To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Education

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Education

Version finale

37th Legislature, 2nd Session
(March 14, 2006 au February 21, 2007)

Tuesday, January 30, 2007 - Vol. 39 N° 19

Audition des dirigeants d'établissements d'enseignement de niveau universitaire conformément à la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-six minutes)

Le Président (M. Chagnon): Alors, je constate que nous avons quorum. J'invite évidemment tous nos invités, en présumant que tous nos hôtes ont éteint leurs téléphones cellulaires ? des fois, je me trompe, hein, des fois, c'est de notre côté que ça se met à sonner, alors je... Mais le message est fait, ça va éviter d'avoir à le refaire plus tard.

Alors la commission est réunie...

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): Pardon?

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): Oui, c'est ça. Vous n'êtes pas obligés de vous téléphoner, vous pouvez vous parler, là.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions des dirigeants d'université en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire, et nous entendrons, ce matin, les dirigeants de l'Université du Québec à Rimouski et, cet après-midi, les représentants de l'École nationale d'administration publique.

Alors, M. le recteur, M. Ringuet...

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): Ah oui! Je m'excuse. Est-ce que j'ai des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Charest (Rimouski) remplace M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

Auditions (suite)

Le Président (M. Chagnon): Alors, M. Ringuet, je vous cède la parole pour une vingtaine de minutes, 20 à 30 minutes, et puis après cela, nous procéderons à une période de questions. Mais auparavant j'apprécierais si vous vouliez nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Université du Québec à Rimouski (UQAR)

M. Ringuet (Michel): Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés. Alors, je suis accompagné de Jean Ferron, vice-recteur à la formation et à la recherche; Daniel Bénéteau, vice-recteur aux ressources humaines et à l'administration...

M. Bénéteau (Daniel): Bonjour.

M. Ringuet (Michel): ...Daniel Rousse, vice-recteur au campus de Lévis. Alors, nous sommes les personnes à qui vous devriez poser les questions. Nous accompagnent aussi Alain Caron, secrétaire général, qui est là; Marie-Thérèse Brunelle, directrice des communications.

Et on est aussi fortement appuyés ce matin d'observateurs étudiants: Bruno-Pierre Cyr, président du Regroupement des associations à l'université, de l'UQAR, Marie-Pierre Simard, derrière vous, qui est présidente de l'Association des étudiants du campus de Lévis, et certains autres officiers: Samuel-Jean Cassou, Didier... et Jean... et d'autres, bon, chargés de cours, et tout. Donc, on se sent vraiment bien encadrés ce matin.

J'avais laissé au secrétariat des chemises qui devraient vous être distribuées ce matin. On aimerait donc ajouter aux documents qui vous ont déjà été acheminés un exemplaire du plan d'orientation stratégique de l'UQAR 2004-2009, un exemplaire du plan de développement de la recherche et le tableau des indicateurs mis à jour, c'est-à-dire qu'on y a intégré les données préliminaires 2006-2007 et on a fait certaines corrections.

M. le Président, on se retrouve dans cette salle... on s'est déjà rencontrés, pas dans cette salle mais dans cette procédure de comparution, en septembre 2003, nous étions alors une toute jeune équipe de direction qui débutait son mandat, et le premier objet de ce mandat-là a été de faire adopter par le conseil d'administration de l'UQAR un plan d'orientation stratégique. Alors, vous avez un exemplaire de ce plan-là, dans lequel vous allez retrouver une vision... notre vision de l'UQAR, la mission et la vision, certaines stratégies, certaines cibles. Et l'objectif, aujourd'hui, de ce 20 minutes de présentation serait de, sous les chapitres de ce plan d'orientation stratégique, vous faire valoir principalement par des faits qui pourraient paraître anecdotiques mais qui donc feraient valoir les réalisations de l'UQAR au cours de ces trois dernières années, depuis la dernière comparution.

n (9 h 40) n

La mission d'une université comme la nôtre, c'est d'abord et avant tout d'améliorer l'accès à la formation universitaire en région. Aussi de participer au développement de la connaissance, mais plus particulièrement dans les créneaux dûment choisis, parce que nous réalisons que nous ne pouvons pas tout faire, compte tenu de notre taille. Nous voulons aussi former des ressources humaines compétentes, dotées de connaissances approfondies et répondant aux besoins des employeurs, principalement des employeurs en région. Nous voulons contribuer au développement économique, socioculturel et technologique du Québec et accompagner les régions desservies dans un développement centré sur la créativité, la recherche et l'innovation.

C'est de cette façon que nous voyons la mission de l'UQAR, et, pour réaliser cette mission-là, dans le plan d'orientation stratégique, nous nous sommes donné cinq grand objectifs: accroître notre rayonnement en recherche, accroître notre rayonnement en formation, développer notre milieu, permettre l'expression du plein potentiel de chacun et de chacune ? entendons par là tout aussi bien de nos étudiants que de nos employés ? et, dernière ligne et non la moindre, se donner les moyens financiers d'agir.

Alors, depuis notre dernière rencontre, est-ce qu'effectivement nous avons progressé dans l'atteinte de ces objectifs-là? Oui, sans aucun doute.

En matière de formation, le rayonnement de l'UQAR s'est accru. Nous observons une croissance des inscriptions de 18 % au cours de ces années. Nous avons implanté de nouveaux programmes, la plupart du temps en partenariat. Nous croyons au partenariat. À titre d'exemple, le doctorat en lettres, qui se donne avec l'Université du Québec à Trois-Rivières et l'Université du Québec à Chicoutimi, le doctorat en biologie, qui est extensionné de l'UQAM, et un nouveau doctorat en gestion des ressources maritimes. Nous avons aussi extensionné de l'UQAM la maîtrise en géographie. Nous avons éclaté notre baccalauréat en génie, qui était polyvalent, pour rajouter deux autres baccalauréats, en génie électrique et en génie mécanique.

Nous avons annoncé en conférence de presse, la semaine dernière, que, l'automne prochain, nous accueillerons à l'UQAR un bac en enseignement de la musique pour retenir en région les musiciens qui jusqu'à présent devaient s'expatrier soit pour apprendre, pour aller plus loin dans leur perfectionnement musical ou pour développer la profession d'enseignant. Et ceci, c'est un beau modèle. J'aimerais ça en parler plus longtemps, j'espère avoir des questions, parce que c'est un modèle développé avec les conservatoires... avec le conservatoire et avec le cégep, et tout le monde applaudit à cette proposition qui permet une belle économie pour chacun des établissements, tout en permettant donc d'atteindre des objectifs de rétention.

Nous avons poursuivi notre mission de servir sur tout le territoire. Je vous donnerai l'exemple où, en sciences infirmières, nous donnons le baccalauréat en sciences infirmières en Gaspésie, à Baie-Comeau, à Rivière-du-Loup, à La Pocatière, à Montmagny, en Beauce, en plus de le donner bien sûr sur les deux campus. Nous permettons aux gens de se perfectionner, donc le bac en enseignement en formation professionnelle se donne partout sur notre territoire. Récemment, on a permis à une cohorte de poursuivre un M.B.A. à Baie-Comeau en présentiel, et on a fait toute la cohorte, les diplômés viennent de recevoir leur accréditation.

On développe des partenariats. L'Université du Québec à Trois-Rivières vous a déjà parlé du programme MOBILUQ, mis en place sous l'instigation du président du réseau et où l'Université du Québec à Rimouski donc, maintenant, depuis deux ans, accueille à Rimouski des étudiants en géographie de Trois-Rivières, de Chicoutimi qui viennent chercher six crédits chez nous. On implante le bac en travail social à Rimouski et, l'an prochain, à Lévis... maintenant à Lévis, en demandant à l'Abitibi-Témiscamingue de venir donner ces programmes-là chez nous. Un beau partenariat.

Le rayonnement en enseignement, ça veut aussi vouloir dire une meilleure réussite étudiante. Et, là-dessus, nos chiffres sont porteurs, notre taux de diplomation est élevé. Il est élevé parce que nous avons mis en place un centre d'aide à la réussite. Nous avons été précurseurs dans l'implantation d'une plateforme de gestion de cours informatisée mais avec logiciel libre, là, où donc nous pouvons travailler sur les codes sources et adapter cette plateforme-là pour une meilleure utilisation. Et notre expertise est maintenant reconnue, des gens du Chili sont venus nous demander d'aller les encadrer dans l'implantation. On a une professeure du campus de Lévis, Virgine Martel, qui est une spécialiste en développement d'outils d'accompagnement de la réussite. On met en place des ateliers de pédagogie universitaire.

Et cette réussite-là, elle est confirmée, entre autres, par un élément de mesure précis. Donc, lorsque nos étudiants se présentent dans les concours nationaux, sciences comptables, ces étudiants-là performent vraiment très bien. Deux années de suite, on vient d'avoir la médaille d'or du Regroupement des CGA. Alors, Bernard Hétu, un de nos professeurs, a gagné le Prix de l'enseignement du réseau de l'Université du Québec l'an passé. Vraiment, ça va bien.

Le portrait de l'UQAR en termes d'effectif, en date d'aujourd'hui, c'est 5 387 étudiants, dont 55 % étudiants à temps plein. 84 à 85 % de ces étudiants-là sont au premier cycle, 14 % au deuxième et 2 %, une centaine d'étudiants, au doctorat. 45 % des étudiants sont à Rimouski, 44 % à Lévis, avec une plus forte proportion d'étudiants à temps plein à Rimouski, 11 % sur le reste...

Une voix: ...

M. Ringuet (Michel): 44 % de nos étudiants sont à Lévis, et, à Lévis, la population est vraiment 50-50, temps plein-temps partiel, alors qu'à Rimouski, c'est 72 % temps plein. 11 % sur le territoire des cohortes principales à Rivière-du-Loup et Gaspé, et environ 4 % d'étudiants internationaux. Voilà pour la formation.

En recherche aussi, notre rayonnement s'est accru, entre autres, parce que nous avons vraiment bien choisi nos créneaux, nous avons limité le nombre de créneaux dans lesquels nous nous investissons. Vous les connaissez: sciences de la mer, développement régional, nordicité, avec des forces aussi dans certains autres secteurs: en lettres, en génie, autour de l'éolien et de la productique, en éducation, autour de l'adaptation scolaire.

Cette croissance-là se confirme en termes financiers. Depuis notre dernière comparution, nos subventions et contrats de recherche ont augmenté de 60 %, avec une croissance des revenus moyens par professeur démontrée. Nous sommes la seule université au Québec à avoir obtenu les subventions spéciales du CRSNG pour les petites universités, c'est 1,5 million sur cinq ans.

On a ajouté un certain nombre de chaires de recherche. Cette recherche-là, on ne la fait pas que sur les campus, on la fait aussi en région. Nous avons cinq professeurs-chercheurs sous octroi en Gaspésie. À Gaspé, les biomolécules; à Grande-Rivière, en aquaculture; aux Îles-de-la-Madeleine ? c'est malheureux que M. Arseneau ne soit pas là, j'aurais aimé lui dire qu'on est présents chez lui, avec l'implantation d'un nouveau Centre de recherche sur l'insularité ? et on a aussi un professeur sous octroi, en conchyliculture. M. Ferron, qui est biologiste, pourra vous expliquer de quoi il ressort. On est aussi très associés au TechnoCentre éolien, à Murdochville, le nouveau Centre Corus qui vient d'être créé.

Tout cela, on ne peut pas le porter seul, on le fait beaucoup en partenariat. On est des membres actifs et importants du Centre d'études nordiques, que tous associent très clairement à l'Université Laval, mais on a un fort contingent de professeurs de l'UQAR qui sont membres de ce centre-là. On est bien sûr membres de Québec-Océan, on est membres du CRISES, en économie sociale, de l'UQAM; on est membres du réseau d'aquaculture du Québec, donc tous les grands réseaux qui nous touchent dans nos principaux créneaux, on en est membres ou souvent porteurs. On a d'autres types de partenariat, cette fois-là, plus avec des organisations sans but lucratif: le Centre de recherche en biotechnologie marine, un nouveau centre en cartographie des océans, Innovation maritime, qui est un centre de transfert collégial relié aux Maritimes.

On est en valorisation de la recherche, on est la seule université en région dûment membre d'une société de valorisation, la société Valeo, ce qui a permis, entre autres, de créer récemment une nouvelle entreprise dérivée, l'entreprise NutrOcean. Bien sûr, on a d'autres entreprises, on a un certain nombre d'entreprises qu'on accompagne, AquaBiokem, ATI. On est donc dans la dynamique de soutien régional de cette façon-là.

n (9 h 50) n

En recherche et rayonnement à l'international, évident, le Sedna, dont tout le monde a entendu parler, qui est allé s'englacer en Antarctique pour étudier les changements climatiques. L'équipe en charge du volet scientifique de la mission Sedna est une équipe de l'UQAR-ISMER. On a accueilli, il y a deux semaines, les deux étudiants qui ont accepté cette aventure: neuf mois englacés et ensuite remonter l'Atlantique du sud au nord, en prenant des échantillons à chaque jour. C'est une belle expérience de vie pour ces gens-là, mais on est bien fiers que ce soient nous qui aurons permis cette réalisation.

L'été dernier, on a organisé, à partir de Rimouski, un colloque sur le génocide rwandais, qu'on a tenu à Kigali, avec des professeurs, oui, de l'Europe et du Canada, mais l'objectif était beaucoup de permettre aux Africains de se rejoindre à Kigali pour parler de ce génocide-là, et c'est donc à l'initiative de nos professeurs.

Le Président (M. Chagnon): ...enseigner au Rwanda?

M. Ringuet (Michel): Oui, tout à fait. Donc, effectivement, le recteur avait une...

Le Président (M. Chagnon): ...nostalgie.

M. Ringuet (Michel): Non, non, pas une nostalgie, mais avait une ouverture lorsque les professeurs sont venus proposer ce projet-là, une ouverture certaine. Nous sommes aussi membres de d'autres grands réseaux internationaux, ArticNet, et tout. Notre leadership est reconnu, centre de recherche en développement territorial, c'est piloté à partir de Rimouski, c'est un beau projet qui réunit les universités en région. On pilote le réseau d'aquaculture du Québec maintenant à partir de chez nous.

Et, là encore, il y a des succès. En 2003, deux des 10 découvertes de l'année de le revue Québec Science était portées par des professeurs de l'UQAR. Qui aurait dit ça il y a 30 ans, quand on a créé cette petite université en région, que Québec Science reconnaîtrait parmi ses 10 découvertes de l'année les professeurs Berteaux et Richard Cloutier comme des deux des 10 découvertes de l'année? Et Richard Cloutier, cette même année, a été nommé scientifique de l'année de Radio-Canada. C'est notre biologiste-archéologue qui a découvert le plus vieux fossile marin de requin. Et, encore une fois, l'année passée, c'est un chercheur de l'UQAR qui a gagné le prix de la recherche du réseau de l'Université du Québec, Claude Lacharité, en lettres. On développe notre milieu. Vous savez tous qu'on se construit, à Lévis, un nouveau campus, et on le construit sous une forme de partenariat public-privé exemplaire, reconnue. On a des partenaires privés de premier niveau. On l'a visité hier, ce nouveau campus là, qui va être livré avant temps, où le partenaire prend l'ensemble des risques de dépassement de coûts. Et je sais que le vice-recteur Rousse et les gens qui nous ont accompagnés dans cette aventure sont maintenant appelés un peu partout pour conseiller les gens sur comment monter ce type de partenariat là.

Le développement régional, on le fait par ailleurs principalement à travers nos diplômés, 32 000 diplômés depuis le début de la création. On le fait par la tenue de colloques sur un peu toutes sortes de choses: la ruralité, l'éolien, l'adaptation scolaire, et tout, et par les partenariats. On est membres de conférences régionales des élus, on siège sur trois tables interordres dans l'éducation, celles de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent et de Chaudière-Appalaches. Partenaires de plein d'organismes autres, agences de santé. On travaille beaucoup avec les cégeps de la région, bien sûr.

On permet le développement de notre région aussi par l'accueil d'étudiants étrangers. On a 225, 230 étudiants internationaux qui... une étudiante a fait un documentaire sur eux récemment, et qui démontre que ces gens-là ont une intégration à l'UQAR de premier niveau. Étant donné qu'ils sont peu nombreux et disséminés dans la foule, il y a une intégration véritablement... extrêmement intéressante. D'ailleurs, je pense qu'il y a des représentants ici de l'association de l'UQAR qui sont des étudiants internationaux.

Dernier bel exemple de partenariat avec le milieu: on vient de lancer une première campagne majeure de la Fondation de l'UQAR. J'en dis deux mots: Alban D'Amours a accepté de la présider, c'est un beau message. Mais on a aussi un cabinet de campagne vraiment de premier niveau. Ça va bien, il y a des industries qui se sont déjà bien positionnées. Mais surtout je voudrais vous dire que, chez nous, les employés croient à l'UQAR, les étudiants croient à l'UQAR. La campagne est de 11 millions; on s'était lancé le défi d'amasser 1,1 million à l'interne, on est allé chercher 1,6 million: un don moyen de 2 500 $ par employé sur cinq ans; plus de 80 % de nos employés ont accepté de donner; les associations étudiantes ont contribué, les syndicats ont tous contribué. Donc, il y a un appui vraiment très important de notre base.

Le Président (M. Chagnon): Les anciens?

M. Ringuet (Michel): Les anciens, on va aller les voir dans un deuxième temps. Là, on a travaillé à l'interne, là, maintenant, on va avoir les grandes entreprises; Hydro-Québec déjà est venue nous appuyer dans une recherche de l'acceptation sociale du développement éolien, là. Ils vont travailler ça avec nous. Et les grandes entreprises, comme Telus et tout ça, aussi on déjà annoncé leur partenariat. Mais on va aller voir les anciens dans un deuxième temps.

On a fait tout ça avec... en gérant nos budgets de façon extrêmement sérieuse. En 2005-2006... on ne reculera pas plus loin, parce que, si on recule un peu plus loin, on était en équilibre budgétaire. En 2005-2006, on avait prévu un déficit de 700 000 $, mais on a terminé l'année plutôt autour de 400 000 $ de déficit. Et, cette année, alors qu'on prévoyait un déficit de 1,2 million, le réinvestissement gouvernemental annoncé, à 3,4 millions, va nous permettre dès maintenant de rattraper certaines grandes enveloppes et de terminer bien sûr l'année en excédent après avoir remboursé la dette de l'an passé.

Alors, au budget révisé, qui devrait être adopté par l'assemblée des gouverneurs demain, qui a été adopté par le conseil d'administration de l'UQAR la semaine dernière, pour cette année, c'est 54,6 millions de produits, 54,1 de charge. Alors... avec un excédent de 450 000 $.

L'après, maintenant, où on s'en va à partir d'aujourd'hui. Pour l'UQAR, c'est un avenir de défis. C'est très clairement un avenir de défis. Le renouvellement des employés et des professeurs va nous poser... va nous créer des maux de tête. Depuis quatre ans, on a... le tiers de nos professeurs ont été embauchés au cours des quatre dernières années, le tiers. Malgré ça, l'âge moyen de nos professeurs est de 49 ans. Donc, ça vous dit un petit peu le... combien il peut y en avoir qui sont vraiment dans la ligne d'une retraite prochaine. Et on vous parle des employeurs, mais le groupe de cadres est vieillissant aussi. Au niveau des employés de soutien, dans certaines sphères, ça pourrait nous poser des problèmes. Alors, au service des ressources humaines, on cherche les moyens d'anticiper ce défi. Bien sûr, il y a une démographie chancelante dans l'ensemble de nos régions. Ça veut donc dire qu'il faut se développer des nouveaux modèles de fonctionnement. On est heureux de voir par ailleurs qu'on y réussit déjà. Au cours des cinq dernières années, si je prends le campus de Rimouski, qui est plus dans une situation de démographie difficile que celui de Lévis, au campus de Rimouski, il y a cinq ans, 55 % des étudiants venaient du Bas-Saint-Laurent. Maintenant, c'est 50 %. On est moitié Bas-Saint-Laurent, moitié autres régions ou international. Et ce n'est pas parce que les étudiants du Bas-Saint-Laurent ont diminué, c'est que, dans nos créneaux importants, océanographie, biologie, etc., on attire beaucoup plus maintenant les gens de l'extérieur, qui reconnaissent notre compétence.

Le Président (M. Chagnon): Le Bas-Saint-Laurent, ça inclut la Gaspésie?

M. Ringuet (Michel): Dans ce cas-là, 50 %, c'était vraiment le Bas-Saint-Laurent élargi.

Une voix: Élargi?

M. Ringuet (Michel): Élargi, c'est-à-dire... c'est le Bas-Saint-Laurent. C'est La Mitis... élargi jusqu'à Matane, Matapédia. Élargi jusqu'à Matane. Matane, on ne le sait jamais si on le place en Gaspésie ou... ça va?

n (10 heures) n

Alors, la démographie chancelante, par contre, l'UQAR fait partie des solutions. Pour... je pense que socialement on doit se dire qu'une université implantée en région devrait être un moteur de dynamisation de la démographie, en retenant des gens mais aussi en attirant... il y a plusieurs étudiants qui nous viennent d'ailleurs qui choisissent notre région, c'est... tout le littoral du Saint-Laurent, là, de Lévis à Gaspé, c'est merveilleux. Alors, les gens choisissent de demeurer là, lancent des entreprises et dynamisent le milieu.

Concurrence des universités. Avec le modèle de financement actuel, c'est sûr que, pour nous, c'est une dynamique très interpellante, parce qu'on n'a pas nécessairement les moyens de contrer les activités de publicité et de médiatisation d'autres universités plus importantes.

Et, dernier défi: manque chronique de moyens financiers. Bon, cette année, on va réussir, mais on espère comme vous que certains mouvements, entre autres les transferts fédéraux, pourront nous permettre vraiment de donner un nouveau dynamisme et de compétitionner sur la scène internationale. Par ailleurs, avenir prometteur parce qu'à court terme, pour les deux prochaines années, on a, avec ces budgets-là, la capacité de faire du rattrapage et parce qu'on croit avoir des créneaux porteurs magnifiques: sciences de la mer, nordicité et tout au niveau des changements climatiques. Donc, les grands éléments qui interpellent le monde actuellement, on est très bien positionnés, on a des expertises là-dedans.

Développement régional: si on a une vraie volonté de responsabiliser les régions, nous avons des gens pour accompagner dans cette réflexion-là. Aux niveaux technique, social et culturel, on a aussi les outils, par exemple les gens qui, en technologies, sont dans l'éolien, l'adaptation scolaire, sciences infirmières, lettres, et tout. Et on est bien positionnés au niveau de la main-d'oeuvre. On parlait hier des besoins futurs en sciences infirmières, on a une bonne équipe qu'on devra compléter, on manquait de moyens pour la compléter, donc on voudra compléter les moyens en sciences infirmières pour aller plus loin. Comptables, ingénieurs, tout.

Les nouvelles infrastructures du campus de Lévis nous laissent aussi penser que, pour cette région, on sera mieux en mesure de répondre aux besoins qui nous sont souvent exprimés.

J'ai donc dressé le tableau, là, de nos réalisations, un peu comment on voyait l'avenir. Je vous remercie de votre écoute, en vous disant sans flagornerie que cette opération de reddition de comptes à tous les trois ans, je la juge extrêmement importante. J'ai pu lire un peu de vos débats antérieurs avec d'autres universités, et je vous félicite pour le niveau de préparation que vous avez, vous connaissez bien les universités. Et donc je suis disponible pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup, M. Ringuet. Je remercie aussi à l'avance tous les gens qui vous accompagnent. Après vous avoir souhaité la bienvenue, maintenant c'est le temps de vous poser quelques questions.

Vous avez mentionné la problématique de la démographie dans vos régions et puis vous avez envisagé, non sans raison, je pense, avec justesse, l'hypothèse de pouvoir recruter des étudiants étrangers pour, entre autres, complémenter les étudiants qui pourraient vous manquer à court terme, particulièrement dans vos spécialités. Et, comme vos spécialités ont un caractère éminemment international ? qu'on pense à l'océanographie et à tous ces dossiers-là qui sont relatifs à la mer ? évidemment, ça vous ouvre des portes que d'autres de vos collègues d'autres institutions ne peuvent pas avoir. Donc, j'imagine qu'au niveau du baccalauréat, mais surtout probablement au niveau du deuxième et du troisième cycle, vous cherchez à avoir des étudiants spécialisés qui vont faire en sorte de pouvoir vous faire avancer votre recherche, permettre de pouvoir travailler avec vos professeurs et peut-être même éventuellement remplacer certains de vos professeurs.

Est-ce que vous avez remarqué un potentiel de rétention des étudiants qui terminent chez vous au deuxième ou au troisième cycle pour éventuellement soit demeurer ici, soit demeurer sur le campus ou, évidemment, éventuellement retourner chez eux? Ce qui n'est pas non plus en soi une grande tristesse, parce que ça vous permet d'avoir des ponts et d'assumer des relations avec vos anciens étudiants à l'étranger, qui peuvent éventuellement vous aider par un maillage un peu bien fait dans d'autres sphères d'activité qui sont connexes, toujours, entre autres, ces sciences de la mer. Est-ce que c'est comme ça que vous envisagez votre avenir ou...

M. Ringuet (Michel): Oui. La venue d'étudiants internationaux chez nous est essentielle, parce que notre mission maintenant quand on forme des étudiants, c'est vraiment de les ouvrir sur le monde, là. Une formation en circuit fermé, je dirais, n'est pas pertinente. Alors, le contact avec les étudiants internationaux est nécessaire. Et, vous avez raison, la majorité de nos étudiants internationaux viennent par l'attrait de nos créneaux où on a une certaine renommée. Vous avez parlé de sciences de la mer, développement régional, les gens viennent beaucoup chez nous en développement régional, et c'est vrai que c'est principalement deuxième et troisième cycle. Lorsque vous faites l'analyse qu'un certain nombre peuvent choisir de demeurer chez nous, en région, vous faites une bonne analyse, il y en a un certain nombre. Il y en a un même très connu, Boucar Diouf; les gens connaissent Boucar, Boucar qui est un humoriste. Vous savez probablement qu'il est docteur en océanographie? Alors, il était chargé de cours à Rimouski jusqu'à tout récemment. Il a choisi une autre... Il s'en va vers une autre carrière. Mais je donne juste cet exemple-là. Il y a beaucoup d'autres exemples où les gens vont plutôt choisir de se développer des entreprises ou de s'intégrer.

Par ailleurs, on reçoit aussi un nombre assez important d'étudiants qui nous viennent d'Afrique, d'Afrique du Nord, d'Afrique, et je pense que, dans ce cas-là, notre volonté serait plutôt que les gens effectivement, une fois qu'ils ont acquis l'expertise chez nous, puissent retourner dans leur pays pour permettre le développement de ces pays-là. On n'aurait pas intérêt à vouloir faire de la rétention forcée, là.

Le Président (M. Chagnon): Je remarque que vos pourcentages d'étudiants étrangers varient entre... sont maintenant 4.1 %, en tout cas en 2005-2006. C'est assez stable: 3,8 %, 3,5 %, 3,7 %, 3,6 %, 3,8 %, 4.1 %. Qu'est-ce que vous faites comme démarchage pour augmenter ce...

M. Ringuet (Michel): La stabilité ou...

Le Président (M. Chagnon): ...j'imagine, ce n'est pas d'être stable, c'est d'augmenter.

M. Ringuet (Michel): C'est d'augmenter, mais je vous dirais que récemment nous avons eu une décision difficile à prendre. Nous avons choisi de mettre la pédale douce sur ce qu'on appelle les échanges CREPUQ. Vous savez ce que sont les échanges CREPUQ? Le ministère de l'Éducation maintenant ne finance que la parité. Alors, pour nous, l'UQAR, écoutez, vous connaissez notre taille et vous connaissez notre potentiel. Alors, des échanges CREPUQ, à l'UQAR, on pourrait en accueillir vraiment beaucoup, beaucoup plus que la parité. Cependant, à chaque fois qu'on en accueille au-delà de la parité, il n'y a pas de financement. Et donc, nous, une décision que nous avons prise, c'est de, en fin de compte, cesser. Maintenant, notre recrutement se fait en dehors des échanges CREPUQ, et ça, c'est un autre type de recrutement.

Vous avez raison, nous voulons amplifier notre positionnement à l'international. On va le faire principalement à travers des opérations de maillage que nos professeurs qui vont en... soit en sabbatique à l'étranger ou présenter des communications et des conférences, on va outiller ces gens-là pour qu'ils puissent recruter pour nous, nos meilleurs ambassadeurs étant les étudiants internationaux qui retournent chez eux pour faire du recrutement.

Mais vous dire que... Lorsqu'on dit que nous sommes bien gérés, je vous dirais que, toutes proportions gardées, nous ne mettons pas beaucoup d'argent dans l'opération recrutement. Nous avons vraiment, voyant venir les budgets déficitaires... Pour nous, la principale fonction, c'est l'enseignement, la recherche. On met 70 % de nos dépenses dans la fonction d'enseignement-recherche. Si ce n'est pas le plus haut niveau, c'est parmi les plus hauts niveaux au Québec. Et donc ça, ça veut dire qu'on a moins d'argent pour faire du recrutement pur et simple.

C'est peut-être une mauvaise décision de gestion...

Une voix: ...

M. Ringuet (Michel): ...mais, chose certaine, on n'a pas les moyens, par exemple, comme d'autres grandes universités, de participer à tous les grands salons internationaux de recrutement, et tout. Il faut vraiment être sélectif.

Le Président (M. Chagnon): Évidemment, c'est votre priorité d'augmenter vos étudiants étrangers. Vous prenez les moyens que vous jugez à propos. Les étudiants étrangers, plusieurs de vos collègues sont venus nous dire que c'était bien intéressant d'avoir des étudiants étrangers, mais ça amenait aussi des coûts supplémentaires. Est-ce que vous pourriez épiloguer un peu là-dessus et nous dire un peu ce que vous... Est-ce que, chez vous, c'est vrai aussi?

M. Ringuet (Michel): Un étudiant étranger nécessite un encadrement plus important que... Mais, ceci dit, tout dépend de quel pays il vient, là. Un étudiant purement francophone qui nous vient de... bon, versus un étudiant chinois ? on a une cohorte d'étudiants chinois ? le niveau d'encadrement additionnel n'est pas le même.

Mais c'est vrai que l'étudiant étranger nécessite un accompagnement pour aller chercher des preuves d'assurance... Il y a vraiment... Alors, ce sont des coûts un peu plus importants. Ma question, c'est: Est-ce que vraiment ils représentent... Est-ce que ces coûts-là représentent le différentiel imposé à l'étudiant étranger? Je ne crois pas. L'étudiant étranger actuellement paie cinq ou six fois plus cher que l'étudiant québécois. C'est sûr que, nous, on ne retient pas cet argent-là, mais...

n (10 h 10) n

Une voix: ...

M. Ringuet (Michel): Je pense que ce serait une décision... Oui. Je pourrais vous dire: Oui, j'ai un intérêt. Mais, à trop vouloir le faire, ça... Si vous prenez une université et vous lui dites: Plutôt que d'avoir 2 000 $ pour encadrer l'étudiant, tu as 6 000 $, 8 000 $, et que ton coût additionnel est de 500 $, mettons, par étudiant, bien tu vas avoir tendance plutôt à recruter à l'étranger.

Le Président (M. Chagnon): C'est ce que vous voulez faire, de toute façon.

M. Ringuet (Marcel): Je veux diversifier ma clientèle. Je veux augmenter. Mais est-ce... Moi, je pense que, comme société, aussi il faut considérer que nos universités sont principalement soutenues par l'impôt de nos contribuables. Et donc, amener l'impôt de nos contribuables à amener les universités à orienter principalement leur recrutement vers l'étranger, ce ne serait peut-être pas judicieux, là. Donc, pour moi...

Le Président (M. Chagnon): Je ne comprends pas votre raisonnement.

M. Ringuet (Marcel): Non?

Le Président (M. Chagnon): Si les gens paient cinq fois le prix...

M. Ringuet (Marcel): S'ils paient cinq fois le prix, là, moi, c'est plus rentable pour moi de d'accueillir un étudiant étranger qu'un étudiant québécois. Donc, ma décision de gestion, ça va être de dire: Je mets tout mon argent pour aller recruter l'étudiant étranger, c'est ça que je veux, et c'est ça que je veux uniquement, au détriment des étudiants québécois.

Donc, dans la répartition, ce serait plutôt de reconnaître... ce serait plutôt de reconnaître qu'il y a un différentiel qu'on doit garder, mais est-ce que c'est... Ma réflexion, c'est juste: Est-ce que c'est vraiment la totalité qui doit rester à l'université ou non? Je ne sais pas. Mais je ne sais pas si les collègues veulent ajouter? Mais ça va?

M. Ferron (Jean): Vous vouliez d'autres explications?

Le Président (M. Chagnon): Si vous en avez, nous autres, on est ici pour vous écouter.

M. Ferron (Jean): Peut-être mentionner qu'effectivement ces étudiants-là étrangers, plusieurs viennent dans des programmes de doctorat et maîtrise, et, disons que, la dernière année, sur 221, on en avait 114 à la maîtrise et 39 au doctorat. Donc, au-delà de l'aspect strictement monétaire, ces étudiants-là participent souvent à des grands projets internationaux, des collaborations qu'on a avec l'étranger. Donc, ça nous permet de maintenir la recherche à un niveau de pointe avec des échanges avec l'étranger.

Donc, ces étudiants-là, juste en complément de ce que le recteur vous disait tout à l'heure, il y en a plusieurs qui viennent à l'UQAR un an, dans les échanges CREPUQ ou autrement, et qui restent par après pour une deuxième année ou une troisième année, tout dépendant des programmes, et plusieurs d'entre eux vont s'installer en région après. Donc, il y a un aspect aussi, pour le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie particulièrement, un aspect démographique non négligeable. Donc ça aussi, c'est un...

Le Président (M. Chagnon): Donc, un intérêt supplémentaire à aller vous chercher des étudiants étrangers.

M. Ferron (Jean): Effectivement.

Le Président (M. Chagnon): Alors, vous, vous venez de comprendre où est l'intérêt du gouvernement du Québec à ce que vous le fassiez.

M. Ferron (Jean): Oui.

Le Président (M. Chagnon): Maintenant, je suis content d'apprendre... de constater que la députée, aussi, de Rimouski va l'apprendre en même temps. Et c'est évidemment une chose qui, pour vous, peut être intéressante à court et moyen terme.

M. Ringuet (Marcel): Oui. D'ailleurs, le ministère des Affaires internationales nous encourage à le faire. Cependant, quand le ministère de l'Éducation, lui, nous verse uniquement la parité au niveau des échanges CREPUQ, on nous décourage de le faire. Alors, si...

Le Président (M. Chagnon): Oui, c'est ça. Dites, vous avez en même temps, là, un niveau d'augmentation de vos clientèles qui est assez élevé du côté de Lévis. Le nouveau campus va amener à peu près 45 % de votre clientèle à Lévis. Et, si je regarde l'expansion des deux institutions, je ne sais pas, mais est-ce que vous n'avez pas l'impression qu'un jour il va y avoir de l'université... vous risquez d'avoir un recteur... un vice-recteur à Rimouski plutôt qu'un vice-recteur à Lévis?

M. Ringuet (Marcel): Nos lettres patentes indiquent que le siège social est à Rimouski. Donc, pour nous, il n'est pas question de modifier ces lettres patentes là.

Le Président (M. Chagnon): Je comprends.

M. Ringuet (Marcel): Bon, mais...

Le Président (M. Chagnon): Mais en fait éventuellement ça nous mène où, ça, ce genre d'exercice là, pour reprendre une expression qui a été sortie ici, où l'antenne risque d'être plus grosse, un jour, que la ligne de transmission?

M. Ringuet (Marcel): Ça nous mène où? Nous, on a un défi de démontrer... On est en train de tenter de démontrer qu'une université à deux campus, comme nous sommes, représente une économie pour tout le monde. Je pense qu'à Rimouski même... le campus à Rimouski même aurait de la difficulté à survivre et à payer seul sa fonction administrative, et je pense qu'à Lévis un campus comme celui-là à Lévis aurait aussi de la difficulté. Le partage des deux, le partage des expertises, le partage des gens nous mènent beaucoup plus loin. Les questions d'où cela nous mène, on les anticipe de différentes façons.

