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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, March 25, 1998 - Vol. 35 N° 59

Audition de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes publics


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Table des matières

Journal des débats


(Neuf heures trente-deux minutes)

La Présidente (Mme Blackburn): Mesdames, messieurs, nous avons le quorum. Je déclare donc ouverte la séance. Je rappelle le mandat de la commission qui est d'examiner les orientations, les activités et la gestion de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial en vertu de l'article 294 du règlement de l'Assemblée nationale.

M. le secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Gautrin (Verdun) remplace M. Parent (Sauvé).

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, bienvenue, M. Gautrin. Alors, la lecture de l'ordre du jour, simplement, c'est: examiner, tel que le prévoit le règlement de l'Assemblée nationale, les activités de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial.

Comme vous le savez, il y a un règlement qui confie aux commissions la responsabilité qu'on appelle les mandats de surveillance des organismes. C'est dans le cadre de ce mandat que nous avons invité la Commission de l'évaluation, alors, pour un intérêt certain de ma part mais tout aussi grand, sinon plus, de la part du porte-parole officiel de l'opposition en matière d'enseignement supérieur, le député de Verdun.

Alors, avant de commencer nos travaux et les échanges, pour les fins aussi de la retranscription des débats, bien qu'on se soit présentés, il serait important que vous vous présentiez. Alors, M. le président.

M. L'Écuyer (Jacques): Merci, Mme la Présidente. Évidemment, je suis Jacques L'Écuyer, le président de la Commission. Je suis accompagné aujourd'hui de mes deux collègues commissaires, Mme Louise Chené, à ma droite; et M. Louis Roy, qui est à ma gauche; de même que du secrétaire général de la Commission, M. Jean-Yves Roberge. Donc, nous sommes ici... Il y a aussi avec nous des coordonnateurs de projet, M. Lindfelt et Claude Moisan, qui ont tenu à être présents.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Ça n'est pas dans les règles, mais je pense que, pour vous aussi, il serait intéressant qu'on vous présente les membres de la commission de l'éducation. Je vais les laisser se présenter. Avec le café, à mon extrême droite...

M. Beaumier: Yves Beaumier, député de Champlain.

M. Gaulin: Bonjour. André Gaulin, député de Taschereau.

M. Paré: Jean-Guy Paré, député de Lotbinière, adjoint parlementaire de la ministre de l'Éducation.

M. Gautrin: Henri-François Gautrin, député de Verdun.

M. Bergman: Lawrence Bergman, député de D'Arcy-McGee, à Montréal.

La Présidente (Mme Blackburn): Le secrétaire de la commission, que vous connaissez toutes et tous, puisque c'est avec lui que vous entretenez les communications, et Jeanne Blackburn, députée de Chicoutimi.

J'ai lu très attentivement le rapport de la Commission, comme je suis aussi également vos travaux. Je faisais un bref rappel historique, ce matin, je ne dirais pas au bénéfice des membres de la commission, mais simplement pour resituer le mandat de la Commission. Et le premier document qui a traité de façons formelle et officielle de l'évaluation de l'enseignement collégial remonte à 1977, 21 ans. Et, depuis, le débat a connu des hauts et des bas, a été plus ou moins animé.

Et je dirais que ou ça s'est fait ou ça a perdu de la pertinence ou encore on s'est un peu laissé reposer sur le fait qu'on a créé une Commission, qu'on a conservée – parce que je pense que c'est un peu plus comme ça qu'il faut le voir – une Commission de l'évaluation de l'enseignement collégial, on a l'impression que le climat général quant à l'évaluation de l'enseignement collégial est moins l'objet de critiques. Mais on n'a pas davantage l'impression que c'est parce qu'il s'est fait beaucoup plus de choses. C'est davantage parce que, la Commission étant là, on a rassuré la population. Alors, c'est mon sentiment. Je ne vous dis pas que c'est un sentiment qui est partagé par tous les membres de la commission. Et c'est ce qu'on pourra un peu échanger avec vous tout au cours de cette matinée.

Nous aurions voulu vous retenir toute la journée. C'était difficile compte tenu de l'horaire des commissions et des travaux de la Chambre actuellement. Alors, si jamais c'était insuffisant, avec le consentement de mes collègues, on pourra toujours reprendre la séance.

Alors, à moins que le député de Verdun souhaite ajouter quelques mots, on pourrait tout de suite accepter la présentation de la Commission, de ses travaux, par le président. M. Gautrin? Alors, M. L'Écuyer, avec la bienvenue, nous vous invitons à nous présenter un peu votre Commission, ses travaux et ses perspectives de développement.


Exposé du président de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial (CEEC)


M. Jacques L'Écuyer

M. L'Écuyer (Jacques): D'accord. Alors, je pense que je vais y aller par ordre plutôt chronologique et expliquer ce que nous avons fait, là où nous en sommes et là où nous allons.

Le mandat de la Commission est divisé en trois parties: évaluation des politiques d'évaluation des apprentissages, évaluation des politiques institutionnelles d'évaluation des programmes – chacun des collèges doit se doter de ces deux politiques – évaluation des programmes eux-mêmes – ce qui comporte évidemment de passer en revue l'ensemble des programmes. Nous avons aussi, quoique ce ne soit pas explicité comme tel dans le mandat, le pouvoir de recommander au ministre de l'Éducation l'habilitation d'un collège à décerner le diplôme d'études collégiales par voie de délégation.

Dans ce contexte-là, la première opération que nous avons mise en branle et que nous avons réalisée, ça a été l'évaluation des politiques d'évaluation des apprentissages. Alors, là, il y avait des échéanciers qui avaient été fixés par le ministère, et chacun des collèges devait se doter d'une politique d'évaluation des apprentissages. Donc, dans ce cas-là, la première opération, ça a été de préparer, évidemment, un guide d'évaluation dans lequel nous indiquions aux collèges quels seraient les principaux paramètres que nous utiliserions pour faire l'évaluation de ces politiques. Nous avons très rapidement reçu toute une série de politiques. En fait, ces choses-là devaient être prêtes assez rapidement. Donc, dès la première année de la Commission, nous avons évalué plusieurs de ces politiques.

(9 h 40)

Évidemment, c'est une opération qui s'est faite d'abord sur papier, puisque les collèges devaient nous soumettre leur politique et nous avions dit que nous l'évaluerions sur papier. Mais nous évaluons aussi l'application de cette politique de la façon que j'indiquerai tout à l'heure.

Alors, actuellement, ce que nous pouvons dire, c'est que tous les cégeps ont soumis leur politique d'évaluation des apprentissages. Il y en avait antérieurement. Je crois qu'à peu près tous les collèges en avaient antérieurement, mais il y avait des modifications importantes à apporter en vertu du nouveau règlement d'études collégiales et une modification assez importante aussi dans l'organisation des collèges eux-mêmes. Donc, tous les collèges ont soumis cette politique. Actuellement, tous les cégeps ont une politique que nous jugeons au moins satisfaisante, à deux exceptions près. Et, de façon générale, c'est une opération qui est assez avancée.

Dans le cas des collèges privés subventionnés, 24 sur 25 nous ont soumis leur politique. Je crois que le 25e, c'est l'École du cirque, qui est plus récente et qui a un peu de travail à faire. Encore une fois, ce sont des politiques qui sont satisfaisantes, à une ou deux exceptions près. Pour ce qui est des collèges non subventionnés, des privés non subventionnés, 37 sur 50 ont soumis leur politique actuellement. Il faut comprendre que, dans le cas des collèges non subventionnés, il y en a plusieurs qui sont de création très, très récente. Évidemment, ça leur prend un petit peu de temps avant de s'ajuster à ça. Et, finalement, dans le cas des institutions qui sont hors réseau, on pense aux conservatoires, aux instituts agroalimentaires, ils ont tous soumis leur politique actuellement.

Alors, voilà pour ce qui concerne l'évaluation sur papier des politiques d'évaluation des apprentissages. C'est une opération qui est, à toutes fins pratiques, pour le moment, en tout cas, à peu près terminée. Nous avons déjà publié deux rapports à ce sujet dans lesquels on indiquait quels étaient les principaux problèmes qui faisaient l'objet de difficultés. Grosso modo, les problèmes les plus importants sont ceux qui ont trait à la culture, je dirais, des collèges. Vous vous rappelez que, avec le changement de 1993, le renouveau de 1993, il y avait des choses assez importantes qui ont été mises en place. On parle d'évaluation par compétence, on parle d'approches programmes, et ça, ça impliquait des modifications assez importantes au niveau de l'enseignement, au niveau de la façon d'évaluer et au niveau des relations entre les personnes qui oeuvrent à l'intérieur des collèges.

Alors, c'est dans ces contextes-là. Si je vous donne un extrait, on dit: «Les principes et objectifs des politiques sont maintenant bien annoncés avec clarté. Les règles d'évaluation sont mieux adaptées.» Premier rapport, on constatait qu'il y avait des difficultés d'adaptation. Le deuxième, c'est mieux adapté à l'approche par objectifs et standards. Les mesures, dispenses, équivalences et substitutions qui devaient être précisées l'ont été et, de façon générale, sont mieux comprises, leurs modalités d'application sont davantage précisées. Les paramètres de l'épreuve synthèse sont en train de se mettre en place, sont mieux décrits, en tout cas les grands paramètres.

Évidemment, c'est encore en expérimentation dans beaucoup d'endroits. La procédure de sanction des études est mieux définie, le partage des responsabilités plus clair. En fait, de façon générale, nous constatons que, dans les rapports... Parce que à plusieurs occasions le collège a soumis une première version que nous avions jugée plus ou moins satisfaisante et est revenu avec des versions qui ont été modifiées. Donc, de ce côté-là, je crois qu'on peut dire que le travail est à peu près complété sur papier. Je dis bien «sur papier» parce que je reviendrai sur la question tout à l'heure.

En ce qui concerne les politiques d'évaluation de programmes, les collèges doivent se doter ou devaient se doter de politiques d'évaluation de programmes. Je crois qu'ils devaient s'en doter l'an dernier.

Mme Chené (Louise): La première échéance, c'était juin 1997.

M. L'Écuyer (Jacques): Là, comme dans le cas des PIEA, nous avons élaboré un guide, encore une fois, dans lequel nous disions comment nous entendions évaluer ces politiques d'évaluation de programmes. Nous avons dit aux collèges que, dans le cas d'une politique d'évaluation de programmes, il y a quand même une différence substantielle entre une politique d'évaluation des apprentissages, qui est une espèce de contrat entre le collège, sa clientèle et ses professeurs, dans lequel il affirme ses règles, les recours des étudiants, enfin il y a toute une série de choses... Une politique d'évaluation de programmes, c'est une politique de gestion d'un collège, ça fait partie de la gestion des programmes.

Et nous avons dit aux collèges: Nous allons vous donner une opinion sur papier quant à ce que nous pensons de votre politique, en ce sens que, si nous pensons que votre politique est susceptible de donner des bons résultats, on va vous le dire; si nous pensons qu'elle risque de susciter des problèmes, nous allons vous le dire aussi.

Alors, actuellement, nous avons reçu les politiques de 37 des 49 collèges, sept sont actuellement en évaluation. Donc, on en reçoit régulièrement, dans les temps qui courent. Nous en avons 28 que nous jugeons susceptibles d'être tout à fait corrects, et il y en a deux qui nous posaient des questions. En ce qui concerne les collèges privés subventionnés, il y en a 20 sur 25 qui ont déposé leur politique, et, encore une fois, dans ce cas-là, 17 nous paraissent acceptables, raisonnables, et trois nous paraissent un peu plus douteuses. En ce qui concerne les établissements hors réseau, deux sur cinq ont déposé leur politique. Il reste donc encore du travail à faire, et on peut s'attendre à ce que, dans le courant de l'année... Nous en recevons presque régulièrement par les temps qui courent.

Donc, ces politiques-là, nous les évaluons sur papier et nous les évaluerons de façon plus précise parce que nous disons aux collèges: La vraie évaluation d'une politique d'évaluation de programmes, c'est en voyant comment elle fonctionne. Et ça, nous entendons le faire à partir de la prochaine année scolaire, en ce sens que nous avons dit aux collèges qu'au cours de la prochaine année scolaire nous leur demandons d'évaluer un programme de leur choix, à partir de leur politique d'évaluation de programmes, et nous allons, par la suite, aller sur place vérifier les résultats, les suivis qui auront été donnés. Donc, c'est une opération qui est en cours et qui va se poursuivre sûrement, au niveau de l'application, pendant encore quelques années. Ça, c'est des opérations, je vous dirais, qui se font continûment.

Nous avons aussi, évidemment, abordé l'évaluation de programmes, qui est certainement le coeur de notre fonctionnement. Alors, première opération que nous avons faite, dans le cadre de l'évaluation de programmes, ça a été de préparer un guide dans lequel nous expliquons aux collèges quels sont les paramètres. Alors, nous avons un guide, ici, nous évaluons normalement un programme sous l'angle de la pertinence du programme: Est-ce qu'il est bien adapté aux besoins de la société; si c'est un programme technique, aux besoins du marché du travail? Si c'est un programme pré-universitaire, est-ce qu'il est bien adapté aux exigences des universités – entendons-nous, évidemment, dans le respect des modalités de fonctionnement des objectifs de l'ordre collégial?

Alors, premièrement, nous évaluons sur le plan de la pertinence. On pourra dire que la pertinence, ça relève beaucoup du ministère, dans la mesure où... Si on regarde, par exemple, les orientations d'un programme. Les grands objectifs sont prescrits par le ministre ou la ministre, ce qui est très juste. Mais ça ne dispense pas les collèges d'entretenir des liens étroits avec le marché du travail, si on pense à un programme technique. Et je vous donnerai comme exemple l'informatique. Si vous offrez un programme d'informatique, les grands objectifs sont tous déterminés. Il y a beaucoup de choix à l'intérieur du programme, des choix de cours, il y a des choix de logiciels, il y a des choix d'appareils. Si vous êtes dans une région, mettons, si vous travaillez à Sept-Îles ou, disons, dans une région un peu éloignée, mettons à Matane, si vous voulez, vous ne préparez pas, en général, les étudiants à devenir des opérateurs de gros ordinateurs centraux, il n'y en a pas. Ces ordinateurs-là, vous les trouvez dans les grandes villes.

(9 h 50)

Ce qui fait que... Je vous donne juste un exemple qui est un exemple... Alors, il y a des collèges qui avaient très, très bien compris ces choses-là, qui préparaient... Il y en a d'autres qui étaient, disons, un peu plus loin de la réalité du marché. Disons qu'on a même vu un collège où on enseignait encore le fortran. Vous comprenez que, rendu dans les années 1992, 1993, 1994, quand on prépare des techniciens qui vont opérer en grande partie sur des PC... Et puis le fortran est un langage très utile pour les scientifiques, mais pas beaucoup pour les techniciens. Donc, vous voyez un peu, on...

M. Gautrin: ...

M. L'Écuyer (Jacques): Oui, c'est ça.

M. Gautrin: Mais, en effet, c'était important de connaître le fortran...

M. L'Écuyer (Jacques): Voilà. Alors, ce qu'on fait, dans ce temps-là, c'est qu'on va sur place et on essaie de vérifier jusqu'à quel point les gens ont des rapports assez étroits avec le marché du travail. Alors, ça, c'est un premier point dans le domaine technique.

Deuxième point que nous examinons, c'est la cohérence du programme. Nous disons au collège: Écoutez, un programme, c'est un plan de formation, ce n'est pas un assemblage de cours, une juxtaposition de cours. Alors, expliquez-nous quel est votre plan de formation, dites-nous ce que fait chacun des cours à l'intérieur de programme, en quoi il contribue à l'atteinte des objectifs du programme, alors pourquoi vous avez choisi tel cours plutôt que tel autre. De façon générale, c'est le type de choses que nous demandons. Cette deuxième opération, nous demandons donc d'expliquer la cohérence du programme ou de justifier la cohérence du programme, donc le choix de cours, mais aussi la séquence des cours. Est-ce qu'il y a des cours qui sont trop chargés qui constituent une espèce de goulot d'étranglement pour l'étudiant? Est-ce qu'il y a des difficultés de cet ordre-là? Sur ce plan-là, donc, c'est notre deuxième facteur.

Le troisième, c'est que nous regardons l'encadrement des étudiants, le support qu'on leur apporte, les méthodes pédagogiques des professeurs non pas dans la perspective de leur dire: Vous devriez – je ne sais pas, moi – enseigner de telle façon plutôt que de telle autre, mais plutôt: Collectivement, est-ce que vos objectifs pédagogiques sont bien adaptés aux objectifs du programme? Si vous voulez former des gens qui travaillent en équipe, est-ce que vous les faites travailler en équipe? Si vous mettez l'accent, dans votre projet éducatif ou dans vos objectifs de programme sur, par exemple, la résolution de problèmes, est-ce que vous leur faites faire des problèmes? Comment vous travaillez avec vos étudiants? Alors, ça, c'est le genre de choses que nous leur demandons.

Nous allons ensuite vérifier s'il y a des bonnes mesures de support, si la disponibilité des professeurs est adéquate, et, par la suite, nous examinons les ressources. D'abord, les ressources humaines, les professeurs eux-mêmes, les ressources d'appui, et non seulement les qualifications des professeurs, mais: Est-ce qu'ils se tiennent à jour? Est-ce qu'ils ont fait suffisamment de travail? Est-ce qu'ils ont pris des cours de perfectionnement? Est-ce qu'on les évalue? Et est-ce que, compte tenu des évaluations, on essaie de corriger quand il y a des problèmes qui se présentent? Et finalement les ressources matérielles. Est-ce que, par exemple, dans l'ère actuelle, l'informatique est devenue un instrument non pas utile, je dirais essentiel dans un grand nombre de programmes sinon dans tous les programmes? Alors, encore une fois, nous leur demandons où ils en sont à ce sujet-là.

L'efficacité du programme vient par la suite. Efficacité, c'est-à-dire: Est-ce que le programme produit un nombre suffisant de diplômes? Est-ce que le taux de diplomation, le taux de réussite dans les cours est adéquat? Est-ce que non seulement le taux de réussite est adéquat, mais est-ce qu'on mesure bien l'atteinte des objectifs des cours, l'atteinte des objectifs du programme? Alors, à cette fin, nous allons dans les collèges, nous faisons un échantillonnage de cours, nous choisissons un certain nombre de cours, nous leur demandons de nous transmettre le plan de cours, les instruments d'évaluation des apprentissages. Et c'est une façon, pour nous, de vérifier que l'évaluation des apprentissages se fait bien. Donc, ça, c'est un autre élément.

Et, finalement, nous terminons par la gestion du programme, c'est-à-dire... Ça, c'est un élément assez important. Vous savez que, dans les collèges, on est beaucoup organisé en départements et il y a des programmes qui relèvent, pour l'essentiel, de départements. Mais il y a des programmes qui sont multidépartementaux. Alors, comment ces programmes-là sont gérés? Comment s'assure-t-on que les professeurs ont une bonne connaissance des objectifs du programme, se situent bien par rapport à ces objectifs-là? Alors, ça, c'est notre façon d'évaluer les programmes.

Par la suite, nous demandons au collège de faire cette opération-là, cette évaluation-là. Nous lui demandons d'abord de procéder à ce que nous appelons sa propre autoévaluation. Alors, il le fait à partir d'un guide que nous développons. Par exemple, ici, j'ai le guide spécifique pour l'opération de techniques d'éducation en services de garde. J'ai ces guides-là pour chacun des programmes. Nous développons ces guides-là en collaboration avec des représentants des collèges et du milieu du travail, ou des universités, si c'est dans le cas d'un programme préuniversitaire.

Nous allons sur place avec une équipe, après avoir reçu le rapport d'autoévaluation. Nous l'analysons, à la Commission, et nous allons sur place avec une équipe, habituellement composée de trois personnes, trois experts, je veux dire, du domaine, accompagnés d'un commissaire qui préside toujours la visite. Donc, chacune des visites est présidée par l'un ou l'autre de nous trois. Et nous passons dans le collège une journée et demie, deux jours, dépendant de l'ampleur des programmes. Nous rencontrons les professeurs, nous rencontrons les étudiants, nous rencontrons la direction, nous rencontrons les diplômés, lorsque c'est possible. Donc, nous essayons d'avoir un éventail assez considérable de personnes, des conseillers pédagogiques, enfin tous ceux qui ont un intérêt dans le programme.

Par la suite, nous faisons, avec nos experts, un diagnostic. Nous proposons un rapport que nous envoyons comme rapport préliminaire au collège et nous lui demandons ses réactions. Et, dans nos rapports, nous faisons trois types de remarques. Nous faisons des recommandations. Les recommandations appellent un suivi. Et nous disons au collège que, lorsqu'il y a recommandation, il doit nous faire rapport quant au suivi qui aura été donné. Suggestion, c'est notre deuxième niveau, si je peux dire, d'intervention. La suggestion n'appelle pas nécessairement de suivi, mais c'est quand même une indication qu'il y a une certaine préoccupation de la Commission. Enfin, nous faisons des remarques, ce qu'on appelle des invitations, des encouragements, qui sont, disons, de nature plus légère mais permettraient... pas plus légère mais, en tout cas, qui ont moins de répercussions sur, disons, le niveau central du programme.

Donc, nous faisons ce rapport-là, nous disons au collège: Si vous n'êtes pas d'accord, si vous pensez que nous avons mal perçu votre réalité, dites-le-nous. Si vous êtes d'accord avec nous et si vous le voulez – nous ne l'obligeons pas – vous pouvez nous indiquer les gestes que vous avez déjà posés, ou que vous poserez, pour corriger le problème, ou que vous entendez poser. Et nous l'incorporons au rapport comme tel.

