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Question avec débat
(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Richard): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Mesdames, messieurs, bonjour. Je déclare ouverte la séance
de la commission parlementaire de l'éducation, des affaires culturelles
et des communications, aux fins d'entendre le débat sur la
questionqu'on appelle justement question avec débat
proposée par Mme le député de L'Acadie, qui se lit comme
suit: "La politique de subvention à la recherche du gouvernement du
Québec et son application".
Etant donné que c'est la première question avec
débat, après avoir nommé les membres de la commission, je
vais me permettre, pour les fins du journal des Débats, de lire
l'article 162a qui donne, en quelque sorte, les règles de fonctionnement
de ce genre de séance de commission.
Les membres de la commission sont M. Alfred (Papineau), M. Bertrand
(Vanier), M. Charbonneau (Verchères), M. Charron (Saint-Jacques), M.
Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Ciaccia (Montréal)...
Mme Lavoie-Roux: Remplacé par M. Ray-nauld,
d'Outremont.
Le Président (M. Richard): M. Raynauld (Outremont)
remplace M. Ciaccia (Mont-Royal); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M.
Dussault (Châteauguay), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Guay
(Taschereau); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplacé par M. Forget
(Saint-Laurent); M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé).
M. Brochu: M. Le Moignan de Gaspé est remplacé par
M. Brochu (Richmond).
Le Président (M. Richard): M. Le Moignan (Gaspé)
est remplacé par M. Brochu (Richmond). M. Paquette (Rosemont), M. Roy
(Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Mme Lavoie-Roux: Vous n'êtes pas là!
Le Président (M. Richard): M. Morin (Sauvé).
M. Morin (Sauvé): Je remplacerai M. Chevrette, de
Joliette-Montcalm, M. le Président.
Règles spéciales de la
commission
Le Président (M. Richard): Je lis l'article 162a:
"Lorsqu'une commission élue est saisie d'une question avec débat,
elle est soumise aux règles spéciales suivantes: a) le
député qui a donné l'avis de question avec débat a
droit d'être entendu le premier et le ministre questionné peut lui
répondre immédiatement après; chacune de ces interventions
doit être limitée à vingt minutes; b)un
député peut prendre la parole aussi souvent qu'il lui
plaît, à condition de ne parler plus de vingt minutes en tout;
cette restriction ne s'applique pas au député qui a donné
l'avis de question avec débat, ni au ministre questionné,
lesquels ont un droit de parole privilégié; c)le ministre peut se
faire accompagner des fonctionnaires de son choix et les autoriser à
prendre la parole; ils parlent alors en leur nom; d)la commission ne
désigne pas de rapporteur et il n'y a pas de rapport à
l'Assemblée; e)le quorum est présumé exister et l'absence
du quorum ne peut être invoquée; f)il ne peut y avoir ni motion,
ni vote; g)à treize heures, ou lorsqu'il n'y a plus d'intervenants, le
président met fin aux travaux de la commission".
Je vous indique en outre que, comme règle de pratique, si le
proposeur, de même que le ministre questionné me l'indiquent avant
la fin de la séance, je leur réserverai à chacun quelques
minutes pour tirer leurs propres conclusions. Ce sera dans l'ordre inverse du
commencement, c'est-à-dire que le ministre aura le droit de
réplique final.
Mme le député de L'Acadie, comme proposeur, je vous donne
immédiatement la parole.
Exposé du sujet Mme Thérèse
Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Laissez-moi
d'abord vous exprimer notre satisfaction pour la rencontre de ce matin, qui
nous permet d'explorer une nouvelle formule dans notre régime
parlementaire. Je voudrais, au départ, vous assurer et assurer le
ministre d'une participation positive de notre part. Même si le titre est
débat, je pense qu'il se veut un débat tout à fait
positif.
Je voudrais d'abord souligner au ministre le grand intérêt
que nous accordons au thème de notre rencontre de ce matin, et ceci pour
différentes raisons. Je n'en aborderai que quelques-unes,
évidemment, la première étant l'importance toujours plus
grande que constitue la recherche dans les pays industrialisés.
Même si des périodes économiques plus difficiles semblent
parfois ralentir temporairement l'élan dans ce domaine même
là, il faudrait peut-être se demander si c'est là que
devraient d'abord s'appliquer des mesures d'austérité ce
ralentissement ne saurait être que passager puisque les problèmes
que doivent régler les sociétés deviennent de plus en plus
complexes, qu'ils soient d'ordre social, économique ou autre.
Les défis que constituent les problèmes d'énergie,
de pollution, de consommation des ressources, de santé, de
vieillissement des populations, pour n'en mentionner que quelques-uns,
indiquent bien que la recherche devient de plus en plus une priorité, si
elle ne l'est pas déjà.
Une seconde raison, qui nous paraît importante et qui nous a
amenés à porter ce sujet sur la place publique, d'une certaine
façon, est que nous avons peut-être ici une occasion assez unique
de sensibiliser et d'informer la population sur un sujet avec lequel elle est
très peu familière. S'il est un secteur qui s'adresse à un
groupe d'initiés, parmi lesquels je ne me compte pas, c'est bien celui
de la recherche scientifique. Compte tenu que les contribuables demeurent
toujours ceux qui en assument le coût, il est peut-être important,
même si cela ne sera pas facile, de tenter de les mettre davantage dans
le coup en tentant de vulgariser l'information ou, du moins, de mieux y
expliquer les grands objectifs poursuivis dans l'établissement de ces
politiques portant sur la recherche scientifique.
Le résultat sera peut-être qu'en période
d'austérité on coupera moins allègrement dans ce domaine
qu'une grande partie de la population connaît peu et qu'en
conséquence elle juge rapidement superflu. D'ailleurs, ce n'est
certainement pas de ce côté-là qu'on verra de grandes
marches de protestation si de telles mesures d'austérité sont
adoptées.
Il serait peut-être également intéressant pour la
population, parmi un grand nombre d'informations, de connaître le montant
total affecté à la recherche si on tient compte de toutes les
sommes utilisées à l'intérieur des différents
ministères pour des recherches qu'ils assument eux-mêmes ou qu'ils
confient à différentes institutions paragouvernementales ou
privées.
Une troisième raison nous incitant à aborder cette
question, qui est en fait un peu le prolongement de la deuxième, c'est
qu'à titre de responsables de l'administration des deniers publics nous
puissions assurer la population et les chercheurs eux-mêmes que les
critères utilisés pour décider de l'affectation des
subventions, que les mécanismes administratifs prévus pour
l'application de ces subventions et qu'enfin les mécanismes de
contrôle et d'évaluation des performances soient les plus clairs
et les plus rigoureux possible. Alors que, jusque vers la fin des années
soixante, l'initiative, dans les subventions à la recherche, provenait
surtout de sociétés à but non lucratif et
particulièrement du gouvernement fédéral, depuis ce temps,
les provinces, et en particulier le Québec, ont commencé à
jouer un rôle croissant en tant que pourvoyeurs de la recherche.
Il semble que cet effort du gouvernement provincial ait
été le résultat d'une prise de conscience de la
nécessité de se doter de politiques de recherche collant
davantage à sa spécificité culturelle et à son
évolution socio-économique.
Après un an au pouvoir d'un nouveau gouvernement, même si
nous savons qu'il a créé un comité de coordination et
trois comités sectoriels chargés respectivement de la recherche
gouvernementale, de la recherche industrielle et de la recherche universitaire
qui doivent publier incessamment, nous dit-on, un livre vert sur la politique
québécoise de |a recherche scientifique, il n'en demeure pas
moins que le gouvernement actuel a la responsabilité dans ce domaine
d'administrer des sommes déjà importantes et qu'il se doit de
nous faire connaître ses orientations actuelles ou les priorités
qu'il entend établir pour déterminer la répartition des
subventions à la recherche.
Certains seront peut-être quelque peu déçus de
réaliser que le thème retenu pour ce premier débat n'ait
pas pour objectif principal, et je voudrais être très claire
là-dessus, de faire la lumière sur certaines
irrégularités qui auraient pu fausser le processus
régulier prévu pour l'affectation de certaines subventions. Nous
croyons que le ministère de l'Education du Québec est
présentement saisi de ce problème et qu'il lui revient d'examiner
sérieusement plus à fond le dossier.
Nous souhaitons que, si des situations particulières sont
touchées à l'occasion de la discussion de principes
généraux, elles le soient d'une façon tout à fait
incidente. Nous pouvons seulement demander au ministre qu'il nous assure qu'il
fait un examen sérieux du problème particulier dont nous avons
entendu parler dans les dernières semaines, et qu'il fasse rapport en
temps et lieu à l'Assemblée nationale.
M. le Président, l'Opposition officielle, pour sa part, voudrait
ici énoncer ou tenter une ébauche de principes qui ne seront
certes pas exhaustifs, mais qui lui apparaissent importants dans
l'élaboration d'une politique de recherche pour le Québec. En
premier lieu, nous voulons dire et souligner très fortement que
l'Opposition officielle reconnaît l'importance primordiale des
activités de recherche scientifique. Là-dessus, nous voulons
accorder notre appui aux efforts qui seront déployés par le
gouvernement du Québec pour faire, de la recherche scientifique, une
priorité au Québec.
Je pense qu'à cet égard nous ne devrions pas nous cacher
souvent derrière des querelles de clochers, qui ont leur importance, je
ne veux pas les minimiser, mais quand même ceci ne devrait pas faire
mettre en veilleuse une priorité qui nous apparaît tout à
fait fondamentale.
Un deuxième principe que nous aimerions signaler, c'est que,
même si l'Opposition officielle reconnaît que l'Etat peut faire
connaître ses priorités dans le domaine de la recherche, nous
croyons cependant que dans la répartition des fonds la qualité
intrinsèque des projets présentés doit conserver la
préséance sur les priorités établies par
l'Etat.
Un autre principe est que l'Opposition officielle croit qu'il est plus
sain dans ce domaine, comme dans d'autres, que le milieu établisse
lui-même l'équilibre entre la recherche fondamentale et la
recherche appliquée. Dans le cas d'un déséquilibre non
souhaitable entre les
deux, qu'on intervienne au niveau des causes profondes ou de l'examen
des causes profondes et des palliatifs à apporter, plutôt que par
un réajustement mathématique qui risquerait fort d'être
artificiel.
M. le Président, j'aurais beaucoup d'autres observations et
commentaires à formuler sur un sujet aussi important que la recherche.
Je doute fort que nous puissions examiner ce matin, dans le temps qui nous est
alloué, tous les aspects de cette question qui, d'après ce que
l'on me dit, fait pour la première fois l'objet d'un débat
à l'Assemblée nationale.
Je m'arrêterai afin de permettre au ministre de répondre
à ces premières interrogations, pour qu'ensuite on puisse
reprendre la discussion sous forme de dialogue.
Je souhaite, en terminant, que cette première parlementaire, M.
le Président, s'avère une expérience suffisamment
constructive pour que nous puissions la répéter avec profit. Je
désire donc de nouveau vous assurer de notre collaboration, ainsi que de
notre collaboration avec le ministre et son équipe de
fonctionnaires.
Je pense que nous pouvons procéder. Je ne sais pas si le ministre
veut faire quelques commentaires, à ce moment-ci, ou que nous
procédions à des questions. Je lui laisse le choix.
Le Président (M. Richard): Merci, Mme le
député de L'Acadie. M. le ministre de l'Education, vous avez la
parole.
Réponse du ministre M. Jacques-Yvan
Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il n'est pas
mauvais que soient débattus publiquement le rôle de la science et
celui de la recherche scientifique dans notre société.
Je me réjouis fort de la façon constructive dont Mme le
député de L'Acadie semble vouloir aborder cette
question-débat.
Depuis que la science a conquis sa légitimité contre une
certaine orthodoxie sociale, au siècle dernier, et contre le dogmatisme,
elle a pris une place croissante dans le système social. Elle a
pénétré les bases mêmes de la vie économique
et sociale, les connaissances scientifiques touchant désormais
directement le fonctionnement de la société.
Depuis la deuxième guerre mondiale en particulier, nous sommes
devant des rapports de dépendance, très étroits entre le
progrès économique et industriel, d'une part, et le
développement scientifique, de l'autre. On a pu parler de mobilisation
de la science comme facteur stratégique décisif dans la
défense et la poursuite des objectifs d'une nation, d'où
l'apparition de la politique scientifique des Etats, en particulier depuis la
seconde guerre mondiale; d'où l'apparition d'une recherche de plus en
plus structurée et orientée de la part des gouvernements;
d'où la grande controverse sur le transfert de la science et de la
technologie des Etats développés vers les Etats moins
développés.
Le Québec n'a pas échappé à ces
transformations scientifiques et sociales. Notre société, est-il
besoin de le rappeler, est venue tard à ces réalités, par
rapport aux autres sociétés occidentales. Il n'a guère
existé de milieu scientifique au Québec avant 1920 et les
développements ont été d'une lenteur extrême. Sans
doute fallait-il d'abord jeter les bases, mais nous en sommes encore
aujourd'hui, il faut bien le constater, aux fondements de ce qui pourrait
être un jour une véritable politique scientifique de l'Etat.
Depuis le milieu des années trente, les choses ont
progressé quelque peu. Le gouvernement est devenu plus conscient de
l'importance de la recherche. Les premiers laboratoires, les premiers
organismes scientifiques sont nés à cette époque. Nos
universités francophones, cependant, n'ont pas connu le niveau
d'activités de recherches que l'on trouvait à McGill ou à
Toronto sous l'impulsion du conseil, dit "national", de la recherche, le
conseil fédéral.
Notre propre office provincial des recherches scientifiques,
créé en 1937, fut un échec, il faut bien le
reconnaître.
Depuis la deuxième guerre mondiale, le Québec, et
particulièrement le Québec francophone, a accumulé
beaucoup de retard. Alors que d'autres pays profitaient de la guerre et de
l'après-guerre pour accélérer la recherche, nous
étions aux prises avec des questions constitutionnelles, notamment en ce
qui concerne le financement des universités et de la recherche. Peu
à peu s'est affirmée la mainmise d'Ottawa sur la science et le
développement scientifique. Avec la révolution tranquille, les
choses ont commencé à changer, non sans débats,
d'ailleurs. Fallait-il privilégier la recherche liée au
développement industriel ou la recherche fondamentale de type
universitaire, débat auquel Mme le député faisait allusion
il y a un instant? En 1966, nous avons connu de grands projets de loi, portant
sur le Conseil de la recherche scientifique et le centre de recherche
industrielle qui auraient marqué un tournant s'ils avaient franchi
l'étape de la première lecture en Chambre.
Depuis dix ans, les choses ont évolué plus favorablement
au Québec alors que, paradoxalement, on s'essoufflait ailleurs. Nous
avions un retard énorme à rattraper et je ne suis pas sûr
que nous ayons fait tout ce qu'il était nécessaire de faire pour
le combler. Nous avons tout de même créé, depuis une
dizaine d'années, l'IREQ, le CRIQ, le complexe scientifique de
Sainte-Foy, l'INRS, rattaché à l'Université du
Québec, la Commission de la recherche universitaire du Conseil des
universités, bref, un certain nombre de mesures qui, malheureusement,
n'ont pas été liées entre elles de façon
cohérente.
On peut dire que, depuis cette époque, on a créé
des conditions préalables au développement de la recherche
plutôt qu'une véritable politique scientifique. Pendant ce temps,
à Ottawa,
le Secrétariat des sciences était créé et le
gouvernement fédéral s'assurait une sorte de prédominance
dans le domaine de la recherche universitaire, en particulier, avec des
dépenses de $22 millions sur les $37 millions qui ont été
dépensés en 1969/70.
Je dois dire, M. le Président, que dans ce domaine comme dans
bien d'autres, le partage des compétences et des responsabilités,
qui n'est même pas clairement établi, constitue l'un des obstacles
majeurs à la définition d'une véritable politique
scientifique québécoise et, à mon avis, l'un des fils
conducteurs les plus importants dans la situation que nous apportons
actuellement.
Depuis 1970, de nombreuses démarches et des budgets croissants
ont été consacrés à la recherche, mais aucune
coordination des interventions gouvernementales n'a été
effectuée. Il y a eu l'espoir d'une concertation entre les deux niveaux
de gouvernement et d'un nouveau partage des responsabilités, mais ces
espoirs ont été déçus. Bref, depuis 1974, les
choses ne vont pas bien dans la recherche; on a même pu parler de
crise.