Ceci dit, faisons le portrait du campus de Lévis. Dans les universités en région, là où il y a de très fortes clientèles, des gros morceaux, c'est en administration, en éducation, en sciences infirmières. Partout. Et c'est ça qu'on fait à Lévis. Alors, les potentiels de nouveaux développements à Lévis sont dans des secteurs à plus faible clientèle. Alors, est-ce que les projections vont nous amener vraiment à ce que, dans cinq ans, on se retrouve et on aura le double d'étudiants à Lévis qu'à Rimouski, moi, je ne le crois pas, parce qu'il y a aussi un potentiel de développement à Rimouski.

Par ailleurs, pour moi, cette dynamique-là, siège social versus... à partir du moment où les étudiants du campus de Lévis, le personnel du campus de Lévis et les gens de la région de Lévis auront un sentiment d'être bien servis par l'UQAR et qu'on répondra aux besoins de Chaudière-Appalaches, je pense qu'on va dissiper cette discussion-là, parce que sinon ça nous mène beaucoup plus loin, là: est-ce que tous les sièges sociaux d'entreprises canadiennes qui sont à Montréal devraient déménager parce qu'il y a plus de clientèle à Toronto? Tu sais, c'est... Je pense qu'il faut... non, mais c'est la même question...

M. Bouchard (Vachon): Je suis curieux d'entendre les gens du développement régional répondre à cette question-là. Parce que, dans le fond, ce qui se pose...

Le Président (M. Chagnon): M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Ce qui se pose comme question sur le fond, là, on comprend très bien que les universités sont dans un contexte de compétition, disons-le, quant à leur capacité d'attirer des clientèles, mais j'ai trouvé particulièrement intéressant dans vos documents, notamment dans votre Bilan et perspectives, l'expression que vous utilisez en page 2 de 9 de votre Bilan et perspectives, sous le titre En termes d'objectifs: «L'UQAR désire mettre son expertise au service d'un développement social, culturel et économique responsable et durable dans le milieu où elle est implantée.» C'est un petit peu évanescent comme concept, «le milieu où elle est implantée». Dans le fond, là, quand on pense à vous, c'est sûr qu'on pense au développement régional puis on vous identifie au Bas-du-Fleuve. Bon, quand vous dites «Bas-du-Fleuve un petit peu étiré», là, vous n'allez pas jusqu'à englober Chaudière-Appalaches, c'est très évident, et...

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Bien, il y a une région qui s'appelle Chaudière-Appalaches puis une autre qui s'appelle Bas-du-Fleuve. Et la réflexion que je me faisais quand je lisais vos textes, c'est: est-ce qu'on vient de perdre, dans la région du Bas-du-Fleuve ? puis vous allez me dire non, vous allez m'expliquer pourquoi, puis je serais content de l'entendre ? ...mais est-ce qu'on vient de perdre un fanion extrêmement révélateur et représentatif du Bas-du-Fleuve? Parce que, lorsque vous dites «dans le milieu où elle est implantée», vous êtes obligé d'écrire ça maintenant, là, vous ne pouvez plus écrire «dans le Bas-du-Fleuve», vous êtes obligé d'écrire «dans le milieu où elle est implantée» puis de devenir très généraliste dans la façon de vous désigner. Je dois vous dire que ça m'interroge. Je ne m'objecte pas systématiquement contre l'idée, mais ça m'interroge sur votre fonction en tant que moteur du développement régional dans le Bas-du-Fleuve. Parce que, quelque part, non seulement le symbole s'étiole et devient un peu plus évanescent, mais en même temps vos énergies se déploient autrement. Et, moi, si j'étais votre partenaire du Bas-du-Fleuve puis que je voyais une expression comme celle-là, ça m'inquiéterait un brin.

n (10 h 20) n

M. Ringuet (Michel): L'inquiétude peut être là puis elle est là. Je veux dire, on le sent actuellement quand on est dans le Bas-Saint-Laurent. Mais, ceci dit, ça ne date pas d'hier, là, quand on parle de «milieu où elle est implantée», quand on se promène en Gaspésie, là, les gens vont nous dire: Ouais, vous êtes à Rimouski, vous n'êtes pas en Gaspésie, vous êtes à Rimouski. Le concept du milieu, du territoire, nous, on devait le défendre. On a reçu les gens de Baie-Comeau il y a 15 jours, les gens de Baie-Comeau demandent des services, on leur en offre puis en même temps... tu sais: est-ce qu'on est dans le territoire ou pas? Alors, ça a toujours été un petit peu une problématique pour l'UQAR de déborder du cadre de la ville de Rimouski même, parce que l'appellation, elle est là.

Dès la création de l'UQAR, les gens se sont dit: On n'est pas là juste pour servir la ville de Rimouski, on a un territoire à desservir, et on a commencé à aller donner des cours à Matane, on s'est rendus à Gaspé, à Baie-Comeau, puis on a remonté aussi, hein, Rivière-du-Loup, La Pocatière. Quand on a été rendus à La Pocatière, les gens de Montmagny ont dit: Nous autres aussi, on voudrait de la formation, et on est allés en donner. Et, quand on a été rendus à Montmagny, les gens de Lévis on dit: Nous autres aussi, puis on est allés en donner. Ça remonte à plus de 25 ans, ça. Si bien qu'au début des années quatre-vingt-dix, quand les gens en Chaudière-Appalaches, suite à un grand forum, ont revendiqué des services universitaires, le ministère de l'Éducation a dit: Je ne vous donne pas d'université, mais je vais demander à des universités de vous servir. Je vais demander à l'Université Laval de servir tout Beauce-Appalaches et Chaudière-Appalaches et en même temps, puisqu'il y a déjà des universités qui sont là, je vais aussi leur demander, donc l'UQAR sur le littoral et Trois-Rivières à Saint-Georges.

Il y a eu à ce moment-là un rapport, rapport Beaupré, qu'un certain nombre d'entre vous ont pu lire, qui spécifiait que les besoins de formation en Chaudière-Appalaches étaient en administration, en éducation, en sciences infirmières. Les gens de l'UQAR ont pris ce volume-là, ont été voir les gens du milieu puis ont dit: Est-ce que c'est vrai? Puis est-ce que vous en voulez, des services? Puis on va vous en offrir. Et ce qui a fait en sorte que les racines ont poussé, et maintenant... On avait de nos gens qui rencontraient le conseil municipal de la ville de Lévis, hier, pour discuter, pour échanger sur les services. Maintenant, plusieurs personnes de Chaudière-Appalaches nous voient comme étant l'université qui devrait répondre à certains services. Et je vous rejoins quand on... On a une gestion d'image à faire, là, parce qu'en même temps...

M. Bouchard (Vachon): Pas à peu près.

M. Ringuet (Michel): ...en même temps on veut être carrément l'université du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, mais, là aussi, on a des attaques. Vous lisez comme moi dans les journaux qu'il y a d'autres universités qui sont à Percé puis à Gaspé puis qui sont... Il y a d'autres universités qui viennent donner des formations à Rimouski.

M. Bouchard (Vachon): Mais là vous venez d'employer le mot «attaque». De fait, je pense que ce qui nous interpelle comme membres de cette commission, c'est la question du déploiement d'une cartographie nationale de la présence des universités, qui se fait avec un brin de rationnel et un brin de planification. Historiquement, l'Université Laval pourrait dire: Écoutez, on est dans l'alignement Québec?Chaudière-Appalaches depuis fort longtemps, on a développé des centres de recherche, d'expertise etc., avec Chaudière-Appalaches, etc. Mais la préoccupation demeure quand même quelque part à l'effet que, sur le plan de l'ensemble, on peut se demander s'il y a quelque part ce que j'appelle, moi, un pilote dans l'avion. Autrement dit, est-ce qu'on a un plan national de déploiement de nos universités? Puis je pense qu'il va falloir qu'on s'assoie convenablement autour d'une table à ce propos-là.

M. Ringuet (Michel): Oui.

M. Bouchard (Vachon): D'autre part, l'inquiétude peut demeurer en effet à propos de la capacité d'une université en région comme la vôtre, qui est vibrante, là, puis qui... moi, je n'ai pas de problème avec le dynamisme de l'Université du Québec à Rimouski, franchement j'ai beaucoup de respect pour ce qui se passe sur le campus, etc. ? puis sur la campus de Rimouski, que je connais un peu mieux que celui de Lévis, en passant ? mais je me pose quand même des questions, s'il n'y a pas une dilution des efforts dans une région qui a besoin au contraire d'une immersion totale de son université pour pouvoir se déployer comme région, alors que Chaudière-Appalaches, au niveau de son développement économique et de sa capacité de renouvellement démographique et de sa connexion sur un grand centre universitaire, c'est déjà relativement bien pourvu et mieux outillé au point de départ.

Alors, je m'inquiète de ça, je vous le dis très franchement, puis ce n'est pas le bon travail qui est fait, mais il y a tellement à investir dans le Bas-du-Fleuve, en Gaspésie, sur la Côte-Nord pour un développement de cette région-là que je me dis: Une université régionale comme ça ne devrait-elle pas concentrer toute cette énergie dont elle a besoin là?

M. Ringuet (Michel): Il faut comprendre que les énergies sont faites des gens qui constituent l'université. Disons-nous que, si nous n'avions pas la masse des 5 300 étudiants, si nous avions la masse des étudiants qui se retrouvent actuellement à Rimouski, nous aurions moins d'énergie.

M. Bouchard (Vachon): Ah! ça, c'est un vrai problème, ça.

M. Ringuet (Michel): Moins d'énergie totale. Et je vous rejoindrais si j'avais le sentiment qu'actuellement l'UQAR délaisse le Bas-Saint-Laurent pour s'occuper de Chaudière-Appalaches. Mais je vous jure que non. Ce qu'on constate actuellement, c'est que l'enveloppe totale de tout ce monde-là en même temps... je dirais, le tout fait beaucoup plus que les deux parties. Et on a tellement d'exemples du dynamisme que l'UQAR... que l'UQAR pousse actuellement dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie. Le maritime, on peut en parler longtemps, là, mais la création du Centre de recherche en biotechnologies marines n'aurait pas eu lieu il y a cinq ans si l'UQAR n'était pas là. Et maintenant on travaille sur un incubateur à Rimouski... Non, mais c'est juste pour... L'éolien, le dynamisme autour de l'éolien dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, c'est autour de l'UQAR que ça fonctionne.

M. Bouchard (Vachon): Ça a commencé avec Augustin St-Laurent à Cap-Chat.

M. Ringuet (Michel): Oui. Mais les gens nous identifient, du monde chez nous aussi qui sont des prophètes de l'éolien depuis plusieurs années. Donc, le pari qu'on fait, c'est effectivement ça, nous, que, tout le monde ensemble, on est plus forts, et on va pouvoir desservir l'ensemble de ce territoire-là. C'est notre mission de le desservir.

Mais je comprends vos inquiétudes. Et, quand on parle d'un pilote, je veux juste dire que faire ce qu'on fait en Chaudière-Appalaches, donc un campus où il y a 50 % des étudiants qui étudient à temps complet, avec les coûts que ça importe, c'est différent de s'en aller faire de la formation continue, deuxième cycle, à un endroit. Parce qu'on discutait avec les gens de Baie-Comeau, l'Université de Montréal va donner une formation de deuxième cycle à Baie-Comeau. Ils vont le faire en vidéoconférence, je ne sais pas trop comment. Mais, nous, on est en présentiel, on veut être là. Ça nous occasionne des coûts additionnels. Et je dois ici féliciter nos gens, nos acteurs, les chargés de cours qui sont là, qui prennent l'avion pour aller à Baie-Comeau, là, alors qu'on leur paie une charge de cours au même tarif que les autres universités. Mais les gens sont prêts à faire ça.

M. Bouchard (Vachon): Simple curiosité, M. Ringuet...

M. Ringuet (Michel): J'avais M. Bénéteau qui voulait ajouter.

M. Bouchard (Vachon): Ah! M. Bénéteau. Il a un beau nom pour le Bas-du-Fleuve!

Le Président (M. Chagnon): Un nom de voilier?

M. Bénéteau (Daniel): Malheureusement, il n'y a aucun lien. C'est une Française, hein, qui est propriétaire. Vraiment, le défi de desservir deux régions qui ont des similitudes, hein, qu'on parle du bois, de l'agroalimentaire, qu'on parle de développement régional, qu'on parle de PME, alors le fait d'avoir deux campus qui sont indissociables nous donne la masse critique puis les ressources pour mieux répondre à l'ensemble de la région. Au fond, je reprends les mots de Michel. Alors, au fond, c'est cette synergie-là qui est gagnante pour le Québec, parce que ça va demander moins de ressources pour finalement répondre à des attentes puis des besoins qui sont, sur un territoire, énormes. Alors, le défi, c'est les ressources. Alors, nos ressources à Lévis rendent des services dans le Bas-du-Fleuve, et vice versa. Alors, le défi pour nous, c'est de faire un tout qui est vraiment en synergie puis le pus gros possible, qui dispose de plus de ressources possible, pour répondre le plus possible, le mieux possible aux besoins de ces régions-là.

M. Bouchard (Vachon): Alors, peut-être une question supplémentaire, M. le Président, là-dessus. Je conçois, je vous entends bien sur la question de votre préoccupation de répondre aux besoins des deux régions et de votre théorie de la synergie pour arriver à mieux le faire puis éventuellement à ce que ça retombe sur les deux régions. La région de Chaudière-Appalaches, lorsqu'on regarde la cartographie... ou le menu des formations qui sont offertes à la région, est-ce que ce menu-là a été élaboré, concocté, planifié en collaboration avec l'Université Laval? Est-ce que, quelque part, il y a eu des propositions et des protocoles de service en regard de la population? J'aimerais ça qu'on puisse voir comment ça se fait dans les faits, là, parce que...

M. Ringuet (Michel): Il y a eu un protocole, qui date de longtemps, là, du temps du rapport Beaupré ou au début, là, quand on a donné le service.

Le Président (M. Chagnon): ...

M. Ringuet (Michel): ...oui. Donc, on parle du début des années quatre-vingt-dix. Il y a eu un protocole effectivement mais qui n'a pas été mis à jour. Ça, c'est clair. Mais, à plusieurs tables, les gens de Laval et de l'UQAR s'assoient. Je parlerai... Peut-être, Daniel Rousse pourrait vous en parler, on a une table de la gestion de l'enseignement primaire, secondaire avec le ministère. Et les universités et les commissions scolaires sont là. Et les deux universités sont là. Et on me raconte qu'il y a un dynamisme là intéressant. Donc, planifier ensemble cette offre de service.

En sciences infirmières, le réseautage s'est fait différemment, ça s'est fait à l'invitation aussi du ministère, où on nous a invités à faire partie de regroupements.

Une voix: De consortiums.

M. Ringuet (Michel): Consortiums avec les cégeps. Donc...

Le Président (M. Chagnon): D.E.C.-bac.

n (10 h 30) n

M. Ringuet (Michel): Les D.E.C.-bacs, c'est ça. Alors, on est dans une dynamique où les deux universités, le cégep Lévis-Lauzon est associé aux deux universités, et puis, bon, etc.

En administration et sciences comptables, ça se gère différemment. Ce qu'on doit avouer par contre, c'est que la grille actuelle de financement ne nous amène pas nécessairement à aller voir notre voisin quand on a une idée de développement de nouveau programme, ça, c'est clair donc. Et je pense que Michel Pigeon vous a un peu dit la même chose quand il a comparu, avant Noël, où il a dit: Le problème n'est pas au niveau des professeurs ni des recteurs, c'est la grille qui nous oblige à agir d'une certaine façon. Il y aurait là une logique, effectivement.

Ceci dit, nous, on a plein de propositions de lancements de programmes, chez nous, où on dit: Non, le service, il est offert par Laval, puis on n'ira pas concurrencer, là. Quand on amène le travail social ? il y a une volonté d'amener le travail social ? c'est qu'on nous dit qu'il y a un besoin en Chaudière-Appalaches qui n'est pas comblé par l'Université Laval et qu'il faudrait jouer, tu sais. Bon, alors, tu sais, on joue en tout respect de ce qui est offert par l'Université Laval. Daniel?

M. Rousse (Daniel R.): Oui, en effet, c'est une de nos préoccupations. Je vous donne un exemple: la semaine prochaine, le 6 février, on a une rencontre avec le doyen de la Faculté des sciences de l'éducation pour discuter de l'offre de formation continue qu'on va offrir aux 10 commissions scolaires de la région 03-12. Donc ça, c'est quelque chose qui est très intéressant. On essaie d'être concertés. Je suis tout à fait d'accord avec vous que ça prendrait un plan plus élaboré, mais, pour nous, pour l'instant on fait au mieux. Et je pense que ce que M. Beaupré a fait à l'époque en conférant à l'UQAR la mission d'offrir des services sur le littoral, c'était parce qu'il en avait besoin, et c'est ce qu'on fait. On est des contribuables, nous aussi, donc on essaie de faire faire du chemin à nos impôts, pour paraphraser une publicité antérieure du MTQ, et on essaie d'avoir une action concertée avec Laval dans la mesure où c'est possible, bien entendu.

On a d'autres projets de programmes qu'on analyse et qu'on décide de reléguer aux oubliettes en se disant: Bien, écoutez, il y a 17 inscriptions dans ce programme-là à l'Université Laval, qui offre déjà le service, ça ne donnerait rien de faire cette chose-là. Effectivement, on est en synergie. Puis, imaginez donc l'UQAR, avec son siège social à Rimouski, elle a un campus académique à Rimouski, un campus académique à Lévis, puis elle a aussi des bureaux aussi qui tentent d'offrir des services un peu partout. Il faut regarder une grande entité. Peut-être effectivement qu'avec la taille qu'on a il est très difficile pour nous d'offrir une mission de Lotbinière jusqu'à Gaspé, puis en ayant une brèche à Baie-Comeau, puis en allant jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine, oui. Mais on a décidé de le faire; c'est inscrit dans la mission de l'université, l'accessibilité, le développement des territoires, l'avancement des connaissances.

Et ce que M. Bénéteau a dit, ça a l'air d'un beau mot, là, la synergie, mais ça marche. La preuve, c'est que notre situation s'améliore malgré le fait que la démographie ne nous aide certainement pas, et ce sont les régions périphériques qui pâtissent davantage de la décroissance démographique. Et on est très au fait, pour revenir à l'international, qu'on veut bien y aller, mais on tente de trouver une formule qui ne nous pénalisera pas, là. Quand des étudiants arrivent, on leur achète des tuques puis des mitaines puis on leur trouve un logement, puis... je veux dire, c'est extrêmement coûteux pour notre système d'avoir un étudiant étranger. Alors, pour nous, on ne lance pas ça de façon extrêmement débridée, parce qu'à la taille qu'on a, on n'a pas la résilience d'une très grande université qui peut se permettre d'absorber un grand déficit puis de revenir par la suite. On y va parcimonieusement.

Le Président (M. Chagnon): À Lévis, si je comprends bien, vous avez en fait trois importantes écoles professionnelles.

M. Rousse (Daniel R.): Trois grands axes. Et d'ailleurs on le dit souvent.

Le Président (M. Chagnon): En santé, en éducation, en formation des maîtres et puis en administration. Donc, ce n'est pas un endroit où vous faites de la recherche. Est-ce qu'il y a le deuxième et le troisième cycle à Lévis?

M. Ringuet (Michel): Oui, en éducation, on donne deuxième et troisième cycle; en administration, on donne le MBA pour cadres, on donne la maîtrise en gestion de projets; et, en sciences infirmières, dès qu'on aura assez de professeurs pour le faire, on entend aussi offrir la maîtrise. On a un problème de ressources professorales.

Le Président (M. Chagnon): Pour... en administration?

M. Ringuet (Michel): En sciences infirmières.

Le Président (M. Chagnon): Sciences infirmières.

M. Ringuet (Michel): En administration, on a le MBA et gestion de projets. Mais, en éducation, on fait du deuxième et troisième cycle. Et on a actuellement... Parce que c'est aussi notre volonté de faire du campus de Lévis un vrai campus où il se fera de la recherche dynamique, et on a une équipe actuellement en adaptation scolaire qui est vraiment bien outillée.

J'ajouterais à ce que Daniel a dit, qu'en bout de ligne, là, ce qu'il faut se dire aussi, c'est que la compétition, ce n'est pas mauvais. Et le fait d'attirer des étudiants par ce qu'on fait bien ? c'est ça, là, on ne parle pas de publicité, on fait bien ? on leur donne une bonne formation, on donne un bon accès au marché du travail... si mon voisin d'en face fait mieux que moi, l'étudiant, il ne viendra pas chez nous. Alors, moi, je suis persuadé que cette compétitivité-là a fait en sorte que nos universités sont meilleures.

Le Président (M. Chagnon): Sachez que tous ici autour de cette table, en tout cas de ce côté-ci de la table, concourent avec vous avec l'idée qu'il faut essayer d'augmenter le plus possible la persistance d'études universitaires puis l'élargissement des études universitaires pour les citoyens. Alors, si, par la multiplication du réseau de services, on y arrive, c'est une méthode, mais mon collègue pose des questions fort pertinentes sur l'organisation puis la rationalisation de la façon d'y arriver. Et vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Rousse (Daniel R.): Oui. On parle souvent du campus de Lévis comme étant une école professionnalisante, et je dois l'admettre, vous avez bien raison, mais j'aimerais signaler à l'Assemblée que la première thèse de doctorat a été soutenue le 16 décembre au campus de Lévis. Donc, s'il y a une thèse de doctorat en éducation qui a été soutenue à cet endroit-là, c'est qu'il y a de la recherche qui s'y effectue depuis bon nombre d'années. Donc, ça commence. Mais c'est ce qui m'a passionné en fait dans cette opportunité que d'aller à Lévis, c'est de démarrer quelque chose, là, qui serait plus que l'école professionnalisante qu'on avait auparavant.

Le Président (M. Chagnon): Alors, question supplémentaire à celle-là: Comment l'organisation de la recherche se fait avec la maison mère? Le transmetteur est quand même assez loin, les gens qui s'occupent de la recherche, ils sont à chacun des deux campus ou encore ils sont organisés par le campus principal?

M. Rousse (Daniel R.): Pour la gestion, je vais parler... je vais céder la parole à M. Ferron, mais je vais revenir sur l'exemple de la soutenance de doctorat, qui avait lieu en simultané, en présentiel à Lévis, avec des professeurs en vidéoconférence et des administrateurs des programmes à Rimouski et avec une université européenne, qui est située à Tours, en France. Donc, aujourd'hui, avec la vidéoconférence, on arrive à faire des choses intéressantes.

Le Président (M. Chagnon): C'est évident.

M. Rousse (Daniel R.): Mais, pour la gestion, Jean va répondre.

M. Ferron (Jean): Oui. Pour ce qui est de la gestion, d'abord, auprès des organismes subventionnaires, ça prend un interlocuteur, pas deux. Le doyen des études avancées de la recherche fait beaucoup de va-et-vient entre les deux campus. D'ailleurs, il est là aujourd'hui ? la preuve ? et...

Le Président (M. Chagnon): Vous l'avez emmené avec vous. Vous allez le reprendre en passant.

M. Ferron (Jean): Oui, c'est ça. Oui, on essaie de faire de l'économie en faisant du covoiturage! Mais, au-delà de ça, il y a beaucoup de jeunes professeurs qui rentrent dans le système, parce qu'on a des départs à la retraite, là, ce qui fait qu'on est en train de renouveler le corps professoral, et ces jeunes professeurs là qui arrivent justement aussi bien au campus de Lévis qu'au campus de Rimouski, ce sont des gens qui sont dynamiques, qui s'impliquent de plus en plus en recherche. Donc, on les accompagne et on a même mis, conjointement avec le syndicat des professeurs, un programme pour venir en soutien aux nouveaux professeurs, pour les aider à démarrer en recherche. Donc, le syndicat en finance une partie, même. Ça fait que, vous voyez, on essaie d'être ingénieux. C'est dans le cadre de la campagne majeure de financement qu'on est allés avec ça.

Puis, le recteur parlait tout à l'heure du renforcement de capacité de recherche payé par le CRSNG, un programme auquel... un programme pilote pour lequel on a obtenu du financement. Ça nous permet aussi d'épauler les jeunes chercheurs qui démarrent en recherche, comme ça, puis ça, on le fait aussi bien... indifféremment d'un campus à l'autre.

M. Ringuet (Michel): Ajoutons à ça que notre objectif structurel, c'est que les étudiants et les professeurs qui doivent recevoir un service de première ligne, un étudiant qui doit avoir l'information sur un programme ou le professeur qui doit avoir de l'information sur, lui aussi, un programme de subvention à quelque part, doit recevoir le même service, que l'étudiant ou le prof soit à Rimouski ou à Lévis. Cependant, le service de support, qui n'est pas en contact direct avec l'individu, lui, peut être à un endroit ou à l'autre. Mais vraiment on a comme objectif que le professeur de Lévis reçoive le même service. Actuellement, la principale difficulté du développement de la recherche à Lévis, c'est que la masse critique de gens qui sont vraiment animés autour de la recherche n'est pas présente. Donc, quand on voit notre succès à l'Institut des sciences de la mer, c'est qu'on a 20 profs qui font recherche et études graduées. Il y a un dynamisme...

Le Président (M. Chagnon): ...masse critique. Il y a une masse critique là.

M. Ringuet (Michel): ...et ces gens-là viennent à la cafétéria puis discutent avec des gens d'autres secteurs moins bien nantis du côté recherche et donc font de l'émulation. Ça, on va l'avouer, ça nous manque un peu à Lévis. Il faut arriver à l'implanter à un moment donné.

Le Président (M. Chagnon): Merci. Mme la députée de Rimouski. M. le député de Vimont après.

n (10 h 40) n

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Alors, bienvenue à toute l'équipe de l'UQAR. Je trouve que cette discussion est très pertinente et aussi éclairante, parce que, vous savez, les écrits de la commission permettront toujours aux citoyens de la région, que ce soit celle du Bas-Saint-Laurent ou de Chaudière-Appalaches, d'avoir l'heure juste par rapport à ces questions qui se posent, qui en quelque sorte sont normales. Moi, j'étais surprise qu'ils la sortent, la question, mais d'un autre côté je me dis non, parce qu'elle a cours aussi au sein de la population, et ça a donné l'occasion à vous, les premiers responsables de l'UQAR, d'y répondre de façon tout à fait adéquate. Alors, pour cela, je vous dis merci.

Maintenant, je regardais les données qu'on a sur l'UQAR. Des fois, je me dis: Bien, c'est des choses peut-être que je sais un peu plus parce que je me préoccupe de l'université qui dessert non seulement mon comté, mais ma région, et qui est, oui, une petite université, mais une grande université. Ça, je pense qu'il ne faut pas être gêné de le dire. Et ce n'est pas parce qu'on est en région qu'on ne connaît pas ce qu'est la recherche, qu'on ne connaît ce qu'est l'expertise et qu'on n'a pas l'ouverture qu'il faut. Ça, je pense qu'il faut le réaffirmer à chaque fois qu'on en a l'occasion.

Moi, j'aimerais savoir la proportion des femmes aux cycles supérieurs. On sait tous que le profil d'études des femmes et des hommes est en quelque sorte ancré, hein, dans certains créneaux, les hommes sont en sciences pures, les femmes sont en santé, en éducation, etc., mais, un peu dans cette même lignée là, j'aimerais savoir: Est-ce qu'au niveau du doctorat, au niveau de la maîtrise, la participation des femmes se maintient? Et à quel niveau? Je ne veux pas vous embêter, là. C'est parce que je pense que c'est important aussi, là, si on veut s'assurer... Dans le fond, c'est de connaître leur persévérance à ces niveaux-là. Si vous n'avez pas la réponse immédiatement, on peut toujours y revenir plus tard. Ce que je voudrais savoir: C'est quoi, le ratio...

Le Président (M. Chagnon): Les réponses, on les a dans l'annexe I.

Mme Charest (Rimouski): Pardon?

Le Président (M. Chagnon): Dans l'annexe I, nous avons les réponses.

Mme Charest (Rimouski): Peut-être. Parce que ce qu'on me dit, c'est que les femmes sont... Bon. Concernant la proportion d'hommes et de femmes selon le grade, on note que, pour l'ensemble, les premières sont plus représentées au premier cycle.

M. Ringuet (Michel): Mais, voyez-vous, Mme Charest, effectivement, à l'annexe I, je ne sais pas si vous avez le... à la dernière page, les indicatifs, ce qu'on indique, c'est qu'à la maîtrise il y a 229 hommes pour 295 femmes, donc...

Mme Charest (Rimouski): Oui, c'est peut-être ça que je n'ai pas vu. O.K.

M. Ringuet (Michel): Oui. Alors qu'au doctorat la proportion s'inverse, et on a 53 hommes pour 38 femmes. Et ça, je pense, la majorité des universités doivent vivre ça. Effectivement, ce qu'on constate, c'est une proportion beaucoup plus forte de femmes au premier cycle, puis là, là, c'est vraiment évident, là, compte tenu, entre autres, de nos programmes forts. Nos principaux programmes, c'est l'éducation, sciences infirmières, puis, en éducation, c'est beaucoup préscolaire, primaire, alors on a 2 300 femmes pour 789 hommes, O.K., c'est...

Mme Charest (Rimouski): Au premier cycle.

M. Ringuet (Michel): Au premier cycle. Aux études avancées, 295 femmes, 229 hommes, donc encore une majorité de femmes, mais parce qu'on a des programmes en arts, lettres et sciences humaines, développement régional, littérature, et tout ça, forte concentration de femmes.

Aux études de troisième cycle, notre programme le plus important, celui de doctorat en océanographie, là on va retrouver une majorité d'hommes, et c'est pour ça qu'on se retrouve avec 53 hommes, 38 femmes. Et ces chiffres-là sont à peu près...

Mme Charest (Rimouski): Et, à l'UQAR, vous êtes très actifs dans plusieurs secteurs de recherche. On parle souvent des sciences de la mer, mais il y a aussi d'autres secteurs.

Vous attribuez à quoi surtout la hausse des octrois de recherche? Est-ce que c'est... Bon, on peut dire le dynamisme, là...

M. Ringuet (Michel): Notre compétence!

Mme Charest (Rimouski): ...mais, au-delà du dynamisme, parce que parfois on a beau être dynamique, ça ne répond pas toujours à la commande. Je ne sais pas. Est-ce que vous avez des éléments particuliers qui...

M. Ferron (Jean): Oui. Deux choses. D'abord, je vous signale que, dans la pochette que le recteur vous a remise, vous avez le plan stratégique de développement de la recherche à l'Université du Québec à Rimouski, qu'on doit faire pour les organismes subventionnaires.

Pourquoi on performe mieux en recherche, c'est qu'on a créé des groupes. Par exemple, juste vous donner un exemple, en géographie, on a complètement renouvelé le corps professoral, on a une équipe très dynamique qui s'occupe, entre autres, de géodynamique côtière. Donc, on a créé une équipe où on a un spécialiste des avalanches, un autre des bassins versants puis un autre d'érosion côtière. Donc, il y a une logique, et là on vient d'engager un spécialiste de la télédétection, dans tout ça. Donc, on a créé des équipes, et là il y a un effet synergique dans ces équipes-là qui fait qu'elles sont plus performantes, après ça, pour aller chercher des subventions aux niveaux national et international.

Mme Charest (Rimouski): Parce que, dans ce secteur-là comme ailleurs, on sait très bien que la notoriété parfois aide à avoir de la recherche. Mais, pour avoir cette notoriété-là, il faut avoir comme une certaine expertise, une expérience, et la faire reconnaître, c'est une chose, et de tout ça découle si les subventions vont tomber automatiquement ou si vous aller les gagner, les...

M. Ringuet (Michel): Je rajouterais à ça qu'il faut réaliser que, dans l'ensemble des universités en région, il y a carrément une évolution par rapport à ce qu'on pouvait être il y a 20, 25 ans, où on était surtout des universités de premier cycle avec beaucoup d'étudiants à temps partiel, et tout, alors il y avait moins de pression autour de la recherche.

Maintenant, quand on embauche un professeur à l'UQAR, et je le répète, le tiers de nos profs ont moins de quatre ans, chez nous, de présence chez nous, ces gens-là savent très bien qu'ils doivent envisager une carrière de recherche et l'envisager, comme le dit Jean, à l'intérieur des créneaux qu'on soutient déjà. Si, chez nous, embaucher... je ne sais pas, un professeur en histoire qui vraiment ne se verrait pas du tout collaborer avec le développement régional, on aurait de la difficulté, parce que les gens savent que chez nous, en sciences humaines, sciences sociales, notre force, c'est le développement régional, et donc... et les gens le savent. Et maintenant, de plus en plus, ce qu'on constate, c'est que les gens qui postulent chez nous pour des postes de professeur, c'est en voulant travailler sur la nordicité, sur... en sciences marines, en sciences de la mer, où les gens connaissent nos créneaux. Le plan d'orientation... le plan de développement de la recherche a été très bénéfique à cet égard-là. Nos créneaux sont choisis. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas évolutif, là. La géographie telle qu'elle existe maintenant à l'UQAR n'existait pas comme telle il y a quatre, cinq ans, là. Vraiment, on a mis l'emphase sur certains aspects de la géographie qui étaient mal couverts ailleurs.

Alors, c'est le développement de masses critiques, même si elles sont moins importantes qu'ailleurs. Le réseautage aussi. On encourage beaucoup nos chercheurs à faire partie des grands réseaux. Et, quand ils font partie des grands réseaux, nécessairement ça a un impact sur leur carrière personnelle et sur leur capacité à aller chercher des subventions.

Mme Charest (Rimouski): Une dernière question, si M. le Président me le permet, je reviendrais sur toute la question du renouvellement du corps professoral. Vous avez renouvelé, mais vous avez dit aussi, dans vos documents, que vous aviez arrêté, là, question de budget.

M. Ringuet (Michel): Bien, quand vous voyez les statistiques, l'année passée et il y a deux ans, on a embauché seulement cinq nouveaux professeurs. C'était les moyens qu'on avait.

Mme Charest (Rimouski): Oui, mais, là-dessus, j'aimerais quand même vous nous en parliez un peu plus, et ce que je veux savoir aussi: est-ce que c'est plus difficile d'engager et de retenir des profs à Rimouski qu'à Lévis, ou s'il n'y a pas de différence? Et, là-dessus... et c'est... et les difficultés d'embauche, là, est-ce qu'elles sont strictement une question de sous pour l'UQAR?

M. Ringuet (Michel): Bon, lorsqu'on n'en n'a pas les moyens, il est évident que tout ce qu'on fait, c'est le remplacement des gens qui quittent, au mieux. Cette année, l'annonce du réinvestissement... le premier geste qu'on a posé en connaissant le réinvestissement, c'est faire une répartition des postes de professeurs, où on rajoute un certain nombre de postes de professeurs à notre bassin, parce que vous le constatez aussi, qu'on a un taux de dispensation des cours par les professeurs très faible. Et donc...

Mme Charest (Rimouski): Là, on ne parle pas de chargés de cours, on parle de profs.

M. Ringuet (Michel): On parle de profs réguliers. Donc, quand un cours n'est pas donné par un prof, il est donné par un chargé de cours. Je ne porte pas de jugement ici sur l'encadrement effectué par les chargés de cours, il est excellent. On a d'excellents chargés de cours, mais le professeur, il a d'autres fonctions à assumer, la gestion...

Mme Charest (Rimouski): La tâche n'est pas la même.

M. Ringuet (Michel): Et donc... Est-ce que c'est une question... Pourquoi on a un si faible taux de cours assumés par des professeurs? C'est clair que c'est une question budgétaire. Si on avait des meilleurs budgets, on aurait un corps...

Mme Charest (Rimouski): Ça vous prendrait combien pour répondre à vos besoins?

M. Ringuet (Michel): Allons-y dans la lignée des grands chiffres qui sont toujours sortis: pour atteindre la moyenne nationale, 375 millions à l'échelle du Québec, nous, on représente à peu près 2 % de la masse, donc, si on fait le calcul, ça vous dira un éventail.

Vous parlez de difficulté de recruter: tout dépend des disciplines. Première chose, tout dépend des disciplines, là, c'est...