Alors, si vous regardez nos rapports finaux d'évaluation, il y a le rapport de la Commission, la dernière page, c'est les suites données par le collège, où le collège dit soit les gestes posés ou soit ce qu'il va faire. Et ça devient une espèce d'engagement public parce que ces rapports-là sont tous publics. Ils sont tous disponibles sur Internet. Vous pouvez tous les voir là-bas. Et finalement, à la suite de ça, nous avons un rapport synthèse. Quand je dis qu'il y a des suites aux rapports que nous envoyons individuellement à chaque collège, c'est tout à fait le cas. Nous donnons un certain délai au collège pour améliorer sa prestation. Et nous lui disons: Écoutez, faites-nous rapport d'ici six mois, un an, dépendant de l'ampleur des problèmes. Faites-nous rapport sur les améliorations qu'on vous avait demandé d'apporter au programme.

Et, dans certains cas, lorsque le programme est vraiment très mauvais, nous disons au collège que nous réévaluerons le programme. C'est-à-dire que nous l'avons fait dans un certain nombre de cas. M. Roy est allé, il y a deux semaines, trois semaines, dans un collège où, en informatique, il y avait des problèmes très sérieux. Pour vous donner un petit peu une idée, dans ce cas c'était un département qui avait été même mis sous tutelle par le collège et tout.

Alors, c'était mauvais. Nous sommes allés. Nous avons dit au collège: Vous ne pouvez pas continuer d'offrir un programme comme ça, ça n'a pas de bon sens. Vous apportez les améliorations et nous reviendrons vous voir. Le collège lui-même était tout à fait d'accord avec ça, d'autant plus que c'était un collège qui a une très, très bonne réputation. Bien, là, on était mal tombé, sur le... Alors, il nous a dit: Oui, oui, on est bien intéressé. Nous sommes retournés et la situation est complètement changée. Des professeurs qui étaient, disons, problématiques, ont pris leur retraite, ou, en tout cas, le collège, je ne sais pas exactement ce qu'il en a fait, mais, chose certaine, la situation n'est plus du tout la même. Alors, c'est très encourageant de ce point de vue là.

(10 heures)

Dans le cas de sciences humaines, nous avons deux ou trois collèges, deux, hein, où nous allons retourner parce qu'il y avait des problèmes très, très sérieux. Alors, c'est une indication très claire que les collèges, actuellement...

Alors, pour vous donner maintenant un bref compte rendu, en services de garde il y a 15 collèges publics et privés qui offrent le D.E.C. et 23 qui offrent une attestation. Alors, dans le cas des 15, il y en avait 10 qui avaient des recommandations. Nous avons reçu des suivis – ça, c'est au niveau du D.E.C. – dans sept cas et il nous en reste trois à venir. Et, quand je dis «suivi», suivi satisfaisant, nous avons estimé que le suivi était adéquat.

Dans le cas des A.E.C., il y avait de très sérieux problèmes, car, la première fois que nous sommes passés, au niveau de l'éducation des adultes, il y avait plusieurs problèmes. Sur les 23 collèges qui offraient l'A.E.C., il y en avait 19 qui avaient des recommandations, dont certaines très sévères disant: Vous ne pouvez pas offrir, si vous voulez continuer à offrir, il faut que vous fassiez des changements. Alors, nous avons reçu 14 suivis satisfaisants, et il nous en reste trois à venir.

Dans le cas de l'éducation aux adultes, c'est moins étonnant que les suivis tardent, parce que les programmes ne sont pas offerts sur une base régulière. Alors, évidemment, si un collège a offert, par exemple, services de garde une année, il peut être deux ans, trois ans sans l'offrir à nouveau. Alors, évidemment, il peut bien faire des changements sur papier, mais, nous, on lui dit: Les suivis, on veut savoir ce que vous avez fait et non pas simplement ce que vous proposez de faire.

Dans le cas de l'informatique, nous avions 47 collèges qui offraient le D.E.C., il y en a 36 qui avaient un rapport avec recommandations. Nous avons le suivi: il y a 27 suivis satisfaisants de donnés, il y en a quatre que nous considérons comme non satisfaisants encore actuellement – nous avons demandé aux collèges des renseignements complémentaires – et il nous en reste cinq à venir, c'est ça. Dans le cas de l'A.E.C. offert par les cégeps publics, il y en avait neuf sur 15 qui avaient des recommandations. Nous avons des suivis satisfaisants dans cinq cas et un cas qui n'était pas satisfaisant, il y en a trois qui nous restent à venir. Dans le cas des privés non subventionnés – il s'agit des petits établissements à vocation très spécifique, style, je ne sais pas, moi, Institut d'informatique de Québec, collège MultiHexa, collège Delta à Montréal, enfin tout ça – nous avons évalué sept programmes. C'étaient habituellement des anciens certificats, des A.E.C., mais des anciens...

Une voix: Des C.E.C.?

M. L'Écuyer (Jacques): Des C.E.C. Il y en a six avec recommandations, et les six suivis ont été donnés et tous sont satisfaisants.

En sciences humaines, là, les 49 collèges publics offrent le D.E.C. et 13 privés qui offrent le D.E.C. aussi. Dans ce cas-là, sur, donc, les 62 que nous avons, il y en a 50 qui avaient des recommandations. Évidemment, nous commençons à recevoir les suivis. Je ne sais pas combien on en a, mais je pense que c'est 27.

Mme Chené (Louise): On en a 17.

M. L'Écuyer (Jacques): On en a 17 qui sont déjà arrivés, mais nous ne les attendions pas avant autour du 1er janvier cette année, et il y en a qui vont aller encore plus tard que ça. Alors, c'est une opération qui est actuellement en cours mais qui permet de noter ça.

Actuellement, nous terminons l'opération techniques administratives, c'est-à-dire que nous avons examiné cette question-là dans les 49 cégeps qui l'offrent, de même que dans les privés. Il y a des privés subventionnés et non subventionnés qui offrent le D.E.C. et l'A.E.C. Alors, c'est une opération de très grande envergure, nous avons fait pas loin de 75 visites dans ce cas-là.

Donc, nous avons actuellement, à travers ces programmes-là, touché une très grande partie de la clientèle qui... Si on regarde ça en termes de clientèle, sciences humaines, c'est un programme où, grosso modo, c'est presque le tiers des étudiants de cégeps qui sont inscrits dans ça. Alors, le programme de techniques administratives est le plus important programme technique en termes de nombre, aussi avec info, tout ça. Je dirais que, globalement, on n'est pas loin d'avoir touché la moitié maintenant des étudiants par l'un ou l'autre de ces programmes-là.

Nous avons présentement en cours la formation générale, nous commencerons nos visites incessamment. Actuellement, nous sommes à visiter les établissements que nous n'avons pas touchés et que nous ne toucherons pas dans le cadre de la formation générale. Ça, c'est les petits établissements privés non subventionnés, par exemple, qui ne donnent que des A.E.C., alors Aviron, par exemple, ici, à Québec, l'Institut supérieur d'électronique...

M. Gautrin: ...collège Delta, vous savez que...

M. L'Écuyer (Jacques): ...exactement. Voilà. Il y en a qu'on avait déjà... Delta et Julien, par exemple, ceux-là avaient déjà été touchés soit en informatique ou, Julien, dans le cas de techniques administratives, parce qu'ils offrent souvent des programmes comme gestion financière informatisée, des choses comme ça. CDI a été touché en informatique, directement.

Mme Chené (Louise): Écoles de danse, de théâtre, de mode...

M. L'Écuyer (Jacques): Enfin, vous avez toute une gamme... l'école d'humour... Il y en a plusieurs. Alors, on peut dire que, à la fin de l'opération, à la fin de l'année, nous aurons visité au moins une fois chacun des établissements. Au moins une fois chacun des établissements.

Si je regarde maintenant quels sont les principaux problèmes que nous trouvons dans le cas des programmes de D.E.C., prenons ceux-là pour commencer. De façon générale, les problèmes de pertinence, les problèmes de liens avec le marché du travail sont des problèmes importants qui ne mettent pas, si vous voulez, en péril ce que j'appellerais, disons, la qualité... qui mettent rarement en péril la qualité générale du programme parce que les objectifs sont précisés par la ministre. Mais c'est là où les liens sont très étroits qu'on observe les programmes les plus dynamiques, les plus intéressants, les plus branchés, si je peux...

Alors, par exemple, en techniques administratives, il y a des programmes très intéressants. Et, habituellement, ces programmes-là sont très branchés sur... Et je vous dis «c'est branché» dans le sens où on utilise, dans ce cas-là, l'entreprise non seulement à des fins de connaître ses besoins, mais, en partie aussi, on a des espèces de joint ventures, si je peux prendre l'expression, au niveau éducatif. Si vous prenez un cégep – je vais vous en mentionner quelques-uns que j'ai moi-même visités, mes collègues pourront en ajouter – comme Sainte-Foy, dans le cours de marketing, les étudiants sont invités à aller travailler directement avec des entreprises. Ils ont essayé de développer des plans de marketing. Évidemment, je ne vous garantis pas que l'entreprise va acheter... pas acheter, mais enfin va utiliser... Mais on travaille avec une entreprise, donc avec du réel, on essaie d'amener l'étudiant à fonctionner.

Ça a deux avantages. Évidemment, ça met un étudiant plus rapidement en contact avec le marché. Ça lui permet de préciser ses orientations. L'autre avantage, c'est que, dans certains cas, les entreprises ont des équipements tout à fait valables, dont les étudiants peuvent tirer profit.

L'autre avantage d'avoir des liens, c'est au niveau des stages. La plupart des programmes techniques ont des stages. Je dirais presque tous. Alors, quand vous avez une bonne relation avec l'entreprise, le stage peut être organisé de façon à ce que l'étudiant approfondisse ce qu'il a connu et que ça devienne vraiment non pas seulement l'introduction au marché du travail, comme, hélas, c'est dans certains cas, mais vraiment une activité d'intégration à la fin du programme. Donc, la question des liens, elle fait souvent la différence entre un programme qui est très bon et un programme qui est moyen. Mais c'est une chose à développer, et nous mettons beaucoup l'accent sur cette question.

Du côté de la cohérence, c'est probablement là que les problèmes sont actuellement les plus aigus, dans le sens que, malheureusement, je dirais, trop longtemps on a considéré un programme comme étant une série de cours. C'était particulièrement vrai dans le domaine pré-universitaire, puis je pense que ça le reste encore dans une large mesure. On ne s'est pas suffisamment préoccupé d'expliquer à l'étudiant ce qu'on voulait lui proposer comme plan de formation. Pourquoi tel cours intervenait? Comment, quelle était sa place? Quel était son rôle à l'intérieur du plan de formation?

Et ça, c'est particulièrement vrai pour la formation générale. Quand vous entrez dans un collège et que vous posez la question aux étudiants: Quels sont vos professeurs? Là, on a un programme d'informatique. Ils vont vous nommer tous et chacun des professeurs d'informatique, souvent par leur prénom. Ils ont souvent leur numéro de téléphone chez eux. Il y a un lien très étroit qui s'établit. Et vous leur demandez: Mais vous n'avez pas des professeurs de français? Vous n'avez pas des professeurs d'anglais, de philosophie? Et on nous dit: Ah! ouais, je pense que j'ai eu un tel. Il n'y a pas de lien qui se crée.

(10 h 10)

Alors, c'est très, très important, et, nous, nous disons beaucoup aux gens de la formation spécifique, les gens qui enseignent, par exemple, l'administration, l'informatique: Vous avez une responsabilité particulière non seulement vis-à-vis de l'informatique, vous ne formez pas que des informaticiens, vous formez aussi des gens qui vont vivre en société. D'ailleurs, en techniques administratives, c'était assez frappant, on avait demandé aux collèges: Dites-nous, dans le cadre de vos liens, quelles sont les attentes des employeurs? Il y a des collèges qui ont fait des études assez approfondies pour connaître mieux quelles étaient les attentes des employeurs. Ce qui vient en tête de liste presque partout: connaissance de la langue – des attentes – connaissance de l'informatique.

Sur le plan des connaissances techniques, je vous dirais que, de façon générale, les commentaires sont plutôt positifs. C'est assez rare qu'on note des gros problèmes, parce que techniquement nos gens, les diplômés de collège, ils sont bien formés. Mais, sur le plan de la langue, sur le plan... Et ça, c'est des choses, c'est des habiletés transversales, des compétences, si vous voulez, des connaissances transversales. Alors, nous disons aux gens: Écoutez, il y a des liens à établir. Par ailleurs, du côté de la formation générale que nous entreprenons maintenant, on va certainement s'intéresser beaucoup à savoir quels sont les liens qu'on établit avec ces gens-là.

Alors, ça, c'est des points. Le premier, la cohérence à un programme est souvent évoquée, ça a souvent fait l'objet de recommandations. Quand il y a des recommandations, habituellement ou très souvent, c'est dans la cohérence. Il y en a d'autres. Au niveau des méthodes pédagogiques, on n'est pas allé encore très, très loin là-dessus. On est bien là-dessus, on a discuté avec les collèges, mais ça n'a pas fait l'objet d'autant de... Je ne dis pas que ça devrait, mais nous n'évaluons pas évidemment individuellement les professeurs. Ce n'est pas notre rôle là-dessus. Mais on essaie plutôt d'avoir des...

Mais, au niveau des ressources, je vous dirais que, de façon générale, les ressources qu'on observe – c'est vrai partout – sont des gens bien qualifiés. Il y a des problèmes dans le sens que les collèges doivent se doter d'une politique de gestion des ressources humaines qui comprend l'évaluation, qui comprend le perfectionnement, qui comprend l'accueil des nouveaux profs. Ça, je dois dire que ça progresse lentement, surtout l'aspect évaluation. Là, il y a des réticences marquées au niveau syndical, ce qui fait que ça progresse assez lentement.

Au niveau de l'efficacité du programme, bien, là, j'imagine que vous référiez peut-être un petit peu à ça, à votre point de départ, c'est dommage. Il faut bien noter actuellement qu'il y a deux problèmes qui se posent de façon régulière, et ça, c'est vrai à peu près pour n'importe quel programme. Le taux de diplomation est généralement beaucoup plus bas que ce que, nous, on souhaiterait qu'il soit. À quoi c'est dû? Je pense qu'il y a beaucoup de facteurs. Il y a des facteurs qui sont reliés aux collèges, oui, mais il y a des facteurs qui sont tout à fait autres. Il y a des facteurs, écoutez, dépendant du type de clientèle qu'on dessert, si vous êtes dans une clientèle qui est issue de milieux défavorisés, par exemple, qui a peu de support à la maison, c'est sûr qu'ils partent avec, comme on dit, quelques prises contre eux.

Il y a des problèmes d'orientation qui sont très, très importants. Il y a des problèmes de préparation. Il y a beaucoup d'étudiants... Parce qu'on pose la question aux étudiants, quand on les rencontre: Pourquoi vous êtes partis à 30 et vous êtes rendus 10? Qu'est-ce qui s'est passé en cours de route? Pourquoi vos étudiants et vos collègues sont partis? Bien, vous avez toutes sortes de réponses. En technique d'informatique, les gens nous disent: Ah! les gens viennent parce que l'info, c'est dans le vent, parce qu'ils ont fait du Nintendo, parce qu'ils ont fait ci. Et tout à coup ils s'aperçoivent que programmeur-analyste, c'est un programme exigeant et ils ne sont pas préparés. Alors, au bout d'un trimestre...

Alors, ce que nous faisons, c'est que nous disons aux collèges: Regardez le cheminement de vos étudiants, le cheminement, regardez ce qui se passe. Est-ce qu'ils partent en première année? Est-ce qu'ils partent en dernière année? Là, il y a des collèges qui ont découvert... Je dois vous dire que la première fois que nous avons demandé ça, de regarder le cheminement des étudiants, c'était en informatique et en TESG, les deux. On a envoyé nos guides au mois de septembre, et, rendu au mois d'octobre ou novembre, on reçoit un téléphone à un moment donné du service régional d'admission de Montréal qui nous dit: Qu'est-ce que vous demandez aux collèges? On leur demandait tout simplement: Prenez la cohorte qui a commencé en septembre 1991, par exemple, dites-nous combien ont gradué, ont obtenu leur diplôme dans le temps prévu, donc en 1994. Jamais les collèges n'avaient fait cette opération-là. Et là...

Mme Chené (Louise): Pour l'ensemble de la clientèle. Parce que, là, pour l'autre clientèle, la clientèle en provenance du secondaire, le ministère...

M. L'Écuyer (Jacques): Le ministère le faisait, mais, pour l'ensemble de la clientèle... Mais, même à ce niveau-là, disons, pour les professeurs eux-mêmes, dans bien des cas on arrivait et, à ma grande surprise, on s'est aperçu que les professeurs ne savaient pas ces informations-là. Nous disions, par exemple, dans une évaluation: Comment se fait-il... Je me rappelle des questions qu'on posait en informatique, nous disions aux professeurs d'informatique: Vous avez commencé avec 30, il en reste huit, comment ça se fait que votre taux de diplomation est de 10 %, 15 %? Ils nous disaient: Ce n'est pas vrai. Je disais: Écoutez, ou bien donc votre collège a mal transmis ses données, mais expliquez-nous. Mais ce dont on s'est aperçu, c'est que, dans bien des cas, ce qu'ils manquaient, c'est des cours de formation générale. Évidemment, le professeur d'informatique n'est pas au courant de ces données-là, ne sait pas. Alors, il y a toute une jonction qu'il y avait à faire.

Alors, ça, sur ce plan-là, efficacité, nous avons trouvé que, premièrement, le taux de diplomation est bas. Et il faut bien dire qu'à bien des reprises nous avons été amenés aussi à dire aux professeurs: Vous n'évaluez pas correctement soit sur le plan de l'équité soit parce que vos évaluations ne couvrent pas les objectifs de vos cours. Alors, à plusieurs reprises, on a été amenés à faire des commentaires assez sévères sur l'application du PIEA et nous avons dit aux collèges: Vous devez appliquer votre PIEA, c'est un engagement, vous avez à le faire. Et là c'est des recommandations fermes que nous avons là-dessus.

Et, finalement, au plan de la gestion...

M. Gautrin: C'est surévalué ou sous-évalué?

M. L'Écuyer (Jacques): Ce n'est pas toujours qu'ils surévaluent ou sous-évaluent, c'est qu'ils n'évaluent pas toujours ce qu'ils devraient évaluer. Ça, c'est un point. Si on a par exemple une dizaine d'objectifs, qu'on en évalue la moitié, ils peuvent être de bon niveau, on peut dire indirectement: Oui, probablement que l'étudiant est bien préparé, mais ce n'est pas toujours bien fait.

Par ailleurs, dans bien des cas, c'est que vous avez trois professeurs qui enseignent le même cours, le niveau de difficulté est très différent d'un cours à l'autre. Alors, là, on a dit: Écoutez, si le plan de cours n'est pas commun... Il arrive des fois où c'est commun, de plus en plus je pense que les gens font un effort pour rendre les plans de cours en commun. S'ils ne sont pas communs, vous devriez vous concerter, à tout le moins pour couvrir essentiellement la même matière, puis, quand vous arrivez aux examens, vous devriez avoir un niveau de difficulté qui est comparable. Ce n'est pas toujours le cas.

M. Gautrin: Il ne peut pas y avoir une filière avancée, une filière...

M. L'Écuyer (Jacques): Non, pas dans ce sens-là.

Mme Chené (Louise): Non, non, pas...

M. Gautrin: Ce n'est pas de... Ah non!

M. L'Écuyer (Jacques): Non, ce n'est pas du tout dans ce sens-là, c'est à l'intérieur de profs. Alors, là, prenez, disons, des situations qui ne se présentent pas souvent mais qu'on a pu voir, par exemple un professeur qui va préparer à toutes fins pratiques ses étudiants en donnant des questions ou en préparant des exercices qui mènent directement à l'examen puis l'autre à côté, qui est un professeur plus normal, qui va vraiment vérifier ses étudiants. Alors, là, vous avez... C'est les étudiants qui vous le disent, la majorité du temps. Vous leur demandez.

Puis d'ailleurs on demande au collège, quand il fait son rapport d'autoévaluation, de demander l'opinion des étudiants sur les méthodes pédagogiques, sur l'équité de l'évaluation, sur des choses de ce type-là, et on vérifie, évidemment, quand on rencontre avec les étudiants et aussi quand on va chercher les plans de cours. Par exemple, en techniques administratives, on est allé chercher le plan de cours de comptabilité II et de marketing et de stages, de façon à vérifier que les plans de cours décrivent bien la matière à étudier, qu'ils vérifient bien l'atteinte des objectifs du cours à l'aide des examens, avec les questionnaires.

Alors, c'est une évaluation assez approfondie là-dessus. Je vous dirais que ça s'améliore, mais là on heurte, il faut bien le dire, on heurte beaucoup des cultures de collèges, des habitudes qui sont...

Une voix: Et de profs.

M. L'Écuyer (Jacques): ...et de profs, qui sont créées dans des années. Quand on demande: Écoutez, concertez-vous pour les plans de cours, je pense... Mais ça, à l'université, ce serait pareil.


Discussion générale

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, M. le président, comme le temps nous est compté, et je ne vous avais pas indiqué un temps pour la présentation, je pense qu'on pourrait passer à l'échange avec les parlementaires.


Évaluation de l'enseignement

J'ai personnellement plusieurs questions, mais je vais ouvrir sur quelques-unes. Quand j'ai relu votre rapport, je retrouve cette idée d'autoévaluation. Dans votre présentation, vous faites état, et avec raison, de la difficulté de faire une évaluation ou d'être cohérent dans un programme, puisque la structure est départementale, alors que vous évaluez des programmes. On connaît la difficulté, est-ce que c'est demain que ça va changer? Ça, c'est une autre question.

