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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Thursday, September 11, 1997 - Vol. 35 N° 41

Consultation générale sur l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. Jean-Guy Paré, président
Mme Pauline Marois
M. François Ouimet
M. Léandre Dion
Mme Hélène Robert
M. Lawrence S. Bergman
*M. Jean-Pierre Blais, AEQ
*M. André Rivest, idem
*Mme Jocelyne St-Cyr, APCQ
*M. Jacques Goulet, idem
* M. Jean-Paul Jacques, Comité pour l'avenir des franco-protestants
de la commission scolaire Greater Québec
*M. Stéphane Gariépy, idem
*M. Serge Leclerc, idem
*Mme Georgina Rilling, idem
*Mme Judy Fay, ACSFPQ
*Mme Suzanne Berney, idem
*M. Jocelyn Aubut, idem
*M. Rémy Bouchard, idem
*M. Joe Rabinovitch, CJC, région du Québec
*M. David Sultan, idem
*M. Jack Jedwab, idem
* M. Gilles Gagnon, Association des comités de parents Québec–Chaudière-Appalaches
*Mme Anne Bureau, idem
* M. Pierre Bolduc, Comité de parents de la commission scolaire de la Chaudière-Etchemin
*Mme Édith Godin, idem
*Mme Dominique Morin, idem
* Mme Diane Guilbault, Le comité de stratégie des parents de l'École
d'éducation internationale de Saint-Hubert
*M. Gilles R. Pelletier, idem
*Mme Hanh Tran, idem
*Mme Francine Lepage, idem
*M. David Lapierre, idem
* M. Gilles Boudrias, Comité de parents de la commission scolaire catholique de Sherbrooke
*M. Rémy Bergeron, idem
*Mme Claire Berthold, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures sept minutes)

Le Président (M. Paré): Je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Je rappelle le mandat. Ce mandat de la commission est de procéder à une consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, il y a des remplacements, M. le Président. M. Dion (Saint-Hyacinthe) remplace Mme Caron (Terrebonne).


Auditions

Le Président (M. Paré): Merci, M. le secrétaire. Maintenant, je convierais nos prochains invités, nos premiers invités de ce matin, l'Assemblée des évêques du Québec, représentée par M. Jean-Pierre Blais, président du Comité épiscopal de l'éducation. M. Blais, est-ce que vous pouvez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?


Assemblée des évêques du Québec (AEQ)

M. Blais (Jean-Pierre): Oui. Alors, vous avez Mgr André Rivest, ici, du diocèse de Montréal, qui m'accompagne et puis, Mme Matilde Francoeur, qui est la secrétaire adjointe au Comité épiscopal de l'éducation.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. Je vous rappelle que le temps alloué à la présentation est de 30 minutes: 10 minutes de présentation par la personne et 20 minutes d'échange avec les parlementaires. On vous écoute.

Une voix: ...

Le Président (M. Paré): Ah! Ils ont une heure. Donc, c'est une heure pour vous.

M. Blais (Jean-Pierre): Merci bien.

Le Président (M. Paré): Je m'excuse. Vingt minutes, donc, de présentation et 40 minutes d'échange avec les parlementaires.

M. Blais (Jean-Pierre): Merci. Alors, je tiens à vous remercier, M. le Président, et à remercier également Mme la ministre de son invitation à l'Assemblée des évêques du Québec de venir apporter sa part de contribution à cette grande réflexion qu'elle a lancée sur la question du partage des responsabilités au niveau des commissions scolaires et des écoles, dans le contexte où nous sommes toujours vus comme étant un partenaire dans cette réalité de l'éducation.

Ce que nous signalons, dans un premier temps, c'est que nous sommes favorables au principe de transfert des responsabilités des commissions scolaires vers les écoles, puisque, dans cette recherche où nous voulons davantage axer sur la réussite des élèves, dans notre mémoire, aux états généraux, déjà, nous avions souligné cette particularité-là qui était très importante dans le contexte scolaire actuel, qu'il devait y avoir cette recherche avant tout.

Concernant la répartition des responsabilités entre les acteurs en éducation, ce que nous voulons faire remarquer, c'est que les responsabilités, on pourrait dire, peuvent se modifier dans l'exercice même, dans leur application, selon les contextes. Même si on a, au niveau légal, des points d'appui, le contexte peut rendre plus difficile ou plus favorable l'exercice des responsabilités, de telle sorte que l'ensemble de notre lecture est marqué par ce regard-là.

(9 h 10)

Quelles seront, dans les faits, les possibilités d'exercer le partage des responsabilités tel que l'esprit de l'avant-projet de loi le recherche? Et c'est dans ce sens que nous avons regardé l'ensemble du document et que nous allons faire quelques interventions.

Le premier élément sur lequel nous voulons porter l'attention de la ministre, c'est sur les articles 72, 44 et 49 de l'avant-projet de loi, où notre préoccupation à nous, c'est de s'assurer que les parents aient des responsabilités réelles. Quand on parle des articles 72, 44 et 49, ce sont ceux de l'avant-projet de loi introduits par l'article 11, pour se situer comme il faut au niveau de l'intervention. Et, plus particulièrement, à l'article 49, on mentionne le fait que les directeurs d'école pourront exercer les fonctions et pouvoirs du conseil d'établissement et on ne donne pas d'encadrement, à savoir de temps limite, de particularités. Nous, selon notre expérience, nous réalisons que, lorsque des personnes reçoivent ainsi ou prennent des éléments d'autorité, s'il n'y a pas des encadrements assez précis, définis, c'est qu'à un moment donné ça devient quasiment comme des droits acquis ou des manières de faire habituelles et c'est bien difficile de revenir en arrière pour procéder autrement. Alors, ce sur quoi nous voulons alerter, bien simplement, c'est sur cet aspect-là de l'article de loi.

Nous proposons qu'il devrait y avoir un encadrement un peu plus précis pour limiter dans le temps la délégation et la suppléance, sinon, il nous semble qu'il y a risque qu'il n'y ait pas de recherche, dans les cas où ça va se produire, pour trouver des parents au niveau du conseil d'établissement et puis que ça puisse se prolonger d'une façon indue, de telle sorte que ce que l'avant-projet de loi veut attribuer aux parents comme davantage d'autonomie ou de responsabilités, ce ne soit pas possible dans les faits.

Également, concernant cet élément-là, nous voulons faire remarquer que le partenariat et la concertation, c'est bien sûr, ça conduit au fait de se responsabiliser dans son milieu. Et l'ensemble de l'avant-projet de loi insiste sur cette dimension d'autonomie et de participation de l'ensemble des partenaires. Dans ce contexte-là, pour plusieurs parents qui sont moins habitués à arriver au niveau de l'école puis à exercer une fonction de gestion ou, en tout cas, une fonction de travail avec d'autres collaborateurs et collaboratrices en éducation, s'il n'y a pas une certaine préoccupation de formation pour les aider à saisir et à comprendre leur rôle puis à saisir aussi et à comprendre les mécanismes de l'école, à ce moment-là, la participation peut être difficilement réelle. Des parents risquent d'être davantage à la remorque d'autres personnes qui sont plus au fait des questions. Alors, c'est sur cet élément-là que nous voulions attirer davantage l'attention concernant ces aspects de l'avant-projet de loi.

Le deuxième aspect sur lequel nous voulons attirer votre attention, c'est concernant le responsable du soutien à la gestion de la confessionnalité mentionné aux articles 262 et 263 de la Loi sur l'instruction publique. Notre préoccupation à ce niveau-ci, c'est de s'assurer que l'esprit de la loi soit respecté dans son application. À l'heure actuelle, dans le contexte scolaire, qui est modifié par rapport au contexte où cet élément de l'article de loi a été apporté, il nous semble que la personne qui peut répondre davantage à cet esprit de la loi, de par sa fonction, ne serait pas un cadre de la commission scolaire, mais qu'un professionnel non enseignant pourrait remplir plus adéquatement, de par le statut de cette personne en relation probablement avec le conseil d'établissement, en relation avec les directeurs et les directrices d'école, avec les enseignants et les enseignantes, avec les parents, avec l'ensemble de ses partenaires qu'on appelle du milieu de l'éducation... Ce rôle pourra être rempli d'une façon plus appropriée par un professionnel non enseignant.

C'est dans ce sens-là que nous préconisons qu'il puisse y avoir un amendement à cet article de la loi de l'instruction publique et que cette personne-là puisse être également entourée d'un groupe de soutien. Dans la perspective d'autonomie, la perspective d'implication du milieu, la perspective des partenaires qui doivent appuyer ensemble une forme de communauté éducative recherchée, comme la ministre le signalait dans son discours d'introduction à cette commission parlementaire, il nous semble important qu'il y ait un groupe de soutien qui puisse entourer cette personne responsable du soutien à la gestion de la confessionnalité au niveau de la commission scolaire. Et c'est une façon qui serait beaucoup plus facile de rendre applicables les dispositions de la loi. De telle sorte que ce que nous nous recherchons, ce n'est pas de tout requestionner cette réalité-là, mais c'est simplement de trouver le meilleur mécanisme ou la personne qui aurait la possibilité de remplir le plus adéquatement cette responsabilité.

Également, un autre point que nous voulons souligner, c'est concernant les articles 5, 6 et 37 de l'avant-projet de loi. C'est que les articles 5 et 6, on les modifie en ajoutant: Toute personne autre que celles inscrites à la formation professionnelle aura la possibilité de l'enseignement moral et religieux catholique. Nous, ici, à cet élément-là, nous le soulignons, notre préoccupation, c'est de rechercher la question de l'accès à l'enseignement moral et religieux catholique: Qui y a accès? Alors, dans les ajouts proposés de l'avant-projet de loi aux articles 5 et 6, de la manière dont ils sont formulés, c'est que les personnes, les jeunes en formation professionnelle n'auraient pas la possibilité d'un choix libre. Alors, nous, nous questionnons cette disposition.

Et à l'article 37, c'est que, dans les dérogations au régime pédagogique, ça ne nous semble pas clair, la question de l'accès à l'enseignement religieux. Même s'il y a un autre article concernant les dispositions du règlement du Comité catholique un peu plus loin actuellement dans le projet de loi, il nous semble que ce serait plus clair s'il y avait l'ajout à cet article-là: sous réserve des dispositions du Comité catholique. Ça amènerait, en tout cas, un élément de clarification concernant cette particularité-là.

Alors, nous, le biais, comme je disais tout à l'heure, c'est la question du respect pour l'accès à l'enseignement moral et religieux catholique des jeunes, qui semble être vue autrement à travers, en tout cas, les dispositions 5 et 6 suggérées. Et au niveau 37, ce n'est pas dit comme tel mais, par contre, on dit que ça serait peut-être plus précis s'il y avait cet ajout: sous réserve des dispositions du Comité catholique, dans les dérogations concernant le régime pédagogique.

Nous voulons simplement signaler – parce que ça ne fait pas partie directement de l'avant-projet de loi – la question de l'exemption. Dans le contexte d'une plus grande autonomie des enseignants et des enseignantes, d'une plus grande autonomie de la réalité de l'école, nous nous questionnons sur l'aménagement de l'exemption de l'enseignement religieux. Et, dans ce contexte-là, c'est une simple question que nous aimerions voir adresser à l'un ou l'autre des partenaires en éducation dont ce serait davantage le mandat de se pencher sur cette question-là et de voir ivéritablement comment on pourrait aménager une plus grande forme d'autonomie. Et est-ce que véritablement le droit à l'exemption est la meilleure formule à l'heure actuelle ou s'il y a possibilité d'élargir à la réalité d'un choix libre, si c'est réaliste dans ce contexte-là et si c'est possible? Mais nous n'avons pas réfléchi ou regardé la question plus que cela, nous l'apportons bien simplement.

(9 h 20)

Concernant, par la suite, les demandes de retrait ou de révision du statut confessionnel de l'école, notre préoccupation c'est de s'assurer, on pourrait dire, d'une plus grande précision. Les articles mentionnés dans notre document, 26 et 31, faisaient davantage référence au projet de loi n° 109. Alors, je ferais la correction davantage pour l'article. C'est l'article 69 introduit par l'article 11 de l'avant-projet de loi qui est concerné ici. L'article de loi prévoit une consultation du conseil d'établissement pour la reconnaissance confessionnelle de l'école. Il nous semble que cette consultation pourrait être également faite pour le retrait du statut confessionnel de l'école. S'il y a une consultation pour la reconnaissance, il semble qu'on pourrait également ajouter le retrait de la question du statut confessionnel de l'école. Alors, c'est cet élément-là, cette disposition-là que nous voulons bien simplement apporter à votre attention.

Les autres éléments, c'était tout simplement pour compléter, on pourrait dire, l'ensemble de notre situation où nous en sommes également, à l'Assemblée des évêques du Québec, ou en rappel des garanties réelles demandées. Et sur cette particularité-là, ce que nous voulons rappeler bien simplement – et c'est le dernier item de la page 6, avant le préambule à la loi que je souligne davantage d'une façon particulière – c'est que nous voulons rappeler qu'auprès de nos communautés catholiques, il y a unanimité pour le droit à l'école confessionnelle, sauf qu'il y a des avis partagés concernant l'aspect légal. Et, dans ce contexte-là des avis partagés, il y en a qui préféreraient qu'il y ait à la fois des appuis fermes dans la loi du Québec et des appuis fermes au niveau de la loi fédérale et s'il y avait une voie retenue dans ce sens-là, l'ensemble des personnes, avec ces avis partagés, trouveraient leur compte dans la communauté catholique.

Au niveau de l'Assemblée des évêques, la position que nous avons toujours tenue et que nous tenons toujours, c'est que nous avons toujours demandé un équivalent à ce que nous avions actuellement comme régime, un équivalent dans la Loi sur l'instruction publique du Québec. Et, dans ce contexte-là, à travers la loi qui est présentée, nous retrouvons cet équivalent-là qui répond à la demande de ce que nous avions appelé des garanties réelles, nous les retrouvons dans cette réalité d'équivalence. Et, concernant des aspects d'ajustement que les élus politiques ont à faire, nous avons toujours annoncé également que ce n'était pas là le champ d'intervention des évêques et que nous nous lierons au choix ou à la voie qui sera retenue par le législateur.

Également, concernant le dernier élément de préambule à la loi, il y a un mot, on pourrait dire, qui mêle un petit peu, qui donne l'impression que ce qu'il y a là est du même ordre que les garanties réelles. C'est que, dans la troisième ligne, on a inscrit: «En ce qui concerne les points défendus par l'Assemblée des évêques du Québec». Il y a une coquille sur le mot parce qu'en débattant avec des personnes on s'aperçoit que c'est mal saisi. Il faudrait changer pour «en ce qui concerne les points travaillés par l'Assemblée des évêques du Québec».

C'est que nous avons reçu à l'Assemblée des évêques du Québec un certain nombre de questions qui ont été transmises au Comité épiscopal de l'éducation dont c'est le rôle de porter la question de l'éducation et puis de réfléchir sur un certain nombre de questions. Alors, les quatre points de réflexion y sont mentionnés concernant une certaine ouverture à la confessionnalité d'autres confessions religieuses que protestante et catholique. Alors, nous ne sommes pas très avancés sur cette réflexion-là parce que notre dossier principal, à l'heure actuelle, c'est de cerner la proposition de la foi aujourd'hui, comment se fait la proposition de la foi dans les différents contextes. Et nous nous attarderons davantage par la suite, probablement au début de 1998, aux questions qui sont soulevées ici et qui nous ont été remises pour apporter un dossier ou une proposition à l'Assemblée des évêques, qui n'a pas encore été saisie de ces propositions-là puisque nous ne les avons pas encore formulées.

Alors, ça vous donne un peu l'ensemble de ce que nous voulons apporter ici comme contribution à la réflexion. Et nous vous remercions de nous entendre.

Le Président (M. Paré): Merci, monseigneur. La parole est à vous, Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais souhaiter la bienvenue à Mgr Blais, à Mgr Rivest et à Mme Francoeur à notre commission. Je les remercie d'être venus nous présenter leur mémoire ce matin. Je comprends, par votre dernière intervention, un certain nombre de nuances qui sont apportées quant au fait qu'il y a encore des éléments à discuter quant au mémoire que vous nous déposez et qui pourraient être éventuellement repris par l'Assemblée des évêques formellement; c'est ce que je comprends bien de votre part.

D'abord vous allez me permettre de situer un petit peu le cadre de mes interventions pour ne pas que ça ait l'air décalé par rapport au mémoire que vous déposez. Vous vous souviendrez que, lorsque nous avons eu le débat sur la question des commissions scolaires linguistiques et, donc, sur leur organisation sur une base linguistique comme commissions scolaires plutôt que confessionnelles; d'ailleurs, une proposition que vous aviez appuyée et que vous réitérez, si je comprends bien, ce matin. J'ai, à ce moment-là, précisé, au moment d'une déclaration ministérielle – c'était au printemps dernier – devant l'Assemblée nationale, que toute la question et la place de la religion à l'école devraient faire l'objet d'un débat spécifique, d'un débat sociétal particulier parce que je pense que cela mérite qu'on y accorde toute l'importance nécessaire et souhaitée et souhaitable, mais aussi, dans le cadre qui va dégager ce débat, d'autres débats que nous aurions, dont, entre autres, par exemple toute la question de la pédagogie à l'école et toute espèce d'autre avenue qu'on pourrait explorer.

Alors, pour que la discussion soit la plus sereine possible, j'ai annoncé que je formerais un groupe de travail. Je peux vous dire que je suis à le finaliser, à en finaliser la composition. Le mandat est à toutes fins pratiques prêt, la composition aussi. Je pense qu'on devrait mettre un point final à tout ça dans les jours qui viennent. Et j'ai l'intention d'annoncer la constitution de ce groupe de même que son mandat dans quelques semaines, j'espère d'ici la fin du mois, je le répète. Et, à ce moment-là, tout ce qui, dans votre mémoire, par exemple touche la place de la religion à l'école, le statut confessionnel de l'école, toute question qu'il m'apparaît important de débattre pourra être discutée, soulevée auprès de ce groupe de travail, qui pourra même entendre votre Comité de même que l'Assemblée des évêques, s'il est utile de le faire, qui devra rencontrer évidemment d'autres groupes.

On sait que cette question préoccupe l'ensemble de la société québécoise. Et, en ce sens ce matin, vous allez me permettre de me concentrer sur des questions qui ont trait à d'autres propositions que vous faites dans le cadre du projet de loi actuel plutôt que ce qui concerne la place de la religion à l'école, compte tenu que nous allons prendre le temps de faire ce débat, comme je le mentionne, sereinement, complètement, en profondeur et que, suite à cela, on pourra faire des propositions qui pourront éventuellement être même soumises à cette commission parlementaire à laquelle nous siégeons ce matin, qui pourraient faire l'objet de propositions d'amendement à la loi et permettre justement de faire en sorte qu'on ne mélange pas tous les débats et que, finalement, on perde le sens même de ce que l'on veut faire.

Je peux vous dire aussi, pour clarifier peut-être, d'entrée de jeu, certains éléments, on sait que les articles 262 et 263 de la loi – je pense que vous y faites référence – ne sont pas encore en vigueur et qu'ils doivent bien sûr être revus dans la perspective de la mise en place des commissions scolaires linguistiques. Et je peux vous dire que les juristes du ministère sont actuellement à travailler sur la façon dont on pourrait amender ces articles pour tenir compte du nouveau contexte. Alors, là encore, on pourra y revenir plus tard.

Donc, je reviens maintenant à l'avant-projet de loi dans tous ses autres aspects. Je voudrais donc vous soumettre quelques questions, et la première est la suivante. Vous soumettez que la délégation de pouvoirs du conseil d'établissement à la commission scolaire devrait être une mesure d'exception et limitée dans le temps. Alors, on a eu aussi d'autres groupes qui sont venus faire ces représentations-là. Moi, j'aimerais vous entendre un petit peu sur cette question. Est-ce que vous ne croyez pas qu'une telle disposition est souhaitable, mais, en même temps, lorsque cela peut apparaître préférable, par exemple, qu'une implantation progressive de la réforme puisse amener des gens à déléguer les pouvoirs temporairement et, dans d'autres cas... Hier, entre autres, on a eu la commission scolaire, je pense que c'est Chaudière-Appalaches ou Beauce-Appalaches... Chaudière-Etchemin, excusez-moi. On en a eu plusieurs, hier comme dans les jours qui ont précédé. Eux, ils suggéraient même que certaines petites écoles, par exemple où il y avait moins d'une centaine d'élèves, où on ne voulait pas avoir certains pouvoirs ou certaines responsabilités – parce que, avec les pouvoirs surtout, il y a une responsabilité – on allait préférer les confier à la commission scolaire et d'une façon peut-être un petit peu plus permanente. Alors, l'avant-projet de loi, c'est ce qu'il veut ouvrir aussi comme possibilité. Maintenant, comme on est dans un avant-projet de loi, c'est pour ça qu'on en débat, et votre éclairage en ce sens peut être intéressant, j'aimerais vous entendre sur ça.

M. Blais (Jean-Pierre): Moi, il me semble que...

(9 h 30)

Le Président (M. Paré): Mgr Blais.

M. Blais (Jean-Pierre): C'est bien, merci. Tel que c'est prévu là, moi, il me semble que c'est prudent, parce que c'est bien évident que les milieux n'ont pas tous les mêmes ressources et on ne peut pas calculer ça au départ. Nous avons une grande expérience dans ce sens-là parce que c'est l'optique dans laquelle nous voulons organiser la vie paroissiale, la vie communautaire. Et nous réalisons qu'il y a un problème d'essoufflement quand on veut en demander trop et puis qu'on en met trop sur le dos des gens, de telle sorte qu'il me semble que c'est une mesure qui est prudente en elle-même. Mais toute mesure qui est prudente doit être éveillée en même temps à l'esprit qui est recherché. Même si, éventuellement, de petites écoles préféraient que, dans un temps donné, les pouvoirs soient remis à la commission scolaire ou au directeur de l'école, il arrive même que ces milieux-là se retrouvent avec d'autres personnes qui ont plus d'habilité dans ces milieux et qui aimeraient y exercer un plus grand rôle. Et, très souvent, ce qui arrive, c'est que, parce qu'il y a un élan qui a été donné, ça devient comme une espèce de tradition puis: C'est comme ça qu'on fait ici.

Alors, c'est juste cet élément-là que, moi, je voulais éveiller, à savoir quelles sont les ouvertures de modifier ou de reprendre autrement lorsque, dans notre situation actuelle, le monde circule beaucoup puis les ressources circulent un peu dans la province en raison du milieu du travail et que des personnes aimeraient exercer au niveau des parents cette réalité-là, alors que, dans un autre temps, ils n'avaient pas cette possibilité-là. Et par expérience, nous, il nous semble que c'est là que ça devient difficile. C'est que là on a un acquis, une façon de faire qui devient difficile à réaménager autrement. Et c'est là que nous apportions le fait: Est-ce que, dans la loi, il y aurait des éléments qui pourraient apporter une précision sur cette dynamique-là qui pourrait permettre une reprise selon davantage la loi lorsque des personnes dans le milieu se retrouvent et ont la possibilité d'assumer la fonction? C'est un peu ça, là.

Mme Marois: Oui, je pense qu'on se rejoint bien à cet égard-là. Je suis sensible aussi à ce point de vue que vous présentez. Il faudra sans doute resserrer certains aspects dans la loi. Est-ce qu'une possibilité, ça ne pourrait pas être, entre autres, par exemple, d'introduire dans la loi le fait qu'une fois par année ou en début d'année on révise la possibilité de se réapproprier ces responsabilités et ces pouvoirs ou de confirmer le fait qu'on les a délégués à la commission scolaire? Je veux dire, c'est une hypothèse qui pourrait peut-être être envisagée.

M. Blais (Jean-Pierre): Oui, moi, je suis d'accord, c'est une hypothèse qui est intéressante dans cette perspective, là, que ça permet de relancer du moins la question par un aménagement. Je ne sais pas si mes...

M. Rivest (André): Bien, si vous permettez, madame, un ajout.

Le Président (M. Paré): Mgr Rivest, un ajout.

Mme Marois: Oui.

M. Rivest (André): Si vous permettez, Mme la ministre, et j'en profite pour vous remercier de nous donner la parole, ainsi qu'aux membres de la commission. Oui, je pense que c'est une hypothèse intéressante et ce qu'on souhaite effectivement, c'est qu'il y ait une forme ou une façon de faire qui ne font pas d'une règle d'exception ou de suppléance la normalité. Alors, je pense que c'est une voie intéressante, effectivement.

Mme Marois: D'accord. Merci, ça va pour l'instant.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette, critique officiel en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. C'est à mon tour de souhaiter la bienvenue à Mgr Blais, Mgr Rivest et Mme Francoeur, et à votre contribution positive à l'avancement de nos travaux. Sur la lancée de la ministre de l'Éducation, je vais également vous poser des questions concernant les aspects pédagogiques qui sont soulevés dans l'avant-projet de loi, mais je voudrais précéder ces questions d'un préambule et d'un souhait que je formule. Parce que la place de la religion à l'école est une question extrêmement importante pour les parents et pour plusieurs membres de notre société. Le risque que j'y vois avec un groupe de travail qui va prendre le pouls, écouter les recommandations et les positions des différentes composantes de notre société, ça risque de prendre un certain temps et les décisions gouvernementales ne seraient prises que lors d'un deuxième mandat, ou d'un premier mandat dans notre cas.

Le voeu que j'exprime, c'est que la commission parlementaire puisse recevoir le rapport du groupe de travail que vous allez mettre sur pied, que nous puissions avoir une commission parlementaire ouverte, générale et que, par la suite, les formations politiques puissent bien donner, afficher leurs couleurs par rapport à leurs tendances, parce que ça pourrait faire l'objet d'un enjeu électoral important lors de la prochaine élection. Il serait trop facile de mettre sur pied un groupe de travail, de le faire travailler et puis, par la suite, si le gouvernement actuel obtenait un mandat, il pourrait avancer avec une décision qui ferait tomber des pans importants de notre société, comme ça a été le cas, par exemple, dans le cadre du virage ambulatoire, ça n'avait jamais fait l'objet d'enjeux électoraux, et pourtant on regarde ce qui se passe dans notre système de la santé et c'est assez dramatique.

Alors, sur la question de la place de la religion, je pense que, si le gouvernement a l'intention de prendre une décision, on devrait pouvoir en faire l'objet d'un enjeu électoral pour que ça soit bien clair pour l'ensemble de la population où loge le Parti québécois sur cette question et où loge le Parti libéral du Québec sur cette question, et puis, par la suite, permettre aux électeurs de prendre une décision en toute connaissance de cause, sans surprises ultérieures.

Je reviens maintenant sur les volets plus pédagogiques de l'avant-projet de loi. Je constate que votre mémoire, bien sûr, comporte beaucoup de composantes touchant la confessionnalité et c'est tout à fait compréhensible. Dans votre introduction, à la page 1, vous dites ceci: «Nous souhaitons que cette autonomie de l'école permette de réaliser l'objectif d'une école capable d'agir pour la réussite des élèves.» Vous avez bien saisi l'objectif apparent de l'avant-projet de loi, c'est-à-dire, ce que nous visons par le moyen choisi par le gouvernement, la décentralisation et l'autonomie, c'est d'atteindre un objectif: la réussite du plus grand nombre d'élèves possible. Et vous dites que cela suppose que les acteurs, en éducation, soient conscients de leurs responsabilités.

Moi, en regardant les premières dispositions de la loi, l'article 1, l'article 2, l'article 3, on voit bien la préoccupation qui découlait du rapport Parent, c'est-à-dire de favoriser l'accès du plus grand nombre. Lorsqu'on lit les dispositions, on dit: «Toute personne a droit aux services de formation et d'éveil à l'éducation.» À l'article 2: «Toute personne qui n'est pas assujettie à l'obligation de fréquentation scolaire a droit aux services éducatifs.» On voit la préoccupation du législateur qui était de favoriser l'accès du plus grand nombre possible et c'est transcrit dans les dispositions de la loi, dans les premiers articles. Je ne vois pas cependant de modifications quant à la préoccupation du législateur sur la favorisation de la réussite du plus grand nombre d'élèves possible.

J'aimerais entendre vos commentaires à cet égard-là, à savoir: Est-ce qu'on ne devrait pas placer également dans le projet de loi, ou dans la loi éventuelle, l'objectif que nous nous fixons comme société, après avoir entendu les états généraux de l'éducation et après cette commission parlementaire, de dire: Voilà maintenant l'objectif que nous nous fixons comme société, nous le transcrivons dans l'avant-projet de loi? Et puis, par la suite, est-ce que ça pourrait favoriser la conscientisation de tous les acteurs en éducation de leur première responsabilité, c'est-à-dire de favoriser la réussite des élèves?

(9 h 40)

Le Président (M. Paré): Mgr Blais.

M. Blais (Jean-Pierre): Alors, la réussite des élèves. Si je pars d'un exemple, là, à Notre-Dame de Vanier, il y a quelques années, la commission scolaire a pris une entente avec les Soeurs de la Charité de Saint-Louis pour assurer un déjeuner à 25, 30 élèves de l'école, et puis, par la suite, l'après-midi, assurer de recevoir ces jeunes, de les aider à faire leurs devoirs, de les aider à étudier les programmes qu'ils avaient, de faire la partie qui revient à la maison et de leur servir aussi une collation. Bien, vous voyez, cette mesure-là a permis à des jeunes de passer de 40 % à 80 %, 85 %. 75 % des jeunes qui étaient là ont eu une augmentation scolaire aussi forte que ça, et puis d'autres, moins forte.

Alors, moi, je souligne cet élément-là pour rappeler, selon moi, que l'esprit de la réalité du projet de loi permet l'atteinte de la réussite des élèves. Parce que la réussite des élèves, ce n'est pas juste une question dans l'école, ce n'est pas juste une question dans la classe. C'est qu'il y a un environnement, il y a toute une perspective dans laquelle le jeune va vivre, puis qui va assurer des bases de stabilité. Et lorsque vous n'avez pas ça, c'est que le jeune, il est complètement déstabilisé à l'école, dans la classe, et il sait qu'il va arriver chez lui où il n'y aura personne. Et, quand vous travaillez à répondre à cette dynamique-là, eh bien, à ce moment-là, vous atteignez davantage la réussite des élèves.

Alors, c'est dans ce sens-là qu'il nous semble qu'il y a une responsabilité du milieu et que la réussite des élèves n'est pas toujours en fonction de ce qui se passe dans la classe, ou de ce qui se passe dans l'école, ou des pouvoirs de la commission scolaire. C'est qu'il y a une dynamique au niveau des valeurs, au niveau de la stabilité de vie, au niveau de ses possibilités de se prendre en main. Et, dans ce contexte-là, nous croyons beaucoup à la dynamique de dire: Il faut que l'ensemble de la réussite éducative de l'élève repose sur une conscientisation d'un milieu, parents, enfants, jeunes, éducateurs, commissions scolaires, et que l'on soit capable de détecter des petits points, comme l'exemple que j'ai donné à Notre-Dame de Vanier, pour être en mesure de dire: Voici, on va faire quelque chose.

Alors, c'est pour ça, pour moi, au niveau de l'ensemble du projet de loi, je suis d'accord, on ne trouve pas toujours des éléments. Mais l'élément que je mentionnerais, que je trouve qui est direct et qui est aidant, c'est toute l'ouverture au programme de formation personnelle. Parce que, dans notre mémoire, on a rappelé que pour les jeunes, souvent, à l'heure actuelle, le cégep, c'était comme si tous ceux qui peuvent aller à l'université, c'est la bonne voie, puis ceux qui ne peuvent pas faire autrement, ils vont aller dans le professionnel. Et cette dimension d'ouverture au professionnel court, il me semble, va dans la réalité de la réussite des élèves, de par cette valeur, valorisation qui est donnée aux jeunes dans cette réalité des travaux techniques ou des particularités de formation plus professionnelle, pour être en mesure de travailler et de vivre à l'intérieur de la société.

Moi, par rapport à l'aspect plus éducatif, ce que je vois dans le projet de loi, c'est cette dimension-là. C'est sûr, les autres, on parle beaucoup de partage de responsabilités, puis on se dit: Comment ça va véritablement réussir à l'atteinte de la réussite des élèves? Alors, dans ce sens-là, il y aura peut-être un élément ou l'autre, là, que je ne pourrais désigner, mais je vois déjà des assises qui, pour moi, sont importantes et qui constituent un pas en avant sur beaucoup de questions.

M. Ouimet: Mais, Mgr Blais, sur la question des leviers que possèdent le législateur et le gouvernement pour favoriser la réussite éducative du plus grand nombre d'élèves possible, moi, j'avançais l'idée de bien fixer ça dans les premières dispositions de l'actuelle Loi sur l'instruction publique. Seriez-vous en accord avec cela? Pour que tous les acteurs puissent être bien conscients, leur premier devoir, qu'est-ce qu'il est? Et puis, par la suite, est-ce qu'il y a d'autres moyens que le gouvernement pourrait utiliser pour enrichir ce contexte? Parce que les études nous ont démontré que la décentralisation et l'autonomie, là où elle s'est exercée, particulièrement aux États-Unis, ça n'a pas eu d'impact par rapport à la question de la performance scolaire des élèves?

M. Blais (Jean-Pierre): Nous, il nous semble que, dans ce contexte-là, quand on parlait tout à l'heure de partenariat, on a parlé de formation et on a parlé... on n'en a pas parlé, mais là, suite à votre question, je parlerais d'information. Il me semble que ces deux éléments-là, comme levier du législateur, de favoriser des perspectives d'information et de formation des personnes sur le terrain... Souvent, quand les résultats n'arrivent pas, c'est que, comme je disais tout à l'heure, le contexte d'application ne le permet pas. Et, selon moi, le législateur doit être éveillé et travailler à développer et à s'assurer que le contexte d'application sera favorisant. Alors, qu'est-ce que c'est, les mesures ou les perspectives? Moi, je ne saurais dire parce que ma compétence est moins au niveau des formulations de ces particularités-là, mais il me semble que, quand le législateur est préoccupé de cette question-là et travaille aux améliorations à ce niveau-là, nous atteignons des résultats parfois surprenants. Peut-être que l'un ou l'autre de mes collègues aimerait intervenir.

M. Rivest (André): Si vous permettez, M. Ouimet, je vais ajouter tout simplement ceci. D'ailleurs, vous touchez et vous soulignez une dimension tellement importante qui fonde la réalité même de l'école quand on parle de réussite éducative, et on s'entend tous et toutes, je pense, pour faire la distinction entre la réussite éducative et la réussite scolaire, hein, qui n'est concentrée que sur la diplomation des résultats, donc, qui concerne l'instruction. C'est beaucoup plus vaste que ça, bien sûr, hein, la mission éducative de l'école étant aussi de socialiser, étant aussi de qualifier ou d'habiliter ce petit être en croissance à avoir sa part dans la société dans laquelle il vit et à trouver le sens... il y a, enfin, tout l'ensemble. Donc, c'est un élément très, très important qui est soulevé et qui fonde même la réalité de l'école.

Ce que j'ajouterais peut-être à ce que Mgr Blais vient de vous apporter, c'est que nous retrouvons dans ce qui est mis de l'avant par la réforme scolaire, dans la place qui est donnée aux parents et au milieu, une place accrue dans cette éducation du jeune, on retrouve des éléments intéressants, puisque l'école n'appartient pas plus à l'Église qu'à l'État, qu'à des groupes corporatifs, elle appartient aux parents et à l'élève. Alors, faisant intervenir l'ensemble des partenaires par le conseil d'établissement, enfin je pense qu'il y a probablement un certain nombre de choses à clarifier encore, mais, sur le principe même, nous trouvons que c'est un levier drôlement important et qui rejoint, nous, notre préoccupation qui se situe nettement au niveau de la réussite éducative de l'enfant. Alors donc, faisant intervenir le milieu, faisant intervenir la famille, les parents et les autres partenaires, bien sûr, du milieu.

M. Ouimet: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, Mgr Rivest. Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, merci, M. le Président. Par rapport aux derniers échanges que vous venez d'avoir avec mon collègue de l'opposition, je pense que c'est intéressant ce que vous soulevez. Évidemment, c'est l'esprit qu'il y a derrière l'avant-projet de loi. Que l'on ait à repréciser des choses, à rebaliser certains articles, ça va de soi, d'ailleurs on est devant cette commission parlementaire pour recevoir l'éclairage qu'on a maintenant. Et je peux vous dire qu'encore hier je discutais avec les juristes du ministère et ceux qui ont préparé, évidemment, cet avant-projet de loi et on constatait comment était riche l'actuelle commission parlementaire parce qu'elle permet justement de poser très librement un certain nombre de questions, de soulever certaines inquiétudes parfois et de proposer aussi des bonifications à l'avant-projet de loi, ce qui est l'objectif de la commission.

Mais j'aimerais vous entendre expliciter la question de la communauté éducative par rapport à l'expérience que vous mentionniez, Mgr Blais, entre autres, sur le fait que des gens d'une communauté religieuse avaient donné un coup de pouce dans une école et on avait vu s'améliorer le taux de réussite des élèves. Et, en ce sens, bien sûr que c'est ce qu'on recherche par la participation des parents.

(9 h 50)

Et je suis d'accord avec le député de Marquette, ce n'est pas nécessairement la centralisation en soi ou la décentralisation en soi qui va permettre d'atteindre la réussite éducative. Mais ce qu'on peut constater cependant, c'est qu'un modèle centralisé comporte des failles, on en constate certains des résultats ou certains des effets, et on tente d'aller vers une amélioration de la situation qu'on connaît maintenant en impliquant un des intervenants qui est au coeur de ce projet, que sont, entre autres, les parents, et la communauté pour faire en sorte que la communauté éducative apparaisse et s'implique dans le processus d'instruction, de formation et de développement de l'enfant, de l'enfant jeune, puis de l'enfant adolescent, jeune adulte qui a aussi besoin d'aide et de support, entre autres – on parle de la formation professionnelle – pour y être orienté et soutenu dans ses choix. Alors, je ne pense pas qu'il y ait de vérité absolue dans tout ça, mais il y a quand même un fondement à ce qu'on veut faire. Et même si ça mérite d'être bonifié par rapport à ce qu'on a devant nous, je pense qu'on va dans ce sens, dans une direction qui est souhaitable et souhaitée.

Je me méfie un petit peu juste... je voudrais prévenir le député de Marquette sur ça. Il se souviendra que, lorsque l'Université de Montréal est venue, ils nous ont dit que les études américaines devaient être prises avec une certaine... enfin, leurs résultats devaient être nuancés à ce moment-ci parce que le temps d'implantation de mesures décentralisées n'est pas suffisamment long pour qu'on puisse en mesurer vraiment tous les effets. Alors, c'est simplement une petite nuance que je voulais apporter.

Justement dans la perspective d'impliquer les parents, d'engager et de faire participer les parents, vous dites qu'il devrait être de notre devoir et de notre responsabilité comme État de prévoir la formation, l'encadrement et le soutien des parents dans cette nouvelle responsabilité qu'on veut leur confier à titre de partenaires au sein du conseil d'établissement. Et je suis assez d'accord avec vous, je pense qu'on a un travail à faire de ce côté-là. Maintenant, il y a toujours, lorsque nous intervenons comme ministère de l'Éducation, des commentaires qui nous viennent ou des remarques qu'on nous fait en nous disant: Est-ce que vous ne voulez pas trop encadrer l'exercice du pouvoir des parents? Est-ce que vous ne voulez pas, dans le fond, finir par vous substituer encore à eux dans les décisions? Alors, si vous aviez des conseils à nous donner dans ce sens-là, puisque vous nous recommandez de faire ça – ce à quoi je souscris, soit dit en passant, puis on verra comment – justement, comment vous verriez qu'on évite cette critique ou ces commentaires qui, à notre point de vue, risquent de se présenter aussi et qu'on voudrait pouvoir éviter?

Le Président (M. Paré): Mgr Blais.

M. Blais (Jean-Pierre): Je dirais un préambule avant de répondre. Je cernerais la difficulté devant laquelle nous sommes placés quand nous parlons de communauté éducative ou de bâtir la communauté éducative. C'est que nous sommes dans un contexte de société de consommation et, souvent, la réalité de communauté est perçue comme étant un lieu de services, une espèce de station de services où on va se chercher des services. Quand je les ai, je suis content, la communauté est bonne; quand je ne les ai pas, bien, je suis insatisfait puis je chiale. Alors que, quand on parle d'une communauté, ce n'est pas de ça qu'on parle; on parle des gens qui s'impliquent et qui orientent leur liberté pour y apporter une part significative, et puis ça devient véritablement un aspect de leur vie qu'ils prennent en charge avec d'autres. Et ça, le grand défi, selon moi, il est là, de telle sorte que les réactions disant: Bien, on essaie de les récupérer par de la formation, par de l'information, on pourrait dire la décentralisation des pouvoirs, elle est inévitable... Et, selon moi, c'est un problème de perception, perception dans un contexte de société de consommation où on perçoit un peu différemment.

Au niveau de la formation, moi, il me semble qu'en offrant des programmes, peut-être pas des programmes, mais en offrant des éléments tout à fait libres auxquels les gens peuvent venir s'inscrire, auxquels les gens peuvent venir, une soirée, par inscription, selon notre expérience, nous, c'est suffisant pour permettre aux gens de voir qu'ils ne sont pas récupérés. Si vous placez quelque chose, dire que ça devient obligatoire pour avoir accès au conseil d'établissement, bien, à ce moment-là, c'est une emprise. Mais, si on ouvre un jeu tout à fait libre où c'est des services qu'on offre pour des personnes qui veulent les utiliser, à ce moment-là ça dénoue la question d'avoir la possibilité de dire: Vous voulez mettre la main ou l'emprise sur nous. Et puis que ce soit fait en dehors très souvent, que ce soit donné à des entreprises privées ou des consultants, les gens voient déjà... dans le fond, c'est de placer où, eux, ils se retrouvent dans leur liberté. Quand c'est trop tous les cadres du gouvernement dans le sens d'employés, à ce moment-là ils se sentent piégés par la personne qui est là, mais, quand c'est fait à travers une autre dynamique, cette réalité-là n'est pas soulevée à ce moment-là. Moi, il me semble que c'est ça que je verrais comme particularité ou comme approche.

Mme Marois: Merci. Ça va.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Marquette, s'il vous plaît.

M. Ouimet: Oui, juste un petit commentaire sur le commentaire de la ministre. Il est vrai que les représentants de l'Université de Montréal nous ont dit qu'il fallait presque prendre les études qui allaient à l'encontre de la thèse qu'ils défendaient ici, les prendre avec un grain de sel. Mais ils admettaient quand même que les résultats, au Québec, ne seraient pas nécessairement différents des résultats obtenus aux États-Unis.

Mais ils ont soulevé d'autres préoccupations également et ils appuyaient les craintes des organisations syndicales et d'autres groupes qui sont venus devant nous nous dire: Nous craignons que l'avant-projet de loi porte les germes d'un système à deux vitesses: une école pour les riches, une école pour les pauvres, notamment avec la possibilité de choisir la clientèle; deuxièmement, l'enrichissement du curriculum; troisièmement, l'article 85 qui permet au conseil d'établissement d'exiger une contribution financière du milieu par rapport à certains volets qui ne relèvent pas du régime pédagogique. Connaissant la préoccupation de l'Église par rapport à l'égalité des chances et l'aide que vous accordez aux plus démunis de notre société, n'avez-vous pas, vous aussi, cette préoccupation-là, de l'école à deux vitesses?

Le Président (M. Paré): Mgr Blais.

M. Blais (Jean-Pierre): Alors, face à cette question-là, moi, il me semble que c'est un danger comme tous les autres dangers qui sont là, mais, par contre, ce ne sont pas des dangers qui doivent être, je dirais, suffisants pour dire: On ne fait rien. C'est toujours un peu la difficulté. On évoque un danger pour dire: Bien là on va attendre. On ne peut pas attendre indéfiniment que le train passe et que d'autres fassent d'autres choses. Mais, par contre, le danger, il est réel. Et, selon moi, à ce niveau-là, vous parliez tout à l'heure d'appui ou d'éléments du législateur, moi, il me semble que, de ce côté-là, le législateur a à être très attentif sur la dynamique. Parce que je suis d'accord avec vous que, quand vous introduisez la dynamique qu'on peut aller percevoir des argents dans le milieu au niveau de l'école pour améliorer des éléments, vous venez certainement de faire un gros trou dans la question de l'instruction gratuite et de l'égalité des chances un peu pour tout le monde, dans ce contexte-là.

Alors, selon moi, un des rôles du législateur est, dans cette dynamique-là, de voir comment ça peut prendre certains tournants que nous ne désirons pas et de voir à apporter des correctifs, parce que le législateur est en fonction de cela également, il est attentif de ce qui se vit, de ce qui se passe dans le milieu, il est alerté, et puis d'en arriver avec des mesures pour assurer... Parce que c'est évident que ces éléments-là, on ne peut pas les lier indépendamment de toute étude qui peut avoir été faite. Nos expériences nous disent qu'on veut, tout le monde, bien faire, mais qu'il y a des écueils qui s'installent de par la manière qu'on dit ou qu'on veut faire les choses.

Alors, moi, il me semble que c'est tout simplement en étant attentif, en regardant ce qui se passe sur le terrain et en étant en mesure de réagir pour s'assurer de ne pas aller, parce que personne ne veut aller vers le fait des discriminations au niveau de la possibilité d'accès à la réussite éducative des élèves. Personne ne veut faire dans la réalité du Québec des différences: école de riches et école de pauvres. C'est justement ça qu'on essaie de stabiliser pour tout le monde. Alors, dans ce sens-là, je pense que le législateur a un grand rôle à jouer, dans ce contexte-là.

M. Ouimet: Je partage tout à fait votre avis. Ce n'est pas parce qu'il y a des dangers qu'on ne devrait pas aller de l'avant, mais les dangers que nous identifions aujourd'hui, il faut quand même les éliminer ou les baliser pour s'assurer que le risque ne se concrétisera pas. Merci.

Mme Marois: C'est terminé.

Le Président (M. Paré): Vos remarques finales, M. le député de Marquette.

Mme Marois: C'est parce qu'on n'a plus de temps.

M. Ouimet: Oui, je remercie l'Assemblée des évêques, et Mgr Blais, Mgr Rivest et Mme Francoeur, pour l'échange que nous avons eu. Je compte sur votre vigilance, parce que, si la ministre rappelait sa déclaration ministérielle d'il y a quelques temps, rappelez-vous que c'était un sursis de deux ans qu'elle donnait aux écoles confessionnelles. Alors, quant à moi, il va falloir en faire le débat avant le prochain rendez-vous électoral. Merci.

M. Blais (Jean-Pierre): Merci bien.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, on va apporter un peu de nuance, on s'en excuse, mais ce n'est pas un sursis qu'on a donné, et le député le sait. C'est que, comme nous changeons toutes les commissions scolaires et que nous donnons des nouveaux statuts, nous avons souhaité justement que les parents soient consultés à nouveau pour qu'ils choisissent, s'il y a lieu, le statut de leur école, qu'ils le reconfirment, et vous le proposez d'ailleurs, l'Assemblée des évêques, enfin, le comité qui se présente devant nous ce matin propose que les parents soient régulièrement consultés sur cette question, que ça leur revienne comme choix. Et c'est tout simplement ce qui est prévu.