Heureusement, les travaux du Conseil des universités et de sa
commission de la recherche scientifique sur le rôle des
universités ont pu empêcher que tout sombre complètement.
Il y a eu également la création, en 1972, du Conseil de la
politique scientifique et du Bureau de la science et de la technologie qui
permettent d'espérer un meilleur avenir, mais qui n'ont pas encore,
hélas! il faut le constater, vraiment décollé du sol.
L'encadrement administratif est insuffisant. Les ressources
financières sont demeurées insuffisantes. On a créé
des organismes, mais on ne leur a pas donné les moyens d'être
efficaces. L'augmentation des budgets depuis 1972 ne suffit même pas
à couvrir les coûts de l'inflation, de sorte que, pour être
plus précis, nous nous trouvions, comme gouvernement, en décembre
1976, devant la situation suivante: dispersion des efforts, rôle
imprécis de l'Etat, absence quasi totale de politique scientifique.
Voilà le diagnostic qu'il faut porter sur ces dernières
années.
La recherche scientifique québécoise souffre de
sous-développement chronique et de dépendance à
l'égard du pouvoir fédéral, qui lui a d'ailleurs toujours
fait la portion congrue. Voilà la situation qui régnait dans ce
domaine, lorsque nous sommes arrivés aux affaires de l'Etat, d'où
la décision annoncée dès le premier discours inaugural de
présenter à la communauté scientifique et aux
Québécois un bilan, un diagnostic, en même temps que les
fondements d'une politique nouvelle de là recherche scientifique
québécoise. C'est le Livre vert en gestation, auquel on a fait
allusion tout à l'heure, le Livre vert sur la politique
québécoise de la recherche scientifique, qui traitera de trois
secteurs: la recherche gouvernementale, la recherche universitaire et la
recherche industrielle. Ce document devra proposer à la consultation des
citoyens du Québec des principes et des projets concrets touchant
l'organisation des subventions à la recherche universitaire,
l'évaluation des projets et des structures les plus appropriés
pour favoriser l'avancement de la recherche.
Nous avons déjà je l'ai sous les yeux le
plan modifié à plusieurs reprises, mais qui a le mérite
d'indiquer les divers domaines sur lesquels portera le Livre vert.
Je ne puis me permettre, évidemment, d'indiquer en détail
le contenu de ce Livre vert. Mon collègue, le ministre d'Etat au
développement culturel, qui est responsable de ce dossier avec moi, qui
en est le premier responsable, voudra peut-être tout à l'heure
apporter des précisions.
Toutefois, je pourrais vous donner une idée
générale du plan préliminaire du livre vert, après
quoi je consacrerai quelques minutes à l'exposé du plan de
relance et du plan de redressement que j'entends mettre en oeuvre pour ce qui
est plus spécifiquement de la recherche universitaire.
M. Raynauld: C'est une relance.
M. Morin (Sauvé): Un plan de relance à court terme
et un plan de redressement à moyen et à long termes...
M. Raynauld: J'espère que ce ne sera pas la même
chose que l'autre relance.
M. Morin (Sauvé): ... puisque nous avons trouvé une
situation à ce point déplorable qu'il faut parler de relance et
de redressement.
M. le Président, je laisserai le ministre d'Etat vous parler du
contenu du Livre vert. Je voulais simplement indiquer qu'il contiendra un
diagnostic de la situation actuelle, tant pour ce qui est de la recherche
gouvernementale que pour la recherche universitaire et industrielle. Il
contiendra également des indications sur les fondements d'une politique
de la recherche scientifique québécoise où nous
analyserons plus précisément les principes directeurs du
rôle de l'Etat dans le domaine de la recherche. Enfin, il contiendra des
recommandations pour tous les secteurs, y compris celui qui nous touche plus
particulièrement ce matin, le secteur universitaire.
Je ne sais combien de minutes il me reste, M. le Président, pour
exposer la situation que j'ai trouvée au ministère et les plans
de relance et de redressement que je voudrais décrire brièvement
à tout le moins, en vue d'amorcer la discussion qui suivra.
Le Président (M. Richard): II vous reste dix minutes, M.
le ministre, alors il n'y a pas de problème.
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie, M. le
Président, cela me donne amplement le temps.
M. Raynauld: Ce n'est pas suffisant, mais quand même.
M. Morin (Sauvé): Cela me donne le temps
d'amorcer la discussion. Je n'ai pas l'impression que nous puissions
régler l'ensemble de ces problèmes autour de la table ce matin,
mais au moins, étant donné l'attitude adoptée par
l'Opposition qui me paraît être extrêmement constructive, je
pense que nous pourrons peut-être arriver à déblayer le
terrain. En tout cas, j'imagine que c'est dans cet esprit que vous avez
proposé cette question-débat.
En arrivant au ministère, j'ai trouvé une situation qu'on
pourrait décrire brièvement comme étant une situation de
pourrissement sur pied. Ce n'est jeter la pierre à personne que de le
constater, d'ailleurs. Je pense que le système étant ce qu'il
était, il ne pouvait pas faire autrement que de mener à une
impasse dans ce domaine comme dans les autres aspects de la politique
scientifique.
M. Raynauld: Hélas!
M. Morin (Sauvé): Les difficultés
rencontrées dans le fonctionnement du service de la recherche ont
considérablement retardé les travaux et en particulier l'octroi
des subventions à la recherche. Dans les semaines qui ont suivi mon
arrivée au ministère, quand les deux grèves universitaires
me laissaient quelques loisirs, je tentais d'en savoir un peu plus long sur ces
problèmes liés à la recherche. Nous avions
décidé, le ministre d'Etat et ses collègues, du CMPDC, de
nous pencher sur l'ensemble de ces problèmes dès le mois de
décembre 1976, c'est-à-dire au cours des premières
semaines de notre mandat gouvernemental.
D'ailleurs, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, le
premier ministre, dans le discours inaugural, annonçait la mise en
marche de ce Livre vert sur la politique scientifique.
J'ai tenté de débroussailler la question des subventions
de recherche pour me rendre compte bientôt qu'il y avait lieu de mettre
sur pied un plan de relance à court terme pour m'assurer que les
subventions de l'année en cours puissent être
expédiées aux destinataires, qui les attendaient toujours, et un
plan de redressement, à moyen et à long terme, pour m'assurer que
nous sortions du bourbier actuel, qui date maintenant de quelques
années. Je puis vous donner une idée de ce que contient ce plan
de relance. D'ailleurs, j'ai demandé qu'on en fasse des copies. Je ne
sais pas si elles sont prêtes. Avec votre permission, M. le
Président, je vous remettrai copie de ce document, pour le
déposer devant la commission, ainsi que des copies additionnelles pour
les membres de la commission.
Le Président (M. Richard): Je vous signale que ce n'est
pas un dépôt formel devant la commission, mais disons une
production de pièces.
M. Morin (Sauvé): Un exhibit! Le Président (M.
Richard): P-1.
M. Morin (Sauvé): P-1 ?
Le Président (M. Richard): Je vous rappelle que P-1, c'est
"plaintiff".
M. Raynauld: C'est une relance de papier.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour être
plus exact, nous allons l'appeler M-1.
M. Laurin: Cela peut se traduire par plainte. M. Raynauld:
C'est une relance de papier.
M. Morin (Sauvé): Je pense que nous avons tous lieu de
nous plaindre de la situation qui règne depuis quelque temps dans le
domaine des subventions à la recherche universitaire. C'est la raison
pour laquelle, dans ce plan de relance, j'ai demandé à un
fonctionnaire de prendre en charge la direction du service. Il s'agit de M.
Marcel Gilbert, qui est directeur général de l'enseignement
supérieur, qui se porte directement responsable du fonctionnement du
programme FCAC en particulier, c'est-à-dire le programme de formation
des chercheurs et d'action concertée.
Le 3 novembre, M. Gilbert a désigné un professionnel du
service, M. Cliche, pour agir comme coordonnateur des activités du
service de la recherche universitaire. Dans le tableau qui vous a
été distribué, vous voyez quatre colonnes. Dans la
première, la situation au 31 octobre 1977; dans la seconde, ce qui a
été fait depuis le 31 octobre; dans la troisième, ce qui
reste à faire; enfin, la quatrième indique
l'échéancier. Si vous le voulez, nous allons considérer
très brièvement ce document, puisque vous l'avez devant vous,
avant que je vous fasse part du plan de redressement.
Tout d'abord, vous constaterez, dans la colonne de gauche, que sont
énumérés les volets du programme FCAC, c'est-à-dire
la constitution d'équipes de recherche, les centres de recherche, les
programmes majeurs de recherche, les organismes de service à la
recherche, les programmes d'aide aux revues scientifiques et le volet "action
concertée", lequel porte sur la câ-blodistribution, les plasmas,
les lasers et, enfin, la subvention générale, avant que nous
passions à quelques cas particuliers, à la page 6.
Pour ce qui est du volet "Equipes", l'annonce générale des
subventions aux institutions universitaires avait été
effectuée en septembre avec beaucoup de retard. Il restait à
informer les chercheurs individuellement des crédits qui leur
étaient alloués depuis le 31 octobre. L'ensemble des lettres
individuelles ont été transmises aux chercheurs dans
quelques cas elles sont sur le point de l'être de même que
les remarques justificatives à l'exception de celles émanant de
certains comités où M. Brochu agissait comme rapporteur,
c'est-à-dire les comités 6, 7, 8 et 10 qui ont posé des
problèmes particuliers.
Il reste, avant le début du mois de décembre.
c'est-à-dire au cours des jours qui viennent, à
compléter les fiches d'appréciation pour ces comités 6, 7,
8 et 10 et a les transmettre aux chercheurs concernés. Ce travail est en
cours et tout à l'heure j'inviterai, si vous le désirez, M.
Gilbert à vous donner plus de détails sur ce volet.
Le compte-rendu tenant lieu de rapport complémentaire du
Comité-conseil sur les améliorations suggérées pour
l'opération 1973/79 du FCAC n'était pas complété
mais nous avons maintenant un projet de compte-rendu qui tient lieu de rapport;
ce document propose un certain nombre de mesures de redressement. Il reste
à faire adopter le projet de compte-rendu, et l'échéance
est fixée au 5 décembre. Je vous fais grâce du reste; je
pense que les membres de cette commission peuvent prendre connaissance de tout
ce qui a été fait depuis le 31 octobre, c'est-à-dire
depuis le moment où nous avons confié à M. le directeur
général de l'enseignement supérieur la
responsabilité de remettre de l'ordre dans le service, qui était
réduit à une véritable paralysie depuis quelques semaines
en particulier.
A cela doit s'ajouter, M. le Président, un plan de redressement
à moyen et à long termes. Ce plan de redressement est
déjà passablement élaboré. Malheureusement il n'a
pas encore acquis sa forme définitive, de sorte que je ne suis pas en
mesure de le déposer devant la commission. Nous sommes à y
travailler d'arrache-pied. Il est beaucoup plus développé que le
programme de relance et exigera évidemment beaucoup plus de travail. Je
dois ajouter qu'il sera lié, dans une certaine mesure, aux conclusions
du Livre vert sur la recherche scientifique, particulièrement le volet
universitaire.
Pour ce qui est de l'avenir donc, mon cabinet a demandé un plan
de redressement au service de la recherche et qu'on s'engage dans cette
démarche de façon urgente. Le premier projet de redressement m'a
déjà été communiqué d'ailleurs. Il comporte
trois parties: une description de la situation actuelle, les réformes
envisagées et l'échéancier. Je me permettrai de donner
quelques exemples de ce que contient ce rapport.
Tout d'abord, il porte sur l'élaboration des politiques de
soutien à la recherche, en second lieu, de façon plus
précise, sur la gestion du programme FCAC et, enfin, sur l'organisation
du service de la recherche universitaire au sein de la DGES.
Pour ce qui est de l'élaboration des politiques de soutien
à la recherche universitaire, elle se fait dans le cadre de la
préparation du document de travail sur les stratégies triennales
d'allocation de ressources dans le réseau universitaire. La
préparation de ce document comporte un certain nombre d'étapes,
comme la rédaction d'un document de travail de la DGES et la
révision de celui-ci par le comité de régie du secteur
postuniversitaire, ce que nous appelons le CODEP, par le bureau des
sous-ministres et par le conseil du ministère.
L'étape suivante est la transmission de ce document au Conseil
des universités, pour avis, et aux universités, pour
commentaires. Après réception de ces avis et commentaires, nous
révisons à nouveau le document â la DGES et l'acheminons
vers l'approbation finale par le ministère. Enfin, le document est
diffusé. Là-dessus, nous n'envisageons pas de réforme
parce que le processus s'est avéré satisfaisant jusqu'ici. Il y a
tout de même des choses qui fonctionnent, je dois le dire, dans ce
service.
M. Forget: On commençait à s'inquiéter,
c'est rassurant.
M. Morin (Sauvé): Comme on le sait, il a un budget qui
frise les $10 millions maintenant, et les événements qui ont
été rapportés dans les journaux à la suite de
certaines fuites, concernant un document dont mon cabinet avait demandé
la rédaction ne portent que sur certains aspects de l'octroi de ces
programmes de recherche, en particulier le programme FCAC.
La politique de soutien à la recherche se trouve dans la
définition du contenu du programme FCAC, et les principaux
problèmes qui ont trait au contenu sont les suivants. D'abord, il y a
multiplicité et ambiguïté des objectifs. Nous voulons, parmi
les réformes envisagées, réévaluer les objectifs du
programme FCAC dans son ensemble. A cette fin, nous songeons à former un
comité à court terme pour clarifier les objectifs
susmentionnés. A ce comité pourraient siéger notamment des
représentants du ministère de l'Education et de la Commission de
la recherche universitaire du Conseil des universités.
On s'est plaint également de la faiblesse de la coordination
intragouvernementale et intergouvernementale et de l'impact négatif que
cela pouvait avoir sur les objectifs retenus. Le comité auquel nous
songeons devra rencontrer les organismes québécois, et même
les organismes fédéraux analogues, notamment les conseils
fédéraux de la recherche, afin de préciser les objectifs
spécifiques poursuivis par chacun.
Il a pu exister également, il faut le souligner, des divergences
de vues entre la conception de la politique de recherche du service de la
recherche et celle de la Commission de la recherche universitaire du Conseil
des universités. Il faudra, parmi les réformes envisagées,
concilier ces points de vue divergents et annoncer officiellement la position
du ministère de l'Education aux termes des travaux du comité.
M. le Président, nous avons devant nous, au ministère de
l'Education, beaucoup de travail à faire pour remettre de l'ordre,
à court terme comme à long terme, dans le fonctionnement de ce
service qui, depuis quelques années, s'acheminait
irrémédiablement vers une paralysie qui, pour certains
comités, est devenu presque complète.
Il nous faudra préciser les politiques. Il nous faudra aussi
sûrement étoffer le personnel de ce service de façon
à le rendre plus efficace et plus compétent. Il nous faudra donc
intervenir au ni-
veau des objectifs, qui doivent être clarifiés, et au
niveau des personnes qui mettront en oeuvre ces objectifs. C'est ce à
quoi la DGES et le ministère vont s'occuper au cours non seulement des
semaines qui viennent, puisque j'aimerais bien que le plan de relance ait
abouti, pour la majeure partie de ses objectifs, avant Noël, mais
également à plus long terme quant au plan de redressement lequel
devra, dans le contexte du Livre vert, s'échelonner sur plusieurs mois,
voire sur plusieurs années. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Mme le
député de L'Acadie.
Discussion
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je remercie le
ministre de son exposé. Avant que nous nous engagions dans des
discussions, je voudrais demander au ministre s'il pourrait nous indiquer le
nom des personnes responsables de l'élaboration des politiques et de la
coordination entre le Conseil de la recherche scientifique et les
différents ministères, tant à l'intérieur du
ministère de l'Education que du ministère des Affaires
culturelles. Au point de départ pour le débat, cela pourrait
être utile.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je n'ai pas sous
les yeux tous les noms ni l'organigramme complet, mais je pourrais
peut-être prendre conseil et donner une réponse assez
complète. Pour ce qui est du ministère de l'Education, le secteur
de la recherche universitaire relève, bien sûr, du secteur
post-secondaire qui est sous la direction de M. Girard.
