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Etude du projet de loi no 101
Charte de la langue française
(Onze heures quarante minutes)
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, madame et
messieurs!
Puis-je demander aux députés de regagner leurs chers
fauteuils où ils siégeront pendant quelques heures?
Au début de cette séance, je voudrais, pour que nous nous
comprenions tous et que nous nous entendions tous, faire une mise au point,
sinon une mise en garde. Nous aurons une seule séance aujourd'hui. C'est
rare que cela arrive. C'est arrivé lorsque nous avons
siégé sur le projet de loi 1 et, par conséquent, les
changements que l'on m'indiquera, au moment où je ferai l'appel des
députés, sont valides pour tout le reste de la séance et,
même si on ne demande pas le consentement unanime devant la directive, il
n'y a pas de changement pendant une séance. D'ailleurs, cette directive
a été rendue le 7 ou le 8 juin 1977 à cette même
commission, alors que nous entreprenions les travaux sur le projet de loi
1.
Par conséquent, je vais faire l'appel. Je pense que j'ai fait
tous les changements, sauf un; lequel? Je fais l'appel des membres. M. Alfred
(Papineau) remplacé par M. Duhaime (Saint-Maurice); M. Bertrand
(Vanier), M. Charbonneau (Verchères), M. Charron (Saint-Jacques)...
M. Charron: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Chevrette
(Joliette-Montcalm) remplacé par M. Fallu (Terrebonne)...
M. Fallu: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Ciaccia (Mont-Royal),
M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes)...
M. de Bellefeuille: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Dussault
(Châteauguay)...
M. Dussault: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Grenier
(Mégantic-Compton)...
M. Grenier: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Guay
(Taschereau)...
M. Guay: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys)...
M. Lalonde: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... Laplante (Bourassa)...
M. Laplante: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Laurin (Bourget)...
M. Laurin: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie)...
Mme Lavoie-Roux: Présente.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Le Moignan
(Gaspé) remplacé par M. Biron (Lotbinière)...
M. Biron: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Paquette (Rosemont)
remplacé par M. Morin (Sauvé)...
M. Morin (Sauvé): Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Roy
(Beauce-Sud), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M.
Raynauld (Outremont)...
M. Raynauld: Présent.
Le Président (M. Cardinal): ... M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Sur ce, lors de l'ajournement aujourd'hui, nous aurons
peut-être deux suspensions hier soir, nous en étions
à débattre l'article 68. M. le député de
Sauvé était intervenu et avait employé tout son temps. M.
le député de Lotbinière est intervenu; il lui reste encore
du temps. Mme le député de L'Acadie était intervenue; il
lui reste encore du temps. Il y avait aussi M. le député de
D'Arcy McGee qui est intervenu, mais il n'est pas, aujourd'hui, membre de cette
commission et, par conséquent, c'est oublié; il faut le prendre
dans le sens de la procédure et non pas dans ce qu'il a pu dire de
profond.
Sur ce, je n'ai personne que je peux reconnaître, à qui la
parole était accordée, puisque M. le député de
D'Arcy McGee n'est pas là. Oui, Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne sais pas si c'est
une question de règlement avant de débuter; est-ce que...
Le Président (M. Cardinal): Approchez donc votre micro,
s'il vous plaît!
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais vous demander, M. le
Président, ou peut-être que je devrais plutôt demander cela
au ministre d'Etat au déve-
loppement culturel... J'ai vu, dans le Devoir de ce matin, qu'il
était dans les intentions du gouvernement d'imposer le bâillon le
15 août. Je voudrais savoir s'il y a un fondement à ceci et, si
oui évidemment, je crains fort qu'on le nie je lui pose la
question directement.
M. Laurin: Des rumeurs.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, je peux répondre
à la question de Mme le député.
Le Président (M. Cardinal): En tant que leader
parlementaire adjoint.
M. Charron: II n'y a rien de fondé dans les articles qui,
d'ailleurs, vont se répéter jour après jour. Je signale
seulement à madame que ce qui peut alimenter pareille rumeur est
habituellement l'attitude de l'Opposition et, si elle ne veut pas se retrouver
avec pareille rumeur chaque matin, elle en a en bonne partie la
responsabilité. Mais puisque madame fait référence
à des journaux de ce matin, peut-elle nous confirmer ce que la Gazette
nous annonce ce matin, c'est-à-dire de la dissension profonde dont sa
position serait victime dans son propre parti?
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît,
à l'ordre!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, cela me ferait tellement
plaisir de lui répondre, mais j'en aurai l'occasion un peu plus
tard.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! Je l'ai déjà mentionné, pas de questions de
privilège déguisées et pas de débat sur les fausses
questions et surtout sur les rumeurs.
Je reconnais, dans l'ordre, M. le député de
Lotbinière et ensuite M. le député de
Marguerite-Bourgeoys. Ils voudront bien m'indiquer ce sur quoi ils veulent
parler.
M. Biron: M. le Président, c'est tout simplement une
demande de directive.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
Chapitre VIII: La langue de l'enseignement
(suite)
M. Biron: A quel moment précis pourrions-nous poser
quelques questions très brèves au ministre de l'Education
concernant le projet d'un nouveau règlement qu'il nous a
déposé hier?
Le Président (M. Cardinal): C'est une question facile,
mais la réponse est difficile.
Si je me souviens bien, le ministre d'Etat au développement
culturel a distribué hier, en commission parlementaire, un projet de
règlement qui découle de plusieurs articles, dont le prochain que
nous allons étudier, l'article 69. On me corrigera si je commets la
moindre erreur. Comme je l'ai déjà dit, on en demande
beaucoup.
M. Morin (Sauvé): Non, M. le président, il
découle de l'article 77.
M. Lalonde: A l'article 69, on ne prévoit pas de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Bon, alors, 77... D'accord. Je
ne pense pas qu'au moment de l'étude de l'article 68, nous puissions
discuter de ce règlement pour la raison suivante, c'est que le
règlement n'a pas été déposé en commission
parlementaire, il a été remis à des fins d'information.
Mais, dès maintenant, je puis dire ceci: Lorsque nous serons rendus au
premier article pertinent on m'indique que ce sera 77 dans la
limite de ce que prévoit l'article 160, c'est-à-dire dans la
limite du débat de 20 minutes par député, je permettrai
certainement que l'on discute même d'un projet de règlement.
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Sauvé, sur la même question de
règlement?
M. Morin (Sauvé): Oui, précisément.
Le Président (M. Cardinal): Parce que j'avais reconnu
auparavant M. le député de Marguerite-Bourgeoys. D'accord,
allez!
M. Morin (Sauvé): Mon intervention n'est pas faite pour
compliquer les choses, au contraire. En attendant que nous abordions l'article
77, ce qui devrait se produire dans le courant de la semaine prochaine, je suis
disposé à donner toutes les explications que le chef de l'Union
Nationale ou ses collègues du même parti voudront me poser dans le
particulier. Je suis prêt également à répondre en
Chambre à toutes les demandes qu'ils voudraient me faire officiellement
sur le sens du nouveau règlement, sur sa portée etc.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé, je reconnais votre connaissance c'est un peu
pléonastique sur la façon dont les choses doivent se
passer. Vous avez raison: II y a trois moments où ces questions peuvent
être posées, soit au moment de la période des questions
orales à l'Assemblée nationale, soit au moment où nous
étudierons le premier article auquel ce projet de règlement se
rattache, soit, évidemment, si on ne veut pas le faire publiquement,
dans les corridors ou dans les bureaux de cette Assemblée nationale.
M. Biron: C'est tout simplement pour m'expliciter, M. le
Président. Le projet me semble assez clair partout, sauf à
quelques points précis. C'était beaucoup plus pour avoir des
explications. Si ce n'est pas clair pour moi, ce ne l'est peut-être
pas
pour beaucoup d'autres aussi. En posant la question publiquement
à la commission parlementaire, on éclaire tous nos concitoyens
québécois. C'est surtout sur ce point...
M. Lalonde: Si ce n'est pas clair pour lui, M. le
Président, ce ne l'est sûrement pas pour personne.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Lotbinière, je pense qu'on vous a indiqué la voie à
suivre. Vous pourrez, soit mardi, à l'Assemblée nationale... A
l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît! ... soit
à l'Assemblée nationale, mardi, poser des questions...
Une Voix: Lundi...
Le Président (M. Cardinal): ... soit, lundi, oui, je
m'excuse...
M. Lalonde: Soit, M. le Président, en abordant l'article
77.
Le Président (M. Cardinal): Soit lorsque nous serons
rendus à l'article 77 en cette commission.
Est-ce que le député de Mégantic-Compton voulait
intervenir sur la même question de règlement?
M. Grenier: Me permettez-vous simplement une seconde? ...
c'était l'objet de ma question de tout à l'heure. Entre 69 et 77,
on aura bien sûr des questions à poser. Cela va atténuer ou
changer notre position sur plusieurs articles. Si on avait les informations...
S'il y avait lieu de faire une pause à 69, on pourrait poser toutes les
questions dont on a besoin afin de nous éclairer sur les articles. On
aurait des amendements aux articles 69 et 77.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton, j'ai déjà mentionné à
cette commission qu'on pourrait évidemment s'entendre et avoir un
dialogue à 21, soit le nombre de membres de cette commission, mais
chaque décision que vous me demandez de rendre constitue un
précédent: Je dois penser non seulement au moment présent,
mais à l'avenir qui est ensuite engagé. C'est pourquoi, si on
m'informe vraiment que ce n'est pas l'article 77 auquel le règlement
peut vraiment se rattacher, je ne pourrai pas le permettre à l'article
69.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Si cela peut aider le député de
Mégantic-Compton et le député de Lotbinière, quant
à nous, s'il y a des questions accessoires ou rattachées aux
problèmes que nous étudierons à l'article 69, si cela peut
faciliter les travaux de cette commission, nous n'aurons aucune objection
à ce que vous donniez autant de liberté que vous en avez
donné au ministre de l'Education hier, lorsque, sur l'article 68, il a
quand même engagé le débat sur toute la question de la
langue de l'enseignement.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, vous êtes fort aimable et
aussi fort renseigné. Vous avez trouvé la solution que la
présidence pourrait employer pour aider les députés de
Lotbinière et de Mégantic-Compton.
Si, au moment de l'article 69, j'obtenais un consentement unanime de la
commission, je pourrais vous permettre ces questions.
M. Lalonde: L'Union Nationale pourra toujours compter sur
l'Opposition officielle pour l'aider.
Le Président (M. Cardinal): Je n'en doute absolument
pas.
M. Grenier: Cela commence bien la journée.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, reprenons-nous
l'article 68? Qui demande la parole sur l'article...?
M. Laurin: Je l'avais demandée hier.
Le Président (M. Cardinal): Oui, d'accord. Je reprends
cette tradition qui veut que, quand même, c'est un projet du parti
ministériel...
Le ministre d'Etat au développement culturel.
M. Grenier: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Je n'ai pas entendu le président de
l'Assemblée nationale ni vous non plus saluer la présence dans
notre salle, ici, d'un député de l'Assemblée
législative de Toronto qui est parmi nous. J'aurais aimé que M.
Roy se lève pour qu'on puisse l'accueillir.
Le Président (M. Cardinal): Alors, c'est M. Roy, de
l'Assemblée législative de l'Ontario. M. Roy, vous êtes
bienvenu dans cette capitale du Québec. J'ai permis, exceptionnellement,
qu'il y ait dans une commission parlementaire, une manifestation de sympathie.
C'est interdit normalement par le règlement, mais c'est pour souligner
votre présence.
Merci.
M. le ministre d'Etat au développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, à la suite de
l'intervention du ministre de l'Education, hier soir, le député
de L'Acadie a émis le souhait, peut-être le regret aussi, que le
gouvernement fasse au plus tôt connaître les principes qui ont
présidé à l'élaboration de sa politique en ce qui
concerne l'enseignement et les objectifs qu'il poursuit.
Je pense qu'il convient de satisfaire cette curiosité.
Les objectifs du gouvernement comportent essentiellement trois
éléments. Premièrement, que
l'enseignement en anglais soit réservé aux
Anglo-Québécois actuels et à leurs descendants,
Anglo-Québécois étant pris ici dans un sens culturel et
linguistique, non en fonction de l'appartenance à une communauté
anglo-saxonne, panca-nadienne, panaméricaine ou mondiale.
Deuxièmement, que les nouveaux immigrants et leurs descendants
soient orientés vers l'école française.
Troisièmement, que les mesures de contrôle soient les plus
simples possible et excluent tout recours à des tests linguistiques.
Pour concilier le premier élément avec le
troisième, nous avons dû éliminer la
référence aux critères de langue maternelle et de langue
d'usage. Ces critères, en effet, ne se contrôlent pas
objectivement. Il nous aurait fallu les appliquer de façon qu'on aurait
pu qualifier d'arbitraire, et plus nous aurions voulu réduire la part
d'arbitraire, plus il nous aurait fallu multiplier les enquêtes, les
cueillettes de données, les vérifications multiples.
Quant au deuxième élément, il nous est apparu
impossible de l'atteindre en établissant un régime de droit
distinct pour les nouveaux immigrants. Outre le fait qu'il apparaîtrait
odieux dans l'avenir d'avoir à établir la date d'arrivée,
avant ou après 1977, de son premier ancêtre, pour
déterminer les droits d'un individu à recevoir l'enseignement en
anglais, une telle disposition aurait été sûrement
contestée comme incompatible avec la Loi de la citoyenneté
canadienne, qui interdit toute discrimination sur la base de la date
d'obtention de cette citoyenneté.
M. Lalonde: Le ministre me permettrait-il de l'interrompre?
M. Laurin: Oui.
M. Lalonde: Croyez-moi, ce n'est pas pour être
désagréable, mais je m'aperçois que le ministre s'exprime
sur l'article 69. Je sais que l'invitation a été faite hier par
le député de L'Acadie, mais si on permet à chacun des
députés de discuter pendant 20 minutes sur l'article 68 en
parlant de l'article 69 et qu'on fait la même chose à l'article
69, cela va retarder les travaux. Je n'aimerais pas que le gouvernement se
rende coupable de filibuster.
M. Laurin: A ce moment, je peux proposer l'adoption de l'article
68.
M. Lalonde: II y en a peut-être qui ont quelque chose
à dire sur l'article 68, c'est pour cela.
M. Laurin: Mais c'est en réponse à une
question...
Le Président (M. Cardinal): D'accord, je ne vous ai pas
interrompu, M. le ministre.
M. Laurin: II y a aussi des discussions
générales.
Le Président (M. Cardinal): Je ne vous ai pas interrompu,
parce que je sens depuis hier soir ce désir que l'on parle de l'article
69, presque avant l'article 68.
M. Laurin: Qu'on les considère ensemble.
Le Président (M. Cardinal): Tant qu'il n'y a pas
consentement unanime, je pense qu'il faut en revenir à l'article 68. Je
demande, pour une deuxième fois, s'il y a quelqu'un qui veut s'exprimer
strictement sur l'article 68? M. le député de Mont-Royal. Je
m'excuse M. le ministre, mais...
M. Laurin: Cela va.
Le Président (M. Cardinal): Sans cela, tantôt,
à l'occasion de l'article 69, on parlera peut-être de l'article
77. Alors, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je ne veux pas enlever la parole au ministre. Je n'ai
pas demandé le droit de parole pour interrompre le ministre. Si vous
voulez continuer, M. le ministre, je peux attendre.
M. Lalonde: ...de l'article 68.
M. Ciaccia: Si vous voulez continuer, je peux attendre.
Le Président (M. Cardinal): Je vais être
obligé de poser la question autrement. Est-ce que l'article 68 est
adopté?
M. Ciaccia: Non. Je veux parler sur l'article 68.
Le Président (M. Cardinal): S'il n'est pas adopté,
nous allons parler sur l'article 68.
M. Ciaccia: Exactement, mais, par courtoisie, M. le
Président, je veux donner le droit de parole au ministre. S'il veut
parler sur l'article 68, oui.
Le Président (M. Cardinal): Alors, est-ce que M. le
ministre a quelque chose à ajouter sur l'article 68?
M. Laurin: En fait, il m'apparaît assez difficile de
distinguer les principes, d'une part, sur lesquels est fondée une
politique, et les objectifs que nous entendons poursuivre et les moyens qui
nous ont semblé les plus pertinents pour atteindre la réalisation
de ces objectifs. Mais si, procéduralement parlant, il s'avère
impossible, en l'absence d'assentiment, de procéder à un
exposé qui couvre ces trois éléments, je suis bien
prêt à attendre, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Remarquez que je puis prendre
votre intervention comme une demande de directive. Il est possible, à la
commission parlementaire, à l'occasion d'une étude article par
article, de prendre ensemble deux ou trois articles. Cela s'est fait
fréquemment. Si la
commission, non pas la présidence, ce n'est pas à moi
à le décider, est d'accord pour qu'on étudie à la
fois les articles 68 et 69, je vais le permettre, mais si j'ai un
consentement.
M. Lalonde: M. le Président, pour faciliter les travaux,
nous serions tentés de donner notre accord. J'aimerais qu'on revienne
quand même aux sources.
Le Président (M. Cardinal): La tentation est forte, mais
vous y résistez.
M. Lalonde: Oui, parce que l'article 68 établit le
principe que l'école française est l'école de tout le
monde. Je pense que cela mérite que quelqu'un s'exprime
là-dessus, soit du gouvernement, et l'Opposition a l'intention aussi
d'exprimer son point de vue là-dessus. L'article 69, c'est l'exception.
On commence par l'exception, quand on arrive à l'article 69. Je sais que
c'est là que les problèmes se trouvent en fait, qu'on retrouve
les problèmes pratiques, la controverse et tout. Mais il reste que le
principe que l'école française est l'école de tous les
Québécois mérite qu'on s'y attache
séparément. C'est pour cela que nous nous opposons.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, est-ce que c'est sur la question de règlement?
M. Laurin: Brièvement, M. le Président, quand on
parle de l'exception à un principe ou de la dérogation à
un principe, par le fait même, on se trouve à parler du principe
également. On peut parler d'un principe de deux façons, soit
à partir de l'exception, soit à partir de l'affirmation
fondamentale initiale.
Le Président (M. Cardinal): Je suis bien d'accord, mais il
y a malheureusement des questions de procédure qui me lient et je ne
veux pas justement qu'il y ait un débat sur cette question. A mon humble
avis, l'article 69 est une dérogation à l'article 68 et, à
moins que le parti ministériel ne veuille s'exprimer sur l'article 68,
je vais donner la parole à quelqu'un de l'Opposition officielle. Oui, M.
le député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, puis-je refaire la suggestion
que je vous faisais hier soir? Pouvons-nous, de bonne grâce,
considérer l'article 68 comme adopté?
Mme Lavoie-Roux: Non.
M. Lalonde: Non, parce que nous avons des choses à dire.
Cela me surprend que le gouvernement n'ait pas grand-chose à dire sur
l'article 68. C'est le fondement de sa politique.
M. Charron: Pouvons-nous proposer, M. le Président,
d'aborder les deux articles en même temps?
M. Lalonde: Le député de Saint-Jacques vient de
nous rejoindre après une absence sûrement motivée, mais on
vient justement de discuter de cela.
M. Charron: J'étais là.
M. Lalonde: Je viens d'exprimer les raisons pour lesquelles,
même en étant tenté d'approuver cette suggestion, pour
accélérer les débats, je pense qu'on ne peut pas le faire,
parce que nous voulons nous exprimer sur l'article 68 librement et ensuite sur
l'article 69, qui est une dérogation.
M. Bertrand: Faites-le.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît.
M. Lalonde: Oui, mais on avait demandé le droit de parole
et il a été donné aux autres.
Le Président (M. Cardinal): II demeure une seule et
dernière solution, je me permets de la proposer, elle sera ou ne sera
pas acceptée, c'est qu'on pourrait suspendre l'article 68 et
étudier la dérogation de l'article 69 pour revenir à
l'article 68.
M. Lalonde: Non, écoutez.
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas d'accord. Par
conséquent...
M. Charron: Allons-y, Alonzo.
Le Président (M. Cardinal): ... nous revenons à
l'article 68. Je demande si quelqu'un du parti ministériel veut
s'exprimer.
Alors, du côté de l'Opposition officielle, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: L'article 68, tel qu'il est rédigé,
exprime un principe mais ne va pas assez loin. Il écarte certains... On
va pouvoir faire beaucoup d'autres choses. L'Union Nationale oublie encore que
c'est le gouvernement péquiste qui est au pouvoir et que c'est contre
lui qu'elle devrait diriger son opposition. Bon! Elle recommence...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, d'autres pourraient vous le dire, approchez votre micro.
M. le député de Mont-Royal, sur l'article 68, s'il vous
plaît. Cela fait 20 minutes qu'on se demande si on va parler d'un article
ou d'un autre. Alors, je vous prierais de parler de l'article 68.
M. Ciaccia: M. le Président, l'article 68, comme je le
disais tantôt, exprime un principe mais ne va pas assez loin. Le
député de Sauvé a parlé hier soir des
minorités, il a parlé des tests. Il s'est
référé à la charte que le gouvernement a
introduite. Il a parlé aussi de la communauté anglophone ou de
l'accès aux écoles de langue anglaise. Je voudrais, M. le
Président, toucher à chacun de ces sujets, en relation avec
l'article 68.
Premièrement, quant à la question des minorités, le
gouvernement est mieux de comprendre que les minorités n'accepteront pas
qu'on les force à être unilingues. C'est quelque chose que vous
êtes mieux de vous rentrer dans la tête. Si vous voulez...
M. Morin (Sauvé): Qui vous a dit cela?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Votre projet de loi le dit, votre charte le dit.
M. Morin (Sauvé): Voyons donc.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Sauvé, M. le ministre de l'Education. Ce ne sont
pas des duos que je veux entendre ici. Les articles déjà
mentionnés, 100 et 26, vous obligent tous à écouter le
député qui parle du sujet qui est sur la table. Faudrait
peut-être aussi, M. le député de Mont-Royal, et je ne veux
en rien me prononcer sur le fond, être un peu indemne d'une certaine
agressivité impérieuse qui, à coup sûr, rend les
interlocuteurs éventuels de mauvaise compagnie.M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je vais essayer de reprendre mon calme face à
la provocation dJ député de Sauvé.
The minorities of Quebec, the ethnic minorities, M. le Président,
will not accept to be forced into an unilingual school system. Unless the
government can accept this, we will not have a law that can be administered
properly and accepted by the population.
Si nous essayons de faire des lois à rencontre des désirs,
des voeux, des nécessités et de la réalité, cette
loi, M. le Président, ne sera pas applicable.
Les minorités je parle des minorités qui sont ici,
je ne parle pas des émigrants futurs. Je vais aborder ce sujet
après les émigrants qui sont ici, M. le Président,
sont venus sous certaines représentations. Ils n'ont pas les avantages
des autres citoyens du Québec. Le seul espoir qu'ils ont, c'est de
s'améliorer pour eux-mêmes et pour leurs enfants. C'est ce qu'ils
cherchent, c'est ce qu'ils veulent et c'est ce qu'ils vont avoir, malgré
quatre ou cinq lignes dans un projet de loi.
Et si le gouvernement ne peut pas réaliser cela et que, pour
jouer à la galerie, il essaie de donner l'impression qu'il va forcer
certaines choses contre la justice et l'équité des immigrants, M.
le Président, la loi ne sera pas administrée d'une façon
équitable. Je dirais une autre chose. Les immigrants, les
minorités ethniques, malgré ce qui a été
écrit dans la loi, vont le faire d'une façon légale, vont
trouver le moyen de devenir bilingues, quoi que le gouvernement puisse inclure
dans cette loi. Ils l'ont déjà fait dans le passé. On a
déjà essayé de les empêcher de devenir bilingues.
Ils vont faire des classes dans leurs sous-sols; ils vont créer des
écoles privées, non pas parce qu'ils ne veulent pas être
membres de la société québécoise, mais parce qu'ils
veulent en être membres à part entière; ils ne veulent pas
être des handicapés; il savent qu'ils sont au Québec dans
l'Amérique du Nord, et c'est cela que le gouvernement est mieux
d'accepter, s'il veut donner justice à ce groupe de citoyens.
M. Laurin: Pas de problème.
M. Ciaccia: Quant aux tests, M. le Président, je suis
contre les tests; il n'est pas question de tests. Les critères
d'admissibilité, d'après l'article 68 et les articles
subséquents, ne sont pas fondés et ne devraient pas être
fondés sur les tests. Qu'on n'essaie pas, par une erreur du
passé, d'essayer de masquer les injustices de la présente loi.
Parce qu'il y a eu une erreur dans les tests, on veut aller à une
injustice plus grande; on veut créer des critères arbitraires. On
aurait bien pu dire: Parce que les tests étaient odieux, ils n'ont pas
été acceptés, nous allons prendre le critère des
personnes qui ont les cheveux bleus ou les cheveux blonds pour être admis
à certains... Certainement que c'est objectif. Cela peut
être...
M. Laurin: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, un instant! C'est une
question de règlement.
M. Laurin: On tombe dans l'article 69, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourget a raison. Je ne veux pas revenir sur ce que la commission a
décidé et je dois vous rappeler à l'ordre.
M. Ciaccia: Très bien, M. le Président, je vais
revenir. On s'est référé au livre blanc. Je crois, que
j'ai dit tantôt que le député de Sauvé
s'était référé à la charte, je voulais dire
plutôt qu'il s'était référé au livre blanc.
Si l'article 68 et l'application de l'article 68 étaient en
conformité de l'esprit du livre blanc, je serais très
préoccupé, parce que, quand nous disons que l'enseignement se
donne en français dans les classes maternelles, etc., et que, dans le
livre blanc, nous avons vu une définition du Québécois qui
incluait seulement une certaine portion, un certain secteur de la population,
c'est de la discrimination, c'est quelque chose que je ne peux accepter. On a
maintenant fait l'amendement, mais on trahit toujours notre pensée par
les paroles qu'on prononce. Même, si, dans les mots, nous avons
corrigé "Québécois", supposément pour inclure tous
les résidants du Québec quelles que soient leurs origines
ethniques ou linguistiques, je me souviens que, la semaine dernière, le
premier ministre, quand il a nommé le nouveau président de
l'Hydro-Québec, M. Robert Boyd, a dit: C'est un
Québécois.
Cela m'a encore inquiété, parce que dans son esprit, il
voulait encore justifier qu'un Québécois,
c'est seulement quelqu'un qui a un nom d'origine française, que
cela ne pourrait pas être quelqu'un d'origine anglaise, Boyd, et si
c'est de cela que les minorités s'inquiètent on
parle comme cela de quelqu'un du nom de Boyd ou de M. Smith, qu'allons-nous
faire avec les noms de Montini, de Tadeo et de Ciaccfa? C'est cela qui
m'inquiète et c'est cela l'esprit contre lequel je me prononce dans cet
article 68 dans cette charte, dans le livre blanc.
M. Morin (Sauvé): On peut en faire des
députés.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! Une Voix:
Comme les Fallu d'ailleurs.
M. Ciaccia: Ce n'est pas avec le livre blanc, ce n'est pas avec
ce projet de loi qu'on va encourager et arriver à vos objectifs, M. le
député de Sauvé.
Quand nous disons que l'enseignement se donne en français dans
les classes maternelles, dans les écoles primaires et secondaires, etc.,
et encore, quand on relie ça, M. le Président, à l'esprit
du livre blanc, on se dit: Ecoutez! Qu'allons-nous faire de la
collectivité anglophone? Malheureusement, on essaie de créer une
drôle d'atmosphère ici. Hier soir, je me suis
référé à une sorte d'atmosphère
d'intimidation. Je le répète, M. le Président. On veut
créer une atmosphère où on ne devrait pas dire le mot
"anglais"; on n'e devrait pas défendre cette collectivité, on ne
devrait pas en parler. Mais je m'excuse, M. le Président. Ce sont des
droits individuels, ce sont les droits d'une collectivité, et ça
va au-delà de ça. Cela va dans l'atmosphère de notre
société que nous allons créer, et c'est cette question que
je me pose.
Savez-vous, M. le Président, quand on parle toujours d'une autre
langue et qu'on semble vouloir effacer quelque chose dans l'esprit de l'article
68, peut-être, c'est pour cela que je me dis que peut-être que
l'article 68 aurait besoin d'être amendé. Je ne ferai pas cet
amendement, parce qu'on va encore nous accuser de vouloir faire de
l'obstruction. Quand on veut prendre le droit de parole de ce
côté-ci de la table, c'est toujours pour des questions dilatoires.
On ne peut pas s'exprimer. Je ne ferai pas d'amendement à l'article 68,
M. le Président, mais je vais exprimer mes doutes, poser mes questions
et exposer lés préoccupations que j'ai quand même à
l'article 68, dans le temps qui m'est alloué, quant à mon droit
de parole.
M. le Président, quand on parle des droits de certains individus,
des droits individuels, des droits d'une collectivité, si on veut
admettre le principe du droit d'une collectivité, il y a une
collectivité anglophone au Québec, et ce n'est pas une question
de défendre je veux encore souligner cela le statu quo,
les privilèges. Ce n'est pas ça que je veux faire, M. le
Président, mais quand on veut enlever certains droits, quand on veut
aller contre la justice et l'équité, où cela va-t-il nous
mener? Comme minoritaire, ça me préoccupe, je suis inquiet de
ça, je suis inquiet de l'esprit qui anime le projet de loi.
Je voudrais faire référence aux droits... Quand on dit que
la collectivité a plus de droits ici que n'importe où ailleurs,
ce n'est pas ça la question, M. le Président. C'est possible ou
ce n'est pas possible. Ce n'est pas parce que des gens ont plus de droits qu'on
doit leur en enlever; s'ils en avaient moins, ce ne serait pas une raison pour
leur en donner plus. C'est la justice et l'équité, la
réalité. Mais, à titre d'exemple, je peux citer la
Tchécoslovaquie, ça peut paraître bizarre, pour
défendre les droits culturels parce que c'est de ça dont
on parle on parle des droits culturels, la majorité en a
certainement, M. le Président, des droits culturels, et je serais le
dernier à vouloir enlever ou entamer, ou même brimer, ou faire en
aucune façon que ces droits culturels ne puissent pas s'épanouir
de la façon la plus brillante ou de la meilleure façon possible.
Ce n'est pas ça. Mais je regarde, par exemple, M. le Président,
la constitution de la fédération d'un pays qui n'est pas
démocratique, la Tchécoslovaquie, M. le Président. C'est
à l'article 3. Il y a des minorités dans ce pays. C'est seulement
pour donner l'exemple de la façon non pas dont on protège mais
dont on respecte les minorités. Même un pays qui n'est pas
démocratique dans sa constitution accorde, aux minorités des
droits culturels entiers j'y fais référence ici: des
citoyens appartenant aux nationalités hongroise, allemande, polonaise,
etc., et ceci est important, M. le Président, elles jouissent du
droit au plein développement culturel.
M. le Président...
M. Morin (Sauvé): C'est ça...
M. Laplante: Collectifs ou individuels?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: M. le Président, le principe de l'article 68,
c'est bien que, dans le Québec, l'enseignement se donne en
français. Ce n'est pas contre cela que je parle, mais cela ne va pas
assez loin. Cela ne va pas du tout assez loin. Il n'y a pas de reconnaissance,
premièrement, d'une autre collectivité et je ne veux pas faire,
comme je l'ai dit, de la procédure...
Que le gouvernement le place à l'article 68 ou à un autre,
mais qu'il accepte ce principe et je crois que, pour moi, il est important d'en
parler ici parce qu'on a établi certains principes au début de la
discussion sur la langue de l'enseignement.
Qu'est-ce que cela veut dire, le droit au plein développement
culturel? Cela ne veut pas dire des restrictions, essayer d'effacer, essayer
d'enlever, peur de dire le mot. Cela veut dire de traiter ces gens sur un pied
d'égalité, de leur donner ce droit, non sans restriction, et on
en reviendra à la question d'admissibilité, des restrictions aux
écoles anglaises.
Il y a un autre point que l'article 68 n'établit pas. Il
n'établit pas la nécessité de l'enseignement
de la langue seconde. Je n'en ferai pas un amendement, mais il est
important d'en parler et, quand on cite le livre blanc, on a plus que
l'impression... Le projet de loi nous dit qu'il y aura de l'unilinguisme, mais
il y aura une élite. Quelques-uns pourront apprendre l'anglais. Je ne
parle au nom d'aucune collectivité. Je parle au nom de la justice pour
tous ceux qui habitent au Québec. Si vous pensez que c'est ainsi que
vous allez créer votre société avec une classe
d'élite qui aura le droit d'apprendre une langue et une autre classe qui
n'aura pas ce droit, vous allez échouer. La population n'acceptera pas
cela. C'est injuste. Il n'y a pas d'équité. C'est contre tous les
principes de la justice et c'est cela que l'article 68 n'accepte pas, et il
devrait au moins faire référence...
Même si vous voulez établir ce principe à l'article
68 ce principe acceptable vous n'avez pas le droit d'enlever
à toute la population la chance, le droit d'apprendre une seconde
langue.
Je soutiens que cela revient à faire, avec la protection d'une
culture, d'une langue... Parce qu'on ne donne pas une sécurité en
n'en tenant pas compte, en oubliant la réalité. Ce n'est pas
ainsi qu'on rassure une population. Ce n'est pas en leur disant: Oubliez la
réalité. La réalité est que le Québec est en
Amérique du Nord. La réalité est que nous, les dirigeants
du parti, sommes bilingues. Nous pouvons transiger avec toutes les autres
provinces et les autres pays, mais vous, d'après ce projet de loi, vous
n'aurez pas ce droit. Vous n'aurez pas l'occasion d'apprendre la langue seconde
et...
M. Morin (Sauvé): ... pardon...
M. Ciaccia: M. le Président, j'invoque le
règlement. J'ai le droit de parole.
Le Président (M. Cardinal): ... c'est déjà
fait.
M. Ciaccia: Merci. Et vous n'allez jamais imposer cela aux
minorités du Québec. Je vous le dis à l'avance.
M. Charron: Est-ce que cela se peut?
M. Ciaccia: Elles ne l'accepteront pas. Ces gens veulent
être des citoyens à part égale. Ils ne veulent pas
être des handicapés. Je crois que les principes que je viens de
défendre sont des principes de justice et d'équité. Nous
n'en avons pas du tout contre le principe d'une loi qui veut protéger ou
promouvoir la langue française.
If I would have my choice, I would not have any language legislation at
all because language legislation, by its very nature, must cause restrictions
and it is almost like trying, attempting to legislate on religion, but, in the
present context, it seems that the Parti Québécois is trying to
use this legislation for its other political motives.
I think that we must not fall into their trap. We will discuss the
legislation. Where the articles are accredible and just, we will accept them.
Whether or not, we will make our recommendations and we will oppose them.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, le temps était
déjà écoulé. J'ai reconnu auparavant, selon la
tradition, M. le député de Lotbinière, à qui il
reste seize minutes.
M. Biron: M. le Président, je vais être bref. Je
vais simplement résumer un peu ce que j'ai dit hier soir, d'autant plus
que le ministre de l'Education avait semblé réceptif à
certaines suggestions qu'a répétées tout à l'heure
le député de Mont-Royal.
C'est sûr que, pour nous l'article 68 est très clair, il
donne l'enseignement en français dans les classes maternelles, dans les
écoles primaires et secondaires, sous réserve des exceptions
prévues au précédent chapitre. C'est sûr que les
exceptions, nous allons les discuter un peu plus loin, mais nous sommes
totalement d'accord qu'on donne l'enseignement en français dans les
écoles du Québec. Cela n'empêche pas, sous réserve
des exceptions, de donner l'enseignement d'une autre langue, l'anglais, dans
d'autres écoles.
Voici où je veux en venir, M. le Président. Hier, j'ai dit
ce qui manquait au projet de loi. Il s'agit d'un article par lequel le ministre
de l'Education s'engagerait à améliorer la qualité du
français dans toutes les écoles du Québec il m'a
semblé réceptif à cette suggestion de même
qu'à assurer une bonne fréquence et une bonne qualité des
cours de français dispensés dans les écoles anglaises. La
même chose dans toutes les écoles françaises, une bonne
fréquence et une bonne qualité des cours d'anglais. Ainsi, on
assurera une connaissance suffisante de la langue française dans les
écoles anglaises et une connaissance suffisante de la langue anglaise
dans les écoles françaises.
J'ai constaté tout à l'heure qu'encore ce matin il
était réceptif à une telle suggestion. Je sais que les
députés de l'Opposition ne peuvent présenter de motions
qui engagent des sommes d'argent ou des fonds de la part du gouvernement, mais
j'ai l'impression que le ministre, étant réceptif à une
telle suggestion, lui-même, un peu plus tard, devrait présenter un
amendement ou un nouvel article dans son projet de loi qui garantirait à
ceux et celles qui s'inquiètent justement de l'éducation, de la
langue seconde dans nos écoles au Québec, une certaine
sécurité.
Je reviens à ce que je disais hier, en parlant
d'insécurité. C'est ce qui est le pire, vivre dans
l'insécurité. Alors, si une partie de la population souffre
d'insécurité, surtout si le ministre est réceptif à
de telles suggestions qui peuvent donner un sentiment de sécurité
à notre population québécoise, je crois qu'on devrait
faire l'impossible pour donner un sentiment de sécurité à
notre population, aux allophones, aux anglophones qui craignent que dans les
écoles françaises nous n'enseignions pas la deuxième
langue.
Le député de Mont-Royal, disait tout à l'heure
qu'on n'enseignerait que le français dans les écoles
françaises. Le ministre nous a dit non, qu'on allait enseigner une
langue seconde. C'est un voeu pieux. Si c'était véritablement
dans la loi, une grande partie de la population achèterait le projet
de loi 101 avec des améliorations, bien sûr, mais elle
serait prête à l'accepter. Lorsqu'on ne donne pas ce sentiment de
sécurité à ces gens, ils restent inquiets pour leur
avenir, ils restent inquiets pour la qualité et la quantité de la
langue seconde, la langue anglaise, enseignée dans les écoles
françaises. C'est pour cela qu'ils hésitent à venir dans
les écoles françaises, surtout les allophones. Si ces
gens-là étaient sûrs que dans l'école
française on enseigne une bonne qualité d'anglais, je sais, de
par les nombreuses discussions que j'ai eues avec ces gens-là, qu'il n'y
aurait pas de problème à les convaincre de venir chez nous. Mais
à l'heure actuelle, ils souffrent d'insécurité, ils ne
sont pas sûrs.
Le passé est garant de l'avenir; dans le passé dans les
écoles françaises, malheureusement, on n'a pas enseigné
l'anglais et personne ne pouvait parler la deuxième langue en sortant
des écoles françaises. C'est là qu'il faut faire un effort
additionnel. Je crois qu'avec un engagement, soit du ministre de l'Education ou
du ministre d'Etat au développement culturel, pour qu'on ait dans ce
projet de loi un nouvel article de loi... ou peut-être, M. le
Président, qu'on pourrait greffer à l'article 61 une suggestion
de l'Union Nationale qui est dans son livre bleu à la page 87, l'article
74.
Finalement on fera en sorte d'en former véritablement un projet
collectif au Québec, parce que les gens n'auraient plus peur d'opter
pour l'école française parce qu'ils sauraient qu'ils auraient un
enseignement de l'anglais.
Mais, encore une fois aussi, c'est une recommandation que je fais au
ministre de l'Education, car je crois, je ne peux pas présenter
d'amendements qui vont causer des dépenses au Québec. J'aimerais
que, dans cet article, il y ait un engagement du ministre de l'Education
d'enseigner un meilleur français, d'améliorer les cours de
français dans nos écoles françaises et d'améliorer
nos cours de français dans les écoles anglaises. Cela aussi
manque au projet de loi.