(10 heures)

D'ailleurs, pour rassurer tous les membres de cette commission et mon collègue le député de Marquette, le rapport du groupe de travail va être déposé devant cette commission à laquelle nous siégeons ce matin et à laquelle siègent régulièrement mes collègues et pourra faire l'objet de commentaires, suite à des demandes d'audiences, à une proposition d'audiences. M. le Président, alors, vous pourrez convoquer des groupes qui pourraient venir donner leur point de vue sur le rapport du groupe de travail sur la place de la religion à l'école. Et, en ce sens, je veux et je souhaite que ce débat ait lieu de la façon la plus sereine possible. Je ne suis pas sûre qu'une campagne électorale est nécessairement un bon moment pour que ce soit tout à fait serein, mais, ça, on pourra en débattre plus tard.

Par ailleurs, si vous le permettez, M. le Président, en conclusion, je suis très sensible à cette question de l'école à deux vitesses. Il y en a une qui croit que nous devons nous attaquer à ce problème-là, qui en est un maintenant, parce qu'il y en a malheureusement, actuellement. Et je pense que M. le député de Marquette le sait aussi, qui a été président d'une commission scolaire, que c'est l'objectif qu'ont les décideurs, dans les milieux scolaires comme à notre niveau ici, que de se doter de tous les outils nécessaires pour corriger ces situations-là. Et, s'il faut changer des choses dans l'avant-projet de loi pour nous assurer qu'on va atteindre cet objectif d'un meilleur équilibre et que justement des ressources supplémentaires vont être accordées au milieu qui vit des difficultés particulières, il faut qu'on soit capable de le faire.

D'ailleurs, déjà, que la commission scolaire soit obligée, tel qu'on le prévoit, de rendre publics les critères d'allocation de ressources apporte un élément de transparence et permet à des gens de s'opposer ou de présenter des propositions différentes. Mais on va s'assurer que ce soit bien balisé parce que nous devons donner la plus grande possibilité à nos enfants de réussir, peu importe le milieu d'où ils viennent, peu importe ce qu'ils ont comme talents, chacun ayant justement des talents. Et on doit offrir à ces jeunes la possibilité de les développer à la hauteur de leurs espoirs.

Alors, merci pour votre présentation. Nous aurons sûrement l'occasion de reprendre le débat sur la place de la religion à l'école dans d'autres forums et même dans celui-ci.

Le Président (M. Paré): Le mot de la fin est à vous, monseigneur.

M. Blais (Jean-Pierre): Alors, moi, je tiens à vous remercier, M. le Président, Mme la ministre et les membres de la commission parlementaire, de m'avoir reçu avec mes collègues, ce matin, et de nous avoir permis d'apporter notre contribution à ce débat. Il nous a fait plaisir de répondre à votre invitation. Merci bien.

Le Président (M. Paré): Merci, au plaisir. J'inviterais l'Association des parents catholiques du Québec et sa présidente, Mme Jocelyne St-Cyr.

Je vous rappelle, Mme St-Cyr, que nous avons ensemble 45 minutes, dont 15 minutes pour votre présentation et 30 minutes pour la période des échanges avec les parlementaires. Si vous vouliez nous présenter la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.


Association des parents catholiques du Québec (APCQ)

Mme St-Cyr (Jocelyne): Merci, M. le Président. Mme la ministre, M. le député de Marquette, M. le Président, j'aimerais vous remercier de nous avoir invités, surtout de nous recevoir. Je vous présente M. Jacques Goulet, qui est un professeur d'université ici, à Québec, qui est aussi avant tout un père de famille, qui est le premier vice-président de l'Association des parents catholiques du Québec, qui, ce matin, va vous présenter le mémoire que nous vous avons déposé.

Le Président (M. Paré): M. Goulet, la parole est à vous.

M. Goulet (Jacques): Merci beaucoup. Je suis très heureux d'être devant cette commission et je vous remercie à l'avance de l'écoute que vous aurez à nos revendications et nos opinions.

Je vais, en essence, présenter le résumé du mémoire qui vous a été soumis, de sorte qu'on puisse avoir suffisamment de temps pour en discuter aussi, parce que le mémoire aurait pris plus que 15 minutes de présentation.

Depuis sa fondation, en 1966, à l'occasion de la grande réforme de l'éducation de l'époque, l'Association des parents catholiques s'est fait un devoir de participer à tous les grands débats du monde de l'éducation au Québec et d'y faire valoir l'opinion et les droits des parents qu'elle représente.

L'avant-projet de loi n° 109 a pour objectif la mise en place d'un nouvel équilibre dans la répartition des pouvoirs et de rendre l'école capable d'agir pour la réussite des élèves. Il propose des amendements qui touchent les fonctions et les pouvoirs de l'école actuelle. Le présent mémoire se limitera à traiter des nouvelles responsabilités des parents, d'une formation de qualité, des écoles confessionnelles et du droit de gérance.

Commençons par les nouvelles responsabilités pour les parents. En tant que représentant de dizaines de milliers de parents soucieux de la formation intégrale de leurs enfants... Ici, le terme important c'est «formation intégrale des enfants». Les parents que nous représentons ne sont pas tellement intéressés à entendre parler de statistiques, quoi que c'est toujours intéressant pour un gestionnaire de comparer les choses en comparant les chiffres. Je commente, là. Ne cherchez pas le texte dans le résumé, mais je voulais faire quelques commentaires là-dessus.

Donc, les parents sont beaucoup moins intéressés par les statistiques que par la réussite de leur enfant. Et la réussite de leur enfant, c'est évalué à la maison chaque soir, au retour d'une journée d'école. Donc, quand on parle de formation intégrale de l'enfant, c'est un peu ça qu'on sous-entend, c'est-à-dire que l'enfant doit recevoir non seulement une instruction, il doit recevoir une éducation.

Nous constatons que le projet de loi proposé veut accorder davantage d'importance et de responsabilités aux parents. Cependant, dans la réalité, nous croyons qu'il en sera tout autrement. Le droit des parents en éducation est largement reconnu par les chartes internationales: de l'ONU, de Genève, la Charte de la famille, etc. Les parents qui ont donné la vie à leurs enfants ou les ont adoptés ont l'obligation primordiale de les élever – au sens assez imagé du terme, «les élever», c'est-à-dire les faire progresser dans quelque chose. Par contre, cette responsabilité d'éduquer ses enfants ne doit pas être limitée à l'environnement familial immédiat. C'est pourquoi il est nécessaire de laisser aux parents un véritable droit de parole dans le système scolaire. Cependant, compte tenu du bon travail qu'ont effectué les comités d'école jusqu'à maintenant, leur remplacement par des conseils d'établissement nous apparaît questionnable, surtout que ceux-ci ne font place qu'à un nombre limité de parents qui ne seront pas majoritaires au sein de ces conseils.

Nous sommes en désaccord avec la présence des représentants de la communauté sur le conseil d'établissement, car, à notre avis, celle-ci est déjà représentée par les commissaires d'école. De plus la possibilité qu'un membre de la communauté occupe la présidence du conseil d'établissement diminue le pouvoir des parents au sein de ce conseil. Si la présence des représentants de la communauté devait être maintenue, on devra éviter que ces personnes aient un lien avec les associations oeuvrant à l'intérieur de l'école: conflit d'intérêts potentiel, de toute évidence. Il suffit d'avoir vécu un peu dans des milieux scolaires pour s'en apercevoir.

Il serait de mise que des parents de jeunes enfants, qui ont tout autant intérêt à la chose scolaire que ceux dont les enfants ont quitté l'école, aient un siège à ce conseil d'établissement. Je vous assure qu'un parent ou des parents qui ont des enfants qui sont sur le point d'être inscrits à l'école pour la première fois, ils aimeraient bien savoir un an d'avance ce qui les attend à l'école.

Nous sommes conscients de la lourdeur de la tâche qui incombera à ce conseil, plus particulièrement s'il décide de se prévaloir des nombreux pouvoirs qui lui sont consentis, sans oublier les devoirs qui lui incomberont. Si on estime que chacun des documents soumis au conseil d'établissement pour approbation ou adoption fera l'objet de discussions et de modifications, on peut facilement imaginer que la tâche de tous ceux qui y participeront sera gigantesque. Et j'en parle en connaissance de cause, j'ai été membre d'un conseil d'orientation où on a eu à passer à travers des paperasses, des piles de paperasse. On n'arrivera jamais, en simple parents, ayant nos soirées et quelques fins de semaine disponibles, à lire en détail la documentation préparée par un groupe de fonctionnaires qui font ça à la journée longue. Impossible.

Ces parents, qui ont de moins en moins de temps, le temps de s'occuper de leurs enfants et qui sont pédagogiquement moins bien préparés que les professionnels de l'enseignement, auront-ils suffisamment de motivation à la fin d'une journée de travail et de compétence pour assumer les devoirs et les responsabilités qu'on veut leur transmettre? Les pouvoirs que la ministre entend donner à l'école sont-ils vraiment des pouvoirs cédés aux parents? Est-ce que les conseils d'établissement ne deviendront pas des instances aux pouvoirs quasi symboliques? Ces conseils risquent-ils de devenir des simulacres d'instances décisionnelles où les parents deviendront des spectateurs informés qui estampilleront des décisions déjà prises?

(10 h 10)

Il suffit d'assister à quelques réunions de commissaires dans les commissions scolaires pour s'apercevoir de la situation. Là encore, je parle en connaissance de cause. Je me suis présenté à plusieurs reprises aux réunions de commissaires de la commission scolaire des Chutes-Montmorency et j'ai pu voir là une présidente qui indiquait à ses commissaires comment voter sur chacune des résolutions qui étaient présentées par le directeur général. Les résolutions passaient toujours. Nous considérons que l'on donne beaucoup trop de pouvoir au conseil d'établissement, un pouvoir qui n'est pas nécessairement remis aux parents.

Parlons maintenant de la formation: formation de qualité. Au-delà des crises et des conflits qui pourront opposer les directions d'école, les enseignants et les parents dans l'exercice de leurs droits et responsabilités – permettez-moi encore de vous apporter mon vécu sur un conseil d'orientation, à Sainte-Famille, île d'Orléans, où on n'a pratiquement rien fait dans une année parce qu'il y avait une opposition des enseignants qui ne voulaient pas siéger; on a été paralysé, simplement parce que ça ne fonctionnait pas dans le groupe – il faudra s'assurer que les programmes d'études soient couverts adéquatement, non seulement au terme de chacun des cycles d'études sur l'ensemble du territoire des commissions scolaires, mais aussi au terme de chacune des années d'études dans chacune des écoles.

Comment le directeur d'une école, sur recommandation des enseignants, tel que dit dans l'avant-projet de loi, article 97, peut-il évaluer objectivement la performance de son école et de ses enseignants sans référence aux autres écoles? Et, moi, comme parent, ça me préoccupe. Je choisis l'école. Cette responsabilité devrait continuer de relever, à notre avis, des commissions scolaires. Par ailleurs, nous croyons peu réaliste l'énoncé de l'article 77 de l'avant-projet de loi.

Nous croyons qu'il ne doit pas être de la responsabilité du conseil d'établissement de procéder à des évaluations d'apprentissage. À cet effet, il ne lui appartient pas de s'assurer de l'atteinte des objectifs et de l'acquisition des contenus obligatoires. Peut-on raisonnablement espérer que les conseils d'établissement, composés essentiellement de citoyens bénévoles et de bonne volonté, auront la compétence requise pour approuver en toute connaissance de cause chacun de ces points? Et, si ce n'est pas le cas, vous conviendrez avec moi qu'ils vont donner leur O.K. aux recommandations du directeur et des enseignants, de toute évidence. C'est ce dont on parlait tout à l'heure, d'un simulacre d'instance décisionnelle.

Les écoles confessionnelles, maintenant. Notre nom vous indique qu'on ne pouvait présenter un mémoire sans parler un peu de ce sujet. Les parents et les jeunes qui choisissent l'enseignement moral et religieux catholique ont droit à un enseignement religieux authentique et de qualité donné par des maîtres bien préparés – on ne conteste pas ça pour les mathématiques, on ne conteste pas ça pour l'anglais, on ne conteste pas ça pour l'histoire, on ne conteste pas ça pour la géographie, je ne vois pas pourquoi on pourrait le contester pour les aspects moraux et religieux – le tout soutenu par la direction de l'école à qui les règlements du comité catholique font un devoir de faire la promotion du projet éducatif catholique. «Il va de soi que la référence explicite à la foi catholique inspire la mission d'une école catholique et de son projet éducatif.» Ça, c'est une citation de L'école catholique aujourd'hui , du Comité épiscopal de l'éducation, de l'Assemblée des évêques du Québec, du 10 avril 1995.

L'application de la révision des curriculum prévue par le rapport Inchauspé devra tenir compte de ce fait, principalement lors de l'intégration du cours de formation personnelle et sociale, volet éducation à la sexualité. Je vous réfère à certains des documents qui ont été déposés au ministère de l'Éducation par notre Association en ce qui regarde justement le cours de formation personnelle et sociale, volet éducation à la sexualité. Les ministres qui vous ont précédée, Mme la ministre, en ont pris connaissance et certains ont réagi très fortement.

Nous sommes satisfaits du maintien du temps minimum prescrit pour l'enseignement moral et religieux catholique et nous demandons que le service de pastorale soit maintenu ainsi que le temps qui lui est alloué. Enfin, nous sommes inquiets face à certaines déclarations ministérielles à l'effet qu'un comité est sur le point d'être formé – là, il est presque formé, semble-t-il – pour donner avis sur les temps d'enseignement religieux. On espère très fortement être appelés à siéger sur ce comité, en passant, nous croyons avoir des choses intéressantes à dire et des avis à exprimer là-dessus.

Le Président (M. Paré): Je vous rappelle qu'il vous reste trois minutes.

M. Goulet (Jacques): Trois minutes. Je vais sauter aux droits de gérance et à la conclusion. Un professeur, ça s'étend toujours un peu sur le sujet, hein? Ha, ha, ha!

Droit de gérance. Nous constatons avec étonnement que le nouveau partage de responsabilités proposé entre l'école et la commission scolaire et le ministère de l'Éducation ne s'accompagne pas d'un partage analogue d'autorité dans un domaine aussi primordial que la négociation et l'administration des conventions collectives. Comment, en effet, les parents et la direction d'une école peuvent-ils s'imaginer pouvoir, selon les termes mêmes de la ministre, «prendre de vraies décisions pédagogiques, administratives et budgétaires» s'ils n'ont pas le droit de participer à la négociation des conditions de travail des enseignants, par exemple? C'est facile, dans les écoles privées, de le faire; on a des syndicats de boutique. Est-ce qu'il est réaliste de penser qu'on puisse le faire dans le secteur public? Il faut se poser sérieusement la question.

Si on veut réellement obtenir les résultats qu'on laisse miroiter en présentant les grandes lignes de cette réforme, il faudrait revoir en profondeur les conventions collectives. Dans un exercice de refonte majeure comme celui qu'on nous propose actuellement, on ne peut tourner les pages à moitié. C'est-à-dire que les parents tournent la page, mais les enseignants ne tournent pas la page, eux autres. Si l'on attend des parents une nouvelle implication et un nouvel engagement dans l'administration de l'école, il faut attendre aussi en contrepartie une ouverture et une flexibilité analogues de la part des enseignants et de leurs syndicats.

Si on veut vraiment faire avancer l'école, en conclusion, en lui faisant prendre le virage du succès, nous croyons que les intervenants, peu importe leur niveau de responsabilité au sein du monde scolaire, devront avoir comme ultime objectif la formation intégrale, je le rappelle, de l'élève, tant aux plans physique, psychologique, intellectuel que moral et religieux. En définitive, pour que l'école soit ce qu'elle doit être, il devra s'établir une étroite, sincère et loyale collaboration entre l'État, les administrateurs scolaires, les professeurs et les parents afin de doter la clientèle scolaire des structures administratives et des services pédagogiques adéquats pour que l'école dispense efficacement et l'éducation et l'instruction. J'arrête ici.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Goulet. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je vous remercie pour votre présentation. Je ne pense pas que j'aie nécessairement à reprendre la démonstration que je faisais auprès du Comité de l'éducation de l'Assemblée des évêques, tout à l'heure, parce que vous savez qu'effectivement nous discuterons de cette question de la place de la religion à l'école. Vous semblez être un petit peu en désaccord avec la façon dont nous le faisons, mais nous le faisons en toute transparence et visière levée, et je voudrais le rappeler, peut-être, ici. D'abord, j'ai procédé à cette déclaration ministérielle au printemps dernier. Nous constituons actuellement un comité, qui sera plutôt un comité d'experts qui procédera éventuellement à la remise d'un rapport qui, lui, pourra être soumis à débat, ce qui vous permettra à ce moment-là de venir présenter votre point de vue. Et je pense que c'est peut-être plus normal et logique que ça se passe comme ça.

Ce comité pourra aussi, s'il le désire et s'il le souhaite, entendre des groupes pour préparer son rapport. Alors, en ce sens, je pense que toutes les portes sont ouvertes. Et l'idée n'est pas de mettre cette question sous le boisseau, de la camoufler ou que le débat, justement, n'ait pas lieu. Au contraire, nous voulons qu'il ait lieu, mais qu'il ait lieu en toute sérénité parce que, à chaque fois qu'on aborde cette question-là, et vous le savez, vous êtes au coeur de toutes ces discussions depuis des années, c'est assez étonnant comme l'émotivité prend le dessus, et il n'y a rien à faire. À chaque fois que j'ai vu ces débats s'engager, résultat: toujours, les comportements sont allés dans ce sens-là. Alors, j'essaie de trouver les moyens pour faire en sorte qu'on chemine, je le répète, le plus sereinement possible et qu'on fasse les choix les plus adéquats possibles, compte tenu de l'évolution de la société dans laquelle nous vivons, en tout respect pour les convictions et les points de vue des uns et des autres. Et, donc, ce matin, je n'avais pas l'intention d'aborder cette question de la place de la religion à l'école, compte tenu qu'il y aura un forum et que nous aurons l'occasion d'en débattre et que vous aurez l'occasion de façon plus précise de présenter votre point de vue.

(10 h 20)

Alors, je voudrais maintenant revenir, par contre, sur des recommandations que vous nous faites dans votre mémoire ou sur des commentaires. Dans votre présentation de même que dans le mémoire, vous semblez énoncer – vous semblez, je dis bien – que les parents n'auraient pas les compétences requises pour approuver, je dirais, en toute connaissance de cause, l'atteinte des objectifs des programmes, leur adaptation – je reprends leur mémoire – la répartition du temps consacré à chacune des matières, l'évaluation des apprentissages, le respect des règles de sanction, et que ces responsabilités devraient relever de la commission scolaire. C'est sûr que les parents n'auraient pas à statuer sur cela, mais auraient à approuver et à – comment je dirais ça – émettre leur point de vue sur ces questions.

Alors, vous, vous dites: Ça devrait relever de la commission scolaire. D'abord, j'aimerais rappeler que le conseil d'établissement va recevoir des propositions de la direction de l'école, du directeur ou de la directrice de l'école, qui aura fait un travail préalable, évidemment, avec les enseignantes et les enseignants, qui sont au premier chef ceux qui sont concernés par les programmes, la pédagogie à utiliser, les méthodes, le choix évidemment des outils de travail, etc. Donc, la direction de l'école proposera des choses au conseil d'établissement. Il y aura un travail de préparation qui aura été fait, d'analyse, et on soumettra toutes ces questions aux parents, mais avec un éclairage, bien sûr, qui permettrait aux parents d'aller plus loin, de présenter leurs préoccupations, de soulever certaines questions.

Alors, pourquoi les parents n'auraient pas les compétences requises, alors que les gens de la commission scolaire les auraient davantage, qui sont des élus, bien sûr, mais qui peuvent être des parents et parfois ne pas en être, puisqu'on a le droit d'éligibilité universelle? Il n'y a pas de contrainte quant à la possibilité de se présenter à titre de commissaire. J'ai un petit peu de difficulté à comprendre vos propos sur cela, surtout venant de gens qui représentent quand même des parents.

M. Goulet (Jacques): Oui. Et, comme je le disais tout à l'heure lors de mon intervention, j'ai assisté à des réunions de commissaires à la commission scolaire et j'ai vu les discussions qui se font là. En toute une année, il y a eu un seul point pédagogique qui a été discuté par les commissaires. Donc, je ne crois pas qu'il y ait une grande compétence pédagogique au niveau des commissaires, non plus.

Au niveau des professionnels qui sont là, j'ose croire qu'on engage des gens qui ont des compétences en matière d'éducation.

Mme Marois: Bien sûr.

M. Goulet (Jacques): Et ceux-là sont bien préparés, effectivement, à préparer les documents, comme vous avez dit, à les soumettre aux parents pour approbation. Mais vous venez confirmer ce qu'on dit, finalement, dans notre mémoire, c'est que les parents vont être là des spectateurs informés. Et peut-être que, s'il y a un parent ou deux – j'ose me citer en exemple – qui ont une certaine formation dans le domaine de l'éducation parce qu'ils sont des enseignants, parce qu'ils sont des professeurs à l'université ou ailleurs, eux, ils sont peut-être un peu plus éveillés à certaines réalités, mais l'ensemble des parents...

La formation intégrale de l'enfant, c'est sérieux, ce n'est pas quelque chose qui se fait simplement en faisant des statistiques. Je vous donne, là encore, un exemple que j'ai vécu, toujours dans le milieu où mes enfants sont allés à l'école, l'école publique. Maintenant, j'en ai à l'école privée. Pour moi, j'ai le choix, et c'est heureux que ce soit comme ça, et il faudrait que ça le demeure. Et je sens qu'on me le laisse de moins en moins, le choix de le faire, maintenant. Mais j'ai à discuter, à un moment donné, un petit problème de régie interne dans l'école: un professeur qui fait faire son café ou qui envoie un élève chercher son café pendant qu'il donne des cours. Moi, je n'étais pas d'accord avec ça, il y avait un autre parent qui n'était pas d'accord, mais l'ensemble des autres parents trouvaient ça naturel.

Le Président (M. Paré): Mme St-Cyr, vous voulez ajouter?

Mme St-Cyr (Jocelyne): Oui, je voudrais juste souligner qu'on ne doute pas de la compétence des parents. Comme M. Goulet vient de le dire, de nombreux parents sont en mesure, je pense, de siéger sur ces conseils. Mais, pour avoir travaillé depuis quelques années au sein du monde scolaire ou des lois, tous les programmes, toute la pédagogie, je pense, les parents ont un instinct, une formation qu'ils acquièrent, mais au niveau de la décision, au niveau du pédagogique, les professionnels de l'enseignement sont très qualifiés. Ils vont conseiller le directeur et, lui, il va faire des recommandations aux parents, qui, de toute bonne foi – et je pense qu'il faut faire confiance aux gens du milieu – vont accepter des choses.

Par contre, dans d'autres endroits, les parents sont complètement dépassés juste par le langage, le langage de la loi, les conséquences de certains gestes. Et c'est là qu'est notre inquiétude, particulièrement quand on arrive au nombre de parents sur le conseil d'établissement. Il y en a de tous les milieux. Il y en a qui sont très éveillés, il y en a d'autres qui font confiance et il y en a d'autres qui ont vécu de mauvaises expériences au sein du comité d'école, anciennement, où on commence à s'intéresser vraiment à la chose, et les répercussions retombent sur leurs enfants. Donc, on vous parle du fond de notre coeur. On ne dit pas que les parents sont des innocents. Mais est-ce qu'ils ont suffisamment de compétences pour toute la charge et le pouvoir qu'on leur donne ou qu'on leur donnera, actuellement? C'est là qu'est le sens de notre question.

Le Président ( M. Paré): Merci, Mme St-Cyr.

Mme Marois: Vous me permettrez d'être en désaccord avec vous. Maintenant, cependant, à partir de votre analyse, si on la pousse plus loin, qu'est-ce que vous proposez, à ce moment-là? Vous dites: Ça devrait être seulement les enseignants qui soient responsables de l'école, et à ce moment-là, les parents n'ont pas voix au chapitre, sauf pour des questions relativement secondaires?

Mme St-Cyr (Jocelyne): Non, je pense que ça fait tellement longtemps qu'on défend le droit des parents qu'il faut qu'ils en aient un véritable.

Mme Marois: Il me semble, c'est pour ça que ça m'étonne de vous entendre.

Mme St-Cyr (Jocelyne): Un véritable droit, c'est-à-dire...

Mme Marois: Pouvoir. Mais comment vous le traduisez, à ce moment-là? Parce que, moi, j'ai, à un moment donné, à le rédiger, à l'introduire dans une loi.

Mme St-Cyr (Jocelyne): Moi, je vois ça: que les parents soient majoritaires au sein du conseil d'établissement. On veut réellement donner un pouvoir aux parents? Qu'ils soient majoritaires. Ils sont cinq plus les deux de la communauté. Qui seront les gens de la communauté? D'où viendront-ils? Comment seront-ils nommés? Ce sont toutes des inquiétudes que nous avons. Nous croyons que les parents, lorsqu'ils expriment des attentes ou des observations face à certains programmes, qu'on les écoute et qu'on ne leur fasse pas sentir qu'ils sont des «troublemakers». Excusez le mot, mais ça exprime vraiment ce que l'on veut dire. Et, là-dessus, je pense qu'il faut qu'ils aient un véritable pouvoir en ayant la majorité au sein du conseil d'établissement.

Mme Marois: Mais j'ai de la difficulté à vous suivre, puisque vous dites, parfait: Qu'ils soient majoritaires – ça, c'est différent de ce qui est ici, dans l'avant-projet – qu'ils aient des véritables pouvoirs, mais, en même temps, vous dites qu'ils ne sont pas compétents pour discuter de ces choses-là. Alors, je cherche la cohérence. Je vous le dis, là, je suis très franche, je cherche la cohérence, j'essaie de voir où vous voulez aller avec une telle analyse et une telle hypothèse. Sur quoi les parents devraient donc avoir un point de vue à émettre? Parce que, nous, on veut leur confier des responsabilités parce qu'on fait confiance aux parents, on pense qu'ils sont les premiers responsables de l'éducation et du développement de leur enfant. Ils sont, en ce sens, appuyés, soutenus et aidés par les enseignants, les enseignantes, qui, dans leurs sphères spécifiques, ont des compétences au plan pédagogique, au plan des connaissances, au plan des contenus, et c'est à eux qu'on confie cette tâche et cette responsabilité-là. Puis ce n'est pas aux parents à venir dire comment le prof va enseigner dans sa classe et ce qu'il va enseigner. Mais je crois que le parent peut dire comment il voit les méthodes pédagogiques, c'est-à-dire qu'il peut émettre des commentaires quant au projet éducatif de l'école, quant aux grandes orientations poursuivies par l'école et exercer une responsabilité à cet égard, en tout respect pour les enseignantes et les enseignants qui sont dans les classes.

M. Goulet (Jacques): Entièrement d'accord avec vous, Mme la ministre.

Mme Marois: Bon, alors, comment vous le traduisez?

M. Goulet (Jacques): Et ça existe déjà, actuellement, avec les conseils d'orientation. Je ne vois pas pourquoi on changerait quelque chose qui existe et qui a l'air de fonctionner. Ça existe déjà, les parents peuvent émettre des opinions, peuvent formuler des avis, peuvent informer le directeur d'une insatisfaction. Ils sont supposés interagir avec les enseignants, il y a une dynamique sur les conseils d'orientation qui favorise ça. Mais ça ne marche pas tout le temps, ça ne marche pas dans tous les milieux.

Je voudrais revenir sur l'aspect plus pratique, parce que, comme parent, comme je vous le disais tout à l'heure, c'est moins les chiffres et les analyses de situations très théoriques qui m'intéressent, c'est davantage que ça fonctionne à l'école. Et l'exemple que je peux vous offrir, si vous voulez avoir des choses pratiques, des conseils qui vont vous aider à formuler quelque chose qui va fonctionner, regardez les écoles privées. Ça fonctionne, et ça fonctionne bien. Pourquoi ne pas modeler le secteur public sur le mode de fonctionnement du secteur privé, qui fonctionne? Il suffit d'y injecter l'argent. Mais ils l'ont déjà l'argent, au public, donc c'est juste une question de gestion.

Le Président (M . Paré): Alors, vous voulez ajouter?

(10 h 30)

Mme Marois: Je ne veux pas poursuivre la discussion plus loin sur cette question. Mais, justement, on veut responsabiliser et donner des pouvoirs aux parents, et vous nous dites que ce n'est pas ceux-là qu'on devrait leur donner ou leur confier comme responsabilités, et que, si on les leur confie, il y a un risque qu'ils ne puissent pas avoir la compétence pour les exercer. Alors là, je suis un petit peu...

M. Goulet (Jacques): J'aimerais sortir un peu de ce débat-là.

Mme Marois: J'essaie trouver la cohérence.

M. Goulet (Jacques): J'aimerais sortir de ce débat-là de la façon dont vous vous y engagez parce que ce que je viens de dire à propos de l'école privée, si ça fonctionne à l'école privée, ce n'est pas parce que les parents sont tenus à l'écart. Il y a des comités de parents, on tient compte de l'avis des parents, les parents ont le choix. Il n'y a rien qui régit ça au niveau de la loi comme telle. Je veux dire, c'est une organisation fonctionnelle, qui fonctionne et on ne l'impose pas. Chaque collège a sa façon de fonctionner et tout ça.

Moi, je me dis: Si vous pouvez faire un effort, au ministère de l'Éducation, pour regarder et analyser sérieusement ce mode de fonctionnement du secteur privé puis essayer de le traduire le plus possible pour l'école publique. Je conçois, et on le dit dans le mémoire, qu'il va y avoir un écueil majeur, c'est celui des conventions collectives. Mais, est-ce que c'est à cause des conventions collectives, est-ce qu'on va soumettre l'éducation de nos enfants aux contraintes des conventions collectives actuelles? Comme parent, là, ça me trouble profondément.

Le Président (M. Paré): Mme St-Cyr.

Mme St-Cyr (Jocelyne): Moi, je voulais juste revenir sur les nombreux pouvoirs qui sont consentis au conseil d'établissement, pour lequel peut-être que le mot «compétence» était fort, je l'avoue. On aurait pu dire que les parents étaient grandement préoccupés par la lourdeur de la tâche qu'on leur offrira. Je pense que là-dessus, c'est beaucoup plus juste parce que, tout de même, les parents ne sont pas des incompétents, à mon avis, ils font leur possible et ils voient avec leur coeur, particulièrement sur l'éducation de leurs enfants.

Mais, quand on parle des devoirs qui vont être faits au conseil d'établissement et qu'on dit «approuver la répartition du temps alloué à chaque matière obligatoire ou à option», on lit, dans le rapport Inchauspé: «Les temps sont déjà définis.» Est-ce qu'il y aura une certaine souplesse si une école décide d'offrir plus d'enseignement moral et religieux à ce moment-là? Ça c'est une question, je pense, qui préoccupe largement les parents, parce qu'on sait que, dans certaines écoles, la première chose qui est coupée, il y a les animateurs de pastorale, même si c'est enchâssé dans la loi. Il y a toutes sortes de questions au niveau des budgets qui devront être discutées au conseil d'établissement. C'est des dossiers très lourds, je pense, pour les parents qui n'ont peut-être pas l'expertise de la gestion. C'est des choses comme ça qui nous préoccupent grandement.

J'étais très heureuse de vous entendre, Mme la ministre, lorsque vous disiez à nos prédécesseurs, particulièrement à Mgr Blais, que peut-être on pourrait demander de la formation pour les parents, non obligatoire. Ils ne demandent que ça, comprendre particulièrement la loi et être en mesure de faire le lien entre ce que l'école continue d'offrir à leurs enfants. Je pense que c'est là-dessus qu'il faut nettement se préoccuper.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme St-Cyr. M. le député de Marquette, critique officiel en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme St-Cyr, M. Goulet. Juste pour terminer sur la question de la place des parents au niveau du conseil d'établissement puis la discussion qui vient d'avoir lieu sur la compétence ou la lourdeur de la tâche, la question que je me posais en entendant la ministre dire qu'il y aurait un comité d'experts pour la place de la religion à l'école, est-ce que des parents seront sur ce groupe de travail? Et, j'ai hâte de voir la composition du comité. Sont-ils experts ou ne le sont-ils pas dans ces domaines aussi?

Mais, si on revenait maintenant au conseil d'établissement, parce qu'on sent que vous avez des objections par rapport au conseil d'établissement. J'amènerais une autre dimension qui n'a pas été abordée par à peu près aucun autre groupe: la place de l'élève au niveau du conseil d'établissement au niveau secondaire. Avez-vous une réflexion là-dessus? On dit souvent: la transmission des savoirs, des connaissances, ça s'effectue principalement dans la salle de classe. Il est important que l'enseignant soit bien appuyé, bien supporté, qu'il ait les outils pour bien former, qu'il ait tous les outils nécessaires pour bien transmettre ses connaissances mais également que l'élève, lui, puisse être dans une situation pour bien recevoir les apprentissages. Est-ce que la place de l'élève au conseil d'établissement, au niveau secondaire, serait susceptible d'apporter une dynamique qui ferait en sorte qu'on serait plus préoccupé des conditions dans lesquelles l'élève reçoit ses apprentissages?

Mme St-Cyr (Jocelyne): On s'était déjà prononcé là-dessus, M. Ouimet, il y a quelques années, à l'effet qu'on n'a pas d'objection à ce qu'il y ait des étudiants du secondaire au conseil d'établissement. Où on avait une réserve, c'était au niveau de leur droit de vote. Ce sont des gens qui sont en formation – pour donner un exemple de mère de famille, comme quelqu'un à qui on continue d'apprendre à marcher – et, sur des décisions importantes, on se questionnait sur leur droit de vote à ce moment-là. On n'a pas vécu l'expérience d'un conseil d'orientation avec des étudiants mais on avait une réserve à ce niveau-là. Mais je pense qu'ils ont leur place, ils sont les premiers concernés par ce qui se passe, mais de là à avoir un pouvoir décisionnel... Peut-être que M. Goulet a autre chose.

M. Ouimet: Alors, prêts à entendre leur voix au niveau du conseil d'établissement par rapport aux recommandations qu'ils pourraient faire mais, compte tenu qu'ils ont moins de 18 ans pour la plupart, j'imagine que votre logique s'appuie là-dessus: ils ont moins de 18 ans, donc pas de droit de vote. C'est ce que je comprends.

Mme St-Cyr (Jocelyne): Pas en fonction du droit de vote, tout simplement en fonction peut-être de juger les conséquences des décisions. Bon, prenons la généralité des choses. Ils sont tout de même brillants, nos jeunes, mais on sait qu'à la période du secondaire, on change le monde. On n'a qu'à se rappeler notre époque.

M. Goulet (Jacques): Aussi, oui, en ce qui regarde la présence des étudiants, étant du monde universitaire, je vois les résultats finalement au conseil universitaire, puisque je siège au conseil universitaire, et l'intervention des étudiants est très appréciée des membres du conseil universitaire. Donc ils ont des choses à dire et ils ont droit de vote. Disons, moi, je n'ai pas trop de problème avec un droit de vote, en autant qu'il ne soit pas majoritaire – ha, ha, ha! – mais qu'ils puissent le faire valoir, faire valoir leurs opinions comme d'autres groupes à l'intérieur d'un conseil, par exemple.

Ce que j'aimerais voir aussi – c'est ce qui se fait dans bien des universités actuellement – c'est une évaluation des enseignements par les étudiants et qu'on en tienne compte dans ces réunions des conseils d'établissement. Je sais que dans les départements, les différents départements à l'université, il y a des évaluations obligatoires des cours et tous les étudiants se prononcent. Tous les étudiants. Alors, c'est pas mal plus démocratique que d'avoir un représentant qui peut-être sur un sujet donné a une opinion personnelle qu'il va essayer de faire valoir plutôt que celle de l'ensemble des étudiants qu'il est supposé représenter. Mais, d'avoir des évaluations des enseignements faits par les étudiants, interprétés par des gens qui peuvent leur fournir, en tout cas, les moyens de porter un jugement là-dessus et de les faire valoir auprès de ces conseils-là, moi, je verrais ça très bien, oui.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Goulet.

M. Ouimet: Et l'autre question, si on est toujours au niveau du conseil d'établissement, la question des représentants de la communauté, là on sent un désaccord assez profond. Certains groupes sont venus devant nous nous dire: Ça pourrait avoir des éléments bénéfiques dans le sens que ça constituerait un lien entre l'école et certaines institutions, par exemple un représentant du CLSC qui siégerait au conseil d'établissement ou un représentant du monde municipal qui pourrait favoriser l'entente par rapport à l'utilisation des bibliothèques municipales réservée à des fins scolaires. Les groupes semblent de façon générale assez positifs à cette représentativité-là. Certains disent, les parents entre autres disent: On devrait n'avoir qu'un seul représentant au lieu de deux pour permettre qu'il y ait plus de parents au niveau de la table et même d'assurer une majorité, mais on ne sent pas trop d'hésitation par rapport aux représentants de la communauté. J'aimerais bien saisir les raisons pour lesquelles vous vous y opposez.

M. Goulet (Jacques): La communauté a plusieurs tribunes où elle peut faire valoir son opinion en relation avec l'école ou autres. On a parlé que les commissaires remplissent un peu ce rôle-là, finalement. Les gens qui se font élire comme commissaires, il peut y avoir n'importe qui, il n'est pas nécessaire d'avoir un parent à l'école pour se faire élire comme commissaire. Dans la commission scolaire de l'endroit où j'habite, il y a effectivement des gens qui n'ont même pas d'enfants puis qui sont sur le conseil des commissaires et qui font un excellent travail, ils font valoir des points et tout ça. Moi, je n'ai aucune objection là-dessus.

(10 h 40)

Mais là on est à l'école, on discute de choses de l'école et tout ça. Les interrelations entre l'école et le milieu, il s'en fait naturellement dans le milieu. Moi, je ne voudrais pas que ce soit l'école qui soit responsable de tout ça ou qui cherche à utiliser le prétexte de l'éducation pour le faire. Il y a un processus naturel qui se fait. Il y a des tables de concertation dans bien des municipalités, dans bien des endroits, où justement cette concertation-là se fait avec le milieu, où les gens de l'école sont invités. Pourquoi il faudrait que tout soit ramené à l'école, finalement? Il y a déjà beaucoup à se préoccuper de la pédagogie, de la mission éducative, de la formation intégrale de l'enfant, sans être obligé de ramener sur la table tous les liens qu'on doit maintenir avec la Caisse populaire, le CLSC et ces choses-là. Il y a d'autres tribunes, je crois, où ça peut se faire, ces choses-là, que ce soit, comme on le disait tout à l'heure, par le biais des commissaires ou des tables de concertation régionales.

M. Ouimet: Parfait. Merci.

Le Président (M. Paré): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: M. le Président, je vous remercie. Je vous remercie de votre rapport et des propos que vous avez tenus pour nous éclairer dans l'étude de cette question si importante pour nos enfants et pour notre société.

J'ai écouté avec beaucoup d'attention votre présentation et j'admets que, sur certains points, j'ai eu de la misère à vous suivre. Vous avez parlé des commissaires d'école qui, de façon habituelle, ont la coutume de prendre des votes plutôt téléguidés, préparés par le...

M. Goulet (Jacques): Dans certaines commissions scolaires.

M. Dion: Dans certaines. Mettons que c'est exceptionnel. Et vous avez parlé de la loi qui donne trop de pouvoirs au conseil d'établissement. Je vois ici, dans un document que vous connaissez très bien, qui a été remis à tout le monde, à la page 6, on voit, par exemple, les pouvoirs reliés au service éducatif. On dit qu'actuellement «le pouvoir du comité d'école est d'approuver la programmation qui nécessite un changement aux heures d'entrée et de sortie des élèves ou un déplacement de ceux-ci à l'extérieur des locaux de l'école». Alors, c'est une portion assez congrue de pouvoirs, hein!

Alors, on dit «la situation nouvelle permettrait d'approuver des modalités d'application du régime pédagogique, l'orientation et l'enrichissement de programmes d'études, d'approuver la répartition de temps», ainsi de suite. Donc, il y a un certain nombre de pouvoirs qui sont mentionnés qui iraient à l'école. J'ai cru comprendre que vous – en tout cas, si j'ai bien interprété votre proposition, M. Goulet – dites qu'on s'apprête à donner beaucoup trop de pouvoirs à l'école et qu'il vaudrait mieux en rester à la situation actuelle. C'est ce que j'ai cru comprendre.

Je passe sous silence votre comparaison de privé-public parce que, chez nous, on a, au niveau secondaire, autant d'écoles privées que d'écoles publiques, l'histoire a voulu ça, et les gens dans le milieu semblent valoriser autant l'un que l'autre. Alors, je pense que j'aurais de la misère à dire que, parce que c'est bon dans l'un il faut faire comme ça, parce que ça semble être bon dans les deux. Ce qu'on veut faire, c'est améliorer ce qui existe déjà parce que, dans les deux cas, on voit un taux de décrochage et de réussite qui est questionnable.

Donc, j'aurais trois questions précises à vous poser. J'aimerais vous les poser toutes ensemble, l'une après l'autre, afin que vous puissiez élaborer là-dessus. La première chose, vous avez remis en question la compétence des parents. Alors, je ne sais pas si vous êtes d'accord, j'ai cru comprendre que vous n'étiez pas d'accord sur ça. Ma question est la suivante: Sur quelle base on peut juger de la compétence des parents? On admet tout le monde que ce sont les premiers responsables de l'éducation. Comment est-ce qu'on peut s'y prendre pour juger et dire qu'ils sont compétents ou pas compétents?

Deuxième question: Quels sont les champs de juridiction dévolus au conseil d'établissement que vous trouvez qu'ils sont de trop et qu'ils devraient être plutôt enlevés?

Et troisième question: Quel équilibre vous souhaitez, de façon très précise, entre la présence des parents, la présence des professeurs, la présence du directeur et des autres membres de la communauté dans le conseil d'établissement?

M. Goulet (Jacques): O.K.

Le Président (M. Paré): M. Goulet, brièvement.

M. Goulet (Jacques): En ce qui regarde la compétence des parents, je crois la présidente a apporté des nuances tout à l'heure. Ce qu'on voulait dire, ce n'est pas que les parents sont incompétents dans l'éducation de leurs enfants, mais on parle dans la matière d'école, je veux dire de matières...

M. Dion: La scolarisation.

M. Goulet (Jacques): Oui, la scolarisation. Il y a tout un langage, une façon de voir les choses et tout ça pour des bons pédagogues, et un bon pédagogue n'est pas toujours nécessairement du côté de certains parents. Il y a certains parents qui voient la façon d'enseigner à l'école différemment que d'autres parents et tout ça. Puis, qui va vraiment juger qui a raison entre les deux et tout ça? Je pense que le parent qui n'a pas reçu de cours de pédagogie, il faut quand même admettre au départ... lui donner un préjugé favorable à celui qui a reçu un cours de pédagogie par rapport à celui qui n'en a pas reçu. C'est dans ce sens-là qu'on dit, en termes de compétence... On est quand même dans un domaine qui est très spécialisé. J'en vis moi, je gagne ma vie dans ce domaine-là, et je ne vois pas un parent, devant ma classe, essayer de maîtriser un groupe comme j'arrive à le maîtriser. O.K. Donc, c'est une question de compétence dans le domaine et, entre les différents enseignants, il y en a qui sont plus ou moins compétents aussi. C'est dans ce sens-là qu'on a parlé de compétence. On n'a pas voulu dire que tous les parents étaient des incompétents, on a dit que parmi ceux qui vont siéger là, il y en a peut-être dont les sujets qu'on va traiter vont leur passer par-dessus la tête parce qu'ils n'ont pas eu la formation pour pouvoir en discuter correctement.

Les champs de juridiction qui seraient de trop et tout ça. On n'est pas pour passer tout le texte de loi, on pourra peut-être revenir dans un autre débat là-dessus, mais il reste néanmoins que les évaluations par exemple des étudiants là... Un conseil, je ne sais pas s'il peut vraiment se prononcer de façon éclairée là-dessus. On a dit dans le mémoire que ça relevait davantage de la commission scolaire de permettre une comparaison entre les écoles pour juger de la qualité, plus que d'un d'un conseil d'établissement. Un conseil d'établissement va accepter ce que le directeur et les professeurs vont lui présenter. Comme un de mes enfants qui est arrivé à la maison, à un moment donné, et a dit: «Papa, en anglais, on est les meilleurs, on a dépassé le programme et tout ça, puis il n'y a personne qui est meilleur que nous.» Il arrive au secondaire puis il est dans les derniers. Ça, c'était le message qu'on lui avait livré à l'école: il était le meilleur puis, lui, il se tirait les bretelles avec ça. Il faut se comparer à d'autres, je n'ai pas besoin de faire des dessins là-dessus.

D'ailleurs, l'exemple que vous avez utilisé de la région de Saint-Hyacinthe pour les écoles privées et les écoles publiques, bravo! On a des amis qui demeurent à Saint-Hyacinthe et nous parlent de la situation là-bas. Merveilleux. Si ça pouvait exister dans l'ensemble du Québec, je pense, la qualité d'enseignement du côté public qui se donne à Saint-Hyacinthe et qui est calquée en bonne partie sur le privé, dans le fond... Les bonnes choses du privé, on a essayé de les reproduire au public, et avec succès. Chapeau! C'est ce qu'on souhaiterait qui soit fait. C'est en plein le sens de notre recommandation de tout à l'heure à l'effet qu'on devrait s'inspirer du privé pour le public. Saint-Hyacinthe, vous l'avez déjà fait, bravo!

Le Président (M. Paré): Merci, M. Goulet. Vos remarques finales, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je veux remercier l'Association des parents catholiques du Québec pour l'éclairage qu'ils fournissent pour l'avancement de nos travaux. Je vous en remercie.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, pour votre présentation.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, au plaisir.

J'inviterais maintenant le Comité pour l'avenir des franco-protestants de la commission scolaire Greater Québec et son commissaire, M. Jean-Paul Jacques.

M. Jacques, on aimerait que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous avez 30 minutes, dont 10 minutes de présentation et 20 minutes d'échanges avec les parlementaires. M. Jacques.


Comité pour l'avenir des franco-protestants de la commission scolaire Greater Québec

M. Jacques (Jean-Paul): M. le Président, Mme la ministre, M. le député de Marquette, membres de la commission parlementaire, j'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent ce matin. À ma gauche, M. Serge Leclerc, qui est commissaire; à ma droite, M. Stéphane Gariépy, président du comité d'école Eau-Vive, et Mme Georgina Rilling, qui est commissaire représentant la minorité.

Le Président (M. Paré): Bienvenue.

M. Jacques (Jean-Paul): M. le Président, le Comité a pris connaissance de l'avant-projet de loi et est en accord de principe avec une plus grande responsabilisation au niveau de l'école. Ceci va permettre aux parents qui forment le conseil d'établissement de participer plus entièrement ou activement à la mission éducative.

Nous vous présentons ce matin des commentaires qui, selon nous, vont permettre au conseil d'établissement d'une école confessionnelle de mieux exercer ses fonctions et ainsi permettre à l'école d'avoir la couleur locale de la communauté qui la compose.