Mme Charest (Rimouski): Ça dépend du bassin de profs disponibles, ça dépend de la discipline?

n (10 h 50) n

M. Ringuet (Michel): Je vous parlais de sciences infirmières tout à l'heure, c'est extrêmement difficile de recruter un doctorat en sciences infirmières. Quelqu'un qui est détenteur... il n'y en a pas. Donc, c'est très difficile, alors il faut recruter à la maîtrise et permettre à ces gens-là d'aller poursuivre un doctorat. Et c'est aussi difficile à Rimouski qu'à Lévis, là, dans ces matières-là, c'est très difficile.

Par contre, moi, je veux... On se félicite, à l'UQAR, parce que généralement, quand quelqu'un accepte un emploi chez nous, il reste chez nous. On a un très faible taux de déperdition soit vers d'autres universités ou soit vers un retour à la profession.

Mme Charest (Rimouski): Le taux de rétention est fort.

M. Ringuet (Michel): Taux de rétention très intéressant. Et les gens qui sont à Lévis et ceux qui sont à Rimouski ne sont pas nécessairement les mêmes personnes. C'est clair que la personne qui vient à Rimouski, c'est quelqu'un, assez souvent, pour qui la qualité de vie naturelle qu'on retrouve à Rimouski est un facteur de choix professionnel, alors qu'à Lévis c'est quelqu'un qui préfère demeurer dans un contexte plus urbain. Et on s'aperçoit de plus en plus que ces facteurs-là jouent dans l'intérêt de la personne pour postuler au niveau de l'emploi. Il y a quelques années, les emplois étaient tellement rares que vraiment on postulait sur tout. Maintenant, toutes les universités sont en embauche, et en embauche très large, alors il y a plus de postes de professeur disponibles, et les gens choisissent en fonction d'un certain nombre d'autres facteurs. Je ne sais pas, Jean, si tu veux rajouter?

M. Ferron (Jean): Peut-être rajouter effectivement qu'il y avait un article dans Le Devoir, en fin de semaine dernière, où on parlait qu'il y avait un taux d'abandon assez élevé dans certaines universités. Heureusement, on n'a pas... Je pense qu'en quatre ans il y a deux profs qui ont quitté, pas nécessairement pour aller ailleurs, là, qui ont retourné dans la pratique...

Mme Charest (Rimouski): ...quitté l'enseignement.

M. Ferron (Jean): ...qui ont quitté l'enseignement pour retourner dans la pratique. Mais en général on a un très bon taux de rétention de nos profs, d'une part. Et, moi, j'appréhendais toujours le recrutement des jeunes profs, et on s'aperçoit que les jeunes profs aiment venir en région ? vous aimez bien Rimouski, vous en savez quelque chose ? et la qualité de vie est là, le milieu culturel, l'éducation, il y a un milieu de vie qui est intéressant pour le jeune prof, pour venir élever leur famille là. Donc ça, ça joue beaucoup en notre faveur. On s'aperçoit qu'il y a plusieurs jeunes profs qui quittent la ville, même certains qui avaient des offres d'universités de grande taille en milieu urbain qui ont préféré venir à Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): En terminant, j'aimerais demander à M. le recteur d'informer la commission... Parce que vous avez aussi le sens de l'innovation, et vous avez déposé ou vous allez déposer prochainement un projet au niveau de la musique, de l'enseignement. Est-ce que vous êtes prêt à en parler ou...

M. Ringuet (Michel): Oui, tout à fait.

Mme Charest (Rimouski): Oui? Alors, j'aimerais bien que vous expliquiez aux membres de la commission comment une université en région innove. Et ce programme-là, je pense, est tout à fait le reflet de votre capacité d'innovation, et ce serait important de l'entendre.

M. Ringuet (Michel): Vous...

M. Bouchard (Vachon): Ça va être de la musique à nos oreilles.

M. Ringuet (Michel): C'en est aux miennes aussi, parce que...

Mme Charest (Rimouski): En tout cas, c'en est aux nôtres.

M. Ringuet (Michel): Lors de ma première sortie publique, quand je suis devenu recteur, en mars 2003, j'avais été rencontrer la Chambre de commerce à Rimouski et j'avais pris un engagement d'amener de la musique à l'université. C'était parce que Rimouski est tellement une ville musicale, les gens la connaissent beaucoup par le festival de jazz, mais on a un orchestre symphonique, et tout, donc c'était... Et plusieurs fois le conservatoire était venu nous dire comment c'était important de trouver un moyen de conserver nos jeunes musiciens chez nous.

Vous connaissez peut-être les baccalauréats en enseignement de la musique, c'est un peu le même modèle que le baccalauréat en enseignement en activité physique, hein? C'est un bac en enseignement tout à fait à part, alors que les bacs en enseignement secondaire, dans d'autres secteurs, c'est un tronc commun suivi d'un... où on complète certaines disciplines, soit scientifiques ou société, et tout.

L'innovation ? et on a maintenant l'avis du comité d'accréditation des programmes en enseignement; l'innovation ? chez nous, ça a été de monter un bac en enseignement de la musique sur ce second modèle, donc où on va avoir l'aspect pédagogie, l'aspect stage, sous une certaine forme de tronc commun, et la discipline octroyée par le conservatoire. Donc, on ne se transforme pas en un département de musique qui va assurer le volet disciplinaire, on s'associe au conservatoire, donc ce sont les étudiants qui feront les diplômes... Alors, l'étudiant pourra faire son bac en musique au conservatoire, parce que maintenant ces gens-là peuvent octroyer un bac en musique, et, nous, on va reconnaître un 60 ou 66 crédits effectués au conservatoire comme étant le volet disciplinaire de notre bac d'enseignement de la musique, et on va s'occuper de la formation pédagogique, si bien qu'en cinq ans l'étudiant va pouvoir sortir avec deux bacs: le bac en musique et le bac en enseignement de la musique. C'est vraiment un volet très novateur, et ça ne s'est pas fait ailleurs jusqu'à présent, et on économise beaucoup. Si les deux ministères peuvent s'entendre, parce que là on un ministère...

Mme Charest (Rimouski): S'entendre?

M. Ringuet (Michel): ...s'entendre, le ministère de l'Éducation et le ministère des Affaires culturelles, les responsables des conservatoires... Mais je pense que la discussion va très bien à ce niveau-là. Les gens voient notre projet comme vraiment comme un projet pilote très novateur, très positif, on en est très contents. Et il y a un volet discussion avec le cégep aussi, parce que, nous, on parle de deux bacs, mais, avec le cégep et le conservatoire, eux autres parlent de deux D.E.C., hein? Il y a une possibilité de faire un double D.E.C.: D.E.C musique et D.E.C. sciences ou... Alors, tout ça s'est intégré, là, donc c'est vraiment trois institutions d'enseignement qui démontrent une belle collaboration.

Mme Charest (Rimouski): C'est parce que ça permet aussi de démontrer le rôle que joue l'université dans une région donnée. Ce bac en musique va permettre de consolider à la fois la vocation du conservatoire, de l'école de musique, l'orchestre symphonique, le choeur de chambre, etc. Donc, le rôle d'une université en région, c'est important, et ce n'est pas strictement créneau par créneau, là, c'est dans toutes les sphères de l'activité...

M. Ringuet (Michel): Au niveau culturel, c'est extrêmement important.

Mme Charest (Rimouski): Tout à fait. Merci et bonne fin de journée à chacun et chacune d'entre vous.

M. Ringuet (Michel): Merci, Mme Charest.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup. M. le député de Vimont et Mme la députée de Taillon.

M. Auclair: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, madame, bonjour. Très intéressant, votre situation en ce moment, à l'UQAR, avec votre agrandissement, votre cheminement. Parce qu'on a eu, la semaine dernière, les gens de l'UQO, de l'Outaouais, qui vivent également un peu la même réalité que vous. Et, au niveau... vous avez parlé tantôt au niveau des services, services aux élèves, services aux enseignants, professeurs et chargés de cours. L'UQO nous parlait qu'eux autres, lorsqu'ils vont ouvrir leur prochain campus, à Saint-Jérôme, ces services-là suivaient. Et, si j'ai bien saisi, de votre côté, ce n'est pas tout à fait... au niveau des services étudiants, services... parce qu'eux autres parlaient même de services de psychologue, et tout ça. Est-ce que, de votre côté, j'ai bien saisi que c'est également, à Lévis, où vous alliez avoir cette possibilité-là, ou, malheureusement, pour une réalité terrain en ce moment...

M. Ringuet (Michel): On les a déjà, les 2 400 étudiants... Avec la limite, là... la limite qui nous était imposée était celle de la limite physique où on se retrouvait. Est-ce qu'on pouvait avoir de l'activité physique au campus de Lévis comme à Rimouski? Non. Parce que, dans les lieux où on se trouvait, on ne pouvait pas en faire. Dans le nouveau campus, où on va être en septembre prochain, il va avoir un centre de conditionnement physique, et tout. Alors...

M. Auclair: Mais ce n'était pas sur ce volet-là, moi, que...

M. Ringuet (Michel): Non, mais je prenais cet exemple-là. Mais, les services aux étudiants, pour nous, notre intention, notre volonté, et on y travaille, c'est de donner le même service aux étudiants à Lévis ou à Rimouski. Je prendrais un autre exemple. On encourage beaucoup nos étudiants à développer des activités para-académiques, on les accompagne là-dedans, plusieurs de nos étudiants réussissent très bien. Au concours Forces Avenir, un concours que vous connaissez où on reconnaît vraiment les bons coups des étudiants québécois annuellement, c'est un gala où il faut aller, parce que la jeunesse québécoise qu'on voit au gala Forces Avenir, c'est tellement magnifique, là... Mais les étudiants de l'UQAR performent bien à ce concours-là, on reçoit des prix presque à chaque année puis en plus forte proportion. Et il y a des étudiants de Lévis qui se rendent là, Péd@linux, je pourrais donner un certain nombre... Pourquoi? Parce qu'on accompagne aussi les étudiants dans leurs activités para-académiques de ce type-là.

n (11 heures) n

M. Auclair: Parce que vous comprendrez, le questionnement qui arrive aux membres de la commission, et dans mon cas, c'est qu'on voit l'expansion d'universités, on voit... et c'est plus... et ça devient dans le fond une compétition à la recherche de qui?, de l'étudiant, hein? Parce que c'est vraiment la réalité en ce moment, on a un problème parce qu'on finance au niveau... par étudiant, on a un financement à tête de pipe, comme on dit comme expression, donc cette réalité fait en sorte que vous êtes en compétition, chacun, pour une partie de cette tarte-là. Puis, au Québec, malheureusement, en tout cas ce qu'on voit, ce qu'on entend dans les écoles, le nombre d'étudiants n'est pas en croissance majeure.

Mais je vois, de votre côté, que vous avez une partie importante d'étudiants à temps partiel. Donc, temps partiel peut dire aussi, dans le fond, de la formation continue, dans le fond... Surtout que vous êtes près d'un bassin. J'avais fait la même réflexion à l'UQO, parce qu'eux autres également étaient un bassin au niveau d'une capitale, bon, Ottawa, Québec, qui a la même réalité au niveau des employés, donc ils ont des fonds, ils ont des dotations quand même pour permettre aux employés d'avoir des mises à jour, et tout ça. Est-ce que, de votre côté, on peut parler de... votre clientèle à Lévis va être une partie importante de formation continue, de formation additionnelle, ou c'est vraiment... vous allez chercher, avec votre nouveau campus, dans le fond, à changer la donne au niveau du temps partiel? Parce qu'avec un campus bien établi on pourrait penser que les étudiants deviendraient du temps plein, donc plus rentables pour vous autres aussi, au niveau rentrées de fonds?

M. Ringuet (Michel): Le portrait actuel à Lévis, c'est moitié-moitié, hein: une moitié formation initiale temps plein, une moitié formation continue.

M. Ferron (Jean): Il y a peut-être une réalité aussi, si on prend, par exemple, sciences infirmières, à Lévis, plusieurs infirmières, vous savez comment c'est difficile pour le ministère de la Santé et des Services sociaux de trouver des infirmières, que ce soit dans les CLSC, les hôpitaux, les centres de santé et de services sociaux. Bon. La plupart des étudiantes, et on en a une derrière M. Chagnon qui peut en témoigner, il y a plusieurs de ses consoeurs qui travaillent à temps partiel ou même à temps plein parfois même et qui étudient à temps partiel. Donc ça, pour ça, on reste... ça, je pense que la réalité du marché du travail, pour cette portion-là des effectifs étudiants à Lévis, va demeurer comme telle. Je vous dirais que la clientèle, dans la région de Lévis, le campus de Lévis est né de la formation continue, donc il y a toujours plusieurs personnes qui viennent...

C'est sûr qu'on a des programmes contingentés, aussi. Par exemple, du côté de l'éducation, on a un contingent pour le préscolaire-primaire, on a un contingent pour l'adaptation scolaire et sociale, donc ça, c'est contingenté. Donc de toute façon on ne peut pas développer plus que ça, c'est des contingents que le ministère impose. Même chose du côté des consortiums en sciences santé, on joue un peu sur le nombre en fonction des clientèles temps partiel, temps plein. Il reste administration, et, dans administration, on a une partie des gens qui viennent qui sont des PME alentour, qui, ça, ça va rester une clientèle à temps partiel de toute façon, et il y a, et je pense que monsieur est à temps complet, il y en a un autre... hein, on a une autre partie des étudiants qui viennent effectivement étudier à temps plein soit en administration, soit en comptabilité. Ça fait que ça vous donne un peu le portrait de Lévis. Peut-être que Daniel pourrait...

M. Rousse (Daniel R.): Oui. On vous a donné... je pense que Jean vous a fait un survol du détail de ce qu'est aujourd'hui le campus de Lévis, mais je pense que je pourrais parler pour à peu près toutes les universités: on est là pour rendre des services aux régions. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va considérer les besoins de Chaudière-Appalaches, de Lévis.

Et puis on a aussi des étudiants qui nous viennent de la capitale nationale qui ne trouvent pas dans les programmes offerts à l'Université Laval, par exemple, ce qu'ils désirent, et, s'il y a un besoin, ça peut être de la formation initiale qu'on va donner. Ce qu'on entend par formation initiale, c'est l'étudiant classique qui vient suivre cinq cours par session à l'automne et à l'hiver, mais parfois c'est de la formation continue. Et, d'une façon assez générale, les universités du Québec ont développé ? hein, ça fait 35 ans qu'on existe ? une foule de programmes, on en a un bel assortiment qui, je crois, peut satisfaire les besoins du Québec d'aujourd'hui. Donc, il va y avoir une croissance, mais une croissance moins effrénée que ce qu'on a connu au cours des 30 dernières années en formation initiale.

Bien entendu, on le sait, on vit le changement, il va y avoir des changements, et on va s'adapter à ça. Donc, dans les formations initiales, il ne faudrait pas s'imaginer qu'on crée de toutes pièces un tas de programmes. Donc, on assiste présentement à beaucoup de formation au deuxième cycle, beaucoup de programmes courts qu'on offre de façon ciblée pour former des gens à une tâche précise ou pour désapprendre quelque chose qu'ils faisaient et réapprendre quelque chose de nouveau, pour citer Toffler, qui était un peu visionnaire de ce côté-là.

Mais bref, on n'a pas des objectifs en termes de nombres pour développer le campus de Lévis, on a un objectif en termes de rendre des services appropriés à la population, puis de façon la plus efficace possible, puis en harmonie aussi avec Rimouski.

M. Ringuet (Michel): Et je dirais plus précisément, donc ces services-là, donc les besoins qui nous sont exprimés actuellement, on en a aussi bien pour de la formation continue que pour de la formation initiale. Vraiment, on voit... il y a des créneaux où on pourrait agir, voir l'impact où on sera dans cinq ans, au campus de Lévis, au niveau de la proportion étudiants formation continue-étudiants temps complet; moi, j'imagine que ça va être à peu près dans le même ordre que ce qu'on a actuellement.

M. Auclair: Et comment vous voyez... parce que là je regardais vos budgets, on parlait, au mois de mai dernier, d'environ... dépendant de quel journal on lisait, on parlait de 1,2 million, 1,3 million de déficit. Aujourd'hui, avec les réinvestissements qu'il y a eu, là j'ai entendu parler que vous aviez également, bon, vous voyez aussi la possibilité d'augmenter le corps professoral, en vertu des données qu'on a ici, c'est comprenable, vous voyez comme quoi votre situation budgétaire au moment où on se parle? Aujourd'hui, est-ce que 1,3, 1,2 est réaliste ou, le fait qu'il y a eu une réinjection, ça a diminué un peu le...

M. Ringuet (Michel): Et totalement, enfin c'est un peu ce que j'ai dit.

M. Auclair: Excusez-moi, oui.

M. Ringuet (Michel): Oui, c'est un peu ce que j'ai dit en début, c'est parce que, nous, le réinvestissement annoncé par le ministère, c'est 3,4 millions, dont 2,7 millions récurrents, et, là-dessus, l'attention spéciale, dans ce réinvestissement-là, accordée aux universités en région a été très intéressante, de notre côté. Et donc, ce que ça veut dire, c'est que le 1,2 disparaît complètement, et on peut déjà poser des gestes, parce que le budget est déjà disponible maintenant, on peut déjà poser des gestes pour vraiment rattraper certains investissements qu'on n'avait pas faits. On parle d'équipements scientifiques, par exemple, qui étaient très... vraiment, on avait des problèmes. Alors, le budget révisé qu'on a adopté la semaine passée disponibilise certaines enveloppes pour faire ce rattrapage-là, et on prévoit terminer l'année avec 400, 500 000 $ de surplus.

M. Auclair: Est-ce qu'au niveau... parce qu'on a eu une position quand même assez claire au niveau des universités, de la famille Université du Québec, parce que, bon, on comprend que, dans votre situation, puis c'est pour ça que je voulais arriver avec vos... que vous me confirmiez bien les chiffres. Donc, en ce qui concerne la situation financière de l'université, on peut dire qu'elle n'est pas rose malgré tout, parce qu'il y a beaucoup de développement, il y a beaucoup de... il y a des choses à rectifier dans votre...

M. Ringuet (Michel): On a un déficit de 6 millions.

M. Auclair: C'est ça. Donc, il y a des choses à faire aussi, il y a des gestes concrets à poser pour la formation, pour augmenter votre corps professoral, les défis sont encore toujours là. Et au niveau de la situation, comment vous voyez ça, vous, dans un avenir, parce que le débat fait rage au niveau des frais de scolarité? La situation, votre situation à vous, à l'UQAR, est à quel niveau? Sur une approche beaucoup plus de maintien des frais tels quels? D'aller dans une tendance vers un dégel ou encore, d'un autre côté, regarder la possibilité de dire: Bien, O.K., nous, on aime mieux avoir la gratuité? Pour nous, au niveau de l'accessibilité, etc., la gratuité serait peut-être une option? Comment vous voyez ça, chez vous, à l'UQAR?

M. Ringuet (Michel): ...étudiants pour m'entendre aujourd'hui!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ringuet (Michel): Bien, je ne surprendrai personne, parce que j'ai, dans une entrevue publiée dans l'UQAR-Info, le journal de l'université, j'ai émis certaines hypothèses, et le journaliste les a reprises. Donc, la position que, moi, je tiens ? puis là, c'est une position personnelle, ce n'est pas une position de l'UQAR, c'est...

M. Auclair: Bien là, je n'ai pas lu UQAR-Info sur ce qui est...

Une voix: Il faudrait l'abonner.

M. Ringuet (Michel): Moi, ce que j'ai... la porte que j'ai ouverte, c'est qu'effectivement le gel pur et simple est une position que je crois de plus en plus difficile à défendre, le gel actuel, bon parce que... sans élaborer plus loin, parce qu'effectivement le gel correspond, dans la tête de tout le monde, plutôt à une diminution du coût, hein, parce que c'est gelé depuis 1994. Bon, c'est un débat qu'on a entendu.

Ceci dit, les positions que... parce que j'ai lu un petit peu les débats qui se sont tenus ici par d'autres universités, l'hypothèse du dégel pur et simple, puis on déréglemente tout, puis les universités peuvent faire ce qu'elles veulent, là-dessus, nous, on est totalement contre, parce qu'au niveau de... L'université, au Québec, elle est très bien gérée. La Loi des universités, là, qui dicte qu'il y a un certain nombre d'universités qui peuvent dispenser des diplômes, et tout, etc., nous, on vit bien avec ça. L'université que nous représentons est une université publique, alors les fonds publics, on doit rendre des comptes, et tout, et, dans cette dynamique-là, je pense que, dans ma tête à moi, le gouvernement doit être encore l'instance qui doit prendre des décisions. Alors, c'est une décision politique effectivement, donc la décision de... et le volet financier ne doit pas être vu autrement que dans une dynamique d'accessibilité.

Alors, pour moi, on ne peut pas juste dire: On dégèle les frais de scolarité, il faut aussi dire: Si on dégèle les frais de scolarité, occupons-nous des étudiants qui n'ont pas les moyens ou moins les moyens d'aller à l'université.

n (11 h 10) n

Une voix: ...

M. Ringuet (Michel): Oui. Quand on se compare aux frais de scolarité de l'Ontario, s'il vous plaît, examinons aussi ce que ça coûte vraiment dans la poche de l'étudiant. Les fondations des universités ontariennes donnent des bourses à à peu près tout le monde, et les prêts et bourses, en Ontario, qu'on le veuille ou non, sont plus socialement acceptables que les nôtres. Chez nous, une famille... Quand notre revenu familial atteint 30 000 $, on commence déjà à être moins éligibles aux bourses, hein? En Ontario, ce seuil-là est à 50 000 $. Moi, je pense que quelqu'un qui a un revenu familial de 30 000 $ n'a pas beaucoup les moyens de payer, tu sais, au-dessus de 2 000 $, là, pour un étudiant. Alors, si vous déréglementez, puis c'est une décision qui vous appartiendra, si vous dégelez, s'il vous plaît, les prêts et bourses.

Deuxièmement, parce qu'on va faire un calcul rapide: Chez nous, si ça avait été indexé depuis 1994, ça voudrait dire 1,5 million de plus de revenus cette année. Ça voudrait dire qu'on n'a pas de déficit. Calcul trop simpliste pour moi, parce que je ne suis pas sûr que, si ça avait été indexé, on aurait convaincu aussi facilement le ministère de l'Éducation de réinjecter de l'argent comme il l'a fait jusqu'à présent. Donc, il y a aussi le volet... ça, je pense que le débat devrait être fait, il devrait y avoir, associé à cette réflexion-là, un engagement formel du Québec de continuer à soutenir au moins à même hauteur et plus si possible les universités à partir du budget, si jamais on demande aux étudiants de contribuer plus. Parce qu'au-delà de tout ça, je pense que les gens autour de la table vont être tous convaincus, là, on parle de l'avenir du Québec. L'avenir du Québec, ça ne repose pas... Oui, ça repose sur nos ressources naturelles, mais on sait qu'on en a de moins en moins, ça repose sur la capacité que nous avons à former des gens compétents, des gens créateurs, des gens novateurs, et c'est à travers l'université qu'on va réaliser ça.

Donc, si le Québec ne met pas en place un système qui accentue le nombre de gens pouvant accéder à des études universitaires de haut niveau, on est en train de tuer notre capacité à réagir aux nouvelles économies. Et c'est sérieux, parce que, quand on regarde actuellement ce qui se passe en Chine, aux Indes, et tout, là, ces gens-là ne sont pas juste en train de faire des petites choses simplistes qu'ils vont nous vendre. Le nombre d'universités mises en place dans ces pays-là est important, et, un jour ou l'autre, on devra se confronter à ce niveau-là. On a actuellement, je pense, une longueur d'avance. La créativité des Québécois, c'est renommé partout, pas seulement dans le secteur des arts, là, on est créatifs aussi dans le secteur des sciences, et tout, mais ça, c'est grâce aux universités. Alors, examinons-la de façon plus globale, cette question-là des frais de scolarité.

M. Auclair: ...suite, puis je pense que l'ensemble de l'oeuvre des personnes autour de la table, ici, au niveau de l'accessibilité, peu importe la réalité, il faut maintenir. Je pense que, là-dessus, tout le monde est conscient. Tout le monde, là-dessus, est d'accord. Juste un dernier point là-dessus. Puis d'ailleurs, toutes les universités qui ont passé avant vous, peu importe ceux et celles qui avaient émis des opinions très fermes sur la possibilité d'augmenter les frais de scolarité, ont tous d'entrée de jeu, d'emblée spécifié qu'il fallait maintenir l'accessibilité, parce que, bon, il y a tout le débat de financer les plus riches de la société à travers notre système.

Au niveau de la modulation des coûts, comment vous voyez ça, vous, des frais de scolarité selon aller... avec dans le fond des frais adaptés sur le coût véritable, en médecine, par exemple, en engineering, etc., comment vous voyez ça, chez vous?

M. Ringuet (Michel): Est-ce que vous allez aussi accepter de moduler les prêts et bourses, parce que c'est de ça dont on parle?

M. Auclair: Bien, selon moi... Écoutez, écoutez, je pense que ma prémisse... d'entrée de jeu, oui. C'est sûr... En tout cas, si ma logique, à moi, oui, parce que c'est l'accessibilité, toujours. Mais, au niveau du débat, parce qu'il y en a qui ont amené justement cette réalité-là en disant: Nous verrions la modulation comme étant un moyen également plus équitable à travers. Donc, les gens, on sait très bien que les gens qui sont en politique, en administration ont un coût beaucoup moins élevé qu'au niveau de former un médecin, infirmière, etc. Donc, c'est une certaine logique, là, qui rentrait dans l'approche des gens qui ont présenté... Et, d'entrée de jeu, ce n'est pas la position de la commission. Nous, on a le privilège de vous questionner là-dessus et de vous demander votre opinion. Ce n'est pas mon opinion à moi, là, ici, c'est vraiment l'opinion des gens qu'on questionne.

M. Ringuet (Michel): Si on allait vers ça, une modulation, le débat sur la fixation, là, du coût réel pour former un médecin versus un dentiste, versus... je ne sais pas comment, de quel côté on pourrait prendre cette facette-là. Parce qu'actuellement on dit: Ça ne coûte pas très cher, former les gens en administration. Ça ne coûte pas cher pourquoi? Parce que le taux de chargés de cours en administration est tellement élevé. Alors, est-ce que c'est ça, le tarif qu'on va prendre pour fixer les frais de scolarité en administration versus les gens dans d'autres secteurs où ? en génie par exemple, je prendrais ça, en génie ? la proportion de cours donnés par les professeurs est beaucoup plus importante? Mais non, il faut regarder aussi l'équité de traitement. Normalement, toutes les facultés devraient avoir un rééquilibrage à ce niveau-là. Donc, les coûts observés, ce n'est pas la référence non plus. C'est bon, là, pour établir une grille de financement, etc., mais...

Le Président (M. Chagnon): Vous voyez venir ma prochaine question?

Des voix: ha, ha, ha!

M. Ringuet (Michel): Non, mais il faut partir à quelque part, là, pour établir une grille de financement. Mais on comprendra que pour moi, là, déréglementer ce niveau-là, ça va nous prendre plusieurs années, là, de négociations pour arriver à vraiment fixer le coût réel de la formation d'individus.

M. Bénéteau (Daniel): Peut-être rajouter une question d'équité: Est-ce qu'on va permettre à tous nos étudiants d'avoir accès à la médecine ou on va privilégier les étudiants qui sont un petit peu plus fortunés que d'autres?

M. Auclair: Comment ça fonctionne en ce moment? On ne parle pas des gens les plus fortunés, parce qu'au niveau... Là, je parle, on comprend... Mais...

M. Bénéteau (Daniel): Non, actuellement ce n'est pas le cas.

M. Auclair: Mais c'est certain que dans une logique la réponse serait non, ce seraient les prêts et bourses qui suivraient en conséquence.

M. Bénéteau (Daniel): Alors, c'est certain. Le volet équité pour l'accès est important.

M. Auclair: L'accessibilité, toujours, maintenir l'accessibilité, mais je pense que mon collègue...

M. Ringuet (Michel): Et par ailleurs le médecin, c'est toujours l'exemple qu'on prend pour celui qui est le plus fortuné à la sortie, mais il va payer plus d'impôts aussi. Est-ce qu'on va tenir compte de ça, hein? Je ne sais pas.

M. Bouchard (Vachon): Mais en même temps est-ce qu'il n'y a pas aussi un argument qu'on oublie toujours, c'est qu'à force de fonder à la fois... Mais l'argumentaire de la modulation pour les frais de scolarité, c'est une chose, l'argumentaire de la modulation pour le financement, c'est une autre chose, mais qui se ressemblent étrangement. Parce qu'à le faire comme ça tout le temps, ce qui arrive, c'est qu'on vient à fixer le coût à partir de l'histoire du financement. Alors, prenons l'hypothèse que la meilleure école d'administration, c'est celle qui fait voyager ses étudiants au niveau international, dans les sièges sociaux des multinationales, pour voir comment ça se passe, le développement du commerce international. On vient de relever la barre pas mal, en administration. Alors, moi, je... Il y a des idées séduisantes comme ça, là, à prime abord qui m'apparaissent, moi, quelquefois un petit peu périlleuses quand on les pousse un peu loin, là.

Le Président (M. Chagnon): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Ringuet, bonjour à toutes les personnes qui vous accompagnent. Je trouve ça extrêmement intéressant, ce que nous faisons à cette commission, parce qu'à chaque fois il me semble qu'on arrive à poser des questions précises sur ce que vous représentez mais aussi des questions à portée plus générale. Et je vais en reprendre une qu'on a évoquée dans les échanges, je vais en reprendre une parce que je trouve ça très passionnant, puis j'aimerais parler aussi un peu de la question des professeurs.

Le mot qui me vient, il est peut-être un peu exagéré, mais je voudrais avoir votre réaction. Le mot qui me vient à l'idée, c'est: Est-ce que nous ne sommes pas en train d'assister à une forme de mutation de la mission des universités, qui ont été longtemps associées à un territoire relativement fermé, avec donc un lieu fixe, des étudiants fixes qui se déplaçaient à un endroit pour suivre des formats de cours assez rigides, pouvons-nous dire, mais probablement que ça correspondait aux besoins à cette époque? Quand je vous entends, vous parlez de rayonnement, mais c'est rayonnement» au sens fort, là, ce dont vous parlez, ce n'est pas juste un pôle central avec quelques satellites: vous avez deux campus, vous allez aux quatre coins du Québec; les autres universités font de même, viennent jouer aussi sur votre territoire, entre guillemets, c'est-à-dire, on a moins de notions territoriales qu'on avait autrefois; vos étudiants, aussi, si j'ajoute à cela une dimension, ont accès à, je crois, ce programme Mobiluq ? c'est ça? ? ...

n (11 h 20) n

Une voix: Mobiluq, oui.

Mme Malavoy: ...donc ils peuvent suivre une partie de leurs cours ailleurs et même à l'international. Donc, ce qu'on concevait comme étant une université, autrefois, vraiment on a un lieu, avec des gens qui sont face à face tout le temps, c'est devenu complètement éclaté. Et on peut même soutenir une thèse de doctorat en vidéoconférence avec quelqu'un qui est dans un autre pays, dans une autre ville.

Et j'aimerais simplement que vous me parliez peut-être un peu plus précisément de Mobiluq, mais aussi de façon générale j'aimerais entendre votre réflexion sur cette ? moi, je dis «mutation», là; c'est peut-être un peu fort, mais ? de ce qu'est une université et quels avantages cela vous procure, quelles contraintes cela peut avoir, quelles questions, aussi, ça porte, parce qu'on doit se projeter dans un monde qui ne changera pas. Je veux dire, la tangente actuelle, elle ne changera pas. Ça ne peut que s'accentuer.

Le Président (M. Chagnon): Ça va changer, mais encore plus vite.

Mme Malavoy: Oui. Ça ne pourra que s'accélérer, en fait. Et les nouvelles techniques de communication ne pourront qu'accélérer cela. Or, notre cerveau... Puis quand je dis «notre», j'inclus le mien. Moi qui suis professeur d'université, je sais bien que j'ai étudié et enseigné dans un autre univers.

J'essaie de voir, quand je projette ce monde-là un peu plus loin, qu'est-ce que ça exige de nos universités. Et vous êtes un bon exemple pour m'aider à réfléchir là-dessus, puisque vous êtes déjà confrontés, plus que d'autres universités plus anciennes ou dans des grands centres urbains, à ce type de problème.

M. Ringuet (Michel): C'est véritablement une très vaste question, mais en se disant que...

Le Président (M. Chagnon): ...que l'Australie!

M. Ringuet (Michel): Oui, au moins! Et l'Australie, bien vous lancez la perche de l'Australie. L'Australie, maintenant, est très présente en Chine, hein, l'Australie délocalise plein de ses programmes en Chine. Alors, on est vraiment à l'international.

En fait, on est confrontés à un ensemble de nouveaux paradigmes. Les étudiants ont plus besoin de mobilité, et nous savons, pour former les étudiants, il faut les former à la mobilité aussi. Parce que le discours qu'on tenait il y a un certain nombre d'années, c'est que, oui, on formait les gens dans une ville donnée parce que la probabilité d'embauche, c'était dans cette même ville là, la personne faisait toute sa carrière dans la même ville. Bon, la mobilité était secondaire.

Maintenant, on sait que ce n'est plus ça du tout. Donc, notre capacité du jeune d'aujourd'hui à faire toute sa carrière dans un environnement donné est plutôt faible. Et donc on a une responsabilité aussi d'ouvrir l'étudiant à la nécessité d'aller voir ailleurs. Former un ingénieur aujourd'hui et lui donner son diplôme sans que la personne n'ait jamais pris d'avion, ce n'est pas le servir, parce que, le jour où il va être employé par quelqu'un, il risque d'être mis sur une mission pour aller travailler à 500 km du...

Mme Malavoy: Et, quand je vous entends dire «prendre l'avion», j'entends aussi: être confronté à d'autres cultures, à d'autres façons de faire. En fait, c'est tout ce que ça inclut que de voir ailleurs, ce qui se passe ailleurs.

M. Ringuet (Michel): Tout à fait. C'est ça que je veux dire. Et c'est pour ça donc que la première question de M. Chagnon, où on disait: L'international, est-ce que c'est important pour nous?, c'est clair que c'est important. Ce contact-là est prioritaire.

Alors, c'est le premier paradigme. Le deuxième, c'est les objets de communication. Nous, nous nous déplacions beaucoup quand même, là. Historiquement, je l'ai dit tout à l'heure, mais on ne donnait pas des cours qu'à Rimouski ou sur un campus, on était partout. Il y a des gens, dans certains secteurs, qui suivaient trois cohortes en même temps. Donc, le professeur se déplaçait à Matane, Amqui puis Carleton. Alors, c'est vraiment... Il y avait beaucoup de mobilité. Mais ça, maintenant on peut le faire à travers d'autres outils. Il y aura bientôt le webcam, là, où on pourra donc réunir les gens. La plateforme Claroline, dont je vous ai parlé, lorsque le cours est fini, tous les documents sont sur une plateforme de gestion de cours, et l'étudiant va chercher ses notes de cours là, le professeur en dépose d'autres, l'étudiant pose une question au... Alors, c'est ça. Ça se fait tout sur... dynamique sur écran.

Alors, c'est vrai que... Moi aussi, moi, j'ai quitté... Le dernier cours que j'ai donné, c'était quelque chose comme en 1992, puis j'imagine que j'aurais beaucoup de rattrapage à faire pour vivre la formation d'aujourd'hui.

Ceci dit, je vous disais que les professeurs qui nous choisissent nous choisissent pour certains créneaux de recherche, ils nous choisissent aussi tout en sachant que, nous, on exige d'eux cette forme d'ouverture à la mobilité ou à la créativité dans la façon de rejoindre l'étudiant. Parce que vous avez voulu aussi que j'aborde la question de Mobiluq, et, là-dessus... C'est un projet extrêmement novateur où, le réseau de l'Université du Québec, son président a voulu faire en sorte qu'on soit un vrai réseau et non pas un amalgame d'universités. Et donc, dans un premier temps, l'idée était de favoriser le maillage et la possibilité que des étudiants d'une constituante puissent aller étudier avec les étudiants de l'autre constituante, en sachant que ce partage-là, il est précieux. Nous, on continue à croire au présentiel, au professeur avec le groupe d'étudiants, parce que... Même au deuxième cycle, là, dans le M.B.A., aller apprendre de l'autre étudiant qui est au M.B.A. puis en présentiel, c'est précieux. Alors, la même chose au niveau de Mobiluq, on se disait: Si des étudiants de plusieurs universités travaillent ensemble, ils vont s'enrichir l'un l'autre.

