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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'énergie et des
ressources est à nouveau réunie ce matin, jusqu'à 13
heures, aux fins d'examiner les circonstances entourant la décision du
conseil d'administration de la Société d'énergie de la
Baie James de régler hors cour la poursuite civile intentée
à la suite du saccage du chantier de LG 2 survenu en 1974 et, plus
spécifiquement, le rôle du premier ministre et de son bureau
à cet égard.
Les membres de cette commission sont: M. LeMay (Gaspé), M.
Ciaccia (Mont-Royal), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Bourbeau (Laporte), M.
Laplante (Bourassa), M. Gratton (Gatineau), M. Dussault (Châteauguay), M.
LeBlanc (Montmagny-L'Islet), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Champagne
(Mille-Îles) et M. Rodrigue (Vimont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscaminque), M. Desbiens (Dubuc), Mme Harel
(Maisonneuve), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Pagé (Portneuf), M.
Doyon (Louis-Hébert), M. Tremblay (Chambly), M. Saintonge (Laprairie),
le rapporteur étant toujours M. LeBlanc (Montmagny-L'Islet).
La personne invitée ce matin est toujours Me Rosaire
Beaulé, sous le même serment qu'il a prêté. À
la fin de nos travaux, à 22 heures hier soir, nous en étions
à toutes les questions à être posées par le
député de Mont-Royal. Je dois aussi vous rappeler que nous sommes
convoqués par avis mardi prochain, de 10 heures à 12 h 30, ceci
pour les gens de cette commission qui veulent savoir l'horaire du début
de la semaine prochaine.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
Horaire des travaux et invités
M. Lalonde: Enchaînant sur les derniers propos que vous
avez tenus, mardi prochain, j'aimerais savoir du ministre quel est l'horaire de
nos travaux. D'abord, on commence à 10 heures, mardi matin; est-ce qu'on
siège mardi soir? Ensuite, quels sont les invités mardi, si on a
terminé avec Me Beaulé?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Je pense que le député voulait dire
quelque chose.
Le Président (M. Jolivet): Non, je n'ai pas
considéré qu'il avait le droit de parole et je ne le lui ai pas
donné. M. le ministre, c'est à vous.
M. Duhaime: M. le Président, j'avais l'intention de
demander à la commission ce matin - je vais, d'abord, adresser ma
demande au député de Marguerite-Bourgeoys - qu'on fasse ensemble
une évaluation du temps qui est devant nous. Il est 10 h 15 et je serais
disposé à aller au-delà de 13 heures, jusqu'à 13 h
15, pour rattraper le quart d'heure qui nous échappe. J'anticiperais que
nous pourrions terminer ce matin avec Me Rosaire Beaulé, ce qui nous
permettrait de préparer un horaire pour mardi matin, 10 heures, en vous
indiquant que mardi nous pourrions, à votre demande, entendre Me Gadbois
et, ensuite, Me Yves Gauthier et Me Jean-Roch Boivin. Le premier ministre,
député de Taillon, viendra rejoindre la commission en temps
utile. Cela, M. le Président, dans l'ordre que je viens de le
réciter, mais sous réserve, cependant. Je pense que le
député de Marguerite-Bourgeoys comprend ce que je veux dire. Cela
m'apparaîtrait raisonnable si les trois prochaines heures étaient
bien consacrées à terminer avec la comparution de Me
Beaulé. Je pourrai vous confirmer le programme à la fin de la
séance, c'est-à-dire vers 13 h 15 aujourd'hui. Il me reste une
vérification à faire, je le regrette. Je vais devoir apprendre
l'information et je vais la transmettre à la commission aussitôt
que je l'aurai! Je ne sais pas si Me Gadbois a terminé sa courte
convalescence ou non. Mais on m'a assuré la semaine dernière que
l'intervention qu'il avait subie était mineure; je n'ai aucune
idée de quoi il s'agit, remarquez bien. Je sais qu'il y a des gens de
mon bureau qui m'écoutent actuellement, ils vont très
certainement faire la recherche au moment où je vous parle et, dans les
minutes qui vont venir, on devrait avoir l'information. Je pense, M. le
Président, avoir répondu à la question du
député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, en ce qui concerne le
témoignage de Me Beaulé, à savoir s'il va terminer ce
matin, je n'ose pas anticiper comme le fait le ministre. On sait que les
anticipations du ministre sur les témoignages, jusqu'à
maintenant, ressemblent aux prévisions du ministre des Finances sur les
revenus et les déficits.
M. Duhaime: II est quand même pas mal meilleur que
MacEachen et Lalonde.
M. Lalonde: Précisez lequel.
M. Duhaime: II doit être parent avec vous, cela ne me
surprendrait pas, un lointain cousin.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, ne
recommencez pas dès ce matin à perdre du temps.
M. Lalonde: Non. Il m'interrompt.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, la parole est à vous.
M. Lalonde: En ce qui concerne les prochains témoins, dont
Mes Gadbois, Gauthier, Boivin et M. Lévesque, il y a Me Jasmin; il ne
faut pas anticiper.
M. Duhaime: Je n'ai pas déclaré que M.
Lévesque serait témoin. J'ai très bien indiqué
qu'il viendrait rejoindre la commission et le député de Taillon
sera à son siège, soyez sans inquiétude.
M. Lalonde: On réglera ce problème quand on y
arrivera.
M. Duhaime: Ne vous en faites pas, vous ne réglerez pas
ici ce que le gouvernement entend faire.
M. Lalonde: J'ai déjà indiqué ce
qu'on...
M. Duhaime: Vous êtes dans l'Opposition, vous faites
très bien cela.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Duhaime: Ce n'est pas vous qui allez décider où
siégera le premier ministre, je vous en passe un papier.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je crois que le ministre est bien nerveux.
M. Duhaime: Ne jouez pas au procureur devant la Cour des sessions
de la paix.
M. Lalonde: Bon! On verra ce que la commission décidera en
ce qui concerne l'endroit où le premier ministre témoignera. Nous
avons indiqué, d'ailleurs, nos couleurs au tout début de cette
commission à ce propos.
Il reste Me Jasmin...
M. Duhaime: Ce n'est pas ce que vous avez dit encore.
M. Lalonde: Bien, lisez la transcription, vous allez voir
exactement ce qu'on en pense.
M. Duhaime: Oui, je l'ai lue, mais je ne l'ai pas comprise.
Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une
autre, pour éviter un débat qui risque de s'amorcer et qui n'a
pas à être fait pour le moment, je dois vous dire que ce n'est ni
à ma gauche, ni à ma droite qu'on décidera. C'est ici
à la présidence qu'on décidera à quelle place devra
s'asseoir le premier ministre.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Il reste Me Jasmin
dont on ne retrouve pas le nom sur la liste. M. le ministre, il arrive
où, en fonction naturellement de la décision de la
présidence, qui, si je comprends bien, devra être rendue au
début de la semaine prochaine, mardi peut-être, à
l'ouverture de nos travaux...
Le Président (M. Jolivet): Effectivement, la prise en
délibéré de cette question devrait connaître son
aboutissement possiblement au début de la semaine prochaine,
c'est-à-dire mardi. Il reste encore des vérifications à
faire mais je serai prêt à rendre une décision possiblement
mardi matin.
M. Lalonde: Compte tenu de ces propos, est-ce que M. le ministre
pourrait nous dire à quel endroit, sans présumer
nécessairement de la décision, dans l'hypothèse où
Me... De toute façon, Me Larivière, l'avocat du barreau, a bien
indiqué qu'en ce qui concerne les communications entre le Conseil
provincial des métiers de la construction et Me Jasmin il a
été libéré; donc, il peut témoigner. De
toute façon, il va réapparaître devant nous. À quel
endroit sur la liste le ministre le situe-t-il?
M. Duhaime: M. le Président, je vais attendre la
décision du président de l'Assemblée nationale.
M. Lalonde: Bon.
M. Duhaime: La seule chose que je veux dire, c'est que, si j'ai
bien compris Me Larivière, il ne parle pas au nom de l'honorable juge
Jasmin, mais au nom du barreau. L'honorable juge Jasmin était seul ici
devant nous.
Le Président (M. Jolivet): II faudrait quand même
faire une petite rectification pour les besoins de la cause. La décision
doit être rendue par le président, qui est effectivement moi ce
matin; non par le président de l'Assemblée nationale, mais par la
présidence de la commission parlementaire en collaboration, bien
entendu, avec les services de la présidence de l'Assemblée
nationale.
M. Lalonde: Puisque la présidence est indivisible, M. le
Président, je ne voudrais pas faire de personnalités.
M. Duhaime: C'est une trinité.
M. Lalonde: Maintenant, il manque des témoins sur la liste
du ministre. Il manque M. Pouliot, M. Yvan Latouche. Quand peut-on s'attendre
à les entendre?
M. Duhaime: Ils ne seront pas entendus, M. le Président,
je l'ai indiqué hier, puis avant-hier et il y a trois jours. Je crois
que c'est le Soleil d'hier qui a rapporté cette nouvelle à la
une. Cela a été répété. Si vous avez une
motion à faire, faites-la et on va la débattre maintenant.
M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais rappeler les
propos du ministre, le 30 mars 1983...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je pense que nous avons eu l'occasion hier de discuter
amplement de cette question. Si vous voulez qu'on discute de cette question ce
matin, je n'ai aucune objection, mais j'aimerais qu'on le fasse sous forme de
motion, de façon que je sache, comme président, ce que j'aurai
à prendre comme décision.
M. Lalonde: Je peux terminer mes propos par une motion, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, mais je voudrais qu'en
commençant vous ayez l'intention d'en faire une. Si vous n'avez pas
l'intention d'en faire une, je n'ai pas l'intention de reprendre le
débat qui a eu lieu et qui a assez duré, à mon avis. Donc,
si vous voulez commencer ou finir par une motion, je n'ai aucune objection.
Mais je ne voudrais pas qu'on débute sans qu'il y ait de motion. Je ne
voudrais pas que l'on recommence des discussions qui ont eu lieu ici, à
cette commission, à deux occasions et à l'Assemblée
nationale. Je suis, comme président, obligé de vous demander de
proposer une motion, si vous avez l'intention, ce matin, au début ou
à la fin de votre intervention, de demander la présence d'autres
personnes ici, à cette commission.
M. Lalonde: II ne fait aucun doute, M. le Président, que,
si on nous force à faire la motion, nous allons la faire à un
moment donné. Mais j'aimerais faire précéder cela par des
questions au ministre. Il nous a dit: Nous n'entendrons pas M. Pouliot,
à moins qu'on ne nous fasse la preuve de la pertinence de ses propos, de
son témoignage. Quels sont les critères que le ministre nous
impose pour savoir si c'est pertinent ou non?
M. Duhaime: Je vais répondre, M. le Président. J'ai
dit, ici même à cette table, il y a maintenant une semaine, que
nous allions entendre ici des personnes, des invités dont le
témoignage avait un lien ou un rapport. Et j'ai demandé au
député de Marguerite-Bourgeoys de nous indiquer quel était
le lien qu'il voyait ou le rapport. Et je peux m'expliquer bien longuement. Je
pense que le député de Marguerite-Bourgeoys est assez grand pour
savoir ce que cela veut dire. Cette commission parlementaire ne servira ni de
tribune, ni de tremplin à personne, incluant ceux qui,
bénévolement, travaillent pour le Parti libéral du
Québec. Et je le dis très clairement.
À la demande du Parti libéral, nous avons entendu M.
Daniel Latouche, autrefois attaché au bureau du premier ministre. C'est
exact? Nous avons même retardé et modifié - vous appelez
cela "tripoté" - l'ordre des témoins pour entendre M. Daniel
Latouche, à votre demande. Quant à nous, nous n'avons strictement
rien appris ou entendu qui ait quelque lien que ce soit entre ce que M. Daniel
Latouche a dit devant cette commission et le mandat de la commission. Il en est
resté une vague querelle de cousinage et j'avoue honnêtement
qu'autour de cette table nous n'avons pas l'expertise pour la
démêler. C'est un cas.
Je n'ai pas l'intention, M. le Président, que cette commission
entende tous et chacun des officiers de tous et chacun des syndicats. Je
voudrais faire référence à M. Pouliot qui, à
l'époque de 1978-1979, n'occupait pas le poste d'autorité qu'il
occupe aujourd'hui. Si le député de Marguerite-Bourgeoys nous dit
qu'il a l'intention d'établir que M. Pouliot a négocié
avec Me Jean-Roch Boivin ou avec le premier ministre ou avec Me Yves Gauthier,
ou encore qu'il a siégé au conseil d'administration de la SEBJ ou
qu'il était un officier supérieur d'une société
d'État qui a eu directement à voir avec le mandat de la
commission, je dis tout de suite que je vais donner mon accord pour que nous
l'entendions. Mais tant que je n'aurai pas ces
éléments, M. Pouliot, lui comme un autre, ne viendra pas
régler ses comptes en commission parlementaire. Si vous voulez que
j'aille plus loin, je peux le faire.
M. Lalonde: M. le Président, je ne sais pas ce qui a
piqué le ministre, ce matin. Que M. Pouliot règle des comptes
avec qui? M. Pouliot n'a aucun lien avec le Parti libéral et le ministre
vient de dire qu'il n'aura...
M. Duhaime: Je n'ai pas dit cela non plus.
M. Lalonde: Enfin, vous avez dit que personne...
M. Duhaime: Mais je n'ai jamais dit cela...
M. Lalonde: ...ne serait invité ici, enfin quelqu'un qui
travaille bénévolement pour le Parti libéral.
M. Duhaime: Ah! Je m'excuse, M. le Président...
M. Lalonde: Ah bon! Ce n'est pas M. Pouliot.
M. Duhaime: Je vais soulever mon... Je sais qu'il n'y a pas de
privilège ici. Je m'excuse. Je voudrais préciser. Vous voulez me
faire dire toutes espèces de choses au sujet de M. Pouliot, depuis hier
soir. C'est votre deuxième tentative, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Et ce ne sera pas la dernière. Aussi longtemps
que M. Pouliot ne sera pas entendu ici.
M. Duhaime: Vous ferez les tentatives que vous voudrez, mais vous
ne me mettrez pas dans la bouche des mots que je n'ai jamais prononcés
ni même pensés à l'endroit de M. Pouliot.
M. Lalonde: Précisez.
M. Duhaime: Je vais préciser que, quand je parle d'un
bénévole au service du Parti libéral du Québec, je
parle de M. Yvan Latouche...
M. Lalonde: Ah bon!
M. Gratton: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant!
M. Duhaime: Et ce que je viens de dire, M. le
Président...
Une voix: Vrai ou faux?
M. Duhaime: ...n'étant pas de la région de
Gatineau, mais étant député de Saint-Maurice, à
l'ajournement, si un journaliste me demande de répéter en dehors
de l'Assemblée ce que je viens de dire, je vais le
répéter. (10 h 30)
Le Président (M. Jolivet): Juste une chose que je voudrais
bien établir. On a commencé par dire que nous avions une
quinzaine de minutes de retard. Nous sommes en train d'en ajouter une quinzaine
ou une vingtaine d'autres. Si on ne règle pas le problème
à savoir si on veut reprendre le débat... Je vous dis que je n'en
ai pas l'intention et, à ce moment-là, je l'arrêterai. Si
on a l'intention de proposer une motion, je suis dans l'obligation d'abord de
considérer sa recevabilité et, si elle est recevable, de la faire
discuter. Je n'ai aucunement l'intention d'aller plus loin ce matin. Si on ne
veut pas cesser, je ferai moi-même cesser ce débat qui ne doit pas
avoir lieu ce matin puisque j'ai, dès le départ, mentionné
que je voudrais avoir une motion pour qu'on puisse continuer.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...c'est justement pour éviter de passer deux
heures sur une motion à tenter de convaincre le ministre que je pense
prendre quelques minutes pour lui poser des questions. Je voudrais, si cela est
possible, trouver un moyen de régler ces problèmes. Il y a le
problème de comprendre ce que M. Latouche fait dans ce dossier.
Or, c'est l'article du 17 mars lui-même qui l'implique dans une
réunion du 16 février avec Me Yves Gauthier et Me Jasmin au
bureau du premier ministre. Cela semble tellement important que le premier
ministre lui-même, dans sa réponse du 18 mars, y a fait
référence. On a entendu le cousin ou enfin l'autre Latouche, M.
Daniel Latouche, ici, à sa demande. On l'a entendu rapidement parce
qu'il s'en allait en Europe pour quelques semaines.
M. Duhaime: À votre demande.
M. Lalonde: Oui, oui, à sa demande à lui. Je n'ai
fait que transmettre sa demande à la commission. On n'a qu'une partie de
l'histoire. Il y a une réunion du 16 février à laquelle M.
Latouche a participé et qui est directement reliée, selon
l'article du 17 mars, au règlement de la Baie-James parce qu'il y aurait
eu un échange de documents entre Mes Gauthier et Jasmin et M. Latouche.
