Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Comité de la constitution
(neuf heures trente sept minutes)
M. BERTRAND (président du comité): Alors, messieurs, il
est quelques minutes passé neuf heures trente. Nous devons siéger
à onze heures ce matin. Comme président du comité je
souhaite la bienvenue à tous les membres du comité parlementaire
de la constitution. A la suite de deux réunions du comité
directeur, l'une qui a eu lieu le 15 août et l'autre qui a eu lieu le 22
novembre, nous nous sommes entendus pour qu'il y ait ce matin une séance
publique du comité parlementaire de la constitution. Je demande au
secrétaire s'il a transmis à tous les membres du comité
les documents qui devaient l'être.
M. MORIN (secrétaire du comité): J'ai transmis, M. le
Président, d'abord le projet de l'ordre du jour sur lequel le
comité directeur s'était arrêté vendredi dernier.
Alors, c'est celui que vous avez devant vous.
Deuxièmement, j'ai envoyé ce qu'on demandait aussi,
c'est-à-dire un relevé des travaux accomplis par le comité
depuis son institution et de certaines questions en suspens. Vous avez
déjà reçu ça. C'est un long mémoire
accompagné d'un certain nombre d'annexes qui donnent la substance de ce
qui est écrit dans le rapport.
On avait aussi demandé de préparer pour cette
réunion d'aujourd'hui une compilation, si possible, des lois
québécoises de nature constitutionnelle. Je l'ai ici. Elle n'est
pas encore distribuée. Nous l'avons reçue hier.
On m'a aussi demandé de faire des copies d'un article de
Jacques-Yvan Morin au sujet d'une charte des droits de l'homme pour le
Québec. Je l'ai ici. Elles seront distribuées tantôt, en
plus des notes qui concernent la question qui avait été
posée à une réunion qui avait eu lieu le 15 août sur
des divergences entre la version définitive de certains travaux de
recherche et les textes qui avaient été polycopiés
auparavant Et enfin, une liste des mémoires qui n'ont pas encore
été présentés à ce comité. Alors j'ai
deux notes là-dessus. Je demanderais maintenant à quelqu'un de
bien vouloir les distribuer. C'est la documentation qu'on avait demandée
pour ce matin.
M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, vous avez l'ordre du jour provisoire.
Voulez-vous rapidement en prendre connaissance? Il comporterait d'abord
l'adoption de l'ordre du jour qui, pour le moment, est provisoire. Cela
consisterait dans: 1)le bilan des travaux accomplis par le comité depuis
son institution; 2) les questions en suspens; 3) le programme de travail du
comité. a) La constitution interne du Québec. i) Dispositifs de
modification de cette constitution, ii) Projet de déclaration
québécoise des droits de l'homme. b) La place du Québec
dans la Confédération canadienne; examen du document de travail
soumis par le Québec à la conférence constitutionnelle. Je
devrais dire: Par les fonctionnaires qui siègent au comité
permanent qui a été établi à la suite de la
conférence constitutionnelle de février 1968. 4) a)
Décisions à prendre quant au caractère public ou
privé des prochaines réunions du comité; b) Date et ordre
du jour de la prochaine réunion. 5) autres questions.
Est-ce que cet ordre du jour provisoire, qui a été
préparé par le comité directeur à sa
dernière réunion du 22 novembre 1968, vous agrée?
M. LESAGE: Ma seule remarque, M. le Président, a trait à
troisièmement. « Programme de travail du comité: a), La
constitution interne du Québec; i) Dispositifs de modification de cette
constitution; ii) Projet de déclaration québécoise des
droits de l'homme ». Il me semble que le I) est peut-être un peu
restreint. C'est que j'avais beaucoup plus songé...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez dit restreint?
M. LESAGE: Restreint, oui. Il restreint la discussion, parce qu'on ne
parle que des mécanismes de modification, alors qu'il me semble qu'il y
aurait peut-être lieu...
M. LE PRESIDENT: De contrôle?
M. LESAGE: Non, c'est plus que ça. Le mécanisme de
modification devrait peut-être revenir à troisièmement.
Mais, il s'agit de savoir ce que devrait contenir la constitution interne du
Québec. Au fond, c'est un peu le document que M. Morin nous a
distribué.
Je pense que la première question à se poser est: Que doit
contenir la constitution interne du Québec?
M. LAPORTE: Est-ce l'on pourrait même
dire: Ce qu'elle contient actuellement et ce qu'elle devrait
contenir?
M. LESAGE: Oui: Ce qu'elle contient et ce qu'elle devrait contenir.
Avant de parler des dispositifs de modification! Je pense que cela
devrait venir en troisième lieu, même après une
déclaration des droits de l'homme. Surtout si cette déclaration
des droits de l'homme doit faire partie de la constitution interne du
Québec. On doit parler des dispositifs de modification seulement
après.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je serais d'accord avec M. Lesage pour que
nous nous entendions d'abord sur le contenu de la constitution, mais eu
égard à un certain projet de loi qui est actuellement devant la
Chambre, je me demande si nous ne pourrions pas justement commencer par
cela.
M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, M. Tremblay, nous avons
justement un document qui renferme la compilation de toutes les lois
québécoises de nature constitutionnelle et nous le faisons
distribuer immédiatement aux membres du comité. Cela
répondra au moins à une des questions, savoir quelles sont les
lois qui seraient fondamentales quant à la constitution interne du
Québec, à l'heure actuelle. Cela vous permettra, en faisant sa
revue, de voir si c'est complet; s'il y a eu des oublis, nous n'aurons
qu'à compléter.
C'est un travail que nous avions demandé à nos experts
à la suite de la première réunion du comité
directeur qui avait eu lieu en août dernier. Alors, voilà un
document qui est extrêmement important parce qu'il fait la revue de
toutes les lois de portée constitutionnelle au sujet du
Québec.
Alors, je pense que cela répond un peu à une question
formulée par le chef de l'Opposition et que le député de
Chicoutimi a appuyée de ses propos.
M. LESAGE: Je suis bien d'accord, M. le Président. C'est
qu'à partir de là, je pense qu'il y aurait lieu de
déterminer, d'après nous et d'après les experts
évidemment il ne faut pas se fier seulement à nous,
même experts en dehors du comité quelles sont les
catégories de lois fondamentales qui doivent en faire partie.
J'ai parcouru rapidement le document intitulé: «
Suggestions quant à un programme de travail, en vue d'une nouvelle
constitution interne pour le Québec ». Je pense bien qu'il sera
intéressant de comparer ces notes avec le do- cument intitulé:
« Compilation des lois québécoises de nature
constitutionnelle ». Je pense que c'est la première chose que nous
aurons à faire.
M. LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition me permettra de reposer la
question avec la suggestion qu'il vient de faire, qui a été
appuyée et qui a été adoptée, je crois. Est-ce
qu'au moins l'ordre du jour provisoire peut être accepté pour ce
matin? Alors, si nous adoptons l'ordre du jour avec les corrections que l'on
vient d'apporter ainsi que les suggestions, pourrions-nous déclarer que
l'ordre du jour est adopté?
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT! Adopté. Bilan des travaux accomplis par le
comité depuis son institution et questions en suspens. Si mon souvenir
est juste, un mémoire ou un rapport a été envoyé, a
été transmis à tous les membres du comité et vous
le retrouvez dans les documents qui vous ont été transmis et qui
s'intitulent: « Etude commanditée par le comité de la
constitution à l'Institut de recherche en droit public
del'université de Montréal. »
Premièrement, vous l'avez dans le dossier et vous avez la liste
des études reçues et, deuxièmement, des études
à venir. Je demanderais au secrétaire du comité de nous
indiquer d'abord, quant aux études à venir, à quelle date
c'est au bas de la page deux pourrons-nous recevoir ces
études?
UNE VOIX: Pourrions-nous accepter cela?
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. LAPORTE: M. le Président, comme question préliminaire
je vois que M. le secrétaire a en main un document parmi
les documents, parmi les études qui sont terminées, quelles sont
celles qui ont été distribuées aux membres du
comité?
M. LE SECRETAIRE: C'est justement pour ça que je demandais qu'on
sorte les documents. Trois livres ont été publiés. Nous
les avons mais ils n'ont pas encore été distribués aux
membres du comité; ils le seront. L'un porte sur l'immigration; il est
de Jacques Brossard. Un deuxième porte sur les pouvoirs
extérieurs du Québec; il est de Jacques Brossard, André
Patry et Elisabeth Weiser; l'autre sur la cour Suprême et la
constitution, également de Jacques Brossard. Ce sont trois des
études...