Il y a également M. Marcel Gilbert qui, en ce moment, est
responsable directement du plan de relance au service de la recherche. Le
bureau de la science et de la technologie, que j'ai mentionné tout
à l'heure dans mon exposé, relève également de M.
Girard. Il est sous la direction de M. Slivitzky, qui est présent,
d'ailleurs, se trouvant dans la troisième rangée. Il y a
également à l'heure actuelle un conseil de la politique
scientifique que j'ai également mentionné qui, en ce moment, fait
rapport au ministre de l'Education, mais il se peut qu'il y ait, à la
suite du Livre vert, des changements dans les responsabilités
ministérielles à l'égard de ce comité. Il est sous
la direction de M. Louis Berlinguet et M. Dominique Mascolo en est le
secrétaire.
Tournons-nous maintenant vers la question du Livre vert et des
responsables qui font partie du comité de coordination. On y trouve M.
Fer-nand Dumont, qui en est le président, M. Slivit-sky, que j'ai
mentionné il y a un instant, M. Gilles Cloutier, M. Maurice
Labbé, de l'Université de Montréal, M. Mascolo, que j'ai
également mentionné, M. Jean Gagné, de mon cabinet
il est derrière moi et M. Serge Doyon, qui agit comme
secrétaire.
M. Laurin: II y a le comité qui s'occupe plus
spécifiquement des universités pour la préparation du
livre vert, qui est dirigé par M. Maurice Labbé, de
l'Université de Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Ces choses ont été rendues
publiques.
M. Morin (Sauvé): Oui, ces noms ont été
rendus publics lors d'une conférence de presse.
M. Laurin: II y a trois autres membres: M. Saint-Pierre, de
McGill, M. Bellavance, du ministère de l'Education, et M. Vincent
Lemieux, de l'Université Laval.
Mme Lavoie-Roux: Comment s'articule, M. le ministre, la
coordination entre le ministre d'Etat au développement culturel ou
l'équipe qui travaille avec lui et le ministère de l'Education
dans ce projet?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le
ministère de l'Education est présent par ses fonctionnaires, par
des membres du cabinet du ministre et aussi par des personnes en provenance du
réseau universitaire, par exemple M. Maurice Labbé, de même
que M. Saint-Pierre de l'Université McGill, ou M. Lemieux de
l'Université Laval. Il y a donc comment dire, interprétation
très étroite entre le ministère et le réseau
universitaire, d'une part, et, d'autre part, les fonctionnaires qui entourent
le ministre d'Etat au développement culturel.
Mme Lavoie-Roux: II y a une première question que je
voudrais poser au ministre j'en ai soulevé quelques-unes dans le
court exposé que j'ai fait. Est-il capable, à ce moment-ci,
de nous dire quel est le montant total affecté à la recherche non
seulement à l'intérieur du ministère de l'Education, mais
dans l'ensemble des différents ministères du gouvernement? La
deuxième question: Comment se fait la coordination entre ces
différents groupes qui s'intéressent à la recherche?
M. Morin (Sauvé): A l'heure actuelle, M. le
Président, il se dépense, au Québec, au titre des fonds
publics proprement québécois, environ $40 millions qu'on peut
distribuer de la manière suivante: tout d'abord, $13,5 millions sont
consacrés dans divers ministères à ce qu'on pourrait
appeler la recherche interne. Je pense, par exemple, à la recherche dans
le domaine de l'agriculture. Vous savez qu'il existe des laboratoires dans
plusieurs ministères. Ces laboratoires sont, d'ailleurs, pour la majeure
partie, je pense, regroupés dans ce qu'on appelle le complexe de la
recherche de Sainte-Foy. Les autres ministères...
M. Laurin: Les Richesses naturelles.
M. Morin (Sauvé):... sont les suivants, à part
l'Agriculture qui consacre $5 millions à la recherche: les Richesses
naturelles qui y consacrent
$2 millions, les Terres et Forêts, un montant égal, et les
Pêcheries, qui y consacrent $1 million. Dans les autres
ministères, pour des projets de moindre importance, on trouve encore
$3,5 millions, pour un total de $13,5 millions dans l'ensemble des
ministères.
A cela s'ajoutent $26,5 millions pour ce qu'on pourrait appeler la
recherche externe, c'est-à-dire qui ne se fait pas strictement dans un
ministère. Cependant, une bonne partie de ces fonds est
administrée par les ministères et distribuée selon un
processus de choix, d'élimination, de subventions qui se trouvent, pour
la majeure partie, au ministère de l'Education, mais non exclusivement,
comme je vais avoir l'occasion de le dire dans un instant. Tout d'abord, le
FCAC, programme que j'ai mentionné tout à l'heure et qui
relève de mon ministère retient, à lui seul, $9,7
millions. C'est une somme fort importante et, croyez-moi, plus des neuf
dixièmes ne posent pas de problèmes à l'heure actuelle.
Les difficultés auxquelles il a été fait allusion
récemment portent surtout sur certains volets de ce programme.
Le Centre de recherche industrielle du Québec, organisme
gouvernemental que vous connaissez bien, je pense, retient, pour sa part, $6
millions, mais il relève, si ma mémoire est bonne, du
ministère de l'Industrie et du Commerce.
Les hôpitaux, dans le domaine de la santé, dépensent
encore $6 millions. L'agriculture externe, $1,5 million. Enfin, divers
programmes, qui sont répartis à droite et à gauche,
coûtent $3 millions, pour un total de $26,5 millions. Voilà, M. le
Président, le décompte des sommes qui sont
dépensées pour la recherche à même les fonds publics
québécois à l'heure actuelle.
M. Laurin: On peut ajouter que chacun de ces organismes
fonctionne indépendamment et qu'il n'y a actuellement aucune
coordination entre les différents ministères.
M. Morin (Sauvé): C'est l'un des problèmes auxquels
j'ai fait allusion tout à l'heure, M. le ministre d'Etat a bien raison:
rien n'est coordonné et il n'existe pas de priorités. Chaque
groupe a tendance à se considérer comme étant le seul
détenteur de ces fonds et de la vérité dans le domaine de
la recherche. Remarquez que c'est bien naturel. On peut dire qu'avec ce
système, tel qu'il a existé dans le passé, il était
à peu près inévitable d'aboutir à ce
désordre. Mais il est grand temps, justement, que l'Etat exprime des
priorités, organise l'ensemble de la recherche sur une base beaucoup
plus coordonnée.
Notez que $40 millions, c'est peu par rapport à ce qui se
dépense dans l'ensemble du Canada pour la recherche. Mais si
déjà ces $40 millions ne sont pas bien utilisés,
pleinement utilisés, on voit la faiblesse à laquelle notre
système de recherche peut aboutir. De sorte qu'il devient urgent de
porter un diagnostic sur la situation de la recherche et d'y apporter des
remèdes également.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre nous a dit
cela je le savais, je lui avais posé la question dans le texte
qu'il y a de la recherche qui se fait, de la recherche interne et de la
recherche externe, dans une proportion, je pense que c'était $13
millions à l'intérieur et la différence à
l'extérieur. Est-ce l'intention du gouvernement d'accentuer ou de mettre
l'accent sur la recherche externe ou sur la recherche interne dans
l'avenir?
M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas préjuger des
conclusions du livre vert. L'opinion que j'émettais personnellement
là-dessus est peut-être entachée du fait que je sois
moi-même un universitaire et que je me sois heurté dans le
passé à certains de ces problèmes auxquels nous faisons
allusion ce matin. Je vois d'autres députés également
universitaires qui sourient d'un air entendu. Je pense que nous savons tous de
quoi il s'agit. De sorte que ma tendance personnelle et le ministre
d'Etat voudra peut-être exprimer là-dessus la sienne propre
est de penser que la recherche externe n'a sûrement pas acquis
l'importance qu'elle devrait avoir. Ce n'est pas dire que la recherche interne,
elle, doive plafonner ou reçoive vraiment tout ce dont elle a besoin.
Mais si l'on compare la situation du Québec avec ce qui se fait dans
d'autres pays, on constate qu'il nous reste énormément à
faire à l'externe. M. le ministre d'Etat, voulez-vous ajouter quelque
chose?
Le Président (M. Richard): M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: Par déformation professionnelle,
évidemment, je serais porté à privilégier la
recherche effectuée en externe. D'ailleurs, dans le domaine de la
santé, c'est surtout dans les hôpitaux ou dans certains instituts
spécialisés que les résultats les plus intéressants
ont été apportés. Mais, il reste que le
développement de l'optique recherche-développement, en accord
avec les besoins nationaux, a amené plusieurs pays à
privilégier ou à mettre l'accent sur la recherche interne. Le
gouvernement fédéral le fait depuis plusieurs années. Il a
d'ailleurs construit presque tous ses laboratoires nationaux à Ottawa et
on fait des efforts actuellement pour en amener quelques-uns au Québec,
mais nos efforts n'ont pas encore été couronnés de
succès.
Mais je pense qu'il y a là un équilibre à maintenir
par rapport aux priorités que l'on se fixe. Il y a aussi lieu
d'étudier les modalités de collaboration entre la recherche
intragouvernementale et la recherche qui se fait à l'extérieur du
gouvernement. C'est un des objets de l'étude du livre vert. Nous sommes
en train d'étudier toutes les dimensions de ce problème
actuellement et j'espère qu'on sera en mesure d'apporter des optiques,
des orientations qui permettront aussi bien le progrès de la recherche
à l'intérieur du gouvernement qu'à son articulation avec
les recherches qui se font à l'extérieur.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais poser pour le
moment une dernière question au ministre de l'Education...
M. Morin (Sauvé): Mme le député de L'Acadie
me permettrait-elle de répondre à une autre de ses questions ou
suggestions qu'elle a faite plus tôt et que j'ai
négligée?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Morin (Sauvé): Mme le député nous a fait
part de son opinion à l'effet qu'il était absolument
nécessaire de mettre au point des critères de décision,
des mécanismes d'allocation et des mécanismes de contrôle
qui soient à la fois clairs et rigoureux. Je voudrais lui dire que, sur
ce plan, nous avons déjà fait du chemin, mais le système
n'est pas aussi étanche que nous le souhaiterions.
D'abord, je lui dirai que nous sommes totalement d'accord avec les
exigences qu'elle vient d'énoncer. On ne peut pas concevoir de programme
de recherche scientifique au niveau universitaire qui ne soit fondé sur
des critères clairs et rigoureux. Nous sommes à ce point d'accord
qu'en ce qui concerne le programme FCAC, la formation des chercheurs, ces
critères sont déjà publics. Ils font l'objet d'un document
public que messieurs les députés ont certainement eu sous les
yeux, intitulé "Les subventions de formation de chercheurs et d'actions
concertées, crédits alloués pour l'exercice 1977/78". Ce
document de cinq ou six centimètres d'épaisseur décrit
chaque année...
M. Raynauld: Au moins deux pouces.
M. Forget: C'est le langage scientifique ce matin.
M. Morin (Sauvé): Comme je pensais me trouver parmi les
chercheurs, j'ai utilisé le système métrique, mais de
toute évidence il y en a qui viennent d'Ottawa et qui sont encore
enclins à utiliser les pouces et les pieds; je ne leur en ferai pas
grief.
Toujours est-il que, chaque année, nous publions ces
critères, ces mécanismes d'allocations des subventions. Nous
faisons état des choix de domaines et de volets, nous
énonçons les crédits alloués et nous faisons
également rapport des allocations de fonds cas par cas. Cela est
très précis; j'imagine d'ailleurs que vous avez eu ce document
sous les yeux. Toutefois, je ne dis pas qu'il ne faut pas améliorer les
procédures et les mécanismes; nous en sommes conscients, et
notamment quant à certains volets et à certains programmes qui
sont décrits dans ce document.
Mme Lavoie-Roux: II y a une dernière question, à ce
moment-ci, que je voudrais poser, parce que j'ai quand même deux
collègues qui ont même beaucoup plus d'expérience que moi
dans le domaine de la recherche; alors, je voudrais leur laisser la chance de
s'exprimer.
M. le ministre, vous avez fait allusion, d'une part, au fait qu'il y
avait eu un retard dans les subventions accordées, retard qui
n'était pas nouveau, mais qui a peut-être été plus
aigu cette année, si je ne m'abuse. Vous avez fait allusion aussi aux
problèmes qui sont survenus et qui sont reliés aux fameux volets
dont vous faites l'énumération ici: volet "Equipes", volet
"Programmes majeurs", il y a des centres de recherche etc. Il reste que, pour
des gens peut-être un peu moins initiés, il ne s'agit pas
uniquement de déterminer tel volet, tel volet. Chacun des volets, je
pense, contient en soi des orientations ou indique des orientations possibles
du gouvernement. Alors, c'est dans ce sens où j'aimerais que vous
m'expliquiez, au moins à moi, peut-être que mes collègues
savent les réponses, quel est l'accent qui en fait était mis dans
le volet "Equipes" et l'accent qui est maintenant mis dans le volet "Programmes
majeurs". Je pense qu'il s'agit peut-être d'une orientation assez
fondamentale qui est différente dans les deux cas.
M. Morin (Sauvé): En 1977/1978, le budget des subventions
de recherche a été établi sur ce que nous appelons une
base historique.
Je veux par là dire que nous tenons compte de ce qui s'est fait
dans le passé. On ne peut pas totalement improviser dans le domaine de
la recherche universitaire, base à laquelle nous faisons des ajustements
annuels en tenant compte des suggestions des universités et de l'avis du
Conseil des universités et de la Commission de la recherche
universitaire. J'ai décrit d'ailleurs le mécanisme plus tôt
ce matin, montrant la dialectique, si je puis m'exprimer ainsi, qui existe
entre le ministère, le Conseil des universités et ses organismes
subsidiaires et les universités dans l'élaboration des budgets de
subvention. Le ministère ne peut procéder seul dans un domaine
aussi délicat. Le ministère ne se considère pas comme le
propriétaire de la recherche au Québec ni même des fonds
publics qu'il met à la disposition des chercheurs.
Sur la base du système que je viens de décrire, nous avons
réparti les montants pour l'année 1977/1978.
Mme Lavoie-Roux: Si je peux me permettre d'interrompre le
ministre, ce n'est pas tellement sur les montants que j'insiste, je pense les
connaître. Du côté du volet Programmes majeurs, on avait
prévu un montant de $500 000 qui, je pense, n'a pas été
utilisé.
M. Morin (Sauvé): II ne l'a pas été
effectivement, vous avez tout à fait raison.
Mme Lavoie-Roux: La plus grande partie du montant est
restée du côté du volet Equipes. Ce que je voudrais
comprendre, c'est l'orientation qui sous-tend ce nouveau volet Programmes
majeurs par rapport à l'orientation qui sous-tendait
le volet Equipes, que je comprends. J'ai cru saisir qu'il mettait
l'accent davantage sur la recherche fondamentale alors que l'autre
développe peut-être une "philosophie" différente. C'est
davantage là-dessus que je m'arrête que sur les montants
impliqués.
M. Morin (Sauvé): Avant de donner la parole à l'un
des sous-ministres pour qu'il donne tous les détails requis par Mme le
député, je voudrais dire deux mots au sujet de ces programmes
majeurs de recherche qui, vous le savez, ont été annoncés
en juillet 1976. Le gouvernement de l'époque avait prévu un
demi-million de dollars destinés à ce volet pour l'année
qui est en cours. Il s'agissait, si je puis résumer l'objectif
général, de créer des équipes de chercheurs autour
de programmes de recherche vraiment importants. Il fallait, bien sûr, au
début, lancer ces programmes. Dans une large mesure, c'était,
convenons-en, l'un des objectifs du gouvernement de l'époque, pour
répondre aux plans et aux façons de procéder du
gouvernement fédéral. Le Québec était toujours
réduit à des projets mineurs et décousus tandis que le
gouvernement fédéral, lui, intervenait massivement grâce
à des injections de fonds très importantes, créant des
programmes majeurs de recherche.
Le gouvernement a voulu le gouvernement précédent,
pour être plus précis commencer à redresser la
situation. 26 projets ont été soumis mais, malheureusement, il
semble que les intentions gouvernementales et ministérielles n'avaient
pas été clairement perçues, de sorte que sur les 26 qui
avaient été soumis, quelquefois un peu pêle-mêle, il
s'en est trouvé à peine trois qui paraissaient admissibles. Je me
réfère à l'INRS-Energie, l'INRS-Urbanisation et
l'INRS-Océanologie. En outre, neuf auraient pu être admissibles,
mais avec certaines réserves. En fin de compte, lorsque est venu le
moment de faire les choix définitifs, il a été
décidé que ce programme devait être
réexaminé, d'autant plus que le service qui devait les
administrer n'avait pas de ces programmes la même conception que le
gouvernement et le ministère.