Je comprends que le ministre de l'Education va certainement accepter une
telle suggestion, c'est important, si on veut véritablement aller au
fond des choses, c'est peut-être avec l'article 61 qu'on pourrait
l'améliorer en conséquence. C'est une ouverture que je fais ce
matin, M. le Président, au gouvernement d'accepter une telle suggestion
et, finalement, on sera sûr d'avoir du français partout et on sera
sûr aussi d'avoir une bonne connaissance de l'anglais comme langue
seconde dans toutes nos écoles françaises.
Est-ce que je peux me permettre de distribuer une copie de ce que je me
proposais de faire, mais je ne suis pas sûr que ma motion soit recevable,
parce que cela comporte des déboursés de fonds possibles. Alors,
comme information...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous
avez une motion à présenter, je vous suggère de la
présenter tout simplement, verbalement, pour commencer, et par
écrit, par la suite, au Président, qui verra à
décider de sa recevabilité. Si elle est recevable, à ce
moment, on pourra la distribuer.
M. Biron: Je ne voudrais pas présenter une motion pour
discuter longtemps et faire perdre du temps, si vous jugez...
M. Lalonde: Cela ne vaut pas la peine qu'on en parle?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, selon les usages, vous présentez une motion ou vous
n'en présentez pas. Si vous en présentez une, le président
décidera de sa recevabilité et après, si elle est
déclarée recevable, elle sera distribuée.
M. Biron: Alors, je présente ma motion, M. le
Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
l'article 68?
M. Biron: Sur des mots à ajouter à 68.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pourriez-vous au préalable lire votre motion et m'en remettre une copie,
s'il vous plaît?
M. Biron: "Le ministre de l'Education doit prendre les mesures
nécessaires pour s'assurer que la fréquence et la qualité
des cours de français aux élèves qui reçoivent
l'enseignement en langue anglaise soient de nature à donner à
ceux-ci une connaissance suffisante de la langue française. Le ministre
de l'Education doit également prendre les mesures nécessaires
pour s'assurer que la fréquence et la qualité des cours d'anglais
dispensés aux élèves qui reçoivent l'enseignement
en langue française soient de nature à donner à ceux-ci
une connaissance suffisante de la langue anglaise".
M. Laplante: Ce n'est pas le bon article.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Lotbinière, est-ce que je pourrais vous
demander, dans le cadre de l'article 68, où se situerait l'inclusion de
ces deux paragraphes, parce que nous avons déjà deux
alinéas dans l'article 68, et il serait de mon intérêt et
de l'intérêt de tous de savoir où se situeraient ces
articles, avant de décider de la recevabilité
évidemment?
M. Biron: A l'article 68, on discute de l'enseignement...
l'enseignement se donne en français dans les classes maternelles, je
voudrais être sûr de le compléter. Mais, même si vous
jugez que ma motion n'est pas recevable, M. le Président, je la laisse
comme suggestion et j'y reviendrai peut-être à un article, un peu
plus tard, si vous croyez...
M. Lalonde: Vous plaidez en faveur de l'irrecevabilité de
votre motion, monsieur.
M. Biron: C'est recevable, mais c'est difficile de trouver la
place exactement où...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Lotbinière, vous me placez dans une
drôle de situation parce que vous me présentez une motion,
mais, d'autre part, vous me dites que si elle est irrecevable, ce sera une
suggestion. Je dois vous dire en toute neutralité qu'à moins que
vous ne m'indiquiez de façon précise parce qu'une motion
doit avoir le fond et doit avoir une forme où est située
cette motion dans l'article 68, je devrai, simplement pour défaut de
forme, la déclarer irrecevable.
M. Biron: M. le Président, entre le premier et le
deuxième paragraphe de l'article 68, j'insérerais ma motion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II est
proposé par le député de Lotbinière et chef de
l'Union Nationale que les articles dont il vient de faire mention et qu'il
vient de lire soient inclus et deviennent respectivement les alinéas 2
et 3 de l'article 68, l'alinéa 2 devenant l'alinéa 4.
M. le député de Saint-Jacques, sur la recevabilité
évidemment.
Mme Lavoie-Roux: Peut-on en avoir copie?
M. Charron: M. le Président, me servant des arguments
mêmes du chef de l'Union Nationale dans la présentation de sa
motion, je vois qu'il a fait une partie de ses armes et il est parfaitement
conscient que pareil amendement qui engage des fonds publics est irrecevable
lorsque présenté par l'Opposition.
On peut toujours rappeler qu'il existe à l'article 44 de la loi
22, d'où s'inspire sans doute le chef de l'Union Nationale, une mesure
similaire, mais je rappelerai il n'a pas vécu cette époque
que cet amendement, qui n'était pas au texte original de la loi
22, avait été introduit par le parti ministériel de
l'époque, l'eussions-nous voulu, le gouvernement nous en aurait
empêchés. Peut-être, dans les circonstances, le chef de
l'Union Nationale préférera-t-il s'abstenir sur sa propre
motion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
qu'il y a d'autres députés qui voudraient intervenir sur la
recevabilité? M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, j'inviterais la
présidence à une attitude large et non restrictive
là-dessus, si le député de Lotbinière me permet de
plaider en faveur de la recevabilité de sa motion. Tout d'abord, parce
que le libellé de l'amendement est de facture assez
générale pour vous permettre, M. le Président de ne pas en
venir à la conclusion qu'il s'agit d'une motion d'amendement qui
amènerait nécessairement une dépense d'argent.
On dit que le ministre de l'Education doit prendre les mesures
nécessaires pour s'assurer que la fréquence et la qualité
des cours de français dispensés aux élèves qui
reçoivent l'enseignement en langue anglaise soient de nature à
donner à ceux-ci une connaissance suffisante de la langue
française et vice versa pour l'autre paragraphe. C'est une motion visant
à l'amélioration de la langue seconde.
Quant à moi, j'aurais préféré que... Enfin,
on présentera des motions pour, tout d'abord, commencer à
améliorer la qualité du français et, ensuite, la
qualité de la langue seconde, mais l'Union Nationale a choisi de
procéder de cette façon. Je pense que la motion est recevable,
parce qu'elle ne demande pas directement au gouvernement de prendre des mesures
qui vont coûter de l'argent. On dit: Cela peut être des mesures de
réforme, de politique, de directives, toutes sortes de mesures qui
n'engagent pas des fonds directement. Je vous invite, M. le Président,
à la lire assez attentivement je sais que vous l'auriez fait sans
mon invitation parce que, réellement, le chef de l'Union
Nationale n'engage pas de dépenses d'argent, ce qui ne peut être
fait que par un ministre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, je reviens à la charge
un instant. Ce n'est pas pour être déplaisant, mais il y a un
règlement qui a prévu cela, c'est l'article 64 de notre
règlement. Je renvoie les députés de la commission au
libellé de cet article. L'on dit qu'une motion ne peut être
présentée que par un représentant du gouvernement et
même on spécifie, après recommandation du
lieutenant-gouverneur en conseil. C'est une contrainte qui s'impose aux membres
du gouvernement eux-mêmes, parce qu'elle a pour objet directj'en
viens aux 2 et 3, M. le Présidentl'allocation de subventions et
l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les
contribuables.
Si nous acceptions je ne dis pas qu'on le refuse en esprit
dans le libellé la motion d'amendement présentée par le
chef de l'Union Nationale, il est évident que l'allocation des
subventions aux différentes commissions scolaires du Québec s'en
trouverait forcément modifiée. Il se trouverait dès lors
une imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics, autrement
dit la liberté de manoeuvre du gouvernement se trouverait ainsi
diminuée du fait que, forcément, par la loi, il se verrait
obligé de prendre une partie du budget total de l'Etat et de la
convertir aux fins que vient de signaler le chef de l'Union Nationale.
Si cet aspect existe dans notre règlement, M. le
Président, qui vient même d'un précédent
règlement, il a toujours été jugé essentiel pour
que la législation présentée et étudiée,
soit à l'Assemblée, soit en commission lorsque l'Assemblée
la délègue en commission, ait tout le caractère de
responsabilité. J'invoque donc l'article 64, 2e et 3e à nouveau
pour l'irrecevabilité de la motion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je crois qu'à sa face
même, la motion est recevable parce qu'il n'y a rien, à la lecture
de cette motion, qui oblige qu'on dépense de l'argent ou que ça
tombe dans le libellé de l'article 64. A la face même, on peut
s'assurer de l'enseignement de la langue seconde sans,
nécessairement, dépenser des sommes additionnelles. On pourra le
faire de toutes sortes de façons, question d'allocation des cours,
prendre les professeurs qui sont en chômage et au lieu de les laisser en
chômage, les laisser enseigner la langue seconde. Alors, à la face
même, ça n'oblige pas, ça n'implique pas qu'on
dépense des fonds, et je pense que la motion est recevable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je partage l'avis de mes
collègues, à savoir qu'à sa face même, cette motion
est recevable. J'aurais préféré, par exemple je le
regrette compte tenu du principe énoncé à l'article
68, qu'il inspire un amendement qui soit davantage pour améliorer la
qualité du français, puisque c'est ça qui est le principe
du projet de loi. C'est l'école française. Cela m'aurait
semblé préférable. Mais je pense que des mesures
nécessaires ne veulent pas nécessairement dire des mesures
financières. D'ailleurs, je pense que cela a été un des
plaidoyers du ministre de l'Education, à qui on a demandé
plusieurs fois: Est-ce qu'on ne trouve pas de sommes supplémentaires au
budget? Il nous a assurés que ce n'était pas nécessaire,
que l'amélioration et même la reconnaissance d'un principe tel que
l'amélioration de la langue seconde n'impliquait pas
nécessairement des mesures budgétaires supplémentaires.
Tout le monde se rappellera, de fait nous étions en commission
parlementaire pour l'étude des crédits sur l'éducation et,
également, je pense, à l'Assemblée nationale
...
Une Voix: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Alors, moi, je pense que ce que le
député de Lotbinière veut faire accepter, c'est un
principe: préciser des intentions et que, continuellement, le
gouvernement ne se dérobe pas vis-à-vis de cette obligation qu'il
a d'assurer aux étudiants une bonne connaissance de la langue seconde.
Dans ce sens-là, je pense qu'elle est acceptable et que l'argument, en
tout cas peut-être en aura-t-il un meilleur plus tard que
le député de Saint-Jacques invoque présentement ne me
semble pas rendre cette motion irrecevable, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... M.
le député de Sauvé, à qui j'avais donné la
parole préalablement.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais tout
d'abord féliciter le chef de l'Union Nationale pour les
préoccupations qu'il a exprimées. L'amélioration du
français et des langues secondes doit être, pour tous les
Québécois et pour le gouver- nement en particulier, une
préoccupation de premier plan. A telle enseigne que le gouvernement,
dans son discours inaugural, a fait savoir que deux de ses priorités
portent là-dessus.
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.
Est-ce qu'on parle de la recevabilité de la motion ou sur le fond de la
motion?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On parle
de la recevabilité.
M. Morin (Sauvé): Bon! J'ai l'intention...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
permets une dernière intervention aux députés de
Sauvé et de Marguerite-Bourgeoys. Par la suite, j'aurai une
décision à rendre.
M. Morin (Sauvé): Bien! M. le Président, le
gouvernement a annoncé des priorités à cet effet je
pense que le chef de l'Union Nationale s'en souviendra et nous avons
même dit que nous allions consacrer à ces priorités
plusieurs millions de dollars cette année, l'an prochain et au cours des
années à venir, puisque cette politique va se développer
dans l'avenir. De même va-t-il être question de l'enseignement des
langues secondes dans le livre vert, qui doit paraître incessamment.
M. Lalonde: M. le Président, je déteste...
M. Morin (Sauvé): De sorte que, M. le
Président...
M. Lalonde:... interrompre le...
M. Morin (Sauvé): ... je veux en venir à mes
conclusions.
M. Lalonde: C'est un long préambule.
M. Morin (Sauvé): Le chef de l'Union Nationale est fort
conscient du fait qu'on ne saurait inclure dans un projet de loi, de la part de
l'Opposition, en tout cas des dispositions entraînant des dépenses
pouvant se chiffrer à plusieurs millions de dollars. De sorte que tout
en félicitant le chef de l'Union Nationale pour ses
préoccupations qui rejoignent les nôtres je tiens à
le rassurer pleinement sur ce point je suis contraint, d'autre part, de
reconnaître que le député de Saint-Jacques, leader du
gouvernement à la commission, a raison de souligner le fait que cette
proposition entraîne des dépenses.
Non seulement sont-elles considérables, mais l'article
proposé par le chef de l'Opposition est d'une telle
générosité que le coût en demeure
indéterminé; mais, tout indéterminée qu'elle soit,
elle n'en sera pas moins considérable.
Quand on se réfère à la fréquence, à
la qualité des cours de français et de langues secondes, cela
entraîne des dépenses et nous allons les faire. Seulement, du
point de vue de la procédure
parlementaire, il n'appartient malheureusement pas au chef de l'Union
Nationale, membre de l'Opposition, de proposer cela à la commission.
M. Ciaccia: Pourquoi n'avez-vous pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, M. le député de Mont-Royal.
M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Sur la
recevabilité, une dernière intervention.
M. Lalonde: J'ai seulement mentionné l'article 64 et il
m'apparaît important que, si vous décidiez de déclarer la
motion irrecevable, cela ne soit pas en vertu de l'article 64 parce que la
motion est libellée de telle façon qu'elle n'entraînerait
pas directement ou nécessairement des dépenses de l'Etat. Il
reste l'article 70. Je pense qu'il est de mon devoir, étant donné
que j'ai plaidé en faveur de la recevabilité, de me poser une
question, toutefois, à savoir si c'est bien à l'article 68 que
cet amendement devait être apporté, étant donné...
A-t-il pour but d'écarter la question principale?
M. Morin (Sauvé): Voilà.
M. Lalonde: C'est la seule question, mais il importe que cela ne
soit pas en vertu de l'article 64. J'ai intérêt à ce que
cela ne soit pas en vertu de l'article 64 parce que j'ai une motion
d'amendement semblable à l'article 80 qui...
M. Morin (Sauvé): Tiens, tiens. M. Lalonde: Je vous
déclare...
Mme Lavoie-Roux: Vous aimez cela le savoir à l'avance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, je dois vous informer que votre
intervention est extrêmement pertinente et qu'elle correspond au jugement
que le président avait l'intention de rendre.
Tout d'abord, je ne pense pas que le président soit en mesure,
à ce stade-ci s'il vous plaît d'alléguer
l'article 64 puisque la présidence est dans l'ignorance la plus
complète, à savoir si un tel amendement amène oui ou non
des dépenses supplémentaires.
Si la présidence était convaincue de ce fait, la
présidence n'hésiterait pas à alléguer l'article
64. D'autre part, à bon droit, le député de
Marguerite-Bourgeoys s'est servi de l'article 70 et, sans déclarer cette
motion recevable ou irrecevable, je dis qu'elle est prématurée et
qu'il y a certainement d'autres articles que nous étudierons au cours de
certaines journées qui permettront à n'importe quel
député de cette commission de présenter un tel amendement
et le président, alors, aura une décision à rendre.
Alors, sans la déclarer recevable ou irrecevable, je dis
qu'à ce stade-ci, elle ne me paraît pas recevable parce que vous
aurez l'occasion de la représenter, probablement, un peu plus tard.
D'accord?
M. Charron: Je propose l'adoption de l'article 68.
M. Lalonde: M. le Président, vous m'aviez reconnu
après le député de Lotbinière pour l'article
68.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ma liste
est vierge puisque j'ai remplacé l'autre président. Je vous
accorde la parole, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je regrette de changer la virginité de votre
liste.
M. Charron: La violer!
M. Lalonde: Mais si vous consentez...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
l'autre président qui a dit qu'on pouvait tout violer, sauf le
règlement. Je dis que ma liste est vierge.
M. Lalonde: II me semble que, si vous m'accordez le droit de
parole à ce stade-ci, il importe que la commission examine de
façon expresse le principe émis à l'article 68 et je suis
un peu surpris de ne pas avoir entendu les députés
ministériels réellement affirmer le bien-fondé de ce
principe.
On a parlé tout de suite du problème qui en est un
on le sait extrêmement complexe des exceptions à ce
principe, mais il importe et je vais le faire assez
brièvement de rappeler que, si le législateur,
actuellement, à l'article 68, premier paragraphe, reprend, avec une
certaine analogie, non p'as verbatim, le libellé de l'article 40 de la
Loi sur la langue officielle actuellement en vigueur, ce n'est pas sans
raison.
Malheureusement, en effet, il était devenu nécessaire
d'affirmer que l'école française doit avoir l'attrait naturel
qu'une école de la grande majorité de la population devrait
avoir, sans même l'affirmation de la loi.
On sait l'évolution que nous avons connu après les
années cinquante au niveau de la fréquentation scolaire, surtout
de la part des nouveaux arrivants. Je ne reviendrai pas là-dessus, mais
il reste toutefois, M. le Président, que, quant à moi, je suis
d'accord et c'était l'affirmation que nous faisions à
l'article 40 de la loi sur la langue officielle qui est actuellement en vigueur
que le principe de base est que l'école française, c'est
l'école de tout le monde, c'est l'école naturelle de tout le
monde.
J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les
remarques du député de Mont-Royal. M. le Président, je
pense qu'il faut toutefois, en affirmant ce principe, en affirmant par
réalisme, il faut continuer cet exercice de réalisme et tenter de
comprendre la réalité québécoise qui n'est pas
homogène, qui est pluraliste au point de vue linguistique, au point de
vue de l'origine ethnique et au point de vue culturel. En votant en faveur
de
cet article 68 qui affirme ce principe sur lequel nous sommes d'accord,
nous avons quand même, M. le Président, beaucoup de réserve
sur les modalités d'application de ce principe qui seront
proposées par le gouvernement dans les articles suivants. Je ne verserai
pas dans l'impertinence, ou plutôt dans la non-pertinence du
débat, c'est-à-dire que je ne discuterai pas maintenant des
articles 69 et suivants.
Lorsque le député de Mont-Royal a affirmé avec une
conviction qui ne faisait pas de doute que les minorités ethniques
avaient une perception de la réalité québécoise, de
la réalité canadienne et de la réalité
nord-américaine, extrêmement sensible, je pense que le
gouvernement devrait tendre une oreille accueillante à ces propos. Ce
n'est pas par contestation que le député de Mont-Royal faisait
ces remarques. Il veut, comme nous, faire une loi qui va correspondre à
la réalité, qui va correspondre aux désirs des gens.
Lorsqu'il mentionnait son désir, il le faisait peut-être dans ses
propos, plus particulièrement en rapport avec les minorités
ethniques... Je me permettrai d'élargir ces propos à
l'égard de la majorité francophone, à savoir le
désir des gens de connaître la langue seconde, de pouvoir...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, je m'excuse. Je vais être obligé de
suspendre les travaux pour que vous puissiez accomplir votre devoir de
député, à moins que ce ne soit pour une question de
quorum.
M. Lalonde: Comment savoir, M. le Président? Comment
sait-on si c'est un quorum?
Le Président (M. Cardinal): Justement, si vous le
permettez, je vais m'informer immédiatement, mais je ne voudrais pas...
Continuez, je vais faire vérifier tout de suite. A l'ordre, s'il vous
plaît. Je vais faire vérifier tout de suite, mais je voulais quand
même informer les députés que la cloche sonnait. Allez, M.
le député.
M. Lalonde: Non, ce n'est pas la passion que je veux soulever, M.
le député de Sauvé, c'est à la raison que je tente
de m'adresser. Je ne suis pas sûr d'avoir beaucoup de succès,
parce que si on en juge par...
M. Morin (Sauvé): ...passionnant.
M. Lalonde: ...l'inspiration romantique de ce projet de loi, peu
souvent avons-nous l'occasion d'y rencontrer la rationalité et le
réalisme. Alors, M. le Président, c'est au nom de la
majorité francophone aussi que, tout en affirmant le principe de
l'école française pour tous, nous faisons appel au gouvernement
pour, en même temps, donner la chance à tous les francophones, non
pas simplement à une petite minorité privilégiée,
comme cela s'est vu dans le passé, mais à tous les francophones,
d'avoir l'apprentissage de la langue seconde, de façon suffisante, de
façon qu'on ait une connaissance d'usage...
Le Président (M. Cardinal): Je viens de poser la question,
il n'y a pas de vote. C'est simplement que les gens sont trop attirés
par la commission et qu'il n'y a pas assez de députés à
l'Assemblée.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que vous
suggérez qu'on transporte nos travaux à l'Assemblée
nationale?
Le Président (M. Cardinal): Non, je suggère que
vous continuiez.
M. Proulx: Je pense qu'il n'y a pas de problème de quorum.
Il y a suffisamment de gens à l'Assemblée.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Jean, vous n'avez pas le droit de parole, en vertu d'une motion
adoptée à cette commission.
M. Lalonde: Je pense que nous aurons l'occasion, dans l'examen
des autres articles, de proposer au gouvernement des dispositions qui, tout en
conservant avec le caractère le plus solennel, le plus sacré
possible, le principe du français, de la langue française
c'est-à-dire de l'école française pour tous, permettront
à tous nos Québécois, qu'ils soient partie de
minorités ethniques ou de la majorité francophone, d'avoir une
connaissance suffisante de la langue seconde pour que leurs enfants soient
traités équitablement dans une société qui, quand
même, M. le Président, est entourée et immergée par
plus de 200 millions d'anglophones en Amérique du Nord.
Ce désir des parents francophones est légitime et il est
malheureusement exprimé souvent par une nécessité
actuelle, dans ce qu'on a appelé la liberté de choix, qui
à mon sens, est un faux problème. Pourquoi les parents
francophones, lorsqu'on fait les sondages, à 70% ou 80% ou enfin c'est
dans cette proportion, choississent-ils ou préfèrent-ils la
liberté de choix? C'est parce qu'ils veulent que leurs enfants aient la
chance d'apprendre la langue seconde d'une façon correcte, que leurs
enfants ne soient pas handicapés lorsqu'ils arriveront sur le
marché du travail. C'est la seule raison.
Si on leur assurait à l'école française, un
enseignement de la langue anglaise qui permette à leurs enfants
d'apprendre l'anglais, d'une façon correcte, non pas d'être
parfaitement bilingues, je ne pense pas qu'aucun système d'enseignenent
permette, comme langue seconde, d'avoir une maîtrise suffisante de cette
langue seconde pour qu'on puisse parler de l'élève qui sortirait
de cette école comme d'un parfait bilingue, mais permette quand
même d'avoir un apprentissage raisonnable de la langue anglaise. Ce n'est
pas attaquer les droits de la majorité que de dire cela, M. le
Président, c'est le désir légitime de chaque parent
francophone, et, ce serait de la fausse pudeur que de le cacher.
Je reviendrai là-dessus, M. le Président, lorsque nous
présenterons un amendement à l'article 80, ce qui nous porte
à nous inquiéter et à ne
pas accepter les assurances que le ministre de l'Education nous a
données, encore maintenant, de façon solennelle, c'est que vous
avez, nous avons comme Québécois, dans la Loi sur la langue
officielle actuelle, une assurance législative à l'article 44,
qui se lit comme suit: "Le ministre de l'Education doit également
prendre les mesures nécessaires pour assurer l'enseignement de la langue
anglaise, langue seconde, aux élèves qui reçoivent
l'enseignement en langue française". Disons tout de suite, M. le
Président, que, seulement trois ans après l'adoption de cette
loi, on ne peut pas dire que, dans les faits, ce désir du
législateur ait reçu ou ait produit des résultats
satisfaisants. Non.
M. Morin (Sauvé): Mésestimez-vous mes
prédécesseurs?
M. Lalonde: Une longue évolution naturellement, une
réforme avait été engagée, je ne reviendrai pas
là-dessus, mais il reste que...
M. Morin (Sauvé): Je vous comprends.
M. Lalonde: ... que le gouvernement actuel, non seulement est
muet, dans sa loi, dans son projet de loi 101, mais il se trouve à
enlever de la loi qui est en vigueur une disposition que tous les parents
désirent avoir, francophones et autres, allophones, pas les anglophones,
puisqu'ils l'ont, la langue anglaise, mais, à ce moment-là, le
fait que le gouvernement ait choisi de l'enlever est une source
d'inquiétude sérieuse pour tous les parents
québécois.
C'est en affirmant ce principe de la langue française, de
l'école française comme école pour tous les
Québécois, que je fais ces réserves, M. le
Président et que j'annonce un peu de quelle façon nous allons
engager le débat sur ce chapitre VIII.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voulais faire
mes excuses au député, je crois qu'il a parfaitement raison, mes
prédécesseurs ont été fort négligents sur ce
chef.
Le Président (M. Cardinal): Je pense qu'il n'y a pas une
question de règlement. A l'ordre, s'il vous plaît! Vous avez
épuisé les trente minutes de votre temps...
Mme Lavoie-Roux: II me reste du temps de parole.
M. Morin (Sauvé): En dépit des dispositions
législatives.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député. M. le ministre de l'Education, s'il vous plaît!
M. Lalonde: M. le Président, je pense que... Le
Président (M. Cardinal): Oui.
M. Lalonde: Je pense que, M. le Président, quand
même l'article 96 m'oblige de l'invoquer.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas impératif,
l'article 96.
M. Lalonde: Oui, M. le Président, j'ai quand
même...
Le Président (M. Cardinal): C'est permissible.
M. Lalonde: Mais, dans l'économie de notre droit
parlementaire, M. le Président, il me fait une invitation que je ne peux
pas refuser.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Lalonde: ...Parce que je n'ai pas dit que les
prédécesseurs du ministre avaient manqué à leur
devoir, et il m'invite à le dire, tout à fait en dehors du
débat, et c'est pour cela que je ne l'ai pas dit. Un programme de
l'enseignement des langues a été mis sur pied, avec des
investissements importants, par l'ancien gouvernement, il commence à
donner des résultats, mais, il n'en donnera pas avant, quand même,
enfin, il va en donner, j'espère, le plus rapidement possible, pourvu
que la volonté politique soit là. Elle n'est pas là dans
le projet de loi 101.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Mégantic-Compton, sur une question de
règlement.
M. Grenier: Non, non, est-ce qu'on pourrait demander le vote sur
l'article 68 avant de sortir?
Le Président (M. Cardinal): D'accord, est-ce que
l'article...
Mme Lavoie-Roux: II est déjà une heure moins
cinq.
Le Président (M. Cardinal): Non, il n'y a pas
consentement. Si vous permettez, avant que nous ne suspendions, quand
même, je voudrais rétablir un fait moi aussi, non pas en vertu de
9b, parce que je ne fais pas de discours, quoi qu'il en paraisse. Tout à
l'heure, on n'a pas eu l'invitation au quorum, M. le whip, qui n'a pas droit de
parole, avait quand même raison de le souligner, ni à un vote.
C'est une fausse alerte et ceux qui voudront des explications plus
particulières, je les leur donnerai. Nous pouvons suspendre, je pense,
selon l'ordre de la Chambre, à cet après-midi, quinze heures.
M. Charron: Peut-être que madame n'en a que pour une minute
et nous pourrions procéder au vote.
Mme Lavoie-Roux: Je suis bien prête à ce qu'on
adopte le 68, je voulais juste vous dire un mot.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! Oui, non...
Mme Lavoie-Roux: Non, non, je pense que c'est normal qu'on le
fasse. Non, ce que je voulais
simplement souligner, suite aux réactions du député
de Sauvé et ministre de l'Education, tant et aussi longtemps qu'on
traitera un peu à la légère la question de l'enseignement
de la langue seconde, à savoir que nos prédécesseurs ont
été bons ou n'ont pas été bons, on sait que le
problème est très complexe, il y a la volonté politique
à affirmer, il y a aussi d'autres attitudes qui doivent être
modifiées. C'est dans ce sens, je pense, qu'il faut considérer ce
problème d'enseignement de la langue seconde, d'une façon
sérieuse et non pas en se disculpant ce n'était
peut-être pas l'intention du ministre ou en le discutant d'une
façon légère pour dire: Cela viendra la seule remarque que
je voulais faire, pour ma part, en ce qui touche la langue seconde, c'est que
je préférerais qu'il vienne à l'article 80, compte tenu de
l'esprit de l'article 1, sur lequel hier, j'ai exprimé très
clairement mon point de vue. Je suis donc bien prête à ce que nous
adoptions l'article 68, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Dans les trente secondes qui
restent, est-ce que l'article 68 est adopté?
M. Charron: Appel nominal, s'il vous plaît!
Le Président (M. Cardinal): M. Alfred (Papineau)?
M. Charron: C'est M. Duhaime qui le remplace, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Non, pardon, M. Duhaime, de
Saint-Maurice, cela revient au même.
M. Charron: En haut.
Le Président (M. Cardinal): M. Bertrand (Vanier)?
M. Bertrand: D'accord.
Le Président (M. Cardinal): M. Charbonneau
(Verchères)?
Une Voix: II est en Chambre.
Le Président (M. Cardinal): M. Charron
(Saint-Jacques)?
M. Charron: En faveur, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. Fallu (Terrebonne)?
M. Fallu: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Ciaccia (Mont-Royal)? M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes)?
M. de Bellefeuille: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Dussault
(Châteauguay)?
M. Dussault: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. Grenier
(Mégantic-Compton)?
M. Grenier: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Guay (Taschereau)?
M. Guay: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys)?
M. Lalonde: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Laurin (Bourget)?
M. Laurin: Pour.
Le Président (M. Cardinal): Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie)?
Mme Lavoie-Roux: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. Biron
(Lotbinière)?
M. Biron: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. Morin (Sauvé)?
M. Morin: En faveur.
Le Président (M. Cardinal): M. Roy (Beauce-Sud)? M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier)?
M. Lalonde: C'est Raynauld.
Le Président (M. Cardinal): Pardon, M. Raynauld
(Outremont)? Je m'excuse, c'est parce que je ne vois pas ces personnes. M.
Samson (Rouyn-Noranda)?
L'article 68 est adopté.
M. Lalonde: Combien sont en faveur? Et combien y en a-t-il
pour?
Le Président (M. Cardinal): Sauf les absences, c'est un
vote unanime.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
Reprise de la séance à 15 h 7
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Comme il fut mentionné ce matin, nous continuons la même
séance de la commission de l'Education, des Affaires culturelles et des
Communications qui a mandat de l'Assemblée nationale d'étudier,
article par article, le projet de loi 101 après sa deuxième
lecture. L'article 68 a été adopté avant la suspension.
Nous en sommes à l'article 69 et, comme il se doit à moins
que ce soit une question de règlement, madame je donne la parole
au ministre d'Etat au développement culturel.
L'enseignement en anglais: Explication des
principes
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, je reprends l'explication des
principes qui ont présidé à l'élaboration de notre
politique, des objectifs que nous poursuivons. Les objectifs du gouvernement
comportent essentiellement trois éléments. Premièrement,
que l'enseignement en anglais soit réservé aux
Anglo-Québécois actuels et à leurs descendants,
Anglo-Québécois étant pris ici dans un sens culturel et
linguistique, et non en fonction de l'appartenance à une
communauté anglo-saxonne panca-nadienne, panaméricaine ou
mondiale. Deuxième élément, que les nouveaux immigrants et
leurs descendants soient orientés vers l'école française.
Troisième élément, que les mesures de contrôle
soient les plus simples possibles et excluent tout recours à des tests
linguistiques.
Pour concilier le premier élément avec le
troisième, nous avons dû éliminer la
référence au critère de langue maternelle et de langue
d'usage. En effet, ces critères ne se contrôlent pas
objectivement. Il nous aurait fallu les appliquer de façon qu'on aurait
pu qualifier d'arbitraire, et plus nous aurions voulu réduire la part
d'arbitraire, plus il nous aurait fallu multiplier les enquêtes, les
cueillettes de données, les vérifications multiples.
Quant au deuxième élément, il nous est apparu
impossible de l'atteindre en établissant un régime de droit
distinct pour les nouveaux immigrants. Outre le fait qu'il apparaîtrait
odieux dans l'avenir à établir la date d'arrivée, par
exemple avant ou après 1977, de son premier ancêtre pour
déterminer les droits d'un individu de recevoir l'enseignement en
anglais, une telle disposition aurait été sûrement
contestée comme incompatible avec la loi de la citoyenneté
canadienne qui interdit toute discrimination sur la base de la date de
l'obtention de cette citoyenneté.
Le critère de la scolarité de niveau
élémentaire des parents rencontre sinon la lettre, en tout cas
certainement l'esprit des objectifs que nous avions. Premièrement, ce
critère se réfère directement à la langue et
à la culture.
L'école élémentaire, en effet, est celle des
apprentissages fondamentaux. Elle joue un rôle beaucoup plus
apparenté à celui de la famille et des parents que celle des
autres niveaux. La langue qu'on y enseigne est souvent la langue maternelle,
mais certainement, pour la très grande majorité des enfants, une
des premières langues apprises et, probablement, la première des
langues dont on conservera l'usage.
L'école élémentaire est le premier milieu
institutionnel d'intégration à une culture. On retrouve donc
normalement à l'école élémentaire anglaise les
descendants de Britanniques qui sont demeurés culturellement
anglophones, à l'exception bien sûr des Burns, O'Neill, McKay,
McAndrew et autres qui sont devenus francophones.
M. Bertrand: McAndrew c'est français.
M. Laurin: On y retrouve aussi certains descendants de
Français qui sont devenus culturellement anglophones on dit qu'il
y en a 75 000, actuellement et les descendants d'autres groupes
ethniques, Scandinaves, Néerlandais, Juifs, Indopakistanais et le reste,
qui s'intègrent le plus souvent à la communauté
anglophone. Mais on y retrouve aussi d'autres enfants dont les parents ne sont
pas anglophones, mais ont choisi l'anglais pour leurs enfants dans le cadre
d'une loi linguistique permissive comme celle de la loi 63. Avec le
critère tel que proposé, nous ne revenons pas en arrière
pour corriger une situation historique dont certains éléments
peuvent déplaire, mais nous fermons la valve pour tenter
d'empêcher de nouveaux transferts vers l'école anglaise.
Deuxièmement, l'application de ce critère nous permet
d'acheminer tous les nouveaux arrivants vers l'école française,
sans avoir à les traiter comme un cas particulier. Ce ne sont pas les
immigrants qui sont ici un cas particulier, ce sont les héritiers du
réseau d'enseignement en anglais du Québec, lesquels, d'ailleurs,
ne se voient nullement privés de leur droit à l'école
française. Les immigrants ne sont pas nommés dans la loi et ils
n'ont pas à l'être, puisqu'ils entrent dans la règle
générale.
Troisièmement, nous éliminons totalement le recours
à des tests linguistiques, comme également toute mesure de la
qualité linguistique des individus, élèves ou parents. Ce
qui est en considération, ce n'est pas le caractère des individus
d'être ou de ne pas être d'origine britannique, d'être ou de
ne pas être de langue maternelle anglaise, c'est le fait d'avoir ou non
fait ses études en anglais dans le réseau scolaire
québécois.
On considère ici une action posée par l'individu
concerné et pour laquelle il peut y avoir une attestation officielle,
mais non la concordance de cet individu avec une définition
théorique.
Les avantages de la formule sont particulièrement
évidents. Il faut bien voir que l'un ou l'autre de ces avantages
pourrait être perdu si on y introduit certains amendements. Nous avons
dit que le maintien du réseau d'enseignement en anglais doit être
vu comme une mesure exceptionnelle au sein d'un système
d'éducation en principe français. Ajoutons que ce n'est pas en
vertu d'une philosophie générale de promotion des langues
maternelles que nous maintenons ce réseau.
D'une part, la langue maternelle appartient au milieu familial. Il ne
peut pas être question pour nous de limiter le droit des parents, de
transmettre à leurs enfants la langue de leur choix. Mais la
conservation et le développement de la langue maternelle est avant tout
une responsabilité de la famille. L'école publique a normalement
pour fonction d'assurer la connaissance par tous et le développement de
la langue nationale, de la langue commune, de la langue officielle, de la
langue qui assure le maintien de la cohésion sociale.
D'autre part, aucun Etat moderne, pas plus le Québec que les
autres, n'a les moyens d'assurer par l'école publique l'apprentissage de
toutes les langues maternelles existant dans la population. Ce n'est pas non
plus en vertu d'une quelconque garantie constitutionnelle.
Ce n'est pas non plus en vertu d'un droit fondamental assimilable aux
droits reconnus dans les diverses chartes ou déclarations des droits de
l'homme. Ce n'est pas non plus en vertu du principe des droits acquis, un tel
principe, s'il est invoqué d'une manière générale
à propos des législations, étant le meilleur moyen de
paralyser tous les législateurs et les empêcher de modifier les
situations de droit créées par les législations
antérieures. Nous maintenons le réseau d'enseignement en anglais
parce que ce réseau existe et qu'il nous paraît juste d'accorder
aux Anglo-Québécois de naissance et d'adoption le droit d'y faire
instruire leurs enfants s'ils le trouvent opportun. Le critère
proposé permet de maintenir le réseau d'enseignement en anglais
à une taille à peu près équivalente à celle
qu'il a présentement, mais il en limite l'accès de façon
précise, évitant ainsi à la fois la disparition de ce
réseau et les dangers, aux plans social, culturel et politique, d'une
expansion de ce réseau au détriment du réseau
francophone.
Il est évident, par ailleurs, que le fait de ne considérer
la scolarité que d'un seul parent simplifie considérablement
l'opération administrative. La vérification des attestations est
deux fois moins longue en principe; mais il y a aussi que si des archives ont
été perdues, concernant la scolarité d'un des parents, on
peut se rattraper avec les attestations de l'autre parent. On facilite donc aux
familles, dont les deux parents sont anglophones, la détermination ou
l'établissement du droit des enfants à l'école anglaise.
On diminue d'autant le nombre de ces problèmes. Les pertes d'archives
auraient donc statistiquement beaucoup moins de chance, toutes proportions
gardées, de toucher les familles anglophones homogènes.
A long terme, ce critère peut augmenter le nombre des
inscriptions à l'école anglaise selon la façon dont
s'effectueront les mariages mixtes et selon l'attitude adoptée par les
couples mixtes. En effet, les enfants d'un francophone et d'une anglophone
pourraient fréquenter l'école anglaise et, plus tard, même
mariés de nouveau à des francophones, ils pourraient continuer
à envoyer leurs enfants à l'école anglaise, et ainsi de
suite pour toutes les générations à venir, de sorte que si
tous les anglophones et autres ayants droit, disons 18% de la population
actuelle, mariaient des francophones et si nous oublions, pour un moment,
l'impact de l'immigration aussi bien que de l'émigration,
théoriquement, 36% des enfants de la génération suivante
auraient droit à l'école anglaise. Si, au niveau de cette
deuxième génération, tous les ayants droit usent de ce
droit, théoriquement, 72% des enfants de la troisième
génération auraient droit à l'école anglaise, alors
que théoriquement tous ces enfants pourraient bien être des
francophones.
On me dira que c'est là une hypothèse farfelue, et j'en
conviens. Je ne l'ai présentée que pour faire ressortir la
différence qu'il y a, à long terme, à ne faire porter le
critère de la scolarité en anglais que sur un seul des deux
parents. Si le critère portait sur les deux parents, il y aurait
tendance à une réduction du réseau anglophone d'autant
plus rapide qu'il y a de nombreux mariages mixtes.
