la presse, de même
qu'avec les collègues d'un côté ou de l'autre de cette
table. Quand on parle d'énergie
hydroélectrique en particulier et qu'on parle d'un plan
d'équipement, il y a très souvent beaucoup de confusion dans les
mots et expressions utilisés.
J'ai cru comprendre des exposés qui ont été faits
par le président d'Hydro-Québec que le plan d'équipement
était basé sur des prévisions de ventes
régulières. Par ailleurs, dans le dossier d'exportation, on parle
de ventes excédentaires et, tantôt, quand on touchera au dossier
d'exportation, on parlera de ventes d'énergie, tantôt
d'énergie sur un tarif interruptible, tantôt d'énergie
ferme, ou encore de contrat de puissance.
J'aimerais savoir, de M. Coulombe ou de M. Bourbeau, comment à
Hydro-Québec s'oriente le processus pour en arriver à
établir un plan d'équipement. Est-ce que vous tenez compte des
prévisions de ventes régulières seulement ou si vous tenez
compte également des prévisions de ventes sur des programmes
spéciaux ou d'écoulement d'énergie? Ou encore tenez-vous
compte d'une problématique d'exportation, que ce soit d'énergie
excédentaire, que ce soit d'énergie tout court ou que ce soit de
puissance? Là-dessus, j'aimerais qu'on se comprenne bien pour
éviter toute confusion.
Je lisais une manchette d'un journal, il y a quelques jours, qui
annonçait... Je pense que le député d'Outremont a
péché dans ce sens-là aussi en reprenant qu'avec X
milliards de kilowattheure d'énergie en surplus, c'étaient tous
ces beaux milliards qu'on voyait s'écouler le long de nos
rivières, etc.; il manquait seulement le poème. Et plus loin,
dans le même article, on disait: Ces surplus seront affectés
à tel programme, tel programme, tel programme de sorte que, sur une
période de cinq ans ou de dix ans, les surplus prévus
apparaissaient presque comme des quantités négligeables, si on
tient compte des ventes faites par Hydro-Québec en fonction de sa
capacité de production et des ventes réelles. J'aimerais qu'on se
comprenne là-dessus et si on se comprend sur cela, j'aurais
peut-être une autre question, mais je ne suis pas sûr.
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles):
D'accord. M. le président.
M. Bourbeau (Joseph): À venir jusqu'à maintenant,
Hydro-Québec a toujours planifié son plan d'équipement sur
les ventes d'énergie régulière au Québec. On n'a
jamais installé de centrales pour vendre de l'énergie
excédentaire ou de l'énergie interruptible. On fait une
différence, évidemment, entre le ferme... L'énergie ferme:
il y a de la puissance, il y a de l'énergie qui est livrée ou qui
peut être livrée à tous les instants, c'est-à-dire
365 jours par année, 24 heures par jour. C'est ce qu'on entend par de la
puisssance et de l'énergie fermes.
Au contraire, si on peut dégager de nos installations de
l'énergie durant certaines périodes de l'année, mais pas
toute l'année, à ce moment, on utilise les termes "énergie
interruptible", on dit qu'on a des surplus ou de l'énergie
excédentaire.
On pourra parler plus tard - au point de vue de vente aux
Américains - du principe de l'énergie ferme. Énergie ferme
veut dire: Dans une période de douze mois, on s'entend pour livrer une
certaine quantité d'énergie, ce qu'on appelle de l'énergie
ferme, mais cela ne veut pas dire qu'elle est livrée durant douze mois
par année.
Au point de vue des surplus... Vous avez dit, M. le ministre, qu'on a
des surplus. Je crois qu'on a avec nous le vice-président à la
planification qui peut démontrer de quelle façon on a des
surplus, ce qui a engendré les surplus et de quelle façon on
entend disposer des surplus.
On a M. Claude Dubé, vice-président à la
planification des équipements, pour nous présenter un tableau
qui, je pense, va répondre à toutes les questions.
M. Duhaime: II est beau.
M. Bourbeau (Joseph); On a plusieurs autres tableaux comme cela,
si cela peut être...
M. Tremblay: Les tableaux d'Hydro-Québec sont toujours
bien préparés.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Maintenant,
est-ce que vous pourriez vous identifier, s'il vous plaît, pour...
M. Dubé (Claude): Claude Dubé,
vice-président à la planification des équipements. Je me
suis permis d'apporter un tableau qui pourrait nous aider à comprendre
un peu le phénomène.
En 1983, au moment où on se parle, la consommation
d'énergie électrique au Québec se situe autour de 100 000
000 000 de kilowattheures par année. On a parlé, tantôt ou
avant le dîner, d'un rythme de croissance prévu de 2,9% par
année à partir de 1981. Bien sûr, ces 2,9% comprennent une
croissance très rapide dans les trois prochaines années, autour
de 4,5% à 5% par année. Mais, à long terme, c'est une
prévision de demande qui s'articule autour de 2,9% par année.
Or, si on se situe à 100 000 000 000 de kilowattheures cette
année et qu'on croît à 2,9%, on voit ici en rouge la
croissance annuelle de la demande d'énergie électrique au
Québec. On voit que cette demande monte d'année en année
pour aller se situer, en 1999-2000, autour de 165 000 000 000 de
kilowattheures. Or, on a ici la capacité moyenne de production du parc
d'équipement d'Hydro-Québec à partir de la fin des travaux
du complexe La Grande, soit après
la mise en service totale des centrales de La Grande 2, La Grande 3 et
La Grande 4. Notre capacité de production se situera en 1985 autour de
165 000 000 000 de kilowattheures et, au moment où on se parle, la
consommation annuelle du Québec est autour de 100 000 000 000 de
kilowattheures. Il y a donc un écart entre les deux. Cet écart
n'est finalement rattrapé qu'en l'an 2000 et le plan qu'on vous a
proposé suggère justement que, pour satisfaire les besoins
internes du Québec, ce qu'on a appelé tantôt la demande ou
les besoins prioritaires, ce n'est qu'à partir de l'an 2000 qu'il y
aurait besoin de mettre en service de nouveaux équipements - ce qui est
prévu ici, c'est la phase II du complexe La Grande - pour continuer de
satisfaire les besoins internes du Québec qui continueraient à
croître.
Or, à partir du moment - il y a environ deux ans - où est
apparu un écart justement entre notre capacité de production
prévue et la demande du Québec, Hydro-Québec a
développé la notion de marché global, c'est-à-dire
qu'au-delà de la demande interne du Québec vient maintenant
s'ajouter une autre demande principalement constituée d'énergie
interruptible ou d'énergie excédentaire. On retrouve cette
demande principalement en Nouvelle-Angleterre, dans l'État de New York,
au Nouveau-Brunswick, en Ontario et, bien sûr, pour les bouilloires
industrielles au Québec.
Au total, ce nouveau marché constitué de charge
interruptible ou de demande excédentaire se situe autour de 47 700 000
000 de kilowattheures par année. Donc, les besoins internes du
Québec, 100 000 000 000; les besoins excédentaires, 47 700 000
000. C'est donc un marché très important.
Pour l'expliquer un peu davantage, ici on se situe en 1988 ou même
en 1986, si vous voulez, à partir du moment où toutes nos
interconnexions actuellement prévues seront en service. Donc, on parle
de New York avec une capacité de 2300 mégawatts, on parle de la
Nouvelle-Angleterre avec 690 mégawatts et on parle du Nouveau-Brunswick
avec au-delà de 1000 mégawatts de capacité ou de nouveaux
marchés qu'on est prêt à aller chercher.
Si on devait satisfaire tous ces nouveaux marchés, au lieu de
mettre en service de nouveaux équipements en l'an 2000, c'est
plutôt en 1989 qu'il faudrait mettre en service de nouveaux
équipements puisque c'est à ce moment-là que la demande
rattrape notre capacité de production.
On a séparé ici les marchés excédentaires en
deux catégories: ceux où -ils sont indiqués en bleu -
notre espérance de revenu dépasse le coût de production et
ceux où notre espérance de revenu serait inférieure
à notre coût de production. Dans cette catégorie-là,
on retrouve, bien sûr, l'Ontario. L'espérance de revenu sur le
marché ontarien est nettement plus faible que sur les marchés des
États-Unis pour la bonne raison qu'aux États-Unis notre
électricité sert à déplacer la consommation de
pétrole tandis qu'en Ontario on ne peut réussir qu'à
déplacer la consommation de charbon. Il y a une différence
importante entre le prix du charbon et le prix du pétrole, de sorte que,
pour Hydro-Québec, l'Ontario devient un marché intéressant
au moment où on a trop de surplus, mais beaucoup moins
intéressant à partir du moment où il faudrait construire
pour alimenter ce nouveau marché.
Si on devait maintenant construire un programme d'équipement pour
satisfaire non plus les besoins prioritaires du Québec ou notre demande
interne, mais aussi ce nouveau marché lucratif, c'est en 1992 qu'on
verrait l'apparition de nouveaux équipements de base.
Il faut maintenant tenir compte d'un autre phénomène. On a
parlé aussi tantôt de l'état de nos réservoirs et,
bien sûr, à partir du moment où on est en état de
surplus, nos réservoirs sont remplis à pleine capacité. Au
moment où on se parle, nos réservoirs contiennent environ 100 000
000 000 de kilowattheures de réserve. C'est une quantité
énorme. Le réservoir le plus important qui contient la
majorité de ces réserves est, bien sûr, le réservoir
de Manic 5. Pour des fins de sécurité et afin de mettre les
consommateurs du Québec à l'abri d'une sécheresse
éventuelle, Hydro-Québec désire toujours maintenir dans
ses réservoirs un minimum d'accumulation égal à environ 70
000 000 000 de kilowattheures. Il reste donc 30 000 000 000 de kilowattheures
qui seront accumulés au-delà de nos besoins propres. Donc, pour
satisfaire les besoins ou la demande totale, lucrative, à
l'intérieur et à l'extérieur du Québec - on a vu
tantôt que c'était en 1992 qu'on aurait besoin de nouveaux
équipements - si on ramène le niveau de nos réservoirs
à leur niveau normal, c'est-à-dire du niveau de 100 000 000 000
de kilowattheures à 70 000 000 000 de kilowattheures qui serait le
niveau normal de nos réservoirs et en tirant sur nos réservoirs,
ce n'est maintenant qu'en 1995-1996 que de nouveaux équipements seraient
nécessaires pour satisfaire l'ensemble de ces nouveaux marchés.
On a ici la notion de besoins prioritaires, de besoins internes du
Québec, de besoins excédentaires, de puissance ou charge
interruptible et la notion de marché lucratif ou de marché
vraiment moins lucratif. C'est un peu autour de ces notions que vous a
été présenté le plan des installations.
M. Fortier: J'aurais juste une petite question.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Cela va. M.
le député d'Outremont.
M. Fortier: Je vais laisser la parole à mon
collègue de Notre-Dame-de-Grâce, mais j'ai une question sur le
petit tableau. Vous avez dit que votre politique serait de réduire les
réserves de Manic 5, mais je n'ai pas compris les raisons. Est-ce que
c'est une politique que vous aviez avant ou est-ce à cause des
faiblesses du barrage qui ont été évoquées dans
certains journaux? Est-ce que c'est une mesure plus sécuritaire?
M. Dubé: Pour des fins de gestion normale, on aurait
tendance à maintenir notre niveau de réserve autour de 70 000 000
000 de kilowattheures à l'intérieur de l'ensemble de tous nos
réservoirs. Étant donné notre situation de surplus
temporaire, il se trouve que, à cette période-ci, 1986-1987-1988,
nos barrages auront atteint leur cote maximale, c'est-à-dire qu'ils
seront pleins; ils seront au niveau 100 au lieu d'être au niveau 70.
C'est à cause de cette anomalie qu'il faudrait d'abord ramener le niveau
de nos réservoirs à leur niveau normal avant de construire de
nouveaux équipements.
M. Fortier: Quelle est la raison pour laquelle votre politique
est de maintenir au niveau de 70? Est-ce une mesure de sécurité?
Est-ce que le design était fait pour pouvoir supporter un maximum plus
élevé ou si c'est simplement une mesure de sécurité
à long terme?
M. Dubé: C'est la gestion normale de nos
réservoirs.
M. Coulombe: La vraie raison, c'est tout simplement qu'il est
plus payant de gérer des réservoirs de cette façon. En
d'autres mots, si les spécialistes disent qu'il faut 70 000 000 000 de
kilowattheures de réserve pour bien gérer, on perd de l'argent si
on maintient cela à 100 000 000 000. Donc, on est aussi bien de vendre
ces 30 000 000 000 plutôt que de les garder inutilement.
M. Bourbeau (Joseph): On parle beaucoup plus de la
sécurité d'approvisionnement...
M. Fortier: Oui, d'accord. On parle de la sécurité
d'approvisionnement et non pas de la sécurité d'un barrage en
particulier.
M. Bourbeau (Joseph): On ne parle pas de la
sécurité de barrage.
M. Fortier: Juste un petit mot avant de passer la parole à
mon collègue. La Loi sur l'Hydro-Québec qui a été
modifiée donne le mandat à Hydro-Québec de gérer
son plan d'équipement sur l'ensemble de la demande. Je croyais que le
ministre posait la question alors qu'il me semblait que les modifications qui
ont été apportées à la loi étaient
très claires et que, maintenant, vous devez préparer des plans
d'équipement en prenant en considération la totalité des
besoins et non pas uniquement des besoins du Québec.
M. Coulombe: Oui, c'est-à-dire que...
M. Fortier: Autrement dit, il n'y a plus de limites
géographiques dans la Loi sur l'Hydro-Québec. Cette question de
la part du ministre m'a surpris. Je tenais pour acquis que la nouvelle loi vous
donnait un mandat très clair de planifier votre plan d'équipement
en fonction de besoins du Québec et de l'extérieur du
Québec, si besoin en était.
M. Coulombe: C'est exactement ce que M. Dubé vient
d'expliquer, sauf que, si on sort du rouge qui est là, on tombe dans de
l'excédentaire à l'heure actuelle. Or c'est évident que
l'aspect excédentaire ou interruptible est un marché beaucoup
plus volatif que le ferme contractuel qui, lui, est soumis au marché
interne du Québec.
M. Fortier: C'est par sécurité
financière.
M. Coulombe: C'est par sécurité financière.
C'est par calcul économique. À un moment donné, dans ces
surplus-là, il faut se dire: II y en a où c'est payant de vendre,
il y en a d'autres où c'est moins payant de vendre. C'est toujours
payant si les installations sont déjà construites, c'est
toujours payant. Mais, si elles ne sont pas construites, cela devient une
question de rentabilité. En d'autres mots, si tel type
d'équipement est bâti, est-ce que les kilowattheures qui vont
sortir de là, seront vendus à un prix supérieur à
ce qu'il nous en a coûté? C'est la réponse à cette
question-là qui va nous dire quand les équipements doivent
être bâtis.
M. Fortier: Pour le moment, je n'ai pas de questions.
M. Bourbeau (Joseph): Tout ce que l'on dit dans la loi, c'est
qu'Hydro-Québec va évaluer les besoins du Québec en
énergie et non pas de construire pour fournir toute l'énergie du
Québec.
M. Rodrigue: J'ai également une question sur le tableau,
M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Vimont.
M. Rodrigue: On retrouve la notion d'un besoin prioritaire qu'on
retrouve également dans le graphique I: Situation des excédents
1984 à 1993, à la page 34 du document Plan de
développement d'Hydro-Québec.
On retrouve aussi, dans ce graphique-là, la notion de
débouchés. La question que je vous pose, c'est: Est-ce que les
débouchés que l'on retrouve dans le graphique 1, Situation des
excédents de 1984 à 1993, cela englobe la portion jaune que vous
avez en haut ou seulement la portion bleue?
M. Dubé: C'est la totalité. M. Rodrigue:
C'est la totalité. M. Dubé: C'est la totalité.
M. Rodrigue: Merci.
M. Dubé: C'est la même courbe, exprimée
différemment, avec un peu plus de détails.
M. Rodrigue: D'accord, merci.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Oui, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous mentionnez, en fait, que
l'excédent, le surplus serait de 30%, pour être vraiment
sécuritaire. Est-ce qu'il pourrait être de plus de 30%? Vous
dites, en fait, qu'on a un surplus ou que le réservoir contient
l'équivalent de la consommation annuelle; c'est cela?
M. Dubé: Au moment où l'on se parle, c'est
cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Bon. Alors, ce serait quoi le
pourcentage critique?
M. Dubé: C'est-à-dire que, lorsque l'on parle de
100%, nos réservoirs sont pleins, sont à pleine
capacité.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais la réserve qu'on devrait
conserver?
M. Dubé: C'est 70%.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites 70%. Est-ce qu'on pourrait
diminuer un peu cette...
M. Dubé: Pour des raisons de fiabilité
d'alimentation, on veut s'en tenir à la cote 70%.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc le surplus de 30%, pourrait
être vendu s'il y avait un marché.
M. Dubé: C'est une capacité d'emmagasinement en cas
de crue plus supérieure à ce qui a été prévu
et c'est la gestion normale d'un résevoir, d'un parc d'équipement
dont la production est essentiellement liée aux précipitations de
neige et de pluie. Et c'est pour ces raisons-là qu'il faut se garder une
marge de maneouvre, une marge d'accumulation pour des fins de
sécurité d'approvisionnement.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais je veux bien comprendre. Le
surplus de 30%. Est-ce qu'on pourrait le vendre sous forme
d'électricité ferme, régulière ou bien strictement
excédentaire?
M. Fortier: N'importe comment.
M. Dubé: On pourrait le vendre sous forme
d'électricité ferme aussi si on avait les équipements pour
le faire.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, il est là et on serait
prêt à l'utiliser immédiatement. On pourrait le vendre
immédiatement.
M. Dubé: Exact.
M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Est-ce
qu'il s'agit d'une question portant sur le tableau, M. le député
de Chambly?
M. Tremblay: Pas sur le tableau.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Alors, s'il
n'y a plus de questions sur le tableau, je vais laisser la parole au
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci. Juste une brève question portant sur le
tableau. J'ai remarqué qu'aujourd'hui, le pourcentage d'excédent,
le bleu et le jaune, si vous voulez, par rapport au total, cela monte - si mes
calculs sont bons - à 30% ou 35% du total de la capacité actuelle
de la compagnie. Est-ce que, historiquement, ces écarts entre les
demandes fermes et la capacité étaient aussi importants ou si on
se trouve aujourd'hui dans une situation...
M. Dubé: C'est strictement une situation nouvelle. On a,
depuis longtemps, développé la notion de l'énergie
excédentaire. On a toujours parlé d'une petite quantité ou
de faible quantité d'énergie.
M. Fortier: Qui variait de mois en
mois.
M. Dubé: Et ce n'est vraiment que depuis deux ans,
à partir de l'apparition de ces surplus prévus qu'a
été développée la notion de marché global et
que de nouveaux marchés ont été approchés et
atteints. On parle de ceux de New York, de la Nouvelle-Angleterre, du
Nouveau-Brunswick et de l'Ontario.
M. Scowen: Mais vous vous trouvez effectivement avec cet
écart important aujourd'hui, par accident et non par dessein. (20 h
30)
M. Dubé: Avec l'Ontario, en particulier, on a des
interconnexions qui datent de 30 ans. Il y a toujours eu un échange
d'énergie et des ventes d'énergie excédentaire. Avec le
Nouveau-Brunswick, la première interconnexion remonte à une
dizaine d'années, avec Eel River, où on a atteint un nouveau
marché de l'ordre de 500 mégawatts. À New York, on avait
déjà une interconnexion de 1000 mégawatts qui sera
portée à 2400 mégawatts au printemps prochain. Avec la
Nouvelle-Angleterre, on parle vraiment d'une nouvelle interconnexion d'une
capacité de 690 mégawatts qui pourrait éventuellement
être portée à 2000 mégawatts. Dans l'histoire, c'est
la progression de la croissance des interconnexions à
Hydro-Québec avec les réseaux voisins.
Prévisions économiques
M. Scowen: Merci beaucoup. M. Bourbeau ou M. Coulombe, dans un
premier temps, je voulais vous poser une série de questions qui portent
sur vos prévisions économiques. Je le fais parce que je trouve
à première vue que vos prévisions, quant à la
croissance économique au Québec pour les deux prochaines
années, sont dans un état de contradiction flagrante avec celles
du premier ministre. Je pense qu'il est important de soulever cette question et
de l'approfondir un peu parce que nous sommes devant deux prévisions ou
déclarations d'intention qui sont très importantes pour le
Québec.
Premièrement, les vôtres sont des prévisions sur
lesquelles vous basez toute votre planification financière et votre
planification d'équipement pour la plus grande compagnie au Canada, une
compagnie qui a une très grande importance pour l'économie du
Québec. De l'autre côté, dans le cas du premier ministre,
ses intentions sont la base de son plan de relance sur lequel il veut refaire
l'économie du Québec et en même temps refaire la
crédibilité de son gouvernement. Si les deux calculs sont
opposés, ne sont pas conformes, je pense que la population a le droit de
poser des questions.
La question que je vous pose est la suivante: Dans le cas du premier
ministre, il a déclaré le 13 novembre qu'il avait un objectif
très précis. Vous pouvez le trouver à la page 2 des fiches
techniques qu'il a fournies aux journalistes et qui sont une précision
de son discours. Il dit qu'à court terme, d'ici la fin de 1985 - c'est
deux ans - ils ont pour objectif de faire en sorte que notre économie
non seulement atteigne, mais maintienne un rythme de croissance
supérieur à la moyenne canadienne, ce qui devrait amener une
baisse sensible de son taux de chômage.
C'est la première fois que nous avons une déclaration
aussi claire d'un objectif de la part du premier ministre. Pour 1984 et 1985,
à court terme, un rythme de croissance... Il ne précise pas la
croissance, mais on peut imaginer qu'il parle d'abord de PIB et peut-être
de création d'emplois supérieure à la moyenne
canadienne.
Je regarde vos prévisions pour ces deux années et je sais
très bien que vous avez une équipe d'analystes économiques
qui sont probablement les meilleurs au Québec sinon au Canada. Vos
analyses sont faites d'une façon sérieuse et sont construites sur
la base de prévisions sectorielles. Je présume qu'il n'existe
probablement pas un seul groupe au Québec qui ait les compétences
égales pour au moins évaluer à court terme les tendances
économiques probables.
À la page 2 de votre document, je vois, sur le
résumé du plan de développement, que vous prévoyez
pour 1984 une croissance du PIB de 3,5% qui est 23% plus basse que celle que
vous prévoyez pour le Canada. Pour l'année 1985, vous
prévoyez une augmentation de notre produit intérieur de 2,7% qui
est encore 23% plus bassse que celle du Canada.
Quand je regarde l'autre document qui touche la question d'une demande
d'électricité, page 10, tableau 1, je vois que vous
prévoyez qu'en 1984 il y aura une création nette, ici au
Québec, de 59 000 emplois; pour 1985, 53 000 emplois et, pour 1986, 54
000 emplois. On sait que le premier ministre n'a pas précisé de
chiffres sur le plan de la création d'emplois, il en a mentionné
plusieurs, mais il ne s'est pas assis sur l'un ou l'autre. Dans ce cas-ci, vous
ne donnez pas vos prévisions quant au taux d'emploi au Canada. Mais
quand même, lorsqu'on regarde vos prévisions concernant les deux
PIN ou PIB, nous avons le droit de dire qu'il existe un écart
très important entre votre analyse, votre perception de l'avenir du
Québec à court terme - je répète que vous autres,
plutôt que n'importe qui au Québec, devez avoir le respect des
gens dans vos prévisions - et les intentions du premier ministre. Donc,
voici la première question que je veux vous poser et à laquelle
vous
pouvez répondre d'une façon très courte: Est-ce que
ces prévisions ont été faites en tenant compte du plan de
relance du premier ministre?
M. Coulombe: Ces prévisions datent d'août-septembre.
En termes de prévisions économiques, nous ne les avons pas
changées depuis ce temps, pour une raison très simple. Nous,
à Hydro-Québec, n'étions pas au courant de toutes les
facettes et de toutes les dimensions du plan de relance gouvernemental, de tous
les projets que le gouvernement pouvait avoir là-dedans. On avait deux
choix. Soit de dire: On attend de connaître les fondements du plan, de
connaître les projets, de connaître les investissements, on va
refaire l'ensemble de nos calculs et on va voir ce que cela peut donner.
L'autre choix, c'était de dire: On va présenter le plan tel quel,
cela nous donnera suffisamment de temps pour voir le contenu du plan de relance
et ses effets, lors de la révision du plan, qui est annuelle. À
chaque année, on arrive avec des prévisions qui sont
modifiées. Tous les "prévisionnistes", contrairement à ce
qu'on fait à HydroQuébec, à tous les trimestres, ont de
nouvelles prévisions qui arrivent; pour nous, c'est plutôt
annuel.
C'étaient donc les deux choix qu'on avait. On a opté pour
le premier. En d'autres mots, présenter le plan tel qu'il était,
quitte à voir le contenu, les conséquences, les objectifs du plan
de relance - ce qu'on commence à connaître à l'heure
actuelle - et, dans la révision du plan, intégrer tout simplement
ces nouvelles données. C'est le choix qu'on a fait.
Je tiens aussi à dire que vous avez raison de dire qu'en 1984,
les prévisions du PIB québécois sont inférieures
aux prévisions concernant le Canada, mais nos prévisions sont
quand même supérieures aux prévisions du Conference Board
pour le Québec. On est plus optimiste pour l'économie du
Québec que le Conference Board, légèrement, vous me direz,
puisque c'est 3,5% au lieu de 3,2%. Nos prévisions sont
légèrement supérieures aux prévisions du Conference
Board, mais vous avez raison de dire qu'elles sont inférieures aux
prévisions du Canada. Cela s'explique très bien. Nos
prévisions datent du mois d'août et de septembre, soit le plan
qu'on a déposé au gouvernement. Les données fondamentales
du plan de relance ne nous étaient pas connues; elles viennent de nous
parvenir. Aussitôt qu'on va en comprendre tous les mécanismes,
tout le contenu et tous les projets, on verra si, dans les prévisions du
prochain plan, cela doit s'intégrer. Cela correspond à peu
près à ce que le premier ministre a dit et - comme je l'ai lu
dans les journaux - à ce que le ministre des Finances a dit aussi en fin
de semaine, puisque les conséquences de la relance se feront sentir dans
quelques mois. Pour le prochain plan, on sera prêt à
intégrer ces nouvelles données et on verra si cela donne une
croissance plus accélérée. C'est ce que nous souhaitons
tous. On pourra combler le retard qu'on a pris depuis quelques années si
l'économie fonctionne mieux.