C'est de là, d'ailleurs, que viennent plusieurs des
difficultés auxquelles il a été fait allusion
récemment. Quand un service commence à se considérer comme
étant plus ou moins autonome par rapport au ministère dont il
relève et a sa propre conception de ce que devrait être la
politique scientifique ce qui peut être explicable à bien
des égards puisqu'il n'y avait pas vraiment de politique
générale clairement établie on s'achemine vers des
impasses. Je pense que c'est l'une de celles auxquelles nous sommes
acculés.
En fin de compte, aucun projet n'a été accepté,
aucune subvention n'a été octroyée; 25 programmes ont
été rejetés et il y a eu recommandation d'une action
concertée avec le ministère des Richesses naturelles au sujet
d'un projet émanant de l'Ecole polytechnique. Je ne sais pas si la
décision définitive a été prise, je ne le pense
pas... La décision a été prise tout récemment, je
viens de l'apprendre.
C'est une décision qui date des tout derniers jours, M. le
Président, une décision administrative, bien sûr, et non
pas une décision politique.
Mme Lavoie-Roux: Les effets de la relance.
M. Morin (Sauvé): J'inviterais maintenant M. Girard
à compléter les renseignements que je viens de donner et à
répondre de façon précise à la question de Mme le
député.
Le Président (M. Richard): M. Girard, vous avez la
parole.
M. Girard (Jacques): Si on prend les trois volets principaux, le
volet équipes et formation des chercheurs, le volet centres de recherche
et le volet programmes majeurs, il faut faire les distinctions suivantes. Le
volet équipes est orienté davantage, comme vous l'avez
souligné, vers la recherche fondamentale et était destiné,
d'abord et avant, à nous permettre de former des chercheurs et à
nous permettre ensuite d'assurer un rattrapage, ces chercheurs ayant
été formés et ayant reçu de premières
subventions de recherche, se trouveraient dans une position plus favorable sur
le marché national ou international pour aller chercher des subventions
auprès des grands organismes subventionnaires.
Le deuxième volet Centres de recherche est, lui, davantage
tourné ou orienté vers la recherche appliquée et voulait
surtout développer la recherche interdisciplinaire. Je pense que nous y
sommes parvenus. Le troisième volet que l'on a tenté de
développer, celui des programmes majeurs, est bien davantage
tourné, orienté vers la recherche appliquée et voulait
favoriser le développement de programmes intégrés de
recherche. Nous avons obtenu, suite aux propositions que nous avons faites dans
les stratégies triennales, des réactions des universités
et du Conseil des universités nous suggérant de moins tenir
compte que nous n'aurions voulu le faire au point de départ des grands
axes majeurs de développement qui avaient été
assignés aux universités suite à l'opération
Grandes orientations menée par le Conseil des universités
auprès de chacune des universités. C'est autour de ce volet des
programmes majeurs que nous avons connu plus particulièrement des
difficultés, mais nous tentons, par la création récente
d'un comité tripartite, de l'adapter davantage à la
situation.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. Girard.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Richmond, vous avez la parole.
M. Brochu: Merci, M. le Président. J'aimerais aussi
à mon tour, au nom de l'Union Nationale, intervenir dans cette grande
première de nos traditions parlementaires sur l'importante question de
la recherche scientifique. Tout d'abord, j'aimerais préciser que devait
être présent ce
matin le député de Gaspé, qui aurait
été fort intéressé par la question, comme le
ministre le sait. A différentes occasions, à l'Assemblée
nationale, le député de Gaspé a manifesté son
intérêt pour différentes questions qui sont actuellement en
discussion et qui font partie, je pense, du grand ensemble de la discussion
dans laquelle on s'est engagé ce matin. Malheureusement, le
député de Gaspé était retenu à
l'extérieur et il m'a demandé de le remplacer à cette
commission ce matin.
M. le Président, pour commencer mes remarques, je veux d'abord
souligner que l'intervention du ministre, comme également la
première intervention du député de L'Acadie, se veut
d'abord d'ordre assez général. Le ministre a pu, à la
suite de cette première intervention du député de
L'Acadie, apporter certaines précisions fort intéressantes en ce
qui concerne le domaine de la recherche scientifique.
Il nous a présenté tout à l'heure son plan de
relance. Il a parlé d'échéanciers. Il a parlé de
réformes, en quelque sorte, de façon générale, en
ce qui concerne tout le secteur de la recherche scientifique.
Comme première question, avant de continuer plus loin mes
remarques, j'aimerais peut-être, avec votre permission, M. le
Président, demander au ministre à quelle date ce plan de relance
a-t-il été mis sur la table de travail du ministère,
à quelle date ce document a-t-il été produit, puisqu'en le
feuilletant je ne remarque à aucun endroit de date de parution? Est-ce
qu'il y a très longtemps que le ministre a demandé que ses
fonctionnaires lui préparent ce document de travail? Si oui, combien de
temps, environ?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le plan de
relance a été élaboré à compter de la
mi-octobre, et comme vous pouvez le voir, on a tenté d'établir la
situation au 31 octobre 1977, à la suite de la désorganisation
qui s'est installée au service de la recherche durant les mois de
septembre et d'octobre, désorganisation qui remontait en fait, à
plusieurs mois, sinon même à une année ou deux, et que les
sous-ministres ont tenté de régler par de nombreuses
interventions, jusqu'à ce que nous arrivions à une sorte
d'état de crise où il a fallu prendre le taureau par les cornes
en vue de transformer le système de la recherche, pour qu'il fonctionne
efficacement.
M. Brochu: En somme, si je comprends bien les propos du ministre,
il s'agissait là, à la fin d'octobre, d'un premier correctif
coordonné pour pallier le problème d'ensemble qui se posait
à ce moment.
M. Morin (Sauvé): C'est un plan d'intervention
immédiate, si vous voulez, mais qui fait suite à un certain
nombre de démarches en vue d'obtenir un fonctionnement plus efficace du
service, notamment à l'égard de nombreuses subventions qui n'en
sortaient pas.
M. Brochu: Oui, on a fait état, à
différentes occasions, et même à l'Assemblée
nationale, de ces retards dans l'octroi de subventions. J'aimerais revenir sur
une phase...
M. Morin (Sauvé): II y avait des tensions, au sein
même du service, que nous avions tenté de résorber à
diverses reprises, et qui avaient pris des proportions considérables
depuis quelque temps.
M. Brochu: J'aimerais, à ce stade-ci, avoir certaines
précisions de la part du ministre, sur ce qu'il entend par ce qu'il a
appelé lui-même, il y a quelques instants, la
désorganisation au sein de ce service. Est-ce que le ministre pourrait
maintenant nous faire état de cette situation qui prévalait
lorsqu'il est arrivé, si tel est le cas, et qui a semblé
s'aggraver au cours des mois qui ont suivis? C'est quoi, lorsque le ministre
nous parle de désorganisation à l'intérieur de ce service
dont il nous parlait tout à l'heure?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la
réponse que je pourrais donner à cette question mettrait en cause
la réputation d'un certain nombre de personnes, et on comprendra que,
s'agissant de porcelaine, je sois fort prudent dans mes réponses. Je
sais que le rapport que j'avais pressé M. Brochu de nous remettre le
plus tôt possible est entre les mains de la presse. Je sais qu'il est
même tombé entre les mains, par les soins de ladite presse, d'un
certain nombre de députés.
J'ai songé, je vous avoue, à un moment donné,
à le rendre public pour montrer à quel point il contenait des
inexactitudes et faisait état de problèmes qui ont
déjà été corrigés. C'est un rapport
incomplet, qui a traîné pendant des mois, alors que le directeur
du service, M. Gauvin, avait demandé ce rapport à M. Brochu
dès le mois de mars, je crois.
Le rapport devait être déposé le 7 avril. Nous
n'avons eu de rapport préliminaire et incomplet, qu'au mois de
septembre.
Une Voix: La date exacte?
M. Morin (Sauvé): Plus exactement, M. le Président
je dois corriger cette date c'est le 13 juillet qu'on nous a
remis ce rapport incomplet, passablement informe et contenant de nombreuses
inexactitudes. C'est pourquoi je voudrais inviter les députés,
sinon la presse, à utiliser ce document, qui est tombé entre
leurs mains, avec grande circonspection. Il peut donner lieu, je pense,
à des libelles diffamatoires caractérisés. C'est au risque
de chacun d'en faire l'utilisation qu'il voudra.
J'ai décidé en fin de compte de ne pas le rendre public,
me fiant à la conscience professionnelle le peut-on? je pense que
oui des journalistes et des députés. Si je le rendais
public sans l'accompagner d'un rapport complémentaire
considérable qui expliquerait les abus qui ont été
corrigés, qui ferait toutes les nuances sur certaines affirmations qui
s'y trouvent, le résultat serait de compromettre le système
d'octroi des subventions et notamment le jugement par
les pairs auquel nous sommes, en définitive, fort
attachés; bien qu'il n'ait pas fonctionné dans un comité,
il a fonctionné ailleurs de façon satisfaisante. Et parce qu'il y
a eu des difficultés notamment dans un comité, le numéro
10, nous ne voulons pas mettre en danger tout le système de jugement par
les pairs.
De plus, le rapport en question ne règle rien. Il ne propose
aucun remède particulier ou précis et, de surcroît, ne
pèche pas par cohérence. De sorte que, M. le Président, en
raison du risque de ternir la réputation de chercheurs qui ne
méritent pas ce traitement, j'ai décidé de ne pas le
rendre public. Si d'autres le font, ils sauront que ce rapport est cousu
d'embûches et d'inexactitudes et qu'il peut donner lieu à des
libelles.
M. Brochu: M. le Président, sur cette question fort
importante le ministre le conçoit très bien; d'ailleurs
ses propos le soulignent, sinon directement du moins implicitement ce
problème auquel donne lieu toute la question de ce rapport, le ministre
est conscient des remous qu'occasionne cette situation, quelle qu'elle soit et
quel qu'en soit son contenu. Je reprends parce que le ministre était
occupé. Le ministre est conscient des remous auxquels donne lieu la
parution de ce rapport, soit directement ou indirectement, comme cela a pu
avoir lieu, avec les inexactitudes qui y sont contenues comme le ministre le
souligne.
M. Morin (Sauvé): Fort heureusement, je dois dire, M. le
député, que les journalistes ont tout de même usé de
leur jugement dans l'utilisation des documents qu'ils avaient entre les mains.
C'est fort heureux car cela aurait pu donner lieu hélas
à des "chamboulements" plus importants en raison des inexactitudes et
des incohérences que contient ce rapport.
M. Brochu: Justement pour cette raison, M. le ministre,
étant donné que le rapport, selon vos propres propos, est
déjà entre les mains de la presse, sinon d'une partie du public
et même de certains députés comme vous l'avez dit tout
à l'heure...
M. Morin (Sauvé): II n'est pas entre les mains du public,
à ma connaissance.
M. Brochu: II n'y a qu'un pas parce que dans les journaux, de
toute façon, ils en ont fait état. Déjà la question
est devenue publique. Du fait que le rapport n'est plus strictement entre les
mains du ministère, déjà il devient pratiquement une
pièce publique. Compte tenu du fait, comme le disait tout à
l'heure le ministre, qu'il serait contenu, dans ce rapport, certaines
irrégularités graves qui pourraient donner lieu à des
interprétations malheureuses je continue dans le sens de
l'interprétation que lui donne le ministre ne serait-il pas
mieux, à ce stade-ci, comme vous l'avez souligné tout à
l'heure, de rendre public ce rapport en y incluant, comme vous l'avez dit, le
document d'explications pertinentes de sorte qu'on clarifie cette situation,
étant donné que le document est déjà entre les
mains de la presse et d'autres personnes possiblement?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je constate que
le député et l'Union Nationale fonctionnent en tandem avec un
journaliste qui s'est joint à eux pour la circonstance.
M. Brochu: M. le Président, je m'excuse.
M. Morin (Sauvé): Mais je vous dirai tout de suite que
vous prendrez vos responsabilités, si vous ou le journaliste
décidez de rendre le rapport public. Ma réponse est nette et
catégorique: Je ne le rendrai pas public parce qu'il pourrait
entraîner des injustices à l'égard d'un certain nombre de
personnes et, en particulier, de chercheurs. Je ne le ferai pas.
M. Brochu: M. le Président, je dois d'abord corriger une
remarque que le ministre a faite tout à l'heure. J'ai dû me
retourner, d'ailleurs, pour voir qui était derrière moi,
exactement, en plus des recherchistes de l'Union Nationale. Il n'est question
d'aucune collusion avec la presse, à ce stade-ci, pour essayer
d'extraire du ministre quelque document que ce soit.
M. Bisaillon: A ce stade-ci!
M. Brochu: S'il faut aller plus loin, on verra! Mais je voudrais
bien que le ministre prenne ma parole à ce sujet: le dossier que j'avais
ici, ce matin, je l'ai... D'ailleurs, le député de Gaspé
avait fait état clairement de la situation à l'Assemblée
nationale, et c'est à partir de documents de presse qui sont ici, qui
sont d'ailleurs publics...
Tout à l'heure, d'une certaine façon, on a abordé
la discussion d'une façon fort intéressante, d'une façon
philosophique, avec beaucoup d'égards dans différents
aspects.
Cependant, ce que je craignais, c'est qu'un des points majeurs le
ministre en est conscient reste en litige, auquel personne n'a
touché encore, et c'est toute cette question.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je pense que
plutôt que de gratter les plaies du passé ou de s'amuser à
regarder les quelques pustules qui couvrent le corps de la recherche, il faut
nous tourner vers l'avenir. C'est ce que veulent faire le plan de relance et le
plan de redressement. Autrement dit, il ne sert à rien de partir du
diagnostic incomplet, fragmentaire et inexact que vous avez eu sous les yeux,
ou qui vous a été communiqué sous une forme ou sous une
autre, parce que cela ne peut servir de fondement à une politique
rationnelle de relance et de redressement. C'est incomplet, on n'y donne qu'une
partie du tableau, et on n'y fait pas même allusion à tout ce qui
fonctionne. Il y a énormément de programmes qui ne posent pas de
difficultés, qui fonctionnent relativement bien.
M. Brochu: M. le Président, étant donné
et je prends les propos du ministre qu'il s'agit tout simplement
de pustules, ou même de "pus-tulettes", devrais-je dire, dans le sens que
le ministre le présente, raison de plus, à ce moment-là,
étant donné que ces "pustulettes" semblent créer beaucoup
de remous, de les présenter et de les identifier, soit devant cette
commission ou devant le public, pour que les gens impliqués dans la
recherche scientifique sachent également ce qui se passe. M. le
ministre, je m'excuse de souligner de nouveau cette question de cette
façon, mais, quand même, vous êtes pris avec les
problèmes du passé, qu'on veuille les considérer ou non;
que cela soient des pustules antérieures ou postérieures, vous
les avez, et elles vont continuer de vous démanger.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, que ce soient
les "pustulettes", comme le voudrait le député, ce sont des
problèmes réels, mais je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce
soit à gagner à les contempler puisque le document dont fait
état le député contient de lourdes inexactitudes, des
approximations, des accusations qui ne sont pas fondées, à
côté de certaines choses qui peuvent l'être, de sorte que
rien ne sert de le rendre public.
De toute façon, j'ai déjà donné ma
réponse. Le député sait très bien comment il peut
le rendre public. Qu'il prenne ses responsabilités!
M. Brochu: En ce qui concerne la question du rapport sur les
programmes majeurs...
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Brochu: ... est-ce que celui-là, on peut l'avoir?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, pour ce qui est
des programmes majeurs, j'ai dit ce qui pouvait être dit tout à
l'heure: Aucune subvention n'a été donnée en vertu de ces
programmes, cette année. S'il y avait eu des subventions sur lesquelles
on avait pu jeter quelque doute sérieux, c'eût été
autre chose. Il n'y a pas eu de subventions, et nous voulons réexaminer
plutôt le fonctionnement de ces programmes majeurs. Je tiens à
ajouter, cependant, que la Commission de la recherche universitaire du Conseil
des universités a pris position, en faveur du maintien du volet
Programmes majeurs pour 1978-1979.