Mais ça pose des défis, ça, parce qu'un étudiant de Montréal ou de Trois-Rivières qui vient passer une partie de l'été à Rimouski pour faire un stage en géographie ? parce qu'on a le plus beau terrain et la meilleure équipe de professeurs! ? cet étudiant-là, ça veut dire assez souvent... mais il y a des coûts associés à ça: bon, ils doivent venir, mais aussi manger autrement que dans son appartement, et tout. Alors, il faut trouver du financement pour ce genre d'opération là aussi, et c'est là que le réseau est très novateur, en allant chercher du financement particulier pour le permettre. Là, oui, il y a un projet d'y aller international, mais l'objectif est toujours de permettre à l'étudiant d'au moins ne pas avoir la contrainte financière à cette mobilité-là.

Mme Malavoy: À l'international, je comprends que c'est plus à l'état de projet pour le moment?

M. Ringuet (Michel): À ma connaissance, oui, à moins que Daniel Coderre me...

Une voix: ...

M. Ferron (Jean): Peut-être rajouter qu'il y a d'autres... Si on essaie de donner une teinte, à travers le réseau de l'Université du Québec, une teinte à nos étudiants ? et M. Moreau, qui était assis derrière, a été derrière ça en bonne partie ? on veut apprendre, oui ? la mobilité, je pense que les étudiants de demain devront être mobiles, et Mobiluq en est un exemple ? mais ils doivent aussi se débrouiller dans un mer d'informations, comment arriver à développer des compétences informationnnelles. Donc, il y a eu un projet, que toutes les constituantes de l'Université du Québec ont participé, pour mettre au point comment on peut rendre nos étudiants plus performants pour trouver l'information. Puis il y en a un autre qui est en cours sur les compétences communicationnelles, comment adapter le discours à différents... on s'adresse... Bon, on est en commission parlementaire aujourd'hui, demain, je pourrais m'adresser au conseil d'administration de l'Université, ou aux profs, donc comment ajuster le discours, comment aussi utiliser à la fois des affiches, le discours, les écrits, etc. Donc, on essaie vraiment de rendre nos étudiants, à l'Université du Québec, plus polyvalents et on travaille aussi, à Rimouski, à essayer de trouver aussi une coloration particulière qu'on pourrait leur donner dans des créneaux particuliers.

Donc, je pense que les étudiants sont en... on voit beaucoup plus de mobilité, les étudiants... Quand on parle d'étudiants internationaux, c'est une richesse aussi d'envoyer nos étudiants à l'international et d'en recevoir, d'avoir des étudiants de différents pays dans une même classe, avec des points de vue différents. C'est ça, la réalité d'aujourd'hui. Les jeunes, ils font des jeux électroniques avec des jeunes du Danemark, d'Angleterre, puis, eux autres... la planète, pour eux, c'est leur terrain de jeu maintenant.

M. Rousse ((Daniel R.): Si je peux rajouter quelque chose sur ça. Écoutez, la communication est souvent la mère de tous les maux, et je prétends que l'une des façons de faire fonctionner l'Europe aujourd'hui, c'est d'avoir des taux d'échange étudiant extrêmement élevés entre les constituantes de la CEE. C'est particulièrement évident à cause de programmes comme Erasmus, Socrates, qui ont été mis en place il y a même très longtemps. Donc, nous, on le fait, là, mais on est derrière la vague, il faut bien l'avouer. Je connais des institutions européennes dont 73 % des étudiants font au moins un trimestre ou un stage à l'extérieur de leur établissement d'attache. C'est plus que 50 %.

Le Président (M. Chagnon): ...Erasmus.

M. Rousse ((Daniel R.): Oui. Et l'INSA ? c'est l'INSA de Toulouse dans ce cas-là ? qui reçoit aussi 50 % de leurs étudiants qui viennent de l'étranger, donc c'est vraiment très important ? quand on dit de l'étranger ? mais d'autres membres de la Communauté européenne, puis à ce moment-là ça enrichit les cultures des uns et des autres, ça aplanit les différences puis ça aide à créer...

Le Président (M. Chagnon): Celle de Toulouse ou celle de Poitiers.

M. Rousse (Daniel R.): Pardon?

n (11 h 30) n

Le Président (M. Chagnon): Toulouse ou Poitiers?

M. Rousse (Daniel R.): INSA Toulouse. Mais il y en a d'autres aussi. Je prenais celle-là parce que c'est celle où le 73 % est plus important.

Mme Malavoy: J'aimerais enchaîner avec...

Le Président (M. Chagnon): Certainement, allez-y.

Mme Malavoy: ... ? vous me permettez? ? avec la question du corps professoral, puis je vais faire un lien avec ce dont on vient de parler. Vous dites: Depuis quatre ans, on a engagé un tiers de nos professeurs. Est-ce que vous avez l'impression que les gens que vous engagez arrivent de plain-pied dans un nouveau mode d'enseignement intégrant ce dont on vient de parler? Autrement dit, est-ce que vous avez affaire à une nouvelle...une ou plusieurs nouvelles générations de professeurs mais qui d'ores et déjà sont comme gagnés à ce monde de communications beaucoup plus rapides, à cette mobilité, avec cette capacité d'enseigner à étudiants qui viennent de l'étranger, ou est-ce qu'il y a des efforts à faire de ce côté-là en termes d'ajustement de leurs enseignements?

M. Ringuet (Marcel): Jean saurait mieux que moi. Mais, moi, je dirais qu'en général, oui, là.

Mme Malavoy: O.K.

M. Ringuet (Marcel): C'est difficile de le généraliser, mais c'est certainement des gens qui sont plus ouverts à cette mobilité qu'on pouvait le constater il y a une vingtaine d'années, là.

M. Ferron (Jean): Plus ouverts également à toutes les nouvelles technologies, là. Le recteur parlait tout à l'heure de la plateforme Claroline, eux autres, d'emblée ils utilisent ça, les présentations PowerPoint, mais ils vont utiliser toutes sortes de... ils vont chatter avec leurs étudiants, ils vont les mettre en contact avec des banques d'information. Donc, c'est vraiment... Je pense qu'il n'y a aucun problème de ce côté-là. Et d'ailleurs on parlait de recrutement tantôt, c'est beaucoup plus facile maintenant, recruter un professeur, parce que, pour trouver tel article scientifique, il va sur son ordinateur, même de son bureau des fois, il n'a même plus besoin de se déplacer à la bibliothèque, en quelques secondes, il trouve, alors qu'auparavant il fallait faire une demande écrite à la bibliothèque. ça venait par photocopie deux, trois semaines plus tard. Donc, c'est... Maintenant, c'est... les gens ont accès à toute cette information-là de façon quasi instantanée.

Mme Malavoy: En ce sens-là, il n'y a plus de distance, donc on peut très bien être chez vous et puis... Maintenant, vous parliez de l'attrait de votre région pour les nouveaux professeurs, parce que les universités sont confrontées au même problème, c'est-à-dire qu'il y a un renouvellement du corps professoral massif qui s'en vient, il y a quand même une forme de concurrence entre les universités. J'ai tendance à croire, comme vous, que les milieux de vie prennent plus d'importance ces années-ci que peut-être il y a 25 ans. Peut-être, c'est l'importance qu'on donne à la qualité de vie, par opposition à, je ne sais pas, moi, à la notoriété d'une des plus grandes universités ou plus populeuses, bon, je croirais ça.

Mais est-ce qu'il y a aussi... Dans votre accueil des nouveaux professeurs, est-ce qu'il y a des éléments liés à leurs tâches qui sont des facteurs d'attrait, outre le milieu de vie, par exemple, je ne sais pas: infrastructures au plan de la recherche ou différentes choses qui vous permettent de les attirer mais aussi de les attirer, par rapport à leurs tâches de professeur et de chercheur?

M. Ringuet (Marcel): De les attirer ou de les perdre. Parce que ces gens-là magasinent, hein? Donc, les meilleurs candidats professeurs ont souvent plusieurs offres sur la table, et donc effectivement une université qui offre... Jean vous disait tout à l'heure qu'on n'a pas perdu beaucoup de professeurs, mais, moi, ceux que... En tout cas, je pense à un qu'on a perdu, et il était titulaire de chaire; celui-là, on l'a carrément perdu parce que l'autre université lui offrait un meilleur salaire, et vraiment un meilleur salaire, et c'est une université...

Une voix: Ontarienne.

M. Ringuet (Marcel): ...hors Québec. Donc, qu'on le veuille ou non, la qualité de vie, c'est important, mais...

Mme Malavoy: Il y a aussi par les moyens.

M. Ringuet (Marcel): ...il y a autre chose. Mais c'est clair qu'il faut être capables, nous aussi, de dire au professeur qu'il va y avoir un environnement adéquat pour poursuivre sa recherche, et tout, et qu'on va lui donner les stimuli nécessaires. Alors, le nouveau programme mis en place cette année, en collaboration avec le syndicat des professeurs... où on assure à chacun des professeurs un budget de démarrage. Donc, le jour de son entrée, le professeur, chez nous, va avoir un budget de démarrage minimal...

Mme Malavoy: De quel ordre?

M. Ringuet (Marcel): 4 000 $ juste, bon, pour s'installer. 4 000 $ pour tout le monde, et il sera plus pour les professeurs en sciences naturelles et en génie, parce que la subvention particulière du CRSNG pour les petites universités que nous avons reçue vise justement ces objets-là de démarrage.

Mais donc, ça, c'est précieux. Le professeur, le candidat veut savoir ce qui va lui arriver en termes de démarrage en recherche, et le volet allégement de la tâche d'enseignement joue toujours un peu. Et c'est pour ça que, quand on veut arriver avec des normes mur à mur, où il faut absolument avoir la même tâche pour tout le monde, j'ai l'impression qu'il faudrait aussi avoir une certaine ouverture pour permettre à un professeur de démarrer correctement sa carrière aussi bien en recherche qu'en enseignement. Bon, et ça, c'est encore fait vécu, mais, moi, j'ai été embauché à l'UQTR, j'ai été à l'UQTR pendant plusieurs années. J'ai été embauché le 26 août et, le 2, 3 septembre, je commençais, il fallait que je donne deux cours et, à l'hiver, deux autres cours.

Mme Malavoy: Il n'y avait même pas de progression?

M. Ringuet (Michel): Non, c'était... et ça, je vous dis tout de suite que, volet recherche, ça case un peu, là. Alors, il faut avoir une ouverture à l'allégement. Ce qui se fait assez souvent à l'intérieur des départements, les départements vont considérer que le nouveau professeur, il faut l'encadrer correctement et choisir de lui alléger la tâche. Mais, oui, ce sont des facteurs qui jouent, là, le facteur de l'attractivité reliée à la tâche, aux possibilités de démarrage en recherche.

Mme Malavoy: Une dernière question, sur les professeurs, mais d'un autre ordre. Je ne l'ai pas vue, mais c'est peut-être quelque part, mais je vous pose la question, sur la proportion de femmes et d'hommes professeurs dans votre université. Est-ce que vous arrivez à augmenter la proportion de femmes professeurs et dans tous les secteurs ou est-ce qu'il y a des secteurs qui sont encore beaucoup plus féminins? Je suppose qu'éducation est probablement...

Une voix: Sciences infirmières.

Mme Malavoy: Sciences infirmières, c'est... vous avez une proportion de clientèle, en sciences infirmières, qui est très forte, mais, sur l'ensemble, j'aimerais vous entendre sur cette question-là.

M. Ferron (Jean): Au cours des dernières années, on a quand même eu certains programmes, notamment de la part du CRSNG, pour favoriser l'engagement de femmes, et, jusqu'à date en tout cas, on en a eu une sur deux, on attend une réponse pour la deuxième, on espère avoir l'autre... Et, du côté des chaires de recherche du Canada, la dernière chaire ? on a perdu une chaire, le recteur vous le mentionnait il y a quelques minutes, on a perdu un candidat, on n'a pas perdu la chaire, donc on a reçu...

Une voix: La chaire est faible!

M. Ferron (Jean): Oui, la chaire est faible, dans son cas. Mais on a... la personne qu'on a proposée pour reprendre la chaire, c'est une femme. Donc, on essaie vraiment de faire un effort dans ce sens-là. Il y a des programmes, comme en éducation, effectivement, sciences infirmières, où là il y a une proportion de femmes plus grande. Mais ce qu'il y a derrière ça ? et vous aviez les chiffres tout à l'heure, Mme Charest posait la question ? rendu au niveau doctorat, il y a plus d'hommes que de femmes dans certains secteurs, de sorte que le potentiel, à ce moment-là, pour trouver des candidates est plus limité. Donc, à compétence égale...

Mme Malavoy: Au total, dans votre corps professoral, il y a quel pourcentage de femmes? Au total, est-ce que c'est 35 %, est-ce que c'est...

M. Ferron (Jean): Je vais vérifier, je vais vous le dire.

Mme Malavoy: ...donner un chiffre moyen, qui est peut-être...

M. Ferron (Jean): Beaucoup plus fort que dans l'équipe de direction.

Mme Malavoy: Oui. Je ne vous en faisais pas la remarque, là. Je sais d'ailleurs que c'est une des... c'est sûr que c'est une des considérations à avoir. Il faut un bassin pour qu'il y ait des femmes qui accèdent ensuite à des postes de direction.

M. Ringuet (Michel): À première vue, en tout cas, je regarde la liste des dernières personnes embauchées, et on embauche une majorité de femmes actuellement, là. Oui. Et dans tous les secteurs, même, par exemple, à l'Institut des sciences de la mer, en océanographie, plusieurs femmes embauchées récemment. Il y a peut-être le secteur du génie où on a encore une lacune.

M. Rousse (Daniel R.): Écoutez, pour moi, c'est une question de temps, de toute façon. On a vu les femmes prendre d'assaut le premier cycle universitaire. Maintenant, c'est le deuxième cycle universitaire, ça va être le troisième cycle universitaire. Peut-être que je vais être très «politically incorrect», mais, moi, je m'inquiète beaucoup de l'absence de garçons au premier cycle universitaire dans plusieurs programmes. Ça devient extraordinaire, et peut-être que mon trouble est exacerbé parce que j'ai travaillé neuf ans en génie à Laval, sept ans à Polytechnique, et que maintenant je suis au campus de Lévis, et que j'ai de l'éducation et des sciences infirmière, mais où sont passés les hommes à l'université en général? Donc, on dirait que c'est une vague. Et n'ayez crainte, là, dans 20 ou 30 ans, il n'y aura que des femmes de ce côté-ci de la table.

n(11 h 40)n

Le Président (M. Chagnon): Elles parleront bientôt de nous au passé.

M. Rousse (Daniel R.): Oui, oui, c'est ça.

Mme Malavoy: Honnêtement, je fais une différence entre le fait que les femmes soient très majoritaires au premier cycle et le fait que tout naturellement elles accèdent aux postes de direction. Je ne suis pas convaincue que ça se fasse de façon aussi naturelle.

M. Rousse (Daniel R.): On est rendus là, effectivement. Aujourd'hui, c'est plus difficile. Il y a toujours plus d'hommes donc qui font des doctorats que des femmes, donc il y a plus d'hommes qui vont occuper des postes de professeur. Donc, peut-être, en ayant plus... Mais on voit qu'il y a davantage de femmes aussi qui complètent des études doctorales. Et, à mon campus de Lévis, je peux vous dire que les professeurs récemment engagés, il y a un homme, toutes les autres sont des femmes. Et puis je trouve ça tout à fait naturel, parce que ce sont les personnes les plus compétentes. Mais ça va se...

M. Ringuet (Michel): J'ai ici le tableau... bien les noms des professeurs embauchés en 2005-2006, et, tout confondu, réguliers, substituts, et tout, on a 12 femmes et sept hommes.

Mme Malavoy: O.K. En 2005-2006?

M. Ringuet (Michel): Oui, mais et je pense que c'est vraiment la tendance.

Mme Malavoy: Une tendance, oui. Je comprends, cela dit, votre préoccupation, M. Rousse, pour la proportion de garçons et d'hommes au premier cycle. J'ai bien vu que c'était 75 % de femmes, je crois, au premier cycle comme étudiantes. C'est sûr que vous avez des programmes qui sont presque entièrement... Bon, moi, je n'aurais aucun problème à ce qu'il y ait plus d'hommes en sciences infirmières, mais on sait que, pour des raisons que l'on connaît et des raisons historiques et un peu traditionnelles, là, il y a peu d'hommes qui vont dans ces secteurs-là. Mais c'est un fait que, les trois quarts de votre clientèle au premier cycle étant des femmes, on peut souhaiter, comme je le souhaite, que les femmes accèdent au troisième cycle et à des postes de direction, mais on doit aussi se demander où vont ces hommes-là. Est-ce qu'ils vont ailleurs ou est-ce qu'ils ne vont pas à l'université? C'est ça, la question. Ou est-ce qu'ils décrochent?

M. Ringuet (Michel): Le décrochage scolaire au secondaire, chez les hommes, est beaucoup plus important que chez les femmes.

Mme Malavoy: Oui, bien sûr. Mais la proportion se répercute, je vous dirais, en droite ligne au plan universitaire. Bien, merci beaucoup. Je vous recède la parole, M. le Président.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup, Mme la députée de Taillon. M. le député de Vimont... Vachon. J'ai le même problème. Un problème de dyslexie régulière entre mes deux collègues.

M. Bouchard (Vachon): Peut-être vous ramener quelques pas en arrière. Sur la question des étudiants étrangers, il reste une petite question que je n'ai pas eu le temps d'aborder, qui n'a pas été soulevée, je pense. Si elle a été soulevée durant mon absence, parce que j'ai dû m'absenter quelques minutes, vous me le direz.

En page... je ne sais pas laquelle des pages dans votre rapport à vous, là, mais vous mentionnez quelque part que vous avez choisi de restreindre le nombre d'étudiants en échange CREPUQ à cause d'une politique du ministère de l'Éducation quant au financement paritaire des échanges. Est-ce que vous pouvez m'informer davantage de ça?

M. Ringuet (Michel): Le ministère a décrété que maintenant il ne finançait... dans les échanges CREPUQ, il ne financerait les étudiants internationaux qu'on reçoit qu'au même nombre que les étudiants de l'UQAR que nous envoyons à l'étranger en échange CREPUQ. Donc, le même nombre. Nous, une boîte comme la nôtre, depuis toujours, on recevait beaucoup plus qu'on envoyait. Les échanges CREPUQ se font majoritairement avec la France, principalement, pour nous en tout cas, et ces échanges CREPUQ là, donc... Et la France, pour nous, en océanographie, en biologie, et tout, c'est vraiment... c'est 60 millions de personnes au total pour, alors, le bassin du Bas-Saint-Laurent, Chaudière-Appalaches et Gaspésie, on le connaît. Ce n'est pas beaucoup. Alors, c'est clair qu'on n'est pas capables d'en envoyer en mêmes nombres, alors...

M. Bouchard (Vachon): ...discussion là-dessus avec le ministère?

M. Ringuet (Michel): Nous, on s'est plaints, mais ouvertement. On a dit que... Et vraiment cette politique-là, cette décision du ministère contredit les intentions du ministère des Relations internationales, qui nous invite à aller chercher des étudiants internationaux pour régler une partie du problème démographique des régions périphériques. Alors ça, c'est clair que ça a été extrêmement nocif pour nous.

Mais j'ajouterais une autre chose: nous avions fait pression, nous, les universités en région, pour que le Québec et le fédéral s'entendent pour permettre à nos étudiants internationaux de travailler en dehors du campus. Parce que, compte tenu de notre taille, on n'a pas beaucoup d'emplois disponibles pour les étudiants internationaux. C'est réglé. Mais, quand c'est... Alors, ça nous donnait un avantage, consenti aux universités en région. Maintenant, on a perdu l'avantage, maintenant c'est étendu à tout le monde, mais...

Une voix: ...

M. Ringuet (Michel): Oui. Non, je ne veux pas revenir là-dessus, c'est une décision. Cependant, je pense qu'au niveau... si on considère que les universités peuvent aider à régler les problèmes démographiques des régions ? pas celles de Montréal, celles des régions ? moi, j'encouragerais le ministère à considérer de façon particulière soit un traitement spécial au niveau des échanges CREPUQ, ou des bourses d'exemption, ou enfin...

Le Président (M. Chagnon): Je suis content que mon collègue soulève cette question-là, parce qu'elle est fort pertinente, et puis elle... moi, je serais d'avis qu'on la garde même dans nos conclusions.

M. Bouchard (Vachon): ...souligner ça en caractères gras, parce que...

M. Ringuet (Michel): Nous, la parité des échanges CREPUQ, c'est une décision d'affaires pour nous, là. Quand on reçoit un étudiant de plus de l'étranger en échange CREPUQ, c'est une perte financière totale pour nous. On doit le supporter à nos frais, on n'a pas de subvention du ministère pour le recevoir. Et, même si on voulait envoyer le plus possible de nos étudiants à l'étranger, à un moment donné on est limités, le bassin...

Le Président (M. Chagnon): C'est pas Montréal.

M. Ringuet (Michel): ...est limité. Voilà! On n'a pas... Les universités métropolitaines comme McGill ou autres n'ont pas le même problème que nous, là.

Le Président (M. Chagnon): MM. Bénéteau et Rousse?

M. Bénéteau (Daniel): Peut-être une petite note régionaliste, là. À l'heure actuelle, dans les régions du Québec, on manque déjà... il y a des pénuries de main-d'oeuvre pour plusieurs emplois spécialisés, alors on est en concurrence, à l'intérieur du Québec, pour aller chercher et s'accaparer cette main-d'oeuvre là. Évidemment, les régions, on ne dispose pas de tous les atouts des grands centres, il y a des entreprises qui sont plus en moyen de rémunérer et de donner un certain traitement.

Puis, si on regarde l'ensemble du Québec, et en fait les pays occidentaux, il va manquer de main-d'oeuvre disponible pour répondre au développement des entreprises. Alors, la solution, c'est clair, c'est l'immigration. Il faut absolument... les régions qui vont s'en sortir, ce sont les régions qui vont le mieux réussir à attirer de la main-d'oeuvre immigrante et à les retenir.

Alors, déjà, là, il y a une urgence, il y a des entreprises, il y a des régions qui souffrent de manque de main-d'oeuvre à l'heure actuelle, alors il y a un sentiment d'urgence à l'heure actuelle. Au lieu de se cannibaliser entre nous et de cannibaliser les grands centres, bien ayons des politiques beaucoup plus ouvertes pour attirer les immigrants. Alors, c'est douloureux pour nous autres, là, de devoir mettre le frein là-dessus alors qu'en même temps bien on voit que la région est en train de s'essouffler ou d'étouffer, là.

Le Président (M. Chagnon): M. Rousse.

M. Rousse Daniel R.): En fait, je n'ai pas bien compris cette décision d'abolir ou d'imposer la parité dans les échanges. Je vous expliquerai que, si on reçoit 200 étudiants étrangers, bien entendu, et qu'on donne la subvention à l'université pour ces 200 étudiants là, ça représente un budget d'environ 1 million de dollars qu'on doit défrayer pour les accueillir chez nous. Et quelqu'un pourrait arguer que la personne ayant terminé ses études va repartir chez elle, puis elle ne contribuera pas du tout à l'essor de la société.

Je vous dirais que, si l'une de ces 200 personnes ? 0,5 % des gens ? reste ici, contribue au produit intérieur brut du Québec et qui paie de l'impôt pendant 40 ans et enrichit la société québécoise de sa culture, c'est vraiment extraordinaire.

Ce que je vous dirai de mon expérience personnelle, c'est que 16 % des étudiants que j'ai accueillis pendant la période d'un programme où j'étais à l'Université Laval sont restés ici. J'ai assisté personnellement à quatre mariages de mes ex-étudiants, qui travaillent dans la région de Québec.

M. Bouchard (Vachon): ...

M. Rousse (Daniel R.): Et je parle... et c'est vrai, et je parle pour deux autres recruteurs. Remarquez que c'est une expérience extrêmement limitée, mais je pense qu'ici la commission devrait se pencher sur combien il y en a qui viennent puis qui restent, puis quelle est la valeur de cet investissement ? actualisez-le comme vous le voulez ? sur le fait que des gens vont venir ici pour combler une pénurie de main-d'oeuvre.

J'ajouterai que d'avoir quelqu'un qui arrive ici à 18 ou 19 ans comme immigrant, il va s'intégrer beaucoup plus facilement dans nos sociétés. On fait du couscous au sirop d'érable, si vous me permettez l'expression. Alors que, si la personne arrive beaucoup plus tard, il y a fort à parier que la personne va rester dans la région de Montréal, contre laquelle je n'ai absolument rien, là, j'en suis originaire. Mais quelqu'un qui arrive, là, à 40 ans, c'est une nouvelle culture, avec femme et enfants, puis il débarque à Saint-Georges de Beauce, bien ça peut peut-être être extrêmement difficile d'y aller, ou à Hérouxville ou à un autre endroit comme ça, alors que, quand tu arrives à 19 ans, ouf! c'est beaucoup plus facile de s'intégrer. On se fait des copains, on va aux partys, etc., puis on devient Québécois et Québécoises plus facilement.

Le Président (M. Chagnon): Vos cas de figure sont intéressants.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rousse (Daniel R.): C'est une opinion tout à fait personnelle. Ce n'est pas l'opinion de l'UQAM.

Une voix: ...

n(11 h 50)n

Le Président (M. Chagnon): Vous ne lancez pas la pierre à personne!

M. Rousse (Daniel R.): J'apprécie votre sens de l'humour.

Le Président (M. Chagnon): M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Mais votre représentant n'a qu'à se méfier des fêtes qui sont organisées où on vous présente des Québécoises, parce que c'est la grande stratégie.

J'aimerais revenir sur votre population étudiante et sa participation au développement de l'UQAR. J'ai lu dans vos documents qu'ils étaient fort actifs, notamment en ce qui concerne les levées de fonds. Et je me demandais si vous aviez une politique particulière à l'égard de leur participation aux décisions concernant, par exemple, l'aide financière aux étudiants, notamment les frais afférents. Autrement dit, quel est le rapport que vous entretenez avec vos étudiants dans leur capacité de contribuer au financement, d'une part, de l'université? Je pense que vous avez des politiques exemplaires à cet égard-là, et eux aussi.

Par ailleurs, je m'interroge sur: Est-ce que vous avez, en contrepartie, des politiques sur leur capacité d'influer sur la réflexion, les décisions à la fois en ce qui concerne les frais afférents ? puis là je soulève la question des frais afférents en jouant ça à l'aveugle, là, parce que je ne connais pas la situation sur votre université ? et en ce qui concerne toute la question de ce qu'on a évoqué tout à l'heure, des frais de scolarité, et notamment dans une situation où une partie en tout cas de votre université dessert des MRC dont le niveau socioéconomique est extrêmement fragile, où on a des étudiants de première génération encore, hein, qui fréquentent votre campus et qui donc risquent de s'endetter davantage que d'autres étudiants?

Et, dans le cas d'un scénario de dégel, évidemment l'idée de compenser avec des prêts et bourses, ça vous concerne plus particulièrement encore, parce que, si on le faisait à partir d'une formule nationale, vous seriez en état de vulnérabilité très carrément, hein, parce qu'on entend parler... on entend circuler le chiffre de 30 %, là, tu sais, c'est parti de McGill, ça a passé à d'autres, là. On réinvestirait 30 % de l'accroissement des frais de scolarité, disent-ils, mais, écoutez, là, franchement, d'un campus à l'autre, là, les besoins varient, hein?

M. Ringuet (Michel): L'effectif étudiant des différentes universités québécoises n'est pas le même. Ça, c'est clair, là, il faut se le dire. Et vous avez raison de souligner que notre effectif à nous, la provenance de nos effectifs fait en sorte qu'une plus forte proportion d'entre eux ont des revenus relativement bas...

M. Bouchard (Vachon): ...modestes. Oui, oui.

M. Ringuet (Michel): ...modestes, O.K.? Et donc, quand on regarde la proportion des étudiants détenteurs de prêts et bourses chez nous, c'est généralement plus élevé que ce qu'on peut voir ailleurs.

M. Bouchard (Vachon): 72 %, 73 %, dans ce coin-là?

M. Ringuet (Michel): Ça, ça dépend ce qu'on... ça dépend comment on examine ça, aussi, là, parce que...

Le Président (M. Chagnon): ...2003, dans votre texte, c'est 2003.

M. Ringuet (Michel): Oui, c'est ça. Mais, nos relations avec les étudiants, d'abord, je pense qu'on a une relation amicale, de transparence. Ce sont nos partenaires. Les représentants des associations étudiantes, c'est nos partenaires dans le développement de l'université, et c'est comme ça qu'on les considère.

On peut ne pas être d'accord sur tout. Je suis persuadé que Bruno-Pierre n'est pas d'accord avec mon interprétation du fait que je pense que le gel des frais de scolarité est plus défendable... est plus difficile à défendre maintenant, mais on s'en parle, on se le dit franchement et on collabore.

M. Bouchard (Vachon): Là, laquelle expression on prend: plus défendable ou plus difficile à défendre?

M. Ringuet (Michel): Est plus difficile à défendre, plus difficile à défendre.

M. Bouchard (Vachon): O.K. C'est pour les fins de la transcription.

M. Ringuet (Michel): Là, il commence à être tard. C'est ça, est plus difficile à défendre maintenant.

Le Président (M. Chagnon): Il est tard, mais il n'est pas encore midi.

M. Ringuet (Michel): Mais je prendrai l'exemple des frais afférents. Le ministre de l'Éducation nous demande de ne pas imposer de modification des frais afférents sans consulter les associations étudiantes. Nous avons été plus loin que ça. Nous, on a signé un protocole avec les étudiants. L'année passée, on a augmenté les frais afférents en signant ensemble un protocole pour dire comment on les augmentait et vers où on s'en irait éventuellement. Donc, je pense qu'on est la seule université à avoir fait ça. La majorité des autres universités consultent, et, quelle que soit l'opinion des étudiants, on procède. Parce que c'est vraiment comme ça qu'il faut y arriver, il faut échanger sur les dynamiques respectives. Je pense que les étudiants comprennent bien qu'on n'a pas non plus avantage à, je dirais, maintenir l'université à des taux de financement tellement faibles qu'un jour ou l'autre l'enseignement va en souffrir. Donc, eux veulent un diplôme de qualité, et c'est de cette façon-là qu'on peut discuter et se comprendre.

En gros, donc, c'est véritablement de cette façon-là que nous échangeons.

M. Ferron (Jean): Peut-être mentionner aussi que les étudiants contribuent chaque année de façon volontaire à la fondation de l'université et qu'au cours des dernières années, par exemple au cours des trois premières années d'opération de ce programme-là, on a recueilli 196 000 $ qui ont permis de supporter 140 projets étudiants.

Donc, c'est des choses assez particulières, des façons qu'on a de faire avec nos étudiants où eux bénéficient directement de ce qu'ils investissent. Et tantôt on parlait aussi de campagnes majeures de financement aussi où ils ont contribué. Donc, ce n'est pas des frais afférents, c'est une autre façon, c'est de l'argent qui leur retourne pour faire des projets, dont certains à l'international, même, là-dedans. Donc...

M. Bouchard (Vachon): Peut-être dernière question sur la question des sous. Puis je pose la question à peu près à tout le monde qui passe, là. Le chiffre... le chiffre qui a circulé durant très longtemps sur le transfert canadien, là, c'était 4,9 milliards au niveau canadien, 1,2 pour le Québec. Est-ce que vous maintenez toujours cet objectif de financement? Est-ce que vous avez des... est-ce que vous êtes inscrits dans une dynamique particulière? Moi, mon hypothèse en tant qu'observateur, c'est que le front commun que vous avez formé jadis s'est étiolé un brin, là; on en entend moins parler, en tous les cas, on voit moins la dynamique entre les représentants gouvernementaux, les universités, les collèges. Elle l'est moins, en tous les cas, sur la place publique. C'est comme si, quelque part, c'était en dormance, là, sur la publique, mais est-ce que vous avez toujours cet objectif de 1,2 milliard récurrent pour le Québec en matière d'études postsecondaires?

M. Ringuet (Michel): La lecture que j'en fais, oui, là. Les dernières discussions de la CREPUQ auxquelles j'ai participé, il n'y a pas eu de révision de ce point-là. Est-ce que c'est moins sur la place publique? Oui, mais c'est...

M. Bouchard (Vachon): Bien, les frais de scolarité le sont plus ce qu'ils étaient, puis ça, ça l'est moins, là. Ça, c'est sûr.

M. Ringuet (Michel): Oui. Mais, les transferts fédéraux, c'est que ça a été beaucoup sur la place publique l'an passé, quand il y a eu ce grand forum, là, organisé conjointement par l'Ontario et le Québec, où on a vu véritablement... et on était tous là et on le défendait, parce que c'est clair, là, pour nous... c'est encore clair que le fédéral doit participer... doit relever son niveau de soutien aux études supérieures, au Canada. Ça, c'est évident, et donc on est toujours dans la dynamique des transferts fédéraux. Une fois qu'on a dit ça, la lecture que j'en fais, moi, c'est que, oui, transferts fédéraux, mais, si actuellement on a un déficit de revenus par rapport à la moyenne des universités québécoises, même avec les transferts fédéraux, on va garder ce déficit-là. Donc, à quelque part, il faut...

M. Bouchard (Vachon): Oui, oui. Dernière question, puis là je ne suis pas sûr qu'on a beaucoup le temps d'en parler, mais j'ai été intrigué par votre... est-ce que c'est un nouveau programme ou est-ce que... ah! je pense que oui, dans le domaine de la sculpture monumentale. Mais... non, non, mais c'est parce que... tu sais, on se promène dans le Bas-du-Fleuve, là, c'est la place, tu sais. Si tu veux une sculpture monumentale, c'est là, et... mais je suis intrigué par ça...

Mme Charest (Rimouski): ...l'éolienne aussi...

Une voix: Oui, c'est monumental.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard (Vachon): C'est monumental, c'est monumental. C'est parce que, comme ça, des fois se forge soudainement un milieu d'effervescence dans les arts et culture parce qu'on a quelque part pigé quelque chose d'important à développer, puis je veux... peut-être quelques minutes, là, vous entendre là-dessus parce que ça m'a intrigué.

M. Ringuet (Michel): Ça repose beaucoup sur l'expertise d'un homme, Roger Langevin, qui est un sculpteur, un artiste reconnu, et tout, et autour duquel donc on a formé cette école-là. Roger est associé, chez nous, au programme d'enseignement des arts, parce qu'on n'a pas de programme en arts plastiques formellement, et donc pour lui créer une niche et parce qu'il a le réseautage... Roger Langevin a un très grand réseautage chez nous, beaucoup d'influence. On a travaillé avec la ville de Rimouski, c'est aussi un partenariat où la ville de Rimouski nous a cédé un bâtiment pour permettre donc de tenir cette école de sculpture là.

n(12 heures)n

M. Bouchard (Vachon): C'est une école qui décerne un diplôme universitaire ou...?

M. Ringuet (Michel): On travaille dans les programmes courts. C'est vraiment... ce n'est pas un diplôme de grade actuellement.

M. Ferron (Jean): On travaille éventuellement à aller vers un certificat, et pourquoi pas un bac un moment donné. Peut-être pas en sculpture comme en arts, plus.

M. Ringuet (Michel): Mais l'université est impliquée de toutes sortes de façons dans la culture. Vous avez peut-être... je ne sais pas si on en a fait référence, mais on a aussi accepté... reçu un don d'une maison ancestrale, reconnue aux deux niveaux, par le fédéral et par le Québec. Donc, le propriétaire, le propriétaire ne voyait pas comment, en léguant ça à du privé, la propriété pourrait être préservée. Alors, il a cherché, au niveau du Bas-Saint-Laurent, qui pourrait l'accueillir, et il a identifié l'université.

Le Président (M. Chagnon): C'est à qui, la propriété?

M. Ringuet (Michel): C'est la maison Louis-Bertrand, à L'Isle-Verte. C'est une maison, c'est une magnifique maison, c'est l'histoire du Québec, les 100 dernières années du Québec sont dans cette maison-là. Il y a des objets qui n'ont pas été bougés dans la maison depuis 100 ans. Alors, on demande... on a demandé à l'université d'accueillir et d'agir comme maître d'oeuvre de la préservation, et on l'a accepté. Donc, quand Mme Charest parlait du rôle d'une institution comme la nôtre dans une région comme la nôtre, ça va jusque-là, parce qu'il n'y a pas d'autres organisations qui auraient pu prendre ça.