A l'inverse, étant donné qu'il ne porte que sur un seul
des deux parents, il y a tendance à une expansion du réseau
anglophone d'autant plus rapide que les mariages mixtes seront nombreux.
L'impact des flux migratoires modifiera nécessairement tous ces
chiffres. Je ne présente cette comparaison que comme un modèle
théorique pour illustrer que le choix de ce critère n'a pas que
des effets à court terme. Ce choix simplifie de même d'une
façon notable l'administration du critère et c'est là un
avantage très important.
Faut-il réserver l'accès de l'école anglaise aux
enfants dont les parents ont fait leurs études
élémentaires en anglais au Québec ou faut-il l'ouvrir
également aux enfants dont les parents ont fait leurs études
élémentaires en anglais au Canada? Disons, d'abord, que ceci
compliquerait de beaucoup l'administration du critère si le
critère était étendu à l'ensemble du Canada. Mais
regardons au préalable une autre application de ce critère en ce
qui concerne son administration. Nous avons l'impression qu'une fois
établi, le système fonctionnera tout seul. Un fichier central
sera établi, ce fichier central s'enrichira à mesure des
données sur la scolarité élémentaire des
élèves actuels et futurs. Pour les futures
générations, le système pourra continuer à
fonctionner sans problème, sans test linguistique.
Revenons maintenant à l'alternative Québec-Canada. S'il
faut.considérer la scolarité faite un peu partout au Canada, on
complique énormément l'administration du critère,
dès le départ, mais surtout, on le maintient compliqué
pour toujours. On aura beau établir un fichier central, une partie des
données pertinentes au fonctionnement du système
échapperont toujours à ce fichier central. Il va de soi que, si
nous défendons l'autonomie du Québec en matière
d'éducation je ne me situe même pas ici comme
indépendantiste; je raisonne tout simplement comme aurait pu le faire M.
Duplessis ou M. Lesage nous ne pouvons pas donner de directives aux
ministères de l'Education des autres provinces et encore moins aux
commissions scolaires et aux écoles de ces provinces sur la façon
de tenir leurs archives.
Nous ne pouvons pas leur demander de
conserver des renseignements qui nous intéressent pour le
fonctionnement de notre système scolaire. Nous ne pouvons pas leur
donner de directives sur la façon de donner leurs attestations
d'études. Parmi les neuf autres provinces, il s'en trouvera
sûrement dont les archives sont moins bien tenues. Peut-être s'en
trouvera-t-il qui ne voudront pas collaborer de bonne foi et nous n'y pourrons
pas grand-chose.
En ne considérant que la scolarité faite au Québec,
on peut envisager, après une période de rodage, de libérer
les parents du fardeau de la preuve. Quand le ministère disposera
directement des données pertinentes, il établira les droits de
chacun sans avoir à les envoyer à la chasse aux certificats
d'études. Si l'on considère la scolarité faite partout au
Canada, il faudra nécessairement laisser aux parents le fardeau de la
preuve à moins que par des accords de réciprocité, les
autres provinces ne s'engagent à mettre leurs services à la
disposition de leurs ressortissants à qui le Québec ouvrirait
l'accès à l'école anglaise en échange d'avantages
similaires consentis aux Québécois dans ces mêmes
provinces.
Si on veut donc mettre l'accent sur la simplification des mesures de
contrôle tout en conservant au Québec toute l'initiative de
l'administration et du fonctionnement de notre système scolaire, nous
devons refuser l'extension au Canada tout entier du critère des parents.
Mais il n'y a pas que la complexité administrative en cause, il y a
aussi les deux premiers objectifs dont je parlais au début, qui se
recoupent d'ailleurs et que j'ai déjà énoncés.
Si nous acceptons, pour le présent et l'avenir, de
considérer la scolarité élémentaire faite en
anglais n'importe où au Canada, premièrement, nous ne
réservons pas l'enseignement en anglais aux seuls descendants des
Anglo-Québécois actuels; deuxièmement, nous ne le
réservons même pas aux seuls descendants des Anglo-Canadiens
actuels.
En effet, nous n'avons aucun contrôle, ni sur la politique
d'immigration du gouvernement canadien qui pourrait nous inonder, un jour,
selon des critères qu'il serait à même d'établir, ni
sur les migrations interprovinciales. C'est donc dire qu'un immigrant qui
arrivera à Toronto, à Vancouver ou à Halifax, en 1980, en
1990 ou plus tard, n'aura qu'à demeurer dans une autre province le temps
où ses enfants font leur scolarité de niveau
élémentaire et à venir ensuite s'établir
définitivement au Québec. Il aurait alors acquis le droit
à l'école anglaise pour tous ses descendants.
Je ne prétends pas pour le moment que le gouvernement
fédéral conseillera systématiquement aux immigrants de
faire d'abord un stage en Ontario avant de s'établir au Québec,
je dis seulement que, s'il voulait le faire, nous n'aurions aucun moyen de
l'empêcher. Présentement ceci dure depuis des années
plus de la moitié des immigrants qui entrent au Canada
s'installent d'abord en Ontario et environ un cinquième viennent d'abord
au Québec.
Nous ne savons pas grand-chose des dépla- cements
ultérieurs de ces migrants, une fois qu'ils sont devenus citoyens; ce
que nous savons, cependant, c'est que c'est avec l'Ontario que le Québec
échange le plus en termes de population et que c'est justement dans
cette province que les immigrants arrivent surtout.
Pouvons-nous nous permettre de laisser la réalisation de nos
objectifs politiques à la merci des humeurs politiques d'un autre
gouvernement? Il ne s'agit pas de prétendre que le gouvernement
fédéral osera influencer les immigrants dans le sens
décrit plus haut, malgré que l'on pourrait se poser des questions
très pertinentes a ce sujet, mais je dis simplement qu'il pourrait
éventuellement arriver qu'un gouvernement fédéral, moins
bien disposé à notre égard et moins
systématiquement dévoué à la réalisation de
nos objectifs que le gouvernement Trudeau, décide de le faire. Je
prétends que nous ne devrions pas nous livrer ainsi à sa
merci.
M. Trudeau n'est-il pas déjà lui-même intervenu
récemment pour défendre le droit des immigrants en
anglicisation?
Pourquoi serait-il farfelu de penser qu'un de ses successeurs puisse
passer des paroles aux actes et mettre les services de l'Immigration au service
de sa politique "civilisatrice"? Je me garde bien de prétendre
qu'actuellement les services canadiens de l'Immigration puissent intervenir de
quelque façon sur l'orientation linguistique des immigrants ou sur le
choix de leur lieu d'entrée au pays. Mais il manque présentement
au Québec des instruments importants pour agir efficacement sur tous les
aspects de son développement économique, social, culturel et
politique. Il nous manque notamment le contrôle de notre immigration.
Cependant, il est un domaine où nous sommes constitutionnellement
souverains, c'est celui de l'éducation. Il serait, pour le moins,
paradoxal qu'une équipe gouvernementale qui se propose de
récupérer les autres instruments qui lui paraissent essentiels
hésite à se servir de façon souveraine d'un instrument
dont il dispose déjà.
Par ailleurs, il faut éviter tout ce qui pourrait
apparaître comme de la discrimination entre les diverses
catégories d'immigrants. Or, si nous acceptons de reconnaître, aux
fins d'établir le droit à l'école anglaise, la
scolarité faite n'importe où au Canada, nous faisons de la
discrimination entre immigrants.
Deux Italiens, par exemple, partent en même temps de l'Italie.
L'un s'établit directement à Montréal; l'autre fait un
stage de dix ans à Toronto avant de s'établir
définitivement au Québec. Les descendants du premier vont
obligatoirement à l'école française. Les descendants de
l'autre ont droit à l'école anglaise. Si c'est au nom de la
civilisation qu'on justifie cette discrimination, il n'y a plus rien à
comprendre.
Par ailleurs, encore aujourd'hui, quand un Anglais vit en France, il est
soumis au droit civil au même titre que les Ecossais de naissance. De la
même manière, un Ontarien qui vit au Québec est soumis au
droit civil québécois, aussi longtemps qu'il reste au
Québec. Même s'il ne réside pas au
Québec, s'il transige au Québec, il est soumis aux lois du
Québec pour ses transactions. Il ne faudrait pas non plus accuser
à la légère les Suisses de ne pas être
civilisés, et pourtant, quand un Suisse change de canton, il accepte
normalement les lois de son canton d'adoption, y compris le régime
linguistique de l'école du nouveau canton, et pourtant, tous les Suisses
appartiennent à la même confédération suisse.
Je ne rejette pas totalement toute notion de droits acquis. C'est pour
respecter, de façon civilisée, ce qui peut être
raisonnablement considéré comme une situation acquise que le
projet de loi propose de laisser à l'école anglaise tous ceux qui
y sont déjà et d'y admettre aussi leurs frères et soeurs
cadets. Parmi ceux qui seront ainsi admis à l'école anglaise, on
retrouvera une bonne part des enfants actuels des Canadiens actuellement au
Québec. Je ne vois pas très bien pourquoi nous devrions
considérer que les Canadiens qui viendront demain s'établir au
Québec ou que les familles n'ayant pas encore un enfant à
l'école y auraient des droits acquis. La théorie des droits
acquis, si on l'appliquait à la manière dont certains la
comprennent, aboutirait à immobiliser totalement le législateur,
car toute nouvelle loi modifie, d'une certaine façon, le régime
de droits antérieurs.
Si on permet, par ailleurs, aux Canadiens déjà
installés au Québec de profiter du droit à l'école
anglaise, il n'est pas nécessaire, pour autant, de reconnaître ce
droit à tous les Canadiens à venir et à tous les
immigrants qui auront, à l'avenir, la brillante idée de passer
par l'Ontario avant de s'établir définitivement au
Québec.
Par ailleurs, à l'appui de notre position, nous avons fait
effectuer plusieurs études démographiques statistiques qui ont
été déposées à l'Assemblée nationale.
Nous en avons d'autres que nous déposerons incessamment. Je pense bien
que ces statistiques montrent que c'est simplement avec ce critère que
l'école française au Québec pourra maintenir ses effectifs
et même les augmenter et que, par ailleurs, l'application du
critère n'entraînera en rien l'élimination ou la
disparition du réseau scolaire anglais, ni celle de la minorité
anglophone. Pour toutes ces raisons, je demande l'adoption de l'article 69.
M. Bertrand: Adopté.
Le Président (M. Cardinal): J'ai reconnu Mme le
député de L'Acadie, ce qui me laisse présumer que
l'article n'est point adopté.
Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'on le soupçonnait.
Le Président (M. Cardinal): Pas la présidence!
Mme Lavoie-Roux: Vous, vous ne soupçonnez jamais rien.
Merci, M. le Président. J'avais déjà dit hier soir
que nous avions l'intention de présenter une mo- tion à cet
article 69; mais vous me permettrez, au préalable, de faire un
préambule.
Le Président (M. Cardinal): Tant qu'il n'y a pas de
motion, vous pouvez parler sur l'article.
Mme Lavoie-Roux: Hier soir, certaines opinions furent
émises par le ministre de l'Education. J'avais dit que je ne les
relèverais pas, parce que je ne les trouvais pas pertinentes, du moins
à l'article 68.
Je voudrais quand même apporter certaines précisions. J'ai
eu l'impression, devant l'attaque pour le moins surprenante du
député de Sauvé, de quelqu'un qui, ne voulant pas
être obligé de parler d'un problème qui le confrontait, se
lançait à l'attaque pour éviter d'avoir à parler de
ce qui était le vrai problème.
D'ailleurs, c'est une chose que j'ai apprise depuis que je suis à
l'Assemblée nationale et peut-être que mon meilleur maître
à cet égard a été le député de
Sauvé. Quand ce dernier est dans l'embarras il n'est pas le seul
à le faire, mais je dois dire qu'il a beaucoup de talent de ce
côté très rapidement, il se lance à
l'attaque.
Cela m'a même permis, un jour, de soulever une question de
privilège à l'Assemblée nationale. D'abord, tout le monde
se rappellera qu'hier soir il a fait nombre d'accusations contre les tests, les
caricaturant et même, avec une certaine allure de psychodrame, disant que
ces tests étaient horribles, et ainsi de suite. Je voudrais tout de
suite établir au départ que je ne suis pas d'accord avec les
tests et que si certains journaux ont rapporté cela, je pense que je
n'ai pas à critiquer les journalistes. Pour une fois où j'aurais
aimé qu'on m'eût interprétée plus fidèlement,
il y a peut-être vingt fois où l'on m'interprète
fidèlement. Je pense que c'est là le hasard du journalisme, et je
l'accepte au point de départ. Je pourrais dire la même chose du
reportage qui fut fait dans la Presse, auquel le ministre de l'Education a
également fait allusion en disant que nous étions pour le libre
choix. Je pense que c'est là aussi une interprétation, à
mon point de vue je tiens à le préciser ici
très généreuse de la position que nous avions
exposée le midi. Mais enfin, encore une fois, je l'accepte, cela fait
partie des règles du jeu.
Ce qui m'a beaucoup amusée, c'est la caricature dramatique des
tests du ministre de l'Education. Je vais juste relater un petit incident dont
tout le monde se souviendra. Non pas pour justifier l'utilisation des tests,
mais pour se poser des questions sur j e ne sais pas si on peut appeler
cela ainsi la rigueur intellectuelle du ministre de l'Education. Tout le
monde se souviendra qu'au mois de décembre, le ministre de l'Education,
avec beaucoup de solennité, ce qu'il fait toujours d'ailleurs, avait
fait une déclaration ministérielle dans laquelle il avait dit,
après avoir rappelé tout le monde à l'ordre, à
l'obéissance à la loi, ce qui est fort bien d'ailleurs: "En
premier lieu, quant aux groupes d'enfants, au nombre d'environ 250, qui, pour
diverses raisons, n'ont pas encore passé les tests, mon ministère
et les commissions scolaires
concernées sont invités, dans les jours qui viennent,
à prendre les mesures nécessaires pour qu'ils puissent les passer
comme la majorité l'a déjà fait, et que l'application des
tests se déroule dans les meilleures conditions pédagogiques
possibles". Pour la dernière partie, j'étais tout à fait
d'accord. Mais on se souviendra qu'en réponse à cette
déclaration ministérielle, j'avais soulevé des doutes
très sérieux quant à la décision que le ministre de
l'Education prenait à ce moment, surtout que la loi ne l'obligeait pas
à ce que les enfants subissent des tests et que, dans le passé,
tous les enfants n'avaient pas été soumis à des tests
parce qu'on avait tenu compte d'autres critères d'identification pour
éviter à certains enfants d'être soumis aux tests. Mais
enfin! Telle était la position, à ce moment-là, du
ministre de l'Education qui, sans hésitation, recommandait pour tous les
enfants que l'on passe des tests. Mais, ce qui est le plus surprenant,
après cette décision très comme il faut, je suppose, aux
yeux du ministre de l'Education, je lui ai posé, le 15 juillet dernier,
la question suivante, à savoir s'il pouvait me dire si les enfants qui,
au mois de décembre, avaient été soumis aux tests certains
avaient échoué et s'ils avaient interjeté appel
auprès du ministre, c'est la réponse du ministre: "Je puis
cependant dire à Mme le député qu'il n'y a pas eu d'appel
et tout s'est déroulé dans l'ordre le plus complet." Alors, dire
que tous les tests causaient des situations dramatiques, comme ce qu'il a voulu
décrire hier soir, je pense que ceci est un peu en contradiction avec le
scénario qu'il a voulu créer autou. des tests.
D'ailleurs, tout le monde connaît l'éloquence du ministre
de l'Education. On l'a vu, hier soir, aller rapidement, mêlant entrevues,
tests et faisant des affirmations qui étaient pour le moins
surprenantes.
Je voudrais également dire qu'hier soir le ministre de
l'Education nous a dit qu'il avait discuté pendant des jours des
critères appropriés, quel serait le meilleur critère
à retenir pour déterminer l'accès à l'école
anglaise. Ce qui est le plus étonnant, c'est que sans doute sa
décision était prise avant même le début des
commissions parlementaires, puisqu'il n'y est jamais venu, sauf une ou deux
fois, alors qu'il est venu discuter d'aspects constitutionnels du projet de
loi. On peut se demander quel est l'objectif qu'on poursuit quand on a ces
commissions parlementaires.
J'ai également entendu hier soir le ministre de l'Education
et c'était fort amusant tendre des perches au
député de D'Arcy McGee, ceci, encore une fois, c'est que le
ministre de l'Education préférerait qu'on discute d'un projet
hypothétique de l'Opposition officielle qui n'est pas au pouvoir
je le regrette, mais elle n'y est pas, ce sont les faits alors que ce qui
fait l'objet de l'étude, c'est le projet de loi du gouvernement. Je
pense qu'au point de départ, il faudrait se le rappeler.
Ceci dit, enfin, il y aurait peut-être d'autres mises au point,
mais je ne veux pas prendre vingt minutes pour faire ces mises au point, je
pense que c'est suffisant.
Le Président (M. Cardinal): Oui, parce que vous ne
pourriez rien dire après.
Mme Lavoie-Roux: Je ne pourrais pas faire ma motion.
J'en arrive au critère qui est présenté par le
gouvernement. Au départ, je suis prête à admettre et
je l'admets bien volontiers qu'il y a eu de la part du gouvernement une
recherche certainement aussi approfondie que celle qui a été
décrite hier par le ministre de l'Education pour trouver un
critère qui, justement, soit le plus simple possible. Malheureusement,
il en est découlé une décision quant au choix d'un
critère automatique pour utiliser les mots du ministre de l'Education
lui-même, hier soir. Je pense que ce critère automatique est un
critère de facilité qui, à mon point de vue, met
très sérieusement en doute l'équité de ce
critère.
D'autres l'ont qualifié de critère mécanique, je
l'ai qualifié de critère d'accommodement dans le sens qu'il
permet je ne parle pas de toute la machine administrative qu'il faut
mettre en marche pour le vérifier d'éviter les tests, il
n'y a aucun doute là-dessus. Ce critère a plusieurs
inconvénients. D'abord, il donne à l'interprétation de la
communauté anglophone un prolongement assez surprenant; je l'ai
déjà cité en commission parlementaire, mais je pense qu'il
convient de le rappeler ici: Les dispositions de la charte seront donc
rédigées de façon à atteindre un double objectif,
permettre l'accès à l'école anglaise de tous ceux qui se
trouvent actuellement au Québec et dont les parents, par
l'éducation reçue, font partie de la communauté anglophone
ainsi qu'à leurs descendants.
Je trouve et je le redis extrêmement surprenant que
tous les parents qui ont reçu leur enseignement primaire à
l'école anglaise soient tout à coup devenus des anglophones.
Là-dessus, les trois ministres qui sont devant nous le savent fort bien.
Il y a eu, depuis longtemps, un pourcentage qui se situait, et je pense
il a dû diminuer depuis la loi 22 à environ 2 1/2% de la
population francophone qui s'est trouvée dans les écoles
anglaises non pas pour s'angliciser, mais peut-être, dans certains
cas, pour la majorité des cas faire l'apprentissage de l'anglais, langue
seconde. Tout à coup, ce gouvernement sanctionne l'anglicisa-tion de
milliers de francophones québécois. Il en va de même pour
les allophones et pour un grand nombre d'entre eux.
Tout le monde sait, et particulièrement dans le cas de la
minorité italienne qui est quand même une minorité
très considérable au Québec, qu'une grande partie d'entre
elle est allée à l'école anglaise mais vit en
français et conserve à la maison la langue italienne. Je pense
que là, également, ainsi que pour d'autres groupes, le
critère retenu par le gouvernement ne permet pas de rejoindre l'objectif
que devrait rejoindre l'école anglaise, c'est-à-dire d'en
permettre l'accès à ceux qui sont membres de la communauté
anglophone, qu'ils soient nés anglophones ou qu'ils le soient deve-
nus par les circonstances de la vie ou du cheminement personnel qu'ils
ont vécu.
Pour parler d'une façon plus précise... J'entendais, tout
à l'heure, le ministre d'Etat au développement culturel qui
disait: On va créer de la discrimination entre deux Italiens, celui qui
est passé par Toronto et celui qui est arrivé à
Montréal directementje pense que cette discrimination s'exerce
déjà à l'égard des familles qui sont ici. Je ne
pourrai pas prendre vingt minutes pour citer des cas particuliers, mais pensez
simplement à une famille dont certains enfants sont allés
à l'école anglaise, d'autres sont allés à
l'école française et, dans les générations qui
suivent, vous aurez des enfants qui auront le choix d'envoyer leurs enfants
à l'école française et d'autres à l'école
anglaise.
Vous avez même, à l'intérieur de familles
anglophones et ce ne sont pas des cas hypothétiques, ce sont des
cas que je connais qui, a partir des années 1960, étaient
de véritables familles anglophones personne ne pourrait mettre en
doute cette spécificité qui ont fait le choix d'envoyer
leurs enfants ou quelques-uns de leurs enfants à l'école
française. Maintenant devenus adultes, certains enfants de ces familles,
quelques-uns, conservent le droit d'envoyer leurs descendants à
l'école anglaise alors que d'autres l'ont perdu. Ce sont des cas
précis que je pourrais apporter au ministre.
Pour ce qui est des immigrants à venir, la même
discrimination pourra s'exercer, M. le Président. On sait fort bien que
beaucoup de membres de la communauté portugaise, italienne et grecque
je parle de celles-là parce que peut-être je les connais
mieux vont régulièrement en vacances dans leur pays
d'origine, y envoient leurs enfants. Encore une fois, il ne s'agit pas de cas
hypothétiques. Le ministre d'Etat au développement culturel ne
trouve-t-il pas discriminatoire, par exemple, qu'une Portugaise qui est ici,
qui va marier un Portugais qui est au Portugal, qui revient ici, les
descendants de ce groupe peuvent aller à l'école anglaise. Non
seulement ceci mais de plus ces familles vont vivre en portugais chez eux parce
que ces communautés gardent leur langue d'origine. On va voir, et ce
sera assez amusant amusant est peut-être une mauvaise expression
des enfants qui vont arriver à l'école anglaise en ne
parlant pas du tout l'anglais.
Mais il y a une inquiétude de moins, l'Etat n'aura pas à
encourir de dépenses supplémentaires, parce que les écoles
anglaises les accueilleront sans même demander de classes d'accueil. Ce
qui ne veut pas dire ici que je porte un jugement contre les classes d'accueil,
je pense qu'elles sont nécessaires, mais on sait qu'historiquement les
secteurs anglais, pour des raisons qu'on connaît fort bien, n'ont jamais
exigé de classes d'accueil et ont massivement intégré des
enfants qui n'étaient pas de langue anglaise.
Je voudrais parce que vous m'avez avertie qu'il ne me resterait
peut-être plus de temps finir en disant que ce critère
et c'est ceci qui m'apparaît le plus grave qui est retenu
par le gouvernement est un critère qui dévalorise l'école
française. Il le dévalorise dans le sens que le fait que vous
ayez fréquenté l'école anglaise devient une partie de
votre héritage, de votre legs, de votre dot et il devient un
critère qui donne, dans un sens, une plus-value, si on veut, aux yeux
d'un grand nombre, à l'école anglaise. C'est cela le drame du
Québec. Toutes les mesures que nous avons prises et je dois
l'admettre même dans le cas de la loi 22 ont créé
cette situation de dévalorisation pour l'école française
et de revalorisation ou de survalorisation je pense que le terme serait
peut-être mieux choisi pour l'école anglaise.
Je m'arrête ici, je ne ferai pas ma motion immédiatement,
M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): De toute façon, madame,
il vous restait encore près de quatre minutes.
Mme Lavoie-Roux: Je peux continuer?
Le Président (M. Cardinal): Non, pas
nécessairement.
M. le député de Lotbinière.
M. Biron: Merci, M. le Président, je veux remercier le
député de l'Acadie de me permettre de faire des remarques
générales sur cet important article de ce projet de loi. En fait,
si les membres de la commission ont décidé d'étudier ce
chapitre, comme on l'a dit hier, c'est que ce chapitre cause de
l'inquiétude dans la population et il est grand temps que tout le monde
sache exactement où nous voulons aller sur ce chapitre sur la langue de
l'enseignement. Alors, je veux remercier le député de L'Acadie et
je lui repasserai la parole tout à l'heure pour lui permettre de
présenter les amendements qu'elle veut présenter.
Cet article 69 du projet de loi, à mon point de vue, est un
progrès sensible sur le projet de loi 22, et spécialement sur
certains aspects, c'est beaucoup plus humain. C'est sûr que nous avons
énormément critiqué les tests linguistiques, mais cela me
plaît qu'on ait trouvé une autre formule par laquelle on va
finalement sélectionner les enfants, ceux qui ont le droit d'aller dans
les écoles anglaises.
La formule choisie par le gouvernement j'emploie les mots du
ministre lui-même c'est la moins "mauvaise" des formules, mais, au
moins, c'est celle qui m'apparaît la plus humaine à l'heure
actuelle.
Il n'est pas question de revenir à des tests. Toutes sortes de
tests sur les enfants m'apparaissent complètement inhumains. Je suis
heureux de voir qu'on a trouvé une formule, peut-être un peu plus
bureaucratique, c'est vrai, mais il n'y a jamais d'avancement, il n'y a jamais
de progrès sans avoir quelques petits désavantages. La formule
trouvée, quant à moi, me plaît. Je trouve qu'on va donner
justice avec une formule qui est peut-être un peu moins arbitraire
même que le critère de langue maternelle, parce qu'encore une fois
la langue ma-
ternelle, c'est quoi? Cela va être difficile, il va falloir la
revérifier de toutes sortes de façons. Cette formule qui donne le
fardeau de la preuve aux parents me plaît quand même, parce que le
père ou la mère qui veut envoyer ses enfants à
l'école anglaise, à mon point de vue, c'est par exception au
Québec, parce que la grande majorité du Québec, on a dit:
C'est l'école française pour tout le monde.
Si on veut quand même reconnaître certaines écoles
anglaises ou si le père ou la mère, un des deux parents ou les
parents veulent envoyer leurs enfants à l'école anglaise par
exception, c'est à eux d'avoir le fardeau de la preuve et c'est à
eux de faire la preuve qu'ils peuvent envoyer leurs enfants dans de telles
écoles.
Dans le programme de l'Union Nationale d'octobre 1976, c'était
clairement dit que nous reconnaissions la prééminence du
français dans le respect des autres cultures. Le fait d'avoir des
écoles anglaises, c'est le respect de la culture anglophone. Il est
également dit dans notre programme, compte tenu de la situation sociale
qui prévaut au Québec, qu'il faut prévoir
l'intégration à la communauté francophone de tous les
immigrants non anglophones à venir. Là-dessus, je pense bien que
tous les partis politiques sont unanimes.
Le 16 avril dernier, notre parti, dans une volonté de clarifier
et d'expliciter davantage ce que nous entendions par la
prééminence de la langue française, a convenu de surseoir
à l'application du principe du libre choix de la angue d'enseignement.
Cela veut dire que, finalement, aujourd'hui, pour le francophone, nous sommes
d'accord avec le gouvernement qu'il n'y aura plus la liberté de faire
inscrire les enfants dans une école de langue anglaise; ils devront
aller à l'école de langue française. Mais on a finalement
aussi voulu, à même nos amendements, donner une certaine garantie
que dans cette école de langue française ils auront l'occasion
d'apprendre la langue anglaise comme langue seconde. Pour l'anglophone, qu'il
soit déjà au Québec ou qu'il soit un immigrant, nous
voulions qu'il conserve le libre choix de se faire instruire dans sa langue ou
dans la langue de la majorité du Québec, soit la langue
française, parce que nous reconnaissons, au Québec, deux grandes
communautés, deux grandes collectivités, la française,
d'abord, et aussi une communauté anglophone au Québec. Le fait de
reconnaître une telle communauté nous oblige à dire que
tous ceux qui déjà appartiennent à la communauté
anglophone, peu importe qu'ils soient de Montréal, de Toronto ou de
Londres en Angleterre, parce que déjà ils appartiennent à
cette communauté anglophone, ils peuvent, à notre point de vue,
continuer de s'intégrer à la communauté anglophone qui
existe déjà au Québec.
Or, nous nous sommes également entendus pour que les allophones
vivant au Québec, s'ils avaient opté pour l'école
anglaise, ceux qui déjà étaient là, pouvaient soit
y demeurer, y compris leurs frères et soeurs cadets, soit opter pour
l'école française.
Cependant les immigrants non anglophones à venir devaient
s'intégrer à la communauté franco- phone. Pour eux, il
n'est pas question de liberté de choix. Le fait d'avoir une garantie, de
par cette loi, du ministre de l'Education d'avoir une excellente qualité
d'anglais langue seconde dans les écoles françaises va encourager
beaucoup d'allophones à s'enregistrer de bon gré et
volontairement à l'école française, même si
quelques-uns d'eux avaient la permission ou le droit d'aller, en vertu de cet
article de notre projet de loi, à l'école anglaise.
Je suis assuré que beaucoup vont s'intégrer à la
communauté francophone.
Enfin, nous nous sommes déjà engagés, au chapitre
sur la langue d'enseignement, à réclamer et à obtenir, en
plus d'une meilleure qualité de l'enseignement de la langue
française, des garanties précises pour un enseignement accru, une
meilleure qualité de la langue seconde partout.
Les commentaires spécifiques. Les tests sont terminés.
Bien sûr, comme le disait d'ailleurs il y a quelques mois le
député de L'Acadie, c'est peut-être un passeport pour
l'école anglaise pour quelques francophones qui, normalement, devraient
rester à l'école française, mais il y a une date où
il faut tout couper et où il faut dire:
A partir d'aujourd'hui, on commence ça; même si le
passé était correct ou pas correct, je pense bien qu'il y a une
date à laquelle il faut dire: A partir d'aujourd'hui, c'est comme cela
que ça va aller. Même si je regrette, pour ma part,
personnellement, qu'on donne un passeport à plusieurs francophones pour
aller à l'école anglaise, c'est très difficile de
décider de cas particuliers d'un bout à l'autre de notre
province.
Finalement, même si ce passeport existe, j'accepte la formule
préconisée par le gouvernement là-dessus. Il faut
prévoir, quand même, au premier paragraphe de ce projet de loi,
lorsqu'on donne la permission aux enfants dont le père ou la mère
a reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais, d'être
un peu plus large. Il faut prévoir le cas de parents qui sont
arrivés ici, au Québec, à l'âge de l'école
secondaire, qui sont allés à l'école secondaire anglaise
et qui sont intégrés à la communauté anglophone,
qui font véritablement, aujourd'hui, partie de la communauté
anglophone. Il faudrait élargir un peu et prévoir ces cas de
parents qui ont étudié ou d'enfants qui ont étudié
et ont fait leur secondaire dans les écoles anglaises au
Québec.
De même, il faudrait prévoir aussi le cas de petites
municipalités du Québec, dans Mégantic ou dans
Gaspé, ou à quelques endroits où il reste encore des
îlots d'anglophones, mais pas assez nombreux pour envoyer leurs enfants
à l'école anglaise. Habituellement, ces gens envoient leurs
enfants à l'école française, pour le primaire, et les
envoient à l'école anglaise pour le secondaire. Il faudrait
prévoir ces cas-là en particulier parce que, si on n'ouvre pas
nos écoles anglaises à ceux qui ont reçu l'enseignement
soit primaire ou secondaire en anglais, on crée des injustices à
ces gens.
En plus de ça, ce qui va arriver, c'est qu'immédiatement
après l'adoption de la loi, il y aura peut-être un échange
d'étudiants entre l'école
française et l'école anglaise, les parents qui ont le
droit d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise au primaire vont
peut-être les prendre d'une école française pour les
envoyer à une école anglaise. Alors, il faudrait prévoir
que, dans ce cas-là en particulier, on va peut-être perturber la
vie de jeunes étudiants. Cela ne comporte peut-être pas des
milliers d'étudiants peut-être quelques centaines,
peut-être quelques milliers mais pas tellement d'étudiants
au Québec. Il faudrait être un peu plus large dans le premier
paragraphe de ce projet de loi.
Quant au deuxième, je me pose encore la question, à savoir
où est la générosité promise par le premier
ministre dans son discours inaugural et surtout en considérant qu'il y a
un consensus au Québec dans toutes les écoles de pensée
à ouvrir un peu plus large l'option Québec, et la plupart nous
disent: L'option Canada. Nous, à cause de notre philosophie, parce que
nous reconnaissons, ici, au Québec, l'existence d'une communauté
anglophone bien articulée, nous disons: Tous ceux qui,
déjà, font partie de la communauté anglophone peuvent y
aller, mais, si on garde cet article tel quel, on verra de véritables
anglophones, qui viennent de Toronto ou qui viennent de Londres en Angleterre,
devoir aller à l'école française, alors que des gens qui
ne sont pas de véritables anglophones, qui sont ici depuis
peut-être quinze ans, mais qui ne sont pas de véritables
anglophones, eux, vont avoir le passeport pour aller à l'école
anglaise.
Il s'agit de reconnaître ou de ne pas reconnaître une
communauté, une collectivité anglophone au Québec et, si
nous reconnaissons cette collectivité, je pense bien qu'il faudrait
ouvrir nos écoles pour les membres de cette collectivité.
Il y aura aussi des fonctionnaires fédéraux qui voyagent
d'un bout à l'autre du pays, qui sont appelés à travailler
ou à vivre dans des immeubles fédéraux à Hull et,
autrement, on va peut-être forcer ces gens à demeurer du
côté d'Ottawa, au lieu de venir demeurer au Québec. C'est
peut-être important de prévoir, d'autant plus que, dans les
écoles anglaises, il y aura la qualité de français pour
permettre à ces gens, finalement, de devenir parfaitement bilingues dans
les écoles anglaises et de s'intégrer, avec le temps, à la
communauté francophone, à la culture et à la langue de la
majorité au Québec.
L'option Québec du Parti québécois, c'est un manque
de confiance, à mon point de vue, dans l'effet d'entraînement de
l'ensemble des autres articles du projet de loi qui visent, on ne peut plus, la
prééminence du fait français au Québec.
Hier, j'étais heureux d'entendre le ministre
délégué au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux
loisirs et aux sports nous dire que, quant à lui, il aurait
commencé par l'article concernant le travail ou la langue des affaires,
parce que c'est là, véritablement, que nos
Québécois vont pouvoir continuer de vivre en français et,
lorsqu'ils peuvent travailler en français, ils étudient le
français pour pouvoir travailler dans cette langue. Cet argument du
ministre délégué au Haut-Commissariat à la
jeunesse, aux loisirs et aux sports, je pense que c'est important, très
important dans la philosophie du gouvernement, parce que, si cet argument est
valable, cela veut dire que la langue de l'enseignement, c'est peut-être
secondaire. Les enfants vont se faire instruire dans la langue dans laquelle
ils vont pouvoir gagner leur vie honorablement.
Je ne vois pas des gens au Québec se faire instruire
complètement en chinois. Ce n'est pas possible. Il faut qu'ils se
fassent instruire en français si la langue du travail est le
français, si la langue des affaires est la langue française.
J'ai confiance dans toutes les autres mesures apportées
avec certaines corrections par le gouvernement à l'heure actuelle
à même ce projet de loi pour créer un effet
d'entraînement pour tous ceux qui vont vouloir vivre au Québec, un
effet d'entraînement à tel point que ce sera normal de choisir
l'école française et que ce sera par accident qu'on choisira
l'école anglaise. J'ai confiance dans ces mesures.
J'ai peut-être plus confiance dans les mesures que le gouvernement
préconise que le gouvernement lui-même dans ses propres mesures.
Je rejoins là-dessus le député de Saint-Jacques. J'ai
été heureux de l'entendre dire hier qu'il aurait commencé
par la langue du travail et la langue des affaires.
On ose ici nous parler des dangers d'assimilation que
représenterait l'accès à l'école anglaise
d'éventuels Canadiens ou anglophones venant d'autres pays. On ignore ou
on feint d'ignorer que le gouvernement du Québec peut, à
l'intérieur même du système actuel, avec la même
détermination qu'il met à défendre sa position sur le
dossier linguistique, agir dans le domaine de l'immigration et, notamment, dans
la sélection des immigrants. Là-dessus, l'Union Nationale a
prouvé sa bonne foi; elle a collaboré avec le gouvernement sur
une motion spécifique à l'occasion de l'étude des
crédits. Le choix de ses immigrants relève du gouvernement du
Québec qui a la possibilité de faire quelque chose et de choisir
le genre d'immigrants, la qualité d'immigrants qu'on veut avoir chez
nous.
Par ailleurs, le gouvernement se montre complexé sur ce sujet en
dressant une barrière symbolique dans une attitude séparatiste
plus qu'autre chose, ne tenant pas compte de la réalité
canadienne et on frappe, rétroactivement, les futurs
Québécois venant ici enrichir la mosaïque culturelle du
Québec.
Je qualifie cette partie de l'article 62 de mesquine, restrictive, et je
me demande si, véritablement, le premier ministre, lorsqu'il plaidait
sur toutes les tribunes, que son gouvernement veut faire preuve de
générosité à l'endroit de la minorité
anglophone, était sincère lorsqu'il disait cela et qu'il plaidait
la civilité à l'endroit des autres provinces canadiennes ou des
autres pays du monde.
Il me paraît injuste de faire porter l'odieux de manques, surtout
à l'avant-dernier paragraphe, lorsqu'on dit: "...recevaient
légalement au Québec..." Là aussi, j'aurai certainement
des suggestions à faire dans ce domaine pour des amélio-
rations, parce qu'il ne faudrait pas faire porter l'odieux d'un manque
de politique gouvernementale passée, qui ne dépend pas du
gouvernement d'aujourd'hui et qui peut-être inconsciemment ne
dépendait pas du gouvernement passé non plus de telles
choses ont existé et sont arrivées sur le dos des enfants
complètement étrangers à des jugements que d'autres,
à tort ou à raison, ont pris à leur place.
Je crois qu'au nom de l'équilibre affectif de ces enfants, il
faut amender l'article qui dit: "... recevaient légalement au
Québec..." Là-dessus, on a fait quelque chose
dernièrement, il y a quelques mois, en abolissant les amendes dues et
devant être payées en vertu du bill 23 et du bill 253 parce qu'on
a dit: C'est le passé, on veut oublier cela et on veut créer au
Québec un bon climat social, un climat social sain.
On a déjà fait quelque chose dans le passé. C'est
ce même gouvernement qui a pris une décision dans ce sens pour
créer un climat social sain en disant: C'est le temps. C'est
arrivé dans le passé, mais c'est fini. On regarde l'avenir avec
foi.
Dans ce cas en particulier, vis-à-vis de l'article 69c, il
faudrait regarder l'avenir, avoir foi dans l'avenir et dire: C'est malheureux.
C'est arrivé dans le passé, et faire la même chose qu'on a
faite pour le bill 23 et le bill 253, en disant: A partir d'aujourd'hui, on
commence véritablement à marcher dans la bonne direction et on a
foi dans l'avenir du Québec et dans l'avenir francophone du
Québec.
M. le Président, nous demandons instamment au gouvernement de
faire preuve de plus de flexibilité dans cet article 69. Nous
proposerons des amendements en conséquence un peu plus tard.
Nous reconnaissons que le Québec doit être français;
que la collectivité au Québec doit vivre essentiellement en
français. Nous reconnaissons aussi qu'au Québec, nous avons une
communauté anglophone bien articulée. Il faut reconnaître
cette collectivité, cette communauté, spécialement avec
l'article 69.
Un peu plus tard, nous aurons des amendements, mais tel qu'entendu avec
le député de L'Acadie, je voudrais lui laisser présenter
ses propres amendements.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le
député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, nous aurions
souhaité présenter un amendement à l'article 69 qui aurait
remplacé le texte complet de l'article. Mais après consultation
avec le président, il semble qu'il soit plus sage que nous
procédions alinéa par alinéa, ou, étape par
étape.