Que voulez-vous de plus comme
lien? En ce qui concerne M. Pouliot, avec qui M. Pouliot a-t-il des
comptes à régler? Certainement pas avec nous. Si je dis au
ministre que M. Pouliot peut nous donner des renseignements - selon ce qu'on
sait - sur l'exécution du mandat de Me Jasmin, qu'il a eu des
communications avec Me Jasmin, est-ce que ce n'est pas suffisant? Il
était un officier supérieur - pas au même poste que
maintenant - de ce syndicat, défendeur dans la cause. Quel lien doit-on
avoir de plus pour venir témoigner?
Je rappelle au ministre qu'il disait, il y a quelques semaines, que
même les personnes qui n'ont pas été convoquées
n'avaient qu'à communiquer avec le secrétariat de la commission
de l'énergie et des ressources et faire connaître leur nom et leur
identité -je pense que je pourrai parler avec mon collègue de
l'Opposition - et d'où que viennent ces personnes, si son
témoignage peut éclairer les membres de cette commission...
Comment, avant de les entendre, peut-on décider... Le ministre a
déjà été avocat. Comment peut-il d'avance dire ce
qu'un témoin va dire, comment peut-il d'avance dire ce que le
témoin dirait et affirmer que son témoignage n'est pas pertinent
avant de l'avoir entendu? C'est complètement... C'est une charade de la
justice.
Le Président (M. Jolivet): Ceci étant dit, chacun
ayant eu le temps et l'occasion de vouloir se convaincre, une chose est
certaine, c'est que je dois constater qu'il n'y a pas entente. À partir
de maintenant, je n'accepterai pas autre chose que des motions si on veut faire
entendre des personnes.
M. Lalonde: Vous allez en avoir.
Le Président (M. Jolivet): L'autre question que je
voudrais régler: Le ministre a fait mention d'une possibilité
d'aller à 13 h 15. Je veux savoir...
Une voix: On peut aller à 13 h 30, M. le
Président.
M. Lalonde: II n'en est pas question.
Le Président (M. Jolivet): Il n'en est pas question?
M. Gratton: M. le Président, sur cette question...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gatineau sur cette question, mais je veux simplement dire une chose, c'est que,
comme je n'ai pas le consentement, je n'ai pas l'intention d'aller plus loin
non plus.
M. Gratton: Non, mais...
Le Président (M. Jolivet): Quant à moi, cela
me...
M. Gratton: C'est une question de règlement, M. le
Président, que je soulève.
Le Président (M. Jolivet): Question de règlement,
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: Parce que le ministre et vous-même avez
parlé d'un retard de quinze minutes, qui est maintenant rendu à
trente minutes, parce qu'on a le malheur de ce côté-ci de vouloir
obtenir que certains témoins viennent témoigner pour
éclairer la commission... M. le Président, il ne s'agit pas de
retard...
M. Rodrigue: Question de règlement, M. le
Président.
Une voix: C'est une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
pense que je vais régler ce problème assez rapidement.
Une voix: Très bien...
Le Président (M. Jolivet): Effectivement, de part et
d'autre, nous avons commencé à 10 h 15. Pour moi, c'est
déjà un retard comme président.
Une voix: Le ministre....
Le Président (M. Jolivet): J'étais ici à 9 h
55 pour commencer à 10 heures comme à chaque fois. Je suis
toujours au moins cinq minutes à l'avance ici. Les gens peuvent en
témoigner. La deuxième chose est que, vu qu'il n'y a pas de
consentement... Je dois vous dire que, s'il y avait eu consentement, j'en
aurais quand même fait une question personnelle puisque, comme je suis
député d'un comté et que je dois me rendre au
Lac-Édouard, au bout de mon comté, à quatre heures et
demie d'automobile, j'aurais eu l'occasion de vous demander de terminer
à 13 heures quand même. Je vous remercie beaucoup...
M. Lalonde: C'est pour des raisons similaires...
Le Président (M. Jolivet): Un peu de...
M. Lalonde: ...que nous ne pouvons accepter d'aller
au-delà de 13 heures, parce que nous avons tous des engagements dans nos
comtés.
M. Rodrigue: M. le Président, la Sûreté du
Québec étant nolisée, ils vont sûrement vous
surveiller sur les routes.
Le Président (M. Jolivet): Ils sont nolisés, mais
je dois vous dire que, malheureusement ou heureusement - je pense plutôt
heureusement - on n'a aucun droit, que ce soit un député, un
ministre ou un autre, d'enfreindre les lois. En conséquence, même
si la Sûreté du Québec était nolisée, si nous
dépassions la vitesse prévue, nous serions
arrêtés.
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre, sur quelle
question?
M. Duhaime: Je voudrais présenter mes excuses, à
vous-même et à mes collègues membres de cette commission.
J'ai effectivement été retardé de quinze minutes ce matin,
mais, si je me souviens bien, le député de Marguerite-Bourgeoys a
retardé les travaux de la commission hier pendant une demi-heure...
Le Président (M. Jolivet): Mais, M. le ministre...
M. Duhaime: ...parce qu'il avait un débat de
procédure à l'Assemblée nationale...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, M. le ministre.
Je vais vous arrêter.
M. Duhaime: Je ne lui en ai pas fait un blâme.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, M. le
ministre.
M. Duhaime: Je n'ai blâmé personne.
Le Président (M. Jolivet): Je vais vous arrêter.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vais prendre
votre défense...
M. Lalonde: Question...
Le Président (M. Jolivet): ...pour dire que la
décision appartenait à l'Assemblée nationale. Il y avait
des discussions et le leader de l'Opposition... Oui, mais,
indépendamment de cela, je ne pense pas qu'on doive s'accuser
mutuellement des retards. Il y a eu effectivement des retards et, en
conséquence, tout ce que j'ai à dire, c'est: Procédons
immédiatement.
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: J'avais commencé à intervenir sur une
question de règlement. On a qualifié de retard dans les travaux
de la commission la discussion qui dure maintenant depuis 20 minutes, à
savoir si on pourra entendre M. Pouliot...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gatineau, je vous arrête immédiatement. Si j'ai employé le
mot "retard", ce n'était pas dans le but de dire que nous étions
en retard dans nos travaux, mais que nous étions en retard pour une
chose, celle d'entendre le témoin en réponse aux questions qu'on
lui a posées. Donc, le mot "retard" ne voulait pas dire que
c'était inutile, ce que nous avons fait. Je pense que c'est plus clair
ainsi.
M. Gratton: Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
Témoignages M. Rosaire Beaulé
(suite)
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Me Beaulé, vous
nous avez dit hier qu'au mois d'août, il y a eu une rencontre avec...
M. Laplante: ...la vérité.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député, je ne veux pas vous interrompre, mais je demanderais au
député de Bourassa de nous permettre de bien fonctionner ce
matin.
M. Laplante: ...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
j'entends des choses de part et d'autre qui ne sont pas enregistrées,
j'en conviens, mais j'ai besoin d'avoir la collaboration de chacun.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je vous remercie de votre
intervention pour protéger mon droit de parole et je voudrais dire, par
votre entremise, au député de Bourassa que...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, ne
commencez pas parce que vous allez m'enlever la collaboration que j'ai
demandée.
M. Ciaccia: Très bien, c'est seulement que...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais seulement l'assurer que cela ne changera
pas les questions que je vais poser et que cela ne m'énervera pas du
tout. Vous n'êtes pas énervant du tout, vous êtes fatigant,
par exemple.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, je dois vous
rappeler que nous sommes rendus au vendredi matin. Hier soir, je pensais
déjà
que c'était vendredi matin.
M. Beaulé (Rosaire): M. le Président, vous
m'invitez pratiquement à dire quelque chose. Je ne voudrais pas abuser
non plus, mais je pensais aux rendez-vous que j'ai avec des clients mardi
matin. Je ne sais pas si le député de Mont-Royal accepterait de
me remplacer ou si mes clients seraient d'accord pour qu'il me remplace, mais
j'ai un ordre du jour aussi pour mardi et j'ai des obligations
professionnelles.
Le Président (M. Jolivet): Maintenant, soyons
sérieux une fois que les taquineries sont faites. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Alors, recommençons. Me Beaulé, vous
nous avez informés qu'au mois d'août, il y a eu une rencontre au
bureau du ministre du Travail, M. Pierre-Marc Johnson, avec vos clients. Je
crois que Me Jasmin était présent à cette réunion.
Je crois aussi que M. Yves Gauthier était aussi présent à
cette réunion.
M. Beaulé: ...
M. Ciaccia: Oui, M. Yves Gauthier, mais, à ce
moment-là, M. Yves Gauthier était tuteur du local 791, il
n'était pas encore conseiller, attaché politique au bureau du
premier ministre. Cela s'est produit au mois d'août. Vos clients ont cru
assez important de venir personnellement de Washington pour rencontrer le
ministre du Travail.
Le 1er décembre, vous avez remis à Québec, je
crois, une copie de la contestation de la défense de la cause à
Jean-Roch Boivin du bureau du premier ministre. On sait que, le 11
décembre, vous avez eu une autre rencontre avec Jean-Roch Boivin, cette
fois-ci à Montréal, au bureau du premier ministre. Vous avez
discuté avec M. Boivin de votre contestation, d'après ce que vous
nous avez dit hier. On sait aussi qu'il y a eu d'autres rencontres avec
Jean-Roch Boivin le 15 janvier, le 19 janvier et le 2 février. J'ai
noté, dans vos réponses d'hier, dans la cassette 887, page 1:
"L'attitude de M. Jean-Roch Boivin, du 1er décembre 1978 jusqu'au
début de février 1979, a été d'écouter et de
me dire qu'il allait transmettre les renseignements, les documents que je lui
faisais parvenir à qui de droit." Est-ce que vous pouvez nous informer
qui est la personne à qui il fait référence lorsque qu'il
dit "à qui de droit"?
M. Beaulé: M. le Président, c'est M.
Boivin qui a dit qu'il transmettrait les renseignements et les documents
à qui de droit, je ne peux pas répondre pour lui.
M. Ciaccia: À cette réunion, lorsqu'il vous a dit:
Je remettrai cela à qui de droit, à qui pensiez-vous qu'il allait
le remettre?
M. Beaulé: Je ne me souviens pas à qui je pensais.
En réalité, M. le Président, je crois que ces questions
devraient s'adresser à la personne qui a prononcé les paroles que
l'on cite.
M. Ciaccia: Mais vous, est-ce que vous lui aviez demandé
qui était "à qui de droit"?
M. Beaulé: D'aucune façon.
M. Ciaccia: Vous avez seulement laissé passer "à
qui de droit" sans soulever aucune question?
M. Beaulé: Aucune question, M. le Président.
M. Ciaccia: Vous ne pouvez pas nous dire à qui, dans votre
esprit, M. Jean-Roch Boivin allait remettre ces documents?
M. Beaulé: Je peux toujours faire des hypothèses,
M. le Président, mais je ne crois pas que cela avancerait les travaux de
la commission.
M. Ciaccia: Mais vous faisiez des représentations pour vos
clients, à ce moment, des États-Unis, vous saviez sûrement
que cela ne pouvait pas rester strictement dans le bureau de Jean-Roch Boivin;
il fallait que cela aille quelque part, les documents et les
représentations que vous faisiez. À qui cela devait-il aller?
M. Beaulé: Je pense, M. le Président, que le
député me pose une question où il essaie de savoir
indirectement ce qu'il m'a déjà demandé tout à
l'heure quand il m'a demandé: À qui M. Boivin se
référait-il quand il a dit "à qui de droit"? Je soutiens
que cette question devrait être posée à M. Boivin. On
revient indirectement avec la même question, M. le Président.
M. Ciaccia: Non, je ne reviens pas indirectement, je vous pose
une autre question. Ce n'est pas une dispute que j'ai avec vous, ce n'est pas
du tout cela. Mais vous, vous dites que vous faisiez des
représentations, c'est-à-dire des démarches auprès
de Jean-Roch Boivin. Vous vous entreteniez avec lui. Vous aviez sûrement
quelque chose à l'esprit. Vous vouliez que la cause soit retirée.
Vous faisiez des représentations pour vos clients. À qui
pensez-vous que M. Jean-Roch Boivin aurait transmis ces représentations
que vous faisiez pour le sensibiliser à votre point de vue? À qui
aurait-il transmis ces représentations et à qui aurait-il
transmis les documents que vous lui avez fait parvenir?
(10 h 45)
M. Beaulé: M. le Président, je vais invoquer
l'article 4 de la Charte des droits et libertés. Je me
réfère à l'article publié ce matin dans le journal
La Presse du 29 avril 1983 par M. Louis Falardeau où il écrit,
sous le titre "Règlement hors cour du saccage de LG 2: L'avocat
Beaulé jure qu'il n'a pas négocié avec Boivin". Il
écrit, dans son article, à la deuxième colonne en haut:
"Interrogé de façon très agressive par le
député libéral John Ciaccia qui se moquait de lui et
multipliait les allusions susceptibles de miner sa crédibilité,
Me Beaulé n'a pas modifié sa version des faits..." M. le
Président, ce n'est donc pas seulement une perception personnelle que
j'ai selon laquelle mes droits, en vertu de l'article 4, sont violés. Je
ne veux pas entreprendre de débat avec la personne qui m'interroge. Je
pense, d'autre part, que j'ai des droits: j'ai droit au respect de ma
dignité et à ma réputation. En ce qui concerne la question
qui m'est posée, j'y ai répondu trois fois, je crois. M. Boivin a
dit qu'il allait transmettre ces renseignements, ces documents à qui de
droit et je soutiens avec respect que la question devrait lui être
posée. C'est lui qui a prononcé les mots "à qui de droit".
Ce n'est pas à moi à faire des hypothèses, car ce seraient
uniquement des hypothèses.
M. Ciaccia: M. le Président, puisqu'on a invoqué
l'article de la Presse et qu'on s'est référé à mon
comportement, je ne peux pas répondre sur l'impression que M. Falardeau
a de mes questions. C'est son privilège, il est journaliste, il est
libre d'interpréter à sa façon la manière avec
laquelle je pose mes questions. Quant à moi, je peux vous dire que j'ai
posé mes questions de la façon la plus modérée
possible, d'un ton assez calme. Si, devant le refus de répondre à
mes questions, je continue les mêmes questions sous une autre forme,
c'est peut-être que j'essaie d'élucider d'autres réponses.
Je vous dis très respectueusement, M. le Président, que je ne
l'ai pas fait d'une façon agressive, je l'ai fait dans le but d'essayer
d'en arriver à la vérité.
Je peux vous assurer, M. Beaulé, que je ne me moque pas du tout
de vos réponses quand vous invoquez la Charte des droits et
libertés de la personne ou quelque autre réponse que vous
pourriez me donner.
Quant à la question de ce matin, de dire à qui de
droit...
Le Président (M. Jolivet): ...un instant... M. Ciaccia:
Oui, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Je crois, sans vouloir entrer
dans le fond du débat, cependant, être juste envers
l'invité, quand vous parlez du refus de répondre aux questions.
Je pense que Me Beaulé a effectivement répondu à vos
questions. Je vous dis simplement que, vu qu'il est sous serment, je dois,
comme président de même que tous les membres de cette commission,
accepter qu'il dit la vérité. En conséquence, je voudrais,
quand bien même on voudrait revenir continuellement sur la même
question, vous faire aussi mention que Me Beaulé a le droit de dire
qu'il a déjà répondu à cette question puisque c'est
la même question qui, d'après lui, revient sous différentes
formes.
M. Ciaccia: Oui, M. le Président. Je voudrais clarifier ce
point-ci parce que je pense que cela peut survenir encore durant le cours des
questions que je vais poser ce matin. Libre à Me Beaulé de dire
qu'il ne veut pas que je pose indirectement une question à laquelle,
lui, a refusé de répondre directement. C'est
l'interprétation qu'il fait de mes questions. Ce n'était pas mon
intention de les poser indirectement. Mon intention, c'est que, si je vois que
M. Beaulé ne refuse pas nécessairement - parce qu'il donne une
réponse - mais ne se souvient pas ou me renvoie à un autre
témoin en disant de poser la question à Me Boivin, à ce
moment, je peux reposer la question pour essayer d'avoir une réponse de
lui sur certains faits, sur ce qu'il faisait, ce qu'il pensait, ce qui se
produisait à cette rencontre.
M. le Président, franchement, je ne ferais pas mon devoir de
parlementaire si, chaque fois que je pose une question, je tenais pour acquis
que j'accepte la réponse immédiatement sur la phrase que j'ai
posée. Quand je ne suis pas satisfait, j'essaie d'obtenir d'autres
informations. Je pense que c'est le but de cette commission parlementaire que
de chercher la vérité. On peut me dire: Je refuse de
répondre à la question, j'accepte cela. C'est le droit de Me
Beaulé de refuser. Moi aussi, j'ai des droits devant cette
commission...
