Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Neuf heures vingt-trois minutes)
Le Président (M. Blouin): À l'ordre! La commission
élue permanente de l'éducation reprend ses travaux. Je vous
rappelle le mandat de cette commission, qui est d'entendre toute personne ou
tout groupe qui désire intervenir sur le projet de loi 40, Loi sur
l'enseignement primaire et secondaire public.
Je tiens d'abord à nous excuser du retard que nous avons mis
à commencer nos travaux, mais nous avions quelques problèmes
techniques avec des bruits qui nous empêchaient de
délibérer au salon rouge. Alors sur ce, j'invite, sans plus
tarder, les représentants de l'Association des cadres scolaires du
Québec à venir s'asseoir à la table des invités,
à s'identifier et à nous livrer le contenu de leur
mémoire.
Association des cadres scolaires du
Québec
M. Giard (Bruno): Je vous remercie, M. le Président. Je
vais d'abord présenter aux membres de cette commission la
délégation de l'Association des cadres scolaires du
Québec. En commençant par ma gauche, M. Vincent Tanguay,
vice-président de l'association; à ma droite, M. J.
Édouard Lapierre, de la région du Lac-Saint-Jean, premier
vice-président de l'association des cadres; de même que M. Denis
Hudon, de la rive sud de Montréal, également
vice-président de cette association. J'ai oublié de dire que M.
Vincent Tanguay était de la région de Québec. Je suis
Bruno Giard, président de l'association et je suis de la région
de l'Estrie.
Avant de commencer la présentation proprement dite de notre
mémoire, permettez-moi, M. le Président, de faire un bref rappel
des efforts déployés par notre association pour faire du livre
blanc une école communautaire et responsable et du projet de loi
annoncé un projet de réseau d'éducation du Québec.
Il nous apparaît en effet, comme d'ailleurs l'a exprimé le Conseil
supérieur de l'éducation dans son mémoire du 25 octobre
1983, qu'une réforme scolaire, qui ne recueillerait pas
l'adhésion du réseau scolaire, risquerait de demeurer une
réforme de papier. Je m'excuse, c'est un petit document parce qu'on a
fait un avant-propos sur un document à couverture jaune.
Alors je dis donc que nous reprenons ce que le conseil supérieur
avait repris après nous, qu'une réforme scolaire, qui ne
recueillerait pas l'adhésion du réseau scolaire, risquerait de
demeurer une réforme de papier. Dans cette perspective, à la
suite des déclarations gouvernementales en matière de
décentralisation, voire de régionalisation, l'assemblée
générale de notre association adoptait, à
l'unanimité, dès juin 1982, un projet de mémoire relatif
au livre blanc portant notamment sur les éléments suivants:
L'intégration des commissions scolaires, la participation des parents,
le partage des pouvoirs et responsabilités entre les commissions
scolaires et le ministère de l'Éducation, entre l'école et
la commission scolaire, le pouvoir de taxation et de suffrage universel, la
commission scolaire, l'école et le statut confessionnel, la composition
du conseil d'école, les statuts administratifs et juridiques de
l'école et de la commission scolaire.
Avant le dépôt du projet de loi 40, en juin 1983, nous
avons participé à presque toutes les rencontres des agents
d'éducation aux fins d'élaborer dans l'harmonie un projet qui
réponde aux objectifs visés par chacun des partenaires.
À notre avis, ce projet devait garantir la cohérence sur
les plans pédagogique et administratif tout en assurant à chacun
une voix dans les décisions relatives à la qualité des
services éducatifs à offrir aux jeunes et aux adultes.
Nous avons travaillé quelques fois avec tous les partenaires du
réseau sans la présence du ministère de
l'Éducation; parfois, avec le ministère de l'Éducation et
plusieurs partenaires du réseau; à l'occasion, avec le
ministère et certains partenaires du réseau.
Nous devons malheureusement dire que, malgré les efforts loyaux
et sincères déployés par chacun, nous n'avons pas
réussi à établir les consensus minima en regard de
certains objectifs du projet de loi. Nous voulions, à l'époque,
élaborer un projet collectif et non pas des projets parallèles.
Nous avons alors tenté un ultime effort en novembre et décembre
1983. En effet, au moment du dépôt des projets de règlement
par le ministre de l'Éducation, à la fin d'octobre, nous avions
perçu une ouverture de sa part à l'effet d'apporter certaines
modifications substantielles au projet de loi. Nous avons donc saisi l'occasion
pour rencontrer individuellement le ministre de l'Éducation, les
présidents des Fédérations
des commissions scolaires, les directeurs généraux, la
Fédération des comités de parents, la
Fédération des directeurs d'école, les invitant à
un ultime effort de concertation en vue d'amender, avant la tenue de la
commission parlementaire, les articles du projet de loi d'où paraissent
résulter les conflits de juridiction entre le ministère de
l'Éducation et les commissions scolaires, les commissions scolaires et
les conseils d'école, le niveau politique et le niveau
administratif.
Nonobstant la volonté de chacun de participer à cette
démarche, force nous est de constater que la rencontre de ces
partenaires le 21 décembre 1983 fut un nouvel échec et ce,
malgré nos efforts. Compte tenu de ces éléments, il nous
plaît de vous présenter, au nom des 1800 membres de l'Association
des cadres scolaires du Québec qui l'ont accepté à
l'unanimité, tant au niveau des principes que dans sa forme finale, le
mémoire suivant:
L'ampleur des transformations que provoquerait l'application du projet
de loi 40 incite l'Association des cadres scolaires du Québec à
intervenir devant la commission élue permanente de l'éducation.
Nous croyons qu'un système scolaire est toujours perfectible. Cependant,
à notre avis, il est fondamental de bien choisir le moment de
procéder à des changements et, surtout, de bien mesurer la
portée de ces décisions.
Voilà pourquoi l'Association des cadres scolaires du
Québec ne peut accepter un projet qui jettera plus de confusion dans le
système scolaire qu'il n'apportera d'amélioration. Notre position
vise donc, avant tout, à nous assurer qu'une éventuelle
réforme recherchera d'abord à parfaire la qualité des
services offerts aux jeunes et aux adultes dans les réseaux primaire et
secondaire.
Ainsi, toute tentative de solution que l'on voudrait apporter à
des conflits hypothétiques de juridiction ou de pouvoir, n'a pas,
à notre avis, sa raison d'être. C'est pourquoi, dans une
première étape, nous procéderons à l'examen de
l'état de santé du système scolaire actuel. Ensuite nous
nous interrogerons sur la qualité des services garantis par le projet de
loi et dans une troisième étape, nous ne pourrons passer sous
silence le traitement qui est fait à nos membres et
particulièrement au niveau de leur condition d'emploi. Enfin, nous
étudierons les propositions de mise en oeuvre véhiculées
dans ledit projet de loi.
L'état de santé du système scolaire. Malgré
le peu de temps dont nous disposons, il nous semble nécessaire de
rappeler quelques moments significatifs de l'évolution du réseau
scolaire depuis le rapport Parent. Les auteurs du livre blanc ont, pour leur
part, posé un diagnostic très sévère sur le
système scolaire actuel. À notre avis, certains problèmes
soulevés par ces derniers auraient mérité une
évaluation plus substantielle. D'autre part, nous sommes convaincus que
les objectifs visés par les auteurs du rapport Parent, soit
l'égalité des chances et l'accessibilité pour tous
à l'éducation, sont encore tout à fait d'actualité
en 1984. Dans cette perspective, tout projet qui aurait pour résultat de
diminuer la qualité et la quantité des services éducatifs
accessibles aux jeunes dans une région donnée serait à
combattre.
D'autre part, les commissions scolaires, à la demande du
ministère de l'Éducation, ont procédé en 1972
à des regroupements. Ces regroupements se sont traduits par des
améliorations sensibles, tant sur le plan pédagogique que sur le
plan financier pour l'ensemble du réseau des écoles primaires.
Cette opération a permis, entre autres, d'assurer un support
pédagogique accru aux enseignants, une plus grande disponibilité
de matériel didactique par des économies provoquées par
des achats regroupés et enfin, la mise en place de services
professionnels spécialisés pour les élèves
éprouvant des difficultés.
De plus, nous avons assisté depuis 1975 à un mouvement
d'intégration volontaire du primaire et du secondaire. Ce mouvement est
continue depuis les huit dernières années et favorise, à
notre avis, le passage de l'élève du primaire au secondaire, tout
en garantissant l'harmonisation et la continuité des apprentissages.
Dans un autre ordre d'idées, nous tenons à rappeler que
durant ces dernières années, le ministère de
l'Éducation, en collaboration avec les commissions scolaires et leur
personnel, a commencé à implanter avec succès plusieurs
règlements et politiques portant, notamment, sur le régime
pédagogique, l'allocation des ressources, les programmes
d'études, l'adaptation scolaire, les services personnels aux
élèves. Ces projets sont à peine amorcés et encore
en étape d'implantation que déjà d'autres mesures sont
annoncées depuis quelque temps, à savoir l'évaluation
pédagogique, les services complémentaires, la formation
professionnelle des jeunes et des adultes, la politique d'éducation des
adultes, la micro-informatique et l'enseignement, les mesures d'insertion
sociale des jeunes, la formation et le perfectionnement des maîtres.
Il y aura dans ces dossiers, M. le Président, du travail de base
à effectuer. Ce travail s'échelonnera sûrement sur les dix
prochaines années. Ce qui nous renverse donc, c'est qu'en dépit
de tout le pain qu'il y a sur la planche, le projet du ministre de
l'Éducation veuille en plus changer les structures. Nous affirmons que
nous risquons, avec tout ce branle-bas de combat, un épuisement du
système et, plus particulièrement, des forces vives de ce
système, celles qui peuvent faire un succès des mesures
proposées. En effet, pourquoi vouloir tout à coup faire de
l'école le pivot du système? Tout le monde est conscient que
c'est à l'école que se passe l'action. Tout le monde est
également conscient qu'il ne faut pas distraire l'école de sa
mission première qui est l'éducation des jeunes en vue de leur
insertion sociale et professionnelle. Pourquoi appeler projet éducatif
la simple concertation de base des agents d'éducation nécessaires
au bon fonctionnement de l'école? N'est-ce pas un nouveau concept pour
décrire une vieille réalité? En 1965, nous parlions
d'ateliers pédagogiques; depuis 1976, nous parlons de projets
éducatifs.
Pourquoi vouloir modifier le mode de relations interpersonnelles dans
tout le réseau scolaire, alors que les changements commandés par
le ministère mobilisent déjà toutes les énergies
disponibles? Pourquoi la réforme pédagogique actuellement en
cours devrait-elle être mise en veilleuse au profit de changements de
structure?
Est-il nécessaire de rappeler que le réseau
d'éducation du Québec a progressé, au cours des
années soixante à quatre-vingt, en ce qui a trait à la
qualité et à la diversité des services éducatifs
offerts à la population québécoise et ce, malgré le
fait qu'à tous les trois ans une négociation collective
centralisée venait perturber la nécessaire concertation entre les
principaux agents du système d'éducation; malgré aussi le
fait que des compressions budgétaires très sévères
ont mis un frein à beaucoup de projets de développement et ont
occasionné une diminution sensible du soutien pédagogique et
administratif; malgré, enfin, un climat économique difficile
où les faibles perspectives d'emploi ont des répercussions
profondes sur la motivation du personnel et celle des élèves?
Nonobstant les derniers bouleversements dans le monde scolaire,
l'Association des cadres scolaires du Québec croit que le système
scolaire a produit, à maints égards, d'excellents
résultats depuis les dernières années. Les constats
ci-dessus s'imposent, M. le Président, parce que nous sommes convaincus
que les structures actuelles sont efficaces, ce qui n'écarte pas la
possibilité qu'on puisse y apporter des améliorations, notamment
certaines améliorations proposées dans l'avis au ministre de
l'Éducation déposé par le Conseil supérieur de
l'éducation le 25 octobre 1983.
Les cadres ont vécu de l'intérieur à travers les
hésitations, les perturbations, la lente maturation du système
scolaire. Ils ont joué très souvent, face au ministère,
par l'expertise qu'ils ont développée tant sur les plans
pédagogique qu'administratif, un rôle de soutien de leur
commission scolaire.
Voilà pourquoi l'Association des cadres scolaires du
Québec affirme que le réseau actuel a la vitalité et la
maturité nécessaires pour permettre une application harmonieuse
des réformes pédagogiques proposées. Vitalité et
maturité, disons-nous, et ce, malgré le fait que de longues
périodes de négociations collectives et les règles
budgétaires sont toujours susceptibles de constituer des contraintes de
taille.
Le projet de loi 40. Les membres de notre association ont lu et
étudié très sérieusement le projet de loi sur
l'enseignement primaire et secondaire public. L'association en a d'ailleurs
fait une étude détaillée dont vous trouverez copie en
annexe. Aussi surprenant que cela puisse paraître, toutes les
catégories de personnel que nous représentons en sont venues
à la même conclusion. En effet, nos membres attendaient, à
la suite des déclarations ministérielles sur la
décentralisation, un projet de loi exprimant clairement la
volonté du gouvernement de confier aux gouvernements locaux que sont les
commissions scolaires la responsabilité d'organiser et de maintenir des
services éducatifs de qualité pour les Québécois.
Force nous est de constater que le ministre veut diluer les
responsabilités des commissions scolaires en les confiant, dans certains
cas, aux écoles ou, tout simplement, en se les appropriant à
titre de ministre.
Pourquoi donc, M. le Président, l'Assemblée nationale du
Québec, dans le cadre de ses politiques, ne se limiterait-elle pas
à répartir les responsabilités entre le gouvernement, le
ministre de l'Éducation et les commissions scolaires? Pourquoi
l'Assemblée nationale ne laisserait-elle pas aux commissions scolaires
le soin d'en faire autant avec les établissements relevant de leur
juridiction?
Dans les faits, un grand nombre de commissions scolaires ont
déjà fait la preuve qu'elles pouvaient elles-mêmes agir
comme gouvernement local responsable en effectuant dans l'harmonie une
répartition des pouvoirs avec les écoles. D'ailleurs, seul un
gouvernement local responsable peut répondre devant les citoyens d'un
territoire donné de la qualité des services éducatifs
offerts à la population scolaire.
Dans les milieux où le partage des responsabilités ne
s'est pas encore fait, nous pensons qu'un seul article de loi, tel l'article
212 du présent projet, serait de nature à déclencher un
tel processus. Ceci aurait pour effet de permettre à chaque commission
scolaire d'évoluer selon le modèle qui lui conviendrait le mieux
et à son propre rythme et ainsi d'éviter de créer
inutilement des attentes illusoires ou de provoquer des affrontements
stériles.
L'Association des cadres scolaires du Québec reconnaît la
pertinence de certains éléments de la réforme et elle est
prête à contribuer à leur mise en oeuvre. Ainsi en
est-il des éléments relatifs à la langue, à
la confessionnalité et à l'intégration des commissions
scolaires.
Nous avons toujours collaboré à l'application de la loi
101 et nous pensons que, sous ce rapport, le projet de loi offre des pistes
intéressantes. Nous pensons que la réduction du nombre de
commissions scolaires et l'intégration du primaire et du secondaire
constituent des gestes logiques d'un processus visant à responsabiliser
davantage des gouvernements locaux.
Nous croyons, de plus, qu'il faut garantir aux parents la
possibilité d'influencer les décisions des commissions scolaires
en visant un meilleur service aux élèves. Cependant,
l'Association des cadres scolaires du Québec ne saurait être
caution de l'empressement du gouvernement à procéder ' partout,
en même temps, selon un modèle unique.
Dans chacun des cas d'intégration, il faudra bien mesurer les
avenues, bien amorcer le processus et laisser le temps faire son oeuvre. Il
n'est pas si loin le temps où le gouvernement, dans un message
publicitaire, proclamait "La personne avant toute chose". En éducation,
M. le Président, c'est toujours de personnes, dispensatrices ou clients
des services éducatifs, dont il est question. Il ne faut pas, au moment
où nous sommes conviés à réinventer certains
milieux de travail, détruire les personnes qui seront les chevilles
ouvrières de l'implantation d'un réseau scolaire primaire et
secondaire intégré.
Pourquoi cette course contre la montre, ce compte à rebours
jusqu'en juillet 1985? Qu'y a-t-il de si urgent? Pourquoi ne pas prendre le
temps qu'il faut? Pourquoi modifier les structures encore une fois plutôt
que de travailler en profondeur sur les contenus et sur les services, bref, les
défis pédagogiques énoncés plus haut? Pourquoi ne
pas faire confiance à cette vitalité et à cette
maturité des personnels dont nous faisons mention plus haut?
Les conditions d'emploi des cadres et des gérants. Il nous
apparaît important, dans cette partie de notre intervention, de vous
faire part de nos inquiétudes en ce qui a trait aux conditions d'emploi
des personnels de cadre et de gérance des commissions scolaires.
Nous sommes très perplexes en constatant que le projet de loi
traite, nommément, du directeur d'école et du directeur
général, mais qu'on ne puisse citer d'endroit où il serait
fait mention des responsabilités dévolues aux cadres de
direction, de coordination ou de gérance des commissions scolaires ou
des écoles.
Les pessimistes parmi nous disent: "Les tâches des administrateurs
de la commission scolaire sont tellement vidées de leur contenu que ce
n'était plus la peine de les mentionner dans un projet de loi." Les
optimistes, eux, prétendent que: "les fonctions sont sous-entendues ou
au moins comprises dans les attributions du directeur général."
Qu'en est-il au juste?
Par ailleurs, comment se fait-il que le projet de loi soit aussi clair
et aussi explicite en ce qui regarde les droits et privilèges des
personnels salariés au sens du Code du travail, alors que les
règlements relatifs aux conditions d'emploi des cadres sont, à
maints égards, ignorés dans le présent projet?
Pourtant, et particulièrement depuis 1972, l'Association des
cadres scolaires du Québec et d'autres associations homologues avaient
réussi à établir, en collaboration avec le
ministère de l'Éducation, une politique administrative et
salariale donnant des indications relatives aux règles d'effectifs et
aux traitements admissibles pour les cadres et gérants. Ces
propositions, colligées en 1977 dans le règlement 2902,
reconnaissaient l'existence et les principales prérogatives des cadres
et des gérants.
Nous avons toujours continué à travailler en collaboration
avec nos homologues et nos interlocuteurs en vue de rendre plus fonctionnelle
et mieux adaptée la teneur de ce règlement. Pourquoi les
règles du jeu seraient-elles modifiées? Pour quelles raisons le
projet de loi semble-t-il vouloir restreindre la portée et l'application
de certains articles?
Nous nous excusons, nous avons rayé de notre mémoire le
dernier paragraphe de la page 13 et le premier paragraphe de la page 14. Nous
les avons rayés car nous avons toutes les raisons de croire que les
promesses verbales qui nous ont été faites par le ministre de
l'Éducation seront tenues. Nous avons récemment travaillé
en collaboration avec les responsables de ces dossiers au ministère de
l'Éducation; nous pensons que les règles habituelles seront
maintenues et que les éventuels transferts de personnels seront faits
dans le respect des personnes avec les garanties appropriées.
Dans un autre ordre d'idées, nous constatons que
l'éducation des adultes est un sujet presque ignoré dans le
projet de loi. Nous comprenons qu'un texte législatif ne peut contenir
toutes les dispositions relatives à son objet, mais il n'en demeure pas
moins que les activités directement reliées à
l'éducation des adultes sont nombreuses et variées. Aussi, nous
ne croyons pas que les mécanismes prévus dans le projet de loi
soient de nature à garantir un développement harmonieux de ce
secteur.
Sous ce rapport, doit-on comprendre que les personnels
présentement affectés à l'organisation et au soutien de
l'éducation des adultes n'auront plus désormais de
responsabilités dans ce domaime? Nous n'avons pas jugé opportun
d'expliciter
davantage nos positions en regard de l'éducation des adultes
parce que nos membres se sont prononcés à ce sujet dans un
mémoire présenté par la TREAQ, c'est-à-dire la
Table des responsables de l'éducation des adultes du Québec.
M. le Président, nous vous prions avec instance de modifier la
liste de présentation des mémoires de façon que ce groupe
puisse être entendu.
Nous regrettons que ni les directeurs généraux ni nous,
n'ayons eu l'occasion de mentionner ce problème dans nos mémoires
et nous espérons que vous accepterez de les entendre en commission
parlementaire.
La mise en oeuvre du projet. Étant donné l'existence
simultanée de l'ancienne commission scolaire, d'une nouvelle commission
scolaire, d'un ou de plusieurs comités de mise en oeuvre ayant de vastes
pouvoirs, qui, pensez-vous, M. le Président, aurait juridiction pour
déterminer les orientations à prendre?
Nous tenons à rappeler que la préoccupation majeure des
membres de l'Association des cadres scolaires du Québec a toujours
été et demeure la variété et la qualité des
services éducatifs que les commissions scolaires doivent rendre
accessibles à la population québécoise et ce, au meilleur
coût possible.
Dans cette perspective, nous croyons que l'implantation de nouvelles
structures provoquant des changements aussi radicaux que ceux
préconisés dans le projet de loi risquerait d'occasionner des
retards irrécupérables dans la mise en oeuvre d'autres politiques
antérieurement mises de l'avant par le ministère de
l'Éducation. (9 h 45)
En effet, pendant que les personnels des commissions scolaires seraient
insécurisés par de nombreux changements, pendant qu'ils seraient
soumis à des orientations multiples en provenance des comités de
mise en oeuvre de l'ancienne et de la nouvelle commission scolaire, qui
assurerait le soutien nécessaire à l'implantation des politiques
récemment acceptées en vertu des nouveaux règlements,
comme le régime pédagogique? Qui assurerait l'application des
nouveaux programmes d'études?
Notre expérience dans le réseau nous amène à
affirmer qu'une nécessaire autonomie doit être laissée
à chaque milieu dans le choix de ses priorités. À cet
effet, nous sommes d'avis que l'implantation d'un modèle unique,
applicable dans toute la province en même temps, n'est pas
réaliste. Nous partageons l'objectif du projet de loi visant à
réduire le nombre de commissions scolaires. Nous pensons que,
normalement, chaque commission scolaire devrait être responsable de
rendre disponibles des services éducatifs pour les élèves
de la maternelle, des classes du primaire, du secondaire et de
l'éducation des adultes. Nous ne sommes toutefois pas convaincus qu'un
découpage territorial décrété pourra
répondre adéquatement aux vrais besoins de la population
concernée.
En conclusion, M. le Président, nous voulons insister sur le fait
que les cadres scolaires, parce qu'ils vivent de l'intérieur le
système d'éducation, se considèrent parmi les plus aptes
à porter un jugement sur les modifications à y apporter. À
ce titre, ils demandent le retrait du projet de loi 40. Le projet veut
répondre à de trop nombreux faux problèmes
générés par une approche théorique, non conforme au
vécu quotidien dans la gestion pédagogique et administrative
d'une commission scolaire ou d'une école.
L'Association des cadres scolaires du Québec demande plutôt
que le gouvernement du Québec respecte les gouvernements locaux que sont
les commissions scolaires et ce, en continuité avec les principes
énoncés par ce même gouvernement en regard de l'exercice de
toute saine démocratie. À notre avis, le vrai respect d'un
gouvernement local ne permet pas au gouvernement central de
décréter unilatéralement par loi, règlements ou
autres moyens, les droits et pouvoirs des écoles sans en convenir avec
les commissions scolaires qui ont juridiction sur lesdites écoles.
En effet, l'Association des cadres scolaires du Québec
considère que l'école est une entité administrative sous
la responsabilité des commissions scolaires et qu'il appartient à
celles-ci, en concertation avec les agents du milieu, d'identifier les pouvoirs
et responsabilités qu'elles jugeront à propos de lui
déléguer. L'Association des cadres scolaires du Québec est
aussi d'avis que la commission scolaire, du fait même qu'elle est un
gouvernement local, doit être véritablement responsable de la vie
pédagogique d'un territoire donné. Dans ce sens, elle doit jouer
un rôle fondamental dans la planification des services, leur
coordination, leur soutien, l'évaluation des enseignements et des
services spécialisés.
L'Association des cadres scolaires du Québec croit que
l'école doit être responsable de la totalité de la gestion
quotidienne des activités d'apprentissage, des services
complémentaires et des services particuliers aux
élèves.
Nous considérons toutefois utopique de croire qu'une école
puisse s'évaluer seule comme si les autres parties du système
n'existaient pas. Il est essentiel que l'ensemble puisse porter un jugement sur
chacune de ses parties et développe, en conséquence, des plans de
redressement.
M. le Président, s'il devait absolument y avoir un projet de loi,
que ce projet de loi se borne à redéfinir le partage des
responsabilités entre le gouvernement, le ministre de l'Éducation
et les commissions
scolaires et qu'il laisse aux commissions scolaires, qui ont fait la
preuve de leur efficacité, le soin de gérer véritablement
les activités éducatives sur leur territoire.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Giard. Avant que nous
ne procédions à l'échange entre les membres de la
commission et vous-mêmes, je vais donc, comme le prévoit le
règlement, identifier les gens de cette commission qui sont: M.
Brouillet (Chauveau), M. Champagne (Mille-Iles), M. Cusano (Viau), M.
Paré (Shefford), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Hains
(Saint-Henri), M. Laurin (Bourget), M. Leduc (Fabre), M. Lachance
(Bellechasse), M. Payne (Vachon), M. Ryan (Argenteuil), les intervenants
étant: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Charbonneau (Verchères),
M. Maltais (Saguenay), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Gauthier (Roberval),
Mme Harel (Maisonneuve), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Rochefort (Gouin) et M.
Sirros (Laurier).
M. le ministre, vous avez la parole.
M. Laurin: M. le Président, je veux d'abord remercier
très sincèrement l'Association des cadres scolaires du
Québec de son intéressant mémoire. J'ai eu le plaisir de
rencontrer à plusieurs reprises les dirigeants de cette association sur
le plan national et j'ai eu aussi le plaisir de rencontrer des
représentants régionaux de plusieurs régions, à
plusieurs reprises et les échanges que nous avons eus ont toujours
été très intéressants et constructifs.
M. Giard a fait allusion à des rencontres récentes que
nous avons eues et à une décision que nous avions prise en commun
de réunir à nouveau les partenaires pour étudier d'une
façon plus précise cette répartition des pouvoirs entre
les divers paliers du système éducatif. Je l'ai entendu dire ce
matin en préface à son mémoire qu'il regrettait que ces
rencontres n'aient pas donné tous les résultats attendus. Je le
regrette moi aussi, mais je ne crois pas que nous soyons au bout de nos efforts
et je pense qu'il faudra les continuer, pour deux raisons, d'abord parce que je
crois qu'il persiste encore, soit des malentendus à dissiper sur
la répartition des pouvoirs entre le ministère de
l'Éducation et les commissions scolaires d'une part; d'autre part, parce
que les discussions peuvent sûrement être modifiées à
partir du moment où, lorsque nous discutons des relations entre
commission scolaire et école, nous admettons la pertinence d'un
troisième palier de responsabilité et de pouvoir,
c'est-à-dire l'école. Je m'explique.
En ce qui concerne le premier point, il faudrait savoir si l'Association
des cadres scolaires trouve que dans le projet de loi 40, le ministère
s'arroge plus de pouvoirs discrétionnaires, réglementaires, que
ceux qu'il possède actuellement et il faudrait alors en faire la preuve,
car pour ma part je suis convaincu que déjà nous nous
délestons de certains pouvoirs. Deuxièmement, nous transformons
des contrôles a priori en contrôles a posteriori.
Troisièmement, nous transformons les pouvoirs personnels du ministre,
discrétionnaires, donc, par des règlements généraux
qui permettront aux commissions scolaires de les appliquer sans
référence au ministère, faisant par le fait même
disparaître un grand nombre de transactions, de directives qui sont
actuellement, chacun le sait, très nombreuses et trop nombreuses.
Ce qu'il faut savoir, c'est si, à l'occasion de la discussion de
la loi 40, l'Association des cadres scolaires veut s'en prendre davantage aux
pouvoirs actuels du ministère et, à l'instar des commissions
scolaires, demander une décentralisation encore plus massive des
pouvoirs du ministère auprès des commissions scolaires. Je pense
qu'il faut bien s'entendre là-dessus. Est-ce que les critiques portent
sur la situation actuelle ou sur la loi 40 qui déleste, allège,
mais pas suffisamment au goût de l'Association des cadres scolaires. Sur
le deuxième point, il faudrait peut-être ne pas s'entendre, si
j'en juge d'après le mémoire de ce matin, mais au moins
reconnaître qu'une partie de nos différends, de nos divergences
vient du fait que d'un côté le gouvernement veut reconnaître
une existence au troisième palier important de responsabilité que
nous considérons se situer à l'école,
particulièrement sur le plan pédagogique, et, en
conséquence, attribuer à ce troisième palier certaines des
responsabilités qui sont actuellement exercées par les
commissions scolaires.
À partir du moment où on s'entend que c'est là la
source du différend, il faudrait d'abord régler ce
différend avant que nous puissions nous entendre sur le transfert de
responsabilités qui en est la conséquence. C'est la raison pour
laquelle je continue de penser que nos discussions, non seulement avec
l'Association des cadres scolaires, mais avec certains autres partenaires,
devront se continuer à la lumière des éclaircissements
qu'aura apportés cette commission, à la lumière des
décisions qu'il nous faudra prendre à la suite de cette
commission parlementaire.
Je constate quand même avec plaisir que l'Association des cadres
scolaires se dit d'accord avec des changements extrêmement importants
qu'entend apporter le projet de loi, par exemple au sujet de
l'intégration de l'enseignement primaire et secondaire, ce qui
amènerait une réduction marquée du nombre de commissions
scolaires. L'Association des cadres scolaires se dit également d'accord
avec la division des commissions scolaires sur une base linguistique
plutôt que
confessionnelle qui est un autre changement majeur. Et l'Association des
cadres scolaires se dit enfin d'accord sur les nouveaux aménagements de
la confessionnalité qui correspondent davantage à
l'évolution de la société québécoise. Ce
sont là des changements extrêmement importants et je me
réjouis, encore une fois, que l'accord sur ces divers points semble de
plus en plus général.
Là où l'Association des cadres scolaires est moins
d'accord, c'est sur les conditions de travail des cadres et,
deuxièmement, sur l'existence ou la pertinence de ce troisième
palier de responsabilité officialisé que constitueraient les
écoles.
En ce qui concerne le premier point, les conditions de travail, j'ai
bien noté qu'à la suite des rencontres que nous avons eues avec
l'Association des cadres scolaires du Québec, les cadres
s'inquiètent moins des modalités de transfert et
d'intégration des personnels. Je pense que la tendance optimiste dont
vous faisiez état s'avère plus juste que la tendance pessimiste.
Et, d'ailleurs, vous étiez sûrement là hier quand j'ai dit
à vos homologues de la région de Montréal que nous
entendions procéder à ces modalités de transfert et
d'intégration dans le respect le plus strict des droits acquis et de
l'équité.
Cependant, une question demeure. C'est celle de ce règlement de
la politique administrative et salariale. On présente souvent
l'existence du règlement actuel déterminé par le
gouvernement comme une preuve de la centralisation indue du ministère de
l'Éducation. La fédération des commissions scolaires,
hier, nous a même demandé de nous départir de cette
responsabilité à son profit, c'est-à-dire qu'elle voudrait
l'assumer. C'est d'ailleurs le cas actuellement en ce qui concerne les
enseignants qui oeuvrent à l'intérieur du réseau
protestant, puisque nous savons qu'à l'heure actuelle, ce n'est pas le
gouvernement qui détermine les conditions de travail du personnel non
syndiqué dans le secteur protestant, c'est l'Association des commissions
scolaires protestantes. Pour le secteur francophone, jusqu'ici, c'est le
gouvernement qui a assumé cette responsabilité. Est-ce que je
dois comprendre, M. Giard, que, dans cette manifestation de la volonté
de décentralisation du ministère de l'Éducation vers la
commission scolaire, vous souhaiteriez, en tant qu'association, que le
gouvernement remette à la fédération des commissions
scolaires, désormais, la responsabilité de déterminer le
règlement fixant les conditions de travail de l'Association des cadres
qui travaillent à son service?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Si vous me le permettez, M. le Président, comme
dans l'intervention de M. le ministre, j'ai perçu quelques questions, je
vais en faire d'abord une analyse. Ensuite, je demanderai à des
personnes de répondre, d'une façon plus spécifique, aux
questions telles que posées.
Dans un premier temps, à la question que posait le ministre
à savoir si nos critiques portent sur le projet de loi 40 ou sur la
situation actuelle, je voudrais rappeler que nous appelons plutôt cela
des observations et qu'elles portent effectivement sur le projet de loi actuel
et non pas sur la situation. (10 heures)
D'autre part, à propos de la décentralisation, des
pouvoirs accrus du ministère, j'ai un commentaire à faire et,
ensuite, je demanderai à M. Lapierre de répondre selon votre
demande.
Je ferai également un commentaire sur le palier de gestion. Au
niveau des conditions de travail, je demanderai à M. Hudon de le faire.
Quant au quatrième point, au niveau des accords, j'aurai
également un commentaire.
Je commence par le premier élément. Je voudrais rappeler
au ministre de l'Éducation que ce n'est pas nous qui avons fait des
annonces de décentralisation dans l'ensemble des déclarations
ministérielles parce qu'il n'est pas de notre pouvoir de le faire, bien
qu'il soit tout à fait de notre intention que ces déclarations
s'appliquent un jour, nous n'avons pas fait les déclarations de
décentralisation à l'intérieur du réseau de
l'éducation. Nous trouvons un peu lourd qu'on nous demande de faire la
preuve que la décentralisation n'est pas faite. Ce sont ceux qui ont
fait les déclarations de décentralisation dans le réseau
scolaire qui devraient faire la preuve qu'effectivement, dans le projet, il y a
décentralisation.
