(Quinze heures trente-quatre minutes)
Le Président (M. Kelley): Alors, je constate le quorum des membres de la Commission de l'éducation, donc je déclare la séance de la Commission de l'éducation ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et la qualité des universités au Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Soucy (Portneuf) remplace Mme Gaudet (Maskinongé).
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. On a deux groupes cet après-midi. On va commencer avec le Regroupement étudiant des facultés d'administration de l'Est du Canada. Ensuite, nous allons entendre l'Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. J'invite tout le monde qui a un téléphone cellulaire de, s'il vous plaît, l'éteindre. Et, sans plus tarder, je cède la parole à M. Yannick Denis-Trudel, qui est le président du Regroupement étudiant. La parole est à vous, M. Denis-Trudel.
Auditions (suite)
Regroupement étudiant des facultés d'administration de l'Est du Canada (REFAEC)
M. Denis-Trudel (Yannick): Merci beaucoup. Alors, je voudrais en premier lieu remercier la commission ainsi que tous les commissaires actuellement assis ici, alentour de la table, pour nous avoir invités à cette commission parlementaire.
Premièrement, je vais vous faire un bref historique de qu'est-ce que le REFAEC parce que je suis sûr que ce regroupement n'a pas été d'aucune façon présenté... ou que vous sachiez de qui il s'agit, là, finalement aujourd'hui. Le REFAEC existe depuis 1986, donc ça fait 18 ans que ce regroupement existe. Il regroupe l'ensemble des universités du Québec. On parle de, bon, en fait tout le réseau UQ, l'Université Laval, HEC, McGill, Concordia, et ainsi de suite, donc 13 universités au total... et qui regroupe également l'Université de Moncton, l'Université d'Ottawa. Ce sont des étudiants en administration, pour la plupart en premier cycle... mais qui regroupe tous les cycles universitaires. Nous sommes 32 000 étudiants, et, de ce 32 000 là, il y a environ, je vous dirais, plus du deux tiers qui sont des étudiants non-membres de la FEUQ. Donc, ils ne sont pas représentés par la FEUQ. C'est pourquoi c'était de notre devoir finalement de prendre position et de pouvoir utiliser l'opportunité qui nous était offerte par la commission parlementaire pour venir déposer nos points.
Sur ce, on va démarrer la présentation avec l'importance finalement des études en gestion, les étudiants en gestion. Si on regarde le secteur de l'administration, en fait il y a plus de 150... 180, pardon, programmes d'études qui sont offerts aux étudiants québécois, et en fait ça répond à finalement plus de 20 % de la clientèle étudiante au Québec. Donc, on est un des plus gros domaines d'éducation au Québec. Ensuite, si, pardon... si on regarde toutefois, malgré ce fait-là que nous soyons une des facultés... ou en fait un des champs d'études les plus grands, nous sommes un peu les parents pauvres du système universitaire québécois pour plusieurs raisons. Premièrement, il y a le concept finalement de péréquation qui est comment un peu l'argent est réparti à l'intérieur même ? merci ? est réparti à l'intérieur même du système, et ça, je vais pouvoir revenir, là, sur ce point-là plus particulier. Il y a également tout le concept finalement de ratio professeurs-chargés de cours. Si on regarde actuellement, plus de la moitié des cours sont enseignés par des chargés de cours, et ce ratio-là peut augmenter jusqu'à 72 % finalement dans certaines facultés. Je vous dirais que finalement, si on prend les chiffres de 1998, le secteur de l'administration, à ce moment-là, avait un ratio finalement de 36 étudiants par professeur, et ce ratio-là tombait à 24,8 % dans l'ensemble de tous les secteurs universitaires.
Donc, déjà là nous avons beaucoup plus d'étudiants par professeur en administration. Il y a également quelques champions du non-encadrement, comme on pourrait dire: l'Université Concordia, Laval et l'UQAM, c'est 34 étudiants par professeur; on tombe à 40 étudiants par professeur pour les HEC et l'Université de Sherbrooke; et le champion finalement dans ce domaine-là, c'est l'Université McGill, qui, malheureusement, tombe à 50 étudiants par professeur à l'intérieur de la faculté. Alors, on remarque que finalement il y a énormément de chargés de cours qui donnent des cours mais très peu de professeurs. Si on y va avec un ratio, c'est finalement le domaine de l'administration, même si on compte pour plus de 20 % de la clientèle étudiante, on parle finalement d'environ 10 % de l'effectif professoral québécois. Alors, là déjà, il y a un écart. Tout ça vient, bien entendu, donc d'une certaine péréquation qui est faite, d'un certain transfert d'argent. Par la suite, si on regarde maintenant les nouveaux coûts qui sont reliés avec le système d'éducation en administration, on a le côté de l'avènement des technologies de l'information.
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(15 h 40)
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Le ministre Reid nous a discuté, avant même de l'arrivée... l'entrée en ondes, du fait qu'il était à même le démarrage finalement d'un certain programme dans les technologies de l'information dans les années quatre-vingt. Donc, il est tout à fait au courant actuellement que c'est réellement la pierre angulaire de... Finalement, toute étude en administration a besoin d'avoir un côté technologies de l'information qui est de plus en plus développé, de plus en plus poussé. Ce sont des coûts additionnels qui auparavant n'étaient pas pris en considération à l'intérieur même du système de péréquation, encore une fois.
Il y a également l'impact de la mondialisation des économies nationales. De plus en plus, il est du devoir finalement de l'étudiant de prendre en charge cette ouverture vers le monde, que ce soit via des cours de langues ou que ce soit via des échanges internationaux. Bien, ce sont également, là, à ce moment-là, une offre de service qui devrait être offerte, beaucoup plus facilement accessible finalement aux étudiants en administration... et qu'actuellement ne le sont pas. L'étudiant doit faire toutes les démarches dans cette direction-là.
Maintenant, si on regarde pour la qualité du financement finalement de tout le système pour les études en administration, bien, premièrement, je crois qu'on peut se mettre d'accord, tout le monde, avec la recherche qui avait été faite conjointement, le ministère de l'Éducation avec la CREPUQ. Il y avait un montant de 375 millions qui avait été demandé. On se pose sérieusement la question: Pourquoi, lors du dernier budget, le montant qui a été alloué finalement a été de 307 millions? Pourquoi le 375 millions? Et de plus c'est que ce 307 millions là a dû être distribué à travers toutes les couches du niveau éducationnel versus un 375 millions uniquement pour le système universitaire. Ça, c'est la première des deux... des questions.
Et, deuxièmement, il y a également le transfert d'environ 60 millions de dollars qui a été fait d'une bourse d'études à un système de prêts étudiants. Donc, c'est une augmentation finalement de l'endettement étudiant. Quand il y a une partie, oui, qui vient des bourses du millénaire ? et là, j'en conviens, c'est de compétence provinciale uniquement, et là le fédéral a mis son nez là-dedans ? mais toutefois il y a un certain montant d'argent qui a été redistribué au Québec dans ce cadre de ces bourses-là, et c'était réellement pour des bourses et non pas pour des prêts. Donc, ça, on aimerait bien avoir des explications là-dessus.
À ce moment-là, donc il y a le système finalement du financement universitaire qui actuellement est... oui, une partie vient du gouvernement, une autre partie, de l'apport étudiant. Actuellement, l'apport étudiant est finalement gelé. Ce sont des dollars courants qui sont gelés actuellement. Donc, depuis 1994, le montant n'a pas bougé. Toutefois, si on se fie à un taux d'indexation tout simplement normal du coût de la vie, bien l'apport réel de l'étudiant, année après année, diminue, et ce, depuis 1994. Ça, c'est un point sur lequel je crois que c'est bien important qu'on se mette à jour et qu'on considère le fait qu'il faudrait finalement que tout gel, si gel il y a, si gel il restera dans le futur... il faudra absolument que ce gel-là soit en dollars courants et non pas... en dollars constants, pardon, et non pas en dollars courants, ce qui fait en sorte que c'est indexé au coût de la vie et on arrête de jouer à l'autruche et de mettre la tête dans le sable; c'est bien important. Bon. On étudie en administration; on est peut-être un peu plus au courant de ces problématiques-là, mais c'en est une. Et ça, c'est vraiment important, je crois, pour l'ensemble finalement de tous les étudiants.
Et il faudrait également que les frais afférents qui actuellement sont au bon gré de tout système... de finalement tout établissement universitaire, bien au lieu que ce soit à leur gré, que ce soit dans une enveloppe gelée si gel on conserve, bien entendu. C'est important pour ne pas justement qu'il y ait des écarts et que les étudiants en paient le prix finalement dans le futur.
Maintenant, il y a une partie également de l'argent qui provient de fonds de dotation et de fondations universitaires. Je crois qu'actuellement on pourrait dire que finalement, au Québec, nous ne sommes pas juste les parents pauvres du côté administration, mais, de toutes les facultés possibles, la différence est notable et majeure. Bon. On va prendre un exemple qui est complètement à l'extrême et vraiment à toute l'extrémité totale, là, du spectre; on va parler, admettons, des universités comme Princeton et Harvard. Bon. Ces deux universités-là, pour chaque étudiant inscrit, ils ont l'équivalent d'entre 900 millions de dollars... entre 0,9 million et 1,5 million de dollars canadiens par étudiant inscrit dans la fondation universitaire. C'est énormément d'argent. Et, de là, ils peuvent justement se permettre de faire des améliorations, des investissements, et ainsi de suite.
Si on prend les quatre plus grosses universités canadiennes dans ce domaine-là ? on parle de McGill à Montréal, on parle de Queen's, UBC et l'Université de Toronto ? là, on parle d'un montant d'environ 15 000 $ par étudiant inscrit. Donc, déjà là il y a une marche incroyable qui vient d'être passée. Pour la meilleure université québécoise francophone ? on parle de HEC Montréal ? c'est moins de 2 300 $ par étudiant dans la fondation universitaire. Et là je n'irai pas avec l'ensemble des autres universités où est-ce que, là, les montants sont de plus en plus minimes et quasiment ridicules, là.
Donc, si on veut qu'une bonne partie de l'argent qui vient de ces fondations universitaires là puisse servir dans le futur, il faut commencer à les bâtir, ces fondations universitaires là. Ce n'est pas dans la mentalité actuelle des finissants, peut-être pour certaines universités... Mais, pour l'ensemble des finissants universitaires québécois, ça ne fait pas partie de leur mentalité, de faire des dons à la fondation universitaire. C'est le cas ailleurs au Canada, c'est le cas à certaines universités au Québec; on parle de l'Université McGill, par exemple. Bien, alors ce qui est important, c'est qu'il faut bâtir ce fonds-là, qu'il faut bâtir cette énergie-là par la suite parce que c'est avec cet argent-là qu'on va pouvoir continuer à investir dans le système.
Moi, ce que je vous dirais, c'est qu'il y aurait une possibilité qu'on puisse offrir à tous ceux qui désirent donner de l'argent à des fondations universitaires un certain incitatif, que ce soit via des crédits d'impôt additionnels que ceux qui sont accordés à quelqu'un qui fait un don à un organisme de charité... Donc, on parle, admettons... Pour le premier mille dollars, vous avez jusqu'à 75 % de crédit d'impôt. Bien, premièrement, oui, c'est de l'argent qui est retourné en crédit d'impôt à des particuliers, je suis tout à fait d'accord. Toutefois, on vient de créer de l'argent dans des fondations universitaires qui de toute façon n'auraient jamais été là parce qu'on n'a pas actuellement la mentalité et l'automatisme de donner de l'argent aux fondations universitaires. Ces fondations-là peuvent nous aider dans le futur; ça, c'est vraiment important.
Tout à l'heure, quand je vous ai parlé que les étudiants, bien on était prêts à faire notre part, entre guillemets, en indexant les frais de scolarité, bien, à ce moment-là, c'est important également que le gouvernement ne s'assoit pas dans une vision d'évidemment retirer ses billes de ce domaine-là mais en continuant le réinvestissement, c'est très important. Finalement, c'est une vision d'avenir pour l'ensemble de la société québécoise, et, si le gouvernement retire son apport dans le système, bien, à ce moment-là, il n'a plus accès à dicter finalement, dans un certain sens, la voie avec laquelle les diplômés québécois vont pouvoir poursuivre dans le futur. Et ça, je crois que c'est vraiment important, qu'il faut garder les pieds bien, là, ancrés dans le système. Merci.
Maintenant, pour ce qui est finalement de la péréquation, et là je crois qu'on va rentrer dans le vif de la chose qui nous, les étudiants en administration, nous affecte le plus. C'est que la grille de pondération a été crée il y a environ 20 à 25 ans, et ça faisait en sorte que, pour tout étudiant inscrit, il y a un montant qui est transféré à l'université ou à l'établissement, et ce montant-là est par la suite redistribué finalement entre les différentes facultés. Certaines facultés ont besoin de plus d'argent ? tout à fait d'accord. On parle de finalement facultés de médecine, où est-ce qu'il y a des ratios professeur-étudiants qui sont établis de niveau international, où est-ce qu'on doit absolument finalement avoir certaines bases qui font en sorte que, oui, il y a des coûts additionnels rattachés à ça ? je suis tout à fait d'accord. Toutefois, si on regarde la différence finalement entre les domaines de l'administration, droit, lettres, sciences humaines, bien l'administration actuellement a moins d'argent que toutes ces autres facultés. On parle de droit, de lettres, de sciences humaines, sciences de l'éducation, sciences appliquées ? je peux comprendre ? les arts, et ainsi de suite. Nous sommes vraiment les parents pauvres, en administration. Et, comme je vous disais précédemment, les technologies de l'information, qui, il y a 20, 25 ans, étaient quasi inexistantes, faisaient en sorte que, oui, on comprend pourquoi, à ce moment-là, on avait besoin... calculatrices, livres, merci, bonsoir, c'est terminé, et quelques professeurs, c'est tout. Mais là ce n'est plus le cas. Les sciences administratives ont des coûts additionnels qui sont réellement... qui ont augmenté de façon finalement exponentielle et qui font en sorte qu'actuellement, bien en n'ayant pas ces montants d'argent là, ça crée un déséquilibre.
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(15 h 50)
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Deuxièmement, l'université elle-même, après avoir reçu les montants qui ont déjà été séparés selon une grille de pondération du gouvernement, bien par la suite elle-même peut commencer à transférer également des fonds d'une faculté à l'autre. Alors, encore là le parent pauvre va être finalement le secteur de l'administration. Je crois qu'on peut concevoir que finalement il serait temps qu'il y ait une modification qui soit faite à cette grille de pondération là et que certains niveaux soient requis de la part des institutions pour qu'on ait les montants nécessaires à avoir une bonne formation en administration.
Alors, en terminant, je crois qu'il y a également un point ? puis c'est un point assez rapide ? c'est concernant le programme de prêt de micro-ordinateur qui a été aboli l'année passée, au mois de juin. Ce programme de prêt micro-ordinateur là, si on le regarde dans son ensemble, oui, il y avait des coûts rattachés à ça. Toutefois, il y avait certains montants qui étaient mis en prévision de mauvaises créances et qui ne sont pas nécessairement automatiquement repris par le ministère de l'Éducation... ou finalement l'aide financière aux étudiants. Bien, à ce moment-là, si on regarde l'ensemble des prêts micro qui avaient été accordés, il y a seulement 2 % à peu près de ces prêts-là qui n'ont jamais été recouverts, c'est tout. On parle de 390 000 $. Il y a 3,9 millions de dollars qui avaient été mis de côté en prévision de mauvaises créances. Si on prend l'ensemble de toutes les dépenses reliées au programme, c'est environ 1,2 million de dollars pour aider les étudiants qui ont besoin d'un micro-ordinateur. Et on peut en concevoir que finalement tous les étudiants en administration ont besoin d'un micro-ordinateur, que le programme d'études l'oblige ou pas. Certaines universités obligent d'avoir un micro-ordinateur portatif, d'autres universités, non, mais tous les étudiants en administration ont absolument besoin d'un micro-ordinateur, et ça, c'est absolument essentiel.
