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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, September 10, 1997 - Vol. 35 N° 40

Consultation générale sur l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique


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Table des matières

Auditions


Intervenants
Mme Jeanne L. Blackburn, présidente
M. Jean-Guy Paré, président suppléant
Mme Pauline Marois
M. François Ouimet
M. Lawrence S. Bergman
Mme Hélène Robert
M. Normand Poulin
M. Yves Beaumier
*M. Marcus Tabachnick, Commission scolaire Lakeshore
*Mme Paulette S. Rancourt, Commission scolaire Prince-Daveluy
*Mme Diane Grandmaître, idem
*M. Charles-Henri Lecours, Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin
*M. André Roy, idem
*M. Georges Pelletier, idem
*M. Pierre Bégin, idem
*M. Jules Caron, idem
*M. Michel Pallascio, CECM
*M. Giuliano D'Andrea, The Greater Québec Movement
*M. Deepak Awasti, idem
*M. Richard Walsh Smith, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures sept minutes)

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre, Mme et MM. les députés, la commission de l'éducation reprend ses travaux ajournés hier. M. le secrétaire, est-ce que nous avons quorum?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le secrétaire. Donc, je déclare la séance de la commission de l'éducation ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à une consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.

Est-ce qu'on a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Poulin (Beauce-Nord) remplace M. Parent (Sauvé).

La Présidente (Mme Blackburn): Alors, la bienvenue à M. Poulin de Beauce-Nord. L'ordre du jour, je vous le donne immédiatement. Le premier organisme que nous rencontrerons, Commission scolaire Lakeshore; à 9 h 45, Commission scolaire Prince-Daveluy; à 10 h 30, Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin; à 11 h 15, Commission des écoles catholiques de Montréal; et, à midi, The Greater Québec Movement.


Auditions

Alors, sans plus tarder, j'inviterais les représentants de la Commission scolaire Lakeshore à prendre place à la table des témoins. Cette commission scolaire est représentée par M. Tabachnick – si je prononce bien – président et porte-parole de la commission scolaire. Bonjour, monsieur. Bonjour, mesdames. Alors, M. le président, je vous inviterais à présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Tabachnick (Marcus): Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Je vous rappelle brièvement les règles. On souhaite que votre présentation se fasse à l'intérieur d'une dizaine de minutes, et suivra un échange avec les parlementaires membres de la commission. C'est à titre indicatif, il va de soi. Puisque vous êtes invités, donc c'est à vous la parole.


Commission scolaire Lakeshore

M. Tabachnick (Marcus): Merci, Mme la Présidente. Vous avez bien prononcé mon nom. C'est M. Tabachnick. Je vous présente, à ma gauche, Mme Ann Cumyn, vice-présidente du conseil scolaire et, à ma droite, Mme Catherine Prokosh, la directrice générale.

Mme la Présidente, Mme la ministre et membres de la commission sur l'éducation, le Conseil des commissaires de la Commission scolaire Lakeshore apprécie l'occasion qui lui est donnée d'exprimer son opinion sur l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Le Conseil comprend 19 commissaires, deux commissaires représentant les parents et deux commissaires représentants de la minorité, de même que la directrice générale de la commission scolaire. Le directeur général adjoint et le secrétaire général assistent régulièrement aux réunions du Conseil, et toutes ces personnes ont contribué à notre mémoire.

(9 h 10)

La Commission scolaire Lakeshore dispense présentement l'enseignement en anglais à plus de 10 000 élèves dans 17 écoles primaires et cinq écoles secondaires et l'enseignement en français à plus de 2 800 élèves dans cinq écoles primaires et une école secondaire. La Commission scolaire Lakeshore bénéficie d'un très haut taux de participation des parents à la vie de ses écoles. Les comités d'école ont rarement moins de 10 membres et le nombre moyen de parents membres des conseils d'orientation est de neuf. De plus, il existe un réseau d'associations foyer-école très actif dont les comités exécutifs se réunissent régulièrement. Les parents travaillent à la bibliothèque des écoles, aident les enseignants dans les classes et assurent une présence constante à l'infirmerie des écoles secondaires. Nous estimons que plus de 3 500 parents sont impliqués d'une manière d'une autre, de façon régulière, dans la vie de nos écoles.

La ministre de l'Éducation doit être félicitée de vouloir ainsi permettre une plus grande implication de la communauté dans la conception de l'école de quartier. La Commission scolaire Lakeshore endosse ce concept. Cependant, elle a de sérieuses réserves quant à certains détails de l'implantation de cette réforme. Nous aimerions attirer votre attention sur quelques-unes de nos principales préoccupations.

Premièrement, au niveau de l'échéancier, ce n'est pas seulement notre opinion, mais une opinion que nous entendons souvent exprimée dans notre milieu à l'effet que la ministre tente d'en faire trop en même temps. Les parents craignent que les bouleversements créés par le passage aux commissions scolaires linguistiques auront un impact jusque dans la salle de classe. Plusieurs employés devront s'adapter à de nouveaux syndicats et de nouveaux contrats de travail. Les modifications aux programmes d'études commenceront également à ce moment-là. Le système peut-il vraiment absorber en même temps un tel déplacement de responsabilités dans l'éducation de l'élève? Nous recommandons fortement que la ministre considère de reporter d'un an la mise en place des conseils d'établissement de l'école.

En ce qui concerne les parents, la diminution du nombre de parents officiellement impliqués dans la conception de l'école reste un problème. À cet égard, deux points doivent être clarifiés.

The Lakeshore School Board has a high success rate, very often leading the province. We believe that a major factor in this success is the involvement of parents in our schools. With the possible involvement of some 30 parents – and in many cases more than 30 parents – through the school committee, orientation committee and home and school associations, they form a community-wide network of parents, and a large number of those parents who are not actually involved will know someone or do know someone who is on the school committee or one of the other committees, and by their knowledge, they feel involved. The great reduction in the number of parents involved will then leave many of those parents feeling isolated. Consequently, when difficult decisions have to be made, there is a danger that the parents will become polarized. We believe that it should be the school board's responsibility to make the difficult and often political decisions.

Nous sommes également inquiets du fait qu'un si petit nombre de parents au conseil d'établissement permette la prise de contrôle de l'école par un groupe d'intérêts spéciaux. Par exemple, un petit groupe de parents peut être d'avis que l'intégration des élèves handicapés ou en difficulté d'apprentissage va à l'encontre de leur désir d'avoir une école d'élite. Ils peuvent même décider de signer une entente avec une autre école, peut-être en dehors de la communauté locale, pour ces services. Dans ce cas, qui sera responsable pour les droits et les besoins de ces élèves? Étant donné la politique d'élection, il sera possible à ce petit groupe de ne faire élire que des parents sympathiques à leur cause. Avec un plus grand nombre de parents au conseil d'établissement, il y a plus de chances d'avoir un meilleur échantillonnage des opinions et une meilleure représentation des parents. Même sans égard au nombre de parents au conseil d'établissement, il faut un processus de mise en candidature et d'élection qui garantisse la publication des noms des candidats avant l'assemblée générale des parents.

Au sujet de la pédagogie, les amendements proposés parlent très peu du rôle de la commission scolaire du point de vue pédagogique. S'il est de la responsabilité de la commission scolaire d'assurer que l'école suive effectivement le régime pédagogique, alors la commission scolaire doit engager des personnes ayant la compétence nécessaire en pédagogie pour évaluer la performance de l'école. On doit se rappeler que la performance ne peut être évaluée que sur le résultat.

It is expected that there will be changes in the curriculum beginning next year. Who will provide the support to the schools during the implementation stage of each aspect of this new curriculum? If it is left to the schools, there will inevitably be differences in the quality of education from school to school. It is our opinion that the school board must continue to play a major role in organizing professional development, especially in the area of changes to the mandatory curriculum. This pedagogical role of the school board needs to be affirmed in the amendments to the Education Act.

En ce qui concerne la responsabilité, il est important que l'organisme qui détient l'assurance-responsabilité et le contrôle des actions régies par cette assurance, en particulier la responsabilité de la politique de supervision des élèves, incombe au conseil d'établissement. Si un accident survient à la suite d'un manque dans la politique, les membres du conseil d'établissement pourraient être tenus responsables. Agir de bonne foi ne peut excuser la négligence. Le conseil d'établissement peut signer des contrats au nom de la commission scolaire. Qui est responsable en cas de défaut de paiement du conseil d'établissement? Qui est responsable si le conseil d'établissement s'engage dans des dépenses qui ne justifient pas son budget?

Under the law, it is the school board that holds the liability insurance for the system. It is essential that the school board be able to set limits and oversee any action or policy of the governing board which is covered by this liability insurance.

Au sujet du budget, nous nous demandons si la ministre se rend compte de la complexité de rédiger un budget, tel que l'exige l'avant-projet de loi. Présentement, l'équipe de l'école gère les fonds qui sont alloués à l'école par la commission scolaire. Si ces fonds sont inadéquats, le directeur de l'école peut tenter de négocier avec la commission scolaire pour en obtenir un peu plus. Tout ceci se passe au niveau de l'administration de la commission scolaire. L'équipe de l'école et les membres du personnel, même s'ils ont participé au processus, ne sont pas toujours satisfaits des résultats. Les interventions des parents, jusqu'ici, ont surtout porté sur le montant des frais demandés aux élèves et à la façon de dépenser cet argent.

In the future, the governing board will be responsible for the school's budget and for presenting it to the school board. Will parents now become the focus of lobbying by individual staff members? Who will defend the budget vis-à-vis the school board? How many meetings of the governing board will be required during this process of negotiation? We're not saying that this cannot be done, but it is essential that it begin early and that the ministry not delay in informing school boards of the funds available to them. Regarding the funding to the boards, the minister has given the impression that the proposed amendments will not result in changes in funding from the ministry. However, the amendment to article 472 of the Education Act implies that, in fact, there will be a change. The implications of this amendment need to be explained.

Plusieurs des choix budgétaires disponibles au conseil d'établissement se trouvent dans le domaine de l'approvisionnement. Les achats centralisés sont un moyen pour la commission scolaire de réduire ses coûts. La commission scolaire devrait être encouragée à planifier des stratégies d'achat centralisé et à baser ses allocations aux écoles sur les prix ainsi obtenus.

La grande question de la diversité. Il y a beaucoup d'inquiétude à l'effet que le système proposé conduira à des inégalités dans la qualité de l'éducation. Nous recommandons dans notre mémoire que la commission scolaire puisse établir une politique globale afin d'assurer des normes pédagogiques minimales. Il est important de favoriser la réussite et non de simplement faire face à l'échec après coup.

(9 h 20)

There is however another aspect to this reform that has escaped notice. All schools aspire to having high academic standards, and as you have noted and as you notice the proliferation of academies and of international schools, it is not difficult to imagine that every school will want to have some kind of academic specialty. It is even possible to imagine that every school in one board will want to become, for example, an international school. What powers in the amendments to the act are given to the school board to insure that the needs of all the students in the system are addressed? We believe that the school board must be given the power to take control not only in those instances when the governing body does not carry out its responsibilities properly, but also in cases where the school board's interference is necessary to insure adequate and appropriate service for all students under its jurisdiction.

In conclusion, it is our hope that following these hearings by the parliamentary commission on education the minister will make the appropriate changes to the draft bill, including those suggestions on which there is consensus or near consensus.

Les commissaires de la Commission scolaire Lakeshore n'ont pas d'indices à l'effet que les communautés scolaires aient envie de s'impliquer dans toutes les tâches qui attendent les conseils d'établissement. Nous doutons que la réduction substantielle du nombre de parents officiellement impliqués dans l'élaboration et l'application des politiques de l'école soit approuvée par la communauté des parents. Un changement d'une telle importance ne devrait pas se faire à la hâte, et nous répétons que le report de son implantation est essentiel au succès de l'entreprise. Merci, madame.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le Président. La parole est maintenant à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Alors, merci pour votre présentation et bienvenue à notre commission. Je suis fort intéressée par les propositions que vous nous faites dans votre mémoire. Je vous dirais cependant une remarque générale. D'un côté, vous souhaitez qu'un plus grand nombre de parents soient impliqués, soient engagés, participent au conseil d'établissement – là, vous n'en définissez pas les modalités – mais, en même temps que vous demandez une augmentation de la présence des parents, vous demandez que les pouvoirs que, actuellement, on veut confier et les responsabilités qu'on veut confier au conseil d'établissement soient plutôt confiés à la commission scolaire. C'est le sentiment que j'ai en lisant votre mémoire, parce que je regarde toute la question, par exemple, d'allocation du temps aux matières de base, lorsqu'il y a une possibilité de décision dans ce sens-là, et il n'y en a pas partout parce que – je répète ce que j'ai dit à plusieurs qui sont venus jusqu'à maintenant – c'est évident qu'il y a un curriculum national, hein, on se comprend bien, et on ne pourra pas prétexter qu'on n'aime pas telle matière pour la soustraire de la grille horaire. On se comprend? Nos enfants, dans nos écoles, autant au primaire qu'au secondaire, auront des obligations en ce qui a trait à l'acquisition de connaissances, et, pour celles-là, il n'y aura pas de passe-droit, on se comprend bien? Mais, au-delà de ça, évidemment, il y aura une marge pour déterminer plus de temps à certaines matières, pour enrichir, je dirais, certaines matières, bien sûr.

Ça, nous, nous préférerions le confier à l'école, c'est ça que fait le projet de loi. À partir du moment où il y a ce curriculum national et ces exigences bien claires en termes de connaissances à acquérir et de compétences aussi à acquérir, selon qu'on est au secondaire, bien sûr, ou au primaire, est-ce que vous ne seriez pas d'accord pour que l'on aille dans le sens de l'avant-projet de loi et de confier cette responsabilité et cette prise de décision au conseil d'établissement, surtout dans la perspective où vous souhaitez qu'il y ait plus de parents au conseil d'établissement?

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

M. Tabachnick (Marcus): Mme la ministre, nous ne sommes pas opposés à impliquer les parents dans les décisions de l'école et nous avons souligné dans notre mémoire que nous avons un réseau de plus de 100 groupes que nous consultons régulièrement à ce sujet et sur plusieurs autres sujets. Nous suggérons qu'il y a des décisions qui sont de temps en temps basées sur la politique qui peuvent diviser les parents dans une école, qui peuvent mettre sur une école une sorte de pression qui ne bénéficie pas aux élèves, et ça, c'est un de nos «concerns». En même temps, nous voulons souligner que c'est important que tous les changements impliqués doivent être expliqués plus clairement aux parents parce que, d'après nous autres, ils ne sont pas conscients de toutes les implications des changements en face des parents et nous pensons que ça va prendre un peu plus de temps pour bien comprendre s'ils veulent faire part de ces décisions, comme vous avez mentionnez.

Mme Marois: C'est intéressant ce que vous soulevez là. Plusieurs associations de parents ou comités de parents des différentes commissions scolaires – d'ailleurs, on en a reçu quelques-uns hier et on recevra plus tard la Fédération des comités de parents – suggèrent que, effectivement, on informe les parents, et, moi, je vais aller plus loin que ça, je pense qu'on doit travailler de concert à la formation des parents, dans le sens de leur donner des outils pour qu'ils puissent assumer ces nouvelles responsabilités, prendre en charge ou vivre ces changements en ayant les outils pour le faire. Et, en ce sens, c'est sûrement un élément qu'on va retenir éventuellement, là, soit dans des modifications qu'on apporterait au projet de loi ou dans les faits, dans des programmes et des mesures dans lesquels on s'engagerait avec les parents. Et je pense que, ça, vous avez tout à fait raison, c'est fondamental, surtout lorsqu'on engage un processus comme celui-là qui est assez majeur en termes de changements.

Quant au fait qu'on prenne un peu plus de temps pour le faire, je n'ai pas de problème avec ça, et on verra comment le traduire dans la loi ou dans les décrets qui vont concerner l'application de la loi. Ce qui est certain, c'est que, plutôt que d'empêcher des gens qui voudraient commencer, ce qu'on pourrait faire, c'est qu'on dise: La loi commence à s'appliquer tel jour, et, assez tôt après qu'elle sera adoptée, cependant, il y aura un temps assez long pour la mettre complètement en opération de telle sorte qu'une école, une commission scolaire, un groupe de parents puissent le faire à leur rythme, en autant que, quelque part, il y ait une date de fixée ou qu'il y ait un point d'arrivée où toute la réforme des responsabilités, des partages nouveaux de pouvoirs soit en place. Alors, sur ce, je suis d'accord avec vous. On verra comment le traduire concrètement et, par ailleurs, qu'on partage avec les parents cette nécessité de formation et d'information.

Je vais revenir sur d'autres questions en ce qui a trait à la planification budgétaire.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Vous souhaitez réagir?

M. Tabachnick (Marcus): Non.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Alors, M. le député de Marquette, porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation, la parole est à vous.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, M. Tabachnick, Mme Cumyn, Mme Prokosh. Il y a un principe sur lequel d'autres intervenants... un principe qu'ils ont abordé, c'est le principe que l'égalité des chances en éducation passe par l'inégalité de ressources financières, humaines, etc., un principe qui découle des états généraux sur l'éducation et qui est transcrit dans l'avant-projet de loi de façon à ne pas trop attirer l'attention, mais vous l'avez saisi. C'est dans l'article 472 de l'actuelle Loi sur l'instruction publique qui viendrait changer les règles budgétaires. En d'autres termes, on passerait par un modèle de financement per capita, chaque élève représentant une somme d'argent qui est par la suite allouée à la commission scolaire de façon générale, et on remplacerait ça par un financement qui serait équitable et non discriminatoire. Vous semblez avoir des inquiétudes à cet égard-là. J'aimerais entendre vos inquiétudes parce que c'est un peu le fondement de la transposition du principe «l'égalité des chances passe par l'inégalité des ressources». Si chaque élève reçoit un per capita et que la commission scolaire reçoit un per capita, ça veut dire que tout le monde est placé sur un pied d'égalité, alors que, dans certains milieux, les besoins sont différents par rapport à d'autres milieux compte tenu des indices de défavorisation. Alors, j'aimerais entendre votre point de vue là-dessus. Qu'est-ce qui vous fait peur? Comment aimeriez-vous que ça soit bien balisé?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Tabachnick.

M. Tabachnick (Marcus): La première inquiétude, c'est simplement qu'on ne comprend pas l'implication de cette nouvelle clause, de cette nouvelle façon de donner les mots sur le papier. Je ne sais pas comment, exactement, ça va être mis en vigueur. Comme toujours, il n'y a jamais assez de subventions pour atteindre tous les besoins de notre communauté, mais, je pense, nous comprenons maintenant le système actuel qui existe. Nous ne sommes pas sûrs de ce qui va arriver avec un système basé sur l'égalité et pas discriminatoire. Le problème de répondre à votre question, c'est un grand principe, mais les spécifications, moi, je ne peux pas vous répondre parce que je ne connais pas les résultats de cette clause.

M. Ouimet: En d'autres termes...

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député.

M. Ouimet: ...pour l'équité et la discrimination, chacun peut avoir sa propre interprétation. L'inquiétude que vous avez, c'est, bien sûr, que c'est le gouvernement qui va avoir le mot final dans comment on l'interprète. Pour une commission scolaire comme la vôtre, actuellement, Lakeshore, pour la commission scolaire qui va succéder à la vôtre, la Commission scolaire de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, commission scolaire anglophone, ça pourrait représenter une perte de financement. Est-ce que c'est ça?

(9 h 30)

M. Tabachnick (Marcus): Ça peut arriver. Nous avons maintenant un problème avec les subventions pour les milieux défavorisés. Il existe maintenant des milieux défavorisés dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, mais ils ne sont pas reconnus par le gouvernement ni par le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Alors, c'est non discriminatoire d'adresser les problèmes les plus gros, les plus problématiques, mais il y a une certaine inéquité dans cette sorte de subvention, et nous avons la crainte d'un même système auquel nous aurons à faire face après.

M. Ouimet: O.K.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Ça va, M. le député?

M. Ouimet: Si j'ai le temps pour une autre question.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, une autre question.

M. Ouimet: La question du noyautage, également, des conseils d'établissement, ça refait surface. Plusieurs autres groupes sont venus nous dire qu'il y a un risque, à un moment donné, qu'un groupe d'intérêts tente de prendre le contrôle du conseil d'établissement puis, par la suite, d'imposer sa vision du projet éducatif de l'école en fonction des intérêts qu'il représente. Comment est-ce que, sur le plan législatif, pouvons-nous placer des balises pour éviter ce type de problème?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Tabachnick.

M. Tabachnick (Marcus): Agrandir le nombre de parents qui sont éligibles à s'asseoir sur le conseil d'établissement. Ça rend une plus grande...

M. Ouimet: Représentativité?

M. Tabachnick (Marcus): Oui. Ça va donner un plus grand...

M. Ouimet: Échantillonnage?

M. Tabachnick (Marcus): Oui, échantillonnage de population.

M. Ouimet: O.K. Parfait. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Vous proposez également que les règles présidant l'élection des parents soient mieux circonscrites de manière à assurer une meilleure représentativité.

M. Tabachnick (Marcus): Je n'entends pas votre question.

La Présidente (Mme Blackburn): Vous proposez que les règles régissant l'élection des parents soient mieux établies de manière à assurer plus de transparence et une plus grande démocratisation du système et la publication de la liste des candidats.

M. Tabachnick (Marcus): Oui.

La Présidente (Mme Blackburn): À la lecture, ça m'apparaissait un peu lourd mais intéressant. Je voudrais avoir un commentaire.

M. Tabachnick (Marcus): Non, c'est seulement pour s'assurer que tous les parents savent qui va les représenter. Comme à tout autre niveau des élections, même pour les commissions scolaires, même pour l'Assemblée nationale, il faut avoir une liste des candidats. Ce n'est pas un processus lourd, c'est juste pour s'assurer que tout le monde connaît qui va les représenter.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le président. Il y avait M. le député de Lotbinière. Mme la ministre?

Mme Marois: Oui. Juste une brève question, peut-être, sur la question des budgets et aussi sur cette dernière question de la participation des parents, à laquelle je crois. Et, d'ailleurs, je pense que ceux et celles qui s'opposent, s'opposent au fait qu'on donne plus de responsabilités aux parents. Alors donc, a contrario, j'imagine que c'est parce que je voudrais leur en donner un peu de pouvoirs et de responsabilités. Mais une des craintes qu'ont eue les parents dans certains cas et qu'ils nous ont exprimée, c'est de dire: L'école ne nous rend pas disponibles des locaux ou des ressources pour nous permettre d'exercer nos responsabilités. Par contre, vous, dans votre présentation, vous dites que vous seriez d'accord pour qu'il y ait plus de parents membres du conseil d'établissement et que, en plus, il y ait des listes de publiées, par exemple, pour savoir qui on choisit au conseil d'établissement comme parents. Ça veut dire que, à ce moment-là, vous êtes prêts aussi à rendre disponibles les ressources pour les comités de parents pour assumer cette responsabilité-là. On se comprend bien en ce sens-là?

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. le président.

Mme Marois: Et vous n'avez jamais eu de difficulté avec cette réalité-là?

M. Tabachnick (Marcus): Non.

Mme Marois: D'accord. Bon, sur la question des budgets maintenant. La loi actuelle, elle dit: Il faut une répartition proportionnelle au nombre d'élèves inscrits dans les écoles. Et nous proposons le changement, une répartition équitable et non discriminatoire. Dans les faits, la répartition proportionnelle, on l'a appliquée, mais on a une mesure particulière pour transférer les budgets, par exemple sur les élèves en difficultés d'apprentissage, les fameux EHDAA, les élèves handicapés, etc. Donc, dans les faits, on essaie, par la modification qui est ici, de faire correspondre nos règles budgétaires à la réalité avec laquelle on travaille. Pour s'assurer cependant qu'on ne puisse pas faire n'importe quoi et que la transparence puisse être une règle qui s'applique, on va demander à la commission scolaire de faire connaître par avance les critères qui vont l'amener à décider de la partie proportionnelle – il y en aura une de toute façon, une base – et ensuite le critères particuliers pour reconnaître la différence dans une école ou dans l'autre. Et, en ce sens, à mon point de vue – puis c'est pour ça que je veux vous réentendre sur ça – à mon sens, ça n'amènerait pas les parents à être aux prises avec des choses plus ou moins connues et puis des batailles chaque fois sur leur budget d'école, mais il y aurait des règles assez bien établies et surtout très connues, de telle sorte qu'ensuite le conseil d'établissement puisse faire ses choix compte tenu de cette réalité-là.

Et, par ailleurs, la notion d'équité, être équitable selon la loi, c'est justement pour permettre à des commissions scolaires comme les vôtres qui ont plutôt des écoles et des situations de parents et d'enfants avec, peut-être, un petit peu moins de difficultés, mais qui ont des poches de pauvreté, des milieux où c'est plus difficile... Vous le mentionniez vous-même tout à l'heure parce que vous avez parfois des difficultés à aller chercher les budgets, peut-être, avec les politiques appliquées par le Conseil scolaire sur l'aide aux milieux en difficulté. Bien, ça permettrait aux commissions scolaires d'avoir des outils pour faire ces choix-là. Est-ce que ça ne vous apparaît pas quelque chose qui peut être intéressant pour la commission scolaire?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Tabachnick.

M. Tabachnick (Marcus): Oui, Mme la ministre. Nous n'avons pas peur de comment nous allons appliquer la loi. Ha, ha, ha!

Mme Marois: Bon. Ha, ha, ha! C'est pour ça que ça ne m'inquiète pas, moi non plus. Ha, ha, ha!