Le Président (M. Jolivet): ...juste avant. Je comprends
votre position, M. le député. Vous savez aussi très bien
que, de mon côté, j'ai essayé de faire en sorte que toutes
les questions soient posées. Ce que j'essaie de dire est que j'ai voulu
protéger la part de l'invité qui est devant nous. C'est que,
à mon avis, à moins que mon jugement n'erre, l'invité que
l'on a devant nous a répondu aux questions. C'est possible que la
réponse qu'il vous a donnée ne vous satisfasse pas. Vous avez le
droit d'utiliser un autre moyen pour avoir une réponse que vous pensez
devoir avoir. Mais je pense qu'il ne faut pas harceler non plus quelqu'un qui,
en vertu de son serment, dit la vérité. Et si vous croyez qu'il
n'a pas dit la vérité, il y a d'autres moyens qui sont
prévus pour faire en sorte
que, s'il s'est parjuré ou s'il a menti à la commission,
ces moyens-là soient utilisés. Mais qu'on ne harcèle pas
l'invité.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je pense qu'il faut clarifier une chose ici. Le
témoin, que vous appelez invité, est ici en vertu de la Loi sur
l'Assemblée nationale. Il est contraignable en vertu d'un article de la
loi. Il a prêté serment. Je pense qu'il faut bien se rendre compte
qu'il doit répondre aux questions et non pas argumenter avec celui qui
le questionne. S'il n'a pas de réponse, d'accord, il le dit. Mais je
pense que le témoin doit s'attacher à répondre
concrètement, expressément, à la question qui lui est
posée et non pas argumenter et discuter avec le député qui
pose des questions.
En ce qui concerne le serment, c'est-à-dire vos propos à
savoir que, étant donné que le témoin est sous serment, la
commission doit tenir pour acquis que chacun des mots qu'il dit est la
vérité, il y a aussi une distinction à apporter. Si
c'était comme cela devant les cours de justice, il y aurait beaucoup de
vérité à chaque procès. Et cela ne se
réfère pas du tout au témoignage de Me Beaulé,
c'est strictement en général. Souvent la vérité, on
la trouve petit à petit. Et n'est pas nécessairement un parjure
une réponse qui n'est pas exacte. Elle peut être
incomplète. Et d'autres questions sur le même point peuvent lui
permettre de compléter sa réponse. Alors, cela, je voulais...
Parce que, plusieurs fois, on a répété: Puisque le
témoin a dit ceci, il faut finir d'en parler et passer à autre
chose. Et ce que vous appelez harcèlement - vous avez vous-même
dit de ne pas harceler le témoin, l'invité, pour reprendre vos
paroles - il faut faire aussi une distinction... J'aimerais savoir de vous si
le fait de poser deux ou trois questions sur le même sujet, pour
être bien sûr d'avoir fait le tour de la question et d'avoir permis
au témoin de compléter ses réponses, constitue du
harcèlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Je suis d'accord avec le député de
Marguerite-Bourgeoys lorsqu'il dit qu'un invité devant notre commission
doit répondre aux questions. Cependant, il a à répondre
aux questions qui portent sur des choses dont il a une connaissance
personnelle, premièrement. Et, deuxièmement, je ne crois pas
qu'on puisse exiger de Me Beaulé, ou de toute autre personne qui
pourrait être appelée devant la commission, qu'il rende un
témoignage à la place de quelqu'un d'autre.
M. Lalonde: Parfait.
M. Duhaime: On s'entend là-dessus? Bon, alors si on
s'entend là-dessus et que vous l'acceptez, je pense qu'on peut
continuer.
M. Lalonde: D'accord.
M. Duhaime: Cela va régler la dernière question que
vous avez posée à trois reprises et à laquelle M. Boivin
serait peut-être bien placé pour répondre.
Le Président (M. Jolivet): Pour bien nous entendre,
l'invité - peu importe que vous l'appeliez témoin - ne peut, en
aucune façon, refuser d'obéir à un ordre de
l'Assemblée et l'ordre de l'Assemblée, c'est, ici, de dire toute
la vérité des faits qu'il connaît sur le mandat qui nous
est confié. La seule chose que je voulais souligner quand j'ai
parlé de harcèlement, c'est que, quand l'invité a
répondu à trois ou même à quatre occasions à
une question qui lui est posée et qu'il répète toujours la
même réponse, à ce moment-là - surtout quand il
n'est pas au courant d'un fait, comme on vient de le dire à ma gauche et
à ma droite - il est normal qu'on la pose à la personne qui devra
ou qui a déjà témoigné et qu'on pourra faire
revenir, s'il le faut. Je ne voudrais pas qu'on fasse en sorte, même si
cela fait quatre fois qu'on obtient toujours la même réponse, de
continuer à poser la même question sous différents angles,
question qui, en fait, est toujours la même.
M. Lalonde: M. le Président, je m'excuse d'insister, parce
que...
Le Président (M. Jolivet): Insistez, insistez!
M. Lalonde: C'est très important. Je vais relire en bref
la transcription, mais je ne prétends pas répéter les
questions du député de Mont-Royal. Je les ai
écoutées, mais je n'ai pas la transcription devant moi. Par
exemple, si on dit à un témoin: M. Boivin vous a dit qu'il allait
en parler avec qui de droit, on peut d'abord lui demander: Est-ce qu'il vous a
dit qui était "qui de droit"? Suivant les réponses, est-ce que
vous vous êtes demandé qui était "qui de droit"? Est-ce que
vous lui avez demandé qui était "qui de droit"? On peut donc
poser quatre ou cinq questions qui ne sont pas les mêmes. Qui ne sont pas
du tout les mêmes, mais qui sont de nature à éclairer pour
savoir si, pendant cette conversation, on n'a pas effectivement
identifié qui était "qui de droit".
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. On
va reformuler la question. Je ne demande pas à M. Beaulé
de répondre pour M. Boivin, mais, quand vous avez transmis ces
documents, à qui vouliez-vous que ces documents soient transmis et cette
sensibilisation faite?
M. Beaulé: J'ai déjà répondu, M. le
Président, à plusieurs reprises que je voulais sensibiliser M.
Boivin autant que c'était nécessaire.
M. Ciaccia: Bien. Vous allez m'excuser, M. le Président.
J'ai entendu la réponse du témoin. Je n'en suis pas satisfait, il
n'a pas répondu à ma question. Je vais la reposer: À qui
vouliez-vous que ces documents soient transmis et cette sensibilisation
faite?
M. Beaulé: M. le Président, j'ai répondu
à plusieurs reprises depuis hier à cette question en disant que
je voulais sensibiliser M. Boivin, pour autant que c'était
nécessaire, aux implications sociales de ce litige, le sensibiliser au
fait que l'union internationale a été poursuivie abusivement et
aussi indiquer que ce procès pouvait avoir des conséquences
internationales, du moins en ce qui concerne nos relations avec les
États-Unis ou avec les syndicats américains. J'ai
déjà répondu à ces questions. Je n'ai rien d'autre
à ajouter, M. le Président.
M. Ciaccia: Pourquoi, M. Beaulé, vouliez-vous sensibiliser
M. Boivin particulièrement et pas d'autres personnes?
M. Beaulé: En fait, si le député de
Mont-Royal avait été une personne en autorité à
l'époque, je l'aurais sûrement vu ou j'aurais tenté de le
voir.
M. Ciaccia: Ah! une personne en autorité. C'est parce
qu'il était une personne en autorité.
M. Beaulé: Oui, je l'ai dit. M. le Président, je
vous réfère à la dernière page de mon intervention
d'hier, à la page 18, ma déclaration du début. "À
la lumière des faits qui précèdent, on comprendra que j'ai
fait appel à la droiture, à la sagesse et au fair-play des
personnes en autorité et des membres du conseil d'administration de la
SEBJ, afin que cessât au plus tôt ce procès long et
coûteux non seulement pour la SEBJ, mais également pour
l'International Union of Operating Engineers."
Quant à moi, je considérais que le canal normal, pour
sensibiliser les personnes en autorité, était de m'adresser au
directeur du cabinet du premier ministre.
M. Ciaccia: Alors, c'était le premier ministre, si je
comprends bien votre réponse.
M. Beaulé: Je m'excuse, M. le Président.
J'étais à me verser un verre d'eau. Ma réponse
n'était pas le premier ministre. Ma réponse était...
M. Ciaccia: Le bureau du premier ministre.
M. Beaulé: ...de sensibiliser M. Boivin, directeur du
cabinet du premier ministre.
M. Ciaccia: Parce qu'il était en autorité et,
évidemment, M. Boivin devait communiquer avec le premier ministre.
Autrement, les personnes en autorité... Le conseil d'administration
était en autorité, Claude Laliberté était en
autorité, Roland Giroux, Robert Boyd. C'étaient toutes des
personnes en autorité, mais ce n'est pas à elles que vous avez
transmis vos documents. Ce n'est pas elles que vous avez voulu sensibiliser.
C'était Me Jean-Roch Boivin, du bureau du premier ministre, que vous
vouliez sensibiliser. C'est exact?
M. Beaulé: Je pense que j'ai répondu à la
question à plusieurs reprises, M. le Président.
M. Ciaccia: C'est exact. Le premier ministre est l'actionnaire
principal. Il représente la population du Québec. Il est
l'actionnaire principal de la Société d'énergie de la Baie
James.
M. Duhaime: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (11 heures)
M. Duhaime: Je voudrais invoquer - je n'ai pas le texte avec moi
- que je suis aujourd'hui responsable de cette société
d'État et je peux vous dire que ce n'est pas le premier ministre qui
détient les actions de ces sociétés d'État, que ce
soit HydroQuébec ou la SEBJ, mais le ministre des Finances au nom du
gouvernement du Québec. C'est marqué dans la loi.
M. Lalonde: Mais le chef du gouvernement, M. le Président,
est le premier ministre, alors c'est lui qui représente les
actionnaires.
M. Duhaime: Oui.
M. Ciaccia: C'est le représentant des actionnaires et les
actionnaires d'Hydro-Québec et de la SEBJ, c'est la population du
Québec. Le premier ministre est le chef d'État, c'est donc lui
qui représente les actionnaires de la SEBJ et d'Hydro-Québec,
même si vous êtes le ministre responsable de cette
société d'État.
Dans les règles d'éthique de la
profession du barreau, est-ce que c'est conforme à nos
règles d'éthique qu'un avocat de la partie défenderesse
aille voir et communique avec l'actionnaire principal du demandeur?
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, en vous
rappelant l'article 168 de notre règlement; c'est une question
d'opinion.
M. Beaulé: Si on se replace en 1978, puisque ces
événements se sont produits en 1978 et en 1979, je suis d'avis
qu'à l'époque, la SEBJ était une filiale
d'Hydro-Québec, qu'elle avait son conseil d'administration qui prenait
ses décisions de façon autonome et libre et je n'accepte pas le
postulat de la personne qui m'interroge, à savoir que M.
Lévesque, que le premier ministre, était l'actionnaire principal
de la SEBJ. Je n'ai eu aucune rencontre avec le conseil d'administration de la
SEBJ ou avec l'un ou l'autre de ses membres et je ne trouve rien de
dérogatoire dans ma démarche auprès du directeur du
cabinet du premier ministre. Je veux citer ici une déclaration
malheureusement, je ne suis pas équipé comme vous l'êtes -
de M. Aquin le 22 avril 1983. Il a dit qu'une telle démarche, et je
cite: "ce n'est pas usuel, mais ce n'est pas critiquable".
Je maintiens cependant que c'est le droit de tout citoyen, de tout
avocat, de tout représentant d'organisme de s'adresser aux personnes en
autorité pour obtenir ce que j'appelle un remède à
certains torts. Dans la Charte des droits et libertés de la personne, on
dit qu'un citoyen peut s'adresser par pétition à
l'Assemblée nationale. Je pense qu'un citoyen, son représentant
peut s'adresser au directeur du cabinet du premier ministre pour soumettre une
situation de fait, en l'occurrence une action qui était abusive, et
faire des représentations dans le cours normal des choses en pleine
lumière. J'ai prévenu, au cours du mois de janvier - à une
date que je serais incapable de préciser, M. Aquin croit que c'est vers
le 26 janvier -mon confrère Me Aquin que j'avais de tels contacts ou
communications - le mot serait plus juste - avec le directeur du cabinet du
premier ministre. Pour moi, cette poursuite n'est pas du tout de la même
nature qu'une poursuite de nature privée. Elle avait des
répercussions tant à l'échelle des relations
ouvrières patronales qu'à celles de nos relations avec
l'étranger et en particulier avec les États-Unis et les syndicats
américains. Je pense que je n'ai rien d'autre à ajouter.
M. Ciaccia: Une remarque seulement. Le premier ministre est le
représentant des actionnaires de la SEBJ et d'Hydro-Québec et les
nominations au conseil d'administration se font par l'entremise du bureau du
premier ministre. Donc, en plus d'avoir un contrôle effectif, il est
aussi le représentant et le chef d'Etat.
M. Duhaime: ...ce point-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Duhaime: Depuis l'élection de 1981, dans les jours qui
ont suivi, le premier ministre m'a proposé le portefeuille de
l'Énergie et des Ressources et j'ai accepté avec plaisir. Depuis
que je suis en fonction à ce ministère, plusieurs nominations ont
été faites à Hydro-Québec et à
différents conseils d'administration des sept sociétés
d'État dont j'ai la tutelle suivant la loi. Je voudrais dire à la
commission que les décisions ne sont pas prises au bureau du premier
ministre, mais elles sont prises au Conseil des ministres comme toute
décision que le gouvernement prend sur des arrêtés en
conseil et, comme vous le savez, il n'y a jamais de vote dans un Conseil des
ministres. Je ne sais pas comment les libéraux fonctionnaient,
mais, chez nous, il n'y a jamais eu un vote, c'est le consensus et cela a
toujours été la règle.
M. Ciaccia: M. le Président, je comprends les remarques du
ministre disant que, depuis 1981, c'est lui qui a la responsabilité de
certaines sociétés d'État, mais je voudrais lui rappeler
qu'avant 1981, il y a eu des nominations et même, d'après le
témoignage de plusieurs de ceux qui ont eu ces nominations à la
SEBJ après la loi 41, ils ont été appelés
directement par le premier ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je vais préciser
davantage. Depuis l'élection de 1976, à la fin de novembre - je
crois que c'est le 29; il faudrait que je vérifie à quel moment
j'ai prêté serment à Sa Majesté devant le
lieutenant-gouverneur - je siège au Conseil des ministres depuis
bientôt six ans et cela a toujours été la même
procédure. J'ai occupé le portefeuille de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme; j'avais la responsabilité de SIDBEC et de la
SGF, entre autres sociétés d'État, avec six ou sept autres
sociétés et, chaque fois qu'il y a eu des nominations à
des conseils d'administration, les décisions ont été
prises au Conseil des ministres exactement de la façon dont je l'ai
expliquée tantôt. Chaque fois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Bourbeau: M. le Président, une question de
règlement. Je voudrais rectifier une chose.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Je n'ai pas l'occasion d'intervenir souvent, M. le
Président, mais je voudrais rectifier une chose. Lors de son
témoignage devant la commission, M. Laliberté, président
de la SEBJ, a dit textuellement que sa nomination avait été faite
par le premier ministre et je vous réfère au journal des
Débats, M. le Président.
M. Duhaime: Vous lirez l'arrêté en conseil. Cela va
répondre à votre question.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Bourbeau: Les mots ne veulent plus dire ce qu'ils veulent
dire.
M. Ciaccia: Juste un autre point sur les représentations
que vous avez faites, les discussions que vous avez eues avec M. Jean-Roch
Boivin au bureau du premier ministre. Vous avez dit hier que vous aviez un
mandat de vos clients américains. Est-ce que ce serait possible de
communiquer une copie de ce mandat aux membres de la commission?
M. Beaulé: Je l'ai déjà offert hier; alors,
il ne fait aucun doute que ma réponse est oui.
Le Président (M. Jolivet): Donc, quelqu'un du
Secrétariat des commissions parlementaires. M. le député
de Mont-Royal, vous pouvez continuer, le mandat va être donné.
M. Beaulé: Je soutiens, M. le Président, qu'en
vertu de nos lois, un avocat est cru dans sa déclaration quant à
son mandat; il n'est pas obligé de fournir la preuve de l'écrit,
mais je vais la fournir.
M. Ciaccia: M. le Président, encore une fois, pour qu'il
n'y ait pas de mésentente, soit de la part de la présidence, soit
de la part de Me Beaulé ou soit de la part des journalistes, hier, Me
Beaulé nous a dit qu'il avait un mandat que je ne conteste pas. La
raison pour laquelle je demande de prendre connaissance...
Le Président (M. Jolivet): II a même offert hier de
le donner, mais personne ne l'a demandé.
M. Ciaccia: Oui, oui. C'est pour cela que je le demande
aujourd'hui. Je veux voir les détails du mandat.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Ciaccia: Je n'ai jamais eu la communication des
détails. C'est la seule raison pour laquelle je voudrais prendre
connaissance du mandat.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Ciaccia: Cela pourrait m'inspirer dans certaines
questions.
Une voix: Vous avez besoin d'inspiration.