Donc, c'est important, s'il vous plaît, de remettre en place ce programme qui en coûtait peu et qui aidait l'ensemble des étudiants en administration. Maintenant, si donc on fait finalement une récapitulation sommaire de nos demandes, bien en fait ce qu'on voudrait avoir, c'est une explication, premièrement, pour le 375 millions qui avait été clairement demandé ? CREPUQ, MEQ. Bien, à ce moment-là, pourquoi est-ce que le montant qui a été discuté au dernier budget, ce n'est pas le même montant? Également, bien on parle d'un gel. Oui, nous sommes pour le gel, mais un gel en dollars constants et non pas en dollars courants, donc qui fait en sorte que, oui, il y a une indexation des frais de scolarité, sauf qu'au moins, bien, on paie exactement et on conserve le niveau finalement où on en est rendu, et non pas, à chaque année, diminuer le montant équivalent qui est offert à chaque étudiant.
Une voix: ...
M. Denis-Trudel (Yannick): Oui. Et, c'est vrai, on m'a fait remarquer une chose, c'est que, pour chaque dollar investi par l'étudiant dans ce programme-là, il faudrait que le montant équivalent vienne du gouvernement, ce qui va démontrer que, oui, l'étudiant est prêt à faire sa part, à dire: Bon, bien, on va avoir ça de moins, on va donner plus d'argent dans le système, mais que le gouvernement en donne l'équivalent au prorata. Ça veut dire que, si, moi, je suis prêt à donner quelques dollars de plus, faites donc le même effort, et, à ce moment-là, on va avoir la satisfaction finalement du devoir accompli. Je crois que ça peut être une façon, là, finalement de faire entrer plus d'argent dans le système.
Ensuite, bien donc vérifier tout le côté de péréquation et s'assurer qu'on redistribue l'argent de façon plus équitable, surtout vu les nouveaux aspects des sciences administratives. Et, pour ce qui est finalement des fonds de dotation... exonération ? oui, c'est vrai, j'avais oublié ça ? exonération du gain en capital pour tous les dons en valeurs mobilières pour les fonds de dotation ? je crois que ça avait déjà été apporté par les HEC ? ce serait extrêmement pratique et très, très, très important finalement pour créer ces fonds de dotation. Et en plus, bien finalement les crédits d'impôt pour les dons des particuliers à des fondations universitaires supérieurs à tout crédit pour un don à un organisme de charité, je crois que ça peut être une des façons de pouvoir démarrer le projet.
Il y avait également le concept finalement des universités en région. On a actuellement ici un représentant de l'Université du Québec à Rimouski. On croit qu'actuellement dans les universités en région, et je vais terminer là-dessus ? je vais terminer sur ça, merci ? les universités en région actuellement pourraient utiliser un peu le même concept qui a été utilisé pour les cégeps. Certains cégeps en région finalement ont des créneaux qui leur sont donnés spécifiquement. On parle, mettons, du cégep de Jonquière pour ce qui est des communications, Sainte-Thérèse pour l'art et le théâtre, et ainsi de suite. Bien, la même chose pourrait être faite pour les universités en région. Il y a actuellement de multiples chaires et de programmes d'études qui existent. Si on pouvait donner certaines spécificités aux universités en région, bien on viendrait, à ce moment-là, d'augmenter le nombre d'étudiants qui iraient et qui se présenteraient finalement à ces universités en région et qui pourraient les aider finalement, là. Ça pourrait être une des bonnes façons de pouvoir faire ça.
Alors, sur ce, bien je vous remercie, chers membres de la commission, et on attend vos questions avec impatience. Merci.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Denis-Trudel. Et je suis prêt à passer la parole au ministre de l'Éducation et député d'Orford.
M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous apporter une bonne nouvelle ? c'est assez récent, on l'a annoncé en conférence de presse il y a moins de deux heures ? concernant le prêt micro. Alors, nous avons entendu vos prédécesseurs, et nous avons lu votre mémoire, et nous avons regardé tous les aspects, et nous avons complété notre analyse. Et nous allons... nous avons réinstauré, pour à partir de donc la prochaine rentrée, le prêt micro, qui coûte plus cher que vous dites, en passant; c'est 5,6 millions de dollars que ça nous coûte pour faire ça, mais on le fait et avec des particularités, certaines améliorations et des petits détails. Mais les deux principales sont que dorénavant les coûts d'intérêt, qui, dans l'ancien prêt micro, devaient être remboursés par l'étudiant, l'étudiante au trimestre, seront dorénavant payés par l'État et donc incorporés aux dettes d'études en général. Et donc c'est un élément intéressant.
Deuxièmement, il n'y aura pas de monopole. Donc, autrement dit, des étudiants qui ne sont plus en mesure de faire leur propre montage, ou etc., tant que c'est des choses qui seront claires et qui seront vérifiables, évidemment pourront peut-être en avoir plus pour le même argent s'ils le souhaitent et s'ils le veulent, parce que c'est ce qu'on nous a beaucoup dit ici et ailleurs. Et, troisièmement, nous allons annoncer un système de remboursement proportionnel au revenu, et donc le système de remboursement proportionnel au revenu s'appliquera également au prêt micro. Et donc c'est un élément qui permettra à des étudiants qui par la suite n'auraient pas la chance d'aller chercher un emploi ou des revenus correspondant à leur diplôme, par exemple, à la moyenne... se verront donc moins pénalisés de ce côté-là.
Concernant les éléments... Vous parliez des éléments du budget de cette année en relation avec ce que nous avons entendu à la commission. Il faut comprendre que la commission, comme disait le président de la Conférence des recteurs dans un communiqué, c'est un événement historique au Québec ? je ne me rappelle pas que ça ait existé, là, à cette ampleur-là ? et qu'on regarde toute la problématique de la qualité, de l'accessibilité et du financement des universités dans un horizon qui n'est pas uniquement le budget de mars 2004, sinon on plierait tous bagage puis on... Alors, ce n'est pas du tout cette optique-là, c'est une optique plus longue.
Pour être capables d'assurer le financement et la qualité et l'accessibilité à court, moyen et long terme, il faut et il fallait de toute urgence nous assurer que les universités ne voient pas leur situation se rempirer avant qu'elle ne s'améliore. Donc, nous avons fait en sorte que la situation des universités... qu'on protège les acquis, que la situation des universités reste stable. Ça voulait dire pour nous bien évidemment couvrir les coûts d'inflation, les coûts reliés à la main-d'oeuvre, les fameux coûts de système de toute nature. Mais aussi, et c'est ce qui, dans les universités, fait une augmentation de 6,3 %, alors que l'augmentation totale des dépenses du gouvernement est la moitié de ça, ce qui fait ça, c'est le fait qu'il y a un engouement pour les études universitaires au Québec, contrairement aux prévisions d'il y a quelques années. Et le dilemme, c'est: si on laisse les universités dire aux étudiants: Venez, mais même si on ne peut pas vous embaucher des professeurs puis on ne peut pas... Donc, ça veut dire que les descriptions et les ratios que vous nous avez donnés se retrouveraient à se rempirer. Et donc, là, on ne parle pas d'améliorer, on parle de laisser se détériorer.
La première des choses qu'il y avait à faire, c'était d'empêcher la détérioration, et c'est ce que nous avons fait, et ça, ça a pris beaucoup, beaucoup d'argent. Et évidemment l'année n'est pas finie, c'est la première journée de l'année financière aujourd'hui. Nous avons dit que, dans cette année financière, nous ferions des efforts importants pour non seulement investir, parce qu'on investit beaucoup, ce faisant, là, dans le budget actuel, mais aussi réinvestir, et c'est évidemment ce que l'on souhaite. Et tout ce que vous nous dites là-dessus, c'est extrêmement important, en particulier pour la situation de l'administration. J'en profite pour dire bienvenue à toute votre délégation, également les personnes qui vous accompagnent que j'ai eu l'occasion de voir tout à l'heure.
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(16 heures)
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La question que j'aimerais vous poser, c'est concernant les fonds de dotation. Évidemment, quand on pense fonds de dotation, il y a plusieurs possibilités. Vous en évoquez quelques-unes, et ces possibilités-là, quand on regarde sur le plan budgétaire de l'État, ça veut dire qu'il y a des coûts. Un crédit d'impôt, c'est de l'argent, bien sûr, hein? C'est dire qu'il faut trouver l'argent en quelque part pour donner le crédit d'impôt parce que c'est de l'argent qui ne rentre pas pour autre chose, ou etc. Il y a plusieurs possibilités, mais, moi, j'aimerais peut-être...
Quand vous dites, des crédit d'impôt, sachant d'une part que, dans beaucoup de cas, si on compare avec le côté anglophone, où il y a des traditions différentes, beaucoup de cas au côté francophone, les... Au côté anglophone, pardon, ce qui fait la richesse des fondations, ce sont les dons des particuliers, entre autres les héritages sur les testaments, les dons testamentaires. Et donc on se retrouve avec une décision où souvent le crédit d'impôt n'a pas nécessairement beaucoup d'importance. Autrement dit, ce type d'incitatif, dans beaucoup de cas, chez les anglophones, puisque les meilleurs dons, les dons les plus généreux sont ceux-là... ce n'est pas nécessairement sous cette forme-là qu'on incite les testaments. Et on peut se demander s'il n'y aurait pas plus d'intérêt à faire une campagne et à travailler. Et on va le faire d'ailleurs, on s'y est engagés dans une rencontre qu'on a eue ici.
Mais, moi, je voudrais vous demander... Par exemple, le système qui a été favorisé par le gouvernement jusqu'à maintenant ? c'était le gouvernement précédent ? mais qu'on a continué à favoriser, c'est le système où il y aurait une contrepartie jusqu'à une certaine limite, c'est un système qui comporte des coûts parce que ça veut dire que, la contrepartie, le gouvernement doit la trouver dans son budget pour la déposer dans une fondation universitaire ou la déposer à l'université. Est-ce qu'entre les deux, des crédits d'impôt et des fonds de contrepartie, quant à dépenser une somme d'argent donnée, est-ce que vous pensez qu'il y en a une qui est plus efficace que l'autre? Et est-ce que c'est pour ça que vous semblez avoir opté davantage pour les crédits?
M. Denis-Trudel (Yannick): Alors, je vais rectifier une erreur que j'ai faite au début: j'ai complètement oublié d'introduire le panel qui m'accompagnait. Et je vais le faire tout de suite. Alors, introduire, à ma gauche, Maxime Bernard, coordonnateur à la recherche et auteur du mémoire; par la suite, à l'extrême gauche, Adam Al-kabyyr, le vice-président académique du REFAEC actuellement; et, à ma droite, Michaël Chabot, qui représente l'Université du Québec à Rimouski.
Alors, pour répondre à votre question, je vais laisser finalement M. Maxime Bernard, l'auteur de la recherche, répondre. Merci.
M. Bernard (Maxime): On a rien vraiment contre les fonds de contrepartie en tant que mécanisme, c'était un bon moyen. Il a été employé durant le dernier mandat justement du gouvernement. Mais on n'a pas vu justement une hausse de la part, dans les fonds de dotation, une hausse de la part des... justement un démarrage d'une culture philanthropique, comme, justement vous l'énonciez, dans les universités anglo-saxonnes.
Donc, de là, on cherchait peut-être l'originalité d'aller chercher un moyen supplémentaire d'inciter, en plus du fonds de contrepartie, qui serait justement des crédits d'impôt pour une période limitée. Ça pourrait être sur un horizon donné de 10 ans ou de cinq ans, le temps, là ? encore une fois c'est des spéculations ? mais le temps qu'une culture philanthropique se développerait chez les diplômés. C'est important de le remarquer parce que c'est vrai que la plupart du temps, dans les universités anglo-saxonnes, c'est des diplômés qui donnent à leur université, comparativement à des entreprises, quoique les entreprises aussi ont aussi un gros apport, mais c'est vraiment important que... c'est les diplômés et c'est sur ça qu'on veut majorer. Donc, ce serait sur des crédits d'impôt aux particuliers et non aux entreprises, surtout pour remettre dans les fonds de dotation.
Donc, c'est vraiment une question juste d'aller chercher un nouveau moyen en plus des fonds de contrepartie, puisque maintenant selon les données qu'on a étudiées, on n'a pas vraiment vu un effort majeur justement qui pourrait faire en sorte qu'à long terme on rattraperait des niveaux de fonds de dotation comme il y a dans les universités anglo-saxonnes.
M. Reid: Est-ce à dire, en même temps ? je vais essayer de pousser plus loin que ce que j'ai lu, là, et ce que vous dites, mais, quand on fait des comparaisons avec le reste du Canada, il y a une comparaison qui tient, pour un tiers peut-être en tout cas, qui tient aux fonds de dotation qui sont plus riches ailleurs au Canada ? est-ce à dire que vous recommandez plutôt d'aller vers une formule qui amène une culture, disons, de dons par opposition à avoir une intervention directe de l'État qui remplace, au Québec, les fonds de dotation par des fonds publics? Ou est-ce que je vais trop loin?
M. Bernard (Maxime): À long terme, ce serait ça.
M. Reid: D'accord.
M. Bernard (Maxime): À long terme, on irait dirigés vers ça, mais, pour l'instant, on ne peut pas. Présentement, la situation... ce serait impossible de dire que l'État enlève le programme des contreparties, enlève les crédits d'impôt et laisse ça aux universités. La culture n'est pas là, puis la culture, c'est une question intrinsèque d'un, je pourrais dire, d'un peuple ou peu importe, mais... Donc, ça prend du temps à développer, c'est des mentalités qu'il faudrait changer. Mais, à long terme, je crois que la culture philanthropique pourrait justement faire en sorte que les gouvernements... Ces fonds de contrepartie là, mais là encore une fois c'est à très long terme ? je ne veux pas m'avancer sur des choses que je ne veux pas dire ? mais c'est au moins jusqu'à 50 ans, je dirais. Ça ferait en sorte que finalement le gouvernement pourrait se retirer des fonds de contrepartie. C'est vraiment pour démarrer finalement. C'est de l'aide de l'État pour démarrer, mais après, quand on voit que c'est démarré, qu'il y a un apport suffisant des diplômés, que finalement les fonds de dotation ont pris de l'essor, là, ce serait bien justement de laisser ça finalement, la culture va y aller toute seule, si on peut dire. Ça a marché depuis presque 100, 200 ans sous la culture anglo-saxonne. Pourquoi ici on ne serait pas capables d'instaurer ça de notre côté franco-canadien?
M. Reid: Est-ce que j'ai encore du temps pour la dotation?
Le Président (M. Kelley): Peut-être une dernière question, mais en...
M. Reid: Très bref. Parce que, si vous n'avez pas eu le temps de regarder ça, dans le fond, si... Moi, c'est... Simplement, c'est, quand on se compare avec le reste du Canada, on peut faire la même comparaison à l'intérieur du Québec. Il y a des universités qui ont des fonds de dotation assez importants, et maintenant les universités francophones en ont aussi. Il y en a d'autres où c'est naissant à peine. Et je pense que les universités que vous représentez tous ensemble nous donnent une bonne gamme, là, de fonds de dotation très forts et de fonds de dotation qui sont... qui commencent à peine à se développer.
Est-ce que vous pensez qu'il y a lieu de différencier, au Québec, les politiques qu'il pourrait y avoir? Actuellement, la politique de contrepartie, elle est la même pour tout le monde. Est-ce que vous pensez qu'il y a lieu de différencier ou non? Et on va laisser la culture se développer avec des formules d'aide?
M. Bernard (Maxime): On ne s'est pas vraiment penchés sur ce point-là. Mais la problématique qu'amène votre question est aussi le fait qu'il y a des universités très jeunes, des universités plus vieilles au Québec. Et, de là, je crois, vient beaucoup un peu la différence aussi dans les fonds de dotation, parce que les fonds de dotation, avec les intérêts accumulés, ça prend beaucoup de temps à bâtir finalement. Donc, on n'a pas étudié... je ne pourrais pas vous répondre, malheureusement, sur des programmes différenciés pour aider les fonds de dotation, mais il y aurait sûrement à regarder justement si c'est une question par rapport aux universités plus jeunes ou quoi que ce soit.
M. Denis-Trudel (Yannick): Juste pour...
Le Président (M. Kelley): Permettez à M. Denis-Trudel...
