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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Thursday, February 26, 2004 - Vol. 38 N° 16

Consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Kelley): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je constate le quorum, donc je déclare la séance de la Commission de l'éducation ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Tomassi (LaFontaine) remplace M. Auclair (Vimont) et M. Bourdeau (Berthier) remplace M. Cousineau (Bertrand).

Le Président (M. Kelley): Alors, bienvenue aux collègues qui nous joignent. Le député de LaFontaine, bienvenue. Alors, je vais juste rappeler très rapidement l'ordre du jour, qui est le suivant. Cet avant-midi, nous entendrons la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec, la Commission des fédérations scolaires du Québec conjointement avec l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec et ensuite l'Université de Sherbrooke. Cet après-midi, nous poursuivrons avec les Forces AVENIR, la Fédération médicale étudiante du Québec, la Confédération des syndicats nationaux et enfin le Conseil interprofessionnel du Québec.

Juste un rappel pour toutes les personnes qui ont un cellulaire, si on peut bien assurer qu'ils sont fermés pour assurer une certaine tranquillité autour de nos réflexions ce matin.

Auditions (suite)

Sur ça, je suis prêt à céder la parole à la présidente de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec, Mme Trudeau.

Commission-Jeunesse du
Parti libéral du Québec (CJPL)

Mme Trudeau (Stéphanie): Merci, M. Kelley. Je voudrais vous présenter tout d'abord la personne qui m'accompagne, Simon Bégin, qui est notre coordonnateur aux affaires politiques, à la Commission-Jeunesse.

Tout d'abord, bien bon matin, et c'est avec une grande fierté qu'on a la chance d'être entendus aujourd'hui. C'était le souhait de la Commission-Jeunesse que cette commission-là se tienne, on l'a demandée et on est très heureux que ce soit maintenant une réalité. On est heureux que vous nous offriez la chance non seulement de parler de financement ? oui, c'est important ? mais cette tribune-là, on veut l'utiliser pour parler aussi de qualité et d'accessibilité. Ça nous paraît excessivement important, il ne faut pas oublier ces deux pans-là.

Le mémoire, que vous avez peut-être parcouru, vous allez voir qu'on vous présente ça dans une très grande humilité. C'est des grandes orientations. On n'a pas la prétention d'être des experts, c'est notre vision en tant que jeunes libéraux. D'ailleurs, si vous me permettez rapidement, avant de passer au mémoire, de vous expliquer un peu la démarche et la trame de fond de ce mémoire. Au mois de novembre, on a environ 150 jeunes libéraux qui se sont réunis pour parler du système d'études postsecondaires. Il y a une consultation en ligne qui s'en est suivie. Et, à la lumière de ce qui est ressorti de ces deux événements-là, eh bien, on en est venu à la rédaction du mémoire que vous avez aujourd'hui avec l'aide de nos 25 représentants régionaux.

Je pense que c'est peut-être important de vous mentionner que nos 25 représentants régionaux viennent autant de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent, de Québec, de Montréal, sont âgés entre 16 et 25 ans, donc sont parfois même encore au secondaire, parfois fréquentent le système collégial, et certains sont aussi à l'université, dans toutes les régions du Québec. Une bonne partie sont bénéficiaires du programme d'aide financière du Québec. Donc, je pense qu'on est à l'image, là, de notre génération.

Comme trame de fond, on a décidé de faire table rase, comme la Commission-Jeunesse le fait toujours. Et, plus précisément au niveau du financement, ce qu'on a gardé en trame de fond, bien je pense que tout le monde, tous les intervenants que vous allez entendre, je pense, vont s'entendre pour dire qu'il y a un sous-financement important du système, que les finances publiques sont aussi dans un état qui, on ne se le cachera pas ? je ne vous apprends pas ça, en tant que parlementaires vous le savez encore pas mal mieux que moi ? dans un état assez précaire.

On voulait garder aussi en tête quelque chose qui est cher, je pense, à tous les groupes jeunes, c'est le choc démographique. Avec le choc démographique qui s'en vient, à la Commission-Jeunesse, on a gardé en tête qu'il y aura de moins en moins de contribuables pour contribuer au système et de plus en plus de gens pour en bénéficier, et que des systèmes très importants... Comme, par exemple, le système de santé sera appelé à avoir des coûts de plus en plus importants. Donc, on sera confronté à des choix, et on pense qu'il faut les faire dès maintenant.

On est de plus ? je ne vous apprends rien non plus ? malheureusement les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, et, pour nous, c'est certain que d'alourdir le fardeau fiscal, ce n'est pas une option qu'on avait en tête. À part de ça, on voulait avoir une vision à long terme qui serait bonne pour ma génération, mais aussi pour les générations qui vont me suivre.

Donc, je sais que le temps est assez limité. Donc, on va aller tout de suite avec les enjeux qui touchent la qualité, si vous me le permettez. Dans les recommandations qui suivent, on ne voulait pas aller à l'encontre de l'autonomie universitaire, mais c'étaient des choses, des orientations qui nous apparaissaient intéressantes ou souhaitables, donc on vous les propose.

En fait, on voulait que la formation universitaire soit mieux arrimée ? elle l'est déjà, mais qu'elle le soit peut-être encore plus ? aux besoins du marché du travail. Comment? Ce n'est pas en réinventant la roue, mais c'est peut-être en remettant certains principes qui fonctionnent bien dans plus d'universités au Québec, comme par exemple les programmes coopératifs. Je pense que l'Université de Sherbrooke, c'est un très bon modèle qui permet non seulement aux entreprises d'être gagnantes, mais aussi aux étudiants d'avoir une expérience concrète sur le marché du travail, de se démarquer et de pouvoir mettre en pratique ce qu'ils apprennent de façon théorique. Aussi, peut-être en permettant ? ça se fait déjà dans certains programmes, mais pas partout ? qu'il y ait davantage d'individus provenant du milieu du travail qui siègent sur les comités de programmes, de façon à ce que ce soit encore plus collé sur la réalité du marché du travail, sans bien sûr avoir aucune influence sur le cursus des cours, c'est quelque chose de très important pour nous. Puis il y a d'autres types de partenariats qui peuvent être envisagés, comme Telus à Rimouski, etc.

On veut aussi, comme plusieurs personnes, faire du renouveau du corps professoral une priorité, et ça, ça prend des moyens. On veut aussi... On aimerait qu'il y ait une plus grande stabilité qui soit assurée aux chargés de cours, parce qu'ils jouent un rôle important. Des fois, ils amènent un complément différent de ce que les professeurs amènent, avec une expérience parfois plus pratique. On trouve qu'il serait souhaitable que le gouvernement recommande aux universités de favoriser la mise en place de normes d'évaluation, parce qu'on veut que le milieu universitaire soit stimulant, compétitif, donc qu'il y ait des hausses de salaires qui soient mises en parallèle avec ça. Et peut-être qu'il serait intéressant aussi d'avoir des formations de base en pédagogie pour les chargés de cours qui ont peut-être une expérience pratique très intéressante, mais qui gagneraient peut-être ? et ça, ce serait de façon, là, volontaire ? d'avoir peut-être une petite formation en complément pédagogique, là, qui leur permettrait d'être plus à l'aise.

n (9 h 40) n

Au niveau du ratio professeur-étudiants, on pense que c'est important qu'il y ait des ratios qui soient fixés par programmes, et non par universités bien sûr, et qui soient respectés, parce qu'on pense que, là, il y a une limite qui est atteinte dans certains programmes puis que ça va affecter la qualité de la formation des gens. Entre autres, là, je parle de médecine, mais, à beaucoup d'autres places, à un moment donné, il y a une limite, ça ne devient plus un enseignement très personnalisé.

Un autre point, l'imputabilité des administrations universitaires. On veut que nos universités soient performantes, là n'est pas la question, mais on pense peut-être que les contrats de performance, comme ils sont actuellement, pour nous, ce n'est pas nécessairement la solution. On veut développer des nouveaux moyens basés sur la confiance envers les universités puis on veut renforcer l'imputabilité des administrations universitaires en évitant bien sûr, là, d'affecter le principe d'autonomie universitaire.

Au niveau des enjeux sur l'accessibilité, je ne vous apprends rien non plus si je vous dis qu'on a un système de prêts et bourses très généreux, un des plus généreux, mais qui a quand même des failles et qu'à la Commission-Jeunesse ? ce n'est pas nouveau d'aujourd'hui, ça fait plusieurs mois, voire quelques années qu'on en parle ? on pense qu'il faut réviser en profondeur l'aide financière aux étudiants, la revoir complètement, revoir les méthodes de calcul, qu'elle soit plus personnalisée. Présentement, là, on ne fait pas toujours de différence entre le statut de l'étudiant... et ça peut avoir un impact important.

On veut aussi redéfinir la contribution des parents, parce qu'on sait que, bon, c'est assez complexe, là, il y a des immobilisations qui des fois, là, sont comptées qui ne devraient peut-être pas l'être, à notre avis. Et en fait on ne devrait pas nécessairement avoir besoin d'avoir des grandes connaissances en actuariat pour comprendre le système, mais présentement des fois c'est un peu complexe. Donc, on voudrait même que la contribution parentale, dans certains cas, puisse être totalement écartée lorsque c'est nécessaire, ce qui n'est pas le cas présentement.

Et, dans un dernier temps, on voudrait aussi mettre en place un véritable mode de remboursement des prêts proportionnel au revenu, parce que des fois le niveau d'endettement peut être le même, mais, malheureusement, des fois un étudiant, par exemple, en sciences sociales ne gagnera peut-être pas le même revenu que quelqu'un qui est en médecine, ou en biologie, ou... Donc, on pense que c'est... C'est quelque chose dont on parle beaucoup. Je pense que tous les acteurs s'entendent là-dessus. Ce serait peut-être juste le temps de le concrétiser. Je vais céder la parole à Simon, qui va nous parler d'une loi-cadre qui nous tient aussi à coeur.

M. Bégin (Simon): Évidemment, l'accessibilité, ça nous tient tellement à coeur, nous, à la Commission-Jeunesse, qu'on a été les premiers à demander à son parti politique d'inscrire la loi-cadre à son programme. On pense que l'accessibilité est tellement importante que le gouvernement doit la marquer d'une façon législative. On voudrait qu'en adoptant une loi-cadre sur l'accessibilité aux études postsecondaires le gouvernement fixe ses objectifs en matière d'accessibilité.

On veut aussi que le gouvernement profite de l'occasion pour assurer l'évolution du Programme de prêts et bourses. Parce que les étudiants qui sont sur les prêts et bourses, c'est les étudiants qui par définition sont les plus démunis, donc qui sont les plus susceptibles d'être touchés par des variations des frais de scolarité. On voudrait donc que le financement des institutions soit corrélatif au financement des étudiants. C'est une condition essentielle au maintien de l'accessibilité.

On veut aussi encadrer l'ensemble des frais chargés aux étudiants. On ne vous apprend rien si on vous dit que les universités ont contourné le gel en instaurant des frais afférents un peu partout. Nous, on voudrait que tout ce qui est frais étudiants... les frais qui sont exigés aux étudiants sur les droits de scolarité, les frais afférents, soient encadrés et qu'ils soient soumis à l'approbation du gouvernement, entre autres par un comité permanent qui assurerait la régie courante des frais de scolarité dans les dossiers. Donc, c'est un peu le procédé législatif qu'on vous propose qui permettrait d'assurer que l'accessibilité aux études postsecondaires soit garantie.

Mme Trudeau (Stéphanie): Rapidement, avant que Simon reprenne la parole et vous parle du rôle du fédéral dans le financement des universités, on aimerait réitérer que je pense que... Peu importe le gouvernement, peu importent les allégeances des gouvernements qui ont été là avant nous, je pense que la priorité pour l'éducation a toujours été là, et elle doit demeurer. On a la contribution gouvernementale par étudiant la plus importante au Canada, et ça doit demeurer ainsi. Donc, on veut que le gouvernement maintienne son engagement de faire de l'éducation une priorité, qu'il continue à le démontrer. Donc, on tenait à clarifier ça d'entrée de jeu, avant de passer aux autres sources de financement.

M. Bégin (Simon): Bien, le rôle du gouvernement, c'est aussi le rôle de clarifier le rôle que le gouvernement fédéral a à jouer en éducation postsecondaire. On a séparé ça en deux volets, le premier étant le financement de l'éducation générale et le deuxième étant le financement de la recherche. Pour ce qui est du financement général, on croit que le gouvernement fédéral ne devrait pas intervenir dans le champ de compétence provinciale. Pour ce faire, pour assumer la pleine souveraineté de notre compétence en éducation, on croit que c'est important de rapatrier des points d'impôt pour assurer nos moyens pour financer adéquatement l'éducation.

Un endroit où on veut clarifier le rôle du gouvernement, c'est en recherche. Là, on croit que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer, mais ce rôle-là ne doit pas venir interférer avec les priorités provinciales en matière de financement de la recherche. Donc, on croit qu'on pourrait négocier une entente du type McDougall?Gagnon-Tremblay sur l'immigration afin de s'assurer d'avoir un financement adéquat, qui ne nuit pas aux priorités gouvernementales. C'est le rôle du gouvernement fédéral, on croit... Stéphanie va vous parler du rôle de l'étudiant, mais on croit que le gouvernement fédéral a à jouer davantage son rôle, mais qu'il doit le faire dans le respect de nos compétences.

Mme Trudeau (Stéphanie): Au niveau de la fameuse question des droits de scolarité, on tient, d'entrée de jeu, à dire à quel point c'est important pour nous que le gouvernement ? peu importe ce qui ressortira de cette commission parlementaire là ? au niveau des droits de scolarité, respecte son engagement électoral de maintenir les frais de scolarité gelés jusqu'à la fin du mandat. On veut que les jeunes aient confiance dans le système politique, donc je pense qu'on doit tenir les engagements qu'on a pris.

Par contre, étant donné le manque à gagner important et le fait qu'on est déjà les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord et que, s'il est vrai qu'effectivement les entreprises québécoises, la société québécoise est gagnante dans le fait d'avoir une main-d'oeuvre qualifiée et abondante qui sort de nos universités, il reste qu'à notre avis le plus grand gagnant, c'est toujours le bénéficiaire, celui qui décide de poursuivre ses études universitaires... D'ailleurs, il y a une étude qui est sortie dernièrement qui disait que la moyenne canadienne était... que les universitaires gagnaient 60 % de plus de salaire que quelqu'un qui avait un secondaire V en poche. Donc, on pense que c'est un très bon retour sur l'investissement et donc on recommande de hausser les frais de scolarité dans une mesure raisonnable et de les indexer ensuite au coût de la vie. Et il est très, très important pour nous que toute majoration des frais de scolarité soit échelonnée dans le temps, selon un calendrier précis, et qu'ils soient soumis à une augmentation en conséquence du Programme de prêts et bourses. Et ça, c'est l'élément essentiel pour nous, parce que, en aucun cas, l'accessibilité ne doit être compromise. Et, pour nous, on pense que ça va de pair et qu'il est très facile de faire en sorte que ça suive.

Donc, ça, c'est notre position pour ce qui est des droits de scolarité. Simon va vous parler aussi du rôle du privé, qui pourrait jouer un rôle accru.

M. Bégin (Simon): Bien, de tout temps, la Commission-Jeunesse a été ouverte à davantage de sources de financement dans le secteur de l'éducation. On croit que le secteur privé doit jouer un rôle encore plus important. On a demandé plus au gouvernement fédéral, on a demandé plus... on va demander plus aux étudiants, alors on doit aussi demander plus au secteur privé. Nous, la limite raisonnable où on fixe l'intervention du privé, c'est tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas d'intervention dans le curriculum des cours. Si le curriculum des cours n'est pas affecté, que c'est seulement sur les infrastructures qu'on fait des partenariats public-privé, bien on croit que c'est une limite acceptable et raisonnable qui va nous permettre d'aller chercher des fonds pour augmenter la qualité de l'enseignement.

Oui, on ouvre la porte au privé, mais, pour le financement de la recherche, on veut l'ouvrir de façon responsable, parce qu'il y a certains domaines qui vont attirer... parce qu'il y a moins de grosses compagnies privées dans ces domaines-là qui vont attirer moins de fonds privés. Donc, nous, on croit qu'il faudrait établir une formule de péréquation du financement de la recherche. Ça s'est fait en Belgique, où on prélève 15 %, si je ne me trompe pas, sur les sommes qui sont accordées aux universités par les partenaires privés pour faire des recherches. Ce 15 % là est réinvesti dans un fonds qui pourrait redonner du financement à d'autres secteurs. Nous, on croit que les critères, ça pourrait être donner du financement aux universités en région où il y a moins de compagnies privées qui sont intéressées à investir, mais aussi pour l'ensemble des domaines de la recherche, parce que c'est clair qu'il y a des domaines de recherche... en sciences sociales, il va y avoir moins de partenaires privés qui vont être intéressés à investir que dans les domaines de haute technologie. Donc, on veut ouvrir la porte au privé, oui, mais on veut le faire de façon responsable en assurant un financement adéquat.

Une partie très importante de notre mémoire et de toute notre réflexion, à la Commission-Jeunesse, c'est l'accessibilité en région. Le défi postsecondaire en région, moi, je viens de Rimouski, dans le Bas-Saint-Laurent, donc je suis prêt à vous dire que c'est important. Pour ce faire, on voudrait changer les formules de financement des universités en région. On croit que le financement doit être moins tributaire du nombre d'étudiants. Je ne veux pas dire par là qu'on veut maintenir des programmes sur le respirateur artificiel. Je pense qu'il va falloir faire des choix, il falloir que les universités s'entendent sur une meilleure répartition des programmes pour qu'on choisisse quels programmes on veut donner, où et à quel endroit. Puis, une fois que ce sera fait, bien on pourra les financer de façon responsable, puis question d'avoir des masses critiques d'étudiants suffisantes dans les cours.

Un élément qui allie très bien le défi postsecondaire en région au développement économique régional, c'est la création des centres d'excellence régionaux. C'est aussi un engagement du Parti libéral auquel on est... beaucoup important de rester dans la tenue de cet engagement-là auquel on croit. On croit que ces centres d'excellence régionaux là vont permettre de développer des masses critiques d'étudiants et des centres d'expertise qui vont pouvoir assurer la survie des établissements en région. À Rimouski, nous, on a développé une expertise en sciences de la mer qui est incomparable, qui permet d'attirer des étudiants de partout au Québec, au Canada et même dans le monde. On croit donc qu'il faut faire davantage. Ça s'est fait naturellement au cours des dernières années, on croit maintenant qu'il faut faire des efforts pour développer en ce sens-là.

Dernière partie de notre solution pour les régions, c'est de développer une politique d'accès à l'éducation postsecondaire à distance, profiter de l'impact des nouvelles technologies pour rendre les cours universitaires accessibles à l'ensemble des Québécois, peu importe où ils seront sur le territoire. C'est quelque chose qui nous tient beaucoup à coeur et auquel on croit. Je vais laisser Stéphanie conclure sur l'ensemble du mémoire.

n (9 h 50) n

Mme Trudeau (Stéphanie): Peut-être une conclusion rapide parce que je sais que le temps file. Eh bien, au niveau du financement, pour nous, il est important que toutes les sources de financement qu'on a nommées ? le gouvernement provincial, rapatrier des points d'impôt du fédéral, le privé, la part de l'étudiant ? soient conjuguées en équilibre afin de respecter les principes d'accessibilité, de qualité et de démocratisation du système qui, comme on vous l'a dit, nous sont très chers. On le répète, c'est un mémoire sans prétention. On pense qu'on soulève de bons points. Est-ce qu'on a toujours la réponse juste? On pense qu'on a des bonnes idées, c'est une vision à long terme. Et on est conscient aussi que toutes ces recommandations-là ne pourraient pas être mises en oeuvre de façon simultanée, c'est quelque chose de progressif. Donc, on vous remercie de nous avoir entendus.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Bégin, Mme Trudeau. La parole est maintenant au ministre de l'Éducation.

M. Reid: Merci, M. le Président. Bienvenue à tous les deux de la Commission-Jeunesse, Commission-Jeunesse qui a toujours manifesté beaucoup d'indépendance par rapport à son parti mais qui, en même temps, a toujours permis d'amener des idées nouvelles et de progresser. À preuve, c'est que c'est la Commission-Jeunesse qui est à l'origine de cette commission parlementaire.

Vous amenez effectivement beaucoup d'idées intéressantes. Je voudrais peut-être vous demander de nous donner un peu de détails, si vous en avez, sur une des idées, qui touche un sujet d'actualité d'ailleurs, mais qui a été touchée par plusieurs autres personnes dans la commission, au niveau des chargés de cours. Vous proposez deux suggestions, une qui est la stabilité, si je reprends... j'essaie de reprendre vos mots, de donner une certaine stabilité aux chargés de cours, et l'autre concernant une formation de base en pédagogie pour les chargés de cours, enfin vous l'avez précisé, pour les chargés de cours.

J'aimerais peut-être avoir un peu de détails. Par exemple, au niveau de la stabilité, est-ce que vous pensez, là, à la question des chargés de cours qui en ont fait une carrière, par exemple, et qui se voient parfois une charge de travail qui peut varier en fonction des règles de convention, de l'absence ou de la présence de professeurs, etc.? Est-ce que c'est ce dont on parle ici? Et avez-vous une suggestion quant à la manière dont les universités pourraient amener une stabilité? Et, d'autre part, quand vous parlez de pédagogie pour les chargés de cours, est-ce que vous voyez ça comme quelque chose d'obligatoire, de suggéré? Et, dans les deux cas, je vois bien que c'est quelque chose qui est en rapport avec la qualité de la formation, est-ce que vous avez quelques détails, peut-être, pour élaborer là-dessus un petit peu?

Le Président (M. Kelley): M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Oui. Bien, l'idée principale de cette suggestion-là, c'est que les chargés de cours peuvent amener, à notre avis, là... Ce que nos consultations nous disent, c'est que les chargés de cours peuvent amener un apport intéressant à la formation, entre autres pour ce qui est de la connecter davantage sur les réalités du milieu. C'est que les chargés de cours sont des gens qui disposent d'une expérience parfois pratique qui peut être très développée, donc on croit que ça peut apporter une plus-value à l'enseignement qui est donné. Mais, malheureusement, de par la nature même d'un chargé de cours, il y a certains problèmes de stabilité qui pourraient peut-être décourager certains enseignants qui pourraient être de qualité, selon nous, à s'affairer à cette profession-là. Donc, on croit que, oui, il faudrait mettre... Je ne sais pas si c'est dans la répartition de comment on alloue les charges pour ces chargés de cours là, mais, oui, il faut développer des mécanismes pour encourager les gens de qualité à venir enseigner dans nos universités.

Pour ce qui est de la formation pédagogique, c'est que, comme c'est des gens qui ont une formation très poussée dans leur domaine mais qui n'ont pas nécessairement les bases de la pédagogie, on voudrait leur offrir cette chance-là. Il y en a certains qui sont des très bons enseignants, qui l'ont de par nature. Ceux qui l'ont un peu moins, on pourrait les aider en leur offrant cette formation-là. Mais il n'est pas question pour nous de les obliger à ça, c'est question de... c'est une formule gagnant-gagnant, on veut les aider à nous aider.

Le Président (M. Kelley): Oui. Mme la députée de Chauveau.

Mme Perreault: Oui. Alors, merci à vous d'être ici. Je vais reprendre un peu ce que mon collègue de Beauce-Nord a dit hier, on a entendu les jeunes du Parti québécois, on a entendu également les jeunes de l'ADQ, aujourd'hui on entend les jeunes libéraux, je vous dirais que c'est avec beaucoup d'enthousiasme qu'on vous entend parce que... d'abord, parce que vous vous impliquez dans cette consultation-là, ce qui est extrêmement important pour nous, et ensuite parce que vous avez mis beaucoup de travail dans votre mémoire qui est fort intéressant.

Moi, j'aimerais vous entendre sur les frais de scolarité. Vous nous proposez une augmentation des frais de scolarité, évidemment dans le respect de l'engagement qu'on a pris pour le gel jusqu'à échéance de ce mandat-là. D'une part, je voudrais vous entendre sur est-ce que c'est simplement une indexation au coût de la vie, que vous détailliez davantage. Et j'ai un second volet. On nous a proposé, notamment la FEUQ, de diminuer les frais de scolarité pour les étudiants étrangers. Évidemment, c'est souvent fait dans un contexte de coopération afin de permettre à des jeunes de venir acquérir une formation universitaire ici, retourner dans leur pays. On nous a présenté un volet au niveau de la démographie, là, faire en sorte qu'on puisse encourager ces jeunes-là à rester ici, au Québec. J'aimerais vous entendre sur ce volet-là qui est quand même... qui a été discuté par certains groupes. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Mme Trudeau.

Mme Trudeau (Stéphanie): Merci. Je vais y aller rapidement par le premier volet de la question qui concernait les droits de scolarité. Eh bien, nous, on n'est pas des experts en la matière, on ne fixe pas de pourcentage jusqu'auquel... on sait, là, qu'on dit grosso modo que l'étudiant québécois, c'est environ 9 % de ses études. On ne s'arrange pas jusqu'à un certain pourcentage, mais on croit que ce pourcentage doit être augmenté et qu'ensuite il doit être indexé pour ne pas qu'on soit... qu'une autre génération que la mienne soit devant une décision déchirante comme on est présentement, d'avoir à augmenter de plus que, exemple, l'IPC ou quelque chose comme ça. Donc, ça, c'est ça pour le départ, et ça, des experts pourront l'établir lorsqu'on verra comment on pourra aller chercher de plus au privé, au fédéral, combien le provincial pourra consentir de plus. Et je pense qu'avec tout ça on va pouvoir faire un tout, un équilibre. Donc, ça, c'est pour le premier volet de la question.

Pour le deuxième volet de la question, on en a parlé effectivement, mais peut-être moins que les autres. Nous, ce qu'on dit, ce n'était pas qu'on voulait réduire le coût pour un étudiant étranger, mais, par exemple, on voulait stopper l'hémorragie parce que ça commençait à ressembler à une hémorragie. On comprenait que les administrations universitaires faisaient preuve de créativité puis essayaient d'aller chercher un peu de sous, puis je pense que peut-être les étudiants étrangers ont parfois écopé. On n'est pas contre qu'il y ait des ententes qui soient faites quand c'est dans les deux sens aussi comme, entre autres, avec certains pays de la francophonie, on trouve ça très intéressant. Par contre, ce n'était pas, nous, dans nos visées, de baisser ces coûts-là, mais, par exemple, de les stabiliser. Et en fait ce qu'on recherche... Oui, c'est un plus pour nous quand les étudiants viennent étudier ici, mais on devrait aller plus que ça, on devrait essayer de les convaincre de rester et d'avoir envie de rester. Donc, ça, je pense que c'est un plan auquel il faudrait s'attaquer, parce que les coûts, comme ils sont là, il faut qu'ils arrêtent d'augmenter, mais ils sont encore intéressants pour la majorité des jeunes de par le monde, qui paient normalement plus que ce qu'ils paient ici.

Mme Perreault: Je veux juste ajouter, donc ce que je comprends, là, au niveau de votre proposition d'augmenter les frais de scolarité: vous n'êtes pas dans le détail, mais dans le fond ce que vous craignez, c'est que, si on ne le fait pas à court ou moyen terme, là, évidemment, après ce mandat-là, compte tenu de notre engagement, c'est que vous craignez que les générations futures ou en tout cas celle qui va vous suivre subisse un choc d'augmentation de frais qui pourrait être extrêmement important puis qui pourrait, je veux dire, porter un coup dur à l'accessibilité aux universités. C'est ce que je comprends?

Mme Trudeau (Stéphanie): Oui.

Mme Perreault: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le ministre.

M. Reid: Vous l'avez sûrement déjà constaté, j'ai un grand intérêt au développement du système universitaire dans sa totalité, au Québec, y compris dans les régions, et vos commentaires sur les universités en région sont extrêmement intéressants. Je voudrais peut-être juste vous entendre un peu élaborer sur ce que vous avez dit et ce que vous dites, là, que la subvention devrait être un peu moins tributaire du nombre d'étudiants parce qu'il y a des problèmes éventuellement de démographie en région, mais, en même temps, les universités devraient faire un effort ? et c'est très respectueux de leur autonomie, là, j'en conviens ? pour s'entendre entre elles, et choisir des créneaux, et ne pas... disons, pour s'assurer d'avoir une masse critique. C'est ce que vous aviez dit tout à l'heure.

Est-ce que, quand vous dites «une subvention moins tributaire du nombre d'étudiants», c'est surtout de ça dont vous parlez, autrement dit qu'une partie des subventions pourrait être attribuée à celles des universités qui ont fait cet effort de développer des masses critiques entre elles et de ne pas se partager finalement une masse qui devient moins critique, qui n'est plus critique dans un endroit ou un autre? Est-ce que c'est surtout ça que vous avez en tête, autrement dit qu'une partie de la subvention, au lieu d'être uniquement au nombre d'étudiants, serait aussi pour encourager ce type de réorganisation pour les universités qui le feraient du moins, là, entre elles?

Le Président (M. Kelley): M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Bien, je crois qu'il ne faut pas la voir, non, comme une bonification aux universités qui auront décidé de faire cavalières seules et de rationaliser leur offre. Je pense que c'est un problème où il faut que tous les gens de l'université en région s'assoient ensemble et évaluent de façon concertée comment on veut répartir les programmes sur le territoire pour développer à chaque endroit des masses critiques. Ce n'est pas dans l'esprit d'en bonifier une plus qu'une autre ou d'en avantager une pour qu'elle fasse son ménage elle-même. Le ménage, on voudrait qu'il soit fait de façon concertée et que tous les acteurs régionaux puissent dire: Bien, nous, on tient plus à ce programme-là parce que c'est un programme qui répond à nos réalités régionales. Puis cette technique-là va permettre de développer des masses critiques d'étudiants qui vont nous permettre peut-être à long terme d'avoir une variété quand même assez grande, assez large de programmes en région. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on veut aller. Peut-être, Stéphanie veut compléter, là.

n (10 heures) n

Mme Trudeau (Stéphanie): Peut-être juste ajouter un complément, quelque chose qu'on n'a pas nécessairement bien exprimé dans le mémoire, mais on comprend que souvent on prend des décisions et que peut-être que ce n'est pas regardé de façon assez globale. Je m'explique, comme, par exemple, il y a certaines choses qui nous apparaissent un peu aberrantes ? je pense que, peu importent nos allégeances politiques, les jeunes, on s'entend là-dessus ? comme, exemple, un programme en Abitibi-Témiscamingue, où une partie de la formation en génie minier, si j'ai bien compris, doit se compléter à Montréal. Oui, sur le coup, peut-être qu'il est bon de dire: Il n'y a pas assez d'étudiants en Abitibi, ça va coûter plus cher. Mais ces jeunes-là sont aux trois quarts sur l'aide financière. Donc, le gouvernement du Québec va aller en quelque part débourser de l'argent supplémentaire, et peut-être que la région va perdre ces jeunes-là qui ne reviendront pas, et c'est une perte de capital humain excessivement importante. Donc, il y a des choses comme ça aussi qui nous apparaissent comme très importantes à revoir en région.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Bien, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vous souhaite la bienvenue, à mon tour, au nom de ma formation politique. Effectivement, vous êtes le troisième comité de jeunes d'une formation politique qui vient présenter ici ses points de vue, et déjà de prendre la peine de faire ces réflexions, c'est remarquable, et je vous en félicite et vous en remercie.

Bon. Je veux maintenant venir sur votre mémoire, sur la partie qui concerne les enjeux de qualité. Je sens une certaine... et peut-être que vous pourrez m'éclairer, mais je sens une certaine contradiction entre ce que vous proposez et vos remarques générales au niveau des universités.

Bon. Vous dites: Il faut leur laisser le plus de liberté possible et respecter à cet égard-là leur autonomie, mais, en même temps, vous avancez deux ou trois choses. Un, vous dites: Nos réseaux d'éducation et plus spécifiquement nos universités ne sont actuellement pas suffisamment connectés sur les besoins que le Québec aura à combler, et on devrait donc modifier les comités de programmes des universités pour leur demander d'introduire des gens qui viendraient de l'extérieur de l'université.

Après ça, un peu plus loin, vous nous parlez de ratio, hein, ratio maître-élèves ou professeur-étudiants, en disant qu'on devrait fixer des ratios professeur-étudiants pour chacun des programmes d'enseignement universitaire. Est-ce qu'on ne va pas à l'encontre de la liberté qu'ont les universités, évidemment selon qu'ils ont des troncs communs plus grands dans certains cours, d'avoir des ratios un petit peu plus élevés versus des cours où ce sont des formations professionnelles très pointues, je pense aux sciences, je pense à la médecine, où souvent les ratios vont être beaucoup plus réduits ou un ratio plus petit, si on veut.

Et, sur toute la question d'imputabilité enfin, où, là, vous dites, bon, que vous n'aimez pas beaucoup les contrats de performance parce qu'il dit... Vous dites: Il ne revient pas à l'État de fixer les orientations spécifiques et particulières des universités. Mais, s'il ne revient pas à l'État, à qui cela va-t-il revenir? Et par ailleurs, un peu plus loin, vous dites: On ne doit pas fixer le critère que l'on réussisse ou que l'on échoue, la solution résidant dans la relativisation de la souplesse et des critères. Moi, je pense qu'on doit demander des comptes, et, si on échoue, on a des problèmes, des problèmes sérieux, et il faut voir comment les corriger.

Alors, c'est un ensemble, là, de faits que je ressors de votre mémoire où je sens... je sens une volonté de nous dire: On veut respecter la liberté et l'autonomie des universités, mais, en même temps, il faudrait qu'ils fassent telle, telle, telle chose. Alors, j'aimerais ça vous entendre sur ça.

Le Président (M. Kelley): Mme Trudeau.

Mme Trudeau (Stéphanie): Une question large. Je vais essayer de retenir un petit peu les points de la question qui étaient intéressants, qui soulèvent plusieurs points. Donc, je vais essayer de les reprendre le plus possible.

Le Président (M. Kelley): Oui, question à plusieurs volets.

 

Mme Trudeau (Stéphanie): Dans la première partie de la question, il y a... là-dedans, c'est des recommandations. Or, on ne veut rien... On l'a dit et je pense que je l'ai dit d'entrée de jeu, qu'on ne voulait pas aller à l'encontre de l'autonomie. C'est juste peut-être que le gouvernement pourrait suggérer ça. Mais par contre je pense qu'on ne veut pas dire le comment faire ces grandes orientations là, mais c'est que, présentement, peut-être que je me trompe, mais, en tant que jeune, j'ai l'impression que les universités n'ont pas les moyens, ne serait-ce que les moyens financiers, de faire ces changements-là qui s'imposent. Donc, ça, c'est la première chose.

Donc, au niveau de l'imputabilité, on n'est pas contre du tout. Le but des contrats de performance, ça, c'est excessivement louable. Justement, on veut que les universités soient imputables, sauf qu'on pense que les critères doivent être plus personnalisés. Exemple: un centre régional, un pôle d'excellence n'a pas la même mission qu'une autre université, donc miser excessivement sur le taux de diplomation par exemple, ça nous apparaît... On n'est pas des experts d'ailleurs, je veux dire, ce n'est pas un pan important de notre mémoire, là, des contrats de performance. Mais on pense que... Exemple, je vous donne un exemple très pratique: moi, en tant qu'employée, quand c'est le temps de fixer les objectifs annuels pour avoir mon boni, tu sais, c'est juste mon patron qui me les fixe sans trop regarder de façon personnelle, bien j'ai moins de motivation puis c'est peut-être moins réaliste que si on les fixe ensemble. Donc, c'est un petit peu ça, si vous comprenez ça. Et ce qu'on trouvait dommage, c'était un peu... le... On pense que des fois il y a place à l'explication pourquoi certains objectifs ne sont pas atteints. On pensait peut-être que présentement c'était un peu trop rigide et qu'on gagnerait à rendre les administrations plus imputables et à ce qu'elles aient encore plus leur mot à dire dans les critères qui sont utilisés.

M. Bégin (Simon): Petit complément de réponse.

Le Président (M. Kelley): Oui, M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Sur le fond de votre question, là, notre mémoire est beaucoup plus notre contribution, si on veut, au grand débat de société sur les universités qu'un mode d'emploi pour les universités. C'est des choses qu'on suggère, des choses dont on a débattu, qu'on tenait à vous dire, parce que c'est un débat qui doit aussi... un débat sur le financement qui... mais on doit aussi parler de qualité et d'accessibilité. C'est pour ça que, nous, dans le respect de l'autonomie des institutions universitaires, on propose certains aménagements où à notre avis tout le monde serait gagnant si on s'assoyait ensemble pour trouver les moyens d'y arriver. C'est un peu... La contradiction s'explique par ce fait-là.

Mme Marois: D'accord. Dans le fond, vous explorez différentes avenues et vous dites à nous ou à nous, là, aux membres de la commission et éventuellement gouvernement de creuser plus loin ces questions-là et puis de prendre, s'il y a lieu, des décisions dans le sens de ce que vous suggérez ou pas, hein? C'est un peu comme ça que j'interprète vos propos, à ce moment-ci.

Je veux venir maintenant sur la position constitutionnelle, que vous présentez à la page 25 et 26 de votre document. Il y a des choses que j'aime beaucoup, entre autres quand vous dites «Assumer la pleine souveraineté de notre compétence en éducation». Vous allez trouver une alliée et de mon côté et... du côté de notre parti, des alliés indéfectibles à cet égard. Bon. Je pense qu'on n'a pas à se redire longuement le fait que la solution que nous prônons, au Québec, est que la pleine souveraineté s'exerce dans tous les champs de responsabilité qui devraient nous appartenir. Maintenant, cela étant, d'ici à ce que nous le soyons, je suis d'accord avec vous qu'on doit aller chercher le maximum de ce que l'on peut aller chercher pour les Québécois et les Québécoises.

Vous proposez, à toutes fins pratiques, quasi un amendement constitutionnel, dans le sens où vous dites qu'on devrait encadrer le pouvoir de dépenser du fédéral. Vous faites un long plaidoyer à partir des textes qui sont la position constitutionnelle de votre parti, et je ne veux pas y revenir plus longuement. On dit, par exemple: «C'est pourquoi nous croyons qu'il est primordial que le fédéral et les provinces canadiennes ? au premier chef le Québec ? s'entendent sur une nouvelle distribution de l'assiette fiscale. En effet, les arrangements fiscaux renouvelés assureraient un meilleur équilibre entre les revenus et les responsabilités du fédéral et des provinces.» Et, en gras dans le texte, vous rappelez le fait qu'il serait important qu'il y ait une entente formelle sur le pouvoir de dépenser du fédéral.

Est-ce que vous pensez qu'on devrait aller à un amendement constitutionnel sur cette question? Et est-ce que ça a été débattu à l'intérieur soit de votre comité ou de votre formation politique?

Le Président (M. Kelley): M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Bien, nous ce qu'on propose dans le fond, c'est une solution globale à un problème global qui est le déséquilibre fiscal. Mais on trouvait qu'elle était particulièrement vraie dans le problème spécifique qui nous touche présentement, c'est-à-dire, l'éducation. On n'a qu'à penser aux bourses du millénaire ou à d'autres interventions du gouvernement fédéral en matière d'éducation. Pour cela, on pense que la réduction du déséquilibre fiscal de même que la signature d'une entente administrative pour baliser le rôle en recherche sont des solutions appropriées. À long terme, dans la politique constitutionnelle du parti, on vise la constitutionnalisation des ententes administratives du type McDougall?Gagnon-Tremblay. Donc, on croit que, oui, il faut aller de l'avant avec ces solutions-là.

Maintenant, dans le comment, dans le pourquoi, je ne suis pas le meilleur des constitutionnalistes. M.  Pelletier a une position quand même assez intéressante là-dessus. Mais, nous, c'est qu'on croit que c'est un problème général et que la solution générale sera particulièrement vraie et bénéfique pour le financement de l'éducation. Donc, ce n'est pas notre position, là. Je ne m'avancerai pas, en tant que tel, sur la nécessité de l'amendement constitutionnel, mais on s'en réfère totalement à cette avenue-là. Oui, on a l'ambition d'investir en éducation. Maintenant, il faut se donner les moyens de nos ambitions, puis, pour ce faire, prenons le meilleur chemin pour y arriver.

n (10 h 10) n

Mme Marois: En fait, M. Pelletier, dans les textes qu'il a produits concernant la position constitutionnelle de votre formation politique, indique qu'on devrait encadrer le pouvoir fédéral de dépenser et le constitutionnaliser, et en ce sens-là je veux simplement vous dire, à vous, mais dire au ministre, comme je l'ai déjà indiqué à quelques reprises depuis le début de nos travaux, que nous serions prêts à concourir à cela, si tant est que ça permettait de bien clarifier les rôles et responsabilités, puisque le fédéral ne respecte même pas sa propre constitution actuellement, je pense qu'on en convient, en intervenant dans un champ de compétence qui est exclusivement d'ordre provincial et qui appartient donc au Québec, dans le cas présent. Merci, M. le Président. Ça va pour l'instant.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Bonjour. Merci d'être là. Alors, moi, je voudrais revenir sur les contrats de performance. J'aimerais que vous nous disiez qu'est-ce que vous reprochez aux contrats de performance et pourquoi vous ne croyez pas que ce soit le principal critère d'imputabilité.

Le Président (M. Kelley): M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Bien, c'est avant tout les conséquences sur la formation. On croit que l'imposition de critères aux administrations universitaires nuit, entre autres, à l'autonomie. On l'a répété tantôt, qu'on croit beaucoup à l'autonomie universitaire. Donc, en imposant des critères, on vous dit: Vous devez diplômer tant d'étudiants puis que l'argent que vous allez avoir est conditionnel à ça. Bien, les administrations universitaires ont une pression indue qui fait qu'elles seront peut-être portées à diplômer à rabais, et, nous, la qualité et l'accessibilité s'en verraient grandement et s'en voient grandement, par cette logique-là, affectées.

Nous, on pense qu'il faut s'asseoir, il faut faire confiance. On a des bons administrateurs universitaires, au Québec. On a des gens compétents qui... avec eux, on pourra déterminer quels sont les objectifs à atteindre, de quelle façon ils veulent les atteindre, de quelle façon est-ce qu'on peut les aider à les atteindre. Cette logique-là, c'est une logique basée sur la confiance. On pourrait peut-être voir, si les administrations universitaires viennent vous rencontrer, si je ne me trompe pas, une fois par année, ici, en commission, bien peut-être que si on pouvait prolonger ce processus encore davantage pour qu'il y ait un dialogue permanent avec les responsables pour que, ensemble, on relève le défi, là, de la performance et de la qualité...

Mme Gaudet: Vous avez parlé aussi de l'aide financière aux étudiants. Vous faites des propositions qui tendent à modifier les règles actuelles qui régissent l'aide financière aux étudiants. J'aimerais vous entendre davantage sur les propositions et les amendements que vous souhaiteriez voir apporter.

Le Président (M. Kelley): Mme Trudeau.

Mme Trudeau (Stéphanie): Oui. Écoutez, il y a plusieurs choses que la Commission-Jeunesse a relevées. Comme j'ai dit tantôt, on ne s'est pas étendu beaucoup, mais il n'y a pas beaucoup de différenciation qui est faite au niveau du statut de l'étudiant. Un étudiant qui est au collégial n'a pas nécessairement les mêmes besoins financiers qu'un étudiant universitaire. Un étudiant qui fait un retour aux études, ce n'est peut-être pas la même réalité que quelqu'un qui sort du secondaire. Donc, présentement c'est un petit peu trop mur à mur.

Et, pour entrer dans les exemples concrets que je ne pensais pas avoir à citer ici, aujourd'hui, des fois il y a des choses que je trouve, à mon avis, en tant que jeune Québécoise, aberrantes, quand quelqu'un se fait répondre: Théoriquement, là, si on regarde les immobilisations de tes parents, puis ils ont une terre, tout ça, si on regarde ça, ils ont les moyens de te payer tes études. Donc, retourne-toi et poursuis tes parents. Ça, pour nous, là, tu sais, il y a des failles, puis on ne l'a pas entendu juste une fois, là.

Donc, ça, je pense qu'il faut qu'il y ait une certaine latitude qui soit donnée à ce comité d'aide financière là ? qui malheureusement n'est pas là présentement ? pour que ce soit plus personnalisé, plus collé à la réalité. Donc, ça, entre autres, là, c'est vraiment dans les choses qui sont les plus importantes pour nous, là, dans les changements à effectuer, et puis aussi que ce soit revu de façon périodique, là. Présentement, on fait un peu, excusez l'anglicisme, là, mais un peu du «patchage», on ne revoit pas en profondeur. On pense que, de façon périodique, l'aide financière devrait être revue pour être sûr qu'elle soit toujours à date et qu'elle suive bien la réalité.

Mme Gaudet: Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Ça va? M. le ministre.

M. Reid: Là-dessus, parce que vous avez quand même élaboré beaucoup sur ces modifications-là et c'est intéressant, je comprends que, quand vous parlez d'accorder plus de latitude aux instances de révision, c'est notamment pour l'exemple que vous avez donné, c'est-à-dire celui de la contribution parentale, par exemple, et des choses comme ça. Avez-vous eu l'occasion d'évaluer ou d'essayer d'évaluer un peu qu'est-ce que ça pourrait représenter comme phénomène, disons, les impacts d'accorder plus de latitude aux instances de révision financière... Vous dites «afin de donner plus de personnalisation», et donc ça veut dire de tenir compte davantage des situations particulières comme celle que vous venez de décrire. Avez-vous une idée de ce que ça pourrait représenter en termes de financement supplémentaire, puisque la commission, c'est aussi sur le financement?

M. Bégin (Simon): Bien, c'est évident que, si on personnalise plus puis on tient davantage compte de la situation personnelle et réelle de l'étudiant, bien il y a inévitablement plus d'étudiants qui vont être admis au Programme de prêts et bourses. Mais, s'ils en ont besoin, pourquoi est-ce qu'on s'y arrête? Peut-être que cette façon personnelle là aussi, d'un autre côté, va nous permettre de revoir notre façon de faire, puis on va se rendre compte qu'il y a des gens à qui on remet de l'aide financière qui... On pourrait la remettre d'une façon différente ou on pourrait la centraliser sur ceux qui en ont vraiment le plus de besoin. Donc, c'est un réaménagement complet, c'est une révision qui doit être faite.

Comme Stéphanie l'a dit, ça a été un peu rapiécé, ce programme, puis on croit qu'il est temps, même si c'est un des programmes les plus généreux, je dirais même, au monde, un des programmes les plus généreux... qu'il doit être revu, question que l'accessibilité soit maintenue.

L'impact est certain, mais ça va demander davantage de ressources. Mais, pour ce faire, notre solution sur le financement, on vous l'a expliquée. Donc, les ressources supplémentaires qu'on investira, qu'on ira chercher en éducation devront, entre autres, servir à financer ces étudiants-là. Donc, on n'a aucun problème à ce que les étudiants reçoivent davantage de financement pour leurs études.

Le Président (M. Kelley): Sur le même sujet, Mme la députée de Maskinongé?

Mme Gaudet: Oui. J'aimerais vous entendre sur le remboursement que vous proposez, là, j'entends le remboursement que les étudiants doivent faire de leur aide financière. Est-ce que vous avez des modalités différentes de remboursement à proposer ou si les modes actuels vous conviennent?

Le Président (M. Kelley): Mme Trudeau.

Mme Trudeau (Stéphanie): Merci. En fait, on a un mode différent à proposer. D'abord, peut-être juste remettre en contexte que, pour la Commission-Jeunesse, l'accessibilité est très importante, qu'il n'y ait pas de différence... Je sais qu'il y a certaines ailes jeunesse ou certaines personnes qui proposaient, par exemple, que les frais de scolarité soient différents dépendamment du programme auquel on adhère. Nous, à la Commission-Jeunesse, on est contre ça, et on est logiques sur toute la ligne, et on veut aussi... Les gens qui vont bénéficier, qui vont avoir le même niveau d'endettement mais qui vont gagner, je ne sais pas, 50 000 $ de moins, on trouve ça normal qu'ils remboursent à plus long terme leur prêt. Et, présentement, c'est laissé à la discrétion des institutions financières qui, la plupart du temps, sont flexibles. Donc, les étudiants ne vivent pas de gros problèmes avec ça, mais c'est toujours mieux pour nous, je pense, d'en faire quelque chose d'assuré, qu'il y ait un processus qui fasse en sorte, là, que ce soit étalé différemment selon le revenu qu'on gagne lorsqu'on a terminé nos études.

Mme Gaudet: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: Merci, M. le Président. Bienvenue à vous deux à cette commission parlementaire et bienvenue à l'Assemblée nationale. Je tiens d'abord à vous féliciter pour la qualité de votre mémoire.

Très rapidement, à la page 34 de votre mémoire, vous faites état d'une certaine formule de péréquation pour les régions. Et je voudrais peut-être revenir sur ce que M. Bégin disait tout à l'heure lorsqu'il mentionnait qu'il était lui-même d'une région. En proposant une telle formule, ne craignez-vous pas... Parce que nous avons quand même entendu plusieurs universités de milieu urbain ici, à la commission, qui posaient la problématique du financement. Alors, en mettant en place cette formule-là, ne craignez-vous pas de mettre, d'une certaine façon ? et je pèse mes mots, là ? en péril, si on veut, le financement des universités en milieu urbain? J'aimerais tout simplement vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Kelley): Mme Trudeau.

Mme Trudeau (Stéphanie): Bien, peut-être rapidement, je céderai la parole à Simon qui avait présenté ce point-là. Mais, lorsqu'on parlait de péréquation, à la page 34, on parlait au niveau de la recherche et non du financement général des universités. Donc, je ne sais pas si vous voulez qu'on élabore là-dessus ou si ça clarifie?

M. Mercier: Tout à fait. Tout à fait.

Mme Trudeau (Stéphanie): Vous voulez qu'on élabore?

M. Mercier: Oui, oui, s'il vous plaît.

Mme Trudeau (Stéphanie): Oui? O.K. C'est au niveau de la recherche et non au niveau du financement des programmes. Donc, ce qu'on disait, pour reprendre ce que disait Simon... Par exemple, je ne sais pas, je prends... l'UQAT a peut-être moins d'industries qui sont prêtes à investir, à donner des contrats de recherche aux étudiants. Pourtant, les étudiants sont aussi compétents. Donc, on disait: Peut-être que la pharmaceutique, l'ingénierie, qui reçoivent plus de contrats en recherche, par exemple, à Montréal, ou à Québec, ou peu importe où, aient l'obligation de remettre un certain pourcentage ? nous, on parlait, par exemple, ici, de 15 % ? dans un genre de fonds commun qui serait redistribué aux universités en région mais aussi aux programmes des fois, à Montréal, ou à Québec, ou à Trois-Rivières, qui sont peut-être moins sollicités, comme les sciences sociales. Donc, c'est là qu'on parlait de péréquation et puis de retourner de l'argent en recherche, en région notamment mais aussi dans d'autres domaines.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Chauveau, il vous reste deux minutes.