M. LE PRESIDENT: Nous avions demandé, je me rappelle, à
une des dernières séances, il y a déjà assez
longtemps, que tous les volumes publiés soient transmis à tous
les membres du comité parlementaire. Alors je sais qu'il y en a qui en
ont acheté mais je crois qu'étant donné que ces volumes,
que ces publications ont été rendues possibles grâce aux
travaux que nous avions demandés à ces auteurs, je
suggérerais que ces volumes soient transmis à tous les membres du
comité parlementaire de la constitution, au fur et à mesure
qu'ils seront publiés.
M. LAPORTE: Est-ce qu'il y a un certain nombre de travaux qui ne vont
exister que sous forme de polycopies?
M. LE SECRETAIRE: Eventuellement ils vont tous prendre cette
forme-là. Mais pendant une période X, ils vont être sous
forme de polycopiés. Réponse: oui.
M. LAPORTE: Pour les fins de l'étude que nous entreprenons,
peut-être une deuxième étape, est-ce que même les
travaux polycopiés ne pourraient pas être distribués aux
membres du comité?
M. MORIN: Oui.
M. LAPORTE : Ceux qui sont arrivés pourraient l'être dans
un délai assez court, j'imagine?
M. LE SECRETAIRE : Nous avons un problème en ce qui concerne les
études - je l'ai mentionné l'autre jour au comité
directeur c'est qu'elles ont toutes, au fur et à mesure que nous
les avons reçues sauf peut-être une exception, été
distribuées dès leur réception aux membres. Seulement les
membres ont changé plusieurs fois, avec pour résultat qu'il ne
nous reste pas suffisammsnt d'études polycopiées. Tout de
même, on est en train de corriger la situation: en effet, à
Montréal on les édite sous forme de volumes. Alors cela va
être transmis à chaque personne. En plus de ça, tout ce qui
sera sous forme de polycopies, bien sûr va être transmis
immédiatement. Troisièmement, il faudra demander à chaque
membre les études que nous pourrons transmettre à ceux qui ne les
auraient pas reçues parce qu'ils sont des nouveaux membres. Mais
là, tout de suite, il y aura un problème parce qu'il y a des cas
où il faudra refaire une impression. Remarquez que ce n'est pas la fin
du monde mais l'idée évidemment est automatiquement, quand c'est
reçu, de les distribuer, deuxièmement quand c'est sous for- me de
volumes, de les envoyer aux membres du comité à même le
budget du comité. C'est ce qui arrivera d'ailleurs...
M. LE PRESIDENT: On avait posé une question: quelqu'un avait
noté qu'entre le volume publié et le rapport, ou l'étude
faite qui nous avait été remise au comité il y avait des
différences. L'on a posé cette question: S'agit-il de
différences substantielles ou seulement d'une formulation
différente entre le rapport transmis au comité parlementaire et
entre le livre? Avez-vous une réponse à apporter à cette
question qui avait été posée, je pense, par M. Laporte ou
M. Gérin-Lajoie, à ce moment-là?
M. LE SECRETAIRE: Oui, il y a une réponse, M. le
Président. Elle vient d'être distribuée aux membres du
comité sous cette forme-ci: il s'agit d'une petite note qui explique
pourquoi les divergences de rédaction; on dit là-dedans qu'il y a
certainement des divergences de rédaction et on signale où dans
le cas de deux volumes deux des trois que j'ai ici, l'un qui concerne
l'immigration et l'autre, les pouvoirs extérieurs du Québec. En
tout cas, ça ne change pas les conclusions essentielles de chacun de ces
volumes ou de chacune de ces études. Alors, ça constituerait en
somme la réponse à la question qui avait été
posée antérieurement. Est-ce qu'il y a des divergences
fondamentales? Il n'y a pas de divergences fondamentales; il y a des
divergences d'expression, de rédaction.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Du reste, M. Morin, on indique que les
divergences sont signalées par un astérique dans les
ouvrages.
M. LE SECRETAIRE: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: D'ailleurs, vous noterez dans ce document qui vient de
nous être remis que l'on analyse entre autres le volume sur l'immigration
de Jacques Brossard; on y réfère à certaines pages. Alors,
il y a eu un examen méticuleux et du livre et du rapport qui nous
avaient été transmis. On nous indique qu'il n'y a pas de
différences substantielles.
Maintenant, est-ce que nous pouvons dire que, quant aux études
reçues, le rapport qui nous est présenté par le
secrétaire répond aux questions qui avaient été
posées?
M. LAPORTE: Cela répond à toutes les questions
posées quant à la partie reçue des documents qui y sont
déjà.
M. LE SECRETAIRE: Dya peut-être d'autres détails de la part
de M. Roblchaud. Je ne sais pas si vous savez si d'autres études vont
nous arriver incessamment.
M. LE PRESIDENT: Aux études à venir, à la page 2.
Est-ce que nous sommes en état de dire à quelle date
l'étude sur la constitution et la réglementation des
corporations, de M. Ouellette, devrait nous parvenir?
M. ROBICHAUD: Non, M. le Président, pas encore, mais elle nous a
été promise dans un avenir prochain.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela veut dire d'ici un mois?
M. ROBICHAUD: Moi, je pense que ce serait plus prudent de dire d'ici
à trois mois.
M. LE PRESIDENT: L'étude d'Henriette Immarigeon: « Les
frontières terrestres du Québec. »
M. ROBICHAUD: Cette étude a été
rédigée et elle est entre les mains de l'Institut de recherche en
droit public depuis au-delà d'un an et demi. Mais je crois qu'il y a des
questions d'édition, des points de détails qui ont
été entrepris et qui devront être complétés
avant que l'étude nous soit envoyée.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on a tenu compte, à ce
moment-là, d'une des remarques qui avaient été
formulées?
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'attire l'attention sur le fait
que, quand M. Robichaud parle, on n'enregistre pas ce qu'il dit parce qu'il
n'est pas assez près des micros.
UNE VOIX: Qu'on lui confie un micro ou encore...
M. LAPORTE: Ne peut-il pas prendre la place de M. Bousquet au bout,
là?
UNE VOIX: Pardon?
M. BOUSQUET: Que ce soit plutôt celle de M. Laporte parce qu'il
invite...
M. PROULX: M. Laporte, on l'entend partout mais on entend rien...
M. LE PRESIDENT: M. Robichaud, voulez-vous enregistrer la réponse
que vous venez de donner.
M. ROBICHAUD: On nous a laissé entendre que l'étude du
professeur Yves Ouellet nous parviendrait dans un avenir prochain et nous
interprétons cet « avenir prochain » comme signifiant un
délai d'environ trois mois.
Quant à l'étude de Me Henriette Immarigeon, elle est
déjà entre les mains de l'Institut de recherche en droit public
depuis au-delà d'un an. Nous croyons comprendre qu'il y a des points
d'édition de travail pour l'édition de revision sur
les questions de détails techniques qui ont été entrepris
assez lentement, ces travaux de revision devront être
complétés avant que l'étude ne nous parvienne.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on a tenu compte d'une note, qui avait
été formulée à la première réunion du
comité directeur au mois d'août, disant de ne pas faire faire
d'études qui pourraient être similaires à celles qui sont
déjà entreprises par la Commission Dorion, ou aux études
qui sont déjà faites...
M. ROBICHAUD: Oui, monsieur...
M. LE PRESIDENT: ... au sujet de ce problème des
frontières du Québec?
M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président. L'étude du professeur
Immarigeon a été entreprise si ma mémoire est bonne
vers 1963, 1964 ou 1965. Par conséquent, avant la création
de la Commission d'études sur l'intégrité du
territoire.
Nous avons tenu compte de cette directive du comité directeur.
Elle a été portée à la connaissance du directeur de
l'Institut de recherches en droit public, Me Pierre Carignan, qui a reçu
à cet effet une lettre du secrétaire du comité au cours
des jours qui ont suivi la dernière réunion du comité
directeur. Nous n'avons cependant reçu aucun accusé de
réception, jusqu'à présent, de cette lettre. Mais nous
savons, après avoir été en contact
téléphonique avec Me Carignan, qu'il en a pris connaissance.
Il y a une petite question technique qui se pose. Il semble que certains
membres, certains commissaires de la commission Dorion aient exprimé des
réserves quant à l'opportunité de faire distribuer les
études, commanditées par la commission Dorion à l'Institut
de recherche en droit public, aux membres du comité parlementaire bien
que le secrétaire de la commission nous ait indiqué verbalement
qu'il n'y voyait aucune objection. Alors, il resterait à clarifier ce
point qui m'apparaît avoir un caractère purement technique.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que j'ai bien compris que cette étude
devrait nous parvenir incessamment?
M. ROBICHAUD: Je crains que l'étude du professeur Immarigeon
pourrait encore prendre quelque temps à venir, parce qu'il existe des
questions de détail qui doivent être mises au point.