M. Denis-Trudel (Yannick): ...vraiment pour clore directement là-dessus. Toutefois, il faudrait faire attention pour ne pas glisser vers une trop grande différenciation, finalement une espèce de dichotomie entre les différentes universités. Le système universitaire québécois actuel fait en sorte que, peu importe à quelle université on va, les frais de scolarité sont les mêmes, et ainsi de suite. Je crois que c'est une valeur ajoutée finalement à l'ensemble du système universitaire. Et, commencer à différencier chaque université via: «Bon, bien, eux ont déjà un système de fonds de dotation supérieur à un autre, on ne donnerait pas les mêmes avantages», je verrais peut-être un risque de ce côté-là.
M. Reid: O.K. Merci.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à mon tour au nom de ma formation politique. Je vais me permettre de faire quelques remarques suite à celles du ministre. Je me réjouis bien sûr qu'il ait rétabli le prêt pour les micro-ordinateurs. On va voir dans la mécanique, là, si c'est mieux qu'avant ou pire, moins bon qu'avant, mais enfin je vais le voir. Je déplore cependant que ça ait pris un an, à toutes fins pratiques, et un peu plus, là, parce qu'il sera remis en place, là, pour l'automne. C'est ça que j'ai bien compris ou c'est maintenant?
M. Reid: Pour la rentrée.
Mme Marois: Pour la rentrée. Bon. Alors donc, ça aura pris plus d'un an. C'est un peu long pour réviser ce type de programme. Mais cependant ce que le ministre ne dit pas, même s'il indique qu'il a réinvesti dans les universités... ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il n'a pas vraiment augmenté les sommes allouées aux universités, si ce n'est que pour couvrir la croissance de clientèles et que ça... et par ailleurs, que, pour le faire, il va endetter les étudiants de 64 millions de dollars de plus. Alors, je ne trouve pas que c'est la bonne méthode. Il le sait, que je ne suis pas d'accord. Je le redis ici: qu'on paie plus tard parce qu'on aura le remboursement proportionnel au revenu, c'est quand même une dette qu'on a sur les épaules, hein, ce n'est pas... et que c'est 64 millions de moins qui vont dans les poches des étudiants, sans aucun lien, parce qu'une bourse, on ne la rembourse pas, on la consomme aux fins de ses besoins, et c'est terminé. Tandis qu'un prêt, on le doit. Qu'on le paie proportionnellement à ce qu'on gagne ou pas, c'est une dette pareil. Alors, il y a... c'est donc 64 millions de moins dans les poches des étudiants, et je le déplore.
Et par ailleurs le gouvernement et le ministre de l'Éducation n'ont pas respecté leurs engagements, puisqu'ils avaient prévu réinvestir 30 millions pour améliorer la situation dans les universités, et je ne vois pas ce 30 millions nulle part. Ils ne font que réparer les pots cassés dans un cas, empirent la situation des étudiants et, de l'autre côté... réparer leurs pots cassés, parce que, l'année dernière...
Des voix: ...
Mme Marois: ...non, leurs pots cassés, parce que, l'année dernière, c'est 54 millions de moins... 53 millions de moins qu'ils n'ont pas versés aux universités et qu'ils leur doivent toujours. Alors, commençons par là. Ce serait déjà un bon commencement, n'est-ce pas? Alors, plutôt que de regarder... plutôt que de critiquer les réinvestissements que nous avons faits dans les universités, ils devraient faire comme nous. Il me semble que ce serait déjà pas mal, hein? Bon.
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(16 h 10)
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Alors, pour moi, c'était important de le rappeler parce que je trouve que le ministre s'en sort un peu trop facilement, hein? Il ne met pas d'argent de plus dans les universités malgré qu'il y ait un rattrapage nécessaire à faire de l'ordre de 375 millions de dollars et qui sûrement s'amplifie parce que c'est une évaluation qui a été faite il y a deux ans. Alors, vous qui êtes en administration, vous savez évidemment de quoi on parle.
Je veux maintenant revenir sur une question qu'a soulevée le ministre, puis j'en aborderai une autre. Si mes collègues, M. le Président, si mes collègues du gouvernement veulent intervenir, j'imagine qu'ils ont un droit de parole éventuellement qu'ils pourront utiliser. Je les écoute habituellement, alors j'imagine qu'ils peuvent faire la même chose, hein? On s'entend. Bon. La culture philanthropique. Là, vous suggérez deux avenues. Est-ce que vous croyez qu'il y a d'autres gestes qui pourraient être posés conjointement par les universités, par le gouvernement, par les partenaires de l'éducation?
M. Bernard (Maxime): Il y a déjà plusieurs campagnes de financement que les universités font. Je n'ai rien contre les campagnes de financement. Notre regroupement n'a rien contre ça, mais la vocation d'une université n'est pas de lever des fonds, de pratiquer des levées de fonds, puis même souvent ça engage des coûts supplémentaires finalement pour relever les fonds parce que c'est des levées de fonds qui sont à contrat, avec des organisations, peu importe. Ce n'est pas dans l'organisation d'une université; l'université, c'est pour faire de la recherche, c'est pour utiliser ces fonds-là, pas les rechercher. Donc, c'est pour ça que, dans ces avenues-là, il y aurait peut-être une aide sûrement à aller chercher dans des universités, mais je crois qu'elles font déjà beaucoup leur part justement avec ces levées de fonds là, et leur en demander encore plus, ce serait finalement de déplacer des ressources que l'université manque déjà pour l'enseignement et la recherche pour aller faire du travail de recherche de fonds. C'était un peu la situation. C'est pour ça qu'on cherchait des avenues...
Mme Marois: Oui, et donc... C'est ça. Les avenues, donc choix fiscal ou fonds de contrepartie vous apparaît ce qui devrait être retenu et privilégié. D'accord.
Bon. Maintenant, sur le mécanisme de répartition des subventions. Vous avez un long plaidoyer sur cette question: d'abord, une analyse, ensuite, une explication, et vous revenez avec la question de l'iniquité entre les différents lieux de formation, les différents secteurs de formation. Et vous indiquez, par exemple: «Il est difficile de penser, à la lumière des nouveaux impératifs dans la formation en gestion, que les coûts de formation en gestion par étudiant soient toujours inférieurs à ceux des autres secteurs des sciences humaines.» Et vous faites la démonstration, là, qu'on reçoit plus d'étudiants que la proportion de sommes d'argent qui est versée et moins encore que dans les sciences humaines, alors que ça s'apparente, on en convient.
D'ailleurs, on doit toujours déclarer nos intérêts ? on en a fait une règle ici par rapport au groupe qui vient ? et je suis une diplômée des HEC, alors je tenais à le mentionner et j'en suis très fière.
Bon. Donc, vous dites: Il y a un problème de péréquation pratiquée par les universités. J'aimerais vous entendre sur cela, de un, et, de deux, sur la transparence. Parce que, dans une des recommandations que vous nous faites ? on la retrouve à la page 24 ? vous indiquez que... vous demandez «que des mesures soient prises par le gouvernement pour restreindre et rendre plus transparentes les activités de péréquation que les universités exercent». À quoi pensez-vous dans cette perspective-là?
M. Bernard (Maxime): Présentement, les activités de péréquation qui sont exercées, c'est justement à cause du mécanisme de distribution, mais en plus c'est souvent à cause de situations externes aux universités. Donc, il y a eu comme la coupure de fonds gouvernementaux durant les années quatre-vingt-dix qui ont fait en sorte que les universités cherchaient pour certains programmes ? il y a le recteur de l'Université de Montréal qui l'a dit dernièrement ? donc pour prendre dans les programmes où est-ce qu'il n'y a pas nécessairement de certification ou, je pourrais dire, de prérequis de formation pour les mettre dans des secteurs qui ont besoin de ressources importantes. Donc, de là... Le problème, je crois, c'est que ces fonctions de redistribution à l'interne, de péréquation sont faites de manière tout simplement... les étudiants ne le voient pas. En administration, pour notre part, ça a été nouveau, cette recommandation-là. Quand on s'est vraiment penchés sur la question, parce que tout étudiant ne le sait pas... Et on aimerait juste au moins avoir, dans les états financiers... que ce soit publié, que ce soit vraiment des choses qui sont redevantes aux étudiants.
Par exemple, qu'est-ce qui serait intéressant, je pense... une des idées serait peut-être que, sur la facturation à l'étudiant de ses frais de scolarité, il soit énoncé: Subvention du gouvernement, l'ensemble de vos coûts serait de... mais le gouvernement vous donne tant. Donc, vous, vous apportez plus de transparence en ce moyen-là, une divulgation meilleure de l'information, parce que finalement l'étudiant, qu'est-ce qu'il voit présentement, c'est qu'il paie un certain montant de frais de scolarité, mais il ne voit pas ce que le gouvernement apporte pour lui dans son programme puis ce que l'université apporte pour lui. Donc, ce serait plutôt de ces moyens d'information là, que l'étudiant soit plus au courant finalement du fonds... qui subventionne ses études finalement. C'était pour ça.
M. Denis-Trudel (Yannick): Et, pour compléter aussi, justement, vu votre question directement qui était finalement en lien avec, je crois, le tableau à la page 17, bien, c'est justement, c'est que, si on regarde... l'administration est considérée une science humaine, dans un certain sens. Donc, déjà là, si on regarde pourquoi est-ce que, pour l'ensemble des autres sciences humaines, il y aurait plus d'argent de disponible, quel que soit le cycle universitaire versus les sciences de l'administration, on se pose vraiment sérieusement la question.
Actuellement, les besoins sont majeurs. Les preuves en sont faites. Il y a certaines universités et facultés qui investissent dans finalement, là... établir un réseau informatique, et ainsi de suite, ce qui sont des coûts qui sont uniquement rattachés aux sciences administratives. Et c'est là, en plus de finalement tout le côté «être très transparent avec les étudiants»... Bien, c'est important, là, que le message passe. On l'a découvert cette année, nous. Je ne pensais pas que ça se passait comme ça, et c'est après avoir vu ça que, oh! là, le choc a été assez majeur. Merci.
Mme Marois: Oui, je comprends. Ça va? Je peux...
Le Président (M. Kelley): Oui, une dernière question peut-être et on va...
Mme Marois: Oui? D'accord. Sur la question justement de la contribution des étudiants, vous faites, comme recommandation... que soit adoptée... vous proposez, pardon, que soit adoptée une loi-cadre gelant les frais de scolarité et les frais afférents en dollars constants au lieu d'en dollars courants, là. C'est une proposition qui n'est pas revenue souvent mais qui vous est propre. Cependant, vous dites: «Ce, à la condition que le gouvernement s'engage à un réinvestissement récurrent annuellement et proportionnel au nouvel apport des étudiants...» Vous en avez parlé tout à l'heure.
Est-ce que cela s'inscrirait dans la loi-cadre, à ce moment-là?
M. Denis-Trudel (Yannick): C'est notre souhait, bien entendu, à tout le moins, que la loi-cadre gèle et les frais de scolarité et les frais afférents. Ça, c'est la première partie. Mais, dans notre souhait ultime, c'est de faire en sorte qu'en plus que ce soit un...
M. Bernard (Maxime): Ce n'est pas un souhait ultime, c'est vraiment... c'est le prérequis. Donc, oui, dans la loi-cadre, ce serait... le prérequis, c'est que le gouvernement adopte aussi un gel finalement automatique. Il est obligé d'augmenter sa contribution au financement de l'université.
Mme Marois: Et non pas un retrait comme on l'a constaté, là, lorsqu'il y a eu une hausse des frais de scolarité.
M. Bernard (Maxime): C'est cela.
Mme Marois: Ça va. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Kelley): O.K. Merci. Avant de céder la parole à Mme la députée de Chauveau, juste... je sens l'impatience de tomber sur le débat sur les crédits. Juste informer les membres de la commission: on aura une bonne vingtaine d'heures ensemble pour faire le débat des crédits. On est toujours dans les consultations et on est ici pour écouter nos témoins. Et, sur ce, je vais céder la parole à Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Oui. Merci, M. le Président. Vous comprendrez... Tout à l'heure, notre réaction, c'était davantage pour vous laisser du temps de parler. La députée de Taillon a plusieurs forums ici, à l'Assemblée nationale, pour exprimer ses doléances envers le gouvernement. Je veux revenir quand même sur les propos de ma collègue au niveau de votre position quant à l'indexation des frais de scolarité. Vous le mettez en parallèle avec une loi-cadre sur les frais afférents. Il y en a certains qui nous ont dit qu'on devrait peut-être laisser davantage de liberté aux institutions universitaires au niveau des frais afférents, et je veux vous mettre un peu en parallèle avec les autres étudiants. Vous êtes quand même... Il y a quelques groupes de jeunes, d'étudiants, dont notamment l'ADQ, les libéraux, jeunes libéraux, Jeune chambre de commerce, qui nous ont tenu à peu près des propos semblables aux vôtres, mais l'ensemble de la communauté étudiante est assez unanime sur le gel des frais de scolarité. Il y en a même qui vont jusqu'à nous demander de ne plus en avoir, de droits de scolarité, alors... puis par souci d'accessibilité. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, votre position par rapport à celle de vos confrères et consoeurs.
M. Denis-Trudel (Yannick): Bien, la position du gel en dollars constants au lieu d'un gel en dollars courants, je crois que, pour l'ensemble des groupes étudiants, on est les seuls. Les jeunes de l'ADQ, les jeunes, là, ainsi de suite, ce sont des jeunes, mais ce ne sont pas nécessairement des étudiants. Nous sommes un regroupement étudiant, et là je crois que la différence est quand même notable parce que tous les autres regroupements d'étudiants sont soit pour un gel, gel tel qu'il est, comme maintenir le même gel qu'on a actuellement, ou sinon, bon, tel d'autres groupes, pour vraiment une abolition des frais de scolarité.
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(16 h 20)
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En fait, on est conscients qu'un gel, qu'il soit en dollars constants, ou courants, ou quelque autre solution dans cette optique-là, ne règle pas le problème. La seule chose, c'est qu'on dit: actuellement, bon, on va trouver d'autres solutions pour aller chercher de l'argent parce que ce n'est pas, et de un, un étudiant, à son niveau de vie, qui va pouvoir vraiment facilement apporter plus d'argent dans le système. On sait qu'on a besoin de plus d'argent, mais, à leur niveau, les étudiants ne l'ont pas. Donc, pourquoi s'acharner à dire: Bien, oui, parfois on va augmenter les frais de scolarité de façon un peu moins... plus libérale, comme on pourrait dire ? ce n'est vraiment pas dans l'optique d'un parti, mais c'était plus de façon libérale, mais c'est dans cette optique-là... Donc, ce n'est pas à leur niveau qu'ils vont pouvoir finalement apporter plus d'argent dans le système.
La raison du gel en dollars constants, c'est réellement de faire en sorte qu'on arrête de se mettre vraiment la tête dans le sable, et ça, vous avez un tableau qui vous démontre clairement qu'actuellement, au lieu du 1 600 $ par année, bien c'est rendu à 1 300 $ environ, c'est 1 390 $. Si on prend... À la page 25, vous avez exactement le tableau. C'est que, si les frais avaient été gelés en dollars constants dès le début au lieu de dire 1 681 $, bien là on serait rendus peut-être à 1 800 $, 1 900 $. Mais c'est normal parce qu'il y a une indexation du coût de la vie. Les coûts de système ont augmenté, et ainsi de suite. En gardant le même taux, bien là on vient de diminuer l'argent. L'apport étudiant vient de diminuer. Alors, c'est pour éviter cette problématique-là.
Maintenant, tout à l'heure vous avez parlé du fait que les frais afférents ne devraient peut-être pas être gérés de la même façon ou gelés de la même façon. Bien, c'est tout simplement une façon détournée d'augmenter les frais de scolarité qui sont gelés actuellement et qui sont délibérément... C'est choisi de cette façon-là parce qu'on veut s'assurer une accessibilité complète et totale. Quels que soient le champ d'études où est-ce qu'on veut aller et l'établissement universitaire où est-ce qu'on veut aller, on peut le faire. Donc, là, en laissant porte ouverte aux établissements à augmenter leurs frais afférents de façon... de leur choix finalement, bien, automatiquement, on vient d'éliminer cette optique-là et on fait en sorte que certains établissements vont offrir peut-être des services plus élitistes, qu'on pourrait dire, et ça, il ne faudrait pas arriver à ça parce que ce n'est pas dans l'optique actuelle de la société québécoise.