Actuellement, notre commission scolaire dessert une clientèle composée de deux communautés, soit les anglophones et les franco-protestants. Quelque 2 300 élèves du primaire et du secondaire, provenant d'à peu près tous les secteurs des régions 03 et 12, fréquentent les 10 écoles primaires et six écoles secondaires situées sur le territoire de la commission scolaire Greater Québec. Cinq de ces écoles reçoivent moins de 100 élèves chacune. L'enseignement en anglais est offert dans sept écoles primaires et dans quatre écoles secondaires. L'enseignement en français est offert dans trois écoles primaires et dans deux écoles secondaires.

Puisque l'entrée en vigueur du système des commissions scolaires linguistiques aura un impact important sur nos deux communautés, différents comités ont été formés pour traiter des préoccupations des deux communautés. La mission de notre commission scolaire a toujours été de répondre aux besoins éducatifs de nos deux communautés et d'assurer leur plein épanouissement. Ainsi, il est de la plus haute importance que les intérêts et les droits des communautés francophone et anglophone soient protégés et que l'implantation des nouvelles commissions scolaires se fasse harmonieusement, avec le moins d'impacts possible sur la clientèle scolaire. C'est pour respecter cet objectif que nous, les membres du Comité pour l'avenir des franco-protestants, apportons les commentaires suivants.

À la section 2 de l'avant-projet de loi concernant le conseil d'établissement, l'article 41 qui parle de la composition du conseil d'établissement, nous croyons que les parents doivent avoir une plus grande représentation au sein du conseil d'établissement. Les deux membres de la communauté pourraient être remplacés par des parents ou bien que le nombre total des membres du conseil soit augmenté afin de garantir une plus grande participation des parents.

L'article 43 concerne la participation du commissaire d'école. Étant donné le territoire géographique de notre commission scolaire, il est tout à fait possible que dans la circonscription électorale d'un commissaire il y ait plus d'une école et que dans la circonscription d'un autre commissaire il n'y ait pas d'école. Alors, nous suggérons que le deuxième paragraphe soit modifié afin de permettre qu'un commissaire puisse être désigné au conseil d'établissement d'une école par le conseil des commissaires peu importe la circonscription électorale qu'il représente.

L'article 53. La présidence du conseil d'établissement. Considérant l'importance que veut donner le projet de loi à la participation des parents au conseil d'établissement, nous croyons qu'il est essentiel que le président soit un parent représentant l'école.

Maintenant, à l'article 69, nous lisons que la commission scolaire doit consulter le conseil d'établissement sur la reconnaissance confessionnelle de l'école. Afin de pouvoir garantir le droit d'existence pour les écoles franco-protestantes comme écoles confessionnelles reconnues, nous souhaitons voir certaines garanties dans la loi, telles qu'un élargissement de la loi afin de permettre au conseil d'établissement d'une école reconnue comme étant une école confessionnelle le droit d'embaucher son personnel selon des critères spécifiques et propres à l'école; un élargissement de la loi afin de permettre au conseil d'établissement d'une école d'élaborer les critères de sélection pour le poste de directeur d'école et de participer au sein du comité de sélection; un élargissement de la loi afin de permettre au conseil d'établissement d'une école reconnue comme étant une école confessionnelle le droit d'établir des critères d'inscription étroitement liés au projet éducatif de l'école; la reconnaissance du statut d'une école confessionnelle en garantissant le financement et le transport scolaire nécessaires au maintien de l'école.

Lorsque le statut confessionnel d'une école est reconnu, cette reconnaissance ne devrait être révoquée que lors d'une demande formelle par la majorité des membres du conseil d'établissement ayant fait l'objet d'approbation par la majorité des parents de l'école.

En terminant, nous aimerions remercier les membres de la commission de l'éducation pour l'occasion qui nous est donnée d'exprimer nos opinions concernant l'avant-projet de loi et nous osons croire qu'ils en tiendront compte afin de protéger les droits et privilèges des minorités. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Jacques. Il vous reste un peu de temps, est-ce que d'autres personnes voudraient ajouter? M. Gariépy.

M. Gariépy (Stéphane): Oui, M. le Président, Mme la ministre, il me fait plaisir de vous parler. J'aimerais insister de nouveau sur l'importance des élargissements dont M. Jacques a fait mention tantôt. Par sa réforme, Mme la ministre désire poursuivre des objectifs qui sont entre autres la réussite scolaire, une augmentation de l'autonomie des écoles, l'adaptation de ses services aux besoins et caractéristiques de ses élèves, le renforcement des liens avec la communauté, également l'intégration d'élèves de familles immigrantes.

À l'heure actuelle, dans notre système présent de commissions scolaires confessionnelles, les écoles franco-protestantes de la région de Québec poursuivent et atteignent avec un très bon degré de succès ces objectifs, tel que nous le vivons actuellement. Nos écoles présentent un assez bon taux de réussite scolaire, même un excellent dans plusieurs cas. Elles ont des services qui sont adaptés aux besoins et aux caractéristiques de ces élèves et aussi de leurs familles. Il y a de très bons liens avec la communauté franco-protestante. Ces liens sont très développés et les parents sont très engagés dans l'école, tant dans la vie de chaque jour de l'école que dans les comités qui sont très fonctionnels. En ce qui nous concerne, nos comités, conseils d'orientation, comités d'école, fonctionnent très bien.

(10 h 50)

De plus, actuellement, nos écoles contribuent à l'intégration des familles immigrantes. À titre d'exemple, il y a Mme Rilling, qui est ici présente, qui est d'origine grecque, si je ne me trompe pas, et qui est parmi nous à la fois sur le comité d'école et sur le conseil des commissaires.

En fait, les parents franco-protestants sont prêts à recevoir davantage de responsabilités par la voie d'un conseil d'établissement. Ils sont prêts à recevoir plus de pouvoirs, même, à la limite, comme vous voyez, on en demande pratiquement davantage. En ce qui nous concerne, l'instauration des commissions scolaires linguistiques aura dans le cas des franco-protestants exactement l'effet contraire de celui que poursuit présentement la réforme. Nos écoles fonctionnent bien, comme je vous l'ai mentionné, mais, en ce qui nous concerne, la réforme aurait l'effet contraire, ce qui est très important à souligner en ce qui concerne les objectifs de Mme Marois.

En principe, les écoles francophones protestantes ne sont pas opposées à la réforme, donc. Elles sont prêtes à s'intégrer aux commissions scolaires francophones qui sont locales et à les enrichir par leurs caractéristiques qui leur sont propres. On a nos propres caractéristiques, on est prêt à travailler avec les autres écoles francophones. Toutefois, pour ce faire, on doit d'abord survivre comme écoles puis, en ce qui nous concerne, c'est de notre survie dont il est question présentement dans la réforme.

C'est la raison pour laquelle l'intégration de leurs écoles aux commissions scolaires francophones ne serait acceptable, pour les franco-protestants que nous sommes, que nous représentons, que si la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique contient des garanties minimales telles que celles que nous avons mentionnées tantôt, disons en ce qui concerne le droit de gérance, si on veut, en ce qui concerne le choix des professeurs, du directeur, entre autres, et un autre enjeu très important qui est celui du transport scolaire. À cause de notre éparpillement, on se retrouvait dans une situation, en ce qui nous concerne, où notre clientèle, qui est dispersée mais présentement dans une seule commission scolaire, se retrouverait dans au moins quatre commissions scolaires différentes, même cinq commissions scolaires, ce qui implique autant d'ententes entre commissions scolaires afin que notre école puisse continuer à être desservie. Alors, ce sont les points qu'on vous amène aujourd'hui. On est prêt à répondre à vos questions.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Gariépy. Mme la ministre.

Mme Marois: Oui, merci, M. le Président. En fait, c'est assez intéressant, ce que vous vivez comme situation, dans un sens. Vous faites la démonstration, je vous dirais, et je le dis sans flagornerie, que la perspective que nous avons et ce que nous recherchons, à savoir une école autonome et plus responsable de ses orientations, devrait amener une amélioration du niveau de réussite et de la qualité des services éducatifs que nous rendons disponibles dans nos écoles parce que, du fait de la grande étendue de vos commissions scolaires sur le territoire... Greater Québec, c'est quoi, c'est presque la moitié du Québec, M. Jacques, un peu moins?

M. Jacques (Jean-Paul): Un peu moins mais...

Mme Marois: Pas beaucoup moins. Ce qui fait que les écoles ont pris en charge beaucoup de responsabilités. C'est ce qui est arrivé, vous l'avez dit vous-mêmes à travers les différentes rencontres que j'ai eues avec vous. Donc, en ce sens, c'est intéressant quand même, l'expérience que vous avez vécue à cet égard-là.

Par contre, le risque présente peut-être certaines attentes que vous manifestez à l'égard de ce que deviendra l'école demain, c'est qu'on puisse tomber dans cette perspective d'une école à charte. Je sais qu'un groupe qui va venir plus tard le propose, à toutes fins pratiques, et ce n'est pas l'orientation que nous privilégions parce que nous croyons que l'école fait partie d'un ensemble où il y a des responsabilités au plan national et il y a une perspective, entre autres, par exemple, sur la question du curriculum. Il y a des parents qui sont venus avant vous et qui souhaitaient presque, c'est-à-dire qui donnaient l'impression que le curriculum pouvait être choisi selon ce que les parents souhaitaient ou pas. Ce n'est pas le cas. Vous êtes bien conscients de ça, le curriculum sera un curriculum national et, après, on pourra l'aménager, l'ajuster, mais il y aura une obligation d'acquisition de connaissances à l'intérieur de ce projet d'enseignement et de ce projet éducatif.

(11 heures)

Mais, cela étant, je reviendrai un petit peu plus tard dans nos échanges sur vos attentes par rapport au respect de ce que vous avez vécu jusqu'à maintenant et de ce que vous souhaiteriez pouvoir vivre demain, étant entendu cependant que toute la question de la place de la religion à l'école comme de la place de la religion dans l'ensemble de notre système scolaire – je l'ai dit à d'autres groupes ce matin, je crois que vous étiez là – sera abordée par un comité à qui je confierai ce mandat qui fera rapport et sur lequel on pourra entendre à nouveau les points de vue des personnes intéressés, dont vous êtes. Donc, je ne veux pas non plus m'attarder trop longtemps sur ça même si je poserai quelques questions sur les suggestions que vous faites à cet égard.

Maintenant, je reviens à des propositions plus précises que vous nous faites sur la composition du conseil d'établissement. À l'article 41, vous dites: «Les deux membres de la communauté pourraient être remplacés par des parents ou que le nombre total de membres du conseil soit augmenté afin de garantir une plus grande participation des parents.» Est-ce que je comprends par là que vous êtes d'accord avec la participation des membres de la communauté en autant que ça ne vient pas enlever, si on veut, la place des parents et que, par ailleurs, on compense pour que les parents restent... soient majoritaires ou en nombre significatif au sein du conseil d'établissement?

Le Président (M. Paré): M. Jacques.

M. Jacques (Jean-Paul): Tout à fait exact, Mme la ministre. Les parents étant vraiment ceux qui sont les plus concernés par l'école devraient avoir une place prépondérante dans l'école, et nous ne sommes pas en désaccord, mais, actuellement, de la façon dont c'est présenté, il y aurait une diminution de l'influence des parents au niveau du conseil d'établissement. Alors, on pourrait augmenter les parents et garder les membres de la communauté.

Mme Marois: D'accord.

M. Jacques (Jean-Paul): C'est exactement ça, le sens.

Mme Marois: Donc, vous n'avez pas d'objection de principe à...

M. Jacques (Jean-Paul): Non, aucunement.

Mme Marois: ...la présence des membres de la communauté au sein du conseil d'établissement?

M. Jacques (Jean-Paul): Nous, c'est la place prépondérante des parents au sein du conseil d'établissement que nous recherchons.

Mme Marois: D'accord. À ce moment-là, est-ce que vous souhaitez, comme d'autres l'ont fait, vous le mentionnez effectivement, que la présidence... Je le vois, là, à votre article 53, vous recommandez formellement aussi que la présidence puisse revenir à un parent.

Vous êtes assez explicite sur un élargissement des pouvoirs donnés aux conseils d'établissement. Quant aux pouvoirs actuels que la loi propose de confier aux conseils d'établissement – on a eu des discussions pas mal depuis le début sur cela – je crois comprendre in absentia, dans le sens où vous ne dites pas être... vous dites d'abord être en accord avec la loi et vous ne revenez pas sur cette question autrement que pour en demander davantage sous un angle qui est la question, entre autres, du statut confessionnel de l'école et des choix du personnel. Est-ce que je dois comprendre que vous êtes particulièrement d'accord avec les pouvoirs que l'on souhaite confier actuellement aux conseils d'établissement et aux parents qui y sont, entre autres, en ce qui a trait à l'approbation du projet pédagogique, du projet éducatif de l'école et même de certaines stratégies qui seraient retenues par l'école?

M. Jacques (Jean-Paul): Comme vous le savez, Mme la ministre, nonobstant des demandes que nous faisons ici, par rapport à la situation particulière de nos écoles, cette prise en charge est déjà enclenchée dans nos écoles.

Mme Marois: C'est ça, oui.

M. Jacques (Jean-Paul): Les parents sont très activement liés aux écoles et participent activement sur les différents comités. Alors, pour nous, je veux dire, ce n'est que souhaitable. Mais, afin de pouvoir actualiser les pouvoirs qui sont donnés, alors c'est là qu'on arrive en disant: On aimerait avoir un élargissement, afin de pouvoir activer justement ces nouveaux pouvoirs. Parce qu'on semble ici, lorsqu'on discute... quand on parle d'écoles qui doivent être la couleur de la communauté, on a une différence peut-être de vision quand on parle de communauté. Pour nous, la communauté, c'est les gens qui fréquentent l'école et non le quartier. Alors, c'est ça, pour nous autres, le sens de communauté. Alors, c'est un petit peu ça, là, qui peut peut-être porter... Je n'aimerais pas que ça porte à confusion quand on dit qu'on veut des choses au niveau de l'engagement des professeurs, des critères, c'est par rapport à la communauté de l'école.

Mme Marois: Bien, prenons cette question-là, puisque vous l'abordez, et je vais terminer ma première intervention avec ça. Vous souhaitez aller jusqu'à l'embauche du personnel. Est-ce que ça veut dire que le conseil d'établissement deviendrait le patron des gens de l'école? Et c'est là que vous n'êtes pas trop loin de ce qu'on définit dans d'autres États comme étant ce qu'est une école à charte.

M. Jacques (Jean-Paul): M. Gariépy pourrait répondre à la question.

M. Gariépy (Stéphane): Enfin, on ne veut pas devenir les patrons, on ne veut pas remplacer la structure qui existe, on veut avoir une part plus importante dans le choix des enseignants et, également, du directeur, en fait. En ce qui nous concerne, l'école, la façon dont nous la vivons, en ce qui concerne l'enseignement religieux, si on veut, ou notre vie confessionnelle, ça ne se limite pas à l'enseignement religieux. Même, je dirais qu'à la limite l'enseignement religieux pourrait être pris en charge directement, financièrement puis concrètement par la communauté. Nous, notre style d'école que nous préconisons, c'est une école où on intègre nos valeurs de foi, puis nos valeurs concrètes qui en découlent dans la vie de chaque jour, nous les intégrons dans la vie de l'école, d'où l'importance de l'implication à la fois... non seulement d'une pastorale, par exemple, d'une implication des enseignants et du directeur ainsi que des parents dans la vie de l'école. Donc, c'est pour cette raison-là que nous tenons à être en mesure d'avoir des enseignants qui partagent notre projet éducatif.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Gariépy.

M. Gariépy (Stéphane): Merci.

Le Président (M. Paré): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue aux représentants du Comité pour l'avenir des franco-protestants de la commission scolaire Greater Québec.

J'aimerais faire un commentaire, premièrement, sur la place qu'on fait aux parents dans le nouveau système, parce qu'on prétend et on entend depuis le début des travaux de cette commission parlementaire: l'intention gouvernementale est de faire de plus en plus de place aux parents. Sauf qu'à peu près tous les groupes représentant des parents qui sont venus témoigner en commission parlementaire ont un malaise par rapport à la place qui leur est réservée, et on sait pourquoi. Ils avaient un comité d'école où ils étaient en nombre de 25, et un conseil d'orientation où ils étaient toujours majoritaires et le nombre pouvait aller jusqu'à sept, on balance ça par-dessus bord, on remplace ça par un conseil d'établissement où, là, ils sont à égalité des voix.

Donc, à l'évidence, je ne pense pas qu'avec ce que nous avons sous les yeux on puisse affirmer qu'on accorde plus de place aux parents au niveau des écoles parce que l'ensemble des représentants des parents, que ce soit au niveau des comités d'école, conseils d'orientation ou d'autres groupes, nous ont dit: On est mal à l'aise par rapport à la place que vous nous faites. Dans certains cas, on demande même de préserver le comité d'école. Dans d'autres cas, on demande un comité de participation de parents. Parce qu'on semble constater que les parents vont avoir de moins en moins leur place au sein de ce qui est prévu dans l'avant-projet de loi. C'est le commentaire que je voulais faire parce que, à l'évidence, il y a un décalage entre le discours entendu et les témoignages qui sont rendus ici.

Sur l'autre question maintenant, vous demandez le droit d'embaucher un personnel, le poste de directeur d'école, de participer au sein du comité de sélection, d'établir des critères d'inscription. Est-ce que ce sont des choses que vous avez comme leviers actuellement, dans le cadre que nous avons, avec les commissions scolaires protestantes? Ou est-ce que vous avez ces leviers-là indirectement, c'est-à-dire que la particularité de votre commission scolaire fait en sorte que vous n'avez aucune crainte par rapport au personnel qui est embauché et par rapport à la direction d'école qui est embauchée? Vous avez ça presque de fait. Et compte tenu qu'on se dirige dans un système de commissions scolaires linguistiques où, là, il va y avoir mariage entre la communauté catholique et la communauté protestante, vous perdez ces leviers-là. Ça, c'est la première question que je pose.

Et, dans un deuxième temps, pourquoi est-ce que ça devrait être exclusif, ce que vous revendiquez, uniquement pour des écoles confessionnelles? Les directeurs d'écoles publiques demandent ces mêmes pouvoirs là et ne font pas référence à la confessionnalité.

Et troisième question, peut-être, au niveau de la sélection. Quand vous dites: «d'établir des critères d'inscription étroitement liés au projet éducatif de l'école», là, on semble se diriger vers une sélection des élèves, et je pense que ce qui inspire l'avant-projet de loi ne suivrait pas cette recommandation-là.

(11 h 10)

Le Président (M. Paré): M. Leclerc.

M. Leclerc (Serge): Oui, j'aimerais répondre. Effectivement, présentement, au sein des commissions scolaires Greater et Eastern Québec, on a les leviers nous permettant de faire respecter le projet éducatif, sa couleur et, jusqu'à un certain point, le choix des professeurs, c'est-à-dire que les professeurs doivent adhérer, doivent correspondre au projet éducatif, doivent y adhérer et se sentir à l'aise et libres de le promouvoir à l'intérieur du système scolaire de tous les jours.

Ensuite, concernant la sélection des étudiants, on a présentement aussi, jusqu'à un certain point, ce levier-là à l'intérieur de nos écoles, ce qui permet jusqu'à un certain point de protéger la couleur de notre école.

M. Ouimet: Mais vos écoles sont publiques et communes?

M. Leclerc (Serge): Oui. Je ne dis pas qu'on a...

M. Ouimet: Bien que confessionnelles, elles sont ouvertes à tous et à toutes?

M. Leclerc (Serge): Oui, sauf que, disons que, lorsqu'on présente le projet éducatif à un parent, ou le parent qui veut inscrire son enfant dans une école, il va sûrement demander à voir le contenu du projet éducatif pour savoir si lui-même est prêt à adhérer, si ça correspond à ses visions, à ce que l'enfant va faire. Donc, lorsque le projet éducatif est présenté, les parents qui y adhèrent sont favorables à faire l'inscription de leurs enfants là. Ceux qui n'y adhèrent pas ou qui ne veulent pas parce qu'ils ont l'impression que c'est trop rigide ou trop restreint décident simplement de faire l'inscription ailleurs. Comme vous dites, les écoles sont ouvertes, on peut s'inscrire où on veut. Alors, c'est le choix des parents d'inscrire à côté ou ailleurs. Alors, c'est ce qu'on veut.

M. Ouimet: Mais le problème que ça pose, c'est qu'en région le parent qui serait domicilié en face d'une école X, mais où le projet éducatif ne correspond pas à ses valeurs pour toutes sortes de raisons... si la dimension religieuse, elle est omniprésente et le parent ne se sent pas à l'aise avec cela, ça l'oblige, lui, à inscrire son enfant dans une école qui serait plus éloignée de son lieu de domicile.

M. Leclerc (Serge): Vous parlez de quelqu'un qui veut y adhérer ou qui ne veut pas y adhérer?

M. Ouimet: On parle d'une personne qui veut que son enfant puisse recevoir les services éducatifs, le programme pédagogique national du curriculum, qui veut avoir des apprentissages en mathématiques, en sciences, en histoire, en géographie, en français.

M. Leclerc (Serge): C'est tout compris dans ça. Il n'y a aucun problème au niveau de l'enseignement, on respecte exactement les mêmes normes que toutes les écoles. Les endroits où sont situées nos écoles présentement sont presque à côté d'autres écoles qui appartiennent à la commission scolaire des écoles catholiques de Québec, ou peu importe. Donc, il n'y a pas d'exclusion dans le sens de dire au niveau du territoire. S'il est près et que c'est la seule école qu'il peut fréquenter – ce n'est pas le cas parce qu'on est toujours à côté d'une autre école. Les emplacements de nos écoles sont dans les quartiers résidentiels où il y a déjà une autre école catholique, ou peu importe, qui est dans la même région. Alors, ça ne s'applique pas dans ce cas-là.

M. Ouimet: O.K. Et sur la place des parents, le commentaire que je faisais tantôt, partagez-vous ce sentiment-là? Peut-être que la question s'adresse davantage à M. Jacques. Partagez-vous ce sentiment que, sur le plan du discours, on semble vous dire: On veut vous faire davantage de place? Lorsque vous regardez ce qui vous est offert présentement par rapport à ce que vous avez dans l'actuelle Loi sur l'instruction publique, il y a un décalage important.

M. Jacques (Jean-Paul): Oui. C'est pour ça qu'on demande d'avoir une majorité de participation des parents, c'est pour assurer exactement ça. C'est sûr que dans l'ancienne structure, au niveau du comité d'école et du conseil d'orientation, il y avait deux comités. Mais ce qu'il faut dire, c'est que souvent il y avait les mêmes parents qui étaient sur les deux comités, ça faisait une double réunion et beaucoup, beaucoup d'efforts mis pour les mêmes causes. Alors, en mettant tout ça dans le conseil d'établissement, nous autres, nous disons: C'est bienvenu. Mais ce qu'on veut quand même s'assurer, c'est que les parents aient une place de choix là-dedans, parce que, dans le fond, ce sont les clients, en bout de compte; c'est eux qui paient, alors ils doivent avoir un droit.

M. Ouimet: Dans le fond, vous dites «une place de choix», mais est-ce qu'on ne pourrait pas dire «d'assurer la majorité au sein de ce conseil d'établissement là»? Et lorsqu'on dit «majorité», on sous-entend d'assurer un contrôle sur les décisions qui s'y prennent. Parce que l'intérêt des parents, j'imagine, c'est de s'assurer que les décisions qui émaneront du conseil d'établissement vont correspondre à la volonté des parents. Si les parents n'ont pas le contrôle, la majorité au niveau du conseil d'établissement, ils pourraient être en position de minorité aussi. Je sais bien que ce ne sera pas la règle à travers la province, où il va y avoir des conflits, mais il peut arriver des situations conflictuelles, et c'est dans les situations conflictuelles où tu veux t'assurer que la loi te donne comme parent la protection voulue pour assurer que tu exerces la majorité, donc le contrôle des décisions.

M. Jacques (Jean-Paul): Je suis en accord avec ça. M. Gariépy, je pense, aimerait...

(11 h 20)

Le Président (M. Paré): M. Gariépy, brièvement.

M. Gariépy (Stéphane): Je vais dans le même sens. En ce qui nous concerne, vu qu'il existe un excellent climat de collaboration entre les enseignants, les parents et la communauté, ça ne nous pose pas de problème. On fonctionne plutôt en collégialité, alors, le fait que les parents seraient majoritaires ou, à la limite, minoritaires ne pose pas de problème en général. C'est sûr que c'est en cas de conflit, comme vous dites, où là c'est important que les parents aient une majorité absolue.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Gariépy. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Il y a madame qui voulait parler.

Le Président (M. Paré): Ah! excusez, madame, excusez-moi.

Mme Rilling (Georgina): Est-ce que ça vous dérangerait si je parlais en anglais?

M. Ouimet: Go ahead.

Mme Rilling (Georgina): O.K. I just have a few points to make on the criteria of registration but I just want to add first that our community is filled with a lot of young families, families with school age children and with children not yet in school, also with many young adults that have not yet started a family. We are not a dying community but a growing community.

Now, if we compare this, having the criteria with, let's say, a school that is strong in music, but if you have a family that is very strong in music, very interested in music, and there is a school close to them, just down the street, that's very strong in sports, now, they're not going to put their child in the school strong in sports if they want their child to grow up strong in music. They're going to switch for that school that's strong in music.

I really feel that certain criterias have to be set and I'm going to compare it with the French language and with the laws that are implemented to protect the French language which I am in accordance with, but with all the English pressure that is around Québec, if there are no laws implemented to protect the French language, within generations, the French language would surely die, and I know that for myself too that my English is a lot stronger than my Greek and, since I've been learning French, my Greek is even less than that. But, you know, there are certain criterias that have to be set to protect what we do have and it would cause a lot of conflict, I think, between home and school when there is... I mean, people can send their kids to our school and say they are in accordance with our educational project but really they're not. You know, when the child comes home with certain stuff or certain rules, you know they're going to be supported at home the way they're supported at school.

Le Président (M. Paré): Thank you for your comments. Des remarques finales, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: If I just may add in two seconds. A situation where, let's say, within a radius of 50 km or 100 km, you have three school buildings and all three are entitled to develop their own particular project: one is either strongly catholic or strongly protestant, one chooses on the basis of physical education, the other one chooses on the basis of music. What happens to the parent whose child would not answer to the selection process of the music school or the physical education school and who would neither be catholic, if the school were protestant or vice versa? That is the concern, I think, of the legislator.

Mme Rilling (Georgina): O.K. But I think that is a non-existing concern because there are schools, I mean, schools do exist that don't have all those criterias.

M. Ouimet: But in an urban area maybe, but in a rural area, less so.

Le Président (M. Paré): Merci. Mme la ministre, le mot de la fin.

Mme Marois: Certainement. Merci pour votre présentation et vos commentaires et recommandations, on verra comment en tenir compte. En même temps, je veux quand même être claire. On se comprend bien que, en ce qui concerne la place de la religion à l'école, je le redis, il y aura une autre tribune, un autre lieu pour en débattre et en discuter, et je pense qu'à ce moment-là on pourra reprendre certains des aspects de vos propositions au moment de la discussion de cette question. Ça va? Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, madame, merci, messieurs. Bonne fin de journée.

M. Jacques (Jean-Paul): Merci aux membres de nous avoir reçus.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Paré): Maintenant, nous allons entendre l'Association des communautés scolaires franco-protestantes du Québec représentée par sa présidente, Mme Judy Fay.

Je vous rappelle, Mme Fay, que nous avons 45 minutes d'échanges dont 15 minutes pour votre présentation et 30 minutes d'échanges avec les parlementaires. Je vous prierais de nous présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît.


Association des communautés scolaires franco-protestantes du Québec (ACSFPQ)

Mme Fay (Judy): Merci, M. le Président. Je vous présente Mme Suzanne Berney, à ma gauche, qui est directrice de l'école La Source, à Chicoutimi. Je vous présente aussi M. Jocelyn Aubut, qui est conseiller en orientation et aussi vice-président de l'Association. Et, ensuite, il y a M. Rémy Bouchard, à ma droite, qui est commissaire, membre de l'Association et membre de l'exécutif; il est agent de la paix – et, souvent, on a besoin de lui en ce sens-là – et aussi président du Syndicat des policiers d'Alma.

M. le Président, Mme la ministre, M. le porte-parole officiel de l'opposition, Mmes et MM. les députés, on vous remercie d'avoir bien voulu nous entendre ce matin. Nous avons été très encouragés de voir que vous avez accepté de parler un petit peu plus de tout le débat des écoles à charte. Nous savons que, autant il y a de législations sur les écoles à charte, autant il y a de recettes. Alors, ce matin, ce que nous souhaitons, ce n'est pas de faire le tour complet de la question, mais seulement de reconnaître qu'il y a une certaine valeur à ce concept et, à un autre moment, on pourra avoir des témoignages experts, soit du ministère de l'Éducation de l'Alberta, soit du U.S. State Department of Education, soit aussi des praticiens et des recherchistes qui ont traité beaucoup plus en profondeur que nous tout le sujet des écoles à charte. Alors, nous venons humblement ce matin devant vous avec un concept qui nous semble intéressant et, aussi, sans prétendre en être des experts, et ça, je le souligne. C'est une formule qui est en croissance partout où elle est instaurée et nous voulons nous pencher quelques minutes pour vous en parler davantage.

Nous applaudissons la redistribution des pouvoirs que le gouvernement québécois envisage dans l'avant-projet de loi. Vous désirez – et je cite – «revoir le cadre juridique qui fixe les responsabilités des uns et des autres» en diminuant les responsabilités des commissions scolaires au profit des écoles, «accorder à chaque établissement d'enseignement une plus grande autonomie, adapter ses services aux besoins et aux caractéristiques de ses élèves et de son milieu» tout en demandant à cette école de rendre compte à la communauté de ses services, tout cela dans le but louable d'en faire l'école de la réussite.

Nous comprenons le contexte actuel dans lequel vous devez opérer cette réforme. Nous devons inévitablement subir les compressions budgétaires tout en répondant à l'urgence de pallier à la faible performance de notre système relativement à la diplomation.

Permettez-nous d'exprimer notre opinion et nos préoccupations en tant que représentants d'écoles généralement reconnues comme performantes. En effet, au fil des ans, plusieurs de nos écoles se sont taillées une place enviable au niveau des épreuves de classement du MEQ. Notre taux de décrochage est presque nul. La réputation de notre compétence et de notre dynamisme pédagogique est solidement établie. La culture organisationnelle de nos écoles est enrichie par des visionnaires et des exécutants engagés. Nos parents tiennent une place prépondérante dans la vie de nos écoles et sont actifs à divers paliers de l'administration scolaire. Et ça nous amène à se demander la question: Pourquoi réinventer le bouton à quatre trous?

La mise en place prochaine des commissions scolaires linguistiques menace l'existence même de nos écoles étant donné leur nature régionale. Cette réalité nous a incités à considérer sérieusement d'autres options. Nos recherches approfondies nous ont conduits en Grande-Bretagne. En 1988, le gouvernement britannique était aux prises avec un déficit budgétaire énorme et une piètre performance académique. Pour contrer ces problèmes, il fut décidé d'offrir l'option des écoles à charte dans toutes les communautés qui voulaient s'en prévaloir. Ce n'était pas une solution pour tout le pays.

Loin de s'arrêter à l'Angleterre, ce phénomène a gagné, l'année suivante, la Nouvelle-Zélande qui a transformé ses 2 600 écoles publiques en autant d'écoles à charte. Deux ans plus tard, soit en 1991, nos voisins américains adoptèrent leur première législation permettant la création d'écoles à charte. Nous retrouvons actuellement aux États-Unis au-delà de 700 de ces écoles, réparties dans 29 États. Le U.S. Department of Education prévoit dans sa planification stratégique l'établissement, d'ici l'an 2000, d'au minimum 3000 écoles à charte, et ce, dans 40 États différents. En février 1997, le président Clinton, lors de son State of the Union Address , a identifié sa priorité nationale en s'exprimant comme suit: «Our plan will help America create 3000 more charter schools. Charter schools are a powerful tool to provide communities, schools and teachers the maximum flexibility to give students more opportunity to reach high standards of achievement, to improve teaching and learning in our schools.»

Tout dernièrement, l'Alberta, chez nous, s'est engagée sur la même voie que les pays ci-haut mentionnés en adoptant, elle aussi, une législation permettant l'établissement de ces écoles à charte. La ministre de l'Éducation de cette province, Halvar Johnson, résume ce mouvement des écoles à charte comme suit: «Charter schools are an opportunity to seek innovative methods and learning and build on the many good things already happening in education.»

Constatant l'ampleur mondiale de ce phénomène, il nous a semblé opportun d'approfondir notre connaissance des écoles à charte et nous voulons vous en partager les faits saillants. Soulignons, d'entrée de jeu, l'interchangeabilité des notions de l'école à charte et de l'école autonome et responsable, tel que vous le préconisez.

Mme Berney (Suzanne): Qu'est-ce qu'une école à charte? Les écoles à charte sont une nouvelle forme d'écoles publiques. Elles sont gouvernées par un comité de direction; il pourrait s'agir, au Québec, d'un conseil d'établissement. Celui-ci est généralement formé de représentants des enseignantes et des enseignants, de parents et de membres de la communauté, et possiblement d'élèves. Elles sont donc contrôlées de l'intérieur même de l'école et oeuvrent au sein d'un cadre de travail assoupli. Elles sont établies par charte émise par l'autorité gouvernementale concernée – au Québec, le ministère de l'Éducation – et contenant les détails des résultats que les parties s'engagent à atteindre d'un commun accord. Une fois la charte établie, l'école est autorisée à atteindre les objectifs visés de la manière qu'elle juge la plus favorable, et ce, en conformité avec sa vision. Si, par la suite, l'école n'obtient pas les résultats escomptés selon les standards préétablis par le ministère, elle se voit retirer son droit d'exister en tant qu'école à charte et doit, par conséquent, fermer ses portes.

En quoi les écoles à charte sont-elles meilleures? L'«empowerment» est accru au niveau des éducateurs; une bureaucratie réduite résulte en un plus grand pourcentage de fonds se rendant directement aux élèves; un soutien parental accru; un climat organisationnel amélioré; un engagement plus grand de la part des élèves; un encouragement pour les enseignantes et les enseignants à prendre des risques, à prendre des initiatives; une revalorisation de la profession enseignante; la compétition inciterait les écoles publiques traditionnelles à s'améliorer, effet d'entraînement; la responsabilisation mènerait à des écoles plus à l'écoute de sa clientèle; et l'autonomie remise aux écoles en augmenterait l'efficience.

Tous les points ci-haut mentionnés mènent vers la réussite et, pour reprendre une autre de vos idées, la réussite est un levier pour la réussite. Les écoles à charte seraient-elles le levier désiré, le levier dont M. Michel Gravel, de l'Association des directrices et des directeurs d'école, était à la recherche?

Prêchons-nous à des convertis? Lors de nos recherches, nous avons pris connaissance du rapport émis par cette commission en décembre dernier. Nous avons été frappés par la similitude entre les conclusions, les observations et les recommandations qu'on y retrouve et le concept des écoles à charte. D'ailleurs, nous nous en réjouissons, car ceci illustre davantage la convergence de ces idéologies. Vos recommandations pourraient très bien être insérées à l'intérieur d'un document traitant des écoles à charte sans que personne n'y voit la différence.

(11 h 30)

Alors, vous dites: «Il semble que ce soit une équipe exceptionnelle, un directeur et des enseignants particulièrement dynamiques et novateurs qui sont souvent responsables de l'émergence d'une école efficace.» Malgré sa volonté initiale d'éviter autant que possible de débattre des structures, elle en arrive à la conclusion que l'accroissement de la réussite requiert que le système éducatif soit restructuré autour de l'école. La commission croit que l'école de la réussite est une école autonome et responsable. La commission de l'éducation juge que la réussite scolaire appelle une nouvelle culture organisationnelle de l'école. Pour réaliser sa culture, la commission recommande de recentrer le système éducatif sur une école autonome, responsable et qui dispose de tous les pouvoirs et moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission. La commission de l'éducation recommande de simplifier et d'assouplir le cadre de l'organisation du travail et la répartition des tâches tant dans les conventions collectives du personnel scolaire que dans le régime pédagogique afin de les transformer en outils de réussite. Enfin, afin que tous puissent développer leur potentiel, la commission de l'éducation recommande d'explorer et de développer au primaire comme au secondaire, en formation générale comme en formation professionnelle, des stratégies diversifiées d'enseignement afin de réussir à faire mieux apprendre l'ensemble des élèves.

M. Aubut (Jocelyn): Je vais commenter le tableau à la page 8. C'est basé sur les recommandations de la commission de l'éducation.

Le Président (M. Paré): Oui. Allez-y.

M. Aubut (Jocelyn): Et puis on peut voir que l'école à charte est bien placée pour faire un pas de plus dans la même direction que les conditions de réussite scolaire au secondaire. Premièrement, on a que l'école autonome et responsable devrait déterminer ses objectifs dans le respect du curriculum. On a parlé tout à l'heure de l'école à charte, qu'elle pourrait elle-même choisir son curriculum. Ce n'est pas ce qu'on voit et ce n'est pas ce qu'on propose ici. L'école à charte détermine ses objectifs dans le respect du curriculum national et le détail des objectifs terminaux serait même contenu dans la charte. La commission recommande aussi que l'école autonome devrait développer un plan d'action centré sur la réussite. Mais, c'est dans la nature même d'une école à charte, à cause de sa charte et, parce qu'elle est imputable pour la réussite, elle devra développer un plan d'action centré sur la réussite. Encore plus.

L'école autonome dispose d'un budget autonome fermé et dans de l'école à charte aussi. J'ajouterais qu'elle aurait les mêmes subventions par élève que toute autre école publique du même district. On a parlé tout à l'heure de frais additionnels qui pourraient être chargés. Ce n'est pas ce qu'on entrevoit, nous, et ce qu'on vous propose. C'est aussi une école ouverte à tous. Ce n'est pas une école à deux paliers, à deux vitesses, comme vous aviez parlé tout à l'heure, c'est une école publique comme toutes les autres, avec le même financement.

La commission aussi mentionnait que l'école autonome devrait définir et réaliser son projet pédagogique, et c'est surtout ce qu'on voit: dans le même curriculum, dans le même cadre proposé par le guide pédagogique du MEQ, l'école à charte aurait plus d'initiative pour choisir son projet pédagogique, ses stratégies et ses moyens d'apprentissage. L'école autonome s'associe avec des parents pour définir son projet éducatif. C'est la même chose qu'on peut très bien voir et même plus dans le cas de l'école à charte. Elle organise ses tâches; même chose. Elle est responsable devant les autorités et sa communauté. L'école à charte va encore plus loin à ce sujet-là. Si vous voyez, dans la colonne de droite, en bas, on voit en italique: Si l'école n'obtient pas les résultats escomptés selon les standards préétablis par le ministère, selon sa charte, elle se voit retirer son droit d'exister en tant qu'école à charte et, par conséquent, elle doit fermer. Donc, c'est encore plus exigeant.

Dans les prochains points, on voit que c'est identique, l'école à charte peut tout aussi bien atteindre ces recommandations de la commission de l'éducation au niveau des relations soutenues avec son milieu. Le prochain point: collabore avec son milieu quant à l'utilisation des équipements, c'est tout aussi possible dans une école à charte. Se dote d'un code d'éthique ou l'équivalent; tout aussi possible. Détermine les modes d'organisation de l'encadrement des élèves et du suivi individuel; tout aussi possible. Fait appel à des ressources de l'économie sociale. Évalue ses performances. On voit que c'est l'essence même de l'école à charte de devoir évaluer ses performances. L'école est imputable envers la communauté et le ministère. Développe une culture de formation continue tant chez les élèves que chez son personnel. C'est un point intéressant parce qu'ici on voit que le phénomène de l'école à charte encourage l'entrepreneurship et la prise d'initiatives chez l'enseignante et l'enseignant en reconnaissant son professionnalisme. Je trouve que c'est un point très intéressant.

Maintenant, c'est la grande question qu'on voit à la page 10. En Angleterre, avec un système qui existe maintenant depuis près de 10 ans, nous disposons de certaines données. Le tableau qui suit provient directement du Department of Education, London, England. Là-bas, malheureusement, ils ont des écoles où ils peuvent être sélectifs et ils ont aussi des écoles communes. Alors, vous avez, dans la première partie du tableau, en haut, des statistiques concernant toutes les écoles qui sont «comprehensive», c'est-à-dire qui incluent tout le monde, et d'autres qui sont «selective». Et c'est les résultats à un test pour le «General Certificate of Secondary Education», le certificat général d'éducation au secondaire. Des élèves de 15 ans ont passé ce test.

Considérant les deux écoles, on a «Local Education Authority Schools», qui sont les écoles faisant partie de commissions scolaires comme on les a ici. Dans les examens portant sur huit matières, cinq de ces matières avaient des résultats entre A à C, donc de bonnes notes, sur une échelle de A à G. On voit que les écoles faisant partie de commissions scolaires avaient 39 % de leurs élèves faisant partie de cette catégorie-là, c'est-à-dire ayant eu des bonnes notes dans au moins cinq matières.

Maintenant, les écoles à charte, qu'ils appellent, eux autres, «Grant Maintained Schools», avaient 48 % d'élèves dans cette catégorie-là, avec des notes supérieures. Puis, pour différentes catégories de notes, là, on voit, dans la prochaine colonne, cinq matières et plus ayant des notes de A à G. Les écoles faisant partie de commissions scolaires avaient 86,6 % de leurs élèves tandis que les écoles à charte avaient 91 %, et ainsi de suite dans la dernière colonne.

Maintenant, ce qui est particulièrement intéressant et ce sur quoi j'aimerais attirer votre attention, c'est quand on prend les écoles communes sans considérer celles qui peuvent sélectionner certains élèves, et c'est des statistiques qu'on voit dans les deux dernières lignes. On voit que les écoles faisant partie de commissions scolaires, LEA, «Local Education Authority», 38 % des élèves de ces écoles communes avaient cinq matières et plus dans les notes de A à C. Maintenant, pour les écoles à charte, on voit que c'est 44,7 %. Encore là, une différence de 6 % de plus. Et c'est là qu'on a des statistiques à long terme qui prouvent que les écoles à charte offrent une qualité d'éducation. C'est des statistiques concrètes qui existent même... Dans la deuxième colonne, on voit cinq matières et plus, des notes de A à G; 90 % des étudiants, dans les écoles à charte, avaient été de cette catégorie-là comparativement à 86 % dans les écoles faisant partie de commissions scolaires. Je cède la parole à Rémy Bouchard.

Le Président (M. Paré): M. Bouchard.

M. Bouchard (Rémy): Aux États-Unis, les écoles à charte se révèlent un succès auprès de toutes les parties impliquées: les élèves, enseignantes, enseignants et parents. Un travail de recherche publié au mois de juillet dernier indique un taux très élevé de satisfaction et de progrès au niveau des écoles à charte. Ce rapport, qui provient du Hudson Institute, est une étude effectuée sur une période de deux ans, portant sur plus de 50 écoles à charte, dans 10 États différents, totalisant au-dessus de 16 000 élèves.

Entre autres, ce rapport conclut ce qui suit: les parents jugent les écoles à charte supérieures sur chaque indicateur; les écoles à charte sont un havre pour les minorités et les élèves à risque; les parents, les élèves ainsi que les enseignantes et enseignants disent tous d'emblée que le progrès académique s'est amélioré.

En conclusion, ce rapport amène ce qui suit: «Nos données révèlent un profond et complet niveau de satisfaction face aux écoles à charte. Il semble y avoir un consensus parmi toutes les principales parties prenantes, consensus qui indique que ces écoles rejoignent les attentes et qu'elles livrent un produit de haute qualité.»

(11 h 40)

Bien sûr, c'est une chose pour les élèves de sentir qu'ils reçoivent une éducation de qualité mais une toute autre chose d'en faire la démonstration. Des écoles publiques qui ont opté pour adopter une charte rapportent avoir obtenu des rendements académiques améliorés suite à ce changement. Toutefois, il est encore trop tôt pour avoir des statistiques significatives quant au rendement académique. La principale raison d'être de telles écoles est de répondre aux besoins actuels, d'avoir une réforme majeure en injectant dans notre système d'éducation liberté, choix et imputabilité, ceci dans le but d'offrir une meilleure éducation aux enfants de notre société. Les données empiriques constitueront une partie importante de cette histoire et la collecte de données est maintenant en cours dans diverses parties du pays.

Parallèlement, un autre chapitre de cette histoire s'écrit par les familles, les enseignantes et enseignants qui choisissent ces écoles publiques indépendantes et qui y demeurent puisqu'ils y trouvent des avantages. Ces sondages dépeignent un portrait statistique imposant. Le niveau de satisfaction est très frappant chez toutes les parties impliquées des écoles à charte, leur focus étant l'éducation. Leurs élèves s'y épanouissent sur le plan académique et elles représentent un havre de paix pour les enfants, quels que soient leur origine, leur arrière-plan et leurs habiletés, ce qui n'est pas toujours le cas à l'intérieur des écoles conventionnelles.

Le Président (M. Paré): M. Bouchard, je suis obligé de vous arrêter parce que votre temps est largement dépassé. Donc, j'invite Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je vous remercie pour votre présentation. C'est intéressant, évidemment, la façon dont vous abordez toute cette question et quand vous faites la comparaison par rapport à ce qu'a proposé la commission et ce qu'on retrouve dans la proposition d'une école à charte, sauf que je vous dirais: Est-ce que vous êtes prêts à aller plus loin encore pour faire la démonstration et aboutir au modèle réel de ce que cela donne? En fait, c'est une multitude d'écoles privées que l'on retrouverait à travers le Québec, si on allait au bout de la démonstration que vous faites dans le modèle.

À ce moment-là, le risque qui nous est présenté même avec le projet actuel qui ne se situe pas dans cette perspective-là, il se situe dans une perspective où il redonne des pouvoirs, des responsabilités aux parents, à la communauté locale, et une prise meilleure sur le projet éducatif, bien sûr, aux parents, mais qui continue de faire partie d'un ensemble où les grands paramètres nationaux, entre autres, au niveau du curriculum sont bien établis, où il y a effectivement des règles de mobilité, c'est-à-dire qu'il y a une réalité de mobilité des parents et des enfants, donc qui fait en sorte que nos écoles ont une constitution de base qui fait en sorte qu'on peut muter d'une école à l'autre sans pénaliser, bien sûr, les enfants.

Et quand on regarde les États qui ont fait la promotion de ces écoles à charte et leur tradition à cet égard... Je revenais justement à l'analyse qu'avait faite le comité Inchauspé sur les curriculum, Réaffirmer l'école , et il mentionne entre autres qu'en Angleterre, c'est tout récent que l'on ait un curriculum national, c'est depuis 1988 seulement que l'on parle d'un curriculum national, ce qui veut dire que, dans chaque école, on pouvait choisir ce qu'on allait enseigner à nos enfants. C'est quand même extraordinaire! On ne pourrait pas imaginer ça ici évidemment. Je pense que les gens seraient estomaqués de voir qu'on puisse même penser à ça. Et donc, c'est ce modèle-là qui a donné ce que l'on a connu particulièrement dans les milieux anglo-saxons, qui a été l'école à charte, mais ils reviennent de plus en plus – l'Angleterre y vient maintenant depuis 1988 – avec des curriculum nationaux. Les États-Unis, dans chacun des États, même ont défini des curriculum. Mais le risque de l'école à charte, c'est celui-là aussi, hein? Il faut bien être conscient de cela.