Une Voix: C'est plus sage.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... sans
préjugé, évidemment.
Motion d'amendement Mme Thérèse
Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Si nous avions eu le loisir de le faire
globalement, nous aurions proposé la motion suivante: "Peuvent recevoir
l'enseignement en anglais, à la demande de leur père, de leur
mère ou de leur tuteur, les enfants appartenant à la
communauté anglophone. Les enfants qui sont déjà inscrits
à l'école anglaise peuvent y demeurer s'ils le désirent,
les frères et soeurs des enfants qui ont fréquenté
l'école anglaise au Québec peuvent s'inscrire à
l'école anglaise s'ils le désirent." Eventuellement, sans vouloir
produire un livre bleu azuré comme l'Union Nationale quoique je
devrais être plus gentille maintenant que le chef de l'Union Nationale a
accordé un appui à la déclaration de principe du Parti
libéral, qui a eu lieu à Drummondville il y a déjà
quelques mois. Le gouvernement aime aussi savoir vers quoi on se dirige.
Ultérieurement donc, nous avons l'intention de présenter un
amendement pour des mesures transitoires touchant les allophones de 0 à
5 ans. Si nous n'avons pas de chance avec nos amendements, nous avons
l'intention de présenter un amendement qui permettra aux enfants de la
communauté anglophone, qui requièrent des mesures
pédagogiques particulières, d'avoir accès à
l'école anglaise, strictement comme mesure pédagogique.
Ceci dit, l'amendement que nous voulons présenter est le suivant:
Que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en remplaçant
dans les première et deuxième lignes les mots "dont le
père ou la mère a reçu au Québec l'enseignement
primaire en anglais", par les mots "appartenant à la communauté
anglophone". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "a) les enfants
appartenant à la communauté anglophone,".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour le
bénéfice des membres de la commission, et pour que les
débats soient mieux compris, comme la motion d'amendement qui a
été présentée se rattache à l'article 69a,
je suggère donc, parce qu'il pourrait y avoir des amendements à
d'autres paragraphes si cette motion est déclarée recevable, que
la discussion se fasse sur cet amendement et par la suite, sur un autre
amendement, s'il y en a d'autres, et ainsi de suite, de paragraphe en
paragraphe, à l'article 69. Car il serait illusoire de penser pouvoir
discuter de quatre ou cinq amendements ou motions d'amendements en même
temps ou simultanément.
M. Lalonde: C'est pour cela, M. le Président, que nous
avons présenté un amendement seulement au sous-paragraphe a),
pour la bonne marche des travaux.
M. Biron: M. le Président, je voudrais poser une question
au député de L'Acadie. Est-ce que cela veut dire critère
de langue maternelle ou langue de fréquentation scolaire, "la
communauté anglophone"?
Mme Lavoie-Roux: Je le...
M. Lalonde: Je pense qu'on devrait d'abord laisser
déclarer l'amendement recevable et, ensuite, cela nous fera
plaisir...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
déclare immédiatement cette motion recevable et...
M. Charron: M. le Président, je m'interroge avant qu'on ne
procède au débat que veut entamer le chef de l'Union Nationale.
Je m'interroge, à savoir si l'amendement est complet tel que
présenté par Mme le député de L'Acadie. J'aimerais
qu'on me précise ce qu'est la communauté anglophone. Les enfants
appartenant à la communauté anglophone, on n'a rien
réglé en disant cela. La question qu'on se pose, c'est: Qu'est-ce
que la communauté anglophone? Ceux qui sont de langue maternelle
anglaise, ceux qui sont assimilés aux Anglais, ceux qui désirent
par une entrevue se déclarer appartenant à la communauté
anglophone... Il faudrait peut-être le savoir pour qu'ensuite tous les
membres de l'assemblée puissent se prononcer en connaissance de cause.
Mais la communauté anglophone, qu'est-ce que c'est?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En fait,
l'amendement tel que rédigé est conforme à notre
règlement et est recevable. Il pourra être adopté ou battu,
mais à ce stade-ci, il serait peut-être bon que Mme le
député de L'Acadie explique le sens de son amendement.
M. Morin (Sauvé): Qu'elle prenne tout le temps qu'il faut,
cela va être difficile.
M. Charron: Je soutiens, sur un point de règlement, M. le
Président, que...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît.
M. Charron: ... madame a déjà épuisé
son temps de parole sur la motion même. C'est peut-être un de ses
collègues, si elle leur fait confiance, qui pourrait nous
présenter ce qu'elle veut dire par son amendement. Elle ne peut pas
elle-même intervenir sur l'amendement qu'elle présente à la
toute fin d'une motion principale.
M. Lalonde: Sur la question de règlement. Je pense que le
député de L'Acadie a exprimé son opinion sur l'article 69.
Lorsqu'elle a présenté une motion d'amendement, elle a maintenant
le droit, en vertu de l'article 160, d'exprimer son opinion sur l'amendement
aussi longtemps que le règlement le lui permet, c'est-à-dire
vingt minutes. Si elle avait choisi autrement, c'est-à-dire de ne pas
discuter de l'article 69 mais de commencer par une motion d'amendement, il est
possible que son temps aurait été...
M. Charron: M. le Président, le député a
suffisamment d'expérience pour savoir qu'elle aurait pu débuter
par son amendement ou alors prendre les vingt minutes pour nous préparer
à expliquer son amendement. Mais un député qui intervient
sur une motion principale et proposeur d'un amendement n'a plus vingt minutes
à nouveau pour parler de son amendement. Madame a choisi de parler sur
l'article 69 sans nous prévenir ou nous prévenant de façon
peut-être imprécise.
M. Lalonde: Je ne suis pas d'accord sur cela. M. Charron:
Le député sait très bien tout cela.
M. Lalonde: La motion d'amendement est un débat
différent. Je ne vois pas quel règlement l'empêcherait
maintenant de parler, étant donné que c'est un nouveau
débat, que c'est une motion différente. La motion sur laquelle le
député de L'Acadie s'est exprimée pendant je ne sais pas
combien de minutes, c'était la motion peut-être du
député de Saint-Jacques ou d'un autre député qui a
dit que l'article 69 soit adopté. A ce moment, c'est une motion, elle
s'est exprimée pendant quelques minutes, sûrement, et elle a
conclu par un amendement qui est tout à fait différent de
l'article 69. Alors elle a donc le droit de s'exprimer, d'exprimer son opinion,
de tenter de nous convaincre pendant soixante minutes, c'est une motion
différente.
M. Charron: Etes-vous prêt à trancher, M. le
Président, ou si je dois vous donner d'autres exemples qui affluent dans
notre tradition parlementaire?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je
considère, M. le député de Saint-Jacques, que la question
que vous avez soulevée est extrêmement pertinente et difficile. Si
vous pouvez m'éclairer davantage, vous pouvez le faire.
M. Charron: M. le Président, je prends l'exemple il
y en a à la tonne dans la tradition parlementaire d'un chef de
l'Opposition qui intervient...
M. Raynauld: En vertu de quel article du règlement?
M. Charron: 69. Le chef de l'Opposition qui intervient sur une
motion peut proposer un amendement à une motion non annoncée, par
exemple. Mais avez-vous vu, dans notre tradition parlementaire, par habitude ou
par règlement, que le chef qui termine un long discours de deux heures
sur le discours inaugural par une motion de blâme, comme c'est la
tradition chez nous, a ensuite une heure pour venir nous expliquer, à la
fin de ses deux heures, pourquoi il a conclu par une motion de blâme?
Le député de Verdun qui a proposé, en
deuxième lecture sur le projet de loi no 101, de retarder à trois
mois l'adoption de cette loi, l'a fait en intervenant sur la motion principale,
mais n'a pas recouvré par le fait même un droit de
réintervenir. Au contraire, lorsque les motions de réintervenir
paraissent, elles sont appelées au chapitre des motions de
réplique. Mais les droits de réplique n'existent pas en
commission parlementaire. Donc, il est évident, il me semble, qu'un
député
qui décide de garder le contenu, le libellé de sa motion
à la toute fin de son temps de parole de vingt minutes doit c'est
une question de confiance entre membres d'un même parti, j'en conviens
laisser reposer l'argumentation de son amendement sur un ou l'autre
collègue en qui il a le plus confiance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Vanier.
M. Bertrand: Je vais être très bref. C'est seulement
pour vous dire que quand on a un amendement à proposer, c'est qu'on veut
être en mesure de discuter, à un moment donné, d'un article
amendé qui sera considéré comme article final. En d'autres
mots, quand on veut améliorer un article, on propose des
amendements.
Si on propose des amendements, c'est qu'on va aboutir, après
avoir discuté de ces amendements, avec un article qui ne sera plus
amendé parce que plus personne n'aura d'amendement à apporter et
c'est sur cet article final que les gens ont à se prononcer, en
définitive.
Donc, si le député de L'Acadie propose un amendement pour
améliorer cet article 69, si c'est son point de vue, c'est son devoir de
le faire dès qu'elle prend la parole pour qu'à la toute fin,
quand ces amendements auront été acceptés ou battus, nous
nous retrouvions avec un article sur lequel elle puisse se prononcer et
peut-être même prendre la parole. Mais elle a un amendement
à proposer et elle a pris 20 minutes, avant, pour discuter de l'article
dans sa globalité.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
dernière intervention, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Mon collègue en aurait une, avant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Entendez-vous ensemble.
M. Lalonde: Oui, mais j'ai découvert, dans l'article 160,
la source du bien-fondé de la suggestion que je vous fais et je vais le
lire. "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi je passe sur
les crédits un député peut prendre la parole sur le
même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne
parler plus de 20 minutes en tout sur un même article, un même
paragraphe, une même motion". Je laisse le reste de l'article.
Lorsqu'on a appelé l'article 69, la motion était à
l'effet d'adopter l'article 69. Mme le député de L'Acadie a
exprimé son point de vue; donc, il y avait deux motions. Je disais que
l'article 160 prévoit un droit de parole de 20 minutes, globalement,
pour chaque motion et la première motion sur laquelle le
député de L'Acadie s'est exprimée, c'est sur la motion
d'adoption de l'article 69.
Là, nous avons une motion différente, une motion
d'amendement à l'article 69 qu'elle vient de proposer et l'article 160
lui permet d'exprimer son point de vue pour un maximum de 20 minutes, mais le
temps nécessaire. Je propose, M. le Président, que le
député de L'Acadie ait encore 20 minutes en vertu de l'article
160.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
dernière intervention, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le député de Saint-Jacques s'est
référé à l'article 69, mais l'article 69 commence
par les mots "sauf les exceptions prévues au règlement". Une des
exceptions nous renvoie à l'article 160. Si le député de
L'Acadie n'a pas le droit de parole, vous lui enlevez un droit qu'elle aurait
selon le règlement parce que le député de L'Acadie a le
droit de parler 20 minutes sur la motion d'adoption de l'article 69. Si c'avait
été un autre député qui avait fait une motion
d'amendement, le député de L'Acadie aurait encore droit à
20 minutes sur l'amendement à l'article 69. Le fait que ce soit elle qui
ait fait l'amendement ne devrait pas lui enlever son droit de parole. Sa
première intervention se référait à la motion de
l'adoption de l'article 69 et son droit de parole maintenant se
réfère à la motion d'amendement; ce sont deux sujets
différents.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Depuis
deux jours et demi ou trois jours, c'est certainement la question de
règlement la plus difficile et la plus importante également,
importante puisqu'elle va peut-être régler, en fait, un
problème pour le reste de nos travaux.
Il est bien évident que l'article 160 est de mise relativement
à cette question de règlement, il faudrait peut-être le
lire ensemble. "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi ou des
crédits, un député peut prendre la parole sur le
même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne
parler plus de vingt minutes en tout sur un même article, un même
paragraphe, une même motion ou une même question d'ordre ou de
règlement." Il est bien évident qu'un article de loi peut avoir
plusieurs paragraphes et qu'à l'occasion de l'étude de cet
article et des paragraphes, plusieurs questions de règlement peuvent
être soulevées. Ainsi, théoriquement parlant, un même
député pourrait intervenir, sur un même article, si
celui-ci a plusieurs Daragraphes et si les paragraphes sont
étudiés un à un et s'il y a plusieurs ques-tionsde
règlementqui sont soulevées, à chaque fois et avoir 20
minutes sur chaque question de règlement, et ainsi de suite.
L'intervention du député de Bourget et ministre d'Etat au
développement culturel s'est terminée par la phrase suivante; M.
le Président, je propose donc l'adoption, je fais donc motion pour que
l'article 69 soit adopté.
En ce qui me concerne, j'estime que le député de L'Acadie
a parlé 16 minutes sur la motion du député de Bourget
demandant l'adoption de l'article 69 du projet de loi 101. Ceci, à mon
avis, ne l'empêche absolument pas de présenter à la fin de
son intervention une nouvelle motion d'amende-
ment. Selon l'interprétation de l'article 160, puisque la motion
a été déclarée recevable, j'estime qu'à
partir de ce moment, tous les députés membres de cette
commission, y compris le député de Bourget et ministre d'Etat au
développement culturel, ont le droit d'intervenir, et ce pendant 20
minutes chacun sur cette nouvelle motion qui est une motion d'amendement
à celle du député de Bourget.
En conséquence, et compte tenu de l'article 160, j'estime que le
député de L'Acadie a employé 16 minutes pour parler sur la
motion présentée par le député de Bourget; j'estime
qu'elle n'était pas obligée de présenter
immédiatement sa motion d'amendement à l'article 69, qu'elle
avait le droit d'utiliser 20 minutes sur cette motion et qu'elle avait
également le droit, au bout de deux minutes, au bout de dix minutes, au
bout de dix-neuf minutes, de présenter la motion d'amendement qu'elle a
présentée. En conséquence, je pense être logique
avec l'article 160 en estimant que le député de L'Acadie a le
droit de présenter cette motion, qu'elle a le droit d'intervenir sur
cette motion au même titre que tous les autres députés et
qu'une autre période de 20 minutes supplémentaires, pour chaque
député, y compris le député de L'Acadie, commence
à partir du moment où la motion qu'elle a présentée
a été déclarée recevable. C'est dans ce sens que je
vois l'article 160.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.
Une Voix: C'est contraire à la pratique qu'on a toujours
suivie jusqu'ici.
M. Lalonde: C'est une mauvaise pratique.
M. Charron: Vous savez très bien que ce n'est pas une
mauvaise pratique!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
M. Charron: M. le Président, je voudrais vous demander une
directive sur une question de règlement. Si, plutôt que de parler
20 minutes, j'ai envie de parler 40 minutes, je n'ai qu'à proposer un
amendement entre la 19ème et la 20ème?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si, par
exemple, vous jugez à propos, M. le député de
Saint-Jacques, de proposer un sous-amendement...
M. Charron: Non, pas un sous-amendement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...non,
mais supposons-le, parce que les sous-amendements sont prévus dans le
règlement. En supposant que vous vouliez présenter un
sous-amendement à l'amendement proposé par le
député de L'Acadie, j'estime que vous pourriez parler 20 minutes
sur la motion du député de L'Acadie et, à la fin de votre
intervention, présenter un sous-amendement. A partir de ce moment, vous
avez 20 minutes pour parler de votre sous-amendement.
M. Charron: Donc, vous me donnez une directive positive, à
savoir que si un député veut transgresser habilement le
règlement qui le limite, selon l'article 160, à 20 minutes...
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai jamais eu l'intention de faire cela.
M. Charron: Mais non, madame, parce que vous saviez fort bien que
c'était irrégulier.
M. Lalonde: Voyons donc, jamais, ces accusations sont
fausses.
M. Charron: Donc, il y a un nouveau précédent que
vous venez de créer à cette commission, M. le Président,
c'est que si un député...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
sais pas si j'ai...
M. Charron: Moi, je vous assure que je n'ai jamais eu pareille
directive...
M. Lalonde: M. le Président, votre décision
est-elle rendue?
M. Charron: C'est une directive que je demande. Je ne conteste
pas la décision du Président, j'essaye avec lui d'en mesurer
toutes les conséquences pour chacun des membres de la commission, pour
que cette fois cette question dont semble se réjouir le
député de Marguerite-Bourgeoys soit claire aux yeux de tous.
Donc, un député peut étirer son droit de parole par une
motion non annoncée, au milieu ou à la fin de son intervention et
se regagner un nouveau droit de parole.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si on
lit l'article 160, en résumé, un député pourrait
théoriquement, comme je l'ai dit, intervenir huit fois s'il y a trois
paragraphes étudiés séparément et s'il y a cinq
questions de règlement, et si à chaque motion d'amendement il y a
des motions de sous-amendement, le droit de parole de chaque
député recommence à 20 minutes, si l'on lit à la
lettre l'article 160, qui dit qu'un député peut parler 20 minutes
sur un même paragraphe un paragraphe cela présuppose que
des paragraphes peuvent être étudiés
séparément une même motion, ce qui veut dire que
s'il y a des motions différentes. Le droit de parler 20 minutes
recommence à chaque motion différente, et lorsqu'on parle de
motion, on peut parler de sous-amendements, ce qui veut dire que
théoriquement, s'il y avait cinq amendements et dix motions de
sous-amendement, chaque député pourrait avoir le droit, non
seulement pourrait mais aurait le droit de parler 20 minutes, et c'est... Ce
n'est pas la première fois que j'ai l'occasion de lire l'article 160,
même si c'est la première fois que j'ai à trancher un cas
semblable. J'estime, avec vous, M. le député de Saint-Jacques,
qu'un député qui veut se servir, de façon dilatoire et de
façon très habile et
très subtile, de l'article 160, pourrait, à toutes fins
pratiques, avec des amendements et des sous-amendements dilatoires
évidemment je ne qualifie pas actuellement les amendements qui sont ici
avoir un droit de parole de beaucoup supérieur à 20
minutes parce que les 20 minutes sont toujours sur une même motion, un
même article ou un même paragraphe, comme le dit l'article 160. De
cette façon, s'il y a plusieurs paragraphes, vous avez plusieurs 20
minutes.
S'il y a plusieurs motions, vous avez plusieurs vingt minutes, et s'il y
a plusieurs sous-amendements, vous avez d'autant plus de vingt minutes. C'est
l'interprétation de l'article 160. M. le député de
Saint-Jacques, je n'ai pas tous les précédents de
l'Assemblée nationale en ma possession. Je maintiens cette
décision, et j'en prends toute la responsabilité tout en vous
avouant que ce n'est pas la première fois que j'ai des problèmes
d'interprétation avec l'article 160. M. le député de
Mont-Royal a déjà eu une de mes décisions venant à
l'encontre de ses opinions sur l'article 160, mais je dois dire que la
décision que j'ai rendue à ce moment-là était
conforme et en toute logique avec celle que je viens de rendre aujourd'hui sur
l'interprétation de l'article 160. C'est dans ce sens que je
déclare que le député de L'Acadie a présenté
une motion d'amendement et que, comme l'article 160 parle d'une même
motion et puisqu'il s'agit d'une motion différente, de nouvelles
périodes de vingt minutes viennent de naître pour le
député de L'Acadie et pour chaque député.
M. Ciaccia: D'ailleurs, M. le Président, seulement pour
confirmer ce que vous venez de dire, c'est que c'est seulement avec cette
interprétation de l'article 160 que le Parti québécois a
pu rester deux semaines sur l'article 1 en 1974.
M. Morin (Sauvé): Non jamais, au contraire, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Votre
remarque est déplacée, M. le député de
Mont-Royal.
M. Morin (Sauvé): Ce n'est pas le cas, si nous avions pu
utiliser une décision comme celle que vous venez de rendre, M. le
Président, en 1974, je pense que ce n'est pas une semaine que nous
aurions tenu, c'est un mois.
M. Lalonde: M. le Président, l'article 43, sur les
questions d'ordre et de règlement, vous permet de mettre fin au
débat, avant les vingt minutes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, je
pense que, compte tenu de l'importance de la question, il est important... Je
ne demande pas évidemment à tout le monde d'accepter cette
décision, mais je sais que tout le monde la respecte. Elle est faite en
toute objectivité et selon la compréhension personnelle de
l'article 160 sur lequel j'ai déjà eu à rendre des
décisions et, en conséquence, évidemment, ce que j'ai dit
s'applique à tous les députés de cette commission. Je
cède la parole au député de L'Acadie.
M. Lalonde: Si le député de L'Acadie me permet
avant, simplement pour réagir aux propos du député de
Saint-Jacques, nous n'avons pas l'intention d'utiliser votre décision
pour allonger les débats, au contraire, sauf qu'il m'apparaît tout
à fait dans l'ordre que celui ou celle qui présente une motion
ait le loisir de l'expliquer et de la défendre.
Mme La voie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord, au préalable, rassurer le député de
Saint-Jacques. Je pense également que cela permettra de clarifier
certaines autres hypothèses qui ont été soulevées
au cours des derniers jours. Hier soir, j'entendais le député de
Saint-Jacques qui s'inquiétait à savoir comment j'allais
réconcilier ce qui avait été ma position à titre de
présidente de la CECM avec la position linguistique de mon parti.
Je voudrais rappeler ici je le citerai alors que je
présidais cet organisme. J'ai eu l'occasion d'en parler hier ou ce matin
et, à ce moment-là, je présentais en commission
parlementaire un rapport que je cite: "De l'avis de la commission, il est
essentiel et urgent que l'Etat accorde un statut prioritaire au français
dans le domaine de l'enseignement". "A notre avis, accorder priorité au
français, c'est adopter des mesures appuyant concrètement le
principe selon lequel la langue d'enseignement est le français". Je
pense que, ce matin, l'article 68 soulignait ce que nous avons fait. On
ajoutait: "Ce principe doit toutefois souffrir un tempérament important
à l'égard des anglophones qui ont droit à leur culture et
à leurs écoles. Par anglophones, la commission entend des
personnes issues de familles d'expression anglaise ou des personnes de quelque
nationalité ou provenance qu'elles soient ayant acquis la culture
anglaise."
Ceci, sans aucun droute, demeure ma position et je pense qu'elle demeure
au niveau des principes la position de l'Opposition officielle.
On m'a demandé tout à l'heure je pense que c'est
tout à fait légitime ce que nous entendions par "enfants
qui appartenaient à la communauté anglophone". Pour nous, les
enfants qui appartiennent à la communauté anglophone sont d'abord
des enfants dont la langue maternelle et la culture des parents sont anglaises
et qui, partant, parlent l'anglais et sont anglophones, et également les
enfants des familles qui ne sont pas nécessairement de langue maternelle
et de culture anglaises mais qui, au fil des années, par des
circonstances qu'on les appelle des circonstances de travail, sociales
ou autres se sont intégrés à cette
communauté anglophone et dont les enfants parlent également
l'anglais et sont intégrés à cette communauté
anglophone.
Je pense que, pour nous je l'ai dit il y a déjà
très longtemps certains soulèvent des difficultés
quant à cette question d'appartenance à la communauté
anglophone. C'est strictement pour pouvoir y intégrer non seulement,
comme je viens de le dire, ceux qui sont de langue maternelle et de culture
anglaises par la naissance, mais également ceux qui s'y sont
intégrés. Je pense qu'évidemment, si on veut faire des
obstacles, créer des
difficultés, on dit: Est-ce que j'appartiens à la
communauté anglophone oui ou non? Je pense qu'avec toutes les
statistiques qu'on nous a servies pour nous démontrer qui était
la minorité anglophone et qui ne l'était pas, ce n'est quand
même pas un argument, je pense, qui résiste très longtemps
à l'analyse.
Une autre raison pour supporter cette notion de respect de la
communauté anglophone réside, d'abord, au plan historique, sur le
fait ceci a été signalé à d'autres reprises
que la communauté anglophone est partie du Québec depuis
au-delà de 200 ans et qu'elle y a contribué au plan social, au
plan culturel et dans toutes les autres sphères d'activités et
qu'elle peut se réclamer, à ce titre et je pense que
même le gouvernement, dans ce sens, l'a reconnu, au moins dans le livre
blanc elle peut se réclamer de droits historiques dont je pense,
d'autres communautés ou d'autres minorités ne peuvent se
réclamer au même titre. D'ailleurs, c'est un peu la même
chose dans le reste du Canada parce que je pense que si, à Toronto, vous
prenez les statistiques touchant les Italiens, même si les Italiens sont
probablement plus nombreux non seulement à Toronto, mais dans l'ensemble
de l'Ontario que les francophones, on n'a pas d'écoles pour les
Italiens. On a, par contre, des écoles pour les francophones parce que,
historiquement, les deux communautés font partie de l'héritage
canadien et font partie de l'héritage du Québec.
Depuis longtemps, j'ai dû interpréter, et probablement bien
avant plusieurs de ceux qui sont assis autour de cette table, que ce
désir du Québec d'être français et de
protéger son équilibre démographique nous semblait
prioritaire. Il nous semblait également important d'assurer à la
communauté anglophone, à cause de ces droits historiques qu'elle
avait acquis, que nous ferions tous les efforts pour qu'on la respecte et aussi
toutes ses institutions qui viennent soutenir cette culture. Je pense que ce
qui est prévu à l'article 69, aux fins de restreindre, par
exemple, au Québec, cet accès à l'école anglophone,
d'une part, pour nous, ne respecte pas cette page de l'histoire ou cette partie
de l'histoire et va créer, je pense, de la discrimination entre des
citoyens qui partagent la même langue et la même culture.
J'aimerais ici citer le Conseil supérieur de l'éducation
qui disait que, du fait que, d'abord, "le groupe anglais était un
élément fondateur important du Québec, il était
naturel que, dès lors, un anglophone, d'où qu'il vienne, se
joigne au groupe culturel qu'il trouve ici et avec lequel il se
reconnaît.
D'autre part, si l'existence de la communauté anglophone est
admise, elle doit pouvoir maintenir des rapports normaux de
perméabilité et d'échange avec l'extérieur et
accueillir les nouveaux venus qui sont de sa culture.
En dépit de tous les chiffres dont nous a fait part le ministre
d'Etat au développement culturel, chiffres qui, nous le savons, ont
soulevé de nombreux conflits, nous ne croyons pas et d'autres
auront l'occasion de s'exprimer sur le sujet que de protéger et
de permettre l'accès à l'école anglaise à tous les
membres de cette communauté anglophone constitue un danger au
déséquilibre démographique. Il faut dire que, lorsque ce
débat a commencé, le problème qui a été
soulevé était l'intégration massive des allophones
à l'école anglaise, particulièrement depuis la
deuxième guerre, et d'un certain nombre de francophones. L'autre jour,
en discours de deuxième lecture, avec chiffres à l'appui, j'ai
prouvé que les allophones qui arrivent au Québec
s'intègrent maintenant, par le truchement des classes d'accueil, en
quasi-totalité aux classes françaises ou aux écoles
françaises.
J'ai même indiqué que, déjà, même si le
délai a été court à peu près deux ans
on le ressentait dans la distribution linguistique des deux secteurs de
la CECM. J'ai mentionné la Commission des écoles catholiques de
Montréal. Tout le monde sait que c'est là que le problème
s'est fait sentir de la façon la plus aiguë, mais il y a un autre
facteur qui m'apparaît extrêmement important. Jusqu'ici, que l'on
permette à des enfants de langue maternelle et de culture anglaises,
qu'ils le soient par la naissance ou qu'ils aient acquis la langue anglaise par
la suite, de profiter d'un régime pédagogique qui est celui de
leur langue maternelle, quand ce régime pédagogique existe ou
quand ce système scolaire existe...
Je pense qu'on n'a pas besoin de démontrer à qui que ce
soit qu'il est toujours difficile pour quelqu'un de faire des apprentissages
dans d'autres langues. Pour les immigrants on sait fort bien les retards
pédagogiques que cela cause. Pour les immigrants allophones, je pense
que le problème ne se pose pas de la même façon puisqu'ils
auront de toute façon à faire le choix, ils auront de toute
façon à faire des apprentissages, soit en français, soit
en anglais. Ils auront à subir ces inconvénients. Mais de refuser
à des enfants qui sont déjà de langue et de culture
anglaises, si tel est le désir des parents, de pouvoir fréquenter
l'école anglaise, cela me semble tout à fait injustifié
sur le plan pédagogique. On sait fort bien que pour certains enfants, il
est inutile de multiplier ces difficultés pédagogiques, surtout
si le système scolaire leur permet d'aller à l'école
anglaise.
Un autre point que je voudrais soulever... Des articles ont paru,
à savoir que même en l'an 2000, si on permettait le libre choix
je ne veux pas par là laisser entendre qu'on devrait revenir au
libre choix, je l'ai exprimé au début la communauté
anglophone ou la population des écoles anglophones se maintiendrait
à peine, même dans une option de libre choix.
Dans l'amendement que nous proposons, il n'est pas question de libre
choix. Il est clair que ceci restreint le choix et, en aucune façon, ne
risque de déséquilibrer la distribution démographique de
la population scolaire. J'ai trouvé tout à fait
intéressant d'ailleurs, je le soupçonnais depuis longtemps
l'aveu du ministre d'Etat au développement culturel. Je le
comprends et je sais que c'est là une de ses difficultés. Selon
le critère qu'on a retenu, si on devait ouvrir au Canada et à
l'ensemble des autres pays où l'anglais est la lan-
gue d'usage, la langue officielle, je comprends fort bien qu'il y aurait
des difficultés très sérieuses à obtenir les
preuves d'études primaires en anglais à
l'élémentaire... Non seulement cela, mais on risquerait aussi
d'ouvrir une digue extrêmement considérable, parce que le
critère en lui-même est assez large et moins
contrôlable.
Pour toutes ces raisons, à ce moment-ci, je veux quand même
me garder quelques minutes. Non, je ne veux pas tout à fait terminer
ici. On me dira: Mais de quelle façon déterminerez-vous les
critères d'appartenance, etc.? Je pense que ce sont là des
questions qui doivent être examinées et qui présentent des
difficultés. Plusieurs ont déjà été
suggérées à partir du recensement, de fiches d'inscription
appropriées, le critère retenu par le gouvernement serait aussi
un indice intéressant qui pourrait être ajouté à
d'autres indices. Je pense, également, à certains moyens que le
Conseil supérieur de l'éducation menait de l'avant quant aux
données du registre de la population au ministère des Affaires
sociales qui, depuis 1974, enregistre la langue maternelle des enfants. On me
dira: Oui, mais quelle sera la véracité de ce que les gens
déclareront? Je leur soulève le même problème.
Comment allez-vous vérifier la véracité des attestations
qui seront apportées par les parents de pays extérieurs au
Québec présentement, de commissions scolaires où les
archives sont disparues, d'écoles qui sont passées au feu? Je
pense que l'exemple le plus frappant est l'école St. Patrick, qui est
une vieille école de Montréal qui a dû accueillir nombre
d'enfants anglophones. Je ne suis pas certaine que vous n'aurez pas beaucoup
plus de diplômés de l'école St. Patrick que le nombre
d'enfants qui y sont vraiment passés.
Ce sont des difficultés d'ordre pratique et vous apportez, comme
réponse finale, que le fonctionnaire ou le directeur
général ou quelqu'un décidera en dernier lieu de
l'attestation que le parent soumettra. Je pense que ces difficultés
demeurent aussi considérables, sinon plus, sans parler des
difficultés que vont apporter la tenue des registres qui vont assurer
à la descendance des parents ayant fréquenté
l'école élémentaire en anglais le droit à
l'école anglaise pour que ceci soit maintenu d'une
génération à l'autre. Je voudrais juste, en terminant,
montrer encore la faiblesse du critère retenu par le gouvernement.
Sera-t-il possible, pour un francophone, de retenir pendant plusieurs
générations, même s'il ne s'en prévaut pas, ce droit
à l'école anglaise? Ceci démontre bien la fragilité
de ce critère.
Si ce critère d'appartenance à la communauté
anglophone était uniquement celui du Parti libéral, on pourrait
dire que c'est une lubie qu'il a. Mais je pense que c'est un critère
admis par nombre d'autres organismes qui sont venus ici, devant la commission
parlementaire. Je mentionnerai le Conseil supérieur de
l'éducation, la Fédération des principaux du
Québec, qui ne lui donnaient pas l'extension à l'extérieur
du Québec je l'admettrai ils la lui donnaient à
l'intérieur du Canada, mais qui voyaient ce critère comme
étant un critère beaucoup plus juste, beaucoup plus
équitable, pouvant répondre aux besoins pédagogi- ques des
enfants d'une façon beaucoup plus adéquate que celui qui est
présentement mis de l'avant par le gouvernement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
Mme le député de L'Acadie.
M. Biron: M. le Président, je vais laisser la parole au
député d'Outremont qui a...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, la
motion a été déclarée recevable.
M. Biron: ... qui doit quitter plus tôt pour
Montréal. Alors que je suis disponible toute la soirée et
j'interviendrai après. Mais avant, je voudrais tout simplement savoir,
et finalement je vais mieux me préparer à vous répondre:
l'appartenance à la communauté anglophone, comment
déterminez-vous cela? Et qui détermine que j'appartiens ou pas
à la communauté anglophone?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Madame...
Mme Lavoie-Roux: Appartenez-vous à la communauté
anglophone ou si vous appartenez à la communauté francophone,
M...?
M. Biron: Comment déterminez-vous cela? C'est ce que je
veux savoir.
M. Lalonde: ... de la déclaration.
M. Morin (Sauvé): C'est le libre choix.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Lalonde: Vous ne faites pas confiance aux gens.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mme le
député de L'Acadie, si vous voulez répondre à la
question sur votre temps, il vous reste deux minutes sur votre motion.
Mme Lavoie-Roux: Non, je ne réponds pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Lotbinière, vous cédez votre droit de
parole au député d'Outremont?
Mme Lavoie-Roux: Je veux garder mes quatre minutes, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Merci, M. le Président, merci, M. le
député et chef de l'Union Nationale.
Une Voix: Cela prend du temps à s'ajuster. M. Lalonde:
On peut être gentil, mais...
M. Biron: ... à contribution.
M. Raynauld: Je veux simplement reconnaître que le chef de
l'Union Nationale me donne l'occasion de parler avant lui et je
l'apprécie.
J'ai tenu à intervenir sur ce sujet, parce que le problème
est très important, il est fondamental, il est, en grande partie,
fonction d'une perception qu'on peut avoir sur l'évolution de la
communauté francophone, sur l'évolution de cette
communauté anglophone au Québec et tout particulièrement
à Montréal. Il me semble que cette perception devrait être
fortement orientée et influencée par les faits, par les
statistiques que nous avons sur l'évolution respective des
communautés en cause.
Auparavant, je voudrais mentionner que, si je suis favorable à ce
critère qui est proposé de reconnaître l'accès
à l'école anglaise à la communauté anglophone,
c'est qu'il me semble, à mes yeux, au départ, qu'il s'agit d'une
question de justice. Non pas d'une justice absolue, mais d'une justice comme
celle que nous avons cru avoir, nous les Canadiens français au Canada,
depuis 200 ans. Nous nous sommes, en effet, battus pour avoir l'accès
à des écoles françaises, nous avons maintenu des
institutions au Canada, souvent contre l'avis des gouvernements que nous
avions. C'est cette même justice que je réclame pour les
anglophones. Encore une fois, pas cette justice absolue, parce que cela
n'existe pas, malheureusement, mais la même justice que celle dont nous
nous sommes réclamés nous-mêmes pour obtenir cet
accès à l'école française.
Je dirai aussi que je suis favorable à cet amendement qui est
proposé par réalisme et par intérêt pour la
communauté francophone dans son ensemble. Je pense que la
communauté anglophone exerce un certain rôle dans notre
société. Ce rôle ne doit pas être contraint suivant
des règles que le gouvernement du Québec établit car il
est extrêmement positif. J'ai essayé de montrer cela dans le
discours de deuxième lecture sur le projet de loi no 101.
Ceci dit, je voudrais examiner très brièvement avec vous
les facteurs qui sont susceptibles d'influencer notre perception des choses
quant au danger qu'il y aurait ou danger qui n'existe pas d'une certaine
assimilation qu'on traduit en chiffres statistiques d'habitude par une
proportion de francophones qui baisserait dans la population totale au
Québec. On associe en effet cette proportion, qui est une proportion
statistique, souvent à un danger d'assimilation et non sans raison. Si
la capacité d'une langue à absorber et à intégrer
des gens est déterminée par un grand nombre de facteurs, le
premier c'est encore la densité de cette population. Donc, il est
important de conserver cette densité de la population francophone au
Québec, si cette communauté doit grandir et
s'épanouir.
Quels sont ces facteurs qui déterminent cette proportion de
francophones et ce danger d'assimilation des francophones au Québec? Il
y a trois facteurs qui sont reconnus par tout le monde, la
fécondité, c'est-à-dire l'accroissement naturel de la
population...
M. Fallu: Une question de règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: J'aimerais bien qu'on nous parle de la
fécondité, ce serait d'ailleurs un très bel
après-midi pour en parler puisqu'il pleut. Mais il s'agit de parler sur
l'amendement.
J'aimerais bien qu'on me parle de l'appartenance, du sentiment
d'appartenance, de la définition d'une communauté, la
définition d'une communauté anglophone et la justification de
l'appartenance à la communauté anglophone comme étant un
amendement à l'article 69.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
fait...
M. Raynauld: Est-ce que je peux parler sur une question...
M. Lalonde: Question de règlement. Sur la question de
règlement, la motion d'amendement a pour effet de permettre à un
enfant qui appartient à la communauté anglophone l'accès
à l'école anglaise. De là, l'argumentation du
député d'Outremont voulant que ce n'est pas un danger
d'assimilation. Tous ses arguments, fort intéressants je
l'écoutais avec beaucoup d'intérêt je pense, sont
tout à fait pertinents pour éclairer les membres de cette
commission.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce que
je dirai, en résumé, c'est que nous avons une motion d'amendement
proposée par le député de L'Acadie. Il faudrait que tous
les députés fassent des efforts pour parler de l'amendement et
non pas de l'article 69 en général. On doit parler de
l'amendement proposé à l'article 69a qui se lit ainsi: "les
enfants appartenant à la communauté anglophone".
M. le député d'Outremont.
M. Raynauld: Pour le bénéfice de mon
collègue d'en face, puisqu'il n'a pas compris, je vais lui expliquer
dès maintenant le sens et la portée des données que je
veux présenter sur la fécondité, l'immigration et les
transferts. Je veux essayer de lui démontrer et de démontrer
à tout le monde que si on acceptait cet amendement, si on donnait
accès à l'école anglaise à la communauté
anglophone, on ne mettrait pas en péril la survie de la
communauté francophone au Québec. Je pense que c'est tout
à fait pertinent à l'amendement.
Ceci dit, parmi ces trois facteurs qui déterminent
l'accroissement des communautés, la fécondité,
l'immigration et les transferts linguistiques, je ne dirai qu'un mot sur la
fécondité. Comme on le sait, du côté francophone,
les taux de naissance ont diminué de façon brutale depuis le
début des années soixante; pour moi, c'est l'une des raisons
fondamentales pour lesquelles on a commencé à craindre, en
général, au Québec, pour la survie de la communauté
francophone. Ces taux de fécondité sont à peu près
équivalents aujourd'hui chez
une communauté anglophone, allophone ou francophone au
Québec, de sorte que ce facteur n'est pas un facteur déterminant
très important.
Je dirai cependant, en ce qui concerne les francophones, qu'il y a
beaucoup de démographes qui croient que ce taux de
fécondité va se relever dans les années à venir,
pour toutes sortes de raisons sur lesquelles je ne m'étendrai pas.
