(Neuf heures quarante-trois minutes)
Le Président (M. Kelley): Je vois le quorum des membres de la Commission de l'éducation, donc je déclare la séance de la Commission de l'éducation ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Morin (Montmagny-L'Islet) remplace Mme Gaudet (Maskinongé).
Le Président (M. Kelley): Bienvenue, M. le député. Ce matin, on a trois groupes qu'on va entendre. C'est une demi-journée de travail pour les membres de la commission. Nous entendrons l'Association générale étudiante de la Faculté des lettres et les sciences humaines de l'Université de Sherbrooke; après ça, la Fondation Universitas du Canada; et, à la fin, les associations étudiantes facultaires de l'Université du Québec à Montréal.
S'il y a du monde qui a des téléphones cellulaires, je vous invite de les éteindre maintenant. Sur ça, sans plus tarder, je vais passer la parole à M. Jean-Patrick Brady, qui est le président de l'Association des étudiants de la Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Sherbrooke. Bienvenue.
Auditions (suite)
Association générale étudiante
de la Faculté des lettres et sciences
humaines
?
Université de Sherbrooke
(AGEFLESH
?
Université de Sherbrooke)
M. Brady (Jean-Patrick): Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Je remercie la commission de pouvoir... de bien vouloir nous entendre aujourd'hui. C'est un enjeu qui nous concerne particulièrement, donc merci beaucoup.
Donc, M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les députés, j'ai l'honneur de vous présenter les personnes qui sont avec moi aujourd'hui. Mme Alexandra Beaudry, qui est vice-présidente, et Véronique Martel, qui est celle qui a rédigé notre mémoire à l'AGEFLESH.
Donc, qu'est-ce que l'AGEFLESH? Évidemment, c'est la Faculté des lettres et sciences humaines à l'Université de Sherbrooke. Nous sommes les représentants des étudiants de premier cycle. En tout, nous représentons environ 2 000 étudiants, c'est donc quand même une partie importante de l'Université de Sherbrooke. Et nous sommes formés de 10 associations départementales. Malgré, je dirais, notre aspect «seulement premier cycle», nous avons quand même, comme vous avez pu le constater, écrit une partie sur la recherche, deuxième et troisième cycles, car évidemment c'est difficile de détacher l'ensemble de la problématique. Et malgré quand même que nous n'ayons pas, là, les ressources comparables à celles, on peut dire, de la FEUQ ou des grosses associations universitaires, nous sommes très fiers de pouvoir vous présenter un mémoire qui, nous pensons, tient compte de beaucoup de facteurs dans le milieu des sciences humaines. Donc, sans plus tarder, je vais vous énoncer, là, un peu de quoi que nous allons vous entretenir aujourd'hui.
Au niveau évidemment de la question de la contribution étudiante, je pense qu'à plusieurs occasions vous avez eu la possibilité d'entendre des regroupements étudiants ou des universités en parler, donc on va en parler brièvement. Et ensuite, bien entendu, nous allons plutôt vous parler, là, de l'importance des sciences humaines et de subventionner adéquatement cette partie des universités.
Donc, au niveau du Québec, vous savez, bon, il y a eu le rapport Parent en 1969, si je me rappelle bien, ou un petit peu avant, pardon, qui justement, là, parlait de la gratuité au niveau des études postsecondaires. Et ensuite on a pu voir qu'on avait peut-être eu tendance un peu à s'en éloigner en tant que société pour en arriver à un dégel, au début des années 1990, qui a quand même été assez important, ce qui fait en sorte que maintenant on ne nie pas, dans la société, évidemment l'importance de l'université. Mais on peut constater que son rôle a changé. Et aujourd'hui, évidemment nous sommes très contents de pouvoir être là en journée de budget, car nous allons pouvoir voir un peu plus tard ce qui va arriver. Je pense que le seul point que j'ai entendu moi-même quand j'ai assisté à des présentations, c'était l'importance de réinvestir en sciences, bon, globalement, finalement, dans les universités. Alors, on ne surprendra personne en disant que, oui, nos universités ont besoin d'argent et finalement... 375 millions dont il est question ici.
Par après, vous savez, bon, dans une société du savoir, dans la question des mondialisations, du choc démographique, l'université prend un rôle qui est appelé à continuer mais en même temps un peu à transformer, à prendre vraiment une place de leader, si je peux me permettre l'expression, au niveau de l'ensemble de l'éducation puis de former la relève finalement au niveau de certains types d'emplois. Puis on pense évidemment que c'est très important.
Au niveau de la contribution étudiante, maintenant. Ça, évidemment, vous avez eu l'occasion, comme je disais tout à l'heure, d'en entendre largement. Et encore une fois, nous, à la faculté, en sciences humaines, nous pensons qu'il est clair qu'il faut un gel des frais de scolarité évidemment accompagné d'une loi-cadre qui pourrait, là, légiférer l'ensemble des frais afférents, qui ont quand même augmenté de façon assez drastique, là, contrairement, là, au supposé gel qui est supposé exister depuis maintenant 10 ans. On a souvent tendance à créer un débat dans la société au niveau de la contribution étudiante. Et nous pensons sérieusement qu'il est un peu faux de commencer à dire aux étudiants: Vous êtes ceux qui en profitent, donc payez. Nous payons en ce moment, et je pense, ainsi que les étudiants de ma faculté, que le gel est tout à fait approprié, car c'est vraiment la société ? ça, je tiens vraiment à le souligner ? c'est l'ensemble de la société qui va faire en sorte que ça va être bon pour tout le monde, finalement.
Alors, par rapport à ça, vous savez, il y a plusieurs modèles d'analyse qui ont été faits, là, au niveau des universités pour savoir comment on peut amener les étudiants à venir à l'université. Souvent, ces analyses-là vont... ne considéreront pas l'aspect financier. Elles vont simplement mettre en question la volonté des étudiants. Au niveau de ça, nous pensons sérieusement qu'encore une fois, là, il faudrait peut-être prendre en compte plus largement l'aspect financier. Ce n'est malheureusement pas tout le monde qui a les parents qui sont capables de financer les études. Donc, à ce niveau-là, nous pensons que c'est vraiment important de garder en mémoire, là, l'aspect de l'aspect financier finalement et de faire en sorte que le gel soit maintenu.
n
(9 h 50)
n
Il y a plusieurs, là, questions qui ont été aussi soulevées ou comparaisons, si je pourrais m'exprimer ainsi, par rapport aux autres pays, que ce soit dans les médias ou que ce soit autour de la table, même si ça a peut-être été moins regardé. Bien entendu, il y a la question, là, de la Grande-Bretagne qui a été soulevée, et, bien entendu, il y a de forts aspects négatifs auxquels nous n'adhérons pas, à notre faculté. Et ensuite, là, vous pouvez regarder aussi au niveau des indices d'abordabilité, qu'on a justement abordés dans notre mémoire. Et ça prouve, là, qu'il commence a y avoir un écart assez croissant entre les différentes classes sociales. Nous espérons évidemment que la décision du gouvernement ira dans le sens de favoriser l'accessibilité au maximum et de faire en sorte que le Québec puisse vraiment devenir une société épanouie et, bien entendu, très éduquée.
J'ai donc parlé évidemment de la loi-cadre. Je tiens à le rementionner, c'est important pour nous. Une question aussi de dire que, quand ça augmente de manière un peu bizarre, si on peut dire, il y a vraiment des augmentations par rapport soit aux frais de rédaction ou à des frais qui ne sont pas nécessairement reliés à des services. Donc, nous pensons, là, qu'il faut évidemment une loi-cadre à ce niveau. Par rapport à ça aussi, je parlais, là, tout à l'heure, là, des... de l'Angleterre, pardon. Et ensuite de ça aussi, une comparaison un peu fâcheuse pour nous, à la faculté, c'est de se comparer aux États-Unis. Vous savez, les États-Unis ont un modèle et... une société qui est très différente de la nôtre. Nous pensons que nous devons adapter notre système d'éducation de manière à ce qu'il nous convienne, et non pas sur ce qui peut nécessairement se faire aux États-Unis. Je pense que l'ancien recteur de l'Université Laval, qui est malheureusement décédé, là, dans une lettre, là, exprimait bien la vue de l'ensemble de l'Europe un peu sur notre système d'éducation, qui était quand même bien. Et on pense qu'il faut continuer à mettre en valeur les avantages et évidemment pallier à certains défauts.
Et évidemment, en ce qui concerne le reste du Canada, bien, vous savez, le reste du Canada a quand même vu ses frais de scolarité augmenter. On parlait tout à l'heure, là, de l'indice d'abordabilité et on a pu constater, là, qu'il y a quand même un certain écart, là, malgré les tentatives qui ont été faites au niveau des prêts et bourses. On pense donc que ça ne serait pas nécessairement très pertinent de se comparer au reste du Canada. Et évidemment, en ce qui concerne la place du privé, on n'en pas nécessairement parlé beaucoup. Mais je pense que c'est plus dans le niveau du deuxième, troisième cycles qu'on aborde la question, et on pourra y revenir tout à l'heure, là, mais ça reste quand même un enjeu important, là, pour trouver des manques... pour trouver le financement finalement au manque à gagner de nos universités.
Maintenant, en ce qui concerne l'importance des sciences humaines, ça nous tient particulièrement à coeur, vous le comprendrez. Il n'y a pas énormément de groupes qui sont venus quand même parler des sciences humaines. À chaque fois... dont il était question, c'était le manque financement au niveau de la recherche des cycles supérieurs. Nous, on va aller dans ce sens-là puis on va pousser un peu plus loin parce qu'on pense que... Vous savez, on parle souvent d'un avantage comparatif sur les autres pays, mais finalement on ne peut pas faire en sorte qu'un professeur de l'Inde vienne enseigner notre histoire ou un sociologue russe... bien entendu, dans une université, oui. Mais l'éducation, ça se fait quand même à plusieurs niveaux. Donc, il faut quand même faire en sorte que les sciences humaines aient leur part et... les sciences sociales finalement aient leur part d'argent, qu'on puisse faire en sorte finalement qu'ils soient quand même bien traités et... vraiment développer cet aspect-là des universités, qui, nous pensons, pourrait être mieux encadré.
Vous savez, les sciences humaines amènent un esprit... ou les sciences sociales, avec la philosophie, amènent un esprit critique que toute société a de besoin. Je pense qu'on n'aura pas vraiment d'objection à ce niveau autour de la table. C'est quand même quelque chose d'important. Et, vous savez, les sciences humaines à Sherbrooke, c'est quand même... Malgré notre manque à gagner, un certain sous-financement, on réussit à sortir des lapins de nos chapeaux et à faire en sorte que ce soit quand même assez orignal, faire en sorte qu'on puisse développer un aspect qui est, comme vous le savez un peu, là, particulier à l'Université de Sherbrooke, c'est-à-dire un aspect appliqué. Puis je pourrais vous donner des exemples très rapidement. Au niveau du bac en communications, c'est un bac qui est basé beaucoup sur, bon, sur le système coop, donc les stages en entreprise. Ensuite, faire en sorte qu'il puisse y avoir un aspect multimédia. Vous savez, tout l'aspect multimédia est très important de nos jours, et c'est difficile d'en détacher le reste de nos programmes.
Au niveau, exemple, aussi de la politique appliquée, nous, ce n'est pas un bac en sciences politiques, c'est vraiment un bac en politique appliquée. Et qu'est-ce qu'il y a de différent? Bon. Vous savez, a on des professeurs comme Sami Aoun, Jean-Herman Guay justement qui enseignent et qui ont une approche pédagogique qui est quand même, au niveau du département, très différente. On a la simulation des Nations Unies qui est vraiment encadrée, qui a des cours qui font en sorte que les étudiants vont une semaine à New York, vraiment à l'ONU, faire une simulation de ce qui se passe au niveau international. Et on est quand même très bien cotés à ce niveau-là. Alors, c'est quelque chose dont nous sommes fiers et que nous aimerions, bien entendu, pouvoir pousser davantage. Ou, exemple, justement il y a un outil sur Internet, Bilan du siècle, qui fait en sorte que c'est un outil de référence qui est nouveau, qui est sur Internet, qui a été créé à l'Université de Sherbrooke, au département. Donc, c'est quelque chose de très, très bien. Ou il y a encore, je pourrais dire, le bac en économique ou encore en service social, où il y a des stages, en géomatique aussi, si je me rappelle bien. Donc, c'est vraiment un aspect qu'on a réussi à développer, à faire en sorte qu'on s'intègre à l'Université de Sherbrooke, même si ce n'est pas nécessairement facile en sciences humaines.
On parlait, là, justement, lors de la présentation de l'Université de Sherbrooke ou encore de la fédération étudiante des universités, de l'aspect de l'Université de Sherbrooke. C'est un peu difficile de cadrer exactement quel est le statut de l'Université de Sherbrooke, université en région, université urbaine. C'est un débat, juste au niveau des étudiants, qui est quand même assez intéressant quand on considère, là, qu'un étudiant postsecondaire finalement représente une personne sur cinq habitant la ville de Sherbrooke; c'est quand même 20 % de la population. Donc, Sherbrooke vit quand même beaucoup, là, à l'heure de l'université. Évidemment, les sciences humaines, on est partie, on fait partie intégrante de ce processus. Et justement aussi au niveau, là, des petites statistiques, les étudiants ne venant pas de Sherbrooke ? on en parlait lors de la présentation de la FEUQ. C'est quand même trois étudiants sur quatre qui ne viennent pas de Sherbrooke, ce qui fait quand même une dynamique sur le campus, là, qui est assez particulière.
Et, parlant de dynamique, je voulais en arriver là pour vous donner une impression, une anecdote dont M. Reid pourra peut-être se rappeler comme ancien recteur mais Mme Marois aussi ? je pense que vous êtes venue sur notre campus dernièrement. Vous savez, l'Université de Sherbrooke est faite en strates, si je peux m'exprimer ainsi. Et les facultés en haut de la pente sont administration et génie, et les facultés du bas de la pente sont sciences humaines et sciences sociales, globalement. Donc, quand on parle des sciences riches, des facultés riches... quand on parle des facultés riches, on parle des facultés en haut de la pente, et, dès qu'on fait référence à des personnes du bas de la pente, c'est des personnes qui n'ont pas nécessairement les mêmes moyens financiers. C'est quand même une anecdote intéressante qui révèle, là, pas mal le portrait, je dirais, de la situation de la Faculté des lettres et sciences humaines.
Maintenant, là, au niveau du financement de la recherche. Nous ne sommes pas des experts, mais nous avons quand même pris le temps d'y réfléchir, car nous voyons, à ce moment-là, vraiment un problème au niveau de la recherche fondamentale versus recherche appliquée. Au niveau de la recherche, là, il y a des statistiques, là, je pense, qui le montrent. Vous pouvez voir, là, d'ailleurs notre graphique à la page 41 de notre mémoire, au niveau des montants d'argent qui sont attribués. C'est donc quand même, là... Au niveau de la contribution des partenaires en sciences humaines et sociales, sciences naturelles et génie, on ne reçoit pas nécessairement notre juste part, et ce qui fait que nous avons parfois comme préoccupation: Quel est vraiment le sentiment de la société envers notre égard, envers nous? Qu'est-ce que la société attend de nous? Nous avons peu de moyens financiers. Nous avons souvent le mythe de pelleter des nuages qui s'applique à nous, et c'est un peu difficile des fois de s'en défaire. Quelqu'un, exemple, nos parents, quand nous étions jeunes, nous disaient: Vous allez aller en sciences humaines; qu'est-ce que vous allez faire dans la vie? Ce n'est pas nécessairement quelque chose qui est facile. Et, quand on voit des statistiques comme celles-ci, qu'on a dans notre mémoire, on se pose sérieusement la question: Qu'est-ce que la société nous demande en nous subventionnant moins adéquatement, je dirais, que les autres sciences ou programmes?
n
(10 heures)
n
C'est donc un enjeu important pour nous, de pouvoir faire en sorte que l'ensemble des programmes, les fonds de recherche, des programmes, et ainsi de suite, reçoivent quand même une part plus juste que d'autres programmes.
Vous savez, la recherche est en pleine mutation. On parle de plus en plus justement de la place du privé, aussi de, bon, l'apport du public, l'apport du parapublic, et ainsi de suite, ce qui fait en sorte encore une fois que la recherche n'est pas nécessairement facile à cibler au niveau de la subvention. Et, bien entendu, le problème qui se pose, c'est: le secteur n'est pas nécessairement intéressé en premier lieu à financer nos recherches, et ainsi de suite.
Je vais vous donner un exemple classique au niveau de la place du privé, encore une fois à Sherbrooke. On va aller à la Faculté de l'administration. Il y a... Des locaux ont, pratiquement à côté de la porte, un commanditaire. Mais, en sciences humaines, ce serait très difficile d'après moi à première vue, de demander à Bombardier de subventionner notre plus gros local. Ce n'est pas nécessairement la même dynamique. Bien entendu, ça se ferait peut-être, mais ce serait quand même un travail à accomplir qui en vaudrait peut-être la peine mais qui serait difficile, certainement.
Après ça. Bon. Bien, vous savez, nous ne sommes pas contre la place du privé, bien entendu. Nous vivons dans un cadre de société qui est quand même fort complexe et où le contexte budgétaire est ? on ne se le cachera pas, là ? quand même très serré. Il faut donc aller chercher l'apport de toutes les personnes qui en profitent mais aussi la société en général, donc ce qui veut dire, bien entendu, le gouvernement. Il faudrait donc faire en sorte que, bien entendu, le privé ait sa place dans tout ce qui concerne le financement des universités, mais que ce soit avant tout le gouvernement et la société en général qui gardent un point de vue, là... vraiment la gestion, si on peut dire, du financement des universités.
Par rapport à ça justement, je parlais tout à l'heure, là, de tout l'aspect, là, du privé qui est difficile à mettre en place pour les sciences humaines. Vous savez, on a quand même, là, au niveau des besoins au niveau des sciences humaines, des ouvrages de référence dans les bibliothèques, des revues spécialisées, et ce n'est pas nécessairement facile dans un contexte, là, où les coûts de système, et ainsi de suite, sont quand même assez gérés étroitement. Globalement, là, je n'ai pas les chiffres du budget de ma faculté, bien entendu, mais, vous savez, on était supposés engendrer un déficit important... très important qui se chiffrait dans les centaines de milliers de dollars, si ce n'est pas plus. Et, lorsqu'on a vu les chiffres à la toute fin, qui étaient quand même astronomiques mais qui étaient beaucoup moindres, le conseil d'administration a pratiquement mis une motion de félicitations à la faculté pour avoir réussi à ne pas faire trop de déficits.
C'est quand même assez particulier, qu'on en arrive à cette situation, qui est quand même un peu choquante pour nous, de voir que les sciences humaines se font applaudir pour ne pas créer trop de déficits, alors que d'autres facultés ont la possibilité d'avoir davantage de moyens d'accomplir quand même les rêves des étudiants. Alors, on pense finalement que c'est simplement une question d'équité. Ensuite, au niveau...
Bon. Je conclurais très, très simplement. J'ai fait un portrait global. C'est peut-être un peu difficile, là, de pouvoir parler de l'ensemble des sciences humaines en 20 minutes, mais, vous savez, au niveau des fonds subventionnaires, il y a plusieurs solutions qui ont été mises sur la table. On peut peut-être parler, là, évidemment, bon, de ce que le CNCS-FEUQ propose ? évidemment, c'est plus eux qui s'y connaissent, donc on les appuie évidemment fortement dans leurs demandes ? et ensuite faire en sorte que... ? bon, on en a parlé un peu: gel des frais de scolarité, aussi la place du privé; ça, je tiens à le rappeler, là, on est quand même ouverts à discuter à ce niveau-là ? de faire en sorte vraiment que les universités puissent rattraper leur retard tout en ayant l'apport de toutes les parties qui peuvent être intéressées à les financer. Et, bien entendu, ce sera à vous de décider comment vous gérez ce problème. Et, vous savez, cet aspect, ce genre de mentalité, je dirais, des fois qu'on a à court terme dans notre société...