Les seules observations qu'on peut faire comme personnes
extérieures qui ne peuvent intervenir directement dans ce processus,
c'est de dire que lorsqu'un projet de loi présente un modèle
unique pour l'ensemble des écoles du Québec - alors qu'on sait
que les écoles sont toutes différentes les unes des autres - qui
présente un modèle qui doit s'appliquer de la même
façon dans le temps à tous les endroits dans la province, on peut
penser que l'intention de décentralisation là-dessus n'est
sûrement pas très forte. C'est la raison pour laquelle on revient
continuellement pour dire: Comment peut-on, dans une logique cohérente,
décentraliser alors que les écrits mêmes sont de nature
très centralisatrice, en partant d'un modèle unique applicable
à tout le monde en même temps et partout.
Sur ce, je vais respecter la question que vous nous posez et je vais
demander à M. Lapierre de nous dire comment, à la
lecture des articles, on n'a pu faire la preuve que vous
décentralisez.
Le Président (M. Blouin): M. Lapierre.
M. Lapierre (J.-Édouard): M. le Président, M. le
ministre dit: Est-ce que nous décentralisons suffisamment? Il est
certain que, quelle que soit la partie qui discute de décentralisation,
elle cherche toujours à en obtenir davantage par ses interventions.
C'est la lutte du pouvoir, c'est la lutte pour la vie. Chaque organisme qui se
croit mandaté désire avoir les responsabilités de ses
mandats.
À l'intérieur du projet de loi, quand on le compare
attentivement à la Loi sur l'instruction publique, nous devons, en toute
honnêteté et en toute objectivité, constater et
concéder qu'il y a un effort louable de décentralisation. Ce
serait de l'hérésie que de soutenir d'une façon
impérative le contraire. Il y a un effort très louable. À
maints endroits, en lisant la Loi sur l'instruction publique, on voit que le
ministère de l'Éducation s'est départi, comme le disait M.
le ministre tout à l'heure, de pouvoirs discrétionnaires.
Cependant, quand on regarde le projet de loi 40, malentendu ou mauvaise
interprétation, nous y retrouvons certaines coquilles. J'en prends comme
exemple, en y allant un peu dans l'ordre des articles, le 245, qui a
déjà été mentionné par d'autres organismes,
où on parle du mandat du vérificateur défini d'une
façon générale et particulière. Ce "particulier"
intrigue, surtout quand on considère qu'au chapitre VIII, il y a encore
une autre possibilité, c'est celle de nommer une personne pour
enquêter sur les activités de la commission scolaire et que ce
chapitre VIII dans son article 328, si ma mémoire est bonne, permet au
ministre d'utiliser la tutelle. On ne le conteste pas, on se
réfère tout simplement au mandat d'une façon
particulière du vérificateur.
À un autre endroit, c'est-à-dire 246, le ministre est en
droit d'obtenir directement de la commission scolaire des informations quant
aux opérations financières. Cependant, il nous semble assez
intriguant de voir que le ministre peut demander également à la
commission scolaire de faire fournir par l'institution bancaire les
renseignements concernant les opérations financières.
À l'article 298, alors que c'est un pouvoir que détenait
déjà le gouvernement ou le ministre, on dit que ce dernier peut
réviser les résultats d'un élève. Il peut
pondérer les résultats aux épreuves de l'école. Il
va sans dire que ces fonctions doivent répondre à des
critères très clairement définis. Toutefois, il nous
semble que l'exercice de cette fonction pourrait se faire à un autre
niveau, d'autant plus qu'il est permis à l'étudiant ou aux
parents d'avoir recours au Protecteur du citoyen.
À l'article 300, lorsqu'on parle de règles d'attribution
des ressources financières, ou le texte est mal défini ou il est
mal compris, mais lorsqu'on parle de la gestion financière des
commissions scolaires et des écoles, c'est aller jusqu'à la
définition même des opérations en matière de budget.
À l'article 301, peut-être, encore là, est-ce un manque de
clarté, mais on parle, dans les allocations de ressources, de conditions
particulières et on parle de normes générales ou
particulières, alors qu'on sait très bien que ce gouvernement
s'est arrêté tout particulièrement à établir
des normes assez fixes en matière de distribution équitable des
revenus de la province.
À l'article 302, on dit que le ministre peut
déterminer les cas ou conditions pour donner des subventions non
prévues. Encore là, il me semble que cela échappe à
la règle générale de la distribution des subventions
statutaires. Également, à l'article 305, on détermine des
conditions d'indemnisation à une commission scolaire dont les biens sont
endommagés. Il me semble que cela devrait plutôt répondre
à un principe général. À l'article 306, il y a un
terme nouveau. C'est qu'en matière de distribution, le ministre peut
retenir ou diminuer une subvention, sauf celle du transport, mais, par
ailleurs, le ministre du Transport peut retenir ou diminuer une subvention.
À l'article 309, dans un sous paragraphe, on parle de conditions
d'admission d'un élève n'étant pas sous la juridiction de
la commission scolaire. À ce moment, le ministre peut déterminer
les frais de scolarité et les modalités de paiement. Est-ce que
le milieu ne pourrait pas, à partir des montants non sujets aux
subventions, établir les frais de scolarité et établir les
modalités de paiement? Aux 6 et 7° alinéas, je lis:
"Établir les allocations des membres du conseil d'administration du
comité exécutif et du remboursement des dépenses de ses
membres et le remboursement des membres des comités d'école et
des divers autres comités." Est-ce qu'à partir de normes
établies, le milieu ne pourrait pas déterminer ces
modalités de paiement ou de remboursement?
M. Laurin: Un amendement que j'ai déposé arrivera
justement à ce résultat.
M. Lapierre: C'est vrai, je m'excuse, M. le ministre. Je
m'excuse, il m'a échappé celui-là.
À l'article 327 - d'ailleurs j'y ai fait allusion tout à
l'heure - à l'effet de nommer une personne pour enquêter sur les
activités de la commission scolaire, ce qui revient à l'autre
article précédent, c'est-à-dire l'article 245.
À l'article 341, à la commission de
mise en oeuvre, le ministre nomme le président. C'est
peut-être un peu chercher noise, mais il me semble que, les personnes
étant nommées selon une procédure déterminée
par cet article, le milieu pourrait nommer la présidence.
Enfin - c'est le dernier, je ne veux pas m'attarder - à l'article
352, on parle de déterminer les normes d'inventaire sur les actifs et
les passifs des commissions scolaires et des transferts, en cas de nouvelles
commissions scolaires. Encore là, on aimerait peut-être une
générosité plus ouverte à savoir qu'en faisant
confiance au milieu, le milieu pourrait élaborer des normes ou des
modalités de transfert des actifs dans ces cas, tout au moins les
discuter à partir de principes établis. Voilà, M. le
Président, en vous remerciant.
Le Président (M. Blouin): Merci. Cela va?
M. Giard: À la question suivante, on parlait plus
particulièrement du troisième palier de gestion. Si vous me le
permettez, M. le Président, je voudrais tout simplement faire un rappel
d'une chose que tout le monde connaît mais qu'on semble oublier à
l'occasion. Une commission scolaire n'est pas une entité
accrochée quelque part en l'air et à laquelle personne ne peut se
référer. Une commission scolaire, c'est un lieu de réunion
d'un ensemble d'écoles sur un territoire donné. S'il n'y avait
pas d'école, il n'y aurait pas de commission scolaire. Alors, quand on
parle de paliers de gestion, si on en donne un aux écoles, cela veut
dire, à toutes fins utiles, que ce n'est pas la peine de donner de
palier de gestion à une commission scolaire, parce que la commission
scolaire est constituée de l'ensemble de ces écoles.
Dans cette perspective, nous disons: Deux paliers de gestion, cela nous
apparaît normal et fonctionnel. Cela nous apparaît de nature
à permettre aux écoles d'interagir les unes avec les autres et de
former ensemble ce qui s'appelle la commission scolaire. Dans ce cadre, nous
pensons qu'il est normal que l'école, comme entité administrative
autonome, doive assumer un certain nombre de responsabilités.
Là-dessus, je ne voudrais pas me répéter. Je vous
réfère à la page 18 de notre mémoire. C'est
très global, cela resterait à définir, mais on croit que
l'école doit être responsable de la totalité de la gestion
quotidienne des activités d'apprentissage, des services
complémentaires et des services particuliers aux
élèves.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Giard: Quant à la troisième question sur les
conditions d'emploi, je voudrais tout simplement dire que M. le ministre a
raison. Nous avons voulu dire dans notre mémoire que, depuis
récemment, nous avons eu des échanges fructueux avec les agents
du ministère. Nous considérons qu'avant d'aller vers des
études, à savoir que ce serait à tel niveau, ou tel autre,
où ces conditions devraient se régler, nous voulons poursuivre
ces études.
Je vais demander à M. Denis Hudon de vous faire part de
l'approche que nous avons l'intention d'avoir par rapport à ce
dossier.
Le Président (M. Blouin): Alors, succinctement, M.
Hudon.
M. Hudon (Denis): M. le Président, en 1976, l'Association
des cadres avait déposé une requête au gouvernement afin
d'établir des nouveaux modes de régime de relations du travail
pour les cadres, ce qu'on appelait un régime formel, entier et
particulier de relations du travail qui aurait fait l'objet d'une loi. Alors,
pendant l'étude de ces dispositions de notre requête, c'est en
1977 qu'il a été convenu par trois parties: l'Association des
cadres, l'Association des directeurs généraux et la
fédération des commissions scolaires, d'avoir un régime de
relations du travail transitoire sous la forme d'un règlement du
gouvernement du Québec. En 1979, nous avions entrepris des discussions
avec les tables de consultation, afin d'établir un certain nombre de
sujets qui auraient pu faire l'objet d'une décentralisation plus
poussée au niveau provincial et de sujets qui auraient fait l'objet
d'ententes au niveau de chacune des commissions scolaires. Il y a
déjà, d'ailleurs, une partie des conditions de travail, celles
qui touchent plus immédiatement la gestion des personnels de cadre, qui
fait l'objet d'une politique de gestion des commissions scolaires et de
consultation au niveau local.
Alors, je pense qu'il y aurait probablement lieu de s'interroger de
nouveau sur toute la pertinence d'avoir des conditions de travail aussi
réglementées et aussi complètes au niveau provincial et
laisser plus de latitude au niveau local. Alors, on serait prêt à
entreprendre des discussions là-dessus avec tous les partenaires, la
fédération et le ministère. Cependant, entre-temps, tant
qu'on ne se sera pas entendus sur les nouvelles modalités, le partage
des sujets ou les modalités de fonctionnement des nouvelles conditions
de travail et de leur application, il serait pertinent de maintenir encore pour
un bout de temps la réglementation des conditions de travail des
cadres.
Le Président (M. Blouin): Merci, monsieur.
M. Laurin: M. le Président, j'ai un commentaire. Je suis
heureux d'apprendre ces éclaircissements, mais je voudrais rappeler que
si le gouvernement, en ce qui concerne
les employés de la fédération des commissions
scolaires catholiques, a gardé la responsabilité du
règlement, c'est à la demande même de l'Association des
directeurs généraux et de l'Association des cadres scolaires.
Nous n'avons aucune objection à envisager un changement dans le sens
d'un transfert de responsabilités à la fédération
des commissions scolaires à cet égard. De plus, en ce qui
concerne les articles qu'a soulevés M. Lapierre, il y en a qui ne font
que reconduire les pouvoirs actuels en les aménageant cependant d'une
façon plus souple. Par exemple, le vérificateur, le
ministère ne garderait que la responsabilité de déterminer
les champs de vérification alors qu'il reviendrait aux commissions
scolaires de déterminer les conditions particulières auxquelles
il voudrait soumettre la vérification. (10 h 15)
Sur d'autres points qui touchent la gestion financière, il ne
s'agit que d'ajuster la loi aux changements importants survenus dans le
système d'allocation des ressources en 1980 à la suite des
déclarations du ministre de l'Éducation d'alors et du ministre
des Finances pour prévenir des déficits d'une ampleur aussi
grande que ceux qu'on avait manifestés. Il est possible que dans cette
formulation qui veut recouvrir les méthodes actuelles d'allocation des
ressources il y ait encore des ambiguïtés. Je suis bien prêt
à les regarder. D'ailleurs je l'ai déjà fait et je peux
vous dire que dès mardi je serai en mesure de déposer un document
qui visera à éliminer toutes les ambiguïtés qui
peuvent subsister dans la formulation de ces articles et que vous avez
relevées vous-mêmes, ce qui est encore une fois une preuve qu'on
veut que les articles de la loi recouvrent exactement la
réalité.
J'aurais d'autres questions à poser sur le deuxième volet
auquel je faisais allusion tout à l'heure: l'existence du
troisième palier. Je constate que votre opinion est différente de
celle des cadres scolaires de l'île de Montréal qui, hier, nous
ont dit que - ils nous ont fait un grand plaidoyer pour l'école
responsable et communautaire - ils étaient prêts à
envisager qu'on leur transfère un très grand nombre de
responsabilités importantes sur le plan de la pédagogie. Je vois
que vous n'êtes pas prêts à aller aussi loin que vos
collègues de l'île de Montréal mais je voudrais vous dire
que je trouve votre conception du projet éducatif un peu restrictive en
ce sens que vous la réduisez à une concertation des agents
éducatifs du milieu de l'école. Ceci est le moyen qui peut
être envisagé pour la réalisation du projet éducatif
mais il ne décrit en aucune façon un projet éducatif qui,
au contraire, est la détermination par les agents en concertation, des
besoins de l'école, des priorités de l'école devant
conduire à l'établissement d'un plan d'action où chacun
des intervenants aurait son rôle à jouer. Je trouve que c'est une
conception réductrice et simplificatrice du projet éducatif que
celle que vous nous présentez ce matin.
Dans votre mémoire, à la page 5, vous dites qu'il faut
quand même laisser une marge de manoeuvre importante à
l'école, qu'il faut en particulier lui reconnaître des
responsabilités pédagogiques. Si vous dites que le but principal
de l'école est l'éducation des jeunes, en quoi les
responsabilités pédagogiques reconnues à l'école
par le projet de loi 40 peuvent-elles distraire celle-ci de sa mission
première?
Puisque vous dites vous-mêmes qu'il tombe sous le sens commun que
c'est à l'école que se passe l'action, n'y aurait-il pas lieu
alors d'en faire le premier lieu de responsabilité pédagogique,
éducative plutôt qu'une simple entité administrative?
Le Président (M. Blouin): Rapidement, M. Giard, s'il vous
plaît.
M. Giard: Je pense que M. le ministre est très juste dans
son observation. Je relisais la définition de la page 39 du livre blanc
sur le projet éducatif et je dois dire que si nous n'avons pas
cité la définition ce n'est pas parce que nous ne la partageons
pas. Le discours que vous avez prononcé à l'école
Saint-Exupéry en décembre 1982, dans le texte "L'enseignant et
l'enseignante, des professionnels" et les définitions qu'il y a à
l'intérieur du livre blanc, nous sommes tout à fait d'accord pour
dire que cela constitue en gros des éléments propres à
permettre à chaque école, chaque conseil d'école de se
doter d'un projet éducatif qui soit raisonnable, valable et bien
articulé.
Comme base de travail, nous sommes tout à fait d'accord pour
accepter les documents et déclarations ministériels.
Quant à la deuxième partie de votre question, en quoi le
fait que le régime pédagogique s'applique à l'école
puisse distraire l'école de sa vocation première, je vais
demander à M. Vincent Tanguay de vous donner un certain nombre
d'observations.
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay.
M. Tanguay (Vincent): M. le Président, j'aimerais prendre
quelques minutes pour rappeler le régime pédagogique. Il me
semble qu'il y a beaucoup de confusion qui naît à partir du
contenu même du régime pédagogique. On dit que
l'école doit être responsable de l'application du régime
pédagogique et j'ai l'impression que, même là,
l'école ne peut pas elle-même ou elle seule prendre la
responsabilité totale de l'application du régime
pédagogique. C'est pour cela que j'aimerais faire
référence aux principales dispositions du régime
pédagogique
et à tout ce qu'il comporte.
Tout d'abord, le régime pédagogique définit les
objectifs du primaire et du secondaire. Lorsque le régime
pédagogique a été présenté, c'était
la première fois, à la suite du livre vert et du livre orange,
que le ministre de l'Éducation et le gouvernement définissaient
quels étaient les objectifs visés aux niveaux primaire et
secondaire. On parle de qualité de langue d'enseignement; on parle de
programme d'études, de manuels scolaires, de matériel didactique,
d'évaluation des élèves, de renseignements aux parents, de
consignation des résultats scolaires jusqu'à ce que les adultes
aient 75 ans, des services personnels, des services complémentaires et
des services particuliers aux élèves.
Je vais m'arrêter aux services personnels aux élèves
pour commencer. D'abord, tout le monde sait que les services personnels sont
des services... On parle de services de pastorale, on parle de services
d'orientation, de psychologie, d'orthopédagogie, d'orthophonie. On parle
aussi de services sociaux, de services de santé qui nécessitent
des ententes particulières avec les centres de services sociaux, avec
les centres locaux de services communautaires et avec les départements
de santé communautaire et d'autres organismes similaires. Les services
rendus par le personnel appartenant à ces organismes doivent
correspondre aux priorités de ces organismes. Du côté
scolaire, il doit y avoir de la cohérence dans les attentes d'une
école à l'autre, de sorte que, lorsqu'une école, au niveau
des services personnels, est très grande et qu'elle peut avoir
l'exclusivité des services d'un ou de deux conseillers d'orientation ou
d'un psychologue, il n'y a aucun problème à ce qu'elle puisse
gérer les services personnels dans l'école. Mais, à partir
du moment - c'est le cas d'environ 2000 écoles au Québec -
où une école a moins de 500 élèves, qu'elle ne peut
se payer le luxe - qu'elle n'aura d'ailleurs pas plus après l'adoption
du projet de loi -d'avoir un conseiller d'orientation à temps plein, un
psychologue à temps plein, un travailleur social à temps plein.
Il faut qu'elle s'entende avec les autres écoles pour déterminer
le genre de services qui doivent s'y rendre et le moment où les gens
doivent y aller.
On comprend bien qu'un conseiller d'orientation ne peut pas avoir des
objectifs différents d'une école à l'autre. En changeant
de milieu de travail deux ou trois fois par semaine, si on n'a pas de
cohérence dans les priorités demandées à ces
gens-là, ils vont être de vraies queues de veau dans
l'école. On doit donc s'ajuster sur le genre de priorités pour
une année scolaire. Il faut comprendre aussi que si c'étaient
strictement les directeurs d'école qui avaient à s'entendre
là-dessus, ils y passeraient leur année. Ce n'est pas parce
qu'ils ne s'entendent pas entre eux, mais ils prendraient beaucoup de temps
à l'extérieur de l'école pour déterminer les
modalités de gestion et de partage de ce personnel.
Au niveau des services complémentaires, il me semble très
clair que c'est ici que prend naissance le projet éducatif. Les services
complémentaires sont tout ce qui s'appelle l'encadrement des
élèves, les modalités d'encadrement des
élèves, les politiques d'encadrement des élèves,
les règlements d'élèves dans l'école, tout ce qui
s'appelle la surveillance des élèves à l'intérieur,
à l'extérieur, dans les temps d'arrêt entre les cours,
après les cours et les services d'activités culturelles,
d'activités sportives et autres activités aux
élèves. Il me semble que c'est à partir de ces
services-là - les services complémentaires aux
élèves - qu'on donne une couleur locale et qu'on donne vraiment
une couleur à une école. Ces services doivent être - et
c'est le cas dans la plupart des écoles - la responsabilité
exclusive de l'école.
Le Président (M. Blouin): Succinctement, s'il vous
plaît, maintenant.
M. Tanguay: Je le fais succinctement, M. le Président. Je
vais parler de l'enseignement. Si on parle de l'enseignement proprement dit,
l'enseignement concerne les programmes. Les programmes d'enseignement sont
prescriptifs dans la majeure partie des cas. Il n'y a qu'une partie des
programmes qui sont déterminés et acceptés par le ministre
où les contenus notionnels sont indicatifs, de sorte que ce serait la
partie qui reste à l'école. Les parties qui sont prescriptives,
ce n'est pas à l'école que cela revient. Lorsqu'on regarde le
temps d'enseignement, le temps prescrit pour chacune des disciplines
d'enseignement au primaire et au secondaire, lorsqu'on l'additionne dans le
nouveau projet de règlement même du ministre sur le régime
pédagogique, il n'y a qu'au premier cycle du primaire qu'il y a 1380
minutes de définies. Ailleurs, les 1500 minutes sont définies par
le règlement du régime pédagogique de sorte que ce n'est
pas la commission scolaire qui est responsable de ce fait. On ne dit pas que ce
n'est pas bien. On dit que les 1500 minutes d'enseignement sont
déterminées dans le régime pédagogique et il n'y a
que des profils au deuxième cycle du secondaire pour dire: II y a un
profil de sciences humaines ou de sciences pures qui peut être sous
l'autorité de l'école. Je pense que c'est normal que
l'école puisse définir aussi quel genre de profil elle veut
donner à ses options au deuxième cycle du secondaire, mais encore
là, cela ne peut pas être strictement l'école qui a
l'autorité pour
déterminer les programmes, la répartition du temps de
programme et la répartition du temps d'enseignement dans chacune des
disciplines. Je pourrais m'arrêter là, mais revenir pour d'autres
questions.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Tanguay. Cela va, M.
le ministre?
M. Laurin: Cela va.
Le Président (M. Blouin): Merci. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de saluer
l'Association des cadres scolaires du Québec avec nous non seulement ce
matin, mais depuis le début des audiences de la commission. Nous avons
eu l'occasion de côtoyer nos représentants à plusieurs
reprises et de noter le vif intérêt avec lequel ils suivent les
travaux de la commission. Je reviendrai tantôt sur ce qui vient
d'être dit, qui m'a paru particulièrement intéressant pour
l'objet de nos débats, mais en vous écoutant ce matin, je me
rendais compte peut-être encore plus clairement du dilemme dans lequel le
gouvernement place le législateur. Ou la réforme ne sera qu'une
espèce de vernis pour donner au gouvernement l'impression que tout cet
exercice qu'on fait depuis un an aura servi à quelque chose - et
à ce moment-là, cela ne changera pas grand-chose dans la
réalité - ou la réforme apportera des changements profonds
et à ce moment-là, les changements seront imposés sans
qu'existe le consensus nécessaire. C'est le paradoxe, c'est le dilemme
dans lequel se place le gouvernement. Nous avons entendu, depuis le
début de la journée d'hier, toutes sortes de points de vue. Si on
fait le tour des agents qui sont engagés dans l'éducation, on
constate qu'il y a l'élève, évidemment, il y a
l'enseignant, il y a l'administrateur scolaire professionnel, il y a
l'administrateur scolaire élu, il y a les parents et il y a les
directeurs d'école. Dans ces six catégories, je pense que nous
savons déjà à ce stade de nos débats, étant
donné l'importance des points de vue qui nous ont été
donnés depuis hier, qu'il va manquer des catégories très
importantes. Ce que l'Association des directeurs généraux nous a
dit hier soir, c'était concis, mais clair et vigoureux. On a dit au
gouvernement: Attachez-vous à certains aspects qui peuvent faire l'objet
d'un consensus actuellement, d'un effort commun et d'une véritable
concertation, par conséquent, et le reste qui ne donne pas lieu à
un consensus, attendez un peu. Attendez que les circonstances aient
évolué, que l'opinion ait mûri davantage. On nous dit
exactement la même chose ce matin. Je ne pense pas que ces deux
mémoires aient été préparés en collusion.
D'ailleurs, les explications que chaque groupe a données
démontrent qu'on a fait une étude différente du projet de
loi. C'est un problème, j'allais dire pour le gouvernement, mais aussi
pour nous, comme législateurs.
Dans les arguments qu'on nous a présentés ce matin, il y a
en a un qui m'a vivement remué. C'est celui où l'Association des
cadres souligne la contradiction fondamentale qui caractérise la
politique du gouvernement. D'un côté, on inscrit le projet
à l'enseigne de la décentralisation et de l'autre
côté, on commet un accroc majeur par la nature même du
projet, parce que tout de suite, on a une structure intermédiaire qui
s'appelle la commission scolaire qui est un organisme démocratiquement
élu. Par-dessus la tête de la commission scolaire, on lui dit:
Voici comment vous allez organiser votre affaire. C'est un peu comme si on
allait dire aux municipalités: Voici comment vous allez organiser vos
services dans vos quartiers respectifs. On va vous le dire, nous autres, vous
ne le savez pas. Vous avez été élus par le peuple, mais
vous ne savez pas ce que vous avez à faire. On va vous montrer cela. On
va vous faire un dessin. (10 h 30)
On va jusque là. C'est vraiment une violation du principe
même de la responsabilité d'un gouvernement local que ce type de
loi qu'on veut imposer. Cela va plus loin. Quand cela va jusqu'à
l'uniformité du modèle, il y a toujours des petites
modalités qu'on laisse, mais le modèle fondamental on veut
l'imposer partout alors qu'il ne répond, de toute évidence,
à aucune espèce de consensus sérieusement établi.
J'entendais le ministre tantôt vous dire: vous autres, vous avez ce point
de vue-ci. L'Association des cadres scolaires de la commission des
écoles catholiques de Montréal nous a donné un autre point
de vue hier. Il faudrait nuancer. Je pense que le point de vue qui a
été donné hier est assez proche du vôtre finalement.
J'avais dit au ministre hier, mais il ne m'écoute pas toujours: si vous
voulez invoquer l'Association des cadres scolaires, je vous préviens,
prenez son témoignage au complet; ne prenez pas seulement le volet qui
convient davantage à votre thèse; prenez-le dans l'ensemble, et
vous allez vous apercevoir que c'est autant une mise en garde qu'un aval.
Ce matin, c'est plus direct. On peut moins facilement faire cela, mais
je ne crois pas qu'il y ait de contradiction fondamentale entre les deux
témoignages qui ont été donnés. Même à
supposer qu'il y en eut un, cela montrerait justement l'absence de consensus
d'une manière encore plus claire, je pense. C'est un premier point que
je voulais souligner nettement. Ce n'est pas la première fois qu'on le
fait. Je crois que nous allons être appelés à le souligner
à maintes
reprises au cours des prochaines semaines. Nous autres, nous avons eu un
avantage, en même temps un pensum pendant la période des
fêtes. Nous devions nous préparer en vue des audiences de la
commission. Il a fallu que nous lisions, comme parlementaires, cette montagne
de mémoires qui nous avaient été remis et je pense bien
que le ministre est au courant comme moi, parce qu'il a fait le même
exercice, j'en suis sûr: Les associations qui parlent des
problèmes d'éducation en véritable connaissance de cause,
c'est-à-dire qui comprennent des personnes engagées dans
l'éducation, une très forte majorité va parler et a
déjà commencé à le faire avec des objections
extrêmement sérieuses à l'encontre du projet de loi.
Ceci étant dit, je voudrais en revenir à un certain nombre
de questions qui découlent de votre mémoire et que j'aimerais
discuter avec vous. Dans une première, vous dites au début du
mémoire que vous avez fait une étude plus analytique du projet de
loi, que vous auriez ajouté en annexe à votre mémoire. Je
n'ai pas cette annexe. Est-ce que l'annexe a été
distribuée à tout le monde? Je pense que nous ne l'avons pas eue,
nous. Cette pièce-ci, je l'ai peut-être dans toute la collection
que j'ai là-bas. Quand j'ai vu le numéro 20, je n'ai pas
remarqué le "a" à côté. Très bien, je vous
remercie.
Je voudrais en venir d'abord à vos conditions de travail parce
que c'est un problème que nous avons commencé à aborder
depuis hier. Je suis très heureux des précisions qu'a
apportées M. Hudon tantôt. Je veux comprendre que des conditions
particulières ont pu justifier à une certaine époque le
genre de régime dans lequel on est entré, ce genre de
régime réglementaire, pour la définition de vos conditions
de travail. Je me souviens, je relisais tantôt une partie du texte, pas
tout parce que c'est une brique considérable comme vous le savez, mais
cela confirmait ce que j'avais suggéré hier soir: qu'on a sans
doute adopté ce règlement en s'inspirant de l'article 16 de la
Loi sur l'instruction publique. C'est écrit au début en toutes
lettres.
Vous vous souvenez sans doute, vous autres, que le gouvernement
n'était pas sûr de son affaire avec cela. Il a dit: On va aller
plus loin. Il a fait adopter un amendement à la Loi sur l'instruction
publique, il y a un an ou deux. Je ne me souviens pas de la date exacte. Je la
fais chercher. On lui a donné explicitement un pouvoir encore plus net
de ce côté. On m'avait donné comme explication qu'on se
disait: Si jamais il y a des contestations judiciaires, on veut être bien
sûr qu'on agit dans notre droit. Là le gouvernement va plus loin.
Il met dans la loi d'une manière encore plus explicite l'article 309.2
que vous avez cité tantôt; je pense que c'est M. Lapierre.
C'est un exemple du point jusqu'où on est prêt à
aller. J'étais content d'entendre le ministre dire qu'il n'y tient pas.
Il y en a beaucoup d'affaires auxquelles il n'a pas l'air de tenir quand on
discute avec lui dans le projet de loi. J'espère qu'il va tous les
enlever ces articles sur lesquels il se dit prêt à faire montre de
souplesse. J'espère que vous autres, de votre côté, vous
êtes prêts à affirmer que vous n'avez pas crainte de
négocier vos conditions de travail avec vos employeurs réguliers
qui sont les commissions scolaires, abstraction faite, je dirais, des
conditions salariales qui doivent faire l'objet, à mon point de vue,
d'une politique commune pour l'ensemble du Québec. Vu que les fonds qui
servent à financer les salaires du personnel des commissions scolaires
viennent du trésor public, je pense qu'il serait inadmissible, on le
comprend tous, qu'il y ait certaines normes de rémunération dans
un secteur et d'autres dans l'autre et qu'il n'y ait point un minimum
d'harmonisation de tout cela. C'est la question que je vous pose. Est-ce que
vous seriez prêt à aller jusqu'à demander que l'article
309.2 ne figure pas dans le projet de loi? Je comprends très bien que
vous ayez besoin d'une période de transition. Je n'ai pas d'objection
à cela du tout. Mais, je vais poser ma question autrement: Est-ce que
vous insisteriez pour que cet article demeure dans le projet de loi?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Pour répondre au député
d'Argenteuil, en ce qui a trait aux conditions d'emploi pour les cadres et le
personnel de gérance des commissions scolaires et, je dirais, les cadres
des écoles également, c'est une longue histoire qui s'est faite
par toutes sortes de dents de scie, quelquefois plus ou moins
prononcées. Il faut dire que la démarche a commencé
vraiment avec une restructuration des commissions scolaires, en 1972, avec "La
politique administrative et salariale", document préparé par M.
Jean Lessard dont vous vous souvenez probablement qui, finalement, avait mis
ensemble quelles étaient les réalités dans l'ensemble des
commissions scolaires et avait fait une espèce de consensus au niveau
des emplois mêmes. Ceci a évolué jusqu'à temps qu'on
puisse avoir, en 1977, une reconnaissance formelle de ces conditions dans un
arrêté en conseil. Ce que nous avons dit tout à l'heure et
ce que nous répétons, c'est qu'il nous apparaît important
d'avoir, d'une façon formelle, colligé quelque part des
conditions minimales.
Nous étions satisfaits, comme mesure transitoire, d'avoir un
arrêté en conseil. Aujourd'hui, à l'article 309.2, on nous
dit qu'il pourrait y avoir une réglementation qui soit plutôt au
niveau du ministre. Dans un
premier temps, on a dit: C'est très surprenant. Mais après
réflexion et après discussion avec les agents du
ministère, on dit: C'est peut-être une étape
d'évolution normale qui nous amènerait éventuellement
à amender le règlement tel qu'il est, parce que nous avons
déjà une provision à l'intérieur du
règlement qui s'appelle la politique de gestion qui est
déjà décidée au niveau des commissions scolaires.
Alors, peut-être qu'il y a des étapes transitoires à
franchir pour augmenter la partie réservée à la politique
de gestion qui se règle au niveau de la commission, diminuant par
là la partie réglementaire. Et nous sommes ouverts. Et, dans ce
cadre-là, je suis tout à fait d'accord avec
l'énoncé que nous faisait le ministre de l'Éducation il y
a quelques instants à savoir que nous allions nous asseoir ensemble et
examiner les hypothèses qui répondraient le plus
adéquatement, en 1984, à l'élaboration des conditions
d'emploi des cadres et des gérants des commissions scolaires.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Vous déplorez que, dans le projet de loi, il ne
soit pas question des cadres scolaires au point de vue de la définition
du rôle que vous êtes appelés à jouer. La même
remarque s'applique en moins, même aux directeurs généraux
qu'on se borne à mentionner dans le projet de loi, comme si
c'était une obligation dont on s'était acquitté. Mais,
s'il fallait se fier uniquement au projet de loi pour savoir ce que le
directeur général est appelé à faire dans une
commission scolaire, on n'aurait pas grand-chose et, à plus forte
raison, dans votre cas. Je voudrais vous demander: Est-ce que vous avez
envisagé des projets d'amendement qui permettraient de combler cette
carence?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Je pense, M. Ryan, que vous touchez là le
fondement même du projet de loi. Si nous demandons le retrait du projet
de loi, c'est parce qu'il nous apparaît absolument impensable qu'on
puisse faire un organisme qui n'a pas, à toutes fins utiles, de
composantes. Et je définissais tout à l'heure la commission
scolaire comme étant un regroupement d'un ensemble d'écoles pour
desservir un territoire donné en termes de services éducatifs. La
gestion même de cet organisme, si l'organisme est complètement
vidé des pouvoirs qu'il avait et de la responsabilité qu'il avait
sur l'ensemble de ses unités administratives, il est tout à fait
normal pour nous qu'à l'intérieur d'un projet de loi, on n'ait
pas trouvé de responsabilités à donner aux cadres, parce
que cela n'existe plus. Il s'agit d'une étape à
l'intérieur d'un cheminement. Je ne dis pas... Je n'ai pas à
critiquer les volontés gouvernementales à savoir si c'est une
étape nécessaire ou non, mais il est clair que, dans le projet de
loi, comme ce l'était d'ailleurs dans le livre blanc, la loi 40 est une
étape à l'intérieur d'un processus visant à
éliminer complètement le palier intermédiaire qui
s'appelle une commission scolaire. Compte tenu de cette étape, je
comprendrais très mal qu'un législateur vienne introduire des
fonctions de coordination à un palier intermédiaire, alors que la
volonté semble être d'éliminer, à court ou à
moyen terme, ce palier intermédiaire.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Une autre question en relation avec ce qu'avait
commencé à dire M. Tanguay, tantôt. Celui-ci a dit des
choses très intéressantes à propos du projet
éducatif. Il y en a beaucoup qui se gargarisent de mots mais, à
un moment donné, il faut bien savoir ce qu'il y a là-dessous. Il
nous a donné des éléments de description qui sont
extrêmement intéressants, qui vont bien au-delà des deux ou
trois lignes qu'on trouvait dans votre mémoire, c'était à
peine une mention. Ce que vous avez dit est très éclairant
aussi.