Et donc on est à l'étape d'aller cogner dans les différents ministères pour vraiment arriver... En même temps, c'est un objet que nous croyons entrer dans notre mission, parce que nos gens en histoire, en développement régional, en lettres vont l'utiliser comme plateforme d'enseignement et de recherche.

M. Bouchard (Vachon): Je pensais que c'était ma dernière, mais ce sera vraiment ma dernière. C'est parce que tout à l'heure je regardais votre positionnement au niveau international puis je me disais... Bien, d'abord, vous ouvrez un programme de recherche sur l'insularité, j'ai trouvé ça fantastique, j'ai dit: J'espère qu'ils vont avoir des relations avec les gens d'Islande, c'est un beau pays à visiter. Mais...

M. Ringuet (Michel): On en voit d'autres que ça, on voit les Açores, les Galapagos.

M. Bouchard (Vachon): Bien, oui! Magnifique, magnifique! Mais, en ce qui concerne les sciences qui tournent autour de l'océanographie, sciences maritimes, etc., quel est votre principal concurrent mondial? Parce que vous êtes dans une classe à part, hein? Je pense que vous avez développé des trucs assez fascinants, mais est-ce que vous avez, quelque part, un vis-à-vis... ou qui vous inspire, ou qui vous préoccupe, ou qui vous effraie, ou je ne sais pas?

M. Ringuet (Michel): Non. À ce niveau-là, je ne pense pas, il ne faut vraiment pas parler de concurrents. D'abord, le problème, il est tellement vaste, les océans, là, actuellement ? et j'entendais quelqu'un récemment, dans la dynamique donc de la grande conférence sur les changements climatiques qui se tient à Paris actuellement ? on fait référence au fait que la principale question actuellement, c'est: Comment est-ce que les océans peuvent éliminer une partie du carbone, agir avec du carbone atmosphérique? Puis on ne le comprend pas bien. Donc, c'est extrêmement important qu'on mette toute l'énergie qu'il faut pour mieux comprendre la dynamique des océans.

Alors, les gens des grandes institutions, Southampton, en Angleterre, ou le Scribbs, aux États-Unis, ou ces choses-là, on ne peut pas les identifier comme des concurrents, c'est des partenaires dans les grandes opérations internationales. Il y a le programme CASES, qui est un programme auquel nous avons participé avec l'Université Laval, ici, principalement. Mais donc on est à cette étape-là, internationale, il faut mettre nos gens ensemble pour mieux comprendre le système.

L'automne dernier, j'ai participé à la mission du Québec en Chine, où on a eu donc, dans le cadre d'un partenariat scientifique avec la province du Shandong, qui est une province soeur du Québec, et il y avait le volet maritime qui était carrément identifié. Il y a une grande institution chinoise, la Ocean University of China... puis ce n'est pas une concurrente, là, j'ai vu les gens se parler ensemble, les gens des sciences de la mer, chez nous, avec les scientifiques là-bas, puis les projets sortaient, puis, oui, on va aller frapper à telle porte pour avoir du financement. Alors, c'est vraiment une dynamique de partenariat, puis c'est comme ça que la science doit se faire.

Le Président (M. Chagnon): Excellent. Je veux vous garder encore cinq minutes, puisqu'on a commencé un petit peu en retard. Deux questions, deux questions rapides. La première, en page 4 de votre bilan, je ne sais pas si c'est la façon de le dire, mais ça m'apparaissait suffisamment subtil, dépassant même ma compréhension, on dit: «De plus, les contraintes budgétaires auxquelles fait face l'université nous ont forcé à geler le nombre de postes de professeur pour 2006-2007 malgré la poursuite de la croissance de l'effectif étudiant ? en principe, ce n'est pas une excellente nouvelle, mais: Bien sûr, le ratio du nombre d'étudiants [à temps plein] par professeur reste relativement bas à 15,6 % en 2004-2005 mais la prévision pour 2005-2006 à 18,2 % ? donc, elle relève ? témoigne ? puis c'est là que je ne comprends pas ? de l'effort de gestion réalisé pour améliorer cette situation».

M. Ringuet (Michel): On se plaint... En fait, d'étudiants par prof...

Le Président (M. Chagnon): Oui, oui, mais ça, ce n'est pas un objectif recherché, d'augmenter le nombre d'étudiants par...

M. Ringuet (Michel): Bien, non. C'est un indicateur.

Le Président (M. Chagnon): De la gestion?

M. Ringuet (Michel): C'est ça. Si...

Le Président (M. Chagnon): Vous auriez pu mettre 42 étudiants puis vous vanter de votre exemplarité sur le plan de la gestion.

M. Ringuet (Michel): De la gestion, mais on aime mieux se vanter de...

Le Président (M. Chagnon): ...que vous administrez.

M. Ringuet (Michel): C'est ça. On aime mieux se vanter de notre exemplarité au niveau du ratio d'encadrement professeur-étudiants, tu sais. Pour nous, l'idéal... et je pense, de toute façon, dans... quand on discute dans les organismes d'accréditation, le BCAPI, on dit toujours qu'un taux d'encadrement se situant autour de 18, 20 est le taux à viser. Bon. Alors, à 15, on était peut-être un peu bas, mais maintenant on est autour de 18.

Le Président (M. Chagnon): J'imagine que, si vous aviez les sous nécessaires pour augmenter... ou si vous aviez plus d'argent, ça ne ferait pas partie des choses que vous chercheriez à diminuer?

M. Ringuet (Michel): Non, mais nous nous voyons ici dans une dynamique de reddition de comptes où on vous dit qu'on utilise l'argent de façon sérieuse, et c'est pour ça qu'on dit: Si on fait des efforts, nous, pour...

Le Président (M. Chagnon): Je comprends votre raisonnement...

M. Ringuet (Michel): ...monter notre ratio étudiant...

Le Président (M. Chagnon): ...mais vous comprenez aussi le mien. Je veux dire, en principe, ce n'est pas un objectif que d'augmenter...

M. Ringuet (Michel): Non. Non, non, non, tout à fait.

Le Président (M. Chagnon): ...d'augmenter le ratio.

M. Ringuet (Michel): D'autant plus que...

Le Président (M. Chagnon): En principe, si vous aviez plus d'argent, vous chercheriez à le baisser. Puis, si vous aviez plus d'argent, on ne pourrait pas... Puis, le problème, c'est qu'un jour, on vous dira: Bien oui, mais vous faisiez des efforts de gestion en augmentant votre ratio, alors que ce n'est pas effectivement un objectif que vous devez rechercher.

M. Ringuet (Michel): Je pense qu'il faut chercher un équilibre entre les deux.

Le Président (M. Chagnon): ...finir par faire de la politique, vous!

M. Ringuet (Michel): Ceci dit, à 18... Oui. À 18, on est bien fiers de ça, parce qu'il faut réaliser qu'on l'a fait tout en maintenant l'Institut des sciences de la mer de Rimouski, 20 postes de professeur, qui est une INRS, à toutes fins pratiques.

Le Président (M. Chagnon): Mais je pense qu'on se comprend sur le plan de l'articulation de cette phrase-là, parce qu'elle risque de revenir un jour.

M. Ringuet (Michel): O.K. Très bien.

Le Président (M. Chagnon): Alors, l'indicateur de performance en 2003: «L'atteinte du taux de diplomation de 80 %, bien que ce soit un objectif louable, ne pourra sans aucun doute être atteint, non pas faute de moyens efficaces mis en oeuvre par l'université pour favoriser la réussite, mais à cause de la nature même de l'étudiant.» Vous vouliez dire quoi?

M. Ringuet (Michel): Je veux dire qu'il y a des étudiants qui s'engagent dans un programme d'études à temps plein mais dont l'objectif, c'est d'aller chercher quelques cours. Ils ne visent pas un diplôme, mais ils visent à aller chercher quelques cours, et donc ces gens-là, on ne les diplômera jamais.

Le Président (M. Chagnon): Parce que votre moyenne est quand même bonne, 66,1 %.

M. Ringuet (Michel): Oui, oui. Oui, oui, oui.

Le Président (M. Chagnon): Ce n'est pas loin de 80 %, ça.

M. Ringuet (Michel): Et, dans le document corrigé que nous vous avons donné, les dernières informations qu'on a, en 2000, diplomation après six ans, 79,3 %. C'est...

Le Président (M. Chagnon): Ah, vous n'êtes pas loin de 80 %. En deux mots, vous aviez une mauvaise vision en 2000.

M. Ringuet (Michel): Oui. Ça, on croyait avoir de la difficulté à y arriver. On y est arrivé.

Le Président (M. Chagnon): Dernier point: vous avez un taux extraordinaire de diplomation en santé, 93 %. En sciences pures et appliquées, par contre, là, vous fléchissez depuis quelques années, à 63 %.

M. Ringuet (Michel): Oui, mais je vous invite encore une fois à revoir les données...

Le Président (M. Chagnon): Les diplômés de 2000, là.

M. Ringuet (Michel): ...mais, 2000, on est à 71,6 %. On l'avait constaté, ça.

Le Président (M. Chagnon): Sciences de l'administration, la même chose, à 63,1 %. Vous êtes en baisse.

M. Ringuet (Michel): Ça... Et ça a remonté à 71,2 % cette année.

Le Président (M. Chagnon): C'est une bonne chose. Et la diplomation à la maîtrise, troisième, quatrième cycle, à 33 % après quatre ans.

M. Ringuet (Michel): Après quatre ans. En 2000, on est à...

Le Président (M. Chagnon): Ce n'est pas très élevé.

M. Ringuet (Michel): En 2000, on est à 57,8 %, puis ça revient à 49 %, 47 %, là. Donc, il y a des années de fléchissement. Il y a des... C'est parce que, nous, on travaille en petit nombre, vraiment des petits groupes.

Le Président (M. Chagnon): Et ça influe...

M. Ringuet (Michel): Il s'agit qu'il y ait deux étudiants qui ne diplôment pas, puis ça vient jouer dans notre...

Le Président (M. Chagnon): Je comprends.

M. Bouchard (Vachon): Vous devriez donner des noms!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Chagnon): Auxquels on pourrait ajouter des étoiles.

M. Ringuet (Michel): Vous viendrez me voir après, puis comme ça je vais vous les donner.

n(12 h 10)n

Le Président (M. Chagnon): Auxquels la commission pourrait ajouter des étoiles. Alors, M. le recteur, M. le recteur Ringuet, madame, messieurs et les gens qui vous accompagnent, au nom de la commission, nous désirons certainement vous remercier pour l'ensemble de la prestation que vous nous avez offerte ce matin. Ça a été un trois heures... même presque trois heures éminemment heureux et agréable pour nous, j'espère que ça l'a été aussi pour vous. Nous cherchons à ? contrairement à ce qui a été fait dans le passé, puis je n'ai pas de jugement à porter sur le passé; mais nous cherchons à ? ramasser l'ensemble des dossiers universitaires avec les mêmes caractères, les mêmes variables, c'est-à-dire en même temps les mêmes règles budgétaires, etc., pour se donner une idée, un portrait de l'ensemble du monde universitaire. Nous allons finir la semaine prochaine, et votre passage ici aura été certainement important pour nous permettre éventuellement de compléter notre rapport qui sera remis à l'Assemblée nationale. Alors, au nom de tous les membres de la commission, encore une fois nous vous remercions beaucoup.

M. Ringuet (Michel): Et, moi, je voudrais vous remercier de nous donner l'occasion comme ça de parler de l'université, de rendre des comptes, carrément, et de vous dire qu'on gère bien les fonds publics qui nous sont octroyés. Et je reprends ce que j'ai dit d'entrée de jeu, mais j'ai le sentiment, à la lecture des auditions que j'ai pu donc constater des universités qui sont déjà passées et de la journée d'aujourd'hui, que vous êtes extrêmement bien préparés, vous savez ce que sont les universités québécoises, et je vous en félicite.

Le Président (M. Chagnon): Sur ce, nous vous libérons pour trois ans, et je suspends jusqu'à 2 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 11)

 

(Reprise à 14 h 11)

Le Président (M. Chagnon): Je constate que nous avons quorum. J'invite évidemment toutes les personnes qui sont ici présentes à éteindre leurs cellulaires, d'un côté comme de l'autre de l'Assemblée.

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): Oui, c'est... Quand ça fait buzz pendant le milieu d'une... c'est un peu particulier.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions des dirigeants d'université en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire. Nous entendrons, cet après-midi, les membres de l'École nationale d'administration publique et son directeur, qui est avec nous, M. Marcel Proulx.

Est-ce que nous avons des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Aucun, M. le Président.

Le Président (M. Chagnon): Alors, M. Proulx, d'abord, un, premièrement, vous nous permettrez de vous souhaiter la bienvenue dans cette commission. L'ENAP était déjà venue, en octobre 2004, dans le cadre de ce travail, de cette imputabilité, qui est une notion évidemment que vous connaissez bien, chez vous, à l'ENAP. Eh bien, M. Proulx, vous aurez une vingtaine de minutes, 20 à 30 minutes pour nous présenter votre organisme et aussi nous présenter les gens qui vous accompagnent. Alors, je vous laisse, M. Proulx, puis, à la fin, nous aurons une période de questions et réponses ? et on espère, des réponses, mais en tout cas vous aurez sûrement une période de questions.

M. Proulx (Marcel): Et réponses aussi, sans doute.

Le Président (M. Chagnon): Alors, à vous, M. Proulx.

École nationale d'administration
publique (ENAP)

M. Proulx (Marcel): Bonjour. Je suis accompagné de l'ensemble de notre équipe de direction: à ma droite, M. Nelson Michaud, qui est notre tout nouveau directeur de l'enseignement et de la recherche; à ma gauche, immédiatement à ma gauche, Mme Madeleine Moreau, qui est directrice des services aux organisations; M. Robert Brulotte, qui est notre secrétaire général et directeur des services administratifs; à droite, Mme Louise Laflamme, notre directrice des finances, et, à l'extrême gauche, M. Dominique Beaulieu, qui est directeur des communication, des...

Le Président (M. Chagnon): Ça me rassure quand les femmes s'occupent de finances.

M. Bouchard (Vachon): Il n'a pas toujours dit ça!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Proulx (Marcel): Nous aussi. Nous accompagnent dans l'arrière-ban, comme on dit à l'Assemblée nationale, Mmes Angèle Tremblay et Francine Deschênes, qui ont contribué à la préparation de la présente audition.

Merci d'abord de nous accueillir. Je suis très heureux d'avoir l'occasion de présenter à cette commission un bilan de nos activités puis de discuter avec vous de quelques enjeux concernant les universités dans leur ensemble, et l'ENAP en particulier.

J'en suis d'autant plus heureux, et vous y avez fait allusion, que, pour nous, il... nous croyons fermement à l'importance de la reddition de comptes de la part des organisations et des gestionnaires publics. Et, comme nous nous efforçons de faire ce que nous enseignons, nous croyons importante, ici, cette activité de reddition de comptes. Vous nous donnez en outre la chance de mieux faire connaître notre institution et ses réalisations, dont nous croyons, pour notre part, avoir toutes les raisons d'être fiers.

Quelques mots d'abord pour vous présenter l'ENAP, sa mission et la vision stratégique qui anime son développement. L'ENAP, vous le savez sans doute, est née en 1969 de la volonté de doter le Québec d'une institution de haut savoir dans le domaine de l'administration publique, de façon à favoriser le développement d'une gestion moderne et rigoureuse. L'ENAP s'est ainsi vu confier comme mission de contribuer au développement de l'administration publique au Québec à la fois comme champ de pratique et, il faut bien le spécifier, comme champ de connaissances.

On a parfois vu l'ENAP comme l'école de la fonction publique, mais la mission de l'ENAP est beaucoup plus large puisqu'elle concerne tous les secteurs de l'administration publique, aussi bien les fonctions publiques québécoise, mais aussi fédérale au Québec, que les secteurs de la santé et des services sociaux, que de l'éducation, des affaires municipales, locales et régionales. Nous formons en outre des gestionnaires des sociétés d'État, du milieu policier, du milieu militaire et des cadres d'organismes sans but lucratif, bref toute la palette des organismes publics.

L'ENAP a aussi une vocation de répondre aux besoins de formation en gestion publique sur l'ensemble du territoire québécois. Notre mandat est un mandat national. En pratique, cela se traduit par des implantations permanentes à Québec bien sûr, où est notre siège social, mais aussi à Montréal où se retrouvent la majorité de nos étudiants, à Gatineau, à Saguenay et à Trois-Rivières.

Nous sommes aussi présents partout au Québec où se constituent des groupes qui réclament notre présence. Nous privilégions en cela les demandes provenant d'acteurs du milieu institutionnel, y compris nos camarades des institutions à vocation régionale, des universités à vocation régionale. C'est ainsi que nous offrons ou avons offert nos programmes en Beauce-Appalaches, en Estrie, dans Lanaudière, dans la région du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie et en Abitibi.

L'ENAP, vous le savez, est une université à part entière mais une université atypique à plusieurs égards. Atypique d'abord parce que nous n'oeuvrons qu'aux deuxième et troisième cycles, ensuite parce que nous nous limitons à un seul champ d'activité, celui de l'administration publique, même si c'est un champ qui connaît diverses ramifications et que, dans l'extension du concept d'administration publique, nous incluons à la fois la formation des gestionnaires mais aussi des analystes et que nous ouvrons sur la formation en administration internationale.

Notre clientèle nous distingue aussi des autres universités. En effet, environ 80 % de notre clientèle étudiante est constituée de praticiens de l'administration publique qui étudient à temps partiel, en marge de leur travail, pour parfaire leur formation.

L'ENAP est aussi exceptionnelle par la place qui occupe ce qu'on appelle chez nous les services aux organisations, c'est-à-dire des services non subventionnés destinés à appuyer les organisations publiques dans leurs activités. Ces services sont importants; chez nous, ils représentent 40 % du budget de l'école. Donc, ça vous montre qu'il ne s'agit pas d'une activité ancillaire, mais qu'elle est au coeur même de la mission de l'école.

Ces services aux organisations comprennent des formations de courte durée, qu'on appelle chez nous du perfectionnement mais dont l'appellation évolue, des contrats de recherche, des activités de conseil en gestion et des activités d'évaluation de compétences à des fins de sélection et d'appui au développement des carrières.

Les services aux organisations, incluant les services destinés à nos clientèles internationales, je l'ai dit, font partie intégrante de la mission de l'école et contribuent, au même titre que l'enseignement et la recherche, au développement des organisations publiques. Ce ne sont que deux facettes de la même mission. Je l'ai évoqué tout à l'heure, ces services représentent près de 42 % du budget de l'école.

Enfin, l'ENAP est atypique par la place importante qu'elle accorde aux praticiens dans son corps enseignant et de recherche. Non seulement la très grande majorité des chargés de cours sont des praticiens d'expérience ? et j'y reviendrai ? mais, en outre, l'école accueille en son sein une vingtaine d'administrateurs en résidence, soient des fonctionnaires prêtés à l'ENAP ou de jeunes retraités ? davantage de jeunes retraités que de fonctionnaires prêtés, d'ailleurs ? qui contribuent à ancrer nos formations et l'ensemble de nos activités dans la pratique.

Sans vouloir vous accabler de chiffres, je vous propose quelques statistiques qui vous donneront une idée de l'envergure de l'ENAP cette année. Notre budget est de l'ordre de 22 millions, en croissance de 21 % depuis deux ans, donc une école qui progresse. Notre clientèle étudiante est constituée d'un peu moins de 2 000 étudiants, 1 800 personnes, représentant 670 équivalents temps plein, un effectif stable depuis deux ans. Cela fait de nous à la fois la plus petite université au Québec mais aussi l'une des plus importantes écoles francophones d'administration publique au monde, dont la taille est supérieure incidemment à celle de l'ENA, par exemple, l'ENA de France qui sert souvent de référence dans notre milieu. Quant à la clientèle de nos activités de perfectionnement, elle représente environ 5 000 personnes de toutes origines.

Notre corps enseignant est constitué de 40 professeurs réguliers, auxquels s'ajoutent...

Le Président (M. Chagnon): Ça, c'est moins qu'à l'ENA.

M. Proulx (Marcel): Ça, c'est... C'est-à-dire que c'est plus qu'à l'ENA, il n'y a pas de professeur à l'ENA. Il y a beaucoup de vacataires mais pas de professeurs. Mais c'est vrai qu'il y a un grand nombre de vacataires, vous avez raison.

n(14 h 20)n

Notre corps enseignant donc est constitué d'une quarantaine de professeurs, auxquels s'ajoutent 41 professeurs invités, associés et émérites, professeurs sous octroi, professeurs substituts, et six administrateurs invités qui participent à nos activités d'enseignement et de recherche. Donc, un noyau dur relativement petit mais un deuxième cercle relativement large de gens qui ont un lien privilégié avec l'école et qui assument des fonctions d'enseignement et de recherche. Font aussi partie de notre effectif enseignant une soixantaine de chargés de cours et plus d'une centaine de formateurs associés qui participent aux activités de la Direction des services aux organisations. Donc, vous voyez, à la fois petit et relativement large. Finalement, les activités de l'école reposent sur une cinquantaine de professionnels dont la majorité oeuvrent dans nos pôles de recherche.

Quelques mots, si vous le voulez bien, à propos de notre vision stratégique, qui s'incarne dans notre plan stratégique 2004-2010. Notre plan stratégique retient quatre orientations majeures: assurer une plus grande pertinence aux actions de l'école par un meilleur ancrage dans le milieu. Je dirais, cette première orientation est en soi le leitmotiv qui anime l'ensemble de notre plan stratégique, cette idée d'un ancrage fort dans le milieu.

Deuxième orientation: accroître la visibilité et le rayonnement d'une école dont on considère qu'elle fait beaucoup de bonnes choses mais qui est jusqu'à maintenant trop discrète, certains diraient confidentielle. Nous serons encore moins...

M. Bouchard (Vachon): Ça dépend qui vous invitez comme professeur de l'extérieur, dans le fond.

M. Proulx (Marcel): Tout à fait. Cela fait sans doute partie des opérations visant à ce que nous soyons moins discrets.

Le Président (M. Chagnon): ...ça.

M. Proulx (Marcel): On aura l'occasion d'en discuter avec vous si vous le souhaitez, mais effectivement ça faisait partie de notre opération visibilité que l'accueil de M. Juppé.

Une voix: ...150 %.

M. Proulx (Marcel): Je constate qu'on a réussi. Troisième orientation: étendre l'occupation du territoire ? je sais que cette commission se préoccupe de cette question; étendre l'occupation du territoire ? de l'administration publique, à la fois territoire géographique mais aussi territoire sectoriel, en faisant en sorte que l'ENAP ait une meilleure emprise dans les régions du Québec et dans les secteurs de l'administration publique qu'on a eu tendance à certains moments à négliger.

Et quatrième orientation, qui ne vous étonnera pas beaucoup dans une école d'administration publique: se doter d'une gestion exemplaire notamment en matière de rigueur budgétaire et de bonne gouvernance.

J'aurai le plaisir d'élaborer davantage sur ces orientations stratégiques en réponse... que vous désirerez nous poser. Mais qu'il suffise pour l'instant d'indiquer qu'une conviction forte sous-entend l'ensemble de ces orientations, c'est la conviction selon laquelle notre école n'a de raison d'être que si elle répond aux besoins, aux besoins actuels mais aussi aux besoins futurs de l'administration publique québécoise au sens large et que si elle sait mettre son expertise au service de l'action. Donc, tout le contraire d'une école désincarnée, tour d'ivoire.

Maintenant, j'aimerais aborder avec vous les principales réalisations de l'école depuis notre dernière comparution devant cette commission, il y a de ça deux ans. Je distinguerai à cet égard nos réalisations en matière de programmes crédités, en matière de recherche, en matière de services aux organisations publiques, en matière de développement international et, de façon transversale, en matière de maillage avec le milieu.

En matière d'enseignement crédité, l'attrait de nos programmes s'est stabilisé au cours des deux dernières années. En effet, notre clientèle a peu fluctué au cours de cette période, avec une progression d'autour de 2 % en deux ans, ce qui n'est pas très spectaculaire. En revanche, il faut souligner que cette période d'accalmie suit une période de progression spectaculaire. Au cours des cinq dernières années, l'effectif étudiant en équivalents temps complet a progressé de 45 %. Je ne crois pas qu'il faille interpréter le fléchissement, que nous considérons chez nous comme conjoncturel, de la demande pour nos programmes comme une source d'inquiétude. À notre avis, ce fléchissement est tout à fait conjoncturel et tient largement à la réduction actuelle de l'effectif gouvernemental dans la fonction publique, qui envoie un message global quant aux possibilités d'emplois dans le secteur public, et un message, il faut bien le dire, un peu déprimant pour les candidats potentiels, et en particulier ceux, les plus jeunes, qui pourraient être attirés par un métier dans le secteur public.

Or, on le sait, malgré les compressions actuelles, l'ampleur des départs à la retraite qui sont annoncés est telle qu'un grand nombre de postes de professionnels de toutes manières, de professionnels et de gestionnaires, devront être comblés au cours des prochaines années. En conséquence, nous ne sommes absolument pas inquiets et nous sommes persuadés que la demande pour les programmes en administration publique devrait progresser de façon très sensible au cours des prochaines années, au fur et à mesure que sera mieux connue dans la population l'envergure du renouvellement de l'effectif dans le secteur public.

J'aurai l'occasion de compléter là-dessus, mais il est clair qu'au cours des prochaines années plus de la moitié des gestionnaires et des professionnels, à un horizon de 10 ans, auront quitté le service public. Et, quels que soient les choix qui seront faits en matière de taille de l'État, il y aura des possibilités extraordinaires pour les candidats à des postes de gestion et de professionnels dans le service public. Donc, nous n'avons pas d'inquiétude pour notre marché à moyen terme. Nous sommes un peu affectés, il faut bien le dire, par la stabilité de nos clientèles actuelles, mais nous croyons que ce n'est que temporaire.

En ce qui concerne la qualité, nous avons parlé de quantité, mais parlons maintenant de qualité. En ce qui concerne qualité de nos programmes de formation, l'évaluation de nos cours et de nos programmes montre à notre avis que nous répondons bien aux attentes. D'une part, à chaque session, tous les cours sont évalués par les étudiants, et notre taux moyen de satisfaction se maintient, d'année en année, autour de 90 %, ce qui, vous le reconnaîtrez, est plus que satisfaisant. D'autre part, nos programmes... en fait, l'évaluation périodique de nos programmes de maîtrise pour analyste et nos programmes de doctorat, qui a été complétée l'année dernière, montre, dans les deux cas, une évaluation très positive et n'entraînera à terme que des ajustements mineurs à nos programmes. Donc, sans dire que tout va bien à bord, rien à signaler, nos programmes pour analyste et nos programmes de doctorat sont considérés comme de très bonne qualité, nous en sommes heureux. Et nous procédons, à partir de cette année, à l'évaluation de nos programmes pour gestionnaire, et nos indications sont à l'effet qu'ils devraient être aussi considérés comme étant de très bonne qualité.

D'autres indicateurs sont utilisés, vous le savez, pour évaluer la qualité de l'enseignement. Parmi ceux-là, on cite le plus fréquemment le pourcentage des enseignements donnés par des professeurs réguliers et le taux d'abandon, ou le taux de diplomation, comme on dit en mauvais français, le taux de diplomation. Dans le cas du taux... du pourcentage des enseignements donnés par des professeurs réguliers ou par des chargés de cours, chez nous, un peu plus de la moitié, 53 % de nos enseignements sont donnés par des chargés de cours, ce qui, pour certains, pourrait paraître inquiétant et qui ne l'est absolument pas pour nous. Il faut vous dire que nos chargés de cours sont, à plus de 85 %, des praticiens, des professionnels qui ont déjà un emploi, qui exercent une profession dans le secteur public et qui viennent témoigner au sein de nos cours, qui viennent témoigner de leur pratique et aussi des perspectives théoriques.

Nos évaluations des enseignements montrent que la qualité de la formation donnée par des chargés de cours est tout à fait équivalente à celle donnée par nos professeurs réguliers. Et c'est pour nous une belle illustration, même dans la composition de notre corps enseignant, de cette articulation forte entre la théorie et la pratique, entre le monde universitaire et le monde pratique, qu'on retrouve dans tous nos cours mais qu'on retrouve aussi dans la composition même de notre corps enseignant.

Par ailleurs, le tiers de nos chargés de cours est constitué en fait, j'ai envie de dire, de faux chargés de cours, de gens qui sont rattachés ? ils n'aimeraient pas qu'on utilise cette expression à leur endroit ? mais qui ont un lien fort avec l'école, puisque, même s'ils sont considérés comme des chargés de cours, puisque je n'ai pas de professeur régulier, ils ont souvent chez nous, pour à peu près le tiers d'entre eux, un titre de professeur associé, professeur invité, administrateur invité, bref ces praticiens qui ont un lien fort avec l'école, dans lesquels on retrouve une quantité impressionnante de jeunes retraités qui viennent faire une deuxième carrière chez nous.

Donc, cet indicateur, chez nous, serait trompeur si on l'utilisait de façon très mécanique en disant: Mais qu'est-ce que c'est que cette université dont plus de la moitié des professeurs sont des chargés de cours? Ce serait d'autant plus embêtant que ça voudrait dire qu'une école comme l'ENA, l'École nationale d'administration de Paris, qui n'a aucun professeur mais que des vacataires, que des praticiens, serait une mauvaise école, ce qui n'est évidemment pas le cas. Quant à notre taux de diplomation ou notre taux d'abandon de nos programmes, il faut encore là tenir compte du caractère particulier de notre institution.

n(14 h 30)n

En ce qui concerne nos étudiants à temps complet, ça représente en gros 20 % de notre effectif étudiant. Leur taux de diplomation est de l'ordre de 80 % après quatre ans, ce qui, pour des programmes de deuxième cycle, est excellent. On oubliera ici les programmes de doctorat, qui relèvent d'une autre logique. Même en considérant les étudiants à temps partiel, notre taux d'abandon après six ans ne dépasse pas 25 %, même s'il faut dire que beaucoup de nos étudiants prennent plus de six ans pour compléter leur maîtrise, dans des conditions souvent difficiles, en marge de leur travail, et que, pour nous, ce n'est pas une catastrophe. Au moment où on parle de formation à vie, de la nécessité pour les praticiens de constamment se former, que des gens prennent six ans, à la rigueur qu'ils en prennent 10, bien que les normes universitaires fassent que c'est considéré comme une indécence, je vous confierai qu'en ce qui me concerne, tant et aussi longtemps qu'il y a de la persistance, que les gens continuent à étudier, continuent à appliquer dans leur milieu ce qu'ils viennent chercher chez nous, pour nous, la durée des études n'est qu'un indicateur très, très faible de la qualité de ce que nous faisons. Que certains, parce qu'ils ont des mandats très accaparants, interrompent leurs études pendant un an ou deux et reviennent, pour nous, ce n'est pas un indicateur de mauvaise qualité, au contraire c'est un indicateur de qualité des programmes qu'on puisse continuer année après année à faire des efforts tels alors qu'on a une charge de travail importante par ailleurs.

Dans les indicateurs de qualité de l'enseignement, on pourrait rajouter que le nombre maximal d'étudiants dans nos classes a été fixé à 25 personnes et que la taille moyenne de nos groupes était à 22. Au-delà de ces niveaux, nous considérons que nous ne pourrions pas donner la qualité d'enseignement que nous donnons actuellement.

La qualité des programmes se mesure aussi à notre capacité d'innover pour répondre aux besoins du milieu. Et, en ces matières, je pense qu'ils méritent... plusieurs de nos innovations récentes au cours des deux dernières années méritent d'être soulignées. Ainsi, nous complétons actuellement un programme de D.E.S.S., donc l'équivalent d'à peu près la moitié d'une maîtrise, à distance, offert avec nos partenaires étrangers, avec l'aide de nos partenaires étrangers, à l'international... sur la scène internationale pour l'instant mais qui sera offert sous peu à nos clientèles québécoises, notamment celles qui sont excentrées, des régions périphériques, que nous avons du mal à rejoindre.

Nous avons créé récemment aussi de nouveaux programmes de formation à l'intention des administrateurs de la santé et des services sociaux et des administrateurs locaux et régionaux. Nous avons consolidé notre coopération avec le Groupe Femmes, Politique et Démocratie pour offrir sous forme intensive un miniprogramme crédité de formation tout à fait original à l'intention d'éventuelles candidates à des fonctions électives, principalement dans le secteur municipal. Nous avons aussi négocié des ententes avec des institutions ou des groupes d'institutions pour offrir des programmes crédités sur mesure à l'intention de cohortes homogènes. Citons parmi celles-là notre entente avec les autorités fédérales pour la formation de la relève de gestion dans les ministères et organismes fédéraux au Québec, un programme à l'intention des gestionnaires des centres de jeunesse de l'Outaouais et un tout nouveau programme à l'intention des policiers de la ville de Montréal. D'autres programmes, et encore des plus originaux, sont actuellement en discussion, et nous pensons que c'est une façon de remplir notre mission que de passer des clientèles individuelles aux clientèles institutionnelles et que de discuter avec des institutions la préparation, dans le cadre de cours crédités qui correspondent à nos normes, mais la préparation de la relève.

L'ENAP montre ainsi qu'elle est en mesure de moduler ses programmes, pas de les transformer, pas de les édulcorer, mais de les moduler de façon à s'adapter aux besoins spécifiques de grandes organisations publiques ou de regroupements d'organisations publiques.

En matière de recherche, l'ENAP a fait du développement de la recherche au cours des dernières années une priorité majeure. Et nos efforts ont porté fruit, puisque nos subventions et contrats de recherche, au cours des deux dernières années, ont progressé de 83 % et de 107 % en cinq ans. Cette progression de la recherche résulte dans une large mesure de la création de pôles, de nouveaux centres de recherche se constituant en pôles d'excellence. Parmi ces pôles, on connaît déjà, et vous les connaissez sans doute, l'Observatoire de l'administration publique, dont la réputation n'est plus à faire, et la Chaire Bell en technologies et organisation du travail, qui a été créé il y a quelques années.

De nouveaux pôles sont venus se greffer aux pôles existants au cours des deux dernières années, ce qui montre bien l'effervescence de la recherche chez nous. D'abord, la Chaire La Capitale en leadership dans le secteur public, qui bénéficie de l'appui financier de La Capitale, mutuelle de l'administration publique, du Centre de recherche et d'expertise en évaluation, spécialisé en évaluation de politiques et de programmes, déjà beaucoup sollicité par les administrations publiques québécoise et fédérale, du Laboratoire sur les politiques publiques et la mondialisation, créé grâce à un partenariat avec le ministère des Relations internationales du Québec, du Centre de recherche sur la gouvernance des entreprises et l'intérêt général, créé grâce à l'appui d'Hydro-Québec, et du Groupe d'étude sur les politiques publiques et la santé.

En matière de services aux organisations, dont je vous ai dit tout à l'heure qu'ils constituaient une dimension essentielle de la mission de l'école, la croissance des dernières années est à la mesure de la croissance des besoins de l'administration publique. Cette croissance est particulièrement forte, puisque le budget d'opération, les revenus de notre Direction des services aux organisations au cours des deux dernières années ont été de l'ordre de 36 % alors pourtant que les organisations publiques, nos clients, connaissent de sérieuses difficultés budgétaires. Plus de 3 000 professionnels et gestionnaires ont bénéficié de nos formations de courte durée, ce qui représente près de 6 000 jours-personnes. Quant au Service d'évaluation des compétences, 1 650 personnes ont vu leurs capacités de gestion évaluées. Enfin, en matière de conseil, l'école a réalisé 55 mandats en réponse à des demandes de ministères et d'organismes publics. Au total, 80 ministères et organismes différents ont profité de nos services.

Par ailleurs, en matière d'innovation, notre Direction des services aux organisations est particulièrement innovatrice, puisqu'elle est constamment engagée dans le développement de nouvelles activités de formation en réponse aux demandes des organisations publiques et de façon plus générale dans l'anticipation des besoins des organisations publiques.