Nous, dans notre faculté, il est beaucoup question d'environnement parfois, et on trouve que c'est parfois difficile d'avoir une vision à long terme. J'ai été très content, et je pense que je ne suis pas le seul quand même, de voir M. Charest, là, parler déjà du choc démographique. C'est une question à long terme, et on pense que c'est évidemment, là, quelque chose qu'il va falloir régler. Et, pour faire le lien avec les universités, ce serait peut-être bien, de régler le problème là, avant justement qu'on ait un retard important et, surtout au niveau des sciences humaines, de commencer à valoriser finalement ce domaine d'études là qui est parfois un peu, je dirais, un peu négligé.
Donc, je vous remercie évidemment beaucoup et j'espère que la discussion qui va suivre sera très agréable.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Brady. Alors, je propose peut-être des blocs de huit minutes. Je vais commencer à ma droite avec M. le ministre de l'Éducation et député d'Orford.
M. Reid: Merci, M. le Président. Bienvenue à la délégation de l'Association générale des étudiants de la Faculté de lettres et sciences humaines, qui nous amène un point de vue très intéressant. Je ne pense pas qu'on ait insisté autant, depuis le début de la commission, pour nous faire ressortir les préoccupations que vous avez. Juste avant de continuer, je voulais vous rappeler aussi qu'en bas de la pente, à Sherbrooke, je pense qu'il y a les économistes, qui ne sont pas nécessairement les plus pauvres, qui n'ont peut-être pas nécessairement les pouvoirs... Comme on va voir aujourd'hui, c'est souvent des économistes qui préparent les plus grandes décisions qu'on prend annuellement. Également ? si ça peut vous consoler ? si on vous demande: Qu'est-ce qu'on peut faire dans la vie avec des lettres et des sciences humaines? Si cela peut vous consoler, moi, j'ai fait les mathématiques pures et je me suis fait demander, pendant des années, qu'est-ce que j'allais faire dans la vie avec des mathématiques pures. Mais rassurez-vous, on se débrouille.
Je trouve... C'est très intéressant que vous nous ameniez des préoccupations qui touchent à beaucoup de choses, effectivement qui sont de la sensibilité propre, et vous nous les amenez, et je trouve que c'est très intéressant. Je pense, par exemple, à toute la question du subventionnement de la recherche et de la création, d'ailleurs ? parce que ça fait partie aussi des sciences humaines et des lettres ? le financement par le privé, dont vous venez de reparler; les comparaisons que vous faites dans le texte entre la recherche en sciences humaines et en génie ou entre les sommes qui sont consacrées par l'extérieur, par le privé; toute la question de la valorisation, la valorisation et l'innovation. En fait, on parle souvent d'innovation sociale et pas uniquement d'innovation technologique. Et vous amenez aussi quelque chose dont on n'a pas parlé ici ? et j'aimerais que vous nous en reparliez un peu tantôt ? cette question de la recherche dite «recherche libre» et aussi la question du recrutement des professeurs également, typiquement aux sciences humaines. On parle souvent de ce que ça coûte pour recruter un professeur en biotechnologie, mais on oublie que le recrutement des professeurs en sciences humaines, c'est une problématique qui est essentielle également à la qualité de la formation universitaire.
J'aimerais peut-être que vous commenciez par un élément de la valorisation en fait de la recherche. Et vous mentionnez la valorisation de la recherche en sciences humaines et vous dites... Bon. Vous faites ressortir effectivement qu'il y a des outils de valorisation qui sont beaucoup plus répandus quand on pense à la technologie, que ce soit biotechnologie ou autre.
Est-ce que vous avez pensé à des moyens particuliers... surtout venant de, comme vous l'avez décrit, là, d'une faculté où il y a quand même beaucoup d'innovation au départ, même dans les formules d'enseignement, et tout ça, et donc il y a de l'innovation également dans la recherche? Est-ce que vous avez pensé à des moyens qui pourraient nous éclairer, là, dans le sens d'une plus grande valorisation de la recherche en sciences humaines?
M. Brady (Jean-Patrick): C'est une excellente question. Et je tiens tout d'abord à vous mentionner un petit changement, c'est-à-dire que le Département d'économique de la faculté va maintenant se déplacer en administration, donc dans le haut de la pente. Donc, c'est un petit changement quand même important à noter.Et donc, bien entendu, là, plusieurs d'entre vous quand même ont des bacs en sciences humaines, là. Mme Marois a un bac en service social; M. Kelley, je pense que vous avez une formation en histoire. Donc, évidemment, je pense que vous êtes bien placés pour comprendre un peu l'aspect.
En ce qui concerne... Bon. Vous avez parlé un peu de la recherche libre. On n'a pas nécessairement développé, là, au maximum, je dirais, ces aspects-là parce que c'est des aspects quand même très techniques puis on ne voulait pas nécessairement, là, se mettre dans ce cadre-là. Mais finalement, là, toute la question, bon, recherche libre, valorisation, recrutement des sciences humaines, comme vous le dites, ça vient toucher vraiment la notion de valorisation. Et c'est un peu difficile de... Parce que c'est une mentalité en société, un peu, la notion de valorisation et un peu qu'est-ce que la société pense de nous. Et, au niveau politique, je comprends un peu votre interrogation de comment on peut en venir à des solutions très pratico-pratiques.
Finalement, au niveau de... Je pense que le gouvernement, juste en rétablissant un équilibre, lance un message en disant: Vous êtes importants. Parce que, quand quelqu'un... Puis on a les statistiques; je pense que c'est au nombre de... le nombre d'étudiants, là, ou la proportion des fonds qui sont attribués, alors qu'on a 18 %, je pense, environ, là... Je ne m'en rappelle plus exactement.
n
(10 h 10)
n
En tout cas, on a un très faible taux des fonds subventionnaires, alors qu'on représente beaucoup de masse de recherche. Alors, peut-être qu'à ce moment-là, en simplement, là, en rétablissant un équilibre, ça peut aider. Et ensuite je dirais qu'au niveau de la notion de la valorisation, dont vous parliez tout à l'heure, ouf! C'est une question que, malheureusement, là, je ne pourrais pas nécessairement élaborer longtemps, mais je pense qu'avant tout c'est de relancer le processus et de faire en sorte que ça puisse mieux marcher, là, le lien gouvernement et étudiants et fonds subventionnaires. Je pense que c'est la première démarche, et ensuite vous ne pouvez pas nécessairement tout faire. Et, en lançant un message comme ça, ça peut faire en sorte que ça va aider nos étudiants juste à se sentir plus valorisés ? c'est déjà une augmentation de la confiance en soi ? et ensuite de faire en sorte qu'on ait d'autres fonds, finalement. C'est surtout ça, la première étape, je pense.
M. Reid: Oui. Concernant... Bon. Je comprends donc, dans votre réaction, là, que, quand vous parlez de rééquilibrer, ou en tout cas de faire quelque chose de plus pour la recherche en sciences humaines, lettres et sciences humaines, création, ce n'est pas nécessairement en faisant quelque chose en dehors des conseils subventionnaires, C'est... Ce que vous parlez, c'est de mettre un équilibre ou d'en mettre plus mais par le biais et le mécanisme des conseils subventionnaires.
Est-ce que je comprends bien? C'est ça ou...
M. Brady (Jean-Patrick): C'est un moyen. Nous pensons que c'est un moyen. Ce n'est pas le seul moyen, mais, bien entendu, écoutez, il y a... C'est un aspect un peu plus philosophique, si on peut dire, la notion de valorisation, et c'est, bien entendu, à l'ensemble de la société...
On ne peut demander au gouvernement de dire à la population de davantage valoriser ça ? c'est un peu impossible ? mais c'est la première étape. Nous pensons vraiment que c'est la première étape et ensuite voir les effets. Bien entendu, des fois il ne faut pas nécessairement mettre trop d'éléments sur la table. Il faut commencer par faire les premiers gestes, et, au niveau financier, ce serait déjà un message clair envoyé aux étudiants et à la population que les sciences humaines sont importantes pour notre société et ensuite voir, là, est-ce qu'aussi... Bon. Je ne veux pas... Parce qu'on peut penser aussi à la cote CLARDER... la façon de redistribuer l'argent, ce qui est quand même, là, un débat assez minutieux et très, très difficile à faire. Mais finalement, là, je vous dirais que la première étape pour nous au niveau de la recherche, c'est de mettre en sorte... que le gouvernement mette vraiment une notion de valorisation, puis dire aux étudiants: Nous pensons à vous, et vous êtes aussi importants que même... vous êtes aussi importants que les autres, même si, au niveau commercial, vous n'avez pas autant de répercussions immédiates. Mais, à long terme, c'est très, très, très important.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Oui. Alors, merci, M. le Président. Je m'excuse pour mon retard, mais rassurez-vous; j'avais lu votre mémoire et je suis heureuse de vous accueillir aussi au nom de ma formation politique et de vous remercier pour cette présentation.
Effectivement, je pense que tous les historiens le disent et le rappellent: Pour savoir où l'on va, il faut savoir d'où l'on vient. Et je pense qu'à cet égard c'est aussi important de valoriser l'histoire, la philosophie, les sciences sociales qui se préoccupent souvent des comportements, enfin qui se préoccupent pour l'essentiel, dans certains cas, des comportements humains, de leur importance pour les changements dans nos sociétés et le progrès de nos sociétés. Et il faut tout autant, je crois, valoriser la recherche à ce niveau qu'au niveau, comme vous le mentionniez dans votre propre mémoire... qu'on le fait au niveau des sciences dures, pour utiliser votre expression.
Qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus ou de différent? Et ça s'inscrit un peu dans la discussion, là, que vous venez d'avoir avec le ministre. Qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus comme société, comme État, comme décideurs politiques ou décideurs économiques pour davantage valoriser la recherche en sciences humaines, en sciences sociales, en littérature, en histoire? Parce que, ça aussi, ça fait partie de la vie. C'est ce qui souvent d'ailleurs la rend belle et agréable finalement, hein? De pouvoir se plonger dans un livre écrit par un grand philosophe ou par une grande poétesse ou... c'est absolument passionnant. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus ? autant, là, que par les décideurs que par d'autres intervenants dans nos sociétés.
M. Brady (Jean-Patrick): C'est le débat même, je pense, de notre présentation. C'est la question la plus importante et... Bon. Vous savez, il y a une sensibilisation, on pense, à faire. Et là je pense que je parle vraiment au nom de ma faculté. Quand on parlait un peu de raisons instrumentales dans notre mémoire et un aspect aussi court terme que j'ai parlé, et on...
Finalement, il faudrait peut-être penser à des moyens dans les écoles. On parle beaucoup des programmes au niveau secondaire, bon, de tout l'aspect des cheminements, bon, école internationale, et ainsi de suite. Ça, c'est très intéressant au niveau de la langue ? apprendre d'autres langues ? ce qui fait partie évidemment de tout l'aspect social, sciences sociales. Et, oui, il faut pratiquer les sports; l'éducation physique, c'est important. Mais il y a sûrement, là, moyen, là, au niveau, là, de pousser les activités peut-être un peu plus pratiques et sortir, là... Vous savez, on parle souvent du taux de décrochage chez les garçons. Peut-être qu'au niveau d'activités pratiques, au niveau de l'histoire, exemple... Si les étudiants en bas âge venaient ici ? c'est sûr que ça se fait, mais ça ne se fait pas nécessairement beaucoup ? ou s'ils avaient l'occasion de rencontrer... de visiter des lieux importants, des lieux intéressants, d'avoir des activités... Ça se fait déjà un peu au niveau de l'écriture, là, c'est quand même poussé. Mais, quand on parle de valorisation, avant tout je pense qu'il faut aller chercher en bas âge, et ça, je pense que plusieurs d'entre nous seront d'accord avec ça: plus on va chercher en bas âge, plus c'est important. Donc, que ce soit même au niveau primaire, finalement.
Vous allez avoir, bien entendu, là, la question des collèges qui approche bientôt, mais plusieurs groupes sont venus parler en disant: C'est important, c'est un point de vue global qu'il faut avoir. Au niveau des sciences humaines, je pense que c'est le même point de vue qu'il faut adopter, qu'il faut absolument améliorer peut-être la vision qu'on a au niveau primaire, secondaire et de permettre, là, un renouveau au niveau des activités, là, pratiques, je dirais beaucoup pratiques. Et ça va déjà faire... ça va créer un nouveau momentum, si je peux m'exprimer encore une fois ainsi, là, et faire en sorte que les générations à venir vont avoir aussi un esprit plus critique, plus global de la société, une culture générale. On parle souvent, là, des fois, là... Moi, on me rappelle, là, que nos enfants n'ont pas beaucoup de culture générale. Bien là ce sera peut-être, là, en poussant de cette façon-là, à améliorer les sciences humaines à l'université, mais en même temps, la société en général.
Mme Marois:. C'est intéressant parce que, dans votre mémoire, vous faites référence aux transformations, là, qui se sont produites et qui se produiront encore dans les cours primaires et secondaires, en disant, là: «Il serait intéressant d'encourager les écoles secondaires [...] à utiliser de telles publications ? en faisant référence aux publications scientifiques, littéraires ou dans le domaine des sciences sociales, là ? dans le cadre de leurs cours d'éducation à la citoyenneté, par exemple.» Alors, c'est intéressant effectivement d'imaginer que ça puisse se passer comme ça.
Bon. Dans vos recommandations, évidemment vous faites référence beaucoup, et dans votre mémoire et dans vos recommandations, au sous-financement des programmes de sciences humaines. On dit ? et à 6 et à 7, là, ce sont des recommandations qui touchent cela en particulier ? à la page 54 de votre...
Une voix: ...
Mme Marois: ...pardon? Excusez-moi, j'étais trop concentrée; je ne suivais pas ce qui se passait de l'autre côté. «Que les universités mettent en place des mécanismes permettant aux programmes souffrant d'un sous-financement de la part d'entreprises privées et des fonds subventionnaires de se développer à juste titre.»
Vous avez vraiment... Bon. Je pense que ça se constate, là, concrètement, qu'il y a un écart assez important dans les sommes dévolues à chacun des fonds, mais à quoi vous pensiez en particulier lorsque vous avez fait cette recommandation-là?
M. Brady (Jean-Patrick): C'est... Je dirais que, bon, il y a toute la question de la péréquation, là, comme à l'Université de Sherbrooke. M. Béchard vous en a entretenu, là, sur la péréquation qui... Évidemment, quand on parle de sous-financement des facultés des lettres et sciences humaines, ça fait référence aussi à un sous-financement global.
Première chose. Peut-être qu'en redonnant le montant qu'on désire, le 375 millions, ça pourrait pallier ou ça pourrait au moins donner une forme de réinvestissement. Et je pense que les universités ont fait un débat ici, et, bien entendu, on va en parler aussi à notre université. Vous avez peut-être évidemment une partie à faire.
n(10 h 20)n Les universités en ont une aussi, car c'est la question de la péréquation. Bien entendu, la médecine, ça coûte très cher ? former un étudiant ? on en est conscients, mais il faudrait trouver un moyen en repensant une péréquation peut-être un peu plus poussée, je dirais, moi. Au niveau de la cote CLARDER, là, ce n'est quand même pas beaucoup d'argent qui est donné à chaque étudiant pour, bon, les étudiants à temps plein, là. Alors, il faudrait peut-être penser justement à revoir cette formule-là, qui sera évidemment ? on le saura dans quelques heures ? peut-être permise, là, tout dépendant du budget, et ainsi de suite. Donc, première étape, je dirais que, bien entendu, c'est au niveau des universités, là, la question de la péréquation; et ensuite, là, pouvoir jouer dans toute la question de la bureaucratie universitaire et gouvernementale au niveau du financement, qui est lourde mais qui est quand même en partie nécessaire. Donc, la péréquation en est un exemple.
Mme Marois: D'accord. Merci, ça va. On reviendra.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Reid: Oui. Juste peut-être pour vous dire qu'il y a quand même des choses intéressantes qui arrivent pour préparer nos jeunes à... et les ouvrir... Hier, il y avait le Colloque de l'école montréalaise, qui est un programme de soutien qui avait été fait par le gouvernement précédent et qu'on a gardé parce qu'il est essentiel. Et, juste pour vous dire, là, il y a 50 organismes culturels de Montréal qui se sont associés aux écoles montréalaises pour faire des activités particulières, pour aider au décrochage, et donc ça veut dire aider au décrochage mais carrément avec un contact plus étroit avec la culture, la littérature, etc. Et donc il y a beaucoup de choses qui se font, pas uniquement à Montréal. Le programme Agir autrement, qui est un peu le même programme, a aussi... amène des éléments nouveaux.
Moi, j'aimerais vous poser une question qui est spécifique à l'Université de Sherbrooke, qui est un exemple, et voir si c'est ce genre d'exemple là que vous aimeriez voir se multiplier. Sans rentrer dans les détails ? et ce ne sera pas controversé parce que c'est un projet qui a été d'abord subventionné par le gouvernement précédent et qui a continué de l'être par notre gouvernement ? c'est le programme... c'est ce projet de dictionnaire du français d'Amérique, qui implique beaucoup de chercheurs, linguistes, etc., qui, finalement va remplacer peut-être... ? enfin, c'est le souhait qui est fait par ces chercheurs-là et par le gouvernement ? qui va amener une alternative tout à fait québécoise au Robert, au Larousse, etc. C'est un projet énorme. C'est un projet qui, d'après ce que j'en sais, fonctionne bien. Et on parle de quelque chose qui est typiquement lettres et sciences humaines. Et on parle de quelque chose qui est un projet de valorisation spécifique dans lequel il y a beaucoup effectivement de recherche, de recherche appliquée, de jeunes chercheurs et chercheuses impliqués et qui va donner quelque chose qui n'est pas un médicament, là, mais quelque chose qui est peut-être au moins aussi important pour notre société québécoise et notre identité québécoise.
Est-ce que ce genre de projet est un projet que... c'est ce genre de chose là que vous souhaiteriez voir se multiplier au Québec, en lettres et sciences humaines?
M. Brady (Jean-Patrick): C'est en effet un projet dont nous sommes très fiers ? évidemment, nous sommes très fiers ? qui est quand même une bonne visibilité pour la faculté. Et en effet c'est toujours intéressant de pouvoir donner un aspect québécois. Vous parliez justement, là, d'une alternative au Robert, et ainsi de suite. C'est en effet une possibilité, c'est quelque chose... c'est un bon point de départ. C'est quelque chose dont nous pouvons être fiers, qui serait un bon outil de valorisation. Évidemment, à partir de ce moment-là, il faut le publiciser, il faut... C'est peut-être un peu un des problèmes, à la limite, de dire que nos recherches n'ont pas nécessairement aussi l'impact qu'on voudrait, alors que nous formons quand même beaucoup la vulgarisation. Et c'est un peu dommage de peut-être pas... à la limite, je dirais, de ne pas nécessairement le publiciser assez. Mais en effet, le dictionnaire du français d'Amérique ? j'aurais pu le citer tout à l'heure ? est un exemple qui est quand même assez intéressant qui pourrait être appliqué, là, à quand même plusieurs autres domaines, qui serait encore une fois, là, un bon point de départ.
M. Reid: C'est bien. Est-ce qu'il y a des collègues qui ont des questions, là?
Le Président (M. Kelley): Moi, je veux poser une question. La première recommandation. Parce qu'on a eu un débat sur la question d'une loi-cadre pour réglementer les frais afférents. Et je pense à vos voisins de Bishop's qui sont venus avec leurs étudiants, qui ont plaidé le contraire. Ils ont dit: Il faut préserver notre autonomie. Ils ont un processus à l'interne à chaque année pour négocier les frais afférents et ils ne veulent pas les gros sabots du gouvernement mêlés dans leurs affaires.