Et surtout – surtout et c'est là qu'est ma question – les gens qui sont venus ici craignent que notre projet de loi puisse amener l'école à deux vitesses. Or, moi, je pense qu'avec toutes les démonstrations qu'on a faites on peut prouver... S'il y a lieu, on resserrera encore davantage pour que ce ne soit pas le cas. Parce que je pense que ça ne peut pas être le cas. Au contraire, on veut lutter contre les écoles à deux vitesses qui existent déjà malheureusement. Ce n'est pas souhaité et voulu, mais c'est le résultat de ce que l'on connaît maintenant, et c'est ça qu'il faut corriger. Mais, là où vous nous amenez, là, à mon point de vue, le risque serait particulièrement grand que cela puisse se produire. Alors, je vous pose la question.

Vous aviez évidemment un projet de mémoire. Vous nous aviez envoyé un mémoire, on l'a analysé et lu, et là, ce matin, vous nous déposez un autre document. C'est votre prérogative et vous pouvez le faire, je ne vous blâme pas de cela, mais j'avais des questions plus précises à poser quant au premier mémoire et j'y reviendrai peut-être, si vous le permettez.

Le Président (M. Paré): Mme la présidente.

Mme Fay (Judy): Merci, Mme la ministre. Premièrement, en ce qui concerne les écoles privées, c'est à peu près l'inquiétude la plus étendue de ceux qui traitent des écoles à charte. Or, c'est seulement des écoles privées qui sont quand même approvisionnées par l'État.

Ce qu'on retrouve, c'est bien. On ne parle pas seulement de ce qui est sur papier mais on parle de ce qui est vécu. Et, premièrement, des écoles privées, on peut faire une présélection. Les écoles à charte, de par leur définition même, ne peuvent pas faire de présélection. Ensuite, il n'y a pas de discrimination, c'est une école qui est publique et ouverte à tous, avec exactement les mêmes critères d'admissibilité que vous avez dans vos modalités de la loi.

Alors, pour ça, ce n'est pas des écoles privées. Le plus souvent qu'autrement, parce que ce sont des écoles qui fonctionnent, ce qui arrivent dans la plupart des États, notamment, c'est des loteries. Parce qu'il y a tellement de gens qui se démènent pour avoir le privilège d'aller dans ces écoles-là, ils prennent toutes les inscriptions et ils procèdent par loterie dans un très grand nombre d'écoles parce qu'il n'y a justement aucune présélection, aucune discrimination.

Ce matin, j'aurais pu amener 10 pieds de haut d'études, de livres, de recherches; ce n'est pas mon but. Mais, ce que les études démontrent, c'est que, en effet, les jeunes qui sont plus souvent qu'autrement retrouvés à l'intérieur de ces écoles, notamment on le voit dans le Hudson Report, c'est des jeunes provenant de milieux défavorisés et des jeunes qui se qualifient pour toutes sortes d'aides fédérales. Alors, ça démystifie, en quelque sorte, toute la question d'école privée.

En ce qui concerne une recette, moi, cette notion d'école à charte me passionne parce que, pour une fois, nous pouvons nous asseoir et faire une recette vraiment taillée sur mesure, comme lorsqu'on arrive pour acheter une auto et qu'on met toutes les petites options qu'on veut. C'est ce que moi je souhaiterais, avec l'association, avec votre aide, s'asseoir puis trouver une recette d'école à charte qui convient en tenant compte du curriculum national et aussi des contraintes dans lesquelles on vit et on travaille. Alors, on souhaiterait pouvoir amener cette discussion plus loin.

En ce qui concerne les deux vitesses, j'en ai parlé tantôt. Les clientèles qu'on retrouve plus souvent qu'autrement – et je peux vous donner les documents à l'appui – c'est le jeune défavorisé et aussi le jeune avec des problèmes socioaffectifs ou de développement. C'est un des problèmes que les écoles à charte retrouvent. À cause du dynamisme et de l'innovation dans les écoles, il y a beaucoup de parents d'élèves EHDAA, etc., qui envoient leurs enfants dans ces écoles-là. Le contenu maintenant de ces écoles-là se retrouve en grand nombre d'élèves avec des besoins particuliers.

Le risque. La seule chose que je peux répondre concernant le risque: Est-ce qu'on peut prendre le risque d'avoir des écoles à charte, est-ce que c'est un risque? Moi, je dirais plutôt: Est-ce qu'on peut prendre le risque de ne pas l'essayer? Nous voyons que ça fonctionne ailleurs. Le momentum est augmenté; même en Alberta, ils sont rendus avec 11 écoles à charte. On ne prétend pas que c'est une solution panprovinciale, mais on voudrait que ceux qui sont visionnaires, qui sont pionniers, bâtisseurs, qu'ils puissent avoir l'opportunité de s'approprier cette formule-là. Alors, le risque, ça dure trois ans. Parce que, au bout des trois ans, cette école-là doit démontrer au ministère qu'il y a une augmentation dans le niveau d'éducation; sinon, c'est la clé dans la porte. Alors, je vous le demande: C'est quoi le risque?

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente.

(11 h 50)

Mme Marois: Juste une dernière petite question, je sais qu'il ne nous reste plus beaucoup de temps et je sais que mes collègues veulent aussi poser des questions. Enfin, compte tenu que je connais vos écoles, les écoles membres de votre association, votre projet et ce que je lis dans vos documents, je suis un petit peu étonnée, parce que vous dites: «Aucune discrimination ne peut être fondée sur l'origine géographique dans la mesure où l'élève est résidant au Québec.» Ce serait un des articles qu'on retrouverait dans les écoles à charte. À ce moment-là, aucune discrimination n'étant fondée sur l'origine géographique, j'imagine qu'il ne devrait pas y avoir de discrimination non plus sur d'autres critères.

Mme Fay (Judy): Aucunement.

Mme Marois: Et, à ce moment-là, l'école à charte, est-ce qu'elle serait une école commune où protestants, catholiques, juifs, peu importe, ou musulmans pourraient la fréquenter? Donc, à ce moment-là, qu'il y ait cette notion d'école commune et non pas d'école comme celle que nous connaissons maintenant, à statut protestant, par exemple, ou à statut catholique?

Le Président (M. Paré): Brièvement.

Mme Fay (Judy): Très bonne question. Je crois fermement que ces écoles-là sont ouvertes à tous et, comme je l'ai dit, selon les modalités de la loi pour les critères d'admissibilité, selon le respect du projet éducatif et toutes les autres modalités pour l'admission. Les écoles doivent être des lieux qui sont accueillants. Et je ne fais pas de distinction du tout entre ce que sont les besoins des protestants, des catholiques, des musulmans ou autres. Il n'y a pas exemple meilleur que celui des États-Unis, c'est un «melting pot» incroyable de multiethnicité, de multireligion ou multiculture. On l'a notre exemple et il fonctionne.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Fay et les gens qui vous accompagnent. Moi, je voudrais peut-être faire une mise au point dès le départ parce que vous faites plusieurs comparaisons avec le mandat d'initiative que s'était donnée cette commission de l'éducation. À la page 13 de votre mémoire, ça laisse presque entendre que la commission parlementaire suggérait une école à charte, alors que c'était loin d'être la conclusion que nous tirions. Je voudrais faire cette mise au point, que ce soit clair pour tout le monde. Et je vous dirai également, je partage à peu près totalement les préoccupations de la ministre de l'Éducation dans son intervention. Je vous pose deux ou trois questions. En quoi est-ce que la Loi sur l'enseignement privé vous empêche d'avoir le modèle d'école que vous souhaitez? Il me semble que, comme infrastructure, tout est là. Tout est là sauf, bien sûr, le financement public à 100 %.

Dans un deuxième cas, lorsque vous décrivez les éléments de comparaison entre l'école autonome et responsable et l'école à charte, à la page 8, vous dites que «l'école qui n'obtient pas les résultats escomptés selon les standards préétablis par le ministère se voit retirer son droit d'exister en tant qu'école à charte». Quel sera l'incitatif de l'école à charte d'accueillir les élèves qui ont des difficultés d'adaptation, d'apprentissage, des élèves handicapés, des élèves qui ne performent pas sur le plan scolaire? Les dirigeants de l'établissement vont vite se rendre compte que s'ils en ont trop à l'intérieur de leurs rangs, ça va faire baisser leur moyenne. En faisant baisser la moyenne par rapport aux règles que vous vous donnez, ça ferait disparaître l'école à charte comme telle. J'ai l'impression que votre système est viable en autant qu'il y ait un système d'école publique à côté, où là le système public à côté va pouvoir recueillir ces élèves qui ont des difficultés et apporter le soutien.

Le Président (M. Paré): Mme la présidente? M. Aubut.

M. Aubut (Jocelyn): O.K. J'aimerais juste reprendre l'exemple que Mme Fay avait apporté. À Chicago, on a l'exemple d'une école à charte où est-ce que la clientèle est vraiment défavorisée. Ils n'ont pas pu sélectionner, c'était fait par loterie, et pourtant le résultat a été meilleur. La demande était là.

Maintenant, ce que vous dites se tient. C'est vrai, si la proportion d'élèves en difficulté devient très élevée, l'école aura de la difficulté à rencontrer les objectifs, mais ça fonctionne quand même à cause de l'initiative accrue, des possibilités qui leur sont données. Maintenant, juste pour dire, il y a beaucoup d'idées préconçues face aux écoles à charte, mais je pense que c'est bon de les évaluer d'après leur mérite. Tout ce que ça demande, c'est: Est-ce que vous êtes prêt à donner davantage d'initiative en échange de davantage d'imputabilité seulement à certaines écoles qui le demanderaient?

Puis, quand vous demandez la question face aux écoles privées, la loi sur les écoles privées, je pense que vous avez répondu vous-même en disant que le financement n'est pas à 100 % et qu'il y aurait davantage d'intérêt pour nous d'avoir un financement à 100 % mais tout en ayant la même initiative, tout en restant, par contre, une école publique. Comme Mme Fay l'a mentionné, il y a différentes sortes de législation pour les écoles à charte. Ce qu'on désirerait ici, pour le Québec, c'est quelque chose qui rentre dans le cadre de l'école publique qui existe ici: ouverte, commune et publique.

M. Ouimet: Mais, contrairement à la croyance populaire, lorsqu'on fait le tour des écoles privées au Québec, on se rend compte qu'une vaste majorité d'écoles privées ne sélectionnent pas toujours leur clientèle.

M. Aubut (Jocelyn): O.K. Tant mieux pour eux, et c'est ce qu'on voudrait aussi.

M. Ouimet: C'est ça. À part la question de sous et de financement, en quoi est-ce que la Loi sur l'enseignement privé ne vous permet pas votre modèle d'école?

M. Aubut (Jocelyn): Ce serait bon, c'est la question du financement.

M. Ouimet: C'est juste le financement?

M. Aubut (Jocelyn): Oui.

Le Président (M. Paré): Mme Fay.

Mme Fay (Judy): Le questionnement que j'ai face à cette question, c'est qu'en effet nous sommes le public et, ce qu'on propose, ce n'est pas que pour peut-être 3 000 élèves au Québec. Moi, j'étais convaincue, «sold on», complètement corps et âme, sur les écoles à charte en tant qu'éducatrice, et j'en parlais à ma commission scolaire, aux anglophones, aux francophones, aux protestants, aux catholiques et aux autres qui sont à l'intérieur de ma commission scolaire. En tant qu'éducatrice, moi, je voudrais sortir ça un peu de la règle: Ce sont des franco-protestants qui veulent se protéger. C'est un peu aussi pour ça que nous n'avons fait aucune mention dans le mémoire. On peut prendre l'exemple, peut-être, de l'école à Alma qui souhaiterait, plus que toute autre chose, avoir un projet-pilote d'école à charte et aucunement pour des raisons religieuses. M. Bouchard, ici, est à la tête de ce mouvement-là et il est athée. Mais, il fait partie du public, il paye ses impôts et ses taxes comme tout autre. Nous croyons que toute personne au Québec devrait pouvoir avoir le privilège, l'opportunité d'essayer cette chose qu'est l'école à charte.

La nomenclature nous fait peur et je ne voudrais pas qu'on s'embourbe, pas dans les fleurs, mais dans les fleurs de lys du tapis, ici, ce matin, et puis, qu'on se dise: C'est une école à charte, c'est péjoratif, ce n'est pas bien. J'aimerais qu'on s'assoie, qu'on regarde le modèle, il fonctionne. Des exemples, on en a par centaines d'écoles qui sont parties avec des enfants qui ne réussissaient pas très bien ou avec un accomplissement moyen, puis après un an, deux ans, trois ans, ils étaient à des niveaux supérieurs. Est-ce qu'on peut amener ce débat, cette discussion, plus loin? Est-ce que ça vaut la peine, l'investissement, donner des personnes, des experts pour nous exposer ce que c'est pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois?

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, M. le Président. J'ai écouté avec intérêt votre présentation et les échanges qui ont eu lieu avant d'en arriver à ce stade-ci de la discussion. La question que je me pose... Moi-même, j'ai été enseignante plusieurs années. J'ai aussi été dans une école publique à projets particuliers émanant des États-Unis: système AMI, système modulaire, enseignement...

L'école à charte, pour moi, surtout quand vous avez tout repris la comparaison, la charte vient clore un petit peu à l'américaine, je dirais, ce qu'on appelle, nous, ici, le projet éducatif. Moi, c'est là que je veux regarder. On n'a pas la culture américaine, il faut partir d'où on est. On a une histoire, on a une organisation, etc. Et, pour avoir travaillé beaucoup à l'implantation d'un projet américain qu'on a fait... Le système AMI existe. Ce n'est plus le système AMI comme tel. On l'appelle toujours comme ça, il a évolué, depuis 20 ans, dans un contexte très précis de clientèle scolaire qui diminuait, parce qu'il est dans la région de Laval, etc., qui a donné une allure particulière.

(12 heures)

Est-ce que la charte est vraiment ce qui va faire que l'école va être performante, près du milieu? Vous faites la comparaison d'ailleurs avec tout le tableau que nous avons fait et, ce tableau-là, pour y avoir participé au niveau de la commission d'une façon importante, est partie. On l'a pris avec nos écoles performantes actuelles du Québec qui sont dans le réseau public. Ces gens-là sont venus nous voir et nous ont dit: On a essayé de relever tout ce qui faisait que ces écoles-là étaient performantes et on s'est rendu compte que ces écoles-là sont arrivées à développer, avec les clientèles qu'elles ont, des écoles dynamiques, des écoles qui réussissent, etc., dans les structures actuelles. Et là on s'est dit: Est-ce qu'il n'y aurait pas des modifications? Parce qu'on s'est rendu compte aussi qu'il y a des écoles qui ont tenté, qui n'ont pas réussi, à cause des structures actuelles, certaines choses qu'elles pouvaient. Alors, c'est là qu'on a dit: Comment donner plus de dynamisme au milieu, c'est-à-dire la participation? De ce qu'ils parlent, des conseils d'administration des établissements avec une charte, c'est ça.

Nous, on a parlé du conseil d'établissement, d'une certaine façon, la loi a débouché là-dessus. Alors, en quoi la charte viendrait régler la dynamisation par rapport à la prise en charge du conseil d'établissement? Et vous savez qu'il peut aller plus loin aussi au niveau de l'école. À l'heure actuelle, moi, je parle de la polyvalente Vanier. Il y a un conseil d'administration à l'intérieur de l'école, dans le cadre actuel, qui fonctionne et qui travaille. En quoi la charte changerait la dynamique? Parce que, la charte, ce n'est pas notre culture, ce n'est pas notre organisation. Il faut partir d'une réalité où on est, et c'est là que je vois difficilement...

Par contre, c'est ça que j'aimerais, le projet éducatif. Oui. À l'heure actuelle, on en a très peu. Toutes nos écoles au Québec devraient avoir un projet éducatif, c'est-à-dire qu'on développe avec le milieu où on est une façon de faire pour arriver au meilleur résultat possible. Pourquoi on ne centre pas sur le projet éducatif? Est-ce que la charte est un moyen pour que le projet éducatif fonctionne? C'est la question que je me pose.

Le Président (M. Paré): Mme la présidente.

Mme Fay (Judy): Merci. Il n'y a pas de garantie. Une charte, ce n'est pas la garantie Midas, c'est certain. Et puis, la charte, ce n'est pas non plus quelque chose qu'on pourrait importer, si on veut, des États-Unis. Je suis partie des États-Unis, je suis ici maintenant pour faire ma vie et je serais la première à être très honorée de pouvoir travailler à une charte qui est pure laine québécoise.

Ce que je voudrais peut-être souligner, juste pour commenter ce que vous venez de dire, Mme Robert, c'est qu'une école à charte, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'elle a le même financement qu'une école publique mais elle prend le financement... La hiérarchie intermédiaire, la bureaucratie intermédiaire n'est plus là. Alors, peut-être ce 15 % d'argent, où est-ce qu'il s'en va? Il s'en va directement dans les classes, dans les écoles. Ce qu'on retrouve, c'est les écoles à charte. Elles peuvent avoir un ratio maître-élèves beaucoup plus bas à cause justement des économies qui proviennent de là.

Nous sommes dans un contexte, comme on a dit, de finances de plus en plus restreintes, avec un taux de diplomation qui n'est pas tout à fait à notre goût. On retrouve les écoles à charte, on peut mettre plus d'argent dans les salles de classe pour nos enfants et on voit que les écoles à charte ont un taux de réussite qui est maintenant très bien établi. Alors, ce que je dis, c'est: Pourquoi nous ne pouvons pas inventer une charte québécoise à nous, pas garante de succès, mais avec une formule qui, en elle-même, par ce qui a été vécu dans le passé, on voit que c'est garant en quelque sorte d'un succès?

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Je suis très intéressé par votre présentation ce matin et je vous demande, si on prend votre école à charte et qu'on la met dans une école moins performante dans une ville sans changer les étudiants, en acceptant les mêmes étudiants mais avec votre méthode, quelle serait votre pensée sur votre réussite dans ce type d'école?

Mme Fay (Judy): Merci, M. Bergman. J'espérais que quelqu'un pose cette question-là parce que j'ai une réponse ici qui nous parvient directement du State Department dans l'État du Minnesota. Ils ont pris une école qui avait une performance sous la moyenne, moyenne tout au plus. Ils ont changé tous les enseignants mais ils ont gardé les 400 élèves qui y étaient. Ils ont évalué les enfants en rentrant et, aussi, huit mois plus tard, ces enfants-là, avec leur formule d'école à charte, ont progressé de 1,5 année de niveau avec les mêmes élèves mais avec un dynamisme totalement différent. Ça, ça vient du département de l'État.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente. M. Bergman.

M. Bergman: Est-ce qu'on peut avoir une copie de cette étude?

Mme Fay (Judy): Avec plaisir.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la présidente. Vos remarques finales, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui. Juste sur cette dernière lancée, il est bien sûr que même à Montréal, dans les écoles les plus défavorisées, si je prends l'école Pierre-Dupuis de la CECM et qu'on va chercher la crème de la crème au niveau des enseignants, de la motivation, de la mobilisation, la même chose au niveau de la direction d'école, la même chose au niveau des professionnels, on obtiendrait des résultats supérieurs à ce que nous avons actuellement, mais est-ce qu'on va écrémer l'ensemble d'un réseau? Il y a des risques à ça aussi. Qu'est-ce qui arrive à la qualité, par exemple, des services qui seraient donnés dans d'autres écoles? Ça devient le facteur de sélection non pas au niveau des élèves mais au niveau du personnel.

Le Président (M. Paré): On n'a plus de temps pour les remarques finales. On s'excuse, M. Aubut. Mme la ministre, s'il vous plaît, pour le mot de la fin.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je veux vous remercier quand même pour votre éclairage et votre proposition, même si je peux être en désaccord avec certaines des conclusions que vous tirez parce que je crois que l'école que nous proposons dans l'avant-projet de loi pourrait faire tout autant que l'école que vous proposez en éliminant, peut-être, les aspects qui pourraient nous amener à perdre de vue l'approche plus globale que nous recherchons et la responsabilité que nous avons à assumer aussi en termes d'un meilleur équilibre et d'un meilleur partage des ressources. Alors, je pense que le projet qui est devant nous est un pas dans le sens d'une participation de la communauté, d'une participation des parents, d'une plus grande autonomie de l'école, mais dans un système national où il reste que nous avons des perspectives et des objectifs collectifs que nous poursuivons. Alors, je vous remercie pour votre présentation.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Nous vous remercions, Mme Fay, Mme Berney, M. Bouchard et M. Aubut pour votre contribution à ces travaux.

Maintenant, je suspends les travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 8)

(Reprise à 14 h 8)

Le Président (M. Paré): Je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte. Je rappelle le mandat: c'est de procéder à une consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Est-ce qu'il y a des remplacements? Il n'y a pas de problème.

Maintenant, nous recevons le Congrès juif, représenté par M. Marc Anderson. M. Anderson? Non? Il y a eu un changement? O.K. M. Rabinovitch, est-ce que vous pouvez nous présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît? Bienvenue.


Congrès juif canadien, région du Québec (CJC)

M. Rabinovitch (Joe): Oui, merci. Alors, moi, je suis Joe Rabinovitch, je suis le président de la Commission éducative du Congrès juif canadien, région du Québec. J'aimerais vous présenter M. Jack Jedwab, le directeur général du Congrès juif canadien, et M. David Sultan, le directeur du Comité des relations culturelles et communautaires du Congrès juif canadien.

Le Président (M. Paré): Bienvenue, messieurs. La parole est à vous.

M. Rabinovitch (Joe): Merci. Alors, nous avons soumis un mémoire que j'espère que tous les gens ici ont lu, et je ne vais pas répéter, je ne vais pas dire encore ce qui est dedans, mais j'aimerais souligner trois ou quatre points qui sont d'importance. Après ça, peut-être qu'on peut échanger des questions ou autre chose.

Le Président (M. Paré): Bien sûr. Vous avez 15 minutes pour votre présentation et 30 minutes pour l'échange avec les parlementaires.

M. Rabinovitch (Joe): O.K. Alors, nous trois allons présenter le mémoire. Le mémoire, ça comprend peut-être trois, quatre secteurs. Le premier parle de l'histoire de la communauté juive au Québec. C'est très important pour nous de vous informer que nous sommes depuis 200 années ici, au Québec. Il y a un bref résumé des points saillants de l'histoire de la communauté juive ici, au Québec. Pour la communauté juive du Québec, l'éducation a toujours été primordiale, et c'est pourquoi nous sommes ici aussi aujourd'hui pour vous informer de notre position en ce qui concerne les modifications à la Loi sur l'instruction publique.

(14 h 10)

La chose importante pour nous, c'est que nous sommes complètement d'accord pour que nous procédions pour déconfessionnaliser les commissions scolaires; ça veut dire établir des commissions scolaires linguistiques. Et la position du Congrès juif canadien a toujours été l'appui à cette position. Mais, étant donné que cette transformation du système éducatif demeure – comment on peut dire – en discussion, maintenant, nous avons des «concerns» en ce qui concerne la confessionnalité qui va rester à l'école.

Dans la modification de la loi, on parle de maintenir la confessionnalité pour la population catholique et la population protestante. Nous, nous comprenons qu'il y a 125 ans, en 1867, on a établi la section 93 et on a protégé les droits des catholiques et des protestants, parce que, ça, c'était la population à cette époque. Maintenant, c'est un Québec tellement différent, et nous sommes dans la position que, si on garde les droits des catholiques et des protestants en ce qui concerne la confessionnalité au niveau de l'école, il faut donner ces mêmes droits à d'autres religions; ça veut dire la communauté juive aussi. Ça, c'est la chose la plus importante pour nous. Et j'aimerais demander à mes amis, ici, de vous parler davantage de notre position. David.

M. Sultan (David): Oui, sur la question... Pardon.

Le Président (M. Paré): M. Sultan.

M. Sultan (David): Merci. Alors, encore une fois sur la question, comme M. Rabinovitch le disait si bien, il est important qu'on comprenne l'importance pour la communauté juive, et je suppose également pour d'autres communautés, d'arriver à un statut d'égalité et d'équité en matière scolaire, que ce soit au niveau public ou au niveau privé. Mais nous sommes là pour parler de l'instruction publique. La communauté juive a toujours considéré et considère encore une fois qu'elle est tout à fait favorable aux amendements que propose le gouvernement du Québec sur la question de l'article 93 de l'Acte d'Amérique du Nord britannique. Cependant, nous pensons également que le projet de loi tel qu'il est présenté et les diverses discussions autour de ce projet de loi devraient également suivre l'esprit de cet amendement de 93 et, donc, donner à toutes les entités religieuses un statut égal et équitable. Malheureusement, nous ne retrouvons pas ça dans le projet de loi et dans les discussions qui tournent autour de cette question-là et nous pensons qu'il est important de soumettre cette question à la commission parlementaire et à la ministre de l'Éducation.

Sur d'autres questions, puisque je pense que nous aurons l'occasion d'y revenir en réponse aux questions, nous nous sommes également penchés sur l'importance des conseils d'établissement, ce que nous avions présenté lors des états généraux sur l'éducation, il y a un certain temps, en août 1995, si je me souviens bien, des positions sur l'importance d'assurer que l'école soit proche du milieu communautaire. Et nous sommes très satisfaits de voir que la réforme actuelle, justement, met l'accent sur ces questions-là, met l'accent sur la proximité de l'école avec son milieu, sur l'importance de l'interaction. C'est évident que le Congrès juin canadien et que la communauté juive, sur ces questions-là, favorisent tout à fait ce genre d'approche, puisque c'est une approche que nous avons nous-mêmes adoptée dans les écoles privées de la communauté juive.

Un point sur lequel nous nous posons des questions, puis je vous le soumets respectueusement, c'est la question de l'élection ou bien de la nomination des membres des conseils d'établissement. Certains d'entre eux sont nommés pour une période d'une année, et nous nous demandons dans quelle mesure une année n'est pas un laps de temps trop petit pour pouvoir permettre à une équipe de pouvoir orienter véritablement les grandes orientations, en fait, de l'école en tant que telle?

Alors, ce sont des questions que nous nous posons. Ça a été un petit peu étayé dans le mémoire que nous vous faisons grâce de vous lire. Il y a également d'autres questions sur lesquelles nous nous sommes penchés, particulièrement la diversité religieuse et l'accommodement. J'inviterais peut-être mon collègue, M. Jedwab à...

Le Président (M. Paré): M. Jedwab, bienvenue.

M. Jedwab (Jack): Oui. On a également souligné deux autres sujets concernant l'accommodement raisonnable, où, dans certaines instances, vous allez remarquer, par exemple, une école donnée, à l'intérieur de nouvelles structures, désignée catholique ou protestante, inclut des membres de communautés religieuses autres que catholique et protestante. Nous croyons que c'est extrêmement important que des accommodements existent pour permettre un respect, naturellement dans la mesure du possible, tout en respectant la Charte des droits et libertés, des principes ou des croyances de ces autres communautés. Naturellement, c'est une question assez complexe.

Nous-mêmes, on a embarqué dans un projet conjoint avec le ministère de la Justice pour déterminer les circonstances exceptionnelles où on peut identifier des personnes de croyance autre que catholique ou protestante ou des personnes, effectivement, qui ne sont pas prêtes à suivre les règlements qui peuvent être établis par une école donnée orientée vers le catholicisme ou le protestantisme. Nous avons entrepris avec le ministère de la Justice une étude qui, nous espérons, va offrir des cours de conduite, si vous voulez, quant à cet aspect de la question. Je crois que notre étude va se terminer au début de l'an prochain. Alors, ça, c'est un élément qui demeure assez important quant à quelle structure future le système d'éducation va offrir à l'ensemble de la population du Québec.

Pour en revenir rapidement sur le point sur lequel vous avez entendu parler mes deux collègues, notamment la section 93, pour la résumer rapidement parce que je pense que c'est la question centrale qu'on se pose aujourd'hui: Quelle structure future le système scolaire du Québec va offrir à la population, à nos jeunes? Nous avons souhaité, effectivement, depuis de nombreuses années, une centaine d'années, comme vous pouvez remarquer dans notre mémoire, une refonte du système éducatif qui soit un système qui offre aux membres de notre communauté une équité avec les catholiques et les protestants. C'est pourquoi, en tant que communauté, le Congrès juif, en particulier, est allé devant les cours du Québec, la Cour suprême du Canada afin d'insister pour qu'on puisse avoir ces mêmes droits. Et on les a presque eus en 1930, justement quand il y a eu cette question d'établir un système ou un réseau d'écoles juives parallèle à ce que les catholiques et les protestants ont eu. Justement, vous pouvez savoir que, dans l'histoire, on était toujours considérés, pour des fins éducatives, comme des protestants. Moi-même, quand j'étais à l'école protestante, dans les années – je ne me rappelle même pas, ça fait si longtemps – 1970, merci, j'ai appris tous les cantiques, à l'école. C'était un peu bizarre, le caractère démographique, 90 % ou 80 % de l'école était composé de jeunes élèves d'origine juive, et on chantait tous les cantiques, le matin.

Alors, nous avons toujours espéré qu'on pourrait arriver à un règlement de cette question dans le respect de l'ensemble de la population du Québec et de ses croyances. C'est pourquoi le changement dans la section 93 aurait eu une importance majeure pour la communauté juive et, du point de vue symbolique, une importance capitale pour nous. Alors, vous pouvez comprendre, si vous vous mettez à notre place, qu'on est un peu désolés par le résultat, dans la mesure où on arrive à un système qui accorde pour les catholiques et les protestants, quasiment au niveau public, des droits très similaires aux droits qui sont offerts dans la section 93, cette même section qu'on veut changer pour moderniser – on dit «moderniser» – le système scolaire québécois contemporain.

Alors, on se demande, à la limite: On est là depuis 200 ans, est-ce qu'on doit demeurer ici – nous espérons être une communauté dynamique, dans une centaine d'années, ici, au Québec – si on doit attendre une autre centaine d'années pour avoir les mêmes droits que les catholiques et les protestants dans le système scolaire? Justement, on a eu des échos assez favorables quant à notre démarche dans des dialogues qu'on a entrepris avec les leaders des autres groupes confessionnels. On a deux documents, ici, avec nous, une lettre d'Andrew Hutchison, qui est...

Une voix: L'évêque de l'église anglicane de Montréal.

(14 h 20)

M. Jedwab (Jack): Oui, l'évêque de l'église anglicane de Montréal, qui appuie notre position. On a également une résolution de la part du groupe ou de l'organisme Dialogue judéo-chrétien de Montréal, qui a des représentants de chacune des Églises qui appuient notre démarche. Et nous sommes très contents du fait que tous ces représentants de ces Églises respectives comprennent l'importance pour nous, l'importance du geste d'accepter notre position dans le Québec contemporain. Alors, nous sommes très contents de ça. On a amené des photocopies pour tout le monde, si vous voulez voir les résolutions et les lettres d'appui à notre démarche.

Et, lors des états généraux de l'éducation, Mme la ministre Marois va se rappeler de tous les sondages qui ont été faits. Il y avait de nombreux sondages, c'était le conflit des sondages, même, en ce qui concerne le sentiment de la population du Québec. Mais je me rappelle une question qui a été posée auprès de la population du Québec, où la majorité de la population a dit... C'est le sondage Léger & Léger. Je ne sais pas lesquels étaient en compétition avec. Mais ce sondage a indiqué clairement que la majorité de la population du Québec était favorable à ce que des confessions autres que catholiques ou protestantes aient les mêmes droits que les catholiques et les protestants dans le système scolaire contemporain du Québec. Alors, je pense que c'est un geste important pour notre communauté, reflétant sa présence historique, ici. C'est un geste que la population, dans la majorité, dans le cas de l'opinion publique, appuie, et c'est un geste que, j'espère, le gouvernement du Québec va appuyer aussi. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Jedwab. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci pour votre présentation. Effectivement, vous rappeliez certains échanges que nous avions eus et discussions et événements que nous avons vécus il y a quelque temps, et je peux confirmer ce que vous affirmez dans vos propos.

Maintenant, je vous répéterai ce que j'ai dit ce matin aux représentants de l'Assemblée des évêques, et ce fut le cas aussi pour d'autres groupes qui sont venus pour représenter des associations soit d'écoles protestantes ou autres. J'ai désigné un forum pour que nous puissions discuter de cette question de la place de la religion à l'école. J'ai désigné un forum qui éventuellement devra faire rapport. En effet, vous vous souviendrez qu'en mai ou juin – je pense que c'était en mai dernier – j'avais procédé à une déclaration ministérielle, à l'Assemblée nationale, donc, souhaitant que l'on aborde cette question de la place de la religion à l'école et qu'on en fasse un débat particulier dans un contexte qui serait le plus serein possible. Parce qu'on sait fort bien que, lorsqu'on aborde ces questions, souvent, l'émotivité a tendance à vouloir prendre le dessus. Mais je pense que nous sommes des gens raisonnables et nous sommes capables de parler de ces questions fort calmement.

Donc, en ce sens, d'ici quelques semaines, je désignerai un groupe avec un mandat très précis, qui me fera rapport d'ici un an sur la question de la place de la religion à l'école et qui pourra, à l'occasion, consulter des organismes comme le vôtre, entre autres, qui pourra consulter les Églises, qui pourra consulter les représentants de parents. Le rapport de ce groupe devrait être éventuellement déposé, même devant cette commission à laquelle nous siégeons aujourd'hui, et faire l'objet de remarques et de représentations au plan des organismes qui, publiquement, voudraient le faire. Et, donc, les propositions que vous nous faites aujourd'hui, les débats que vous souhaitez que nous engagions aujourd'hui sont prématurés en ce sens-là. Ils sont intéressants, ils sont pertinents, mais prématurés, au sens où on le fera dans les semaines et les mois et l'année qui vient.

Vous savez aussi qu'évidemment on devra revoir toutes ces questions dans le cadre de la question du «nonobstant», et 1999 est l'année butoir à cet égard. Et, donc, avec l'arrivée du rapport du groupe, le débat que nous aurons éventuellement, on rentrera dans la perspective dans le temps, de telle sorte qu'on puisse prendre une décision éclairée: Est-ce qu'on continue de se soustraire à certains aspects de la Charte? Parce que c'est bien ça, il faut le dire, et je pense que vous le démontrez aussi. Alors, tout ça est donc prévu dans une perspective où, je crois, ça nous donnera le temps d'apporter l'éclairage utile et nécessaire à ce que nous voulons faire.

J'apprécie particulièrement votre ouverture et votre appui quant à la philosophie – parce que je pense qu'il faut dire ça – qu'il y a derrière le projet de loi qui est devant nous. C'est un peu ce que vous nous dites quand vous dites, entre autres, que vous accueillez avec enthousiasme la création des conseils d'établissement dont le mandat, bien sûr, et je suis d'accord avec vous, dépasse très largement la simple administration scolaire.

Vous faites référence, entre autres, à tout ce qui concerne l'entraide communautaire. Je connais assez bien vos écoles pour savoir que c'est le cas de l'engagement de votre communauté à cet égard. Comment verriez-vous et comment voyez-vous la participation de la communauté au sein des conseils d'établissement? Actuellement, nous suggérons qu'il y ait deux membres qui soient nommés par le conseil d'établissement, mais provenant de la communauté et qui soient membres à part entière du conseil d'établissement. D'abord, quant à la façon de les choisir, de les désigner et quant à l'importance qu'ils y soient et plus largement quant à l'importance et à la place de la communauté au sein du conseil d'établissement, comment vous envisagez cela par rapport entre autres à ce que vous vivez aussi concrètement dans vos réseaux et dans vos écoles?

Le Président (M. Paré): M. le président.

M. Rabinovitch (Joe): Alors, ça dépend comment on définit le mot «communauté» parce que, dans une ville comme Montréal ou peut-être comme Québec aussi, la communauté existe sur papier mais, dans un quartier spécifique, on a des représentants de presque 100 communautés différentes, vous savez, dans des quartiers montréalais. Et comment on choisit? C'est très, très difficile, mais je peux suggérer qu'il existe maintenant à Montréal – et moi, je dois parler de Montréal parce que je ne suis pas au courant de ce qui existe peut-être dans les autres communautés québécoises – il y a dans chaque quartier des organismes communautaires qui ont été mis en place il y a beaucoup d'années et qui sont impliqués directement dans la communauté actuelle.

Si on veut des représentants de la communauté, je crois que c'est par le biais de ces types d'organismes qu'on doit les approcher pour leur demander de faire des recommandations, des «nominations». Il faut prendre avantage de ce qui existe maintenant. Et, à Montréal, je sais qu'il y a beaucoup d'organismes comme tels qui veulent s'impliquer dans le processus éducatif. Et ça dépend de quel type d'école. Parce que, moi, j'aimerais revenir encore sur le sujet que j'ai soulevé et dont mon collègue a fait des commentaires davantage. Prenons un exemple. Peut-être qu'on prend une école qui est dans le quartier Côte-Saint-Luc à Montréal. Côte-Saint-Luc à Montréal est à 80 % juif.

Mme Marois: Oui.

M. Rabinovitch (Joe): O.K. Quand on parle d'une école publique, il y a deux ou trois écoles publiques françaises et anglaises qui existent dans ce quartier de la ville. Quand on demande des représentants communautaires, pour moi, c'est évident que les représentants seraient des représentants de la communauté juive. Il existe des organismes de la communauté juive au sein de Côte-Saint-Luc ou Hampstead. Mais, en même temps, si on demande des représentants de la communauté par ce biais de consulter des organismes déjà sur place, pour moi, si j'envoie mes enfants dans une école publique à Côte-Saint-Luc et, comme je suis juif, j'aimerais avoir aussi le droit qui je sais ou je crois qu'il est exprimé dans la loi que mes enfants vont recevoir un support au niveau religieux juif. Mais, dans le projet de loi, comme c'est rédigé, on n'a pas ce droit encore. Vous me demandez comment on va choisir des représentants communautaires, alors j'ai répondu. Mais, en même temps, si j'étais un de ces représentants, moi, j'insisterais pour que le droit à la confessionnalité soit disponible pour mes enfants aussi.

(14 h 30)

Mon collègue a parlé de quand il a fréquenté des écoles publiques. Moi, j'ai fréquenté des écoles publiques dans les années quarante et cinquante. Et je me souviens fortement que, chaque matin, on commençait, on entamait les classes, je me levais et je devais chanter Jesus Loves me, yes I know ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rabinovitch (Joe): ...et Onward Christian Soldiers . Ça, c'est un fait, parce que tous les enseignants à cette époque étaient des protestants presbytériens, très très presbytériens.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rabinovitch (Joe): Comment on peut décrire ça? Et c'était très drôle, maintenant quand je le regarde, parce qu'il y avait une classe à 99 % juive, et on se levait pour chanter des hymnes protestants. Et, moi, je ne veux pas et je n'accepterais pas que mes enfants, ou mes petits-enfants maintenant – c'est la différence – reçoivent ce type d'éducation. Parce que, moi, comme citoyen québécois, j'aimerais avoir le choix d'envoyer mes enfants ou mes petits-enfants aux écoles privées; j'ai le droit. Mais, moi, comme juif aussi au Québec, j'ai choisi d'envoyer mes enfants dans une école publique et, pour l'éducation juive, je les ai envoyés dans une école supplémentaire. C'était mon choix, comme mes amis ont choisi différemment. Mais, pour l'école publique, dans le secteur public, c'est très important pour nous, après 200 années, d'être assurés que tous les droits qui sont accordés aux protestants et aux catholiques soient accordés aussi pour les autres religions minoritaires. Et, si ces droits ne sont pas accordés aux catholiques et protestants, alors, moi, je ne demande rien. Mais au niveau de l'égalité, pour nous, c'est primordial comme expression de l'avenir du Québec, comme la société québécoise dans laquelle nous aimerions que nos enfants et nos petits-enfants vivent, que le concept d'égalité, qu'on ne fait pas de différence entre des catholiques, des protestants et des juifs, etc., soit rédigé, soit inclus dans n'importe quelle loi qui se met sur la table pour discussion.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Rabinovitch.

Mme Marois: Alors, merci. Comme je vous le mentionnais, effectivement, c'est le genre de débat que nous aurons dans les mois qui viennent. Mais il reste que l'école publique québécoise, actuellement, reste une école commune, même si elle a un statut...

M. Rabinovitch (Joe): Je suis d'accord.

Mme Marois: Vous savez. Alors, donc, elle est accueillante à tous les enfants, à tous les jeunes, peu importe leurs convictions et leurs croyances religieuses. Sauf que, dans les faits, vous avez vécu ce que vous nous avez décrit, M. Jedwab m'en avait raconté tout plein aussi quand on a participé aux états généraux ensemble. Évidemment, c'est la réalité historique à laquelle vous faites référence, ce qui est normal dans une société; évidemment, on vit avec son histoire, on en est le résultat, mais ce qui ne nous empêche pas cependant d'avoir un point de vue et, évidemment, d'en changer un certain nombre d'éléments pour en changer un peu le cours pour la suite des choses. Mais on aura l'occasion de faire ce débat. Je trouve ça intéressant quand même ce que vous soulevez.

M. Rabinovitch (Joe): Oui, et soyez assurés que nous y serons, parce que c'est très important pour nous. C'est pourquoi je suis revenu sur le même sujet.

Mme Marois: Oui, je comprends bien. Merci.

M. Rabinovitch (Joe): En ce qui concerne la philosophie de ce changement, comme nous l'avons dit, nous sommes tellement d'accord, parce que, moi, personnellement, je crois fortement que l'école doit être la plus proche possible de la communauté. Le rôle du gouvernement national, c'est d'établir les balises, les standards et un curriculum général où l'école peut choisir ce qui est applicable dans la situation actuelle. Il faut donner pas seulement sur papier, mais il faut donner des pouvoirs aussi au niveau école. Quelle sorte de pouvoirs? Bien, c'est très difficile de le faire actuellement. Le pouvoir qui est le plus important pour faire fonctionner l'école, c'est un pouvoir, je crois, qu'on ne peut pas accorder aux écoles, c'est l'embauche des professeurs et des professionnels.

Mme Marois: Vous proposez et vous donnez la réponse vous-même à votre proposition.

M. Rabinovitch (Joe): C'est ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Ça va.

M. Rabinovitch (Joe): Mais vous savez ce que je veux dire.

Mme Marois: Oui, oui.

M. Rabinovitch (Joe): Je sais toutes les contraintes qui sont en place. Mais ça, c'est un pouvoir. Et si on ne peut pas donner un pouvoir comme tel, il faut donner un autre type de pouvoirs, soit l'évaluation des performances des gens qui travaillent auprès de l'école. Il existe un type de pouvoirs, faire des évaluations, mais c'est très, très dur à cause des conventions collectives. Il y a aussi des choses à poursuivre exactement, etc. J'ai constaté que dans le projet de loi aussi, quand on définit le mode des élections, comment on choisit, c'est très, très serré aussi.

On n'a pas mentionné ça dans notre mémoire, mais, moi, je crois qu'on doit donner un petit peu de souplesse au niveau des écoles, suggérer que les procédures, que vous avez suggérées, sont dans un encadrement et on peut faire des changements en ce qui concerne les processus, étant donné qu'on garde toujours la philosophie des changements. Moi, ce que j'ai trouvé, comme éducateur aussi, c'est qu'il y avait trop de détails. Qu'est-ce qui arrive quand on a trop de détails? On dépend seulement des détails et on ne donne pas la chance, l'opportunité à des gens d'improviser, c'est très important, pour essayer d'autres expériences, etc. Si la loi est serrée, on réfère tout le temps aux lois et on dit: On se désiste des responsabilités qu'on doit avoir aussi pour faire des choses. Je ne sais pas comment on peut contourner ce type d'idées, mais, moi, j'ai trouvé qu'il y a trop de détails. Il faut donner dans la loi... Pour moi, c'est un encadrement. Nous avons des professionnels auprès des écoles; les professionnels peuvent traduire ces encadrements pour le niveau et la communauté où ils demeurent.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le président.

Mme Marois: C'est très intéressant. Je ne veux pas prolonger, je sais que mes collègues veulent poser aussi des questions. Je dirais que le plus grand défi, c'est ça, hein, c'est l'équilibre entre tout définir et ne rien définir. Alors, qu'est-ce qui, entre les deux, laisse la latitude nécessaire pour exercer son imagination, sa créativité et avoir un réel pouvoir et, en même temps, l'obligation que j'ai comme ministre de m'assurer que la réussite de nos élèves se compare d'un endroit à l'autre à travers le Québec? Alors, c'est tout cet équilibre-là qui est à préserver et à rechercher. Je vous remercie pour vos interventions.

Le Président (M. Paré): M. le député de Marquette, porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il nous reste combien de temps, à mon collègue et à moi?

Le Président (M. Paré): Il vous reste 12 minutes.

Mme Marois: Ce n'est pas une heure?

Le Président (M. Paré): Non, c'est 45 minutes.

Mme Marois: Ah! je croyais que c'était une heure.

Le Président (M. Paré): Non, non.

M. Ouimet: Oui. Alors...

Mme Marois: Je m'excuse, je suis désolée, vraiment... Sauf que je suis certaine...

M. Ouimet: Je sais que c'était intéressant.

Mme Marois: ...que les membres de l'autre côté de la commission aussi, de la table, ont apprécié les échanges qu'on a eus quand même.

M. Ouimet: Tout à fait.

Le Président (M. Paré): Mais le reste du temps va être imparti à...

M. Ouimet: Mais on aime bien avoir un peu de temps aussi, M. le Président, surtout que...

Le Président (M. Paré): Vous avez le reste du temps...

Mme Marois: Oui. Je suis désolée, je croyais qu'on avait plus de temps que ça.

M. Ouimet: Bon. Alors, brièvement, compte tenu que le temps file rapidement. Je ne reviendrai pas sur la question religieuse dont vous faites état, c'est omniprésent dans votre mémoire.

Vous disiez tantôt: La création de conseils d'établissement, c'est le rapprochement entre l'école et le milieu, donc il ne devrait pas y avoir pour les écoles des statuts que catholique ou protestant; vous suggérez que les écoles puissent avoir un statut d'école juive également. Mais, a contrario, vous dites aussi: S'il n'y a pas de privilèges pour les autres confessions religieuses, il ne devrait pas y avoir de privilèges pour les catholiques et les protestants non plus. Ça, c'est la trame de fond que j'ai bien saisie. S'il y a des privilèges pour les catholiques et les protestants, il devrait y avoir des privilèges pour tout le monde; s'il n'y en a pas pour les autres confessions, il ne devrait pas y en avoir pour les catholiques et les protestants. J'ai bien saisi?

