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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources est à nouveau réunie aux fins d'examiner les
circonstances entourant la décision du conseil d'administration de la
Société d'énergie de la Baie James de régler hors
cour la poursuite civile intentée à la suite du saccage du
chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus spécifiquement, le râle
du premier ministre et de son bureau à cet égard.
Les membres de cette commission sont: M. Vaillancourt
(Jonquière); M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Duhaime (Saint-Maurice); M.
Bourbeau (Laporte); M. Laplante (Bourassa); M. Paradis (Brome-Missisquoi); M.
Lavigne (Beauharnois); M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet); M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys); M. Perron (Duplessis); M. Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue); M. Desbiens (Dubuc); M. Dussault
(Châteauguay); Mme Harel (Maisonneuve); M. Gratton (Gatineau); M.
Pagé (Portneuf); M. Doyon (Louis-Hébert); M. Tremblay (Chambly);
M. Saintonge (Laprairie).
Le rapporteur est toujours M. le député de
Montmagny-L'Islet, M. LeBlanc.
Je tiens à vous faire remarquer que les travaux de cette
commission - on aura d'autres détails pour la journée de demain
-pour aujourd'hui se dérouleront à compter de ce moment-ci
jusqu'à 12 h 30. Nous reprendrons après la période de
questions, c'est-à-dire vers les 15 heures, 15 h 30 -puisque la
séance de l'Assemblée nationale débute à 14 heures
- jusqu'à 18 heures et de 20 heures à 22 heures ce soir.
La personne qui est invitée devant nous ce matin est Me Jean-Roch
Boivin, chef de cabinet du premier ministre. J'invite le greffier de... Juste
un instant, oui. M. le député de Louis-Hébert.
Mise au point
M. Doyon: M. le Président, vous vous souviendrez
sûrement, avec la mémoire qui vous caractérise, que, hier
avant-midi, dans un échange que nous avons eu et qui portait sur la
troisième demande ou la troisième requête qui avait
été présentée par le procureur de Me Gauthier,
j'avais tenté de vous faire valoir un certain point de vue sur des
allégués de la requête et vous m'aviez empêché
de le faire plus longuement de la façon dont j'avais pensé
pouvoir le faire, en me disant: J'ai une décision à rendre
là-dessus. Je vais établir un certain nombre de points et
à partir de là vous verrez si les représentations que vous
vouliez me faire ont encore leur raison d'être. Et vous m'aviez dit, M.
le Président: Vous êtes d'accord avec moi pour cela, etc.
Vous vous souviendrez, simplement pour situer le débat, que je
vous avais répondu: II m'est difficile d'être d'accord avec
quelque chose que je ne connais pas encore, et vous m'avez dit: Quoi qu'il en
soit vous aurez l'occasion, M. le député, après ma
décision, d'intervenir. Vous avez rendu votre décision et je m'y
conforme pleinement. Dans cette décision vous avez rétabli un
certain nombre de faits qui vont dans le sens de ce que je voulais dire mais
qui malheureusement ne me rendent pas, en tant que membre de cette commission,
totalement justice. Il y a eu le témoignage de Me Gauthier et, comme la
pression avait monté et que les échanges étaient assez
vifs, j'ai pensé qu'il était peut-être de bon aloi de
permettre aux choses de se dérouler comme vous vouliez qu'elles se
déroulent, c'est-à-dire plus calmement, quitte à faire
appel à votre souvenir et à votre mémoire pour revenir
ultérieurement, et c'est ce que je voudrais faire très
brièvement, ce matin, en utilisant mon droit de parole. M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Avant de vous donner votre
droit de parole - parce que je suis bien conscient de ce que j'ai dit hier -
... J'avais cru, à la suite de l'intervention que j'avais faite dans le
but, justement, de dire à cette personne, qui était le procureur,
Me Jutras, que la requête était rejetée, d'abord, parce
qu'on ne pouvait pas la considérer comme requête.
Deuxièmement, ce qu'il énonçait en termes
d'allégations dans sa requête n'avait pas d'application ici,
à cette commission, que chacun avait droit à des opinions et
qu'il était malheureux, de la part du procureur... À un moment
donné, je lui ai même demandé de retirer certaines parties
d'opinions qu'il avait exprimées de façon à rendre justice
à l'ensemble des membres de cette commission. J'avais cru, à ce
moment-là, compte tenu que je vous avais dit que
c'était après l'intervention que je ferais... Vous me
dites: J'ai accepté, à ce moment, pour le bien de la commission,
qu'on puisse procéder aux questions. D'ailleurs, le député
de Mont-Royal avait procédé aux questions qui devaient avoir
lieu.
Maintenant, il y a eu d'autres discussions qui se sont
déroulées de telle sorte que, à 13 heures, on n'avait pas
terminé les questions du député de Mont-Royal qui les
avait reprises après la période des questions de
l'Assemblée nationale. J'avais cru, à ce moment-là, que
vous aviez accepté les correctifs que j'avais apportés en disant
que la requête comme telle était irrecevable, deuxièmement,
que j'avais accepté qu'on la discute au niveau de certaines parties pour
m'éclairer sur la décision finale que j'avais à rendre. Je
vous permettrais, si vous me promettez d'être très rapide, de
faire le correctif que vous voulez, en sachant, cependant, que je ne veux
engager aucun débat sur la question. Mais allez-y rapidement, pour vous
rendre justice.
M. Doyon: Très rapidement, M. le Président. Ce que
je veux souligner, actuellement, c'est le fait que la requête que vous
avez rejetée hier est une requête qui a fait l'objet d'une lecture
in extenso de la part du procureur de Me Gauthier. Ce faisant, en tant que
membre de cette commission et député de Louis-Hébert, mon
comportement à cette commission a été remis en question.
Pour citer la requête, le procureur de Me Gauthier m'a accusé
d'avoir procédé par insinuations et d'avoir fait des
hypothèses sur le dos et au détriment de l'invité. Il a
été plus loin que cela quand il a dit que j'ai fait plusieurs
interventions - je lis la requête - insinuant qu'il y avait un danger -
un danger qu'il avait décrit plus tôt - que, effectivement, Me
Jasmin pouvait s'être servi des visites dans le sens
suggéré par cette question, alors qu'il n'y avait aucun iota de
preuve en ce sens devant la commission.
Le procureur de Me Gauthier référait spécifiquement
à une question par laquelle je demandais à Me Gauthier s'il
était conscient que certaines visites qu'avait pu lui rendre Me Jasmin
pouvaient servir d'arme à Me Jasmin pour déstabiliser Me Aquin,
le procureur de la 5EBJ. Quand Me Jutras affirme dans sa requête - et il
en a donné lecture - qu'il n'y avait pas un iota de preuve à cet
effet, je pense qu'il est essentiel que les faits soient rétablis de
façon à ce qu'on puisse bien porter un jugement.
Je me réfère plus particulièrement, M. le
Président, au journal des Débats du 21 avril 1983 où c'est
M. Aquin qui est interrogé par le ministre de l'Énergie et des
Ressources et qui dit ce qui suit à la page
CI-1079; il affirme parlant de Me Jasmin ou de Me Beaulé: "Mais
ils nous avaient dit - en parlant des avocats, Me Jasmin ou Me Beaulé
-qu'ils avaient eu des contacts avec le bureau du premier ministre au milieu du
mois de janvier." Je passe quelques lignes. (10 h 15) "M. Beaulé avait
dit: je pense qu'il est normal, entre avocats, de vous prévenir que nous
avons eu des contacts avec le bureau du premier ministre, que nous avons vu des
gens du bureau du premier ministre." Et c'est Me Aquin qui continue: "Je trouve
toujours très déstabilisant ce genre d'information. Alors, je
voulais savoir si c'était exact et j'ai téléphoné
à Me Gauthier pour lui dire que j'aimerais parler de cela avec lui
quelques minutes seulement."
M. Lapilnte: M. le Président, question de
règlement.
M. Doyon: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa, je m'excuse, M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Écoutez, vous avez promis une courte
intervention, pensant qu'il y aurait des faits. Tout ce qu'il dit là, il
l'a dit hier.
M. Doyon: Pas du tout.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Laplante: C'est une requête qui a été
rejetée de votre part, qui n'apporte pas de discussion, qui n'apporte
pas rétractation et qui n'apporte rien. On retombe dans le même
panneau, M. le Président, lorsqu'on a commencé hier. Vous savez
qu'hier cela a coûté 6000 $ à la population le niaisage et
l'enfantillage qu'ils ont fait pendant trois heures.
Le Président (M. Jolivet): Écoutez, M. le
député, je dois dire qu'hier effectivement j'avais dit au
député de Louis-Hébert que je lui accorderais la parole
à la fin mais j'avais cru qu'il ne la demandait pas. Ce matin il m'a dit
je serai bref. Donc, je lui demande simplement d'être bref et qu'on le
règle une fois pour toutes.
M. Laplante: Oui, merci.
M. Doyon: Alors, si les interventions ne sont pas trop
nombreuses, M. le Président, je suis à la toute fin de mon
intervention.
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez.
M. Doyon: Ce que je veux souligner c'est que la requête
présentée ou la pseudo requête présentée par
le procureur de Me Gauthier, où il affirme sous sa signature que la
question que j'ai posée à Me Gauthier demandant s'il était
conscient de l'effet que pouvaient avoir les visites qu'il recevait de Me
Jasmin sur le travail que faisait Me Aquin en tant que procureur de la SEBJ.
Sous sa signature, le procureur de Me Gauthier affirme que j'ai posé
cette question alors - et je cite - "qu'il n'y avait aucun iota de preuve en ce
sens devant la commission." Ce que je veux souligner, c'est que si le
procureur...
Le Président (M. Jolivet): Pas de jugement, M. le
député.
M. Doyon: ...Me Jutras, avait lu, comme c'était son devoir
de le faire avant d'écrire ce qu'il a écrit...
M. Duhaime: Question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député. M.
le député, s'il vous plaît! Le ministre a soulevé
une question de règlement. Je vais l'écouter. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais invoquer le
règlement pour que vous mettiez fin à cet exercice matutinal qui
n'a ni queue ni tête. On est en train de mettre en cause Me Jutras alors
que la chaise qui est devant nous est vide et que Me Jutras n'est pas
là. Il y a un vieux principe qui dit - à moins que vous aimiez
cela, de votre côté - "avoir des procès par contumace". Et
je pense qu'il y a des gens qui sont mis en cause par les propos du
député de Louis-Hébert qui auraient peut-être le
droit de donner une réplique.
Une voix: Ils viendront.
M. Duhaime: Ils viendront, ouil Si vous pensez qu'on va passer
l'été ici à vous écouter niaiser tous les matins,
vous, le député de Louis-Hébert, vous allez vous
tromper.
M. Doyon: En parlant de niaiseries, on peut se rendre la
pareille.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît!
M. Duhaime: M. le Président, j'invoque le
règlement. Si un député veut faire une intervention en
utilisant son droit de parole, qu'il le fasse. Mais qu'on mette en cause et
qu'on interprète, à partir de procédures qui ont eu lieu
hier et qui ont été réglées, je vais m'y
opposer.
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, je vais juste demander une
chose... Oui, je sais, je vais vous l'accorder. Mais, juste avant, si je peux
le régler, cela pourrait permettre d'aller plus rapidement. M. le
député de Louis-Hébert, je vous avais demandé
d'aller rapidement. C'est que mon problème n'est pas là. Je vous
ai fait signe en vous disant de ne pas faire de procès d'intention pour
le moment. Corrigez ce que vous avez à corriger pour vous, mais le plus
rapidement possible. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'aimerais, M. le Président, me reporter aux
propos du ministre lorsqu'il dit que, étant donné que Me Jutras
n'est pas là, on n'a pas le droit, ou il n'est pas à propos, ou
il n'est pas indiqué de faire des observations concernant soit ses
interventions ou ses demandes. Il est très important d'établir
maintenant que la commission est maîtresse de ses travaux, que les
députés ont le droit de s'exprimer et vont devoir de plus en plus
s'exprimer sur les témoignages qui ont été rendus. Il
faudra que des conclusions soient exprimées par les uns et les autres,
des deux côtés de la table, j'en suis convaincu; enfin, je
réserve mon droit de le faire, et en me reportant à des
témoins qui ne sont plus là. On ne peut pas inviter tous les 20
ou 25 qui auront témoigné ici pour rendre un jugement. On ne
rendra pas de jugement, mais on aura sûrement une appréciation de
la preuve et de tous les travaux de la commission. Je pense que le
député de Louis-Hébert est tout à fait
justifié de soulever cette question de règlement étant
donné qu'il n'a pas eu l'occasion de le faire ou, enfin, qu'il a remis
à ce matin cette occasion qu'il avait hier.
M. Duhaime: Je demanderais d'entendre le témoin, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Je voulais quand même
corriger ce que j'ai pu faire hier, compte tenu que je croyais que le
député avait terminé. Terminez rapidement, et on passera
à autre chose, M. le député.
M. Doyon: Je pense qu'il est important... Je ne fais pas de
procès d'intention et je n'aime pas qu'on dise qu'on en fait. Je prends
la peine personnellement de relever le journal des Débats, si c'est
faire des procès d'intention que de citer...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, vous
allez me rendre la tâche difficile. Allez donc à votre
décision.
M. Doyon: Ce que je n'accepte pas, c'est qu'aussi bien le
procureur de Me
Gauthier que qui que ce soit m'accuse de procéder par
insinuations et hypothèses et de faire des procès d'intention
alors que le but de mon intervention est précisément celui de
montrer...
M. Laplante: ...
M. Doyon: Le député de Bourassa continue. Je sais
que...
M. Laplante: II ne le sait pas, c'est un grand niaiseux, bon
Dieu!
Le Président (M. Jolivet): Un moment, s'il vous
plaît. Laissez tomber. M. le député de Bourassa, vous
n'avez pas la parole.
M. Doyon: Je suis bien prêt à laisser tomber, mais
je ne suis pas sûr que quelque chose va tomber.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
députél
M. Doyon: Le but de mon intervention est d'indiquer clairement
que mon droit en tant que parlementaire a été brimé par le
procureur qui a affirmé des choses qui, à leur face même et
à la suite des citations que j'ai faites, sont fausses. Son affirmation
à savoir que les questions que j'ai posées concernant les effets
de certaines visites que recevait Me Gauthier l'ont été sans
qu'il n'y ait eu nulle part un iota de preuve sur les conséquences de
ces visites est totalement non fondée et contraire à la
vérité compte tenu du fait que c'est verifiable n'importe quand,
à la page 1079 du journal des Débats du 21 avril, où il a
été établi que Me Aquin s'était lui-même
inquiété du genre de visite que recevait Me Gauthier. C'est pour
ça que j'ai posé cette question. Si l'accusation d'avoir fait des
insinuations est aussi fondée que celle d'avoir posé une question
sans avoir un iota de preuve, je pense qu'elle n'est nullement
fondée.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement.
M. Doyon: C'est ce que je voulais établir clairement ce
matin, et je vous remercie de m'avoir permis de le faire, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci. J'invite donc Me
Jean-Roch Boivin et le greffier de notre commission parlementaire. S'il vous
plaît, au micro, Me Boivin.
Une voix: Je suis certain que le Québec aurait
été très mêlé ce matin si cette mise au point
n'avait pas été faite.
M. Duhaime: Cela a pris 25 minutes.
Vous vous couchez trop tard, les gars, cela n'a pas de bon sens.
Le Président (M. Jolivet): Me Boivin.
Le Greffier (M. Jean Bédard): Monsieur, pourriez-vous
mettre la main sur l'Évangile et répéter après moi:
Je - vos noms et prénoms - je déclare solennellement que je dirai
toute la vérité et rien que la vérité.
Témoignage M. Jean-Roch Boivin
M. Boivin (Jean-Roch): Je, Jean-Roch Boivin, affirme
solennellement que je dirai toute la vérité et rien que la
vérité.
Le Greffier (M. Jean Bédard): Merci.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Est-ce que vous avez une
déclaration préliminaire?
M. Boivin: Si vous permettez, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Boivin: ...je voudrais vous présenter mon bras droit,
qui se trouve à ma gauche, Me Gilles R. Tremblay, avocat, chef de
cabinet adjoint au bureau du premier ministre. Il a eu la chance de suivre vos
travaux, ce qui ne fut pas mon cas. Il a connaissance, je crois, des documents
qui ont été déposés ici. Il pourra m'être
utile, si jamais vous me faites l'honneur de me poser quelques questions et si
ces quelques questions devaient m'obliger à me référer aux
documents.
Le Président (M. Jolivet): Accordé.
M. Boivin: Deuxièmement, M. le Président, je l'ai
déjà remise au secrétariat de la commission - je ne sais
pas si c'est selon les règles - je voudrais faire distribuer et vous
remettre une lettre du premier ministre, qui m'est adressée, me relevant
de mon secret. J'en ai fait des copies pour l'information de tout le monde.
Le Président (M. Jolivet): Pour distribuer.
M. Boivin: L'original est ici pour vous. Enfin, M. le
Président, avec votre permission, je ferais une déclaration dont
des exemplaires ont été remis également au
secrétariat de la commission.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Oui, allez!
M. Boivin: M. le Président, je n'ai pas
et je n'ai jamais eu de note écrite ou de dossier concernant le
règlement hors cour de la poursuite civile intentée par la SEBJ,
à la suite de ce qu'il est convenu d'appeler "le saccage de la
Baie-James". Je témoignerai donc au meilleur de mon souvenir.
C'est dans l'exercice normal de mes fonctions de chef de cabinet du
premier ministre qu'il m'a été donné de me renseigner sur
ce dossier, de l'étudier et d'en faire rapport au premier ministre.
À l'automne 1978, j'ai reçu un appel
téléphonique de M. Louis Laberge, président de la FTQ. Je
ne saurais préciser la date de cette conversation
téléphonique mais il me semble que ce fut peu de temps avant ma
première rencontre avec Me Michel Jasmin, le 4 décembre 1978.
Elle aurait donc vraisemblablement eu lieu au cours du mois de novembre. M.
Laberge argua que la SEBJ devait régler la cause hors cour. Il m'a
énuméré certains arguments au soutien de sa
prétention, mais je crois que la conversation téléphonique
fut brève, car il m'a alors dit que Me Michel Jasmin demanderait
à me voir pour me faire une argumentation plus complète en faveur
d'un tel règlement.
Le 1er décembre, j'ai rencontré, à sa demande, Me
Rosaire Beaulé à mon bureau de Québec. Il me remit
à cette occasion une copie de sa défense à l'action de la
SEBJ. Afin de me former une opinion, j'ai écouté les
représentations de MM. Laberge, Beaulé et Jasmin. J'ai pris des
informations au sujet de la poursuite auprès du bureau d'avocats
Geoffrion et Prudhomme et, finalement, j'ai lu le rapport Cliche. J'en suis
venu à la conclusion qu'il devrait y avoir un règlement hors cour
pour les raisons suivantes:
Premièrement, l'incapacité évidente des syndicats
québécois défendeurs de payer une somme d'argent qui
puisse avoir quelque rapport que ce soit avec le montant réel des
dommages.
Deuxièmement, la non-responsabilité de la très
grande majorité des syndiqués ordinaires de ces mêmes
syndicats. En effet, j'ai été frappé par ce passage du
rapport de la Commission d'enquête sur l'exercice de la liberté
syndicale dans l'industrie de la construction, le rapport Cliche. Je cite, aux
pages 68 et 69: "Les commissaires ont acquis la conviction que les travailleurs
ordinaires n'encourent pas la responsabilité de ce qui est
arrivé. Il ne s'agit aucunement d'une réaction de masse, mais
bien d'une opération montée par un noyau de
mécréants, dirigés par Duhamel, pour montrer, une fois
pour toutes, qui était le maître à la Baie-James.
"L'impression nette que nous tirons de l'interrogatoire des témoins du
saccage est que les travailleurs ont été de simples spectateurs
et même des victimes des actes insensés posés par un
Duhamel en délire. "C'est à ce genre de catastrophe que devait
finalement aboutir l'irresponsabilité des aventuriers sans scrupule qui
avaient fait main basse sur le contrôle des principaux locaux de la
FTQ-Construction. "Il suffit, à partir de Yvon Duhamel, de remonter le
lien de filiation pour voir à qui incombe ultimement la
responsabilité morale de son crime. "Car, enfin, l'agent d'affaires
travaillait à la réalisation d'un objectif maintes fois
déclaré par les dirigeants de sa centrale: l'acquisition du
monopole syndical sur les chantiers. Et il le faisait avec des méthodes
qui ne détonnent pas du tout avec celles généralement
admises dans la FTQ-Construction. Il n'est que de lire le procès-verbal
de l'asssemblée mensuelle des membres du local 791, tenue le 25 mars
1974. Une résolution, adoptée unanimement, accepte le rapport par
lequel M. René Mantha, après avoir souligné le "beau
travail" accompli par M. Yvon Duhamel "pour le local et pour tous les membres",
ajoute qu'il "a été grandement apprécié à
son dernier meeting à la Baie -James". À noter que les membres
sont alors bien au courant du saccage du 21 mars puisqu'il en a
été question à la même assemblée."
L'opération consistant à obtenir jugement contre les
syndicats québécois et à procéder ensuite à
la saisie des cotisations syndicales eut été d'un
irréalisme total sans parler d'inéquité à
l'égard de la majorité des membres d'alors et des membres futurs
de ces syndicats.
La troisième raison de mon opinion qui était favorable au
règlement hors cour: mon très grand scepticisme quant à la
capacité de la SEBJ de faire établir par les tribunaux canadiens
la responsibilité civile du syndicat américain, The International
Union of Operating Engineers. Aujourd'hui encore j'entretiens le même
scepticisme pour ne pas dire davantage. Il n'est pas inutile de rappeler ici
que la SEBJ n'alléguait aucune faute d'action contre le syndicat
américain lui-même. Dans un document déposé devant
cette commission parlementaire les avocats et les procureurs de la SEBJ
écrivent: "Cet organisme international pouvait être engagé
à deux points de vue, premièrement, pour être valide le
contrat d'agent d'affaires de Yvon Duhamel pour le local 791 avait
été ou devait avoir été approuvé par cette
union; deuxièmement, de plus cette union avait par ses règlements
des pouvoirs structurels de contrôle sur le local 791 qu'elle aurait omis
d'exercer". (10 h 30)
Les avocats de la SEBJ ont déclaré devant cette commission
qu'il n'y avait pas de précédents judiciaires canadiens au
soutien de leurs prétentions. Ces avocats étaient d'ailleurs loin
d'être catégoriques au sujet de cette prétendue
responsabilité civile. Dans leur opinion du 16 décembre 1975, ces
avocats s'expriment en termes prudents. À la
page Il, ils s'expriment ainsi - M. le Président, les
soulignés que vous trouvez dans la citation sont du soussigné:
"Nous ne savons pas si le contrat d'agent d'affaires qui existait entre le
local 791 et Yvon Duhamel a été approuvé
conformément à la charte de l'union internationale. Cependant,
Yvon Duhamel a été agent d'affaires tant à Matagami
qu'à LG 2 pour une période de près de seize mois et il est
à présumer qu'une telle approbation a existé." Sur cela,
il serait certainement intéressant de poursuivre nos recherches qui
n'ont à date rien révélé. "Cependant si l'union
internationale n'a pas approuvé le contrat d'agent d'affaires d'Yvon
Duhamel, nous sommes tout de même d'avis que l'on peut possiblement
impliquer l'union internationale à cause de sa faute d'omission. L'union
internationale se devait d'approuver le contrat d'emploi d'Yvon Duhamel comme
agent d'affaires du local 791 en vertu de ses règlements et de sa
constitution. Qu'une telle approbation ait été donnée ou
non l'union internationale a pu possiblement engager sa responsabilité
du fait qu'elle aurait sciemment permis à Duhamel d'occuper la
fonction."
À la page 14 - "D'autre part vu que l'union internationale a
approuvé le contrat d'agents d'affaires d'Yvon Duhamel ou qu'elle lui a
permis d'agir comme tel, la responsabilité civile de l'union
internationale se trouve peut-être engagée."
Dans leur opinion du 19 février 1979 ces mêmes procureurs
s'expriment de la façon suivante - cette fois les mots soulignés
se trouvent dans le texte original de la citation: "Si la responsabilité
de The International Union of Operating Engineers était retenue ce
serait par effet combiné des dispositions de ses statuts et des articles
1054 et 1731 du Code civil qui imposent au commettant et au demandant une
responsabilité présumée, tandis que dans l'affaire de
Gaspé Copper Mines il a été prouvé que des agents
et représentants de l'union internationale avaient "fomenté,
organisé, dirigé, soutenu et financé" la grève
illégale et que certains actes de violence qui s'en sont suivis ont
été commis "avec la participation, l'approbation expresse ou
tacite, les encouragements, les incitations ou les appuis matériels et
financiers des agents et représentants de la haute hiérarchie et
direction" de la même union. "Nous n'avons pas, dans notre cas - ce sont
les avocats qui parlent toujours -d'élément de preuve permettant
de croire que l'International Union of Operating Engineers aurait
participé de semblable façon aux événements de mars
1974."
Comme avocat ayant exercé pendant 20 ans, principalement dans le
domaine de la responsabilité civile, je me suis intéressé
à la question de la responsabilité du syndicat américain.
À titre de chef de cabinet du premier ministre il ne m'appartenait pas,
cependant, de trancher cette question ni d'émettre une opinion juridique
formelle. Il me suffisait de constater que cette responsabilité civile
était fort aléatoire.
Quatrième raison: Cette commission parlementaire a entendu de
longs exposés juridiques - je devrais dire de longs et savants
exposés juridiques - sur la responsabilité civile possible du
syndicat américain. À ce sujet, la conclusion personnelle
à laquelle j'en suis arrivé me suffisait. En effet, le
caractère très aléatoire de la responsabilité
civile du syndicat américain n'était peut-être pas
suffisant à lui seul pour me permettre de recommander au premier
ministre la cessation de la poursuite contre ce syndicat.
L'équité la plus évidente commandait cependant une telle
recommandation, puisqu'il était admis de tous que le syndicat
américain n'avait pas réellement participé au saccage. En
somme, on essayait de faire payer par un syndicat américain les dommages
causés par quelques aventuriers québécois sans
scrupule.
M. le Président, je pèse mes mots. Je trouvais hier et
trouve encore aujourd'hui cela tout à fait inéquitable et
j'ajouterais inacceptable.
Cinquième raison: Enfin, mais de façon subsidiaire - je
dis bien, M. le Président, de façon subsidiaire - le climat sur
le chantier était bon et la productivité excellente puisque les
travaux étaient de six mois en avance sur l'échéancier
prévu. Il m'apparaissait imprudent de risquer de compromettre de tels
acquis pour tenter d'obtenir un jugement contre le syndicat américain,
jugement qui était fort aléatoire, lointain et possiblement
difficile d'exécution. De plus, à la connaissance même de
la SEBJ, les syndicats québécois n'étaient pas en mesure
d'y satisfaire.
Donc, avant le congé de Noël, j'ai fait un court rapport
verbal à M. Lévesque des faits que je connaissais de ce dossier
et des représentations qui m'étaient faites par la FTQ ainsi que
par Me Beaulé, le procureur du syndicat américain. M.
Lévesque m'a dit -et je cite - qu'"il était évident" que
cette cause devrait se régler hors cour aux conditions dont les parties
auraient elles-mêmes convenu. Il m'a demandé de faire
connaître son opinion au président de la SEBJ et de me tenir au
courant de l'évolution du dossier afin de pouvoir l'en informer.
Le 3 janvier 1979, j'ai eu une brève rencontre avec M. Claude
Laliberté, comme vous le savez, président de la SEBJ, pour lui
dire que le premier ministre était favorable à un
règlement hors cour. Si ma mémoire est fidèle, M.
Laliberté m'a alors dit qu'il verrait à soumettre cette question
au conseil
d'administration. Il disait douter, cependant, que le conseil puisse en
arriver à une décision avant le début du procès
fixé pour le 15 janvier.
Du 3 janvier jusqu'à la rencontre du premier ministre avec les
trois membres du conseil d'administration de la SEBJ tenue le 1er
février 1979, j'ai, à quelques reprises, parlé
brièvement de cette affaire à M. Lévesque pour l'informer
de l'évolution générale du dossier. Il en fut de
même après le 1er février.
En bref, M. le Président, j'ai été approché
par MM. Laberge, Jasmin et Beaulé qui m'ont fait des
représentations. J'ai étudié le dossier et j'ai fait au
premier ministre les recommandations que je croyais appropriées. J'ai
ensuite rencontré M. Claude Laliberté, comme il est dit plus
haut. Enfin, je me suis tenu au courant de l'évolution
générale du dossier.
La tenue de la présente commission parlementaire a
été ordonnée à la suite de l'article paru dans la
Presse du 17 mars 1983 sous la signature du journaliste Michel Girard. Je me
permets donc d'examiner les affirmations faites par ce journaliste et au sujet
desquelles je peux témoigner. Première affirmation: "Le premier
ministre Lévesque, accompagné de M. Boivin, avait
rencontré, le 19 février 1979, soit la veille de son intervention
en Chambre, MM. Robert Boyd, P.-D.G. de Hydro-Québec, Claude
Laliberté, P.-D.G. de la SEBJ, et Lucien Saulnier, président du
conseil d'administration des deux sociétés d'État."
Ma réponse à cette affirmation: Cette rencontre a eu lieu
le 1er février 1979. Une petite erreur de 18 jours qui n'est pas sans
colorer une autre phrase du même article où l'auteur affirme que,
le lendemain de la rencontre, soit le jour de l'intervention en Chambre de M.
Lévesque, donc le 20 février, la majorité des membres du
conseil d'administration de la SEBJ a cédé à l'ultime
pression du premier ministre en acceptant de donner à ses avocats un
mandat de négocier un règlement hors cour.
De plus, le journaliste a le culot d'écrire, le 19 mars, dans un
autre article, dans le même journal: "La date de cette consultation a
été confirmée au journal par l'attachée de presse
du premier ministre, Mme Catherine Rudel-Tessier, et reconfirmée par la
suite par d'autres personnes". Admirons la précision de l'expression
"autres personnes" et sachons que Mme Rudel-Tessier n'a jamais confirmé
au journaliste Girard la date du 19 février.
Deuxième affirmation du journaliste: "À l'exception de M.
Boyd et de deux collègues, tous les autres membres du conseil
d'administration d'Hydro-Québec et de la SEBJ ont cédé
à l'ultime pression du premier ministre en acceptant, le jour même
de l'intervention en Chambre de M. Lévesque, de donner à leurs
avocats un mandat de négocier un règlement hors cour.
Ma réponse: "Cette phrase est un tissu de faussetés. J'en
relève quatre. La première: Comme le journaliste se
réfère explicitement à la réunion du conseil
d'administration de la SEBJ du 20 février 1979, la phrase est
complètement fausse, puisque tous les membres du conseil
d'administration présents sans exception ont donné ce
jour-là un mandat de négocier un règlement hors cour.
Deuxièmement, si d'autre part le journaliste confond avec la
séance du conseil d'administration du 6 mars alors que le conseil a
voté majoritairement en faveur du règlement, erreur qui serait
inadmissible, il serait encore faux d'écrire: "À l'exception de
M. Boyd et de deux collègues..." En effet, il aurait alors fallu
écrire à l'exception de M. Boyd et de quatre collègues,
Mme Nicolle Forget et M. Hébert ayant voté contre le
règlement, M. Lucien Saulnier s'étant abstenu et M. Roland Giroux
étant alors absent.
Troisième fausseté dans la même phrase. Les membres
du conseil d'administration qui ont voté en faveur du règlement
le 20 février et ceux qui ont voté le 6 mars en faveur du
règlement finalement intervenu l'ont fait librement comme ils l'ont tous
affirmé sous serment durant cette commission parlementaire. Les mots:
"...ont cédé à l'ultime pression du premier ministre" sont
donc une fabrication pure et simple du journaliste.
Quatrième fausseté dans une seule phrase. Il est
maintenant prouvé que le mandat donné par M. Laliberté aux
avocats de la SEBJ de participer à des échanges l'a
été bien avant le 19 février et même avant le 1er
février. Il est donc faux d'écrire que ce mandat fut donné
le jour de l'intervention en Chambre du premier ministre, le 20
février.
Troisième affirmation du journaliste dans l'article: "Pendant
trois mois, soit de décembre 1978 à février 1979, ils, -
"ils" se réfère à M. Jean-Roch Boivin et M. Yves Gauthier
- ont mené des tractations visant à obtenir un règlement
hors cour nettement favorable pour les syndicats de la FTQ." Ma réponse:
Le mot "tractations" employé au pluriel a souvent, selon le petit
Robert, le sens préjoratif suivant: "négociations de
caractère officieux et occulte, où interviennent des manoeuvres
et des marchandages". Je n'ai jamais participé à des tractations
dans l'exercice normal de mes fonctions de chef de cabinet. J'ai
rencontré les avocats ouvertement à mon bureau et j'ai
rencontré M. Laliberté officiellement au même endroit.
Je n'ai jamais visé à obtenir un règlement hors
cour nettement favorable pour les syndicats de la FTQ par des manoeuvres ou des
marchandages. Ce qui est
arrivé, M. le Président, c'est qu'après
étude du dossier j'ai dit au premier ministre que j'étais
favorable à un règlement hors cour avec les syndicats
québécois et le syndicat américain pour les raisons que
j'ai mentionnées plus haut. Le journaliste m'impute des motifs partisans
alors que c'est l'intérêt public qui m'a guidé lorsque j'ai
fait cette recommandation au premier ministre.
Quatrième affirmation du journaliste: "...c'est dans le bureau du
premier ministre, à Montréal, qu'une bonne partie de ces
négociations ont eu lieu..." Ma réponse: Je n'ai jamais
négocié, c'est-à-dire - regardez dans le dictionnaire -
que je n'ai jamais établi ou négocié quoi que ce soit
entre la SEBJ et les parties adverses. Je n'ai jamais même discuté
des termes, conditions et montants du règlement avec qui que ce soit.
Enfin les parties ou leurs avocats n'ont jamais négocié en ma
présence.
Cinquième affirmation du journaliste toujours dans le même
article: "Avant de poser quelque geste que ce soit (offres de règlement,
lettres, mémoires, recommandations à leur client respectif, etc.)
les avocats consultaient régulièrement M. Boivin". Ma
réponse: Faux, et voir la réponse précédente. (10 h
45)
Sixième affirmation du journaliste, toujours dans le même
article, et je cite: "D'ailleurs, dès le 22 janvier 1979, cinq jours
après le début du procès, les avocats des principales
parties impliquées s'étaient entendus, avec la participation de
Jean-Roch Boivin, sur un projet de transaction de règlement hors cour".
Ma réponse: "Suivant le témoignage des avocats devant cette
commission, les avocats ou les parties ne s'étaient pas encore entendus
entre eux le 22 janvier sur le montant du règlement. Ils ne
s'étaient donc pas entendus sur un projet de transaction. Quant à
moi, je n'ai jamais aidé les parties à s'entendre sur ce projet
ou tout autre projet de transaction".
Septième affirmation du journaliste, toujours dans le même
article, et je cite: "C'est vraisemblablement - c'est un beau mot,
"vraisemblablement" - par sympathie envers la FTQ qui avait donné son
appui au Parti québécois lors des élections de 1976 que le
bureau du premier ministre s'est ingéré dans la
négociation du règlement hors cour." Ma réponse: "En fin
de phrase, on répète pour la nième fois que le bureau du
premier ministre s'est ingéré dans la négociation du
règlement". Mais j'admire surtout l'emploi du mot "vraisemblablement".
Il n'est malheureusement pas suffisant pour cacher une odieuse calomnie. Enfin,
ce bel article était coiffé d'une belle sous-manchette
intitulée "Jean-Roch Boivin a négocié avec les avocats".
Tout cet article est coiffé d'une belle sous-manchette que je viens de
citer.
À part les affirmations du journaliste, M. le Président,
rien dans l'article ne prouve cette sous-manchette. Il est maintenant
évident, pour toute personne désintéressée, qu'il
n'y a pas de telle preuve puisque tous les membres du conseil d'administration
de la SEBJ et tous les avocats au dossier, entendus jusqu'à ce jour,
affirment ne pas avoir négocié avec moi. J'affirme, sous serment
bien sûr, n'avoir joué aucun rôle dans les conditions du
règlement, au point que je n'en ai appris le montant que plusieurs jours
après sa conclusion. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Alors, M. Boivin, vous occupez cette fonction de chef
de cabinet du premier ministre depuis quand?
M. Boivin: Depuis le printemps ou l'été 1978, je
crois. Avant, j'étais conseiller spécial depuis le début
de 1977.
M. Duhaime: II a été question, avant votre
témoignage et, en particulier, lors de sa comparution devant cette
commission, de Me Rosaire Beaulé. Est-ce que vous pourriez rappeler
à la commission à quelle époque vous avez
été en relations d'affaires avec Me Beaulé ou
associés professionnels?
M. Boivin: Comme il l'a dit, pendant quatre ans, de 1961 à
1965.
M. Duhaime: De 1961 à 1965? Maintenant, vous-même
êtes membre du barreau?
M. Boivin: Depuis 1977, M. le Président, je ne paie plus
ma cotisation. Donc, je ne suis pas membre, je ne suis pas inscrit au tableau
de l'ordre. Avant d'occuper les fonctions que j'occupe, j'ai été
avocat de 1956 à 1976.
M. Duhaime: Pendant ces années de pratique, vous avez
été un avocat actif, je présume. Dans quel secteur du
droit avez-vous pratiqué d'une façon plus
particulière?
M. Boivin: J'étais un avocat de la piétaille,
c'est-à-dire un avocat qui devait gagner sa vie en plaidant devant les
tribunaux. J'ai plaidé devant les tribunaux pendant quinze ans
exclusivement, ou presque exclusivement, en responsabilité civile.