Alors, comment s'assurer que... On plaide pour une loi-cadre ici. Est-ce que c'est vraiment souhaitable ou est-ce qu'on risque d'avoir une ingérence dans vos affaires qui ne serait pas souhaitable?
M. Brady (Jean-Patrick): Le fameux concept d'autonomie des universités, c'est quelque chose qui est quand même fort important dans tout ce débat-ci, principalement évidemment la question de la loi-cadre. Je dirais que, bien entendu, nous, nous sommes pour une loi-cadre, car ce que nous avons constaté ? et je pense que c'est dans le mémoire, là, c'est quand même assez explicitement dit ? c'est que le problème avec les frais afférents et toute cette problématique-là, c'est qu'on a l'impression que les universités, pour pallier le sous-financement, ont augmenté les frais afférents et... ce qui fait en sorte que c'est quand même assez... ça crée une multitude de problèmes par rapport justement au fait que... d'où doit venir la formule de financement, et ce qui crée ensuite une compétition entre les universités ? quelle université qui va le moins augmenter les frais afférents, et ainsi de suite.
Nous pensons évidemment que c'est une question qui doit être réglée par la loi-cadre... ? comme la FEUQ le demande et beaucoup d'associations étudiantes, quand même ? et de faire en sorte finalement que ce soit réglementé et que ça ne serve plus d'excuse à un sous-financement qui est beaucoup plus global, et qu'on ne peut pas simplement, là, pallier, là, avec une question de frais afférents à coup de 300 $, 400 $, qui est un peu, selon notre avis, un peu non démocratique finalement, parce que c'est des institutions quand même un peu publiques ? et un peu beaucoup ? et ensuite de faire en sorte vraiment que ce soit ? néanmoins, je dois le dire, là ? réglementé au niveau du gouvernement, bien qu'il y ait le principe d'autonomie. Et c'est ce que nous pensons, et les associations étudiantes l'ont déjà mentionné, je pense.
Le Président (M. Kelley): C'est juste pour situer le débat, parce que, comme j'ai dit, les étudiants de Bishop's sont venus avec les exemples très concrets que c'est les services additionnels qu'ils sont prêts à payer pour. Et ma crainte ? toujours avec une loi-cadre ? on a 19 établissements universitaires qui ont des réalités toutes différentes. Et quelque chose qui marcherait pour vous à Sherbrooke, et... peut-être les étudiants aux Hautes Études commerciales ont un autre point de vue aussi. Le problème avec la loi-cadre, c'est toujours l'uniformité et, de par la réalité chez vous... Et avoir une loi-cadre qui fait votre affaire peut causer des problèmes pour vos voisins dans d'autres établissements.
M. Brady (Jean-Patrick): ...c'est clair que ça fait partie évidemment d'un enjeu, bon, à la limite politique avec plusieurs groupes de pression, je dirais. Je pense qu'il y a quand même moyen, là, d'en arriver avec une loi-cadre, là, qui a une certaine flexibilité. Puis, vous savez, au niveau des frais afférents, ce n'est pas comme si on était totalement contre. Nous, ce qu'on... quand il est question des services, on n'a aucun problème des frais afférents reliés à des services. Et, en ce qui concerne les étudiants à l'Université Bishop's, de la façon dont vous le mentionnez, je pense qu'il y avait quand même, là ? et nous aussi, là ? il y a la question de la passe universelle des autobus, qui va bientôt venir sur le tapis, là, à l'université mais qui est quand même des frais afférents reliés à un service.
Donc, au niveau de la loi-cadre, là, c'est surtout, là, au niveau de... ? bon, vous savez, il y a environ 135 appellations différentes ? c'est de quand même, là, bien cibler, là, ce qui est un service et de dire finalement: les universités, qu'elles ne procèdent pas à des hausses de frais de scolarité déguisées parce que c'est ça, le véritable problème, et c'est ça, le véritable enjeu. Et on pense sérieusement qu'avec une loi-cadre on peut en venir à une solution qui serait capable de respecter l'ensemble, là, des acteurs universitaires.
Le Président (M. Kelley): Parfait, merci beaucoup. M. le député de Bertrand.
M. Cousineau: Merci, M. le Président. Bonjour. Bienvenue à cette commission parlementaire. Beaucoup de groupes, là, qui vous ont précédés dans les dernières semaines aussi ont déploré le manque de financement ou la baisse du financement au niveau des trois fonds subventionnaires québécois, là: celui de la recherche en santé; au niveau de la science technologie; et puis celui évidemment qui nous touche particulièrement aujourd'hui, au niveau de la société puis de la culture et puis... Donc, il y a eu une baisse de 7 %.
Mais j'imagine qu'avec tout ce qui s'est dit depuis quelques semaines le ministre des Finances a dû prendre ça en compte, parce que, sans doute que le ministre de l'Éducation a plaidé pour une augmentation des budgets dans ces trois fonds là ? on va le voir cet après-midi de toute façon ? mais je suis persuadé qu'il a plaidé pour ça mais... Donc, les gens nous ont dit que c'était déplorable de voir les baisses au niveau de ces trois fonds là. Puis, vous, vous consacrez toute la section II, là, puis le chapitre IV de votre mémoire pour nous dire qu'il y a un sous-financement au niveau des sciences humaines et puis qu'on devrait faire en sorte... D'abord, vous avez parlé de péréquation. Vous avez... Bon. On a parlé de valorisation des sciences humaines, on a parlé de péréquation.
Il y a certains groupes qui nous ont rencontrés et puis qui nous ont présenté un modèle qui pourrait être intéressant dans l'avenir pour le financement de la recherche au niveau de... dans tous les domaines universitaires. On nous a parlé de la mise en place d'un fonds institutionnel ou d'un fonds national, c'est-à-dire que l'argent en provenance du privé pourrait être placé dans un fonds, et puis ça pourrait être redistribué aux différentes facultés, et puis aux différents domaines d'études avec un système de péréquation. Est-ce que vous pensez que c'est un modèle qui serait intéressant, ça?
n(10 h 30)nM. Brady (Jean-Patrick): C'est, en effet, d'après ce que je me rappelle, et... entre autres, évidemment, bon, le CNCS-FEUQ et d'autres organismes, là, qui sont arrivés avec la question du fonds du savoir et, bon, de différentes façons de procéder à ce niveau-là. Évidemment, bon, là, on en arrive peut-être encore à la question de l'autonomie des universités, la capacité à gérer leur argent comme ils le désirent. Mais, au niveau de la recherche, ce serait en effet, là, l'application peut-être d'un fonds national, là, qui pourrait avoir un budget quand même relativement global, parce que, dans notre mémoire, là, on présente l'augmentation, là, de chaque fonds de recherche, et finalement c'est celui des sciences humaines qui a le moins augmenté en pourcentage comparativement aux autres. Donc, c'est encore une fois une preuve, là, du manque de valorisation et du manque de financement. Et ce serait, là, en effet une possibilité pour nous à travers, là, ce fameux fonds du savoir, là, qui serait une alternative quand même assez intéressante à explorer. Et ensuite, là, on pourrait évidemment modeler, là, ce fonds-là d'une manière correcte, là, avec des critères de sélection et ensuite de manière plus articulée.
M. Cousineau: On a parlé de valorisation tantôt. Est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir une façon de communiquer à la société, à la population l'importance d'investir au niveau de la recherche en sciences humaines puis en sciences sociales? Parce que la répercussion n'est pas nécessairement à court terme, ça peut être dans 10, 15, 20 ans. Une recherche, exemple, en criminologie, bien, ça peut avoir des répercussions extrêmement importantes dans quelques années. Bon.
Donc, est-ce que vous pensez qu'il y aurait moyen de mettre en place un système de... ? bien, on en a parlé, de valorisation, tantôt ? mais de communication pour vraiment, là, mettre le point là-dessus, pour dire que... l'importance d'investir en sciences humaines?
M. Brady (Jean-Patrick): Il y a... On pourrait sortir beaucoup d'exemples, que ce soient des sites Web, que ce soient des campagnes publicitaires. Ça, c'est des exemples, qu'on pourrait dire assez généraux, qui couvrent l'ensemble du territoire sans nécessairement aller chercher précisément, là, dans le coeur de la population. Mais c'est quand même... Bon. Il y a des façons comme ça, des campagnes quand même assez importantes. Puis évidemment on parle, là... vous parliez, là, du long terme des sciences humaines. C'est un aspect qui n'est pas facile à gérer, qui est quand même, là... Dans une société où est-ce qu'on valorise quand même beaucoup le commerce et le court terme, ce qui a évidemment ses avantages et ses désavantages, bien il faut faire en sorte que... C'est une question de valorisation, là ? on en parlait tout à l'heure, là ? de prendre finalement maintenant les enfants et de les... changer tranquillement la mentalité. Et ça, je pense que c'est... Nous pensons totalement et complètement qu'il faut vraiment commencer à cet âge-là. Évidemment, les sciences sociales, c'est des éducateurs, des professeurs, alors c'est des personnes qui sont bien placées pour comprendre l'enjeu de toutes les sciences humaines et aussi sociales à ce niveau-là. Donc, ça pourrait être tout simplement les sites Web, les campagnes dans les journaux, ça pourrait être... Ah, vous savez, il y a quand même plusieurs façons, là.
Mais c'est sûr que, pour nous, au niveau des écoles même, des enfants en bas âge, s'ils ont des projets intéressants, ils arrivent chez eux, à la maison, puis ils disent à leurs parents: «Je suis allé à Québec aujourd'hui; je suis allé à Montréal rencontrer un député, rencontrer un professeur universitaire», ça a quand même un aboutissement sur l'ensemble de la société. L'éducation, c'est pour ça souvent qu'on en parle comme une priorité. Que ce soit n'importe quel gouvernement, c'est tout le temps une priorité. Et, à la base, quand on réussit à aller chercher les enfants, ça les rend heureux, ce qu'ils font, ça rend les parents plus heureux, ainsi de suite. Ça fait que c'est une façon de procéder qui est quand même gagnante.
Mme Marois: J'ai une question en relisant vos recommandations. Bon. Vous parlez d'une politique scientifique, une politique claire de recherche. Est-ce que c'est parce que vous n'êtes pas à l'aise avec celle qui a été élaborée et adoptée par le gouvernement du Québec? Parce qu'on se souviendra que, sous Jean Rochon, il y a eu un travail important et imposant qui s'est fait avec les partenaires pour aboutir à cette Politique québécoise de la science et de l'innovation, qui s'appelle Savoir changer le monde. Et, entre autres ? parce que je me souviens quand on avait débattu de cela ? entre autres, une des grandes préoccupations, au moment de la préparation de cette politique, c'était de s'assurer de prendre en compte les sciences humaines et les sciences sociales tant dans le processus d'innovation que de valorisation, que de transfert. Parce qu'on parle souvent de transfert technologique, mais il y a des transferts possibles dans les sciences sociales tout autant qu'il y en a dans le domaine des technologies ou des domaines économiques. Évidemment, c'est un autre type de transfert. À partir d'expériences vécues, de recherches faites, de conclusions tirées, évidemment on peut, mais... Et c'est un processus différent, mais ça existe aussi. Alors, j'aimerais ça vous entendre un peu sur ça.
M. Brady (Jean-Patrick): Bien, vous savez, à savoir si on est à l'aise ou non avec cette politique-là, il faut quand même constater, là, qu'il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Et, oui, je pense que tout gouvernement ou tout député s'intéressant à la question de l'éducation qui est allé un peu en profondeur quand même analyser les sciences sociales et les sciences humaines... Mais où on en est rendus aujourd'hui? Et, malheureusement, il faut quand même... ? c'est un constat, là, avec les chiffres qu'on a ? il reste quand même beaucoup de chemin à faire. Donc, au niveau de la politique, bien ? on en a parlé ? ça fait partie d'un ensemble assez global, la question des sciences humaines. Et, à savoir si elle est claire ou non, elle est peut-être claire, mais elle est peut-être claire dans le mauvais sens. C'est surtout ça.
Donc, on ne vous le cachera pas, là, en termes de politique claire, ce n'est pas pour nous, là... Quand ? je reviens souvent dans notre fameux tableau de la page 41 ? quand on regarde, là, quand même, là, la disparité assez énorme à laquelle nous devons faire face en termes de recherche, et ainsi de suite, je pense que, là, il faut quand même se rendre compte d'une évidence: c'est que cette politique-là, malgré toute cette bonne volonté qui a été mise derrière, n'a pas nécessairement réussi à changer les statistiques et surtout l'argent qui est disponible pour nos chercheurs.
Mme Marois: C'est ça. Mais en fait, comme elle s'applique plus après 1996-1997, parce que je pense que le tableau fait référence à 1996-1997, bien, on espère qu'elle aura un impact en ce sens-là.
M. Brady (Jean-Patrick): Bien, nous aussi, bien entendu, on espère qu'elle va avoir un impact, mais il y a encore... ça tarde à venir.
Mme Marois: Il y a encore du chemin à faire, on s'entend.
Le Président (M. Kelley): Sur ça, merci beaucoup pour avoir plaidé pour ma paroisse. Tout comme le vice-président de la commission, le député des Îles-de-la-Madeleine, on est tous les deux finissants en histoire. Moi, je viens aussi d'un campus haut niveau. Les arts étaient en bas, alors on était privés de l'opportunité de monter la rue Peel à moins 20 ° au mois de janvier. Alors, ce n'était pas si mauvais que ça. Et on était à côté de la bibliothèque, alors il y avait des avantages pour les arts à McGill. Mais merci infiniment pour la présentation que vous avez faite ce matin.
Je vais suspendre nos travaux quelques instants et j'invite la Fondation Universitas du Canada de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 38)
(Reprise à 10 h 41)
Le Président (M. Kelley): Alors, bonjour. On va reprendre nos travaux. Maintenant, c'est la Fondation Universitas du Canada. C'est M. Richard Garneau qui va prendre la parole. Alors, c'est à vous, M. Garneau.
Fondation Universitas du Canada
M. Garneau (Richard): Ça marche bien, le micro? Oui?
Le Président (M. Kelley): Oui.
M. Garneau (Richard): Parfait. Alors, mon nom est Richard Garneau. Je suis directeur général pour la Fondation Universitas du Canada. Je suis accompagné d'Isabelle Grenier, qui est directrice Affaires juridiques et ressources humaines à Gestion Universitas. Je vais tout de suite céder la parole à Isabelle, qui va faire l'introduction sur qui on est et puis sur notre mémoire.
Mme Grenier (Isabelle): Merci. Alors, bonjour. Tout d'abord, on veut vous remercier de nous donner l'opportunité de vous parler aujourd'hui au nom de la Fondation Universitas, que vous connaissez sans doute. Enfin, nous l'espérons. La Fondation Universitas existe depuis 40 ans maintenant et puis elle a poursuivi la même mission depuis les tout débuts. Et la mission de la fondation est d'encourager les parents, les grands-parents, les amis à prévoir en vue de financer les études postsecondaires des enfants.
Au cours des ans, la Fondation Universitas a largement contribué à favoriser l'accessibilité aux études universitaires en versant plus de 160 millions de dollars en bourses d'études et en remboursement d'épargne à ses souscripteurs, donc aux parents et aux autres personnes qui ont à coeur l'intérêt et enfin les études postsecondaires des enfants. Les fondations de bourses d'études comme la nôtre représentent des joueurs majeurs sur le marché des régimes enregistrés d'épargne-études. Nous représentons effectivement 40 % du marché des REEE.
Il va sans dire qu'un niveau de scolarisation élevé est un atout primordial dans la nouvelle économie du savoir au Québec. Et nous croyons fermement évidemment qu'un sous-financement des universités du Québec conduirait inévitablement à l'appauvrissement des universités, ce qui représente nécessairement, à long terme, une facture importante pour l'économie du Québec. Il est aussi primordial que nos universités québécoises soient performantes et compétitives par rapport aux autres universités canadiennes, et, dans ce sens-là, nous croyons que le gouvernement doit avoir une vision à long terme pour solutionner le problème tant de l'accessibilité que du financement des universités. Pour notre part, à la Fondation Universitas, nous tentons, autant que faire se peut, de travailler sur ce problème depuis maintenant 40 ans.
De nos jours, avoir un enfant est évidemment un choix personnel, mais c'est également une responsabilité collective quand vient le temps de penser à l'éducation de nos jeunes. Le financement des universités doit selon nous résulter d'un équilibre entre les contributions des étudiants et des parents, d'une part, et, bien sûr des gouvernements et des donateurs, d'autre part. Avec le gel des frais de scolarité que nous connaissons maintenant depuis 10 ans, nous pensons que cela devient maintenant un fardeau de plus en plus lourd sur l'État. Le Québécois moyen a malheureusement tendance à se fier un peu trop sur l'État quand vient le temps de penser au financement des études. Et, non pas que nous prônions et souhaitions une hausse des frais de scolarité, mais nous ne pouvons que constater que cet état des choses ne fait que cristalliser la situation. Donc, les gens se fient vraiment sur l'État pour financer les études postsecondaires de leurs enfants.
Donc, le gel des frais de scolarité sera difficile à soutenir à moyen et long terme, et de toute manière nous constatons, dans les universités, que ce gel profite davantage aux familles aisées. C'est facile de vérifier. Aux universités, les gens, les étudiants qui fréquentent les universités proviennent en général de milieux un petit peu plus aisés, et bien sûr le gel profite tant aux bien nantis qu'aux moins favorisés. Par mesure... Par souci d'équité entre les différentes générations, si l'on doit en venir à une hausse éventuelle des frais de scolarité, nous pensons que ces frais devront augmenter de façon très progressive et nous suggérons, pour ce faire, un horizon de 10 ans, ce qui correspond d'ailleurs à la durée moyenne de l'épargne dans un régime enregistré d'épargne-études. Je laisse maintenant la parole pour la suite à mon collègue M. Garneau.
M. Garneau (Richard): Merci, Isabelle. Alors, le Régime enregistré d'épargne-études, c'est sûr que c'est un excellent véhicule pour financer les études postsecondaires, en particulier les études universitaires. Le gouvernement fédéral, en 1998, a donné un bon coup de pouce aux Canadiens pour les aider à épargner pour les études postsecondaires en introduisant, en 1998, là, une subvention canadienne à l'épargne-études. Et, cette subvention, je la résume simplement en disant que c'est 20 % des premiers 2 000 $ d'épargne annuelle pour un maximum de 7 200 $. Et, dans le dernier budget fédéral de la semaine dernière, le fédéral a augmenté... a bonifié cette subvention-là pour les familles à faibles revenus et à moyens revenus et il a introduit aussi un bon d'études canadien qui peut aller chercher... qui peut contribuer jusqu'à 2 000 $ pour un enfant provenant de famille à faibles revenus. La subvention bonifiée que je vous parlais tantôt devrait faire en sorte que le gouvernement va réinjecter dans le fond 20 % de plus de subventions qu'il le faisait autrement. Ces sommes sont toutes déposées dans un régime enregistré d'épargne-études.
Depuis cinq ans, cette subvention canadienne à l'épargne-études a distribué 1,5 milliard de dollars aux familles canadiennes au bénéfice des jeunes qui vont poursuivre des études. Et, sur ce 1,5 milliard là, il y a 212 millions qui est attribuable au Québec. Ça, c'est peu et c'est tributaire du fait que seulement 40 % des Québécois épargnent, en comparaison avec une moyenne canadienne de 50 % des gens qui épargnent pour les études. Et, en Ontario, c'est l'inverse, c'est en haut, c'est 54 %. Donc, il y a 14 % d'écart entre les familles qui épargnent ou pas pour les études. Et en plus les familles, par exemple, ontariennes... ? si je fais juste parler de l'Ontario ? l'Ontario épargne deux fois plus en moyenne que les familles québécoises. Évidemment, cette subvention-là, ce faisant, va avoir profité plus aux familles ontariennes, par exemple.