M. Rabinovitch (Joe): Oui.

M. Ouimet: O.K. Je reviens sur une autre dimension: l'implication des parents et le lien que vous en faites avec le conseil d'établissement. Lorsque vous dites que l'implication des parents dans le cadre de l'instruction et de l'éducation de leurs enfants constitue un facteur essentiel à la réussite scolaire, avez-vous en tête l'implication des parents au niveau des comités d'école ou des futurs conseils d'établissement, ou davantage l'implication des parents par rapport à l'éducation de leurs propres enfants? Et la raison pour laquelle je vous pose la question, c'est que ce qu'on remarque à travers les commentaires qui ont été formulés par d'autres groupes qui vous ont précédés, c'est que, bien qu'on dise qu'on souhaite donner plus de place aux parents au niveau de l'école, dans les faits, si on compare ce qui existe actuellement, comités d'école où 25 parents peuvent siéger, conseils d'orientation où jusqu'à sept parents peuvent siéger, on propose maintenant un seul conseil d'établissement où seuls sept parents siégeront, et, pour l'instant, ils ne seront même pas majoritaires. Alors, je voudrais juste bien clarifier ça. Dans quelle mesure pensez-vous que la place qu'on fait aux parents au niveau du conseil d'établissement va favoriser la réussite scolaire de leurs enfants s'ils sont en nombre moins grand avec l'actuel avant-projet de loi qu'avec la Loi sur l'instruction publique?

Le Président (M. Paré): M. Rabinovitch.

(14 h 40)

M. Rabinovitch (Joe): Oui, je peux répondre de deux façons. La première façon, ce sera que chaque parent ait la responsabilité personnelle pour assurer la réussite de ses enfants au niveau de l'école. Ça, c'est «a given», c'est une donnée: chaque parent a ce droit, a sa responsabilité.

Deuxième réponse. Moi, ma formation a été dans l'éducation. J'étais un éducateur aussi il y a 30 ans, pas maintenant, mais je suis de l'ordre des «of the old school», de l'ancienne école, on donne aux professionnels les outils pour faire ce qu'ils doivent faire. Je crois que c'est important d'impliquer les parents, mais c'est les professionnels qui sont là chaque jour, qui travaillent avec les enfants aussi, et je trouve que ce n'est pas nécessaire d'avoir les parents comme des partenaires majoritaires sur les comités. Les parents sont là pour deux, trois années peut-être dans la communauté, après ça, ils partent pour un autre niveau, etc. Je crois que les professionnels – et j'inclus dans ce mot «professionnels» le directeur, les enseignants, les professionnels psychologues et tous les autres gens qui s'impliquent dans la vie de l'école – doivent être majoritaires. Je ne trouve pas que c'est nécessaire que les parents soient majoritaires, parce que le parent actuel a deux responsabilités, comme je viens de le dire: la responsabilité personnelle de l'éducation de son enfant puis la responsabilité communautaire, comme parent, de s'impliquer dans la vie de l'école. Mais, à savoir s'ils doivent être majoritaires, moi, je ne trouve pas que c'est nécessaire pour faire fonctionner l'école et pour faire de l'école une réussite.

M. Ouimet: Et nonobstant la question de la majorité, sur quoi doivent porter, au sein du conseil d'établissement, les pouvoirs des parents pour favoriser la réussite éducative de leurs enfants? Vous avez dit tantôt: Idéalement, il faudrait que le conseil d'établissement puisse choisir la direction d'école, et encore plus important selon vous, le personnel enseignant. Ces pouvoirs ne sont pas prévus dans l'avant-projet de loi. Alors, l'implication des parents au conseil d'établissement est le lien avec la réussite de leurs enfants, mis à part lorsque vous soulevez, à juste titre, la responsabilité personnelle de chaque parent de voir à la réussite de ses propres enfants, mais située dans le contexte du conseil d'établissement.

M. Rabinovitch (Joe): O.K., deux ou trois choses. Premièrement, c'est un «input» – on dit «input»?

Une voix: «Input».

M. Rabinovitch (Joe): «Input», O.K.

M. Ouimet: On a compris.

M. Rabinovitch (Joe): ...«input» dans le processus évaluatif des professeurs, «input» dans le processus évaluatif du curriculum, «input» dans le processus – je dis tout le temps «input dans le processus» – évaluatif du but, de la mission de l'école. Ça veut dire que les parents, comme partenaires dans le fonctionnement de l'école, doivent avoir, pas le pouvoir, mais l'«input» nécessaire pour ces trois ou quatre champs dont je viens de parler. Parce que, moi, si je suis parent, j'aimerais avoir des choses à dire en ce qui concerne le corps professionnel, parce que, moi, je crois fortement dans l'évaluation, «accountability»...

Une voix: La responsabilité.

M. Ouimet: Reddition de comptes.

M. Rabinovitch (Joe): ...la responsabilité de chacun qui travaille dans l'école. Il faut avoir la responsabilité, c'est très très important, il faut être «accountable for your actions», il faut vous tenir responsables de vos actions.

Une voix: Imputable.

M. Rabinovitch (Joe): Imputable? Oui, c'est ça. Alors, les parents doivent être partenaires – dans quel format, je ne le sais pas, je ne peux pas vous le dire maintenant – mais dans le processus d'évaluation du personnel, du curriculum, de la mission de l'école, dans ces trois grands volets de l'école.

M. Ouimet: Avec votre permission, M. le Président, je céderais la parole à mon collègue de D'Arcy-McGee.

Le Président (M. Paré): M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Ouimet: Merci.

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. Rabinovitch, moi aussi, j'ai chanté les mêmes chansons que vous, j'étais élève à l'école publique d'Outremont, où on était, à peu près à 99 %, des étudiants de religion juive. On a chanté les mêmes chansons que vous.

La ministre a dit, en relation avec le statut confessionnel, à vous et à un groupe ce matin, qu'on doit discuter, parler de ce sujet dans un contexte serein, qu'elle va adopter un groupe d'étude bientôt, avec un mandat précis, avec un rapport dans un an, et que votre discussion dans ce mémoire est prématurée. Je me demandais ce matin, et je me demande encore maintenant: Est-ce qu'on devrait étudier cette question en relation avec cet avant-projet de loi? Comment est-ce qu'on peut étudier l'avant-projet – et je suis certain qu'après l'avant-projet la ministre va revenir avec le projet de loi – et est-ce que ce n'est pas prématuré d'adopter un projet de loi sans avoir la chance d'étudier le rapport final du groupe d'étude pour qu'on puisse adopter le projet de loi en même temps? À mon avis, en étudiant les mémoires qu'on a vus à ce jour où ce sujet a été abordé, c'est difficile d'adopter un projet de loi sans avoir eu la chance d'avoir une discussion sur le statut confessionnel. Alors, j'aimerais avoir votre opinion, car, moi, je suis mal à l'aise en relation avec ce sujet, avec votre rapport et d'autres rapports qu'on a reçus, et je pense qu'on doit avoir un changement de la ministre à ce sujet.

M. Rabinovitch (Joe): M. Jedwab.

Le Président (M. Paré): M. Jedwab.

M. Jedwab (Jack): Pendant que vous posiez la question, M. le député de D'Arcy-McGee, on a fait un mini-caucus et on est tous d'accord que justement – et j'ai même noté ça avant – peut-être que ce serait mieux d'attendre qu'on règle cette question de la place des groupes confessionnels à travers ce processus que Mme Marois a mentionné, avant qu'on procède à établir ou à – how do you say «implement»?

M. Rabinovitch (Joe): Mettre en place.

M. Jedwab (Jack): ...mettre en place les structures scolaires avec les désignations confessionnelles telles qu'elles sont formulées dans la loi actuelle. Comme ça, je pense qu'on va éviter la confusion et les malentendus que la loi telle qu'elle est actuellement formulée peut engendrer. Alors, on ne peut qu'être d'accord avec le point que vous avez soulevé malgré le fait que nous aimerions que tout ça se fasse dans les plus brefs délais parce que, comme on l'a dit tantôt, la modernisation du système scolaire est dans l'intérêt de l'ensemble de la population. Si «les plus brefs délais» n'inclut pas qu'on tente de régler cette question, qui est une question importante pour l'ensemble de la population, la place de la confessionnalité, je pense que c'est mieux d'attendre.

Je voudrais aussi dire un mot très rapidement sur un point que M. le député de Marquette a soulevé, quant aux mêmes privilèges. Si les privilèges ne doivent pas exister pour les catholiques et protestants au niveau public, on ne demandera pas de privilèges. Ça ne veut pas dire que nous pensons qu'il n'y a pas de place pour la confessionnalité dans le système scolaire du Québec. Effectivement, nous considérons qu'il y a une place importante pour la confessionnalité dans le système scolaire du Québec et, comme on l'a dit aux états généraux, idéalement ce serait dans le domaine privé, avec un appui étatique équitable et important, comme on l'a toujours prôné. Mais, si on élimine la confessionnalité du réseau privé, j'ai l'impression que des membres de notre communauté reviendront à la demande que, dans le réseau public, on ait les mêmes droits que les catholiques et protestants.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Jedwab. M. Sultan, pour les remarques finales.

M. Sultan (David): Simplement pour revenir à ce que disait M. Jedwab, il est effectivement, à la lecture du projet de loi, difficile de ne pas parler de cette question-là, puisqu'elle est présente à tous les niveaux, incluant le curriculum, les programmes, les conseils d'établissement où on fait toujours référence à la question de représentants soit catholiques, soit protestants. Alors, avec tout le respect que je dois à la ministre – et je comprends très bien ce qu'elle essaie de dire et elle a peut-être raison là-dessus – c'est évident qu'on ne peut pas se pencher aujourd'hui sur cette question-là, mais le projet de loi en tant que tel nous donne l'occasion de le faire et, en fait – et je ne le dis pas avec émotivité, je le dis avec sérénité – nous donne l'obligation, avant d'adopter un projet de loi dans ce sens, de discuter de cette question-là, puisqu'elle est présente à tous les niveaux, également au niveau structural, au-delà de la question philosophique elle-même.

(14 h 50)

Le Président (M. Paré): Merci, M. Sultan. Les remarques finales, s'il vous plaît. Allez-y.

M. Bergman: Une question. À la page 10 de votre rapport, vous faites référence à la possibilité de conclure des ententes administratives avec d'autres partenaires, et vous faites référence à l'article 70 de l'avant-projet de loi. Est-ce que vous pouvez expliquer quel type d'entente administrative et avec quel autre partenaire vous faites référence, à ce sujet?

M. Sultan (David): En fait, nous reprenons l'article 70 du projet de loi que nous trouvons intéressant dans la mesure où ça permettra aux écoles qui auront la latitude, justement, de parvenir à des ententes administratives avec d'autres écoles, peut-être, la possibilité d'économiser ou bien d'être beaucoup plus flexibles au niveau budgétaire, et puis c'est une mesure que nous trouvons intéressante, puisqu'elle permettra aux écoles de pouvoir gérer leur budget et gérer leur administration de façon beaucoup plus responsable et beaucoup plus autonome également.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Marquette, pour vos remarques finales.

M. Ouimet: Alors, je remercie les représentants du Congrès juif canadien, région du Québec, pour leur excellente présentation et pour l'éclairage que vous fournissez aux travaux de notre commission. C'est toujours très intéressant de vous recevoir et d'entendre à la fois votre historique et votre point de vue par rapport à l'avenir. Merci.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Dans la foulée des propos de mon collègue, c'est un peu dommage, d'ailleurs, que vous n'ayez pas lu cette partie du mémoire qui est très intéressante et qui relate votre histoire et votre participation à la société québécoise et à son histoire, puisque vous y êtes depuis plus de 250 ans aussi, ce qui est pas mal, quand même, pour un pays qui a quelque 350 ans d'histoire. Donc, c'est un peu dommage qu'on n'ait pas pu entendre cette partie, mais votre contribution a été intéressante. Je me permets de vous inviter à nouveau, éventuellement, à revenir présenter aussi votre point de vue, au moment où on aura des débats aussi sur la question de la place de la religion à l'école. Alors, merci.

Le Président (M. Paré): Merci.

M. Rabinovitch (Joe): Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Maintenant, nous entendrons l'Association des comités de parents Québec– Chaudière-Appalaches représentée par M. Gilles Gagnon, président. On vous rappelle, M. Gagnon, que vous avez 45 minutes dont 15 minutes de présentation. On vous demanderait de présenter la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.


Association des comités de parents Québec–Chaudière-Appalaches

M. Gagnon (Gilles): Bonjour, M. le Président. Bonjour, Mme la ministre. Bonjour, M. Ouimet. Bonjour, membres de la commission parlementaire. La personne qui est avec moi, c'est Mme Anne Bureau, qui est la première vice-présidente de l'Association Québec–Chaudière- Appalaches, l'Association des comités de parents. C'est ma première vice-présidente, comme j'ose l'appeler de temps en temps.

Il me fait plaisir aujourd'hui, accompagné de Anne, de venir présenter, au nom des comités de parents de la région Québec–Chaudière-Appalaches, c'est-à-dire un groupe de 21 comités de parents qui s'étend de Charlevoix à Portneuf de ce côté-ci et, de l'autre côté, du côté sud, de L'Islet aller jusqu'à la commission scolaire de L'Amiante... C'est beaucoup de parents qui sont impliqués dans la chose scolaire depuis moult années et qui veulent être participants. D'ailleurs, notre mémoire, qu'on ne vous lira pas, on va... également, nous autres, on sait que vous savez lire, donc on va se limiter à le présenter dans les grandes lignes.

On veut aussi dire qu'on représente quand même des commissions scolaires d'anglophones qui sont représentés, chez nous, par un vice-président qui s'appelle M. Otto, à l'heure actuelle. On a dans l'esprit, toujours, l'association, la collaboration avec les autres partenaires de l'éducation. On a, à plusieurs occasions déjà, eu des collaborations, naturellement avec la direction régionale du ministère, mais également avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles. On a commencé certaines approches avec les enseignants et on veut agrandir le cercle de nos partenaires qui sont en discussion avec nous pour le mieux-être de nos enfants et leur réussite éducative.

On a participé également aux états généraux, et ça a été, je pense, malgré les difficultés que les parents ont à quand même se réunir, compte tenu des outils qu'ils ont en leur possession, mais également aussi du temps, parce que c'est des gens qui sont au travail le jour ou à la maison pour s'occuper de leurs enfants... Donc, ça devient, pour nous, beaucoup plus difficile.

Ça devient également difficile, question – le mot anglais – de «timing». C'est qu'en fin d'année scolaire les parents sont surchargés. Il y a des difficultés aussi à rencontrer nos parents. On sait que, nous, le conseil d'administration, compte tenu des moyens qu'on a, on ne fait que quatre rencontres par année et ça devient difficile d'avoir l'intérêt de tout le monde. Par contre, on tenait à vous présenter ce mémoire dont vous avez le texte entre les mains. On tenait à vous faire dire au moins ce que nous pouvions vous dire, avec les outils qu'on avait de disponibles.

Naturellement, on a ajouté certains éléments, nos prédécesseurs avaient ajouté certains éléments qui n'étaient pas contenus dans l'avant-projet de loi. Nous aussi, on a parlé de certains éléments qui étaient là. On a ajouté également, entre autres, les EHDAA, communément appelés, que ma collègue de l'exécutif vous présentera. On va se partager le travail en deux.

Ce qu'on avait surtout à redire. L'avant-projet de loi est quand même, dans l'ensemble, bien accueilli par les parents de la région 03-12, Québec–Chaudière-Appalaches. Par contre, il y a quelques petites choses qui ont accroché et, sans plus tarder, je vais aller directement là-dedans. Entre autres – et là je me mêle dans mes pages, naturellement – ce qu'on veut, c'est toute la notion d'école. Ce qu'on veut, c'est qu'il y ait un conseil d'établissement par lieu physique où nos enfants vont, par bâtisse donc – c'est le terme qui a été employé par l'ensemble des parents qui se sont prononcés là-dessus. Ce qu'on se dit, c'est que, effectivement, on veut que la direction, toute la gestion de l'établissement soit faite avec une seule réalité, qui est la réalité de la bâtisse.

On veut également que la composition du conseil d'établissement soit revue, d'abord à différents éléments, surtout la représentation des parents qui soit haussée. Parce qu'on se dit – puis, M. Ouimet, vous l'avez mentionné dans l'intervention précédente: On passe d'une trentaine de parents qui sont plus impliqués dans l'école à sept parents, dans le projet de loi. Ce qu'on se dit, c'est qu'on voudrait que le nombre soit ajouté, mais selon, aussi, la capacité du milieu à pouvoir. On n'a pas besoin, à ce qu'on pense, d'un conseil d'établissement de 25 personnes si l'école compte 100 élèves. Par contre, là où il y aura une école qui a un bassin d'écoliers suffisant, qu'on puisse avoir un ajustement selon les besoins, comme on a à l'heure actuelle aussi au niveau du conseil d'orientation où il y a un nombre variable qui est déterminé à l'heure actuelle par le conseil des commissaires, mais qui tient compte, entre autres, de la population de l'école.

On se dit que la composition devrait être d'au plus deux enseignants, parce qu'il faut dire qu'à l'heure actuelle le comité d'école a un enseignant; le conseil d'orientation, deux enseignants, mais on ajoute au conseil d'établissement d'autres professionnels, d'autres employés du monde scolaire. Le parallèle entre le conseil d'établissement et le conseil d'orientation, c'est un conseil d'administration. Donc, à ce moment-là, c'est au demandeur de services ou au payeur d'administrer. Donc, on se dit: Le conseil d'établissement devrait être dirigé par des parents.

Il faut aussi qu'il y ait des représentants de la communauté – ça, on est d'accord avec ça – mais on se dit qu'un seul pourrait suffire. Et le représentant de la communauté serait aligné sur les besoins propres de l'école. On parlait d'une définition, on s'interrogeait, on s'est dit: Peut-être qu'il y aurait lieu d'avoir... les membres du milieu pourraient se prendre en charge, comme dans d'autres projets de loi qu'on a vus.

Les parents majoritaires pourraient être décisionnels. Ce qu'on veut effectivement, c'est que la décision appartienne aux parents. Et on veut aussi que le quorum soit établi sur la base des parents présents, parce qu'on pourrait avoir un nombre de parents inférieur et tout l'ensemble des autres membres siégeant au conseil d'établissement... qu'il se prenne des décisions alors que les parents, à cause d'un concours de circonstances... le nombre est inférieur à ce qu'il devrait être, on parle de sept; s'ils sont deux parents, ils peuvent quand même prendre une décision. Donc, on se dit qu'il y a un danger là que la parole des parents soit mal entendue.

Naturellement, le rôle des commissaires, bien, on souhaite effectivement que le commissaire, comme il se fait d'ailleurs à l'heure actuelle dans plusieurs de nos écoles, soit présent. Mais n'est-ce pas le surcharger que de l'obliger à siéger dans les conseils d'établissement lorsqu'il y a un grand territoire à couvrir, lorsqu'il y a plusieurs écoles à couvrir? Parce qu'on sait que, avec la refonte de la carte des commissions scolaires, le nombre de commissaires va être naturellement diminué, réduit et, de ce fait, va demander de couvrir un plus grand territoire, donc un plus grand nombre d'écoles.

Naturellement, on est d'accord avec le fait qu'au comité de parents, enfin, on reconnaisse que, quand un représentant du comité de parents n'est pas disponible, son substitut agisse comme... On fait l'analogie avec le vice-président ou la vice-présidente d'une organisation, quelle qu'elle soit, qui prend les commandes lorsque le président n'est pas là.

(15 heures)

On se dit aussi que la convocation devrait être faite par des parents. C'est une chose de parents, donc c'est aux parents, qui paient et qui ont la première responsabilité de l'éducation des enfants, donc on se dit, qu'ils prennent déjà le conseil d'établissement en main et que, lui, ce président ou, elle, cette présidente-là, convoque la première assemblée générale, à défaut, la personne qui occupe le poste de la vice-présidence et, en troisième lieu, le directeur de l'école, advenant que l'incapacité soit dans ces deux éléments-là.

Le mandat, on en a discuté. On se dit: Il y a une distorsion, il y a une dichotomie entre le mandat du parent qui siège à deux ans et les autres membres qui siègent à une année. Donc, on se dit: Ça devrait être un mandat équivalent pour tout le monde. Naturellement, d'aucuns pourraient dire qu'effectivement deux ans, ça serait l'idéal. Mais, d'un autre côté, on arrive dans une école primaire et si le parent élu, c'est un parent de sixième année, si on l'a élu pour deux ans, on va le préférer à une autre personne qui serait peut-être plus compétente, à notre avis et à l'avis des parents en assemblée générale pour le nommer. J'espère que je ne prends pas trop de temps puis que j'en laisserai un peu à ma vice-présidente, la première.

La qualité de parent est essentielle pour siéger, pour avoir naturellement la voix du parent qui est là. Une personne qui devient déqualifiée – on parle surtout au secondaire, lorsqu'il y a un décrochage à 16 ans – le parent devrait automatiquement être déqualifié pour être remplacé par un parent qui, lui ou elle, peut naturellement encore penser comme étant un parent. On a des craintes là-dessus.

Nos membres parlent de choisir également le vice-président parmi les parents, encore là, à cause du jeu de remplacement en cas d'absence d'agir ou d'incapacité d'agir du ou de la présidente. On a revu ça, le nombre de parents, la moitié des parents, on l'a vu en quorum.

Le nombre de séances. On se dit que peut-être trois séances, c'est peut-être insuffisant. On suggère cinq séances au niveau du conseil d'établissement.

Les critères de sélection du directeur d'école: On est d'accord comme ça se fait actuellement au niveau des conseils d'administration. Ce qu'on nous donne souvent, dans nos comités de parents, comme information, c'est: Si c'est de la réaffectation, on n'a pas à nous consulter parce que le libellé de l'article de loi fait en sorte qu'on dit «à l'embauche». Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'un directeur d'école qui est embauché selon certains critères de sélection dans une école, dans un établissement, ce n'est pas nécessairement les mêmes critères qu'un autre établissement ou un autre groupe de parents, compte tenu du contexte, compte tenu de plusieurs facteurs. Ça ne serait peut-être pas nécessairement les mêmes critères qu'on adopterait. Donc, il faudrait peut-être aller en consultation à chaque fois qu'on a à changer le directeur d'un établissement, donc d'une école, plutôt qu'à l'embauche seulement.

Le délai des consultation, je pense l'avoir mentionné, mais je vais ajouter effectivement qu'on aimerait avoir un délai raisonnable de consultation, parce qu'il ne faut pas oublier qu'on a un cycle minimum de 45 jours à un mois si on veut aller au niveau régional chez nous ou au niveau provincial à la Fédération, nos collègues de la Fédération. Il ne faut pas oublier qu'il faut aller au comité d'école, au comité de parents, à l'Association régionale, puis Anne siège également comme directrice représentant la région 03-12 à la Fédération. Donc, si on veut qu'elle amène un dossier d'une école, à la rigueur suivre la panoplie des échelons, il faut absolument qu'il y ait un délai suffisant pour ce faire.

Les parents, naturellement, travaillent dans la journée ou ont d'autres activités. Pour fournir un avis éclairé, ce délai-là est nécessaire pour pouvoir à tout le moins bien présenter un avis éclairé. On sait que le soir même où on remet un document, on le lit en diagonale, on n'a pas toute l'information. C'est d'autant plus sérieux comme problématique que, si on est sept parents, c'est difficile d'avoir un chargé de dossier dans chaque situation ou dans chaque type de dossier qui est étudié et d'aller consulter à la base nos gens aussi. Parce qu'on veut aussi que les parents s'impliquent. D'ailleurs, on verra plus loin qu'on veut avoir une table de concertation parentale qui soit un peu le genre du comité d'école actuel, quitte à l'avoir un petit peu plus grand.

La qualité des services, bien, on craint que les écoles cherchent à se compétitionner. On craint un déplacement de la clientèle. On le vit actuellement avec certains programmes qui existent. On a des classes de concentration, ou on a des classes internationales, ou on a des classes informatiques, et déjà chaque commission scolaire va s'arracher de la clientèle scolaire puis, en bout de ligne, si on fait le tour, on a à peu près la même clientèle de commission scolaire que si on l'avait. Mais on craint que ça se fasse au niveau d'une école par rapport à une autre et de dégarnir peut-être certains étudiants qui auraient avantage à rester dans une école.

Donc, ce qu'on veut, nous, c'est que chaque établissement – on parle d'égalité dans notre société – ait les ressources disponibles nécessaires, qu'il y ait une qualité d'enseignement comparable, que, si un enfant passe d'une école à l'autre, il ne soit pas ou trop formé par rapport à ses voisins ou pas assez formé. Il faut qu'il y ait un équilibre quand même là-dessus.

Je termine, moi, en parlant de l'approbation des modalités d'application des régimes pédagogiques. On n'a aucun regard à l'heure actuelle sur les manuels scolaires et le matériel didactique. On a analysé certains coûts d'achat du matériel scolaire; la gratuité, on commence à s'interroger là-dessus. Quand on dit que ça peut coûter jusqu'à 180 $ à un parent d'un élève du secondaire dans certaines commissions scolaires, on aimerait peut-être dire aux enseignants: On est conscient que vous avez vos propres manuels, on est conscient de votre autonomie professionnelle mais, d'un autre côté, soyez conscients de la capacité de payer des parents et essayez au moins d'avoir certaines balises. Il y a des commissions scolaires, on le sait, qui ont déjà donné des balises, mais on aimerait pouvoir avoir un droit de regard comme conseil d'établissement, et donc, par ce fait, comme parents. Je passe la parole maintenant à Mme Bureau, ma première vice-présidente, et je vous remercie de m'avoir écouté pour ce bout de présentation.

Le Président (M. Paré): Mme Bureau, il vous reste deux minutes.

Mme Bureau (Anne): Je vais essayer de faire ça vite. J'ai quatre petits points à aborder, je vais essayer de les résumer du mieux que je peux. Le premier, c'est le comité d'école. Sur le conseil d'établissement, nous nous rendons compte que la majorité des partenaires ont un lieu où ils peuvent aller concerter leurs pairs: les enseignants peuvent consulter les autres enseignants de l'école; les directeurs d'école ont leur table de gestion au niveau de la commission scolaire mais les parents se retrouvent comme un peu isolés puisqu'ils n'ont aucune table de concertation.

Donc, les parents de la région recommandent que soit instauré et reconnu dans la loi un comité d'école. Et, si on veut qu'il soit reconnu dans la loi, c'est pour pouvoir se réunir dans les locaux de l'école, utiliser certaines ressources de l'école et aussi peut-être avoir un certain budget de fonctionnement.

Je voudrais aborder aussi très brièvement les comités EHDAA. Les parents sont nommés par le comité de parents mais ensuite ils ne revoient plus le comité de parents, ce qui fait qu'il n'y a aucun lien fonctionnel entre les deux comités qui sont deux comités de la commission scolaire. Ce que les comités EHDAA de la région recommandent, c'est qu'un membre du comité EHDAA siège au niveau du comité de parents, qu'il y ait un siège pour lui.

Je vais aller plus vite. Il y avait d'autres choses dans le mémoire mais je pense que, comme le disait mon collègue tantôt, vous êtes capables de lire; donc, je vais laisser tomber les autres points. Il y a l'immunité des parents qui est un point que la région a abordé. Nous demandons que soit ajouté à la clause de l'immunité des parents que la commission scolaire prenne fait et cause pour tout membre de conseil d'établissement qui serait poursuivi dans l'exercice de ses fonctions, et je précise l'exercice de ses fonctions à l'intérieur d'une réunion du conseil d'établissement.

Et, le dernier point, c'est qu'on voudrait avoir un protecteur de l'élève de façon à protéger les droits de l'élève. Donc, je crois que mon temps est écoulé. Nous allons répondre maintenant à vos questions.

Le Président (M. Paré): Merci, madame. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vous remercie pour votre présentation et vous allez me permettre aussi de vous féliciter parce que, s'il y a un projet de loi qui est devant nous, qui veut redonner de la place aux parents, c'est parce que nous croyons à la présence des parents auprès de leurs enfants, auprès de l'éducation et du développement de leurs enfants, et nous croyons, malgré ce qu'on a pu en penser parfois, qu'ils sont les premiers responsables du développement de leurs enfants. Pour moi, c'est fondamental, et j'aime que vous veniez là en disant: Nous sommes d'accord, nous voulons cependant voir baliser mieux certaines de nos responsabilités, nous voulons voir préciser nos rôles. C'est pour ça qu'on est ici, ensemble, et je vous remercie du mémoire que vous nous présentez et de l'apport que vous avez à cet égard à la réflexion de notre commission.

Parce que j'étais un petit peu désolée de certains mémoires – je le dis là, je choisis le moment de votre présence ici – qui trouvaient que les parents n'avaient pas les compétences nécessaires pour exercer ce rôle qu'on veut leur confier au sein des conseils d'établissement. Moi, je suis convaincue du contraire. Vous en êtes une belle preuve. Vous en faites la preuve aujourd'hui et vous faites la démonstration de par votre implication passée aussi que cela est possible.

(15 h 10)

Maintenant, j'aimerais ça que vous nous entreteniez un petit peu de l'affirmation que vous faisiez au départ. Ce n'est pas nécessairement dans le texte ou ça l'est en filigrane. Vous dites: Nous avons des liens avec les partenaires de l'enseignement, nous nous sentons des partenaires et nous avons des expériences en ce sens-là. Vous savez, autant vous pouvez manifester votre accord avec les réserves, les recommandations, etc., je peux comprendre ça, autant il y a certaines craintes – je vais utiliser ce terme-là – de la part, entre autres, de représentants d'enseignants par leurs représentants syndicaux, à ce moment-ci. Ils ont des craintes de voir ces responsabilités confiées aux parents. Or, vous nous dites: Nous avons des partenariats avec les gens avec lesquels on travaille, que ce soient les enseignants, les directions d'école ou autres. J'aimerais que vous nous parliez un petit peu de ces expériences-là et que vous nous indiquiez comment on pourrait rassurer les gens qui voient ça d'un oeil un peu différent de celui que vous nous présentez aujourd'hui.

M. Gagnon (Gilles): Je vais débuter un peu et je vais laisser Anne compléter. Premièrement, on a quand même déjà des contacts qui sont, dans plusieurs écoles, au sein même des instances à l'heure actuelle: comité d'école, conseil d'orientation. Dans plusieurs écoles, on a des bonnes discussions, on a des bonnes activités. Il s'organise des choses dans chacune des écoles qui sont surprenantes des fois. On dit: On peut avoir un partenariat. Ça fait deux années qu'on invite les enseignants à notre colloque qui a pour but, entre autres, de former et d'informer nos parents, mais également de faire des forums de discussion sur certains sujets. Comme on a invité l'AQPDE, comme on a invité d'autres partenaires, on invite également les enseignants, et la participation l'an passé... Cette année, notre colloque, c'est au mois de novembre, le 8. Excusez, je perds mes dates. Il reste qu'ils sont invités, ils ont une place, on veut leur faire une place puis on veut discuter. Discuter parce que, à notre avis, la communication, c'est vraiment ce avec quoi on peut régler beaucoup de problèmes. C'est l'outil privilégié pour pouvoir s'apprivoiser puis se compléter. Parce qu'il faut se compléter, le parent et l'enseignant, dans l'éducation de l'enfant; il faut absolument qu'il y ait un pairage, et on pense qu'avec la communication on peut y arriver. Anne.

Mme Bureau (Anne): Je crois qu'une des grandes peurs des enseignants, c'est que les parents s'ingèrent dans leurs classes. Et ce n'est pas ce que nous demandons, de s'ingérer dans la classe. Nous, on veut prendre part aux décisions, on veut avoir droit de regard sur certains sujets. On veut être reconnus comme partenaires de l'éducation parce que, vous l'avez dit tantôt, nous sommes les premiers éducateurs de nos enfants. Et je pense que ce n'est pas de notre intérêt. On n'est pas des professionnels de l'enseignement, on ne veut pas aller dans la classe voir ce qui se fait, mais je pense que quelque part l'échange entre les deux peut être profitable.

Je pense uniquement à des enfants en troubles d'apprentissage ou d'adaptation, par exemple, où la communication parents-professeur se doit d'être très bonne pour aider l'enfant à réussir une année scolaire. Et, comme le disait mon collègue, c'est la communication entre les deux. C'est sûr que, bon, comme je le disais un petit peu plus tôt cette semaine: tout ce qui est nouveau fait peur. Le conseil d'établissement fait peur. Les nouveaux pouvoirs que les parents vont avoir avec le conseil d'établissement peuvent faire penser à certains enseignants qu'on veut aller dans la classe, mais ce n'est pas ça qu'on veut. Ce qu'on veut, c'est d'être capable de voir ce qui se fait avec nos enfants, de voir à une meilleure qualité de services, à une meilleure éducation pour nos enfants. Je ne pense qu'on veuille aller dans la classe enseigner à leur place.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Bureau. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je partage le commentaire de la ministre de l'Éducation qui vous félicitait sur la qualité de votre intervention. Je partage entièrement ce commentaire et je vous félicite également. J'ai une question rapide puis j'ai quelques commentaires. Juste sur le dernier point que vous soulevez par rapport l'inconfort manifesté apparemment par les enseignants, est-ce possible que c'est parce que ce n'est pas suffisamment clair dans le projet de loi sur quoi vont porter les décisions du conseil d'établissement? Est-ce que c'est possible que nous obtenions cette réaction-là de la part des enseignants avec ce qui a été mis sur la table et que, lorsque la ministre clarifiera les choses de façon claire, nette et précise dans le projet de loi qui suivra, on aura réglé ces choses-là?

M. Gagnon (Gilles): Je peux répondre en disant que je ne suis pas le porte-parole des enseignants puis ils sont, je pense, équipés de porte-parole peut-être meilleurs que nous...

M. Ouimet: Ah, ça, sans l'ombre d'un doute.

M. Gagnon (Gilles): ...pour répondre à cette question-là, mais il est évident, en osant quand même tenter une réponse, que quand les règles du jeu sont plus claires, la partie risque d'être jouée selon les règles du jeu et qu'on n'interprète pas le livre de règlements.

M. Ouimet: Oui. Alors, le problème, ce n'est peut-être pas la méfiance des enseignants, mais c'est peut-être que le travail que nous avons sous les yeux mérite d'être retouché de façon importante.

M. Gagnon (Gilles): Écoutez, là-dessus, moi, je pense qu'il y a toujours place à amélioration de quelque document que ce soit. C'est sûr que, si toutes les lois prévoyaient tout, on n'aurait pas besoin de tribunaux. Dans ce contexte-là, je me dis: Les enseignants, oui, ont certaines craintes, mais il y a beaucoup d'enseignants qui, à l'heure actuelle, connaissent la façon de travailler des parents.

Mme Marois disait, et vous-même: On est capable d'amener de l'argumentation. On est conscient que quand tu administres, peu importe dans quel domaine d'activité tu es, et que tu fais confiance aussi aux gens qui sont là, tu laisses tes professionnels travailler.

M. Ouimet: Oui.

M. Gagnon (Gilles): Ce que tu as besoin de savoir, c'est leur plan d'action, les objectifs qui sont visés et, par la suite, tu les laisses aller. En fait, tu leur formules des attentes et tu vas avoir, en bout de course, si ces attentes-là ont été comblées. Naturellement, dans les années précédentes, si les attentes te sont formulées, qu'elles ont été discutées et que tu es d'accord avec ces attentes-là, elles ont été rencontrées, l'enseignant n'a pas de crainte à avoir. Ça, c'est la très grande majorité des enseignants parce que ce sont des professionnels qui sont compétents et qui ont beaucoup d'expérience. On connaît la moyenne d'âge des enseignants, malgré qu'elle s'est réduite quelque peu, là, avec les mesures de départ assisté, mais il reste que c'est des professionnels compétents, expérimentés.

M. Ouimet: Parfait. Une question rapide...

Le Président (M. Paré): Mme Bureau, un complément de réponse?

Mme Bureau (Anne): Non, c'est beau.

M. Ouimet: Une question rapide: un conseil d'établissement par bâtisse.

M. Gagnon (Gilles): Oui.

M. Ouimet: J'avais déjà posé la question au début de la semaine, je pense, ou à la fin de la semaine passée: Combien de directeurs d'école – je ne parle pas de directeurs et directeurs adjoints – avons-nous dans le système? Et est-ce que vous allez assez loin pour dire: Un directeur d'école par bâtisse également, avec le conseil d'établissement? Et, si la réponse est oui, est-ce qu'on pourrait avoir une donnée précise: Nous avons combien d'écoles au Québec, primaires et secondaires, combien de directeurs titulaires d'une école? Ce serait intéressant juste d'avoir la donnée.

Mme Bureau (Anne): Ce que je voudrais juste vous dire, c'est que je sais qu'il y a des directeurs qui se partagent deux ou trois écoles, à l'heure actuelle.

M. Ouimet: Oui, je le sais. Il y en a qui en partagent quatre, également.

Mme Bureau (Anne): Oui. Alors, ce que les gens nous demandaient à nous, c'est d'avoir vraiment un conseil d'établissement par école puisqu'il y a des écoles institutionnelles qui regroupent deux ou trois villages. Ils se sont dit: La réalité d'un village, ce n'est pas la réalité du village voisin, ils voulaient vraiment être capables d'avoir leurs décisions dans leur milieu.

M. Ouimet: Est-ce qu'on a un chiffre, Mme la ministre?

Mme Marois: On aurait actuellement, sous toute réserve, 2 200 directeurs et directrices d'école pour 3 300, 3 400 écoles; 3 000 bâtisses, pardon. Évidemment, on a des directeurs adjoints aussi, il y en a 1 100; alors, parfois, des directeurs adjoints...

M. Ouimet: Oui, mais il y a des écoles polyvalentes aussi.

Mme Marois: C'est ça, oui. Des écoles polyvalentes, il y en a beaucoup moins, je pense qu'on a 2 400 écoles primaires et, le reste, ce sont des écoles secondaires.

M. Ouimet: O.K. En tous les cas, c'est une donnée intéressante.

M. Gagnon (Gilles): Il faut se dire que beaucoup de parents, ce qu'ils nous signalaient, c'est que quand un directeur d'école couvre plus qu'une bâtisse, il n'est pas là au moment où se passent les choses. Il y en a qui me disaient, un petit peu en blague: C'est comme quand la mère disait: Attends que ton père arrive, pour ce que tu as fait, il va te punir. Bien, si on ne réagit pas immédiatement à ce qui se passe, attendre que le directeur arrive, dans deux ou trois jours, il va venir mettre la bonne cheville dans le bon trou, on pense, nous, que ce n'est pas correct. Il y a des mémoires dont on a pris connaissance, où on nous dit: Il pourrait être chargé de certains autres dossiers. Nous préférons un directeur d'école qui a charge d'autres dossiers, mais qui est présent à l'école le maximum du temps possible pour réagir, pour évacuer s'il faut évacuer, pour pénaliser s'il faut pénaliser, mais pour sanctionner positivement aussi s'il y a sanction positive à faire.

(15 h 20)

M. Ouimet: Une dernière question, si vous permettez, et elle me paraît importante. Tantôt, je feuilletais à nouveau l'avant-projet de loi. Vous dites, dans votre mémoire, pour faire la vérification: «Les parents sont satisfaits des pouvoirs qu'ils auront en tant que membres du conseil d'établissement.»

Quand je regarde l'avant-projet de loi, les parents n'ont pas de pouvoirs comme tels. Ils ont le pouvoir de siéger au conseil d'établissement, c'est le seul pouvoir qu'ils ont. Et, si je vous dis ça... On aurait pu prévoir d'autres modèles, par exemple – peut-être que dans 10 ans, dans 15 ans, dans 20 ans, on changera – on aurait pu prévoir, par exemple, un droit de veto pour les parents sur certaines questions qui relèvent davantage de la compétence des parents; ça n'a pas été prévu. Le seul pouvoir qu'a le parent, en vertu de l'avant-projet de loi, c'est de siéger au conseil d'établissement.

Et, ce que je vous dirais: Dans la littérature américaine, il y a une étude que je cite depuis le début de la commission parlementaire, qui, elle, fait référence à une trentaine d'études américaines. C'est que, là où ça s'est effectuée la décentralisation et accorder plus d'autonomie aux écoles, on a eu les réactions des parents après l'avoir vécu, ce modèle-là, et l'implication des parents se limitait à à peu près ceci: à être informés et par la suite à estampiller des décisions prises par la direction de l'école.

M. Gagnon (Gilles): Je vous ferais remarquer que, à l'heure actuelle, dans certaines de nos écoles...

M. Ouimet: C'est ça aussi.

M. Gagnon (Gilles): ...que ce soit au comité d'école ou au conseil d'orientation, c'est comme ça que ça se passe.

M. Ouimet: Je sais.

M. Gagnon (Gilles): Il faut dire également que, dans d'autres écoles, ce n'est pas le cas. Mais, si on regarde l'ensemble du mémoire, ce qu'on se dit, c'est que, si on accepte d'abord d'ajouter des parents au conseil d'établissement, si on accepte également la présidence par un parent et si on accepte la majorité de parents, effectivement, là, comme on sera majoritaires...

M. Ouimet: On prend le contrôle.

M. Gagnon (Gilles): ...on aura un pouvoir qui sera réel.

M. Ouimet: Voilà.

M. Gagnon (Gilles): Deuxième élément. En fait, si on regarde le projet de loi – à moins qu'on en ait fait une mauvaise lecture – c'est déjà ce que les comités d'école et conseils d'orientation ont comme pouvoirs plus certains ajouts. Donc, on se dit: Déjà, si on avait été capable, dans les années précédentes et même cette année, d'au moins assumer les pouvoirs tels qu'on les a parce que le contexte le permet, je pense qu'on est capable d'assumer les pouvoirs de conseil d'administration. Je rejoins aussi l'objectif d'être majoritaires et, comme le disait Mme Marois et comme vous le disiez tout à l'heure, on est capable de gérer. Ce n'est pas parce qu'on est parents qu'on n'agit pas à d'autres titres ailleurs, qu'on n'a pas des emplois qui sont aussi importants et, des fois, plus importants que ceux qu'il y a dans les écoles.

M. Ouimet: Un dernier élément, si vous me permettez, M. le Président. Ce qui va se passer au conseil d'établissement, à l'école, c'est une chose, mais les grands encadrements, les conventions collectives, les règles budgétaires, tout ce qui régit, je dirais, à 90 % l'école, ça se passe ailleurs. Pourtant, il n'y a pas de place pour les parents ailleurs; aux tables de négociation, que ce soit comme observateurs, aucune place n'est faite. Si c'est vrai qu'on souhaite accorder plus de place aux parents dans le système scolaire, est-ce qu'on devrait réfléchir aussi à la possibilité d'avoir des représentants, par exemple, de la Fédération des comités de parents de la province là où les grandes décisions se prennent, pour s'assurer que ceux qui ont comme premier mandat l'intérêt de leurs enfants, l'intérêt des élèves, qui sont les parents, puissent être là aussi, là où les grandes décisions se prennent?

M. Gagnon (Gilles): Je vais laisser répondre Mme Bureau sur cette question-là, parce que, d'abord, elle siège à la Fédération des comités de parents de la province de Québec, et, d'autre part, c'est un palier supérieur au nôtre, au régional.

Le Président (M. Paré): Mme Bureau.

Mme Bureau (Anne): Je ne voudrais pas m'embarquer au nom de la Fédération des comités de parents; je pense que M. Garry Stronach pourrait facilement répondre à votre question mieux que moi. Ce que je vous dis, c'est que, si vous me l'offriez à moi – et je dis bien personnellement – je dirais oui, mais je ne crois pas que ce serait très bien accueilli partout. Comme le disaient certaines personnes que j'ai entendu cette semaine venir parler ici, des fois, les parents sont comptés dans l'équipe-école et des fois ils ne le sont pas. Donc, nous ne sommes pas partenaires tout le temps partout à part égales. La journée où on sera peut-être partout à parts égales et reconnus réellement, on pourra vous faire part de choses comme vous nous en avez parlé.

M. Ouimet: Mon dernier commentaire. Tous les partenaires ont des intérêts: les enseignants ont leurs intérêts; les commissions scolaires leurs intérêts; je dirais même que le gouvernement a ses propres intérêts, surtout lorsqu'il s'agit de réaliser des économies, mais les premiers concernés ne sont pas représentés à ces tables-là.

Mme Bureau (Anne): Non, en effet. Bien, quelquefois, mais pas toujours.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Bureau.

M. Ouimet: Merci.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Oui. D'abord, je voudrais vous dire que plusieurs des recommandations que vous faites vont être regardées de très près et on va essayer de voir comment on peut les retenir. Elles font consensus aussi chez les parents, soit sur la représentation ou la précision à apporter. Alors, on va analyser ça de près et, je le répète, c'est l'objet d'un avant-projet de loi, c'est ce qui permet la latitude, et les consultations qu'on fait aujourd'hui sont très riches; elles nous permettent vraiment d'avoir un éclairage particulier dont on se servira pour mieux resserrer le projet de loi lorsqu'on le déposera et qu'il deviendra un projet de loi.

Deux choses. La première, c'est sur la question de l'immunité des parents. Vous n'êtes pas les premiers à le dire, d'autres parents sont venus le dire, et je me suis tournée à quelques reprises vers les juristes en disant: Qu'est-ce qu'on peut faire de plus que ce qui est là pour essayer de rassurer et de dire: On prévoit cela, on prévoit cette immunité? On me dit: Bien, l'étape suivante, c'est comme l'immunité parlementaire. Autrement dit, il y en a une immunité telle que prévue par la loi. D'abord, la notion de bonne foi qu'on retrouve à l'article 66 de l'avant-projet de loi, c'est une notion qui est reconnue au plan de la jurisprudence et qui est aussi reconnue dans le Code civil, par le Code civil du Québec. Et cette notion-là, elle implique, entre autres – et je regarde mes notes pour ne rien oublier – qu'«une personne qui exerce une fonction qui est prévue par la loi, qui exerce cette fonction dans le respect de la loi, sans intention de nuire ou de léser un individu, ou d'utiliser sa fonction dans un but malicieux, ne peut faire l'objet d'une poursuite judiciaire individuelle».

Par ailleurs, il est important de rappeler que l'article 178, tel qu'il est amendé par l'avant-projet de loi, permet au conseil d'établissement de participer à une assurance-responsabilité, si on voulait aller plus loin. Maintenant, on va quand même le regarder pour nous assurer que les craintes que vous avez sont bien tenues en compte dans l'explication que je vous donne, dans les interprétations qui nous sont apportées. Il y a une préoccupation en ce sens de notre part aussi. On se comprend bien, on a intérêt à ce que ce soit le plus clair possible et qu'il n'y ait pas de poursuite, évidemment, de parents dans l'exercice de leurs fonctions et lorsqu'ils sont de bonne foi.

Maintenant, ma question plus précise, c'est à la page 7 de votre mémoire. Je ne reviens pas sur d'autres éléments, on essaiera de les reprendre éventuellement. À la page 7 de votre mémoire, vous dites: «Les parents sont inquiets de voir que le conseil d'établissement devra rendre compte de la qualité des services qu'offre l'école. Ils craignent que les écoles cherchent à compétitionner entre elles et qu'on assiste à un déplacement de clientèles. Nous croyons que l'école publique doit être accessible à tous et de bonne qualité dans tous les établissements. Pourquoi faudrait-il alors évaluer notre école?»