Dans la même perspective - ce n'est pas parce que je veux vous
inviter à redire ce qui a été dit, pas du tout - je
voudrais vous poser une question. Dans le projet de loi, j'ai lu avec
étonnement que l'application du régime pédagogique
relèverait de l'école. Je voudrais vous demander ceci: Est-ce
que, dans l'application et la mise en oeuvre du régime
pédagogique, il y a une part, d'après vous, qui doit relever de
la commission scolaire?
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay.
M. Tanguay: M. le Président et M. Ryan, effectivement, il
y a des parts qui doivent relever de la commission scolaire. Parlons, par
exemple, de l'évaluation des élèves. Il est très
clair que le premier responsable de l'évaluation, c'est l'enseignant.
Cela est indéniable. Quand on parle de la partie de l'évaluation
qui revient à l'enseignant, il me semble que c'est la partie de
l'évaluation formative, soit d'être capable, en cours de
cheminement ou en cours d'apprentissage, de vérifier où en est
rendu l'apprentissage de tel élève par rapport à tel autre
et l'apprentissage de l'ensemble d'un groupe. Ce premier niveau
d'évaluation, c'est l'enseignant qui en est le premier et le seul
responsable de cela.
Le deuxième niveau d'évaluation, on l'appelle
l'évaluation sommative. Quand on a fini un bon déroulement ou une
étape de
trois mois, six mois, ou un an et qu'un groupe d'enseignants, ensemble,
préparent un test, cela devient encore sous la responsabilité de
l'école. L'école doit être responsable, avec l'enseignant,
de l'évaluation sommative.
La dernière partie de l'évaluation sommative, c'est le
jugement qu'on porte sur un élève pour savoir s'il est prêt
à passer à un autre niveau, à une autre classe, de la
deuxième à la troisième. C'est l'école qui est
responsable de cela avec l'enseignant, en respectant les 60%, les
critères de passage de la première à la deuxième,
de la deuxième à la troisième.
Par contre, la partie de l'évaluation des apprentissages
où on est capable de savoir comment se situe une école par
rapport à un ensemble, cela devient de la responsabilité de la
commission scolaire. Dans le projet qui nous est proposé actuellement,
c'est à l'article 207, je crois. Cet article donne à la
commission scolaire la seule responsabilité d'établir des plans
d'évaluation pour les matières qui ne sont pas l'objet d'un
examen uniforme du ministère et qui sont nécessaires à la
sanction des études secondaires. Pour être très clair, la
commission scolaire n'aura la responsabilité que de l'évaluation
de l'enseignement religieux de quatrième et de cinquième,
l'enseignement moral de quatrième et de cinquième et de
l'éducation physique. Ce sont les seules matières qui ne sont pas
l'objet d'un examen uniforme du ministère et qui sont nécessaires
à la sanction des études.
Cela a-t-il de l'allure de remettre à une commission scolaire la
responsabilité dans ces seules disciplines? Cela n'a pas de bon sens du
toutl On ne s'occupe pas du français en première, deuxième
ou troisième, pour savoir si cela va bien. On ne s'occupe même
plus des sciences, parce que le ministère a délesté les
examens de science, de chimie 442, cette année, de physique 552 qui sont
des examens primordiaux pour l'accessibilité des élèves
aux études collégiales. De sorte qu'à moyen terme il va se
faire quoi? Ce sera le collège qui accréditera une école,
qui dira: Les élèves qui nous sortent de telle école ont
de l'allure ou ils n'ont pas d'allure. Cela va prendre deux
générations d'élèves. Avant d'établir des
plans de redressement d'une école, cela va prendre dix ans. Il faut que
la commission scolaire puisse avoir la responsabilité de la mesure, pour
mesurer à la fin d'une année, en français, première
secondaire, en français deuxième, en français,
troisième, en mathématiques de quatrième secondaire, en
chimie-physique, si l'école performe bien et, si elle joue toute seule
dans sa cour, elle n'est pas capable de savoir si elle est bonne. Mon
équipe de hockey n'est pas bonne dans sa cour, elle est bonne quand elle
se mesure avec une autre.
Le Président (M. Blouin): Cela va. M. le
député d'Argenteuil. (10 h 45)
M. Ryan: M. le Président, j'ai encore une question pour la
délégation de l'Association des cadres scolaires du
Québec. Sur ce point, je voudrais faire une demande à M. Tanguay:
Est-ce que ce serait trop vous demander que de vous suggérer d'envoyer
une deuxième annexe à votre mémoire, dans laquelle vous
donneriez des développements sur tous ces points qui se rattachent
à la mise en oeuvre du régime pédagogique. Il me semble
que c'est l'un des points absolument cardinaux dans tout l'exercice que nous
sommes en train de faire et qui a été littéralement
escamoté dans le projet de loi. On dit toutes sortes de choses. On fait
de la rhétorique et de la littérature avec cela. Pour nous former
une opinion, nous voulons des données fonctionnelles. Si vous pouviez
nous rendre ce service, je pense que cela serait très utile.
M. Giard: Nous ferons tous les efforts possibles pour essayer de
vous les fournir.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup.
M. Ryan: Maintenant, une dernière question, M. le
Président. Vous avez parlé de l'éducation des adultes.
C'est un autre bel exemple dans le projet de loi d'une réalité
qui est absolument escamotée. Vous le dites vous-mêmes dans votre
mémoire. Je pense qu'on en a déjà donné de
très bons éléments au cours des interventions des trois
premiers jours des travaux de la commission. J'aimerais que vous nous disiez un
peu comment vous voyez ce problème: l'éducation des adultes. Vous
avez dit tantôt qu'un de vos secteurs, la table des responsables des
services d'éducation des adultes, a demandé à être
entendu. Je voudrais vous assurer que, sur la liste des 70 organismes que nous
demandions d'ajouter à celle des 78 organismes que le gouvernement avait
décidé d'inviter, cette table occupait une place de choix. Nous
savons que c'est un organisme qu'il est absolument important d'entendre, de
même que l'Institut canadien d'éducation des adultes. Mais s'il y
avait des choses que vous vouliez ajouter à votre mémoire
là-dessus, je pense que ce serait très intéressant de les
entendre.
Le Président (M. Blouin): M. Giard, s'il y avait donc des
ajouts...
M. Giard: Oui, je vais demander à M. Vincent Tanguay de
faire un ajout, mais je voudrais profiter de l'occasion pour remercier M. Ryan
de l'insistance qu'il a l'intention d'apporter pour que la table des
responsables de l'éducation des adultes du Québec soit
entendue à cette commission. Nous nous excusions de ne pas avoir
fait mention de tout ce volet à l'intérieur de notre
mémoire, parce que nos membres avaient travaillé avec un autre
groupe et c'est avec beaucoup d'insistance que je réitère cette
demande.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Giard: Je ne sais pas si M. Tanguay voudrait faire quelques
commentaires.
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay.
M. Tanguay: M. Ryan, s'il advenait que l'éducation des
adultes soit sous l'autorité de la direction d'une école, dans la
perspective d'une école responsable et autonome, et que la commission
scolaire n'avait pas de responsabilité, de marge de manoeuvre à
l'intérieur de cela, il me semble que l'éducation des adultes
serait vraiment vouée à l'échec. Je prends exemple dans la
formation des adultes, où il y a la formation générale et
la formation professionnelle. Dans la formation professionnelle, il faut qu'une
commission scolaire, avec son service d'éducation des adultes, puisse
s'entendre avec les industries du milieu pour savoir quels sont leurs besoins
particuliers en termes de formation et de perfectionnement de leurs
employés. Il faut d'abord qu'il y ait une concertation dans un milieu
donné, qui dépasse l'école, pour savoir quels sont les
besoins de telle industrie par rapport à telle autre et ajuster des
plans de formation ou de perfectionnement des employés ou de la
main-d'oeuvre qui leur sera nécessaire dans un an ou dans deux ans, de
sorte qu'il faut avoir vraiment une concertation régionale pour ce
faire. Une école seule ne pourrait pas se promener chez des employeurs
et un peu partout et établir des plans de formation et de
perfectionnement des employés, de sorte qu'il faut absolument que les
centres soient complémentaires les uns aux autres dans un milieu
donné. Donc, cette complémentarité est assurée par
la commission scolaire et les programmes doivent être ajustés
aussi aux besoins de main-d'oeuvre au fur et à mesure qu'ils se
développent. De là, ce besoin de coordination ou de cette
nécessaire coordination de la formation de la main-d'oeuvre adulte.
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay, cela va? Merci, M.
le député d'Argenteuil. M. le député de Mille-Iles,
en vous rappelant que nous aurons ensuite un autre groupe à entendre et
que nous devrons obligatoirement ajourner nos travaux à 13 heures. M. le
député de Mille-Îles.
M. Champagne (Mille-Îles): Merci beaucoup, M. le
Président. Je remercie les membres de l'Association des cadres scolaires
du Québec pour le contenu de leur mémoire. J'étais content
de voir que la loi 40, sur certains points, fait des consensus. Elle fait un
consensus au point de vue de la langue, comme vous le dites, des commissions
scolaires maintenant linguistiques, et c'est un très large consensus. Il
y a un consensus aussi au sujet de la confessionnalité, qui est un peu
décentralisée plutôt vers l'école que vers
l'institution. C'est un consensus très important. Il y a consensus aussi
sur l'intégration du primaire et du secondaire. Je pense que ce sont des
points qui rallient à peu près la majorité des
mémoires. Je pense qu'on peut s'en réjouir.
J'étais content d'écouter M. Lapierre dire tout à
l'heure qu'il y avait quand même un effort louable de
décentralisation. Peut-être que d'autres disent qu'il n'y en a pas
du tout. Il y a un effort de décentralisation et on en a la preuve dans
le projet de loi 40. J'étais aussi content d'entendre M. Lapierre dire
qu'il fallait faire confiance au milieu mais que, dans tout cela aussi, il y
avait une lutte de pouvoirs qu'il reconnaissait. C'est bien sûr qu'il y a
un troisième palier. On a entendu la Fédération des
comités de parents réclamer un peu plus de pouvoir, eux qui sont
à la base. Le palier intermédiaire veut peut-être garder
tout le pouvoir. C'est un peu cela, et j'espère qu'il y aura un
consensus dans le projet de loi sur un partage pour qu'enfin il y ait un projet
éducatif viable dans chacun des milieux. C'est l'enfant qui, à
travers ce projet de loi, devrait être le centre et avoir aussi tous les
avantages de cette réforme. Alors, il y a 40 000 parents qui s'occupent
d'éducation dans tout le système; ils veulent avoir le pouvoir ou
les moyens de réaliser cette réforme scolaire.
Tout à l'heure, j'entendais M. Giard dire qu'à travers le
projet de loi 40 on essayait d'éliminer le palier intermédiaire.
Je pense qu'il faudrait peut-être faire la preuve de cela. On
exagère. C'est peut-être un peu gros d'avancer cela. Dans votre
mémoire, entre autres, à la page 5, je lisais que c'est à
l'école que se passe l'action. C'est sûr que c'est là que
se passe l'action. Puis, d'autre part, vous dites à la page 18, et vous
l'avez relu après cela: "L'Association des cadres scolaires du
Québec croit que l'école doit être responsable." Vous le
dites bien. Cela veut dire que vous êtes un peu en faveur du livre blanc,
qui parlait d'une école communautaire et responsable. Alors, vous
êtes en faveur de cela. On le voit à la page 18: "L'école
doit être responsable dans la totalité de la gestion quotidienne
des activités d'apprentissage, des services complémentaires et
des services particuliers aux élèves."
Vous le dites et, d'autre part, vous n'êtes pas chauds pour le
projet de loi 40, qui est l'instrument pour faire en sorte qu'on
puisse donner au milieu les moyens. C'est simplement un projet de loi
qui fait en sorte qu'on donne au milieu les moyens de se prendre davantage en
main pour réaliser le projet éducatif. J'ai été un
peu frustré, et peut-être le ministre en a-t-il parlé tout
à l'heure, de voir ce que vous faites du projet éducatif. Le
projet éducatif pour vous, c'est une simple concertation. J'ai
été un peu choqué de voir cela, lorsqu'on sait ce qu'est
un projet éducatif, en soi, dans un milieu, c'est un projet dans lequel
on met les objectifs pédagogiques disciplinaires d'une communauté
que l'on veut là: les parents, les étudiants, le principal
d'école et les enseignants se mettent ensemble pour avoir une
école propre à leur milieu.
Vous dites aussi que vous avez peur de l'uniformisation. Le projet de
loi 40 va faire que, par l'application du projet de foi 40 et du projet
éducatif dans chacun des milieux, il n'y aura pas d'uniformisation, mais
il y aura plutôt des écoles à l'image du milieu, qui
répond aux besoins du milieu. Alors, un projet éducatif, dis-je,
c'est un projet qui contient les objectifs du milieu. Les parents, avec les
enseignants, les étudiants et le directeur d'école peuvent dire:
On va avoir une école plus permissive. Dans un autre milieu, ce sera une
école très autoritaire. Un autre milieu pourra dire: On veut se
donner plus de services en fin de semaine et des services d'apprentissage pour
ceux qui ont de la difficulté. On veut se donner des services de
garderie d'enfants, soit le matin très tôt, le midi ou le soir.
C'est cela le milieu et c'est cela le projet éducatif.
Le projet éducatif aussi, c'est du parascolaire. On veut donner
à nos enfants plus de moyens, que ce soit dans les activités
culturelles et les activités sportives. C'est pour cela que je
considère qu'à la fois vous êtes un petit peu pour la vertu
mais vous êtes contre les moyens qui feraient en sorte que cette vertu
s'applique. J'ai rencontré beaucoup de personnes qui avaient lu le livre
blanc et qui trouvaient cela suave parce qu'elles disaient: on ne peut
être contre la vertu et elles se ralliaient à cela.
Je vais vous poser une question. Comment voulez-vous, comme cadres
scolaires, à la fois une école communautaire responsable de la
totalité de la gestion quotidienne des activités d'apprentissage
et des services complémentaires, - vous qui êtes en faveur de cela
- alors que vous vous refusez de donner aux parents des moyens par la loi de 40
de réaliser une école différente et une école de
qualité?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Je pense que ou bien notre mémoire n'est pas
écrit selon l'esprit dans lequel on voulait l'écrire ou le
député de Mille-Îles donne des interprétations qui
ne sont pas sur les lignes à l'intérieur de notre mémoire.
Permettez-moi, M. le Président, quand même de revenir sur la
question qui nous est posée.
Dans un premier temps, nous sommes tout à fait d'accord pour que
les écoles soient communautaires, responsables et publiques. Nous
exigeons toutefois que les écoles doivent rendre compte, à
quelqu'un et le palier auquel les écoles doivent rendre compte c'est la
commission scolaire parce que c'est le palier qui est démocratiquement
élu et qui sert de gouvernement local responsable de la qualité
des services éducatifs que doit recevoir la population dans un milieu
donné.
Il est possible, l'histoire du Québec et l'histoire scolaire du
Québec des récentes années nous dit qu'il est possible
qu'une école soit très responsable, très dynamique,
très autonome à l'intérieur d'une structure qui s'appelle
la commission scolaire à qui elle doit rendre des comptes.
Le Président (M. Blouin): D'accord.
M. Giard: C'est premièrement. Deuxièmement, quant
au projet éducatif, je voudrais relire la page 39 du livre blanc
où l'école québécoise décrivait le projet
éducatif comme une démarche dynamique par laquelle une
école, grâce à la volonté concertée des
parents, des enseignants, des élèves, de la direction, entreprend
la mise en oeuvre d'un plan général d'action. Ce que nous disons,
c'est qu'avant de faire des châteaux en Espagne, il va commencer par
devoir faire de la concertation dans le milieu avant de bâtir des plans
d'action. Ce que nous disons c'est qu'actuellement les enseignants, par le
traitement qu'on leur donne à l'intérieur, à la fois des
conditions d'emploi et des projets comme le projet de loi 40, ne peuvent
s'inscrire dans une démarche de concertation. Donc, s'il n'y a pas de
concertation à la base, il n'y aura pas de projet éducatif
valable au bout.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci.
M. Giard: C'est l'esprit de notre mémoire qui est
là.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Giard. M. le
député de Mille-Îles.
M. Champagne (Mille-Îles): Je me réjouis de voir
qu'on est sur la même longueur d'onde pour dire qu'on veut quand
même rendre l'école responsable. Comme vous le disiez, je pense
que c'est une question de pouvoir. C'est une lutte de pouvoir. Je vous ai
cité tout à l'heure. J'ai pris la peine de citer la page 18. Cela
vient de vous, c'est l'interprétation que vous
faites. Ce n'est pas mon interprétation. Je vois la conclusion de
la page 19, "que ce projet de loi se borne à redéfinir le
partage..." C'est ce que vous souhaitez: "Que ce projet de loi se borne
à redéfinir le partage des responsabilités entre le
gouvernement, le ministère de l'Éducation et les commissions
scolaires." Vous ne parlez pas des écoles. Vous croyez en l'école
communautaire et responsable et - comme M. Lapierre l'a dit, c'est une lutte de
pouvoir -vous bloquez cela là.
Je pense que dans le projet de loi, il n'est pas question
d'éliminer le palier intermédiaire qu'est la commission scolaire.
C'est de faire en sorte que les parents qui veulent aussi se réaliser
dans le milieu, les principaux d'école qu'on va entendre tout à
l'heure qui veulent aussi une école de qualité, les enseignants
et les étudiants dans chacun des milieux puissent le réaliser.
C'est la loi 40 qui est le moyen. On va espérer qu'elle fera un grand
consensus.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. le
député de Mille-Îles. M. le député de
Louis-Hébert. (11 heures)
M. Doyon: Merci, M. le Président. Les propos qu'on entend
et que vous nous avez tenus avec ceux qu'on a eu l'occasion d'entendre pendant
les jours précédents commencent à ressembler à un
leitmotiv. Finalement, je n'ai pas l'impression que le ministre va vouloir se
laisser convaincre, mais une chose est sûre, c'est que, devant un
mémoire aussi clair que celui que vous présentez, la chance aura
été donnée au ministre de voir les difficultés que
soulève son projet. Le ministre parle de concertation, parle de
consensus, parle d'intervention du milieu, mais il ne permet pas au milieu
d'agir efficacement. Il me fait penser à un jardinier qui veut faire
pousser ses fleurs en tirant dessus. Elles ne poussent pas plus vite et, s'il
continue comme cela, j'ai l'impression que son projet va manger les fleurs par
la racine.
On est vis-à-vis d'une situation où toutes les tentatives
de démonstration qui me paraissent extrêmement convaincantes sont
tournées de telle façon que le ministre tente de les
récupérer comme étant des approbations à son projet
alors que ce n'est pas le- cas, d'aucune façon. Les oppositions sont
virulentes, sont totales, sont fondamentales. La réflexion qui me vient
à l'esprit dans les circonstances, c'est: de quelle façon les
intervenants devront-ils dire les choses pour être compris? Si le
député de Mille-Iles voit dans le mémoire que vous
présentez un endossement du projet de loi 40, c'est le bout de tout. Je
me dis: Le français n'est plus le français et les phrases ne
disent pas ce qu'elles veulent dire.
Cela m'inquiète joliment parce que c'est une attitude qui risque
de vicier à sa base même toutes les autres interventions. Je
voudrais que le ministre, si possible - je ne me fais pas trop d'illusions
là-dessus -profite de la fin de semaine pour faire un sérieux
examen de conscience pour au moins saisir les choses de la façon dont
elles sont dites et leur donner la signification normale que les intervenants,
les gens qui prennent la peine de venir nous trouver donnent à leurs
opinions. Dans le moment, cela m'inquiète joliment. Peut-être que
la semaine prochaine sera de meilleur augure, on verra.
Dans vos remarques préliminaires, vous avez fait état - et
je vous en félicite -d'une tentative de concertation en vue de
dégager un consensus entre la fédération des commissions
scolaires, entre le ministère de l'Éducation, entre les cadres,
les directeurs généraux. Je pense que c'est un exercice
extrêmement louable que vous avez fait et que vous étiez en
position privilégiée pour le tenter. J'aimerais que vous nous
indiquiez avec un peu plus de détails la forme que cela a pris. Avec qui
avez-vous dialogué, s'il y a eu dialogue, du côté du
ministère de l'Éducation? Quels étaient vos
vis-à-vis? Quelles étaient les personnes qui ont
été invitées ou qui ont participé à cette
tentative de concertation en vue de dégager un consensus commun qui
aurait permis de donner une position uniforme ou, du moins, plus globale de
tous les agents du milieu de l'éducation? Qui agissait pour le
ministère de l'Éducation? S'il y a eu des rencontres ou s'il y a
eu des dialogues, comment s'est comporté le ministère de
l'Éducation par ses représentants?
Le Président (M. Blouin): Succinctement, si possible, M.
Giard.
M. Giard: Je ne voudrais pas porter de jugement; il y a eu deux
étapes. La première étape était que tous les
partenaires du réseau, y compris les enseignants et tous les
administrateurs et les directeurs d'école, ont tenté de faire un
projet de réseau qui serait déposé au ministère par
la suite. Cela a été la première étape de ce
travail. Il est sûr que, compte tenu des positions que vous entendez
autour de cette table, ce n'était pas possible. C'est dans cet
esprit-là que nous avons sollicité du ministre de
l'Éducation que nous puissions travailler ensemble pour bâtir ce
que j'appelais un projet collectif et non pas des projets parallèles.
Dans cette démarche-là, il y a un partenaire qui a voulu
s'abstenir délibérément et il s'agit des enseignants, de
sorte que nous avons continué avec le ministère une
démarche qui s'est faite en dents de scie, comme je le disais
tantôt.
Pour être objectif, nous avons reçu de la part du ministre
de l'Éducation un accueil chaleureux. Nous avons eu l'occasion de
discuter de ce projet toutes les fois que nous l'avons jugé
à-propos avec le ministre lui-même et les personnes qu'il avait
mandatées pour travailler aux diverses tables ont toujours
été des personnes qui étaient porteuses de mandats et qui
travaillaient dans un esprit très positif. Toutefois, compte tenu des
écarts qui existaient entre les divers partenaires de ces tables - et on
l'a dit dans notre mémoire - malgré la bonne volonté des
uns et des autres, il n'a pas été possible d'arriver à des
consensus véritables.
Je voudrais revenir sur une observation qui a déjà
été faite à cette table-ci, à savoir que, si on
devait poursuivre cette démarche, il faudrait absolument qu'il y ait un
certain nombre de nuages gris et lourds qui disparaissent de la scène
scolaire actuellement. Principalement, ces nuages sont causés
actuellement par les relations tendues qui existent entre le ministère
de l'Éducation et la fédération des commissions
scolaires.
Le Président (M. Blouin): D'accord.
M. Doyon: Pour poursuivre vos propos, du côté du
ministère - parce que c'est ce qui nous intéresse dans le moment
- avez-vous pu sentir, à la suite des représentations que vous
avez faites et aux rencontres que vous avez eues, une certaine évolution
devant les arguments que vous avez fait valoir, qui me paraissent assez
convaincants comme je le disais tout à l'heure et qui sont probablement
de la nature de ceux que vous avez présentés ici? Du
côté du ministère, compte tenu que, bien sûr, les
gens qui agissaient pour le ministère étaient liés par des
mandats qui leur étaient confiés, y a-t-il eu une
évolution? Sentiez-vous qu'il y avait un rapprochement qui se faisait ou
si les positions ont été figées, finalement, et que cela
n'a pas changé?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Je ne voudrais pas porter de jugement exclusif. Je
pense que le comportement des agents du ministère a été
semblable au comportement d'autres partenaires au niveau du réseau,
c'est-à-dire qu'il y avait un certain nombre d'objectifs fondamentaux
qui leur apparaissaient, comme ils apparaissaient à d'autres à
l'intérieur du réseau, comme des impératifs par rapport
aux objectifs visés. Ils voulaient à tout prix que ces objectifs
soient atteints. Sur ce, il y a d'autres objectifs qui étaient aussi
différents des objectifs du ministère qui ont été
soutenus tout au long du processus. Dans ce cadre-là, quand on parle
dans nos mémoires des efforts loyaux de concertation, je ne voudrais pas
qu'on entache la loyauté du ministère de l'Éducation.
À mon avis, ce partenaire a été aussi loyal que les autres
dans cette démarche progressive.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Oui. Très brièvement et pour terminer,
vous mentionnez dans votre mémoire une inquiétude qui me
paraît fondamentale, à savoir qu'il y a un certain nombre de
choses qui sont en cours, qui se poursuivent et qui demandent qu'on y consacre
tous les efforts dont on est capable. Vous craignez, devant le changement
structurel et fondamental que va amener le projet de loi 40, un certain nombre
de ces choses qui ne peuvent pas être mises sur la glace purement et
simplement; vous craignez qu'on perde, finalement, des acquis et qu'on retarde
l'atteinte d'objectifs qui sont nécessaires et qui sont, d'après
ce que je comprends, peut-être même à portée de la
main. Si on agit trop rapidement et dans la voie qui nous est indiquée
par le projet de loi 40, vous indiquez que, possiblement, on remet en question
l'atteinte de ces objectifs. Pourriez-vous nous l'expliquer peut-être un
peu?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: D'abord, juste un commentaire. Après, je vais
demander à M. Vincent Tanguay de donner l'explication. Ce que je
voudrais dire - tout le monde le sait, mais je voudrais le
répéter - c'est que, depuis deux ans, le ministère de
l'Éducation et les commissions scolaires sont en période de
latence à cause d'un projet de loi qui vient bouleverser tout le
système. Pendant ce temps, il y a quand même des politiques et il
y a surtout des élèves dans les écoles qui ont besoin de
services éducatifs de qualité. Il est important qu'on arrive
à une solution qui permettra aux gens de se concentrer vraiment sur les
réalités et sur les objectifs à atteindre,
c'est-à-dire la qualité des services à offrir à ces
élèves. Je vais demander à M. Tanguay de vous donner les
principaux impacts.
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay.
M. Tanguay: Je vais vous donner rapidement trois exemples dont un
sur la micro-informatique. Je crois qu'il serait absolument impensable que
l'école seule puisse voir au perfectionnement et à la formation
des enseignants pour l'avènement de la micro-informatique à
l'école et plus particulièrement pour le développement de
l'assistance par ordinateur, ce qu'on appelle l'APO. C'est une preuve que
l'école, si elle était seule, ne pourrait pas avoir les
ressources et l'expertise suffisantes pour faire le développement
ordonné pour qu'autant le professeur de français puisse y trouver
son profit que le professeur d'arts, le professeur de mathématiques et
le professeur
de sciences au niveau de l'avènement de la micro-informatique
à l'école. Je ferme cela vite.
Deuxièmement, la formation professionnelle. Il y a une politique
de formation professionnelle qui est annoncée. Il y a aussi beaucoup de
travail qui a été fait et plusieurs de nos membres ont
participé depuis un an à différents comités au
niveau du ministère et de la fédération. Dans la politique
de formation professionnelle, il y a tout ce qu'on appelle les cheminements
particuliers des élèves, c'est-à-dire qu'on a des groupes
d'élèves qui entrent au secondaire et qui sortent avec leur
diplôme d'études secondaires, c'est fini. Pas de problème
avec eux autres. C'est l'élève moyen et brillant et il n'y a pas
de problème. Pour tous les autres, qui doivent réorienter leur
cheminement scolaire vers la formation professionnelle ou vers l'adaptation
scolaire, il y a des attestations, à la fin de leurs études
secondaires, un diplôme d'études secondaires ou d'études
professionnelles. On doit aménager d'ici à deux ou trois ans des
cheminements particuliers pour chacun de ces élèves et il doit y
avoir vraiment de la coordination, parce que chacune des écoles ne peut
pas le faire à moins d'avoir 4000 élèves et il n'y en a
plus beaucoup. Dès qu'un élève sort du réseau de la
formation régulière, il faut très souvent qu'il aille vers
une autre école pour continuer sa formation professionnelle, sa
formation d'adaptation scolaire ou son stage en industrie. Pour ce faire, il
faut qu'il y ait une concertation et une coordination entre les écoles,
et une école seule, encore là, ne peut pas le faire.
Le troisième point, la préparation des enseignants au
nouveau programme et à l'arrivée du nouveau matériel
didactique, des nouveaux manuels scolaires. On n'arrive pas avec un manuel
scolaire du jour au lendemain et l'enseignant part en classe avec cela. Je
pense qu'il faut préparer l'avènement de ce matériel pour
assurer le succès. Quand il y a un ou deux enseignants dans une
école qui se servent d'un manuel, je pense qu'il faut que les divers
enseignants d'une communauté ou d'une commission scolaire puissent
regarder ensemble, étudier ensemble les faiblesses et les forces d'un
manuel pour pouvoir le mettre en application. Encore là, l'école
seule ne pourrait pas le faire.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Tanguay. M. le
député de Shefford.
M. Paré: Merci, M. le Président. Très
rapidement, parce que je sais que la Fédération
québécoise des directeurs d'école doit passer et on
voudrait bien l'entendre aussi. Juste quelques remarques et, ensuite, une
question très rapidement. Le député d'Argenteuil disait
tantôt que cela prend un consensus pour mettre en application une
politique semblable. Oui, cela va prendre un consensus assez large. On ne
pourra jamais avoir l'unanimité, c'est évident, parce qu'il y a
une question de pouvoirs à l'intérieur de ce projet de loi. Quand
il s'agit de partager les pouvoirs, il va toujours falloir s'attendre que les
gens veuillent en perdre le moins possible, veuillent en avoir davantage. Il ne
faut pas oublier cela, non plus, sauf qu'il ne faudra pas oublier que,
même si les gens viennent faire des recommandations de changements, il y
a quand même des consensus très larges qui se développent
au niveau de très grands principes qui, au départ,
n'étaient pas sous le signe du consensus. Donc, il se dégage des
consensus, de prime abord.
Deuxièmement, la fédération des directeurs
généraux nous disait qu'elle aimerait mieux que certains points
du projet de loi n'entrent pas en vigueur. Par contre, elle finissait, quand
même, par dire qu'advenant que le projet de loi - parce que le
législateur déciderait de l'adopter - soit adopté, elle va
collaborer à sa mise en place. Il faut quand même faire attention.
Que les gens viennent ici nous demander des changements, je trouve cela
formidable, indispensable à l'éclairage des membres de la
commission, sauf que demander des améliorations ne veut pas dire un
rejet total. Il faudrait aussi faire attention dans ce sens.
J'en viens maintenant au mémoire qui a été
présenté. Apparaît, à certains moments, la
vitalité et la maturité des personnels dont on parle
là-dedans. On reconnaît cela. Si on arrive avec un projet de loi
qui demande des changements semblables, on pense que le milieu a justement la
vitalité et la maturité de le mettre en place; autrement, on
n'arriverait pas avec un projet semblable. Je pense que le projet de loi, c'est
une reconnaissance de ces deux qualificatifs que vous apportez.
À la page 18 - je trouve cela important parce que vous en avez
parlé beaucoup - c'est spécifié en toutes lettres que la
commission scolaire "doit jouer un rôle fondamental dans la planification
des services, leur coordination, le soutien aux écoles et
l'évaluation des services spécialisés." Les services
spécialisés, c'est le transport, c'est l'enfance en
difficulté d'adaptation, et c'est l'éducation des adultes. Pour
cela, je suis tout à fait d'accord avec vous, il faut absolument qu'il y
ait une responsabilité au niveau de la commission scolaire, justement
parce qu'il faut la répartir sur le territoire. Mais je dois vous dire
que c'est reconnu dans le projet de loi 40. (11 h 15)
Concernant les services spécialisés, l'éducation
des adultes, c'est sûr qu'il y a des demandes qui viennent des
écoles; c'est
sûr que les écoles ont des besoins qu'elles vont exprimer.
Mais on retrouve cela élaboré, au niveau de la commission, dans
le projet de loi 40. Donc, il faudrait aussi faire attention, parce que ce
n'est pas vrai qu'on enlève tous les pouvoirs à la commission
scolaire. Dans les services spécialisés comme ceux-là, on
reconnaît des pouvoirs à la commission scolaire.
Il y a une crainte, que vous exprimez à propos du principe de
reconnaissance, dans la loi, des pouvoirs des conseils d'école, qui
ferait en sorte qu'on vienne uniformiser les écoles. Donc, c'est une
crainte que vous avez alors que tout ce qu'on fait, c'est donner des pouvoirs
afin que chaque école se donne un projet spécifique, une image
selon la volonté des gens de l'école. Cela, c'est un peu
contradictoire. En même temps, à la page 9 de votre
mémoire, vous dites qu'en amendant l'article 212, "Ceci aurait pour
effet de permettre à chaque commission scolaire d'évoluer selon
le modèle qui lui conviendrait le mieux et à son propre rythme."
Je trouve que c'est beaucoup plus uniformiser chacune des écoles d'une
commission scolaire que ce que le projet de loi permet à chacune des
écoles à l'intérieur de principes reconnus
généraux pour toutes les écoles du Québec. Vous, ce
que vous demandez, c'est que ce soit à l'image, à la
volonté et au rythme de la commission scolaire.