M. Scowen: M. Coulombe, si je comprends bien, les
prévisions ne tiennent pas compte du plan de relance. Est-ce que vos
analystes il y a déjà un mois maintenant - ont eu l'occasion
d'analyser ce plan de relance et de faire une évaluation froide du
potentiel, des possibilités de ce plan de relance pour réaliser
les objectifs du premier ministre? Pour vous rappeler brièvement le plan
de relance, il y a six éléments principaux. Premièrement,
il y a une extension du plan de financement des moyennes entreprises pour une
période de 18 mois. Il y a un plan de reboisement
accéléré des pépinières. Il y a le
prolongement du programme Corvée-habitation pour sept mois. Il y a un
programme d'investissements publics dont vous faites partie dans un certain
sens. C'est pour les institutions culturelles et les équipements
touristiques et l'assainissement des eaux. Il y a un prolongement de votre
programme de rabais auquel je reviendrai. Il y a une réorientation des
programmes d'aide sociale. Ce sont les six éléments
principaux.
Vos analystes, parce que cela fait déjà un mois, ont-ils
pris connaissance de ce plan? Sont-ils capables aujourd'hui de nous dire s'ils
pensent que, sur la base de ce plan, vous pouvez maintenant réviser vos
prévisions sur le PIB du Québec à un niveau qui sera plus
élevé que celles du Canada pour les années 1984 et
1985?
M. Coulombe: En toute honnêteté, on a le contenu
depuis plusieurs semaines, mais il y a plusieurs éléments que
vous venez de mentionner et dont personne ne sait exactement quelles seront les
conséquences concrètes. C'est très facile à
comprendre. Si on prend le premier volet du plan, ce sont les prêts aux
entreprises; il faudrait que quelqu'un nous dise combien d'entreprises vont
s'en servir et combien d'investissements elles feront. Là, on va
calculer ce que cela donne en investissements et on sera capable de
réviser certains chiffres. Mais il n'y a personne qui le sache, à
moins que le gouvernement n'ait des chiffres précis. On ne le sait pas.
Combien d'entreprises vont se servir de ces possibilités de
crédit? On ne le sait pas.
Pour d'autres volets, dans les investissements, s'ils se
réalisent, on est fort bien capable de dire que cela va faire augmenter
une partie de la demande. Mais il ne faut pas oublier que, dans les trois
prochaines années, Hydro-Québec prévoit une demande
régulière - la partie rouge - plus forte que les quatre ou cinq
dernières années, c'est-à-dire de l'ordre de 4% dans les
deux ou trois prochaines années, dans la partie rouge seulement. Donc,
il y a déjà une partie de la croissance de la demande qui est
prévue comme une activité économique
supérieure.
Donc, la réponse très nette et très claire
consistant à dire qu'on prévoit 3,5% comme PIB l'an prochain,
à la question de savoir si le plan de relance, on pourra le changer
aujourd'hui de 3,5% à 4,5%, en toute honnêteté, on n'est
pas capable de la donner. Si on voulait risquer un peu plus, on pourrait mettre
au défi n'importe qui.
M. Scowen: Le premier ministre, M. Coulombe, a prétendu
que tout dans ce plan et les fiches techniques qui l'avaient accompagné
était clair et complet. Par exemple, lorsque vous dites que vous ne
savez pas combien d'investissements va susciter ce plan Biron, M.
Lévesque a dit très clairement que ce serait 2 000 000 000
$...
M. Coulombe: Combien d'entreprises?
M. Scowen: Alors, c'est à vous, j'imagine, à
décider si ce plan peut susciter des investissements additionnels de 2
000 000 000 $. C'est le chiffre qui est dans son texte. Je peux le citer. Il
prétend...
M. Tremblay: Citez-le!
M. Scowen: Vous voulez que je le cite?
Attendez... C'est son texte, c'est à la page 10: "Cette garantie
de prêts jusqu'à concurrence de 2 000 000 000 $..."
M. Tremblay: Ah! Jusqu'à concurrence! M. Scowen:
C'est cela. Bon!
M. Tremblay: II n'a pas dit que ce serait 2 000 000 000 $.
M. Scowen: Ah! Alors, ce n'est pas clair!
M. Coulombe: On interprète qu'il y a des crédits
disponibles pour les entreprises. Vont-elles s'en servir? Cela, c'est l'avenir
qui va le dire.
M. Scowen: Alors, est-ce que je peux vous poser une question qui
va peut-être raccourcir la discussion? Après avoir pris
connaissance de ce plan de relance et des informations disponibles, vous et M.
Bourbeau vous avez été portés immédiatement
à changer vos prévisions pour les deux prochaines années.
Croyez-vous que, d'après les informations que vous avez reçues
jusqu'à maintenant de vos analystes et d'après votre propre
expérience d'hommes d'affaires québécois, le plan de
relance du premier ministre peut avoir comme effet les conséquences
qu'il établit comme objectifs? (20 h 45)
M. Coulombe: Tout ce que l'on peut dire, c'est que nous le
souhaitons, sauf que, dans les deux prochaines années, et je pense que
le tableau est assez éloquent là-dessus, même si le plan de
relance donnait une efficacité de 125%, Hydro-Québec n'a pas
besoin à notre avis, de prendre de décisions autres que celles
qui sont présentées dans le plan de développement que vous
avez devant les yeux. En d'autres mots, notre problème, à l'heure
actuelle, n'est pas tellement de vous dire qu'on souhaite que cela fonctionne,
que cela marche et que l'économie commence à rouler et on verra
dans le prochain plan si cela a de l'impact sur les grandes prévisions,
mais, à très court terme, dans un, deux, trois ou six mois, on
n'a pas besoin de changer les décisions fondamentales d'investissements
qui sont contenues dans le plan.
Donc, dans cette perspective, et c'est ce qu'on dit dans le plan
à peu près à toutes les pages, la flexibilité qu'on
a à l'heure actuelle de réagir à des situations, c'est
comme cela que cela s'exprime. Si le plan de relance fonctionne
merveilleusement bien, on n'aura pas besoin, même si cela fonctionnait
à 125%, l'an prochain, de changer nos décisions d'investissements
à Hydro-Québec. Il se peut, comme le disait M. Dubé
tantôt, que, si cela a un succès très grand, les
décisions qui devaient être prises en 1988 ou en 1990 soient
ramenées en 1986 ou en 1985, mais certainement pas dans une
période d'un an.
M. Scowen: M. Coulombe...
M. Coulombe: Donc, cela nous place dans une position relativement
confortable, en ce sens qu'on peut voir évoluer la situation et
réagir, parce qu'on a tout ce qu'il faut pour réagir rapidement
à n'importe quel changement de conjoncture. Tout le monde sait que ces
conjonctures ne changent pas dans deux, trois ou six mois. Cela prend un peu
plus de temps.
M. Scowen: M. Coulombe, avec tout le respect que je vous dois, je
pense que vous avez la responsabilité d'aller un peu plus loin que le
monde ordinaire qui souhaite bonne chance au premier ministre. Vous avez la
plus grande entreprise au Québec. Vous avez une analyse assez
complète des prévisions de la demande d'électricité
dans tous les secteurs, industrie par industrie. Vous avez toute une
gamme de décisions à prendre, sur la base des prévisions
macro-économiques.
Vous venez d'entendre une déclaration de votre premier ministre
disant qu'il a l'intention que, l'année prochaine, le PIB au
Québec ne soit pas de 3,5%, mais de 4,5% au moins, plus de 4,5%. Pour
l'année 1985, ce sera encore plus élevé.
C'est une déclaration qu'il a faite. Il a, d'après lui,
mis en oeuvre les moyens pour le réaliser. La question que je vous pose
est la suivante: Avez-vous pris au sérieux cette déclaration et
avez-vous demandé immédiatement à votre personnel de
changer le plan pour concorder avec la décision du premier ministre? De
dire: Bon, si cela marche, on en a la capacité globalement, je suis
certain, mais, pour vous, avec une société qui touche au...
M. Coulombe: Mais, on a réagi immédiatement.
D'abord, comme je l'ai mentionné dans mon intervention du début,
on a réagi immédiatement en augmentant les investissements. Cela
a été un geste concret. On a rapproché dans le temps 350
000 000 $ d'investissements concrets. Deuxièmement, il y a eu un
élargissement de certains programmes de vente, deux ans de plus dans les
rabais, un programme d'accompagnement du retard que le Québec avait pris
dans les usines d'épuration des eaux; il y a un programme
spécifique qui concerne cela. Donc, il y a eu une réaction
immédiate d'Hydro-Québec.
Là, vous me demandez les conséquences globales d'objectifs
gouvernementaux sur le PIB. En toute honnêteté, on n'est pas
capable de vous dire si le taux de 3,5% qu'on prévoit cette
année, le plan de relance va le mettre à 4,5 ou à 5,5. On
ne le sait pas, mais je tiendrais à faire remarquer de nouveau que la
réaction d'Hydro a été claire et précise. Je l'ai
indiqué tantôt, dans quatre ou cinq secteurs précis, on a
mis tout l'effort qu'il fallait, dans le cadre raisonnable, pour appuyer le
plan de relance avec des investissements concrets. Cela était à
la portée d'Hydro. Maintenant, Hydro, même si elle est la plus
grosse boîte au Canada en termes d'actifs, il y a toute une série
de décisions dans laquelle elle n'a rien à voir: comment les
entreprises vont investir, comment les entreprises vont emprunter, et ainsi de
suite.
Tout ce qu'on peut faire, c'est donner le maximum d'appuis, mais c'est
tout ce qu'on peut faire. Il faut que l'économie fonctionne par
elle-même.
M. Scowen: En fin de compte, vous avez décidé de ne
pas changer immédiatement la base de vos prévisions pour
concorder avec celles annoncées par le premier ministre?
M. Coulombe: Peut-être que je me trompe, mais je ne suis
pas au courant que le premier ministre ait dit formellement que les 3,5%
allaient devenir 4,8%, ou 5,2%, ou 5,4%.
M. Scowen: II a dit que cela doit être plus
élevé que la moyenne canadienne pour l'année
1984-1985.
M. Coulombe: C'est un objectif poursuivi et sur lequel on peut
être en total accord, mais cela ne nous semblait pas pour le moment, pour
la présentation du plan actuel... À cause du
phénomène dont je vous ai parlé tantôt, même
si on changeait les 3,5% pour 4,5% en 1984, cela ne changerait pas les
décisions de base d'investissement à cause du temps
nécessaire pour les absorber.
M. Scowen: Est-ce que je peux vous poser juste une
dernière question dans ce domaine? Cela touche à un aspect de
votre part, de l'effort... Je ne parle pas des investissements. Le premier
ministre a annoncé comme élément très important
d'étendre... Je vais le citer précisément pour qu'il n'y
ait pas de malentendus. À la page 15 de son discours, il a parlé
des tarifs d'électricité. Il a dit, et je le cite: C'est pourquoi
la décision a été prise d'appliquer un équivalent
de ce programme non seulement aux alumineries, mais aussi aux industries
métallurgiques et électrochimiques et à la chimie
minérale. Il y a là en perspective et dans les secteurs de pointe
des possibilités sérieuses d'implantation pour plus de 1000
mégawatts de puissance disponible.
Est-ce que cet objectif, cette déclaration de 1000
mégawatts - c'est un chiffre que vous avez donné - pouvez-vous
préciser un peu les industries et les compagnies qui peuvent profiter de
ce programme à court terme? Si je comprends bien, c'est un rabais de 50%
sur le taux grande puissance pour une courte période, une période
de moyen terme pour faire des investissements. De toute façon, vous
pouvez peut-être même expliquer le plan. Mais voici la question de
fond que je veux vous poser: Est-ce que vous pensez que, dans les deux
prochaines années, vous aurez des clients pour des investissements qui
vont nécessiter 1000 mégawatts de puissance, et qui sont-ils?
M. Coulombe: Ce programme, en ce qui concerne
Hydro-Québec, c'est une extension -c'est d'ailleurs ce que vous venez de
citer -du programme du secteur de l'aluminium. En d'autres mots, ce n'est pas
le programme de rabais temporaire qui est associé à n'importe
quelle entreprise qui fait un investissement, qui augmente sa consommation
d'électricité. C'est un autre programme, c'est le programme de
l'aluminium, c'est-à-dire le programme gouvernemental qui a
été annoncé en 1978 ou 1979 pour permettre à de
nouvelles entreprises dans le secteur de l'aluminerie de
s'établir au Québec en ayant la possibilité d'obtenir une
garantie d'un tarif plafond pour une période de 20 ou 25 ans. Cela a
été fait dans le cas de Reynolds, cela a été fait
dans le cas de Pechiney. Nous savons, parce que nous sommes en discussion avec
le gouvernement, qu'il y a d'autres projets d'aluminerie qui sont en discussion
à l'heure actuelle.
Dans les trois autres secteurs, ce serait exactement le même
principe, c'est-à-dire des tarifs plafonds dans le cadre de la politique
gouvernementale existante. Cette politique prévoit que, s'il y a un
manque à gagner de la part d'Hydro-Québec, dépassé
un tarif plafond, c'est le gouvernement qui en assume la
responsabilité.
Les exemples précis dans les trois secteurs en question, il
serait délicat de notre part de les mettre sur la table. On a quelques
projets qui se discutent au gouvernement avec des entreprises
extérieures. Je pense que cela serait délicat pour nous de donner
exactement le nom des compagnies. Est-ce que cela va faire 1000
mégawatts d'ici à deux ans? Je suis incapable de vous le
dire.
M. Scowen: Est-ce que vous avez eu des pourparlers sérieux
avec des compagnies qui ont le potentiel de faire des investissements d'ici
à deux ans qui vont totaliser 1000 mégawatts?
M. Coulombe: Si vous parlez d'investissements qui vont être
réalisés d'ici à deux ans, je pense qu'on n'a pas dans nos
carnets ce genre d'industrie, ce genre d'entreprise. Mais, si vous parlez d'une
période un peu plus longue, les projets en discussion, que cela puisse
atteindre 1000 mégawatts, ce n'est pas impensable puisque, si vous avez
une aluminerie qui prend tout de suite 200 mégawatts, avec une autre
série de cuves de 200 autres, cela fait tout de suite 400
mégawatts. Donc, ce n'est pas illusoire et impensable que cela puisse
arriver.
Maintenant si vous me demandez si, d'ici à deux ans, les
investissements vont être faits, je vous dirai non. Si on regarde le cas
de Pechiney, cela fait deux ans et demi que c'est en discussion et on
prévoit pour septembre 1986 le premier lingot. Alors, en septembre 1986,
cela fera deux ans que ce sera en discussion, si je ne me trompe, si ce n'est
pas deux ans et demi. Donc, cela nous place en... C'est cinq ans. Un
investissement de cette envergure, entre le moment où les discussions
commencent et l'ouverture de l'usine, c'est quatre ou cinq ans.
M. Scowen: Alors, vous n'avez rien là, dans le contexte de
cet élément du plan de M. Lévesque, qui va nous donner une
augmentation importante dans les deux prochaines années à
l'intérieur desquelles il prévoit cette augmentation
importante...
M. Coulombe: C'est-à-dire que l'énergie ou la
charge puisse être sur le réseau d'Hydro-Québec d'ici
à deux ans.
M. Scowen: En conclusion - je vous remercie beaucoup de vos
précisions - vous me laissez avec l'impression que vous êtes un
peu comme nous, les membres de l'Opposition, les journalistes et les autres
observateurs, qui ont écouté le premier ministre et lu ses
documents qui étaient disponibles avec tous les détails. Je pense
que vous donnez l'impression de partager l'opinion générale,
à savoir qu'on lui souhaite bonne chance, mais qu'on ne pense pas qu'il
y ait la moindre chance que ce plan de relance puisse marcher.
Je le dis, parce que, d'après vous, si je comprends bien, aucun
changement n'a été fait, à la suite de
l'énoncé de ce plan, pour changer vos plans en conformité
avec ses intentions.
M. Coulombe: J'ai bien dit qu'on avait fait des changements dans
les programmes d'investissements et dans les programmes de vente pour
accompagner le plan de relance. J'ai donné les chiffres. Cela, c'est
clair. Quant aux effets sur le PIB, la création d'emplois et ainsi de
suite, nous pensons qu'au moment où on se parle, pour modifier tous nos
chiffres dans cette perspective, il faut attendre quelques mois afin de pouvoir
en déduire tous les effets.
Le gouvernement, dans son plan de relance, a des objectifs à
atteindre. C'est tout à fait normal de fixer des objectifs semblables.
En ce qui nous concerne, on y participe du mieux que l'on peut, mais on n'est
pas le moteur unique et fondamental de ce plan de relance. Il y a beaucoup
d'aspects qui n'ont rien à voir avec Hydro-Québec.
Donc, on n'a pas de jugement à porter en termes d'entreprise. On
y participe et on augmente nos investissements. On met des centaines de
millions de dollars de plus. On a élargi nos programmes de ventes et on
fait tout l'effort que l'on peut. Quant aux résultats globaux, en tant
qu'entreprise, on n'a pas de jugement à porter. On peut en porter comme
citoyens. Mais, comme entreprise, on a fait tout ce que l'on pouvait. Pour le
moment, c'est ce que cela donne. Dans le prochain plan - et cela c'est dans
douze mois, si on prend le même rythme qu'aujourd'hui - on aura les
éléments pour pouvoir dire: Compte tenu... Voyez-vous, l'autre
année, on prévoit 2,7% d'augmentation du PIB au Québec.
Si, dans le prochain plan, cela s'est matérialisé, les
entreprises ont embarqué et la reprise s'est faite, on pourra dire que,
pour les 2,7%
prévus pour 1985, on a changé d'idée, c'est 3,5% ou
4,5%, ou ainsi de suite.
M. Scowen: En terminant, je peux dire qu'à la suite de la
présentation de ce programme télévisé le soir du 13
novembre, vous n'avez pas rappelé tous vos économistes au travail
à minuit le même soir pour reprendre tout leur travail.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. Bourbeau
voudrait répondre.
M. Bourbeau (Joseph): C'est pour reprendre un point qu'a
mentionné M. Coulombe. On a peut-être précédé
le plan de relance économique parce que, l'an prochain, on aura de
disponibles 6000 mégawatts et on aura 50 000 000 000 de kilowattheures
de disponibles. Alors, on peut faire face à la musique n'importe quand.
En 1985, on sera aussi dans une situation à peu près semblable.
On aura à peu près 6000 mégawatts et 50 000 000 000 de
kilowattheures. (21 heures)
M. Scowen: M. Bourbeau, mes commentaires ne touchaient pas la
disponibilité de votre électricité, mais plutôt la
capacité d'analyse de votre groupe économique. Tout ce que j'ai
dit ce soir était en fonction de cet aspect. Il y a d'autres questions,
bien sûr, mais c'était simplement à savoir si on
était tous sur la même longueur d'onde au Québec quant
à l'évolution économique probable du Québec. Je
constate qu'on ne l'est pas.
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
ministre. Ensuite, je reconnaîtrai M. le député de
Chambly.
M. Duhaime: J'aurais pu interrompre le député tout
à l'heure, mais je voulais l'entendre jusqu'au bout de son raisonnement.
D'après ce que je viens d'entendre des questions qui ont
été posées, l'Opposition veut voir si, dans les documents
déposés par Hydro-Québec et dans les réponses du
président du conseil ou du P.-D.G. de l'entreprise, il n'y avait pas
là une contradiction quelconque avec le plan de relance du premier
ministre tel qu'il l'a annoncé le 13 novembre dernier. Pour une
Opposition qui très souvent se targue de nous lire in extenso ce qu'il
est convenu d'appeler la loi constitutive d'Hydro-Québec et sa propre
autonomie de gestion, je dois lui dire qu'elle manque de beaucoup de logique
avec son approche traditionnelle.
Deuxièmement, je pense qu'Hydro-Québec a dit tout à
l'heure avant la suspension - je crois que c'était dans le texte de M.
Coulombe - que du devancement d'investissements et de
l'accélération avaient été faits, entre autres sur
la cinquième ligne, pour le plan d'équipement de 1984. Tout le
monde sait, de ce côté-ci de la table, que ce que l'Opposition
souhaite au plus haut point, c'est l'échec du plan de relance de
façon que l'Opposition puisse dire dans six mois ou dans un an: Nous
vous l'avions bien dit.
Une voix: Des prophètes de malheur. M. Kehoe: On est des
bons Québécois.
M. Duhaime: Quand l'Opposition pousse à demander à
Hydro-Québec s'il y a des clients potentiels dans le secteur de
l'électrométallurgie ou dans l'électrochimie ou dans la
chimie minérale, je dirais au député de
Notre-Dame-de-Grâce qu'il aurait peut-être dû consulter son
collègue de Chapleau, qui nous a accompagnés sur la
Côte-Nord pendant une grande journée.
M. Kehoe: II n'y a pas de solution là. C'est bien pis.
M. Duhaime: II y a un bloc d'énergie et de la
capacité de conversion qui pourrait aller jusqu'à 400
mégawatts dans l'électrométallurgie, dans les usines de
boulettage, seulement là. Dans les secteurs de chimie minérale et
de l'électrochimie, je peux vous dire qu'il y a des projets en
discussion actuellement entre le ministère de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme et des investisseurs, de même qu'avec le ministère
de l'Énergie et des Ressources. Lorsque nous nous donnons un objectif de
1000 mégawatts sur deux ans en espérant que les conditions de
marché et de concurrence puissent être satisfaites, vous serez le
premier heureux de dire, je l'espère - vos paroles vont vous suivre -
que c'est parce que nous aurons appliqué à ces trois secteurs
industriels la même problématique tarifaire que celle que nous
avons appliquée dans le secteur de l'aluminium.
Je sais bien que l'Opposition est déçue que Reynolds ait
investi 500 000 000 $ au Québec et que l'Opposition est également
déçue que Pechiney ait investi 1 500 000 000 $ à
Bécancour. Vous auriez aimé mieux dire: Voilà, parce que
c'est le gouvernement de René Lévesque qui est à
Québec, il n'y a pas d'investissements qui se font. Encore vendredi
dernier, mon collègue, M. Biron, annonçait un investissement de
773 000 000 $ de Domtar. Cela rejoint aussi un certain climat de confiance. Ce
qui me renverse chaque fois, M. le Président, c'est de voir que de purs
étrangers ont davantage confiance dans l'économie du
Québec que le Parti libéral. J'avoue que cela me
déçoit. Je dis tout de suite, et je l'ai d'ailleurs dit au tout
début de mon intervention, que cela fait
déjà quelques années qu'on se livre à ce
genre d'exercice.
Si vous l'avez vous-même remarqué, on n'a pas encore
beaucoup parlé de la proposition tarifaire d'Hydro-Québec
à 3,4% et du plan d'équipement. Alors, l'Opposition s'amuse et,
pour rejoindre l'expression utilisée il y a quelques mois, "la
croisière s'amuse". Si vous vouliez être sérieux, vous
poseriez des questions à Hydro-Québec ou bien sur le plan
d'équipement ou encore sur la problématique tarifaire. Je suis
convaincu qu'on vous a appris ce soir qu'il y avait 30 000 000 000 de
kilowattheures disponibles dans les barrages. Peut-être pourrez-vous dire
cela à votre chef. S'il divise cela par 6,3, cela va lui donner le
nombre de mégawatts disponibles. Au lieu de faire des
"déjeudînes", comme on dit, et d'annoncer à tout le monde
qu'il va faire le devancement à Québec, il s'agirait de regarder
les tableaux. Je dois dire que les couleurs qui sont indiquées n'ont
rien à voir avec les propos qui sont tenus. Cela me paraît
très éloquent de dire que, lorsqu'on veut pousser un raisonnement
jusqu'à l'absurde, il faut compter sur le député de
Notre-Dame-de-Grâce pour réussir ce tour de force.
M. Scowen: M. le Président, je ne sais pas sur quelle
question ce sera, mais j'espère que...
M. Duhaime: C'est une question d'appréciation.
M. Scowen: ...vous allez me permettre de répondre. Il y
avait des allusions assez personnelles dans la déclaration du ministre
et je veux prendre 60 secondes pour m'expliquer.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): On va vous
accorder 60 secondes, oui.
M. Scowen: Premièrement, si le gouvernement commence
à dire qu'une Opposition qui critique ses politiques est déloyale
envers le population, c'est alors que vous ressentez la panique à
l'intérieur de ce gouvernement. C'est le dernier recours d'un
gouvernement de dire que le critiquer, c'est être déloyal envers
la population. Cette Opposition a, depuis sept ans maintenant, essayé de
faire comprendre au gouvernement certains faits économiques que,
malheureusement, il a commencé à apprendre seulement depuis ces
derniers mois. Je parle, entre autres, du rôle du secteur public et du
secteur privé. C'est simplement un aspect du discours de M. Parizeau de
la fin de semaine dernière; ce n'est pas le même genre de discours
qu'en 1976. Le programme du Parti québécois d'aujourd'hui est
changé aussi. Ne dites pas de nous que nous sommes déloyaux. On
ne critique pas le Québec, on critique les politiques du
gouvernement.
Je veux simplement vous dire, en terminant, que je me demande si
Hydro-Québec savait, comme vous le prétendez, que tous ses
projets étaient pour se réaliser selon les prévisions de
ces documents. Par exemple, quand vous prévoyez dans l'industrie des
produits chimiques où vous mettrez beaucoup d'emphase, que, de 1980
à 2001, la croissance annuelle moyenne sera de -0,4%, je dis qu'il y a
très peu de sérieux dans les déclarations du premier
ministre, du moins d'après les dirigeants d'Hydro-Québec.
Merci.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): D'accord.
M. le député de Chambly.
Surplus et baisse des tarifs
M. Tremblay: Oui, M. le Président. Je dirais que le
député de Notre-Dame-de-Grâce vient de démontrer
avec beaucoup d'éloquence la confusion qui règne dans l'esprit de
l'Opposition. Ces gens préconisent le développement
économique par l'entreprise privée. D'autre part, ils voudraient
que ce soit Hydro-Québec, compagnie d'État, qui fasse le
développement économique.
Je vais poser seulement une question sur la politique tarifaire et je
vais garder pour plus tard les questions qui porteraient plus sur le plan de
développement.