Mme Perreault: Je veux juste... Dans le fond, ça a un double volet, votre proposition, là. Ça a le volet non seulement d'encourager la recherche en région, mais également d'encourager la recherche dans différents programmes où il y a peut-être moins de recherche qui se fait. C'est ce que je comprends?

Mme Trudeau (Stéphanie): C'est un double objectif et c'est tout à fait ça.

Mme Perreault: O.K. Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Beauce-Nord.

n (10 h 20) n

M. Grondin: Merci, M. le Président. Bonjour à vous autres et bienvenue à l'Assemblée nationale. Je trouve que vous faites bien ça, les jeunes. On peut dire que des fois... Notre système scolaire, des fois on est portés à porter des jugements, mais, quand on voit des jeunes comme vous autres se présenter ici, à l'Assemblée nationale, on doit dire qu'il n'y a pas juste des failles, il y a sûrement des bons côtés parce que vous êtes très brillants.

Moi, j'ai lu un peu votre mémoire, puis, à une place, vous semblez dire qu'il va falloir faire du recrutement au niveau des professeurs puis que ça va être, dans l'avenir, un point important. Est-ce que vous avez déjà pensé... Parce que, moi, j'ai visité, là, dernièrement, avec le ministre de la Santé, des installations dans le domaine de la santé, où on se sert beaucoup des nouvelles technologies, même qu'on va pouvoir faire des opérations presque, tu sais, de Montréal à la Beauce, ou... Mais est-ce que, dans le domaine scolaire, on ne pourrait pas se servir de ces technologies-là pour peut-être combler un manque de professeurs que vous semblez... des superprofs, là? On ne pourrait pas se servir de cette technologie-là? Est-ce que vous avez envisagé ça, dans vos études?

Le Président (M. Kelley): M. Bégin.

M. Bégin (Simon): Oui. Dans la partie VI de notre mémoire, sur les régions, il y a un grand pan où on parle beaucoup de l'utilisation des nouvelles technologies, entre autres spécifiquement pour donner accès aux gens des régions à de l'enseignement. Puis c'est évidemment une suggestion qui est très intéressante: combiner les nouvelles technologies au recrutement pourrait permettre d'enseigner à distance.

Mais, nous, avant tout, la priorité qu'on veut donner au recrutement, c'est une priorité d'avoir des enseignants de qualité dans les universités. Puis, pour ça, on veut donner aux universités les moyens d'y arriver, ne serait-ce que par encourager l'excellence en donnant des meilleurs salaires aux enseignants, assurer une meilleure stabilité aux chargés de cours. Je l'ai dit tout à l'heure, les chargés de cours sont des gens qui viennent du milieu, des professionnels qui parfois peuvent avoir une expérience fort intéressante mais qui, par le manque de stabilité, pourraient peut-être dire... pourraient être peut-être rebutés de l'enseignement. Donc, nous, on veut rouvrir les portes des facultés à ces gens-là, puis, pour ça, on veut donner aux universités le moyen d'y arriver, que ce soit par l'utilisation des nouvelles technologies, la stabilité ou la rémunération, là.

Mme Trudeau (Stéphanie): Peut-être juste un complément très rapide. Au niveau de la nouvelle technologie, c'est non seulement pour les régions, mais, je pense, pour l'ensemble du Québec, tout le monde serait gagnant, et ça nous apparaît une solution intéressante aussi pour la formation continue. Donc, en région, oui, mais pour le Québec au complet, je pense qu'on est rendu à cette étape-là.

M. Grondin: Alors là, je vais vous poser une petite question un petit peu plus pointue. Les prêts et bourses, un étudiant, là, qui va à l'université, qui part d'une région comme la Beauce, qui s'en va à Montréal, avec le système de prêts et bourses, à l'heure actuelle, et puis qui va à l'université, je pense, s'il a 20 heures d'université, ça l'oblige presque à 20 heures aussi, à la maison, d'études, puis tout ça. S'il ne travaille pas, est-ce qu'il peut arriver financièrement? Est-ce que vous êtes...

Mme Trudeau (Stéphanie): ...quelqu'un d'une région? Non.

M. Grondin: Quelqu'un d'une région pourrait me répondre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin (Simon): Bien, je vous dirais qu'il y a beaucoup de critères qui sont en faveur de ça. Parce que le critère de la région n'est pas le seul pour un étudiant: il y a le critère du revenu des parents, qu'on veut relativiser d'ailleurs, le critère de si, lui, il travaille, de si, lui... Donc, sur la question de savoir comment un étudiant peut arriver, nous, on croit que c'est un choix personnel. Mais ce choix-là doit être fait... Un étudiant qui n'a pas les moyens et qui part de sa région... Ça coûte cher, là. Quand on part d'une région, c'est soit une voiture, un appartement, c'est tout un changement de monde.

Donc, oui, si l'étudiant, ses parents sont en difficulté, il faut l'aider. À ce moment-là, quand ses parents sont capables de l'aider à contribuer puis, avec une aide financière révisée, on pourra lui dire: Bien, oui, tu as accès à l'aide financière ou non. Mais ce qui est important à la finalité, c'est que le jeune qui en ait besoin ait accès à cette aide financière là. Puis c'est en mesure de ça, les solutions qu'on propose aujourd'hui.

M. Grondin: C'est bien. Alors, parce que, moi, je suis un parent qui paie, là, parce que j'ai une petite fille, moi, qui...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Il faut déclarer tous nos intérêts.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Grondin: Je voulais voir votre...

Le Président (M. Kelley): La transparence à l'Assemblée nationale.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Grondin: Puis, juste pour terminer, donner la chance aux autres, une réflexion. Vous savez, quand on a des cheveux blancs, des fois c'est parce qu'on a vécu beaucoup de choses dans le passé.

J'ai été famille d'accueil, moi, pour trois années de suite, pour des étudiants étrangers, chez nous. Et puis les étudiants étrangers qui venaient chez nous, ils trouvaient qu'au Québec on avait un bon système d'éducation et puis que ce n'était pas... quand on fait l'échange d'argent... parce que notre argent, dans le temps, était plus bas qu'aujourd'hui, mais, monétairement, ils trouvaient ça très, très... tu sais, c'était convenable. Alors, je ne pense pas qu'il faut nécessairement faire de baisse de coûts pour les étudiants étrangers, mais peut-être plus en accueil. Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Le temps est épuisé. Je vais passer la parole maintenant au député de Berthier.

M. Bourdeau: M. le Président, bonjour, bon matin. Je pense comme mes collègues, je peux vous dire félicitations pour votre travail. On a vu les jeunes du PQ, les jeunes de l'ADQ, vous autres aujourd'hui. Moi, j'ai la chance de faire, avec mes collègues, une tournée du Québec, voir les jeunes un peu partout, là, puis, lorsqu'on dit que les jeunes ne sont pas politisés, je pense que c'est totalement faux, chers collègues. Les jeunes sont politisés lorsqu'on parle surtout de sujets qui les intéressent, comme aujourd'hui avec l'éducation.

Vous avez parlé beaucoup, là, quand même, du choc démographique, et je suis content de vous entendre parler du choc démographique. Vous allez peut-être pouvoir convaincre votre gouvernement de partir la commission nationale sur le choc démographique, commission qui, malheureusement, présentement, a été refusée. J'espère que vous allez travailler dans ce sens-là pour nous aider à faire en sorte que, tout le monde ensemble, on puisse s'assire de façon non partisane et parler du choc démographique.

Vous n'avez pas parlé non plus des baisses d'impôts. Les deux autres partis sont venus nous voir pour nous parler que les baisses d'impôts, ce n'est peut-être pas la meilleure idée présentement, surtout dans le cadre du choc démographique. On sait qu'on va manquer de revenus d'ici 10, 15 ans et que présentement on a besoin d'un investissement en éducation. Ne croyez-vous pas que ce serait plutôt nécessaire d'oublier les baisses d'impôts et faire un investissement en éducation?

Et ma deuxième question ? j'avais aussi une deuxième question ? c'est par rapport... Je veux juste clarifier ce que vous avez dit. Vous dites que vous êtes contre la modulation des frais, mais, dans votre mémoire, il est marqué, à la page 30, qu'une modulation du niveau des frais de scolarité est donc une solution responsable si elle répond aux impératifs de la contribution de l'étudiant à sa formation et au maintien de l'accessibilité.

Le Président (M. Kelley): Alors, les deux questions sont posées. Est-ce que c'est Mme Trudeau qui va commencer?

Mme Trudeau (Stéphanie): Oui. Là, je voulais juste regarder, à la page 34, une réponse... Tu compléteras si jamais... Donc, au niveau de la baisse d'impôts, je pense qu'on n'est pas ici pour faire un débat partisan ou venir justifier des décisions. Nous, peu importe d'où l'argent est pris, nous, on pense qu'effectivement il va falloir que le gouvernement provincial fasse un peu plus sa part, c'est certain. Par contre, si vous nous demandez si l'ensemble du financement doit être pris dans la poche des contribuables québécois, la réponse est non, il doit y avoir un juste équilibre, et on pense qu'il est temps que le privé et l'étudiant aussi hausse sa contribution. Et c'est peut-être juste un...

M. Bégin (Simon): Oui, bien, sur le...

Mme Trudeau (Stéphanie): Oui, c'est ça, une question de partisanerie.

M. Bégin (Simon): Sur le deuxième volet de la question, la modulation qu'on propose ici, c'est une modulation pour l'ensemble des frais de scolarité. On croit qu'il faut les moduler, c'est-à-dire les hausser de façon raisonnable et puis les indexer par la suite. La modulation à laquelle on s'oppose, c'est une modulation par programmes qui encouragerait un peu... Si les études en médecine, ou en droit, ou en sciences dentaires coûtent plus cher que les autres études, ça encouragerait l'élitisation, un peu, de ces professions-là. Ça, on est absolument contre ça. Mais on est pour une modulation généralisée, mais une modulation programme par programme, on s'y oppose.

M. Bourdeau: O.K. Au niveau aussi de votre mémoire, vous parlez qu'il faudrait tenir compte maintenant, dans l'aide financière, de la nécessité de l'achat d'un micro-ordinateur. Est-ce que vous voulez dire par ça que vous demandez aussi à votre... je dis «à votre gouvernement», étant donné, là, que vous êtes représentants du Parti libéral, de revenir un peu sur la décision de suspendre le prêt micro qui a sauvé simplement 4,8 millions cette année et faire en sorte que le prêt micro puisse revenir et que les étudiants aient accès à ce service?

Mme Trudeau (Stéphanie): On ne s'est pas penchés spécifiquement sur le prêt micro. Par contre, je pense que l'impératif ? et c'est nous qui l'avions demandé ? c'était que ceux qui présentement ont obligatoirement besoin d'un ordinateur, ils y ont accès présentement dans les programmes où c'est obligatoire. Oui, on envisage qu'on puisse le mettre dans les frais de l'aide financière. Donc, je ne sais pas si ça répond à votre question.

Mais un des problèmes, je pense, qu'il y avait avec le programme micro, et on était d'accord avec le gouvernement, c'est que présentement on donnait le monopole aux coops étudiantes, et ça, c'était à réviser, ça, je pense. À notre avis, ce n'était pas acceptable. Il y avait d'autres entreprises québécoises qui auraient pu offrir des ordinateurs à prix raisonnable. Et puis aussi, pour une certaine partie de la clientèle, ils sont capables d'aller chercher un prêt pour les micro-ordinateurs. Par contre, ceux qui se verraient refuser le prêt, c'est évident qu'on veut qu'ils puissent avoir accès à un financement à partir de l'aide financière. Mais il faut départager ceux qui n'ont pas les moyens de l'acquérir et ceux qui ont les moyens.

Le Président (M. Kelley): Alors, ça va mettre fin au bloc. Alors, il ne me reste de juste dire merci beaucoup. Dernier commentaire, M. le ministre, il vous reste deux minutes.

M. Reid: Il me restait quelques secondes, je pense. Je voudrais en profiter...

Le Président (M. Kelley): Une minute.

n (10 h 30) n

M. Reid: Une minute? Je voudrais en profiter pour vous dire ? et vous répondrez si vous le souhaitez ? que votre document et votre présentation ont été extrêmement équilibrés et que vous comprenez bien les impératifs du gouvernement et qui sont aussi de répondre aux demandes de la classe moyenne, cette classe moyenne qui envoie ses enfants à l'école, cette classe moyenne qui contribue aussi à l'aide financière à ses enfants qui vont à l'université, et que votre approche est une approche qui cherche l'équilibre. Et, sans me prononcer sur vos propositions, mais, en cela, je voudrais vous féliciter de cette approche équilibrée.

Le Président (M. Kelley): Et, au nom des membres de la commission, je pense que ça complète notre trio des comités des jeunes de nos formations politiques. Je pense, chacun des membres va tirer les conclusions qui a mieux performé. Mais je pense, dans l'ensemble, tous les parlementaires peuvent être fiers. Et je veux vous féliciter pour votre militantisme. Je pense, c'est très encourageant pour l'avenir du Québec, d'avoir les jeunes qui s'impliquent dans la politique. Alors, félicitations! Et, sur ça, je vais suspendre nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 31)

 

(Reprise à 10 h 33)

Le Président (M. Kelley): Alors, je demande aux représentants de la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec de prendre place, s'il vous plaît.

Alors, bienvenue aux représentants de la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. La parole est à vous, M. Caron.

Fédération des commissions scolaires du
Québec (FCSQ) et Association des commissions
scolaires anglophones du Québec (ACSAQ)

M. Caron (André): Merci, M. le Président. Dans un premier temps, j'aimerais vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Bonjour, M. le ministre, MM., Mmes les députés. Mme Visser, la vice-présidente de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec; à mon extrême gauche, M. Jeff Polenz, qui est le directeur général de cette association; à ma droite immédiate, M. Réjean Morel, qui est directeur général de la Fédération des commissions scolaires; ainsi que M. Beaudet, qui est conseiller technique au dossier.

D'abord, M. le Président, la Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des commissions scolaires du Québec ont pour mission de promouvoir l'éducation préscolaire et l'enseignement primaire et secondaire public au Québec. La Fédération des commissions scolaires représente les 60 commissions scolaires francophones du Québec ainsi que la commission scolaire du Littoral, et, pour sa part, l'Association des commissions scolaires anglophones représente les neuf commissions scolaires anglophones du Québec. Parmi nos principaux mandats, la fédération et l'association, nous avons comme objectifs de défendre les intérêts de nos membres et de faire avancer la cause de l'éducation au Québec.

Le mémoire que vous avez devant vous fait état de la réaction de la fédération et de l'association au document de consultation devant servir aux travaux de la commission parlementaire sur la qualité, l'accessibilité et le financement des universités. Nous tenons à remercier la Commission de l'éducation d'avoir accepté de recevoir l'opinion de la fédération et de l'association en cette matière.

En tant que responsables de l'enseignement primaire et secondaire, les commissions scolaires du Québec jouent un rôle important dans le cheminement scolaire des jeunes Québécoises et Québécois, puisque c'est à l'école qu'ils reçoivent la formation de base qui leur permet de se préparer à leur vie d'adulte et, pour la majorité d'entre eux, c'est-à-dire tout près de 60 %, leur permet de poursuivre, au cours de leur vie, des études postsecondaires.

Il est important que le passage entre les études secondaires et postsecondaires soit harmonieux, et, de ce fait, les commissions scolaires sont intéressées à l'avenir et à l'évolution des études universitaires. La Fédération des commissions scolaires du Québec et l'Association des commissions scolaires anglophones désirent donc, en leur nom, contribuer à la réflexion de la Commission de l'éducation sur les questions reliées à son mandat et les questions qui sont d'un intérêt commun pour tous les partenaires du secteur de l'éducation.

Le document de consultation sur les enjeux entourant la qualité, l'accessibilité et le financement des universités au Québec soulève explicitement plusieurs questions, dont certaines posent des problèmes complexes. Malheureusement, ni la disponibilité des analyses nécessaires ni le temps dont nous disposions pour préparer le présent mémoire ne nous ont permis de faire le tour de tous les enjeux et de répondre à chacune des questions.

Néanmoins, les questions les plus importantes qui intéressent les commissions scolaires, à juste titre, ont fait l'objet d'un rapport qui a été rendu public récemment, c'est-à-dire au mois de novembre dernier, par la Fédération des commissions scolaires du Québec et déposé au ministre de l'Éducation. Ce rapport, intitulé Les études secondaires et postsecondaires ? Propositions de réorganisation pour améliorer la performance du système d'éducation, rapport produit par M. Denis Bédard, traite de propositions de réorganisation pour améliorer la performance du système d'éducation au Québec. D'ailleurs, nous avons joint ledit rapport au mémoire qui vous a été présenté.

Il va de soi que le présent mémoire prend en considération plusieurs conclusions de ce rapport, notamment l'interdépendance des ordres d'enseignement dans l'analyse de chacun des enjeux soulevés dans le document de consultation préparé par le ministère de l'Éducation, à savoir la qualité, l'accessibilité et le financement du réseau universitaire.

Sur la qualité du système d'éducation, il convient d'abord de préciser que la Loi sur le ministère de l'Éducation donne une responsabilité importante au ministre de l'Éducation quant à la qualité des services éducatifs dispensés par les universités, et ceci, dans le respect de leur autonomie. Un système d'éducation de qualité doit assurer la continuité des études à toutes les personnes qui en ont la volonté et l'aptitude.

En ce qui a trait à l'accessibilité aux études supérieures, nous la considérons sous trois angles, à savoir: la fluidité du système d'éducation; les coûts pour les usagers; et l'accessibilité aux études supérieures en région.

Nous faisons d'abord le constat que le principal échec du système d'éducation québécois au plan de la performance est le faible taux de qualification professionnelle. Il faut que le passage de la formation professionnelle à la formation technique soit plus facile et plus naturel, tout comme le fait que la formation professionnelle et technique devienne une voie tout aussi régulière que la formation générale pour accéder aux études universitaires.

n (10 h 40) n

Quant aux coûts pour les usagers, nous constatons que les droits de scolarité plus bas au Québec ne semblent pas améliorer l'accessibilité aux études supérieures lorsqu'on se compare avec le reste du Canada ou avec d'autres pays. Il nous manque beaucoup d'informations pour en faire une analyse sérieuse, puisque les renseignements fournis dans le document de consultation ne nous permettent pas d'émettre une opinion juste et équitable sur le sujet. C'est pourquoi nous ne faisons que quelques observations ou commentaires.

Le tableau 16 du document de consultation nous indique que le taux d'accès au baccalauréat, en pourcentage, est de 26,6 % au Québec comparativement à 27,9 % pour le Canada et 33,2 % pour les États-Unis. Les données de ce tableau à première vue ne semblent pas démontrer que des droits de scolarité bas assurent une plus grande accessibilité. Toutefois, il aurait été intéressant d'avoir des données pour le Québec sur le modèle du tableau 13, qui nous permet de constater une nette progression dans le taux de participation aux études universitaires des jeunes provenant de familles à faibles revenus. Cela aurait été un indicateur intéressant.

Un autre élément d'analyse qui aurait pu être intéressant est lié au taux de réussite. En effet, on note que près d'un étudiant sur trois inscrits à un programme menant au baccalauréat quitte sans avoir obtenu de diplôme. Comment peut-on expliquer ce phénomène? Ces étudiants retournent-ils dans les autres ordres d'enseignement comme la formation professionnelle ou la formation technique? Est-ce que les droits de scolarité bas et le fait que des parents dévalorisent la formation professionnelle et technique n'entraîne pas un contingent d'étudiants qui sont mal orientés?

Quel est l'effet des droits de scolarité bas sur la durée de formation des étudiants tant au niveau collégial qu'au niveau université? Combien d'étudiants changent d'orientation durant ou après la première année au baccalauréat? Voilà des données qui auraient pu être intéressantes pour une meilleure analyse de la situation.

De plus, il faut voir la situation générée par des droits de scolarité bas sur l'ensemble du système d'éducation. Comme le montre le tableau 29 du document de consultation, le gouvernement finance davantage le réseau universitaire, si on compare à l'Ontario ou à la moyenne canadienne. Il est normal que cela se produise, puisque le gouvernement du Québec doit compenser les coûts relativement bas des droits de scolarité. Il faut également mettre cette réalité en relation avec les taxes et les impôts payés par les contribuables. Comme le Québec est la province la plus taxée au Canada, selon les renseignements contenus dans des documents de consultation prébudgétaires pour l'année 2004-2005, il est peut-être normal que les droits de scolarité soient plus bas ici qu'ailleurs. La situation doit donc être analysée dans son ensemble et non en silo.

Un autre aspect qui nous préoccupe, c'est celui de l'accessibilité aux études supérieures en région. Le tableau 17 du document de consultation nous fournit des renseignements intéressants sur le pourcentage de la population de 15 ans et plus détenant un grade universitaire. On y remarque que les régions dites éloignées ont un taux beaucoup plus faible de scolarisation que les régions urbaines. Mais ces données peuvent être trompeuses pour avoir un portrait réaliste de l'accessibilité aux études universitaires en région. En effet, l'emploi, dans certaines régions, peut requérir moins de grades universitaires, il serait donc normal que le taux de scolarisation observé y soit plus faible. Il aurait été intéressant de connaître, pour une cohorte d'étudiants ayant déjà obtenu le diplôme secondaire, combien d'entre eux se rendent à l'université, et ce, par région.

Une chose par contre est indéniable, c'est que le coût des études universitaires peut être beaucoup plus élevé pour les étudiants et les parents provenant des régions, compte tenu des frais de subsistance et de logement lorsque ces jeunes doivent quitter la région. Même si plusieurs régions offrent l'accès aux études universitaires, des problèmes demeurent, puisque tous les programmes ne sont pas disponibles partout.

Il faut cependant reconnaître, tel que le signale le document de consultation, que les universités en région représentent des forces dynamiques dans leur milieu. Et c'est avec pertinence que ce document conclut: «Le potentiel de développement de l'enseignement supérieur en région suppose des solutions qui accroissent la complémentarité et la synergie entre les ressources du milieu.» Et nous considérons que les commissions scolaires, nous sommes des ressources du milieu.

C'est encore au nom de cette complémentarité et de cette synergie que les trois ordres d'enseignement doivent se concerter, car ils sont interdépendants. Les effectifs scolaires sont moins nombreux et, dans une perspective à moyen et à long terme, diminueront. Si on veut maintenir des choix de programmes professionnels, techniques et universitaires en région, il faudra que la concertation régionale entre les ordres d'enseignement soit favorisée pour que les jeunes puissent demeurer dans leur région.

Le projet de réingénierie rendu public dans le rapport Bédard, que j'ai cité précédemment, s'inscrit en ce sens, car il présente un moyen d'assurer la vitalité de ces établissements en région et d'améliorer leur financement. Une année de plus au secondaire permettrait aux jeunes de demeurer dans leur région en améliorant leurs connaissances et en mûrissant leurs projets d'avenir pour faire un choix de carrière mieux arrêté. Les collèges professionnels et techniques offriraient un choix d'options élargi, qui permettrait aux jeunes de poursuivre leurs études professionnelles et techniques en région avec plus de points de services.

Si les jeunes choisissaient de poursuivre aux études supérieures, l'ajout d'une année de plus aux études universitaires permettrait de consolider la formation de base au niveau du baccalauréat en augmentant le nombre d'étudiants et d'étudiantes. À notre avis, cela pourrait permettre aux universités en région d'offrir un plus large éventail de programmes. La proximité géographique des services éducatifs serait alors préservée. Aussi, l'ajout d'une année de formation universitaire permettrait également d'accroître le financement des universités.

Le gouvernement doit s'assurer de la viabilité des universités en région en procédant à un financement juste et équitable entre les universités par le biais, entre autres, des règles budgétaires annuelles. C'est là un gage d'amélioration de l'accessibilité aux études universitaires.

Finalement, il ne faut pas perdre de vue la transition entre les études secondaires et supérieures. Et là-dessus il faut toujours se rappeler que la population du Québec attend de son gouvernement et de ses mandataires qu'ils administrent des services publics qui répondent correctement à ses besoins, qui sont de bonne qualité et qui sont conformes à la capacité de payer de la société.

Le fait qu'il y ait une année d'études de moins par rapport aux autres provinces prive les universités de ressources qui les empêchent de rentabiliser l'ensemble des études universitaires au plan de l'enseignement et de la recherche. Elle sont aussi désavantagées par rapport aux autres universités nord-américaines avec lesquelles elles sont directement en concurrence.

C'est en prenant en considération la problématique combinée de l'enseignement secondaire et postsecondaire que la Fédération des commissions scolaires a décidé d'appuyer la proposition de réforme présentée dans le rapport de M. Denis Bédard, c'est-à-dire la réforme des études collégiales préuniversitaires et de prolonger les études secondaires et universitaires d'une année. La mise en application de la proposition demandera une reconfiguration des deux cycles d'études afin de bien les arrimer, mais, une fois mise en place, les bénéfices de cette réforme seront, à notre point de vue, assez rapides à la fois au niveau de la durée des études et sur des économies de gestion.

La proposition de réforme repose également sur le principe qu'une seule organisation serait responsable des études secondaires générales et de la formation professionnelle et technique. Cette façon de faire est la seule pour maximiser l'efficacité du système d'éducation. En effet, une seule entité décisionnelle, imputable, permettrait d'apporter de la fluidité dans le système, c'est-à-dire le cheminement scolaire d'un élève du préscolaire à la fin du secondaire général ou à la fin du professionnel avec la possibilité de poursuivre au secteur technique et même à l'université.

Le contexte budgétaire qui nous est présenté, particulièrement au cours des derniers jours, au regard du désengagement du gouvernement fédéral en matière de péréquation et de programmes sociaux, accentue notre inquiétude face à la situation budgétaire du gouvernement. Et, là-dessus, il est clair, compte tenu que nous savons que le ministre de l'Éducation aura une enveloppe globale et qu'il aura un partage à faire entre les trois réseaux d'enseignement, pour nous, on est convaincus que, s'il y a plus d'argent dans un secteur, il va y en avoir moins dans l'autre, c'est des vases communicants qui s'appliquent à ce moment-là. Une raison de plus, nous croyons, de regarder le financement des réseaux de l'éducation dans son ensemble et non en silo, comme je l'ai dit tout à l'heure. Et je demanderais à Mme Visser, la vice-présidente de l'association, de vous donner la conclusion de cet exposé.

Le Président (M. Kelley): Mme Visser.

n (10 h 50) n

Mme Visser (Aline): Alors, je vous remercie également, M. le ministre ainsi que les membres de la Commission de l'éducation, d'avoir accepté de nous recevoir dans le cadre de ces consultations. L'Association des commissions scolaires anglophone est solidaire et fait sienne le mémoire qui vient de vous être présenté par nos collègues francophones. Nous sommes convaincus que le gouvernement doit analyser la problématique financière des réseaux de l'éducation dans leur ensemble et non pas de façon sectorielle. S'il peut être légitime que le réseau universitaire demande des fonds supplémentaires, les demandes des réseaux collégial, et primaire, et secondaire le sont tout autant.

En matière de financement des réseaux de l'éducation, nous nous situons à la croisée des chemins. Aussi, c'est avec réalisme et détermination que nous devons faire face à la situation. L'analyse de la problématique financière des universités vue dans une perspective globale des réseaux entraînera sans conteste des décisions dont les impacts ne seront pas uniquement d'ordre financier, mais aussi d'ordre social. Ces décisions contribueront largement au dynamisme de notre développement économique. Nous réussirons donc ensemble à préparer les jeunes Québécoises et Québécois à s'engager dans les nouvelles perspectives économiques et sociales du Québec. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Visser. Merci beaucoup, M. Caron. Maintenant, la parole est au ministre de l'Éducation.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je vais souhaiter la bienvenue à nos distingués invités des commissions scolaires francophones et anglophones.

J'ai eu l'occasion de visiter la plupart des régions du Québec ? je n'ai pas terminé: beaucoup de commissions scolaires, plus de 50 écoles, beaucoup de contacts avec des efforts de concertation qui se font dans les régions, et ce n'est pas étonnant d'entendre M. Caron parler des trois ordres d'enseignement comme devant se concerter, parce qu'ils sont interdépendants. J'ai eu l'occasion de voir et d'entendre ce que les régions, qui ont beaucoup avancé vers cette concertation-là, ont à dire là-dessus. J'aimerais vous entendre peut-être sur... élaborer un peu plus sur cette interdépendance qui existe déjà dans plusieurs régions, c'est-à-dire qui existe partout mais qui est déjà bien reconnue dans plusieurs régions, et je pense, par exemple, à l'Outaouais, où on a, même, une table très active à laquelle se sont ajoutés même des représentants d'Emploi-Québec, par exemple, et des CLSC, pour s'assurer d'une concertation grande là-dessus.

J'aimerais vous entendre sur, d'une part, le type d'interdépendance et quelles sont les actions qui peuvent être prises là-dessus, et on parle des universités, de leur qualité, de leur accessibilité, donc évidemment c'est notre toile de fond, là, et, d'autre part, dans quelle mesure est-ce que ces expériences et ces avancées qui sont faites dans certaines régions ne devraient pas être encouragées à être déployées de façon beaucoup plus systématique peut-être à la grandeur du Québec.

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Oui, M. le ministre, je pense que vous faites référence effectivement à des régions qui ont débuté une concertation. Ça ne date pas d'un demi-siècle, là, c'est peut-être récent, dans les cinq, sept, huit dernières années. Surtout depuis cinq ans ou six ans, avec les commissions scolaires, depuis les fusions en 1998, on a commencé, et je pense que la concertation, ça va bien, au niveau des organisations. Nous, entre autres, ce qu'on veut souligner: en plus de cette concertation-là, il faut aussi que, dans le système, il y ait une fluidité. Il faut que, pour l'élève ou les étudiants, ça paraisse aussi, pas juste au niveau des organisations.

C'est pour ça qu'on fait référence, dans notre mémoire, entre autres, à la fluidité des systèmes d'éducation. Il faut que le jeune soit capable de passer d'un système à l'autre sans recommencer certains crédits ou certaines options. Donc, la concertation régionale que vous avez constatée dans les régions, elle est excellente. Pour qu'elle s'accentue, il faudrait qu'elle soit, partout au Québec, du même ordre. Et, en même temps, par conséquent on va faire ça, on va faire aussi, avec le modèle proposé tel que je vous l'ai décrit, la fluidité dans le système pour que l'élève y retire quelque chose aussi. Je ne sais pas si M. Beaudet pourrait renchérir sur cette... M. le Président, si vous permettez.

Le Président (M. Kelley): Oui, M. Beaudet.

M. Beaudet (André): Sur cette question de fluidité, on peut faire les grands constats actuels où effectivement il y a des absences de cette fluidité. Quand on pense à la grande proportion de jeunes qui quittent sans avoir obtenu un diplôme, quand on pense à la proportion de jeunes qui commencent une formation professionnelle après avoir commencé une formation collégiale, quand on pense au nombre de jeunes qui ne terminent pas leur formation professionnelle ou leur formation collégiale, préuniversitaire, et particulièrement en formation technique, ce sont là tous des indices d'une absence de fluidité.

Encore aujourd'hui, on le sait, la notion de formation terminale est encore présente à différentes étapes du réseau. Or, si on veut vraiment une fluidité, si on veut vraiment qu'il y ait cette concertation, cette possibilité pour les jeunes de converger vers une plus grande éducation et une meilleure professionnalisation, il faut absolument développer cette fluidité. Donc, faire en sorte que la notion de formation terminale n'existe plus, faire en sorte que le régime pédagogique de la formation professionnelle et technique soit constitué d'une même économie ? enfin, il y a différentes façons, là, que la fédération propose ? faire en sorte qu'un plus grand nombre de jeunes accèdent à une formation professionnelle et de ce fait puissent également, par cette voie, comme en Europe, accéder à une formation universitaire.

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Juste pour rajouter, c'est que souvent cette concertation-là est liée à des individus, et, quand les individus changent de poste ou prennent leur retraite, la concertation est affaiblie. Parce que c'est du partenariat, ce sont des liens qui se sont tissés entre des individus et un partenariat d'individus. Donc, ce n'est pas d'une solidité à toute épreuve. C'était le point que je voulais ajouter.

M. Reid: Donc, il y a un besoin de réfléchir à cette... comment permettre une structuration, une solidification de ces partenariats qui ne dépendent pas uniquement de l'intérêt d'un individu qui se retrouve dans un poste, à un moment donné, avec un autre, et... Donc, ça répond bien à ma question.

Vous parlez aussi de répartition juste et équitable entre les universités en région, des fonds, qui est une préoccupation évidemment qui est tout à fait naturelle, puisque les commissions scolaires participent à ces discussions sur le rôle de l'éducation à tous les ordres d'enseignement, là, en région. J'aimerais peut-être... Si vous pouvez élaborer un peu là-dessus mais aussi, en même temps, nous parler des efforts qui ont été faits, dans ces milieux de concertation, pour essayer justement de faire en sorte que la masse critique d'étudiants en région, au niveau universitaire, qui proviennent donc du système scolaire et du système collégial puisse augmenter, se maintenir ou augmenter, alors que, évidemment, on sait qu'il y a des difficultés de ce côté-là. Est-ce que vous pouvez élaborer sur ce point-là et peut-être aussi, si vous avez plus à dire, là, au niveau d'une répartition juste et équitable entre les universités en région?

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Si vous permettez, M. le Président, M. Morel pourrait répondre à la question.

Le Président (M. Kelley): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Oui, bonjour. Bon. Alors, un peu comme notre rapport le propose, lorsqu'on fait le tour... Nous aussi, on arrive d'une tournée de régions, là, moi et le président et les nouveaux commissaires, après les élections scolaires. Puis une grande préoccupation des gens des régions, c'est de garder leurs jeunes en région pour être capables justement de créer une synergie. Puis, s'il y a des entreprises, ça prend de la main-d'oeuvre bien formée, hein? C'est comme les saucisses Hygrade, en somme, hein, plus on en mange plus elles sont fraîches. Alors, il faut que les gens puissent avoir une formation, mais les entreprises vont aller s'établir en région s'il y a une main-d'oeuvre qualifiée qui est disponible. Et leur grande préoccupation effectivement, c'est de voir sortir leurs enfants et ils ne reviennent plus par la suite, là, lorsqu'ils ont été formés.

Alors, dans la proposition qu'on a faite justement, en ajoutant un secondaire VI, ça va permettre d'avoir les jeunes plus près de leur milieu une année de plus, là, bien sûr en adaptant le système à l'âge des étudiants, hein. On s'est fait dire, à un moment donné, que les jeunes, ils vont décrocher davantage parce qu'il y a une sixième secondaire. Ils vont être encore encadrés, mais je pense que le ministère a dû y réfléchir aussi depuis longtemps. Avec la réforme, là, il y a moyen d'adapter les cycles au secondaire pour adapter ça à l'âge des étudiants puis avoir la liberté qu'il fallait au niveau de leurs études.

Et, au niveau universitaire, bien c'est certain que, avec un bassin plus grand, avec un... Ce qu'on nous a indiqué, par exemple, dans plusieurs universités qu'on a consultées, c'est que les baccalauréats autres que ceux de la santé, il y avait... Plusieurs universités nous ont cité un chiffre qui tournait autour de 40 % d'élèves qui changent d'orientation après une année du programme baccalauréat. Et on expliquait ça souvent par le fait que, avec trois années de baccalauréat, on doit, dès la première année, entrer dans les matières, là, très spécifiques, là, au choix de carrière fait par l'individu, ce qui permet une moins grande possibilité d'options. Alors, quand le jeune change de voie, bien il se voit peu reconnaître de crédits. Une quatrième année va permettre justement une plus grande flexibilité en cette matière et va permettre, dans les régions, d'avoir un bassin de clientèle plus grand.

n (11 heures) n

Donc, on pense que ça va permettre de garder les enfants en région plus longtemps dans les réseaux universitaires régionaux et peut-être que ça va permettre aussi de développer des programmes qui, jusqu'à maintenant, n'étaient pas rentables. Mais ce qu'on sait de tout ça, à moins que je me trompe, mais je pense que c'est la première année qui est peut-être la moins dispendieuse. Peut-être, pour les universités, là, on met peut-être plus d'élèves par groupe ou... permettre une plus grande flexibilité. Donc, ça va permettre un meilleur financement des universités et peut-être d'offrir une plus grande palette d'options, de programmes en région pour permettre justement ce mécanisme-là.

Et je ne connais pas beaucoup les règles budgétaires, là, du réseau universitaire, là, le répartissement des ressources, mais c'est sûr que, si on veut assurer cette équité-là entre les régions aussi, bien ça prend, pour ces universités-là, des indices d'éloignement, des indices de taille. On sait très bien qu'il ne faut pas que... C'est ça qu'on réclame, nous autres, au niveau des commissions scolaires, que de moins en moins les règles budgétaires soient tributaires de montant par élève, mais d'enveloppe de base, là, de fonctionnement qui permet une assise, là, qui fait en sorte que, lorsqu'on est en décroissance de clientèle, bien il y a un frein qui assure un service adéquat, là, à chaque organisation. Donc, j'imagine que ça doit être un peu le même système au niveau universitaire, avec des pondérations bien sûr par rapport aux programmes, parce que le coût des programmes bien sûr doit varier aussi énormément.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue au nom de ma formation politique. Ça me fait plaisir de vous retrouver. Vous êtes des partenaires avec lesquels j'ai eu plaisir à travailler un long moment. Ça me fait plaisir de vous revoir ce matin. Bon.

Alors, revenons sur votre mémoire. Bien, évidemment il s'appuie sur le rapport Bédard, là. Je ne veux pas entrer trop longuement sur... c'est-à-dire je ne veux pas revenir trop longuement sur le rapport, je pense qu'il y a de mes collègues qui y viendront, et sûrement qu'on aura d'autres forums pour en débattre dans les mois qui viennent. Bon.

Je veux revenir sur cet objectif que l'État s'est fixé en termes de niveau de diplomation, hein, pour, entre autres, au niveau du bac, puisque nous parlons des universités, en faisant passer notre taux d'obtention d'un bac à 30 %, de 25 point quelques pour cent qu'il est maintenant pour aller vers 30 %. Et, dans votre mémoire, à la page 9, vous nous présentez cela comme étant une cible particulièrement difficile à atteindre compte tenu des résultats que l'on constate, mais vous faites une remarque particulièrement pertinente en disant: En fait, la cible de 30 %, elle a été annuellement dépassée depuis 1996. Elle a été dépassée par les femmes, par les jeunes femmes. Et ce qui a fait chuter finalement, c'est le fait que les jeunes hommes n'ont pas atteint les mêmes niveaux de réussite. Je sais que c'est une question qui non seulement vous préoccupe, mais préoccupe la société québécoise dans son ensemble. On a vu des gens venir ici en parler, on en parle quotidiennement, et il y a des universités qui sont venues nous dire qu'ils travaillaient actuellement en collaboration avec les commissions scolaires pour identifier quels seraient les facteurs sur lesquels on pourrait intervenir pour corriger cela.

En même temps, je mets ça en lien avec une autre donnée dans votre document, toujours à la page 9, où vous dites que ça caractérise d'ailleurs le système québécois par rapport aux systèmes d'éducation des pays de l'OCDE, où on parle du faible taux d'obtention d'un diplôme d'études professionnelles avant l'âge de 20 ans. On parle de 6,2 %, alors que, chez les adultes de 20 ans et plus, c'est 19,3 %.

Qu'est-ce que vous pensez qui devrait être fait pour nous amener à soit corriger la question de l'obtention du diplôme d'études professionnelles pour les moins de 20 ans ou est-ce que c'est une donnée avec laquelle on doit composer simplement puis accepter que c'est comme ça, et par ailleurs sur le fait que le taux de réussite des garçons est moins élevé? Je vous dis mon sentiment à ce moment-ci, j'ai l'impression que c'est une espèce de corvée collective dans laquelle il faudrait s'engager pour trouver des solutions à cela en mettant à profit les meilleurs talents du Québec, qu'ils viennent des commissions scolaires, des universités, des cégeps ou d'ailleurs. Alors, je vous pose la question.

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Vous posez la question, Mme Marois, et vous y répondez en même temps. Vous notez qu'à l'université il y a moins de garçons. Vous savez que la réussite des garçons, dans les commissions scolaires, ça nous préoccupe grandement. Et vous avez même mentionné qu'il y a beaucoup de cerveaux qui sont à essayer de trouver des solutions, puis il n'en est pas apparu des très évidentes.

Par contre, nous, on a la prétention qu'avec des activités parascolaires, amener les garçons à l'école ? parce qu'on parle spécifiquement des garçons, mais ça s'applique aussi aux filles ? avec quelque chose qu'ils aiment... Et là je vous donne quelques exemples, ça peut être de l'informatique, ça peut être du football, ça peut être de l'art dramatique, ça peut être d'autres activités qui ne sont pas nécessairement dans le curriculum, O.K., et qui vont faire en sorte que le jeune, il part le matin puis il dit: Ce midi, j'ai ma pratique de basketball. Et là on l'amène à l'école en le motivant avec quelque chose et, en même temps, par hasard, hein, parce que c'est notre mission fondamentale, on lui montre des mathématiques, du français et des sciences. Donc, avec ça, on prétend que ça peut être une avenue.

Et aussi une fluidité ? je reviens là-dessus, vous allez me l'entendre dire encore des mois et des mois ? dans le système pour ne pas que le parent, il voie un cul-de-sac dans la formation professionnelle, entre autres, qu'il soit capable de décoder qu'au bout du tunnel la formation professionnelle, c'est le point de départ, qu'il va pouvoir passer en formation technique et peut-être en génie à l'université pour prendre certaines options. Donc, la valorisation de la formation professionnelle passe par là. Si on n'a pas ça puis on n'est pas capable de démontrer aux parents que c'est une voie aussi naturelle, comme je l'ai mentionné tantôt, que la formation générale, à ce moment-là on a une embûche en avant de nous autres.

Parce que les parents n'ont pas la propension, au Québec ? en tout cas, ce que nous constatons ? d'encourager des jeunes à s'en aller dans cette formation-là. La première réaction que les parents ont, puis là je le dis entre guillemets, vous me permettrez, M. le Président, mais: Je ne t'ai pas mis au monde pour que tu fasses un plombier, même si le jeune veut ça. Donc, il n'y a pas de fluidité, il n'y a pas cette lueur au bout du tunnel. Et, nous, on prétend qu'avec la proposition que vous avez lue il peut y avoir des réussites au niveau des garçons au secondaire, ce qui va amener automatiquement une cohorte de garçons à l'université pour venir un petit peu balancer le niveau garçons-filles à l'université.

Mme Marois: Bon. Oui, j'ai lu votre rapport bien sûr, le rapport qu'a préparé M. Bédard et que vous avez adopté. Bon. Ça ne me convainquait pas tout à fait que ça va nécessairement donner les résultats que vous escomptez.

Pourquoi, à ce moment-là, la formule des passerelles entre le diplôme d'études professionnelles, le diplôme d'études collégiales et, éventuellement, le bac ne serait pas possible dans le système actuel? Et ce qu'on me dit, moi ? puis vous le savez parce que j'ai rencontré quand même un certain nombre de commissions scolaires aussi et d'universités: il y a actuellement des programmes qui sont en train de se bâtir et de se refaire au complet dans cette perspective-là. Et, à ce moment-là, ça donnerait les mêmes résultats que vous souhaitez sans avoir à restructurer le système. Ça, c'est une première chose.

Il y avait une autre question qui m'était venue en même temps que je vous posais... mais ça va peut-être revenir. Bon. Ah oui! L'autre question, c'est que, pour permettre quand même que le jeune, en passant par le cégep, puisse aller à l'université tout en venant d'une filière professionnelle, il reste qu'il y a une formation générale de base en mathématiques, en français, en philosophie, etc., qui devrait être préservée, et cela, votre proposition, j'imagine, le prévoit aussi, hein?

Le Président (M. Kelley): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Bien, je vais vous répondre, Mme Marois, peut-être avec une expérience personnelle, là, aussi. D'abord, les passerelles, là, actuellement, elles sont souvent tributaires des individus, des gens, des organisations en place, qui se parlent, qui travaillent puis qui veulent faire évoluer leur région, leur... Ils voient les avantages aussi communs. Mais c'est lent, hein? Ça fait combien de temps qu'on en parle?

Mme Marois: ...quelques années, disons.

Une voix: Huit ans.

M. Morel (Réjean): Il me dit huit, mais, moi, je pense que... J'ai été au ministère longtemps, je dirais peut-être 15 ans qu'on en parle, des passerelles puis d'une continuité...

Mme Marois: De façon, disons, plus systématique, là, au tournant des années 1995, 1996, hein, mais...

M. Morel (Réjean): Oui. Mais M. Ryan, je me souviens, en 1985, nous parlait de ça, de la réforme de la formation professionnelle. Et, je dirais, malgré ces passerelles-là... ont même fourni des batailles, les parents ? j'en suis, là ? pour faire reconnaître des cours pour nos jeunes. J'ai un jeune qui a fait son D.E.P. en foresterie, qui veut aller en foresterie au cégep. Là, il faut recommencer des cours. Ces cours-là sont donnés non pas par le secondaire, qu'il lui manque, mais par le collégial. Alors, les coûts ne sont pas les mêmes. Là, l'université lui offre d'essayer ces cours-là aussi, au niveau universitaire, de rattrapage, mais ils sont de niveau cégep. C'est une question de clientèle, hein? Plus on a les clientèles longtemps...

n (11 h 10) n

Et c'est compliqué les cours... On recommence... Par exemple, prenez en commerce et secrétariat, cours de comptabilité, là, hein, actif, passif, là, au secondaire on l'enseigne, au collégial on enseigne les mêmes cours puis à l'université on l'enseigne, puis des fois la seule différence, c'est que le livre est en anglais, tu sais. Mais c'est à peu près ça, tu sais. Combien d'exemples qu'on m'a donnés de cours qui sont les mêmes, qu'on reprend, qu'on réussit un petit peu à déboguer par le fait qu'on fait des passerelles? Mais je vous dis que c'est ténu, c'est lent, c'est relié à des individus. Ça va prendre une pression énorme, gouvernementale.

Au ministère, on a fait l'impossible, on a mis les deux secteurs ensemble sous la responsabilité d'un même sous-ministre adjoint depuis plusieurs années, et ça n'a pas donné de résultats, je pense, prévus non plus là-dedans. Chaque ministre de l'Éducation arrive avec son programme, avec les mêmes promesses, les mêmes intentions nobles, mais on se butte à une machine, parce que les machines, c'est des organisations.

On est en baisse de clientèle, et tout le monde court après les élèves parce qu'on est dans un financement basé sur les clientèles. C'est humain, on essaie de les garder plus longtemps, tu sais. On fait accroire qu'un D.E.C. est aussi bon qu'un bac en foresterie, par exemple. Ce n'est pas la même chose, là, tu sais, mais on essaie, chacun, au niveau de l'orientation scolaire... Tout le monde a sa propre organisation au niveau de l'orientation mais bien sûr tente de l'orienter vers son secteur d'activité, vers ses programmes qu'il donne, au détriment de l'élève. Et c'est là qu'il se fait un va-et-vient puis qu'il... essai-erreur, un peu, puis il retourne... Alors, je vous avouerai qu'on n'y croit pas beaucoup, aux passerelles. C'est des acquis, c'est ce qu'on peut... on a gagné, mais c'est des acquis, je vous dirais, très ténus. C'est fragile, ce n'est pas systémique, ce n'est pas musclé.

Mme Marois: Le président me dit que j'ai encore une minute... Non?

Le Président (M. Kelley): Non...

Mme Marois: Je vais... 16 secondes, me dit-il. Mais, moi, je... Bon. Je comprends, vous avez raison, puis on a constaté tous ça, là, dans le champ et la façon dont ça se passe. Mais, s'il y avait une volonté suffisamment ferme au plan des orientations politiques pour dire: Programme par programme, nous demandons à ce qu'il y ait des intégrations qui se fassent et à ce qu'il y ait... à ce qu'on bâtisse, un peu comme on l'a fait au niveau des sciences infirmières... Je pense que ça, c'est un succès. Évidemment, ça passe de... c'est moins le professionnel qui est concerné dans le cas présent, là, c'est le cégep technique et l'université. Mais, si on disait: On s'oblige à le faire, et il y a donc une obligation de résultat, à ce moment-là ça ne reposerait pas sur la volonté de l'un ou de l'autre, dans sa région, qui aime, qui aime pas, qui veut garder ses jeunes plus longtemps parce qu'il est payé à la tête de pipe, etc.

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): C'est pour ça, M. le Président, que notre proposition d'avoir une seule ? et une seule ? organisation qui chapeaute le tout, à ce moment-là il n'y a pas de chicane et de guerre entre chacune des organisations, c'est la même organisation, et avec une obligation de résultat. On peut convenir de ça très facilement, qu'il y a autant de jeunes en formation générale qu'en formation professionnelle, qu'en formation technique. À ce moment-là, la clientèle est dans la même organisation.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Bonjour. Merci d'être là. Moi, j'aimerais... En continuité avec la fluidité du système d'éducation que vous préconisez, là, j'aurais une question à double volet. Le premier volet de ma question, c'est: j'aimerais vous entendre sur l'affirmation que vous faites qui dit qu'en intégrant les ordres d'enseignement collégial aux deux ordres d'enseignement universitaire et secondaire, là il y aurait des économies réelles de générées. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Et j'aimerais vous entendre, en continuité avec la proposition de ma collègue la députée de Taillon: Est-ce que ce serait possible que le collégial conserve une partie de la formation professionnelle? Et comment vous voyez la situation que vous proposez, là, par rapport à ce qui se véhicule ou ce qui se vit en Amérique du Nord?

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Je vais débuter la réponse et je demanderai à M. Morel de compléter. D'abord, sur une sixième secondaire, c'est qu'on s'arrime avec le reste de la planète. Donc, il y a une 12e année, ce qui existe ailleurs en Amérique du Nord et, je pense, partout dans le monde. Il y a même certaines provinces, certains pays qui ont diminué de 13 à 12 ans. Donc, là-dessus, je pense qu'on est en harmonie. Et, au niveau des économies, bien c'est sûr que, si la même organisation fait la sixième secondaire, il y a des chances d'avoir des économies d'échelle.