J'ai une question à vous poser, parce que c'est une
préoccupation fondamentale qu'on retrouve dans votre mémoire et
que je trouve également très important de souligner. Vous dites
que les gens ont la préparation, la maturité pour faire
fonctionner le système et on le reconnaît, sauf que vous dites:
Vous nous arrivez avec beaucoup de changements. Donc, il faut aussi être
capable de le faire en fonction du personnel en place. Vous dites qu'il ne
faudrait pas en mettre trop. Mais, par contre, au sujet des changements majeurs
que sont l'intégration, la confessionnalité, la reconnaissance
des commissions scolaires au niveau linguistique - ce sont des changements
majeurs - vous êtes d'accord. Donc, concernant les grands chambardements,
il semble que vous pourriez les absorber. Deuxièmement, si on dit que
c'est une décentralisation et qu'on donne plus de pouvoirs à
l'école, vous ne pensez pas qu'en en donnant à l'école -
il semble, en tout cas, selon les directeurs d'école qu'on va entendre
tantôt et les comités de parents, qu'ils sont prêts à
en prendre - cela vous permettrait de vous libérer d'une partie,
justement, de ces tâches pour permettre à la commission scolaire
et au personnel des commissions scolaires de consacrer plus de temps aux grands
changements qui font consensus et que je viens d'énumérer:
intégration, confessionnalité et division linguistique?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Je voudrais revenir sur deux points. Dans un premier
temps, je voudrais revenir sur la question de vitalité et de
maturité. La raison pour laquelle nous disons que le régime ne
peut pas s'appliquer, que la loi ne peut pas s'appliquer en même temps,
de la même façon, partout, etc., c'est qu'actuellement, dans des
milieux donnés, on a fait des efforts de décentralisation. Si
cela fait dix ans que les personnels des écoles, les personnels des
services fonctionnent dans un système décentralisé, ils
ont une mentalité qui est formée et un perfectionnement acquis
qui leur permettent de gérer de plus en plus de dossiers là
où les dossiers peuvent être le mieux gérés.
Souventefois, en éducation, c'est dans l'école que les dossiers
peuvent être le mieux gérés. C'est un premier
élément.
Le deuxième élément, c'est qu'à
l'intérieur des changements dont vous parlez il faut bien distinguer
ceux qui sont des changements en profondeur d'autres changements qu'on pourrait
qualifier de brassage de chaises. Si on prend l'intégration des
commissions scolaires aux niveaux primaire et secondaire, c'est caricaturer un
peu, mais c'est une espèce de brassage de chaises parce qu'on n'a pas
changé la structure même des commissions, on n'a pas changé
la mission, on n'a pas changé les responsabilités dévolues
à l'un ou à l'autre, etc. Alors, à ce moment-là,
c'est au détriment de nos membres, parce qu'il y aura vraiment du
brassage de chaises. Mais, on dit: Malgré cela, il nous apparaît
que les élèves seraient mieux servis par des commissions
scolaires mieux organisées qui gèrent en même temps le
primaire et le secondaire. Donc, nous sommes d'accord pour que le
ministère procède, dans les plus brefs délais, à
l'intégration des niveaux primaire et secondaire.
Quant à la confessionnalité, on dit: Actuellement, il nous
apparaît que c'est la communauté locale la plus près de
l'école qui est la plus en mesure d'évaluer si l'école
doit être confessionnelle ou non. On dit dans notre mémoire: II
nous semble que le projet de loi pourrait procéder immédiatement
sur un sujet comme cela. Par rapport à la langue, je ne
répéterai pas la chose. C'est pour dire que, pour nous, lorsqu'on
parle de changements en profondeur, on parle de changements qui touchent la
mentalité, les façons de faire des personnes et non pas le
déplacement des personnes d'un poste à l'autre.
Le Président (M. Blouin): Merci. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: M. le Président, un bref commentaire et une
question. Ce matin, le
ministre, après la lecture du mémoire, nous disait encore
une fois que vous étiez d'accord avec l'intégration. C'est de ce
sujet particulièrement que je veux parler. Ce n'est pas la trouvaille du
siècle, cela fait des années que le processus
d'intégration est engagé au sein des commissions scolaires, sauf
que, depuis trois ans, le ministère bloque le processus normal
d'intégration désiré par le milieu. Lorsqu'on veut par un
projet de loi responsabiliser l'école et le milieu, le ministre devrait
d'abord se responsabiliser à ce niveau. Aussi le député de
Mille-Îles - à moins qu'il n'ait pas le même mémoire
que moi - nous a dit à deux reprises que le système
d'éducation que nous avions n'était pas de qualité. Vous
le dites spécifiquement dans votre mémoire: Depuis les
années soixante, le système d'éducation au Québec
n'a tendu qu'à s'améliorer au cours des années. De
là à atteindre la perfection, ce n'est pas facile. Je ne crois
pas que le projet de loi 40, non plus, permettra aux Québécois
d'atteindre la perfection.
À la page 3 de votre mémoire, vous nous dites: "D'une
part, nous sommes convaincus que les objectifs visés par les auteurs du
rapport Parent, soit l'égalité des chances et
l'accessibilité pour tous à l'éducation, sont encore tout
à fait d'actualité en 1983. Dans cette perspective, tout projet
qui aurait pour résultat de diminuer la qualité et la
quantité de services accessibles aux jeunes dans une région
donnée serait à combattre." Comment qualifiez-vous le projet de
loi 40?
Le Président (M. Blouin): M. Giard, je sais que vous avez
déjà touché ce point à quelques reprises. Je vous
demande de procéder le plus succinctement possible.
M. Giard: Je vais être très bref. Un des
éléments qu'il est important de mentionner ici, c'est
qu'étant donné l'assignation de responsabilités à
plusieurs niveaux - quand on veut faire trois paliers de gestion, il faut
donner des responsabilités aux trois paliers - on en vient à
faire une espèce de - excusez l'expression anglaise -"overlapping" de
responsabilités, de sorte qu'on aurait, par exemple, à
régler un contenant de 100% et on a 160% à mettre dans cela;
donc, à un moment donné, il en tombe un peu partout. Je vous
donne, à titre d'exemple, le calendrier scolaire. À l'article 85,
si ma mémoire est fidèle, le calendrier scolaire appartient au
conseil d'école. À l'article 203, c'est la commission scolaire
qui décide du calendrier scolaire. À l'article 302 ou 303, on dit
que c'est le ministère qui fixe l'encadrement du calendrier
scolaire.
Ce qu'il est important de percevoir à la fin de cela, c'est que,
dans des situations qu'on dit conflictuelles, il est bien clair que les gens
vont devoir s'affronter et, à un moment donné, quand les gens
s'affrontent, il y a quelqu'un qui vient mettre la paix dans cela et qui dit:
Mes petits enfants, cela fonctionne comme ceci, comme cela. Cette façon
de procéder, à notre avis, est de nature à diminuer la
qualité des services qui seront offerts pour des élèves
dans un milieu donné parce qu'il n'y aura plus personne, dans ces
situations conflictuelles, qui aura comme fonction de diminuer les tensions
entre les uns et les autres et d'essayer de généraliser la
mentalité et le type de services à fournir, allant par là
régler les cas individuels élève par élève
en les dirigeant vers l'école, le point de services qui peut leur donner
le maximum de services éducatifs.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Giard.
Mme la députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Je m'excuse de mon
absence lors de votre présentation, mais je vous ai suivi soigneusement
à la télévision. En vous écoutant, il me semble que
le coeur du problème en ce qui concerne la décentralisation est
que dans le projet de loi le gouvernement fausse complètement le
principe de la décentralisation. Si je comprends bien, la
décentralisation est un principe, une condition de "good management". Ce
principe dit essentiellement que le point de décision doit
coïncider avec le point de responsabilité, le point
d'imputabilité pour le bien-fondé de la décision. Donc,
les pouvoirs décisionnels doivent être distribués aux
niveaux et aux points appropriés. Cela veut dire selon la
responsabilité pour le bien-fondé des décisions. Si on
sépare, comme on le fait dans le projet de loi 40, les points de
décision des points de responsabilité, on fausse le principe. Par
exemple, si les parents choisissent des manuels scolaires qui ne sont pas
appropriés aux besoins spéciaux et particuliers des enfants, qui
est responsable? Si les parents choisissent une mauvaise méthode
d'enseignement de la langue seconde, qui est responsable des résultats?
Le coeur du problème en ce qui concerne le projet de loi 40 n'est-il pas
là? Est-ce que vous avez des commentaires là-dessus? Est-ce que
mon raisonnement est logique?
Le Président (M. Blouin): M. Giard.
M. Giard: Je demanderais à M. Tanguay de faire un
commentaire.
Le Président (M. Blouin): M. Tanguay.
M. Tanguay: Encore là, je pense qu'il y a beaucoup de
confusion qui règne. Je vais
prendre l'exemple du manuel scolaire dont Mme la députée
de Jacques-Cartier a fait mention. On dit que la responsabilité du choix
du manuel scolaire doit revenir à l'école. C'est tout à
fait normal que l'école choisisse le manuel scolaire. Mais, en bonne
gestion, qu'est-ce qui devrait se passer dans la réalité? On
s'aperçoit que nos élèves vont facilement - une
étude a été faite lors du livre vert où on disait
qu'il y avait plus de 25% des élèves qui ne restaient pas dans la
même école pour y terminer leur cours -changer d'école lors
de leur cheminement scolaire. On sait aussi que les mécanismes
d'affectation des enseignants font que ceux-ci vont aussi changer
drécole plusieurs fois durant leur carrière et d'une
année à l'autre, très souvent, pour ceux qui sont au bas
de la liste. Il me semble qu'une commission scolaire devrait, sans imposer -
cela s'appelle de la saine gestion - dire aux écoles qu'il serait bon
qu'elles s'entendent pour choisir le même manuel scolaire parce que nos
élèves et nos profs se promènent d'une école
à l'autre. Même si on dit que l'école est responsable, il
me semble que la commission pourrait avoir l'autorité pour faire en
sorte que les écoles puissent s'entendre sur le choix du manuel
scolaire.
Le Président (M. Blouin): Merci. Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty; C'est simplement que je reconnais le
bien-fondé de votre exemple. Je crois que c'est un problème sur
le plan pratique. Je cherche le principe parce que je crois que le principe
même est faussé. Est-ce que vous croyez que les parents doivent
choisir des manuels scolaires? Est-ce que c'est vraiment leur
responsabilité? Si les manuels ne sont pas appropriés pour tel ou
tel enfant ou pour certains groupes en raison de leur "background" ou de je ne
sais quoi, est-ce que c'est la responsabilité des parents si le
résultat est mauvais?
Le Président (M. Blouin): La question est claire. M.
Tanguay.
M. Tanguay: Mme la députée de Jacques-Cartier, dans
un centre hospitalier, est-ce que c'est le conseil d'administration qui choisit
les méthodes d'opération?
Le Président (M. Blouin): D'accord. La réponse est
également claire.
Mme Dougherty: Merci.
Le Président (M. Blouin): Merci, Mme la
députée de Jacques-Cartier. Sur ce, je remercie l'Association des
cadres scolaires du Québec et ses représentants
particulièrement de leur importante collaboration aux travaux de cette
commission. Sur ce, j'invite maintenant les responsables de la
Fédération québécoise des directeurs d'école
à venir prendre place à la table de nos invités afin
que...
M. Giard: On remercie beaucoup les membres de la commission. (11
h 30)
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Giard - nous
entendions la présentation qu'ils ont à nous faire à
l'égard du projet de loi 40. J'ai noté que le mémoire que
la Fédération québécoise des directeurs
d'école a déposé au Secrétariat des commissions
était assez volumineux. Je leur rappelle que leur présentation
doit s'effectuer dans une vingtaine de minutes. J'insisterai pour que nous
respections ces normes qui sont régulières en commission
parlementaire.
M. Leduc (Fabre): M. le Président.
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Je requiers le consentement de la commission
pour faire inscrire le député de Bellechasse à titre
d'intervenant.
Le Président (M. Blouin): Je crois que le
député de Bellechasse est déjà inscrit comme
intervenant, M. le député. Non seulement il est intervenant, mais
il est membre.
Alors, je vous invite donc à vous identifier et à nous
livrer le contenu de votre mémoire, en tenant bien compte des limites de
temps auxquelles nous devons tous faire face.
Fédération québécoise des
directeurs d'école
M. de Guire (Réal): Merci, M. le Président. Je
remercie la commission parlementaire de l'éducation de nous accueillir.
Nous sommes très heureux de déposer aujourd'hui le mémoire
contenant nos positions. Mon nom est Réal de Guire, président de
la Fédération québécoise des directeurs
d'école. Si vous me le permettez, je vais vous présenter les
membres de notre conseil d'administration. Je vais commencer par
l'extrême droite: M. Léonce Gagnon, de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean; immédiatement à la suite, M. Michel
Longchamps, de la grande région 03; M. Marcel Lebel, de la région
de Rimouski et du Bas-du-Fleuve, et Mme Rita Barrette, qui représente la
région de l'Abitibi-Témiscaminque. Immédiatement à
ma droite, notre vice-président, M. Jacques Coderre, qui
représente la région de l'Estrie; à l'extrême
gauche, M. Jean Soumis, de la région sud de Montréal; M. Gilles
Lauzon, de la région de
la ville de Laval, et M. Rolland Poirier, de la grande région de
l'Outaouais.
Comme vous le savez, M. le Président, la Fédération
québécoise des directeurs d'école est un organisme qui
regroupe 27 associations régionales ou locales totalisant 3500
directeurs ou directrices adjoints ou adjointes des écoles primaires et
secondaires du Québec. Notre "membership" est composé de
francophones travaillant dans les commissions scolaires catholiques, auxquels
s'ajoutent plus d'une cinquantaine de membres anglophones de ces mêmes
commissions.
Nous disons que nous sommes heureux d'être enfin rendus à
ce moment du dépôt de mémoire en commission parlementaire
parce que le projet de réforme, le livre blanc et le projet de loi 40
font la une des journaux depuis près de deux ans. Je vous assure que le
climat dans les écoles durant toute cette période n'a pas
été des plus calmes pour nous permettre de bien travailler. Notre
fédération, durant ces deux longues années, a
multiplié les études, favorisé la discussion chez nos
membres, participé à toute démarche, rencontre,
réunion avec les partenaires du réseau scolaire, dans le but de
faire en sorte que le projet déposé soit un pas en avant pour un
meilleur service à l'élève, dans une école de plus
en plus responsable et tournée vers les membres de la
communauté.
Je voudrais rapidement vous rappeler quelques grandes étapes qui
ont marqué notre démarche de consultation. À la suite des
travaux du comité que nous avions formé et que nous avions
appelé dans le temps: Vision de l'école québécoise,
on avait publié, dès juin 1980, une étude sur
L'école de demain et sa gestion. Nos membres votaient, dès
février 1982, pour asseoir toute notre démarche sur quatre grands
principes de base que je voudrais rappeler. Le premier de ces principes:
l'école doit être autonome pour tout ce qui regarde son
vécu et les services à offrir a ses clientèles,
c'est-à-dire ce qui se passe dans l'école quotidienne; le
deuxième principe: l'école délègue à un
palier intermédiaire des pouvoirs de coordination et de planification,
comme le transport, les relations de travail, etc.; le troisième
principe: nous disions que le directeur d'école et la directrice
d'école doivent avoir le même type de pouvoirs et d'obligations
dans leur école respective qu'un directeur général en a
actuellement dans sa commission scolaire. Nous faisons le parallèle
clair. Le quatrième mandat que nos membres nous avaient donné,
c'est que notre fédération doit s'assurer du statut et de la
sécurité de l'ensemble de nos membres.
Le 1er mai 1982. À cette date, nous nous retrouvions plus de 1200
directeurs et directrices d'école à Lévis, tout
près, pour étudier les principes que contenaient les documents
disponibles sur la future réforme et pour demander qu'un livre blanc
soit enfin déposé.
Le dépôt du livre blanc, en juin 1982, nous amena, en
octobre de la même année, à adopter des orientations sur ce
livre blanc. Vous trouverez le résultat de notre étude en annexe
I du présent mémoire. Il contenait 71 éléments qui
ralliaient l'opinion de nos membres quant aux énoncés du livre
blanc.
Nous sommes allés sur la place publique avec ces prises de
position, conscients qu'elles alimenteraient le débat en cours. Pour
nous, il fallait que l'ensemble de la communauté éducative
connaisse les orientations de nos membres.
Déjà, les pressions que subissaient les directeurs et
directrices d'école dans leur milieu nous obligeaient à demander
à plusieurs reprises le fameux dépôt d'un projet de
loi.
La publication d'un livre blanc indique qu'un gouvernement s'engage dans
une démarche pour atteindre des objectifs qu'il juge valables. Pour
nous, le dépôt d'un projet de loi, c'est la confirmation que cette
démarche se fera.
Aussi, c'est avec un grand soulagement que nos membres apprenaient le
dépôt du projet de loi 40 en juin dernier.
L'étude du projet de loi, suivie d'une nouvelle consultation de
nos membres, se termine à la fin de septembre 1983, parce qu'à ce
moment, on s'attendait encore à venir en commission parlementaire en
octobre. C'est pourquoi nous avions terminé nos travaux à la fin
de septembre 1983. Notre assemblée générale, à 83%
- j'insiste énormément sur la représentativité de
notre mémoire - adopte alors les positions qui font l'objet de ce
mémoire que nous vous présentons aujourd'hui.
Je voudrais vous rappeler qu'il y a à peine une trentaine
d'années, plus de dix ans donc avant le rapport Parent, l'école
publique était élémentaire partout au Québec, dans
chaque village et dans chaque ville.
Le secondaire public était à peu près inexistant,
sauf à Montréal, à Québec et à quelques
autres endroits. Là ou ailleurs, le secondaire était
privé, classique surtout, et exceptionnellement scientifique.
C'était le système.
Pourquoi, aujourd'hui, le projet de loi 40? À cette question,
nous répondons que l'ensemble de la réforme qui a
débuté avec la publication du rapport Parent n'est pas
terminé. L'aboutissement de toutes les démarches, en passant par
la consultation du livre vert, c'est dans le vécu de l'école que
l'on y trouvera la réponse et c'est dans l'éducation que
reçoit l'élève que l'on déterminera si ce fut une
réussite. Il est fondamental que l'objectif de la réforme soit de
revaloriser l'école, de lui donner la
chance de réaliser son projet éducatif
-c'est-à-dire comment l'élève vit chaque jour - et, pour
ce faire, de reconnaître son existence, de reconnaître que
l'école existe et de lui donner le pouvoir de décider ce qu'elle
veut être.
La décentralisation. Est-ce nouveau de parler de
décentralisation? Depuis plusieurs années, nous réclamons,
nous, directeurs et directrices d'école, une décentralisation et
plus de pouvoirs pour l'école, afin de lui permettre de réaliser
son "projet d'îécole" avec toute la latitude dont elle a
besoin.
J'insiste sur les dates parce que beaucoup de gens pensent que nous
sommes devenus favorables à certains éléments du projet du
jour au lendemain. Je voudrais rappeler qu'en 1974 - c'était bien avant
la présence du gouvernement actuel - novembre, 1974, dans un article
ayant pour titre: La décentralisation: pourquoi? comment?", le
président de notre fédération d'alors, M. Gill Robert,
écrivait: "L'école doit être le pivot de tout
système d'éducation et plus particulièrement dans un
système décentralisé."
Il revenait à la charge en 1975 dans un autre texte
intitulé: "Notre place dans la gestion" en disant: "II n'est permis
à personne d'oublier que le lieu des opérations de tout service
éducatif, c'est l'école. C'est là que naissent et
s'expriment les besoins, c'est là que s'exercent les pressions du
milieu; c'est là qu'on doit appliquer les solutions
appropriées."
Dans un autre article sur le même sujet, un de nos membres
écrivait: "On exige de la part du ministère de l'Éducation
de délier les cordons de la hiérarchie scolaire, en rapprochant
les pouvoirs de décision de la base. Demander plus de pouvoirs, c'est
aussi être capable de plus de responsabilités".
À cette époque, M. Mario Laliberté, conseiller en
communications à la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec, dans un article de la Revue scolaire, la
célèbre revue scolaire de la fédération, en
septembre 1975 intitulait son article, La décentralisation, et il
terminait l'article ainsi: "Une décentralisation jusqu'à
l'école. À la limite, si on veut passer de la
démocratisation d'accessibilité à une
démocratisation de participation active, le transfert de pouvoir devra
s'étendre jusqu'à l'école. Si les commissions scolaires
assurent à leurs écoles l'autonomie nécessaire pour
favoriser au maximum la prise en charge par le milieu de la gouverne de son
école, il y a des chances que le pouvoir se rapproche vraiment de
l'étudiant et le serve. "Dans cette perspective, le ministre de
l'Éducation - évidemment le ministre de l'Éducation du
temps, puisque nous sommes en 1975 - a annoncé la publication prochaine
d'un document qui traitera des rapports possibles entre la commission scolaire
et ses écoles en conformité avec l'intention du ministère
de décentraliser le plus possible le système d'éducation.
Il reste aux administrateurs scolaires à franchir les étapes
subséquentes et à assumer pleinement la décentralisation."
C'était la citation.
Notre président d'alors mentionnait également en
février 1976: "En fin de démarche, l'école devra
posséder les pouvoirs et les ressources qui lui permettront
d'intégrer toutes les richesses et les valeurs du milieu, de faire que
les choix des politiques soient largement assis sur des consensus de tous les
agents locaux d'éducation. "Tout notre système scolaire n'existe
que pour l'instruction et l'éducation des enfants et ces enfants sont
dans les écoles. Pour nous, l'école publique doit
développer ses propres couleurs, promouvoir ses valeurs
particulières par son projet éducatif et se donner les services
qu'elle a identifiés elle-même comme nécessaires."
Il faut repartager les pouvoirs, non pour affaiblir quelque
entité que ce soit, mais pour renforcer la base. Toute structure qui ne
reposerait pas sur une base solide ou qui serait trop lourde ne risquerait-elle
pas de s'écrouler?
Le projet de loi 40 propose essentiellement trois paliers. Le projet de
loi 40 recentre le ministère sur sa mission éducative et
pédagogique, invite les commissions scolaires à la coordination
des services à rendre à l'école et rend l'école
responsable de la qualité de l'éducation qu'elle doit donner
à l'élève.
Me Patrice Garant, notre conseiller qui n'est pas effectivement un
spécialiste en administration scolaire, comme le disait M. le
député d'Argenteuil, puisque nous, nous sommes des
spécialistes en administration scolaire, mais bien un spécialiste
en législation scolaire, dans l'étude qu'il faisait pour notre
compte sur le projet de loi 40, nous donne un avis favorable quant à
l'originalité du système proposé par le législateur
et quant à la répartition des pouvoirs dans les trois paliers.
Sans entrer dans le détail de son étude sur "Le projet de loi 40
et le directeur d'école", que nous reproduisons d'ailleurs
intégralement en annexe 2, citons-le sur la question des trois niveaux:
"À première vue, le projet de loi 40 offre une
présentation remarquablement ordonnée de la répartition
des responsabilités et pouvoirs entre les trois niveaux
d'autorité dans le système scolaire: le nouveau système
scolaire du Québec sera donc à trois paliers; c'est là une
nouvelle caractéristique fondamentale." (11 h 45)
Dans la conclusion, il ' dit: "Dans l'ensemble, ce projet de loi est
nettement acceptable; il constitue un compromis dans lequel on retrouve les
avantages de la
décentralisation pour la réalisation de la mission
éducative proprement dite, et ceux de la déconcentration, pour le
fonctionnement efficace d'un système administratif complexe. À
notre avis, la loi est suffisamment claire dans la répartition des
responsabilités, pouvoirs et droits de chacun des paliers."
C'était Patrice Garant.
La proposition actuelle est nettement centrée sur l'option que
veut vivre l'école dans son projet éducatif. Ce projet
éducatif, c'est le foyer de convergence de toute initiative qui fera de
l'école le pivot du système éducatif. C'est ce projet
éducatif qui permet de nommer les besoins, de fixer les
priorités, de choisir les moyens, de les mettre en oeuvre et de juger
aussi bien de la démarche suivie que des résultats obtenus. Le
projet de loi veut favoriser l'émergence de ces projets éducatifs
élaborés par des communautés éducatives vivantes et
responsables, animés par le directeur ou la directrice d'école.
Pour faire vivre le projet éducatif de l'école, le projet de loi
lui donne le pouvoir de déterminer ses orientations propres, de
préciser les modalités d'application du régime
pédagogique, d'élaborer des programmes locaux, de choisir ses
modèles pédagogiques, d'établir son système
dévaluation des apprentissages et de décider de sa participation
à des projets communautaires. Actuellement, l'ensemble de ces pouvoirs
sont exercés sous l'autorité de la commission scolaire,
d'où la nécessité d'un nouveau partage des pouvoirs au
profit de l'école. Notre appui au projet de loi 40 vient du fait que nos
membres, à la suite de nombreuses études et consultations,
retrouvent dans ce projet de loi les principes qu'ils défendent depuis
longtemps. C'est dans cette perspective que nous vous livrons nos avis et
commentaires sur le projet de loi sur l'enseignement primaire et secondaire
public. Au chapitre I...
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, j'ai
remarqué que vous procédiez à une lecture
systématique de votre mémoire qui contient 42 pages. Vous en
êtes à la page 7 et vous avez déjà mis un quart
d'heure à présenter cette portion de mémoire. Vous
comprendrez donc que j'insiste pour que vous résumiez votre
mémoire. Je comprends qu'une vingtaine de minutes, ce serait maintenant
assez peu possible, mais au-delà d'une demi-heure, je devrai vous
demander de conclure et, à ce moment-là, nous devrons
procéder aux échanges entre les membres de la commission et les
représentants de votre organisme.
M. de Guire: Je comprends, M. le Président, votre
position. En ce qui nous concerne, je crois que la réforme scolaire
dépend de son succès dans l'école, de ce que, nous,
directeurs et directrices d'école, aurons comme objectifs et comme
tâches demain. Je crois que l'avis des gens qui devront mettre en place
la réforme scolaire demain m'apparaît important. Nous avons des
messages à transmettre à cette commission, des messages qui
viennent de l'ensemble de nos membres et je crois que les membres de la
commission parlementaire, autant du côté ministériel que de
l'Opposition, seraient nettement d'accord pour nous concéder
-probablement chacun de son côté - quelques minutes pour nous
permettre de donner l'opinion de l'ensemble de nos membres sur certains projets
importants de l'école. Je pense, M. le Président, être
capable de terminer en une demi-heure, mais, s'il me manquait quelques minutes
pour terminer, je pense que les membres de la commission - je vois M. le
député d'Argenteuil et M. le ministre qui me font signe que oui
-pourraient me prêter quelques minutes que je considère des plus
importantes.
Le Président (M. Blouin): Mais avez-vous l'intention
à ce moment-là...
M. de Guire: Je n'ai pas l'intention, M. le Président, de
lire de façon servile l'ensemble des choses. J'ai l'intention, à
chacune des têtes de chapitre, sauf le chapitre III qui traite de
l'école où je vais vraiment élaborer à fond... Les
autres, je vais me contenter d'en donner un court résumé.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président... M. Ryan: M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: Si vous voulez bien me permettre une observation
à ce moment-ci. Je n'ai pas d'objection à ce que la lecture aille
un peu au-delà de la limite de temps que vous avez indiquée.
J'aimerais bien que nous sachions à quoi nous en tenir au sujet de la
période de discussion qui suivra, cependant. Vous avez annoncé
tantôt que nous devions terminer nos travaux à 13 heures. Si cela
devait favoriser une discussion plus élaborée que nous allions
jusqu'à 14 heures, je n'aurais pas d'objection. Je crois qu'une fois
entrepris cet exercice, il faudrait essayer de le faire comme il faut. Cela
nous permettrait d'entreprendre nos travaux au début de la semaine en
tenant compte du programme chargé que nous avons. Jusqu'à
maintenant, nous n'avons pas accumulé trop de retard. Je ne sais pas si
cela convient à la délégation de la
Fédération québécoise des directeurs
d'école,
mais c'est la manière dont cela m'apparaîtrait.
Le Président (M. Blouin): D'accord. M. de Guire, je crois
que vous êtes très conscient des limites dont nous devons tenir
compte.
M. de Guire: Je suis conscient de tout cela, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Je fais appel à votre
collaboration.
M. de Guire: Je suis bien conscient, M. le Président. Je
voudrais remercier M. le député d'Argenteuil pour la
spontanéité avec laquelle il consent à nous écouter
même au-delà de l'heure limite.
Nous sommes en accord avec la philosophie de l'ensemble de ce premier
chapitre qui veut bien définir et focaliser sur l'objet premier de tout
le système d'éducation les services éducatifs. Nous
voulons attirer l'attention de la commission parlementaire sur la
complémentarité de ces services et sur l'importance que
revêtent les services complémentaires dans la vie des
élèves de nos écoles. Mentionnons à titre d'exemple
de ces services, l'encadrement des élèves, les activités
parascolaires, l'orientation, la psychologie, la pastorale, etc. À la
lecture de ce texte du chapitre, nous avons l'impression qu'il y a une
importance très grande aux services d'enseignement, ce qui est bon en
soi, mais que les services complémentaires apparaissent comme non
essentiels. Une expression comme: Ils comprennent également des services
complémentaires, qu'on retrouve à l'article 1, deuxième
paragraphe, nous laisse cette impression.
Pour nous, directeurs et directrices d'école, la
désignation des services complémentaires dans la loi est une
affirmation de la valeur éducative de ces activités et un appui
aux efforts soutenus que plusieurs écoles ont déployés
jusqu'à maintenant. L'organisation des services complémentaires
représente une dimension importante du projet éducatif de
l'école et contribue à lui donner sa couleur locale.
Au chapitre II, nous formulons des commentaires sur les articles 14, 15,
17 et 18 qui concernent la fréquentation scolaire, la gratuité,
les choix de l'enseignement religieux et moral et le choix de l'école.
Je voudrais cependant faire une seule remarque sur ce chapitre et dire que le
ministère de l'Éducation n'a pas encore reformulé sa
politique de l'éducation des adultes à la suite du rapport de la
commission Jean. Il y a là urgence et sa politique devrait tenir compte
des soucis que nous exprimons quant à cette clientèle, si nous
voulons la servir avec tout le respect qu'on lui doit.
J'en viens au chapitre III. C'est ici qu'apparaît
l'économie nouvelle que propose le projet de loi sur le système
d'éducation au Québec, un système à trois paliers:
écoles, commissions scolaires, ministère de l'Éducation.
Le projet de loi 40 reconnaît l'école comme un des trois paliers
du système et, pour ce faire, il donne à l'école un
véritable statut juridique et propose un réaménagement
important des fonctions entre les trois paliers du nouveau système
scolaire québécois. La formule de corporation publique
proposée par le livre blanc pour assurer un statut juridique à
l'école avait fait l'objet de questions par moments. Dans une
étude que nous vous déposons aujourd'hui en annexe IV, que Me
Garant nous remettait alors, il disait dans son texte: Si l'on applique
à la lettre le livre blanc, il ne pourra qu'en résulter des
situations fort délicates qui risquent d'engendrer des conflits ou
tensions. Il continuait en disant: II est possible de transférer un
grand nombre de pouvoirs au niveau de l'école sans qu'il ne soit
nécessaire d'en faire une corporation.
Alors, le changement de définition pour l'école par
rapport à l'ancienne loi permet d'affirmer que l'école est
dotée d'un statut juridique et je voudrais citer à l'appui de
cette affirmation Me Garant qui dit que la réforme entend donner un
véritable statut juridique à l'école et opérer un
réaménagement important des attributions entre les trois paliers
du nouveau système scolaire québécois. Actuellement,
l'école est définie par la loi comme une entité
institutionnelle. Le projet de loi 40 en fait un établissement
d'enseignement sans lui conférer la personnalité juridique. Le
législateur qui n'est pas censé parler pour ne rien dire a
utilisé le même vocable qu'il a utilisé dans la Loi sur les
services de santé et les services sociaux pour des institutions ou
entités qui sont dotées de la personnalité juridique. De
plus, le législateur a expressément conféré
à l'école de nombreux pouvoirs normatifs et décisionnels.
La décentralisation administrative - poursuit-il -signifie l'attribution
par une loi de pouvoirs autonome, décisionnels et normatifs à de
simples entités ou organismes qui ne sont pas de simples agents ou
relais d'exécution du pouvoir central; l'administration
décentralisée est donc un centre juridique distinct et
autonome.
L'ensemble de ce chapitre du projet de loi, de même que les
dispositions qu'il prévoit pour assurer le meilleur service possible
à chaque élève fréquentant cette école
communautaire et responsable, comme la qualifiait le livre blanc,
revêtent pour nous, directeurs et directrices d'école, une
importance capitale. De façon particulière, nous aimerions
traiter ici - et je dois avouer que nous sommes les seuls actuellement à
donner ce son de cloche. Je vais le faire
avec le plus de sincérité et le plus de
représentativité possible. Nous aimerions traiter de la place des
enseignants et enseignantes dans le projet de loi 40 car ils sont pour nous,
directeurs et directrices d'école, nos plus proches partenaires et
collaborateurs dans les services que l'école rend quotidiennement
à l'élève.
Nous voulons redire ici notre confiance et notre considération
pour les enseignants et les enseignantes du Québec. Nous rappelons que
les orientations de notre système d'éducation depuis le rapport
Parent les ont amenés à passer de généralistes
à spécialistes. Aujourd'hui, on leur demande de redevenir les
généralistes qu'ils étaient autrefois. Les changements de
régime pédagogique ont aussi été fréquents.
Nous avons vu que les enseignants et enseignantes ont dû changer
d'employeur, dans certains cas jusqu'à trois fois. Il faut,
croyons-nous, reconnaître les impacts de ces changements sur leur
carrière.