En matière de développement international, la coopération internationale, pour l'école, est une façon de valoriser l'expertise québécoise en administration publique, non seulement celle de l'école, mais celle de l'ensemble de l'administration publique. Au cours de la dernière année, les activités de développement international ont crû de plus de 25 %, à la fois à l'étranger et dans des activités destinées à des clientèles étrangères mais offertes au Québec. L'essentiel de ces activités ont porté sur la diffusion, dont j'ai parlé tout à l'heure, de notre D.E.S.S. en ligne à l'intention de nos clientèles de l'Afrique et de l'Amérique du Sud, D.E.S.S. offert à la fois en espagnol et en français.

On a été aussi très actifs dans l'accompagnement des écoles et instituts d'administration publique dans le monde. Un peu moins de 20 écoles et instituts d'administration publique dans le monde coopèrent avec nous dans le développement d'une partie de leur enseignement, l'enseignement du management public, dont nous nous sommes fait une spécialité. Nous avons aussi développé un programme de pointe en gouvernance à l'intention des secrétaires généraux, ce qu'on appellerait chez nous des sous-ministres, et, alors que ce programme s'adresse d'abord et avant tout à des clientèles de pays en développement, nous avons eu la surprise de constater que le premier séminaire que nous avons offert à l'intention de secrétaires généraux s'est adressé à des hauts fonctionnaires flamands, ce qui est une excellente nouvelle, ce qui montre que nous ne faisons pas une formation qui pourrait être considérée comme une formation à rabais pour des clientèles de pays en développement mais que le niveau de qualité est tel qu'il attire aussi bien des clientèles de pays développés que de pays en développement, ce qui correspond d'ailleurs aux valeurs de l'école. Notre programme de formation des cadres étrangers, par ailleurs, a connu un très solide succès.

L'année 2006 a été particulièrement marquée, en matière de développement international, par le développement d'un programme majeur de coopération portant sur la gouvernance en Haïti. L'ENAP joue le rôle d'agence d'exécution pour un projet conçu à l'initiative du gouvernement du Québec, donc un projet en partenariat financé par l'ACDI. Ce projet, piloté conjointement par l'ENAP et le ministère des Relations internationales, mettra à contribution les expertises de plusieurs ministères et organismes québécois en conjugaison avec les experts de l'ENAP. Donc, on est vraiment dans l'ordre du maillage avec le milieu et du faire-ensemble. Finalement, l'ENAP a signé des ententes avec des écoles supérieures et des universités européennes oeuvrant en administration publique, dont l'ENA de Paris, des instituts régionaux d'administration et quelques universités françaises et belges, à la fois pour les fins de stages internationaux de nos clientèles étudiantes mais aussi à des fins de recherche et de développement et même de coopération internationale.

J'ai parlé depuis tout à l'heure de partenariats. Nos réalisations en matière de partenariats sont des réalisations transversales par rapport à l'ensemble de nos activités. Je vous ai dit: Nous croyons fermement que cette école n'a de raison d'être que si elle est solidement ancrée dans son milieu; cela se traduit par divers partenariats. J'ai déjà évoqué nos partenariats en matière de recherche, notamment l'Observatoire de l'administration publique, qui bénéficie du soutien du ministère du Conseil exécutif du Québec et, très prochainement, bénéficiera de l'appui de l'École de la fonction publique du Canada pour traduire ses activités de veille à l'intention des clientèles anglophones du reste du Canada. Notre Laboratoire sur les politiques publiques et la mondialisation est aussi le fruit de ce type de partenariat, puisqu'il est la résultante d'une relation forte avec le ministère des Relations internationales du Québec.

L'ENAP a par ailleurs développé des partenariats étroits en matière de formation avec les organismes centraux de l'appareil gouvernemental québécois. C'est ainsi que l'ENAP et le Conseil du trésor ont conjointement institué le Centre québécois de leadership, qui est responsable des programmes institutionnels de formation des nouveaux cadres de la fonction publique québécoise, les nouveaux cadres des premiers niveaux mais aussi les nouveaux cadres des niveaux supérieurs. L'ENAP est aussi responsable, dans le cadre de ce partenariat, du programme d'accueil gouvernemental à l'intention des tout nouveaux employés de l'État.

n(14 h 40)n

L'ENAP est aussi partenaire du ministère du Conseil exécutif pour la réalisation d'activités de développement... Comme vous le savez, on ne parle pas de formation pour les administrateurs d'État, mais d'activités de développement à l'intention de la très haute fonction publique, donc des sous-ministres, sous-ministres adjoints et présidents d'organismes.

Le ministère de la Santé, pour sa part, a créé au sein de l'ENAP un bureau de liaison en administration de la santé et de services sociaux pour constituer une sorte de passerelle de coopération entre l'école et les organisations du milieu sociosanitaire. Et une des premières réalisations de ce bureau a consisté à concevoir un programme de formation tout à fait innovateur à l'intention des membres des conseils d'administration des établissements de santé et de services sociaux.

Enfin, le ministère des Relations internationales, déjà partenaire de l'ENAP en matière de recherche sur la mondialisation, s'est associé à l'école pour la création toute récente du Centre de valorisation internationale de l'expertise publique québécoise en administration publique.

En matière de réalisations, je terminerai par nos réalisations en matière de gestion administrative. Dans ce domaine, nous sommes, au conseil d'administration de l'école et à la direction, très soucieux de la rigueur de notre gestion. Et, je dirais, en particulier ? c'est vrai aussi de notre équipe de direction; mais ? notre conseil d'administration est particulièrement vigilant à cet égard. Étant constitué de hauts fonctionnaires, on s'attend de nous que notre image de gestion soit tout à fait exemplaire. C'est ainsi que nous avons maintenu au cours des dernières années des budgets équilibrés tout en puisant dans notre modeste surplus accumulé les fonds nécessaires au développement de nos activités. Le principe, pour nous, est clair: il n'est pas question d'utiliser ces fonds que nous avons constitués au cours des années, de les utiliser dans le cadre de dépenses récurrentes et courantes, mais de profiter de cette marge de manoeuvre pour développer des activités. Et vous avez vu qu'on a fait pas mal de choses en matière de développement.

La qualité de notre gestion s'est aussi illustrée lorsque nous avons dû faire face, en décembre 2005, à un incendie qui a complètement ravagé les locaux de l'école à Montréal ? vous en avez entendu parler ? nous obligeant à relocaliser près de 1 000 étudiants et une soixantaine de membres du personnel. Je suis fier de pouvoir vous dire que notre équipe a réussi à faire des miracles pour que nos activités puissent reprendre à peine une semaine après le sinistre et que, malgré certaines difficultés, nos clientèles n'ont eu à subir que des inconvénients mineurs.

Sur la qualité de notre gestion, j'ajouterais que nous avons revu l'ensemble de nos mécanismes de gouvernance avec notre conseil d'administration, de façon à nous assurer que notre conseil puisse assurer pleinement son rôle, et que nous avons adopté un système de gestion des risques permettant d'anticiper les problèmes susceptibles d'affecter le fonctionnement de l'école.

Je terminerai en évoquant deux enjeux majeurs, qui affectent l'ENAP comme l'ensemble des universités: la question du financement, évidemment incontournable, et l'évolution de la demande de formation en administration publique. Sur la question du financement des universités, je ne vous étonnerai pas en vous disant d'entrée de jeu que l'ENAP, à l'instar des autres institutions universitaires, n'a pas les moyens financiers de ses ambitions. Certes, le réinvestissement annoncé par le ministre de l'Éducation, qui correspond pour l'ENAP à un peu plus d'un demi-million de dollars cette année, représente une bouffée salutaire d'oxygène pour nous, mais elle ne nous permettra de récupérer qu'une partie du retard que nous avons pris au cours des années, lorsque nous avons dû comprimer notre effectif professoral pour faire face à la réduction du financement universitaire.

Par ailleurs, le réinvestissement dans les universités s'accompagne d'une révision majeure des normes de financement de l'enseignement. Or, ces nouvelles normes nous préoccupent énormément dans la mesure où elles impliquent une réduction sensible du financement des programmes en administration, y compris en administration publique.

Il nous paraît déraisonnable que désormais les cours en administration reçoivent un financement de 50 % inférieur à celui des cours en sciences humaines ou en droit, alors que, chez nous, ni le nombre d'étudiants par classe ni les méthodes de formation utilisées ne justifient un tel écart, au contraire. Bien que nous comprenions le rationnel de cette réforme du financement, une réforme nécessaire du financement donc de l'enseignement universitaire, nous n'arriverons pas à maintenir la qualité de nos enseignements si nous devons subir la diminution prévue du financement accordé aux sciences administratives.

Le second enjeu que je voudrais évoquer avec vous est celui de l'évolution de la demande pour des formations en administration publique. Je vous ai déjà indiqué qu'à notre avis le secteur public a besoin plus que jamais d'une école universitaire comme la nôtre. En effet, les besoins en termes de relève de gestion et de transformation des organisations seront à brève échéance si considérables que le problème est moins de savoir si la demande de formation croîtra, ce qui nous paraît évident, que de s'assurer que l'ENAP soit en mesure de répondre à cette demande, ce qui est moins évident dans notre esprit. À court terme, cette question de la demande constitue un enjeu sérieux dans la mesure où le discours actuel sur les organisations publiques minimise les besoins futurs des organisations publiques et réduit d'autant la motivation des personnes à se former pour répondre à ces besoins. Si on n'y prend pas garde, on risque de se retrouver dans la même situation que celle qu'on a dû affronter au cours des années soixante, alors qu'on a nommé massivement des gestionnaires publics insuffisamment formés.

C'est pourquoi il nous apparaît très important que les organisations publiques investissent dès maintenant dans la préparation de ceux et celles qui constitueront les gestionnaires de demain et que l'on fasse savoir aux jeunes intéressés par le service public qu'il y aura bientôt des emplois stimulants ? il y en a déjà pas mal, mais ? qu'il y en aura de plus en plus au fur et à mesure que les plus anciens prendront leur retraite, et que ces emplois seront disponibles pour ceux qui auront su se préparer aux métiers de l'administration publique.

Je conclurai en vous disant que l'ENAP est prête à assumer pleinement sa mission de développement des compétences et des connaissances nécessaires à l'administration publique pour faire face aux défis de l'avenir. Je vous remercie.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup, M. Proulx. Première remarque, évidemment, c'est extrêmement intéressant, ce que vous nous avez dit. Sur une expression, j'ai titillé, puis c'est un détail, mais je vais quand même le soulever parce que ça m'a achalé, je l'ai déjà entendue une fois puis je vais vous dire comment. Quand vous avez dit «le rôle ancillaire», vous voulez dire quoi?

M. Proulx (Marcel): On a tendance à considérer que c'est un peu marginal. Dans beaucoup d'universités ? et à mon avis on a tort de le faire ? on toujours tendance à considérer qu'il y a l'activité noble, qui est l'activité d'enseignement crédité et la recherche, et que le reste est souvent ? j'aurais pu dire même «alimentaire» ? utile, mais qu'on offre ce genre de type d'activité presque avec la honte, en considérant que ce n'est pas vraiment de niveau universitaire.

Le Président (M. Chagnon): C'est secondaire.

M. Proulx (Marcel): Secondaire, marginal. Effectivement, l'expression est peut-être mal choisie.

Le Président (M. Chagnon): En tout cas, parce que je... J'ai entendu un très haut fonctionnaire nous apporter cette expression-là, j'avoue bien franchement que je la trouvais belle, sauf jusqu'au moment donné où je suis allé regarder dans le dictionnaire ce que ça voulait dire, et là c'était pas mal moins fin.

M. Proulx (Marcel): Oui, ce n'est pas très fin.

Le Président (M. Chagnon): Et ça n'exprime rien de ce que vous voulez dire, dans le fond. Et je ne vous blâme pas, parce qu'on est un peu tous à la merci de mots qu'on juge intéressants, et, quand on regarde un peu, après, la définition, la définition est...

Une voix: ...

Le Président (M. Chagnon): De rien! Mais ne le prenez pas mal, parce que vous m'avez appris aussi quelque chose ce matin, puis je vais vous le dire tout de suite après. «Ancillaire: 1855, qui a rapport aux servantes. 1803, latin, ancillaris, de ancilla, servante.»

M. Bouchard (Vachon): C'est un filibust, ça?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Chagnon): Ah! Pas tout à fait. «Plaisant: se dit de liaisons avec des servantes ? je ne pense pas que ce soit ça que vous vouliez dire! ? des amours ancillaires.»

Je ne vous le reproche pas, parce que, de deux choses l'une, ou le très haut fonctionnaire dont je parle a influencé le vocabulaire de l'ENAP ou c'est l'ENAP qui aurait influencé son vocabulaire, mais ce n'est pas le bon qualificatif pour la bonne chose. Mais je voudrais vous remercier parce que vous nous avez aussi dit qu'on ne devrait pas dire «taux de diplomation», et, moi, je l'ai répété souvent ici, encore probablement ce matin. Et vous avez raison, après vérification, «diplomation» n'est pas un mot français. On pourrait parler de taux de diplômés ou de pourcentage de diplômés ou de taux de diplômants, mais pas de taux de diplomation. Alors, 1-1, sur le dossier de la protection et de l'amélioration de langue française.

M. Proulx (Marcel): J'apprécie.

Le Président (M. Chagnon): Ceci étant dit, dans le rapport d'activité que vous nous avez fourni, je dois dire que je l'ai trouvé... J'ai ri en le lisant, parce que, quand on a fini... D'abord, c'est le rapport des actions prioritaires pour le plan de développement 2004-2010, mais vous êtes en avance sur votre temps, quand on lit ça: 2005-2006, vous avez à peu près tout fini, sauf, en page 4: «Accroître l'effort de recherche portant sur les enjeux de l'administration publique: Un, résultats à venir ? on va vous demander pour quand; deux, amener les professeurs à publier annuellement un RAC et un CHA ? là, c'est, bon, un RAC puis un CHA, mais ? non réalisé, les résultats obtenus sont en deçà des objectifs.» Et, si on continue, il faut aller à la page 10 pour trouver quelque chose qui n'a pas été fait encore, dans le programme pour 2010. Vous êtes en avance sur votre temps, je vous le dis.

n(14 h 50)n

«Arrimer les activités internationales à la mission nationale de l'école. Objectif 2005-2006: Préparer un plan d'affaires en lien avec la mission de l'école à l'échelle internationale ? puis, résultat en 2005-2006: Le dossier n'a pas évolué mais sera inscrit au plan d'action 2006-2007.» Comme on est pas mal avancé dans l'année 2006-2007 et comme je vous ai vu à l'étranger il n'y a pas très longtemps, je présume que celui-ci a avancé, mais qu'est-ce qu'il va vous rester à faire entre 2008 puis 2010?

J'ai un troisième exemple, à la page 11: «Favoriser l'accroissement ? toujours dans les actions prioritaires selon le plan de développement 2004-2010; favoriser l'accroissement ? des clientèles en formation accréditée.» On dit que... les résultats en 2005-2006: «Résultats à venir». «2. À ce jour, un seul cours a été offert.» Et, dans tout le reste, qu'on parle de toutes les autres orientations, tout est fait en 2005-2006, sauf, et la dernière est la suivante, à la page 16, on dit: Dans le cadre de «se doter d'un plan de développement technologique ? c'est le dernier point, on dit, au dernier point ? définir les paramètres pour la gestion informatisée ? en 2005-2006 ? des dossiers des professeurs quant aux nouvelles obligations établies dans la convention collective». Puis ce qui en découle, c'est qu'«en raison des difficultés majeures éprouvées au cours de l'année 2005-2006 avec le système de courrier électronique et le changement de personnel, cette activité n'a pu être réalisée». Finalement, vous êtes rendus quasiment en 2010. Qu'est-ce que vous allez faire entre 2008 puis 2010? Vous allez être obligé de revenir ici, à part ça. Après l'exercice d'aujourd'hui, il vous reste trois ans.

M. Proulx (Marcel): Je pourrais vous dire qu'on va se reposer au cours des trois prochaines années. Je répondrai plus sérieusement que l'ensemble de l'école s'est mobilisé fortement autour des objectifs du plan stratégique. Nous nous sommes donné, et ça a un peu inquiété notre conseil d'administration, une série d'actions découlant du plan stratégique, et, dès la première année, notre conseil d'administration nous a trouvés très ambitieux parce que nous nous sommes donné un programme très très large. Or, comme vous le constatez, ce que nous vous présentons ? et le document que nous avons présenté au conseil d'administration, ce qui explique que certaines expressions soient un peu codées ? nous avons fait beaucoup de choses parce que nous sentions une sorte d'urgence, pas parce que c'était inscrit dans le plan de développement, parce que tout cela résulte largement de demandes du milieu, d'une part, et, d'autre part, de besoin de consolider nos services administratifs pour faire en sorte que l'intendance suive, comme disait de Gaulle. Ce qui n'est pas toujours évident dans une institution universitaire; on a tendance à bétonner nos services à la clientèle ? et on en a fait notre priorité ? et parfois négliger nos services administratifs, ce qui explique que beaucoup de nos orientations portent sur les services administratifs, dans le plan d'action que nous avons présenté.

Je vous dirai qu'une fois que ces actions prévues dans le plan stratégique auront été réalisées ? et nous souhaitons les réaliser le plus rapidement possible ? nous aurons de nouvelles actions qui seront prévues, dans la mesure où les grandes orientations, celles que je vous ai présentées, sont des orientations qui peuvent nous mener très loin. L'ancrage dans le milieu, par exemple, vous voyez, on a créé, cette année, une série de partenariats, on a développé nos partenariats, de l'ordre de cinq ou six nouveaux chaque année. Je ne suis pas certain qu'on pourra en faire autant à chaque année, mais nous ne cesserons pas d'avoir ce type de partenariat, parce que c'est un des vecteurs de développement importants dans notre institution.

Sur la recherche, vous avez raison, nous avons eu quelques inquiétudes en matière de recherche. Notre progression en matière de subventions et de contrats de recherche est très spectaculaire, ce qui démontre bien que nous allons bien. Nous trouvons que nous...

M. Bouchard (Vachon): Moi, je n'ai pas les chiffres, année après année de fait, de cette progression dont vous parlez dans votre tableau de la page 2 de 5.

M. Proulx (Marcel): Effectivement, ils ne s'y trouvaient pas et, même pour les chiffres de cette année, compte tenu du retard du ministère de l'Éducation à nous transmettre les chiffres, on est encore un peu fragiles, mais globalement nos indications, nous les avons avec nous, nos indications quant à l'évolution des budgets de recherche et des pourcentages d'évolution en termes de financement...

Mme Laflamme (Louise): C'est parce que celle-ci, quand on parle, ici, subventions d'infrastructure de la FCI, pour l'instant, celle à laquelle vous faites référence, à la page 2, nous ne recevons pas, nous, de subvention de la FCI, et je pense que cette page porte presque exclusivement...

M. Bouchard (Vachon): Tout ça tombe sur...

M. Proulx (Marcel): ...des années précédentes

M. Bouchard (Vachon): Les contrats de recherche, ce n'est pas sur FCI, subventions de recherche excluant les revenus de la FCI...

M. Proulx (Marcel): Non, c'est ça. Subventions et contrats devraient être là.

M. Bouchard (Vachon): Oui, c'est ça. C'est que je m'étonnais de ne pas pouvoir trouver ces données évolutives là, parce que ce dont vous parlez c'est... Je vous crois sur parole, là, mais...

M. Proulx (Marcel): Tout à fait. Je vous comprends très bien.

M. Bouchard (Vachon): Ce serait peut-être intéressant d'avoir le tableau à jour éventuellement, parce que, puisque vous faites référence à une remontée, enfin une amélioration de...

Mme Laflamme (Louise): Ce sont les avantages du système d'inventaire de recherche universitaire, qui est le SIRU, qui est déposé au ministère de l'Éducation.

M. Bouchard (Vachon): Oui. D'accord.

M. Proulx (Marcel): Vous voyez, dans des données que nous ne vous avons pas transmises, nous avons... que nous aurions dû vous transmettre...

M. Bouchard (Vachon): Non, non, mais c'est correct.

M. Proulx (Marcel): ...je comprends bien, nous sommes passés, en 2001, de quelque chose comme 1 million...

Le Président (M. Chagnon): Bien, peut-être pourriez-vous fournir à la commission ces données-là dans les jours qui viennent, et puis nous les transmettrons aux membres de la commission?

M. Proulx (Marcel): Tout à fait.

M. Bouchard (Vachon): Mais allez-y, parce que vous... Je ne veux pas vous arrêter sur votre lancée, là, mais...

M. Proulx (Marcel): On a constaté que nous avons progressé moins rapidement que nous l'aurions souhaité en matière de publications de la part de nos professeurs. Donc, la demande existe, les subventions et les contrats de recherche arrivent chez nous, et ça tient au fait que nous avons recruté énormément de nouveaux professeurs au cours des cinq dernières années ? quelque chose comme le quart de nos professeurs a été recruté au cours des cinq dernières années ? et que nous avons peut-être exagéré la productivité potentielle de tout nouveaux professeurs.

Chez nous, l'enseignement est extrêmement important; les deux premières années, les professeurs ont besoin de se bâtir des cours solides, nos étudiants sont extrêmement exigeants, de sorte que... alors que nous avons engagé de jeunes professeurs qui ont un potentiel de recherche extraordinairement fort, leur productivité globale en recherche n'est pas aussi forte que celle que nous avions anticipée. Cependant, nous commençons à voir apparaître, maintenant que ceux qui sont arrivés il y a trois ou quatre ans ont pris leur rythme de croisière, on commence à voir des choses s'améliorer, et nous sommes à peu près persuadés qu'à la prochaine audition devant cette commission nous pourrons montrer des résultats plus impressionnants en matière de publications.

Par contre, en matière de subventions, les subventions et contrats de recherche sont aussi un bon indicateur de la qualité de ce que nous faisons, puisque les organismes subventionnaires nous financent de plus en plus et que les contrats de recherche sont un bon signe non seulement de notre qualité, mais aussi de notre ancrage dans notre milieu.

Mme Laflamme (Louise): Peut-être un complément d'information, M. Bouchard, peut-être... juste la page précédente, on a le détail de Subventions et contrats de recherche, Contrats de recherche excluant les revenus de la FCI, Contrats de recherche et frais indirects de recherche. Si vous continuez, l'autre...

M. Bouchard (Vachon): Attendez voir. À la page suivante?

Mme Laflamme (Louise): C'est ça, qui serait la page 2 de 5. Je trouvais ça étonnant. Vous avez... Ça fait référence aux lignes 25, 26 et 27.

M. Bouchard (Vachon): Ah, vous les avez reprises à part!

Mme Laflamme (Louise): C'est ça. C'est que ça, c'étaient les éléments d'information, mais ils sont consolidés en 25, 26, 27. Alors, vous voyez...

M. Bouchard (Vachon): Ah! O.K. D'accord. Là, on voit clairement. Donc, c'est ça.

Mme Laflamme (Louise): Voilà. Voilà. Alors, vous avez les subventions de recherche, 1 286 000 $, où on fait référence aux octrois des organismes subventionnaires, et les contrats de recherche, à 1,3 million, et ensuite on fait mention des frais indirects de recherche qui nous sont versés par le CRSH.

M. Bouchard (Vachon): D'accord. Merci. Ça clarifie très bien la chose.

Le Président (M. Chagnon): Je l'avais dit tout à l'heure, que c'était rassurant d'avoir des femmes qui s'occupaient des finances.

Mme Laflamme (Louise): Je vous remercie.

M. Bouchard (Vachon): C'est la même page qui, sur l'autre... C'est correct.

Mme Laflamme (Louise): Voilà. C'est ça. L'autre, il était juste un élément exclu de l'information.

M. Bouchard (Vachon): Ça va. Non, non, c'est mon erreur.

Mme Laflamme (Louise): Non. Je vous en prie.

Le Président (M. Chagnon): Je reviens à la vision globale des activités, du rapport d'activité, qui est séparé en parties qui sont l'Ancrage dans le milieu, la Notoriété, le Renforcement de l'identité institutionnel et Accroître la visibilité et le rayonnement de l'école. On a l'impression que vous êtes à ce point avancés que vous allez devoir refaire l'exercice de 07010 ou 017012. Est-ce que vous avez l'intention de le refaire?

M. Proulx (Marcel): On va le refaire, forcément. Est-ce qu'on le refera d'ici 2010?, je n'en suis pas sûr.

Le Président (M. Chagnon): Vous allez... vous allez avoir moins d'ouvrage.

M. Proulx (Marcel): Nous aurons de nouvelles actions et nous nous apprêtons, à faire à mi-parcours, avec notre conseil d'administration, une revue de nos réalisations en lien avec le plan stratégique. Il est clair que, sur certains points, nous n'avons pas avancé autant que nous l'aurions souhaité. Par exemple, nous venons de réaliser une étude de notoriété de l'école. Si on veut attirer, il faut être connu, et nous avons cherché à mesurer si nous sommes connus et reconnus. Dans le milieu de la fonction publique, les choses vont très bien; du secteur public en général, les gens du secteur public, à 80 %, nous connaissent et, de façon générale, dans les mêmes proportions, à peu près à 80 %, trouvent que nous faisons un bon travail, ce qui est très satisfaisant. Mais, quand nous nous adressons aux étudiants qui complètent un premier cycle en administration, en sciences politiques, en économie, en sciences humaines, qui constituent la clientèle de nos programmes pour analystes, on constate qu'à peine 18 % des étudiants nous connaissent.

n(15 heures)n

Quant à nous reconnaître, bien là on est loin de nous reconnaître, puisqu'on ne nous connaît pas. Et donc nous avons encore pas mal de chemin sur ce thème de la notoriété, non pas dans les administrations publiques, mais dans le grand public, et en particulier dans le public étudiant. Or, les besoins en termes de formation des professionnels, des spécialistes en appui à la gestion seront aussi considérables que les besoins dans le domaine de la gestion. Et, pour nous, c'est intéressant en plus d'attirer des jeunes, d'abord parce que la mixité des âges, dans une institution de formation comme la nôtre, est quelque chose d'important, mais aussi parce que ça nous permet d'avoir des clientèles à temps plein ? les jeunes sont davantage à temps plein que les clientèles de praticiens ? et que ces clientèles occupent nos salles le jour. Nos clientèles à temps partiel étudient aussi le jour, mais moins, et, si on veut optimiser l'utilisation de nos locaux, bien, plus on a une clientèle de jour, plus c'est intéressant, puis ça permet de faire de l'école un véritable milieu de vie.

Et, sur d'autres domaines, j'aurais pu continuer, dans d'autres domaines, on voit que nous aurons, en gardant les mêmes orientations générales, pas mal de boulot à réaliser et que nous fixerons de nouveaux objectifs dans le cadre de ces grandes orientations.

Le Président (M. Chagnon): Une autre question, concernant vos ratios. Vous êtes à 14,3... vous étiez à 14,3 en 2005-2006, ratio que vous jugez satisfaisant? On parle quand même de deuxième et de troisième cycle, là.

M. Proulx (Marcel): Non. Nous souhaiterions avoir davantage de professeurs. Nous considérons qu'il nous manque une dizaine de professeurs.

Le Président (M. Chagnon): Pour amener votre ration à combien?

M. Proulx (Marcel): Pour amener notre ratio... En fait, notre ratio professeurs réguliers serait à 15, parce que ce ratio inclut des gens qui nous sont prêtés, des professeurs associés qui participent à l'encadrement ? les règles du ministère font que nous sommes amenés à les inclure ? ce qui n'est pas indécent, mais qui nous rend relativement fragiles, parce qu'un retraité, un professeur retraité qui vient comme professeur... un haut fonctionnaire retraité qui vient comme professeur associé chez nous n'est chez nous que pour une durée limitée. Et, si nous n'avions pas ces gens, notre ratio serait plutôt à 1-18, 1-19, ce qui nous paraît, au deuxième cycle, excessif. Notre ratio minimum serait de 1-15, et, pour avoir 1-15, il nous faudrait une dizaine de professeurs de plus.

Le Président (M. Chagnon): 1-15 avec des professeurs... uniquement des professeurs de carrière.

M. Proulx (Marcel): Des professeurs réguliers, de carrière, qui sont les seuls à qui on peut demander de faire de la recherche. Et donc c'est davantage... pour la recherche, ce ratio-là est un ratio intéressant, mais, en matière de recherche, à 40 professeurs, notre masse critique n'est pas suffisante.

Le Président (M. Chagnon): Dans la page 3 de 5 des indicateurs que vous nous avez suggérés...

M. Bouchard (Vachon): M. le Président?

Le Président (M. Chagnon): Oui, allez, allez.

M. Bouchard (Vachon): Juste à ce sujet-là.

Le Président (M. Chagnon): Oui, bien sûr.

M. Bouchard (Vachon): Parce que j'essaie de bien comprendre votre ratio, là, puis ce que je comprends, c'est qu'il y a quand même parmi vos chargés de cours des gens qui ont un statut particulier, notamment de professeur associé. Donc, c'est des gens qui sont habilités à codiriger des thèses de doctorat.

M. Proulx (Marcel): Oui.

M. Bouchard (Vachon): Donc, ce qu'il faut comprendre, c'est que votre ratio ne reflète pas la qualité réelle de l'encadrement, parce que, si vous avez des codirecteurs de thèse, codirecteurs de travaux de doctorat, ça améliore considérablement l'encadrement effectif de l'étudiant, ou des étudiants. Est-ce que je me trompe? Non, j'imagine?

M. Proulx (Marcel): Oui. Mais ils sont considérés, ces professeurs associés, certains d'entre eux, ceux avec qui on a un lien plus solide, des professeurs invités en particulier, ils sont considérés dans le calcul, une partie d'entre eux. Je vous fais grâce des détails du ministère de l'Éducation, mais une partie d'entre eux sont considérés, et c'est vrai que ça contribue à l'amélioration.

Par ailleurs, les autres qui ne sont pas considérés encadrent moins des thèses de doctorat. Quelques-uns seulement sont habilités à encadrer des thèses de doctorat, en particulier ceux qui sont des retraités de l'enseignement universitaire. Les autres encadrent davantage des étudiants à la maîtrise.

M. Bouchard (Vachon): Oui. Et vous avez des codirections de thèse au doctorat avec vos professeurs associés?

M. Proulx (Marcel): Oui, tout à fait. Tout à fait.

M. Bouchard (Vachon): Je ne conteste pas vos chiffres. C'est parce que vous pourriez laisser l'impression, avec 1-15, que l'encadrement doctoral est extrêmement fragile, parce que... alors que dans les faits il y a certainement un encadrement étudiant plus serré que le ratio pourrait nous le laisser entendre.

M. Proulx (Marcel): C'est juste.

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Au niveau du...

M. Proulx (Marcel): Surtout à la maîtrise. Au doctorat, les choses sont un peu plus difficiles, il faut bien le dire.

M. Bouchard (Vachon): Alors, en moyenne, chacun de vos profs chez vous supervise combien de thèses de doctorat à la fois, simultanément?

M. Proulx (Marcel): Tous n'en dirigent pas. Ça peut représenter combien?

M. Michaud (Nelson): C'est variable. Ça va vraiment avec le type de professeur. Un professeur qui est un chercheur de pointe peut avoir trois, quatre, cinq étudiants au doctorat, mais des professeurs avec un profil davantage praticien, davantage tourné vers l'action, bien à ce moment-là c'est des professeurs qui vont être utilisés, chez nous, davantage pour l'encadrement des stages, pour l'encadrement des projets d'intervention.

M. Bouchard (Vachon): Non, mais je parle des thèses, je parle des thèses.

M. Michaud (Nelson): Au niveau des thèses de doctorat, dans les professeurs-chercheurs de pointe, il y a à peu près une moyenne de deux, trois, je dirais.

M. Bouchard (Vachon): O.K. C'est beau.

Le Président (M. Chagnon): Ça va? Je vais continuer dans la page 3 de 5 des indicateurs que vous nous fournissez, et, pour ne pas retomber dans le travers dont je parlais, on parlait de diplomation, alors on ne parlera plus de diplomation, on va dire «le pourcentage de diplômés» à la maîtrise après quatre ans, je remarque qu'à partir de 1997 votre pourcentage baisse tout le temps, enfin de 1997 à 2001, parce qu'on n'a pas après 2001, évidemment: 80,7, 71,1, 68,9, 67,2, 62,4. Est-ce que ça vous a intrigué? Est-ce que ça vous amène à vous poser des questions particulières? Et, si oui, quelles sont les réponses à ces questions que vous vous posez?

M. Proulx (Marcel): Tout à fait. On a des données aberrantes. En fait, les deux années étranges sont les années 1996 et 1997, où on a des taux de 80 %; autrement, on se retrouve à peu près dans les mêmes eaux, autour de 70 %, avec un 62 qui est un peu faible, en 2001. Il faut dire que c'est le reflet de mesures que nous avons prises il y a longtemps, puisqu'on sait, six ans après ou quatre ans après, quels sont les résultats de ce qu'on a fait, et nous sommes passés, à cette époque, d'une maîtrise à 60 crédits à une maîtrise à 45 crédits, ce qui a fait en sorte de doper littéralement, mais temporairement, notre taux de diplomation... notre taux de diplômés ? on a du mal à trouver un équivalent à «diplomation» ? ce qui a en quelque sorte dopé nos résultats.

Le Président (M. Chagnon): On en fera peut-être un néologisme qui va s'inscrire dans notre langue, remarquez, on ne sait jamais. Mais, pour l'instant, un taux de diplômés.

M. Proulx (Marcel): Ça a dopé nos résultats donc et a fait en sorte que nos étudiants ont quitté massivement, parce qu'entre ceux qui étaient... tous ceux qui avaient dépassé 45 crédits, on a pris des mesures rapides pour qu'ils obtiennent leur diplôme. Pour le reste, sur quatre ans, autour de 60 %, ça ne nous inquiète pas, en vous rappelant que nos étudiants à temps partiel, qui représentent 75 % de notre clientèle, mettent rarement moins de cinq ans pour faire leur maîtrise, ce qui fait que c'est malgré tout étonnant. C'est parce qu'on a des étudiants à temps partiel...

Le Président (M. Chagnon): Oui, mais on a toujours des étudiants à temps partiel; en 1994, on avait des étudiants à temps partiel, puis ils faisaient aussi probablement la même chose, ils ne pouvaient pas faire leur maîtrise en quatre ans, ils devaient faire leur maîtrise en plus que... alors on compare des choses qui sont comparables. De 70 % en 1994 à 80,4, qui est peut-être une anormalité pour les raisons que vous avez mentionnées, mais revenons à 1998, 71, 68, 67, 62. On a une espèce de pente descendante qui est intrigante, qui est questionnable en tout cas, dont l'institution devrait se questionner, il me semble.

M. Proulx (Marcel): On s'est questionné, on a eu ce débat chez nous: Faut-il forcer les étudiants... En gros, ça correspondait à: Faut-il forcer les étudiants à temps partiel à prendre au moins deux cours par session? C'est à dire deux soirs, plus les week-ends, plus... et on en est arrivé à la conclusion qu'il valait mieux laisser les étudiants cheminer à leur rythme, d'être un peu moins autoritaire en ce domaine, de faire en sorte qu'un étudiant qui veut faire sa maîtrise en six, sept, huit ans, et on a des cas de 10 ans, bien de ne plus considérer que c'était une catastrophe. Or, auparavant, notre régime des études nous amenait à sanctionner ceux qui n'allaient pas suffisamment vite, ce qui fait qu'on mettait de la pression. On considère qu'on a perdu des clientèles, ce n'est pas qu'ils ne diplômaient pas si vite, c'est qu'ils ne s'inscrivaient pas chez nous, sachant que la pression était trop forte.

Et ce phénomène va s'accentuant, et ça explique nos résultats. De plus en plus, nos étudiants prennent une session de congé par année, souvent la session d'été, parfois la session d'hiver, ce qui en même temps est un indicateur de la qualité de nos étudiants. Ils sont sollicités dans le milieu de l'administration, il y a des périodes où ils ne peuvent plus, et nous sommes de plus en plus ouverts à ces congés, on l'a toujours été, mais on l'est de plus en plus, et puis on accepte qu'un étudiant puisse prendre deux cours par année. Mais, deux cours par année, quand vous pensez qu'une maîtrise représente l'équivalent de 15 cours, ça fait très long.

Le Président (M. Chagnon): M. le député de Vachon et M. le député de Charlesbourg.