Aussi, au niveau sociologique, pour avoir discuté avec quelqu'un, un sociologue de réputation au Québec, il me disait qu'aussitôt qu'il y a une marche à sauter ou un système à changer il y a un risque de perdre de la clientèle parce qu'il y a un choix à faire, tandis que, s'il y a une sixième secondaire, il n'y a pas de choix à faire. Donc, il y a deux alternatives.

Au niveau de l'autre modèle canadien sur la formation professionnelle et technique, ça revient à la fluidité et à la concordance de la même organisation. Ça veut dire qu'il n'y a pas de bataille de clientèle, et notamment en région, pour garder la clientèle chez eux au lieu d'avoir la propension de l'envoyer dans l'autre réseau en ayant la même organisation. Mais, là-dessus, je laisserais M. Morel peut-être compléter la réponse.

Le Président (M. Kelley): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Au niveau économique, d'abord toute la base, là... Vous savez, quand on a analysé les coûts de l'éducation, tout ça est parti, là... on s'est fait dire, à plusieurs reprises, quand on venait en commission parlementaire, au niveau des finances, par plusieurs ministres des Finances ? il y a rien que Mme Marois qui ne nous l'a pas dit parce qu'on n'a pas eu le temps de la rencontrer en commission parlementaire ? c'est: Pourquoi, M. Caron, vous chialez, vous demandez plus d'argent? On met plus d'argent au Québec que le reste du Canada, que l'Ontario. On s'est fait dire ça depuis plusieurs années à toutes les fois, puis on était tanné de se faire dire ça. On a dit: Bien, on va toujours bien aller voir c'est-u vrai si on en met plus, puis pourquoi, et qui est coupable, hein? C'est ça qu'on est allé voir.

Mme Gaudet: Vous répondez à tout ça, là?

M. Morel (Réjean): Oui, c'est ça. Alors, on est allé voir ça, on a dit: Oui... La réponse de notre expert nous a dit oui, on en met plus. Au départ, quand on regarde les chiffres vérifiés par le gouvernement, c'est apeurant, on dit: On met 2,5 milliards de plus quand on regarde ça par rapport au PIB. Là, on est dans le trouble, hein, on va changer notre cassette de revendications financières, n'est-ce pas, hein, 2,5 milliards. Mais là, quand on pondère ça avec la péréquation, notre capacité de payer, en somme, puis avec ce qu'on appelle le salaire hebdomadaire... Tu sais, quand on dit, par exemple... quand on compare d'ailleurs au niveau universitaire les per capita au niveau des élèves, si je fais des liens, bien, à Victoria en Colombie-Britannique, à Vancouver, le coût de la vie n'est pas le même qu'à Québec. Donc, il faut voir que, quand on compare les coûts par élève, il faut aussi pondérer ça. Alors, on a aussi modulé nos montants par élève en fonction du salaire hebdomadaire moyen payé dans chacune des provinces canadiennes à partir des données de Statistique Canada. Et, quand on dégraisse ça, on arrive à 1,3 milliard de coûts excédentaires. Ce n'est quand même pas mineur, mais 1,3 milliard.

On dit maintenant: Quel réseau fait que ça lui coûte plus cher? Nous, on dit... Au primaire, secondaire, on nous dit: Bien, c'est 300 millions de plus environ, puis une des raisons qui nous sautent aux yeux, c'est le rapport éducateur-élèves au Québec, où il est plus généreux que dans les autres provinces. Éducateur, ce n'est pas seulement enseignant, là, mais c'est aussi... Mais il faudrait dire aussi qu'on dépense 300 millions en services de garde dans les commissions scolaires et qu'on ne retrouve pas dans les autres provinces. Donc, on a deux éléments qui nous expliquent, qui pourraient nous expliquer nos coûts excédentaires au primaire et secondaire.

Et vous savez que, si ça nous coûte plus cher, il y a deux raisons: soit que le coût de formation nous coûte plus cher, ou qu'il y a trop d'élèves dans le système ou ils restent trop longtemps dans le système. Alors, c'est l'autre raison. Quand on regarde au niveau secondaire, un élève qui obtient un diplôme d'études secondaires prend en moyenne 11,2 années sur 11 ans pour obtenir son diplôme d'études secondaires. Au collégial, au secondaire général, c'est 2,4 années pour deux ans. Puis, en professionnel, c'est 3,8 années, et le taux de réussite est de 25 %. D'ailleurs, le taux de réussite est tellement bas que le ministère, dans ses statistiques, ne parle plus de trois ans maintenant, parle... ne parle plus d'années. Donc, là on réussit à avoir un taux respectable, autour de 58 %.

Alors, c'est pour ça que... Cette durée de formation là excédentaire, on estime que ça coûte 600 millions. Alors, on pense qu'en faisant un secondaire général, une sixième année, une année de plus ? notre taux est 11,2 sur 11, pas si pire ? on va avoir des économies là. Puis on pense qu'aussi, avec l'effet de ralentissement dans le réseau, un passage au collégial, l'économie de la durée de formation technique, si nos élèves sont mieux orientés avec une seule organisation, on va aussi faire des économies là, au-delà des économies de gestion, qu'eux autres sont très rapides et directes. C'est un peu ça qui nous fait... Bien, avant de revendiquer des sous supplémentaires, tout le monde voudrait revendiquer des sous supplémentaires, bien on va regarder avant, dans le cadre de la réingénierie ou modernisation, peu importe le terme qu'on peut appliquer de réorganisation, où on devra faire des propositions au gouvernement.

Mme Gaudet: Puis le fait que vous proposez que la formation professionnelle relève des commissions scolaires, n'y aurait-il pas lieu que le collégial prenne une partie de cette formation professionnelle pour se rapprocher un peu de ce qui se passe en Amérique du Nord?

n (11 h 20) n

M. Morel (Réjean): C'est une autre hypothèse qui a été analysée, ça. Le modèle canadien est un modèle où on retrouve un secondaire VI, une année de plus au baccalauréat universitaire, parce que là on parle d'université, mais on a aussi ce qu'on appelle les «community colleges», donc des collèges de formation professionnelle et technique et indépendants. Mais, nous, on pense que, si on a un réseau indépendant, c'est qu'on n'améliorera pas notre performance. Parce que quelle propension vont avoir les écoles secondaires d'envoyer leurs élèves en formation professionnelle et technique, hein? Ils vont essayer de les conserver le plus possible. Parce qu'on est financé sur une base per capita, on va essayer de les garder le plus possible dans nos écoles secondaires, puis au prix de les faire redoubler puis essayer de les emmener à l'université. Parce qu'on les perd, sans ça, en termes de financement.

Déjà, on a des problèmes de même dans nos commissions scolaires, il faut intervenir dans des programmes musclés pour un peu forcer nos directeurs de polyvalentes, d'écoles secondaires à réorienter nos jeunes dans la formation professionnelle. Déjà, on des problèmes à l'intérieur d'une même organisation, il faut faire des programmes puis des plans stratégiques reliés à ça.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Chauveau, il vous reste trois minutes.

Mme Perreault: Oui. Alors, merci à vous d'être ici. Dans le même ordre d'idées, à la lecture de votre mémoire, ce que je comprends ? ou, si je me trompe, vous me le direz ? c'est que tous les intervenants qu'on a rencontrés ici se sont entendus sur le fait que les universités étaient sous-financées. Dans votre mémoire, vous le mettez beaucoup en parallèle avec l'organisationnel. Je vous cite ici, vous dites: «Or, à cet égard, non seulement le système d'éducation coûte relativement cher ? vous le comparez avec à l'extérieur du Québec, avec des comparaisons, mais vous dites également ? les résultats au plan de la qualification de la main-d'oeuvre sont globalement insatisfaisants.»

Est-ce qu'on doit comprendre de ça que vous n'êtes pas d'accord... ou en tout cas je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais que, pour un réinvestissement dans les universités, vous voudriez peut-être qu'on refasse l'ensemble de l'analyse ou... Je veux vous entendre là-dessus.

Puis, en deuxième volet, parce que j'ai très peu de temps, bien c'est quoi, votre position sur l'augmentation des frais de scolarité? Vous englobez tout ça ensemble ou... Parce que ce n'est pas... Vous n'admettez pas finalement... À mots couverts, vous admettez, mais vous n'êtes pas clairs sur la situation financière des universités.

Le Président (M. Kelley): Une question à deux volets. M. Caron.

M. Caron (André): Dans un premier temps, il faudrait plutôt dire qu'on n'est pas convaincu. On n'est pas convaincu qu'il y a un sous-financement, et le rapport Bédard en fait la démonstration, entre autres, que, toutes choses étant égales ? quand on a normalisé les données statistiques du gouvernement du Canada, et du Québec, et du ministère de l'Éducation ? on met la même proportion d'argent au niveau universitaire. Donc, c'est pour ça qu'on dit: On n'est pas convaincu. Et probablement que, s'il y avait une commission parlementaire sur le sous-financement du réseau primaire et secondaire, les universités ne seraient pas convaincues, et on pourrait faire la démonstration demain matin qu'on est sous-financé dans le même ordre de grandeur et peut-être trois fois plus que les universités peuvent le démontrer. Donc, là-dessus, on a une petite réserve.

Sur le deuxième volet, vous me rappelez votre question, je l'ai échappée.

Mme Perreault: Bien, je vous parlais des frais... de l'augmentation des frais de scolarité ou...

M. Caron (André): Frais de scolarité.

Mme Perreault: Ce serait quoi, votre position là-dessus?

M. Caron (André): C'est que, nous, là-dessus, avec les chiffres qu'on voit et surtout toutes les données du document de consultation, on dit: Il ne faut pas juste regarder ça, il faut regarder l'ensemble du réseau, et non en silo, des frais de scolarité. Ça fait partie de... ne pas regarder tout simplement un réseau. Tout ce qu'on peut constater, c'est les chiffres qui parlent, c'est qu'on est à la moitié de la moyenne canadienne et que le gouvernement par conséquent doit mettre plus d'argent dans les enveloppes de base des universités parce que les droits de scolarité sont plus bas. Donc, est-ce que c'est encore tolérable? Je ne réponds pas à la question.

Le Président (M. Kelley): Alors, le bloc pour le parti à ma droite est épuisé. Je vais passer la parole à ma gauche. M. le député de Beauce-Nord et, après, Mme la députée de Champlain.

M. Grondin: Alors, moi, ça va être une réflexion qu'on a souvent en région. Présentement, les commissions scolaires ou les cégeps, même au secondaire, on veut essayer, là... Comme on parle souvent des jeunes garçons, le taux de diplomation des jeunes garçons est plus bas que les filles, puis tout ça, mais on ne fait pas une erreur en voulant essayer de garder nos jeunes garçons à l'école? Mettons, là, vous parlez même d'un secondaire VI. Quand les jeunes, là... Ça se voit beaucoup en tout cas en région, et j'imagine qu'à Montréal ça doit être la même affaire, rendus en secondaire III, secondaire IV, les jeunes, là, ils ont envie d'aller travailler, ils ont envie d'apprendre un métier. On essaie peut-être de faire tous des médecins ou bien des avocats quand ils ne veulent pas le faire. Vous parliez tantôt qu'un plombier... Un plombier, aujourd'hui, là, en 2004, là, il gagne aussi cher qu'un député, hein? Il ne faut pas vous stresser avec ça.

Une voix: Au Québec, pas au fédéral.

Le Président (M. Kelley): ...ça qu'il dit au fisc. Ha, ha, ha!

M. Grondin: Bien, moi, je trouve que, rendus dans le secondaire III, secondaire IV, si on pouvait orienter nos jeunes qui veulent aller dans des métiers de construction, électricien, plombier, menuisier, je suis certain que le taux de décrochage serait beaucoup plus bas qu'on vit à l'heure actuelle. Les jeunes, ils ont compris le système, eux autres, là, là. Quand ils sont rendus en secondaire IV, puis ils veulent faire ce métier-là, puis l'école dit: Non, tu vas continuer jusqu'en secondaire V, ils sacrent leur camp chez eux. Là, ils se mettent sur le marché du travail un an de temps. Après ça, ils s'en vont dans un centre local d'emploi et ils se font réintégrer en formation professionnelle. Mais pourquoi que la commission scolaire ou le ministère de l'Éducation ne les oriente pas tout de suite, en secondaire III, secondaire IV, dans une formation professionnelle où le jeune se sent bien? De toute façon, il va y aller pareil. C'est juste...

Le Président (M. Kelley): M. Morel.

M. Morel (Réjean): Je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'ensemble de votre question. C'est que, dès le secondaire III, là, on commence de plus en plus à faire ce qu'on appelle de l'exploration, dans les commissions scolaires. Donc, les jeunes vont voir des métiers. Et, même là, avec la réforme, on a introduit ce qu'on appelle l'école orientante. Dès le primaire VI maintenant, on prend les jeunes à l'école primaire puis on les fait visiter des ateliers, visiter des industries, des entreprises pour les amener de plus en plus à ça.

Mais l'embûche qu'on a, M. Caron tantôt l'a signalé, c'est les parents actuellement. De plus en plus, il faut travailler sur les parents, la perception que la formation professionnelle, c'est comme terminal. Donc, un jeune qui s'en va en formation professionnelle, ce n'est pas ça qu'ils voulaient pour leur jeune. Puis je peux vous en parler personnellement, tu sais. Et on est un peu à nos tripes, là, quand on a travaillé fort dans notre vie, puis on dit: Bien, mon jeune, tu vas devenir plombier, il me semble que je te voyais, comme vous dites, avocat, médecin ou, pire, député. Alors...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Quelqu'un doit le faire, alors... Ha, ha, ha!

M. Morel (Réjean): Alors... Mais aussi, dès le secondaire IV, maintenant... Avec la réforme aussi, au secondaire IV, un jeune peut aller en formation professionnelle. Même, ça commence même en... Il y a beaucoup de ce qu'on appelle la concomitance de plus en plus. Mais il faut que ce soit la même organisation qui s'occupe de ça, là. Mais le seul sujet, c'est la valorisation. On fait des gains, mais c'est valoriser ces métiers-là. Puis il faut dire: Si, plus tard, je veux poursuivre pour devenir technicien ou devenir professionnel, je vais être capable sans tout recommencer mes préalables puis reprendre un ou deux ans, de tout chercher mes cours de base, mais de pouvoir poursuivre dans mon cheminement. C'est...

Mais aussi il faut jouer beaucoup sur l'orientation scolaire. On se fait reprocher... Et, on le fait à tous les niveaux, hein, les collèges nous disent: Ils nous arrivent mal orientés. Les universités disent aux collèges: Ils nous arrivent mal orientés. Tout le monde, on se dit ça, les uns les autres. Bien, il faut vraiment qu'on ait justement un service d'orientation scolaire qui commence... Ça ne commence pas rien que par, je dirais, des conseillers puis des professionnels, mais par des... ce qu'on appelle de l'immersion de l'école orientante, des gens où on va sur le terrain voir ce que les gens font.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Champlain, il vous reste quatre minutes.

Mme Champagne: Quatre minutes, je vais essayer de partager ça avec mon collègue. Ce n'est pas évident, hein? Alors, bonjour à vous tous. Bienvenue.

Écoutez, là, si le rapport Bédard nous permet d'avoir cette discussion-là aujourd'hui, bien ça va être sain en soi tant qu'à moi, parce que, oui, on a des problématiques. Vous faites même le constat que, en 1999, il a été observé que, parmi la clientèle de formation professionnelle au secondaire, un étudiant sur deux avait fréquenté un cégep avant de revenir à la formation professionnelle. Et, moi, ce qui m'inquiète, c'est le taux d'échec terrible au niveau collégial. Par contre, ça m'inquiète également de garder les étudiants au niveau secondaire. Il y a toute une question de mentalité et d'approche, et je comprends bien également que, quand un parent voit son jeune de niveau secondaire III vouloir se lancer dans une profession, il le voyait effectivement universitaire et plus, peut-être même député effectivement.

Donc, ce que je vous dis, c'est que le rapport Bédard, que j'ai lu intégralement, avec vos recommandations sont en lien direct avec un besoin de revoir l'orientation de nos jeunes. Qu'elle soit faite dans une sixième secondaire, cette orientation-là, comme enseignante de niveau secondaire, il y a un vice de forme là définitivement, et ça cause un problème important. Nos jeunes se plantent en collégial I de façon majeure parce qu'ils sont mal orientés. Ça peut parfois les amener à faire de meilleurs choix plus tard, mais le danger de l'échec est toujours là.

Alors, ma question: Quand on dit que nos jeunes passent du secondaire au collégial, reviennent au professionnel, vous vous êtes basé sur quoi pour avoir... ou en venir à ces données-là? Et, quand vous dites également que, selon le Conseil permanent de la jeunesse, l'école secondaire deviendrait le port d'attache d'un jeune, est-ce que c'est réaliste de penser qu'on va passer du secondaire à l'université sans étape entre les deux? C'est tous des questionnements que j'ai aujourd'hui.

Le Président (M. Kelley): M. Caron.

M. Caron (André): Sur le premier volet de votre question, c'est des statistiques du ministère de l'Éducation qu'on... Tous les chiffres que vous voyez dans le rapport Bédard, c'est des statistiques soit du gouvernement du Canada ou des indicateurs du ministère de l'Éducation. On n'a rien inventé, et ces indicateurs-là nous permettent de faire ces conclusions-là. L'autre aspect, M. Morel.

Le Président (M. Kelley): M. Morel.

n(11 h 30)n

M. Morel (Réjean): Au niveau de l'orientation, là, ce que je pourrais vous dire, c'est qu'actuellement il y a plusieurs organisations qui font de l'orientation scolaire. Et, si vous prenez quelqu'un, par exemple, qui est un accidenté, qui veut revenir à l'école, bon, il va aller au CLE, il va aller au carrefour jeunesse-emploi? Non, tu es trop âgé pour ça. Au CLE? Non, tu n'es pas sur l'aide sociale. À la commission scolaire? Non, tu as un diplôme d'études secondaires. Tu vas au collégial? Non, tu as un diplôme de... tu n'es pas dans la clientèle. Il se promène. On en voit plusieurs qui nous appellent, à la fédération, à un moment donné: Dans quelle commission scolaire je pourrais être...

On s'est dit: S'il y avait un point de chute quelque part pour réunir toutes ces forces-là d'orientation à un seul endroit. Qu'il arrive de quoi, tu travailles, tu veux te réorienter, il t'est arrivé un pépin dans la vie, tu veux t'orienter, où vas-tu pour avoir des services... puis qui est capable de te donner vraiment par rapport à tes besoins? Actuellement, il y en a plusieurs qui offrent ces services-là avec des ressources plus ou moins limitées, donc sous le bras, je dirais, et avec des résultats comme on connaît, hein? Alors, les gens font du va-et-vient puis de l'essai-erreur, je dirais, dans leur carrière.

Le Président (M. Kelley): Alors, merci beaucoup, M. Caron, Mme Visser, pour cet échange. J'espère que je ne suis pas dans l'eau trouble, parce que j'ai deux filles au secondaire, et, si j'annonce ce soir qu'il y aura un secondaire VI, pas certain que papa va être trop populaire. Mais ça, c'est quelque chose qu'on va regarder.

Alors, sur ce, je vais suspendre nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 31)

 

(Reprise à 11 h 35)

Le Président (M. Kelley): Je demande aux membres de la commission de, s'il vous plaît, prendre place, et j'invite les représentants de l'Université de Sherbrooke à s'approcher, s'il vous plaît.

Alors, bienvenue, M. Béchard. Avec un premier ministre issu de votre institution, un ministre de l'Éducation qui est un ancien recteur, on pense souvent à l'Université de Sherbrooke. Alors, bienvenue parmi nous. Et maintenant la parole est à vous.

Université de Sherbrooke (US)

M. Béchard (Bruno-Marie): Merci, M. le Président. M. le ministre, est-ce que ça se bouge, ça? Non, ça ne se bouge pas. Alors, est-ce que vous m'entendez bien comme ça? Oui?

Des voix: Très bien.

M. Béchard (Bruno-Marie): Excellent. Alors, M. le Président, M. le ministre, chers membres de la commission, d'abord j'aimerais vous présenter les personnes qui composent la délégation de l'Université de Sherbrooke. Alors, je vous les présente dans cet ordre-ci, allons-y du bout: M. Alain St-Jacques, qui est président du Regroupement étudiant aux cycles supérieurs chez nous, qui s'appelle le REMDUS; M. Denis Marceau, qui est vice-recteur à l'enseignement; M. Martin Tremblay, président de la Fédération étudiante de premier cycle à l'Université de Sherbrooke, qu'on appelle la FEUS; et M. Bernard Chaput, qui est doyen de la Faculté des lettres et sciences humaines. Alors, on a pensé que l'université qui vous rencontre doit être représentée par ses composantes essentielles. Alors, c'est pour ça qu'on a composé la délégation de cette façon-ci.

Je dois vous dire d'abord que l'Université de Sherbrooke est extrêmement heureuse de rencontrer la commission à l'occasion, vous le savez peut-être, de notre 50e anniversaire. Alors, ces jours-ci, on célèbre les 50 ans de l'Université de Sherbrooke, une université toute jeune et toute dynamique comme vous la connaissez, et vous savez que le thème de notre 50e anniversaire, c'est L'audace porte fruit. Alors, il me semble que ça nous colle assez bien à la peau.

Alors, évidemment, nous sommes très fiers de l'Université de Sherbrooke, et je peux vous assurer que toute la communauté universitaire travaille d'arrache-pied à ce que l'Université de Sherbrooke soit une source de fierté pour l'ensemble du Québec. En fait, nous sommes fiers, et pour cause, je devrais dire, nous considérons que l'Université de Sherbrooke est finalement un «success story» dans le monde universitaire mondial, et une si jeune université, d'à peine 50 ans donc, qui déjà contribue très activement au développement social, culturel et économique du Québec, qui contribue à faire rayonner le Québec partout sur la planète et qui déjà se mérite des reconnaissances et une réputation extrêmement enviables qui normalement seraient dévolues à des institutions d'âge bien plus vénérable que la nôtre. Et simplement j'attire votre attention sur quelques reconnaissances ou réalisations qui sont vraiment d'ordre très exceptionnel, hors de l'ordinaire, pour stimuler chez vous cette fierté qui est la nôtre.

Vous le savez, le Globe and Mail publie, depuis deux ans maintenant, une évaluation de l'ensemble des universités canadiennes à travers les yeux des étudiants canadiens. Et vous vous souvenez peut-être que, dans sa dernière édition, à l'automne, l'Université de Sherbrooke reçoit la meilleure cote des universités canadiennes. Alors, c'est peu banal. Vous savez aussi que l'Organisation mondiale de la santé a reconnu la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke comme centre collaborateur de l'OMS en reconnaissance de la qualité exceptionnelle de l'enseignement médical qu'on y prodigue. Et vous savez peut-être que cette Faculté de médecine, cette reconnaissance, bien c'est la seule Faculté de médecine au Canada et la seule Faculté de médecine dans le monde francophone qui a reçu une telle reconnaissance de l'Organisation mondiale de la santé. Alors, il faut le faire. Dans d'autres domaines, l'association internationale dans le domaine de la finance reconnaît que notre Faculté d'administration est l'une des trois meilleures écoles de finance au monde.

n(11 h 40)n

En termes de l'étendue de nos activités, nous avons à coeur de desservir les besoins de la population là où ils sont, et vous savez peut-être que l'Université de Sherbrooke est régulièrement active dans plus de 50 villes au Québec et même régulièrement dans plus de 20 villes ailleurs dans le monde.

Évidemment, l'Université de Sherbrooke, depuis sa naissance, défie toutes prédictions démographiques. On parle de dénatalité au Québec. On parle de dénatalité de façon toute particulière dans les régions. Eh bien, à l'Université de Sherbrooke, qui attire, comme vous le savez, 80 % de sa population étudiante de toutes les autres régions du Québec et aussi évidemment de l'étranger, mais de toutes les régions du Québec, nous connaissons un pouvoir d'attraction en très, très forte croissance.

Simplement pour illustrer la chose, cette année, alors qu'on prédit... Lorsqu'on regarde la démographie qui s'applique aux sources de nos populations étudiantes, on nous prédisait une chute de clientèle substantielle. Eh bien, tout au contraire, nos demandes d'admission ont progressé de 20 % au baccalauréat, de 30 % à la maîtrise et, tenez-vous bien, de 100 % de croissance, en un an, de nos demandes d'admission au doctorat chez nous. Alors, nous, les problèmes de dénatalité, tout ça évidemment on sera bien mal placés pour éclairer la commission sur ces éléments, parce que, en fait, à cet égard, comme on se fait plaisir à le dire dans Le Devoir, «l'Université de Sherbrooke est sur une autre planète».

Vous savez aussi ? et je termine là-dessus ? que notre performance exceptionnelle en termes de valorisation de la recherche, qui amène d'ailleurs le gouvernement fédéral à braquer les yeux sur nous pour tenter de stimuler la valorisation de la recherche ailleurs, dans d'autres régions du pays... Et, là-dessus, il faut savoir que l'Université de Sherbrooke a le plus fort taux de redevance sur ses inventions de toute université de l'Amérique. Alors, ça non plus, ce n'est pas banal comme performance.

Donc, je vous ai mentionné ces éléments non pas pour simplement se vanter, l'Université de Sherbrooke, mais plutôt pour qu'on réalise ensemble qu'une université aussi jeune qui a déjà des réalisations aussi exceptionnelles, bien c'est effectivement un joyau collectif et un joyau qui a des retombées extrêmement importantes sur la vitalité du développement québécois.

L'Université de Sherbrooke, c'est une de ses marques de commerce d'ailleurs, a toujours tenu à contribuer de façon diversifiée, complémentaire, différente donc de ce qui se fait dans les autres universités. Pas parce que ce qui se fait dans les autres universités, ce n'est pas intéressant, parce qu'on cherche à faire autrement, à sortir des sentiers battus, et on s'est organisés et on se plaît à le faire.

Et je voudrais insister sur cet élément parce que, à l'Université de Sherbrooke, on croit fermement que la diversité de l'ensemble des universités du Québec, c'est une des plus grandes richesses que détient le Québec dans ce contexte d'économie mondiale et de société du savoir. Nous avons eu la sagesse, au Québec, de laisser libre cours aux institutions universitaires de développer des personnalités différentes et des contributions de styles différents à la société. Et, grâce à ça, je pense que nous sommes en mesure d'offrir aux nouvelle générations et à nos descendants une variété de programmes universitaires, une variété d'approches universitaires pour rejoindre les aspirations très différentes, évidemment, chez les jeunes. Et nous continuerons, avec votre appui, à se démarquer, à faire autrement, à innover et à tenter, de toutes nos forces, d'être à la toute avant-garde de ce qui se fait dans le monde universitaire.

Donc, dans ce sens-là, vous comprendrez que, chez nous, bien que l'université soit une université localisée en région, nous avons comme territoire non pas notre région d'attache principale, mais notre territoire, finalement c'est le monde. Notre territoire, en fait c'est les nouveautés, les innovations, les programmes qui sont les nôtres et que nous tentons de rendre aussi complémentaires et différents que possible de ce qui se fait ailleurs.

Dans le contexte actuel, nous avons, vous le savez, traversé une première phase de réinvestissement universitaire, un effort courageux fait par le gouvernement du Québec pour réinvestir massivement dans ses universités. Le Québec, que ce soit son gouvernement, ses élus de façon générale ou la population de façon encore plus générale, prend de plus en plus conscience évidemment que la compétence de haut niveau et l'avancée des connaissances de haut niveau sont des clés déterminantes pour situer le Québec dans le grand échiquier mondial. Et, dans ce sens-là donc, le gouvernement du Québec a eu la sagesse d'enclencher le pas vers un réinvestissement massif dans ses universités, des universités qui, lorsqu'on les compare avec les universités à l'échelle mondiale, jouissent... font preuve d'une performance assez remarquable.

Cette première phase nous a permis de donner un coup de barre majeur dans l'embauche. Vous savez qu'on a, à l'Université de Sherbrooke, embauché 600 personnes en quatre ans, et, là-dessus, un peu plus de la moitié... ou en fait près de la moitié, ce sont des embauches professorales. Alors, quel instrument extraordinaire pour le Québec que de donner les moyens aux universités d'importer les cerveaux les plus prometteurs et avec les plus grands potentiels d'un peu partout dans le monde!

On a embauché déjà, écoutez, autant des Québécoises et des Québécois qui s'étaient expatriés vers la Californie, vers la Suisse, etc., on les a rapatriés. On a aussi importé ? si vous me permettez le terme ? des cerveaux de toute la francophonie et même de zones non francophones du monde mais, à tout le moins, francophiles. Donc, on ne parle plus, depuis plusieurs années, d'exode des cerveaux, à l'Université de Sherbrooke ? parce que ça a déjà été le cas ? on parle plutôt d'«inode» des cerveaux. On rapatrie, au Québec, les cerveaux qui vont nous permettre de nous distinguer comme société et de faire progresser sur tous ces plans, donc ? et je me répète là-dessus ? autant sur le plan social, culturel, qu'économique. Et donc le prochain défi qui se présente à nous, c'est évidemment de poursuivre cette lancée pour donner aux universités les moyens de continuer à importer les meilleurs éléments de la planète et les faire contribuer à l'avancement de la société chez nous.

Sur le financement des universités, il y a effectivement un premier effort déjà réalisé de la part du gouvernement. Il y a aussi les efforts que nous faisons de notre côté pour nous donner les moyens qu'il faut pour réaliser nos missions. Et, là-dessus, je tiens à souligner non seulement les efforts, mais les résultats remarquables. L'Université de Sherbrooke déjà mène, actuellement, en fait sa cinquième campagne majeure de financement. Et la dernière campagne majeure qui a été menée à l'université, il faut savoir que, parmi les universités québécoises, en toute proportion évidemment de leur taille, l'Université de Sherbrooke a connu le plus grand succès de levée de fonds.

Et on explique ce succès en partie évidemment probablement par la relation privilégiée que l'Université de Sherbrooke a développée à travers le régime coopératif d'alternance d'études et de stage en milieu d'emploi, qui nous a permis évidemment de se brancher, de se connecter et d'être en relation régulière avec pratiquement toutes les organisations de plus de 50 employés au Québec. Alors, pratiquement toutes les organisations de plus de 50 employés au Québec accueillent régulièrement des stagiaires de l'Université de Sherbrooke. Donc, cette relation privilégiée nous a servis dans les campagnes majeures de financement. Évidemment, on n'est pas encore à la hauteur du soutien philanthropique dont jouissent les institutions anglo-saxonnes, il y a encore du chemin à faire là-dessus, mais un progrès remarquable.

Et, juste comme point de référence, à la dernière campagne majeure, simplement de l'interne, donc, le soutien de la communauté universitaire s'élevait à 3,4 millions de dollars. Et on vient juste de terminer cette phase dans la nouvelle campagne que nous menons. Et on a amassé, chez nos gens, 5,5 millions de dollars. C'est quelque chose. Je pense que ça peut démontrer à quel point non seulement on fait notre propre effort, mais, nous-mêmes, personnellement, les membres de la communauté universitaire, on y contribue et de façon vraiment remarquable.

n(11 h 50)n

L'autre aspect de... l'autre source de financement qui est sous notre responsabilité et qu'on tient à développer de toutes nos forces, c'est les retombées évidemment de nos activités de recherche, donc la valorisation des découvertes, des inventions faites par notre corps professoral et aussi notre corps étudiant. Là-dessus, je vous disais tantôt que nous avons le plus fort taux de redevance sur nos inventions de toute l'Amérique, mais ce que ça veut dire concrètement, c'est des millions de dollars, en fait des dizaines de millions de dollars qui, chaque année, sont réinvestis à l'Université de Sherbrooke dans nos activités de recherche et qui représentent finalement les redevances les plus importantes que reçoive quelque institution universitaire que ce soit au Canada, et ça, en valeur absolue, là, indépendamment de la taille. Donc, c'est quand même assez percutant de savoir que l'Université de Sherbrooke reçoit, chaque année, plus de redevances sur ses inventions que la gigantesque Université de Toronto. C'est quand même assez percutant.

Donc, c'est une autre source qu'on a voulu développer depuis déjà un bon bout de temps et qui fait qu'on fait notre part dans le financement de l'activité universitaire. Évidemment, il y a toute la recherche contractuelle qui est très développée à l'Université de Sherbrooke, donc qui amène des fonds d'autres natures qui s'ajoutent aux fonds... à partir d'organismes subventionnaires, là où l'Université de Sherbrooke performe aussi très bien.

En fait, et ça, je n'ai pas pris soin de le mentionner parce que j'ai pris pour acquis que vous avez lu le mémoire, mais, pour ceux et celles d'entre vous qui peut-être nous connaissez moins, il faut savoir que l'Université de Sherbrooke fait partie, si on veut, d'une espèce de classe à part, une catégorie particulière, parce que c'est la seule université complète, avec Faculté de médecine, de droit, avec forte intensité d'activités de recherche, qui est localisée en région. Alors, ça nous donne une configuration un peu particulière, et aussi des défis évidemment particuliers, et des avantages particuliers. Donc, sur les sources de financement qui sont de notre ressort, je peux assurer la commission que nous nous évertuons à faire toujours mieux et nous faisons déjà admirablement bien.

J'aimerais maintenant faire une image, avec vous, qui est un peu la perception donc de l'Université de Sherbrooke à l'égard du contexte actuel. Vous savez, les sociétés ? on n'a pas besoin de le redire mais quand même ? par l'action universitaire, donc autant du côté formation que du côté de l'avancée des connaissances, peuvent ou peuvent ne pas se distinguer sur l'échiquier mondial en fonction de l'intensité du soutien qu'on peut accorder à ces deux volets donc de la mission universitaire. Pour faire image, là, nous sommes en quelque sorte dans une course de formule 1. Nous sommes dans une course de formule 1 et on a le choix évidemment du véhicule qu'on peut utiliser. Avant la première phase de réinvestissement universitaire, j'aurais tendance même à caricaturer le Québec, les universités québécoises, comme se promenant en mobylette et puis, bon, on... Évidemment, on a progressé, on a fait des choses très intéressantes, mais avec un véhicule qui était assez limité.

La première phase du réinvestissement universitaire nous a amenés à faire des progrès extrêmement importants. Et, vous savez, tout ça s'est produit dans un contexte de contrat de performance, où on a livré la marchandise. On a tenu parole. Le gouvernement a cru en nous, a investi en nous, mais on a aussi donc progressé. On a fait progresser le Québec. Alors, maintenant je considère qu'on se promène dans une voiture ordinaire. En soi, il n'y a rien de dramatique à se promener en voiture. Mais, quand tous les autres sont dans une formule 1, il faut évidemment agir rapidement et vigoureusement parce que, en demeurant au volant d'une voiture ordinaire, chose certaine, c'est que le Grand Prix de formule 1, on le perd. Et c'est un peu évidemment à ce grand défi collectif qu'est convié le Québec.

On a beaucoup parlé, au cours des dernières semaines, des derniers mois, de l'écart de 375 millions qui existe entre le financement d'activités comparables dans le reste du Canada et dans les universités québécoises. Il faut savoir que ce 375 millions de dollars là, c'est lorsqu'on se compare à la moyenne canadienne. Là-dessus, vous me permettrez de faire une invitation à la commission. Les étudiants de l'Université de Sherbrooke ne visent pas la moyenne des notes de leur classe. L'Université de Sherbrooke, dans tout ce qu'elle fait, ne vise pas la moyenne mondiale. Le Québec a-t-il le droit de se donner comme objectif de simplement rattraper la moyenne du Canada? Moi, je nous invite à réfléchir là-dessus. Le Québec, puis ça tout le monde le reconnaît, et je me permets de le dire puisque les deux partis s'entendent là-dessus, les deux partis principaux s'entendent là-dessus, le Québec forme une société distincte. Eh bien, avons-nous les moyens de ne consacrer que la moyenne de ce qui se consacre ailleurs à l'activité universitaire lorsqu'on est une société distincte et qu'on a un rôle particulier à jouer en Amérique?

Je termine en vous laissant sur deux remarques. La première: Nous sommes profondément convaincus, à l'Université de Sherbrooke, que le Québec ne tire pas actuellement le plein potentiel de ce qu'on peut faire pour son progrès. Alors, le gouvernement, mais la population en général, ne tire pas pleinement profit du potentiel de l'Université de Sherbrooke en ce moment. Alors, la question qui se pose, ce n'est pas ce que le gouvernement doit concéder ou donner aux universités de façon générale et à l'Université de Sherbrooke de façon particulière, mais je pense qu'il faut inverser la question: Comment pouvez-vous nous permettre de contribuer davantage à l'avancement et à la distinction du Québec à travers le monde, sur la scène internationale?

Je peux vous assurer que nous sommes dévoués, équipés, compétents, performants pour le faire, il nous manque juste les moyens de le faire au moins à la hauteur des moyens dont jouissent nos voisins immédiats. Mais, je vous dirai, j'ai le goût de nous interpeller à un défi encore plus grand: Donnons-nous des moyens plus que la moyenne canadienne pour qu'on puisse s'assurer que les universités contribuent à ce que le Québec se démarque davantage encore sur la scène internationale. Nous en sommes capables, il nous manque juste les moyens pour le faire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Béchard. Hier, nous éteignions un incendie, aujourd'hui c'est la formule 1. Alors, merci pour une autre image pour alimenter la réflexion des membres de la commission. Et, sur ce, la parole est au ministre de l'Éducation.

M. Reid: Merci, M. le Président. Bienvenue à toute l'équipe de l'Université de Sherbrooke et à ses représentants étudiants.

Je constate, en écoutant la fin de la présentation du recteur, que l'Université de Sherbrooke retombe rapidement sur la planète Terre quand on parle de financement. Là-dessus, vous nous amenez à nous interroger, mais je pense qu'il faut faire tout de suite une mise au point. Le Québec ne s'attend pas à ce que ses universités dépassent les dépenses des universités à l'extérieur, le Québec s'attend à ce que les universités québécoises, comme elles l'ont fait et comme elles le font maintenant, aillent chercher les meilleures notes possibles et le sommet de la classe avec des moyens qui sont souvent un peu limités. C'est d'ailleurs intéressant, parce que c'est un exemple d'une université qui va bien, l'Université de Sherbrooke, où on va chercher des notes très fortes en ayant des étudiants qui proviennent majoritairement, plus qu'ailleurs au Québec, de classes sociales, disons, moins riches. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il est important, quand on parle de la moyenne canadienne des dépenses, de se ramener à des questions de revenus, à des questions de ce que l'on met dans les universités. Mais nous avons tous les yeux, comme vous l'avez souligné, sur ce qui en sort, et c'est vraiment là-dessus que les Québécois ont des attentes très importantes qui ont été bien comblées jusqu'à maintenant, je pense que ça a bien ressorti dans la commission.

Mais restons au niveau des moyens. Quand on parle effectivement des moyens, là-dessus, je ne pense pas qu'il faudrait avoir une ambition de dépenser plus, il faut avoir une ambition de réussir mieux avec les moyens qui sont les nôtres et qui sont moindres, tout en ne niant pas qu'il y ait des réinvestissements qui sont admis par tous.

J'aimerais vous entendre, surtout que, depuis un certain nombre d'années, l'Université de Sherbrooke a pris des initiatives extrêmement intéressantes au niveau de ce que vous appelez des projets porteurs, mais au niveau donc d'un rapprochement et d'une intégration plus forte avec les communautés dans lesquelles elle est plus active et où elle se trouve géographiquement, même si son activité dépasse largement ce contexte géographique. Et j'aimerais... Parce qu'on n'élabore pas beaucoup dans le contexte, mais j'aimerais que vous nous en parliez d'autant plus que certaines des choses que vous avez faites, depuis notamment 2000-2001, sont des choses qui pourraient peut-être servir à d'autres universités ou en tout cas éclairer les membres de la commission, quand on pense au contexte des universités en région et dont... Enfin, il y en a plusieurs qui sont souvent régionales, pour employer la terminologie de l'Université de Sherbrooke. Alors, j'aimerais, si possible, que vous nous éclairiez un petit peu plus sur ces initiatives qui, autant que je sache, sont innovatrices, là, mais dont on ne parle pas beaucoup dans le rapport.

n(12 heures)n

M. Béchard (Bruno-Marie): Bien. Sur le premier élément de votre intervention, vous avez tout à fait raison de constater que les universités québécoises font beaucoup plus avec des moyens qui, en ce moment, sont moindres que ce qu'on retrouve ailleurs dans le Canada, et, là-dessus, je pense qu'il faut effectivement se réjouir de l'économie de notre système universitaire. En quelque part, les Québécoises et Québécois savent particulièrement bien faire à cet égard.

Mais justement imaginez ce que ce serait si en plus on avait les moyens comparables ou même davantage de moyens. Ce serait vraiment fantastique. Et je suis convaincu pour ma part que les retombées d'une activité universitaire plus intense, d'une formation de haut niveau plus appropriée, plus adéquate peuvent non seulement nous aider à nous positionner en termes d'évolution de société, mais aussi à régler bien d'autres problèmes de notre société dans d'autres secteurs, ne serait-ce que, par exemple, au niveau de la santé. Vous savez que des gens mieux éduqués, qui en plus sont plus prospères, bien vont aussi permettre de régler donc d'autres problèmes très intenses que notre société peut vivre. Comme quoi l'investissement dans l'éducation, c'est probablement le meilleur investissement que vous puissiez faire.

Sur les initiatives de rapprochement, d'intégration avec le milieu, vous soulevez là une préoccupation constante de l'Université de Sherbrooke depuis plusieurs années. Vous savez, nous sommes situés en région, et, au début de notre existence, on avait à tort la tentation de nous associer à une université à vocation régionale. Bon. Lorsqu'on regarde d'un peu plus près ce qui se passe à l'Université de Sherbrooke, vous savez que 80 % de notre population étudiante vient d'ailleurs, et pas juste d'ailleurs... de certains secteurs, mais vraiment de partout au Québec. Ça nous a amenés donc à mieux connaître les milieux, à travers notre régime coopératif, d'être mieux branchés aussi sur les organisations, pas juste les entreprises, hein, les institutions, les organisations, les gouvernements situés partout au Québec, et, au cours des dernières années, ça nous a amenés même à focaliser certaines actions universitaires dans certains lieux.

Celui qui est le plus visible, je pense, c'est notre campus de Longueuil, un campus autour duquel gravitent maintenant 10 000 personnes. C'est quelque chose, c'est bien plus gros que bien des petites institutions au Québec. Mais les principes qui sont à la base de ce succès, c'est d'abord une réponse aux besoins du milieu. Il ne s'agit pas d'exporter dans un autre lieu ce que l'université fait de bien à Sherbrooke ? ça n'a pas été l'approche ? c'est d'être branché sur les besoins du milieu et développer ce qu'il faut pour répondre à ces besoins-là. Donc, ça, ça a été la première clé du succès de notre intervention à Longueuil.

Et je vous donne des exemples. Le premier M.B.A. pour cadres en exercice en français au monde, bien ça a été développé à Longueuil, au campus de Longueuil, et juste au campus de Longueuil de l'Université de Sherbrooke. Ce n'était pas donné à Sherbrooke. Donc, il n'était pas question de strictement exporter nos programmes dans un autre lieu; on les a développés pour ce lieu-là.

Une autre clé du succès, c'est l'approche collaborante. Par exemple, dès les origines de notre campus de Longueuil, l'Université de Sherbrooke a été extrêmement accueillante et même, je dirais même, activement accueillante donc en allant chercher d'autres partenaires universitaires, collégiaux, donc d'autres partenaires pour desservir les besoins d'une région. Et vous savez peut-être qu'à notre campus de Longueuil, par exemple, de façon bien, bien concrète, nous avons même logé les activités de l'Université du Québec à Montréal, logé les activités de l'Université de Montréal dans nos locaux. Maintenant, nous logeons les activités de l'Université McGill dans nos locaux dans le but de leur donner des conditions optimales pour se développer dans ce lieu puis qu'ils contribuent à remplir l'ensemble des besoins de la population qu'on n'a pas le goût de desservir nous-mêmes. On n'a même pas nécessairement tous les talents pour la desservir.

Alors, ce concept qui maintenant s'appelle, formellement d'ailleurs, un pôle universitaire ? on l'appelle le pôle universitaire de la Montérégie dans ce cas-là ? c'est un concept par lequel plusieurs institutions offrent ce qu'elles ont de mieux en toute complémentarité, en tout respect. Il ne s'agit pas, là, de compétition, ce n'est pas ça, là. C'est en complémentarité qu'on dessert une région. Ça, c'est un modèle extrêmement prometteur qui est répandu en Europe et qui... Et nous sommes très heureux, à l'Université de Sherbrooke, d'avoir été à l'origine donc des deux premiers pôles universitaires. Parce que le deuxième qui existe, qu'on a déjà fondé formellement, c'est celui à Sherbrooke.

Et celui-là, je vous en glisse aussi un mot parce qu'il est très intéressant. Il est d'une autre forme. Le pôle universitaire de Sherbrooke regroupe les neuf institutions à caractère universitaire, et on inclut là-dedans les trois institutions à caractère collégial. Parce que, vous savez, sur le plan québécois, on... Je vous entendais dans la comparution précédente parler des ordres d'enseignement, tout ça. Mais vous savez qu'il y a juste au Québec où on parle de collégial et d'universitaire. Ce sont des études avancées de toute façon. Donc, dans ce contexte-là, les neuf institutions à caractère universitaire de Sherbrooke se sont alliées formellement pour créer le pôle universitaire de Sherbrooke.

Et, là encore, l'idée est la même. C'est qu'ensemble on combine nos forces pour offrir des choses qu'on ne peut pas offrir chacun de notre côté. Et là-dessus je vous donne simplement un exemple. C'est avec l'université Bishop's, notre soeur évidemment de langue anglaise à Sherbrooke, nous offrons maintenant et depuis peu un programme intégré où la même personne va faire son cours en génie en français dans une culture très francophone de l'Université de Sherbrooke et la même personne, par des sessions agencées et tout ça, va faire son bac en «liberal arts» en anglais, mais non seulement en anglais, mais dans une culture très anglophone de l'Université Bishop's. Et, au bout donc de ses études, la personne aura à la fois une formation en sciences humaines, une formation en sciences, disons, plus dures ? je n'ose pas dire inhumaines ? donc en génie et en sciences humaines, une culture française, une culture anglaise et donc deux baccalauréats au terme de ses études.

Alors, ces approches de pôle universitaire, de concertation, de collaboration entre institutions nous amènent à faire des choses qu'on ne pourrait faire nous-mêmes. On ne pourrait pas... et on y a réfléchi, vous savez. Nos étudiants s'intéressent beaucoup à l'ouverture aux autres cultures, aux autres langues, tout ça. On a réfléchi, si c'était une bonne idée, par exemple, de se mettre à enseigner en anglais chez nous. On trouve ça bien plus intéressant d'enseigner en français chez nous mais de s'allier un partenaire anglophone puis un partenaire plus que de langue anglaise, mais de culture anglaise auquel exposer nos étudiants. Alors, au lieu d'essayer de tout faire nous-mêmes, plutôt on s'associe à d'autres pour le faire. Et je vous dirai aussi...

Le Président (M. Kelley): En conclusion, parce qu'il y a un complément de question.

M. Béchard (Bruno-Marie): Oui, en conclusion là-dessus. Notre dernier né, bientôt il sera communiqué de façon un peu plus formelle, mais on y travaille très activement. Il y a un rapprochement très important, en fait, un... Dans la même foulée, on cherche à développer maintenant une activité intense en Sagamie, donc au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Nous sommes en étroite collaboration pour ça avec l'Université du Québec à Chicoutimi, avec l'agence dont j'oublie le nom exact dans le domaine de la santé, les nouvelles agences, là, les agences régionales de...

Une voix: ...

M. Béchard (Bruno-Marie): Voilà! On se comprend, là, je l'ai échappé.

M. Marceau (Denis): l'Agence de développement de réseaux locaux de services de santé et de services sociaux.

M. Béchard (Bruno-Marie): Voilà!

Le Président (M. Kelley): La poésie.

M. Béchard (Bruno-Marie): Et aussi l'hôpital, donc le Complexe hospitalier de la Sagamie, qui est affilié à l'Université de Sherbrooke depuis déjà de nombreuses années. Alors, on est en train de développer, là encore, une action universitaire plus intense et mieux adaptée aux besoins de la région en complémentarité avec d'autres institutions, pour mieux la servir.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue au nom de ma formation politique. Ça me fait toujours plaisir de vous rencontrer. On a eu un excellent échange d'ailleurs il y a quelques semaines à peine. Je suis heureuse de constater aussi que les étudiants font partie de la délégation. Je vous en félicite.

Moi, je vais revenir sur un des encadrés, là, dans votre mémoire, où vous faites référence à la question de la qualité de la formation que vous offrez. Vous dites, bon: «...en tant qu'institution responsable et imputable, l'université développe actuellement un plan d'assurance de la qualité de la formation pour consolider ses mécanismes d'autorégulation.» Vous avez fait référence auparavant, là, à plusieurs projets qui sont en marche ou qui sont appliqués, c'est-à-dire politiques ou structures d'appui. Donc, à quoi faites-vous référence quand vous parlez des mécanismes de contrôle rigoureux pour assurer la qualité de la formation que vous offrez? J'aimerais ça que vous m'illustriez cela, compte tenu que la commission effectivement aborde ces questions de la qualité, de l'accessibilité et bien sûr du financement.

M. Béchard (Bruno-Marie): Vous savez qu'au Québec le budget de l'éducation représente une pointe de tarte très importante dans le budget du Québec.

Mme Marois: Oui.

n(12 h 10)n

M. Béchard (Bruno-Marie): En réponse à cela et pour assurer la population qu'on utilise les ressources gouvernementales de la façon la plus appropriée qui soit: les universités, de façon générale, donc que ce soit à travers la CREPUQ, la Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec, en collaboration avec le ministère de l'Éducation du Québec mais aussi par toutes sortes d'initiatives institutionnelles, je vous dirai que la rigueur... le niveau de rigueur est extrêmement élevé dans le contrôle qu'on applique à nos programmes, par exemple au processus d'évaluation de nos étudiantes et étudiants mais aussi de nos programmes, et ça se déploie de toutes sortes de façons.

Et nous concourrons totalement à tout ce qui est en vigueur, là, au niveau de la CREPUQ comme actions, tout ça, et nous sommes même un partenaire très actif dans tout ce qu'on fait là-dessus. Et c'est un devoir, pour nous, d'utiliser tous les moyens qu'il faut pour s'assurer que la population en a pour son argent. Et je vous assure qu'au Québec, comme on le disait un peu plus tôt, je considère qu'on en a plus que pour notre argent, et c'est tant mieux, et on veut travailler pour intensifier ça par de nouvelles approches. Et, là-dessus, Denis, je vous invite à poursuivre.