Une voix: Je crois que vous en avez grandement besoin.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Me Beaulé, le 13 janvier, Me Gadbois, du
contentieux de la SEBJ, informe Me Jean-Paul Cardinal, un des procureurs de la
SEBJ, qu'il y a eu une demande d'ajournement du procès qui devait
commencer le 15 janvier. Si vous vous rappelez, seulement pour nous situer, le
procès devait commencer le 15 janvier entre les demandeurs et les
défendeurs, toutes les parties, et le 13 janvier, Me Gadbois communique
avec Me Cardinal pour lui faire part qu'il a eu une demande d'ajournement.
Avez-vous été consulté pour la demande d'ajournement?
M. Beaulé: M. le Président, consulté par
qui?
M. Ciaccia: Ce n'est pas à moi à le savoir, c'est
à vous. Je vous demande si vous avez été
consulté.
M. Beaulé: M. le Président, on parle de Me Gadbois.
Je n'ai eu aucune communication avec Me Gadbois. J'ajoute que je n'ai fait
aucune démarche auprès de Me Gadbois ou auprès du bureau
Geoffrion et Prud'homme pour obtenir un ajournement le 15 janvier.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas été consulté par
Me Gadbois. Je ne veux pas argumenter encore une fois, mais, lorsque je vous ai
demandé: Avez-vous été consulté? Vous m'avez dit:
Par qui? Ou vous avez été consulté ou vous ne l'avez pas
été. Est-ce que quelqu'un a discuté avec vous de la
demande d'ajournement possible?
M. Beaulé: Me Jasmin m'a mis au courant qu'il voulait
rejoindre les procureurs de la SEBJ pour obtenir un ajournement de la cause, le
15 janvier, pour éviter que la guerre ne commence, comme je l'ai dit
hier, dans le but d'en arriver, de concert avec les avocats de la SEBJ, si
possible et avec l'accord évidemment de la SEBJ, cela
supposait cela, à un règlement de la cause.
M. Ciaccia: Vous ne savez pas pourquoi. Normalement, lorsqu'on
veut un ajournement - vous avez de l'expérience dans la pratique - on
appelle la partie adverse et on dit: Écoutez, est-ce qu'on peut ajourner
le procès? On peut demander un ajournement. Est-ce que vous savez
pourquoi, au lieu d'appeler les procureurs du dossier, Mes Geoffrion et
Prud'homme, on a appelé Me Gadbois qui était le chef du
contentieux de la SEBJ?
M. Beaulé: M. le Président, pour être bien
clair, d'abord, Me Gadbois, même s'il est chef du contentieux de la SEBJ,
est également membre du barreau. Ensuite, j'étais informé
par Me Jasmin de son désir d'avoir un ajournement, en
réalité, de faire en sorte que le procès ne commence pas
le 15 janvier. Je ne sais pas à qui il s'est adressé. Est-ce
qu'il a tenté de rejoindre Me Aquin et qu'il n'a pu le rejoindre, ou Me
Jetté et qu'il n'a pu le rejoindre? Je ne sais absolument rien de ses
démarches. Mais votre question est: Est-ce que j'en ai été
informé? Oui, j'ai été informé par Me Jasmin qu'il
sollicitait un ajournement ou une remise de l'audition.
M. Ciaccia: Me Jasmin vous a-t-il communiqué pourquoi il
voulait un ajournement?
M. Beaulé: II ne l'a pas communiqué, mais je le
devinais. J'ai expliqué longuement hier que, lorsque la guerre commence,
c'est difficile de l'arrêter. (11 h 15)
M. Ciaccia: Alors, allons au 15 janvier. Le 15 janvier,
c'était le début du procès. Si je comprends bien, les
avocats sont à la cour, et Me Jasmin et vous-même vous dites
prêts à commencer des pourparlers de négociation. Je pense
que les procureurs de la SEBJ ont témoigné à cet
égard. Vous avez indiqué, le jour du procès, que vous
vouliez commencer des pourparlers de négociation. Vous auriez
communiqué cela aux procureurs. Mais les procureurs de la SEBJ vous ont
informé qu'eux, n'avaient pas de mandat de négocier et
procédaient au procès. Le même jour, vous êtes
allé au bureau de Jean-Roch Boivin, au bureau du premier ministre, avec
Me Michel Jasmin. Le 13 janvier, on demande l'ajournement, c'est refusé.
Le 15 janvier, on commence le procès, on demande de négocier,
c'est refusé. Le même jour, l'après-midi, vous et Me Jasmin
vous rendez au bureau du premier ministre. Est-ce que vous pourriez - je vais
vous poser la question avant - nous dire pourquoi vous êtes allés,
cette journée, au bureau de Jean-Roch Boivin?
M. Beaulé: M. le Président, les
préliminaires à la question ne sont pas exacts. Me Jasmin m'a
informé, le 12 ou le 13 janvier - je présume que c'est le 12
janvier, parce que j'ai passé la fin de semaine dans le Nord à
skier - qu'il croyait être dans l'intérêt de nos clients
d'obtenir un ajournement. Je l'ai dit tout à l'heure, je ne veux pas
revenir là-dessus. La demande d'ajournement n'a pas été
refusée selon les renseignements que j'ai ou plutôt à
partir des déclarations faites par Me Aquin. Le 15 au matin, il y a eu,
effectivement, devant l'honorable juge Bisson, une demande formelle
d'ajournement. Si je me souviens bien du témoignage de M. Aquin, les
procureurs de la SEBJ étaient prêts à y consentir ou y ont
consenti. Cependant, l'honorable juge Bisson a ordonné à la SEBJ
de procéder. Donc, soyons bien clairs, ce ne sont pas les procureurs de
la SEBJ qui ont refusé l'ajournement, c'est le président du
tribunal. Cela s'est passé le 15.
À l'heure du dîner, à la cafétéria,
cinquième étage du palais, j'ai vu Me Aquin, Me Gadbois - je
crois qu'il était là - et Me Cardinal. J'ai tenté de
savoir des avocats de la SEBJ s'ils avaient mandat de s'asseoir à une
table pour discuter des possibilités de régler hors cour ce
litige. M. Aquin a témoigné dans ce sens. Il m'a répondu
qu'il n'avait pas de mandat. Il a dit devant vous qu'il a
téléphoné à la SEBJ ou à Me Gadbois - c'est
cela? - et il est revenu en disant qu'il avait mandat d'écouter. Je
pense qu'il a très bien fourni la séquence des
événements. J'ai dit qu'un mandat d'écouter, pour moi,
n'était pas un mandat de négocier. Notre conversation s'est
terminée là-dessus. On a repris l'audition commencée le
matin.
En fin de journée, comme je l'ai fait, d'ailleurs, pendant tous
les jours d'audience -j'étais à la cour tous les jours durant
lesquels cette cause a été entendue devant l'honorable juge
Bisson - le 15 janvier, j'ai eu une brève rencontre avec Me Jasmin au
bureau de M. Boivin. J'ai déjà indiqué dans mon
témoignage - parce qu'on m'a posé la question, la question venait
du ministre - que nous avions informé M. Boivin du déroulement
des procédures de la journée purement et simplement. La rencontre
a duré 26 minutes, peut-être moins.
M. Ciaccia: Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous jugiez
nécessaire d'aller informer Jean-Roch Boivin du bureau du premier
ministre du déroulement de la journée? Quel était le but
de cela?
M. Beaulé: Je pense que cette démarche s'inscrit
logiquement dans la démarche de sensibilisation que j'ai entreprise
auprès de Me Boivin à compter du 1er décembre 1978. Je
n'ai rien d'autre à ajouter.
M. Ciaccia: Dans le processus de sensibilisation, quels arguments
additionnels aviez-vous communiqués à M. Jean-Roch Boivin cette
journée-là?
M. Beaulé: Aucun argument, M. le Président. Je l'ai
dit déjà deux fois, je le répète pour la
troisième fois. J'ai fait rapport à Me Boivin, en présence
de M. Jasmin, de la marche des procédures à la cour ce
jour-là.
M. Ciaccia: Alors, vous...
M. Beaulé: Cela a duré moins d'une demi-heure.
M. Ciaccia: Si je comprends bien, vous, le procureur d'un des
défendeurs durant le procès, vous avez jugé
nécessaire de retourner, la première journée du
procès, au bureau du premier ministre. Cela, après qu'on vous a
informé que M. Jean-Paul Cardinal a dit: Je n'ai pas l'instruction de
négocier, et il a appelé M. André Gadbois, et là il
a dit: Je peux écouter. Vous avez jugé nécessaire de
retourner au bureau de M. Jean-Roch Boivin.
M. Beaulé: J'ai jugé utile d'informer M. Boivin du
déroulement des procédures de la journée.
M. Ciaccia: Qu'avez-vous dit à M. Boivin?
M. Beaulé: Je lui ai fait un rapport du déroulement
des procédures de la journée.
M. Ciaccia: Qu'est-ce que M. Boivin vous a répondu?
M. Beaulé: À ma connaissance rien, sauf
d'écouter comme d'habitude. Je tiens à dire qu'il m'a
salué, il m'a invité à passer dans son bureau avec M.
Jasmin.
M. Ciaccia: II ne vous a fait aucun commentaire sur les propos
que vous lui avez faits.
M. Beaulé: J'ai informé M. Boivin du
déroulement des procédures de la journée.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez parlé du
règlement?
M. Beaulé: Pas ce jour-là.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas mentionné que vous aviez
demandé de négocier et que les autres avocats ont refusé
parce qu'ils n'avaient pas de mandat?
M. Beaulé: II m'apparaît bien clair, M. le
Président, qu'en faisant rapport de la journée, j'ai
sûrement indiqué - c'est une déduction - à M. Boivin
que les procureurs de la SEBJ, particulièrement M. Aquin, nous avaient
dit qu'ils n'avaient qu'un mandat, celui de nous écouter. J'ai
sûrement informé M. Boivin de cela et de la marche des
procédures de la journée.
M. Ciaccia: M. Boivin ne vous a fait aucun commentaire.
M. Beaulé: J'ai déjà répondu quatre
fois à cette question.
M. Ciaccia: Est-ce que M. Boivin a indiqué qu'il voulait
vous revoir à une autre réunion?
M. Beaulé: Absolument pas.
M. Ciaccia: II ne vous a pas dit non plus qu'il en ferait part
à qui de droit, à ce moment-là.
M. Beaulé: J'ai déjà répondu à
votre question en disant qu'il n'a pas fait de commentaire sur les choses qu'il
pouvait faire, qu'il allait faire ou qu'il devait faire.
M. Ciaccia: Est-ce que vous étiez au courant...
M. Beaulé: ...M. le Président, si vous me le
permettez. Après cette journée qui avait été assez
longue et laborieuse, j'avais simplement le goût d'aller prendre une
bière.
M. Ciaccia: Qu'est-ce que Me Jasmin a dit?
M. Beaulé: Je pense qu'il a été plutôt
silencieux. C'est moi qui ai fait le rapport. Dans la mesure où Me
Jasmin peut être silencieux.
M. Ciaccia: M. Jean-Roch Boivin aussi, apparemment. Le seul qui
ne parle pas, dit mon collègue en écoutant les réponses,
c'est M. Jean-Roch Boivin. Est-ce que vous étiez au courant que, le 12
janvier, juste avant la demande d'ajournement, Me Jasmin était au bureau
de M. Jean-Roch Boivin?
M. Beaulé: Pardonnez-moi, M. le Président, je n'ai
pas saisi la question.
M. Ciaccia: Est-ce que vous étiez au courant à ce
moment que, le 12 janvier, la journée avant que Me Gadbois ait
informé Me Cardinal d'une demande d'ajournement, Me Jasmin était
au bureau de M. Jean-Roch Boivin?
M. Beaulé: Ma réponse est non.
M. Ciaccia: Vous n'étiez pas au
courant.
M. Beaulé: J'étais très
intéressé à quitter rapidement Montréal pour aller
faire du ski de fond au Mont-Tremblant parce que je savais que la semaine qui
commençait allait être une semaine qui pouvait être
dure.
M. Ciaccia: Quand vous avez informé
Jean-Roch Boivin du déroulement de la journée, est-ce
qu'il vous a dit que lui suivrait cela?
M. Beaulé: M. le Président, j'ai déjà
répondu à la question.
M. Ciaccia: On va revoir un peu le déroulement des
événements. Alors, le 15 janvier, au début du
procès, vous vous rendez au bureau de Jean-Roch Boivin en
après-midi. Vous lui avez fait dire, le jour du procès, que
Geoffrion et Prud'homme n'avait pas le mandat de négocier. Ils ont fait
un appel à Me Gadbois et ils se sont fait dire qu'ils pouvaient
écouter. Et, le 17 janvier, M. Claude Laliberté demande à
ses avocats de rédiger un projet de règlement et de le
transmettre aux défendeurs.
La cause commence le 15. Pas de mandat de négocier. Mandat
d'écouter. Vous vous rendez au bureau de Jean-Roch Boivin le 17. Mais
Claude Laliberté vous a informé qu'il a demandé à
ses avocats de préparer un projet de règlement. Le 19 janvier,
vous vous rendez au bureau de Jean-Roch Boivin avec Me Michel Jasmin. Qui a
convoqué cette réunion?
M. Beaulé: Premièrement, M. le Président, je
ne connais d'aucune façon les instructions que le P.-D.G. de la SEBJ a
pu donner à Geoffrion et Prud'homme concernant la préparation
d'un projet de transaction qui aurait pu être discuté
ultérieurement. La seule connaissance que j'en aurais, M. le
Président, c'est celle que j'aurais acquise en écoutant les
témoignages ici, devant la commission. Deuxièmement, quant
à la réunion du 19 janvier 1979, j'ai déjà eu
l'occasion de m'expliquer à ce sujet, à deux ou trois reprises,
à savoir que MM. Woll et Fanning étaient présents,
étaient à Montréal, et qu'ils désiraient rencontrer
M. Boivin. J'ai sollicité cette entrevue et, effectivement, j'ai
passé une heure et cinq minutes au bureau de M. Boivin, dont une bonne
demi-heure dans l'antichambre. J'ai déjà dit cela hier. Je n'ai
rien à ajouter.
M. Ciaccia: Quand vous nous dites que vous...
M. Beaulé: J'ai même dit - on m'a posé des
questions hier, M. le Président, à savoir ce qui s'était
dit - j'ai indiqué que M.
Woll s'était surtout adressé à M. Boivin. J'ai dit
que j'avais eu, à ce moment-là, l'intuition ou le "feeling" ou
l'impression, à partir d'une remarque de M. Boivin, qu'on
étudiait avec sympathie le dossier. J'ai eu le "feeling" que le bureau
du premier ministre pouvait être favorable au règlement de la
cause. Je n'ai rien d'autre à ajouter à ce sujet. J'ai
déjà témoigné à plusieurs reprises.
M. Ciaccia: Si vous le permettez, je vais vous poser quelques
questions. Et je demanderais votre collaboration pour les réponses. Vous
avez mentionné tantôt que vous ne saviez pas que M.
Laliberté avait donné instruction à ses procureurs de
préparer un projet de règlement. Mais, le 19 janvier, vous
n'aviez pas une copie de ce règlement en votre possession? (11 h 30)
M. Beaulé: Oui. Mais, M. le Président, le fait que
Me Aquin, que je rencontrais chaque jour, à ce moment-là -
c'était la première semaine du procès - m'a
communiqué un projet de règlement n'a rien à voir avec les
instructions, en ce qui me concerne, qu'il ait pu recevoir du P.-D.G. de la
SEBJ. Les instructions que M. Laliberté a pu donner à Me Aquin,
c'est une chose. Les rencontres que j'ai eues avec Me Aquin, c'est une autre
chose. Au cours de ces rencontres, évidemment, il a été
question du texte d'un projet de règlement. M. Aquin s'est
expliqué devant la commission sur le sens de ce document. C'est
évident qu'on m'a remis un projet de texte que j'ai examiné.
J'essaie de retrouver mon dossier. Vous savez que, ce jour-là, Mes Woll
et Fanning étaient à mon bureau, à Montréal. Un
instant;
Cependant, je voudrais répondre à la question. M. le
Président, je me réfère au cahier déposé par
le président de la SEBJ, le 30 mars dernier. Le 22 janvier 1979, j'ai
transmis à Me Aquin une lettre, que l'on retrouve dans le cahier de la
SEBJ, à la page 75, avec annexe, les versions française et
anglaise d'un projet de transaction. J'avais discuté de ce texte avec
Mes Woll et Fanning lors de leur présence à Montréal, le
19. Effectivement, si on regarde aux pages 76 et suivantes du cahier, on verra,
à gauche en bas, la date sur le document. C'est moi qui ai fait apposer
cette date par ma secrétaire, Mme Legault, à l'époque.
J'ai reçu ce document de M. Aquin. Évidemment, les paragraphes
qui concernaient ma cliente avaient reçu mon assentiment. J'ai
étudié ce document avec Mes Woll et Fanning, qui ont
rapporté le texte de la version anglaise à Washington. Cela a
été signé par le secrétaire-trésorier de ma
cliente, M. Conlan. On m'a retourné, par messager ou par courrier
très spécial, ces documents pour le lundi matin 22 janvier. C'est
alors que j'ai écrit à Me Aquin la lettre que vous trouvez
à la page 75.