C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, nous allons y consacrer un
montant semblable à celui qui avait été prévu
l'année dernière. Je puis donc rassurer le député:
II n'y a pas eu de subventions, quelles qu'aient pu être les tractations;
il n'y a pas eu dépense de fonds publics. Maintenant, avec un service
qui va être renouvelé, j'ose l'espérer, au cours des
semaines et des mois qui viennent, nous pourrons aborder l'année 1978/79
avec un peu plus d'efficacité quant au déroulement des
opérations.
J'ajoute que nous allons demander un nouvel avis sur les programmes
majeurs au Conseil des universités et à sa Commission de la
recherche universitaire; je m'engage à rendre publique la réponse
qui me sera faite.
Le Président (M. Bertrand): Mme le député de
L'Acadie demande simplement d'ajouter une remarque là-dessus, M. le
député de Richmond.
Mme Lavoie-Roux: Comme je l'avais dit au début du
débat, je ne veux entrer dans le cas spécifique. Seulement, j'ai
entendu les arguments du ministre de l'Education qui dit: "II n'y a pas eu de
dépenses de fonds publics, etc." Je ne veux pas même que vous me
répondiez. Je voudrais simplement souligner à votre attention que
les dépenses de fonds publics, c'est une chose, mais qu'il y a aussi des
personnes dont les droits et je ne veux me porter juge d'aucune
façon ont pu être lésés. C'est l'autre
dimension du problème et il faut s'assurer qu'il n'y ait pas d'injustice
de faite. C'est tout ce que je voulais dire sur ce point.
M. Morin (Sauvé): Je voudrais assurer Mme le
député que je suis tout à fait conscient de ces dimensions
du problème. Ce sont celles, d'ailleurs, qui sont les plus difficiles
à traiter parce qu'elles présentent des aspects humains. L'une
des raisons pour lesquelles je souhaitais que tout cela soit
réglé sur le plan interne, c'était justement que je
voulais protéger les réputations des fonctionnaires et des
chercheurs. En portant tout cela sur la place publique, je pense qu'on n'aura
pas fait avancer les démarches que nous avions déjà
entreprises pour assainir la situation.
Vous me direz: Cela a donné lieu au débat de ce matin.
Peut-être est-ce là l'origine du débat de ce matin, et, de
ce point de vue, ce n'est pas totalement négatif. Toutefois, pour ce qui
est des personnes en cause, je tiens à vous assurer que c'est une de mes
préoccupations principales dans cette affaire. Je vous assure que,
parfois, on se trouve devant des noeuds gordiens; les personnes qu'on
désire quelquefois protéger ne sont pas toujours disposées
à être protégées.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Richmond, est-ce qu'il vous reste encore du temps?
M. Brochu: Oui, il me reste encore du temps un peu. Vous pouvez
continuer, je reviendrai plus tard.
Le Président (M. Bertrand): M. le député
d'Outremont.
Remarques générales M. André
Raynauld
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Peut-être aussi
à titre de remarques préliminaires, compte tenu des
circonstances, je devrais faire quelques remarques générales. Je
dirai, au dé-
part, que le problème que nous envisageons ce matin est un des
problèmes les plus fondamentaux, les plus importants que nous ayons
à examiner. En effet, je pense qu'il n'y a aucun pays au monde qui
puisse se dispenser aujourd'hui d'attacher la plus grande importance à
la recherche scientifique, au développement de nouvelles idées,
à la diffusion de ce progrès scientifique et technique. C'est
indispensable au niveau de la place que peut occuper un pays dans le monde,
mais c'est aussi indispensable quant au progrès économique
lui-même, puisque aujourd'hui le progrès économique se
mesure beaucoup à l'habilité, à la possibilité
qu'ont les entreprises et à l'ensemble des agents économiques
d'introduire le progrès technique dans leurs activités.
M. Laurin: Et l'innovation.
M. Raynauld: Et l'innovation. Je pense que ce fait est reconnu.
Ce qui est peut-être moins reconnu, c'est la conséquence qu'on
devrait tirer d'une proposition, somme toute très
générale, mais conséquence qui, à mes yeux, est
d'une importance capitale, soit celle d'y consacrer des ressources
indépendamment de l'utilisation particulière qui peut être
faite de ces ressources.
Je reviendrai là-dessus dans un instant. Mais il me semble
qu'au-delà de tous les problèmes de gestion, au-delà de
tous les problèmes d'affectation de ces ressources, il y a d'abord le
niveau global des ressources qui sont affectées à ce secteur
d'activité, et à cet égard, je pense que le gouvernement
du Québec n'a pas attaché suffisamment d'importance à la
recherche scientifique jusqu'à maintenant.
Je crois que même les fonds qui sont consacrés à ce
domaine, à l'heure actuelle, sont insuffisants. Je voudrais assurer le
gouvernement du Québec actuel, sûrement, de notre appui à
nous, de l'Opposition officielle, s'il s'agit d'accroître les ressources
consacrées à la recherche scientifique, à la recherche et
au développement. C'est mon premier point.
Le deuxième, c'est que ce domaine en particulier a
peut-être été celui où les querelles
constitutionnelles et politiques entre Ottawa et Québec nous ont fait le
plus de tort. Ces querelles ont servi de prétexte à l'inaction du
gouvernement du Québec, ont servi d'excuses pour masquer un manque
d'intérêt, si on le mesure par les ressources effectivement
consacrées à ce domaine. Même si, aujourd'hui encore, le
ministre de l'Education ne s'est pas retenu sur cette pente, a succombé
lui aussi à la tentation d'essayer de mettre...
Mme Lavoie-Roux: C'est bien...
M. Raynauld: ... sur le dos d'Ottawa la responsabilité qui
est nôtre et pour laquelle nous avons des ressources, et si nous, nous ne
sommes pas assez sages pour affecter les ressources que nous avons, et de
façon suffisante, à la recherche scientifique, quand même
on viendrait à exclure de l'ensemble de ce champ d'activité le
gouvernement fédéral, on ne serait pas plus avancé. Je
pense qu'il faut que les ressources globales du Québec soient
affectées de telle sorte que ce domaine de recherche scientifique
reçoive l'appui indispensable dans toute société
contemporaine. Je crois aussi que ces querelles constitutionnelles et
politiques peuvent encore bloquer des développements indispensables au
Québec. Je prierais le gouvernement du Québec, surtout le
gouvernement actuel, je le prierais fort d'essayer de ne pas se servir de cette
excuse de difficultés de juridiction, de difficultés de
contrôle sur les fonds qui sont utilisés au Québec pour
ratarder encore davantage la définition d'une politique scientifique
pour la société québécoise.
Ici, je suis un peu inquiet parce qu'il me semble que dans les propos
qu'ont tenus les ministres et dans d'autres propos antérieurs, pas
seulement du gouvernement actuel, mais même des gouvernements
précédents, dans ce domaine on entend trop de remarques à
l'effet qu'il faille toujours tout contrôler, qu'il faille toujours
orienter, qu'il faille toujours se préoccuper davantage de l'utilisation
surtout des fonds des autres que de définir des politiques qui sont
positives. Je ne pense pas, surtout dans le domaine de la recherche, qu'on
devrait donner un poids indu à cette idée. Il y a des organismes
extérieurs au Québec qui consacrent des ressources il n'y
a pas seulement le gouvernement d'Ottawa, il y a aussi les organismes
internationaux à la recherche, bien sûr, si ce n'est pas
concerté avec les actions qui sont entreprises par le gouvernement du
Québec, ils doivent être perçus, de l'extérieur,
comme une source de désordre s'il y a des mots que je
déteste, c'est bien cela, mais le ministre de l'Education les a
employés lui-même parce qu'on n'a pas le contrôle
administratif sur toutes les ressources qui peuvent être
consacrées à ce domaine.
Je ne peux m'empêcher ici de faire allusion à des remarques
que j'avais entendues, il y a déjà quelques années, de la
part d'un sous-ministre qui avait déploré à ce point
qu'une troupe de théâtre reçoive des subventions du
gouvernement fédéral qu'il avait ordonné à cette
troupe de théâtre de cesser d'accepter des subventions d'Ottawa
comme condition de réception des subventions du gouvernement du
Québec. Il y a donc des antécédents, des
précédents qui ont été créés.
J'espère que le gouvernement actuel va résister à la
tentation de faire de même.
Ceci dit, je voudrais en arriver à deux points plus particuliers
qui me paraissent faire l'objet même de cette rencontre ce matin. Le
premier point concerne les politiques d'application; au stade où nous en
sommes, je sais qu'il y aura un livre publié sur la politique
scientifique, mais il me semble qu'à ce stade, peut-être pour
mieux apprécier le livre lorsqu'il sera publié, il serait bon
qu'on ait des informations supplémentaires sur la façon dont
cette aide à la recherche est faite à l'heure actuelle. Je fais
allusion aux politiques générales des priorités du
gouvernement du Québec. Il me semble qu'il serait bon, ce matin, que le
ministre de l'Education nous dise quel-
les sont les grandes priorités générales qu'il se
donne je ne veux pas parler ici de priorités particulières
sur des projets en matière d'aide à la recherche
scientifique. A cet égard, je pense qu'il serait également
intéressant de lier l'application de ces priorités aux politiques
d'affectation des ressources. Quelles sont les politiques de gestion
employées à cet égard?
On me dit qu'en gros, en ce qui concerne certaines parties de cette aide
à la recherche, on a des comités de sélection qui prennent
des décisions sur l'acceptation des projets. J'aimerais savoir si ces
comités de sélection ont, de façon réglementaire,
si je puis dire, des avis des gens qui travaillent dans les mêmes
domaines avant que le comité de sélection se prononce sur
l'acceptation d'un projet. Est-ce la valeur des projets d'abord qui est
à l'origine de l'acceptation ou si ce sont, au contraire, les grandes
priorités? Peut-être que les priorités dont je reconnais le
besoin seraient trop particulières et trop précises. Il me semble
là encore que c'est, au départ, la valeur intrinsèque des
projets qui devrait déterminer l'attribution des ressources
financières. La valeur des projets pourrait affecter, bien sûr,
les superstructures qui pourraient être établies et sur lesquelles
j'ai des doutes très sérieux quand on en arrive à des
pôles, à des vocations d'institution, à des programmes de
recherche orientée; on a des axes de développement, on a toutes
sortes de concepts qui ont tous la même signification pour moi,
c'est-à-dire négliger ou mettre au second rang la valeur des
projets présentés et mettre au premier rang une certaine
concordance entre la nature du projet et certaines orientations
générales.
J'ai une dernière question. Depuis quelques années, nous
avons quand même consacré des sommes assez considérables
à la recherche scientifique. Existe-t-il des appréciations qui
ont été faites de l'utilisation passée des ressources?
A-t-on des rapports sur les résultats des recherches entreprises avec
les fonds publics? On me dit souvent j'ai souvent entendu cette
réponse lorsque j'ai posé la question que la recherche ne
s'estime pas facilement, que c'est très qualitatif, etc.
J'ai toujours pensé que, dans la plupart des cas, il y avait une
réponse très simple à donner à cela, c'était
de savoir s'il y avait des publications, s'il y avait des communications
scientifiques qui avaient été faites. Dans le cas de
laboratoires, est-ce qu'il y a des produits qui sortent de ces laboratoires?
Est-ce qu'il y a des applications qui ont été faites, dans
l'industrie ou ailleurs, des travaux qui ont été
exécutés dans ces laboratoires avec l'aide financière de
l'Etat? Je n'irai pas beaucoup plus loin, mais ce serait encore plus
désirable s'il y avait des mesures de l'impact de ces résultats
de recherche sur l'ensemble de l'économie, de façon qu'on ait des
critères un peu plus objectifs quand vient le moment de décider
du montant global des ressources consacrées à la recherche
scientifique.
Donc, en résumé, j'ai en fait deux questions
concrètes. Pour les politiques d'affectation des ressources, quels sont
les critères primordiaux? Est-ce que c'est la qualité du projet
ou bien si c'est une certaine adéquation de ces projets à des
politiques plus générales? Deuxièmement, est-ce qu'il
existe des résultats qu'on pourrait évaluer à la suite des
dépenses qui ont été faites dans le passé?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je traiterai
d'abord de la seconde question, celle de savoir si l'on doit juger les
programmes de recherche d'abord et avant tout selon les critères de
qualité ou en tenant compte davantage de l'orientation à laquelle
l'Etat voudrait soumettre la recherche. Le député doit savoir,
puisqu'il est lui-même universitaire et qu'il a entrepris des projets de
recherche, que tout programme de recherche est un mélange de ces deux
composantes. D'abord, il y a une orientation donnée par l'Etat qui veut
favoriser, par exemple, le développement de certaines études dont
il a besoin. Je pense à l'océanologie, qui constitue un cas
typique à l'heure actuelle.
Toutefois, ces priorités ne valent à vrai dire que pour la
recherche orientée, celle où l'Etat entend intervenir pour
favoriser le développement de certaines recherches ou qui répond
à l'action des divers ministères. A côté des projets
des ministères et de l'Etat, il y a la recherche libre, laquelle est
évidemment beaucoup moins sujette à des priorités. Quand
on parle de recherche libre, on fait allusion à l'initiative des
chercheurs, des universités, des centres de recherche; ces initiatives
sont bien moins faciles à encadrer que des programmes qui sortiraient
tout faits des ministères ou du gouvernement.
Je vais tenter de concrétiser ce que je viens de dire en montrant
comment les programmes majeurs de recherche correspondent à la fois
à une certaine orientation que veut donner l'Etat et, en même
temps, à la liberté qu'il veut laisser aux divers instituts de
venir chercher des fonds pour une recherche qui serait non pas dictée
par l'Etat mais choisie par les chercheurs ou les centres locaux.
D'ailleurs les programmes majeurs, je m'empresse de l'ajouter, ne sont
pas les seuls qui donnent lieu à ce genre d'appel à l'initiative
locale. Il y a également les subventions qui vont aux centres de
recherhce où nous tenons compte des projets qui nous parviennent, de
même que le cas des équipes et séminaires qui fonctionnent
en partie selon l'initiative locale et en partie selon l'orientation qui
émane du ministère.
Dans ces trois cas, Programmes majeurs, Centres, Equipes, il y a une
sorte de symbiose entre les priorités définies depuis quelques
années par le ministère, les organismes gouvernementaux, d'une
part, et les organismes libres qui se trouvent généralement dans
les universités d'autre part. Nous parlons ce matin surtout des
universités; je ne veux pas traiter d'un domaine que je connais beaucoup
moins qui est celui de la recherche industrielle.
On ne peut donc donner une réponse qui ne
soit nuancée à la question du député.
D'ailleurs, je pense qu'il connaissait déjà cette réponse.
J'attendrai ses commentaires tout à l'heure ou maintenant, s'il le
désire.
Le Président (M. Richard): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, c'est une bonne façon
de préciser et la question et la réponse. Est-ce exact que, dans
la recherche libre, par exemple, on passe en 1977/78 de $5,6 millions à
$3 millions, qu'on diminue la recherche pour 1980/81, suivant les
prévisions, et qu'en même temps on augmente en sens inverse la
recherche orientée de $500 000, en 1977/78, à $4,7 millions en
1980/81? Est-ce que cela reflète la politique du gouvernement?
M. Morin (Sauvé): S'agissant de chiffres, je vais demander
à M. Pierre Martin de vous apporter quelques
éclaircissements.
M. Martin (Pierre): Ce que vous citez, je crois, c'est une des
hypothèses qui étaient énoncées dans un document
dit des stratégies triennales universitaires, qui a été
soumis aux réactions et aux avis des universités, de même
qu'au Conseil des universités, évidemment. Cette hypothèse
n'a pas été retenue au moment où on se parle.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si celui-là était
confidentiel, mais ce ne sont pas les journalistes qui nous l'ont donné.
Vous nous l'avez remis, je pense.
M. Morin (Sauvé): Non, les stratégies triennales
ont été rendues publiques et je pense, d'ailleurs, que je vous en
avais remis un exemplaire aux crédits.
M. Martin: II s'agit justement d'un exemple de véhicule
utilisé pour avoir l'avis du milieu sur les orientations et les
priorités.
M. Raynauld: Sur le plan politique, M. le ministre, est-ce que
vous avez une opinion là-dessus?