Alors, des 212 millions que je vous parlais tantôt de subventions, c'est que ça représente 14 % du total de 1,5 milliard, alors que nous avons, au Québec, 23 % des jeunes âgés de 0 à 17 ans. Pour l'Ontario, 723 millions de dollars qui ont été injectés dans les REEE en Ontario; ça représente 47 % du total, alors qu'il y a 39 % des enfants qui sont âgés de 0-17 ans qui sont en Ontario. Alors... Et, pour vous mentionner les autres provinces, les autres provinces vont aller chercher à peu près la proportion des enfants. Alors, il y a vraiment un déséquilibre, on peut dire, entre Québec et Ontario. Avec un taux d'épargne similaire, si le Québec avait épargné de la même façon qu'en Ontario, nous aurions été chercher, les Québécois, 130 millions de dollars de plus de la subvention canadienne. Donc, comme vous pouvez le constater, il y a un écart important entre l'épargne des Québécois et l'épargne des Ontariens et du reste du Canada. Les gens pourraient dire: Oui, mais les frais de scolarité sont gelés. C'est vrai, mais ce n'est qu'une partie des coûts qu'il faut financer pour les études postsecondaires.
Cet écart-là, qui nous préoccupe, pourrait augmenter dans le futur. Et ça, cette information-là, vous ne l'avez pas dans le mémoire parce que c'est tout récent, c'est que l'Alberta a annoncé récemment un bon d'études également, comme le fédéral l'a fait la semaine dernière, de 800 $ pour chaque enfant né à partir de 2005. Les bons d'études sont encore là déposés dans un REEE, et il s'agit, pour ce gouvernement-là de l'Alberta, d'un investissement estimé de 20 millions de dollars en 2005 et qui va augmenter avec le temps pour atteindre 30 millions à maturité par année. Une telle mesure au Québec pourrait coûter un peu moins du double en proportion des naissances.
n(10 h 50)n Bon. Alors, notre première recommandation, c'est que, comme mentionnait Isabelle tantôt, c'est sûr que, nous, ce n'est pas une recommandation que l'on fait ici ce matin d'augmenter les frais de scolarité. Ce que l'on pense, c'est que cette chose-là pourrait devenir ? est peut-être rendue là ? inévitable. Et, si elle doit se faire, nous disons: On devrait le faire progressivement et l'annoncer le plus rapidement possible pour que les familles puissent s'y préparer. Parce que ce qui est problématique, c'est que, si on arrive du jour au lendemain puis on les augmente trop drastiquement, bien là ça crée évidemment des frustrations parmi les étudiants pour lesquels nous sommes très sympathiques... à leur cause.
Alors, ce que nous proposons donc, c'est un dégel progressif des frais mais combiné à un effort du Québec d'introduire elle aussi un support à l'épargne-études. Ça peut être de différentes façons. Nous, ce qu'on propose, c'est d'encourager les Québécois à épargner davantage et de préparer cette hausse de coûts éventuelle. Et il faut davantage les responsabiliser, les familles québécoises, sur le sujet.
Donc, nous suggérons une subvention, par exemple, de 20 % des premiers 1 000 $, non pas des premiers 2 000 $ comme le fait le fédéral, mais ça pourrait être les premiers 1 000 $. Il faut encourager les familles à moyens et faibles revenus, et là, encore là, vous ne l'avez pas dans le mémoire, puisque ça a été fait par la suite, mais certains d'entre vous se sont peut-être questionnés qu'est-ce que ça pourrait peut-être représenter comme coûts pour le Québec. Alors, nous avons fait un petit travail là-dessus, et, en supposant une hausse des épargnes de 25 % ? en fait, c'est comme on disait tantôt, on a un recul important par rapport à l'Ontario ? par exemple, si on faisait simplement augmenter de 25 % l'épargne des Québécois annuelle dans les régimes enregistrés d'épargne-études, le coût global de la subvention de 20 % serait de 60 millions de dollars, O.K.? Sur une période de cinq ans, on parle de 300 millions, donc. Mais ça aurait comme impact, l'augmentation de 25 % d'épargne, d'aller chercher plus d'argent d'Ottawa avec la subvention canadienne, et ça, on parlerait d'aller chercher un 60 millions de dollars du fédéral, additionnel. Puis là, bien évidemment, l'augmentation d'épargne, ça représenterait 300 millions de dollars. Ce n'est pas les 300 millions, là, du coût du gouvernement, mais c'est qu'est-ce que les Québécois épargneraient de plus qu'ils le font actuellement. Dans les cinq prochaines années, on parle de 300 millions de dollars.
Donc, l'incitatif, on pense que ça pourrait aller chercher ce résultat-là. Donc, on parle, au total, là, d'argent, de 660 millions de dollars de plus de disponibles pour les familles québécoises pour financer les études postsecondaires, en particulier les universités. Et, si on accumule ça avec intérêt, dans 10 ans, en 2014, ces argents-là pourraient aller chercher 1 milliard de dollars avec un taux d'intérêt de 6 %. Sur ça, je laisse Isabelle vous faire part des autres recommandations que nous vous proposons.
Mme Grenier (Isabelle): Merci. Donc, en plus d'une subvention provinciale, ce que nous suggérons, ce que nous faisons comme recommandation pour faciliter l'accessibilité et le financement, par exemple ? évidemment, on parle toujours du régime de prêts et bourses du Québec, excellente chose ? nous croyons que le Québec doit continuer de se démarquer à ce chapitre-là et nous pensons aussi que ce régime de prêts et bourses, en bout de ligne, s'avère plus efficace que le gel des frais de scolarité pour favoriser l'accès aux études, principalement pour les familles à revenus faibles ou moyens.
Autre suggestion: Pourquoi ne pas tolérer l'accumulation d'épargne dans un régime enregistré d'épargnes-études, même pour les prestataires d'aide sociale? Chez nous, à la Fondation Universitas, nous avons des exemples très concrets des gens qui, en ayant de faibles ou moyens revenus, étant sur le marché du travail, ont réussi à épargner pour leurs enfants dans un REEE, mais, malheureusement, avec quelques difficultés par la suite, ils se retrouvent sur l'aide sociale et en viennent à devoir fermer leur régime enregistré d'épargne-études. Donc, c'est une chose malheureuse, et, si l'on pouvait permettre l'accumulation d'épargne pour ces gens, ce serait probablement...
Une voix: ...
Mme Grenier (Isabelle): Au Nouveau-Brunswick également. Et, au Nouveau-Brunswick d'ailleurs, il y a eu un amendement à la loi en ce sens-là. Les gens qui sont sur l'aide sociale peuvent dorénavant épargner dans un REEE sans être pénalisés.
Autre recommandation que nous vous faisons aujourd'hui: ce serait, par exemple, d'autoriser le transfert du fonds enregistré de revenu de retraite, des FERR, dans un REEE, en guise de transfert de patrimoine entre grands-parents et petits enfants. Et finalement pourquoi ne pas encourager davantage les levées de fonds et les partenariats corporatifs avec les universités? Donc, ce serait des mesures incitatives, là, fort pertinentes.
M. Garneau (Richard): Alors, ce qu'il faut retenir de ce mémoire... évidemment notre gros morceau, nous, c'est d'encourager davantage les Québécois à épargner plus pour les études postsecondaires puis parce que ça peut s'avérer une solution très efficace pour le financement des hausses éventuelles de frais de scolarité, en autant qu'elles sont progressives et annoncées d'avance. Alors, responsabiliser davantage les parents à cet égard.
Alors, on pense que ça pourrait être fait en même temps. En fait, c'est de dire, bien: on pourrait annoncer un dégel progressif en même temps qu'on introduit une subvention. Donc, il y a un message d'envoyé aux gens: oui, les frais augmentent, mais voici un coup de pouce pour vous aider à y faire face. Alors, c'est ça, je pense, qu'il faut amener, et ça a l'avantage de ne pas créer de conflits intergénérationnels entre les différentes générations d'étudiants, parce que les étudiants qui entrent aujourd'hui, qui ont des frais gelés, puis les autres, dans 10 ans, qui vont avoir des frais, mettons, exemple, équivalents à la moyenne canadienne, bien, au moins, ils auront eu un coup de pouce du gouvernement puis ils auront eu la possibilité de se préparer davantage.
Alors, ça termine notre présentation. Alors, on vous remercie encore beaucoup pour l'opportunité que vous nous donnez de s'exprimer sur un sujet aussi important, qui nous tient à coeur. Il nous fait plaisir maintenant de répondre à vos questions.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Comme père de cinq enfants, je dois avouer que j'ai toujours contribué à un régime d'épargne-études, et c'est fort utile. J'ai deux enfants maintenant à l'université, et ça aide beaucoup dans la planification des dépenses familiales qui sont beaucoup. Sur ce, je cède la parole à M. le ministre.
M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants de la Fondation Universitas du Canada. Vous nous amenez des points... un point de vue qui est très intéressant. Je ne pense pas qu'on en ait beaucoup discuté, et c'est d'autant plus intéressant. Je voudrais laisser la parole d'abord peut-être à un de mes collègues qui aurait une question à poser. J'en aurai d'autres par la suite.
Le Président (M. Kelley): M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Chez nous, la Fondation Universitas, dans ma famille, m'a bien aidé, et je vous en remercie. Vous suggérez qu'il faut exiger... ou à tout le moins inciter les universités à obtenir de meilleurs résultats dans leurs levées de fonds, leurs partenariats avec les entreprises.
Quels seraient selon vous les meilleurs incitatifs pour que les universités obtiennent de meilleurs résultats tant qu'à leurs campagnes de financement puis que les petites universités soient aussi favorisées?
M. Garneau (Richard): Bien, écoutez, d'abord, je dois vous dire, on n'est pas des experts là-dedans; on est plus des experts dans l'épargne-études, mais on a quand même fait la suggestion, dans le sens que... En fait, nous, on déplore... ? puis je pense que vous allez être d'accord avec ça ? c'est que, quand on regarde les universités anglophones au Québec puis les universités ailleurs au pays, il y a une philanthropie qui est beaucoup plus forte. Il y a une appartenance très forte dans les universités anglophones, qu'elles soient au Québec ou ailleurs, et on en souffre un peu ici, au Québec. Alors, ce serait peut-être de donner un coup de pouce à ce niveau-là.
Est-ce qu'on devrait... le gouvernement du Québec devrait aider en donnant des dollars? Je ne sais pas. Si, à chaque dollar qui est donné, il y a 0,25 $ qui provient du gouvernement... ou... Je ne sais pas, là. On n'a pas vraiment de choses concrètes, mais on fait simplement sensibiliser la commission sur ce sujet parce que... Mais ça s'améliore. On constate que ça s'améliore. Les universités québécoises ont fait beaucoup de chemin là-dessus, mais on est encore loin des universités... des autres universités anglophones, et ça, c'est une préoccupation que l'on a.
Et, quant à l'aspect des entreprises, bien, encore là on n'a pas vraiment de suggestion précise à faire, mais encore là est-ce que le gouvernement ne devrait pas favoriser ces échanges-là, ces partenariats avec les universités qui finalement pourraient supporter la recherche, entre autres, ou je ne sais quoi, là?
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
n(11 heures)nM. Reid: Oui. Bien, c'est intéressant peut-être de souligner qu'il y a effectivement des programmes qui avaient été mis en place par le gouvernement précédent, que nous avons conservés, qui semblent être très, très efficaces, là. Je pense que l'Université Bishop's nous a dit que ça avait été d'un grand secours pour augmenter considérablement leur base. Ça ne semble être pas toujours aussi efficace ailleurs, mais je pense que ça monte progressivement, à chaque année, l'utilisation de ces fonds-là.
Vous parlez de fonds d'entreprises. Mais aussi, dans les universités anglophones, à ce que je sache, c'est beaucoup de dons de particuliers, en particulier de dons testamentaires, ce qu'on a peut-être pas encore pris l'habitude au Québec. Mais ça m'amène à ma question.
Vous parlez de façon très intéressante d'un... Vous ne prenez pas le mot coup de pouce, mais enfin c'est un peu un coup de pouce dans un transfert qui vous paraît fort judicieux entre les grands-parents et les petits-enfants. Si on pouvait faire, comme vous avez dit, un transfert de fonds enregistrés d'épargne-retraite... ou de revenu de retraite et un régime enregistré d'épargne-études, je me demande... Parce que, ce que je comprends, c'est que vous dites ici, à la page... à la fin de la page 8: «Ces transferts seraient considérés dans le calcul des montants minimums à décaisser à chaque année.» Maintenant, si on ne les décaisse pas, ces montants, mais qu'on les garde encore une fois à l'abri de l'impôt pour le temps que ça prendra à un jeune d'arriver à l'université, à ce moment-là, il n'y aurait donc pas un réel décaissement, et donc il y aura un coût pour l'État, pour les finances publiques, assurément.
Est-ce que vous avez une idée de ce que ce coût-là pourrait représenter, parce que vous avez peut-être des chiffres sur le temps moyen, etc.?
M. Garneau (Richard): Malheureusement, non. En fait, nous, on lance l'idée.. Évidemment, il faudrait faire la démarche aussi avec le fédéral; ça, c'est certain. C'est une idée qu'on a lancée relativement récemment. On n'a pas fait de recherche autant que dans l'autre cas, où j'ai des chiffres que je vous ai transmis aujourd'hui. Mais, nous, on pense que vraiment, là... Vous savez, les baby-boomers, je pense qu'il y en a plusieurs qui sont bien nantis ? vous allez être d'accord avec moi. C'est quand même une couche de la population qui est quand même assez privilégiée, là; il y en a beaucoup là-dedans qui ont pas mal d'argent. Et voilà une belle occasion de supporter les jeunes... leurs enfants, qui, eux, en arrachent peut-être un peu plus par les temps qui courent. Et voilà une belle façon d'encourager les petits enfants à étudier. Et, nous, notre slogan chez nous: L'éducation! Peut-on offrir un plus beau cadeau? Alors, ce serait une façon de décaisser. Évidemment, vous le savez, là, ces FERR là forcent le décaissement des argents. Puis il y en a là-dedans qui n'ont pas nécessairement besoin de cet argent-là, donc c'est de l'impôt qu'ils paient. Bien, ce serait un incitatif à encourager les générations futures à étudier. Mais, malheureusement, on n'a pas de chiffre là-dessus, ce matin, à vous transmettre, mais c'est sûr qu'on va faire des démarches, on va continuer nos démarches là-dedans.
M. Reid: Merci.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je vous remercie de votre présentation. Je vous souhaite la bienvenue au nom de ma formation politique. Effectivement, vous apportez un certain nombre de suggestions qui sont particulièrement pertinentes et intéressantes. Je me permettrai de faire un commentaire plus large, étant entendu que, si nous pouvions avoir toutes nos ressources et tous nos moyens et qu'on règle le problème du déséquilibre fiscal, nous pourrions offrir de telles mesures, qu'il s'agisse de régimes d'épargne-études ou de bonification des régimes de bourses, et peut-être être, à ce moment-là, encore plus, je dirais, actifs et déterminés à faire la promotion de la participation des gens à de telles institutions. Parce que, on le voit bien, le Québec ressort un peu perdant, hein, actuellement de ça. On ne va pas chercher notre part; autant, actuellement, on va la chercher dans la Fondation canadienne de l'innovation au niveau de la recherche, autant là on ne va pas la chercher, comme on ne va pas la chercher non plus, notre part, lorsqu'on ne déduit pas nos frais de garde, par exemple, pour les enfants parce que nos coûts sont tellement bas, alors qu'ailleurs, dans le reste du Canada, on le fait.
Donc, c'est autant d'argent de moins qui rentre au Québec. Et, vous le mentionnez, il y a un retard à rattraper. On a des débats ici, entre nous, à la commission, sur les raisons de ce retard, mais, moi, je le place... Je reviens à notre histoire. Nous sommes les premières générations à avoir eu accès, d'une façon systématique et plus large, à l'école, alors et à l'école et à l'enseignement supérieur, alors qu'il y a eu, à cet égard-là, dans d'autres provinces du Canada, une accessibilité qui était plus... et aussi une offre au niveau de l'éducation qui était beaucoup plus grande qu'elle ne l'a été chez nous. Alors, il y a ça qu'on a... sur lequel on a à continuer à travailler pour procéder à du rattrapage.
Moi, je voudrais que vous me parliez un petit peu de la fondation, ces commentaires étant faits, là. Puis je trouve que votre suggestion est intéressante. J'aimerais ça que vous me parliez un petit peu de la fondation. Vous avez versé 160 millions en bourses d'études et en remboursement d'épargne. Comment vous procédez? Vous rendez disponible un programme de bourses sur la base des besoins et du mérite ou essentiellement du besoin?
M. Garneau (Richard): O.K. Nous autres, de la façon dont on fonctionne... D'abord, chaque régime enregistré d'épargne-études, l'épargne doit être retournée au souscripteur. O.K. Donc, c'est pour ça que, chez nous, on a un fonds de souscripteurs. On a un fonds de bourses qui, lui, est composé de tous les intérêts qu'on va faire sur...
Mme Marois: Que vous allez chercher sur ça.
M. Garneau (Richard): ...l'épargne des souscripteurs. O.K.? Et la façon dont on fonctionne, c'est que, quand arrive l'enfant... D'abord, le parent fait un engagement à la fondation, parce que ce qui caractérise la fondation par rapport à d'autres institutions financières, c'est que, bon, un, on est un organisme à but non lucratif, et, deux, c'est une approche collective, c'est-à-dire que...
Mme Marois: C'est comme une sorte de mutuelle, finalement.
M. Garneau (Richard): ... ? oui ? les gens renoncent à leurs intérêts lorsqu'ils épargnent au bénéfice des jeunes qui vont étudier. Donc, il y a un phénomène, à ce moment-là, d'attrition, c'est-à-dire qu'on va donner l'argent à ceux qui en ont besoin et on va verser des bourses en fonction de... On accompagne l'enfant, dépendant de s'il finit son université ou pas, ou s'il fait le cégep technique, ou tout ça. Alors, on verse des bourses comme ça mais aux bénéficiaires. La subvention vient s'ajouter aux bourses parce que la subvention, elle ne vise que les bénéficiaires. Si un parent arrête, à un moment donné, de souscrire à son régime, la subvention est prise et retournée au gouvernement. O.K.? Dans le cas des fondations comme nous, l'avantage qu'ils ont, les gens, à souscrire chez nous, c'est qu'à la fin du processus d'épargne les subventions qui sont là, si l'enfant ne fait pas d'études, elles ne sont pas retournées au gouvernement; elles restent dans le fonds et elles bénéficient à ceux qui font des études.
Mme Marois: Qui vont suivre.
M. Garneau (Richard): Donc, les subventions, dans les régimes collectifs, sont bonifiées, si on peut dire, par le phénomène d'attrition de ceux qui...
Mme Marois: Et la bourse se verse au besoin ou simplement à la demande et du fait que...
M. Garneau (Richard): En fonction de... Quand on accumule tant de crédits à l'université, on va verser... Dans le fond, ceux qui font l'université vont avoir trois bourses ? une par année ? selon certains critères bien précis. Puis, nous, on verse des bourses, peu importe, l'enfant, s'il étudie au Zimbabwe, ou à Québec, ou ailleurs dans le monde entier, là. C'est vraiment... d'autant que le jeune étudie, tu sais.
Mme Marois: Mais ce sont des enfants des épargnants, évidemment.
M. Garneau (Richard): Oui, tout à fait.
Mme Marois: C'est ça, puisque c'est le bénéfice qu'ils en retirent, compte tenu qu'ils renoncent à leurs rendements, là.
M. Garneau (Richard): Oui. C'est ça. Et j'ajouterais également que, peut-être dans le trois quarts des cas, les parents reçoivent, comme je disais tantôt, leur remboursement intégralement. Tout ce qu'ils ont épargné, on leur redonne. À l'âge de 17, 18 ans, on redonne ça aux parents, et, dans le trois quarts des cas, les parents prennent l'argent, le chèque, ils l'endossent, puis ils le donnent à l'enfant, puis voilà. Alors, ça paie tes études, ça paie un paquet de choses.