Ensuite, j'ai fait du droit ouvrier et un peu de droit administratif.
M. Duhaime: Bon. Maintenant, est-ce que vous pouvez dire à
la commission si d'autres personnes que vous avaient reçu un mandat du
premier ministre de suivre le dossier de cette poursuite de la SEBJ contre
les syndicats québécois et le syndicat
américain?
M. Boivin: Personne d'autre que moi n'a reçu de
mandat.
M. Duhaime: Maintenant, je voudrais qu'on en vienne à la
rencontre du 1er février 1979. Vous avez corrigé l'article de la
Presse qui mentionnait le 19 février. Je pense que c'est acquis pour
tout le monde, maintenant; tout le monde s'entend maintenant, je pense, de tous
côtés, qu'il s'agit d'une erreur manifeste. Est-ce que vous pouvez
nous dire dans quelle circonstance cette rencontre a été
organisée, d'abord, et ensuite quel a été son
déroulement?
M. Boivin: Sous toute réserve, si mon souvenir est exact,
c'est M. Saulnier qui m'a téléphoné pour demander cette
rencontre. C'est la façon dont ç'a été
organisé, si on peut employer un aussi grand mot. Deuxièmement,
la rencontre elle-même a duré environ 40, 45 ou 35 minutes, dont
25 à 30 minutes sur le sujet, c'est-à-dire sur le dossier de la
SEBJ. Le climat était amical, comme il l'est généralement
dans ce genre de rencontres. M. Laliberté n'a pas parlé, ou si
peu que point.
M. Lalonde: Ou si peu que point.
M. Boivin: Ou si peu que point. C'est une expression...
M. Lalonde: Oui, oui. M. Laliberté muet.
M. Boivin: M. Saulnier a agi un peu comme animateur de la
discussion, probablement qu'il s'autorisait de son titre de président du
conseil d'administration d'Hydro-Québec et de la SEBJ. Quant à M.
Saulnier - c'est loin, le 1er février 1979 - il me semble qu'il restait
neutre, qu'il ne laissait pas voir tellement son point de vue, quoique j'en aie
retiré l'impression - c'est une impression personnelle - qu'il
était favorable à un règlement hors cour. Quant à
M. Boyd, il était contre le règlement hors cour et il l'a dit
clairement, et à peu près dans les termes qu'il a utilisés
ici.
Selon mes souvenirs quant à ce que M. Boyd a dit - je ne
prétends jamais citer verbatim, c'est en substance - la première
question qui se posait, selon lui, c'était d'obtenir un jugement contre
les responsables pour qu'il soit clairement établi qu'il n'y avait pas
dans cette affaire de responsabilité partagée entre la SEBJ et
les défendeurs. Je pense qu'il a dit que dans les journaux ou dans le
rapport Cliche, je ne m'en souviens plus - je veux être très
honnête vis-à-vis de M. Boyd - on avait laissé planer des
questions de responsabilité partagée et il y allait de l'honneur
ou du bon renom de la SEBJ de ne pas laisser traîner cette
possibilité de responsabilité partagée. Donc, il y a eu un
jugement. Là-dessus, je ne me souviens pas si c'est moi ou le premier
ministre qui avait demandé à ces syndicats d'admettre leur
responsabilité; il va être clairement établi qu'il n'y a
pas de responsabilité partagée.
Deuxièmement, lorsqu'on lui disait -quand je dis "on", parfois
c'est M. Lévesque, parfois c'est moi - que l'incapacité
évidente des syndicats québécois de payer quelque montant
que ce soit qui puisse ressembler ou s'approcher, si vous voulez, d'un montant
possible du jugement, il disait que ça n'avait pas d'importance pour
l'instant. Je pense qu'il était logique avec son raisonnement, il
s'agissait d'abord d'établir un jugement de responsabilité, et la
question de la perception du montant du jugement était une autre
question à laquelle la SEBJ devrait voir en temps et lieu. Lorsque je
lui ai dit: Bien oui, mais supposons, pour les fins de la discussion, M. Boyd,
que vous obtenez un jugement contre les syndicats québécois pour
un montant X - que je ne voulais pas discuter parce que je ne sais rien de ce
qu'aurait été le montant du jugement - que feriez-vous avec le
jugement? Je lui ai dit: Vous l'encadreriez, le jugement? Vous le mettriez aux
filières? Qu'est-ce que vous feriez avec le jugement? Il a dit: En tout
cas, je l'aurais et ils sauraient qui est le "boss". Ce n'est pas du verbatim.
Ou ils sauraient qui est maître ou ce serait une épée, vous
savez, en faisant le geste.
J'ai dit à M. Boyd - entre parenthèses, je suis
très à l'aise pour le dire parce que j'ai beaucoup de respect
pour M. Boyd: vous avez des conceptions ouvrières patronales qui datent
d'avant 1940. Elles sont peut-être très respectables, mais je lui
ai dit: Je ne les partage pas. Là, on était toujours, comme vous
l'avez noté, sur la question d'un jugement possible contre les syndicats
québécois. Quant aux syndicats américains, j'ai dit
à M. Boyd: Votre cause est loin d'être gagnée contre le
syndicat américain. Il a dit: On a une bonne cause, l'affaire de
Gaspé Copper Mines. J'ai dit à M. Boyd de faire attention, que je
ne lui en voulais pas, qu'il n'était pas avocat mais de consulter les
avocats et de faire attention parce que sa cause n'était pas du tout
pareille à celle de Gaspé Copper Mines.
À la suite de cette discussion sur l'aspect de la
solvabilité des syndicats québécois et de la
responsabilité du syndicat américain, M. Lévesque est
intervenu. Je ne sais pas en quels termes, mais il a dit à M. Boyd qu'il
ne comprenait pas son attitude parce que lui - c'est M. Lévesque qui
parle -il dit: Ce que je comprends de cela, c'est que les syndiqués
ordinaires des syndicats québécois défendeurs ne sont pas
responsables
de cela. Ce que je comprends de la cause c'est que les syndicats
québécois ne sont pas capables de payer un montant qui ressemble
à un montant d'un jugement qui serait de 3 000 000 $, 4 000 000 $, 5 000
000 $, 7 000 000 $, 8 000 000 $ ou 17 000 000 $ - les avocats ont-ils dit ici -
et il dit en plus: Troisièmement, le syndicat américain, si je
comprends bien les questions d'avocasse-ries, la responsabilité civile
du syndicat américain et aléatoire.
Mais ce qui frappait surtout M. Lévesque - c'est M.
Lévesque qui l'a soulevé - c'est que le syndicat américain
n'avait rien eu à voir avec le saccage et il disait que cela ne tenait
pas debout d'essayer de faire payer par les Américains les dommages
causés par des Québécois. Ensuite, il parlait de
l'épargne des frais de cour qui pouvaient peut-être
s'élever à quelques millions de dollars. Il a dit très
clairement aux personnes présentes qu'il espérait fortement un
règlement hors cour. Il a répété plusieurs fois
que, quant aux modalités du règlement, ceci ne nous concernait
aucunement puisque cela concernait le conseil d'administration de la SEBJ.
Alors, ce fut en gros, M. le Président, la substance de la
rencontre.
M. Duhaime: M. Boivin, lors du témoignage de Me Aquin,
devant cette commission, je crois que c'est Me Aquin, lui-même, qui a
utilisé cette expression, qui m'a frappé, qu'il a qualifié
de "projet de transaction de déclaration multilatérale",
indiquant qu'il y avait plusieurs parties en cause. Est-ce que, à
quelque moment que ce soit, vous-même avez discuté de cette
déclaration multilatérale ou avec Me Aquin, ou avec Me Cardinal
ou avec Me Jetté ou avec Me Beaulé ou avec Me Jasmin?
M. Boivin: Pour vous aider, M. le Président, avec
personne.
M. Duhaime: Est-ce que vous connaissiez personnellement certains
des membres du conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James?
M. Boivin: Oui, M. le Président. (Il heures)
M. Duhaime: Au cours de toute cette période, qui va de
votre première journée de travail au cabinet du premier ministre
jusqu'au 13 mars 1979, qui est le jour du règlement, avez-vous fait
pression ou êtes-vous intervenu en dehors de la rencontre du 1er
février 1979 pour avoir une discussion sur ce dossier avec M. Lucien
Saulnier?
M. Boivin: M. le Président, comme je vous l'ai dit
tantôt, au début, je n'ai pas suivi vos travaux à la
télévision tout le temps, parce que alors on ne pourrait pas
travailler, mais j'ai obtenu de Me Tremblay des résumés de
témoignages des personnes qui sont passées ici sur des bouts
importants ou des bouts qui semblaient me concerner et je pense - mais je dis
cela sous toute réserve, on pourra vérifier tantôt - que M.
Saulnier a dit "au meilleur de mon souvenir". Je pense qu'il a dit cela ainsi.
Il a dit: Je n'ai pas eu de rencontres avec M. Boivin. Est-ce qu'on s'en est
parlé au téléphone? Je ne le sais pas. C'était
quelque chose de semblable. Je résume son témoignage
peut-être imparfaitement, mais mon adjoint ici va vérifier cela.
Je corrobore les propos de M. Saulnier à savoir qu'il n'y a pas eu de
rencontre. Je n'ai pas eu de rencontre avec M. Saulnier à ce sujet.
Quant au souvenir de conversations téléphoniques, je n'en ai pas,
mais je dirais que j'ai l'impression - c'est ce qui est délicat ici
quand on parle de 1978-1979 - de lui avoir parlé de cette affaire au
cours d'une conversation téléphonique où on parlait
d'autre chose. C'est pour cette raison que mon souvenir est très vague.
Ce n'était pas une grosse affaire.
M. Duhaime: Quant à M. Claude Laliberté, vous nous
avez dit tantôt dans votre déclaration préliminaire que
vous lui aviez fait part du souhait du premier ministre lors d'une brève
rencontre; c'était le 3 janvier 1979, si je me réfère
à la page 8, paragraphe 6, de votre déclaration. En dehors de
cette rencontre, avez-vous eu d'autres discussions avec M.
Laliberté?
M. Boivin: Je n'ai jamais eu d'autres discussions avec M.
Laliberté sur le bien-fondé ou sur l'opportunité pour la
SEBJ de régler cette cause hors cour. J'ai eu d'autres conversations
téléphoniques avec M. Laliberté. Par exemple, je l'ai
appelé pour avoir un renseignement - on reviendra peut-être
à cela un peu plus loin - mais je n'ai jamais eu d'autres discussions
sur le bien-fondé ou sur les arguments - mes arguments ou les arguments
du premier ministre -favorables à un règlement hors cour. Avec M.
Laliberté, lors de la rencontre du 3 janvier 1979, ce qui n'a pas
été une grande discussion bien longue, je pense... A-t-on les...
On indique: entrée et sortie, 20 minutes. S'il a attendu le
moindrement... La rencontre aurait duré, en tout cas, au maximum 20
minutes. À part cela, le 3 janvier - je ne sais pas si vous vous en
souvenez - je me suis rendu au bureau et je venais seulement pour cela.
Après lui avoir servi un café, je ne sais pas si on a
parlé de cela pendant 20 minutes. J'ai surtout parlé à M.
Laliberté très brièvement, lors de la rencontre, des
raisons - pour ne pas me répéter - que vous trouverez dans ma
déclaration à la page 2, c'est-à-dire:
1.-l'incapacité des syndicats québécois de payer; 2.- la
non-responsabilité des syndiqués ordinaires; 3.- mes très
grands doutes quant
à la responsabilité civile du syndicat américain,
et 4.- le côté inéquitable, carrément
inéquitable à mes yeux de demander aux Américains de payer
les pots qu'ils n'ont pas cassés. Ce sont à peu près les
quatre arguments que j'ai énumérés ou fait valoir à
M. Laliberté.
M. Duhaime: M. Boivin, en dehors de la réunion du 1er
février 1979, que vous avez relatée tantôt et à
laquelle assistait M. Boyd, avez-vous eu d'autres discussions, rencontres ou
conversations avec M. Boyd au sujet de ce dossier?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Duhaime: Avez-vous eu des discussions, rencontres ou
conversations avec M. Roland Giroux concernant ce dossier?
M. Boivin: Pour vous aider dans votre tâche, je n'ai
parlé à personne du conseil d'administration de cette affaire,
sauf, M. Boyd, qui était présent à la rencontre du 1er
février, sauf M. Laliberté que j'ai rencontré, sauf M.
Lucien Saulnier dans les termes dont je me suis exprimé tantôt et
possiblement -là je vais être très poli et mettre des
"possibles" parce que M. Giroux dit que je ne lui ai pas parlé de cette
affaire - il me semble avoir parlé de cette affaire une fois au
téléphone avec M. Giroux. Je ne le jurerais pas si M. Giroux
jurait le contraire, mais il me semble avoir parlé au
téléphone de cette affaire avec M. Giroux. Tous les autres
membres, je ne leur en ai pas parlé.
M. Duhaime: Avec M. Georges Gauvreau?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Duhaime: J'aime autant épuiser ma liste.
M. Boivin: Oui, parce que je n'ai pas la liste devant moi.
M. Duhaime: Avec M. Hervé Hébert? M. Boivin:
Non.
M. Duhaime: Avec Mme Nicolle Forget? M. Boivin: Non, M. le
Président.
M. Duhaime: Avec M. André Thibaudeau?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Duhaime: Avec M. Claude Roquet?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Duhaime: Avec M. Guy Monty? M. Boivin: Non, M. le
Président.
M. Duhaime: Avec M. Pierre Laferrière?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Duhaime: Depuis les derniers jours, nous avons entendu Me Yves
Gauthier qui est un de vos collaborateurs puisqu'il est attaché
politique au bureau du premier ministre. Voulez-vous dire à la
commission si à quelque moment que ce soit, vous-même, vous avez
eu des discussions avec Me Yves Gauthier concernant ce dossier?
M. Boivin: Je vais faire des reproches à la fin de cette
commission à Me Gauthier parce que c'est un cachottier. Ce qu'il a fait
dans ce dossier, je l'ai appris lors de la commission.
M. Duhaime: Vous l'avez appris lors de la commission.
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Duhaime: Me Gauthier nous a raconté, je n'ai pas la
date devant moi, je crois même que cette date n'a jamais
été clairement établie mais c'était soit la
journée où Me Michel Jasmin était en discussion, ou
s'était rendu au bureau du Me Yves Gauthier... Je vais essayer de me
souvenir du témoignage, de ce que Me Gauthier nous a dit ici, qui
rapportait vos propres remarques. Je voudrais que ce soit bien clairement
établi devant la commission. Si je me souviens bien, Me Gauthier nous a
dit que vous lui aviez dit, à une certaine occasion, dans une forme
interrogative en faisant le geste avec propres lunettes: Est-ce que tu es
encore ou est-ce que vous êtes encore tuteur du 791? Ou, Ti-Lou es-tu
encore tuteur? Je n'ai pas la transcription avec moi. Vous souvenez-vous de ces
remarques que vous auriez formulées à l'endroit de Me Gauthier?
Dans l'affirmative, pouvez-vous nous éclairer davantage?
M. Boivin: J'ai manqué cet épisode à la
télévision, il paraît que c'était drôle. Je ne
m'en souviens pas, M. le Président.
M. Duhaime: Je n'aurais pas d'autres questions pour l'instant, M.
le Président.
Le Président (M. Jolîvet): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, si vous me permettez
seulement quelques remarques préliminaires pour bien situer les
témoins qui auraient eu des questions après.
C'est en effet un témoignage important puisque la lumière
que nous sommes chargés de faire dépend de la mémoire des
participants aux réunions, cela revient essentiellement à ceci.
C'est beaucoup demander aux différents témoins que de se souvenir
des conversations qui ont eu lieu il y a plusieurs années.
Essentiellement, Me Boivin a mentionné l'article et même
analysé une bonne partie de l'article de la Presse du 17 mars. Ce que
nous tentons de faire ici, M. le Président, c'est de voir si c'est exact
que le premier ministre a trompé l'Assemblée nationale et quand
il l'aurait trompée. C'est lorsqu'il a répondu à une
question, le 20 février 1979, de la façon suivante... En toute
justice pour ceux qui nous écoutent, je vais citer la question avant la
réponse: "Deuxièmement, est-il exact que c'est dans le bureau du
premier ministre, en présence du premier ministre ou d'un de ses
représentants, qu'une partie de cette négociation de
règlement a eu lieu?"
Réponse: "Deuxièmement, ce n'est pas du tout, ni de
près, ni de loin, dans le bureau du premier ministre que le
règlement ou partie du règlement a eu lieu." "Mais il y a eu une
consultation au bureau du premier ministre?" "Oui. Avec des gens du conseil
d'administration d'Hydro-Québec et de la Société
d'énergie de la Baie James."
J'arrête là la citation parce qu'à ce moment, le
premier ministre avait commencé une longue réponse qu'il avait
introduite de cette façon: "Je crois qu'en toute bonne foi, parce qu'il
s'agit de quelque chose de très important qui concerne une
propriété publique, le député permettra que je
donne l'arrière-plan." Là, le premier ministre avait donné
l'historique, en fait, les arguments qu'on a entendus ici en faveur d'un
règlement hors cour.
Donc, ce n'est ni de près ni de loin dans le bureau du premier
ministre que le règlement ou partie du règlement a eu lieu. On a
fait un peu de sémantique autour de la table, surtout à ma
droite, à savoir ce qu'est un règlement qui a lieu. On pourra
peut-être se faire éclairer par le premier ministre lui-même
parce qu'à une première question que j'avais posée:
"Est-il exact qu'un tel règlement est envisagé...
M. Duhaime: À quelle page?
M. Lalonde: Toujours à la même date, page 5739. Le
premier ministre avait dit: "II est exact qu'il est question d'un
règlement. C'est même, paraît-il, pour ce que j'en sais,
assez avancé." Si le premier ministre parle du règlement, de la
transaction, du document signé au mois de mars, il ne peut
répondre de cette façon. S'il y a un règlement qui est
avancé, ce sont les négociations qui sont avancées. C'est
pour cela que je pense qu'en se faisant éclairer par le premier ministre
on peut voir que, lorsqu'il dit qu'une partie du règlement ou tout le
règlement n'a pas eu lieu dans son bureau, dans mon esprit, cela
comprend les discussions ou les tractations -sans sens péjoratif - ou,
enfin, les échanges, les entretiens.
C'est donc sur la mémoire des membres du bureau du premier
ministre, entre autres, qui sont encore à l'emploi du premier ministre,
que nous devons compter. Cela impose un fardeau assez difficile à ces
témoins et il faut le comprendre.
Si on examine la preuve fournie jusqu'à maintenant, y compris le
document que le bureau du premier ministre ou le premier ministre a
déposé ici à cette commission, la liste des rencontres et
des autres échanges, lunches, qu'on a appris ici, à mesure que se
déroulaient nos travaux, on arrive, Me Boivin, à une douzaine -
et je dis une douzaine pour être bien en deçà de
l'exagération - ou une quinzaine d'interventions ou de rencontres, de
conversations de votre part. Vous êtes le chef de cabinet du premier
ministre; vous l'étiez à ce moment-là. Le premier ministre
est le chef du gouvernement.
Ma première demande - je pense, M. le Président, que vous
allez la permettre -c'est que le témoin nous décrive quelles sont
ses fonctions. Qu'est-ce qu'un chef de cabinet d'un premier ministre? Quels
sont ses pouvoirs? Ensuite, je pense qu'on pourra aller plus directement vers
ce qui nous concerne.
M. Boivin: M. le Président, quand les journalistes me
demandent quelle est ma fonction, je leur dis que c'est bien difficile à
décrire. Et pour la question aussi: Qu'est-ce qu'un chef de cabinet du
premier ministre? Je pense qu'elle est théorique parce qu'un chef de
cabinet de premier ministre fait un peu... Cela dépend de la
personnalité et de la perception du rôle qu'en a le premier
ministre lui-même. On peut avoir un chef de cabinet plus administratif,
on peut avoir un chef de cabinet plus politique, on peut avoir un chef de
cabinet, enfin... Cela dépend de la personnalité du premier
ministre, de la personnalité du chef de cabinet et des relations qu'il y
a entre les deux. Mais j'imagine que vous ne voulez pas une discussion
théorique comme celle-là. Moi non plus. Vous voulez savoir ce que
je fais, moi, j'imagine? (Il h 15)
M. Lalonde: ...par rapport à celui qu'on nomme le
fonctionnaire numéro un, le secrétaire du Conseil
exécutif. On sait que le premier ministre est le chef de
l'Exécutif. M. Louis Bernard, aujourd'hui - il y en avait d'autres
avant, il y en aura d'autres dans l'avenir - est ce qu'on appelle le
fonctionnaire numéro un. Le chef de cabinet, par rapport à cela,
est-ce que c'est plus
politique? Est-ce que c'est moins administratif? Je vous laisse...
M. Boivin: Comme vous le savez, M. le Président, le
secrétaire général du gouvernement est le sous-ministre du
ministère du Conseil exécutif. Dans le ministère du
Conseil exécutif, il y a une case qui s'appelle le cabinet du premier
ministre ou un programme, pour parler comme si on était devant la
commission des crédits. Le cabinet du premier ministre, c'est l'appareil
politique de soutien du premier ministre.
M. Lalonde: Est-ce que vos fonctions sont plutôt
administratives ou plutôt politiques?
M. Boivin: Plutôt politiques.
M. Lalonde: J'aimerais, M. le Président, si le
témoin le permet, commencer l'examen des nombreuses rencontres ou
conversations du 3 janvier 1979. Je pense, d'ailleurs, que c'est un peu
conforme à votre mémoire. Vous avez, dans votre mémoire,
décrit votre préparation et, ensuite, il me semble que la
première intervention extérieure au premier ministre est celle du
3 janvier. Vous nous avez dit, dans votre mémoire, à la page 8:
"J'ai eu une brève rencontre avec M. Claude Laliberté pour lui
dire que le premier ministre était favorable à un
règlement hors cour." Je vous cite encore: "Si ma mémoire est
fidèle, M. Laliberté m'a alors dit qu'il verrait à
soumettre cette question au conseil d'administration". Est-ce que M.
Laliberté a répondu à votre demande ou à votre
message? Qu'a-t-il dit?
M. Boivin: Je ne répéterai pas tout le temps,
pendant deux ou trois jours, que ce sont de vagues souvenirs. Ce sont toujours
des souvenirs, je l'ai dit au début de ma déclaration. Le
souvenir que j'en garde, c'est que M. Laliberté a été
prudent. Je l'en félicite, dans le fond, parce que je trouve que
c'était son rôle. En d'autres termes, lorsqu'il est sorti de mon
bureau, le 3 janvier - je ne sais pas si c'est le sens de votre question - je
ne savais pas, moi, si M. Laliberté allait faire une recommandation
favorable à un règlement hors cour ou non.
M. Lalonde: Est-ce que M. Laliberté vous a indiqué
des arguments à l'encontre de votre demande?
M. Boivin: Non, il s'est presque contenté d'écouter
ce que je lui disais lorsque j'ai développé les arguments. C'est
cela.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez fait rapport à M.
Lévesque, votre patron, de cette réunion?
M. Boivin: Honnêtement, je ne le sais pas, mais j'imagine
que oui.
M. Lalonde: Est-ce que vous étiez seul avec M.
Laliberté ou s'il y avait une tierce partie?
M. Boivin: J'étais seul avec M. Laliberté.
M. Lalonde: Est-ce que - par rapport à votre
réponse sur le rapport au premier ministre, je ne suis pas trop
optimiste quant à la réponse à la prochaine question,
parce que vous ne vous en souvenez pas tellement clairement - vous pouvez nous
dire quelle a été la réaction du premier ministre à
votre rapport de la réunion du 3 janvier?
M. Boivin: Je m'en souviens encore moins, M. le
Président.
M. Lalonde: En revenant un peu en arrière,
c'est-à-dire avant Noël, lorsque vous avez, selon votre
déclaration, fait un court rapport verbal - à la page 7 de vos
déclarations - à M. Lévesque, est-ce qu'il a
été question, à ce moment-là, de la composition du
conseil d'administration de la SEBJ?
M. Boivin: Aucunement.
M. Lalonde: Avant l'intervention de M. Laberge, le
président de la FTQ, on retrouve dans votre mémoire, à la
première page, vous dites: M. Laberge vous a
téléphoné et il argua que la SEBJ devait régler la
cause hors cour. Est-ce qu'avant cette intervention que vous situez, je pense,
au mois de novembre, à l'automne, vous aviez discuté de cette
question soit avec M. Pierre-Marc Johnson alors ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ou des membres de son
cabinet, soit avec M. Guy Joron alors ministre de l'Énergie et des
Ressources ou des membres de son cabinet?
M. Boivin: Je n'ai jamais discuté de la chose avec les
deux ministres dont vous venez de mentionner les noms, sauf qu'une fois en
passant - je ne suis pas capable de vous situer quand c'est arrivé - M.
Johnson a dit: si je comprends bien, Jean-Roch, cette cause-là
relève du bureau du premier ministre. J'ai dit oui. Début et fin
de la conversation avec M. Johnson. Avec M. Joron, je pense que je n'ai
même pas parlé aussi brièvement que cela de la cause avec
lui.
M. Lalonde: Est-ce qu'on vous a informé des rencontres
qu'il y aurait eu entre des membres du cabinet de M. Johnson
à ce moment et des membres ou un membre du cabinet de M. Joron
sur cette question vers la fin de l'été 1978?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Lalonde: Vous avez dit tout à l'heure - je reviens
après le 3 janvier -qu'avec M. Laliberté vous n'avez pas eu
d'autre discussion, si je vous cite bien, c'est-à-dire vous n'avez pas
eu à échanger à une autre occasion des arguments en faveur
de votre position mais qu'il y aurait eu d'autres conversations. Est-ce que
vous pouvez être plus précis sur le contenu des conversations et
la date?
M. Boivin: Oui, par exemple - mais j'imagine que j'aurai à
y revenir si jamais vous me faites l'honneur de m'interroger sur les
différentes rencontres...
M. Lalonde: On vous fera l'honneur.
M. Boivin: Merci beaucoup.
M. Lalonde: Puisque vous le demandez.
M. Boivin: Merci. Je vais vous donner un ou deux exemples si vous
le voulez, parce que je ne me souviens pas. Le 15 janvier la cause commence. Je
pense qu'il y avait eu un conseil d'administration le 9 ou avant et le conseil
d'administration n'a pas décidé de régler la cause puisque
le procès se déroule. Bien sûr que si M. Jasmin ou M.
Beaulé m'appellent et me disent "quand est-ce la prochaine
réunion du conseil?" je place un appel téléphonique et je
demande à M. Laliberté quand a lieu la prochaine réunion
du conseil, et qu'il me dit telle date, je dis à M. Jasmin: la prochaine
réunion du conseil sera telle date.
Autre exemple, dont je ne me souvenais pas mais dont le
témoignage de M. Aquin m'a fait me souvenir. Me Aquin dit dans son
témoignage que je l'aurais appelé - je ne mets aucunement en
doute la parole de M. Aquin s'il l'a affirmé ici - le 8 février
pour lui dire, est-ce vrai que la SEBJ exige la reconnaissance de
responsabilité des syndicats? C'est un exemple que je n'ai pas
cité mot à mot.
Je ne sais pas si c'est avant la conversation que j'ai eue avec M. Aquin
ou après - mais je présume que c'est avant pour que ce soit
logique - Me Jasmin m'avait dit: c'est tout à fait inhabituel que la
SEBJ exige notre reconnaissance de responsabilité. Je me souviens - et
c'est le témoignage de Me Aquin qui m'en a fait me souvenir -d'avoir
téléphoné à M. Laliberté et de lui avoir
dit: est-il exact que la SEBJ exige la reconnaissance de responsabilité
des syndicats défendeurs? M. Laliberté me rappelle et à ce
moment-là au téléphone me dit que la question de la
responsabilité est très importante, à savoir qu'il n'y a
pas de responsabilité partagée entre la SEBJ et les
défendeurs. J'ai dit: cela a bien du bon sens. Je rappelle M. Jasmin et
lui dit: en effet la SEBJ exige la reconnaissance de responsabilité.
C'est un exemple.
Est-ce qu'il y aurait eu d'autres exemples?
M. Lalonde: Est-ce que Me Jasmin, à ce moment-là,
vous a indiqué qu'il devait obtenir l'information de vous parce que les
avocats de la SEBJ ne la lui donnaient pas?
M. Boivin: Savez-vous, je vais essayer de choisir mes mots, parce
que je trouve cela un peu délicat entre des membres du barreau; mais, ce
n'est pas dérogatoire ou quoi que ce soit. Pourquoi Me Jasmin est-il
venu si souvent à mon bureau? L'une des raisons, je devrais dire, pour
lesquelles Me Jasmin est venu si souvent à mon bureau, et l'une des
raisons de cet appel au sujet de la responsabilité - c'est qu'ils me
l'ont dit une fois - je suis obligé de vous le dire, et cela me semble
une explication plausible. Me Beaulé et Me Jasmin m'ont dit, une fois,
qu'ils n'étaient pas certains que leurs messages, que leurs arguments,
en faveur d'un règlement hors cour, étaient bien transmis
à la SEBJ par les avocats de Geoffrion et Prud'homme et qu'ils se
demandaient si le bureau d'avocats Geoffrion et Prud'homme était
favorable à un règlement hors cour ou s'il ne faisait pas en
sorte qu'il n'ait pas lieu. Alors, je présume qu'il a voulu passer par
moi pour vérifier cette information au sujet de la
responsabilité, laquelle, comme vous le dites, je présume, cette
exigence, avait été demandée ou transmise par le bureau de
Geoffrion et Prud'homme à Me Jasmin.
M. Lalonde: Dans votre description de la réunion du 1er
février, vous avez, je pense - je ne veux pas vous citer incorrectement,
on n'a pas encore la transcription - dit à peu près ceci, pour
répondre à un argument de M. Boyd - que ce soit vous, ou M.
Lévesque - vous avez eu la prudence de ne pas l'affirmer parce que vous
ne vous en souveniez pas exactement. M. Boyd voulait obtenir un jugement, en
partie parce qu'il voulait que ce soit bien clair que la SEBJ n'était
pas responsable de ce qui est arrivé et ne voulait pas que ce soit
reconnu; il voulait laver son honneur, etc., et que, soit M. Lévesque ou
vous aviez rétorqué que si les syndicats reconnaissaient leur
responsabilité, cela revenait au même; cela accomplissait ce
résultat. Il me semble que vous avez dit cela.
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Bon. Alors, pourquoi -j'essaie de me souvenir, c'est
le 1er février le 8 février, appeler Geoffrion et Prud'homme pour
leur demander si c'était exact qu'ils demandaient la reconnaissance de
la responsabilité?
M. Boivin: Je trouve que vous avez tout à fait raison de
soulever cette question, M. le député, parce que, quand j'ai
entendu Me Aquin... Me Aquin est un ami, il est honnête et je ne mets pas
sa parole en doute. Il doit avoir des notes, donc cela doit être vrai que
je l'ai appelé le 8 février. Mais cette question s'est
soulevée avant le 1er février, bien avant. Pourquoi je l'aurais
appelé le 8 février? Cela m'étonne, mais il l'affirme,
donc, je le crois. Pourquoi je l'ai appelé le 8 février? Cela
s'est soulevé bien avant cette question-là et bien avant
même le 1er février.
M. Lalonde: Parlant de Geoffrion et Prud'homme, M. le
Président, Me Boivin me pardonnera, non pas de faire du
coq-à-l'âne, mais, enfin, de revenir en arrière. J'ai la
page 2 de son mémoire où vous dites au paragraphe 4: "Avant de me
former une opinion, j'ai écouté les représentations de MM.
Laberge, Beaulé et Jasmin." Et, je comprends - vous me corrigerez si je
fais erreur - du déroulement de votre mémoire, que vous vous
êtes formé une opinion avant de faire un court rapport verbal
à M. Lévesque, avant le congé de Noël, je
présume, puisque vous lui avez fait votre recommandation.
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Donc, c'est en 1978? On était en 1978 à
ce moment-là?
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Donc, vous avez eu des rencontres avec Me
Beaulé? Je pense que c'est établi. Le 1er décembre, il
vous remet sa défense du 28 novembre et je pense que c'est le Il
décembre aussi que vous avez une réunion avec lui, avec Me
Beaulé, si mon souvenir est exact.
M. Boivin: C'est indiqué ici, le Il décembre.
M. Lalonde: En ce qui concerne M. Jasmin, on y reviendra. Mais,
vous dites: "J'ai pris des informations au sujet de la poursuite auprès
du bureau d'avocats Geoffrion et Prud'homme." Et, à moins que j'aie
manqué un petit bout de la longue preuve qui a été faite
ici, je ne me souviens pas qu'on ait établi qu'il y a eu des rencontres,
ou des conversations téléphoniques, avec les avocats de Geoffrion
et Prud'homme, en 1978. (Il h 30)
M. Boivin: M. le Président, pour vous montrer que la
mémoire est lointaine, je ne me souvenais pas de la rencontre du 1er
décembre avec M. Beaulé à Québec. Maintenant que M.
Beaulé a témoigné qu'elle a eu lieu, je me souviens
qu'elle a eu lieu. Comme l'a dit M. Beaulé, il m'a remis une copie de
son plaidoyer. Je ne l'ai pas relu dernièrement, mais il m'apparaissait
assez catégorique quant à la négation de
responsabilité de son client. Je suis chef de cabinet du premier
ministre, il y a une cause prévue, mais je n'agis pas à titre
d'avocat.
J'étais étonné que Me Beaulé, dans son
plaidoyer, soit aussi catégorique quant à la négation de
responsabilité et que la SEBJ ait quand même poursuivi son client.
Je suis allé au bureau de Geoffrion et Prud'homme en décembre
1978 où j'ai vu Me Jean-Paul Cardinal et il m'a fait lire ou j'ai pris
copie - je ne saurais l'affirmer, mais j'ai fait un des deux - l'opinion dont
je parle, celle du mois de décembre...
M. Lalonde: 1975.
M. Boivin: Décembre 1975.
M. Lalonde: La première opinion de toutes.
M. Boivin: Voilà.
M. Lalonde: Avez-vous terminé? Oui. Est-ce que vous pouvez
situer de façon plus précise la date de la rencontre avec Me
Jean-Paul Cardinal au bureau de Geoffrion et Prud'homme en décembre
1978?
M. Boivin: Non, je ferais des présomptions. Je pourrais
m'imaginer toutes sortes de choses à cause des dates, mais je ne m'en
souviens pas.
M. Lalonde: C'est sûrement après le 1er
décembre.
M. Boivin: Ah, sûrementl
M. Lalonde: Et avant votre rapport au premier ministre, donc
avant Noël.
M. Boivin: C'est exact.
M. Lalonde: Est-ce que ce serait aussi, si je peux me permettre
cette question, après la rencontre du Il décembre avec Me
Beaulé ou avant?
M. Boivin: C'est ce que je voulais vous dire tantôt en
disant que je ne le savais pas. Je ne le sais pas.
M. Lalonde: À cette rencontre du Il
décembre avec Me Beaulé, avez-vous discuté de son
plaidoyer qu'il vous avait remis le 1er décembre?
M. Boivin: Je vais souvent employer la même tournure de
phrase en vous répondant, ça va devenir fastidieux pour vous. Si
la réunion du Il décembre n'avait pas été inscrite
sur la fiche, je ne saurais pas qu'il y avait eu une réunion le Il
décembre. Donc, je ne m'en souviens pas. Comme elle est inscrite et
comme elle fait suite à la réunion du 1er décembre, je
présume que M. Beaulé a dû me faire voir ses arguments en
faveur d'un règlement hors cour. Ne me demandez pas de me souvenir de ce
qu'on s'est dit le Il décembre. Il faut bien qu'il y ait une logique
dans la vie, de temps en temps. Il m'a vu le 1er décembre et le Il
décembre, il a dû plaider en faveur d'un règlement hors
cour. Ce sont des suppositions que je fais.
M. Lalonde: Vous vous souvenez de façon assez claire et
avec beaucoup de détails de la réunion du 1er février.
M. Boivin: Disons que ce n'est pas pareil, n'est-ce pas?
M. Lalonde: Non. Je ne sais pas s'il y a eu un langage aussi vert
dans celle du Il décembre.
M. Boivin: Non, je ne remarque pas le langage vert, alors
ça ne me frappe pas.
M. Lalonde: Je vous posais la question concernant le contenu de
la réunion du Il décembre avec Me Beaulé pour vous aider
à situer la réunion, dont je ne connaissais pas l'existence
jusqu'à ce que vous veniez ce matin, avec Geoffrion et Prud'homme.
Autrement dit, si vous aviez dit: J'ai rencontré Geoffrion et Prud'homme
avant le Il décembre, je vous aurais demandé si vous aviez
discuté de l'opinion de décembre 1975 de Geoffrion et Prud'homme
avec Me Beaulé. Cela peut vous aider à vous situer.
M. Boivin: M. le député, je crois savoir par votre
biographie que vous avez déjà exercé le droit.
M. Lalonde: Que j'ai quoi? M. Boivin: Je crois
savoir...
M. Lalonde: Nous étions presque ensemble à
l'université, Me Boivin, vous vous souvenez?
M. Boivin: Ce n'est peut-être pas officiel.
M. Lalonde: J'ai été admis en 1957 et vous en
1956.
M. Boivin: Ce n'est peut-être pas officiel, je connaissais
plus votre frère que vous, mais enfin.
M. Lalonde: C'est la même chose pour mon frère.
M. Boivin: Concernant votre frère, il y a des choses plus
personnelles dont je ne ferai pas état ici.
M. Lalonde: Mais qui ne sont pas dérogatoires, sans
doute.
M. Boivin: Aucunement, elles sont même flatteuses pour
lui.
Vous m'avez fait perdre le fil de votre question.
M. Lalonde: Vous m'avez demandé si j'avais une formation
juridique à la suite de la question que je vous avais posée.