Le Président (M. Kelley): M. Marceau.

M. Marceau (Denis): Si vous me permettez, M. le Président, M. le ministre, et mesdames, messieurs, d'abord de revenir un petit peu sur le contrat de performance qu'on a signé en 2000. L'Université de Sherbrooke a pris très au sérieux ce contrat de performance qu'elle a signé ? et elle était d'ailleurs la première, je pense, à signer des contrats de performance ? et nous avions des objectifs. Et je dois vous dire qu'aujourd'hui on a réalisé nos objectifs, et nous en sommes très fiers, comme, par exemple, le taux de diplomation, six ans après avoir commencé des études, nous sommes rendus à 76 % de notre engagement, au bout de huit ans, donc dans deux ou trois ans, c'est 80 %, et on a déjà fait un gain de 4 %, donc on est bien sur la bonne lancée. Également, sur la rétention des étudiants et des étudiantes après une première année, on sait tous qu'à l'université tout se joue à la première année. Et nous avons fait un gain de 10 %, nous sommes rendus maintenant à 82,6 % de rétention. Et également nous sommes à réviser toutes nos politiques d'évaluation périodique des programmes, d'évaluation des enseignements, des apprentissages, et ainsi de suite.

Et là ça m'amène un peu au concept global d'assurance qualité. C'est qu'on est en réflexion là-dessus, on a un groupe de travail très imposant qui est en train de réfléchir là-dessus. C'est qu'on a procédé, dans le passé, en développant des politiques sectorielles. Là, on est rendu à un moment où c'est important d'avoir une politique d'ensemble ou un travail d'ensemble donc d'assurance qualité, pas juste petit morceau par petit morceau, mais d'ensemble sans nier nécessairement nos politiques. Alors, on est rendus dans ces réflexions-là. Toujours pour poursuivre notre poussée, l'objectif, c'est qu'on vise évidemment à ce que tous nos étudiants qui entrent à l'université méritent d'en sortir aussi et avec succès. Donc, il y a un chemin qui est parcouru, il faut poursuivre l'autre partie, et c'est sur cette foulée-là qu'on est en train de travailler. Alors, c'est un peu ce qu'on veut dire par notre plan d'assurance qualité. C'est une réflexion qui... partant des acquis actuellement, mais c'est de les ramasser ensemble pour qu'on puisse encore mieux garantir cette qualité de la formation à tous les cycles, que ce soit au premier cycle, deuxième et troisième cycles.

M. Béchard (Bruno-Marie): M. le Président, il faut aussi savoir qu'à l'Université de Sherbrooke, compte tenu de la nature des programmes, notamment l'enseignement médical, en génie, en droit, dans plusieurs domaines, nous sommes assujettis à des organismes d'accréditation de programmes externes. Et, là-dessus, par exemple, notre Faculté de médecine est très, très heureuse, parce que, tout récemment, on vient de recevoir l'accréditation de notre programme de doctorat de médecine...

M. Marceau (Denis): De huit ans.

M. Béchard (Bruno-Marie): ...pour huit ans, ce qui est exceptionnel et sans aucune défaillance notée. Donc, il faut le faire. Et, pour ça, je pense que, pour bien des programmes puis pour l'ensemble de l'activité universitaire au Québec, je vous dirai que le regard en tout cas qu'on y jette, c'est que, de façon globale, à travers les efforts de la CREPUQ, du ministère et aussi les efforts institutionnels, nous pouvons assurer la population qu'on a des programmes de très haut niveau. Et d'ailleurs ce n'est pas pour rien que notre réputation internationale... la réputation internationale de nos diplômes québécois est aussi forte.

Mme Marois: En tout cas, vous en parlez d'abondance et d'abondance du coeur aussi. C'est bien. J'ai encore un petit... Bon.

Je veux revenir... Effectivement, on en avait parlé quand vous êtes venus, là, sur la... les contrats... c'est-à-dire quand vous êtes venus, à la commission parlementaire, pour rendre compte dans cet exercice d'imputabilité auquel on est soumis les uns et les autres. Et on avait constaté qu'au niveau des objectifs fixés dans le contrat de performance les avancées étaient assez remarquables, et je vous en félicite.

Je veux revenir maintenant sur la question du financement de la fonction enseignement. Dans votre mémoire, à la page 8, vous indiquez que «le financement ne doit pas engendrer des distorsions selon les formules pédagogiques ou la clientèle visée, puisque toute démarche en ce sens alourdirait indûment la structure de financement en plus de restreindre les choix pédagogiques». J'aimerais ça que vous me parliez de cela un peu. Vous n'abordez pas la question des frais de scolarité. J'imagine que cela a dû être débattu entre vous. J'aimerais ça que vous m'en parliez un peu.

M. Béchard (Bruno-Marie): Sur les deux aspects. D'abord, je dois vous dire que l'Université de Sherbrooke est très à l'aise avec la formule de financement actuelle et ses composantes. Est-elle parfaite? Non, pas du tout. Il n'y a aucune formule de financement, aucune formule de partage qui est parfaite. Mais, en soi, les principes fondamentaux qui la gouvernent, c'est-à-dire la grande transparence, le fondement de financement de l'enseignement per capita, donc qui ne porte pas flanc justement aux distinctions entre tel type d'université, tel... Il n'y a rien comme des mécanismes de partage simples et limpides. Ils seront toujours imparfaits, mais l'imperfection n'est pas suffisante pour les remettre en question.

Donc, nous sommes réticents à toute modulation en fonction des méthodes pédagogiques choisies par telle université ou telle autre. J'ai vu et vous avez vu défiler devant vous des universités qui disent: Bien, nous, on aimerait un traitement particulier parce que... bon, parce qu'on est en région, ou parce qu'on est en forte intensité de recherche, ou parce que... Finalement, tout le monde a un trait particulier et nous aussi. Bien, nous, en fait on serait très heureux que vous financiez de façon particulière les universités en région ou les universités à recherche intense, et tout ça, parce que tout ça s'applique à nous. Alors, on en est bien heureux. J'espère que c'est cumulable. Mais je veux juste le dire. Autrement dit, chez nous, on est très à l'aise avec la simplicité de la formule actuelle.

Là où on a un problème majeur, c'est dans l'ampleur des ressources consenties à l'application de cette formule de partage. Alors, nous ne militerions pas en faveur d'une grande remise en question, là, de tous les paramètres, et tout ça. Il y a déjà un bouleversement important qui a été fait, il y a quelques années, puis il y a un degré d'adhésion suffisant à nos yeux pour que ce ne soit pas remis en question à court terme.

Sur la question des droits de scolarité, nous avons effectivement regardé différentes solutions, vous le savez, à travers nos travaux, les universités, toutes ensemble d'ailleurs, à travers la CREPUQ, on a exploré toutes sortes de scénarios. La position de l'Université de Sherbrooke est claire là-dessus. D'abord, nous respectons le fait qu'il appartienne au gouvernement de faire les choix entre la contribution privée et la contribution publique à l'éducation. Non seulement nous respectons que c'est un choix gouvernemental qui doit tenir compte d'un ensemble de préoccupations, certaines qu'on puisse porter puis certaines que d'autres groupes de la société puissent porter, non seulement nous sommes à l'aise avec le fait que le gouvernement donc ait cette responsabilité-là, mais nous sommes aussi à l'aise avec les choix qui ont été faits jusqu'ici. C'est-à-dire, le Québec a choisi d'avoir une façon bien particulière et qui se démarque beaucoup du reste du continent pour financer toute l'activité de l'éducation universitaire. Le rapport contribution étudiante versus contribution sociétale est très différent d'ailleurs, mais nous sommes très à l'aise avec ça. On pense que les objectifs fondamentaux derrière tout ça sont tout à fait justifiables.

S'il y a un élément à propos des droits de scolarité qui, à nos yeux, mérite une bonne réflexion, parce qu'on a regardé toutes sortes... toutes les autres avenues... Bien, d'ailleurs, je vais commencer par les avenues qu'on a rejetées. Par exemple, les droits de scolarité diversifiés d'un secteur à l'autre, parce que, vous savez, le coût de l'éducation est bien différent selon qu'un étudiant, une étudiante soit en médecine ou en philosophie, là. C'est des coûts très différents, mais, en ce moment, les droits de scolarité sont les mêmes. Alors, on a exploré cette piste-là. Est-ce que... Tenant compte du revenu qu'on puisse espérer à la fin des études, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que l'étudiante ou l'étudiant contribue davantage? Là-dessus, la conclusion est la suivante de notre côté: il y a déjà un mécanisme qui tient compte très efficacement des revenus après étude, c'est l'impôt, et vous l'utilisez bien. Bien... Beaucoup. Bien. Ce que je veux dire, c'est que, donc, il y a un autre mécanisme qui tient lieu de ça, et on verrait mal comment une complexification à cet égard-là puisse être justifiable, étant donné qu'il y a un autre mécanisme qui est là pour en tenir compte.

Sur le...

Le Président (M. Kelley): En conclusion.

n(12 h 20)n

M. Béchard (Bruno-Marie): Oui, en conclusion. L'aspect donc qu'on n'a pas résolu et qui mérite peut-être réflexion ? et peut-être serez-vous tenté d'y jeter un regard particulier ? c'est la question d'indexation des droits de scolarité. Ce n'est pas évident, c'est loin d'être évident, mais c'est une question d'équité intergénérationnelle qui est sous-jacente. Alors, on sait que, d'une part, les droits de scolarité ont peu évolué au cours des dernières années. Vous savez que, dans les années soixante, bon, ça coûtait 500 $ grosso modo, une session à l'université. Mais 500 $ dans les années soixante, ça vaut 2 500 $ cette année. Est-ce que c'est normal que les étudiants d'aujourd'hui paient moins en dollars constants que dans les années soixante? Bien, il y a plein d'arguments positifs et négatifs qui militent en faveur de ça. Alors, s'il y avait un aspect au niveau des droits de scolarité qu'il faudrait regarder et puis pour lequel on n'a pas de réponse a priori, parce que c'est complexe, c'est l'aspect d'équité intergénérationnelle. Peut-être voulez-vous compléter, Alain?

M. St-Jacques (Alain): Oui. En complément de ce que M. le recteur vient de dire, c'est évident qu'on peut regarder pour l'équité intergénérationnelle, pour l'indexation. Toutefois, si on parle d'équité intergénérationnelle, il y aurait d'autres facteurs qu'il faudrait considérer aussi. On sait, par exemple... On peut parler de la dette qui a été contractée par d'autres générations et que nous avons à payer. Donc, ce n'est pas un débat qui doit se limiter seulement sur les frais de scolarité.

Et je rajouterais finalement, rapidement, qu'un autre aspect important concernant l'indexation est le fait que, oui, nos frais de scolarité sont restés à peu près fixes, si on ne tient pas compte des frais afférents, mais, d'un autre côté, l'aide financière aux études, qu'on reçoit par le régime public, est restée également à peu près fixe, et encore aujourd'hui on considère qu'un étudiant peut se nourrir pour 5 $ par jour. Donc, il faut regarder les deux côtés de la médaille.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Chauveau... Oh, pardon! Est-ce qu'on prend la réponse de M. Tremblay? M. Tremblay.

M. Tremblay (Martin): Oui. Merci beaucoup. Sur ce petit point, en complément, les associations étudiantes, comme vous l'avez sûrement lu dans nos mémoires, nous allons plutôt vers le gel des frais de scolarité et non pas l'indexation. C'est certain que, pour compléter ce qu'Alain St-Jacques a déjà dit, si on regarde l'avenue de l'indexation, il faut tout regarder l'indexation, sinon c'est le gel qu'on doit maintenir. C'est la position des associations étudiantes.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. Tremblay. Mme la députée de Chauveau.

Mme Perreault: Oui. Bonjour à vous. Juste, peut-être.. Encore sur le même sujet, je voudrais vous entendre davantage. On avait des préoccupations qui ont été élaborées longuement, d'accessibilité au niveau des frais de scolarité, de financement. On voit aussi qu'au Québec on met beaucoup... le gouvernement met beaucoup d'argent dans les universités. Ça n'a pas nécessairement d'impact au niveau du nombre d'universitaires qui sortent au Québec comparativement à d'autres provinces. J'aimerais vous entendre aussi sur la participation du privé dans le financement. On a eu beaucoup de... Il y a eu beaucoup de mémoires qui ont fait état, là, d'une certaine crainte au niveau de l'autonomie des universités, notamment dans le curriculum. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Kelley): M. Béchard.

M. Béchard (Bruno-Marie): D'abord, sur l'effort en termes d'augmentation du nombre de diplômés universitaires au Québec, parce qu'on y revient toujours, hein, le positionnement du Québec, dans notre société, va dépendre largement du niveau d'éducation de nos gens. Et c'est pour ça que, même s'il y a dénatalité au Québec, le besoin en éducation supérieure connaît une telle croissance que finalement la commande à remplir est bien plus grande aujourd'hui qu'hier et elle sera bien plus grande demain qu'aujourd'hui.

Là-dessus, juste vous donner une idée de ce qui s'est produit chez nous au cours des dernières années, juste pendant la période des contrats de performance, donc depuis 1999-2000, l'année académique 1999-2000. Nous avons une fréquentation étudiante, donc, dans nos programmes de premier cycle, de 7 % plus élevée, de 13 % plus élevée au deuxième cycle et 59 % plus élevée au troisième cycle. Donc, on forme plus de monde, O.K., pas juste en qualité ? parce que maintenant les embauches professorales nous permettent d'assurer un meilleur encadrement, tout ça ? mais en quantité aussi, O.K. Et je pense qu'il en est de même pour à peu près toutes nos consoeurs universitaires au Québec. Donc, c'était sur le premier élément.

Le deuxième, je l'échappe...

Mme Perreault: Sur la participation du privé, là.

M. Béchard (Bruno-Marie): Oui, voilà! Merci. C'est l'âge. L'université a 50 ans cette année, moi, c'est 40, et puis j'ai de la misère avec ça. Donc, sur la participation du privé. Je vous disais tantôt que l'Université de Sherbrooke a fait des efforts qui ont connu un succès particulier au niveau des levées de fonds. Il y a effectivement une prudence qu'il faut maintenir à l'égard justement de la proportion du financement privé et de la forme que ce financement peut prendre. Parce que, effectivement, les universités doivent aussi conserver une certaine distance par rapport aux intérêts commerciaux, en particulier, pour assurer que l'enseignement universitaire soit un enseignement diversifié pour ce qui est, à court terme, rentable pour une société mais aussi pour ce qui ne l'est pas mais qui est capital.

Vous savez, lorsqu'on fait l'enseignement... Bien, tiens, prenez notre Faculté de théologie, éthique et philosophie, c'est un bel exemple. C'est une faculté qui a été menacée souvent. On a fait... À l'époque de grande noirceur financière des universités, on a voulu... on s'interrogeait: Bon, bien, est-ce qu'il faudrait peut-être couper certains programmes dans ces domaines moins populaires puis moins rentables, entre guillemets, pour la société? Et puis il y a eu des menaces sérieuses, hein? On aurait pu fermer facilement notre Faculté de théologie, éthique et philosophie, chez nous, par exemple. Bien, aujourd'hui, cette faculté-là est extrêmement en demande, en particulier dans nos facultés professionnalisantes, en médecine, en génie, parce que les préoccupations éthiques de notre société... Et, si vous suivez l'actualité, inutile d'insister que les préoccupations éthiques sont grandissantes. Bien, ce sont nos philosophes, nos éthiciens, qui sont dans cette faculté qui, il y a quelques années à peine, était très peu populaire, qui sont appelés aujourd'hui à nous aider à se développer comme société.

Alors, il faut faire bien attention, dans le réseau universitaire, à sacrifier des pans d'activité universitaire qui, momentanément, à cause du contexte, sont moins en demande par la société, mais parfois c'est ce qui peut aussi assurer notre salut comme société quand le moment se présente.

Le Président (M. Kelley): Juste... Je dois demander, au niveau de l'intendance, un consentement pour un léger dépassement de 12 h 30. Alors, le consentement est donné. Mme la députée de Chauveau.

Mme Perreault: C'est juste pour bien illustrer, peut-être, vos propos. Ce que je comprends, c'est qu'on rattrape actuellement, peut-être, le retard du Québec comparativement à d'autres. Ce n'est pas dû à notre modèle, mais peut-être à un retard qu'on avait il y a plusieurs années et qu'on est en train selon vous de rattraper.

M. Béchard (Bruno-Marie): Tout à fait.

Mme Perreault: Donc, on n'a pas à revoir la base même de notre formule de financement, qui n'a aucune incidence sur le nombre de diplômés qu'on forme au Québec. Est-ce que je comprends bien ce que vous dites?

M. Béchard (Bruno-Marie): Tout à fait d'accord avec vous. M. Chaput?

Le Président (M. Kelley): M. Chaput.

M. Chaput (Bernard): Merci. Je pense qu'à l'Université de Sherbrooke on s'entend pour dire qu'il ne faut pas nécessairement revoir la formule de financement, on est à l'aise avec cette formule-là. Ça ne veut pas dire par ailleurs qu'on ne doit pas mettre l'argent qui manque pour se hausser à la moyenne, au moins, des autres provinces canadiennes.

Moi, j'aimerais attirer l'attention de la commission sur un point, un seul: planification. On a beau avoir la formule qu'on veut, si on ne sait pas combien d'argent on a cette année pour fonctionner, combien d'argent on aura l'an prochain pour fonctionner, c'est très difficile de gérer comme il faut. On dit: Gouverner, c'est prévoir, mais gérer une faculté, gérer une université, c'est aussi prévoir. Il y a des années... Mme la députée, on ne sait pas combien d'argent on avait il y a un an et demi. Alors, on ne peut pas planifier comme ça. La commission doit, dans ses recommandations, à mon avis, en parlant de formule de financement, tenir compte de la nécessité de la planification. Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le ministre, il vous reste trois minutes.

M. Reid: Une dernière question. On a beaucoup entendu parler, à la commission, hier en particulier, de l'innovation sociale, de la valorisation de l'innovation sociale. L'Université de Sherbrooke est une championne au niveau de la valorisation de ses découvertes en technologie, notamment. Donc, là-dessus, je pense que c'est un modèle exemplaire. Est-ce que... qu'est-ce que vous avez à dire... Et je vois la présence donc du doyen de la Faculté de lettres et sciences humaines qui se préoccupe de ces choses-là, qui est un historien, M. le Président, du Moyen Âge.

Le Président (M. Kelley): Formidable.

M. Béchard (Bruno-Marie): Personne n'est parfait.

M. Reid: Et j'aimerais savoir ce que l'Université de Sherbrooke a fait dans ce sens-là, comment elle envisage cette problématique-là et où elle est rendue là-dedans.

M. Béchard (Bruno-Marie): Vous avez raison, M. le ministre, de soulever cette question, parce que, si des avenues différentes de financement nous permettent de se donner les moyens dans certains secteurs d'activité, bien il y en a d'autres qui sont beaucoup plus vulnérables et qui nécessitent une conscience gouvernementale puis un appui gouvernemental correct. Et c'est le cas donc des avancées en sciences humaines, l'activité autour des sciences humaines de façon générale.

n(12 h 30)n

L'Université de Sherbrooke a voulu prendre des moyens particuliers pour s'assurer que toutes les disciplines ont pu progresser dans le cadre de la dernière phase de réinvestissement universitaire. Et simplement, là, sans rentrer dans les détails, juste attirer votre attention sur un exemple bien concret. Vous savez, nous calquons notre méthode de distribution des ressources à l'intérieur de l'université sur la méthode gouvernementale de distribution ou de partage entre les universités. Eh bien, nous ne nous en sommes pas tenus simplement donc à appliquer cette méthode de distribution à l'interne, mais nous avons voulu moduler ce partage entre les facultés pour s'assurer que, dans les domaines plus fragiles, moins développés ? puis souvent c'est associé à toutes sortes de circonstances historiques ? toutes les disciplines disposent de ressources suffisantes pour se développer. Et donc on a introduit, chez nous, une formule temporaire d'entraide entre les facultés, et les facultés mieux nanties aident les facultés moins bien nanties pour permettre leur développement. Et c'est capital d'apporter ces nuances-là, sans quoi il y a juste ce qui est facilement vendable, entre guillemets, ou facilement intéressant pour, par exemple, l'entreprise privée qui peut se développer dans les universités.

Alors, c'est là toute la racine fondamentale du service social que représente l'éducation et que vous portez comme responsabilité, au gouvernement du Québec, et nous comptons sur votre sagesse évidemment pour s'assurer que l'appui aux sciences fondamentales, aux sciences tant... et même temporairement parfois, temporairement moins populaires bien soit adéquat.

Le Président (M. Kelley): Très rapidement, M. Marceau. Très rapidement.

M. Marceau (Denis): Peut-être un petit ajout. C'est qu'à l'Université de Sherbrooke il y a des secteurs qui sont en plein développement et qui sont par rapport à cet objectif-là. Pensons, par exemple, à tous les programmes de développement local, également tous les travaux de l'IRECUS, à l'Université de Sherbrooke, où il y a beaucoup de travail de formation et de recherche par rapport à ces préoccupations des gens qui sont, en tous les cas, dans des situations plus difficiles. Alors donc, il y a un vent qui souffle beaucoup à l'Université de Sherbrooke sur la question du développement local, aide dans les petites régions, les paroisses, comment les aider finalement à évoluer dans notre société par rapport aux grands objectifs de notre société.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Dernier bloc, M. le député de Bertrand, il vous reste à peu près...

Mme Marois: ...être en reste, M. le Président, pour vous dire que ma recherchiste est diplômée de l'Université de Sherbrooke et a eu comme professeur M. Chaput. Alors, voilà.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): Que le monde est petit!

Mme Marois: Hein?

Le Président (M. Kelley): Alors, sur ça, je passe la parole à M. le député de Bertrand.

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Je peux dire qu'on a... Bonjour, messieurs, bienvenue à cette commission parlementaire. Je disais qu'on a des recteurs, au Québec, d'université qui sont des amateurs de course automobile. Parce que vous nous avez parlé de voitures ordinaires, parce qu'il y a eu une belle progression de la bicyclette jusqu'à la voiture ordinaire, sauf que ce n'est pas avec ça qu'on gagne une course de formule 1. Puis, hier, le recteur de l'Université de Montréal nous disait à peu près la même chose, en disant que, lui, bien les universités québécoises sont très performantes et puis on a une formule 1 sur la ligne de départ, mais on n'a pas d'essence.

Mme Marois: Mais on n'a pas d'essence, c'est ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cousineau: Donc, dans les deux cas, on ne gagne pas la course. Ceci dit, aux pages 9 et 10 de votre mémoire, vous faites... Bon. Vous parlez des enjeux de la recherche universitaire et puis d'ailleurs vous démontrez très clairement, puis tout le monde le sait, que l'Université de Sherbrooke, il y a eu une très, très, très belle progression au niveau de la recherche, dans les dernières années. D'ailleurs, le tableau de la page 9 nous le démontre très bien. Puis vous soulignez aussi le fait que les universités québécoises ont un avantage sur les autres universités à travers le Canada puis voire même de certains États nord-est-américains et puis qu'il faut conserver cet avantage-là par du réinvestissement, et tout ça. Vous nous mentionnez, à la page 10, certaines pistes à voir, et puis vous précisez, dans le dernier paragraphe, que «nous suggérons même que la méthode de répartition des frais indirects ? beaucoup nous ont parlé des frais indirects ? soit bonifiée». Soit revue, puis bonifiée.

Pouvez-vous nous donner un petit peu les grandes lignes de ce que vous voyez par bonification de ces frais de recherche là, ces frais indirects à la recherche?

Le Président (M. Kelley): M. Béchard.

M. Béchard (Bruno-Marie): Bien sûr. Sur le premier élément, au niveau de la formule 1, notre réflexe normal est probablement conditionné par le fait que le grand patron de la formule 1 au Canada, c'est un diplômé de l'Université de Sherbrooke, M. Normand Legault.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Béchard (Bruno-Marie): Alors, sur la performance en recherche, de façon générale, vous avez effectivement noté que l'Université de Sherbrooke a connu une progression de 260 % de ses fonds de recherche en six ans. Il faut le faire. Et donc c'est... l'Université de Sherbrooke évidemment fait partie des universités à forte intensité de recherche. Il y a, à l'échelle planétaire donc, des spécialisations ou des catégorisations d'universités qui se dessinent, de grands courants, et, pour nous, le choix est clair, nous sommes une université complète, à forte intensité de recherche, et c'est dans cette mouvance-là qu'on veut performer.

Sur les frais indirects de recherche ? il faut savoir puis il faut s'en souvenir et il faut en être fiers ? le gouvernement du Québec a fait les premiers pas et a donné le ton. Et donc, depuis plusieurs années, le gouvernement du Québec soutient les universités en appuyant financièrement les activités qui découlent de l'activité de recherche subventionnée, pour laquelle on reçoit des frais directement et qui engendre des dépenses directes. Alors, c'est ça, les frais indirects de recherche, c'est lorsque, pour accommoder l'activité de recherche qui est subventionnée, bien il faut bonifier nos laboratoires, nos infrastructures de bibliothèque, etc. C'est ce qu'on appelle les frais indirects de recherche.

Le gouvernement du Québec a été le premier à reconnaître ça et à nous soutenir là-dedans. Et le gouvernement du Canada a joint ses efforts à ceux du gouvernement du Québec depuis quelques années, et ça a permis au gouvernement du Québec d'intensifier le taux de remboursement des frais indirects de recherche sur ses propres subventions et au gouvernement du Canada de faire la même chose du côté de ses subventions.

Là où on suggère une piste d'amélioration, c'est à l'égard de toute l'activité de recherche qui n'est pas subventionnée. Les universités doivent faire l'effort ? et nous le faisons, nous vous le promettons ? de réclamer les frais indirects de recherche, ou leur équivalent, si on veut, aussi dans la recherche qui est non subventionnée, donc les contrats de recherche. Et, lorsque l'université prend la peine... Parce qu'on comprend bien que c'est déplaisant pour le commandeur de recherche, le payeur, lorsqu'une université prend la peine de prendre ses responsabilités puis d'exiger du payeur que les contrats de recherche incluent les frais indirects de recherche, bien je pense qu'il faut en quelque part en tenir compte dans l'équation. Sinon, ce serait trop facile de ne pas faire l'effort d'aller chercher les ressources nécessaires de ce côté-là et puis de compter exclusivement sur l'appui gouvernemental.

Et ça, c'est dans l'optique d'un des tout premiers éléments que j'ai abordés avec vous dans la présentation. C'est que nous sommes tous conscients, je pense, ici, qu'il y a un effort majeur à faire pour consentir aux universités québécoises des ressources comparables aux autres universités, et également, comme je vous le disais, même supérieures. Ça, c'est l'effort gouvernemental qui doit être fait. Mais je vous assure que cet effort gouvernemental n'est pas le seul. Il faut absolument aussi que les institutions fassent tous les efforts pour aller chercher, à travers la philanthropie, à travers les retombées de leurs activités de recherche, à travers la facturation de leurs activités de recherche qui répondent à des intérêts non gouvernementaux, de faire notre part. Et c'est dans ce sens-là qu'on pense que la formule de distribution des frais indirects de recherche devrait tenir compte de la part qu'on fait ou qu'on ne fait pas.

Le Président (M. Kelley): Un tout dernier mot, M. Marceau, parce que le temps est épuisé.

M. Marceau (Denis): Deux petits éléments. Un, M. le Président, c'est que la recherche est indispensable pour la qualité de l'enseignement, de la formation, et il ne faudrait pas l'oublier. C'est que souvent on peut concevoir la fonction enseignement et qui est supportée par, bon, les subventions de fonctionnement, mais la partie recherche, elle est très importante pour faire en sorte que notre formation soit toujours de qualité. Ça, c'est le premier élément.

Le deuxième élément. Une des difficultés que nous avons dans nos institutions, c'est que les professeurs ont... les professeurs ordinaires, là, leur charge de travail, c'est 40 % pour de l'enseignement, 40 % pour de la recherche et 20 % pour autre chose, pour le support, administration, etc. Et qu'est-ce qui supporte la partie recherche de notre professeur? Et c'est là qu'il y a une question, à mon point de vue, dans nos institutions puis il faudrait y réfléchir. Parce que qui la supporte, c'est la subvention de fonctionnement qui, elle, est souvent pensée en fonction de l'enseignement.

Donc, il y a une difficulté, là, qui est assez importante pour toute cette question de la recherche qui est si nécessaire. C'est pour ça que les frais indirects ont été au moins un soulagement pour les universités. Mais ce n'est qu'un début, à mon point de vue, pour vraiment supporter comme il faut la recherche, les professeurs qui font de la recherche et évidemment la conséquence de cela: la qualité de la formation.

Le Président (M. Kelley): Et, sur ça, merci beaucoup. Le dernier témoin a attaqué le métier de député, ce témoin attaque la formation d'historien. Alors, ça va mal pour le président aujourd'hui. Mais malgré cela c'est toujours un grand plaisir de recevoir les représentants de l'Université de Sherbrooke.

Sur ça, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 40)

 

(Reprise à 14 h 5)

Le Président (M. Kelley): Alors, je constate de nouveau quorum de la Commission de l'éducation. Alors, on est prêt à commencer cet après-midi.

Nos premiers invités sont les représentants de Forces AVENIR. Alors, encore une fois la jeunesse québécoise est parmi nous, ce qui est encourageant pour les membres de la commission. Alors, je vais donner la parole à vous, M. Grégoire, oui? O.K. M. Grégoire, la parole est à vous.

Forces AVENIR

M. Grégoire (François): Alors, au nom de Forces AVENIR et à titre de citoyens, sachez que ça nous fait plaisir d'être ici et d'avoir l'heureux privilège de discuter avec vous d'éducation.

Aux yeux de Forces AVENIR, la santé d'une collectivité dépend davantage de son système d'éducation que de tout autre système relatif à notre économie. L'éducation élève la personne, qui élève le monde. Dans cet esprit, l'éducation est la priorité, et cette priorité devrait se refléter dans les budgets qu'une collectivité tout entière s'accorde pour s'organiser.

D'abord, laissez-moi vous renseigner sur Forces AVENIR, pour ceux qui connaissent moins ça, puis je rencontre aussi des gens ici qui connaissent bien Forces AVENIR. C'est une organisation qui a vu le jour en 1996. C'est des jeunes de la région de Québec qui ont décidé d'avoir une contribution ou d'exercer une force sur le milieu universitaire québécois en reconnaissant des modèles extraordinaires d'engagement et d'esprit d'entreprise, des jeunes qui poursuivent une réussite académique et qui, parallèlement à leurs études, s'impliquent dans la collectivité. Et, à nos yeux, nous pensons qu'il y a là des avenues extrêmement intéressantes à envisager pour améliorer notre système d'éducation.

Forces AVENIR remet 114 000 $ en bourses par année à des étudiants qui ont déposé un dossier de candidature dans les 17 universités québécoises. Alors, les 17 universités québécoises appuient l'initiative. Ils sont là. Nous avons, à l'intérieur du conseil d'administration, le président de la Conférence des recteurs. Les étudiants aussi appuient Forces AVENIR. Nous avons, sur le conseil d'administration, le président de la Fédération étudiante universitaire du Québec. Le conseil d'administration est présidé par nul autre que M. Bernard Lamarre.

Alors, toujours est-il que Forces AVENIR reconnaît avec des bourses de prestige, honore dans une belle soirée d'excellence et fait la promotion de modèles à travers les médias du Québec. Alors, il y a 100 personnes de notoriété qui évaluent tous les dossiers de candidature. Il y a trois étapes de sélection. Alors, il y en a une dans les universités, il y en a une par des jurys spécialistes puis il y en a une par un dernier jury, le grand jury, qui est présidé par l'honorable Lise Thibault.

Forces AVENIR remet également des stages au Sénégal, au Honduras, au Burkina Faso puis au Brésil. Pour des étudiants qui pourraient être reconnus chez nous, on pense que c'est important d'aller voir une réalité dans un pays comme le Burkina Faso par exemple, pour donner de la perspective. Alors, voici pour Forces AVENIR. Si vous avez des questions, ça va me faire plaisir d'y répondre tout à l'heure.

Aujourd'hui, nous sommes à notre première expérience en commission parlementaire. C'est avec peu de temps et peu de moyens que nous avons préparé ce mémoire. Malgré tout, nous avons confiance que nos propos serviront le débat sur la qualité de l'université. D'ailleurs, dans le cadre de cette commission sur le financement, la qualité et l'accessibilité, nos propos porteront sur la mission fondamentale des universités et sur l'importance de considérer l'innovation, l'innovation en matière d'engagement social et d'esprit d'entreprise, dans l'évaluation de la qualité d'une université, dans l'évaluation des objectifs de financement ainsi que dans la répartition des budgets.

Aujourd'hui, j'ai la chance d'être entouré de deux personnes extraordinaires. Alors, ici, Valérie Gosselin, la première récipiendaire de la plus haute distinction Forces AVENIR. Elle a fait des études de doctorat, une Maîtrise en psychologie. Elle est fondatrice et directrice d'une clinique de professionnels en santé ? ça s'appelle Amis-Maux, hein, Amis-Maux. Elle est championne provinciale novice en nage synchronisée. Puis elle est aussi atteinte de fibrose kystique et de diabète. Puis j'ai ici, à ma gauche, Félix-Antoine Boudreault, récipiendaire de la plus haute distinction Forces AVENIR comme personnalité cette année. Puis également je vous présente la personnalité par excellence de La Presse dans la catégorie Courage, humanisme et accomplissement.

n(14 h 10)n

Alors, ils sont aujourd'hui les représentants de tous les jeunes de Forces AVENIR, en tout cas les jeunes que Forces AVENIR reconnaît. Ils sont des modèles extraordinaires d'engagement et de réussite qui peuvent inspirer, comme je disais tout à l'heure, le développement de nouvelles avenues de formation. Ils sont ici pour vous témoigner de leurs expériences, pour soutenir les propos et pour répondre à vos questions.

Pour entrer dans le coeur du mémoire ? alors, voilà ? le programme Forces AVENIR s'intéresse à notre système d'éducation en se basant sur une vision de l'humanité en tant que projet. Mais, si l'humanité est un projet, on doit en énoncer la mission. Comment orienter un système d'éducation de façon responsable sans convenir de ce à quoi il sert fondamentalement?

Lorsque nous regardons autour de nous, nous constatons que beaucoup de Québécois et de Québécoises et plusieurs habitants de la terre vivent dans des conditions qui ne leur permettent pas de combler leurs besoins, de développer leur personne et de saisir leur bonheur. Pourtant, nous avons tous la même valeur humaine.

Aujourd'hui encore, pour l'ensemble des humains sur la planète, la possibilité de naître et de vivre dans un environnement qui permet de s'épanouir relève davantage de la chance que d'un droit. Voilà fondamentalement la mission qui nous unit aux autres et le défi d'excellence devant lequel l'humain est confronté. C'est pour ce droit à l'épanouissement que la collectivité québécoise ainsi que toute autre collectivité s'organise, prend ses responsabilités, établit des politiques, répartit le travail, éduque, enseigne et recherche. C'est de ce point de vue que nous mesurons et évaluons notre excellence, et c'est à titre de citoyens que nous nous investissons dans la réussite de ce projet.

C'est donc comme citoyens que l'on construit d'abord le monde. Alors, à notre avis, le premier devoir d'un système d'éducation est de voir à la formation d'un citoyen conscient de ce pour quoi le monde s'organise et engagé non seulement pour lui, mais également pour les autres. Par conséquent, l'énoncé de mission des universités devrait faire référence, en plus de l'enseignement et de la recherche et des services à la collectivité, au projet des hommes, au citoyen, à la conscience et à l'engagement. Un énoncé de mission formulé comme tel aura pour effet de garder l'enseignement près des fondements de ce qui nous motive à nous organiser, et cela maintiendra l'éducation au-dessus des intérêts économiques. Cela aura également pour effet de favoriser et de valoriser l'engagement des étudiants dans un projet parascolaire ou un projet de vie qui contribueront à leur épanouissement et à celui des autres. Aussi, avec le temps, nous développerons des moyens d'appréciation de la capacité des étudiants à s'engager à l'égard d'eux-mêmes et à l'égard des autres. Ces outils d'appréciation mettront en relief la qualité de la conscience citoyenne de nos étudiants.

Dans un autre ordre d'idées, nous convenons facilement que la personne s'épanouit quand elle donne naissance aux forces qui l'habitent ? j'espère que vous convenez de ça avec moi ? et, selon nous, le projet de l'humanité, qui doit tendre à réunir les conditions favorables à l'épanouissement de la personne, se construit avec les forces de chacun. Par conséquent, pour mener les gens et la collectivité sur la voie de l'épanouissement et ainsi du bonheur et de la réussite, il nous apparaît prioritaire de travailler, au sein des universités, à la réalisation de l'individu afin qu'il déploie son plein potentiel. Imaginez l'impact sur la personne et sur l'organisation de la société si, demain matin, chaque être qui habite la terre s'enrichissait d'une plus grande force. Mais, aujourd'hui, l'université, en s'identifiant principalement comme milieu de formation au service de l'économie du savoir, de la production du savoir, de la formation menant au marché du travail, risque de perdre de vue les aspects de son rôle liés à l'épanouissement des personnes à titre d'institution d'éducation.

C'est pourquoi à notre avis l'université ainsi que tous les paliers d'éducation, dans le cursus qui mène à l'obtention des diplômes, doivent tendre à la réalisation personnelle et entière de chacun. Cet objectif constituerait le deuxième devoir d'un système d'éducation, associé à celui de former des citoyens qui soient conscients et engagés. C'est de ce point de vue que le système d'éducation doit selon nous rehausser sa qualité et se définir comme institution. Par conséquent, l'énoncé de mission des universités devrait faire référence au développement personnel des étudiants, leur permettant de réaliser leur plein potentiel. Cela aura pour effet de motiver l'université à innover sur le plan du développement de la personne.

Avec le temps, des outils se développeront qui permettront d'apprécier des aspects autres que celui de la connaissance, en ce qui a trait à la qualité de la formation universitaire. Ici, il ne faut pas percevoir cette orientation comme une opposition à l'enseignement ou à la recherche. Il faut la voir comme un complément, il faut la voir comme une bonification: nous visons seulement le développement intégral de la personne. Par ailleurs, cette approche contribuera également à faire de nos étudiants des travailleurs complets, donc à hausser la qualité de leur formation en vue de leur profession. Les employeurs d'aujourd'hui disent souvent qu'ils recherchent des têtes bien faites. Alors, cela peut aussi contribuer.

Je pense que vous allez me dire probablement tout à l'heure: François, qu'est-ce que pourrait être l'énoncé de mission finalement? N'allez pas dans vos documents, je l'ai ici. Si vous le voulez, ça va me faire plaisir de vous le remettre, puis j'ai pris le risque d'en faire un, bien humblement d'ailleurs.

La mission universitaire sert le projet des hommes. À cette fin, l'université transmet des connaissances, développe le savoir par la recherche scientifique, sert la collectivité, permet de vivre des expériences. L'université élabore des programmes académiques et para-académiques qui visent à élever la conscience, à favoriser l'engagement et à développer tous les aspects de l'être afin de mener la personne à jouer son rôle de citoyen de façon responsable et à exercer une profession.

À partir d'une mission énoncée comme telle, à la lumière de ces réflexions, il serait pertinent d'améliorer le système éducationnel universitaire en favorisant davantage les expériences à l'extérieur du cadre académique, de sorte qu'une valeur ajoutée marque l'individu, son pouvoir à long terme, la réussite de sa vie et ainsi la qualité de l'organisation de la collectivité. L'innovation en matière d'engagement social et d'esprit d'entreprise à l'université contribuerait à former un meilleur citoyen, conscient et engagé, et à développer les forces de la personne. L'innovation n'est pas seulement une voie à emprunter pour le savoir-faire, mais également pour le savoir-être.

Selon nous, les activités parascolaires permettent de vivre des expériences qui contribuent à développer les forces citoyennes. Également, les activités parascolaires permettent de vivre des expériences qui contribuent, tout comme l'enseignement, à développer les forces personnelles. Puis, en guise d'exemple, Forces AVENIR a reconnu 4 000 jeunes qui, à tous les ans, essaient d'en faire la promotion, pour vous donner toute la valeur. Puis j'ai amené avec moi assurément nos deux meilleurs: la première en 1999, puis Félix-Antoine en 2003. Puis j'aimerais ça qu'ils vous parlent un peu de leur cheminement académique, de ce qu'ils ont pu retirer à travers leur cheminement, pour que vous puissiez apprécier la valeur de ces propos. Valérie.

Mme Gosselin (Valérie): Bonjour. Ça me fait plaisir d'être ici. C'est ma première expérience. Je vais essayer de décrire un peu le parcours que j'ai fait. En fait, moi, je suis atteinte de fibrose kystique, de diabète. Donc, ce n'est pas toujours facile. Mais, moi, ça m'a donné une urgence de vivre, une force de vivre et de m'impliquer dans mon milieu, de faire du bien aux autres pour me faire du bien à moi aussi. Puis d'apprendre, oui, c'est bien, le savoir. J'ai étudié en psychologie pour m'orienter comme psychologue, mais j'ai toujours beaucoup valorisé l'implication pour développer des valeurs personnelles. Parce que je trouve que, dans le milieu universitaire, on apprend beaucoup de choses au niveau technique pour se débrouiller au niveau des théories, des approches, surtout en sciences sociales, mais le développement des valeurs, la compassion, l'altruisme dont on a besoin dans nos interventions, dans notre rôle de citoyen aussi, ça, je trouve qu'on les apprend beaucoup plus dans de l'implication sociale que sur les bancs d'école. Donc, je trouvais, moi, que c'était un excellent complément à ma formation.

Je me suis beaucoup impliquée, moi, au niveau... Bon. J'ai fait du sport, j'ai fait de la nage synchronisée, j'ai été bénévole pour les compétitions en nage synchronisée. Ça, ça m'a appris la persévérance. Évidemment, avec ma maladie, au début, je n'étais pas capable de faire une longueur sans tousser puis aller cracher aux toilettes, mais j'ai réussi à être championne provinciale novice en 1994. Donc, ça, ça m'a appris l'effort, la persévérance et de ne jamais lâcher, quand on a un objectif, de le cibler et de ne pas le lâcher des yeux. Puis ça, ça fait que je suis une personne vraiment aujourd'hui qui me dépasse. J'ai fondé une entreprise, je crée de l'emploi. Je trouve que ça a une répercussion quand même importante pas juste sur moi, mais aussi autour de moi.

n(14 h 20)n

Puis aussi je me fais souvent dire: Valérie, tu es un modèle pour nous. Quand j'ai des petits bobos, on pense à toi puis on se dit: Valérie, elle le fait, elle fait encore plus que peut-être bien des jeunes, mais elle aurait toutes les raisons du monde de s'arrêter. Mais ça, moi, je le sais que ces choses-là, je les ai apprises par mon éducation aussi mais aussi par mon implication dans la société.

Donc, c'est ça. Moi, j'ai toujours été impliquée. Même que présentement je suis encore psychologue bénévole. Les psychologues, on gagne cher, mais ce n'est pas tout le monde qui peut se payer un psychologue, alors je suis psychologue auprès des familles défavorisées, pour les gens qui n'ont pas les moyens de payer un psychologue. Donc, c'est ma façon encore de contribuer. Donc, c'est ça. Puis ça m'apporte... ça fait que je suis une femme comblée, heureuse, qui rend... en tout cas j'essaie de rendre les autres personnes autour de moi heureuses, puis je me dis...

Je trouve ça tellement merveilleux, ce que François et toute l'équipe de Forces AVENIR valorisent, parce que, dans nos universités, ce n'est pas ça qui est valorisé. C'est beaucoup les notes; les notes, la recherche. J'ai eu des bourses de recherche, j'avais une bonne moyenne aussi, mais ça ne m'a pas enlevé de m'impliquer parce que ça, je trouve que c'est plus... encore, dans la vraie vie de tous les jours. Donc, c'est ça. Ça fait que c'est ça un peu que je veux que vous reteniez peut-être, que ça fait de moi une personne beaucoup plus forte et plus vraie. Puis ça fait que, je pense, j'ai un impact positif sur la société, encore plus que peut-être des gens qui ne se sont jamais impliqués, là, au niveau social. Donc, c'est ce que j'avais à dire. Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, Mme Gosselin. À vous la parole maintenant, M. Boudreault.

M. Boudreault (Félix-Antoine): Oui. Donc, Félix-Antoine Boudreault. On vient d'avoir, ici, une option sciences sociales; moi, c'est sciences appliquées. Moi, je suis ingénieur de formation, toujours à l'université, en maîtrise à l'Université McGill. Et, comme disait Valérie, c'est la même... encore plus, j'imagine, en ingénierie, on n'apprend pas les valeurs, là, qu'on parlait, d'altruisme, de compassion, de générosité, etc. Donc, c'est un petit peu dommage. C'est un milieu qui est très, très compétitif. Je ne sais pas comment c'était, dans votre temps, à l'université, mais maintenant c'est... On n'apprend pas du tout...

Des voix: ...

Le Président (M. Kelley): ...partout d'ailleurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: On a encore...

M. Boudreault (Félix-Antoine): Oui, oui, c'est ce que... Je n'osais pas mentionner la durée, là. Mais, bref, c'est... Donc, moi, dès le début, j'ai décidé... Même bien avant l'université, j'avais déjà cette volonté-là, ce désir-là de travailler à l'international, et donc j'ai participé à plusieurs programmes qui m'ont amené à l'international, des programmes provinciaux, fédéraux ? Chantier jeunesse, Jeunesse Canada Monde, etc. ? avant l'université.

En entrant à l'université, j'en ai profité pour faire mes stages. Tout ce qui était technique, je l'ai fait aussi en Afrique. Je suis allé trois fois en Afrique mettre mes connaissances au profit de ces gens-là, essayer de faire un transfert technologique, bon, tous les termes, là, qu'on peut associer au développement international. C'est sûr que, moi, c'était un programme coopératif, où j'étais, au baccalauréat. Les gens, mes confrères, bon, ils avaient des expériences de travail plus souvent qu'autrement ici, et donc ils avaient donc des compétences professionnelles qu'ils pouvaient après mettre à profit lorsqu'ils allaient se trouver un emploi. Je trouve que, dans l'option que j'ai prise et que prônent aussi plusieurs organismes dont Forces AVENIR, c'est que, en plus d'avoir des expériences professionnelles, on a aussi une expérience humaine qui fait probablement de nous des meilleurs citoyens, comme on parle ici.

Je crois que le temps s'écoule un peu, on va...

Le Président (M. Kelley): Il reste deux minutes et demie.

M. Boudreault (Félix-Antoine): O.K. Non, je crois que je vais arrêter pour l'instant. Merci.

Le Président (M. Kelley): Alors, merci beaucoup pour ces deux témoignages qui, je pense, sont vraiment à votre crédit, à votre honneur. J'ai lu les notes biographiques sur M. Boudreault qui sont dans le mémoire et c'est vraiment formidable qu'est-ce que vous avez fait, et Mme Gosselin également, c'est des beaux témoignages. Alors, sur ce, la parole est au ministre de l'Éducation.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter la bienvenue à mon tour à M. Grégoire, M. Boudreault, Mme Gosselin. Des témoignages fascinants, en effet, et ceux qui ont assisté à la soirée de gala ont pu entendre plus de détails et voir des vidéos.

Il est clair que les deux exemples que nous avons devant nos yeux donnent foi à cette affirmation qui est dans le titre, où on associe la qualité de l'enseignement universitaire à l'engagement parascolaire. Mais, d'une façon plus générale, j'aimerais, M. Grégoire, peut-être que vous nous parliez un peu de ce lien qui existe. Parce qu'on a deux témoignages, mais est-ce que c'est plus documenté... Puis des témoignages, il y a des exemples beaucoup que vous nous donnez. Est-ce que c'est plus documenté ou est-ce qu'on peut élaborer un peu sur ces avantages liés à la qualité de la formation, et peut-être... vous n'en parlez pas peut-être parce qu'il n'y a pas lieu d'en parler, mais à l'accessibilité, également parfois, de la formation?

Et je vais... J'apprends tranquillement mon métier, j'apprends à poser deux questions dans une. Ma deuxième question...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Reid: ...ma deuxième question... J'ai eu beaucoup d'exemples devant mes yeux. Ma deuxième question...

Une voix: ...

M. Reid: C'est ça, c'est la bonne école.

Le Président (M. Kelley): Habileté parlementaire.

M. Reid: Et la deuxième question, c'est: Si effectivement ça a un impact, qu'on pense, sur la qualité de la formation, est-ce que ça devrait... Je pense que, dans certains cas, c'est l'objet d'une démarche pédagogique précise dans des universités ou dans des départements. Mais, si effectivement il y a des avantages aussi certains, est-ce que ça ne devrait pas peut-être faire davantage l'objet d'une démarche structurée dans les programmes, là où ça n'est pas le cas?

Je ne pense pas que la majorité des gens qui ont été en nomination faisaient partie d'un projet qui était intégré dans une démarche pédagogique, dans une formation. Ça faisait partie de la vie étudiante en général des universités, je pense, du moins, en tout cas. Mais, si tel n'est pas le cas, détrompez-moi. Mais, si tel est le cas, qu'est-ce que vous en pensez, en termes de la valeur ajoutée que ça apporte, d'intégrer une telle démarche à l'intérieur d'une démarche pédagogique d'un programme? Et n'oubliez pas ma première question, sinon je vais avoir manqué mon coup, là, dans ma nouvelle approche.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Kelley): M. Grégoire.

M. Grégoire (François): Si mes confrères aussi veulent répondre, là, n'hésitez pas, puis, si vous voulez ajouter, n'hésitez pas aussi.

La première question touchait un peu est-ce qu'il y a une influence sur l'implication et puis est-ce qu'il y a un lien entre... et l'accessibilité, hein? C'est ça, cette question-là? Puis le mémoire n'en fait pas mention.

M. Reid: Le mémoire en fait mention, c'est un titre de la page... Il n'y a pas de page, mais enfin dans le tout début: Qualité de l'éducation et engagement parascolaire. Vous en parlez de façon très générale, un peu à l'image des exemples qu'on a eus, qui sont convaincants. Mais est-ce qu'on peut élaborer un peu plus que ça? Ou est-ce qu'il y a de la documentation qui va un peu plus loin sur cette liaison, là, qualité de formation...