M. LAPORTE: Nous ne pouvons pas savoir! Il existe depuis un an des
questions d'édition, qu'est-ce que ça signifie?
M. ROBICHAUD: Je ne sais pas.
M. LE PRESIDENT: Oui, mais pourriez-vous vous enquérir pour que
nous le sachions?
M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président. UNE VOIX: D'accord?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il arrive, M. Robichaud, que
certaines de ces études soient des thèses de doctorat ou de
maîtrise?
M. ROBICHAUD: Je ne saurais, je ne crois pas. A ma connaissance ce sont
des travaux autonomes.
UNE VOIX: Bien plus complexe que l'on imagine!
M. LE PRESIDENT: Tâchez donc de leur dire que nous ne sommes pas
ici comme jurés pour accorder un doctorat ou une maîtrise. Ce que
nous voulons, c'est l'étude. Et ces études-là qui ont
été demandées il y a déjà assez longtemps,
nous aimerions au moins qu'elles soient complétées d'une
manière aussi parfaite que possible et dans le plus court délai,
étant donné qu'elles ont été demandées
je pense qu'ici, ça remonte à 1964, 1965 ? Si elles
sont prêtes, qu'on nous les envoie polycopiées! Quant à la
publication future, vous pourrez y voir à ce moment-là.
Gilles Pepin: « Les obstacles constitutionnels à la
création de tribunaux administratifs québécois
».
M. LAPORTE: Pourquoi cela n'a-t-il pas été confié
à Bona?
M. LE PRESIDENT: Bona?
M. CHOQUETTE: Malgré les obstacles!
M. LAPORTE: Malgré les obstacles.
M. LE PRESIDENT: Non, il s'en va en Louisiane!
A quand l'étude: « Les obstacles constitutionnels à
la création de tribunaux administratifs québécois
»?
M. ROBICHAUD: M. le Président, je crois que cette étude
devrait aussi nous parvenir prochainement mais je n'ai pas de délai
précis à vous communiquer.
M.LE PRESIDENT: Elle a été demandée
également à Me Carignan par le ministère de la Justice
nous n'en voulions pas deux mais nous voulions au moins celle-là
en vue des négociations qui ont été
commencées quant à la revision de la constitution canadienne.
Cela nous intéresse fortement au ministère de la Justice.
Voudriez-vous vous enquérir de manière que nous ayons une
réponse plus précise quant à la date où cette
étude pourra nous parvenir?
L'étude no 23: M. Jacques-Yvan Morin: « Le statut
particulier ».
M. ROBICHAUD: Cette étude a maintenant été remise
au secrétariat et devrait être distribuée ce matin, dans le
cours de la matinée.
M. LE PRESIDENT: Distribuée ce matin.
M. LAPORTE: Elle sera distribuée ce matin?
M. LE PRESIDENT: Oui. Au moins, nous pourrons connaître ce que
pourrait être le statut particulier!
UNE VOIX: Un statut particulier, parce qu'il y en a plusieurs.
M. BOUSQUET: C'est sa spécialité!
M. PROULX: Le chef de l'Opposition, c'est de la sémantique pour
lui. Particulier, spécial, c'est le concept qui m'intéresse.
M. BOUSQUET: Il est moins dramatique là-dedans qu'à la
télévision!
M. LAPORTE: Vous avez retrouvé l'usage de la parole au dernier
caucus, vous?
M. BOUSQUET: Nous l'avions depuis longtemps.
M. PROULX: Non, nous avons toujours gardé notre sourire, M. le
député de Chambly!
M. CHOQUETTE: Avez-vous le sourire triomphant, ce matin?
M. PROULX: Non, le sourire chrétien!
M. BOUSQUET: Le chef de l'Opposition a retrouvé son usage de la
démagogie hier soir à la télévision?
M. LAPORTE: Voilà le fait d'une minorité qui se prend pour
la majorité!
M. CHOQUETTE: C'est ça.
M. PINARD: Vous avez l'air d'avoir un statut particulier
vous-même, M. le député de Saint-Jean!
M. BOUSQUET: Mais vous, vous êtes bien particulier!
M. LE PRESIDENT: Les membres n'ont pas besoin de se lever; ils peuvent
rester assis!
M. PROULX: Nous voulons faire mal! Nous avons l'impression que cela fait
plus mal debout.
M. LESAGE: Peut-être bien que non. Arrêtez donc de nous
faire mal!
M. LE PRESIDENT: L'étude no 24, M. Yves Ouellet: « Le
comportement de la cour Suprême dans l'interprétation de la
constitution canadienne ».
M. ROBICHAUD: Je crois, M. le Président, que cette étude
qui avait été commanditée n'a pas été
entreprise parce qu'on a jugé que d'autres études couvraient le
même sujet.
M. LE PRESIDENT: M. Brossard a fait une étude. Je crois
qu'à la suite de la première réunion du comité
directeur, nous vous avons dit: Point n'est besoin de continuer cette
étude puisque Jacques Brossard a publié il nous a
été transmis, d'ailleurs un rapport.
Pourquoi deux études sur le même sujet?
Alors, l'étude no 24 est mise de côté?
C'est le voeu des membres?
Nous l'avions décidé, d'ailleurs, au comité
directeur, mais je tenais à en faire rapport aux membres du
comité. Il ne s'agit pas d'avoir deux ou trois études sur le
même sujet.
M. Jacques Brossard: « L'organisation judiciaire ».
M. ROBICHAUD: Je crois, M. le Président, que votre remarque au
sujet de l'étude du professeur Yves Ouellette s'applique aussi à
celle de M. Jacques Brossard sur l'organisation judiciaire, de même
qu'à son introduction sur les études relatives au pouvoir
judiciaire qui devaient au début faire partie du projet de commandite
d'un ensemble.
Vu les études qui ont été entreprises, pour la
commission Prévost notamment, il a été jugé
inopportun de faire double emploi.
M. LE PRESIDENT: Alors, le mandat est retiré quant aux
études numéros 24, 25 et 26. C'est bien?
M. ROBICHAUD: Oui, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Les études, nous les aurons ailleurs et elles
pourront servir au comité parlementaire de la constitution.
L'étude numéro 27. Nous venons de distribuer le travail de
Luce Patenaude: « La compilation des lois se rapportant à la
constitution interne du Québec ».
L'étude numéro 28. M. Raymond Lachapelle! « Les
relations ouvrières ».
M. ROBICHAUD: Oui. Alors, M. le Président, pour ce qui a trait
à l'étude 28, Raymond Lachapelle: « Les relations
ouvrières », à l'étude 29, Raymond Lachapelleî
« Le commerce local et interprovincial », il a été
entendu, entre l'Institut de droit public et le secrétariat du
comité que ces études ne seraient pas entreprises. De même,
l'étude du professeur Paul-André Crépeau: «
Considération sur l'organisation judiciaire », ne sera pas
entreprise.
M. LE PRESIDENT: Elles sont reliées aux études 24, 25 et
26.
M. ROBICHAUD: Justement. Pour les raisons mentionnées au sujet
des études du professeur Jacques Brossard.
M. CHOQUETTE: M. Robichaud, la question « le commerce local et
interprovincial » est extrêmement importante au point de vue
constitutionnel. Enfin, selon la constitution telle que vous l'avons
aujourd'hui! Entre autres, une cause que j'ai brillamment perdue.
Est-ce que vous pouvez me dire pourquoi cette étude-là a
été annulée?
M. DOZOIS: C'est-à-dire que vous l'avez perdue.
M. CHOQUETTE: J'ai dit que je l'ai brillamment perdue!
M. LE PRESIDENT: II a lamentablement échoué!
M. CHOQUETTE: Non, non, Je ne dirais pas ça. DJailleurs je ne Pai
pas perdue à la cour Suprême; f ai donné la cause à
un autre qui l'a perdue à la cour Suprême.
M. TREMBLAY: Vous l'avez probablement « brillamment perdue »
à cause du savon.,.
M. LE PRESIDENT: Voici, nous attirons l'attention...
M. CHOQUETTE: Pourquoi cette étude-là a-t-elle
été annulée? C'est extrêmement important. C'est
important au Canada, c'est important aux Etats-Unis. Dans tous les Etats
fédéraux, cette question-là comporte des points
fondamentaux.
M. ROBICHAUD: Nous sommes tout à fait d'accord avec les remarques
de M. Choquette. La raison pour laquelle cette étude n'a pas
été fournie, c'est que M. Lachapelle n'était plus
disponible pour l'entreprendre. Cependant, nous avons discuté cette
question avec le professeur Carignan, directeur de l'institut, qui serait
prêt à confier le travail à un autre chercheur si le
comité en faisait la demande expresse.