M. Tabachnick (Marcus): Notre inquiétude, c'est au niveau gouvernemental.

Mme Marois: Alors donc, dans ce sens-là, ça vous donnerait un moyen de plus.

M. Tabachnick (Marcus): Oui, et nous opérons toujours dans ce sens, mais ça donne la possibilité au gouvernement de faire regard à tout le système et de choisir des communautés peut-être regardées comme plus riches et de faire quelque chose avec le budget qui va diminuer le montant du budget parce que c'est pensé par la ministre qu'une communauté peut supporter ses propres écoles elle-même. Alors, au niveau des commissions scolaires, nous allons l'appliquer en bonne foi, certainement.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien.

Mme Marois: Notre objectif est aussi d'éviter, justement, ces écoles à deux vitesses, d'éviter qu'on gomme, qu'on camoufle des situations difficiles dans certaines situations et que la commission scolaire, qui est à même de les voir et de les analyser, ces situations-là, puisse avoir, de par la loi, le pouvoir de faire des choix.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, Mme la ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci. Mr. Tabachnick, I'm always concerned when one body or one group of persons can contract in the name of another group of persons, and you brought an interesting point in reference to article 85 when you show a concern that the governing board can contract in the name of the school board, and you're concerned about the efficiency of costs. But also, do you have any other concerns that it could be an abuse of a power whereby one can contract in the name of the other although it has to be a contract within the budgetary limits? But are there other concerns that you have with article 85?

M. Tabachnick (Marcus): I guess our concern is for the ultimate responsibility, and where does that lie. Normally, when two parties contract... And I'm not a lawyer, and I wouldn't pretend to speak for one, but when two parties contract, those who sign the contract are responsible for what they sign. What's being said in the law here is that a party can contract on behalf of another and obligate it to whatever conditions, and some of our concern includes who they may hire to carry out these services. They may or may not meet minimum standards as required by the school board or as required by the Education Act. So we believe that in terms of contracting the school board has the ultimate liability. It should be the school board responsible for entering into contract.

M. Bergman: Thank you.

(9 h 40)

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député de Lotbinière.

M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Mesdames, monsieur, bienvenue. À la page deux de votre mémoire, vous souhaitez une prolongation de l'échéancier d'implantation. Pourquoi? Qu'est-ce qui vous inquiète?

M. Tabachnick (Marcus): C'est pour donner aux parents l'opportunité de bien comprendre tout ce qui est impliqué dans ces changements et leur rôle dans ces changements. Nous pensons que, en face de tous les autres changements dans le système d'éducation, ils n'ont pas, déjà, le temps de bien comprendre ce qui va arriver avec ces changements.

M. Paré: Vous proposez quoi comme échéancier?

M. Tabachnick (Marcus) : Un an de plus.

M. Paré: Un an?

M. Tabachnick (Marcus): Oui.

M. Paré: Deuxième précision. À la page trois, vous parlez du statut légal de l'école et vous voulez qu'il soit clarifié. Est-ce que vous pouvez préciser un peu votre pensée là-dessus?

M. Tabachnick (Marcus): Bon, ça tombe sur presque la même question que M. Bergman a posée. C'est que c'est la commission scolaire qui a finalement la responsabilité pour toutes ses écoles pour tous les contrats entre les commissions scolaires, les écoles et d'autres personnes, et nous pensons qu'il faut que cette responsabilité reste avec la commission scolaire. Maintenant, l'école-individu n'a pas de statut civil. C'est la commission scolaire qui a le statut civil.

M. Paré: Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. D'autres questions? M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Brièvement et toujours sur l'article concernant les règles budgétaires, est-ce que ça vous rassure lorsqu'on vous dit que la règle proportionnelle n'est pas claire présentement et que la règle de l'équité et de la non-discrimination va être plus claire? Est-ce que, ça, ça vous rassure?

M. Tabachnick (Marcus): Que ça va être clarifié?

M. Ouimet: Oui. Lorsqu'on dit qu'on passe d'un changement où, actuellement, c'est une règle proportionnelle avec des règles budgétaires bien établies où il y a des pondérations... Dépendamment du nombre d'élèves EHDAA que vous avez, par exemple, il y a une pondération, ce qui amène une augmentation des budgets pour pouvoir répondre aux besoins de ces élèves-là. C'est une règle qui m'apparaît claire d'application. On prétend, de l'autre côté, que ce n'est pas clair et on veut changer ça pour «équitable et non discriminatoire». Est-ce que, ça, ça vous rassure davantage ou est-ce que ça vous inquiète davantage?

M. Tabachnick (Marcus): Si les règles sont claires, nous pouvons l'accepter. Mais les règles doivent être claires, et le principe d'égalité et de non-discrimination doit être suivi aussi. Mais les règles fondamentales doivent être clarifiées et basées sur le nombre d'élèves et les autres faits qu'on met maintenant dans les règles budgétaires.

M. Ouimet: Mais vous êtes conscient qu'on va quitter le système du financement per capita, là, fort probablement. C'est ce que d'autres groupes réclament, d'ailleurs, pour assurer le grand principe «l'égalité des chances passe par l'égalité des ressources», c'est-à-dire qu'il va y avoir redistribution de la richesse relative des budgets en éducation. On va redistribuer.

M. Tabachnick (Marcus): Les subventions de base doivent être basées sur le per capita, doivent rester, oui. Ça, nous le voulons.

M. Ouimet: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, merci. Mme la ministre.

Mme Marois: Très brièvement sur cette question-là. On ne remet pas en question qu'il y ait une base et qui s'appuie sur le per capital, mais, déjà, on tient compte des réalités propres à chaque commission scolaire dans le sens de la présence d'enfants en difficulté et ce qui enlève la notion, simplement, d'un transfert proportionnel en se fermant les yeux et en disant: Il y a 1 000 élèves là, vous avez x milliers de dollars. Il y en a 500, vous avez x autres milliers de dollars. On a d'autres critères, et, dans le fond, l'école montréalaise est un bel exemple de ça. Le programme spécifique à l'école montréalaise, c'est un apport de ressources supplémentaires. On dit: Ces écoles-là ont les mêmes ressources que les autres, mais, en plus, on ajoute cela parce que, justement, il y a déjà cette réalité pour ces écoles d'une difficulté, d'un risque d'un système d'écoles à deux vitesses, et c'est ça qu'on essaie de corriger. Alors, oui, une proportionnalité et une base – ça m'apparaît fondamental – et, après ça, on dit: Il y a une approche particulière. Vous le demandez, d'ailleurs. Quand vous vous dirigez vers le Conseil scolaire pour dire: Voici, dans telle école, nous avons un problème de pauvreté particulier, ce n'est pas vrai pour toutes nos écoles, mais c'est vrai là, c'est vrai là, et on veut avoir des ressources, c'est ce qu'on reconnaît ensemble, dans le fond, dans un sens.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, Mme. la ministre.

Mme Marois: Alors, le temps est écoulé, je crois.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, juste pour terminer la discussion là-dessus, là, par rapport à l'école montréalaise, on a taxé les citoyens de 76 000 000 $ et on leur a redonné, aux écoles montréalaises, 10 000 000 $. Si c'est ça que ça veut dire, là, allouer plus de financement, j'ai de sérieuses réserves. Et puis ça, c'est un principe que la ministre avait avoué, il y a une richesse...

Mme Marois: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): C'est un peu gros.

M. Ouimet: ...foncière à Montréal, il faut redistribuer ça. Le risque, dans le fond, c'est que, au lieu d'augmenter les investissements en éducation, ce qui va se passer, c'est qu'on va aller chercher de l'argent à certains endroits pour en mettre davantage ailleurs. Donc, il va y avoir des gagnants, il va y avoir des perdants, un peu comme le financement des maternelles temps plein cinq ans, ceux qui ont reçu leurs allocations familiales...

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député, il ne faudrait pas...

M. Ouimet: ...pour apprendre que c'était maintenant réduit à zéro ont compris qu'ils vont financer la mesure. Alors, c'est le risque qui se passe.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député, il ne faudrait pas recommencer le débat.

M. Ouimet: Alors, merci beaucoup aux gens de la Commission scolaire Lakeshore. J'apprécie leur présence et leurs interventions.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

M. Ouimet: Mais on voit clair.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Disons que c'est un peu court, l'analyse sur la taxation sur l'île de Montréal, parce que le niveau de taxation, là, était en deçà du plafond qu'avaient déjà atteint les autres commissions scolaires. Mme la Présidente donne justement l'exemple de Chicoutimi où ils payaient déjà 0,35 $ du 100 $ d'évaluation depuis un long moment, ce qui n'était pas le cas sur l'île. Alors, ça n'a pas de lien de cause à effet.

M. Ouimet: ...l'évaluation des maisons, là, ça glisse.

Mme Marois: Je remercie M. Tabachnick de même que ses collègues pour leur présentation. C'est un éclairage dont on tiendra compte pour la suite des choses. Merci beaucoup.

M. Tabachnick (Marcus): Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre, en ce qui me concerne, la commission de l'éducation avait souhaité que les sommes consenties par l'État pour les élèves en difficultés d'adaptation et d'apprentissage soient plus transparentes. Je pense que les nouvelles règles devraient nous permettre, souhaitons-le, d'obtenir cette transparence des budgets consentis pour ces clientèles particulières.

M. Tabachnick, Mme Cumyn, qu'on a l'occasion de revoir pour la deuxième fois ici, en cette commission et avec grand plaisir, et Mme Prokosh, merci de votre participation aux travaux de cette commission.

M. Tabachnick (Marcus): Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Au plaisir. Et, pendant que les représentants de la Commission scolaire Lakeshore quittent la table des témoins, j'inviterais les représentants de la Commission scolaire Prince-Daveluy à prendre place à la table.

Alors, la Commission scolaire Prince-Daveluy est représentée par sa présidente, Mme Paulette Rancourt. Mme Rancourt et ses collègues prennent place à la table. Je me permets, comme on l'a fait pour tous les groupes qui se présentent ici, Mme la présidente, d'abord, de vous souhaiter la bienvenue à vous et à vos collègues et de vous inviter à présenter les personnes qui vous accompagnent en vous rappelant brièvement les règles: une dizaine de minutes pour la présentation de votre mémoire et le reste du temps consacré à un échange avec les parlementaires membres de cette commission. Alors, Mme la présidente, la parole est à vous.


Commission scolaire Prince-Daveluy

Mme Rancourt (Paulette S.): Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Bonjour, Mme la ministre, M. Ouimet, membres de la commission. Je veux vous présenter Mme Diane Grandmaître, à ma droite, qui est la directrice générale de la commission scolaire.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonjour, madame.

Mme Rancourt (Paulette S.): M. Robert Raymond, à ma gauche immédiate, qui est le directeur des services éducatifs.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Raymond.

M. Rancourt (Paulette S.): À ses côtés, M. Daniel Sicotte, qui est un enseignant présentement directeur d'école par intérim.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Sicotte.

Mme Rancourt (Paulette S.): Et, à mon extrême droite, Mme Brigitte Simoneau, qui est membre de l'équipe de direction d'école de notre commission scolaire.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Simoneau, bonjour. Bien, nous vous écoutons.

Mm e Rancourt (Paulette S.): Alors, voilà, nous n'avons pas l'intention de commenter ici chacun des points de l'avant-projet de loi, puisque plusieurs d'entre eux viennent officialiser ce qui se passe déjà dans plusieurs commissions scolaires et que, pour plusieurs également, nous sommes d'accord avec ce qui est énoncé. Cependant, sur certains aspects, nous désirons soit émettre des réserves, soit manifester une certaine opposition ou même formuler des recommandations.

(9 h 50)

S'il est une prémisse essentielle à établir dès le départ, c'est bien de dire que l'enfant est et doit être au centre de toute l'action éducative et de toutes les préoccupations qui en découlent. Convaincus hors de tout doute de la beauté, de la grandeur et de la nécessité de la tâche sacrée qu'est l'éducation, nous croyons que le domaine scolaire est suffisamment important, vaste et complexe pour justifier une gestion spécifique et l'existence d'un palier de gouvernement qui soit exclusivement voué à sa cause. C'est dans ce contexte que s'inscrivent le rôle et la mission de la commission scolaire qui doit, entre autres, représenter la population, assurer l'équilibre du système, définir et assurer la dispensation des services éducatifs à la population de son territoire, s'assurer que ces services sont équitablement offerts à l'ensemble de la population quelle que soit l'école fréquentée et exercer les contrôles pédagogiques et administratifs inhérents à ces responsabilités, de là l'imputabilité.

Cependant, force nous est de constater que les pouvoirs généraux qui, d'après l'avant-projet de loi, seront confiés aux commissions scolaires sont parfois d'un ordre plutôt accessoire. Pourtant, dans l'optique d'un système scolaire juste, équitable, stable et cohérent, il importe qu'un palier intermédiaire assure l'équilibre entre la vision nationale propre au ministère et le cas par cas de chaque établissement. Là se trouve l'essence même du rôle de la commission scolaire, là se trouvent ses responsabilités et là se trouve aussi l'imputabilité qu'elle doit assumer. Par voie de conséquence, là se trouve également son droit de regard et de décision, car le devoir d'imputabilité dont on parle abondamment pour les divers intervenants du monde scolaire ne devrait s'appliquer que lorsque lesdits intervenants ont une certaine emprise sur les objets dont ils doivent répondre.

Parlons d'abord du conseil d'établissement. Dans sa composition, il existe à notre avis quelques ambiguïtés. Ainsi, la limite de 14 membres risque de créer problème. En effet, à l'intérieur de cette limite, si les enseignants d'une école décidaient, tel que permis par l'article 41.2, de nommer plus de deux représentants pour leur catégorie, il y aurait incompatibilité avec l'article 42 qui propose que les représentants des parents et ceux de la communauté soient en nombre au moins égal au nombre total de postes détenus par les représentants des autres groupes. On peut donc conclure que, dans certains cas, le chiffre 14 serait insuffisant pour permettre à chaque groupe d'utiliser la représentation maximale permise par la loi.

Pour ce qui est des représentants de la communauté, nous manifestons notre désaccord avec la nomination de deux représentants, puisque, selon nous, les commissaires d'école sont précisément élus pour faire office de tels représentants. Et, dans un même souffle, nous souhaitons que le droit de vote soit accordé aux commissaires d'école et possiblement aux directeurs d'école également, puisque ces personnes ont à répondre devant la population de la qualité des services offerts.

Quant aux parents, au chapitre de leur représentativité, certaines mesures nous laissent perplexes. La représentation des parents sera fortement diminuée par rapport à ce qu'elle est présentement avec les comités d'école et les conseils d'orientation. Les parents ne sont pas assurés de la majorité au conseil d'établissement, et de nombreux pouvoirs octroyés au conseil d'établissement ne sont pas nécessairement des pouvoirs octroyés aux parents. Et les parents pourront-ils, en étant si peu nombreux, assumer en toute connaissance de cause une tâche aussi lourde et complexe?

Quant aux pouvoirs, l'ampleur de ces pouvoirs dévolus au conseil d'établissement et à la direction de l'école risquent, selon nous, d'engendrer de grandes disparités entre les services offerts dans les différentes écoles. Nous faisons allusion ici aux règles de passage, aux modalités d'évaluation, au temps alloué à chaque matière, etc.

Compte tenu de la grande mobilité des familles, cet état de fait serait fort dommageable pour la population étudiante à qui nous avons l'obligation d'assurer une accessibilité comparable quand vient le temps d'entrer au cégep ou à l'université. Nul besoin d'être prophète pour prédire que, en peu de temps et à cause de divers facteurs – taille et situation géographique, personnel en place, ressources disponibles, et le reste – les écoles du Québec offriront des services carrément disparates.

Quant aux ententes, entre autres prérogatives, l'avant-projet de loi donne au conseil d'établissement la possibilité d'établir diverses ententes. Là aussi, une certaine ambiguïté semble régner quant au partage à effectuer entre les conseils d'établissement et les commissions scolaires relativement aux diverses ententes possibles. Or, nous voulons insister sur le fait que ces différentes ententes conclues par le conseil d'établissement ne doivent en aucun cas créer des difficultés à la commission scolaire ou imposer des contraintes supplémentaires relativement à l'embauche et au lien d'emploi.

Au chapitre des conflits d'intérêts, il nous semble que, le conseil d'établissement devenant décisionnel sur nombre de points, il est à craindre que certains de ses membres se trouvent en situation de conflit, étant pour plusieurs impliqués d'une façon ou d'une autre dans le fonctionnement de l'école.

En ce qui a trait à la délégation temporaire de fonctions et pouvoirs à la commission scolaire par le conseil d'établissement, c'est-à-dire l'article 72, nous considérons que, bien que cela puisse être intéressant dans certains domaines, il faudrait mettre en place des mécanismes visant à éviter que les écoles se déchargent de leurs dossiers chauds et que, d'autre part, la commission scolaire se voie obligée de maintenir du personnel en prévision d'une telle délégation. C'est pourquoi nous demandons que de tels transferts temporaires de pouvoirs ne puissent se faire qu'après entente avec la commission scolaire et dans les limites des ressources dont celle-ci disposera à ce moment-là. De plus, dans le cas de ces délégations, qu'adviendra-t-il de l'imputabilité?

Au chapitre de l'évaluation des apprentissages, l'article 77 de l'avant-projet de loi donne au conseil d'établissement la responsabilité d'approuver la répartition du temps en s'assurant de l'atteinte des objectifs obligatoires et de l'acquisition des contenus prévus dans les programmes d'études. Or, il nous semble qu'il n'est pas et qu'il ne doit pas être dans la responsabilité du conseil d'établissement de procéder à des évaluations d'apprentissage. En conséquence, il n'appartient pas à ce palier de s'assurer de l'atteinte des objectifs et de l'acquisition des contenus obligatoires.

Notre conception et notre expérience de l'évaluation des apprentissages nous amènent également à manifester une opposition à l'article 47, dont le texte vient remplacer l'article 231 de la Loi sur l'instruction publique qui, tel que rédigé, confie à la commission scolaire la mission de s'assurer que l'école évalue les apprentissages en restreignant toutefois, à notre grand regret, les moyens dont elle dispose pour ce faire. En effet, le même article précise que la commission scolaire ne peut imposer des épreuves uniques qu'à la fin du primaire et qu'à la fin du premier cycle du secondaire. À notre avis, une telle façon de procéder vient limiter l'exercice de cette fonction importante qu'est l'évaluation, qui se doit, pour être efficace et valable, d'être rigoureuse et périodique.

Il nous semble de plus que l'objectivité requise pour une telle évaluation est davantage assurée par des épreuves uniques, élaborées et corrigées au niveau de la commission scolaire. Nous basons nos affirmations sur l'exemple concret que nous vivons à notre commission scolaire où, depuis plusieurs années, nous avons implanté, en collaboration avec les directeurs d'école et les enseignants, un processus d'évaluation des apprentissages qui, annuellement pour le secondaire et biannuellement pour le primaire, permet à la commission scolaire de s'assurer de l'atteinte des objectifs obligatoires. Oui?

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la Présidente, je pourrais vous demander d'accélérer un peu...

Mme Rancourt (Paulette S.): Bien sûr.

La Présidente (Mme Blackburn): ...pour donner le temps aux parlementaires de poser des questions sur votre intéressant rapport.

Mme Rancourt (Paulette S.): Parfait. Alors, le reste de cette page concerne aussi l'évaluation. Nous soulignons également que, beaucoup de nouveaux enseignants arrivant sur le marché du travail, ce serait sans doute aidant aussi que l'évaluation puisse être supervisée au niveau de la commission scolaire plus fréquemment. Et, là comme ailleurs, nous faisons référence aussi au devoir d'imputabilité, et c'est pourquoi nous disons que, compte tenu de l'argumentation qui précède, nous demandons instamment – et c'est là la recommandation particulière que nous faisons – que soit textuellement maintenu le deuxième alinéa de l'article 231 de la Loi sur l'instruction publique qui dit que la commission scolaire s'assure de l'application des épreuves imposées par la ministre et qu'elle peut en outre imposer des épreuves internes dans les matières qu'elle détermine. Alors, la conclusion apparaissant au rapport, je vous laisserai la liberté d'en faire lecture, et ça permettra d'écourter.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la présidente. La parole est maintenant à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.

(10 heures)

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Alors, merci pour votre présentation. Je me permets, moi, de lire une partie de la conclusion qui dit: «Nonobstant ces difficultés et malgré les améliorations qu'on en attend, le système scolaire québécois compte quand même d'importantes réussites à son actif.» Et vous continuez dans ce sens-là. Ce n'est pas mauvais de se le rappeler à l'occasion – d'autres sont venus le dire aussi hier – parce que la tendance a plutôt été, depuis un certain nombre d'années, à être très critique et, à mon point de vue, en tombant dans la démesure dans certains cas, puisque, dans les faits, je pense qu'on peut être assez fier de ce qu'on a construit au cours des ans, et toutes les formations politiques qui ont eu la responsabilité gouvernementale, à tour de rôle, ont apporté des bonifications, des améliorations, et je pense que, dans l'ensemble, on peut quand même remarquer qu'il y a des réussites assez importantes et assez significatives. Il y a aussi des ratés, et c'est pour ça, quand même, que c'est important qu'on se penche sur ces ratés. Bon.

Là, il y a une chose qu'il faudrait peut-être essayer de clarifier ensemble, c'est toute la question de l'évaluation des apprentissages. Quand on regarde l'équilibre du projet de loi, effectivement, la commission scolaire a la responsabilité de s'assurer que les objectifs sont atteints, mais il est assez clair que c'est l'école... On dit: «S'assurer que l'école évalue les apprentissages. Imposer des épreuves uniques dans les programmes d'enseignement d'une langue seconde et des mathématiques à la fin du primaire et du premier cycle du secondaire.» C'est-à-dire que la commission scolaire peut faire cela, mais elle s'assure que l'école évalue. Elle peut donc discuter avec l'école de mesures et choisir avec l'école, avec ses établissements, des mesures qui pourraient être, dans certains cas, l'épreuve unique dans certaines matières. Le système auquel vous faites référence dans votre commission scolaire n'est pas empêché par le projet de loi. On dit: «...et imposer des épreuves uniques dans les programmes de langue». Elle peut imposer à ce moment-là. On dit ça, là. L'imposition est possible, mais la décision de procéder à plus que ça, elle est tout à fait possible aussi. Rien ne l'empêche. Là où la loi est muette dans un sens, à ce moment-là, ça reporte le tout sur les initiatives que des milieux peuvent prendre, comme vous le faites maintenant.

Rien dans la loi, maintenant, ne vous oblige à faire ce que vous faites. Enfin, une partie de ce que vous faites, vous le faites avec l'assentiment de vos directions d'école, de vos équipes de professeurs, de vos équipes de spécialistes, et ce n'est pas remis en question, on se comprend bien, de la même façon que ce n'est pas le conseil d'établissement qui établit les modalités d'évaluation des apprentissages et les approuve, mais c'est la direction d'école, avec les enseignants, qui doit retenir un projet d'évaluation au-delà de ce que la commission scolaire pourrait vouloir faire, c'est-à-dire compte tenu de ce qui était exigé à ce niveau-là, et la commission scolaire, elle, pourrait aller plus loin – nous parlons d'examens obligatoires – et pourrait, si elle le désire, se doter d'outils d'évaluation. Il n'y a absolument rien qui empêche ça. Les règles de passage d'un cycle à l'autre, rien n'empêcherait aussi qu'inter-établissement on s'entende pour dire que ça pourrait être la réussite d'une épreuve. Cependant, selon le projet-école, il pourrait arriver... D'ailleurs, sur le passage d'un cycle à l'autre, on se comprend que c'est la commission scolaire qui a cette responsabilité-là. Alors, à ce moment-là, pour exercer votre responsabilité, vous pourriez dire: Bien, nous, on souhaite qu'il y ait une épreuve unique qui touche une, deux, trois matières. Alors, ça, c'est une responsabilité qu'aura la commission scolaire et qui amènera évidemment à créer une dynamique, à s'engager dans une dynamique avec ses établissements qui vont aller dans le sens de partager, comme je dis, les responsabilités et, bien sûr, les pouvoirs, mais les responsabilités.

Alors, on a mis des choses obligatoires, on a logé des responsabilités clairement, et il y en a d'autres où on dit oui si on veut aller plus loin, si on veut faire davantage. Ou la façon de vérifier le passage d'un cycle à un autre, bien, là, ce sera à la commission scolaire d'établir ses règles. Et, comme vous nous donniez une belle démonstration tout à l'heure du fait que vous aviez déjà des projets dans ce sens-là, ou des programmes dans ce sens-là, ou des mesures dans ce sens-là dans vos écoles, rien n'empêche que tout ça puisse se continuer.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la présidente.

Mme Rancourt (Paulette S.): Oui, Mme la Présidente. Je suis contente d'entendre de tels commentaires, et nous sommes tout à fait d'accord. Nous sommes tellement d'accord que c'est à cause de ça que ça nous inquiétait de voir la rédaction de l'article en question, parce que l'article dit: «Elle peut imposer – le «elle» pour la commission scolaire, donc – des épreuves uniques», tout ça. Et la fin de la phrase dit «à la fin du primaire et du premier cycle du secondaire», ce qui, à notre avis, risquait de devenir limitatif. S'il était dit qu'elle peut imposer, mais qu'elle doit à tout le moins s'assurer d'en donner à la fin du primaire et du premier cycle du secondaire, ce serait autre chose. Mais on croyait comprendre qu'il y avait le risque, à l'intérieur de la rédaction telle quelle, que l'on puisse comprendre de ça que ça voulait dire: La commission scolaire peut imposer, mais seulement à la fin du primaire et du premier cycle du secondaire, et c'est là notre crainte, alors que l'article 231, lui, de la Loi sur l'instruction publique permettait plus de latitude en disant tout simplement: «Elle peut, en outre, imposer des épreuves internes dans les matières qu'elle détermine.» Alors, c'était plus large et ça permettait aux commissions scolaires qui le désirent et qui s'entendent avec leurs gens dans ce sens-là de pouvoir procéder, tandis que l'article actuel nous semble limitatif.