M. Bernard (Maxime): Et, par rapport à l'accessibilité financière, il y a des études qui avaient déjà démontré ? je pense que l'Institut économique de Montréal est venu témoigner ici justement ? qui disaient qu'il n'y avait aucun lien entre frais de scolarité-accessibilité. Cependant, nous, c'est justement, on croit qu'il y en a un, et c'est pour ça que c'est très important. C'est finalement pour ça qu'on propose un gel, c'est pour maintenir la qualité mais aussi pour maintenir aussi un gel en dollars constants, aussi l'aide financière aux études. Donc, faire en sorte que les deux fassent en sorte que l'accessibilité ne soit pas restreinte, parce que je ne crois pas qu'en indexant l'aide financière et en indexant au coût de la vie les frais de scolarité l'accessibilité soit touchée dans une majeure proportion. Si les deux sont bien coordonnés, l'accessibilité devrait demeurer la même et pourrait peut-être même s'accroître selon les conjonctures économiques.
Mme Perreault: Juste une petite question. Pourquoi vous dites «s'accroître selon les conjonctures économiques»? Pouvez-vous être plus clair?
M. Bernard (Maxime): Oui. C'est simplement parce que j'ai lu quelques études aux États-Unis qui démontraient que parfois justement, avec une indexation selon les cycles économiques, l'université devient plus attrayante si on est dans une bonne conjoncture qu'une mauvaise. C'était tout simplement ça. Ça n'a rien lieu avec la situation des frais, c'était juste...
Mme Perreault: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir sur la question de la députée de Taillon concernant la répartition des sommes. Le tableau que vous avez, vous dites qu'il vous a surpris. Moi, j'ai l'occasion d'avoir ça depuis longtemps, et il y a différents éléments qui peuvent être faits. En passant, on peut aussi apporter des correctifs à l'intérieur d'une université quant à la distribution. C'est quelque chose qui est possible aussi et que j'ai déjà vu personnellement dans une autre vie.
Mais, à l'heure actuelle, après avoir fait des représentations importantes dans cette autre vie, là, le ministre de l'époque, qui est député de Rousseau, avait été sensible à ça et par contre s'était dit, lui, comme mode d'action: Les universités ne peuvent pas être exclues de la discussion sur la répartition, puisqu'il y a l'autonomie des universités, etc. Et donc il a mis en place un comité qui existe encore et qui travaille encore pour faire cette répartition.
Et ma question là-dessus, c'est: Est-ce que, comme association, vous vous faites entendre, vous mettez votre poids dans la balance pour essayer d'influencer d'une quelconque façon ces discussions qu'il y a entre les universités réunies par la CREPUQ et le ministère de l'Éducation? Est-ce que vous avez des démarches, par exemple, auprès des autres collègues étudiants, étudiantes qui bénéficient finalement d'un meilleur financement dans leur faculté ? pas toutes, parce que l'éducation, c'est assez proche, là? Mais est-ce que vous avez ce genre de démarche ou d'action? Est-ce que vous pourriez nous en parler?
M. Denis-Trudel (Yannick): Alors, comme je vous expliquais au début de notre audience, même si on a actuellement 18 ans d'expérience et d'ancienneté, et ainsi de suite, malheureusement, on doit vous avouer que c'est notre première démarche du côté politique ? faire avancer des idées, et ainsi de suite. Je vous dirais que, depuis les deux, trois dernières années finalement, c'est en constante progression et c'est notre première position publique qui actuellement vous a été déposée finalement. Alors, oui, nous sommes actuellement dans la démarche de rencontrer finalement la CREPUQ pour pouvoir s'asseoir avec eux et discuter avec eux.
Également, je veux en profiter pour, à un moment donné, pouvoir m'asseoir avec vous, M. le ministre, et peut-être discuter un peu du fait qu'actuellement, bon, le regroupement étudiant, le REFAEC, n'est pas encore reconnu comme un regroupement étudiant d'associations étudiantes, mais... bien qu'il le soit actuellement. Mais, vu que, nous, nous ne sommes pas reconnus... Et on a au-dessus du deux tiers de nos étudiants qui ne sont pas membres de la FEUQ. Donc, c'est vraiment... on est un regroupement finalement d'associations étudiantes. Ça pourrait être quelque chose qu'on aurait à discuter ensemble, là, mais, c'est justement... actuellement, c'est dans nos démarches futures, et nous sommes aux balbutiements finalement de ça. Après avoir fait l'étude, c'est vraiment le départ de tout ça. Et je vais laisser en conclusion mon collègue.
M. Bernard (Maxime): C'est ça. Puis donc, avec nos discussions avec les autres regroupements étudiants, pour répondre à votre question, il n'y a pas vraiment eu de positionnement sur ce sujet-là parce que, c'est bien entendu, on représente des facultés d'administration, tandis que la plupart des autres regroupements étudiants représentent des universités au complet ou toutes les facultés. Donc, je ne sais pas, on n'a pas eu leur opinion sur le sujet, mais je crois que ce n'est jamais vraiment venu sur la table. Donc, je ne crois pas non plus qu'ils prendraient part à cette discussion-là, vu que justement ils veulent assurer l'équité.
Mais ce serait une optique justement. On va s'engager à ouvrir les discussions sur ce débat-là. On l'a déjà fait avec la plupart des universités justement dont nous venons justement, donc pour savoir est-ce qu'il y a... Nous, qu'est-ce qu'on exige finalement, c'est une meilleure redistribution puis peut-être justement faire en sorte que... conscientiser les établissements.
M. Denis-Trudel (Yannick): En fait, en dernier... En fait, le sujet de discussion s'était terminé au moment où est-ce qu'on commençait à parler avec eux. Nous, on était pour un gel en dollars constants et non pas en dollars courants, et déjà là on avait un achoppement de vision. Donc, la discussion s'était arrêtée là.
M. Reid: Juste 15 secondes.
Le Président (M. Kelley): Commentaire, M. le ministre?
M. Reid: Juste 15 secondes, M. le Président, pour dire qu'on va être ouverts aux discussions et que, puisque c'est votre première démarche, je pense qu'il y a un mot célèbre qui s'applique: Pour un coup d'envoi, c'est un coup de maître.
Le Président (M. Kelley): M. le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux d'entrée de jeu d'abord vous dire que ça me fait plaisir de pouvoir vous interroger. Et, si c'est votre première présentation, comme le souligne le ministre aussi, je veux vous féliciter non seulement pour le contenu mais aussi pour la facture de votre mémoire, la présentation qui est d'une très belle, une très grande qualité.
M. le Président, je voudrais quand même relever le fait que certains de nos collègues d'en face étaient indisposés peut-être par des commentaires qu'on peut faire de ce côté-ci. Je dirais que, si ces gens, qui sont dans la première démarche politique comme regroupement... ils doivent très bien savoir que, si on s'entend tous, à l'Assemblée nationale et dans cette commission, sur notre désir, notre volonté d'améliorer l'éducation supérieure au Québec, on ne s'entend pas nécessairement sur les moyens de chaque côté. Et je pense que ces gens-là doivent d'entrée de jeu être conscients de ces réalités.
Je veux, moi, vous amener sur... Puisque le ministre...
Le Président (M. Kelley): ...
M. Arseneau: Pardon?
Mme Marois: Je pense qu'ils l'ont soupçonné.
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(16 h 30)
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M. Arseneau: Voilà. Mais je pense que c'est essentiel comme formation même, M. le Président. Et, puisque le ministre, il y a quelques instants, nous annonçait des bonnes nouvelles somme toute en regard des demandes qui étaient dans votre mémoire en ce qui concerne le prêt pour les micros, moi, je veux revenir sur un sujet qui me préoccupe: il s'agit de l'accessibilité aux études. Et on a su aussi, puisque le ministre ? c'est dans le budget ? il s'apprête à prendre ou à soustraire 64 millions dans le régime des bourses pour finalement transférer ça du côté... ? pas un transfert parce qu'il les retire pour les dépenser ailleurs ? dans le régime de soutien pour l'accessibilité financière aux études. Ça va se concrétiser sous forme de prêt. Alors, on comprend qu'un prêt puis une bourse, pour un étudiant, c'est différent parce que, la bourse, tu n'as pas à la rembourser, tandis que le prêt, tu dois le rembourser.
Comme je m'adresse à des étudiants en administration et que vous avez tantôt, de façon très savante, exposé la différence entre le dollar constant et le dollar courant... Puisque vous êtes en administration, vous devez savoir aussi qu'il y a toujours un élément de risque en économie et on évalue en fonction des risques. Moi, si, par exemple, je suis le père d'un enfant qui s'apprête à entrer au cégep ou à l'université, et que je suis finalement avec des revenus assez modestes, et que mon étudiant a des résultats moyens, là, il y a des décisions à prendre. Par chez nous, en tout cas, là, quand on évalue le coût d'une année au cégep ou à l'université à l'extérieur du milieu, c'est 10 000 $ à peu près, minimum. Alors, il y a une contribution des parents, une contribution des étudiants. Alors donc, je m'assois avec mon jeune et là j'ai une décision à prendre; en fonction de ses résultats, en fonction de mes moyens, est-ce que je vais investir 10 000 $ par année sur cinq ans? Et est-ce que je vais... Si, par exemple, j'ai moins de bourse ou je n'ai pas de bourse, j'ai plus de... il y a un risque.
Alors, moi, ma question, c'est la suivante: Quand on regarde l'accessibilité, vous n'avez pas peur qu'avec une mesure comme celle-là on s'apprête justement à faire en sorte qu'il y a des gens qui ne voudront pas prendre le risque de s'endetter ou d'endetter leur jeune plus tard, même si les conditions de remboursement sont favorables? Vous n'avez pas peur que ça nuise à l'accessibilité?
M. Denis-Trudel (Yannick): Je vais profiter justement du fait que c'est une question sur l'accessibilité et qu'on a finalement des statistiques assez... fort éloquentes pour les universités en région. Je vais laisser Michaël Chabot, représentant l'Université du Québec à Rimouski, répondre à une partie de la question, et on complétera.
M. Chabot (Michaël): Tout simplement pour vous informer qu'au niveau des régions... au niveau de l'UQAR il y a près de 70 % des étudiants qui profitent du Programme de prêts et bourses; au niveau de l'Université de Chicoutimi, c'est 65 %; 60 % au niveau de l'Abitibi-Témiscamingue; puis, au niveau de Trois-Rivières, c'est 51 %, tandis que le niveau de la moyenne provinciale est de 36 %. Donc, l'arrivée de transfert de bourses vers des prêts, c'est-à-dire tout simplement aller rajouter un fardeau sur les plus pauvres, tout simplement, puis sur les riches aussi.
M. Denis-Trudel (Yannick): Alors, eh bien, c'est ça. Donc, automatiquement, avec un transfert, là, de 64 millions, là, qui passent de bourses à prêts, bien c'est automatique. Premièrement, c'est un fardeau additionnel que les étudiants vont avoir. Oui, on est conscients que c'est de l'aide financière aux études, donc, au moment où est-ce que les étudiants sont aux études, ils n'ont pas à rembourser, à ce moment-là, le fardeau. Mais le fardeau s'accumule, et je ne crois pas que c'est une bonne façon de faire en sorte que les gens, une fois qu'ils ont terminé et entrent sur le marché du travail, ils aient déjà la corde au cou avec encore plus de dettes étudiantes. Et, qui plus est, ce sont surtout les étudiants en région qui vont avoir ce fardeau-là parce que ce sont eux, en pourcentage étudiant, qui profitent le plus du système d'aide financière aux études. Et c'est un montant additionnel qui a été transféré. Et, moi, vraiment il y avait un point, c'était: Où est passé l'argent qui est venu du programme des bourses du millénaire que le gouvernement fédéral devait transférer? Est-ce que cet argent-là est revenu au Québec, vu que c'est une compétence provinciale, à mon avis? Bien, à ce moment-là, où est allé cet argent-là? Est-ce que c'est une partie de cet argent-là? Pourquoi c'est allé en prêts au lieu d'aller en bourses? Ça, c'est une question que j'avais. Je ne sais pas si quelqu'un va pouvoir me répondre, mais bon.
Mme Marois: C'est au ministre de répondre, mais...
Une voix: Sur son temps.
Mme Marois: ...tout à l'heure, sur son temps.
M. Arseneau: Sur son temps.
Mme Marois: Sur son temps. Sur son temps.
Le Président (M. Kelley): La seule façon que le ministre peut répondre, c'est avec le consentement de l'opposition, sur leur temps.
M. Arseneau: Justement, M. le Président, on lui a posé la question cet après-midi, en période de questions. Mais il reste quand même... Et il voulait s'approprier le mot «souveraineté», et... alors que, là, vous voulez le mot «libéral». M. le Président, c'est extrêmement intéressant. C'est parce que ce que vous nous dites dans le fond, M. Chabot... les universités en région, vous dites que ça va avoir un impact très certain, mais est-ce qu'on ne peut pas aller plus loin puis prétendre que finalement il pourra y avoir des familles qui prennent tout simplement la décision de ne pas risquer, donc on va carrément diminuer l'accessibilité? Ça va aller à l'encontre des objectifs qu'on s'est donnés comme collectivité de favoriser l'accès et la diplomation au niveau des études supérieures. Parce que, là, les gens de la CREPUQ sont venus nous voir. Ils nous ont dit: Bon. Il faut poursuivre le réinvestissement massif au niveau des études supérieures. Ça s'est fait dans les années 2002, 2003, et il fallait continuer. Bon, on sait qu'il y a un sous-financement. Mais vous n'avez pas peur que justement ça ait un impact pour les jeunes de nos régions et de l'ensemble du Québec, qu'il y en a qui prennent tout simplement la décision que c'est trop risqué de s'endetter, alors que tu ne sais pas, dans cinq ans, par rapport aux résultats qui vont venir.
M. Bernard (Maxime): C'est certain que ça va engendrer une détérioration ou un apport un plus important dans la décision, le risque, comme vous énoncez. C'est pour ça que notre position était justement d'indexer l'aide financière finalement à nos propositions de gel des frais de scolarité. Donc, c'est justement faire en sorte aussi... L'aide financière, la bourse, le prêt, c'est certain qu'on voulait garder les mêmes proportions qui étaient là ou même améliorer les bourses finalement, puisque ce n'est pas des prêts. C'est certain. On n'est pas des devins, cependant. On ne pourrait pas dire précisément l'issue que cela va avoir, là, le fait qu'il y ait plus de prêts que de bourses. Je suis désolé, on ne s'avancera pas sur cette question-là précisément, mais on a toujours voulu défendre justement... avoir de meilleurs programmes finalement d'aide financière pour justement faire que le système d'éducation ait plus de ressources et que l'étudiant finalement en ait, je pourrais dire, pour son argent. S'il avait un prêt, qu'au moins le système ait une bonne qualité.
Il y a des statistiques qui disent que les étudiants québécois sont moins endettés. Le problème, c'est qu'ils ne prennent pas la régionalité, ils ne prennent pas le côté humain que c'est le côté des régions, comme on vient d'énoncer, qui a le plus important... qui a accès... qui utilise l'aide financière, finalement le régime d'aide financière.
Donc, c'est très important finalement de ne pas couper l'aide financière parce que, en même temps, on dit qu'on veut rétablir les universités en région, les rendre plus accessibles. C'est certain qu'il y a des mesures qui réduisent les bourses pour agrandir les prêts. Ça va avoir sûrement un impact, je suis certain. Cependant, on n'est pas des devins au REFAEC. On est désolés, on ne pourra répondre.