(10 h 20)

Également, vous avez parlé à la toute fin, et je vais vous poser la question, il s'est peut-être développé – et c'est ce que je voudrais savoir – une culture de l'évaluation dans les collèges à un certain niveau, mais, à tous les niveaux, là, j'en douterais un peu. Vous avez évalué le programme en sciences humaines et trois programmes techniques: techniques administratives, informatique et services de garde, si je ne m'abuse, j'essaie de me rappeler. On a comme 120 programmes en enseignement collégial, on va être rendu en l'an 2030 avant que vous ayez fini, ha, ha, ha! C'est la question que je me suis posée et j'imagine que mes collègues aussi se sont interrogés là-dessus. Et toute cette difficulté de l'autoévaluation et de l'absence quasi totale d'évaluation des enseignements, parce que là où ça posait problème ou que ça a toujours posé problème, c'était sur cette partie de l'activité de l'enseignement collégial, et je n'ai pas le sentiment que ça ait progressé.

M. L'Écuyer (Jacques): L'enseignement comme tel, vous voulez dire l'évaluation...

La Présidente (Mme Blackburn): Du professeur.

M. L'Écuyer (Jacques): ...du professeur.

La Présidente (Mme Blackburn): De son enseignement.

M. L'Écuyer (Jacques): Vous avez tout à fait raison de dire que cet aspect-là, nous, c'est clair que nous ne pouvons pas toucher à ça. Il y a, quoi, 17 000 enseignants, et ça, c'est sans compter ceux qui sont à l'éducation des adultes. Ce n'est pas le rôle d'une commission comme la nôtre d'évaluer l'enseignement, mais c'est le rôle d'une commission comme la nôtre d'exiger que le collège évalue ses enseignants. Et il y a des collèges qui le font depuis un certain temps, mais ce n'est pas très répandu. Il y en a quand même quelques-uns, je pense à Rimouski qui le fait je crois, Drummondville le fait très bien, la plupart des privés le font. Les cégeps, ça progresse beaucoup plus lentement, en partie à cause de résistances syndicales. Ceci dit, ils doivent se donner une politique de gestion à cause du règlement sur les régimes des études collégiales...

La Présidente (Mme Blackburn): Et de la loi.

M. L'Écuyer (Jacques): ...et de la loi sur les... Ils le doivent.

La Présidente (Mme Blackburn): Et les sanctions.

M. L'Écuyer (Jacques): Alors, ce que nous...

La Présidente (Mme Blackburn): Quand on dit «doit», il y a une sanction qui est prévue, on ne met pas le collège en tutelle, à ma connaissance.

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, écoutez, nous, nous n'avons pas le pouvoir de sanctionner. Tout ce qu'on peut faire, c'est recommander à la ministre que, dans tel programme ou dans tel collège, il y ait des suspensions. Je peux vous dire cependant qu'il y a un aspect que je n'ai pas touché. J'ai parlé de l'habilitation tout à l'heure. Pour nous, l'habilitation, ce sera un moyen de s'assurer... Parce que nous avons commencé à dire aux collèges: Nous ne recommanderions pas l'habilitation parce que vous avez un bon programme ou des bons programmes. Nous allons recommander l'habilitation parce que nous sommes convaincus que vous avez les moyens de gérer correctement votre programme et d'offrir un enseignement de qualité en tout temps. On ne vous dit pas qu'il n'y aura jamais de problème, mais, quand il y aura des problèmes, vous saurez les diagnostiquer et les solutionner.

Et ça, nous sommes en train de développer actuellement un guide et je puis vous dire que, dans ce guide-là, nous allons certainement nous assurer que les politiques générales, politique d'évaluation des apprentissages, politiques d'évaluation de programmes, politiques de gestion du personnel, sont connues, correctes et appliquées. Alors, ça, je pense que ça sera un élément motivant pour amener les collèges à bien évaluer leurs professeurs. Et c'est d'autant plus dommage que, là où il y a de l'évaluation des enseignements, des professeurs sont non seulement d'accord, ils trouvent que c'est très valorisant, que ça leur permet de progresser, sauf que, actuellement, il y a une...

La Présidente (Mme Blackburn): Résistance.

M. L'Écuyer (Jacques): ...une résistance qui est très forte, j'imagine, qui vient d'une certaine inquiétude qu'on va utiliser ça pour les mettre à la porte, alors que ce n'est pas l'objectif. Nous, nous disons: Écoutez, s'il y a des problèmes, on essaiera de trouver les moyens de les solutionner. Et, effectivement, ça, je peux vous garantir ça, vous allez à Drummondville, parlez aux professeurs, vous allez à Rimouski, ils sont d'accord, ils vous le disent. Non seulement ils sont d'accord, mais ils trouvent que ça leur donne un feed-back dont ils ont besoin, qui leur permet de faire des ajustements.

Et puis les mêmes professeurs, d'ailleurs, c'est ce qui est étonnant, quand ils enseignent à l'éducation des adultes, ils sont toujours évalués, l'éducation des adultes, les professeurs, presque dans tous les collèges, ils sont évalués. Et souvent c'est les mêmes professeurs qui enseignent dans les deux. Ils sont évalués à l'éducation des adultes; ils ne le sont pas en enseignement régulier.

La Présidente (Mme Blackburn): Diriez-vous qu'il est en train de se développer une culture de l'évaluation dans les collèges, et, si oui, à quel niveau? Là, vous nous avez dit que, chez les professeurs, il y avait de la résistance, une résistance importante.

M. L'Écuyer (Jacques): Attention! La résistance chez les professeurs, elle est au niveau de l'évaluation de leur enseignement propre, elle n'est pas au niveau de l'évaluation du programme comme tel, bien au contraire. Et ça, je peux vous citer quelques exemples de ceci. Je vous dirais, par exemple, un exemple qui me vient à l'esprit. On est allé à Lennoxville, j'ai fait l'évaluation moi-même en techniques administratives avec des collègues. Je suis rentré là et le directeur du département est un Vietnamien très, très formel, il a déjà été sous-ministre des Finances dans son pays, un bonhomme très qualifié. Il dit: M. le président – et là il a continué en anglais – Mr. Chairman, this has been – l'autoévaluation – an operation frustrating and painful, but if we had to, we would be prepared to do it again tomorrow.

Alors, je lui ai demandé: Pourquoi «painful»? Il m'a dit: Écoutez, «painful», parce que, dans le département, j'ai des professeurs qui viennent de toutes sortes d'origines différentes, il y avait un Indien, un Autrichien, un Écossais, des Canadiens, nous avions tous notre propre idée de ce que devait être un programme de techniques administratives. Nous avons eu de longues discussions qui ont été «painful» pour bien nous enligner correctement pour réconcilier nos points de vue. Ça a été «frustrating» parce qu'on aurait voulu en faire peut-être encore plus et surtout obtenir, peut-être, un peu plus de ressources, mais, il dit, on serait prêts à le refaire de nouveau parce que maintenant nous savons où nous allons, nous avons un plan d'action.

D'ailleurs, c'est souvent ce qui arrive à la fin de l'autoévaluation, c'est que les collèges eux-mêmes... Une bonne autoévaluation, quand vous faites la visite, va souvent amener plus à une validation qu'à trouver des choses. Alors donc, il n'y a pas de résistance. Il y a eu de la résistance au point de départ, et, dans certains cas, en sciences humaines en particulier, pour des raisons idéologiques, certains ont résisté. Mais, de façon générale, les professeurs trouvent intéressant parce que, dans le fond, c'est leur pratique qu'on les amène à examiner. Mais vous avez raison de dire qu'il y a une résistance au niveau de l'évaluation de leur propre enseignement.

Ceci étant dit, je vous dirais, et là nous n'avons, là-dessus, rien à voir avec ça, mais la Fédération des cégeps a fait une enquête auprès de ses membres – je ne l'ai malheureusement pas apportée avec moi – mais, au cours de cette enquête, la Fédération disait que 90 % des gens qui ont été consultés, qui sont des conseillers pédagogiques, surtout au niveau de la direction, à 90 % ils disaient que le travail de la Commission a amené au développement d'une culture d'évaluation. On interroge chacun des collèges. Et vous pouvez le voir, aussi, dans les PIEP, parce que les politiques d'évaluation des programmes qui nous sont soumises reprennent, pour l'essentiel, les grandes caractéristiques des évaluations de la Commission.

Ce que j'ai, par ailleurs, et ça, je pourrais vous le lire si ça vous... J'ai une lettre, ici, qui a été envoyée à Mme Marois par la Fédération des cégeps, dans laquelle on dit, et ça, je vous le dis ici: Il est clair que le processus permanent d'évaluation mis en place par la Commission est un outil de gestion essentiel qui atteste la qualité de la formation. Tel qu'on parlait, c'est une réaction au rapport Facal qu'ils nous ont transmise par la suite. Ils disent: La Commission a contribué à renforcer une culture d'évaluation dans les établissements d'enseignement supérieur que sont les cégeps. Les collèges doivent avoir les moyens nécessaires pour soutenir ce développement, et la Commission d'évaluation constitue pour eux un atout indéniable.

(10 h 30)

Alors, vous voyez qu'il y a... Je pense que ça, ça a progressé. Je suis confiant que le reste va venir, mais les professeurs sont extrêmement prudents là-dessus.


Taux de diplomation et durée des études

La Présidente (Mme Blackburn): Comment penser qu'on a fait des progrès remarquables quand on n'évalue pas les résultats – moi, c'est ce qui me trouble le plus – qui se traduisent par le taux de diplomation? Moi, je vous dis, c'est la première chose qu'on se pose. La question, elle va à la sortie: On forme quoi, dans quelle proportion, c'est quoi, la durée des études? Et, après ça, vous remontez tranquillement votre filière. Là, on a l'impression que la vraie question n'a pas été posée.

M. L'Écuyer (Jacques): Ah! bien nous évaluons les résultats.

La Présidente (Mme Blackburn): Non, je parle des collèges. On parlait des collèges qui auraient développé une culture de l'évaluation, alors que le meilleur indicateur de performance d'un collège, c'est son taux de diplomation et la durée des études.

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, là, écoutez, je ne peux pas être d'accord avec vous là-dessus. J'ai vu des collèges qui offrent des programmes extrêmement intéressants, au dire même de leurs étudiants, mais qui ont des taux de diplomation très bas pour toute une série de raisons.

La Présidente (Mme Blackburn): C'est ce que je dis, là. Je veux dire, il aurait fallu qu'ils comprennent le phénomène qui mène à un taux de diplomation bas, si vous voulez vous donner des politiques qui amènent une plus grande performance. Le programme peut être excellent, il faut voir pourquoi il y a un taux de réussite aussi faible. C'est ça que je dis, et c'est ce qui me trouble le plus. J'ai vu les données statistiques là-dessus, parce que le ministère les compile, et il compile la durée des études d'un même programme, diplomation... Je pense que ça donne 40 %, et puis pas dans les délais requis, dans les délais normaux. Même si, dans les délais normaux, on ajoute une session en plus.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, si vous faites le décompte total, vous avez globalement un étudiant sur deux qui obtient un D.E.C.

La Présidente (Mme Blackburn): Pas dans les délais.

M. L'Écuyer (Jacques): Pas dans les délais.

La Présidente (Mme Blackburn): Ce n'est pas 40 % dans les délais, je pense que c'est le tiers.

M. L'Écuyer (Jacques): On est d'accord avec ça, mais...

La Présidente (Mme Blackburn): C'est énorme, vous savez ce que ça coûte à l'État, ça, puis aux citoyens? Je veux juste vous dire que mon inquiétude... Quand vous me dites que ça progresse bien, je suis ravie. C'est sûr que les administrations se sont retournées assez rapidement parce que les administrateurs sont l'objet d'évaluation au moment du renouvellement de leur contrat. Puis ils ont intérêt, aussi, à ce que ça se fasse. Mais, dans le fond, je me dis, le principal indicateur de la performance d'un cégep, qui est le taux de diplomation et la durée des études, ça n'est pas utilisé pour redresser la situation, et c'est ce qui est préoccupant.

M. L'Écuyer (Jacques): Mais, écoutez, c'est là que je ne suis pas d'accord avec vous, puis mes collègues non plus ne le sont pas. Premièrement, dans chaque cas, dans chaque cas...

La Présidente (Mme Blackburn): Très bien, alors vous allez nous expliquer ça.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, c'est très clair, dans chaque cas où nous allons dans un collège et quand le taux de diplomation est bas – et il est souvent très bas – la première choses que nous demandons au collège, c'est: Quelle est la raison?

La Présidente (Mme Blackburn): Mais ce n'est pas à vous que je dis ça, je ne dis pas que la Commission ne le fait pas, je dis que le collège... Vous me dites qu'il y a une culture d'évaluation qui s'est développée et que le collège est en train de développer une telle culture, mais je dis: Si c'est un fait, si c'est un fait, qu'ils sont en train de développer une telle culture, expliquez-moi pourquoi ils ne prennent pas le principal indicateur de performance, qui est... Le collège, je ne parle pas de la Commission. J'espère bien que la Commission arrive là en disant: Écoutez, vous êtes bien bons mais vous dipômez à 36 %. Ça, il n'y a pas de problème. Ce n'est pas votre travail que je questionne, c'est l'état d'avancement de la culture d'évaluation dans les collèges, qui prendrait comme principal indicateur de performance le taux de diplomation.

Mme Chené (Louise): Si vous permettez, Mme la Présidente, j'aimerais démarrer mon intervention.

La Présidente (Mme Blackburn): C'est un plaisir de vous retrouver. Les collègues qui sont du réseau savent que Mme Chené est dans le réseau depuis au moins 20 ans.

Mme Chené (Louise): «Au moins», vous êtes gentille. J'allais justement, peut-être...

M. Gautrin: Vous avez commencé très jeune.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Chené (Louise): Vous, vous êtes flatteur.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Chené (Louise): Excusez-moi, je n'ai pas le sérieux de mon président, je m'en excuse. Ce que j'allais dire, c'est que je voudrais faire une intervention qui, justement, prenne appui sur l'expérience que j'ai eue comme directrice des études, juste avant de passer à la Commission. J'étais non seulement directrice des études du cégep de Sainte-Foy, mais aussi présidente de la Commission des affaires pédagogiques, qui regroupait tous les directeurs d'étude. Si bien que j'avais la possibilité d'avoir une vue assez complète, en tout cas, par le biais des directeurs d'étude, de la situation de l'évaluation. Donc, je voudrais prendre appui là-dessus.

Je crois que vous avez raison. Les collèges n'ont pas encore développé le réflexe récurrent de toujours examiner les taux de diplomation pour justifier les questions qui vont se poser quant à la mise en oeuvre de leur programme. Je vais vous dire, toutefois, qu'il y a quatre ans et demi seulement les données fournies par le ministère qui permettaient d'avoir une petite idée de ce qui se passait étaient relativement incomplètes, parce que ce que l'on nous donnait comme information, ça ne touchait que les élèves qui passaient directement de secondaire V à collège, donc ce qu'on appelait la cohorte A.

Je vais parler de la cohorte A; tout à l'heure, je vais parler de la cohorte B, c'est-à-dire les étudiants qui ont déjà des crédits collégiaux et qui, en changeant de programme, reprennent leurs études, étudiants sur lesquels on n'avait pas d'informations. Et, pour les collèges, on n'avait pas non plus d'outils de suivi de cheminement scolaire qui permettaient de repérer ces étudiants-là et d'en suivre le cheminement.

Là où, d'après moi, la culture de l'évaluation portant sur l'évaluation des résultats a changé et s'est appesantie, c'est, premièrement, que, collectivement, par le biais d'organismes régionaux d'admission ou avec le ministère, les collèges se sont donné des outils pour être capables de suivre l'entièreté de leur clientèle. Et, en plus, c'est pour nous une exigence qu'on leur a faite de se donner cet outil-là pour pouvoir avoir une PIEP qui soit considérée comme étant correcte.

Deuxièmement, non seulement a-t-on fait ce travail-là, mais, dans la mesure où les statistiques deviennent de plus en plus disponibles, elles sont maintenant – et on l'observe quand on va dans un collège, il y a quatre ans et demi, ce n'était pas le cas – transmises au département et, quand elles existent, aux comités ou aux structures de programmes. Et, quand je dis «quand elles existent», ça nous amène à environ 70 % des cas où ça commence à être en place. Donc, on commence à interpeller les professeurs sur le taux de réussite et le taux de diplomation.

Je voudrais dire aussi que par ailleurs toute la question de ce qu'on appelle les taux d'abandon ou les taux de difficulté d'apprentissage, ça, c'est un courant qui avait été beaucoup analysé dans les collèges depuis les années quatre-vingt. Non pas le résultat mais les difficultés d'apprentissage. Et je pense que vous n'êtes certainement pas sans savoir que le réseau collégial avait développé toutes sortes de moyens d'aide et de suivi des élèves en difficulté. Pour mémoire, je parlerai simplement des centres d'aide en français, des centres d'aide à l'apprentissage, des mesures d'encadrement individualisées, etc.

On se souciait de l'élève en difficulté; on ne se souciait pas de la performance du collège en tant qu'émetteur de diplômes en durée prévue ou en durée plus allongée. On commence à le faire. Et la jonction de la préoccupation de l'aide aux élèves en difficulté avec l'identification de la situation à laquelle vous faisiez allusion tout à l'heure commence à porter ses fruits. Cependant, il y a tellement de facteurs qui entrent en ligne de compte que l'analyse qui se fait actuellement dans les collèges fait ressortir des éléments que je vais mentionner, là, et qui pour l'instant restent au chapitre plus des questions que de l'identification des moyens d'y répondre.

Deux exemples. Le premier, M. L'Écuyer faisait allusion tout à l'heure au fait que les programmes, n'étant pas cohérents, consolidés dans leur partie formation générale versus leur partie formation spécifique, il arrive souvent que c'est la difficulté en formation générale qui amène un retard dans la diplomation. À cela, il n'y a pas un professeur qui peut faire quelque chose. C'est un ensemble de facteurs sur lesquels les collèges interviennent, sur lesquels nous intervenons, sur lesquels le ministère intervient pour assurer que, au moins, dans la mesure du possible, on permette aux élèves d'atteindre le D.E.C.

La Présidente (Mme Blackburn): Et la structure départementale demeure une difficulté majeure quand on veut faire un tel exercice.

Mme Chené (Louise): Oui, mais elle se transgresse actuellement avec les évaluations de programmes. Ça évolue.

La Présidente (Mme Blackburn): Vous avez des professeurs de français qui devraient siéger dans quatre départements.

Mme Chené (Louise): Oui, mais ce n'est pas nécessaire qu'ils siègent à chaque jour non plus.

La Présidente (Mme Blackburn): Non, mais, quand même, je sais, vous savez tous, on sait qu'une des difficultés est là. On sait que l'élève...

Mme Chené (Louise): C'est cloisonné.

La Présidente (Mme Blackburn): ...était sur une chaîne de montage – j'ai toujours eu cette impression – et le professeur qui donnait une matière ignorait ce qui avait été donné avant puis ignorait totalement ce qui allait se donner après, et l'autre, c'est en contenant, tu sais.

Mme Chené (Louise): C'est ça. Sauf que maintenant, avec l'approche programme, ça évolue beaucoup. Mais je voudrais terminer mon dernier exemple. Donc, la question de la formation générale, ça peut être abordé comme solution par le biais de ce qu'on appelle l'approche programme.

(10 h 40)

L'autre chose que nous rencontrons et qui est extrêmement compliquée, c'est le rapport entre la préparation antérieure des élèves, pas nécessairement le niveau du cours de français – il y a déjà ça; ça, ça a été étudié – mais le fait que les élèves entrent au collégial avec une préparation antérieure qui est très hétérogène, souventefois – parce que certains programmes sont contingentés – dans des programmes qu'ils n'ont pas choisis, et on a rencontré des facteurs d'échec qui sont liés beaucoup plus à la motivation qu'on aurait pu le croire.

À titre d'exemple, la Commission, en faisant l'évaluation de sciences humaines, a procédé à une étude un petit peu plus approfondie des raisons qui pouvaient faire que des élèves abandonnaient les études en sciences humaines. On n'a même pas questionné la dernière fraction, ceux qui entrent entre 65 et 70. On a questionné la fraction des élèves qui ont une moyenne au secondaire de 70 à 73 et qui, dans ce cas, de 70 à 73, abandonnent. En tout cas, les statistiques que nous avions disaient que ça abandonnait les études à 39 % de ces élèves-là. Donc, ils arrivent avec une préparation cautionnée, qui devrait leur permettre de réussir, et toutes les réponses qu'on a obtenues, c'est à l'effet que ça ne les intéresse pas, qu'ils sont entrés là parce qu'ils ne savent pas où ils s'en vont, parce qu'on leur a dit: Va en sciences humaines, c'est plus facile, parce qu'ils n'ont pas eu accès au programme qu'ils voulaient avoir.

La Présidente (Mme Blackburn): Ou encore parce qu'ils ne savent pas gérer leur temps.

Mme Chené (Louise): Aussi. Mais ça, c'est des problèmes de... Bon.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je ne voudrais pas vous couper la parole si vous n'avez pas terminé. D'abord, je voudrais vous remercier de venir devant nous. Sachez que, quand on vous reçoit, ce n'est pas parce qu'on veut vous critiquer. C'est parce que vous avez des alliés dans la commission par rapport au travail que vous faites. On a toujours, indépendamment des partis, ministériel ou de l'opposition, apprécié ce que vous faites. Moi, j'ai des questions à vous poser.