M. Bouchard (Vachon): J'imagine qu'il faut inclure là-dedans aussi... vous avez une clientèle majoritairement féminine. Il y a peut-être des cohortes aussi qui arrivent à rencontrer leur horloge biologique, là. Ça arrive, hein? Et, moi, je pense que, pour avoir été dans le milieu universitaire un bout de temps, il y a comme des cohortes où on voit que les étudiantes, au doctorat notamment, prennent un an de congé de maternité, et c'est fort acceptable et fort louable en même temps, et je pense qu'on devrait le comptabiliser de cette façon-là.

n(15 h 10)n

Ce que je me pose comme question, c'est: Votre clientèle... d'abord, il y a des acronymes qui m'ont interpellé, là, le D.E.S.S. notamment. Moi, je ne suis pas familier avec le diplôme d'études supérieures spécialisées, j'aimerais ça que vous puissiez m'en parler un tout petit peu, puis la différence entre vos analystes et vos gestionnaires. Tout simplement question de culture, et votre personnel, j'imagine, parce que tout le monde ici doit connaître ça, sauf moi. Mais ça, c'est ma première question.

La deuxième, c'est celle-ci, vous avez... dans le fond vous êtes bien placé pour porter un jugement sur l'ensemble de l'administration publique, parce que j'imagine que vous êtes attentif à cet environnement-là pour développer des nouveaux créneaux à la fois de recherche, de connaissances, d'apprentissage et d'enseignement. Et ce que j'allais vous demander, c'est: Quelle différence avez-vous observée durant les quelques dernières années, disons les 10 dernières années, dans les besoins que l'administration publique vous imposait comme institution d'enseignement? Et quels créneaux prévoyez-vous développer en vertu de nouveaux besoins?

Je vais vous donner un exemple. Là, je m'aventure sur une glace très mince, là, mais je ne crois pas que nos gouvernements successifs et peut-être notre administration aient une approche très expérimentale du changement institutionnel. Très souvent, on implante des programmes, puis c'est très souvent des programmes mur à mur, puis on n'a pas une approche dite expérimentale, et ça va de pair, ça, avec une culture de l'évaluation des institutions. Alors, moi, de mon point de vue d'observateur externe, j'ai cru observer un état de la question comme celui-là, je me demandais si ça avait évolué durant les dernières années, vers où on s'en allait dans ce créneau-là en particulier, mais peut-être avez-vous d'autres priorités, en vertu de développement chez vous, au niveau pédagogique, au niveau de la nature des enseignements et des recherches.

M. Proulx (Marcel): Je dirais qu'il y a à la fois des phénomènes conjoncturels puis des phénomènes structurels. Sur le plan structurel, je dirais, il y a deux grandes tendances qui correspondent à l'évolution des besoins depuis cinq, peut-être 10 ans, dans l'administration. La première tendance, c'est une tendance à la formalisation, autour de la gestion axée sur les résultats, autour de la reddition de comptes, cette volonté de mesurer, de définir de façon plus rigoureuse les objectifs. Tout ce concept de la rigueur, qui a commencé dans les années soixante-dix avec la rationalisation des choix budgétaires, mais qui, depuis la Loi sur l'administration publique, s'est resserré, et donc cette importance d'équiper les gestionnaires d'outils pour définir rigoureusement des résultats: planification stratégique, tableau de bord de gestion, tout ce qui est donc dans l'ordre de la formalisation.

Et parallèlement un mouvement qui est presque un mouvement inverse, qui tourne autour des nouvelles compétences, et notamment des compétences que certaines personnes appelleraient «soft», des compétences émotionnelles, de tout ce qui est de l'ordre de l'interpersonnel, du gestionnaire à qui on demande d'être à la fois plus rigoureux, plus systématique et plus méthodique mais en même temps plus soucieux des personnes, plus mobilisateur. Vous reconnaîtrez ce qui apparaît comme un cliché mais qui n'en est pas un, et qui est vécu comme ça par les gestionnaires, cette difficulté de concilier à la fois le côté dur et méthodique puis le côté de comment on fait en sorte que des êtres humains concrets, dans les organisations, arrivent à se développer, arrivent à être stimulés, mobilisés puis à avoir de l'ambition.

Ça s'est incarné dans des affaires comme l'intelligence émotionnelle ? je n'aime pas beaucoup le concept, mais l'idée derrière est très, très forte ? derrière toutes ces compétences nouvelles de gestion. Je dirais...

M. Bouchard (Vachon): Rigueur et chaleur...

M. Proulx (Marcel): Rigueur et chaleur.

M. Bouchard (Vachon): ...c'est ce qu'on demande à tout bon parent également, mais... Alors donc, formalisation et d'autre part humanisation, disons, comme deux vecteurs que vous avez identifiés. Mais, lorsque vient le temps de développer l'ENAP en vertu de ces deux grands vecteurs, quelle évolution prévoyez-vous? Dans quels créneaux allez-vous orienter vos enseignements? Parce qu'il me semble que, puisque la fonction publique est en train de se renouveler, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, on va arriver avec une nouvelle génération de gestionnaires ou de grands administrateurs qui vont sortir de chez vous. Quelle différence on va voir dans l'appareil administratif?

M. Proulx (Marcel): Il y a une part des compétences de gestion qui sont des invariants. Il serait dangereux ? on l'a fait dans certaines administrations et à mon avis avec des résultats pas très heureux; il serait dangereux ? de dire: On va faire table rase des compétences de base. Donc, pour nous, c'est important de maintenir les compétences de base. Il est clair qu'il y a de nouvelles attentes à l'égard des gestionnaires, qui viennent moins des nouvelles générations que de la population dans son ensemble et des attentes de la population. Par exemple, il y a quelques années, on aurait souri de nous voir offrir des cours en éthique, par exemple. Or, toutes les considérations éthiques, de la même façon que tout ce qui concerne l'intelligence émotionnelle, les capacités à mobiliser les personnes, apparaissent comme plus importantes maintenant qu'elles n'apparaissaient il y a quelques années. Un déclin des techniques, des outils et techniques, on se rend compte que ce qui fait la différence dans la qualité de gestion, c'est moins l'outillage technique, que les gens acquièrent par ailleurs, qu'ils viennent chercher.

Quant à nos façons de nous adapter... parce que, derrière cette question, il y a: comment faites-vous? Je dirais qu'on est avantagé parce que nous avons chez nous une direction, la Direction des services aux organisations, qui, elle, est forcée d'être en pointe, qui répond de façon immédiate aux besoins et qui a besoin de les anticiper, et, comme elle a... comme elle n'est pas subventionnée, que ses activités ne sont pas subventionnées, la logique du marché fait que nous avons intérêt à saisir les tendances dans le milieu. Et ce que nous amorçons, ce que nous testons dans la Direction des services aux organisations souvent sert de point de départ à la réflexion sur l'évolution de nos enseignements. Par exemple, nous avons commencé à enseigner en éthique à la Direction des services aux organisations, dans nos activités de courte durée, avant de recruter un professeur en éthique et d'offrir un enseignement en éthique. Ça a été la même chose en évaluation de programmes. Je disais tout à l'heure, dans l'évolution, une évolution majeure de l'école porte sur un accent plus fort sur l'évaluation de programmes. Je pense que les gestionnaires de l'avenir seront davantage sensibles à l'évaluation périodique de leur action parce qu'ils devront rendre des comptes mais aussi parce que ça fait partie de l'outillage intellectuel d'un gestionnaire public que de se poser la question: est-ce que je fais donne les résultats attendus?

Donc, ce questionnement fait maintenant partie des réflexes de gestion, en tout cas c'est que nous enseignons.

Quant... si vous voulez bien, quant à la distinction entre nos programmes D.E.S.S., programmes pour analystes, je pourrai à notre directeur de l'enseignement et recherche de vous en dire un mot.

M. Bouchard (Vachon): Oui, je... M. Michaud. Très bien, mais peut-être en complément sur cette lancée. Il y a... de tous les gouvernements, là, je le dis indistinctement, là, cette volonté de régionaliser les administrations puis, bon, de décentraliser, etc. Quand on pense à l'ENAP, on pense à la grande fonction publique, on pense à Québec, on pense... bon. Quelle est la part de... à la fois de vos préoccupations et de vos diplômés qui sont orientés plutôt vers l'administration régionale, l'administration locale, l'administration municipale et qu'est-ce que vous entrevoyez de côté-là?

M. Proulx (Marcel): Seule une minorité de nos étudiants et de nos diplômés proviennent de la fonction publique, alors qu'on nous voit comme l'école de la fonction publique...

M. Bouchard (Vachon): Bien oui.

M. Proulx (Marcel): La fonction publique, c'est à peine 10 % du secteur public au Québec. Et donc ce n'est pas anormal que, chez nous, ça représente finalement une toute petite partie de nos diplômés. Nelson Michaud doit avoir les statistiques sur la provenance de nos étudiants...

Le Président (M. Chagnon): ...de la santé...

M. Proulx (Marcel): Et donc, je dirais, l'essentiel de nos clients, de nos étudiants, étudiantes, clients proviennent du secteur de la santé, du secteur de l'éducation, du secteur municipal, local et régional, et donc, pour nous, ça fait partie intégrante de notre enseignement que de gérer à distance, par rapport à une administration centrale. Donc, c'est évidemment une problématique qui est importante. Nos programmes à l'intention des clientèles du secteur local et régional ne progressent pas très rapidement. Nous avons eu, il y a longtemps, une maîtrise en analyse et gestion urbaine, que nous venons de relancer. Nous avons en gros une quarantaine d'étudiants, parce qu'un bon nombre d'entre eux, de ceux qui sont de ce secteur, dans nos programmes, préfèrent se retrouver avec des gens de la santé, de l'éducation et de la fonction publique; il y a une sorte de goût de la mixité des cultures de gestion, et cette impression, qui est fondée, selon laquelle un enseignement est d'autant plus riche que vous ne vous retrouvez pas avec des gens qui font le même métier que vous et que vous pouvez combiner les expériences des uns et des autres... C'est ainsi que, par exemple, l'arrivée de policiers et de militaires, qui est relativement récente chez nous mais qui est de plus en plus marquée, un bon nombre des membres des états majors de la Sûreté du Québec, des polices de Québec et de Montréal sont des diplômés de chez nous.

Le Président (M. Chagnon): ...l'état major de la Sûreté, c'est tous, c'est le cas de tous.

M. Proulx (Marcel): Oui, une exception près.

Le Président (M. Chagnon): C'était peut-être une exception.

n(15 h 20)n

M. Proulx (Marcel): Mais, vous avez raison, c'est assez... et ça constitue pour nos étudiants une source de stimulation forte, alors qu'on pourrait croire le contraire. On pourrait croire qu'une infirmière-chef cherche dans un hôpital trouverait un peu ennuyeux d'avoir un cadre du milieu policier, en disant: qu'est-ce qu'on a à apprendre l'un de l'autre? Au contraire. Et donc il y a de ce côté... on ne doit pas interpréter la faiblesse de l'attrait de nos programmes spécifiquement destinés aux administrateurs, aux gestionnaires municipaux, locaux, régionaux comme étant un signe de désaffection à l'égard de l'ENAP, mais peut-être un signe d'intérêt pour autre chose. Est-ce qu'on les a, les statistiques par secteur d'études?

M. Michaud (Nelson): Par secteur, je ne les ai pas avec moi, mais je pourrai les faire parvenir à la commission. Mais ça reflète à peu près la composition de l'administration publique et du secteur public en général. Il y a aussi...

M. Bouchard (Vachon): ...moi, j'étais surtout curieux de voir notamment quel était l'input de vos enseignements au niveau des organisations municipales et régionales. Si vous avez ça, là, ce serait peut-être intéressant qu'on puisse en prendre connaissance.

M. Michaud (Nelson): Oui. Bien, je ferai parvenir à la commission...

Le Président (M. Chagnon): ...au secrétariat de la commission.

M. Michaud (Nelson): ...l'ensemble des données. Je vais en prendre note. Pour ce qui est du secteur municipal en tant que tel, les administrations régionales, de ce côté-là, on a eu... je dirais, on a ressenti le climat qu'il y avait dans les administrations régionales au cours des dernières années, de sorte que, quand on a beaucoup de changements, on est retenu au bureau pour mettre beaucoup de changements en oeuvre, puis s'assurer que les choses fonctionnent, puis tout ça, la disponibilité pour suivre des formations est beaucoup moins grande, et ça, on a reçu le signal très clairement. Ceci étant dit...

M. Bouchard (Vachon): Autrement dit, les formations courtes, les formations sur mesure, etc., étaient moins populaires parmi le monde municipal et régional étant donné les changements auxquels... O.K.

M. Michaud (Nelson): Le climat.

M. Proulx (Marcel): Les formations courtes marchaient bien, mais les formations longues, moins bien.

M. Michaud (Nelson): C'est ça. Par contre, on a mis sur pied, à partir de l'automne de cette année scolaire ci, un nouveau programme en administration locale et municipale, et c'est un programme qui semble très prometteur. Comme tout nouveau programme, il doit acquérir sa propre notoriété pour atteindre son rythme de croisière, mais les premiers signaux, quand on compare avec ce qui se fait ailleurs, sont encourageants. Alors, en ce sens-là, le côté gestion municipale, gestion locale va être de l'avant.

Une autre dimension qu'il faut aussi considérer, c'est que le municipal, c'est une chose, mais souvent les services de santé ont une dimension de gestion locale aussi.

M. Bouchard (Vachon): Oui, oui.

M. Michaud (Nelson): Alors, on a beaucoup de gens. Je pense, par exemple, à notre campus à Trois-Rivières, la plupart des étudiantes et des étudiants qui viennent chez nous, dans la région du Centre-du-Québec, appartiennent au secteur de la santé et ont cette préoccupation-là. Alors, comme je disais, je vais faire parvenir les chiffres par secteur, mais c'est...

M. Bouchard (Vachon): ...

M. Michaud (Nelson): On ne peut pas s'y fier au chiffre près, il faut voir dans l'ensemble les préoccupations des gens. En plus de leur provenance, il faut bien comprendre quelles sont leurs attentes.

M. Bouchard (Vachon): Alors, le D.E.S.S., le D.E.S.S.

M. Michaud (Nelson): Le D.E.S.S., oui, le diplôme d'études spécialisées supérieures. En fait, on a segmenté nos programmes de différentes manières à répondre aux besoins des diverses clientèles qui s'intéressent à nous. On a des programmes courts, on a un programme qui est de moyen terme, qui est le D.E.S.S., le diplôme d'études spécialisées supérieures, et il y a aussi le programme de maîtrise complet, de 45 crédits, et ces programmes-là peuvent être gigognes, c'est-à-dire, quelqu'un peut venir tâter l'eau, si ça l'intéresse, dans un programme court, ensuite de ça: Oui, je peux aller jusqu'au D.E.S.S., et finalement aller jusqu'à la maîtrise. On n'a pas de barrière. Techniquement, il y a une réadmission parce que c'est un nouveau programme, mais il n'y a pas de barrière nécessairement, il n'y a pas un paquet de cours à recommencer, on a essayé de rendre ça le plus transparent possible.

Nos programmes se déclinent, vous l'avez remarqué, en programmes pour administrateurs et pour analystes et...

M. Bouchard (Vachon): Gestionnaires.

M. Michaud (Nelson): ...gestionnaires. Les programmes pour gestionnaires sont essentiellement pour des gens qui sont des administrateurs publics déjà, des gens qui sont en exercice, donc on va aller chercher leur expérience et on va l'enrichir, tandis que les programmes pour analystes s'adressent davantage à une clientèle qui nous arrive directement du baccalauréat, des différentes universités...

M. Bouchard (Vachon): D'accord, d'accord, O.K.

M. Michaud (Nelson): ...et qui permettent de préparer des gens de la relève de l'administration publique.

M. Bouchard (Vachon): Merci, merci bien.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup. M. le député de Charlesbourg, M. le député de l'Acadie, Mme la députée de Taillon.

M. Mercier: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue. Comme toujours, vous le savez, je tiens toujours à vous réaccueillir, si vous me permettez l'expression, ici, à cette Assemblée nationale, et c'est toujours un plaisir de vous recevoir, soyez-en assurés.

En deux volets, ma question ? on l'a abordée tout à l'heure, mes collègues l'ont abordée, autant du côté ministériel que de l'opposition officielle ? c'est au niveau du corps professoral, mais notamment les associés et invités. Et ma question va peut-être être plus précise, bien que vous l'ayez abordée de l'autre côté, ici, de cette commission.

Moi, j'aimerais savoir: Au niveau du recrutement de vos professeurs associés et invités, vous en avez parlé tout à l'heure, la notoriété, c'est important. Évidemment, votre école, votre institut, l'université doit se faire connaître et doit avoir un rayonnement autant régional, national qu'international. Mais comment faites-vous pour aller chercher justement de ces professeurs associés? Parce que la concurrence est féroce, la compétition, pour employer un anglicisme, est féroce. Il y a d'autres universités, qu'on ne nommera pas, évidemment ici, dans la région, ou ailleurs. Mais comment faites-vous pour attirer justement ces gens de calibre qui sont en mesure de pouvoir enseigner à nos étudiants au doctorat et au deuxième ou troisième cycle?

Alors, moi, je voulais savoir d'abord et avant tout comment est-ce que vous faites pour attirer ces professeurs associés ou invités. Et également, combien ça représente dans votre pourcentage de budget, c'est-à-dire au niveau de vos chargés de cours? Parce qu'évidemment ils font partie de ces chargés de cours. Ça représente combien en pourcentage, tant au niveau du pourcentage lui-même de l'effectif que des budgets qui y sont rattachés?

M. Proulx (Marcel): Je dirais, sur la concurrence pour le recrutement, elle est plus forte dans le cas des professeurs réguliers. Vous le savez, toutes les universités sont en quête de... Surtout en administration, où la demande est extrêmement forte, il est difficile de recruter... il n'y a pas tant de gens qui font des études en administration, au niveau du doctorat, dans les domaines spécialisés, il n'y en a pas tant en administration publique. Il y a une réelle concurrence.

Nous avons connu beaucoup de succès au cours des dernières années dans le recrutement de nos professeurs réguliers parce que nous pouvons faire valoir certains avantages concurrentiels: le fait que nous ne donnons des cours qu'au premier et qu'au deuxième cycle, donc il n'est pas nécessaire de se retrouver à enseigner à un amphithéâtre de 200 personnes. Ça peut être un attrait. Le fait qu'une bonne partie de nos clientèles sont dans l'action, ça intéresse ceux qui souhaitent, comme professeurs, être tournés vers l'action. Ça peut être dissuasif pour des étudiants qui considèrent que le rôle de l'université est plus désincarné. Ils vont trouver qu'enseigner à des praticiens, ce n'est peut-être pas la meilleure des choses, alors que les gens que nous attirons et qui correspondent au profil que nous recherchons, au contraire, trouvent absolument stimulant d'enseigner à des gens qui ont déjà une pratique et avec qui on va pouvoir avoir un dialogue fort.

En ce qui concerne les invités associés, administrateurs invités, donc ces praticiens qui viennent chez nous, pour une période limitée, participer à l'enseignement, là il n'y a pas beaucoup de concurrence. Les universités ont tendance à bouder ce type de formateurs, alors que, nous, nous y voyons un immense avantage. Comme nous sommes proches de l'administration, nous connaissons les administrateurs publics, nos réseaux nous permettent de les connaître. Et je dois dire que nous faisons régulièrement une opération séduction auprès de ceux dont nous anticipons le départ prochain en leur soulignant que, s'ils ont envie de faire une deuxième carrière, bien, que nous sommes disposés à travailler avec eux à faire en sorte qu'ils travaillent avec nos étudiants.

Nous cherchons pour cela des gens un peu particuliers qui sont non seulement des praticiens solides, mais qui sont ce qu'on appelle des praticiens réflexifs, donc des gens qui ont une réflexion forte sur leur propre pratique, qui ont aussi des assises théoriques. Mais il s'en trouve beaucoup dans la haute fonction publique et il se trouve beaucoup de gens qui trouvent que c'est un défi extraordinaire, d'autant plus que, vous le savez, les gens prennent leur retraite à un âge indécent et que nous avons de très, très jeunes retraités, au Québec, qui sont extraordinairement capables et qui, pour des gens qui ont été pris dans l'action quotidienne, trouvent beaucoup d'intérêt à enseigner à la fois à des jeunes et à des moins jeunes ce qu'ils ont appris au cours des années. Et donc, de ce point de vue, nous n'avons pas de réelles difficultés, si ce n'est qu'il faut constamment renouveler.

n(15 h 30)n

Par ailleurs, sur le pourcentage que ça représente, ce n'est pas très considérable, parce que notre manière de rémunérer ces professeurs associés, administrateurs invités, ceux qui ne sont pas en affectation chez nous... nous en avons six qui sont affectés, donc qui continuent à être payés par l'administration. Mais, pour les autres, ils sont payés comme on paie toutes nos ressources externes, c'est-à-dire, pour ceux qui donnent des cours, comme un chargé de cours, pour ceux qui participent à nos activités de perfectionnement, comme on paie les formateurs à la Direction des services aux organisations, même chose pour ceux qui interviennent dans des mandats de conseil, comme on paie nos ressources externes. L'intérêt pour nous, c'est qu'ils ont un lien privilégié à l'ENAP et que, plutôt que d'être des pigistes que nous allons chercher, ils font partie de la maison. Et ceux qui travaillent relativement longtemps chez nous et ceux qui passent pas mal de temps chez nous, bien ont bureaux, sont établis dans nos locaux, et ils sont en relation nos professeurs et contribuent, je dirais, à créer une dynamique très particulière dans l'école.

M. Mercier: Je reconnais évidemment dans votre réponse tout le rayonnement ou du moins la qualité qui en ressort de votre enseignement. Vous le savez, ici, dans la région de Québec, dans la capitale nationale, la qualité de votre enseignement, de votre corps professoral mais également tout le rayonnement quant au niveau... je vous dirais, au niveau architectural, dans l'intégration du tissu urbain ici, à Québec, votre choix, et ça, je dois vous féliciter pour ce.

Mais, sur le corps professoral, je vous amènerais à un autre volet qui est celui de l'international. Et j'ai peut-être deux questions sur ce. Vous le savez, vous l'avez dit tout à l'heure, on le sait, vous avez beaucoup d'ententes avec le gouvernement du Québec, vous avez beaucoup de relations avec le gouvernement du Québec, notamment au niveau des relations internationales, ici. Vous avez une entente avec le Mali également, que je connais. Lorsque je regarde dans vos effectifs d'étudiants étrangers, vous avez 20 à 25 étudiants étrangers par année ou à peu près. Encore là, et je reviens un peu à la question, la même question que pour le corps professoral: Quelle est votre façon justement d'attirer les étudiants étrangers? Vous l'avez abordé, mais très brièvement, tout à l'heure dans votre exposé. De quelle façon vous allez chercher des étudiants étrangers? Et je vois qu'en 2005 vous aviez 58 étudiants, par rapport à l'an passé, 22, 26 avant, et, même en 2002, 53, ce qui est à peu près relativement semblable. Alors, quel est votre objectif à long terme et est-ce que vous tenterez de maintenir à peu près le même niveau ou est-ce que vous voulez pousser davantage puis être beaucoup plus agressifs en ce sens?

M. Proulx (Marcel): Je vous donnerais une réponse en trois volets. D'abord, sur nos clientèles étrangères à proprement parler, elles ne sont pas très considérables. 58 étudiants, c'est très, très peu.

M. Mercier: Exact.

M. Proulx (Marcel): Et cela tient à la nature même de la formation en administration publique. Dans la plupart des pays francophones, quand vous étudiez en administration publique, vous le faites pour être en mesure de passer un concours de la fonction publique dans votre pays. Or, la meilleure façon de réussir à intégrer l'administration dans votre pays, c'est d'étudier chez vous, dans la mesure où les concours sont tournés vers la connaissance du milieu administratif, du droit administratif, des pratiques dans votre pays. Donc, nous ne sommes pas très attrayants pour quelqu'un qui veut poursuivre une carrière dans son pays. À l'étranger, faire une maîtrise à l'ENAP n'est pas très, très attrayant.

Cependant, ce que montrent pas nos statistiques, c'est que nous attirons énormément de nouveaux Québécois, de néo-Québécois qui souhaitent intégrer l'administration québécoise et qui arrivent avec des diplômes, certes de bonne qualité mais qui ne correspondent pas aux besoins de nos administrations et qui ne leur permettent pas d'intégrer facilement des postes dans l'administration publique québécoise. Ce qui explique... C'est en partie ce qui explique la difficulté que connaît l'administration publique à attirer des néo-Québécois.

Et ce que nous faisons avec ces clientèles, dont nous n'arrivons pas à mesurer l'ampleur parce que nous ne croyons pas opportun de demander à nos étudiants quelle est leur origine ethnique ? mais nous les voyons dans les classes, même si on ne peut pas le mesurer ? et on constate que des néo-Québécois qui passent chez nous arrivent à valoriser leur premier diplôme et vont chercher une connaissance de l'administration, de nos moeurs administratives, de nos pratiques administratives, ce qui constitue un avantage comparatif énorme lorsqu'il s'agit d'intégrer l'administration. Or, on le sait, c'est le cas du présent gouvernement, mais c'est une tendance de fond, on souhaite, dans les administrations publiques, avoir de plus en plus... être de plus en plus représentatif de la société québécoise et retrouver davantage de néo-Québécois à tous les niveaux de l'administration. Donc, cela est très porteur.

Le troisième élément de ma réponse porte sur notre enseignement à l'étranger. On a parlé tout à l'heure de notre D.E.S.S. en ligne à l'intention des clientèles étrangères. Et, dans ce cas-là, nous pensons qu'il existe dans le monde un marché considérable pour l'enseignement à distance, d'abord parce que c'est beaucoup moins cher que de se déplacer et de venir passer deux ans au Québec pour faire une maîtrise. Par ailleurs, la formule que nous avons adoptée jusqu'à maintenant consiste à nous entendre avec des établissements, des écoles, des instituts étrangers d'administration publique de façon à ce qu'ils participent à la formation, qu'ils contribuent à adapter cette formation en ligne à leur réalité locale et, dans beaucoup de cas, même, plutôt que de prendre l'ensemble du programme globalement, qu'ils intègrent des éléments de ce programme-là dans leurs propres programmes. Donc, il y a une sorte d'appropriation, et nous pensons que cette tendance sera une tendance forte au cours des prochaines années. On en a déjà vu des traces, notamment en Amérique latine, où nos partenaires d'Amérique latine souhaitent ? parce qu'on est à compléter la traduction de notre programme à distance en espagnol; souhaitent ? plutôt que de nous voir offrir à la volée notre programme de D.E.S.S. en administration publique, en faire une partie de leur propre programme de formation.

M. Mercier: Et justement, puisque vous parlez de l'Amérique latine, vous volez quelque peu ma sous-question, mais quels sont vos partenaires en Amérique latine, au D.E.S.S.?

M. Proulx (Marcel): Pour ne pas me tromper, je vais demander à notre directrice des services aux organisations, qui les connaît, elle, par coeur.

Mme Moreau (Madeleine): C'est d'abord le Costa Rica et le Chili. Ce sont nos deux partenaires principaux. Il y a aussi un intérêt, présentement on est à négocier avec le Paraguay, qui est aussi intéressé, et le Mexique, qui avait un petit peu tiré la patte mais pour lequel il y a un nouvel intérêt.

M. Mercier: Là, on parle évidemment de pays, mais qui sont-ils plus exactement, ces gens-là, les institutions universitaires?

Mme Moreau (Madeleine): L'université ? absolument ? du Costa Rica... Ce sont tous des partenaires universitaires donc qui peuvent être accrédités et qui peuvent offrir eux-mêmes des programmes de maîtrise. Donc, on finit par offrir des programmes conjoints, et nos programmes ne sont pas en mode de substitution mais beaucoup plus en codiplomation ou en complément d'intervention.

M. Mercier: Et croyez-vous qu'à long terme évidemment ça portera fruit, tous ces partenariats, éventuellement quant à l'augmentation du nombre d'étudiants éventuellement? Qu'ils soient en ligne ou sur place, ici, par exemple, ce que je doute fort, plutôt en ligne?

M. Proulx (Marcel): Ce sera sans doute plutôt en ligne. M. Bouchard évoquait tout à l'heure la tentation de lancer de grandes opérations plutôt que des opérations expérimentales. Nous préférons, nous, y aller par expérimentation progressive, et nous avons de bons partenaires, et nous pensons que la réputation de nos programmes devrait attirer davantage. Avec un écueil à la clé: dans la plupart de ces pays, les études universitaires sont gratuites, de sorte que, nous, quand nous arrivons pour facturer nos programmes, les universités partenaires nous disent: Écoutez, on a une dotation globale, alors que nous sommes financés, vous le savez, sur une base per capita, la plupart des universités sont financées sur une base globale et ont du mal à trouver le financement pour acheter, même à des prix modestes, pour acheter nos programmes. Donc, l'écueil sera plutôt économique que de l'ordre de l'attrait, parce que l'attrait existe. Beaucoup de nos partenaires souhaitaient travailler avec nous mais n'ont pas encore réussi très facilement à trouver le financement. Alors que, s'ils étaient financés sur une base per capita, c'est une chose qui serait plus facile, parce qu'on leur dirait: On va prendre votre place, vous allez faire de la substitution et, plutôt que de payer un professeur, vous allez prendre nos programmes. Mais ce n'est pas comme ça que les choses fonctionnent.

M. Mercier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Chagnon): Sur le dernier point, peut-être pourriez-vous nous parler de l'expérience que vous avez bâtie avec, entre autres... au Sommet des chefs d'État de la Francophonie?

M. Proulx (Marcel): Deux choses intéressantes. Grâce à l'appui du gouvernement du Québec, il faut bien le dire, qui de plus en plus... ces partenariats nous permettent d'aider le gouvernement du Québec dans son action internationale mais permettent aussi à l'école de bénéficier des relations internationales qui s'établissent et des possibilités d'intervention. Dans le cadre du Sommet de la Francophonie, nous avons discuté de la création d'un réseau d'écoles francophones en administration publique. Nous pensons actuellement que les grands réseaux, notamment le réseau du Commonwealth, l'Association du Commonwealth, sont très actifs, les réseaux qui tournent autour d'une vision américaine et anglo-saxonne, américaine, britannique et australienne, en administration publique, il y a des réseaux très, très forts d'exportation d'une vision de l'administration publique, et nous pensons qu'il y a une manière francophone ? il faudrait détailler, mais une manière francophone ? de faire de l'administration publique, une sensibilité qui mérite d'être nourrie, en tout cas qui mérite que des écoles se réunissent pour échanger sur la manière de faire du management public en français.

n(15 h 40)n

Et c'est à cela que nous nous sommes employés, notamment en Roumanie, à la création de ce réseau. Nous sommes aussi devenus partenaires de l'INA, l'Institut national d'administration, qui est une sorte de pendant de l'école en Roumanie, pour la création d'un programme en management public dans le cadre de leur formation en administration publique. C'est assez révélateur de ce qu'on souhaite faire. Plutôt que de nous opposer à des visions européennes, qui sont souvent marquées par le droit administratif, en administration publique, nous pensons qu'il est utile d'ajouter des composantes de management public à ce qui est fait dans ces institutions. Et ça va très bien parce que ça se joue sur cette carte de la complémentarité.

Vous savez sans doute qu'il n'y a pas très longtemps qu'à l'ENA de Paris on enseigne le management public. On considérait, il y a quelques années, qu'un haut fonctionnaire n'avait pas besoin de connaître le management public, qu'il suffisait qu'il soit compétent en matière de politique publique. Les choses changent dans le milieu francophone et changent dans l'ensemble des écoles européennes, et nous pensons qu'à l'image de ce que nous avons fait en Roumanie et à travers ce réseau des écoles francophones nous allons pouvoir développer des coopérations fortes sur l'enseignement en management public, du management public en français, avec une sensibilité un peu différente de ce qu'on retrouve dans le monde anglo-saxon.

Le Président (M. Chagnon): Et vous vous êtes donné un plan de travail qui va vous amener éventuellement à Québec pour le prochain Sommet des chefs d'État, en 2008?

M. Proulx (Marcel): Tout à fait, tout à fait. Cette nouvelle association dont la forme n'est pas encore déterminée et qui ne suscite pas que de l'enthousiasme dans le milieu francophone. Il y a des francophones, notamment en France, qui trouvent qu'il vaut mieux être international que d'être francophone, et que ça fait un peu passéiste d'être francophone, et que la culture occidentale doit être uniforme. Ce n'est pas notre vision, et c'est parfois un peu étonnant que nous devions lutter contre la France pour faire valoir cette vision française, francophone.

Le Président (M. Chagnon): De diversité culturelle.

M. Proulx (Marcel): De diversité culturelle, effectivement.

Le Président (M. Chagnon): Je pense que vous avez raison, et, à l'expérience personnelle, ce que j'ai vu de vos travaux, même à Bucarest, c'était non seulement intéressant, mais stimulant aussi pour l'ensemble de la recherche puis de l'enseignement en matière d'administration publique dans l'ensemble de la francophonie. Et je voyais plusieurs pays qui étaient extrêmement intéressés, et des enseignants de plusieurs pays qui étaient extrêmement intéressés à s'intégrer dans votre expérience, et j'espère que vos travaux en 2008 sauront être à la hauteur de ce que vous cherchiez à avoir, ce que vous espériez avoir et à ce que vous avez annoncé à Bucarest. M. le député de l'Acadie, Mme la députée de Taillon.

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Juste quelques questions, mais je vais enchaîner peut-être un peu avec les questions qui ont été soulevées par mon collègue au sujet de votre présence au niveau international. J'ai eu l'occasion d'aller, dans les dernières années, à Haïti à une couple de reprises. Je sais que... J'ai été là l'été dernier, il y avait une mission qui venait en août pour évaluer les besoins comme tels d'une collaboration avec... dans le cadre de l'ACDI, et j'aimerais peut-être que vous nous donniez un peu plus d'information, où ça en est actuellement, et qu'est-ce que ça implique comme activités pour l'ENAP, de façon plus précise.

M. Proulx (Marcel): Je vais demander à notre directrice des services aux organisations, qui est responsable aussi de la coopération internationale, peut-être de vous en dire quelques mots, parce qu'elle suit ce dossier activement.

Mme Moreau (Madeleine): Merci. Tout d'abord, nous sommes à attacher les derniers morceaux d'entente de collaboration à la fois avec l'ACDI, avec le ministère des Relations internationales du gouvernement du Québec et avec quelques ministères du gouvernement du Québec qui seront mêlés ou qui seront impliqués au premier chef dans le cadre d'un projet qui aura une durée minimale de cinq ans, très certainement.

Le projet, les principaux axes de ce projet-là concernent d'abord l'organisation de ce qu'on appelle la gouverne de l'État, donc le soutien à l'organisation du premier ministère, des relations entre la présidence, la primature et le Conseil des ministres, les directeurs généraux de principaux ministères, tout ce qu'on appelle l'appareillage, le comment-faire, le comment-gérer leurs rencontres, la coordination, le développement des politiques publiques, la gestion et la mise en oeuvre du plan d'action du président.

Donc, on a déjà commencé à travailler de ce côté-là. Le secrétaire général du gouvernement haïtien sera ici, sera des nôtres dans les prochaines semaines, de même que le secrétaire général de l'Office des ressources humaines du gouvernement haïtien, qui est un peu l'équivalent de notre ministère de la Fonction publique... ici, ce serait le Conseil du trésor, en l'occurrence, qui est chargé de ces fonctions ici, au sein du gouvernement du Québec. Donc, un soutien au premier ministère à la gouvernance, un soutien aussi très important au niveau du ministère des Finances, au niveau de la gestion budgétaire, de la planification budgétaire et du contrôle budgétaire également.

Un autre axe très important qui sera donné par le Conseil exécutif, ici, aussi, c'est toute la question de la planification, donc la capacité du gouvernement haïtien donc d'assurer sa propre planification. Et donc il y a déjà un ministère du Plan, mais c'est un travail conjoint entre la primature et le ministère du Plan. Et finalement il y aurait également un volet, qui est à redéfinir ou qui sera à préciser, mais du côté du soutien à la gouverne en matière de santé, auprès du ministre et du secrétaire général, donc du directeur général dans leur pays, du ministère de la Santé, entre autres pour la gestion des urgences, des crises importantes qui peuvent survenir, en besoins humanitaires et autres.