M. Arseneau: M. le Président, c'est que je veux, moi, vous entendre parce que, là, vous avez préparé votre mémoire, c'est vous qui l'avez rédigé d'ailleurs ? très bien, félicitations. Mais, à ce moment-là, vous n'aviez pas les informations que nous avons maintenant depuis le budget. Moi, ce que j'essaie de vous faire dire, là, avec mes deux premières questions, c'est que votre recommandation du dégel, à toutes fins pratiques, c'est le dégel... Vous recommandez... C'est très bien expliqué, puis ça peut se comprendre, puis ça peut se justifier, votre recommandation de travailler en dollars constants et non en dollars courants. Mais, en faisant, en maintenant votre recommandation aujourd'hui avec ce que vous savez sur le transfert des bourses en prêts, vous allez, vous, ajouter un fardeau et de l'endettement sur le dos des étudiants et vous allez même contribuer à diminuer l'accessibilité à l'université. Oui ou non?
M. Bernard (Maxime): Bien, c'est justement. Nous, qu'est-ce qu'on demanderait, ce serait que la décision soit renversée, que la situation soit comme elle l'était avant ou même encore plus de bourses finalement pour... dans notre décision, vu que cette information-là n'était pas présente.
Donc, aujourd'hui même, c'est certain qu'on est déçus de la décision du ministre qui a fait en sorte qu'il y ait plus de prêts que de bourses.
M. Arseneau: ...votre recommandation ou vous demandez au ministre de changer sa décision?
M. Denis-Trudel (Yannick): La recommandation n'a jamais été de faire en sorte que c'est un dégel, premièrement, et ça, c'est clair. C'est un gel mais en dollars constants, ce qui veut dire tout simplement: il y a indexation. Un dégel, c'est qu'il n'y aurait pas de limite. Alors, déjà là ce n'est pas un dégel.
Deuxièmement, on dit tout simplement de faire l'indexation également de l'aide financière aux études. En aucun moment, on dit comme quoi c'est un transfert de bourses à prêts. C'est: gardons le système, mais indexons-le. L'argent qui est disponible pour les étudiants augmente selon l'indexation du coût de la vie, et ainsi de suite. C'est tout ce qu'on demande, nous. Nos propositions sont dans cette optique-là.
Le Président (M. Kelley): Malheureusement, je dois mettre fin à cet échange. Mais c'était fort intéressant et, pour les recrues, pour les personnes qui présentent un mémoire pour la première fois, c'était une très belle performance. Alors, je vous félicite. Je vais suspendre nos travaux quelques instants et j'invite les représentants... l'Association des étudiantes et étudiants de Laval inscrits aux études supérieures de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 39)
(Reprise à 16 h 42)
Le Président (M. Kelley): ... dire bienvenue aux représentants l'Association des étudiantes et étudiants de Laval inscrits aux études supérieures. Et, avant de commencer, je veux de nouveau les remercier pour leur souplesse, leur flexibilité. On avait une journée au début du mois de mars qu'on avait coincée dans le temps, et ils ont accepté de prendre un autre rendez-vous avec les membres de la commission. Alors, ça, c'est un deuxième rendez-vous avec la commission. Alors, merci encore une fois pour votre compréhension. Et, sans plus tarder, je vais donner la parole à son président, M. Antoine Goutier.
Association des étudiantes et des étudiants de Laval inscrits aux études supérieures inc. (AELIES)
M. Goutier (Antoine): Bonjour. Alors, tout d'abord l'AELIES est l'association qui représente les étudiants de maîtrise et de doctorat de l'Université Laval. Nous représentons plus de 8 200 membres, ce qui fait de nous la plus grosse association des cycles supérieurs du Québec. Je suis accompagné de Nicolas Dumont, vice-président aux affaires externes, et de Dana Cristina Cadeschi, vice-présidente aux communications.
Ainsi, je commence. Au XIIe siècle, en Europe, une nouvelle institution de savoir voyait le jour, l'université. Depuis cette époque, elle s'est multipliée et a assuré la pérennité du savoir à l'échelle mondiale. Plus près de nous, c'est dans les années soixante que le gouvernement du Québec, d'après les recommandations du rapport Parent, investit activement dans le financement des universités. Celles-ci contribuent, depuis lors, au florissement de la société québécoise. Cependant, depuis deux décennies, on voit le monde universitaire se transformer progressivement. En premier lieu, la recherche connaît un engouement sans précédent. La formation des étudiants a pris l'arrière de la scène, considérée comme une activité de second ordre. Deuxièmement, les universités sont axées de plus en plus vers l'économie. Lorsqu'on parle d'enseignement, on désire maintenant former une main-d'oeuvre hautement qualifiée. La commercialisation de la recherche est une priorité pour les universités. Tout concourt à la glorification de la sacro-sainte économie du savoir. En troisième lieu, la société, par le biais des gouvernements, demande aux universités davantage de retombées immédiates et applicables de leurs activités de formation et de recherche.
Face à ces bouleversements dans le monde universitaire, on s'interroge sur sa mission et comment la réaliser. Nous croyons qu'il est bon de réaffirmer ce qui est pour nous le rôle de l'université. Elle doit, par la recherche et la formation, participer à la société du savoir. Par le fait même, son rôle ne se réduit pas à l'économie mais compose avec l'ensemble des aspects de la société. L'université produit du savoir et le transmet à la communauté pour l'amélioration et l'évolution de celle-ci. Le gouvernement a demandé l'avis de la population sur la qualité, l'accessibilité et le financement des universités. Nos positions sur le sujet s'inscrivent dans l'énoncé que nous venons vous faire. De plus, elles se basent sur trois valeurs qui furent notre grille de lecture dans la rédaction de notre mémoire. Tout d'abord, nous considérons fondamentale l'universalité de la connaissance. Celle-ci ne doit pas être réservée à un groupe privilégié mais bien être disponible pour l'ensemble de la communauté. Par le fait même, nous croyons que l'accessibilité aux études universitaires doit être universelle, et l'État doit garantir cette accessibilité.
Cette accessibilité n'aurait pas de sens si la formation universitaire n'était pas de qualité. Cette qualité, pour nous, se témoigne par la capacité du diplômé de s'intégrer efficacement dans la société. En ce sens, une formation de qualité se témoigne par la polyvalence du diplômé. C'est par l'acquisition d'outils de réflexion et d'analyse que s'acquiert une grande capacité d'adaptation. Si on regarde les progrès fulgurants qu'a connus le Québec depuis la Révolution tranquille, on ne peut que constater l'apport fondamental des universités dans le développement de la province. Les individus qui reçoivent une formation universitaire en sont les bénéficiaires directs. Cependant, la mise en commun des compétences et la synergie qui s'en dégage ont propulsé le Québec là où il est actuellement. Pour cette raison, nous considérons l'éducation comme un bien commun et une affaire publique.
Le financement des universités doit refléter les valeurs dont je viens de mentionner, à la fois garantir l'accessibilité et une qualité des études tout en reconnaissant le rôle de l'État comme premier pourvoyeur de fonds des universités. Si on regarde les conditions des universités lors de la dernière décennie, on constate que ces valeurs ne sont pas nécessairement priorisées. C'est reconnu par tous: il y a un sous-financement dans les universités. Cependant, les conséquences d'une telle situation ne sont pas aussi connues. Les réductions de personnel ont des répercussions importantes sur la qualité de la formation. Si on analyse, par exemple, le ratio professeur-étudiants à l'Université Laval, on remarque que, de 1994 à 2003, il est passé de 23 à plus de 27,5 étudiants par professeur. Cette hausse est très importante. Si on regarde uniquement les cycles supérieurs, on constate que le ratio passe de 4,5 à 6,2 en 10 ans. C'est une augmentation de plus de 33 %. La relation essentielle entre un étudiant et son directeur de thèse risque d'être compromise avec un tel ratio.
On remarque aussi que les réductions de personnel ont des conséquences importantes sur les employés présents. 40 % des employés de l'Université Laval présentent des signes de détresse psychologique élevés. De 1993 à 1999, on a vu une augmentation de 400 % des absences au travail pour des troubles de santé psychologique. La qualité de vie des employés s'en trouve atteinte de manière significative. De plus, les absences accrues amènent des coûts supplémentaires pour les universités, comme quoi il n'est pas rentable de sous-financer les universités. Nous ne pouvons passer sous le silence la détérioration du milieu d'apprentissage; les locaux sont vétustes, et l'espace commence à manquer. Ce n'est pas pour rien que les chargés et chargées de cours de l'Université Laval ont insisté pour avoir des locaux dans le renouvellement de leur convention collective. De plus, les étudiants sont aussi pris avec des problèmes d'espace. Actuellement, les associations étudiantes des cycles supérieurs de l'Université Laval perdent leurs locaux au profit des centres de recherche. Autre problème pour le milieu universitaire: les bibliothèques manquent de ressources pour acheter des livres et des périodiques nécessaires à l'enseignement et à la recherche. C'est un déficit important de connaissances à l'université.
Ces quelques problèmes démontrent la nécessité de financer adéquatement le milieu universitaire québécois. L'analyse conjointe de la CREPUQ et du MEQ est là pour en témoigner. Il manque 375 millions de dollars dans le financement des universités québécoises. Le gouvernement doit prendre ses responsabilités et assurer le financement adéquat des universités. Par ailleurs, lorsqu'on parle de financement adéquat, on ne peut pas passer sous le silence le manque de financement actuel. Le gouvernement calcule la subvention des université à 100 % des effectifs étudiants. Conséquence: les universités se livrent une féroce compétition pour obtenir le plus d'étudiants possible au lieu de prendre du temps d'améliorer leurs programmes de formation. En bout de ligne, c'est l'étudiant qui paie pour cette compétition.
Le calcul des coûts de système est un autre exemple que les universités ne reçoivent par leur dû. Ces coûts représentent des indexations de salaire, le vieillissement du personnel et les indexations non salariales telles que le chauffage, l'entretien et les assurances. Le ministère de l'Éducation calcule les coûts de système avec une augmentation annuelle d'environ 2 %. Cependant, la réalité est tout autre pour les universités. Par exemple, les assurances des universités ont doublé en trois ans depuis le 11 septembre 2001. Malheureusement, le gouvernement ne prend pas en compte cette donnée. Conséquence: l'université doit assumer 1 million de dollars en assurance de plus depuis trois ans. Ça représente 12 postes de professeur non renouvelés. Encore une fois, c'est la qualité de la formation qui en paie le prix. Il est impératif que le gouvernement remédie à la situation. Pour y parvenir, il doit échapper à la tentation de hausser les frais de scolarité. Cette solution facile, prônée en quasi-totalité par des personnes qui ne sont plus étudiants, risque de compromettre l'accessibilité aux études. L'AELIES au contraire considère que l'abolition des frais de scolarité serait un moyen d'assurer une accessibilité universelle aux études. Le coût d'une telle mesure, estimé à 300 millions de dollars par année, n'est certes pas le meilleur argument pour convaincre le gouvernement. Cependant, l'apport d'une telle mesure à l'accessibilité aux études recommande que les députés méditent à leur mise en place.
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(16 h 50)
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Notre réflexion s'est portée aussi sur le gel des frais de scolarité. Actuellement, en place depuis 1994, le gel a assuré que les droits de scolarité restent à 55 $ et 61 $ par crédit. Nous considérons cette mesure comme un moyen important pour assurer une accessibilité aux études. Cependant, nous constatons que le gel des frais de scolarité fut en réalité illusoire pendant plus de 10 ans. Le sous-financement des universités a poussé celles-ci à imposer d'autres frais aux étudiants pour renflouer leurs coffres. Il est alors évident qu'un réel gel des frais de scolarité doit s'accompagner de deux mesures: un financement adéquat des universités et une loi-cadre qui vient réglementer les frais perçus par les universités. Cependant, le gel des frais de scolarité n'est qu'une mesure à court terme. D'année en année, la valeur des frais de scolarité en dollars constants diminue. Il en résulte un manque à gagner qui doit être comblé par les universités. À moyen et long terme, le gouvernement doit penser à des alternatives pour assurer à la fois le financement des universités et l'accessibilité aux études.
Plusieurs personnes pourraient nous répondre que l'indexation des frais de scolarité au coût de la vie serait une solution envisageable, que ce système a des avantages... gel des frais... quant à l'accessibilité aux études tout en assurant un financement fixe aux universités. Nous recommandons la prudence aux individus attirés par un tel argumentaire. L'indexation nous tend un piège. En effet, une indexation des frais présuppose que les hausses de revenus se répartissent également sur l'ensemble de la société. Sur une telle base, indexer les frais revient à suivre l'accroissement normal de la richesse de la population. Cependant, ce n'est pas la réalité. Nous avons constaté que, depuis 1981, seulement 20 % de la population a connu une hausse de revenus en dollars constants, les plus riches de la société. Dans le même temps, la classe moyenne voyait son pouvoir d'achat diminuer. Ainsi, une indexation des frais de scolarité voit tout de même une perte d'accessibilité à moyen et à long terme pour les individus avec les situations économiques les plus précaires. À la lumière de quoi, nous recommandons fortement à cette commission de ne pas indexer les frais de scolarité.
Par la suite, une accessibilité aux études doit aussi tenir compte de l'aide financière accordée aux étudiants. Au Québec, nous accordons une aide financière en prêts et bourses. Force est de constater que ce mécanisme amène un endettement aux étudiants. De plus, on remarque que le niveau d'endettement augmente d'année en année. En conséquence, de plus en plus d'étudiants ont de la difficulté à rembourser leurs dettes d'études. Il existe actuellement un régime de paiements différés qui permet aux étudiants dont le revenu mensuel brut est inférieur à 1 125 $ de réduire leur remboursement. Cependant, ce système ne prend pas en considération les autres dettes contractées ainsi qu'une réalité plus conforme de la situation des étudiants. La mise en place d'un remboursement proportionnel aux revenus peut venir aider à corriger la situation. En effet, ce système prévoit un meilleur arrimage entre le remboursement des dettes et la situation financière des diplômés. Il calcule la capacité de remboursement de l'étudiant et permet à celui-ci d'effectuer des paiements qui ne le placent pas dans une situation de précarité financière. C'est pourquoi nous vous recommandons de mettre en place un régime de remboursement proportionnel aux revenus.
Dans un autre ordre d'idées, accessibilité rime de plus en plus avec conciliation études-travail-famille. Un nombre croissant d'étudiantes et d'étudiants ont des enfants. En 1997, plus de 20 % des étudiants gradués avaient au moins un enfant à leur charge à l'Université Laval. Les garderies sur les campus ne sont pas capables de fournir à une telle demande. Les listes d'attente vont jusqu'à deux ans. Nous recommandons l'attribution d'un plus grand nombre de places en garderie sur les campus universitaires. De plus, considérant l'horaire particulier des étudiantes et des étudiants, nous recommandons la mise sur pied de haltes-garderies avec des horaires atypiques. Nous considérons qu'il est impératif que le gouvernement se penche sur la question.
Il serait futile de parler du financement des universités et de l'accessibilité aux études si on ne tient pas à dispenser une formation de qualité. Tout le monde doit en convenir avec nous. Par contre, sur la question de savoir ce que représente une formation de qualité, les opinions divergent. On pourrait même dire qu'il est difficile de cerner ce qu'est une formation de qualité. On se sert régulièrement du taux de chômage pour identifier une qualité de formation. On suppose que taux de chômage bas représente une formation de qualité. La réalité est plus complexe que ça. En mesurant le taux de chômage, on veut évaluer la capacité d'insertion dans le marché du travail des diplômés. On ne prend pas en considération le type d'emploi occupé. Par exemple, un diplômé à la maîtrise qui travaille comme commis de dépanneur serait surqualifié pour le type d'emploi. Sa formation ne lui aurait pas permis d'obtenir un emploi à la hauteur de ses qualifications. Peut-on alors parler de formation de qualité?
Selon nous, une formation de qualité permet aux diplômés de développer une capacité d'adaptation, une polyvalence. Grâce à celles-ci, le diplômé peut évoluer dans l'ensemble des domaines de l'activité humaine avec une plus grande aisance. Une formation universitaire doit en ce sens permettre à l'étudiant non seulement d'acquérir des connaissances ponctuelles, mais aussi des outils d'analyse et de réflexion, un savoir-faire. Celui-ci est garant de la polyvalence de l'étudiant qui saura s'adapter aux diverses situations qui se présentent devant lui. Ainsi, si on veut analyser la qualité de la formation, on doit tenir compte du type d'emploi occupé. De plus, il faut noter que le marché du travail se transforme rapidement. La formation d'un diplômé doit lui permettre de s'adapter à ces transformations. L'analyse du taux de chômage doit alors se faire non seulement à la sortie de l'université, mais aussi après 10 ans, après 20 ans pour permettre de voir la polyvalence des diplômés à travers le temps et l'évolution du marché du travail.