Les citoyens - je voudrais m'expliquer un peu par ce petit laïus -
qui nous rencontrent se disent qu'il y a présentement des surplus
d'électricité à Hydro-Québec et que cela nous
appartient à nous, Québécois, qui sommes d'une
façon directe, jusqu'à un certain point, propriétaires de
l'électricité qu'elle produit. Étant donné qu'il y
a des surplus, il serait normal que ce soit nous qui en profitions d'une
façon directe. Dans ce sens, ils se disent qu'ils pourraient profiter
plus de l'électricité si elle était moins chère. Je
sais bien que vous nous proposez une augmentation des tarifs qui est fort
raisonnable si on compare cela avec l'inflation qui sera d'environ 5%; on parle
de 3,5% d'augmentation générale. Il reste que les citoyens
seraient bien d'accord pour qu'il y ait non seulement un gel des prix de
l'électricité, mais une baisse des tarifs de
l'électricité. Qu'est-ce que vous répondez à
cela?
M. Coulombe: D'abord, il y a des surplus, c'est d'accord.
Deuxièmement, il y a aussi, parallèlement à ces surplus,
des investissements faits dans les 40 dernières années, plus
particulièrement dans les dix dernières années. On a
cité les chiffres au début. Lorsque vous avez un service de la
dette, sur une dette générale de 17 000 000 000 $, c'est
évident que la roue tourne en termes de remboursement des
intérêts et le service donné à la
clientèle
augmente aussi d'année en année. Donc, il y a des
critères financiers; si on veut continuer d'investir, il faut être
capable de garantir le paiement des dettes. Si on veut garder
l'équilibre financier, il y a des critères de base qui ont
été mentionnés dans la loi, qu'il s'agisse de la
couverture des intérêts ou du taux de capitalisation. Il y a donc
des critères minimaux financiers qu'il faut respecter. Le pire service
qu'Hydro-Québec pourrait rendre non seulement à son actionnaire
immédiat, qui est le gouvernement, mais à ses actionnaires
ultimes qui sont les 6 000 000 de citoyens qui paient, serait d'ignorer ces
faits et de baisser des tarifs et ainsi mettre en péril
l'équilibre financier; ce serait la pire erreur à faire.
Consciente de ce que vous dites, Hydro-Québec, depuis quelques
années, s'est dit: Si la demande baisse et si on n'a pas le choix -
parce que, même si la demande baisse, les financiers ne baisseront pas
nos taux d'intérêt; il va falloir continuer à payer quand
même, c'est irréversible et incompressible - qu'est-ce qu'on
contrôle à Hydro-Québec pour que le consommateur
d'électricité profite de tarifs les plus bas possible? Il faut
réduire nos dépenses. Le seul moyen que nous avons, c'est de
réduire les dépenses, de ne pas avoir de programmes
d'investissement qui affectent trop la structure financière et de ne pas
mettre en marche des équipements qui ne feraient qu'augmenter des
surplus qu'on serait obligé de vendre à des prix peu
intéressants. C'est ce qu'a fait Hydro-Québec: elle a
réduit ses dépenses radicalement. M. Bourbeau a fait un calcul
dans sa présentation: 1% de coupures de dépenses d'exploitation,
c'est à peu près 10 000 000 $. Un point de tarif, c'est à
peu près 30 000 000 $. Chaque fois que vous coupez les dépenses
de 3%, vous permettez à la population d'avoir 1% de tarif de moins. Dans
deux ans, on a coupé les dépenses d'exploitation de 120 000 000
$. Ce sont des dépenses qu'on contrôlait.
La question m'a été posée: Pourquoi ne pas donner
cette électricité puisque ce sont des surplus? Le problème
précis est que, si vous preniez une tranche de clients
d'Hydro-Québec, la tranche industrielle ou la tranche de consommation,
cela peut être 600 000 000 $ ou 700 000 000 $. Si vous donnez 10% ou 15%
d'électricité, il ne s'en consommera pas plus. Cela peut
même être dommageable s'il s'en consomme plus. S'il ne s'en
consomme pas plus et que vous perdez 50 000 000 $, 75 000 000 $, 100 000 000 $
ou 125 000 000 $ de revenus, ce sont tout simplement des revenus que vous
perdez et, là, vous mettez en péril l'équilibre financier.
Donc, ce serait une stratégie à ne pas conseiller d'agir de la
sorte. Vous avez ici le tableau; vous voyez que tout cela c'est vendu, ce sont
des ventes. Quand on parle de surplus, c'est ce qu'il y au-delà de ce
tableau et M. Bourbeau a bien indiqué que c'était surtout avant
1988. Le tableau commence à 1988, ici. À partir de là, ce
sont toutes des ventes. Les surplus en haut de ce tableau sont
véritablement une petite quantité par rapport au tableau global
que vous avez là. Cela va se résorber dans les trois, quatre ou
cinq prochaines années. On pense que le meilleur service qu'on peut
rendre encore à la population, c'est d'avoir une situation
financière saine et de ne pas la mettre en péril.
M. Tremblay: Si j'ai bien compris, le fait, par exemple, de
mettre en chantier une centrale a un effet direct sur les tarifs de
l'électricité.
M. Coulombe: Éventuellement oui.
M. Tremblay: Prenons, par exemple, le cas de Manic 5 qui est
votre prochaine centrale dans le plan. Je crois que c'est cela. Si on la
mettait en chantier présentement, vous voulez me dire que les tarifs
d'Hydro-Québec, cette année seraient augmentés plus que de
3,5%? (21 h 15)
M. Coulombe: Non, pas nécessairement, parce que, lorsque
les centrales sont en construction, c'est évident que ces coûts
sont capitalisés. Ce n'est que lors de leur mise en service que... On le
voit dans le plan que vous avez devant les yeux: dans les trois prochaines
années, il va y avoir pour 7 200 000 000 $ d'équipements
déjà bâtis, LG 3, LG 4, Gentilly 2 qui vont venir en
exploitation. Immédiatement, c'est combien de frais
d'intérêt de plus, pour cette année seulement? Vous avez
cela au tableau de la page 69; vous avez tous ces équipements qui
viennent en exploitation et, en 1983-1984, vous en avez pour 293 000 000 $ de
plus de dépenses d'intérêt, 789 000 000 $ de plus de
dépenses d'intérêt en 1984 et 1 094 000 000 $ en 1985. Ce
sont des équipements qui sortent de la capitalisation qu'on fait et qui
viennent en exploitation. Immédiatement, il faut que ces
intérêts soient payés au titre de l'exploitation.
Or, si vous n'avez pas des revenus équivalents pour faire face
à ces coûts, en termes financiers, vous êtes coincés.
En d'autres mots, si vous avez des équipements qui viennent en
exploitation et que vous ne vendez pas le produit ou que vous le vendez
à un prix pas assez élevé, évidemment, la
conséquence est immédiate: il faudra augmenter les tarifs pour
trouver le moyen d'équilibrer les finances. La réaction est
immédiate.
M. Tremblay: Je voudrais présenter cela à l'envers.
Si La Grande 4, par exemple, avait été retardée, si on
avait pu voir, dans
le temps, que la baisse de la demande allait être ce qu'elle est,
cela voudrait dire que présentement on pourrait avoir un tarif
réduit d'électricité, puisqu'elle est
excédentaire.
M. Coulombe: L'an passé, on avait ce dilemme, et on l'a
étudié à fond, de retarder ou non La Grande 4. On ne l'a
pas fait tout simplement parce que ce n'était pas économique; il
y avait 85% ou 90% des dépenses déjà investies et cela
aurait été antiéconomique d'arrêter les travaux
à 90% ou 95% de leur finition. Donc, on a continué et c'est ce
qui cause en partie certains des surplus qu'on a, mais là,
c'était un raisonnement strictement économique. On s'est dit: Ne
pas le faire, on épargne et cela n'ira pas à l'exploitation tout
de suite, mais, au point de vue économique, ce n'était pas
rentable parce que le projet aurait coûté trop cher et le
coût du kilowattheure aurait été trop dispendieux dans
deux, trois, quatre ou cinq ans lorsqu'on l'aurait fini. Donc, à ce
moment, c'était une décision purement économique. On s'est
dit: C'est plus rentable de le terminer que de le mettre en suspens.
Techniquement, si on l'avait mis en suspens, cela n'aurait pas
été versé à l'exploitation. Remarquez, on paie les
intérêts pareil. Il y a une question comptable, on paie les
intérêts pareil; cela ne veut pas dire qu'on suspend les
intérêts quand c'est capitalisé, on paie pareil.
M. Tremblay: Mais, si je comprends bien, il y a un très
grave danger à construire une centrale lorsqu'on n'est pas relativement
certain qu'on va utiliser cette électricité. Cela a un effet
très grand sur les tarifs.
M. Coulombe: Éventuellement, c'est évident que, si
vous construisez des équipements de production et - cela est vrai pour
n'importe quelle compagnie, que ce soit une compagnie qui veut faire une
chaîne de production ou bâtir une nouvelle usine pour augmenter sa
production d'automobiles ou de chocolat ou ainsi de suite - s'il n'y a pas une
relative certitude que les marchés sont là, tôt ou tard,
vous vous mettez dans le pétrin au point de vue financier.
M. Tremblay: Excepté qu'une entreprise où il y a
une concurrence directe, elle, à ce moment, fait faillite, tandis que
vous, ce que vous faites, vous augmentez les tarifs.
M. Coulombe: C'est-à-dire non. Il y a d'autres compagnies
aux États-Unis qui sont dans ce cas où elles ont des
équipements qu'elles ne sont pas capables de payer. Alors, elles
augmentent les tarifs, mais normalement la population n'endure pas que cela
augmente de façon inconsidérée. Il y a l'autre
éternel moyen - vu que c'est un service public - que le gouvernement
subventionne. Cela arrive dans certains États américains, cela
arrive dans certaines provinces canadiennes que le gouvernement est
obligé d'intervenir parce que la charge financière est trop
lourde et que personne n'est capable d'augmenter les tarifs de 20%, 25%, 30% ou
40% d'un coup. Mais il y a certaines compagnies américaines qui sont
rendues à cet état actuellement; elles ont arrêté
leurs centrales nucléaires, elles ont fait des radiations de plusieurs
centaines de millions et là, elles sont obligées de dire à
leurs clients: On va augmenter les tarifs de 25%, 30% ou 35%, on n'a pas le
choix.
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles): M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, je crois qu'on doit
féliciter le député de Chambly parce qu'à l'aide de
ses quelques questions il a permis à Hydro-Québec
d'évoquer les relations qui existent entre le développement
économique, la demande, la construction de centrales qui affectent le
plan d'équipement et, éventuellement, la tarification. En
étudiant les documents, certains d'entre nous l'avaient saisi, mais je
pense que le député nous a permis de saisir davantage les
relations. C'est la raison pour laquelle j'oserais espérer que le
ministre comprenne davantage le processus dans lequel nous nous sommes
engagés. Tout à l'heure, il se posait des questions sur ce que
nous faisions. Il est bien évident qu'Hydro-Québec nous a remis
trois documents extrêmement importants; d'une part, La demande
d'électricité au Québec, qui fait part de la demande
d'énergie électrique; deuxièmement, le Plan de
développement d'Hydro-Québec 1984-1986 et, finalement, le
mémoire sur la tarification. J'espère bien que nous n'allons pas
à l'encontre du règlement si nous posons des questions sur ces
trois documents pour essayer de comprendre les interrelations entre tous les
documents qui nous ont été remis ici. S'il faut que le ministre
et toute la batterie d'experts derrière lui ne comprennent pas cela, je
ne voudrais pas être le sous-ministre qui aurait à lui donner des
explications. Nous, nous allons continuer dans cette voie et essayer de
comprendre ces interrelations. C'est pour cela que je crois que les questions
du député étaient fort à point pour
connaître, justement, les interrelations entre le développement
économique, la demande, le programme d'équipement et la
tarification.
M. Tremblay: N'en mettez pas trop, j'ai peur dans ce
temps-là. Je vous le dis: Cela me fait peur.
M. Fortier: C'est parce que le ministre
n'a pas l'air de comprendre et vous, vous comprenez. Cela me
désole un peu! Par ailleurs, M. le Président, le ministre a fait
une remarque sur l'autonomie d'Hydro-Québec. Je pense que ce qu'il n'a
pas aimé dans les commentaires de mon collègue de
Notre-Dame-de-Grâce, c'est que, justement parce que nous avons beaucoup
de respect pour l'autonomie d'Hydro-Québec et parce que nous croyons
qu'ils sont des gens compétents, ce sont là autant de raisons
d'avoir foi aux prévisions économiques qu'ils ont faites, de voir
si ces prévisions économiques sont basées sur des
hypothèses réalistes - on nous en a convaincus très
facilement - et de voir les différences d'opinions qui peuvent exister.
Je crois que c'est également dans le meilleur intérêt du
public en général et de ceux qui se préoccupent de
développement économique.
Toutes ces choses, M. le Président, sont comprises par ceux qui
se préoccupent de développement économique. Si certains de
l'autre côté de la table ne le comprennent pas, je crois qu'il est
encore temps, après sept ans de pouvoir - il est encore temps, vous avez
encore un an et demi ou deux ans pour faire vos études
économiques d'essayer de comprendre de quelle façon le
développement économique se fait.
Prévision de la demande
Ma première question, celle que j'ai évoquée dans
mes remarques liminaires, est une question qui apparaît assez
académique au départ, mais qui, en pratique, est très
importante. Je me réfère à la page 19 de La demande
d'électricité du Québec, où vous évoquez
votre prévision de la demande totale d'énergie que vous estimez
à 0,7% d'ici à l'an 2000. J'ai consulté le document de
l'an dernier et je crois que l'an dernier c'était le même chiffre
que vous aviez utilisé. Si nous faisons le ratio dont je parlais et dont
le professeur Ayoub nous avait parlé, c'est-à-dire le pourcentage
d'augmentation de la consommation totale d'énergie divisé par
l'indice de l'augmentation du développement économique, si on
utilise vos chiffres, entre 1981 et l'an 2001, on utilise 0,7 divisé par
2,3, ce qui nous donne 0,3.
Je sais que dans ce domaine, personne n'a la vérité
absolue et je sais qu'on peut utiliser, chacun d'entre nous, différents
chiffres. Les commentaires de M. Ayoub sur ce point, qui avaient
été confirmés par le directeur général de
l'Agence internationale de l'énergie, le Dr Lantzke, m'amènent
à vous poser la question suivante: Quelles hypothèses, quelles
sources avez-vous pour utiliser un chiffre qui, de prime abord, est aussi bas?
Avant que vous répondiez à la question, j'évoquerai, bien
sûr - et vous le savez - qu'avant le choc pétrolier, lorsqu'il y
avait un développement économique de 3% ou 3,5% par année,
la demande énergétique globale était de l'ordre de 3,5%.
Donc, à ce moment, on parlait d'un ratio de 1-1: pour 3,5% de
développement économique, on parlait d'une demande totale
d'énergie qui était du même ordre de grandeur.
Depuis le choc pétrolier et la crise qui sévit depuis
trois ou quatre ans, peut-être que ce n'est plus possible de faire des
ratios. Depuis deux ou trois ans, la demande a baissé tellement. Il y a
des ajustements, d'ailleurs. Au Québec, on utilise davantage
l'électricité pour le chauffage, donc on déplace du
pétrole et, comme l'électricité est trois fois plus
efficace sur le plan énergétique que le pétrole, il y a
des ajustements qui se font qui ne nous permettent peut-être pas à
court terme de voir clair. Mais, lorsqu'on regarde sur une période de
vingt ans et si on accepte les prémisses du professeur Ayoub, à
savoir qu'il serait peut-être malsain de conclure trop vite que toutes
les économies apparentes que nous faisons proviennent des
économies d'énergie et que, si les choses redeviennent normales
et que nous avons un développement économique, il se pourrait
bien que la demande énergétique totale soit beaucoup plus
élevée que celle que vous utilisez dans votre document, ceci a un
impact direct, parce que vous dites qu'en l'an 2000,
l'électricité comptera pour 41% de l'énergie totale du
Québec; bien sûr, si la demande énergétique totale
était du double, cela voudrait dire qu'en l'an 2000, au lieu
d'être 41%, ce serait seulement 20,5%.
Donc, je pense que vous connaissez l'importance d'une prévision
de l'énergie totale pour le Québec d'ici à l'an 2000,
sachant, quand même, les aléas, les difficultés de faire
une telle prévision, mais celle-ci est importante puisqu'elle a un
impact sur votre marché, le marché intérieur du
Québec, et sur le développement économique du
Québec.
Alors, en résumé, ma question est à savoir si vous
avez fait des études spéciales pour déterminer ce chiffre
ou si vous avez, tout simplement, utilisé le même chiffre que le
ministère; je crois que le chiffre que le ministère a
utilisé est plus élevé durant les années
quatre-vingt-dix.
M. Bourbeau (Joseph): M. Michel Grignon, vice-président
à la planification générale.
M. Grignon (Michel): Je pense qu'il faudrait, d'abord, souligner
que nous ne sommes pas partis avec le chiffre; dans le cadre de la
méthodologie de la prévision de la demande, c'est plutôt un
résultat. Je pense qu'il serait important de distinguer les
périodes. Effectivement, si on considère la période
1981-2001, Hydro-Québec prévoit un taux de croissance moyen pour
la demande
d'énergie de 0,7 et le PIB, pour la même période,
est prévu à 2,3, d'où le ratio de 0,3 dont vous
parlez.
Si on regarde la période 1981-1986, qui est, quand même,
une période assez spéciale compte tenu que nous avons eu la plus
grave récession que les pays industrialisés aient vécue en
1982, on observe, par exemple à la page 10, que le produit
intérieur réel, si on compare 1981 à 1986, a
augmenté de moins de 1% par an en moyenne à cause principalement
de la récession de 1982.
Du côté de l'énergie, on a une décroissance.
La consommation totale d'énergie passe de 1325 petajoules à 1245.
Pour cette période, nous avons donc eu un effet inverse.
En fait, si nous prenions la période 1986-2001, nous observerions
qu'effectivement la prévision totale d'Hydro-Québec en
énergie est de 1,4 par rapport à un PIB de 2,8; donc, nous avons
donc un facteur de 0,5. La raison qui explique 0,5, un ratio
légèrement plus faible que celui dont le professeur Ayoub a
parlé - je pense qu'il en parlait surtout dans un contexte mondial - est
précisément qu'au Québec le potentiel de substitution du
pétrole est très important, plus important qu'il ne l'est d'une
façon générale au Canada ou ailleurs dans le monde. Comme
vous l'avez mentionné, la substitution du pétrole est un facteur
additionnel aux économies d'énergie qui fait que la croissance
d'énergie par rapport à la croissance du PIB, serait
implicitement plus faible dans la prévision d'Hydro-Québec.
La période 1981-1986 est particulièrement importante
à cet égard parce que, finalement, les 51% de la croissance, par
exemple, d'électricité en 1981-1986 dans les ventes
régulières, seraient dus à de la substitution du
pétrole. Par la suite, évidemment, il y a la saturation du
marché et ce phénomène devient moins important. Donc, en
résumé, nous sommes à un facteur de 0,54 pour la
période des années quatre-vingt-dix, ce qui se rapproche
sensiblement, et, finalement, nous serons toujours un peu plus faibles tant que
la substitution du pétrole nous amènera, en plus des
économies d'énergie, des économies dues à
l'efficience de l'électricité par rapport aux combustibles.
M. Fortier: Je crois que c'est un sujet sur lequel on pourrait se
pencher longtemps, mais, à titre de référence, je ne sais
si vous avez pris connaissance d'un des meilleurs mémoires qui aient
été présentés à la commission parlementaire,
celui de la compagnie Gulf: La demande et l'offre d'énergie au
Québec de 1982 à l'an 2000. Gulf est tout à fait d'accord
pour souligner le fait que le pétrole serait déplacé au
Québec et au Canada, mais elle utilise un coefficient de la demande - je
cite: "Si la demande primaire devait croître au rythme moyen annuel de
1,8% pour atteindre 13,3 hexajoules en l'an 2000" - qui semble encore beaucoup
plus élevé. Je me demandais quel genre d'analyse
particulière vous faites. Je pense bien qu'à court terme cela n'a
pas tellement d'importance, mais à long terme, au point de vue de
l'orientation de votre programme d'équipement, cela a certainement une
importance cruciale. Est-ce un sujet que vos experts étudient d'un peu
plus près présentement? (21 h 30)
M. Grignon: Évidemment, c'est un domaine complexe. Les
prévisions sont faites de plus en plus à partir de
méthodes analytiques qui impliquent qu'on décortique chacun des
marchés, le marché concurrentiel, le marché captif, pour
chacune des sources d'énergie. Vous faites référence au
mémoire de Gulf. Or, dans le mémoire de Gulf qui a
été présenté ici en commission parlementaire, si on
regarde leurs prévisions en énergie, ces gens prévoyaient
effectivement que, de 1981 à l'an 2000, la consommation
d'énergie, au total, n'augmenterait que de 0,1%, ce qui était, en
fait, pas mal plus pessimiste que ce que vous avez devant les yeux dans les
prévisions d'Hydro-Québec.
M. Fortier: Merci. Un autre sujet, M. le Président, si
vous me le permettez, qui a un impact direct sur l'équilibre entre la
demande et la disponibilité d'électricité, c'est le
dossier de Churchill Falls. Nous savons, par les journaux, qu'à la
demande de Terre-Neuve le jugement de la Cour suprême a été
retardé jusqu'au 31 décembre de cette année. Je crois que,
lorsque vous êtes venus la dernière fois en commission
parlementaire, vous avez évoqué vaguement qu'il se pourrait qu'il
y ait des négociations. Est-ce que vous pouvez nous dire certaines
choses qui nous encourageraient à croire qu'il y a des
possibilités d'entente avec Terre-Neuve, que, toutes choses étant
égales, les parlementaires de cette commission devraient tenir pour
acquis que le bilan énergétique du Québec ne serait pas
trop modifié et qu'à l'avenir nous continuerons de pouvoir
compter sur l'énergie de Churchill Falls?
M. Bourbeau (Joseph): Je pense qu'on peut dire ici qu'il y a
effectivement des pourparlers avec Terre-Neuve. Les négociations sont
engagées. Toutefois, il n'est pas d'intérêt public de
divulguer, disons, ce qui se dit à la table des négociations.
Même, je ne peux pas vous mentionner qu'on a un espoir de régler
ou qu'on n'a pas d'espoir. Je pense que le fait principal est qu'actuellement,
à Terre-Neuve et à Québec, nous nous parlons, nous
négocions.
M. Fortier: Mais, pouvez-vous nous dire
si c'est nouveau que vous vous parliez parce que, moi qui ai suivi un
peu le dossier, l'impression que j'en tire, c'est que, durant les deux
dernières années, il n'y a pas eu beaucoup d'occasions? Je ne
sais si vous avez même eu l'occasion de vous asseoir à la
même table. Alors, le fait que les deux parties en présence
puissent s'asseoir à la même table, c'est tout de même un
facteur encourageant.
M. Bourbeau (Joseph): Depuis le mois d'août, la
décision a été prise d'engager des négociations et,
à compter du début de septembre, je pense, on a eu des rencontres
et on se rencontre encore.
Exportations
M. Fortier: Je crois qu'on va respecter le secret d'État
sur cette question.
Un autre sujet qui a un impact déterminant, bien sûr, ce
sont les ventes d'exportation. J'évoquais plus tôt ce que M. Monty
avait dit à Hydro-Presse et vous avez vous-même
évoqué cette possibilité qui a existé à ce
moment. Vous l'avez rejetée un peu du revers de la main en disant: On
avait demandé aux Américains de payer 30 000 000 $, mais ils
avaient refusé. Vous savez, l'impression que j'ai quand je regarde
certaines entreprises qui veulent absolument exporter - et je pense à
Bombardier, c'est un nom qui me vient comme cela à la tête -c'est
que, lorsque ces gens veulent absolument vendre, ils n'acceptent pas le premier
non qu'on leur sert. Même si on leur dit non une première fois,
ils retournent une deuxième fois voir le client. Ils cherchent d'autres
façons de promouvoir leur produit. L'impression que j'ai eue lorsque
vous avez donné cette réponse, d'après votre allocution de
tout à l'heure, M. Bourbeau, c'est que trop facilement
Hydro-Québec, à ce moment, a dit: Bien, ils ne veulent pas payer
30 000 000 $, tant pis, on passe à autre chose. De fait, ce que vous
nous avez confirmé dans un certain sens, c'est qu'il y avait une
possibilité à ce moment et, la façon dont vous avez
abordé les discussions avec les Américains ayant
été rejetée, il y avait peut-être d'autres
façons de promouvoir cette vente qui serait aujourd'hui
bénéfique.
M. Bourbeau (Joseph): Je pense que vous avez fortement raison. On
a engagé les négociations en 1979 et, vis-à-vis du refus
des Américains de s'engager dans le développement d'une
rivière, on a poursuivi avec eux les pourparlers et on a signé
avec PASNY un contrat de 111 térawattheures et avec NEEPOOL un contrat
de 33 térawattheures pour une période d'environ quinze ans. C'est
33 000 000 000 de kilowattheures. Cela veut dire que, devant le premier refus,
on s'est retourné et on a discuté avec les mêmes personnes,
les mêmes groupes, et on est arrivé à un autre genre de
contrat.
M. Fortier: Quand même, je crois que le président
tout à l'heure, M. Coulombe, évoquait dans une certaine mesure la
"fragilité", entre guillemets, financière d'Hydro-Québec
qui doit compter sur des ventes excédentaires qui sont soumises aux
aléas du marché dans une certaine mesure, alors qu'un contrat
ferme donnerait une plus grande sécurité financière et
permettrait de prendre des décisions sur son plan d'équipement
beaucoup plus solides. Je me permets quand même de revenir. La solution
que vous avez adoptée à ce moment me semble un peu,
j'étais pour dire, une solution de facilité, mais, connaissant
les difficultés de négociation dans ce genre de contrat, je
n'utiliserai pas ce mot. Quand même, il y avait à ce moment une
possibilité d'exportation d'énergie ferme.