M. Ciaccia: M. le Président, c'est la raison pour laquelle
j'avais fait référence aux instructions de M. Claude
Laliberté à ses procureurs. Je n'avais pas insinué que
vous étiez au courant de ces instructions.
M. Beaulé: D'aucune façon, M. le
Président.
M. Ciaccia: Non, mais je voulais établir - vous l'avez
admis subséquemment - que vous aviez reçu de l'étude
Geoffrion et Prud'homme un projet de règlement.
M. Beaulé: M. le Président, j'ai
rencontré...
M. Ciaccia: Je crois que c'est ce même projet de
règlement et mon collègue de Brome-Missisquoi a fait la
démonstration que le projet de règlement que vous aviez, et
d'après les changements que vous avez présentés auxquels
vous venez de faire référence, était presque mot à
mot le projet de règlement qui avait été
préparé par Me Aquin.
Quand vous êtes allé voir Jean-Roch Boivin, aviez-vous le
projet de règlement avec vous?
M. Beaulé: Absolument pas. J'imagine que vous faites
référence à la rencontre du 19 janvier.
M. Ciaccia: Oui, le 19 janvier, avec M. Woll et M. Fanning.
M. Beaulé: Non, il n'a été aucunement
question de ce texte-là.
M. Ciaccia: II l'avait déjà reçu avant la
rencontre du 19?
M. Beaulé: Pardon? Qui avait reçu quoi?
M. Ciaccia: Vous aviez déjà reçu le projet
de règlement de M. Aquin, avant la rencontre du 19 janvier.
M. Beaulé: M. le Président, je voudrais
rétablir certains faits.
M. Ciaccia: Non, mais je vous demande si vous l'aviez
reçu.
M. Beaulé: Je voudrais rétablir certains faits, M.
le Président, parce que je trouve toujours que cela touche l'article 4
de la Charte des droits et libertés. J'ai discuté, les 16, 17 et
18 janvier 1979, avec Me Aquin, de la teneur d'une déclaration de
règlement qui pourrait faire l'objet de discussions
ultérieures...
M. Ciaccia: Préparée par Me Aquin.
M. Beaulé: Ce document a été
préparé par Me Aquin, qui a tenu compte... Je vous
réfère, je reprends toujours le même cahier de la SEBJ, du
30 mars. À la page 75, on retrouve la lettre du 22 janvier et on a le
texte de la déclaration, version française, à partir de la
page 77. A la page 77, il y a les déclarations du conseil
d'administration de l'Union internationale des opérateurs de machinerie
lourde, local 791 - à ne pas confondre avec mon client - vous avez
l'Union des opérateurs de machinerie lourde du Québec et le
Conseil provincial du Québec des métiers de la construction. Le
texte qu'on retrouve là, de mémoire, représente
l'essentiel de la position de Me Jasmin telle qu'il me l'a exposée
à l'époque.
À la page 78, au bas de la page et au début de la page 79,
il y a là la déclaration très brève de
l'International Union of Operating Engineers dans laquelle elle
réitère qu'elle nie toute responsabilité quant aux faits
qui ont donné ouverture à la présente cause mais, pour
manifester sa coopération avec le Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction, verse une partie de l'indemnité
forfaitaire qui est une des considérations de la présente
transaction. Ces deux paragraphes, évidemment, avaient fait l'objet
d'une consultation entre Me Aquin et moi-même.
Il en va de même du paragraphe 10 qui touche le local 134
représenté par Me Cutler. J'avais eu des conversations avec Me
Cutler à l'époque et lui aussi niait toute responsabilité
de la part de ses clients. Quant aux paragraphes subséquents qui sont en
fait les déclarations de la SEBJ, je n'y ai pas participé. Je
n'ai en aucune manière inspiré Me Aquin. Tout cela, M. le
Président, pour dire que je ne suis pas l'auteur de ce document. J'ai
inspiré la partie qui me concerne. Me Aquin a retenu ces
déclarations-là parce que c'étaient celles que ma cliente
était prête à faire et pas d'autres. Le même
commentaire, j'imagine, vaut pour Me Jasmin.
Ceci étant dit, j'ai donc eu ce document le 19 janvier, le texte
final. De quelle façon et dans quelles circonstances il a pu être
modifié à la SEBJ ou entre les avocats du contentieux de la SEBJ
et Me Aquin, je l'ignore, même aujourd'hui. Je sais simplement que le 19
janvier on m'a remis ce texte. J'en ai fait faire d'urgence, par Mme Grossman,
une traduction anglaise. J'en ai discuté avec mes clients,
c'est-à-dire Mes Woll et Fanning. Ils sont repartis pour Washington avec
le texte. Le texte a été approuvé par le secrétaire
trésorier de ma cliente, signé par lui et il m'a
été retourné, de sorte que le 22 janvier au matin je
pouvais adresser à Me Aquin la lettre que vous trouvez à la page
75. À la réunion chez
Me Boivin ou à son bureau d'Hydro-Québec le 19 Janvier, il
n'a été nullement question, ni de près ni de loin, de ce
document.
M. Ciaccia: On a déjà entendu cette expression, ni
de près, ni de loin.
M. Beaulé: C'est une expression française et qui
correspond à la réalité parce qu'il n'y a pas
d'incompatibilité entre la langue française et la
vérité.
M. Ciaccia: Je ne conteste pas votre réalité, mais
cela ne semble pas correspondre à la réalité qui a
été prononcée à l'Assemblée nationale, selon
ce qu'on peut voir à la commission parlementaire.
M. Duhaime: Vous savez que j'ai très bon caractère
et ce matin, je suis d'excellente humeur pour assurer mes collègues que
j'aimerais...
Une voix: Cela ne doit pas être beau quand...
M. Duhaime: ...que le député de Mont-Royal pose des
questions à Me Beaulé, plutôt que de nous envelopper de
narrations de faits contenant sa propre opinion, ses propres évaluations
et de faire ce que j'appelle de l"'emberlificotage". Je prends à
témoin tous ceux qui nous écoutent, de même que les gens de
la presse - qui ont droit aussi à leur opinion - et j'en viens à
la conclusion très claire, très nette que le député
de Mont-Royal fait le tour du parlement, actuellement, absolument pour rien.
Nous piétinons et nous n'avançons pas. Vous nous faites perdre
notre temps. Je vous demanderais, en votre qualité de parlementaire,
d'avoir et de manifester surtout du respect pour un membre du barreau qui est
devant nous, qui est un de vos confrères, et de lui poser des
questions.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, sur cette question de règlement.
M. Lalonde: M. le Président, on savait déjà
que le ministre avait l'intention de contrôler et de manipuler la preuve
au point de refuser des témoins, mais on ne savait pas qu'il avait
l'intention de poser des questions à notre place. Je dirai au ministre
que nous allons poser toutes les questions, de façon conforme au
règlement - nous comptons sur la vigilance du président - de la
façon que nous allons déterminer nous-mêmes. Maintenant, si
cela ne fait pas son affaire, il posera les questions lui-même lorsqu'il
le voudra. Hier, on est à peine intervenu pendant les deux heures qu'il
a données à Me Beaulé pour qu'il fasse sa plaidoirie -
qu'il n'avait pas eu l'occasion de faire parce que la cause avait
été réglée -devant la commission pour
démontrer que la cause de la demanderesse n'était pas bonne.
Laissons donc le député de Mont-Royal poser ses questions, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas que
le ministre fasse des insinuations en disant que je ne respecte pas un des
membres du barreau dans la personne de Me Beaulé. Vous m'avez
demandé de montrer du respect envers un membre du barreau. Si,
d'après votre définition de montrer du respect, je ne dois pas
essayer de poser des questions, je pense que ce n'est pas une bonne
définition du respect. Comprenez-vous? Je suis...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne voudrais pas non plus qu'on reprenne un débat. J'aimerais
plutôt qu'on reprenne les questions à l'endroit de Me
Beaulé.
M. Lalonde: J'ai une question urgente, M. le Président,
parce que c'est...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Le ministre a demandé au député
de Mont-Royal de montrer du respect envers un membre du barreau. Est-ce que le
ministre fait de la discrimination envers les autres témoins qui ne sont
pas membres du barreau? Est-ce qu'on va les respecter quand même?
M. Laplante: ...discrimination.
Le Président (M. Jolivet): Vous voyez le débat dans
lequel je ne veux en aucune façon...
M. Laplante: ...discrimination pour deux classes de
témoins.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Je sais
très bien que cela risque d'enclencher un débat et je ne le
voudrais pas.
M. Lalonde: C'est le ministre qui a parti cela.
Le Président (M. Jolivet): Mais comme vous avez
posé une question au ministre, je vais lui demander s'il a une
réponse à vous accorder.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais corriger une
impression. Vous savez que notre règlement interdit à un
parlementaire de prêter des motifs à un
autre parlementaire.
M. Lalonde: Ou prêter quoi que ce soit.
M. Duhaime: Et je n'ai fait aucune insinuation, j'ai fait une
affirmation, ce qui est très différent. J'ai le sentiment, la
conviction très nette que le député de Mont-Royal, de la
façon qu'il se comporte envers Me Beaulé depuis qu'il a
commencé à l'interroger hier, manque de respect envers Me
Beaulé. Ce n'est pas une insinuation, c'est une affirmation.
M. Lalonde: Complètement...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre!
M. Lalonde: Question de règlement! Question de
règlement!
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Je pense que
la personne qui devrait répondre à cela pour clore le
débat, c'est le député de Mont-Royal. Cela permettrait de
le clore une fois pour toutes, s'il veut bien y répondre. M. le
député de Mont-Royal, mais après cela je voudrais vous
demander d'aller aux questions.
M. Ciaccia: M. le Président, je n'accepte pas du tout
l'affirmation du ministre disant que je ne démontre pas de respect
envers Me Beaulé ou pour d'autres témoins que j'aurais pu
questionner. Si le ministre n'est pas d'accord avec les questions que je pose,
c'est une autre affaire, mais qu'il n'essaie pas d'enfirouâper cela au
lieu de dire qu'il n'aime pas les questions que je pose qui vont
peut-être mener à la vérité et faire la
lumière sur la déclaration du premier ministre et le bureau du
premier ministre. Qu'il n'essaie pas de créer l'impression que chaque
fois que j'arrive à de telles questions, je ne montre pas de respect
pour Me Beaulé. C'est clair?
Le Président (M. Jolivet): Maintenant, chacun ayant
exposé son point de vue, je voudrais que vous reveniez aux questions
adressées à Me Beaulé.
Une voix: Respectueusement, monsieur.
M. Ciaccia: Le tout, respectueusement, si vous voulez. Je peux
procéder?
Une voix: ...
M. Ciaccia: Merci.
Une voix: Une saute d'humeur, une autre saute d'humeur.
M. Ciaccia: Me Beaulé, quand avez-vous reçu...
Écoutez, ce n'est pas nous qui avons...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député....
M. Ciaccia: Non, non, un instant! Je vais faire le point.
Le Président (M. Jolivet): Non, non. Je m'excuse, je
m'excuse, je m'excuse. S'il vous plaît! À l'ordre! Je n'ai...
À l'ordre, s'il vous plaît! Je n'ai en aucune façon
accordé le droit de parole à qui que ce soit. La parole est au
député de Mont-Royal et j'aimerais qu'il dirige ses questions...
Comme je l'ai fait tout à l'heure, j'ai demandé que personne ne
l'interrompe. C'est à lui le droit de parole et qu'il l'utilise à
l'endroit de Me Beaulé, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Me Beaulé,
quand avez-vous reçu le projet de règlement préparé
par Me Aquin? (11 h 45)
M. Beaulé: Écoutez, j'ai répondu tout
à l'heure. Nous en avons parlé les 16, 17 et 18 janvier. C'est
impossible pour moi de préciser l'heure. Vous savez, peut-être que
j'étais à la cour et que le tribunal siégeait. Est-ce que
j'ai reçu le projet le matin du 19 janvier ou le soir du 18 janvier?
C'est plus probable que je l'aie reçu le 18 janvier, parce que je vois
que le 19 janvier avant-midi, il y avait relâche, le tribunal ne
siégeait pas. J'ai fait certaines inscriptions sur le document, en
particulier, je l'ai daté. Je l'ai indiqué tout à l'heure.
J'imagine que cela m'a été remis le soir du 18 janvier ou
très tôt le 19 au matin. De toute façon, j'avais le
document et je l'ai fait traduire en anglais - je l'ai dit tout à
l'heure - le 19 janvier, par Mme Grossman et j'ai pu en discuter avec mes
clients, avec Mes Fanning et Woll.
M. Ciaccia: À votre connaissance, est-ce que Me Jasmin
avait le projet?
M. Beaulé: Je n'en sais rien, M. le Président. Je
présume que oui. C'est une présomption.
M. Ciaccia: Me Beaulé, il apparaît que Me Jasmin
avait le projet avant le 19 janvier, car à une réunion du 19
janvier, à 9 h 45, je pense que cela se situe la même
journée que vous et Me Jasmin vous êtes rendus au bureau du
premier ministre. Le matin de cette journée, à 9 h 45, Me Jasmin
a présenté le projet de règlement au conseil provincial.
Je vais lire certains extraits du procès-verbal de la réunion
spéciale des membres de l'exécutif tenue le 19 janvier 1979 dans
les bureaux du conseil provincial. Un des articles...
M. Beaulé: Pas Me Jasmin.
M. Ciaccia: Non, mais vous l'avez rencontré. Je vais
revenir à mes questions si vous patientez, parce que vous avez eu des
discussions avec Jean-Roch Boivin la même journée,
l'après-midi, Me Jasmin était là...
M. Beaulé: M. le Président, il s'agit, je crois
avec respect, d'une insinuation, même si elle est faite avec un
sourire...
M. Ciaccia: M. le Président, un instant...
M. Beaulé: ...et j'invoque l'article 4. J'ai
déjà répondu que je n'ai parlé d'aucune
façon, ni de près, ni de loin, de ce projet de règlement
avec M. Boivin en présence de Mes Woll et Fanning le 19 janvier. J'ai
déjà dit que j'ai probablement reçu ce texte le 18 janvier
au soir ou tôt le 19 janvier. J'ai passé la journée du 19
janvier en conférence avec mes clients, Mes Woll et Fanning. C'est tout.
Je ne pense pas avoir eu d'autres contacts avec Me Jasmin avant de le
rencontrer au bureau de M. Boivin en fin de journée. Cette rencontre n'a
pas porté, je l'ai déjà expliqué sous serment
devant cette commission, sur le projet de règlement dont on parle.
Ce qui a pu se passer entre Me Jasmin et le Conseil provincial des
métiers de la construction du Québec, je l'ignore. J'avoue que je
ne pourrais pas éclairer la commission sur des choses que je ne connais
pas.
M. Ciaccia: M. le Président, si vous me permettez, avant
de recevoir une réponse, de compléter ma question.
Le Président (M. Jolivet): Oui, cependant, M. le
député, j'ai cru de mon devoir de permettre à Me
Beaulé de rectifier. On le fait souvent par des questions de
règlement, mais comme il n'a pas de question de règlement, je lui
ai permis de le faire.
M. Ciaccia: Très bien. Alors, je vais continuer.
Me Beaulé, voici un passage du procès-verbal du bureau du
conseil provincial: "Poursuite de la SEBJ - on parle de Me Michel Jasmin - II
procède ensuite à la lecture du document qu'il a
préparé, afin d'obtenir un règlement hors cour, concernant
l'action intentée par la Société d'énergie de la
Baie James. Il explique clairement les raisons pour lesquelles il recommande au
conseil provincial d'accepter ce document et, par la suite, demande
l'autorisation de procéder au règlement en signant pour et au nom
du conseil provincial le document, tel que rédigé." Je vais vous
lire la résolution: "II est proposé par M. Tousignant,
secondé par etc.. que Me Michel Jasmin, de l'étude Jasmin,
Rivest, Castiglio, et Lebel, soit autorisé à procéder au
règlement, conformément au document déposé par Me
Michel Jasmin, et soit autorisé à signer le règlement et
régler l'action intentée par la SEBJ contre le conseil provincial
- et là on donne le nom de la cause - pour et au nom du Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction que Me Michel
Jasmin est autorisé à engager un montant maximal de 62 500 $ pour
et au nom du conseil provincial pour les fins du règlement de ce
dossier. Quand avez-vous entendu parler de cela pour la première fois
que Me Jasmin avait reçu ce document et avait été
autorisé à signer pour ses clients?
M. Beaulé: M. le Président, je vous demande de
prier le député qui m'interroge de préciser sa question.
Il a référé à une réunion du conseil
d'administration du Conseil provincial des métiers de la construction,
à un projet de règlement, à une résolution du
conseil d'administration. Au fond, de quoi s'agit-il? Je voudrais être
bien sûr de connaître la question qu'il me pose?