M. CHOQUETTE: Si vous voulez, moi, je ne pense pas qu'il y ait lieu de
commanditer une étude spéciale à l'heure actuelle sur la
question « le commerce local et interprovincial » parce qu'à
bien y penser il y a déjà un livre qui existe que vous
connaissez peut-être M. Robichaud dont l'auteur est un professeur
d'une université de Pouest, « Interprovincial Trade ».
Est-ce que vous connaissez ce livre-là? Il me semble que c'est
MacDonald? Je trouverai le volume. Il a étudié toute la question
au Canada et aux Etats-Unis.
M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous nous procurer le nom de l'auteur du
volume...
M. CHOQUETTE: Justement
M. LE PRESIDENT: ... et le transmettre à M. Robichaud qui verra
si ça répond aux questions que nous nous posions?
M. ROBICHAUD: Oui.
M. CHOQUETTE: Oui, c'est très bien, M. le Premier ministre. Je
vais le chercher.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez avoir là le factum de la
cause que vous avez perdue.
M. CHOQUETTE: Oui, bien oui. Sûrement.
M. LE PRESIDENT: Cela nous permettrait peut-être, ce
jugement-là étant porté en appel au comité
parlementaire de la constitution, de savoir...
M. LAPORTE: Maintenant qu'il a perdu il va faire le contraire.
M. LE PRESIDENT: ... pourquoi il prétend que cela a
été brillamment plaidé.
M. PROULX: M. le Président, est-ce que je pourrais vous
suggérer une recherche qui pourrait être intéressante;
celle de l'évolution de la pensée constitutionnelle du chef de
l'Opposition depuis deux ans? Du mois de juin 1966 au 25 juin 1968. Je pense
que ce serait intéressant. Comme plaquette, là nous aurions
quelque chose de bon!
M. LE PRESIDENT: Nous pourrions peut-être tous nous poser la
même question.
M. LAPORTE: Nous pourrions ajouter un chapitre: Pourquoi le
député de Saint-Jean a-t-il retrouvé P usage de la
parole?
M. PROULX: Ah! je l'ai retrouvé depuis longtemps. Je Pai depuis
le 5 juin 1966.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): De l'influence des caucus!
M. LAPORTE: De l'influence d'habitudes sur la pensée!
M. LE PRESIDENT: Mais, pourrions-nous, à ce moment-là,
faire témoigner les membres des caucus étant donné que les
caucus ont pour règle la discrétion absolue? Pourrions-nous les
relever de ce... ?
M. LAPORTE: Est-ce que ce serait nécessaire de les relever, M. le
Président?
M. LE PRESIDENT: Pourquoi?
M. LAPORTE: Parce qu'ayant été journaliste je connais fort
bien le secret des caucus.
M. LE PRESIDENT: Etude 31, Claude-Armand Sheppard: « Analyse
comparative et pra-
tique des difficultés techniques et juridictionnelles
posées par les différentes modifications proposées
à la structure de la cour Suprême ».
M. ROBICHAUD: Cette étude n'a pas été entreprise
parce que Me Claude-Armand Sheppard n'a pas pu trouver le temps d'entreprendre
un travail supplémentaire, à cause de ses nombreuses occupations.
Si le sujet avait porté sur un autre point, M. Carignan aurait
confié l'étude à un autre chercheur.
Mais il a jugé que les études de M. Jacques Brossard et du
professeur Beaudoin, notamment sur la cour Suprême, couvraient l'aspect
que le professeur Sheppard avait l'intention de développer plus en
détail.
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous le demander à Me Antonio Dubé
il y a une ou deux études que le ministre de la Justice a
confiées, l'une à Me Antonio Lamer et l'autre, le nom
m'échappe là, au sujet de l'organisation judiciaire au
Québec et vous procurer le mandat qui a été
confié. En communiquant avec Me Dubé, il pourra vous le dire. Ces
travaux-là seront certainement bénéfiques au comité
parlementaire de la constitution en vue de la réforme dont j'ai
quelquefois parlé, de la réforme qui s'impose: la réforme
judiciaire au Québec. Je pense qu'il sera à propos que ces
travaux-là parviennent jusqu'ici.
M. PINARD: La commission Prévost a-t-elle entrepris des
études sur le même sujet?
M. LE PRESIDENT: La commission Prévost a entrepris des
études, surtout, dans le domaine de l'organisation de nos cours
criminelles et de toutes les matières qui relèvent de
l'application du droit criminel et pénal. Mais, en ce qui a trait aux
tribunaux civils, non.
M. PINARD: Est-ce que la commission Prévost aura
déposé dans un avenir rapproché les principales
recommandations des travaux qu'elle a complétés?
M. LE PRESIDENT: J'ai demandé à la commission
Prévost de faire comme l'on a fait pour le rapport sur les
évasions, soit qu'au fur et à mesure que les travaux seront
complétés, il ne fallait pas attendre pour nous présenter,
dans un an, la bible complète. Et c'est mieux, dès que les
travaux sont complétés, de faire rapport et de les transmettre au
ministère. A ce moment-là, il y a certainement des choses qui
devront arriver ici au comité parlementaire. J'ai demandé de nous
transmettre le résultat de ces tra- vaux de manière que, si nous
le pouvons à ce moment-là, suivant les recommandations faites,
appliquer immédiatement lesdites recommandations. Mieux vaut que nous
agissions plutôt que d'attendre un an, un an et demi. Je serai en mesure
de vous donner un rapport là-dessus dès la prochaine
réunion.
M. PINARD: Est-ce que la commission Prévost a vu son mandat
élargi à cause des événements que nous vivons
depuis quelques mois, et à cause dubesoin de plus en plus pressant de
modifications dans le domaine constitutionnel? De la constitution interne
surtout?
M. LE PRESIDENT: Le mandat est demeuré le même!
Excepté que pour éviter que des études soient faites
à la fois par l'Institut de recherche en droit public et par la
commission Prévost, j'ai demandé à Me Carignan de
rencontrer la commission Prévost et de s'entendre afin de bien
délimiter les mandats quipourraient leur être confiés;
ainsi, l'Institut de recherche en droit public n'entreprendra pas des travaux
qui sont déjà entrepris par la commission Prévost.
M. DOZOIS: M. le Président, peut-être dans un domaine autre
que cette étude de M. Sheppard, pourrions-nous nous procurer le
comité et chacun des membres copie des études qui ont
été faites par la chambre de commerce sur les conditions
économiques? Je pense que ce serait intéressant d'en avoir une
copie officielle.
M. LE PRESIDENT: Oui, cela serait intéressant pour tous.
M. LAPORTE: Oui, il y a un mois ou deux...
M. LE PRESIDENT: Voudriez-vous M. le secrétaire
répondant au voeu exprimé par le député de
Saint-Jacques demander que l'on transmette cette étude à
tous les membres du comité.
M. CHOQUETTE: Dans le même sens, M. le Premier ministre, vous
savez que le rapport de la chambre de commerce est fondé sur un certain
nombre d'études que j'ai vues n'est-ce pas de
différents travaux. Il y a des annexes très importantes.
M. DOZOIS: Oui, je veux qu'on demande, si possible, copie de toutes les
études qui ont servi à l'élaboration du mémoire de
la chambre de commerce.
M. CHOQUETTE: D'accord.
M. DOZOIS: Si c'est possible.
M. LE PRESIDENT: Voici à l'ordre du jour: bilan des travaux
accomplis par le comité depuis son institution et questions en suspens.
Est-ce que les membres du comité ont d'autres questions à
poser?
M. MALTAIS (Limoilou): M. le Président, comme travaux pratiques
que nous avons actuellement, il y a trois volumes, les volumes de Me Brossard
qui se ressemblent.
M. LE PRESIDENT: Vous avez l'étude commanditée par le
comité de la constitution à l'institut de recherche en droit
public de Montréal. Vous avez cela. Vous avez d'abord: études
reçues, études à venir. Quant aux études
reçues, je n'en ai pas fait la revue. Excepté ceci: depuis nos
dernières séances il y a déjà longtemps
des membres ont reçu des études. Alors, nous avons
demandé au secrétaire du comité de transmettre à
tous les membres actuels les études déjà reçues, et
de bien vouloir transmettre les autres dès qu'elles seront
publiées.
M. Morin, est-ce que cela peut prendre un délai long?
M. LE SECRETAIRE: Non, court.
M. LE PRESIDENT; Pour que les études reçues soient
transmises aux membres du comité.