On s'interroge souvent sur la place qui leur est faite dans le projet de
loi 40. Est-ce une place prépondérante, digne de leur statut
professionnel? Nous, directeurs et directrices dHScole, croyons qu'ils ont un
rôle de premier plan. En ce sens, nous voulons pointer certains articles
du projet de loi que nous jugeons de la plus haute importance et qui font appel
à la participation, à la concertation et au professionnalisme des
enseignants et enseignantes, corps d'emploi dont nous sommes issus pour la
très grande majorité, nous, directeurs et directrices
d'école du Québec.
Sans les mentionner de façon directe, le chapitre I concernant
les services éducatifs, base du système proposé, repose en
grande partie sur la compétence et l'efficacité des enseignants
et enseignantes. Quand nous étudions la constitution de l'école
à l'article 28, nous constatons que les enseignants et enseignantes sont
collaborateurs du projet éducatif. Puis, nous les retrouvons comme
participants largement majoritaires au comité pédagogique,
là où pourra s'exercer leur compétence
professionnelle.
Aux articles 76, 77 et 78, c'est, encore une fois, la reconnaissance de
leur compétence qui permettra de dispenser des services éducatifs
de qualité, d'une qualité quant à la langue et d'un
professionnalisme quant aux orientations de l'école. Lorsqu'on regarde
l'épineux problème des élèves en difficulté
d'adaptation scolaire, là aussi, le projet de loi prévoit la
consultation de l'enseignant ou de l'enseignante.
L'article 99, au deuxième paragraphe, reconnaît leur
compétence quant à l'enrichissement des programmes. Et c'est lui
et elle, en tant que professionnels, qui déterminent les
modalités d'application de la méthode pédagogique. Et
c'est sûrement lui et elle qui aideront le plus l'école à
choisir les manuels pour les matières qu'il ou qu'elle enseigne, tel que
prévu à l'article 105.
On fait appel à leurs services lorsqu'il s'agit du passage de
l'élève du primaire au secondaire. Et ce sont eux, en somme, qui
sont les grands responsables de l'évaluation des apprentissages. Nous
rappelons que tout ce qui s'élabore et se réalise dans
l'école, nonobstant ce que le projet de loi ne peut décrire,
invite à la participation et à la concertation des enseignants et
enseignantes de chaque école.
La constitution, à l'article 28. Permettez-nous de rappeler le
principe que nous défendons depuis le début de l'étude de
ce dossier où on dit que l'école doit être autonome. C'est
notre principe de base. Et, dans nos conclusions sur le livre blanc, nous
adoptions la position suivante: "Notre fédération
préconise que les pouvoirs donnés à l'école soient
assumés entièrement par un conseil d'école." Alors, ce
conseil d'école est l'instance qui est l'autorité dans
l'école et qui exerce les pouvoirs conférés à
l'école." (12 heures)
Vous comprendrez que l'importance que nous attachons à l'article
28 du projet de loi, pour nous, c'est la pierre angulaire de tout
l'édifice et c'est pour cela que nous sommes intégralement en
accord avec son texte. C'est à cet établissement d'enseignants et
à son conseil que le législateur a attaché une quarantaine
de responsabilités en propre qui lui permettront de jouer pleinement le
rôle de pivot du système. Nous sommes d'accord avec la proposition
du projet de loi, aux articles 29 et 32 qui concernent le statut linguistique,
le niveau scolaire primaire et secondaire, le statut confessionnel. Vous
comprendrez qu'étant donné l'heure je voudrais vous parler de
façon particulière de la composition du conseil
d'école.
Nous avons dit précédemment que nous préconisions,
en accord avec le projet de loi 40, que le conseil d'école assume
entièrement les pouvoirs donnés à l'école. Il est
de la plus haute importance de retrouver au conseil d'école des
décideurs qui ne peuvent être, en aucun moment, en conflit
d'intérêts.
C'est dans cet esprit que nous faisons nôtres les
réflexions de M. Louis Roquet sur le conseil d'administration d'un
établissement public, rôle et fonctionnement, que nous
déposons en annexe 6. Pour nous, le conseil d'école est en fait
le conseil d'administration de l'école et je cite Louis Roquet qui dit:
"Un conseil d'administration ne gère pas. Commençons par un
paradoxe. Quoi qu'en dise la loi, un conseil d'administration ne gère
pas et ne devrait jamais gérer. Il ne s'agit pas ici d'une querelle de
mots, mais d'une réalité plus fondamentale. En effet, le conseil
d'administration n'a rien à voir avec
ce qu'on appelle traditionnellement la gestion, le management ou la
direction."
Plus loin, il continue: "Mais si le conseil ne dirige pas, s'il ne
gère pas, que fait-il donc? C'est très simple, le conseil juge.
Le conseil ne formule pas de plans; il évalue, corrige, amende des plans
qui lui sont présentés, à sa demande, par la direction
générale. Le conseil ne dirige pas l'organisation, mais il
évalue, il juge la façon dont les cadres supérieurs de
l'organisation dirigent celle-ci et il pose de façon remarquable les
conséquences de cette distinction. La distinction entre gérer et
juger n'est pas une distinction mineure, elle est cruciale. Si le conseil
d'administration dirige, s'il se mêle de mise en oeuvre, s'il
s'ingère dans des domaines qui devraient normalement être du
ressort de la direction de l'organisation, il devient en même temps juge
et partie."
Par la suite, M. Roquet s'interroge en disant: "Pour la plupart, les
membres d'un conseil d'administration, dans le réseau des affaires
sociales, sont élus par des segments donnés de la population: les
usagers, les autres établissements du réseau, le personnel
clinique et non clinique. Ce mode de sélection ou élection des
membres du conseil d'administration amène plusieurs d'entre eux à
se demander si leur rôle ne se limite pas à représenter
fidèlement les intérêts du groupe qui les a choisis. En
d'autres mots, les membres du conseil d'administration sont-ils des
représentants ou des porte-parole de leurs électeurs?"
Cette situation est génératrice de conflits
d'intérêts et M. Roquet le démontre. Il dit: "Plusieurs
membres de conseil d'administration se sentent mal à l'aise parce qu'ils
sont placés régulièrement en situation de conflit
d'intérêts. Prenons l'exemple de l'employé professionnel,
membre du conseil, qui participe à l'évaluation du directeur
général faite par le même conseil."
M. le Président, si nous avons insisté sur une
argumentation quant à la composition du conseil d'administration, venant
du secteur des affaires sociales, ce n'est pas parce que le
phénomène n'avait pas été étudié dans
le réseau de l'éducation. Qu'il suffise de mentionner les
nombreux écrits venant du réseau des cégeps où le
même modèle de composition du conseil d'administration existe.
Plus près de nous, dans le temps, en août 1982,
dernièrement, rappelons l'étude de M. Germain Julien, du Centre
d'études politiques et administratives du Québec, de l'ENAP, qui
portait comme titre: "Le livre blanc sur la restructuration scolaire et
l'expérience québécoise de participation à la
gestion des établissements publics", que nous reproduisons d'ailleurs en
annexe 7. Au point 4 de son étude, parlant des conflits dans les
conseils d'administration, il rapporte: "Suivant Roquet, l'économie de
ce système suppose qu'une fois élu au conseil d'administration,
le délégué d'un groupe doit oublier complètement
qu'il représente des intérêts particuliers. Son seul
objectif doit être de travailler pour le bien commun, c'est-à-dire
d'administrer l'établissement, le bien faire fonctionner et fournir des
services adéquats à la clientèle. Ainsi, le
délégué d'un groupe ne doit pas siéger au conseil
d'administration dans le but de défendre les intérêts du
groupe qui l'a élu." Il continue en portant un jugement très
sévère: "Cette conception idyllique des établissements
publics n'est qu'une illusion. Bien au contraire, en réalité, le
système institutionalise le conflit. Le mode de sélection des
membres du conseil d'administration et le mandat qui leur est confié, en
principe, sont fondamentalement incompatibles, de sorte que les membres d'un
conseil se trouvent nécessairement confrontés à une sorte
de dilemme entre l'allégeance à leurs électeurs et
l'allégeance à leur établissement."
Sa conclusion se présente ainsi: "En définitive, de l'avis
général des auteurs consultés, le bilan de
l'expérience québécoise de participation à la
gestion des établissements publics montre que celle-ci ne s'est pas
conformée au modèle proposé selon lequel le conseil
d'administration, qui est une structure décisionnelle où se
concilient d'une façon harmonieuse les intérêts divergents
en vue de servir le bien commun de l'institution. Dans le projet gouvernemental
de restructuration scolaire, rien ne peut assurer que les conseils
d'école proposés permettront le développement de ce
modèle idéaliste."
L'expérience vécue dans les secteurs
précités devrait nous inciter à ne pas renouveler une
telle pratique. Nous sommes conscients que le projet éducatif
nécessite la concertation de tous les intervenants du milieu scolaire.
Nous savons aussi que c'est dans nos écoles que nous tentons de vivre
cette concertation avec l'ensemble des partenaires parce que nous savons qu'un
projet d'école ne peut vivre autrement. Mais il est de la plus haute
importance de retrouver sur le conseil d'école des décideurs dont
le seul objectif sera toujours le mieux-être de l'élève.
Croire que n'importe qui peut siéger au conseil d'école, c'est
faire fi de la réalité à laquelle les directions
d'école sont confrontées quotidiennement; c'est aussi faire fi de
la réalité syndicale au Québec. Il est essentiel de bien
voir la différence entre, d'une part, l'enseignant et l'enseignante, des
professionnels régis par une sorte de droit de pratique exclusif,
disposant de marge de manoeuvre dans l'exercice de leurs fonctions et qui
apportent dans la réalisation éducative plus que leur savoir ou
leur savoir-faire - ils y témoignent de leur savoir-être - et,
d'autre part, l'enseignant et l'enseignante membres d'un syndicat qui
véhicule son
propre système de valeurs, tel que nous avons été
à même de le constater depuis plusieurs années.
On n'a pas le droit, M. le Président, de prendre des risques avec
cette réforme scolaire. C'est trop sérieux et trop engageant pour
la compromettre avec de la pseudo-participation. La participation à
l'élaboration des projets et des politiques pour l'école, de
même que leur mise en oeuvre, doivent être absolument
dissociées de la prise de décision de ces mêmes projets.
Cela assurera un climat sain et une stabilité dont l'école a
besoin pour réaliser son projet éducatif. Nous croyons à
l'importance du rôle des enseignants et des enseignantes. Nous l'avons
dit précédemment. Nous croyons qu'ils doivent avoir
prépondérance sur les décisions en matière
pédagogique. Ce rôle, ils peuvent le jouer avec le directeur
d'école, la directrice d'école, à l'intérieur du
comité pédagoqique, mentionné à l'article 67.
C'est pourquoi, à l'article 39, nous recommandons qu'on n'y
retrouve que le commissaire de l'école élu, que les parents qui
sont élus et que le directeur d'école.
Nous formulons également à l'intérieur de ce
chapitre... compte tenu du temps, je vous citerai uniquement les articles sur
lesquels nous faisons des recommandations concernant les procédures de
convocation, le mandat du conseil, la présidence du conseil
d'école, les règles de régie interne.
Nous passons au comité de l'école. Toute
l'éducation est essentiellement recontres et dialogue. Il faut que les
attitudes et les mentalités de méfiance, d'affrontement ou de
passivité fassent place à des mentalité d'ouverture, de
collaboration et de participation. De même que nous avons fermement
insisté pour que les décideurs du conseil d'administration aient
les mains libres. Ainsi, il est de la plus haute importance, croyons nous, que
chacun des groupes impliqués dans l'école puisse être
consulté sur les sujets qui les concernent. Nous croyons qu'il faut
à tout prix voir à ce que les mécanismes de la
consultation et de la participation dans l'école existent et
fonctionnent pour que la mise en oeuvre du projet éducatif devienne
possible. L'équipe-école constituée des enseignants, des
professionnels non enseignants et des personnels de soutien est
l'élément qui, avec les usagers jeunes ou adultes ou les parents,
fait vivre le processus éducatif dans l'école. Une école
ne saurait exister sans la collaboration étroite entre ces divers
partenaires. Le conseil d'école aura à juger de
l'efficacité de cette participation. Les directeurs d'école
donnent leur accord à l'ensemble des articles sur les comités de
l'école.
À la section V sur les fonctions de l'école. En
étudiant attentivement l'ensemble des fonctions dévolues à
l'école, nous nous sentons en terrain connu et nous sommes d'accord avec
l'ensemble, sauf avec l'article 90 au sujet duquel nous formulons, à
l'intérieur du mémoire, une demande de radiation et nous
exprimons suffisamment clairement les arguments sur lesquels repose notre
opinion. Je passe aux ressources de l'école à la page 29. Comme
vous le voyez, je me rapproche de la fin.
Nous avons dit précédemment que les directeurs et
directrices d'école du Québec sont très conscients de
l'ampleur de la tâche projetée par le projet de loi 40, mais la
réforme scolaire apportera aux directeurs d'école des
défis supplémentaires et, dans plusieurs cas, des défis
nouveaux, des défis de taille: gestion, écoute du milieu,
concertation. La façon de gérer sera totalement nouvelle
puisqu'on devra préparer des prévisions budgétaires, des
prévisions de personnel, de matériel et d'équipement.
Aussi, devrons-nous les présenter à la commission scolaire qui,
elle, sera responsable régionalement de la planification, de la
coordination et du contrôle des ressources matérielles et
financières, selon les règles édictées par le
ministère et selon les politiques élaborées avec les
écoles. Nous devrons aussi rendre les comptes pour l'école. Le
directeur sera l'exécutif dans l'école.
Tout cela demandera de l'aide. Il faudra de la part du gouvernement
qu'il y ait une volonté véritable de donner à
l'école l'ensemble des ressources humaines, matérielles et
financières pour que l'école puisse assurer sa mission. Il va
falloir que la nouvelle commission scolaire apporte tout le soutien aux agents
responsables de la bonne marche de l'école. C'est un profond changement
de mentalité. Je vous invite à lire Mme Marie Bouchard à
ce sujet qui est tout à fait explicite.
Je voudrais aussi rappeler que la tension et le stress s'accumulent
depuis nombre d'années sur les épaules du directeur et de la
directrice d'école, de même que sur celles de leurs adjoints et
adjointes, sans qu'il y ait eu de mouvement concret pour leur donner quelque
soutien que ce soit et leur faciliter la tâche. Je voudrais vous rappeler
ici l'étude que faisait en 1975 le Dr Charles-S. Lusthaus de la
faculté d'administration scolaire de l'Université McGill
intitulée: "Job related tension and Québec School Administrators"
que je reproduis en annexe 9 et que j'aimerais bien citer; elle est très
explicite sur le niveau de stress des directeurs et directrices d'école.
Je vous fais grâce des citations, mais je pense qu'il est temps que le
gouvernement du Québec comprenne que c'est à l'école que
s'exercent les pressions du milieu et que c'est là qu'on doit appliquer
les solutions appropriées. Nous demandions et nous demandons encore
d'aider les directeurs et
directrices d'école qui, eux, vivent sur la première ligne
de feu et non dans les arrière-tranchées derrière des
bureaux. C'est en toute conscience cependant que nous acceptons le défi,
mais aussi, en toute confiance dans les ressources propres de l'école et
dans l'aide ainsi que le soutien que peuvent et doivent leur accorder le
ministère et les commissions scolaires. (12 h 15)
Au chapitre IV. Depuis le début de nos démarches,
concernant les commissions scolaires, dans ce long cheminement qui nous conduit
aujourd'hui en commission parlementaire, nous nous sommes appuyés sur
quatre principes. Le second portait précisément sur le maintien
d'un palier intermédiaire: la commission scolaire.
M. le Président, nous croyons qu'il est bon de le rappeler, car
trop souve'nt avons-nous entendu dire que nous étions contre les
commissions scolaires, ce qui est totalement faux.
Quand nous voulons ce palier qu'est la commission scolaire, nous le
voulons pour qu'il coordonne, qu'il planifie, qu'il soutienne le réseau
que constitueront les quelque 30 écoles de son territoire. Nous voulons
que la commission scolaire soit préoccupée par la vie de
l'école. Nous voulons qu'un lien existe entre les deux paliers:
école et commission scolaire. Un lien fort, un lien dynamique. Nous
voulons que la collaboration s'établisse en termes de "partnership", car
nous croyons que chacun des paliers du système, l'école, la
commission, le ministère, est un engrenage essentiel et que les pouvoirs
et responsabilités de chacun doivent être clairement
définis.
C'est dans cet esprit que nos membres ont analysé et
accepté les textes contenus dans ce chapitre. Ils ont reconnu ce palier
intermédiaire souhaité, ils ont vu le lien établi entre
nos deux paliers par la présence d'un commissaire d'école qui
siège au conseil d'école et au conseil des commissaires.
Pour nous, ce lien école-commission scolaire est essentiel et
nous croyons qu'il augmentera la cohérence du système.
Si le commissaire perd sa qualité pour siéger au conseil
d'école, tel que défini à l'article 58, nous croyons qu'il
devrait quitter également son siège à la commission
scolaire et, vice versa, s'il perd sa qualité de commissaire.
Il se peut que l'intention du projet de loi soit dans ce sens. Mais nous
n'avons pas trouvé les articles l'indiquant clairement. Aussi, nous
demandons au gouvernement de donner suite à cette recommandation dans la
nouvelle formulation qu'il fera des articles 58 et 172.
Nos membres ont aussi reconnu les fonctions de coordination, de
planification et de soutien de la commission scolaire, que ce soit pour la
répartition des services éducatifs, pour le plan quinquennal
d'utilisation des immeubles, pour la coordination du transport ou pour
l'organisation des services aux élèves en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage.
En ce qui concerne le territoire - cela m'apparaît important -
notre fédération a retenu comme politique que chacune de nos
associations locales prenne position elle-même selon les besoins de son
milieu. C'est pour cela que nous ne traitons pas du tout de la carte
scolaire.
Je vous fais grâce des quelques modifications que nous
suggérons dans le reste du chapitre. Je pense qu'elles sont suffisamment
claires dans notre mémoire.
Pour les besoins de notre mémoire, nous avons regroupé
l'ensemble des chapitres V à XI, étant donné que les
articles qu'ils contiennent sont, sous un aspect ou un autre, reliés au
ministre de l'Education et au gouvernement selon leur compétence
propre.
Nous avons toujours soutenu qu'il appartenait au gouvernement de fixer
les grandes orientations de notre système d'éducation. Il a
été élu pour cela. Il doit aussi édicter les
règlements qui feront que les orientations retenues s'appliqueront et il
doit poser les gestes politiques conséquents à ces
orientations.
Cela dit, dans l'ensemble de cette partie du projet de loi, nous
reconnaissons très bien le troisième palier du système
scolaire avec ses prérogatives, ses pouvoirs, sa stature.
Nous reconnaissons aussi que ces quelques articles ne décrivent
que le canevas de ce qu'est le ministère de l'Éducation. Nous
savons très bien que les mandats attribués au ministère de
l'Éducation seront complétés par une
réécriture de la réglementation existante pour la mettre
en concordance avec le projet de loi. D'ailleurs, nous avions formellement
demandé que ces projets de règlement soient déposés
avant la commission parlementaire, et c'est ce qui a été
fait.
Par la suite, nous faisons plusieurs recommandations concernant divers
articles: 297, 307, 309, 368 et 385. Mais, étant donné la
rapidité avec laquelle j'ai dû procéder, je crois que vous
me permettrez de résumer en quatre minutes notre pensée sur le
projet de loi. Je voudrais la résumer. Peut-être que je ferai une
répétion mais c'est dans le but d'être tout à fait
conforme étant donné que j'ai omis tellement de points. Je
résume en quatre minutes.
Le Président (M. Blouin): S'agit-il de votre
conclusion?
M. de Guire: Oui, M. le Président. Nous vous avons
présenté notre mémoire sur le projet de loi 40, que je
rappelle adopté à 80% de nos membres en assemblée
générale.
Notre but a été d'apporter une collaboration positive
à l'élaboration et à l'amélioration de ce projet.
Nous disons que ce projet rejoint une grande partie de nos aspirations quant
à la prise en charge de l'école par elle-même, autant pour
un meilleur service à l'élève que pour une meilleure
implication communautaire.
Notre appui au projet de loi 40 vient du fait que nos membres, à
la suite des nombreuses études et consultations, retrouvent dans ce
projet de loi les principes qu'ils défendent depuis longtemps. En effet,
le projet de loi recentre le ministère sur sa mission éducative
et pédagogique, invite les commissions scolaires à la
coordination des services à rendre à l'école et rend
l'école responsable de la qualité de l'éducation qu'elle
doit donner à l'élève.
L'article 28 est la pierre angulaire de tout l'édifice et c'est
pour cela que nous sommes en accord avec son libellé intégral.
Pour nous, l'école doit être autonome pour tout ce qui regarde son
vécu quotidien et les services à offrir à ses
clientèles chaque jour. C'est notre principe de base, c'est ce qui nous
a guidés tout le temps.
Nous préconisons, en accord avec le projet de loi 40, que le
conseil d'école assume les pouvoirs donnés à
l'école. C'est à cet établissement d'enseignement et
à son conseil que le législateur a attaché une quarantaine
de responsabilités en propre pour lui permettre de jouer pleinement son
rôle de pivot du système scolaire. Il est de la plus haute
importance cependant de retrouver au conseil d'école, des
décideurs qui ne peuvent être, en aucun moment, en conflit
d'intérêts. La participation à l'élaboration des
projets et politiques pour l'école, de même que
l'élaboration de leur mise en oeuvre, doivent être absolument
dissociées de la prise de décision sur ces mêmes projets
dont l'articulation est assurée à l'aide des comités
d'école.
L'école a besoin, pour réaliser son projet
éducatif, d'une stabilité et d'un climat sain. Nous retenons que
les agents de lrécole, les enseignants et les enseignantes en
particulier, ont un rôle important à jouer et que les services
offerts à l'élève reposent sur le professionnalisme et la
compétence de tous les personnels. Nous sommes d'accord, comme
directeurs et directrices d'école, pour exercer les fonctions
prévues dans le projet de loi 40 et pour en rendre compte. Nous
adhérons à la notion d'imputabilité, ce qui est clairement
exprimé.
Nous prétendons cependant que le projet de loi 40 devrait se
limiter à fixer qui est l'employeur du directeur et de la directrice
d'école - j'ai dû, malheureusement, omettre ce bout qui nous
apparaît fondamental. Nous croyons que le projet de loi ne doit
déterminer que l'employeur du directeur et de la directrice
drécole, de l'adjoint et de l'adjointe, sans préciser
comme il est fait aux articles 82, 83, 84 et 85 les règles qui nous
concernent nous, directeurs d'école, qui concernent les règles de
l'engagement, du mandat, de la nouvelle affectation, de la
sécurité d'emploi et globalement de toutes les modalités
qui découlent de l'engagement. S'il fallait que tout cela soit contenu
dans un projet de loi, demain quand j'aurai à représenter mes
directeurs et mes directrices, mes adjoints et mes adjointes pour faire changer
quoi que ce soit à leurs conditions de travail, je devrai me
présenter à l'Assemblée nationale pour discuter de cela.
Je ne veux pas me présenter à l'Assemblée nationale; ce
n'est pas la place pour faire des discussions sur nos conditions de travail. Je
voudrais retrouver toutes ces conditions dans le règlement.
J'ai résumé, mais c'est un peu vous, M. le
Président, qui m'avez forcé à résumer. Je pense que
vous avez sûrement compris l'essentiel: les conditions de travail d'aucun
corps d'emploi du secteur public ne se discutent à l'Assemblée
nationale, ce n'est pas possible.
Rappelons également que ce que nous disons pour le directeur et
la directrice d'école doit s'appliquer mutatis mutandis à
l'adjoint et à l'adjointe au directeur d'école. C'est un membre
à part entière de l'équipe de direction. Nous croyons que
la loi est suffisamment claire dans la répartition des
responsabilités, pouvoirs et droits de chacun des paliers. Par ailleurs,
l'école n'exerçant pas toutes ses fonctions dans un cadre
défini par la commission scolaire, nous trouvons inutile et tendancieux
l'article 90. Nous voulons qu'un lien existe entre les deux paliers. Nous
voulons que la collaboration s'établisse en termes de "partnership". Ce
lien est établi entre nos deux paliers par la présence d'un
commissaire d'école qui siège au conseil des commissaires. Ce
lien école-commission scolaire est essentiel et nous croyons qu'il
augmentera la cohérence du système.
En toute conscience, nous acceptons le défi proposé et
nous mettons notre confiance dans les ressources propres de l'école et
aussi dans le soutien que peuvent et doivent apporter le ministère et
les commissions scolaires à nos écoles. Il faudra, de la part du
gouvernement et des nouvelles commissions scolaires, qu'il y ait une
volonté de donner à l'école l'ensemble des ressources
humaines, matérielles et financières pour qu'elle puisse assumer
sa mission. Nous estimons que l'union des forces vives du réseau peut
faire franchir une étape importante dans la valorisation de notre
école publique trop souvent - et à tort, à mon sens -
décriée. Nous avons hâte de voir la loi publiée dans
la Gazette officielle car, après deux ans de travaux, nous croyons
que
le temps est venu de la rendre en vigueur. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire. Je puis
déjà vous assurer qu'au-delà de toutes les idées
que vous avez exprimées, toutes les idées contenues dans votre
mémoire ont déjà fait l'objet d'une étude attentive
des membres de la commission qui ont reçu votre mémoire depuis
déjà un bon moment. M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
et féliciter la Fédération québécoise des
directeurs d'école et toutes ses associations régionales
représentées ce matin à la table pour l'étude
fouillée qu'elles ont faite, aussi bien du livre blanc que du projet de
loi. Vous êtes des administrateurs scolaires, mais vous êtes, parmi
les administrateurs scolaires, les seuls qui oeuvrez quotidiennement au niveau
de ce palier du système éducatif qui en constitue le coeur, le
centre, le foyer, la base et le pivot, c'est-à-dire l'école.
Votre tâche est délicate - vous l'avez rappelé - et
difficile, mais considérable et essentielle. Je pense que cette
expérience et cette tâche confèrent à vos opinions
un poids et une crédibilité qu'on ne saurait trop souligner.
J'aurais évidemment plusieurs questions à vous poser, mais
je ne voudrais pas les accaparer toutes. Je sais, d'ailleurs, qu'elles vous
seront posées soit par mes collègues de l'Opposition ou mes
collègues ministériels. Je voudrais simplement commencer la
discussion en ne vous en posant qu'une. Plusieurs intervenants à cette
commission ont fait état du fait que les modifications apportées
par la loi 71 en 1979 relativement à la participation des parents
à la gestion de l'école et relativement au conseil d'orientation
qui était établi par cette loi étaient suffisantes.
Cependant - et je pourrais même dire par contre - votre mémoire
insiste particulièrement sur la nécessité de créer
juridiquement ce nouveau palier du conseil d'école en lui attribuant des
pouvoirs et des responsabilités très définis pour la
réalisation du projet éducatif. Ma question est à double
volet: Selon vous, comment le projet de loi permettra-t-il à
l'école de mieux prendre en charge son projet éducatif? Et le
deuxième volet: Croyez-vous qu'une telle mesure sera susceptible
d'améliorer la qualité des apprentissages, ce qui est le but
premier du système éducatif, tout en respectant, cependant, la
diversité des besoins de chaque milieu. (12 h 30)
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: II est bien sûr, en réponse à la
question qui m'est posée, qu'on pourrait formellement dire que la loi 71
pourrait être améliorée. Des conseils d'orientation
pourraient permettre de réaliser les objectifs qui sont
véhiculés à l'intérieur du projet de loi 40.
Cependant, la loi 71 ne s'est pas appliquée. Je n'apprendrai rien
à personne. Les conseils d'orientation dans la région 01, il n'y
en a aucun. Dans la région 02, il n'y a aucun conseil d'orientation.
Dans la région 03, il n'y a aucun conseil d'orientation.
Dans la région 04, il y a une exception, à l'école
Sainte-Thérèse, à Drummondville. Dans la région 05,
il n'y en a aucun. Dans la région 06, dans la première partie, il
en existe à la commission scolaire des Mille-Îles dans une
école anglophone. Dans la région 06, sur la rive sud de
Montréal, il n'y en a aucun. Dans la région de l'île de
Montréal, il y en a un à la commission scolaire Sainte-Croix,
l'école Cardinal-Léger. Dans la région 07, on en retrouve
dans deux polyvalentes de la commission scolaire régionale Papineau.
Il y a une particularité, cependant, à la commission
scolaire régionale de l'Outaouais, c'est qu'on a là un
comité de régie. Ce n'est pas tout à fait un conseil
d'orientation. C'est une particularité importante, cependant, à
mentionner. Dans la région 08, il n'y en a aucun. Dans la région
09, il n'y en a aucun. Alors, quand nous affirmons que le projet de loi 71 ne
permet pas à l'école de prendre des décisions, c'est que
pour tout ce qui se fait à l'école ou tout ce qui pourrait se
faire à l'école, c'est écrit partout dans la loi que c'est
sous l'autorité du DG de la commission scolaire ou selon les politiques
et directives de la commission. Quand on pense actuellement à notre
système public, je serais porté à vous faire la
comparaison avec notre système privé. Qu'est-ce qui fait qu'on
entend régulièrement que c'est merveilleux dans l'école
privée. On entend dire que les gens voudraient y aller parce que cela va
beaucoup mieux que dans notre système public. Justement, M. le
Président, c'est que dans l'école privée ils ont ce que
nous demandons dans le projet de loi, ils ont une petite marge de manoeuvre.
À l'école privée, ils sont obligés de respecter les
lois du Québec, ils sont obligés de respecter les régimes
pédagogiques. Ils ont une marge de manoeuvre financière. Nous
demandons que les commissions scolaires continuent de régler cette
question.
L'autre partie qui fait que l'école privée est si belle
par rapport à l'école publique, c'est qu'elle se donne une
couleur locale, elle applique elle-même le régime
pédagogique dans l'école en permettant une application
concrète, quotidienne pour répondre aux besoins de son
école, aux besoins des gens qui sont dans son école. Je crois que
la qualité de l'éducation, la qualité du service à
donner à l'école sera, à mon point de vue,
améliorée - c'est en réponse à votre question -
parce que, justement, les
décisions qui concernent cette question seront prises près
de l'action, c'est-à-dire dans l'école avec les gens qui ont
aussi à tenir compte des aspirations, des contraintes, mais des
possibilités qu'ils ont également.
Nous croyons que la diversité d'une école à l'autre
pourrait apporter justement ce qui fait la gloire actuellement de
l'école privée, c'est-à-dire la couleur différente
d'une école à l'autre, tout en respectant le régime
pédagogique de l'ensemble du système.
Maintenant, je ne sais pas si mes collègues auraient des
compléments à la réponse que je viens de vous donner.
Le Président (M. Blouin): Cela va? Merci. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, vous me prenez par
surprise...
Le Président (M. Blouin): Ah oui?
M. Ryan: ...parce que les choses marchent à un rythme qui
me renverse. Je pensais être encore en train d'écouter le ministre
tellement les thèmes concordaient, tellement les thèmes qu'on
aborde de part et d'autre sont convergents, cette fois-ci. Voici un cas
où je ne contesterais pas le constat de convergence de notre
collègue, le ministre de l'Éducation. Blague à part...
Le Président (M. Blouin): Ah! il s'agissait d'une
blague?
M. Ryan: Oui, c'était une pure plaisanterie, M. le
Président. Blague à part, j'ai écouté avec beaucoup
d'intérêt le résumé forcément rapide qu'a
présenté M. de Guire, ce matin, du mémoire de la
Fédération québécoise des directeurs
d'école. Je veux l'assurer que j'ai lu le mémoire au complet
-j'ai mes notes ici, dont je vais m'inspirer, ces notes de lecture remontent
à la période entre Noël et le jour de l'An parce que,
pendant la session, nous n'avions pas le temps de le faire - et je pense que
nous aurons une discussion intéressante.
Je voudrais tout d'abord dire à M. de Guire et à
l'équipe qui l'accompagne, en particulier à l'un des principaux,
M. Poirier, qui nous fit naguère l'honneur d'être un citoyen du
comté d'Argenteuil, mais qui a cru aller vers des pâturages plus
agréables en se laissant entraîner dans le comté de
Papineau, à l'occasion de la dernière refonte de la carte
électorale. Je voudrais lui dire que je conserve un très bon
souvenir de lui et du dynamisme qu'il a manifesté, non seulement dans
son travail d'éducateur, mais également dans son travail
d'animateur social et communautaire.
Nous avons eu l'occasion - je pense que vous me permettrez de le
rappeler, M. de Guire - de discuter longuement des sujets qui font l'objet de
votre mémoire et du projet de loi 40. Vous m'avez accordé
beaucoup de temps, l'été dernier, pour une discussion très
détaillée sur ce sujet que j'avais vivement
appréciée. J'avais apprécié en particulier l'esprit
de courtoisie et de dialogue dans lequel nous avions pu causer de ces choses
avec vous-même et quelques-uns de vos collaborateurs. Et c'est dans le
même esprit que je veux continuer la discussion ce matin.
Sur le rôle capital du directeur d'école, je pense qu'il
existe un accord assez large. Je pense qu'on peut comprendre, en lisant votre
mémoire, que, pour vous, le directeur d'école est vraiment
l'épine dorsale de ce système de relations et de travail qu'est
l'école. Si vous avez eu l'occasion d'écouter ce que nous avons
dit depuis le début des travaux de la commission parlementaire, vous
aurez constaté que, nous aussi, accordons une très grande
importance au directeur d'école. Nous ne le voyons pas tout à
fait de la même manière que vous - nous en discuterons
tantôt - mais, sur le fond, je voudrais vous assurer que le directeur
d'école est, pour nous, une pièce absolument majeure du
système d'enseignement. Et vous l'avez souligné tantôt avec
à propos.