M. Grégoire (François): Oui. Je porte à votre attention qu'au ministère de l'Éducation, en ce qui a trait aux programmes parascolaires, la capacité, par exemple, au secondaire, d'en faire une bonne évaluation, d'avoir une bonne idée des programmes parascolaires dans chacune des écoles ? je parle du secondaire pour l'instant ? le nombre d'étudiants impliqués sur l'heure du midi, le soir, tout ça, il existe plus ou moins de données à cet égard. Les recherches en ce qui a trait à l'impact des activités parascolaires sur l'accessibilité, sur le décrochage, sur... Il y a des études, mais il n'y en a pas beaucoup.

Puis, en ce qui a trait à l'université, des indicateurs de qualité entre l'implication parascolaire et puis la réussite d'un étudiant, le lien que ça a pour le garder à l'université, pour s'assurer qu'il va réussir, je vais vous dire, aussi des études de longévité, là, pour voir l'impact des programmes parascolaires sur la personne, je pense qu'il y a une carence en cette nature. Puis c'est normal, parce que, dans les missions universitaires, on ne fait pas mention que l'université est responsable de créer des programmes para-académiques.

En ce moment, M. le ministre, puis vous avez bien raison, c'est soit à la liberté des gens qui trouvent les moyens pour le faire puis des fois ça s'inscrit aussi dans le cadre d'un cours où on va aller plus loin, on va donner... Ça, c'est bien, ça, c'est... On va donner un savoir puis on va demander de l'appliquer, puis, à partir de là, les heures qui vont être appliquées pour ce projet-là ? puis on va le demander ? vont dépasser largement les heures qu'on donne à un cours. Alors, ça se passe de deux façons: des fois à l'intérieur d'un cours, comme pour monter un programme, pour monter un projet; et puis des fois ça se passe de façon délibérée, l'individu s'engage, dans son intérêt, dans les choses pour lesquelles il peut le faire.

n(14 h 30)n

Si c'était dans la structure, impliqué dans la mission, nécessairement on devrait évaluer la qualité de nos programmes para-académiques dans l'excellence de la mission universitaire. Puis je pense que, si c'était favorisé et valorisé par une mission qui en fait mention, on aurait des gens, comme eux, beaucoup plus. Il y aurait beaucoup plus de gens comme eux qui s'impliqueraient, qui s'investiraient. Puis l'engagement, c'est un peu... C'est une habitude. On les prend, on les garde. Ils sont encore impliqués. Une des normes de Forces AVENIR, une des choses que les jeunes nous disent, qui ont fini l'université: ils sont encore impliqués. Mme Trépanier devait venir ici, c'est une personne qui était impliquée tous azimuts dans la société. Puis elle avait un conseil d'administration. Elle n'a pas pu se libérer, elle devait être ici. Elle est encore impliquée.

Alors, je ne sais pas si je réponds bien à votre question. Puis le lien entre l'accessibilité, Félix-Antoine me disait qu'il peut avoir aussi... Ça peut être bien pour les universités. Un jeune qui est au secondaire qui s'est impliqué dans des sports, dans un projet d'éducation en environnement, dans un projet d'entrepreneurship, dans un projet social, qui a fait du parascolaire au secondaire, si l'université s'identifie comme étant des institutions qui favorisent ça aussi, peut-être que des étudiants du secondaire vont dire: Aïe! moi, ça répond à ce que je veux, comme besoin, comme parcours de vie, je vais choisir cette université-là. Je pense que ça peut être quelque chose qui attire. À partir de là, ça peut être un frein à... ça peut être un... En tout cas, peut-être que la dimension qui nous donne des freins à l'accessibilité serait atténuée.

En tout cas, tout ça pour vous dire que, sur l'accessibilité, je pense que ça peut être également une voie à emprunter puis on pourrait être surpris de voir combien les étudiants reconnaissent ou aiment l'idée, là, de s'impliquer dans une université qui va leur donner les possibilités, là, parallèlement à leurs études, de faire preuve d'engagement.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Jean-Talon, une courte question, il vous reste trois minutes.

Mme Delisle: Oui, ce sera court. Alors, je trouve ça très rafraîchissant de vous entendre aujourd'hui, madame et messieurs. Dans mon temps, il y avait effectivement, au secondaire et au collégial, surtout au collégial, l'obligation de faire du parascolaire, et ça s'est comme perdu lorsqu'on est arrivés à l'université.

Ma question en fait... Parce que je pense que vous avez fait le point, vous avez très bien illustré, là, par des exemples et aussi par vos propos, l'importance de l'engagement du citoyen dans son milieu. Et, quand on considère la difficulté, aujourd'hui, que les gens ont à concilier travail-famille, c'est à se demander si les gens vont prendre... pouvoir même considérer prendre du temps pour s'engager, donc il faut que les habitudes soient prises avant.

Quelle réception avez-vous de la part des universités? Je vois que vous proposez un vice-rectorat, dans les universités, qui serait responsable finalement de promouvoir puis d'aller... de promouvoir cette action-là dont vous parlez. J'imagine que, si vous êtes ici, devant nous, c'est parce que vous avez déjà commencé à en parler ailleurs. C'est quoi, la réception que vous avez à ce niveau-là?

M. Grégoire (François): La réception, elle est extrêmement positive. Pour vous donner une meilleure appréciation de ce que je vous dis, pour lancer Forces AVENIR, j'ai eu un appui de recteurs, rectrices de grandes institutions ? grandes, il faut comprendre que je n'en dénigre aucune, là ? qui personnellement ont pris le téléphone, ont appelé des entreprises, ont appelé plusieurs personnes pour dire: Ça, c'est important, il faut faire ce pas-là si on veut être capables éventuellement d'ajouter ça à la mission universitaire. Il faut commencer par reconnaître des étudiants qui poursuivent ce parcours-là. Il faut être capable de saisir la valeur pour ensuite peut-être l'insérer dans la structure.

Je pense à M. Michel Gervais, je pense à Bernard J. Shapiro, je pense à M. Pierre Lucier, alors c'est des gens qui ont accueilli ce projet-là favorablement. Puis je pense aussi à la ministre de l'Éducation à l'époque, Mme Pauline Marois, qui a accueilli ce projet-là avec un... comme vous dites, un vent de fraîcheur, puis c'est sans hésitation, en l'espace d'une demi-heure, qu'elle a dit: On y va, c'est sûr. Alors, ces gens-là qui étaient à l'Éducation, dans les universités, moi, je pense qu'ils ont vu ça comme une opportunité pour faire avancer cet esprit-là.

Le Président (M. Kelley): Je pense que c'est le moment pour passer la parole à la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci. Ça fait un lien intéressant. Merci, M. le Président.

Mme Delisle: J'ai bien préparé le terrain.

Mme Marois: Alors, bien je vous souhaite la bienvenue au nom de ma formation politique, ça me fait plaisir de vous revoir. Pour faire une petite histoire courte, effectivement j'ai toujours cru qu'on devait supporter des initiatives qui venaient des jeunes. Et, moi, ce qui m'avait plu en particulier dans votre proposition, c'était vraiment de mettre en valeur des réalisations, des projets que des jeunes initiaient, même si ces projets n'allaient pas mener à la naissance d'une multinationale mais allaient mener à la naissance parfois de petites entreprises, d'autres fois simplement allaient permettre le développement de jeunes bourrés de talents et qui ne finissaient pas par trouver, je dirais, une façon d'être reconnus.

Forces AVENIR, dans ce sens-là, qui était une initiative de jeunes, m'a plu beaucoup, et c'est pour ça que j'ai donné mon aval à l'époque, et j'ai donné mon aval, mais le résultat il est... C'est-à-dire, vos réussites et vos résultats, ce sont les vôtres, hein, je pense que vous êtes bien conscients de ça, et de tous ceux et celles qui ont mis leur talent dans ce projet-là. Et maintenant je pense qu'on est bien fiers de voir chaque année le gala Forces AVENIR qui vient reconnaître des réussites exceptionnelles. Vous en avez fait une belle description ici, dans votre document, là. Évidemment, ce sont des exemples, parce que vous en avez des dizaines et des dizaines d'autres qui auraient pu être soulignés. Mais, quand on se désole parfois de certains gestes posés par des jeunes souvent un peu malheureux et mal pris, je me dis: On se console en regardant toutes les réalisations que beaucoup de jeunes font pour eux-mêmes et pour d'autres jeunes aussi puis pour leur collectivité. Alors, je vous félicite de vous être rendus jusque-là et j'espère que vous allez pouvoir continuer à accompagner des projets, et à les appuyer, et à les mettre en valeur.

Ce matin, on a rencontré la Fédération des commissions scolaires et on a abordé un peu la question du décrochage, entre autres, et des problèmes de réussite chez les jeunes garçons. Et une des réponses qui ont été apportées par le président de la Fédération des commissions scolaires, M. Caron, c'est de dire: Il faut qu'on développe du parascolaire dans les écoles primaires ou les écoles secondaires, qui va donner le goût aux jeunes d'être à l'école, et aux jeunes gars en particulier. Puis y étant, bien ils vont apprendre en même temps, tu sais. C'était un peu amusant de la façon dont il le disait, mais il reste qu'il y a là, je suis persuadée, une piste qu'il faut continuer d'explorer et surtout de mettre en oeuvre, c'est-à-dire des actions qu'il faut mettre en oeuvre dans cette perspective-là.

Il y a beaucoup d'associations étudiantes qui souhaitent que l'on reconnaisse l'implication étudiante et qu'on le reconnaisse formellement à l'occasion d'un diplôme qu'on émettrait. On pourrait même reconnaître certains crédits parce qu'il y a un engagement à l'égard soit de projets sociaux, communautaires liés à l'université, liés au champ de pratique dans lequel on se trouve, au champ de formation dans lequel on se trouve, ou simplement à l'entraide internationale, ou quoi que ce soit. Est-ce que vous avez réfléchi à ces questions-là puis est-ce que vous êtes au courant de cette demande des associations étudiantes?

M. Grégoire (François): Dans certaines universités, il y a déjà des crédits à l'implication, à l'Université Laval. Le crédit à l'implication, je pense que c'est une belle façon de favoriser l'engagement. Félix-Antoine me disait tout à l'heure que tout le monde qui donne aime ça être reconnu d'une certaine forme. Par contre, il faut aussi comprendre que l'engagement, il ne faut pas tout le temps que ce soit payant pour soi. L'engagement, c'est relatif à soi, mais c'est relatif aux autres.

Alors, moi, je suis pour ça, de donner une formule de reconnaissance avec des crédits pour souligner la part d'étudiants qui se sont impliqués. Foncièrement, je suis pour ça, ça va favoriser et puis ça va valoriser. Mais par contre ce n'est pas suffisant. Ça, c'est important aussi. Ce n'est pas suffisant, je crois. Forces AVENIR a, à lui seul... en faisant la promotion de modèles d'excellence qui s'impliquent, peut avoir aussi un impact majeur. Parce que ces gens-là, ils sont dans les classes, ils ont des amis, ils ont des familles, ça parle de l'engagement, ça parle de l'esprit d'entreprise.

n(14 h 40)n

Donc, promouvoir des modèles d'engagement, c'est important. Puis je pense qu'on devrait développer ou on devrait supporter les universités qui ont déjà commencé à créer des Forces AVENIR dans leur institution pour, à tout le moins, commencer à reconnaître de façon formelle l'implication. Ce n'est pas toutes les universités qui les font. Encore une fois, il y a deux, trois ans, j'étais à l'Université de Sherbrooke, avec M. Reid, puis on remettait, à cette institution-là, la 3 000e reconnaissance officielle de l'implication. Puis, dans d'autres établissements, il n'y en avait pas, de reconnaissance. Forces AVENIR a amené ça. Aujourd'hui, toutes les universités, pour les candidatures qui sont déposées dans le cadre de leur institution, vont donner un diplôme ou une lettre félicitant les candidatures qui ont été déposées. Donc, ça, ça a une valeur, à mon avis.

Avoir des crédits, ça en a une autre. Ajouter, à la structure, à la mission universitaire, la dimension élabore des programmes para-académiques, ça, ça va amener énormément d'innovations. Ça, ça veut dire qu'il y a un bassin d'étudiants, et de professeurs, et de directions universitaires qui vont dire: Comment on réussit à être bon en cette matière? Puis il va se développer des idées beaucoup plus grandes que celles qui sont dans ce document-là, à la dernière page, puis que celles des trois crédits. On va devenir créatif.

À partir de ce moment-là on va avoir une université, à mon avis à moi, de recherche et de savoir ? à mon avis c'est important d'investir là-dedans ? mais on va avoir une université qui va développer aussi quelque chose qui va la différencier à l'échelle québécoise, à l'échelle canadienne et à l'échelle internationale. On va parler des universités québécoises comme étant des universités humaines et des universités de savoir, des universités qui contribuent à l'économie, qui forment les meilleurs travailleurs au monde et qui forment aussi les meilleurs citoyens du monde. Pour ça, il faut l'insérer dans la mission. Puis on va être surpris de l'apport créatif des vies étudiantes, des rectorats, des vice-rectorats, de toute la communauté universitaire.

Déjà Forces AVENIR, juste en reconnaissant des modèles, on a vu, dans les universités, arriver avec un Forces AVENIR McGill, on a vu arriver, dans les villes... parler d'être des villes étudiantes pour faire le lien entre la communauté et l'université. Il ne faut pas que je donne toutes les... Mais en tout cas je vous dis, ça, c'est exceptionnel. Ça, c'est exceptionnel. Ça, ça veut qu'il y a une communauté universitaire qui va rentrer dans sa grande communauté, parce que ça rayonne, les modèles comme Valérie puis comme Félix-Antoine.

Si on injecte ça dans la mission, on va changer la façon de voir l'université. Ça ne la diminuera pas, ça va augmenter sa qualité. Puis je vous garantis que l'accessibilité à l'université, peut-être que les gens vont être davantage prêts à assumer des coûts supplémentaires puis ils vont dire: On en a plus, on en a davantage. Peut-être aussi que, juste parce que l'université s'identifie comme des universités qui contribuent à développer un citoyen responsable, il y a beaucoup d'étudiants qui vont vouloir y adhérer et s'y rendre, davantage que l'élaboration de programmes qui mènent à la profession. On va avoir une université complète, complémentaire, engagée, une université consciente. Puis, moi, c'est ça qui me rendrait fier, comme Québécois.

Le Président (M. Kelley): Court complément de question.

Mme Marois: C'est passionnant de vous entendre. Ça va. On va revenir après.

Le Président (M. Kelley): Je vais revenir mais, à ma gauche, j'ai deux demandes d'intervention et huit minutes qui restent. Alors, je demande de la discipline pour les députés de Maskinongé et Charlesbourg. Je vais commencer avec Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Bonjour. Merci d'être là. Merci du message que vous nous apportez. Vous savez, moi, avant d'être députée, j'étais directrice d'une école secondaire. Je n'ai pas de recherche ou de chiffres à l'appui visant la réussite des élèves par rapport à leur implication dans les activités parascolaires, mais je peux vous dire que j'y crois beaucoup et que mon expérience m'amène à dire que les élèves qui se sont inscrits dans des activités parascolaires ont développé un sentiment d'appartenance beaucoup plus grand à l'école, ont développé de la motivation. En tout cas, j'adhère beaucoup au discours que j'entends.

Dans le message que vous nous laissez, vous dites, entre autres, qu'il serait important d'établir un programme engagement-études auquel les étudiants pourraient s'inscrire. J'aimerais que vous élaboriez davantage, entre autres: Quel serait le curriculum de ce programme et comment vous le voyez, là, inséré par rapport aux programmes qui sont déjà existants dans nos universités?

M. Grégoire (François): Le programme engagement-études, l'idée est venue un peu du sport-études, hein. Alors, le sport-études... les Jeux olympiques et l'histoire des Jeux olympiques ont amené bien entendu le sport à prendre la place qu'on lui connaît au Québec, au Canada puis à l'international. Donc, ça a amené des structures, ça a amené des fédérations, puis ça a amené aussi les étudiants, les jeunes à vouloir en faire, du sport, pour le plaisir du sport bien entendu, pour ce que ça apporte, mais aussi parce qu'il y avait des modèles sportifs qui nous intéressaient, des modèles qu'on voulait atteindre. Toujours est-il que... Alors, à partir de là, il s'est créé des principes pour faciliter justement la venue de sportifs.

Puis souvent, moi, je dis, là, qu'eux autres, ça en est, des sportifs, c'est des athlètes de l'engagement. Alors... mais on est loin d'être en mesure d'avoir des athlètes en engagement puis tout un programme structuré, parce que la culture... Par exemple, en environnement, dans Forces AVENIR, on peut recevoir 20 dossiers de candidature qui vont toucher 150 jeunes. Je pense qu'il faut commencer par développer cette culture-là pour être capable de passer de 150 jeunes peut-être, au Québec, à 300, 350 jeunes qui ont le goût de s'impliquer en environnement puis qui étudient en environnement, puis tranquillement pas vite commencer à bâtir les programmes pour leur donner des facilités. Dans le sens que, s'il veut s'impliquer puis les études coûtent cher, là il va choisir le travail puis il va se concentrer sur ses études. Il faut leur donner des facilités financières, des facilités de temps.

Il faut aussi rendre les professeurs conscients que l'étudiant, lui, étant dans un programme engagement environnement-études, alors il faut juste lui donner la possibilité d'exprimer son potentiel à travers toutes sortes d'organisations là-dedans. À partir de là, ça va prendre, par exemple, la disponibilité des professeurs, des professeurs qui guident et qui encadrent ces jeunes-là, puis ça, d'un point de vue désintéressé de la recherche et du financement, pour dire: Ça va me faire plaisir de t'aider, tu as telle idée en engagement, on peut annexer ça à ton programme, ça va nous faire plaisir, tu vas aller chercher du savoir-faire, mais tu vas sûrement aller chercher comme d'autres valeurs, d'autres...

Donc, ça prend aussi une culture qui va favoriser l'implication des professeurs là-dedans. Comme on peut avoir dans le sport, hein? Les professeurs vont s'impliquer très près de leurs athlètes, ils vont être là. Je pense à M. Jean-Marie De Koninck, hein, son implication dépasse largement ses recherches, quoique c'est un chercheur extraordinaire, mais il est impliqué également pour le sport, beaucoup. Il s'est rendu disponible, et parce qu'il a une culture sport-études qui l'a favorisé.

Moi, je pense qu'au Québec il faut commencer à la base, dire... Dans l'énoncé de mission qui nous a été présenté aujourd'hui, peut-être d'annexer ça, puis de laisser par la suite, avec les années ? parce que, là, on parle du long terme, on parle de long terme, on ne parle pas de court terme ? les institutions, dans toute leur autonomie, donner naissance à cet aspect-là. Puis ils vont donner une couleur, je pense, qui va être différente d'un endroit à l'autre. D'un endroit à l'autre, ils vont s'inspirer beaucoup. Et puis on peut en arriver finalement à créer un mécanisme, d'ici 20 ans, qui va être envié de partout dans le monde.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: Combien de secondes, ou de minutes?

Le Président (M. Kelley): 3 min 30 s.

M. Mercier: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue ici, à l'Assemblée nationale. Bien que ce soit votre première expérience, je dois vous avouer, jusqu'à maintenant, ça va très bien.

J'ai répertorié évidemment, comme le disait la députée de Taillon, moi, j'ai répertorié 27 exemples évidemment de modèles, de modèles dans votre mémoire. Mais je suis assuré qu'il y en a des milliers d'autres, au Québec, qui méritent autant d'attention, mais je vous dirais que le portrait que vous dressez là m'impressionne énormément, et je tiens à vous en féliciter, vous personnellement, mais également ceux qui sont présents dans le mémoire. Et je dirais que certains... Évidemment, je remarquais que beaucoup proviennent des régions, et ça nous démontre à quel point les régions, au Québec, sont pleines de talents, et ça, c'est bien heureux.

Je vous dirais que je reconnais également tout ce qui est parascolaire, comme le disait tout à l'heure ma collègue de Maskinongé. Parce que, moi-même, ça m'a amené, tout ce qui est parascolaire, dans un autre monde, c'est-à-dire à devenir officier de la marine, ce qui est totalement différent de la politique. Mais ça prouve à quel point, à un moment donné, dès qu'on étudie dans un certain domaine, les activités parascolaires peuvent nous amener dans un monde tout à fait différent mais tout aussi valorisant pour l'humain.

Ma question va être plus spécifique, je vous dirais, pour faire suite à ce que M. le ministre tout à l'heure disait et ce que vous vous avez répondu, c'est-à-dire la reconnaissance avec les crédits. Et, moi, ce qui m'intrigue beaucoup, c'est de... Puis ce que vous indiquez là-dedans, dans votre mémoire, c'est de bonifier le diplôme en ajoutant une mention pour les étudiants du baccalauréat, de la maîtrise, du doctorat, et etc. De quelle façon ce serait articulé? Est-ce que ce serait un document tout à fait à part, compte tenu des crédits qui sont donnés, ou c'est vraiment à même le diplôme que ce serait inscrit? Et est-ce que ça doit nécessairement être la matière qui est étudiée ou du moins qu'il y ait certaines affinités ou ça peut être complètement différent, comme je vous le disais tout à l'heure en préambule?

Le Président (M. Kelley): Qui veut... Mme Gosselin ou...

Mme Gosselin (Valérie): Mon Dieu! Bien, c'est une opinion personnelle, là, mais, moi, j'aurais tendance à ne pas encourager nécessairement que ce soit uniquement dans son domaine d'études. Au contraire, je trouve qu'on s'enrichit en allant chercher d'autres domaines. Puis la mention, mon Dieu, vite comme ça, une idée... Ça peut être en termes d'heures. Mais, en même temps, moi, qu'est-ce que j'aurais peur que ça fasse dans la tête des gens: O.K., là, il faut que je fasse mon 100 heures, là, puis là c'est fait, puis, O.K., merci, bonsoir. Mais je crois que ceux qui sont fondamentalement sincères dans leurs actions, ça, le fait qu'ils vont s'impliquer comme ça...

n(14 h 50)n

Tu sais, des fois, il faut se botter un petit peu pour commencer quelque chose, puis là juste de prendre goût à l'accomplissement de soi, on se rend compte qu'en donnant de soi ça nous fait grandir énormément. Puis ça, je pense que ce serait la meilleure façon de les obliger un peu à faire un certain nombre d'heures, bien on risque de développer beaucoup plus... Comme quand on fait de l'exercice, ça ne nous tente jamais, mais, un coup qu'on a commencé, on ne veut plus perdre cette sensation-là. Ça fait que je pense que ça pourrait être une bonne façon peut-être, d'inculquer un minimum d'heures.

M. Mercier: M. le Président, si vous me permettez, très rapidement.

Le Président (M. Kelley): Dernier commentaire, 20 secondes.

M. Mercier: Merci, M. le Président. Alors, est-ce que ce serait exclusif à chacune des universités ou ça pourrait être standardisé à la grandeur de la province?

Mme Gosselin (Valérie): Ça doit être standardisé, dans le fond. Je ne sais pas, c'est une opinion personnelle.

M. Grégoire (François): Non. Ça peut être standardisé, mais je pense aussi que... Ça peut être standardisé, mais, moi, je le laisserais à la discrétion et à l'évaluation de chacun des milieux. L'avantage que ça a, bon, bien je pense que les milieux vont émettre leurs propres standards. Éventuellement il va y avoir des discussions entre les établissements pour dire: Quels standards que vous avez mis? À partir de là, avec le temps, on va pouvoir avoir une meilleure valeur d'excellence de cette... Puis je suis à peu près convaincu qu'il y a des gens qui vont vouloir... On pourrait faire le baccalauréat traditionnel puis un baccalauréat en arts, parce que ceux qui réussissent leurs études puis qui s'impliquent, c'est de la relève en arts.

À partir de là, il y a des gens qui vont poursuivre un cheminement pour... pas juste... ils vont s'impliquer, sont impliqués, mais ils vont être tellement contents d'avoir poursuivi l'objectif d'avoir le baccalauréat en arts remis dans... ou la maîtrise ou le doctorat qu'à partir de là, moi, je pense qu'il y aurait des comités d'évaluation pour regarder les parcours, établir les standards d'excellence. Il faut être capable de livrer ces choses-là pour que ça ait une valeur, une valeur pour ceux qui les ont.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Il reste 10 minutes pour les partis de l'opposition. Alors, je vais commencer avec M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Bonjour à vous autres. On a eu deux ou trois universités qui ont passé hier après-midi et ce matin, puis ils nous parlaient qu'il y avait... Ils nous ont donné comme exemple la formule 1. Il y en a même une, elle nous a dit: On a la machine, mais on n'a pas le gaz. J'aurais le goût de dire que le gaz, c'est vous autres. Mettez-vous en lien tout de suite, ils ont besoin du gaz pour partir.

En tout cas, moi, j'ai... Remarquez que je suis peut-être en retard dans les nouvelles, mais, moi, c'est la première fois que j'entends parler de Forces AVENIR, là. Est-ce que vous êtes dans toutes les universités du Québec?

M. Grégoire (François): Oui. Les universités du Québec épaulent cette cause-là dans le secteur des vies étudiantes, puis, pour chaque université, il y a une personne responsable de Forces AVENIR qui voit à la bonne marche du projet: donc, de recevoir les dossiers de candidature, de voir à la sélection puis de voir aussi à leur reconnaissance. Alors, c'est une grosse opération. C'est 17 universités qui s'impliquent activement avec des ressources humaines, des ressources financières aussi. Le milieu universitaire québécois va donner un apport financier, là, une contribution pour qu'on puisse, là... en tout cas pour qu'on puisse fonctionner un peu. Ce n'est pas la... Ils vont contribuer à peu près pour 10 %.

Puis ils vont aussi contribuer aussi, puis je pense que c'est normal de le faire aussi... ils vont le mettre au service des étudiants, de ces jeunes-là, les médias universitaires. Alors, ils vont faire des portraits sur les gens, là, qui sont finalistes ou qui sont reconnus. Donc, ça donne encore une fois... C'est encore une fois un modèle qui rayonne dans sa collectivité proprement dite. Puis ces articles-là, ils ont une valeur aussi parce que souvent les médias régionaux vont les prendre, puis des fois les médias nationaux vont les prendre aussi. Alors, oups! tranquillement pas vite, ça a un effet d'entraînement.

M. Grondin: Alors, moi, je vais donner la chance à mes autres copains d'intervenir. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je trouve ça formidable, votre organisation, puis ça cadre bien quand on dit: Ce n'est pas tout, dans la vie, de gagner sa vie, mais de réussir sa vie. Vous cadrez bien là-dedans. Je vous félicite, et continuez.

M. Grégoire (François): Merci beaucoup.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. J'espère que l'essence que vous avez évoquée, c'est pour la voiture du recteur Béchard et non pour l'incendie du maire Tremblay. Alors, sur ça, je vais donner la parole au député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci beaucoup. Bon après-midi. Merci d'être ici. Et encore, comme je disais tout à l'heure, on a eu différents groupes jeunes soit des partis politiques soit au niveau des fédérations, puis ça démontre encore une fois qu'au Québec bien il y a des jeunes qui sont impliqués. Souvent, on dit que les jeunes des fois sont un peu désabusés de ce qui se passe en politique, mais vous êtes encore une fois la preuve que ce n'est pas vrai, que, lorsqu'on parle de sujets qui nous intéressent, on est sur la place publique.

Pour répondre à votre question, mon université, dans mon temps, c'est la même que vous avez connue. Faites-vous-en pas, je viens d'avoir mon diplôme voilà un mois et demi environ, j'ai reçu mon beau diplôme.

Puis vous avez mis le doigt sur un problème que j'ai connu, moi, au cours de mes années universitaires et qui fait la grande différence entre l'université québécoise, selon moi, même je pourrais aller plus loin, université québécoise francophone versus les universités à travers le monde, au moins des États-Unis et du Canada anglais, grande différence de culture d'université. Malheureusement ? et ce n'est pas partout pareil, parce que j'ai fait deux universités puis j'ai quand même eu la chance, pendant mes années universitaires, de me promener un peu partout au Québec et voir différents types d'universités puis de la façon qu'ils fonctionnaient ? mais trop souvent on mise sur de la formation de cerveaux sans vraiment donner d'outils de citoyenneté.

Moi, personnellement, si je n'avais pas fait toute l'implication que j'ai faite au cours des années, je ne pense pas que je serais la même personne aujourd'hui et je ne pense surtout pas que je serais assis ici avec vous pour pouvoir discuter de ce sujet-là. Cette implication-là que j'ai eue de l'extérieur m'a tellement donné de choses incroyables et de connaissances et d'outils, ces outils-là qui sont tellement importants dans la vie de tous les jours, vous le savez, et, comme vous disiez tout à l'heure, le marché de l'emploi est des fois très, très concurrentiel, mais ces outils-là, là, viennent donner un plus, un plus énorme.

Puis je pense qu'encore plus loin, ça, ce que ça peut donner tant pour les étudiants, pour l'avenir... Pour les universités, c'est important. On parlait beaucoup des dons philanthropiques. Souvent, nos universités francophones ont cette difficulté-là, il n'y a pas la même culture d'appartenance qui existe entre l'université francophone et son étudiant versus l'université anglophone versus ses étudiants. Et ça, cette problématique-là vient beaucoup par le sentiment d'appartenance qui existe moins. Et, par cet engagement-là... Puis c'est le même discours que je tenais l'année passée, dans mon université. Ce lien-là est tellement important, cet engagement-là... Si vous permettez à vos étudiants et vos étudiantes d'être engagés dans leur milieu, ils vont avoir un sentiment d'appartenance qui va se développer.

Puis je pense que le problème... Parce que, même si on donne des crédits de cours... J'ai eu des crédits, j'ai eu la chance, moi, au département... J'étais en science politique, j'étais impliqué au niveau du mouvement étudiant, ça tombait bien, ça cadrait, si on veut, comme un stage. J'ai eu ces crédits-là. Mais, au-delà des crédits, comme vous dites, je crois ? et j'aimerais ça, vous entendre là-dessus ? qu'on doit implanter, le gouvernement doit implanter une culture. On dit: Les entreprises souvent doivent avoir des cultures d'entreprise, mais on doit avoir une culture universitaire d'engagement social, ce qui n'existe malheureusement pas beaucoup dans plusieurs de nos universités, parce que, comme j'ai dit tout à l'heure, on forme les cerveaux sans leur donner vraiment les outils.

Est-ce que vous pensez comme ça, qu'on devrait implanter, au-delà de l'énoncé de la mission, comme ça, implanter cette culture-là à l'intérieur de l'université? Est-ce que vous avez des moyens, vous pensez, pour implanter ce type de culture pour qu'enfin les étudiants puissent... Parce qu'il y a des étudiants qui se font... Moi, je vais te donner un exemple facile. J'ai un de mes amis, il est impliqué, son directeur de thèse de maîtrise lui a dit: Tu débarques de là, sinon tu ne fais plus de la recherche avec moi. C'est une grosse problématique, puis ça, c'est plus dans les sciences... Sciences sociales, c'est peut-être un peu moins présent que les sciences pures et appliquées. Et je pense que c'est une problématique, mais comment on pourrait... Parce que c'est beau de le dire, là, mais comment on peut opérationnaliser ça, selon vous?

Le Président (M. Kelley): M. Grégoire.

M. Grégoire (François): Je suis désolé de vous revenir avec la même réponse: Il faut que l'énoncé de mission l'interpelle, puis les indicateurs d'excellence vont suivre, et les gens et la culture se développeront. Pour développer une culture, monsieur, il y a cinq aspects: il faut favoriser; et il faut valoriser; il faut reconnaître; il faut honorer; et il faut promouvoir. Vous comprenez ce que je vous dis? À partir du moment où l'établissement favorise, les professeurs la valorisent, une fois qu'on la reconnaît, et qu'on l'honore, et qu'on en fait la promotion, toute la roue tourne pour que la culture continue et ne s'éteigne plus. C'est comme ça que ça fonctionne. Ça commence par un énoncé de mission, ça continue par des professeurs, des vice-recteurs et des recteurs qui en parlent et qui le valorisent dans l'établissement, ça se poursuit avec des gens que l'on reconnaît, qu'on honore, puis par la suite nos meilleurs sujets, on en fait la promotion. Voilà une culture.

M. Bourdeau: Dernière petite question: Est-ce que vous pensez ? puis là c'est une idée qui m'est venue lorsque vous parliez ? qu'on pourrait peut-être aussi inclure, dans tous les curriculums de cours, un stage ? moi, j'avais connu ça au secondaire, c'est pour ça que ça m'est venu comme ça ? un stage de formation dans des milieux, mettons, un peu défavorisés ou, tu sais, là, d'amener ce stage-là avec la formation qu'on a, par exemple, bon, en ingénierie, dans d'autres milieux? Est-ce que vous pensez que ce serait une bonne idée de... au-delà juste du crédit d'engagement? Parce qu'il y a des universités qui le donnent, comme vous dites, là, mais ça, c'est un crédit parascolaire, si on veut, mais, exactement dans le curriculum de cours, avoir un stage obligatoire?

M. Grégoire (François): Absolument.

M. Bourdeau: Oui, parce que...

n(15 heures)n

M. Grégoire (François): Mais par contre ce que je vous dirais, c'est d'en arriver à parler à l'étudiant pour dire: Est-ce que vous avez le goût de vous impliquer à l'intérieur de ce cours-là? Si oui, si vous avez une idée, ça va me faire plaisir. Comprenez-vous? Il faut aussi que ça vienne de l'étudiant. Il faut que ce soit valorisé, mais il faut aussi que ça ait une valeur pour eux, il ne faut pas que ce soit obligatoire tout le temps. C'est ça que je veux vous dire. Le stage, ça a une valeur formatrice intéressante, puis, à certains moments, c'est important d'en avoir. Dans d'autres, juste parce que c'est valorisé et suggéré, oup! il se crée des groupes qui décident d'avoir une idée à l'intérieur d'un cours, à l'intérieur d'un savoir, puis dire: Bon, bien on va faire un savoir-faire puis, en même temps, on va avoir un savoir-être. Puis, si, dans l'institution, on favorise ça, le professeur va être enclin, lui, à les aider, à les guider pour les partir.

Alors, moi, je vous dirais que la notion de stage, elle est intéressante, mais je pense aussi que la notion de liberté de s'impliquer, elle l'est aussi. Puis ça, c'est un autre défi, en arriver à ça. C'est une subtilité qui est importante. Le sentiment que tu as eu le choix, tu as pris le choix et puis tu l'as appliqué, le sentiment de fierté n'est pas le même.

Le Président (M. Kelley): Alors, il nous reste seulement à dire merci beaucoup à Forces AVENIR. Félicitations pour cette première participation dans une commission parlementaire, et je vous invite de répéter l'expérience avec d'autres commissions parlementaires.

Sur ce, je vais suspendre, très rapidement, pour saluer nos inviter. Et j'invite les représentants de la Fédération médicale étudiante du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 1)

 

(Reprise à 15 h 3)

Le Président (M. Kelley): Alors, je demande aux membres de prendre place, s'il vous plaît. Et les représentants de la Fédération médicale étudiante du Québec, c'est à votre tour. Alors, bienvenue. Et je vais donner la parole à M. Charbonneau, je pense, qui est le président. La parole est à vous.

Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ)

M. Charbonneau (Guillaume): Oui, bonjour. Je vais commencer par vous présenter mes deux collègues. Je vous présente, à ma droite, Mme Hélène Khuong, qui est déléguée aux affaires politiques pour notre fédération, qui est aussi étudiante en médecine à l'Université Laval; puis, à ma gauche, Mme Laurence Masson-Côté, qui est vice-présidente aux affaires externes de notre fédération et aussi étudiante à l'Université de Montréal en médecine. Moi-même, j'étudie à l'Université de Montréal en médecine, et je suis président de la fédération.

Donc, d'abord, notre fédération apprécie beaucoup l'invitation qui lui a été faite de présenter les réflexions de ses membres sur les préoccupations bien d'actualité dans le domaine de la formation médicale.

La FMEQ compte plus de 2 700 membres qui sont tous étudiants, étudiantes en médecine dans l'une des quatre facultés du Québec, soit l'Université Laval, l'Université McGill, l'Université de Montréal et l'Université de Sherbrooke. Donc, la fédération est le porte-parole officiel de l'ensemble des étudiants en médecine du Québec, et ses délégués entretiennent des liens réguliers avec les différents intervenants de la formation médicale comme le Collège des médecins, la Table de concertation permanente sur la planification de l'effectif médical au Québec, l'Association des facultés de médecine du Canada et le Conseil médical du Canada.

La fédération a aussi un volet international. Chaque année, elle envoie des représentants à l'assemblée biannuelle de l'International Federation of Medical Students' Association, où elle négocie des ententes pour des échanges internationaux pour ses membres et aussi pour ouvrir la voie vers une collaboration en santé internationale.

La FMEQ s'est aussi intéressée beaucoup au débat dans le domaine de la santé au Québec et au Canada, notamment en participant aux travaux de la commission Clair et de la commission Romanow.

Finalement, la FMEQ a joué un rôle actif dans le débat actuel au sein des milieux pédagogiques médicaux quant aux conditions encadrant la qualité de la formation médicale au Québec, notamment par la production du constat des effets qualitatifs des hausses d'admissions en médecine sur la qualité de la formation médicale au Québec et des pistes de solutions à privilégier. Ça, c'est un rapport qui a été publié en novembre 2002.

Donc, les études médicales se situent au confluent des domaines de l'éducation et de la santé. On ne peut pas ignorer qu'un volet important de la qualité des soins médicaux, au Québec, passe par la formation des intervenants de l'ensemble des sciences de la santé, notamment les médecins.

Donc, notre présentation aujourd'hui reflète les réflexions quant à un système universitaire en santé, et elle va se diviser en trois parties: d'abord, je vais rappeler les modalités de la formation médicale prédoctorale au Québec; par la suite, Mme Khuong va vous présenter les enjeux de la qualité de la formation médicale au Québec; puis finalement Mme Masson-Côté présentera la vision des étudiants en médecine quant à l'accessibilité aux études médicales au Québec ainsi qu'au Canada. Par la suite, je vais terminer avec une conclusion.

Donc, le cheminement menant l'étudiant en médecine vers son permis de pratique est de très longue haleine. Il faut d'abord quatre à cinq ans d'études prédoctorales, suivies d'un programme de résidence de deux à six ans. Donc, il s'écoule au minimum six ans pour la formation d'un médecin généraliste et de, minimum, neuf à 10 ans pour un médecin spécialiste. C'est important de comprendre, là. C'est assez compliqué, la formation médicale, là. Les étudiants qu'on représente en fait sont dans leur formation doctorale et il y a aussi des médecins résidents qui sont toujours en formation, qui, eux, sont représentés par la Fédération des médecins résidents du Québec.

Donc, la partie qui concerne nos étudiants, c'est-à-dire la formation de premier cycle, est divisée en deux étapes. La première partie, c'est davantage rattaché à l'université, et les deux dernières, ce qu'on appelle l'externat, se déroulent principalement sinon exclusivement dans les milieux hospitaliers. Donc, il n'y a plus d'attache à l'université.

La formation médicale est envisagée dans l'optique d'une pratique médicale, c'est-à-dire que ce n'est pas seulement d'acquérir des connaissances qui est important dans la formation médicale, mais c'est aussi important de développer un jugement clinique, de développer des habiletés d'autoapprentissage puis aussi des bonnes habiletés pour travailler en équipe pour relever les défis de la médecine du XXIe siècle. En ce sens, le Québec a suivi la tendance nord-américaine au niveau pédagogique par l'approche par problèmes, qui privilégie la formation en petits groupes de six à huit étudiants avec un moniteur qui est le plus souvent un médecin. Ça nécessite évidemment un regroupement plus élargi de médecins pour l'enseignement mais aussi de locaux pour que ces petits groupes aient lieu.

Parallèlement à ça, dans la formation médicale maintenant, il y a une approche de plus en plus précoce au contexte clinique et hospitalier. C'est une tendance qui est nord-américaine, et les avantages ont été rapportés quant à l'efficacité de l'apprentissage et aussi à la rétention des notions. Donc, maintenant il y a des étudiants de tous les niveaux qui se croisent dans les corridors des hôpitaux, même si la majorité sont encore à l'externat. À l'externat, les étudiants s'intègrent à l'équipe de soins, c'est-à-dire qu'ils sont en interaction avec les médecins et les autres intervenants de la santé.

Cette formation se fait principalement dans les centres hospitaliers universitaires, les centres hospitaliers affiliés, les institutions universitaires, qui ont une triple mission qui ne leur est malheureusement pas toujours reconnue, soit celle de donner des soins mais aussi de faire de l'enseignement, de participer à la recherche et, même, à l'évaluation des nouvelles technologies.

Donc, les réformes qui ont marqué le système de santé, dans les dernières années, ont beaucoup affecté l'enseignement dans les milieux cliniques. On pense au virage ambulatoire qui a raccourci la durée de traitement des patients et aussi qui a amené un nombre décroissant de patients dans les milieux hospitaliers, ce qui fait que les étudiants sont moins exposés aux patients hospitalisés. Les patients sont de plus en plus sollicités pour des fins pédagogiques, tant par les étudiants en médecine que par les médecins résidents et aussi tous les autres intervenants du milieu de la santé. De plus en plus de patients sont suivis en externe. On pense aux suivis de grossesses, des suivis des enfants anormaux, de nombreuses pathologies qui sont prises en charge dans les cabinets privés, tant par les omnipraticiens que les spécialistes, qui sont des patients qui ne sont pas disponibles ou du moins très peu pour des fins d'enseignement.

n (15 h 10) n

Parallèlement au virage ambulatoire, les cliniques externes puis tous ces... ont commencé à s'organiser pour adapter l'enseignement à ce nouveau mode de soins, mais il reste encore beaucoup de travail à faire pour que notamment on ait suffisamment de cubicules de consultation qui soient adaptés à l'enseignement, c'est-à-dire qu'il y en ait un nombre suffisant qui soient capables aussi d'accueillir l'étudiant, le patient et le médecin superviseur.

Il y a aussi la pénurie des effectifs médicaux évidemment qui affecte l'enseignement. Les tâches cliniques de nos patrons sont de plus en plus importantes, ce qui fait en sorte qu'ils ont de moins en moins de temps pour l'enseignement. Il faut dire que le support financier aux activités d'enseignement est souvent symbolique, sinon nul, et que le paiement à l'acte n'encourage évidemment pas les activités d'enseignement. J'ai souvent... en fait, l'enseignement, c'est vu comme un sacrifice ou un devoir, et, heureusement, la grande majorité des patrons le font très bien, on leur en est reconnaissants. Mais c'est évident que, lorsqu'on a un étudiant avec nous, on ne peut pas voir le même nombre de patients et il faut lui consacrer du temps qu'on ne consacre pas au patient.

Il y a aussi la loi n° 90, la loi qui modifie le code des professionnels, qui va avoir un impact sur l'enseignement en médecine. On ne peut pas encore très bien l'évaluer, mais c'est évident que les actes délégués aux autres professionnels vont demander aux médecins de former d'autres professionnels de la santé, ce qui fait que déjà, étant donné que les ressources professorales sont limitées, on s'attend à une compétition encore plus grande entre de plus en plus d'individus pour ces mêmes ressources professorales.

Donc, la dernière chose, c'est que de plus en plus on parle de formation en région pour les étudiants en médecine, ce qui est une très bonne chose à nos yeux parce que ça ouvre la porte à de nouveaux milieux d'enseignement. Ça donne accès aussi à beaucoup d'autres professeurs pour les étudiants en médecine. Par contre, je crois qu'il faut s'assurer que la formation qui va être donnée à ces étudiants-là dans ces nouveaux milieux va être de qualité au moins égale à celle donnée dans les centres universitaires. Et aussi il va falloir penser aux accommodations nécessaires pour envoyer les étudiants en région, donc penser, entre autres, que l'étudiant qui paie un logement à Montréal, s'il va faire un stage en région, bien il doit se trouver un logement là-bas aussi. S'il va à Sept-Îles, s'il va à Kuujjuaq, il y a des frais de transports qui sont très élevés. Donc, je pense que ça va être des choses qui vont être importantes à tenir en compte.

Donc, je vais passer la parole à Mme Khuong qui va nous parler des enjeux de la qualité de la formation médicale.

Mme Khuong (Hélène T.): Bonjour. Il y a plusieurs organismes qui ont comme mandat d'encadrer la formation médicale et sa qualité, tant celle qui est offerte par les facultés que, ensuite, d'encadrer les médecins qui sont accrédités une fois leurs études complétées. On reconnaît l'importance de leur travail puis l'importance de leur présence, mais il ne faudrait pas oublier que le juge, sur la base quotidienne, de la qualité des médecins, ça reste le patient, puis qu'une formation médicale de qualité, c'est celle qui répondra aussi aux besoins de la société où évolueront les médecins formés.

La pénurie de médecins a amené les facultés de médecine et le ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que le ministère de l'Éducation à renverser le mouvement, amorcé en 1994, qui avait diminué le nombre d'étudiants québécois admis en première année de médecine à un plancher de 404 étudiants en 1996. Dès l'automne 1999, c'est 466 nouveaux étudiants québécois qui faisaient leur entrée dans les facultés, nombre qui allait augmenter jusqu'à atteindre 666 à l'automne 2003. Ça représentait donc une hausse de 64 % sur cinq ans, les admissions.

Parallèlement, les contingents particuliers qui comprennent les étudiants provenants de l'extérieur du Canada puis les étudiants qui bénéficient d'une entente entre le Québec et le Nouveau-Brunswick, bien ce contingent-là a augmenté de 39 % sur la même période. Donc, totalement, les hausses d'admissions, c'est de l'ordre de 60 % entre l'automne 1998 et l'automne 2003. Une hausse aussi rapide de la population étudiante a évidemment eu un impact sur presque tous les aspects de la formation médicale, puisqu'elle a nécessité un recrutement des ressources qui avaient été mises de côté par les baisses précédentes et un recrutement de nouvelles ressources jamais sollicitées.

Il faut comprendre que les ressources en médecine qui sont destinées à la formation sont évidemment très limitées et que les organismes d'agrément sont évidemment très inquiets de... Parce que, par exemple, aux États-Unis, la cloche d'alarme sonne lorsqu'on parle d'une hausse d'admissions de l'ordre de 20 %. Alors, celle de 64 % a été accueillie avec scepticisme évidemment de la part de certains de ces organismes. Puis tout cela s'est produit évidemment dans le contexte de pénurie de médecins qu'on connaît.

En novembre 2002, ainsi notre fédération déposait un constat des effets qualitatifs dus aux admissions d'étudiants sur la réalité de l'enseignement de la médecine au Québec. Parmi les effets négatifs des hautes admissions sur les conditions d'apprentissage au niveau pré-clinique, on peut mentionner le manque de places en auditorium, l'augmentation du nombre d'étudiants en groupes d'approche par problèmes, alors qu'il est reconnu que le nombre optimal est de six à huit étudiants. Le recrutement de médecins spécialistes devant animer des groupes APP devaient animer des groupes d'une spécialité autre. Par exemple, on peut penser à un gastroentérologue de l'Université de Sherbrooke qui s'est retrouvé à animer un groupe de gynéco-obstétrique.

Il y a également un manque de microscopes ou de cadavres de dissection, des annulations de séances pratiques par manque de moniteurs, puis l'augmentation des groupes d'étudiants qui participent à des après-midi en hôpital, qui amènent parfois des cohortes de 15 étudiants dans une chambre de patient.

Dans les milieux cliniques, l'impact est encore plus évident avec une diminution du nombre de patients sous la responsabilité de chaque étudiant et, parfois même, un partage des patients entre deux et trois étudiants. De faire une augmentation de la sollicitation de ces patients hospitalisés, certains refusent même désormais d'être en contact avec des étudiants à leur admission. Il y a une augmentation du nombre d'étudiants par médecin superviseur puis une limitation des stages à option disponibles. Il est quand même paradoxal de constater que, en même temps qu'on encourage l'exposition clinique précoce dans la formation pour favoriser la rétention des apprentissages, cette même exposition clinique diminue chez les externes, une fois dans leur période de stage.

En réponse à ce document déposé par notre fédération, un groupe de réflexion sur les conditions de la formation médicale a été formé. Son rapport, déposé en décembre 2002, énonçait diverses recommandations qui se rapportaient à la bonification des tâches d'enseignement par les médecins, au recrutement des médecins aux fins d'enseignement, à l'aménagement de nouveaux locaux d'enseignement sur les campus et en milieu hospitalier, à un financement supplémentaire des facultés de médecine, au développement très rapide d'un nouveau milieu de stage et à la rétention des médecins en milieu universitaire. Selon ce groupe, il paraissait difficile que les facultés puissent s'engager à maintenir la qualité de la formation des prochaines cohortes d'étudiants si les moyens appropriés ne leur étaient pas fournis. Aujourd'hui, un an plus tard, le constat demeure le même.

Une partie du financement pour de nouvelles infrastructures a été versée aux facultés de médecine. Une rénovation du pavillon des sciences de la santé est prévue à l'Université Laval. Toutefois, les amphithéâtres et les locaux d'étude sont encore plus bondés, les groupes d'APP et d'ateliers sont encore plus nombreux, le recrutement des médecins enseignants demeure difficile, et l'enseignement est toujours aussi peu valorisé lorsqu'il est comparé aux tâches cliniques. Les médecins résidents, eux-mêmes en formation, contribuent pour environ 40 % à 50 % de l'enseignement aux externes, selon une structure pyramidale où le médecin enseigne au résident enseignant qui, lui, enseigne au résident junior qui, lui, transmettra la formation... ses connaissances à l'externe, et leur nombre fait que... le cheminement en médecine de cinq ans fait que les résidents actuels sont ceux qui ont été admis dans le contexte des baisses drastiques des admissions en médecine.

Donc, le nombre de résidents par rapport au nombre d'étudiants actuels est un ratio qui... est un plancher qui n'a jamais été atteint. Il y a peu de nouveaux milieux de stages qui ont été ouverts, puis cet impact se ferait même... Par exemple, le Centre hospitalier de la Sagamie, à Chicoutimi, commence même à refuser certaines demandes de stages d'externat, faute de capacité d'accueil dans certains secteurs.

Malgré les projets de solution à moyen et long termes, il est difficile pour la FMEQ d'envisager avec optimisme une résolution de ces problèmes à court terme avec le niveau actuel des cohortes. La possibilité d'accommoder 750 étudiants québécois supplémentaires sur cinq ans est d'autant plus intimidante.

Selon les étudiants en médecine, la population québécoise a droit à un nombre suffisant de médecins pour assurer le traitement et le suivi de quiconque en éprouve le besoin. Les étudiants en médecine demeurent conscients de leur rôle social et des attentes de la société envers eux. Certes, il est essentiel d'assurer un nombre adéquat de médecins pour dispenser des soins partout au Québec, mais encore faut-il s'assurer que ceux-ci soient compétents.