Harmonisation des enseignements collégial et universitaire

La première question: Les articulations. C'est-à-dire que vous avez touché l'articulation secondaire-cégep. Moi, je me pose beaucoup de questions sur l'articulation de sortie entre le programme dit général avec les universités. Vous évaluez les programmes sur des objectifs, mais je ne suis pas sûr – et le président de cette Commission et moi-même sommes des professeurs d'université – qu'il y ait une réelle articulation et un élément dans les universités pour s'adapter à ce qui se passe dans les cégeps. Je ne sais pas si vous avez réfléchi à ce niveau-là. Les ordres d'enseignement m'ont l'air très cloisonnés, et je pourrais vous donner des exemples. Bien souvent, on rerépète dans certains programmes universitaires ce qui a été enseigné au cégep, etc. Je ne sais pas si vous vous êtes penchés sur cette question.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, moi, à la suite des sciences humaines, évidemment, en sciences humaines, ça a été je ne dirais pas une révélation, mais ça a été une opération extrêmement intéressante pour nous et, je crois, pour les collèges aussi. Parce que pour la première fois on leur posait des questions en disant, par exemple, aux professeurs de collèges: Vous avez des objectifs dans le programme, comment situez-vous vos cours? Et là il y a un éventail de cours très, très considérable. Alors, il y a un tronc commun et, après ça, il y a des... Ça nous a amenés à poser des questions aux collèges. Je dois dire que, dans ce cas-là, sur nos comités d'évaluation, presque partout nous avions un représentant d'université. Au lieu d'avoir un représentant du monde du travail, un de nos experts venait de l'université. Je pense qu'ils ont beaucoup appris, eux autres aussi.

En tout cas, les commentaires qu'ils nous ont faits sont à l'effet que... je ne dirais pas que c'est mieux que ce qu'ils pensaient, ce n'est peut-être pas la bonne chose. C'est-à-dire que ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il y a des collèges qui font un travail absolument remarquable à ce niveau-là. Et des professeurs d'universités anglophones nous ont dit: Vous avez des étudiants de collèges beaucoup mieux préparés maintenant que des étudiants de l'Ontario qui nous arrivent même avec... Alors, ils ont été assez élogieux d'une façon générale.

Ceci étant dit, je suis allé à la CREPUQ par la suite, à la Commission des affaires académiques de la CREPUQ – je pense que c'est comme ça qu'elle s'appelle – et j'ai parlé avec mes anciens collègues de la CREPUQ et je leur ai dit: Cette question d'articulation est très, très importante. Sauf que la façon dont est souvent travaillée l'articulation entre les universités et les collèges – vous savez, vous venez de l'université; moi aussi, j'en viens – ça s'est fait beaucoup au niveau des départements des universités. Tel département dit: Moi, j'exige. Ou tel programme dit: Moi, j'exige tel cours, tel cours ou tel cours. Alors, ça produit toutes sortes d'effets pervers et des effets vraiment...

En techniques administratives, c'est un cas d'espèce très, très intéressant. Vous avez deux programmes qui peuvent mener aux facultés d'administration à l'université, où la voie normale, là, ce serait le pré-universitaire de sciences humaines avec concentration administration. Mais concentration administration, entendons-nous, l'objectif du programme des sciences humaines, c'est de donner une culture assez générale, une ouverture sur le monde. Ce n'est pas de donner des cours de comptabilité, ou de ci, ou de ça, c'est d'avoir une certaine ouverture.

Regardez ce qui est en train de se produire. Les universités reconnaissent maintenant aux étudiants qui sortent avec un D.E.C. en techniques administratives – un D.E.C. techniques administratives – de plus en plus le cours de comptabilité. Tant mieux! Il y a des universités qui ne le font pas, dont HEC par exemple. Alors, HEC reçoit chez elle des étudiants qui arrivent avec le D.E.C. en techniques administratives et des étudiants qui n'ont pas de préparation particulière de ce type-là.

Ces étudiants-là se retrouvent dans les mêmes cours en première année, les mêmes cours de comptabilité; résultat, l'étudiant qui arrive avec le D.E.C. en sciences humaines dit: Aïe, on est bien mal préparés; eux autres, ils ont déjà fait de la comptabilité, c'est facile. Tout ça. Ils reviennent au collège et ils disent au collège: Il faudrait que vous mettiez un cours de comptabilité, qui est un des cours optionnels, mais qui, entre nous, là, la comptabilité, je veux bien, mais, en sciences humaines, tu sais, ça commence à devenir assez spécialisé. Ce qui fait que, au lieu de respecter... On n'a pas ce dialogue qui serait un dialogue de dire: Voilà ce qu'on attend.

C'est ça que je disais à mes collègues: Dites ce que vous attendez d'un programme de sciences humaines non pas en termes de: Tel cours, on le voudrait, ou tel cours, mais dites ce que vous attendez en termes d'orientation générale, de résultat final de ce programme-là. Si c'est la culture – une culture méthodologique, je ne parle pas simplement d'une culture... – alors, à ce moment-là, respectez ça et puis ajustez-vous au niveau. S'il manque un cours, par exemple... Parce que, là, on demande toutes sortes de cours de mathématiques, mais regardez ce que ça donne. Vous avez le tronc commun, vous avez quatre cours de maths: trois obligatoires, mais il y a un complément de mathématiques aussi. Alors, vous avez beaucoup de maths. Il ne reste plus de place pour mettre des cours qui permettraient une certaine ouverture.

Alors, c'est un peu dans ce sens-là que, nous, on dit aux gens: Vous devriez faire cette réflexion-là, mais faites attention à la façon... Tant que vous allez aller chercher un professeur d'administration, ou, si je prend les sciences qu'on connaît bien tous les deux, si on demande à un professeur de physique, ou à un professeur de chimie, ou à un professeur de mathématiques, il va dire: Ah! il faut tel, tel, tel cours. Les gens ne se préoccupent pas de ce qu'on attend.

M. Gautrin: Mais, M. le président, je résume, version du volet de ma question, il existe un effort qui est fait par la CREPUQ, le comité des programmes, je ne sais pas si c'est de la CREPUQ ou du ministère, c'est un comité conjoint.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est un CLES. C'est le comité de liaison enseignement supérieur.

M. Gautrin: C'est le comité de liaison de l'enseignement supérieur. Bon. Est-ce que vous avez des rapports? Vous comprenez bien, nous, comme parlementaires, alors qu'on est préoccupés par cette articulation entre le collégial et l'université, tout ce qu'on peut essayer de forcer, c'est que vous et eux, c'est-à-dire ceux qui s'occupent des programmes, vous parliez.

Je suis parfaitement conscient que, si on laisse la situation telle qu'elle est, ou à chacun des départements et à la dynamique interne des départements à l'université la liberté de devoir faire les prérequis, on n'en sortira absolument pas, compte tenu des dynamiques propres à chacun des départements, que vous connaissez et que je connais assez bien.

Mais il faudrait que... Là, maintenant, du côté universitaire, on a cette commission sur les programmes. Est-ce qu'il y a...

M. L'Écuyer (Jacques): Cette commission, elle contient des gens des collèges et des universités.

M. Gautrin: Et des universités. Elle est créée...

La Présidente (Mme Blackburn): C'est le CLES maintenant.

Mme Chené (Louise): Le comité de liaison de l'enseignement supérieur.

M. Gautrin: C'est le comité de...

M. L'Écuyer (Jacques): Il est présidé par le sous-ministre.

M. Gautrin: Par qui?

M. L'Écuyer (Jacques): Par la sous-ministre.

M. Gautrin: Non, non, non, ce n'est pas ce comité-là. Le comité...

La Présidente (Mme Blackburn): Le comité de liaison entre...

M. Gautrin: Le comité qui s'occupe de revoir l'ensemble des programmes. Ils se sont penchés sur... J'oublie. C'est l'ancien sous-ministre qui maintenant est à l'Université Laval.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, Mme McNicoll.

(10 h 50)

M. Gautrin: C'est Claire McNicoll qui en est la secrétaire. Mais le président, c'est... son nom m'échappe.

M. L'Écuyer (Jacques): Ce n'est pas Pierre Lucier.

M. Gautrin: Non, non.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, c'était Tavenas?

M. L'Écuyer (Jacques): C'était Léonce Beaupré.

M. Gautrin: Léonce Beaupré. Il serait important, si je peux faire une suggestion que, d'une manière informelle, ce comité et vous, vous vous rencontriez. Et même, si je pouvais vous faire une suggestion, c'est qu'à un moment il y ait peut-être une certaine harmonisation entre ce que vous faites, dans votre stratégie d'évaluation de programmes, et ce qu'ils font. Je vous donne un exemple. Je ne pense pas que vous ayez évalué, actuellement, l'enseignement de la musique dans les collèges. Eux, par contre, la première question sur laquelle ils se sont penchés, ça a été toute l'harmonisation des enseignements de la musique. Bon.

Ça aurait été, je dirais, utile, peut-être, que simultanément vous puissiez avoir des échanges à ce niveau-là entre leur programme de travail et votre programme de travail. Alors, je peux seulement vous le suggérer. Je n'ai pas les moyens de faire en sorte que vous vous parliez. Par contre, nous, comme parlementaires, on peut vous parler à vous et on peut parler aussi, de l'autre côté, à Léonce Beaupré et à la présidence du comité Beaupré. Et tâcher qu'au minimum on puisse avoir une meilleure articulation entre l'université... Je crois que c'est par ce biais-là qu'on pourra l'avoir. Si on laisse faire de manière naturelle, on risque d'avoir énormément de difficultés.

M. L'Écuyer (Jacques): Je suis d'accord avec ça. Je vous dirais qu'un des problèmes que nous avons, c'est que les objectifs du programme qui sont... Voyez-vous, nous autres, quand on travaille, qu'on fait une évaluation, on doit respecter les objectifs du programme. Parce qu'ils sont prescrits par la ministre. Nous avons, quand on parle d'un programme de D.E.C., le mandat d'évaluer la mise en oeuvre du programme. C'est-à-dire que, tout en étant d'accord avec votre suggestion, je pense que ce serait très important que les représentants de la ministres ou les gens qui travaillent sur les objectifs du programme parlent beaucoup, parce que, s'ils nous fixent des objectifs ou s'ils fixent au collège des objectifs qui ne sont pas en accord avec ce que les attentes sont au niveau universitaire, là... Mais je suis très sensible à votre préoccupation. C'est la raison pour laquelle, à la fin de sciences humaines, on est directement allés là-bas...

M. Gautrin: Alors, ce que vous nous dites, si je comprends bien, dans l'échange qu'on a de manière informelle, vous dites: Oui, il serait important que le troisième partenaire, qui est la ministre ou le ministère, soit aussi impliqué dans cette mission. Alors, je peux vous dire que souvent, dans ce genre de rencontre, on est relativement apartisan, c'est-à-dire non partisan.

La Présidente (Mme Blackburn): C'est l'intérêt de la chose, d'ailleurs.

M. Gautrin: Mais on va avoir un échange avec la ministre de l'Éducation dans le cadre des crédits. Il y a, bien sûr, un côté qui est un peu plus partisan dans le cadre des crédits. Mais je pense qu'on pourrait soulever cette question avec la ministre dans les échanges que la commission devrait avoir. Ce serait peut-être bon que le secrétaire en prenne note pour qu'on ne l'oublie pas.

La Présidente (Mme Blackburn): Si on se pose la question, il faudrait peut-être voir, M. le député de Verdun, en amont comme en aval. Je veux dire...

M. Gautrin: Absolument.

La Présidente (Mme Blackburn): ...par rapport au secondaire vis-à-vis du collège, le collège vis-à-vis du secondaire.

M. Gautrin: Je n'ai aucune difficulté là-dessus, madame, mais je croyais que la question aval ou amont...

La Présidente (Mme Blackburn): Amont.

M. Gautrin: Amont, merci, amont avait déjà été abordée par Mme Chené, et c'est pour ça que je n'ai pas pris la peine de rerentrer sur la question.

La Présidente (Mme Blackburn): Parce que les collèges ont la même attitude vis-à-vis des écoles secondaires que les universités ont vis-à-vis des collèges. C'est ça. Ça a toujours été le problème. Et le problème d'harmonisation a été posé au moment où les pratiques d'admission des diplômés dans les D.E.C. professionnels étaient extrêmement variables, pas selon les programmes d'enseignement universitaire, selon les universités. Et il y avait plus de souplesse dans les universités hors Québec qu'au Québec même et une reconnaissance beaucoup plus large de la formation reçue au niveau du D.E.C. professionnel. Ça reste un scandale pour moi. Je laisse la parole à mon collègue. Oui, Lotbinière? Vous devez partir à quelle heure?

M. Gautrin: Je ne sais pas, vers 11 h 30, il va falloir au moins que je...

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, vous ne savez pas encore de quoi le budget va être...

M. Gautrin: Je sais tout, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...il va falloir...

M. L'Écuyer (Jacques): Mais je ne dis rien.

M. Gautrin: Je ne peux pas dire parce que vous savez que je ne sais rien.

Une voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, c'est ça. Ça va être déposé à 14 heures, alors...

M. Gautrin: Est-ce que je peux aborder une autre question, vous permettez?

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, je vous en prie.


Diminution des services aux élèves

M. Gautrin: Il y a d'autres dimensions. Bon, vous savez que les budgets dans les collèges ont été compressés année après année. La Fédération des cégeps nous dit à chaque fois, année après année: Vous savez, on n'est plus capable de fonctionner. Malgré tout, ça fonctionne.

Néanmoins, si on fait un tour dans les collèges, on se rend compte que tout ce qui est le support pédagogique, que ça soit le support dans les laboratoires, le support dans les bibliothèques, le support des orienteurs, des conseillers... – je pense que c'est psychologues, ce n'est pas conseillers pédagogiques, conseillers pédagogiques aussi? – s'entend à disparaître parce que les compressions, quand on compresse dans un budget, il faut bien les faire quelque part. Est-ce que vous avez senti, dans votre évaluation, l'effet des compressions budgétaires sur la qualité de l'enseignement? Et j'essaie de moins rendre partisan. Si j'étais en discours, je serais beaucoup plus partisan.

La Présidente (Mme Blackburn): Cette question-là préoccupe tout le monde des deux côtés de la table, vraiment. Alors, M. le président.

M. L'Écuyer (Jacques): O.K. Alors, écoutez, je vais vous répondre très franchement. Je l'ai déjà fait à des journalistes qui me posaient la question. Oui, nous le voyons, nous le sentons et nous pouvons le voir, effectivement, au niveau du personnel de soutien pédagogique et soutien dans les laboratoires.

M. Gautrin: Et des bibliothèques aussi.

M. L'Écuyer (Jacques): Certainement les bibliothèques. C'est tout.

La Présidente (Mme Blackburn): Est-ce que ça a eu un effet sur le taux de rétention? C'est ça qu'on veut savoir.

M. Paré: Vous parlez, dans votre critère, de l'adéquation entre les ressources humaines et les ressources matérielles. Est-ce que ça vous pouvez le mesurer quelque part?

M. L'Écuyer (Jacques): Oui. Maintenant, écoutez, on les mesure toujours, mais écoutez...

M. Paré: Disons en informatique.

M. L'Écuyer (Jacques): Bon. En informatique, c'est un bon exemple. Il y a eu un effort de fait il y a deux ans ou trois ans, il y a eu un budget particulier pour l'appareillage informatique, de telle sorte que, quand, nous, on compare l'appareillage tel qu'on l'a vu quand on a évalué le programme d'informatique et tel qu'on vient de le faire avec les techniques administratives, il y a un progrès certain. Donc, au niveau de l'appareillage, il y a un progrès.

Cependant, le support technique, lui, a baissé, ce qui fait que, là où il y avait x techniciens, par exemple, pour faire l'entretien des appareils, pour mettre à jour les logiciels, il y en a moins. Ce qui fait que, dans un certain nombre de collèges, on demande, par exemple: Pourquoi vous utilisez encore tel logiciel? Ah bien! on a l'autre, mais il n'est pas encore installé et on est en réseau, on ne peut pas faire des... Assez souvent, les gens nous disent: On éprouve du retard à installer les logiciels les plus récents. L'entretien des appareils, ça, c'est très clair, les heures d'ouverture des bibliothèques, des laboratoires d'informatique... Vous savez, l'informatique, aujourd'hui, on s'en sert peu importe le programme. Alors, ça aussi, c'est restreint de plus en plus.

Hier, on était en train d'examiner un rapport préliminaire en techniques administratives. Bien, le collège, il est fermé, la bibliothèque est fermée toute la fin de semaine. Elle ferme le vendredi à 16 heures, c'est terminé. Il n'y a pas d'argent pour. Et, évidemment, c'est la même chose dans les laboratoires d'informatique, où on ne laisse pas les gens venir sans surveillance. Comme vous savez, on se fait voler partout.

M. Paré: Je regardais votre rapport au niveau de l'informatique, c'est pour ça que j'ai posé la question directement. Pourquoi, à des endroits, c'est leur force puis, dans un collège à côté, c'est leur faiblesse?

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, ça dépend. Là, on parle en général, hein?

M. Paré: Donc, ce n'est pas égal.

M. L'Écuyer (Jacques): Non, ce n'est pas égal. Mais ce à quoi il faut faire attention, c'est qu'il y a des choix que les collèges font. Par exemple, il est possible – je dis bien «il est possible» – que le collège ait choisi de laisser sa bibliothèque ouverte, d'avoir une bibliothécaire de plus mais un informaticien de moins. En fait, il y a des choix de ce type-là. Il y a aussi des programmes qui exigent différemment. Si vous avez beaucoup de programmes techniques, je ne sais pas si ça a des répercussions... Ça a des répercussions dans le financement, ça, c'est clair. Maintenant, est-ce que ça peut se compenser? C'est sûr que les choix ne sont pas les mêmes d'un collège à l'autre.

(11 heures)

Autre chose. Il y a des collèges qui sont très actifs à l'éducation des adultes et qui ont pu financer, à certaines époques, soit par le biais d'achats directs ou autres, des équipements puis, dans certains cas, ont pu les maintenir. En tous cas, ça leur a évité de mettre autant d'argent.

La situation varie dans les collèges; tous les collèges ne sont pas nécessairement gérés de la même façon. Écoutez, on ne fait pas une analyse détaillée des budgets des collèges, ça, c'est clair. Il y a des choix là-dessus, vous avez parfaitement raison. Il y a des collèges qui ont décidé de maintenir – je ne sais pas, moi – un équipement informatique haut de gamme et puis des services informatiques, peut-être aux dépens d'autres...

Mme Chené (Louise): Ça dépend aussi des années, si je peux me permettre, parce que le budget d'investissement des collèges, à part les cas où il y a un investissement massif de la part de l'État avec un objet précis, le budget étant un budget global, un collège qui gère plusieurs programmes techniques peut décider, cette année, de faire du développement dans tel et tel programme et, l'année d'après, il prendra le même budget et il le fera dans un autre programme. Et donc, quand on fait une évaluation comme on fait en informatique, on peut arriver, par rapport au plan quinquennal d'investissements d'un collège, à un moment où il n'a pas encore développé de ce côté-là alors qu'il a développé en électrotechnique, ou vice versa. Donc, ça peut dépendre des années, aussi.

La Présidente (Mme Blackburn): Une dernière question, M. le député de Verdun?

M. Gautrin: Oui. Vous m'excuserez, je vous remercie...

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, allez-y, M. le député.

M. Gautrin: ...de la souplesse que vous me donnez. J'ai deux autres questions qui sont de deux champs différents.


Nouveaux programmes non subventionnés conduisant à une attestation d'études collégiales

Vous savez que la nouvelle loi n° 166 va permettre, en concordance avec la carte des programmes de chacun des collèges, de développer des A.E.C. autofinancées, mais qui soient plus en contact direct avec les besoins du marché du travail de la région où se trouve le collège. Est-ce que, dans votre programme de travail, vous avez l'intention de faire une évaluation de ces nouveaux programmes?

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, nous le faisons déjà, parce que les A.E.C...

M. Gautrin: Je parle des autofinancées.

M. L'Écuyer (Jacques): Les autofinancées, ça, c'est un nouveau développement...

M. Gautrin: C'est un nouveau programme. Alors donc, ça va venir, voyez-vous.

M. L'Écuyer (Jacques): Mais je pense que ce à quoi il faut s'attendre à court terme, étant donné les ressources dont disposent les collèges, c'est que ça va être pour beaucoup des adaptations ou des copies des A.E.C. déjà existantes, parce que, vous savez, quand même, développer... On va sans doute s'en tenir initialement à ce type. Nous avons beaucoup travaillé avec les gens de l'éducation des adultes, parce que, au début, je peux vous dire que l'éducation des adultes, c'était vraiment le parent pauvre, en ce sens que, par exemple, en TESG, je crois que la moitié, on leur a dit: Écoutez, vous ne pouvez pas continuer d'offrir comme tel...

M. Gautrin: Attendez un instant! Moi, je ne connais pas vos acronymes.

Une voix: Services de garde.

M. L'Écuyer (Jacques): Services de garde, pardon.

M. Gautrin: Excusez. Ha, ha, ha!

M. L'Écuyer (Jacques): Alors, on leur a dit: Écoutez, vous ne pouvez pas continuer à offrir le programme comme vous le faites. Ils l'offraient sur le... Mais il y a encore de sérieux problèmes, des problèmes de jonction entre l'éducation des adultes et le secteur régulier. L'expertise est au secteur régulier, mais il faut qu'il se fasse une jonction. Il y a des collèges qui le font bien, mais il y en a qui ne le font pas. Donc, il va falloir être attentif à cette chose-là. Quand vous développez un programme sans avoir recours à votre expertise ou quand vous offrez un programme sans avoir recours à votre expertise que sont vos professeurs – parce qu'il faut comprendre que la situation dans les collèges est très différente d'une université; quoique, des fois, l'Université de Montréal ait certaines similitudes avec les collèges à ce plan-là – mais, si on développe une A.E.C. sans avoir recours à nos gens, il est arrivé dans le...