Au moment où on se parle, vous négociez avec les
Américains. Malgré les difficultés - vous en
évoquez plusieurs dans votre document - est-ce que vous utilisez tout
l'armement possible des arguments qu'on peut utiliser dans ce genre de
négociation pour vous assurer que les difficultés apparentes ou
réelles qui peuvent être évoquées par les
Américains sont surmontées et qu'éventuellement
Hydro-Québec pourrait signer un contrat d'une certaine envergure pour de
l'énergie ferme aux États-Unis?
M. Bourbeau (Joseph): Actuellement, il y a des
négociations avec les Américains. On regarde la
possibilité de signer avec eux un contrat d'énergie ferme,
c'est-à-dire que, durant une année, on pourrait leur livrer un
montant d'énergie, mais pas durant les douze mois de l'année.
C'est la négociation qui est engagée et maintenant la
négociation se poursuit. On espère que dans quelques mois, au
cours de l'année 1984, on pourra signer un contrat d'énergie
ferme avec les Américains.
M. Fortier: Quand on regarde le tableau à la page 23 en
particulier, on voit qu'il y a des centrales au charbon et au mazout lourd dans
NEEPOOL et dans New York Power Pool, j'imagine, aux États-Unis. On
s'aperçoit qu'en additionnant les centrales au charbon et au mazout
lourd, il y a un potentiel de 48,6 térawattheures dans NEEPOOL et de
67,6 dans New York Power Pool. Si on divise cela par sept, en moyenne, cela
nous donne à peu près 4000 mégawatts dans NEEPOOL et 10
000 mégawatts dans le New York Power Pool. Est-ce bien cela
l'abréviation? NYPP, c'est New York Power Pool?
M. Bourbeau (Joseph): New York Power Pool. Oui.
M. Fortier: Ma première question, c'est que je sais que
vous vendez votre énergie excédentaire pour déplacer le
mazout lourd. Pourriez-vous nous donner des ordres de grandeur du coût de
génération d'électricité aux États-Unis? Je
ne demande pas nécessairement ce qui apparaît au contrat, qui
pourrait être confidentiel, mais vous pouvez nous donner des ordres de
grandeur. Je sais que vous vendez votre énergie à 30 mills, ou
à peu près, aux Américains, et je crois que vous la vendez
à 70% ou à 80 % du coût de génération aux
États-Unis.
M. Bourbeau (Joseph): 80% du fuel.
M. Fortier: 80%? Cela veut dire que le coût de
génération au pétrole se trouve de l'ordre de 50 mills?
Oui? 50 mills?
M. Bourbeau (Joseph): Entre...
M. Fortier: Ce que je voulais savoir, c'est quel était
environ le coût de génération par les centrales au mazout
et quel était le coût de génération par les
centrales au charbon. Est-ce qu'il existe réellement un marché
face à ces centrales au charbon?
M. Bourbeau (Joseph): M. Jacques Guèvremont.
M. Guèvremont (Jacques): Pour les centrales thermiques au
pétrole, les coûts varient entre 45 $ et 60 $ le
mégawattheure. Pour les centrales au charbon, c'est de l'ordre de 20 $
à 25 $ en dollars canadiens.
M. Fortier: C'est donc dire que, pour les centrales au charbon,
telles qu'elles existent, le prix de vente d'énergie excédentaire
présentement serait légèrement supérieur au
coût de génération.
M. Guèvremont: Le prix auquel on vend sur ce genre de
marché de l'excédentaire, c'est environ 80% du coût de
production. Cela veut dire que, si leur coût de production est 20 $,
alors on vendra 80% de 20 $, soit 16 $ le kilowattheure.
M. Fortier: Est-ce que ces centrales au charbon remplissent
toutes les conditions de la protection de l'environnement? Je crois que vous
mentionnez dans votre texte que, si les normes de l'environnement
étaient renforcées, certaines de ces centrales se trouveraient
nécessairement en difficulté. On connaît tout le
problème des pluies acides non seulement aux États-Unis, mais au
Canada. S'il y avait un lobby pour exiger des Américains que leurs
centrales au charbon soient équipées de tout l'arsenal moderne de
protection de l'environnement, j'imagine que les coûts que vous venez
d'évoquer seraient de beaucoup supérieurs.
M. Guèvremont: II faudrait ajouter des équipements
pour purifier l'air, c'est juste. Mais actuellement les centrales au charbon ne
semblent pas avoir de problèmes pour fonctionner selon les besoins.
M. Fortier: Mais quand on regarde vos chiffres ici, on
s'aperçoit qu'entre 1981 et 1991 il y a des augmentations assez
substantielles de centrales thermiques au charbon. On voit que dans NEEPOOL en
1981, c'était de 4,5 térawattheures pour passer à 24,9, et
à New York Power Pool, de 19,5 à 47,3. Quelle est la
stratégie d'Hydro-Québec pour influencer ce marché
potentiel? Dans quelle mesure cherchez-vous à alimenter le lobby des
pluies acides qui pourrait nous permettre de capturer ce marché?
M. Guèvremont: Nous n'avons pas de lobby aux
États-Unis; à ma connaissance, Hydro-Québec n'est pas
impliquée dans cet aspect de la question. Il est juste que la meilleure
source d'énergie pour les États-Unis, c'est la conversion des
usines au pétrole en usines au charbon. C'est ce qui est le plus
économique parce qu'ils ont eux-mêmes une production assez
importante de charbon.
M. Fortier: Je poserais ma question à M. Coulombe. Compte
tenu de ce marché potentiel et compte tenu du fait qu'il y a des
arguments qui peuvent être utilisés et qui nous avantageraient,
pourquoi Hydro-Québec n'organise-t-elle pas aux États-Unis un
lobby - cela se fait couramment aux États-Unis; je n'ai pas besoin de
faire de dessin à personne - qui nous favoriserait à court et
à long terme? Pourquoi ne pas s'organiser pour appuyer ceux qui, aux
États-Unis, militent en faveur d'un renforcement des normes de
l'environnement, ceux qui militent pour réduire les pluies acides aux
États-Unis et au Canada? Alors, pourquoi ne pas faire ces
choses-là en tant qu'entreprise autonome qui cherche à
écouler sa marchandise et qui utiliserait, somme toute, des armes que
bien des compagnies utilisent aux États-Unis lorsqu'elles font face
à des difficultés ou à un potentiel semblable à
celui que vous avez présentement?
M. Coulombe: M. Lafond va vous donner un panorama de notre
activité.
M. Lafond (Georges): M. le Président, avant de
répondre de façon précise à la question du
député d'Outremont, il est important de bien voir la
mosaïque sur laquelle on travaille. Dans une transaction d'exportation, il
faut bien se rappeler que, pour qu'elle prenne fait et lieu, il faut deux
parties: d'une part, un acheteur et, d'autre part, un vendeur.
Le député d'Outremont, dans son allocution a dit:
Cependant, il faudrait arrêter de considérer presque uniquement
les aspects négatifs. Mais je pense que c'est être réaliste
- et on a le devoir d'être réalistes - d'examiner les contraintes,
les embâcles, les difficultés. De plus, s'empêcher de
souligner l'importance de la loi de l'offre et de la demande, ce serait aussi
une erreur.
Dans notre effort de marketing aux États-Unis, on rencontre
principalement la philosophie et la culture américaine qui dit ceci: II
n'est pas bon pour les Américains de remplacer une forme de
dépendance par une autre et de s'exposer à une trop grande
importation de kilowattheures du Québec. Si on regarde les chiffres du
tableau auquel on faisait allusion dans le plan de développement
à la page 23, il est exact d'identifier qu'en 1991 il y aura
effectivement 116,2 térawattheures qui auront une origine de charbon et
de mazout lourd dans les États de la Nouvelle-Angleterre et dans
l'État de New York. (21 h 45)
Cependant, tout dernièrement, le responsable des achats pour NYPA
aux États-Unis a dit que sa politique était ferme et qu'il ne
voudrait pas dépendre du Canada -cela n'a rien à voir avec le
Québec, l'Ontario ou la Colombie britannique - pour plus de 20% de ses
besoins. Comme ses besoins en 1991 s'établiront à environ 125
térawattheures, il y a là une limite maximale pour des fins
politiques de 25 térawattheures. Par surcroît, pour
protéger son risque et son approvisionnement, il a l'intention de
diviser cette tarte, si je peux m'exprimer ainsi, à peu près en
parts égales entre l'Ontario et le Québec. Si on applique le
même raisonnement à la Nouvelle-Angleterre, il y aura un maximum
en 1991 de 20,2 térawattheures.
Cette volonté politique de se limiter quant à la
dépendance étrangère, elle est le fait des gens qui
achètent les kilowattheures; elle est le fait d'entreprises municipales,
de coopératives, d'entreprises qui sont la propriété
d'actionnaires. De ce côté, il y a déjà une
contrainte dont nous devons tenir compte pour aller, si possible, plus loin,
mais sans exposer Hydro-Québec, ni le Québec, par
surcroît.
Deuxièmement, il faut aussi tenir compte de ce que j'appellerais
la compétition des réseaux voisins. Hydro-Québec n'a pas
un marché aux États-Unis qui lui soit acquis en propre et de
façon exclusive. Du côté de l'État de New York, nous
avons l'Ontario; du côté des États de la
Nouvelle-Angleterre, nous avons le Nouveau-Brunswick.
Troisièmement, il y a aussi les embouteillages et les goulots
d'étranglement sur le réseau de transport et de transmission.
Lorsqu'Hydro-Québec a signé un contrat avec NYPA, c'est
Hydro-Québec qui a insisté pour que ses kilowattheures puissent
rejoindre le marché le plus lucratif du sud de l'État de New
York, pour imposer des investissements additionnels de 500 000 000 $ à
600 000 000 $ à NYPA pour renforcer son réseau de transmission,
sans quoi, d'une part, elle ne pouvait pas absorber tous les kilowattheures
qu'Hydro-Québec mettait à la disposition de l'État de New
York et, d'autre part, le produit du Québec aurait été
déprécié. D'ailleurs, la même chose va se produire
dans le deuxième contrat avec NEEPOOL.
Quatrièmement, il ne faudrait pas oublier, non plus, que nos amis
américains du Sud ont connu les effets de la crise
énergétique plus tôt que nous, au Canada, et beaucoup plus
tôt que nous, au Québec. La première crise
énergétique s'est fait sentir en 1974-1975 lorsque le baril de
pétrole est passé de 2,50 $ à 15 $. La deuxième
vague s'est produite en 1978-1979 lorsqu'il est passé de 15 $, 16 $ ou
18 $ à 29 $, 30 $ et 31 $. Présentement, dans l'État de
New York, il y a un surplus de capacité de 45%. On peut constater aussi
le même genre de surplus de capacité dans les États de la
Nouvelle-Angleterre. Ce n'est pas, selon les dernières informations que
nous avons, avant 1995, 1996 ou 1997 que ces marchés qui sont
accessibles à Hydro-Québec pour des raisons géographiques
auront besoin de capacité additionnelle.
Dans une perspective comme celle-là, il ne faut pas oublier que
le temps de construction d'une centrale au charbon, qui est de sept ou huit
ans, ne nécessite pas de décision au sud de la frontière
avant 1988-1989. Aujourd'hui, ils ne sont pas acheteurs de puissance. Les
Américains qu'on connaît sont davantage acheteurs d'énergie
pour des périodes données. Hydro-Québec travaille
présentement dans une perspective à long terme avec beaucoup
d'agressivité. Au cours de l'année, tous les clients potentiels
directement reliés à Hydro-Québec: Niagara Mohawk Citizens
Utilities, NYPA, New York Power Pool, NEEPOOL et toute la Nouvelle-Angleterre,
ont été rencontrés non pas dans des cocktails, mais dans
des séances de travail très sérieuses pour évaluer
les besoins, d'une part, et le potentiel à moyen et à court
terme.
Quand je dis travailler à long terme, cela veut dire respecter
les trois étapes normales d'échanges et de relations commerciales
avec les réseaux voisins. Ces étapes, on les a vécues avec
le NYPA dans l'État de New York, d'une part, en construisant une ligne
en 1976 qui a permis des échanges d'énergie interruptible. Dans
un deuxième temps, cela entraîne, lorsque la ligne est construite,
un contrat d'énergie ferme qui subséquemment est suivi,
lorsque
le besoin existe, d'un contrat de puissance avec NEPOOL, les
États de la Nouvelle-Angleterre. La première étape est
franchie, mais la ligne, c'est-à-dire l'outil qui va nous permettre de
travailler et de franchir d'autres pas, sera disponible vers la fin de
l'année 1986. Nous travaillons présentement sur un contrat
d'énergie ferme, comme le disait M. Bourbeau. Subséquemment,
espérons-le, dès que le besoin sera identifié et que nos
intervenants seront prêts à rendre le risque, il y a aura un
contrat de puissance.
Mais à travers tout cela, si nous mettions trop de kilowattheures
sur le marché, il est évident que le produit serait
déprécié. Qu'on l'aime ou que ne l'aime pas, c'est la loi
de l'offre et de la demande. Je me permettrais, si vous m'en donnez la
permission, de citer mon premier professeur d'économie politique,
c'est-à-dire mon vieux papa, qui, ayant été
élevé sur une ferme du Québec, m'a souvent rappelé
qu'il était inutile d'amener à l'abreuvoir un cheval qui n'avait
pas besoin de boire. Si on met trop de kilowattheures, c'est ce qu'on fait.
Dans cette perspective, on pourrait aussi illustrer la valeur du respect
des étapes, surtout en allant à la page 22, par exemple, du plan
de développement d'Hydro-Québec. Si on regarde la série de
l'évolution des prix moyens de vente de kilowattheures aux
États-Unis, en 1972, cela valait 6,2$ canadiens par
mégawattheure. Il y a eu une ascension régulière, c'est
passé à 23,6$ en 1981, et en 1982, un saut absolument
exceptionnel de 34,3$. Cela illustre le passage d'une phase à une
deuxième phase dans nos relations avec NYPA. Je pense que ce petit saut
très significatif illustre les étapes que nous suivons.
M. Fortier: Vous m'avez confirmé un peu mon
appréhension. Vous avez dit: Un tel négociateur a dit qu'il avait
une limite de 20% de ses achats. Je ne sais pas si cette personne a des
responsabilités politiques ou si elle détermine ses propres
orientations sans égard aux politiques énergétiques qui
peuvent exister dans son patelin ou dans le Nord-Est des États-Unis. Je
me souviens qu'il y a quelques années il y avait le tsar de
l'énergie, M. Schlesinger qui, lui, avait suggéré,
étant donné que le Canada était bien différent de
l'Arabie Saoudite ou de l'Iran ou de l'Irak, d'avoir une politique
énergétique nord-américaine par laquelle le Canada et les
États-Unis seraient soudés ensemble. Au moins, cette personne qui
a été très influente dans le domaine
énergétique aux États-Unis semblait recommander une
politique énergétique qui, à ce moment, ne faisait
peut-être pas l'affaire du Canada, mais qui indiquait son désir de
s'abreuver au Canada au lieu de s'abreuver ailleurs dans le monde.
Dernièrement, lorsque vous avez donné une interview à la
télévision, vous nous mettiez dans le même bain que l'Irak
ou l'Iran; je dois avouer que j'étais un peu mal à l'aise. Vos
réponses me convainquent d'autant plus, si ces gens sont fixés
à une limite de 20% qu'un lobby justement nous permettrait de les
convaincre qu'il y a moult raisons pour lesquelles ils ne devraient pas
accepter un maximum comme celui-là. Je reviens à l'influence
politique. Autrement dit, vous regardez cela en tant que
Québécois et Canadiens; vous dites: Ils ont leur règle du
jeu, on ne les influencera pas. Ce que j'essaie de vous suggérer, c'est
qu'on devrait aller aux États-Unis et aller influencer les règles
du jeu dans le domaine énergétique, qui nous permettraient
d'augmenter notre marché potentiel, si ce n'est pas cette année,
si ce n'est pas l'an prochain, dans cinq ans ou dans dix ans d'ici.
M. Bourbeau (Joseph): Au début de la séance cet
après-midi, le ministre a mentionné qu'il y a deux semaines on a
fait un voyage. On a traversé les quatre États de la
Nouvelle-Angleterre en trois jours et ce que vous appelez du lobby, on en a
effectivement fait à travers ces États. Le 13 janvier prochain,
il y aura une journée dédiée aux exportations
d'énergie venant du Québec et, encore là, nous serons
là et nous ferons des exposés aux Américains. On
développe ces rencontres, on fait du lobbying.
Pointe-Lepreau
M. Fortier: Une dernière question; après, je
laisserai la parole à mes collègues. J'aimerais maintenant parler
d'une nouvelle qui a paru dans le Devoir de samedi portant sur la centrale
nucléaire de Pointe-Lepreau 2. Je crois qu'Hydro-Québec
évoquait des appréhensions par rapport à cette nouvelle
centrale nucléaire qui pourrait nous voler une partie de notre
marché dans une certaine mesure. Je dis tout de go au ministre qu'il
devrait présenter - sinon, moi-même, il me fera plaisir de le
faire - une motion non annoncée, qui pourrait être unanime
à l'Assemblée nationale du Québec pour demander au
gouvernement fédéral de ne pas influencer le marché de
l'exportation en donnant des subventions à une seule province privant
ainsi, peut-être, le Québec de l'exportation d'énergie
auquelle elle a droit.
Ceci m'amène à poser une autre question. Si le
gouvernement fédéral est prêt à donner des
subventions pour faciliter l'exportation d'énergie à partir du
Nouveau-Brunswick, est-ce qu'Hydro-Québec ou le gouvernement a
pensé à demander une aide du gouvernement fédéral
pour faciliter l'exportation de notre énergie vers les
États-Unis? Autrement dit, s'il est prêt à aider une
province, il devrait avoir comme politique d'aider toutes les provinces, y
compris le Québec. Est-ce que des démarches pourraient
être faites dans ce cens?
M. Bourbeau (Joseph): Actuellement, toute notre exportation
provient d'énergie hydraulique et on n'a pas besoin de mettre à
contribution des centrales nucléaires pour vendre aux
Américains.
M. Fortier: Je ne parlais pas de centrales nucléaires, je
parlais d'une aide financière quelconque pour les centrales que nous
avons.
M. Coulombe: En ce qui concerne Hydro-Québec, toute aide
financière sera la bienvenue, de la même façon qu'une aide
financière pour notre réseau de transport équivalente
à l'aide financière que le gouvernement fédéral
donne au réseau du gaz serait la bienvenue; il n'y aurait aucun
problème.
M. Fortier: II y a deux politiques là-dedans. Si on reste
passif, le Nouveau-Brunswick va peut-être recevoir une aide qui va lui
permettre d'exporter son énergie. Ce que je propose au ministre, c'est,
pour une fois, d'être solidaire là-dessus pour dire: Nous ne
croyons pas que le gouvernement fédéral devrait avoir une
politique qui privilégierait une province en particulier. Que la
règle soit que le gouvernement fédéral n'aide aucune
province et, à ce moment, on se retrouve tous sur le même pied ou,
s'il y a une aide financière, que toutes les provinces qui exportent de
l'énergie puissent en recevoir au prorata de l'exportation qu'elles font
aux États-Unis. Là-dessus, je pense qu'on pourrait s'entendre.
C'est la raison pour laquelle je vous demandais si Hydro-Québec avait
exploré - en se creusant les méninges un peu, même si les
centrales sont déjà construites - les possibilités de
chercher à obtenir une aide du gouvernement fédéral qui
diminuerait vos coûts de production ou, du moins, les coûts
présentement capitalisés, mais qui vont survenir lorsque vous
allez faire passer ces dépenses aux dépenses d'exploitation.
M. Duhaime: M. le Président, je pense qu'il y a une
question qui m'était adressée. Je peux peut-être prendre 45
secondes pour y répondre.
Je dis tout de suite que je pourrais non seulement donner mon
consentement à une pareille motion, mais probablement intervenir en
faveur, mais attention! Quand cela vient de mon ami le député
d'Outremont, il a parfois des cadeaux de Grecs. Demander au gouvernement
fédéral l'égalité de traitement dans un programme
nucléaire Nouveau-Brunswick-Québec, je ne pourrais pas endosser
une motion semblable pour la bonne et simple raison que, d'ores et
déjà, notre décision est prise de tenir un moratoire sur
les équipements nucléaires et de le prolonger.
M. Fortier: M. le Président, j'arrête
immédiatement le ministre, je n'ai pas parlé de nucléaire
dans ma proposition.
M. Duhaime: Je vais répondre tout simplement. Je n'ai
malheureusement pas la lettre avec moi, je pourrais peut-être l'avoir
demain matin.
Le financement du nucléaire par le gouvernement
fédéral ou sa participation a toujours été sur la
base des coûts estimés. C'était vrai pour Pointe-Lepreau 1
et c'était vrai aussi pour Gentilly 2. Les coûts estimés
à Gentilly 2 - si mon souvenir est bon - en 1972, étaient de 325
000 000 $ ou de 350 000 000 $. Hydro-Québec vient de terminer la
centrale Gentilly 2 et cela a coûté 1 400 000 000 $. (22
heures)
Connaissant bien le ministre fédéral de l'Énergie -
on est presque voisins - je lui ai adressé une lettre pour lui demander
une révision de la contribution fédérale sur le niveau du
prêt à bas taux d'intérêt pour ce qui était de
Gentilly 2, par rapport, en demandant l'égalité de traitement
avec Pointe-Lepreau 1. Je pourrais déposer la lettre demain. La
réponse a été négative.
Je comprends, j'ai lu la coupure du journal Le Devoir que j'ai devant
moi ici, du 10 décembre 1983. Les gens au Nouveau-Brunswick disent bien
ceci à M. Côté, gérant général de
Maritime Nuclear, et si les propos qu'on lui prête sont exacts, ils
m'apparaissent remplis de sagesse. Il dit ceci: "Nous n'avons pas encore pris
de décision définitive à l'égard de ce projet et on
ne pourra en prendre avant la fin des négociations avec la
Nouvelle-Angleterre."
Alors, le prix d'un kilowatt électronucléaire par rapport
au prix d'un kilowatt hydraulique, il y a une marge entre les deux. Les
craintes d'Hydro-Québec et du gouvernement du Québec seraient une
intervention massive du gouvernement fédéral au type de
subventions directes ou indirectes à Pointe-Lepreau 2 pour, en ultime
essor, venir nous concurrencer sur des marchés de la
Nouvelle-Angleterre. Si c'est là le sens de la motion du
député d'Outremont, on va la faire tout de suite demain. Mais, je
ne pense pas que cela soit la stratégie unique du gouvernement
fédéral. Tout le monde sait qu'au niveau canadien, on imagine
toute espèce de scénarios pour sauver le CANDU. C'est de cela
qu'il s'agit. Vous en étiez témoins lorsque M. Després,
président d'Énergie atomique du Canada, est venu ici en
commission parlementaire et nous a entretenu des trois projets d'Énergie
atomique du Canada. D'abord, pour ce qui est
de l'usine d'eau lourde La Prade, il y avait là un immense point
d'interrogation. Qu'est-ce qu'ils vont en faire exactement? On n'a pas de
réponse sur cela. Deuxièmement, au sujet de Gentilly 1, il n'y a
pas de projet non plus d'arrêté pour ce qui est d'Énergie
atomique du Canada. Le troisième volet était un projet de
recherche dont le coût était de 60 000 000 $ et dont le
créneau de recherche n'était pas encore identifié.
Je pense que le plus grand service qu'on pourrait rendre à la
population du Nouveau-Brunswick, de la part du gouvernement
fédéral, serait de lui indiquer tout de suite que construire des
centrales nucléaires au Nouveau-Brunswick à des fins
d'exportation vers la Nouvelle-Angleterre, ce n'est pas la meilleure des choses
à faire alors que, depuis cinq ans, il n'y a pas eu un seul nouveau
permis ou une seule nouvelle autorisation de construire une centrale
nucléaire aux États-Unis. Tout le monde sait qu'il y a des
problèmes au New Hampshire avec Seabrook, du moins il y a des
discussions. Il y a des discussions avec la centrale atomique de Long Island.
Il y a des problèmes avec la centrale nucléaire du Vermont. Il y
a des problèmes tout récents encore avec l'Ontario. Alors, je
suis loin d'être convaincu qu'on ferait un bon coup en sollicitant une
intervention quelconque. Il faudrait plutôt aller en sens contraire et
laisser les forces du marché en concurrence sur les marchés
d'exportation.
C'est un peu comme la position fédérale dans le dossier de
Terre-Neuve qui voudrait, bien sûr, pousser nos amis de Terre-Neuve sur
des marchés d'exportation pour concurrencer Hydro-Québec. Je ne
trouve pas cela tellement catholique de procéder de cette façon.
Mais, si l'on maintient une non-intervention, il m'apparaît très
clair que Pointe-Lepreau 2 ne se bâtira jamais. Et pour tous ceux qui
sont dans ce dossier, de près ou de loin, du côté sud ou du
côté nord de la frontière, à moins qu'il n'y ait un
transfert de fonds fédéraux massif pour rendre concurrentiel le
kilowattheure électronucléaire, cette centrale n'a aucune raison
d'être mise en chantier. Pas plus, d'ailleurs, qu'on pourrait avec
succès mettre en chantier Gentilly 3 à des fins d'exportation
vers les États-Unis ou encore prendre les quelque 700 mégawatts
produits à Gentilly 2 et tenter de les vendre aux États-Unis au
coût marginal de production. C'est clair et net pour tout le monde.
M. le Président, il est certain qu'au Nouveau-Brunswick, ce n'est
pas une affaire bâclée, mais, cependant, si le gouvernement
fédéral a décidé d'y mettre une somme additionnelle
de 10 000 000 $ dans des études de marché, je crois... On dit: 10
000 000 $ dans l'aventure à la fin de la présente année
financière en mars prochain. Des études préliminaires
défrayées par le gouvernement fédéral de la
même façon que le gouvernement fédéral a 200 000 000
$ d'engagés dans Lower Churchill Falls Corporation. Alors, c'est entendu
que, sur cela, on se rejoindrait; si votre motion va dans le sens de dire au
gouvernement fédéral de ne pas venir "disturber" les
marchés d'exportation en Nouvelle-Angleterre ou à New York, on va
être d'accord.
M. Fortier: C'était le sens de ma motion, M. le
Président ou de dire qu'ils devaient avoir un traitement
égal.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Je
me réjouis de la bonne intention qu'a manifestée le
député d'Outremont vis-à-vis...
M. Fortier: Je suis toujours plein de bonnes intentions.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): ...du projet de Pointe-Lepreau.