Mme Marois: D'accord. Je pense que, effectivement, il est perçu comme ça, mais, dans le fond, c'est de dire: Minimalement, il y a ça. Après ça, on peut imaginer toute espèce d'avenue qui convienne aux différents milieux, qui soit propre à la réalité d'une commission scolaire, de sa philosophie et de sa culture avec ses écoles. Tout ça continuera d'exister, continuera d'être possible dans notre système. Rien ne l'en empêchera.

Mme Rancourt (Paulette S.): Si le «minimalement» était inscrit, ce serait parfait.

Mme Marois: D'accord. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Rancourt. M. le député de Marquette, porte-parole de l'opposition en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Dans votre mémoire, vous témoignez beaucoup d'une préoccupation par rapport à l'érosion des pouvoirs de la commission scolaire, qui seraient dévolus en faveur de l'école. Vous allez même jusqu'à dire à la page 3 que, à votre avis, le projet de loi «laisse clairement présager l'intention gouvernementale de faire disparaître les commissions scolaires à plus ou moins brève échéance». Vous dites que la ministre, dans son discours, va vouloir vous rassurer et vous dire que, non, non, non, au contraire, là n'est pas son intention, mais que vous savez que le projet de loi ou l'avant-projet de loi que nous avons sous les yeux ressemble énormément à une autre réforme qui avait été mise de l'avant par un ancien ministre de l'Éducation, l'actuel député de Bourget, M. Laurin. Au lieu de s'intituler L'école autonome et responsable , ça s'appelait, on l'a ici, L'école: une école communautaire et responsable . Lorsqu'on lit les dispositions et les différents paragraphes de ce même projet qui avait été mis de l'avant en 1982 par M. Laurin, on constate les similitudes entre ce que nous avons aujourd'hui et l'ancien projet de loi. L'ancien projet de loi ou l'ancienne réforme visait carrément la disparition des commissions scolaires, et les craintes, à l'époque, c'était que ça ferait en sorte que les écoles seraient de plus en plus dépendantes du rôle du ministère de l'Éducation.

Moi, j'aimerais vous entendre sur vos préoccupations, parce que, si le gouvernement fait, pour l'instant et pour les quelques années à venir, le choix de préserver la commission scolaire dans une stratégie étapiste, disons, qu'est-ce que vous pourriez réclamer comme pouvoirs du ministère de l'Éducation pour redynamiser les commissions scolaires, pour leur donner une plus grande marge de manoeuvre par rapport à ce qui est exercé par le ministère de l'Éducation? Parce que, dans le discours, on disait que la décentralisation se fait à deux niveaux: du ministère vers les commissions scolaires et des commissions scolaires vers les écoles. Dans votre mémoire, vous abordez beaucoup le deuxième volet, des commissions scolaires vers les écoles, et vous abordez très peu le premier volet, du ministère vers les commissions scolaires. Mais ça a été repris par d'autres groupes qui vous ont précédés, qui nous ont dit: De fait, on ne voit pas une grande décentralisation du ministère vers les commissions scolaires. Avez-vous une réflexion à cet égard?

(10 h 10)

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Rancourt.

Mme Rancourt (Paulette S.): Mme la Présidente, merci. Tout d'abord, il est peut-être important de préciser qu'il ne s'agit pas, en ce qui nous concerne, de dire que nous voulons préserver des pouvoirs pour des pouvoirs. C'est évident que, tous ensemble, nous visons également la plus grande réussite du plus grand nombre. Et non seulement la plus grande réussite du plus grand nombre, mais la meilleure réussite. Pas seulement une question de notes et de nombre de personnes. Dans cet esprit-là, c'est bien sûr qu'il est important que, au niveau de l'acte pédagogique, l'école devienne la grande responsable, mais il est important aussi – et on l'a surtout démontré, en ce qui nous concerne, au chapitre de l'évaluation parce que, chez nous, c'est très important – de façon générale, que la commission scolaire puisse quand même avoir un droit de regard sur tous les objets dont elle doit répondre. Ça, c'est certain.

C'est pourquoi, quand on constate à plusieurs articles que le texte de l'avant-projet est pratiquement le texte de la Loi sur l'instruction publique, mais auquel on a changé tout simplement le lieu – c'est-à-dire que, auparavant, on pouvait charger la commission scolaire d'une telle responsabilité; maintenant, c'est le même texte, mais on en charge le conseil d'établissement – c'est évident que, nous, on regarde ça et on se dit: Il faudra peut-être encadrer davantage pour s'assurer qu'il n'y ait pas de disparité. C'est notre autre grande crainte. Après l'évaluation, nous voyons la disparité qui peut être engendrée si les conseils d'établissement ont trop ou, en tout cas, beaucoup d'autonomie, beaucoup d'indépendance par rapport aux éléments qu'on a mentionnés tout à l'heure.

Et, quand je parlais des règles de passage, on est conscient que, entre les cycles, c'est la commission scolaire, mais, entre chacun des niveaux, ça peut relever de l'école, et tout ça fait en sorte que nous croyons que, si toutes ces règles relèvent spécifiquement du conseil d'établissement, ça peut créer des disparités plus importantes. Et, là-dessus, peut-être que Mme la directrice générale aurait le goût d'ajouter quelque chose également pour compléter.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la directrice générale.

Mme Grandmaître (Diane): C'est sûr, quand on parle des règles de passage, que, si on laisse ça aux conseils d'établissement, il se peut que certaines règles de passage diffèrent, et ça fait au bout du compte des élèves de secondaire V qui n'ont pas les mêmes acquisitions de connaissances, et c'est ce point-là, particulièrement, qu'on craint.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Grandmaître. M. le député.

M. Ouimet: Oui, mais est-ce que, ça, ça peut être contrôlé par le ministère, ou par une direction régionale, ou par une commission scolaire? Un gouvernement qui envisagerait, par exemple, la disparition d'une commission scolaire, est-ce qu'il pourrait confier cette mission-là à une direction régionale du ministère pour assurer que, à l'intérieur d'une même région, on puisse préserver ces standards uniformes là?

La Présidente (Mme Blackburn): Madame...

M. Ouimet: La même chose au niveau du financement, si vous me permettez...

La Présidente (Mme Blackburn): Oui.

M. Ouimet: ...parce que, dans votre mémoire, vous dites: L'importance de la commission scolaire pour assurer l'équilibre du système, pour assurer que les services sont équitablement offerts à l'ensemble de la population. Si la subvention accompagne l'élève là où l'élève se dirige dans les écoles, est-ce que la commission scolaire a quand même un rôle à jouer, si, par exemple, au niveau des règles budgétaires, on change les règles budgétaires et que, là, le financement accompagne davantage l'élève que se diriger vers les commissions scolaires? J'essaie juste de me faire l'avocat du diable, là, pour voir en quoi les tâches exécutées par les commissions scolaires ne pourraient pas être exécutées, par exemple, par une direction régionale du ministère ou par des grands encadrements nationaux.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la présidente.

Mme Rancourt (Paulette S.): Oui. Je laisserai aussi Mme Grandmaître continuer la réponse par la suite. Quand vous dites que vous vous faites l'avocat du diable, vous y arrivez assez bien.

M. Ouimet: Bien, écoutez, c'est mon rôle, hein, moi. Je vous l'ai dit, j'ai signé un rapport en faveur de la décentralisation, de l'autonomie aux écoles, mais j'ai quand même un rôle à jouer comme parlementaire, de voir où sont les failles dans l'avant-projet de loi. Je vous dirais que je suis très largement servi par le gouvernement.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la présidente, ensuite Mme Grandmaître.

Mme Rancourt (Paulette S.): Je dirais que, quand nous avons inscrit ces phrases, c'est évident que nous avons vu à l'intérieur des possibilités, pour qui voudrait plus tard modifier le contenu, de pouvoir regrouper différemment les pouvoirs actuellement octroyés aux commissions scolaires. Et, présentement, c'est hors du contexte de l'avant-projet de loi, mais, avec tout ce qu'on entend sur la gestion des édifices, etc., ça vient aussi contribuer à augmenter cette impression que, effectivement, les commissions scolaires ne sont peut-être pas là pour une éternité encore dans le contexte actuel. Mais, bien sûr, tout dépend de la volonté des personnes qui implantent ces lois.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien, merci. Mme Grandmaître.

Mme Grandmaître (Diane): Ça va.

La Présidente (Mme Blackburn): Ça va? Alors, Mme la ministre.

Mme Marois: Très, très brièvement, parce que je sais que mes collègues veulent aussi soulever des questions. J'aimerais ça qu'on se replace dans un ensemble un petit peu plus global. D'abord, effectivement, vous avez raison, vous le dites vous-même, le projet de loi ne touche pas la question de la disparition des commissions scolaires. Au contraire, il les confirme dans un rôle stratégique, à mon point de vue, et majeur. Cependant, oui, il refait l'équilibre des responsabilités, le projet de loi, et, autant on a souhaité que le ministère décentralise et déconcentre, autant nous le faisons actuellement, mais vers l'école en consolidant cependant le rôle de planification et de gestion stratégique qu'assume la commission scolaire – et de contrôle aussi. C'est ce qu'on confirme dans la loi.

Mais il y a une chose qu'il ne faut pas oublier, et ça, c'est sûr qu'on a peut-être tendance à le mettre de côté, parce qu'on a vu certains articles qui disent: On va bonifier tel curriculum, on peut décider du nombre d'heures d'enseignement de certaines matières. Ça, je dirais, c'est pour nous aider et faciliter la tâche des équipes-écoles qui pourront bâtir des projets propres aux besoins des jeunes qui fréquentent leur école, mais ces écoles, ces commissions scolaires et le ministère de l'Éducation auront une obligation à l'égard des enfants, à l'égard des élèves du secondaire. il y a un curriculum de base, et personne n'y échappera. Il y aura des voies, évidemment, pour le secondaire, diversifiées – bon, ça, on se comprend – mais personne n'y échappera. Alors, c'est pour ça que, par exemple, quand on dit: Le passage d'un cycle à un autre ou le passage d'une classe à une autre, d'un niveau à un autre, il sera contraint par l'obligation d'acquisition de connaissances qu'auront à assumer les élèves et les enfants dans les écoles... Alors, dans un sens, la base et les fondements de ce que l'on fait seront, eux, très clairs et très définis.

Cependant, on pense que c'est important que l'école de base... Et, oui, le député a raison. M. le député de Marquette, M. Ouimet, vous avez raison, il y a eu une évolution dans notre société. Il y a eu un projet qu'a présenté le Dr Laurin, il y a 15 ans, qui était très audacieux et qui n'a pas reçu l'appui souhaité, mais ces idées ont cheminé progressivement, se sont adaptées. Le projet d'aujourd'hui n'est pas celui d'il y a 15 ans, et M. Ryan, qui a occupé le fauteuil que j'occupe maintenant, est allé aussi dans le sens d'une responsabilisation plus grande des intervenants de la base, des parents, et ce qu'on fait maintenant, c'est un pas de plus, oui, pour reconnaître cela, mais pas sans une obligation quant à la qualité de ce que l'on fait et quant aux connaissances que doivent acquérir nos jeunes et aux compétences qu'ils doivent aller chercher dans notre réseau scolaire. Et celui-là, ce ne sera pas un modèle et ce ne sera pas un contenu différent d'une commission scolaire à l'autre et d'une école à l'autre, sauf que les modalités d'apprentissage, les façons de faire, là, pourront être propres à chaque milieu, et je pense que c'est souhaitable, parce que vous souhaitez vous-mêmes qu'il y ait plus de parents dans les conseils d'établissements. J'imagine que c'est parce que vous êtes d'accord qu'ils aient un petit peu plus de responsabilités et qu'ils les assument.

Cependant, je dois vous dire – et je me permets très honnêtement de le faire avec vous – que je trouve que vous avez l'air d'être hésitants un peu. Vous croyez que les parents doivent occuper une place, mais vous aimeriez mieux garder plus de pouvoirs au niveau de la commission scolaire et plus de responsabilités. Moi, je dis: Pourquoi vous n'êtes pas prêts à faire confiance au milieu en vous faisant confiance à vous-mêmes aussi? Dans le sens où je pense qu'il va y avoir des dynamiques très intéressantes qui vont s'instaurer dans nos commissions scolaires et entre les établissements pour, justement, établir des règles, des politiques qui vont faire qu'on va respecter la diversité des milieux, mais qu'en même temps on va trouver une cohérence. Sauf que, évidemment, ça va être exigeant en termes de partage de responsabilités et en termes de concertation, et ça, ça s'apprend, bien sûr, ça s'apprend en le pratiquant, sauf qu'il est important que, dans un encadrement général, on loge quand même bien les pouvoirs et responsabilités des uns et des autres.

(10 h 20)

Alors, c'est une série de commentaires en même temps que de réponses à des questions ou des choses qui n'étaient pas claires, mais peut-être que j'aimerais entendre quand même vos commentaires suite à ça.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. Mme Rancourt.

Mme Rancourt (Paulette S.): Mme la Présidente, merci. Je dirais là-dessus – et j'entends la dernière phrase qui disait: Faites-vous confiance – que, effectivement, je pense que nous nous faisions tellement confiance à l'équipe de la commission scolaire, avec le personnel de direction, le personnel enseignant, et tout que nous étions fort heureux, jusqu'à maintenant, de ce qui s'était bâti et que nous avions visé les points à modifier. Et c'est bien sûr que nous savons qu'il y a, dans nos milieux, la dynamique nécessaire pour mettre en place tout ce processus, et c'est certain que les gens vont y arriver ensemble. Cependant, et je le dis en aparté, nous avons aussi, en même temps, à vivre avec une restructuration qui fait que nos territoires, chez nous particulièrement, seront largement modifiés. Donc, il n'y a pas que la différence entre ce que l'avant-projet de loi viendrait apporter, chez nous, quatre commissions scolaires devront réapprendre à vivre aussi ensemble, et ça vient faire en sorte qu'il y a doublement un amalgame à faire entre les forces vives des différents milieux.

Et vous comprendrez que, si je fais référence à la question de M. Ouimet auparavant, quand on élargit la région beaucoup... Nous étions habitués, comme petite commission scolaire, à être très, très près de nos gens. Nous avions toujours dit que la prise de décision devait être le plus près possible de l'utilisateur, et, chez nous, on était carrément collé sur l'utilisateur, et ça allait vraiment très bien. Alors, vous comprendrez que, quand on voit élargir de beaucoup la région, agrandir les commissions scolaires dans l'ensemble du Québec – et nous sommes directement concernés – quand on voit tout ça, c'est bien sûr qu'on se dit: Oui, les commissions scolaires comme nous les avons connues chez nous vont différer beaucoup parce que la commission scolaire va devenir nécessairement plus étrangère au quotidien de ses écoles et de ses gens. Et, à cause de ça, à cause de cette régionalisation, il se peut, bien sûr, que nous manifestions une inquiétude, parce qu'il nous semble que nous allons avoir un petit peu plus de difficulté à maintenir le lien direct et concret. Maintenant, probablement que les gens autour de moi auraient quelque chose à ajouter sur la question. Est-ce que quelqu'un veut...

Mme Marois: Mme la présidente, je comprends bien votre propos, et c'est pour ça, dans le fond, que, dans l'avant-projet de loi, bien sûr – parce qu'on a dit que l'un n'allait pas sans l'autre – il y avait plus de pouvoirs vers l'établissement, parce que le territoire couvert par la commission scolaire sera, évidemment, plus grand. Mais l'esprit dans lequel vous avez travaillé jusqu'à maintenant avec vos écoles n'est pas empêché par le projet de loi. Au contraire, à mon point de vue, il peut le faciliter. Je vous le mentionne.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, M. la ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci, Mme la Présidente. Mme la présidente, j'aimerais savoir votre vision sur l'intégration des élèves handicapés dans les écoles, premièrement par le développement d'expertise à un niveau local et, deuxièmement, par le soutien au niveau des commissions scolaires, car il y a toujours le risque que les écoles renvoient en dehors de leur champ tous ces enfants pour lesquels elles ont développé peu d'habilités. Est-ce que, dans votre opinion, on devrait avoir des mesures dans la loi pour limiter l'inégalité pour les étudiants handicapés, des mesures de formation pour compenser le manque de savoir dans certains milieux et, troisièmement, des contrepoids légaux pour favoriser l'intégration scolaire des élèves handicapés? Dans ce sens, votre mission que vous décrivez à votre page 3: on va s'assurer que ces services seront équitablement offerts à l'ensemble de la population quelle que soit l'école fréquentée... C'est quoi, votre vision, Mme la présidente?

La Présidente (Mme Blackburn): Oui. Mme Rancourt.

Mme Rancourt (Paulette S.): Merci, Mme la Présidente. C'est bien sûr que la base de ce que nous avons inscrit ici est toujours le fondement. Nous souhaitons que chacun des enfants trouve le meilleur service possible, ce qui sera le plus adapté à sa condition et à ses besoins. Nous étions jusqu'à maintenant une petite commission scolaire. Aussi, nous n'avions pas la totalité des services sur notre territoire bien que nous en assumions plusieurs. Dans la commission scolaire à venir, ça regroupera l'ensemble des services puisque, actuellement, déjà quelques-uns de nos jeunes fréquentaient, par entente, des écoles d'autres commissions scolaires et recevaient tous les services requis par leur condition. Maintenant, pour plus de détails sur le sujet, j'aimerais que Mme Grandmaître, la directrice générale, puisse continuer l'intervention.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme Grandmaître.

Mme Grandmaître (Diane): Oui. Pour nos élèves les plus lourdement handicapés, on a une entente avec la commission scolaire de Victoriaville qui est tout près, et nos élèves fréquentent ces écoles-là. C'est à environ 10 km, c'est tout près. Alors, il y a de très bons services, c'est bien organisé. Dans l'avenir, ça sera toute la même commission scolaire, de toute façon, alors...

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, madame. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Une question très rapide. Dans votre mémoire, vous souhaitez que le directeur d'école ait droit de vote au conseil d'établissement. Pourquoi?

Mme Rancourt (Paulette S.): Mme la Présidente, c'est que, tout d'abord, nous l'avons inscrit immédiatement après le chapitre qui traite des représentants de la communauté et, à cet égard-là, nous souhaitions que le commissaire qui, à notre avis, fait office de représentant de la communauté, ce commissaire, qui siégera au conseil d'établissement de l'école qu'il représente, puisse avoir droit de vote, puisqu'il devra assumer l'imputabilité relativement aux décisions qu'il y prendra. Or, comme il n'y avait que le directeur d'école et le commissaire qui n'avaient pas droit de vote, nous avons inscrit les deux, de telle sorte que, si l'ensemble des directeurs d'écoles y trouvent un intérêt, nous n'avions pas d'objection, tout simplement, à ce qu'eux aussi puissent avoir droit de vote. C'est souvent sur leur recommandation que les propositions seront discutées, mais nous nous sommes dits qu'ils devraient répondre, eux aussi, alors nous n'étions pas du tout opposés à ce qu'ils aient ce droit de vote. Maintenant, est-ce que d'autres, ici, autour de la table, veulent ajouter quelque chose?

La Présidente (Mme Blackburn): Ça va? Merci. Ça va, Mme la députée? Alors, si vous permettez, moi, je vais soulever une question qui n'a pas été soulevée. Je pense que c'est la première fois qu'on voit dans un mémoire cette réticence à assurer une participation de la communauté au sein des conseils d'établissement. La commission de l'éducation, qui a produit un rapport sur la réussite éducative, a voulu voir une école très fortement enracinée dans son milieu, et l'idée de la présence de la communauté par deux représentants au conseil d'établissement, je trouvais que c'était une initiative heureuse, un peu le genre «coopté», c'est-à-dire choisis selon des critères établis par le conseil d'établissement pour assurer une responsabilisation de la communauté dans la réussite éducative et scolaire, et je suis étonnée. Je suis étonnée. Je voudrais comprendre, pourriez-vous m'expliquer?

Mme Rancourt (Paulette S.): Bien, d'abord, Mme la Présidente, j'ai l'impression que d'autres ont peut-être ou vont peut-être en parler. Cependant, j'ai précisé tout à l'heure que, à notre avis, le commissaire d'école est justement représentant de la communauté, mais je vous dirai que, règle générale, nous sommes très loin d'être contre la participation des gens de la communauté, au contraire, et je vous donnerai un exemple. Chez nous, nous avons une école-entreprise, une école qui s'adresse aux décrocheurs potentiels qui est située carrément en dehors de l'école physique des jeunes de leur âge, et ces jeunes travaillent dans un quartier industriel où le local est situé. Et, pour s'occuper de ces jeunes avec l'équipe de professeurs, il y a énormément d'industriels qui donnent du temps bénévolement, qui sont intégrés de près au fonctionnement de l'école, et nous sommes tout à fait en faveur de cette intégration, sauf que, de façon formelle, aller nommer deux personnes qui, d'ailleurs, sont nommées par les autres membres du conseil d'établissement, ça nous apparaissait être une possibilité, d'autres diront peut-être, de patronage ou de noyautage, mais, tout simplement, nous nous disions, peut-être aussi parce que nous sommes en région, nous ne sommes pas d'une très grande ville – il faut se rappeler, cependant, que presque 75 % du Québec est en région – mais nous nous disions que les autres personnes, les parents sont évidemment aussi, souvent, des gens impliqués dans le milieu, mais le commissaire les représente également, et c'est simplement dans cette optique que nous avions indiqué la notion que vous avez vue apparaître.

La Présidente (Mme Blackburn): Mais l'idée de choisir le représentant de la communauté en fonction du projet de l'école, par exemple. Ça peut être un représentant du CLSC quand on parle de la communauté, comme ça peut être un représentant des centres des loisirs ou de la coopérative culturelle, ou de la chambre de commerce. Mais cette idée d'enrichir la réflexion sur la base du projet pédagogique, le projet de l'école, est-ce que ça n'est pas une idée intéressante? Alors, je ne vous demande pas de réponse. C'était simplement ma réflexion.

Mme Rancourt (Paulette S.): Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): J'inviterais le député de Marquette à conclure.

(10 h 30)

M. Ouimet: Je remercie la présidente, Mme Rancourt et les gens qui l'accompagnent de leur participation aux travaux de la commission et de l'éclairage qu'ils nous ont fourni. Je vous en remercie.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vous remercie à mon tour et puis vous rassure sur le fait qu'on pourra encore faire preuve de beaucoup d'imagination, de créativité et de concertation entre les commissions scolaires et leurs écoles avec l'avant-projet de loi qui est devant nous. On va essayer de le mieux baliser encore pour que nous atteignions ensemble... C'est l'objectif de toute façon que l'on poursuit, qui est la réussite de nos élèves par les façons les plus dynamiques de le faire. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme Rancourt, Mme Simoneau, Mme Grandmaître, M. Raymond et M. Sicotte, de votre participation aux travaux de cette commission. Au nom des membres de la commission et en mon nom personnel, j'apprécie votre présence ici. Nul doute que votre réflexion aura enrichi la nôtre et celle de la ministre. Merci.

Pendant que ces personnes quittent la table, j'inviterais les représentants de la Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin à prendre place à la table. Je dois dire que, pour le groupe qui a précédé, on constate que les femmes occupent une grande place dans l'éducation à cette commission scolaire. Pour ce qui est de la suivante, on constate que les hommes s'intéressent aussi à l'éducation.

Alors, j'inviterais le président du Conseil des commissaires, M. Marc-Yvon Poulin, à présenter les personnes qui l'accompagnent. Je vous souhaite, messieurs, la plus cordiale des bienvenues, au nom des membres de la commission. Les règles, vous les avez entendues tout à l'heure: une dizaine de minutes pour la présentation de votre mémoire, suivi d'un échange avec les membres parlementaires de cette commission. Alors, la parole est à vous, M. le président.


Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin

M. Lecours (Charles-Henri): Mme la Présidente, Mme la ministre, mesdames, messieurs les membres de la commission. Permettez-moi, Mme la Présidente, de faire une petite correction. J'ai dû accepter hier soir, à la dernière minute, de remplacer M. le président, Marc-Yvon Poulin, pour cause de maladie. C'est pour cette raison que je suis accompagné ce matin de personnes très compétentes...

La Présidente (Mme Blackburn): Et vous êtes monsieur?

M. Lecours (Charles-Henri): Je suis M. Charles-Henri Lecours. J'y venais, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien.

M. Lecours (Charles-Henri): Alors, ces personnes très compétentes, je le répète, répondront à vos questions tout à l'heure.

La Présidente (Mme Blackburn): Vous nous les présentez, s'il vous plaît?

M. Lecours (Charles-Henri): Oui, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Blackburn): Je vous le dis simplement. Peut-être expliquer pourquoi on demande ça à nos témoins. C'est parce que ça facilite la retranscription des débats de la commission parlementaire. Parce que ceux qui sont attachés à la saisie des voix ici doivent les identifier dans le Journal des débats . Ça leur permet de le faire. Alors, je vous inviterais à présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Lecours (Charles-Henri): Oui. À ma droite, Mme la Présidente, notre directeur général, M. André Roy; son voisin, M. Jules Caron, qui est directeur des Services de formation professionnelle et de l'éducation aux adultes...