M. Gautrin: C'est-à-dire au corps professoral régulier. Autrement dit, si vous engagez uniquement des chargés de cours pour enseigner dans les A.E.C., c'est ce que les...

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, écoutez, il faut encadrer ce monde-là et il faut avoir une idée assez précise...

M. Gautrin: Je ne voudrais pas entrer dans le débat qu'on a avec la FEP.

M. L'Écuyer (Jacques): ...tu sais. Il y a des problèmes, en tout cas, qui se posaient, et vous avez raison de pointer ce problème-là. Mais je pense qu'il y a un autre problème qui va se poser, c'est que, écoutez, développer des A.E.C. efficaces dans les collèges du style de ce qu'on trouve, par exemple, dans l'enseignement privé non subventionné – parce que c'est de ça qu'on parle, hein – ...

M. Gautrin: C'est ça, oui.

M. L'Écuyer (Jacques): ...ça, ça va nécessiter certains ajustements aux conventions collectives.

M. Paré: Pour le personnel.

M. L'Écuyer (Jacques): Pour le personnel, parce que...

M. Gautrin: Est-ce que vous avez fait une évaluation de l'enseignement privé non subventionné?

M. L'Écuyer (Jacques): Oui. L'enseignement privé, écoutez, actuellement, vous payez 12 000 $, 13 000 $, 14 000 $, et puis on est allé chez des gens comme Jean-Guy Leboeuf, Delta, Julien, tout ça. Il y en a qui sont très bien faits, il y en a qui sont faits couci-couça, mais...


Rôle des conseils d'administration

M. Gautrin: J'ai une dernière question, M. le Président. Les rapports à l'intérieur des collèges entre ce que j'appellerais la vie administrative et pédagogique et le conseil d'administration, est-ce que c'est quelque chose sur lequel vous vous êtes penchés ou pas? On a une loi structurelle, il y a des pouvoirs aux conseils d'administration. Les gens qui siègent sur les conseils d'administration ont parfois l'impression qu'ils ont du pouvoir. Pratiquement, c'est souvent illusoire. Mais est-ce que, dans votre vécu, vous vous êtes penchés sur le rôle... Quand vous rencontrez des collèges... Autrement dit, ma question, je pourrais la prendre de ce bord-là, quand vous dites: On rencontre le collège, vous rencontrez le DSP, enfin, il ne s'appelle plus comme ça maintenant, mais enfin le DG ou le conseil d'administration?

M. L'Écuyer (Jacques): On rencontre la direction du collège, le...

M. Gautrin: Le directeur général.

M. L'Écuyer (Jacques): ...le directeur général, le directeur des études. Je ne pense pas qu'on rencontre à peu près jamais un conseil. Il y a une chose cependant qu'on fait, c'est qu'on demande toujours que le rapport d'autoévaluation soit approuvé par le conseil d'administration de même que les politiques. Nous leur demandons que ce soit comme ça, et il y a certains collèges qui nous ont dit que ça avait été l'occasion pour le conseil d'administration, dans bien des cas, de prendre connaissance de ce qui se passait sur le plan pédagogique.

M. Paré: De parler pédagogie de...

M. L'Écuyer (Jacques): De parler pédagogie.

M. Paré: Les trois quarts de l'agenda sont au niveau des ressources matérielles.

M. L'Écuyer (Jacques): Voilà. Et on nous a dit que les gens avaient trouvé ça intéressant, puis je pense que, même à l'intérieur du collège, ça amène les départements responsables... Parce que, habituellement, ils vont présenter leur point de vue évidemment là-dedans, parce que le conseil a toute latitude de poser toutes les questions, c'est pour ça d'ailleurs qu'on a exigé ça, que ça passe par là. On voulait que le conseil soit saisi de ce qui se passait là-dessus. Maintenant, je peux vous dire que, dans l'habilitation, ça, c'est clair.

M. Gautrin: Je regrette, je n'ai pas compris.

M. L'Écuyer (Jacques): Dans l'habilitation, là on va regarder de beaucoup plus près le fonctionnement des organismes décisionnels du collège parce que là, comme je vous disais tout à l'heure, pour nous, l'habilitation, ça va. On serait prêt à la recommander à condition qu'on sente que le collège est bien géré et...

M. Gautrin: Je comprends. Qu'il y ait une volonté dans ce sens-là, etc. Vous me laissez encore?

Une voix: Allez-y.


Participation des élèves à l'évaluation de l'enseignement

M. Gautrin: Mme la présidente a abordé tout à l'heure un élément, vous y avez répondu en partie, dans les éléments d'autoévaluation, l'évaluation par les étudiants, un mécanisme structuré d'évaluation des cours par les étudiants. Vous savez à quel point ça a pu être difficile dans les universités. Maintenant, je pense que c'est relativement établi. On a participé ensemble d'ailleurs, dans nos vies antérieures, à ces débats-là – ha, ha, ha! – dans une institution universitaire, sur les établissements des questionnaires. Est-ce que ça se fait dans les collèges?

M. L'Écuyer (Jacques): Ça se fait dans quelques collèges. Ça se fait toujours ou presque toujours à l'éducation des adultes.

M. Gautrin: Par un questionnaire qui est distribué à la fin du cours aux étudiants, c'est ça?

M. Roy (Louis): Après chaque cours, soit durant le cours même, à des endroits, ou à moitié du cours, il y a une évaluation faite par les étudiants.

M. Gautrin: Qui est traitée à ce moment-là d'une manière informatique?

M. Roy (Louis): Non, qui est remise à ce moment-là – on parle de l'éducation des adultes – l'évaluation est remise au conseiller pédagogique qui s'occupe du programme. Lui, il compile ça et il va en discuter ou rencontrer le professeur en question. Malheureusement, ces rencontres-là, c'est souvent quand il y a des problèmes. Quand ça va bien, il y a rarement du suivi. Mais, à l'éducation régulière, c'est des initiatives dans certains collèges et dans certains programmes. De plus en plus, on voit que ça s'en vient.

M. Gautrin: Parce que, c'était drôle – si vous me permettez une remarque là-dessus – l'expérience qu'on a pu avoir en milieu universitaire, c'est que très souvent après... D'abord, il y a une réticence de la part du corps professoral, mais, une fois que c'est établi, vous voyez que les étudiants ont toujours tendance à surévaluer leur propre cours par rapport aux autres cours. On a souvent tendance... On pose, par exemple, dans le questionnaire que nous avions établi une question: Comment vous évaluez l'ensemble de vos professeurs? Comment vous évaluez ce professeur-là? Normalement, si on fait le traitement informatique de tout, on devrait avoir la même chose. Donc, ce n'est pas vrai. La moyenne du cours est toujours plus évaluée par rapport à la moyenne qu'ils évaluent.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, M. le député... Ça appelait des réponses, madame?

Mme Chené (Louise): Je voulais simplement rajouter que, de façon générale, cette évaluation des enseignants par les étudiants se fait pour les enseignants non permanents, pour les nouveaux enseignants en période de probation. Le foyer de résistance à l'évaluation de chaque cours, c'est chez les professeurs permanents.

Une voix: C'est malheureux.

M. Gautrin: Mais vous comprenez bien, si vous me permettez, que, s'ils ne se livrent pas à ce truc-là, la pression va être telle qu'il va finir par remettre en question le concept même de permanence.

M. L'Écuyer (Jacques): Voilà.

M. Gautrin: C'est une question...

M. L'Écuyer (Jacques): Je pense que vous avez parfaitement raison.

Mme Chené (Louise): Voilà.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Taschereau.

M. Gaulin: Oui, ou on peut le voir différemment aussi. Moi, je voulais vous dire d'abord merci d'être là. Je trouve que votre tâche est, d'une certaine manière, une tâche de titan. Je serais porté à le dire comme le président tout à l'heure: Avec les moyens que vous avez, c'est presque aussi long de faire votre travail que l'Académie française de revoir le dictionnaire.

(11 h 10)

Alors, le fonctionnement ou clivage auquel faisait allusion le député de Verdun, il a toujours existé puis, d'une certaine manière, il est même entretenu par la structure même du fonctionnement de l'éducation ou du ministère, ce qui est normal d'ailleurs. Il y a des niveaux d'enseignement puis il y a des directions générales d'enseignement. Il y a finalement peu d'institutions où on fonctionne sans clivage. C'est le cas des associations professionnelles, par exemple.

Je prends le CIEP, qui n'a pas toujours autant qu'il le voudrait – je ne dis pas qu'il ne l'a pas – l'appui de la CEQ, par exemple, le Conseil pédagogique interdisciplinaire. Je prends l'Association québécoise des professeurs de français, qui est une association qui enseigne de la maternelle, enfin, qui regroupe des professeurs de la maternelle et de l'université puis, même là, je peux vous dire, pour en avoir été un des présidents, que ce n'est pas toujours facile de faire se parler entre eux des professeurs de différents niveaux.

Cependant, on y arrive, entre autres, à l'occasion des colloques et des congrès. Mais, comme le laissait entendre aussi la députée de Chicoutimi tantôt, les gens de niveaux supérieurs d'enseignement trouvent toujours que les gens du niveau inférieur d'enseignement n'ont pas fait ce qu'il fallait faire. À certains égards, d'ailleurs, ça peut être vrai parce que, moi, j'ai toujours trouvé qu'un des exemples d'un gaspille, puis là c'est aussi en matière d'argent, mais, par exemple, au niveau de l'économie de l'enseignement, c'est l'enseignement de l'anglais. C'est un très bel exemple. On l'a instauré maintenant au niveau collégial, on le donne au niveau primaire, on le donne au niveau secondaire. On enseigne au Québec l'anglais sur neuf ans, et, finalement, ça donne quoi, comme résultats? Alors que, dans d'autres pays, qui ne sont pas plus brillants que nous autres, qui ne sont pas moins fins non plus, on enseigne pendant ce temps-là deux langues. Alors, c'est des questions qui nous sont posées.

Vous avez fait allusion aux cultures des collèges, c'est vous, M. le président, qui utilisez ça. Puis j'ai l'impression que, à ce niveau-là, les cultures de collèges, le niveau collégial est un niveau qui est apparu au moment de la Révolution tranquille, il a à peine une trentaine d'années, c'est ça? Il y a eu des cultures de collèges qui se sont établies un petit peu comme la culture des fiefs dans un pays qui doit refaire une sorte d'unité nationale. On pourrait prendre la France, par exemple, avec ses différentes provinces et essayer de voir ce que ça donne, finalement. C'est que les cégeps ont souvent fonctionné comme des petites principautés et c'est difficile de rallier tout ça.

Et c'est pour ça que, moi, je ne serais pas porté nécessairement à faire porter aux professeurs permanents un poids qui ne leur revient pas. C'est sûr qu'il y a toute la pression du syndicalisme là-dessus. Moi, étant un universitaire de formation mais ayant enseigné à tous les niveaux d'enseignement, je peux vous dire que, même à l'université, on départage la fonction pédagogique de la fonction syndicale, et puis c'est les mêmes gens qui vont dans des commissions différentes. Ça fait un peu drôle, c'est un petit peu schizophrène, mais, en tout cas, c'est comme ça.

Au niveau du conseil d'administration aussi, c'est comme ça. Maintenant, l'Université Laval s'est dotée d'un double conseil, et ce serait peut-être une bonne idée, au niveau du collégial, d'avoir une sorte de double conseil, l'un qui aurait une préoccupation beaucoup plus pédagogique. Mais, ceci étant dit, je suis en train de faire de longs commentaires, Mme la Présidente, mais, moi, je trouve que la question qui pourrait vous être posée, c'est: Est-ce que vous avez des chiffres, par exemple, sur le pourcentage de gens qui, au cégep, font leur diplôme dans le temps prévu?


Responsabilité des enseignants

M. L'Écuyer (Jacques): On aurait par programme, oui, on en a. On revient à une des question de Mme la présidente tout à l'heure, la question du taux de diplomation, pour nous, ça reste une préoccupation. Si vous me permettez juste un petit commentaire, je dirais que je suis un petit peu de l'opinion, avec vous, quand vous parlez... Je ne sais pas jusqu'à quel point vous voulez aller là-dessus, mais, quand vous parlez du poids des professeurs, je pense que le poids des professeurs doit être très, très important. Ils sont les premiers responsables, c'est eux qui sont au coeur de la mission d'un collège.

Et je pense que, quand on dissocie trop certains aspects du fonctionnement du collège, comme par exemple, et là je reviens au taux de diplomation, nous nous sommes aperçus, quand nous avons commencé ces évaluations, que les professeurs des départements responsables des programmes informatique, services de garde, techniques administratives... Techniques administratives, déjà, ça commence à changer, les professeurs sont nettement plus conscients maintenant que ce n'est pas tout d'offrir mais qu'il faut que les gens sortent de ces programmes-là. Et c'est à partir du moment où les gens prennent conscience de ça qu'on commence à poser des gestes et des gestes qui sont vraiment des gestes valables.

Je pense que tant et aussi longtemps que vous ne posez pas la question à un professeur: Comment ça se fait que ton taux de réussite dans un cours de première année n'est que de 30 % ou 25 %... Alors, disons que c'est assez rare, mais prenons comptabilité I, qui est un cours vraiment difficile pour les étudiants qui arrivent en techniques administratives. Ce cours-là, vous trouvez très fréquemment qu'il est, pour 40 %, 50 % des élèves, un cours où ils échouent. Alors, c'est un cours de première année, premier trimestre, souvent, habituellement premier trimestre. Quelqu'un qui vient d'échouer ce cours-là, qui est préalable à tous les autres, il ne finira pas dans le temps voulu. Donc, vous venez de commencer avec un étudiant qui, c'est clair, va prendre au moins une session de plus, si ce n'est pas une année.

Alors, je pense qu'il faut poser la question aux professeurs eux-mêmes: Qu'est-ce que vous faites dans ce temps-là? Et nous avons commencé à poser cette question-là. Je pense que ça va être intéressant de voir dans les prochaines années – parce que là les statistiques qu'on a sont des cohortes qui ont commencé essentiellement en 1993-1994, les plus récentes – alors, là, on va voir, maintenant. Parce que je regardais, par exemple, en comptabilité, il y a plusieurs collèges, maintenant, qui ont pris des mesures particulières visant ce cours-là, parce que c'est un cours où le taux d'échec est élevé. Alors, plutôt, parmi les mesures qu'on a vues, on a créé, dans certains cas, à l'intérieur des départements de techniques administratives, une espèce de centre d'aide en comptabilité. Ailleurs, le cours qui est un cours de trois heures, on l'a porté à quatre heures en disant: Ça, on va utiliser ça, les mesures prévues dans leur encadrement.

Donc, on pose des gestes, et c'est les professeurs qui doivent poser ces gestes-là. Parce que, moi, je peux vous dire – effectivement, comme le disait le député de Verdun, je suis un ancien professeur d'université – que je suis impressionné par la panoplie de mesures que les collèges ont mis sur pied pour essayer d'aider les gens en difficulté – ça, moi, ça m'a impressionné, vous ne trouvez pas ça dans les universités, ça, ce n'est pas vrai, on ne trouve pas ça – conseillers pédagogiques, les centres d'aide, vous avez toute une panoplie. Maintenant, c'est au niveau des départements, il faut que le professeur, quand ça ne marche pas dans son cours de première année, aille essayer de trouver ce qu'on peut faire pour améliorer. Ça va être des mesures comme ça qui vont permettre d'améliorer le taux de diplomation.

Et je ne pense pas qu'on puisse rêver à de grandes structures. Il faut que chaque professeur soit conscient qu'il a une certaine – entendons-nous, il faut être prudent là-dedans – responsabilité, pas obligation mais responsabilité, quant à la réussite des étudiants dans ses cours.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Chené.


Taux de diplomation et durée des études (suite)

Mme Chené (Louise): Oui, il y a aussi, quand on parle de la diplomation en durée prévue, différents facteurs dont il faut tenir compte, des facteurs qui sont liés au système. Je vais vous donner un premier exemple: le nombre d'unités. Les programmes techniques, notamment, se sont beaucoup alourdis, y compris en nombre d'unités, c'est-à-dire de crédits, sans que la durée prévue ait été modifiée depuis les derniers 10 ans. Alors, déjà, c'est qu'on exige un effort de plus en plus grand aux élèves, puisqu'on leur a donné des programmes plus chargés.

L'autre chose, c'est qu'il y a des mesures qui tiennent aux règlements des études et qui ont aussi trait à la loi des collèges qui ont un effet sur la valeur de la notion de durée prévue. Je vous donne des exemples: on a beaucoup développé, dans les collèges, des sessions d'accueil et d'intégration pour les élèves dont on percevait qu'ils auraient des difficultés à entrer dans leur programme. Vous savez, le collège, dans la loi, en tout cas, a le devoir d'accepter les élèves qui sont admissibles, et le degré d'admission, c'est le D.E.S plus, maintenant, deux cours. Bon.

(11 h 20)

Mais, même si l'élève est admissible, quelquefois il n'a pas ce qu'il lui faut pour réussir dans le programme, donc on va diriger les élèves vers des sessions d'accueil et d'intégration. Nécessairement, ce service-là qu'on donne aux élèves va faire en sorte que l'élève ne finira pas en durée prévue. Or, plus vous admettez des élèves qui sont faibles à l'entrée – vous êtes dans des situations où vos élèves sont admissibles, mais ils sont faibles à l'entrée, je pourrais nommer des cégeps comme Saint-Laurent, Limoilou, Vieux-Montréal, et tout ça – plus votre taux de diplomation en durée prévue peut être coloré par l'existence d'une session d'accueil.

Autre chose, M. L'Écuyer faisait allusion aux échecs de préalables. Alors, si vous êtes dans un gros collège, il arrive que le préalable à ce cours puisse être répété à l'autre session, donc vous allez perdre une session. Mais, si vous êtes dans un collège qui n'a pas une grosse clientèle dans ce programme, ça va être un an de délai. Donc, ça, il n'y a rien à y faire, s'il y a un échec.

Autre chose, c'est que tout le processus d'inscription aux cours dans les collèges est laissé, et ça fait partie de – je ne saurais pas dire si c'est fondé sur la loi – une culture qui date depuis 30 ans. Ce sont les élèves qui choisissent les cours. C'est-à-dire qu'un élève – c'est même dans notre système de financement – il a le pouvoir de s'inscrire à sa maquette de cours, dans son programme technique, mais on ne peut pas l'empêcher d'abandonner avant la date prévue pour le financement. Alors, il n'y a aucune règle qui fait qu'on peut empêcher un élève de faire ça. Donc, l'élève est amené à gérer, au fond, son cheminement scolaire, et, alors, là, ça a un effet, nécessairement. Si l'élève dit: Bien, moi, c'est trop lourd, je le fais en quatre ans, il va diplômer après la durée prévue. Ensuite de ça, il y a aussi une autre chose qui est liée à la loi, c'est qu'un élève qui a eu trop d'échecs à une session n'a pas le droit de se réinscrire à la session d'ensuite. Donc, là aussi, si jamais on arrive à le récupérer, ce qui est une autre histoire, là aussi ça va avoir un effet.

Donc, et enfin, on est en train de creuser, par l'évaluation qu'on va faire de la composante de formation générale, le rapport à la diplomation en durée prévue de la cohorte 1994 dans tous les programmes dans tous les collèges entre la formation générale et la formation spécifique. On aura à ce moment-là beaucoup plus de données, plus fines, par rapport aux questions que vous vous posez. Mais, autant je pense qu'il faut dire que de plus en plus il faut que l'encadrement, ça se situe près des professeurs, il faut aussi dire qu'il y a dans notre système toutes sortes d'éléments qui ont une influence, sur laquelle les collèges et les professeurs n'ont pas de prise.

La Présidente (Mme Blackburn): Peut-être, pour mieux cerner, vous permettez juste une sous-question. Est-ce qu'il y a un écart considérable dans le taux de diplomation entre un cégep, prenons les deux qu'on connaît ici, à Québec, Sainte-Foy ou F.-X.-Garneau et Limoilou? Ça donne quoi?

M. L'Écuyer (Jacques): Selon les programmes?

La Présidente (Mme Blackburn): Une session, deux sessions de plus?

M. L'Écuyer (Jacques): De façon globale.

Mme Chené (Louise): À programme similaire, oh oui!

M. L'Écuyer (Jacques): Sciences humaines, exemple.

Mme Chené (Louise): Sciences humaines? Oui.

M. L'Écuyer (Jacques): Oui, tout à fait. Cégep de Sainte-Foy, il y a des... Mais, même, c'est assez étonnant. Il y a des collèges qui ont réussi à implanter chez eux... je ne sais pas si on peut appeler ça une culture, mais, en tout cas, des efforts particuliers. Sainte-Foy habituellement a des bons taux de diplomation, mais l'Amiante habituellement a d'excellents taux de diplomation dans les durées prévues.

Mais remarquez qu'il y a toutes sortes de choses. Comme vous dites, il y a la question des étudiants. Mme Chené le disait très bien. Ils ont les choix de cours. Ils ont aussi le choix du nombre de cours qu'ils vont prendre. Or, ce qu'on constate, ça, c'est particulièrement vrai dans les grandes ville, vous avez des étudiants qui travaillent 20 heures, 25 heures. Alors, vous savez, vous leur dites: 25 heures, tu ne trouves pas que c'est un peu beaucoup? Oui, mais je m'en tire. Bon. Bien, il s'en tire à un trimestre. Oups! à un moment donné, bien, il laisse tomber des cours, aussi. Et ça, c'est difficile.