Les médecins formés en cette période de réajustements constants seront-ils moins compétents? Pas nécessairement. En effet, l'autoapprentissage est très valorisé au cours de notre formation. Toutefois, ces médecins seront peut-être moins à l'aise dans la prise en charge de leurs patients les premières années, puisqu'ils auront été moins exposés. Il est donc primordial de se donner les ressources financières, matérielles, organisationnelles ainsi que le temps nécessaires pour former les étudiants dans les meilleures conditions.

Je passe donc le relais à Mme Masson-Côté qui vous entretiendra de l'accessibilité aux études médicales.

Mme Masson-Côté (Laurence): Alors, bonjour. Donc, je vais vous parler plus de l'accessibilité aux études médicales au Québec et au Canada. En fait, l'exercice de la médecine a longtemps été perçu comme appartenant exclusivement aux classes plus privilégiées de la société. Ce n'est plus la réalité aujourd'hui, et nous en sommes tous heureux, je crois. À l'image de l'ensemble du milieu universitaire, une plus grande proportion d'étudiants provenant de milieux socialement moins enclins à fréquenter l'université se retrouve désormais sur les bancs à la Faculté de médecine.

Toutefois, les études médicales demeurent un domaine contingenté face aux multiples demandes d'admissions reçues chaque année par les facultés de médecine québécoises. Le dossier académique doit constituer un critère d'admission majeur dans le processus de sélection des candidats dans chacune des facultés de médecine. Or, le support des parents, le niveau d'éducation et le revenu des parents sont souvent cités comme des sources d'influence déterminantes quant à l'excellence académique, et il devient facile de dégager un avantage pour les étudiants bénéficiant d'un tel support quant à l'accès au doctorat en médecine.

n (15 h 20) n

Par ailleurs, le Québec, comme le reste du Canada, se diversifie culturellement. Toutefois, la représentation des minorités culturelles au sein des étudiants en médecine demeure minime. Or, une diversité étudiante permet l'échange d'information et le partage de systèmes de valeurs différents, ce qui constitue une base solide de contact aux autres cultures et milieux socioéconomiques pour le futur médecin. Cela peut donc contribuer à l'établissement d'une relation médecin-patient plus solide si le médecin a été exposé de façon étroite, au cours de ses études, à des systèmes de valeurs différents des siens mais partagés par certains de ses patients. L'enseignement par les pairs prend ainsi tout son sens.

Selon des études récentes, la diversité d'une population étudiante augmenterait la conscientisation des étudiants qui la composent quant aux besoins de groupes diversifiés. De plus, les étudiants provenant de milieux économiquement moins favorisés ou culturellement très diversifiés auraient plus tendance, ensuite, à pratiquer dans des centres se rapprochant de leur milieux d'origine, centres où le manque de médecins est criant.

Dans un autre ordre d'idées, les étudiants en médecine sont généralement perçus comme étant un groupe choyé au sein de la communauté universitaire, ayant un taux de chômage presque inexistant et un revenu enviable à l'issue de leurs études. Par ailleurs, il est étonnant de constater que les étudiants en médecine obtiennent un retour sur l'investissement qui est moindre que ce qu'on pourrait croire, constitué notamment par les années consacrées aux études et les frais de scolarité. Une étude récente effectuée aux États-Unis rapporte même un taux de rendement privé qui serait moindre pour la médecine que pour d'autres professions libérales comme le droit, la médecine dentaire ou le milieu des affaires.

La longueur des études médicales a certainement un impact sur le coût imposé aux étudiants. Il s'écoule environ quatre ou cinq ans à l'université avant de décrocher le doctorat en médecine. Pour obtenir ensuite un droit de pratique, la résidence de deux ans en médecine familiale et de cinq ou six ans en spécialité est obligatoire. De plus, une formation complémentaire surspécialisée de deux ans est requise pour pratiquer en centre universitaire. Près de la moitié des candidats admis chaque année en médecine au Québec ont complété auparavant une formation universitaire: baccalauréat, maîtrise ou doctorat.

À titre d'exemple, l'Université Laval accueille une proportion de 44 % d'étudiants de provenance universitaire. Leur moyenne d'âge à l'admission est de 25 ans. Les étudiants atteignent souvent le nombre de trimestres maximal admissible au programme gouvernemental de prêts et bourses avant de terminer leurs études. Ils doivent alors se tourner vers les institutions financières pour compléter le reste de leurs études médicales.

Comme l'Université de Sherbrooke est actuellement la seule à offrir d'emblée un curriculum prédoctoral de quatre ans aux étudiants provenant des cégeps, bien rares sont donc les médecins qui font leur entrée sur le marché du travail à 25 ans après avoir complété leur résidence.

Entre parenthèse, nous trouvons important de mentionner à cette lumière l'étude de M. François Vaillancourt, déposée en annexe du mémoire de la CREPUQ, que nous ne considérons pas qui reflète la réalité quant au taux de rendement privé des études médicales dû à l'âge où les étudiants terminent leurs études.

La structure des études médicales rend difficile l'occupation d'un emploi pour financer ses études, aussi. En effet, la durée des vacances estivales est raccourcie pour les étudiants en médecine avec une ou deux sessions d'été obligatoires et même une fin ou un début de l'année scolaire ne s'accordant pas avec les autres programmes universitaires. Dès l'entrée à l'externat des deux dernières années de formation, occuper un emploi en parallèle devient carrément impossible. L'horaire régulier comporte les journées normales de travail en plus des gardes de soir et de fins de semaine et quatre semaines de vacances par année seulement.

Notons que la médecine est l'un des rare champs d'études où les stages ne sont pas rémunérés. Cela accroît la dépendance des étudiants en médecine envers leurs parents ou envers les institutions financières.

Une déréglementation a déjà eu lieu, dans certaines provinces canadiennes, quant aux frais de scolarité demandés aux étudiants en médecine. L'expérience de l'Ontario est intéressante à étudier, puisqu'une telle déréglementation est en place depuis 1997. En trois ans, les frais de scolarité annuels de la Faculté de médecine de l'Université de Toronto sont passés de 4 844 $ à 14 000 $ par année, en 2000, et ce, sans ajustement du programme provincial d'aide aux études. Une étude à l'Université de Toronto, parue en 2002, a démontré, sur trois ans, une diminution de la proportion des répondeurs provenant de familles avec un revenu familial de moins de 40 000 $, allant de 22,6 % à seulement 15 %.

L'impact de l'endettement sur le choix d'une spécialité peut aussi se faire de deux manières, puisque les gens qui ont à payer plus durant leurs études s'endettent plus. L'étudiant peut privilégier une formation plus courte lui permettant une entrée sur le marché du travail plus tôt, comme avec la médecine de famille, ou peut choisir des spécialités qui sont moins rémunérées traditionnellement, telles que la psychiatrie, et la pédiatrie, ou la médecine de famille encore une fois. Je veux dire... Oui, c'est ça. Ils pourraient délaisser ces spécialités-là, puisqu'ils auraient moins les moyens de rembourser leurs dettes.

Pour les étudiants en médecine, l'accès aux études médicales devrait être ouvert à tout individu qui en présente l'intérêt et qui réussit le processus d'admission élaboré en fonction de la personnalité et des aptitudes de chaque individu. Les ressources financières, la race, la religion sont tous des critères ignorés actuellement et devraient demeurer comme tels.

Le coût financier de ces longues études est déjà parfois un obstacle pour certains individus qui réussissent avec brio leurs études universitaires et qui hésitent à entreprendre un nouveau cheminement. Il serait dommage, dans le futur, de voir une modulation des frais de scolarité en fonction d'une formation médicale dont le coût est estimé être élevé ou en fonction d'un revenu à l'issue de longues études qui s'accompagnent souvent d'un endettement important. En effet...

Le Président (M. Kelley): Si je peux vous inviter de conclure, parce que...

Mme Masson-Côté (Laurence): Oui, c'est ça, c'est... il nous reste... En effet, augmenter les frais de scolarité dans certains champs d'études pourrait discriminer les étudiants qui répondraient aux critères de sélection déterminés mais qui se tourneraient vers des cheminements professionnels plus courts en causant moins de sacrifices sur le plan humain et moins coûteux. Les avantages de la diversité étudiante ont été établis, et nous croyons que déréglementer les frais de scolarité à l'image de l'Ontario serait un pas vers l'homogénéisation de la population médicale étudiante au Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Et je ne veux pas vous presser, mais je veux préserver le temps pour les échanges avec les parlementaires. Alors, juste pour... Il y avait un léger dépassement, là, je propose quatre blocs de huit minutes. Et je donne la parole au ministre.

M. Reid: Oui. Bonjour, bienvenue. Vous avez un document qui est extrêmement intéressant, les positions sont très intéressantes aussi. Vous avez parlé plusieurs fois des formules pédagogiques, donc de l'APP, etc., et on parle aussi par ailleurs... Le plan de pratique. Moi, j'ai connu, par le biais de Sherbrooke évidemment, l'organisation particulière qu'il y avait là-bas, mais il me semblait que le plan de pratique qui faisait en sorte qu'il y ait une motivation, pour les professeurs, beaucoup plus forte de s'impliquer au niveau de l'enseignement et de la recherche, parce qu'ils étaient compensés de façon importante pour ça, c'était une solution enfin qui semblait bien marcher. Alors, on parle de ça aujourd'hui. Quelle est votre position sur ça et comment vous voyez les discussions qui sont en cours là-dessus?

M. Charbonneau (Guillaume): Pour nous, c'est un modèle qui est très intéressant effectivement parce que le modèle des plans de pratique, la façon que ça fonctionne: il y a des unités qui sont données, les médecins mettent leur rémunération ensemble puis se partagent en fonction d'unités administratives pour l'enseignement puis pour la clinique, ce qui fait que l'activité d'enseignement n'est plus du bénévolat mais une activité qui est reconnue au niveau de la rémunération.

C'est un programme... Je pense que ça dépasse un peu nos compétences, là, au niveau de la rémunération, mais, pour nous, c'est sûr qu'on voit ça d'un bon oeil, parce qu'on croit que c'est important que la... Si on veut qu'il y ait un enseignement de qualité qui soit donné, il faut qu'il soit reconnu. Il ne faut plus que ce soit vu comme du bénévolat, là, parce que, sinon... Nous, on sent même des fois le besoin de remercier, d'acheter des cadeaux à nos patrons, parce qu'on se dit: Ils sont gentils, ils nous donnent l'enseignement, on veut les garder. Et puis ils le font très bien, ceux qui le font.

Malheureusement, avec la hausse des admissions qu'on a connue, les patrons qui se consacrent à l'enseignement sont débordés puis on pense qu'ils n'arriveront pas. Avec les hausses qui ont déjà eu lieu en ce moment puis avec celles qu'on envisage, on est très, très, très inquiets, là, sur la capacité de maintenir une formation de qualité au Québec.

Le Président (M. Kelley): M. le ministre.

M. Reid: Sur le même thème, vous parlez aussi, à plusieurs endroits d'ailleurs dans votre document, à propos de l'APP, vous parlez des locaux, vous parlez aussi, je pense, dans la proposition 8, vous parlez de locaux de façon générale pour les programmes... pour l'APP mais pour un certain nombre d'éléments. Je pense aussi, au numéro 10, que vous parlez ici de financement supplémentaire des infrastructures qui est adressé aux universités en relation avec l'augmentation des clientèles. Donc, autrement dit, les clientèles nouvelles demandent des locaux qui doivent être... Bon. On a vu certaines annonces qui ont été faites, mais c'est des clientèles additionnelles ou...

J'aimerais peut-être vous entendre un peu, d'une façon générale, en regroupant ce que vous dites un peu, là, sur cette question, la problématique telle que vous la vivez ? il y a au moins deux universités que vous représentez ici ? au niveau des espaces et qu'est-ce que ça occasionne quand on pense changement de pédagogie, on pense augmentation des clientèles, on pense aussi à l'utilisation de nouvelles technologies.

Mme Khuong (Hélène T.): Oui. Bien, je peux commencer avec l'exemple de l'Université Laval, où le pavillon était vraiment en manque... Je pense que ça a été reconnu d'ailleurs dès l'entrée en mandat de votre gouvernement. C'est un pavillon qui était désuet, qui avait été conçu pour une population étudiante moindre que celle qu'il accueille actuellement, puisqu'il faut ajouter évidemment que ce n'est pas juste les étudiants du doctorat en médecine qui sont dans ces pavillons-là. Dans l'ensemble du réseau universitaire, on côtoie les étudiants en pharmacie, en sciences infirmières aussi où il y a eu un décontingentement.

Alors, dans de nombreuses facultés, on peut penser à Québec, à Laval ou à l'Université McGill notamment, dans les amphithéâtres, les gens s'assoient déjà dans les marches ou encore ne bénéficient pas des conditions optimales d'apprentissage, par exemple lorsqu'on a une colonne, une colonnade dans la salle. On peut penser aussi aux laboratoires de dissection qui sont encore valorisés par certaines universités pour l'apprentissage de l'anatomie. Alors, il est évident que, à 15 autour d'un même cadavre, les opportunités d'apprentissage ne sont pas les mêmes que lorsqu'on est cinq. Les laboratoires de microbiologie aussi, où le partage des microscopes doit se faire entre de plus en plus d'étudiants. Tout ça, ce sont des manques criants que l'on vit déjà actuellement dans les universités.

n (15 h 30) n

Il y a de nombreuses tendances, actuellement, nord-américaines où on parle des «skills labs», des laboratoires d'habiletés techniques. On n'a pas encore vraiment étudié la question, mais on sait que c'est une tendance et que ça va devenir de plus en plus une exigence aussi des organismes d'agrément, par rapport à l'implantation de tels «skills lab» non seulement au niveau des facultés de médecine, pour toucher les étudiants de la formation préclinique, mais également dans les centres universitaires qui accueillent un certain débit d'étudiants, pour permettre à ces mêmes étudiants de profiter de ces laboratoires. C'est, par exemple, des laboratoires de stimulation virtuelle où on peut apprendre certaines techniques chirurgicales ou des techniques d'intubation d'urgence. On peut penser à ça.

L'intégration des nouvelles technologies s'est aussi faite par rapport à Internet. De plus en plus de revues scientifiques sont facilement disponibles pour nos étudiants grâce à l'accès à Internet. On remarque d'ailleurs par rapport à ça que, lorsque les étudiants sont stimulés à aller chercher des articles, ils vont être plus tentés de s'éloigner des «textbooks» et d'aller chercher des articles qui vont être plus récents, qui vont être plus à la pointe nécessairement de la médecine, parce que, évidemment, la médecine continue d'évoluer chaque jour. Ce sont toutes des innovations. C'est sûr que, si on commence à envoyer des gens à Kuujjuaq, et tout ça, il va falloir aussi s'assurer que ces gens-là aient accès à ces mêmes technologies pour apprendre.

M. Charbonneau (Guillaume): Ce que je rajouterais peut-être à ce niveau-là, c'est que les ressources dont vous parlez, les locaux, les nouvelles technologies de l'information, ça, je crois que c'est des choses qui, jusqu'à un certain point, ne sont pas limitées, c'est-à-dire qu'on peut toujours en ajouter, des locaux, on peut toujours ajouter des ordinateurs, toujours en fonction des ressources financières, là, bien évidemment. Mais ce qui est beaucoup plus inquiétant avec les hausses d'admission, c'est l'exposition clinique. Des patients, on ne peut pas puis on ne veut pas en inventer. Des patrons qui donnent de l'enseignement, on ne peut pas... Puis la médecine, malheureusement, ça ne s'apprend pas seulement dans les livres, ça s'apprend surtout au contact des patients. Donc, c'est à ce niveau-là que la qualité de la formation médicale est surtout menacée puis de façon... C'est difficile d'agir sur ces facteurs-là, alors que je crois que les locaux, les outils pédagogiques, c'est plus facile. Bien, c'est toujours difficile parce que ça prend des budgets, mais c'est des choses qui sont plus facilement envisageables.

Le Président (M. Kelley): Une courte...

M. Reid: Oui. En fait, je vais vous poser une question, pas pour vous mettre dans l'embarras, mais je vais vous poser une question de 60 millions. Dans les investissements qu'on a faits, soit les 150 millions dans les facultés de médecine, il y en a 60 millions à l'Université Laval. Et en particulier, dans ces 60 millions, on nous a dit qu'il y aura un atout extraordinaire: c'est qu'à l'Université Laval on aurait l'apprentissage en médecine, et, en même temps, les étudiants en médecine côtoieraient au quotidien les étudiants et les étudiantes en sciences infirmières et dans les différents domaines qui sont le lot de ce qui se passerait normalement dans un hôpital. Et donc c'est un avantage. Et je me demandais si les étudiants de l'Université de Montréal étaient jaloux de cette situation-là qui n'est peut-être pas celle qui...

M. Charbonneau (Guillaume): Là, on vient de l'apprendre, on va lui en parler après. Non, mais je crois que c'est une bonne chose. Je ne pense pas que ce soit une bonne chose que les étudiants en médecine soient toujours ensemble et puis ne fréquentent pas, dès leurs études médicales, les autres professionnels de la santé avec lesquels ils vont travailler. Je ne sais pas si...

M. Reid: Le fonctionnement dans des stages, j'imagine.

M. Charbonneau (Guillaume): Oui.

Mme Masson-Côté (Laurence): Oui. Je pense qu'il y a une coopération qui va s'apprendre sur le terrain de toute façon. Quand on arrive devant un patient puis qu'on doit coordonner des soins, l'esprit de l'équipe multidisciplinaire, c'est beaucoup plus dans l'espace de travail, je crois, que ça se développe puis aussi en fonction des mentors qu'on a là-bas. Sur le terrain de l'université, oui, je crois que c'est une bonne chose à la base. Ceci dit, c'est certain qu'ils n'auront jamais nécessairement ou rarement, je veux dire, de ce que je peux concevoir, les mêmes cours ou les mêmes... C'est certain qu'il y a une limite. On peut se côtoyer dans l'espace, je pense que c'est bien. En partant, c'est des gens nécessairement qu'on va recroiser dans le système de santé. Mais il y a un apprentissage qui doit vraiment se faire sur le terrain: comment collaborer entre nous, comment... la division des tâches puis, en même temps, le partage et la collaboration.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président, Alors, bonjour et bienvenue au nom de ma formation politique. J'ai lu avec attention votre mémoire, et ça m'a rappelé un certain nombre de souvenirs. J'ai eu la chance, je pense que c'est quand même une chance exceptionnelle, d'avoir occupé des fonctions ministérielles et à l'éducation et à la santé. Et, quand vous revenez sur les contingentements et le fait que ça a été un déblocage peut-être un peu rapide pour la capacité qu'avait ensuite le réseau de superviser, d'accueillir, de former, je peux vous dire que c'était une demande plus grande encore que celle à laquelle j'ai répondu, qu'on me faisait au moment où on a levé les contingentements. Les facultés de médecine comme le collège, comme l'ensemble des intervenants dans le milieu souhaitaient qu'on augmente encore plus rapidement qu'on ne le faisait. Et donc, en ce sens, ça aurait causé des problèmes encore plus grands, sans doute.

Mais c'est vrai, et on ne peut pas le nier, que, évidemment, à partir du moment où la formation se faisait, théoriquement, dans des grands groupes, et, en passant, une formation maintenant qui se fait sous supervision avec des petits groupes, là, vous le mentionnez, c'est sûr que ça change de façon significative les besoins de ressources à cet égard. Mais je reste quand même confiante, parce que je trouve qu'on a une tellement belle qualité de professionnels dans nos réseaux, nos réseaux universitaires, nos instituts universitaires, etc., que je crois qu'on va passer à travers, hein? Je reste confiante à ce niveau-là.

Vous suggérez ? j'essaie de retrouver exactement où ? vous suggérez, dans votre mémoire, qu'il y ait un financement particulier... Bon. Voilà. À la page 18, vous suggérez une enveloppe budgétaire indépendante pour les facultés de médecine, hein? Alors, est-ce que vous avez réfléchi un petit peu à ce que ça pourrait signifier et est-ce que vous en avez parlé avec les responsables, les doyens, ou les doyennes, ou les responsables des facultés de médecine dans les universités?

Le Président (M. Kelley): Mme Khuong.

Mme Khuong (Hélène T.): Sur cette question précise, ce n'était pas tant une recommandation, nous désirions plutôt lancer des pistes de réflexion qui s'éloignaient des modèles traditionnels qui sont actuellement étudiés au Québec. C'était l'idée d'élargir le débat, de peut-être aller voir ce qui se fait ailleurs, pour essayer de trouver une solution à un problème qui actuellement ne satisfait pas les intervenants du milieu médical en éducation.

M. Charbonneau (Guillaume): Ce que je rajouterais par rapport à ça, c'est qu'il me semble... Selon ce qu'on m'a dit, c'est qu'à Sherbrooke, à l'Université de Sherbrooke, il y aurait une enveloppe différente pour la Faculté de médecine. Moi, je peux vous dire que, dans le passé, j'ai souvent essayé, en demandant à mes autorités facultaires et universitaires, d'avoir une estimation de combien ça coûte, un étudiant en médecine puis combien d'argent reçoit la faculté pour un étudiant en médecine, puis jamais on n'a... on ne m'a jamais donné de réponse à ce niveau-là. Puis ce qu'on entend souvent, c'est qu'on ne sait pas où l'argent se passe entre le moment où il est donné à l'université puis le moment où l'étudiant... où il est vraiment donné pour l'enseignement à l'étudiant puis qu'est-ce qu'il reçoit de la faculté.

Donc, en fait, c'est peut-être une façon de clarifier puis d'avoir... Parce que je pense que, quand on n'a pas les chiffres, c'est toujours difficile de bâtir une argumentation puis de vraiment évaluer l'impact de notre investissement. Donc, à ce niveau-là, je pense qu'au moins on saurait combien la Faculté de médecine reçoit pour ses étudiants en médecine et dans toutes les universités. Mais ce que je comprends, c'est que chaque université a tellement un fonctionnement qui est différent que c'est difficile d'avoir une opinion qui est globale pour l'ensemble des universités du Québec.

Mme Marois: Oui, c'est ça. Donc, c'est un petit peu dans cette perspective que vous exploriez, là, une piste de réflexion ou que vous suggériez que cette piste-là puisse être évaluée.

Vous développez, dans votre mémoire, aussi un point de vue à l'effet que les médecins sont à l'image de la population qu'ils servent et devraient l'être aussi. Est-ce que vous suggérez qu'il y ait des critères particuliers, lorsqu'on fait la sélection des étudiants pour les facultés de médecine, pour qu'elle reflète mieux la réalité culturelle, les réalités différentes de la société dans laquelle on vit maintenant?

Le Président (M. Kelley): Mme Masson-Côté ou...

Mme Masson-Côté (Laurence): Oui, d'accord. Bien, en fait je crois aussi qu'on spécifie, dans notre mémoire, comme je l'ai dit tout à l'heure dans mon discours, que la race, la religion ou d'autres critères dans ce genre ne devraient pas être des critères, selon nous. Ceci dit, il est prouvé que, lorsqu'on augmente... Il a été du moins étudié que, lorsqu'on augmente les frais de scolarité, on diminue l'accessibilité à l'ensemble de la population. Et on croit qu'en rendant l'accessibilité aussi grande que possible aux études médicales on va se donner le plus de chances d'avoir une population d'étudiants en médecine qui reflète la population actuelle. Mais on ne considère pas, et c'est dit dans notre mémoire, que la race, la religion, ou l'ethnie, ou la provenance devraient être des critères à l'entrée en médecine.

n (15 h 40) n

Mme Marois: Oui, c'est ça. Bon. Alors, pour en revenir à la question des frais de scolarité, il apparaît clairement que votre analyse vous amène à conclure qu'il ne devrait pas y avoir une hausse significative ou une hausse même des frais de scolarité. Et vous faites l'analyse, là, de l'expérience de l'Ontario en démontrant, chiffres à l'appui, que le fait qu'on ait rehaussé... laissé monter les frais de scolarité, selon ce que les universités voulaient bien fixer comme hauteur, a amené à éloigner certains étudiants qui venaient de milieux moins favorisés.

Mme Masson-Côté (Laurence): Bien, en fait, pour reprendre sur l'Ontario, c'était une déréglementation des frais de scolarité.

Mme Marois: C'est ça.

Mme Masson-Côté (Laurence): Donc, on parle d'une mesure assez extrême où en fait, si nous avons bien saisi, le gouvernement ne se mêle plus vraiment de la réglementation des frais de scolarité. Il laisse libre cours à une espèce de libre marché entre l'université et l'étudiant.

Ceci dit, notre mémoire ne prend pas position en faveur d'un gel des frais de scolarité. On n'est pas positionné gel, dégel. Je crois qu'il y a beaucoup de solutions qui sont, disons, dans un juste milieu entre une déréglementation... Mais je crois que l'expérience de l'Ontario nous inquiétait particulièrement, parce que ce n'est pas une expérience qui vient des États-Unis ou de très loin de nous, c'est dans une province qui est à côté. Et nous ne souhaitons pas que ça aille vers une déréglementation ou des hausses dans ce sens, ou toute mesure qui, nous pensons, porterait atteinte à l'accessibilité aux études en médecine. Ceci dit, nous ne nous sommes pas positionnés sur un gel ou dégel des frais de scolarité.

Mme Marois: D'accord. Mais cependant je comprends que vous ne souhaitez pas qu'il y ait une modulation selon qu'on est en médecine, en droit, en arts, en lettres, en sciences ou autres.

Le Président (M. Kelley): M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Guillaume): En fait, ce qu'on suggère, c'est que ça pourrait amener justement une homogénéisation des étudiants en médecine, puis, nous, on ne souhaite pas ça. On trouve que la situation actuelle est belle pour ça. On a des étudiants en médecine qui viennent de milieux très diversifiés. C'est une richesse de notre population d'étudiants. Puis une chose où on a moins insisté, dans le mémoire, puis qui est importante, ça me fait penser à... étant donné la présentation de Forces AVENIR qu'on a eue avant... Le fait que les étudiants en médecine sont moins préoccupés par les questions financières, ça nous laisse une possibilité pour s'impliquer socialement. Pour l'implication sociale, tantôt on l'a dit, il faut que ce soit reconnu, il faut que ce soit valorisé, mais il faut aussi avoir le temps, là. Déjà, en médecine, on n'a pas beaucoup de temps pour l'implication sociale. Si en plus les étudiants sont très préoccupés par leur situation financière, je pense qu'ils n'auront pas non plus la disponibilité psychique ou intellectuelle pour s'impliquer dans des causes. Puis, moi, j'en connais beaucoup, des étudiants en médecine, qui sont impliqués dans la Croix-Rouge, dans plein d'organismes, puis c'est à cause qu'ils ont du temps, puis c'est à cause qu'on les aide financièrement qu'ils peuvent se consacrer.

Mme Marois: Qu'ils peuvent y arriver.

M. Charbonneau (Guillaume): Oui, exactement.

Mme Marois: Ça va, pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Bonjour, merci d'être là. Moi, je suis députée de Maskinongé. Maskinongé, c'est dans la région de Louiseville?Trois-Rivières-Ouest, la région de la Mauricie. Et je ne sais pas si vous avez suivi, dans les journaux, que la Mauricie, même si ce n'est pas une région éloignée, c'est une région qui a un manque sérieux d'effectifs médicaux. Alors, différentes solutions ont été envisagées sans trop de succès, là.

Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur la création ou comment vous voyez, vous percevez les stages en région? Comment vous percevez au niveau, un, peut-être que les médecins s'installent par la suite en région et aussi au niveau de l'aide à la formation. Peut-être qu'en dégorgeant les grands centres, en venant vous installer en région, peut-être que ça peut favoriser votre formation en médecine. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Kelley): Mme Khuong.

Mme Khuong (Hélène T.): Oui. Il faut comprendre que cette problématique-là, de pénurie d'effectifs médicaux en région, c'est une réalité qui existe pas seulement au Québec, on la retrouve notamment, par exemple, en Australie, en Grande-Bretagne. Puis c'est notamment deux endroits où il y a eu implantation de programmes favorisant le retour des étudiants vers ces communautés-là, notamment en favorisant une exposition plus grande de ces étudiants-là dans des milieux implantés en centres plus régionaux.

Évidemment, comme on l'a mentionné, nous, on vit présentement un problème au niveau des stages en milieu universitaire avec un «surpeuplage», puis on voit d'un très bon oeil le fait que plus d'étudiants aient accès à des stages en région et finalement pour les possibilités académiques mais aussi parce qu'il est reconnu que non seulement les étudiants qui proviennent de régions non universitaires, mais également les étudiants qui sont exposés au cours de leur formation à des régions non universitaires ont une plus grande tendance à retourner pratiquer dans de telles régions. Je crois que découvrir la pratique en région au cours de sa formation, c'est ce qui permet à l'étudiant de l'envisager comme pratique future personnelle. Puis tout ça, ça suit tout à fait les orientations des derniers gouvernements face à la pénurie d'effectifs médicaux.

Il faut se donner les moyens de former ces étudiants-là. Il y a plusieurs projets actuellement qui sont à l'étude. Si on pense au projet de l'Université de Montréal d'établir un campus satellite à Trois-Rivières ou encore à une idée qui circule à Sherbrooke qui implanterait un tel projet à Chicoutimi, ce sont des projets bien concrets qui devraient débuter très prochainement. Il serait très intéressant d'observer l'impact à long terme, mais c'est sûr que l'impact à court terme, au niveau des possibilités d'apprentissage de ces étudiants-là, nous autres, on n'a rien à redire.

Puis effectivement l'arrivée d'étudiants dans des milieux hospitaliers où il n'y en avait pas d'habitude, habituellement ça supporte les médecins puis ça donne envie à ces médecins-là justement, qui doivent ensuite accomplir des tâches d'enseignement, de poursuivre une formation continue et de se mettre à jour. Le déploiement des étudiants en région, c'est un concept que l'on adopte, mais évidemment, comme M. Charbonneau l'a dit, il faut s'assurer qu'on n'envoie pas ces étudiants-là comme ça, sans encadrement, sans objectifs précis quant aux notions à acquérir, évidemment.

M. Charbonneau (Guillaume): L'expérience de la Mauricie est très intéressante.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Jean-Talon ou M. Charbonneau, voulez-vous compléter?

Mme Delisle: Bien, voulez-vous parler...

M. Charbonneau (Guillaume): Non, ça va, je voulais juste dire que c'est ça, l'exemple de la Mauricie est très intéressant. Mais ce qu'il est important de comprendre, c'est qu'il y a une pénurie partout au Québec, en ce moment, tant d'omnipraticiens que de médecins spécialistes. Dans le cas de la Mauricie, c'est plus au niveau des omnipraticiens qu'il y a un problème, parce que, en général, au niveau des spécialistes, c'est plus dans la moyenne québécoise. Puis c'est ça, nous, on a plus que suivi par les journaux, là, le projet Mauricie de l'Université de Montréal, on y a aussi participé puis on a même appuyé le projet, parce que, justement, c'est une des solutions qui est intéressante au fait de la problématique que causent les hausses d'admissions en médecine. Donc, on a très hâte de voir l'impact que va avoir ce projet-là en Mauricie.

Le Président (M. Kelley): Mme la députée de Jean-Talon, il vous reste trois minutes.

Mme Delisle: Combien?

Le Président (M. Kelley): Trois minutes.

Mme Delisle: Bon. Alors, ce sera rapide. Sur la question du contingentement, j'aurais une question là-dessus. J'aurais aussi juste... j'attendrais juste un commentaire de votre part. À la page 6 de votre mémoire, vous semblez laisser entendre que, bon, oui, il serait important que les étudiants en médecine puissent faire leurs stages en région parce que la capacité de rétention est très intéressante puis c'est important pour ces populations-là. Mais vous semblez à la fois dire: Bien, par contre, ils vont difficilement pouvoir avoir accès à des équipements de pointe comme ceux qui vont pouvoir faire leurs stages dans les hôpitaux universitaires. Bon. Alors ça, c'est un constat que vous semblez avoir fait à la page 6 de votre mémoire. J'aimerais vous entendre un petit peu là-dessus, voir si c'est majeur pour vous ou pas.

L'autre chose, c'est par rapport au contingentement. On sait qu'il y a au-delà de 1 500 médecins, là, qu'on a laissé partir, il y a plusieurs années, là, en 1997-1998, je ne me souviens plus de la date. C'est une expertise évidemment qui a été perdue, dans un certain sens. Est-ce que vous sentez, vous autres, ça dans le milieu? Est-ce que, ce rattrapage-là, vous sentez que vous en payez peut-être le prix? Puis comment on peut corriger cette situation-là?

Mme Khuong (Hélène T.): Je vais faire un commentaire sur la première partie. Je crois que, effectivement, ça reflète la réalité que jamais on ne va retrouver un PET scan, par exemple, un appareil de médecine nucléaire à Baie-Comeau, il n'y a pas la masse critique de patients pour justifier un tel équipement. Toutefois, il faut savoir qu'un médecin qui se dirige vers une pratique en région... un étudiant en médecine qui se dirige vers une pratique en région, par rapport à l'étudiant qui se dirige en pratique en milieu universitaire, n'aura peut-être pas la même vision de sa formation médicale. Mais il demeure important d'exposer ces étudiants-là tant à la pratique en région, mais aussi aux technologies de pointe, puisque le médecin en région a nécessairement à référer son patient en centre universitaire avec ces technologies-là. Donc, il est important que la formation d'un étudiant en médecine ne se concentre pas exclusivement en milieux universitaires ni exclusivement en milieux régionaux, mais plutôt soit la combinaison des deux.

Mme Delisle: Je pense que c'est un bon commentaire, parce que ce n'est pas tout à fait comme ça qu'on le lisait. Par rapport à l'expertise, là...

Le Président (M. Kelley): M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Guillaume): Oui. Bien, je voudrais commenter là-dessus, là. Ce n'est pas le fait que ce soit en région universitaire ou en région...

Mme Delisle: Non, non, j'ai compris.

M. Charbonneau (Guillaume): Il peut y avoir des mauvais milieux en région, des mauvais milieux en milieu universitaire, puis l'important, c'est de toujours les évaluer puis de ne pas envoyer des étudiants dans un... Par rapport à...

Mme Delisle: Est-ce que vous sentez, vous autres, qu'il y a une expertise finalement dont vous ne bénéficiez pas ou... Et comment peut-on rattraper ça, à votre point de vue, là, sans ouvrir, si vous voulez, sur le contingentement, puisque c'est déjà assez compliqué au niveau des locaux, etc., là?

n (15 h 50) n

M. Charbonneau (Guillaume): Bien... Oui? O.K., bon. C'est sûr que ça cause un problème à différents niveaux. Ça cause un problème pour tout le monde, au Québec, pour avoir accès aux soins. Ça, je pense que tout le monde peut le constater. Au niveau de l'enseignement, ça cause un problème aussi, parce que la pression est très forte pour que les médecins donnent des soins, donc ils ont moins de temps pour l'enseignement. Parallèlement à ça, on leur demande de former plus d'étudiants, ce qui est un peu paradoxal et problématique, et qui est une bonne solution, là. Je pense que c'est important qu'on répète que, nous, on est pour solutionner la problématique de la pénurie de médecins au Québec. L'augmentation des admissions en médecine, c'est une des solutions, une très bonne solution. Mais là on pense qu'elle a atteint son maximum, là. On l'a peut-être même dépassé. On va le voir avec l'arrivée en externat des deux prochaines cohortes, qui sont énormes, là.

À l'Université de... Moi, ma cohorte ? je finis cette année, là ? on était 137; 168 l'autre année après. On parle de classes de 227 étudiants en première année. Ils ne le savent pas encore, la faculté, où ils vont les placer, puis là on leur demande encore d'augmenter, encore plus que le 227. Donc, pour nous, là... En médecine, on dit: Quand on donne un traitement, il faut regarder les avantages et les inconvénients. Le traitement, là, pour la pénurie d'effectifs médicaux, avec les hausses d'admission, là... Les inconvénients, selon nous, qui sont arrivés pourraient être plus élevés que les avantages.

Mme Delisle: Il aurait fallu évaluer les impacts avant de laisser partir ces médecins-là.

M. Charbonneau (Guillaume): Aussi. En fait, la problématique... Ce que je voudrais juste rajouter par rapport à ça, puis je pense que l'expérience nous le montre, là: La prévision des besoins en effectifs médicaux, là, c'est extrêmement difficile à faire. Puis autant notre prévision actuelle que celle dans le passé a beaucoup de faiblesses. Donc, il faut y aller avec beaucoup de prudence à ce niveau-là, quand on fait des gros changements, pour des prévisions qui sont plus ou moins certaines.

Le Président (M. Kelley): Ça met fin au temps qui est alloué au côté ministériel. Maintenant, Mme la députée de Champlain, il vous reste huit minutes.

Mme Champagne: Oui, parfait. Bonjour à vous trois. Alors, écoutez, tout à l'heure j'ai entendu... Et, si j'ai fait erreur, vous me corrigerez. Concernant le dépassement du nombre de sessions par les étudiants en médecine, bien il y a une cause à ça, puis c'est-u énorme? Ça a-tu des conséquences majeures? Il y a tant de sessions pour réussir un cours. Si tu les dépasses, tu as un problème de financement évident. Alors, on le voit également au niveau collégial puis on le voit ailleurs également. Alors, qu'est-ce qui se passe, puis pourquoi ça arrive? C'est-u... En tout cas, je vais vous laisser donner la réponse, là. J'ai peut-être des pistes, moi-même, là, mais je veux vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Kelley): Mme Khuong.

Mme Khuong (Hélène T.): Le Québec est individuel au sein de l'Amérique du Nord par la proportion d'étudiants qu'il accepte directement, sans formation universitaire prérequise, au doctorat en médecine. Toutefois, il reste encore qu'entre... Une estimation d'à peu près 40 % de la population étudiante admise en médecine provient des... a une formation universitaire auparavant qui est parfois du bac mais le plus souvent d'une maîtrise aussi ou d'un doctorat, ce qui fait que c'est des étudiants qui ont déjà bénéficié de leurs sessions d'aide financière puis qui atteignent rapidement le maximum, une fois qu'ils sont rendus au cours de leurs études en médecine.

Une seconde chose que l'on peut voir, par rapport au coût des études médicales, c'est que le doctorat en médecine, c'est un doctorat de 200 crédits qui se fait sur quatre ou cinq ans. Lorsqu'il se fait sur quatre ans, on parle ici de 50 crédits par année, donc ce qui constitue peut-être presque le double des frais de scolarité d'un étudiant moyen à l'université à temps plein, et ce, alors que... Lorsque l'on parle aussi d'un curriculum en quatre ans, c'est qu'un étudiant condense ses cours et ne peut pas non plus travailler l'été pour financer ses études.

Les deux dernières années d'études en médecine, qui sont l'externat, sont également problématiques, en ce sens que l'étudiant est à temps plein, est plus qu'à temps plein à l'hôpital. L'étudiant moyen passe 70 heures à l'hôpital, doit étudier ensuite, participe aux services de garde, donc le financement des études en médecine, pour chaque étudiant, devient rapidement problématique. Et on n'a pas les chiffres, mais il serait intéressant d'étudier le niveau d'endettement des étudiants à la sortie de leurs études en médecine.

Mme Champagne: Je suis convaincue qu'il est très élevé, là. J'aurais une autre petite question: L'étudiant qui arrive en médecine, qui a préalablement parfois même, comme vous dites, un D.E.C. et même plus, est-ce que c'est un préalable exigé, ou bien donc s'il est passé par cette étape-là parce qu'on n'était pas prêt à le recevoir pour étudier en médecine? Il y a tout ce critère de sélection, également, là.

Mme Khuong (Hélène T.): Les universités sont responsables, chacune, de déterminer la quantité... la proportion d'étudiants qu'ils acceptent directement du collégial et directement... et ceux qu'ils vont accepter de l'université. Les candidats universitaires amènent une richesse aussi à la population étudiante, avec des backgrounds différents. Certains ont fait une formation en pharmacie ou en ergothérapie, qui sont d'autres domaines des sciences de le santé, puis ils sont plus à même, à ce moment-là, de partager cette expérience-là avec des étudiants qui n'ont pas cette expérience.

Il y a aussi l'impact de la recherche. La recherche est très importante en médecine. Les étudiants-chercheurs constituent une autre partie de notre population étudiante. Donc, c'est chaque université qui décide quelle proportion d'étudiants elle va choisir, mais la majorité des universités vont privilégier à peu près le tiers d'étudiants comme provenant de l'université.

M. Charbonneau (Guillaume): Je pense même plus.

Mme Champagne: C'est le message qui est lancé? Oui, vas-y.

M. Charbonneau (Guillaume): À l'Université de Montréal, c'est au moins 50 %, puis à l'Université McGill, c'est plus. Il y a encore plus d'étudiants... Je crois que l'université qui accepte le plus du cégep, c'est probablement Sherbrooke. Après ça...

Mme Champagne: C'est Sherbrooke avec 80 %.

M. Charbonneau (Guillaume): Oui. À Montréal, nous autres, on est au moins 50 %, minimum 50 %, qui ont fait une formation...

Mme Champagne: Mais qui ont déjà un bac.

M. Charbonneau (Guillaume): Oui, puis, à McGill, c'est encore plus.

Mme Champagne: Mais, en bout de piste, tu n'es pas reconnu en termes de crédits de session, donc tu n'as pas d'argent pour finir ton...

M. Charbonneau (Guillaume): C'est ça.

Mme Champagne: O.K.

Mme Khuong (Hélène T.): J'aimerais aussi rajouter, par rapport au début de votre question, le nombre de sessions, c'est qu'il y a un nombre de sessions maximal pendant lesquelles vous êtes admissible à l'aide financière. Et beaucoup de ces gens-là, en ayant complété, par exemple, physiothérapie ou un bac avant, arrivent en cours de formation et ont dépassé ce nombre de sessions là et donc n'ont plus accès à l'aide financière. Ce qui devient un problème majeur, parce qu'à ce moment-là ces gens-là n'ont pas le moyen de se financer autrement et tombent, à ce moment-là, sur des programmes de marge de crédit ou d'aide financière... pas d'aide financière, mais d'institution financière qui charge quand même, là, des intérêts.

Mme Champagne: La solution, pour vous, c'est quoi?

Mme Khuong (Hélène T.): Peut-être en partie repenser le programme d'aide financière pour peut-être que ces gens-là aient accès à de l'aide quand même alors qu'il sont à temps plein, ils font des études. En partie, une des solutions.

Mme Champagne: Merci.

Le Président (M. Kelley): M. le député de Berthier, il vous reste trois minutes.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Bonjour, bienvenue. Ça me rappelle des vieux souvenirs... bien, des vieux, pas si vieux que ça, de se voir alentour d'une table pour discuter de sujets comme ceux-là.

Moi, j'ai une question pour vous, parce qu'on parle, ici, aussi de la qualité. Vous avez vécu une réalité, l'an passé, assez difficile, qui est une crise externe qui vous a influencés au niveau interne, c'est-à-dire par rapport aux spécialistes, ce qui a fait en sorte de remettre en cause vos cours par APP. Est-ce que... Je ne sais pas, là, parce que, bon, depuis ce temps-là, moi, j'ai quitté l'université. Je n'ai pas vu... Est-ce que vous avez mis en place des choses, des structures pour que ça n'influence pas, la prochaine fois, votre réalité dans vos cours? Parce que vous avez une réalité différente de tous les étudiants pratiquement, là, dans les autres facultés parce que, vous, vos professeurs viennent de l'extérieur.

M. Charbonneau (Guillaume): Les situations sont différentes d'une université à l'autre, là, puis les universités, les facultés ont été affectées de façon différente, en fonction des ententes qu'ils ont avec leurs professeurs puis de la façon qu'ils les rémunèrent aussi. Notre position était particulièrement délicate, l'année dernière, parce que c'est difficile de demander à un professeur qui fait bénévolement de l'enseignement... C'est difficile d'avoir des gros moyens de pression pour le ramener à l'enseignement, surtout à l'Université de Montréal, là, je pense que... Donc, c'est ça. Donc, je pense que, quand on parle de la qualité de l'enseignement, là, c'est toute cette structure-là qui est à repenser. Entre autres, avec les plans pratiques, c'est une bonne chose, surtout si ça vient des gens des universités, eux-mêmes, qui l'implantent, là, c'est une très bonne chose. Mais, d'après nous, ça fragilise... Ce qu'on s'est rendu compte l'année dernière, c'est que la formation médicale est très fragile parce que l'enseignement est fait de façon bénévole, très souvent.

M. Bourdeau: En reconnaissant l'enseignement, comme vous avez dit tout à l'heure, vous pensez que, grâce à ça, on ne vivra peut-être plus ce qu'on a connu l'an passé, avec quasiment une crise de fermeture de facultés?

Mme Khuong (Hélène T.): Bien, en fait je pense qu'à la base l'université qui a été la plus touchée, l'année passée, était Montréal, aussi parce que peut-être qu'à la base justement la reconnaissance de l'enseignement, la rémunération qui est accordée, la reconnaissance tout simplement par l'université est très, très fragile, je dirais, actuellement et même peu, très peu reconnue. Et les médecins et enseignants s'en plaignent beaucoup et en fait on qualifie souvent ça d'enseignement bénévole. Je pense que, du côté de l'université, il y a eu des démarches de faites pour essayer, bon, d'aller vers une meilleure reconnaissance et puis peut-être des contrats plus clairs d'enseignement. Mais à ce jour je n'ai pas eu vent vraiment de choses concrètes qui ont eu lieu. Peut-être des comités, tout ça, des études, mais je crois que le problème de base est vraiment que cet enseignement-là est souvent non rémunéré et non reconnu et que justement, à cause de ce dont on parle, du «surpeuplage» de clientèle, d'étudiants, les débordements, les médecins, ils viennent facilement, je dirais, aussi... On est épuisé face à cet enseignement-là et à quelque part un peu déçu du peu de reconnaissance et de la rémunération, parfois absente, qui est accordée.

M. Charbonneau (Guillaume): Ce que je rajouterais, c'est... Il y a une chose qui est intéressante, c'est qu'en ce moment il y a un comité ministériel qui se penche sur l'enseignement non rémunéré. Donc, nous, on attend les conclusions de ce rapport avec beaucoup d'intérêt puis aussi de l'espoir.

Le Président (M. Kelley): Ça va, M. le député?

M. Bourdeau: Oui. Je veux juste les féliciter pour le travail qu'ils ont fait, avec le nombre d'heures qu'ils passent en clinique, pour faire des mémoires comme ça. Comme je vous dis, j'en connaissais deux plus personnellement. Le travail qu'ils font, ça démontre encore une fois que la jeunesse, au Québec, est très vivante.

Le Président (M. Kelley): Je pense, je parle au nom de l'ensemble des membres de la commission. On a rencontré plusieurs représentants de la jeunesse québécoise dans ces dernières journées, et je vous félicite pour votre implication au niveau de la fédération, parce que ça, c'est important aussi, et bon succès avec vos études.

Alors, je vais suspendre quelques instants et j'invite les représentants de la Confédération des syndicats nationaux de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 heures)

 

(Reprise à 16 h 3)

Le Président (M. Tomassi): Alors, j'inviterais la Confédération des syndicats nationaux à prendre place. Alors, bonjour, messieurs, mesdames. Mme Boucher, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Boucher (Denise): Alors, merci, M. le Président. Alors, à ma gauche, à votre droite, Michel Tremblay, de la Fédération des professionnèles; Pierre Patry, de la Fédération nationale des enseignants et enseignantes du Québec, la FNEEQ; et Josée Roy, qui est adjointe à l'exécutif de la Confédération.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci, Mme la présidente. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, et ça va être suivi par une période d'échange. Vous pouvez y aller.

Mme Boucher (Denise): Alors, M. le Président, M. le ministre, Mme la critique de l'opposition officielle en matière d'éducation, autres membres de la Commission de l'éducation, nous vous remercions de nous offrir la possibilité d'intervenir dans le cadre de cette consultation sur la qualité, l'accessibilité et le financement des universités.

La trame de fond de la vision CSN a toujours été de travailler au progrès social et au développement des individus. Les valeurs de justice, d'égalité et d'accessibilité ont été le fondement de l'ensemble de nos réflexions et de nos interventions. Au cours de ces décennies, la CSN a été présente et très active dans le cadre des diverses étapes de la transformation du réseau de l'éducation, et ses membres oeuvrant en éducation ont contribué à cet avancement de façon continue.

La CSN n'est pas réfractaire au changement. Au contraire, elle l'a démontré à plusieurs reprises en étant elle-même agent de changement dans la société québécoise. Certes, certaines améliorations peuvent être apportées, mais, pour ce faire, le gouvernement doit associer les différents partenaires à ses travaux et développer un large consensus sur les éléments à bonifier et sur les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les résultats souhaités.

Comme cette commission parlementaire est le fer de lance de réflexions importantes sur le système d'éducation annoncées par le gouvernement québécois et que, contrairement à ce qui avait été annoncé pour cette consultation dans le programme électoral, le document soumis ne permet pas de se prononcer ni sur des orientations gouvernementales ni sur des pistes d'action, on se retrouve avec une série de questions générales et vagues qui viennent occulter les vrais enjeux des décisions qui devront être prises en vue de l'adoption d'une politique de redressement du financement des universités et d'une loi-cadre sur l'accessibilité aux études supérieures. Nous croyons que le gouvernement se doit de procéder à une seconde phase de consultations avant l'adoption de la politique sur le redressement du financement des universités et la loi-cadre sur l'aide financière aux études.

Devant l'absence d'une vision globale, les éléments soumis à la consultation nous rendent songeurs sur les réels objectifs qu'ils sous-tendent. Le document apparaît davantage comme une apologie à l'endroit des universités qu'une recherche de l'identification des attentes et des besoins de la société. De plus, plusieurs aspects ont été évacués. Les universités n'apparaissent pas comme une des constituantes du système d'éducation, on les place hors du système en ignorant les ordres d'enseignement primaire, et secondaire, et collégial responsables de former et de préparer les étudiants à la formation universitaire. En outre, on ne retrouve aucune mention des liens avec les collèges ni avec les commissions scolaires, alors même que les universités ont une mission essentielle, soit la formation et le perfectionnement des enseignants et des enseignantes, des professeurs, des professionnels. On continue à saucissonner le système d'éducation et à travailler à la pièce sans vision d'ensemble et sans cohérence.

Les pressions exercées par le marché du travail sur les universités pour qu'elles répondent aux besoins en main-d'oeuvre hautement qualifiée et aux nouvelles exigences de l'économie en termes de savoir transforment la mission première des universités, qui deviennent de plus en plus des pourvoyeurs de main-d'oeuvre, souvent dans une perspective à court terme. Cette vision réductrice et ces pratiques transpirent dans le document.