M. Morin (Sauvé): Assurément, lorsque le livre vert
sera rendu public, nous aurons une idée plus précise à
vous mettre sous la dent. Je pense avoir indiqué tout à l'heure
qu'au contraire c'était une opinion personnelle nous
devions consacrer des montants beaucoup plus importants à la recherche
universitaire, laquelle est très souvent libre, c'est-à-dire
qu'elle fait appel à l'initiative des chercheurs et des centres de
recherche. Peut-être mon collègue, le ministre d'Etat, veut-il
ajouter quelque chose à cela, dans la perspective du livre vert en
particulier.
M. Camille Laurin M. Laurin: Je voudrais me référer
d'abord aux remarques générales énoncées aussi bien
par le député de L'Acadie que par le député
d'Outremont. Nous nous entendrons rapidement et volontiers sur les principes
qu'ils ont énoncés. Je pense qu'il va de soi que, dans une
société de plus en plus technologique et industrialisée,
la recherche est non seulement de plus en plus importante, mais qu'elle
s'insère, je dirais, dans le processus normal de production, de
développement, de progrès de la société, à
telle enseigne que plusieurs entreprises que vous avez visitées et que
nous visitons ont un service de recherche qui fonctionne en liaison très
étroite avec le service d'exploitation, car il y a une relation
dialectique constante entre le processus de production et le laboratoire de
recherche.
Il en va de même au niveau gouvernemental. Si les
ministères, comme celui de l'Agriculture, celui des Richesses
naturelles, l'Industrie et le Commerce, ont senti le besoin de créer des
laboratoires de recherche, c'est que précisément, pour leurs fins
propres, pour le développement du secteur ou du domaine qui était
de leurs responsabilités, ils sentaient le besoin de se
référer à des études, à des expertises de
plus en plus fouillées et qui seules leur permettaient d'éclairer
l'action qu'ils devaient entreprendre en vertu de leurs
responsabilités.
Je pense que, dans les années qui viennent, nous verrons de plus
en plus tous les ministères gouvernementaux se doter de ces instruments
de recherche absolument nécessaires à l'élaboration des
politiques, aussi bien qu'à leur mise en application et au
contrôle des résultats de ces politiques.
Je n'en prends pour exemple que la loi 101 à laquelle j'ai
été associé. Il est bien évident que j'ai senti le
besoin, abstraction faite de la dimension partisane, de faire faire certaines
études et de m'inspirer d'études qui avaient été
faites spontanément, d'ailleurs, aussi par d'autres organismes que ce
soient des organismes universitaires ou autres.
C'est donc un truisme que de dire que nous sommes absolument d'accord
avec les principes que vous énoncez. Evidemment, il en découle
également l'autre conclusion que vous avez tirée. C'est que les
Etats modernes, aussi bien que les industries, d'ailleurs, devront consacrer
une part de plus en plus importante de leur budget à cette dimension
recherche, et je dirais même à cette dimension
recherche-développement puisqu'elles sont inextricablement
liées.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, dès décembre,
comme l'a souligné le ministre de l'Education, à la toute
première ou à la deuxième réunion du comité
interministériel nous avons commencé à étudier ce
problème, à faire un inventaire sommaire de la situation. Devant
les carences, les insuffisances, les lacunes qui nous ont été
signalées, nous avons senti le besoin de faire faire les études
en vue d'en arriver le plus rapidement possible à l'élaboration
d'une politique et aussi à des appropriations budgétaires
beaucoup plus considérables.
Je me permets quand même de nuancer ce qu'a dit le
député d'Outremont. Autant je suis d'accord pour que l'Etat
québécois, en particulier, consacre des sommes d'argent beaucoup
plus considérables à la recherche qu'il ne l'a fait par le
passé, autant il m'apparaît nécessaire, pour des fins
prudentielles, de gestion rationnelle et intelligente, que nous
procédions en même temps à un diagnostic de la situation,
à l'examen de toutes les dimensions du problème et, surtout,
à la mise en place de structures adéquates qui nous permettront
de canaliser, de la façon la plus utile et la plus rentable possible,
les sommes que nous y dépensons. Etant donné le peu d'argent dont
nous disposons, nous voudrions potentialiser au maximum le moindre dollar que
nous voudrions mettre dans cette entreprise. C'est la raison pour laquelle
notre recherche des structures idéales, des mécanismes des
critères va de pair avec l'étude des besoins, de tous les besoins
qui sont ceux du Québec à l'heure actuelle.
J'aimerais aussi nuancer peut-être ces remarques en revenant
brièvement sur ce qui peut facilement devenir une querelle
académique entre recherche fondamentale et recherche appliquée,
et entre recherche libre et recherche orientée. Ces deux distinctions
peuvent d'ailleurs parfois se chevaucher et lier des rapports encore plus
complexes, par exemple, entre recherche fondamentale et recherche libre ou
recherche appliquée et recherche fondamentale. Ce n'est pas la
même chose, en ce sens que, bien souvent, dans le secteur universitaire,
il peut y avoir des recherches appliquées qui sont libres en vertu
même du développement d'un département universitaire ou en
raison des liaisons que tel département universitaire entretient avec
telle industrie par les commandites que l'industrie peut donner à un
laboratoire universitaire. Il peut y avoir, même à
l'université, de la recherche orientée, de la même
façon que, dans certains ministères, il peut y avoir une
recherche fondamentale. Par exemple, je pense à la recherche sur les
placements, menée par l'IREC, qui a un caractère fondamental,
même si nous savons que, tôt ou tard, elle aboutira à des
conséquences très pratiques sur le plan de la technologie.
Il n'est pas facile de trancher au couteau entre recherche libre,
orientée, fondamentale et appliquée. Nous étudions les
dimensions de cette question dans le livre vert. Les conclusions auxquelles on
en arrivera ne seront pas dogmatiques, mais plutôt empiriques, à
la lumière du développement réel qu'ont connu ces diverses
dimensions de la recherche dans le passé, afin de préciser,
cependant, la responsabilité qui incombe à l'un ou l'autre des
agents qui participent au développement de la recherche dans nos
sociétés.
Une deuxième remarque du député d'Outremont avait
trait au regret et au souhait, en même temps, qu'il
énonçait en ce qui a trait aux querelles entre les paliers de
gouvernements. Il a noté la présence de ces querelles, par
exemple, entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa. Il
a noté que ces querelles ne datent pas d'hier. Elles existent maintenant
depuis une vingtaine d'années. Il y voit, à juste titre, un
élément négatif.
D'ailleurs, toutes les querelles sont négatives, en fin de
compte, et il ne voudrait surtout pas que ces querelles se perpétuent
afin qu'elles ne deviennent pas, comme par le passé, dit-il, des
prétextes à l'inertie ou des prétextes à
l'inaction.
Je pense que si son témoignage est juste, en l'occurrence, il se
trouve à blâmer d'une façon sévère tous les
anciens gouvernements qui ont précédé le nôtre,
puisque c'est sous l'égide des anciens gouvernements que se sont
passées, que se sont développées, que se sont
accentuées ces querelles dont il faut mention. Donc, s'il y a eu
inaction en raison de ces querelles, je ne pense pas que ce soit le nouveau
gouvernement qui est là depuis un an qu'il en faut blâmer puisque,
dès notre arrivée, nous avons, au contraire, mis le pied à
l'étrier et essayé de développer une politique qui ne
mettra sûrement pas l'accent sur les querelles passées ou à
venir avec d'autres gouvernements.
Il reste, cependant, que je nuancerais quand même ces propos,
parce que je ne crois pas, après l'étude préliminaire du
dossier, que les anciens gouvernements aient trouvé un prétexte
à l'inaction dans ces querelles. Je pense qu'il y avait
véritablement matière à récrimination, quand on
constate, par exemple, que le Québec n'a eu sa quote-part des
crédits consacrés par le fédéral à la
recherche que d'une façon très graduelle et, d'ailleurs, ce n'est
même pas terminé aujourd'hui. Il y a eu une époque, il y a
sept ou huit ans à peine, où le pourcentage des crédits de
la recherche attribué au Québec par le gouvernement
fédéral n'était que de 11% alors que la population du
Québec comptait pour 30%. Si on considère l'importance de la
recherche, c'est quand même essentiel que, dans ce domaine
névralgique, le Québec possède toute la part à
laquelle il a droit, en vertu de son poids démographique et en vertu du
nombre de contribuables qui nourrissent les coffres du
fédéral.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais poser
une question? Est-ce que le ministre délégué au
développement culturel sait qu'au moment où ces
répartitions sur lesquelles il fonde son pourcentage de 11% le nombre de
professeurs d'universités, les actifs des universités
représentaient au Québec à peu près de 11% à
15% des actifs et des chercheurs au Canada? C'est un cercle vicieux,
peut-être; moi, la conclusion que j'en tire, c'est qu'il faudrait que
nous, on s'occupe de nos affaires et, à ce moment-là,
peut-être que cela irait mieux.
M. Morin (Sauvé): Excellente conclusion.
M. Raynauld: Qu'on s'occupe de nos affaires plutôt que de
toujours citer des chiffres comme celui-là, par exemple, où il
semble évident, quand on mentionne un chiffre comme cela, que
le point de référence, c'est la population. Ce n'est pas
évident du tout, du moment où on accepte également qu'on
ne peut quand même pas jeter l'argent par les fenêtres. Si on
s'était occupé de nos affaires, qu'on avait
développé nos universités, qu'on avait formé des
chercheurs cela, ce n'était pas une responsabilité
fédérale, et le fédéral ne s'en occupait pas
peut-être qu'à ce moment-là on aurait eu, aussi, une part
plus adéquate des fonds de recherche.
M. Laurin: Je ne nie pas le caractère partiellement vrai
des remarques du député d'Outremont, mais je ne voudrais pas, non
plus, qu'il cache l'autre dimension. Pour avoir participé
moi-même, à l'époque, à plusieurs réunions de
comités de recherche créés par le fédéral
où j'apportais la voix, les réclamations d'une certaine
université, je dois quand même dire que cette appropriation
insuffisante de fonds fédéraux aux universités
francophones provenait, en grande partie, des critères de
sélection qui avaient été établis par le
fédéral pour l'octroi des fonds. C'était le jeu de la
poule et de l'oeuf; on ne voulait octroyer de fonds fédéraux
qu'à des équipes de chercheurs qui avaient déjà
fait leur réputation alors que, précisément, en raison de
l'état du développement des universités chez nous, ces
équipes étaient beaucoup moins nombreuses que dans d'autres
provinces et que même celles qui existaient dans d'autres
universités québécoises. Cela amenait ce paradoxe que
même au Québec, avec des appropriations insuffisantes
déjà de 11%, la grande partie des subventions des appropriations
budgétaires du fédéral à la recherche allait
à l'université anglaise du Québec et non pas aux
universités françaises.
Je sais que la situation s'est graduellement corrigée, mais
grâce à quoi? Grâce aux pressions constantes faites par les
universitaires québécois francophones, par tous les moyens
possibles, auprès des autorités fédérales. Cette
situation s'est graduellement corrigée, tant mieux, mais il y a encore
des progrès à faire puisque cette quote-part sur laquelle nous
devrions compter n'est pas encore réalisée à l'heure
actuelle. Donc, même si je suis d'accord avec le député
d'Outremont pour dire que le gouvernement du Québec ne doit pas se
cacher derrière ces querelles, ne doit pas considérer ces
querelles comme un prétexte à l'inaction, je dois quand
même souligner que les reproches faits par le gouvernement du
Québec et les universités francophones dans le passé
à l'endroit du fédéral étaient fondés et
sont encore fondés sur des aspects importants.
Je n'en mentionne qu'un, par exemple: c'est la centralisation dans
l'Ontario de tous ou presque tous les laboratoires de recherche établis
par le gouvernement fédéral, que ce soient le Conseil
médical de la recherche, le Conseil national de la recherche, le Conseil
de recherche de la défense nationale et beaucoup d'autres organismes
reliés, par exemple, au Food and Drug
Administration et d'autres organismes gouvernementaux. Il y a là
matière à reproches réels, à discussions, à
négociations qui devront avoir lieu car c'est une question de
justice distributive en même temps qu'une question de
développement normal pour le Québec sans esprit de clocher
ou sans esprit de querelle indu ou simplement pour des fins purement partisanes
ou politiques.
Quant à ce qui concerne les autres questions qu'a
soulevées le député d'Outremont, je pense que mon
collègue de l'Education y a bien répondu. Je voudrais simplement
ajouter que les inquiétudes du député d'Outremont en ce
qui concerne l'organisation actuelle de la recherche m'apparaissent bien
fondées. Mais s'il s'inquiète à ce sujet, c'est parce que
l'héritage que nous avons trouvé lorsque nous sommes
arrivés était précisément un héritage.
C'étaient des structures que nous avons trouvées. Pourquoi
sont-elles dans l'état où elles sont? Je pense qu'il y a deux
facteurs à considérer.
Il y a certes la fonction publique qui peut être responsable de
l'élaboration de certaines strus-tures, mais il y a aussi la
volonté politique. Il doit exister une relation dialectique entre la
volonté politique, d'une part, et le travail normal de la fonction
publique. Peut-être que, dans le passé, il y a eu des lacunes ou
des insuffisances à cet égard. Là aussi, nous sommes
conscients du problème. Nous essaierons de le corriger. Quant à
ce qui concerne l'évaluation, je suis d'accord, elle reste à
faire. Ce serait intéressant, pour ne pas dire indispensable, de
procéder à cette évaluation dans tous les domaines que
couvre la recherche. Il reste, cependant, comme l'a laissé subodorer le
député d'Outremont, que cette évaluation reste difficile.
Il faut trouver les bons mécanismes, les bons critères
d'évaluation. C'est une question à laquelle nous nous
intéressons également. J'espère qu'avec les
réponses que nous trouverons, même si nous devons le faire avec un
peu de retard, il nous sera possible de procéder à cette
évaluation très souhaitable.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Claude Forget
M. Forget: M. le Président, je suis arrivé ici avec
un nombre limité de questions et j'ai bien peur, en voyant
s'écouler les minutes, même les heures, que je vais repartir avec
mes questions, à moins que le ministre de l'Education ou celui du
développement culturel puisse, dans les quelques minutes qui suivront
l'exposé de ces questions, me fournir un petit nombre de
réponses.
Une Voix: Des réponses brèves.
M. Forget: Des réponses brèves, si possible.
D'ailleurs, il n'y aurait pas beaucoup de place pour autre chose que des
réponses brèves, M. le Président.
M. Morin (Sauvé): Dans le domaine de la recherche
scientifique, les choses ne sont pas toujours aussi simples qu'on le
souhaiterait.
M. Forget: Non, en effet.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il faudrait deux jours
de débat.
M. Forget: II reste qu'au-delà des énoncés
de bonnes intentions et de voeux pieux, et je dois dire que c'est un secteur
où il y en a toujours, des voeux pieux et des bonnes intentions, mais
où il n'y a pas toujours eu autre chose...
M. Morin (Sauvé): Sûrement pas de 1970 à
1976!
M. Forget: M. le ministre de l'Education, je vous ai
écouté religieusement...
M. Morin (Sauvé): Je vous écoute.
M. Forget:... quoique l'exercice de la religion en certains cas
n'est pas toujours facile, mais je vous demanderais la même
gentillesse.
M. Morin (Sauvé): Vous y avez droit, M. le
député...
M. Forget: La première question qui se pose c'est
dans le sens français du mot, je n'en doute pas la
première question qui vient a l'esprit du profane et aussi des milieux
scientifiques est tout simplement: Combien de ressources le gouvernement a-t-il
l'intention d'investir dans ce domaine de la recherche, non pas, bien
sûr, en termes nécessairement de dollars ou de sous pendant
l'exercice financier actuel ou le prochain, mais en termes d'objectifs?
Où se dirige-t-il lorsqu'il pense à la recherche? Est-ce
vers le maintien d'un effort financier stable en termes de pourcentage du
budget? De ce côté, l'effort actuel n'est pas, malheureusement,
aussi impressionnant qu'il devrait l'être, c'est un tiers de 1% du budget
de l'Etat du Québec qui est consacré, apparemment, d'après
les chiffres qu'on nous a donnés, à la recherche scientifique.
D'ailleurs, on couvre par cette désignation bien des choses sur
lesquelles on mettrait un gigantesque point d'interrogation dans des cas
particuliers.