Le Président (M. Jolivet): Vous avez le droit de
connaître la question si vous ne l'avez pas comprise.
M. Ciaccia: Oui, je vais la répéter, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Quand avez-vous su pour la première fois que
Me Jasmin avait un tel mandat de régler pour ses clients?
M. Beaulé: De régler sur la base de 125 000 $?
M. Ciaccia: L'avez-vous su sur une autre base, avant?
M. Beaulé: Manifestement, M. Jasmin m'informait qu'il
avait mandat de ses clients de négocier pour eux avec les avocats de la
SEBJ un règlement.
M. Ciaccia: Mais celui de 125 000 $...
M. Beaulé: Si vous parlez du montant forfaitaire de 125
000 $...
M. Ciaccia: Oui, 125 000 $.
M. Beaulé: ...je savais, je pense, dès le 18,
dès la veille de cette réunion, que Me Jasmin allait recommander
au conseil d'administration du Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction de contribuer 62 500 $. Je présume -
je n'aime
pas m'avancer dans ces choses - qu'il avait eu des consultations avec
ses clients à l'avance et que la réunion du 19 constitue, si vous
voulez, une ratification de son mandat. Mais ce sont des déductions, M.
le Président.
M. Ciaccia: Alors vous venez de...
M. Beaulé: Je crois que M. Jasmin pourrait répondre
à ces questions. Quant à moi, j'ai compris dès le 18 au
soir ou le 19 au matin, plutôt le 18 au soir, qu'il avait mandat d'offrir
un règlement de 62 500 $.
M. Ciaccia: Vous saviez que, le lendemain, le vendredi matin, il
devait se faire autoriser formellement?
M. Beaulé: Je ne suis pas au courant de la plomberie, mais
je...
M. Ciaccia: Vous saviez qu'il avait un mandat...
M. Beaulé: ...n'informais pas M. Jasmin de la façon
dont je communiquais avec mes clients à Washington. Cela ne
m'intéressait pas de savoir comment il communiquait avec les siens.
M. Ciaccia: Revenons un peu à la réunion du 19 dans
le bureau de Jean-Roch Boivin. Vous nous dites que les représentants de
vos clients étaient présents, M. Fanning ou Me Fanning, je ne
sais pas.
M. Beaulé: Me Fanning.
M. Ciaccia: Me Fanning et Me Woll. Me Jasmin était
également présent. Qui d'autre était présent?
M. Beaulé: Au bureau de M. Boivin, ce soir du 19
janvier?
M. Ciaccia: Oui.
M. Beaulé: II y avait donc M. Boivin, M. Woll, M. Fanning,
M. Jasmin et moi. J'ai déjà répondu à cela.
M. Ciaccia: Quelles étaient les conversations? Qu'est-ce
que Me Fanning et Woll ont dit exactement à M. Boivin?
M. Beaulé: M. le Président, j'ai déjà
répondu à plusieurs reprises à cette question hier, hier
soir en particulier. Je demande la permission de vous adresser la parole, M. le
Président, sur un point particulier. J'ai consulté des
confrères et Me Roy, qui m'accompagne. Je soumets qu'il existe, en
"common law", une procédure qui consiste à demander à un
tribunal, par motion, la cessation d'un contre-interrogatoire qui devient
abusif. Je soumets que ces règles de la "common law" s'appliquent en
droit public et s'appliquent à votre commission. Je soumets que le
contre-interrogatoire, puisqu'il s'agit bien d'un contre-interrogatoire que me
fait subir M. le député de Mont-Royal, est abusif. C'est
également l'opinion de personnes qui ne sont pas avocats, comme le
journaliste M. Falardeau. Je pense, M. le Président, que je vais songer
sérieusement à faire déposer devant cette commission une
telle motion. La question qu'on m'a posée, j'y ai répondu
à plusieurs reprises. J'ai précisé que c'est surtout M.
Woll qui s'est adressé à M. Boivin le 19 janvier. J'ai
déjà répondu à tout cela, hier soir.
M. Ciaccia: M. le Président...
M. Beaulé: ...et j'ai également
précisé, tout à l'heure, qu'il n'a pas été
question, au bureau de M. Boivin, du lien que vous tentez de faire avec la
déclaration de règlement que m'a transmise M. Aquin, le 18
janvier, que mes clients ont examinée, le 19 janvier, que le
secrétaire-trésorier a signée à Washington,
probablement le dimanche 21 janvier, que j'ai reçue, le 22 janvier et
que j'ai transmise, le 2 février, à Me Aquin. Il n'y a eu aucune
discussion là-dessus. Je pense avoir répondu clairement à
toutes ces questions qu'on me pose constamment. Si vous cherchez une
contradiction, M. le Président, je risque de décevoir le
député de Mont-Royal, car je ne crois pas qu'il y en aura.
M. Ciaccia: M. le Président, je ne peux pas accepter les
propos de Me Beaulé, à savoir qu'il a répondu à ce
qui s'est produit le 19 janvier. Vous avez fait une déclaration assez
générale, à la suite d'une question du ministre, sur ce
qui s'est produit le 19 janvier. Je ne conteste pas que M. Woll, M. Fanning, M.
Jasmin et vous-même étiez là. Je vous dis que je ne peux
pas être satisfait d'une déclaration générale, en
termes généraux. Je voudrais vous faire préciser ce qui
s'est dit par les différentes parties. Est-ce que c'est
incompréhensible? Est-ce contre la charte des droits?
Laissez-moi terminer. Le but, c'est d'essayer d'avoir des
précisions. On utilise les mots "sensibiliser", "démarche", ce
n'est pas une négociation, ce n'est pas ceci. J'essaie de voir ce qui
s'est dit. C'est un procès de 32 000 000 $. Vous avez reçu des
honoraires de 280 000 $. Cela a été réglé pour 200
000 $ quand, à la SEBJ, cela leur en a coûté 900 000 $. M.
Boyd est venu ici et nous a dit: Les dommages étaient de 21 000 000 $.
C'était la cause de l'année. On n'a jamais eu une cause d'une
telle envergure au Québec alors qu'il y a eu un saccage à la
Baie-James, que le projet du siècle a été
arrêté. Tout le monde le connaissait. On le savait tous et on
s'en
souvient. J'essaie d'avoir des précisions et on me dit que je
fais du harcèlement, que je suis abusif. M. le Président, comment
voulez-vous que j'interprète cela? Je demande la protection de la
présidence afin de pouvoir continuer...
M. Dussault: ...la farce.
M. Ciaccia: ...mon interrogatoire.
M. Beaulé: M. le Président, sur la question des
honoraires...
Le Président (M. Jolivet): Un instant. On va permettre
à Me Beaulé de rectifier une partie de l'affirmation qu'a faite
le député de Mont-Royal; j'espère que c'est un lapsus. Je
pense que c'est à vous de rectifier.
M. Beaulé: M. le Président, quels que soient les
montants en jeu, à mon humble avis, et les frais afférents
à cette procédure, ce n'est pas cela qui rend pertinentes ou non,
légales ou non, justes ou non les questions qu'on me pose.
Deuxièmement, je n'ai pas reçu 280 000 $ des
Américains. J'ai reçu en frais, incluant les
déboursés, incluant les frais judiciaires, 280 000 $ pour la
durée de mon mandat. J'ai précisé, hier, que des avocats
travaillaient avec moi et que j'ai dû les payer. Quant à la
question qu'on me pose...
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! M. le
député de Bourassa...
M. Laplante: C'est important à ce moment-ci, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! Vous aurez le droit
de parole quand je vous le donnerai. C'est Me Beaulé qui a la
parole.
M. Laplante: C'est là-dessus, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa...
M. Laplante: ...je voudrais que le député de
Mont-Royal dise tout haut ce qu'il vient de dire actuellement...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa, je n'ai pas à intervenir dans des choses qui se disent de part
et d'autre; de la même façon que je l'ai fait depuis le
début, je ne les ai pas entendues. Moi, j'entendais Me Beaulé,
j'étais attentif à ce qu'il disait et c'est de cela que je vais
m'occuper.
M. Laplante: C'est une insulte au témoin.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé. (12
heures)
M. Beaulé: M. le Président, peut-être que le
député de Mont-Royal qui m'interroge, à cause de cette
barrière de la langue, ne saisit pas tout à fait toutes mes
réponses. Je suis prêt, pour une dernière fois, à
répondre pour la cinquième ou sixième fois à une
question touchant la réunion du 19 janvier, pour que l'honorable
député n'ait pas l'impression qu'il est lésé et
qu'il a besoin de la protection de la présidence.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, de la
même façon que je demande au député d'être
envers vous courtois et normal dans les questions qu'il vous pose, je vous
demanderais aussi la même tolérance envers le député
de Mont-Royal, et je n'accepte pas, comme président, ce que vous avez
dit sur la barrière de la langue.
M. le député de Bourassa.
M. Laplante: Vu que je l'ai entendu de ce côté-ci de
la table, M. le Président, je voudrais que le député de
Mont-Royal précise pourquoi il doutait...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, je m'excuse, M. le
député. Moi, je ne l'ai pas entendu et je ne voudrais pas que ce
soit inscrit au journal des Débats. M. le député, ce que
vous dites de part et d'autre de cette assemblée - j'en ai fait mention
tout à l'heure - je ne l'accepte pas, puisque ce n'est pas
enregistré au journal des Débats et que je ne l'ai pas entendu.
Si le député de Mont-Royal veut, à votre demande et
à votre insistance, répéter ce que lui-même a dit,
c'est son droit, mais je n'accepterai pas que...
M. Laplante: Je vais vous dire ce que j'ai entendu, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le député
de Bourassa.
M. Laplante: On ne doute pas d'un témoin, M. le
Président, sur la paie des employés qu'il aurait pu engager.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: C'est ça, la saloperie qui se passe ici de la
part du député de Mont-Royal.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: C'est une saloperie, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! M. le député de Bourassa, s'il vous
plaît!
M. le député de Mont-Royal.
M. Laplante: C'est comme ça qu'on manipule les
témoins ici.
Le Président (M. Jolivet): M. le député! M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. La
référence que j'ai faite...
M. Laplante: II doute qu'il ait payé ses
employés.
M. Ciaccia: ...au montant de la cause et au montant des
honoraires, ce n'était pas pour mettre en doute le travail que Me
Beaulé a fait, ce n'était pas pour suggérer qu'il a
été payé excessivement; c'était pour souligner que,
dans les causes de cette envergure, on se souvient de tout et on voudrait
obtenir les renseignements. C'était la seule raison. Et je n'accepte pas
le genre d'insinuation qu'il a faite. Il a complètement mal compris la
question que j'avais posée. Le bureau de Geoffrion et Prud'homme a
obtenu des frais et honoraires de 435 000 $, la Société
d'énergie de la Baie James a payé des frais totaux de 900 000 $.
Le seul but de mentionner ce montant de 280 000 $, ce n'est pas d'insulter une
personne...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
voudrais vous interrompre, parce que vous allez "engancer" encore, comme on dit
dans notre langage, qui n'est peut-être pas un langage parlementaire,
mais qui est compris par bien du monde. Je pense que vous devriez adresser vos
questions à Me Beaulé, s'il vous plaît.
M. Lalonde: On comprend cela.
M. Ciaccia: Très bien, M. le Président.
M. Laplante: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa, je vous répète...
M. Laplante: Étant donné...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa, avant que vous interveniez, je vous répète que, de mon
côté, j'étais attentif à ce que Me Beaulé
disait. Je n'ai pas entendu et, à ma connaissance, ce n'est pas inscrit,
non plus, au journal des Débats. Je ne voudrais pas que vous
entrepreniez un débat ici, sur des choses que vous vous dites, de temps
à autre, de part en part de cette table, qui ne sont pas inscrites au
journal des Débats. Si vous avez une intervention, je vous permettrai de
la faire aussitôt que le député de Mont-Royal aura
terminé. M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
Me Beaulé, je voudrais revenir à la réunion du 19,
si vous me... J'allais dire si vous me le permettez, mais c'est le
président qui va me le permettre. Je ne voudrais pas donner ce genre de
pouvoir au témoin, de me permettre ou non des questions. Durant la
journée précédente, il y a eu des discussions sur le
projet de règlement. Vous avec reçu le projet de
règlement. Le Conseil provincial des métiers de la construction a
eu une réunion spéciale de son exécutif pour autoriser Me
Jasmin à procéder au règlement. C'était... En tout
cas, je ne donnerai pas mes impressions. Je voudrais en venir à la
réunion avec M. Jean-Roch Boivin, avec M. Woll, avec M. Fanning, avec M.
Jasmin. Je voudrais essayer d'obtenir de vous des précisions sur ce que
ces gens ont dit. Qu'est-ce que M. Woll, par exemple, aurait dit?
M. Beaulé: C'était, à ma connaissance, la
première et la seule rencontre que MM. Woll et Fanning aient eue avec M.
Boivin. J'ai déjà dit à la commission que nous avions
attendu près d'une demi-heure dans l'antichambre. Donc, selon la liste
des rencontres de Me Jean-Roch Boivin document que j'ai sous les yeux - je suis
arrivé là à 15 h 36. J'ai signé le registre. Nous
avons vu Me Boivin vers 6 heures. Mes clients aussi étaient très
pressés. Ils voulaient reprendre leur avion pour Washington le soir
même. La conversation a été très courte. Je l'ai
déjà dit.
Je répète, M. le Président: Je suis arrivé
au bureau de M. Boivin à 15 h 36 - je m'excuse de l'erreur - donc,
à 3 h 36 de l'après-midi; c'est un peu comme pour le
système métrique - et j'ai pu rencontrer Me Boivin, avec mes
clients, vers 4 heures. Mes clients avaient un avion à prendre à
6 heures.
M. Ciaccia: D'accord. Cela va.
M. Beaulé: Je pense qu'il faisait tempête, ce
jour-là parce que je suis allé les reconduire, je m'en souviens.
La réunion a été très courte. J'ai
déjà indiqué, et je le répète, que c'est M.
Woll qui a parlé presque tout le temps. Il n'avait pas eu l'occasion de
rencontrer M. Boivin; il le rencontrait pour la première fois.
Sensiblement, il a exposé à M. Boivin les mêmes choses
qu'il avait déjà dites à M. Pierre-Marc Johnson, ministre
du Travail, le 28 août. Il a parlé du caractère abusif de
cette poursuite. Il a parlé des conséquences de cette poursuite
auprès de l'AFL-CIO. Vous savez, une demi-heure passe très
rapidement. Il n'a pas été question, ni de près ni de loin
- je vous vois sourire - du
règlement...
M. Ciaccia: Non. Ce sont les mots qui me font sourire. Ce n'est
pas vous.
M. Beaulé: ...ni du texte de transaction.
M. Ciaccia: C'est le langage qui me fait sourire. Ce n'est pas
vous. Ne prenez pas cela personnellement, Me Beaulé, je vous assure.
M. Beaulé: Alors, il n'a pas été question du
projet de transaction auquel vous avez fait allusion, que j'ai reçu de
Me Aquin le 18 janvier au soir ou le 19 au matin, que j'ai fait traduire en
anglais le 19, dont j'ai parlé avec mes clients le 19. Il n'a pas
été question de cela. M. Woll, qui est un homme de 75 ans, qui
est avocat syndical depuis 1935, 1940, je crois, qui est un homme d'une vaste
expérience, a parlé du problème des relations-patronales
ouvrières de cette poursuite abusive, des conséquences que cela
pouvait avoir même au Canada, de la préoccupation, si vous voulez,
en anglais on dit "concern"... Il a dit que cette poursuite était une
préoccupation majeure pour certains membres du conseil de l'AFL-CIO.
Je pense qu'il a simplement reflété les faits.
C'était, de fait, une préoccupation pour ces gens, non pas
d'être poursuivis - je l'ai expliqué, hier - mais d'être
poursuivis d'une façon abusive. Évidemment, il espérait,
j'imagine - et là, j'entre dans la tête de M. Woll; vous savez
que, même si j'ai beaucoup de respect pour l'homme, en cour, ce que je
vais dire ne serait pas permis - de la part de M. Boivin, une réponse
à savoir si les personnes en autorité, que ce soient les
ministres concernés ou le Conseil des ministres, je l'ignore, avaient
une opinion sur ce dossier. Je pense qu'il espérait obtenir de M. Boivin
une réponse à ses préoccupations.
Je vous ai dit que j'ai compris, d'une réponse de M. Boivin,
qu'il étudiait avec sympathie ce dossier, qu'on étudiait avec
sympathie ce dossier. Il n'y a pas autre chose qui s'est déroulé,
M. le Président.
M. Ciaccia: Est-ce que M. Woll aurait parlé de la
possibilité d'un règlement?
M. Beaulé: Pas du tout. Pas du tout. Je peux vous dire, M.
le Président - et, là, cela va préciser assurément;
c'est peut-être également nouveau - que les Américains ne
voulaient rien payer...
M. Ciaccia: Pardon?
M. Beaulé: Ils ne voulaient rien payer pour obtenir ce
règlement.