Mme Marois: Oui, c'est ça. Remarquez que le Québec pourrait aussi, si c'était possible de s'entendre avec Ottawa, dire: On se retire, on se fait transférer les sommes et puis on les consacre essentiellement à la constitution d'une telle...
M. Garneau (Richard): ...le fédéral. On avait vérifié avec le fédéral, nous, s'ils étaient prêts à partager leur système, parce qu'il y a tout un système là-dedans, là. Eux autres, ils sont prêts à le partager avec n'importe quelle province qui va vouloir... Quand je dis «partager», ça ne veut pas dire d'envoyer les argents à Ottawa, c'est de prendre les outils technologiques...
Mme Marois: Les outils qui ont été développés, oui, parce que, effectivement, c'est un système qui...
M. Garneau (Richard): ...qui ont été développés, ne pas réinventer la roue, là. Mais il y a toutes sortes de façons de l'aider. Comme je mentionnais tantôt, l'Alberta, eux autres, ils ont choisi de donner un bon. L'enfant qui naît, tout de suite, on vous donne l'argent. Et l'avantage de cette approche-là, c'est qu'elle incite les gens à ouvrir un REEE. À partir du moment où il est ouvert, à ce moment-là, il y a toutes sortes d'occasions plus tard de rajouter de l'argent dedans; à Noël, à la fête, on invite les parents, les grands-parents à contribuer à ce régime-là.
Mme Marois: C'est ça. Je voulais revenir sur une autre de vos recommandations qui est une hausse progressive des frais de scolarité. Vous avez fait référence, dans votre présentation tout à l'heure, à la stratégie qui a été retenue en Angleterre, à savoir un impôt postuniversitaire, mais vous avez juste effleuré, là, la question. Est-ce que c'est une avenue qui pourrait se substituer à ce qu'on connaît maintenant ou est-ce que vous l'avez envisagée, cette question de l'impôt postuniversitaire, plutôt qu'une hausse des frais de scolarité?
M. Garneau (Richard): Je ne pense pas qu'on ait parlé de l'Angleterre dans notre mémoire.
Mme Marois: Mais c'est parce que je j'avais cru entendre ça dans votre présentation tout à l'heure.
M. Garneau (Richard): Non. Excusez; tantôt, j'ai parlé de l'Alberta...
Mme Marois: Ah, O.K., d'accord. Alors, ça m'a...
M. Garneau (Richard): ...de l'Alberta, qui a fait un bon, qui a mis en place récemment, en février, un bon d'études qui est 500 $ à la naissance de l'enfant déposé dans un REEE et 100 $ à son huitième, 11e et 14e anniversaire, donc 800 $ qui est versé aux jeunes qui vont naître à partir de 2005.
Mme Marois: Remarquez qu'ils ont une chance exceptionnelle. Je voyais que la ministre, Mme Nelson, annonçait l'autre jour ? la ministre des Finances ? qu'ils n'avaient plus de dette, pas de déficit.
M. Garneau (Richard): Ça, c'est sûr que ça doit aider.
Mme Marois: Oh là là! On en rêve, hein, mais enfin...
M. Garneau (Richard): Bien d'accord. Mais c'est...
Le Président (M. Kelley): ...pétrole.
M. Garneau (Richard): ...c'est préoccupant.
Mme Marois: Oui, on n'a pas de pétrole. Mais enfin, on a une source d'énergie intéressante.
n(11 h 10)nM. Garneau (Richard): Mais, vous savez, ce qui est préoccupant là-dedans, c'est que si... plus les autres provinces vont encourager l'épargne-études, plus les Canadiens hors Québec vont épargner pour les études... ça va faire plus d'argent plus tard pour financer l'éducation et les études postsecondaires dans ces provinces-là, et c'est de l'argent qu'on n'aura pas, nous. Et c'est ça qui est préoccupant. Donc, c'est pour ça que c'est très important que le Québec fasse quelque chose à cet égard, surtout qu'on a un retard. Si on a une vision à long terme, il faut penser longtemps.
Mme Marois: Oui. Mais par contre on a choisi d'autres façons de faire. C'est vrai qu'on a moins... on a... on connaît moins le même, je dirais, le même engagement philanthropique d'individus qui donnent, mais il faut dire qu'on n'avait peu de gens avec des fortunes importantes.
M. Garneau (Richard): C'est vrai. Tout à fait.
Mme Marois: C'est tout... C'est le résultat de notre histoire, hein? Nous sommes le résultat de notre histoire.
M. Garneau (Richard): Mais ça s'en va dans le bon sens, par exemple.
Mme Marois: Oui. Je pense que... Oui, bien, on l'a vu dernièrement de toute façon; des dons assez importants de la part d'entreprises... mais de la part de chefs d'entreprise et à même leurs capitaux propres, et non pas ceux nécessairement de leur entreprise. Alors, déjà on voit des changements apparaître. Encore faut-il que la base soit là, hein? Ça, c'est une des réalités avec laquelle on a à composer. Bon.
Une seule question sur les hausses de frais de scolarité. Évidemment, beaucoup de jeunes, d'étudiants sont venus plaider pour faire valoir le fait que cela restreignait l'accessibilité pour les gens à quand même plus bas revenus, même quand on compensait par des formules d'aide, prêts et bourses et autres. À partir d'études qui ont été faites, dont, entre autres, une faite par Statistique Canada, où on constate que les gens à revenus moyens et en dessous de la moyenne... que les jeunes provenant de ces familles-là avaient vu leur fréquentation se réduire, entre autres, en Ontario, par exemple... Évidemment, l'Ontario a complètement décloisonné, là, ses frais... déplafonné, c'est-à-dire, ses frais, et ça crée des différences très, très grandes d'une faculté à l'autre. Alors, bien, je veux vous entendre un peu sur ça.
M. Garneau (Richard): O.K. Bien, écoutez, c'est sûr que les... Là, dans le fond, vous... Pourrais-tu répéter le début surtout, là? Excusez-moi, là.
Mme Marois: Bien, c'est-à-dire que... Ce que j'indique, c'est que la prétention des étudiants qui viennent, là... ? appuyée avec des études quand même relativement sérieuses ? c'est qu'il y a quand même un effet sur l'accessibilité.
M. Garneau (Richard): Alors, c'est beau. Bien, c'est sûr. C'est sûr que... C'est pour ça que, nous, dans notre mémoire, on pense que le Québec doit continuer de se démarquer au niveau des prêts et bourses. On se démarque déjà beaucoup...
Mme Marois: Beaucoup. Oui, beaucoup. C'est clair.
M. Garneau (Richard): ...et il faut continuer de le faire. En ce sens... Moi, c'est la réponse que j'ai à vous donner là-dessus. Et ça... Et le fait que, si on encourage les gens à épargner plus, bien, à un moment donné, ces gens-là vont pouvoir accéder à ces choses-là. Entre autres, le fédéral a fait une mesure, la semaine dernière, là-dessus: ils vont donner 3 000 $ aux familles à faibles revenus qui bénéficient de la prestation nationale pour enfants. Et leurs estimés font en sorte que ces jeunes-là... ces argents-là, et combinés à une épargne de 4 $ par semaine, vont arriver à financer, par exemple, des études de collège communautaire ou cégep au moins professionnelles. Donc, c'est une base intéressante. Alors, c'est pour ça que, nous, on...
Isabelle, tantôt, mentionnait que c'est une responsabilité partagée. Il faut trouver un équilibre. Il faut que tout le monde y fasse sa part au niveau, là, du financement. Donc, le fédéral fait un bout de chemin. Le provincial devrait normalement aussi faire son bout de chemin au niveau de l'épargne-études. Je sais qu'elle en fait beaucoup ailleurs, mais, nous, ce qu'on dit, c'est qu'elle devrait poser un geste en ce sens-là.
Mme Marois: Merci.
Le Président (M. Kelley): M. le ministre.
M. Reid: Oui. Pour revenir un peu sur cette question effectivement des programmes fédéraux d'épargne-études. Vous nous avez donné des chiffres assez éloquents. Si ma mémoire est bonne, je retiens les chiffres ? en arrondissant beaucoup, là ? mais 200 millions au Québec, 700 millions en Ontario, quelque chose comme ça. C'est clair que... donc le Québec ne va pas chercher sa part, entre guillemets, là-dessus. Vous proposez de faire un programme épargne-études québécois, mais ce qui ne va pas nécessairement... En fait, ça pourra augmenter l'incitatif. C'est dans ce sens-là que vous le dites?
M. Garneau (Richard): Bien, nous, on pense que l'incitatif pourrait être très fort, si, exemple... Pensez-y, là; si le gouvernement fédéral donne 20 % minimum sur le premier 2 000... ? puis là les familles à faibles revenus, là, c'est 40 %, là, qui est donné de subvention ? si on rajoute 20, on est rendu de 40 à 60 % d'aide. Ça commence à être très sérieux pour que toutes les familles s'y attardent et disent: Aïe! Je n'ai pas le choix, moi; moi aussi, je vais faire mon petit bout de chemin là-dedans. Alors, on pense que ce serait un véritable coup de pouce important qui sensibiliserait davantage les gens à épargner.
Mme Grenier (Isabelle): D'ailleurs, nous l'avons constaté avec... Lorsque la subvention fédérale a été introduite en 1998, nous, à la fondation, on a constaté que ça avait vraiment eu une incidence sur le taux de familles qui épargnaient. Donc, je pense que de donner une subvention additionnelle au provincial ne ferait qu'accroître ce phénomène-là, là.
M. Reid: Et vous avez l'impression que ça, ça pourrait nous permettre de rééquilibrer un petit peu la part de l'argent fédéral finalement qui pourrait... reviendrait au Québec.
M. Garneau (Richard): Oui, absolument.
M. Reid: Parce que ça ferait augmenter le pourcentage de familles québécoises. C'est dans ce sens-là que vous le dites.
M. Garneau (Richard): C'est ça. Bien, en fait, je donnais l'exemple tantôt. Si on augmente de 25 % les épargnes qu'on fait... À chaque année, on épargne, puis on reçoit 20 % de ça, puis ça a donné 212 millions sur cinq ans. Nous autres, on dit que, si on introduit une subvention québécoise qui ferait en sorte que 25 %... les épargnes annuelles sont augmentées de 25 %... Vous savez, depuis deux ans, là, les épargnes augmentent d'à peu près 3 %, là. Ça avait augmenté de beaucoup, là; de 25 %, 30 % au début... 10 %, 15 %, puis, à un moment donné, ça commence à se stabiliser dans le coin de 3 %, 4 %. Bon. En faisant l'hypothèse que, si on ne fait rien, il y a une croissance de 3 % au Québec... ? 3 %, 4 % ? mais, si on introduit la subvention, que cette épargne-là est augmentée de 25 %, ce qui est très plausible à notre avis ? ça peut être plus même, mais on pense que c'est réaliste ? bien, ça, ça amènerait 60 millions de plus d'argent qui viendraient du fédéral.
M. Reid: Dans l'épargne.
M. Garneau (Richard): Dans l'épargne pour les jeunes, tu sais, pour financer les études...
M. Reid: Éventuellement, plus loin évidemment, ça veut dire que ça se dépense... Au Québec, on parle d'un certain nombre d'années. Avez-vous une idée de ce que ça peut représenter comme coûts pour l'État ou si vous n'avez pas...
M. Garneau (Richard): Pour, vous voulez dire, la subvention?
M. Reid: Oui. Si on fait des prévisions de ce qu'on pense que serait le nombre d'épargnants.
M. Garneau (Richard): Bien, en fait, là, c'est le 60 millions.
M. Reid: Ah, O.K. C'est de ça...
M. Garneau (Richard): Ce qui est un peu mêlant dans l'affaire, là, j'en conviens, là, c'est qu'il y a deux 60 millions dans mon discours, là. Ça fait que j'aurais dû dire 61, 63, là. Ça aurait été moins mêlant, là, mais j'ai arrondi, là. Alors, on récapitule. Le coût annuel d'introduire 20 % par année sur le premier 1 000, on l'estime ? si les épargnes augmentent de 25 %, là; ça, il faut que je suppose ça ? c'est 60 millions par année. Ça commence à 50, puis, dans cinq ans, ça se ramasse dans le coin de 65. En moyenne, à peu près 60 millions par année de coûts pour le gouvernement du Québec.
Ça irait chercher... augmenterait les épargnes de 300 millions des Québécois. On épargnerait 300 millions de plus sur cinq ans ? un horizon de cinq ans ? de plus. Et ça, cet argent-là, irait chercher à Ottawa 60 millions. Autrement dit, là, 300 millions sur cinq ans que le gouvernement du Québec investirait, il y a 60 millions qui revient de... qui est réinjecté d'Ottawa là-dedans. C'est ça que ça reviendrait à en dire.
M. Reid: O.K. Bon. Ça marche.
M. Garneau (Richard): En plus, là, il faut penser que le 60 millions, là, ça, c'est l'ajout, mais, sur le 300 millions, là, ça, c'est la hausse. Mais l'épargne normale, on continuerait à recevoir notre quote-part normale, là. Le 60 millions, c'est en surplus qui nous permet de récupérer, si on veut, le déséquilibre, un peu qu'il y a ? un peu pas mal ? qu'il y a avec l'Ontario, par exemple.
M. Reid: Merci. C'est très clair.
Le Président (M. Kelley): Est-ce qu'il y a une raison, selon vos chiffres, que... Ça donne l'impression qu'en Ontario ils sont très efficaces et ils contribuent au-delà de la moyenne canadienne, si j'ai bien compris. Est-ce qu'on sait pourquoi? En Ontario, est-ce qu'il y a des démarches ou est-ce que c'est parce que les frais de scolarité sont élevés que les familles sont plus préoccupées par la question? Parce que vous avez, sur la page 4... on dit 46 % ou presque 47 %. Le total va à l'Ontario, mais il ne représente que 38 % ou 39 % des enfants. Alors, ils sont nettement au-delà de la moyenne canadienne.
M. Garneau (Richard): Moi, je vous répondrais que... Bien, en fait, je l'ai indiqué un peu dans le mémoire, mais je rajouterai quelque chose. C'est que, évidemment la province étant plus riche, elle a plus le moyen d'épargner. Les frais de scolarité sont plus élevés. Ils sont plus que le double, là: en 2003-2004, 4 223 $ versus 1 862 $. Ça, ça peut être évidemment un incitatif, mais il y a aussi, je pense... ? puis ça, c'est le reflet un peu de la philanthropie, le pendant de ça ? c'est que, nous, on pense que, malheureusement, le Canada anglais, les Canadiens anglais ont une sensibilisation plus grande à l'éducation.
n(11 h 20)n Évidemment, au Québec, on a fait un bon bout de chemin. Depuis les années soixante, c'est incroyable ce qu'on a réussi à faire au Québec en éducation. Mais on a encore un recul, je pense, par rapport au Canadien moyen sur la sensibilisation à l'importance de l'éducation. Je vais aller plus loin que ça; moi, je pense que... nous, on pense que les allophones qui sont ici sont peut-être même supérieurs. Pour eux autres, c'est bien important. Ils sont venus ici, dans un pays libre avec plein d'opportunités. Ils veulent que leurs enfants étudient, puis c'est bien, bien, bien important. Au Québec, moi, je pense qu'on a encore un petit bout de chemin à faire là-dessus.
Un autre point qui n'est pas mentionné dans le mémoire, c'est qu'évidemment il y a peut-être la question d'impôts. Ils payent moins d'impôts en Ontario; peut-être plus d'argent un peu pour épargner pour les études. Ça peut être un facteur.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. D'autres questions à ma droite? Alors, à ma gauche, Mme la députée de Champlain.
Mme Champagne: Bonjour à vous deux. Écoutez, je constate évidemment que les subventions canadiennes d'épargne-études... toutes ces subventions-là permettent à nos jeunes de moins s'endetter plus tard. Bon, bien, il y a un constat ? tout le monde le dit ici, autour de la table: il y a moins de participants au niveau de nos Québécois et Québécoises, là, on participe moins.
À part l'aide et accompagnement qui pourraient venir du gouvernement du Québec puis qui seraient un incitatif ? ce que je comprends, puis, moi-même, je serais intéressée si on me l'avait proposé à l'époque ? c'est quoi, les autres moyens d'information que vous utilisez face à la population en général? Puis, si on fait un comparable avec le reste des provinces, parce que je suis quand même capable de comprendre, moi aussi, que l'Ontario est mieux nantie ? meilleurs moyens ? c'est quoi, les incitatifs qu'on a présentement pour faire que tout parent soit conscient de l'importance de mettre un petit peu de sous, même si ce n'est pas beaucoup, à l'intérieur de ça?
M. Garneau (Richard): Nous autres, là, c'est notre obsession, de convaincre les gens de faire ça. Donc, on fait des démarches continuelles dans ce sens-là.
Mme Champagne: Vous le faites comment?
M. Garneau (Richard): Bien, on...
Mme Grenier (Isabelle): On a fait de la publicité.
M. Garneau (Richard): ...on fait de la publicité. On s'en va, je vous dirais... Partout où il y a des poussettes, on est là. Exemple: au Salon de la maternité à Montréal, on a un beau kiosque ? et justement en fin de semaine ? un beau kiosque pour sensibiliser les gens, les mères qui se présentent à ce salon-là, qui sont en grossesse ou elles ont des très jeunes enfants. Alors, c'est une super occasion pour nous de sensibiliser les... Comme on disait tantôt, on fait de la publicité, mais, vous savez, on a un petit budget de publicité quand même. On est modestes, on est un organisme à but non lucratif, on met des annonces à RDI, qui est à un coût qui est quand même raisonnable. Mais c'est sûr que c'est pour ça qu'on pense qu'il devrait y avoir un appui, peut-être une sensibilisation de la part du gouvernement justement pour encourager les gens à le faire, mais on fait ce que l'on peut, autrement dit, là, en ce sens-là.
Mme Grenier (Isabelle): Il faut comprendre d'où l'on vient aussi, parce qu'il y a 40 ans, c'étaient des représentants sur la route ? et c'est encore le cas ? mais qui vont s'asseoir à la table de cuisine des clients et puis qui expliquent le régime sur place, là, alors dans les chaumières. Et ça se passe encore comme ça. Donc, nous, la façon dont on se fait connaître, c'est vraiment sur le terrain, comme M. Garneau disait, c'est: Salon paternité, maternité; partout où il y a des kiosques, où il y a des enfants qui sont susceptibles d'être là, que ce soit au zoo de Granby, peu importe, à La Ronde, on y est, on est sur le terrain. Et là on s'est modernisés, on a fait donc de la publicité à la télévision de plus en plus. Mais évidemment, là, à nous seuls, on ne peut pas y arriver, donc on a besoin d'un petit coup de pouce de votre part.
Le Président (M. Kelley): Oui. Dernière question.
Mme Champagne: Une petite question supplémentaire. Que diriez-vous à un parent ? et je l'ai entendu la semaine dernière ? qui n'a pas l'intention... n'a pas le goût, n'est pas sensible à la participation à ce genre de fonds là, préfère ouvrir un petit compte de banque pour sa petite-fille, d'ailleurs ? c'est une petite fille en l'occurrence ? et dire: Écoute, moi, dans 20 ans, je vais avoir épargné, puis mes risques sont moins grands que si je participe à ça puis que la jeune demoiselle en question décide, rendue à 18 ans, de ne plus continuer ses études, là. Vous répondriez quoi à ce genre de parent là?