Alors, l'objectif que nous poursuivons n'est pas, évidemment, de ne plus rendre l'école accessible ou de la mettre en compétition avec l'école à côté, mais de la mettre face à elle-même dans le sens suivant. Le projet éducatif va être défini par l'équipe-école et par le conseil d'établissement. Ce projet éducatif comportera des objectifs de qualité éducative et, en ce sens, ce qu'on veut pouvoir faire, c'est que les objectifs que s'est donnée une équipe-école, le projet éducatif que s'est définie une école devraient faire l'objet d'un état de situation public pour que la communauté éducative, la communauté des parents, le milieu dans lequel oeuvre l'école, sachent que cette école a un objectif d'amélioration, de rehaussement de la qualité, mais par rapport à elle-même et à sa réalité, et non pas nécessairement en comparaison avec l'école d'à côté.

(15 h 30)

Je pense que c'était tout à fait à juste titre que des parents sont venus la semaine dernière nous dire que, dans le fond, ce n'était pas que la note à l'examen qui était nécessairement le critère pour évaluer la réussite d'une école. Prenons, entre autres, les enfants en difficulté. Un enfant en difficulté qui réussit à être plus autonome, ça va être une extraordinaire réussite pour cet enfant-là, alors que sa note, en bout de piste, elle ne sera pas nécessairement très bonne comparé à l'autre élève qui est très talentueux puis qui n'a pas de limites à cet égard-là. Et c'est dans ce sens-là, donc, qu'on veut voir connu le projet éducatif de l'école et qu'on veut qu'il soit transparent pour les parents dont les enfants fréquenteront cette école. Je ne sais pas si ça peut soit vous rassurer ou faire réduire vos inquiétudes, mais, par ailleurs, j'aimerais ça peut-être vous entendre sur cette question, à partir évidemment de l'interprétation que, moi, je donne à cet article-là.

Le Président (M. Paré): M. Gagnon.

M. Gagnon (Gilles): Permettez-moi de prendre quelques secondes, juste pour ajouter peut-être à ce que vous disiez comme commentaires mais sur l'autre sujet, au niveau de l'immunité des parents.

Mme Marois: Oui.

M. Gagnon (Gilles): Ce qu'on se dit, nous, c'est que le parent, à l'heure actuelle, oui, il a une protection légale, comme vous avez bien expliqué, sauf que souvent il n'a pas la ressource. La piste que vous avez donnée est intéressante, mais on se dit, nous autres, peut-être que le conseil d'établissement étant pris... décide-t-il d'en prendre une, assurance, ou pas? Est-ce que ça ne serait pas plutôt si c'était écrit dans la loi: La commission scolaire ou le conseil d'établissement fournit les ressources pour le parent de se défendre – compte tenu qu'il y a des partenaires qui sont des enseignants qui, eux autres, ont les ressources quand même. Je donne ça comme exemple – et on a tous les partenaires qui sont là – eux ont leurs ressources, mais, nous, les parents, on ne les a pas. Et on est à la merci des commissions scolaires au niveau du financement également comme comité de parents et comme association également. Ça fait qu'on ne l'a pas; c'est ça, c'est la ressource qu'on n'a pas. La loi, ça va. C'est bien beau de dire que tu as le droit de te défendre, mais, si on ne te donne pas d'arme, tu peux difficilement te défendre.

Mme Marois: D'accord.

M. Gagnon (Gilles): Veux-tu ajouter un commentaire?

Mme Bureau (Anne): Pas sur l'immunité, je pense que tu as tout dit, puis j'en ai parlé suffisamment déjà.

M. Gagnon (Gilles): O.K. Sur l'autre sujet, vas-y.

Mme Marois: Oui, parce que madame a participé à une autre séance où ça a été aussi abordé. Mais ça va, je comprends bien votre point de vue et on va essayer de voir comment on peut en tenir compte.

M. Gagnon (Gilles): D'ailleurs, c'est une excellente collègue, et je vous ai dit en début que c'était mon bras droit, et vous comprenez pourquoi maintenant.

Le Président (M. Paré): Mme Bureau.

Mme Bureau (Anne): Oui.

M. Gagnon (Gilles): La qualité des services.

Mme Bureau (Anne): O.K. La qualité des services. Vous savez, les êtes humains sont des êtres humains et la comparaison est facile. On compare toujours. Quand on veut acheter n'importe quoi, on compare toujours ce qu'on achète. On cherche souvent la meilleure qualité à moindre coût. Et je crois que ce que nous avons entendu comme commentaires, c'est que, si les projets éducatifs de chacune des écoles d'une commission scolaire sont publics, les parents vont chercher à acheter le meilleur et, souvent, celui qui va leur coûter le moins cher, malgré que chez moi je ne peux pas dire ça, à ma commission scolaire, parce qu'on a tous le même prix. Mais les parents vont chercher à acheter le meilleur, et je les comprends aussi. C'est dans ce sens-là que les parents de la région ont vraiment manifesté leur inquiétude. C'est-à-dire que, si les parents cherchent à acheter le meilleur, on va assister à un déplacement de clientèle, parce que les écoles en milieu défavorisé qui ne pourront peut-être pas offrir les mêmes activités parascolaires ou les mêmes services éducatifs aux enfants en difficulté vont peut-être se retrouver à un moment donné avec un manque de clientèle qui sera déplacée vers des endroits où il y aura plus d'activités, plus de services offerts aux parents et aux élèves. C'est les inquiétudes qui ont été manifestées par les parents.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Bureau. M. le député de Marquette, pour vos remarques finales.

M. Ouimet: Oui. Alors, je remercie sincèrement M. Gagnon et Mme Bureau à nouveau pour votre excellente présentation et vos excellents commentaires et recommandations. Je vous invite à réfléchir sur la perspective que j'ouvrais tantôt, c'est là que ça se passe, au national, 90 % des grands encadrements. Peut-être que, dans un mémoire éventuel, vous aurez des recommandations à nous faire. Merci.

M. Gagnon (Gilles): Si on a le temps de le monter, un peu plus de temps pour regarder la question.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Gagnon.

M. Ouimet: On trouvera les budgets pour vous appuyer.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de notre commission. Nous allons être attentifs, lorsque nous rédigerons le projet de loi, aux remarques que vous nous avez faites et aux propositions que vous nous avez présentées. Merci beaucoup.

M. Gagnon (Gilles): Nous vous remercions de nous avoir écoutés, d'autant plus que ce n'est pas souvent que les parents du monde scolaire ont l'occasion de s'exprimer.

Mme Marois: Moi, j'aime bien ça vous entendre.

M. Gagnon (Gilles): Merci, madame.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Gagnon... M. Gagnon, excusez, et Mme Bureau.

M. Gagnon (Gilles): Le lapsus est fait par d'autres personnes aussi.

Le Président (M. Paré): Exactement. J'inviterais le Comité de parents de la commission scolaire de la Chaudière-Etchemin, par son président, M. Pierre Bolduc. Nous vous rappelons que nous avons 45 minutes, dont 15 minutes de présentation, et on aimerait que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent. M. Bolduc.


Comité de parents de la commission scolaire de la Chaudière-Etchemin

M. Bolduc (Pierre): M. le Président, Mme la ministre, MM. les députés. Dans un premier temps, j'aimerais vous présenter mes collègues de travail parce qu'ils vont intervenir à tour de rôle, eux autres aussi. À ma droite, vous avez Mme Dominique Morin, qui est secrétaire du Comité de parents et, en même temps, commissaire-parent au niveau primaire. À ma gauche, vous avez Mme Édith Godin, qui est trésorière du Comité de parents. Celui qui vous parle, en même temps que président, est également commissaire-parent à la même commission.

On est très heureux et à la fois très, très nerveux d'être ici devant vous. Pas nerveux dans un sens négatif, mais très positif, en ce sens qu'on espère vous livrer l'essentiel du message de nos parents. Comme parents, bien, évidemment, nos enfants sont au coeur de nos préoccupations et, sans vouloir faire de jeu de mots, dans la même veine, nos parents nous ont donné comme mandat de venir vous parler à coeur ouvert, ils ont à coeur de dire plusieurs choses. Puis, si on avait, je dirais, à faire un résumé en une phrase, on vous dirait que le mémoire, c'est un cri du coeur de nos parents.

La façon de procéder, je vais y aller d'un court préambule. Par la suite, je vais céder la parole à Mme Godin.

Le Comité de parents de la commission scolaire de la Chaudière, dans un premier temps, si on est ici devant vous, c'est parce qu'il y a deux principes de base qui sous-tendent notre présence ici. C'est que, dans un premier temps, évidemment, on a fait un sondage. Notre commission scolaire a quand même un immense territoire. On a 48 comités d'école, ce qui n'est pas peu dire. On a recueilli les commentaires de nos gens. Il y a eu un comité de rédaction, évidemment, de formé, et c'est ça qu'on vient vous livrer aujourd'hui.

Le deuxième principe de base. Moi, j'ouvrirais une petite parenthèse. Il y a une grande dame de la chanson qui a, selon moi, immortalisé, dans les paroles d'une chanson, c'est quoi, le geste éducatif, l'essentiel du geste éducatif. C'est Mme Nana Mouskouri qui dit: «Prendre un enfant par la main, c'est le conduire vers demain.» Dans cette optique-là, comme parents, vous ouvrez la porte du coeur de vos enfants. Vos enfants, vous leur ouvrez la porte de l'avenir, finalement. Et je sais que c'est une vérité de La Palice de le redire, mais, comme parents, on est les premiers éducateurs, les premiers responsables de nos enfants.

Sur ce, je vais laisser la parole à Mme Godin. Autant que possible, on va essayer de résumer, quand même, notre mémoire et de le commenter, le comment et le pourquoi. Mme Godin.

Le Président (M. Paré): Mme Godin.

Mme Godin (Édith): Bonjour. Premièrement, je voudrais mentionner qu'on est membre de l'Association qui nous a précédés, avant, puis ils ont fait un bon travail, parce que vous allez retrouver des similitudes, c'est sûr.

Bon, au risque de se répéter, je pense qu'on ne le dira jamais assez qu'on est les premiers éducateurs de nos enfants et qu'on est responsables vis-à-vis d'eux. Nous autres, à notre commission scolaire, nos parents nous ont manifesté qu'ils se sentaient compétents puis qu'ils se reconnaissaient les capacités de siéger sur le conseil d'établissement, parce que c'est une tâche qui demande quand même des qualités d'administrateur, de pédagogue, de visionnaire. C'est toutes des choses qu'on met en application chez nous, à la maison.

Par exemple, ça a suscité beaucoup de questionnement, les articles de loi. Entre autres, les parents se sont demandé: Bien, si on nous reconnaît ces compétences-là, comment ça se fait que ce qui était notre table de concertation – vous allez voir qu'on va en reparler – pourquoi est-ce qu'on nous la retire par l'avant-projet de loi? Pourquoi est-ce qu'elle n'aura plus d'existence légale? On nous a dit: Bien, les autres représentants, eux autres, que ce soient les enseignants, les services complémentaires et particuliers, le personnel de soutien, les services de garde, même les élèves, même nos enfants, ils vont pouvoir s'appuyer sur une structure de regroupement, que ça soit un syndicat ou une association.

(15 h 40)

On voit aussi dans les articles que, lors de la convocation de ces assemblées-là pour l'élection de leurs représentants, on fait toujours référence à leurs modalités de convocation, puis, s'il n'y en a pas, le directeur d'école va consulter ces gens-là pour en établir. Nous, dans l'article de loi, la modalité de notre convocation, elle est régie par la loi. C'est le directeur qui va convoquer l'assemblée générale des parents. Puis, même en cas de vacance au conseil d'établissement, les autres instances, c'est leur structure de regroupement qui va voir à combler la vacance, tandis que, nous, c'est le conseil d'établissement qui va aller coopter un autre parent. On ne repasse pas par l'instance des parents pour combler ce poste-là. Là, on commence à se poser des questions, on nous dit: Mon Dieu, on «est-u» plus enfant que nos enfants? Cette loi-là, elle considère qu'on n'est pas capables de s'organiser puis qu'on n'est pas capables de gérer nos propres structures de concertation. Si on étudie, finalement, on essaie de dresser un organigramme d'un conseil d'établissement, on voit à ce niveau-là que les parents, on n'est plus considérés sur le même pied que les autres représentants. Il y a comme un trou noir, là.

On va peut-être nous répondre: Bien, les parents, ils ont juste à s'en créer une, structure. Mais, nous autres, ce qu'on dit, c'est que, si la loi ne la reconnaît pas, ne lui reconnaît pas d'existence légale, on se demande jusqu'à quel point dans le milieu scolaire cette structure-là va avoir la crédibilité qu'elle devra avoir. Puis, en n'ayant pas cette structure-là, on voit aussi que les autres représentants peuvent se retourner vers leur base quand il s'agit soit de... Puis ils vont évoluer, aussi, au sein d'une structure de regroupement qui a des moyens; ça, c'est sûr et certain. Les syndicats, même les associations étudiantes aujourd'hui ont des moyens. Alors, ils peuvent se retourner vers eux pour aller chercher des mandats, pour aller chercher des avis, des opinions, ou quoi d'autre, puis les parents, eux autres, ils ne l'auront plus, cette structure-là, puis ils deviennent même dépendants du conseil d'établissement à ce niveau-là, parce que, selon la loi, c'est le conseil d'établissement qui va voir à favoriser leur participation à la vie de l'école puis à l'éducation de leurs enfants. Ça fait que, encore ici, on ne voit pas, nous autres, le lien logique puis on ne voit pas le lien hiérarchique dans l'organigramme du conseil d'établissement.

Une autre crainte de nos parents, puis ça, c'était très fort chez nous, c'était la question de la représentativité. Ils trouvent qu'elle va être beaucoup diluée. Je ne le répéterai pas, vous savez les compositions, ça veut dire que ça peut aller jusqu'à 30 parents qui vont s'impliquer au niveau de la vie de l'école actuellement.

Nous autres, ce qu'on voit venir chez nous – c'est déjà sur la table – c'est que la réorganisation au niveau administratif de notre commission scolaire, on parle déjà de regrouper des écoles dans des unités administratives. Alors, on l'a dit tantôt, ça peut être un directeur pour trois, quatre écoles; à ce moment-là, on n'aura peut-être même pas un représentant de parents d'une école sur ces conseils d'établissement là. Parce que, nous autres, on ne se fait pas de leurre, les directeurs d'école, ça va tendre à ce qu'ils demandent un conseil d'établissement pour un regroupement. Ils ne voudront pas siéger sur quatre conseils d'établissement, la tâche va être bien trop lourde. Ça n'a pas de bon sens.

Alors, on se dit: Oui, on a des pouvoirs. Bien, des pouvoirs, on ne les a pas en tant que parents, mais on va pouvoir aller siéger sur une instance qu'on considère que le conseil d'établissement a des pouvoirs accrus par rapport à ce qui était délégué au niveau des comités d'école, des conseils d'orientation où, plus souvent qu'autrement, on était consultatif. On n'était pas décisionnel sur grand-chose. Mais là on se dit: Légalement, oui, on va l'avoir, mais, dans les faits, ça va être combien de parents, là? Il va y avoir de moins en moins de parents qui vont s'impliquer au niveau de la vie de l'école à ce moment-là. Puis on peut créer des sous-comités, mais je ne pense pas que ça va jamais remplacer une entité qui serait comme un comité d'école. Mais, en tout cas, la loi devrait prévoir l'existence de ça. Puis c'est un lieu aussi où on peut se retrouver entre nous, les parents, puis déjà on se retrouvait aussi au comité d'école entre parents, entre pères puis entre mères, pour faire un petit jeu de mots.

Les parents de notre commission scolaire, aussi, sont éminemment conscients que leurs représentants vont avoir quand même des lourdes responsabilités au niveau des conseils d'établissement. Ce qu'on regarde, nous, c'est qu'on dit: Tous les autres représentants, eux autres, ils évoluent quotidiennement à l'école ou dans le milieu scolaire; mais, nous autres, les parents, on n'est pas là présents dans le monde scolaire à la journée longue, hein. Nous autres, on trouve qu'il va peut-être y avoir un déséquilibre qui va se produire, parce que notre présence, à ce moment-là, en diminuant encore le nombre de parents, bien, elle va être plus que ponctuelle à l'école. Puis, nous autres, ça va être vraiment sur une base bénévole, tandis que les autres représentants, bien, la plupart du temps, c'est des professionnels de l'enseignement – il ne faut pas se le cacher. Puis on se demande: Quel parent va peut-être être prêt à... Nous autres, c'est le questionnement, on dit: Oui, on se sent compétent, mais, en même temps, c'est dur dans un milieu, où tu n'es pas continuellement, de tout contrôler au niveau du langage, même au niveau d'avoir l'information, au niveau des communications même. Ce n'est pas facile quand tu n'es pas à la journée longue dans un endroit. Alors, on trouve que peut-être le lien école-famille, ça va être encore plus dilué que ça peut peut-être l'être actuellement.

Puis, pour finir, je conclurais en disant – puis ça, c'est revenu et revenu, puis ça, je pense que c'est un point dont il va falloir que vous teniez compte, parce que les parents, de ce que j'ai entendu ici, y tiennent mordicus – c'est nous autres les premiers responsables, c'est nous autres, alors pourquoi est-ce que les parents ne sont pas majoritaires sur le conseil d'administration... mon Dieu! la langue m'a fourchue, sur le conseil d'établissement, et pourquoi le président n'est pas un parent?

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Godin. M. Bolduc.

M. Bolduc (Pierre): J'enchaîne sur ce que Mme Godin a dit. Moi, je vais y aller peut-être un peu plus techniquement concernant les articles 41, 42, 44 à 49.

La composition du conseil d'établissement. Moi, je fais un parallèle – on parle de vécu – avec le conseil d'orientation actuel. Dans notre commission scolaire, sur certains conseils d'orientation, on sait qu'on est au moins égalitaire, mais on est souvent majoritaire. Je donne l'exemple, moi, de l'école secondaire dans laquelle je suis parent. On a huit parents, puis il y a sept autres membres, tandis que là, dans le nouveau régime, on tomberait à six parents à ce moment-là. On a beaucoup de difficultés à saisir le pourquoi de, à savoir que, dans un premier temps, on nous enlève notre table de concertation comme parents, donc on a déjà moins de parents à l'école, et, deuxièmement, au niveau du conseil d'orientation, on diminue notre représentativité également.

Et pour quelle raison est-ce qu'on l'associe à la communauté? On y voit, nous autres, peut-être... écoutez, on est peut-être dans l'erreur, mais on se pose de sérieuses questions à ce niveau-là. Dans le vécu quotidien, on a un représentant de la communauté, puis c'est le conseil qui peut le nommer, alors que, dans la nouvelle loi, on se doit d'en nommer deux. Et, à l'heure actuelle, par chez nous, je vous parle quand même de 48 comités d'école, conseils d'orientation, on l'a peut-être essayé dans quelques écoles, de nommer un représentant de la communauté, on se demande finalement: Est-ce que c'est pour faire un pont éventuellement avec le municipal? En tout cas, on se pose de sérieuses questions là-dessus.

Au niveau de la structure de parents, de table de concertation que Mme Godin évoquait tout à l'heure, c'est qu'on essaie de faire encore le lien. Écoutez, expliquez-nous, éclairez-nous, on a de la difficulté à comprendre qu'on n'en a plus, de lien, nous autres. Comme comité de parents, là, on a un délégué qui siège au conseil d'établissement. Oui, mais il siège au conseil d'établissement... Je vous donne l'exemple de tantôt: On a fait un sondage à ce moment-là, nous autres, pour recueillir des données et venir vous présenter un mémoire. On s'est adressé à nos comités d'école. Mais là, à présent, on va s'adresser... Répétons le même exercice: éventuellement, on se retourne vers le délégué, celui-ci va à son conseil d'établissement, mais, si le conseil d'établissement décide: Pas intéressé, on n'en fait pas. On est un petit peu à la merci de. Puis on ne comprend plus, finalement, comment on va faire pour tâter le pouls de nos parents, aller prendre le pouls de nos parents. On n'en a plus, de table de concertation de parents, puis je pense que Mme Godin a insisté énormément là-dessus tout à l'heure: Qu'est-ce qui fait que, nous autres, on est différents des autres? Même le conseil des élèves a une table de concertation. Nous autres, on ne l'a plus. On se pose sérieusement la question: Coudon, les comités de parents sont-ils appelés à disparaître? Aux comités de parents, on va représenter des conseils d'établissement, ou les parents du conseil d'établissement... En tout cas, on essaie de voir clair là-dedans.

Évidemment, le reste est un petit peu technique. On aimerait qu'on parle de date, que la composition se fasse avant le 30 juin. Parce qu'il faut comprendre toute la structure, là. Le comité de parents, lui, se met en branle quand tous les délégués sont nommés par les écoles. Mais, quand ça va au 30 septembre... Le comité de parents, lui, prend son envol au mois d'octobre, le 15 octobre. Ça fait qu'on trouve que c'est un petit peu tard. En tout cas, on pourra y revenir dans la période de questionnement.

Là, je cède la parole à Mme Morin.

Le Président (M. Paré): Mme Morin. Vous avez trois minutes pour ce faire.

Mme Morin (Dominique): Moi, je vais y aller sur des points un petit peu plus techniques, là.

Nous pensons que le conseil d'établissement ne doit pas être invalidé parce que le nombre requis de parents n'est pas atteint. Dans un premier temps, nous pensons qu'une deuxième convocation devrait être faite avant le 15 septembre et, dans un deuxième temps, l'absence de tout groupe n'est pas une raison, pour nous, en tout cas, de remettre entre les mains d'une seule personne toutes les fonctions et pouvoirs du conseil d'établissement. De même, dans la même optique, après trois convocations consécutives où la séance du conseil d'établissement ne peut être tenue faute de quorum – c'est ce qu'on dit dans l'avant-projet de loi – la commission scolaire peut remettre les pouvoirs et fonctions au directeur d'école. Nous autres, ce qu'on propose, c'est qu'on devrait peut-être aller voir pourquoi le conseil d'établissement ne fonctionne pas avant de remettre ça encore entre les mains d'une seule personne.

(15 h 50)

Au niveau de la régie interne, la décentralisation faite vers le conseil d'établissement demandera que des ressources financières adéquates soient allouées pour les budgets de fonctionnement, en tout cas, du conseil d'établissement. Il ne faudrait pas oublier que certains de ces pouvoirs et fonctions sont aujourd'hui tenus par des personnes rémunérées. En tout cas, ça va ressembler, à notre avis... les membres du conseil d'établissement vont jouer un peu le rôle du commissaire. Et, aujourd'hui, le commissaire, on sait qu'il a une rémunération. Il ne faudrait pas demander trop de bénévolat pour ces gens-là parce qu'il reste que la tâche sera vraiment accrue.

Aussi, avec les fonctions et pouvoirs dévolus au conseil d'établissement, on trouve que c'est peu, trois séances. On se demande comment on pourra venir à bout des ordres du jour avec le lot du conseil d'établissement. Alors, nous autres, on propose cinq séances.

En ce qui a trait au directeur adjoint, nous croyons que le conseil d'établissement devrait être consulté sur les critères de sélection du directeur adjoint parce qu'on sait que, dans la mécanique, souvent, le directeur adjoint va être promu au poste de directeur. C'est pour ça qu'on trouve que c'est important d'avoir des critères, de donner nos critères, de donner les critères pour le directeur adjoint.

Et, enfin, bon, l'Association en a parlé tout à l'heure, on comprend mal que le conseil d'établissement fasse sa propre promotion. Mais Mme la ministre l'a expliqué d'une autre façon. Vu sous cet angle, bien, certain, ça peut enlever des appréhensions, mais il reste quand même que les parents avaient cette peur que ça mène à une course à la performance entre les écoles. Alors, c'est ça pour ma part.

M. Bolduc (Pierre): Est-ce qu'il nous reste quelques minutes?

Le Président (M. Paré): Non. Mais, pendant la période de questions, je pense que vous allez pouvoir repasser vos messages. Mme la ministre de l'Éducation.

M. Bolduc (Pierre): Pardon, le président aurait une requête à faire. Il est un petit peu dur d'oreille à cause de l'âge. Y aurait-il possibilité de parler assez fort, s'il vous plaît?

Le Président (M. Paré): Oui. Mme la ministre de l'Éducation, s'il vous plaît.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vous remercie pour votre mémoire. Vous avez vu par les échanges qu'on a eus avec le groupe qui vous a précédés, parce que je voyais que vous étiez là, présents, dans la salle, qu'on a clarifié quand même un certain nombre de choses. Je pense que madame le disait tout à l'heure.

Je pense, M. le président, que vous êtes aussi commissaire, président... C'est ça?

M. Bolduc (Pierre): Oui.

Mme Marois: Vous êtes président de votre comité d'école...

M. Bolduc (Pierre): ...président du comité de parents.

Mme Marois: ...et commissaire-parent...

M. Bolduc (Pierre): Commissaire-parent au niveau de la commission scolaire.

Mme Marois: Alors, dans le fond, ce n'est pas le nombre très grand de parents qui a fait qu'on a choisi deux personnes différentes pour occuper ces fonctions-là, hein. Bon. Et vous faites la démonstration – en le disant, je blague un peu – vous faites la démonstration qu'effectivement les parents s'impliquent, mais que, parfois, ils choisissent les mêmes personnes pour les représenter, dans un cas, comme président du comité de parents, et comme président commissaire, c'est-à-dire comme parent commissaire.

Et je pense que vous avez compris aussi, dans l'esprit de ce qu'on discute ici, que notre intention n'est pas d'enlever du pouvoir aux parents. Au contraire, c'est de leur redonner plus de place et de leur donner un réel pouvoir, ce qu'ils n'ont pas actuellement. Cependant, si, pour ce faire, vous croyez qu'il est nécessaire qu'apparaisse dans la loi un forum qui va permettre aux parents d'être présents, d'exprimer leur point de vue, je suis tout à fait à l'aise avec ça. D'accord? Et notre objectif n'était pas d'enlever de la place aux parents, c'est l'inverse que l'on poursuit. Sauf que, évidemment, quand on donne du pouvoir, cela implique des responsabilités et, quand il y a des responsabilités, cela implique qu'on soit parfois plus précis, cependant, dans les tâches à accomplir, les responsabilités à assumer et, évidemment, les façons de choisir les parents, etc.

Mais je ne suis pas du tout fermée quant au fait qu'on identifie que les parents puissent être associés, consultés par le biais de leur assemblée générale ou d'un comité de parents ou autrement, et ce n'était pas du tout l'objectif. D'ailleurs, dans ma tête, c'était plutôt l'inverse, dans le sens où on regroupait conseil d'orientation et comité de parents, c'est-à-dire qu'on retrouvait les fonctions des uns et des autres exercées au sein du conseil d'établissement par des représentants de parents, mais en allant plus loin, en donnant plus de pouvoirs, je le répète, et plus de responsabilités à ce niveau-là, et en souhaitant que le conseil d'établissement se donne des comités et fasse participer ces gens, dont les parents, bien sûr. Si on pense que c'est préférable que la loi habilite le conseil d'établissement à le faire et le reconnaisse pour les parents, on essaiera de le faire réapparaître d'une façon quelconque dans la loi. Alors, je veux que ce soit clair à cet égard-là. Je comprends parfois qu'on puisse ne pas percevoir immédiatement l'intention du législateur quand évidemment apparaissent des nouveaux textes et qu'on croit qu'on abandonne une chose alors que c'est plutôt l'inverse que l'on veut faire.

Je vais venir maintenant à une question plus pointue et plus précise. D'abord, vous souhaitez évidemment que le conseil d'établissement soit constitué majoritairement de parents, que son président soit un parent. Vous savez qu'a contrario il y a des représentants des syndicats, des représentants syndicaux qui nous ont dit qu'ils trouvaient que les parents avaient trop de pouvoirs. Enfin, là, il y a peut-être des choses à clarifier, je ne disconviens pas de ça. Je pense qu'il faut clarifier des choses. Mais, un peu comme je l'ai posé comme question à vos collègues qui vous ont précédés, vous en avez des expériences concrètes de vie dans les écoles et, moi, le sentiment que j'ai, c'est qu'au contraire on a appris à travailler ensemble dans les écoles et qu'il y a des expériences très positives qui se vivent actuellement en termes de projets éducatifs et, dans le fond, on veut miser sur ces expériences positives pour l'étendre plus largement.

Ma question plus précise, elle porte cependant sur la question des représentants de la communauté. Vous dites: «Dans cette optique, nous souhaitons que le terme "communauté" soit explicité davantage et encadré par une certaine éthique.» Parce qu'on dit: «Il serait dommage de voir l'école servir des intérêts autres que ceux qui constituent le pilier de ralliement des intervenants du milieu scolaire.» En fait, on ne l'a pas défini volontairement dans la loi. Pourquoi? Parce qu'on souhaite que ce soit le conseil d'établissement avec l'ensemble des membres qui auront été choisis, à l'exception des gens de la communauté, qui rechoisiront les gens de la communauté, et donc ils s'établiront des critères leur permettant de choisir les personnes qui vont être les plus intéressantes à amener à travailler avec l'équipe-école et l'équipe du conseil d'établissement. Et c'est pour ça qu'on l'a laissé assez vague parce que, dans un cas, ça peut être quelqu'un qui viendrait du CLSC, du secteur culturel, du secteur des loisirs; ailleurs, ça pourrait être quelqu'un qui viendrait des milieux socioéconomiques, peu importe. Alors, c'est dans cette perspective-là.

Moi, j'aimerais ça, maintenant que je vous donne cet éclairage-là, que vous me donniez votre réaction sur l'importance à accorder justement aux gens de la communauté, mais que vous seriez amenés à choisir. Est-ce que ça ne vous rend pas le projet plus intéressant à cet égard-là et que ça ne fait pas tomber un certain nombre de craintes que vous pourriez avoir sur cette question?

Le Président (M. Paré): M. Bolduc.

M. Bolduc (Pierre): O.K. Dans un premier temps, je l'ai expliqué tout à l'heure, le fait que... Dans le vécu, ça fait quand même cinq ans que les conseils d'orientation fonctionnent. Par chez nous, on ne l'a pas expérimenté. Moi, dans ma propre école, on a expérimenté une année. On a eu un représentant de la communauté qui était un monsieur qui était retraité. Ça a été très intéressant comme expérience.

Mme Marois: Est-ce que vous l'aviez choisi à ce moment-là? Quel avait été le mécanisme pour le choisir?

M. Bolduc (Pierre): Le mécanisme, premièrement, c'était du contact personnel. Je pense que c'est très difficile parce qu'il faut considérer que, nous autres, on est quand même un milieu semi-rural, urbain, semi-urbain, un petit, micro-organisme scolaire. Ça fait qu'à ce moment-là ça a été difficile d'approcher quelqu'un qui était intéressé à venir, au départ. Je pense que c'était déjà ça, le critère. C'était difficile de trouver quelqu'un qui était intéressé à venir.

Nous, notre crainte là-dedans, c'est quand vous, Mme la ministre, dans votre projet de loi, c'est quand les membres de la communauté sont au même titre que les parents. On parle de la majorité puis on les assimile aux parents. Ils n'ont pas nécessairement d'enfant dans l'école. Puis, écoutez, c'est peut-être... en tout cas, on va peut-être trop loin dans notre appréhension. En tout cas, c'est ce qu'on ressent. Je sais qu'il y a eu un discours qui a eu lieu à un moment donné, que les commissions scolaires sont appelées peut-être à disparaître, pas à court terme, là. Ça fait qu'on se demande s'il n'y a pas dans ça ce mouvement-là. On sait que les gens de la communauté, ça va être des gens qui vont...

(16 heures)

Mme Marois: Il n'y a pas d'agenda caché sous cet angle-là. Je l'ai vu dans votre mémoire, quand vous mentionnez ça.

M. Bolduc (Pierre): Vous l'avez vu? On ne le sait pas. On se pose sérieusement la question, si ce n'est pas à ce niveau-là. Ces gens-là peuvent être présidents et, éventuellement, n'auront pas nécessairement les mêmes intérêts de l'école et des parents. Je reviens justement sur le petit point que vous avez dit tout à l'heure, que je trouve superimportant. Je suis content de vous entendre dire qu'il y aurait une place pour un forum pour les parents. J'ai compris que ce n'était pas le défunt forum de Montréal, que ça va être définitivement une place... Mais il faudrait que ce soit consacré dans la loi. On est d'accord, ce n'est pas un dédoublement qu'on veut, tout simplement une structure. Le terme «forum», il me plaît beaucoup en autant qu'il est consacré dans la loi. Mme Godin ou Mme Morin ont peut-être travaillé plus le dossier de communauté, elles seraient peut-être à même d'apporter un commentaire additionnel, s'il y a lieu.

Mme Marois: Et, sur vos liens avec les équipes enseignantes, et tout ça, dans les écoles aussi, je pense, c'est important pour moi.

Le Président (M. Paré): Mme Godin.

Mme Godin (Édith): Oui. Alors, moi, je vais vous parler peut-être plus d'expériences personnelles, comment j'ai vécu ça, entre autres à travers le comité d'école, les conseils d'orientation, et tout ça, les comités de parents, les liens avec les enseignants, aussi par rapport à la Fédération et par rapport à l'Association. Je suis là-dessus aussi. C'est très récent, le lien qu'on a réussi à établir avec les représentants des syndicats au niveau des enseignants. Ça fait déjà quand même quelques années qu'on travaillait avec les directions d'école et disons qu'on voyait qu'il y avait un partenariat. On se rencontrait, on convergeait énormément sur différents points, ce qu'on ne retrouve pas encore jusqu'à ce point-là avec les enseignants. Moi, je pense qu'on est encore à des balbutiements, de ce point de vue là.

Et je ne voudrais pas peut-être jeter une pierre dans la marre, mais, quand il y a eu – je ne me rappelle pas c'était quoi, cette loi-là – des coupures de 1 % dans leurs salaires, il y a beaucoup d'enseignants, au niveau de la vie quotidienne de l'école, qui se sont retirés, qui ont refusé de siéger sur les conseils d'orientation, sur les comités d'école, qui dont dit: On ne fera plus d'activités complémentaires avec les enfants, qui nous demandent du bénévolat. Ça s'est vécu, ça, dans les écoles.

Graduellement, les gens ont recommencé à revenir siéger sur ces instances-là, mais, si on parle, dans beaucoup de milieux, la confiance n'est pas rétablie. Les parents n'ont pas aimé ça que les enseignants fassent ça. Ils ont dit: Ils nous punissent, nous, ils puissent nos enfants, mais ce n'est pas nous autres, les responsables là-dedans. Ils ont coupé la communication et, à mon sens, elle n'est pas tout à fait rétablie.

Moi, ça me fait peur, l'espèce de réticence des représentants syndicaux, qu'ils ne veuillent pas que les parents aient tant de pouvoirs. Moi, je trouve aussi qu'en tant que parent – là, je vais vous parler comme parent d'un enfant – souvent, il y a des enseignants avec qui ça va très bien, quand tu vas aller leur parler, qui vont te reconnaître comme un partenaire. Et, même si tu n'as pas un bac ou une maîtrise, ils vont reconnaître ta compétence au niveau pédagogique. Mais il y a d'autres enseignants, parce que tu ne parles pas avec des mots ça de long – ce n'est pas tous les parents qui sont capables de parler avec des mots ça de long – il y a des jugements. Moi, j'ai fait du bénévolat au sein d'écoles, dans des bibliothèques, j'étais beaucoup là, à un moment donné, l'équipe-école oubliait que j'étais un parent, et des commentaires sur les parents, si je vous disais ce que j'ai entendu, ça vole bas. Ça vole bas. Les enfants sont indisciplinés, un matin, c'est la faute des parents, parce qu'ils élèvent mal leurs enfants. Ça va jusqu'à ce point-là. Moi, je pense que quelque part, en tout cas, il y a une communication et un rapport de confiance qui est à construire, de ce point de vue là.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Godin. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue aux représentants de la commission scolaire Chaudière-Etchemin. Je vous félicite aussi pour votre franchise et votre cri du coeur. J'y reviendrai comme question dans quelques minutes, mais je voulais faire quelques commentaires. Je ne suis pas sûr, moi, que j'ai entendu, Mme la ministre, des représentants syndicaux dire qu'ils avaient peur qu'on accorde trop de pouvoirs aux parents. De mémoire, c'était trop de pouvoirs aux directions d'école. Aux parents, je peux me tromper, mais il ne me semble pas d'avoir entendu ça.

Au niveau de l'agenda caché par rapport aux disparitions des commissions scolaires, ça a été évoqué par d'autres intervenants avant vous, et pas des commissions scolaires, ou pas juste des commissions scolaires. Mais on se rappelle qu'un projet de réforme déposé par l'ancien ministre de l'Éducation, M. Laurin, en 1982, qui s'intitulait – vous allez reconnaître le terme – L'école communautaire et responsable , est à toutes fins pratiques identique au projet que nous avons devant nous, et même la ministre le confirmait hier, sauf, bien sûr, qu'on a décidé stratégiquement de préserver le palier de la commission scolaire, pour l'instant. On se rappelle aussi qu'il y a trois ministres dans le gouvernement actuellement qui ont déjà dit, il n'y a pas plus tard que deux ans, qu'il fallait que les commissions scolaires disparaissent.

Puis je mets en perspective aussi les discussions autour du 500 000 000 $, les tables Québec-municipalités, et faire en sorte que la gestion des bâtiments scolaires et des équipements scolaires soit confiée à d'autres personnes que les commissions scolaires ou que les écoles comme telles. Alors, il n'y a peut-être pas d'agenda caché, mais il y a quand même des preuves flagrantes de certaines intentions qui ne sont pas manifestées clairement pour l'instant.

Un autre commentaire, maintenant, lorsque vous parlez du forum pour les parents. Dans le fond, il s'agirait presque de faire réapparaître le comité d'école que nous avons actuellement sous une forme différente. Un organisme qui vous a précédés hier appelait ça la table de participation des parents; vous appelez ça, je pense, le comité consultatif de parents. Vous comprendrez que, je pense, si la ministre ouvre là-dessus, ce sont les directeurs d'écoles qui vont l'attendre avec une brique et un fanal. Et je vous explique pourquoi.

Les directeurs d'école étaient favorables à faire disparaître l'un des deux comités parce qu'ils siégeaient sur les deux comités, et la tâche était lourde pour eux. Alors, on verra ce qu'il y aura dans le projet de loi. Mais c'est sûr que les directeurs d'école aiment bien pouvoir influencer les décisions ou les discussions qui ont lieu entre parents. Moi, j'ai été commissaire d'école et, lorsque les commissaires se réunissaient à huis clos pour discuter de certaines choses, l'appareil administratif manifestait beaucoup d'inconfort parce qu'il ne savait pas dans quelle direction ça pouvait aller. Ça pouvait prendre une direction qui serait contraire aux volontés des administrateurs scolaires. Donc, ce sont les commentaires que je voulais faire.

Sur mes questions, maintenant. Dans votre rapport, dans les conclusions de votre mémoire, vous dites: Nous sommes obligés de constater que ce qui émerge de ça – et vous employez le terme «branle-bas de combat» – ressemble à s'y méprendre au modèle qui existe déjà dans les services sociaux. Avez-vous en tête le virage ambulatoire? Vous craignez également qu'une nouvelle fois et dans peu de temps d'autres politiciens feront un remaniement selon leurs vues en croyant sincèrement que c'est leur vision qui apportera la solution. Votre plaidoyer, dans le fond, c'est d'être plus attentif aux besoins des enfants. Votre cri du coeur, moi, je pense que c'est ça que vous dites: Être plus attentif aux besoins des enfants. La discussion que nous avons et ce qui est mise sur la table au niveau de l'avant-projet de loi, avez-vous l'impression que ça fait en sorte que nous serons plus attentifs aux besoins des enfants?

Le Président (M. Paré): M. Bolduc.

M. Bolduc (Pierre): Je vais laisser Mme Morin... Je pense qu'elle brûle d'impatience de vous répondre.

Le Président (M. Paré): Mme Morin.

Mme Morin (Dominique): C'est certain que, comme parents, nous le souhaitons ardemment, ce qui viendra, que ce sera l'enfant qui en bénéficiera. Mais c'est sûr que, nous, notre appréhension, c'est bien certain, c'est un peu que la trame de fond soit plus de laisser les commissions scolaires aller vers le municipal. En tout cas, on se demande si ce sera vraiment pour le bien de l'enfant. Et ça bouge beaucoup. On ne voit pas vraiment où on veut en venir. C'est difficile de voir vraiment où on veut en venir. En tout cas, comme parents, c'est ce que je pourrais dire.

(16 h 10)

M. Ouimet: Et vous pouvez l'affirmer avec beaucoup de conviction. Moi, je l'ai dit à quelques reprises, au tout début de cette commission parlementaire, j'ai dit que je craignais que nous en arrivions à un autre virage ambulatoire, mais, maintenant, dans le système d'éducation. C'est un brassage de structures qui s'opère, là. Quand on regarde ce qui est sur la table devant nous, on partage des pouvoirs, des responsabilités entre le ministère, puis ce n'est pas tellement évident entre le ministère et les commissions scolaires, mais certainement entre les commissions scolaires vers les écoles; ça, c'est très clair. Le palier intermédiaire vivra pendant combien de temps encore? Nous ne le savons pas. Moi, j'ai défendu souvent une thèse à l'Assemblée nationale, lors de périodes de questions, qu'on se dirigeait, du côté gouvernemental, vers des gouvernements régionaux et où la chose scolaire serait régie par des gouvernements régionaux. Et ça, c'est dans une perspective – je ne veux pas amener des éléments politiques dans le débat – où, si le Québec devient souverain, le Québec devra assumer les pouvoirs qu'assume présentement le gouvernement fédéral, et, donc, les provinces seraient des gouvernements régionaux. Et ce n'est pas farfelu, ce que je vous dis là, c'était dans les cartons du gouvernement en 1982 et en 1983, c'était les engagements électoraux du programme politique du Parti québécois en 1992-1993.

Alors, moi aussi, j'ai un peu de méfiance, surtout lorsque c'est servi à une sauce où il y a beaucoup de décentralisation, beaucoup de transferts de responsabilités, mais, par rapport au transfert de ressources humaines, matérielles et financières, on ne les voit pas. Et ce qu'on entend depuis lundi passé: on transférerait la gestion des bâtiments et des équipements scolaires vers les municipalités avec la facture qui l'accompagne, et, on me dit, c'est entre 468 000 000 $ et 523 000 000 $; c'est ce qui a été évalué par la Fédération des commissions scolaires.

Alors, ce n'est pas farfelu, ce que vous dites, et vous pouvez le dire avec beaucoup de liberté. Je ne voulais pas dévier sur le côté politique, mais l'arrière-plan, il est là. On nous présente un morceau, mais on sait qu'il y a un grand ensemble. Et, pour moi qui suis les débats depuis au moins trois ans maintenant – trois ans aujourd'hui ou demain – à l'Assemblée nationale, ça me préoccupe, parce qu'on voit la solution par étapes, et ça ressemble beaucoup à ce que M. Laurin avait dans ses cartons en 1982-1983. Alors, ça va, pour l'instant, M. le Président.

Le Président (M. Paré): O.K. J'étais pour vous ramener à la pertinence, là. M. Bolduc...

M. Ouimet: Ah! c'est tout à fait pertinent.

M. Bolduc (Pierre): O.K. Il y avait un commentaire fait... C'est M. Marquette, je pense?

Le Président (M. Paré): Oui, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. Ouimet, de Marquette.

M. Bolduc (Pierre): Mme Godin, avait... Par rapport au commentaire que vous avez fait sur le... ce n'est pas remettre le comité d'école et qu'on va se faire attendre par une brique et un fanal. Je pense que Mme Godin pourrait vous l'expliquer rapidement.

Le Président (M. Paré): Mme Godin.

Mme Godin (Édith): Oui. Alors, premièrement, nous autres, ce qu'on veut, c'est que la loi donne cette ouverture-là. Elle n'est pas obligée de nommer ce que c'est, mais qu'elle donne l'ouverture. Et nous autres, on ne voit pas pourquoi le directeur aurait à siéger sur ce comité-là. Il ne va pas siéger aux assemblées syndicales des professeurs. Tu sais, je veux dire, les autres sont autonomes dans leur fonctionnement, quand ils se réunissent ensemble en collégialité et qu'ils parlent de leurs choses.

J'aimerais peut-être revenir sur le transfert dans les municipalités. Moi, ce n'est pas une question de sous que je vois là-dedans. Les aménagements des locaux, ça a un lien direct avec comment tu vis ton projet d'école. Et chaque projet d'école, il a son image, il a l'image qu'il veut, il veut donner une couleur à son école. Moi, j'ai fait des implantations de systèmes de garde, il n'y en a pas un qui se ressemble, parce que, selon ton projet, tu vas faire tes aménagements différemment. Ça fait que, si c'est un organisme extérieur qui vient gérer tes aménagements, comment tu vas faire le lien entre tes orientations et ton projet et les moyens que tu vas donner pour le mettre en application? Et je pense qu'il faudrait faire attention à ces choses-là, pour ne pas aller disperser les pouvoirs et les gestions à plein de niveaux et qui, finalement, n'ont peut-être pas d'affaire là.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Moi, je ne veux pas faire le débat de structures, c'est le député de Marquette qui, sans arrêt, resoulève ces questions-là.

M. Ouimet: On commente ce qu'on a devant nous.

Mme Marois: On a clarifié un certain nombre de choses sur les rôles des commissions scolaires; on les reconnaît justement dans l'avant-projet de loi. On confie des mandats, des responsabilités, on confie un rôle très stratégique, justement, aux commissions scolaires pour l'allocation des ressources, et c'est assez majeur à cet égard-là, ce qu'on confirme, au contraire. Alors, je dis que, quand viendra le temps de le faire, s'il y a lieu de le faire, on le fera. Là, on est à un autre niveau de discussion.

Je veux essayer de comprendre ce que vous nous avez dit tout à l'heure ou ce que vous avez répondu à mon collègue le député de Marquette sur la place des parents et sur le rôle du directeur. Je comprends que ce n'est pas au conseil d'établissement que vous ne voulez pas qu'il soit, évidemment, mais c'est que, s'il y avait, par exemple, un forum ou l'assemblée des parents qui serait constitué et serait le lieu où des parents vont chercher des mandats, vont débattre, vont discuter, vous ne souhaiteriez pas que le directeur soit là, finalement, et ait une espèce de rôle de censeur ou quelque autre rôle que ce soit. Est-ce que c'est bien ça que je comprends?

Le Président (M. Paré): Mme Morin.

Mme Morin (Dominique): Il pourrait être invité, par exemple, à la demande de ce comité-là. Ça pourrait être ça.

Mme Marois: Oui, d'accord. Exactement, oui, il pourrait être invité. Mais vous dites: Qu'il y ait ce forum qui nous soit réservé et qu'on puisse l'animer et le présider comme on le souhaite. Moi, je pense qu'il n'y a pas... Enfin, écoutez, je ne veux pas dire comment on traduira ça très techniquement dans la loi, mais je comprends bien l'esprit dans lequel vous présentez cela. Et, comme notre intention n'était pas justement d'enlever des voix aux parents, mais, au contraire, de leur en donner davantage, si on peut trouver une façon de le faire qui soit plus claire dans la loi, on va le faire; ça, c'est très clair. Vous vouliez continuer l'intervention, madame, et madame au bout.

Mme Morin (Dominique): Oui. C'est ça, oui.

Le Président (M. Paré): Mme Morin.