M. Boivin: C'était une question de rhétorique. Vous
l'aviez bien saisie. Non, mais vous m'aviez posé une autre question
avant.
M. Lalonde: Oui. C'était la réunion du Il
décembre. Je voulais situer celle de Geoffrion et Prud'homme.
M. Boivin: J'ai toujours pris soin, M. le Président, de ne
pas discuter des opinions de l'un en présence de l'autre. En d'autres
termes, je n'ai pas dit à M. Beaulé que j'étais
allé m'enquérir de l'opinion de M. Cardinal et qu'elle dit telle
chose, puis comment la démolir. Et inversement.
M. Lalonde: Si vous me permettez, vous avez dit tout à
l'heure que vous étiez étonné que, dans le plaidoyer de Me
Beaulé, vous retrouviez une dénégation de
responsabilité catégorique ou, enfin, totale...
M. Boivin: Non, je m'excuse, M. le député...
M. Lalonde: Vous avez fait de la responsabilité civile
pendant une vingtaine d'années, est-ce que ce n'est pas courant?
M. Boivin: Non, non. Ce que je voulais dire, M. le
député, je me suis sûrement très mal exprimé,
puisque vous avez mal compris...
M. Lalonde: Ah bon! C'est ce que j'ai compris.
M. Boivin: Alors, c'est parce que c'est ma faute. J'ai
été étonné de l'opposition de la distance, si vous
voulez, entre les deux
positions, c'est-à-dire d'un côté, le syndicat
américain qui affirme catégoriquement - et vous connaissez le
style de M. Beaulé et par écrit, il le fait aussi avec beaucoup
de vigueur - que sa cliente n'est pas responsable. Et moi, cela ne
m'étonne pas en soi parce que je viens de dire, dans mon mémoire,
que je suis très très sceptique, pour ne pas dire davantage,
quant à la responsabilité civile du syndicat américain.
Donc, la position de M. Beaulé ne m'étonne pas du tout. Mais ce
qui m'étonne - j'ai dit, à la SEBJ, ce ne sont pas des fous
complètement - c'est qu'elle a quand même poursuivi ce syndicat.
Donc, elle doit avoir des raisons; donc, je vais voir chez M. Cardinal, enfin
chez Geoffrion et Prud'homme.
M. Lalonde: Est-ce que, lors de cette réunion en
décembre au bureau de Geoffrion et Prud'homme, Me Cardinal vous a
expliqué, au-delà de simplement vous remettre une copie ou,
enfin, vous laisser prendre connaissance de leur opinion de trois ans
auparavant, quelle était la position de la SEBJ là-dessus?
M. Boivin: Non. Je ne lui ai pas demandé non plus. Vous
voulez dire, la position...
M. Lalonde: De la SEBJ sur la poursuite.
M. Boivin: Cela ne m'est pas venu à l'esprit de lui poser
cette question-là. Je vois qu'il y a une poursuite de la SEBJ contre les
défendeurs, donc, c'est clair que la SEBJ poursuit. Il y a une poursuite
officielle enregistrée en cour.
M. Lalonde: Je veux seulement comprendre.
M. Boivin: Oui, je suis sûr que je ne comprends pas votre
question.
M. Lalonde: Non, je veux seulement comprendre ce qui s'est
passé dans les faits, justement lors de cette réunion. J'ai
compris jusqu'à maintenant que vous avez, soit obtenu copie ou pris
connaissance de l'opinion de l'étude Geoffrion et Prud'homme de 1975. Je
veux vous demander si, au-delà de prendre connaissance de cette opinion,
vous avez eu une conversation ou un entretien avec Me Cardinal?
M. Boivin: Au-delà de cela?
M. Lalonde: Au-delà de prendre... Avez-vous simplement lu
l'opinion ou bien si vous avez discuté avec lui?
M. Boivin: Non, vous savez bien... Je connais Me Cardinal.
J'entre dans son bureau et je lis une opinion. J'en parle avec lui, bien
sûr. Je ne suis pas un lecteur muet. Je lis, j'en discute
brièvement. Là, je vais encore faire des hypothèses et
c'est très mauvais, quand on témoigne, de faire des
hypothèses, mais... Je pense que j'ai apporté une photocopie de
l'opinion. Je n'en suis pas sûr. Il faudrait quasiment demander à
Me Cardinal.
Comme vous le savez, on ne peut pas apprécier à sa juste
valeur une opinion juridique sur une simple lecture, somme toute, relativement
assez rapide quand même. Parce que je me souviens lui avoir
téléphoné après, à Me Cardinal, pour lui
avoir dit, toujours en substance. J'ai encore des gros doutes quant à la
responsabilité du syndicat américain. Là, Me Cardinal m'a
dit: Je vais consulter Me Jetté et je vais te rappeler. Et là, il
m'a dit en substance ce qui suit. En substance. Je ne voudrais jamais
prétendre que je cite Me Cardinal. Je dis, en substance, il m'a dit ce
qui suit: Nous avons, au vu des procédures, un lien de droit apparent.
Le reste dépend de la preuve qui sera faite. Il se peut qu'on gagne, il
se peut qu'on perde. Autant à poursuivre, il valait mieux poursuivre
tout le monde, surtout qu'on était proche de la prescription. Quant
à moi, comme avocat, cela me satisfaisait. Je comprenais les raisons
pour lesquelles il avait procédé de cette façon.
M. Lalonde: Donc, vous avez eu, après cette rencontre avec
Me Cardinal au bureau de Geoffrion et Prudhomme en décembre 1978, si
j'ai bien compris, deux autres conversations, c'est-à-dire que vous avez
appelé Me Cardinal pour avoir des informations additionnelles et il vous
a rappelé après, dit-il, avoir consulté Me Geoffrion.
Est-ce que c'est cela?
M. Boivin: Oui, mais quand vous dites "deux autres", j'ai
peut-être appelé deux autres fois, mais ces deux-là, je
m'en souviens.
M. Lalonde: Oui, c'est cela. Je parle de ces deux-là. Et
c'est en décembre, toujours?
M. Boivin: Toujours.
M. Lalonde: Avez-vous eu d'autres conversations ou rencontres
avec des avocats de Geoffrion et Prud'homme, à part ces deux appels
téléphoniques et cette rencontre qui se situent en
décembre 1978 et avant le lunch du 2 février 1979?
M. Boivin: Le lunch dont je ne me souvenais pas et dont ils ont
parlé ici, à part ce lunch.., entre le 2 février, vous
dites... entre le temps des fêtes et le 2 février?
M. Lalonde: Oui, oui.
M. Boivin: Je regarde là... s'ils ne sont pas venus au
bureau, est-ce que je serais allé au bureau? Ma réponse serait:
Cela m'étonnerait; je croirais que non.
M. Lalonde: Si vous me le permettez, j'aimerais simplement
remettre à plus tard les questions que j'aurais à vous poser en
ce qui concerne votre argumentation, parce que vous exprimez une opinion dans
votre mémoire, à savoir que vous vous êtes fait une opinion
quant à l'incapacité évidente, la
non-responsabilité, etc.
M. Boivin: Je ne permets rien, M. le Président, parce que
j'imagine que ce n'est pas à moi de permettre. C'est au
député de...
M. Lalonde: Non, non. Je veux simplement vous expliquer que si je
n'en parle pas maintenant, ce n'est pas parce que je l'accepte. Je veux tout
simplement vous rassurer là-dessus.
Vous dites à la page 6 de votre mémoire: "À titre
de chef de cabinet du premier ministre, il ne m'appartenait pas, cependant, de
trancher cette question ni même d'émettre une opinion juridique
formelle. Il me suffisait de constater que cette responsabilité civile
était fort aléatoire." Dans vos fonctions, que ce soit à
cette époque ou depuis que vous occupez ce poste jusqu'à
maintenant, vous est-il arrivé souvent d'examiner les opinions
juridiques données par les avocats des commissions, des régies,
des sociétés d'État et ensuite d'intervenir comme vous
l'avez fait auprès du président de cette société
d'État pour lui dire ce qu'était le désir du premier
ministre?
M. Boivin: N'importe quand, quand le premier ministre me le
demande, je le fais, à moins qu'il ne me demande quelque chose de
criminel ou d'illégal, ce qui n'arrive pas. Je n'ai pas de
problème avec cela.
M. Lalonde: Vous est-il arrivé, à d'autres
occasions, d'examiner les opinions juridiques d'un avocat d'une
société d'État?
M. Boivin: Les opinions juridiques des avocats d'une
société d'État? Non, je ne le pense pas. Oui, excusez-moi
- mais presque par curiosité, parce que je n'avais pas à
émettre d'opinion - j'ai étudié très longuement,
presque par déformation professionnelle et par ennui de l'exercice de ma
profession - je m'ennuie d'exercer ma profession - j'ai étudié
longuement les...
M. Lalonde: Qu'à cela ne tienne. Si vous voulez y
retourner, vous savez, on ne vous en empêche pas.
M. Boivin: On ne sait jamais. Parfois, on pense perdre des
élections et on les gagne. Les mandats se prolongent.
Des voix: Ahl Ah!
M. Lalonde: Enfin! Ne parlons pas de politique ici. Une autre
fois.
M. Boivin: J'ai étudié longuement, mais presque par
curiosité - je n'avais pas de mandat précis, sauf pour faire un
résumé assez bref à M. Lévesque - les opinions
juridiques volumineuses et savantes dans le cas de Churchill Falls. (Il h
45)
M. Lalonde: Bon! Je fais encore un petit parcours de votre
mémoire. Vous affirmez, à la page 7, au premier paragraphe, vers
le milieu: "L'équité la plus évidente commandait cependant
une telle recommandation." Vous parlez de la recommandation que vous avez faite
au premier minstre pour la cessation de la poursuite. C'est juste dans les
lignes précédentes.
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Lalonde: Puisqu'il était admis de tous que le syndicat
américain n'avait pas réellement participé au saccage. De
tous, de qui?
M. Boivin: Tous, c'est tout le monde. Même Geoffrion et
Prud'homme.
M. Lalonde: Ah boni vous parlez de ceux qui vous ont
conseillé sur ce sujet.
M. Boivin: De tous, c'est-à-dire les gens impliqués
dans ce dossier.
M. Lalonde: Est-ce qu'avant de faire votre recommandation
à M. Lévesque, à laquelle vous vous reportez au bas de la
page 7, vous avez aussi discuté avec Me Jasmin?
M. Boivin: Je l'ai rencontré - c'est écrit ici - le
4 décembre, le 12 décembre, le 15 décembre, le 16
décembre. Vous voulez dire discuté de ma recommandation à
M...
M. Lalonde: Excusez-moi. Est-ce qu'avant de faire votre
recommandation au premier ministre que vous décrivez ici, vous avez
parlé à Me Jasmin? Parce que là, on a établi que
vous avez parlé à Me Beaulé le 1er et le Il
décembre, à Me Cardinal à quelques reprises. Je vous
posais la question: Est-ce que vous avez rencontré Me Jasmin pour
discuter de cette question de la cessation des poursuites?
M. Boivin: Suivant la liste des
rencontres émise par le bureau du premier ministre, jel'ai rencontré le 4 décembre.
M. Lalonde: Le 4 décembre.
Pouvez-vous nous décrire ce qui s'est passé le 4
décembre 1978 lorsque Me Jasmin vous a rencontré? Qui avait
convoqué la réunion?
M. Boivin: La même phrase fastidieuse que tantôt. Je
ne m'en souviens pas du tout. Vu qu'elle est là, elle est
indiquée: le 4 décembre, Me Michel Jasmin. Je suis sûr que
je l'ai rencontré.
Deuxièmement, qu'est-ce qu'on s'est dit: Le même
raisonnement de tantôt au sujet de Me Beaulé. Me Jasmin voulait me
convaincre... je ne m'en souviens pas du tout, mais cela m'apparaît
logique de présumer que Me Jasmin voulait me convaincre de
l'opportunité pour la SEBJ de régler hors cour. Je me souviens
des raisons parce qu'il les répétait tout le temps chaque fois
que l'on se recontrait, c'était même fastidieux, je dois vous le
dire: l'incapacité de payer. Les arguments n'étaient pas les
mêmes pour tout le monde et je n'attachais pas la même importance
à tous les arguments.
Me Jasmin insistait sur l'incapacité de payer des syndicats
québécois. Il insistait sur la non-responsabilité des
syndiqués ordinaires, le rapport Cliche en somme. Ce sont deux raisons.
Comme il ne parlait pas du syndicat américain, on va sauter par dessus.
Il insistait beaucoup sur la dernière raison que j'ai mentionnée
dans mon mémoire à la page 7-E. Je la qualifie, je dis: enfin,
mais de façon subsidiaire.
Est-ce que je parle trop fort M. le Président?
M. Lalonde: Non, le président et quelques autres membres
s'inquiétaient de ce que la loi qui interdit de fumer dans les lieux
publics ne soit pas encore appliquée.
Le Président (M. Jolivet): Vous parlez pour moi d'une
façon ou d'une autre.
M. Boivin: J'ai cessé de fumer depuis 18 mois alors...
M. Lalonde: Je parle d'un membre de la commission.
M. Boivin: Me Jasmin insistait beaucoup sur ce que j'ai
exprimé dans mes mots à moi ici: le climat sur le chantier
était bon, la productivité excellente puisque les travaux
étaient de six mois en avance sur l'échéancier
prévu. Il insistait beaucoup sur cela. Je dois vous avouer en toute
honnêteté, c'est pour cela que j'ai écrit dans mon
mémoire "de façon subsidiaire" que j'attachais moins d'importance
à cet argument. Je trouvais que pousser à la limite, cet argument
était dangereux et pouvait équivaloir, excusez l'expression, je
ne veux pas du tout qualifier Me Jasmin ou ses clients, s'il était
poussé à sa limite, dis-je, s'il était grossi et s'il
était caricaturé, à presque du chantage. En d'autres
termes: on vous a fait des dommages, maintenant qu'on est gentil, ne nous
faites pas payer. Je le qualifie de façon subsidiaire. J'y attachais une
importance très secondaire. Mais ce n'est pas moi qui ai
décidé, alors ce n'est pas important.
M. Lalonde: Je vous avais posé une question sur la
réunion du 4 décembre 1978 avec Me Jasmin. Je ne pense pas
déformer votre pensée en disant que vous m'avez répondu
d'une façon assez générale sur toutes les réunions
que vous avez eues avec Me Jasmin. Autrement dit, est-ce que vous m'avez dit
que c'était le 4 décembre que Me Jasmin vous a fait valoir ces
arguments?
M. Boivin: Je dis que je le présume et que cela
m'apparaît logique. Il faut bien qu'il me fasse valoir des arguments, sa
cause s'en vient le 15 janvier et il sait bien que je vais aller en vacances
comme tout le monde dans le temps des fêtes, alors je présume que
c'est à ce moment qu'il me fait valoir ses arguments. Il me semble que
ce n'est pas déraisonnable de présumer cela.
M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez... Enfin, avez-vous
répondu à Me Jasmin dans ces entretiens? Est-ce que vous avez
participé à une discussion?
M. Boivin: Je ne sais pas si on appelle cela des discussions. Je
faisais attention, parce qu'à cause de ma fonction il ne faut pas que
j'engage trop... Même si je ne parle pas au nom du premier ministre, il
ne faut pas donner trop d'espoir non plus. J'ai toujours pris soin de surtout
écouter et de poser des questions.
M. Lalonde: Est-ce que vous vous souvenez de quelles
questions...
M. Boivin: Mais je dois vous avouer, M. le Président, pour
peut-être éviter d'autres questions, quitte à ce que je me
sois trompé c'est autre chose si j'ai un mauvais jugement - mais avec Me
Jasmin je trouve que les conversations, dans le fond, étaient assez
simples parce que c'était évident quant à moi - je ne suis
pas un juge et je ne suis pas là pour rendre jugement - que ses clients
étaient responsables. Alors...
M. Lalonde: Excusez-moi, je n'ai pas saisi la fin de votre
phrase.
M. Boivin: J'ai dit que quant à moi
c'était évident que ses clients étaient
responsables. Alors il n'y avait pas de discussions telles que: mes clients ne
sont pas responsables, mes clients sont responsables. Il a peut-être
essayé de le dire, je ne le sais pas, mais je n'ai jamais
écouté cela avec beaucoup de sérieux. Quant à moi
c'était fait, ils étaient responsables.
Cela m'apparaissait évident aussi qu'ils n'étaient pas
capables de payer un montant approchant, comme je m'en exprime dans mon
mémoire, le montant réel des dommages. J'ai employé cette
expression "montant réel des dommages" parce que chaque fois que
quelqu'un me parlait des dommages... Me Beaulé me disait que la cause ne
valait rien, 1 000 000 $. Je leur disais toujours: Votre procès est
prévu pour six mois, ce n'est pas moi qui vais déterminer le
montant des dommages dans mon bureau. Mais de toute façon c'était
évident que la réclamation valait peut-être plus de 1 000
000 $, 2 000 000 $, 3 000 000 $, quelque chose comme cela. C'était
évident que les syndicats québécois n'avaient pas cette
capacité.
Quand je dis "évident"... Quand j'avais eu la rencontre avec M.
Laliberté le 3 janvier - je ne devrais peut-être pas employer le
mot "évident" - j'ai lui ai dit: II m'apparaît fort vraisemblable
que les syndicats québécois n'aient pas les moyens de payer le
montant d'un éventuel jugement mais j'imagine que vous aurez la prudence
élémentaire de le faire vérifier. Alors cette question ne
me concernait pas tellement mais elle m'influençait. Un argument qui m'a
influencé c'est aussi comment percevoir ce jugement autrement qu'en
pénalisant indûment - je parle toujours des syndicats
québécois, c'est l'aspect de votre question -la grande
majorité des membres présents et futurs de ces mêmes
syndicats?
M. Lalonde: Si vous permettez, Me Boivin, je voudrais simplement
faire un autre retour en arrière et je pense qu'on aura à ce
moment complété - ou enfin ce que j'en sais - les rencontres qui
ont précédé 1979. Il a été fait état
ici, je pense que c'est Me Beaulé qui l'a fait sous toute
réserve, d'un lunch qui aurait eu lieu le 26 juin 1978 avec Me
Beaulé.
M. Boivin: Ah oui! Me Beaulé m'épatera tout le
temps de sa vie. Il a une mémoire d'éléphant. Je ne me
souviens de rien de ce lunch.
M. Lalonde: Vous pensez?
M. Boivin: Alors pour répondre à votre question
à savoir si j'ai lunché avec Me
Beaulé le 25 juin... Quelle année, dit-il, 1978?
M. Lalonde: Le 26 juin 1978.
M. Boivin: Bon. S'il l'a dit ce doit être vrai.
M. Lalonde: Vous ne vous souvenez pas du tout?
M. Boivin: Bien non.
M. Lalonde: II est difficile pour moi de vous demander si vous
vous souvenez de ce qui s'est dit à ce lunch.
M. Boivin: En effet, M. le Président.
M. Lalonde: En plus sérieux, Me Boivin, en vous rappelant
ce que tout le monde sait ici, que vous avez peut-être suivi d'ailleurs
dans la preuve, Me Beaulé a été nommé avocat du
syndicat américain en avril - si ma mémoire est bonne c'est
autour du 20 avril 1978. Est-ce qu'en vous rappelant cela - parce qu'à
plusieurs reprises, et on ne peut vous en faire reproche, vous faites de la
reconstitution, je présume - vous pouvez vous rappeler si Me
Beaulé vous a parlé de son nouveau mandat qui était de
défendre le syndicat américain contre la SEBJ?
M. Boivin: Je ne m'en souviens pas. C'est fort possible, mais je
ne m'en souviens pas.
M. Lalonde: Revenons à une période un peu plus
récente, à ce moment-là. Il y a eu, d'après la
liste des rencontres que le premier ministre nous a remise, des rencontres
entre Me Michel Jasmin, avocat des syndicats québécois ou
canadiens, et Me Gauthier qui faisait partie, en quelque sorte, du personnel du
cabinet du premier ministre...
M. Boivin: C'est un terme un peu...
M. Lalonde: Vous êtes le chef du cabinet. J'imagine qu'il
doit y avoir un cabinet pour en être le chef et que Me Gauthier faisait
partie de ce cabinet?
M. Boivin: Un des membres du cabinet, oui.
M. Lalonde: Un des membres. Il y aurait eu des rencontres entre
Me Gauthier en octobre, en novembre et plus tard en janvier et en
février, est-ce que Me Gauthier vous a fait... C'est-à-dire Me
Jasmin, plutôt, excusez-moi, parce que je pense qu'il a été
établi que vous n'avez jamais parlé de ce problème avec Me
Gauthier?
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Est-ce que Me Jasmin vous a informé des
rencontres qu'il avait avec Me
Gauthier - semble-t-il, d'après les témoignages de Me
Gauthier - sur cette question?
M. Boivin: Non.
M. Lalonde: Me Jasmin ne vous a jamais dit qu'il avait
rencontré ou qu'il allait rencontrer Me Yves Gauthier de votre
bureau?
M. Boivin: Non, mais, M. le Président, il faut que vous
vous mettiez dans le contexte, parce que, sans cela, la réponse peut
vous étonner.
M. Lalonde: Oui, donnez les explications.
M. Boivin: Le contexte est que Me Jasmin, je le voyais souvent
dans le bureau; alors, je ne lui demandais pas ce qu'il venait faire là,
s'il est avec M. Gauthier ou s'il est avec M. Carpentier ou s'il est avec... Je
le vois et, quand il n'a pas affaire à moi, je ne lui parle pas. C'est
dans ce sens que je dis que je n'ai jamais parlé à M. Jasmin
à savoir: Qu'est-ce que tu fais dans le bureau? Lui, il ne m'a jamais
dit, non plus: J'ai expliqué cela à M. Gauthier ou à
"Ti-Lou". Il l'appelait "Ti-Lou". Il ne m'a jamais dit cela. Cela lui
apparaissait peut-être normal. Je ne sais pas. Je ne peux pas
spéculer sur ce que les autres font.
M. Lalonde: Non, je pense que je ne me suis pas fait
comprendre...
M. Boivin: Vous ne me l'avez pas demandé, d'ailleurs.
M. Lalonde: Non, je ne vous ai pas demandé si vous aviez
fait une enquête sur la présence de Me Jasmin dans vos bureaux. Je
vous ai demandé si Me Jasmin vous avait fait rapport, vous avait dit
qu'il avait rencontré ou qu'il allait rencontrer - selon la date
à laquelle on se situe dans le temps -Me Yves Gauthier, un membre de
votre personnel, avec qui il allait discuter ou avait discuté de cette
cause qui vous préoccupait.
M. Boivin: La réponse est non, M. le Président.
M. Lalonde: La réponse est non. Je reviens en 1979. Vous
étiez, lorsque nous avons fait un retour en arrière, en train de
nous expliquer les communications que vous aviez pu avoir avec M.
Laliberté. Vous avez donné un exemple, comme: M. Jasmin vous
demande ce qui arrive. Là, vous vous enquérez auprès de M.
Laliberté pour savoir quand est la prochaine réunion du conseil
d'administration. Je vais poser une question plus précise: Maintenant
vous savez - c'est dans les documents de la commission - que, le 9 janvier
1979, à une réunion du conseil d'administration, le conseil a
examiné une opinion juridique rafraîchie de Geoffrion et
Prud'homme, enfin, une reprise de tout le problème et l'expression de
leur opinion sur la cause. La conclusion - je ne parle de l'opinion, mais de la
réunion - était que les décisions antérieures
étaient maintenues, à savoir qu'on continue de poursuivre. Cela,
c'est six jours après votre réunion avec M. Laliberté.
Vous lui avez dit qu'il fallait, ou enfin, que le souhait du premier ministre
était que cela se règle. Est-ce qu'on vous a fait rapport de
cette réunion?
M. Boivin: J'ai pris connaissance de l'existence et de la teneur
de cette décision ou résolution lorsque le cahier de la SEBJ a
été déposé devant cette commission; à mon
grand étonnement, d'ailleurs. Mais, en tout cas, j'en ai pris
connaissance ici. (12 heures)
M. Lalonde: J'essaie de rattacher votre réponse
précédente à quelque chose. Est-ce que vous vous souvenez
de façon particulière que Me Jasmin vous ait appelé pour
vous demander ou, enfin, pour vous exprimer la préoccupation que vous
avez vous-même décrite tout à l'heure, à savoir que
cela ne se règle pas, que le procès continue, que le
procès commence le 15: Quand a lieu la prochaine réunion du
conseil d'administration? Il me semble que c'est cela vous nous avez dit tout
à l'heure.
M. Boivin: En gros, oui.
M. Lalonde: En gros. Est-ce que vous pouvez situer cette demande
de Me Jasmin dans le temps? J'imagine que c'est autour du 15 janvier parce que
le procès commençait le 15 janvier.
M. Boivin: Regardez, je fais de la reconstitution parce que j'ai
devant moi la liste des rencontres de Me Jean-Roch Boivin au bureau du premier
ministre, document qui a été déposé ici.
M. Lalonde: Oui.
M. Boivin: Je n'ai pas d'agenda personnel de cette
période-là, mais j'ai consulté des agendas personnels du
premier ministre et j'ai vu dans l'agenda du premier ministre de janvier 1979
que nous sommes allés en Louisiane et que nous en sommes revenus le Il
janvier au soir.
M. Lalonde: C'est après la réunion du 3 que vous
êtes allés en Louisiane.
M. Boivin: Oui.
M. Lalonde: D'accord.
M. Boivin: Si vous le voulez bien, mais c'est de la
reconstitution, nous sommes allés en Louisiane et nous revenons le Il
janvier au soir. Donc, je suis fatigué un peu le Il janvier au soir et
je suis au bureau le lendemain matin. Pourquoi je suis au bureau le lendemain
matin? C'est probablement -mais là je fais de la reconstitution pure
-parce que M. Jasmin avait pris un rendez-vous avec moi pour, probablement, me
demander ce qui arrivait de la cause, parce que c'était dans trois
jours. J'ai déjà plaidé des causes et, quand ta cause est
dans trois jours, tu te prépares. Ce n'est pas la même chose si
cela procède ou si cela ne procède pas, n'est-ce pas?
Alors là, et je reconstitue toujours, je ne vous affirme pas sous
serment, je fais de la reconstitution... Si vous ne voulez pas, je vais
arrêter là.
M. Lalonde: Ce que je veux dire, c'est que, lorsque vous dites
que vous n'affirmez pas sous serment, je pense que le président et tout
le monde sait que vous reconstituez sous serment.
M. Boivin: D'accord, si vous voulez, si vous voulez.
M. Lalonde: Je ne peux pas vous donner la permission de dire des
choses non sous serment ou sous serment.
M. Boivin: D'accord, d'accord. Je suis certain - mais c'est de la
reconstitution que M. Jasmin a bien dû me demander -c'est normal, car il
a une cause qui s'en vient le 15 janvier - si le conseil d'administration
s'était réuni et s'il avait décidé quelque chose,
j'imagine, et j'imagine que je m'en suis informé.
M. Lalonde: Est-ce que, au cours de cette réunion,
puisqu'on arrive à celle du 12 janvier 1979, vous avez vous-même
abordé... On voit ici que l'heure d'entrée au registre est de 15
h 56 - mettons 16 heures aux fins de la discussion - et que l'heure de sortie
de Me Jasmin est à 17 h 20, c'est-à-dire une heure vingt minutes
plus tard. Compte tenu de l'attente, est-ce que vous pouvez vous souvenir de la
durée de cette réunion?
M. Boivin: Je ne me souviens même pas de la réunion,
encore bien moins de la longueur. Je parle toujours de cette
réunion-là parce qu'elle est inscrite sur les feuilles.
M. Lalonde: Vous n'avez aucun souvenir que le 12 janvier ou,
enfin, aidé par le registre, qu'au retour de votre voyage en Louisiane
vous avez rencontré Me Jasmin?
M. Boivin: J'ai un vague souvenir parce que je me disais: Maudit,
j'arrive de
Louisiane et il y a un gars tout de suite dans mon bureau. J'ai un vague
souvenir comme cela, c'est aussi vague que cela. En voulant dire: Je suis
fatigué et il y a déjà quelqu'un dans mon bureau. C'est
aussi vague que cela.
M. Lalonde: En fait, M. le Président, je dois poser les
questions. Je regrette... Non, mais je ne veux pas...
M. Lavigne: ...glissé.
M. Lalonde: Non, je dois poser les questions parce que je ne veux
pas que cela ait l'air de harceler le témoin. Malgré le fait que
la question précédente n'introduit pas un grand optimisme dans
mon esprit pour la question suivante, je dois vous poser la question: Qu'est-ce
que Me Jasmin vous a dit le 12 janvier?
M. Boivin: Pardon?
M. Lalonde: Je dois vous poser la question et j'aimerais avoir
une réponse, parce que c'est extrêmement important pour nous:
Quelle a été - pas verbatim - la substance de l'échange
que vous avez eu... Enfin, est-ce que vous avez eu un échange avec Me
Jasmin le 12 janvier, lorsqu'il vous a rencontré à votre
bureau?
M. Boivin: M. le Président, si je l'ai vu et si la
rencontre a eu lieu, aussi courte ou aussi longue soit-elle, qu'elle ait
duré une heure ou une demi-heure, nous avons dû nous parler
certainement. Mais, je ne peux absolument pas vous dire ce dont il a
été question.
M. Lalonde: La cause commençait, le procès
commençait trois jours plus tard. Est-ce que Me Jasmin vous a
parlé de cette cause qui commençait trois jours plus tard et du
fait qu'elle pourrait être ajournée?
M. Boivin: C'est ce que je viens de vous dire tantôt, et
mon conseiller me le dit à l'oreille, je pense qu'il a peut-être
raison: Je fais de la reconstitution presque pour vous faire plaisir. Je ne
m'en souviens pas, de cette rencontre-là, sauf que vous me dites, et
c'est vrai, je me souviens, que le procès commençait le 15
janvier. C'est certainement logique qu'il m'ait parlé du procès
qui s'en venait. Mais, c'est de la reconstitution.
M. Lalonde: Le 15 janvier 1979... Le 12 janvier est un vendredi,
je crois, en tout cas, je vous le suggère; c'est une question
suggestive, d'après le calendrier que je consulte. On sait maintenant,
c'est mis en preuve, qu'une demande d'ajournement a été faite
auprès de Me Gadbois par Me Jasmin
et, si encore là ma mémoire est fidèle, c'est le
vendredi après-midi, d'après ce que Me Gadbois nous a
décrit, qu'il a reçu un appel téléphonique. Je ne
veux pas aller dans les détails, à savoir s'il a reçu
l'appel de Me Cardinal ou de Me Jasmin, mais en tout cas. Mais, Me Jasmin
était au début de la demande d'ajournement, soit par Me Cardinal
ou directement par Me Gadbois. Cela, c'est le vendredi après-midi. On
voit qu'il est à votre bureau jusqu'à 17 h 20. Est-ce qu'il a
été question de cette demande d'ajournement? C'est-à-dire
que - je ne me suis peut-être pas exprimé assez clairement -cette
demande faite auprès de Me Gadbois, c'était pour que le
procès soit ajourné, c'est-à-dire ne soit pas
commencé le lundi suivant. Le 15 janvier, c'était justement le
lundi suivant.
M. Boivin: Une remise de cause?
M. Lalonde: Oui. Est-ce que vous vous souvenez s'il a
été question de cet ajournement dans...?
M. Boivin: Non.
M. Lalonde: Vous ne vous en souvenez pas?
M. Boivin: Non, M. le Président, je ne m'en souviens
pas.
M. Lalonde: Bon. Le 15 janvier 1979, d'après, encore une
fois, la liste des rencontres qui nous a été remise par le
premier ministre, ou par son bureau, vous avez - enfin, vous avez
rencontré, oui... Me Rosaire Beaulé et Me Michel Jasmin se
retrouvent à votre bureau de 17 h 34 à 18 heures; ce sont les
heures d'entrée et de sortie. Je parle de vos bureaux, c'est le bureau
du premier ministre, pas nécessairement en votre présence. Est-ce
que vous vous souvenez de les avoir rencontrés?
M. Boivin: Je me souviens vaguement de cette rencontre. Et Me
Beaulé a témoigné ici qu'elle avait surtout porté
sur le début du procès ou sur le déroulement de la
première journée du procès. J'avoue ne pas me souvenir du
tout de cette partie-là. Mais, je me souviens que Me Beaulé et Me
Jasmin, ou l'un des deux - quand je dis Beaulé et Jasmin, je ne sais pas
qui parle, mais c'est l'un des deux - m'ont dit que Geoffrion et Prud'homme
n'avaient pas le mandat de négocier mais d'écouter seulement. Je
me souviens de cela. Je me souviens avoir répondu - parce que je crois
que cela troublait pas mal M. Jasmin qui voyait que si le procès
s'engageait, c'étaient des frais chaque jour - à Me Jasmin, ou
à Me Beaulé, ou aux deux, que tout cela était entre les
mains du conseil d'administration et que, même si je suis bien conscient
autant qu'eux qu'il y a un procès qui se déroule, il faut bien
attendre les décisions du conseil d'administration. Que voulez-vous que
je fasse? C'est tout. C'est cela, mon souvenir de cette rencontre.
M. Lalonde: Si je vous demandais de préciser: Lorsque vous
avez dit que l'un des deux vous a informé que Geoffrion et Prud'homme
n'avaient pas le mandat de négocier, mais d'écouter seulement, on
parle bien de négocier un règlement hors cour?
M. Boivin: Je présume.
M. Lalonde: Non, non, c'est vous...
M. Boivin: Cela va de soi.
M. Lalonde: Cela va de soi, bon. C'est parce que c'est vous qui
avez dit "négocier". Je voulais savoir: Négocier quoi?
M. Boivin: Oui, oui. C'est l'expression qu'ils ont
utilisée.
M. Lalonde: Le 16 janvier, le lendemain, le mardi, le
deuxième jour du procès, Me Michel Jasmin entre à vos
bureaux à 15 h 23 et en sort à 16 heures, d'après le
registre du bureau du premier ministre. Est-ce que vous vous souvenez d'avoir
rencontré Me Jasmin ce jour-là?
M. Boivin: Voici, M. le Président: Er préparant le
témoignage que je rends ic aujourd'hui au sujet de cette journée
du 1er janvier, j'ai écrit ce qui suit, parce que ça
s'applique à d'autres rencontres: "Je ne me souviens aucunement de cette
rencontre. I me faut dire ici que je n'ai peut-être pas de raison
particulière de m'en souvenir - je parle toujours de cette rencontre -
parce que M. Jasmin, qui m'apparaissait très nerveux ' cette
époque, est venu quelquefois me voii pour me dire ou redire des choses
que j'écoutais par politesse, exemples, qu'il se demandait si la SEBJ
voulait ou voudrait régler - deuxième exemple - que ses arguments
n'étaient peut-être pas très bien transmis à la SEBJ
par Geoffrion et Prud'homme, que ses clients n'avaient pas d'argent et que,
s'il n'y avait pas de règlement, ils ne se défendraient
même pas jusqu'au bout et laisseraient la cour procéder ex parte
quant à eux, que Me Beaulé rendrait le règlement
difficile."
Je lui disais: Jasmin, prends un café, que veux-tu que je te
dise?
M. Lalonde: Voilà pour la réunion du 16
janvier.
M. Boivin: Pour épargner du temps, quand j'ai vu sur la
liste: rencontre de Me
Jean-Roch Boivin, au bureau du premier ministre, le 9 février,
avec Jasmin et Cardinal, je suis allé au bureau de Jean-Paul Cardinal,
en préparation de cette commission, et je lui ai dit: Jean-Paul,
apparemment, tu es venu à mon bureau le 9 février. As-tu des
notes dans ton dossier? Je ne sais pas ce que tu es venu faire. Il a dit: Non,
je ne m'en souviens pas. Alors, moi, je ne m'en souviens pas.
Quant à Me Jasmin, je n'ai pas osé lui
téléphoner. S'il témoigne, j'espère qu'il se
souviendra de ce qu'il est venu faire au bureau le 9 février, parce que
je ne m'en souviens pas. Cela, c'est pour le 9. Concernant le 16, j'ai
répondu tantôt et, pour les deux autres, on va attendre les
questions.
M. Lalonde: Celle du 19 janvier, si vous permettez - j'en
étais rendu là et vous êtes allé plus loin, vers le
9 février - je ne pense pas que je vous aie posé des questions
sur la réunion du 19 janvier.
M. Boivin: Pardon?
M. Lalonde: Celle du 19 janvier.
M. Boivin: Oui.
M. Lalonde: Je ne vous ai pas posé de question sur
celle-ci.
M. Boivin: Non, vous ne m'en avez pas posé.
M. Lalonde: Vous avez offert de répondre pour les
réunions qui ont eu lieu un peu plus tard; je n'ai pas d'objection,
mais, si vous le permettez, on va revenir au 19 janvier. Le registre dit que Me
Michel Jasmin et Me Beaulé se retrouvent à vos bureaux le 19
janvier pour rencontrer Me Jean-Roch Boivin. Me Jasmin, étant
entré à 15 h 20, est sorti à 16 h 30, et Me Beaulé
est entré à 15 h 36 - donc, après Me Jasmin - et est sorti
à peu près en même temps, à 16 h 31. Est-ce que vous
vous souvenez de cette réunion?
M. Boivin: J'ai vu ce que vous venez de mentionner sur les
feuilles. Quand M. Beaulé a témoigné ici au sujet de cette
rencontre du 19 janvier, il a dit: J'étais avec Me Jasmin,
j'étais avec Me Fanning et Me Woll. Si j'avais témoigné
avant Me Beaulé, j'aurais dit, de mémoire, qu'il y avait - les
Américains, je ne les distingue pas de nom -un avocat américain,
il y avait Me Beaulé et moi-même. Mais, comme Me Beaulé
vous affirme que M. Jasmin était là et qu'il y avait deux avocats
américains, je prends sa parole. Je me souviens d'avoir parlé en
anglais avec un avocat américain. Mais, s'appelle-t-il Me Woll ou Me
Fanning...