La Présidente (Mme Blackburn): Bonjour, M. Caron.

M. Lecours (Charles-Henri): ...à ma gauche, M. Georges Pelletier, qui est directeur des Services éducatifs...

La Présidente (Mme Blackburn): Bonjour, M. Pelletier.

M. Lecours (Charles-Henri): ...son voisin, M. Pierre Bégin, coordonnateur de l'enseignement primaire.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Bégin.

M. Lecours (Charles-Henri): Alors, Mme la Présidente, notre commission scolaire est issue de la fusion, en 1992, de six commissions. On y retrouve une soixantaine d'écoles et de centres de petite et grande taille. Notre organisme est localisé dans une région à la fois rurale et semi-urbaine.

À notre avis, une loi ne peut être la garantie de la réussite d'un projet éducatif. Il nous semble plutôt qu'une loi a pour but d'établir des règles et encadrements généraux en vue d'organiser une activité importante de notre société. La Loi sur l'instruction publique actuelle empêche-t-elle la réussite, l'implantation de nouveaux modèles de gestion, une répartition différente des pouvoirs et responsabilités et la délégation de pouvoirs? Si, en toute connaissance de cause et au vécu, on peut répondre oui à ces questions, alors nous avons besoin de modifications importantes à la loi actuelle, Mme la ministre.

Les nouvelles réalités sociales, économiques de même que celles de l'information, des communications et de l'apprentissage nous obligent à trouver de nouveaux moyens pour être en mesure d'atteindre l'objectif d'une réelle amélioration de la réussite éducative. Cette réussite éducative ne sera atteinte que si on se préoccupe en priorité des conditions sociales, culturelles et économiques essentielles à l'accès au succès, donc à l'apprentissage durable.

Pour y parvenir, il importe avant tout de doter les acteurs de première ligne d'outils leur permettant de se préoccuper, dans leur action quotidienne, d'une approche axée tant sur le client que sur le résultat avec l'ouverture d'esprit et la créativité nécessaires à la diversité. De plus, la mobilisation et la responsabilisation de ces acteurs sont préalables à une bonne reddition de comptes de la qualité des services et des résultats.

Si l'école a surmonté un certain niveau d'impuissance, issu de l'isolement et du morcellement, en se regroupant en réseau, il ne faudrait pas y revenir. Il nous apparaît essentiel de viser une dynamique provoquant un projet éducatif partagé, où les enjeux pédagogiques se réalisent à travers des consensus supposant la participation et le partenariat communautaire. Dans cet esprit, la direction doit être d'abord et avant tout le chef de file de ce partenariat pour la réalisation de la mission éducative. Pour ce faire, les directions d'établissement doivent être entourées d'une équipe forte leur permettant de bien recevoir et gérer ce transfert de pouvoirs et de responsabilités qui, à notre avis, s'il dépasse de façon importante l'aspect éducatif, entraînera un certain ajout de ressources humaines et financières.

Nous sommes en accord avec une répartition des pouvoirs entre l'école, le centre de formation, la commission scolaire et le gouvernement. Nous craignons cependant, si nous n'y prêtons pas suffisamment attention, que l'établissement ne devienne le lieu d'une nouvelle administration au détriment de son rôle premier, la réussite éducative. De plus, nous avons plusieurs petites écoles dont les ressources humaines ne sont pas en mesure d'accueillir davantage de tâches administratives sans ajout de ressources.

Nous souhaitons donc, Mme la ministre, que chaque commission scolaire, en partenariat avec son milieu, développe son modèle de répartition de pouvoirs et de responsabilités.

Mesdames et messieurs, je vous remercie de votre écoute. Maintenant, Mme la Présidente, si vous le permettez, je passerai la parole à notre directeur général, M. Roy, pour la présentation de la deuxième partie de notre mémoire.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Roy, la parole est à vous.

M. Roy (André): Merci, Mme la Présidente. Alors, ce que le vice-président nous mentionnait, dans le fond, ce qu'on souhaite, nous, madame, c'est que le Québec se donne une loi la plus large et la plus souple possible, et avec le moins d'encadrement possible, pour être cohérent, finalement, avec les principes mêmes de la décentralisation puis de la subsidiarité.

On est présentement, nous, en démarche, depuis un an, en réflexion sur un nouveau partage des pouvoirs et responsabilités entre les services, les centres et les écoles. La loi actuelle ne nous inquiète pas, les fondements de la loi ne nous inquiètent pas. Ce qui nous inquiète, c'est que ça puisse nous empêcher d'aller un petit peu plus loin qu'on aurait voulu aller. À titre d'exemple, supposons qu'on choisirait, chez nous, de dire: Les manuels scolaires, bien, peut-être que c'est l'équipe d'enseignants d'une école qui devrait choisir les manuels scolaires, peut-être qu'on est rendu là. Si on encadre ça dans la loi, puis c'est telle personne, il me semble qu'on est au niveau du moyen, là. Il me semble qu'on devrait se situer un peu plus au niveau des orientations puis des grands objectifs que d'aller déterminer qui fait quoi, comme déterminer qui fait partie des conseils d'établissement, combien il y a de personnes. On ne s'entendra jamais, au Québec; pour certains, ça va être cinq, pour d'autres, 12, pour d'autres, 22. Laissons le soin aux milieux de regarder comment ils veulent puis comment ils peuvent faire ça, puis je pense qu'ils peuvent bien le faire.

Pour vous donner un exemple aussi, on a, au niveau du CIMIC, du Centre intégré de mécanique industrielle, un comité école-entreprises. Il ne faudrait pas briser la dynamique de ça parce que la loi nous oblige à intégrer tel ou tel individu. On a une dynamique avec des gens d'affaires pour qui, eux autres, il faut que ça marche puis il faut qu'ils sentent que ça avance, sinon ils ne viendront plus à nos réunions si jamais ça déborde sur des caractéristiques plutôt administratives.

Mme la Présidente, dans les différents pouvoirs, on est d'accord avec les pouvoirs qui sont donnés aux services éducatifs. Entre autres, peut-être juste un petit commentaire à l'effet qu'au niveau des enfants en difficulté c'est à l'école que devraient s'analyser les besoins, pas au centre, parce que les psychologues, les orthopédagogues, les conseillers d'orientation, les orthophonistes, ils sont dans les écoles. Ce serait comme alourdir la chose que de ramener ça au central. Je ne sais pas trop pour quelle raison on l'a mis là. Peut-être qu'on nous l'expliquera.

(10 h 40)

Il y a beaucoup d'énergie aussi à faire des modifications dans le sens des conseils d'établissement, avec les nouvelles règles, les nouvelles choses. Il faut faire attention pour ne pas placer les énergies là où les gens en ont besoin pour d'autre chose actuellement, la réussite puis tous les autres aspects pour lesquels on a des changements actuellement. Je pourrais peut-être faire un petit addenda sur ça. On parle beaucoup de gestion de transport et des établissements, ces temps-ci. On pense, nous, que ça va un peu à l'encontre des principes que la ministre a décrits dans sa loi. Il faut que ça reste aux commissions scolaires si on ne veut pas nuire aux enfants, au bout de la ligne, avec ça. J'y reviendrai peut-être un petit peu plus tard.

Au niveau des services à la communauté, je vous dirai juste qu'il faut faire attention pour ne pas augmenter, je dirais, les intervenants qui offrent des services à la communauté en matière d'éducation. Il y en a déjà beaucoup. Il y a le collégial, l'université, la commission scolaire, le centre d'éducation aux adultes, l'école. Il faut faire attention pour coordonner ça, harmoniser ça pour ne pas embarrasser le public avec ça mais bien l'aider.

Je vous dirai aussi qu'il faut faire attention aux petites écoles quand on parle de partage des budgets, et tout ça. Il faut faire attention pour ces petites unités là. On en a beaucoup, nous. On a au-delà de 12 écoles qui ont moins d'une centaine d'élèves. Donc, pour nous, c'est important. Et au Québec, il y en a beaucoup aussi. Je pense que, à long terme, si on veut s'assurer de la plus longue vie possible des petites écoles dans leur milieu, parce qu'on pense que c'est important – on a d'ailleurs une politique à cet égard-là – que ce soit clair pour les gens dans un milieu, comment ça va se faire quand il y a une fermeture d'école, pour que tous les gens connaissent les règles du jeu au préalable. On trouve que ça, c'est capital.

Mais il faut éviter, d'un autre côté, de donner des règles qui font en sorte que les petites écoles sont prises toutes seules. Il y a des règles de financement. Dans le fond, si on prend nos centres d'éducation aux adultes, on donne des cours d'éducation aux adultes à Saint-Magloire, à Saint-Camille; on est capable de le faire parce qu'il y a de gros centres qui font peut-être un peu plus de profits que les petits, et c'est comme ça. Mais, si on met ça par centre ou par école, ça va faire comme au niveau du transport. Les petites municipalités ne veulent pas payer pour les grosses, et les grosses pour les petites. Il ne faudrait pas en arriver là en éducation. C'est trop important pour ça.

Finalement, Mme la Présidente, on n'est pas venus ici pour vous parler de pouvoirs, pour vous parler de défendre les pouvoirs de la commission scolaire. On ne fait pas de trip de pouvoirs actuellement, nous autres. On pense d'ailleurs, à la commission scolaire, qu'on a deux pouvoirs dans la vie: le pouvoir d'aimer et le pouvoir d'influencer. C'est les deux principaux pouvoirs qu'on a et qu'on doit bien exercer.

On n'est pas venus vous faire des recommandations non plus, mais bien des réflexions, des opinions, des mises en garde. On est convaincus que Mme la ministre aura la détermination. On est sûrs qu'elle va l'avoir, la détermination...

Mme Marois: Ha, ha, ha!

M. Lecours (Charles-Henri): ... – d'ailleurs, si jamais vous voulez déménager en Beauce, on en prendrait, une Beauceronne comme ça, par chez nous aussi – et la clairvoyance de déposer une loi dans le plus grand respect des principes de décentralisation de subsidiarité souhaitée par le gouvernement. Parce que la plus grande preuve d'une volonté de décentralisation commence par l'exemple, c'est-à-dire décentraliser à ceux à qui on l'adresse le soin d'en montrer la forme et le contenu.

Au nom de la cohérence gouvernementale, il ne faut pas non plus, excusez l'expression, enfarger la cohérence locale. On inviterait même, Mme la Présidente, les penseurs et les scripteurs de la loi à venir vivre un mois dans nos écoles, dans nos centres, avant d'écrire et de finaliser une loi qui va en durer 120. Ça fait à peu près 1 %; ça vaut peut-être la peine d'investir 1 % pour voir ce qui va se passer dans les 120 prochains mois. On les invite, puis on serait heureux de les recevoir. Ils seront bien accueillis. Ce ne sera pas le temps du sirop d'érable, mais on va bien les accueillir pareil. En parlant de sirop d'érable, on peut comparer, dans le fond, notre milieu d'éducation à une érablière. Chaque érable, chaque école. La qualité de la sève ne garantit pas la qualité du sirop. En tout cas, nos bons bouilleurs nous disent ça, que ça ne garantit pas la qualité du sirop. Puis, s'il fallait mettre une bouilleuse à chaque érable, ça coûterait cher par chaudière, cette affaire-là, dans le sens qu'il ne faut pas rapetisser les unités. Il y a des forces collectives, il y a des forces de regroupement qui sont importantes et qu'il faut maintenir. Alors, c'est les commentaires que je voulais apporter.

La Présidente (Mme Blackburn): On reconnaît le langage imagé des gens de votre région. Sans plus tarder, je cède la parole à Mme la ministre de l'Éducation qui va certainement réagir au compliment que vous lui avez fait. Mme la ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Je pense qu'ils commencent à s'habituer à ma détermination. Ha, ha, ha!

M. Lecours (Charles-Henri): On aime ça, madame. On aime ça.

Mme Marois: Je le sais. J'aime bien vous entendre parce que, dans le fond, vous faites la démonstration de là où on veut aller avec le projet de loi. C'est simple, hein. Mais c'est ça que vous faites, parce que vous avez appliqué avant la lettre l'esprit du projet de loi que l'on a présenté ici. Et, dans le fond, le dilemme devant lequel on se trouve au ministère de l'Éducation, et dans lequel je me trouve comme ministre de l'Éducation, c'est effectivement, je dirais, une latitude complète sans trop de règles et des gens qui souhaiteraient que tout soit défini absolument parfaitement, complètement et dans les moindres détails.

Dans le fond, vous, vous dites: Nous, avec déjà les grands encadrements que nous connaissons, nous avons réussi des choses qui ne sont pas trop mal et il y a de l'autonomie dans nos établissements. C'est ça que vous nous dites, et je le sais. Je connais un petit peu votre milieu, pour en avoir entendu parler et pour le connaître personnellement, et, en ce sens-là, je peux comprendre les attentes que vous exprimez dans votre mémoire et ce que vous présentez aujourd'hui. Mais, évidemment, moi, comme ministre de l'Éducation, je dois faire une loi pas seulement pour la Beauce. Je dois faire une loi pour l'ensemble du Québec. Donc, en ce sens-là, c'est un équilibre entre un cadre qui serait à ce point lâche et qui permettrait n'importe quoi et un cadre qui serait en même temps très rigide et que plus rien n'est possible. Là, il faut que je puisse passer entre les deux et faire en sorte qu'il y ait un équilibre dans tout ça.

Moi, je vais vous dire, d'ailleurs, sur le fond, c'est-à-dire sur certaines modalités, quand vous dites que vous avez des petites écoles, par exemple, qui risqueraient d'être encombrées par certaines responsabilités qu'on voudrait leur confier alors qu'elles sont très confortables avec ce qu'elles font maintenant, et la commission scolaire assume pour elles un certain nombre de dossiers ou d'activités, bien, c'est justement ce que permet l'article qui vous embête un peu, là, l'article 72, où vous dites: C'est rare qu'une instance locale va déléguer à une instance plus globale des pouvoirs. Mais c'est justement pour nous permettre de faire en sorte qu'il y ait des situations comme celle que vous décrivez, vos petites écoles, là, avec moins d'une centaine d'élèves qui pourraient dire, le conseil d'établissement pourrait dire: Nous, tout ce qui nous intéresse, c'est le projet-école, et on ne veut pas avoir la responsabilité de gérer un certain nombre d'aspects qui concernent, je ne sais pas, moi, des ententes qu'on pourrait faire avec l'établissement d'à côté, avec la municipalité d'à côté, avec le service de loisirs d'à côté. Voulez-vous prendre ça à charge à notre place? C'est exactement ce qu'on permet par l'article 72. Alors, c'est pour ça qu'il est d'autant plus important qu'il soit là. Je comprends, c'est vrai que ça heurte un peu, ça choque un peu, je suis d'accord avec vous, mais, en même temps, ça permet ça.

Quand vous dites, donc, que vous êtes «en désaccord avec le principe qu'une instance déconcentrée puisse déléguer des pouvoirs à un palier central», c'est pour nous permettre de faire ce que vous faites déjà et de le confirmer. Peut-être qu'il y a une façon plus élégante de le dire, autre de le dire. Ça, je n'ai pas de problème, on peut trouver ensemble. Mais ce qu'on ne veut surtout pas remettre en question, c'est des expériences comme celles que vous avez vécues; au contraire, on croit que la loi vient les consolider, vient les confirmer. Et je suis d'accord aussi avec vous que la décentralisation, ce n'est pas une garantie que la réussite scolaire va s'améliorer. Ce qu'on sait, c'est que la centralisation a donné les résultats très positifs que nous connaissons, mais, en même temps, des problèmes majeurs. On pense au décrochage scolaire, puis on pense à des projets que vous avez souhaités, avec lesquels il a fallu, si on veut, vivre en interprétant largement la loi. Tandis que là, vous pourrez continuer avec vos projets sans qu'on ait à interpréter largement la loi; elle prévoit formellement. Alors, en ce sens-là, je suis intéressée par votre mémoire, mais, en même temps, je me dis: J'ai besoin de balises et puis je veux de la latitude. L'équilibre se trouve quelque part dans une définition assez générale, dans certains cas, plus précise, dans d'autres, puis moins ailleurs, avec les risques que ça comporte. Oui, je vous écoute.

M. Roy (André): Je veux juste, en réaction...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Roy.

M. Roy (André): Merci, Mme la Présidente. C'est que c'est justement ce qu'on pensait. On se disait: C'est vrai qu'il faut peut-être qu'on pousse pour que ça arrive un petit peu partout au Québec, mais est-ce que c'est nécessairement par la loi qu'on doit le faire? C'est pour ça qu'à un moment donné, dans le mémoire, on parlait d'incitatifs, exemple, financiers ou autres, mais il pourrait peut-être y avoir des incitatifs autres que dans la loi. Parce qu'on dit: Une loi qui veut décentraliser ne devrait pas encadrer, en principe, trop, trop. Puis il me semble que par, je ne sais pas, des règlements... Écoutez, on a eu des incitatifs financiers pour fusionner les commissions scolaires, pour la réussite éducative, pour les technologies de l'information; il me semble qu'on pourrait peut-être avoir des incitatifs qui... En tout cas, c'est une idée qu'on lançait, au lieu de s'encadrer pour 20 ans ou 10 ans dans une loi avec des choses qui pouvaient nous empêcher d'aller un petit peu plus vers où on voudrait aller. C'est juste là-dessus.

(10 h 50)

Mme Marois: Je comprends votre point de vue, mais, en même temps, la loi actuelle, elle peut être un empêchement à faire des choses, et on a à l'adapter. Remarquez qu'il y a un avantage, par contre. Je pense qu'on accepte maintenant de modifier plus facilement certaines de nos lois pour justement qu'elles suivent l'évolution de nos sociétés et qu'elles ne soient pas à ce point en retard qu'on se dise: On a 15 ans à rattraper. Ce qu'on essaie de faire par la loi actuelle, c'est de donner suffisamment de latitude pour que justement la loi soit un encadrement, mais ne contraigne pas à un modèle unique partout.

M. Roy (André): C'est ça.

Mme Marois: Alors, évidemment, les propositions que vous faites nous amènent à regarder certains aspects pour dire: Est-ce qu'on devrait, là, préciser plus, là moins?

Je vous donne l'exemple: «...nous estimons qu'il y aurait quand même lieu de maintenir, au plan provincial, un minimum de temps pour les matières de base.» Savez-vous qu'actuellement la loi ne prévoit pas ça? C'est un temps indicatif.

M. Roy (André): Indicatif, c'est vrai.

Mme Marois: Si un temps est là, vous le savez. C'est un temps indicatif. Cependant, on se comprend bien que ce n'est pas possible que les enfants de la Beauce apprennent des choses qui ne seraient pas les mêmes que celles qu'apprendraient les enfants du quartier Hochelaga-Maisonneuve ou d'Amos, ça va de soi. Bon.

Donc, il y en aura, un curriculum de base, soyez sûrs de ça, mais chacun pourra le bonifier, l'améliorer. Mais il y aura des connaissances que l'on devra acquérir, et ça, c'est fondamental, sinon il n'y a plus d'éducation nationale. Remarquez qu'il y a des états qui ont fonctionné comme ça. Les résultats ne sont pas nécessairement toujours heureux. Bon. Alors, voilà.

Je suis très sensible à vos propos. On va essayer de voir comment on peut encore mieux baliser certaines choses ou donner plus de latitude. Mais, quant à vos attentes sur l'organisation des établissements et la possibilité que certains établissements renoncent à certains pouvoirs, c'est dans la loi. Il faut peut-être le dire autrement, mais c'est là.

M. Roy (André): Oui.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci. Oui, vouliez-vous réagir?

M. Pelletier (Georges): Juste en complément, si vous le permettez. J'inviterais peut-être la ministre à questionner...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pelletier?

M. Pelletier (Georges): Oui. À questionner peut-être des commissions scolaires comme la nôtre où on considère, quand même, qu'on a un niveau de réussite acceptable. Qu'est-ce qui nous empêche d'aller un petit peu plus loin? Et ce n'est pas sûr que c'est dans cette loi-là qu'on vient amener les correctifs qui vont nous permettre d'aller plus loin. Je ne voudrais pas amener de...

Mme Marois: Bien alors, répondez donc à la question que vous soulevez.

M. Pelletier (Georges): C'est délicat d'amener ça, mais je pense que certaines conventions collectives, par le manque de souplesse qu'on y trouve, empêchent les directions d'école d'aménager des horaires de façon différente. Les directions d'école, dans l'application des conventions collectives, sont obligées de faire des ententes extraconventions si elles veulent aller plus loin. Je pense que nous avons des choses, et je pense que certains...

Mme Marois: Et vous en avez, des ententes.

M. Pelletier (Georges): On en a, mais...

Mme Marois: Et ça marche bien.

M. Pelletier (Georges): ...ce n'est pas simple. Moi, je pense que, si on amenait des aménagements à l'intérieur de ces documents-là, on nous permettrait d'aller aussi loin que vous voulez bien dans les aménagements que vous amenez dans la loi aussi.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre.

Mme Marois: Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Je suis heureux d'accueillir les représentants de la Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin, surtout que je pense que vous posez très bien la question de fond qui se pose, à savoir: Est-ce que l'avant-projet de loi va avoir un impact significatif sur l'atteinte de l'objectif d'une plus grande réussite éducative? C'est la raison d'être de la réforme en éducation. Et c'est la question que vous posez.

Je vous signale, en passant, que les études et la littérature américaines abondantes et les études québécoises ne sont pas concluantes à cet égard. Les éléments bénéfiques de la décentralisation et d'accorder plus d'autonomie aux écoles ont apporté des résultats, mais, en ce qui concerne la performance scolaire des élèves, l'impact est nul.

Vous, ce que vous dites, dans le fond, à la page 2: Il faut «doter les acteurs de première ligne d'outils leur permettant de se préoccuper, dans leurs actions quotidiennes, d'une approche axée tant sur le client que sur le résultat». Et vous les nommez, ces pouvoirs-là. Vous faites référence, à la page 1 de votre mémoire, qu'on ne pourra pas atteindre notre objectif de la réussite éducative si on ne s'occupe pas «en priorité des conditions sociales, culturelles et économiques essentielles à l'accès au succès, donc à l'apprentissage durable.»

Quelles sont ces conditions-là sur lesquelles on devrait s'attarder? Parce que faire un brassage de structures, départager les pouvoirs à nouveau entre ministère, commissions scolaires et écoles, selon les professeurs de l'Université de Montréal qui sont venus hier, ça permet de créer des conditions plus favorables à l'atteinte de l'objectif, mais ça ne permet pas d'atteindre l'objectif en soi, ça prend d'autres conditions. J'aimerais vous entendre sur ces conditions-là, lorsque vous dites: Il faut doter les intervenants de première ligne des outils nécessaires. On a en tête – moi, j'ai en tête – l'élève, qui est véritablement le personnage central du système scolaire au Québec. Il faut faire en sorte qu'il puisse recevoir une qualité de services; les élèves qui sont en difficulté ont besoin de services additionnels. Et l'autre acteur le plus important, à mon point de vue, dans le système, c'est, bien sûr, l'enseignant, comment nous soutenons l'enseignant, comment nous lui donnons les moyens pour bien transmettre les savoirs à l'élève.

Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. Et je pose une deuxième question – vous y avez fait référence dans votre présentation – c'est la question de la gestion des bâtiments et des équipements scolaires. Hier, le premier ministre du Québec a annoncé que ce serait maintenant sujet à discussion entre le gouvernement et l'UMQ et l'UMRCQ. Il est d'accord pour mettre ce dossier-là sur la table. Et là, il est dans une perspective de décentralisation. Qu'est-ce qu'on décentralise? On dit: La gestion des équipements et des bâtiments scolaires, on prend ça, on donne ça à un autre palier que sont les municipalités, mais sans leur donner les ressources financières. Parce que, on le sait bien, le gouvernement veut récupérer 500 000 000 $, et on a évalué à entre 480 000 000 $ et 536 000 000 $ la facture qui accompagnerait le transfert. Donc, la deuxième question est liée à la première, parce que, dans une perspective de décentralisation où il n'y a pas de ressources qui l'accompagnent, quel objectif est-ce qu'on vise véritablement? Et est-ce qu'on vise véritablement l'objectif de la réussite éducative du plus grand nombre?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Lecours? M. Roy? Oui, M. Roy.

M. Roy (André): Si vous le permettez, monsieur, je vais commencer par répondre à votre deuxième question, parce qu'elle nous chatouille pas mal, celle-là. J'ai quasiment envie de dire: Quand est-ce que les municipalités vont la ramasser, leur pilule, et vont la ramasser, leur facture? Parce que là, elles sont en train de la faire sur le dos des élèves. Ça, en tout cas, ça nous apparaît, à la commission scolaire, inacceptable qu'on fasse ça sur le dos des élèves, parce que, imaginez-vous... On parlait tantôt d'unité de direction, dans notre document; on ne l'a pas mentionné verbalement, mais c'est écrit. Le directeur d'école, il va avoir affaire au conseil d'établissement, à la commission scolaire, à la municipalité et peut-être à la MRC, avec ça. Je veux dire, ça va commencer à faire une petite problématique administrative et politique, et je ne sais pas si les gens ont vraiment le temps de s'occuper de ça dans les écoles, ces affaires-là. Parce que la bibliothèque de l'école... Nous, on a des programmes d'investissement et d'amélioration de nos bibliothèques et on juge que c'est capital. Si la municipalité donnée décide qu'elle n'investit pas pour aménager et agrandir la bibliothèque, tu laisses ce milieu-là dans des situations qui ne sont peut-être pas facilitantes à ce point de vue là. Ça, c'est un exemple.