La première année du projet est assez bien définie; les autres sont à définir. On est dans un mode très itératif. On va s'ajuster et on va travailler de pair avec le gouvernement là-bas. Ce que l'on peut dire présentement, c'est que, du côté du gouvernement du Québec, entre autres des principaux ministères impliqués, on a une très belle ouverture, très belle... un grand intérêt, malgré les défis, hein, les défis aussi, parce que ça va appeler à des déplacements de personnes d'ici en Haïti, aussi bien que de l'accueil de délégations de haut niveau du gouvernement haïtien, mais une très belle collaboration. Et déjà, je pense, c'est à prévoir, compte tenu de ce qu'on a pu... de l'intérêt et de la volonté de s'engager. Donc, Conseil exécutif, Conseil du trésor, principaux ministères, Finances, Santé.

M. Bordeleau: Est-ce que... Vous faisiez référence, à la fin de votre réponse, disons, à de la présence sur place et aussi des gens qui viennent ici. Au niveau de la gouvernance à un niveau plus intermédiaire, ça va se faire sur place, je suppose, là-bas, et l'ENAP sera impliquée, à ce moment-là?

Mme Moreau (Madeleine): Oui. Disons que l'ENAP est maître d'oeuvre, hein, du projet, appelons ça ainsi. L'ENAP donnera directement ou rendra disponible une partie de son expertise pour le développement de tout ce qui a trait... et il y aura aussi une école d'administration publique de créée là-bas, donc tout ce qui s'appelle plus soutien à l'établissement d'une fonction publique, d'une fonction publique plus professionnelle, disons-le, donc élaboration de la loi sur l'administration publique, tout ce qui concerne, là, l'élaboration du cadre, de l'engagement du personnel de l'État pour créer une fonction publique plus stable, par rapport à une fonction publique qui serait plus volatile et plus près, trop près du politique, disons-le, donc une certaine séparation des pouvoirs. Donc, l'ENAP va agir à la création de l'école et va donner des conseils au gouvernement.

Mais il y a aussi plusieurs fonctionnaires publics. Il y a... La contribution estimée, en nature, de prestations par le gouvernement du Québec est à la hauteur de 1,5 million de dollars, évaluée sur cinq ans. Donc, c'est quand même pas mal de jours-personnes, ça, qui sont consacrés. L'ACDI, l'Agence canadienne de développement, couvre les frais de déplacement et les frais de séjour de tous les fonctionnaires publics québécois qui seront impliqués, de même que les coûts de l'expertise de l'ENAP directement. Puisqu'on est en autofinancement, c'est l'ACDI qui assurera ce volet-là avec nos propres frais de déplacement. Donc, on mettra en place une école, on formera des formateurs, développement des programmes et aide à la diffusion de nouveaux programmes pour moderniser... créer, plutôt, devrait-on dire ? on peut parler difficilement de modernisation mais davantage de création ? une administration publique stable.

M. Bordeleau: Est-ce que ce type d'intervention là, dans les pays... un peu comme pour Haïti, mais je pense au type d'intervention que vous allez faire là-bas, est-ce que ça s'est fait dans le passé avec d'autres pays en développement ou est-ce que ça se fait actuellement avec certains pays en développement, autres qu'Haïti?

n(15 h 50)n

M. Proulx (Marcel): Bien, à cette échelle-là, c'est probablement ce que nous avons fait de plus considérable. Mais nous avons une solide habitude d'implantation... en fait de contribution à l'implantation de réformes administratives majeures, et même, je dirais, de réhabilitation d'administrations publiques complètement détruites.

Notre toute première intervention, il y a de ça maintenant plus de 20 ans, s'est passée en République centrafricaine, juste après le départ de Bokassa, avec une administration qui était absolument exsangue. Et nous sommes intervenus difficilement, il faut le dire. Pour une première opération, c'était un peu costaud. Mais nous sommes intervenus pour mettre en place les bases de la création d'une administration. Et, depuis ce temps-là, de façon régulière les interventions de l'école vont dans le sens de la consolidation des écoles d'administration. On pense qu'une des façons de moderniser les administrations consiste à renforcer, à créer, dans certains cas ? ce qu'on a fait au Cameroun, par exemple, où on a créé de toutes pièces une école de management public; mais de plus souvent à renforcer ? le noyau existant, à parfaire en faisant en sorte que, plutôt que, nous, d'essayer d'intervenir ? à la taille qu'on a, vouloir réformer un pays puis son administration, c'est un peu excessif ? mais de se servir de cette école comme levier. Mais nous avons participé un peu partout, à Djibouti, au Rwanda, à la modernisation... au Rwanda plus récemment ? vous voyez, on se spécialise dans les pays difficiles ? à Madagascar, donc participer à la réforme administrative. De plus en plus, nous le faisons au niveau supérieur de l'administration.

Le Président (M. Chagnon): Vous avez reçu plusieurs ministres de Madagascar il y a deux ans.

M. Proulx (Marcel): Tout le Conseil des ministres et tous les secrétaires généraux.

Le Président (M. Chagnon): Il y a deux ans.

M. Proulx (Marcel): Par tranches d'un tiers. Ça a été une assez grosse opération effectivement, et c'est un nouveau créneau pour nous d'intervenir au niveau très supérieur de l'administration, ce que nous faisons en Haïti, ce que nous avons fait à Madagascar, en se rendant compte que c'est bien utile, ce que nous faisons quand nous participons à la formation des... enfin à l'appui à la formation des administrateurs des niveaux intermédiaires à travers les écoles, mais qu'il y a un avantage à aussi former au niveau supérieur, pour faire en sorte que la réforme, que les mouvements de réforme percolent dans les administrations.

M. Bordeleau: Le sujet que je veux aborder, vous y avez fait référence tout à l'heure, ça a été abordé, c'est la question des publications. Bon, on sait que dans le milieu universitaire, quand on fait carrière à l'université, que les publications, c'est une dimension importante, au fond, d'une institution universitaire et que ça contribue aussi à la renommée, au rayonnement d'une institution universitaire. Quand vous disiez, tout à l'heure, bon, qu'à venir à date il y a eu une certaine difficulté au niveau des publications comme telles, comment se situe l'ENAP, comme tel, par rapport à d'autres institutions du même type dans le domaine de l'administration publique? Est-ce que c'est commun que les gens publient peu? Puis c'est général dans l'ensemble des écoles d'administration publique ou si vous avez une situation un peu particulière par rapport à ce qui se fait dans les autres écoles?

M. Proulx (Marcel): Vous savez, il y a très peu d'écoles d'administration publique au Canada, et elles sont toutes petites. Donc, les comparables sont difficiles. Et, quand on examine les publications en français en administration publique, on s'aperçoit que l'ENAP accapare la part du lion, ce qui n'est pas étonnant étant donné notre taille et le fait qu'en administration publique il n'y a pas beaucoup d'autres.

Je dirais qu'il y a un problème, que vous connaissez très bien sans doute, qui est celui de l'effort de publication en sciences administratives; il n'est pas très considérable. Les professeurs dans les facultés d'administration ont des activités extérieures, souvent de la commandite qui est très accaparante, de sorte que ce que l'on constate, c'est que le volume de publications des professeurs en administration n'est pas égal à ce qu'on retrouve dans les sciences de l'homme en général.

Cela dit, en ce qui concerne l'ENAP, on a eu des attentes qui étaient peut-être un peu fortes, mais nous sommes en progression, surtout si l'on considère des types de publications qui traditionnellement n'étaient pas nécessairement valorisées en milieu universitaire. On valorise surtout, vous le savez, les revues avec comité de lecture, alors que dans une école professionnelle il faut savoir panacher. Nos professeurs ont toujours publié beaucoup de livres, on toujours participé à des efforts collectifs, et on avait tendance dans le passé à traiter avec un peu de... je ne dirais pas mépris, mais à considérer que c'est une activité un peu secondaire. Or, nous avons été très actifs, et beaucoup de nos professeurs ont publié beaucoup de livres utilisés dans la pratique, et ça commence à être davantage valorisé.

Nous pensons malgré tout qu'il faut mettre de la pression comme on le fait pour que nos professeurs soient davantage reconnus dans le milieu universitaire, et ça devient un indicateur, vous l'avez évoqué, un indicateur de qualité. Donc, nous ne devons pas relâcher la pression. Par ailleurs, notre conseil d'administration nous a fait remarquer, avec justesse, je pense, que nos professeurs publient beaucoup dans les journaux. Vous savez, publier dans un journal, dans un quotidien, ce n'est pas considéré, comme universitaire, comme une oeuvre grandiose. Nous avons présenté les résultats...

Le Président (M. Chagnon): Ça dépend dans quel journal vous publiez, évidemment!

M. Proulx (Marcel): Bien sûr, il y a du meilleur et du pire. Et, un peu timidement, nous avons présenté les résultats à notre conseil d'administration, les résultats des publications de nos professeurs, y compris les résultats dans les journaux, pour nous rendre compte que nos professeurs publiaient énormément dans les journaux, de plus en plus sur des questions d'actualité, sur des questions de politique publique, et j'ai constaté avec plaisir que notre conseil d'administration nous a encouragés à, je dirais... pas inciter nos professeurs à le faire davantage, mais à reconnaître l'importance, dans une école comme la nôtre, que les professeurs se trouvent au coeur des débats publics. Il y a chez nous des experts en administration publique, et, s'ils n'écrivaient que pour leurs pairs, il y aurait, il me semble, une perte pour la société québécoise et pour la qualité des débats publics.

Donc, nos professeurs publient des livres, sont lus par des praticiens, publient dans les journaux, et donc contribuent au débat public, et publient de plus en plus dans les revues avec comité de lecture. Nous souhaitons ? et c'est peut-être une ambition excessive; nous souhaitons ? que nous puissions panacher dans ces domaines et être reconnus à la fois dans les milieux de référence scientifique mais aussi ne pas y perdre en termes de reconnaissance dans le milieu. Ce n'est pas toujours facile, mais nous allons... je pense que nous cheminons dans le bon sens.

M. Bordeleau: L'ENAP comme telle, par rapport aux grandes écoles d'administration publique, comment ça se compare au niveau des publications? Est-ce que c'est le même type, le même type d'implication ou de publication qu'on retrouve dans les grandes écoles au niveau international?

M. Proulx (Marcel): Dans les écoles internationales, dans le milieu francophone, la plupart n'ont pas de professeurs, donc n'ont pas de publications. C'est très rare qu'on retrouve des professeurs, et on se classe fort bien dans ce comparable. En ce qui concerne les universités, lorsque ces professeurs... lorsqu'on retrouve l'administration publique dans les départements de sciences politiques, par exemple, ou dans les facultés de sciences administratives, on n'a pas fait de comparaison systématique, mais notre impression, c'est que nous étions, jusqu'à maintenant, un peu en deçà de ce qui se faisait ailleurs, et que nous avions des efforts à faire, mais des efforts, dont je vous ai dit qu'ils commencent à être couronnés de succès.

M. Bordeleau: Je vous remercie.

M. Michaud (Nelson): Si je peux ajouter un complément d'information à cela. Le directeur général a fait allusion tout à l'heure au renouvellement du corps professoral, près de 20 % au cours des dernières années. Alors, ce sont des gens qui arrivent, qui viennent de terminer leur doctorat, donc il y a peut-être un article qui est en révision, et leur programme de recherche est à peine amorcé. Alors, c'est un deux, trois ans où ces gens-là vont vraiment arriver sur le marché de la publication. C'est un facteur.

L'autre facteur, c'est qu'il y a une dimension importante de la recherche qui se fait chez nous qui malheureusement, pour les standards du fameux «publish or perish», là...

Une voix: ...

M. Michaud (Nelson): Bien, d'une part, mais, d'autre part, il y a beaucoup de la recherche qui se fait, chez nous, qui est de la recherche appliquée à la demande, par exemple, de l'administration publique québécoise. Et, à ce moment-là, c'est davantage de la recherche qui est envers un client, la publication se fait en privé, si vous voulez. Et c'est très rare que... certains contrats le permettent, mais, la plupart, ça va être un contrat de diffusion restreinte de l'information. Alors, la recherche se fait quand même. L'effort de recherche est là, les statistiques, on le disait tout à l'heure, il y a à peu près... c'est à peu près moitié-moitié, recherche subventionnée et recherche commanditée.

Alors, vous voyez que l'effort de recherche demeure discret par sa nature même. On peut le déplorer quand on prend certains étalons, mais ça n'empêche pas que l'effort est là et que le travail... il y a des choses qui sortent, l'influence est là.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup. Si Mme la députée de Taillon, à qui j'avais offert la parole, me le permet, je demanderais à notre collègue le député de Vachon de poser une question, qu'il me disait, technique.

M. Bouchard (Vachon): Technique, mais j'ai négocié...

Le Président (M. Chagnon): Oh! c'était négocié, c'était prénégocié. Excusez-moi!

M. Bouchard (Vachon): J'ai des préarrangements.

Le Président (M. Chagnon): Des préarrangements!

M. Bouchard (Vachon): De fait, sur le dernier bout de conversation que nous venons d'avoir, moi, je suis persuadé que vous n'avez pas à vous inquiéter outre mesure. Comme on dit à Paris, c'est un «catch-22», cette affaire-là, de toute façon, parce que, dans les départements où on fait beaucoup de transfert de connaissances, on leur dit: Oui, mais là, vous ne publiez pas beaucoup dans les revues scientifiques, et là les autres, on dit: Oui, mais le transfert de connaissances... Alors, c'est toujours le pendule qui va d'un côté et de l'autre.

Tout simplement une question technique: Vous êtes dus de déclarer les états de traitement de la direction supérieure; vous avez nommé deux personnes, à la direction supérieure, dans votre déclaration. Je vois que vous êtes plus que deux, est-ce qu'il y a des plus supérieurs que d'autres, ou? Quelle est votre définition?

M. Proulx (Marcel): La définition technique? Tous égaux devant la supériorité.

M. Bouchard (Vachon): C'est embêtant, hein?

M. Proulx (Marcel): Non. Techniquement, il n'y a à cette table que deux cadres supérieurs: le directeur d'enseignement et recherche et moi-même. L'équipe de direction supérieure comprend à la fois des cadres et des cadres supérieurs; ça tient à la nature de l'Université du Québec et c'est davantage lié à la structure de rémunération. Étant une petite institution, tous les collègues autour de cette table ne pourraient être cadres supérieurs.

M. Bouchard (Vachon): C'est parce que, pour les universités, pour les universités régionales, par exemple, de l'UQ, ce qu'on s'aperçoit, c'est qu'il y a à peu près quatre personnes, hein, un recteur, un vice-recteur et le secrétaire... deux vice-recteurs, le secrétaire général. Chez vous, vous avez seulement deux personnes comme cadres supérieurs. Quel serait l'équivalent des deux autres?

n(16 heures)n

M. Proulx (Marcel): En fait, nous avons trois postes de cadre supérieur, un poste à la direction, Direction d'enseignement et de la recherche, qui est l'équivalent d'un poste de vice-recteur enseignement et recherche, et le poste de directrice des services aux organisations, que Madeleine Moreau occupe par intérim, qui est aussi un poste de cadre supérieur, et le mien, évidemment.

Pour le reste, dans une très grande institution, la directrice des finances serait cadre supérieur et sans doute le secrétaire général serait aussi cadre supérieur. On pourrait même imaginer que notre directeur des communications, dans une très, très grande université, à McGill, pourrait être cadre supérieur.

M. Bouchard (Vachon): Parfait. Alors, vous venez de m'augmenter de salaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Chagnon): Moi, je suggérerais... votre conseil d'administration de l'an prochain!

M. Bouchard (Vachon): Merci. Merci de ces informations.

Le Président (M. Chagnon): Mme la députée de Taillon.

Mme Malavoy: Bonjour, M. Proulx. Ça me fait plaisir de vous voir, entouré donc de vos cadres supérieurs et autres, devrais-je dire.

M. Proulx (Marcel): De notre équipe de direction.

Mme Malavoy: De direction. Parce que, dans vos programmes, il y a maîtrise, doctorat puis il y a autre, je pense, dans vos colonnes. Ça fait référence aux diplômes, je crois?

M. Proulx (Marcel): Oui, diplômes et programmes courts.

Mme Malavoy: ...dont vous parliez tout à l'heure. Je vais vous poser une question en mettant bout à bout un certain nombre de choses, parce qu'on a déjà, depuis 2 heures, évoqué beaucoup d'éléments. Mais je voudrais mettre bout à bout plusieurs choses et puis vous demander, à travers ça, comment vous définiriez votre couleur comme École nationale d'administration publique.

Alors, je mets, par exemple...

Une voix: ...bleu, rouge.

Mme Malavoy: Pas politique, couleur au sens symbolique. Par exemple, bon, un élément qui rejoint votre vision stratégique. Vous parlez d'ancrage dans le milieu. Moi, je connais de vous, pour avoir participé à certaines activités, cette très belle... ce très beau partenariat avec Femmes, Politique et Démocratie, que vous avez évoqué. Et je vous avoue que, la première fois que j'ai su que c'est l'École nationale d'administration publique qui accueillait ce groupe, j'ai été très, très favorablement impressionnée, puis ça fait déjà quelques années que ça dure. Donc ça, c'est un élément, je pense, qui, je crois, tendance à croire, donne déjà une certaine couche de couleur à ce que vous faites.

Je mets également dans le décor ce que vous appelez l'occupation du territoire et donc cette volonté de donner des formations à différents endroits à la grandeur du Québec. J'ajoute ce qui a été dit en termes de rayonnement international, et on en a parlé quand même beaucoup avec des projets précis.

Quelque chose qui m'intrigue un petit peu plus, quand vous parlez de la manière francophone de faire de l'administration publique, bien ça m'intrigue. Je peux imaginer des choses, mais j'aimerais, disons, en mettant ensemble ces choses-là, que vous me disiez, selon vous, quels seraient les éléments constitutifs de la couleur de ce que vous faites comme École nationale d'administration publique et en spécifiant l'aspect, entre autres choses, francophone par rapport à d'autres.

M. Proulx (Marcel): Sans utiliser trop de clichés, on pourrait dire que ce qui serait notre couleur, c'est cette idée qu'on doit mettre l'intelligence, l'intelligence savante au service de l'action, cette idée selon laquelle il n'y a, dans nos domaines, de possibilité de faire de l'action sérieuse qu'avec la réflexion et que, puisque les universités sont des lieux de réflexion par excellence, ils doivent accompagner l'action puis en même temps se nourrir de l'action. Vous le savez, en matière de sciences administratives, l'invention vient souvent du terrain. Et les universités, sans être à la remorque de ça, ont su cristalliser en quelque sorte les leçons d'expériences, les théoriser, les modaliser. Je dirais: Ça, c'est le premier élément de la couleur.

Le deuxième élément de notre couleur, vous l'avez évoqué, c'est notre flexibilité. On a l'habitude de dire, chez nous: On est très fermes sur les principes mais très souples sur les modalités. Et nous pouvons profiter du fait que nous sommes de petite taille, que nous avons cette habitude de nous adapter, que nous sommes très peu bureaucratiques, avec des avantages et des inconvénients. Parfois, on improvise un peu. On essaie d'être systématiques mais toujours être très souples, être capables de répondre rapidement...

Mme Malavoy: Répondre rapidement à des demandes sur mesure en adaptant aux besoins les contenus.

M. Proulx (Marcel): C'est exact. En étant toujours très fermes sur le niveau d'exigence, parce qu'on pense que, si nous devenons complaisants, nous cesserons de jouer notre rôle, mais en étant extraordinairement souples sur les manières de faire, sur les formats pédagogiques, sur la manière de rendre le service.

Pour nous, ce qui est important, c'est que les apprentissages soient de niveau élevé. Ce qu'on a fait, par exemple, avec Femmes, Politique et Démocratie est tout à fait un exemple, un bon exemple de ça. Il n'existait pas un programme comme tel chez nous, mais on a considéré qu'il était possible de reconnaître, dans le cadre d'un microprogramme que nous avons conçu sur mesure, à toute vitesse, parce que le besoin était là et qu'on considérait que c'était à la fois notre responsabilité et de bon niveau. Donc, dialogue, théorie, pratique, une organisation tournée vers l'action, une organisation souple et une organisation aussi dont on souhaite qu'elle soit à l'avant-garde des besoins, et ça, c'est plus difficile.

Comment fait-on pour anticiper les tendances, anticiper les courants? Et on pense que le fait que nous soyons, que nous pouvions joindre à la fois des formations de courte durée, forcément, très... plus faciles à adapter, avec des formations qui s'inscrivent dans la durée, les formations de maîtrise, même de doctorat, nous permet de rester constamment à l'affût des tendances. On voudrait être reconnu comme une institution qui voit venir des choses et...

Mme Malavoy: Qui anticipe.

M. Proulx (Marcel): Qui anticipe, effectivement.

Mme Malavoy: Maintenant, je reviens sur l'aspect francophone, parce que, quand je vous entends parler, je trouve, et je le dis dans le bons sens du terme, qu'il y a quelque chose de nord-américain dans cette volonté de répondre à des besoins avec souplesse, par rapport à une conception ou une approche plus théorique, plus... je dirais, plus déductive des choses, avec, bon, des transmissions de connaissances un peu plus formelles et cette façon de s'ajuster à la demande, d'être rapide, de savoir mettre en place quelque chose dans un court laps de temps, c'est aussi nord-américain. Alors, quand vous parlez de cette manière francophone, j'aimerais que vous me la qualifiiez un peu. Je dis ça parce que vous avez parlé tout à l'heure, et ça m'intéresse beaucoup, de liens avec la francophonie et de projets avec la francophonie. Mais, la francophonie, c'est très large, c'est plusieurs continents. Comment vous amalgamez ça, une approche que, moi, je qualifie malgré tout d'inspirée par le fait que nous soyons en Amérique du Nord et notre, bien sûr, caractéristique francophone?

M. Proulx (Marcel): En caricaturant un peu, je vous dirais qu'on peut opposer une approche française de l'administration publique à une approche américaine, une approche française très intellectualisante, très soucieuse des fondements de la logique interne, de la cohérence mais qui finit à terme, si on n'y prend pas garde, par être stérilisante du point de vue de l'action. Donc, des gens qui réfléchissent de façon merveilleuse mais qui ont un peu de mal à passer à l'action, et les Américains, qui sont extraordinairement pragmatiques, qui se soucient assez peu parfois de la rigueur de la construction: pourvu que ça marche, on essaie... Il y a une sorte de bricolage, intelligent, mais de bricolage dans la manière nord-américaine de voir la gestion. Nous prétendons que nous pouvons être à la jonction des deux et qu'on...

M. Bouchard (Vachon): Des bricoleurs intellectels.

M. Proulx (Marcel): Des bricoleurs intellectualisants, oui. Des praticiens réflexifs. Tout à l'heure, j'évoquais: comment peut-on tirer, au-delà de ce souci de réussir à répondre, comment peut-on tirer des leçons pérennes de ces innovations brouillonnes un peu qu'on fait en gestion? Et ça, quand on se retrouve en milieu francophone, je trouve, on est à valeur ajoutée, au Québec, pas seulement à l'ENAP, mais les administrateurs publics, parce qu'on partage ce souci quand même davantage que les Américains, ce souci de la rigueur, de la modélisation. À l'école, c'est très important. On considère que la pratique sans la réflexion, sans une certaine intellectualisation, a tendance à rester stérile, qu'une innovation ne se reproduit pas, que, pour reproduire l'innovation, il faut l'intellectualiser, et en ça on est assez proche de la mouvance francophone, si on veut. Mais en même temps, et c'est pour ça que les Européens et que les pays francophones d'Afrique apprécient ce qu'on fait, on a ce souci de dire: mais quand même, il faut atterrir. Et quand même... Donc, on introduit du pragmatisme dans un milieu où il en manque et de l'intellectualisation dans un milieu où nous pensons qu'il n'y en a pas assez.

Et on aime bien être, comme disent les sociologues, des marginaux sécants qui ont les pieds dans les deux systèmes. Et on reste persuadé... en tout cas, personnellement je reste persuadé qu'on ne peut faire de la bonne gestion publique qu'en intellectualisant, mais pas à outrance. Et quand je parle de cette manière francophone, c'est ce souci de réfléchir sur les fondements de la rigueur. Et les meilleurs écrits, à mon sens, en administration publique sont ceux qui reprennent les écrits fondateurs et les écrits contemporains en management public nord-américain, mais repris par des Européens, notamment des Français, qui déconstruisent ou reconstruisent le raisonnement pour qu'il soit mieux transmissible et qu'il devienne plus rigoureux. Et à mon sens c'est le meilleur des deux mondes.

n(16 h 10)n

Mme Malavoy: Alors finalement il y a une touche québécoise dans ce que vous dites et qui est peut-être la forme de contribution que nous pouvons avoir, c'est-à-dire avec nos deux grands courants d'inspiration, hein, le courant européen et le courant nord-américain. Mais je comprends que vous arrivez à le matérialiser dans des projets, des programmes.

Une dernière question peut-être, parce que je pourrais en aborder plusieurs, mais une dernière: Avez-vous des liens avec les écoles d'administration qui ne sont pas publiques, là: les HEC, les... Est-ce qu'il y a des liens quelconques? Est-ce qu'il y a des... je ne sais pas, des projets communs? Est-ce qu'il y a des... Ou est-ce que c'est vraiment des univers complètement distincts, qui fait que, bon, les écoles d'administration ou les facultés d'administration et l'ENAP, ce sont des univers qui n'ont pas à se côtoyer ou à partager de choses?

M. Proulx (Marcel): Ce sont des univers qui traditionnellement ne se fréquentaient pas beaucoup. Les facultés d'administration, traditionnellement, ne s'intéressaient pas beaucoup à l'administration publique, et ça ne faisait pas des relations très riches. Ça change cependant. Ça a beaucoup changé avec HEC depuis que nous avons commencé à recruter... depuis qu'on recrute massivement, et on recrute en administration là où il y a des diplômés, c'est-à-dire dans les facultés d'administration, dans les écoles d'administration, principalement aux HEC, à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM et à travers ces nouveaux jeunes professeurs qui sont inscrits dans des réseaux de recherche, mais on voit apparaître des relations. Par ailleurs, nous avons aussi des relations institutionnelles: une des membres de notre conseil d'administration vient de HEC, une autre vient de la Faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval. Et on a donc des relations institutionnelles; quelques projets communs, pas énormément, parce qu'il y a une zone d'intersection entre l'administration publique et l'administration privée, qui n'est finalement pas très, très large, mais, là où elle existe, elle est porteuse.

Mme Malavoy: Bien, merci beaucoup, M. Proulx.

M. Bouchard (Vachon): M. Proulx, pour les fins de transcription, vous avez utilisé un mot que je n'ai pas tout à fait bien saisi, vous avez panaché votre discours d'un nouveau concept sociologique: «marginaux sécants», avez-vous dit?

M. Proulx (Marcel): Marginal sécant, oui.

M. Bouchard (Vachon): Alors, pouvez-vous...

M. Proulx (Marcel): Le marginal sécant, c'est...

M. Bouchard (Vachon): Les gens vont nous appeler pour savoir comment ça s'écrit, cette histoire-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Proulx (Marcel): Le marginal... Ça vient d'un ouvrage de Michel Crozier...

M. Bouchard (Vachon): Ah! Bon.

M. Proulx (Marcel): ...avec qui j'ai étudié.

M. Bouchard (Vachon): Ah oui, c'est vrai? Ah bon.

M. Proulx (Marcel): Oui, tout à fait. C'est cette idée... «Marginal sécant», c'est celui qui a un pied dans deux systèmes et qui, parce qu'il participe à ces deux systèmes, arrive à servir de passerelle.

Mme Malavoy: Mais «sécant», vous...

M. Proulx (Marcel): Sécant, s-e-c-a-n-t.

Mme Malavoy: C-a-n-t.

M. Proulx (Marcel): Oui.

M. Bouchard (Vachon): Non, mais c'est fascinant. On peut appliquer ça à toutes sortes d'autres systèmes que celui auquel vous pensez, là.

M. Proulx (Marcel): Mais je me méfie des mots. Connaissant la rigueur du président, je me méfie maintenant des mots que j'utilise.

M. Bouchard (Vachon): Bien non, mais...

Le Président (M. Chagnon): Le député de Vachon est un homme conséquent. Alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Chagnon): Nous avons notre ami député de Bertrand qui voulait aussi vous questionner. Alors, j'inviterais le député de Bertrand à vous questionner.

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Bonjour. Seulement une petite question, là, qui me tracasse. Bon. 80 % des étudiants à l'ENAP proviennent... ce sont des praticiens, donc des gens qui sont au travail puis qui viennent à temps partiel suivre les cours pour se perfectionner, puis l'autre 20 %, j'imagine qu'il y a les étudiants étrangers, dont vous parliez, qui... Bien, l'autre 20 %, en fin de compte, vous allez me l'expliquer, là, ce sont des étudiants qui proviennent de... des étudiants qui ont fait des baccalauréats dans d'autres institutions et puis qui arrivent. Comment ça se fait, cette jonction-là? Parce que, dans une classe, si 80 % des étudiants sont des étudiants qui sont au travail, sont des praticiens, les enseignants doivent savoir ça, parce que ceux qui ne sont pas des praticiens, bien ils sont déphasés, et il doit y avoir un ajustement, là. L'enseignant doit le savoir, qu'ils ne sont pas au même niveau, là.

M. Proulx (Marcel): Ça a été notre choc culturel, il y a maintenant 15 ans, quand nous avons reçu des jeunes, ça a été un choc culturel à plusieurs égards, ne serait-ce que parce que les jeunes n'avaient pas les mêmes attitudes, parfois pas les mêmes tenues vestimentaires que les praticiens...

M. Cousineau: La cravate.

M. Proulx (Marcel): ...et, la première fois qu'un professeur s'est retrouvé avec un étudiant avec une casquette, ça a été une surprise: Quoi, une casquette dans une classe de l'ENAP?

Le Président (M. Chagnon): À l'envers?

M. Proulx (Marcel): À l'époque, c'était... À l'envers, effectivement. Cela dit, outre l'anecdote, vous avez raison, c'est une vraie difficulté. Quant à la provenance, sur votre question, nos étudiants proviennent de diverses disciplines, essentiellement sciences politiques et administration, mais aussi philosophie, droit, sociologie, tous ceux qui ont un premier baccalauréat et qui se disent: Il serait temps que je me spécialise dans un objet, dans un domaine qui va me permettre d'intégrer une profession, un métier.

M. Cousineau: Mais celui qui a fait, par exemple, un baccalauréat en ressources humaines à l'Université du Québec ou un cumul de certificats qui l'amène à un baccalauréat en ressources humaines peut aller à l'ENAP?

M. Proulx (Marcel): Tout à fait. On a une concentration pour analystes en ressources humaines.

Je dirais: Là-dessus, sur le mélange des... faut parler de la difficulté de recruter, parce que la plupart des universités recrutent leurs étudiants au baccalauréat dans leurs propres classes. Les meilleurs étudiants sont repérés par les professeurs, qui essaient de les convaincre de s'inscrire à la maîtrise en leur promettant des assistances de recherche, etc. Nous, on n'a pas cette possibilité, donc il faut faire plus d'efforts pour les attirer.

Quant à ce qui arrive dans les classes, je dirais: Il faut distinguer. Il y a un certain nombre de cours qui sont réservés aux étudiants de la maîtrise pour analystes. Donc, dans ceux-là, c'est relativement simple, ça n'a pas été un choc... Ça a été malgré tout un choc culturel pour les professeurs habitués à enseigner à des praticiens. Vous imaginez, quand vous êtes habitués à enseigner à des praticiens, vous fournissez les modèles, ils vous fournissent la pratique, et le dialogue se fait. C'est très riche. Quand la pratique n'est pas dans la classe et que vous avez l'habitude, il faut que vous fournissiez tout à la fois la théorie et la pratique. Ce qui heureusement était fait par des professeurs qui avaient assez fréquenté de praticiens pour avoir en stock pas mal d'exemples.

Là où ça devient plus difficile ? et vous l'avez parfaitement compris ? c'est lorsque, pour des cours qui sont des cours communs, un certain nombre de nos cours sont communs, où les professeurs doivent conjuguer avec des gens qui ont tendance à s'exprimer beaucoup, qui ont plein de choses à apporter puis d'autres qui se retrouvent un peu marginalisés. Et c'est tout l'art du professeur de réussir à faire la jonction de ces clientèles. Les meilleurs de nos collègues font cela en faisant en sorte que les équipes de travail ? on travaille beaucoup en équipe, en atelier, chez nous ? soient mixtes, de sorte que ceux qui arrivent du baccalauréat, qui souvent sur le plan théorique sont plus forts parce qu'ils ont travaillé dans un discipline il y a moins longtemps, qu'ils ont un intérêt pour la théorie, et nos collègues... nos étudiants, étudiantes praticiens qui, eux, arrivent avec de la pratique, on peut faire une jonction.

M. Cousineau: Le tutorat.

M. Proulx (Marcel): Il faut savoir gérer les choses. Certains jeunes étudiants ont du mal à composer avec ce genre de situation. Certains de nos étudiants plus anciens trouvent ça agaçant. Mais on a généralement réussi à trouver le bon dosage. Et ce qu'on entend maintenant, sauf pour quelques cours où ça passe plus mal ? les cours de management, par exemple, ça passe plus mal ? mais, dans beaucoup de cours, nos étudiants nous disent que ça contribue à faire une dynamique qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Les jeunes disant: Ça fait du bien d'avoir des praticiens, parce qu'il n'y a pas que le professeur qui raconte des histoires, il y en a plein d'autres qui racontent des histoires ? au sens positif du terme, là ? puis on peut travailleur avec. Et, pour des praticiens, de dire: Bien, il y a une sorte de fraîcheur, de dynamisme, y compris, dans certains cas, une candeur très profitable, une naïveté. Vous savez, dans une classe, poser une question candide, c'est parfois une bonne façon de faire progresser la discussion.

M. Cousineau: Oui. À l'Assemblée nationale aussi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Proulx (Marcel): Je me permettrai de ne pas répondre à cette question, par exemple, à cette remarque.

Le Président (M. Chagnon): C'est pour ça qu'on a des périodes de questions, ce n'est des périodes de réponses.

M. Cousineau: Donc, le 20 %, là, effectivement ce sont des jeunes qui proviennent d'autres institutions, et puis il peut y avoir, dans le 20 %, aussi d'anciens praticiens qui ont décidé de faire une réorientation de carrière, qui ne sont plus...

M. Proulx (Marcel): Oui, mais très peu.

M. Cousineau: D'accord.

M. Proulx (Marcel): Très peu. Ils vont généralement choisir la maîtrise pour gestionnaires, malgré tout.

M. Cousineau: Merci. Ça répond à ma question.

Le Président (M. Chagnon): Vous avez eu Michel Crozier comme professeur?

M. Proulx (Marcel): Oui, comme directeur...

Le Président (M. Chagnon): De thèse?

M. Proulx (Marcel): ...de programme. Ouf, c'est compliqué, les histoires de directeur de thèse, parce qu'à une époque Michel Crozier dirigeait toutes les thèses mais n'en dirigeait aucune. Moi, j'ai...

Le Président (M. Chagnon): J'ai plusieurs assistants qui...

M. Proulx (Marcel): Il y avait plusieurs professeurs qui faisaient... Non, j'étais avec un autre professeur, mais Michel Crozier veillait à toutes les thèses.

Le Président (M. Chagnon): Bon. O.K. C'est parce que c'est un grand... un éminent professeur.

M. Proulx (Marcel): Tout à fait.

Le Président (M. Chagnon): ...et un grand écrivain. Alors, M. Proulx, bien il ne me reste plus, au nom des membres de cette commission, que de vous remercier, ainsi que Mmes et MM. les gens qui vous accompagnent, de l'ENAP. Ça a été un entretien très profitable et très heureux, c'est bien entendu. Évidemment, je pense que, de ce côté-ci, nous avons été en tout cas fort satisfaits des réponses que nous avons obtenues. Évidemment, vous êtes maintenant libres pour les trois prochaines années, libres mais en liberté surveillée!

M. Proulx (Marcel): Parfait. Merci de votre accueil, et nous reviendrons quand vous voudrez.

Le Président (M. Chagnon): Merci beaucoup.

M. Bouchard (Vachon): Le député de Vimont n'étant pas là, vous n'avez pas eu la question sur les frais de scolarité.

Des voix: Ha, ha, ha!

(Fin de la séance à 16 h 20)


Document(s) related to the sitting