Je peux même vous donner... Puis il y a des contraintes, dans le système, qui sont très sérieuses. Je sais que le cégep Dawson à une certaine époque voulait imposer à toutes fins pratiques aux étudiants une espèce de charge complète ou, en tout cas, un nombre minimal de cours, de façon à les amener à terminer dans... Ce n'est pas possible. Et le ministère lui a rappelé qu'il n'avait pas le pouvoir de faire ça. Le résultat: toute la stratégie de Dawson, évidemment, ils insistent, mais ils ne peuvent pas avoir une politique contraignante de pleine charge d'enseignement.

Mme Chené (Louise): Si on n'a pas de promotion par session, on a une promotion par cours.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Taschereau.

M. Gaulin: Moi, si le député le permet, je voulais dire... En fait, vous parlez des professeurs et vous avez dit à la fois, M. le Président, professeur et département. Même si le prof est très important, c'est bien sûr, c'est une des constituantes d'une maison d'enseignement, c'est l'élève et le professeur. À la rigueur, les administrateurs ne sont là qu'à cause d'eux, hein, et d'elles. C'est aussi le département, puis c'est le rôle du directeur des études aussi, la fonction du directeur des études.

J'ai essayé de savoir, moi – j'ai fait quelques téléphones, tantôt – si les professeurs avaient des systèmes d'évaluation internes, comme ça s'est fait un peu à l'université, sans que ce soit nécessairement imposé. Je pense que, moi, pour avoir été 23 ans à l'université, il y a eu beaucoup de progrès dans le sens de l'encadrement pédagogique, et je me demande si ça s'est toujours fait dans les cégeps. Je me demande aussi si le fait de créer des contrôles nationaux pourrait aider l'évaluation dans les collèges d'enseignement.

Quant au reste, vous soulignez un problème que, entre autres, j'avais souligné dans Québec Français : Est-ce que le cégep ne devrait pas, finalement, être de trois ans, est-ce que, au bout du compte, ça ne coûterait pas moins cher à l'État que de le faire sur deux ans, avec toutes les conséquences qu'on vient de soulever? Parce que très souvent le cégep, il finit par ressembler à une gare: il y a la moitié des étudiants qui arrivent puis il y a la moitié des étudiants qui partent. S'il y avait un groupe, au centre, qui tiendrait ces deux groupes – l'un qui arrive et l'autre qui part – ça changerait peut-être tout l'esprit des cégeps.

D'ailleurs, c'est un niveau d'enseignement qui a besoin beaucoup d'être valorisé parce que, vous le dites, au fond, ça passe pour un niveau d'enseignement facile, où on est un peu flémard, où on ne fait pas grand-chose, où les profs ont beaucoup de vacances, alors que c'est un niveau d'enseignement exigeant, et je pense qu'il faudrait peut-être que ça soit valorisé nationalement de ce point de vue là.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. M. le député de D'Arcy-McGee.


Éducation des adultes

M. Bergman: M. L'Écuyer, dans votre présentation de ce matin, vous avez mentionné que, dans la section éducation des adultes, dans certains collèges il y avait certains problèmes. Est-ce que vous pourriez nous faire part de ces problèmes et des méthodes qui ont été employées pour les rectifier?

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, ils sont de plusieurs ordres, mais je vous dirais que l'éducation des adultes, ça dépend beaucoup des collèges. Il y a des collèges où c'est parfaitement bien organisé et très bien fait. Quand on offre un programme, on offre des choses de qualité, et, presque à chaque fois, c'est toujours la même chose. Cependant, il y a beaucoup de collèges où on n'a pas apporté à l'éducation des adultes le même soin qu'on apportait à l'enseignement régulier. Il y a plusieurs contraintes qui peuvent expliquer ça, mais, en particulier, assez souvent, l'éducation des adultes se fait sur des programmes qu'on évalue le plus fréquemment... C'est des programmes qui sont offerts par achat de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre ou de DRH, Développement des ressources humaines Canada, et ces organismes-là recrutent des gens et achètent des programmes dans les collèges, à toutes fins utiles.

Or, les collèges doivent fonctionner, très souvent, dans des conditions assez particulières, et je pense surtout aux collèges en région. Souvent, les collèges, on leur demande: Pourquoi vous n'avez pas – je ne sais pas – mieux préparé votre programme? On nous dit: Bien, vous savez, on est venu nous voir et on doit ouvrir le programme à 15 jours d'avis. Donc, il faut recruter des professeurs puis il faut des chargés de cours, la plupart du temps.

(11 h 30)

Donc, un première problème, là, c'est que, souvent, les chargés de cours sont recrutés à la dernière minute, l'encadrement des chargés de cours, s'il n'y a pas un très bon service d'éducation des adultes, est minimal. Il y a des chargés de cours qui ont une bonne expérience pédagogique, mais, dès que vous sortez des grandes villes, où il y a une espèce de bassin de chargés de cours professionnels, ça n'existe pas. À ce moment-là, on recrute un peu les personnes qu'on peut trouver, et ce n'est pas nécessairement des gens qui ont une grande expérience pédagogique. Alors, quand vous regardez ces programmes-là, vous notez que très souvent l'évaluation n'est pas très bien faite, les méthodes pédagogiques peuvent laisser à désirer, des choses aussi simples que de conserver les registres, les plans de cours, les examens, l'évaluation, ce qu'on devrait faire parce que ces gens-là peuvent revenir, on ne le faisait pas. Dans certains cas, les ressources – j'ai même des cas en tête – ont été mises sur pied à la dernière minute, des ressources vraiment minimales.

Bon, ce n'est pas le cas de tous les collèges, mais ce qu'il faut noter, c'est d'abord l'encadrement des chargés de cours, la relation avec le département. Et ça, je peux vous dire que récemment les nouvelles politiques négociées dans le cadre des conventions collectives avec la meilleure intention du monde, la politique, par exemple, qui évite le double emploi des professeurs, elle a un effet nocif, pervers, si je peux me permettre, très sérieux. En ce sens que vous aviez des services d'éducation des adultes qui avaient l'habitude de recourir à un ou des professeurs de l'enseignement régulier pour donner des cours à l'enseignement des adultes. Ils ne peuvent plus le faire maintenant à cause des contraintes. Et ça, ça peut avoir des conséquences très sérieuses.

Quand vous êtes, je ne sais pas, moi, à Chibougamau ou à Baie-Comeau, ou autre, il y a des types de personnes que vous recrutez difficilement. Alors, si vous appliquez de façon trop rigide, s'il n'y a pas d'entente locale avec le syndicat pour essayer de permettre que l'expertise du département puisse servir à l'éducation des adultes – vous savez, il y a des endroits où les syndicats ont été assez réticents à ces choses-là – vous vous retrouvez à ce moment-là avec un manque d'expertise à l'éducation des adultes, avec un encadrement des chargés de cours qui est minimal.

Alors, c'est beaucoup ces choses-là que nous avons reprochées, surtout dans les premiers programmes. Je pense que ça s'est beaucoup amélioré du côté des techniques administratives, où on voit de très bons programmes. Parce qu'il y a d'excellents programmes qui sont offerts. Je peux vous dire que, sur ce plan-là, je ne voudrais pas paraître trop négatif, là. Je vous donne les problèmes tels qu'on les a vus. Je pense qu'il y a eu beaucoup d'efforts de faits, vous avez d'ailleurs des services d'éducation des adultes qui ont pris les choses très à coeur. Parce que, au début, on les avait un peu brassés, je pense.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Roy.

M. Roy (Louis): L'autre problème aussi, en plus de l'improvisation de la mise en oeuvre d'un programme, c'était – surtout au début, quand on a commencé – que les collèges n'avaient pas droit de regard sur la clientèle. C'était soit la SQDM ou DRH Canada qui sélectionnait la clientèle et qui disait au collège: J'ai un groupe et voulez-vous leur offrir telle formation? Et les collèges se sont rendu compte qu'ils s'en faisaient passer des fois, c'est-à-dire qu'ils pouvaient avoir dans la clientèle étudiante des gens, des candidats qui n'étaient vraiment pas à leur place.

On a eu, suite à notre première expérience, des communications avec la SQDM, entre autres. Et de plus en plus les collèges sont impliqués. Ils ont accepté que les collèges soient sur les comités de sélection pour aller chercher vraiment des candidats qui ont des chances de réussir. Alors, c'est un problème qui est en train de se résoudre.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de D'Arcy-McGee.


Adaptation des programmes aux besoins des marchés locaux

M. Bergman: Une autre question. Dans votre guide, vous avez indiqué que vous avez des paramètres, et vous avez parlé du marché du travail qui est différent de région en région. Et vous avez dit que c'est des cours basés, en fait, un peu, sur le marché du travail. Je me demande, si je comprends bien, si c'est trop restrictif que les cours soient basés sur la région. En fait, vous avez raison, car c'est une question de «practicalities» pour le faire.

Mais, dans un autre sens, on crée, sur un grand portrait, des divisions entre les régions ou les régions et les centres urbains avec ce type de philosophie. Je me demande si j'ai raison. D'une manière, je vous appuie, car les cours doivent être basés sur le marché du travail d'une région, mais, d'un autre côté, ça me cause des problèmes, car on parle toujours dans notre société québécoise qu'il y a des divisions entre les régions et les centres urbains. Et je me demande si c'est une des causes qui font les divisions plus grandes au lieu de plus petites.

La Présidente (Mme Blackburn): J'apprécie sa question parce que, quand vous avez fait votre présentation, ça m'est venu en disant: Adapter un programme aux besoins du marché local, qu'est-ce que vous faites de la mobilité de la main-d'oeuvre?

M. L'Écuyer (Jacques): Non, écoutez, je pense qu'il faudrait...

M. Bergman: Mais j'ai eu la chance, lors d'une visite dans les régions, privée... Je pense à Matane où j'ai vu le cégep basé sur l'industrie de la pêche, et j'ai trouvé ça tellement intéressant. J'ai fait une visite à ce cégep, j'ai trouvé ça très intéressant et très intelligent comme société pour avoir quelque chose comme ça.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, je pense qu'il ne faudrait pas... J'ai peut-être mal exprimé cette dimension-là. Ce qu'on veut dire, nous, c'est qu'il y a quand même un intérêt à tenir compte du marché local, mais partout on forme quand même des informaticiens, on forme quand même des gens d'affaires, on forme... L'idée, ce n'est pas d'avoir quelque chose d'étroit, sauf qu'on a aussi avantage, je pense, à offrir à nos étudiants un éventail de cours qui leur permettent d'entrer assez facilement sur le marché du travail. Et, comme ces gens-là, dans la majorité des cas, vont travailler dans la région où ils sont – en tout cas, on peut toujours espérer qu'ils travaillent dans leur région – bien, le fait d'avoir une préparation plus immédiate... Mais ça n'empêche absolument pas – puis vous avez parfaitement raison de rappeler cette dimension-là – que c'est un programme de base, qui doit former un technicien, mais on a des choix à l'intérieur de ce programme-là.

Alors, on a des choix, et c'est là que les choix permettent une certaine diversification à l'intérieur des établissements. Ce n'est pas une question de grande ville versus petite ville. Je vous dirais par exemple qu'un des programmes, prenons l'informatique, que j'ai trouvé très, très bien adapté, très bien fait, à Sainte-Thérèse, mais qui est essentiellement axé sur les petits ordinateurs, les PC, des choses comme ça, ça correspond bien, disons que ça serait plus étonnant...

Prenons le cas de Dawson qui offre aussi un excellent programme, mais Dawson nous faisait le raisonnement suivant, disait: Beaucoup de mes diplômés sont des gens qui, pour toutes sortes de raisons, vont travailler beaucoup dans des banques, des choses comme ça, alors on leur donne une préparation qui les rend aptes plus rapidement à interagir ou à agir comme techniciens auprès de grands appareils. Ça serait plus étonnant de trouver ça, disons, à Baie-Comeau, où il n'y a pas de grands appareils. Alors, les gens de Baie-Comeau, à un moment donné... Mais ça reste des techniciens de base, c'est juste de tenir compte... Ça permet de préparer mieux l'étudiant, mais ça permet aussi d'organiser des activités avec les gens de l'entreprise. C'est un peu cette dimension-là.

Soit dit en passant, juste le fait de pouvoir interagir, c'est souvent beaucoup plus facile d'interagir avec l'entreprise dans les régions que dans les grandes villes. Pour toutes sortes de raisons, l'entreprise est plus diffuse dans les grandes villes, elle est plus sollicitée par toutes sortes de choses. Alors, en techniques administratives, je vous dirais que très souvent les programmes dans les régions sont des programmes extrêmement intéressants parce qu'il y a une dynamique qui s'établit avec le milieu régional, et c'est tout au profit des régions, dans bien des cas.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Champlain, la parole est à vous.

M. Beaumier: La parole est à moi? Bien, je vais en profiter pour dire quelque chose.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Ça serait préférable.


Évaluation de l'enseignement (suite)

M. Beaumier: Je n'ai pas tellement de questions, mais je profite de nos invités pour me mettre à jour sur un certain nombre de choses. Je voudrais revenir sur la question d'évaluation des enseignements, ayant une partie de ma carrière au niveau de l'Université du Québec à Trois-Rivières, je crois qu'on s'était rencontrés à quelques occasions, M. L'Écuyer. Ça avait été une grande opération, précédée, accompagnée et suivie d'un débat sur l'évaluation des enseignements, où, entre autres, on faisait la distinction qui a permis d'aller de l'avant dans cette opération-là, d'évaluation d'enseignements, en distinguant de façon très jésuistique quasiment l'évaluation de l'enseignant par rapport à l'évaluation des enseignements. Et ça avait permis d'avancer à ce niveau-là.

(11 h 40)

Ma question serait à M. L'Écuyer, et aux autres probablement aussi: Est-ce que l'expérience que vous avez eue de l'évaluation des enseignements qui s'est faite dans l'ensemble des universités – au moins de l'Université du Québec, en cours, je ne sais pas où ça en est actuellement – est-ce que ça a eu des effets positifs tels qu'on pourrait s'attendre à ce qu'il y ait le même type d'effets au niveau collégial? Autrement dit, que peut-on attendre de ce volet-là, de l'évaluation des enseignements, quant à la qualité de la formation que l'on donne au niveau de l'ordre collégial?

La Présidente (Mme Blackburn): M. L'Écuyer.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est une très, très bonne question. J'ai déjà été très critique de ce volet-là dans les universités, pour la raison suivante, que vous allez reconnaître sans doute. Je pense que vous étiez à l'université, vous aussi, à une certaine époque. Écoutez, le problème de l'évaluation des enseignements, c'est très bien. Je pense qu'il y a un premier feed-back immédiat, c'est que ça donne au professeur qui est évalué de l'information sur sa capacité de transmettre des... Alors, quand vous avez des professeurs consciencieux, qui veulent s'améliorer, je pense qu'ils en profitent beaucoup.

Si vous avez des cas problèmes, là, la question qu'il faut se poser, c'est: Qu'est-ce qu'on fait? Moi, c'est la question que j'ai posée. J'ai fait une espèce de cheminement à travers l'Université du Québec, je suis allé à Chicoutimi, à Trois-Rivières, dans le cadre d'une évaluation des modules département – pour ceux qui connaissent l'université – et je posais la question, je disais aux gens des modules – parce que c'est les modules, dans l'université, qu'ils doivent évaluer: Qu'est-ce qui arrive quand vous avez des évaluations négatives en succession par rapport à un professeur?

Alors, on me disait: On transmet l'information au département qui est responsable du cheminement professionnel. Je disais: Bon, parfait. Alors, j'allais voir le département et je disais: Qu'est-ce que vous faites? Les gens du département me disaient: Bien, on parle au professeur. Je disais: Parfait, puis après? Si ça continue, on essaie de le changer, mais ce n'est pas toujours possible, parce que, à l'université, il y a aussi des mécanismes de distribution des tâches qui ne permettent pas toujours cette mobilité-là facilement. Mais, en tout cas, le département essayait. Puis je disais: Au module, s'il n'y a rien qui se passe? Bien, ils disaient: En somme, à toutes fins pratiques, on demande fortement au département de nous envoyer un autre professeur.

Bon, tant mieux si ça marche. Puis j'ai dit: Sauf que vous avez juste déplacé le problème, là, parce que le professeur va continuer de donner ses cours ailleurs. Alors, il n'y avait rien. Et on allait même jusqu'à nous dire: Dans les cas les plus critiques, quand le professeur ne veut pas changer, bien on change le numéro de cours, alors, là, ça nous permet de nommer un nouveau professeur parce qu'on n'a plus le même cours. Vous voyez, il y a un problème, si on ne donne pas de suivi.

Quel type de suivi on peut donner? C'est là que, nous, dans les évaluations aux collèges, on dit: Oui, il faut que vous fassiez de l'évaluation, ne serait-ce que pour donner du feed-back aux professeurs. Et on constate – et ça, je pense que c'est Louis qui le disait tout à l'heure – qu'il y a plusieurs professeurs, probablement les plus motivés, qui se préoccupent de chercher l'avis de leurs étudiants. Il y a des questionnaires qui existent, puis ils leur demandent d'eux-mêmes, puis ils les conservent pour eux. Mais, quand on a des cas problèmes, nous, on dit aux gens: Vous ne faites pas de l'évaluation pour mettre les gens dehors, actuellement de toute façon les gens ont la permanence, hein. Il faut trouver les moyens d'aider ou d'amener les gens...

Alors, nous, on essaie de coupler beaucoup évaluation et perfectionnement, en disant aux collèges: Écoutez, vous avez une politique de gestion des ressources humaines, faites l'évaluation de l'enseignement mais couplez-là avec le perfectionnement ou avec des mesures d'aide. Parce que des fois ce n'est pas du perfectionnement. Les gens me disent: Ah! le professeur est qualifié. Le professeur est qualifié, oui, je veux bien, mais, s'il y a un petit problème qui se développe, et puis on sait que... Je veux dire, les professeurs, c'est comme n'importe qui d'autre, il peut y avoir des problèmes de toutes sortes d'ordres, dans la vie personnelle, des choses comme ça, qui se répercutent sur l'enseignement. Mais, s'il n'y a rien de fait...

Mais, vous savez, pour avoir été gestionnaire au niveau universitaire et pour voir ce qui se passe dans les collèges, je vous dirais que nous avons beaucoup fait, dans les institutions d'enseignement, de la gestion par convention collective. De là à faire de la gestion des ressources humaines, c'est une tout autre paire de manches. Quand j'étais à l'Université du Québec, on avait un vice-président qui était très sensible à cette dimension-là et qui nous avait beaucoup sensibilisés au fait qu'il y a beaucoup d'autres dimensions, dans la gestion des ressources humaines, que de simplement gérer la convention collective.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Champlain, ça va?

M. Beaumier: Oui, ça va dans le sens où, dans le volet, disons, de promouvoir l'évaluation des enseignements au niveau du cégep, avec les rencontres que vous avez avec les directions des cégeps et tous les gens impliqués, ça a une certaine importance, mais ça a une certaine limite aussi. De l'expérience de l'université, en tout cas, mon intuition est à l'effet que ça a une certaine limite parce que, au fond, quand ça a été le plus utile – et vous l'avez dit vous-même tantôt – c'est quand le professeur lui-même l'avait, et même à un moment donné on ne l'envoyait pas, ce n'était pas public, ce n'était pas envoyé même au département pendant un certain temps. C'était uniquement remis du module au professeur qui, lui, pouvait faire sa lecture et c'était bénéfique pour lui à ce niveau-là. C'est ce qui a été le plus utile. Tout le reste, qui va jusqu'aux sanctions, c'était inapplicable, c'était non administrable aussi, pour les raisons que vous avez données. En tout cas, c'est relatif, comme fer de lance, la question de l'évaluation des enseignements au niveau du cégep.

M. L'Écuyer (Jacques): Il y a des choses qui peuvent être faites quand même. Je comprends que les méthodes pédagogiques, ça peut être difficile. Quelqu'un qui s'exprime mal, on peut toujours essayer de l'aider à s'exprimer mieux, mais on n'en fera pas nécessairement un bon pédagogue. Il aurait fallu peut-être diagnostiquer ça dès le point de départ. Mais il y a quand même des choses. Nous, par exemple, on constate que très fréquemment la qualité de l'évaluation laisse à désirer. Mais ça, ça s'apprend. Ça, ça s'apprend et ça fait partie de l'évaluation de l'enseignement.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Lotbinière.


Programmes insatisfaisants

M. Paré: Seulement deux petites questions de précision peut-être. Vous avez parlé dans votre exposé de recommandations à la ministre. Vous avez parlé de suspension et de tutelle. S'il y avait un...

M. L'Écuyer (Jacques): Un problème sérieux.

M. Paré: Si jamais ça allait jusque-là, vous dites qu'il y avait deux cégeps délinquants pour tel et tel programme. Qu'est-ce que vous faites dans ce temps-là?

M. L'Écuyer (Jacques): Délinquants, non. Je vous dirais d'ailleurs que les quelques cégeps qui n'ont pas donné suite, je pense qu'on sait pourquoi, mais on va faire un rappel. Je ne suis pas inquiet là-dessus. Je vous dirais que, dans certains cas, nous pouvons ou nous pourrions dire à la ministre: Écoutez, enlevez à tel cégep l'autorisation d'offrir tel programme si c'est un programme qui... Et nous avons toujours dit aux cégeps: Écoutez, nous, on n'est pas là pour vous sanctionner. On est là pour vous aider. Et, dans ce sens-là, on va vous faire des recommandations, des suggestions et des choses comme ça. Tenez-en compte, et, si vous en tenez compte, vous ne devriez pas avoir de problème majeur, d'une façon générale. On n'est pas là pour vous sanctionner, mais pour vous aider. Maintenant, si vous ne faites rien et si des problèmes perdurent, là c'est autre chose. Là, on se sentira très à l'aise pour dire à la ministre: Écoutez, dans tel cégep, l'informatique, vous ne devriez plus permettre d'enseigner ça. J'imagine que la journée où on fera ça, il va y avoir: Oups!