Il demeure que le gouvernement ne nous a pas indiqué s'il avait
à l'esprit un objectif quelconque, soit en pourcentage du produit
intérieur brut, soit en termes d'un taux d'accroissement pour effectuer
un rattrapage sur un nombre d'années quelconque. Y a-t-il, du
côté gouvernemental, la conscience qu'il faut qu'il y ait plus
d'argent, si ce que nous disons ce matin doit être autre chose que le
réaménagement des chaises sur le Titanic, si vous voulez? Dans le
cas d'un certain nombre d'efforts de recherche, étant donné les
resserrements financiers qui s'effectuent à d'autres niveaux ou dans des
organismes sans but lucratif privés ou internationaux, il y a
véritablement un sentiment d'inquiétude parce que l'on est
coincé entre le taux d'inflation, d'une part, et l'inflexibilité,
la rigidité des allocations budgétaires. Dans le contexte actuel
de l'inflation et d'une espèce de dépression économique,
les milieux scientifiques aimeraient obtenir une réponse
là-dessus.
C'est une réponse que nous aurons peut-être dans un livre
blanc ou un livre vert, encore qu'il n'appartienne pas à des conseillers
de l'Etat qui oeuvrent au niveau de la rédaction d'un livre vert de
prendre ce genre d'orientation. Il faudra qu'elle leur soit donnée par
le gouvernement. Nous aurions certainement aimé obtenir au moins la
notion que le gouvernement était conscient de la nécessité
pour lui de réviser à la hausse les projections
budgétaires dans ce domaine.
La deuxième question avec laquelle je suis venu a
été abordée brièvement sans qu'on ait vraiment de
réponse convaincante de la part du ministre de l'Education.
C'était pour savoir, dans le fond et en termes très clairs, si ce
sont les meilleurs chercheurs qui auront l'argent limité de l'Etat pour
les aider à poursuivre leurs travaux ou si ce seront des chercheurs qui,
tout en n'étant pas nécessairement les meilleurs,
répondent le plus fidèlement ou le plus docilement à des
indications qui ne leur viennent pas nécessairement de
l'Assemblée nationale, mais qui leur viennent à travers un vague
processus de consultation et de concertation. Parfois, les
intéressés eux-mêmes sont consultés sur
l'orientation à venir. Est-ce que ce seront des gens qui correspondent
plus fidèlement à ces orientations, à ces soi-disant
priorités nationales qui sont établies, à ma connaissance,
de façon très souvent fort intuitive? Est-ce que ce seront les
meilleurs chercheurs ou ces chercheurs-là?
En particulier, il y a, dans le milieu de la recherche et dans le milieu
universitaire aussi, une inquiétude qui n'est un secret pour personne,
à savoir que, du côté du ministère de l'Education,
et cela de façon traditionnelle, il y a certaines
préférences institutionnelles. Il y a certaines règles de
jeu qui font que tous n'ont pas une chance égale d'obtenir l'attention
du ministère de l'Education et les fonds publics. C'est bien connu, il y
a entre toutes les universités du Québec, d'une part, et, d'autre
part, l'INRS et l'Université du Québec une tension qui s'est
maintes fois exprimée dans ces milieux et sur laquelle le gouvernement
n'a jamais le gouvernement antérieur comme le gouvernement actuel
clairement indiqué son orientation. Il serait temps, je pense,
que cet abcès crève, parce qu'il est de longue date et il a des
implications extrêmement importantes au niveau même des
individus.
Le ministre a fait de façon très oblique allusion à
des divergences qui existeraient entre le Conseil des universités et la
Direction générale de l'enseignement supérieur. Est-ce
qu'il s'agissait de ce genre de tensions? Est-ce qu'il s'agissait de ce genre
de débat? Il eut été fort intéressant de
l'apprendre et de savoir à quel sujet il y avait des différences
entre l'organisme qui parle
au nom des universités et celui qui est le bras séculier
de l'Etat quant à la distribution des subventions.
Ce serait un domaine où il serait possible de faire ressortir que
l'engagement gouvernemental et l'engagement du ministère de l'Education
face, par exemple, à des critères d'excellence dans l'octroi des
subventions, ne se sont pas articulés jusqu'à maintenant de
façon satisfaisante. Le milieu scientifique québécois,
tout le monde le sait, est un milieu qui est, malheureusement on le
déplore et on peut chercher à réparer cela avec le temps
assez étroit; il y a peu de monde, il y a peu de chercheurs dans
ce milieu. Espérons qu'il y en aura un jour davantage. Mais il reste que
l'application des mécanismes, connus dans le monde entier,
d'évaluation préalable des projets de recherche est portée
à faire appel essentiellement au même groupe de gens qui
siègent alternativement comme requérants et comme attributeurs de
fonds. C'est vrai dans tous les domaines et je vous prie de me croire quand je
dis que je ne fais allusion à personne en particulier; c'est une chose
qui a toujours existé au Québec et qui, malheureusement, va
exister encore longtemps.
Face à cette difficulté réelle, est-ce que le
ministère de l'Education envisage des remèdes? Des remèdes
sont possibles. On fait appel, dans l'octroi de certaines bourses, par exemple,
à des compétences extérieures au Québec, de
manière à diminuer cette difficulté qui fait que des
professeurs ont à recommander leurs propres étudiants. Il y a des
situations embarrassantes et il faut qu'il y ait des solutions à ces
problèmes. Il faudrait que le gouvernement nous annonce ses intentions
sur ce plan.
Une autre question à laquelle il y a bien peu de réponses
et même peut-être beaucoup d'incertitude, c'est le rôle du
ministère de l'Education, en particulier, face aux autres
ministères. Le ministère de l'Education a, jusqu'à
maintenant, de façon non pas exclusive mais certainement de façon
prédominante, assumé un certain leadership sur le plan de la
recherche scientifique et du financement de la recherche. Peut-il, cependant,
se prononcer pour l'ensemble des ministères? Jusqu'à quel point
doit-on applaudir au fait que le correspondant du conseil de la politique
scientifique, au sein de l'administration publique, se trouve maintenant dans
un ministère en particulier plutôt que d'être dans un point
central où les préoccupations sectorielles, qu'il s'agisse de
l'Industrie et du Commerce, de l'Agriculture ou de la Santé, auraient
des chances de se faire entendre sur un pied d'égalité? Je crois
qu'il n'y a pas seulement l'impartialité réelle et je ne
doute pas des individus en cause mais il y a aussi l'apparence de
l'impartialité et d'un accès égal de toutes les
préoccupations sectorielles au sein de l'organisme qui joue le
rôle de plaque tournante et qui joue un rôle dans
l'évolution de la politique scientifique au nom de tout le gouvernement
et pas seulement au nom de ceux qui sont, en quelque sorte. les producteurs,
par personne interposée, de la recherche scientifique.
Il y a l'aspect consommateur, si on veut, pour employer cette
catégorisation un peu sommaire, qui est important, et en particulier
lorsqu'on aborde le sujet des programmes majeurs où on nous dit que la
ligne de force de ces programmes majeurs est la recherche appliquée. Or,
n'est-il pas absolument paradoxal que la recherche appliquée soit
administrée par un ministère comme celui de l'Education qui, bien
sûr, s'intéresse à la recherche parce qu'il finance les
milieux où se fait la recherche, mais qui n'a certainement pas le
même accès, la même sympathie, la même connaissance
intuitive et immédiate des problèmes sectoriels, des champs
d'application de la recherche que pourraient avoir les ministères
impliqués. Ceci pose tout le problème de la coordination de la
recherche et du rôle des ministères sectoriels dans le financement
et la sélection des projets de recherche dans des domaines
d'application.
Pour ma part, je m'interroge, et ce n'est pas la première fois
que je le fais, sur la capacité d'un organisme central de stimuler la
recherche appliquée. Pour ce qui est de la recherche plus gratuite,
encore que je sois d'accord avec le ministre d'Etat, il ne faut pas faire des
fétiches de ces catégories, d'autant plus faut-il
réfléchir longuement avant de centraliser en un seul endroit le
financement de la recherche.
Pour résumer ce dernier point, la recherche gouvernementale se
fera-t-elle via le ministère de l'Education ou se fera-t-elle autrement?
Il y a, à l'heure actuelle, dans l'organisation du Conseil
exécutif du ministère d'Etat au développement culturel un
point de rattachement naturel d'une politique de recherche scientifique, encore
que, même à ce niveau, il faudrait être extrêmement
prudent pour ne pas expulser les ministères sectoriels d'une
participation réelle et significative dans l'élaboration des
projets de recherche appliquée.
Autrement on produira des recherches appliquées en agriculture
qui seront complètement divorcées des préoccupations du
ministère de l'Agriculture, etc., etc. On pourrait multiplier les
exemples. C'est un danger réel que, sous prétexte de coordonner
et d'améliorer l'efficacité des sommes qu'on consacre à la
recherche, on les stérilise au contraire de façon radicale.
Enfin il y a tout le problème de la recherche gouvernementale,
c'est-à-dire qu'à l'intérieur de chaque ministère
il y a des orientations qui doivent être prises par le gouvernement,
à savoir s'il doit faire lui-même ou faire faire. C'est un
problème qui se pose dans bien des domaines, dans le domaine, à
la limite, de la consultation ou de l'expertise, mais certainement qui se pose
dans le domaine de la recherche. C'est peut-être le seul domaine
où on a eu une lueur ou une lumière qui nous permettait de juger
de l'orientation probable du gouvernement puisque deux ministres,
peut-être par inclinaison personnelle, étant dans le milieu
universitaire déjà dans le
passé, se sont montrés sensibles à la notion que le
gouvernement du moins c'est le sens que j'y ai lu devait
être bien disposé à faire faire la recherche plutôt
qu'à la faire lui-même.
D'ailleurs, si on regarde la structure de la rémunération
et des carrières au sein de la fonction publique et qu'on sait comment
fonctionnent les milieux scientifiques, on se rend compte tout de suite d'une
incompatibilité de fond, a moins de changer les règles de jeu de
la fonction publique, de faire de la carrière ce même genre
d'occupation avec sécurité d'emploi et pour la vie que l'on fait
normalement dans la fonction publique. Cela répugne essentiellement
à la notion d'un chercheur véritable que de devenir un
fonctionnaire dans ce sens et ce n'est qu'une des difficultés sur
lesquelles on bute.
Il y a aussi la difficulté d'évaluation objective, par des
experts, par des pairs, d'une structure gouvernementale ou de ce qui se passe
à l'intérieur d'une structure gouvernementale. C'est un danger
tellement réel ou c'est une difficulté tellement réelle
que c'est ce qui me poussait au tout début à poser la question
relativement aux sommes que l'on dit consacrer dans le moment à la
recherche scientifique et qui apparaissent dans les comptes publics sous ce
titre. Je pense bien que je n'étonne personne de l'autre
côté de la table en disant que c'est une classification comptable
qui a les mérites qu'on voudra, mais qui n'a certainement pas beaucoup
de prétentions scientifiques en soi.
Il y a des activités que l'on connaît tous au sein de
certains ministères, dans certaines installations qui n'ont rien
à voir, mais absolument rien à voir, sauf le titre qu'ils portent
dans les comptes publics, avec la recherche scientifique. Ce sont des
activités de contrôle, d'étalonnage,
d'échantillonnage, de pure routine. Les gens qui sont là sont des
techniciens, parfois très hautement qualifiés, mais ce sont des
techniciens et ce ne sont pas des chercheurs.
Alors il faut bien tenir cela à l'esprit lorsque l'on parle du
rôle possible de l'Etat dans toute cette opération. Je pense qu'il
y a des limites très certaines, mais encore une fois, c'est cette
dernière question sur laquelle je pense qu'il y a le moins de doute ou
d'hésitation. Les trois autres, pour résumer brièvement,
la masse totale des ressources financières que l'Etat se dispose
à mettre à la disposition des chercheurs, c'est une question
majeure sur laquelle des orientations du rapport du gouvernement sont attendues
avec beaucoup d'intérêt, non seulement par l'Opposition officielle
mais par tout le monde des chercheurs.
La deuxième question vise essentiellement le rôle respectif
des critères d'excellence et de la capacité des chercheurs
à assumer leur rôle par rapport à des considérations
de structure, des considérations de développement institutionnel
qui devraient avoir la deuxième place de façon très
marquée, ce qu'elles n'ont pas toujours eu dans le passé
malheureusement. Je pense qu'il s'agit ici essentiellement de respecter le
milieu de la recherche; la culture scientifique, elle s'in- carne dans le
milieu de la recherche, dans nos chercheurs. A force de vouloir surimposer des
schémas gouvernementaux déterminés a priori, dans le fond,
ce que l'on dit au milieu de la recherche scientifique, c'est qu'ils sont les
moins compétents pour décider de l'orientation de leurs
recherches.
C'est une chose que l'on ne dirait à aucun des autres milieux
avec lesquels l'Etat cherche à collaborer, et c'est une orientation qui
â mon avis est très importante. Enfin le rôle des structures
gouvernementales de coordination devrait être précisé. Il
n'apparaît pas dans la situation actuelle où le Conseil de
politiques scientifiques est malgré tout une expérience
intéressante qui ne date pas d'il y a très longtemps et où
énormément de bonne volonté s'est exprimée de la
part des milieux scientifiques, bonne volonté de collaboration avec le
gouvernement.
Un travail immense s'y est fait de façon bénévole
par tous ceux qui, émanant des milieux scientifiques, ont voulu par
là montrer l'importance qu'ils attachaient à
l'intérêt naissant du gouvernement du Québec pour ce
domaine. Je pense qu'ils méritent d'être pris dans les conseils du
gouvernement, dans l'élaboration de sa politique. Ils méritent
aussi d'avoir le bon porte-parole. Sans dévaluer le ministre de
l'Education, je pense que sa situation dans l'ensemble de la structure
gouvernementale n'est pas la plus appropriée pour ce faire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Saint-Laurent. M. le ministre de l'Education.
M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le temps passe
vite, et je vais tenter de répondre brièvement aux trois ou
quatre questions importantes qui ont été soulevées par le
député de Saint-Laurent. Si mon collègue le ministre
d'Etat veut ajouter quelque chose par la suite, il le fera sûrement.
Pour ce qui est des ressources financières, je voudrais d'abord
apporter une nuance aux propos de M. le député et ex-ministre. Il
ne faudrait pas oublier qu'environ 15% si ce n'est davantage des
frais d'administration qui sont accordés aux universités vont, de
fait, à la recherche, et doivent donc être ajoutés à
ces $26,5 millions dont je parlais tout à l'heure. Ce sont des
subventions, comment dire, non pas cachées, parce qu'elles sont
publiques, mais dont on ne fait pas état d'habitude comme faisant partie
des budgets de recherche et qui pourtant servent à ces fins. A l'heure
actuelle, ce montant doit osciller autour de $90 millions.
Si l'on veut donc avoir une idée réelle, exacte de la
contribution du gouvernement québécois depuis quelques
années aussi bien sous le régime précédent
que sous celui-ci à la recherche, il faut ajouter ces $90
millions aux $26,5 millions qui sont versés directement par le
truchement du service des subventions et des
autres organismes dispensateurs de subventions. Déjà cela
corrige le tir, mais je ne voudrais pas éluder la question du
député. Je lui dirai que tant et aussi longtemps que le livre
vert que nous attendons d'ici quelques mois n'aura pas fixé les
orientations majeures de la recherche québécoise, et n'aura pas
établi les équilibres recherchés entre la recherche
industrielle et la recherche universitaire, nous ne songeons pas à
augmenter de façon dramatique les budgets consacrés à la
recherche universitaire.
Cependant, je puis assurer le député que ces budgets
seront maintenus et indexés, puisque nous ne voulons pas qu'en
pourcentage ceux-ci diminuent. Autrement dit, nous songeons à faire un
effort pour maintenir ce qui existe, et même, au titre Programmes
majeurs, à mettre en oeuvre, enfin, le demi-million de dollars
consacrés à ce volet.
La seconde question ou était-ce une observation?
concernant les tensions dont le député faisait état entre
le ministère et le Conseil des universités... Je ne voudrais pas
qu'il interprète mes propos de façon erronée. Je n'ai pas
parlé de tensions à cet égard entre le conseil et le
ministère, mais de tensions entre le service, organisme qui devrait
être bien intégré au sein du ministère et le
ministère lui-même, je veux dire les autorités du
ministère, et, éventuellement, le Conseil des universités.