J'ai visité cette centrale quelques mois après son entrée
en exploitation au cours de l'été et j'avais comme premier point
justement ce projet qui est dans l'air depuis quelque temps. Je voudrais avoir
un peu plus de précisions de la part de ces messieurs
d'Hydro-Québec quant à l'ordre de grandeur du coût de
production d'un kilowattheure de la prochaine centrale hydroélectrique
qu'Hydro-Québec pourrait bâtir et du coût de production du
kilowattheure à Pointe-Lepreau 2; avoir une idée, par exemple, de
l'investissement, de la subvention nécessaire pour être capable de
concurrencer ce qu'Hydro-Québec pourrait exporter vers les États
de la Nouvelle-Angleterre.
M. Bourbeau (Joseph): M. Dubé.
M. Dubé: Règle générale, on peut dire
que la prochaine centrale qu'Hydro-Québec pourrait construire pour
satisfaire soit ses besoins à elle ou des besoins d'exportation serait
la centrale de La Grande 1. Le coût de production de cette centrale
serait à peu près identique au coût de production de la
phase I du complexe La Grande. Or, on sait qu'un chiffre publié depuis
nombre d'années a situé le coût de production de la phase I
du complexe La Grande à 27 mills le kilowattheure ou à 27 $ le
mégawattheure.
Il faut tenir compte, bien sûr, du jeu de l'inflation, puisque la
phase I du complexe La Grande est en train d'être réalisée
et que la centrale de LG 1 ne pourra être, à toutes fins utiles,
construite ou mise en service avant 1990 ou 1991. Donc, si on tient compte du
jeu de l'inflation et du fait que l'intérêt sur l'argent est
aujourd'hui beaucoup
plus élevé qu'il ne l'était l'an passé, les
27 mills le kilowattheure pour la phase I du complexe La Grande deviendraient
76 mills le kilowattheure. Ce serait à peu près le coût de
production de La Grande 1, entre 70 et 75 mills le kilowattheure.
M. Fortier: Aux lignes de transport d'énergie à la
frontière?
M. Dubé: C'est livré à Montréal.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): Le coût de production du
kilowattheure à Pointe-Lepreau 2 serait quoi approximativement?
M. Dubé: Pointe-Lepreau 2 serait d'environ 30% à
35% supérieur à ce coût-là.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): Cette somme
supplémentaire, ces 30% auraient besoin d'être fournis en
subventions pour être capable d'arriver avec un même prix de vente,
aux mêmes clients, en Nouvelle-Angleterre, par exemple?
M. Dubé: C'est cela.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): Dans un autre ordre
d'idées, nos barrages sont, en réalité, nos
entrepôts d'énergie. Sur quels critères évaluez-vous
la capacité de remplissage de ces entrepôts, basée, bien
sûr, sur les précipitations annuelles? De quelle façon
assurez-vous une sécurité de remplissage?
M. Dubé: Bien sûr, on le mentionnait plus tôt,
notre production est essentiellement liée aux précipitations,
puisqu'elle est à 95% hydroélectrique. Or, ce qu'on fait pour
mettre les Québécois à l'abri de périodes
sèches, ce sont vraiment des simulations sur de nombreuses années
et, finalement, sur plusieurs centaines d'années, de façon
à construire des barrages ou des réservoirs qui ont une
capacité d'emmagasinage telle que des années successives de
faibles précipitations ne mettraient pas en danger notre capacité
de production. Pour ce qui est de notre barrage de Manic 5, à titre
d'exemple, nous avons pu déterminer que, s'il se produisait, en ligne,
les cinq années les plus sèches qu'on n'ait connues depuis les
cent dernières années, notre réservoir ne serait pas
asséché à ce niveau-là.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): II faudrait encore que Manic 5
ait de plus grands entrepôts.
M. Dubé: Non, c'est notre plus grand entrepôt, et de
loin.
M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet): En ce qui se rapporte plus
spécifiquement à la tarification, il y a un point qui
m'inquiète un peu par rapport à certaines régions du
Québec qui ne sont pas desservies par les réseaux de gaz naturel
et où il y a nécessairement aussi des possibilités pour
nos investisseurs soit de prendre de l'expansion avec leurs entreprises ou
d'implanter de nouvelles entreprises. Dans vos propositions de tarification, il
y a un parallèle avec nos PME, petites, moyennes et grandes entreprises,
car vous avez, dans vos tarifs généraux, petite, moyenne et
grande puissance. Je fais un rapprochement entre les deux. Est-ce que
l'augmentation de la petite entreprise, de la petite puissance, qui est de 3,4,
c'est l'équivalent de l'augmentation moyenne? Est-ce qu'avec ces
augmentations, des investisseurs peuvent avoir encore de l'intérêt
ou avoir l'assurance que leur coût d'énergie peut être
concurrentiel; êtes-vous concurrentiels par rapport au gaz et pouvez-vous
nous assurer que ces régions-là ne sont pas automatiquement
défavorisées parce que le gaz en est absent?
M. Bourbeau (Joseph): Alors, M. Claude Boivin,
vice-président à la mise en marché.
M. Boivin (Claude): Si on parle de la position concurrentielle de
l'électricité par rapport au gaz, dans le secteur
résidentiel, présentement, pour fins de chauffage, il y a un
avantage en faveur du gaz par rapport à l'électricité,
mais qui est léger. Par contre, dans les différents secteurs
industriels pour fins d'application de chauffage, les tarifs de gaz donnent un
avantage au gaz naturel par rapport à l'électricité. Cet
avantage-là est variable selon justement l'ampleur de la charge.
Quand vous parlez de petite puissance, je pense que c'est ce niveau qui
vous intéresse, chez les petites entreprises qui prennent moins de 100
kilowatts, effectivement, il y a un avantage là aussi du gaz par rapport
à l'électricité pour des procédés de
chauffage. D'ailleurs, à ce sujet-là, dans le plan de
développement, à la page 21, vous avez un tableau, le tableau 7,
qui situe la position concurrentielle de l'électricité par
rapport au mazout et au gaz dans les différents secteurs d'application,
à savoir l'usage domestique, l'usage général et l'usage
industriel.
M. Tremblay: Mais cette différence, elle est
déterminée aussi en raison du pourcentage du coût de
production d'un produit qui est dû à l'électricité
ou à l'énergie dans la fabrication du produit.
M. Boivin: Bien, c'est évident que, lorsqu'on parle,
normalement, en général, des petites entreprises, à savoir
en fait des charges de moins de 100 kilowatts dans la
petite puissance, règle générale, dans ce
domaine-là, les procédés industriels ne sont pas des
procédés énergivores et la composante énergie dans
le coût total des produits finis est relativement faible. On peut dire
qu'en moyenne, dans l'industrie québécoise, sauf pour les
procédés très énergivores, cela se situe, pour la
partie électrique, entre 3% et 5% du coût du produit fini. Ce
n'est pas le cas, par exemple, pour l'aluminium ou...
M. Coulombe: Maintenant, il y a un autre aspect à votre
question. Évidemment, c'est l'évolution prévisible des
prix des deux formes d'énergie. C'est évident qu'au tableau de la
page 21, vous voyez que, à l'usage industriel, lentement,
l'électricité devient de plus en plus concurrentielle. Dans
d'autres marchés, cela se produit différemment.
Mais la question qu'il faut se poser, c'est sur le moyen et le long
terme. En d'autres mots, est-ce que la politique du gouvernement
fédéral de prix du gaz, qui est un prix de
pénétration de marché, va demeurer? Nous, à
l'Hydro, à cette question-là, on n'a pas de réponse, on ne
le sait pas, mais ce qu'on peut dire, c'est que, toutes choses étant
égales, nos coûts de production, on les connaît, et,
normalement, on devrait les contrôler. Donc, l'évolution de nos
prix est beaucoup plus prévisible, parce que le contrôle est
strictement à l'intérieur du Québec. Alors, le point
fondamental est de dire comment vont évoluer ces deux formes
d'énergie à l'avenir. Ce n'est pas tellement l'année
prochaine, dans deux ans ou dans trois ans. Les programmes d'aide du
fédéral pour la pénétration du gaz vont se terminer
à un moment donné. Quelle va être l'évolution
après cela? C'est une question à laquelle nous ne pouvons
répondre. Sauf que, pour nos coûts et nos prix de vente, nos
tarifs, on pense qu'on peut faire des simulations qui tiennent compte des
variables internes contrôlées à 100% par Hydro et le
gouvernement. Donc, ce sont le moyen et le long terme qui sont
problématiques dans les coûts des énergies. (22 h 15)
M. LeBlanc: Une dernière question qui me préoccupe,
c'est: Comment conciliez-vous la diminution de vos effectifs, 1000 postes
abolis, et vos projets d'immobilisation pour 1984 dans la rénovation de
votre réseau de distribution, ce qui est une activité assez
intense? Est-ce que vous avez dû avoir recours à des entreprises
à contrats en région et dans quelle partie du Québec cette
opération est-elle nécessaire?
M. Coulombe: Peut-être que M. Godin peut venir dire
quelques mots sur ce programme spécial, mais simplement comme
introduction, c'est évident que ce programme spécial demandera du
personnel de plus. Il y aura une montée et une descente rapide de
personnel nécessaire pour exécuter ces travaux qui sont
distribués dans l'ensemble de la province. M. Godin pourra parler plus
longuement du type de travaux et de l'endroit où ils vont se faire.
D'une façon générale, il est évident qu'il
faudra engager beaucoup d'entrepreneurs et ainsi de suite, ce qui va nous
amener à négocier avec nos syndicats parce que, dans nos
conventions collectives, c'est un point très ferme: contrats à
forfait, etc. On entend respecter intégralement la convention collective
qu'on a signée il y a quelques semaines, mais il va y avoir des
discussions sérieuses sur ce mouvement de personnel. Alors, on peut
jouer sur les postes temporaires, augmenter ceux-ci, et lorsqu'on dit qu'il y a
une diminution de 1000 postes, c'est évident que ce sont des postes
permanents dont on parle. Ce sont des gens qui sont à Hydro,
théoriquement, pour une très longue durée. Donc, on
n'inclut pas là-dedans les entrepreneurs, les postes temporaires,
etc.
Il va falloir avoir une balance entre les permanents qui vont diminuer,
les temporaires qui peuvent augmenter, les entrepreneurs, etc., et ce sont des
négociations relativement complexes qu'il faudra avoir.
Maintenant, M. Godin pourra peut-être donner des détails
sur le programme.
M. LeBlanc: Avant la réponse de M. Godin, je vous
demanderais à combien vous avez évalué le nombre
d'années-hommes que va représenter, en 1984, cette participation
à l'emploi.
M. Godin (Pierre): Ce chiffre n'a pas encore été
déterminé. Tout cela dépend du type, de la
répartition des travaux qui vont être faits. Il y a un ensemble de
travaux qui ont été déterminés, à travers
lesquels il faut encore faire des choix et c'est une fois seulement que ces
choix seront faits que nous pourrons déterminer l'ensemble de la
main-d'oeuvre nécessaire pour la réalisation de ces travaux.
Ce que l'on peut dire quand même au départ, c'est que ces
travaux exigent beaucoup de main-d'oeuvre, de façon
générale, par rapport à la quantité de
matériaux requis. Je ne serais pas en mesure de vous donner des chiffres
à ce moment-ci.
Quant à la répartition de ces travaux, elle sera faite
partout à travers la province mais, là encore, les travaux qui
concernent la répartition de ces travaux ne sont pas terminés. De
façon générale, on peut dire dès ce moment qu'ils
sont répartis un peu partout dans la province.
M. LeBlanc: Dans les endroits où le gaz naturel ne
pénètre pas - je pense par
exemple à l'Est du Québec - la conversion à la
biénergie, à l'électricité, doit être un
petit peu plus intense que dans d'autres régions, les centres
très urbanisés, par exemple.
M. Godin (Pierre): Cela n'a pas d'effets très
marqués à ce niveau.
M. LeBlanc: Je vous remercie.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Chapleau.
L'industrie du fer sur la Côte-Nord
M. Kehoe: Hydro-Québec récemment, par votre
entremise, a annoncé un programme de stabilisation tarifaire pour les
grosses industries. Il y avait un reportage dans le Soleil du mercredi, 7
décembre. Dans ce reportage, il est dit que dans les efforts de
commercialisation, Hydro multiplie les programmes de subventions et de rabais
tarifaires pour élargir sa clientèle et, si possible, amener au
Québec des entreprises à forte consommation
d'électricité, les alumineries notamment. Dans ce même
article, on mentionne les différents autres programmes, celui de
biénergie, les programmes de rabais tarifaires de 50% pour des
entreprises qui investissent, pour augmenter leur production, qui seraient
également prolongés pour deux ans.
Mais c'est le dernier paragraphe de l'article qui m'inquiète
beaucoup. Il dit ceci: Par ailleurs, M. Coulombe a indiqué qu'il
n'était pas question, pour le moment, de consentir des rabais tarifaires
à l'industrie minière, notamment pour permettre de sauvegarder
l'industrie du fer sur la Côte-Nord.
La semaine dernière, le 29 novembre, le ministre de
l'Énergie et des Ressources et quatre autres ministres ont eu une
conférence à Port-Cartier dans laquelle justement étaient
avancés plusieurs programmes, plusieurs scénarios, non pour la
relance de l'économie de la Côte-Nord, mais pour son sauvetage.
À cette conférence, le ministre a promis qu'au mois de mars ou
avril il y aurait justement un sommet pour annoncer un vrai programme de
sauvetage de la Côte-Nord, plus spécifiquement pour le fer.
Maintenant, la déclaration que vous avez faite jette une lumière
complètement différente de l'espoir que le ministre a
donné à ces gens lors de la conférence du 29, l'espoir
qu'il y ait un programme de sauvetage dans lequel un tarif spécial
d'électricité serait accordé à des mines pour au
moins tenter de sauvegarder ce qu'elles ont actuellement. Quelle est votre
position là-dessus?
M. Coulombe: En fait, lorsque cette référence a
été faite, la question était posée dans un cadre un
peu plus général. C'est tout le problème de la
tarification sectorielle, c'est-à-dire ce qu'on doit faire pour certains
secteurs qui sont en danger et pour d'autres qui sont plus ou moins dynamiques
en termes de tarification de l'électricité.
D'abord, il y a une politique officielle du gouvernement pour certains
secteurs déterminés. Il y avait l'aluminium et se sont
ajoutées l'électrométallurgie, l'électrochimie et
la chimie minérale. On a dit tantôt que, dans ces cas, la
politique gouvernementale est très claire. En d'autres mots, s'il y a
des plafonds qui sont accordés à ces industries, cela fait partie
de ce que le gouvernement a annoncé en 1978 et, en ce qui nous concerne,
cela ne nous cause aucune espèce de problème.
Sur la tarification, c'est-à-dire si Hydro-Québec doit
assumer le coût d'une tarification par industrie, là-dessus, en
toute honnêteté, on est en période de réflexion
intense, mais la réflexion nous fait nous poser plusieurs questions du
genre de celle-ci: D'abord, les industriels, l'Association
québécoise des consommateurs industriels
d'électricité et plusieurs autres industriels avec qui on a fait
affaires - M. Boivin pourra donner plus de détails - sont
extrêmement inquiets de cette approche. Nos clients industriels sont
très inquiets de cette approche parce que cela pose très
certainement le problème de l'interfi-nancement, c'est-à-dire si
les secteurs en santé et les secteurs dynamiques industriels vont
financer les secteurs moins bien nantis. C'est évident que l'ensemble
d'une tarification, c'est le principe des vases communicants: ce qui est perdu
d'un côté doit être gagné de l'autre.
L'ensemble des industries est donc réticent vis-à-vis de
ce genre de choses. Je vous avoue qu'on partage un peu cette réticence.
Il n'y pas de décision définitive de prise. Le dossier complet
n'est pas terminé à Hydro-Québec, il n'a jamais
été présenté au conseil d'administration, mais la
tarification sectorielle, en dehors du cadre d'une politique gouvernementale,
c'est-à-dire une tarification sectorielle strictement
d'Hydro-Québec, où Hydro-Québec assumerait la
totalité des coûts que cela implique, cela nous fait nous poser
beaucoup de questions.
M. Kehoe: Est-ce qu'il y a des négociations entre le
ministère et HydroQuébec justement pour la Côte-Nord? Lors
de la conférence en question, le ministre a dit qu'il faut absolument
baisser le coût de production d'une tonne de fer de 7 $ à 8 $ pour
être concurrentiel avec le Brésil ou l'Australie et ainsi de
suite.
Un des facteurs les plus importants dans le coût de production du
fer, c'est
nécessairement le coût énergétique, le
coût de l'électricité. Cela peut représenter
jusqu'à 30%. Il me semble que c'est la manière la plus facile
pour tenter de régler... Le commencement d'un programme de sauvetage, ce
serait justement dans ce domaine.
Je pose la question: Est-ce qu'il y a des négociations
actuellement entre les deux pour tenter d'établir...
M. Coulombe: Cette discussion nous l'avons avec le
ministère de l'Énergie et des Ressources depuis de très
nombreux mois. On en discute régulièrement. Au point vue des
discussions, cela existe. De plus, HydroQuébec a discuté avec les
principaux intervenants auxquels vous faites référence, les
compagnies en question. On est en discussion avec eux de façon
régulière. Je peux dire que dans certains cas on a fait un effort
maximum pour donner toute l'aide qu'on pouvait donner; et cela ce ne sont pas
des projets à venir, cela existe à l'heure actuelle. Sans
révéler de détails contractuels complexes avec ces
compagnies, ce qu'on peut dire c'est que les discussions sont non seulement
avec le gouvernement mais avec ces compagnies. Et on fait tout l'effort
possible pour en arriver à des ententes qui pourraient leur donner un
coup de main.
Le problème fondamental c'est toujours la question du coût
à payer pour augmenter la rentabilité d'une entreprise. Il faut
bien penser que ces entreprises jouissent tout de même des tarifs les
plus bas qu'ils ne peuvent trouver nulle part ailleurs. J'exclus
l'hypothèse qu'un pays puisse donner des subventions à des
concurrents, mais en termes de tarifs d'électricité on maintient
que les tarifs dont ils jouissent sont parmi les plus bas qu'ils peuvent
trouver.
Deuxièmement, ils ont historiquement eu des tarifs
privilégiés qui représentent des sommes très
considérables depuis cinq ans, dix ans ou quinze ans.
Troisièmemement, demander à HydroQuébec d'assumer
un coût ou d'augmenter la rentabilité sur un facteur de
production, alors que ni les compagnies de pétrole, ni les autres
intervenants ne feraient un effort équivalent ou ne seraient soumis
à cet effort, cela nous semble pour les autres clients
d'Hydro-Québec un problème, comme je vous l'ai expliqué
tantôt, assez important.
M. Kehoe: Je comprends mieux la situation. En ce qui concerne le
projet Pechiney, où il y a un tarif spécial qui est
négocié entre le gouvernement de la province de Québec et
la compagnie Pechiney pour la tarification d'Hydro-Québec, ce qui semble
très favorable à la compagnie Pechiney... C'est aussi le cas pour
Reynolds à Baie-Comeau. Est-ce que vous êtes aussi
généreux avec l'industrie du fer que vous l'êtes avec
l'industrie de l'aluminium?
M. Coulombe: On pourrait avoir des exemples précis.
M. Kehoe: Semble-t-il, le contrat que vous avez accordé
à Pechiney surtout semble extrêmement généreux.
Tandis que dans les autres endroits, comme Gagnon qui est en train de fermer,
Schefferville qui est déjà fermée, Fermont, Port-Cartier,
Sept-Îles, ces villes qui sont dans une situation désastreuse, qui
sont sur le bord de la faillite, qui sont sur le bord de la fermeture... Est-ce
que d'un côté, vous allez donner des tarifs
préférentiels à Reynols et à Pechiney et d'un autre
côté, si je lis bien le dernier paragraphe de ce reportage, il
n'est pas question en ce moment de consentir des rabais tarifaires à
l'industrie, notamment pour permettre la sauvegarde de l'industrie du fer de la
Côte-Nord? On dirait qu'il y a un contraste ou une postion
complètement opposée dans les deux.
M. Coulombe: Non, je crois qu'il y a une logique
générale qui est la suivante. Dans le cas de l'aluminium d'abord,
indépendamment du fait qu'il s'agissait de nouveaux investissements au
Québec etc., donc de création d'activité
économique, de nouveaux clients etc., cela fait partie d'une politique
gouvernementale qui est très claire: au-delà d'un plafond qui est
accordé par Hydro-Québec et par le gouvernement -puisque c'est le
gouvernement qui approuve les choses - c'est le gouvernement dans cette
politique qui assume les frais de dépassement du plafond. C'est clair,
c'est entendu. En d'autres mots, si c'est le même principe pour les mines
de fer, cela ne nous cause aucun problème. C'est très
délicat de comparer la situation de l'aluminium à ce que vous
décrivez. Ce n'est pas du tout le même contexte. Dans le cas de
l'aluminium c'est très clair.
Deuxièmement, en ce qui concerne ces points il faut admettre que
ces compagnies ont profité de tarifs extrêmement réduits de
la part d'Hydro-Québec historiquement; et sans dévoiler de
chiffres précis, le manque à gagner d'Hydro-Québec dans le
cadre de ces contrats se chiffre à au-delà de 200 000 000 $
depuis l'existence de ces contrats. (22 h 30)
Je pense que, là, il s'est agi d'une politique d'aide à
ces industries, qui a d'ailleurs profité énormément
à la création d'emplois et à l'existence même de ces
compagnies. Mais de poursuivre sur la même voie, comme je l'ai dit
tantôt, pose des points d'interrogation et semble une politique qu'il
faudrait examiner beaucoup plus à fond en termes de conséquences
sur l'ensemble des autres industries. Tout en comprenant
parfaitement bien ce que vous dites, est-ce c'est logique de demander
à l'ensemble des industries d'absorber, finalement, le coût de ces
rabais systématiques lorsque cela ne fait pas partie d'une politique
générale accessible à l'ensemble des entreprises?
M. Kehoe: La situation de la Côte-Nord est tellement
à part, complètement différente des autres.
M. Coulombe: Là, vous faites référence
à une politique industrielle du gouvernement. Possiblement qu'à
ce niveau les gouvernements peuvent agir.
M. Kehoe: Peut-être que je peux poser une question au
ministre. Est-ce qu'il y a une politique spécifique pour la tarification
sectorielle en ce qui concerne les mines de fer de la Côte-Nord? Est-ce
que le gouvernement a une position? On a entendu la réponse
d'Hydro-Québec. Je pense que la balle est dans votre cour maintenant.
Quelle est donc votre position dans cela?
M. Duhaime: Je ne sais si vous avez entendu comme il faut quand
nous avons soulevé cette question à Port-Cartier. J'ai dit
très clairement que nous allions réunir à nouveau, en
mars, je l'espérais, ou en avril, cette table de concertation et que, en
temps utile, lorsque nos discussions seront terminées avec les quatre ou
cinq compagnies impliquées, le gouvernement annoncerait sa position.
J'ai indiqué également que dans l'intervalle, dans le cas de
trois compagnies, Québec Cartier, IOC et Fer et Titane, des
assouplissements aux contrats déjà existants avaient d'ores et
déjà été accordés et acceptés par
Hydro-Québec et, dans au moins un de ces cas, le gouvernement les a
approuvés. Il en reste deux, je crois, à approuver au niveau du
gouvernement.
M. Kehoe: Mais le problème, M. le ministre, d'ici le mois
de mars ou d'avril, on se demande si SIDBEC-Normines à Gagnon pourra
rester ouverte. La situation est rendue au point que c'est une question de vie
de ces mines. Je me demande même si elles auront assez de temps pour
survivre.
Le ministère a le problème en main. Vous connaissez,
depuis trois, quatre, cinq ans, la situation du fer sur la Côte-Nord.
Qu'est-ce que vous avez fait en ce qui concerne les négociations des
tarifs sectoriels, des tarifs spéciaux pour ces compagnies?
Ce que je sais, c'est que vous avez annoncé - c'est vrai -
l'autre jour qu'au mois d'avril vous alliez annoncer autre chose; mais, dans le
passé, qu'avez-vous fait outre de dire que, d'ici à ce
temps-là, il y a certains contrats mineurs qui seront affectés?
Mais dans l'ensemble, concernant l'établissement des tarifs
spéciaux pour la Côte-Nord qui auraient pu exister depuis un
certain nombre d'années, on vous reproche de ne pas avoir fait cela plus
tôt, de ne pas avoir prévu. Gouverner, c'est prévoir.
On savait, depuis les quatre ou cinq dernières années, que
la situation était un désastre complet dans la région de
la Côte-Nord, et le ministre a fait très peu dans ce domaine des
taux d'électricité.
M. Duhaime: Je rappelle, M. le Président, que les
dirigeants de ces compagnies nous ont dit que l'énergie comptait pour
à peu près 25% du coût de production. Alors, dans
l'énergie qui est consommée par l'industrie minière,
l'industrie du fer et du titane, bien sûr, il y a
l'hydroélectricité mais aussi du mazout importé.
Vous étiez présent lorsque les dirigeants de
SIDBEC-Normines ont parlé d'un éventuel programme de conversion
du mazout à l'électricité en allant vers un nouveau
procédé de fabrication; même chose pour IOC. Je n'ai pas
beaucoup d'objections à ce qu'on parle ce soir de l'industrie du fer au
Québec mais je vous souligne que l'on est très loin de la
proposition tarifaire d'Hydro-Québec.
J'ai eu l'occasion de dire, et je peux vous le répéter,
que nous allons continuer de discuter avec les compagnies. Le chiffre qu'a
mentionné M. Coulombe tantôt est un chiffre contesté par
les entreprises - elles nous l'ont indiqué à Port-Cartier - mais
en valeur actualisée, si on prend le coût ou encore si on applique
à l'industrie du fer le tarif grande puissance et son évolution
depuis son installation, c'est là qu'on retrouve la marge de 210 000 000
$.
Si votre approche consiste à dire qu'il faudrait refiler la
facture pour tenter de minimiser les coûts de production à la
tonne de fer de 7 $ ou de 8 $, quand on pense que ces cinq compagnies ensemble
paient à Hydro-Québec 100 000 000 $ par année et si c'est
vrai que cela compte, en arrondissant les chiffres un peu pour les fins de la
discussion à 25%, cela représente un montant énorme. Je
crois qu'en toute logique, il faut que les discussions qui ont
été entreprises avec les industries, avec les travailleurs de
l'industrie et avec les milieux municipaux de la Côte-Nord se poursuivent
et qu'on voie le bout de chemin que chacune des parties concernées
serait disposée à faire pour mettre au point un plan de
sauvetage. Si vous me posez la question directement, est-ce que le gouvernement
est disposé à absorber complètement la différence
à la tonne qu'il faudrait regagner sur le marché international
pour maintenir l'industrie du fer? Ma réponse va être
carrément non.