M. Morin (Sauvé): Vous ne vous étendrez pas
là-dessus?
M. Raynauld: Non. C'est déjà assez long, ce que
j'ai à dire, M. le ministre. Décidément, la
fécondité énerve les gens. Il n'y a pas beaucoup de gens
féconds; on dirait qu'ils se sentent attaqués!
En tout cas, le taux d'accroissement naturel de la communauté
francophone au Québec a des chances d'augmenter plus rapidement; ce taux
d'accroissement a des chances d'être plus élevé à
l'avenir qu'il ne l'est à l'heure actuelle. Ceci serait un facteur
positif.
Venons-en maintenant aux deux autres facteurs qui ont été
les plus discutés récemment, celui de l'immigration, entre
autres. Là où cette question d'immigration est pertinente, c'est
évidemment que s'il y avait un afflux considérable de gens de
langue anglaise ou de gens qui adopteraient l'anglais à l'avenir, ils
pourraient, par leur nombre, en arriver à supplanter les francophones au
Québec. Il est important de savoir si ces migrations se soldent
finalement par des entrées ou des sorties, par un afflux de gens de
langue non française ou si, au contraire, il s'agit de sorties.
Statistique Canada a récemment publié des statistiques qui
se rapportent à la période de 1961 à 1976, donc quinze
ans. Ceci répond à l'une des objections qui avaient
été faites auparavant suivant lesquelles on avait des
séries trop courtes. Sur une base de quinze ans, ce que nous savons de
façon certaine, dans la mesure où on peut être certain,
c'est qu'au total on a eu une immigration nette d'origine internationale de 151
000 personnes pendant ces quinze ans; on a eu des sorties nettes
interprovinciales de 220 000 personnes, ce qui a laissé un solde
négatif de 68 789 personnes qui, sur une base nette, ont quitté
la province de Québec en seize ans. Donc, il n'est pas question
d'afflux. C'est vrai qu'il y a des gens qui entrent, mais il y en a plus qui
sortent. Par conséquent, on ne peut pas invoquer cet argument pour dire
que c'est l'immigration qui va être la cause d'un
rétrécissement relatif de la communauté francophone au
profit des anglophones ou des gens parlant d'autres langues au
Québec.
Si on essaie de répartir, maintenant, les migrations que nous
avons connues suivant la langue parce que cela aussi est important
suivant la langue française, anglaise ou autre, on voit que, si
l'on fait l'hypothèse que 1966 à 1971 est une période
représentative pour l'ensemble des quinze ans, on voit là encore
que les sorties nettes de 68 000 se répartissent comme suit. Il y a eu,
en fait, de 1961-1962 à 1975-1976, 180 000 anglophones qui sont sortis;
il y a eu à peu près autant de francophones entrés que de
sortis; donc, un bilan égal à zéro et, enfin, il y a eu
une sortie de 40 969 gens d'autres langues. Donc, on voit que ce ne sont pas
les francophones surtout qui quittent la province de Québec, ce sont des
anglophones ou des gens d'autres langues.
Là encore, on ne peut pas invoquer cet argument pour craindre ou
pour susciter des craintes selon lesquelles le Québec
s'angliciserait.
En ce qui concerne maintenant les transferts linguistiques je l'ai
mentionné dans ce discours et je veux simplement dire un mot
là-dessus puisque je l'ai déjà dit suivant le recensement
de 1971, il y a eu des gains du français de 52 000 personnes; il y a eu
des pertes, des francophones qui ont adopté l'anglais comme langue
d'usage, de 46 000 et il y a eu des pertes en faveur de l'anglais de 76 000
provenant des allophones qui ont adopté l'anglais comme langue d'usage.
Ce que je veux faire ici comme raisonnement, c'est simplement que, si le
problème des gens dont la langue maternelle n'est ni le français
ni l'anglais est réglé en faveur du français comme ce
l'est en vertu de la loi actuelle et comme ce le serait en vertu du projet de
loi 101, il n'y aurait aucun danger, les transferts linguistiques, en fait,
seraient en faveur du français et non pas de l'anglais.
Venons-en enfin à la clientèle scolaire. Là aussi,
on a essayé d'établir des soldes d'entrées et de sorties
d'enfants, soit sur le plan international ou interprovincial, pour essayer de
démontrer que la clientèle des écoles anglaises, à
Montréal en particulier, augmenterait, donc que la proportion des
élèves du Québec augmenterait dans les écoles
anglaises. Ici encore, j'ai des statistiques qui sont très
révélatrices. Si on prend la clientèle scolaire, le bilan
migratoire interprovincial de la clientèle scolaire pour les quinze
dernières années, on voit que les enfants anglophones ne sont pas
entrés dans des écoles anglaises dans la province de
Québec, sur une base nette, mais sont sortis. Il en est sorti 2603 sur
une base annuelle; les francophones, entrées 219, et il serait sorti 410
enfants d'autres langues. Là encore, sur le plan de la clientèle
scolaire, des enfants d'âge scolaire, il y a eu plus de sorties que
d'entrées; par conséquent, il est impossible d'imaginer que cette
clientèle scolaire serait à l'avenir plus favorable aux
écoles anglaises qu'aux écoles françaises, si on s'en
tient à ces tendances passées.
Si on remarque, cela est un bilan migratoire interprovincial. Il
faudrait aussi examiner combien d'enfants viennent de l'étranger. Des
enfants d'âge scolaire de langue anglaise qui viennent de
l'étranger dans une année au Québec, je ne sais pas si
vous savez quel est ce chiffre. J'ai été Jrès surpris
quand je l'ai appris; c'est 1470 par année. Il y a 1470 enfants
d'âge scolaire qui entrent par année et qui sont de langue
maternelle anglaise. Cela est la moyenne pour la période de 1971
à 1976.
Pense-t-on que c'est avec des chiffres comme ceux-là qu'on va
mettre en danger la survie de la communauté francophone lorsqu'on sait
qu'en 1975, il y avait 1 459 500 enfants au Québec qui
étaient inscrits à l'école, 1 500 000, et il en
vient 1470 de l'étranger et j'ai dit que, sur le plan des migrations
interprovinciales, le bilan était négatif, il en sortait plus
qu'il n'en entrait. Donc, il ne peut pas y avoir d'afflux massif d'enfants
d'âge scolaire dans les écoles anglaises de la province de
Québec.
Je terminerai avec un seul autre petit chiffre. Si on oublie que des
enfants sortent du Québec et qu'on prend juste les entrées en
provenance des autres provinces seulement les entrées des enfants
des autres provinces pour la période de 1971-1976, il en est
entré 5229 de langue maternelle anglaise peut-on savoir ce que
cela représente comme proportion de l'ensemble des élèves
inscrits dans les écoles du Québec?
Sur 1,459 million, cela veut dire 36 sur 10 000; cela veut dire 3,6 sur
1000 et cela veut dire 0,3, soit le tiers de 1% des enfants qui sont dans les
écoles, qui proviennent chaque année de l'extérieur du
Québec et qui parlent anglais.
Je pense que ces chiffres sont absolument dérisoires, M. le
Président et qu'il n'y a aucune espèce de raison pour laquelle on
devrait manquer à des considérations qu'on pourrait avoir, par
ailleurs, de justice ou de réalisme et qui pourraient nous faire refuser
d'élargir la portée de la clause actuelle du bill 101, suivant
l'article 69, et d'adopter l'amendement proposé par l'Opposition
libérale. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député d'Outremont. Avant de céder la parole au
député de Lotbinière, pour compléter un peu la
décision que j'ai rendue tout à l'heure, j'aimerais vous lire un
passage où des directives ont été données aux
présidents de commission relativement à l'interprétation
de l'article 160.
L'auteur, Erskine May, 19e édition, aux pages 720 et 721,
explique, pour l'exercice financier 1975/76 à Londres, que l'estimation
des dépenses pouvait faire l'objet de 166 votes à
l'intérieur de 17 départements. C'est donc dire que le droit de
parole pouvait échoir aux parlementaires en 166 occasions. Ces 166 votes
correspondent en somme aux 173 programmes qui contient le budget des
dépenses du Québec pour l'année 1977/78. Nous sommes
déjà très généreux au Québec en
étendant ces occasions de parler pendant vingt minutes à chaque
député, à chacun des trois, quatre, cinq ou six
éléments que contient chacun des 173 programmes de notre cahier.
Je fais référence à l'article 160 où on parle d'une
commission qui étudie un projet de loi ou des crédits.
Par assimilation... à la commission parlementaire qui
étudie des crédits, on peut parler pendant vingt minutes sur
chacun des éléments qui composent un programme. Un
député pourrait donc intervenir quatre fois vingt minutes sur un
programme qui contient quatre éléments et si les 173 contiennent
chaque élément... Il pourrait, en vertu de l'article 160 et en
vertu des directives qu'on nous a données, parler vingt minutes aux 173
programmes et à chaque élément.
M. Charron: M. le Président, si vous me le permettez, j'ai
à nouveau deux questions de règlement. Puisque vous l'avez fait
vous-même, l'explication que vous venez de donner n'est absolument pas
contestée et, à mon avis, ne fait pas l'objet du litige que vous
avez été appelé à trancher tout à l'heure.
La question n'était pas que nous discutions qu'on puisse avoir vingt
minutes par article, par paragraphe ou par élément de
crédit, c'était une question de principe, à savoir si un
proposeur d'un amendement pouvait, à la suite, revenir pour argumenter
lui-même, sur son amendement. A cet effet, je vous rappellerai
l'existence de l'article 163 qui dit que les règles relatives aux
débats à l'Assemblée nationale s'appliquent mutatis
mutandis. Je soutiens, avec les quelques années d'expérience que
j'ai et que le député de Marguerite-Bourgeoys peut avoir
également, pas aussi nombreuses que les miennes, mais sûrement
bien utilisées aussi, que jamais à l'Assemblée nationale
un proposeur d'amendement ne récupère... Je ne l'ai pas vu
récupérer un droit de parole d'intervention à la
défense de son propre amendement. C'est ce point qui est en litige.
L'article 4 de notre règlement, qui nous rappelle que les
traditions à l'Assemblée ou les usages à
l'Assemblée ont valeur constitutionnelle, si vous voulez, est aussi
important dans ce cas. Je n'ai jamais assisté à pareille
décision.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je dois
vous dire, M. le député de Saint-Jacques, qu'effectivement je
n'ai pas rendu la décision dans ce sens. Je pense qu'on se comprend sur
l'interprétation de l'article 160. Je n'ai absolument pas saisi si
c'était le sens de votre intervention et je n'ai pas statué sur
la question de règlement que vous venez de soulever.
Ce que j'ai décidé tout à l'heure, c'était
tout simplement l'interprétation de l'article 160, à savoir que
chaque député pouvait intervenir vingt minutes sur chaque motion,
sur chaque question de règlement et sur chaque article ou chaque
paragraphe, mais en aucun moment, je ne veux que cette décision ne soit
interprétée dans ce sens que Mme le député de
L'Acadie pouvait immédiatement, après cette motion d'amendement,
prendre la parole.
En aucun moment je n'ai eu à réfléchir et à
statuer là-dessus. Si le sens de votre question de règlement,
c'était cela, je m'en excuse, mais le sens de mon jugement,
c'était d'interpréter l'article 160 de la façon dont je
l'ai fait.
Mais, en aucun moment je n'ai interprété ou je n'ai
pensé avoir à rendre une décision sur l'opportunité
pour Mme le député de L'Acadie de prendre la parole en premier,
en deuxième ou en troisième lieu.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'explique le sens de la décision qui a été rendue.
M. Lalonde: ... puisque le député de Saint-Jacques
a gentiment fait référence à ma courte expérience
à l'Assemblée nationale, je voudrais
d'abord dire que, pour ma part, je ne fais pas référence
à mon expérience pour tenter d'interpréter l'article 163
ou 160, simplement au règlement. L'article 163 dit: A moins de
dispositions contraires, les règles relatives à
l'Assemblée s'appliquent aux commissions. L'article 160 fait
référence aux commissions particulièrement... Les usages
de l'Assemblée nationale sont sûrement applicables, mais pas dans
le cas de l'article 160.
M. Charron: Est-ce que le député convient que
l'usage à l'Assemblée nationale est qu'un proposeur d'amendement
ne récupère pas un droit d'intervention...
M. Lalonde: Je ne voudrais pas donner d'opinion juridique. Je
crois que oui, mais l'article 160 dit: Lorsqu'une commission je ne parle
pas de l'Assemblée nationale c'est exceptionnel à
l'article 163.
M. Charron: L'article 163 se situe dans le chapitre qui vise les
travaux de la commission. Il n'a pas été placé là
inutilement.
M. Lalonde: Oui, mais à moins de dispositions contraires.
C'est tout à fait clair, M. le Président. Vous avez certainement
raison.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De toute
façon, ce que j'avais dit, c'est que j'avais interprété
l'article 160...
M. Lalonde: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... et,
en aucun moment... Et si la question m'était posée lors de
travaux supplémentaires, cette question, qui vient d'être
soulevée, à savoir, en fait...
M. Lalonde: Cela, c'est autre chose.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... qui
doit parler le premier, à ce moment-là j'aurai à rendre
une décision, mais dans mon esprit à moi j'aimerais
être bien compris en aucun moment je n'ai statué
là-dessus.
M. Charron: Bien!
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière, sur la motion d'amendement.
M. Biron:... rapidement la motion... Sur la motion d'amendement
du député de L'Acadie. Si nous adoptions cet amendement, cette
motion telle que rédigée, cela voudrait dire que les
alinéas b), c) et d) de l'article 69 n'auraient plus leur raison
d'être. Or, je voudrais expliquer ici clairement que je rejoins le souci
du député de L'Acadie, exprimé dans sa motion
d'amendement, c'est-à-dire reconnaître en fait pour les
écoles qu'ici, au Québec, nous avons une communauté
anglophone et reconnaître des droits à cette communauté
anglophone. C'est une question de principe. Je crois que le
député de L'Acadie a voulu nous faire accepter... Or, la
communauté anglophone, si elle existe véritablement au
Québec, a le droit à ses propres institutions et,
spécialement au niveau de l'enseignement, cette communauté
anglophone a le droit d'avoir ses écoles.
Mais la question qu'il faut se poser en fonction de l'article 69, c'est:
Comment va-t-on déterminer l'appartenance d'une personne à la
communauté anglophone? C'est ça qu'est la question. Sur la
question de principe, bien sûr, je suis d'accord avec le
député de L'Acadie, mais il y a plusieurs façons de
déterminer l'appartenance à une communauté. Il y a
peut-être les tests qu'on a connus dans le passé ou d'autres
sortes de tests, mais que les gens refusent maintenant, parce qu'on dit: C'est
inhumain, des tests. Il y a la langue maternelle, mais comment va-t-on faire
pour déterminer la langue maternelle? Quels sont les critères?
Encore une fois, il va y avoir des tests. Il y a la fréquentation
scolaire qui, à mon point de vue, est le moins mauvais des
critères.
Chaque personne va-t-elle dire: J'appartiens à la
communauté anglophone? Est-ce que moi, demain matin, si je décide
de déménager dans Pointe-Claire et vais-je dire, parce que je vis
dans une ville anglophone: Maintenant, je vis dans la communauté
anglophone, donc, j'appartiens à la communauté anglophone?
C'est pour ça, dans le fond, que par deux fois j'ai posé
des questions au député de L'Acadie, pour savoir comment on fait
pour déterminer qui appartient à la communauté anglophone.
Qui décide ça si, quelque part, au bout de la ligne, il y a
divergence d'opinion là-dessus? C'est ça que je voudrais savoir.
Comment fait-on pour déterminer, dans l'amendement du
député de L'Acadie, les enfants qui appartiennent à la
communauté anglophone? Que fait-on pour déterminer cela?
Nous, en tout cas, nous avons choisi la fréquentation scolaire,
parce que cela a été suggéré par le gouvernement
et, à notre point de vue, ça apparaît plus pertinent, plus
simple, plus facile à réaliser. On préfère, sur ce
point-là, comme disait hier soir le député de
Saint-Jacques, affronter directement le gouvernement, mettre ça sur la
table, sur son terrain, quand même, mais dans la propre structure de
formulation, dans sa technique de législation et dire:
A travers cela, si c'est véritablement clair que c'est la
fréquentation scolaire, on va essayer d'ouvrir les écoles
anglophones à tous ceux qui sont véritablement membres de la
communauté anglophone.
Je rejoins véritablement l'amendement du député de
L'Acadie, mais au point de vue technique, je trouve que cet amendement n'est
pas complet. Le moment venu, tout de suite après que nous aurons
disposé de cet amendement, si la commission ne l'adopte pas, nous
présenterons des amendements pour clarifier ce que nous voulons et, pour
nous mettre sur le même terrain que le gouvernement dans sa structure de
formulation, comment nous voulons ouvrir les écoles anglaises aux
véritables membres de la communauté anglophone.
Encore une fois, j'aurais aimé que le député
de L'Acadie réponde clairement aux deux questions que j'ai
posées sur les critères d'appartenance à la
communauté anglophone. Cela nous aurait certainement aidés
à prendre une décision.
Si on décide des principes, on va décider des principes;
mais je crois qu'à l'article 69, il n'est pas question de décider
de principes. Il est question de décider de l'application de la loi,
comment on fera pour appliquer la loi. Il est sûr qu'il y a les tests, la
langue maternelle, fréquentation scolaire. On peut peut-être en
prendre un ou deux ensemble et même les trois. Comme j'ai dit tout
à l'heure, si je décide de déménager à
Pointe-Claire si je décide demain matin que j'appartiens à la
communauté anglophone, cela se résume au libre choix total.
Ce n'est pas cela qu'on veut. Avec l'amendement tel que
rédigé par le député de L'Acadie, je pense qu'on ne
fait pas assez ressortir la prééminence du fait français
pour le Québec. Il n'y a rien là-dedans qui nous dit que les
écoles françaises seront obligatoires pour les francophones qui
vont se dire, un bon jour, membres de la communauté anglophone. Je
voudrais quelque chose de clair qui fasse ressortir clairement la
volonté d'une prééminence du français et, en
même temps, rendre justice à tous ceux qui sont
véritablement membres de la communauté anglophone.
Ce n'est pas tout de dire qu'on va ouvrir les écoles aux enfants
appartenant à la communauté anglophone. Il faut décider en
même temps des critères. Si on laisse cela tel que la motion est
formulée présentement, on ouvre la porte à l'incertitude,
à la confusion totale et à l'arbitraire, un jour ou l'autre. Il
faut absolument que la loi détermine clairement l'appartenance à
la communauté anglophone et comment on va déterminer cela. Il
nous manque énormément d'informations de la part du
député de L'Acadie, les mécanismes par lesquels le
député de L'Acadie entend appliquer ce critère
d'appartenance à la communauté anglophone.
Il est sûr que si, un peu plus tard, le député de
L'Acadie ou d'autres députés du Parti libéral nous
expliquent comment ils feront pour établir les mécanismes
d'appartenance à la communauté anglophone, et si cela
répond véritablement à l'objectif de l'Union Nationale,
c'est-à-dire assurer la prééminence du fait
français au Québec d'un côté, et de l'autre
côté, rendre justice à la communauté anglophone, on
serait prêt à voter sur un tel amendement. Mais à l'heure
actuelle, parce qu'il manque trop d'informations sur l'application même
de cette motion d'amendement, s'il fallait que la commission l'accepte, nous,
du moins, devrons voter contre cette motion. Encore une fois, si les membres du
Parti libéral nous expliquent clairement les mécanismes par
lesquels ils entendent donner la prééminence au français
et donner justice à la communauté anglophone et comment ils
feront pour déterminer cela, je serais prêt à
reconsidérer ma façon de décider. Mais à l'heure
actuelle, je trouve que cette motion, telle que rédigée, n'est
pas assez claire dans l'application même du projet de loi.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé et ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais
d'abord qu'il soit très clair que le gouvernement, par ce projet de loi,
entend reconnaître les droits moraux et historiques de la minorité
anglophone du Québec.
Depuis toujours, et même à une époque où nous
n'avions pas encore d'université francophone, cette collectivité
avait les siennes; elle avait ses écoles, ses collèges, ses
établissements d'enseignement supérieur. Il n'est pas question de
s'en prendre le moindrement à tout cela, au contraire. Je pense que le
gouvernement a démontré sa ferme intention de traiter tous les
Québécois, anglophones et francophones, sur le même pied,
compte tenu, bien sûr, du nombre, de part et d'autre.
Ce projet de loi reconnaît donc, et entend expressément
reconnaître les droits de la minorité anglophone. Encore faut-il
s'assurer qu'il s'agit bien de la minorité anglophone et non de
personnes qui voudraient s'y joindre, venues de l'extérieur du
Québec ou de l'étranger. Il y a un droit moral de la
collectivité anglophone du Québec à ses écoles. Ce
droit, enraciné dans l'histoire du Québec, le gouvernement entend
le reconnaître pleinement.
Toute la question est évidemment de savoir qui fait partie de
cette minorité, qui a le droit de se prévaloir de ces droits
historiques, dont le fondement moral est indubitable. Après avoir fait
le tour de tous les critères possibles et imaginables, après nous
être, à bien des reprises, arraché les cheveux au sujet de
cette question, nous avons choisi, comme le chef de l'Union Nationale le
rappelait il y a un instant, le critère qui nous paraissait le plus
humain et soulevait le moins de difficultés. Ce n'est pas le meilleur;
à compter du moment où l'on veut départager les droits de
deux collectivités coexistantes, il n'y a pas de "meilleur"
critère, il n'y en a que de "moins mauvais".
Or, le député de L'Acadie nous propose un critère
des plus vagues, probablement le plus vague qui se puisse concevoir. Qui est
moins strict même j'attire votre attention là-dessus, M. le
Président que celui de la loi 22: "les enfants appartenant
à la communauté anglophone", nous dit-elle. Elle nous aurait
proposé un autre amendement, comme "anything goes", cela serait revenu
à peu près au même.
M. le Président, il y a deux interprétations possibles de
ce critère, l'un émanant de Mme le député de
L'Acadie, l'autre nous venant il y a un instant d'une courte intervention, mais
non suffisamment remarquée, du député de
Marguerite-Bourgeoys. La première interprétation est celle qui
fait de cette appartenance un fait vérifiable; la seconde veut que, ce
fait étant trop difficile à vérifier, on se contente d'une
simple déclaration, comme le suggérait le député de
Marguerite-Bourgeoys.
Si, comme le veut Mme le député de L'Acadie, c'est un fait
vérifiable, nous sommes amenés inévitablement à ce
qu'elle appelle, euphémistique-
ment et pudiquement, "de simples entrevues", c'est-à-dire que les
enfants ou les parents ou tous sont amenés devant un
examinateur qui vérifie si, oui ou non, ces enfants, ces parents, cette
cellule familiale appartenant à la communauté anglophone. Je vous
laisse imaginer les scènes qui peuvent se produire à cette
occasion. Je vous laisse imaginer, surtout, les risques d'arbitraires que cela
comporte, lesquels ont d'ailleurs amené une condamnation sans appel de
la loi 22. Ce n'est pas moi qui condamne ce critère que nous propose Mme
le député de L'Acadie. Ce n'est même pas le chef de l'Union
Nationale qui, pourtant, vient d'exprimer son désaccord. C'est la presse
anglophone elle-même qui n'en veut pas et qui dénonçait
hier, ce matin encore, tous les risques que comporte un tel critère. Je
voyais dans la Gazette, ce matin: "Children would be subjected to a short and
simple interview. It does not need much imagination to predict that there could
be many situations where decisions would appear arbitrary". Même si elles
n'étaient pas arbitraires, elles pourraient paraître, arbitraires
et cela suffirait à défaire tout le bien que la loi veut à
la communauté anglophone ainsi que l'ordre et la paix que ce projet de
loi veut ramener entre les collectivités qui forment le
Québec.
M. le Président, si l'on en fait un fait vérifiable, comme
Mme le député de L'Acadie le suggère, nous sommes conduits
inévitablement aux tests qu'elle appelle cela comme elle voudra:
"de simples entrevues" nous sommes de retour à la
vérification, et cela nous paraît odieux.
C'est la raison pour laquelle, avec le chef de l'Union Nationale, nous
l'avons écarté.
L'autre façon d'appliquer un tel critère, c'est de
n'exiger qu'une simple déclaration. N'importe qui se présente et
dit: "Je suis anglophone". C'est ce que nous suggérait, il y a un
instant, le député de Marguerite-Bourgeoys qui, je le signale,
n'est pas d'accord sur ce point avec Mme le député de L'Acadie.
Il semble qu'il y ait deux écoles de pensée su sein du Parti
libéral. J'aimerais bien savoir laquelle est la bonne.
M. Charron: Deux!
M. Morin (Sauvé): Au moins deux!
M. Ciaccia: II y en a beaucoup plus de votre
côté.
M. Lalonde: En avez-vous une au moins? Vous n'en avez pas de
pensée là-dedans. C'est de la mécanique.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!
M. Morin (Sauvé): Notre critère est
énoncé dans la loi.
M. Lalonde: C'est de la mécanique.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Sans insister, ce matin, à votre égard, M. le
député de Mont-Royal, j'ai eu une phrase pour diminuer votre
agressivité. Cet après-midi, je ne parlerai pas
d'agressivité, je vais simplement vous rappeler pour la Xième
fois si cela peut s'écrire au journal des Débats
qu'il y a des articles qui nous régissent et que, tantôt d'un
côté, tantôt de l'autre, l'on cherche à
s'interrompre.
J'aimerais qu'on laisse M. le député de Sauvé
terminer son exposé avant de lui répondre.
M. le député de Sauvé et ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): J'achevais, M. le Président. Le
député de L'Acadie nous propose le retour aux tests; le
député de Marguerite-Bourgeoys nous propose le retour au libre
choix, en somme. Appelons donc un chat un chat. Je m'excuse, ce n'est pas une
allusion au député de Pointe-Claire.
M. le Président, le Parti libéral, sur cette question, se
montre bicéphale. Il va falloir que vous vous décidiez entre
vous, avant toute chose, ce que vous avez à nous proposer. Mais j'aime
autant vous dire qu'en ce qui nous concerne, qu'il s'agisse de tests ou de
libre choix, nous n'en avons que faire. C'est pourquoi, M. le Président,
nous voterons contre cet amendement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Premièrement,
je voudrais assurer le député de Sauvé que nous n'avons
pas la division, la dissenssion et le nombre d'opinions sur ce sujet qu'il
suggère.
M. le Président, le député de Sauvé, le
ministre de l'Education, ainsi que le ministre d'Etat au développement
culturel ne cessent de nous assurer, d'assurer cette commission et la
population qu'ils veulent protéger les droits de la communauté
anglophone. Et immédiatement après l'avoir dit, ils
procèdent à les leur enlever et les restreindre par des mesures
qui sont contenues dans le projet de loi no 101. Les propos du chef de
l'Opposition me laissent un peu perplexe et me rappellent les paroles du
député de Saint-Jacques. Il semble que le programme de l'Union
Nationale est: Une langue officielle, two official languages. Parce que lui
aussi veut protéger et veut reconnaître la communauté
anglophone, mais lui aussi commence à faire ces distinctions à
savoir qui aura le droit, qui appartient à une collectivité, qui
n'y appartient pas...
Premièrement, je voudrais dire au ministre d'Etat au
développement culturel et au ministre de l'Education de cesser de venir
nous dire: Convainquez-nous avec vos arguments. Je crois que le fardeau de la
preuve, maintenant, pour prouver leurs paroles, à savoir qu'ils veulent
vraiment protéger ou reconnaître la collectivité
anglophone, est sur eux. C'est sur eux que repose le fardeau de la preuve de
démontrer qu'ils ne veulent pas restreindre la communauté
anglophone, les individus lui appartenant; qu'ils ne veulent pas l'amoindrir,
qu'ils veulent que cette collectivité, que cette culture puisse
s'épanouir au Québec.
On parle de tests. Je suis content les tests, c'est clair? Je suis
contre les interviews...
M. Charron: Parfait.
M. Ciaccia:... les entrevues...
Une Voix: La troisième école.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Pas de dialogue ni, surtout, de trio. M. le député
de Mont-Royal.
M. Ciaccia: II y a un écho à ma gauche.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Si je rappelle les autres à l'ordre, je vous prie de ne pas
tomber dans le même panneau.
M. Ciaccia: Les raisons qu'on invoque sont vraiment bizarres. On
a eu de la difficulté avec les tests en 1974; puisqu'on a eu de la
difficulté, on va abolir la communauté anglophone! Bien oui,
c'est ce qu'on dit. On n'aura plus de critères pour la communauté
anglophone, on va décider, nous, qu'il n'y en aura plus parce que les
tests sont inapplicables. Je trouve cette façon de penser absolument
inacceptable et aberrante.
C'est pareil à ceci: on ne peut pas définir d'une
façon exacte le concept de la justice, mais on veut la justice. Mais
parce qu'on ne peut pas la définir d'une façon exacte, va-t-on
dire que nous sommes pour l'injustice? Ce sont les arguments de l'autre
côté de la table.
On se réfère à la collectivité francophone.
Je veux que mes propos soient clairement compris. Ce n'est pas
nécessaire, pour protéger cette collectivité les
statistiques et les arguments du député d'Outremont nous ont
éclairés sur ce fait d'enlever les droits d'une autre.
Chaque communauté, chaque collectivité a le droit non seulement
de se faire reconnaître, mais elle a le droit aussi de s'épanouir.
C'est un droit inhérent à la reconnaissance d'une
communauté. Le projet de loi 101 n'accorde pas ce droit.
La communauté anglophone, à la suite des mémoires
qui nous ont été présentés, nous dit qu'elle
accepte qu'on doive parler le français au Québec. Je ne pense pas
que ce soit cela, on fausse le débat. On essaie d'identifier l'existence
d'une communauté avec le fait que la langue française doit
être parlée au Québec; cela, c'est faux. Dans les
écoles anglophones, on nous l'a démontré à maintes
reprises; il y a des cours d'immersion, il y a les cours de français et
ces gens ne s'opposent pas à apprendre le français, mais ils
veulent survivre comme communauté culturelle. Est-ce tellement difficile
à comprendre? On dit: C'est quoi, la communauté anglophone? Comme
on ne peut pas définir spécifiquement la communauté
anglophone, on ne doit pas la reconnaître, on doit la faire
disparaître. C'est faux. On n'est pas pour commencer à mettre des
numéros sur leurs bras pour qu'ils aient le droit d'avoir leurs
écoles. Est-ce cela que vous préconisez?
On peut vous citer des lois d'autres pays où ils reconnaissent
les minorités, les collectivités qui font partie de ces pays.
Elles disent que chaque citoyen décide librement. Premièrement,
elles reconnaissent le droit au plein développement culturel de cette
communauté. Je ne parle pas d'en assimiler d'autres, je ne parle pas des
futurs immigrants non anglophones, je parle de l'existence d'une
communauté. Dans d'autres pays, on reconnaît leur droit à
un plein développement culturel, on reconnaît leur droit à
l'instruction dans leur langue. Pour ceux qui s'inquiètent de la
définition, laissez-moi vous lire un article d'une constitution d'un
pays dictatorial.
Je ne vous ai pas cité l'article 4, M. le ministre, et je ne veux
pas me faire interrompre. Savez-vous, non seulement cela, mais pour plaire au
côté gauche de votre parti...
M. Morin (Sauvé): Faites attention!
M. Ciaccia:... c'est un pays socialiste. O.K.?
M. Morin (Sauvé): Faites attention à ce que vous
allez citer parce que je l'ai, moi aussi, le texte.
M. Ciaccia: L'article 4, je le cite. J'espère que vous
avez la même édition, une édition plus récente que
celle que j'ai.
M. Dussault: Quel pays?
M. Ciaccia: C'est la Tchécoslovaquie, encore.
Une Voix: C'est un Etat fédéral.
M. Ciaccia: C'est un Etat fédéral, exactement.
M. Dussault: Une nouvelle constitution en janvier 1974, en
1969.
M. Ciaccia: M. le Président, c'est seulement pour donner
un exemple. Vous pouvez citer toutes sortes de choses, mais c'est seulement
pour donner l'exemple d'un certain esprit qu'on veut abolir ici; vous voulez un
précédent, je vous en donne un.
Chaque citoyen décide librement, d'après sa propre
conviction, de son appartenance à une des nationalités, et ils
reconnaissent quatre ou cinq nationalités.
M. le Président, c'est un faux débat, la question:
Allons-nous définir la communauté anglophone oui ou non? Vous
savez que vous pouvez la reconnaître, cette communauté existe et
si, parce que vous ne le pouvez pas au dernier degré, au nième
degré, il peut y avoir une personne qui, peut-être, n'appartient
pas à la communauté anglophone et qui va trouver une place dans
la communauté anglophone, quelle tragédie! Pour éviter
cette petite tragédie, on va l'anéantir et refuser de la
reconnaître. C'est le principe, M. le Président, it's the
principle...
M. Charbonneau: Le principe de libre choix.
M. Ciaccia: Non, ce n'est pas le principe de libre choix,
monsieur. On parle de l'amendement, de la reconnaissance de la
communauté anglophone, 69a.
M. Charbonneau: C'est quoi, la communauté anglophone? La
réponse est claire.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le
député de Mont-Royal. A l'ordre! M. le député de
Verchères.
M. Ciaccia: II me reste combien de temps, M. le
Président?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal, vous avez commencé à 17 h 20 et vous connaissez le
texte de l'article 160 par coeur, je pense, il a été si souvent
invoqué.
M. Ciaccia: Je ne savais pas à quelle heure j'avais
commencé. Les interruptions... On fait exprès.
Le Président (M. Cardinal): Cette question est revenue
souvent de votre part, M. le député de Mont-Royal. Il est du jeu
parlementaire qu'il y ait des interruptions, même si elles ne sont pas
conformes au règlement. Je ne suis pas pour prendre un
chronomètre pour savoir si vous avez été interrompu
à bon droit, à mauvais droit, pendant 30 secondes ou autrement.
Ce que j'ai fait jusqu'à présent, c'est que j'ai normalement
déduit le temps que la présidence prenait de l'intervention du
député et, deuxièmement, j'ai toujours manifesté
une générosité particulièrement libérale
qu'on a même soulignée dans les journaux.
M. Ciaccia: M. le Président, je ne demande pas plus de
temps parce que j'ai été interrompu. Je sais que c'est de coutume
parlementaire d'interrompre et c'est aussi de coutume parlementaire de se
plaindre d'être interrompu.
M. Charbonneau: Vous êtes parfait.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères, s'il vous plaît. Je sais que c'est chacun son tour. Si
vous pouviez, cependant, à cause de l'importance du sujet dont nous
discutons, avoir une certaine retenue.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: La reconnaissance telle que préconisée
par notre amendement à l'article 69 non seulement répond à
un droit juste et équitable et à la réalité de la
communauté anglophone, mais répond également aux questions
de la langue de travail, aux représentations qui nous ont
été faites par la communauté des affaires tant anglophone
que francophone. C'est pour cela que nous aurions préféré
discuter de la langue de travail avant d'aborder la question de la langue
d'enseignement parce qu'il y aurait eu beaucoup de précisions et nous
aurions vu que, si nous avions pu discuter de la question de la langue de
travail, on ne perdrait pas notre temps aujourd'hui à décider si
une communauté anglophone existe. On aurait vu ce que c'était et
pour quelles raisons la communauté anglophone existe et doit continuer
d'exister et doit continuer d'avoir des droits.
Mr Chairman, even the representatives of the English-speaking community,
most of whom, by the way, Mr Chairman, when they came to the parliamentary
committee, presented their briefs to the government in a French language. They
have pleaded and asked and they have recognized that there is such a thing as
anglophone parents. They have said that just because, merely because it was
odious to have introduced the question of tests, that it is not a reason to
refuse the recognition of this community which is part of Quebec.
This community has been part of Quebec, has made its contribution in all
fields and will continue and wants to remain part of Quebec society. One of the
problems of language legislation, of this particular language legislation, is
the fact that it may be used by the government, I am of the opinion that it is
being used by the government for political motives, it is being used by the
government to advance its objectives of separatism and every time someone tries
to identify, to recognize either individual rights or rights of the
English-speaking community, we are immediately labelled as working against the
interests of the majority and that is false, it is based on a false premise and
it is divisive of the goodwill that exists between these communities which are
being eroded away by the constant introduction of language legislation such as
bill 101.
M. le Président, on se réfère toujours aussi
à d'autres endroits, d'autres provinces et à ce qui a
existé dans le passé. Il y a eu des injustices dans le
passé, c'est vrai, mais ce n'est pas une raison pour nous aujourd'hui
d'essayer d'imiter ces injustices. Qu'on essaie de faire justice à notre
société, de ne pas créer de divisions. Ce n'est pas une
raison parce qu'en 1890, au Manitoba, il y a eu une loi que personne ne peut
accepter, qui est discriminatoire et qui n'aurait jamais dû être
introduite et acceptée, pour aujourd'hui imiter ce genre de loi. On
devrait avoir un esprit un peu plus large, si vraiment le but du gouvernement
est de légiférer dans les intérêts de tous les
Québécois.
Le gouvernement se plaît toujours à dire que, malgré
notre origine ethnique, linguistique, nous sommes tous des
Québécois, mais je veux vous rappeler, M. le Président,
que c'est lui qui introduit les distinctions.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le
député me permettrait-il une question?
Le Président (M. Cardinal): S'il vous le permet.
M. Ciaccia: Après mon intervention.
Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas après,
c'est pendant ou ce n'est rien.
M. Ciaccia: S'il me reste du temps, après que j'aurai
terminé, je lui permettrai une...
Le Président (M. Cardinal): Après, c'est la
permission du président. D'accord. M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, on cite toujours la loi 22;
on nous accuse; on accuse le gouvernement. Hier soir, le député
de Saint-Jacques m'a dit que j'avais voté contre la langue officielle,
le français langue officielle; je lui ai rappelé que non, que
j'avais voté contre la loi 22, de la même façon que
lui-même avait voté contre la loi 22.
Le fait qu'il ait voté contre la loi 22, est-ce parce qu'il a
voté contre la langue officielle, le français langue officielle?
Non, nous avions chacun nos raisons.
Oui, c'est excellent, merci, M. le député de Sauvé.
M. le Président, je pense que M. le député d'Outremont,
mon collègue d'Outremont nous a prouvé que le bill 101 n'est pas
nécessaire. Pour ma part, si nous n'étions pas dans le contexte
politique actuel, je voterais contre toute législation linguistique,
c'est simple, mais je n'oublie pas les objectifs du gouvernement et je ne veux
pas jouer son jeu en m'opposant à un projet de loi sur la langue.
Les articles qu'on peut appuyer, je vais les appuyer, mais il y a
certains principes fondamentaux, quant à moi, auxquels je vais
m'opposer.
Pour terminer, M. le Président, pour montrer que la loi 22 ne
nous préoccupe pas tellement, on réalise certaines failles et
certaines difficultés, et je pourrais vous dire ceci:
Le député d'Outremont a prouvé que le bill 101
n'est pas nécessaire et que c'est une loi politique pour des buts
politiques. Je pourrais dire que la loi 22, de la façon dont elle a
été rédigée elle a été faite
de la même façon c'était un projet de loi politique.
Ce projet de loi a pendu le premier ministre qui l'a présenté. Je
vais vous dire, M. le Président, que le projet de loi no 101 va avoir le
même effet sur le Parti québécois.
Merci!
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement,
excusez.
M. Morin: M. le Président, est-ce qu'il reste...
Le Président (M. Cardinal): Un instant!
M. Morin (Sauvé): ...un instant pour poser ma
question?