M. DOZOIS: Bien, transmises à ceux qui ne les ont pas encore.
M. LE PRESIDENT: Ceux qui les ont déjà voudraient-ils
faire la revue des documents reçus de manière que le
secrétariat ne soit pas obligé de préparer toute une
série d'autres volumes?
M. LE SECRETAIRE: De toute façon, ce matin ou aujourd'hui, nous
allons envoyer les trois volumes que j'ai montrés tantôt; ils sont
déjà disponibles. Nous en avons reçu une quantité
suffisante pour tout le monde. Que les études aient été
déjà transmises ou non, achetées ou non, nous envoyons
quand même à tout le monde celles qui sont sous forme de volumes.
Ce sont celles qui sont polycopiées qui nous créent des
problèmes parce qu'il y a eu des changements parmi les membres. Nous ne
savons pas très bien qui a quoi actuellement parce que des personnes ont
été membres pendant quelque temps et après cela... Nous
avions en- voyé des copies et elles ont été
remplacées par d'autres. Nous ne savons pas trop où nous
retrouver. Nous allons peut-être être obligés d'appeler
chacun pour le savoir.
M. LE PRESIDENT: M. Maltais, est-ce que cela répond à
votre question?
M. MALTAIS (Limoilou): Parfait.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres ont d'autres questions à
poser?... A l'ordre du jour, article 2? Sinon, nous allons passer à
l'article 3: Programme de travail du comité: La constitution interne du
Québec I) Dispositifs de modification de cette constitution.
M. Lesage, chef de l'Opposition, a fait une remarque tantôt.
M. LESAGE: Je me renseignais sur les enseignants.
M. LE PRESIDENT: Ah! sur quoi? M. LESAGE: Sur les enseignants.
M. LE PRESIDENT: L'éducation d'ailleurs, cela ne...
M. LESAGE: Parce que j'ai des problèmes à Sainte-Foy.
M. LE PRESIDENT: Comment cela se fait-il?
Alors, programme de travail de la constitution interne; dispositifs de
modification de cette constitution.
Pour amorcer la discussion sur ce problème disons qu'à
l'occasion de l'étude pour ne pas aller plus loin des
bills 90 concernant le Conseil législatif, nous sommes des deux
côtés d'accord au sujet de son abolition. J'ai, avec le chef de
l'Opposition et quelques autres collègues, indiqué que lorsqu'il
s'agit d'amendements de la constitution, étant donné la
disparition prochaine du conseil, il y aurait peut-être lieu
d'établir des mécanismes afin que l'Assemblée du
Québec ne puisse pas, par une majorité simple, apporter des
projets de loi destinés à changer fondamentalement la
constitution interne du Québec, seulement par le jeu d'une
majorité simple. Je crois que c'est là le problème.
Il y en a qui ont suggéré que, si nous n'avons qu'une
Chambre, il y ait, par exemple, une majorité des deux tiers ou des trois
quarts, qu'il y ait une deuxième Chambre ou un conseil d'Etat ou un
conseil constitutionnel qui aurait compétence en matière
constitutionnelle j'ap-
pule sur ces mots: un conseil d'Etat ou un conseil constitutionnel, et
l'on saisit bien la portée du mot conseil laissant la
décision finale en dernier ressort à l'assemblée des
parlementaires élus.
On a indiqué, également, qu'en certains cas -et aucun
doute quant à moi dans mon esprit s'il s'agissait de changements
profonds, il faudrait que nous ayons une loi - nous en avons parlé
à quelques reprises des deux côtés -une loi du
référendum.
Alors, vous avez là un résumé. J'aimerais que nos
collègues, de part et d'autre, exposent une opinion pour le moment, non
pas sur le fond du problème mais sur certains autres mécanismes
qui pourraient être prévus.
M. LESAGE: J'en ai mentionné quelques-uns. A la Chambre, j'ai
mentionné la majorité des deux tiers comme aux Nations unies.
J'ai parlé de la possibilité d'avoir une espèce de conseil
constitutionnel qui n'aurait pas le droit de veto. Il y a des dispositions
auxquelles nous pourrions songer.
On me dit qu'il existe, par exemple, dans certains cas, des dispositions
à l'effet qu'un changement à la constitution d'un pays, sur des
points précis, ne vaut que si la modification est votée de
nouveau par le Parlement après une élection
générale.
M. LAPORTE: Il faut que ce soit voté deux fois et ensuite qu'il y
ait des élections.
M. LESAGE: Deux fois, et qu'entre les deux il y ait une élection.
C'est un mécanisme qui, me dit-on, existe. Je pense que ça vaut
la peine de le faire explorer par nos experts.
M. LE PRESIDENT: Monsieur, j'aimerais l'apporter justement, au chef de
l'Opposition, je n'ai aucune objection à le faire polycopier et
distribuer. Je n'entrerai pas dans les détails.
J'ai fait préparer un travail sur le problème suivant; Une
Législature peut-elle par une loi se lier elle-même et lier une
Législature future en affirmant qu'aucune modification ne pourrait
être apportée à une loi sans une majorité autre
qu'une majorité simple?
M. LESAGE: M. le Président, si vous le permettez, je voudrais
vous dire que ce matin j'ai discuté assez longuement cette question avec
mes collègues, le député de Chambly et le
député d'Outremont. C'était une question qui nous
inquiétait beaucoup. Nous nous demandions si, justement, une des
garanties possibles n'était pas de faire approuver la constitution
interne pour pouvoir la geler avec ses mécanismes de modification par la
population, par un référendum.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est la solution...
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous que je vous lise, tout simplement, quelques
paragraphes sans référer aux auteurs.
A la suite d'un examen de la constitution par certains auteurs en droits
constitutionnel ont dit ceci; « Une loi du Parlement du
Québec qu'elle soit déclarée ou non constitutionnelle,
demeure une loi ordinaire. Ellen'a pas et ne peut pas avoir la force d'une
constitution du genre de celle de la France, ou des Etats Unis, qui existe en
dehors de toute atteinte possible du Parlement sans une procédure
spéciale d'amendement. En conséquence, toute loi d'une
Législature provinciale peut être amendée ou abrogée
quelle que soit sa nature. Aucune procédure spéciale, aucune
majorité qualifiée ne peut être exigée.
On peut noter à cet effet l'article 49 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique: « Les questions à la
Chambre des communes seront décidées à la majorité
des voix. Le président ne votera pas à moins qu'il y ait partage
des voix, mais, dans ce cas, il devra voter ».
En vertu de l'article 87, cette disposition s'applique aussi aux
Législatures provinciales. Beauchesne explique comme suit cette
disposition: « Le principe voulant que ce soit la majorité qui
gouverne a été reconnu par l'article 49 et ça
remonte loin de la Grande Charte de 1215 ».
Ce principe de la majorité simple est fortement incarné
dans le droit constitutionnel du Canada. Il procède d'une conception
fondamentale de la démocratie parlementaire telle qu'instituée
dans les pays de tradition britannique. Un précédent,
créant une règle contraire dans une loi, pourrait induire en
erreur les Parlements subséquents et être à l'origine d'une
multitude de discussions et d'appels aux tribunaux. Il nous apparaît donc
préférable, dans le but d'éviter des débats
stériles et inutiles, de ne pas inclure une telle disposition dans un
projet de loi.
Je ne dis pas que c'est parole d'évangile, c'est une opinion, une
opinion qui, à première vue, paraît très respectable
et qui reposerait sur des études assez complètes faites par
certains auteurs; mais, à ce moment-ci, disons que je pourrai
transmettre à tous les membres du comité... Je n'en ai qu'une
copie, ça m'est arrivé hier. J'avais demandé qu'on examine
ce problème-là qui est, je crois, très important au
moment où nous voudrons essayer d'établir un
mécanisme qui soit au moins valable et qui puisse permettre un certain
contrôle. Le chef de l'Opposition vient de parler d'un
référendum en pareil cas. En fait si nous changeons d'une
manière fondamentale une constitution, je pense bien que le
maître, c'est celui qui nous élit, et le maître, c'est le
peuple.