Mme Morin (Dominique): Oui. C'est important, la table de concertation, parce que, comme vous le disiez tout à l'heure, on a besoin d'aller chercher le pouls, d'aller chercher des mandats. Aussi, les parents nous disent, certains parents, beaucoup de parents aussi, puis quand je dis ça j'ai des parents derrière moi qui me l'ont dit: Écoutez, le conseil d'établissement, c'est un rôle d'administrateur qu'ils sont en train de nous donner, et on n'en veut pas; ça ne veut pas dire qu'on n'est pas compétents, on est capables de le faire, mais avec le temps que ça va demander...

Je le sais. Quand j'ai commencé dans le réseau de l'éducation à m'impliquer dans la structure, j'ai eu une surprise énorme de voir comment c'était compliqué – puis le langage qu'il y avait là-dedans – de s'approprier tout ça; ça demande de la détermination. Mais ça ne nous enlève rien, on est compétent, puis on est capable de le faire. Mais il y a des parents qui disent: On n'en veut pas, on ne veut pas être des administrateurs, on veut vivre dans l'école, participer à l'école, être informés de ce qui se passe dans l'école, alors donnez-nous notre table, on veut encore se réunir, on veut être dans l'école.

Puis c'est ça que vous dites, Mme Marois, vous dites que ce n'était pas ça, votre intention. Mais il reste que, quand on lit l'avant-projet de loi on ne la voit plus, notre table, on ne la voit plus, elle nous est donnée au bon vouloir d'un conseil d'établissement, et ce n'est pas ça qu'on veut. On veut vraiment l'avoir, on veut que ce soit inscrit dans la loi.

Mme Marois: Oui. Je comprends bien, mais je ne veux pas que vous renonciez, puis-je vous le dire, aux responsabilités qu'on est prêt à vous confier et qu'on souhaite que vous accomplissiez au niveau du conseil d'établissement. Et là je pense que, ça, on se comprend bien. Puis, moi, je suis prête à regarder comment réintroduire dans la loi cette question de la place et du forum qu'auraient les parents dans le sens de ce que vous souhaitez. On trouvera les mots pour le faire.

Mais, quand on regarde les rôles que nous voulons confier au conseil d'établissement et qu'on dit: Approuver les modalités d'application du régime pédagogique, les modalités d'application, c'est le projet d'école. Quand on dit: Approuver l'orientation, l'enrichissement ou l'adaptation des programmes d'étude et de l'élaboration de programmes locaux, dans le fond, c'est le projet éducatif de l'école, et qu'on veut que vous approuviez.

Donc, vous n'avez pas à le dessiner, à l'écrire, mais quelqu'un le préparera et viendra en débattre au conseil d'établissement. C'est la direction de l'école qui a cette responsabilité-là, avec des gens que seront les parents, mais que seront aussi des représentants des professeurs, du personnel non enseignant, des services de garde. Vous parliez des services de garde. Pour moi, c'est au coeur de la vie et du projet éducatif de l'école.

Alors, en ce sens-là, s'il faut élaguer un peu sur des aspects qui pourraient apparaître d'ordre administratif. Moi, je n'ai pas d'objection non plus à ce qu'on regarde ça. Mais je trouve que ça, c'est le coeur des nouvelles responsabilités qu'on veut confier au conseil d'établissement. Et là je pense que les parents ont leur mot à dire, ont leur perspective et leur vision, à cause, justement, de la première responsabilité qu'ils ont à l'égard de leurs enfants.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette, pour vos remarques finales.

Mme Marois: Je pense que madame voulait faire un petit commentaire. On la laisse faire ses commentaires.

Mme Morin (Dominique): Oui. On pense exactement la même chose, Mme Marois. Je pense que les parents, au niveau pédagogique, veulent continuer. Mais c'est quand on parle de l'administration, des affaires matérielles, ça, là, c'est...

Mme Marois: O.K. Bien, on va s'entendre sur ça, puis on va essayer de voir à clarifier ça. Mais je pense que, sur le coeur de ce qu'on souhaite que vous exerciez comme rôle, on se comprend aussi et on est d'accord.

Mme Morin (Dominique): Oui.

Le Président (M. Paré): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci. J'ai beaucoup apprécié la franchise de nos échanges et vos recommandations, et je peux vous dire que, de ce côté-ci, nous serons très vigilants. Alors, merci.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors merci, M. le Président. J'ai fait relever ce qu'avait dit Mme Fortier, qui est la présidente de l'Alliance, pour être sûre qu'on fasse... Les parents veulent-ils autant de pouvoirs? Les parents veulent être informés. Quelles compétences ont-ils, sinon? C'était un sens interrogatif. Alors, on va...

M. Ouimet: Ils n'ont pas dit que les parents avaient trop de pouvoirs.

(16 h 20)

Mme Marois: Alors, je veux remercier les gens qui sont venus devant nous. Je pense que ça a été un débat très enrichissant, comme l'ont été beaucoup d'autres avant, comme le seront d'autres demain et dans la suite des choses. Et surtout, ça viendra améliorer sûrement et bonifier le projet de loi que nous déposerons bientôt. Merci.

Le Président (M. Paré): M. Bolduc, pour le mot de la fin.

M. Bolduc (Pierre): En conclusion, M. le Président, je voudrais tout simplement finir comme j'ai commencé. Comme législateurs, c'est évident, c'est vous qui avez les cartes en jeu, les cartes-maîtresses. Je vous rappelle tout simplement que c'est vous autres qui avez l'atout. Mais, en éducation, l'atout, je pense que c'est une affaire de coeur aussi. Merci.


Le comité de stratégie des parents de l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert

Le Président (M. Paré): Merci, monsieur. J'inviterais Le comité de stratégie des parents de l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert à prendre place, s'il vous plaît.

Mme Guilbault (Diane): Avant de commencer, je voudrais vérifier si vous avez reçu copie du document révisé qu'on vous a fait parvenir et si les membres de la commission ont pu en prendre connaissance ou en avoir des copies, sinon, moi, j'en ai apporté.

Le Président (M. Paré): O.K. Je vais demander au secrétaire. Madame, est-ce que vous voudriez vous présenter et présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

Mme Guilbault (Diane): Alors, je m'appelle Diane Guilbault, je suis un parent et je suis accompagnée par Mme Francine Lepage, M. Jacques Caron, qui est président du conseil d'orientation de l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert, M. Gilles Pelletier, qui est membre, Mme Hanh Tran. Et on a aussi un étudiant, donc, qui vit la réalité, M. David Lapierre, qui est en secondaire V.

Mme la ministre, M. le Président, MM. et Mme les députés, nous sommes ici au nom du Comité de stratégie, comme vous l'avez dit. Et peut-être vous dire tout de suite qui est ce Comité de stratégie. C'est un comité qui est issu du comité d'école et du conseil d'orientation. D'autre part, la version révisée que je vous amène, c'est celle qui a été entérinée lundi soir à notre réunion. Donc, on a fait des ajouts assez importants.

Pourquoi un comité de stratégie? Eh bien, nous sommes inquiets quant à la survie de notre école. Le redécoupage des commissions scolaires – et je vous rassure tout de suite, on ne le remet pas en cause – entraîne un problème technique parce que la commission scolaire de L'Eau-Vive, qui est responsable de l'école internationale de Saint-Hubert, est démantelée, et la clientèle se retrouve subdivisée sur deux nouveaux territoires. On perd, en quelque sorte, notre maman, notre papa, notre commission scolaire parent, et on ne sait pas si quelqu'un va l'adopter et qui va l'adopter.

Alors, cette préoccupation a amené, au printemps dernier, quelque 500 parents, même un peu plus, à redire leur profond désir que l'école soit maintenue. Ils ont mandaté le comité d'école et le conseil d'orientation pour suivre la situation. Alors, c'est ainsi que nous avons été amenés à nous intéresser à toutes les réformes qui s'enclenchent dans le domaine de l'éducation. Et je dois dire, Mme Marois, qu'on a été très gâtés, on a du pain sur la planche.

Alors, à notre grand plaisir, nous avons constaté que, pour l'essentiel, les réformes proposées par la ministre de l'Éducation rencontrent nos objectifs. Parmi les objectifs visés, nous en discernons deux qui nous semblent très importants et qui sont avancés à la fois par l'avant-projet de loi et par le rapport pour réformer l'école Prendre le virage du succès ou celui qu'on appelle le rapport Inchauspé. Ce premier objectif, c'est d'accorder plus d'importance à l'acquisition de connaissances et le deuxième, de donner aux parents une plus grande place dans les orientations et les décisions. Pour nous, la survie de l'école est un test qui validera ces deux objectifs.

D'abord, un mot sur notre vision du système public. Comme parents, nous sommes heureux de vous dire que c'est dans le système public que nous avons trouvé une école qui assure à nos enfants une éducation de qualité. On entend souvent le jugement général un peu contraire, et pourtant c'est une école du système public qui obtient les meilleurs résultats aux examens uniques du ministère. C'est aussi, donc, le système public qui a été capable de mettre sur pied des moyens diversifiés, même si certains diront que c'est pour répondre à ses propres lacunes. Mais, n'empêche, je pense qu'il faut remarquer ce dynamisme et en tirer profit, et c'est tout à l'honneur du réseau public, qui cherche et qui parfois trouve des solutions.

Pour nous, le système public d'éducation doit être capable de donner à chaque enfant la chance de se développer au maximum. Les besoins des enfants sont variés. Les modes d'apprentissage, les façons de raisonner, les forces, les faiblesses sont des caractéristiques individuelles auxquelles une seule école, un seul modèle ne saurait répondre. Et, si l'on souhaite que le Québec soit en mesure d'offrir à tous ses élèves, quels que soient leurs revenus, leurs capacités ou leur lieu de résidence, une chance égale de développer au maximum leur potentiel, il faut que le système public se dote d'outils et de moyens adéquats pour répondre à ces besoins diversifiés.

La mise sur pied des écoles à vocation particulière, plus précisément au niveau secondaire – et c'est là-dessus, vraiment, que nous interviendrons – est née d'un constat que l'école d'un seul modèle ne répondait pas à tous les besoins. À l'adolescence – on a des adolescents, vous en avez sans doute – on sait que les jeunes sont particulièrement sensibles à cette dimension de la motivation, qui peut faire toute la différence entre la réussite, l'échec, l'enthousiasme, l'indifférence, l'engagement, la nonchalance. Il faut donc trouver pour chaque élève un moyen de le stimuler, d'aller chercher le meilleur de lui-même. Et, à cet égard, notre école a fait la preuve que sa présence sur le territoire donne à des jeunes du primaire le goût du travail, le goût d'augmenter leurs efforts dans le but de se préparer à l'école.

Je précise que ce projet, on le voit dans une perspective régionale, parce que, selon nous, le réseau public d'éducation doit être vu comme un système complet et non pas simplement comme une addition d'établissements. Au contraire des écoles privées, le réseau public doit être composé d'un ensemble d'établissements dont certains peuvent avoir des vocations complémentaires. Et, maintenant, la grandeur de territoires qui sont couverts par les nouvelles commissions scolaires va permettre d'assurer d'autant plus cette complémentarité. Selon nous, certaines vocations imposent des bassins plus larges, et là aussi on peut penser à des missions régionales.

Venons-en aux projets spéciaux. Alors, je vois que M. Bisaillon est ici, et je sais que j'aborde un sujet délicat. On a vu un peu les interventions qui ont été faites grâce à Internet et on sait qu'on n'est pas dans le discours qui est bien, entre guillemets, mais celui auquel on croit profondément. On pense que, comme parents, on se doit de vous dire ce qu'on pense profondément.

Alors, lors des états généraux sur l'Éducation, justement il a été question des projets spéciaux, danse, musique, sports, arts plastiques, sur lesquels on s'entend pour dire qu'ils sont intéressants et peuvent répondre aux besoins de certains élèves. Ce jugement favorable devrait aussi s'appliquer à l'École d'éducation internationale. Pourtant, à elle, on lui reproche son élitisme, que je mets entre guillemets. Le Québec se dit prêt à offrir des services de type national pour des élèves, donc pour le cirque, pour la danse, pour le sport, mais, pour nous, pour beaucoup de parents d'ailleurs, il est extrêmement difficile de comprendre comment il se fait qu'en revanche il serait antidémocratique d'offrir des services adaptés à des élèves doués sur le plan intellectuel et surtout, et j'insiste, qui sont disposés à fournir des efforts supplémentaires dans le cadre d'un projet éducatif centré sur l'humanisme et ouvert sur le monde.

L'avant-projet de loi insiste sur la place que les parents doivent occuper, et ce qu'on a entendu cet après-midi témoigne de cette ouverture par rapport à l'opinion des parents. Une des priorités des parents, c'est la réussite de leurs enfants. La mise sur pied de projets spéciaux est une des réponses que des parents avec des directions scolaires ont trouvées pour améliorer ce contenu éducatif ou pour motiver davantage leurs enfants, bref pour s'assurer que ceux-ci trouveront au cours de leur cheminement scolaire des défis adaptés à leur situation, qui leur permettront de se dépasser. On ne demande pas de faire des faveurs pour un groupe d'élèves, on souhaite que l'on trouve aussi pour eux réponse à leurs besoins. La démocratisation doit-elle obligatoirement passer par un seul modèle? Pense-t-on vraiment que l'uniformisation des services peut répondre adéquatement à la diversité des besoins, des talents, des intérêts? Poser la question, c'est un peu y répondre.

Parlons démocratisation. Les élèves de l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert proviennent de tous les milieux socioéconomiques, ils partagent ce même désir d'apprendre et de se dépasser. Grâce au programme de l'École d'éducation internationale, ils s'ouvrent sur l'étranger, doivent apprendre une troisième langue en plus d'avoir accès à des contenus enrichis en histoire, en français et en sciences.

Plus de rigueur, plus de connaissances, apprentissage d'une troisième langue, intégration des matières, c'est, en résumé, le programme de notre école depuis 11 ans. C'est également, je le souligne, la voie que recommande le rapport Inchauspé. Pour nous, c'est une confirmation que nous étions sur la bonne voie. Les résultats de nos élèves aux épreuves du ministère ont démontré la qualité de l'enseignement reçu. Mais je vous dirais que cette réussite au plan des notes, elle est due d'abord et avant tout au travail des élèves, car, oui, c'est vrai, nos élèves ont plus de travail qu'ailleurs. Ce ne sont pas des génies, mais plutôt d'assez bons élèves qui sont motivés et qui vivent dans un environnement où les études sont la priorité. Je m'empresse ici de répéter que ce n'est pas simplement une question de milieu économique, contrairement à ce que l'on dit très souvent, car nos élèves viennent de toutes les couches de la société.

(16 h 30)

Notre école appartient au secteur public, et nous en sommes très fiers, car, pour nous, c'est le signe d'un système public en santé que d'être capable de garder ses meilleurs éléments. Oui, il y a une sélection à l'entrée, mais elle s'explique d'abord et avant tout par l'excédent des demandes d'admission sur le nombre de places disponibles: 900 demandes pour 256 places disponibles en première année. Fait à signaler, ce n'est pas une sélection qui repose sur la capacité de payer des parents ou encore sur les relations que les parents pourraient entretenir avec des membres du personnel. Il s'agit plutôt d'une sélection au mérite. Le mérite est ici mesuré au moyen d'un examen d'admission, qui n'est pas basé sur les seules connaissances académiques, mais qui comporte également des questions sur les connaissances générales et l'actualité. Pour réussir à notre école, c'est vrai, il faut avoir une certaine capacité intellectuelle. Comme dans tous les autres projets spéciaux, de toute façon, où l'on donne un enrichissement, que ce soit en sport, en danse, il faut que l'élève soit capable, dès le départ, de faire plus que le programme régulier, sinon c'est le mettre en situation d'échec.

Une autre des caractéristiques de notre école, c'est que le projet éducatif de l'École internationale concerne toute l'école et, à ce sujet, les parents sont formels. Cette situation permet une meilleure synergie, puisque tous, tous les enseignants, tous les parents, tous les élèves, poursuivent les mêmes objectifs. Nous ne voulons pas dire que cette façon est la seule qui soit la bonne, mais elle convient à notre milieu et les parents y tiennent. C'est pourquoi ils croient que le projet éducatif doit se poursuivre. Ce projet inclut, je le rappelle, un engagement communautaire, la réalisation d'un projet personnel qui prend la forme d'un mini-mémoire ou d'une réalisation, d'une création, en suivant la méthodologie de recherche proposée par l'école. Il faut donc maintenir l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert sous peine de mettre fin à une expérience pédagogique réussie qui a nécessité beaucoup d'efforts du milieu. La perte de ce projet aurait pour conséquence de faire éclater une équipe-école qui a permis une telle réussite, de dilapider une expertise construite depuis 11 ans, enfin, ce serait un peu trahir les élèves qui se sont engagés résolument dans cette voie, sans oublier tous ceux et celles qui s'y préparent déjà.

Nous pensons qu'il vaut mieux partir de ce qui va bien pour construire et on peut parler d'acquis importants et utiles à notre société. Les programmes que l'École a créés, l'expertise que son personnel a développée sont des acquis, nous semble-t-il, et notre société a tout intérêt à connaître et à comprendre ce qui fonctionne bien dans le système public pour s'en inspirer et continuer de l'améliorer. Les programmes de l'École d'éducation internationale sont même exportés dans les régions du Québec, dans différentes provinces du Canada, dans plusieurs pays d'Europe dont l'Espagne, la Suisse, la Grande-Bretagne, aux États-Unis. On peut donc penser que nous ne sommes pas les seuls à reconnaître la qualité de ce produit québécois.

Alors, je terminerai en disant que, pour nous, il est clair que c'est l'ensemble de la société qui bénéficie des excellents résultats obtenus par les élèves de l'école. Et, comme nous l'avons dit, un système public d'éducation complet doit être capable de répondre aux besoins variés des élèves du Québec, tant ceux des plus faibles que ceux des plus forts, et répondre à l'un ne signifie absolument pas négliger l'autre. Une école qui fonctionne, des élèves qui réussissent, des parents qui s'engagent, voilà, il nous semble, un bilan plus que positif.

Et si, à la faveur des réformes entreprises, l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert devait disparaître de façon volontaire ou par inadvertance, ce serait alors perdre un des fleurons de notre réseau d'écoles publiques, ce serait démanteler un projet qui a été source d'inspiration pour plusieurs écoles, démanteler une institution qui a appliqué le rapport Inchauspé avant la lettre, mettre fin à une expérience qui est tout à l'honneur du système public et du Québec, puisque, comme je l'ai dit, on vient même de l'étranger pour s'en inspirer. Enfin, ce serait même fermer une école née de la volonté des parents et du milieu de créer un projet valorisant et mobilisateur pour les jeunes, des objectifs qui apparaissent pourtant centraux dans l'avant-projet de loi qui nous a été soumis. Il faudra alors se demander s'il n'y a pas quelques oublis, quelques failles dans l'avant-projet que nous étudions présentement.

C'est pourquoi nous avons formulé trois recommandations que je vous résumerai ici brièvement: maintenir l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert, bien sûr; donner aux commissions scolaires l'obligation de répondre à l'ensemble des besoins des élèves, y compris des élèves talentueux et désireux de s'investir davantage dans leurs études; et, enfin, donner aux commissions scolaires et au ministère de l'Éducation une responsabilité dans l'encadrement des projets éducatifs pour s'assurer que toutes les régions du Québec profitent des projets éducatifs de grande qualité. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Guilbault. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à notre table, à cette commission. On a eu une présentation – je vous écoutais et j'essayais de la retrouver, et je l'ai devant moi – assez intéressante de l'Université de Montréal, cette semaine d'ailleurs, au début de la semaine – ça a bien commencé notre semaine – sur, justement, le fait qu'on devait permettre aux élèves, selon leurs capacités, de pouvoir progresser dans l'ensemble de nos établissements, et, selon leurs talents aussi, par exemple, artistiques ou sportifs, qu'on devait permettre à nos jeunes de les développer à l'intérieur de notre système scolaire, et que, souvent, cela amenait aussi ou cela avait aussi une influence sur le progrès que pouvaient connaître nos enfants, même dans les matières académiques, lorsqu'on les amenait à participer à des projets concernant leur développement dans d'autres sphères d'activité que la sphère d'activité ou la sphère d'apprentissage essentiellement intellectuelle.

En fait, vous avez fait quelques remarques en parlant de mon sous-ministre adjoint qui a coprésidé la Commission des états généraux. Je pense que la représentation que nous a faite la Commission des états généraux n'a pas été de rejeter la recherche de l'excellence dans nos écoles, mais de nous assurer que, dans l'ensemble de nos écoles, on allait voir à ce que les talents de tous nos jeunes allaient être mis à profit et allaient être développés. Et ce pourquoi on fait une réforme de l'éducation, ce n'est pas pour le plaisir, évidemment, de restructurer ou de repartager les responsabilités autrement, juste pour le plaisir de le faire, mais pour nous assurer que l'ensemble des élèves du Québec, l'ensemble des jeunes du Québec vont mieux réussir à l'école, vont diplômer en plus grand nombre, vont moins décrocher, etc.

Vous avez raison d'être fiers de ce qui s'est fait à l'École internationale de Saint-Hubert et de la réussite que vous pouvez constater chez les jeunes. Mais, vous le dites vous-mêmes, bien sûr, il y a une sélection à l'entrée. Pas parce que vous la souhaitez nécessairement, mais, vous dites, parce qu'il y a un trop grand nombre de jeunes et les places disponibles ne sont pas suffisantes. Sauf que le fait de sélectionner évidemment sur la base de critères académiques amène ensuite, bien sûr, aussi, une possibilité de meilleurs résultats. Il faut être de bon compte, puis je pense qu'on le reconnaît ensemble.

Moi, ma perspective, c'est que je voudrais que chaque école développe des projets particuliers, qu'on ne les réserve pas, ces projets-là, à un groupe, ou à un milieu, ou à une école, et qu'il y ait, par exemple, un programme international qui véhicule la philosophie des programmes internationaux. J'ai rencontré un certain nombre d'entre vous, on a déjà eu des discussions, j'ai eu la possibilité de voir le programme de l'École internationale et des écoles internationales. Dans le fond, ce qui est intéressant et stimulant, c'est qu'on amène un jeune à s'ouvrir à l'ensemble des réalités du monde, non seulement de son univers immédiat, mais de l'univers international, qu'on amène à enrichir certaines matières.

Qu'est-ce que vous pensez qu'on dit quand on demande aux conseils d'établissement de voir à enrichir des matières? On veut justement que, au-delà d'une certaine base, chaque milieu choisisse des façons de faire qui vont amener ces jeunes à se dépasser. Ce n'est pas un blâme à l'École internationale qui est fait quand on dit qu'il serait peut-être souhaitable que des programmes comme ceux-là se développent dans les établissements secondaires, par exemple, ou primaires, mais à un autre point de vue, bien sûr, dans les établissements secondaires où la contribution des élèves va même être apportée aux autres élèves de l'école qui progressent moins vite, par exemple. C'est ça, la perspective qui est recherchée dans les changements qu'on veut apporter, et ce n'est pas contre quelque chose qu'on en a, mais c'est de s'inspirer d'expériences qui ont leurs valeurs, mais qui, en même temps, présentent leurs risques.

Je pense que vous êtes conscients aussi que, si tous les élèves qui ont beaucoup de facilité à apprendre, ou plus de facilité, ou travaillent plus sont retirés de l'école habituelle et régulière, bien, effectivement, ça n'aide pas nécessairement ou ça ne stimule pas nécessairement l'école qui perd ces éléments qui pourraient être des éléments de stimulation. Alors, ce n'est pas contre le fait qu'il y ait des projets particuliers qu'on en a, et d'aucune espèce de façon, mais c'est que ces projets particuliers puissent s'inscrire dans le cadre d'une école où on a une forme d'influence sur l'école. Alors, il ne faut pas, donc, vous sentir menacés en ce sens-là, mais plutôt faire en sorte que des projets comme les vôtres puissent être pris en compte dans les écoles pour influencer le cheminement des écoles. On se comprend? Je comprends que la situation particulière que vous vivez maintenant est un fait qu'on peut observer. Vous êtes en contact, de toute façon, avec vos commissions scolaires, j'imagine, à cet égard-là.

(16 h 40)

Par ailleurs, j'aimerais ça que vous me parliez un petit peu justement, par rapport à ce que vous dites dans votre mémoire et aux choix qu'on aura à faire éventuellement dans le projet de loi... vous dites que vous croyez que la mission de chaque école devrait s'accomplir ou se faire dans le cadre d'une vision régionale. Je fais référence à l'autre mémoire, mais on le retrouve aussi dans votre mémoire actuel. Vous pensez à quoi à ce moment-là?

Le Président (M. Paré): Mme Guilbault.

Mme Guilbault (Diane): Oui. On pense que, d'abord, les territoires sont devenus assez grands et qu'une région doit être sûre ou une commission scolaire doit être sûre d'offrir à tous ses élèves une panoplie qui va motiver, un, le sport, la musique, puis, dans des milieux qui sont démographiquement assez denses, comme c'est le cas dans la Montérégie, il y a une possibilité donc de variété peut-être plus grande que dans d'autres secteurs où une école va couvrir... J'ai déjà travaillé dans le comté de Portneuf et l'école couvrait un territoire immense, et c'était la seule.

Donc, ce qu'on dit, nous, c'est que, par exemple, sport, danse, ça ne peut pas se donner dans une école, il n'y aura pas assez d'élèves – on s'entend, au point de vue intensif. Il faut donc penser à des services régionaux. Et ce qui est motivant par le sport, ce qui est motivant par la danse, certains jeunes, ce qui les motive, c'est apprendre plus. Et ça, il n'y en a peut-être pas trois classes par école. Il y en a peut-être deux, trois dans une école primaire, il y en a peut-être deux, trois dans l'autre école primaire. C'est à peu près le cas de l'ensemble des écoles qui envoient des jeunes passer les examens d'admission pour l'École d'éducation internationale.

Donc, ce qu'on dit, on ne veut pas accaparer une école pour dire: Nous autres, à côté de chez nous, on élimine tous les voisins qui ne sont pas bons puis on garde juste les plus forts. Ce qu'on dit, c'est que la commission scolaire est en mesure de voir à ce que l'ensemble des moyens pour motiver les élèves soient en place sur son territoire et, dans notre cas, ça a pu passer par une école consacrée à ça parce qu'il y avait à la fois un bâtiment qui était disponible et à la fois une clientèle qui était suffisante en faisant un grand territoire. Et j'insiste qu'il y avait une entente intercommissions scolaires depuis six ans. Il y a quand même cinq commissions scolaires qui envoient des jeunes à cette école.

Donc, on ne vide pas les écoles de leurs bons éléments. Et je dirai que d'autres bons éléments aussi vont à l'école privée et là on a une sélection aussi, mais beaucoup moins démocratique, qui est sur l'argent. Donc, on ne peut pas dire que les écoles à projets spéciaux ou à un projet spécialement axé sur le développement intellectuel vident les écoles de leurs bons éléments. Je pense qu'on fait une erreur de perspective et d'importance et je pense que, dans une école donnée, on ne pourra pas donner toute cette variété de projets motivants pour des jeunes. Donc, il faut accepter qu'il y ait une répartition de services régionaux qui va rejoindre un nombre d'élèves, mais en couvrant un plus grand territoire.

Il y a mon collègue aussi qui voudrait ajouter quelque chose.

M. Pelletier (Gilles R.): Oui. Je pense, Mme la ministre, que...

Le Président (M. Paré): M. Pelletier, pour un complément de réponse.

M. Pelletier (Gilles R.): Ce qu'il serait peut-être important de comprendre, en dépit du nom peut-être un peu prétentieux qu'on s'est donné de «comité de stratégie», on n'est pas ici pour vous transmettre les récriminations de quelques parents qui veulent le maintien d'un privilège, ce n'est pas ça. On est ici pour vous demander de nous affirmer la volonté politique, que vous avez sûrement, de vouloir que se maintienne le principe d'une école de qualité. On est certain que vous voulez qu'une école d'excellence puisse continuer à exister. Et il n'y en a pas des centaines, de ces écoles-là, il y en a quatre actuellement au Québec, des écoles qu'on appellerait mur à mur. Celle de Saint-Hubert est la première. Nous, les parents, qui sommes ici, on n'a pas d'enfants d'âge primaire qui seraient susceptibles d'aller, éventuellement, à cette école-là si elle était maintenue.

C'est une école qui existe – Mme Guilbault vous l'a dit – dans 102 pays, actuellement. La volonté qu'elle a, c'est de mieux développer les talents et cette volonté de mieux développer passe par la diversité. Vous avez, Mme la ministre, des enfants, vous-même, qui fréquentent l'école internationale dans des classes internationales. Ce n'est pas le même type d'école, mais c'est la même volonté d'avoir une éducation de qualité qui existe, et ces classes internationales là, quant à moi, sont des wagons. Pour que ces wagons-là continuent à rouler, ça prend des locomotives au système et les locomotives du système sont ces quatre écoles internationales, dont celle de Saint-Hubert et celle qui couvre le territoire de la Montérégie. Mme Guilbault vous l'a dit, le faible retrait que peuvent exercer ces quatre écoles là sur à peu près 90 000 élèves à chaque année qui terminent leur primaire est de moins de 1 %. Ce n'est pas un gros écrémage, on ne fait pas de la très forte crème avec une petite crème de 1 %. Je pense que le secteur privé va faire des retraits beaucoup plus substantiels. Alors, voilà l'essentiel du message.

Maintenant, ce que je voulais aussi... Peut-être que vous allez nous poser des questions tantôt au niveau du conseil d'établissement. Nous avons, à Saint-Hubert, actuellement une structure qui, en dépit de la loi actuelle, équivaut à peu de chose près à ce que veut nous donner votre projet de loi. Alors, on n'est sûrement pas contre le fait que vous vouliez donner du muscle comme tel à ce qu'on fait déjà, mais ce n'est pas un besoin primordial en tout cas dans le contexte actuel.

On a entendu aussi les inquiétudes que vous ont transmises ceux qui nous ont précédés. C'est sûr que comme parents, que vous appeliez ça un forum ou une table de concertation, on serait inquiets de la disparition de ce qui est actuellement l'équivalent du comité d'école. Je pense que ça prend une structure quelconque qui devrait être maintenue pour qu'on puisse, comme parents, se réunir et prendre une participation plus active, arriver aux réunions du conseil d'établissement avec déjà un peu de travail, un peu de cheminement de fait.

Vous avez interrogé tantôt nos collègues du Congrès juif également au niveau de la participation de la communauté. Je peux vous dire que localement, à Saint-Hubert, l'expérience que l'on vit, c'est une expérience au cours de laquelle ce sont les parents qui, traditionnellement, parce qu'ils sont en surnombre et que trop de parents veulent participer au conseil d'orientation, sont nommés, un à chaque année, pour agir comme représentant de la communauté. Alors, c'est vous exprimer à quel point à Saint-Hubert l'école qui est là est une école où les parents ont déjà un rôle actif. Moi, j'y suis, j'ai un fils qui a terminé l'an passé en secondaire V et je peux vous dire qu'en octobre 1993, après deux années de sessions au cours desquelles le conseil d'orientation a siégé à 12 ou 13 reprises à chaque année, on a organisé un mini-colloque, un mini-colloque auquel ont participé – tenez-vous bien, on avait 1 200 enfants dont 200 étaient des finissants – 200 parents ont assisté, un samedi ou un dimanche d'octobre 1993, à un colloque pour déterminer qu'est-ce qu'on voulait privilégier comme valeurs que l'école devrait véhiculer.

Alors, je pense que vous avez devant vous des parents d'une institution qui sont hautement concernés par le meilleur apprentissage, le meilleur développement des valeurs de chacun des enfants qui le fréquentent, et je pense que ce n'est pas quelque chose que l'on peut jeter du revers de la main. Il ne faut pas adopter la politique de la terre brûlée pour adopter cette réforme de l'éducation que privilégie votre projet de loi, si nécessaire que soit cette réforme.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Pelletier.

Mme Marois: Juste un commentaire. Quand, Mme Guilbault, vous dites: C'est une école où il y a plus de motivation, moi, je pense qu'il faut qu'il y ait dans toutes nos écoles – vous le savez, vous me connaissez, vous m'entendez à l'occasion – des équipes qui vont être motivées à faire que les plus talentueux exploitent leurs talents à fond, comme ceux qui en ont un petit peu moins aillent au bout aussi des leurs. Je pense que c'est absolument fondamental et essentiel, et c'est ça, l'esprit qu'il faut retrouver dans nos écoles, sans pour autant qu'on soit obligés de faire des écoles sélectives. C'est ça, ma difficulté, là, et on est en réflexion sur ça.

Je relisais encore le document de l'Université de Montréal qui disait: «Chaque école doit en principe demeurer commune, accessible à tous les élèves du quartier ou de la localité désireux de la fréquenter compte tenu des places disponibles.» Mais on disait par ailleurs: «Tout en respectant le projet national d'éducation, des écoles voudront se donner des orientations axées ou mettant l'accent sur l'humanisme, l'esprit scientifique, les arts, le sport, ou encore la participation, la coopération, la démocratie, l'éducation internationale, l'éducation planétaire», et où tous les jeunes pourraient se sentir concernés par un projet comme celui-là, n'empêchant pas les plus talentueux d'aller au bout de leurs talents. Ça, je suis essentiellement d'accord. On ne peut pas empêcher quelqu'un qui veut apprendre et qui a plus de facilité à le faire de le faire. On serait absolument irresponsables de ne pas permettre ça. Mais, en même temps, il faut permettre à ceux qui apprennent, je dirais, plus difficilement parfois ou plus lentement... mais aussi d'aller au bout de leurs talents, parce que, sinon, je pense qu'on passe à côté de l'objectif qui est de faire que l'école permette à tous de se développer. C'est sûr, comme ça n'a pas été réparti également, c'est à nous d'être équitables cependant dans la recherche du développement de chacun, si on veut.

(16 h 50)

Mme Guilbault (Diane): Mme Tran.

Le Président (M. Paré): M. le député de Marquette.

Mme Marois: Je termine pour l'instant. Je vois que notre temps passe.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Moi, également, je félicite les représentants du comité de survie, premièrement, pour la qualité des services que vous dispensez à votre école et, bien sûr, les résultats que vous obtenez. Vous venez ici en vous présentant comme comité de survie. Vous venez d'avoir un échange avec la ministre de l'Éducation. Moi, je suis un petit peu perplexe par rapport à ce que j'ai entendu, mais je vais vous poser la question: Avez-vous l'impression que votre projet éducatif est possible avec la réponse que vous venez d'entendre? Moi, je ne le sais pas, puis je vous dis, si j'étais légiste, en arrière, je me gratterais la tête, je me dirais: Qu'est-ce qu'elle voulait dire, la ministre? Il y a des discours divergents, là. Si le groupe est syndical, il n'y a pas de danger, il n'y en aura pas, on va y voir; l'école internationale, ne vous inquiétez pas, ça va être possible puis... Moi, je vous pose la question.

Le Président (M. Paré): Mme Tran.

Mme Tran (Hanh): Est-ce que je peux répondre à M. Ouimet?

Le Président (M. Paré): Bien sûr.

Mme Tran (Hanh): Justement, nous sommes venus ici en espérant que Mme la ministre va garder nos écoles spécifiquement internationales. Parce que, comme Gilles a dit, il y en a seulement trois, quatre au Québec. Il y a beaucoup de classes internationales qui vont se développer. Comme vous saviez, Henri-Bourassa va avoir des classes internationales, et ailleurs au Québec. Et je veux en profiter pour vous donner quelques chiffres pour quand même voir la vue...

M. Ouimet: Mais, madame, je vous interromps. Je comprends, là, vous avez des messages à passer, ils ont été passés...

Mme Tran (Hanh): Non, non, non, justement...

M. Ouimet: Vous ne les avez pas tous passés, les messages.

Mme Tran (Hanh): On arrive ici, là, pour...

M. Ouimet: Mais, moi, la question que je vous pose: Si vous quittez, c'est quoi l'impression que vous retenez de votre passage ici suite aux réponses qu'on vous a données? Est-ce que ça va être possible ou pas?

Mme Tran (Hanh): Nous n'avons pas l'impression qu'elle va fermer nos trois, quatre écoles au Québec, mais nous avons l'impression qu'elle va arrêter ces quatre écoles-là, ne plus ouvrir les écoles entièrement internationales, mais les classes... Par contre, nous espérons qu'elle va garder ces quatre-là. C'est pour ça que nous sommes ici.

Et la raison pourquoi je veux donner un peu de chiffres, c'est parce que je dis que l'île de Montréal, vous avez 14 100 élèves de 6e année. Il y en a 2 500 qui vont au privé. Il y en a seulement 3,3 % qui vont à l'international. Et, en Montérégie, vous avez seulement 5,5 % qui vont à l'international et 24 % au privé. Alors, il nous reste quand même un 70 % d'élèves à classer dans les écoles... les classes internationales dans les autres écoles régulières. Alors, c'est quatre écoles-là, nous, comme on est ici, on a fait des réunions et on voulait former des comités vraiment pour faire l'impossible pour que l'école internationale soit maintenue. C'est parce que nous pensons, comme elle l'a dit, que c'est une excellente école. Et son projet, c'est d'utiliser cette école-là, j'ai l'impression – c'est ça que j'ai compris – de les faire multiplier ailleurs aussi, et pas faire payer les quatre écoles qui ont vraiment la vocation internationale entièrement. C'est ça que j'ai compris.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Tran. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, je demeure perplexe. Je vais poser la question autrement: L'avant-projet de loi – il faut avoir des réponses, à mon point de vue, les plus claires possible – est-ce qu'il permettrait l'École internationale de Saint-Hubert?

Le Président (M. Paré): Mme Guilbault.

Mme Guilbault (Diane): Comme les services régionaux...

M. Ouimet: Là, je fais abstraction du contexte du brassage des commissions scolaires, hein.

Mme Guilbault (Diane): Oui, oui, j'ai compris. Moi, je n'ai pas compris que, dans le projet de loi, on abolissait tous les projets régionaux. Et je pense que, si les commissions scolaires sont à l'écoute des parents de leur territoire puis que dans une situation donnée il s'avère que c'est possible de répondre à des besoins qui sont exprimés, moi, je ne vois pas comment, en quoi ça pourrait être empêché et interdit. Je n'ai pas compris ça dans le projet de loi. Je n'ai pas compris que c'était encouragé, j'ai compris qu'on voulait davantage offrir des options enrichies dans l'école du quartier. À ce chapitre-là, je me permettrais de dire que l'école de quartier au secondaire, quand on voit le nombre d'autobus, on dit que le quartier est «mosusment» grand. Parce que ce n'est pas vraiment des écoles de quartier. Et, moi, mes enfants qui sont allés à l'école internationale, ils seraient allés en autobus ailleurs, dans une autre ville aussi, ce n'est pas le quartier du tout. Donc, c'est pour ça que je fais une différence assez importante entre le primaire et le secondaire, où l'école commune au primaire est vraiment l'école de quartier et, au secondaire, là on part tous azimuts, et on peut donc se permettre de jouer avec la carte et de s'assurer que... Et les commissions scolaires – et c'est ça qu'on demande – elles ont l'obligation de s'assurer que tous les élèves trouvent dans leur système scolaire, donc dans l'ensemble des services qui sont offerts, ce qui leur convient, ce qui les motive.

Et, pour ajouter un petit peu sur ce que Mme Marois disait tout à l'heure par rapport à la motivation, oui, nos élèves sont motivés. Pourquoi? Parce qu'ils participent à un projet commun. Tout le monde est d'accord pour avoir plus de devoirs. Parlant d'expérience, je peux vous dire que, dans d'autres écoles où les élèves sont bons aussi, pas nécessairement pas bons, tout le monde n'est pas d'accord pour faire des devoirs. C'est difficile de demander à un élève de faire encore plus quand les autres font moins, puis ils peuvent avoir des bonnes raisons pour en faire moins: ils peuvent avoir d'autres activités, ils peuvent avoir d'autres priorités. Sauf que, oui, c'est vrai, ça mélange, mais je ne suis pas sûre... Et je pense qu'on n'aurait pas eu les états généraux, je pense qu'on n'aurait pas eu toute cette réforme si, effectivement, la théorie que le haut tirait le bas vers le haut avait fonctionné à 100 %. Je pense qu'on a observé dans beaucoup de cas la situation où on a descendu tranquillement pas vite les exigences, et c'est ça qui a amené des recherches d'outils différents, d'outils nouveaux, et c'est très important que l'ensemble des élèves, l'ensemble du groupe adhèrent aux mêmes objectifs, et, entre autres, ça demande beaucoup plus de travail.

M. Ouimet: O.K. Ça, ça va. Donc...

Le Président (M. Paré): Vous voulez commenter?

M. Pelletier (Gilles R.): Un complément.

Le Président (M. Paré): Un complément de réponse?

M. Pelletier (Gilles R.): La réponse que Mme Tran a pu vous donner était peut-être un petit peu... manquait un peu de clarté, mais la question ne l'était peut-être pas plus non plus.

M. Ouimet: Bien, écoutez, je vais la reprendre, pour que ce soit bien clair.

M. Pelletier (Gilles R.): Oui.

M. Ouimet: L'avant-projet de loi, si c'était adopté demain, est-ce que le lendemain l'École internationale de Saint-Hubert pourrait continuer sous sa forme actuelle?

M. Pelletier (Gilles R.): Alors, nous pensons que oui, M. le député...

M. Ouimet: La réponse, c'est oui.

M. Pelletier (Gilles R.): ...avec la réserve suivante, que nous vous avons déjà transmise, au niveau de l'amélioration potentielle... Mme Guilbault vous a parlé tantôt de régionalisation. Alors, ça va dans ce sens-ci. Supposons que vous avez un bassin de 50 000 personnes, une école qui a 1 000 personnes qui la fréquentent, où le conseil d'établissement désire privilégier, lui, l'apprentissage du patin à glace. Si vous avez dans cette école-là des gens qui ne savent pas chausser les patins, qui n'ont aucun talent pour apprendre à patiner, vous ne pourrez pas réaliser votre projet éducatif. Alors, si vous avez, dans le système que la ministre veut lancer, une école où ce que l'on veut privilégier c'est l'excellence, ça prend un bassin où on a des candidats excellents ou un peu plus forts que les autres. Il ne s'agit pas, comme dit la ministre... Ça, c'est possible dans le système actuel.

M. Ouimet: Bien là je vous arrête, parce qu'il y a la question de la sélection de la clientèle. On «est-u» sur la même longueur d'onde ou on ne l'est pas? Moi, ce que j'entends depuis deux semaines ici, il n'y aura pas de sélection de clientèle. Je vous posais la question: Avec l'avant-projet de loi, est-ce que votre école peut continuer de survivre, si on l'adoptait tel quel? Vous me dites: Oui, mais il va y avoir un empêchement pour choisir la clientèle.

Mme Guilbault (Diane): Si vous me permettez de répondre à ça... Peut-être, Francine, vas-y.

Mme Lepage (Francine): Moi, je me demande: Est-ce que le projet de loi, tel qu'il est rédigé...

Le Président (M. Paré): Mme Lepage.

Mme Lepage (Francine): Oui. Le projet de loi, tel qu'il est rédigé actuellement, est-ce qu'il veut dire que mon enfant d'un quartier donné devrait obligatoirement aller à l'école secondaire la plus près de chez moi? Si c'est ça que ça veut dire, c'est possible que l'école secondaire la plus près de chez moi privilégie le sport ou les sciences, alors que ce qui stimulerait mon enfant, c'est un enrichissement en arts.

M. Ouimet: Non, ce n'est pas ça qu'on veut dire.

Mme Lepage (Francine): Est-ce que mon enfant va pouvoir aller...

M. Ouimet: Ce n'est pas ça qu'on veut dire.

Mme Lepage (Francine): ...à l'école où il y aurait un enrichissement en arts?

Mme Marois: On a dit que l'enfant ne pouvait pas être refusé...

Le Président (M. Paré): Mme Lepage.

Mme Marois: ...parce qu'il y avait effectivement un projet particulier dans son quartier, l'enfant ne pouvait pas être refusé dans son école de quartier. Alors, effectivement, vous avez bien compris ce qu'on a dit. On n'a pas...

Mme Lepage (Francine): Ça veut dire que mon enfant... Si le projet de mon quartier est sciences et sport et que mon enfant, moi, aime beaucoup les arts, il ne pourrait pas aller à une école un peu plus loin où le projet éducatif...

Mme Marois: Non, c'est-à-dire qu'il pourrait le faire, justement.

Mme Lepage (Francine): Il pourrait le faire.

M. Ouimet: M. le Président...

Mme Marois: Il pourrait le faire, c'est-à-dire...

Le Président (M. Paré): Excusez, Mme la ministre.

Mme Marois: ...ce qui ne serait pas possible...

M. Ouimet: Voulez-vous l'interrompre, votre patronne?

Mme Marois: ...c'est que l'école de quartier refuse votre enfant...

M. Ouimet: Mets tes culottes, Jean-Guy!

Le Président (M. Paré): Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: ...parce qu'il veut pouvoir participer à un programme régulier.

M. Ouimet: Mets tes culottes, Jean-Guy!

Le Président (M. Paré): Mme la ministre, là, il faudrait éviter...

Mme Marois: Ha, ha, ha! Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Paré): ...l'échange, qui est intéressant, mais la parole est à vous, M. le député de Marquette.

(17 heures)

M. Ouimet: Oui. La question qu'on pose... Ne prenons pas votre enfant, mais prenons un autre enfant qui n'a pas de bons résultats académiques, mais la bâtisse de l'École internationale, elle est située juste en face de sa résidence. Cet enfant-là peut-il aller à l'École internationale de Saint-Hubert, avec les règles que nous avons dans l'avant-projet de loi? Vous saisissez, là? Parce qu'il y a une sélection qui se fait à partir des résultats académiques. Si j'ai bien compris depuis deux semaines les interventions de la ministre, il ne pourra pas y avoir cette sélection-là.

Mme Guilbault (Diane): Je voudrais juste préciser peut-être.

Le Président (M. Paré): Mme Guilbault.

Mme Guilbault (Diane): C'est pour ça qu'on parle d'une école régionale. On dit: Ce n'est pas une école de quartier, notre école, c'est une école régionale. Donc, ça se trouve bien, il y a deux écoles côte-à-côte: il y a notre bâtiment puis il y a un autre bâtiment qui est plus école de quartier, si vous voulez. Mais c'est pour ça qu'on parle de services régionaux. Je pense qu'il ne faut pas qu'un quartier s'accapare d'un bâtiment pour en faire une mission exclusive, et donc empêche des enfants du quartier d'avoir accès à cette école.

M. Ouimet: Mais l'école régionale... Je comprends, là.

Mme Guilbault (Diane): C'est une école donc sur une base régionale et donc ce n'est pas une école du quartier, ce n'est pas le petit voisin, ce n'est pas parce qu'il reste à côté, il reste dans le territoire.

M. Ouimet: Ça va, là, mais c'est quoi l'attribut de cette école régionale? C'est qu'elle peut choisir la clientèle en fonction des résultats académiques des élèves.

Mme Guilbault (Diane): C'est ça.

M. Ouimet: C'est ça. O.K. Il fallait bien l'éclaircir parce que sinon on pourrait partir sur... et, moi, je ne pense pas, je vous le dis d'après ce que j'ai entendu depuis deux semaines, que l'avant-projet de loi va permettre ça, à moins qu'on me corrige. Et là je suis prêt à céder la parole à la ministre pour qu'on ait la réponse claire. Vous êtes venus, vous vous êtes déplacés pour ça.