Le Président (M. Cardinal): Oui, mais auparavant, si vous
permettez, M. le député de Marguerite-Bourgeoys invoque le
règlement. Je répondrai ensuite à M. le
député de Sauvé.
M. Lalonde: M. le Président, c'est...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...une suggestion que j'ai à faire qui
concerne la marche de nos travaux. Après consultation avec le leader
adjoint du gouvernement et le député de Mégantic-Compton
et mes collègues, je suggérerais que pour continuer la bonne
marche des travaux et éviter quand même de terminer à une
heure trop tardive et permettre à ceux qui ont à quitter
Québec de retourner chez eux ce soir, que nous continuions après
18 heures la tenue de cette séance jusqu'à 20 heures, et
qu'après, la séance soit ajournée, tel qre le leader du
gouvernement l'a exprimé dans son avis ce matin.
Le Président (M. Cardinal): Sur cette question, s'il y a
consentement, je serais disposé à accepter... Oui, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Ce n'est qu'une discussion; ce n'est pas une motion,
bien sûr, on s'entend bien?
M. Lalonde: C'est ça, oui.
Le Président (M. Cardinal): Je l'ai
considérée comme suggestion, non pas comme motion, parce que s'il
faut repartir sur l'article 160, il sera onze heures quand on aura
décidé qu'il faut ajourner à 20 heures.
M. Lalonde: Si on en fait une motion, M. le Président,
ça va prendre 30 secondes.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: ...on aura discuté en dehors de la table, bien
sûr, c'est un moindre mal, puisqu'on a voté contre le fait de
siéger cet après-midi, nous, depuis 13 heures cet
après-midi jusqu'à lundi matin, à 10 heures. C'est un
accommodement qui nous va, même si je trouve pénible d'être
obligé de siéger le vendredi soir. On va quand même
accepter de se rendre jusqu'à 20 heures, s'il y a lieu, et de terminer
là jusqu'à lundi.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. le leader parlementaire adjoint du gouvernement?
M. Charron: M. le Président, nous sommes tout à
fait d'accord avec cet accommodement proposé. Il rejoint l'objectif de
faire avancer les travaux sur cette importante loi, en même temps que de
respecter un calendrier normal à la fin de cette semaine pour les
députés, membres de la commission.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez quand
même, je vais ajouter un commentaire qui concerne le règlement et
nos façons de procéder.
Je suis prêt, à titre d'accommodement, à recevoir
cette suggestion, qui reçoit un consentement unanime. Je ne voudrais
cependant pas en faire un précédent. J'ai souvent rappelé
à cette commission que, suivant nos règlements, et là,
on
pourrait s'interroger longuement sur le vendredi c'est pourquoi
je ne veux pas en faire un précédent nous sommes dans une
situation particulière. Je ne voudrais pas qu'à l'avenir on
puisse invoquer un consentement unanime pour qu'à 18 heures le
président ne quitte pas d'office son fauteuil et ajourne à 20
heures. Je veux que ceci soit bien clair. Disons que j'accepte ce que vous
proposez à titre d'accommodement provisoire pour un certain vendredi
soir, celui, si je ne me trompe pas, du 5 août 1977.
M. le député de Sauvé et ministre de
l'Education.
M. Morin (Sauvé): Oui, M. le Président, je
désirais poser une question au député de Mont-Royal...
Le Président (M. Cardinal): ...à ce sujet, M. le
député de Sauvé, il vous reste encore pas mal de temps, et
il reste même aussi un peu de temps au député de
Mont-Royal. Ce que je voudrais éviter, c'est que le député
de Sauvé ou le député de Mont-Royal, dans un
échange très courtois et très savant, ne dépasse
chacun, ou l'un d'eux, leur temps. Alors, M. le député de
Sauvé, d'accord, mais pourvu que M. le député de
Mont-Royal, suite à votre question, ne vienne pas ajouter à son
discours, contrairement aux dispositions de l'article 160.
M. Morin (Sauvé): Je serai très bref. Le
député de Mont-Royal a fait allusion $ la législation
répressive et injuste du Manitoba en 1885 et 1890. N'imitons pas ce
mauvais exemple, nous dit-il! Je suis tout à fait d'accord mais ce n'est
pas ce que fait le présent projet de loi. Je me demande ce que le
député a voulu dire exactement. La législation de 1885 au
Manitoba abolissait, à toutes fins pratiques, l'école
française. La législation de 1890 abolissait l'usage officiel de
la langue française.
Or, la Charte de la langue française ne fait rien de tel. Elle
maintient les écoles anglaises l'usage de la langue anglaise. La preuve
est que le député s'exprimait tout à l'heure en anglais et
continuera de le faire. J'espère, du moins, qu'il continuera si, cela
lui chante. Autrement dit, le Québec est bien trop civilisé pour
imiter le Manitoba.
Alors, voulez-vous nous expliquer en quoi consistait ce curieux
parallèle?
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, M. le
député de Mont-Royal, parce qu'il faut éviter lors d'un
amendemtent, des sous-débats ou des mini-débats, nous ne sommes
pas à l'Assemblée nationale, vous avez deux minutes au maximum
pour répondre.
M. Ciaccia: C'est regrettable que je n'aie que deux minutes parce
que pour répondre à une telle question, je pourrais prendre plus
que cela, mais je serai bref.
Le député de Sauvé a raison quand il dit que le
Québec est trop civilisé pour accepter l'attitude du Manitoba et
c'est pour cela que le Québec n'acceptera pas votre projet de loi no
101, et quand vous dites que le projet de loi n'abolit pas l'anglais comme
langue officielle, vous ai-je bien compris?
M. Morin (Sauvé): Aurez-vous le droit, oui ou non, de vous
exprimer en anglais à l'Assemblée nationale?
M. Ciaccia: Oui, je vais l'avoir, et je n'ai pas dit que ce
projet de loi allait aussi loin, mais c'est l'esprit, et vous savez ce que je
voulais dire, c'est l'esprit et... Les mots plus que l'esprit, certaines
restrictions dans le projet de loi. L'article 69, c'est une question de
degrés. Vous commencez aujourd'hui avec cela et, plus tard, où
allez-vous aller? Si les institutions ne peuvent pas survivre, si elles ne
peuvent pas continuer, si les droits individuels n'y sont pas, vous savez, M.
le député de Sauvé, ce que vous faites avec le projet de
loi 101. Il n'est pas nécessaire qu'il soit un duplicata de la
législation de 1890, mais nous sommes en 1977. Il faut être un peu
plus subtil, tel que vous l'êtes, tel que votre gouvernement l'est. Vous
êtes plus subtil avec votre projet de loi 101, mais vous ne changez pas
les concepts de la législation de 1890 ou de ce projet de loi.
M. Morin (Sauvé): J'accepte le compliment du
député, mais je souhaiterais qu'il en extirpe le venin. Cela
serait plus juste à l'endroit du projet de loi.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Nous sommes rendus dans les problèmes de réaction de
formations politiques.
M. Ciaccia: Vous avez essayé de me provoquer et vous avez
réussi.
A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! Ces deux
députés devraient se rappeler ce que j'ai mentionné ce
matin sur l'agressivité-.
M. Charron: Y a-t-il d'autres intervenants sur la motion?
Le Président (M. Cardinal): Oui, il y a d'autres
intervenants, M. le député de Saint-Jacques.
M. Charron: Voulez-vous appeler les prochains intervenants, s'il
vous plaît!
Le Président (M. Cardinal): Oui. M. le
député de Bourget et ministre d'Etat au développement
culturel.
M. Laurin: Je ne comprends pas qu'un parti qui a assumé,
à plusieurs reprises dans l'histoire l'exercice du pouvoir
présente un amendement aussi vague, aussi flou, administrativement
invérifiable, aussi mou et aussi spongieux, car l'appartenance à
la communauté anglophone me semble absolument impossible à
définir.
Je n'en nie pas la réalité, mais il est extrêmement
difficile de cerner cette réalité, ne serait-ce
qu'en raison du pouvoir intégrateur, pour ne pas dire
assimilateur, de la minorité anglophone ici au Québec, à
l'endroit de tous les nouveaux arrivants, à l'endroit en tout cas, de la
grande majorité des nouveaux arrivants.
Quel que soit le critère que l'on choisisse, que ce soit le
critère de l'origine ethnique, que ce soit le critère de la
langue maternelle, que ce soit le critère de la langue d'usage, que ce
soit le critère de ceux qui savent parler français en même
temps qu'anglais, le critère de bilinguisme, on en arrive à des
chiffres éminemment variables et différents, et je pense que
c'est absolument impossible, à ce moment, d'introduire un pareil
amendement dans une loi qui se respecte et qu'il faut faire respecter.
D'ailleurs, Mme le député de L'Acadie en est tellement
consciente qu'elle-même a dit qu'elle ne pouvait pas ajouter un
critère à son amendement. Elle a avoué qu'il serait
difficile de le faire. Elle a mentionné, au hasard, le recensement, les
fiches d'inscription. Mais nous savons bien, nous qui avons eu à
préparer le projet de loi, que nous avons examiné chacune de ces
hypothèses. Le ministre de l'Education disait 17, 18, 19. Nous avons
peiné durant des mois pour essayer de vérifier le
caractère administrable de chacun de ces critères et cela a
été absolument impossible. Je pourrais vous faire un long
discours pour vous montrer en quoi chacun des critères mentionnés
par le député de L'Acadie est impossible à
administrer.
Présenter un pareil amendement sans critère qui en rend
l'administration possible me semble naïf, me semble infantile à
certains égards et, en tout cas, me semble absolument irresponsable. En
ce sens, il nous apparaît absolument impossible de l'accepter.
Evidemment, dans son exposé de présentation, le
député de L'Acadie a dit qu'elle était obligée,
finalement, de penser à ce qu'avaient dit le Conseil supérieur de
l'éducation et d'autres organismes, c'est-à-dire au
critère de la langue maternelle anglaise. Nous savons très bien,
pour l'avoir étudié, que ce critère de la langue
maternelle anglaise ne constitue en rien la méthode simple,
complète, objective, fiable, identique et juste pour tous que le
législateur doit introduire dans une loi pour que son administration en
soit possible. Donc, il n'est pas possible de le retenir. Par ailleurs, si nous
voulons véritablement le retenir, avec toutes les conséquences
qu'il comporte, c'est-à-dire qu'il nous ramènerait
infailliblement à des mesures de contrôle qui seraient, comme je
l'ai dit dans mon discours de deuxième lecture, tout aussi
tracassières, tatillonnes et odieuses que les tests linguistiques,
à ce moment, nous retombons de Charybde en Scylla. On ne peut pas
retenir un critère, celui de la langue maternelle anglaise, qui,
même s'il ne nous ramène pas à des tests, nous oblige, pour
son administration, à quelque chose qui lui ressemble.
Je sais que le député de Mont-Royal n'est pas d'accord
avec les entrevues. Il nous l'a dit. Le député de D'Arcy McGee,
hier, nous a dit qu'il fallait plutôt tester les parents. Probablement
que ce n'est pas l'opinion du député de L'Acadie. Peut-être
qu'il y a quatre ou cinq autres opinions dans le Parti libéral, ce qui
montre qu'il est absolument impossible, avec la base de départ qu'ils
ont choisie, d'arriver à faire une législation qui se
respecte.
Il faut donc arriver à des mesures de contrôle. De quel nom
les baptisera-t-on? On voudra éviter, évidemment, le mot "test",
mais il faudra revenir à la réalité du test. J'ai
essayé de voir dans le dictionnaire d'où pouvait venir ce mot
"test". Je ne l'ai pas trouvé dans le Larousse, incidemment, mais je
l'ai trouvé dans le Webster Nov. Collegiate Dictionary. A la page 1205,
j'ai vu une définition du "test" que j'accepte; d'ailleurs, c'est un mot
d'origine anglaise, c'est pour cela que je l'ai trouvé là. Le mot
"test" se définit dans le Webster: "a critical examination, observation,
or evaluation". Ce sont souvent des mots qu'on entend autour de la table depuis
le commencement de la discussion. Cela veut dire que, quel que soit le mot que
vous employez: examen, observation, entrevue, déclaration,
évaluation, c'est toujours, au fond, de la même farine. Cela
participe à la même famille qui est définie par le mot
"test" dans le Webster New Collegiate Dictionary, c'est-à-dire aux
mêmes mesures de contrôle, qui sont subjectives, qui donnent lieu
à tout l'arbitraire imaginable, à tous les contrôles
possibles et impossibles. Nous arrivons donc aux mêmes conclusions, aux
mêmes méthodes que rejette la communauté anglophone, tel
qu'il en appert des articles que nous avons vus depuis quelques jours dans la
Gazette et dans le Star, qui représentent bien, en ce moment, l'opinion
de la majorité anglophone.
On nous dit, par ailleurs c'est le député
d'Outremont qui l'a dit que cette loi n'est pas nécessaire; donc,
que le critère que nous choisissons n'est pas nécessaire. Je
profite de l'occasion pour dire qu'à mon avis le député
d'Outremont est à peu près le seul dans ce débat, du
côté libéral, qui a présenté des vues
objectives, sérieuses, étoffées et qu'il convient donc de
respecter à leur pleine valeur. Il reste, cependant, que je ne suis pas
d'accord avec les diverses objections qu'il a fait valoir, aussi bien en ce qui
concerne le taux de fécondité que le taux d'immigration
anglophone, que le taux de transferts linguistiques et que l'évaluation
qu'il fait de la clientèle scolaire.
Nous avions présenté à cet égard, depuis
plusieurs semaines, nos propres scénarios, nos propres perspectives. Je
sais qu'elles ont été contestées. Elles ont
été contestées par certains démographes, MM.
Henripin et Lachapelle, dans deux articles dans le Devoir. Elles ont
été contestées par l'Université McGill. Elles ont
été contestées par certains membres du comité
protestant du Conseil supérieur de l'éducation et M. Slingerland
a fait paraître, à cet effet, un article dans le Devoir. Elles ont
été contestées par la Chambre de commerce, lorsqu'elle
s'est présentée à la commission parlementaire.
Nous avons lu avec la plus grande attention, M. le Président, ces
diverses critiques qui ont été faites à nos
prévisions démographiques. Nous les avons étudiées
dans ce qu'elles pouvaient présen-
ter de scientifique, sans en retenir le côté inutilement
polémique, car j'ai très mal réagi, je dois vous l'avouer,
à certaines des remarques qui ont été faites par l'un ou
l'autre de ces critiques à l'endroit des démographes, à
l'endroit des statisticiens ou à l'endroit des professionnels du
gouvernement qui nous ont aidés à préparer ces
statistiques.
On a voulu dire que le gouvernement leur avait donné des ordres,
qu'ils avaient travaillé dans un esprit partisan, qu'ils avaient
été mobilisés pour la défense d'une cause. Je
m'inscris en faux contre ces affirmations, car jamais le gouvernement n'a
donné d'ordres ou d'hypothèses de travail aux démographes
du gouvernement. Jamais il n'a tenté d'incliner dans quelque sens que ce
soit leur travail. Ce travail a été fait selon les
critères les plus rigoureux de la recherche scientifique. Je pense qu'il
serait très malsain de la part de certains députés, comme
le député de Saint-Laurent, ou d'autres personnes à
l'extérieur de cette Chambre de prétendre que les professionnels,
qui travaillent au service du gouvernement, travaillent au service, en fait,
d'un parti politique.
Mais, quoi qu'il en soit, M. le Président, cette mise au point
étant faite, nous avons étudié d'une façon
scientifique, rigoureuse toutes les représentations, toutes les
critiques qui ont été faites à l'endroit des
premières prévisions que nous avons établies. Je peux
remettre maintenant aux membres de la commission le résultat de
l'étude critique, des travaux critiques qui ont été faits
à l'endroit de nos propres prévisions. Nous en avons même
préparé un tableau synthèse, que nous avons
intitulé "La langue et l'école", où nous reprenons,
à la suite des représentations qui nous ont été
faites et des informations additionnelles que nous avons pu recueillir, tous
les scénarios que nous avions présentés il y a un mois,
c'est-à-dire un nouveau tableau de l'évolution de la
clientèle scolaire, suivant la langue d'enseignement, de 1971 à
1986.
Nous nous sommes permis aussi de faire une réflexion sur la
méthodologie employée par ceux qui ont critiqué nos
propres prévisions. Nous avons tenté de mettre en rapport les
informations anciennes et additionnelles que nous possédions avec
l'évolution des clientèles scolaires au Québec. Nous avons
réétudié d'une façon plus attentive la situation
particulière de la région de l'Outaouais. Ce sont ces documents
maintenant que j'aimerais remettre pour éclairer la discussion aux
membres de la commission, quitte à ce que, en môme temps, ils
puissent consulter d'autres documents que j'aimerais déposer, que
j'aimerais remettre aux membres de la commission, pour aller plus au fond des
critiques qui ont été faites par ceux qui sont intervenus dans ce
débat. On peut les distribuer pour le moment.
Il nous semble, par ailleurs, que la position de l'Opposition officielle
à cet égard, si on la retenait, s'avérerait
discriminatoire à l'égard des allopho-nes, en ce sens qu'elle
tendrait à prétendre qu'il n'y a que deux seules
communautés ici au Québec, alors que nous savons nous
l'avons re- connu dans le livre blanc qu'il existe plusieurs
communautés au Québec. Même si la communauté
anglaise est la plus importante, il importe de ne pas oublier les autres, leurs
caractéristiques, les motivations qu'ils ont à maintenir leur
propre langue maternelle et leur propre culture, souhait qu'ils m'ont souvent
exprimé et qu'ils ont sûrement souvent exprimé
également au gouvernement précédent.
Par ailleurs, nous continuons à refuser d'ouvrir les
écoles du Québec à la communauté anglaise du monde.
Nous voulons préserver les droits de la communauté anglophone du
Québec et je pense que les dispositions de la présente loi sont
respectueuses, justes et généreuses à cet égard. Je
pense même que, lorsqu'on les comprendra et qu'on les évaluera
justement, on verra que le gouvernement a fait montre, en l'occurrence, de la
plus grande justice et de la plus grande équité.
Pour revenir durant quelques minutes également sur le
critère que nous avons adopté, il est vrai, comme l'a dit le
ministre de l'Education, que ce critère n'est pas parfait. Dans certains
cas, il pourra s'avérer difficile de l'administrer en raison des
inconvénients qu'a signalés le député de L'Acadie.
Il y a quelques écoles qui ne les possèdent pas, il y a eu des
écoles qui ont été brûlées. Il y a des
archives qui sont perdues.
Mais avant d'en arriver à notre décision, je veux vous
assurer que nous avons fait toutes les enquêtes nécessaires afin
de savoir si les dossiers dont nous pourrions avoir besoin étaient
suffisamment nombreux et suffisamment adéquats pour nous permettre
justement d'appliquer ce critère dans un esprit de justice et
d'équité. Les résultats de l'enquête que nous avons
faite prouvent, de toute évidence, que ces dossiers ont
été préservés, qu'ils sont disponibles et qu'ils
nous permettront d'appliquer d'une façon responsable le critère
objectif, fiable et juste que nous avons choisi.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Sur l'amendement,
j'accepte le principe voulant que l'école anglaise soit une institution
destinée à donner des services d'enseignement aux anglophones; en
conséquence, l'école anglaise doit être accessible à
tous les anglophones. Je pense que ceci est conforme à notre philosophie
linguistique au Parti libéral, exprimée d'abord à
l'article 68: l'école française pour tous et l'école
anglaise pour les anglophones. De là l'amendement et je l'appuierai.
On s'est attaché, surtout du côté
ministériel, à rechercher les difficultés d'application
que ce principe pourrait avoir dans les faits. Je me souviens de l'allusion que
le député de Sauvé a faite à un mot que j'ai dit
tantôt. Tout à coup, j'ai mis la main sur des formulaires
apparemment préparés, me dit-on, par le gouvernement pour
l'application de ce principe tel que contenu dans le projet de loi no 101 et
j'ai vu, parmi les trois formulaires sou-
mis, l'un, qu'on appelle, je pense, le formulaire C, qui, justement,
contient la signature du parent. Donc, on admet, même pour l'application
de ce principe, qu'on doive recourir à une déclaration des
parents, à une déclaration des gens.
M. Morin (Sauvé): Oui, la demande d'admission en
anglais.
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Sauvé.
M. Lalonde: L'application du principe n'est jamais très
facile. Le ministre d'Etat au développement culturel vient, d'ailleurs,
lui-même d'admettre que l'application du principe contenu à
l'article que nous tentons d'amender rencontrera des difficultés souvent
pénibles. Mais je pense qu'il s'agit d'une question d'attitude. Tout
d'abord, l'application du principe devrait, au départ, et pour la
très grande majorité des gens, être aussi facile qu'il est
facile, pour le recensement, de conclure qu'il y a X milliers d'anglophones au
Québec ou Y milliers de francophones en Ontario.
Si cette formule de vérification des populations est assez
précise et sûre pour qu'on puisse s'y appuyer dans les
études démographiques utilisées tant par le gouvernement
que par d'autres organismes, elle devrait, au départ, suffire pour
l'application d'un tel critère. Autant le gouvernement fait confiance
aux gens pour le processus de recensement, autant nous devrions changer
d'attitude à l'égard de l'application de tels critères et
éliminer à tout jamais l'approche coercitive de
vérification absolument stricte que, par exemple, les tests
représentaient. Pourquoi recourir à des mesures coercitives quand
on sait qu'on peut faire confiance à la très grande
majorité des gens, à la très grande majorité des
Québécois?
La disparition des tests est essentielle et la disparition de tout
système de tests organisés, de tests systématisés
ou de toute chose qui ressemblerait à des tests, mais organisée
pour tous les gens doit aussi disparaître. Autant on prend la parole ou
la signature du citoyen lors du recensement, autant on peut lui faire confiance
dans ce secteur. Le ministère de l'Education devra se fier à la
déclaration des gens quant à la fréquentation scolaire
dans bien des cas.
Le ministre d'Etat au développement culturel vient justement de
mentionner quelques-unes des difficultés que représentent, par
exemple, la disparition d'écoles, la disparition d'archives, le fait que
certaines écoles aient été incendiées, etc. A ce
moment là, il faudra que le gouvernement fasse confiance aux gens. De
simples fiches d'inscription contiendront la preuve amplement suffisante de
l'appartenance à la communauté anglophone, ce qui, dans la
très grande majorité des cas, ne posera aucun problème.
Les abus, s'il y en a, comme dans toute application de loi, seront apparents de
façon inévitable.
Le député de Sauvé a fait l'analogie de cette
attitude ouverte, de cette attitude de confiance avec le libre choix. Il dit
qu'on retourne au libre choix. Rien de plus faux, M. le Président. Faire
confiance aux gens, prendre leur parole équivaut, pour le ministre de
l'Education, à la présomption d'infraction. On dirait que, pour
le Parti québécois, on est présumé coupable. On est
présumé toujours vouloir faire une infraction à la loi. Le
Parti québécois ne fait pas confiance aux francophones alors
qu'à l'époque de la grande liberté de choix, à
peine 2,5% des francophones se servaient de cette liberté de choix. L'on
sait, depuis la loi 22, même hors l'application des tests, que la
population francophone s'est imposé elle-même une autodiscipline
à l'égard de l'exercice de cette liberté de choix assortie
d'une restriction. Quant aux allophones, M. le Président, la preuve de
leur non-appartenance à la communauté anglophone est l'enfance de
l'art.
M. le Président, le critère du Parti
québécois est artificiel. On ferait subir aux
Québécois plus de contraintes et d'injustices qu'un
critère positif, fondé sur un principe comme celui que nous
proposons.
J'aimerais vous mentionner je ne suis pas un expert dans cette
question, je fais confiance naturellement aux recherches que le
député de L'Acadie a faites et aux exemples qui sont assez
impressionnants de résultats de l'application du test artificiel,
commode, qu'on nous propose un article de Mme Lysiane Gagnon,
journaliste qui a suivi le débat sur la langue, sur la question
linguistique depuis fort longtemps et qui écrivait dans la Presse, je
crois, le 16 avril 1977: "En retenant ce critère de l'école du
père ou de la mère, le gouvernement péquiste mise sur le
fait que l'école primaire est généralement le prolongement
culturel de la famille et que la plupart des adultes qui ont
fréquenté une école élémentaire anglaise
sont des anglophones soit par naissance soit par assimilation. Mais la
réalité est souvent plus complexe et mouvante que ce
critère mécanique, sans compter les nombreux cas d'assimilation
entre francophones et anglophones (en Gaspésie, dans l'Estrie, etc). Le
simple fait que la loi interdise l'école anglaise à certains
"vrais" anglophones et permette le libre choix à des gens pour qui
l'anglais n'est pas la langue d'usage, est déjà une faille en
soi."
Je continue la citation, un peu plus loin dans l'article, M. le
Président: "Deuxième faille dans la loi projetée; un
élève peut avoir ou non le libre choix de la langue
d'enseignement selon des facteurs qui tiennent partiellement au hasard de la
vie. Selon qu'il est membre d'une famille nombreuse ou enfant unique. Selon son
rang au sein de la famille, selon l'âge de l'aîné des
enfants au moment de la promulgation de la loi, selon cet autre hasard qui a
amené les parents à envoyer l'un de leurs ainés à
l'école anglaise, etc."
Voilà deux failles qui, dans un premier temps, vont avoir pour
résultat de refuser l'accès à l'école anglaise
à des anglophones, des "vrais" anglophones, pour citer Mme Lysiane
Gagnon, et, dans un autre temps, donner un passeport à vie à de
nombreux francophones qui, parce que leurs parents auront
fréquenté l'école anglaise pourront
envoyer leurs enfants ad vitam aeternam à l'école
anglaise, alors que le principe du maintien d'un système de
l'école anglaise au Québec repose sur la nécessité
de pourvoir et de continuer de pourvoir à la communauté
anglophone des services d'enseignement en anglais.
M. le Président, pour nous, c'est une question de justice, ce
n'est pas une question de commodité, et les trois critères ou
principes plutôt que le ministre d'Etat au développement culturel
a mentionnés au début de son intervention, lors de la
présentation de l'article 69, sont assez symptomatiques, surtout dans
l'utilisation qu'il en a faite et que le gouvernement aussi en a faite,
c'est-à-dire que le troisième critère ou le
troisième principe était la facilité ou la
possibilité d'appliquer les deux premiers principes.
Naturellement, il faut s'attacher à la facilité où
à la possibilité d'appliquer une loi lorsqu'on fait nos choix,
mais, en s'inspirant de ce troisième principe, en le rejoignant avec le
premier qu'il a mentionné je n'ose pas les répéter,
parce que je ne les ai pas verbatim on s'est inspiré, je crois,
on s'est laissé influencer de façon trop importante par la
question de l'application pour aboutir à un critère qui ne repose
sur aucun principe, qui repose sur des accidents dans beaucoup de cas, qui
repose sur quelque chose d'artificiel, qui va créer de la
discrimination, non pas de la discrimination dans le sens de la Charte des
droits et libertés de la personne. Je sais que la Commission des droits
et libertés de la personne a donné un avis à cet
égard et je suis tout à fait d'accord avec ses conclusions, mais
dans les faits, on va traiter différemment, sans aucune raison valable,
à propos ou sur la base d'aucune rationalité, la
possibilité pour des gens d'envoyer leurs enfants à
l'école anglaise, d'une part parce qu'ils ne pourront pas le faire
même en étant anglophones, et, d'autre part, en donnant un droit,
un privilège à des francophones d'envoyer leurs enfants à
l'école anglaise alors que l'on sait que ce n'est pas le but de ce
projet de loi, que ce n'est pas le but de toute la politique linguistique et de
la loi 22 et de ce projet de loi.
M. le Président, à cet article que l'on veut amender, "les
enfants dont le père ou la mère a reçu au Québec,
l'enseignement primaire en anglais," notre amendement a pour but de faire
tomber cet article. Je crois qu'il est pertinent de faire
référence à ce critère, particulièrement,
c'est-à-dire la clause Québec, dans le plaidoyer que l'on fait en
faveur de notre amendement. Je dis donc que ce choix politique, cette
restriction, cette contrainte sont inutiles, d'autant plus inutiles que,
lorsqu'on a vu les données démographiques que le
député d'Outremont nous a décrites et remises
tantôt, que le but en est de traiter la minorité anglophone d'une
façon restrictive, inutilement restrictive et coercitive.
Il s'agit d'une minorité, d'une minorité nombreuse, d'une
minorité que nous, du Parti libéral, conformément à
une philosophie de liberté et de démocratie, voulons
reconnaître par la loi. Le sous-paragraphe a) que l'on veut amender le
fait d'une façon pusillanime, le fait d'une façon inuti- lement
restrictive et, ne serait-ce que pour cette raison, on devrait accepter
l'amendement du député de L'Acadie.
Le degré de civilisation d'une société
démocratique est fonction du respect que cette société a
à l'égard de ses minorités. Or, traiter cette
minorité considérable de la façon dont le sous-paragraphe
a) veut le faire, M. le Président, va se refléter
négativement sur toute la société québécoise
et ce n'est sûrement pas le désir des francophones. Les
francophones ne sont pas assez peureux, ne sont pas assez timorés, M. le
Président, pour vouloir traiter les anglophones de façon aussi
restrictive et aussi inutile les données démographiques
sont quand même évidentes à ce propos que le fait le
sous-pagraphe a) de l'article 69, M. le Président.
Quant à moi, je me sens mal à l'aise, comme
Québécois francophone, de devoir recourir à ce genre
d'attitude, à ce genre de mesure pour, supposément et
prétendument assurer la survie, le maintien et le développement
de ma culture et de ma langue.
M. le Président, l'amendement du député de L'Acadie
repose sur un principe sûr. Il appartient à un système de
valeurs démocratiques modernes; il veut que l'on reconnaisse dans la loi
des faits, une situation de fait, et il m'apparaît inspiré d'une
philosophie libérale tout à fait conforme aux grandes
orientations de notre parti; c'est pourquoi je l'appuierai, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
député de Saint-Jacques, il vous reste deux minutes.
M. Charron: II me reste deux minutes?
Le Président (M. Laplante): Non, vous commencez, vous.
M. Charron: M. le Président, je m'étais inscrit, il
me semble, il y a déjà longtemps, c'était pendant que mon
excellent ami le député de Mont-Royal nous formulait une fois de
plus toutes ses appréhensions et ses angoisses. Entre-temps, le ministre
d'Etat au développement culturel a, une fois de plus, tenté
d'expliquer le bien-fondé de la position qui nous amène à
rejeter l'amendement de Mme le député de L'Acadie.
Mais, puisque mon sujet initial était les propos du
député de Mont-Royal, aussi bien y revenir.
Il se dit victime de plusieurs interruptions depuis qu'il travaille avec
nous à cette commission. C'est un fait statistique, je crois, qu'il cite
mais j'estime que le député de Mont-Royal devrait se rendre
compte qu'il les provoque, qu'il les sollicite, parce qu'il est difficile
d'être Québécois de langue française, et, se croyant
honnête et se croyant juste, de voir l'assiduité avec laquelle, au
point même, je pense, d'en gêner ses propres collègues de
son parti j'ai presque envie de dire la mauvaise foi, mais le
règlement me l'interdit le député de Mont-Royal
aime répéter combien de citations pourrais-je relever
depuis le début des
travaux d'hier que ce que le gouvernement recherche, c'est la
mort, l'extinction, l'assassinat de la minorité anglophone du
Québec? Combien de fois il nous a dit...
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le
Président.
Une Voix: C'est vrai!
M. Ciaccia: Je n'ai pas utilisé le mot "assassinat", les
mots qu'il dit. Il m'impute des motifs; il m'attribue des paroles que je n'ai
pas dites.
M. Charron: Très bien...
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député de Mont-Royal.
M. Charron: On va se parler comme il faut et on ne fera pas de
point de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Votre question de
règlement est acceptée. Vous avez rétabli les faits. M. le
député de Sauvé. Pas de Sauvé, pardon, de
Saint-Jacques, veuillez continuer.
M. Charron: C'est difficile, comme Québécois
francophone, d'endurer ça. Et c'est peut-être pour ça que,
spontanément, de ce côté-ci, parce que nous, nos couleurs
et notre programme sont sur la table, je soutiens encore que vos propres
collègues, dans votre propre parti, ne doivent pas toujours trouver
très drôle de vous entendre dire, chaque fois que les
Québécois ils peuvent s'y prendre de différentes
façons, on peut discuter sur les modalités essaient
d'assurer à la communauté anglophone, pour reprendre le mot de
l'amendement de madame, selon des modalités différentes, que nous
sommes d'ailleurs en train de discuter, chaque fois, dis-je, que nous voulons
assurer spécifiquement à la communauté anglophone ses
écoles et les instruments culturels pour son développement.
Nous voulons spécifier ces gestes, comme le gouvernement
libéral, dont s'était dissocié à l'époque,
le député, dont le chef qu'il vient de renier à nouveau
avait pourtant osé présenter comme une voie d'avancement pour la
collectivité française; je vous assure que c'est difficile, comme
Québécois, de rester impassible à ce genre de geste.
Si j'avais le moindre doute, le moindre doute je ne dis pas
l'assurance le moindre doute que, même à long terme, le
projet de loi tel quel, sans l'amendement de Mme le député,
conduit à la moitié du début de l'extinction de la
minorité québécoise anglophone, je serais de votre
côté, opposé au projet de loi. Mais me faire dire, chaque
fois que j'interviens honnêtement en faveur de cela, que je discute avec
d'autres sur des motions, que, de toute façon, je suis persona non
grata, que parce que j'appartiens à un parti indépendantiste
québécois, je n'ai qu'un but en tête, la disparition des
Anglais, je n'aime pas me faire accuser de pareil geste.
Je suis en train de travailler honnêtement à trouver une
loi qui va assurer, justement, à la communauté anglophone tout ce
à quoi elle a droit. Je suis convaincu que je suis en train d'offrir
déjà à la communauté anglophone du Québec
beaucoup plus qu'aucune communauté francophone, dans le pays que vous
défendez, n'a jamais reçu ailleurs.
M. Ciaccia: J'accepte cela.
M. Charron: Et en ce sens-là, que le député
ne se soulève pas du fait que, de temps à autre, ses
insinuations, pour ne pas dire ses affirmations parce que je l'ai
entendu clairement provoquent un haut-le-coeur. Je me dis, quand je
l'écoute, qu'il s'adresse probablement bien au-delà des cerveaux
qui sont à l'entour de cette table. Il sait qu'à chaque fois
qu'il ouvre la trappe il a au moins deux importants organes d'information qui
s'adressent à la minorité anglophone qui lui réservent les
pleines pages, comme s'il était le porte-parole officiel et tenace, et
comme si, à chaque fois, il était le seul défenseur, et
qu'ici tous les francophones de cette assemblée, de quelque parti que ce
soit, n'avaient en tête qu'une idée, éteindre, torturer et
chasser la minorité anglaise du Québec. Il est bien servi par les
media d'information, le député. Il le sait et il en profite
abondamment, je pense, dans ses interventions depuis le début.
Je me dis encore plus, quand nous ne sommes pas témoins, quand il
n'est même pas sous la surveillance des media d'information, mais quand,
comme homme responsable de l'Assemblée nationale, il rencontre les
citoyens anglophones, peut-être inquiets, j'en conviens, lorsqu'il s'agit
d'aborder des questions aussi importantes que celles que nous débattons,
j'aime autant ne pas entendre ce qu'il doit leur dire. J'aime autant ne pas
entendre et, en ce sens, je me demande si le député demeure tout
aussi honorable que son titre le maintient. Je ne m'avance pas, je ne l'ai pas
entendu, mais j'ai le droit d'exprimer les craintes que j'ai en moi.
L'amendement de Mme le député...
M. Ciaccia: M. le Président, il n'y a pas de question de
privilège. Je n'en soulève pas, mais c'est une question de
règlement...
Le Président (M. Cardinal): Ecoutez. Je ne voudrais pas
prendre la place des députés. S'il y a une question de
privilège, vous savez que vous devrez donner un avis avant lundi
après-midi, 14 heures.
M. Ciaccia: ...mon intention, mais le député de
Saint-Jacques m'impute des motifs que je n'ai pas... Il m'a imputé des
paroles que je n'ai pas dites.
M. Charron: Mes propos n'ont rien d'irrégulier. Le
député intervient abondamment.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je reconnais vos
droits, M. le député, mais je ne veux pas intervenir...
M. Ciaccia: Quand on défend les minorités, on se
fait accuser d'être contre la majorité. Je regrette, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre, s'il
vous plaît! Il y a une façon de le faire. Je viens de l'indiquer
et je ne veux pas qu'il y ait un débat sur les affirmations d'un
député en commission parlementaire.
M. Charron: Tout ce que j'ai affirmé est que je n'aime
autant pas assister j'ai le droit de dire que je n'aime autant pas
assister aux rencontres que le député de Mont-Royal peut
avoir avec des citoyens de langue anglaise du Québec par le temps qui
court, non pas parce que je suis indépendantiste, mais parce que je suis
démocrate.
M. Raynauld: ...imputer des motifs.
M. Ciaccia: Oui, cela s'appelle imputer des motifs.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Charron: Je n'impute pas de motifs à ces propos. Vous
pouvez m'en imputer, si vous le voulez.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Tous ceux qui auront des questions de privilège donneront
un avis avant 14 heures, lundi.
M. le député de Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, l'amendement de Mme le
député de L'Acadie a tous les caractères que lui a
donnés tout à l'heure le ministre d'Etat au développement
culturel, et est même beaucoup plus généreux dans un sens.
Le texte de l'article 69 du projet de loi 101, tel quel, a peut-être
beaucoup plus d'effet que l'amendement et couvre peut-être beaucoup plus
de gens que l'amendement de Mme le député. Je pense que si nous
devions adopter le critère de la Communauté anglophone du
Québec, non seulement devrions-nous recourir à quelques "tests",
le mot ne peut pas être mieux choisi, à quelques critères
objectifs.
Prenons le cas qui occupe les journaux de ce temps-ci, le cas d'un pays
privé de son chef d'Etat soudainement, qui abrite, comme on le sait,
deux communautés sans doute beaucoup plus en guerre que ne peuvent
être les communautés du Québec. Si je vous demandais,
demain matin et la question a sans doute déjà
été posée dans ce pays d'identifier à Chypre
la communauté turque et la communauté grecque, comment le
feriez-vous? Sur la base de la langue maternelle, très probablement,
tellement ces deux langues ont des différences. Comment
vérifieriez-vous la langue maternelle de chacun? Sur une simple
déclaration? Par un test? Par une entrevue?
Nous avons dit: La communauté anglophone du Québec est
celle qui est de langue maternelle anglaise, donc qui a probablement
été à l'école anglaise. Et, en ajoutant le
critère que les parents aient été à l'école
anglaise, nous incluons même, madame, des gens qui ne seraient pas inclus
dans votre critère basé sur la langue maternelle pour
définir la communauté anglophone, parce qu'il y a eu des
francophones qui sont allés à l'école anglaise primaire,
75 000 francophones, qui, en vertu de cette loi, et je le dis à regret
obtiennent le droit inaliénable d'inscrire leurs enfants à
l'école anglaise.
C'est dur, parce que je ne comprends pas comment un francophone peut
mettre ses enfants à l'école anglaise. Il y en a qui l'ont fait.
Par respect pour ces gens, parce qu'on les estime désormais par un choix
que leurs parents ont fait ou qu'ils ont fait eux-mêmes, peu importe, il
ne s'agit pas d'écorcher les gens, nous les estimons membres de la
communauté anglophone maintenant, assimilés très
probablement, parce que nous nous disons: Un jeune francophone qui est
entré à l'école anglaise à six ans, qui a fait tout
son primaire, tout son secondaire et éventuellement son
université en anglais, doit sans doute encore parler français, le
milieu l'y aide, mais il est sans doute d'esprit membre de la communauté
anglophone.