M. Ciaccia: Ils avaient une bonne cause.
M. Beaulé: Non seulement ils avaient une bonne cause,
mais, pour eux, c'était aussi une question de dignité. Je pense
qu'ils faisaient appel au sens des responsabilités des
Québécois. Si un montant de 150 000 $ a été offert
et finalement payé, c'est en désespoir de cause en regard des
frais que cette poursuite occasionnait.
M. Ciaccia: Vous avez mentionné tantôt la
préoccupation de l'International Union et que Me Woll et Me Fanning sont
venus pour exprimer leur préoccupation à M. Jean-Roch Boivin.
Pourquoi Me Jasmin était-il présent si le seul but de la
réunion était de discuter de la préoccupation de
l'International Union?
M. Beaulé: II ne faut pas oublier que Me Jasmin
était l'avocat du conseil d'administration du local 791 qui était
en tutelle et que ce local était alors affilié -avec une charte
comme je l'ai dit - à l'union internationale. J'ai peut-être
donné un renseignement inexact hier. Cette charte a été
suspendue depuis.
M. Ciaccia: Vous nous dites qu'il n'y a pas eu de discussion sur
la possibilité d'un règlement; vous avez eu un "feeling" que la
cause... Je ne veux pas mettre de paroles dans votre bouche mais vous avez
utilisé, hier, le mot intuition, "feeling". Comment ce "feeling"
s'est-il traduit? Est-ce que Jean-Roch vous a fait un clin d'oeil? J'essaie de
voir. Vous avez le "feeling" que cela va se régler, mais il n'a rien
dit. Il a un "feeling" et il n'a rien dit.
M. Beaulé: Je crois avoir déclaré que M.
Boivin a dit qu'on étudiait le dossier avec sympathie et j'en ai conclu
- je me suis déjà exprimé à plusieurs reprises
là-dessus - que les personnes en autorité étaient
favorables à la cessation de cette poursuite. Maintenant, ce n'est pas
à moi de dire pour quelles raisons elles étaient favorables
à la cessation de cette poursuite. Cela les regarde.
M. Ciaccia: Si je comprends bien, Jean-Roch aurait dit qu'il
avait une certaine sympathie, mais Jean-Roch...
M. Beaulé: Jean Roch? De qui parlez-vous?
M. Ciaccia: Jean-Roch Tousignant? Je parle de Jean-Roch Boivin.
Il demande quel Jean-Roch. Il y a déjà trois semaines qu'on parle
de Jean-Roch. Jean-Roch Boivin.
M. Beaulé: Nous parlions de Me Boivin en réunion.
Il n'y a jamais eu de tutoiement, de familiarité dans nos
rencontres.
M. Ciaccia: Bon, d'accord, Me Jean-Roch Boivin du bureau du
premier ministre.
Le 3 janvier, Me Jean-Roch Boivin...
Une voix: Vous ne savez pas vivre.
M. Ciaccia: Écoutez, là, on dit que c'est
épouvantable. Moi, je fais une distinction quand on agit à titre
d'avocat et quand on agit dans une autre fonction. Quand Me Jean-Roch Boivin
comme Me Beaulé agissent comme avocats, je fais référence
à Me Beaulé, à Me Jean-Roch Boivin.
Mais quand on voit toutes ces réunions et les documents qu'ils
s'envoient de droite et de gauche, des renseignements et des gens qui viennent
des États-Unis qui sont tellement certains d'avoir une bonne cause qu'il
faut qu'ils aillent au bureau du ministre du Travail, ou au bureau du premier
ministre, ce n'est pas là tout à fait le rôle d'un avocat.
C'est pour cela que je me suis permis d'être un peu plus familier. Je
peux référer à Me Jean-Roch Boivin.
Le 3 janvier, Me Jean-Roch Boivin aurait dit à Claude
Laliberté que le premier ministre voulait que la cause se règle.
La décision avait déjà été prise. Cela ne
vous a jamais été communiqué?
M. Beaulé: C'est une question qu'on devrait poser à
M. Boivin, à savoir si la décision avait été prise.
Quant à Me Boivin, j'ai répondu à plusieurs reprises, hier
et aujourd'hui, que c'est une perception que j'ai eue, le 19 janvier, que les
personnes en autorité étaient favorables à la cessation
des procédures. Ma réponse est là, elle ne changera; pas
même si on me pose 15 ou 20 questions, ce sera toujours la même
réponse. M. Boivin a toujours eu une attitude avec moi - je ne sais pas
quant aux autres - c'est un homme très discret qui sait écouter
et, à mon point de vue, c'est peut-être pour cela qu'il occupe
cette fonction. (12 h 15)
M. Ciaccia: M. Beaulé, je ne vous demande pas si la
décision avait été prise ou non. C'est, évidemment,
une question qu'on pourrait poser à d'autres invités. La question
que je vous pose est: Est-ce qu'il ne vous a jamais été
communiqué que Me Jean-Roch Boivin avait informé M. Claude
Laliberté ou peut-être d'autres membres du conseil
d'administration que le premier ministre voulait un règlement?
M. Beaulé: M. le Président, si tout à
l'heure j'ai référé à Me Boivin, c'est que la
personne qui m'interroge et qui m'interrogeait, en faisant entrer cette notion
du prénom, pouvait insérer dans ces rapports que j'ai avec Me
Boivin ou avec M. Boivin un caractère de familiarité qui n'a
jamais existé.
M. Ciaccia: Vous étiez associé avec lui mais jamais
familier avec lui?
M. Beaulé: Cela ne change rien; je ne suis pas le genre
à taper sur l'épaule de quelqu'un. Les quelques rencontres que
j'ai eues avec lui sur ce sujet se sont faites sur une base professionnelle et
d'affaires.
Maintenant, je vais répondre à votre question, M. le
Président. On ne m'a pas informé avant le 19 janvier qu'une
décision était prise et je ne sais même pas où cette
décision a été prise. Je ne suis pas compétent pour
y répondre. Est-ce à un Conseil des ministres ou à un
comité ministériel? Je l'ignore totalement. J'ai compris le 19
janvier que les personnes en autorité étaient sympathiques
à la cessation de ces procédures. Je l'ai dit et
répété: M. Boivin ne m'a pas tenu au courant de ses
conversations avec qui que ce soit, ni de sa rencontre avec M.
Laliberté.
M. Ciaccia: II ne vous a jamais informé que le 3...
M. Beaulé: Je viens de répondre non, M. le
Président.
M. Ciaccia: Non, non.
Le Président (M. Jolivet): Question de
règlement?
M. Duhaime: Qui, M. le Président, sur une question de
règlement. À l'article 155 des règlements de
l'Assemblée nationale, il est dit: "En commission, aucune motion n'est
annoncée." Je voudrais en faire une.
M. Gratton: M. le Président, question de
règlement.
M. Duhaime: Je suis déjà sur une question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Juste un
instant. M. le député de Gatineau, sur une question de
règlement.
M. Gratton: L'article 155 permet à un député
qui a la parole de faire une motion. Or, le député qui a la
parole présentement est le député de Mont-Royal et non le
ministre.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, mais le ministre veut
m'annoncer quelque chose que je voudrais bien connaître avant.
M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je voudrais vous
renvoyer également à l'article 157 de notre règlement, qui
se lit comme suit: "En commission plénière, un
député peut proposer de rapporter à l'Assemblée que
la commission n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la
permission de siéger à nouveau. En commission élue, un
député peut proposer que la commission ajourne ses
travaux. "Ces motions sont mises aux voix, sans amendement, et elles ne
peuvent être faites qu'une fois au cours d'une séance, sauf par un
ministre. Elles ne peuvent être débattues, sauf qu'un
représentant de chaque parti reconnu peut prononcer un discours de dix
minutes chacun à leur sujet."
Motion pour ajourner et libérer le
témoin
M. le Président, me référant à l'article 155
et à l'article 157 que je viens de vous lire, me référant
également à ce que je considère être un appel
à la présidence de la part de Me Beaulé, qui a
invoqué tantôt la "Common Law" très clairement, qui a
demandé également la protection de la présidence, je
voudrais faire motion que cette commission...
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.
Le ministre n'a pas le droit de faire de motion, il n'a pas le droit de
parole.
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Juste un
instant. M. le ministre, après lecture de ces articles, vous commenciez
à faire entendre que vous aviez l'intention de proposer une motion; je
suis prêt à vous entendre, mais aussitôt que le
député de Mont-Royal aura terminé son droit de parole. Je
ne peux en aucune façon l'accepter sous le principe qu'une motion
appelée "non annoncée" peut être faite à tout
moment. Je pense qu'elle peut être faite en tout moment à
condition d'avoir le droit de parole. Alors, malheureusement, pour le moment,
le droit de parole appartient au député de Mont-Royal.
M. Lalonde: "Malheureusement".
M. Gratton: Malheureusement pour le ministre.
Le Président (M. Jolivet): Je veux dire: Malheureusement
pour le ministre. À moins que le ministre n'ait autre chose à
ajouter. Je veux quand même bien m'assurer que le règlement est
suivi à la lettre. M. le ministre a-t-il autre chose à
ajouter?
M. Duhaime: Oui, M. le Président. Le Président
(M. Jolivet): Allez!
M. Duhaime: Je voudrais vous renvoyer à l'article 77 du
règlement que je vais vous lire. "Motions d'ajournement du débat.
Article 77. Une motion non annoncée d'ajournement du débat peut
être faite en tout temps; une telle motion, sauf si elle est faite par un
ministre, ne peut être faite qu'une seule fois au cours d'une
séance. Elle est mise aux voix sans amendement, à la suite d'un
débat restreint au cours duquel un représentant de chaque parti
reconnu peut prononcer un discours de dix minutes, le proposeur pouvant exercer
un droit de réplique de même durée."
M. le Président, suivant l'article 77, je voudrais faire la
motion suivante...
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Jolivet): Un instant! M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît!
M. Lalonde: L'article 77 ne change pas le principe qu'on peut
faire une motion seulement lorsqu'on a le droit de parole. L'article 77
répète, en fait, de façon différente l'autre
article invoqué par le ministre, à savoir qu'on peut faire un
motion pour un rapport spécial. Mais vous avez bien dit - et je pense
que votre décision a été rendue - que la demande du
ministre est en quelque sorte un appel de votre décision. Votre
décision était que le député de Mont-Royal a la
parole et le ministre pourra faire toutes les motions qu'il voudra faire
lorsqu'il aura le droit de parole, une fois que le député de
Mont-Royal aura terminé.
Le Président (M. Jolivet): Cependant...
M. Duhaime: Sur la question de règlement, si vous le
permettez.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur la question
de règlement.
M. Duhaime: Je veux rappeler que le député de
Mont-Royal a la parole depuis 17 h 55 hier soir et qu'il l'a conservée
au début de nos travaux, hier soir, à 20 h 10 jusqu'à 22
heures et qu'il a la parole depuis 10 h 15 ce matin. Je pense que c'est
explicitement pour que cesse ce genre de stupidité que l'article 77
existe disant qu'une motion non annoncée d'ajournement du débat
peut être faite en tout temps. Je voudrais que vous me permettiez, au
moins, de formuler la motion que je voudrais faire.
Une voix: II n'en a pas le droit.
Le Président (M. Jolivet): Juste avant, je pense que, pour
le moment, pour éviter tout imbroglio, puisqu'on a à juger
à partir des textes du règlement, vous allez me permettre, quant
à moi, de suspendre quelques instants pour aller faire les
vérifications qui s'imposent.
M. Laplante: Bravo!
Le Président (M. Jolivet): Je reviendrai
pour donner une décision définitive, eu égard
à ce que j'ai déjà dit cependant, pour bien m'assurer que
la décision que je vais rendre va respecter toutes les connotations de
notre règlement.
M. Laplante: Avant de suspendre...
M. Gratton: M. le Président, avant que vous suspendiez, je
pense que cela pourrait peut-être faire partie de votre
réflexion.
Le Président (M. Jolivet): Je vais permettre au
député de Gatineau de parler. Je reviendrai au
député de Bourassa ensuite.
M. le député de Gatineau.
M. Gratton: II est vrai qu'en temps normal, au moment où
une commission parlementaire siège, un député a un droit
de parole qui est limité à un maximum de 20 minutes. L'article 77
permet donc à tout député qui a la parole, parce que c'est
impensable qu'un député puisse se lever...
M. Dussault: L'abus écoeurant.
M. Gratton: ...à n'importe quel moment pendant qu'un autre
député a la parole et soulever une question de règlement
pour faire une motion d'ajournement. En temps normal, lorsqu'il y a vingt
minutes...
Une voix: Cela se fait à l'Assemblée nationale
régulièrement.
Des voix: Non, non.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...
M. Gratton: M. le Président, est-ce que je pourrais
continuer à expliquer? Vous allez voir qu'il n'y a rien de partisan.
Le Président (M. Jolivet): D'accord! M. le
député de Gatineau, vous avez déjà
été président de certaines commissions; alors, je vais
vous écouter avec attention, de la même façon que le
député de Bourassa qui est actuellement président de
commission.
M. Gratton: Oui. D'ailleurs, je vous référerai
à des décisions rendues lors de l'étude de la loi 22,
entre autres, que j'ai eu le bonheur ou le malheur de présider, selon le
cas, et où, dès le début des travaux, les membres de la
commission avaient accepté de n'imposer aucune limite de temps aux
interventions. Vous allez constater, si vous faites tout le décompte,
que ce n'est qu'après qu'un député a terminé ou a
exercé son droit de parole et a dit: J'ai terminé mon droit de
parole, qu'un autre député, fût-il ministre, peut prendre
la parole et proposer une motion, que ce soit une motion d'ajournement ou
quelque autre motion que ce soit.
C'est sûr que, si nous n'avions pas donné un consentement
unanime pour faire lever cette limite de 20 minutes que dure normalement le
droit de parole d'un député, le ministre pourrait, dès que
les 20 minutes du député de Mont-Royal sont terminées,
prendre la parole et faire sa motion. Mais, comme on a décidé
unanimement qu'il n'y aurait aucune limite de temps à l'exercice du
droit de parole des membres de cette commission, c'est donc le
député de Mont-Royal seul, au moment où il dispose du
droit de parole que le président de la commission lui a donné,
qui peut faire une motion quelconque, que ce soit une motion d'ajournement ou
une motion pour faire comparaître quelqu'un. C'est dans ce contexte, M.
le Président, que je vous demanderais de réfléchir avant
de renverser la décision fort judicieuse que vous avez
déjà rendue.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Ce sera court, M. le Président, il s'agit
d'examiner les précédents. Vous remarquerez que, lorsqu'une loi
est rappelée à l'Assemblée nationale après un
certain "filibuster", le leader arrive subitement à la table de la
commission, coupe la parole aux gens et fait la motion de suspension.
Une voix: Vous êtes complètement à
côté de...
M. Laplante: Moi-même, M. le Président, dans un cas
analogue, au sujet de la loi sur l'hôpital Charles-Lemoyne, je suis
arrivé au début d'une commission - le député de
Gatineau était présent à ce moment-là -et j'ai fait
une motion d'ajournement de nos travaux.
M. Lalonde: Je voudrais seulement attirer...
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant.
M. Laplante: Je me suis servi de l'article 77.
Le Président (M. Jolivet): Un instant, un instant!
M. Lalonde: Trente secondes.
Le Président (M. Jolivet): Je vais donner la parole au
député de Marguerite-Bourgeoys, pour respecter l'alternance.
M. Lalonde: Je voulais simplement
attirer votre attention sur le règlement annoté de
l'Assemblée législative, de Geoffrion, à la page 59...
Une voix: C'est l'ancien règlement?
M. Lalonde: Oui, c'est l'ancien règlement, qui est
toujours pertinent lorsqu'on a des problèmes
d'interprétation.
M. Duhaime: Quand le règlement actuel n'est pas clair.
M. Lalonde: II n'y a pas de problème
d'interprétation, à mon sens, mais au cas où on pourrait
le suggérer, il est dit: "II est irrégulier de proposer
l'ajournement du débat quand on a interrompu un opinant pour soulever
une question d'ordre ou de règlement." C'est exactement ce que le
ministre a fait. Il a soulevé une question de règlement en
interrompant le député de Mont-Royal et il veut proposer une
motion d'ajournement. La décision est là. En fait, c'est dans la
jurisprudence. Je voulais attirer votre attention là-dessus, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, maintenant.
M. Duhaime: Quand je pratiquais ma profession, M. le
Président, je ne travaillais pas avec l'ancien code, je travaillais avec
les loi modifiées et c'est en toute clarté que l'article 77 dit:
"Une motion non annoncée d'ajournement du débat peut être
faite en tout temps." J'ajoute, M. le Président, que le
contre-interrogatoire qui est conduit depuis hier soir par le
député de Mont-Royal est une manoeuvre de harcèlement
vexatoire à l'endroit d'un membre du barreau, Me Rosaire Beaulé.
Je n'ai rien d'autre à ajouter.