Le Président (M. Paré): Auparavant, j'aimerais que vous fassiez vos remarques finales parce que nous venons d'écouler le temps.

M. Ouimet: Mon Dieu! On approchait le point crucial de l'intervention puis... Alors, moi, je vous remercie. J'espère que vous obtiendrez satisfaction, mais il faudra voir par la suite le projet de loi, ce qu'il dira, et c'est là qu'on aura véritablement les réponses dans les gestes concrets posés et non pas dans les discours.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Effectivement, dans l'avant-projet de loi qui est devant nous, M. le Président, il n'y a rien qui empêche qu'une école comme celle qui est là continue d'exister. Ce que nous avons dit cependant, c'est qu'effectivement nous viendrions avec des orientations sur le fait que l'école de quartier ne puisse pas refuser un enfant de son quartier même si le quartier est grand, comme Mme Guilbault le disait dans le cas d'une école secondaire, et on pourrait souhaiter aussi que la sélection ne se fasse pas seulement sur la note scolaire. Ça aussi, ça pourrait être une autre possibilité qui serait envisagée, mais le projet de loi actuellement ne vient pas toucher ce qui concerne l'existence d'une école comme l'École internationale.

Mme Tran a assez bien compris ce que j'ai explicité jusqu'à maintenant. Je crois qu'il faut que nous permettions que des enfants, encore là, se développent au maximum de leurs talents et je crois qu'il y a effectivement des talents qui sont répartis différemment dans la société dans laquelle on vit, n'est-ce pas, et ma responsabilité comme ministre de l'Éducation, c'est que j'aille chercher toutes les motivations nécessaires, tout le dynamisme qu'une école peut être capable de dégager pour que ses enfants réussissent, et c'est ça la perspective qu'on a. Alors, merci pour votre présentation.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Le mot de la fin est pour toi, David!

Mme Marois: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: ...sur la tête des élèves au niveau de la communauté comme au niveau du conseil d'établissement, mais on aura peut-être d'autres occasions. Comment ils voyaient ça.

Une voix: Vas-y!

M. Lapierre (David): Bien, j'aimerais ça dire que j'ai remarqué à travers ce que vous avez dit qu'il faudrait permettre à n'importe quel élève d'entrer dans notre école, mais je pense que les attentes à notre école sont beaucoup plus élevées que les écoles générales. Donc, à partir de là, quelqu'un qui arriverait à notre école sans savoir à quoi s'attendre, il pourrait avoir beaucoup de difficulté à s'intégrer, à atteindre les exigences qui sont dans notre école. Donc, en sachant ce qui est demandé, je crois qu'on pourrait arriver à faire une sélection pas nécessairement uniquement sur les résultats, ça pourrait faire partie de ça, mais voir ça plus général, sur la personnalité et le désir de vouloir performer à l'école.

Mme Marois: C'est une nuance intéressante. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): Merci. Maintenant, notre dernier groupe de la journée, le Comité de parents de la commission scolaire catholique de Sherbrooke. M. Gilles Boudrias, président. J'aimerais, M. Boudrias, que vous présentiez les gens qui vous accompagnent, et je vous rappelle que nous avons une heure, donc une présentation de 20 minutes de votre part et de 40 minutes pour les échanges avec les parlementaires. Bienvenue!


Comité de parents de la commission scolaire catholique de Sherbrooke

M. Boudrias (Gilles): Alors, je vais vous présenter les membres. D'abord, je voudrais vous remercier de nous avoir invités; on avait travaillé fort pour faire le mémoire, c'est une sorte de gratification.

À ma gauche, Mme Lucie Bédard est secrétaire du Comité de parents et elle est l'ex-présidente aussi de la Fédération des comités de parents de l'Estrie; elle est secrétaire, depuis trois ans, du Comité de parents, mais ça fait huit ans qu'elle est dans des conseils d'école et des conseils d'orientation, et cinq ans au Comité de parents.

À ma droite, M. Rémy Bergeron. Ça fait sept ans qu'il est dans les comités d'école et conseils d'orientation, depuis six ans au Comité de parents et, depuis cinq ans, commissaire-parent au primaire.

À mon extrême droite, Mme Berthold est commissaire-parent depuis quatre ans; elle est, depuis neuf ans, dans des comités d'école et des conseils d'orientation et, depuis huit ans, au Comité de parents. Si je vous dis tout ça, c'est parce que je vais insister tout à l'heure sur l'expérience de chacun.

Dans mon cas, je suis président du Comité de parents, c'est ma sixième année; ça fait 12 ans que je traîne ma bosse dans les comités d'école et les conseils d'orientation et huit ans au Comité de parents.

L'exposé que je vais vous faire va avoir trois parties. Je vais commencer par vous décrire la commission scolaire de Sherbrooke, très brièvement, parce que vous devez la connaître un petit peu de toute façon. Si je fais ça, c'est que nous considérons que nous sommes un cas typique par rapport à ce qui s'en vient, et je vais vous expliquer ce que j'entends par là. Ensuite, nous allons parler, et c'est pourquoi j'ai tellement insisté sur notre expérience, des difficultés que rencontrent les parents à occuper la place qui leur revient dans l'école que fréquente leur enfant. Et, finalement, nous allons rappeler les principaux points de notre mémoire et nous allons les mettre en relation avec ce qu'on va vous avoir présenté antérieurement. On veut surtout vous communiquer notre expérience, on ne pense pas s'embarquer dans une espèce de débat oratoire, ce n'est pas notre intention. Alors, je commence avec la description de la commission scolaire.

La commission scolaire de Sherbrooke comprend environ 20 000 élèves. Pourquoi j'insiste là-dessus? C'est que c'est à peu près la taille que les commissions scolaires fusionnées auront. Alors, ça veut dire que ça fait des années qu'on vit le même phénomène. Ça apporte des différences – c'est presque une petite digression que je fais – au niveau du fonctionnement des comités de parents; ils sont beaucoup plus complexes à faire fonctionner, on doit fonctionner avec des règles, des procédures. Ça demande des ressources additionnelles mais, aussi, ça fournit des compétences intéressantes parmi les parents, parce qu'il y a un plus grand bassin de parents. Dans notre Comité de parents, il y a 50 parents; alors, on ne fait pas des réunions de coin de table, il faut convoquer, etc.

En plus – et c'est là qu'elle est plus typique – la commission scolaire de Sherbrooke décentralise depuis trois ans. Alors, déjà, le budget des écoles est décentralisé, l'organisation scolaire est décentralisée, la grille-matière est décentralisée, et même, par certains aspects, le calendrier est décentralisé, en respectant les transports, là, mais, quand même, on arrive à déplacer, par exemple, des étapes selon les besoins, avoir trois étapes ou quatre étapes selon les écoles, et c'est décidé par les conseils d'orientation.

C'est pourquoi, quand on va parler tout à l'heure de décentralisation, ce que je voudrais dire, c'est que ce n'est pas des conjectures qu'on fait, c'est une expérience sur le terrain, et je pense que c'est intéressant de le souligner. En ce qui concerne la peur du changement, je ne pense pas qu'on puisse nous soupçonner de peur du changement parce que le Comité de parents a demandé et appuyé cette décentralisation qui s'est faite à Sherbrooke.

(17 h 10)

Les difficultés maintenant que rencontrent les parents à occuper la place qui leur revient dans l'école que fréquente leur enfant. Dans ce titre-là, il y a deux parties. La première partie, c'est la place des parents. Je pense qu'il n'y aura pas de problème. J'écoutais Mme la ministre parler tout à l'heure et je pense qu'il y a unanimité ici, dans la salle, sur cette question-là, mais je veux revenir dessus quand même. Ensuite, nous allons parler des obstacles au partenariat.

Donc, la place des parents. Nous croyons que, même à l'école – et ça a été affirmé par la ministre tout à l'heure – les parents doivent demeurer les premiers maîtres d'oeuvre de l'éducation de leur enfant. Nous l'utilisons comme argument, mais on ne l'exprime jamais de façon explicite. Ce que ça signifie quand on dit qu'ils doivent être les premiers maîtres d'oeuvre, cela ne signifie pas que nous voulons devenir les patrons de l'équipe-école – on ne veut pas être les boss – cependant, je crois que la place des parents, le terme que nous utilisons, c'est d'être des partenaires privilégiés de l'équipe-école. Pour nous, privilégiés, cela veut dire qu'on devra avoir une opinion prépondérante et s'assurer qu'on nous met dans une position où on nous entend, où on nous écoute, parce qu'il est possible qu'on nous ignore aussi en nous fournissant des raisons.

Alors, ce que je voulais dire ici et ce que font les parents, en fait, quand ils vont dans un comité d'école, ce n'est pas un trip de pouvoir, ils ne veulent pas dominer l'école, mais ils veulent surtout s'informer et aussi faire valoir leur point de vue, voir ce qui se passe avec leur jeune et participer aux décisions de ce qui se passe là. De ce point de vue là, nous croyons que la Loi sur l'instruction publique ne doit pas se limiter à permettre le partenariat des parents ou elle ne doit pas même se limiter à le faciliter, mais elle doit l'inciter, c'est-à-dire que la loi doit inciter le plus grand nombre possible de parents à être des partenaires de l'école. Nous croyons que l'intention de la loi, c'est que cela se produise, mais, dans sa forme actuelle, d'après nous, ça ne marche pas.

Quels sont les obstacles que les parents rencontrent au partenariat? Ce que je vais vous dire là provient de l'expérience de l'ensemble des membres ici qui ont participé à des soirées de formation de parents et qui ont participé à des comités d'école et des conseils d'orientation pendant de nombreuses années. Je me suis amusé à additionner tout à l'heure; tous ensemble, ça fait 36 ans de conseils d'école, de comités d'école ou de conseils d'orientation. Alors, ce que nous voulons dire ici, je ne voudrais pas que ça soit mal interprété. Je ne suis pas en train de dire que les parents sont incompétents, mais je suis en train de dire qu'il y a des obstacles à ce que leur compétence se manifeste. Ce n'est pas la même chose.

D'abord, les parents qui sont, par exemple, dans un conseil d'orientation ou même dans un comité d'école ne sont pas des experts en pédagogie. Et souvent par rapport aux autres intervenants. Si, par exemple, dans un conseil d'orientation, il y a trois, quatre profs, un directeur d'école et d'autres membres du personnel de l'école, le parent ne peut pas porter des jugements d'expert, semble-t-il, sur la pédagogie, ce qui le place un peu dans une situation d'infériorité.

L'autre chose, on en a parlé tout à l'heure, le jargon du système scolaire. Alors, ça n'est pas facile, surtout que les gens s'expriment à coups de sigles et, les sigles, il n'y a absolument rien à comprendre avec ça. Moi, ça fait 12 ans que je traîne ma bosse. Quand j'ai commencé, on me parlait de MSA. J'ai fini par comprendre que c'étaient des mésadaptés socioaffectifs, mais ils sont devenus des TC par la suite, et ces TC sont devenus des TGC, et tout ça fait partie des EHDA qui sont devenus des EHDAA. Il y a même des termes équivoques. Les DGA, par exemple, ce sont des gens qui ont des difficultés graves d'apprentissage, mais c'est aussi un directeur général adjoint, etc. En tout cas, le problème des sigles, le problème du jargon de la pédagogie, il y a toute une initiation qui doit se faire. J'ai même vu des parents démissionner dès la première réunion parce qu'ils ne comprenaient rien. L'éducation peut se faire et ça se comprend vite, je veux dire, on le maîtrise maintenant, le langage.

Ils craignent aussi – et ça, c'est un point qui est assez fort, je l'ai vu à peu près dans toutes les réunions de formation, les autres parents qui sont ici pourront en témoigner aussi – les parents, que leur enfant soit victime de représailles s'ils revendiquent trop de choses, ou s'ils revendiquent, point, ou s'ils contestent, de sorte que souvent on leur dit: «Pourquoi tu ne l'as pas fait valoir, ton point de vue? Bien, je ne sais pas, peut-être que mon enfant pourra en subir les conséquences sans que je le sache.» Cela est très répandu comme sentiment. On ne le retrouve pas au niveau des comités de parents, mais on le retrouve souvent dans les comités d'école ou les conseils d'orientation.

La solution qui a été souvent apportée ici, c'est de rendre les parents un petit peu plus nombreux au sein du conseil d'orientation. Nous croyons que cela est un pas dans le bon sens, c'est-à-dire les rendre majoritaires dans le conseil d'orientation, sinon même on reculerait par rapport à la loi actuelle. Par contre, on pense que ce n'est pas une mesure suffisante. Ça accroît le nombre de personnes, mais ce n'est pas assez. Ce n'est pas assez parce qu'il faut distinguer entre le pouvoir formel qu'on donne aux parents en les rendant majoritaires et ce que je vais appeler ici la force d'influence. Or, le pouvoir formel sans la force d'influence, ça ne vaut rien. Imaginez un nombre de parents majoritaires qui arrivent, au sein d'un conseil d'établissement, à obtenir une décision majoritaire sur une question mais que le personnel n'est pas d'accord; ça ne fonctionnera pas. Il faut que les parents soient aussi capables de convaincre le personnel qu'ils ont raison.

La force d'influence, elle provient, d'après nous, du nombre de parents qui sont représentés. Si vous êtes quatre parents, par exemple, ou cinq parents – ce qui peut arriver dans la formulation actuelle de la loi – dans un conseil d'établissement puis que l'école n'est pas d'accord, qu'on trouve que c'est trop d'ouvrage, ce que vous demandez, que c'est compliqué, etc., on risque de vous envoyer paître tout simplement, mais avec bienveillance, là, on ne fera pas ça méchamment, mais on ne vous écoutera pas. On va se dire – parce qu'on va avoir des excuses – par exemple, que vous ne comprenez pas vraiment et que c'est pour ça que vous faites cette revendication-là. On va vous dire que vous avez peur du changement ou des choses comme ça.

Si vous êtes huit parents unanimes mais que vous êtes isolés, là, on va probablement trouver des excuses pour ne pas agir. Par contre, si vous êtes huit parents qui représentent la volonté de 300 parents, je pense qu'on va trouver des moyens. C'est là qu'est l'importance du nombre. C'est pourquoi nous insistons tant, dans notre mémoire, sur le nombre de parents qui sont impliqués, d'autant plus que ça s'associe aussi à notre intention qu'il y ait le plus possible de partenaires de l'école. Je ne pense pas, de la façon dont la loi est faite présentement... Je veux dire, c'est corrigeable, là. En tout cas, on va vous suggérer une solution. Vous savez laquelle, d'ailleurs, parce que... En tout cas!

Donc, comment les parents peuvent-ils être nombreux? De trois façons. D'abord, ils peuvent être nombreux en répondant nombreux à une consultation de leur école. Par exemple, si vos gens, au sein d'un conseil d'établissement, vous disent: On a fait un sondage et il y a, dans notre école, je ne sais pas, 80 % des parents qui ont répondu, qui sont favorables à cette mesure-là. Et vous avez, je ne sais pas, moi, 500 répondants. C'est très gênant pour l'école, à ce moment-là, de ne pas agir dans cette direction-là et de prendre les moyens nécessaires. C'est aussi possible au niveau du comité de parents.

Et, l'autre chose, ce n'est pas comment être nombreux, mais c'est un besoin des parents, au niveau de leur fonctionnement. Je pense que les parents ont besoin d'un lieu de concertation où ils vont pouvoir parler entre eux et dans leur langage, et où ils ne craindront pas non plus d'avoir des représailles. Ce lieu-là n'est définitivement pas le conseil d'établissement. Le conseil d'établissement, il se tiendra là. Je ne vous dis pas qu'il ne faut pas qu'il y ait de conseil d'établissement, mais les discours qu'il va y avoir là, ce ne sont pas des discours qui vont aider les parents à comprendre l'école, à s'informer puis à en discuter ensemble. Ce n'est pas un creuset de réflexion des parents.

J'arrive donc au troisième point, qui est le rappel...

Le Président (M. Paré): Trois minutes.

M. Boudrias (Gilles): Il me reste trois minutes? Alors, je vais vous parler seulement de deux choses, et le reste, bien, vous questionnerez mes collègues et tout ça. Moi, je vais avoir parlé suffisamment, alors, je vais être discret.

La première chose qui m'intéresse, c'est notre... Quand je parle d'expulsion, vous avez compris – je dis ça très vite – c'est la force d'influence qui est nulle présentement et c'est ça qu'il faut récupérer. Mais j'ai vu tout à l'heure des velléités à la récupérer et je suis très content de ça.

Les recommandations. La recommandation 1, pour nous, est particulièrement importante. Ce que nous proposons, c'est un comité de consultation qui pourrait parfois faire une assemblée générale de parents et faire un débat sur une question, ou qui pourrait simplement produire des questionnaires qu'il distribuerait et qu'il compilerait après. L'avantage de ce comité de consultation – je l'ai vu revenir une couple fois cet après-midi – c'est qu'il élimine certains irritants. Nous croyons qu'un des irritants c'est, entre autres, le personnel de l'école qui trouve qu'il y a trop de réunions le soir, entre autres les directeurs d'école. Les directeurs d'école ne seraient pas tenus d'assister aux réunions de ce comité-là.

(17 h 20)

L'autre avantage, à notre avis, c'est qu'il élargirait le partenariat des parents, parce que, quand on demande aux gens de consulter, quand on consulte comme il faut, consulter, c'est informer aussi et ça veut dire que même les parents qui ne font pas partie du comité de consultation, quand ils ont à répondre à une consultation, d'abord, la consultation doit être suffisamment claire pour expliquer ce qui est en question, et là les parents sont portés à s'informer. Alors, pour nous, c'est une autre façon d'augmenter le partenariat des parents, en consultant.

La deuxième recommandation est assez importante aussi. Le comité de parents perd de la force parce qu'il n'y a plus de base; ça, je pense que ça a été répété souvent. Il en perd aussi un peu peut-être... Non, ce n'est pas ici, excusez. Quand on nomme les gens sur le conseil d'établissement aussi, je pense qu'il est important qu'il y ait un organe qui nomme les personnes, sinon, quand on fait ça dans une assemblée générale de début d'année, où les gens ne se connaissent pas, les gens qui s'en vont là, on ne le sait pas, il y a un peu du hasard. Tandis que, quand le comité d'école nommait les membres du conseil d'orientation, il laissait passer parfois quelques personnes qui allaient s'initier là, mais il s'assurait qu'il y en avait toujours un ou deux, initiés d'avance, qui étaient sur le conseil d'orientation. Ça risque de ne pas nécessairement se produire présentement, vu que les membres sont nommés par l'assemblée générale.

La dernière recommandation qui m'intéresse, c'est la recommandation, en fait, qui concerne l'article 97 dans la loi, où on donne beaucoup de pouvoir à la direction d'école. Les gens sont beaucoup intervenus là-dessus. Je sais que mes collègues interviendront sur le matériel didactique, mais j'aimerais revenir sur notre recommandation 11 où on demande que les normes et modalités d'évaluation des apprentissages, les règles pour le classement des élèves et le passage d'une classe à une autre demeurent un règlement de la commission scolaire. Parce que, d'après nous, d'abord, il y a une question de cohérence à la grandeur de la commission scolaire. Un parent qui aurait des enfants dans trois écoles et où les règles, par exemple, de passage d'une classe à une autre seraient différentes, n'arriverait pas à comprendre. Je veux dire, on construit une sorte d'univers kafkaïen. C'est déjà très difficile de comprendre un seul règlement, par exemple, des normes et modalités d'évaluation des apprentissages, alors, si tu en as trois à comprendre, c'est certain que tu démissionnes.

C'est la même chose. Ici, vous vous dites: Ce doit être un facteur de statu quo. À Sherbrooke, nous avons une expérience qui est intéressante là-dessus. À Sherbrooke, nous avons adopté l'année dernière, après de longs débats, un règlement sur le classement des élèves où on mettait en pratique le principe de non-redoublement.

Ça n'a pas été facile. Au départ, la majorité, la très grande majorité des parents s'y opposait. Au niveau du comité de parents, on a entrepris à ce moment-là une démarche de réflexion collective et d'information. Nous avons finalement obtenu le changement – en même temps, je finis, je termine – en trouvant une mesure, en tout cas, qui protégeait les parents, qui mettait des exceptions possibles si le parent en faisait la demande. On en est venu à une entente et cela s'est fait par l'intermédiaire du comité de parents, et cela s'est fait parce qu'on était – je termine – au niveau de la commission scolaire. Si on avait essayé de faire ça dans chaque école, je ne pense pas que ce processus de réflexion là aurait été possible, ça aurait demandé trop d'intervenants dans chacune des écoles pour répéter la même chose.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Boudrias. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vous remercie pour votre présentation, mais je voulais vous dire que je ne fais pas la même lecture que vous de mon avant-projet de loi ni du fait que vous dites qu'on évacue les parents. Vous dites même «expulse». Là, je vais prendre le temps de m'expliquer, parce que je pense que ça vaut la peine qu'on le fasse ensemble, parce que c'est l'inverse qu'on fait.

Ou il y a une mauvaise lecture de la loi actuelle et une mauvaise compréhension de la loi actuelle, ou il y a une interprétation de la loi actuelle pour qu'on puisse dire que l'avant-projet de loi vient évacuer et expulser les parents. Je vais vous faire une petite démonstration dans ce sens-là, ce qui n'enlève pas le fait, là, que j'ai déjà dit tout à l'heure et que je vous répète – je pense que vous allez être assez satisfaits de cela aussi – qu'on voit réapparaître dans la loi un forum où les parents pourront se retrouver, discuter, faire des propositions, qui viendra éclairer les parents membres du conseil d'établissement. Je pense que vous avez entendu ça tout à l'heure et j'ai l'impression que ça doit tomber dans des oreilles accueillantes, ce que je dis là, bon.

Mais je vais reprendre la loi actuelle. La loi actuelle, par rapport au conseil d'orientation, qu'est-ce qu'elle dit? Elle dit: «Le conseil d'orientation détermine les orientations de l'école et donne son avis sur les mesures propres à assurer leur réalisation et leur évaluation.»

L'avant-projet de loi dit: «Le conseil d'établissement détermine les orientations et le plan d'action de l'école et voit à leur réalisation et à leur évaluation, conclut une entente avec un autre établissement, délègue temporairement un ou plusieurs pouvoirs à la commission scolaire.»

Ensuite, quand on revient au conseil d'orientation qui approuve la programmation qui nécessite un changement aux heures d'entrée et de sortie des élèves ou un déplacement de ceux-ci à l'extérieur des locaux de l'école... C'était le seul pouvoir du conseil d'orientation, alors que là on en donne beaucoup plus au conseil d'établissement où siègent les représentants des parents qui, dans ma tête, pouvaient déjà se donner un outil, qui était un comité de parents tel que vous les connaissez maintenant, mais, comme ça n'apparaît pas dans la loi...

Ça ne me dérange pas de le réintroduire parce que je le voyais comme ça. Je m'imaginais que les parents allaient pouvoir, avec l'assemblée générale des parents, les consulter, les rencontrer, alors, pour moi, disons que je n'ai aucun problème avec cette approche-là, mais le conseil d'orientation n'avait pas de pouvoir autre que celui d'être consulté, tandis que là, on dit formellement: Les parents vont être là où se prennent un certain nombre de décisions et vont donc être sur le conseil d'établissement. Alors, c'est pour ça que je ne vous suis pas sur certains aspects, vous comprenez? Peut-être que c'est une mauvaise interprétation.

Et je suis revenue aux articles 36 et 37 tels qu'ils se lisent maintenant et tels qu'ils se liront dans l'avant-projet de loi sur le projet éducatif. Alors, je reprends l'article tel qu'il se lit dans l'actuelle loi. On dit: «Le projet éducatif de l'école est élaboré, réalisé et évalué périodiquement avec la participation des élèves, des parents, des enseignants et des membres du personnel de l'école et de la commission scolaire.»

L'article 36 actuel dit ceci: «Elle réalise – on parle de l'école – sa mission dans le cadre d'un projet éducatif élaboré, réalisé et évalué périodiquement avec la participation des élèves, des parents, des enseignants et des autres membres du personnel de l'école, des représentants de la communauté et de la commission scolaire.» Nous disons exactement la même chose dans la loi, dans l'avant-projet de loi. Donc, on ne modifie pas, à cet égard, le fait que le projet éducatif de l'école soit élaboré sur les mêmes bases que maintenant. On va plus loin cependant dans le conseil d'établissement.

Donc, en ce sens-là, je comprends que, parce que dans l'avant-projet de loi on n'a plus le conseil d'orientation ni le comité de parents, vous ayez cru que c'est parce qu'on ne voulait plus qu'il y ait d'instances pour aller chercher le point de vue des parents, ce n'est pas notre objectif. Il faut être clair, je vais le dire ad nauseam, jusqu'à la fin de la commission s'il le faut: Je suis très confortable avec ça. Au contraire, c'est ça que je veux. Alors, je serais complètement incohérente si j'évacuais les parents. On se comprend? Et, moi, c'est important de vous dire ça parce que je trouve que, sans ça, on part sur de mauvaises bases quant à la perception qu'on a des choses. D'accord? Ça, c'est la première chose.

Et, le conseil d'établissement, il n'est pas un conseil d'administration au sens où on trouve un conseil d'administration dans quelque institution que ce soit. Le conseil d'établissement, on lui confie des responsabilités qui sont de l'ordre des orientations pédagogiques de l'école. On dit: Approuver les modalités d'application du régime pédagogique, approuver l'orientation de l'enrichissement et de l'adaptation des programmes d'étude et l'élaboration de programmes locaux, approuver la répartition du temps alloué à chaque matière. Ça, ça l'est, le projet éducatif sur lequel, je crois, les parents doivent avoir un droit de regard. Et c'est ce qu'on retrouve. Le reste est vraiment accessoire par rapport au coeur du projet de loi, de l'avant-projet qui est ça. Alors, je ne sais pas si ça peut vous rassurer, dans un sens, et répondre à vos appréhensions.

(17 h 30)

Puis, par ailleurs, dans votre mémoire, à un moment donné, vous nous dites – je reprends un exemple – à la page 8: «La décentralisation excessive – c'est votre titre. Le choix du matériel didactique. Les modalités d'évaluation des apprentissages et les règles pour le classement des élèves sont toutes des questions éducatives sur lesquelles les parents doivent avoir un droit de regard.» On est d'accord? Mais, après ça, vous ajoutez: «Cependant, on veut qu'il y ait une politique de la commission scolaire puis qu'il y ait des règlements.» Là, vous me mettez dans une situation un peu difficile. «Oubedon», je le confie à la commission scolaire – excusez mon «oubedon» – ou je l'édicte par règlement, ou je le confie aux parents. Alors, c'est l'un ou l'autre, là.

Au conseil d'établissement, c'est sûr que le conseil d'établissement est actuellement formé pour moitié de parents et de représentants de la communauté. Ça, vous faites des recommandations, on va les regarder comme il faut. Comme c'est un avant-projet de loi, c'est ça l'avantage, je ne suis pas fermée à ce qu'on me propose des changements; au contraire, c'est pour ça qu'on est là, on essaie de le bonifier ensemble et de l'améliorer. Mais j'ai de la difficulté à vous suivre là-dessus. Je vous le dis, là, très simplement et très franchement, parce que c'est l'esprit même de ce que je veux faire, que de donner plus d'espace aux parents.

Le Président (M. Paré): M. Boudrias.

M. Boudrias (Gilles): Je vais répondre et après je vais me faire discret pour donner l'occasion aux autres membres de parler.

Mme Marois: D'accord.

M. Boudrias (Gilles): En ce qui concerne l'expulsion des parents, nous-mêmes nous avons hésité sur le mot. On a cherché un autre mot et on n'en a pas trouvé. Nous nous basons essentiellement sur le nombre de parents. Jadis, c'est revenu beaucoup ça. Une trentaine de parents pouvaient participer au comité d'école et au conseil d'orientation. À Sherbrooke, moi, j'ai été longtemps dans une école secondaire où il y avait une liste d'attente au niveau du comité d'école. On avait nos 25 parents et il y avait des gens qui attendaient. Il y a présentement une autre école dont on me parlait où les parents négocient entre eux...

Mme Marois: Ne nous privons pas de ça.

M. Boudrias (Gilles): ...le nombre de membres. Alors, moi, je me dis: Il faut trouver un mécanisme qui va ouvrir officiellement la porte aux parents qui ont envie de participer, d'être des partenaires de l'école et qui n'en ont pas la possibilité. Quand on disait ça, c'était en termes, je vous le disais tout à l'heure, de capacité d'influence des parents. Quand les parents ne sont pas suffisamment nombreux, surtout que les parents du conseil d'établissement sont isolés, à ce moment-là, d'après nous, il y a expulsion des parents.

En ce qui concerne le projet éducatif, tout ce que nous demandons... Dans l'autre, il était un peu plus défini. Dans l'article 37, je pense, on ajoutait une sorte de définition ou de description un peu du projet éducatif, et là, ce qu'on demande – pour nous, là, c'est le contrat avec les parents d'une certaine façon – c'est qu'il soit redéfini, mais ce n'était pas un point sur lequel on mourait là, mais c'est parce que les mots mêmes «projet éducatif» n'apparaissent plus, je pense, qu'une seule fois...

Mme Marois: Oui, oui, ils apparaissent encore.

M. Boudrias (Gilles): Ils apparaissent, mais une seule fois...

Mme Marois: Ha, ha, ha! Ah, on peut l'écrire deux fois!

M. Boudrias (Gilles): ...dans la loi et il n'est pas défini.

En ce qui concerne les parents versus la commission scolaire, notre expérience à Sherbrooke, c'est que le lieu où les parents sont le plus influents, parce que c'est le lieu politique, bien c'est auprès du conseil des commissaires, de sorte qu'en envoyant le pouvoir sur ces questions-là uniquement sur le directeur d'école, pour nous, ça a un peu l'effet de diviser pour régner. Les parents sont moins puissants chacun séparé dans leur école.

L'autre chose que l'on craint, c'est une espèce d'incohérence à la grandeur de la commission scolaire parce que les politiques vont être différentes d'une école à l'autre. Ça va être très difficile. Le président du comité de parents qui reçoit un téléphone, par exemple, d'un président de comité d'école qui veut être éclairé... À Sherbrooke, il y a, attendez un peu, 44 écoles, comment voulez-vous que je connaisse les règles, les normes, les modalités d'évaluation des apprentissages de chaque école et que j'aide ce parent-là? Et là je me dis: il faut absolument qu'il y ait une cohérence d'ensemble dans les commissions scolaires.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Boudrias. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. M. Boudrias, on voit que vous avez un certain vécu des fonctionnements des conseils d'orientation, des comités d'école, et j'imagine que c'est la même chose pour les gens qui vous accompagnent, par les remarques que vous avez faites. En tout cas, moi, j'ai été dans les écoles, pas aussi longtemps que vous, mais j'y allais à titre de commissaire et je voyais bien des fois ce qui se passait entre la dynamique, entre la direction d'école, les enseignants et les parents. Ce n'était pas toujours évident. Le pouvoir d'influence dont vous parliez tantôt, il n'était pas toujours évident.

Ce qui semble problématique à mes yeux là... Je ne sais pas si la ministre ne devrait pas envisager la possibilité d'avoir des réunions avec des comités de parents ou la Fédération des comités de parents de la province de Québec pour bien cerner ce sur quoi les parents voudraient pouvoir intervenir à l'intérieur du conseil d'établissement. Ce n'est pas clair. Ce n'est pas ce que vous nous présentez là, mais j'ai de la misère à saisir, moi, quand vous dites: On veut une place prépondérante et on est les premiers maîtres... «...partant du principe que les parents doivent toujours demeurer les premiers maîtres d'oeuvre de l'éducation de leur enfant, vise à donner aux parents une place prépondérante.» Mais, par la suite, vous nuancez ça par rapport à ce que ça ne devrait pas être.

Je ne le sais pas, je lance ça à la ministre de l'Éducation, parce qu'il n'est pas clair exactement ce sur quoi les parents veulent intervenir, mais, une chose est certaine cependant, c'est que les parents, par rapport aux structures qui existent actuellement: comités d'écoles, conseils d'orientation, et lorsqu'on dit qu'on va se retrouver avec sept membres au niveau d'un conseil d'établissement, ça ne semble pas faire le poids par rapport à ce que nous avons actuellement comme leviers pour les parents.

Je ne sais pas si vous partagez ce point de vue là, mais ça a été dit par d'autres comités de parents qui vous ont précédés au cours des deux dernières semaines. Et toujours, le réflexe, c'est d'avoir le même réflexe que vous: il faut augmenter le nombre de parents au niveau du conseil d'établissement, il faut au moins s'assurer que ça soit un parent qui soit le président du conseil d'établissement. On sent le malaise de la part des parents de dire: On est heureux, on est en accord avec le principe de la décentralisation, mais, par rapport au discours tenu par le gouvernement de dire «on fait une plus grande place aux parents», ça ne semble pas résister à l'analyse, à mon point de vue.

Là où il y a une plus grande place, c'est peut-être pour le conseil d'établissement, mais pas nécessairement pour les parents. Et même si vous vous donnez un outil comme un comité consultatif, vous avez un comité consultatif qui donne un mandat, par exemple, aux sept représentants qui vont siéger au conseil d'établissement. Les sept représentants vont au conseil d'établissement, là où il y aura des débats, et puis par la suite on sent l'expertise du directeur ou de la directrice d'école avec l'expertise des enseignants et les débats qui, par la suite, s'enclenchent, où certains directeurs d'école, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, vont être le centre d'information.

Et les études américaines nous le démontrent, celui qui sort gagnant de tout ce processus de décentralisation, c'est le directeur ou la directrice d'école, et les commentaires étaient à l'effet que les parents, des fois, sentent qu'on leur confie le rôle d'être informés des décisions qui vont être prises, et puis, par la suite, qu'ils n'auront qu'à estampiller les décisions prises par l'équivalent du conseil d'établissement. Je ne sais pas comment vous réagissez par rapport aux commentaires que je formule, mais...

M. Boudrias (Gilles): Comme je ne veux pas donner l'impression d'être la seule personne, je vais laisser la parole à mes collègues.

M. Ouimet: ...j'ai l'impression qu'il y a un malaise par rapport à... Vous ou les gens qui vous accompagnent.

Le Président (M. Paré): M. Bergeron.

M. Bergeron (Rémy): Oui. Je peux peut-être répondre tout simplement en indiquant que globalement, en tout cas, ce qui nous semble être inconfortable pour les parents, en termes d'implication pour les parents, il y avait comme deux inconforts: il y avait une question de nombre, effectivement, parce qu'on voyait dans le projet de loi, avant que Mme la ministre ne nous annonce qu'elle était très ouverte à l'institution d'un forum dans la loi, qu'on avait un problème de concentration qui nous semblait très malveillant.

Concentrer le pouvoir des parents, même si, à la limite, il peut consulter, à cinq, à sept parents seulement dans une école, on trouvait que c'était peut-être un petit peu dangereux, étant donné que ça limite quand même pas mal le pouvoir entre quelques personnes seulement. Donc, ça, c'était un premier inconfort qu'on avait. Il est réglé en partie si, effectivement, on nous assure d'un comité de consultation ou d'un forum quelconque qui nous permettra d'agrandir le cercle, comme on dit, d'influence, en disant: Bon, bien, on va aller chercher 25 parents maintenant; donc, l'information et la consultation va se faire sur 25 parents.

Effectivement, on a encore un inconfort parce que, si on n'augmente pas la représentation au sein du conseil d'établissement, si on ne donne pas une majorité aux parents, si on ne s'assure pas que le quorum est toujours fait à partir du nombre de parents, donc d'une majorité de parents en tout temps et qu'on ne donne pas la présidence à un parent, on se retrouve avec le même inconfort. On a peut-être effectivement une base de 25 parents de consultés, mais on a quand même encore seulement cinq, six ou sept parents qui viennent intervenir au conseil d'établissement.

Je sais que la ministre a un inconfort face à augmenter la représentation des parents au conseil d'établissement suite aux représentations des syndicats d'enseignants, particulièrement, je pense. Il faut aussi prendre en compte que ce n'est peut-être pas mieux non plus de laisser un peu trop de pouvoirs à des profs, des professeurs qui sont d'abord là avec des intérêts corporatistes. Je pense que ce n'est pas le cas des parents qui vont siéger aux conseils d'établissement; on est là d'abord comme des parents qui ont à coeur l'éducation des enfants, et on ne peut pas nier que les professeurs, qui se retrouvent généralement en conseil d'orientation ou en conseil d'établissement...

(17 h 40)

M. Ouimet: Le délégué syndical.

M. Bergeron (Rémy): ...ont des intérêts corporatistes forts.

M. Ouimet: Je vous interromps, c'est souvent le délégué syndical qui est là, hein? Souvent.

M. Bergeron (Rémy): Sans que ce soit nécessairement un délégué syndical, il y a toujours des tendances à d'abord vouloir faire profiter quand même l'ensemble des professeurs de certaines conditions. Et ça, je pense que c'est aussi très dangereux. Donc, je pense qu'il y a ce revers de médaille aussi qui est important à prendre en compte.

L'autre élément qui nous rendait inconfortables, c'est... Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas avoir de pouvoir là-dessus, ce n'est pas parce qu'on ne veut pas être consultés là-dessus, au contraire, mais on considère que le meilleur canal de consultation pour certains éléments, et particulièrement des éléments où on demande une certaine cohérence en termes de commissions scolaires, donc les règles de passage d'une classe à une autre, les méthodes d'évaluation, le choix du matériel pédagogique, pour éviter qu'on ait des écoles à deux vitesses, des écoles où on réclame 200 $ aux parents pour acheter du matériel pédagogique haut de gamme et d'autres écoles où on ne peut pas se le permettre, donc où il y aura deux vitesses de croisière, pour éviter ça, il faut absolument que la commission scolaire, au niveau de son conseil des commissaires, soit en mesure d'établir des règlements et des politiques, et on pense que l'influence des parents peut se faire là aussi.

J'ai une expérience de cinq ans comme commissaire-parent et je pense qu'à deux commissaires-parents avec 20 000 parents derrière, parce qu'à notre commission scolaire, c'est 20 000 parents, on avait suffisamment d'influence pour faire changer bien des choses. Je prends comme exemple la politique de non-redoublement qui, au départ, ne nous satisfaisait pas et où on est allé chercher des garanties qui ont réconforté les parents, ce qui fait en sorte que maintenant on est une des seules, je pense, «la» seule commission scolaire au Québec où on essaie, on tente d'élaborer une politique où on évite le redoublement de nos enfants. On est ouvert à ça en autant qu'on est capable de faire notre influence. Mais, au moins, on a une cohérence au niveau de la commission scolaire, ce n'est pas juste une ou deux écoles qui utilisent et qui expérimentent cette chose-là, et je pense que c'est important. Donc, il y a certains domaines – et on les cite comme il faut dans le mémoire – où on pense que c'est la commission scolaire qui doit d'abord donner une politique.

Je peux donner un autre exemple qui est très chaud: les calculatrices graphiques, le matériel pédagogique. On a des problèmes avec les calculatrices graphiques en Math 436.

M. Ouimet: Ah! Voulez-vous prendre votre temps, là? J'aimerais bien entendre celle-là parce que ça a fait l'objet de longs débats au salon bleu.

Mme Marois: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paré): On a eu ça, ce débat-là, ici. Oui. Ha, ha, ha!

M. Bergeron (Rémy): Le problème, c'est qu'on n'est pas capable, même là, même si, chez nous, à la commission scolaire, on a décentralisé tous ces services-là et les budgets aussi, présentement, le problème de décentralisation excessive fait en sorte que les commissaires ne mettent pas leurs culottes et ne décident pas globalement d'imposer quelque part un barème et une norme à leurs écoles secondaires, ce qui fait qu'une école secondaire demande 65 $ pour un type de calculatrice et ça va jusqu'à 150 $ dans une autre polyvalente, dans la même commission scolaire. Nous, on pense que ça n'a pas de sens. Il faut quelque part une commission scolaire et des commissaires qui se tiennent et qui ont le pouvoir d'imposer, même si on décentralise les choses, des normes minimales et des choses qui se tiennent et qui sont cohérentes au niveau d'une commission scolaire.

Mme Marois: Mais les commissaires pourraient le faire.

M. Ouimet: Mme la ministre, j'ai le droit de parole, s'il vous plaît!

Le Président (M. Paré): Excusez. Mme la ministre.

M. Bergeron (Rémy): Ils peuvent le faire, mais ils ne se sentent pas...

Mme Marois: Parce qu'à Québec ils l'ont fait, établir un plafond sur les coûts des matériels scolaires.

Le Président (M. Paré): M. Bergeron.

M. Bergeron (Rémy): Ce qu'il faut comprendre, c'est que chez nous on a expérimenté la décentralisation, Mme Marois, ce qui fait que, dans cet effort de décentralisation, les commissaires ne se sentent plus le pouvoir de le faire parce qu'on a justement été peut-être trop à l'excès. Et, ce qu'on dit dans le mémoire, c'est: Faites attention à votre décentralisation.

Mme Marois: Mais les parents pourraient le faire. Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Pauline, laisse-moi parler!

Le Président (M. Paré): Mme la ministre! M. Bergeron, d'autres choses en complémentaire?

M. Ouimet: Sur le problème de la calculatrice, il y a peut-être des choses que vous ne savez pas. J'ai questionné la ministre pendant six jours, au salon bleu de l'Assemblée nationale, sur un programme d'études qui, à mon point de vue, obligeait l'achat d'une calculatrice fort dispendieuse. On avait le modèle puis on avait tout le reste, puis on a regardé les manuels, les manuels n'ont pas encore été approuvés, je ne sais pas trop pourquoi. J'ai hâte que la ministre les approuve, puis on va resituer le débat.

Est-ce qu'il y a obligation de votre commission scolaire ou est-ce que les élèves se sentent obligés d'avoir une calculatrice, qu'elle soit à 65 $ ou à 150 $, pour pouvoir atteindre les objectifs fixés dans le programme d'études?

M. Bergeron (Rémy): Je vais laisser parler Mme Berthold.

Le Président (M. Paré): Mme Berthold.

Mme Berthold (Claire): Oui. Je vous répondrai, étant moi-même mère d'une fille en secondaire IV qui a eu à se procurer des calculatrices, qu'il n'est absolument pas question de ne pas avoir de calculatrice.

M. Ouimet: Ah, bon!

Mme Berthold (Claire): Et j'irais même jusqu'à dire qu'il y a des élèves qui ont choisi de ne pas faire le cours de Math 436, et donc se couper beaucoup de voies d'avenir, parce que les parents n'avaient pas les moyens de se procurer cette calculatrice.

M. Ouimet: Je suis content de vous entendre, madame. J'ai plaidé ça pendant six jours à l'Assemblée nationale et je me suis fait dire que ce n'était pas vrai.

Mme Berthold (Claire): Ah, c'est très vrai.

M. Ouimet: Vous êtes la preuve, là. Hé, le dossier n'est pas mort, Mme la ministre. Le dossier n'est pas mort!

Le Président (M. Paré): Merci, Mme Berthold.

Mme Berthold (Claire): Merci.

Le Président (M. Paré): M. Ouimet, avez-vous d'autres...

M. Ouimet: Je ne voulais pas que ça dévie là-dessus, je sais que c'est un problème, là, puis c'est un problème à travers la province. Il était théorique l'année passée...

Mme Berthold (Claire): Ah, il est très, très pratique.

M. Ouimet: ...et il est pratique cette année.

Le Président (M. Paré): M. Ouimet, est-ce que vous permettez une question du président?

M. Ouimet: Ah, bien sûr.

Le Président (M. Paré): À M. Bergeron. Vous avez une cinquantaine d'écoles; vous disiez, tout à l'heure, que vous avez une quarantaine d'école plus les centres de formation professionnelle d'éducation aux adultes. Trouver à peu près 100 parents, est-ce que ça va être difficile pour vous ou pas, ou vous pensez que la représentation au niveau des conseils d'établissement... Si vous avez un nombre d'écoles de 50, vous allez avoir au moins 100 parents d'engagés dans le...

M. Bergeron (Rémy): On pense en trouver même plus que 100. C'est-à-dire que, si on a un conseil d'établissement par école, nous, si on nous donne une représentation majoritaire, ça peut représenter 450 parents sur les 20 000. Mais présentement, c'est ce qu'on vit de toute façon. Dans nos comités d'école, il n'y a jamais moins de 12 à 15 parents dans une école primaire. Dans les écoles secondaires, comme on le disait, la plupart sont complets à 25 parents, comme comités d'école, avec des listes d'attente. On a toujours une représentation majoritaire en conseil d'orientation et on n'a jamais eu de difficulté à combler nos besoins.

Je pense que c'est aussi une responsabilité du comité de parents de chaque commission scolaire. Il y a peut-être des commissions scolaires où les difficultés sont plus grandes. Chez nous, je pense qu'on a un comité de parents qui est extrêmement agressif, dans le sens qu'il est motivé à informer, à former les parents et à faire du recrutement actif. À ce niveau-là, on n'a aucun problème d'enrichissement au niveau de nos comités.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Marquette.

M. Boudrias (Gilles): Je voudrais juste préciser une petite chose.

Le Président (M. Paré): Oui.

M. Boudrias (Gilles): Dans les écoles secondaires de deuxième cycle, il n'y a pas nécessairement les 25 parents. Dans les écoles secondaires de premier cycle, souvent les comités de parents sont remplis; les comités d'école, excusez. Au deuxième cycle, les parents, des fois, commencent à démissionner un petit peu, c'est-à-dire qu'ils laissent un peu plus la liberté à leur jeune, mais il y a encore des parents suffisamment pour faire un comité d'école intéressant.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Remarques finales?

Le Président (M. Paré): Oui.

M. Ouimet: Alors, remercier le Comité de parents de la commission scolaire catholique de Sherbrooke de la qualité de vos interventions, on sent que ça s'appuie sur une réalité et un vécu importants. Et je sais que vous avez eu à analyser l'avant-projet de loi avec les moyens du bord, mais je vous dis: Félicitations, vous avez fait un excellent travail. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vous remercie à mon tour pour vos interventions, ça rejoint des préoccupations qu'ont d'autres comités de parents. Je suis sensible aux représentations que vous faites, on va essayer de voir comment on peut en tenir compte pour respecter l'esprit de l'avant-projet de loi qui est vraiment qu'au contraire vous occupiez toute la place qui vous revient en tout respect aussi, bien sûr, pour les enseignantes et les enseignants qui ont, à titre de professionnels, évidemment une responsabilité importante dans la formation de nos enfants, mais ce qui n'exclut pas que les parents soient des partenaires à part entière de l'école. Alors, merci encore une fois.

Le Président (M. Paré): M. Boudrias.

M. Boudrias (Gilles): Merci.

Le Président (M. Paré): Conclusion?

M. Boudrias (Gilles): Ah, je veux juste remercier, moi aussi, la commission. Je pense que c'est intéressant de pouvoir se faire entendre à ce niveau-là aussi. Alors, je n'ai pas de conclusion particulière à ajouter.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Paré): Merci, M. Boudrias, merci à votre délégation. J'ajourne les travaux de la commission au mardi 16 septembre, à 9 heures.

(Fin de la séance à 17 h 48)


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