On ne peut pas parler de la qualité de la formation sans parler de ceux qui la dispensent. Les professeurs sont au centre même de l'enseignement. Aux trois cycles, l'implication des professeurs est fondamentale pour la qualité des programmes. Malheureusement, on remarque une dépréciation significative de la fonction d'enseignement dans les tâches des professeurs. Actuellement, on n'a d'yeux que pour la recherche. Les critères de promotion des professeurs se répartissent officiellement entre la formation, la recherche et la contribution au milieu. En réalité, seule la recherche est pratiquement prise en compte. Il est à notre avis essentiel que le gouvernement réaffirme l'importance de la fonction d'enseignement. L'encadrement des étudiants aux cycles supérieurs offre, à ce niveau, une avenue intéressante. La spécificité des études de maîtrise et de doctorat permet d'évaluer à la fois la recherche et l'enseignement que dispense un professeur. Pour bien encadrer ses étudiants, le professeur doit lui-même développer une capacité de recherche, en plus de talents de pédagogue.
L'évaluation du travail des professeurs devra... L'évaluation du travail des professeurs devrait accorder une attention particulière à l'encadrement des cycles supérieurs, celui-ci étant le trait d'union entre l'enseignement et la recherche. Par ailleurs, la recherche universitaire brille de mille feux. L'attention que les intervenants universitaires lui porte, conjuguée avec les succès des chercheurs, en ont fait la notoriété qu'on lui connaît. En considérant l'efficacité de la recherche, nous considérons que les dépenses que le gouvernement fait dans les fonds subventionnaires sont un puissant atout pour le Québec. Nous recommandons ainsi que les budgets de ceux-ci soient maintenus et même bonifiés dans le but d'offrir plus de bourses aux étudiants et des subventions de recherche. Par contre, nous pouvons constater un déséquilibre dans la recherche; non seulement, comme nous l'avons mentionné plus tôt, la recherche prend le pas sur l'enseignement, mais, au sein même de la recherche, il y a un dérapage. Les demandes accrues pour des résultats immédiats et commercialisables ont poussé les universités à se concentrer sur une recherche de plus en plus appliquée. En même temps, la recherche dite fondamentale est délaissée. Celle-ci, comme son nom l'indique, est essentielle pour la pérennité de la production de connaissances. Alors que la recherche appliquée se fait dans un but de trouver un résultat, la recherche fondamentale débouche sur plusieurs pistes de recherche. Elle offre un éventail large de connaissances.
La recherche fondamentale et la recherche appliquée se complètent. La première crée des pistes de recherche et la seconde pousse la connaissance dans une application concrète. Le débalancement actuel nous porte à croire qu'il y aura un déficit de connaissances à moyen et à long terme. Pour pallier à ce phénomène, le gouvernement se doit d'être visionnaire et... prévoir des mécanismes, notamment dans les fonds subventionnaires, pour assurer le maintien de la recherche fondamentale.
Il existe un autre déséquilibre moins connu dans la recherche actuellement. On n'a d'yeux que pour l'innovation. La recherche se doit de découvrir des choses nouvelles. C'est normal, c'est sa fonction, me dira-t-on. Oui, en partie. Une autre fonction de la recherche se doit d'organiser la connaissance dans le but de la rendre cohérente. C'est la fonction de synthèse. L'innovation, c'est en quelque sorte des autoroutes qui se prolongent à l'infini, allant de plus en plus loin dans la connaissance. On ne sait pas vraiment où on va. La recherche de synthèse, quant à elle, serait justement une carte routière qui identifie les destinations et les jonctions entre les autoroutes innovantes. Dans la recherche de synthèse, la connaissance est réservée à une poignée de privilégiés au lieu d'être diffusée dans un bassin plus large de la population. Pour cette raison, nous suggérons au gouvernement de porter une attention particulière à la recherche de synthèse. Des mesures doivent être mises en place pour assurer la réalisation, notamment par la création de bourses d'études de maîtrise et de doctorat dont les mémoires et les thèses se rapportent à la synthèse des connaissances.
Les étudiants des cycles supérieurs sont indissociables de la recherche universitaire. À l'Université Laval, il est reconnu que les deux tiers des effectifs de recherche sont des étudiants. Ce qui est moins reconnu, c'est leur statut d'étudiant-chercheur. Le terme lui-même renvoie à une incertitude. Bien que le mot est ancré dans une réalité universitaire, on arrive mal à percevoir ce que serait ce statut. Nos recherches nous ont permis de constater que ce dossier est une revendication étudiante depuis plus de 20 ans. Il est grand temps pour nous de fixer un statut d'étudiant-chercheur. Celui-ci devrait, dans un cadre général, reconnaître la contribution des étudiants à la production de connaissances et la particularité des études graduées. Plus précisément, nous suggérons que ce statut reconnaisse la propriété intellectuelle et qu'un financement de base soit garanti pour tous les étudiants-chercheurs. C'est à notre avis un juste retour pour la participation à l'avancement du savoir. En plus de cela, ce statut devrait inclure les droits et les devoirs des étudiants... et de son directeur de recherche. Le succès des études graduées dépend de beaucoup de cette relation entre l'étudiant et son professeur. Pour toutes ces raisons, nous recommandons à cette commission de se pencher sur la formalisation d'un statut d'étudiant-chercheur.
De plus, le gouvernement doit penser à l'avenir des étudiants gradués, ce qui est aussi l'avenir des universités. Je veux parler ici du renouvellement du corps professoral. Bien que les études de la CREPUQ et du Conseil supérieur de l'éducation divergent sur le nombre de postes de professeur à combler, il nous apparaît évident qu'il y a un effort substantiel à effectuer dans le renouvellement du corps professoral dans les prochaines années. Les étudiants au doctorat sont les premiers candidats pour renouveler les postes vacants. En ce sens, nous croyons qu'il est important que le gouvernement prenne des mesures pour assurer un renouvellement efficace du corps professoral.
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En ce qui concerne la formation au doctorat, celle-ci devrait pouvoir reconnaître la charge de cours comme une activité de formation. De plus, on doit mettre en place des passerelles du doctorat vers la carrière professorale pour permettre une transition efficace. Par la suite, il faut reconnaître que les professeurs seniors ont acquis une grande expertise en enseignement et en recherche. Il est fondamental de permettre la transmission de ce savoir-faire aux nouveaux professeurs avant le départ à la retraite des premiers. Nous suggérons en ce sens qu'un système de mentorat soit mis sur pied. Il est impératif de conserver le savoir-faire universitaire au lieu de devoir constamment réinventer la roue.
En conclusion, nous réitérons les valeurs qui ont guidé notre analyse sur la qualité, l'accessibilité et le financement des universités: l'universalité de la connaissance, une qualité de la formation permettant la polyvalence des diplômés et l'éducation comme bien commun. Nous souhaitons que la commission saura prendre les décisions qui s'imposent pour assurer la pérennité des universités tout en respectant ces valeurs fondamentales. Merci.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Je suis prêt à céder la parole maintenant à M. le ministre et député d'Orford.
M. Reid: Merci, M. le Président. Bienvenue à la délégation, M. le Président... pas la délégation, mais à l'association des étudiants, étudiantes de Laval inscrits aux cycles supérieurs. Et je voudrais, au nom de tous les membres de la commission, vous remercier d'avoir accepté... Je crois que vous aviez normalement... il était prévu que vous soyez là la deuxième semaine, et vous avez accepté de repousser votre présentation. Je pense que nous vous en sommes tous reconnaissants parce qu'on a avait des difficultés de cette nature-là.
Je voudrais vous dire d'une part que le service de garde avec horaire atypique, c'est quelque chose... nous n'y reviendrons peut-être pas parce que nous avons eu l'occasion d'en discuter et que c'est quelque chose qui nous a beaucoup intéressés. Et je voudrais que vous sachiez qu'on va regarder ça attentivement; ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Je voudrais vous poser une question néanmoins sur une recommandation que vous avez dans votre mémoire, mais aussi, disons, avec laquelle vous faites une comparaison avec un autre système, il s'agit du système de remboursement proportionnel aux revenus. Et je ne veux pas parler trop longuement, mais nous avons annoncé que nous allions implanter un tel système hier. Mais vous faites la comparaison, et c'est là-dessus que j'aimerais bien vous entendre. Vous avez l'air de vous y être penchés un peu plus longuement avec un impôt postuniversitaire. Et, bon, dans le rapport, on voit un certain nombre de choses, mais c'est peut-être encore plus que jamais l'occasion aujourd'hui de faire cette comparaison parce qu'il n'y a pas de manuel d'emploi pour un régime de remboursement proportionnel aux revenus. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a beaucoup de paramètres à déterminer, et nous allons prendre tout le temps qu'il faut pour les déterminer.
Mais ce serait intéressant de voir, sur la base de ce que vous avez fait, de ce que vous avez regardé ? et d'ailleurs, si vous n'avez pas suffisamment le temps aujourd'hui, surtout ne soyez pas intimidés, vous nous enverrez les documents appropriés pour nous aider là-dessus ? comment est-ce que... quels sont les avantages relatifs des deux ? et je sais que vous les décrivez un peu mais peut-être pour entamer la discussion entre ces deux systèmes? Et où est-ce que vous voyez des inconvénients par rapport à des avantages?
M. Dumont (Nicolas): Alors, concernant l'IPU, nous-mêmes, on avance l'idée dans le but d'initier une réflexion, en fait. Nous-mêmes, on avance la chose avec prudence. Là où l'IPU est intéressant, et puis ça rejoint en fait le RPR, le remboursement proportionnel au revenu, c'est que l'IPU se base... en fait élimine le problème des frais de scolarité à l'entrée, lorsqu'on débute un diplôme, lorsqu'on débute un programme d'études. Donc, ça bascule le problème à la toute fin des études en fait, et donc on élimine en fait cette barrière-là qui pourrait subsister, la barrière des frais de scolarité pour certains. Une barrière qui, soit dit en passant, selon quelques études qui ont été... sur lesquelles je suis tombé nous disaient que plus les classes... plus les personnes provenant de classes sociales de plus en plus défavorisées, de plus en plus, disons, peu nanties... plus le statut baisse, plus la perception des frais de scolarité est élevée. Plus on perçoit le fardeau des frais à assumer, plus c'est élevé. Donc, ce qu'on fait, c'est qu'on élimine totalement le problème pour le faire basculer à la toute fin, donc après diplomation. Et puis c'est là où ça devient intéressant, c'est que les frais de scolarité n'existent plus à l'entrée. Et puis ces frais de scolarité là, un peu comme le RPR, sont basés sur la capacité réelle de payer de l'étudiant.
Donc, après diplomation, s'il se décroche un emploi et à partir d'un salaire plancher, je dirais, l'IPU va faire en sorte qu'on perçoit l'argent dépendamment du salaire. Évidemment, il y a un plafond à atteindre à ce niveau-là. RPR, bon, le parallèle est là, c'est basé sur la capacité réelle de payer des étudiants. En fait, là aussi, il y aurait un seuil à partir duquel on demandera aux étudiants de commencer à débourser leur dette et puis surtout en considérant le taux d'endettement qui augmente année après année, les difficultés des étudiants de payer. Aux cycles supérieurs, c'est reconnu qu'il y a de plus en plus de faillites, le taux de faillite augmente chez les étudiants.
Donc, c'est des mesures comme ça qui parviendraient à alléger le fardeau des étudiants. Concernant l'IPU, une chose qui pourrait être entrevue comme une difficulté de notre part, c'est le fait que ça peut cautionner en effet des hausses de frais assez substantielles. Je dirais que, là où c'est intéressant, c'est que justement ça se base sur la capacité réelle des étudiants de payer et, oui... donc la capacité réelle des étudiants à payer et puis... oui, voilà. Je ne sais pas si M. Goutier...
M. Goutier (Antoine): En complément...
Le Président (M. Kelley): ...
M. Goutier (Antoine): Oui. Alors, un complément. Dans le fond, c'est que la différence entre l'IPU et le RPR, c'est que l'IPU justement élimine tous frais de scolarité à l'entrée de la scolarité, alors que le RPR, c'est un mécanisme pour faciliter le paiement de dette. Mais, avec le RPR, il y a tout de même des frais de scolarité à payer, et c'est là, je dirais, la grosse nuance. L'IPU aussi, selon ce qu'on a écrit dans le mémoire, devrait s'accompagner d'une aide financière aussi sous la forme du IPU. Donc, à ce moment-là, ça permet de... l'IPU devient quelque chose, entre guillemets, d'universel où tous les étudiants qui ont des frais de scolarité à payer le paient sous forme d'impôt, alors que le RPR, c'est une formule qui vient aider les étudiants endettés. Mais il reste tout de même le problème des frais de subsistance et des frais de scolarité lors des études. Je dirais, essentiellement, c'est ça, les différences.
M. Reid: D'accord. Oui, juste pour continuer un peu là-dessus. J'ai quelques chiffres et puis je voudrais voir un peu ce que vous en pensez en termes de différenciation étudiants de cycle supérieur-étudiant de premier cycle, parce que, quand on regarde les chiffres que j'ai ? c'est sur l'enquête Relance 2003 pour les diplômés 2001 et les détenteurs d'une maîtrise; je n'en ai pas pour les doctorats ? les détenteurs d'une maîtrise travaillaient à temps plein dans un domaine relié à leurs études dans une proportion de 85 %. Évidemment, dans le 15 % qui reste, il y a peut-être des personnes qui travaillent dans des domaines qui ne sont pas forcément leurs études, qui ont un bon revenu, mais il y en a aussi qui n'ont peut-être pas les revenus intéressants, et c'est ceux-là, moi, qu'il m'intéresse d'aider, là, plus encore parce qu'ils peuvent vivre des difficultés... ou d'autres étudiants qui se retrouvent au début de leur famille, etc., et puis là il y a beaucoup de questionnements.
La question que je me demandais, c'est ? et je n'ai pas les chiffres; peut-être les avez-vous... Mais 85 % d'étudiants ? les étudiants qui vont avoir un emploi relié à leurs études, donc qui risquent d'avoir des revenus où ils peuvent, entre guillemets, rentabiliser leur diplôme ? est-ce que vous pensez que c'est... cette proportion-là est la même au premier cycle et qu'au premier cycle on risque d'avoir davantage d'étudiants qui... sans difficulté et qui bénéficieraient plus donc peut-être d'un système de remboursement proportionnel ou d'un impôt postuniversitaire?
M. Goutier (Antoine): Je dirais peut-être qu'il y a des étudiants... peut-être que la proportion au baccalauréat d'étudiants qui ont des emplois hors discipline est peut-être moins élevée. Cependant, si on regarde le niveau d'endettement des étudiants à la maîtrise, au doctorat... est donc plus élevé. Et, en ce sens-là, je pense que tous les étudiants peuvent bénéficier d'un RPR ou d'un impôt postuniversitaire, pas pour les mêmes raisons. Il y en a qui ont peut-être des revenus moins élevés, mais il y en a d'autres aussi qui ont un niveau de dette plus élevé. Donc, à ce moment-là, je pense que c'est un bon moyen d'aider tous les étudiants.
M. Reid: Très intéressant. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter aussi la bienvenue au nom de ma formation politique, de vous féliciter aussi pour votre mémoire, qui est d'une très grande qualité et qui est très fouillé aussi, qui va dans plusieurs aspects des questions qui sont soulevées ici par la commission, que ce soit la qualité, l'accessibilité ou le financement.
Je vais commencer d'abord par une première affirmation que vous faites à la page 9 de votre mémoire, où vous dites... vous mettez en contradiction... Vous semblez mettre en contradiction, à la page 9, la qualité de la formation et la surspécialisation. J'aimerais ça vous entendre sur ça. Puis je pense que c'est rare qu'on a abordé la question sous cet angle-là. Vous dites ? c'est dans l'avant-dernier paragraphe, là, de la page 9: «Une formation de qualité se traduit par une formation qui assure la plus grande polyvalence[...]. Ainsi, une formation qui spécialise à outrance ses étudiants ne répond pas à notre critère. La spécialisation excessive limite le champ d'expertise des individus», etc. Alors, j'aimerais vous entendre sur cette question-là.