En tout cas, on se dit, nous autres, que les équipements et le transport scolaire, c'est un peu comme indissociable du tout, de l'activité éducative, parce que c'est en lien direct. Et il faut arrêter d'avoir quatre ou cinq boss pour faire la même affaire. On a déjà beaucoup d'intervenants, et tout le monde veut s'occuper un peu d'éducation et dire quoi faire en éducation. C'est comme des – comment est-ce qu'on appelait ça quand je jouais au hockey? – coachs d'estrade, excusez. Tout le monde veut dire aux joueurs comment faire...

Mme Marois: Des gérants d'estrade.

M. Roy (André): Les gérants d'estrade, oui. Excusez. Les gérants d'estrade. Tout le monde veut dire aux joueurs quoi faire sur la patinoire. Mais ceux qui sont sur la patinoire, ce sont, vous le disiez, les profs, les élèves, les parents, les autres types d'éducateurs, qu'ils soient psychologues, orthophonistes ou autres. C'est ça, c'est eux autres, les vrais acteurs, au bout de la ligne, et c'est eux autres qui doivent prendre ça en main vraiment. Et la réussite, elle va passer par là. La réussite, elle ne passe pas nécessairement par la commission scolaire. La commission scolaire, elle va donner les conditions facilitantes pour le faire.

M. Ouimet: Mais, si on reprend...

M. Roy (André): J'arrive à votre première question, avec les conditions facilitantes avec ça. Quand on parlait là-dedans de conditions sociales, culturelles et économiques, ce n'est pas tant des individus qui sont dans leur milieu, dans leur famille, parce que ça, on n'a pas beaucoup de contrôle, à l'école et à la commission, là-dessus, mais c'est les conditions sociales de vie à l'école, les conditions culturelles, leurs pratiques de gestion, leurs façons de faire, les approches pédagogiques, les méthodes pédagogiques qui prennent... Alors, il y a une culture à développer. Dans le fond, il faut que l'école puisse répondre, aujourd'hui encore plus qu'hier, aux différences de styles d'apprentissage, aux différences de stratégies d'apprentissage et du rythme des enfants. Il faut vraiment qu'on aille là aujourd'hui si on veut réussir. Si on ne fait pas ce pas-là, on ne réussira pas ce qu'on veut faire présentement. Il faut dépasser ça, il faut aller là.

(11 heures)

M. Ouimet: Concrètement, ça veut dire quoi, donner des outils aux acteurs de première ligne? On fait référence à quels outils? C'est bien beau de le dire, je pense que tout le monde est en accord avec ça, mais quels outils?

M. Roy (André): Un des outils importants, c'est au niveau de la formation, au niveau de l'aide. La commission scolaire, dans le fond, je sais bien qu'il y en a qui ont souhaité la faire disparaître, mais elle est là pour soutenir, aider, alimenter, guider puis influencer les gens pour une meilleure réussite. Les outils, là, au niveau de la formation, pour que l'enseignant puisse bien comprendre, connaître tout ce qui touche les styles, les stratégies d'apprentissage de l'être humain... On a encore un bout de chemin à faire, là-dedans, parce que la partie est là. Je ne dirais pas la «game», là, mais la partie est là. Ça se passe là. Ça se passe entre les deux oreilles, ça, cette affaire-là, l'apprentissage. On n'a pas de contrôle sur l'apprentissage, nous autres, mais on a le contrôle sur comment faire pour s'assurer qu'un tel, c'est comme ça qu'il faut le prendre, puis tel autre, c'est comme ça. Ce n'est pas facile à faire, mais je pense que les outils... De plus en plus, je dirais qu'en éducation, malgré qu'on a des programmes, des technologies de l'information et des communications, je pense qu'il faut dépasser ça dans l'utilisation puis l'efficacité que les nouvelles technologies informatiques peuvent nous donner pour mieux comprendre les données qui peuvent nous permettre d'aider les enfants. En tout cas, chez nous, je sais bien qu'on a l'idée de développer un petit peu de recherche dans ce sens-là, parce qu'il faut vraiment outiller le professeur autrement qu'avec une craie et un tableau, ou un acétate. Il faut l'outiller d'une autre façon.

La Présidente (Mme Blackburn): Je crois comprendre que M. Bégin s'intéresse aussi à cette question. Alors, M. Bégin, nous vous écoutons.

M. Bégin (Pierre): Merci, Mme la Présidente. Très, très brièvement, des éléments d'outils et de moyens. Le libellé parle de faire en sorte que les intervenants se préoccupent d'avoir une approche qui soit centrée sur le client, donc, faire en sorte que, via le perfectionnement, via la formation continue, via la responsabilité définie aux professionnels de l'éducation de s'inscrire dans un plan de perfectionnement structuré, on change des attitudes et non pas uniquement... Et peut-être qu'il y aurait moyen de libeller les articles de la loi et de faire en sorte que ça ne soit pas un encadrement, un contrôle qui soit prévu pour les commissions scolaires, mais davantage des responsabilités de soutien et de formation.

En contrepartie, je reste perplexe quand... On vit actuellement, dans le milieu scolaire, une situation où il y a eu une décision, qui n'est pas une décision de la commission scolaire, de couper, de faire une coupure dans les budgets de perfectionnement, entre autres, le budget de perfectionnement du personnel enseignant. À une époque où on avait amorcé, dans les commissions scolaires, une démarche structurée qui nécessitait, effectivement, un support financier pour continuer la démarche, on va vivre une situation où ce sera difficile de répondre aux demandes du personnel. S'ajoute à ça l'arrivée d'un grand nombre de nouveaux enseignants qu'il faut supporter. Alors, si on donne les outils, on donne les outils aux enseignants. Il faut également donner des outils aux directions d'école et, outils aux directions d'école, ça veut dire faire en sorte qu'elles puissent demeurer centrées sur leur fonction principale, c'est-à-dire assumer, assurer un rôle de leader pédagogique dans l'école, et non pas être accaparées par des préoccupations ou des tâches plus administratives.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Bégin. M. le député de Lotbinière.

M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, les gens de la Beauce. Ma question porte sur les petites écoles parce que, dans mon coin aussi, j'ai plusieurs petites écoles. Comment vous voyez ça, un conseil d'établissement à l'intérieur? Parce que l'avant-projet de loi fixe à 14 au maximum, dans une petite école, dans une école de cycle ou dans une école où il y a des multiprogrammes. Comment vous voyez ça? Est-ce que vous voyez ça à six, à huit? Comment vous voyez ça?

M. Roy (André): Bien, nous, je vais vous dire, d'abord, de fixer un nombre, on trouve ça un peu... Il me semble que la loi ne devrait pas fixer un nombre. On devrait dire: Il doit y avoir une majorité de parents, ou quelque chose comme ça. Qu'on nous laisse le soin, dans chacun des milieux, avec les écoles, d'en fixer le nombre selon les besoins. Deuxièmement, les petites écoles, nous, dans le contexte social d'aujourd'hui puis dans le contexte d'une plus grande répartition de pouvoirs et de responsabilités, on pense que les très petites écoles qu'on a, les 12 ou la quinzaine d'écoles qu'on a, on leur suggère – remarquez qu'on n'est pas rendus là encore – de se regrouper pour être plus forts, de faire un conseil d'établissement avec trois, quatre, peut-être cinq écoles. Puis c'est pour ça qu'on mettait, dans notre mémoire, de dire: Peut-être qu'on devrait avoir le pouvoir aussi de continuer des comités d'école. Parce qu'il ne faudrait pas, en faisant ça, diminuer la participation des parents dans l'école sur toutes sortes d'activités, parce que c'est ça qu'ils cherchent, surtout, les parents. Tu sais, les parents, prendre des grandes décisions philosophiques sur les approches pédagogiques, regarder tout ça, sirop! ils ont comme peur de ça un petit peu, puis je les comprends. Ils ne sont pas à temps plein dans ça, puis ce n'est pas leur vocation.

Donc, nous autres, on dit: Dans les petites écoles, si on pouvait faire un concept... Mais essayons peut-être de favoriser des regroupements pour les rendre... d'abord, pour qu'ensemble ils soient plus forts pour éviter le plus possible de disparaître. S'ils sont ensemble, ils vont avoir plus de chances de se tenir, et puis, deuxièmement, bien, donnons-nous la possibilité aussi de former peut-être des comités d'école dans ces milieux-là où les parents veulent continuer à travailler dans leur école et dans leur paroisse.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci. M. le député de Lotbinière.

M. Paré: Donc, l'avant-projet de loi permet aussi ça, d'avoir des comités de parents à l'extérieur du conseil d'établissement, mais ce n'est pas dans l'avant-projet de loi.

M. Roy (André): Ce n'est pas dans l'avant-projet de loi...

M. Paré: Non, mais ça permet... Ça n'empêche pas...

Mme Marois: Ça n'empêche pas.

M. Roy (André): Ça n'empêche pas, mais est-ce que, légalement... Je ne sais pas, mettons qu'on voudrait déléguer des choses à un comité comme ça, est-ce que, légalement... On se demande si...

Mme Marois: Il faudrait le...

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Effectivement, la loi, actuellement, ne l'empêche pas. Donc, il est possible qu'on se dote de plusieurs comités si on le souhaite pour des activités particulières, ou peu importe. Cependant, effectivement, peut-être qu'il faudrait introduire dans la loi une notion d'habilitation, là, si on veut.

M. Roy (André): Oui.

Mme Marois: On permet, sans l'obliger.

M. Roy (André): C'est ça.

Mme Marois: Je suis sensible à ça. Ça fait quelques groupes qui sont venus nous présenter, à cette commission, cette possibilité-là. Je pense qu'il s'agirait tout simplement de manifester l'ouverture dans la loi, ce qui permettrait, à ce moment-là, de légalement reconnaître cette réalité-là sans, cependant, la définir. Et là, ça donnerait beaucoup de latitude.

M. Roy (André): Oui.

Mme Marois: C'est-à-dire, on dirait: On garde le conseil d'établissement, et on ouvrirait la porte à ce que, du côté du regroupement des parents, il y ait la possibilité de se doter de sous-comités, que l'assemblée générale puisse exister si on veut la consulter. Elle existe en soi, mais la loi la reconnaîtrait.

M. Roy (André): Oui.

Mme Marois: Alors, je suis consciente de ça, mais mon collègue, le député, a tout à fait raison, dans le sens où rien ne l'empêche, actuellement, bien sûr.

M. Paré: Puis, au niveau des...

La Présidente (Mme Blackburn): Une question additionnelle, comme on dirait en Chambre, M. le député de Lotbinière.

M. Paré: Oui. Au niveau des centres de formation professionnelle, ce qu'on vous propose, est-ce que ça vous satisfait, pour le conseil d'établissement?

M. Roy (André): Oui, je pense que oui. La participation des parents aux centres de formation professionnelle et d'éducation des adultes, elle est peut-être moins nécessaire, parce que les jeunes, ils savent où ils s'en vont. Ils s'en vont dans un D.E.P. en mécanique industrielle, puis ils sont capables, eux autres, de se représenter eux autres mêmes, rendus à ce niveau-là, rendus à cet âge-là.

M. Paré: Donc, la représentation des parents est moins nécessaire, mais celle de la communauté l'est.

M. Roy (André): Celle des gens d'affaires, en tout cas, dans certains domaines, elle est capitale pour nous. Je ne sais pas si M. Caron veut ajouter?

M. Paré: O.K.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Oui, M. Caron.

M. Caron (Jules): Mme la Présidente, concernant les centres de formation professionnelle, c'est sûr et certain, la présence des élèves, même sur les conseils d'établissement, étant donné que la plupart des élèves ont un taux de circulation d'à peu près entre un an et deux ans de fréquentation dans un centre, bien souvent l'élève participe, mais il disparaît très vite aussi. Le centre d'éducation des adultes, on a le même problème au point de vue de la présence des élèves. Le parent, lui... Bien, dans les centres d'éducation des adultes, elle n'existe pas, la présence des parents, tandis que, dans les centres de formation professionnelle, il devient majeur très vite, donc il est autonome. Comme M. Roy le mentionnait, souvent, la présence des parents, si c'est des parents d'élèves mineurs, en tous les cas, moi, j'accepte ça, puis je ne pense pas que ça va créer de problèmes. Sauf que, très vite dans l'année, il devient majeur et la présence du parent n'est pas nécessairement exigée.

Du côté communautaire, au niveau de l'éducation des adultes, ça peut causer des problèmes, parce qu'il y a plusieurs centres d'éducation des adultes dans notre territoire aussi, puis les organismes, c'est toujours les mêmes qui vont réapparaître dans certains... Du côté de la formation professionnelle, les comités école-entreprises sont là et leur présence est déjà très forte dans nos centres.

Mme Marois: Mais, dans le cas des centres d'éducation des adultes, il reste que, comme dans les autres cas, je ne crois pas qu'on ait fait une distinction dans le sens où c'est le conseil d'établissement qui choisit les représentants de la communauté. À ce moment-là, donc, je comprends que les gens qui vont solliciter leur participation, c'est probablement les groupes d'éducation populaire, de formation, etc. Mais il reste que le conseil d'établissement a la responsabilité – enfin tel que, pour l'instant, le prévoit l'avant-projet de loi – de choisir les représentants de la communauté et pourrait, donc, sortir de ce cercle qui est plus identifié spécifiquement à des groupes populaires, par exemple, en éducation des adultes.

M. Caron (Jules): C'est possible.

La Présidente (Mme Blackburn): Bien. Merci, Mme la ministre. M. le député de Beauce-Nord.

(11 h 10)

M. Poulin: Oui, Mme la Présidente. Je désire saluer les dirigeants de ma commission scolaire. J'ai un commentaire et une question.

Mon commentaire est le suivant. C'est que, dans la Beauce, je pense qu'on est choyé d'avoir des dirigeants semblables. Je pense que, à l'échelle du Québec, on a souvent cité les dirigeants de la Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin, des réalisations qu'ils ont faites au cours des dernières années. On n'a qu'à penser aux phases du CIMIC, mais aussi à tout l'engagement des gens du milieu. Que ce soit au niveau du monde municipal, du monde scolaire ou du monde des affaires, tous les gens, on va dire, ont eu une implication dans la réalisation qu'ils ont faite, soutenus, on va dire, par la direction de la commission scolaire. Au début des années quatre-vingt-dix, je pense, on était très loin d'adapter le milieu des écoles de formation professionnelle. Puis je pense qu'aujourd'hui ils ont atteint un succès encore davantage, parce qu'ils ont encore élargi des réalisations en allant chercher des fonds avec des campagnes de financement qui ont été défoncées, je dois le dire, parce que, quand même, les objectifs étaient très élevés et les gens du milieu se sont associés à la formation professionnelle. Donc, je pense que c'est tout à l'honneur des personnes qui sont ici ce matin, et je tenais à vous en faire part.

Aussi, les écoles de formation professionnelle, il faut dire qu'elles ne sont pas situées que dans un milieu. Il y a trois milieux où on retrouve de l'enseignement de formation professionnelle: il y a à Saint-Joseph de Beauce, il y a à Beauceville et il y a Saint-Georges. Je n'en oublie pas; je ne pense pas qu'il y en ait à d'autres endroits. Il y a d'autres projets à d'autres endroits, mais, actuellement, ce n'est que des projets. On espère qu'on pourra les réaliser sous peu. Donc, je tenais à faire ce commentaire-là, dans un premier temps.

Si je comprends bien les remarques soulevées par la commission scolaire, c'est que la commission scolaire ne veut pas être assujettie à une loi qui aurait pour effet de restreindre son autonomie administrative qui, selon elle, n'affecte en rien sa mission éducative. Un des objectifs de cette réforme, c'est la réussite scolaire. J'aimerais savoir, moi, des dirigeants de la commission scolaire de la Chaudière-Etchemin: En quoi que cette réforme-là, selon vous, va améliorer la réussite scolaire? Est-ce qu'il y a des éléments que vous voyez qui vont faciliter la réussite scolaire en milieux régionaux?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Roy.

M. Roy (André): Bien, je vous dirai que c'est un peu comme les conditions facilitantes de tout à l'heure. Nous, on mise depuis quelques années sur la délégation de pouvoirs dans le milieu, le plus près de l'action possible, parce qu'on pense que ça va mobiliser les gens. Si on mobilise les gens, si on les encourage, si les gens sont plus engagés, ils vont donner probablement un meilleur service, ils vont se préoccuper plus du client qui est dans l'école puis essayer de répondre à ses besoins. C'est comme ça. C'est sûr que ça ne peut pas garantir automatiquement une réussite, mais tu mets des conditions qui... Quand les gens sont intéressés puis sont engagés, il me semble que le résultat suit au bout. Parce que, dans l'éducation, ce n'est pas comme faire des bicycles, on ne peut pas garantir la qualité du bicycle quand il sort. Nous autres, c'est un enfant, puis c'est lui qui décide avec ce qu'il a dedans ce qu'il va apprendre. Mais, par contre, on peut mettre toutes les conditions pour lui donner les chances d'arriver là, puis une chance égale à chacun d'arriver là. C'est un peu ça. C'est comme ça qu'on voit ça, là.

La Présidente (Mme Blackburn): Oui. M. Pelletier.

M. Pelletier (Georges): J'ajouterais rapidement, comme Mme la ministre le disait tout à l'heure... Dans le fond, quand elle nous écoutait, elle dit: Vous êtes à peu près où on voudrait aller ou, du moins, on reconnaît qu'on a voulu exprimer dans la loi des situations ou un vécu de certaines commissions scolaires. Moi, je pense que, dans l'ensemble, la loi est correcte puis elle va dans le bon sens. Ce que je voudrais exprimer, c'est plutôt des morceaux qui nous manquent à l'intérieur, ou des compléments. J'en ai énoncé un tout à l'heure; M. Bégin en a émis d'autres: professionnalisation des enseignants, etc., support. Je vous suggérerais, moi, à titre de directeur des Services éducatifs, de mettre un petit bout qui va maintenir un rôle au niveau de la commission scolaire dans l'évaluation de la qualité de l'enseignement qui est donné aux élèves, dans la reddition de comptes des écoles, qu'elle ne soit pas uniquement une reddition financière mais une reddition de résultat. Alors, je pense que les écoles, si on décentralise davantage, ce sont des petites unités – elles ont le nez collé sur la vitre – elles ont besoin que quelqu'un, quelque part, leur donne des critères, leur amène le développement, la recherche pour aider les enseignants, les supporter, etc.

Et le fait que vous soyez muette là-dessus, bien, ça ne donne pas de chance aux commissions scolaires qui, à ce niveau-là, finalement, considéraient que c'était un des outils importants.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Pelletier. En conclusion, j'inviterais le député de Marquette à quelques remarques.

M. Ouimet: Oui. Je voudrais remercier, au nom de mes collègues, les représentants de la Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin pour la qualité de votre présentation. La réflexion que vous soumettez à notre commission, également vos recommandations, est susceptible d'enrichir nos débats éventuels. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vous remercie à mon tour pour votre présentation, peut-être encore plus pour l'expérience concrète que vous vivez dans vos établissements et dans votre commission scolaire. Et je réitère le fait que notre souhait, c'est peut-être d'amener d'autres écoles, d'autres établissements, d'autres commissions scolaires à travers le Québec à s'inspirer de ce que vous avez tracé comme voie. C'est un peu, et beaucoup, le sens de l'avant-projet de loi qui est devant nous. Alors, merci.

M. Roy (André): Merci bien.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. Souhaitez-vous faire un dernier point, M. le vice-président?

M. Lecours (Charles-Henri): Non, Mme la Présidente. Tout est beau, tout a été dit.

La Présidente (Mme Blackburn): Tout a été dit. Bien. Merci. Alors, au nom des membres de la commission et en mon nom personnel, je voudrais vous remercier, M. Caron, M. Roy, M. Lecours, M. Pelletier et M. Bégin, de votre participation aux travaux de cette commission. Je ne doute pas que vous saurez, comme vous l'avez fait par le passé, tirer le meilleur avantage et le meilleur parti de ce projet de loi et de ses retombées sur la réussite éducative. Bonne fin de journée.

M. Lecours (Charles-Henri): Merci, Mme la Présidente.

M. Roy (André): Vous ne voulez pas dire qu'on est insoumis, là. Ce n'est pas ça que vous voulez dire?

La Présidente (Mme Blackburn): Si...

M. Roy (André): Vous ne voulez pas dire qu'on est insoumis, non?

La Présidente (Mme Blackburn): Non. Quelqu'un est venu nous dire, à la commission de l'éducation, au moment où on tenait des audiences sur la réussite éducative, que les écoles qui réussissaient le mieux, c'étaient celles qui étaient un peu délinquantes.

Mme Marois: On n'a rien entendu.

La Présidente (Mme Blackburn): Ça mériterait peut-être un peu d'explications. Ce que les gens sont venus nous dire à ce moment-là, c'est que, souvent, les règles extrêmement contraignantes à l'intérieur desquelles l'école assumait ses responsabilités, il fallait avoir suffisamment de souplesse pour un peu contourner ces règles, dans ce sens-là être un peu délinquant, pour réussir. Alors, voilà, l'explication est donnée. Je n'invite pas à la désobéissance civile.

Alors, les représentants de la Commission scolaire de la Chaudière-Etchemin ayant quitté la table, j'inviterais les représentants de la Commission des écoles catholiques de Montréal à venir prendre place à la table des témoins. Et comme déjà – et ce n'est pas un reproche – c'est le même président, que j'ai eu l'occasion de rencontrer à diverses reprises à cette commission, j'inviterais M. Michel Pallascio, président de la commission scolaire, à présenter les personnes qui l'accompagnent. Mais au préalable, je voudrais vous souhaiter la plus cordiale bienvenue à cette commission. Une fois que vous aurez présenté les personnes qui vous accompagnent, je vous inviterais à présenter votre mémoire. Les règles, à titre indicatif: 10 minutes de présentation du mémoire, suivi d'un échange avec les membres de la commission. Bonjour, M. Pallascio.


Commission des écoles catholiques de Montréal (CECM)

M. Pallascio (Michel): Je vous remercie, Mme la Présidente. Alors, on va tenter de faire ça en 10 minutes. Je voudrais vous présenter les gens. À ma droite, Mme Gadoury, la vice-présidente de la commission scolaire.

La Présidente (Mme Blackburn): Bonjour, Mme Gadoury.

M. Pallascio (Michel): À ma gauche, M. Archambault, qui est le directeur général de la commission scolaire...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Archambault.

M. Pallascio (Michel): ...et M. Gilles Hébert, qui est le directeur général adjoint aux affaires administratives de la Commission.

Alors, Mme la Présidente, avant de commencer la présentation du mémoire, on pourrait le résumer en disant: Oui, mais – et un «mais» souligné. Vous savez, en ce qui concerne le principe de la décentralisation, à la CECM, depuis trois ou quatre ans, nous le vivons déjà. Nous avons déjà un processus de décentralisation budgétaire et de services éducatifs au niveau des écoles qui est enclenché depuis ces années-là. Mais, par contre, il y a des principes que nous avons maintenus jusqu'ici, entre autres, des principes d'unité d'actions, donc, d'unité d'objectifs aussi au niveau de la Commission, des principes aussi de continuer à mettre en commun nos ressources qui s'amincissent d'année en année, et aussi de garder une certaine répartition équitable de ces mêmes ressources dans l'ensemble des écoles, et même, dans certains cas, une certaine forme de péréquation pour permettre de répondre à des besoins particuliers.

On voudrait souligner tout d'abord que l'avant-projet de loi est peu explicite quant aux liens qui existent entre le conseil d'établissement et la commission scolaire, et quant à l'étendue des pouvoirs qui sont accordés aux différents partenaires du système.

Le premier point, c'est la pertinence des mandats confiés au conseil d'établissement. Alors, selon les textes ministériels, la principale raison d'être des conseils d'établissement est la participation des parents et des membres de la communauté à la prise des décisions qui concernent l'école afin que cette dernière corresponde aux aspirations et aux attentes du milieu. Alors, si les fonctions et les pouvoirs généraux consignés aux articles 67 à 74 reflètent bien cette raison d'être, et ce, tout particulièrement à l'article 67, lorsque l'on précise que «le conseil d'établissement détermine les orientations et le plan d'action de l'école, voit à leur rédaction et procède à leur évaluation», il n'en est pas de même de ceux reliés aux services éducatifs, aux services à la communauté et aux ressources humaines, matérielles et financières.

(11 h 20)

Je pense qu'on demande beaucoup aux parents à l'intérieur de cet avant-projet de loi. On demande, entre autres, aux parents et aux membres de la communauté d'être des gestionnaires et aussi des pédagogues. Alors, s'il est juste et légitime de solliciter l'avis des parents des élèves sur les orientations et modalités d'application des services qui leur sont destinés, il ne va pas de soi qu'il leur faille prendre des décisions aux lieu et place des administrateurs et pédagogues ou intervenir sur les contenus des programmes d'études. À cet effet, à l'automne 1996 qui est assez récent, nous avons eu une consultation de l'ensemble des écoles sur tout le processus budgétaire de la Commission. Nous avons fourni à chaque école des outils très importants pour qu'elles puissent nous répondre en ce qui concerne l'allocation des budgets, et je pense que le processus... D'abord, plus de la moitié des écoles ont renoncé à faire cet exercice, devant l'ampleur et la complexité des éléments qui étaient devant eux, et nous ont dit carrément que cela relevait des administrateurs et des pédagogues.