M. Garneau (Richard): Bien, nous autres, on leur dit d'abord qu'en mettant l'argent de côté comme ça tu renonces à la subvention. En principe, les intérêts que tu as, même s'ils sont peu ? on sait que les taux d'intérêt ne sont pas très élevés, là ? mais les intérêts sont imposables, ce qui n'est pas le cas dans un régime enregistré d'épargne-études. Et, nous autres, on dit aussi la chose suivante: c'est que, si l'enfant ne fait pas d'études, mettons... L'enfant arrive à 18 ans puis... ou il fait des études; il ne va pas à l'université puis il fait un diplôme d'études professionnelles, ce qui n'est pas méchant ? ce qu'il faut prévenir surtout, c'est le décrochage, hein, vous en conviendrez. Mais mettons qu'il fait ça. Bien ça, ça ne coûte pas cher, c'est financé par l'État. Donc, le parent, lui, qui a épargné de l'argent, on lui redonne son argent, puis son enfant ne fait pas d'études postsecondaires coûteuses, donc il n'est pas mal pris. Oui, c'est vrai, il a peut-être renoncé, mais le problème, c'est que, si l'enfant fait des études postsecondaires puis il va à l'université, c'est là que ça coûte cher. C'est là que ça coûte cher et c'est là que l'argent est disponible dans un régime enregistré d'épargne-études. C'est ça qu'on dit généralement.
Évidemment, la subvention est un élément important, ça nous aide beaucoup. C'est de l'argent que tu n'aurais pas autrement si tu n'es pas dans un régime enregistré d'épargne-études.
Mme Grenier (Isabelle): Et ce qu'on a constaté chez nous ? ça, c'est assez amusant ? c'est que ? et les parents nous le disent ? le fait qu'ils aient contribué à un régime enregistré d'épargne-études et que l'enfant le sait... Comme par exemple, chez nous, si votre enfant... s'il a un régime chez nous, nous lui envoyons une espèce de petit diplôme, de certificat que les parents vont encadrer, accrochent dans la chambre de l'enfant. Et puis ça, c'est pour quand il va aller à l'université. Puis l'enfant, il grandit avec cette image-là devant lui, ce diplôme, ce certificat, et puis, pour lui, c'est une évidence qu'il va étudier, là; ce n'est même pas une question, ce n'est pas un questionnement, c'est évident. Alors, c'est un outil, un incitatif. Ça encourage les gens, non seulement les parents, à épargner mais les enfants. On le met dans leur tête, on leur met cette idée-là qu'ils vont en faire, des études.
Alors, le Régime enregistré, ce n'est pas seulement une question de subvention qui est un incitatif, mais c'est vraiment d'inculquer à l'enfant le désir d'aller à l'école et que, pour lui, c'est un choix qui est évident.
Mme Champagne: Merci.
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup pour l'originalité de votre présentation. C'est vraiment un volet qu'on n'a pas regardé comme commission. Alors, je pense, c'est très intéressant et je pense qu'aussi, souvent, le chiffre de le nombre de personnes au Québec qui sont à l'université pour la première fois, la première fois dans une famille ? première génération aux études... Et, peut-être avec le temps, l'habitude de mettre de l'argent à côté pour les générations à venir, ça va développer au Québec.
Alors, sur ça, je vais suspendre nos travaux quelques instants. Et j'invite le prochain groupe, Associations étudiantes facultaires de l'Université du Québec à Montréal, de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 27)
(Reprise à 11 h 30)
Le Président (M. Kelley): Au nom de la commission, je souhaite la bienvenue aux Associations étudiantes facultaires de l'Université du Québec à Montréal. Et je cède la parole... Je pense que M. Patrice Houle... est-ce que c'est bien... La parole est à vous.
Associations étudiantes facultaires de l'UQAM
M. Martin (Éric): M. le Président, bonjour. M. le ministre de l'Éducation, bonjour aussi. Mme la critique officielle de l'opposition en éducation et aussi à tous les membres de la commission, bonjour.
J'aimerais vous présenter les porte-parole des assos facultaires de l'UQAM. Le coordonnateur général de l'Association facultaire étudiante en sciences politiques et en droit, M. Jean Prud'homme, à ma droite; le président de l'Association facultaire en lettres, langues et communications, M. Patrice Houle; l'agent de recherche et de liaison, M. Éric Gougeon; et moi-même, Éric Martin, délégué aux communications. Et, les autres représentants qui sont dans la salle aussi, bonjour. Je cède la parole immédiatement à M. Prud'homme.
M. Prud'homme (Jean): Merci de nous écouter avant de distribuer les copies du prochain budget Séguin. Qui sait? On espère que nous allons réussir à vous apporter des modifications de dernière minute pendant l'heure du repas.
Nous ne sommes pas des économistes, des administrateurs, des politiciens ou des hommes d'affaires, comme la majorité des intervenants qui ont défilé devant cette commission. Nous sommes des étudiants, et je m'adresse à vous en tant qu'anciens étudiants. Nous sommes les premiers concernés lorsqu'il est question de financement et d'accessibilité universitaire. Le problème du sous-financement des universités et la recherche de solutions viables sont une préoccupation majeure pour les associations et pour les étudiants de l'UQAM. C'est un problème que nous vivons, un sujet qui suscite les plus vives discussions, un dossier que nous suivons depuis déjà quelque temps. C'est pourquoi nous avons soumis un mémoire à cet effet, mémoire qui est appuyé par les associations étudiantes de l'UQAM et par notre recteur et la haute direction de l'Université du Québec à Montréal.
Notre statut d'étudiant, notre réalité quotidienne et celle de nos camarades souvent peu fortunés nous donnent une sensibilité particulière à la problématique du sous-financement et nous placent dans une position d'observation privilégiée lorsqu'il s'agit d'en faire l'analyse et d'en tirer des conclusions. C'est pourquoi nous demandons aux membres de cette commission de porter une attention particulière à notre présentation. Nous sommes à même de constater que nos universités sont sous-financées, nous manquons de ressources, les classes sont de plus en plus bondées. Au moment où les universités se remettent à peine des impacts douloureux des compressions budgétaires, une étude conjointe de la CREPUQ et du MEQ a démontré qu'il manque actuellement 375 millions de dollars par année dans les universités du Québec pour qu'elles soient fonctionnelles et qu'elles soient à la hauteur des autres universités du Canada, de l'Amérique et du monde entier. Nous attendons de la commission qu'elle recommande des solutions viables à long terme pour résorber le problème. Ces solutions doivent impliquer l'ensemble des acteurs de la société québécoise. Elles doivent garantir un enseignement de qualité qui soit accessible, qui puisse bénéficier de ressources pédagogiques et d'infrastructures adéquates.
Or, depuis le début de cette commission, des groupes d'intérêts et même des individus isolés, recteurs, éditorialistes et intervenants des différents lobbys et «think tanks» de droite ont fait d'une hausse des frais de scolarité imposée aux étudiants leur principal cheval de bataille. Certains ont même proposé la création d'un impôt postuniversitaire calqué sur le désastre britannique, où les frais ont triplé pour atteindre plus de 6 000 $ par année et où les programmes de bourses déficients ne remplissent pas leur mandat lorsqu'il s'agit de corriger les problèmes d'accessibilité générés par la hausse des frais. On peut bien parler des étudiants qui toucheront des hauts salaires après diplomation et qui seront en mesure d'absorber des hausses de frais, mais qu'en est-il des étudiants en culture ou en arts qui ne gagneront jamais qu'une fraction de ces salaires hypothétiques et qu'on utilise pour justifier la hausse des frais et l'instauration de l'impôt postuniversitaire? On parle constamment des futurs nantis qui étudient en médecine. Le réseau des universités publiques de l'Université du Québec en entier n'a même pas de programme de médecine.
On a jusqu'à avancé l'idée absurde de déréglementer les frais de scolarité et de majorer les frais selon les coûts de la formation. Oui, la déréglementation des frais de scolarité aura sûrement à court terme un effet positif pour plusieurs acteurs du milieu universitaire qui voudraient renflouer rapidement les coffres des universités. Par contre, la situation se gâte lorsqu'on examine de plus près les effets à moyen terme. D'abord, il y aurait une compétition malsaine entre les universités. On peut même anticiper la création d'universités de deuxième ordre. Pire encore, les universités qui émergeraient en tête de peloton ne suffiraient pas à combler la demande. Conséquemment, les universités deviendraient des centres d'achats du savoir où l'achat des diplômes favoriserait les mieux nantis de la société. Il faut éviter de confondre diplôme de qualité et diplôme dispendieux.
Une étude de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université nous révèle que, dans les 30 dernières années, les études universitaires n'ont jamais été aussi peu accessibles aujourd'hui pour la classe moyenne. Beaucoup d'étudiants vivent déjà avec des revenus souvent inférieurs au seuil de la pauvreté. Comme vous pourrez le lire dans notre mémoire, environ deux tiers des étudiants de l'UQAM ont un revenu de 10 000 $ et moins par année. Or, selon Statistique Canada, le seuil de faible revenu en 2001 était plutôt situé à environ 15 500 $. Les étudiants ont à faire face à une augmentation des coûts de la vie, à une crise du logement, font des stages non rémunérés et doivent en plus, pour subvenir à leurs besoins, travailler pendant leurs études. Le travail-étude est devenu une normalité. 58 % des étudiants universitaires conservent un travail extérieur durant la période scolaire. Leur capacité de payer est en détérioration constante, et cette situation n'est pas encore reconnue.
Ainsi, dans le document étudié, au Québec, le ministère de l'Éducation du Québec prétendait qu'il en coûtait 8 000 $ par an à un étudiant étranger qui voudrait étudier ici. Budgéter 5 $ par jour pour se nourrir est, pour le moins dire, plutôt insultant pour la condition étudiante. Fait plus intéressant encore ? pour se remettre dans la bonne perspective ? selon la même étude, les frais payés par les étudiants du Québec et du Canada sont parmi les plus élevés de l'Occident. Il n'y a que les étudiants américains et les Japonais qui paient plus. Dans huit pays d'Europe, les étudiants vont à l'université gratuitement. La rhétorique coût-bénéfice, employée par les acteurs qui prêchent la hausse des frais de scolarité, voudrait nous faire croire que les étudiants retirent tellement d'avantages financiers de leurs études qu'ils doivent être prêts à payer plus. Quand l'endettement moyen des diplômés du premier cycle atteint 21 000 $, ces bénéfices sont très relatifs, et les lectures réductrices qu'on voudrait en faire tombent à plat.
Les associations facultaires étudiantes de l'UQAM ne défendent pas des théories économiques ou des intérêts privés. Nous défendons l'intérêt des étudiants et donc l'accessibilité universitaire. Notre tradition d'engagement et de sensibilité aux valeurs collectives nous fait préférer l'intérêt général au discours dangereusement individualisant qui réduit la valeur des services sociaux à leur rentabilité et à leur coût nominal. Quoiqu'en disent les «chantres de la hausse à tout prix», les étudiants ont l'appui d'une forte majorité de Québécois lorsqu'ils se défendent contre une augmentation de leur fardeau financier. En effet, un sondage Léger Marketing révèle, début janvier, que 60 % des Québécois et, il va sans dire, la majorité des étudiants s'opposent au dégel des frais de scolarité.
L'accessibilité des études instaurée par le rapport Parent a été un des facteurs décisifs dans l'évolution économique et sociale du Québec. Le nombre de bacheliers a augmenté de 135 % dans les 40 dernières années. Il s'agit d'un acquis social important et il faut tout mettre en oeuvre pour le préserver. Restreindre l'accessibilité installerait une formidable injustice entre les générations qui ont bénéficié d'une éducation abordable et la nôtre. Ainsi, dans notre empressement à renflouer les coffres des universités, il faut à tout prix éviter de sacrifier l'accessibilité universelle de l'éducation. Il ne faudrait pas, en réglant le problème du sous-financement, créer un autre problème ailleurs que celui-là, qui serait créer des inégalités intra et intergénérationnelles entre les étudiants aussi bien qu'entre les étudiants et leurs parents. Changer le mal de place, ça ne règle pas le problème de fond. C'est pourquoi nous exhortons le gouvernement à maintenir le gel des frais de scolarité et à réinvestir massivement en éducation plutôt que de céder aux pressions malavisées de ceux qui tiennent à hypothéquer l'avenir.
Nous en arrivons au constat que nous avons déjà les outils au Québec pour trouver l'argent nécessaire au réinvestissement. La solution passe par des mesures fiscales et surtout une fiscalité responsable. Il est vrai que nous retirons des bénéfices indéniables de notre accès à l'éducation universitaire, mais il faut aussi rappeler qu'une éducation de qualité assure des retombées économiques et sociales qui profitent à l'ensemble de la société québécoise.
n
(11 h 40)
n
L'éducation universitaire est un besoin collectif et aussi une responsabilité collective. La solution au problème du sous-financement doit elle aussi être collective. Les entreprises et l'ensemble de la société québécoise doivent y participer. Le gouvernement doit utiliser les fonds publics à sa disposition et parallèlement opter pour la participation des employeurs québécois pour combler le manque à gagner de 375 millions de dollars. Ce 375 millions n'est pas un plafond à atteindre, mais bel et bien un minimum qui n'obligera pas les universités à choisir entre la qualité et l'accessibilité.
M. Houle (Patrice): En éducation, au Québec, chacun doit faire sa part. Considérons d'emblée que l'éducation universitaire pourrait être carrément gratuite, puisqu'il s'agit en définitive d'un choix de société. Considérons également que les étudiants font déjà leur part en acceptant de payer certains des frais les plus élevés en Occident en plus d'une ribambelle de frais afférents.
Avant de creuser plus profondément l'abîme que sont les poches des étudiants, demandons-nous plutôt quels sont les autres acteurs de la société québécoise qui ne font pas leur part en éducation. La réponse saute aux yeux. Le secteur privé est en défaut de paiement depuis trop longtemps. Aujourd'hui, les étudiants deviennent huissiers et exigent des comptes. À l'échelle mondiale, l'entreprise privée s'est montrée intéressée par le secteur éducatif et cherche à s'y introduire par tous les moyens. Une participation directe est à exclure d'emblée pour des raisons que nous n'avons pas à élaborer ici. Le mouvement étudiant québécois s'est toujours opposé à toute forme de privatisation de l'éducation. Faut-il pour autant en rester là et exclure toute participation indirecte de l'entreprise? Depuis l'arrivée du Parti libéral, le secteur patronal et commercial n'a jamais, semble-t-il, été aussi motivé de participer aux affaires publiques. Profitons de cet enthousiasme et proposons aux entreprises de participer par le biais d'une fiscalité responsable. Payez vos impôts comme tout le monde, et nous en ferons un fonds dédié au fonctionnement universitaire.
La Chaire d'études socioéconomiques de l'UQAM publie, année après année, des études qui démontrent que l'entreprise privée est, comment dire, cheap quand vient le temps de participer à l'assiette fiscale du Québec. Les impôts des entreprises doivent être perçus et devenir une nouvelle source de revenus dédiée au fonctionnement des universités et des services sociaux québécois. Observons d'abord l'évolution de la part des impôts payés respectivement par les citoyens et les entreprises. Ensuite, nous présenterons sommairement les résultats de la Chaire socioéconomique de l'UQAM afin de cerner les deux principaux types d'abris fiscaux au Canada et au Québec, c'est-à-dire les reports et les évitements d'impôts des entreprises.
Pour le moment, les entreprises ne participent que minimalement à l'éducation et aux services sociaux du Québec. L'étude de la Chaire socioéconomique de l'UQAM démontre que, pour l'année 1996-1997, les individus ont versé 13 milliards à l'impôt et 7 milliards en TVQ, soit deux tiers des revenus autonomes du gouvernement. En revanche, les entreprises n'ont versé qu'un cinquième des revenus autonomes, soit 1 milliard en impôt sur le revenu, 2 milliards en taxes sur le capital et 4 milliards au Fonds sur les services de santé. Notons que le Parti libéral a promis d'abolir la taxe sur le capital pour les petites et moyennes entreprises et la réduire considérablement pour les plus grandes entreprises. Les reports d'impôts sont aussi une pratique courante dans le milieu des affaires. Les entreprises évitent ainsi de payer les impôts d'année en année en les reportant à l'année suivante, puis à l'année d'après, pour ne pas dire aux calendes grecques, si bien qu'en bout de ligne l'État, donc la population, ne reçoit rien du tout. Par exemple, si l'on se base sur un taux d'intérêt de 8 %, une compagnie qui paie 1 $ d'impôts dans 10 ans ne paiera en réalité que l'équivalent de 0,46 $ en dollars actuels. Par conséquence, en bout de compte, cette même compagnie pourrait faire des économies substantielles. Imaginons qu'une entreprise doive payer 20 millions d'impôts pour l'année 2002. Si elle les reporte en 2012, l'État perd 9,2 millions, tout cela, au détriment des contribuables et des étudiants qui supportent seuls le financement des universités.
L'enjeu est de taille. Au Canada, les 20 plus importants reports d'impôts totalisent 21 milliards en 1999. Au Québec, la cagnotte s'élève à 11 milliards. Si on observe 767 entreprises canadiennes, on constate facilement que les impôts reportés nets sont de 30 milliards pour la seule année de 1999. Dans les tableaux qu'on vous a remis en annexe, on peut voir que certaines compagnies, entre autres Alcan et Bombardier... 1,6 milliard d'impôts reportés d'année en année. En plus de s'attaquer aux 20 plus grands reports d'impôts au Canada, la seule façon acceptable est de rapatrier au gouvernement provincial les sommes nécessaires, comme le suggère le mémoire de la Commission-Jeunesse du PLQ, c'est-à-dire votre relève, M. le ministre de l'Éducation.
Les évitements d'impôts sont encore plus dramatiques pour les finances publiques, puisqu'on parle d'entreprises qui ne prennent même pas la peine de reporter des impôts et qui choisissent tout simplement de ne pas les payer. Cet argent qui n'est pas perçu pour être utilisé pour le bien public et l'avenir de la communauté. Il pourrait à tout le moins compenser aux milliards que le gouvernement a coupés dans les services sociaux. Il faudrait pour ça que le mouvement étudiant et les contribuables exigent du gouvernement actuel qu'il s'attaque franchement à l'évasion fiscale et aux reports d'impôts. L'annexe I contient d'ailleurs des tableaux qui présentent la liste des reports d'impôts au fédéral et au provincial pour l'année financière 1999. On peut voir encore une fois dans les tableaux: Canadien National, 3 milliards de reports d'impôts; Petro-Canada, 1 milliard. En 1999, 40 % des entreprises payaient moins de 20 % des impôts, tandis qu'elles devraient payer normalement 46 % en faisant la somme du fédéral et du provincial.
C'est un phénomène dont on discute très peu, surtout depuis 1988, que les gouvernements ne publient plus les données sur les compagnies qui ne paient pas d'impôts. Néanmoins, la Chaire d'études socioéconomiques de l'UQAM nous apprend que, sur un échantillon de 390 compagnies étudiées, 158 d'entre elles auraient encaissé 26 milliards de profit mais n'auraient payé que 2 milliards et demi d'impôts, 158 entreprises qui ne paient que 10 % d'impôts...
Pire encore, le quart des compagnies analysées n'ont payé que 3,5 % d'impôts en 1999 après avoir engrangé des profits de 11 milliards. Comme si ça ne suffisait pas, certaines entreprises ont reçu des remboursements des gouvernements. 13 entreprises canadiennes auraient reçu 78 millions de dollars même après avoir déclaré des profits de 812 millions. Toujours en 1999, 20 entreprises n'ont pas payé d'impôts du tout malgré des profits de 970 millions.
En somme, pour l'ensemble des 390 entreprises analysées, 3 % ont reçu un remboursement d'impôts, 5 % n'ont ont pas payé du tout, 18 % ont payé 1 % à 10 % d'impôts et 14 % auraient payé entre 11 et 20 % d'impôts. Le tout donne un taux d'imposition d'entre 10 % et 40 % aux entreprises. Votre annexe III contient aussi un tableau qui indique la différence entre le taux d'imposition prétendu que les compagnies déclarent officiellement et les taux d'imposition réels payés par les trois entreprises bien installées au Québec à la fin de l'année financière 1999. C'est particulièrement intéressant; on peut regarder Molson qui a prétendu avoir payé 56 % d'impôts, alors que, dans les faits, elle n'en a payé que 2 %.