M. Kehoe: Ce n'est pas la question que
je vous pose.
M. Duhaime: Nous serons en mesure, dans les trois ou quatre
prochains mois, de donner une réponse à l'ensemble de l'industrie
pour ce qui est d'une problématique tarifaire pour l'industrie du
fer.
M. Kehoe: Juste une dernière question à M.
Coulombe. En ce qui concerne les mines de cuivre à Murdochville, est-ce
que c'est la même situation? Est-ce que vous adoptez la même
politique que celle du fer sur la Côte-Nord? N'y a-t-il pas de tarif
spécial en raison de la difficulté qui existe? C'est une
question...
M. Coulombe: Murdochville est au tarif normalisé.
M. Kehoe: Est-ce qu'elle a fait une demande? Est-ce qu'il y a des
négociations qui se poursuivent? Actuellement, la ville de Murdochville
est sur le bord d'une fermeture et d'une faillite complète. La compagnie
Mines de cuivre Gaspé a décidé d'investir 32 000 000 $ et
le ministère 13 000 000 $ peut-être conditionnels à ce que
le marché du cuivre reprenne, etc. Mais en ce qui concerne les
négocations avec Hydro-Québec spécifiquement pour un tarif
spécial...
M. Coulombe: Je dois vous dire qu'il serait moins long de nommer
les industries qui n'ont pas demandé des choses que de nommer celles qui
en ont demandé. En définitive, dans la récession qu'on a
vécue depuis deux ans, c'est une demande générale de
toutes les industries. En tenant cela pour acquis, le cas de Murdochville est
au tarif normalisé. Si elle fait des investissements
supplémentaires, le programme de rabais lui est accessible. Dans le cas
de Murdochville, s'il y a des nouveaux investissements, elle aura accès
au programme de rabais comme les mines de fer. Si les mines de fer font des
investissements, le programme leur est accessible. Les chiffres des compagnies
qui nous ont été fournis estiment que pour la concentration, les
coûts d'énergie, pour l'électricité sont de 6%
à 15% du coût, pour le mazout 8,5% à 33%. Dans les facteurs
de production, l'énergie est importante mais à l'intérieur
de l'énergie, le coût de l'électricité, c'est de 6%
à 15% du coût comparativement à 8,5% à 33%. Est-ce
que les compagnies de pétrole vont avoir une politique pour baisser leur
tarif et leur prix de pétrole? C'est beaucoup plus important que
l'électricité puisque c'est de 8,5% à 33%, selon les
procédés. C'est un peu ce genre de dilemme devant lequel on est.
Non seulement dans ce genre de compagnie mais il y en a d'autres compagnies au
Québec qui sont en concurrence sur le marché international et qui
ont extrêmement de difficultés parce que d'autres facteurs de
production sont plus élevés ici. Avec des chiffres semblables, il
faut se demander s'il y a un effort énergétique à faire.
Cela règle 25% des coûts, mais il en reste 75%. Est-ce qu'il va y
avoir un effort général pour baisser les coûts de
production? On voit difficilement comment cela pourrait être
absorbé en totalité par Hydro-Québec. Les compagnies de
pétrole, c'est 33% du coût selon le procédé. Il
reste un autre 75%, en dehors de l'énergie, de coût de
main-d'oeuvre et de différents autres coûts. Je pense qu'Hydro,
là-dedans, est un acteur parmi beaucoup d'autres sur la
rentabilité de ces compagnies-là.
M. Kehoe: Ma dernière question porte sur les mines
d'amiante dans les régions d'Asbestos et de Thetford-Mines où la
situation est critique à cause de différents facteurs. Il ne sert
à rien d'entrer dans les détails, mais il y a eu des fermetures
de mines, des mises à pied. La situation n'est peut-être pas aussi
désastreuse qu'ailleurs, mais elle est très pénible pour
les gens de ces régions. Encore une fois, est-ce qu'il y a eu des
discussions ou des négociations pour un tarif spécial pour cette
région ou pour...
M. Coulombe: La réponse est oui. Il y a eu demande. Des
efforts ont été faits, des discussions ont eu lieu avec
Hydro-Québec, parce que l'ensemble des compagnies minières ont
certains problèmes et ont abordé Hydro-Québec, de
façon collective ou de façon individuelle pour demander ces
choses-là. Cela ne fait qu'ajouter un peu à notre
perplexité devant ce problème, parce que, vous le mentionnez
vous-même, il y a trois ou quatre cas: la Côte Nord, les mines de
Murdochville, l'amiante. On s'aperçoit tout de suite où la
logique pourrait nous conduire s'il y avait des tarifs en termes de politique
d'Hydro; le coût que cela pourrait représenter pour les
consommateurs d'électricité, finalement, parce que c'est un
coût qui va se rapporter directement chez les consommateurs
d'électricité.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
Vimont.
Production et investissements
M. Rodrigue: Je regarde votre tableau derrière vous. Cela
me fascine un peu cette part que représente la production de Churchill
Falls, là-dedans. Si on partait de la ligne horizontale qui est la
production actuelle, la capacité de production actuelle, cela nous
amènerait à quel niveau?
M. Bourbeau (Joseph): On achète
environ 31 500 000 000 de kilowattheures par année.
M. Rodrigue: Cela nous baisserait au niveau de 140 à peu
près.
M. Bourbeau (Joseph): On est à 165, alors on se trouverait
à 125 ou 130, environ.
M. Rodrigue: Alors, là vous n'auriez plus de
problème, il n'y aurait plus de surplus? Vous n'auriez plus de
problème si les Terre-Neuviens mettaient à exécution leur
menace et qu'il n'y avait plus de surplus à ce moment-là?
M. Coulombe: À très très court terme,
non.
M. Bourbeau (Joseph): C'est-à-dire qu'on pourrait, pendant
quatre ans, subir une coupure de courant. On a assez d'énergie et de
puissance.
M. Rodrigue: Justement, cela m'amène à
l'explication que donnait M. Dubé, tout à l'heure, concernant la
portion de surplus de réserves, on parlait de...
M. Bourbeau (Joseph): 30 000 000 000 de kilowattheures.
M. Rodrigue: ...30 000 000 000 de kilowattheures, qui sont
représentés par un surplus de réserves dont on pourrait se
passer finalement. Est-ce que je dois comprendre, du fait que vous projetez de
réduire cette réserve au cours des prochaines années, que
vous vous sentez suffisamment en sécurité, même si, dans le
passé, il y a eu quelques menaces de la part des gens de Terre-Neuve,
pour pouvoir vous passer de ce surplus de réserves que vous avez
actuellement dans les réservoirs?
M. Bourbeau (Joseph): Non, je pense que ce dont on parlait,
c'était une réserve normale pour être capable de
gérer le réseau. Cela n'a pas de relation directe avec les 30 000
000 000 de kilowattheures qu'on achète de Churchill Falls.
M. Rodrigue: Oui, mais le sens de ma question, c'est que les
Terre-Neuviens ont fait des menaces, à certains moments. Cela s'est
calmé depuis peut-être un an. On se rappellera des menaces de M.
Peckford, qui disait qu'il allait couper le courant si jamais il ne parvenait
pas à s'entendre avec le Québec. Tout à l'heure, par
ailleurs, je regardais M. Dubé qui expliquait qu'on allait
résorber ce surplus de réserves de 30 000 000 000 de
kilowattheures. Dans l'hypothèse assez peu plausible, j'en conviens,
où les Terre-Neuviens mettraient leurs menaces à
exécution, est-ce qu'on ne peut pas penser que ce surplus de
réserves pourrait être fort utile pour pallier une baisse
importante dans la capacité de production du réseau?
M. Bourbeau (Joseph): Certainement, si tous nos réservoirs
sont pleins en 1988, comme l'a dit M. Dubé, à ce
moment-là, on pourrait soutirer des réservoirs un 30 000 000 000
de kilowattheures. (22 h 45)
M. Rodrigue: Si je comprends bien, vous ne prenez pas très
au sérieux la remarque de M. Peckford de couper le courant parce que,
autrement, vous conserveriez cette réserve.
M. Bourbeau (M. Joseph): Évidemment, si M. Peckford avait
une centrale et qu'il coupait le courant qui alimente le Québec, il
n'aurait pas d'autres clients.
M. Rodrigue: II aurait certains problèmes lui aussi, j'en
conviens.
M. Bourbeau (M. Joseph): II aurait certains problèmes,
oui.
M. Rodrigue: Je reviens à votre programme
d'immobilisations. Lors de votre dernière comparution devant la
commission parlmentaire pour les années qui viennent: 1984-1985-1986,
vous nous aviez parlé d'investissements ou d'immobilisations de l'ordre
de 2 300 000 000 $, 2 400 000 000 $, 2 500 000 000 $ par année. Dans le
programme qui nous est présenté ici, on parle plutôt
d'investissements de l'ordre de 1 700 000 000 $ en 1984-1985 et 1 600 000 000 $
en 1986. Comment expliquer la différence entre les chiffres qui nous
avaient été présentés lors de votre dernière
comparution et les chiffres que vous nous présentez aujourd'hui?
M. Coulombe: Lors de la dernière commission parlementaire,
les chiffres d'immobilisation qu'on a présentés étaient
ceux du plan de 1982. Le mémoire a été fait en
février-mars, donc on n'a pas modifié les chiffres du plan 1982.
Depuis ce temps, donc depuis bientôt quatorze à quinze mois, il y
a deux phénomènes qui se sont produits, que tout le monde
connaît; premièrement: la baisse du taux d'inflation et la baisse
des taux d'intérêt. Le plan 1982 prévoyait des taux
d'intérêt de l'ordre de 15%; en réalité, ils ont
été d'environ 11%. On avait prévu l'inflation à un
taux plus élevé que les 5% à 6% qu'on va observer. Donc,
cela a immédiatement un effet sur l'ensemble des immobilisations par des
diminutions assez importantes. À titre d'exemple, si vous regardez,
à la page 57, les intérêts impliqués à la
construction, on s'aperçoit tout de suite qu'une baisse des taux
d'intérêt de 1% représente plusieurs millions. Ce sont
les
deux phénomènes. La baisse de l'inflation a eu comme
conséquence évidemment que beaucoup de soumissions qui ont
été fournies à Hydro lors de la dernière
année l'ont été à des prix inférieurs
à ceux qui avaient été prévus. Encore là,
cela fait baisser les immobilisations.
Quatrièmement, on ne s'en cache pas, il y a eu un effort
systématique à Hydro-Québec non seulement dans les
dépenses d'exploitation, mais dans les dépenses d'immobilisation,
de resserrer et d'aller à l'essentiel.
Par contre, si vous regardez les investissements nets,
c'est-à-dire que si on exclut de cela les intérêts qui, en
fin de compte, ne sont pas directement créateurs d'emploi...
M. Rodrigue: Page 57.
M. Bourbeau (M. Joseph): ...à la page 57, ces
intérêts payés aux banques ne sont pas directement
créateurs d'emplois, on les a soustraits des immobilisations nettes ou
des investissements bruts pour avoir une notion de l'investissement net. C'est
là que vous remarquez que lorsqu'on a dit que, dans le cadre du plan de
la relance du gouvernement, on avait augmenté les investissements nets
en 1984 par rapport à 1983, vous voyez la différence de 1 650 000
000 $ à 1 742 000 000 $ et, en 1985, 1 713 000 000 $ qui sont aussi
supérieurs aux 1 650 000 000 $ de 1983.
M. Rodrigue: Si je comprends bien, les chiffres qui avaient
été présentés antérieurement comprenaient
les intérêts?
M. Bourbeau (Joseph): Oui, oui.
M. Rodrigue: C'est ce qui expliquerait la différence. En
termes de travaux à effectuer, est-ce que c'est sensiblement
équivalent à ce que vous aviez annoncé ou s'il y a eu
réduction des travaux à exécuter?
M. Bourbeau (Joseph): Ce qui a été augmenté,
c'est évidemment l'effort supplémentaire dont on a parlé
tantôt dans les programmes de distribution et les programmes de
transport. S'ajoute à cela aussi le programme spécial de
réfection que vous avez à la page 57 qui est de l'ordre de 240
000 000 $. Donc, cela a été...
M. Rodrigue: C'est les Cèdres... M. Bourbeau (Joseph):
Pardon?
M. Rodrigue: C'est la centrale Les Cèdres?
M. Bourbeau (Joseph): Beauharnois-Les Cèdres et deux
autres centrales qui vont être remises à neuf parce que ce sont
des centrales assez anciennes. Il y a donc une différence dans la
structure du plan d'équipement. L'accent sur les équipements de
production est moins grand et l'accent sur des équipements de
distribution et de transport est plus grand. Cela correspond d'ailleurs au
quatrième objectif du plan qu'on vous a présenté, la
fiabilité du réseau et le service à la
clientèle.
M. Rodrigue: La réfection des centrales, dont celle des
Cèdres, est-ce que cela va entraîner une augmentation de la
production à ces centrales, de la capacité de ces centrales?
M. Coulombe: Dans le cas des Cèdres, ce sont 30
mégawatts de plus, M. Dubé?
M. Bourbeau (Joseph): Vingt-cinq mégawatts de plus qu'on
pourrait soutirer des Cèdres. Évidemment, quand on fait la
réfection des turbines et de l'alternateur, à ce moment, on peut
dégager, avec de meilleures turbines, un peu plus de puissance.
M. Rodrigue: M. Coulombe, dans votre intervention, cet
après-midi, vous avez mentionné que pour des travaux
effectués dans la réfection du réseau de distribution et
de transport ou dans la construction du réseau de distribution et de
transport, il se créerait 7,5 emplois indirects par million investi, je
crois, et que dans le cas de la Baie James, il se créait seulement cinq
emplois par million de dollars investis.
M. Coulombe: Indirects, oui.
M. Rodrigue: Par ailleurs, les emplois directs
générés par ces deux types d'activité, est-ce que
cela se compare?
M. Coulombe: M. Grignon a fait quelques calculs sur les deux.
M. Rodrigue: J'aimerais aussi, pour compléter la question,
que vous nous disiez quels seront les emplois totaux
générés l'an prochain par le programme d'équipement
et nous fassiez une comparaison, étant donné qu'il y a une
différence ici, 7,5 versus 5 emplois indirects en faveur des travaux
effectués dans le transport et la distribution. Pourriez-vous nous
indiquer ce que ce sera avec les travaux importants que vous ferez dans le
transport et la distribution et ce que cela aurait été? Donc,
combien d'emplois supplémentaires seront générés
parce que les investissements se font dans le transport et la distribution
plutôt que dans l'aménagement hydroélectrique, à la
Baie James ou ailleurs?
M. Grignon: En fait, en 1984, si on prenait le budget
d'immobilisation que vous
avez devant vous, en termes d'activités économiques en
dollars constants, il y aurait à peine le quart dans des
équipements de production et trois quarts seraient dans des
équipements de transport, de distribution ou de soutien. Compte tenu du
fait que les emplois indirects générés dans le secteur
manufacturier sont de 7,5 emplois par million de dollars dépensés
dans le cas du transport et de la distribution, et de seulement de 5 dans le
cas de la production, si on imaginait un programme d'immobilisation de la
même ampleur que celui qui est dans le plan en 1984, mais avec une
proportion de plutôt 25% dans la production et 75% dans le reste,
à l'inverse, ce qui est typiquement ce qu'on a eu dans le programme de
construction de la Baie James où on avait 70% en production,
effectivement, on aurait, pour un même montant dépensé,
entre 1000 et 500 emplois de moins. De sorte que simplement l'effet de
structure dans le budget d'immobilisation d'Hydro-Québec en 1984, en
mettant l'accent sur les programmes de transport et de distribution, cela
crée effectivement de 1000 à 1500 emplois de plus.
M. Rodrigue: Enfin, je vous ai posé la question parce que
lorsque M. Laberge est venu ici en commission parlementaire, il s'est
inquiété des répercussions sur le niveau de l'emploi
qu'entraînait le ralentissement des travaux à la Baie James. Les
chiffres que vous m'indiquez finalement démontrent que non seulement il
n'y aura pas de réduction du niveau de l'emploi parce qu'on fait un
autre type d'immobilisation, mais qu'en réalité il y a un
accroissement du niveau de l'emploi du fait qu'on met l'accent davantage sur le
transport et la distribution plutôt que sur l'aménagement
hydroélectrique.
M. Coulombe: À montant égal.
M. Rodrigue: À montant égal, c'est cela.
M. Coulombe: C'est évident que si on se lance dans de
grands travaux de production...
M. Rodrigue: ...de 4 000 000 000 $ ou 5 000 000 000 $.
M. Coulombe: ...il y a beaucoup plus de milliards
d'impliqués. Mais, à montant égal, c'est évident
que ces chiffres-là sont exacts.
M. Rodrigue: C'est évident. À montant égal,
oui.
M. Grignon: Je pense que c'est une particularité du
changement dans l'ensemble des activités d'Hydro-Québec. En fait,
si on prend Hydro-Québec, il n'y a pas seulement que ses
activités de construction qui créent des emplois.
Hydro-Québec est une entreprise en croissance et ses activités
d'exploitation créent des emplois. Ses activités de vente aussi.
Il faut voir que les programmes de vente, qui n'existaient pas il y a à
peine 18 mois, vont créer, en 1984, 3000 emplois, parce que,
effectivement, plus on va vers la distribution, le transport ou la
commercialisation, plus Hydro-Québec a dans ses dépenses des
éléments qui amènent des contributions des partenaires.
C'est le cas des programmes de vente où, lors d'une conversion,
Hydro-Québec y va d'une subvention, par exemple, à la
biénergie, ou dans le cas des chaudières. Souvent les
gouvernements y vont aussi d'une subvention et les abonnés
eux-mêmes.
Quand on regarde les emplois créés par cet ensemble
d'investissements de plusieurs partenaires - c'est aussi le cas de l'entente
qui a été signée avec la ville de Montréal -et
qu'on considère aussi l'impact global, c'est-à-dire les tarifs,
par exemple, qui augmentent beaucoup moins vite - les tarifs, c'est aussi un
élément qui contribue à augmenter le revenu disponible,
à diminuer les coûts de production, donc à relancer
l'économie - quand on regarde l'ensemble de toutes les activités
d'Hydro-Québec, malgré la diminution dans le programme de
construction, en particulier au niveau de la production, il demeure que, dans
les trois années qui viennent, Hydro-Québec va susciter une
demande de travail qui est sensiblement similaire à ce qu'on a
observé dans les trois dernières années, dont certaines
étaient des années presque record au niveau de la
construction.
M. Coulombe: D'ailleurs, un exemple peut suffire dans cela.
À la page 57 du plan, vous avez l'ensemble des immobilisations
d'Hydro-Québec.
Prenons un projet comme l'hydrogène. La construction d'usines
d'hydrogène est impliquée dans cela pour un montant de 7 000 000
$, à la ligne: placements et avances. C'est un projet de l'ordre
d'envion 50 000 000 $, mais 43 000 000 $ ne sont pas dans cette
page-là.
Dans le cas de la ville de Montréal, on a parlé d'un
montant, cet après-midi, d'environ 500 000 000 $ ou 600 000 000 $. Vous
en avez une très faible partie dans cette page, parce que la structure
de financement de cet investissement n'est pas directement dans le même
cadre que ces investissements-là. Mais ces autres millions de dollars,
et même des dizaines et des centaines de millions,
générés par ces investissements d'Hydro-Québec, ne
sont pas tous considérés ici et eux créent
énormément d'emplois. Ce n'est pas dans cette page-là.
Comme le disait M. Grignon, plus vous
quittez la production qui, là, est financée à 100%
par Hydro-Québec, plus vous allez vers la commercialisation, plus vous
allez vers la distribution, plus il y a là des partenaires qui entrent
en jeu et qui investissent leur propre argent. Donc, ils créent des
emplois qui ne sont pas comptabilisés dans de telles pages, parce que ce
n'est pas Hydro-Québec qui paie directement, ce qui est le cas de la
production.
M. Rodrigue: La proportion des emplois qui sont
générés au Québec avec les programmes actuels,
est-ce que cela se compare à la proportion des emplois qui
étaient générés il y a trois ou quatre ans quand on
avait une plus forte proportion d'investissements dans les équipements
hydroélectriques, parce qu'il y a des emplois qui doivent être
générés ailleurs, les manufacturiers ne sont pas tous au
Québec dans ce domaine et ils ne l'étaient pas tous avant non
plus?
M. Coulombe: La majorité des dépenses
d'équipement d'Hydro-Québec, c'est dépensé au
Québec et la majorité des équipements, on cite souvent le
chiffre de 80%, évidemment, il faut s'entendre sur les composantes de
tout cela, mais la très vaste majorité des équipements
dont se sert HydroQuébec est fabriquée et/ou assemblée au
Québec.
Office fédéral d'exportation de
l'énergie
M. Rodrigue: J'en viens à une autre question, dans une
entrevue ou plutôt un reportage du Devoir du 7 décembre, il est
indiqué que M. Coulombe a également mentionné qu'il
n'était pas favorable au projet d'un office fédéral
d'exportation de l'énergie en raison de la grande complexité des
importations en ce domaine. Et d'autres intervenants, semble-t-il, soutenaient
la même position. Est-ce que vous pourriez détailler un peu les
raisons qui font que vous ne souhaitez pas qu'il y ait création d'un
office fédéral d'exportation de l'énergie?
M. Coulombe: La question posée était la suivante:
Est-ce que le gouvernement fédéral, actuellement, a mis de
l'avant ou semble mettre de l'avant, ou des organismes du gouvernement
fédéral une espèce de "pool" des exportations canadiennes
d'électricité, soit nucléaire, soit hydroélectrique
ou de toute autre forme, qui s'adresserait à un autre "pool"
américain qui achèterait?
C'est une idée qui n'est pas nouvelle en ce sens que, lorsque
Hydro-Québec fait affaire aux Etats-Unis, Hydro-Québec fait
affaire avec un "pool". Quand on parle de NEEPOOL, on pense à 88
compagnies qui se sont mises ensemble pour négocier. Donc, cela existe
déjà dans la structure du marché actuel. Notre opinion sur
cela, c'est que les relations bilatérales actuelles entre
Hydro-Québec et ses clients, malgré ce qu'on peut en dire, vont
bien et vont même très bien. Il y a peu de compagnies au Canada,
soit dans l'électricité, soit dans d'autres formes d'industries
manufacturières, qui peuvent se vanter d'avoir signé pour 6 000
000 000 $ de contrats dans les deux dernières années. Nous sommes
optimistes pour 1984, nous sommes confiants d'en signer un d'énergie
ferme, comme il a été expliqué plus tôt, ce qui
ajouterait encore quelques milliards de dollars de revenus.
Donc, notre opinion est que nos marchés, Hydro-Québec les
connaît. Il y a des efforts systématiques pour les
pénétrer. Il y a déjà une tradition de
communication qui existe. Il y a des contrats qui ont été
signés. Il y en a d'autres qui sont sur le point d'être
signés et on pense que cela fonctionne très bien en ce qui
concerne Hydro-Québec. (23 heures)
J'ai aussi mentionné la très grande complexité de
ce genre d'organisation: faire entendre trois ou quatre provinces ensemble, un
gouvernement fédéral, un gouvernement fédéral
américain, des États, quand on pense qu'au NEEPOOL on fait
affaires avec 88 compagnies. D'ailleurs, on avait un tableau du même
genre que celui qu'on aurait voulu vous présenter ce soir, mais
malheureusement on ne l'a pas terminé parce qu'il était trop
compliqué. Juste le tableau des interrelations entre les compagnies
américaines et nous, on ne l'aurait pas rentré dans un tableau
pareil; il aurait fallu en mettre une quantité, les uns à
côté des autres. Alors, on s'est dit qu'au nom de - je n'ose pas
dire la simplicité parce que ce n'est pas simple - ce qui existe
à l'heure actuelle, on ne voit pas l'intérêt de rendre
encore beaucoup plus complexe une opération qui l'est déjà
assez. C'est tout simplement ce que j'avais à dire.
M. Rodrigue: Dans les projections que vous avez faites, que vous
avez présentées plus tôt, vous avez un scénario
à 2,9% d'augmentation au cours des prochaines années. Vous
signalez que, pour ce qui est de NEEPOOL, c'est 2,6% et que pour New-York,
c'est 1,6%, si je me souviens bien.
Est-ce que cela n'a pas un impact négatif sur les potentiels
d'exportation vis-à-vis... parce que...
M. Coulombe: On l'a mentionné tantôt, la
demande...
M. Rodrigue: Ah bien! j'étais possiblement absent, j'ai
dû m'absenter pour une autre commission parlementaire.
M. Coulombe: ...générale décroît.
M. Rodrigue: Oui.
M. Coulombe: Alors, c'est évident que la tarte à
partager - pour tous ceux qui s'intéressent à l'énergie -
devenant plus petite, les morceaux de tarte vont être plus petits.
Maintenant, est-ce que c'est une situation qui va durer cinq ans ou dix ans? M.
Fortier faisait allusion tantôt au fait qu'il ne faut pas être trop
pessimiste. Est-ce que c'est écrit dans le ciel que cela va rester de
même? Je pense qu'il n'y a pas un "prévisionniste" qui pourrait
affirmer que cela va être le cas. Mais actuellement, c'est
définitif que l'ensemble de la demande énergétique
décroît, c'est-à-dire que le rythme de croissance
décroît.
M. Rodrigue: II y a toujours le potentiel de remplacement, de
toute façon. Merci.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Saint-Laurent.
La vente des surplus
d'électricité
M. Leduc (Saint-Laurent): M. Coulombe, on sait qu'actuellement on
a de grands excédents, que la solution, ce serait d'exporter. Ce serait
surtout d'exporter l'électricité ferme. En tenant pour acquis que
le gouvernement actuel entend séparer le Québec du Canada, c'est
d'ailleurs dans son programme, ce n'est pas un mystère...
M. Rodrigue: On peut faire séparer les
Américains!
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est l'article 1 de son programme.