Il faut aussi souligner ici les limites du bénévolat. Accomplir l'infinité des tâches qui risquent d'être dévolues au conseil d'établissement demande une disponibilité dont peu de personnes jouissent et dépasse certainement, dans la majorité des milieux, l'intérêt premier des parents.

Les programmes d'études. L'article 76 donne au conseil d'établissement la possibilité d'intervenir directement sur les programmes d'études. Cette intervention touche l'enrichissement, ce qui est, à notre avis, tout à fait légitime et ne peut que susciter un apport positif. Toutefois, l'article 76 va plus loin. On peut y lire: «Avec l'autorisation du ministre, un conseil d'établissement peut attribuer à un programme d'études local un nombre d'unités supérieur à celui prévu au régime pédagogique.» Nous croyons dangereux de confier ce dernier mandat au conseil d'établissement. On risque ainsi de produire deux types d'écoles: celles des élèves performants et celles des autres, ces deux types étant souvent conditionnés par le niveau socioéconomique des familles des élèves. À notre avis, l'adaptation de l'enseignement concerne la manière de faire atteindre les objectifs et non l'adaptation des objectifs, étant entendu qu'on ne peut adapter qu'à la hausse ou à la baisse. Alors, doit-on comprendre que, dans les milieux où les élèves trouveraient des difficultés, on adaptera les objectifs qui deviendront alors moins exigeants? Par ailleurs, si les programmes d'études officiels semblent trop ardus pour un milieu, pourra-t-on contourner les exigences de qualification en augmentant les unités des programmes locaux et obtenir malgré tout un diplôme d'études? De plus, il est difficilement concevable que chaque établissement sollicite directement l'autorisation du ministre pour augmenter le nombre d'unités. Cette manière de faire pourrait facilement occasionner un engorgement du système.

Là-dessus, nous voudrions rappeler le rôle premier du ministère de l'Éducation qui est de déterminer ces objectifs des programmes d'études et les exigences pour la diplomation.

L'article 77 permet aussi au conseil d'établissement d'approuver la répartition du temps alloué à chaque matière obligatoire ou à option, sauf en ce qui concerne l'enseignement moral et religieux. Ici encore, le conseil d'établissement a prise sur le programme d'études. Même si l'on reconnaît qu'il est souhaitable d'adopter localement le temps d'enseignement, la façon de faire mise de l'avant dans l'avant-projet de loi nous paraît hasardeuse. D'un côté, malgré le fait que l'intervention du conseil d'établissement soit limitée à l'approbation des propositions de la direction de l'établissement, qu'adviendra-t-il si le conseil n'approuve pas les propositions de la direction? Verrons-nous se former des coalitions pour refuser des propositions émises? Assisterons-nous à des réunions interminables, quand on sait qu'au Québec le système d'éducation ne laisse personne indifférent et que chacun a son idée quant aux moyens d'en améliorer la performance?

D'un autre côté, il est inconcevable que le temps d'enseignement d'une matière varie de façon importante d'une école publique à l'autre et d'une année à l'autre. Effectuer des apprentissages exige, pour la majorité, un temps que l'expérience pédagogique permet de calculer, et il serait périlleux de soumettre les élèves à une répartition du temps qui serait le reflet d'intérêts les plus variés. De plus, on connaît, surtout à Montréal, des taux effarants de déménagements. Comment un enfant pourrait-il se retrouver en cours d'année dans un tel labyrinthe de grilles horaires? Enfin, il faut souligner aussi les coûts sociaux que peut engendrer la disparité, d'une année à l'autre, dans la définition des postes d'enseignants. Ainsi, à titre d'exemple, on pourrait assister à une demande accrue d'enseignants en mathématiques, suivie l'année suivante d'une baisse importante du nombre d'enseignants dans cette matière. Afin de maintenir une uniformité minimale ainsi qu'une certaine continuité dans la répartition du temps alloué à chaque matière, nous recommandons que la commission scolaire approuve, en ce domaine, les propositions des conseils d'établissement.

Les services à la communauté. On prévoit, dans l'avant-projet de loi, la possibilité d'exiger une contribution financières des usagers de certains services à des fins sociales, culturelles ou sportives. Il va sans dire que ces sommes que pourront payer les usagers des milieux défavorisés n'ont aucune commune mesure avec celles que pourront fournir les milieux mieux nantis. Puisque lesdits services seront financés à même les contributions perçues, on peut conclure que les services qui seront mis en place dans les milieux aisés seront de beaucoup supérieurs à ceux des milieux moins riches. Encore une fois, les pauvres seront moins bien servis. Nous affirmons que cette modalité va à l'encontre de l'esprit de la loi qui propose des normes d'allocation des budgets équitables et non discriminatoires, et nous recommandons que les services éducatifs et activités sociales, culturelles et sportives fassent l'objet, pour les milieux pauvres, d'une subvention particulière du ministère de l'Éducation.

Les tâches administratives. Ça comprend, entre autres, l'article 89. Nous comprenons que cet article vise à permettre l'utilisation des locaux de l'école pour les besoins de la communauté et ainsi augmenter le budget de l'école par des locations de locaux inutilisés ou en dehors des heures de classe. Ce principe est peut-être louable et des gains substantiels peuvent effectivement en résulter. Toutefois, le fait de confier à l'école la responsabilité de cette tâche occasionne un surcroît de travail et risque d'entraîner nombre de désagréments.

À la CECM, une étude a été réalisée sur ce sujet en 1995, où on voulait examiner la possibilité de décentraliser. Alors, sans vouloir élaborer, je voudrais rappeler les problèmes qui furent considérés: des tâches administratives reliées aux locations, visites de lieux, baux, perception des revenus, les responsabilités légales, assurances, permis, les conventions collectives, le respect de la Charte des droits et libertés et la non-discrimination des clients éventuels, et bien d'autres. Devant la lourdeur de la procédure nécessaire pour favoriser l'équité envers les locataires potentiels, devant l'inéquité du partage des revenus entre les écoles, devant également la difficulté d'assurer la protection des biens et le respect des conventions collectives, il a été décidé de maintenir une gestion centralisée de cette location de locaux. Et je voudrais rappeler un point très important: ça permet aussi une péréquation à l'intérieur de nos écoles. Parce qu'il était bien entendu qu'une école qui est remplie à pleine capacité n'a pas de locaux à louer; dans d'autres milieux, c'est l'inverse. Alors, ça amène des distorsions. Et dans cette étude réalisée, pour nous permettre une certaine forme de péréquation, il a été décidé de maintenir centralisé ce processus de location pour permettre à tous d'y participer.

Nous sommes conscients que la situation n'est pas identique dans tous les milieux. Cependant, avec l'avènement de commissions scolaires plus grandes et plus populeuses, il deviendra de plus en plus difficile de gérer un tel dossier localement. Afin de permettre à chaque région de se doter d'une structure de fonctionnement adaptée à ses besoins, nous recommandons d'assujettir l'article 89 aux normes de la commission scolaire, car ce n'est pas en se voyant confier de plus en plus de tâches administratives, qui ne sont pas nécessaires pour adapter l'enseignement, que la direction pourra se consacrer au leadership pédagogique.

Les responsabilités de la commission scolaire face aux décisions du conseil d'établissement. Très rapidement. Dans l'avant-projet de loi, le directeur demeure toujours un employé de la commission scolaire. Par contre, l'avant-projet de loi ne précise pas sous quelle autorité est placée l'école. Il accorde au conseil d'établissement des pouvoirs importants qui occasionneront fréquemment la gestion de sommes d'argent et donne à la commission scolaire un mandat de contrôle sur les décisions du conseil d'établissement. Par contre, ce mandat, qui exige un travail imposant de vérification, s'exerce a posteriori. Et bien que la commission scolaire puisse substituer ses décisions à celles d'un conseil contrevenant à ses normes et règlements, qu'adviendra-t-il dans les cas d'engagements litigieux? La commission scolaire ne pourra licencier les membres du conseil puisqu'elle n'a pas d'autorité sur eux. Elle ne pourrait que difficilement les poursuivre en justice devant l'immunité dont ils jouissent dans l'exercice de leurs fonctions. En outre, tout recours en dommages et intérêts pourrait s'avérer illusoire, aucun cautionnement ou assurance n'étant requis. Le directeur d'école, nous le rappelons, n'ayant pas droit de vote, ne pourrait être tenu, non plus, responsable des décisions d'un conseil sur lequel il n'a pas d'autorité.

L'objectivité des normes de financement. L'article 472, relativement à l'allocation des subventions pour dépenses de fonctionnement des commissions scolaires, prévoit déjà une répartition proportionnelle au nombre d'élèves inscrits dans les écoles...

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio, je pourrais vous demander d'accélérer un peu le rythme?

M. Pallascio (Michel): Oui. Enfin, on modifie ces normes pour donner des normes qui auparavant étaient objectives à des normes quelque peu subjectives. Même si des critères sont là, nous croyons que tous... Enfin, ce n'est pas une question d'égalité, mais une question d'équité. Il faut garder quand même une forme qui permettrait à certains milieux de pouvoir obtenir des subventions complémentaires.

La transformation du leadership de la direction d'établissement. Là encore, on demande au directeur d'école d'être beaucoup plus qu'un directeur d'école, d'être un animateur. On lui donne aussi des éléments qui en feront peut-être plus un administrateur que le premier leader pédagogique de l'école.

(11 h 30)

Un dernier point. La représentation des parents, pour nous, est absolument essentielle. Nous voulons revenir et insister sur cet élément-là. Nous croyons que c'est absolument important que les parents restent majoritaires sur le conseil d'établissement, avec le poste de présidence qui leur soit réservé, tel qu'il existe présentement au niveau du conseil d'orientation. En ce qui concerne les représentants de la communauté, nous ne voyons pas pourquoi ils auraient le droit de vote, puisque les intérêts premiers de l'école reviennent aux parents et qu'ils devraient être, avec les représentants enseignants et direction d'école, les premiers responsables de ce qui se passe au niveau de l'école.

Alors, Mme la Présidente, nous allons répondre aux questions. Je comprends que les gens pourront prendre connaissance de l'intégralité de notre mémoire qui est déposé.

La Présidente (Mme Blackburn): Soyez rassuré, les membres de la commission en ont pris connaissance. Et vous pourrez compléter sur les informations peut-être trop brèves que vous nous avez données à l'occasion des questions. Alors, la parole est à Mme la ministre. Madame.

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Merci, M. le président, de votre présentation. Vous avez dû l'écourter un peu, mais, effectivement, on était presque rendu à la fin. Alors, on a pris connaissance, la majorité d'entre nous, des mémoires d'un bout à l'autre.

Je ne voudrais pas vous mettre en porte-à-faux, évidemment, avec ce que nous ont dit les représentants des comités de parents de la CECM, mais je regarde les mémoires qu'ils nous ont présentés – ils sont venus hier – et on nous dit à plusieurs reprises, et je cite même le mémoire: «Nous considérons ce projet de loi très positif. Nous sommes heureux de la place qui est accordée aux parents.» On dit: «À la CECM, les parents sont très impliqués dans les écoles.» Et plus loin, on dit: «Les parents sont prêts à relever les défis, en tant que partenaires.» Dans son ensemble, on accepte très positivement le projet. Et formellement, on souhaite être impliqué – j'essaie de trouver l'endroit exact – dans le choix même du matériel didactique. On va très loin. Même plus loin... Voilà, on dit: «En ce qui concerne le choix du matériel didactique et des manuels, les parents ont toujours eu la possibilité de se prononcer par le biais de consultations. Les parents sont les clients et l'utilisation faite de ce produit nécessite, selon nous, l'opinion des parents. Nous regrettons que cette consultation ne soit pas officialisée dans la loi comme c'est le cas présentement.» Alors, ils souhaitent aller plus loin, finalement, que ce qu'on fait maintenant.

Alors, ça m'étonne un peu, dans le fond, quand vous dites une chose, mais, dans les faits, toutes les recommandations que vous présentez vont dans le sens de continuer à conserver les pouvoirs au niveau de la commission scolaire. J'ai un petit peu de difficulté à vous suivre parce que, dans le fond, dans l'esprit de ce que vous faites dans vos écoles, les parents semblent dire qu'ils sont consultés, qu'ils sont mis à contribution. Alors là, dans le fond, on vient de l'officialiser par l'avant-projet de loi qui est ici.

C'est vrai qu'on donne des responsabilités aux parents. On ne leur donne pas le pouvoir de décider de ce qui va se passer dans l'école en termes de contenu des matières, ça, c'est évident. Et là-dessus, je vais le répéter ad nauseam s'il le faut, il y aura un curriculum national, il y aura des matières et des contenus que, obligatoirement, les enfants devront s'approprier, les élèves devront s'approprier et sur lesquels ils seront d'ailleurs évalués. Et ça, c'est évident qu'on passerait à côté de notre responsabilité s'il n'y avait pas cela.

Mais c'est vrai aussi que nous souhaitons engager davantage les parents. Nous souhaitons leur participation. Et nous souhaitons, à cet égard, qu'ils aient et qu'ils assument plus de responsabilités. Si, pour ce faire, il faut qu'on regarde du côté d'une possibilité qu'ils se dotent de comités supplémentaires à ceux qu'ils ont maintenant dans l'avant-projet de loi, on est prêt à regarder de ce côté-là. Mais, en tout cas, j'ai de la difficulté un petit peu avec votre mémoire sous cet angle-là.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président, M. Pallascio.

M. Pallascio (Michel): Merci, Mme la Présidente. Excusez-moi. Je voulais mentionner: Si on prend l'exemple que vous donniez sur le choix des manuels, effectivement, depuis quelques années, la commission va au-delà de la loi. Nous consultons nos parents sur le choix des manuels et du matériel didactique sur ce point-là. Et nous voulons continuer dans le même sens, nous l'appliquons déjà. Alors, ce n'est pas pour revenir en arrière.

Ce que nous mentionnons dans notre mémoire, c'est plutôt sur la question des matières: le temps alloué à chaque matière, qui peut varier d'une école à l'autre; l'importance donnée à certaines matières plutôt qu'à d'autres; le manque d'uniformité, à un moment donné, qui peut varier d'un milieu à l'autre et les choix qui pourront être faits dans les écoles et qui pourraient amener des distorsions importantes. Alors, c'est là-dessus, à l'intérieur de notre mémoire, que nous insistons, sur les conséquences que peuvent apporter de tels changements si on laisse au niveau local la possibilité d'amener une variation de...

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Remarquez que, quand je lis votre mémoire, vous dites: «Nous croyons dangereux de confier ces derniers mandats au conseil d'établissement.» Pourquoi serait-il plus dangereux de les confier au conseil d'établissement qu'il ne le serait de les confier à la commission scolaire? Tu sais, j'ai de la difficulté parce que, je le répète, on aura un curriculum national. Et ça, je comprends votre préoccupation, vous le redites et je suis d'accord avec vous, et ça, on ne peut pas se soustraire à cette obligation-là. Et en ce sens, si on décidait tout d'un coup que quelqu'un ne va pas apprendre les mathématiques dans telle école, et moins de français dans telle autre école, et pas de langue seconde, ça n'a pas de bon sens; je suis d'accord avec vous, on se comprend bien. Bon. Donc, il faut qu'il y ait ce curriculum de base. Il y aura ce curriculum de base et on aura un temps indicatif aux matières comme on l'a maintenant. D'ailleurs, c'est comme ça déjà et je pense que les gens acceptent assez bien ce système-là. Ils veulent le bonifier et l'améliorer, mais ils disent: Ça va. C'est plutôt sur le contenu, où on veut revenir aux choses plus fondamentales. Donc, il y aura ce curriculum de base. Ça veut dire que tous les enfants, en bout de piste, tous les élèves au primaire et au secondaire devront avoir acquis les connaissances qui concerneront ces matières de base.

Mais après ça, si une école souhaite ajouter un peu plus d'heures, par exemple, pour enseigner – parce qu'il y aura une certaine marge – utiliser les heures disponibles pour enseigner la langue seconde avec des expériences particulières, pour enseigner une troisième langue au secondaire, tel que prévu, mais y accorder un peu plus de temps parce que les objectifs sont atteints sur le programme de base, qu'est-ce qui empêcherait qu'une école puisse, avec le conseil d'établissement... Mais ce sera toujours l'équipe-école au sens de la direction de l'école et des professeurs, des enseignants qui proposeront des choses, parce que le conseil d'établissement approuve une proposition déposée – vous en faites d'ailleurs une analyse ici – par la direction générale de l'école. C'est évident qu'à la limite il faut un mécanisme qui va prévoir que, s'il n'y a pas d'approbation, le programme va s'appliquer dans un temps donné, parce qu'on ne peut pas tergiverser pendant des heures, vous avez raison, il faut prévoir cela. C'est parce que je suis un petit peu, je le répète, mal à l'aise avec ça, en disant: Pourquoi serait-ce plus dangereux que les parents se préoccupent de ça avec des représentants, d'ailleurs, de l'école – avec le directeur ou la directrice de l'école, qui sera sur le conseil d'établissement, sans droit de vote à ce moment-ci – pourquoi serait-ce plus dangereux que ce soit là que ça se fasse qu'à la commission scolaire?

Sur la question des dérogations, vous dites: Ça risque d'être engorgé si ça s'en va au ministère. Êtes-vous conscient qu'actuellement je donne des dérogations sur des classes dans des écoles pour qu'on se soustraie – vous le savez, hein – par exemple, au cours de formation personnelle et sociale? On dit: Mais, nous, on voudrait enrichir notre curriculum de plus d'heures d'anglais, par exemple, langue seconde, ou ouvrir sur l'enseignement d'une troisième matière, ou ouvrir sur l'enseignement de la musique, et là on m'écrit, comme ministre, on me dit: On aimerait, Mme la ministre, déroger, que dans telle classe de troisième secondaire on se soustraie à tel cours; et moi, je donne l'autorisation. Et ça ne s'engorge pas pour l'instant, ce n'est pas engorgé, sauf que là, ce n'est pas dans telle classe. Si c'est une dérogation plus générale, alors, je me dis: Elle peut gérer. Vous comprenez un peu mon analyse? En tout cas, j'aimerais ça vous entendre sur ça.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio.

(11 h 40)

M. Pallascio (Michel): Alors, déjà – excusez-moi – dans les exemples que vous donnez, il y a quand même des objectifs qui sont connus sur ce point-là. Il y a deux articles sur lesquels je voudrais revenir: d'abord, l'article 76, qui donne au conseil d'établissement la possibilité d'intervenir directement sur les programmes d'études. Quand cette intervention touche l'enrichissement, nous le trouvons tout à fait légitime quand on parle d'enrichissement ou de complément. Mais, on le souligne: Toutefois, l'article 76 traite aussi de «l'adaptation par les enseignants des objectifs et des contenus indicatifs des programmes d'études établis par le ministre». Et plus loin, on lit: «Avec l'autorisation du ministre, un conseil d'établissement peut attribuer à un programme d'études local un nombre d'unités supérieur à celui prévu au régime pédagogique.» Et l'article 77 suivant permet au conseil d'établissement «d'approuver la répartition du temps alloué à chaque matière obligatoire ou à option». Alors, c'est évident que dans chaque milieu, à un moment donné, nous allons nous retrouver avec des décisions qui vont se prendre, sur ces points-là, qui vont faire remanier, si vous voulez, la grille horaire. Parce qu'on ne parle pas strictement de complément, mais on parle réellement de répartition du temps alloué à chaque matière obligatoire ou à option. C'est ce qu'on retrouve aux articles. Je présume que le ministère va peut-être, éventuellement, préciser ces éléments-là, mais c'est ce qu'on lit actuellement dans les articles de l'avant-projet de loi.

La Présidente (Mme Blackburn): Mme la ministre.

Mme Marois: Je ne veux pas insister trop, Mme la Présidente, mais, encore là, n'oublions pas qu'il y a une prescription quant à l'acquisition des connaissances de base et plus, d'un curriculum national, autrement dit. S'il n'y avait pas le curriculum national, je pense que vous auriez complètement raison. Et je pense que ça pourrait nous amener à aller dans toutes les directions et, vraiment, à perdre de vue l'objectif de réussite, d'apprentissage et d'acquisition de connaissances. Mais, à partir du moment où on a une base, si, en bout de piste, tout le monde acquiert ces connaissances, pour le reste, je me dis: Si on peut bonifier, améliorer, on ne peut jamais aller à la baisse. Je pense que c'est là que la lecture des articles ou l'interprétation est moins bonne. On ne peut pas aller à la baisse, parce que le fond, il faudra l'acquérir, comme connaissances. O.K.? Ça, c'est important pour moi, parce que, sans ça, effectivement, là on irait n'importe où.

Actuellement, c'est à titre indicatif, vous savez. Déjà, les matières, on les a déterminées dans une grille horaire, bien sûr, et on dit: À titre indicatif, on devrait accorder tant d'heures au français, tant d'heures aux mathématiques, tant d'heures aux sciences. C'est devenu, ce titre indicatif, la règle, mais ça reste... Dans le fonctionnement actuel, c'est déjà comme ça.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette, porte-parole officiel de l'opposition en matière d'éducation. M. le député, vous avez la parole.

M. Ouimet: Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'accueillir M. Pallascio, Mme Gadoury, M. Archambault et M. Hébert. C'est toujours un plaisir de vous retrouver.

Moi, d'entrée de jeu, je voudrais vous féliciter – parce que j'ai pris connaissance, ce matin, des journaux – vous avez réussi un tour de force de terminer quatrième sur huit commissions scolaires. Au niveau de l'île de Montréal, connaissant fort bien les milieux défavorisés, l'intégration des nouveaux arrivants, comment tout ça peut avoir un impact sur la réussite éducative, vous réussissez un tour de force et ça mérite toutes nos félicitations. Je tenais à vous le dire d'entrée de jeu. Je ne sais pas s'il y a là continuité par rapport à des actions que j'avais entreprises, à l'époque, avec les cohortes, mais passons. Je sais que vous faites un travail exceptionnel.

Une voix: On le maintient.

M. Ouimet: J'aimerais vous questionner sur ce que vous dites, dans votre mémoire, à la page 10: «On peut s'interroger sur les répercussions qu'entraînera ce nouveau rôle sur la tâche de la direction et sur la formation qu'il faudra assurer aux gestionnaires d'établissement». En d'autres termes, le rôle du directeur d'école dans tout le processus de la décentralisation, est-ce qu'il y a une crainte, selon l'expérience que vous vivez, qu'il perde quelque peu son leadership pédagogique?

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

M. Pallascio (Michel): On a une crainte importante. C'est que déjà, à l'heure actuelle, on a de la difficulté au niveau du recrutement des directions d'école parce que, comme vous le savez, nous sommes en processus de décentralisation, à la CECM, donc, il y a des tâches plus importantes qui ont été confiées aux directions d'école, depuis quelques années. Et on a déjà, au moment où on se parle, de la difficulté à recruter. Alors, ce qu'on demande actuellement aux directeurs d'école, c'est d'aller beaucoup plus loin dans l'administration générale d'un établissement, en plus d'un rôle d'animateur. Donc, des éléments qui vont beaucoup plus loin que ce que l'on demande présentement à nos directions d'école. Et nous sommes à peu près certains que ça va avoir un impact énorme sur la sélection et même les candidatures, au niveau de la direction d'école. Mais, plus fondamental, jusqu'ici, la direction d'école a toujours été, pour reprendre une expression, le premier pédagogue de l'école. Nous sommes en train, dans cet objectif-là, de lui demander des éléments de gestion où il n'aura pas le temps voulu pour s'occuper de son premier devoir qui est l'animation pédagogique à l'intérieur de l'école. Alors, il va devenir beaucoup plus un administrateur qu'un pédagogue. En tout cas, ce seront les éléments que l'on va demander à un directeur d'école, les capacités qu'on va demander à un directeur d'école bientôt.

M. Ouimet: Moi aussi...

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, M. le député.

M. Ouimet: ...je pense que les études, en tous les cas, tant américaines que québécoises, sur la question, ont tendance à vous donner raison sur ce point, parce qu'on dit, effectivement, que la tâche administrative de la direction d'école s'alourdit grandement avec le processus de décentralisation.

Sur la question, maintenant, de l'avant-projet de loi, par rapport à l'expérience que vous vivez. Vous avez déjà amorcé un processus de décentralisation. Là, je ne me souviens pas si c'était en 1991 ou en 1992. Mais les outils que vous donne l'avant-projet de loi, est-ce que ça vous permet de faire plus sur le plan de la décentralisation? Est-ce que vous vous sentez mieux outillés avec ce qui est déposé devant nous?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio.

M. Pallascio (Michel): Merci. Écoutez, vous savez, la décentralisation, c'est un objectif, mais ce n'est pas un absolu, non plus. Alors, c'est pour ça qu'au début on mentionnait... Il y a quand même certains principes qu'on doit, à notre avis, maintenir au niveau central. On a donné l'exemple, tout à l'heure, de l'utilisation du matériel, des locaux. C'est un exemple typique que l'on retrouve. Quand on commence à demander, au niveau de certaines activités, de permettre d'aller chercher de l'argent dans certains milieux, il est sûr qu'ils seront dans l'impossibilité d'avoir les même services que d'autres écoles se paient, parce qu'ils sont d'un milieu socioéconomique... Donc, il y a des milieux qu'il faut absolument qu'ils aient un soutien. Depuis nombre d'années, la Commission exerce, à l'intérieur même de son propre budget, une forme de péréquation qui vient compléter des actions que le ministère fait, que ce soit au niveau des milieux défavorisés ou des milieux interculturels. Alors, c'est ce qui nous permet de tenter de donner le même service, malgré le fait que, dans certains milieux, ils n'aient pas la capacité financière de s'offrir, même dans les services complémentaires, certains de ces services-là. Alors, pour nous, je pense qu'il est essentiel qu'il y ait une action commune, qu'il y ait des ressources mises en commun, et, d'après nous, la commission scolaire est bien placée pour pouvoir faire cette forme de péréquation.