Au contraire, nous recherchons les avis du Conseil des universités. Je
ne pense pas qu'il existe là de difficultés. Il peut exister des
discussions, bien sûr, comme cela est tout à fait naturel.
Troisième question abordée par M. le député:
celle tout à fait importante, des conflits d'intérêts.
Voilà une difficulté réelle, mais je ne voudrais pas que
nous ayons l'impression qu'elle est générale et qu'elle entache,
en quelque sorte, tout le système d'octroi des subventions à la
recherche universitaire. Cela déformerait la vérité.
Effectivement, il y a eu des cas où l'on pouvait s'interroger sur
la procédure suivie. Ils ne sont pas nombreux, mais ils constituent une
difficulté à ce point réelle que le comité-conseil
je vous en dirai peut-être quelques mots en conclusion tout
à l'heure créé par le ministre de l'Education en
1974 s'est penché là-dessus et nous fait justement des
recommandations.
Nous pensons qu'il faut aller vers une éthique beaucoup plus
stricte que celle qui a régné dans l'octroi des subventions
depuis quelques années. Je dirais même que, dans la foulée
du livre vert, nous allons devoir, au ministère de l'Education, songer
à un véritable code de déontologie dans ce domaine, non
pas parce qu'il y aurait eu, des manquements généralisés
aux règles de l'éthique, mais parce qu'il ne devrait y avoir
aucun manquement à ces règles dans l'octroi de ces subventions.
On sait, d'ailleurs, qu'il suffit qu'il y ait un cas pour qu'automatiquement
cela jette le discrédit sur l'ensemble d'un système qui, par
ailleurs, donne satisfaction.
Enfin, dernière question, celle du Conseil de la politique
scientifique et des structures gouvernementales de coordination de la
recherche. Là encore, je pense que je puis rejoindre le
député dans ses préoccupations. A l'heure actuelle, ce
Conseil de la politique scientifique est rattaché au ministère de
l'Education. Je suis loin d'être sûr et je pense que le
ministre d'Etat partage mes préoccupations là-dessus que
c'est la structure naturelle à laquelle devrait être
rattaché un tel Conseil de la politique scientifique dont, comme on l'a
fait observer, les préoccupations dépassent de loin la simple
recherche universitaire. D'ailleurs, quand on parle de politique scientifique,
il s'agit de quelque chose de plus vaste que la politique de la recherche
proprement dite. C'est un peu bizarre, effectivement, que ce conseil soit
rattaché au ministre de l'Education, quoique, bien sûr, en
attendant que la structure soit modifiée, j'entends bien exercer la
responsabilité qui est mienne. Cependant, je tiens à attirer
votre attention, M. le député, sur le fait que c'est votre
gouvernement qui a rattaché ce Conseil de la politique scientifique, qui
relevait autrefois du Conseil exécutif, au ministère de
l'Education.
M. Forget: Je vais vous expliquer pourquoi.
M. Morin (Sauvé): Je serais heureux que vous nous donniez
l'explication. C'est l'occasion, ce matin, de vider un certain nombre de sacs.
J'ai une idée de l'explication, mais cela ne nous empêchera pas
d'être d'accord pour dire que ce n'était pas le geste le plus
heureux qu'ait posé votre digne gouvernement.
Les hypothèses sont diverses quant à ce qu'on devrait
faire de ce Conseil de la politique scientifique qui, je pense, va
sûrement continuer d'exister. Ce n'est pas trahir un secret du livre vert
de dire que c'est absolument essentiel dans un pays qui veut étoffer le
développement des sciences. Les hypothèses sont diverses. Est-ce
que cela devrait relever d'un ministère spécial consacré
à la politique scientifique, à la recherche? C'est une tentative
qui a échoué ailleurs et même pas très loin de nous,
au niveau fédéral.
Il faut bien peser le pour et le contre et toutes les hypothèses
avant de s'engager dans une telle solution. Le conseil devrait-il retourner au
Conseil exécutif? Devrait-il relever, par exemple, de mon
collègue, le ministre d'Etat? Ce sont des hypothèses que nous
sommes à examiner en ce moment, dans le cadre du livre vert.
J'avoue, pour ma part, que je ne sais encore le débat
n'est pas terminé à quel organisme gouvernemental,
exactement, devrait être rattaché ce conseil de la politique
scientifique, mais je doute qu'il dût être rattaché au
ministre de l'Education. Ses préoccupations dépassent de loin
celles qui sont nôtres, à l'éducation, et qui ont trait
à la recherche proprement universitaire.
Voilà, M. le Président, les réponses, qui se
veulent brèves, que j'entendais donner au député.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: C'est quasiment une question de règlement. Je
vous ai demandé la parole, je pense, à 10 h 45, et vous
constaterez que la plupart de mes collègues ont eu l'intelligence de
quitter il y a quelque temps. Le débat est extrêmement
intéressant, j'aurais énormément de questions à
poser, je souhaiterais que la semaine prochaine vous favorisiez une alternance
entre les partis, parce que je constate que mes collègues de
l'Opposition ont posé des questions extrêmement pertinentes.
Les questions que j'avais à poser ont été
touchées, j'aurais eu des nuances peut-être différentes
à y apporter, et je pense qu'à moins qu'on dise que c'est un
débat entre l'Opposition et les membres du cabinet, je pense que, la
semaine prochaine, vous devriez favoriser une alternance entre les
députés de l'Opposition et les députés
ministériels.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Sur cette question de règlement, M. le
Président, comme j'ai collaboré à l'élaboration des
nouvelles règles parlementaires sur ce sujet mais sans vouloir, pour
autant, parler à votre place Dieu s'en faut! il demeure
que l'esprit dans lequel, il me semble, l'Opposition, au moins, a
accepté l'adoption de ces nouvelles règles, était de
permettre que, sur des questions importantes mais qui ne sont pas
nécessairement des questions qui sont soumises au Parlement sous la
forme d'un projet de loi, il y ait la possibilité d'un débat,
à un moment approprié, étant donné les
circonstances, qui permette de mettre en lumière les points de vue,
à la fois du gouvernement et des formations de l'Opposition sur un sujet
d'intérêt général.
Les règles, cependant et le député de
Rosemont est parfaitement justifié de le souligner n'excluent pas
la participation des députés ministériels. Mais je ne
voudrais pas, non plus, par mon silence, au moins, créer l'impression
que ces règles doivent être interprétées comme
permettant permettez-moi l'expression une espèce de "free
for all", puisque l'opinion publique, sur des sujets comme la recherche
scientifique et le financement de la recherche, s'attend, dans le fond,
à ce que les formations politiques se définissent par le biais
d'un tel débat. Je ne sais pas si, ce matin, nous avons réussi
à le faire ou pas, cela, il faudra un peu de recul pour en juger, mais
je crois que l'intérêt du Parlement est de fournir des occasions,
par ces questions avec débats, pour que se définissent les
positions respectives des formations politiques beaucoup plus que des positions
industrielles de certains membres de l'Assemblée nationale.
Je dis ceci, tout en rappelant qu'effectivement cela ne devrait
être interprété comme privant qui que ce soit d'un droit de
participer nor- malement, mais le but premier, et c'est ce que je voulais
souligner, est celui que je viens de décrire, à mon avis.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Saint-Laurent, vous avez fait l'intervention que je m'apprêtais à
faire. Je vous remercie de votre intervention, sauf que M. le
député de Rosemont, je croyais, durant que je me suis
absenté, que vous aviez pris la parole. Je me suis absenté un
certain temps et je croyais qu'on vous avait donné la parole à ce
moment parce que je l'avais indiqué à celui qui m'a
remplacé. Il est souhaitable quand même que les
députés puissent intervenir, mais je pense que cela
dépendra toujours de la forme des débats et de la nature des
questions qui seront soulevées. Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je regrette que le député de
Rosemont parte un peu ennuyé parce que c'est ordinairement un bien bon
collègue. Il reste, je pense, que c'étaient, au moins
jusqu'à ce moment, les règles de jeu qui avaient
été établies. Pour ne pas perdre de temps, il y a deux
questions précises que je veux poser. Je vais les faire courtes
espérant avoir une réponse courte. Le livre vert doit être
publié incessamment, disons décembre, peu importe. Sera-t-il
suivi d'un livre blanc?
M. Laurin: II est possible que ce soit retardé à la
fin de janvier parce que notre enquête a été plus large
qu'elle avait été prévue au départ et nous voulons
justement que ce ne soient pas des hypothèses improvisées que
nous présentions à l'Opposition et à la population. Donc,
cela va peut-être être un peu retardé, malgré que
cela fait déjà une cinquantaine de réunions qui ont eu
lieu. Donc, ce n'est pas que les gens ne peuvent pas se réunir, c'est
que l'ampleur des problèmes est plus grande que prévue et la
profondeur doit aussi être explorée. Mais il est bien
évident qu'à la suite du livre vert il y aura une période
de consultation menée auprès du public, des milieux
concernés. A la suite de cette consultation, il y aura soit
présentation d'un livre blanc, soit présentation de projets de
loi qui mettront en place les éléments qui ont été
retenus à la suite de consultations publiques.
Mme Lavoie-Roux: Ma deuxième question. Est-ce que le
ministre a travaillé à l'élaboration des mécanismes
de consultation qui seront mis en place pour que cette consultation se fasse
auprès de la population, mais aussi en particulier auprès de
toutes les personnes ou les milieux intéressés à la
recherche scientifique?
M. Laurin: Nous le faisons toujours mais, si vous avez des
suggestions à nous faire en ce sens, elles sont très
bienvenues.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez commencé à
élaborer ces mécanismes?
M. Laurin: Non, pas encore, mais, si vous avez des suggestions
à nous faire, on les accueillera avec plaisir.
Mme Lavoie-Roux: Merci. Une autre question qui est très
pratique aussi. Evidemment, on a touché tout à l'heure le
financement fédéral à la recherche. Est-il dans
l'intention du gouvernement actuel d'empêcher des universités
d'avoir accès aux subventions du gouvernement fédéral ou
de contrôler davantage cet accès aux subventions
fédérales?
M. Laurin: Ce n'est pas l'objet de l'étude que nous menons
dans l'élaboration du livre vert. S'il y avait une position, quelle
qu'elle soit dans ce domaine, elle sera étudiée, je crois, au
Conseil des ministres ou au sein du ministère de l'Education, si cela
touche des institutions de l'Education.
Mme Lavoie-Roux: En d'autres termes, ce n'est ni oui, ni non.
M. Laurin: Non.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Comme il reste quelques minutes, je vais
faire mes trois minutes de conclusion. Ce qui, je pense, n'empêche pas
mes collègues de reparler tout le reste du temps s'il reste quelques
minutes.
Evidemment, je pense que nous avons à peine abordé toutes
les dimensions de ce sujet très vaste. Je voudrais quand même
attirer l'attention du gouvernement sur les réactions du Conseil des
universités aux stratégies triennales. Il y a là-dedans
une foule de questions qui auraient pu nous servir de questions jusqu'à
la semaine prochaine. Je ne les énumérerai pas, mais, il y a
quand même un grand nombre de réticences qui sont exprimées
touchant les modalités de consultation dans l'établissement des
priorités de l'Etat. Si je le mentionne, c'est parce qu'on aura
peut-être l'occasion d'y revenir au moment de l'étude des
crédits. Il y a également des réserves quant aux
modalités et à l'échéancier de l'intervention
définie par le ministère quant à l'évolution du
programme FCAC. Evidemment, il y a des questions qui sont posées quant
à la problématique générale touchant la recherche
libre et la recherche orientée. Je pense que ce que signalent ces
points, c'est qu'évidemment l'université est le chien de garde de
sa propre autonomie et qu'il y aura probablement toujours ces tensions entre
l'université et l'Etat.
Il reste que j'ai cru comprendre que les ministres qui sont devant nous
concourent quand même à ce principe que la recherche doit rester
libre dans les universités et que ces dernières doivent rester
autonomes. Ce qui n'empêche pas l'Etat de faire connaître ses
priorités, de suggérer des champs d'exploration possibles, mais
l'initiative dans le domaine de la recherche scientifique demeure vraiment la
propriété il faudrait peut-être nuancer de
l'université elle-même.
Je vous remercie, M. le Président, M. le ministre et MM. les
fonctionnaires qui l'accompagnaient. Je pense que je dois un bon merci à
mes deux collègues qui ont beaucoup d'expérience dans ces
domaines. Pour moi, l'expérience s'avère assez heureuse.
Le Président (M. Richard): M. le ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, si toutes les
"questions avec débat" de l'avenir entraînent des séances
aussi intéressantes que celle que nous venons de connaître, je
crois que cela aura été une innovation importante dans la vie
parlementaire. C'est de bon augure, je crois, que la toute première
question avec débat ait porté sur un sujet qui, normalement, ne
fait pour ainsi dire jamais l'objet de discussions publiques. Je
considère cela, pour ma part, comme étant d'excellent augure.
Cela étant dit, qu'on me permette de conclure en évoquant trois
points particuliers.
Nous sommes pleinement d'accord, tout d'abord, avec l'importance qui
doit être accordée à la recherche scientifique au
Québec et, en particulier, à la recherche universitaire, puisque,
ici, l'infrastructure de la recherche est largement située dans les
universités. Peut-être un jour la recherche industrielle
prendra-t-elle plus d'ampleur; la recherche gouvernementale est peut-être
aussi appelée à se développer, mais nous devons constater
que, jusqu'ici, les universités ont été à
l'avant-garde. La recherche libre n'a pas été aussi improductive
qu'on le pense. A mon avis, nous pouvons tabler sur les universités dans
l'avenir pour continuer à développer la recherche,
particulièrement le secteur qu'on pourrait appeler libre,
c'est-à-dire dont les citoyens ont l'initiative.
En second lieu, il faut souligner l'importance, qui ressort clairement
des débats de ce matin, d'une politique québécoise de la
recherche faisant partie d'une politique scientifique plus large. Le livre vert
en préparation sous la direction de mon collègue, le ministre
d'Etat, devrait apporter des réponses depuis longtemps attendues
à cette dimension du problème. Le ministère de l'Education
ne refuse pas, bien au contraire, que les volets de recherche universitaire
qu'il administre soient clairement situés à l'intérieur
d'une politique plus générale du gouvernement. J'ajouterais que
nous le souhaitons même vivement. Cela permettrait d'éclairer
davantage des questions importantes et difficiles comme les programmes majeurs,
dont nous avons parlé ce matin, et le choix des thèmes
prioritaires.
En troisième lieu et pour conclure, je voudrais ajouter que les
programmes de recherche universitaire seront, de toute évidence,
maintenus et développés à la mesure de nos moyens
financiers, ainsi qu'assurer mes collègues de la commission et
vous-même, M. le Président, que nous procéderons de
façon vigoureuse à l'amé-
lioration des mécanismes et de la procédure
d'évaluation des projets de recherche universitaire.
A ce propos et même si des correctifs s'imposent, je pense qu'il
convient de rappeler l'existence du comité-conseil responsable,
justement, de diriger et de suivre le processus d'examen des projets et
d'allocation des subventions.
Ce comité-conseil, qui a été créé, je
crois, en 1974 par l'un de mes prédécesseurs, fait rapport chaque
année et propose des améliorations. J'ai d'ailleurs en main son
rapport, qui, malheureusement, est un document interne, et qui pour
l'année courante contient de très nombreuses recommandations dont
certaines rejoignent les préoccupations exprimées, notamment, par
le député de Saint-Laurent, il y a un instant.
Je puis ajouter que son rapport de 1977, dont nous devrions recevoir la
version finale incessamment, sera particulièrement l'objet de notre
attention. Dans le cas qui a été évoqué par le
député de Saint-Laurent, celui de l'éthique
professionnelle, celui de la déontologie en matière de recherche
universitaire, il nous propose des correctifs aux abus partiels non pas
généraux qui ont été à l'origine de
certains événements, ces temps-ci, et nous avons l'intention de
nous en inspirer sur plus d'un point.
M. le Président, encore une fois, j'estime que cet exercice a
été des plus utiles et je vous souhaite qu'il en soit de
même au cours des semaines qui viennent.
Le Président (M. Richard): Avant de mettre un terme
à cette séance, je voudrais vous remercier, madame et messieurs,
de la sérénité de vos propos et de votre collaboration. La
séance est close.
(Fin de la séance à 13 heures)