L'approche retenue est avant tout économique et marchande et elle est savamment supportée par l'utilisation du vocabulaire propre à l'entreprise privée. On y parle de production, de concurrence, d'excellence, de mondialisation, d'internationalisation, d'économie avancée, de performance, d'avantages comparatifs, de position concurrentielle, d'économie du savoir, de capital humain, etc. Ce discours est l'apanage de la culture d'entreprise. Il vient se substituer de façon insidieuse à une vision humaniste de l'éducation et de la formation continue, altérant ainsi la mission universitaire et la subordonnant de plus en plus aux impératifs de l'économie et du néolibéralisme. Pour les universités, s'arrimer aux besoins du marché du travail ne doit pas être synonyme de s'y soumettre au détriment de leur mission et de leurs fonctions essentielles.

Nulle part on ne se réfère aux suites données aux états généraux sur l'éducation, dont l'une des lignes d'action est de consolider, rationaliser l'enseignement supérieur. Ce chantier s'est concrétisé par l'adoption, en 2000, de la Politique québécoise à l'égard des universités et de la Politique québécoise sur le financement des universités; en 2001, de la Politique québécoise de la science et de l'innovation; en 2002, le gouvernement adoptait la Politique gouvernementale sur l'éducation des adultes et la formation continue et un plan d'action.

Le document n'établit pas les conséquences de la mondialisation sur le système d'éducation et sur le rôle et les responsabilités de l'État en éducation. Des négociations sont en cours afin de libéraliser ce secteur. Pourtant, les pressions étant de plus en plus fortes, elles risquent, si on ne balise pas tout, de soumettre l'éducation aux diktats de l'économie du savoir et d'obliger les pays à se soumettre au marché global de l'éducation.

Tel que souligné précédemment, nous ne retrouvons pas, dans le document, une description du contexte global. On y fait allusion sans analyser les défis à relever. Pourtant, de là découlent les besoins de la société et des individus, qui doivent se traduire par des réponses adéquates en termes d'accessibilité et de qualité.

Les universités sont un outil essentiel au développement social et au développement des personnes. Lors de la consultation sur les perspectives pour une politique gouvernementale à l'égard des universités, la CSN indiquait que la société québécoise doit se doter d'un contrat social afin de clarifier les rapports entre la société et les universités. Ce contrat lie deux parties: la première porte sur les besoins et les attentes, et la seconde concerne les ressources pour y répondre.

n (16 h 10) n

Pour la CSN, le concept de contrat social permet de se projeter dans l'avenir et réfère à des valeurs et à un ensemble de règles explicites et implicites convenues par les groupes et les diverses classes dans la société, et se traduisant notamment dans des institutions, des lois, des modes de fonctionnement. C'est pourquoi nous croyons que le Conseil supérieur de l'éducation, par sa Commission de l'enseignement et de la recherche universitaires, soit l'organisme responsable pour procéder à l'identification des besoins et des attentes de la société et procède périodiquement à des consultations et les rende publiques.

Les enjeux de l'accessibilité à l'ordre d'enseignement universitaire gravitent autour des mesures et des moyens à mettre en place en vue de rendre accessibles à toutes les personnes qui le désirent et en ont les capacités les connaissances et les savoirs de haut niveau. L'accessibilité doit couvrir les spectres de l'accessibilité financière, géographique et sociale, et ce, tant pour les jeunes que pour les adultes, les travailleuses et les travailleurs, les aînés et les groupes traditionnellement marginalisés.

Les obstacles actuels à l'accessibilité aux études universitaires sont nombreux et de différents ordres, liés, entre autres, à l'organisation du réseau de l'enseignement, au milieu du travail, au manque de lien entre les deux, à des problèmes d'ordre financier, de conciliation études-famille, de géographie et de culture. Nous proposons que différentes mesures soient mises en place afin de lever les obstacles à l'accessibilité aux études et poursuivre le rattrapage à faire en ce qui concerne le pourcentage de Québécois et de Québécoises détenant un grade universitaire.

Pour ce qui est de l'aide financière aux études, elle doit prendre appui sur les principes d'égalité des chances et d'une plus grande accessibilité aux études et s'attarder aux conditions particulières des étudiantes et des étudiants issus de milieux défavorisés ou de famille à revenus moyens. La réflexion sur l'aide financière doit viser deux objectifs. Dans un premier temps, adopter des mesures d'aide financière qui tiennent compte de la situation actuelle des étudiants et des étudiantes et répondent aux besoins des personnes qui veulent poursuivre leurs études. Nous vous invitons d'ailleurs à lire les propositions mises de l'avant par la CSN dans son mémoire présenté au Comité consultatif sur l'accessibilité financière aux études, déposé en juin 2003.

Cependant, nous croyons tout à fait pertinent qu'une campagne d'éducation à la consommation soit organisée pour rejoindre à la fois les dirigeants et les dirigeantes, les intervenants et les intervenantes, les étudiantes et étudiants universitaires, les fédérations étudiantes et les associations universitaires, afin de les sensibiliser aux diverses sollicitations qui se font ouvertement dans les établissements d'enseignement, où on propose aux étudiantes et étudiants des marges de crédit ou de financement des études par les cartes de crédit. Ce problème de plus en plus croissant finit par avoir des répercussions à moyen et long termes sur la situation financière des nouveaux diplômés.

Au sujet des droits de scolarité, l'aspiration des personnes aux études supérieures doit être un objectif réalisable. Le principe de base que sous-tend cette assertion est que l'éducation est un droit et doit être considérée comme un service public primordial, universel et gratuit. Ce principe doit s'appliquer à toutes les personnes et à tous les ordres d'enseignement, y compris à l'université, dans une perspective d'apprentissage tout au long de la vie.

Pour la CSN, ce principe suppose que la société québécoise a comme objectif d'éliminer les frais de scolarité dès que possible, et, à défaut de pouvoir atteindre cet objectif dans l'immédiat, consentir à exclure définitivement toute augmentation à moyen et long termes. Ajoutons qu'en ce qui a trait aux frais afférents nous proposons que le ministre mette en place un groupe de travail avec les étudiants et les étudiantes sur les frais non réglementés dans les universités, dont le mandat serait de produire un état de situation des pratiques en cours et de faire des recommandations sur des modalités d'uniformisation dans toutes les universités et pour tous les programmes.

Nous ne pourrons passer sous silence le volet de la formation continue à l'égard du financement de celle-ci. Nous avons déjà soulevé des objections sur la démarche du groupe d'experts mis sur pied suite à la publication de la Politique gouvernementale d'éducation des adultes en formation continue, le document soumis à la consultation n'étant pas en concordance avec le mandat que lui a confié le gouvernement. Le questionnement sur le financement de la formation continue doit donc se poursuivre et ne doit pas se faire en vase clos et de façon morcelée. Nous demandons au gouvernement de refaire ses devoirs dans le dossier du financement de la formation continue et de procéder à une consultation large et démocratique sur le sujet.

Pour les universités en région, nous proposons quatre choses. Que l'État soutienne, par des subventions spécifiques, les universités en région qui se donnent un plan de développement qui instaure à la fois un choix de programmes au premier cycle et des créneaux d'excellence pour les deuxième et troisième cycles à la recherche. Ce plan de développement devra s'échelonner sur 10 ans et tenir compte de l'évolution démographique des 18-29 ans d'ici 2016. Une fois ce plan approuvé par le gouvernement, les mesures spécifiques de financement devraient être assurées pour toute la durée du plan. Ce plan devrait aussi prévoir des ententes avec d'autres universités, avec des collèges, dans une perspective de favoriser l'accessibilité et la qualité des services d'enseignement supérieur et à toute la population de la région. Les cégeps sont des partenaires incontournables pour le développement de l'enseignement supérieur en région.

Que le ministre de l'Éducation demande à la Commission de l'enseignement et de la recherche universitaires du Conseil supérieur de l'éducation de produire un avis sur l'état de situation de l'offre de formation dans les régions n'ayant pas d'établissement universitaire sur leur territoire et qu'elle propose des recommandations afin d'augmenter l'accessibilité à la formation universitaire dans les régions défavorisées à cet égard.

Que, dans chaque région, il y ait une concertation entre les universités et les partenaires régionaux.

Enfin, que les universités en région puissent bénéficier d'un financement complémentaire qui pourrait s'ajouter dans le cadre de projets spécifiques de recherche ou d'intervention financés par d'autres ministères, ou par des organismes régionaux de développement, ou d'autres sources.

Nous ne vous surprendrons pas en disant que les universités en région jouent un rôle important dans le développement régional, économique, social et culturel. Elles sont à la fois une force de rétention et d'attraction pour la population, pour les jeunes et pour les entreprises. La situation de certaines d'entre elles demeure fragile suite au déclin démographique et aux compressions budgétaires. Il est primordial de les soutenir par des mesures incitatives.

Pour la CSN, dans le volet portant sur le cheminement étudiant, on doit retenir que la très grande majorité des étudiantes et des étudiants fréquentant les universités sont concentrés au premier cycle. C'est ici que l'on doit investir davantage nos efforts afin de les aider à persister et obtenir un grade universitaire. Un tel investissement, on doit le reconnaître, engendre moins de prestige et de visibilité au niveau international, ce qui peut en décevoir certains. Par contre, il permet à la société québécoise de hausser le taux de la population ayant obtenu un grade universitaire et d'éventuellement amener plus de candidats et de candidates aux deuxième et troisième cycles. D'ailleurs, le taux de persévérance ou de résistance après une année d'études ne dépend pas uniquement de la qualité de la formation. Une multitude de facteurs peuvent intervenir dont, entre autres, la quantité d'emplois disponibles dans le domaine choisi, l'accès aux prêts et bourses, les problèmes financiers, les changements de programmes, la démarche de formation continue.

C'est pourquoi nous proposons que les universités portent une attention toute particulière au premier cycle d'enseignement, où on retrouve la masse des étudiantes et des étudiants et où on prépare la relève pour les deuxième et troisième cycles. Pour ce faire, elles doivent assurer la stabilité des équipes enseignantes, l'encadrement et le suivi pédagogiques de chaque étudiant, les activités de soutien des apprentissages.

Pour l'enseignement, nous pensons que la valorisation de l'enseignement universitaire commence par la reconnaissance de la mission universitaire, la formation et le perfectionnement des personnels des établissements d'enseignement à tous les ordres et par la recherche en éducation dans une perspective de formation initiale et de formation continue. Les activités de formation continue, dont le perfectionnement didactique et en pédagogie, doivent être accessibles à tous et à toutes: professeurs, chargés de cours, professionnels, personnel de soutien et aux autres personnels de l'université. Pour appuyer ceci, nous proposons que soient constituées des équipes intégrées recouvrant des professeurs, des chargés de cours, des étudiants-chercheurs et des chargés d'enseignement.

Sur le volet de la recherche, nous proposons que l'État, dans la prochaine politique sur le financement des universités, rehausse les budgets de recherche afin de maintenir et de développer la recherche dans des secteurs pauvres et qu'il rehausse le financement public pour les coûts indirects aux activités de recherche. La principale difficulté que rencontrent les universités est d'assumer les coûts indirects aux activités de recherche. De plus, on observe des carences importantes de l'investissement dans la recherche dans certains secteurs n'ayant pas ou peu d'incidence dans l'économie du savoir.

Ajoutons que nous proposons que le gouvernement adopte, après consultation, une loi-cadre établissant des règles de transparence et de gestion pour les subventions commanditées et les partenariats université-entreprise. Les partenariats université-entreprise se sont multipliés au cours des 20 dernières années. Ces partenariats sont de différents ordres, dont legs, fondations, recherche subventionnée. Confrontés à la diminution du financement provenant de l'État, les universités et les chercheurs ont développé ces formules alternatives. Certains y reconnaissent des avantages ? des réseaux de chercheurs, accès à de nouvelles ressources; d'autres, beaucoup d'inconvénients. Les PPP soulèvent plusieurs inquiétudes quant à la liberté académique, la propriété intellectuelle, la diffusion large des résultats, les conflits d'intérêts, l'éthique, la protection du public et un certain asservissement aux diktats de l'économie.

n (16 h 20) n

Enfin, nous ne pouvons pas ne pas en parler, ce sont les enjeux du financement. On peut parler de sous-financement en raison des coupes des 10 dernières années, de la non-indexation des subventions gouvernementales pendant toutes ces années, sauf en 2003-2004, et de l'augmentation des effectifs. Durant cette période, les universités ont réduit les services non directement liés à la formation mais qui la supportent, tels que les laboratoires, les bibliothèques, etc. Elles ont dû aussi augmenter de façon importante les frais afférents imposés aux étudiants et réduire le personnel de soutien et le personnel professionnel. Le nombre de professeurs réguliers a été réduit de 1 000, et l'enseignement, et tout particulièrement au premier cycle, a été assumé de plus en plus par les chargés de cours.

Il est difficile d'évaluer l'ampleur du sous-financement des universités, car toute comparaison avec la situation dans les autres provinces risque d'être plus ou moins exacte en raison même des paramètres retenus, de la structure des études universitaires et des effectifs étudiants. Alors, nous proposons que le gouvernement augmente les sources de revenus des universités en raison du rattrapage à faire, et ce, sans remettre en question le gel des frais de scolarité.

Nous proposons aussi que le gouvernement augmente les subventions de base pour tenir compte de l'augmentation des coûts de système et des effectifs étudiants et qu'il procède à la mise en place de subventions dédiées pour des objectifs précis en vue de corriger des problèmes actuels de financement tels qu'identifiés dans la perspective de redressement du financement des universités, proposée par le gouvernement actuel.

Pour conclure, nous nous devons d'indiquer au ministre que le sous-financement en éducation est global, qu'il y a un besoin d'intervention dans tous les ordres d'enseignement sans exception. Le succès de la scolarisation, au Québec, demeure une responsabilité de l'État. La mission première de l'État est d'assurer le bien-être des personnes et le développement de la collectivité. L'éducation joue en ce sens un rôle fondamental. Il est illusoire de penser que les divers ordres d'enseignement pourront, dans un contexte de diminution des ressources, continuer d'assumer leur mission première et d'assurer aux étudiantes et aux étudiants l'accès à des services de qualité. Alors, j'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Tomassi): Merci, Mme Boucher. À temps, c'est parfait. Or, je débuterais les échanges avec M. le ministre.

M. Reid: Merci, M. le Président. Je voudrais souhaiter la bienvenue aux gens de la CSN. Vous avez pris la peine de faire un document qui non seulement énonce des positions générales, mais aussi qui a pris la peine de faire des propositions sur des choses précises et concrètes. Ça m'amène peut-être à vous faire des commentaires précis sur certaines d'entre elles et à poser certaines questions.

Sur la proposition 8, où vous parlez de la mise en place d'un comité et d'un groupe de travail, il existe un groupe de travail qui a déjà commencé, depuis quelques semaines, et qui comprend à la fois les représentants étudiants, les représentants du ministère et des représentants de la Conférence des recteurs pour travailler exactement, me semble-t-il, dans ce que vous proposez ici, au n° 8. Alors, si jamais c'est différent de ce que l'on fait, on pourra peut-être en parler pour qu'on comprenne bien.

Par ailleurs, la proposition 7, j'avais l'impression que la politique actuelle de financement et d'application des frais de scolarité était uniforme, y compris même au nombre des crédits. Alors, vous pourrez peut-être nous donner un peu une idée, est-ce que... Parce que, si vous mentionnez ceci comme étant souhaitable, est-ce que c'est parce que vous considérez, dans ce que vous avez appelé «frais de scolarité», des frais autres, afférents et autres, qui font partie de cela? Et, dans ce sens-là, j'imagine que ça fait partie de la proposition d'une loi-cadre qui couvrirait les frais afférents. C'est un peu... Enfin, c'est des questions, disons, qui permettent de comprendre la portée exacte de ce que par ailleurs je trouve fort intéressant, d'aller dans un certain niveau de détail.

Je voulais vous souligner aussi, et je suppose que la n° 12... que, de façon implicite, comme c'est souvent le cas dans notre document, quand vous proposez que, dans chaque région, il y ait une concertation entre les universités et les partenaires régionaux ? on en a beaucoup parlé ce matin avec les commissions scolaires ? évidemment je suppose que, dans votre cas, ça inclut aussi les partenaires régionaux, c'est-à-dire les autres ordres d'enseignement régionaux, les cégeps, quand il y en a, et les commissions scolaires aussi. Je suppose que c'est ce que vous signifiez par «partenaires régionaux».

Également, au niveau 16, quand vous dites: «Nous proposons que l'État, dans la prochaine politique sur le financement des universités, rehausse les budgets de recherche afin de maintenir et de développer la recherche dans les secteurs pauvres ? je comprends bien ? et qu'il rehausse le financement public pour les coûts indirects [des] activités de recherche.»

Le Québec... Ça fait que, quand vous parlez de l'État, ça peut être le Québec, le Canada et les deux, je suppose. Le Québec a, à la satisfaction des universités du moins, réglé la question de ses propres subventions. Autrement dit, les subventions du Québec maintenant, depuis le dernier budget, ça n'a pas amené beaucoup d'argent neuf dans le système, on en conviendra, mais les subventions du Québec sont financées au niveau des coûts indirects au taux de 55 % ou 65 %, dépendant des types de recherche. Et ça, c'est les coûts totaux.

Maintenant, ce qui reste entier ou presque, c'est le cas du gouvernement fédéral qui ne subventionne pas les frais indirects au même niveau, c'est de l'ordre de 20 %, je pense, où il y a une subvention. Et, là-dessus, la proposition... Ce qu'il y a ici, ça ne s'adresse pas toujours au gouvernement, hein, je sens que parfois c'est aux universités. Et, ici, j'aimerais savoir si vous interpellez également le gouvernement fédéral quand vous faites cette recommandation au niveau des coûts indirects.

Je fais tout ça en même temps. C'est une question d'étapes. Je reviendrai avec quelques autres points, s'il me reste du temps, M. le Président.

Le Président (M. Tomassi): Merci à M. le ministre. Mme Boucher.

Mme Boucher (Denise): Ah! je suis contente que vous ayez arrêté de poser des questions, M. le ministre, parce que vous en avez posé plusieurs. Alors, je vais commencer, peut-être là, par la première à l'égard de... Bon. Alors, si effectivement il y a un groupe de travail qui est en place, nous en sommes contents et satisfaits. Peut-être que, si on l'a indiqué, c'est que nous ne le savions pas, mais, en même temps, vous venez de dire que c'est très récent que ça s'est fait.

M. Reid: D'accord.

Mme Boucher (Denise): Donc, on peut comprendre qu'on n'a pas été mis au courant.

M. Reid: Oui, oui.

Mme Boucher (Denise): Je pense que ça n'a pas été publicisé non plus. Donc, ce que l'on veut, c'est qu'on pense qu'il y a des choses à faire là-dessus, mais, en même temps, je vous indiquerais que ça pourrait être intéressant qu'il y ait des publications qui puissent être faites de ça. Alors, voilà pour la première question.

Sur la question de la proposition 7, oui, effectivement c'est sur la question des frais afférents, parce que c'est variable d'une université à l'autre. Donc, effectivement nous pensons que, là, il y a intérêt à bien regarder ce qui se fait. Mais, en même temps, c'est presque une recommandation de prévention qu'on veut faire aussi, parce que rappelez-vous qu'il y a plusieurs intervenants, depuis le début de la consultation, qui ont voulu aussi indiquer qu'ils étaient prêts que, pour certains cours, on puisse élever les frais et, pour d'autres... Alors, on ne voudrait pas se retrouver dans une situation où les universités se retrouveraient concurrentielles les unes et les autres. Donc, c'est pour ça qu'on veut que cela, ce soit bien vu.

Et, particulièrement aussi pour la formation, on indique le nombre de cours en ce qui a trait à la formation à temps partiel. Donc, ça, je pense que, là, il y a quelque chose de majeur. Généralement, quand on regarde ça, c'est plus en regard des formations à temps plein. Donc, je pense que, pour nous, c'était important. Surtout, on a beaucoup intérêt à la formation tout au long de la vie, et, entre autres, à la question de la formation continue. Donc, là il y a un aspect majeur.

À l'autre question, vous nous avez amenés à la recommandation 12. Je vous dirais que, nous, c'est beaucoup plus large, quand on parle des partenaires régionaux. Il y avait là-dedans... L'idée, c'était aussi de voir, avec les gens des centres locaux de développement, de voir aussi, bon, j'aurais pu dire les CRD, mais, comme ça n'existe plus, les CRE, qu'est-ce qu'il est possible de faire, les conseils régionaux... les conseils, les nouveaux, là, excusez-moi, là, commissions régionales des élus.

Une voix: Conférence...

Mme Boucher (Denise): Conférences régionales des élus. Alors, il faut s'habituer à tous les nouveaux termes. Alors même, merci, madame.

Mais, pour nous, c'était plus large que juste les gens des commissions scolaires, plus large que juste les gens des cégeps, mais qu'on puisse voir une concertation des universités, quels peuvent être les besoins. À la limite, je vous dirais que, même dans les partenaires régionaux, ça pourrait être aussi voir, avec les chambres de commerce, quels sont les besoins qui sont propres à la région autour de cela.

Sur l'autre, j'avais manqué un petit bout parce que je la cherchais. Je pense que c'est la 16.

M. Reid: C'est ça.

Mme Boucher (Denise): Michel, peut-être, 16?

M. Tremblay (Michel): Alors, brièvement, sur la 16...

Le Président (M. Tomassi): M. Tremblay.

n (16 h 30) n

M. Tremblay (Michel): Oui. Brièvement sur la 16, par rapport aux coûts indirects liés aux activités de recherche, il est clair, et, dans la présentation de la commission, on en parlait également... On pense que toutes les formes de financement sont les bienvenues dans ce secteur-là et on pense que, s'il y a un manque à gagner par rapport aux coûts indirects, les premiers qui seront touchés seront les secteurs pauvres, donc les secteurs de recherche qui sont moins utilitaristes, entre guillemets, et qui sont davantage culturels, sciences sociales, etc., et donc il y a un double impact sur ces secteurs pauvres là de la recherche.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci...

Mme Boucher (Denise): ...M. Patry.

Le Président (M. Tomassi): Très court...

M. Patry (Pierre): Seulement un mot. Je dirais, règle générale, dans le mémoire, quand on parle de l'État, on parle de l'État québécois parce que c'est celui qui a juridiction en termes de matière d'éducation. Et en ce sens-là je rappelle qu'une des propositions importantes de notre mémoire fait référence au déséquilibre fiscal, parce que, même si c'est le gouvernement du Québec qui a juridiction en matière d'éducation, on sait qu'il y a des surplus importants à Ottawa, qui a coupé dans les transferts sociaux, dans les dernières années. Puis, nous, on a indiqué, dans le mémoire, qu'on pensait que le gouvernement devait faire des démarches là-dessus puis que, s'il y a lieu, on est prêt à travailler de concert avec le gouvernement du Québec pour qu'on aille chercher ce qui nous revient de droit, au Québec, là-dessus pour pouvoir financer nos programmes sociaux correctement, y compris l'éducation. Donc, quand on parle de l'État, dans ce mémoire-là, règle générale, on parle de l'État québécois.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Patry. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vous souhaite la bienvenue au nom de notre formation politique. Votre mémoire est très fouillé. J'ai bien aimé bon nombre de ses recommandations et de ses analyses, ça rejoint certains commentaires d'ailleurs que j'ai faits à l'occasion au ministre. Je vais me permettre d'en reprendre un éventuellement parce que je crois qu'il y a une mauvaise orientation qui est prise en ce qui a trait à la formation de la main-d'oeuvre. Vous le soulignez dans votre mémoire, j'y reviendrai.

Mais je veux d'abord aborder la recommandation n° 2 qui est particulièrement intéressante, puisque vous parlez, dans la foulée d'un contrat social entre la société et les universités, du fait qu'on demande au Conseil supérieur de l'éducation d'identifier les besoins et attentes de la société et que ce même conseil procède périodiquement à des consultations pour rendre public, tous les cinq ans, un rapport qui fait le bilan des besoins et attentes, ce qui permettrait éventuellement au gouvernement... Parce que j'imagine que vous laissez quand même le loisir au gouvernement de proposer le contrat social entre l'université et sa société, mais sur la base de recommandations qui seraient faites par le Conseil supérieur. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

Et je partage par ailleurs votre point de vue quand vous dites qu'avant d'arriver avec le document de consultation qu'on trouve devant nous on aurait dû, à tout le moins, faire état d'un bilan quant aux différentes politiques qui ont été adoptées depuis quelques années et dont la source origine du suivi apporté à la Commission des états généraux, puisque, depuis ce temps, il y a eu systématiquement des gestes de posés dans le sens d'adoption de politiques. Je reviendrai sur la formation continue d'ailleurs parce que c'est une grande préoccupation pour moi aussi. Mais le ministre a choisi autrement, et j'imagine que c'est pour cela que vous suggérez qu'il y ait une deuxième consultation si tant est qu'il arrivait avec des propositions concrètes.

Bon. Mais revenons maintenant sur le contrat social et sur ce que vous proposez, et j'aimerais vous entendre élaborer un petit peu plus longuement sur cela.

Mme Boucher (Denise): M. Patry va répondre.

Le Président (M. Tomassi): Alors, M. Patry.

M. Patry (Pierre): Oui. Bien, d'abord, c'est un mandat qu'a déjà le Conseil supérieur de l'éducation pour l'ensemble des ordres d'enseignement d'identifier les besoins et attentes de la population en matière d'éducation. Comme, à l'intérieur du Conseil supérieur, il y a différentes commissions et que l'une de ces commissions-là, c'est la Commission des universités et de la recherche, on pense que périodiquement il est nécessaire, étant donné que les universités c'est un service public ? c'est la ligne générale qu'on développe à l'intérieur de notre mémoire ? d'aller vérifier c'est quoi, les besoins et attentes de la population, de sorte à pouvoir soumettre des recommandations au ministre de l'Éducation en ces matières-là.

Bien sûr, pour ce qui est du contrat social, on reconnaît tout à fait le droit au gouvernement de proposer ce contrat social là, mais il doit aussi inclure... Il doit y avoir des pourparlers avec les principaux représentants de la société civile pour établir ce contrat social. Donc, en gros, c'est ce qu'on veut signaler. Quand on parle des besoins et attentes de la population, c'est autant les besoins de développement personnel que les besoins en termes de développement de main-d'oeuvre. Donc, on parle des besoins au sens large, là, pour ce qui est des individus. Veux-tu parler de la deuxième consultation?

Mme Boucher (Denise): Bon. Pour ce qui est de la deuxième consultation, nous, effectivement, parce que c'est tellement large, tout est touché, mais on pense que le gouvernement a une responsabilité à l'égard de ce qu'il déposera. Donc, c'est pour ça que, nous, on demande qu'il y ait une deuxième consultation. Je pense qu'à la lumière de ce que le gouvernement voudra bien mettre sur la table... Je pense qu'on pourra réaménager s'il y avait des réaménagements à faire autour de ce que nous proposons. Mais, en même temps, je pense que ce serait d'une grande sagesse.

Le Président (M. Tomassi): Merci, Mme la députée de Taillon.

Mme Boucher (Denise): Mais vous avez raison, Mme Marois, en indiquant: Oui, il y aurait intérêt à faire un bilan. Et je pense que souvent on oublie de faire des bilans des choses parce que peut-être qu'on n'a pas besoin de tant rebrasser. Et peut-être qu'on n'a pas besoin aussi de tant demander des énergies à travailler là-dessus, et peut-être qu'on serait capable de mieux recentrer nos objectifs et nos priorités.

Mme Marois: Je suis...

Le Président (M. Tomassi): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je suis d'accord avec vous. Moi, je pense qu'on bâtit sur les acquis et on corrige en fonction d'une évaluation de ce qu'on considère ne pas être satisfaisant. Mais, pour ce faire, encore faut-il en avoir, des bilans. Alors, moi, en ce sens-là, j'aurais vraiment souhaité qu'on revienne avec des évaluations et des orientations aussi. Mais ça, ça a été un choix différent du ministre, alors on tire le meilleur parti des points de vue qui sont quand même apportés ici et qui sont particulièrement intéressants. Bon.

Sur la question de la loi n° 90 et qui concerne le développement de la formation de la main-d'oeuvre, vous déplorez le fait que le gouvernement ait exclu les entreprises avec une masse salariale de 250 000 $ à 1 million, là, de la... les ait soustraites de leur obligation de contribuer au Fonds de formation de la main-d'oeuvre et vous souhaitez même qu'on aille plus loin à cet égard. Je suis d'accord avec vous, je crois que c'est un très mauvais message envoyé à la société québécoise, et à ses décideurs, et à ses leaders.

Et, dans le mémoire, à la page 19, là, au point 4.4, vous parlez de la formation continue et vous dites: «Pour ce qui est de la formation créditée, que ce soit en formation initiale ou en formation continue, elle doit être financée par un financement public. Donc, par le maintien d'une enveloppe ouverte à l'intention des formations créditées selon les inscriptions "étudiante-étudiant équivalent temps plein". Pour toute clientèle additionnelle inscrite à [ces] cours [...] le financement doit être à 100 % selon la formule [équivalent étudiant temps plein].» Et vous craignez le principe de l'enveloppe fermée. Ça existe déjà effectivement dans les cégeps, mais, dans les universités, c'est quand même un peu différent.

Mme Boucher (Denise): ...enveloppe ouverte.

Mme Marois: C'est ça, et donc... et j'aimerais vous entendre un peu sur cela et sur la question de la formation créditée...

Le Président (M. Tomassi): Mme Boucher.

Mme Marois: ...et de son support par l'État.

Mme Boucher (Denise): À l'égard de... Bien, peut-être, si vous me permettez, Mme Marois, sur la question de la loi n° 90, vous avez dit tout à l'heure que ça envoyait un mauvais message. Je peux vous dire que c'est déjà commencé, parce que là aussi je pense qu'on est allé trop rapidement et on aurait dû faire un bilan. Il y avait déjà des recherches qui étaient mises en place pour connaître l'état, entre autres chez les employés, de la satisfaction à l'égard de la loi n° 90. La même chose se faisait chez les employeurs. Et, en 2005, on faisait le réaménagement de la réglementation s'il y avait des modifications à apporter. Et l'enquête... Juste pour indiquer que le message est tellement mauvais, que l'enquête faite, entre autres, chez les employeurs, ceux-ci maintenant, quand la recherche du département d'Emploi-Québec appelle pour voir avec eux, on leur répond: Mais, vous savez, nous ne sommes plus assujettis, nous n'avons pas besoin de répondre. Et ça, c'était pour répondre aux questions de 2002 à l'époque. Alors, vous avez tout à fait raison. Pour ce volet-là, Pierre, toi, tu veux-tu faire un bout?

Le Président (M. Tomassi): M. Patry.

Mme Boucher (Denise): Sur le 100 %, là, des trucs crédités.

M. Patry (Pierre): Oui. Bien, en fait c'est parce que là aussi il y a eu... C'est un peu par prévention également parce que, dans des documents de consultation qui ont circulé antérieurement, y était étudiée la possibilité de plafonner les enveloppes, là, en fonction du taux de diplomation des étudiantes et des étudiants, là, au niveau des universités, alors qu'au niveau des universités il y a une enveloppe ouverte. Pour ce qui est de la formation continue et de l'éducation des adultes, c'est intégré au fonctionnement régulier, et, nous, on pense que ça doit être un fonctionnement qui doit s'étendre à l'ensemble des heures d'enseignement si on veut être capable de répondre aux besoins et attentes des populations adultes. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on dit qu'il faut s'assurer que l'enveloppe demeure ouverte pour ce qui est de ces formations-là parce qu'il y a de plus en plus de besoins.

n (16 h 40) n

D'ailleurs, si je ne me trompe pas, dans le rapport de l'Université du Québec à Montréal, ils signalaient que, je pense, c'était près de 50 % des étudiantes et des étudiants qui sont à temps partiel. Donc, pour une très, très grande partie, on parle... Bon. C'est sûr, c'est tous des adultes à l'université, mais des gens, quand même, qui ont fait des allers-retours, là, sur le marché du travail. Donc, il faut s'assurer de maintenir ces enveloppes-là ouvertes pour répondre aux besoins de ces gens-là.

Le Président (M. Tomassi): Merci beaucoup, M. Patry. On va retourner du côté ministériel. M. le ministre.

M. Reid: Oui. J'ai une autre question. Mais avant je pense qu'il faut rappeler que cette loi n° 90 était une façon de donner de l'oxygène à nos PME et en particulier par cette mesure qui était ni plus ni moins qu'une taxe supplémentaire à nos entreprises qui, on le sait tous, génèrent la plupart de nos emplois au Québec. Alors, je pense qu'il ne faut pas mélanger les genres, et revenons à l'objectif et à la mission de cette commission parlementaire.

Juste une... Vous me reprendrez si jamais je me trompe, mais le paragraphe 2, la recommandation 2 est en fait une recommandation au Conseil supérieur de l'éducation. On se comprend qu'il a toute la latitude pour faire ce genre de chose. Il n'a pas besoin, en aucune manière, de la permission du gouvernement pour faire ce genre d'étude, on est conscient de ça, et donc je le prends comme tel. On lui transmettra, mais ils doivent déjà être au courant parce qu'ils lisent tout ça.

C'est au niveau de la recommandation 6 que, moi... Vous savez que cette recommandation-là, de gratuité des droits de scolarité, amène un dilemme. Parce que la proposition 6, si j'ai bien compris, on dit qu'on veut établir un principe de gratuité scolaire à tous les ordres d'enseignement. Donc, ça veut dire l'élimination des droits de scolarité, et ça amène un dilemme qui est le suivant. C'est que, pour les gens à l'aise qui donc n'ont pas accès aux prêts-bourses, une gratuité des droits de scolarité, ça amène un cadeau net de 1 700 $ par année, mettons, si les droits de scolarité sont à 1 700 $ comme maintenant et pour encore plusieurs années. Par contre, pour ceux et celles qui ont accès aux prêts-bourses, ça crée le dilemme suivant: On fait quoi? Parce que les prêts-bourses, par leur principe même, ça calcule quelles sont les sommes nécessaires, absolument nécessaires pour l'étudiant ou l'étudiante pour faire son année scolaire, pour son année universitaire. Et donc, si l'étudiant, l'étudiante n'a plus à payer des droits de scolarité, bien normalement, de par sa nature même et par sa définition, ce coût-là n'étant plus nécessaire pour l'étudiant, bien les prêts-bourses ne vont pas payer évidemment le 1 700 $ qu'ils payaient avant pour les droits de scolarité.

Et donc ça veut dire que le dilemme est le suivant: Est-ce que le résultat net, si les prêts-bourses ajustent en fonction de leur fonctionnement actuel... Et donc ça veut dire que, pour l'étudiant aisé, il y a un cadeau de 1 700 $ par année, pour celui et celle qui n'a pas accès, et qui n'est pas aussi à l'aise, et qui bénéficie des prêts-bourses, il se voit donc diminuer son prêt, sa bourse du même montant. Donc, ça ne change absolument rien à sa situation. Aucune sorte de changement, d'aucune sorte.

À moins que la proposition ? et je ne sais pas si vous avez pris position là-dessus ? serait de dire: Bien, l'étudiant qui a droit aux prêts-bourses, on va lui faire un cadeau. Même s'il n'a plus besoin de payer les droits de scolarité, on va lui donner, pour faciliter sa situation personnelle... Auquel cas évidemment ça veut dire qu'on décide de bonifier d'un montant de 1 700 $ la situation totale de cet étudiant ou de cette étudiante-là. Alors, c'est ce dilemme de choix, et je ne sais pas si vous avez pris position ou si vous avez une position déjà déterminée sur ce choix.

Que faire si on a une gratuité, si on décidait de la gratuité au niveau des droits de scolarité? Que faire au niveau prêts-bourses? Est-ce qu'on ajuste, comme le système le ferait automatiquement aujourd'hui, une dépense de moins ? bien évidemment il n'y a pas la bourse ni le prêt qui va avec, et, pour l'étudiant et l'étudiante, le prêt-bourse, ça ne change strictement rien de faire la gratuité, ça ne lui donne rien de plus, ça n'enlève rien, ça ne lui donne rien ? ou si on dit: Bien, on continue à payer une dépense qui n'existe plus, mais on le fait pour tout simplement bonifier, améliorer, pour être sûr que l'étudiant pauvre ait le même cadeau que l'étudiant riche, en quelque sorte? Il y a un dilemme là, et j'aimerais ça vous entendre si vous avez une position sur ce dilemme.

Le Président (M. Tomassi): Mme Boucher.

Mme Boucher (Denise): Alors, ça va être Mme Roy qui va répondre. Mais, avant de laisser la parole à Mme Roy, juste vous indiquer qu'on ne mêle pas les genres sur la question de la loi n° 90.

M. Reid: ...ma collègue d'en face.

Mme Boucher (Denise): Non, non, mais je veux vous répondre parce que, là-dessus, on ne mêle pas les genres. Quand on a mis la loi n° 90, ça, la loi du 1 %, le message, c'était qu'on en vienne à développer une culture de la formation. Et la seule façon de pouvoir le faire, c'était de le faire de façon coercitive, parce que, si on ne le fait pas par un mécanisme coercitif, les gens n'en feront pas, les entreprises n'en feront pas. Alors, je voulais juste vous indiquer ça. Et, quand on est sur cette question-là de taxe, je vais vous dire juste une chose, le ministère du Revenu aurait pu changer, quand on fait son rapport d'impôts, la ligne qui permettait... et faire l'allégement, et probablement que les entreprises auraient été fort heureuses. Malheureusement, ce n'est pas le choix qui a été fait.

Ceci étant dit, je dois comprendre qu'à la recommandation 2 hein... Parce que vous nous dites: Le Conseil supérieur peut le faire. Ce que je dois comprendre, c'est que vous lancez un signal positif pour que ça puisse se faire et que l'État n'a pas nécessairement à pouvoir le lancer. Est-ce que je dois comprendre ça comme ça? Parce que, à mon avis, c'est intéressant si vous lancez ce signal-là et si c'est un signal positif à cet égard-là. Parce que, si vous me dites: Non, ce n'est pas un signal positif, je serais même prête à amender notre proposition pour que vous le demandiez au Conseil supérieur, de pouvoir le faire. Alors, c'était ce que je voulais vous répondre sur la recommandation 2, et j'invite Mme Roy à vous répondre sur... Vous ne m'avez pas comprise?

Une voix: ...

Mme Boucher (Denise): C'est parce que vous m'avez parlé de la proposition 2 où vous dites que le Conseil supérieur peut. Ce que je vous dis: Est-ce que je dois considérer que c'est un message, un signal positif que vous envoyez pour que le Conseil supérieur puisse le faire et qu'on puisse prendre les devants là-dessus? C'est ça que je vous demande. Et j'ajoute: Je suis prête même à amender la proposition si vous me dites que ce n'est pas un signal clair pour dire que le gouvernement puisse prendre cet engagement. C'est ce que je dis. Mme Roy, pour l'autre volet.

Le Président (M. Tomassi): Mme Patry voulait continuer dans...

Une voix: ...

Le Président (M. Tomassi): Mme Roy, excusez.

Mme Roy (Josée): Oui. Bien, en fait c'est parce qu'il faut que vous lisiez notre texte sur les droits de scolarité avec ce qu'on recommande aussi sur l'aide financière. Les étudiants riches, ça dépend comment on détermine ceux qui ont droit aux prêts et bourses, là. Et, dans notre texte, à la page 15, là, nos recommandations concernant l'aide financière aux adultes, on a quand même plusieurs recommandations en ce qui a trait aux modalités d'attribution des prêts et bourses en fonction des besoins réels, de considérer comme indépendante, aux fins du calcul de l'aide financière, toute personne âgée de 18 ans. Alors, ça augmente le bassin d'étudiants qui auraient droit aux prêts et bourses, et donc il faut vraiment regarder les deux questions en lien l'une avec l'autre.

M. Reid: Et ça n'enlève rien au dilemme, M. le Président, à savoir que, si on donne... Il y a un étudiant qui est à l'université aujourd'hui, on dit: L'an prochain, c'est gratuit. Il y a 60 % des étudiants qui n'ont pas droit aux prêts-bourses. Alors, eux, on leur fait un cadeau pur et simple. Il y a 40 % des étudiants qui ont droit aux prêts-bourses, eux, on rajuste leurs prêts-bourses, et on ne leur donne rien, et il n'y a absolument aucun changement dans leur cas. Donc, ça se retrouverait... Si on ne fait aucun changement, ça se retrouverait à faire un cadeau au 60 % d'étudiants qui ont déjà assez d'argent pour aller à l'université sans avoir l'aide des prêts-bourses.

Le Président (M. Tomassi): M. Patry, en 30 secondes.

M. Patry (Pierre): En 30 secondes, oui. Bien, d'abord ce que je veux signaler, c'est que ? puis c'est ce qu'on dit à la page 15 ? nous, on considère que le régime actuel d'aide financière, il ne correspond pas aux besoins réels des étudiantes et des étudiants. Donc, dans ce sens-là, on ne leur fera pas un cadeau. Même si on laisse le 1 700 $ au niveau des prêts et bourses, ça va juste plus répondre à leurs besoins. Deuxième des choses...

M. Reid: Votre position, si je comprends bien, là-dessus, sur ce dilemme-là, c'est de dire: L'argent devrait être donné aussi à ceux qui bénéficient de prêts-bourses.

M. Patry (Pierre): Bien, on dit qu'il faut revoir le système d'aide financière. Ce que je veux vous dire, c'est qu'on pense probablement que ça va être maintenu, peut-être même augmenté, on ne le sait pas, là, mais... Parce que ça ne correspond pas aux besoins réels des étudiantes et des étudiants. Parce que, quand on connaît un peu les calculs... Moi, je ne suis pas un expert de l'aide financière, mais, quand on connaît un peu ces calculs-là, c'est extrêmement... on sait que les coûts dont on tient compte, c'est assez minime, alors que les coûts de loyer explosent, le logement, ainsi de suite.

Deuxième des choses que je veux signaler, dans le fond...

Le Président (M. Tomassi): Je ne sais pas si la députée de Taillon voudrait prendre le temps sur son temps à elle parce que là on a dépassé le temps.

M. Patry (Pierre): O.K. 30 secondes?

Mme Marois: 30 secondes.

M. Patry (Pierre): 30 secondes.

Le Président (M. Tomassi): Elle est bien généreuse.

M. Patry (Pierre): Oui. Ce que je veux signaler, c'est que, quand on regarde la situation, au Québec, par exemple, au niveau collégial où il y a gratuité puis qu'on compare à ce que c'était avant, avant qu'il y ait un réseau collégial, on constate qu'il y a eu une hausse d'accessibilité extrêmement importante sur l'ensemble du territoire québécois, et, nous, on pense qu'en rendant les études gratuites à moyen terme ou à long terme, ce n'est pas un cadeau qu'on fait à des plus riches ou à des moins riches, c'est un cadeau qu'on se fait, comme société québécoise, de permettre de hausser l'accessibilité aux études pour l'ensemble de la population.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Patry. Alors, Mme la députée de Taillon.

n (16 h 50) n

Mme Marois: Oui. Ma collègue viendra éventuellement avec quelques questions aussi. Je voudrais revenir sur un autre aspect que vous abordez dans votre mémoire, au point 5.4, à la page 25, et il s'agit de l'enseignement. Vous proposez, entre autres, que soient constituées des équipes intégrées regroupant les professeurs, chargés de cours, étudiants-chercheurs et chargés d'enseignement. J'aimerais ça vous entendre parce que, évidemment, on a débattu à plusieurs reprises de l'apport des chargés de cours à l'université, on l'a fait presque à toutes les fois où il y a eu des présentations par les universités ou par des représentants des professeurs ou des personnels.

Comment faire en sorte qu'on les intègre davantage? Est-ce qu'il y a des gestes particuliers que l'on devrait poser pour faciliter des passerelles pour leur permettre d'accéder au statut de professeur régulier? Si tant est que c'est leur souhait, parce que, dans certains cas évidemment, on sait que ce sont des chargés de cours qui sont embauchés sur des projets très, très... des formations très pointues ou très spécialisées. J'aimerais vous entendre sur cette question-là.

Le Président (M. Tomassi): Alors, M. Patry.

M. Patry (Pierre): Oui. Bien, il y a deux volets. D'abord, sur votre deuxième partie, sur la question des passerelles, évidemment on est favorable à ce que des chargés de cours, en particulier ceux qui ont des doctorats et qui enseignent depuis bon nombre d'années dans les universités, puissent accéder à des postes de professeur, d'autant qu'on signale qu'il y aura des besoins. Il y a un débat, là, entre la CREPUQ puis le Conseil supérieur sur l'état de ces besoins-là, mais c'est sûr qu'il y aura des besoins à combler en termes de professeurs dans les prochaines années.

Là-dessus, je veux indiquer qu'on se dissocie clairement, là, des propos de M. Lacroix, de la CREPUQ, qui signalait qu'un chargé de cours qui a un doctorat n'est pas forcément qualifié à devenir professeur parce qu'il n'a pas fait forcément de la recherche dans les dernières années. On trouve que c'est sous-estimer de façon importante la contribution qu'ils apportent à l'enseignement depuis bon nombre d'années, ces chargés de cours là. Donc, nous, on considère que ça constitue un potentiel de remplacement des professeurs.

Deuxième des choses, c'est qu'il va demeurer, de toute façon, réalistement bon nombre de chargés de cours dans les universités. Ils dispensent 50 %, à peu près, là, de l'enseignement au premier cycle et ils ne sont pas intégrés ou très peu intégrés à l'ensemble de la vie universitaire. Donc, on pensait qu'un minimum, c'est qu'il y ait des équipes intégrées, profs, chargés de cours, chargés d'enseignement, là où il en existe, parce qu'il n'en existe pas partout, et étudiants-chercheurs, de sorte à établir une concertation pour offrir, par exemple, des meilleures mesures d'encadrement aux étudiantes, aux étudiants puis ainsi favoriser la réussite aux études, là.

Le Président (M. Tomassi): Merci beaucoup, M. Patry. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Est-ce que tu veux aller maintenant?

Mme Champagne: Oui, puis...

Mme Marois: Oui. Madame...

Le Président (M. Tomassi): Mme la députée de Champlain.

Mme Marois: Je reviendrai.

Mme Champagne: Alors, merci. Alors, bienvenue à vous tous. Écoutez, après avoir lu votre document et revu certaines parties aujourd'hui, je me rends compte que vous éprouvez un regret que j'éprouve également, moi aussi, c'est sur le fait que, à cause du sujet, qui est le financement, évidemment la qualité, au niveau des universités, on a un petit peu négligé ? puis il y a lieu de se reprendre, là ? le lien avec les cégeps et le lien avec tout l'enseignement dans son ensemble. Et j'en suis convaincue, et ça va sûrement se faire dans les mois ou les années qui viennent, je n'en doute pas, il faut mettre en lien toute cette formation, que ce soit primaire, secondaire, collégial, universitaire.

On a eu, ce matin, pour un rappel ? et vous étiez peut-être là ? la Fédération des commissions scolaires qui vient dire: Écoute, il faut brasser les choses. Ils vont aussi loin que de dire: Bien, on va faire disparaître les cégeps dans la forme actuelle pour redonner ailleurs une formation afin de corriger ce qui est corrigeable, parce qu'il y a beaucoup d'étudiants qui ratent, beaucoup d'étudiants qui ne terminent pas ce qu'ils ont commencé. Or, c'est en lien également avec le financement parce que c'est une perte énorme d'argent quand tu ne permets pas, de par les moyens que tu as, à un étudiant de commencer et de compléter ses études. Tu n'en fais pas un travailleur, tu en fais un dépendant du système. Alors, je trouve que, dans votre mémoire, vous le campez très bien en disant qu'il serait important, si ce n'est déjà fait maintenant, d'aller de l'avant et de lier les modèles collégial, universitaire ensemble, on ne peut pas se permettre de les dissocier.

Cette parenthèse-là fermée, je sais également que vous avez pris beaucoup d'attention sur le financement des étudiants et des étudiantes, et, entre autres, vous faites certaines propositions qui me semblent intéressantes. Il y en a une qui est... Tout à l'heure, la députée de Taillon, ma collègue, parlait également de la reconnaissance, et vous avez rajouté là-dessus: Pour les personnes, reconnaître indépendante, aux fins de calcul de l'aide financière, toute personne âgée de 18 ans et plus et éliminer le critère de contribution parentale et de revenus de conjoint. Les étudiants nous en ont parlé également beaucoup. Le régime doit être en fonction de la personne et non pas dépendre de l'arbitraire d'une hypothétique contribution parentale et de celle d'un conjoint. J'élargis ça aussi loin que de vous dire et de vous soumettre, là, que mon opinion là-dessus, c'est que les étudiants et les parents sont parfois pris à partie, et c'est en porte-à-faux, ce n'est pas une réalité. Il faut que ce soit revu également dans son ensemble.

Mais vous ajoutez qu'il faudrait même bonifier l'étudiant qui sort de ses études endetté, comme on dit, là, jusqu'aux yeux. Alors, vous proposez une remise particulière. Avez-vous déjà un scénario, à ce niveau-là, à proposer sur le remboursement de dette? Est-ce que c'est au niveau d'une proportionnelle? Vous le voyez comment? Est-ce que c'est déjà pensé, chez vous, ce modèle-là?

Le Président (M. Tomassi): Alors, Mme Boucher.

Mme Boucher (Denise): Bien, je vous indiquerais qu'on n'a pas regardé le modèle, parce que je pense que ça prendrait beaucoup plus de sérieux, mais on pense qu'il y a des espaces pour le faire. Mais, pour être très honnête avec vous, on n'a pas mis de scénario autour de ça. Mais, en même temps, vous avez raison.

Et on pense aussi aux femmes monoparentales. On en parle, hein, parce qu'il y a des difficultés là aussi. Et souvent on pense que toutes les familles sont heureuses, mais, dans la vie, hein, on pense que c'est juste les jeunes qui sont les fuckés de familles en sécurité du revenu qui ne vont pas bien dans la vie. Mais je pense qu'il y a quelques jeunes dans des familles fortunées où ils ne sont pas très à l'aise et très bien, qui sont un peu tannés d'être dépendants du père et de la mère. Alors, je pense qu'il y a là des éléments auxquels il faut penser. Mais vous avez raison, nous, s'il y avait eu des scénarios à cet égard-là ou s'il y avait eu des propositions qui avaient été amenées à l'effet de voir, sans aucun doute on vous en aurait amené.

Mme Champagne: C'est que je me...

Le Président (M. Tomassi): M. Patry.