On aurait également pu le dire à propos des cadres
scolaires, qui sont venus nous voir plus tôt, aujourd'hui, et des
directeurs généraux des commissions scolaires que nous avons
rencontrés hier. Toutes ces personnes qui exercent, aujourd'hui, des
fonctions de cadre ou de gérance dans le système scolaire furent
d'abord, pour la très grande majorité, des éducateurs, des
enseignants. Ils le demeurent de coeur et ils ont accepté de servir
à des niveaux de responsabilité plus élevés,
justement parce qu'ils voulaient que la fonction enseignante produise des
fruits encore plus grands. Je pense que le vrai directeur d'école, c'est
celui qui est d'abord un enseignant, un éducateur, et qui a vu sa
fonction s'élargir, mais sans oublier ce qu'il fut et ce qu'il demeure
toujours. J'ai connu beaucoup de directeurs d'école et cela m'a toujours
frappé de constater combien ils étaient, d'abord et avant tout,
des éducateurs. Et je pense que c'est essentiel que cela le demeure.
Vous avez été mêlée de très
près comme fédération à tout le mouvement de
discussion et de recherche qui a préparé le projet de loi 40.
Vous avez joué un rôle extrêmement actif dans cela. C'est un
mérite de votre association de l'avoir fait. Une société
démocratique se nourrit des démarches comme celles que vous avez
multipliées au cours des années en vue d'obtenir certains
résultats dont plusieurs sont satisfaisants pour vous aujourd'hui, dont
d'autres demanderaient des améliorations, à votre point de vue.
Cela est très bien et
j'espère que votre fédération continuera longtemps
à jouer ce rôle de pression, de formation de l'opinion publique,
d'agent de changement qui convient à des associations professionnelles
dynamiques, me semble-t-il.
Sur la réforme elle-même, vous avez pu constater depuis le
début de la semaine que des éléments très
importants nous opposent au gouvernement. Je ne veux pas les cacher devant vous
ce matin, ce serait jouer à l'illusionnisme et je sais que ce n'est pas
votre genre. Il y a des points sur lesquels je voudrais avoir des
échanges de vue avec vous et je vais commencer par un - j'en ai inscrit
quelques-uns sur ma feuille.
Tout d'abord, au tout début de votre mémoire, vous
indiquez les quatre principes fondamentaux dont vous dites vous inspirer. Le
premier principe: l'école doit être autonome pour tout ce qui
regarde son vécu quotidien et les services à offrir à ses
clientèles; deuxièmement: l'école délègue
à un palier intermédiaire des pouvoirs de coordination et de
planification - vous donnez les exemples en matière de transport et de
relations du travail; troisièmement: la direction d'école doit
avoir le même type de pouvoirs et d'obligations dans son école que
celle que le directeur général a actuellement au sein de la
commission scolaire; quatrièmement: la Fédération
québécoise des directeurs d'école doit s'assurer du statut
et de la sécurité du directeur d'école. Ce sont les quatre
principes qui sont inscrits au tout début de votre mémoire.
Il y en a deux qui créent des problèmes dans mon esprit.
Le premier, d'abord: l'école doit être autonome pour tout ce qui
regarde son vécu quotidien et les services à offrir à ses
clientèles. Pour tout ce qui regarde son vécu quotidien, je suis
parfaitement d'accord. Les services à offrir à ses
clientèles... Autonome, tout dépend de la définition qu'on
donne du mot autonome. Si vous voulez dire indépendante vis-à-vis
de la commission scolaire, je ne peux pas être d'accord avec cela. Cela
remet en question des principes fondamentaux. Tout à l'heure,
j'entendais la délégation de l'Association des cadres scolaires
du Québec nous dire qu'en ce qui regarde le régime
pédagogique, par exemple, il y a des éléments qui
dépendent de la commission scolaire. En ce qui regarde la dispensation
des services d'éducation des adultes, par exemple, il y a toutes sortes
d'aménagements, il y a toutes sortes de conditionnements qui vont
dépendre de la commission scolaire, cela ne peut pas relever seulement
de l'école. Si vous voulez dire par là qu'elle doit être
autonome en ce sens qu'elle assure exclusivement, sans aucune espèce de
contrôle de la commission scolaire, des services à offrir à
sa clientèle... Il y a le problème de l'évaluation en
particulier qui a été soulevé avec beaucoup de pertinence
et de manière très concrète ce matin. Il va falloir que
vous trouviez des explications satisfaisantes à ces
difficultés.
J'émets une réserve tout de suite sur le deuxième
principe - on pourrait disposer de ces quatre principes tout de suite pour
commencer, cela réglerait un certain nombre d'autres problèmes
ensuite: l'école délègue à un palier
intermédiaire des pouvoirs de coordination et de planification. Vous
vous souvenez que, quand nous nous étions rencontrés, je vous
avais dit que cela me faisait sourire. Encore aujourd'hui, je trouve que c'est
une formulation dont le réalisme doit être démontré.
Dans le système que nous avons actuellement, ceux qui sont les
détenteurs d'un mandat, ce sont les élus du peuple qui ont la
charge de diriger le système d'enseignement sur l'étendue de leur
territoire. À partir du mandat populaire qu'ils détiennent,
qu'ils aient une responsabilité de déléguer des pouvoirs
et des responsabilités à un autre palier, en particulier à
l'école, je le comprendrais très bien.
Si vous me dites que ceci est un principe de base, je vais vous dire une
chose: Faites-vous élire par le peuple comme directeurs d'école
et comme membres des conseils d'école et on va changer toute la
structure. On va créer une vraie structure démocratique en bas.
Ce sera un conseil d'école élu par tous les citoyens. On engagera
un directeur et tout. Je pense que le ministre lui-même n'oserait pas
aller si loin parce qu'il se rendrait compte que ce serait une complication
extrême, sans compter l'augmentation des charges d'énergie et
même des charges financières et administratives, à tout
point de vue. Mais aussi longtemps que nous restons dans le système
actuel, c'est une formulation qui crée des problèmes
sérieux sur le plan logique. (12 h 45)
Je pense que la commission scolaire, c'est plus que cela; c'est plus
qu'un organisme qui se fera déléguer des pouvoirs par
l'institution qui est au plan local. N'oubliez pas que c'est la commission
scolaire qui reçoit le mandat du peuple. Peut-être qu'on
changerait cela si on avait une commission scolaire qui serait uniquement une
fédération d'écoles souveraines; peut-être, mais ce
n'est pas cela, le système. C'est peut-être le système que
vous voulez avoir. C'est l'un des postulats de base de notre politique,
à savoir que nous tenons à ce que, sur un territoire, il y ait un
groupe de citoyens qui aient reçu de leurs concitoyens le mandat de
veiller à ce que les services éducatifs soient assurés sur
tout le territoire, suivant les modalités qui pourront comporter au
maximum les choses que vous désirez.
C'est ma première question: Est-ce que vous êtes
prêts, d'abord, à soutenir les
services à offrir à sa clientèle - cela est
exclusif - sans aucune espèce de droit de regard de la commission
scolaire ou d'un rôle propre de la commission scolaire?
Deuxièmement, comment interprétez-vous le deuxième
principe? Est-ce que je l'ai mal lu ou si j'ai bien compris?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, je voudrais quand
même, avant de répondre à la question, relever un peu la
boutade de M. le député d'Argenteuil, au départ, qui avait
l'impression d'entendre le ministre de l'Éducation. Dans l'ensemble du
Québec...
Le Président (M. Blouin): II s'agissait d'une blague;
alors, n'insistez pas.
M. de Guire: Peut-être que je pourrais faire une blague et
dire que nous sommes possiblement aussi en accord avec M. le
député d'Argenteuil sur certaines choses qu'il a dites depuis le
début et que, pour autant, je ne crois pas qu'on va me dire que je
ressemble aussi...
M. Ryan: Si je peux me permettre juste une petite
précision.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, tout cela est très drôle, mais...
M. Ryan: Comme je le disais tantôt, c'est un reproche
à mon endroit parce que j'avais été distrait pendant deux
minutes par des collègues qui me parlaient de sujets pertinents...
Le Président (M. Blouin): D'accord.
M. Ryan: ...et je n'avais pas compris qui intervenait exactement.
C'est tout, ce n'est pas autre chose.
Le Président (M. Blouin): Cela va très bien. M. de
Guire, sur le fond. Sur le fond, s'il vous plaît, M. de Guire.
M. de Guire: Cela a quand même été dit et moi
aussi... Je dois vous appuyer, M. le député, quand vous dites que
le directeur et la directrice d'école ont un rôle des plus
importants dans le système scolaire. Le directeur d'école est la
pièce majeure. Vous nous avez invités à continuer
d'être positifs. Je pense que nous l'avons fait depuis le départ
et nous allons continuer. Nous aurions pu prendre l'attitude de dire: On est
contre. L'attitude qu'on a prise - et certains nous ont ainsi qualifiés
- c'est que nous avons décidé d'être positifs et nous avons
décidé -d'ailleurs, comme vous nous l'avez demandé et
félicité - de trouver la possibilité d'améliorer un
projet qui répondrait davantage aux aspirations, à la fois des
directeurs et directrices d'école, mais aussi à la fois des gens
avec lesquels nous vivons quotidiennement, parce que nous croyons que nous les
représentons habituellement.
Nos positions, cependant, et nos revendications datent de 1974. Je les
ai citées avec les dates aussi tout au long. Quand vous parlez de nos
quatre principes, j'en viens à la fin de votre question, je vais
commencer d'abord par le deuxième principe: votre deuxième
question, que l'école délègue à un palier
intermédiaire. Je voudrais vous rappeler que nous écrivons
à ce moment-là que nos membres votaient en février 1982,
avant la publication du livre blanc et avant la publication d'un projet de loi.
J'ai dit d'ailleurs tout au long du mémoire que nous avions... À
partir de ce moment-là, ce que nous défendions en fait, c'est ce
que vous dites: une école indépendante - ce qu'on appelait dans
le temps dans le jargon populaire: une école corporation - et que les
écoles pourraient former une fédération d'écoles et
ainsi de suite. C'était ce que nous défendions. J'ai dit aussi
dans notre étude - et je pense que vous l'avez - que Me Garant, à
qui nous avions demandé de faire l'étude de nos opinions sur
cela, nous a fait la preuve qu'il y aurait peut-être davantage de
conflits dans un système comme celui-là que dans un autre
système. C'est pour cela que, par la suite, nous en sommes
arrivés, non plus à dire que l'école délègue
à un palier intermédiaire qu'on appelle la commission scolaire,
mais que la commission scolaire aura des pouvoirs clairs et à la fois de
soutien, de supervision, de contrôle et d'évaluation. Tous ces
pouvoirs, nous les souhaitons pour la commission scolaire. Ils sont d'ailleurs,
de façon très précise, explicites dans la section V,
à la fonction de la commission scolaire où, dès l'article
199 et suivants, on voit que la commission scolaire s'assure que la population
de... Ce sont des pouvoirs. La commission scolaire peut établir; la
commission scolaire assure le soutien de l'organisation pédagogique et
un peu, d'ailleurs, ce qui a été dit ce matin: "La commission
scolaire veille à ce que les écoles évaluent les
apprentissages des pouvoirs de l'école." Ce n'est pas laissé
à la va comme je te pousse. Ce n'est pas l'école qui va faire
à peu près n'importe quoi. La commission scolaire doit veiller
à ce que ce soit fait et applique les épreuves uniques
imposées par le ministre. Et on continue: les pouvoirs et les fonctions
de la commission scolaire et on va même, à l'article 217,
jusqu'à dire que si cela ne marche pas après avoir fait toutes
les observations, la commission scolaire a un pouvoir de tutelle.
M. le Président, ce qui fait que nous sommes en accord et qui
peut peut-être paraître ambigu à beaucoup, c'est que
pour
nous, la différence entre une délégation de pouvoir
que j'appelle dans notre jargon "une décentralisation avec un
élastique" je vous prie de croire que les élastiques sont raides,
cela rebondit très vite les délégations de pouvoir parce
qu'elles sont toutes accompagnées ou de directives ou de politiques si
bien que la délégation de pouvoir, c'est, à toutes fins
utiles, de la bouillie pour les chats. La délégation de pouvoir,
c'est de la déconcentration. Ce n'est pas du tout de la
décentralisation. Quand les gens se gargarisent de mots, qu'ils parlent
de décentralisation et qu'ils veulent décentraliser des choses
à l'école, je regrette, mais de la décentralisation et de
la déconcentration, ce sont deux discours tout à fait
différents. Ce sont deux mots qui, dans la langue française, sont
complètement opposés l'un à l'autre.
Nous sommes en accord parce que précisément ce n'est pas
ce qui se produit. Ce qui se produit et qui, à notre sens, évite
toutes les ambiguïtés, c'est que c'est le législateur qui
décide, c'est-à-dire que c'est vous, les membres de
l'Assemblée nationale, qui décidez de donner des mandats par la
loi à la fois à votre ministère de l'Éducation
-parce que l'Assemblée nationale a aussi des comptes à demander
à son ministère de l'Éducation, c'est un palier dans le
système -donc, le législateur que vous êtes donne un mandat
au ministère de l'Éducation, donne un mandat à la
commission scolaire et donne un mandat à l'école.
Les supervisions et les contrôles. C'est l'Assemblée
nationale qui fait le contrôle de ce que fait le ministère de
l'Éducation; c'est le ministère de l'Éducation qui fait le
contrôle de la commission scolaire. Selon le projet de loi 40, c'est la
commission scolaire qui fait le contrôle de ce que fait ou de ce qu'aura
comme responsabilités l'école. C'est écrit en toutes
lettres, tous les articles dans le chapitre des fonctions de la commission
scolaire, de 199 jusqu'à 217 et 218 sont passablement clairs dans toutes
les fonctions. La commission scolaire doit effectivement veiller, surveiller,
chacune des responsabilités qui sont données à
l'école. C'est pour cela que lorsqu'on a vu qu'il y avait une
véritable décentralisation et qu'on a vu aussi qu'il n'y avait
plus les ambiguïtés qu'on retrouvait auparavant dans le livre
blanc, à savoir les conflits de juridiction, qu'on a vu que les mandats
étaient clairs et qu'il y avait justement non pas le ministre de
l'Éducation qui vient vérifier dans l'école pour arriver
à l'étatisation du système - c'est important -nous nous
sommes mis d'accord, pour éviter précisément
l'étatisation et un lien direct entre le ministre et l'école. Ce
n'est pas cela, c'est la commission qui vient contrôler si l'école
fait bien... Pour employer une expression connue, l'école fait-elle sa
"job" ou non? C'est la commission qui vient la vérifier.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire. M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: M. le Président, au cours des derniers jours nous
avons entendu la Fédération des commissions scolaires du
Québec, l'Association des directeurs généraux des
commissions scolaires catholiques du Québec et, ce matin, l'Association
des cadres scolaires du Québec. Ces trois organismes nous ont dit avec
beaucoup de vigueur qu'ils ne trouvaient pas que le rôle dévolu
aux commissions scolaires dans le projet de loi est satisfaisant. La
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
est même venue nous dire qu'avec ce genre d'aménagement de
pouvoirs, il lui sera impossible de s'acquitter de son mandat.
Et vous, vous dites dans votre mémoire que vous êtes
très satisfaits en général de l'économie des
pouvoirs. Vous venez de le redire tantôt. Les principaux articles qui
traitent du rôle de la commission scolaire semblent vous satisfaire. Plus
que cela, un des rares articles charnières qu'on trouve dans le projet
de loi - moi-même je le trouve plutôt insatisfaisant - l'article
90, dit: "Dans les domaines de compétence que le chapitre IV attribue
aux commissions scolaires - le chapitre IV contient les articles que vous avez
mentionnés tantôt -l'école exerce ses fonctions dans le
cadre défini par la commission scolaire dont elle relève." Je
trouve que cet article n'est pas clair. Si j'étais commissaire
d'école, je n'en serais pas satisfait. Vous trouvez qu'il va trop loin
et vous voulez l'enlever.
Est-ce que cela ne vous met pas un peu dans l'interrogation que de voir
qu'il y a quand même des corps très importants, aussi importants
que le vôtre à bien des points de vue, qui ont des objections
absolument fondamentales et qui ont même insisté pour demander au
gouvernement de retirer le projet de loi, à moins que ce soit
amendé? Il y a un article dans la même veine - je pense que c'est
l'article 28 - qui donne la définition de l'école. J'ai
trouvé très curieux que dans cet article, il ne soit même
pas mention de la commission scolaire. Et vous, vous avez l'air à
trouver qu'il ne faut pas y toucher d'un iota parce que c'est sacré,
c'est la base de l'édifice. J'aimerais avoir vos commentaires
là-dessus.
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, c'est bien sûr que ce
qu'on retrouve à l'article 28, c'est la création de
l'école, c'est la définition de l'école. C'est pour cela
qu'à mon sens il n'est pas question de la commission scolaire à
cet article; cela m'apparaît essentiel. On dit: "L'école est
un
établissement d'enseignement, sous l'autorité d'un conseil
d'école qui est destiné à assurer l'éducation des
élèves dans le cadre de son projet éducatif et qui exerce
ses activités avec la collaboration des parents, du personnel de
l'école..."
Dans le projet de loi 71, on retrouve que l'école est une
entité institutionnelle sous l'autorité d'un directeur pour
assurer d'une manière ordonnée l'éducation des
élèves, activité à laquelle participent les
élèves, les enseignants et les autres membres du personnel et les
parents. Il n'est pas question non plus dans la loi actuelle de la commission
scolaire.
C'est vrai, M. le Président, que des groupes comme la
Fédération des commissions scolaires, comme l'Association des
directeurs généraux et comme l'Association des cadres scolaires
sont opposés- à une décentralisation vers l'école
de pouvoirs qui concernent son vécu. Je comprends parfaitement leur
position. Je pense qu'il n'y a personne qui cède son pouvoir simplement
parce qu'on lui demande. On assiste à...
Ce qu'il faut comprendre, c'est que dans toute démarche, nous,
les écoles, nous sommes en demande. C'est tout à fait normal
qu'on demande. Ce qu'on demande, c'est une décentralisation. Et je
respecte aussi les gens qui veulent conserver des pouvoirs et des
responsabilités qu'ils ont. Je trouve cela tout à fait normal. Je
respecte leur opinion. Mais je voudrais aussi qu'on respecte l'opinion des gens
des écoles qui disent: On est peut-être assez grands pour
appliquer nous-mêmes... On a peut-être assez de gens
compétents, des enseignants... Il y a peut-être suffisamment de
gens dans l'école et on pourrait peut-être être capables,
nous aussi, de lire des programmes d'études. Peut-être qu'on
serait capables aussi d'essayer ensemble de les appliquer en répondant
davantage aux besoins de notre milieu.
On n'a pas demandé pour autant tous les pouvoirs. Je pense que
là-dessus, d'ailleurs, vous l'avez... On n'a pas demandé tous les
pouvoirs. Et je répète, parce que cela m'apparaît
important, qu'on demande aussi que la commission scolaire ait un rôle de
soutien à ces responsabilités qui sont dévolues à
l'école, mais aussi un rôle de contrôle, comme je vous le
disais tantôt. À mon sens, la commission scolaire change de
rôle mais, pour autant que je sache, on n'a quand même pas une
perte totale de ce qui regarde l'école, du vécu de
l'école. La commission scolaire va continuer d'examiner, va continuer de
contrôler, va continuer de soutenir les écoles. (13 heures)
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. de Guire: Tantôt, M. le Président, j'ai dû
complètement omettre les pages où je développais
l'argumentation concernant l'article 90. Je pense qu'à la suite de la
question du député je vais être obligé de lire; je
ne peux pas faire autrement, toute mon argumentation se trouve là.
Sinon, je ne pourrai pas répondre à cette question.
Nous avons indiqué au début dans notre mémoire
notre intérêt pour la décentralisation de certains pouvoirs
nécessaires à l'école. D'ailleurs le projet de loi 40
attribue à l'école une quarataine de pouvoirs en propre qui
engendrent une réelle décentralisation. Nous avons
également souligné la différenciation entre les paliers
que constituent le ministère de l'Éducation, la commission
scolaire et l'école. Pour ce qui est de la décentralisation de
certains pouvoirs entre la commission scolaire et l'école, je vais citer
encore Me Patrice Garant qui dit: "Un tel système de
décentralisation à double palier n'est pas sans susciter des
craintes de conflits entre la commission scolaire et l'école, qui sont
en germe dans les articles 28 et 199. La mission de l'école est
d'éduquer, de dispenser les services éducatifs, d'appliquer le
régime pédagogique mais elle doit la réaliser dans le
cadre défini par la commission. Ce cadre, la commission l'établit
en planifiant la répartition entre les écoles des services
éducatifs, des personnels, des ressources financières et
matérielles. Elle l'établit aussi en fixant des normes et
critères." On retrouve tout cela aux articles 203, 204, 232 et 239.
Plus loin dans son étude, Patrice Garant conclut en disant:
"À notre avis, la loi est suffisamment claire dans la répartition
des responsabilités, pouvoirs et droits de chacun des paliers. Il y a
toutefois quelques ombres au tableau dont l'article 90 qui nous paraît
inutile et tendancieux. L'école n'exerce pas toutes ses fonctions dans
un cadre défini par la commission scolaire; le cadre d'action de
l'école est défini tant par la loi, les règlements du
gouvernement et du ministre que par la commission scolaire mais sous certains
aspects uniquement. Comme "le législateur n'est pas censé parler
pour ne rien dire", l'article 90 risque d'être interprété
autrement que comme une disposition redondante. Pourquoi prendre la peine de
légiférer pour décréter que dans les domaines de
compétence de la commission l'école opère dans le cadre
défini par la commission scolairel Cela ne va-t-il pas de soi et le
contraire ne confinerait-il pas à l'absurde?".
Je pense que vous avez le reste du dossier de Patrice Garant et que vous
pourrez vous en inspirer. Je dois vous dire que l'article 90 est
peut-être une chicane juridique. Nous l'avons fait nôtre parce que
cela nous semble... Peut-être que deux juristes qui s'assoiraient face
à face pourraient trouver que j'ai tort ou que j'ai
raison. Le danger de l'article 90, pour nous, est de laisser croire que
l'école sera enfermée dans un cadre que la commission fixera
à sa discrétion. L'autonomie de l'école consacrée
par la loi ne doit pas être à la merci de la commission scolaire.
C'est l'essentiel.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: M. de Guire, il n'y a qu'une réserve que je
voudrais émettre à propos de l'opinion que vous attribuez
à M. Patrice Garant, mon bon ami M. Garant. Il aurait écrit dans
l'étude qu'il vous a remise que le législateur n'est pas
réputé parler pour rien. Il doit mal nous connaître. S'il
assistait à nos débats plus souvent - nous sommes très
heureux de l'avoir avec nous depuis deux jours - il constaterait que parfois
nous nous efforçons de mettre un contenu dans ce que nous disons mais
que nous ne réussissons pas toujours d'une manière
égale.
Le Président (M. Blouin): Je vous invite à faire
des efforts, M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Dans la même veine que nous avons commencé
à explorer, vous m'avez cité la Loi sur l'instruction publique
à propos de la définition de l'école. Vous avez dit que,
dans un article de la Loi sur l'instruction publique - l'article 32.1 pour les
initiés - il n'est pas question de la commission scolaire. Vous avez
parfaitement raison, mais vous savez comme moi que, deux paragraphes plus loin,
il y a un article tout aussi important qui vient compléter celui-ci dans
lequel il est dit que, sous l'autorité du directeur
général de la commission scolaire, le directeur d'école
préside à la définition des orientations et des
activités, etc. C'est l'article charnière dans la Loi sur
l'instruction publique qui vient expliquer celui que vous avez cité.
Dans cette perspective, je voudrais vous demander une chose. Est-ce que
vous seriez prêts à conserver cette disposition dans la nouvelle
loi: Sous l'autorité du directeur général de la commission
scolaire, le directeur d'école s'acquitte des fonctions que lui attribue
le projet de loi 40?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, en conformité avec
tout ce que nous avons exposé, je suis obligé de répondre:
Non, nous ne sommes pas prêts à dire "sous l'autorité du
directeur général", parce qu'en fait il n'y aurait pas de
décentralisation. Il y aurait ce que j'ai dit tantôt, de la
déconcentration. Vous avez cité l'article 32.3, que j'ai
précisément dénoncé, pour expliquer pourquoi nous
demandions une décentralisation, parce qu'on retrouve dans la loi 71
"sous l'autorité du directeur général". Je pourrais vous
citer d'autres articles où on dit "conformément aux politiques
des commissions" et, malgré tout, nonobstant tout cela, la commission
scolaire peut modifier ce qui a été prévu. Et c'est cela,
la loi actuelle.
On pourrait s'entendre sur le fait qu'il n'y a pas beaucoup de
responsabilités données à l'école dans le projet de
loi 40; je trouve qu'on fait beaucoup de bruit pour le peu de
responsabilités, en fin de compte, qui sont données. Cependant,
quand on parle du vécu de l'école, pour nous, c'est fondamental,
le vécu de l'école; quand on parle des règlements, comment
cela se vit chaque jour comment on vit chaque jour dans l'école. On dit
qu'on est en accord avec cette décentralisation, mais il faut comprendre
qu'actuellement, même sur cela, comment cela se vit quotidiennement dans
l'école, il faut également suivre les directives de la commission
scolaire, parce que c'est sous l'autorité du directeur
général et sous l'autorité de la commission scolaire. On
dit qu'avec le peu de pouvoirs qu'il y a actuellement de
décentralisés à l'école par la loi, ce doit
être le conseil d'école qui a la responsabilité de prendre
les décisions. Alors, il est évident que, par cela, le directeur
d'école devra rendre des comptes à son conseil d'école et
non pas à la commission scolaire.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: On pourrait discuter longtemps de ce que la loi actuelle
attribue au conseil d'orientation et ce serait en vain, parce que, comme vous
l'avez dit justement, il en existe tellement peu que ce ne serait pas rendre
compte d'une grande réalité que d'invoquer la loi. Mais il y a
une chose que je voudrais vous demander dans la même veine. Vous dites,
à un moment donné, qu'il faut que le directeur soit
l'employé de la commission scolaire. Vous dites qu'il faut qu'il soit
choisi par la commission scolaire et vous demandez qu'on laisse tomber les
autres dispositions de tuyauterie qui vous paraissent relever plutôt de
la réglementation ou de la négociation que de la
législation, ce en quoi je suis d'accord avec vous. Maintenant, s'il est
l'employé de la commission scolaire, la chose que je comprends moins, M.
de Guire, c'est qu'il ne relève pas de la commission scolaire. Il y a un
point qui a été soulevé à d'autres reprises depuis
le début de nos travaux, qui n'a pas trouvé de réponse
satisfaisante jusqu'à maintenant. Vous ne pouvez pas être
l'employé de quelqu'un et relever d'une tout autre autorité qui
est indépendante de celle-là. Il faut bien qu'on ajuste nos
choses et qu'on réconcilie les
différentes dimensions de la réalité quelque part
dans l'unité. Comment résolvez-vous ce problème-là?
S'il est leur employé, comment-vont-ils apprécier sa performance?
Comment vont-ils la surveiller, l'orienter, pour être en mesure de
prendre à son sujet les décisions convenables?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: Je pense que nous sommes en accord et vous l'avez
rappelé, ce que nous avons demandé, c'est que le directeur ou la
directrice d'école soient des employés de la commission et que,
d'autre part, on ne retrouve pas dans la loi ce qui concerne les conditions de
travail de ces mêmes directeurs et directrices d'école. Par
contre, nous croyons qu'il est possible à la fois d'être
l'employé de la commission scolaire et de relever d'un conseil
d'école. Je ne voudrais citer qu'un exemple et je suis fort surpris que
les gens qui m'ont précédé à cette table depuis le
début de la commission parlementaire, aient oublié cette
réalité que, pourtant, nous côtoyons tous les jours, dans
cette enceinte. Tous les employés de la fonction publique, pour ne citer
que cet exemple, sont des employés de la fonction publique qui les
engage et les congédie et ils relèvent tous d'un ministère
tout à fait différent pour les mandats qu'ils ont à
réaliser quotidiennement. Cela est tout à fait dans l'habitude
actuelle, cela se fait régulièrement dans la fonction publique.
Je pourrais donner un autre exemple. Les enseignants sont des employés
de la commission scolaire et, pourtant, ils relèvent, dans
l'exécution de leurs tâches quotidiennes, du directeur
d'école.
On croit que l'école, comme conseil d'école, pourrait,
à ce moment - puisque vous avez parlé de la façon de
l'évaluer, etc. - prévoir des mécanismes qui permettraient
au conseil d'école de rencontrer la commission scolaire pour faire part
de ses observations concernant le directeur d'école. Cela peut
très bien se faire. Je crois que cela se fait actuellement à
l'intérieur de la plupart des ministères qui sont dans le
système québécois.
Le Président (M. Blouin)i Merci.
M. Ryan: Je voudrais simplement vous donner une précision
là-dessus. Il y a récemment eu des changements à la loi.
Je ne voudrais pas m'avancer trop loin. Mais, à ma connaissance, la
Commission de la fonction publique était un organisme de
sélection qui établissait un bassin de personnes disponibles pour
des fonctions mais l'engagement, les promotions et les congédiements se
font par les ministères respectifs, par les vrais employeurs. La
commission est un corps qui a une fonction bien spéciale dans tout cela:
vérifier l'admissibilité des candidatures, établir un
"pool", un bassin de candidats pour l'attribution de fonctions, mais ce n'est
pas elle qui engage et qui congédie, à ma connaissance. Est-ce
qu'il y a quelque chose là-dessus?
M. de Guire: Peut-être que la loi a été
modifiée et que ce n'est plus tout à fait exactement cela. Ce que
je voulais dire par là, c'est que cela s'est vécu et que cela se
vit aussi de la même façon à l'intérieur de chacune
de nos écoles avec le cas des enseignants. Les enseignants sont les
employés de la commission scolaire, mais c'est quand même
auprès de l'école et envers le directeur d'école qu'ils
ont à jouer leur rôle et à exécuter leur mandat.
C'est au directeur d'école qu'ils rendent des comptes. C'est clair que
c'est le directeur d'école qui s'adresse à la commission
scolaire, par exemple, pour une action face à un enseignant. Cela se
fait régulièrement et je ne vois pas pourquoi cela ne pourrait
pas se faire dans un système qui est là.
Le Président (M. Blouin): Cela va?
M. Ryan: D'abord, l'exemple de la fonction publique, je le
récuse jusqu'à nouvel ordre, car je pense qu'il ne s'applique
pas. On pourra consulter M. Garant et d'autres experts là-dessus, mais
ce que je vous ai dit, ce n'est pas la nouvelle loi. C'est la loi telle qu'elle
existait avant les modifications récentes. Je pense cependant que
l'essentiel demeure, excepté que c'est passé au Conseil du
trésor. C'est un autre débat. Je pense que l'exemple...
M. de Guire: Même si c'est le Conseil du trésor,
c'est encore quelqu'un d'autre qui fait cette tâche. C'est ce qu'on veut
dire. C'est que cela peut se réaliser.
M. Ryan: Ce que je vous dis, c'est qu'une fois qu'une personne
est employée par un ministère - c'est le ministère qui va
embaucher la personne - elle relève de l'autorité du
ministère, pas de la Commission de la fonction publique.
Maintenant, j'arrive à l'autre point. Vous dites: L'enseignant,
au niveau de l'école, relève de l'école, c'est
évident, mais par l'intermédiaire d'un directeur qui
relève du directeur général de la commission scolaire. On
a l'unité du système. Dans ce qui est proposé, nous ne
l'avons point. J'écoute les explications et je n'en suis point
satisfait. Maintenant, disons qu'on reprendra le débat. Je ne voudrais
pas monopoliser davantage de temps là-dessus. J'ai seulement une autre
question.
M. de Guire: Je veux simplement vous
illustrer une chose. Quand vous parlez du directeur d'école, il
est peut-être aussi, en fait, l'adjoint du directeur
général, un peu comme le directeur adjoint dans l'école
est l'adjoint du directeur d'école. Je veux dire, si on continue la
dialectique autour de cela, on pourrait trouver que cela pourrait
peut-être se vivre. De toute façon, comme on ne l'a pas
expérimenté, cela nous apparaît, après de nombreuses
discussions, faisable et possiblement en tout cas, à notre point de vue,
souhaitable.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, une dernière question, je crois.
M. Ryan: Une dernière question à propos du conseil
d'école. Vous voulez que l'enseignant soit exclu du conseil
d'école. C'est une source d'étonnement pour beaucoup de monde,
pas pour moi parce que vous m'en avez déjà parlé à
plusieurs reprises. Cela reste une source d'étonnement intellectuel pour
moi, cependant, mais je ne me suis pas rendu aux arguments que vous m'aviez
apportés là-dessus. (13 h 15)
J'aimerais que vous nous expliquiez: l'enseignant, vous le confineriez,
si je comprends bien, à la participation au comité
pédagogique qui est d'ordre purement consultatif. Est-ce qu'on pourrait
envisager, M. de Guire - j'essaie de cheminer dans votre direction; je n'essaie
pas de vous mettre des bâtons dans les roues - que le comité
pédagogique - il y a un organisme qui a proposé ça l'autre
. jour ici, c'est l'association des cadres de la CECM - ait une certaine
autorité sui generis, qu'il ait, au moins, une responsabilité
décisionnelle dans les matières qui relèvent de la
compétence professionnelle des enseignants?
Le groupe de McGill nous a fait cette distinction. Il y a des
décisions de politique pédagogique et des décisions
proprement professionnelles à prendre. S'il s'agit, par exemple, de la
manière selon laquelle on va enseigner le français, il me semble
que ça relève plus du groupe des professeurs de français
que du conseil d'école. Je ne sais pas s'il n'y a pas une marge de
cheminement ou de progrès dans cette direction. Dire tout simplement:
Ils ne seront pas là et qu'ils aillent au petit comité
consultatif à côté, paraît un peu
méprisant.
Le Président (M. Blouin): M. de
Guire.