M. Lalonde: Pouvez-vous nous décrire ce qui s'est
passé lors de cette réunion? Combien de temps a-t-elle
duré? (12 h 15)
M. Boivin: Je ne me souviens pas. Dans mon souvenir, cela n'a pas
été long parce que cela a été une rencontre, enfin,
j'ai l'impression que... L'avocat américain m'a dit en substance: On
vous remercie de nous avoir reçus, etc., bon. Nous espérons, par
votre entremise, sensibiliser le premier ministre à l'injustice qui est
faite, que la poursuite, etc. Je l'ai laissé parler un peu, mais pas
tellement longuement, parce que je l'ai interrompu en lui disant qu'ils avaient
un très bon avocat, que Me Beaulé m'avait fait valoir tous ces
arguments-là, qu'on les pesait avec soin, etc., et qu'on regardait cette
cause - pas cette cause - ces représentations avec sympathie.
Après cela, j'ai commencé à parler des élections
présidentielles aux États-Unis. J'ai changé de sujet parce
que c'était une visite presque de sensibilisation ou de politesse, quoi;
je ne sais pas.
M. Lalonde: Lors des réunions du 12 janvier, avec Me
Jasmin, du 15 janvier avec Mes Beaulé et Jasmin, du 16 janvier avec Me
Jasmin, du 19 janvier avec Mes Jasmin et Beaulé, est-ce que vous leur
avez fait savoir que, le 3 janvier, vous aviez déjà
exprimé le souhait du premier ministre auprès du président
de la SEBJ, à savoir qu'il fallait ou enfin que son souhait était
que la cause soit abandonnée et se termine par un règlement hors
cour?
M. Boivin: Je ne m'en souviens pas. Mais, j'ai le droit de faire
de la reconstitution. M. Jasmin était tellement nerveux que je suis
sûr que le 12 janvier je lui ai dit: Énerve-toi pas, j'ai transmis
à M. Laliberté une recommandation favorable du premier ministre
envers un règlement hors cour. Parce qu'il serait absolument illogique
qu'il vienne me voir tout le temps et que je ne lui dise pas quelle est la
position du bureau du premier ministre sur cette affaire que j'ai
étudiée pendant le mois de décembre.
M. Lalonde: En avez-vous parlé aussi à Me
Beaulé?
M. Boivin: Je ne me souviens pas en avoir parlé à
Me Beaulé, mais il se peut très bien que je ne lui en aie pas
parlé, comme il l'a affirmé ici, parce que, dans ma tête,
si je le disais à M. Jasmin, je le disais à M. Beaulé.
Dans ma tête, je me disais: Ils ne doivent pas se faire de cachette. Je
ne sais pas. Je ne sais pas.
M. Lalonde: Pour être honnête avec vous, il faut que
je vous dise quelle est ma
préoccupation quand je vous pose cette question. C'est que Me
Beaulé, et c'est dans la preuve, nous répète que les
réunions qu'il a eues avec vous étaient pour vous sensibiliser.
Nous savons déjà par M. Laliberté que, le 3 janvier - cela
a été un des premiers témoignages qui ont
été donnés ici - vous aviez transmis la décision du
premier ministre de souhaiter que cela se termine sans procès. Je me
demandais comment il se faisait que vous vous laissiez sensibiliser sans avoir
dit à Me Beaulé que c'était déjà
décidé que vous souhaitiez cela.
M. Boivin: Non, mais j'ai vu que cela faisait l'objet de lourdes
interrogations devant cette honorable commission. Je devrais peut-être
vous dire que ma réponse sera une appréciation personnelle. Je ne
sais pas si c'est permis par le règlement. Je présume.
Quant à Me Jasmin, on vient d'en disposer, je le lui ai dit.
Mais, cela, c'est la recommandation du premier ministre. Cela ne donne pas une
décision du conseil d'administration. Moi, je comprends ces gens
d'être nerveux. Il y a un procès et ils plaident à tous les
jours. Si nous sommes au 12 janvier, pour les fins de la discussion, Me Jasmin
sait que le 3 janvier - je ne sais pas si je lui ai dit la date, mais en tout
cas -j'ai rencontré M. Laliberté et que je lui ai transmis, de la
part du premier ministre, son sentiment favorable à un règlement.
Me Jasmin sait cela le 12 janvier. Il y a un procès qui va se
dérouler et il n'y a pas de décision du conseil d'administration
du premier ministre. Le 15 janvier - je vous l'ai dit tantôt - il
était étonné que Geoffrion et Prud'homme avaient un mandat
d'écouter et non pas de négocier. Le 19 janvier, c'est la
fête des Américains. J'ai appelé cela une visite de
courtoisie; dans ma tête - je ne l'ai pas dit - je l'ai qualifiée
ainsi. Il n'y a pas eu tellement de rencontres de sensibilisation de la part de
Me Beaulé, mais il a peut-être essayé - et cela aurait
été normal, parce que je ne lui disais pas que la chose allait
bien ou allait mal, je ne savais pas comment elle allait en haut et, quand je
dis "en haut", je veux dire le conseil d'administration de la SEBJ...
M. Lalonde: Je vous suis jusqu'au conseil d'administration de la
SEBJ. Vous rencontrez M. Laliberté le 3 janvier. Vous lui dites,
d'après son propre témoignage, le souhait du premier ministre que
la cause soit abandonnée et que le tout se termine par un
règlement. Et le procès continue. Avez-vous rappelé M.
Laliberté pour lui demander jusqu'à quel point votre...
M. Boivin: C'est sûr! M. Lalonde: Pardon?
M. Boivin: C'est sûr.
M. Lalonde: Oui?
M. Boivin: Ah oui!
M. Lalonde: À quel moment?
M. Boivin: Je ne le sais pas, mais je lui ai demandé quand
la prochaine réunion du conseil d'administration devait avoir lieu et il
a dû me le dire. Je ne sais pas quand elle a eu lieu. J'imagine que vos
documents l'indiquent. Il a dû me dire la prochaine réunion...
M. Lalonde: Je pense que la preuve indique qu'il y en a eu une le
23 janvier et une le 30.
M. Boivin: II a dû me le dire à ce
moment-là.
M. Lalonde: Et une le 16 janvier, mais dont on n'a pas, en fait,
de procès-verbal.
M. Boivin: Mais moi - c'était simple -j'étais en
faveur d'un règlement hors cour. C'est très simple. Je suis en
faveur d'un règlement hors cour et c'est le conseil d'administration qui
va décider. Tant mieux! Qu'il se réunisse au plus vite et, quand
il le décidera, cela va être parfait. Le reste, c'est de la
plomberie qui ne m'intéresse pas. Va-t-on régler pour 500 000 $,
800 000 $, 200 000 $ ou 300 000 $? Je ne connais rien là-dedans. Je ne
sais pas qui est capable de payer et qui n'est pas capable de payer. Je ne sais
pas pourquoi on fait des mystères avec des affaires simples.
M. Lalonde: Je ne fais pas de mystères. Je veux savoir ce
qui s'est passé.
M. Boivin: Cela ne m'a jamais paru compliqué, cette
affaire-là, et cela ne m'a jamais empêché de dormir, parce
que je trouvais cela simple. Je ferais encore la même recommandation au
premier ministre aujourd'hui, à l'heure où on se parle. J'ai
peut-être un mauvais jugement, mais c'est une autre affaire.
M. Lalonde: Je ne vous ai pas posé de questions
là-dessus. Je n'ai pas l'intention de poser de questions non plus sur
votre jugement. Je voudrais simplement savoir...
M. Boivin: M. le député, vous ne me harcelez pas du
tout.
M. Lalonde: Non, non. C'est parce que j'aimerais savoir ce qui
s'est...
M. Boivin: Je trouve que cela va très bien. Je trouve que
cela va très bien.
M. Lalonde: Bon, bravol Cela va très bien, sauf que
j'aimerais avoir, si c'est possible, une évaluation du nombre et du
contenu - j'y viendrai - des appels téléphoniques que vous avez
faits, parce que M. Laliberté a dit qu'il ne pouvait pas nier qu'il y
ait eu des conversations téléphoniques; il ne pouvait pas
affirmer qu'il y en avait eu après la réunion du 3. On
n'était pas très avancé là-dessus. Vous dites que
vous avez sûrement communiqué - par des conversations et non par
des discussions - avec M. Laliberté après le 3. Je peux
difficilement vous demander à quelle date. Vous ne tenez pas d'agenda
ou, enfin, ce n'est enregistré nulle part. Je vous demande de nous aider
en nous donnant, au meilleur de votre souvenir, une évaluation du nombre
de conversations que vous avez eues après le 3 janvier jusqu'à la
fin.
M. Boivin: Vous savez très bien, M. le
député, que, si on était en cour et que le juge disait que
le témoin a dit qu'il ne s'en souvient pas, c'est très dangereux
de lui demander une réponse quand même.
M. Lalonde: C'est la première fois que je pose cette
question.
M. Boivin: Ce que je veux dire, c'est dangereux. Je vais vous
donner un chiffre dans les airs. Ce que vous voulez savoir, c'est si c'est plus
de cinq ou moins de cinq ou quoi? C'est cela que vous voulez savoir?
M. Lalonde: Un ordre de grandeur.
M. Boivin: Avec qui?
M. Lalonde: Avec M. Laliberté?
M. Boivin: Moins de cinq. Est-ce deux, trois ou quatre, je ne le
sais pas, c'est moins de cinq.
M. Lalonde: Pouvez-vous vous souvenir à quelle
époque ces moins de cinq conversations téléphoniques ont
eu lieu? Est-ce d'abord à votre initiative ou est-ce qu'il vous a
appelé?
M. Boivin: Une bonne question, une minute. Je ne le sais pas.
Sûrement que j'en ai fait à mon initiative, je sais cela. Mais,
est-ce que lui en a fait envers moi? Je ne le sais pas.
M. Lalonde: Pour l'époque, est-ce que c'est plutôt
immédiatement après le 3 janvier ou plutôt - là, je
vous pose une question suggestive, vous pourrez ne pas y répondre si
elle est trop suggestive...
M. Boivin: Allez-y, cela m'aide des fois.
M. Lalonde: ...autour de la réunion du 6 février -
on y reviendra tout à l'heure - qui est assez cruciale dans le
déroulement de ce règlement? Je vous demande si vous pouvez nous
situer à peu près l'époque où ces conversations
téléphoniques ont eu lieu.
M. Boivin: Je ne peux pas. Il y a même un
élément dans votre question qui est drôle. Vous dites:
Est-ce plus près de l'époque de la réunion du 6
février? J'apprends cela, ces réunions, parce que j'ai lu le
cahier, je ne sais pas qu'elles ont lieu, ces réunions et qu'on
décide telle affaire. Je viens de tout apprendre cela en lisant le
cahier.
M. Lalonde: Je pensais que vous m'aviez dit - je ne veux pas vous
coincer sur cela - que vous aviez à l'occasion appelé M.
Laliberté pour savoir à quelle date aurait lieu la prochaine
réunion.
M. Boivin: Oui, les prochaines réunions; je ne vous ai pas
dit et je ne me souviens pas qu'il m'eût dit alors, qu'il y avait une
réunion à telle ou telle date. Le 6 février, pour moi,
c'est une date que je vais croire, parce que cela doit être inscrit dans
le cahier, je présume.
M. Lalonde: Puisqu'on croit ce qui est inscrit dans le cahier, le
6 février, il y a eu une réunion importante - c'est mon
appréciation à moi, je peux l'enlever - il y a eu une
réunion du conseil d'administration. Est-ce que vous avez eu des
communications avec M. Laliberté, à l'époque, de cette
réunion?
M. Boivin: Je ne suis pas capable de vous le dire.
M. Lalonde: Bon. On revient à la réunion du 2
février, cela va peut-être nous aider pour répondre
à la question précédente. Le 2 février, vous
rencontrez MM. Rosaire Beaulé et Michel Jasmin, les deux avocats, entre
10 heures et Il heures - entre 10 heures et midi, quand on englobe les deux.
Est-ce que vous vous souvenez de cette réunion?
M. Boivin: Pour préparer mon témoignage, j'ai
essayé de gratter ma mémoire et c'est bien tannant, mais en tout
cas. Je l'ai fait et j'ai écrit ce qui suit au sujet de la
réunion du 2 février: Je ne m'en souviens pas. Avant le
témoignage de M. Beaulé, je ne me souvenais pas qu'il m'avait
remis un document. Encore aujourd'hui je ne m'en souviens pas, mais, puisque Me
Beaulé l'affirme, je veux bien le croire. Mais je me souviens cependant
de la lettre du 5 février 1979 adressée à Geoffrion et
Prud'homme dont il me fait tenir copie et - je poursuis parce que vous l'avez
interrogé là-dessus - je
ne crois pas les avoir mis au courant de la rencontre de la veille -
celle du 1er février avec le premier ministre - et j'ajoute: Comme je ne
savais pas comment le conseil d'administration de la SEBJ allait traiter cette
affaire, je ne voulais pas trop m'engager vis-à-vis des avocats des
défendeurs ou encore leur donner trop d'espoir.
M. Lalonde: Est-ce qu'au cours de cette réunion de
l'avant-midi du 2 février vous avez informé Me Jasmin et Me
Beaulé que vous alliez rencontrer Me Cardinal et Me Aquin au lunch,
quelques minutes plus tard?
M. Boivin: Je ne m'en souviens pas, mais ce n'est pas mon genre
de dire aux autres où je vais luncher.
M. Lalonde: Est-ce que je peux vous poser la question suivante,
à savoir si l'objet du lunch était étranger à
l'objet de la visite de Me Jasmin et Me Beaulé dans votre bureau?
M. Boivin: Je vais vous répondre autrement tout en vous
répondant. Je ne me souvenais pas du lunch jusqu'à ce que
quelqu'un en parle ici. Je m'en souviens bien vaguement. Puisqu'on l'a dit, ce
doit être vrai. Je suis prêt à accepter, quant à ce
lunch, le témoignage de Me Aquin. C'est bien vague dans mon esprit, un
lunch avec Me Aquin et Me Cardinal.
M. Lalonde: Étant donné qu'on ajourne dans quelques
minutes, si vous le permettez, je voudrais revenir seulement quelques secondes
sur la réunion du 3 janvier. Est-ce que, après avoir
rencontré M. Laliberté, vous avez rencontré un avocat de
Geoffrion et Prud'homme le 3 janvier, à vos bureaux?
M. Boivin: Le 3 janvier? M. Lalonde: Oui.
M. Boivin: Un avocat de Geoffrion et Prud'homme serait venu
à mon bureau?
M. Lalonde: Je vous pose la question.
M. Boivin: Je ne m'en souviens pas et ce n'est pas inscrit.
M. Lalonde: Est-ce que vos registres n'indiquent pas que Me
René Beaulac de Geoffrion et Prud'homme serait allé vous voir
immédiatement après la visite de M. Laliberté à vos
bureaux?
M. Boivin: On peut le vérifier, mais si c'est vrai, M.
Beaulac ne m'a jamais parlé de la SEBJ ou de cette poursuite.
M. Lalonde: Donc, je vous remercie.
M. Boivin: Voulez-vous que je vérifie si M. Beaulac est
venu le 3...
M. Lalonde: Si vous voulez vérifier, s'il vous
plaît.
M. Boivin: Certainement.
Le Président (M. Jolivet): Pour cet après-midi.
Donc, je vais suspendre les travaux en disant qu'on reviendra après la
période de questions, en vous rappelant, aussi, pour les besoins des
membres de la commission, que nous siégerons demain matin, de 10 heures
à 13 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
(Reprise de la séance à 16 h 50)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaîtl
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources reprend ses travaux aux fins d'examiner les circonstances entourant
la décision du conseil d'administration de la Société
d'énergie de la Baie James de régler hors cours la poursuite
civile intentée à la suite du saccage du chantier LG 2 survenu en
1974 et plus spécifiquement le rôle du premier ministre et de son
bureau à cet égard.
Les membres de cette commission sont: M. Vaillancourt
(Jonquière), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Duhaime (Saint-Maurice), M.
Bourbeau (Laporte), M. Laplante (Bourassa), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Lavigne (Beauharnois), M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Perron (Duplessis), M. Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Desbiens (Dubuc), M. Dussault
(Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), M. Gratton (Gatineau), M. Page
(Portneuf) M. Doyon (Louis-Hébert), M. Tremblay (Chambly), M. Saintonge
(Laprairie). Le rapporteur de cette commission est M. LeBlanc
(Montmagny-L'Islet).
À la suite des avis qui ont été donnés
à l'Assemblée nationale, je voudrais faire mention d'une
correction que je dois apporter à ce que j'ai dit ce matin. Nous ne
siégerons pas demain matin; ce sera mardi prochain, à 10 heures,
la prochaine séance. Aujourd'hui, nous irons jusqu'à 18 heures,
à partir de maintenant, et de 20 heures à 22 heures. Nous avons
toujours M. Jean-Roch Boivin qui était questionné, au moment de
l'arrêt pour l'heure du dîner, par le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Simplement aussi rappeler que j'avais indiqué qu'on
débuterait vers les 16 heures
ou 16 h 30 mais il y a eu une discussion à l'Assemblée
nationale et c'est la raison pour laquelle nous débutons un peu plus
tard; à la suite de l'avis donné par motion à
l'Assemblée nationale. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole. Oui, Me Boivin.
M. Boivin: M. le député de Marguerite-Bourgeoys
m'avait demandé, ou avait affirmé - je ne me souviens pas - s'il
était exact que Me René Beaulac, du bureau de Geoffrion et
Prud'homme, était venu à mon bureau le 3 janvier 1979,
après consultation des registres par M. Tremblay. Il appert que le 3
janvier on ai reçu la visite de M. René Beaulac indiquée
comme suit: entrée: 12 h 45, sortie: 14 heures. Je vous avais promis de
vous fournir ce renseignement.
M. Lalonde: Je vous remercie.
M. Boivin: Deuxièmement, si vous me le permettez, M. le
Président. C'est peut-être de ma faute parce que je parle trop
vite ou que je m'exprime mal, mais je crois que mes propos ont
été mal transcrits. Je voudrais référer au ruban
1398, page 1, au bas de la page.
M. Lalonde: Page 1399?
M. Boivin: Ruban 1398, M. le député.
M. Lalonde: Ruban 1398.
M. Boivin: Ruban 1398, page 1.
M. Lalonde: Oui.
M. Boivin: Au bas de la page. Lorsque nous parlions, vous vous
souvenez, de la rencontre du 1er février 1979, je disais que le premier
ministre avait dit, ou moi-même, à M. Boyd que, s'il était
important de faire établir clairement - en tout bas de page, M. le
député - s'il était important de faire établir la
responsabilité des syndicats...
M. Lalonde: Oui.
M. Boivin: ...québécois...
M. Lalonde: Oui.
M. Boivin: Alors, on lit dans la transcription, et je cite, M. le
Président: "Là-dessus, je ne me souviens pas si c'est moi ou le
premier ministre qui avait demandé à ces syndicats d'admettre
leur responsabilité; il va être clairement établi qu'il n'y
a pas de responsabilité partagée." D'ailleurs, cela n'a pas de
sens.
M. Lalonde: Cela n'a pas de sens.
M. Boivin: D'ailleurs, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys avait saisi une autre réponse. La preuve...
M. Lalonde: Oui, oui.
M. Boivin: ...c'est qu'il me pose une question au ruban 1405,
page 1 et là, M. le député de Marguerite-Bourgeoys
résume très bien ce que j'avais dit. Alors, c'est peut-être
suffisant pour les fins du journal des Débats.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y a une demande de correction? Je ne
sais pas comment on procède. Est-ce qu'on corrige...
Le Président (M. Jolivet): Je pense que la correction qui
est demandée par l'invité et la façon dont il le demande
suffiraient. On référerait à ce moment-là à
l'intervention de cet après-midi.
M. Boivin: Je présume. Je ne connais pas vos
règlements.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Lalonde: Bon. Alors, effectivement, Me René Beaulac est
allé à votre bureau. Je pense que, d'après l'heure
d'entrée et de sortie de M. Laliberté, le 3 janvier, M. Beaulac
se serait trouvé à entrer à votre bureau au moment de la
sortie de M. Laliberté; ce qui ne veut pas dire qu'il y a un lien entre
les deux. Je voulais seulement savoir: Est-ce que c'était à
propos de cette cause...
M. Boivin: Non.
M. Lalonde: ...de la cause du saccage?
M. Boivin: Je n'ai jamais parlé à M. Beaulac de
cette cause-là, même aujourd'hui.
M. Lalonde: Bon. M. le Président, nous étions
rendus... Enfin, on s'est rendu à différents endroits, sauf que,
je pense que j'avais commencé à vous poser des questions sur le
lunch du 2 février 1979. Il est en preuve, si vous me permettez
l'expression, de la part de Me Aquin et de Me Cardinal, que vous les auriez
appelés - ou l'un des deux -le 2 février 1979 pour les inviter
à prendre le lunch et qu'il aurait été question de la
poursuite de la SEBJ dont ils étaient les avocats contre un certain
nombre de syndicats et d'individus. J'aimerais vous demander pourquoi
rencontrer les avocats de la partie demanderesse? Quelles étaient les
raisons qui vous ont poussé à les rencontrer?
M. Boivin: Je voulais qu'ils le sachent directement de ma bouche.
Deuxièmement, je
ne sais pas si je l'aurais fait si ces avocats avaient été
de purs étrangers. Comme je connaissais bien Mes Aquin et Cardinal, je
me suis peut-être posé moins de questions, mais ce que je voulais,
c'était tout simplement qu'ils le sachent directement de ma bouche.
M. Lalonde: Qu'ils sachent de votre bouche quoi? Que la
réunion de la veille ou quoi...?
M. Boivin: Oui, exactement.
M. Lalonde: La réunion du 1er février où le
premier ministre aurait exprimé, de façon très claire, son
souhait. En passant, justement, puisque vous parlez du 1er février,
est-ce que vous avez entendu M. Laliberté témoigner ici - enfin,
vous avez peut-être lu la transcription de son témoignage - en ce
sens que le premier ministre aurait dit, au cours de cette conversation: Vous
réglez, avec - j'entends un juron, c'est celui-là - ou bien on
règle à votre place, ou quelque chose comme cela?
M. Boivin: J'ai entendu ou j'ai lu M. Laliberté dire
cela.
M. Lalonde: Oui. Étant présent, est-ce que vous
pouvez confirmer que c'est vrai?
M. Boivin: Non. Je ne peux pas confirmer...
M. Lalonde: Vous ne pouvez pas le confirmer.
M. Boivin: Je ne peux pas le nier non plus.
M. Lalonde: Ah bon! Vous ne pouvez pas le nier non plus.
M. Boivin: Cela ne m'a pas frappé, moi.
M. Lalonde: Je ne vous demanderai pas pourquoi cela ne vous a pas
frappé, vous, comme vous le dites.
M. Boivin: Non, non, mais il y a plusieurs mots dans cette
phrase. Encore aujourd'hui, comme je viens de vous le dire tantôt, je ne
veux pas corroborer ce que M. Laliberté a dit et je ne veux pas nier ce
que M. Laliberté a dit, mais je m'interroge fortement sur la
mémoire de M. Laliberté lorsqu'il dit le bout de phrase suivant:
Sinon, on va régler à votre place. Je cherche encore à
savoir ce que cela veut dire et je ne l'ai pas encore trouvé, ce que
cela aurait voulu dire.
M. Lalonde: En fait, on peut s'interroger sur la mémoire
de plusieurs témoins, Me Boivin.
M. Boivin: Comme sur la mienne.
M. Lalonde: Y compris sur la vôtre, ce matin. Alors, vous
ne pouvez pas nier ou confirmer cette phrase de M. Laliberté. Donc, le
2, vous appelez les avocats de la SEBJ pour leur faire connaître de votre
bouche ce qui s'était passé la veille. Est-ce que j'ai bien
compris votre réponse?
M. Boivin: C'est exact.
M. Lalonde: Est-ce qu'il a été question d'autre
chose que de la réunion de la veille?
M. Boivin: Ah oui! cela a duré quelques minutes ma foil
Ensuite, comme très souvent quand je rencontre Me Cardinal, et quand je
rencontre Me Aquin mais je ne le rencontre pas souvent on a parlé de
choses et d'autres, mais surtout de politique.
M. Lalonde: Excusez-moi, je ne voulais pas savoir de quoi vous
parliez d'autre que la cause; c'est simplement pour rester dans le mandat, la
cause. Vous avez parlé à propos de la cause, qui est la poursuite
de la SEBJ à la suite du saccage de la Baie-James.
À la réunion de la veille, encore à propos de la
cause, est-ce qu'il y a eu d'autres sujets qui ont été
abordés? Je ne veux pas mettre les mots dans votre bouche, mais si vous
avez lu la transcription de ce que les autres ont témoigné, de ce
qu'ils ont dit, il aurait été question de documents que Me
Beaulé et Me Jasmin feraient parvenir à MM. Geoffrion et
Prud'homme. Est-ce que vous ne les avez pas informés de cela? (17
heures)
M. Boivin: Non, je n'ai aucun souvenir de cela dans mon esprit.
Je vous l'ai dit ce matin, j'ai très peu de souvenir de ce lunch, mais
je me souviens vaguement que je leur ai dit: Voici, le premier ministre a
rencontré hier messieurs, messieurs et il leur a dit telle chose. J'ai
ajouté: J'ai cru comprendre très clairement que M. Boyd
était contre. M. Laliberté n'a pas parlé, M. Saulnier a
parlé. Je ne pourrais pas affirmer carrément s'il est pour ou
s'il est contre, mais je crois qu'il est pour. Grosso modo, c'est la substance
du lunch. Après cela, on a parlé d'autres choses. Est-ce que
c'était votre question, M. le député? On n'a pas
parlé de la cause elle-même.
M. Lalonde: Oui. Qu'est-ce qui a été dit à
propos de la cause? Vous m'avez dit: Je le leur ai appris la réunion de
la veille. Je vous pose la question parce que d'autres témoins ont
rapporté que vous auriez dit à ce moment - je pense que c'est Me
Cardinal
ou Me Aquin - qu'ils recevraient les documents de la part de Me
Beaulé et de Me Jasmin. Est-ce à ce moment...
M. Boivin: Moi, je leur aurais dit cela?
M. Lalonde: Au moment du lunch, je pense, à moins que ma
mémoire me... Voici justement: Ces témoins, Geoffrion et
Prud'homme, ont affirmé que le 2 février vous avez fait un appel
téléphonique à leur bureau et demandé à Me
Cardinal et Me Aquin s'ils pouvaient manger avec vous.
Une voix: Quelle page?
M. Lalonde: C'est le ruban 692, page 1. Maintenant, c'est un
résumé que j'ai fait pour m'aider à poser des
questions.
M. Duhaime: Je m'excuse, mais vous êtes... Excusez-moi, M.
le Président.
Le Président (M. Jolivet): ...M. le ministre, vous pouvez
y aller.
M. Duhaime: Je vais y aller avec beaucoup de précaution
parce que le député de Marguerite-Bourgeoys fait très bien
cela depuis le matin. Mais, si vous utilisez des résumés de
témoignages d'autres témoins, il faudrait que cela corresponde au
ruban 692, page 1.
M. Bourbeau: On a pris des cours de M. Jutras.
M. Duhaime: Pardon?
M. Lalonde: On a pris des cours de Me Jutras pour citer...
M. Duhaime: Vous pouvez choisir l'endroit où vous voulez
pour prendre des cours. La mise en garde que je vous fais, c'est que si vous
résumez les témoignages je vais m'opposer. Si vous faites
référence à la page 692, je pense que Me Tremblay qui
accompagne Me Boivin a peut-être ces rubans, mais en toute justice pour
Me Boivin...
M. Boivin: Je voudrais demander au député si... M.
Tremblay me dit que c'est plus facile lorsque vous mentionnez ce que vous avez
mentionné, le ruban et la page, et la date, si vous l'avez. Si vous ne
l'avez pas, j'imagine que vous pouvez vous débrouiller autrement.
M. Lalonde: La date...
M. Boivin: Du témoignage, en somme, de... Mais si vous ne
l'avez pas...
M. Lalonde: Je sais que le lunch était le 2 février
mais la date...
M. Duhaime: La date du ruban?
M. Lalonde: ...du ruban, je ne l'ai pas. En fait, jusqu'à
maintenant, quand j'ai essayé de résumer ce que vous aviez dit,
vous, ou les autres, je n'ai pas fait de difficultés. Je pense que j'ai
pris assez de précautions de langage pour ne pas...
M. Duhaime: C'est que j'éprouve des craintes.
M. Lalonde: Ah bon! Le ministre est nerveux, M. le
Président. En fait, je voulais vous demander si vous les aviez
informés que Me Jasmin et Me Beaulé devaient leur faire parvenir
des rapports sur les difficultés de recouvrement et la situation
financière des syndicats québécois. C'est essentiellement
ce que Me Aquin et Me Cardinal nous ont dit.
M. Boivin: Pour l'instant, cela n'éveille pas de
souvenir.
M. Lalonde: Maintenant, on ne parle plus de rubans puisque cela a
été imprimé dans le journal des Débats; c'est
à la page CI-1061, du 21 avril 1983. Il faudrait maintenant que je
trouve le passage exact. M. Aquin nous a rapporté ceci du lunch. Est-ce
que vous vous souvenez leur avoir dit cela?
M. Boivin: De leur avoir dit quoi, M. le Président?
M. Lalonde: Qu'ils recevraient des rapports.
M. Boivin: Non, non, M. le Président.
M. Lalonde: Me Aquin à la même date, le 21 avril -
on retrouve cette citation à la page CI-1060 - a dit et je le cite: "Je
me souviens lui avoir posé cette question - c'est à vous, lors du
lunch -: Est-ce que la rencontre avec le premier ministre est une rencontre
officieuse ou confidentielle? Il nous a dit, non. - II, c'est vous - Elle -
c'est la rencontre, j'imagine - sera communiquée au conseil
d'administration de la SEBJ." Et Me Aquin continue: "Je me souviens aussi que
je lui parle des nombreux textes de transaction qu'on a faits. Je ne les ai pas
en main." Me Aquin poursuit: "Je me souviens qu'il nous répond - il,
c'est vous, Me Boivin -: Bien, si vous faites quelque chose, ne vous accrochez
pas uniquement dans des papiers ou dans des textes de transaction." Est-ce que
vous vous souvenez avoir dit cela?
M. Boivin: On change de sujet, si je comprends bien. C'est une
autre question.
M. Lalonde: Non, non. C'est la question du lunch, ce qui s'est
passé au lunch.
M. Boivin: Ce ne sont pas des documents qu'ils devaient recevoir
ou je ne sais trop quoi.
M. Lalonde: Ah boni Non, parce que vous avez semblé me
répondre que vous ne vous en souveniez pas.
M. Boivin: Je ne m'en souviens pas. M. Lalonde: Ah
bon!
M. Boivin: Ce que je veux dire, c'est que vous passez à
une autre question. Je ne me souviens pas lui avoir dit cela. Il serait fort
possible que je lui aie dit quelque chose de semblable parce que... Mais "pas
s'accrocher dans des textes de transaction", cela m'étonne un peu comme
expression. J'ai une expression favorite; je lui ai peut-être dit de ne
pas s'accrocher dans les fleurs du tapis. J'ai peut-être employé
ce genre d'expression dans le contexte suivant. Je reconstitue là, parce
que Me Aquin, Me Beaulé et moi-même sommes confrères de
classe. Je connais le tempérament des deux et j'ai probablement dû
dire: Ne vous accrochez pas dans les fleurs du tapis. J'avais entendu dire que,
parfois, ils avaient des exigences en ce sens qu'il fallait que la rencontre
ait lieu au bureau d'untel plutôt qu'au bureau d'untel, être
prévenu d'avance, etc. J'ai peut-être dit: Ne vous accrochez pas
dans les fleurs du tapis. Mais c'est une reconstitution, M. le
Président.
M. Lalonde: Enfin, M. le Président, je rappelle au
témoin que Me Aquin a bien dit: Ne vous accrochez pas uniquement dans
des papiers ou des textes de transaction. Enfin! Est-ce que c'est une remarque
que vous avez faite pour encourager les avocats à bien faire leur
travail comme avocats de la SEBJ? À quel titre pouviez-vous leur donner
des conseils ou des instructions de cette nature? Comme chef de cabinet du
premier ministre?
M. Boivin: Je ne me suis pas posé la question. La
réponse m'apparaît maintenant -étant donné que vous
la posez - normale. Le premier ministre souhaite un règlement hors cour.
Moi, j'espère que les avocats, tout en ne sacrifiant aucunement les
intérêts de leurs parties respectives, ne s'accrocheront pas dans
les fleurs du tapis ou dans des papiers. Je ne sais pas si c'est
bienséant ou non, mais c'est la réponse qui me vient à
l'esprit.
M. Lalonde: Vous ne voyez rien d'anormal à ce genre
d'intervention de la part du chef de cabinet d'un premier ministre
auprès d'avocats d'une société d'État?
M. Boivin: En effet, M. le Président.
M. Lalonde: Est-ce que, au cours de votre carrière comme
chef de cabinet du premier ministre - je vous ai posé la question cet
avant-midi pour les opinions juridiques que vous étudiez - il vous est
arrivé, à d'autres reprises, d'intervenir auprès d'avocats
de sociétés d'État pour leur donner des instructions?
M. Boivin: Des instructions?
M. Lalonde: "Ne vous accrochez pas dans les transactions ou dans
les...
M. Boivin: Ce ne sont pas des instructions, c'est un souhait.
M. Lalonde: On souhaitait beaucoup dans ce cabinet, dans ce
temps-là.
M. Boivin: Vous savez très bien que je ne pourrais pas
donner d'instructions aux avocats d'une société d'État
sans passer par la société d'État.
M. Lalonde: Enfin, M. le Président, je ne poserai plus de
question là-dessus précisément. Je voulais la poser, parce
que... Je ferai mes commentaires une autre fois. Je les garde pour plus tard et
je vous assure que vous allez bien les entendre.
M. Duhaime: Très bien.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y a eu d'autres questions qui ont
été échangées, soulevées, ou est-ce qu'il y
a eu des échanges qui ont été faits entre Me Cardinal, Me
Aquin et vous-même lors de ce lunch, le 2 février 1979?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Lalonde: À quel moment avez-vous rencontré Me
Cardinal après ce lunch?
M. Boivin: Cela est indiqué sur la liste des rencontres
qui a été émise: Me Cardinal apparaît comme
étant venu au bureau le 9 février 1979.
M. Lalonde: Pouvez-vous nous décrire ce qui s'est
passé lors de cette rencontre?
M. Boivin: Quelle rencontre? M. Lalonde: Celle du 9
février.
M. Boivin: C'est à ce sujet, M. le Président, c'est
au sujet de cette rencontre que j'ai parlé ce matin, en parlant d'un
exemple, parmi d'autres, de rencontres dont je n'avais aucun souvenir.
J'ai dit que lorsqu'il s'est agi pour moi de préparer ma comparution,
à la suite de votre invitation, devant cette commission parlementaire et
lorsque la liste des rencontres a été dressée au bureau du
premier ministre parce que, entre parenthèses, je ne savais pas que nous
avions un registre des visites du premier mandat, du mandat de 1976... Je ne
savais pas qu'on conservait cela.
D'ailleurs, cela a été assez difficile parce que notre
copie est disparue, notre copie pour l'année 1978 et les six premiers
mois de l'année 1979 est disparue de notre bureau. L'original se
trouvait cependant au poste de sécurité
d'Hydro-Québec.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Boivin: Alors.
M. Lalonde: Vous me rassurez.
Une voix: ...un vol ou quoi?
M. Boivin: Je n'ai pas dit un vol, j'ai dit une disparition.
M. Lalonde: Vous me rassurez.
M. Boivin: Lorsque cette liste fut dressée, j'ai
parlé à Me Cardinal pour lui dire: Ton nom apparaît sur la
liste du 9 février. Comme vous avez des comptes d'honoraires ou des
agendas, etc., est-ce que tu sais ce que tu es venu faire à mon bureau
le 9 février? Il a dit: Non, je ne m'en souviens pas. Je ne m'en
souviens pas non plus. C'est pour cela que je m'étais informé
auprès de Me Cardinal du but de la visite.
M. Lalonde: Est-ce que Me Jasmin s'est trouvé dans votre
bureau ce même jour?
M. Boivin: Suivant la liste, oui.
M. Lalonde: Est-ce que Me Jasmin, d'après la liste que
vous avez et que j'ai aussi - elle nous a été fournie par le
bureau du premier ministre - serait entré à vos bureaux - pas
nécessairement en votre présence - à 14 h 20 et sorti
à 17 h 15, près de trois heures plus tard, et Me Cardinal serait
entré à 16 h 30 pour en sortir à 17 h 05? Donc, pendant la
période, tel qu'indiqué par l'heure d'entrée et de sortie,
où Me Jasmin était à vos bureaux, pas
nécessairement dans votre bureau, est-ce que vous vous souvenez que Me
Jasmin et Me Cardinal auraient été ensemble en votre
présence?
M. Boivin: Mon souvenir, durant toute la durée de toutes
ces rencontres, c'est que jamais, je n'ai rencontré les avocats des
parties adverses en présence l'un de l'autre.
M. Lalonde: Alors, vous affirmez donc qu'ils n'ont jamais
été en votre présence ensemble?
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Lalonde: Bon. Maintenant, est-ce que... Parce que vous avez
très librement tout à l'heure - le président l'a permis -
dit que, récemment - il y a, j'imagine, quelques semaines - pendant la
préparation de votre comparution ici, vous aviez
téléphoné à Me Cardinal pour attirer son attention
sur la date du 9 février, pour essayer de vous rafraîchir la
mémoire. Est-ce que vous avez fait la même chose avec Me
Jasmin?