Est-ce que vous ne croyez pas, surtout si on veut vendre
l'électricité ferme... Or, je pense que c'est peut-être
plus important comme acheteur de négocier des achats de vente ferme que
de l'électricité excédentaire. Est-ce que vous ne croyez
pas que cela peut être un handicap très sérieux pour
négocier des ententes, négocier la vente
d'électricité dans ces conditions-là? Surtout, je suis
très sceptique quand on parle... Tantôt on a parlé de
dépendance; alors, cela ressemble quasiment à
indépendance! Alors, on a parlé de dépendance. Les
États-Unis ne sont peut-être pas tellement
intéressés à négocier avec une province dont on ne
sait pas quelles seront les conditions de brisure, dont on ne connaît
même pas la monnaie. On ne sait pas quelle sorte de monnaie on aura. Je
me demande si cela ne va pas être un handicap très sérieux
pour négocier la vente de ces surplus d'électricité.
M. Coulombe: M. le Président...
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, c'est une question que j'adresse
à M. Coulombe.
M. Coulombe: ...vous allez comprendre pourquoi on n'a pas
réussi à faire le tableau de tantôt à cause de la
complexité du sujet. Si on avait introduit cette variable-là, on
en aurait pour longtemps à faire le tableau.
M. Rodrigue: ...une question cousue de fil rouge!
M. Coulombe: Je pense que c'est une question qui s'adresse... Si
on introduit le statut politique du Québec dans l'équation des
exportations, vraiment c'est un sujet qui s'adresse plus aux gouvernements
qu'à HydroQuébec.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...qui s'occupe justement de ces
exportations-là. Peut-être qu'il pourrait nous dire ce qu'il en
pense.
M. Rodrigue: II en pense sans doute la même chose.
Une voix: Je pense qu'ils ne veulent pas de réponse.
M. Rodrigue: ...qui pendent après votre question.
M. Tremblay: ...nous aussi.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non. C'est une question qu'on pense
très pertinente. On a de la difficulté à vendre, surtout
de l'électricité ferme. Je pense que peut-être c'est plus
facile, c'est moins dépendant si on achète de
l'électricité excédentaire que de
l'électricité ferme. Surtout qu'on oblige... On veut absolument
négocier avec deux provinces. Pourquoi l'Ontario alors que, si je
comprends bien, l'Ontario ne possède pas les ressources hydrauliques
qu'on possède?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. Lafond?
À qui s'adresse la question? M. Lafond.
M. Lafond (Georges): M. le Président, j'aimerais dire que
les relations entre le Québec, par le biais d'Hydro-Québec, et
les réseaux américains sont excellentes et que les kilowattheures
qui sont en demande, d'une part, et offerts, d'autre part, n'ont pas de couleur
politique. Alors, que ce soit à gauche ou à droite, ils sont
aussi éclairants, aussi réchauffants.
Dans un troisième temps, je dirais que, quoi qu'il arrive
à la devise du Québec, les acheteurs paieront toujours en devises
américaines. -■
À ce moment-ci, je pense qu'Hydro-Québec est bien
placée; elle connaît tous ses marchés, elle n'a pas
laissé une pierre non
retournée. Le député d'Outremont faisait allusion
au tsar de l'énergie dans sa première question. Celui-ci me
rendait visite il y a trois semaines. Il voit la position d'Hydro-Québec
comme excellente et il reconnaît qu'il y a un surplus au sud de la
frontière, particulièrement dans les États de la
Nouvelle-Angleterre et de New York.
En termes de rencontres avec les Américains, évidemment,
Hydro-Québec n'en parle pas tout le temps, mais au cours de
l'été, nous avons reçu, à la Baie James, les
principaux interlocuteurs, tant du marché de New York que du
marché de la Nouvelle-Angleterre: les commissaires responsables des
différents États, les gens du Parlement, de la Chambre haute ou
du Congrès, en particulier tous les maires des municipalités
situées le long de la ligne Marcy South aux États-Unis. Je
feuilletais rapidement tantôt en me rappelant avec beaucoup de plaisir
une liste d'articles de journaux et il y en a 22 qui sont tous positifs,
articles qui ont été publiés aux États-Unis. Alors,
de façon très discrète, mais je pense extrêmement
efficace, Hydro-Québec a très confiance de percer ces
marchés, mais encore une fois en respectant l'équilibre des
besoins. Quant à l'avenir, nous sommes optimistes et nous avons
actuellement comme électriciens, tant sur les plans domestique que de
l'exportation, la réputation d'être l'entreprise canadienne qui a
le plus de dynamisme.
Ceci dit, M. le Président, je pense que je n'ai pas d'autres
commerciaux à faire ce soir et, quant au tableau auquel M. Coulombe
faisait allusion avec beaucoup d'à-propos, je pourrais vous donner
brièvement une idée de ce que cela peut signifier. Une
transaction, par exemple, avec NEEPOOL qui montre que, lorsqu'il y a une
construction de ligne - malheureusement, cela n'est pas en couleur, mais il y a
six États d'impliqués -cela demande des autorisations
après audiences publiques; l'autorisation du département de
l'énergie américain, avec beaucoup d'interventions, et cette
problématique ne saurait être oubliée. C'est l'autre
côté de la clôture dans le cas de NEEPOOL.
Dans le cas du Québec, le tableau est encore passablement plus
compliqué et chacun des cercles, carrés, triangles ou rectangles
représente une autorité, que ce soit l'Office national de
l'énergie, que ce soient les ministères du Québec de
l'environnement ou de l'énergie, que ce soit le conseil d'administration
d'Hydro-Québec. Alors, toute négociation implique un processus
passablement long d'autorisations, de négociations, d'explications et
d'audiences publiques. Dans cette optique, c'est une chose que nous
connaissons, c'est une chose dont nous nous occupons avec beaucoup d'efforts et
de patience, et nous allons livrer un produit.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): ...
M. Leduc (Saint-Laurent): M. Coulombe, vous avez mentionné
tantôt que, quand vous investissez, cela a un effet direct sur le
coût de l'électricité.
Or, si je comprends bien, vous avez également indiqué que
le gouvernement vous avait forcé ou, enfin, vous avait demandé
d'augmenter vos investissements de 400 000 000 $, je pense.
Est-ce qu'on peut déduire dès lors qu'il s'agit d'une
véritable taxe, qu'on facture une taxe indirecte ou, dirais-je,
peut-être directe, aux Québécois?
M. Coulombe: En fait, le gouvernement n'a pas exigé, il
nous a tout simplement demandé - et c'était d'ailleurs rendu
public -s'il y avait possibilité d'augmenter les investissements pour
favoriser la relance. On a examiné en profondeur notre plan
d'équipement. Sur les équipements de production, on a eu de
longues discussions avec le gouvernement. À partir de ces tableaux, de
toutes les discussions et de tous les chiffres, on a dit: ce n'est
peut-être pas la voie qu'il faut prendre. Et il y a eu un accord unanime
avec le gouvernement là-dessus.
Dans d'autres secteurs, comme la réfection de centrales,
c'étaient des programmes prévus qui devaient se faire. La
centrale Les Cèdres a combien d'années?
M. Bourbeau (Joseph): 1915.
M. Coulombe: 1915. Elle était due pour une
réfection tôt ou tard, et plutôt tôt que tard. Donc,
c'étaient des programmes prévus. Mais on s'est dit: Vu qu'on a
des surplus, vu que le gouvernement nous demande de participer à la
relance en augmentant les investissements, donc l'emploi, voici le genre de
projets qu'on peut avancer dans le temps. Car, de toute façon, il va
falloir les faire et c'est probablement le meilleur temps possible puisque,
comme on a des surplus, au lieu d'arrêter la centrale partie par partie
pour pouvoir profiter de la production, on peut avoir une approche qui est
mieux organisée, de façon à ne pas perdre de revenus.
Donc, ce sont des investissements - et le devancement de la
cinquième ligne c'est la même chose; la cinquième ligne
devait se terminer, mais pour accélérer la création
d'emplois et le processus économique, on l'a devancée - utiles,
nécessaires, qui devaient se faire. Et on les a devancés dans le
temps pour ajouter cet input à la relance. C'est exactement le contexte
dans lequel cela s'est passé en termes d'investissements.
M. Leduc (Saint-Laurent): Si on ne vous avait pas demandé
la dernière tranche d'investissements - que vous avez
évaluée tantôt à 400 000 000 $, je pense...
M. Coulombe: 240 000 000 $ plus 100 000 000 $.
M. Leduc (Saint-Laurent): ...vous auriez peut-être pu
encore diminuer le tarif?
M. Coulombe: Non. Parce que l'impact comme je l'ai
expliqué tantôt - des investissements se fait sentir à
moyen terme. En d'autres mots, c'est évident que si, au lieu de
dépenser 3 000 000 000 $ par année on en dépense 4 000 000
000 $ pendant quatre ans, lorsque ces équipements viennent en
exploitation, cela a des impacts précis sur les coûts
d'exploitation de l'entreprise. C'est là qu'il faut avoir les revenus
nécessaires pour compenser cette augmentation de dépenses. Mais
lorsque l'investissement se fait, surtout lorsqu'on parle de 400 000 000 $ -
évidemment le premier 100 000 000 $ c'est 1984, mais les 240 000 000 $
cela est sur deux ou trois ans - lorsqu'on parle de ces montants par rapport
à des investissements totaux de l'ordre de 5 000 000 000 $ - ce sont 5
000 000 000 $ pour les trois prochaines années - évidemment on ne
parle pas de sommes qui ont une influence à très court terme sur
les tarifs. Cela n'a pas eu d'impact sur le 3,4%. La preuve est très
simple à faire. C'est que dans le plan du mois de septembre, on a
proposé 3,4% pour 12 mois et on va avoir 3,4% sur 11 mois, si cela est
accepté. Alors, en dépit de cette augmentation on a - en
resserrant nos coûts d'exploitation - accepté de relever le
défi, de faire notre année avec des revenus de 11 mois
plutôt que 12 mois. Et on pense qu'on va passer au travers.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quand on regarde la tarification,
particulièrement dans le domestique, on voit que par les
premières tranches, l'augmentation est élevée, elle est de
5%, je crois, et pour les dernières tranches, elle est nulle. Est-ce
qu'à ce moment, ce n'est pas une tarification antisociale, est-ce que
vous n'avez pas l'impression qu'on taxe plus les démunis, les petits
que...
M. Coulombe: Je pense que c'est une excellente question. Cela a
été mentionné au début de la commission. Je pense
qu'il faudrait être très clair dans cette espèce de
symétrie qu'on semble faire en disant que les petits consommateurs sont
plus pénalisés que d'autres. Alors, M. Claude Boivin, qui est
vice-président à la commercialisation, peut peut-être
donner plus de détails là-dessus.
M. Boivin (Claude): Tout d'abord, il faudrait peut-être
revenir à la structure même du tarif domestique et remarquer que
la première tranche de 900 kilowattheures par mois du tarif domestique,
malgré la hausse de 5,5%, demeure à 15% meilleur marché
que la deuxième tranche. C'est-à-dire que la première
tranche, qui sert aux besoins fondamentaux, aux tarifs proposés pour
1984, va se vendre 0,0306 $, alors que la tranche de chauffage se vend 0,0362 $
soit 15,5% plus cher.
Deuxièmement, concernant la notion de petits consommateurs, il ne
faut pas confondre petits consommateurs et économiquement faibles. Il y
a présentement, au Québec, environ 1 000 000, près de 50%
du parc de logements qui est chauffé à
l'électricité. Il y a une très grande proportion de
consommateurs qui chauffent à l'électricité qui sont de
gros consommateurs mais qui ne sont pas nécessairement, en fait, des
gens qui sont économiquement faibles ou gagnent de petits salaires. (23
h 15)
À titre d'exemple, on peut prendre un bungalow qui serait
beaucoup plus grand qu'un bungalow moyen, soit 1500 ou 1800 pieds
carrés, et dans lequel il y a un chauffe-eau et un système de
chauffage au mazout, ou encore un chauffe-eau et un système de chauffage
au gaz. Bien qu'une maison comme celle-là puisse être
équipée de tous les appareils électroménagers
imaginables, c'est un petit consommateur d'électricité dont la
consommation ne dépassera probablement pas 400 ou un gros maximum de 600
kilowattheures par mois. Il y en a énormément dans la même
situation.
M. Leduc (Saint-Laurent): J'ai l'impression, je comprends
très bien qu'on taxe un peu plus les démunis, je comprends cela.
En ce qui concerne les excédents...
M. Boivin: Si on prend, par exemple, le parc de HLM qui a
été construit au Québec au cours des dix ou quinze
dernières années, je dirais que ce parc est à 95%
chauffé à l'électricité. Donc, ce sont tous de gros
consommateurs d'électricité et ils seront moins taxés, en
fait, que le petit consommateur d'électricité qui, comme je
disais, n'est pas nécessairement un économiquement faible.
En d'autres mots, on ne peut pas établir une relation directe
entre le revenu moyen par ménage et la consommation
d'électricité. Tous les sondages qu'on fait nous indiquent qu'il
n'y a pas de relation entre la consommation d'électricité par
famille et le revenu par famille.
M. Leduc (Saint-Laurent): Ne croyez-vous pas que, où il
n'y a pas de chauffage électrique, habituellement, c'est dans les
maisons où vous pouvez peut-être avoir une fournaise dans
le centre de certains logements où habitent des gens démunis?
M. Boivin: À titre d'exemple, dans le parc de logements
qui demeurent chauffés à une source autre que
l'électricité - environ 1 000 000 de logements - on sait qu'il y
a encore au moins 375 000 unités dans ce parc qui possèdent un
système de chauffage à air chaud au mazout. Il y en a environ 250
000 qui possèdent un système de chauffage au mazout à
l'eau chaude. Alors, ce ne sont pas des fournaises centrales de plancher. Il
reste un certain nombre de fournaises de plancher, on ne peut pas éviter
cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Quant aux excédents, j'ai lu
dans un article - j'ignore si l'information était bonne ou mauvaise -
qu'il y aurait l'an prochain 25% d'excédent en électricité
et qu'environ 400 000 000 $ d'électricité passerait par-dessus
les barrages.
Si on regarde à la page 33, pour 1984 les prévisions en
énergie disponible sont de 167 térawattheures. Si on regarde
l'excédent net, c'est 25. Cela voudrait donc dire qu'il y aurait un
excédent de 15%. Est-ce exact?
M. Coulombe: C'est vrai.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, ce n'est pas 25%.
M. Coulombe: Non.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, l'information que vous donniez
n'était pas bonne. Est-ce que c'était exact les quelque 420 000
000 $?
M. Coulombe: Bien, cela dépend du prix que vous mettez sur
ces 25 térawattheures.
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, la mention des quelque 420 000
000 $ qui passaient par-dessus le barrage...
M. Coulombe: Si vous multipliez cela année après
année, cela peut monter à ces chiffres-là.
M. Leduc (Saint-Laurent): Les excédents réels
seraient de 25 térawattheures, ce qui représenterait environ 15%
d'excédent. Cela va. Merci.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
ministre, ensuite, M. le député de Beauharnois. M. le
ministre.
M. Duhaime: J'aurais seulement une question
d'éclaircissement à la suite des explications de M. Boivin quant
aux petits consommateurs. Vous avez bien distingué que ce n'était
pas nécessairement les économiquement faibles. Vous
évaluez le groupe appelé "petits consommateurs",
c'est-à-dire dans la première tranche de 900 kilowattheures par
mois. Avec la proposition tarifaire pour les abonnés au tarif domestique
mais en cents par mois, cela représente combien, en moyenne,
d'augmentation dans la catégorie sous la première tranche de 900
kilowattheures.
M. Boivin: Je vous référerais au mémoire
tarifaire, au tableau de la page 6, qui donne l'effet du tarif D proposé
pour des consommations mensuelles types et vous voyez effectivement que la
hausse mensuelle de la facture de l'abonné domestique va varier de 0,55
$ par mois pour l'abonné qui consomme 100 kilowattheures à 1,83 $
comme étant un maximum pour l'abonné qui consomme 900
kilowattheures par mois et plus. Le gel de la dernière tranche fait que
la consommation additionnelle ne subit pas de hausse; donc, la hausse maximale
de la facture de l'abonné domestique, pour une période d'un mois,
sera de 1,83 $ par mois.
M. Duhaime: C'est pour une consommation qui pourrait aller
jusqu'à 5000 kilowattheures. Mais si ça s'arrête
à...
M. Boivin: C'est exact, même au-delà de 5000
kilowattheures parce que, même si la consommation augmente, à
moins que ce soit un abonné domestique qui ait une charge
raccordée d'au-delà de 50 kilowatts, sa hausse ne peut pas
dépasser 1,83 $ par mois à cause du gel de la dernière
tranche.
M. Duhaime: Je ne trouve pas cela si antisocial, si vous voulez
avoir mon avis.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Beauharnois.
M. Lavigne: Quand on regarde l'énoncé de politique
dans "Bâtir le Québec", on voit qu'on veut plutôt importer
des emplois qu'exporter de l'électricité. Je pense que,
globablement, on est d'accord avec Hydro-Québec là-dessus.
Par ailleurs, pour pouvoir importer des emplois, il faut avoir de bons
prix pour ce qui est de la vente de l'électricité afin que les
compagnies viennent s'installer au Québec.
Si on regarde la différence des taux qui existaient entre le
Québec et l'Ontario, il y a quelques années, j'ai l'impression
que les écarts étaient plus larges qu'ils ne le sont maintenant.
Est-ce que cela va continuer à se rétrécir ou si vous
prévoyez que l'écart va plutôt s'élargir, comme il
l'était dans le passé? Je pense que c'est très important,
c'est majeur. Les compagnies seront intéressées à venir
s'installer au Québec dans la mesure - surtout les grosses
consommatrices d'électricité - où il y aura
économie importante à faire; sinon, elles pourront
peut-être aller voir ailleurs. Je ne sais si vous avez une réponse
là-dessus, M. Coulombe.
M. Coulombe: L'écart - on peut avoir des chiffres
précis - d'il y a quelques années, s'est rétréci
dans les trois ou quatre dernières années. Maintenant, si on
regarde ce qui se passe en 1984, Hydro-Ontario a demandé 9%
d'augmentation de tarifs et la décision finale a été de
7,8%, je crois.
Alors, évidemment, l'écart recommence à
s'élargir entre l'Ontario et le Québec. On ne connaît pas
les stratégies intimes d'Hydro-Ontario mais, de l'extérieur
évidemment, sans avoir d'informations confidentielles, on peut, sans, je
crois, se tromper beaucoup, affirmer que la tendance à
l'élargissement de cet écart va se poursuivre. Si on regarde la
situation financière d'Hydro-Ontario et la situation financière
d'Hydro-Québec, à moins de catastrophe ou de secret qu'on ignore,
on est à peu près persuadés, nous, à
Hydro-Québec, que l'écart va s'élargir dans les prochaines
années.
M. Bourbeau (Joseph): Je vous ferai remarquer qu'en 1975 ou en
1976, HydroOntario avait augmenté ses tarifs de 33% et c'est là
que l'écart était devenu assez grand; évidemment,
après cela, elle a eu des augmentations de tarifs qui étaient
moindres. On voit ce rétrécissement mais, comme l'a dit M.
Coulombe, dans les prochaines années, sans être un devin, il se
pourrait fort bien qu'on ait un écart beaucoup plus accentué.
La vente aux entreprises
M. Lavigne: C'est à souhaiter parce que c'est un facteur
important. Vous avez, quand vous avez présenté votre
mémoire, au tout début, parlé d'une politique
éventuelle, au niveau des contrats signés avec les compagnies,
qui pourrait, au lieu d'être répétitive tous les ans, tous
les deux ans, essayer de projeter dans l'avenir, une période un peu plus
longue. Vous avez même parlé de dix ans, je pense. Est-ce quelque
chose d'imminent, cela s'en vient-il bientôt, ou si, avant de prendre
cette décision, vous prévoyez que cela pourrait être encore
très long?
M. Coulombe: C'est une politique qui est en élaboration,
à l'heure actuelle, et en discussion avec le gouvernement. On n'a pas eu
l'occasion de la présenter encore, parce qu'elle n'est pas tout à
fait mise au point. On ne l'a pas encore présentée au conseil
d'administration, mais l'idée centrale c'est qu'on se dit qu'un des
problèmes des industries, qui nous a été mentionné
par les industriels, c'est l'espèce de prévisions qu'ils font
quand une industrie regarde les dix prochaines années. Ils se disent:
avec les ventes que nous faisons, avec les revenus que nous avons et les
dépenses, nous avons un investissement que nous pouvons prévoir,
si nous faisons cet investissement, les coûts de l'énergie, dans
la mesure où ils sont importants dans ces coûts de production,
vont avoir une influence considérable. Quelles sortes de
prévisions pouvons-nous faire là-dessus? Et cela, ce sont les
industriels eux-mêmes qui nous l'ont mentionné. De là
l'idée d'avoir un programme de stabilisation qu'on appellerait, si
jamais il voit le jour, programme de stabilisation tarifaire, qui aurait comme
caractéristique de faire partager les risques de l'évolution des
prix entre Hydro et les compagnies en question. Le risque serait le suivant:
au-delà d'un certain plafond, on absorbe le risque, en
deçà d'un certain plancher, ils absorbent le risque.
Évidemment, il reste beaucoup de discussions à faire. On
veut en discuter avec les industries. On veut continuer les discussions
là-dessus. Il faut répondre à des questions comme
celles-ci: quel devrait être le seuil d'utilisation
d'électricité? Cela n'est pas encore tout à fait clair. La
durée de l'ordre de dix ans, est-ce que cela fonctionne? et ainsi de
suite. C'est un programme qui serait nouveau et qui aurait comme objectif de
permettre aux industries existantes du Québec, et aux nouvelles
évidemment, d'avoir une meilleure planification de leurs
investissements, une plus grande certitude.
Pourquoi on peut avancer un tel programme ou faire l'hypothèse
d'un tel programme? Cela se réfère à l'ensemble de la
situation d'Hydro-Québec. L'actionnaire d'Hydro-Québec et
Hydro-Québec étant en position de contrôler les coûts
de production, en très grande partie, parce que tout est
contrôlé au Québec, tant l'exploration que la production,
il est évident que les variables qui influencent le prix à long
terme sont plus connues, même s'il reste encore une marge d'inconnu.
C'est évident qu'on ne connaît pas les taux d'intérêt
des dix prochaines années, et ainsi de suite.
Donc il y a des marges d'incertitude, mais, dans le cas de
l'hydroélectricité au Québec, cette marge d'incertitude
est beaucoup plus réduite que dans d'autres formes d'énergie et
c'est ce qui nous permet d'envisager ce genre de programme. Quand va-t-il
être accepté? Ou va-t-il être structuré pour
être en application? On ne le sait pas encore. Cela va dépendre
des discussions qui sont en cours. On espère en arriver à un
concept qui puisse satisfaire l'élément de prudence qu'Hydro
devra avoir, parce qu'on parle d'une période assez longue, mais aussi
satisfaire les besoins des industriels dans leur planification
financière.
La centrale de Beauharnois
M. Lavigne: Merci. Vous avez parlé tout à l'heure
de la réfection ou de la réparation de la centrale de
Beauharnois. Evidemment, étant donné que cela se situe dans mon
comté, cela a piqué ma curiosité. Je voudrais savoir si
c'est quelque chose qui peut durer longtemps. S'agit-il de travaux d'envergure,
de sommes extravagantes que vous allez investir dans la centrale de
Beauharnois? Est-ce que la centrale - on sait que c'est l'une des plus
vieilles, je pense, au Québec - est usée, endommagée?
J'aimerais que quelqu'un puisse me donner quelques détails
là-dessus, pour mon intérêt et celui de tous les gens du
comté qui vivent un peu autour de cette centrale.
M. Bourbeau (Joseph): Le vice-président à
l'ingénierie construction.
M. Hamel (Laurent): En fait, on a mentionné surtout le
complexe Beauharnois-Les Cèdres. Alors, à Beauharnois, on pense
peut-être équiper le 37ème groupe. On sait qu'il y a un
groupe qui n'est pas encore équipé à Beauharnois. Il est
possible d'équiper le 37ème groupe. C'est une facette du
problème. De l'autre côté, il y a la réparation, la
mise à jour de la centrale Les Cèdres. Il est possible qu'on
change certains groupes de la centrale Les Cèdres pour des groupes plus
modernes qui pourraient générer un peu plus de puissance, avec un
design, disons optimisé. (23 h 30)
M. Lavigne: Quand vous parlez du 37ème groupe, cela
consiste en quoi?
M. Hamel: Dans la centrale de Beauharnois, actuellement, il y a
36 groupes qui sont équipés. C'est-à-dire que les turbines
et les générateurs sont en place. Il y a un 37ème groupe
où le puits et les assises en béton sont en place. Par contre,
l'unité n'a jamais été équipée. On n'a
jamais installé de turbine ou d'alternateur dans le puits. Alors, il y a
une possibilité d'équiper le 37ème groupe et de produire
de l'énergie électrique.
M. Lavigne: Les travaux peuvent-ils durer longtemps?
M. Hamel: Disons que pour équiper un puits en place, dans
la centrale, on peut parler à peu près de 18 mois.
M. Lavigne: Vous augmentez le potentiel de combien en mettant un
groupe de plus?
M. Hamel: À Beauharnois, on parle d'environ 25
mégawatts.
M. Lavigne: D'accord. J'ai une dernière question. On a
beaucoup parlé depuis le début de la capacité de produire
de l'électricité avec l'équipement que nous avons
déjà, de la capacité d'en absorber une grande partie et de
la capacité d'en vendre aussi à l'étranger. La
démonstration a été faite à l'endroit et à
l'envers, sous toutes ses coutures, à partir des différentes
questions qui vous ont été posées. Ce que l'on doit
comprendre, et bien comprendre, c'est que pour le moment, cela ne sert à
rien de vouloir s'acharner à construire de nouveaux équipements,
parce que nous avons les équipements requis pour satisfaire à la
demande et même pleinement à la demande. Je ne sais pas comment on
pourrait qualifier la personne qui, en dépit de ces informations,
continuerait à prétendre que ce serait une bonne chose pour
Hydro-Québec de continuer à fabriquer des équipements.
C'est plutôt un commentaire qu'une question. Je ne sais pas si
vous voulez réagir là-dessus, mais qu'est-ce que cela
amènerait comme conséquence de passer outre aux recommandations
ou aux explications que vous nous avez données et d'y aller à
fond de train dans de nouveaux investissements au niveau de l'équipement
plutôt que d'y aller au niveau du transport de
l'électricité ou tel programme que vous voulez mettre de
l'avant?