Je reprends l'exemple typique des immeubles chez nous qui nous rapportent, au niveau des locations, plusieurs millions de dollars par année qui sont répartis à l'intérieur de nos écoles. Moi, j'ai un quartier où les écoles débordent. Alors, ils ne pourraient pas en louer, de locaux. Par contre, on sait que, dans d'autres... Mais, si on laisse au niveau local, certains vont être privilégiés par rapport à d'autres, alors que ces ressources-là, d'après nous, doivent être collectées et réparties selon les besoins, en aidant, si possible, des milieux en difficulté et leur permettre, peut-être, d'obtenir des formes... et ça, ça prend absolument un bureau central, à notre avis, pour faire cette répartition. C'est un exemple de ce qui existe chez nous.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci.

M. Ouimet: Peut-être une dernière question, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Blackburn): Oui, une dernière question, M. le député.

M. Ouimet: ...sur les enseignants. Je sais que vous avez une excellente collaboration avec votre personnel enseignant. J'ai vu combien de fois et le président et les cadres et les enseignants tenir des conférences de presse conjointes, ce que, moi, je ne réussissais pas à faire lorsque j'étais président.

Vous avez une bonne collaboration de la part des enseignants. Cependant, l'Alliance est venue devant nous, en commission parlementaire, la semaine passée, dénoncer l'avant-projet de loi et c'est une fin de non-recevoir catégorique.

Ça vous place dans quelle position si l'avant-projet de loi est adopté, avec quelques retouches ici et là? Ça vous place dans quelle position, comme commission scolaire, par rapport à votre corps d'enseignants qui, eux, disent: Il n'en est pas question; nous ne souscrivons pas à cette réforme et nous n'y adhérons pas non plus?

(11 h 50)

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio.

M. Pallascio (Michel): Alors, peut-être rappeler, dans un premier temps, que la formule de décentralisation que nous avons déjà en place n'a pas nécessairement l'acquiescement de l'Alliance des professeurs, même au moment où on se parle. Malgré tout, la Commission a été de l'avant dans ce processus de décentralisation. Je pense qu'il faut regarder aussi l'ensemble des intervenants au niveau de l'école.

Quand je regarde le processus de décentralisation chez nous, même s'il y a des réactions au niveau des enseignants, les directions d'école ont adhéré à ce processus-là, au niveau des parents aussi qui ont adhéré à ce processus-là.

Alors, il est certain que la réaction, elle est très forte. Nous l'avons vu à la lecture des journaux et des médias. Ceci étant dit, on pense qu'en tenant compte, naturellement, des remarques que nous faisons sur l'absolutisme au niveau de la décentralisation, s'il y a des éléments que l'on peut corriger, si vous voulez, nous pensons qu'il est possible d'y faire face. On voudrait rappeler aussi que c'est une représentation syndicale que vous avez devant vous. Et je le répète, au niveau de nos écoles, nous vivons déjà un certain processus de décentralisation, ce n'est pas toujours facile. Je peux vous dire et je pense que je peux affirmer que, même si ce n'est pas écrit nulle part, la très grande majorité de notre personnel collabore et travaille de façon professionnelle à l'intérieur de nos écoles dans un cadre relativement décentralisé.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le président. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs, madame. Je vais simplement aller du côté de la représentation au niveau du conseil d'établissement. À la page 11, quand vous parlez de la participation des membres de la communauté, vous vous interrogez sur la pertinence de leur droit de vote. Vous dites même: «Serait-il approprié que les représentants de la communauté fassent valoir leur point de vue au conseil d'établissement, tout en laissant la décision aux parents d'élèves et au personnel de l'école...?» Alors, pourquoi vous allez aussi loin sur la pertinence même de leur laisser le droit de vote? Puis je pense que, de là à ce qu'ils puissent être président du conseil d'établissement, donc ce serait encore plus utopique, selon vous. Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi cette méfiance.

La Présidente (Mme Blackburn): M. le président.

M. Pallascio (Michel): Écoutez, nous croyons d'abord que les premiers intéressés sont les parents. Ce sont eux les principaux responsables en éducation sur ce point-là. Et les autres intervenants, que ce soient les enseignants, le personnel de l'école, les directions d'école, vont être les premiers responsables de l'application des décisions qui vont être prises de ce côté-là. Alors, nous croyons que le droit de vote devrait être réservé à ces personnes-là qui sont les premiers intéressés et les premiers responsables de ce qui va être décidé et éventuellement appliqué à l'intérieur des établissements.

En ce qui concerne les relations avec la communauté, déjà, dans la plupart des écoles, cela se fait sans la nécessité du droit de vote à ce niveau-là. Et d'avoir un représentant de la communauté au niveau du conseil d'établissement, ça ne cause pas de problème. Sauf qu'au niveau du droit de vote on se pose la question sur la pertinence d'accorder un droit de vote à une personne qui n'est pas directement soit intéressée ou responsable dans les actions de l'école.

Mme Robert: Mais vous ne pensez pas qu'au niveau de la... Parce que le CE, c'est une dynamique aussi. Le CE va vraiment jouer son rôle s'il dynamise le milieu comme tel. Je ne sais pas. Moi, supposons que je sois intéressée à aller sur un CE, j'ai été enseignante, j'ai une expérience, j'ai déjà eu des enfants, etc., et je veux apporter cela à ma communauté, il me semble que je deviens un apport au CE. Justement, je ne suis pas aux prises, en train d'élever mes enfants, puis, veux veux pas, c'est un petit peu plus, j'ai déjà une expérience, donc je deviens un apport au niveau du CE. Pourquoi cette méfiance vis-à-vis de cet apport que la communauté pourrait apporter comme gestion? Parce que le CE va faire une gestion de cet outil-là, de cette école-là qui appartient à la communauté.

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio.

M. Pallascio (Michel): Je voudrais bien rappeler que nous ne sommes absolument pas en désaccord avec le fait qu'il y ait un membre du conseil de la communauté, si vous voulez, à l'intérieur du conseil d'établissement. Déjà, comme je vous l'ai dit, les relations, dans la plupart des écoles, avec le milieu communautaire se font. D'avoir quelqu'un de façon permanente sur le conseil d'établissement, nous sommes en faveur de ça, mais nous croyons qu'au niveau du droit de vote c'est une question importante. Puis, vous le savez, le comité central de parents, chez nous, autant que même la Fédération des comités de parents, questionne la question de la majorité au niveau du conseil d'établissement. Aussi, à ce niveau-là, nous croyons qu'il est important que la personne soit présente, mais, au niveau du droit de vote, nous croyons que, autant au niveau des intérêts des gens que des responsabilités, ce n'est pas nécessaire que ce soit remis aux membres communautaires.

Mme Robert: Vous ne pensez pas qu'à ce moment-là il y a un risque que la personne n'y aille pas? Elle n'a aucun intérêt à y aller si elle ne peut pas faire partie des décisions qui sont prises là.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la députée de Deux-Montagnes...

M. Pallascio (Michel): Ça existe déjà. À l'intérieur d'une très grande partie de nos comités d'école ou conseils d'orientation, les gens sont invités sans même qu'il y ait droit de vote. Alors, je pense que c'est une question de participation d'abord qui est importante, que les gens soient en lien. Mais il reste que l'école, à notre avis, doit répondre d'abord et avant tout aux parents et aux intervenants à l'intérieur.

La Présidente (Mme Blackburn): Très bien. Merci, M. le président. M. le député de Marquette, une question, ensuite vous concluez.

M. Ouimet: Oui. Une dernière question qui est capitale, je pense, pour la commission scolaire, c'est la question de la gestion des bâtiments et des équipements scolaires, surtout des bâtiments, et comment vous utilisez ces ressources financières là pour venir en aide aux milieux défavorisés. Et c'est possiblement une des raisons importantes qui font en sorte que vous terminez quatrième sur huit au lieu de terminer huitième sur huit. Actuellement, le gouvernement, le premier ministre, indiquait, en début de semaine, qu'il acceptait de mettre sur la table cette question-là dans ses discussions pour pelleter une facture, comme je le disais tantôt, entre 480 000 000 $ et 536 000 000 $ au monde municipal. Qu'est-ce que ça aurait comme impact pour la commission scolaire si on prenait l'ensemble de vos bâtiments et les espaces excédentaires et on disait: Dorénavant, ça ne relève plus de la commission scolaire, mais on confie ça à un autre palier gouvernemental, et que vous soyez dépossédés de ce levier-là, de cet outil-là que vous utilisez pour venir en aide, pour effectuer votre péréquation et redistribuer la richesse parmi vos écoles?

La Présidente (Mme Blackburn): M. Pallascio.

M. Pallascio (Michel): Oui, Mme la Présidente. À la CECM, demain, c'est 12 000 000 $ que nous perdons, parce que c'est ça, les revenus que nous obtenons des locations des locaux non utilisés et des bâtisses non utilisées. Alors, c'est un impact majeur. Moi, j'aimerais peut-être rappeler qu'il y a un objectif à ça. C'est un outil, c'est un soutien, les bâtiments; ça fait partie aussi des moyens matériels que nous avons. J'aimerais peut-être rappeler que les commissions scolaires, malgré toutes les critiques, je pense bien qu'on est quand même de bons gestionnaires immobiliers. Je ne ferai pas de comparaison avec d'autres milieux, je dis simplement que nous sommes, je pense, de bons gestionnaires immobiliers, et je ne vois pas l'avantage de confier ça... s'il y aurait un plus à confier ça au niveau municipal, là-dessus. Alors, je pense que l'égalité des chances ne passe pas par l'inégalité des ressources. C'est des ressources absolument très importantes pour nous; quand on parle de 12 000 000 $, c'est un impact énorme sur nos ressources à l'intérieur de la CECM. C'est quelque chose dont on ne peut pas se passer pour nous permettre de faire notre péréquation à l'intérieur de nos murs.

M. Ouimet: Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Pallascio. M. le député de Marquette, pour quelques mots de remerciement.

M. Ouimet: Oui, remercier les représentants de la CECM pour la qualité du mémoire qu'ils ont déposé ici, et l'échange que nous avons eu, qui témoigne de l'importance de tenir compte de certaines réalités lorsqu'un gouvernement national met de l'avant des projets de loi qui pourraient avoir des répercussions dramatiques au niveau de certains milieux, particulièrement les milieux défavorisés de Montréal. Alors, merci de nous sensibiliser à cette particularité-là. Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je vous remercie aussi pour votre présentation. Vous confirmer qu'effectivement les gestionnaires scolaires, en termes d'utilisation de leurs bâtisses et de leurs équipements, sont d'excellents gestionnaires. D'ailleurs, on me mentionnait, l'autre jour, que parmi les organismes publics, ceux qui ont les politiques de conservation de l'énergie les plus performantes sont les commissions scolaires; alors, je peux confirmer ça sans réserve. J'inviterais la CECM en particulier à continuer, dans le fond, sa démarche de décentralisation, parce que – et c'est pour ça que je suis étonnée de votre mémoire – dans le fond, vous en avez, des politiques à cet égard, et l'avant-projet de loi fait franchir un pas de plus. C'est simplement ça qui est souhaité et, en ce sens, je trouve que l'expérience que vous avez vécue – et que reconnaissent les parents, d'ailleurs, ils nous l'ont dit – mérite simplement d'être continuée. Alors, je vous remercie.

M. Pallascio (Michel): Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, Mme la ministre. Souhaitez-vous faire un dernier point, M. le président?

M. Pallascio (Michel): Bien, écoutez, moi, je voudrais vous remercier de nous avoir reçus. Mme la ministre, j'apprécie les dernières remarques que vous avez faites au niveau de la gestion des immeubles. Nous comptons beaucoup sur vous pour défendre cet aspect-là auprès du Conseil des ministres. C'est un aspect très important pour les conseils des commissaires.

Je voudrais juste rappeler très rapidement, Mme la Présidente, que nous sommes d'accord avec l'objectif. Par contre, sur les moyens, nous croyons qu'il y a certainement certaines adaptations à faire pour ne pas aller trop loin et amener certaines distorsions, peut-être, dans le régime. Alors, c'est peut-être un peu le but de la présentation de notre mémoire. Mais, sur l'objectif, je pense qu'on rejoint le gouvernement.

Mme Marois: Merci.

La Présidente (Mme Blackburn): Merci, M. Pallascio, Mme Gadoury, M. Archambault et M. Hébert, de votre participation aux travaux de cette commission. Recevez des membres de la commission, vous et les membres de votre équipe, nos sincères félicitations pour votre performance en matière de réussite éducative et merci également de votre précieuse collaboration aux travaux de cette commission.

(12 heures)

La dernière partie de cette séance sera présidée par mon collègue le député de Lotbinière, adjoint parlementaire à la ministre de l'Éducation. Merci, mesdames et messieurs.

M. Pallascio (Michel): Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): J'inviterais les représentants du Greater Québec Movement à prendre place, s'il vous plaît. M. D'Andrea, on vous demanderait de présenter les gens qui vous accompagnent et on vous rappelle que vous avez 20 minutes pour votre présentation, et, après, il y aura des questions de la commission. Bienvenue à cette commission.


The Greater Québec Movement

M. D'Andrea (Giuliano): Merci. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission. Je vous présente M. Richard Smith, qui est membre du mouvement, M. Deepak Awasti, qui est aussi membre du mouvement, et moi-même, M. Giuliano D'Andrea.

Il y avait une fois un Québécois qui visita le monde pour y découvrir un peu quels systèmes d'éducation existaient dans ses pays. Alors, il visita Marrakech, il visita la Libye, il visita Beyrouth et, tout d'un coup – il prenait ses notes, il devait retourner au Québec pour donner son rapport – il rencontra un marchand, un marchand libanais et, en négociant avec lui, il voit un fils, un petit enfant de quatre ans. Il demande à ce marchand: C'est quoi, le nom de votre enfant? Et le marchand lui répondit: Son nom, c'est Ali. Il a quatre ans, mais il est très intelligent. Alors, le Québécois lui demanda tout de suite: M. Ali, deux plus deux font quoi? Et le petit Libanais le regarda avec des gros yeux et lui dit: Ça dépend, êtes-vous en train d'acheter ou de vendre?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. D'Andrea (Giuliano): On a décidé de venir ici ni pour acheter ni pour vendre, mais pour avoir l'opportunité de vous donner une opinion, une opinion qui, peut-être, est assez difficile, que vous n'allez pas entendre beaucoup de groupes allophones et anglophones du Québec.

There are 50 000 students in the English system. Many of them will get an excellent education. Many of them will go on to CEGEP and university, and when the time comes for them to start working in Québec, because their French is not competitive, they will leave.

C'est une situation qu'on voit dans notre génération, même. On en a beaucoup qui ne se sentent pas québécois, beaucoup qui blâment le gouvernement, qui blâment les partis, que ce soit le Parti libéral ou le Parti québécois, et beaucoup qui sont frustrés et quittent. Et, pour nous, dans le mouvement, c'est avec beaucoup de tristesse qu'on voit ce phénomène, et on a commencé à penser, on s'est réuni des douzaines à parler, examiner c'est quoi, la vraie raison pour laquelle, comme Québécois, comme gens de deuxième, troisième ou même plus de générations ici, on se sent mal. Et on a commencé à se poser la question que peut-être ce n'est pas vraiment une situation politique, mais plutôt une situation de nos écoles. Est-ce qu'on en train de donner à nos élèves, à nos enfants une vision, une éducation qui n'est pas propre pour un Québec de l'an 2000?

Ce qu'on a fait, c'est qu'on vous a donné un mémoire qui examine trois sections: la section – je vais trouver – 36, sur la définition de l'école; la section 97, sur le curriculum, le pouvoir qu'on donne aux professeurs pour choisir des livres d'instruction; et la section 41. Et ce qu'on veut donner comme message, c'est que c'est impératif que, dans nos écoles anglaises dont on est le fruit, on enseigne le français pas comme une langue seconde qu'on puisse parler, disons, jaser, aller au dépanneur, peut-être parler avec le gouvernement, mais qu'on puisse travailler, être compétitif. Et ce qu'on trouve, c'est que, dans notre système, aujourd'hui, cette compétitivité n'existe pas. On peut avoir des doctorats, on peut avoir des maîtrises, et qu'est-ce qu'on fait avec nos Québécois? Bien, on les voit quitter le Québec, leur patrie.

Ce qu'on suggère dans la section 36 – et je vais le lire en anglais – c'est que la définition de l'école est présentée comme «contributing to the social and cultural development of the community». Quelle communauté? Si on va décentraliser le système de l'éducation, la crainte qu'on a... Et on vit dans une situation politique, on voit, à Montréal particulièrement, ce qu'on qualifierait, nous, dans le mouvement, de «nouvelle poudrière linguistique», une situation assez tendue. Est-ce que, dans nos écoles anglaises, ça ne va pas ouvrir une porte à donner le message que «Well, yes, of course, the school contributes to the social and cultural development of our community», une communauté qui va être à part du «main stream»? Et, si on pouvait peut-être définir – et je ne sais pas comment le faire – le rôle de l'école d'une manière un peu plus étroite, donner un message plus clair, ça serait à notre avantage parce que, nous, comme allophones et anglophones – et je pense que, ici, on est tous fédéralistes dans notre comité – nous, comme Québécois et anglophones et allophones, on veut que nos écoles nous préparent pour un marché du travail en français, ce qui n'est pas le cas.

La section 97, sous-section 2, on a noté que ça donne un peu plus d'autorité aux enseignants dans les écoles locales pour choisir leurs textes d'enseignement, et, peut-être que je me trompe, je n'étais pas là, mais on m'a enseigné que, pendant la Révolution tranquille, une des idées centrales, c'était de donner une éducation à tous les enfants qui soit du même niveau. Et, quand, moi, je parle avec des gens de ma génération, même si on parle de l'histoire, on voit, des fois, deux, trois, quatre visions de ces enfants qui sortent des écoles avec des visions tellement différentes, et je me demande si c'est dans l'intérêt de – j'espère, un jour – moi, parent ou de la société d'avoir toutes ces variantes, toutes ces différences dans ce système. Et on est un peu craintif du fait qu'un professeur puisse choisir, disons, certains textes dans une école et certains textes dans l'autre. On a un appel dans la section 41.7. Si on va créer des «governing boards», peut-être, au moins dans les écoles anglaises, si deux de ces membres du comité pouvaient être de la communauté francophone ou de l'autre communauté pour que nos écoles puissent avoir au moins – comment je peux dire – «a window», une ouverture sur l'autre communauté, pour ne pas qu'on se retrouve encore une fois dans nos petites communautés, dans des communautés qui veulent se défendre de l'autre, qui ont peur de l'autre.

(12 h 10)

Dans les années soixante, vous avez eu votre Révolution tranquille. Vous avez vu, vous avez fait, vous avez changé votre système. Si, avant, un francophone, au Québec, était préoccupé par la survivance, vous avez appris que survivre, ce n'est pas vivre, et ce qu'on vous demande, c'est de donner à notre communauté la même opportunité pour qu'on puisse, nous, dans notre communauté avoir des outils avec lesquels on peut renverser les choses. «Let's get away from survival, let's get away from the idea that in Québec we have to defend, defend, defend to the last one of us, and let's get back in the mainstream.» On est intégriste. On voudrait que notre communauté s'intègre au Québec. Merci.

Le Président (M. Paré): Merci beaucoup pour votre témoignage. Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je trouve votre point de vue intéressant. On s'est déjà rencontrés, d'ailleurs. Vous étiez venu, je crois, sur la commission parlementaire au printemps dernier, lorsque nous avons adopté le projet de loi révisant les structures scolaires sur une base linguistique. Alors, je trouve ça intéressant et je peux vous dire que ce que nous recherchons, c'est effectivement, d'une part, la tolérance dans nos écoles et aussi l'exercice de la tolérance, la pratique de la tolérance et la connaissance de l'ensemble des membres de la communauté les uns par rapport aux autres. Et, en ce sens, je pense que notre système d'éducation et nos institutions peuvent aider à cela et je suis d'accord avec vos attentes à cet égard.

Maintenant, vous nous dites: Nous aimerions être capables, dans nos écoles, lorsque nous allons à l'école anglaise, de sortir de nos écoles avec une connaissance qui dépasse la connaissance du français de dépannage pour aller vers une connaissance d'un français qui va nous permettre de travailler en français ou d'exercer une profession où, lorsque nous aurons à intervenir en français, nous puissions le faire. Ce n'est pas dans la loi, mais je peux vous dire que nous allons prévoir dans le curriculum qu'il y ait un temps supplémentaire – en termes de temps indicatif, bien sûr, parce que c'est comme ça qu'est bâti le curriculum de base – un temps indicatif supplémentaire pour ce qui est de l'apprentissage du français dans les écoles anglaises. À ce moment-là, est-ce que ça pourra être par immersion ou autrement? Les écoles pourront choisir leur stratégie, mais il est prévu que, effectivement, on tienne compte de cette réalité-là.

Et nous souhaitons aussi que, dans toutes nos écoles, autant les écoles françaises qu'anglaises, on puisse aussi apprendre une troisième langue. Nous vivons dans un contexte de mondialisation, et, si vous avez raison que le Québec est passé d'une économie de survivance à une économie d'ouverture sur le monde et où on veut s'inscrire dans ce que vous appelez le «mainstream», ça pourrait comporter aussi le fait que l'on puisse avoir accès à l'apprentissage d'une troisième langue, et je crois que c'est une richesse pour une société que ses citoyens puissent parler plus d'une langue, deux et trois si possible. Alors, je suis très sensible à votre point de vue à cet égard, et le curriculum devrait traduire cette préoccupation-là.

L'autre question que vous soulevez, c'est la question des manuels scolaires. Alors, là aussi, je veux vous rassurer, les manuels scolaires seront choisis par les équipes-écoles ou, éventuellement, si les équipes-écoles veulent se rallier, par exemple, à un choix qui serait suggéré par la commission scolaire, ils pourront établir les règles qu'ils choisissent, mais – et c'est important – le manuel aura été approuvé préalablement. Alors, on ne peut pas choisir n'importe quel manuel scolaire, on choisit dans une gamme de manuels scolaires qui auront été approuvés, comme ils le sont maintenant, par la ministre. Est-ce que ce sera un comité? Est-ce qu'on élargira? On regarde différentes possibilités de ce côté-là, mais il y aura une approbation formelle.

En ce sens, vous savez qu'on travaille beaucoup avec le comité de langue anglaise sur le matériel didactique et le matériel pédagogique pour qu'il soit bien adapté à la réalité québécoise et que le manuel anglais traduise bien aussi et utilise bien, si on veut, la réalité dans laquelle on vit pour permettre à nos enfants de mieux apprendre à cet égard dans nos écoles. Alors, je comprends votre crainte, et elle serait justifiée si on pouvait aller tous azimuts. On tomberait, je suis certaine, dans l'exagération. Déjà, il y a un contrôle et, parfois, il y a des commentaires ou des remarques sur certains manuels, parce qu'on dit: On tombe presque dans l'ésotérisme. Et on est très prudent, pourtant, mais il y a des choses qui peuvent parfois échapper. Bon. Alors, je confirme cela et je comprends en même temps votre crainte.

Maintenant, j'aimerais, puisque vous ne l'avez pas abordée dans votre présentation, mais que vous l'abordez un petit peu dans votre document, vous poser une question sur ce que vous pensez de la représentation de la communauté au sein du conseil d'établissement. J'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu sur cette question-là.

M. D'Andrea (Giuliano): Est-ce que vous pouvez préciser, peut-être, un peu la question?

Mme Marois: Dans le fond, le conseil d'établissement prévoit que deux membres viendront de la communauté, choisis cependant par le conseil d'établissement tel qu'il sera au moment où, évidemment, les parents auront été nommés, les professeurs, les représentants du personnel non enseignant, et, ensuite, on choisira des membres de la communauté. Et, dans votre mémoire, si je ne m'abuse, vous allez aussi loin que de dire: Il serait peut-être souhaitable que l'on puisse choisir des membres de la communauté, par exemple, anglophone si l'école est française, ou inversement. Alors, qui est-ce que vous voyez comme représentants? C'est-à-dire, comment voyez-vous le représentant de la communauté au sein du conseil d'établissement?

Le Président (M. Paré): M. D'Andrea.

M. D'Andrea (Giuliano): Si on avait, disons, une école x anglaise et qu'on allait former ce comité, ce qui est important dans ce comité, c'est d'avoir la voix de personnes qui, disons, sont nos voisins, qui, peut-être, n'envoient pas des enfants dans cette école parce qu'ils font partie de l'école française, mais aussi qui ont une préoccupation, parce qu'une école, on ne peut pas l'isoler de la société. Même quand on a une école anglaise, on vit au Québec. Et c'est la même chose avec nos écoles françaises à Montréal, on vit dans un contexte social. Or, pour nous, c'est très important qu'on ne se retrouve pas dans un – et je vais utiliser le mot avec guillemets – ghetto où, tout d'un coup, on peut croire qu'on est une société à part, on vit notre vie, on fait ce qu'on doit faire. Quand on va parler, disons, de politique, c'est normal qu'on va toujours penser d'une certaine manière. Si on pouvait élargir le comité, qu'on puisse donner deux places à des représentants de l'autre communauté, alors, primo, on est forcé à parler avec eux autres, on va écouter leur point de vue. Et, des fois, vous savez, quand on vit dans une culture, dans un autre groupe, on peut dire des choses, on peut faire des choses sans se rendre compte de l'impact de nos gestes ou même sans se rendre compte qu'on pourrait avoir une richesse.