M. Boivin: J'ai dit ce matin que je n'ai pas osé, vu que
M. Jasmin est maintenant juge, je n'ai pas osé lui
téléphoner à ce sujet.
M. Lalonde: Est-ce que vous vous souvenez de ce qui est
arrivé, de ce qui s'est dit lors de ces deux réunions? Si je
comprends bien, elle n'a pas été commune. Il y aurait donc eu
deux réunions, l'une avec Me Jasmin, qui aurait duré quelque part
entre 14 h 20 et 17 h 15, et une autre avec Me Cardinal, quelque part entre 16
h 30 et 17 h 05. Est-ce que vous vous souvenez et pouvez nous dire, nous
éclairer là-dessus? Nous sommes très dépendants de
votre mémoire.
M. Boivin: Absolument pas. C'est pour cela que je vous ai dit
tantôt que j'ai fait des démarches auprès de Me Cardinal
pour essayer de le savoir. Et c'est pour cela que je vous ai dit ce matin que
je n'ai pas osé le demander à M. Jasmin parce qu'il est
maintenant juge et qu'il - moi, je l'espère, en tout cas - s'en
souviendra lorsqu'il viendra ici.
M. Lalonde: Est-ce que je comprends que vous ne vous souvenez de
rien du tout de ce qui s'est passé cet après-midi-là?
M. Boivin: Absolument pas.
M. Lalonde: Vous souvenez-vous qui a convoqué ces deux
réunions?
M. Boivin: Non, M. le Président. Écoutez, c'est le
9 février 1979. Si ce n'était pas écrit sur la liste, je
vous affirmerais qu'elle n'a pas eu lieu, parce que je ne m'en souviens
pas.
M. Lalonde: Non, écoutez, je sais que vous protestez de
votre bonne foi. Je comprends cela.
M. Boivin: Non, je ne proteste de rien. Elle n'est pas mise en
cause. Alors, je ne proteste pas de ma bonne foi.
M. Lalonde: Je veux dire... Je vous demande si vous vous en
souvenez. Vous ne vous en souvenez pas. Et, maintenant, vous avez une remarque
un peu plus énergique. Enfin, je ne veux pas juger votre comportement.
Il reste que j'essaie de savoir si, au moins, en trois heures de
réunion, vous vous souviendriez de... Parce qu'il y a une réunion
du 1er février où vous vous êtes souvenu de pas mal de
choses. Celle-là est du 9 février.
M. Boivin: M. le Président, il me semble que rencontrer le
premier ministre avec trois présidents de sociétés
d'État, ou trois membres d'un conseil d'administration de
sociétés d'État, où on a discuté du sujet
que vous connaissez, il me semble que c'est très différent que de
rencontrer Me Jean-Paul Cardinal, que je rencontre à peu près
toutes les semaines, et rencontrer Me Jasmin, que je voyais tout le temps dans
le bureau. Il me semble qu'il n'y a aucune commune mesure entre les deux
rencontres et que... D'ailleurs, si vous m'interrogiez et que je n'avais pas de
liste, je vous dirais que j'ai eu plusieurs rencontres. Mais vous me diriez:
Telle date, telle date, que je dirais: Je ne le sais pas, je ne le sais pas, je
ne le sais pas, je ne le sais pas. Écoutez, moi, je me fie sur ces
listes-là pour vous dire, pour vous affirmer, grâce aux listes,
qu'il y a eu des rencontres. Parfois, il y a quelques faits qui font que je me
souvienne de quelque chose. Par exemple, la visite des avocats
américains. Je me souviens qu'il y avait un avocat américain - Me
Beaulé a dit deux. Moi, je veux bien l'admettre. Bon, cela, je m'en
souviens. Ce n'est pas tous les jours que je rencontre les grands avocats
américains. Ils étaient assez âgés. Ils
étaient très polis, etc. Je me souviens de cela. Je me souviens
de M. Laliberté, le 3, parce que c'est écrit le 3. Pour le reste,
je me fie à la liste et j'essaie de faire des reconstitutions.
M. Lalonde: Est-ce que vous vous souvenez de l'objectif que Me
Jasmin vous aurait dit qu'il poursuivait dans les rencontres qu'il avait avec
vous?
M. Boivin: II ne s'est pas exprimé dans ces termes, mais
M. Jasmin, tout au long -c'était très clair, il ne s'en est
jamais caché, M. Jasmin - il voulait à tout prix un
règlement hors cour pour les raisons dont je vous ai fait part, je
pense, ce matin. À mesure que le procès se déroulait, M.
Jasmin était nerveux et il me racontait tous ses problèmes -
j'exagère là - dans le sens de: Bientôt, le syndicat n'aura
plus d'argent; bientôt, je vais laisser les procédures ex parte...
Moi, je lui répétais: Bien, mon cher Jasmin, prends une tasse de
café... Qu'est-ce que tu veux que je te dise? C'est dans les mains des
gens du conseil d'administration. Ils vont bien décider un jour,
à une prochaine réunion. Eux aussi savent que le procès
est en cours. Lui, son but était très clair.
M. Lalonde: Je ne veux pas mettre de mots dans votre bouche, mais
est-ce qu'on peut dire que, au cours de vos rencontres, vous avez eu des
entretiens qui ont porté sur l'objectif de Me Jasmin,
c'est-à-dire d'avoir un règlement hors cour?
M. Boivin: Ah! Évidemment, M. le Président.
Évidemment.
M. Lalonde: Est-ce que...
M. Boivin: C'est là qu'il me faisait valoir longuement,
parfois pesamment, ses arguments pour un...
M. Lalonde: Est-ce que votre rencontre avec M. Laliberté
et la rencontre à laquelle vous avez participé, le 1er
février, avec MM. Saulnier, Boyd et Laliberté, étaient des
démarches en vue d'obtenir ce règlement hors cour?
M. Boivin: Bien, je pense qu'il serait plus exact de dire que,
nous, le premier ministre et moi, n'avons pas fait de démarche. C'est M.
Saulnier qui a appelé, au meilleur de mon souvenir, pour demander une
rencontre avec le premier ministre, pour les motifs, dit-il - là, c'est
lui qui le dit, je me réfère à son témoignage ici -
de connaître le sentiment du premier ministre.
M. Lalonde: Parlons d'abord de la réunion du 3
janvier.
M. Boivin: Pardon?
M. Lalonde: Excusez-moi! D'abord, si vous voulez, on va mettre de
côté la réunion du 1er février. Parlons maintenant
de celle du 3 janvier. Je vais vous poser la question, même si je pense
qu'elle a déjà été posée. Est-ce vous qui
l'avez convoquée?
M. Boivin: J'imagine.
M. Lalonde: Bon. Est-ce que c'était une démarche
dans le but d'obtenir l'objectif, c'est-à-dire que la cause soit
abandonnée et qu'il y ait un règlement hors cour?
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Lalonde: Me Boivin, vous avez été en possession
de certains documents tout au
cours de cette période. Dans la première liste des
rencontres que le premier ministre nous a fournie, parce que j'avais
demandé la liste des rencontres et aussi des conversations
téléphoniques et des documents... Quant aux rencontres, on avait
le registre pour se guider, je présume. Quant aux conversations
téléphoniques, le document dit qu'on ne peut pas retracer les
conversations téléphoniques. De mémoire, vous nous en avez
rapporté quelques-unes. Quant aux documents qui auraient pu être
échangés, votre liste, l'avez-vous? Pouvez-vous lire ce
que...
M. Boivin: Je l'ai devant moi, M. le Président.
M. Lalonde: Oui, s'il vous plaît.
M. Boivin: "Les membres du personnel du cabinet du premier
ministre n'ont pas conservé les quelques documents qui leur furent remis
à l'époque, puisque ceux-ci apparaissaient peu importants et
n'étaient de toute façon que des photocopies." Fin de la
citation.
M. Lalonde: C'est cela que j'avais vu dans le document. Vous en
avez eu quelques-uns que vous avez mentionnés au fur et à mesure
que vous décriviez. Pourriez-vous faire un résumé des
documents que vous avez eus, demandés ou pas demandés, par
exemple, à partir du 1er décembre 1978?
M. Boivin: Au meilleur de mon souvenir... C'est assez facile
parce que je me souviens que Me Beaulé m'a remis une copie de son
plaidoyer. Je ne m'en souvenais pas, mais Me Beaulé m'a fait souvenir
qu'il m'a fait parvenir copie de la lettre du 5 février, je crois - je
dis cela de mémoire - adressée à Me Aquin. J'affirme qu'il
m'a remis aussi - je ne sais pas comment qualifier le document... Me Tremblay,
je l'ai dans mes papiers. Ce ne sont pas des bordereaux de paie - je
n'appellerais pas cela de même -c'étaient des...
M. Lalonde: Me Beaulé en a fait la description, je pense,
dans son témoignage.
M. Boivin: II voulait prouver par ce document que M. Duhamel, je
crois, était l'employé du conseil provincial ou de la FTQ
elle-même, plutôt que du local 791, ou quelque chose de semblable.
Je sais que j'ai le document; si je ne l'ai pas ici, je l'ai au bureau. Ce
n'est pas le document original que m'a remis Me Beaulé mais, quand j'ai
préparé ma comparution ici, je suis allé voir Me
Beaulé et je lui ai dit: II me semble que tu m'as remis ta copie de
plaidoyer - quand il m'eut rappelé la rencontre du 1er décembre -
il me semble que tu m'as remis une lettre et là il m'a encore
donné des photocopies.
M. Lalonde: Si cela peut vous aider ce que Me Beaulé a dit
au ruban 1030, il a dit qu'il vous avait transmis des photocopies de factures
que la SEBJ envoyait à la FTQ pour le gîte et - là, il
manque un mot - de M. Duhamel.
M. Boivin: Je ne sais pas si ce sont des factures, mais je sais
que je les ai au bureau ces papiers.
M. Lalonde: Et les photocopies des chèques tirés
par l'Union des opérateurs de machinerie lourde pour payer M.
Duhamel?
M. Boivin: Non, des copies de chèques, je n'ai jamais vu
cela.
M. Lalonde: Vous ne les avez jamais vues?
M. Boivin: Non. Je sais que Me Beaulé a dit cela. Vu qu'il
a une terrible mémoire, cela doit être vrai, mais moi je ne m'en
souviens pas. Je me souviens de ce que vous appelez des factures.
M. Lalonde: Là, on est au plaidoyer de Me Beaulé,
le document de Me Beaulé, qui était une copie d'un document remis
le 5 février à Me Aquin, et aussi ces documents. Si vous me le
permettez, il y a aussi la copie de l'opinion de Geoffrion et Prud'homme que
vous êtes allé quérir au bureau?
M. Boivin: Comme je vous l'ai dit ce matin - c'est pour cela que
je ne l'ai pas mis dans la liste que vous venez de me demander - est-ce que je
l'ai lu au bureau ou est-ce que j'en ai obtenu une photocopie? Je ne m'en
souviens pas.
M. Lalonde: Avez-vous obtenu copie soit du plaidoyer ou
d'opinions juridiques de Me Jasmin?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Lalonde: Je vais reposer ma question pour que vous puissiez y
répondre. Le document que Me Beaulé vous aurait remis et qui
serait une copie du rapport remis le 5 février à Me Aquin portait
une date. Est-ce que vous...
M. Boivin: Je viens de le dire. La lettre était
datée du 5 février. Je ne sais pas s'il me l'a remise le 5. La
lettre est datée du 5 février.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Boivin: Je crois que le... Il me semble que vous l'avez fait
produire par Me Beaulé, mais j'en ai aussi une copie. Si ce n'est pas
ici, c'est au bureau.
M. Lalonde: Cela va. Cela va très bien. Il n'y aurait pas
d'autres opinions juridiques que vous auriez consultées...
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Lalonde: ...que celle de Geoffrion et Prud'homme, 1975, si on
peut la dater ainsi? Il n'y en a qu'une en 1975.
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez vu l'opinion juridique de
Geoffrion et Prud'homme du 5 janvier 1979?
M. Boivin: Savez-vous, je pense que non. Ce qui me fait
répondre de cette façon, c'est qu'il me semble que c'était
la première fois que je la voyais lorsque je l'ai vue. Dans les cahiers
où elle a été produite, je l'ai lue.
M. Lalonde: Vous citez dans votre mémoire l'opinion du 19
février 1979. Si je comprends bien, ce serait l'opinion de Geoffrion et
Prud'homme parce que vous dites: "Dans leur opinion". Au bas de la page 5.
M. Boivin: Exact.
M. Lalonde: Leur opinion, parce qu'on sait qu'il y en a eu une de
Me Gadbois à la même date, adressée... On le sait
maintenant, parce que c'est un document de la commission.
M. Boivin: Ah! Je n'avais jamais vu celle de Me Gadbois.
M. Lalonde: Maintenant, celle du 19 février 1979. Quand en
avez-vous pris connaissance?
M. Boivin: Pendant les travaux de cette commission.
M. Lalonde: Maintenant? M. Boivin: Oui.
M. Lalonde: Vous ne l'aviez pas vue à ce moment?
M. Boivin: Non.
M. Lalonde: Alors, j'ai mal compris si j'ai pensé que vous
aviez invoqué cette opinion du 19 février 1979 pour vous faire
une opinion avant d'aller voir le premier ministre avant Noël 1978.
M. Boivin: Ce que... Vous avez mal compris, c'est certain; mais,
je me suis peut-être mal exprimé, M. le Président.
M. Lalonde: Non, parce que vous la mettez dans une liste
de...
M. Boivin: Non, ce que je veux dire, c'est que j'exprime mon
scepticisme quant à la responsabilité du syndicat
américain et je tire des arguments d'une opinion que je connaissais
à l'époque, c'est-à-dire celle du 16 décembre 1975
et j'utilise, pour les fins de mon propos, l'opinion du 19 février 1979
dont j'ai connu l'existence au cours des travaux de cette commission.
M. Lalonde: Alors, votre très grand scepticisme qu'on
retrouve au sous-paragraphe c, à la page 4, n'est pas totalement
appuyé sur l'opinion du 19 février 1979?
M. Boivin: Exact, M. le Président. M. Lalonde:
Maintenant...
M. Boivin: C'est-à-dire qu'il est en partie appuyé
aujourd'hui, mais à l'époque, il ne l'était pas.
M. Lalonde: Aujourd'hui il est en partie appuyé, oui. Ah
oui! C'est-à-dire que vous l'invoquez pour confirmer l'opinion que vous
aviez à ce moment.
M. Boivin: Voilà. (17 h 30)
M. Lalonde: Vous avez référé dans votre
mémoire à l'article de la Presse du 17 mars 1983. Vous l'avez
même analysé.
M. Boivin: Superficiellement et brièvement, mais, enfin,
je l'ai analysé.
M. Lalonde: Si je comprends bien, oui. Est-ce que ce que le
journaliste vous fait dire, quand il dit que vous faisiez rapport
régulièrement au premier ministre, est exact?
M. Boivin: Si régulièrement n'a pas
nécessairement dans son acception courante l'idée de
fréquence, oui. Ma réponse est oui. Pour moi,
régulièrement ne veut pas dire à une fréquence
rapprochée. Faire rapport régulièrement, c'est faire
rapport lorsque nécessaire et dans le cours régulier des
choses.
M. Lalonde: Vous situez le début de votre
intérêt dans cette cause à novembre 1978 - je pense -
lorsque M. Laberge, président de la FTQ, vous aurait appelé.
Est-
ce que c'est la première fois que vous entendiez parler de cette
cause? Écoutez, je vous mets en garde parce qu'il y a aussi un lunch en
juin 1978...
M. Boivin: Cela va, M. le député. M. Lalonde:
...avec Me Beaulé.
M. Boivin: Cela va, M. le député, je vous remercie.
Je m'en souvenais parce qu'on a parlé du lunch ce matin. J'avais lu les
journaux, mais je n'avais pas une connaissance autre que la connaissance de
tout le monde de cette cause-là, une connaissance que je pourrais
qualifier de superficielle, une connaissance de commune renommée, quoil
C'est exact, j'ai pris connaissance pour vrai de cette cause à
l'époque... Je suis prudent quand je situe mon paragraphe 2, à la
page 1, lorsque je dis: "À l'automne, j'ai reçu un
téléphone de M. Laberge...", et la dernière phrase dit:
"Elle aurait donc vraisemblablement eu lieu au cours du mois de novembre."
C'est au meilleur de mon souvenir. Si M. Laberge venait jurer que c'est en
octobre, je ne le contredirais pas. C'est au meilleur de mon souvenir et c'est
pour cela que je m'exprime de cette façon. Il me semblait que
c'était peu de temps avant la rencontre avec Me Jasmin.
M. Lalonde: M. Michel Girard rapporte un certain nombre de choses
qui vous concernent. Je vais en lire quelques-unes de l'article du jeudi 17
mars 1983: "M. Boivin avait été chargé dès le
début de l'automne 1978 de piloter ce litigieux dossier après
entente entre M. Lévesque, l'ancien ministre de l'Énergie, Guy
Joron, et l'ex-ministre du Travail, Pierre-Marc Johnson." Premièrement,
est-ce que vous avez été chargé à l'automne...
Est-ce vous-même qui vous en êtes chargé ou est-ce que c'est
M. Lévesque qui vous a donné le mandat?
M. Boivin: II ne m'a pas donné de mandat sauf avant
Noël. J'ai eu des représentations - comme je le dis dans mon texte
- j'ai fait rapport à M. Lévesque. Là, on peut dire qu'il
m'a donné un mandat. En d'autres termes, cela fonctionne toujours comme
cela au bureau. Je ne vais pas voir M. Lévesque chaque fois pour lui
demander la permission de rencontrer quelqu'un.
M. Lalonde: Vous considérez avoir reçu un mandat du
premier ministre lors de votre rencontre avant Noël 1978?
M. Boivin: C'est exact.
M. Lalonde: Pouvez-vous décrire en quoi consistait ce
mandat?
M. Boivin: M. Lévesque ne s'exprime pas en termes
juridiques et ne dit pas: Je te confie le mandat.
M. Lalonde: Je vous invite à nous donner cela en
vulgarisant.
M. Boivin: J'ai réfléchi et la meilleure
façon dont je peux m'exprimer je l'ai fait dans ma déclaration,
la plus condensée, la plus claire, la plus précise. Je pourrais
peut-être la citer pour les téléspectateurs: "M.
Lévesque m'a dit qu'il était évident que cette cause
devrait se régler hors cour aux conditions dont les parties auraient
elles-mêmes convenu. Il m'a demandé de faire connaître son
opinion au président de la SEBJ et de me tenir au courant de
l'évolution du dossier afin de pouvoir l'en informer." J'ai
essayé de synthétiser pour la compréhension.
M. Lalonde: Est-ce que vous avez fait rapport à M.
Lévesque, le premier ministre, de toutes vos rencontres?
M. Boivin: Ah non! Cela ne marche pas comme cela chez nous. J'ai
sûrement dû dire au premier ministre que j'avais rencontré
M. Laliberté, mais je n'ai certainement pas dû dire, parce que ce
n'est pas mon style et ce n'est pas le sien: Excusez-moi de vous
déranger, M. Beaulé est venu. Excusez-moi de vous
déranger, M. Jasmin est venu. Quand j'ai quelque chose à dire
d'important, je vais le voir; sinon, je ne vais pas le voir. Je ne le
dérange pas.
M. Lalonde: Est-ce que je dois comprendre que vous n'avez pas
informé le premier ministre, votre patron, des rencontres dans votre
bureau avec Me Jasmin, Me Beaulé et Me Cardinal?
M. Boivin: Je lui ai peut-être dit, c'est bien
différent: M. Beaulé est venu me voir. D'ailleurs, je lui ai dit,
lorsque je lui ai fait rapport avant le temps des fêtes: M. Beaulé
est venu me voir. La FTQ... Quand je parle de la FTQ dans mon texte, je
réfère à M. Laberge et à M. Jasmin. Mais, par la
suite, je n'ai pas dit: Telle date, telle date. Il devait le savoir - j'imagine
- de façon générale, puisque je lui avais dit lorsque je
lui avais fait rapport avant la période des fêtes: J'ai eu des
représentations de M. Laberge, j'ai eu des représentations de Me
Jasmin qui représente des syndicats affiliés à la FTQ,
j'ai eu des représentations de la part de Me Beaulé, procureur du
syndicat américain. Après cela, je ne vais pas voir le premier
ministre pour des rencontres qui se déroulent normalement, parce que le
dossier évolue normalement.
M. Lalonde: Est-ce que...
M. Boivin: À titre d'exemple, je ne lui ai pas dit: J'ai
rencontré les avocats du syndicat américain, parce qu'il n'y a
rien de substantiel dans cette rencontre.
M. Lalonde: Est-ce que vous lui avez fait rapport du lunch du 2
février avec les avocats de la SEBJ?
M. Boivin: Sûrement pas; ce n'est pas mon genre et ce n'est
pas le sien, non plus.
M. Lalonde: Selon vous, quel était l'enjeu de ce dossier
et quel mandat aviez-vous pour le piloter ou le conduire, le dossier?
M. Boivin: Je saisis très mal votre question. Je la saisis
certainement très mal, parce que je viens d'y répondre en citant
le texte qui apparaît au haut de la page 8 de ma déclaration.
Mais, puisque vous répétez la question, je présume que je
la saisis mal, parce que vous ne la répéteriez pas.
M. Lalonde: En fait, j'essaie simplement de comprendre. Vous avez
un mandat. Vous dites que vous avez reçu un mandat. Le mandat, ce n'est
pas un mandat écrit. Je comprends que, entre chef de cabinet et premier
ministre, on ne s'écrit pas de lettres. Mais, vous avez
décidé, ensemble, donc, de faire quelque chose ou le premier
ministre a dit: J'accepte vos recommandations...
M. Boivin: ...de favoriser un règlement hors cour.
M. Lalonde: C'est cela. Est-ce que vous avez fait rapport au
premier ministre des démarches que vous aviez décidé de
faire pour faire en sorte que le règlement hors cour se fasse?
M. Boivin: J'aime bien le premier ministre pour cela, il me fait
confiance. On ne décide pas ces affaires-là en détail. Il
a confiance que je vais accomplir mon mandat selon les formes et la
manière que je juge les plus convenables. Je serai blâmé,
je présume, si j'agis de façon incorrecte.
M. Lalonde: J'ai déjà posé la question,
à savoir si vous aviez fait rapport. Il me semble que vous m'avez dit:
Peut-être de la réunion avec M. Laliberté. Est-ce que je
fais erreur?
M. Boivin: J'ai dit que je ne m'en souvenais pas, mais cela ne
m'étonnerait pas du tout. Ce serait même normal que j'aie dit au
premier ministre: J'ai rencontré M. Laliberté, président
de la SEBJ, pour lui faire part de... etc.
M. Lalonde: Je ne sais pas si vous avez la transcription des
débats du 20 février 1979 où le premier ministre dit... Il
faudrait que j'aie la référence exacte, lors du minidébat.
On dit, à la page 5793, le 20 février 1979, en parlant... Je ne
sais pas si vous avez... Oui, on doit avoir la même photocopie, c'est
vers le bas de la page, à la deuxième colonne, au bas de la page.
On dit: "Mais ce syndicat américain, d'après les avis juridiques
qui m'ont été expliqués longuement avant que je donne mon
humble sentiment..." On demandera au premier ministre exactement où cela
se situe, ce n'est pas à vous de témoigner là-dessus.
Est-ce que vous avez expliqué des avis juridiques au premier
ministre?
M. Boivin: J'ai tenté de mon mieux d'expliquer au premier
ministre la prétention juridique ou le fondement juridique, si vous
voulez, invoqué par la SEBJ, par la voie de ses procureurs, Geoffrion et
Prud'homme. J'ai de mon mieux donné mon sentiment sur cet avis
juridique.
M. Lalonde: Est-ce que vous situez cela avant Noël, au
moment où vous l'avez rencontré, ou si cela a été
fait à d'autres occasions?
M. Boivin: Sûrement avant Noël. Est-ce que nous en
aurions reparlé après? Je l'ignore. J'ai dit sûrement avant
Noël. Est-ce que nous en aurions reparlé, le premier ministre et
moi, de cet aspect de la question, si je comprends bien, de la
responsabilité juridique du syndicat...
M. Lalonde: Je n'ai pas compris les deux derniers mots, tout
simplement. Je l'ignore, avez-vous dit?
M. Boivin: Je l'ignore.
M. Lalonde: Ah bon, c'est ce que je n'avais pas compris. M. le
Président, pour l'instant, je vais passer la parole à quelqu'un
d'autre.
M. Boivin: Merci, M. le député.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: M. le Président, à la page Il de votre
déclaration, sur une réponse que vous faisiez à M. Girard,
si l'on retourne à la page 12, vous dites, comme réponse: Je n'ai
jamais participé à des tractations dans l'exercice normal de mes
fonctions de chef de cabinet. J'ai rencontré les avocats ouvertement
à mon bureau. Pourriez-vous expliquer, pour les fins du débat,
qu'est-ce que vous considérez être rencontrer ouvertement des
avocats?
M. Boivin: Je pense que le texte veut dire que je ne suis pas
allé me cacher dans une toilette ou une taverne pour leur parler. Je les
ai reçus à mon bureau, qui est un endroit respectable, je crois,
jusqu'à preuve du contraire.
M. Laplante: Vous continuez aussi dans le dernier paragraphe: Le
journaliste m'impute des motifs partisans alors que c'est
l'intérêt public qui m'a guidé lorsque j'ai fait cette
recommandation au premier ministre. Ici, en commission, si l'on prend M. Boyd
en particulier, pour lui l'intérêt public, c'était de
continuer l'action de 32 000 000 $. D'autres avocats de Geoffrion et Prud'homme
ont ici pensé à un moment donné la même chose que M.
Boyd. Vous, l'intérêt public qui vous a guidé, dans quel
contexte le placez-vous?
M. Boivin: Si vous me le permettez, M. le député,
je crois que vous confondez deux choses, et je vous le dis respectueusement,
lorsque vous parlez du sentiment de M. Boyd et du sentiment des procureurs de
la SEBJ. Les procureurs de la SEBJ ont dit telle et telle chose sur le plan
juridique. M. Boyd, ne se place pas tellement sur le plan juridique. Pour M.
Boyd il en va du bon renom ou du nom de cette société SEBJ, qui
est une société respectable, de faire établir clairement
par un jugement de cour que la SEBJ n'a aucune responsabilité dans les
dommages ou dans le saccage.
Maintenant, lorsque je dis que c'est l'intérêt public qui
m'a guidé, je peux avoir ma conception de l'intérêt public.
M. Boyd peut avoir la sienne et la sienne peut être aussi respectable que
la mienne. C'est une question de jugement, une question
d'appréciation.
M. Laplante: Puisque vous avez rencontré Me
Boulé...
M. Boivin: Beaulé.
M. Laplante: Puisque vous avez rencontré Me Beaulé
à quelques reprises, lors de ces rencontres, avez-vous fait des
promesses quelconques en disant: Oui, je vais l'arranger, le dossier. Oui, il y
a des choses à faire dedans?
M. Lalonde: C'est très suggestif comme question.
M. Boivin: C'est même dangereux pour le témoin.
Une voix: Ah oui?
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il peut reprendre sa
question? M. le député. (17 h 45)
M. Laplante: Oui, on peut toujours reprendre. Est-ce que vous
auriez donné à M. Beaulé une affirmation quelconque
concernant le dossier qu'il vous apportait, que vous en jugeriez
vous-même, que vous seriez sympathique à un règlement dans
ce dossier? Est-ce que vous lui auriez promis que vous pourriez régler
ce dossier?
M. Boivin: Je crois m'être exprimé, au meilleur de
mon souvenir, sur ce sujet ce matin. J'ai dit à Me Jasmin, au mois de
janvier, que j'avais rencontré M. Laliberté et que je lui avais
dit que M. Lévesque était fortement favorable à un
règlement hors cour - j'ai dit cela à M. Jasmin - tant à
l'égard des syndicats québécois représentés
par Me Jasmin qu'à l'égard du syndicat américain. Est-ce
que je l'ai dit à M. Beaulé? Je l'ignore à ce jour. Mais,
je présumais - je suis sûr que je présumais -que lorsque je
disais quelque chose à M. Jasmin, il le disait à M. Beaulé
et que, lorsque je disais quelque chose à M. Beaulé, il le disait
à M. Jasmin. Dans une grande mesure et non pas dans toute la mesure,
mais dans une grande mesure, leurs intérêts étaient
communs.
M. Laplante: Merci, monsieur.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. En relisant votre
témoignage de ce matin, M. Boivin, vous faites allusion à
plusieurs reprises au fait que Me Jasmin, l'avocat des syndicats
québécois, vous est apparu à de nombreuses reprises comme
étant très nerveux. Vous l'avez répété cinq
ou six fois. Ici, au ruban 1414, page 1: "M. Jasmin qui m'apparaissait
très nerveux à cette époque..."
Un peu plus loin... Je l'ai vu à plusieurs reprises, mais... Et,
ce que je me demande, moi, c'est: Si Me Jasmin était si nerveux que
cela, qu'est-ce qu'il pouvait bien venir faire dans votre bureau? Pourquoi Me
Jasmin venait-il vous voir, vous?
Le Président (M. Jolivet): Je pense que...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une question qui
devrait être posée à Me Jasmin.
Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord. Je ne la
reçois même pas.
M. Bourbeau: Vous ne voulez pas la recevoir?
Le Président (M. Jolivet): Non.
M. Lalonde: Est-ce qu'il vous a dit pourquoi...
M. Bourbeau: Quand M. Jasmin est venu vous voir, est-ce qu'il
vous a dit pourquoi il était si nerveux?
M. Boivin: Nerveux, vous savez... Vous pouvez juger cela
quelquefois, si un gars parle trop vite, si un gars mange ses mots, si un gars
tremble ou si un gars te dit deux fois la même chose, deux jours de
suite, tu trouves que c'est exagéré un peu. Tu te dis que ce doit
être de la nervosité, certainement.
M. Bourbeau: Vous avez dit que les avocats des syndicats
défendeurs, Me Beaulé et Me Jasmin, venaient vous voir parce
qu'ils avaient l'impression que leurs offres de règlement ne se
rendaient pas à la SEBJ.
M. Boivin: Je n'ai pas dit cela, M. le député.
Cela, c'est l'une des raisons.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez préciser, alors,
exactement ce que vous avez dit?
Est-ce que vous avez compris ma question?
M. Boivin: Oui, je l'ai comprise mais c'est parce qu'elle est
très large. C'est la façon dont vous formulez votre question qui
me rend mal à l'aise. Les deux avocats ne venaient pas me voir parce
qu'ils pensaient que leur message n'était pas bien transmis à la
SEBJ par les avocats de l'étude Geoffrion et Prud'homme. Ils venaient me
voir d'abord pour le motif central, principal - il me semble que cela a
été dit par tout le monde depuis 19 jours - qu'ils voulaient un
règlement hors cour. Ils voulaient me convaincre de l'opportunité
ou de la sagesse ou je ne sais trop quel grand mot de la SEBJ de voir à
régler cette cause par la voie d'un règlement hors cour
plutôt que de procéder à jugement. C'est le grand cadre, si
vous voulez, de leur visite.
À un moment donné, j'ai senti très clairement et je
crois même, j'oserais même affirmer, je crois, que Me Jasmin me l'a
dit. Il a dit: Je ne suis pas certain que tous nos arguments, que nous te
faisons valoir - en me parlant - et que nous faisons valoir également
à Mes Geoffrion et Prud'homme, parce qu'il me disait: Est-ce que tu
transmets nos arguments à M. Laliberté? Moi, je disais: Ce n'est
pas "ma job". Ils ont des avocats. Il me disait: Je ne suis pas sûr
qu'ils sont intéressés à un règlement - en parlant
des avocats de Geoffrion et Prud'homme - et je ne suis pas sûr qu'ils
transmettent, avec toute la conviction, avec toute l'amplitude
nécessaire, nos arguments. Voilà ce que j'ai dit ce matin ou ce
que je voulais dire.
M. Bourbeau: Oui. C'est effectivement un peu ce qu'on avait
compris. Mais les défendeurs, quand ils venaient vous voir et qu'ils
vous disaient: On n'est pas sûrs que -j'ai le texte de ce matin, je l'ai
retrouvé depuis ce temps-là et c'est essentiellement ce que vous
venez de dire. Est-ce que vous leur avez dit, aux avocats de la partie
défenderesse, que, normalement, ils devraient s'adresser à leur
confrère et non à vous-même?
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je ne
veux pas...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): Me Boivin répond
très bien et je ne veux pas l'empêcher de répondre, mais il
a déjà dit que le point central, que le but principal des visites
en question était dans le cadre qu'ils voulaient un règlement
hors cour, mais que, à l'occasion, Me Jasmin lui a dit telle
chose...
M. Bourbeau: Écoutez, M. le Président...
M. Vaillancourt (Jonquière): On n'a pas
exagéré aujourd'hui. Vous faites bien cela, continuez à
bien faire cela et on va bien faire nous aussi.
Le Président (M. Jolivet): Non, s'il vous plaît, M.
le député.
M. Duhaime: Vous commencez à exagérer,
là.
Le Président (M. Jolivet): Je permets tout simplement au
député de répéter sa question.
M. Bourbeau: M. le Président, vous le comprendrez, je ne
suis pas avocat...
M. Vaillancourt (Jonquière): Cela paraît.
M. Bourbeau: Je peux peut-être à l'occasion ne pas
très bien saisir...
M. Boivin: M. le député, j'ai saisi votre question.
Si vous voulez que j'y réponde, je répondrai.
M. Bourbeau: Oui. Allez-yl
M. Boivin: J'ai dit ou je crois avoir dit, il est très
vraisemblable que j'aie dit à Me Jasmin: Tu es trop soupçonneux
vis-à-vis de Geoffrion et Prud'homme. Je suis sûr que si tu leur
transmets des arguments, ce sont des avocats responsables, etc., ils vont faire
le message à leur client. Deuxièmement, je lui
ai dit, ce qui me paraît bien plus important... Je ne sais pas
pourquoi cela l'énervait, parce que les arguments de Me Jasmin pour un
règlement hors cour, pas tous, mais les principaux arguments pour un
règlement hors cour invoqués par Me Jasmin sont justement ceux
que j'ai fait miens et que j'exprime dans ma déclaration d'ouverture.
J'ai dit: M. Laliberté et, donc, la SEBJ sait tout cela puisque je lui
en ai fait part lors de la rencontre du 3 janvier 1979 et que c'est
également le sentiment du premier ministre, bien que le premier ministre
ne mettait pas nécessairement le même accent sur chaque argument
que moi. Mais comme c'est la décision du premier ministre et non la
mienne, vous lui poserez des questions sur cela. Voilà l'essentiel pour
répondre à votre question.
M. Bourbeau: Dans le procès dont on parle il y avait
essentiellement deux parties. Une partie demanderesse, qui poursuivait la SEBJ,
qui avait ses avocats; il y avait même un avocat résident, Me
Gadbois, un avocat à l'intérieur de la boîte. Il y avait
les défendeurs, des syndicats qui étaient
représentés par deux avocats, Me Beaulé et Me Jasmin. Ce
que j'ai de la difficulté à comprendre dans cela, n'étant
pas avocat, comme je le disais tout à l'heure, c'est que si une partie
voulait obtenir un rejet de la cause ou un abandon de la cause ou un
règlement, pourquoi cette partie, nommément les
défendeurs, n'allait pas rencontrer ceux qui la poursuivaient: la SEBJ
ou Me Gadbois s'ils n'avaient pas confiance aux avocats qui
représentaient? Pourquoi c'était vous qu'ils allaient voir?
M. Vaillancourt (Jonquière): On pourrait s'opposer
à celle-là.
Le Président (M. Jolivet): C'est une question d'opinion et
vous n'avez pas à répondre. Elle reste irrecevable.
M. Paradis: S'il le sait.
Le Président (M. Jolivet): Je ne recommencerai pas cette
partie. Elle est irrecevable.
M. Bourbeau: Je vais la retirer M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président.
M. Bourbeau: Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Lalonde: Sur la question de règlement, je pense...
Le Président (M. Jolivet): Je ne sais pas de quelle
question de règlement; je n'ai pas reçu la question, elle est
irrecevable; je ne veux pas la discuter.
M. Vaillancourt (Jonquière): Si le député de
Marguerite-Bourgeoys veut plaider on va plaider. Je fais une objection à
cette question.
Le Président (M. Jolivet): Non je ne discuterai pas. La
question est irrecevable.
M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas le meilleur
témoin.
Le Président (M. Jolivet): M. le député la
question est irrecevable, arrêtez d'en parler.
M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. Boivin, est-ce que Me Jasmin ou Me Beaulé
vous ont expliqué pourquoi ils venaient vous voir pour tenter d'enlever
de sur leur tête cette épée de Damoclès, et non pas
les gens qu'ils auraient dû normalement aller voir, soit les avocats de
la SEBJ ou peut-être Me Gadbois s'ils ne faisaient pas confiance aux
avocats de la SEBJ? Est-ce qu'ils vous ont dit pourquoi c'était
vous?
M. Boivin: Non. Je n'avais pas demandé. Cela
m'apparaît normal, j'en reçois souvent des visites de ce
genre.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il y a beaucoup d'avocats qui vont vous
voir?
M. Boivin: Quand on veut sensibiliser les autorités
politiques à une décision, laquelle quand même n'est pas
strictement d'ordre juridique, ce genre de démarches se fait souvent. Je
ne pose pas de questions.
M. Bourbeau: II y a plusieurs avocats qui vont vous voir
régulièrement dans le cours normal de votre travail pour obtenir
des règlements de cause?
M. Boivin: Je n'ai aucunement dit cela. J'ai dit que cela
m'apparaît normal. Je n'ai pas dit cela, M. le député. Vous
me posez une question qui est assez large, elle est presque d'ordre
philosophique, de l'exercice du pouvoir.