M. de Guire: M. le Président, je ne voudrais surtout pas
qu'on ait cette impression des directeurs et directrices d'école. Je
pense avoir pris toutes les précautions nécessaires pour ne
surtout pas laisser l'impression que nous pouvions mépriser, de quelque
manière que ce soit, les enseignants et les enseignantes. Quand vous
parlez des possibilités d'augmenter, par exemple, les pouvoirs du
comité pédagogique, je pense que là-dessus on pourrait
facilement trouver des terrains à examiner, à la condition
cependant que la cohésion pédagogique puisse être
réalisée. Comme le projet de loi ne prévoyait pas plus,
nous n'avons pas examiné d'autres possibilités puisque
actuellement ce n'est pas comme cela. Cependant, nous demeurons ouverts pour
examiner toutes ces possibilités.
Si vous le permettez, je vais demander à mes collègues,
s'ils le veulent, de vous distribuer le tableau sur lequel nous avons
illustré notre position par rapport à la place des enseignants et
des enseignantes à l'intérieur de l'école. Je vous fais
grâce de l'ensemble de la partie de gauche, mais, au centre, j'ai la
commission scolaire et j'ai ici l'école. Ce que nous souhaitons, c'est
qu'au niveau de la commission scolaire, au niveau du palier décisionnel
à la commission, on retrouve des commissaires d'écoles. On ne
retrouve pas, que je sache, de cadres scolaires. On ne retrouve pas de
directeurs d'école. On ne retrouve aucun employé de la commission
scolaire à la commission scolaire. Ce pattern, on le trouve tout
à fait normal. J'écoute tout le monde au Québec et tout le
monde trouve normal qu'il n'y ait pas d'employés à la commission
scolaire. Personne n'a parlé de cela.
Par contre, quand on parle du conseil d'école, on arrive à
dire que, là, ce n'est plus du tout la même chose. Là, il
faut qu'on retrouve des employés, mais la ligne de décision nous
paraît différente de la ligne de participation. Si je regarde la
commission scolaire, la participation se fait avec le directeur
général de la commission. Participent avec lui, pour
l'élaboration des politiques, pour tout le cheminement, la mise en
place, l'organisation - tout cela se fait au niveau du directeur
général - des directeurs d'école, des cadres scolaires,
des enseignants, des groupes de parents, des groupes de pression, n'importe
qui. Tout le monde est là pour l'élaboration, la mise en place.
Tout le monde fait ce travail. On trouve ça normal. On trouve normal
qu'on présente au conseil des commissaires des projets, des demandes,
qu'on reçoive par la suite des mandats et qu'on voie au troisième
palier à leur exécution. Ce que nous demandons, c'est que ce soit
le même pattern. C'est tout simplement cela que nous demandons. Nous
demandons que le pattern que tout le monde trouve normal au niveau de la
commission scolaire le soit au niveau de l'école.
Maintenant, quand on me dit que ce n'est pas la même chose, je dis
que ce n'est pas la même chose si j'ai un conseil d'orientation.
Là-dessus, je serai d'accord. Si j'ai un conseil d'orientation, je n'ai
plus de conseil d'école. À partir du moment où je
n'ai plus de conseil d'école, j'ai un conseil d'orientation et,
à ce moment-là, tous les partenaires doivent être au
même conseil. C'est pour cela que nous étions d'accord avec la loi
71. Dans la loi 71, on prévoit des conseils d'orientation. Un conseil
d'orientation est composé de tous les partenaires qui sont assis parce
que l'autorité n'est pas dans l'école. L'autorité est
à la commission scolaire, tandis que, dans le projet de loi, nous disons
que ce n'est plus un conseil d'orientation. Ce n'est pas un conseil de
concertation, mais un conseil de décision. La participation à
l'élaboration, à la mise en place doit se faire au niveau du
directeur d'école, avec le directeur d'école et tous les
partenaires du système.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire.
M. le député de Bellechasse.
M. Lachance: Merci, M. le Président. Je voudrais
féliciter les porte-parole de la Fédération
québécoise des directeurs d'école pour la qualité
de leur mémoire qui est étayé par de nombreuses
références et citations et qui découle d'une vaste
consultation auprès de leurs membres. Je vais vous dire tout de suite,
M. le Président, que, même si je me sens bien à l'aise, je
suis peut-être un peu en conflit d'intérêts puisque, lorsque
j'ai été élu député, j'étais
directeur adjoint à l'école polyvalente Saint-Damien, dans mon
comté. J'en suis fier et je suis surtout fier du mémoire qui nous
a été présenté par la fédération. Je
dois souligner la façon positive dont vous abordez cet important projet
de loi pour la restructuration scolaire. C'est certain que c'est un langage que
nos amis de l'Opposition ne semblent pas apprécier beaucoup. Ils
semblent plutôt apprécier le langage d'autres groupes, comme la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, qui semble plus coller à leur vision de ce projet de
loi.
Je note aussi votre préoccupation - et je la trouve fondamentale
- de penser à l'élève d'abord. Pourquoi y a-t-il un
système scolaire? Pourquoi y a-t-il des directeurs, du personnel, des
commissions scolaires? Pourquoi y a-t-il des écoles? C'est parce qu'il y
a des élèves. On y sent clairement l'expérience du
vécu quotidien de gens qui sont en contact, qui sont très
près de ce pourquoi le système scolaire existe. Avant de poser
une question bien spécifique, je voudrais vous dire - et là, je
rejoins la discussion qui vient d'avoir lieu, les échanges entre le
député d'Argenteuil et vous, M. de Guire - que je partage
personnellement vos craintes concernant la composition du conseil scolaire.
Cela semblait nouveau pour le député d'Argenteuil, mais en ce qui
me concerne, je vais très brièvement vous faire part d'un
vécu personnel.
J'ai eu l'honneur et le privilège d'être, pendant trois
ans, membre d'un conseil d'administration de CLSC. Comme vous le savez, un
conseil d'administration de CLSC est formé de porte-parole des usagers
qui sont majoritaires et aussi des porte-parole du personnel clinique et
d'autres catégories de personnel. Je peux vous dire que, même si
c'est dans un endroit où le CLSC a la réputation d'être
relativement tranquille, effectivement on a vécu la transposition de
conflits internes. C'est un lieu où on a amené des conflits de
personnalités; c'est un lieu où il y a eu, jusqu'à un
certain point, certains règlements de comptes internes. On sentait que
la lutte de pouvoirs se transposait là à cause de la
participation des membres du personnel. Pour avoir vécu dans une
école, on sait très bien que l'objectif avoué des
enseignants, même si, moi aussi, je pense qu'ils sont des collaborateurs
indispensables dans votre travail, c'est le pouvoir de cogérer, c'est la
cogestion.
Je ne sais pas ce que le ministre décidera finalement. Cela peut
paraître dur; cela peut paraître "rough" d'exclure les enseignants
du conseil d'école, mais, comme vous le dites dans votre mémoire,
si on veut que cela fonctionne, je pense que leur participation doit se situer
à un autre niveau. Là-dessus, je suis parfaitement d'accord avec
ce que vous dites en vous basant sur les études de M. Roquet et de M.
Julien.
J'en viens maintenant à ma question. Elle découle de l'un
des quatre principes que vous avez énoncés dans votre
mémoire à la page 1. C'est le troisième point. Vous dites
que le directeur d'école doit avoir le même type de pouvoirs et
d'obligations dans son école qu'un directeur général a
actuellement dans sa commission scolaire. La question que je vais vous poser,
M. de Guire, est celle que j'ai entendue de la part de certains organismes ou
certaines personnes. Si cela se faisait tel que vous aimeriez que ça se
fasse, le directeur d'école étant à l'école ce que
le directeur général est à la commission scolaire, est-ce
que vous ne voyez pas le danger que le rôle du directeur d'école
en soit un de brasseur de paperasse, qu'il soit enfoui dans l'administration et
qu'il délaisse son rôle pédagogique?
M. de Guire: Je pense que, lorsqu'on disait que nous voulons que
le rôle du directeur d'école s'apparente à celui du
directeur général de la commission scolaire, nous l'avons bien
illustré. Ce que nous voulons dire, c'est que, par rapport au
schéma, à l'organisation prévue dans le projet de loi, on
prévoit un conseil d'école. Par rapport au conseil
d'école, on voulait que notre rôle soit le même que celui du
directeur général de la commission scolaire
par rapport au conseil des commissaires, soit à qui il va rendre
des comptes, comment il va le faire. Cette partie nous paraît claire,
dans le sens que le directeur général de la commission scolaire
rend des comptes au conseil de la commission scolaire et non pas au
président de la commission scolaire; il rend des comptes au conseil. Le
directeur d'école doit rendre des comptes au conseil. C'est la
première partie.
La deuxième partie de votre question: Ne croyez-vous pas que le
directeur d'école, en procédant comme cela, sera enterré
de paperasse ou pris dans des questions administratives et qu'il en arrivera
à délaisser l'essentiel de l'école? Peut-être qu'on
aurait eu davantage de difficultés avec l'école-corporation; il
aurait fallu, probablement, donner au directeur d'école une structure
administrative complète. Ce n'est pas le cas. L'administration, le
soutien de l'école, la paperasse, ces choses-là, continueront
d'être assumées par la commission scolaire.
C'est au niveau des décisions. Je ne veux prendre qu'un seul
exemple: nous allons décider, dans l'école, d'acheter un tableau
pour aider les élèves, un tableau spécial qui pourrait
illustrer telle partie du programme. On achète un tableau; nous allons
le commander. Ce qui est prévu dans la loi, c'est que le directeur
d'école passe la commande. Le directeur d'école décide; ce
n'est pas lui qui va faire le chèque, ce n'est pas lui qui va faire
l'achat et ainsi de suite; ce sont des fonctions de la commission scolaire. On
ne croit pas - et je ne vais citer que cet exemple, je pourrais en
énumérer plusieurs - que le directeur d'école, selon le
projet de loi, sera enterré dans la paperasse. Cela se pourrait si le
projet de loi n'avait pas prévu le soutien de la commission scolaire, le
soutien à la fois administratif et pédagogique, parce qu'à
tous les points de vue les soutiens doivent demeurer. Ils sont prévus
par les fonctions et les obligations de la commission, ils sont là.
Je pense qu'on pourrait ajouter quelque chose.
M. Coderre (Jacques): Oui. On pourrait peut-être ajouter
que, même actuellement, le rôle pédagogique que le directeur
d'école joue dans son école varie beaucoup d'une école
à l'autre. Dans une polyvalente où il y a au-delà de 2000
élèves, son rôle administratif est peut-être plus
grand que son rôle pédagogique. C'est déjà comme
cela. Ce serait différent, mais on demande, comme le disait notre
président, de l'aide pour jouer tout le rôle qui nous serait
dévolu.
Le Président (M. Blouin): Cela va, M. le
député de Bellechasse? Merci. Je donne maintenant la parole
à M. le député de Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Avant de poser quelques
questions à M. de Guire, j'aimerais demander au ministre, puisque
l'Association des directeurs d'écoles de Montréal, connue comme
l'ADEM, est en désaccord avec des éléments fondamentaux du
projet de loi 40 et qu'elle n'a pas été invitée, si on
pourrait avoir l'assurance du ministre que l'ADEM sera convoquée
à cette commission parlementaire. (13 h 30)
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau, je crois que vous êtes en train de relancer un débat qui, il
me semble, a été élucidé au début des
travaux de notre commission. Je ne voudrais pas que nous entamions de
débat sur les organismes qui, éventuellement, seront entendus par
la commission.
M. Cusano: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Je vous suggère,
puisqu'il est déjà 1 h 30 et que nous devrons terminer nos
travaux bientôt, de poser des questions aux organismes qui sont
maintenant devant vous, conformément à l'horaire qui a
été fixé par le Secrétariat des commissions, afin
que nous répondions au mandat qui nous a été fixé
au cours de cette journée.
M. Cusano: Je voudrais souligner que le mandat de la commission,
c'est d'entendre non seulement les groupes qui sont favorables, mais d'autres
qui ont des points divergents. L'ADEM regroupe quelque 350 membres. Vous avez
aussi l'ACPM, l'Association des directeurs catholiques de Montréal, qui
n'a pas été convoquée; vous avez eu The Quebec Association
of Catholic School Administrators qui n'a pas été
convoquée. Il me semble que c'est fausser un peu les choses lorsque ceux
qui sont en désaccord avec le projet de loi ne sont pas invités,
spécialement lorsqu'un organisme aussi important que l'ADEM n'est pas
invité. La seule question que je pose au ministre: Est-ce qu'il va les
inviter, oui ou non?
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau, nous nous engageons encore une fois dans un débat qui ne
mènera pas très loin, selon ce que j'en ai compris mardi matin.
Ce que je vous suggère maintenant, c'est de continuer l'échange
que nous avons, qui, je crois, est fructueux depuis quelques instants
maintenant avec les responsables de l'association des directeurs
d'école.
M. Ryan: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
d'Argenteuil.
M. Ryan: ...est-ce que vous me
permettriez de dire un mot dans le but d'essayer de collaborer avec
vous?
Le Président (M. Blouin): Oui.
M. Ryan: La question du député de Viau me
paraît pertinente parce qu'elle fait écho à un organisme
qui est un des chapitres de la Fédération
québécoise des directeurs d'école. C'est un des chapitres
très importants, celui des directeurs d'école de la ville de
Montréal ou de la CECM en particulier, je pense. Ils ont émis une
déclaration, ce matin même, énonçant leurs opinions
et, si le ministre nous dit qu'il va les entendre en commission, qu'il va voir
à ce qu'ils soient invités, le député de Viau
n'insistera pas. Mais si le ministre n'est pas prêt à nous
promettre qu'il va les inviter, le député de Viau va leur donner
les opinions émises par cette association-là, il va leur demander
ce qu'ils en pensent, ce qui serait parfaitement dans l'ordre.
Le Président (M. Blouin): M. le député
d'Argenteuil, il n'y a aucun problème à ce que vous dites. Le
député de Viau a un droit de parole d'une vingtaine de minutes.
Il peut s'exprimer selon les termes qu'il choisit. Allez-y, M. le
député de Viau.
M. Cusano: D'accord, M. le Président, j'ai un droit de
parole de 20 minutes. Mais le problème est beaucoup plus complexe. Ces
gens de Montréal ont des choses à dire, que je ne pourrai pas
dire en 20 minutes. Alors, c'est pour cela que j'insiste et, comme je l'ai dit
tout à l'heure, la seule demande que je fais, c'est d'avoir un oui ou un
non. C'est tout simple.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau, je vous rappelle que nous nous engageons sur un débat qui risque
de ne pas mener très loin. Nous avons discuté abondamment de ce
sujet mardi matin et il me semble que les éclaircissements que nous
avons collectivement réussi à trouver ont fait en sorte que nous
avons pu ensuite commencer nos travaux. Je souhaiterais maintenant que nous les
poursuivions.
M. Cusano: Merci. Alors, puisque le ministre est muet sur ce
sujet ce matin, je me dois de relever les points qui sont soulignés par
l'Association des directeurs d'école de Montréal.
Le Président (M. Blouin): D'accord, M. le
député Viau.
M. Cusano: Je m'en tiendrai à quelques points parce que le
temps va passer assez vite. L'Association des directeurs d'école de
Montréal, l'ADEM, avait demandé à être entendue par
la commission parlementaire qui a fait l'étude du projet de loi 40 sur
la restructuration scolaire. Elle n'a pas été invitée
à se présenter parce que, selon un fonctionnaire...
M. de Guire: M. le Président, une question de
privilège.
Le Président (M. Blouin): Non, il n'y a pas...
M. de Guire: Je ne sais pas si je peux la poser.
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, je vous
demanderais...
M. de Guire: Je n'ai aucune question de privilège, M. le
Président?
Le Président (M. Blouin): Non.
M. de Guire: Dommage que je n'aie pas de privilège!
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, je m'excuse.
M. de Guire: C'est parce que lorsqu'il y avait des
dissidents...
Le Président (M. Blouin): C'est rare que ce sont les
invités qui interrompent les membres de cette commission.
M. de Guire: Quand il y avait des dissidents...
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, non. S'il vous
plaît, M. de Guire!
M. de Guire: ...M. le Président...
Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît!
M. de Guire: Quand il y avait des dissidents...
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, s'il vous
plaît!
M. de Guire: ...à l'intérieur des autres
groupes...
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, je vous demande de
laisser l'occasion au député de Viau, comme c'est son droit,
d'utiliser son droit de parole d'une vingtaine de minutes, s'il désire
le faire. Je lui ai demandé de collaborer. Je lui ai demandé, si
possible, de vous adresser des questions, mais le député de Viau
a toujours le droit, en fin de compte, d'utiliser comme il le souhaite son
droit de parole. Alors, je ne pense pas qu'on puisse l'interrompre et
très
certainement au cours des interventions qui suivront, vous aurez
l'occasion d'émettre certains commentaires. D'ailleurs, il se peut bien
que le député de Viau vous demande d'intervenir au cours de ce
débat de quelques minutes. M. le député de Viau.
M. Champagne (Mille-Îles): C'est une demande de directive.
M. le Président. On a des invités qui représentent une
fédération et qui sont ici pour être entendus. Voici une
demande de directive...
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Mille-Îles, s'il vous plaît, vous n'avez pas besoin de continuer,
j'ai très bien compris où vous vouliez en venir. Tout ce que je
dois vous dire, c'est que la seule directive que je puisse donner, je l'ai
déjà donnée. Maintenant, je redonne la parole au
député de Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. J'en étais rendu
au point où l'ADEM dit qu'elle n'a pas été
convoquée. Selon un fonctionnaire du bureau du leader du gouvernement,
seuls les groupes nationaux l'ont été. Ce n'est pas le cas, comme
on l'a déjà constaté. Il est à se demander si
plusieurs groupes que l'on pourrait qualifier de dissidents ne sont pas
victimes d'une stratégie gouvernementale. C'est l'ADEM qui dit cela.
L'ADEM, qui représente les directeurs et les adjoints de la plus grosse
commission scolaire au Québec, la Commission des écoles
catholiques de Montréal, estime important que le public en
général connaisse ses inquiétudes sur ce projet de loi
controversé. Certaines informations diffusées dans les
médias laissent croire que les directeurs d'école du
Québec forment un bloc monolithique et qu'ils sont tous d'accord avec le
projet de loi. Cette vision des choses est erronée. Ceux de
Montréal et certains autres ont des réserves sérieuses
face à ce projet de loi. Le président de l'ADEM, M. Michel
Dubé, a déclaré, en effet, qu'il devait se dissocier, sur
des points essentiels, des positions prises par la fédération
compte tenu du vécu particulier de Montréal.
L'ADEM est d'accord pour que l'école devienne le pivot du
système scolaire, pour qu'on lui laisse le choix d'être
confessionnelle ou non et pour une division linguistique des commissions
scolaires. Elle s'oppose, par contre, à des éléments
fondamentaux du projet de loi 40. Les directeurs d'école de
Montréal croient qu'il faut éloigner le plus possible la
politique des services à offrir aux élèves.
Je saute quelques paragraphes et je déposerai le
télégramme par après.
Le Président (M. Blouin): Merci de votre collaboration, M.
le député de Viau.
M. Cusano: Oui, je continue. Ils sont convaincus que le projet de
loi 40 s'il est adopté dans sa forme actuelle, va les éloigner de
la pédagogie et les obliger à faire de la politique et à
jouer le rôle de conciliateurs face à des parties qui auront des
intérêts divergents. L'ADEM s'oppose également à
l'implantation des conseils d'école parce que, selon elle, le directeur
d'école se retrouvera avec deux patrons, la commission scolaire qui
établit des politiques et distribue les ressources et le conseil
d'école qui donne les mandats. Elle se prononce aussi sur le territoire
de la CECM, et j'en passe. Donc, pour les fins du journal des Débats, je
sais que je ne peux pas déposer de documents, mais on se fera un grand
plaisir de le laisser circuler pour ceux qui ne l'ont pas vu.
Le Président (M. Blouin): Très bien. Nous pourrons
le distribuer aux membres de la commission, M. le député de
Viau.
M. Cusano: C'est cela. Une remarque, avant que je pose des
questions à M. de Guire. Ce dernier a fait référence,
comme plusieurs, à l'école privée comme étant un
bel exemple d'une école modèle. M. de Guire a
déclaré, comme le ministre l'a souvent fait, que l'école
privée se donne une couleur locale. Je crois qu'il faut faire une
distinction quand on parle de couleur locale, parce que, dans une école
privée, la couleur locale est vraiment une couleur de l'institution et
non une couleur géographique comme ce que nous remarquons dans nos
écoles du système public. L'école privée se donne
un certain projet éducatif, mais son territoire n'est pas limité.
Si le parent n'est plus en accord avec le projet éducatif d'une telle
école, il envoie son enfant ailleurs, tandis que, dans le
système, tel que proposé, il n'y aura pas beaucoup de personnes
qui pourront se permettre d'envoyer leur enfant d'un bout à l'autre d'un
territoire parce qu'ils ne sont pas en totalité d'accord avec le projet
de l'école en particulier.
Vous parlez aussi, M. de Guire, dans votre mémoire de la question
du stress. Vous avez cité le Dr Lusthaus. Je suis très heureux
que vous ayez cité cette étude parce que j'étais un des
participants, un des répondants en 1975. Je ne comprends pas très
bien pourquoi vous avez cité le Dr Lusthaus parce qu'il a très
bien indiqué que le stress chez les administrateurs anglophones au
Québec était relié à la supervision,
c'est-à-dire la "supervision of instruction". Est-ce que je dois
comprendre par cela que votre position ou votre vision est que vous voulez
enlever le rôle de superviseur de l'acte pédagogique aux
directeurs d'école?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. le Président, je ne crois pas que ce que
nous ayons voulu dire, en citant l'étude sur le stress, que nous
voulions enlever l'aspect de la supervision. Ce que nous avons voulu dire - je
pense que le message a été suffisamment clair - c'est que nous
trouvons qu'il est de plus en plus difficile d'être directeur ou
directrice d'école et que nous trouvons que le gouvernement doit donner
le soutien nécessaire aux directeurs et directrices d'école.
À l'appui, nous avons cité des études qui
démontrent qu'il y a une augmentation du stress chez nos membres.
C'est là une de nos positions. Nous en avons plusieurs à
l'intérieur du mémoire que nous avons déposé. Je
pense que nous avons pris la peine de préciser à deux ou trois
reprises que nos positions avaient été votées à 80%
de nos membres. Il est tout à fait normal qu'il y ait parmi nos membres
des gens qui ne partagent pas l'ensemble des opinions. Je pense, d'ailleurs,
que, dans tous les groupes qui se sont présentés ici, nous avons
eu l'occasion d'écouter l'opinion majoritaire et de savoir, par exemple,
au niveau des commissions scolaires, qu'il y avait six ou sept commissions
scolaires dissidentes. Au niveau de notre fédération, si la
question avait été posée, cela nous aurait fait plaisir de
dire que nous avions, quand même, deux associations dissidentes.
Maintenant, comme l'ADEM est toujours membre de notre fédération,
nous avons représenté l'ensemble de nos membres et je
répète que c'est à 83% que nos membres ont adopté
les idées que nous véhiculons dans notre mémoire.
M. le député, vous parlez de l'école privée
par rapport au système public. Quand on parle de couleur locale, chez
nous on parle de marge de manoeuvre pour vivre d'une façon
différente peut-être un horaire quotidien. Ce n'est pas
grand-chose, peut-être strictement cela. C'est un exemple d'une chose
qu'une école privée peut se donner, mais dans le système
que nous vivons c'est l'horaire défini par la commission scolaire.
Par exemple, si, dans certaines écoles, on met l'accent sur la
musique, sur le sport, ce sont des façons de se donner un plus
pédagogique et nous croyons qu'un plus pédagogique pourrait
être permis à l'intérieur du projet". On ne veut pas, pour
autant, devenir totalement des écoles privées. Je pense qu'on a
dit clairement qu'on voulait même être sous l'autorité d'une
commission scolaire pour tout ce qui s'appelle la supervision, le
contrôle, le soutien, etc. Je pense l'avoir dit assez clairement.
Il y a peut-être une chose. Je ne sais pas si vous pourriez me
permettre une question à ce moment-ci.
Le Président (M. Blouin): Une question?
M. de Guire: Oui.
Le Président (M. Blouin): Allez-y. (13 h 45)
M. de Guire: Une question, une seule question. J'ai fait
allusion, au début de mon message, que je ne voulais pas discuter
à l'Assemblée nationale de nos conditions de travail. Quand M. le
ministre a fait son intervention, je n'ai pas eu d'écho à cette
position. Je ne sais pas si c'est possible que M. le ministre
réponde.
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, vous comprendrez
que, généralement, ici ce sont les membres de la commission qui
posent les questions.
M. de Guire: Ah! Je viens ici dans un esprit de collaboration.
Alors, les règles de la commission, vous savez, il est peut-être
normal... Mais si M. le député d'Argenteuil ou un autre
député pouvait la poser au ministre! On me fait signe que M. le
député d'Argenteuil a épuisé son droit de parole,
mais peut-être qu'un autre député pourrait poser ma
question à M. le ministre.
Le Président (M. Blouin): Je m'excuse, M. de Guire, mais
je crois comprendre que ce sujet ne pourrait pas être traité
aujourd'hui puisque ce n'est pas l'objet de nos débats.
M. le député de Viau.
M. Cusano: Je vais continuer sur cette question. Je ne poserai
pas de question sur vos conditions de travail telles quelles, M. de Guire. On
peut faire une très grande distinction. On est intéressé,
nous, pas nécessairement à vos conditions de travail. On
réalise que vous allez les négocier. On veut savoir, et cela peut
être interprété comme étant des conditions de
travail, comment cela va fonctionner si tous les pouvoirs que vous
réclamez arrivent à l'école. En considérant le
stress que vous avez mentionné, dans votre modèle de
l'école telle quelle, combien de personnes supplémentaires seront
adjointes au directeur d'école?
M. de Guire: Je ne pourrais pas vous répondre en disant:
Nous voyons deux, trois ou dix personnes. Tout dépend de l'école
et des projets que les gens vont se donner et tout dépend des moyens
financiers qui seront mis à sa disposition.
M. Cusano: C'est cela, merci.
M. de Guire: Ce sont quand même des inconnues. Le projet de
chacune des écoles sera décidé au moment où chaque
école se sera assise, aura discuté et aura préparé
un projet de son école en fonction de ses
possibilités et de ses besoins.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci. Alors, si vous n'avez pas tout ce personnel, il
y a des possibilités, dépendant de la situation de chacune des
écoles, que le projet ne soit pas applicable.
Il y a une autre question que j'aimerais vous poser, M. de Guire. Vous
dites à la page 28 où vous vous référez à
l'article 113: "Nous voyons mal comment on pourrait, tel qu'indiqué dans
le second paragraphe, donner au conseil d'école du primaire la fonction
de juger l'aptitude d'un élève à passer du primaire au
secondaire." Vous dites plus loin à la page 29 que vous voyez ce pouvoir
accordé au directeur d'école. Je suis complètement
d'accord avec le fait qu'un conseil d'administration ou un conseil
d'école ne puisse pas le faire mais lorsque j'arrive à l'endroit
ou vous dites que c'est le directeur d'école - je comprends l'esprit de
collaboration et de concertation, etc comment cela va-t-il se faire? On sait
que la grande majorité des écoles élémentaires dans
la province de Québec, ce sont des écoles de 200 à 300
élèves. Une école secondaire a un bassin de plusieurs
écoles élémentaires qui passent au secondaire. De plus,
lorsqu'on parle "de collaboration avec le personnel en cause", je
présume que le personnel en cause, c'est le directeur de l'école
secondaire et tous les autres directeurs. Ils vont tous décider en
collaboration avec le conseil d'administration de l'école qui a ses
priorités, et chacun de ces conseils d'administration peut avoir des
priorités différentes. Alors, vous allez être le juge de
tout cela. Lorsque vous allez vous rencontrer, je présume, dans votre
vision de choses, le directeur du secondaire et les cinq ou six directeurs
d'école du bassin, vous allez décider cela. S'il y a conflit et
si vous ne pouvez pas vous entendre sur les normes de passage de
l'élémentaire au secondaire, qui le ferait d'après
vous?
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau, je crois qu'il s'agira probablement de la dernière question,
puisque vous aurez épuisé votre temps d'intervention. M. de
Guire.
M. Cusano: C'est malheureux, M. le Président, parce qu'un
mémoire comme celui-là suscite des heures et des heures de
questions.
Le Président (M. Blouin): Que voulez-vous! M. de
Guire.
M. de Guire: Pour apporter une précision qui
m'apparaît importante, il s'agit du passage de l'élève du
primaire au secondaire. Donc, la promotion est donnée au primaire et non
pas au secondaire. C'est l'école qui donne la promotion. Il n'est pas
question de coordination ou de concertation avec les écoles secondaires
ou avec les autres écoles primaires. Quand on donne la promotion
à un élève, quand la promotion se fait ou que
l'élève reçoit son bulletin comme quoi il a passé,
etc., cela se fait dans l'école. Cela ne se fait pas avec les autres
écoles, c'est là que cela se fait. L'intervention qu'on fait,
c'est plus que cela. On dit que la responsabilité, ou
l'imputabilité de cet acte, doit être donnée au directeur
d'école et non pas au conseil d'école, parce qu'il s'agit de
l'étude d'un enfant.
M. Cusano: Là-dessus, je suis d'accord, M. de Guire.
M. de Guire: C'est tout ce que nous avons dit.
M. Cusano: Je parle du mécanisme de concertation, M. de
Guire. Il me semble que, lorsque des élèves d'une école
élémentaire se rendent dans une école secondaire, certains
objectifs fondamentaux doivent être acquis.
M. de Guire: Oui.
M. Cusano: Ils vont être différents d'une
école à l'autre. Ils vont être différents, parce que
vous, en tant qu'ex-directeur, et moi en tant qu'ex-directeur d'école,
M. de Guire, on peut avoir des divergences s'il n'y a pas un
contrôle.
M. de Guire: Je viens de comprendre votre question; je n'avais
pas tout à fait saisi la deuxième partie de votre question.
M. Cusano: Ah bon!
Le Président (M. Blouin): M. de Guire, votre intervention
devra conclure sur ce sujet pour que nous passions à un autre
intervenant.
M. de Guire: Oui. En ce qui concerne les acquis, je pense que
l'école n'a pas le choix. Elle devra respecter les critères, les
programmes d'études qui sont fixés. Elle devra respecter les
bagages qui sont fixés par l'ensemble du système qui parle de
régime pédagogique, qui parle de programmes d'études, etc.
L'école a le choix d'ajouter des choses aux programmes, mais elle n'a
pas le choix de retrancher des choses. C'est uniquement cela. Je pense que
l'école ne peut pas faire cela.
M. Cusano: Bon. Si l'école n'a pas le
choix, M. de Guire, cela veut dire que c'est le ministère de
l'Éducation...
Le Président (M. Blouin): Non, M. le député
de Viau.
M. Cusano: ...qui va contrôler.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Merci.
Le Président (M. Blouin): D'accord. Merci beaucoup, M. le
député de Viau. Sur ce, je cède maintenant la parole au
député de Fabre.
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je vais essayer
de donner l'exemple et de poser un certain nombre de questions courtes, mais
précises. Ce matin, les cadres scolaires se sont jugés les plus
aptes à évaluer les changements qui seront engendrés par
le projet de loi 40. Ils ont manifesté leur inquiétude devant
l'ampleur des changements, en particulier des changements que créerait
le fait d'ajouter un troisième niveau décisionnel, le niveau de
l'école, par le biais des responsabilités qui seront
dévolues au conseil d'école. Je voudrais savoir si vous partagez
cette inquiétude. Je voudrais ajouter qu'à mon sens vous
êtes tout aussi compétents, tout aussi aptes à porter un
jugement sur la nature des changements que pourrait provoquer la loi 40. Alors,
j'aimerais avoir votre opinion sur ces changements. Est-ce que vous partagez ce
type d'inquiétude?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: Je pense que, dans l'ensemble de ce que nous avons
dit à ce sujet, nous avons été suffisamment clairs,
à notre point de vue. Les inquiétudes que nous avions, nous les
avons exprimées. On a exprimé une inquiétude concernant le
conseil d'école. Je pense que nous avons été clairs
là-dessus. Nous n'avons pas d'inquiétude en ce qui concerne la
possibilité que l'école puisse assumer certaines
responsabilités. Je ne crois pas que l'école soit capable
d'assumer toutes les responsabilités de l'ensemble du système
scolaire ou celles qu'ont les commissions scolaires.
M. Leduc (Fabre): M. de Guire, je vais préciser ma
question. Les inquiétudes qui ont été mentionnées,
ce matin, par l'association des cadres étaient reliées au fait
que l'école vit actuellement beaucoup de changements. Par exemple, elle
doit vivre l'application des nouveaux programmes; elle doit vivre des
conditions de travail qui ont été amenées par les
décrets. Il y a toutes sortes de changements que l'école vit
actuellement. Je voudrais savoir si le fait de créer un troisième
niveau décisionnel, de créer un conseil d'école
décisionnel, une participation, une concertation à ce niveau avec
les responsabilités qui l'accompagnent, dérangera le milieu. Vous
vivez cela de l'intérieur; est-ce que cela vous inquiète?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: Je pense qu'à l'intérieur de
l'école nous avons déjà des preuves que les gens qui
vivent dans l'école sont très responsables et sont capables
d'assumer de nouvelles responsabilités. Nous avons dit oui à cela
et nous ne sommes pas inquiets parce que les ressources sont toujours
là, les ressources sont toujours au niveau de la commission scolaire.
Actuellement, nous avons des changements de programmes; il y aura d'autres
changements dans cinq ans, dans deux ans, dans trois ans. L'école est un
monde en évolution; ce n'est pas quelque chose qui est établi et
qui ne peut pas bouger dans le temps. Ce n'est pas statique.
Ce qui est apporté comme nouveauté, c'est que nous aurons
un certain nombre de responsabilités en regard du vécu de
l'école. Ces responsabilités ne nous inquiètent pas parce
que la commission scolaire est encore là; elle va nous soutenir par
toutes les ressources, les ressources matérielles et les ressources
financières prévues au projet de loi. Nous n'avons pas raison
d'être inquiets à ce sujet-là. Je ne vois pas pourquoi; on
ne se retrouvera pas seuls le lendemain matin.