Je vais vous donner un exemple. Je travaillais à Saint-Lin. J'étais guide dans la maison Sir-Wilfrid-Laurier. La maison est à peut-être 30 minutes de Montréal. J'ai travaillé pendant quatre étés et j'ai fait 99 % de mes tours en français. Il n'y avait pas une école anglaise de Montréal qui savait qu'il y avait un tel centre. Où est-ce qu'on allait, nous, quand on était à l'école? Upper Canada Village, Old McDonald's Farm, Québec, Ottawa. Mais toute notre richesse du coin, on ne la connaît pas et, peut-être, en ayant l'autre communauté au sein du comité qui peut donner ses expériences, on peut avoir des échanges plus intéressants. Je vais passer à M. Deepak qui va reprendre.

Le Président (M. Paré): M. Awasti.

M. Awasti (Deepak): Mme la ministre, vous connaissez la situation de l'école secondaire Pointe-Claire et John Rennie.

(12 h 20)

Mme Marois: Très bien.

M. Awasti (Deepak): Moi, je suis commissaire à la commission scolaire Lakeshore, et nous avons eu beaucoup de problèmes d'implémentation de programmes, mais je pense que, maintenant, c'est une situation pas nécessairement idéale, mais presque idéale parce que nous avons la coopération entre les deux communautés, les deux communautés consultées entre les deux pour faire quelque chose. Nous espérons, dans quelques années, si c'est possible, encourager plusieurs coopérations entre les communautés parce que, si nous ne pouvons pas coopérer ou faire, comment dire, de l'interaction entre les deux communautés, on va rester des étrangers. Et je pense que vous connaissez l'exemple de l'école secondaire Félix-Leclerc et... Qu'est-ce que c'est? J'ai oublié le nom de l'autre école, mais c'est une école de Baldwin-Cartier. Nous avons beaucoup de problèmes dans ce modèle-là parce qu'ils sont séparés. J'espère que, quand nous venons dans un édifice, dans un programme, nous développons une situation où il y a du P. Dans le P du comité, le P du... Ça a développé de... plus important dans cette situation que nous avons maintenant.

Et c'est aussi une question financière parce que nous espérons que dans le long terme... Maintenant, nous implémentons un programme de langue maternelle française. Nous n'avons pas des enseignants qui sont compétents pour implémenter la langue maternelle française parce qu'ils n'ont pas les capacités de parler en français et nous avons, comme on dit, le «minimum standards» de 30 % ou 40 %. Nous ne pouvons pas implémenter, c'est difficile, et nous espérons que, si nous regardons les autres modèles où il y a le «time sharing» ou quelque chose comme ça, nous pouvons sauver de l'argent et nous pouvons faciliter le processus d'intégration et le processus d'améliorer... qu'on peut améliorer le P dans la communauté.

Mme Marois: Merci beaucoup.

Le Président (M. Paré): Merci, messieurs. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Marquette, critique de l'opposition officielle en matière d'éducation.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue au Greater Québec Movement. Présentation assez originale, qui sort de l'ordinaire, comme vous le disiez vous-même si bien dans votre présentation du début. L'article 97 a beaucoup retenu mon attention et les propos que vous y tenez concernant... Vous donnez deux exemples, entre monsieur A, qui est le professeur d'anglais dans une école anglaise, et monsieur B, qui est le professeur d'histoire dans une école française, et les divergences et les textes, la ministre disait tantôt: C'est contrôlé parce que les commissions scolaires et les enseignants doivent choisir des manuels qui ont été approuvés préalablement par le ministère. Or, dans nos écoles, ce n'est pas le cas parce qu'il y a des écoles et un programme qui est obligatoire cette année et où les manuels n'ont pas encore été approuvés, sauf que les manuels ont été choisis et ils sont dans les écoles. Ça, c'est une problématique. Je ne sais pas si c'est une question de retard ou d'autres facteurs qui jouent à cet égard-là, mais il y a toute la question, également, des textes photocopiés que les enseignants remettent à leurs élèves qui, eux, ne doivent pas faire l'objet de quelque approbation que ce soit, et c'est peut-être là que vous soulevez la problématique.

Comment, du point de vue gouvernemental, allons-nous nous assurer qu'il y ait quand même une certaine vision commune par rapport aux choses, particulièrement sur des sujets qui sont délicats comme l'enseignement de l'histoire? On pourrait, comme vous l'indiquez si bien, trouver des exemples de textes qui seraient signés sous la plume de Pierre Bourgault, ou de Pierre Vallières, ou d'autres personnes, ou signés sous la plume de Mordecai Richler et d'autres personnes qui ont des visions qui sont tout à fait aux antipodes. Alors, dans la transmission des savoirs et des connaissances sur l'histoire, par exemple, est-ce qu'on va présenter la conquête comme une victoire des Britanniques ou une défaite des Français? Ça peut paraître subtil, mais, quand même, lorsqu'on pense aux conseils d'établissement, lorsqu'on pense également aux personnes qui vont y siéger, ces gens-là ne sont pas nécessairement toujours apolitiques. Il y a des visions qui sont mises de l'avant. Alors, comment, comme État, devons-nous exercer un certain contrôle pour éviter que des facteurs trop politiques puissent se glisser à l'intérieur des salles de classe?

Le Président (M. Paré): M. D'Andrea.

M. D'Andrea (Giuliano): Ce qui m'a, disons, surpris quand j'étais à l'Université d'Ottawa et que j'enseignais l'histoire comme «teaching assistant», c'était le fait que les manuels dans les écoles secondaires étaient, pour la plupart, écrits par des gens, par des historiens qui n'étaient pas profs aux universités. Je voyais des manuels de gens compétents, de gens avec des maîtrises, mais qui, peut-être, reflétaient une vision de l'historiographie des années soixante, des années cinquante, la vieille histoire. Et le plus grand problème que j'avais, c'était de convaincre, des fois, des gens que Dollard des Ormeaux n'était pas vraiment un chrétien qui, un jour, a laissé sa pelle et a ramassé 17 bons catholiques pour aller défendre la patrie. On a déjà eu de l'historiographie de l'Université Laval et de Montréal qui ont examiné d'autres visions. Et je me trouvais dans une situation où, primo, je devais enseigner l'histoire à un niveau universitaire et je devais comme reprendre toute l'historiographie ou la petite histoire qu'ils ont apprise à l'école et leur poser des questions, dire: Bon, est-ce que vous pensez vraiment que c'était comme ça, oui ou non? Est-ce que vous pensez que, quand on lit un livre d'histoire, c'est l'Évangile, c'est la vérité? C'est une vision.

Si le gouvernement veut examiner, bon, comment on va apprendre l'histoire, je pense que c'est le devoir d'un gouvernement d'appeler des vrais historiens avec des vraies connaissances aux universités, que ce soit Laval, Ottawa, que ce soit Montréal, et de revoir c'est quoi, l'histoire. Est-ce que c'est des petites histoires de monsieur X qui a fait y ou est-ce que c'est une manière d'étudier le passé? Est-ce qu'on va donner aux enfants les outils? Comment est-ce qu'on peut connaître le passé? Et je pense que, si on avait une vision un peu plus mondiale de l'histoire et de l'historiographie, on pourrait éviter un peu ces histoires et, de cette manière, peut-être qu'on éviterait que les enfants sortent de nos écoles, dans la section française, avec la thèse de la décapitation comme étant, disons, la vérité. C'est une thèse. C'est une thèse qui a été débattue.

Une voix: ...

M. D'Andrea (Giuliano): «Decapitation thesis», disons l'idée que, en 1759 ou 1760, on a comme coupé la tête d'une communauté. C'était, disons, un corps français, la tête anglaise, et l'Église était en conspiration avec les seigneurs, les Anglais, pour soumettre une population. C'est une thèse. Elle a de la validité, elle a des critiques, mais, quand on joue avec des idées politiques comme ça, on se retrouve, des fois, avec des enfants qui pensent que c'est la vérité, et on manque quelque chose.

Le Président (M. Paré): M. le député de Marquette, en complément.

(12 h 30)

M. Ouimet: Si j'ajoutais ceci, et c'est une déclaration qu'avait faite l'ancien ministre de l'Éducation, le député de Lévis, à Chicoutimi, qui avait été rapportée dans les journaux et qui disait que le plus grand obstacle à la souveraineté, c'était ce que nous enseignions en matière d'histoire à nos élèves, qu'il fallait changer cela, et que c'est par la suite qu'il a mis sur pied un groupe pour revoir la transmission de l'histoire. Tout le processus relève de l'ancien ministre de l'Éducation. Donc, lui plaçait ça dans un contexte précisément politique, en disant que la raison pour laquelle les gens ne votaient pas en nombre suffisant pour la souveraineté, c'est qu'ils n'avaient pas retenu une bonne interprétation de l'histoire et qu'il fallait agir à ce niveau-là. Vous réagissez comment? Et est-ce que les manuels scolaires pourraient changer selon qui occupe le ministère de l'Éducation? Est-ce que c'est le Parti québécois? Est-ce que c'est le Parti libéral du Québec? Y voyez-vous des risques par rapport aux manuels que retiendrait un ministre de l'Éducation ou une ministre de l'Éducation?

Le Président (M. Paré): M. D'Andrea.

M. D'Andrea (Giuliano): Vous savez, dans toute société, c'est normal que... Et, si je repense à l'Italie des années Mussolini, alors, nous autres, on nous enseignait – au moins, la génération de mes parents – que c'étaient des Italiens qui avaient conquis l'Angleterre et que l'Angleterre faisait partie du patrimoine italien. Bon, c'était la manière de donner une propagande. Et c'est normal que l'histoire, c'est de la propagande. Alors, il faut faire attention. Et, peut-être, si on pouvait avoir des débats, des fois, sur l'histoire, que ce soit du côté nationaliste ou fédéraliste, si on pouvait se parler de ce qui s'est vraiment passé, je pense que c'est important, le résultat à la fin, mais la qualité du débat serait de beaucoup meilleure. Alors, oui, c'est vrai, c'est la vérité, toute nation veut enseigner une histoire et tout gouvernement va avoir tendance à vouloir pousser son idée, et, si, au moins, on pouvait être honnête et dire: Bon, on veut avoir un débat historiographique avant d'implémenter, disons, des textes à l'école, je pense que ça servirait la cause de l'éducation. Au moins, l'enfant pourrait sortir de son école sachant une chose: ce qu'on m'a appris, ce sont les outils pour que, moi, je puisse faire ma propre recherche. Et pas ce qu'on m'a appris, c'est la sainte vérité.

M. Ouimet: Sur le dernier commentaire, là, je soulève l'autre problématique aussi du ministre de la Restructuration qui avait fait parvenir des textes d'études dans chaque école du Québec demandant à ce que ce soit largement circulé. Vous vous souviendrez, c'était dans le contexte référendaire. La ministre s'en rappelle sûrement. Mais comment est-ce qu'on peut éviter cela en se donnant des balises très fermes pour éviter qu'un parti politique ou un autre soit soumis à cette tentation-là? Et on a vu que, dans un cas, deux ministres ont été très tentés et ont posé des gestes qui, à mon point de vue, sont très discutables.

M. D'Andrea (Giuliano): Publicité. Si on pouvait lancer le débat publiquement et si... On va dire: Bon, on a ce débat-là, on va en parler. Et ça peut aider. Vous savez, moi, de mon côté, j'avais un autre problème – on avait un autre problème – c'est les partitionnistes. Peut-être que vous n'êtes pas assez proches pour voir comment les idéologies changent, mais, déjà, j'ai vu des textes de M. Lionel Albert, qui écrit assez bien, mais qui est en train de réinterpréter l'histoire en disant, exemple, que, en 1866, Montréal était de majorité anglaise, que les Cantons-de-l'Est étaient de majorité anglaise, que la vallée de l'Outaouais, qui comprend le Québec et l'Ontario, était de majorité anglaise. Or, si on a une partition, on a trouvé un droit historique à retourner, à refaire les barrières ou les frontières comme c'était. Bon, c'est un peu, disons, ridicule. Mais ce n'est pas tellement ridicule que ça, on voit toutes sortes de gens qui avancent ces thèses.

J'ai écrit à la Gazette , j'étais fâché, je pensais que c'était, disons, de la propagande, et ils ont publié ça. On a publié trois, quatre fois des volets en avant et en arrière. Mais ce qui m'a marqué, c'était le fait que c'était comme si M. Albert et moi parlions dans le vide. Moi, j'aurais pensé que d'autres gens allaient entrer et dire: Voyons, c'est ridicule! Mais non, ça a passé comme une vérité. Et, s'il y a un problème qu'on a au Québec aujourd'hui, peut-être dans le reste du Canada et en Amérique du Nord, étant une société moderne – et pas comme l'Europe qui a une longue tradition – c'est qu'on ne connaît pas notre histoire. Or, le danger, c'est qu'on a des gens qui parlent, qui nous disent: Laurier était un échec. Et puis personne ne dit l'autre idée, et puis ça passe comme «Laurier était un échec». Et c'est ça qui nous manque, c'est vraiment un débat, une connaissance.

Plato – I'll say this in English – used to say that «the way I like to teach my pupils is to treat them like puppies, throw them a piece of raw meat, have them jump on it and tear at it one way and the other», ce qui voulait dire qu'on doit avoir cet échange d'idées, ces débats, cette volonté de vouloir débattre, et c'est ça qui manque dans l'enseignement de l'histoire ici, au Québec et dans le reste du Canada.

Le Président (M. Paré): Merci. M. le député de Champlain.

M. Beaumier: Oui, merci, M. le Président. Par intérêt, par curiosité aussi et par compréhension, moi, je ne suis pas de formation historique, mais je me préoccupe beaucoup de l'histoire, de la compréhension de l'histoire et de la façon dont l'histoire aussi se construit dans nos imaginaires. À ce moment-là, ce que je voudrais juste dire ici – puis je sens que mon intervention ne sera que le début d'un débat que vous souhaitez et que je souhaite, moi aussi – c'est que je partage l'idée que l'histoire... Dans votre texte, vous dites que c'est de l'interprétation. Tantôt, vous disiez: L'histoire, c'est de la propagande. J'imagine que je préfère ce que vous avez écrit à ce que vous avez dit puis je suis sûr que vous êtes d'accord avec ça également.

Il ne faudrait pas mélanger – tantôt, aussi, ça a été presque effleuré – il ne faut pas confondre politique et histoire – hein, on s'entend bien là? – dans la façon dont on a parlé tantôt. Quand on réfère, par exemple, à l'opinion que peuvent avoir M. Bourgault ou M. Richler, tiens, c'est des conclusions, on pourrait dire, suite à une analyse auxquelles sont arrivés des gens qui ont regardé à leur façon l'histoire. Ça, c'est très noble, c'est très convenable, mais ce n'est pas ce dont on parle quand on parle d'enseignement et de compréhension de s'assurer que tous les gens au Québec comprennent bien ce qui s'est passé, comprennent bien ce qu'est l'histoire. Et là il y a eu plusieurs interprétations.

Je vais vous donner un exemple très simple. Vous parliez tantôt de la partition, ça encore, ce sont des aspects, je vais dire, politiques traités, mais, en 1822, si ma mémoire est bonne, il y a des gens qui sont partis de Montréal et qui sont allés à Londres, comme il en partait, des commerçants et des gouverneurs régulièrement faire leur rapport là-bas, et il y avait déjà cette annexion de Montréal au Haut-Canada, cette volonté, cette velléité. Donc, on invente rien, mais ça ajoute, ça clarifie le débat, mais ça le clarifie aussi dans le sens qu'il faut y réfléchir, y penser convenablement. Bon.

Vous savez, je vais vous dire, je ne voudrais pas qu'il y ait une distinction entre l'histoire que vous avez apprise et l'histoire que, moi, j'ai apprise. Je vais vous parler de l'histoire que nous avons apprise et que nous devons nous-mêmes aussi réapprendre. Je vais vous parler de l'histoire... Moi, je suis un type qui est né à Trois-Rivières, ouvert, mais francophone, avec un cours classique, etc. Vous savez, quand j'étais sur les bancs d'école, on a complètement occulté toute la période, à peu près, de 1791 jusqu'au début du siècle, toute cette évolution à partir de 1763, 1774, 1791, 1837, 1838 et qui a été un des plus beaux élans de démocratie et de démarche démocratique qu'ait pu faire un peuple en ce temps-là, en un temps où la royauté régnait. Ici, au Québec, on a la... 1760, ce n'est jamais une catastrophe en soi. Les choses, ça dépend comment ça se conclut. Alors, il y a l'histoire qu'on apprend pour être bien sûr de bien faire l'histoire qu'on a à faire. Bon.

Alors, on a occulté, chez nous, les francophones, toute cette période-là. Hier – je ne vous dirai pas à quelle heure je me couche, mais vous avez dû l'écouter, je l'espère, ce n'était pas trop tard – il y avait à Maisonneuve à l'écoute – donc, c'était assez tôt – M. Pierre Gauvreau, qui est un écrivain, un artiste également, un sculpteur, qui a écrit Le Temps d'une paix – ça nous dit quelque chose – Cormoran , puis là il y en a un autre... Alors, M. Gauvreau, exactement – il est un petit peu plus âgé que moi, mais il a vécu exactement la même chose; c'étaient des jésuites qui nous enseignaient, donc nos propres jésuites – disait: Nous, on apprenait la littérature jusqu'à Molière, Racine, Corneille – c'est ce qu'on a fait un peu – et, après ça, il y avait comme un nuage, une buée, là, et on revenait avec les catholiques du début du XXe siècle. On obnubilait, on occultait, on oubliait consciemment deux siècles d'histoire, le XVIIIe et le XIXe siècles qui sont extrêmement riches, surtout si on regarde dans la culture française et les autres également, qui nous auraient probablement bien aidés dans la réflexion qu'on a à faire actuellement. Alors, moi, je suis en rattrapage en ce qui concerne cette... Au point de vue littérature, j'ai pas mal rattrapé, mais, au niveau histoire, je suis en rattrapage actuellement et je partage très bien votre opinion, très, très bien votre approche aussi.

Et je terminerais, M. le Président, mais j'aimerais terminer en disant ceci, qu'il faudrait se méfier de confondre ce qui serait peut-être des conclusions et l'utilisation politique que l'on fait actuellement de l'histoire par rapport à ce qui a été notre cheminement, autochtones, francophones, anglophones, Irlandais, allophones, tous ces gens-là qui sont au Québec, et, moi, je pense et je souhaite – et je pense que ça ne tombe pas dans l'oreille d'un sourd, ça – que ce débat-là historique soit fait d'une façon, sur le fond, qui fait qu'on en conclura peut-être les mêmes choses. Et, si on n'en conclut pas les mêmes choses, on comprendra que d'autres concluent différemment. Alors, c'était le début d'un débat que j'aimerais tenir et que je tiens déjà de temps en temps. Merci.

(12 h 40)

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Champlain. Avez-vous une réaction pour vos remarques finales, M. le député de Marquette?

M. Ouimet: Est-ce qu'il ne reste pas cinq minutes pour mon collègue? Non?

Le Président (M. Paré): Ah! Je n'avais pas vu... M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: Merci beaucoup. I've read your report with great interest, and I find that there is a number of interesting elements there. First of all, just to bring to your attention, you talked about there being 50 000 anglophone students in Québec, and I thought the figure would be more along the lines of 100 000. This was a mistake in the...

M. D'Andrea (Giuliano): I'm sorry, I was trying to mention the Montréal area. I have statistics here for 1995 which puts it at 51 448.

M. Bergman: O.K., fine. That's fine.

M. D'Andrea (Giuliano): So, it's the Montréal area, not...

M. Bergman: That's fine. You talk in your report about the new system veering away from the ideal of a centralized education. Then you go on to talk about your concern for functional bilingualism versus mastery of French as a working language, and, while I agree with you that integration is important, is an asset, I'm always concerned about the aspect of integration versus assimilation, because there is a great strength and beauty in our differences, in our diversity and the different cultures that we do have in this province, and our mosaic and our background of differences. And I'm a great believer, yes, of integration and of tremendous working knowledge of both languages, and not only, like the minister said, one language, two languages, but three languages. But then you go on to say in your conclusion that you regret that there are two separate school systems which segregate Montréal students along linguistic lines. Are you suggesting that a solution to what you say is perhaps poor integration would be to combine the two linguistic school systems? Because that, certainly, is no longer integration, but a cultural assimilation, which is certainly not what we are looking for.

Le Président (M. Paré): M. D'Andrea.

M. D'Andrea (Giuliano): There's a lot of questions there. I don't know where to start because, obviously, your question did touch upon a lot of various debates that are all important questions. I am going to defer to Richard Smith, who's probably going to look at one aspect of it. But, just before I do that... In Saint-Léonard, in 1967, 1968, 1969, we did have the beginning of in integrated school system. It was a little bit different, it was a little bit separate, where Italian kids like myself, immigrants in Saint-Léonard were sending their children into schools where they would spend half their day in English and half their day in French. It was a pilot project. It had a lot of critics. Unfortunately – that's part of my master thesis – a lot more critics in the anglophone side than the francophone side. And we seem to have forgotten that, because of the political fallout of 1969. And that, to me, is a great pity, because we had a system, at least for our community, which worked, which people wanted. You talk about integration, assimilation. I understand the concerns in the anglophone community, I also understand that we often feel ourselves to be a community under siege, but I can tell you one thing, I can speak to you in English right now, I can address myself in French, when I go home, I speak Italian from morning to night, you know. Am I assimilated? I don't think so. So, there's this big misunderstanding as to what is assimilation and integration.

What we are talking about is: There is a reality in Québec. That reality is: The workplace is now in French. We are going to have to accept it, or we'll suffer the consequences. When I was going to school, there were still that mentality that: Well, it's going to change. Don't worry. Do everything in English. Well, we come to the job market, and guess what? We have people who speak in stuttered French, or they're comfortable, but they won't even apply to the Québec Civil Service. We don't even apply for jobs. We have all this tension. We're not good enough. We're not going to make it. Imagine if I was to say in French: On a des écoles québécoises qui forment des milliers de gens qui ne parlent pas français. A shock! And then, suddenly, when we say: Oh! but they're English. Oh! it's O.K. That's shocking! How many do we know, in our own respective communities, who are leaving our patrie, our Québec, because they don't feel that they fit in? Richard?

Le Président (M. Paré): M. Smith.

M. Walsh Smith (Richard): Merci. I was just going to add that, in fact, I guess, when we speaked of the other aspects of the legislation which is gliding through this change in restructuring, we would speak to the idea of an integrated school system, but we don't see how a separate English building necessarily makes us better anglophones. And when we look at the past in Québec, and I know my own family is Irish Catholic and it's half French and mostly anglophones, but at one time, the Catholic Church in Québec acted as a single unified institution which served to integrate and unite Catholics of both language groups.

But what we really think the existing school system represents is the social partitioning of Québec and that it might be at the root of a lot of the problems in Montréal. And, quite frankly, we're all in our early thirties, with the exception of extra instruction we did at our own expense, the system did not serve us well. And I know I work with people 10 years my junior, they cannot write reports in French. There's a lot of job opportunities, I know, in my industry, which they would not be capable of doing. The only way they can look to promotion is to emigrate. So, somewhere, the system has failed, and I can't see how the English school system has done anything other than reinforce the sense of alienation.

So, in a sense, yes, the next logical step would be a single integrated school system. That would be unique in Canada. I don't think there's a francophone minority across this country that would be arguing the same thing, because the rest of the country and the rest of the continent are overwhelmingly English and they don't have to worry about integrating or being able to function in the larger English part of the country, but this is a unique situation, perhaps distinct, the only part of a country where an actual integrated school system might be timely. But I can't think of nothing other, no greater cause for the emigration of people my age than the separate school system and the school system has not equipped us properly.

Le Président (M. Paré): Thank you, Mr. Smith. Remarques finales, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, merci, M. le Président. Je pense que vous avez réussi à provoquer des échanges fort intéressants au niveau de cette commission parlementaire et je comprends mieux maintenant ce que vous disiez dans votre introduction à l'effet que vous n'étiez ni un groupe similaire à Alliance Québec ou au Parti Égalité. Et, avec la vision que vous élaborez, on comprend que c'est tout à fait différent. Je vous remercie.

Le Président (M. Paré): Merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je veux vous remercier à mon tour de la très grande richesse de nos échanges. Je pense que ça a été très intéressant. La preuve, c'est qu'on est en train de prendre plus de temps que ce qui était prévu. Et je pense que les propos de mon collègue Yves Beaumier étaient intéressants et rejoignaient aussi la vision que vous avez de l'histoire, ce qui nous permet de dire que nous sommes capables de vivre ensemble sur ce territoire, de nous comprendre, de nous connaître et d'apprendre à être bien ensemble. Je pense que c'est tout à fait souhaitable et possible. Et j'aime bien la façon dont vous voyez les choses et je vous remercie à cet égard de votre contribution à notre commission.

Le Président (M. Paré): Merci, Mme la ministre. Il me reste à vous remercier, messieurs, pour votre témoignage aujourd'hui, et nous ajournons nos travaux à demain, jeudi 10 septembre, à 9 heures. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 49)


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