Si nous adoptions votre amendement, madame, ce membre d'esprit de la
communauté anglophone n'aurait pas le droit d'y aller. Or, nous lui
accordons ce droit d'y aller. Nous respectons plus la communauté
anglophone du fait que nous disons même à un immigrant qui
n'aurait pas été à l'école anglaise, ici ou
ailleurs, mais qui aurait déjà un seul enfant à
l'école anglaise, le droit d'y inscrire tous les autres qu'il aura. Nous
les reconnaissons déjà membres de la communauté
anglophone.
Si nous nous basons sur le seul critère de la langue maternelle,
cet immigrant n'aurait pas, madame, le droit d'y aller. Voilà donc que,
dans un effort rationnel pour le rendre administrable et par respect pour la
communauté anglophone du Québec, citoyen à part
entière du Québec, nous nous sommes dit que le meilleur
critère pour respecter le plus de gens possible membres de cette
communauté, était de se dire que quelqu'un qui a passé six
ans à l'intérieur de l'école primaire a déjà
exprimé un choix d'appartenir à cette communauté, nous le
respectons. Nous ne lui demandons même plus de parler l'anglais
aujourd'hui. Le député s'en rend-il compte?
Certains francophones, dans des provinces, vont à l'école
française et perdent leur français par la suite. Ils sont
pourtant de langue maternelle française. Imaginons, aujourd'hui, qu'ici
un anglophone de Montréal aurait été à
l'école primaire anglaise et, par la suite, se serait marié
à une francophone, aurait vécu dans un milieu francophone, et en
serait venu à perdre son anglais, comme il arrive si tragiquement
à certains d'entre nous dans d'autres minorités.
L'hypothèse est presque fantaisiste au Québec, pour une
minorité en voie d'extinction, c'est assez curieux. Mais disons que
cette hypothèse se réaliserait, qu'un anglophone en vienne
à perdre son anglais au Québec, qu'il
deviendrait de langue courante française, il conserverait le
droit d'inscrire son enfant à l'école anglaise demain matin, ce
que les francophones n'ont plus.
Quand on dit qu'on abolit le libre choix, c'est le contraire, nous
réservons à la communauté anglophone du Québec le
libre choix. C'est aux francophones que nous le retirons. Mais il n'est
aucunement interdit à un Anglais du Québec d'inscrire ses enfants
ou à l'école française ou à l'école
anglaise, le lendemain de ce projet de loi. Que l'on ne me dise pas qu'on est
en train de réduire les droits de la communauté anglophone, nous
lui en laissons plus que la majorité de ce pays ne s'en garde.
Voilà donc ce que c'est que de travailler à l'extinction,
à la mort lente et à la disparition d'une minorité
anglaise, quand on inscrit dans une loi de Charte de la langue française
autant de dérogations possibles pour être certains, dans les
paragraphes a), b), c), d), de rejoindre tous ceux que le passé et le
présent ont fait, et même le futur, puisque ces droits deviendront
inaliénables et qu'il suffira d'avoir passé six ans à
l'école anglaise pour obtenir l'autorisation d'y inscrire ses enfants en
1990, et ceux de 1990, de les y inscrire en 2020.
Cela ne présuppose en rien la disparition des media d'information
qui alimentent le réseau de télévision qui alimentent le
Québec abondamment. Il y a plus de postes de langue anglaise dans la
deuxième ville française au monde qu'il n'y en a en
français. Cette loi n'éteint aucun de ces postes de radio. Elle
vous permettra de retourner à CFCF pour combattre cette loi de la
façon dont vous l'aviez fait au sujet de la loi 22. Rien n'est interdit
là-dedans. La communauté anglophone... Ce pourquoi je m'oppose
à l'amendement de Mme le député, c'est qu'il est
restrictif à l'égard de la communauté, en la restreignant
à la base de la langue maternelle.
Nous disons par cet amendement qu'il suffit presque d'avoir
flirté à un moment avec la culture anglaise et à
Montréal il est difficile d'y échapper. Il suffit même
d'avoir exprimé soit par une inscription scolaire, soit par une
préférence dans un mariage... Il suffit à peine d'avoir
été approché par la communauté anglaise pour
obtenir tous ces droits. Que l'on viennede la Grèce, de l'Italie, du
Pakistan ou de l'Ontario, il est écrit, en vertu de cette loi, que cette
communauté a non seulement ses droits conservés, mais le pouvoir
de les agrandir et de continuer à vivre avec les autres
Québécois.
Je vous dis seulement, et j'espère que le député
suit attentivement les réponses que le premier ministre attend de ses
autres collègues, que si les minorités françaises des
autres provinces avaient eu, comme le disait le chef de l'Etat, la
moitié du début du commencement d'un pareil traitement, ils ne se
plaindraient pas actuellement. On ne serait pas obligé d'être en
train de négocier un minimum de respect à leur égard,
comparativement à ce qu'on est capable d'offrir.
Je donne donc mon opinion et la raison pour laquelle je m'opposerai
à l'amendement de Mme le député, en rappelant, pour la
dernière fois, j'es- père, mais je sais qu'il interviendra
abondamment encore dans les "tributaires" du député. Qu'il ne se
surprenne pas d'être interrompu, quand il s'adresse à nous de
cette façon, quand il veut comme attiseur je ne dis pas
fanatique, mais les fanatiques se nourrissent souvent à des sources
honorables de la hargne que l'on essaie de développer
actuellement, non pas uniquement à l'égard d'une loi, mais
à l'égard d'un choix démocratique d'une population qui
date à peine de huit mois, cette espèce de volonté de
présenter le gouvernement élu par la majorité des
Québécois comme un gouvernement illégitime presque. C'est
l'oeuvre à laquelle travaille actuellement un bon nombre d'artisans de
la minorité anglophone dont est loin de se dissocier le
député de Mont-Royal. Qu'il ne se surprenne pas que, comme
francophone il doit j'espère, à l'occasion le sentir
jusqu'au coeur du Parti libéral, s'il y a encore place pour de la
dignité et de la fierté dans ce parti... Mais il doit savoir que,
comme francophone, je le dis, quelle que soit l'appartenance politique autour
de la table, ses propos sont souvent durs à digérer.
M. Ciaccia: J'invoque l'article 96.
Le Président (M. Cardinal): Le député de
Mont-Royal, sur une question de règlement.
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le Président.
J'espère que vous me permettrez ces quelques courtes paroles. Je vais
m'en tenir aux termes de l'article 96.
Je n'irai pas plus loin, quoique plusieurs des propos du
député de Saint-Jacques demanderaient que je lui réponde
un peu plus sur ce qu'il a dit. Il m'a accusé d'avoir utilisé des
mots comme "assassinat". C'est au sujet du discours que j'ai prononcé.
Quant à la question du mot "assassinat", je donne des explications
d'après l'article 96. Vu l'importance de ce dont on vient de traiter, M.
le Président, j'espère que vous m'accorderez le droit de parole
selon l'article 96. Il a dit que j'ai renié...
M. Charron: M. le Président, je retire le mot
"assassinat". Le député ne l'a pas employé; il a
employé le mot "extinction". Vous en jugerez par vous-même.
M. Ciaccia: Vous avez dit que j'avais renié mon chef, ce
que je n'ai jamais fait.
M. Charron: Le coq va chanter.
M. Ciaccia: Non, j'ai dit... Si vous relisez...
M. Charron: Le coq va chanter!
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Un instant! J'ai dit que cette loi avait causé
ce qui lui est arrivé et que cela va cau-
ser la même chose à votre parti. Je n'ai pas renié
mon chef. J'aurais pu laisser le Parti libéral et je ne l'ai pas
fait.
Vous m'avez accusé d'avoir participé à des
émissions de CFCF; je n'y ai jamais participé. Je me suis
prononcé contre cela. Ce n'est pas tout à fait honnête, M.
le député.
M. Charron: C'est votre autre collègue, je m'excuse.
M. Ciaccia: Oui. Quand vous dites que vous aimeriez assister
à des rencontres que j'ai, j'aimerais que vous y assistiez. J'aimerais
aussi que vous soyez là quand je vais dans d'autres provinces du Canada
pour entendre ce que je leur dis, de quelle façon je défends le
Québec. Cela me fait mal au coeur; vous ne me connaissez pas.
M. Charron: J'ai lu votre discours à Niagara Falls et je
vous assure que c'était loin d'être...
M. Ciaccia: Non, vous ne l'avez pas lu.
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Ciaccia: Non, vous ne l'avez pas lu, mais je vais vous en
envoyer une copie. Vous avez lu quelques extraits de journalistes qui
favorisent le Parti québécois et qui ont pris quatre mots de ce
discours. Je vais vous l'envoyer, M. le député. Cela me fait mal
au coeur quand n'importe quelle minorité, qu'elle soit francophone,
anglophone, italienne ou d'une autre ethnie, se fait traiter de cette
façon. C'est pour cela que je me prononce. Je défends les
francophones, malgré ce que vous dites. Je voudrais que vous assistiez
aux discours et aux rencontres que j'ai dans mon propre comté. Je
voudrais que vous relisiez mes propos sur le bill 22, en 1974, et vous allez
voir. C'est regrettable que vous ayez pris de cette façon mon
intervention sur certains principes fondamentaux.
M. le Président, je vais arrêter à ce moment-ci.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, vous vous êtes
tenu dans les limites de l'article 96. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Bien brièvement, afin qu'on puisse
procéder au vote immédiatement après, s'il y a lieu.
Ensuite, c'est l'amendement proposé par l'Union Nationale qui viendra.
La proposition faite par le Parti libéral, il est sûr que je ne
l'affublerai pas, comme l'a fait le ministre d'Etat au développement
culturel, de toutes les épithètes dont il s'est servi tout
à l'heure et qui sont, à mon sens, assez justifiées
puisque l'amendement est large et difficile à comprendre, encore plus
difficile à résumer.
Je comprends la position du Parti libéral actuellement.
Après avoir entendu la position du gouvernement, qui s'est
exprimée par la loi 101, et la position de l'Union Nationale,
exprimée dans notre livre bleu, tenant compte également du bill
22, les corridors se rétrécissent, bien sûr, et, pour en
arriver à des amendements, il faut les faire plus larges et sortir un
peu des amendements trop précis pour pouvoir couvrir toutes les
positions.
Je trouve que cette motion couvrirait chacun des articles a), b), c) et
d). Il me semble qu'on devrait procéder un par un, en y apportant
ensuite les amendements. Ce sera le cas pour l'Union Nationale dans au moins
trois des quatre. On pourrait présenter un amendement, le discuter et
l'ajuster ensuite à chacun des articles que nous avons là. Il est
difficile, je pense, de déterminer cela semble difficile puisque
le député de Sauvé a posé la question au
représentant du Parti libéral tout à l'heure; M. Biron l'a
lui-même posée à deux reprises l'appartenance
à la communauté anglophone. Je ne sais pas encore, on n'a pas eu
de détermination là-dessus. J'aurais aimé que le Parti
libéral, avec son amendement, dépose en même temps un
document qui nous aurait démontré sur quoi il voulait se baser,
comment il définissait la communauté anglophone et cette
appartenance à la communauté anglophone.
On aurait pu s'attendre à une proposition de ce genre et à
un document qui aurait pu nous l'expliciter. Si on l'avait eu cela aurait
peut-être eu tendance à nous rendre plus compréhensifs
envers cette proposition. Mais, dans le contexte actuel, je vois mal qu'on
puisse appuyer une proposition de ce genre, qui est à mon sens plus
large encore que tout ce dont on a parlé avant, de tests, d'entrevues.
D'autres ont la position de pas de test et pas d'entrevue. On a même le
libre choix dans tout cela.
Si on accepte une motion aussi large que cela, je me demande comment on
va réussir à trouver l'appartenance à cette
communauté anglophone.
Quant à l'Union Nationale, notre livre bleu s'est basé sur
le projet de loi qui était déposé. Quand on n'est pas le
gouvernement, on ne s'attend pas de gagner sur tous les points, non plus que
sur 50% des points, on s'attend d'en gagner quelques-uns. En tenant compte de
cela, notre livre bleu s'est basé sur cet article de loi. On a
proposé des amendements, comme l'a dit tout à l'heure le chef de
l'Union Nationale, cela semble un critère assez équilibré
et qui peut susciter, je pense bien, pas mal moins de problèmes que les
tests qu'on avait avec la loi 22. Cela ne résolvera pas tous les
problèmes, c'est sûr, et il y aura quand même des anomalies
et des cas qui vont sortir de cette loi qui seront obligés d'être
traités un à un. Mais je pense que cette proposition, cette
formule nous plaît avec les amendements qu'on y apportera. On les
déposera sur cette table et personnellement l'amendement qui sera
déposé pour nous au paragraphe a), je m'en ferai un virulent
défenseur. On verra si le gouvernement peut céder des choses
même si cela n'apparaît pas dans les règlements qui nous ont
été déposés hier.
Mais, logiquement, comme Opposition constructive, si on se base sur cet
article 69, sans vouloir trouver des choses originales et un amendement qui est
aussi large que celui-là seulement
pour le plaisir de trouver un amendement qui sort de l'ordinaire, je
pense qu'on peut régler pas mal de problèmes. Si cela ne nous
convient pas après que nos amendements auront été bien
défendus, encore une fois, ce n'est pas nous comme parti d'Opposition
qui en porterons l'odieux, ce sera le gouvernement. C'est notre façon de
travailler et c'est comme cela qu'on va procéder immédiatement
après, si c'est la fin de cette étude de motion d'amendement.
C'est comme cela qu'on va procéder en expliquant brièvement, avec
tous les commentaires que cela justifie, chacun de ces articles et ensuite on
passera au vote. Je pense que c'est une façon de travailler avec le
gouvernement et de démontrer notre appui.
M. le Président, l'esprit est là et on reconnaît que
ce qui est apporté par le Parti libéral n'est pas farfelu, loin
de là, excepté que cela manque de précision. Je pense
qu'on serait plus mal "poigné" avec un amendement de ce genre que de
revenir à ce qui existait avant. C'est comme cela qu'on devra
procéder, article par article, tout à l'heure avec les a) b) c)
et d) et en proposant les amendements sur chacun de ceux-là. En
attendant, un peu malgré nous, on devra quand même voter contre
cet amendement présenté par la députation
libérale.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Mégantic-Compton.
On me permettra très brièvement tout de suite d'indiquer
la marche du débat. Lorsque cet amendement aura été soit
accepté, soit défait, nous reprendrons l'alinéa a) de
l'article 69 et ce sera au tour de l'Union Nationale. Sur ce, je dois indiquer
qu'il y a encore devant moi, au moins, la demande de deux opinants, et je donne
la parole à M. le député de Taschereau.
M. Guay: M. le Président, après des jours, des
semaines, des mois d'hésitation, de tergiversation, de contradiction
dont les journaux nous ont fait abondamment part, voici donc que le Parti
libéral nous énonce sa nouvelle politique dans le domaine de la
langue d'enseignement.
Cette synthèse que veut être l'amendement de Mme le
député de L'Acadie est tout naturellement un chef-d'oeuvre
d'imprécision, et comment en serait-il autrement du reste, quand il
s'agit de concilier l'inconciliable, de réunir en une même
position les idées du député de L'Acadie et en même
temps du député de Westmount, du député de
Montmagny et du député de Mont-Royal, du député de
Charlevoix et du député de Jacques-Cartier? Bref, comment
aurait-on pu, effectivement, en arriver à une position qui rassemblerait
les 26 positions individuelles de ce conglomérat d'intérêts
particuliers qu'est ce qu'il reste du Parti libéral du
Québec?
Aussi bien, M. le Président, cet amendement ne veut-il absolument
rien dire, puisqu'en effet, ce qu'on nous propose, c'est essentiellement,
malgré les négations à cet effet, le fameux libre choix
scolaire. Bien sûr, dans la meilleure tradition du Parti libéral,
depuis six à huit ans, on l'a maquillé; on l'a poudré, on
l'a coiffé autrement, si bien que l'on appelle cela maintenant la
communauté anglo- phone. Mais, à vrai dire, il est évident
qu'il s'agit là du libre choix et, pour paraphraser un slogan
publicitaire, il s'agit même du libre choix à l'ancienne servi
à la moderne.
Le député de Marguerite-Bourgeoys essaie de nous faire
dire et de nous faire croire que cette position est toute naturelle, qu'il
s'agit de faire confiance à la population, qu'en fait, le libre choix,
cela n'a rien de malicieux, que c'est dans la nature des choses. Si tel
était le cas, M. le Président, on doit se demander
sérieusement comment il se fait qu'alors qu'il était membre du
gouvernement précédent, ce même gouvernement a
décidé d'intervenir dans le domaine de la langue et notamment de
la langue d'enseignement pour mettre fin, précisément, au libre
choix que consacrait la loi 63. Si la loi 63 et si le libre choix
étaient si peu dangereux pour la majorité francophone du
Québec, on doit se demander, en effet, pourquoi lui et le gouvernement
dont il faisait partie sont intervenus à ce sujet.
Il est évident que la position actuelle du Parti libéral
constitue un net recul par rapport à sa position déjà fort
timide du passé. Afin de justifier la position de son parti,
l'inénarrable verbo-moteur qu'est le député de Mont-Royal
nous cite abondamment ce qui semble être devenu désormais son
livre de chevet, peut-être par insomnie, la constitution de la
République socialiste de Tchécoslovaquie, pour nous montrer qu'en
Tchécoslovaquie les droits culturels sont abondamment garantis par la
constitution. Il faudrait d'abord qu'il y ait un peu plus de
cohérence.
Hier, au moment où nous étudiions les articles 2 à
6, si ma mémoire est bonne, on nous a accusés, à tort, de
vouloir, par ces articles, amorcer le début de la constitution de la
république du Québec, ce qui était évidemment faux,
mais, d'une part, on nous dit que des articles de la Charte de la langue
française se veulent un début de constitution et, d'autre part,
on voudrait voir inscrire dans une loi qui n'est pas une constitution des
garanties qui sont d'ordre constitutionnel, comme le texte fondamental de la
République tchécoslovaque le démontre.
Un bel exemple, en vérité que celui de
Tchécoslovaquie. Après l'exemple que nous a donné le
député de Laval, en Chambre, l'autre soir, en invoquant ce
merveilleux pays qu'est la Rhodésie, voici qu'on nous donne la
Tchécoslovaquie en exemple. Il serait peut-être de bon aloi
qu'au-delà de la constitution de la Tchécoslovaquie, on se penche
un peu sur la triste réalité qui prévaut dans ce pays
depuis le retour à l'orthodoxie en 1968 et que l'on regarde un peu ce
que les intellectuels qui ont écrit la charte de 1977 pensent de
l'épanouissement culturel en Tchécoslovaquie.
Un certain nombre d'entre eux risquent fort d'y être
emprisonnés prochainement pour avoir voulu profiter des dispositions de
la constitution tchécoslovaque, et c'est cette constitution qu'on nous
cite maintenant abondamment pour soutenir les arguments du Parti libéral
en la matière.
En vérité, M. le Président, la position du Parti
libéral apparaît être, elle aussi, un retour à
l'orthodoxie, à l'orthodoxie libérale fédérale,
à I'ortho-
doxie du "Liberal Party of Canada", dirigé par M. Pierre Trudeau.
En comparaison, pour utiliser un langage que le député de
Mont-Royal comprendra sans doute, puisqu'il évoque la
Tchécoslovaquie, la loi 22 était du révisionnisme, du
déviationnisme, à la rigueur. Mais voilà qu'enfin le Parti
libéral du Québec, pour ce qu'il en reste, revient à une
saine orthodoxie libérale fédérale et ce faisant, M. le
Président, il nous démontre ce que le député de
Saint-Jacques annonçait fort éloquemment hier soir dans son
remarquable discours, lorsqu'il disait que le débat sur la langue de
l'enseignement nous démontrerait quels sont les intérêts
qui sous-tendent le Parti libéral, quels sont les intérêts
que défend cette formation politique. Eh bien! nous le savons avec cet
amendement. Ce sont les intérêts de la majorité
économique du Québec, qui est en même temps la
majorité "Canadian" dans ce vaste pays qu'il veut maintenir, coûte
que coûte.
Ce faisant, le Parti libéral du Québec nous
démontre qu'en fait il n'existe plus comme tel depuis le 15 novembre et
qu'il est devenu, tout simplement, une succursale du Parti libéral du
Canada et de l'orthodoxie fédéraliste de M. Trudeau.
Dans ces circonstances, M. le Président, compte tenu de l'aspect
à tout le moins vague, imprécis de l'amendement de Mme le
député de L'Acadie, qui ouvre la porte à un arbitraire
pire que celui de la loi 22, qui ouvre la porte aux pouvoirs assimilateurs du
libre choix qu'on a connus de 1969 à 1974, compte tenu de ce recul en
arrière honteux, de la part d'un parti qui siège à
l'Assemblée nationale du Québec, compte tenu de cette rupture
avec la constante historique, la marche en avant du peuple
québécois vers son destin, pour toutes ces raisons, M. le
Président, j'ai l'intention de voter contre cet amendement.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie. Mais je vous ai déjà indiqué,
confidentiellement, qu'il vous restait deux minutes.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président.
Je n'ai jamais entendu autant de sophismes autour d'une table. Tout
à coup, chacun d'entre nous ne sait pas s'il appartient à la
communauté francophone ou anglophone. C'est assez étonnant. Ce
que le gouvernement a choisi de faire, c'est de prendre le critère le
plus facile, mais non équitable et qui ne respecte pas la
réalité sociologique et historique de cette province. Cela le
regarde. Mais, quand on essaie de laisser entendre qu'il s'agit d'un libre
choix, vous savez fort bien, M. le député de Taschereau, que,
quand on parle de quelqu'un qui appartient à la communauté
anglophone et qu'on le définit, d'abord et avant tout, comme quelqu'un
de langue maternelle anglaise et de culture anglaise et de ceux qui se sont
associés à cette culture et qui, par conséquent,
participent à cette même langue dans sa totalité, il ne
s'agit pas d'un libre choix, et je tiens à le dire.
Maintenant, c'est de bonne guerre pour le gouvernement de brandir, d'un
côté, les tests, alors qu'il n'en a jamais été
question. On sait que cette perception chez les anglophones ou, enfin, la
communauté anglophone, crée de l'anxiété. De
l'autre côté, on brandit le libre choix, alors qu'également
on sait que, comme collectivité ou majorité, les francophones ne
veulent pas du libre choix, quoique, individuellement, si on le leur demandait,
ce serait peut-être une autre chose. Alors il ne s'agit ni de l'un, ni de
l'autre. Ce que le gouvernement refuse de faire, c'est ce que des organismes,
comme le Conseil supérieur de l'éducation, comme le Conseil
scolaire de l'île de Montréal, comme le Conseil des
évêques, comme la CEQ, même, ont dit, l'école
anglaise doit être aux véritables anglophones et non pas l'ouvrir
comme pour, tout à coup, masquer la réalité et montrer la
générosité du gouvernement, qu'elle soit ouverte aux
Grecs, aux Ukrainiens et aux gens qui arriveront à l'école
anglaise sans même parler l'anglais, et c'est ça, la
réalité. C'est ça qu'on refuse de faire, et c'est pour
ça que de ce critère, on n'en parle pas et qu'on attaque la
position du Parti libéral qui, au niveau des principes, est
inattaquable, alors que celle du gouvernement est pleine de trous et de failles
et un avenir prochain vous le prouvera!
Le Président (M. Bertrand): Merci, Mme le
député de L'Acadie.
M. Morin (Sauvé): On verra bien. Vote sur la
motion
Le Président (M. Cardinal): Remarquez que ceci n'est pas
une réplique. Il n'y en a pas en commission parlementaire, mais
cependant, il est d'usage de permettre au parrain de la motion de terminer. Je
considère que je puis mettre aux voix cette motion.
Est-ce que je fais l'appel nominal? D'accord.
Alors, la motion que nous étudions, si les gens s'en rappellent,
est une motion d'amendement à l'article 69, alinéa a). Je pense
que je n'ai pas besoin de relire. Il s'agissait tout simplement d'ajouter: ...
que les enfants appartenant à la communauté anglophone seraient
compris dans les dispositions de l'article.
Alors, on m'indiquera si on est pour ou contre la motion.
M. le député de Saint-Maurice n'est pas ici. M. le
député de Vanier.
M. Bertrand: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Verchères.
M. Charbonneau: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Bourassa. Il n'est pas présent. M. le député de
Bourget.
M. Laurin: Contre.
Le Président (M. Cardinal): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sauvé.
M. Morin (Sauvé): Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Beauce-Sud n'est pas présent. M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Rouyn-Noranda n'est pas présent.
La motion d'amendement est rejetée. Oui, M. le
député de Sauvé.
M. Morin (Sauvé): Je demande la parole, M. le
Président...
Le Président (M. Cardinal): A quel sujet?
M. Morin (Sauvé): ... si vous voulez bien me la
donner.
Le Président (M. Cardinal): Sûrement.
M. Morin (Sauvé): Puisque maintenant que Mme le
député a soumis un amendement, lequel a été
défait, je voudrais vous demander la permission de déposer un
amendement également qui est plus un amendement qu'autre chose.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, M. le
député de Sauvé. Je ne sais pas si vous m'avez entendu
tantôt. Vous avez eu la motion principale déposée par M. le
député de Bourget, la motion d'amendement déposée
par Mme le député de L'Acadie et, selon une tradition
immémoriale, je m'en remets aux mains de l'Union Nationale.
M. Morin (Sauvé): Je me range à votre
décision.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Lotbinière.
M. Biron: Peut être avons-nous le même amendement, M.
le ministre.
M. Morin (Sauvé): Je ne voudrais pas préjuger,
mais... Allez-y. Allez-y.
Motion d'amendement M. Rodrigue Biron
M. Biron: Je voudrais proposer une motion d'amendement qui se
lirait comme suit: "Que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en
ajoutant, dans la deuxième ligne, après le mot "... primaire..."
les mots suivants: "... ou secondaire."
Le Président (M. Cardinal): Un instant, si vous permettez,
M. le député de Lotbinière. Vous avez eu
l'amabilité de me donner tout de suite le texte de votre amendement. Il
n'y aura pas de problème sur votre droit de parole, mais pour les
membres de la commission, on va attendre que le texte soit distribué. Je
vais le relire, non pas parce que vous n'avez pas une belle voix et qu'on ne
vous a pas bien entendu, mais tout simplement pour que la présidence
prenne connaissance de l'amendement.
C'est un amendement à l'article 69. "Que le paragraphe a) soit
modifié en ajoutant, à la deuxième ligne, après le
mot "... primaire ..." les mots suivants: "... ou secondaire "
Je dois d'abord décider de la recevabilité de la motion,
je ne me ferai pas informer. Je la déclare immédiatement
recevable, en vertu de l'article 70, et je vous cède la parole, M. le
député de Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, par cet amendement, nous
voulons reconnaître le paragraphe ou
l'alinéa tel que présenté par le gouvernement
à l'accession à l'école anglaise pour les enfants dont le
père et la mère ont reçu au Québec l'enseignement
primaire en anglais.
Mais, ici, avec l'amendement, nous voulons couvrir certains cas bien
spécifiques de gens qui, par exception, n'ont pas reçu
l'enseignement primaire en anglais au Québec mais qui font
réellement partie de la communauté anglophone. Il y a des enfants
qui sont arrivés au Québec à l'âge scolaire, mais
qui, au secondaire, étaient intégrés, naturellement,
à l'époque, à l'école anglaise et qui, aujourd'hui,
font véritablement partie de la communauté anglophone. Ils ont pu
arriver ici vers l'âge...
Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce que c'est?
Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous
plaît! Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Ne faites pas comme ces
gentilshommes.
M. Biron: Je vais vous expliquer, Mme le député de
L'Acadie, comment faire maintenant pour définir ceux à qui nous
voulons permettre d'aller à l'école anglaise? Ces enfants ont
véritablement, à notre point de vue, droit d'aller à
l'école anglaise. Il y a aussi le deuxième cas, il y a deux cas
bien particuliers, le deuxième cas qui arrive surtout dans nos petites
paroisses, dans les Cantons de l'Est, ou en Gaspésie, en particulier,
où on a très peu d'enfants anglophones d'âge scolaire. Les
parents ont dû les envoyer à l'école française au
primaire et, lorsqu'ils arrivent au secondaire, déjà les
écoles sont un peu plus loin, mais ils peuvent bénéficier
d'écoles secondaires anglaises, dans la région de Sherbrooke, en
particulier, ou dans la région de Gaspé. A notre avis, ces gens
aussi devraient avoir le droit d'aller à l'école anglaise.
Si on accepte cette motion d'amendement telle quelle, j'ai l'impression
qu'on va même empêcher certains transferts qui se feront
peut-être en septembre de l'école française à
l'école anglaise, pour parents qui vont vouloir assurer à leurs
enfants le droit, pour eux et pour les descendants de leurs enfants, d'aller
à l'école anglaise éventuellement. En plus, on va
encourager peut-être les parents anglophones à envoyer leurs
enfants à l'école primaire française, quitte à les
en sortir par après pour les envoyer à l'école anglaise
secondaire. Ces anglophones deviendront véritablement des gens qui vont
vivre en français beaucoup plus facilement s'ils peuvent envoyer leurs
enfants à l'école primaire française.
Cela ne touche peut-être pas beaucoup de Québécois,
quelques centaines, peut-être quelques milliers, mais ce sont des cas
bien spécifiques que nous voulons couvrir par cette motion d'amendement,
des cas spécifiques qui ont été oubliés
certainement, mais pas par mauvaise vo- lonté de la part du
gouvernement, des cas spécifiques qui nous ont été
référés, à nous personnellement, par nos
députés. J'ai avec moi le député de
Mégantic-Compton, qui nous a parlé de cas bien spécifiques
dans son comté. Le député de Gaspé m'a parlé
de quelques cas bien spécifiques dans son comté.
M. le Président, j'ai voulu brièvement présenter ma
motion. J'ai l'impression qu'elle sera acceptée avec l'ajournement de ce
soir, mais je voudrais que le gouvernement nous dise véritablement ce
qu'il pense de ces deux cas spécifiques. C'est dans cette ferme
intention que j'ai présenté cette motion.
En terminant, je suis convaincu que les véritables anglophones
qui ont étudié à l'école secondaire anglaise au
Québec devraient avoir le droit, pour eux et leurs descendants, au libre
choix de l'école anglaise ou de choisir, s'ils le veulent aussi,
l'école française.
Le Président (M. Bertrand): M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
M. Laurin: M. le Président, malgré tout le regret
que j'en éprouve, nous voterons contre cet amendement. Nous avions
étudié cette possibilité, lors de l'étude qui a
précédé l'adoption de ce critère, comme vient de le
dire le chef de l'Union Nationale. Il reste que ceci s'applique à un
très petit nombre d'individus et ce à quoi le critère
à la recherche duquel nous étions était quand même
un critère général. Comme nous l'avons dit, c'est le moins
mauvais que nous avons choisi, sans avoir la prétention de croire que
c'était un critère parfait. Il est difficile d'édifier un
critère à partir des exceptions. Lorsque nous cherchons un
critère, nous cherchons celui qui s'applique au plus grand nombre de
cas, de façon qu'il soit le plus juste possible. Ceci, pour expliquer la
méthodologie que nous avons suivie.
Par ailleurs, il est peut-être vrai qu'il est certains enfants
anglophones qui n'ont pu aller à l'école primaire anglaise, parce
que le système scolaire québécois ne leur offrait pas la
possibilité de ces classes anglaises. Nous avons fait une enquête
à ce sujet, et il semble que le cas soit extrêmement rare, parce
que, même dans les régions où le nombre
d'élèves de langue anglaise est très limité, dans
la plupart de ces régions, pour ne pas dire toutes et le ministre
de l'Education me confirmera ou m'infirmera cela le gouvernement du
Québec met à la disposition de ces élèves de langue
anglaise, sinon des écoles anglaises, du moins des classes anglaises
qui, bien sûr, peuvent parfois être situées à
l'intérieur de l'école française. Mais ces
élèves de langue anglaise peuvent suivre un enseignement en
anglais à l'intérieur de classes anglaises,
bénéficier du transport scolaire, bénéficier
également d'enseignants dans leur langue et bénéficier de
tous les autres avantages que procure l'enseignement en langue anglaise tel que
défini par le ministère.
Notre raison fondamentale est plus profonde que celle-là.
Malgré ce qui a été dit autour de cette
table, nous avons la certitude que le critère que nous avons
choisi est quand même celui qui se rapproche le plus possible du
critère d'appartenance à la communauté anglophone ou
à celui du critère de langue maternelle anglaise. Cette
appartenance ne se définit pas in abstracto, elle se définit par
des gestes que posent les gens.
Il nous semble que le premier geste que pose quelqu'un qui veut
appartenir à la communauté culturelle anglaise, c'est bien
d'envoyer son enfant à l'école primaire. C'est la raison pour
laquelle nous retrouvons à l'école primaire les enfants de ceux
qui sont des anglophones d'origine, qui appartiennent aux groupes ethniques
communément considérés comme anglophones, soit les
Ecossais, les Irlandais, les Anglais d'Angleterre ou de la communauté
anglophone mondiale ou américaine. Nous retrouvons aussi dans les
écoles anglaises les gens qui, dans l'histoire du Québec, pour
toutes sortes de raisons occupationnelles, économiques ou autres ont
opté pour la communauté culturelle anglaise. Ceux-ci,
évidemment, envoient leurs enfants à l'école anglaise,
quelle que soit l'origine ethnique à laquelle ils appartiennent.
Il est donc évident que dans l'école anglaise se
retrouvent ceux qui appartiennent d'une façon immémoriale
à la communauté anglaise et ceux aussi qui, au Québec, ont
choisi cette communauté et qui l'ont prouvé, justement, par le
geste le plus naturel, le plus normal, le geste premier qui consiste à
envoyer son enfant à l'école anglaise. Donc, si nous avons mis le
mot "primaire" dans le premier paragraphe a), c'est précisément
parce que ce mot "primaire" suffisait pour montrer l'appartenance d'un enfant
ou de sa famille à une communauté bien distincte.
Si par ailleurs nous ajoutions "secondaire", nous élargirions,
d'une façon qui nous semble excessive, le critère. Parce que nous
savons très bien que, dans bien des cas, particulièrement au
Québec, en raison de facteurs historiques, il arrive très souvent
que, sans aucun égard à l'appartenance francophone, italophone ou
anglophone d'une famille, on décide, pour des raisons de
commodité ou d'acquisition d'une autre langue, soit le français,
soit l'anglais, selon le cas, on décide d'envoyer son enfant, ou
l'enfant décide lui-même d'y aller, dans une école
différente de celle où il a fait ses études primaires.
C'est le cas pour un très grand nombre de francophones en particulier.
Les statistiques que nous avons consultées montrent que le nombre
d'élèves francophones, par exemple, aux écoles secondaires
est proportionnellement plus élevé que celui qui se rend aux
écoles primaires. La proportion est encore plus grande lorsqu'il s'agit
des collèges, et encore plus grande, lorsqu'il s'agit des
universités.
Par exemple, nous savons que, l'an dernier, il y avait 34%
d'élèves francophones à l'Université McGill. Quand
on s'éloigne du primaire, on s'éloigne de l'esprit qui a
présidé au choix de ce critère et on se retrouve dans une
situation qui peut être expliquée par des facteurs historiques.
Donc le critère, à ce moment, deviendrait beaucoup moins strict,
beaucoup moins rigoureux, beaucoup moins fondé, aussi, par rapport aux
principes qui ont présidé à l'élaboration de notre
politique.
C'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que nous avons,
après y avoir pensé, éliminé
l'épi-thète "secondaire" dans le paragraphe a) qui est
actuellement à l'étude.
Le Président (M. Bertrand): Merci, M. le ministre. S'il y
a un représentant de l'Opposition officielle qui désire prendre
la parole avant que je cède, au député de
Mégantic-Compton, son droit, tel qu'il l'a demandé, c'est votre
droit.
Mme Lavoie-Roux: Je vais lui laisser la parole, je parlerai
après.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Très brièvement encore, puisque
l'exposé a été fait par le chef de l'Union Nationale. Je
vois que le ministre a pris connaissance de l'amendement qu'on se proposait
d'apporter, qui était compris dans notre livre bleu. Je vois qu'il s'est
penché sur le problème assez longuement pour nous fournir des
explications qui répondent passablement aux questions qu'on se
posait.
Je dois vous dire que ce qu'on couvre actuellement ce sont des cas
très isolés, je le sais. Il faut dire qu'il y a des enfants du
primaire qui, pour être dans le nombre de ceux qui sont incorporés
dans la communauté canadienne anglaise il y a un transport
d'organisé dans la région des Cantons de l'Est font plus
de 80 milles par jour d'autobus actuellement pour pouvoir rejoindre une
école primaire. Bien sûr, ceux-là se qualifient, mais,
comme il y a des limites, il arrive, dans des régions un peu plus
éloignées, que des jeunes du primaire ne peuvent pas compter sur
un transport. Je vois la difficulté avec laquelle le ministre nous
répond.
Il y a des régions, actuellement, qui ne sont pas pourvues de
classes anglaises et qui sont vraiment trop loin; question transport, il n'y a
plus moyen de rejoindre ces régions. Ce ne sont pas des enfants qui
seront incorporés à la communauté canadienne anglaise. Je
pense que ce n'est plus possible, rendu au niveau du secondaire, parce qu'on se
rend compte que ces parents, dont les enfants fréquentent l'école
primaire dans des régions aussi éloignées
peut-être pas éloignées tant que cela parce que c'est une
région développée comme ailleurs mais à
cause des communautés anglophones qui disparaissent des petits villages,
comme dans les Cantons de l'Est, et qui se centralisent davantage à
Lennoxville et à Sherbrooke, il arrive que ces jeunes, de famille
anglophone, deviennent des francophones. Cela n'a peut-être pas
été dit souvent, mais cela devient des familles francophones.
Je n'ai peut-être rien contre cela, excepté que je dois
vous dire que cela est parfois un cauchemar dans des familles et ce sont des
cas pénibles, quand il y en a. C'est comme cela qu'on a soumis
l'amendement aux partis de joindre le mot "se-
condaire". Si cela ne devait pas répondre... Je sais qu'il est
vrai que beaucoup d'élèves, beaucoup de familles francophones, si
on joignait le mot "secondaire", profiteraient de cela ensuite pour être
reconnus anglophones. Vous connaissez l'esprit, actuellement, des gens qui
envoient leurs enfants à l'école secondaire anglaise. Ce n'est
pas pour en faire des Anglais, c'est pour leur faire apprendre l'anglais. Parce
que l'anglais est tellement mal enseigné aux francophones, c'est pour
leur faire apprendre un peu d'anglais. On n'en fait pas des anglophones, on
tâche d'en faire des gens un peu plus bilingues. Je ne vous cache pas
qu'avec l'argumentation que vous m'avez donnée cela demeure un cas
isolé. Je ne sais pas ce que vous pourriez me répondre pour aider
à l'ajuster, je vois que vous discutez chaudement avec le ministre de
l'Education. Je me demande ce qui pourrait ajuster ces familles isolées
dans le Québec. On sait combien la langue maternelle prend aux tripes
les familles. Je me demande comment on pourrait réagir pour aider ces
gens, si ce n'est pas en ajoutant le mot "secondaire".