M. LESAGE: J'avais pensé d'abord à l'adoption de la
constitution interne y compris la charte des droits de l'homme, ce qui est une
possibilité, ça n'exclut rien d'autre. Que ce soit adopté
par référendum pour lui donner la force de la volonté
populaire et, par la suite, peut-être à des dispositions comme
celles que je mentionnais tantôt qu'une loi doit être
adoptée deux fois... S'il y a des dispositions restrictives dans la
constitution quant aux possibilités d'amender une constitution qui
aurait été approuvée par référendum, il y
aurait moyen, je crois, dans la constitution elle-même qui serait
adoptée par référendum, de prévoir les restrictions
du genre de celles que j'ai mentionnées tantôt et encore
peut-être les deux, quelque chose comme suit: Que si un Parlement ou une
Assemblée législative allait, par une décision, à
l'encontre des dispositions de la constitution en ce qui concerne le
mécanisme de modification, n'importe quel citoyen pourrait
immédiatement en appeler soit à un tribunal constitutionnel ou
à la cour d'Appel, si on veut en faire un tribunal constitutionnel. La
question est que ce tribunal aurait le droit de déclarer d'une
façon finale la loi « ultra vires ». Evidemment, ce sont
toutes des choses auxquelles nous pouvons songer et bien d'autres encore. Mais
je pense que si nous avions des travaux d'experts sur l'éventail des
possibilités en nous basant sur l'expérience acquise ailleurs,
cela pourrait nous aider grandement, parce que je considère que cette
question est fondamentale et qu'il faut être d'une prudence
extrême. Et une des raisons, c'est le mémoire que vient de lire le
premier ministre.
M. BOUSQUET: Est-ce qu'il y a une expérience acquise dans les
autres provinces à votre connaissance?
M. LESAGE: Pas dans les autres provinces. Dans d'autres pays, oui. Mais
pas dans les autres provinces.
M. LE PRESIDENT: C'est à M. Choquette.
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'opinion que vous avez lue a en
sa faveur le principe fondamental, qu'on reconnaît en droit britanni-
que, la suprématie du Parlement. Un Parlement ne peut pas lier son
successeur. A ce point de vue-là, je pense bien que cette opinion
mérite d'être respectée malgré qu'il y ait des
auteurs qui disent qu'on puisse lier un Parlement futur par une certaine
procédure. C'est-à-dire obliger en quelque sorte les Parlements
successeurs à suivre une certaine procédure pour abroger la
constitution ou abroger certaines modifications qu'on considère
particulièrement importantes.
Plus particulièrement, je me rappelle avoir lu des articles de
Jenning sur la question. Mais, de toute façon, comme dit le chef de
l'Opposition, je ne pense pas qu'à l'heure actuelle, la question se pose
d'une façon vraiment urgente. Je pense qu'il faut penser en termes de la
constitution que nous voulons avoir et dont nous voulons doter le Québec
et dans cette constitution, voir quels sont les mécanismes d'amendements
que nous devons insérer. Par conséquent, je trouve que c'est un
peu mettre la charrue devant les boeufs que de parler de limites à
l'action parlementaire ou de procédures d'amendement à la
constitution avant d'avoir parlé de la question fondamentale: la
constitution que nous voulons avoir. Pardon?
M. DOZOIS: Nous ne prenons pas comme finale cette loi-là.
M. CHOQUETTE: Elle n'est pas finale, mais je dis que la question qui se
pose vraiment est: Quelle constitution voulons-nous avoir? Après
ça, comment allons-nous l'amender?
UNE VOIX: C'est ça.
M. CHOQUETTE: C'est une question qui arrive en deuxième lieu, la
procédure d'amendement. La première question à se poser:
Est-ce que, par exemple, nous voulons un régime parlementaire ou un
régime présidentiel ou un régime entre les deux? Puis
viennent après ça toutes les institutions 1
M. DOZOIS: II est quand même bon que nous nous penchions sur ce
problème des dispositifs d'amendements. S'il y a des études
à faire faire, que nous les commandions...
M. LE PRESIDENT: Prenez, par exemple, ce que l'on appelle les
comtés protégés au Québec. A ce moment-là,
il faut un vote de l'Assemblée législative, auquel vote doivent
participer les députés représentant ces circonscriptions
électorales.
M. LESAGE: Oui, mais il suffit d'un vote simple de l'Assemblée
dite nationale pour biffer ça maintenant. C'est tout. Il n'y a
qu'à dire que ça ne s'applique plus, et il suffit d'une
majorité simple, et plouf! c'en est fait de cet article. Nous pouvons le
changer, je soutiens que nous pouvons le changer.
M. LE PRESIDENT: Mais, je pose ce problème parce qu'à ce
moment-là, c'est un exemple que nous avons dans la...
UNE VOIX: On ne peut pas le changer. M. LESAGE: Ah oui!
M. CHOQUETTE: Indubitablement, je pense que le fait que nous voulions
promulguer une constitution interne du Québec va impliquer des
amendements à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique»
Nous devons être prêts à aller jusque là, parce que
la constitution, je pense qu'il faut la construire non pas en fonction de
l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, il faut construire ce que
nous, nous pensons être l'idéal d'une constitution interne pour le
Québec. Après ça, on demandera les changements
nécessaires à l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique.
M. DOZOIS: Pas pour la constitution interne.
M. CHOQUETTE: Le premier ministre vient de donner l'exemple des
comtés protégés..,,
M. DOZOIS: Nous pouvons changer nous-mêmes, apparemment...
M. CHOQUETTE: Non, nous ne pouvons changer... Eh bien ça peut
présenter certaine...
M. LE PRESIDENT: Votre chef prétend que ça peut
être...
UNE VOIX: Chef de l'Opposition.
M. LE PRESIDENT: ... changé par le Parlement du
Québec.
M. LAPORTE: Pendant que la Chambre haute existait, si elle existe
encore, le vote pris à l'Assemblée législative pourrait
être rejeté par le Conseil législatif. Comme nous n'avons
plus qu'une Chambre l'Assemblée nationale je crois
également que nous pourrons modifier cette partie de notre constitution
interne par le seul vote de l'assemblée législative.
M. MALTAIS (Limoilou): Dans la conjoncture actuelle ici, je
voudrais répondre à Me Cho-quette en ce qui concerne la
priorité à donner à l'étude de cette question de la
constitution, je dis ceci que évidemment c'est très
intéressant le point de vue qu'il a soulevé est un des
points de vue sur lequel nous avons à nous pencher.
Quelle sera la substance de la constitution? En d'autres termes, de quoi
se composera la constitution du Québec?
Seulement, au départ, je crois qu'il y a une question
fondamentale, dans la conjoncture actuelle, c'est qu'on fait disparaître
quand même un mécanisme! Et ici, je ne discute pas de la valeur du
mécanisme. Mais qu'importe! On fait disparaître par une loi
le bill 90 un mécanisme qui existait.
Et nous allons du jour au lendemain, dès la sanction de cette
loi, nous trouver en présence d'une assemblée qui, par
majorité simple, pourra faire un amendement à la
constitution.
Alors, j'estime que dans les circonstances et dans la conjoncture
actuelle, il est d'une souveraine importance pour apaiser
l'inquiétude du public qui se posera des questions que nous
tentions de trouver, non pas nécessairement le meilleur mécanisme
qui n'aboutirait qu'après une étude assez poussée, et que
le chef de l'Opposition a demandée à nos experts, mais je crois
qu'il serait très important quand même que nous nous penchions sur
ce problème, et l'étudions immédiatement afin de trouver
une solution ne serait-ce que temporaire.
M. LESAGE: II n'y a aucun doute qu'à l'heure actuelle une
majorité simple de l'Assemblée nationale pourrait, par exemple,
dire que l'article 80 de la constitution ne s'applique plus il s'agit des
comtés protégés de la même façon, que
nous pouvons, à l'heure actuelle, abolir le Conseil législatif,
c'est-à-dire modifier les articles 71 et 72. C'est dans la constitution
interne du Québec.
La question que je me pose est la suivante: Ne serait-il pas possible,
à l'heure actuelle, à l'Assemblée nationale, de modifier
l'article 85 de la constitution qui concerne l'étendue, la
période de temps, l'étendue du mandat d'une Législature?
C'est grave, cela.
M. LE PRESIDENT: A l'heure actuelle, c'est quatre ans?
M. LESAGE: C'est cinq ans, cela a été modifié.
M. LE PRESIDENT: Mais cela n'a jamais...
M. LAPORTE: Il est dit dans la constitution que la province peut
modifier sa constitution à terme sauf sur deux points: la charge du
lieutenant-gouverneur et la durée. Ce sera cinq ans quand
même!
M. LESAGE: N'empêche qu'Ottawa, avec l'approbation de Londres, a
déjà étendu son mandat! En 1917.
M. LE PRESIDENT: M. Tremblay.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je crois, M. le Président, que ce que
viens de faire observer notre collègue, M. Maltais, est
extrêmement important.
Nous serons bientôt rendus au point où nous allons abolir
le Conseil législatif qui, indépendamment de ce que nous en
pensons et de ce qu'il a pu faire dans le passé, constituait une sorte
de protection justement contre ces dangers d'amendements soumis aux voix d'une
majorité simple.