C'est que je suis fort heureux de travailler pour un premier ministre
qui croit que la dernière cour d'appel au Québec, sauf dans
l'État fédéral, c'est Ottawa, mais la dernière cour
d'appel au Québec, c'est le bureau du premier ministre. Je ne parle pas
des litiges d'ordre juridique. Je vois les figures scandalisées à
mes propos. Lorsqu'un citoyen s'est fait dire non par deux, trois
ministères, lorsqu'il s'est fait dire non par-ci,
lorsqu'il s'est fait dire non par là, il a encore un droit de
recours, quitte à se faire dire non à quelque part ou à se
faire dire oui.
J'ai reçu, à la demande du premier ministre, toutes sortes
de gens dont je ne mentionnerai pas les noms et à toutes sortes de
sujets, parfois des députés.
M. Lalonde: Des ministres. M. Boivin: Oui.
M. Bourbeau: Mais les démarches que vous faisiez, parce
que vous en...
M. Boivin: Puis-je vous donner un exemple, M. le
député, qui est un exemple assez délicat - si vous voulez
- de cette forme d'exercice...
M. Bourbeau: Je cherche à comprendre. Alors, allez-y. Je
ne comprends rien.
M. Boivin: Pardon?
M. Bourbeau: Je cherche à comprendre. Alors, allez-y.
M. Boivin: Je suis sûr que vous comprenez, M. le
député. Dernièrement, pas dernièrement, mais il y a
environ un an, un avocat qui représentait un entrepreneur, lequel
entrepreneur avait construit ou réparé, je ne me souviens
plus.
M. Bourbeau: ...dans quel genre?
M. Boivin: Un cégep. M. le député, je fais
attention de ne pas faire de farce. Il est venu me voir et a dit: Cette
réclamation est à la Justice, etc. C'est terrible, mon client va
crever, c'est injuste, les délais, si on va... etc. Vous connaissez les
genres de représentations. Et même si le ministère de la
Justice est un ministère très délicat, dans lequel on ne
doit pas intervenir, je me permets d'appeler le ministère de la Justice
pour discuter non pas du contenu du dossier, mais pour lui dire: Est-ce que
vous pourriez recevoir Me Untel ou est-ce que vous pourriez regarder ce
dossier, etc.? En tout cas, dans l'exemple en question, cela s'est
réglé dans des délais plus courts que normaux, je
présume, et, apparemment, puisqu'on m'a remercié, à la
satisfaction des deux parties.
M. Bourbeau: Me Boivin, quand vous intervenez comme, par exemple,
auprès de M. Laliberté, parce que c'est une intervention que vous
avez faite, est-ce que vous intervenez en tant que conseiller spécial du
premier ministre, avec le poids que cela confère, ou si vous intervenez
comme un genre d'"ombudsman" qui cherche à rapprocher les parties?
M. Boivin: M. le Président, votre question
m'apparaît un peu étrange. Il est évident que lorsque je
rencontre qui que ce soit - je dis étrange non pas dans le sens de mal
placée, je dis qu'elle apparaît étrange à mes
oreilles - je ne lui dis pas: Voici, je te parle pendant ces cinq
premières minutes comme chef de cabinet du premier ministre et tout
à l'heure ce sera Jean-Roch Boivin, personnellement. Je présume
que, lorsqu'on me rencontre, on présume que je suis dans l'exercice de
mes fonctions sauf s'il est 23 heures, au restaurant, où je suis en
train de prendre un verre de vin, en m'amusant amicalement avec les
députés qui fréquentent ces lieux.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'heure, nous
allons suspendre jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise de la séance à 20 h 10)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de l'énergie et des ressources reprend
ses travaux. Nous en étions rendus, au moment où nous les avons
suspendus pour l'heure du souper, au député de Laporte qui avait
commencé à poser ses questions à Me Jean-Roch Boivin.
Donc, M. le député, vous avez la parole.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Au moment où
on s'est laissé, si je me souviens bien, j'étais en train de
m'étonner auprès de Me Boivin du rôle qu'il semblait avoir
joué. Je lui disais que je ne comprenais pas comment il se faisait que
les avocats des syndicats qui étaient poursuivis par la SEBJ, lorsqu'ils
voulaient faire valoir leur point de vue, plutôt que d'aller voir les
autres avocats avec qui ils auraient du, normalement, converser, les avocats de
la partie adverse, ils allaient plutôt voir Me Boivin. Je lui demandais
comment il se faisait et si on avait expliqué à Me Boivin
pourquoi les défendeurs allaient voir Me Boivin, qui n'était pas
partie à la cause, alors qu'il y avait, au dossier, des avocats
nommés par la SEBJ pour les représenter. Je pense que j'attendais
la réponse de Me Boivin.
M. Boivin: Votre question est celle-ci: Est-ce qu'ils m'ont
expliqué pourquoi ils venaient me voir. Pas d'autre chose que de
m'exposer des raisons pour lesquelles ils jugeaient que cette cause devait
être réglée hors cour. Mais ils ne se sont pas
exprimés sur la question précise que vous posez à
savoir: Nous venons vous voir au lieu d'aller dire cela aux avocats pour
telle raison. Non.
M. Bourbeau: Vous, est-ce que vous vous êtes posé la
question?
M. Boivin: Je pense que je vous ai répondu, avant la
suspension, que je ne leur ai pas posé la question, parce que, moi, je
trouvais la démarche normale.
M. Bourbeau: Vous la trouviez normale? M. Boivin: Oui, M.
le Président.
M. Bourbeau: En quoi la trouviez-vous normale?
Le Président (M. Jolivet): Un instant, c'est une opinion
que vous lui demandez, je le sais. Ce que je veux vous dire c'est que vous
demandez une opinion et je ne vois pas pourquoi j'accepterais la question.
M. Bourbeau: M. le Président, le témoin vient de
déposer qu'il trouvait cela normal. Je lui demande pourquoi il trouvait
cela normal. Il me semble que c'est normal que l'on pose la question.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a rien d'anormal
à ce que vous posiez la question. Il est tout à fait normal aussi
que je la déclare irrecevable. C'est une question d'opinion.
M. Bourbeau: M. Boivin, vous avez dit au début de votre
témoignage aujourd'hui, que vous aviez reçu un mandat du premier
ministre. Je vais vous trouver l'endroit exact... La question de M. le
ministre, transcription 1397, page 2: "Maintenant pourriez-vous dire à
la commission si d'autres personnes que vous ont reçu mandat du premier
ministre de suivre le dossier de cette poursuite de la SEBJ contre les
syndicats québécois et les syndicats américains?" Vous
avez répondu: "Personne d'autre que moi n'a reçu de mandat".
Donc, j'en conclus que vous avez reçu un mandat?
M. Boivin: C'est ce que j'appelle un mandat par la phrase que
j'ai utilisée au haut de la page 8 de ma déclaration de ce
matin.
M. Bourbeau: Quand vous receviez les avocats à votre
bureau, les avocats de la partie défenderesse, Me Jasmin et Me
Beaulé, est-ce que vous étiez dans l'exercice de ce mandat?
M. Boivin: Cela m'apparaît évident, oui.
M. Bourbeau: Je vous remercie de la réponse.
Étiez-vous au courant qu'en 1975 le local 791, l'un des syndicats
poursuivis, avait lors de négociations avec la SEBJ évoqué
la possibilité de payer 400 000 $ dans une tentative de
règlement.
M. Boivin: J'ai appris cela au cours des travaux de cette
commission. (20 h 15)
M. Bourbeau: Me Jasmin était l'avocat de ce syndicat. Vous
l'avez rencontré à plusieurs reprises dans votre bureau,
d'après les documents que vous nous avez remis. Est-ce que Me Jasmin
vous a communiqué qu'à un moment donné, au cours des mois
et des années précédentes, son client avait
déjà offert de payer 400 000 $ à la SEBJ?
M. Boivin: Je viens de dire que...
M. Bourbeau: Je regrette, ce n'est pas la même question, M.
le Président.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais faire une
question de règlement là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: En toute justice pour Me Boivin, je pense que le
député de Laporte devrait préciser la nature ou
l'étendue complète des propositions de règlement qui
étaient faites en 1975, parce que je crois bien me rappeler que les 400
000 $ dont il vient de faire mention étaient également
reliés à une reconnaissance partielle de la responsabilité
de la part de la SEBJ.
M. Bourbeau: M. le Président, ma question porte sur la
capacité de payer du syndicat. Alors, indépendamment des autres
aspects de cette négociation, à ce moment-là...
M. Duhaime: Ah bon!M. Bourbeau: ...il m'intéresse
de savoir si le syndicat en question avait à ce moment-là les
fonds nécessaires pour payer 400 000 $.
M. Duhaime: Ce n'est pas ce que vous avez dit.
M. Bourbeau: Alors, au strict point de vue de la capacité
de payer, il devient inutile de savoir ce qu'il y avait d'autre dans le paquet.
Je demande si son avocat lui a dit que, à un moment donné, lors
de négociations antérieures, M. Jasmin lui aurait dit que son
syndicat avait 400 000 $ pour payer la SEBJ?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: II ne vous en a jamais parlé?
M. Boivin: Non, M. le Président. C'est-à-dire, oui,
M. le Président, il ne m'en a jamais parlé.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez répéter? J'ai
mal saisi.
M. Boivin: II ne m'en a jamais parlé, M. le
Président.
M. Bourbeau: Vous avez dit aujourd'hui, à un moment
donné, que le ministre Johnson vous avait appelé - M. Pierre-Marc
Johnson, qui était alors ministre du Travail, que vous aviez
parlé de la cause, qu'il avait été question de la cause et
qu'il vous avait dit: Si je comprends bien, c'est le bureau du premier ministre
qui s'occupe de la cause? Vous avez répondu oui.
M. Boivin: Je ne pense pas, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Un instant: Je vois que la
demande est à l'effet de citer exactement la réponse
donnée par Me Boivin, de façon à bien s'assurer que la
question est correcte.
M. Bourbeau: D'accord, M. le Président, je vais vous
donner la référence, si on peut la trouver. Alors, c'est au ruban
1404, page 1. Je cite M. Boivin: "M. Johnson a dit: Si je comprends bien,
Jean-Roch, cette cause-là relève - Jean-Roch, je présume
que c'était vous - du bureau du premier ministre. J'ai dit oui." Alors,
vous vous souvenez d'avoir dit cela aujourd'hui?
M. Boivin: Mais oui.
M. Bourbeau: Bon. Très bien.
Le Président (M. Jolivet): Sauf qu'il y a un
problème. Pour les besoins de la cause, ce n'est pas la question que
vous avez posée tout à l'heure. J'aimerais bien que... ou vous
dites que vous retirez votre question, ou bien vous la reposez autrement. Mais
la façon dont vous avez commencé votre question n'était
pas exacte par rapport à ce qu'on a eu comme réponse ce
matin.
M. Bourbeau: M. le Président, je l'ai remplacée par
ce que je viens de dire.
Le Président (M. Jolivet): Je voulais m'en assurer.
M. Bourbeau: Alors, vous avez dit à M. Johnson: Cette
cause relève du bureau du premier ministre. Est-ce que vous pourriez
nous expliquer ce que vous vouliez dire par "cette cause relève du
bureau du premier ministre"?
M. Boivin: Je voulais dire qu'on s'en occupait. C'est mieux qu'il
y ait seulement une place qui s'en occupe plutôt que deux. Cela doit
être plus clair.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il serait possible pour vous d'approcher
un peu votre microphone?
M. Boivin: Certainement, M. le Président.
M. Bourbeau: J'ai un peu de difficulté à saisir
exactement toutes vos réponses. Vous ne parlez pas toujours avec la
même intensité.
M. Boivin: Je m'excuse.
M. Bourbeau: Bon. D'accord. Alors, vous dites que c'est le bureau
du premier ministre qui s'occupait de la cause.
M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas du tout ce qu'il
a dit.
M. Bourbeau: Voulez-vous répéter, s'il vous
plaît, parce que j'ai mal saisi votre réponse.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est votre
spécialité de mal saisir les réponses.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Bourbeau: M. le Président, voulez-vous rappeler
à l'ordre le député de Jonquière...
Le Président (M. Jolivet): Non. Un instant!
M. Duhaime: Un instant:
Le Président (M. Jolivet): Pour le moment, je vais
rappeler tout le monde à l'ordre, tous ceux qui n'ont pas à
parler. S'il vous plaît: Me Boivin, on vous demande, pour le bon
entendement du député de Laporte, de répéter votre
réponse de tout à l'heure.
M. Boivin: Je ne me souviens pas de ce que j'ai dit tantôt,
mais je vois "relève du bureau du premier ministre"; je voulais dire par
là que c'était le bureau du premier ministre qui suivait
l'évolution de ce dossier, c'est-à-dire la recommandation, si
vous voulez, du règlement hors cour.
M. Bourbeau: Le bureau du premier ministre, bon. M. Johnson,
comme ministre du Travail, est-ce que cela ne relevait pas normalement de son
ministère?
M. Vaillancourt (Jonquière): Objection, votre
seigneurie... M. le Président.
Des voix: Oh!. Oh! Oh!
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une question
d'opinion.
M. Bourbeau: Qu'est-ce qui se passe?
M. Lalonde: II veut avoir une promotion.
Le Président (M. Jolivet): Je me pose une question.
Voulez-vous répéter votre question? Je vais voir si...
M. Bourbeau: Dans le cours normal des affaires au gouvernement -
vous comprendrez, M. le Président, que, nous, nous ne sommes pas au
gouvernement ici, enfin, moi, je n'ai jamais été dans un
gouvernement - normalement, est-ce que ce n'est pas le ministre du Travail qui
s'occupe de ces choses-là?
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, le
témoin...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Boivin: M. le Président, c'est une question d'opinion,
mais si le député ou la commission est intéressée
à mon opinion personnelle...
Le Président (M. Jolivet): Non. Je ne peux pas permettre
la question telle qu'elle est posée, pour les mêmes principes
qu'on a établis. C'est une question d'opinion.
M. Bourbeau: Est-ce que le ministre Johnson vous a dit que,
préalablement à votre conversation téléphonique, il
avait en main le dossier?
M. Boivin: Non. J'ai d'ailleurs appris, pendant les travaux de
cette commission, la rencontre, dont on a parlé, au bureau de M.
Johnson. La rencontre avec M. Beaulé et avec les avocats
américains au bureau de M. Johnson, je crois.
M. Bourbeau: On parlait, à la suspension des travaux, du
fait que les avocats de la défense, Mes Beaulé et Jasmin, avaient
peur que leurs arguments ou leur documentation ne se rendent pas à la
SEBJ?
M. Boivin: Non pas leur documentation, mais leurs arguments.
M. Bourbeau: Leurs arguments d'accord - ne se rendent pas a la
SEBJ. C'est sur cela qu'on s'était laissé. Ils jugeaient bon de
venir vous voir parce qu'ils ne faisaient pas confiance, semble-t-il, à
leurs propres avocats, d'après ce que...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
m'excuse, vous voyez si vous posiez des questions directes, on n'aurait pas ces
problèmes. Vous êtes en train de faire... S'il vous plaît!
S'il vous plaît! On a eu deux heures pour le faire. Je pense que le
député est capable de poser des questions directes au lieu
d'essayer de résumer des réponses à des questions.
M. le député, allez-y donc avec des questions
directes.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Lalonde: Si vous me le permettez...
Le Président (M. Jolivet): Oui, je vais vous le
permettre.
M. Lalonde: ...chaque question ne suit pas nécessairement
la précédente. Il y a eu une longue période de questions
aujourd'hui et les députés qui en reviennent, ont des
inquiétudes, des précisions à faire apporter. À ce
moment, je crois qu'on peut permettre au député de situer la
question qui s'en vient, en rappelant ce qui s'est dit, mais pas
nécessairement verbatim. D'ailleurs, je pense que les précautions
de langage, on les a prises à bon droit aujourd'hui. Lorsque le
député décrit l'environnement de la question, cela ne veut
pas dire qu'il met des mots dans la bouche du témoin. Je crois qu'on
peut lui permettre de situer la question.
Le Président (M. Jolivet): Mon problème est
justement là.
M. Lalonde: Comment s'appelle-t-il?
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît; Mon problème est le suivant. En voulant résumer une
question, on en arrive à faire de ces résumés ce que la
personne a peut-être dit. Donc, c'est une interprétation
personnelle que le député de Laporte pourrait faire. Ce que je
lui demande, c'est qu'il pose sa question. S'il veut la situer, qu'il lise donc
dans les galées, puisqu'il semble les avoir, à quelle place cela
se situe et on verra. Qu'il le dise.
M. Bourbeau: M. le Président, le problème qui se
pose...
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y donc.
M. Bourbeau: ...c'est que M. Boivin s'est exprimé devant
nous jusqu'à 17 h 55, 17 h 57, 17 h 58 et 17 h 59. On a peut-être
100 pages de texte. Vous comprendrez que c'est difficile pour les
députés qui arrivent après 14 heures - ils auront
probablement pris 20 minutes pour aller manger - d'avoir appris par coeur les
100 pages de texte. On tente de reprendre ce que M. Boivin a dit dans
l'essentiel. Pour aller chercher à chaque page, à chaque ligne ce
qu'il a dit après une heure, vous comprendrez que c'est assez difficile
alors. Je ne veux pas déformer du tout la pensée de M. Boivin et
si je ne résume pas bien ce qu'il a dit je suis bien d'accord pour qu'il
me corrige, M. le Président. Mais vous demandez une tâche
impossible à des députés d'avoir appris par coeur 100
pages en l'espace d'une heure.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur cette
question. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, si Boileau siégeait
parmi nous il dirait sûrement que ce que l'on conçoit bien...
M. Lalonde: Ce n'est pas Boileau c'est Boivin.
M. Duhaime: ...s'énonce clairement et les mots qu'on a
pour le dire arrivent aisément.
M. Bourbeau: Les mots "qu'on a" sont de trop.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaîtl M. le député. M. le député. Non,
non. Non, juste un instant. Juste un instant. S'il vous plaît! S'il vous
plaît! S'il vous plaît! Ne vous amusez pas. S'il vous plaît!
M. le député, on ne vous a pas interrompu quand vous avez
posé votre question de règlement. S'il vous plaît, laissez
parler le ministre. Non il ne vous a pas interrompu. M. le ministre ne vous a
pas interrompu, c'est faux. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Duhaime: Vous pouvez rassurer le député de
Laporte en lui disant que je ne l'ai pas cité. Je ne lui prêterai
jamais ce talent. J'ai parlé de Boileau. Ce que je veux dire, M. le
Président, c'est que je n'ai aucune espèce d'objection à
ce qu'on se reporte aux témoignages antérieurs, aux questions et
réponses à partir de la transcription. Mais je ne permettrai pas
que quelque député que ce soit, incluant moi-même, M. le
Président - si jamais je le faisais vous me rappellerez à l'ordre
- puisse résumer des témoignages en y incluant une
interprétation pour ensuite poser une question. Je pense que c'est
irrégulier. Et je suis parfaitement conscient que le
député de Laporte peut avoir des problèmes. Mais je pense
que la façon la plus simple est de se reporter aux transcriptions et si
les transcriptions de 17 h 55 ou 17 h 50 ne sont pas disponibles, bien mon
Dieu, Me Boivin témoigne depuis la matinée, il y a très
certainement d'autres questions. Je serais étonné qu'on en ait
terminé à 22 heures, on pourra poursuivre la semaine
prochaine.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je ne comprends pas la
soudaine inquiétude du ministre qui, tout à coup, émet ce
qu'on appelle des idées mais qui sont plutôt des bruits, à
l'effet que désormais il vient de décréter qu'on ne peut
se reporter à des témoignages précédents sans lire
la transcription. Je dis au ministre qu'il serait peut-être mieux de
partir pour son voyage de pêche maintenant, parce que je regrette...
M. Duhaime: Je pensais que cela faisait six semaines qu'on
était à la pêche avec vous autres.
M. Lalonde: ...mais des nouvelles règles là-dessus
à mesure qu'on entre dans le bureau du premier ministre je n'accepterai
pas cela. J'ai passé la journée à poser des questions et
à référer...
M. Vaillancourt (Jonquière): Et on ne vous a pas
interrompu.
M. Lalonde: Non. Mais à référer... J'ai fait
ce que le député de Laporte fait.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît: M. le député de Jonquière. Excusez.
Excusez. S'il vous plaît: De la même façon que j'ai
demandé au député de Laporte... S'il vous plaît! M.
le député. De la même façon que j'ai demandé
au député de Laporte de laisser parler le ministre, je voudrais
que vous permettiez au député de Marguerite-Bourgeoys de
terminer.
M. Lalonde: J'ai fait ce que le député de Laporte
tente de faire le plus honnêtement du monde. Il le fait avec toute la
prudence du langage, ne voulant prêter aucune intention, ni imputer
aucune parole au témoin mais simplement se situer. Je l'ai fait toute la
journée aussi en demandant au témoin, si ce n'était pas
cela, de me corriger. Le député de Laporte fait cela et, tout
à coup... Je ne sais pas si c'est à cause d'un dîner trop
lourd, mais on entend du bruit à droite. M. le Président, je
vous
demande d'être juste à l'égard du
député de Laporte et de lui permettre non pas d'aller cueillir
dans une transcription qui fait je ne sais pas combien de pieds de hauteur
depuis les 19 ou 20 jours de séances que nous avons eus - quand on peut
le faire, on le fait -mais en ce qui concerne le témoignage
d'aujourd'hui, on n'a pas toute la transcription. On n'a pas eu le temps de
lire toute la transcription. On peut se souvenir de ce qu'un témoin a
dit et c'est ce que, très honnêtement, le député de
Laporte tentait de faire. Je pense qu'on devrait lui laisser faire son travail
- qui est déjà assez pénible à faire - en toute
quiétude.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que je
n'empêcherai jamais le député de Laporte de faire son
travail, au contraire. Il est ici pour poser des questions. Ce que j'ai voulu
dire, c'est que, depuis le début de ses questions, malheureusement, il y
a eu des interruptions et même Me Boivin a demandé à
corriger certaines choses puisque, effectivement ce qu'il disait n'était
pas... Si on passe notre soirée à le corriger, je vous passe un
papier qu'on va avoir du temps difficile à passer. J'espère que
le député comprendra que tout ce que je lui demandais, s'il avait
une référence, c'était de la citer, mais qu'il ne fasse
pas d'interprétation des réponses données par Me Boivin.
C'est tout ce que je demandais.
M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, pendant que vous discutiez,
j'ai eu le temps de retrouver la transcription. M. Boivin, au ruban 1404, page
1, vous nous avez dit aujourd'hui - j'essaie de ne pas relire toute la page
mais pour ne pas me faire blâmer, je vais relire au moins le
paragraphe...
M. Perron: Lisez-nous cela.
M. Bourbeau: Vous avez commencé en disant... Merci...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Perron: ...de Duplessis.
Le Président (M. Jolivet): ...de Duplessis, voulez-vous
m'aider, s'il vous plaît? (20 h 30)
M. Perron: On va essayer de vous aider.
Le Président (M. Jolivet): Laissez parler le
député de Laporte.
M. Perron: II faudrait qu'il comprenne... Le Président
(M. Jolivet): Laissez parler le député de Laporte. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Vous avez dit, M. Boivin : "Je vais vous donner un
ou deux exemples, si vous le voulez, parce que je ne me souviens pas. Le 15
janvier, la cause commence. Je pense qu'il y avait eu un conseil
d'administration le 9 ou avant, et le conseil d'administration n'a pas
décidé de régler la cause, parce que le procès se
déroule."
M. Lalonde: Excusez-moi, M. le député de Laporte.
Je pense que le témoin a de la difficulté à vous
suivre.
M. Boivin: C'est-à-dire que je ne trouve pas cela à
1405. Je me demande s'il n'y aurait pas une erreur.
M. Bourbeau: Ruban 1404, page 1. M. Boivin:
Excusez-moi.
M. Bourbeau: Au bas de la page, à l'avant-dernière
ligne: "Bien sûr que M. Jasmin ou M. Beaulé m'appellent et me
disent: Quand est-ce la prochaine réunion du conseil? - on parle
évidemment du conseil de la SEBJ - Je place un appel
téléphonique et je demande à M. Laliberté - qui est
le président de la SEBJ: Quand est-ce la prochaine réunion du
conseil? Il me dit: Telle date. Je dis à M. Jasmin - l'avocat qui vous
avait appelé: La prochaine réunion du conseil sera à telle
date." Vous avez déclaré cela. Je me demande, en lisant cela -
vous recevez un appel de M. Jasmin, vous appelez M. Laliberté pour
savoir la date de la réunion du conseil, vous obtenez la réponse,
vous rappelez M. Jasmin pour lui donner la réponse - quel était
votre rôle dans ce cas. Pourquoi jouiez-vous les commis voyageurs comme
cela? Qu'est-ce que vous faisiez au juste?
M. Boivin: M. le Président, j'ai décrit ce que je
faisais, quant aux conclusions, chacun peut tirer les siennes.
M. Bourbeau: Je comprends, mais pourquoi faisiez-vous cela?
M. Boivin: Je l'ai dit tantôt.
M. Bourbeau: J'ai sûrement mal saisi; alors, pourriez-vous
répéter?
M. Boivin: J'avais recommandé au premier ministre que
cette cause se règle hors cour et le premier ministre a accepté
cette recommandation. Il m'a dit de faire connaître à M.
Laliberté son sentiment. Pourquoi M. Jasmin - pour prendre l'exemple que
vous citez, qui est vrai, au ruban 1404 -m'appelle pour savoir quand a lieu
la
prochaine réunion du conseil au lieu d'appeler Me Aquin ou Me
Cardinal ou Me Jetté ou je ne sais qui? Il faudrait lui demander. Moi,
il m'a placé un appel, j'ai fait ce que j'ai dit et je crois que j'ai
rendu service.
M. Bourbeau: M. Boivin, quel est votre salaire?
Le Président (M. Jolivet): Non, s'il vous plaît.
M. Ouhaime: Je n'aurais pas d'objection à ce que cette
information soit dévoilée ici, mais comme mon collègue de
l'Éducation dirait, c'est tout à fait superfétatoire.
M. Bourbeau: Je pense que c'est de notoriété
publique, le salaire du chef de cabinet.
M. Duhaime: Pourquoi le demandez-vous si c'est de
notoriété publique?
M. Bourbeau: Je ne sais pas le montant exact, mais je suis
sûr que c'est un document qui est public.
M. Duhaime: Vous devriez aller suivre l'étude des
crédits du Conseil exécutif.
M. Perron: ...l'étude des crédits du Conseil
exécutif.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! D'une façon ou d'une autre... S'il vous plaît;
Je ne vois pas d'objection à ce qu'on y réponde si Me Boivin veut
bien y répondre. Me Boivin.
M. Laplante: II faudrait lui demander combien il fait en dehors
de son job de député, lui. Il en a deux.
M. Boivin: M. le Président, comme vous le savez, c'est
public, cela apparaît dans les comptes publics. Je n'aurais aucune
objection à répondre. Mais, comme question de principe, je trouve
que cela fait drâle. Est-ce que c'est dans le mandat de la commission? Si
on me demandait si j'aime ma femme, est-ce que je serais obligé de
répondre? Je peux bien y répondre, cela me fait plaisir, mais je
trouve cela drôle.
M. Bourbeau: Je pourrais modifier ma question, si cela gêne
le témoin. Je pourrais peut-être dire...
M. Boivin: Non, cela ne me gêne pas du tout, mon salaire ne
me gêne pas.
M. Lalonde: ...dire.
M. Bourbeau: Je vais la poser...
M. Boivin: De le dire non plus, mais je trouve qu'on enfreint des
principes.
M. Bourbeau: ...comme ceci: Est-ce que vous gagnez plus de 60 000
$ par année?
M. Boivin: Pardon?
M. Bourbeau: Est-ce que vous gagnez plus de 60 000 $ par
année?
Le Président (M. Jolivet): Ne répondez pas.
J'essaie de voir et je veux quand même vous être agréable,
M. le député de Laporte. J'essaie de vous être
agréable et non pas désagréable. Je ne vois en aucune
façon ce que vient faire cette question avec le mandat que nous avons.
Je vous ai laissé aller parce que j'avais cru comprendre que Me Boivin
voulait dire quelque chose, mais je me demande... Je la refuse.
M. Bourbeau: Sur la question...
Le Président (M. Jolivet): Je la refuse.
M. Bourbeau: Sur la question, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, je la refuse.
M. Bourbeau: Est-elle irrecevable? Le Président (M.
Jolivet): Oui. M. Bourbeau: Elle est irrecevable.
Le Président (M. Jolivet): Oui, je ne vois pas en quoi le
mandat que l'on a...
M. Bourbeau: Est-ce que je peux vous expliquer, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est irrecevable.
Allez!
M. Duhaime: M. le Président, pourrais-je soulever une
question de règlement?
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, c'est parce
que là j'ai réglé un problème et je veux savoir sur
quoi porte la question de règlement.
M. Duhaime: Oui.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Je voudrais vous faire part de l'existence de
l'article 45 de notre règlement. Le président peut interdire la
parole à un député pour le reste de la séance. On
va sauter le numéro 1. Le numéro 2: Si, lorsqu'il a la parole,
il
continue à s'éloigner de la question en discussion
après avoir été rappelé à l'ordre deux fois.
Je vous demanderais de rappeler à l'ordre le député de
Laporte.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Sur la question de règlement qui a
été soulevée par le ministre, naturellement je regrette de
me répéter, mais je me répète dans la mesure
où les sautes d'humeur du ministre se répètent.
Voilà qu'à chaque saute d'humeur ou à peu près, il
invoque l'article 45. Il faudrait peut-être lui épingler l'article
45 dans le front. On le saurait pour un bout de temps. Vous n'avez pas du tout,
dans vos propos, suggéré que le député de Laporte
n'était pas docile à vos demandes. Maintenant, je pense que
lorsque le député de Laporte vous demande comment poser des
questions ou en pose qui ne sont pas recevables, vous déclarez la
question irrecevable. Peut-être qu'il serait possible de
considérer que dans le rôle du bureau du premier ministre,
à l'intérieur de notre mandat, on pourrait se poser des
questions, à savoir si un chef de cabinet qui est payé 50 000 $
par année, qui fait des messages à son avocat et...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, M.
le député, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Je ne
permettrai pas la question. Je demande au député de Laporte de
passer à une autre question.
M. Lalonde: Je suis de bonne humeur.
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que je peux parler
sur la question de règlement que soulevait le ministre?
Le Président (M. Jolivet): Non.
M. Bourbeau: Ce n'est pas mon droit...
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez, M. le
député, une autre question, s'il vous plaît!
M. Bourbeau: Je suis le seul à qui on ne permet pas de
parler sur une question de règlement, M. le Président.
M. Boivin, vous dites au ruban 1404 page 2: "Me Jasmin - deuxième
paragraphe, 2e ligne - m'avait dit: C'est tout à fait inhabituel que la
SEBJ exige notre reconnaissance de responsabilité. Je me souviens. C'est
le témoignage de Me Aquin qui m'a fait me souvenir d'avoir
téléphoné à M. Laliberté et de lui avoir
dit: est-il exact que la SEBJ exige la reconnaissance de responsabilité
des syndicats défendeurs? M. Laliberté, qui était le
président de la SEBJ, me rappelle, à ce moment-là, au
téléphone. Il me dit que la question de la responsabilité
était très importante, à savoir qu'il n'y a pas de
responsabilité partagée entre la SEBJ et les défendeurs.
J'ai dit: cela a bien du bon sens. Je rappelle Me Jasmin et lui dis: en effet,
la SEBJ exige la reconnaissance de responsabilité." C'est un exemple. Je
cite ce que vous avez dit.
Encore là, je pense que je vais vous poser la même
question. Est-ce que c'était dans l'exercice de votre mandat que vous
jouiez les intermédiaires ou les commis voyageurs entre les avocats et
la SEBJ?
M. Boivin: J'ai jugé et je juge encore aujourd'hui et ce
soir, au moment où je vous parle, que c'était dans l'exercice de
mon mandat.
M. Bourbeau: Est-ce que c'était vraiment en tant que
conseiller spécial du premier ministre que vous "jouiez" comme cela les
téléphones d'un côté et de l'autre?
M. Boivin: M. le député, vous m'appelez toujours
conseiller spécial. J'ai eu une promotion, je suis chef de cabinet.
M. Bourbeau: Oui, mais vous nous avez dit que vous conseillez le
premier ministre aussi.
M. Boivin: À titre de chef de cabinet.
M. Bourbeau: Alors, est-ce en tant que chef de cabinet, que vous
faisiez ces appels téléphoniques de part de d'autre?
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que M. Laliberté, au moment où
vous l'appeliez pour avoir tous ces renseignements dont je viens de parler,
vous demandait si cela avait un lien avec le désir du premier ministre
de régler hors cour?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: II ne vous a jamais posé cette
question-là?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que M. Laliberté vous a demandé
si cela avait un lien avec l'objet de la rencontre que vous aviez eue avec lui
le 3 janvier?
M. Boivin: Non, M. le Président, il ne me l'a pas
demandé, parce que cela était bien évident.
M. Bourbeau: Ah boni Très bien! Quand vous avez
téléphoné, M. Boivin, à M. Laliberté et
à M. Saulnier, vous nous avez dit aujourd'hui que vous les aviez...
M. Boivin: J'ai dit, possiblement, M. Saulnier.
M. Bourbeau: Alors, M. Laliberté et, possiblement, M.
Saulnier. Est-ce que vous avez demandé s'ils avaient reçu des
documents des avocats défendeurs?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Vous n'avez pas posé de question dans ce
sens-là?
M. Boivin: Non, M. le Président. Je me demande encore
pourquoi j'aurais posé une telle question. Mais, enfin, cela vous
appartient.
M. Bourbeau: Oui, en effet. Est-ce que ces gens-là, M.
Laliberté et M. Saulnier, vous ont dit qu'ils rencontraient... ou est-ce
que vous leur avez dit que vous rencontriez régulièrement les
avocats des défendeurs dans votre bureau?
M. Boivin: Ils ne se sont pas informés de cela et je n'ai
pas cru de mon devoir de les informer parce qu'il était implicitement,
sinon explicitement dit à M. Laliberté, par certains
téléphones, que je rencontrais Me Jasmin.
M. Bourbeau: Le 1er février, vous avez assisté avec
le premier ministre à la rencontre dont on a parlé beaucoup avec
le P.-D.G. de la SEBJ, M. Laliberté, le président du conseil de
la SEBJ, M. Saulnier, et le président d'Hydro-Québec, M. Boyd. On
en a parlé à quelques reprises. C'est la réunion au cours
de laquelle le premier ministre a prononcé les paroles
célèbres qu'on a entendues. Le lendemain, vous rencontriez les
avocats de la SEBJ, Me Aquin et Me Cardinal, le 2 février 1979, pour
être bien précis.
Une voix: Qu'est-ce que c'est ça, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le
député de Duplessis, l'article 5 demande de ne pas interrompre
celui qui parle...
M. Perron: Vous avez raison, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): ...et vous m'ennuyez.
M. Perron: Vous avez parfaitement raison, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci de le reconnaître.
M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: II vous ennuie, M. le Président. Mais, moi,
il ne me dérange pas du tout. Il peut continuer.
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais j'ai le droit de
suivre les débats, cependant, M. le député de Laporte et
je veux être tranquille pour les suivre.
M. Bourbeau: Alors, vous nous avez dit aujourd'hui - mon
collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys vous a
cité les propos qu'a rapportés Me Aquin - Je ne suis pas
sûr si c'est cela, mais moi, j'emploie habituellement l'expression
"Accrochez-vous pas dans les fleurs du tapis". C'est l'expression que vous avez
employée, n'est-ce pas?
M. Boivin: Je présume, comme je l'ai dit. Je n'ai pas le
souvenir des paroles exactes évidemment d'un lunch du 2 février
1979.
M. Bourbeau: Oui, mais l'expression que vous avez employée
aujourd'hui: Ne pas s'accrocher dans les fleurs du tapis, cela signifiait quoi,
dans les circonstances?
M. Boivin: J'ai essayé de l'expliquer ce matin ou cet
après-midi, le mieux possible. J'avais peur qu'entre Me Aquin et Me
Beaulé, il puisse se développer des flammèches. C'est cela
que je voulais dire.
M. Bourbeau: Est-ce que vous pourriez expliciter un peu votre
pensée? Ce n'est pas tellement clair.
M. Boivin: Je veux dire que j'avais peur... je ne voulais pas
qu'on se chicane pour un point-virgule ou bien si la rencontre était
à 3 heures et que l'autre est arrivé à 3 h 30, si la
rencontre était à tel bureau, protocolairement, plutôt
qu'à tel autre bureau de façon protocolaire. J'avais entendu
certains propos de la part de Me Beaulé à savoir que... Vous
savez, je parle de deux confrères. Je ne veux pas dire qu'il y avait des
froids entre eux, mais je sentais que des étincelles pouvaient
être possibles. Je leur ai dit: Accrochez-vous donc pas dans les fleurs
du tapis. J'ai dit cela à M. Aquin et à M. Cardinal.
M. Bourbeau: Le témoignage de M. Aquin devant cette
commission tendait à dire que c'était plutôt en ce qui
concernait les textes et la documentation.
M. Boivin: J'ai très bien lu cela. J'ai
répondu et je ne pourrai jamais répondre mieux que j'ai
répondu cet après-midi sur ce sujet.
M. Bourbeau: Alors, l'expression que Me Aquin a employée
à l'égard de cette remarque-là: "Ne vous accrochez pas
uniquement à des papiers ou à des textes de transaction", vous,
ce n'est pas votre version de ce que vous avez dit? (20 h 45)
M. Boivin: Le député de Notre-Dame-de-Grâce a
eu la gentillesse de me référer au texte. Donc, je m'en
souviens...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Boivin: Non. De Notre-Dame-de-Grâce.