S'il existait au Québec une réelle imposition des entreprises, voire une nouvelle source de revenus dédiée à la formation universitaire, les différents paliers de gouvernement pourraient facilement investir des milliards en éducation et en santé. Un impôt minimum aux entreprises et dédié aux services sociaux, à l'éducation qui serait aussi peu élevé que 20 %, soit 10 % au provincial et 10 % au fédéral, est appliqué à l'ensemble des compagnies canadiennes, du moins celles qui sont identifiées dans les tableaux. On obtiendrait au bas mot 5 milliards de plus par année à investir en éducation et en santé. Les données que nous vous avons présentées sont largement disponibles pour consultation.
Pourtant, lorsqu'il est question de refinancement universitaire, la question de la responsabilité des entreprises n'est jamais abordée, mais par les tenants d'une hausse de frais dont l'argumentaire repose précisément sur l'importance de faire payer ceux qui profitent. De toute évidence, les entreprises bénéficient d'énormes largesses, pour ne pas dire de laxisme, à cet égard, alors que les étudiants sont constamment pointés du doigt parce qu'ils ne contribueraient supposément pas suffisamment à payer leur formation.
M. Prud'homme (Jean): En somme, maintenir le gel des frais de scolarité est un choix important pour l'avenir de la société québécoise. Si nous désirons le maintien du gel de frais de scolarité, il faut examiner sérieusement le déplacement du fardeau fiscal des individus vers les entreprises et la collectivité. Les étudiants de l'UQAM estiment que les citoyens québécois ont suffisamment fait les frais des coupures douloureuses dans les programmes sociaux, particulièrement en matière de santé et d'éducation. Il appartient maintenant à l'entreprise privée de contribuer à son tour aux infrastructures de l'économie et de la société québécoise. Nous croyons qu'il est grand temps de dénoncer les différents abris fiscaux et d'envisager une imposition des entreprises afin qu'elles participent pleinement à l'assiette fiscale du Québec, et plus particulièrement à une nouvelle source de revenus dédiée au fonctionnement des universités québécoises.
En somme, le contexte est le suivant: les contribuables, depuis 1993, paient en moyenne près de 89 % d'impôts sur le revenu, alors qu'une corporation paie en moyenne à peine 11 % sur le revenu. Ils versent en moyenne 13 milliards en impôts et 7 milliards en TVQ, soit deux tiers des revenus autonomes du gouvernement. Au Canada, les 20 plus importants reports d'impôts totaliseraient 21 milliards de dollars en 1999, et, au Québec, les 20 plus importants reports d'impôts totaliseront 11 milliards en 1999.
Après mûre réflexion, nous en venons à la conclusion suivante: afin de pallier au sous-financement de 375 millions de dollars identifié en janvier dernier par l'étude conjointe MEQ-CREPUQ, les étudiants de l'UQAM, avec l'appui de leur recteur, M. Roch Denis, et l'ensemble de l'institution exigent que l'on maintienne le gel des frais de scolarité, que le ministère des Finances s'assure de la perception des impôts des entreprises et de la pleine participation des entreprises à l'assiette fiscale du Québec et que le ministère de l'Éducation du Québec collabore avec le ministère des Finances pour instaurer un impôt dédié au fonctionnement des entreprises québécoises. Plutôt qu'une baisse d'impôts sympathique à court terme, nous demandons une participation des entreprises par le biais de la fiscalité responsable. La plus grave erreur de votre gouvernement serait de céder aux solutions simplistes de ceux qui voudraient voir les universités gérées comme des fast foods du savoir, de ceux qui sont trop préoccupés de savoir combien coûte un étudiant à la société pour se demander combien l'université rapporte à la société entière. Comme le disait Oscar Wilde, «les économistes sont des gens qui savent le prix de tout mais ne connaissent la valeur de rien».
Donc, il vous resterait l'heure du dîner pour parler à M. Séguin pour imprimer son budget cet après-midi, pour annoncer une hausse d'investissement. Merci.
n
(11 h 50)
n
Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup pour la présentation. Il y a un léger dépassement de temps, alors peut-être des blocs... quatre blocs de huit minutes; il faut libérer la salle. Alors, je donne la parole à vous, M. le ministre.
M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter la bienvenue aux étudiants... aux représentants étudiants de l'UQAM et étudiantes, puisqu'il y en a aussi d'ailleurs.
Je pense que, le moins qu'on puisse dire, c'est que vos propos sont très contrastés. Ça tranche un petit peu aussi avec les propos d'autres groupes d'étudiants qui ont été beaucoup plus en nuance, je pense, sur les mêmes questions. Juste une petite remarque peut-être. Vous avez dit, dès le départ, que ce qui était dit par les universités et le ministère, c'est qu'il manquait des sommes monétaires pour que les universités aient les mêmes ressources que les autres et... mais vous avez dit aussi pour qu'elles soient fonctionnelles. Je n'ai pas entendu ça pour ma part, et j'espère que nos universités sont fonctionnelles et que vos diplômes vont être bons, parce que je pense qu'ils le sont. C'est beaucoup plus pour nous assurer, si ma mémoire est bonne ? les demandes qu'on a des universités ? qu'il n'y ait pas de dérive de ce côté-là et que nos universités puissent effectivement concurrencer quand c'est le temps d'embaucher, etc. Alors donc, peut-être que vous pourrez réagir à ma petite réaction ici.
Moi, j'aimerais vous demander peut-être... Parce que vous demandez, à la page 33, vous recommandez qu'il y ait un comité qui soit créé selon les modalités qui vous sont propres, là ? vous les décrivez: «Il est proposé, par les associations facultaires de l'UQAM, de créer un comité ministériel décisionnel sur lequel siégeraient deux représentants étudiants ayant pour mission de rédiger une étude complète des frais afférents pour l'ensemble de la province et d'en rendre le contenu public ? et ? d'émettre une série de recommandations à l'Assemblée nationale tout en respectant les règles et les spécificités de chacune des universités.» Vous êtes au courant, j'imagine, qu'il existe actuellement un comité qui ne correspond pas nécessairement aux modalités dont vous parlez ici, mais qui comprend effectivement des représentants de la CREPUQ, du ministère et de la FEUQ et qui discute actuellement de ces questions d'accessibilité, notamment toute la question des frais afférents. Je dois vous dire que, moi, je compte bien sur les éclaircissements, l'éclairage de ce comité quand va venir le temps de rédiger une loi-cadre. Et votre recteur, je pense, le recteur de l'UQAM, fait partie ce groupe également de travail, de ce comité.
Est-ce que vous demandez, par votre recommandation ici, de la page 33, quelque chose qui est différent de ça ou en parallèle avec ce comité-là ou si finalement ce comité-là pourrait faire l'affaire, tout compte fait?
M. Prud'homme (Jean): Dans un premier temps, c'est important de mentionner qu'avec un financement adéquat cette recherche-là n'a pas sa place. Le premier aspect, c'est de s'assurer, par les changements de la fiscalité, du réinvestissement... On ne vise pas l'étude d'un projet de loi-cadre qui viserait à entériner les frais afférents et les frais administratifs, qui ont été un moyen, un palliatif pour combler les manques à gagner des universités. Ça a été les moyens pour aller chercher de l'argent à droite et à gauche. Donc, c'est ce qui diffère de notre position. Il faut qu'une étude complète présentement soit faite sur, entre autres, sur les définitions: Qu'est-ce qu'un frais afférent? Qu'est-ce qu'un frais administratif? Détailler, puisque présentement chaque université a des critères différents. Et de plus, pour ce qui de la représentation sur le comité, on doit mentionner que la seule participation étudiante est celle de la Fédération étudiante universitaire du Québec, d'où nous ne sommes pas représentés. On est quand même heureux de la présence de M. Roch Denis, mais la partie étudiante ici n'est pas représentée officiellement autour de cette table de consultation là.
Pour ce qui est de répondre à la première partie de votre question, sur le fonctionnement de l'université, je vais vous donner un exemple concret. On n'est pas très loin d'une difficulté réelle de fonctionnement. L'exemple flagrant, c'est les bibliothèques: des collections qui prennent des retards depuis des années; les infrastructures... qu'il n'y a pas eu de réinvestissement majeur à l'UQAM depuis des années. C'est des valeurs concrètes, ça. Une bibliothèque qui est désuète, qui n'est pas à jour, comment pouvoir permettre à des étudiants d'effectuer une recherche précise si les données ne sont pas accessibles?
M. Reid: Mais est-ce que je peux insister un peu sur ma question, à savoir: Le comité qui travaille actuellement pour vous, il faut scraper ça, quoi?
M. Prud'homme (Jean): Nous, notre aspect, c'est que le comité n'a pas... on s'oppose à la création de la loi-cadre qui vise à entériner ce processus-là, donc un mandat du comité qui vise à entériner, puisque c'est...
M. Reid: ...voulez dire.
M. Martin (Éric): En clair, on est indépendants de la FEUQ, donc on n'est pas représentés sur le comité non plus, puis ce n'est pas notre position qu'ils défendent. Donc, vous comprendrez qu'on s'en dissocie.
M. Reid: D'accord. Il y a des collègues peut-être qui ont des questions.
Le Président (M. Kelley): Oui. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Oui. Alors, bienvenue à vous. Merci pour votre mémoire. Je vous dirais que, dans l'ensemble des étudiants ou des jeunes qu'on a entendus, ce qui constitue l'ensemble de la relève, vous êtes les seuls à être allés aussi loin au niveau de ? comme mon collègue l'a mentionné tout à l'heure ? au niveau de la participation des entreprises ou en tout cas de la situation des entreprises par rapport à la situation des universités. Ce que je comprends finalement, c'est que, de votre point de vue, la situation des universités est un peu... serait grandement améliorée si les entreprises participaient plus considérablement finalement au financement des universités. Et, vous, vous parlez, là, des reports d'impôts, etc., là. Moi, j'aimerais ça vous entendre sur: De quelle façon vous voyez ça? Est-ce qu'on devrait obliger les entreprises à financer les universités d'une quelconque façon en les obligeant, par exemple, à verser un pourcentage... ou... Je ne sais pas de quelle façon vous le voyez. Parce qu'on nous a dit aussi qu'au niveau des fonds de recherche et de la recherche, tout ça... les étudiants nous ont dit ? la plupart ? bien qu'ils avaient une certaine crainte par rapport à la participation de l'entreprise privée dans la recherche, par exemple, des universités, ce qui contribue aussi au financement des universités. Alors, expliquez-moi davantage, là, de quelle façon vous le voyez ou... Ce que je comprends, c'est que c'est le fonds consolidé finalement qui est un problème pour vous.
M. Houle (Patrice): Bien, concrètement, ce qu'on proposait, c'était un 20 % des impôts non payés qui proviennent... ? 10 % du fédéral, 10 %, du provincial ? qui serait un fonds géré à même le ministère de l'Éducation du Québec pour financer directement les universités. Présentement, la seule contribution des entreprises privées, c'est des champs de recherche, c'est une implication directe dans l'éducation. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'ils doivent passer par un biais indirect, par le 20 % d'impôts. C'est extrêmement important que les entreprises privées participent, pour une raison très simple, c'est qu'ils profitent largement de l'éducation. Donc, les gens qui sortent de l'université avec un diplôme, c'est des gens qui vont aller travailler dans ces entreprises-là. Donc, jusqu'à un certain niveau, il faut qu'eux aussi participent à la formation de ces personnes-là par le biais du MEQ et non pas directement.
M. Prud'homme (Jean): Et ce n'est pas surréaliste, même si, de nos jours, ça semble être si surréaliste, cet aspect-là de l'implication indirecte du privé. Si on prend un certain recul, aux alentours des années soixante, la participation des entreprises privées en termes d'imposition était environ 55-45 pour l'individu, et, aujourd'hui, on parle, dans un espace d'environ 40 ans... un déplacement total du fardeau sur les individus à 89 % des impôts payés. Donc, il y a quand même un écart important qui a été... qui s'est produit, là, durant cette période-là.
M. Gougeon (Éric): Si je peux me permettre, en complémentaire. Pour la question de la recherche et de la privatisation, c'est plus au niveau de la propriété intellectuelle, la question des brevets, et d'éviter que les universités finalement se retrouvent avec des fonds de recherche qui ne vont faire que de la recherche appliquée, et surtout conserver la propriété intellectuelle. Il ne faudrait pas confondre université et entreprise privée, des spin-offs qui vont servir à des satellites pour différentes grandes compagnies multinationales. Ce n'est pas ça, l'enjeu. Quand on parle d'un financement dédié à même l'éducation et les services sociaux, évidemment en incluant la Santé, c'est vraiment pour renflouer le sous-financement global.
n(12 heures)n Peut-être que, comme on disait, l'étude du MEQ et de la CREPUQ, ils disaient que ça prenait au moins un plancher de 375 millions. Bien, nous, on pourrait quand même peut-être en rajouter de plus en plus, parce que, au bas mot, par année, on se retrouverait avec 5 milliards de plus pour dire: Bon, bien, dans le financement global de l'assiette fiscale, comment on peut répartir ça pour que ce soit, en santé, un bon réinvestissement et en éducation aussi, donc que l'investissement et les dépenses soient balancés de façon beaucoup plus équitable pour la moyenne des contribuables du Québec. Voilà.
M. Martin (Éric): Si je peux me permettre. Aussi, vous avez demandé quelle forme concrète ça devait prendre, tout ça. Nous, en fait, ce qu'on veut vous dire aujourd'hui, c'est que, dans toutes les revues de presse que j'ai faites pour la préparation de cette commission-là, j'ai vu beaucoup de gens nous dire: Ah! Les étudiants, c'est eux qui bénéficient, donc ils doivent payer; la solution passe par les poches des étudiants. Et c'est presque un réflexe automatique et immédiat, de s'orienter toujours vers une lecture qui parle de l'individu, combien ça coûte, un étudiant, à la... Et, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut partir d'une autre perspective, c'est de dire: Collectivement, qui bénéficie de ça? Les entreprises, la société et les étudiants. Donc, on est trois joueurs là-dedans, on doit s'impliquer tous les trois.
Quelle forme concrète? On n'est pas des économistes. On sait que c'est possible... Ça fait 40 ans qu'on a l'université accessible au Québec, et là tout d'un coup on nous dit qu'on ne peut plus se le payer. On sait que c'est possible de le faire, et la forme reste à trouver. Nous, on a des suggestions, mais je pense que l'important, ce qu'on veut amener, c'est: de dire que les étudiants sont les seuls bénéficiaires de leur éducation et donc doivent supporter le fardeau financier, c'est une rhétorique qui est complètement faussée et c'est partir dans la mauvaise direction. C'est une analyse qui est tronquée à notre avis, là.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: C'est parce qu'il y avait un collègue...
M. Gougeon (Éric): ...il y a une chose qu'il faut aussi se rendre compte. Quand on dit que nous allons bénéficier à la société, il faut penser aussi pas seulement aux gens qui font des sciences appliquées ou à des... il faut penser aux gens qui font de la science fondamentale et de la création. Pensons à une entreprise, par exemple, qui veut dynamiser son image, va faire appel à des étudiants en design, en arts visuels pour redynamiser son logo, son look, de la même façon qu'on va faire appel peut-être à des gens en sociologie pour appuyer des études de marché ou encore des étudiants en lettres peut-être ? qui sait? ? pour écrire des discours ministériels, M. le Président.
Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue au nom de ma formation politique. Je vais me permettre quelques commentaires, puis, après ça, je poserai des questions.
D'abord, je veux vous dire, peu importe qu'on soit d'accord ou pas avec votre mémoire, parce que je pense qu'il y en a qui sont peut-être en désaccord, ou avec certaines parties de votre mémoire, je trouve qu'il est bien écrit et bien documenté. En ce sens-là, je veux vous en féliciter.
Bon. Vous avez fait référence au budget du ministre des Finances, qu'il nous lira d'ici quelques heures. Quand on a commencé la commission, j'ai rappelé au ministre qu'il était déjà un peu tard pour l'année qui vient parce que les planifications budgétaires généralement, à la fin février, sont à peu près terminées. On est à la marge lorsqu'on arrive au début mars, et notre commission parlementaire commençait. Alors, je ne sais pas si notre commission aura influencé beaucoup le ministre Séguin. Peut-être que ce sera pour l'année prochaine... enfin le ministre des Finances, excusez-moi... mais j'espère que le ministre l'aura influencé avant ça. Je le souhaite d'ailleurs pour le bénéfice de tous ceux et celles qui vont à l'école.
Le ministre fait référence souvent au comité sur les frais afférents. Je pense qu'il n'a jamais rendu public quelque document que ce soit sur ça. Ce serait peut-être intéressant qu'on en ait état pour qu'on sache exactement de quoi il retourne parce que ça fait quelques fois qu'on y fait référence, et puis, moi, j'ai beau fouillé dans ma mémoire...
M. Reid: M. le Président, on ne l'a pas rendu public, mais on peut vous envoyer le document.
Mme Marois: J'aimerais bien. J'apprécierais.
M. Reid: On n'a pas sonné de trompettes, là.
Mme Marois: Bon. Alors, le troisième élément... Ah! Mais c'est de l'information parfois qu'il faut rendre publique sans sonner les trompettes nécessairement, M. le ministre... M. le Président.
Alors, troisième élément, c'est sur la question plus fondamentale évidemment où je crois que nous devrions avoir toutes nos ressources et tous nos moyens comme Québécois et comme Québécoises et ? vous connaissez la position de notre formation politique ? nous devrions être capables de prélever tous nos impôts et de décider de leur allocation en éducation, en santé ou ailleurs. Cependant, nous ne sommes pas un État souverain, et, dans le système fédératif actuel, il nous semble que l'une des solutions qui pourrait cependant être appliquée, c'est le transfert des points d'impôt, dans la foulée du rapport sur le déséquilibre fiscal. Vous y faites référence. Vous y êtes venus pendant votre présentation, mais c'est sûr que c'est par cette avenue-là, dans le système, comme je le dis, actuel, dans la Constitution... avec la Constitution que nous connaissons. On croit que ce serait une des façons d'aider à ce que les ressources disponibles soient plus grandes là où sont les besoins; et, on le sait, c'est en éducation et en santé, entre autres, et en ce qui a trait à la réduction des inégalités et à la lutte contre la pauvreté.
Bon. Je viens maintenant avec deux ou trois questions. Une première. Bon. Vous suggérez des mesures fiscales pour les entreprises ou du moins qu'on modifie la façon de traiter les profits des entreprises. Il y a un groupe d'universitaires qui est venu, les représentants de l'Université de Montréal, la FAECUM, qui a proposé qu'on impose la masse salariale, qu'on impose à 0,18 % la masse salariale, parce que vous savez très bien que les profits, selon qu'on est une multinationale, peuvent être déclarés ailleurs si les règles fiscales et financières des autres États limitrophes le facilitent. Puis je pense qu'on connaît bien les principes à cet égard-là. Vous faites référence au report des déclarations de profits. Et évidemment une entreprise qui, une année, a un très gros profit puis, les années subséquentes, n'en a pas, à ce moment-là, ça crée un déséquilibre dans la planification de ses investissements, de ses revenus, et tout le reste, tandis que, dans l'autre cas, évidemment on ne peut pas déclarer, là, ses profits ailleurs. On peut toujours penser à déménager l'entreprise, mais c'est un peu plus compliqué.
Alors, l'idée de la masse salariale, est-ce que c'est une hypothèse que vous avez envisagée d'une taxe sur la masse salariale pour faire contribuer davantage les entreprises?