Mme Champagne: Je vais vous laisser aller. Oui, allez-y.

Mme Boucher (Denise): Mais M. Patry, peut-être que, lui, il a une bonne idée.

M. Patry (Pierre): Non, ce n'est pas là-dessus.

Le Président (M. Tomassi): M. Patry.

M. Patry (Pierre): J'espère que j'ai plus qu'une bonne idée, par contre.

Une voix: Sans doute.

M. Patry (Pierre): Non, mais c'est sur la première partie de votre commentaire. Nous, il est clair, là, qu'on est favorable à ce qu'il y ait un meilleur arrimage entre les différents ordres d'enseignement, donc entre le secondaire et le collégial puis entre le collégial et l'université. Mais il faut être clair aussi à l'effet qu'on s'est dissocié de la principale conclusion de la Fédération des commissions scolaires qui est à l'effet d'abolir les cégeps, qui, pour nous, serait un recul pour le Québec, parce qu'on sait que ça a contribué à hausser grandement l'accès aux études supérieures. Puis, en forçant les jeunes à choisir plus rapidement des programmes à l'université, parce que c'est un an plus vite finalement, selon la proposition de la Fédération des commissions scolaires, on pense qu'on ne s'aide pas, comme société. Les problèmes d'orientation qu'on retrouve au collégial, on va les retrouver à l'université. Donc, même si on veut favoriser un meilleur arrimage entre les ordres d'enseignement, bien c'est dans le respect de chacune des missions de ces ordres d'enseignement là. Mais on se dissocie totalement de la Fédération des commissions scolaires à l'effet d'abolir le collégial.

Mme Champagne: Je m'en doutais. Par contre...

M. Patry (Pierre): Oui? Bon. Bien, je veux être sans équivoque sur la question.

Mme Champagne: Puis on n'a pas de position ferme là-dessus. C'est un dépôt, mais qui soulève un débat, un débat de malaise, là, sur les passerelles entre les divers ordres d'enseignement. Et le malaise, il est là, il est évident. On en fait le constat, et vous en faites également le constat dans votre mémoire, et je trouve que c'est intéressant également. Alors, je vous remercie.

Mme Boucher (Denise): ...à avoir moins de décrocheurs et de décrocheuses au cégep, au collégial, qu'il peut y en avoir au secondaire.

Mme Champagne: Et ce n'est pas seulement une question de finances ou d'argent, on peut se le dire.

Le Président (M. Tomassi): Mme la députée de Taillon, en une minute.

Mme Marois: Oui. Alors, je veux revenir sur la question des universités en région. Vous faites une proposition assez élaborée ? en fait vous en faites plus qu'une ? à cet égard. Vous, bon, demandez à la Commission de l'enseignement et de la recherche universitaire du Conseil supérieur de faire un état des lieux ? je crois que c'est très pertinent et intéressant ? sur ce qui se passe, là, dans les régions où on ne retrouve pas d'établissement universitaire. On va constater qu'il y a aussi des satellites parfois qui rendent l'accessibilité plus facile, mais je crois que l'état des lieux mérite d'être fait quand même.

Je veux revenir plutôt à la proposition qui concerne les subventions spécifiques aux universités en région qui se donneraient un plan de développement instaurant à la fois un choix de programmes de premier cycle, créneaux d'excellence, deuxième et troisième cycles, et la recherche. Et vous suggérez même que cela s'étale sur une dizaine d'années.

Le Président (M. Tomassi): Il reste 30 secondes, alors...

Mme Marois: Alors, je veux simplement, sur cela, vous entendre d'une façon particulière.

Le Président (M. Tomassi): Mme Boucher, en 30 secondes.

Mme Boucher (Denise): Bien, on essaie de trouver des solutions. Ce n'est pas des choses faciles, mais je pense que, si les universités en région pouvaient se concentrer un peu plus... Et on pense aussi qu'il pourrait y avoir des interactions de région à région. Je pense qu'il y aurait peut-être là une solution. En même temps, le faire sur court terme, c'est irréaliste. C'est pour ça qu'on le place sur 10 ans.

Mme Marois: D'accord, merci.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci beaucoup.

Mme Boucher (Denise): Ça nous a fait plaisir.

n (17 heures) n

Le Président (M. Tomassi): Et je vous remercie beaucoup de votre présence à la Commission de l'éducation. Alors, j'inviterais l'autre groupe à se rapprocher, le Conseil interprofessionnel du Québec.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Tomassi): Alors, j'inviterais le Conseil interprofessionnel du Québec à bien vouloir s'avancer.

Des voix: ...

Le Président (M. Tomassi): Excusez! Un peu d'attention! M. Dutrisac, je crois.

Une voix: Il arrive.

Le Président (M. Tomassi): Ah! Il arrive. C'est parfait, ça. On va essayer de respecter l'horaire. Bonjour, M. Dutrisac. Bienvenue à la Commission de l'éducation. Je vous inviterais à présenter la personne qui vous accompagne, et par la suite vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire.

Conseil interprofessionnel du Québec (CIQ)

M. Dutrisac (Jean Paul): Merci beaucoup. Je m'excuse de mon deux secondes de retard. Alors, M. le ministre, M. le Président de la commission, Mmes et MM. les députés, alors je suis Jean Paul Dutrisac, notaire en pratique privée et président du Conseil interprofessionnel du Québec, le CIQ, et je suis accompagné de Me André Gariépy, avocat, directeur général du conseil. Alors, on est la preuve vivante que, avocat et notaire, on peut travailler très bien ensemble.

M. Gariépy (André): C'est parce qu'il sait que je signe le chèque de temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dutrisac (Jean Paul): Alors, je vous remercie de nous recevoir et de nous permettre d'échanger avec vous sur le contenu de notre mémoire. Je souligne à nouveau aux membres de la commission que nous sommes désolés du délai dans la production de notre mémoire. Les délais de consultation, les exigences de validation interne de nos 45 organismes membres et la présence de plusieurs consultations concomitantes ? on sort à peine de la Commission parlementaire sur la culture... de la culture et sur l'immigration ? alors ont entraîné cette situation qui n'est ni notre coutume ni notre souhait.

Le Conseil interprofessionnel du Québec regroupe les 45 ordres professionnels qui comptent collectivement près de 300 000 membres. Il est le forum d'échange et de concertation de même que la voix collective des ordres sur des sujets d'intérêt commun. Le Code des professions lui octroie un mandat d'organisme-conseil auprès de l'autorité publique.

Dans son mémoire, le CIQ présente la perspective des ordres professionnels en matière de formation initiale et de formation continue des professionnels québécois. Notre mémoire présente trois sujets sur lesquels les ordres professionnels veulent vous entretenir: la compétence et la qualité de la formation dans une perspective de protection du public; les principales difficultés qui nuisent à la qualité de cette formation; et la collaboration entre les universités et les ordres professionnels.

Nous débuterons par la question de la compétence. La compétence est la pierre d'assise des ordres professionnels. Fondés sur la mission de protection du public, les ordres professionnels ont été constitués par l'État pour prévenir le risque de préjudice pouvant découler de certains actes. Ces actes, s'ils ne sont pas accomplis adéquatement, avec compétence, dirions-nous, peuvent porter atteinte à l'intégrité physique, psychologique ou patrimoniale des personnes. C'est pourquoi, dans la perspective du système professionnel, la formation constitue une exigence fondamentale pour garantir la protection du public.

À l'heure actuelle, plus d'une centaine de programmes universitaires sont dédiés à la formation de personnes qui désirent exercer une profession réglementée. 32 des 45 ordres professionnels exigent une formation universitaire pour la délivrance de leur permis. Les universités, parce qu'elles sont responsables de programmes d'études menant aux permis professionnels, ont un rôle primordial à jouer en matière de formation, dans une perspective de protection du public.

En réponse aux exigences de la protection du public, la formation des professionnels doit répondre à des standards de qualité. Pour les ordres professionnels, la qualité d'une formation s'évalue en fonction de son orientation et de son adéquation aux exigences de la pratique. La pertinence et la consistance des programmes d'études menant à l'exercice d'une profession sont au coeur des préoccupations des institutions du système professionnel. Toutefois, des difficultés empêchent les universités d'accomplir ce rôle de façon optimale.

D'abord, sous-jacent à plusieurs des difficultés que nous évoquons, il y a le sous-financement. La difficulté récurrente des universités à obtenir un financement adéquat, à la hauteur de leurs besoins, exerce une pression sur la qualité de la formation des professionnels. Ainsi, l'insuffisance de ressources réduit les choix d'activités d'enseignement adaptées aux diverses formes de pratiques professionnelles. Également, l'incapacité d'augmenter le volume d'étudiants dans certains programmes, faute de ressources financières suffisantes, crée un réel problème dans les programmes menant à des professions et pour lesquelles des pénuries sont constatées ou anticipées.

D'autres phénomènes semblent être alimentés par des considérations budgétaires. Ainsi en est-il du foisonnement des programmes, de leur manque d'articulation et de leur disparité qui posent un enjeu de cohérence entre les programmes, entre les niveaux d'enseignement et entre les institutions. Le CIQ considère que la prise en compte, par les universités, des impacts des programmes d'études sur l'encadrement des professions réglementées permettrait un éclairage significatif sur la pertinence des choix effectués.

Par ailleurs, les professionnels vivent quotidiennement la connexité et la complémentarité entre les domaines d'activité. Ils sont de plus en plus appelés à travailler en interdisciplinarité. Ces transformations professionnelles rendent nécessaire d'inclure l'interdisciplinarité dans les programmes d'études menant à l'obtention d'un permis professionnel.

Un enjeu d'accessibilité se pose aussi au regard de la formation continue. Sur ce sujet, la formation continue fait l'objet, depuis 2002, d'une politique gouvernementale qui appelle à la responsabilisation de tous les acteurs, y compris les universités. Le CIQ souhaite que les universités mettent à contribution leur expertise disciplinaire pour aider à la mise à jour des connaissances des professionnels et au maintien de leurs compétences. Nous demandons aussi que cette expertise aide à répondre aux besoins de formation d'appoint des personnes immigrantes qui projettent d'exercer, au Québec, une profession réglementée.

Devant les enjeux et les difficultés soulevés, nous suggérons quelques pistes en vue d'améliorer la collaboration entre les universités et les ordres professionnels. Il y aurait lieu, par exemple, de bonifier les mécanismes d'évaluation de la qualité des programmes de manière à prévoir formellement l'apport d'expertise et la consultation des ordres professionnels le plus tôt possible dans le processus. Dans le même esprit, le CIQ appelle à la création d'une table de concertation éducation-système professionnel, au niveau universitaire, afin de favoriser les échanges sur les enjeux de qualité et d'accessibilité de la formation des professionnels.

Pour conclure, j'aimerais vous résumer les convictions qui ont animé nos membres dans leurs échanges et discussions sur le sujet et présidé à la rédaction de notre mémoire. Les ordres professionnels considèrent que la contribution des universités, comme institutions de développement et de transmission du savoir, est cruciale à la formation des professionnels. À cet égard, les universités et les ordres professionnels doivent pleinement reconnaître et organiser leur complémentarité dans l'objectif de qualité défini par la pertinence et la consistance des programmes d'études.

Bref, les universités et les ordres professionnels sont des alliés à l'égard de la qualité qu'exige la société à l'endroit des activités des professionnels.

Je vais m'arrêter ici pour nous laisser tout le temps possible pour les échanges. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci, M. Dutrisac. On est prêt pour les échanges. Je vais commencer avec le ministre.

n (17 h 10) n

M. Reid: Oui. Merci, M. le Président. Bienvenue aux représentants du Conseil interprofessionnel du Québec, M. Dutrisac et M. Gariépy.

On touche à un aspect extrêmement intéressant de la qualité de la formation universitaire, la qualité est importante évidemment partout, on pourrait peut-être dire qu'elle est impérative pour la formation des professionnels. Et, dans ce sens-là, vous avez... vous soulevez un certain nombre de difficultés, de points. J'ai un certain nombre de questions qui sont peut-être courtes, mais vous pourrez élaborer, parce que je pense que vous avez justement fait en sorte qu'on ait du temps pour en parler.

Vous parliez tout à l'heure des difficultés de sous-financement. Puisqu'on parle de formations plus pointues qui correspondent à des sous-sections ou des sous-ensembles de la formation d'une université donnée dans chaque université, est-ce que cette question de sous-financement, vous la voyez uniquement comme une question de sous-financement global des universités ou du système universitaire ou s'il n'y a pas des effets de répartition? Parce que les universités, par exemple, parlent de répartition entre régions, etc., mais, dans votre cas, ce serait peut-être le fait de répartition entre des objets de formation pour faire des programmes, par exemple, à l'intérieur d'une université. Est-ce que vous avez des données là-dessus ou une opinion là-dessus?

Le Président (M. Tomassi): M. Dutrisac.

M. Dutrisac (Jean Paul): Oui, mais je vais demander à mon collègue, Me Gariépy, de pouvoir répondre à la question. Il a sûrement des données plus...

Le Président (M. Tomassi): Le notaire va parler, c'est ça.

M. Dutrisac (Jean Paul): Oui.

Le Président (M. Tomassi): Alors, M. Gariépy.

M. Gariépy (André): En fait, les données sont difficiles à établir.

Une voix: Ah! il est avocat, monsieur... Excusez-moi!

M. Dutrisac (Jean Paul): Il a le droit d'être représenté par son avocat.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Tomassi): Alors, M. Gariépy.

M. Gariépy (André): En fait de données, je dois vous dire, il faudrait ? j'ai mon diplôme d'économie de l'Université de Montréal, mais je n'ai pas poussé jusqu'à la comptabilité ? passer au travers de bien des choses pour permettre de comprendre l'embrouillamini, disait un ancien premier ministre, de toutes les dimensions financières d'une université.

En fait, nous avons évoqué le sous-financement non pas parce que nous en sommes des spécialistes et nous sommes des techniciens de la chose, mais tout simplement parce que c'est ce qu'on décode du propos, c'est ce qu'on décode des discussions un peu plus voilées, en secret, que nous avons avec des intervenants du monde universitaire qui veulent bien avouer les choses. Ce qu'ils nous disent: Nous allons faire des choses en fonction que ça nous rapporte pour sauver quelques meubles. Alors, oui, on se concurrence entre institutions, oui, on se concurrence entre ordres d'enseignement, oui, il y a des problèmes d'articulation entre certains programmes au sein même de notre université, mais à quelque part on fait tout ça pour s'assurer qu'on maintient en activité certains de nos profs, certains de nos locaux, et s'assurer des parts de marché qui se rétrécissent par une baisse de clientèle, dans certains cas.

Alors, nous, ce qu'on vous dit, dans notre mémoire, c'est qu'il y a un enjeu sous-jacent, difficile à capter, mais qui est énoncé, évoqué à profusion. Certains l'ont fait, ces derniers jours, avec beaucoup d'émotion, se disant que ça fait des années qu'on en parle, peut-on aboutir enfin? Mais, bon, ce sont leurs propos. Ce que nous vous disons, c'est qu'il semble très présent et, dans certains cas, il empêche même d'agir pour développer certains programmes qui permettent à la société québécoise de répondre à certains de ses besoins, notamment la formation d'appoint pour les personnes immigrantes.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci. M. le ministre.

M. Reid: Je peux continuer?

Le Président (M. Tomassi): Oui, oui.

M. Reid: Vous parlez de ? et puis je pense que vous êtes bien placés pour en parler, puisqu'on parle du Conseil interprofessionnel du Québec ? l'interdisciplinarité et qu'on devrait, dans les universités, s'assurer que ce soit mieux inclus ou inclus de façon plus large dans la formation ou dans les programmes d'études. J'imagine que vous parlez surtout des programmes d'études menant à des diplômes que vous couvrez ou que... enfin qui mènent à un ordre professionnel, sinon vous me reprendrez là-dessus. Ma question est: Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples si ça existe ou alors des exemples de ce que vous souhaiteriez si ça n'existe pas?

M. Gariépy (André): Bien, vous comprenez, lorsqu'on enseigne une discipline, on enseigne une identité professionnelle et quelquefois on la veut très forte et on oublie certaines choses qui sont autour, alors que le marché du travail, la réalité du fonctionnement de la société ou de l'économie ? parce que des fois il faut distinguer les deux ? fait en sorte qu'on a besoin d'une équipe pour soutenir une certaine action, que ce soient les entreprises qui demandent à la fois des notaires, des avocats et quelques comptables pour compléter le tout, des spécialistes des ressources humaines, conseillers en ressources humaines, en relations industrielles, conseillers d'orientation, psychologues industriels, organisationnels, traducteurs et interprètes même. Alors, tous ces gens-là oeuvrent au sein de l'entreprise en fonction de la finalité de cette entreprise-là. Eh bien, il faut que chaque professionnel, plutôt que de se voir en silo, chacun dans sa petite affaire, et de repartir, et bonjour, il faut qu'il comprenne qu'il y a d'autres personnes qui interviennent dans le processus pour aboutir à l'action que l'entreprise requiert d'eux.

L'autre exemple, c'est en santé. En santé, le médecin arrive, le médecin prend en charge administrativement et professionnellement, selon notre régime actuel. Eh bien, il y a une référence à une série de professionnels, il y a une série d'interventions qui se font: des techniciens d'un bord, des inhalothérapeutes de l'autre, les physios, et tout, et tout. Il faut que ces gens-là soient pleinement formés à comprendre le grand tout dans lequel ils se trouvent, qui n'est pas seulement administratif, qui est aussi professionnel, et que ces gens-là puissent voir les recoupements qu'il y a entre les pratiques professionnelles réglementées pour mieux s'adapter à la présence de ces autres professionnels, pour éviter d'être un obstacle dans la délivrance des services, pire, dans la qualité des services.

Alors, cette nouvelle donne que de toute façon les pressions des milieux de travail exercent sur les professions, cette nouvelle donne de l'interdisciplinarité, elle est déjà en marche au sein des ordres professionnels, notamment par le projet de loi n° 90 qui a modifié les champs de compétence au sein du réseau de la santé. Eh bien, là, il faut que la formation s'adapte à ça pour que les gens comprennent d'où vient le patient et à quel type d'intervention ce patient aura à faire face et pour, par la suite, après son acte professionnel, s'assurer du continuum et d'avoir une bonne interface avec le suivant ou tous les autres qui pourraient, de façon concomitante, intervenir.

Alors, les professions de la santé, bien entendu, mais aussi tout le domaine du droit et des affaires, le domaine de génie, aménagement, sciences, quand une entreprise requiert les services d'un géologue, d'un ingénieur, d'un architecte, d'un technologue professionnel, voire d'un urbaniste à certains égards, bien tous ces gens-là agissent et se côtoient, et c'est fini, le temps, là, de: J'ai mon identité professionnelle, je place mes frontières puis je ne m'occupe même pas de l'autre. Non. Aujourd'hui, une société performante, c'est une société qui est capable... que chacun de ses membres puisse connaître ce que fait un peu l'autre et s'adapter pour arriver globalement à un résultat positif.

Le Président (M. Tomassi): Merci. Oui, M. Dutrisac.

M. Dutrisac (Jean Paul): Pour compléter, M. le Président. Les ordres professionnels de la santé ont été un petit peu... ont assumé un certain leadership là-dedans dans le cadre de colloques qui prennent la forme de formation continue. Les ordres professionnels de la santé ont déjà organisé deux ou trois colloques sur justement l'interdisciplinarité dans leurs fonctions médicales. Et on voit... Dans notre mémoire, ce qu'on dit, c'est qu'il serait bon, au niveau de la formation initiale, déjà d'inclure ce volet-là important dans les universités.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Dutrisac. Mme la députée de Maskinongé.

Mme Gaudet: Merci, M. le Président. Bienvenue parmi nous, merci d'être là. Alors, vous parlez, dans vos programmes d'études, là, d'élaborer davantage des programmes avec une approche par compétences. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Et vous ne croyez pas qu'il y ait un risque en même temps de préjudice, là, en élaborant des programmes avec ce volet compétence?

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): C'est rare qu'une personne doit poser ou peut poser une question, mais en quoi voyez-vous des risques? J'aimerais que vous précisiez en fait votre question, tiens.

Mme Gaudet: Au niveau de la subjectivité, par exemple, au niveau des indicateurs de la compétence, là. Parce que, moi, je peux juger une personne compétente, alors que peut-être il faudrait que les indicateurs soient d'une précision, là, à ce moment-là.

n (17 h 20) n

M. Gariépy (André): Quand on parle de l'approche par compétences, et je ne suis pas un andragogue, qui est le terme consacré pour traiter de ces questions, alors je diminue mon autorité à en parler, mais, quand on parle de l'approche par compétences, les expériences que nous en avons sont à l'effet de vraiment voir comme un tout organique de connaissances, d'habiletés et de conditions de performance toute la séquence de travail, en fait... je ne parlerai pas de travail, mais la séquence du service professionnel, dans notre cas, et de voir quel genre d'éléments, quel genre de compétences autant personnelles, autant au plan théorique que pratique, que la personne doit détenir.

Alors, bien entendu, cette approche-là amène un recadrage, une autre façon de voir, hein, c'est une grille tout à fait complète. Mais je peux vous dire qu'il y a une université qui... maintenant deux qui commencent à se plaire beaucoup dans cette approche-là, la première étant l'Université de Sherbrooke ? vous me pardonnerez, M. le ministre, de vous ramener à votre passé ? et je peux vous dire qu'ils démontrent une très grande ouverture et ne voient pas d'incompatibilité ou de difficulté méthodologique au niveau universitaire à aborder l'approche par compétences.

L'approche par compétences est déjà présente dans les programmes de formation professionnelle et technique et fonctionne très bien. Et l'approche par compétences, ce n'est pas seulement une façon d'organiser les objectifs d'un programme de formation pour une performance un peu mécanique et technique, non. Ça peut aussi prendre en compte des habiletés intellectuelles et du travail intellectuel. Et plusieurs ordres professionnels ont déjà, malgré que les diplômes ne sont pas construits avec l'approche par compétences... On croit... Je pense qu'il y a une dizaine d'ordres qui ont actuellement ce qu'on appelle des chartes, des tableaux de compétences, ce qui fait en sorte qu'on a justement regardé comment le professionnel agit et qu'est-ce qu'il lui faut pour agir ainsi. Et ils s'en servent pour l'évaluation de la compétence par l'inspection professionnelle, ils s'en servent aussi pour la formation continue et ils la glissent, mine de rien, sur la table de leurs collègues des universités pour qu'un jour ils s'en inspirent.

Le Président (M. Tomassi): Je glisse aussi sur le temps. Alors, j'inviterais Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vous souhaite à mon tour la bienvenue au nom de notre formation politique.

Je veux revenir sur un élément qu'on retrouve... sur certains éléments qu'on retrouve dans votre mémoire et qui concernent peut-être plus directement les universités. Alors, je ne sais pas ce que vous souhaiteriez que le gouvernement ou que le ministre fasse en l'occurrence pour ce qui concerne ces questions que vous soulevez, entre autres. Et là c'est à la page 5, et vous abordez cela à la page 5 et 6 du mémoire, et ça aboutit à votre première recommandation.

D'abord, un, le foisonnement des programmes. On dit: «...depuis quelques années un foisonnement de nouveaux programmes d'enseignement [tant collégiaux qu'universitaires] qui, par le fait des cohortes successives de diplômés, amène la constitution de plusieurs corps d'emplois et de pratiques.» On dit: «[Ce sont] des redécoupages ou amalgames de programmes existants, dont des programmes donnant ouverture aux permis d'ordres professionnels.» Ça favorise le contournement et l'encadrement des pratiques mises en place par le législateur. Ça entraîne la confusion du public et des milieux de travail. Ça, c'est une première chose.

Ensuite, vous abordez, toujours dans la même foulée, l'articulation dans les niveaux d'enseignement. On dit... Il y a des éléments de formation donnés par un niveau d'enseignement en concurrence avec l'autre niveau.

La disparité de l'enseignement. «Ainsi, des diplômes de même dénomination pourraient ne pas avoir le même contenu et ne fourniraient pas la même compétence à son détenteur.» Et vous plaidez pour une plus grande cohérence, là, c'est au point 5.2.4: «Il est opportun d'offrir globalement aux étudiants un continuum de formation mieux articulé.» Là, vous recommandez que s'introduise de la cohérence, etc. Mais est-ce que vous évaluez que c'est une situation assez sérieuse à cet égard et que ça pourrait avoir des impacts sur la protection des droits du public?

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui. Écoutez, ce n'est pas compliqué. Quand on parle de foisonnement des programmes, une nouvelle idée débarque dans le décor d'un certain domaine, d'une certaine discipline. On dit: Ah! En France, ils appellent ça de telle façon, là, il y a un prof qui est débarqué là-bas ou quelqu'un, et puis il revient ici, puis: Je voudrais un bac en kinésiologie, je voudrais quelque chose en ostéopathie, alors que déjà, dans l'intervention du musculosquelettique, nos universités ont des programmes et produisent des diplômés en physiothérapie, en chiropraxie, et ne serait-ce qu'aussi les médecins physiatres. Alors, là, qu'est-ce qu'on fait, là? Est-ce qu'on fait évoluer, cheminer des filières déjà présentes, bien ancrées, bien structurées ou est-ce qu'on va créer quelque chose de nouveau, un peu comme une nouvelle marque de bière? À chaque fois qu'une brasserie sort une nouvelle marque de bière, elle prend, pour six mois, 5 % du marché. C'est bien payant, merci, bonjour. Qui se souvent de la Löwenbräu aujourd'hui? Ça a disparu à un moment donné, dans l'histoire.

Alors, je ne veux pas comparer ça abusivement à ce marché-là, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une course à un certain marché, il y a une course à faisons quelque chose pour avoir plus d'étudiants et, tant qu'à y être, allons-y vers certaines nouveautés. C'est ça, le foisonnement des programmes. Mais, en faisant ça, on vient à redécouper, on va même prendre des profs de ces programmes qu'on vient cannibaliser, là, autant en termes de profs, de ressources que d'étudiants. On va prendre de ces profs-là puis on dit: Bon, bien là tu t'en vas maintenant; tu enseignes l'ostéopathie, mais on va te coller celui qui a été se former en France là-dessus, et puis là on crée un nouveau programme. Certaines universités sont assez prolifiques pour construire de tels programmes. Ça, c'est le foisonnement.

Qu'est-ce que ça a comme impact? C'est que, lorsque arrivent ces gens-là par cohortes de diplômés après un certain nombre d'années, ce qu'ils font, ces gens-là, ils se construisent une identité sur le terrain, ils bousculent un peu tout le monde, et, lorsqu'ils agissent dans un secteur où il y a des risques de préjudice, bien là le système professionnel se dit: Mais qu'est-ce que c'est que cette affaire-là? C'est pour ça qu'en 1998 a été adopté le projet de loi n° 406 pour permettre l'intégration de groupes de praticiens qui se sont, comme un arbre qui pousse de façon folle, qui se... pour les intégrer à des ordres professionnels connexes.

Et de là les psychoéducateurs qui ont été intégrés, dans le domaine de l'intervention scolaire et psychologique, avec les conseillers d'orientation, là, pour cette fois-ci. Mais les psychoéducateurs, là, c'est une chicane de profs, il y a bien des années, et puis ce qu'a fait le doyen, c'est que, moi, bien je vais te donner ton école de psychoéducation ? c'est tous des profs de psychologie qui enseignent là ? et puis je vais mêler quelques éléments, parce que c'est une approche distincte. Au lieu de faire avancer, évoluer la discipline fondamentale, on lui a donné une petite affaire, un petit bout en saucisson, on l'a collé comme ça, puis on lui donne un nouveau nom, et puis on génère des nouveaux praticiens avec des prétentions qui de toute façon, rendus sur le terrain, ils sont tous à faire de la psychothérapie, de la psycho-intervention. Et là c'est la confusion pour le public, c'est la confusion pour les employeurs, et les syndicats se mêlent là-dedans pour chacun défendre son groupe.

Alors, où est la responsabilité de l'université là-dedans? Nous en avons parlé, il y a plusieurs années, au regretté François Tavenas qui était président de la CREPUQ, à l'époque, qui a été, je pense, le seul président de la CREPUQ qui a démontré vraiment une grande ouverture. Il nous est arrivé justement en début de réunion avec le cas des psychoéducateurs. Il a dit: Vous faites n'importe quoi. On lui a expliqué la situation. Il a dit: Oui, vous avez raison, nous faisons n'importe quoi. Les universités ont la responsabilité sociale de ce qu'elles envoient sur le terrain, il va falloir une cohérence au bénéfice de la société.

L'articulation entre les niveaux d'enseignement. Écoutez, l'Université du Québec en Abitibi a maintenant un Certificat de thérapeute en réadaptation physique qui est un programme de D.E.C. par ailleurs partout au Québec. Qu'est-ce que ça fait là? Qu'est-ce que ça fait là? Alors, il y a toutes sortes d'initiatives comme ça, hors du contrôle du ministre, hors du contrôle de la CREPUQ, qui font en sorte que bien là on se dit: Mais y a-t-il moyen de se parler? Parce que, là, vous formez des gens prétendument au niveau universitaire avec un certificat; ils sont membres de l'ordre professionnel de la physiothérapie avec habituellement un D.E.C. de thérapeute en réadaptation physique. Et est-ce qu'il y a moyen d'avoir de la cohérence? Est-ce qu'on n'est pas en train de faire diversion avec toutes sortes de ressources et de faire en sorte qu'on manque de cohérence par rapport même à la législation qui vient régler les problèmes de protection du public entourant ces activités-là?

Alors, c'est de ça qu'on parle et ça s'observe dans beaucoup de domaines. Et là vous avez vu l'UQAM, là, depuis plusieurs années. Psychosociologie de la communication. Eh bien, là, je vous garantis, dans 15 ans, il va y avoir une demande d'ordre professionnel parce que des praticiens psychosociologues de la communication se seront trouvé une niche quelque part, bousculant un peu tout le monde au lieu de faire évoluer des professions, ou des secteurs, ou des disciplines déjà en place, et il va falloir gérer ça à l'autre bout. Mais c'est l'université qui génère ça. Les cégeps ne sont pas exempts de ça, soit dit en passant, mais là on parle des universités.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Gariépy.

Mme Marois: Alors, remarquez que le ministre veut générer un autre ordre professionnel, alors ça va en ajouter un de plus. Cela étant...

M. Gariépy (André): On ne se prononce pas là-dessus, on ne nous a pas encore demandé notre avis comme le prévoit le Code des professions.

Mme Marois: Non. Mais cependant... En fait, ce que vous soulevez comme problèmes, ce sont des problèmes réels, là, je suis tout à fait d'accord avec vous, mais ça peut être résolu par l'action des universités. Enfin, il y a peu de moyens, là, à moins que, moi, au ministère, on me dise: Il y a des moyens, là, très précis ou il y a des règles qu'on peut imposer.

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Je dois vous dire... M.  Tavenas, à l'époque, nous avait dit: Écoutez, je n'ai pas de pouvoir, ils sont autonomes.

n (17 h 30) n

Mme Marois: Ah bon! Personne n'a de pouvoir dans tout ça, là, si je comprends bien.

M. Gariépy André: Bien, en fait est-ce qu'on a besoin d'un pouvoir pour comprendre qu'il y a des choses qui ont des impacts? Alors, nous, ce qu'on vous propose, et c'est ça qu'on vous dit: Avant de passer à l'étape pouvoir, nous, on veut se parler, parce que nous sommes des alliés des universités, les ordres professionnels. Nous ne sommes ni des entreprises ni des industries qui ont besoin de chair à canon pour leurs machines ou quoi que ce soit. Nous ne sommes pas des apôtres de l'utilitarisme, nous sommes des apôtres de la qualité. Et, quand l'université parle de qualité dans le développement comme dans la transmission de son savoir, nous sommes les clients de cette qualité au premier chef et nous sommes intéressés à cet enjeu-là tout autant, et c'est ça qu'on propose. Parlons-nous, on va peut-être déjà éviter des problèmes.

Mme Marois: Ça va. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tomassi): Ça va? Alors, votre exemple sur la bière était excellent parce que, depuis ce matin, on parle de Grand Prix de formule 1. Alors, ça en met un peu plus. Alors, M. le ministre.

M. Reid: Oui. Merci, M. le Président. Bon. Vous venez de parler justement... Et vous avez anticipé ma question. Il faut se parler, on veut parler, etc. Une occasion de dialogue entre les universités et les ordres professionnels, c'est lorsqu'on évalue les programmes, lorsqu'on discute de changements qu'on voudrait voir dans les programmes, lorsque les universités veulent faire des changements et veulent s'assurer que ces changements-là ne dénatureront pas le programme tel qu'il a été conçu, du moins pour satisfaire les exigences d'un ordre professionnel, et tout ça. Mon expérience là-dessus, c'est que ces conversations-là n'ont pas toujours... ne sont pas toujours faciles. C'est peut-être correct, ça doit peut-être être comme ça parce qu'il y a beaucoup d'avis de beaucoup de monde intelligent.

Et, dans cette optique-là, est-ce que vous pourriez reprendre un peu cette volonté, que vous avez manifestée, de dialogue ? il faut se parler, etc., pour un certain nombre de problèmes ? mais dans le contexte de quelque chose qui existe? Et vous dites: Faire évoluer un ordre, etc. Dans quelle mesure est-ce que la difficulté, qui a déjà existé ? et vous me direz si ça existe encore ? de dialogue lorsqu'on parle d'évaluer un programme, de faire évoluer un programme, etc., disons, est génératrice des problèmes dont vous venez de parler juste auparavant?

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): À tout le moins, un problème, il faut en être conscient à son extrémité nerveuse pour le ressentir, et les universités n'ont pas toujours ces terminaisons nerveuses dans la société, sur le champ, sur le terrain, dans la pratique. Et ce sont les ordres professionnels qui ont cette terminaison nerveuse au nom de la société, et c'est pour ça qu'il faut faire le petit contact avec la zone sensible au sein des universités pour se rendre compte de leur responsabilité sociale... ou plutôt de leur impact social. L'impact social n'est pas quelque chose seulement de positif par le fait d'exister, par le fait de développer puis de faire de la recherche, etc.

Il y a aussi beaucoup de gens qui passent au travers des universités pour trouver leur place dans la société, et ça a été mon cas. J'ai fait des choix de faire ma formation en économie et en droit. Je ne voulais pas devenir nécessairement un universitaire de profession, mais je voulais, à partir de ma formation universitaire, trouver un épanouissement de mes habiletés, et ce qui m'a permis d'être ici avec vous aujourd'hui. Alors, quand on voit tout ça, il faut que l'université soit en prise avec quelques éléments de ce que font ses diplômés par la suite. Alors... Et pas juste de voir s'ils ont une job pour dire: Regardez, notre diplôme, hein, ça donne une job garantie, mais de voir est-ce que ça répond à certaines nécessités.

Nous avons tenu un colloque sur la formation initiale, élaboration, évaluation des programmes, et nous avons fait venir des gens de la CREPUQ, des gens de certaines universités, mais aussi du milieu professionnel et technique parce que nos ordres touchent à ça aussi, et ce qu'on s'est aperçu, c'est que les universités ont une évaluation, une approche d'évaluation de leurs programmes qui intègre des éléments de pertinence mais qui ne sont pas toujours bien développés, c'est-à-dire développés dans le sens où... la pertinence par rapport aux besoins réels de la société environnante. Je soupçonne la chose suivante. Je soupçonne un fossé culturel par rapport aux besoins de la société. Je soupçonne que le fantôme de l'utilitarisme, qui, à bon droit, à certains égards, vient... en tout cas, suscite des réactions, là, négatives de la part des universitaires, je soupçonne ce fantôme de l'utilitarisme de les intimider au point de ne plus voir, même, qu'il faut qu'ils répondent à certains besoins sociaux.

Alors, c'est pour ça que c'est du bout des lèvres quelquefois que les ordres professionnels sont consultés et c'est pour ça que, en 1974, le législateur a décidé d'instaurer des comités de la formation, pour forcer le monde de l'enseignement ? cégeps autant des universités ? à venir s'asseoir avec les ordres pour discuter des programmes qui mènent aux... permis des ordres.

Or, l'expérience, depuis la création de ces comités de la formation, c'est que la CREPUQ envoie des gens, mais ils ne sont pas toujours intéressés. Le profil des personnes n'est pas toujours ajusté aux besoins des discussions qui sont tenues dans le cadre de ces comités-là, ce qui fait que, comme interface individuelle par ordre, ce n'est pas assez performant, d'autant plus que la plupart de ces gens-là qui viennent nous voir viennent nous traduire une culture universitaire qui est: Oui, mais, pour telle université, ça ne va pas marcher, mais, pour telle autre, ça va marcher, et tout, et tout.

Alors là qu'est-ce qui arrive? Il faut se donner un rapport de force. Il faut dire à telle université... Et j'ai travaillé pour l'Ordre des psychologues dans le début des années quatre-vingt-dix, et il a fallu dire à une université: On va sortir ton programme de la liste des diplômes désignés si tu ne changes pas les choses. Tous les autres se sont adaptés, ont trouvé une résonance très positive à la chose. Pourquoi est-ce que ton programme demeure incomplet, inadapté? Il y avait une obstination de ce côté-là, et il a fallu prendre cette menace-là.

Il me semble que, quand on travaille dans un continuum de qualité, formation et qualité de la pratique, il me semble qu'on devrait comprendre, quand on travaille pour le bien d'une société, tous chacun dans son mandat, il me semble qu'on devrait comprendre ces choses-là un petit peu plus facilement. Or, il y a comme une peur de nous parler, une peur d'intégrer et de nous donner quelque influence que ce soit, comme si on était l'interface plus douce, plus agréable de toute l'industrie qui va suivre pour venir nous dicter les contenus de programmes pour répondre à tel besoin de telle entreprise: Bombardier a beaucoup de tel type d'ingénieur, puis ne faites rien d'autre à l'École polytechnique, sinon c'est foutu. Alors, il y a comme cette peur-là, et on sent ça, là, la peur de l'utilitarisme. Or, l'ordre professionnel, je vous le dis, ce n'est pas de l'utilitarisme, c'est de la qualité autant que l'université.

Alors, c'est dans une série de situations comme ça. Il y a des ordres professionnels où ça va bien. Pourquoi? Parce que la faculté est très, très, très, très construite, axée vers... c'est une école professionnelle, il faut se le dire. Alors donc, les liens sont très étroits, très intenses, et ça va bien. Mais pour... Et ce que je soupçonne, c'est que la plupart des programmes qui ne sont pas des facultés distinctes, qui font partie de plus grandes facultés, on a l'impression que là... Bien, là, venez pas nous embêter, vous, là, là. Le programme de physiothérapie, on ne va pas le changer comme ça, là. Ça fait partie d'un grand tout, là, et puis on va tenir... Merci de nous envoyer vos affaires, là, mais on va faire un peu ce qu'on veut.

Pourquoi? Pourquoi cette chose-là? Alors, c'est pour ça que, nous, nous demandons formellement d'être intégrés ? ce qui n'est pas le cas actuellement ? assez tôt dans le processus d'évaluation. Parce que le processus est valable, il répond aux canons, là, de l'évaluation de programmes. On voit des choses, même la CREPUQ a donné quelques outils aux universités pour bonifier le tout, sauf qu'il n'interpelle pas les bons regards sur le programme. Il est incomplet, ce regard. Et, en ajoutant le regard de l'ordre professionnel, vous trouvez là-dedans... vous rencontrez le critère de pertinence, de consistance qui est la base de votre définition de la qualité.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Gariépy. Mme la députée de Maskinongé, vous avez 1 min 30 s.

Mme Gaudet: Une minute? La formation continue. Rapidement, j'aimerais vous entendre sur ce que vous proposez au niveau de la formation continue, qui est extrêmement importante, là, pour que les gens soient toujours à date, là, au niveau de la formation.

Le Président (M. Tomassi): En une minute, M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Autant les universités ont l'expertise disciplinaire pour former nos futurs professionnels, autant l'université a l'expertise disciplinaire pour les accompagner dans le maintien de leurs compétences. Pourtant, pourtant, il est difficile de demander aux universités de s'investir ou d'investir, peut-être par manque de moyens, souvent par manque de volonté. Ce que j'ai compris de certaines conversations de part et d'autre, on s'aperçoit que la formation continue est une espèce d'unité de profit bien sympathique, mais ça vient dévoyer la culture et un certain prestige de l'université. Et ça, c'est embêtant. Je me dis: Mais pourquoi, dans une société comme la nôtre, avoir une telle attitude? Ils ont l'expertise disciplinaire, voici une autre occasion de rayonner dans cette expertise disciplinaire.

Nous, on ne peut pas donner ces cours-là. Dans certains cas, oui, quand c'est très axé sur des éléments de pratique, là, que les praticiens plus expérimentés peuvent transmettre à leurs pairs. Mais, sur d'autres éléments, l'université développe la connaissance dans la discipline. Bien, ces développements-là, il faut les rendre accessibles pas seulement dans des cours de trois, cinq, 10 ans, il faut les rendre aussi disponibles par des cours de trois crédits au bénéfice de l'ensemble des professionnels en pratique.

Le Président (M. Tomassi): Merci, M. Gariépy. Est-ce que du côté de... La députée de Champlain.

Mme Champagne: Bien, bonjour. Écoutez, pour faire un petit peu de millage avec ma collègue de Maskinongé, je vais revenir sur la formation continue.

Le Président (M. Tomassi): On est encore en course, du millage.

Mme Gaudet: C'est le comté voisin.

Mme Champagne: Comté voisin. Nous sommes des voisines, voilà. Écoutez, dans...

Une voix: On est en voiture, en tout cas.

n (17 h 40) n

Mme Champagne: En tout cas, on est vraiment dans la Mauricie. Ça, je peux vous le dire. 5.4.1, si je vous réfère à ça, peut-être que ça va nous guider davantage et ça va compléter l'information dont j'ai besoin. On dit qu'il y a une ouverture qui se fait attendre, alors, bon, le CIQ s'interrogeait, là, sur le peu d'intérêt, là, dans le document qui vous avait été soumis. On dit que «dans le document, seul l'aspect du financement est évoqué. On s'en remet d'ailleurs aux résultats attendus des travaux d'un comité d'experts externes sur le financement de la formation continue, créé il y a plus d'un an par le [ministère] de l'Éducation.» Ça devrait normalement être un comité qui accouche de quelque chose, je suppose. Je ne sais pas si M. le ministre peut m'informer là-dessus, là.

On dit que «le mandat confié à ce comité a donné l'impression [...] que, pour accroître de manière substantielle le nombre d'adultes qui s'investissent dans le développement de leurs compétences, les autorités publiques entendent privilégier le financement de la formation de base dans une perspective de rattrapage d'une partie de la clientèle adulte ? ça rejoint peut-être un peu ce que vous avez dit tantôt. Une telle orientation paraît inadaptée ? ce qui est votre opinion ? aux besoins de plusieurs clientèles. En ce qui a trait aux professionnels, les besoins se situent au niveau de la formation qualifiante et de certaines habiletés, notamment la maîtrise de la langue française.»

Alors, vous dites que, «pourtant, les universités sont détentrices de l'expertise disciplinaire qui peut soutenir adéquatement une offre de formation continue de qualité, c'est-à-dire pertinente et consistante».

Alors, votre propos là-dessus, j'aimerais ça que vous élaboriez quelque peu en me le disant peut-être, ce que, moi, j'ai ressenti. Bien, en fait la marchandise n'est pas livrée, là, puis est-ce que vous attendez toujours après le rapport du comité d'experts?

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Bien, écoutez, cette politique de formation continue a pris, quoi, trois, quatre ans à être rédigée, a été adoptée en 2002, et ça n'aboutit pas. Et je siège à des tables interministérielles sur la reconnaissance des acquis, sur toutes sortes de comités techniques, des sous-groupes, et tout, et tout, des fois j'ai l'impression qu'on réécrit la politique. Écoutez, je ne fais pas un reproche de manque de volonté aux universités. Je n'ai pas cette preuve et je ne ferai pas une accusation, je dirais, là, mais... Parce qu'on sent, là, que tout le monde, dans ce dossier-là, se dit: On a une belle politique, mais on n'a pas les moyens de la mettre en oeuvre.

Ce document-là de 2002 établit très bien les constats. Enfin, tout le monde était d'accord. Ça a pris tellement de temps à le rédiger, je peux vous dire. Mais la suite des choses, c'est quoi? C'est d'agir et c'est d'avoir les gens à la table. Or, sur certains aspects, les universités, peut-être, en fait ils ne veulent pas s'investir là-dedans parce qu'ils n'ont tout simplement pas les moyens, donc ils font de la priorisation. On ne va pas commencer à ouvrir de nouveaux champs si on n'a pas les moyens pour couvrir notre champ fondamental puis d'en assurer la qualité, je peux les comprendre là-dessus. Alors...

Et, quand le groupe d'experts a été créé, mon impression toute personnelle, c'est que: Écoutez, on n'a pas d'argent, on va avoir un groupe d'experts pour essayer de voir comment qu'on peut dynamiser encore plus le peu d'argent qu'on a. Et ce sont des gens très compétents ? je les ai rencontrés, c'est des gens fantastiques ? sauf que en quelque part, dans tout ce dossier-là, les moyens doivent suivre les ambitions collectives qu'on s'est données. Et les décisions que nous prenons aujourd'hui, c'est ça qu'on va avoir dans trois ans pour nos diplômés bacheliers, c'est ça qu'on va avoir dans cinq ans pour nos gens de maîtrise, dans 10 ans pour nos doctorats. Les décisions que nous ne prenons pas aujourd'hui, dans le milieu universitaire, c'est le Québec qu'on aura demain qui va en souffrir.

Alors, moi, je me dis, ça a pris du temps, ça prend encore du temps, il est temps de décider maintenant. L'industrie du diagnostic des problèmes a été florissante depuis des années, il est temps de se lancer dans l'industrie de la décision, mais aussi de mettre les moyens à la hauteur des enjeux. Et, en formation continue, il est vrai qu'on oriente beaucoup vers le rattrapage parce qu'il y a une clientèle, au Québec, effectivement qui a besoin de rattrapage pour répondre à des nouveaux besoins d'intervention sur le marché du travail. Bon. On parle d'alphabétisation, et tout, et tout, et tout. Mais il y a une autre clientèle qui est celle qui est déjà dans les créneaux, je dirais, formés, et de qualité, et qui répondent aux besoins, et qui doivent maintenir ce niveau de réponse adéquat aux besoins, et c'est la formation continue qualifiante qui permet à des professionnels de poursuivre et de maintenir le prestige qu'ils ont, par exemple, pour les ingénieurs, sur la scène internationale et, pour d'autres, pour le service aux citoyens en santé, et tout.

Alors, je pense que c'est une question de priorité. Je pense qu'il est temps d'investir dans l'avenir et de ne pas gérer à chaque année avec le budget. C'est le temps d'investir dans l'avenir. Et, si la santé s'occupe du potentiel... de maintenir le potentiel humain physique, l'éducation, c'est notre potentiel de savoir, notre potentiel économique. Et, si on n'investit pas dans l'industrie du savoir, j'ai bien l'impression qu'on va avoir des Gaspésia universitaires qui vont se succéder. Et ça, un Québec qui se tiers-mondise sur le plan du savoir, ce n'est pas très agréable, et je pense qu'il est temps d'agir.

J'ai débordé un peu, là, c'est parce que, je vais vous dire, sur le financement, là, j'en vois de toutes les sortes, je vois des gens frustrés à toutes sortes de comités qui me disent: Oui, mais on n'est pas pour faire monter quelque chose qui demande de l'argent, on va se faire bloquer là, ça ne sortira pas comme ça. Ah, bien là, écoutez, il faut avoir les moyens de nos ambitions, et je pense que ce sont des nécessités qui ont été évoquées. Et, quand on parle de nécessités, il me semble que ça devient une priorité pour des décideurs publics, et vous en êtes, des décideurs publics. Certains d'entre vous ont été élus au mois d'avril pour changer des choses. Vous êtes nouveaux, bien là c'est le temps. Si vous ne pouvez pas décider parce que vous n'êtes pas au gouvernement, vous êtes des élus pour orienter le gouvernement dans votre action législative et dans votre action de consultation. Et c'est le message que nous vous lançons aujourd'hui.

Nous, nous faisons notre part. Nous avons un mandat lourd, les ordres professionnels. Vous avez délégué le mandat et le financement, parce que ce sont les professionnels qui paient non seulement l'organisme qui vient les embêter pour exiger des compétences, mais on exige en plus de ça qu'ils paient la formation continue. Alors, il faut les soutenir, ces gens-là, il faut que les universités soient à la hauteur de ce qu'elles peuvent fournir pour les professionnels au Québec. Donc, lancez-vous dans la formation continue, mais lancez-vous avec autant de qualité, autant d'engagement, avec le sens de la mission que vous avez à l'égard de la formation initiale.

Mme Champagne: Est-ce que... Vous permettez?

Le Président (M. Tomassi): Oui, oui, allez-y.

Mme Champagne: Est-ce que ça va aussi loin... Une minute?

Le Président (M. Tomassi): Il vous reste deux minutes, madame.

Mme Champagne: Ah! O.K. Je vais en prendre juste une. Est-ce que ça va aussi loin que de dire qu'un professionnel qui ne continue pas à bonifier sa formation, son savoir est à risque puis, quand il détient en main un papier qui dit: Je suis ingénieur ou peu importe le métier, ça demeure, sur le terrain, une personne qui pourrait poser des gestes qui ne sont pas à la hauteur parce que sa formation est désuète? Ça va-tu jusque-là?

Le Président (M. Tomassi): M. Gariépy.

M. Gariépy (André): Oui, parce que... Écoutez, en plus de ça, comment voulez-vous qu'on adapte les normes à des risques nouveaux si on exige de nos professionnels... Bien, si tu veux faire du laser pour les yeux, par exemple, il va falloir que tu suives tel cours. Oui, mais, si les cours ne sont pas là, ne sont pas disponibles, si cette sensibilité n'est pas là, au rendez-vous, bien là on ne pourra pas exiger quelque chose qui ne peut pas se réaliser. Alors, qu'est-ce qu'on fait? On laisse le terrain libre à l'improvisation, on laisse le risque s'installer. Je pense, comme valeur de société, on n'est pas là, hein? Je pense qu'on a encore les moyens de se payer des exigences professionnelles qui soient à la hauteur de ce qu'on veut, comme société.

Mme Champagne: Merci.

Le Président (M. Tomassi): Alors, merci, M. Gariépy. M. Dutrisac, merci beaucoup. Vous pouvez continuer à lui signer son chèque.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

Le Président (M. Tomassi): Oui, exactement. Alors, l'ordre du jour a été épuisé pour aujourd'hui, et j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 48)


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