Encore là, en parlant de secondaire pour les cas isolés,
ce n'est pas avec ceux-là qu'on anglicise le Québec. Comme je
vous l'ai dit, ce sont de rares cas. On n'en fait pas des anglophones, on en
fait des gens qui voudraient tout simplement être capables de communiquer
dans leur langue maternelle.
Le Président (M. Bertrand): Merci, M. le
député de Mégantic-Compton. M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, si vous me permettez...
M. Grenier: Je m'excuse, si vous me permettez, j'ai oublié
une question bien technique. Est-ce que le ministre, qui a fait des recherches,
pourrait nous produire des documents sur les chiffres qu'il a pris? Je serais
peut-être surpris d'apprendre que c'est encore plus rare que je pense,
mais je sais que vous avez chez vous des équipes. En tout cas, vous avez
plus de possibilités, du côté des équipes de
recherche, qu'on peut en avoir dans un parti d'Opposition. Si vous pouviez
déposer les documents qui nous disent exactement combien il y a de cas
de ce genre, nous l'apprécierions.
M. Morin (Sauvé): Pour compléter la pensée
du député: vous voulez parler du cas de parents qui, étant
allés à l'école secondaire, seraient habilités
à envoyer leurs enfants à l'école anglaise...
M. Grenier: C'est cela.
M. Morin (Sauvé): ... par rapport au nombre de ceux que
nous reconnaîtrions si nous ne retenions que le critère de la
scolarisation primaire des parents. Est-ce bien cela? Vous ai-je bien
suivi?
M. Grenier: Oui. Si vous permettez, je vous donne une explication
qui va peut-être rejoindre la vôtre.
Si la loi est adoptée telle quelle, l'élève qui ne
pourra pas fréquenter le primaire à cause des difficultés
qu'on a énumérées, c'est à la deuxième
génération que cela se pose. Il est fils d'Anglais. J'aimerais
connaître pour cette deuxième génération combien il
y en a qui seront privés de s'incorporer à la communauté
canadienne-anglaise.
M. Morin (Sauvé): Je peux essayer de trouver la
réponse, mais je ne suis pas sûr qu'on puisse la trouver à
moins de procéder à une sorte de recensement
général des commissions scolaires; cela pourrait prendre pas mal
de temps. Mais, si le député y tient, je puis demander que la
recherche soit effectuée, mais combien de semaines faudra-t-il? Je n'en
sais rien.
M. le Président, je pourrais m'entretenir de cela dans le
particulier avec le député Au fond, c'est une question assez
intéressante; on pourrait peut-être au moins s'assurer des
chiffres.
Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Si vous me le
permettez, je voudrais parler sur l'amendement proposé par le
député de Lotbinière, en citant, pour donner mes vues sur
l'importance ou sur la nature de cet amendement, quelques propos auxquels s'est
référé le député de Saint-Jacques d'un
discours que j'ai donné à Niagara Falls. Je crois que les paroles
que j'ai prononcées à Niagara Falls s'appliqueraient pour donner
certaines vues quant à la portée de cet article. Cela nous
permettrait de voir si cet article devrait être accepté de telle
façon ou s'il devrait être accepté tel que
rédigé dans le projet de loi 101. Pour comprendre la
portée de l'article, question de langue d'enseignement pour ceux qui
doivent être admis à l'école anglaise par dérogation
à l'article 68, il faut et je cite mon discours comprendre
ce qui se passe au Canada. On parle d'éducation ici au Québec et
on parle de l'option Québec. "Pour comprendre ce qui se passe au Canada,
il faut d'abord comprendre de quel pays il s'agit. Il est également
important de connaître et de comprendre l'histoire et la nature du peuple
canadien-français. Parce que je ne suis pas né dans ce pays et
que, depuis mon enfance, j'ai participé à la vie des deux peuples
fondateurs, j'ai pu observer les relations entre anglophones et francophones
tant de l'intérieur que de l'extérieur. J'ai eu la chance qu'ont
malheureusement trop peu de Canadiens de voyager beaucoup dans tout le pays".
Entre parenthèses, M. le Président, c'est une traduction d'un
discours que j'ai prononcé en anglais à un auditoire anglophone
qui venait de tout le Canada.
M. Charron: J'invoque le règlement.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Saint-Jacques, sur une question de règlement.
M. Charron: J'invoque le règlement. Je déplore que
cela s'adresse au député de Mont-Royal, mais, cette fois, ce
n'est pas sur la teneur de ses propos, mais plutôt sur la
régularité quant à notre règlement de ses propos.
Je n'ai pas d'objection à ce qu'il revienne à ce fameux discours
de Niagara Falls, mais je doute qu'il ait été en train de parler,
à ce moment, de l'amendement proposé par le député
de Lotbinière sur la pertinence de joindre les mots "ou secondaire" dans
le projet de loi qui n'était même pas déposé, si je
me rappelle bien, à l'époque, pas plus que l'amendement du
député, d'ailleurs.
Si par hasard le député traitait de ce sujet, je n'ai
aucune objection, mais nous sommes à une heure avancée de nos
travaux et le règlement nous oblige à nous en tenir à la
pertinence d'ajouter les mots "ou secondaire" dans le projet de loi.
Le Président (M. Bertrand): J'accepterai une intervention
du côté de l'Opposition.officielle pour justifier l'intervention
du député de Mont-Royal.
M. Lalonde: M. le Président, cela semble bien simple, deux
mots "ou secondaire". Il reste, surtout si on a suivi les propos des
intervenants jusqu'à maintenant, que, dans la réalité,
cela change des choses. Pour le député de Mont-Royal, afin
d'expliquer quel sera son vote ou son attitude à l'égard de cette
motion d'amendement, il est tout à fait pertinent, tout à fait
indiqué d'exprimer quelle est sa conception de la société
québécoise, à savoir est-ce qu'on devrait élargir,
par exemple, le critère boiteux qu'on a actuellement?
M. Charron: N'exagérons rien.
M. Lalonde: Je pense que c'est tout à fait dans l'ordre
des choses que le député se fonde sur une conception qu'il a de
la société canadienne et de la société
québécoise en particulier, des différents peuples et que,
par référence à un discours qu'il a fait, il en informe la
commission.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Saint-Jacques et M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je veux
simplement dire que, dans le contexte de cet article 69, sur chacun des
articles, il peut arriver effectivement qu'on ait à recourir à
des exposés qui, très souvent, peuvent déborder le cadre
limité de la motion d'amendement. Le député de Mont-Royal
m'ayant assuré, avant de commencer sa citation, qu'elle se situait dans
le cadre de la discussion sur la motion d'amendement formulée par le
député de Lotbinière, j'attends d'avoir entendu l'extrait
de ce discours à Niagara Falls pour, évidemment, juger de la
pertinence ou pas de cet exposé dans le cadre du débat.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je serai très
bref, je ne prononcerai pas tout le discours, seulement un certain extrait,
merci.
M. de Bellefeuille: Vous n'aurez pas assez de vingt minutes.
M. Ciaccia: Je continue. J'ai eu la chance, qu'ont
malheureusement trop peu de Canadiens, de voyager beaucoup dans tout le pays.
J'ai vu plusieurs aspects et plusieurs régions et j'ai fait
l'expérience du contraste entre les luxueux fauteuils tournants de
conseils d'administration et les caisses d'oranges qui servent souvent de
sièges dans les conseils.d'Indiens. Je connais la situation pour l'avoir
étudiée, si je puis dire, à l'école de la vie.
Permettez-moi donc de vous faire part de quelques-unes de mes impressions de la
réalité canadienne, et je crois que cela s'applique à la
question que nous discutons ici.
M. de Bellefeuille: Quels sont les saints du jour?
M. Ciaccia: A l'époque de la confédération,
les Canadiens français hors du Québec formaient un assez fort
pourcentage de la population.
M. Charron: J'invoque le règlement.
M. Ciaccia: Je ne le citerai pas, s'il vous plaît.
M. Charron: Je sais que le député de Mont-Royal
meurt d'envie...
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Mont-Royal, indépendamment de l'argumentation, je dois donner la parole
au député de Saint-Jacques qui veut intervenir sur une question
de règlement.
M. Charron: Je crois qu'on peut forcer l'interprétation du
règlement. Même le député de Marguerite-Bourgeoys a
eu du mal à se retenir de rire en le faisant.
M. Lalonde: C'est à l'encontre du règlement, M. le
Président. M. le Président, l'article 96.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Saint-Jacques.
M. Charron: M. le Président, nous sommes sur un des
articles les plus importants du projet de loi. L'amendement n'est
peut-être pas majeur, mais il peut être significatif dans
l'application du projet de loi. S'il peut y avoir une certaine attitude quant
à la conception de la société canadienne ou
québécoise lorsqu'on aborde un article, j'en conviens, avec une
certaine limite, mais lorsqu'on est sur un amendement aussi précis, que
l'on ne me dise pas que l'on peut ici donner sa conception de l'humanité
quand il s'agit de savoir si nous incluons les enfants dont les parents
auraient reçu l'enseignement secondaire en anglais au Québec.
M. Ciaccia: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Mont-Royal sur la question de règlement seulement.
M. Ciaccia: Vous avez rendu, je crois, la décision que je
pouvais citer certains extraits de mon discours. Je crois que c'est très
pertinent de savoir si le père ou la mère a reçu, au
Québec, l'enseignement primaire ou secondaire en anglais. On parle de
Québec, est-ce que ce devrait être Québec ou le reste du
Canada? Je crois que j'ai le droit de faire une intervention.
M. Charbonneau: C'est justement cela.
M. de Bellefeuille: Non, ce n'est pas cela dont il s'agit...
M. Ciaccia: Sur la question de règlement, l'article que
nous discutons dit: "Par dérogation à l'article 68, peuvent
recevoir l'enseignement en anglais, à la demande de leur père et
de leur mère, a) les enfants dont le père ou la mère a
reçu au Québec..."
J'ai le droit de toucher à cette question.
Le Président (M. Bertrand): Sur la question de
règlement, M. le député de Mont-Royal, je pense avoir
été d'une certaine souplesse dans la première
interprétation que j'ai donnée tantôt à la question
de règlement invoquée par le député de
Saint-Jacques. Je vous ai laissé lire un extrait de votre discours et je
dois noter qu'après la lecture de ce premier extrait, parce qu'il
semblait y en avoir d'autres, vous n'aviez certainement pas touché
à la motion d'amendement je veux bien spécifier la motion
d'amendement qui demande d'ajouter le mot "secondaire".
Je voudrais aussi que vous notiez, M. le député de
Mont-Royal, que ce genre d'intervention que vous faites je
réitère ce que j'ai dit tantôt peut fort bien se
situer dans le cadre de la discussion que nous avons sur l'article 69.
Je ne vous donne pas de directive sur ce que vous pourriez faire.
Je vous demanderais de réfléchir sur l'opportunité
qu'il y aurait pour vous de retenir certains extraits de ce discours, par
exemple, pour la discussion de l'alinéa b) où, je pense, il est
plus fortement question de rapports qui pourraient exister entre le
Québec et le Canada.
Alors, M. le député de Mont-Royal, je vous demande de vous
en limiter, s'il vous plaît, à la discussion de la motion
d'amendement formulée par le député de Lotbinière
et qui demande d'ajouter les mots "ou secondaire"
M. Ciaccia: Très bien, M. le Président, puisque je
vais prendre les paroles que vous avez prononcées, je ne continuerai pas
maintenant de citer le discours. J'y reviendrai quand nous discuterons
l'article 69a, mais je voulais seulement attirer l'attention du
député de Saint-Jacques sur certains propos que j'avais tenus.
J'y reviendrai quand nous discuterons d'autres articles.
Merci.
M. de Bellefeuille: Quelle joie!
M. Lalonde: M. le Président, sur la question de
l'amendement...
M. Ciaccia: Je ne sais pas si vous savez pourquoi je le
fais...
M. Lalonde: Avant de commencer, je voudrais rappeler au
député de Saint-Jacques que, si je conserve ma bonne humeur,
généralement, durant ces débats, il ne doit pas en
conclure un manque de sincérité dans mes propos.
M. le Président, on voit, à cet amendement, et à
l'attitude un peu tiraillée du gouvernement devant cette motion,
jusqu'à quel point le critère apparaissant au paragraphe a) est
boiteux, artificiel, jusqu'à quel point il crée des
problèmes. C'est très difficile, presque aussi difficile pour un
député de l'Opposition que pour le ministre d'Etat au
développement culturel de discuter d'un tel amendement dans le cadre de
ce critère, étant donné que ce qu'on donne d'une main, on
l'enlève de l'autre, ou, quand on veut donner un pouce, on en donne un
pied à d'autres. Les conséquences de chaque élargissement
sont souvent difficiles à mesurer. Le ministre de l'Education a
même parlé d'une enquête qui durait plusieurs semaines
seulement pour savoir combien d'anglophones qui auraient dû
fréquenter une école francophone par manque de service
d'enseignement en anglais, dans leur région, se retrouveraient à
être... J'ai peut-être mal compris. Cela avait l'air un peu
mêlé, pas vos propos, mais, enfin, l'échange. D'ailleurs,
le ministre de l'Education a hésité à saisir, d'ailleurs,
quel genre d'enquête le député de Mégantic-Compton
lui demandait.
Enfin, quant à moi, compte tenu de la faiblesse, de la
complexité, en pratique, des injustices qui sont créées
par ce critère dans le paragraphe a), je pense qu'on doit s'attacher
à deux critères, à deux éléments pour
décider si on appuie ou non cet élargissement.
D'un côté, le critère, tel qu'il est là,
crée on l'a expliqué auparavant une injustice
à l'égard des "vrais" anglophones, comme Mme Lysiane Gagnon le
disait, qui auraient envoyé leurs enfants dans le secteur
français, soit par nécessité, comme le
député de Mégantic-Compton l'a bien décrit, soit
par choix. Plusieurs anglophones l'ont fait en reconnaissant le
caractère de plus en plus français du Québec et ont fait
fréquenter à leurs enfants l'école primaire
française. Ils se trouvent ainsi privés et à priver leurs
enfants, lorsqu'ils deviendront des parents, du droit de faire
fréquenter l'école anglaise à leurs enfants, étant
donné qu'ils sont demeurés des anglophones.
Le danger d'ouvrir le critère a été
mentionné par le ministre d'Etat au développement culturel,
à savoir qu'un plus grand nombre de francophones fréquenteraient
l'école anglaise au secondaire qu'au primaire, si j'ai bien compris. Le
ministre n'a pas donné de chiffres, mais il a affirmé je
le crois que le nombre est plus élevé.
Toutefois, en tenant compte de toute l'économie de la loi
linguistique en vigueur actuellement et de celle qui, si elle ne fait pas
l'échec que je crains étant donné son aspect coercitif, en
ce qui concerne la francisation des entreprises, la promotion de la langue
française dans toutes les activités du Québec... Je
choisirais de réparer les
injustices créées justement par l'aspect artificiel de ce
critère, tout en faisant confiance qu'en élargissant à la
faveur des francophones, le droit de fréquenter l'école anglaise,
on ne créerait quand même pas un danger pour
l'épanouissement, la survie et le maintien de la culture
française et ce "danger" d'ouvrir la possibilité à plus de
francophones de faire fréquenter l'école anglaise à leurs
enfants ne se réaliserait pas.
Vous voyez le tortueux chemin que j'ai dû suivre pour tenter de
vous démontrer pour quelles raisons je vais voter pour cet amendement.
S'il est tortueux, c'est que l'inspiration de cet article m'impose ce
cheminement très complexe et je crains qu'on ne doive d'ici à la
fin de ce chapitre s'imposer cette torture.
Le Président (M. Bertrand): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je vais être extrêmement
brève parce que le député de Marguerite-Bourgeoys a fait
valoir les arguments que je me proposais d'invoquer. Ce n'est pas grave. Mais
je ne pensais pas que si tôt, il nous serait donné l'occasion de
faire une démonstration aussi concrète du critère boiteux
que le gouvernement a adopté pour déterminer sa politique dans le
secteur de la langue de l'enseignement. Ce ne sont là que quelques
exemples et on n'est même pas sortie de la salle.
Je sais fort bien, j'ai cru entendre le ministre d'Etat au
développement culturel parce que j'ai eu quelques moments
d'inattention... Il est vrai que dans les polyvalentes anglaises à
l'extérieur de Montréal, il y a, je pense, à Galt,
Sherbrooke... Gaspé, je suis moins familière un
assez grand nombre d'élèves francophones, peut-être plus
finalement que dans les écoles polyvalentes de la région de
Montréal. Je pense que le député de
Mégantic-Compton l'a expliqué, très souvent, ces enfants y
sont allés parce que c'était le seul moyen pour eux de faire un
apprentissage de la langue seconde, un peu valable, surtout, que dans les
régions rurales on sait fort bien que les services d'enseignement en
langue seconde sont souvent encore plus déficients qu'ils ne le sont
dans les villes. Mais je partage à ce point de vue, l'idée du
député de Marguerite-Bourgeoys, que ces enfants ne sont quand
même pas allés à l'école anglaise pour s'angliciser,
mais pour vraiment acquérir un deuxième outil, quoiqu'avec le
critère du gouvernement, on va les consacrer anglophones. C'est assez
inouï.
Compte tenu des intentions très louables du député
de Lobtinière qui a présenté la motion, qui veut vraiment
essayer de corriger quelques injustices qui, déjà, se glissent
à l'égard des anglophones, je vais lui faire une taquinerie qui
ne se veut pas méchante... Je voudrais seulement lui demander comment il
a pu décider que ceux-là appartenaient à la
communauté anglophone et étaient des anglophones.
Ceci dit, je voterai pour la motion du député de
Lotbinière.
Le Président (M. Bertrand): Merci, Mme le
député de L'Acadie.
M. Charron: Mettez la motion aux voix.
M. Biron: Une remarque en terminant, très brève,
encore une fois.
Le Président (M. Bertrand): II vous reste seize minutes,
M. le député de Lotbinière.
M. Biron: Je ne prendrai pas mes seize minutes. Si on n'accepte
pas une telle motion d'amendement, on aura peut-être dans une
région deux voisins dont un aura un passeport pour l'école
anglaise parce que son frère ou sa soeur aura été à
l'école primaire anglaise il y a quinze ans, et le passeport est pour
toute la famille. L'autre, le véritable anglophone, qui est
arrivé il y a quelques années, parce qu'il est arrivé
à quatorze ou à quinze ans et qu'il est allé à
l'école secondaire anglaise, ses enfants n'auront pas le droit d'aller
à l'école anglaise.
Je demande au ministre de l'Education de réfléchir
sérieusement sur ces cas bien spécifiques. Ce sont des cas
sérieux. Ces gens qui sont arrivés ici, ce n'est pas leur faute
s'ils ne sont pas allés à l'école primaire anglaise; c'est
parce qu'ils n'étaient pas au Québec et qu'ils y sont
arrivés à l'âge du secondaire. Ce sont des cas bien
spécifiques. Il y a le deuxième cas que j'ai cité tout
à l'heure, sur lequel le député de Mégantic-Compton
a élaboré aussi, des paroisses éloignées des grands
centres. Il reste un fait établi: dans des endroits comme
Montréal en particulier, en donnera des passeports pour l'école
anglaise à un certain groupe de gens, parce que le frère ou la
soeur sont allés à l'école anglaise, à cause du
système qui existait dans le temps, et qu'on est obligé
d'administrer aujourd'hui, alors que l'autre véritable anglophone n'aura
pas le droit d'envoyer ses descendants à l'école anglaise.
Je demanderais au ministre de l'Education de prendre quelques minutes
pour nous dire quelle est l'intention du gouvernement sur ces deux cas bien
spécifiques. Je pense qu'il faudra prendre une décision un jour
ou l'autre. Si on ne la prend pas aujourd'hui, on va s'apercevoir dans un an
qu'il faudra prendre une décision, parce que cela va causer des
embêtements aux rouages administratifs de l'enseignement au
Québec.
Le Président (M. Bertrand): M. le député de
Sauvé.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, quel que soit le
critère retenu lorsqu'il s'agit de départager de façon
aussi délicate une collectivité minoritaire d'une
majorité, il y aura des cas limites qui, bien sûr, nous
amèneront à des résultats qu'on pourrait considérer
comme peu souhaitables; quel que soit le critère. Nous avons retenu
celui qui nous paraissait justement entraîner le moins de cas de ce
genre.
Dans l'exemple que vous avez donné, cependant, je dois vous dire
que, si vous avez lu attenti-
vement l'article 69c, la personne qui a fait des études primaires
en anglais et qui a de jeunes frères ou de jeunes soeurs de quinze ans
plus jeunes n'habilite pas ses cadets de plusieurs années. Si vous avez
bien lu l'article 69, paragraphe c) et d) ce sont les frères et soeurs
cadets des enfants visés au paragraphe c). Or, au paragraphe c), il
s'agit des enfants qui, lors de leur dernière année de
scolarité, avant l'entrée en vigueur de la loi, recevaient
légalement au Québec l'enseignement en anglais dans une classe
maternelle publique etc.
Donc, s'il y a un intervalle de quinze ans, nous n'avons pas le
sentiment, à ce moment, de briser la cellule familiale en dirigeant les
cadets vers l'école française. L'exemple que vous avez
donné ne s'appliquait pas tout à fait. Il faudrait lire
attentivement les paragraphes c) et d), car ils doivent être lus
ensemble.
M. Charron: Le plus simple serait de les aborder le plus
rapidement possible.
Motion rejetée sur division
Le Président (M. Bertrand): La motion d'amendement du
député de Lotbinière à l'effet d'ajouter, à
la seconde ligne du paragraphe a), après le mot "primaire", les mots
suivants "ou secondaire", est-elle adoptée?
M. Lalonde: Non.
Le Président (M. Bertrand): Appel nominal?
M. Lalonde: Je n'y tiens pas.
M. Charron: Rejetée sur division, M. le
Président.
Le Président (M. Bertrand): La motion d'amendement du
député de Lotbinière est rejetée sur division.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je
maintenant solliciter votre permission pour soumettre un amendement à
l'article 69? C'est, comme je l'ai indiqué il y a un instant, un
amendement de forme plus que de fond quoiqu'il puisse avoir certaines
conséquences.
Je demanderais qu'on distribue le document intitulé "Motion
d'amendement à l'article 69 du projet de loi no 101", et seulement cette
motion.
Mme Lavoie-Roux: On pourrait peut-être aller plus
rapidement.
M. Lalonde: Les déposer toutes.
Mme Lavoie-Roux: Et peut-être imiter le beau geste de
l'Union Nationale qui les a toutes déposées.
M. Lalonde: En présentant un livre rouge! Le
Président (M. Bertrand): A l'ordre! M. le député de
Sauvé, si vous voulez bien lire cet amendement, s'il vous
plaît!
M. Morin (Sauvé): Oui. Il est rédigé de la
façon suivante: Que l'article 69 soit modifié en ajoutant au
paragraphe c), après le mot "scolarité" les mots "au
Québec".
M. Lalonde: M. le Président, excusez-moi. Une question de
règlement.
Je n'aime pas interrompre un orateur aussi éloquent que le
ministre de l'Education qui était lancé dans la lecture de son
amendement, mais immédiatement, je dois vous dire que j'ai un amendement
à présenter au paragraphe a) de l'article 69. Il me semble que la
procédure m'empêcherait de le présenter si j'acceptais
qu'on discute du paragraphe c), quoique j'ai bien hâte de connaître
cet amendement.
M. Morin (Sauvé): Nous allons le distribuer, de toute
façon, parce que ce n'est...
M. Charron: Le meilleur moyen de vous satisfaire, c'est qu'on va
disposer très rapidement de votre amendement au paragraphe a).
Le Président (M. Bertrand): Madame, messieurs les membres
de la commission, de toute façon, dès la réception de
cette motion d'amendement, en lisant la lettre c), j'allais demander au
député de Sauvé si c'était une erreur typographique
ou bien s'il s'agissait vraiment d'une motion d'amendement au paragraphe c). Je
pense qu'il est dans l'ordre des choses qu'on procède d'abord aux
amendements qui pourraient concerner le paragraphe a), ensuite le paragraphe
b).
M. Morin (Sauvé): C'est dans l'ordre, M. le
Président. Je ne savais pas que mes collègues libéraux
avaient un autre amendement au paragraphe a).
Le Président (M. Bertrand): A ce stade-ci, je serai en
mesure de donner la parole à un intervenant sur le paragraphe a), avec
motion d'amendement ou sans motion d'amendement.
Motion d'amendement M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, quelques mots avant de
présenter ma motion d'amendement, non pas pour étendre mon droit
de parole. Je serai aussi bref que possible à cette heure. Le paragraphe
a) se lit comme suit, les motions d'amendement successives ayant
été battues: "Les enfants dont le père ou la mère a
reçu au Québec l'enseignement primaire en anglais".
M. le Président, nous avons eu l'occasion d'exprimer notre
désaccord sur le critère exprimé par le paragraphe a).
Etant donné qu'il demeure, toutefois, qu'on a rejeté celui que
nous avions proposé, je dois souligner le fait que la restriction
au Québec de la fréquentation scolaire, que l'on conserve
comme critère au paragraphe a), me paraît tout à fait
inacceptable. Je vais simplement tenter de démontrer, en me limitant au
secteur de l'économie, au secteur des sièges sociaux plus
particulièrement, et plus particulièrement à
Montréal...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. A l'ordre, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. A moins que vous ne parliez sur
la motion principale en vue d'arriver à un amendement, je suis bien
d'accord avec vous. Je voudrais que ce soit clair pour tout le monde.
D'accord.
M. Lalonde: ...jusqu'à quel point il me paraît
inacceptable pour le développement économique, et plus
particulièrement dans le secteur des sièges sociaux, des bureaux
divisionnaires, des bureaux régionaux, des grandes entreprises qui
constituent plutôt un élément extrêmement important,
essentiel de l'économie du Québec, et qui sont concentrés,
il faut le dire, surtout dans la région de Montréal. Le
critère restrictif que l'on voit au paragraphe a) est de nature à
créer des problèmes extrêmement graves. La restriction de
la fréquentation de l'école anglaise aux seuls enfants dont les
parents ont fréquenté au Québec l'école anglaise,
l'annonce de ce critère a déjà commencé, selon tous
les témoignages, que ce soit la Chambre de commerce du Québec,
que ce soit les entreprises, en particulier, à créer des
problèmes extrêmement difficiles, extrêmement sérieux
au niveau de la mobilité du personnel et plus particulièrement du
personnel de cadre des grandes entreprises.
On ne pourra mesurer les effets négatifs qu'après un
certain temps d'application d'un tel critère.
Déjà, tous les témoignages sont unanimes pour
indiquer ceci. Des entreprises ont déjà connu des
difficultés à transférer, à amener ici, au
Québec, des gens de l'extérieur du Québec, plus
particulièrement du Canada, mais aussi des Etats-Unis et de l'Europe. Ce
sera pire parce qu'ils savent maintenant, si ce projet de loi est adopté
tel quel, qu'ils ne pourront pas envoyer leurs enfants à l'école
anglaise. Il s'agit, naturellement, dans les exemples auxquels je me
réfère, d'anglophones visant à l'extérieur du
Québec, dans les autres provinces du Canada, vivant aussi,
naturellement, aux Etats-Unis et qui ont des enfants qui ont déjà
commencé, dans beaucoup de cas, leur fréquentation scolaire dans
des écoles anglaises, nécessairement, et qui se verraient
obligés d'interrompre cet enseignement à leurs enfants pour les
envoyer ici, au Québec, à l'école française.
Je propose que le paragraphe a) de l'article 69 soit modifié en
ajoutant, à la première ligne, après le mot
"Québec", les mots "ou ailleurs". Le paragraphe amendé se lirait
comme suit: "Les enfants dont le père ou la mère a reçu,
au Québec ou ailleurs, l'enseignement primaire en anglais".
Le Président (M. Cardinal): M. le député
de
Marguerite-Bourgeoys, afin que nous procédions avec ordre,
surtout à cette heure, alors que nous avons convenu de terminer à
20 heures, je mentionne que vous avez parlé sur la motion principale en
terminant par un amendement. Il n'a pas épuisé son droit de
parole puisqu'il a 20 minutes sur la motion principale. Par conséquent
il pourra, pour cette raison et cette seule raison, parler sur
l'amendement.
Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "a) les enfants dont
le père ou la mère a reçu, au Québec ou ailleurs,
l'enseignement primaire en anglais".
Dans le fond, il s'agit d'ajouter, à la première ligne,
après le mot "Québec", les mots "ou ailleurs". Est-ce exact?
M. Lalonde: Exact.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, désirez-vous continuer?
M. Lalonde: Oui, M. le Président, si vous le
permettez.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: On pourrait, à plusieurs titres, souhaiter
élargir le critère qu'on a appelé la clause Québec
dans ce paragraphe; on pourrait le souhaiter pour reconnaître
l'appartenance du Québec au Canada. On pourrait le souhaiter pour
éviter d'injecter dans ce projet de loi une restriction, une contrainte
d'inspiration séparatiste.
On pourrait ainsi, M. le Président, continuer à souhaiter
et à invoquer des arguments forts valables pour souhaiter élargir
ces critères. Je ne m'en tiendrai qu'aux inquiétudes qui sont
formulées quotidiennement au niveau des entreprises, comme je l'ai dit
tantôt, et je laisserai à d'autres opinants le soin
d'élargir les arguments. Mais je tiens à insister sur le
caractère extrêmement sérieux, pour l'avenir de
Montréal en particulier, comme capitale économique, comme
capitale des sièges sociaux d'entreprises canadiennes et d'entreprises
internationales, l'amendement que je propose, M. le Président.
Si vous voulez avoir des témoignages, M. le Président,
vous n'avez qu'à vous promener un peu dans certains milieux d'affaires
et vous recevriez quotidiennement des témoignages qu'une telle clause
est de nature à fermer littéralement la source indispensable pour
ces entreprises de cadres venant de l'extérieur du Québec pour
participer aux activités économiques, à l'administration
de ces grandes entreprises qui sont si nécessaires, si indispensables,
surtout actuellement, dans le climat économique négatif que nous
connaissons, dans une économie extrêmement difficile. Avec tous
les problèmes que l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois représente pour ce secteur, il est inutile d'en
ajouter un autre, c'est-à-dire de fermer le robinet, de fermer les
frontières à ceux dont nous avons besoins dans nos entreprises
pour continuer de participer avec nous et aussi avec de
plus en plus de francophones au développement économique,
au développement du Québec.
Naturellement, vous me direz que ce n'est pas qu'à
l'extérieur du Québec qu'une telle entreprise ayant des
activités à l'extérieur du Québec peut aller
chercher ces cadres. C'est exact. Mais il est un fait qu'il faut
reconnaître, toute entreprise qui a des activités non seulement au
Québec et non seulement au Canada mais aussi dans d'autres pays, a
besoin de faire venir au Québec, à son siège social, de
jeunes cadres, des cadres intermédiaires pour leur faire subir une
période d'apprentissage au siège social, souvent pour
éventuellement aller prendre la responsabilité d'une unité
de production ou d'un bureau d'administration à l'extérieur, mais
ils ont quand même besoin de cette mobilité du personnel et pas
seulement la grande entreprise anglophone, je parle de l'entreprise qui est
peut-être maintenant aujourd'hui une petite ou une moyenne entreprise
mais qui va se développer, espérons-le.
Cette entreprise peut être aussi bien francophone; elle a ou aura
des activités et des bureaux administratifs à l'extérieur
du Québec, des marchés et des unités de production
à l'extérieur du Québec et elle devra faire appel, dans
ses unités de production, dans ses marchés, à des gens qui
demeurent à l'extérieur du Québec et qui, dans une grande
majorité, naturellement, sont des anglophones.
Que la compagnie soit soi-disant francophone, moyenne ou autrement
actuellement, elle devra subir les mêmes contraintes linguistiques que
les grandes entreprises actuelles qui, on le sait, doivent faire une place
assez importante à la langue anglaise dans les activités de leur
siège social. On le sait, cela a été
répété tellement souvent; la démonstration n'est
plus à faire. Je pense que l'expérience que la Régie de la
langue française, depuis deux ans, a connue dans sa tentative, sa
démarche de franciser les entreprises, la connaissance que la
Régie de la langue française a obtenue est tout à fait
évidente. Je pense en particulier que le ministre d'Etat au
développement culturel, qui a la responsabilité administrative de
cette régie, a accès à cette connaissance.
Je ne veux pas être trop long. Je voudrais quand même que
l'on constate le caractère sérieux de ce problème. Ce
n'est pas un problème qui va m'affecter personnellement, qui va
peut-être nous affecter, nous, autour de cette table, mais c'est un
problème qui est de nature à affecter le développement de
l'économie au Québec, donc, le développement de 100% de
ses citoyens qui comprennent, il ne faut pas l'oublier, 80% de
francophones.
Ce sont autant les francophones que les anglophones qui peuvent subir
les dommages, les inconvénients d'une politique restrictive,
fermée, comme celle qu'on voit au paragraphe a).
M. le Président, pour toutes ces raisons je pense que
l'amendement que je propose est bien fondé et j'invite tous les membres
de cette commission à l'appuyer.
Le Président (M. Cardinal): M. le député
de
Verchères. Non, je m'excuse, je vais répéter.
Lorsque je suis...
M. Charbonneau: M. le Président, je suis disposé
à laisser mon droit de parole...
Le Président (M. Cardinal): D'accord, s'il y a
consentement, mais, normalement, après une motion qui vient d'un parti
de l'Opposition, je permets au parti ministériel de continuer et ensuite
je reviens aux autres partis, mais si vous voulez vous entendre entre vous,
c'est une autre affaire.
M. Charbonneau: M. le Président, je croyais
personnellement qu'en donnant mon nom tantôt, cela ne privait pas le
ministre d'Etat au développement culturel d'avoir le premier le droit de
réplique pour le gouvernement.
Le Président (M. Cardinal): Vous soulevez un autre point.
Je vais tout de suite demander si M. le ministre d'Etat veut intervenir. Non.
M. le député de Verchères, voulez-vous le faire?
M. Charbonneau: Je peux laisser mon droit de parole, pour le
moment, au député de Lotbinière et j'interviendrai
après.
Le Président (M. Cardinal): II n'est pas obligé de
le prendre.
M. Charbonneau: S'il ne veut pas le prendre. M. Biron: Je
vais le prendre, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Bon! Alors, M. le
député de Lotbinière.
M. Biron: M. le Président, d'abord, cette motion
d'amendement est à peu près semblable à celle que nous
avions préparée pour l'alinéa b) de l'article 69. Or,
c'est sûr que nous voterons pour une telle motion d'amendement, mais,
quand même, peut-être pour différentes raisons que celles du
député de Marguerite-Bourgeoys. Le député de
Marguerite-Bourgeoys nous a parlé des cadres des grandes entreprises
multinationales. C'est sûr qu'il faut protéger les entreprises
multinationales jusqu'à un certain point, mais je ne suis pas encore
sûr que, véritablement, les cadres de ces grandes entreprises
n'ont pas le moyen, en fait, de se payer des écoles privées. Mais
il y a plus que ça. C'est plus profond que ça. A notre point de
vue, en reconnaissant la communauté anglophone au Québec, on veut
que les membres de cette communauté anglophone, tous ceux qui parlent
l'anglais à travers le Québec, qui ont étudié en
anglais dans leurs cours primaires, puissent participer véritablement
à cette vie que nous avons au Québec.
Il est question aussi de la réalité canadienne, M. le
Président. C'est qu'il y a des fonctionnaires du gouvernement canadien
j'en ai parlé aujourd'hui et je le redis qui sont
appelés à travailler dans la région de l'Outaouais au
Québec, à Hull en particulier. Avec une telle clause, ils vont
peut-
être choisir de demeurer à Ottawa ou sur la
frontière de l'Ontario, alors qu'ils pourraient facilement venir
s'installer au Québec, vivre au Québec, apprendre le
français au Québec et participer véritablement à la
vie du Québec.
Il faut avoir confiance dans les effets d'entraînement des autres
mesures et ouvrir un petit peu plus, je crois, nos écoles anglaises aux
membres réels de la communauté anglophone.
Quant aux suggestions de M. Trudeau, je ne suis pas tout à fait
d'accord avec lui lorsqu'il commence à vouloir dire au Québec
quoi faire dans le domaine de l'éducation. Je pense que M. Trudeau a
énormément de travaux à faire au niveau du gouvernement
fédéral, qui regardent le gouvernement fédéral. Il
ne devrait pas se mêler du tout de ce qui regarde les juridictions des
provinces elles-mêmes. Je pense que les provinces sont assez adultes pour
décider ensemble, sans qu'on ait à entendre les suggestions du
premier ministre du Canada là-dessus.
Or, c'est sûr que la réalité canadienne, ça
existe, mais les provinces sont assez adultes pour s'apercevoir que ça
existe, la réalité canadienne. Les provinces sont assez adultes
aussi pour décider, dans leur propre domaine de juridictions et en
particulier dans le domaine de l'enseignement, ce qu'elles ont à
faire.
C'est ici, autour de cette table de la commission parlementaire, que les
représentants du peuple québécois doivent décider
de ce qui est bon pour nous dans le domaine de l'enseignement. M. le
Président, on propose, à même ce projet de loi, d'autres
grandes mesures qui auront des effets d'entraînement immenses sur la vie
future du français au Québec.
Alors, nous avons confiance dans ces effets d'entraînement, nous
avons confiance dans ces mesures qui sont proposées à même
le projet de loi no 101 et nous sommes sûrs qu'ils serviront d'effets
d'entraînement.
Nous voudrions voir de la part du gouvernement un peu moins de
complexes, de peur des anglophones, plus de possibilités que les
francophones s'affirment au Québec, si on leur aide où il faut
les aider.
Il faut montrer un peu plus de générosité
vis-à-vis de ceux qui sont appelés à venir au
Québec, vivre avec vous, enrichir cette province de Québec.
Il faut ouvrir nos bras, ouvrir notre coeur, ouvrir notre esprit et
recevoir ceux qui véritablement font partie de la communauté
anglophone. Le critère désigné par le gouvernement du
Québec, soit avoir étudié en anglais pour l'école
primaire, on y va jusque-là parce que c'est un critère clair.
C'est un critère précis alors qu'un grand mot comme
communauté anglophone, on ne sait vraiment pas; mais là, on sait
qu'il y a un critère clair. Si les parents apportent le certificat
d'étude, on sait que c'est clair. C'est quelque chose qui se mesure.
J'ai été habitué à mesurer quelque chose et je
n'aime pas trop trop les voeux pieux. J'aime cela quand on mesure quelque
chose.
Alors, dans ce sens en particulier, nous faisons appel au gouvernement
pour accepter une telle motion d'amendement qui nous semble réaliste,
qui nous semble pleine de bon sens, à cause des autres mesures que nous
proposons à même le projet de loi no 101.
Alors, nous allons voter pour une telle motion d'amendement.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez madame,
messieurs, je veux d'abord, à vous...
M. Laurin: J'ai demandé la parole.
Le Président (M. Cardinal): Vous pouvez demander la parole
tout de suite pour la conserver. D'accord, M. le ministre d'Etat au
développement culturel.
Mme Lavoie-Roux:...
Le Président (M. Cardinal): Silence! que je puisse
souhaiter à tous bon appétit, bonne fin de semaine parce que nous
sommes le vendredi. Si nous étions un samedi, je vous souhaiterais un
bon week-end. La commission ajourne ses travaux...
Une Voix: Le contraire.
Le Président (M. Cardinal): Alors, le contraire. La
commission ajourne ses travaux à lundi matin, dix heures.
(Fin de la séance à 19 h 58)