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Chené.

Mme Chené (Louise): Moi, j'allais dire que le principal incitatif au changement, une fois qu'on a déclaré qu'un programme ne devait plus être offert comme il l'était, c'est que notre rapport est public et que beaucoup de ses collègues cégeps autres se chargent de le signaler.

M. L'Écuyer (Jacques): Ça, c'est vrai. Maintenant, même dans le privé il y a des cas. Je ne sais pas comment on évoluera. Parce qu'on a la possibilité de faire cette recommandation-là aussi bien au cégep qu'au privé. On peut dire: Dans tel établissement, c'est tellement mal fait. Il y a un cas que je peux donner. Il y a un collège privé qui offre le D.E.C. en sciences humaines, avec lequel on a été très sévère. Ils nous ont remis un rapport d'autoévaluation mal fait, en dehors du temps. Mais on a été très sévère. On leur a dit: Vous recommencez le rapport d'autoévaluation. Parce que la grande vertu du rapport d'autoévaluation, c'est qu'on dit aux cégeps: Dites-nous si vous avez un programme qui est cohérent. Faites-nous-en la démonstration. En faisant ça, eux-mêmes se rendent compte, dans le fond, des problèmes.

Alors, dans ce cas-là, on a dit: Recommencez et déposez-le. S'ils ne l'avaient pas fait, on aurait recommandé... Ce qui est arrivé dans ce cas-là, c'est qu'il y a eu changement important de la direction, remise d'un rapport d'autoévaluation qui était, cette fois, à peu près correct. Mais le programme comportait des lacunes énormes. C'est Louis qui y est allé. Et nous avons dit au collège que nous allions retourner. Donc, ce n'est pas deux, c'est trois en réalité. Nous allons retourner à ce collège-là pour faire...

(11 h 50)

La Présidente (Mme Blackburn): On ne nomme pas les collèges ici.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est un collège privé de la région de Montréal que tu connais très bien.


Approche programme et approche compétences

M. Paré: Au niveau, maintenant, de l'évaluation des... Je regardais l'évaluation au niveau des programmes en informatique. Quand vous les faites... Je regarde dans vos remarques des différents collèges, avec les forces et les points à améliorer. Au niveau de l'efficacité des programmes, dépendamment de l'approche, l'approche programme ou l'approche compétences, est-ce que vous voyez une différenciation?

M. L'Écuyer (Jacques): L'un va avec l'autre. Ce n'est pas exclusif. C'est tout simplement que l'approche par compétences, c'est que l'objectif du programme est décrit sous forme d'une compétence que l'étudiant doit maîtriser. Alors, ça suppose que l'évaluation doit se faire en fonction de l'atteinte ou non de cette compétence-là. Mais ça, ça doit se situer à l'intérieur d'une approche programme, parce qu'il y a des compétences qui peuvent être liées spécifiquement à un cours, mais vous avez des compétences qui sont des compétences transversales, écrire correctement en français, la même chose. Donc, c'est des choses... apprendre à s'exprimer.

Et ça, c'est une initiative qu'on trouve maintenant de plus en plus dans les collèges. C'est que les collèges eux-mêmes ont réécrit des objectifs du programme à partir des objectifs ministériels qui sont prescriptifs mais auxquels ils ont ajouté des objectifs en rapport avec ce qu'ils se sont donné comme mission éducative, par exemple de préparer des gens qui ont de l'entrepreneurship. Les gens de Jonquière, par exemple, sont très forts là-dessus.

M. Paré: Transversal.

M. L'Écuyer (Jacques): Ça, c'est transversal. Donc, ça doit paraître dans un certain nombre de cours, et puis des cours... Donc, ce n'est pas en opposition.

M. Paré: Parce que vous dites, bon, que la pertinence du programme élaboré à partir d'un profil de diplômé, un profil de travail, un profil...

M. L'Écuyer (Jacques): Oui, bien, voilà! Un de ces profils, un profil de diplômé, bien, c'est ça. C'est quand, dans le profil de diplômé, on met... le collège établit les compétences qu'il s'attend à retrouver chez le diplômé. Alors, quand il élabore son programme et puis ses méthodes pédagogiques... Puis, dans bien des cas, c'est souvent au niveau des méthodes pédagogiques que ça apparaît le plus.

Mais là il faut que les gens se concertent parce que, tu sais, si on veut développer l'esprit d'équipe, par exemple, ou l'entrepreneurship, on ne fera pas ça à travers un cours ou en donnant un cours, dans bien des cas. On va essayer de développer des initiatives. Alors, les gens vont envoyer ces gens-là... vont leur proposer des... de façon à ce qu'ils développent eux-mêmes cet esprit d'entrepreneurship. Alors, ça peut être dans plusieurs cours. Ça peut être en marketing, ça peut être en comptabilité, ça peut être en toutes sortes de cours.

M. Paré: Maintenant, l'évaluation des résultats?

M. L'Écuyer (Jacques): Eux doivent s'en préoccuper. Et, nous, quand on évalue... Évidemment, on prend quelques cours, là; on ne peut pas faire un échantillonnage complet. Mais, habituellement, quand on fait l'évaluation sur place, le collège doit nous montrer... On lui demande de nous expliquer quels sont les cours qui contribuent à l'atteinte de tel ou tel objectif. Et, quand on n'est pas satisfait, on lui pose des questions avec nos experts. La discussion avec les professeurs sur ces questions-là, ça prend facilement deux, trois heures à chacune de nos visites.


Taux de diplomation et durée des études (suite)

La Présidente (Mme Blackburn): Juste une petite question, dans le cadre de la question qui a précédé. Je note que, dans vos évaluations, pour peut-être même pas 50 % des commentaires, on indique un trop faible taux de diplomation.

M. L'Écuyer (Jacques): On a la même préoccupation que vous.

La Présidente (Mme Blackburn): Sur quelle base? C'est quoi, un bon taux de diplomation, qui fait que d'autres cégeps n'ont pas cette note-là? C'est 45 %? Parce que j'ai regardé, je pense, votre... Le plus haut, c'est 49 %?

M. L'Écuyer (Jacques): Oui. Ça dépend des programmes puis ça dépend des collèges.

La Présidente (Mme Blackburn): Mais là je vous parle de l'informatique.

M. Roy (Louis): Disons que la référence de base, c'est la moyenne provinciale. Là, on peut se situer.

La Présidente (Mme Blackburn): Ah! d'accord.

M. Roy (Louis): Mais il y a d'autres facteurs qui interviennent. Par exemple, un collège qui va accepter à l'entrée des étudiants forts et qui diplôme dans la moyenne, on va lui faire une recommandation de hausser le taux de diplomation. Un collège qui accepte des étudiants qui arrivent du secondaire, mais qui sont faibles, et qui réussit à diplômer ses étudiants dans la moyenne provinciale, bien, probablement qu'on va lui indiquer qu'il est sur la bonne voie puis qu'il fait du bon travail.

La Présidente (Mme Blackburn): Est-ce que le taux de diplomation et l'effort qu'on va mettre là-dessus ne risquent pas d'avoir des effets pervers, c'est-à-dire qu'on attribue des diplômes à rabais? Parce que c'était ça aussi, l'inquiétude dans le réseau.

M. Roy (Louis): Moi, je ne crois pas. Écoutez, c'est une question très préoccupante. Moi aussi, elle me préoccupe beaucoup. Je trouvais ça vraiment désolant quand je suis arrivé à la Commission. Ça faisait quand même plusieurs années que je n'étais pas dans le réseau collégial. Et socialement ça pose des questions. Effectivement, quand les taux de diplomation, comme en techniques administratives, c'est 18 %, 19 %; en informatique, c'est 20 % et quelques... Mais je pense que c'est parce que les collèges ne s'étaient jamais posé la question: Pourquoi?

Et ça fait quatre ans qu'on leur pose la question: Pourquoi votre taux de diplomation est comme ça? Quelles sont les raisons? Et ça a amené les collèges à aller voir un peu plus en profondeur quelles étaient les raisons qui faisaient en sorte que les étudiants abandonnent, ne persévèrent pas dans le programme. Bon, si on enlève les 10 %, par exemple, qui vont abandonner un ou deux cours de formation générale, si on enlève aussi l'autre 10 % d'étudiants qui changent de programme et qui vont être diplômés dans d'autres programmes, reste qu'ils ont pu mettre le doigt sur certains problèmes particuliers.

Puis il y a des initiatives, de plus en plus, qui seront prises par les professeurs. Je pense, entre autres, à un moment donné, ils se sont rendu compte que le problème était en mathématiques. Et il y a eu des activités spéciales pour les étudiants. Même le prof a décidé qu'il y aurait un examen de reprise pour les étudiants qui échouaient. Alors, ils ont réussi à en récupérer comme ça, dès la première année. À d'autres endroits, c'est des activités. Ils ont identifié un cours cible, un cours qui était problématique et ils ont mis des énergies là-dessus, des activités particulières. Et ils ont réchappé 50 % des étudiants qui, normalement, auraient abandonné le programme. Alors, c'est ça. Je pense que de plus en plus ils sont conscients de ça et ils vont cibler davantage les interventions. Puis je pense, en tout cas, dans quelques années, que ça devrait s'améliorer.

La Présidente (Mme Blackburn): Donc, ma question était un petit peu plus tordue. C'était de dire: Si on met beaucoup de pression pour qu'ils diplôment davantage, ne risque-t-on pas de voir, demain matin, des diplômes de complaisance? Madame... Oui, bien, terminez.

M. Roy (Louis): Honnêtement, moi, je ne pense pas.

La Présidente (Mme Blackburn): Non?

M. Roy (Louis): Je me fie vraiment aux professeurs, et les professeurs nous le disent. On leur dit, nous aussi, qu'on est d'accord avec eux. Ils ne diminueront pas les standards pour ça. En tout cas, honnêtement, là.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Chené?

Mme Chené (Louise): Moi, je suis de l'avis de mon collègue aussi.

La Présidente (Mme Blackburn): Là, j'ai M. le député de Verdun et M. le député de Champlain. Ça se passe toujours de la même manière. On dirait que les questions sont un peu plus lentes au commencement, puis, à la fin, il en arrive des dizaines. Alors, Mme Chené, ensuite, c'est juste une petite incise...

M. Beaumier: C'était sur ça, mais, si...

M. Gautrin: Moi, c'était la même question aussi, mais enfin.

Mme Chené (Louise): Moi, j'allais dire que je suis du même avis que mon collègue parce que ce que le professeur fait, lorsqu'il veut contribuer à ce que l'élève réussisse mieux, il le fait dans son cours ou il le fait collectivement pour aider l'élève. Que l'élève, ensuite, abandonne un autre cours, souvent il n'est pas au courant. Donc, les standards, ce sont les professeurs qui les maintiennent parce que ce sont les professeurs qui font l'évaluation des apprentissages. Dans la mesure où c'est bien fait – puis on travaille à ce que ça le soit – il n'y a pas de danger que de dire aux gens: Vous êtes responsables d'améliorer vos taux de diplomation, fasse que ce soit à rabais. Ce qui va se faire, c'est beaucoup plus de l'aide, de l'encadrement.

La Présidente (Mme Blackburn): La normalisation des notes, ça n'arrive pas, ça?

Mme Chené (Louise): Ou ce n'est pas dans notre culture, ça.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député Verdun.

M. Gautrin: J'ai un peu de difficultés à comprendre les chiffres, là, entre... Ce n'est peut-être pas à vous que je devrais la poser, la question, c'est peut-être au ministère. Le ministère, lorsqu'il parle des taux de réussite moyens des cours, on arrive à un taux de réussite moyen des cours de 83 %. Et donc, c'est le taux de réussite moyen des cours. Même, ils veulent l'augmenter. Et je comprends que, bon, c'est un taux moyen, ça varie peut-être d'un programme à un autre, mais il y a une telle différence entre ce taux de réussite moyen des cours et les taux de diplomation que, moi, j'ai du mal à comprendre. Je ne sais pas si, vous, vous vous êtes posé cette question-là. Mais j'ai bien de la difficulté à comprendre que j'ai un taux de réussite des cours qui dépasse le 80 % puis j'ai un taux de diplomation qui est en dessous du 50 %. C'est ça que j'ai du mal à comprendre. Que ça ne doive pas être strictement identique, ça, je comprends ça, mais il y a quand même une certaine corrélation entre les deux.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, il y a deux, trois éléments qui peuvent intervenir là-dessus. Le premier, c'est qu'il faut noter que, mis à part les cours de première année, surtout première session et mis à part les cours de... où se fait un gros écrémage, à peu près n'importe quel programme, vous avez le tiers des étudiants qui quittent en première année. Alors...

M. Gautrin: Ça, c'est des gens qui sont mal orientés. Autrement dit, c'est des gens qui disaient: Tiens, j'ai envie d'étudier la physique parce que j'aime ça puis, quand ils se rendent compte qu'il y a un certain nombre de...

(12 heures)

M. L'écuyer (Jacques): D'exigences, bon, alors, là, ça peut changer. Alors, ça, c'est la première question. Mais, nous, ça nous a préoccupés pour une autre raison. C'est que ce qu'on constate souvent, c'est que vous arrivez en dernière année, puis vous avez 50 %, 60 % des étudiants qui sont encore présents et là on observe un taux de diplomation de 20 %, 25 %. Diable! Qu'est-ce qui se passe? Et on a eu beaucoup de difficultés à comprendre ça puis je ne suis pas sûr qu'on ait toutes les réponses encore. Je pense qu'il y a une partie des réponses qui viennent du fait que les étudiants sont encore présents au collège, mais ils ont probablement abandonné ou échappé quelques cours en cours de route puis ils vont au diplôme...

La Présidente (Mme Blackburn): Ils font un cours ou deux puis ils reprennent deux ans après.

M. L'Écuyer (Jacques): Mais sauf qu'ils ne se rendent jamais jusqu'au bout. Mettons qu'il vous en reste 60 %, si vous allongez le temps, vous allez vous rendre à 40 %, 45 %, mais pas beaucoup plus que ça. Alors, là, ça nous agace. On sait qu'il y a un phénomène de stages. Ce n'est pas tous les programmes où le D.E.C. est requis pour entrer, en sciences infirmières, en services de garde...

Mme Chené (Louise): En techniques de la santé.

M. L'Écuyer (Jacques): En santé, oui, on demande habituellement le D.E.C. pour entrer sur le marché du travail. Mais, quand vous ne demandez pas le D.E.C. et que l'étudiant... En informatique, ça, on l'a vu, le phénomène, parce qu'on s'apercevait qu'il y avait une déperdition en première année puis il avait une déperdition en troisième année.

M. Gautrin: C'est le marché du travail qui a absorbé.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est le marché du travail qui absorbe l'étudiant. L'étudiant s'en va en stage, l'employeur est satisfait, il lui reste deux, trois cours, peut-être un cours de mathématiques et puis, je ne sais pas, un cours de français ou de philosophie, et voilà.

Mme Chené (Louise): Des fois, mathématiques; des fois, sociologie.

M. L'Écuyer (Jacques): Alors, c'est ça. Il y a une partie qui vient de là. Jusqu'à quel point? Je ne le sais pas. Mais, en fait, cette année, nous allons, comme le disait Mme Chené, dans le cadre d'une formation générale, essayer de creuser cette question-là, de même qu'on va essayer... Parce que les stages, déjà, on a demandé aux collèges dans bien des cas de renforcer les exigences pour aller en stage. On ne veut pas non plus être trop sévère là-dessus.

La Présidente (Mme Blackburn): Je vous remercie. Mme Chené, ensuite le député de Champlain.

Mme Chené (Louise): Juste un petit éclairage. C'est que, lorsque le ministère dit que les taux de réussite sont de 83 %, par exemple, il ne considère pas les cohortes d'élèves, c'est-à-dire il dit: Cette année, en première session, le cours comptabilité I, à la grandeur des collèges, a été réussi à 83 %. Ça, ça veut dire qu'on peut avoir des élèves qui sont en train de le reprendre une troisième fois, etc. Tandis que, lorsqu'il parle des taux de diplomation, il travaille toujours avec une cohorte qui diminue au fur et à mesure et pour d'autres raisons que la réussite de ce cours, par exemple.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. M. le député de Champlain.

M. Beaumier: D'une part, juste pour le souligner, là, parce que tout le monde, je pense, on va être d'accord aussi, il y a toute une dimension sociale dans la question du cheminement des étudiants. C'est peut-être bizarre en public de parler de choses domestiques un peu dans ces choses-là, mais, chez nous, c'est un petit peu un laboratoire, les enfants. Vous savez, ils ont avancé, ils ont reculé, d'autres ont stagné, puis ça avance tout le temps pareil. Et, s'il fallait analyser tout ça, là, je vous dis que ça ne relève pas uniquement de l'institution comme telle non plus, puis c'est leurs collègues aussi.

Alors, on vit dans un monde social qui est assez le nôtre et puis il y a des questions de cheminement. Moi, je suis moins sévère – même si je serais exigeant quant au résultat – quant au cheminement comme tel parce que c'est notre société qui est faite comme ça. Je pense qu'on s'entend tous sur ça. Ça ne veut pas dire qu'il faut être... C'est le contraire d'être laxiste que d'être un peu attentif au développement de nos jeunes. Ils sont jeunes d'ailleurs quand ils arrivent au cégep. On «s'entend-tu», là, sur ça? Ils sont jeunes. C'est ça, je me posais cette question-ci. Et puis ils ne savent pas trop non plus quoi faire. C'est de ça qu'on parle. On parle bien de l'institution, mais là il faut parler – j'allais dire «des clients» – des usagers. Moi, je le vis tellement puis je le vois tellement que c'est un peu comme ça.


Préparation aux études collégiales

Moi, ma question, c'est: Dans les remarques que font les cégeps, est-ce qu'ils ont des remarques ou des messages qui passent et, si besoin est, est-ce qu'ils trouvent que nos jeunes qui sortent du secondaire sont suffisamment bien préparés en termes d'apprentissages, en termes d'efforts, en termes de capacité de travail, de façons de travailler? Est-ce que ça s'est soulevé, ces choses-là qui font que, oui, il y en a qui décrochent, puis il y en a qui retardent, puis il y en a qui reviennent? Est-ce que c'est soulevé par les cégeps ou non?

M. L'Écuyer (Jacques): Oui, c'est certainement une préoccupation, la préparation aux études collégiales. D'ailleurs, il y a un facteur sur lequel il n'y a pas de doute, c'est que la moyenne au secondaire est un facteur déterminant. J'ai ici – vous les avez vu – des courbes telles qu'on a pu les noter en sciences humaines.

Et, soit dit en passant – c'est là-dessus que je divergerais avec vous – ça n'est pas une indication, nécessairement, de la valeur d'un programme, parce que vous avez des institutions qui, je ne dirais pas «se spécialisent», mais qui acceptent... Même dans le privé, il y a une institution à Montréal qui accepte dans le privé des étudiants de seconde chance, comme ils disent, des gens qui récupèrent. Ils ont un taux de diplomation qui est bas, mais c'est un programme... Je veux dire, ils en récupèrent un certain nombre là-dedans. Évidemment, il faut payer; c'est probablement les institutions les plus dispendieuses.

Mais, ceci étant dit, je pense que c'est clair qu'on se pose la question, et non seulement qu'on se pose la question, je pense que les états généraux l'ont bien posée, cette question-là. Il y a une transition qui est difficile. L'étudiant du secondaire, il a une forme d'encadrement qui est particulière, il n'a pas tellement de latitude. Il arrive au collège, et là, tout à coup, on lui demande de gérer son temps, il a des trous dans son horaire. Diable! Il n'a jamais eu ça au secondaire, des trous dans l'horaire comme ça. Il a des trous dans l'horaire. Il a toutes sortes de comportements qu'il a hérités du secondaire et qu'il doit changer.

Par exemple, on parle beaucoup de la disponibilité des profs. On demande aux étudiants: Vos profs «sont-u» disponibles? Ah! ils nous disent: Oui, il n'y a pas de problème. D'ailleurs, il y a quelques personnes au comité qui ont dit: Pourtant, ils ne sont pas si disponibles que ça, les profs, à l'occasion. Alors, ils sont d'un avis... Et on s'est aperçu d'une chose, c'est que c'est vrai que les profs... En tout cas, les étudiants ne s'en plaignent pas, mais ils ne vont pas voir les profs non plus. Alors, on a essayé de comprendre un peu pourquoi. L'étudiant, au secondaire, quand un professeur lui demande de venir le voir après la classe, c'est parce qu'il y a un problème, hein.

Une voix: Une punition.

Une voix: C'est une punition.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est une punition, habituellement, c'est quasiment une retenue ou quelque chose comme ça. Il arrive au collège, on lui dit: Écoute, si tu as des problèmes, va voir ton prof; si tu ne comprends pas, va voir le prof. Pour lui, tu sais, aller voir le prof... C'est des réflexes aussi terre à terre que ça.

Mme Chené (Louise): Ils n'ont souvent pas de travail à la maison, au secondaire.

M. L'Écuyer (Jacques): Au secondaire, même chose. Alors, là, ils ont toute une dynamique de travail à faire qui est très différente et puis qui explique que, souvent, la première session est catastrophique pour plusieurs d'entre eux, et particulièrement, je vous dirais, quand les sollicitations externes... Dans les courbes que je vous montrais tout à l'heure, si vous regardez les collèges qui sont en bas de la courbe, c'est souvent les collèges des milieux urbains où l'étudiant va là, mais il est avec des chums et puis, au coin de la rue, il y a toutes sortes d'autres choses qui sont au moins aussi attrayantes que le collège lui-même. Alors, tu sais, il y a cette dimension-là.