M. Goutier (Antoine): Bien, c'est très simple. Si je veux donner un exemple: quelqu'un qui reçoit une formation pour traiter un type de cellules contre un type de cancer va être apte à traiter ce problème-là et peut-être des problèmes un peu plus connexes, mais, lorsqu'il va sortir du champ de ses compétences, on va remarquer, à ce moment-là, qu'il va y avoir inaptitude. Si on crée des programmes où l'étudiant touche à un ensemble de disciplines, un ensemble d'outils d'analyse et de réflexion, ce que ça permet, c'est que la personne peut arriver et s'adapter à un emploi. Je vous donne un exemple.
Je connais quelqu'un qui a un doctorat en chimie, qui n'a jamais travaillé en chimie. Il est présentement professeur au cégep de Sainte-Foy en informatique. Sa capacité d'analyse, à travers la méthode scientifique, lui a permis d'acquérir par lui-même sa formation. Il avait une formation en chimie, mais, à travers les acquis non seulement... les acquis ponctuels de connaissance... mais bien la méthode qu'il a acquise lui permet de se débrouiller plus facilement que si on lui avait simplement appris le tableau périodique des éléments chimiques.
Mme Marois: D'accord. Donc, c'est dans cette perspective-là que vous faites l'affirmation qui est là.
On a beaucoup discuté, à cette commission, de la place des chargés de cours et... ? bon, voilà; je cherchais ? de la place des chargés de cours et des moyens à imaginer pour faire en sorte que ces chargés de cours prennent mieux leur place au sein du corps professoral lorsque des postes s'ouvrent. Il y a donc des passerelles pour ceux et celles, là, dont l'idée de faire une carrière reste le projet... faire une carrière comme professeur reste le projet de vie, là. Parce qu'il y a des chargés de cours où c'est vraiment une intervention plus ponctuelle, et on peut comprendre ça, dû à spécialisation de certains d'entre eux.
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(17 h 10)
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Alors, je vous amène à la page 49 de votre mémoire, et là il y a plusieurs recommandations intéressantes. J'aimerais vous entendre sur celles-ci. On dit: «Pour permettre l'embauche efficace d'une nouvelle génération de professeurs, nous recommandons: que la charge de cours soit considérée comme une activité de formation au doctorat; que des passerelles du doctorat vers la carrière professorale soient créées afin de permettre un meilleur recrutement des candidats; que l'embauche de professeurs ne se fasse pas lors de départs à la retraite mais auparavant afin d'assurer le transfert[...]; qu'un système de mentorat soit mis sur pied pour favoriser la transition[...]; [...]les fonds subventionnaires mettent sur pied des programmes particuliers [pour des étudiants-chercheurs]», etc.
M. Goutier (Antoine): Un commentaire?
Mme Marois: Oui. Je voudrais avoir, sur ces questions, le... Comment vous pensez qu'il est possible d'arriver à de tels résultats? Est-ce qu'il y a une volonté dans les universités? Est-ce que les processus que vous connaissez, les façons de faire que vous connaissez vous semblent permettre d'aller vers l'atteinte de tels objectifs? C'est sur ça que je voudrais vous entendre.
M. Goutier (Antoine): D'accord. Tout d'abord, sur la charge de cours au doctorat. Il y a déjà des étudiants qui donnent des cours lorsqu'ils suivent leur doctorat. Le problème, c'est que ce n'est pas reconnu. Un, ils ne sont pas reconnus comme chargés de cours, et leurs acquis ne sont pas reconnus après leurs études. Donc, ça, c'est un problème. Et par contre ça peut facilement se faire, puisqu'on donne déjà... les doctorants donnent déjà des cours. On peut facilement, avec l'accord des universités, permettre que ces charges de cours là soient reconnues comme une activité de formation.
Pour les passerelles du doctorat à la carrière professorale, ça aussi, c'est possible. On peut facilement, entre guillemets, identifier les étudiants, les candidats potentiels à une carrière professorale; ce n'est pas tous les étudiants qui s'y destinent. Et on peut, je dirais, justement, dès le début, les préparer à tous les aspects de la vie universitaire, donc l'enseignement, la recherche ? parce que justement, au doctorat, on touche beaucoup plus à la recherche qu'à l'enseignement, donc c'est peut-être un aspect qui est plus faible dans la formation au doctorat ? et aussi tout ce qui s'appelle le monde universitaire, l'implication dans le milieu. Les directeurs de recherche, qui sont déjà en lien privilégié avec les étudiants, pourraient alors assumer un rôle supplémentaire pour transmettre, je dirais, une certaine indépendance lors de la recherche et de l'enseignement. Et justement je fais le pont avec la dernière recommandation: «Que les fonds subventionnaires mettent sur pied des programmes particuliers [qui permettraient] à des étudiants-chercheurs d'obtenir des subventions de recherche.» Dans le fond, l'objectif, c'est qu'un étudiant au doctorat qui a acquis une certaine maturité puisse faire lui-même une demande de subvention et créer un groupe de recherche... un centre de recherche... bien, un groupe, disons ? on va être humbles au début ? un groupe de recherche, et donc, à ce moment-là, réussir déjà à s'insérer dans le milieu universitaire, et donc lancer tranquillement une carrière professorale.
Mme Marois: Toujours dans la même foulée sur l'étudiant-chercheur. À la page 47, vous recommandez «que le gouvernement formalise le statut d'étudiant-chercheur, [...] reconnaisse, dans ses textes, la contribution [...] à la recherche universitaire et par conséquent leur propriété intellectuelle [et] qu'un financement de base soit accordé à tous les étudiants-chercheurs par le gouvernement».
Est-ce que vous avez un peu évalué ou identifié les critères qui permettraient de formaliser le statut d'étudiant-chercheur? Et, le financement de base, avez-vous imaginé quel type... de quel type de montant il pourrait s'agir, quel type de contribution, comment le système pourrait être rendu opérationnel?
M. Goutier (Antoine): Au niveau de la formalisation du statut d'étudiant-chercheur, tout d'abord c'est de reconnaître la particularité des études graduées, c'est-à-dire la formation par la recherche. C'est un autre milieu d'enseignement, de formation. Ce n'est pas des cours magistraux comme il y a au premier cycle, et par conséquent, dans un milieu de recherche, on a beaucoup plus un contact avec la pratique. Entre guillemets, c'est pratiquement déjà un pas vers une vie professionnelle. Dans plusieurs cas, les étudiants travaillent dans les projets de recherche de leurs professeurs et par conséquent s'inscrivent déjà dans la recherche universitaire de plain-pied.
Pour le financement de base, nous n'avons pas évalué des montants. Nous ne voulons pas établir un plancher ou quoi que ce soit. Je dirais, le montant du financement pourrait ressembler grosso modo à ce qu'on reçoit par l'aide financière aux études. Cependant, au lieu de le verser en prêts et bourses, nous pourrions reconnaître, par exemple, une bourse d'études. L'objectif, c'est que l'étudiant-chercheur contribue à l'avancement de la connaissance de la population, et en ce sens c'est pratiquement un boulot à temps plein. Donc, ce serait une compensation pour le fait qu'il n'est pas parti sur le marché du travail. Il travaille dans les laboratoires de l'université, mais, autrement dit, par conséquent on doit lui assurer la capacité de survivre pendant ce temps-là.
Mme Marois: D'accord, merci. Ça va.
Le Président (M. Kelley): M. le député de Vimont.
M. Auclair: Messieurs, madame, bonjour. Je vais continuer un petit peu dans la dernière question de la députée de Taillon parce qu'on a eu... on a reçu, dans cette commission-ci mais à un autre niveau, des universités qui nous parlaient justement quand même que la propriété intellectuelle... il y en a certaines qui avaient des redevances suite à la vente de ces propriétés intellectuelles là. Et, lorsque je lis votre mémoire, vous faites part comme quoi des étudiants... il y a eu des problèmes justement que des... Bon. Des professeurs, des directeurs de thèse, etc., se sont attribués des droits à cet égard-là. Il faut aller un petit peu loin là-dedans, dire que... parce que ça va me permettre de me donner une certaine idée dans ce que vous voulez dire lorsque vous... dans vos recommandations d'établir... de formaliser le statut d'étudiant...
Est-ce que, lorsque l'étudiant, le chercheur participe à une recherche ? donc ça fait partie de son travail de recherche, donc il n'a aucune rémunération, il ne signe pas un contrat, lui ? donc à cet égard-là, pouvez-vous me dire un petit peu comment ça se passe? Parce que, si c'est un travail, une thèse de recherche qu'il travaille avec son directeur, là, il y a un certain débat de droit de propriété intellectuelle que vous engendrez, là, qui est engendré par ce commentaire-là.
M. Goutier (Antoine): L'idée, c'est justement, c'est que, dans le cadre des formations de sciences pures et de sciences de la santé, la formation à la maîtrise, au doctorat se fait de la manière suivante: le professeur reçoit des subventions de recherche et répartit, à travers ses étudiants, les divers aspects de sa recherche. À ce moment-là, des fois il est difficile de discerner quelle est la part de propriété intellectuelle de l'étudiant et celle du professeur. D'une manière normale, elle peut générer des conflits. Ce qu'on reconnaît aussi et ce qu'on connaît, notamment dans certains secteurs comme la santé, c'est des professeurs qui font signer des ententes de confidentialité et des cessations de propriété intellectuelle à leurs étudiants. C'est simple, s'il doit... si l'étudiant veut travailler avec le professeur, il doit céder ses droits. Souvent, un étudiant à la maîtrise n'est pas conscient de ce que ça implique et dans le fond va peut-être accepter sans vraiment savoir que dans le fond il se fait rouler.
n(17 h 20)n En formalisant le statut d'étudiant-chercheur, vraiment en fixant une reconnaissance de la propriété intellectuelle, à notre avis ça va favoriser justement la reconnaissance et éliminer, je dirais, certains problèmes, là, comme ceux-là.
M. Auclair: O.K. Donc, en d'autres mots, vous arrivez à une certaine cession de droits de la part des étudiants, avec... Là, vous ramenez, là, le principe de bourse que vous avez soulevé à la députée de Taillon. Ça viendrait équilibrer un petit peu cette réalité-là.
M. Goutier (Antoine): Il n'y a pas vraiment de lien entre la cessation de droits puis la bourse d'études. La bourse d'études, on la suggère, du fait que l'étudiant, au lieu d'aller travailler sur le marché du travail, donc d'avoir un salaire ? 40 000 $, 50 000 $ ? reste dans un laboratoire, reçoit une formation mais aussi produit le savoir. Dans un laboratoire, dans un centre de recherche, dans une maîtrise, l'acquisition de compétences se fait par la production de connaissances. Donc, cette production de connaissances là n'est pas nécessairement reconnue, du fait que les étudiants ont encore un statut d'étudiant et on ne reconnaît pas la part de création qu'ils ont.
M. Auclair: Merci.
Le Président (M. Kelley): M. le député de Charlesbourg.
M. Mercier: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire... ainsi qu'à votre délégation. J'aimerais, dans la même foulée, toujours dans la recherche, aborder le thème... plutôt ce que vous proposez, c'est-à-dire la création d'un code d'éthique, à la page 24 de votre mémoire. Plusieurs groupes que nous avons entendus ont proposé une telle solution ou une telle proposition. Et je vais vous citer ici. Vous dites: «Que le gouvernement, en collaboration avec les acteurs universitaires, crée un code d'éthique universitaire et qu'il devienne la norme à appliquer dans la recherche et l'enseignement dans les universités québécoises.» Alors, en rafale, j'aimerais vous demander qui seraient les acteurs universitaires? Et également, puisque vous parlez de normes à appliquer, c'est donc dire qu'il y aurait un code commun, qu'il y aurait une norme québécoise; j'aimerais vous entendre là-dessus. Également, à la suite de tout ça, qui et comment envisageriez... plutôt qui ferait l'application de ce code et comment serait-il envisagé, ce code, ou du moins l'application de ce code?
M. Goutier (Antoine): Alors, les acteurs universitaires sont vastes. Ce sont les administrateurs universitaires, ce sont les professeurs, ce sont les chargés de cours, ce sont les étudiants, bref la communauté universitaire en son grand complet. J'oublie peut-être les professionnels de recherche, là, qui sont un groupe qui émerge de plus en plus. Les acteurs universitaires, c'est ceux qui la vivent au quotidien, en plus du gouvernement, qui, par le fait qu'on considère que l'éducation est un bien commun, doit venir aussi participer à cette réflexion-là.
Si on parle d'une norme québécoise, je crois profondément que ce qui est bon au niveau éthique pour l'université l'est pour une autre. Je ne verrais pas pourquoi une université se permettrait d'avoir des normes plus souples en éthique qu'une autre. Pour ça, tout le monde devrait reconnaître les mêmes normes éthiques. Qui le ferait appliquer? Je pense qu'il y a une implication partagée. Je pense que le premier rôle, c'est celui des administrateurs universitaires, qui ont, entre guillemets, la capacité de sanctionner certains défauts, et ensuite aussi le gouvernement, qui peut arriver avec des mesures peut-être plus coercitives à ce niveau-là.
M. Mercier: D'accord. M. le Président, peut-être très rapidement, puisque le temps file...
Le Président (M. Kelley): Oui, très rapidement.
M. Mercier: ...et je sais que M. le ministre veut intervenir. À la page 18 ? et quelque chose qui m'a surpris à la lecture de votre mémoire ? vous affirmez que «la manière la plus simple d'augmenter le taux de diplomation est de diminuer les exigences de formation». Pour avoir été étudiant à Laval, j'ose espérer que c'est quelque chose qui... Est-ce que vous observez de tels effets autour de vous ou est-ce que c'est quelque chose que vous observez ? j'ose espérer que non ? et que c'est plutôt par métaphore ou de façon sémantique, là, que vous vous êtes exprimés?
M. Goutier (Antoine): Lorsqu'on dit que c'est la manière la plus facile, c'est que c'est vraiment la manière la plus simple. Est-ce que les universités s'y sont employées? Pas nécessairement, mais nous avons remarqué que certains programmes universitaires ont effectivement des taux de diplomation très élevés et que ça ne correspond pas nécessairement à une qualité de la formation.
Donc, si on veut ? c'est très simple ? si on veut donner des notes à tout le monde puis que tout le monde passe, on donne A à tout le monde. Ça peut se faire, et, dans certains programmes, il y a un certain laxisme, et ça se fait. Je ne dis pas que c'est généralisé, au contraire, mais c'est déjà arrivé, ça se produit actuellement.
M. Mercier: Je vous remercie.
Le Président (M. Kelley): Avant de céder la parole au ministre, il reste cinq minutes à ma droite, il reste 11 minutes à ma gauche. L'ordre de la Chambre: on termine à 17 h 30. Alors, je demande un léger consentement. On va terminer nos travaux à 17 h 40, et ça va permettre une égalité dans le partage du temps. Et, sur ça, je cède la parole au ministre. M. le ministre.
M. Reid: Merci. Ma question. J'aimerais qu'on parle... on se penche un petit peu... Et j'espère surtout avoir bien compris. Il me semble que tout à l'heure vous parliez d'une composante de la formation universitaire qu'on ne voit pas suffisamment souvent, qui serait, si j'ai bien compris, en d'autres mots, là, la pédagogie dans l'enseignement universitaire. Alors, est-ce que j'ai bien compris? Est-ce que c'est l'élément dont vous parliez tout à l'heure, c'est-à-dire comment enseigner et non pas uniquement faire de la recherche?
M. Goutier (Antoine): Je dirais, dans la formation universitaire, effectivement on a... il y a peut-être un manque de pédagogie qui est donné. En doctorat, c'est essentiellement une grosse recherche, bien c'est une recherche qu'on fait. Et l'acquisition de pédagogie ou de processus pédagogiques se fait dans le fond par l'étudiant lui-même qui...