Le Président (M. Jolivet): Avant de quitter et de
suspendre la séance pour quelques instants...
M. Dussault: C'est une demande de directive, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Une demande de directive de la
part du député de Châteauguay. Faites-la rapidement, s'il
vous plaît, parce que je dois, avant 13 heures, donner ma
réponse!
M. Dussault: Oui. Je vais la faire rapidement, M. le
Président. Il a été évoqué que, au
début des travaux de cette commission, il y avait eu un consentement
pour que les travaux se passent de sorte que certaines règles - entre
autres les vingt minutes - ne s'appliquent pas. Je n'étais pas membre de
la commission au début, j'étais intervenant, M. le
Président. Je me rappelle avoir déjà demandé au
président d'une commission - vous présidiez à ce
moment-là - si je pouvais retirer mon consentement. Vous aviez rendu une
décision disant qu'on ne pouvait pas retirer un consentement. Dans mon
cas, je n'ai jamais donné mon consentement, puisque j'étais
intervenant. M. le Président, est-ce que je dois croire que je dois
maintenant, comme membre, continuer à assumer cette décision ou
si je pourrais - en demandant au président de ne pas faire durer cette
règle - obtenir de vous que cette règle cesse, puisqu'elle permet
des abus? On vient de le voir d'une façon évidente, M. le
Président. C'est une demande de directive.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
répondrai à cette question au même moment où je
répondrai à l'autre.
M. le ministre.
M. Duhaime: Je voudrais formuler la motion.
Le Président (M. Jolivet): Non. M. le ministre, je ne peux
en aucune façon vous le permettre tant que je n'ai pas
décidé, d'abord, s'il peut y avoir motion ou pas. Ce que j'ai
compris, c'est qu'il y avait une motion d'ajournement. Si ma décision va
dans ce sens, aussitôt, vous aurez le droit de parole. Si la
décision que j'ai rendue préliminairement n'est pas
retenue...
M. Duhaime: C'est parce que je voulais, M. le Président,
si vous me le permettez, qualifier...
Le Président (M. Jolivet): Oui, je comprends très
bien, mais je suis dans l'obligation de vous dire qu'il n'y a pas de motion
devant moi.
M. Duhaime: II n'y a donc pas de motion d'ajournement, non plus,
devant vous?
Le Président (M. Jolivet): Pour le moment. Si vous la
retirez, c'est évident que, pour moi, il n'y en aura pas.
M. Duhaime: Non.
Le Président (M. Jolivet): Mais la question n'est pas de
savoir si la motion doit être lue au complet ou pas. J'ai cru comprendre
que vous aviez l'intention, en vertu des articles que vous avez lus, de
proposer une motion d'ajournement de ce débat ou de cette commission. En
conséquence, je dois rendre une première décision sur
cela.
M. Duhaime: Pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté, M.
le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Duhaime: ...je voudrais qualifier la motion que j'ai
annoncée en me référant à des motions
d'ajournement, parce que, sur cette motion, je voudrais aussi que la commission
libère définitivement et immédiatement Me Rosaire
Beaulé.
M. Gratton: On s'en doute bien! M. Lalonde: On s'en doute,
oui.
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, je prendrai en
considération l'ensemble et je reviendrai avant 13 heures, soit pour
ajourner les débats, selon l'avis qui nous a déjà
été donné, jusqu'à mardi, soit pour rendre, sur les
questions qui sont là, une décision autre que celle que j'ai
préliminairement rendue. Donc, suspension. Je ne peux pas dire dans
combien de temps, mais je reviendrai le plus rapidement possible.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise de la séance à 12 h 47)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission reprend ses travaux. Je vais répondre aux
deux questions qui m'ont été posées.
Après avoir examiné la question avec des personnes qui
pouvaient m'être utiles dans la décision, je dois vous dire
qu'effectivement je n'avais pas erré quand j'avais affirmé qu'une
motion non annoncée comme celle-là pouvait être faite,
selon ce que l'article 77 dit, "en tout temps" au moment où la personne
a son droit de parole; elle ne peut en aucune façon interrompre une
personne qui a déjà, à ce moment-là, la parole. En
conséquence, je ne change en rien la décision que j'avais
déjà rendue de façon préliminaire, mais que j'ai
voulu quand même vérifier pour être plus sûr de la
décision que j'avais à rendre.
La deuxième partie concerne la demande du député de
Châteauguay. Je vais lui répéter aussi, en même
temps, ce que j'avais déjà indiqué dans une
décision qui avait été rendue, il y a quelque temps,
concernant le droit de retirer ce qu'on appelle le consentement une fois . que
la décision est prise; une fois que l'ensemble des membres de cette
commission a donné son consentement à une motion de façon
implicite ou explicite.
Vous savez que, comme président, je n'ai aucun pouvoir sur les
choix que vous pouvez faire comme commission. Je n'ai que des suggestions
à vous faire; si vous les acceptez, je les applique. Dans ce cas-ci,
j'avais suggéré, à l'époque, qu'on utilise 20
minutes par intervenant et qu'on revienne autant de fois qu'on le voudrait,
à condition de faire l'alternance, soit un premier tour de table, comme
on le dit, puis un deuxième et un troisième, si
nécessaire. À l'époque, on m'avait recommandé, sous
forme de consentement de part et d'autre, de pouvoir intervenir le temps que
l'on voudrait, jugeant essentiel de le faire comme tel. J'ai, depuis ce temps,
appliqué cette décision à partir d'un consentement. Cette
décision n'appartient pas à un individu; elle appartient à
la commission. La commission l'ayant acceptée, je ne puis la retirer
maintenant, comme je l'avais dit à l'époque, que sur consentement
de l'ensemble de députés puisque ce n'est pas à la suite
d'une motion votée à la majorité qu'elle a
été adoptée, mais par consentement. En conséquence,
je ne changerai rien à ce qui a déjà été dit
sur cette question.
Quant à l'autre partie qui est celle de libérer le
témoin ou l'invité, peu importe comment vous l'appelez
maintenant, ce sont, encore une fois, des choses qui peuvent être faites,
mais en temps et lieu, c'est-à-dire au moment où on a le droit de
parole. En conséquence, la parole était au député
de Mont-Royal et il lui reste quelques minutes pour le faire. M. le
député de Mont-Royal.
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sur une
question de règlement?
M. Duhaime: Oui. D'abord, je voudrais vous dire que j'accepte,
bien sûr, la décision que vous venez de rendre. Même si elle
ne fait pas mon affaire, je l'accepte, comme j'accepte toutes les
décisions des présidents de commissions ou de la
présidence de l'Assemblée nationale. Je voudrais vous demander
dans combien d'heures j'aurai la parole. Aussitôt que je l'aurai, je
ferai la motion que j'ai annoncée. Et si je n'ai pas la parole avant
mardi, 10 heures, je saisirai l'Assemblée nationale de cette affaire,
à la reprise des travaux normaux de l'Assemblée nationale,
à 14 heures, mardi.
Le Président (M. Jolivet): C'est votre droit le plus
strict, M. le ministre. Moi, je ne peux vous garantir dans combien de temps
vous aurez la parole. Si le député de Mont-Royal peut me
l'indiquer, je pourrai vous transmettre l'information. Mais, pour le moment,
tout ce que je sais, c'est que le député de Mont-Royal a la
parole.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, cela va dépendre du
nombre de fois que je serai interrompu, soit par le ministre, soit par d'autres
députés ministériels. Et cela va dépendre aussi de
la longueur des réponses -
non, les questions ne sont pas tellement longues - et de tout le reste.
Alors, M. le Président, je ne peux pas vous dire, à ce moment-ci,
combien de temps cela prendra.
Le Président (M. Jolivet): Pour que cela prenne le moins
de temps possible, commencez les questions.
M. Ciaccia: Très bien. Je voudrais seulement faire une
petite mise au point, M. le Président. Il est bien facile, du
côté du gouvernement, pour le ministre, d'accuser ce
côté-ci de faire du harcèlement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, M.
le député.
M. Laplante: J'ai quelque chose à dire, moi aussi.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, j'aimerais que vous posiez votre question, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Je peux la poser, mais je ne suis pas
assuré... Alors, je peux le faire de cette façon-ci: Me
Beaulé, je n'ai aucunement l'intention de vous harceler, mais je
voudrais que vous compreniez la position dans laquelle je me trouve maintenant.
Je suis à faire une interrogation à propos de la réunion
du 19 janvier. J'ai devant moi un procès-verbal où Me Michel
Jasmin est autorisé à signer un règlement. Je crois que
vous m'avez dit vous-même que M. Cownan -Cownan, Cownlan? -
M. Beaulé: Conlon.
M. Ciaccia: ...avait signé le règlement, une fois
qu'il avait été envoyé à Washington?
M. Beaulé: J'ai déjà répondu à
cela, M. le Président.
M. Ciaccia: Non, non, je ne pose pas la question...
M. Beaulé: J'ai dit que cela a été
signé à Washington, le 21 janvier 1979.
M. Ciaccia: Bon, le 21 janvier, exactement. Alors, M. le
Président, je voudrais attirer l'attention de Me Beaulé sur le
fait que le 19 janvier, effectivement, tous les défendeurs signent un
projet de règlement et que la SEBJ n'est même pas encore
autorisée à négocier un règlement. Alors, j'ai le
droit de me poser des questions et de savoir ce qui s'est passé le 19
janvier, au bureau de Me Jean-Roch Boivin, chef de cabinet du premier ministre.
J'ai le droit d'avoir certaines réponses. Je poursuis pour essayer
d'avoir une explication sur ces événements, sur le fait que les
défendeurs signent un règlement comme un fait accompli. On sait
que, le 3 janvier, M. Claude Laliberté s'est fait dire: Écoute,
le premier ministre veut un règlement. Je ne ferai pas tout le
résumé, mais la SEBJ n'a même pas encore le mandat de
négocier...
M. Beaulé: M. le Président, est-ce que je peux
demander votre protection?
Le Président (M. Jolivet): Très bien, Me
Beaulé.
M. Beaulé: Je soumets que M. le député de
Mont-Royal fait des affirmations qui ne sont pas exactes et sur lesquelles je
n'ai aucun contrôle, non plus. Je soumets que je suis ici pour
répondre; j'y suis depuis hier matin. S'il a des questions, je veux bien
y répondre dans la mesure où je n'y ai pas déjà
répondu à plusieurs reprises. Mais je soumets que la façon
dont les questions sont enveloppées m'oblige pratiquement chaque fois
à rétablir les faits. Je ne crois pas que ce soit dans
l'intérêt de la commission et ce n'est pas, non plus, conforme
à ce que je considère comme des principes
élémentaires de justice à mon égard.
Le Président (M. Jolivet): Me Beaulé, je vais
demander, comme je l'ai fait pour tout intervenant, de poser effectivement des
questions. Je serais tenté de rappeler l'intervention du
président de l'Assemblée nationale, hier, sur la façon
dont les questions devraient être posées à un ministre et
de vous demander de l'appliquer à la personne invitée,
c'est-à-dire de lui poser des questions directes pour qu'elle puisse y
répondre de façon aussi directe.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voulais, justement, situer mes questions à
Me Beaulé. Qu'avez-vous dit, durant la réunion du 19 janvier, au
bureau de Me Jean-Roch Boivin?
M. Beaulé: Cela se résume à ceci, M. le
Président. J'ai présenté MM. Woll et Fanning à M.
Boivin. Je vous ai dit à plusieurs reprises que M. Woll a
expliqué à M. Boivin les préoccupations du syndicat
international face à cette poursuite. J'ai déjà
répondu là-dessus quant à M. Woll. Quant à moi, mon
rôle en a été un de spectateur principalement. J'ai
présenté mes confrères américains à M.
Boivin et j'ai écouté.
M. Ciaccia: Très bien. Entre le 3 octobre 1978 et le 2
février 1979, est-ce que vous avez communiqué avec des membres du
conseil d'administration, par téléphone ou autrement?
M. Beaulé: Conseil d'administration de...?
M. Ciaccia: De la SEBJ.
M. Beaulé: Non. J'ai déjà répondu que
je n'avais eu aucun contact direct ou indirect. J'ai dit cela, je crois, trois
fois. Je n'ai eu aucun contact direct ou indirect avec la SEBJ et même
avec les avocats du contentieux de la SEBJ.
M. Ciaccia: Non. Je parlais du conseil d'administration, des
nouveaux membres qui avaient été nommés le 3 octobre, je
crois.
M. Beaulé: J'ai répondu à la question, aucun
contact. Je le répète pour la quatrième ou
cinquième fois.
M. Ciaccia: Venons-en à la réunion du 2
février au cours de laquelle vous avez rencontré Me Jean-Roch
Boivin au bureau du premier ministre avec Michel Jasmin. Cette réunion a
eu lieu le matin. C'était le lendemain de la rencontre du 1er
février au cours de laquelle le premier ministre a exprimé
à certains membres du conseil d'administration qu'il fallait
régler la cause. Qui a convoqué cette réunion?
M. Beaulé: De mémoire - je me suis
déjà exprimé là-dessus devant la commission - c'est
moi qui ai demandé à M. Boivin de me recevoir. Je l'ai dit hier.
Je lui ai soumis un document daté du 29 janvier. J'ai expliqué,
hier, assez longuement à la commission les circonstances. Le 29 janvier,
le tribunal avait siégé. Le 29 janvier durant la soirée,
j'ai préparé un document qui portait sur la
non-responsabilité de l'International Union of Operating Engineers dans
cette affaire, une mise à jour, si vous voulez, de ce document, parce
que la contestation du 28 novembre comptait déjà des
éléments. J'ai ajouté d'autres éléments qui
avaient été connus au cours de l'enquête qui avait
commencé le 15 janvier. J'ai préparé ce document-là
et j'ai demandé à M. Boivin de me recevoir pour le lui soumettre.
C'est là le but de ma rencontre. Je vois que j'ai été
là de 10 h 07 à 11 h 12. Je pense, encore une fois, que la
réunion a été beaucoup plus courte que cela.
M. Ciaccia: Est-ce que vous avez une copie du document?
M. Beaulé: Je n'en ai pas avec moi; je l'avais encore la
semaine dernière, quand j'ai fait ce texte, la déclaration que
j'ai lue hier. Je ne l'ai pas avec moi. Nous l'avons utilisée pour les
fins de la préparation de ce document.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il serait possible de nous le
communiquer?
M. Beaulé: Je ne le crois pas. Pour répondre
très clairement, je pense que parmi... J'ai des tonnes de documents, je
l'ai simplement mise au panier. Je veux déclarer, comme je le suis
depuis le début, sous mon serment que j'ai utilisé cette
déclaration et je l'ai revue, datée du 29 janvier, pas plus tard
que le mercredi 27 avril. Nous l'avons mise au panier, comme on a mis au panier
beaucoup de copies de documents qui sont reproduits.
En d'autres termes, ce que cela veut dire, c'est quand un document
devient inutile, je ne vois pas l'à-propos de le garder dans mes
dossiers. En somme, cela veut dire que j'ai intégré dans le
mémoire que je vous ai soumis, dans la partie III aux pages 12 et
suivantes, le contenu du document que j'avais remis à M. Boivin le 2
février, préparé le 29 janvier. La seule différence
entre le texte que vous trouvez dans mon mémoire aux pages 12 et
suivantes et le texte remis à M. Boivin le 2 février 1979, c'est,
évidemment, la référence au témoignage de M. Hamel
rendu le 30 janvier.
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Question de
règlement?
M. Lalonde: Je veux être bien sûr d'avoir bien
compris. Est-ce que vous dites que vous avez conservé ce document
jusqu'au 27 avril 1983?
M. Rodrigue: M. le Président, une question de
règlement.
M. Lalonde: En 1983? C'est parce qu'il n'a pas donné de
date-Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse.
Je m'excuse.
M. Rodrigue: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Le
député de Mont-Royal a la parole et ce n'était pas au
député de Marguerite-Bourgeoys de poser cette question. Je pense
que le député de Mont-Royal peut la poser.
M. Ciaccia: C'est exactement la question que j'étais pour
poser. Vous venez de nous dire...
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, je m'excuse, j'ai une question de règlement à ma
droite, de la part du ministre.
M. Duhaime: Vous avez accordé la
parole au député de Marguerite-Bourgeoys et il a
utilisé son droit de parole.
Le Président (M. Jolivet): Je ne l'ai pas
accordée.
M. Duhaime: Mais il a effectivement pris la parole.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, M. le
ministre!
M. Duhaime: En vertu du principe de l'alternance, M. le
Président, je vous demanderais la parole.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je dois vous
dire que je l'ai interrompu. Il m'a posé une question de
règlement. De part et d'autre, souventefois on utilise la question de
règlement pour essayer de faire une intervention. J'ai effectivement
arrêté le député de Marguerite-Bourgeoys sur cette
question de règlement et, en conséquence, je ne lui ai pas
accordé le droit de parole, je l'ai interrompu. Mais, comme il est 13
heures, j'ajourne nos travaux à mardi, 10 heures.
(Fin de la séance à 13 h 02)