Il serait important comme l'a dit M. Maltais de
prévoir dis maintenant, avant même que de se pencher sur le
contenu de la constitution interne du Québec, de prévoir, ne
serait-ce que pour un moment donné, pour une période temporaire,
un mécanisme qui nous permettrait de nous protéger
nous-mêmes contre la liberté que nous aurons de changer notre
constitution.
Alors, évidemment, là, il s'agit de savoir si c'est la
poule ou l'oeuf, ou l'oeuf et la poule. Il est important de définir
d'abord de quoi sera faite la constitution du Québec, mais il reste que
la suppression du Conseil législatif nous met dans cette situation
où pourrait survenir quelque chose qui ferait qu'on puisse changer la
constitution du jour au lendemain sans être protégés contre
nous-mêmes.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, M. Tremblay, je ne veux pas, comme
président, je m'excuse, mais j'aurais une question à poser.
Est-ce que, dans ce mécanisme, vous verriez l'exercice d'un pouvoir
absolu ou d'un pouvoir qui permet... Exemple, aujourd'hui nous votons un
amendement à la constitution, au Parlement, à l'Assemblée.
Majorité, cinq. A ce moment-là, ce projet de loi irait à
un conseil, quel qu'il soit. Est-ce que ce conseil, d'après vous, aurait
un droit de veto absolu? Il ne faut pas oublier que le vote, en Chambre, sera
un vote des élus. Est-ce que vous verriez, à première vue
je n'ai pas d'opinion préconçue là-dessus un
pouvoir absolu de veto ou, comme le suggérait tantôt le chef de
l'Opposition, que ça puis- se être soumis à un tribunal,
conseil ou cour constitutionnelle qui pourrait dire: C'est ultra vires.
M. LESAGE: Ultra vires seulement dans l'hypothèse où le
Parlement ne s'en serait pas tenu à la procédure de modification
prévue. Ce serait le seul cas où un tribunal pourrait intervenir.
Je ne voudrais pas, quant à moi, donner à un tribunal un pouvoir
de veto sur la volonté populaire exprimée par une majorité
des représentants du peuple. Sur le fait que la procédure a
été suivie ou non suivie, d'accord. Mais seulement sur ce
point-là. Peut-être que le délai, c'est le meilleur moyen
dans les circonstances.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour répondre à la question de
M. le premier ministre qui demande enfin quels pourraient être les
pouvoirs de cet éventuel conseil qui servirait, en somme, de
barrière pendant une période de x mois. Je pense bien qu'il
faudrait donner à ce conseil une sorte de pouvoir de rétention
afin que nous ne soyons pas mis dans cette situation, comme je l'indiquais tout
à l'heure, de prendre des initiatives qui pourraient aller contre
l'intérêt des citoyens. Je le disais tantôt, il faut se
protéger absolument contre nous-mêmes parce qu'à partir du
moment où l'on ferait tomber cette barrière du Conseil
législatif, même si c'est une barrière à
claire-voie, il reste que nous sommes sans protection et qu'il peut survenir
des choses qui changent complètement, si vous voulez, la constitution du
Québec, et nous mettent dans une situation telle que nous soyons
obligés de prendre des décisions capitales en matière de
changements constitutionnels.
M. LE PRESIDENT: Vous verriez, à ce moment-là, M.
Tremblay, un mécanisme ou un délai permettant à l'opinion
publique d'être mieux informée, mieux renseignée,
d'être en état d'alerte durant une certaine période, afin
de permettre à ce conseil de faire des recommandations à
l'Assemblée nationale. C'est un peu dans ce sens-là que vous
envisageriez le rôle d'un tel conseil ou l'établissement d'un tel
mécanisme.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, qui aurait une valeur temporaire, si vous
voulez, une durée temporaire pour le moment.
M. LESAGE: C'est un peu dans le sens du bill 3 que j'avais
présenté lorsque je proposais de donner au Conseil
législatif...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est comme le voyage d'Ulysse.
M. LESAGE: Sur le fond, oui. Lorsque je proposais de diminuer les
pouvoirs du Conseil législatif, l'idée c'était le
délai: délai d'un mois dans les cas des bills de nature
budgétaire ou financière et d'un an dans le cas des autres. Alors
c'est un peu la même idée, mais encore faudrait-il, étant
donné que je suis bien de l'opinion exprimée tout à
l'heure par le premier ministre,lorsqu'il a lu un document et étant
donné que l'Assemblée demeure toujours souveraine, c'est
là qu'il faudrait dire: Si le délai n'est pas observé,
là, la cour d'Appel peut déclarer la loi ultra vires, et le
jugement est final.
M. LE PRESIDENT: Un instant. Si vous me permettez, le
député de Drummond m'avait demandé la parole.
M. PINARD: Je ne veux pas que mes remarques soient
interprétées comme étant à caractère mesquin
ou partisan, mais il y a quand même quelque chose que je trouve
très étrange dans la conduite des travaux auxquels nous
participons ce matin. Je prends tout simplement un paragraphe dans un
mémoire confidentiel qui nous a été remis, au chapitre II,
intitulé: Réunions: « Entre le 7 juin 1963 et le mois de
février 1966, le comité parlementaire a tenu une quinzaine de
réunions publiques d'une demi-journée au cours desquelles il a
entendu et interrogé les personnes et organismes qui lui avaient soumis
des mémoires. Le comité n'a pas siégé depuis
février 1966. »
Nous sommes réunis ce matin et, si nous étudions
attentivement l'ordre du jour provisoire qui a été
rédigé, eh bien nous en sommes rendus à discuter des
procédures d'amendement, des mécanismes d'amendement de la
constitution interne du Québec sans avoir en aucune façon
travaillé sur le genre de modifications qui devraient être
apportées à notre constitution interne. C'est la question qui a
été soulevée tantôt par mon collègue, M.
Jérôme Choquette, et je pense qu'il l'a fait à bon droit et
avec à propos.
Tantôt le ministre des Affaires culturelles, le
député de Chicoutimi, s'est inquiété des
conséquences de l'abolition du Conseil législatif, bill portant
le numéro 90. Je trouve, pour ma part je n'engage pas mon parti
en l'affirmant mais je le dis à titre personnel, et je pense que
mon opinion est peut-être partagée par d'autres collègues
qui m'entourent, je trouve tout à fait étrange que le
gouvernement n'ait pas jugé bon de venir devant le comité
parlementaire de la constitution pour dire aux membres de ce comité
l'intention qu'il avait de proposer un bill tel que le bill 90 proposant
l'abolition du Conseil législatif, pour étudier les
conséquences que cela pouvait amener et aussi les organismes qui
auraient pu être suggérés comme solution de remplacement
pour en venir peut-être à une discussion non partisane, comme nous
le faisons ce matin, des mécanismes de protection avec certains pouvoirs
de rétention, dont a parlé tantôt le député
de Chicoutimi...
M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas interrompre le député
de Drummond, mais ce problème-là a fait l'objet, d'abord de
discussions en Chambre. Il n'était pas présent, et nous savons
pourquoi. Je tiens à lui réitérer au nom de tous nos
collègues, nos sympathies à l'occasion du décès de
son père.
Nous avons parlé de tout cela lors de l'étude du bill
90.
M. PINARD: En Chambre?
M. LE PRESIDENT: Oui. De plus, je tiens à dire que le chef de
l'Opposition avait, comme on le sait, déposé un projet de loi.
Mon prédécesseur en avait annoncé un. A un moment
donné le chef de l'Opposition est au courant je lui ai dit
que c' était mon intention, au nom de tous mes collègues, membres
du gouvernement, de déposer un projet de loi qui abolirait le
Conseil.
Quant à l'autre problème, celui du mécanisme, nous
nous sommes entendus également pour que ce deuxième
problème soit référé au comité
parlementaire. Alors, le député de Drummond, je ne le blâme
pas du tout, ne pouvait pas être présent, il n'a pas suivi les
débats en Chambre, et c'est pourquoi, peut-être, ce matin il fait
cette remarque.
M. PINARD: Je comprends très bien les remarques du premier
ministre, mais mon propos était de savoir pourquoi il n'y avait pas eu
de réunion préliminaire avant le dépôt du bill 90
pour discuter de ce dont nous discutons ce matin. Voyez-vous?
M. LE PRESIDENT: Voici, à un moment donné...
M. PINARD: Avant que le problème ne remonte devant la
Chambre.
M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas que nous reprenions cette
discussion. Quant à moi,
elle appartient au passé. Il y avait eu d'abord un premier bill 3
présenté. A ce moment-là, nous avions
suggéré qu'il soit référé au comité
parlementaire. Nous avons été battus. Nous avions accepté
le principe de la loi, à l'époque mais quant aux
modalités, nous avions suggéré qu'il revienne ici. Je ne
voudrais pas reprendre toute cette discussion car tout le problème a
été discuté en Chambre, sur le bill 90, et, à ce
moment-là, j'ai déclaré que, quant au problème d'un
mécanisme qui pourrait être utilisé comme frein aux actes
du Parlement par une majorité simple sur des changements profonds
à la constitution, que c'est ici que nous examinerions ce
problème.