Le Président (M. Jolivet): Ah! De
Marguerite-Bourgeoys.
M. Boivin: Le député de Marguerite-Bourgeoys a eu
la gentillesse de me référer au texte. Donc, je m'en souviens. Je
ne vous demande pas de faire de même. J'ai dit, en réponse au
député, que je ne me souvenais à peu près pas de la
rencontre, donc, que je ne prétendais pas rapporter des propos verbatim
qui ont pu y être tenus. J'ai dit que si Me Aquin a dit ce qu'il a dit,
je ne pouvais pas affirmer que c'était vrai, mais que je ne pouvais pas
le nier non plus quant au Verbatim. Mais j'en ai donné mon propre sens,
parce que ce n'est pas ma façon de m'exprimer. Je vous ai dit que
j'avais une expression commune, une expression que j'emploie souvent - à
tort ou à raison, c'est une autre chose - j'ai dû dire:
Enfargez-vous pas dans les fleurs du tapis!
Vous dites: Mais non, Me Aquin se référait à des
documents de transaction. Je vous dis que cela m'étonne
énormément et je n'ai aucune souvenance de cela.
M. Bourbeau: Est-ce que les avocats de Geoffrion et Prud'homme,
que vous avez rencontrés le 2 février, lors de cette entrevue,
ont paru offusqués de se faire dire par vous de ne pas s'accrocher aux
fleurs du tapis?
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est déjà
acquis. Reposez votre question. Elle n'est pas recevable comme cela.
M. Bourbeau: Est-ce que les avocats de l'étude Geoffrion
et Prud'homme vous ont dit qu'ils étaient offusqués de voir une
telle intervention de votre part?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce qu'ils vous ont dit qu'ils tiendraient compte
de ces recommandations?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a paru à vous...
M. Vaillancourt (Jonquière): Question d'opinion, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Jonquière. Pourquoi? Je ne comprends pas.
M. Vaillancourt (Jonquière): "Est-ce qu'il vous a paru
que..." C'est une question d'opinion et d'appréciation personnelle, M.
le Président.
Le Président (M. Jolivet): En tout cas, reposez votre
question et je vais voir.
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai même pas eu le
temps de la poser que le...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est évident!
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais c'est la façon
dont vous commencez votre question. Cela nous donne l'impression qu'elle va
constituer une demande d'opinion.
M. Bourbeau: Vous pourriez peut-être attendre que je la
pose, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, mais vous savez,
quand...
M. Bourbeau: Est-ce que vous avez constaté...
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le
député. Un instant! On ne laissera pas passer cela comme cela. Je
vous dis que...
M. Bourbeau: Je n'ai rien dit...
Le Président (M. Jolivet): Non, mais, moi, j'ai dit
quelque chose et vous ne m'avez pas laissé finir. Non, non, laissez-moi
parler. J'ai le droit de parler. J'ai encore plus raison que vous... Ce que je
vous dis, c'est que, de la façon dont vous avez commencé votre
question, c'était en apparence, directement, en français, pour un
prof de français, une question demandant une opinion. Donc, ne la
commencez pas comme cela. Posez-la autrement.
M. Bourbeau: C'est ce que j'étais en train de faire, M. le
Président, quand vous m'avez coupé la parole.
Le Président (M. Jolivet): Vous ne
m'aviez pas laissé terminer, cependant, M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous assure que si
j'étais...
Le Président (M. Jolivet): C'était
involontaire.
M. Bourbeau: ...un avocat chevronné comme le
député de Jonquière, je poserais toujours mes
questions...
Une voix: Cela vous aiderait beaucoup.
M. Bourbeau: Mais je n'en saurais pas très long, M. le
Président.
Une voix: On ne les saura jamais, il n'en a pas posé.
M. Bourbeau: M. Boivin, lors de cette réunion avec les
avocats de l'étude Geoffrion et Prud'homme, les avocats de la SEBJ,
lorsque vous avez demandé, selon vos propos, qu'ils ne s'accrochent pas
dans les fleurs du tapis, est-ce que, à votre connaissance, cela a
donné des résultats?
M. Boivin: Je n'en sais rien. Je ne sais pas s'ils se sont
accrochés dans les fleurs du tapis, avant ou après. Je ne le sais
pas.
M. Bourbeau: Selon votre connaissance, est-ce que cela a
aidé à débloquer le dossier, à
accélérer le dossier?
M. Vaillancourt (Jonquière): Objection, M. le
Président.
M. Boivin: Je n'en sais rien, M. le Président.
M. Bourbeau: Alors, est-ce que vous répondez?
M. Boivin: J'ai dit que je n'en sais rien, M. le
Président.
M. Bourbeau: Vous n'en savez rien du tout.
M. Boivin: Du tout.
Une voix: C'est une question d'opinion.
M. Bourbeau: Laissez donc les avocats parler, vous.
M. Perron: À ce moment-là, vous seriez mieux
d'arrêter de parler et de laisser la parole aux autres.
Le Président (M. Jolivet): Boni Là: Cela
recommence! Messieurs les députés, de part et d'autre, je pense
que je vais vous demander la même gentilhommerie que j'ai
demandée. Mais, M. le député, si vous continuez à
provoquer de cette façon, je vais être obligé d'utiliser
les articles du règlement, moi aussi. Je n'accepterai pas que l'on fasse
un dialogue de gauche à droite à cause de ce qu'ils viennent de
dire, M. le député. Je ne l'accepterai pas.
M. Bourbeau: Me parlez-vous, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui, je vous parle. Je vous
demande de vous adresser à moi pour poser des questions à notre
invité, de la même façon que j'ai demandé au
député de Duplessis de ne pas vous interrompre. Je vous demande
aussi de ne pas tenir compte de ce qui peut être dit pour ne pas les
provoquer non plus. D'accord.
M. Paradis: Est-ce que je pourrais soulever une question de
règlement?
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Pour que ce soit bien clair pour les gens qui nous
écoutent, le député de Laporte faisait son travail
consciencieusement lorsqu'il a été interrompu par le
député de Duplessis.
Une voix: C'était une question d'opinion.
M. Paradis: Non, non. Ce n'était pas une question
d'opinion, c'était une question de fait.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, au
lieu de vouloir continuer une chicane qui ne doit pas avoir lieu... S'il vous
plaît! Tout ce que j'ai voulu demander c'est que ni l'un ni l'autre,
à ma gauche et à ma droite ne fasse ces choses.
M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: Oui, M. le Président. M. Boivin, sur le ruban
1404, page 1, vous faites état d'un appel téléphonique
dont on a parlé tout à l'heure, c'est au bas de la page 1,
où Me Jasmin ou Me Beaulé vous ont appelé -je m'excuse,
prenez donc le ruban 1404, page 2 - sur la question de responsabilité.
Me Jasmin vous a appelé. Je les ai cités tout à l'heure,
mais je vais en reprendre une partie. "Est-il exact que la SEBJ exige la
reconnaissance de responsabilité des syndicats?" Me Jasmin vous posait
cette question. Vous avez vérifié avec M. Laliberté. Vous
avez rappelé Me Jasmin pour lui dire qu'effectivement on exigeait la
reconnaissance de responsabilité.
Subséquemment, vous nous avez dit - je vous rappelle ceci - que,
le 8 février vous
avez communiqué au téléphone avec Me Aquin
également au sujet de la responsabilité, un peu le même
genre de question. Vous avez discuté de cela avec Me Aquin. En quoi
est-ce que ce problème vous intéressait, le problème de la
responsabilité des syndicats?
M. Boivin: Tout d'abord, je n'ai pas tout à fait dit que
j'avais communiqué avec Me Aquin le 8 février. J'ai dit que Me
Aquin l'avait dit et que je ne mettais pas sa parole en doute; quant à
moi je ne m'en souviens pas, mais je peux quand même... C'est ce que j'ai
dit ce matin ou cet après-midi. Maintenant, en quoi la question de
responsabilité m'intéressait-elle? Elle était
intéressante pour tout le monde, parce qu'elle était une question
centrale, elle était au coeur du règlement hors cour. En d'autres
termes, si j'ai bien compris, si les défendeurs
représentés par Me Jasmin n'avaient pas admis leur
responsabilité, il n'y aurait pas eu de règlement hors cour,
puisque cela semblait une exigence sine qua non de la SEBJ.
M. Bourbeau: Est-ce que cette question vous préoccupait
particulièrement?
M. Boivin: Je veux dire que si je suis favorable à un
règlement hors cour et qu'une des questions qui est au coeur de ce
règlement est importante, je m'intéresse à la question.
Préoccupé, je ne sais pas le sens précis, mais je
m'intéresse à la question.
M. Bourbeau: Quand vous discutiez avec les avocats, est-ce que
c'était un des points que vous discutiez d'une façon plus
spéciale, la responsabilité?
M. Boivin: Non, je n'ai jamais discuté de la
responsabilité des syndicats représentés par Me Jasmin,
parce que je ne voulais pas entendre parler de cela. Quant à moi, dans
ma tête, c'était clair qu'ils étaient responsables. Me
Jasmin n'a jamais essayé de dire: Mes clients ne sont pas
responsables.
M. Bourbeau: Par contre, vous avez parlé de
responsabilité avec M. Laliberté?
M. Boivin: Quant à l'admission de responsabilité,
c'est bien différent. On peut être responsable et ne pas
l'admettre dans un écrit. La question de Me Jasmin, ce n'était
pas de me dire à moi: Mon client est responsable ou n'est pas
responsable. Sa question, c'était de l'admettre dans un
écrit.
M. Bourbeau: Quand vous avez parlé à Me Aquin, le 8
février, vous posiez des questions sur la responsabilité
aussi?
M. Boivin: Me Aquin a dit, si ma mémoire est
fidèle, que je lui aurais dit: Est-il exact que vous exigez la
responsabilité des syndicats ou du syndicat américain? Je ne sais
pas, vous devez avoir le texte devant vous.
J'ai précisé aujourd'hui que cette question avait
été soulevée bien avant et qu'elle l'avait
été même avant la réunion du 1er février.
J'ai dit que j'étais étonné mais que je ne mettais pas la
parole de Me Aquin en doute. J'étais étonné que j'aie fait
cet appel le 8 février parce que cette question avait été
soulevée bien avant et même avant la rencontre du 1er
février. Mais je suppose que cela traînait encore dans le paysage,
si Me Aquin dit que je l'ai appelé le 8 février.
M. Bourbeau: Vous dites qu'elle avait été
soulevée bien avant. Est-ce qu'elle avait été
soulevée devant vous?
M. Boivin: Bien oui. M. Bourbeau: Par qui?
M. Boivin: Soit par Me Jasmin, soit par Me Beaulé, soit
par les deux.
M. Bourbeau: À quelle occasion?
M. Boivin: N'importe quand entre le 1er janvier et le 31 janvier.
Je ne le sais pas. Lors d'une rencontre.
M. Bourbeau: Donc, lors d'une rencontre que vous avez eue avec
les avocats des défendeurs, la question de la responsabilité a
été soulevée.
M. Boivin: Dans le sens que... Premièrement, M. le
député, avec Me Aquin, avec Me Beaulé, il a
été question de la responsabilité proprement dite du
syndicat américain; c'est une question. Mon client est-il responsable ou
non? Donc on peut dire que la question de responsabilité du syndicat
américain a été soulevée.
Deuxièmement, avec Me Jasmin cela ne s'est pas
présenté du tout de la même façon. Me Jasmin ne dit
pas: Mes clients sont-ils responsables ou non? Il semble l'admettre, enfin je
le tiens pour admis ou pour acquis. Mais il dit: Est-ce que je dois l'admettre
dans un écrit, c'est inhabituel lorsqu'on règle une cause hors
cour? Voilà.
M. Bourbeau: Alors cela a été soulevé avec
Me Beaulé?
M. Boivin: La question de la responsabilité de son
syndicat? Bien sûr que cela a été soulevé.
C'était un de ses arguments principaux.
M. Bourbeau: Alors, vous en avez discuté avec lui?
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: Et avec Me Jasmin, vous avez discuté de la
responsabilité?
M. Boivin: Dans le sens que je viens de dire. Cela ne se posait
pas.
Une voix: De quel syndicat? M. Duhaime: Franchement...
Le Président (M. Jolivet): Non, non, je pense que... M. le
député. Je vous suis avec attention, mais je pense que tout le
monde qui nous écoute comprend très bien la réponse
donnée par Me Boivin. Je ne vois pas l'utilité de votre
deuxième question. Non, non.
M. Boivin: Je pourrais préciser tout de suite, M. le
député. C'est un lapsus de ma part ou un manque. Quand je vous ai
dit "discuté de responsabilité ou d'admission de
responsabilité entre le 1er janvier et le 31 janvier", pour être
précis, il faudrait faire une correction et inclure le mois de
décembre, les rencontres du mois de décembre, les rencontres des
4 et Il décembre.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, je ne veux pas poser
deux fois les mêmes questions, mais je veux simplement m'assurer
qu'à l'égard de Me Beaulé, vous avez eu des entretiens
relatifs à la responsabilité du défendeur.
M. Duhaime: M. le Président, je veux faire une question de
règlement.
M. Boivin: De son client, oui.
M. Bourbeau: Ce n'est pas la même question, M. le
Président, je regrette.
M. Duhaime: M. le Président, je veux soulever une question
de règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît: Juste un
instant. Juste un instant. Non, non. Attendez une minute. Un à la fois.
Oui, oui. C'est paisible là. M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, les questions et les
réponses qui viennent d'être formulées, de part et d'autre,
datent de quelques minutes. Je pense qu'avec un minimum de mémoire et
d'intelligence on peut s'en souvenir. Je pense que cela fait au moins trois
reprises que Me Boivin explicite. À la demande du député
de Laporte, Me Boivin a fait dans ses réponses la distinction
très nette entre une discussion sur la responsabilité proprement
dite et l'admission de responsabilité qui était une condition
sine qua non - pour employer son expression -d'un règlement hors
cour.
Ce sur quoi le député de Laporte revient dans ses
questions va dans le sens de vouloir varier dans sa formulation les
réponses de Me Boivin qui sont à mon sens très claires
pour n'importe qui qui a un minimum d'intelligence et de bonne volonté
pour comprendre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur la question de règlement, et je parlerai
de la responsabilité dans son sens large, autant de l'admission que du
principe comme tel...
Une voix: ...
M. Paradis: Non, non, c'est sur la question de règlement,
M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oh! Mais juste un instant. Non,
non, non. Juste un instant. Je ne permettrai pas une discussion. Vous n'avez
pas le droit de parole. Vous avez le droit de parole sur une question de
règlement mais ne prenez pas d'exemple pour le faire. Allez rapidement
sur la question de règlement.
M. Paradis: Je ne prendrai pas d'exemple. Je veux simplement vous
dire que si vous avez suivi - je sais que vous le faites toujours -
attentivement nos débats, vous avez vu que la première
réponse du témoin a été la question de
responsabilité dans son sens large. J'inclus les deux principes que
j'avais commencé à vous énoncer au début, je les
place là, à la place. J'espère que vous ne
m'arrêterez pas. La première réponse est "entre le 1er et
le 31 janvier 1979." La réponse, à cause des questions
additionnelles plus tard, amène une précision. Il y a
également le 4 décembre 1978 et c'est le genre...
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Paradis: M. le Président, c'est la réponse du
témoin et s'il n'y avait pas eu de question additionnelle...
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Mais... Non, non.
Non, non, je m'excuse. Je m'excuse. Je m'excuse. Il faut quand même
être honnête. L'invité a dit: Je m'excuse, j'ai eu un
lapsus... Peut-être à cause d'un lapsus, j'explique. Mais ce n'est
pas à la suite d'une question qu'il a répondu à cette
question. Il l'a fait de lui-même. Non, non. Il faut être
honnête. L'invité l'a fait de lui-même. (21 heures)
M. Paradis: M. le Président, j'admets
que...
Le Président (M. Jolivet): À la suite d'une
question.
M. Paradis: ...l'invité l'a fait de lui-même. Mais
si la personne qui posait des questions avait quitté le sujet, le lapsus
ne serait pas revenu et on n'aurait pas eu l'information.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, cela est une
interprétation de votre part. Je ne demanderai à personne de
m'expliquer votre interprétation.
M. Paradis: Demandez au témoin.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, en faisant attention à vos questions.
M. Bourbeau: M. le Président, vous m'avez fait tellement
peur que je vais changer de sujet.
Le Président (M. Jolivet): Je n'ai pas à vous faire
peur, M. le député. Je vous demande simplement de suivre le
règlement.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous signale que c'est
une blague que je faisais.
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais je ne les aime
pas.
M. Vaillancourt (Jonquière): ...M. le
Président.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, le
problème qu'on a là, c'est qu'à force de faire des
blagues, on ne va pas au vif du sujet. Je vous demande d'aller au vif du sujet,
c'est-à-dire les questions. Allez-y!
M. Bourbeau: M. Boivin, vous avez reçu à quelques
reprises dans votre bureau Me Beaulé, l'avocat Rosaire Beaulé. On
a les dates - je ne vous les répète pas - vous avez comme moi la
copie du registre. Vous nous avez dit aujourd'hui enfin je vais me
référer encore là au ruban 1406, page 2...
M. Boivin: Page 8?
M. Bourbeau: Page 2. "Je présume que Me Beaulé a
dû me faire voir ses arguments en faveur d'un règlement hors
cour." Mon collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys,
vous demandait ce que M. Beaulé faisait dans votre bureau. Vous avez
prononcé ces paroles-là. Je me demande ceci: Quand Me
Beaulé venait vous rencontrer et qu'il discutait devant vous de ses
arguments...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, il
dit: Je me demande.
M. Bourbeau: Je vais vous poser la question à vous. Est-ce
qu'il vous demandait à ce moment-là d'intervenir en faveur de ses
clients?
Le Président (M. Jolivet): J'ai un problème encore
une fois. Je m'excuse, M. le député. Reposez votre question parce
que, de la façon dont elle est formulée, elle n'est pas
acceptable.
M. Bourbeau: Est-ce que Me Beaulé vous a demandé
lors de ses argumentations...
M. Boivin: Ses arguments.
M. Bourbeau: ...de ses arguments en faveur d'un règlement
hors cour d'intervenir en faveur de ses clients?
M. Boivin: II plaidait en faveur d'un règlement hors cour
et il me donnait des arguments qui, selon lui, militaient en faveur d'un tel
règlement.
M. Bourbeau: C'était évidemment pour favoriser la
cause de ses clients, les...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
c'est une question d'interprétation.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il vous a dit que c'était pour
favoriser la cause de ses clients?
M. Boivin: C'est-à-dire que c'était très
clair qu'il aimait mieux régler hors cour plutôt que de la
plaider, pour quelque raison que ce soit. C'est à lui à s'en
expliquer. Je pense qu'il s'en est expliqué, mais ce n'est pas à
moi à reprendre ses propos.
M. Bourbeau: Est-ce que vous, de votre côté, en
écoutant la plaidoirie de M. Beaulé, vous avez fait valoir les
arguments de la Société d'énergie de la Baie James?
M. Boivin: M. Beaulé n'a pas fait de plaidoirie devant moi
parce que je ne suis pas un juge. Il a avancé des arguments. Est-ce que
j'ai pris la part de la Société d'énergie de la Baie
James? Ce n'est pas un débat contradictoire lorsqu'on rencontre
quelqu'un. Je n'avais donc pas à prendre la part de la SEBJ, à
défendre ou à condamner la Société d'énergie
de la Baie James. J'avais à écouter attentivement les arguments
de M. Beaulé à en peser la valeur et à poser des questions
si les arguments ou les faits qui étaient avancés par M.
Beaulé ne me paraissaient pas assez complets.
M. Bourbeau: En plus des arguments
visant à faire valoir le point de vue des clients de M.
Beaulé, est-ce que vous avez discuté des arguments de la partie
adverse, ceux de la SEBJ?
M. Perron: M. le Président, question de règlement.
Il a déjà répondu à cette question.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Perron: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Ouste un instant. Non, non,
allez-y donc!
M. Perron: J'ai une directive à vous demander.
Lorsque...
M. Lalonde: II a réussi à avoir la
caméra.
M. Perron: ...Non, je m'excuse, je me fous de tout cela...
Le Président (M. Jolivet): Allez, allez, M. le
député.
M. Perron: Le député de Marguerite-Bourgeoys peut
dire ce qu'il veut...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Perron: ...mais je vais m'adresser à vous directement,
M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Merci.
M. Perron: ...parce que les balivernes du député de
Marguerite-Bourgeoys, on peut s'en passer.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le
député.
M. Perron: La directive que je voudrais vous demander est
celle-ci: Est-ce que, lorsqu'un député de l'Opposition, en
l'occurrence le député de Laporte, pose une question qui a
déjà été posée au même témoin,
le témoin est tenu de répondre à une question qui a
déjà été posée? C'est la question que je
voudrais vous poser. Parce que là...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
non, non...
M. Perron: ...je m'explique, c'est parce que le
député de Laporte revient avec les mêmes questions qui ont
déjà été posées par le député
de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Jolivet): Jusqu'à maintenant,
c'était bien revenu. On allait bien... Non, s'il vous plaît. M. le
député, s'il vous plaît. C'est surtout cela que je
voulais.
M. Boivin: ...des problèmes.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y donc, cela m'aidera
beaucoup.
M. Boivin: Je crois avoir répondu indirectement, sinon
directement, au député de... Je me trompe toujours de
comté.
M. Lalonde: Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Jolivet): Marguerite-Bourgeoys.
M. Boivin: Marguerite-Bourgeoys, je vais l'écrire. Je
crois avoir répondu au député de Marguerite-Bourgeoys en
disant que je n'avais pas discuté, en présence d'un avocat, de la
thèse juridique de l'autre et vice versa. Si je ne l'ai pas dit, je le
dis.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte, maintenant, pour une autre question.
M. Bourbeau: Me Beaulé était votre ancien
associé dans votre bureau d'avocats lorsque vous avez pratiqué au
début de votre carrière.
M. Boivin: Mon, amitié avec lui remontait bien avant.
M. Lalonde: D'accord.
M. Boivin: En 1948 ou 1949, je crois, alors que j'étais en
première philosophie. On appelait cela la troisième année
de la faculté des arts à l'Université d'Ottawa. Lui, il
était en deuxième philosophie, ce qu'on appelle au Québec
deuxième philosophie et ce qu'on appelait là-bas quatrième
année de la faculté des arts. Cela ne me rajeunit pas.
M. Bourbeau: C'était donc un ami de longue date.
M. Boivin: Oui, M. le Président.
M. Bourbeau: Et un ancien associé professionnel dans votre
bureau d'avocats.
M. Boivin: Exact, M. le Président.
M. Bourbeau: Le fait de le recevoir dans votre bureau, comme on
vient d'en parler, et qu'il vous demande d'intervenir en sa faveur, est-ce que
cela ne vous causait pas des problèmes de conscience?
M. Boivin: Aucun, M. le Président.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne permettrai pas la
question.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Non, je ne permettrai pas la
question. Ce n'est pas parce que vous me demandez d'intervenir que je
n'interviens pas. Mais, d'une façon ou d'une autre, il y a une chose qui
est certaine, c'est que vous n'avez pas besoin d'intervenir quand j'interviens,
cependant. M. le député de Laporte, je dirais comme M. le
ministre: II y a des portes de grange qui sont ouvertes grandes ce soir. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Si vous voulez, on va passer de Me Beaulé
vers Me Jasmin, qui n'était pas un ancien associé, cela sera
peut-être plus facile.
M. Duhaime: Est-ce que je pourrais faire part de mes anciennes
associations professionnelles, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Non, ce n'est pas
nécessaire, cela ne fait partie de notre mandat.
Une voix: On va attendre un autre saccage!
Une voix: On ne veut faire honte à personne.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte. À l'ordre!
M. Bourbeau: II a été déclaré
à plusieurs reprises que Me Jasmin était très nerveux.
Vous nous l'avez dit, Me Gauthier nous l'a dit à plusieurs reprises,
lorsque vous étiez dans son bureau, il était très nerveux.
Vous l'avez dit également à plusieurs reprises.
M. Boivin: II m'apparaissait nerveux.
M. Bourbeau: II apparaissait nerveux, disons qu'on va
régler pour cela. Vous nous avez dit aujourd'hui que, à un moment
donné, vous lui avez dit: Prends un café. Je souligne en passant
que ce n'est pas la meilleure façon de calmer quelqu'un que de lui faire
prendre un café.
Le Président (M. Jolivet): M. le député.
Vous voyez ce que vous êtes en train de créer; j'appellerais cela,
comme professeur, des moyens détournés de vouloir faire qu'on
s'amuse beaucoup, mais ce n'est pas drôle. M. le député de
Laporte, posez vos questions et arrêtez de faire toutes sortes de
commentaires qui, malheureusement, ne sont pas nécessaires. M. le
député de Laporte, je vais utiliser - c'est vrai, cette fois,
vous êtes désagréable - certains articles du
règlement, si vous continuez.
M. Duhaime: C'est l'article 45, M. le Président, si je
peux vous en suggérer un.
Le Président (M. Jolivet): Posez vos questions, s'il vous
plaît!
M. Bourbeau: M. le Président, j'étais en train d'en
poser une.
Le Président (M. Jolivet): Non, je m'excuse. Vous avez
fait mention de l'article 68 en ma faveur ou en ma défaveur, vous le
ferez, mais ce n'est pas ce que je dis. M. le député, je dois
dire que j'ai un rôle très difficile à remplir ici à
cette commission. Je n'accepterai pas qu'on me fasse des menaces à moi.
L'article 68, vous le connaissez. Si vous voulez mettre en doute ma conduite,
vous le ferez à l'Assemblée nationale. M. le député
de Laporte.
M. Paradis: M. le Président, sur la question que vous
venez de soulever...
Le Président (M. Jolivet): Vous avez parlé de
l'article 68. Lisez-le.
M. Paradis: L'article 68, M. le Président, sauf tout le
respect que je vous dois et que je vous porte, le premier qui l'a
mentionné dans cette commission parlementaire...
Le Président (M. Jolivet): Non, je m'excuse, M. le
député, je ne veux en aucune façon faire mention de qui
l'a mentionné, la seule chose, c'est que je viens de l'entendre.
Non.
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question de
règlement à soulever à ce stade.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y.
M. Lalonde: Je pense que nous n'avons pas abusé de la
blague; d'autres témoins l'ont fait beaucoup plus que nous, je dis bien
"d'autres témoins", il ne s'agit pas de Me Boivin, il ne s'agit pas de
dérider la commission. Tout ce que le député de Laporte a
mentionné, de façon tout à fait anodine - que ce n'est
peut-être pas une façon de calmer les nerfs de Me Jasmin que de
lui offrir un café - ce n'était pas un reproche, c'était
seulement pour nous dérider un peu. Je ne vois pas pourquoi on peut
faire une colère simplement à cause de cette remarque qui est
tout à fait anodine
comparée à d'autres qui ont été faites
ici.
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas sur ce point que
j'ai sursauté, M. le député, mais c'est sur l'article 68,
qui est venu de ma gauche, et j'ai fait mention de cela. J'ai demandé au
député de Laporte de revenir au sérieux de cette
commission. Je le maintiens. M. le député, allezl
M. Bourbeau: M. Boivin, on a fait mention à plusieurs
reprises de la très grande nervosité apparente de Me Jasmin.
Est-ce que je peux vous demander, vous, quand vous avez rencontré Me
Jasmin, quel geste vous avez posé pour calmer cette
nervosité?
M. Boivin: Aucun geste précis, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous lui avez promis que vous
étiez pour régler son problème?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous lui avez dit à quelque moment
que la SEBJ allait éventuellement régler hors cour?
M. Boivin: À quelque moment que ce soit, avant quoi? Ma
réponse ne se veut pas une farce, parce que je ne possède pas,
techniquement, tout le dossier. Il faudrait que je vérifie. Il y a eu la
signature d'une transaction de règlement hors cour. De mémoire,
je crois que c'est le 12 ou le 13 mars. Je pense, de mémoire aussi,
qu'il y a eu une résolution du conseil d'administration du 6 mars
autorisant le règlement. Je présume, je ne le sais pas. Avant
qu'on ait des règlements formels, il y a souvent des règlements
officieux. Est-ce que j'aurais eu vent de quelque chose avant le 12 mars ou
avant le 6 mars et que je le lui aurais dit? Je ne sais pas. Cela est
peut-être possible, M. le Président. Voici pourquoi je vous
réponds de cette façon. C'est que, le 27 février 1979, M.
Cardinal est venu me voir. Il a dit: j'arrive de chez Me Gadbois. Je m'en vais
en vacances. Je lui ai dit: tu es bien chanceux. Il a dit: le dossier est entre
les mains du conseil d'administration et cela me semble en bonne voie. Alors,
est-ce que - je vais être tout à fait pointilleux et même
scrupuleux - entre le 27 février et le 6 mars, j'aurais dit à Me
Jasmin quelque chose lui laissant entendre qu'un règlement était
possible ou probable? Je n'en sais rien. Je tenais à faire quand
même ces remarques.
M. Bourbeau: Disons, par exemple, puisque vous me demandez de
situer ma question, avant le début du procès, avant le 15 janvier
1979, est-ce qu'à quelque moment vous auriez dit à Me Jasmin que
la SEBJ était pour régler hors cour?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Bourbeau: Est-ce que vous l'auriez dit à Me
Beaulé?
M. Boivin: Non, M. le Président. Je ne le savais pas, je
ne pouvais pas le dire.
M. Bourbeau: Est-ce que vous auriez donné des assurances
à Me Jasmin?
M. Boivin: Encore moins.
M. Bourbeau: Aucune assurance. Au ruban 1415, page 1, vers le bas
de la page, troisième paragraphe...
M. Boivin: Excusez-moi, M. le député, il y en a un
qui a toussé pendant que vous disiez le numéro de page.
M. Bourbeau: Le ruban 1415, page 1. M. Boivin: Merci.
M. Bourbeau: Troisième paragraphe de la fin. Vous nous
avez dit aujourd'jui: "Me Jasmin était tellement nerveux que je suis
sûr que, le 12 janvier, je lui ai dit: Enerve-toi pas, j'ai transmis
à M. Laliberté une recommandation favorable du premier ministre
envers un règlement hors cour." Quand vous lui avez dit:
Énerve-toi pas, en quoi cela pouvait-il ne pas l'énerver que vous
ayez transmis à M. Laliberté cette recommandation? (21 h 15)
M. Boivin: II faudrait, M. le Président, que le
député se réfère au contexte, c'est-à-dire
aux questions et phrases précédentes. C'est que lui il
s'énervait, son procès s'en venait, il fallait qu'il
procède, etc., dans tout le contexte des déboursés qui
s'additionnaient. Alors, j'ai dit: Énerve-toi pas, en voulant dire:
Qu'est-ce qu'il y a à faire? J'ai parlé à M.
Laliberté le 3 janvier et c'est entre les mains du conseil
d'administration. Un jour, il va y avoir une séance et ils vont
décider. C'est cela.
M. Bourbeau: Est-ce que ces paroles ont été
prononcées par vous dans le but de rassurer M. Jasmin?
M. Boivin: Dans le but... Je ne sais pas dans quel but. J'ai dit
ce que je savais.
M. Bourbeau: Quand on dit à quelqu'un: Énerve-toi
pas, c'est donc parce qu'on veut le rassurer sur quelque chose?
M. Boivin: Littéralement, peut-être. Mais c'est une
expression commune qui peut
être utilisée à bon escient dans ce contexte. Mais,
enfin, je ne me suis pas interrogé longuement sur le sens profond de:
Énerve-toi pas. Je l'ai dit comme cela ou à peu près. Mais
là, ce n'est pas verbatim, n'est-ce pas? Vous avez compris cela, M. le
député?
M. Bourbeau: Enfin, moi, je cite ce que vous avez dit. Vous avez
dit: Je suis sûr que...
M. Boivin: M. le Président, si on me cite verbatim chaque
fois, je vais passer mon temps, tout le temps que vous allez me garder ici,
bien vouloir me garder ici, à dire: Je ne dis pas que c'est verbatim. Je
vais passer mon temps à faire des... Tout mon témoignage, quand
ce sera verbatim, je vous le dirai, j'ouvrirai des guillemets. Dans tout mon
témoignage, je ne rapporte pas des mots Verbatim des gens, sur des
choses qui se sont passées en 1978 et en 1979. Cela va de soi.
M. Bourbeau: M. le Président, sur la question...
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: ...dont vient de parler le témoin, moi, tout
à l'heure, on m'a demandé de m'en tenir au texte.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, mais je veux
seulement...
M. Bourbeau: On m'a dit de m'en tenir au texte, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: Alors, je le lis.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Bourbeau: Et le témoin a dit aujourd'hui: "Je suis
sûr que". Alors, s'il m'a dit: "Je suis sûr que", c'était
que, pour une fois, il me semble, sa mémoire fonctionnait bien: "Le 12
janvier, je lui ai dit: Énerve-toi pas." Moi, si je me fais dire par
quelqu'un: Énerve-toi pas et qu'à ce moment-là, je suis
très nerveux, j'en conclus que cela va aller mieux, et que celui qui me
dit: Énerve-toi pas, sait de quoi il parle.
M. Boivin: Enfin, M. Jasmin a compris de la façon qu'il a
voulu comprendre. Je ne le sais pas, je dis les mots dans ce
sens-là.
M. Bourbeau: Alors, Énerve-toi pas, est-ce que cela
voulait dire: Ta cause va se régler? C'est cela que je veux savoir.
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, non, je ne permettrai
même pas la question, parce que là, il demande une opinion. Il y a
des réponses qui ont été données sur l'ensemble de
la question.
M. Bourbeau: M. Boivin, est-ce que vous avez expliqué
à M. Jasmin ce que cela voulait dire: Énerve-toi pas?
M. Boivin: Si vous continuez, à la ligne suivante, vous
allez avoir l'explication, M. le député. "Énerve-toi pas,
j'ai transmis à M. Laliberté une recommandation favorable du
premier ministre envers - en faveur, je voulais dire, il y a une
faute-là - en faveur d'un règlement hors cour."
Le Président (M. Jolivet): Je veux en profiter justement,
parce que vous dites qu'il y a une faute, pour dire que les textes que vous
avez, qui sont les galées, ne sont pas les textes définitifs. Il
y a des corrections à venir. En conséquence, ce sont les
préliminaires, et avant qu'on fasse la dactylographie de l'ensemble, il
y a des corrections possibles, parce qu'il peut y avoir des erreurs de frappe.
Je pense que c'est important de le dire.
M. Bourbeau: M. le Président, je comprends que vous
voulez...
Le Président (M. Jolivet): Non, c'était simplement
pour rappeler ce qui s'était passé cet après-midi.
M. Bourbeau: Bon, je serais d'accord sur le fait que, "envers un
règlement", c'est probablement "en faveur d'un règlement". Mais,
quand on dit: Énerve-toi pas, la correction ne pourrait pas être:
Énerve-toi.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
c'est encore quelque chose que je n'accepte pas envers la
présidence.
M. Bourbeau: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Non, je m'excuse. Ce n'est pas
le témoin qui a parlé, c'est moi qui, comme président, ai
profité de la circonstance pour faire référence à
ce qui s'était passé au début de l'après-midi. M.
le député de Jonquière, sur quoi?
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense que les dernières minutes nous ont démontré, de
façon très explicite, la façon habituelle qu'a le
député de Laporte de poser ses questions.
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le
Président, est-ce que je peux terminer?
Le Président (M. Jolivet): Non, je veux savoir sur
quoi.
M. Vaillancourt (Jonquière): II a demandé au
témoin: Qu'est-ce que cela veut dire...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant, je veux
savoir sur quoi, M. le député de Jonquière, pour ne pas
ouvrir un débat.
M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne veux pas ouvrir un
débat, M. le Président.
M. Lalonde: Si vous voulez l'ouvrir, on va l'ouvrir.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Je sais que vous avez
une opinion sur la façon dont le député de Laporte pose
ses questions.
M. Vaillancourt (Jonquière): Non, M. le Président,
c'est tout simplement pour...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
juste un instant. Je ne voudrais pas que vous m'ouvriez encore une boîte
de Pandore.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense que même si on avait un débat là-dessus, cela en
vaudrait la peine, même jusqu'à 10 heures, parce que je pense que
cela s'est produit trop souvent dans le passé. On a encore des
témoins...
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le
député, malheureusement, il n'y aura pas de débat. Non, il
n'y aura pas de débat. Je veux savoir si c'est une question de
règlement. Bon! Donnez-moi votre question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
à sa dernière question, le député de Laporte a
posé au témoin la question suivante: Qu'est-ce que cela voulait
dire: Énerve-toi pas? Et le témoin a été
obligé de répondre: "Lisez la ligne suivante, vous allez
comprendre". Je demanderais au député de Laporte...
M. Lalonde: Ce n'est pas une question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): Tout simplement, en toute
justice pour le ou les témoins à venir - et on aurait dû le
faire pour ceux qui sont venus, malheureusement, M. le Président, on a
resserré les cordes de la procédure un peu trop tard. Je vous dis
que, lorsqu'on cite une réponse d'un témoin, on n'a pas le droit
de la citer partiellement. On doit la citer totalement.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement...
M. Vaillancourt (Jonquière): Dans cette question
précise du député de Laporte, on a cité les mots
"énerve-toi pas", alors que...
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): ...l'explication de ces mots
était dans les...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Une voix: C'est faux! Tu dormais, toi.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
dois simplement...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui, juste avant, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. On reverra dans les galées
- on ne les a pas actuellement - mais pour permettre quand même au
député de Laporte d'être cité aussi
équitablement, il avait effectivement lu au départ l'ensemble du
paragraphe. C'est pour cela que je ne voulais pas qu'on ouvre un débat
pour rien. M. le député de Laporte, question, s'il vous
plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, je vous suis reconnaissant
de m'avoir racheté.