M. Leduc (Fabre): Merci. Deuxième question: les cadres ont
également dit, ce matin: "L'école ne peut pas, seule, être
responsable du régime pédagogique." Vous en avez parlé ce
matin. Il a été démontré que l'école n'est
pas seule responsable du régime pédagogique. L'article 199 du
projet de loi, entre autres, est assez précis à cet égard.
Parce que vous vivez cette réalité de l'intérieur, je
voudrais vous amener à préciser un certain nombre de choses. Les
cadres ont dit - parce qu'eux aussi vivent cela de l'intérieur et il est
intéressant d'avoir votre point de vue et de le comparer à celui
des cadres - qu'au niveau des services complémentaires vécus dans
l'école cela peut se faire, cela peut se réaliser. Les pouvoirs
qui sont prévus dans la loi peuvent être réalisés en
ce qui concerne les services complémentaires.
Par contre, en ce qui concerne les services personnels, on a mis en
doute la possibilité que cela puisse se réaliser. Par exemple, on
a parlé des orthopédagogues, des pédagogues qui devront
aller d'une école à une autre. On a donc parlé de la
nécessité d'une concertation que ne pourrait plus assumer
l'école après l'adoption de la loi 40.
On a également parlé du même type de problème
au niveau des services d'enseignement, compte tenu que certains enseignants de
certaines disciplines doivent aller d'une école à l'autre.
Autrement dit, on semblait dire que, à maints égards, les
pouvoirs confiés à l'école sont irréalistes parce
que c'est, dans les faits et dans le vécu, inapplicable. Qu'en
pensez-vous?
Le Président (M. Blouin): Succinctement, M. de Guire, s'il
vous plaît!
M. de Guire: Je vais essayer, mais ce n'est pas toujours facile.
Je pense que les cadres qui ont exprimé des inquiétudes avaient
peut-être raison de les exprimer. Ces inquiétudes viennent de gens
qui sont à l'intérieur des bureaux, à l'intérieur
de la commission scolaire. Nous, nous sommes dans les écoles et, dans
les écoles, nous aurons à appliquer le régime
pédagogique comme nous le faisons. La seule distinction est que
l'école devra assumer un certain nombre de responsabilités
particulières en regard de l'application du régime
pédagogique. Il reste quand même à la commission scolaire
un pouvoir de coordination, de planification, d'engagement. La commission
scolaire devra répondre à des plans d'effectifs donnés par
les écoles. On ne se retrouvera pas, du jour au lendemain,
complètement dépourvus et complètement seuls sur la
planète. L'école, même si elle assume des
responsabilités, aura quand même ce qui existe
présentement, c'est-à-dire un soutien et un endroit où
quelqu'un pourra faire la coordination entre les différentes
écoles. Mais la possibilité sera donnée au conseil
d'école de prendre les décisions qui concernent l'école en
ce qui regarde le régime pédagogique. (14 heures)
M. Leduc (Fabre): Donc, la coordination sera assurée par
la commission scolaire en regard de l'utilisation des professionnels:
orthopédagogues, pédagogues, etc., au niveau des écoles.
La coordination sera assurée. Donc, cela ne présente pas de
difficulté à cet égard.
Ma dernière question: Comment évaluez-vous actuellement
votre participation à l'élaboration des politiques de la
commission scolaire? Est-ce que la commission scolaire fait appel à
l'expérience, au vécu des directeurs d'école
présentement?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: C'est une question à laquelle il est
passablement difficile de répondre, délicate aussi, parce que
ça va me permettre de porter un jugement et c'est toujours
désagréable. Si la loi 71 avait été
appliquée elle dit clairement que le directeur d'école participe
à l'élaboration des objectifs et des politiques de la commission
scolaire.
L'article ne peut pas être plus clair. C'est l'article 32.3 de la
loi actuelle, de la loi 71 sur l'instruction publique. Le directeur
d'école participe à l'élaboration. C'est très
variable. C'est tellement variable qu'il y a des endroits où ça
se résume à des réunions d'information; à d'autres
endroits, ce sont des réunions d'information informées; à
d'autres endroits, ce sont des lectures. Je dois vous dire, cependant, que dans
quelques endroits il y a effectivement de la participation à
l'élaboration des politiques, mais ça se fait dans tellement peu
d'endroits que nous avons été amenés à dire que les
politiques qui touchent l'école doivent être
décidées à l'école. C'est toute notre
démarche qui fait que l'on arrive à cette conclusion.
Pourquoi, d'ailleurs, demandais-je un peu plus tôt ce matin qu'il
y ait le lien écoles-commission par l'intermédiaire du
commissaire? C'est pour que la préoccupation soit toujours là
parce que ce ne sera pas toujours le directeur d'école. Le directeur
d'école sera le mandataire. Je dois dire, cependant, que,
différemment de la loi 71, la loi 40 prévoit que toute politique,
et non pas que tout ce qui concerne les écoles, devra faire l'objet de
discussions au comité de gestion de la commission scolaire dont fait
partie le directeur d'école. Comme le commissaire siégera aussi
au conseil d'école, le directeur d'école pourra dire à son
commissaire: Écoutez, je pense qu'on n'a pas participé, nous,
à l'élaboration de cette politique. C'est un peu pour cela que,
quand on parle de lien, ça nous intéresse.
Pour nous, si la loi 71 s'était appliquée partout au
Québec, je l'ai dit dans des discours déjà, je l'ai
déclaré publiquement, nous ne serions pas ici en commission
parlementaire
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Saint-Henri.
M. Hains: C'est avec grande joie que je salue plusieurs d'entre
vous qui sont d'anciens collègues du temps où j'étais
principal d'école. Évidemment, vous nous apportez aujourd'hui un
document qui est très "pesant", favorable, en grande partie, au projet
de loi et vous demandez quelques modifications mineures. Soyez assurés
que M. le ministre en est tout réjoui surtout que, depuis deux jours
déjà, les appuis au projet se font de plus en plus rares et que
l'on commence à connaître des agressions éclairées,
incisives et pas mal dévastatrices contre ce projet.
Sur ce, je veux vous poser quelques questions - sans aucune malice, vous
me connaissez bien - sur le projet et sur votre mémoire. Mais avant, je
voudrais vous dire que vous avez raison de croire que votre tâche est
difficile parce que je l'ai vécue,
elle est délicate et souvent même, malheureusement, pas
assez appréciée. C'est pourquoi je vous trouve presque
héroïques d'accepter des défis nouveaux que vous semblez
accepter avec plaisir. Moi, je me félicite d'avoir quitté
à temps et d'être maintenant de ce côté-ci.
Alors, M. le Président, ne croyez-vous pas - j'ai écrit
mes questions pour ne pas commencer à bredouiller un petit peu pour rien
et ne pas perdre de temps - que vous allez devenir, comme je le voyais dans un
article de presse ces jours-ci, vraiment une courroie de transmission - c'est
un peu prosaïque comme mot, mais quand même -entre les nombreuses
instances qui vont bourdonner autour de vous, soit des professeurs, des
commissions scolaires qui auront des ordres et des parents qui auront des
demandes à vous formuler, etc? Est-ce que vous ne voyez pas que cela va
vraiment bourdonner trop fort à vos bureaux?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: Je ne voudrais pas être méchant, M. le
Président, mais je dois dire que nous sommes actuellement une courroie
de transmission de bonne largeur parce qu'effectivement nous allons à la
commission scolaire recevoir les directives que nous transmettons à
l'intérieur de nos écoles. Le rôle que nous aurons à
jouer s'apparente à celui du directeur général dans la
commission scolaire. Ce que nous avons demandé, c'est de jouer un
rôle qui est beaucoup plus un rôle d'animation, d'influence, au
niveau de l'école, auprès d'un conseil d'école, que celui
que nous avons à jouer présentement. Je pense qu'une courroie de
transmission, cela ne peut pas être différent ou pire que ce que
nous pouvons vivre présentement.
Le Président (M. Blouin): D'accord. M. le
député.
M. Hains: J'ai des expressions ce matin, je ne sais pourquoi.
Vous allez être chargés, un peu comme des ânes,
d'obligations diverses et j'ai peur que vous ne crouliez, des fois, sous le
poids de vos obligations. Croyez-vous que vous allez pouvoir vraiment jouer,
quand même, votre rôle d'animateurs pédagogiques parce qu'en
plus de tout cela vous allez être privés, je crois, des services
pédagogiques de la commission scolaire puisque ces services sont
maintenant plus ou moins rendus entre les mains des parents? Est-ce qu'on va
vous garantir des aides surnuméraires pour accomplir votre travail? Je
ne. parle pas de coûts, comme mon compagnon vous le mentionnait tout
à l'heure. Est-ce que, quand même, vous avez certaines garanties
qu'on va vous fournir de l'aide supplémentaire parce que moi, je pense
bien qu'il y en a plusieurs d'entre vous qui vont avoir des crises cardiaques
durant les prochaines années?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: C'est sûr qu'on est chargés. C'est
sûr qu'on sera encore plus chargés. C'est sûr qu'en 1990
aussi on sera encore davantage chargés. Administrer une école,
c'est de plus en plus difficile. Administrer une école en 1960 et
administrer une école en 1980, vous savez comme moi que c'est toute la
différence du monde. Je crois qu'affirmer aujourd'hui que dans dix ans
ce sera encore pire ce serait tout à fait réaliste. Même
s'il est chargé, le rôle fondamental du directeur d'école
que je vous expliquais d'ailleurs tantôt, pour moi, c'est à ce
niveau qu'il se situe, c'est-à-dire au niveau de la participation, au
niveau de l'animation, au niveau de la préparation, la coordination de
tout ce qui se vit dans l'école au plan pédagogique.
Le Président (M. Blouin): Est-ce qu'il y aurait un
complément? M. Poirier.
M. Poirier (Rolland): II y a peut-être un
élément que j'ajouterais, M. le Président. L'avantage
qu'on va y trouver, c'est qu'enfin, peut-être, il y aura des choses qui
vont se décider plus rapidement. Au lieu de "parloter" et de ne
consulter que les gens, on va décider. Les ânes enfin vont avoir
un bonnet. On va être bien. Ce n'est pas tellement avec plaisir qu'on
accepte tous ces défis, mais beaucoup plus avec courage. Vous l'avez
vécu. Je pense que votre rôle de député maintenant
n'est peut-être pas aussi tranquille qu'on le pense.
M. Hains: Ah non! On travaille à des heures...
M. Poirier: Le nôtre ne le sera jamais plus. À cet
effet, je crois que dans l'allégement que prévoit cette loi, il y
aura certainement un apport de ressources et c'est souhaité. D'ailleurs,
le document le précise à plusieurs endroits.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Poirier.
M. Hains: Vous avez raison et c'est pour cela que cela m'a
été facile de passer de mon rôle de directeur à
celui de député parce qu'on ne calcule pas nos heures. À
la page 11, vous faites l'éloge des enseignants. Je vous en sais
gré et je sais que vous êtes sincères. Je n'insisterai pas
là-dessus parce que le député d'Argenteuil vous en a
parlé tout à l'heure. Je ne vous cache pas ma
stupéfaction, quand même, quand j'ai vu que vous demandiez le
retrait des professeurs du conseil d'école, d'autant plus qu'hier -
on
peut dire que ce sont des gens vraiment neutres - la faculté
d'éducation de l'Université McGill disait mot à mot que
c'était "de la pure folie de traiter les professeurs comme des
éléments marginaux du système d'enseignement." Je
n'insiste pas plus, mais si vous voulez ajouter quelque chose là-dessus.
C'est parce que le député d'Argenteuil vous avait posé la
question.
M. de Guire: Je vous remercie de m'ouvrir la porte. Je pense
qu'actuellement j'aurais peut-être une question à poser...
Le Président (M. Blouin): Un commentaire?
M. de Guire: Pas à vous, à l'ensemble de la
commission.
Le Président (M. Blouin): Ah bon! Vous me rassurez.
M. de Guire: Est-ce qu'on s'est demandé ce que
désiraient les enseignants? Est-ce qu'on a demandé aux
enseignants s'ils désiraient vraiment être partie prenante aux
décisions? Le jour où les enseignants seront partie prenante aux
décisions, on leur enlèvera en même temps le pouvoir de
revendication de ces mêmes décisions.
Je pense en avoir parlé un peu. Si vous me parliez d'un conseil
d'orientation - on ne parle plus du tout du projet de loi 40 à ce
moment-là; on parle d'un conseil d'orientation - nous ne croyons pas
qu'il soit possible de le réaliser sans la présence des
enseignants, parce qu'il s'agit de la coordination. Actuellement, je trouve
peut-être un peu curieux aussi que la demande de la présence des
employés au conseil d'école se fasse surtout par les gens qui ne
sont pas dans l'école. C'est peut-être une question à se
poser: Pourquoi cela? Est-ce qu'on a vécu la réalité de
nos écoles depuis quinze ans? Si on avait vécu la
réalité comme nous l'avons vécue quotidiennement, les
conflits avec lesquels nous devons vivre, peut-être qu'on serait de notre
avis. Je vois, d'ailleurs, des gens qui ont déjà
été à la tête d'une école et qui sont en
commission parlementaire. Je pense que, de toute façon, ils pourront
corroborer ce que je viens de dire.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire.
M. Cusano: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Une question de
règlement?
M. Cusano: C'est parce que j'ai fait un signe avec ma tête
à M. de Guire...
Le Président (M. Blouin): Non, non.
Écoutez, M. le député de Viau, personne n'avait
été nommément désigné.
M. Cusano: Je n'étais pas complètement d'accord.
J'étais d'accord avec certaines de ses propositions, mais pas avec
toutes.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau, il ne s'agit pas là d'une question de règlement. Cela va,
M. le député de Saint-Henri? Très bien. Allez-y.
M. Hains: Pour une fois que j'ai le droit de parler.
Le Président (M. Blouin): Vous avez le droit.
M. Hains: Dans Le rejet des enseignants, votre conseiller
juridique, Me Patrice Garant, concluait comme ceci: Si nous voulons un conseil
d'école qui accomplisse ses tâches avec objectivité dans le
seul intérêt de la collectivité, il y a des risques qu'il
ne faut pas prendre - le risque ce sont les enseignants - sinon la
réforme sera un échec.
J'ai peur que ce soit vraiment un échec parce que
déjà ce projet, ici, est amoché et vraiment chancelant.
Nous voyons les coups qui lui sont portés de ce temps-là.
Savez-vous, on dirait que c'est un moribond qui refuse de prendre une pilule
parce qu'il a peur de mourir. Parce que la pilule, tôt ou tard, il faut
bien la prendre: ce sera la participation des enseignants. Et s'il n'y a pas
cette pilule que vous ne voulez pas prendre, ce sera - faites l'agencement que
vous voudrez - l'enfantement de l'affrontement et l'échec viendra. Je
vous donne mon opinion là-dessus.
Le Président (M. Blouin): D'accord.
M. Hains: D'ailleurs, M. le ministre lui-même l'avait dit
et je le cite. C'était M. Camille Laurin, L'enseignant et l'enseignante,
des professionnels, en décembre 1981: "Comment faire de l'école
et de son projet éducatif le pivot de tout le système si
l'enseignant et l'enseignante s'y refusent?" Voilà!
M. de Guire: D'abord, je voudrais faire une distinction au sujet
de la présence d'employés autres que des enseignants au conseil
d'école. Nous englobons tous les employés.
Maintenant, il n'y a pas que notre conseiller juridique, Patrice Garant;
il y a aussi MM. Roquet et Germain qui se sont prononcés
là-dessus. Je crois, cependant, que le projet éducatif de
l'école, la participation à l'intérieur de l'école,
l'élaboration de tout ce qui se fait ne peut se faire sans les
enseignants. Cela n'est pas possible. À ce
niveau, nous sommes absolument d'accord que, pour la réalisation
du projet éducatif, pour un meilleur vécu dans les écoles,
il y a la participation des enseignants. (14 h 15)
Je dois vous dire qu'actuellement les enseignants et les enseignantes le
font à l'intérieur des écoles pour l'élaboration
des projets éducatifs, mais ils n'ont pas actuellement à prendre
des décisions administratives ou qui pourraient concerner leur propre
convention collective. Ce n'est pas ce genre de décisions qu'ils
prennent. Mais, avec le directeur ou la directrice d'école, ils
travaillent en concertation pour élaborer actuellement un projet
éducatif l'intérieur de l'école. Nous croyons,
malgré la position que nous avons prise, qu'ils sont en accord avec nous
pour dissocier, comme nous,, ce qui s'appelle la décision
administrative, ce qui s'appelle prendre part aux décisions de gestion,
de la participation aux décisions du vécu quotidien et à
la préparation d'un projet éducatif. Je crois que l'ensemble des
enseignants et des enseignantes sont sûrement d'accord avec nous.
Le Président (M. Blouin): D'accord!
M. Hains: M. le Président, n'avez-vous pas peur,
cependant, que, lorsque les professeurs vont voir ce qui se passe dans le
projet de loi et surtout devant le rejet que vous faites de leur participation,
il y ait de la part du syndicat une nouvelle levée de boucliers et un
refus peut-être encore plus accentué et plus total de
collaboration avec vous?
M. de Guire: M. le Président, je voudrais relever une
dernière phrase du député. Nous n'avons jamais dit que
nous rejetions la participation des enseignants.
M. Hains: Au conseil.
M. de Guire: Ce que nous rejetons, c'est la présence, pas
la participation même au conseil. Comme un cadre scolaire se
présente actuellement à la commission scolaire pour participer
à des discussions avec des commissaires et pour présenter des
points de vue au niveau du conseil des commissaires, nous n'excluons pas ce
genre de participation avec le conseil d'école. Comme on ne rejette pas
la participation des enseignants, mais qu'on croit que c'est avec le directeur
ou la directrice d'école qu'ils doivent travailler, nous croyons qu'il
n'y aura sûrement pas de levée de boucliers de ce
côté et qu'au contraire les enseignants et les enseignantes seront
en accord avec nous parce que c'est avec nous qu'ils veulent travailler et non
pas avec un organisme qui s'appelle un conseil d'école.
M. Hains: Vous m'avez pris sur un mot: ce n'était pas
"participation", c'était "présence". Voilà! Et pour
revenir maintenant au rôle qui vous est dévolu, comment
acceptez-vous la double allégeance d'autorité qui vous est
imposée? Je sais que vous protestez et que vous demandez le transfert,
par exemple, des articles 82, 83, 84 et 85, de les sortir du projet de loi et
de les amener dans la réglementation. Très bien! Mais est-ce que
cela vous sera possible de servir deux maîtres contrairement à la
parole d'Évangile? Voyez-vous un des vôtres, par exemple, qui a
oeuvré - et cela devrait vous faire peur un peu - pendant quinze ou
vingt ans comme directeur d'école et qui, à un moment
donné, est remercié de ses services par le conseil
d'école? Là, on le renvoie à la commission scolaire qui,
elle, va essayer de lui trouver une place. Si elle n'en a pas, elle va le
coucher sur une tablette et peut-être même le coucher dans sa
tombe, parce que vous savez comme ce n'est pas facile des fois à
accepter. Alors, vous acceptez cela? Qu'en pensez-vous?
M. de Guire: Je crois que, d'abord, je dois insister sur le fait
que nous ne voulons pas que les articles 82, 83, 84 et 85 qui concernent nos
conditions de travail demeurent dans le projet. Il n'est pas question, pour
nous, que cela demeure là. Nous ne croyons pas que nous aurons à
servir deux maîtres. Nous aurons à servir le conseil
d'école et à rendre des comptes au conseil d'école.
Il est certain que nous travaillerons avec le directeur
général à la commission scolaire pour la
préparation des politiques qui concernent la commission. Mais c'est
comme mandataires de notre conseil d'école et, comme mandataires de
notre conseil d'école, on peut très bien participer et
exécuter des décisions, parce qu'on a été
mandatés pour cela, qui sont préparées à la
commission scolaire. Je ne crois pas qu'on puisse appeler cela une double
allégeance ou dire que c'est servir deux maîtres. Par exemple, les
travailleurs sociaux, qui travaillent dans nos écoles, sont à la
fois des employés d'un CLSC ou d'autre chose, mais, pourtant, ils
travaillent à l'intérieur de l'école. Si je regarde la
question des infirmières qui sont toutes des employées d'autres
organismes et qui viennent travailler aussi à l'école, je ne
pense pas qu'elles aient une espèce de double allégeance. Elles
ont à remplir un mandat et, à l'intérieur de ce mandat,
ces personnes le font de leur mieux. Nous allons essayer de remplir de notre
mieux les mandats qui nous seront confiés.
M. Hains: C'est par pur souci de votre santé que je vous
posais cette question et, en même temps, de votre bonne place dans le
système.
Le Président (M. Blouin): En concluant, M. le
député.
M. Hains: En concluant, oui, je vous laisse comme viatique,
messieurs les principaux, deux ou trois petites pensées que j'ai
cueillies pour vous. En voici une qui est tirée du mémoire de
l'ADIGECS hier: "Ce projet de loi doit être légitimé par un
consensus du milieu scolaire; il ne doit pas être imposé." Une
autre. Il y en a plusieurs, mais, enfin, je vais vous en laisser seulement
quelques-unes, parce que, comme un bon professeur, trop de matière
à la fois, cela ne passe pas. Mais celle-ci, je vous la laisse; elle est
de M. Paul Tremblay, dans la revue Relations d'octobre 1982 et cela a
été rapporté hier aussi par l'ADIGECS: "Une institution
peut mourir par immobilisme et par refus de changement. Elle peut aussi mourir
par suite de tensions et de changements continus." Je pense que cela va nous
donner matière à réflexion pour notre fin de semaine.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Saint-Henri.
M. Hains: Mes meilleurs remerciements pour votre attention. Cela
m'a fait grand plaisir de recommuniquer avec vous.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Saint-Henri.
M. de Guire: Je suis d'accord avec vous.
Le Président (M. Blouin): Maintenant, je donne la parole
à M. le député de Chauveau.
M. Brouillet: Alors, soyez sans crainte, cela va être
très bref. Pour une fois, je vais m'exempter de faire un
préambule pour arriver directement à une question qui va
concerner la nature du lien de "partnership" entre les deux paliers de
décision, l'école et la commission scolaire. Ce lien sera
assuré, selon vous, par la présence d'un commissaire élu
au conseil d'école selon l'article de la loi. Vous avez aussi, par
ailleurs, fait appel au principe suivant, à savoir qu'on devrait, pour
une plus grande efficacité, exclure les conflits d'intérêts
des lieux de décision. Alors, je fais un rapprochement entre ces deux
points. Le commissaire élu, d'après un article que nous avons
dans la loi, aura un droit de vote à l'école. Ce même
commissaire élu aura aussi un droit de vote à la commission
scolaire. Alors, je vois aussi une possibilité de conflit
d'intérêts pour la personne. Au niveau de l'école, il
votera dans la perspective des intérêts de l'école et des
besoins exprimés dans l'école. Et il sera appelé, au
niveau de la commission scolaire, à relativiser un peu
l'intérêt de l'école et les besoins de l'école en
fonction de l'ensemble des écoles d'une commission scolaire. Je vois des
difficultés à laisser au commissaire le droit de vote aux deux
instances. Ne croyez-vous pas qu'une des solutions serait de lui permettre une
présence très active au conseil d'école, participation
active à la discussion, etc., mais qu'il s'abstienne de voter à
ce niveau-là et qu'il conserve le droit de vote seulement au niveau de
la commission scolaire?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: Si vous me parlez du droit de vote strictement, que,
dans le projet final, le commissaire ne vote pas au conseil d'école, en
ce qui nous concerne, on n'en fait pas une question importante. Ce qui est
important, c'est sa présence au conseil d'école. Il doit
être là. Et, après, il doit siéger à la
commission scolaire. À la commission scolaire, on n'est pas inquiet
qu'il défende uniquement son patelin. Si on est inquiet qu'il
défende uniquement son patelin, il va falloir s'interroger de nouveau
sur l'ensemble de notre système démocratique. Un
député représente actuellement un comté et quand il
arrive à l'Assemblée nationale, il doit voter des lois pour
l'ensemble des citoyens et non pas uniquement pour son propre comté.
Quand un commissaire d'écoles se présente, c'est la même
chose. Alors, on pense que cet aspect de la question ne devrait pas être
une situation de conflit. Cela se vit régulièrement dans la
société et on pense qu'on est capable de continuer.
Quand on parle de "partnership", on ne parle pas de "partnership"
commission scolaire-école, mais uniquement de la part du commissaire
d'écoles. Il y a aussi les relations avec le directeur d'école et
la commission scolaire. Il y a ce genre de "partnership". Il y a l'ensemble du
réseau: le directeur général avec les liens qu'il aura
avec le directeur d'école. C'est tout cela. Nous, on pense que si tout
ce monde-là travaille dans un esprit de participation, de "partnership",
on ne devrait pas avoir de conflit et surtout pas une fois que le commissaire
va siéger à la commission scolaire, pas plus que le
député à l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. de Guire.
M. Brouillet: Je vous ferai remarquer que le député
n'a pas déjà participé à un vote dans son
comté.
M. de Guire: C'est pour cela que je n'insiste pas.
M. Brouillet: II écoute les gens du
comté et il ne vote qu'une fois. Lorsqu'il doit voter, c'est vrai
que cela ne coïncide pas toujours avec ce qu'il a entendu dans son
comté sur les projets de loi qu'il défend ou les contenus des
projets de loi, mais il n'a pas participé à deux votes. Je suis
d'accord avec vous sur sa présence et tout. Mon point précis,
c'était sur son double droit de vote, à deux niveaux
différents. Quand on est lié par un vote à un niveau, on a
tendance à vouloir le justifier à tout prix à l'autre
niveau parce qu'on va être obligé de voter encore une autre fois
et est-ce qu'on va voter contre le premier vote? C'est sur ce point
précis, finalement, que mon intervention voulait porter.
M. de Guire: Je veux simplement apporter la précision
suivante: pour nous, le droit de vote comme tel, ce n'est pas important. S'il
est enlevé au commissaire au conseil d'école, on ne fera pas de
difficulté. Ce qui nous paraît important - et j'insiste -c'est
qu'il soit présent, qu'il siège et que, s'il perd son aptitude
à siéger à un des deux endroits, il la perde aussi
à l'autre endroit. Cela nous apparaît important pour que la
pensée des écoles soit présente
régulièrement au niveau du conseil des commissaires.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. le
député de Chauveau. Alors, M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Je vous remercie de votre enthousiasme. M. le
Président, je vais être bref. J'aimerais savoir de la part des
directeurs d'école qui, quotidiennement, sont en contact avec les
parents, avec les gens qui sont dans l'école, à tous les niveaux,
et qui, forcément par leurs fonctions, sont aussi en contact quotidien
ou, en tout cas, régulier avec les commissions scolaires qui, selon les
chiffres qui ont été apportés ici à cette
commission sont composées, à 70% ou 75% - cela dépend des
commissions scolaires - de parents si vous avez une opinion sur cette
impossibilité, qu'on semble avoir voulu faire ressortir, qu'il y aurait
à concilier les deux rôles, c'est-à-dire le rôle de
parent éducateur, qui participerait à la gestion de la commission
scolaire et qui serait aussi au comité de parents, par opposition au
rôle de commissaire d'écoles plutôt gestionnaire et qui,
dans les faits et dans la grande majorité des cas, est aussi un parent.
J'aimerais savoir si vous avez réfléchi à cette situation
et si vous concevez qu'une personne puisse, en même temps, continuer
d'avoir des intérêts qui sont ceux des parents, même si elle
est élue au suffrage universel, même si elle siège à
la commission scolaire ou si vous voyez ces deux activités-là
comme s'excluant l'une de l'autre. Comment voyez-vous la situation?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. le vice-président va répondre
à la question.
Le Président (M. Blouin): Très bien. M.
Coderre.
M. Coderre: M. le Président, pour nous, ce qui est
important, c'est que ce qui concerne l'école, les décisions
concernant le projet éducatif soient prises au niveau de l'école.
À ce moment-là, ce sont les parents, qui nous semblent les plus
près de l'école, qui doivent former le conseil d'école.
C'est donc à partir de ce principe que nous voulons que ce soient les
parents parce qu'ils sont plus proches. Nous n'avons jamais dit que nous
opposions les parents aux commissaires. C'est notre point de départ qui
nous fait dire que les parents sont plus près de l'école et que,
en conséquence, ils doivent être membres des conseils
d'école.
M. Doyon: Dans la situation où vous êtes
actuellement, que diriez-vous d'un projet de loi qui contiendrait des articles
vous permettant à vous, en tant que principal d'école, en tant
que directeur d'école, de faire valoir auprès de la commission
scolaire que, dans votre école, vous seriez désireux, avec
l'accord de la commission scolaire et en en faisant la preuve, de gérer
telle partie, de gérer telle chose? Est-ce que vous n'avez pas
l'impression que vous auriez une oreille réceptive de la part des
commissions scolaires si, tout simplement, le projet de loi qui est à
l'étude devant nous était de nature à confier une
variété de pouvoirs étendus, importants et fondamentaux
à la commission scolaire et que vous auriez la tâche, je peux
même aller jusqu'à dire le fardeau, par votre compétence
dans votre école, par votre désir de travailler pour le milieu,
par votre implication de tous les jours avec les parents, avec les
intervenants, avec tous les acteurs du milieu scolaire, de faire la preuve
à la commission scolaire que vous êtes capables de vous occuper de
tel domaine ou de tel secteur?
Il reste que la solution que vous propose le ministre, malgré
qu'elle vous mette dans une situation peut-être difficile, ne
nécessite pas, de votre part, le besoin de prouver à qui que ce
soit que, dans votre milieu, dans votre école, vous avez et la
volonté et la capacité d'exercer tel et tel pouvoir. Je comprends
qu'il peut être difficile d'avoir à faire la preuve de sa
capacité de prendre les responsabilités et de s'en acquitter.
Mais ne concevez-vous pas que cette situation, même si elle vous
obligeait à des efforts supplémentaires, serait de nature
à donner, finalement, au milieu un meilleur service, à condition,
bien sûr, que la commission scolaire dispose de ces pouvoirs
et puisse les déléguer?
Le Président (M. Blouin): M. de Guire.
M. de Guire: M. Poirier va répondre.
Le Président (M. Blouin): Très bien. M.
Poirier.
M. Poirier: M. le Président, je crois que les efforts ont
été faits et, jusqu'à épuisement de la race, on a
essayé de participer, on a même fait des guerres dans des
commissions scolaires afin de participer à l'élaboration de
certaines politiques. On voulait faire la preuve et on était prêt
à faire la preuve que nous avions ce leadership. On voulait travailler
en concertation avec ces commissions scolaires. Très peu de commissions
scolaires, pour avoir travaillé durant huit ans au niveau d'une
association qui regroupait onze commissions scolaires, ont fait la preuve qu'on
voulait jeter du lest au niveau des écoles pour tout ce niveau.
La loi 71, pour nous, a été une fin de non-recevoir, de
façon pratique, je ne dirai pas quotidienne, mais, après chaque
table de concertation où nous entrions avec nos DG, nos cadres
scolaires, il y a eu un blocage. Au niveau des parents, on a fait aussi la
preuve que nous étions capables de travailler en concertation avec nos
milieux. Dans plusieurs de nos comités d'école, il y a des
commissaires invités qui déjà travaillent avec nous. Je
peux en parler d'expérience, depuis quatre ans, cela se vit et cela se
vit très bien.
Quels sont les pouvoirs qui nous sont donnés dans la loi 40 qui
sont si terribles et que je ne serai pas capable d'assumer demain? Je n'en vois
que très peu.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Mes remarques seront plutôt pour conclure. Ce que
je retiens de tout cela, c'est que, quand même, à plusieurs
reprises, on nous a fait la preuve - une preuve, d'après moi,
convaincante - qu'il se passait des choses et que les commissions scolaires
avaient, avec le peu de moyens dont elles disposent, mis en place des
mécanismes et des situations réelles de concertation, de
collaboration et de gestion par le milieu à l'intérieur de ses
capacités.
Que la commission scolaire ait pu faire cela, on en a apporté de
nombreux exemples, hier, en en faisant des signes de maturité, de
vitalité, ce que M. le ministre a souligné à plusieurs
reprises. Ces signes existent; ils sont vérifiables. On nous a
présenté, hier, un document d'environ 100 ou 150 pages où
l'on expliquait, à la suite d'un bref sondage fait par une association
qui est passée devant nous, des initiatives de prise en charge du milieu
à l'intérieur de la loi actuelle. Si on a réussi à
faire cela avec le carcan de la loi actuelle, quelles ne seraient pas, avec une
loi qui donnerait des moyens réels à la commission scolaire, des
pouvoirs et des responsabilités plus globaux, plus conséquents,
les possibilités qui s'ouvriraient à nous?
Vous, vous préférez l'autre solution qui est de
court-circuiter ce palier de gouvernement local qu'est la commission scolaire
et de vous voir confier d'emblée ces pouvoirs. C'est un choix qui vous
appartient. Les raisons que vous nous donnez peuvent vous apparaître
suffisantes. Pour ma part, je pense que la preuve a quand même
été faite et qu'il y avait moyen de procéder autrement. Je
suis sûr que, si on vous avait donné la chance de fonctionner dans
un autre cadre, vous auriez eu des résultats qui auraient
été encore meilleurs et qui, finalement, auraient permis de
préserver et le gouvernement local qui est la commission scolaire et la
nécessité de voir les milieux prendre en charge le maximum de
responsabilités en ce qui concerne l'éducation de leurs
enfants.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député. Je remercie donc, au nom de tous les membres de la
commission, les représentants de la Fédération
québécoise des directeurs d'école de leur très
importante collaboration au cours de ces débats de notre commission
parlementaire et, sur ce, j'ajourne les travaux jusqu'au mardi 17 janvier, 10
heures.
(Fin de la séance à 14 h 36)