Il y a une éducation à faire, et je suis un peu d'accord avec vous, j'ai eu l'occasion de parler avec un certain nombre de personnes là-dessus qui me disaient un peu la même chose. Il y a un peu une éducation à la vie qui se fait, un peu à ses propres responsabilités, qu'il n'y avait pas au secondaire. Alors, ça rend la transition un peu difficile, un peu laborieuse pour un certain nombre, mais ça explique peut-être qu'ils prennent aussi plus de temps à l'occasion. D'ailleurs, justement, en terminant, les études faites par le Bureau de la statistique du Québec montraient que l'étudiant au collège travaille plus qu'à l'université à l'extérieur. C'est déjà une indication que les priorités ne sont pas tout à fait du même...

La Présidente (Mme Blackburn): Parce que, au collège, il est dans son milieu et, à l'université, il est sorti de son milieu. M. le député de D'Arcy-McGee.


Frais spéciaux imposés aux élèves ayant échoué plus d'un cours

M. Bergman: Sur le taux de réussite des étudiants, quel effet a la pénalité sur les étudiants, le supplément qu'ils doivent payer s'ils échouent deux ou plus de cours pendant l'année? Quel effet est-ce que cette...

M. L'Écuyer (Jacques): On n'est pas capable...

La Présidente (Mme Blackburn): La taxe à l'échec, pour l'appeler comme chez les étudiants.

Une voix: On ne le sait pas.

La Présidente (Mme Blackburn): Non?

M. L'Écuyer (Jacques): On ne le sait pas, mais je...

La Présidente (Mme Blackburn): Ça ne fait pas assez longtemps.

Une voix: Trop récent.

M. Beaumier: Moi, je... Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui.

M. Beaumier: J'ai une petite information qui vaut ce qu'elle vaut, mais, moi, dans la région, on a eu l'occasion dernièrement, pour d'autres raisons, de rencontrer deux des responsables privés et publics de niveau cégep. Et ce qu'ils disaient – ça a valeur de ce qu'ils disent, mais est-ce que ça a valeur générale aussi? – c'est que ça a eu un effet d'effort, un effet de plus grande attention, et ils ont dit: C'est une – je vais vous dire tel quel ce que c'est, sans trop les compromettre – des bonnes mesures qui ont été faites dernièrement, ça a responsabilisé davantage. Moi, c'est très partiel comme réponse, mais c'est ce que je sens.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est l'impression qu'on peut avoir, parce que, dans le fond, tout ce qui contribue à responsabiliser l'étudiant quand il arrive au collège...

M. Gautrin: Ce n'est pas ce que disent les mouvements étudiants. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, mais...

M. L'Écuyer (Jacques): Ah, non, non, non! Ça, c'est clair. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Mais c'est un peu ce qu'on entend sur...

M. Beaumier: Mais c'est ce que constatent les conseillers, en tout cas – ça, je peux vous dire ça – aux prêts et bourses.

(12 h 10)

M. L'Écuyer (Jacques): J'irais plus loin, si vous me permettez, là-dessus. Quand on rencontre les étudiants, les étudiants eux-mêmes sont très critiques. Et je me rappelle d'une rencontre, dans un collège de la région de Montréal, où les étudiants nous disaient: Vous savez, ce n'est pas très drôle quand on a, dans une classe – parce que souvent les professeurs vont donner des travaux à préparer, soit un laboratoire soit même un groupe de discussion, en sciences humaines, c'est une des méthodes qui est utilisée assez fréquemment – plus que la moitié des étudiants qui n'ont pas fait les travaux préparatoires. Alors, on arrive, on est supposé être en groupe de discussion, mais on a plus que la moitié de la classe qui est complètement désintéressée. Alors, je pense que tout ce qu'on peut faire pour responsabiliser l'étudiant, c'est une mesure qui est susceptible... mais on verra les résultats.

Une voix: Oui, on verra.


Programmes évalués par la CEEC

La Présidente (Mme Blackburn): Moi, j'avais deux questions. La première, vous avez évalué trois programmes techniques et un général: Sur quelle base avez-vous choisi les programmes que vous avez évalués? La seconde, vous nous présentez les activités pour l'année 1997-1998; comme vous avez seulement quatre programmes d'évalués, ce qui est beaucoup et peu à la fois, c'est quoi, votre plan d'action pour les trois, quatre prochaines années? J'imagine que vous ne visez pas ça juste à six mois d'avance.

M. L'Écuyer (Jacques): Bon, premièrement, effectivement, on a quatre programmes d'évalués, et nous les avons choisis parce que c'étaient des programmes qui étaient dispensés largement. Nous voulions rejoindre le plus grand nombre de collèges possible rapidement, alors nous avons choisi des programmes qui, pour différentes raisons, nous paraissaient... On a commencé par des programmes techniques. On pensait que ces programmes-là ayant des objectifs mieux ciblés, ce serait probablement plus facile. Et je vous dirais que les gens de techniques ont une meilleure appropriation, habituellement, de la partie spécifique de leur programme.

Alors, on avait choisi ces deux-là. Ça nous a permis de toucher, à toutes fins pratiques, je pense, mis à part un cégep, tous les cégeps immédiatement la première année. Sciences humaines, évidemment, ça touche beaucoup de monde, formation générale, bien, tous ceux qui offrent le D.E.C. techniques administratives, tous les... Alors, finalement, notre idée, c'était vraiment de développer une culture de l'évaluation de programmes à l'intérieur de chacun des collèges, des habitudes, des réflexes d'évaluation.

Bon, là, nous commençons – nous sommes avec les petits établissements... en tout cas, on en a, mettons, 25, ou autour de 25, que nous ferons – incessamment, dans les semaines qui viennent, les visites en formation générale, et ça, ça va nous mener, juste les visites... Parce que, écoutez, les visites, c'est très difficile d'en faire plus qu'une par semaine en moyenne.

La Présidente (Mme Blackburn): Une par semaine par commissaire.

M. L'Écuyer (Jacques): Par commissaire. C'est parce que préparer la visite, c'est lire le rapport d'autoévaluation, puis ces rapports-là, il faut les voir, c'est des rapports très considérables et les collèges ont mis de gros efforts à préparer ça. Pour nous, bien, je pense que c'est tout simplement leur rendre justice que de consacrer autant d'efforts à préparer notre visite. Alors, ça veut dire que préparer la visite et faire la visite, c'est trois à quatre jours, puis, après ça, il faut faire le rapport, puis nos... Alors, pour nous...

M. Gautrin: Puis, quand vous visitez, vous visitez seul? Excusez-moi...

M. L'Écuyer (Jacques): Avec des experts.

Une voix: Trois.

M. Gautrin: Avec des experts, mais jamais...

M. L'Écuyer (Jacques): Avec des experts à chaque fois.

M. Gautrin: ...la trilogie ensemble.

M. L'Écuyer (Jacques): Non, jamais. On se sépare les visites comme ça. On s'entend, évidemment, sur les critères et on a un comité consultatif. Nos rapports d'évaluation... avant, le rapport préliminaire, on le soumet d'abord à notre comité consultatif et, ensuite de ça, on le revoit en commission, on l'envoie au collège pour commentaires, puis... Alors, il y a une bonne équité, puis je pense qu'en général les collèges reconnaissent que les rapports sont assez justes.

Mme Chené (Louise): Puis les membres des comités consultatifs, il y en a toujours un sur l'équipe de visite.

M. Gautrin: Vous n'êtes pas seuls, il y a...

M. L'Écuyer (Jacques): Non, non, il y a toujours... Alors, ça, nous les avons choisis vraiment dans la perspective de toucher des secteurs diversifiés. On a donc: administration, sciences humaines, services de garde, c'est techniques humaines... Bon, en tout cas, on a essayé de trouver ça comme ça. Ensuite de ça, évidemment, on doit tenir compte des modifications en cours à certains programmes. On aurait bien aimé toucher sciences de la nature, mais sciences de la nature, actuellement, il est en voie d'implantation et de restructuration à l'intérieur des collèges, on ne veut pas faire ça à ce moment-là.

Bon, notre programme pour les prochaines années. On a dit que formation générale, ça nous amène au moins jusqu'à la moitié de l'année prochaine parce que, au nombre de visites qu'on a à faire, ça va probablement nous amener, à toutes fins pratiques, jusqu'à l'automne de l'an prochain.

La Présidente (Mme Blackburn): Automne 1999.

M. L'Écuyer (Jacques): Automne 1999. Nous...

M. Beaumier: Je veux juste interroger, c'est pour bien comprendre. Quand vous parlez de formation générale, ça vise quoi exactement? Parce que je me souviens qu'il y avait un débat sur la question de la formation fondamentale au niveau cégep...

M. L'Écuyer (Jacques): Non...

La Présidente (Mme Blackburn): Non, non, ce n'est pas...

M. Beaumier: Ce n'est pas du tout la même chose.

M. L'Écuyer (Jacques): Non, formation générale, c'est les cours...

M. Beaumier: Qui mènent à l'université, préuniversitaires.

M. L'Écuyer (Jacques): Non, non. Non, non, non, c'est la composante qui est commune à tous les programmes...

La Présidente (Mme Blackburn): O.K. Ce qui est commun.

M. Beaumier: Français, philosophie...

M. L'Écuyer (Jacques): Français, philo, anglais...

M. Beaumier: O.K.

La Présidente (Mme Blackburn): Cours communs obligatoires.

M. Beaumier: Je vais mieux comprendre.

M. L'Écuyer (Jacques): ...et complémentaire, éducation physique.

M. Beaumier: Je vais mieux comprendre. Merci.

M. L'Écuyer (Jacques): Ça, ça va nous mener, dans tous les collèges, jusque vers le milieu ou l'automne de l'an prochain. Après ça, nous avons dit aux collèges: Vous évaluerez un programme de votre choix et vous commencerez à faire l'évaluation dès l'automne prochain. Parce que, évidemment, on s'en va...

M. Gautrin: Chaque collège va pouvoir choisir le programme qui va...

M. L'Écuyer (Jacques): Ils pourront choisir le programme de leur choix. Notre intention à plus long terme, c'est... Écoutez, il y a beaucoup de programmes qui sont offerts par un ou deux ou trois collèges, alors aller faire l'évaluation du programme, mettons de génie maritime, de techniques de génie maritime qui est offert uniquement à Rimouski... Dans le fond, ce qu'on aimerait dire aux collèges, c'est: Faites l'évaluation, on ira voir, si vous voulez, ou on fera un échantillonnage dans ce sens-là.

Alors, on est en train, actuellement, de dire aux collèges: Vous avez une responsabilité. Si on veut faire vraiment une évaluation, on ne quittera pas le domaine de l'évaluation, mais on veut que les collèges – et ça, c'est inclus dans leur politique d'évaluation de programmes, qu'ils s'engagent à évaluer tous leurs programmes – donc, sur une base régulière, de façon approfondie, évaluent tous et chacun de leurs programmes, et nous allons aller voir, dans le fond, s'ils s'acquittent bien de cette responsabilité-là. C'est dans ce sens-là qu'on passera en revue tous les programmes.

La Présidente (Mme Blackburn): Mais votre échéancier pour passer tous les programmes, c'est quoi?

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, c'est-à-dire que...

La Présidente (Mme Blackburn): Quand vous essayez de voir un peu l'avenir, là.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, nous, pour le moment, nous n'envisageons pas de faire nous-mêmes l'évaluation de tous les programmes. Ce que nous voulons faire, c'est que les collèges fassent l'évaluation de tous les programmes qu'ils offrent sur une période et, nous, on va continuer de faire au moins les gros programmes. Mais est-ce qu'on voudra aller évaluer sur tous et chacun? Jusqu'à maintenant, on ne s'est pas donné ça comme... Peut-être que, éventuellement, mais disons que, à court terme, on n'envisage pas ça.


Évaluation des collèges non subventionnés

La Présidente (Mme Blackburn): J'aurais une dernière question, ensuite, nous, comme on doit libérer la salle parce qu'il y a un caucus ici à 12 h 30... J'ai une dernière question. Vous avez, dans votre mandat, la responsabilité d'évaluer les collèges non subventionnés. Il y a actuellement, au Québec, un débat autour particulièrement de l'aide financière aux études par rapport à ces collèges-là et il y a une certaine confusion. La confusion vient de deux faits: le fait que c'est le ministère de l'Éducation qui accorde le permis. Alors, les gens disent: Le ministère de l'Éducation accorde le permis, donc c'est bon. Et, en plus, vous y ajoutez l'évaluation faite par la Commission d'évaluation. Je sais d'où ça émane, je sais pourquoi on est allé dans cette direction-là. Mais, en même temps, ça envoie un message qui n'est pas conforme à la réalité, souvent, de ces programmes-là et de leur valeur.

M. L'Écuyer (Jacques): En effet.

La Présidente (Mme Blackburn): Qu'est-ce que vous en pensez? Moi, je ne suis pas très à l'aise, je n'ai jamais été à l'aise avec ça.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, je pense que le problème, vous savez, il y a une mésentente parce que, fondamentalement, on s'imagine toujours qu'une commission comme la Commission de l'enseignement privé et, éventuellement, le ministre ou la ministre, quand ils approuvent un collège, tout est bon.

La Présidente (Mme Blackburn): C'est ça.

M. L'Écuyer (Jacques): En réalité, la ministre, ses pouvoirs sont limités. Elle ne peut pas refuser un collège, en tout cas, qui se conforme aux prescriptions du règlement.

La Présidente (Mme Blackburn): De base.

M. L'Écuyer (Jacques): Et voilà. Alors, dans ce contexte-là, nous, quand on va voir là, je peux vous dire qu'il y en a qui sont excellents, mais il y en a que c'est pourri.

La Présidente (Mme Blackburn): Est-ce que c'est connu?

M. L'Écuyer (Jacques): Bien, ça va être connu à mesure qu'on va sortir nos évaluations.

La Présidente (Mme Blackburn): Parce que c'était ça, un peu, l'intérêt qu'on avait de...

M. L'Écuyer (Jacques): Bon, vous en avez, par exemple, en informatique, nous avons pointé un établissement ici, à Québec, comme offrant un programme d'un niveau trop, trop faible. Bon, il y a apporté les corrections à notre satisfaction, on a reconnu qu'il était... On est retourné récemment en techniques administratives et, effectivement, ça a l'air de bien fonctionner.

Une voix: CDI?

(12 h 20)

M. L'Écuyer (Jacques): Non, ce n'était pas CDI, c'était l'Institut d'informatique de Québec. CDI, il y avait plusieurs problèmes, mais c'était plus des problèmes qui étaient reliés à l'évaluation vraiment. Mais c'est un cas très particulier, CDI. C'est une espèce de collège qui fait de l'autoenseignement. Ils utilisent des techniques qui se rapprochent beaucoup, disons, de la formation à distance mais encadrée sur place. Ils ont des documents et des choses comme ça, mais c'est l'étudiant qui chemine à son rythme. Alors, il faut être un petit peu... Mais il y en a d'autres ici, à Québec, et vous allez voir à mesure que ces choses-là vont sortir. En tout cas, vous pourrez regarder. Même, il y a des collèges privés subventionnés qui sont assez moches.

Alors, ça, je comprends très bien. Nous, on va les sortir. Je crois qu'il y a une grosse discussion, et vous avez raison de poser la question parce que, dans un sens, un bon établissement privé non subventionné – et il y en a de très bons, il y en a qui offrent des enseignements qui n'ont pas leur équivalent au niveau des cégeps – c'est surtout au niveau du format d'enseignement et du type d'enseignement qu'on offre. Prenez un institut comme Delta à Montréal qui offre de l'informatique, ou autres, c'est des gens qui accueillent par exemple trois cohortes par année. Si l'enseignement est de bonne qualité, ils vont offrir un programme sur une base intensive. Évidemment, dans les collèges actuellement, offrir un programme sur une base intensive, il n'y a pas beaucoup de collèges qui sont prêts à faire ça 12 mois par année. Eux autres, ils sont ouverts 12 mois par année.

M. Gaulin: Sans formation générale, quand même.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est ça. Je veux dire que c'est des A.E.C. qu'ils offrent. Quand je dis qu'ils offrent... Alors, vous avez des gens qui sont sur l'assurance-chômage, l'assurance-emploi maintenant, dit-on, ils arrivent, ils ont 35 ans, ils veulent se placer assez vite. On leur pose la question, nous, aux étudiants: Pourquoi vous choisissez de venir ici? La majorité vont nous répondre: Écoutez, je suis prêt à payer 12 000 $, mais je veux avoir mon diplôme au bout de l'année. Je vais perdre une année, tandis que, si je vais dans un collège, dans la majorité des cas, c'est deux ans quand ce n'est pas trois. Si le collège n'a pas fait de réaménagement dans ses curriculums, c'est trois ans. Alors, là, les collèges ont maintenant la permission d'offrir des cours intensifs en chargeant l'argent nécessaire, mais jusqu'à maintenant ils ne le faisaient pas.

Alors, là, je ne sais pas. Je pense que c'est une très bonne discussion. Il faudra être très attentif à ça parce qu'il y a un type de clientèle qui veut ça. Ce n'est pas une clientèle de cégep, de jeunes, et d'ailleurs habituellement les règles ne permettent pas d'accueillir des plus jeunes. C'est souvent une clientèle autour d'une trentaine d'années qui veut se replacer rapidement sur le milieu du travail. N'oublions pas aussi qu'ils ont habituellement, ces boîtes-là, les bonnes boîtes, un service de placement assez bien rodé avec de très forts contacts. Ils placent leurs étudiants. Mais il y en a des beaux et des moins beaux.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, et l'inquiétude qui est toujours la nôtre, mais celle de la ministre aussi, c'est qu'on envoie auprès des jeunes une image qui n'est pas conforme à la réalité, ce n'est pas un diplôme d'État.

M. L'Écuyer (Jacques): En effet.

La Présidente (Mme Blackburn): Ce n'est pas un diplôme d'État. C'est un diplôme de formation extrêmement spécifique qui peut être rapidement dépassé. Alors que, sur le fait qu'on les évalue et qu'ils ont un permis du ministère, de la Commission de l'enseignement privé, c'est comme si c'était fatalement bon.

M. L'Écuyer (Jacques): Vous avez parfaitement raison.

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, je reste là-dessus.

M. L'Écuyer (Jacques): Non, c'est tout à fait...

La Présidente (Mme Blackburn): Mais, si à un moment donné il fallait que ce soit là, je vais envoyer ça, je ne sais pas, moi, à Industrie et Commerce ou – comment ça s'appelle? – Institutions financières. Je sais qu'ils donnent les permis d'opérer des entreprises privées.

M. Roy (Louis): L'Inspecteur général des institutions financières.

La Présidente (Mme Blackburn): L'Inspecteur général des institutions financières.

M. Gaulin: Mais, avec l'ouverture qui avait été faite, sous M. Ryan, de couvrir les frais de scolarité, alors il y a un nouveau projet de règlement, c'est ce qui a fait d'ailleurs...

La Présidente (Mme Blackburn): Une inflation terrible.

M. Gaulin: ...une inflation du montant des frais.

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, il y a de bonnes boîtes et il y en a qui ne sont pas de bonnes boîtes, mais je pense qu'il va falloir que les cégeps... Parce qu'il y a un type de clientèle qui ne retournera pas dans le cégep pour prendre... Et ça, qu'on aime ça ou pas.

La Présidente (Mme Blackburn): Des formations plus longues.

M. Gaulin: Il y en a qui ont une vieille tradition, Aviron à Québec, c'est très ancien.

M. L'Écuyer (Jacques): C'est une vieille tradition. Ça date du temps de la guerre.

M. Gaulin: Mais est-ce que je dois comprendre... Puisque j'avais demandé d'intervenir là-dessus, très rapidement.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui.

M. Gaulin: Est-ce que je dois comprendre, à la page 20, que ceux qui n'ont pas répondu... C'est pour quelle raison, dans les non-subventionnés?

M. L'Écuyer (Jacques): À page 20...

La Présidente (Mme Blackburn): Du rapport annuel.

M. Gaulin: Dans votre rapport: politiques institutionnelles d'évaluation d'apprentissages, politiques évaluées, puis c'est des politiques attendues non reçues.

M. L'Écuyer (Jacques): Je vous dirai que, habituellement, de façon générale, c'est des établissements nouveaux parce que, vous savez, ça pousse comme des champignons puis ça s'éteint comme des champignons, ça. Les bons restent là longtemps. Vous avez parlé des choses comme Aviron, Delta et autres, MultiHexa et ICARI. ICARI ne nous l'a pas soumis, mais ça, c'est pour d'autres raisons. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Mais c'est que l'autre problème que ça posait, c'est un problème d'équité. On a des collèges subventionnés, et là les collèges non subventionnés l'étaient, dans les faits, davantage que ceux subventionnés, à cause des droits de scolarité. Aïe! Moi, j'ai vu des choses là...

M. L'Écuyer (Jacques): Écoutez, ça, les aspects politiques, je pense que vous avez tout à fait raison de les poser. C'est donc des questions tout à fait pertinentes. Notre seule préoccupation, nous, évidemment, c'est d'évaluer, et puis, par ailleurs, c'est sûr qu'on va dire à la ministre: Écoutez, si ces gens-là finissent par disparaître, il faudra que les cégeps prennent la relève d'une façon ou d'une autre.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président, Mme Chené, M. Roy et M. Roberge, les professionnels qui vous accompagnent, merci de votre participation aux travaux de cette commission. La commission a accompli son mandat. Donc, elle ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 27)


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