M. Bourbeau (Joseph): Évidemment, si on s'engageait dans
une nouvelle construction, alors c'est la ligne noire qui est à 165 000
000 000 de kilowattheures qui monterait. Cela voudrait dire qu'on aurait
beaucoup plus de surplus. Or, on a déjà des surplus. Comme vous
voyez, on n'est pas capable de vendre tous les surplus.
Pour nous, ce n'est pas impérieux de nous lancer dans de
nouvelles constructions au moment présent.
M. Lavigne: Je vous remercie. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Saguenay.
Manic 5
M. Maltais: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
à M. Coulombe. Tout à l'heure, vous avez bien
spécifié que dans le cadre du plan de relance, vous avez
devancé certaines rénovations de centrales. Ce qui par le fait
même a fait reculer certaines constructions qui étaient
déjà en marche. Particulièrement, le député
de Beauharnois se vante de refaire la centrale de Beauharnois, mais cela ferme
Manic 5 PA.
Il y a une chose qui me chicote, c'est que vous dites que Manic 5 PA est
une centrale de pointe, ce qui est tout à fait
normal, je pense. C'est un équipement supplémentaire, mais
ce qui me chichote, c'est que lorsque vous faites la reconstruction des autres
centrales, vous agrandissez votre volume chaque fois. Vous avez
déjà un surplus. Vous arrêtez des constructions parce que
vous avez déjà un surplus, mais dans le programme de relance, en
faisant la rénovation des autres centrales, vous agrandissez votre
volume quand même. Comment expliquez-vous cet écart?
M. Coulombe: En fait, dans les chiffres, ce sont deux
problèmes complètement différents. Lorsqu'on parle de
Beauharnois, la puissance totale de Beauharnois, c'est combien?
M. Bourbeau (Joseph): 1530 mégawatts.
M. Coulombe: On l'augmente de 25 mégawatts. Donc, c'est
vraiment au niveau de travaux très restreints, très
limités. Lorsqu'on répare la centrale Les Cèdres, ce n'est
pas un impératif d'augmenter la production, c'est tout simplement que si
on ne veut pas qu'elle s'écroule, il faut faire quelque chose. Ce
n'était pas urgent en termes de mois, mais on devait le faire d'ici
à quelque temps. Donc, on le fait. Cela n'augmente pas
nécessairement. Si les équipements sont plus efficaces, on peut
peut-être aller chercher des mégawatts de plus dans ces
projets.
Le problème de Manic 5 est totalement différent. C'est une
énergie de pointe dont on n'a pas besoin avant plusieurs années;
on tombe ici dans des investissements qui sont beaucoup plus
considérables. De la même façon que je vous ai dit
tantôt que, l'année dernière, on avait examiné la
possibilité de retarder LG 4 en même temps, on a fait
l'étude sur Manic 5. LG 4, on ne l'a pas retardé parce que ce
n'était économiquement pas rentable, mais, dans le cas de Manic
5, c'était économiquement rentable de retarder les projets parce
que les travaux étaient beaucoup moins avancés.
Il faut penser aussi que, dans le cas de Manic 5, toute activité
n'est pas arrêtée. On a fait des ententes avec les fabricants, qui
continuent quand même à fabriquer, mais selon un rythme
différent. Cela leur permet de mieux étaler leur production. Il y
a beaucoup d'équipements qui sont en construction à l'heure
actuelle, qui sont en usine, il y a de l'emploi qui est préservé.
On a tout fait aussi pour diminuer l'impact de ce genre de décision qui,
économiquement, était la meilleure, mais on a tout simplement
fait pour étaler les conséquences. La raison pour laquelle Manic
5 a été retardée, c'est qu'on n'en a tout simplement pas
besoin et cela aurait ajouté au fardeau financier de l'entreprise
d'avoir un équipement qui, pour le moment, ne serait pas utilisé,
mais se serait ajouté aux 7 000 000 000 $ d'équipements qui
venaient du côté de l'exploitation. Cela aurait fait un fardeau et
un coût à payer qui se seraient finalement
répercutés sur les tarifs.
M. Maltais: D'accord. Est-ce que vous pouvez me dire
approximativement à quel pourcentage de travaux vous êtes rendus
à Manic 5? Je ne veux pas rien de...
M. Coulombe: La proportion des travaux de Manic 5?
M. Bourbeau (Joseph): Entre 15% et 20%.
M. Maltais: Le pourcentage des travaux lorsque vous avez
arrêté le 15 de...
M. Hamel: Actuellement, à Manic 5, je crois que c'est de
l'ordre de 179 000 000 $ à la fin de 1983...
M. Maltais: ...sur 1 122 000 000 $?
M. Hamel: Sur un peu plus de 1 000 000 000 $.
M. Maltais: Voici ma question. Vous avez commencé Manic 5
il y a environ deux ans, si je ne me trompe, n'est-ce pas? Vous avez
planifié depuis cinq ans. C'est quand même un investissement de 1
122 000 000 $. J'ai de la difficulté à comprendre que, du jour au
lendemain, vous vous soyez rendu compte que vous n'en aviez plus besoin. Vous
aviez planifié un investissement de 1 000 000 000 $.
Comment pouvez-vous m'expliquer cela?
M. Coulombe: Devant la baisse brusque de la consommation, des
modifications dans les prévisions de la demande...
M. Maltais: Vous comprenez, M. le ministre?
M. Coulombe: On était en face de deux choix, soit de
continuer à avoir certains équipements qui n'étaient pas
rentables, soit de limiter les dépenses là-dessus, d'où
l'étude économique qui a été faite l'an
passé et dont la conclusion montrait que c'était plus rentable de
retarder ce projet que de le continuer. Sur le type d'analyse qui a
été fait - M. Hamel ou M. Dubé pourrait donner plus de
détails - on est très clair là-dessus, la conclusion
était qu'il était plus rentable pour l'entreprise, et quand on
dit cela, c'est dire aussi que c'est immédiatement plus rentable pour
les consommateurs d'électricité.
M. Hamel: J'ai peut-être un petit point à ajouter
là-dessus. Lorsqu'on s'est engagé
sur Manic 5, au tout début, la mise en service devait se faire en
1986. Le montant total pour le projet était de 767 000 000 $. J'ai
lancé un chiffre tout à l'heure, mais j'ai un chiffre un peu plus
précis: au 31 décembre 1983, on aura dépensé 230
000 000 $. Lorsqu'on a décidé de retarder la mise en service de
1986 à 1989, le coût, incluant les intérêts, est
passé de 768 000 000 $ à 1 156 000 000 $.
M. Maltais: Dernière question, M. le Président.
Dans un mémoire remis à la commission de l'énergie, la FTQ
disait qu'il en coûterait presque 300 000 000 $ à 350 000 000 $
pour retarder Manic 5 PA, est-ce que c'est vrai?
M. Coulombe: C'est exact.
M. Maltais: C'est vrai. Ce qui fait la différence entre le
coût de 700 000 000 $ prévu et les 1 122 000 000 $...
M. Coulombe: C'est cela.
M. Maltais: Est-ce que c'est correct?
M. Coulombe: Les chiffres sont exacts. C'était la base des
chiffres pour l'étude de rentabilité. Ce sont ces
chiffres-là qui ont servi.
M. Maltais: Alors, le report de trois ans et demi coûte en
réalité à Hydro-Québec 350 000 000 $.
M. Coulombe: Là, il faudrait... M. Maltais:
Pardon?
M. Coulombe: Là, c'est parce qu'il faudrait expliquer la
méthode. Il faudrait peut-être prendre trois minutes pour
expliquer la méthode exacte dont on se sert dans ces cas-là.
M. Bourbeau (Joseph): C'est à cause des
intérêts chargés durant la construction qui sont
chargés au projet lui-même. Mais le fait de différer de
trois ou quatre ans fait qu'on ajoute au coût-capital...
M. Coulombe: Oui. Mais la question de base, c'est: En quoi est-ce
rentable pour ajouter 300 000 000 $? C'est cela, en fait, la question que vous
posez?
M. Maltais: En fait, moi, je refais un petit calcul: 300 000 000
$ sur 700 000 000 $, c'est quand même, grosso modo, de l'ordre de 35%, ce
qui veut dire que cela coûtera, une fois réalisé en 1993 ou
je ne sais trop quand, 350 000 000 $ de plus. C'est ça?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M.
Dubé.
M. Dubé: En fait, le facteur le plus important dans
l'accroissement des coûts, c'est de loin l'inflation. Et quand on reporte
une mise en service de 1986 à 1992 et 1993, il y a quand même
là six ou sept ans d'inflation à 8% qui viennent drôlement
influencer le coût global de la centrale. Cependant, à l'inverse,
on doit considérer que le coût de l'argent croît à
11% par année. Donc, c'est vraiment la différence entre les deux,
les 3%, qui a justifié l'arrêt des travaux.
M. Maltais: D'accord. Maintenant, tout à l'heure, M.
Coulombe, vous avez dit que Manic 5 PA était une centrale de pointe.
Advenant que vous ayez des besoins plus pressants d'ici à un an, est-ce
qu'il est possible que vous le réexaminiez à nouveau et que vous
accélériez la construction?
M. Coulombe: Bon. Dans la structure actuelle du plan
d'équipement tel que cela vous est présenté
aujourd'hui...
M. Maltais: Il est le troisième dans la liste.
M. Coulombe: ...s'il y avait un projet de pointe à faire,
c'est le premier qui serait considéré et donc, s'il y a une
accélération à ce niveau des besoins d'équipement,
ce serait le premier qui serait devancé.
M. Maltais: Merci.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Nicolet.
Une voix: Oui, je suis d'accord avec vous.
Vente aux États-Unis et emploi
M. Beaumier: Oui, M. le Président, toujours dans l'optique
d'un marché potentiel aux États-Unis, qui pourrait être,
selon différentes évaluations, de quelques milliers de
mégawatts. Vous avez déjà expliqué tantôt les
contraintes qu'il y avait à ce marché-là; entre autres, il
y a la concurrence, bien sûr, des autres réseaux canadiens, il y a
des capacités de transport, des interconnexions, il y a des aspects
financiers, il y a des contraintes techniques, etc. Et vous avez aussi
signalé cette position américaine - je ne dirais pas
mentalité, mais position américaine - qui est de ne pas se mettre
dans une situation de dépendance énergétique.
Il y a - je voyais cela dans la revue Finance du 5 septembre 1983 -
quelqu'un que tout le monde connaît qui signalait qu'il y
aurait certainement moyen, à ce moment-là, d'amener les
Américains à financer eux-mêmes la construction de nos
centrales et que dans 30 ans, nous les récupérerions. Et c'est
là que cela pourrait justifier des développements
d'équipement.
Est-ce que si la première hypothèse, qui était que
nous ne pouvons tout de même pas vendre en forçant finalement les
Américains à acheter ou se mettre dans une situation de surplus
qui fait que les coûts auxquels on pourrait vendre notre
électricité seraient en bas de nos coûts de production...
Est-ce que l'hypothèse de dire, par exemple, aux Américains: Vous
financez tout et tout vous avez l'usufruit, comme on pourrait dire, pendant 30
ans, c'est une chose qui pourrait être agréée?
M. Coulombe: II y a une chose qui a été dite et je
pense qu'il faut toujours se la rappeler, c'est que ces
marchés-là évoluent. Je pense qu'il n'y a personne
aujourd'hui qui peut dire que cette hypothèse-là est radicalement
fausse ou radicalement bonne. Tout ce que l'on peut dire à l'heure
actuelle, c'est que ce n'est pas l'objet de nos discussions avec nos clients
américains. Maintenant, à cela, quelqu'un pourra dire: Bien,
pourquoi ce n'est pas l'objet de discussion? C'est qu'on sait - et cela a
été mentionné par M. Lafond tantôt - que ces deux
marchés, New-York et NEEPOOL, n'ont pas besoin de puissance avant 1995.
On pense que l'évolution de la mise en marché dans ce secteur...
(23 h 45)
Historiquement, elle a procédé par étapes et elle
va continuer de procéder par étapes. L'étape à
venir étant de commencer l'excédentaire, raffermir cela en termes
d'énergie pour passer à la troisième étape qui est
celle de vendre de la puissance et de l'énergie. C'est
l'hypothèse de base qui a le mérite d'avoir été
vérifiée. C'est exactement ce qui est arrivé dans les
marchés - M. Bourbeau l'a expliqué tantôt -à partir
de 1976, d'interruptibles petits contrats qui se sont élargis. Donc,
c'est l'histoire qui est vécue par Hydro-Québec depuis de
nombreuses années. C'est exactement cela, c'est la traversée
graduelle de ces étapes.
Maintenant, il n'y a rien qui nous dit que dans un changement de
conjoncture ou dans un changement de contexte énergétique, dans
une crise au Moyen-Orient, dans tout ce que vous voudrez, toutes les
hypothèses que vous pouvez imaginer, la situation ne serait pas
renversée radicalement. Je pense qu'on va être les derniers
à soutenir que toute situation ne peut pas changer. Tout ce qu'on dit,
c'est que l'expérience concrète, et c'est une expérience
qui a conduit Hydro-Québec depuis plusieurs années à
conclure des marchés de l'ordre de 6 000 000 000 $ ou 7 000 000 000 $...
Comme on vous le dit, on espère que la deuxième étape dans
le cas de NEEPOOL, qui est l'énergie ferme, va être
traversée en 1984. Elle devra tôt ou tard être suivie par
une troisième étape qui est la vente de puissance. C'est ce qu'on
vit, c'est ce qui a été vécu, c'est ce qui a donné
des résultats, c'est ce qui donne des revenus. Évidemment, devant
la complexité de l'affaire, on a souvent tendance à dire:
Pourquoi cela ne va-t-il pas plus vite et, quand on vend pour 6 000 000 000 $,
pourquoi n'en vend-on pas pour 12 000 000 000 $? On en serait les premiers
heureux, mais la réalité concrète, au moins,
vérifie que ces hypothèses sont plus que des hypothèses,
c'est la réalité concrète.
Après avoir dit cela, je ne dis pas que l'idée de vouer
des centrales ou de faire ce genre de chose est radicalement impensable ou
impossible. Certaines circonstances peuvent se produire où cela
deviendrait possible, mais ce n'est pas l'état actuel de nos
négociations.
M. Beaumier: Dans l'optique où il y aurait
déblocage dans cette voie, vraiment un bon déblocage pour les
raisons que vous imaginiez, que j'imagine ou que n'importe qui imagine, est-ce
qu'il est dans la réflexion d'Hydro-Québec de voir quel impact
cela pourrait avoir en ce qui concerne l'exportation d'emplois par rapport au
fait de garder cet attrait ou cet avantage comparatif à
l'intérieur du Québec? Autrement dit, en termes d'emplois, est-ce
qu'on pourrait dire que, si cela débloquait... Est-ce qu'il y aura quand
même un frein à ceci pour ne pas faire en sorte que les emplois
temporaires créés par la construction soient les nôtres et
que les emplois engendrés par la production - parce qu'ils auraient
accès à de l'électricité, à un coût
d'énergie assez convenable - soient le lot de nos voisins?
M. Coulombe: Je pense que tout le monde doit admettre que, s'il
n'y a pas un équilibre là-dedans, on va être coincés
d'un bord ou de l'autre. En d'autres mots, si tous les efforts ne sont pas
faits pour que l'électricité - comme avantage comparatif, avec ce
que cela implique pour le Québec -soit utilisée au maximum, cela
serait une erreur. L'exportation massive, sans considérer cela, serait
une autre erreur. Donc, le juste milieu - qui est souvent moins spectaculaire
mais plus difficile à expliquer - est justement dans l'équilibre
de ces deux marchés. C'est évident que la priorité devrait
être de se servir au maximum de l'avantage comparatif qu'a le
Québec en termes d'électricité. Comme je l'ai dit au
début, c'est la seule forme d'énergie où l'exploration, la
production, le transport, la
distribution sont intégralement au Québec. 80% des
dépenses qui sont impliquées dans
l'hydroélectricité sont faites au Québec et profitent
à des Québécois, et Dieu sait si le Québec n'a pas
une liste de 50 pages d'avantages comparatifs en termes économiques!
Cela en est un majeur; donc, il faut l'exploiter à fond. Mais une
façon de l'exploiter à fond, c'est de baisser nos tarifs, et une
façon de baisser nos tarifs, c'est d'avoir des revenus
supplémentaires, et une façon d'avoir des revenus
supplémentaires, c'est de vendre à bon prix notre produit sur des
marchés externes. C'est là que se tient l'équilibre. Mais
la priorité 1a, l'autre étant 1b, si on veut absolument faire des
distinctions entre deux grandes priorités, on pense encore que de
maximiser les avantages comparatifs de l'électricité pour le
Québec peut avoir énormément d'impact au point de vue du
développement économique du Québec. Les revenus
engendrés par de bons prix d'exportation peuvent avoir une influence
énorme sur cet avantage comparatif en permettant l'augmentation des
revenus et la diminution de nos tarifs parce que, par définition, si on
a de bons prix, on va vendre plus cher que ce que nos industries vont avoir.
Dans ce sens, cet avantage n'est pas contradictoire avec des prix excellents au
Québec, au contraire.
M. Beaumier: Merci bien.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, je m'excuse, M. le
député d'Outremont.
Le projet Archipel
M. Fortier: Merci, M. le Président. J'aurais quelques
questions sur le programme d'équipement et demain matin nous
continuerons puisqu'il est déjà minuit moins dix.
La politique que vous avez suivie a été de suspendre
certains projets - on vient de faire allusion à Manic 5 - et, dans
certains cas, d'avancer certains travaux de rénovation. Mais il y a des
études qui se continuent et, franchement, il y en a quelques-unes qui
sont difficiles à expliquer.
L'an dernier, en commission parlementaire, vous avez entre autres fait
état qu'Hydro-Québec n'avait pas évalué à un
très haut niveau de priorité les études sur le projet
Archipel. Vous nous aviez dit que les études se termineraient à
l'automne et ensuite on a appris par les journaux que les études se
continueraient jusqu'au printemps. Tout le monde sait que le coût du
kilowatt pour l'aménagement des rapides de Lachine serait très
élevé. J'ai donc des questions à ce sujet.
Est-ce que les études hydroélectriques,
c'est-à-dire celles qui sont assumées et payées par
Hydro-Québec, se continuent toujours?
Combien d'argent a été avancé dans ces
études à ce jour?
Et, si elles se continuent dans un climat d'austérité,
comment expliquer ce genre d'études si réellement c'est votre
politique d'appliquer un programme d'austérité?
M. Coulombe: Sur la question du projet Archipel, nous allons
remettre notre rapport au conseil d'administration le 18 janvier et au
gouvernement dans la première semaine de février.
Quant aux coûts déjà impliqués dans le projet
Archipel, ils sont de...
M. Hamel: À la fin de 1983, une somme de 14 000 00 $.
M. Coulombe: Cette somme a été investie dans ces
études. Selon le rapport global qui sortira, qui sera remis au
gouvernement et qui sera intégré dans un rapport encore plus
global, là il y aura une décision à prendre à
savoir si l'on arrête ou si l'on continue. Si l'on arrête, ce sera
des radiations et, si l'on continue, on verra comment cela se
présente.
M. Fortier: Mais le ministre nous a déjà dit
à l'Assemblée nationale que les coûts de
l'aménagement possible d'Archipel étaient plus
élevés que La Grande, LG 1. Dans cette optique, vu
d'Hydro-Québec à l'intérieur d'un programme
d'austérité, comment pouvez-vous, en tant que dirigeants
d'Hydro-Québec, recommander à votre conseil d'administration
même une possibilité de continuer de telles études?
M. Coulombe: C'est-à-dire qu'à l'époque
où ces études se poursuivaient c'était exact. Il y avait
des problèmes d'études de base qu'il fallait régler car il
faut bien penser que le problème d'Archipel, d'après ce qu'on m'a
dit, était étudié depuis...
M. Bourbeau (Joseph): ...1954.
M. Coulombe: ...1954 à Hydro-Québec. Donc, ce n'est
pas un problème totalement nouveau pour Hydro-Québec. On
s'était toujours buté au problème des glaces, et là
on a été, on le pense - je n'ose pas employer les mots "au fond"
- avec une campagne d'études très précises, au coeur du
problème. On est plus en mesure que jamais de répondre aux
questions de base qui se posaient sur les glaces.
Deuxièmement, il y a eu un effort systématique
d'Hydro-Québec, et notre position sur cela par rapport à
l'austérité est très simple. Voici un programme qui est
commencé depuis très longtemps mais qui
s'est accéléré depuis quatre à cinq ans. Le
gouvernement nous avait signifié qu'il était
intéressé à regarder l'ensemble des problèmes
hydrauliques ou des problèmes de contrôle des eaux de la
région Archipel, Je pense que c'était valable
qu'Hydro-Québec fasse l'effort que d'autres ministères ou
organismes ont fait pour aller au fond du problème. Il s'agissait
là d'un plan d'envergure. Négliger
l'hydroélectricité dans un tel programme aurait été
de la négligence pure de la part d'Hydro-Québec. On ne pouvait
pas dire: Bon, sous prétexte qu'on a des surplus pour le moment, on
n'étudie pas ce problème. Donc, pour la nécessité
de l'étudier, je pense qu'il n'y a pas de problème.
Maintenant, à un certain moment, il va falloir se demander
jusqu'où cela va? C'est-à-dire quand est-ce que les coûts
vont arrêter et quel genre de problématique va se dégager?
Nous, on n'est pas au courant des autres dimensions, on n'est pas partenaire
privilégié dans les autres parties du dossier qui regardent le
tourisme, les municipalités, etc. Quand ces interlocuteurs auront fait
le tour, si on remet notre rapport au mois de février - d'ailleurs, on
devait le remettre au mois de décembre; c'est nous qui avons
demandé un mois et demi de plus pour le raffiner - on espère que
le gouvernement va faire le tour du problème et avoir une solution
à ce projet. Il s'agissait d'un projet d'ensemble; Hydro-Québec
devait y participer, c'était évidemment parce qu'il y a une
possibilité réelle... Si Hydro-Québec l'étudie
depuis 1954, il doit y avoir une possibilité de faire de
l'électricité dans le coin. Donc, c'était normal
d'étudier cette dimension, mais ce serait peut-être anormal de
poursuivre cela pendant des années. En d'autres mots, il va falloir que
quelque chose se passe autour de cela dans peu de temps; il va falloir
arrêter les coûts et ce, non seulement au nom de
l'austérité mais du bon sens.
M. Fortier: Lorsque vous évoquez le problème des
glaces... indépendamment de ce problème, les coûts
rapportés étaient bien plus élevés que les
coûts de d'autres centrales.
Il y a eu des secteurs où vous avez eu le coeur encore moins
tendre. Énormément d'ingénieurs d'Hydro-Québec nous
appellent pour nous dire: vous avez mis la hache dans les équipes
nucléaires, vous avez mis la hache dans les études de ci, de
ça. J'ai de la difficulté à comprendre moi-même
comment vous avez le coeur si tendre, alors que dans d'autres secteurs vous y
avez été à coups de hache. Je conçois que les coups
de hache que vous avez donnés étaient pour réduire les
coûts de fonctionnement et ça se conçoit. Mais dans un
domaine où, de toute évidence, Hydro-Québec n'a pas de
besoins urgents, où, elle-même est arrivée à des
conclusions que c'était un projet non rentable, il y a quelque temps,
j'ai de la misère à comprendre que vous pouvez même
évoquer la possibilité de continuer de telles études.
M. Coulombe: Le projet a évolué. Je ne peux pas
dire à quelle conclusion Hydro-Québec va arriver. Mais le projet
a définitivement évolué à l'intérieur
d'Hydro et s'est raffiné. On ne sait vraiment pas comment on aurait pu
justifier, dans l'état actuel de la connaissance du dossier,
d'arrêter il y a six mois ou un an cet effort. Maintenant on admet que
l'effort qui est fait actuellement devra avoir un point de chute à un
moment donné. Espérons que dans l'année 1984, il y aura
des éléments...
Comme cela s'intègre dans un projet qui est beaucoup plus vaste
que ce qu'Hydro-Québec contrôle, c'est évident qu'il faut
écouter ce que les partenaires ou le gouvernement va dire dans ce genre
de projet d'ensemble. Cela, on ne le sait pas. C'était la contribution
d'Hydro à une dimension qui regarde Hydro-Québec,
c'est-à-dire la génération d'électricité
dans un projet d'ensemble que le gouvernement mettait sur la table, et on a
pensé que c'était une contribution qui devait être faite
parce que, si elle n'était pas faite par Hydro, elle n'aurait pu
être faite par d'autres. C'est un élément important du
dossier Archipel.
M. Fortier: J'essaie de choisir des sujets qu'on peut
évoquer en deux minutes. Il n'y en a pas beaucoup. Enfin, chacun des
sujets prendrait beaucoup plus de temps.
Je ne vois pas dans votre liste "programme d'investissements" une
possibilité de construire un siège social. Il y en a qui m'ont
dit que vous regardiez cela de nouveau. Est-ce que le siège social est
revenu à l'horizon, est-ce que c'est une possibilité
d'investissement dans l'avenir prévisible pour Hydro-Québec?
M. Bourbeau (Joseph): Pas pour le moment.
M. Fortier: Est-ce que des études sont en cours?
M. Bourbeau (Joseph): II n'y a pas d'étude en cours, que
je sache.
M. Fortier: M. Coulombe.
M. Coulombe: II n'y a pas d'étude spécifique sur ce
sujet-là. Mais, comme on l'a dit tantôt, il y a beaucoup
d'industries qui demandaient des rabais d'électricité. C'est
évident qu'il y a beaucoup de promoteurs qui seraient
intéressés à ce que l'Hydro fasse quelque chose, mais il
n'y a pas d'étude spécifique sur ce sujet.
M. Fortier; Je vous remercie.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Merci.
Alors la commission élue permanente de l'Énergie et des
ressources ajourne ses travaux sine die.
Une voix: Cela prend un ordre de la Chambre.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): Je sais que
cela prend un ordre de la Chambre. À dix heures, il y a une
période de questions. Cela veut dire que vers onze heures et quart
demain, on devrait se réunir ici.
M. Fortier: Très bien.
(Fin de la séance à minuit)