M. Reid: Alors, ça répond à ma question en partie, dans le sens que j'ai peut-être mal compris, mais c'est parce que c'est un élément qui m'intéresse beaucoup. Donc, je vais quand même vous poser une question pour avoir votre avis là-dessus. C'est-à-dire que, quand on veut préparer des professeurs d'université et que la principale source pourrait être nos propres étudiants de doctorat, bien sûr... La question qui s'est posée souvent, et, moi, je me suis beaucoup intéressé à ça et je suis un petit peu frustré, dans ma vie professionnelle universitaire, de ne pas avoir pu changer grand-chose... Il est intéressant de considérer peut-être que, dans la formation doctorale générale qui mène assez naturellement à l'enseignement universitaire, on puisse y incorporer, dans cette formation, non seulement la formation disciplinaire et de la recherche disciplinaire, mais qu'on puisse incorporer une certaine forme de préparation à la carrière professorale qui implique de l'enseignement.
Or, traditionnellement, on ne donne pas beaucoup de cette formation sous forme formelle au niveau des doctorants et des doctorantes, et je me demandais si c'est quelque chose qui, même si ce n'est pas ce que vous avez dit, parce qu'on ne parlait pas tout à fait de la même chose, j'imagine... Est-ce que vous, ça vous interpelle? Est-ce que, vous, vous pensez que c'est une bonne idée? Et, même si le ministre de l'Éducation ne peut pas imposer d'autorité au Québec ? on n'a pas un système de ce type-là ? il reste néanmoins que, si vous pensez que c'est intéressant ou si beaucoup de monde pense que c'est intéressant, moi, j'aimerais bien être le champion un peu de cette approche-là, au moins en tout cas pour en sensibiliser tous les intervenants dans nos universités.
Alors, est-ce que vous pensez que ça vaut le coup de faire quelque chose dans ce sens-là ou si l'acquisition se fait assez naturellement? Si vous pensez aux professeurs que vous avez eus, par exemple qui sortaient de leur doctorat quand vous étiez au bac, est-ce qu'il y en a certains qui auraient bénéficié d'une préparation ou...
M. Goutier (Antoine): Oui. D'ailleurs, actuellement, à l'Université Laval, depuis 2002, il y a un cours de doctorat qui s'offre à partir de la Faculté des études supérieures, dont j'ai oublié le nom exactement mais qui justement donne des outils pédagogiques pour l'enseignement universitaire. Donc, c'est déjà, je dirais, un bon pas. Et aussi, au-delà des cours qu'on peut donner sur la pédagogie, je pense qu'il y a peut-être un encadrement que les professeurs seniors peuvent faire aux étudiants du doctorat qui donnent des cours. Donc, je dirais, il y a deux... il y a plusieurs moyens: il y a par des cours formels et aussi par un encadrement à l'enseignement fait pour les étudiants qui donnent des cours.
M. Reid: Merci. Très intéressant.
Le Président (M. Kelley): M. le député de Bertrand.
M. Cousineau: Merci, M. le Président. Bonjour. Bienvenue à cette commission parlementaire, madame, mademoiselle, messieurs. Je vais faire quand même un petit bout sur la recherche parce que mes confrères... puis le député de Charlesbourg en a parlé tantôt. À la page 42, vous mentionnez que, bon, la recherche, c'est le fleuron des universités québécoises, puis avec raison. Lorsqu'on regarde, dans les dernières années, l'évolution de la recherche depuis le début des années quatre-vingt-dix jusqu'à aujourd'hui, c'est très intéressant de voir, là, à quel point ça a évolué puis évolué dans le bon sens.
Évidemment, lorsqu'on parle de recherche et puis on parle de financement, on parle d'amalgame des fonds de recherche canadiens, des fonds de recherche québécois ? et puis les trois fonds de recherche québécois ? puis évidemment le secteur privé. Puis, au niveau des fonds de recherche québécois, bien, vous dites: «Que le gouvernement maintienne et bonifie les budgets pour les fonds subventionnaires québécois.» Bon. Écoutez, l'année dernière, en 2002-2003, l'argent attribué pour les trois fonds subventionnaires québécois au niveau de la santé, au niveau de la culture puis au niveau de la société, c'est autour de 160 millions. On a eu une coupure de 7 % pour le budget 2003-2004, et puis, au niveau de la bonification, cette année, bien, on repassera parce qu'il n'y en a pas, de bonification; c'est les mêmes montants que l'année 2003-2004.
Ceci dit, en gelant les fonds subventionnaires comme ça au niveau québécois, bien on force les chercheurs à se tourner vers le privé puis à essayer d'aller chercher plus de sous au niveau du privé. Puis là arrive le danger qui dit d'aller chercher de l'argent au niveau du privé, bien, ça ouvre la porte, là ? bon, tantôt on a parlé de l'éthique ? mais ça ouvre la porte à toutes sortes de perversions, si on peut s'exprimer ainsi.
Comment est-ce qu'on pourrait baliser ça, l'investissement du secteur privé dans les universités? Est-ce que vous avez... au niveau de la recherche. Est-ce que vous avez pensé à ça?
n(17 h 30)nM. Goutier (Antoine): Bien, pour la baliser, tout d'abord il faudrait que les entreprises soient conscientes que le premier but d'une université, c'est la formation des étudiants et qu'au-delà des résultats rentables de recherche les fonctions universitaires priment en tout temps. Non seulement un code d'éthique peut venir favoriser ça, mais aussi, justement dans le cas de litiges, puisque l'intérêt d'un organisme privé, c'est le profit... L'objectif d'une université, ce n'est pas le profit, c'est la formation et l'acquisition de connaissances. Ce n'est pas incompatible, mais des fois ça arrive avec des frictions.
Dans le cas de frictions, nonobstant toutes les lois qui pourraient régir une propriété intellectuelle ou des contrats, il faudrait que les universités aient toujours le dernier mot pour la protection des chercheurs de toutes catégories, autant les professeurs que les étudiants. Je dirais, c'est notre position; il faut absolument que le gouvernement envoie un message clair aux universités d'assurer leur fonction et que les entreprises qui font des partenariats doivent se soumettre aux objectifs universitaires.
M. Cousineau: Certains groupes d'étudiants nous ont dit que ce serait intéressant de créer un fonds institutionnel ou un fonds national dans lequel l'entreprise privée pourrait verser les sommes qu'elle voudrait consentir aux universités et puis que ce soit réparti d'une façon plus adéquate, là, au niveau des facultés puis au niveau des universités. Est-ce que vous pensez que c'est un modèle qui pourrait être intéressant?
M. Goutier (Antoine): Au niveau des dons que les entreprises font aux fondations universitaires, ça peut être effectivement une vue à envisager. Cependant, lors des partenariats de recherche, je me pose la question si justement une entreprise dont l'intérêt est d'avoir un résultat... Je ne verrais pas, entre guillemets, son intérêt de venir contribuer à un fonds général si dans le fond les découvertes contribuent à tous. Ce serait un objectif fort louable, mais je crains que les entreprises n'y voient pas leur compte et ne participent pas à une telle initiative.
M. Cousineau: Toujours en recherche, un petit peu plus loin, vous semblez... Bon. En fin de compte, vous avez constaté que l'équilibre qui existe... qui existait entre la recherche fondamentale puis la recherche appliquée, bien là il y a un glissement... Puis vous avez même parlé de perversion de la recherche universitaire. Il y a un glissement, là, vers la recherche appliquée, puis vous dites qu'il y a un danger effectivement. J'aimerais vous entendre sur les paramètres, les facteurs qui font que vous sentez ce danger-là. Comment vous vivez ça à l'université puis quelles sont les répercussions à chacun des cycles, au niveau du premier cycle universitaire?
M. Gontier (Antoine): Comment on peut identifier dans le fond ce phénomène-là? C'est justement par l'octroi de subventions par les fonds subventionnaires, par les discours de plus en plus pesants des gouvernements, comme de quoi les universités doivent produire une connaissance efficace, utile pour la société. Actuellement, au niveau fédéral, le CRSH, le Conseil de recherche en sciences humaines, est en train de se réformer, puisque Paul Martin a dit: La connaissance pour la connaissance, c'est fini. Donc, c'est des choses comme ça qu'on voit.
Comment ça se ressent au premier cycle? Comme ils touchent moins à la recherche, ils vont peut-être moins le sentir. Cependant, on va voir une formation qui va être orientée vers non pas justement une acquisition de théories, mais peut-être plus une acquisition de connaissances pratiques, applicables sur le champ. Au niveau de la maîtrise et du doctorat, là, à ce moment-là, on va remarquer que les sujets de recherche vont être beaucoup plus sur des sujets appliqués. Et là on va voir justement toutes les questions, entre guillemets, de droits d'auteur, de propriété intellectuelle surgir. Je dirais, justement, lorsqu'on parle de recherche appliquée, on parle de sous, et c'est à ce moment-là qu'on voit les conflits surgir.
M. Cousineau: Merci.
Mme Marois: Merci. M. le Président...
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: ...oui, si vous le permettez, je vais revenir sur la question de la qualité. Vous abordez le tout à la partie, là, V de votre mémoire, à partir de la page 37, et vous faites un certain nombre de recommandations. À la page 39, on dit: «Afin d'identifier la qualité de la formation et de l'améliorer, nous recommandons: que le type d'emploi occupé par les diplômés soit utilisé comme indicateur pour évaluer la qualité de la formation; que l'évaluation du taux de chômage se fasse sur le long terme pour juger de la rétention des diplômés liée à la qualité de la formation; [bon] que les fonds subventionnaires allouent des sommes additionnelles aux subventions de recherche pour la formation au premier cycle.» Bon, actuellement, les budgets ont été réduits l'année dernière, puis on a conservé la même réduction cette année, là. Bon.
Mais, moi, je veux revenir à votre première recommandation, que le type d'emploi occupé par les diplômés soit utilisé comme indicateur pour évaluer la qualité de la formation. Est-ce que vous ne craignez pas un petit peu le piège de l'utilitarisme en utilisant un tel critère? Moi, quand j'ai lu ça, ça m'a suggéré ça comme inquiétude.
M. Goutier (Antoine): Je dirais, ce qu'on suggère, c'est justement... dans le cas où on utilise déjà le taux de chômage pour évaluer si les étudiants ont reçu une formation de qualité, on peut dire que ce n'est pas simplement le taux de chômage mais aussi les types d'emplois occupés qui reflètent une qualité. Parce que, si on dit, par exemple, je ne sais pas, moi: «95 % des étudiants de maîtrise se sont trouvé un emploi», oui, mais, si on regarde dans quels secteurs, là, à ce moment-là, ça peut peut-être nous donner des indicateurs si la formation qu'il a reçue lui permet d'avoir un emploi à la hauteur de ses qualifications. Et il est vrai qu'on pourrait utiliser d'autres indicateurs pour refléter d'autres éléments de la société... du domaine. Par exemple ? c'est une suggestion ? on pourrait peut-être regarder le taux de participation aux élections. On dit souvent qu'une formation...
Mme Marois: Excusez-moi, je n'ai pas compris. On pourrait regarder le...
M. Goutier (Antoine): Le taux de participation aux élections.
Mme Marois: Oui. Une bonne question, oui.
M. Goutier (Antoine): On dit souvent qu'une formation universitaire doit aussi former des citoyens. On peut regarder si cet objectif-là est atteint par le biais de telles mesures. Si on avait mis cette recommandation-là sur le type d'emploi occupé, c'était en réaction un peu à ce qu'il y avait dans le document de consultation sur justement le taux de chômage.
Il faut, je dirais, réfléchir à d'autres indicateurs qui ne sont pas économiques, mais là effectivement on tombe dans des éléments beaucoup plus qualitatifs. Et là on a peut-être plus de difficultés à les cerner. Mais, comme je dis, il y a peut-être l'identification du taux de participation au vote. On ne le sait pas, peut-être... Ce serait peut-être intéressant justement de remarquer si les diplômés universitaires votent plus que le reste de la population. Est-ce que c'est un objectif qu'on veut acquérir? Je dirais, là, justement on peut regarder d'autres éléments: responsabilité civile, etc., là.
Mme Marois: C'est très intéressant parce qu'on pourrait faire des corrélations aussi puis des recoupements, savoir qui vote, d'où viennent-ils, quel est leur niveau de formation, comme on le fait dans les sondages pour savoir qui appuie quelle formation politique ou quel point de vue, partage quel point de vue idéologique.
Bon. Mais revenons à ce que vous proposez dans votre mémoire. Vous allez... Toujours dans le chapitre sur la qualité, vous dites: Bon, il y a des dangers à éviter. Vous êtes assez durs justement en faisant référence au fait que la formation actuelle se fait sous le signe de l'utilitarisme: «On n'apprend plus aux étudiants ? là, je saute quelques lignes ? à penser, on leur indique quoi penser.» Bon, alors... Et vous continuez dans cette foulée-là et vous indiquez, à la page 40: «L'engouement pour la multidisciplinarité [par exemple] a amené des effets dangereux pour la formation. On crée des programmes multidisciplinaires dont la valeur académique reste à démontrer.» Et vous finissez avec la recommandation: «Afin de pallier aux problèmes intrinsèques de la formation actuelle, nous recommandons que le gouvernement réaffirme l'importance d'une formation de qualité qui permet à l'étudiant la plus grande polyvalence.» Je crois qu'on est tous d'accord avec ça, à 100 pour cent et plus, mais comment, comment faire cela, par quels moyens?
M. Goutier (Antoine): Par quels moyens créer une formation de qualité ou par quels moyens le gouvernement peut agir sur les universités?
Mme Marois: Pour réaffirmer l'importance, parce qu'on peut le réaffirmer par, par exemple, même la tenue de cette commission, où l'un des thèmes, c'est la qualité qui nous préoccupe. Mais est-ce qu'il y a d'autres façons qui devraient être utilisées? Est-ce qu'il y a des attentes exprimées à l'égard des universités? J'essaie de voir par quels moyens on peut réaffirmer le tout.
Le Président (M. Kelley): J'ai une réponse.
Mme Marois: ...changements dans les modes de reconnaissance de certains cours, d'approbation, etc.
M. Goutier (Antoine): Je dirais, la première manière de reconnaître une formation de qualité, c'est justement de délimiter le champ universitaire et d'affirmer que les universités doivent se préoccuper de la formation des étudiants. Trop souvent, ils reçoivent des pressions venant de l'extérieur, venant d'entreprises ou de groupes d'intérêts qui viennent modifier cette formation-là à des fins autres que la formation en soi. Donc, je dirais simplement, par ce processus-là, de dire: Les universités doivent, par leur formation, permettre à l'étudiant d'acquérir une plus grande polyvalence au lieu de servir des intérêts particuliers, je dirais, et de le légiférer, entre guillemets. Ça peut déjà améliorer la qualité de la formation.
n(17 h 40)n Ceci étant dit, on pourrait penser à des... ? entre guillemets, là; je lance ça un peu au hasard ? à une sorte de palmarès des universités. Il y a déjà des concours qui se font au niveau provincial entre les diverses écoles de comptabilité ou etc. On peut se servir de ça pour évaluer leur formation, puis de voir comment la formation est dispensée, et, à ce moment-là, inciter les universités à suivre les pas de ceux qui se sont montrés les plus performants, les meilleurs dans la qualité de la formation.
Le Président (M. Kelley): Il ne reste pour moi de juste dire merci beaucoup. Il n'y a pas toujours le temps pour la présidence de poser les questions, mais je veux souligner que nous avons bien noté, entre les pages 17 à 19, la question de l'imputabilité. C'est à cette commission qu'on a le devoir de rencontrer les universités. Alors, vous avez fait la distinction entre les mesures quantitatives et qualitatives. Alors, si vous avez des propositions, on est très ouverts parce qu'on aura une autre série de ces rencontres cet automne. Alors, si vous avez les précisions ou les suggestions, on est toujours ouverts à vous entendre à ce sujet peut-être au bon moment. Et, sur ça, malheureusement, il ne me reste qu'à dire merci beaucoup pour un mémoire et une présentation fort intéressants. Et j'ajourne nos travaux à mardi le 6 avril, à 15 h 30, dans cette même salle. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 17 h 42)