M. Prud'homme (Jean): Alors ? peut-être en avez-vous été témoin ? nous avons fait une coalition avec, entre autres, l'Université de Montréal, la FAECUM ainsi que l'Université McGill. Donc, les universités de la grande région de Montréal sont toutes en accord par la voie du réinvestissement par voie fiscale. La porte est ouverte sur les moyens à prendre et les mesures. Donc, nous n'écartons pas le scénario qui a été présenté par la FAECUM devant vous, qui est une voie intéressante. Ce que nous désirons, c'est ouvrir le plus grand nombre de portes possible afin d'offrir des solutions au sous-financement.
Mme Marois: D'accord. Donc, vous considérez que l'entreprise... Bien, vous le démontrez assez bien, là, dans toute la première partie ? la seconde partie, c'est-à-dire; non, la première ? que vous souhaitez une participation plus grande des entreprises ? non, la seconde, c'est les frais afférents. Bon, je pense que ça, ça va, c'est assez clair dans votre mémoire. Et, comme vous vous êtes associés aux autres groupes, je pense que ça pourrait être une avenue à évaluer, à tout le moins. Bon.
Je veux revenir maintenant sur la question de l'aide financière aux études parce que vous avez aussi un long exposé dans votre présentation pour faire la démonstration que les ressources rendues disponibles par le programme d'aide aux études, par les prêts ou par les bourses ne sont pas suffisantes pour répondre aux besoins d'un étudiant qui a toujours un manque à gagner relativement important, là. C'est des petits montants, mais ça devient important quand c'est sur toute une année.
Est-ce que ? et c'est ce que j'ai cru lire ? est-ce que vous suggérez que la notion de faible revenu s'approche du salaire minimum, de ce que pourrait représenter le salaire minimum? Est-ce que vous avez fait des simulations à cet égard-là? Et qu'est-ce que vous envisageriez comme améliorations moins à la marge, là, mais plus substantielles au niveau du régime d'aide aux études? Parce que vous le dites dans votre mémoire ? c'est ça, je ne trouvais pas la référence ? «que le gouvernement se base sur les revenus d'une personne avec un salaire minimum à temps plein et le seuil de faible revenu de Statistique Canada pour une année afin d'établir et donner le coût de la vie réel d'un étudiant au Québec». Est-ce que vous avez fait des simulations à cet égard-là?
M. Gougeon (Éric): À vrai dire, non, parce que, pour une raison fort simple, c'est que les gens qui sont sur le comité à Québec, sur le comité tant opérationnel que consultatif, ne font pas partie de l'UQAM, ne sont pas des gens qui nous représentent. Donc, il n'y a aucune information. Et, à l'heure actuelle, si on prend la question simplement de l'aide financière aux études, on sait qu'à l'UQAM il y a des réformes majeures sur la façon dont vont être distribués les prêts et bourses. Cependant, les documents ne sont même pas encore accessibles. Ils sont disponibles à une mince couche de la population uqamienne, c'est-à-dire les cadres, qui ont même, eux... qui sont un peu serrés dans leur temps parce qu'on leur dit: Vous ne pouvez pas mettre ça en application encore, puisque le règlement n'est pas entériné sur la façon de distribuer la part du gâteau, les versements égaux dans les comptes de banque, et tout.
n(12 h 10)n Par contre, une chose qui pourrait être intéressante, c'est de revoir le seuil de revenu minimum. On l'a déjà fait puis on a eu l'impression que c'était pour bonifier et dire: Bien, voilà, les étudiants ne sont pas si pauvres. Comment se fait-il qu'en 2001 le seuil minimum de faible revenu était 15 500 $ et on se retrouve aujourd'hui à un chiffre qui s'approche de 13 000 $? Alors, je crois que là, c'est fausser la donnée. Et en plus, dans les études, ce qu'on remarque au niveau des prêts et bourses... il y a très peu de mentions de la crise du logement et de la hausse du tarif en transport en commun pour les étudiants montréalais.
Je voudrais simplement peut-être souligner une chose pour le transport... le coût du transport des étudiants: un étudiant qui étudie aux deuxième et troisième cycles souvent est âgé de 25 ans et plus. Or, il n'est même pas considéré étudiant, ne peut bénéficier d'aucun rabais. Et pourtant je pense qu'il y a quand même certains secteurs qui bénéficient en recherche à la compagnie de transport de Montréal. Donc, en ce sens-là, je crois qu'il serait intéressant peut-être de majorer aussi les rabais étudiants et peut-être aussi aux moins bien nantis de la société. Je vous rappellerai que l'UQAM est en plein centre-ville, et que l'itinérance est là, et que probablement qu'un des magazines les plus lus à Montréal, du moins dans le coin de l'UQAM, demeure et reste L'Itinéraire.
Mme Marois: D'accord. Quand vous mentionniez que les frais de logement étaient particulièrement élevés actuellement dans la région métropolitaine, ce qu'on peut vous dire, c'est que c'est vrai aussi dans la région de la Capitale-Nationale parce que c'est peut-être encore plus compliqué et difficile actuellement à Québec. Donc, c'est vrai dans beaucoup d'autres situations.
Vous faites un long plaidoyer pour les étudiants étrangers, ce que je trouve fort pertinent et intéressant. Est-ce qu'il y a déjà eu des démarches de votre part, entre autres pour qu'Ottawa accepte que des étudiants qui sont sur nos campus puissent éventuellement travailler à l'extérieur des campus, comme vous le souhaitez ici? Est-ce que vous savez s'il y a des démarches formelles qui ont été faites en ce sens-là?
M. Gougeon (Éric): Dans ce sens-là, c'est clair qu'il y a eu des démarches formelles, mais je pense qu'il faut revenir à la base du problème, qui est peut-être le programme études... le programme, pardon, études-travail. Il ne faut pas renier... rejeter du revers de la main ce programme-là. On a quand même fait des avancées considérables. Toutefois, ce programme est accessible aux étudiants étrangers qui paient des frais différentiels et ne tient pas compte des critères qui permettent d'élargir son accessibilité à d'autres types de besoins, notamment les retards de fonds ? je pense que c'est un peu normal quand on étudie à l'étranger. Il limite l'accès à l'emploi sur le campus puis il n'est pas compatible avec les séjours de courte durée. Je dirais aussi... il ne s'accompagne pas d'une banque d'emplois réservés aux étudiants étrangers. Donc, c'est un peu...
Imaginez-vous: vous arrivez sur le campus avec vos valises, on vous donne un 0,25 $, on vous dit: Allez voir les associations étudiantes facultaires ? nous ? ainsi que les étudiants qui représentent ces gens-là aussi, les différents regroupements ? africains, bon, etc.. On leur dit: Eux vont vous donner un coup de main. Je ne dis pas que les services à la vie étudiante ne font pas un excellent travail à ce point du vue là. Au contraire, je pense que ces gens-là sont même surchargés de travail. Toujours est-il qu'en ce sens je pense que les raisons qui motiveraient les recommandations de notre troisième chapitre, ce serait peut-être de réajuster et d'élargir le programme travail-études à tous les étudiants internationaux et étrangers qui sont dans le besoin et peut-être que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, avec le gouvernement canadien, adapte la législation au contexte de l'internationalisation des universités afin de permettre aux étudiants internationaux d'occuper un emploi évidemment à l'extérieur du campus. Parce que, en ce moment, si je comprends la logique que le gouvernement du Québec adopte pour ces étudiants-là, si on leur dit: «Vous ne pouvez pas travailler à l'extérieur du campus», je m'excuse, ils vont y aller quand même, mais au noir, donc vous favorisez encore une fois le rapport d'impôts.
Le Président (M. Kelley): Il reste cinq minutes pour M. le député de Vimont et quatre minutes de votre côté. M. le député de Vimont.
M. Auclair: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs. Moi, juste avant de revenir un petit peu... La députée de Taillon a fait des commentaires au tout début que j'aimerais quand même ramener un petit peu dans le contexte. Il faut bien se rappeler que, là, on vit une situation au niveau de l'éducation au Québec qui provient quand même de certains choix qui ont été faits dans le passé. Et cette réalité-là, elle est importante parce que, ces choix-là, on les supporte et on doit les vivre. Vous savez, vous avez mis en lumière quand même des éléments très intéressants au niveau du traitement des entreprises, et tout ça. Et ce que vous relevez dans le fond et ce que je retiens, moi, de ça, c'est une question de choix qui a été faite, parce que, même si on rapatriait ces fonds-là, ça revient toujours au gouvernement de faire des choix. La question est de savoir: Est-ce qu'on ferait le choix que vous demandez, c'est-à-dire d'investir dans l'éducation? C'est là qu'est vraiment la réalité dans tout ça, hein? C'est toujours une question de choix. Aujourd'hui, vous avez soulevé des points quand même, moi, qui m'intéressent, qui m'interpellent beaucoup. Quand vous parlez...
Vous avez soulevé un élément qui est intéressant au niveau des réalités des étudiants ? surtout à l'UQAM, mais ce peut être partout à travers la province ? au niveau des classes surbondées, le fait aussi... ? vous ne l'avez peut-être pas soulevé, mais je pense que ça fait partie de ça... la difficulté d'avoir accès aux enseignants, aux professeurs, comment ça se vit? Moi, ça, ça m'intéresse parce qu'on parle beaucoup de recherche. Beaucoup d'autres universités sont venues nous parler de l'importance de la recherche, qu'il fallait soutenir la recherche. Mais, au niveau des premiers cycles entre autres, comment ça se vit, cette réalité-là, du fait qu'on a beaucoup de professeurs qui se consacrent à la recherche? Et c'est quoi, l'impact sur les étudiants, dans la qualité aussi de votre enseignement? Parce que c'est important pour nous, ça.
M. Houle (Patrice): Pour ce qui est de la question de choix ? on est malheureusement très conscients de ça ? mais on tenait à rappeler que, lors des élections, voilà à peine un an, le Parti libéral a dit que ses deux priorités étaient l'éducation et la santé, donc on présume que l'éducation va demeurer, au cours des prochains budgets et au cours de cette imposition-là, un choix du gouvernement libéral. Mais surtout ce qu'on se dit, c'est: l'impôt qui serait perçu de ces entreprises-là, ce serait un impôt dédié... non pas seulement on va chercher de l'argent et on ne sait pas ce qu'on fait avec, mais on va le chercher pour l'éducation.
M. Auclair: ...consacré directement.
M. Houle (Patrice): Oui.
M. Auclair: Maintenant pour la réalité sur le terrain face à la recherche, entre autres, et tout ça.
M. Houle (Patrice): Au premier cycle, votre réalité est très présente, c'est-à-dire... les professeurs sont de plus en plus actifs vers ces chaires de recherche là, ce qu'on appelle la théorie des superprofesseurs, les «top guns». Et, de plus en plus, les premiers cycles vont se retourner vers les chargés de cours. C'est les chargés de cours qui n'ont aucune infrastructure à offrir pour les étudiants. On parle... chaque département... va avoir un local pour une trentaine de chargés de cours. Alors, c'est flagrant comment que cette classe-là, qui est maintenant en lien direct avec les étudiants au premier cycle, n'a pas les outils pour pouvoir offrir un encadrement adéquat et offrir les outils pour une bonne pédagogie.
M. Auclair: O.K. Et, dans le 375 millions nécessaire qui est réclamé ? je pense que vous n'êtes pas les seuls à le faire ? est-ce que vous prenez en considération cette réalité-là justement pour s'assurer que les étudiants de premier cycle aient le droit à avoir justement accès à ces «top guns» là, ces professeurs-là dans le fond, de ramener un petit peu le professeur universitaire à sa mission de base, c'est-à-dire enseigner? Parce que je pense que c'est très stimulant, d'avoir des chargés de cours ? on a des très bons chargés de cours ? mais c'est très stimulant, d'avoir des professeurs qui ont un vécu puis une connaissance plus poussée. Est-ce que c'est inclus dans le fond? Est-ce que cette réinjection-là, ça fait partie de ça?
M. Gougeon (Éric): Bien, en fait, je scinderais peut-être la question en deux parties pour voir deux volets différents. Il y a la réalité de la recherche, que ce soient des chaires, que ce soient des groupes de recherche qui sont soutenus par des fonds FCAR ou CRSH ? on va mettre ces choses-là dans le même panier ? et d'un autre côté la question des chargés de cours et de leur intégration au niveau de l'enseignement et de la recherche.
Je crois que, dans un premier temps, pour ce qui est des chaires de recherche, dans beaucoup de secteurs, une chose qui est intéressante pour l'ensemble de la collectivité... les gens qui ont des chaires de recherche ainsi que des groupes subventionnés ont beaucoup de liens avec le milieu, donc c'est intéressant pour les étudiants qui travaillent pour ces chaires de recherche là, et tout.
Par contre, je pense qu'il faudrait regarder à même la charge de travail d'un professeur. Peut-être que M. Reid pourrait en témoigner parce que, si je ne m'abuse, il a sûrement eu une carrière d'enseignant. C'est... La charge de travail est assez faramineuse pour des professeurs. Donc, il faudrait peut-être revoir. Est-ce que c'est aux étudiants d'être de... Est-ce qu'on est les mieux placés pour le faire? Je pense qu'on peut être consultés sur le sujet à travers nos instances locales pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'ingérence de la part du gouvernement des choix que nous prenons sur nos campus. Je pense que ça peut s'axer là, les discussions, que ce soit un petit peu plus local et avec les différents acteurs, qu'ils soient syndicaux et associatifs.
D'autre part, pour ce qui est de l'intégration des chargés de cours, une question que les étudiants, disons, regardent, mais avec beaucoup de délicatesse parce que ça pourrait soulever beaucoup de débats, de discussions et faire couler beaucoup d'encre dans plusieurs journaux sur le campus, c'est l'intégration des chargés de cours à la recherche. Je vois un sourire affiché par M. Reid, évidemment. Une chose qu'on a pensée, c'est que, si, au bac par exemple, les chargés de cours donnent beaucoup, beaucoup de charges de cours, ça veut donc dire qu'un étudiant qui voudrait avoir accès à la maîtrise comme tremplin d'études supérieures... normalement, un des critères pour un étudiant normal, c'est avec qui j'ai des affinités au point de vue intellectuel, donc les champs de recherche, les intérêts de corpus, les thématiques, les échantillonnages ? bon, je pense que tout le monde ici comprend la situation ? et d'un autre côté c'est l'affinité personnelle aussi. C'est assez difficile en effet lorsqu'on a peu ou pas de contacts avec des professeurs.
n(12 h 20)n Une des solutions qui pourrait être regardée ? et je pense que ce doit être discuté localement avant d'être débattu au niveau national ? ce serait peut-être de regarder la codirection de mémoire ou de thèse pour les chargés de cours. C'est une question épineuse, on le sait très bien, on ne se le cachera pas; on ne jouera pas derrière des masques ou encore des paravents pour faire du théâtre. Il va falloir regarder sérieusement comment un chargé de cours pourrait-il avoir une intégration à la recherche non seulement pour favoriser son encadrement pour les étudiants, mais toujours pour rester aussi dans le bain de la continuité des résultats qui se font au niveau international, parce que la réalité de la recherche, voilà 20 ans, elle était locale, québécoise. Il y avait un axe de recherche qui était extrêmement est-ouest; maintenant, il s'est déplacé nord-sud.
Donc, on dit qu'on fait feu un peu partout. Je pense que la question de l'intégration de la recherche des chargés de cours pourrait s'avérer pertinente au niveau d'une ? peut-être ? d'une codirection. Évidemment, ça nous permettrait peut-être de ne pas trop toucher aux questions épineuses, mais déjà une intégration, ça serait un premier pas peut-être dans la bonne direction. Mais ce sont des discussions, je le répète ? et je tiens à le souligner en caractère gras, le mettre en italique, tout ce que vous voulez ? c'est des discussions qui doivent être tenues localement parce que c'est des questions aussi qui imbriquent des conditions de travail, c'est des questions qui sont de ressort syndical, qui sont peut-être comme les frais afférents, différents d'un campus à l'autre parce que la réalité, si on veut, la nomenclature, la topologie, n'est pas nécessairement la même. Donc, à l'UQAM, ça serait peut-être ça.
Le Président (M. Kelley): ...dernière question à Mme la députée de Champlain, parce qu'il faut libérer la salle pour midi trente.
Mme Champagne: Parfait. Alors, bonjour à vous quatre. Écoutez, dans votre mémoire, qui est effectivement très complet et qui nous interpelle beaucoup à peu près à chacune des pages, là, vous faites une recommandation qui va dans le sens tout à l'heure que... Un de vous quatre a soulevé ce point-là, c'est que vous n'êtes pas tellement d'accord avec une loi-cadre sur les frais afférents, mais pas du tout. Donc, vous vous distancez, là, de la CREPUQ là-dessus. Par contre, vous dites: Nous, on propose un comité ministériel puis on veut être dessus. J'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu, de ce genre de comité là, parce que vous l'avez déjà suggéré au ministre. Est-ce que c'est rendu plus loin que le mémoire qui est ici? Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Prud'homme (Jean): Dans un premier temps, la raison de notre objection, c'est que la loi-cadre, c'est la porte ouverte sur une déréglementation et sur une augmentation des frais afférents. Au lieu de réglementer, ça va exactement emmener l'inverse. On va cautionner ces frais-là, qui n'auraient jamais dû exister à la première... dans un premier temps. Pour vous donner un exemple, maintenant, il n'y a plus aucun bulletin d'envoyé par papier; un premier critère ? on est tout à fait d'accord: pour des raisons d'écologie.
Dans un deuxième temps, c'est: maintenant, on doit payer 6 $ pour avoir une copie de son relevé-facture. Pourtant, avant, on nous l'envoyait par la poste, même à l'université, sans problèmes, et c'était normal, c'était coutume, de recevoir son bulletin. On est tout à fait d'accord, on ne l'envoie plus par la poste. Mais ce frais-là, qui pourtant... un employé, le registraire, c'est les devoirs... Mais maintenant on a des frais maintenant qui n'existaient pas avant et on ne veut pas se retrouver à créer une loi-cadre qui va nous encadrer. Ils vont donner un aval aux universités pour imposer et surtaxer davantage les étudiants. Donc, c'est pour ça que nous nous objectons à la loi-cadre sous cette forme-là.
Cependant, ce qu'on dit, c'est qu'aujourd'hui ces frais-là existent. Et ce qui est important, c'est d'en faire un recensement complet pour arrêter que les frais soient détournés, appelés d'une façon x, y, autre, parce que c'est une étape préliminaire. Avant même de parler d'une forme d'encadrement, il faut savoir de quoi on parle, et, aujourd'hui, on n'est pas en mesure de faire le détail complet. Même nous, à l'UQAM, on a essayé d'aller chercher au complet tous les frais chargés aux étudiants à tous les niveaux. Il y en a que c'est facile: Service à la vie étudiante, il y a des frais, c'est écrit sur notre relevé-facture. Mais, dans chaque cours, devoir aller chercher des photocopies, combien sont les photocopies, les laboratoires informatiques, c'est... la tâche est extrêmement ardue, et c'est ce premier travail là qui doit être fait avant même de parler d'un encadrement, d'une loi pour savoir de quoi on parle. Et ce n'est pas le cas présentement.
Mme Champagne: Donc, le message est rendu, je pense, tout simplement. C'est beau.
Le Président (M. Kelley): Je vous remercie beaucoup pour cette dernière plaidoirie pour la transparence et l'imputabilité. Le point sur les frais afférents est très intéressant. Je ne suis pas économiste, mais vous avez cité un grand écrivain irlandais, Oscar Wilde. Et une petite précision: quand il a parlé des personnes qui connaissent le prix de tout et la valeur de rien, il parlait effectivement des cyniques, et pas des économistes.
Alors, je veux, avant de recevoir les lettres de l'Association des économistes du Québec, apporter cette précision à la mémoire d'Oscar Wilde.
Alors, sur ça, je vais ajourner nos travaux à demain, le 31 mars 2004, vers 15 heures, après les affaires courantes, dans cette même salle. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 12 h 25)