M. PINARD: Me permettez-vous de vous remercier, M. le Président,
et tous et chacun d'entre vous, pour les témoignages d'amitié et
de sympathies que vous avez bien voulu faire parvenir à l'occasion de la
mort de mon père, à moi-même ainsi qu'à tous les
membres de ma famille. C'est une marque d'amitié et d'affection qui m'a
été très chère et que j'apprécie très
hautement. Merci.
M. BOUSQUET: M. le Président, il y aurait peut-être lieu de
se demander quel sera le mécanisme de vote d'une constitution. Nous
parlons d'amendement à la constitution interne du Québec.
Je pense que nous allons nous doter d'une constitution autre que les
fragments que nous avons dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
Alors, est-ce que les mécanismes de vote de la constitution seront les
mêmes que les mécanismes d'amendements de cette
constitution-là?
M. LESAGE: Je pense que le député de Saint-Hyacinthe n'a
pas saisi exactement quel était le point qu'a soulevé le
député de Chicoutimi. Il faut tout de même, avant d'en
arriver à élaborer une constitution interne avec une charte des
droits de l'homme et avec tout ce que ça comporte de difficultés
comme prévision de procédure de modification, eh bien, il
faudrait tout de même qu'autant que les dispositions de ce qu'on est
convenu d'appeler maintenant la constitution interne du Québec - et
ça comprend l'article 85 que je mentionnais tantôt quant à
la durée de la Législature... il faudrait tout de
même, dès maintenant, pendant que nous faisons ce travail, qu'il y
ait certaines garanties.
C'était le sujet de la discussion, si je comprends bien.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est en deux mots ce que j'ai dit tout
à l'heure, M. le Président. J'ai fait observer que nous devions
nous interroger sur la question de savoir de quoi serait faite la constitution.
Mais, entre-temps, vu l'abolition du Conseil législatif, nous nous
interrogeons ce matin sur les mécanismes de protection contre des
amendements éventuels qui seraient soumis à la majorité
simple de la Chambre.
M. LE PRESIDENT: M. Bousquet, avez-vous saisi le...
M. PINARD: Vous rappelez-vous quand vous avez décidé de
proposer le bill 96?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien, c'est justement la raison pour laquelle
je me demande pourquoi, lorsque vous avez proposé d'amender le Conseil
législatif en inscrivant un projet de loi au feuilleton, vous n'avez pas
proposé de faire siéger le comité de la constitution sur
ce sujet-là.
UNE VOIX: Vous êtes au gouvernement; nous sommes dans
l'Opposition.
M. DOZOIS: Vous avez pris l'initiative d'un projet de loi.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. le député d'Outremont.
M. CHOQUETTE: M. le Président, d'après ce que je
comprends, il y a une question à court terme et il y a une question
à long terme.
M. LE PRESIDENT: Exactement.
M. CHOQUETTE: Alors, ce que le chef de l'Opposition discutait avec le
député de Chicoutimi et le député de Limoilou,
c'est la question à court terme...
M. LE PRESIDENT: A court terme.
M. CHOQUETTE: ... et l'opinion que vous avez donnée, c'est sur la
question à court terme et des observations particulièrement
intelligentes ont été faites de part et d'autre sur cette
question-là. Mais sur la question à long terme, au point de vue
du programme d'étude qui nous est suggéré et qui a
été très bien fait, d'ailleurs, je trouve que les
principales questions sont soulevées dans ça.
Je voudrais faire une suggestion au comité. Il me semble que la
première chose à déterminer, c'est le genre de
constitution que nous
voudrons avoir. Je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est
soit parlementaire ou présidentiel. Enfin, j'ai une opinion sur la
question. Je ne suis pas obligé de l'étaler aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que tout le monde a reçu ce travail:
« Comité de la constitution; Suggestions quant à un
programme de travail en vue d'une nouvelle constitution interne pour le
Québec ». L'avez-vous?
Est-ce que ce document a été distribué à
tous les membres du comité? Il est supposé l'avoir
été! L'avez-vous, M. Bousquet?
M. BOUSQUET: Oui, je l'ai eu. Maintenant, je voudrais préciser
que j'avais très bien saisi le sujet de la discussion tout à
l'heure, mais je voulais quand même que l'on se préoccupe du
problème à long terme.
M. CHOQUETTE: Ecoutez, c'est justement dans ce sens-là que je
voulais faire des observations, M. le Président. Actuellement,
évidemment par des interventions de divers hommes politiques je
n'ai pas besoin de les mentionner, nous les connaissons bien ces
questions-là ont été soulevées. Est-ce qu'on ne
devrait pas aller vers un régime présidentiel, ou est-ce qu'on
devrait garder le système parlementaire tel que nous l'avons, ou le
modifier?
Moi, je pense que, pour éclairer vraiment les membres du
comité, il serait particulièrement important qu'à une
séance ultérieure nous demandions aux autorités en la
matière quand je veux dire les autorités en la
matière, je veux dire par exemple, un homme comme le doyen Baetz de la
faculté de droit de l'université de Montréal qui a
rédigé des constitutions, ou au moins une constitution, pour des
Etats africains. Le professeur Frank Scott qui est un constitu-tionnaliste
réputé. A l'université Laval également, il y a des
experts en la matière. Que nous demandions à ces
messieurs-là de comparaître devant le comité, enfin d'une
manière qui ne serait pas formelle sans soumettre un mémoire
écrit, pour nous exposer les avantages et les désavantages du
système parlementaire et du système présidentiel.
M. LE PRESIDENT: D'une manière théorique.
M. CHOQUETTE: D'une façon théorique. Je pense que, pour
l'intelligence et les décisions ultérieures du comité, ce
serait particulièrement important parcs que c'est la décision
fondamentale, je pense, qu'il faut adopter.
M. LE PRESIDENT: C'est un problème à long terme.
M. CHOQUETTE: A long terme. C'est une suggestion que je fais au
comité pour le travail à long terme.
M. LE PRESIDENT: Ni plus ni moins une réponse aux questions qui
peuvent être posées suivant les documents de travail que nous
avons devant nous.
M. CHOQUETTE: C'est ça, surtout la question no 2, le mode de
gouvernement: Analyse comparative des différents modes de gouvernement
à partir du parlementarisme de type britannique jusqu'au système
présidentiel de type américain, étude de leur plus ou
moins grande compatibilité avec les réalités sociologiques
du Québec La question no 2 me paraît à la base de tout.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous me permettez, M. le Président,
la suggestion de M.
Choquette est excellente. Maintenant je me demande s'il serait opportun
de convoquer ces gens-là pour la prochaine réunion. Je pense bien
qu'auparavant il faudrait faire un examen de notre propre ignorance en le
matière et ensuite voir exactement quels sont les problèmes qui
se posent et pour quelle raison nous devons faire appel à telle personne
en particulier pour nous expliquer ces questions-là.
Je crois que la prochaine réunion pourrait porter sur le
mécanisme dont nous avons parlé pour protéger la Chambre
eu égard à l'abolition du Conseil législatif.
M. CHOQUETTE: Est-ce que nous aurons une réunion
subséquente?
M. DOZOIS: Est-ce qu'on ne pourra pas, à la prochaine
réunion, faire des suggestions quant au choix de ces personnes.
M. CHOQUETTE: Oui, oui.
M. DOZOIS: Je crois que vous en avez mentionné deux, il peut y en
avoir dix...
M. CHOQUETTE: Sûrement, sûrement.
M. DOZOIS: Et puis là, il faudra quand même leur donner un
avis pour que ces gens-là se préparent à donner une
opinion.
M. CHOQUETTE: Sûrement, je suis tout à fait d'accord.
M. DOZOIS: Alors peut-être à la prochaine réunion,
d'Ici là on peut y penser: quels seraient les gens susceptibles de venir
ici?
M. CHOQUETTE: Sûrement.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, étant donné l'heure, nous
devons aller en Chambre pour onze heures, est-ce que nous pourrions ajourner
les travaux du comité, ce matin, à mercredi prochain, à
dix heures?
M. LESAGE: Neuf heures et demie parce que, si j'ai bien compris, la
Chambre siégerait à onze heures mercredi prochain. D'après
les conversations entre les leaders, c'est que l'on va être placé
au rythme des fins de session.
M. BERTRAND: Mercredi prochain, à neuf heures trente, nous
continuerons l'examen de notre ordre du jour.
(10 h 58)