Le Président (M. Jolivet): Non, mais j'essaie d'être
honnête pour tout le monde.
M. Bourbeau: M. le Président, sur cette question, je vais
laisser la parole à un autre.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je dois vous avouer que la
première question que je voudrais poser à Me Boivin m'a
été inspirée par le député de Bourassa.
Quand le député de Bourassa s'est référé
à la déclaration de Me Boivin, à la page 12, où Me
Boivin dit: "Dans l'exercice normal de mes fonctions de chef de cabinet, j'ai
rencontré les avocats ouvertement à mon bureau. J'ai
rencontré M. Laliberté officiellement au même endroit." Me
Boivin, est-ce que vous pourriez nous dire, entre le 15 octobre 1978 et -
disons -le 6 mars 1979, si vous avez dit à M. Claude Laliberté
que vous aviez rencontré Me Beaulé?
M. Boivin: Je crois que oui.
M. Ciaccia: Est-ce que vous lui avez dit que vous aviez
rencontré Me Jasmin?
M. Boivin: Oui.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez dit à M. Saulnier que
vous aviez rencontré Me Jasmin?
M. Boivin: Je ne sais pas.
M. Ciaccia: Est-ce que vous lui avez dit que vous aviez
rencontré Me Beaulé?
M. Boivin: Je ne sais pas. M. Ciaccia: Me Cardinal? M.
Boivin: Je ne sais pas. M. Ciaccia: Me Aquin?
M. Boivin: Je ne sais pas. Vous en êtes toujours avec M.
Saulnier, là?
M. Ciaccia: Oui, oui. Avec M. Saulnier. M. Boivin: Cela
va.
M. Ciaccia: Est-ce que vous auriez dit à M. Gadbois que
vous aviez rencontré Me Jasmin?
M. Boivin: Je ne sais pas si j'ai parlé... Je crois...
Attendez un peu. Je crois que je n'ai jamais parlé à M.
Gadbois.
M. Ciaccia: Alors, évidemment, vous n'auriez pas pu lui
dire que vous aviez rencontré Mes Jasmin, Beaulé, Cardinal,
Aquin.
Le Président (M. Jolivet): C'est une bonne conclusion,
cela.
M. Ciaccia: Oui. Merci, M. le Président.
M. Bourbeau: C'est vous, M. le Président, qui faites des
blagues.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Bourbeau: Ce n'est pas permis au député de
Laporte.
Le Président (M. Jolivet): Oui. Je ne me choquerai pas
après moi-même, vous savez.
M. Bourbeau: Je vais invoquer l'article 45, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): II serait peut-être bon
pour vous autres que l'article 45 m'oblige à quitter le siège
pour faire la levée de cette Assemblée, mais ce n'est pas ce que
vous voulez, n'est-ce pas?
M. Lalonde: Mais pas du tout. On ne veut pas se battre.
Le Président (M. Jolivet): Bon. D'accord. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que vous auriez dit à M. Robert Boyd
que vous aviez rencontré Me Beaulé?
M. Boivin: Je n'ai jamais parlé à M. Boyd ailleurs
que lors de la rencontre du 1er février. Donc, je ne le lui ai pas
dit.
M. Ciaccia: Alors, à cette rencontre, vous ne lui avez pas
dit que vous aviez rencontré Mes Beaulé, Jasmin, Cardinal,
Aquin?
M. Boivin: Exact.
M. Ciaccia: Vous ne lui avez pas dit cela. Est-ce que vous auriez
dit à Me Yves Gauthier que vous aviez rencontré Mes Jasmin,
Beaulé...
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Ciaccia: ...ni Me Cardinal ni Me Aquin?
M. Boivin: Exact. Non, M. le Président.
M. Ciaccia: Est-ce que vous auriez dit aux administrateurs de la
Société d'énergie de la Baie James que vous aviez
rencontré Me Jasmin?
M. Boivin: Comme j'ai dit ce matin, tous ceux à qui je
n'en ai pas parlé, on en a fait la liste. Donc, je ne leur ai rien
dit.
M. Ciaccia: Donc, si je comprends bien, quand vous dites que vous
avez rencontré les avocats ouvertement à votre bureau, ce
n'était pas à la connaissance de ceux qui étaient
impliqués principalement dans la prise de décision...
M. Boivin: C'était à la connaissance de M.
Laliberté que des représentations m'avaient été
faites par Me Jasmin et Me Beaulé. Je n'ai pas dit à M.
Laliberté, ce n'est pas mon genre: Je l'ai vu deux fois, trois, huit
fois ou treize fois. Mais c'était à la connaissance de M.
Laliberté que des représentations m'avaient été
faites par Me Jasmin et Me Beaulé.
M. Ciaccia: À l'exception de M. Claude Laliberté,
que vous avez vu le 3 janvier pour lui faire part du souhait du premier
ministre, il n'y avait personne d'autre parmi les
administrateurs ou parmi ceux qui prenaient les décisions, soit
M. Giroux, M. Boyd ou M. Saulnier, personne qui savait que vous aviez ces
rencontres?
M. Boivin: C'est tout à fait différent quand vous
dites: Personne ne savait. Votre question est pour savoir si je l'ai dit. Je
fais une distinction fondamentale.
M. Ciaccia: Vous ne l'avez pas dit. Je vais la reformuler d'une
autre façon.
M. Boivin: Voilà.
M. Ciaccia: On a établi que vous ne l'aviez pas dit, que
vous l'aviez dit seulement à M. Laliberté, et que vous ne l'aviez
pas dit à tous les autres que j'ai mentionnés. Est-ce qu'à
votre connaissance, M. Saulnier savait que vous rencontriez...
M. Boivin: Je ne sais pas.
M. Ciaccia: Vous ne le savez pas. Est-ce que M. Boyd, à
votre connaissance, savait que vous rencontriez...
M. Boivin: La même réponse, je ne le sais pas.
M. Ciaccia: Vous vous êtes référé...
Au lieu de continuer à vous interroger et de vous faire dire que vous ne
le saviez pas, pour votre information, peut-être que vous le savez, parce
que vous avez peut-être fait le relevé de tous les
témoignages je ne sais pas si, oui ou non, vous avez regardé les
témoignages. Il y a une question que j'ai posée à M.
Saulnier. Lui, il a déclaré ici qu'il ne savait pas qu'il y avait
des réunions des avocats, soit des avocats des défendeurs, soit
des avocats de la demanderesse qui se rencontraient à votre bureau.
M. Boivin: Si M. Saulnier l'a dit, je n'ai pas de commentaire
à faire sur cela.
M. Ciaccia: Me Gadbois, je pense, nous a dit la même chose
à une question du député de Marguerite-Bourgeoys, je
crois. Les administrateurs de la Société d'énergie de la
Baie James ont fait les mêmes affirmations, qu'ils ne le savaient
pas.
M. Boivin: Les avocats de la SEBJ le savaient.
M. Ciaccia: Les avocats de la SEBJ, Me Aquin l'a appris quand Me
Beaulé, celui que vous avez mentionné qui avait une
mémoire d'éléphant, le lui a appris pour le
prévenir. Apparemment, cela a déstabilisé un peu Me Aquin,
parce que, immédiatement, il a appelé Me Gauthier.
Le Président (M. Jolivet): II y a juste un petit
problème. Je ne voudrais pas vous être désagréable,
et je vais vous redire ce que j'ai dit au député de Gatineau, qui
l'avait très bien compris. Si vous avez des commentaires, je peux vous
les permettre, mais si vous avez des questions, posez donc les questions et
vous ferez vos commentaires après. Le problème que j'ai, c'est
que, moi, je suis ici pour essayer de faire en sorte que les questions soient
posées. Là, vous faites des commentaires et cela n'amène
aucune réponse. Vous avez le droit de faire des commentaires. Jamais je
ne vous empêcherai d'en faire, mais je veux savoir si ce sont des
commentaires ou des questions. Ce qu'on a essayé d'établir, vous
pouvez essayer, posez vos questions et vous ferez vos commentaires
après.
Allez-y donc!
M. Ciaccia: M. le Président, je vais y aller. Parfois, il
faut se référer à certains faits pour poser la question.
Si je dois poser la question...
Le Président (M. Jolivet): Le problème que j'ai, et
je ne voudrais pas que cela reprenne, à l'intérieur des
commentaires que vous faites, vous passez vos opinions personnelles et je n'ai
rien contre cela à condition que ce soient vos commentaires. Mais vous
risquez, à travers ces choses, de faire que la personne qui est devant
nous doive répondre à des questions. Mais si la durée du
préambule est exagérée, je vais être obligé
d'appliquer ce que le président a demandé d'appliquer à
l'Assemblée nationale, d'éviter des longs préambules.
Allez-y, mais, s'il vous plaît, à vos questions. (21 h 30)
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais rétablir
certains faits parce qu'il me semble que cela devient de plus en plus difficile
pour moi de poser des questions. Je voudrais comprendre exactement le sens des
directives. Je n'ai donné aucune opinion. J'ai cité ce que Me
Jean-Roch Boivin a dit à propos de Me Beaulé, qu'il avait une
mémoire d'éléphant. Je pourrais sortir la transcription.
Je n'ai fait aucun commentaire personnel, M. le Président, mais j'ai
rappelé certains faits que M. Saulnier avait affirmés devant
cette commission et tout le reste. Alors, à moins que vous puissiez me
demander...
Le Président (M. Jolivet): Non. Simplement, M. le
député, ce n'est que la façon dont vous posez votre
question. J'ai déjà rappelé qu'il y a des virgules dans
une phrase, il y a des intonations dans une voix, qui font que la façon
dont vous la posez, ce sont des opinions par la façon dont vous la
posez. Je veux simplement qu'on évite d'entrer dans des
préambules où des opinions
sont exprimées sans donner la chance à notre invité
de répondre à des questions. C'est simplement cela.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Allez-y, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement. Il ne faudrait quand même pas tomber dans la
paranoïa, pas parce que le style...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
est-ce que vous m'accusez de paranoïa?
M. Lalonde: Non, pas encore.
Le Président (M. Jolivet): J'espère.
M. Lalonde: M. le Président, si j'avais à le faire,
il faudrait que le fasse ailleurs.
Le Président (M. Jolivet): C'est cela.
M. Lalonde: Mais il reste quand même que le
député de Mont-Royal n'a exprimé aucune opinion et, s'il
n'est pas maître de ses intonations, à ce moment, M. le
Président, je me demande où on en est rendu.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. C'est tout simplement
ce que je veux dire. Allez-y donc de vos questions, cela sera bien plus simple.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Vous avez raison, M. le Président. La
façon dont je pose les question est mienne.
Le Président (M. Jolivet): Je le sais, je la connais.
M. Ciaccia: Je ne peux changer ma façon de poser des
questions.
Le Président (M. Jolivet): Allez donc, posez vos
questions. Allez donc!
M. Lalonde: Elle est excellente. Elle a donné des
résultats.
M. Ciaccia: Alors M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Ne demandez pas des
conclusions. Il sera assez tôt pour les donner.
M. Tremblay: Non, c'est que le député...
Le Président (M. Jolivet): Oui, j'ai compris. J'ai
compris.
M. Tremblay: ...de Marguerite-Bourgeoys avait dit que cela avait
donné des résultats.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal. C'est lui qui a la parole. Allez-y, M. le député.
M. Ciaccia: Je peux continuer, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Ciaccia: Me Boivin, quand vous faites l'affirmation, à
la page 12 de votre déclaration, que vous avez rencontré les
avocats ouvertement, ce n'est pas ouvertement dans le sens que... Je vais
formuler. La seule personne qui vraiment était au courant que vous
rencontriez les avocats, soit de la défenderesse ou de la
défenderesse, était M. Laliberté.
M. Boivin: Je maintiens le mot "ouvertement". Ce n'est pas banal
que M. Laliberté le sache et que le premier ministre du Québec le
sache.
M. Ciaccia: Oui, mais les autres ne le savaient pas.
C'était plutôt...
Le Président (M. Jolivet): Attention, attention. Ne tombez
pas dans vos opinions.
M. Ciaccia: Ah! Je ne peux dire que c'était plutôt
ouvertement.
Le Président (M. Jolivet): Non mais vous avez... Non, non.
Ce que je veux vous dire, M. le député, c'est que si vous voulez
faire un commentaire et que vous n'avez plus de questions, je vais vous le
permettre, allez-y. Mais si vous avez des questions, posez-les.
M. Ciaccia: Non, mais le petit commentaire, je peux le
faire...
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Ne le faites pas.
M. Ciaccia: Je ne peux le faire?
Le Président (M. Jolivet): Non, pas tout de suite.
M. Ciaccia: Pas tout de suite? Le Président (M.
Jolivet): Non.
M. Ciaccia: Vous allez me donner la permission, je vais pouvoir
parler?
M. Lalonde: On est dans le coin.
Le Président (M. Jolivet): À la fin, oui. À
la fin. Une question, M. le député.
M. Ciaccia: Ce n'est pas facile, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Pensez-vous que ma tâche
est facile, vous? Allez-y donc, M. le député.
M. Ciaccia: Les mémoires sont courtes, les heures sont
longues. Je voudrais revenir à la réunion du 1er février,
celle dont vous semblez le plus vous souvenir, parce que c'était une
réunion importante. Le premier ministre y était, M. Boyd y
était, M. Giroux, je crois, M. Saulnier.
M. Boivin: Pas M. Giroux.
M. Ciaccia: M. Giroux n'était pas là. M. Boyd, M.
Saulnier, M. Laliberté.
M. Duhaime: Cela fait à peu près 57 fois qu'on le
dit. Franchement, vous commencez à être fatigué. Vous
manquez de gaz.
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. le
député.
M. Ciaccia: Avez-vous d'autres commentaires, M. le ministre?
M. Duhaime: Non, non.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Vous savez que je ne
permets pas plus de commentaires au ministre qu'à vous. Mais le
problème, c'est que je ne peux l'en empêcher, pas plus que vous.
Simplement en vous demandant de revenir à votre ligne de direction,
c'est-à-dire la question.
M. Ciaccia: Et durant cette réunion, vous avez
mentionné, je crois, aujourd'hui, que M. Boyd voulait un jugement. Il
voulait avoir un jugement dans la cause et je crois qu'il avait
explicité ses raisons. Vous aviez dit, je crois, qu'il voulait une arme.
En tout cas, je ne vous cite pas textuellement mais juste pour donner
l'idée. C'est M. Boyd qui avait dit cela.
M. Duhaime: C'est M. Boyd qui l'a dit.
M. Ciaccia: Oui, c'est M. Boyd. C'est ce que j'ai dit.
M. Duhaime: À mes questions.
M. Ciaccia: Oui. Ce n'est pas M. Boivin qui l'a dit.
Le Président (M. Jolivet): Cela va être difficile.
Cela va être difficile à... Non, mais mon problème, c'est
que je pense qu'actuellement il y a du monde qui se pose la question: Le temps
est peut-être de l'argent, dit-on? Posez-donc vos questions et, M. le
ministre, arrêtez donc de l'interrompre. Cela m'aidera
énormément. Donc, M. le député, allez à vos
questions.
M. Lalonde: Vous allez devoir ressortir vos martingales!
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais faire une
question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: J'ai mis en garde tout à l'heure le
député de Laporte contre cette tentation facile, je comprends que
l'heure avance et qu'on puisse manquer de rigueur, être un peu moins
sérieux, mais le député de Mont-Royal vient de mettre dans
la bouche du témoin des paroles qu'a prononcées M. Boyd à
la dernière question que je lui ai posée moi-même, que le
jugement pour lui était une arme dans ses mains. Me Boivin n'en a jamais
parlé depuis ce matin.
M. le Président, si on veut se référer aux
témoignages antérieurs d'autres personnes, c'est pour cela que
j'insiste pour qu'on se réfère à une page, à une
date, pour que tout le monde suive et pour éviter de perdre du temps. Ce
n'est pas parce que l'heure avance que ce sera le laisser-aller à cette
commission parlementaire. Je pense qu'il y a un minimum de rigueur qui doit
être maintenu et j'insisterais pour que ce soit fait.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, si une épée
n'est pas une arme, je ne sais pas ce qu'est une épée.
Le Président (M. Jolivet): Allez donc à votre
question...
M. Ciaccia: Mais non, M. le Président, je vais aller
à ma question, mais je ne veux pas me faire accuser d'avoir mis...
Le Président (M. Jolivet): Vous avez raison.
M. Ciaccia: ...des paroles dans la bouche du témoin, quand
c'est lui-même - je pense qu'il a levé la main, c'était un
épée -il a fait référence à quelque chose
comme cela.
Le Président (M. Jolivet): Je pense, oui...
M. Ciaccia: Une épée, c'est une arme. M.
Bourbeau: Que le ministre retire ses
paroles.
Le Président (M. Jolivet): Allez donc, M. le
député.
M. Lalonde: Que le ministre retire ses paroles ou se retire.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
allez donc à vos questions.
M. Ciaccia: M. Boivin, est-ce qu'il avait été
question, durant les discussions de cette réunion, que M. Boyd ait fait
savoir qu'il était opposé à un tel règlement, car
ce sont tous les Québécois qui vont devoir payer la note et non
ceux qui ont tout saccagé? Est-ce qu'il a, durant cette
discussion...
M. Boivin: Possiblement.
M. Ciaccia: À quel moment est venue la réplique du
premier ministre?
M. Boivin: Au meilleur de mon souvenir - parce que ce n'est pas
une réunion célèbre pour moi, je m'en souviens plus que
les autres mais... - c'est qu'à un moment donné, j'ai
argumenté avec M. Boyd de la façon que j'ai décrite ce
matin. Si vous voulez me le faire répéter, cela me fera plaisir.
C'est après cela, après la discussion entre M. Boyd et moi, que
le premier ministre est intervenu je crois - d'une façon un peu plus
vigoureuse.
M. Ciaccia: C'était au moment où M. Boyd...
M. Boivin: Après le moment où M. Boyd avait fait
valoir ses arguments. J'avais fait valoir mes arguments, etc.
M. Ciaccia: Les arguments que tous les Québécois
vont devoir payer la note et non ceux qui ont tout saccagé.
M. Boivin: Tous ceux que j'ai mentionnés ce matin, je peux
les énumérer de nouveau, si vous voulez, M. le
député.
M. Ciaccia: Quand avez-vous su que Me Jasmin était
autorisé à négocier ou à signer un règlement
hors cour?
Le Président (M. Jolivet): II n'y a qu'un problème,
et le député de Laporte va certainement s'en souvenir. Parce
qu'on dit: Quand avez-vous...? Il faudrait d'abord poser la question: Avez-vous
appris? Je pense que cela est quand même important.
M. Ciaccia: Bon, très bien. Avez-vous appris - je
présume que, lorsque je demande quand, c'est inclus...
M. Boivin: M. le Président, il faudrait distinguer pour
répondre correctement à cette question. Lorsque M. Jasmin vient
me voir et me donne des arguments en faveur d'un règlement hors cour...
Lorsqu'on rencontre un avocat, on présume de son mandat, n'est-ce pas?
On ne dit pas: Montre-moi ton mandat. Je présumais, dès les
premiers instants, qu'il était autorisé à un
règlement hors cour, mais je ne savais pas et je ne lui ai pas
demandé s'il était autorisé à un règlement
de tel ou tel montant.
M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, dès le
début, vous avez présumé, puisqu'il voulait un
règlement hors cour, qu'il était autorisé...
M. Boivin: C'est exact, M. le Président.
M. Ciaccia: Quand avez-vous appris que Me Beaulé avait un
mandat de régler?
M. Boivin: J'ai fait le même raisonnement, M. le
Président.
M. Ciaccia: Cela serait la même chose. Pour vous
référer au témoignage de Me Beaulé...
M. Boivin: Je vous avoue que cela ne m'intéresse
aucunement. Je ne veux pas vous interrompre du tout. Ce que je veux dire, c'est
que ce n'était pas ma responsabilité. Quelqu'un vient me voir et
me dit: Je veux un règlement hors cour. Je n'aurai pas l'outrecuidance
de lui demander s'il a un mandat.
M. Ciaccia: Me Beaulé vous a indiqué qu'il avait
reçu le mandat de représenter les Américains dans cette
cause lors d'une réunion qu'il a eue avec vous vers le 26 juin 1978.
M. Boivin: C'est-à-dire que, si j'ai bien saisi son
témoignage, il dit qu'il m'a informé à ce moment-là
qu'il avait le mandat. C'est cela?
M. Ciaccia: Oui. Je le cite au ruban 917: II a indiqué
qu'il avait reçu le mandat de représenter les Américains
dans cette cause.
M. Boivin: Comme je vous l'ai dit plus tôt dans la
journée, je ne me souviens aucunement de cette rencontre, mais, encore
là, je ne mets pas en doute la parole de...
M. Ciaccia: Vous ne vous souvenez pas de la rencontre, alors vous
ne pouvez pas vous souvenir si c'était à cette rencontre qu'il
vous a indiqué aussi qu'il avait le mandat de négocier en plus
d'un mandat de
représenter...
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Ciaccia: Quand Me Jasmin ou Me Beaulé venait vous voir,
ils étaient autorisés à régler hors cour.
M. Boivin: Je n'en sais rien, je l'ai présumé.
M. Ciaccia: Les discussions que vous auriez eues, auraient
été dans le sens que vous présumiez qu'ils avaient le
droit de régler hors cour.
M. Boivin: Exact, M. le Président. Le Président
(M. Jolivet): ...
M. Ciaccia: Objection? Il vient de dire: Exact. Il vient de
répondre. Il a dit: Exact.
M. Boivin: Quelquefois, c'est plus vite, M. le Président.
Je ne me mêle pas de mes affaires, par exemple, je devrais
peut-être attendre que vous décidiez.
M. Ciaccia: Non, c'est correct.
Le Président (M. Jolivet): Non, mais mon seul
problème, M. le député de Mont-Royal, c'est que je me suis
fait avoir comme cela la semaine dernière.
M. Ciaccia: C'est toujours plus facile, Me Boivin, quand on ne
fait que répondre, qu'on donne des réponses franches et
claires...
Le Président (M. Jolivet): Allez.
M. Ciaccia: Cela évite beaucoup de questions de
règlement et d'ambiguïtés.
M. Boivin: Je vous remercie de qualifier mes réponses de
franches, M. le député.
M. Ciaccia: La dernière que vous m'avez donnée,
oui.
M. Tremblay: Si les questions étaient plus franches cela
irait encore plus vite.
M. Ciaccia: Non, j'ai dit: Quand on les donne claires et franches
comme vous l'avez fait à la dernière question que je vous ai
posée, cela va toujours beaucoup mieux.
M. Lalonde: Le compliment est un peu réduit.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que vous avez d'autres
questions, M. le député?
M. Ciaccia: J'ai beaucoup d'autres questions...
Le Président (M. Jolivet): Allez.
M. Ciaccia: ...mais il ne me reste que quinze minutes ce soir et
j'essaie de déterminer lesquelles je dois poser dans les quinze
minutes.
Le Président (M. Jolivet): Allez, je voulais simplement
m'assurer.
M. Ciaccia: Vous avez mentionné dans votre
déclaration, au début, que vous avez reçu un appel
téléphonique de M. Louis Laberge à l'automne 1978. Est-ce
que vous pourriez nous dire quel était... En plus de ce que vous aviez
spécifié ici, vous dites: Je ne saurais préciser la date,
mais il me semble que ce fut peu de temps avant ma première rencontre
avec Me Michel Jasmin le 4 décembre. M. Laberge apporta comme argument
que la SEBJ devait régler la cause hors cour. Est-ce que vous pourriez
nous donner plus de détails sur ce que M. Laberge vous a dit?
M. Boivin: M. le Président, si je me suis exprimé
de façon assez vague - comme vous voyez, il a
énuméré certains arguments au soutien de sa
prétention - c'est que je ne me souvenais pas précisément
lorsque j'ai rédigé cette déclaration et maintenant au
moment où je témoigne des arguments que M. Laberge a pu faire
valoir à ce moment-là: Je pourrais vous les dire mais cela serait
de la reconstitution. Je pourrais les imaginer mais ce n'est pas cela que vous
voulez savoir.
M. Ciaccia: Non, on ne veut pas reconstituer le dossier. On veut
savoir ce qui s'est produit, ce qui est arrivé. Est-ce qu'il vous a
mentionné un montant?
M. Boivin: II n'a jamais été question de montant
avec qui que ce soit.
M. Ciaccia: Alors, est-ce qu'il voulait strictement que la cause
soit retirée et qu'il y ait un règlement pur et simple? (21 h
45)
M. Boivin: Ce que je peux me rappeler, c'est qu'il voulait un
règlement hors cour. Il m'a dit: Me Jasmin vous demandera un rendez-vous
et il vous l'expliquera plus longuement.
M. Ciaccia: II ne vous a pas indiqué en quels termes il
voulait ce règlement hors cour?
M. Boivin: Non, jamais.
M. Ciaccia: Si cela était de retirer la
cause purement et simplement? M. Boivin: Non, monsieur.
M. Ciaccia: Rien du tout, seulement un règlement hors cour
comme cela?
M. Boivin: Je ne sais pas s'il a employé l'expression
"règlement hors cour", c'est moi qui l'emploie parce que je suis avocat
mais lui, est-ce qu'il connaît l'expression, est-ce qu'il l'a
utilisée? Enfin, ce que je comprenais, c'était de ne pas se
rendre en procès et de régler la cause.
M. Ciaccia: Alors, il n'y a pas eu de montant, il n'y a pas eu de
modalité, sur quel terme ou condition, juste un règlement?
M. Boivin: C'était très vague, vous savez, M.
Laberge m'a peut-être appelé, la conversation a duré, je
vais vous dire cela, deux, trois ou quatre minutes.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il vous a appelé plus d'une
fois?
M. Boivin: À mon souvenir, pour ce sujet, il m'a
appelé seulement une fois. Il faut que je sois délicat dans mes
réponses parce que M. Laberge pouvait me parler d'autre chose parfois;
alors, mon souvenir concernant cette affaire, c'est une fois.
M. Ciaccia: Vous avez mentionné que Me Jasmin vous avait
donné certains arguments, en faveur de son point de vue, pour un
règlement hors cour. Je pense que vous avez mentionné aujourd'hui
qu'à l'argument de la paix sociale, vous ne portiez pas trop attention
parce que cela aurait pu être une autre forme de chantage. Ce
n'était pas une considération principale dans votre esprit.
M. Boivin: Exact, M. le Président.
M. Ciaccia: D'accord. Vous avez aussi mentionné...
M. Boivin: Pour moi.
M. Ciaccia: Oui, oui, je parle pour vous. Vous avez aussi
mentionné la question de responsabilité. Il y avait la
responsabilité, ce n'était pas la même chose avec les
syndicats américains, mais les clients de Me Jasmin étaient
légalement responsables.
M. Boivin: À mon opinion.
M. Ciaccia: À votre opinion, toujours à votre
opinion. La raison principale qui vous a frappée le plus dans la
position de Me Jasmin, si je comprends bien, c'était l'incapacité
de payer de ses clients. C'était une des considérations
principales.
M. Boivin: Exact, M. le Président.
M. Ciaccia: Comment en êtes-vous venu à cette
conclusion? Vous avez admis que c'était une des raisons, comment
avez-vous accepté cette conclusion?
M. Boivin: C'était un peu au conditionnel, comme je me
suis exprimé ce matin, aujourd'hui je veux dire. Quand j'ai
rencontré M. Laliberté, j'ai dit: II m'apparaît
évident, sans être un grand connaisseur - et je n'avais pas
demandé à ce moment-là, lors de ma rencontre avec M.
Laliberté le 3 janvier, je n'avais pas demandé à ce
moment-là ni à aucun autre moment d'ailleurs, d'états
financiers ou de bilan ou quoi que ce soit à Me Jasmin. Alors, j'ai dit
à M. Laliberté: II m'apparaît évident qu'un syndicat
local ne peut pas payer un montant qui est d'un ordre de grandeur ressemblant
à un jugement possible. Je ne savais pas - je ne sais pas encore
aujourd'hui quel aurait été le jugement mais je lui ai dit cela.
Et j'ai dit: Bien sûr, il vous appartiendra de vérifier si c'est
exact, cette incapacité de payer.
M. Ciaccia: Avez-vous demandé les états financiers
de...
M. Boivin: Non, je viens de le dire: jamais. Parce que j'ai
confié ce soin - cela ne m'appartient pas tellement, cela fait partie de
la négociation - à la SEBJ.
M. Ciaccia: Je vais essayer de comprendre...
M. Boivin: Ce que je veux dire, M. le Président, si vous
le permettez...
M. Ciaccia: Oui, oui.
M. Boivin: Si, par hypothèse - on raisonne par
hypothèse - ce syndicat avait eu en banque 2 000 000 $, peut-être
aurait-il fallu lui faire payer plus cher le règlement que s'il en avait
eu 2000 $. Cela appartient vraiment à la négociation. Cela
appartient à la SEBJ de s'enquérir de ces choses qui ont une
influence directe sur le règlement.
M. Ciaccia: Mais, je voudrais comprendre comment vous acceptez...
Vous m'avez dit, je pense - vous avez dit à cette commission - que
l'argument qui frappait votre opinion, c'était l'incapacité de
payer. Bon! Sur quoi vous basiez-vous pour dire que ces syndicats
étaient incapables de payer?
M. Boivin: M. Jasmin me l'affirme et c'est un syndicat local.
Sans être un grand connaisseur, un syndicat local ne peut pas avoir et
n'a pas, généralement, de fonds
suffisants pour payer des montants de l'ordre de ceux dont on parlait.
Mais, j'ai dit - cela me semble élémentaire, mais je pense que si
je ne l'avais pas dit, j'imagine que la SEBJ l'aurait fait quand même;
ils n'ont pas besoin de mes grands conseils pour savoir comment régler
une cause - je leur ai dit: Bien sûr, il vous appartiendra de
vérifier cette allégation de M. Jasmin.
M. Ciaccia: Mais quand vous dites: M. Jasmin me l'affirme, est-ce
que vous lui avez demandé de vous justifier cette affirmation?
M. Boivin: Non, M. le Président, c'est ce que je viens de
dire.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas demandé de
vérifier?
M. Boivin: Non.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas demandé vous-même
à voir les états financiers?
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Ciaccia: Mais vous étiez convaincu qu'ils
étaient incapables de payer?
M. Boivin: Je n'étais pas convaincu, j'étais
porté à croire son affirmation à cause des raisons que je
viens de vous donner. Et je me disais que cela ne porterait pas à grande
conséquence, puisque la SEBJ le vérifierait.
M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, Me Jasmin ne vous a
jamais donné de document, ne vous a jamais montré aucun
état financier pour vous convaincre de l'incapacité de payer de
ses clients?
M. Boivin: Exact, M. le Président.
M. Ciaccia: Est-ce que vous saviez ou est-ce que quelqu'un vous a
informé ou vous a communiqué certaines informations: à
savoir que le client de M. Jasmin, les clients, les défendeurs: pas les
défendeurs américains, les défendeurs
québécois, étaient en mesure de payer 3 000 000 $ sur une
base de trois ans, sans affecter les services que les syndicats pouvaient ou
devaient donner à leurs syndiqués. Autrement dit, sans affecter
leur fonctionnement ils étaient en mesure de payer 3 000 000 $ sur une
période de trois ans.
M. Boivin: Non, M. le Président.
M. Ciaccia: Personne ne vous a jamais communiqué cette
information?
M. Boivin: Exact.
M. Ciaccia: Et vous n'avez jamais... Y a-t-il quelque chose que
le ministre...
Le Président (M. Jolivet): Je ne vous ai pas
dérangé.
M. Ciaccia: Non, pas vous, mais le ministre.
M. Duhaime: Si vous voulez avoir une suspension pour refaire vos
forces, on peut vous la donner. Cela commence à être pesant,
à mon avis.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Lalonde: Une autre saute d'humeur.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît:
M. Ciaccia: II se peut, M. le Président, que mes questions
ne plaisent pas au ministre, mais ce sont mes questions.
M. Duhaime: C'est le ton que je n'aime pas.
Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Ciaccia: Ahl Le
ton non plus...
M. Bourbeau: II le trouve trop agressif...
Le Président (M. Jolivet): Allez donc, M. le
député de Mont-Royal. Continuez!
M. Rodrigue: II manque de vigueur, comme définition.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! II reste
cinq minutes.
M. Ciaccia: Alors, M. Boivin, vous dites que vous êtes le
chef de cabinet du premier ministre. Mes Jasmin et Beaulé viennent vous
faire des représentations et, spécialement Me Jasmin. Il invoque
un argument quant à l'incapacité de payer. Pour vous
personnellement, vous l'affirmez encore aujourd'hui, c'était une des
considérations majeures. Vous dites à la page 2: J'en suis venu
à la conclusion qu'il devait y avoir un règlement hors cour, pour
les raisons suivantes: a) - vous la mettez en premier -l'incapacité
évidente des syndicats québécois défendeurs de
payer. Mais, vous n'êtes pas capable de me donner une information, ce
soir, sur cette incapacité évidente. Comment avez-vous pu faire
cette affirmation? Quelles informations aviez-vous? Quelle documentation
aviez-vous que les syndicats québécois étaient incapables
de payer?
M. Boivin: Même si je me forçais, je ne serais pas
capable de donner une réponse plus complète. Elle est
peut-être insatisfaisante pour vous, mais elle est plus complète
que celle que je vous ai donnée tantôt.
M. Ciaccia: Non, la réponse est complète. Elle est
claire. Elle est très claire cette réponse.
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, M. le
député, allez donc aux autres questions, parce que vous allez
certainement en arriver à ce que vous avez le droit de faire à la
fin, soit de tirer vos conclusions.
M. Ciaccia: Non, avant de tirer des conclusions, M. le
Président, je demande au témoin comment il en est venu à
cette conclusion.
Le Président (M. Jolivet): II vient de vous donner une
réponse indiquant que même si vous le questionnez, cela ne sera
certainement pas satisfaisant comme réponse puisque la seule
réponse qu'il peut vous donner, c'est celle qu'il vous a donnée
depuis longtemps. Allez à une autre question.
M. Ciaccia: Pour continuer dans mes questions, si je comprends
bien, vous en êtes venu à cette conclusion sans avoir
d'information devant vous?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vimont.
M. Rodrigue: Je fais une question de règlement parce que,
là vraiment, il y a une conclusion très nette qui est incluse
dans la question. Il me semble qu'elle est irrecevable. De la façon dont
la question a été posée, elle contient une conclusion. Il
me semble que c'est tout à fait irrecevable.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que d'une façon
ou d'une autre, le député de Mont-Royal a posé une
question. Il est évident qu'elle contient, comme on dit, des
suggestions. Il est évident qu'elle n'est pas recevable de la
façon dont elle a été posée. Oui. M. le
ministre
M. Duhaime: M. le Président, est-ce que je pourrais poser
une question au député de Mont-Royal?
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Duhaime: Je veux juste savoir s'il en a encore pour cinq
minutes ou pour une heure et cinq minutes, parce que j'allais lui proposer que
nous pourrions prolonger notre séance jusqu'à 23 heures. Mais
s'il en a pour cinq minutes, je pourrais peut-être lui suggérer
d'aller un peu plus vite.
Le Président (M. Jolivet): Oui. Le problème que
j'ai, c'est qu'il y a une question qui est posée au député
de Mont-Royal. Je vais lui demander d'y répondre.
M. Lalonde: Non, M. le Président, c'est une question
irrecevable.
M. Ciaccia: Complètement irrecevable.
M. Lalonde: Qui est remplie d'opinions et d'insinuations.
Le Président (M. Jolivet): Tout ce que je veux dire,
c'est: M. le député, vous avez le droit de parole, allez donc
à vos questions. Mais ne revenez pas sur la même question, on
l'avait réglée.
M. Ciaccia: M. le Président, je ne veux pas encore me
faire dire des choses que je n'ai pas dites, me faire accuser de poser des
questions irrecevables. Je n'ai pas posé une question suggestive, j'ai
fait une constatation d'après les réponses que Me Boivin m'a
données. Je lui ai demandé, alors, s'il est exact qu'il en est
venu à la conclusion que les syndicats ne pouvaient pas payer, sans
avoir aucun état financier, sans avoir aucune documentation, sans avoir
aucune preuve devant lui pour en arriver à cette conclusion. C'est la
seule question que j'ai posée, c'est une constatation d'après les
réponses que Me Boivin m'a données.
M. Rodrigue: Donc, c'est une conclusion que vous tirez.
Le Président (M. Jolivet): À partir d'une
conclusion, il pose une question. C'est mon malheur dans les circonstances. Il
tire une conclusion personnelle et demande ensuite à l'invité de
répondre. Ce n'est pas admis de la poser de cette façon.
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
règlement...
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y donc.
M. Lalonde: ...je pense que j'ai bien compris la dernière
question du député de Mont-Royal: Est-il exact que vous
êtes venu à la conclusion que les syndicats canadiens ou
québécois n'étaient pas capables de payer, sans avoir pris
connaissance d'aucun document, d'aucun état financier. Je pense que la
question est tout à fait recevable. Est-ce que c'est exact? Oui ou
non?
M. Boivin: Je répondrai à la dernière
question du député de Marguerite-Bourgeoys. C'est exact mais ce
n'est pas la même
question que celle du député de Mont-Royal.
M. Duhaime: II n'a pas le droit de parole, M. le
Président.
M. Ciaccia: C'est pire.
M. Boivin: Mais je réponds: exact à la question
telle que formulée par le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je m'excuse, je n'ai pas le droit de poser de
question.
Le Président (M. Jolivet): Oui, j'ai bien vu, d'une
façon ou d'une autre, que le problème qu'on a, avec nos questions
de règlement, est de peut-être suggérer la façon
dont la question doit être posée.
M. Lalonde: C'est comme cela que j'ai compris la question.
Le Président (M. Jolivet): Oui mais compte tenu du temps,
je vais ajourner nos travaux à mardi 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 59)