(Seize
heures vingt-neuf minutes)
La Présidente (Mme Thériault) : Attention,
s'il vous plaît! Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.
La commission est
réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)
sera remplacée par M. Martel (Nicolet-Bécancour); Mme Rizqy (Saint-Laurent), par M. Barrette (La Pinière); Mme Dorion (Taschereau), par Mme Ghazal (Mercier);
et Mme Hivon Joliette, par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Étude détaillée (suite)
La Présidente
(Mme Thériault) : Merci beaucoup. Donc, aujourd'hui, nous en
sommes rendus à l'étude de l'article 125 du projet de loi. Il y a eu des
discussions avant d'ouvrir les caméras parce que nous avons de suspendu
l'article 107 à cause de l'article 165.22 où il y a eu un amendement, qui
est toujours suspendu. L'article 111 est suspendu, et l'article 118
est suspendu. Il y a... De consentement, nous pouvons retourner à
l'article 107, à 165.22, sur l'amendement. Je comprends, suite aux
discussions de la semaine passée entre les députés de l'opposition et le ministre, que l'amendement qui avait été déposé
par la députée de Marguerite-Bourgeoys sera retiré et que le ministre va
nous donner un autre amendement qui vient
viser le but que vous aviez en déposant votre amendement. C'est bien ça?
Une voix : Exactement.
La Présidente
(Mme Thériault) : Donc, j'ai besoin d'un consentement pour
retirer l'amendement de la députée de Marguerite-Bourgeoys. Consentement?
Des voix : Consentement.
• (16 h 30) •
La Présidente
(Mme Thériault) : Consentement, ça va. Donc, M. le ministre, je
vous recède la parole. Je rappelle que nous
sommes toujours à l'article 107, à 165.22, sur votre amendement, et je
vous laisse aller. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Toute personne... Excusez-moi.
À
l'article 107 du projet de loi, dans l'article 165.22 de la Charte de
la langue française qu'il propose, remplacer, dans le premier alinéa, «qui, selon — elle — cette
personne» par «, autre que celui relatif à la santé d'un tiers, qui, selon
elle».
Commentaire. Cet
amendement circonscrit la portée de l'article 165.22 en précisant
expressément qu'il ne permet pas à une personne de communiquer à l'office un
renseignement qui concerne la santé d'un tiers, c'est-à-dire d'une autre
personne.
Texte amendé :
«165.22. Toute personne qui souhaite faire une dénonciation communique à
l'office tout renseignement autre que celui relatif à la santé d'un tiers, qui,
selon elle, peut démontrer qu'un manquement à la présente loi a été commis ou
est sur le point de l'être ou qu'il lui a été demandé de commettre un tel
manquement.»
Et le reste de
l'article reste intact.
La Présidente
(Mme Thériault) : M. le député de La Pinière
M. Barrette :
Oui, ça va être très court. D'abord, je voudrais remercier le ministre
d'avoir fait sa réflexion sur ce sujet-là et d'arriver avec cet amendement-là,
qui m'apparaît satisfaisant.
Alors, j'ai une seule
question à poser, Mme la Présidente. C'est une question purement de droit et de
sémantique. C'est très clair pour moi dans un français commun, mais, en droit,
le mot... le terme «relatif» n'a pas de limitation? Ce n'est pas limitatif?
M. Jolin-Barrette :
Qu'est-ce qui n'a pas de limitation?
M. Barrette :
Le mot «relatif» n'est pas limitatif?
M. Jolin-Barrette :
N'est pas limitatif. Dans le fond, c'est en lien avec la santé d'un tiers.
M. Barrette :
C'est ça, il n'y a pas de... Il n'y a pas moyen d'invoquer le fait que
«relatif» empêcherait ou permettrait de divulguer quelque chose de lié à la
santé d'un tiers.
M. Jolin-Barrette :
Non, c'est relatif à la santé d'un tiers, donc, exemple, ce qui est dans le
dossier médical.
M. Barrette :
Non, non, je comprends.
M. Jolin-Barrette :
Tout renseignement autre que celui relatif à la santé d'un tiers.
M. Barrette :
Parfait.
M.
Jolin-Barrette : Donc, un, dans le fond, le dossier du tiers qui
touche à la santé... c'est assez large, la santé, là, puis ça fait suite à vos
représentations de jeudi dernier.
M. Barrette : Alors, je remercie le ministre de m'avoir accordé ce délai-là et
d'avoir présenté ledit amendement.
La Présidente (Mme
Thériault) : Est-ce que j'ai d'autres commentaires sur l'amendement
présenté par le ministre à l'article 165.22? Si je n'en ai pas, est-ce que
l'amendement est adopté?
Des voix :
Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté. Et, puisque le 165.22 est réglé, est-ce
que l'article 107 est adopté?
Une voix :
...nominal.
La Présidente (Mme
Thériault) : Vous voulez un vote par appel nominal? Donc, un vote par
appel nominal sur l'article 107.
La
Secrétaire : Veuillez répondre pour, contre ou abstention. M.
Jolin-Barrette (Borduas)?
M.
Jolin-Barrette : Pour.
La
Secrétaire : M. Émond (Richelieu)?
M. Émond :
Pour.
La
Secrétaire : M. Allaire (Maskinongé)?
M. Allaire :
Pour.
La Secrétaire :
M. Chassin (Saint-Jérôme)?
M.
Chassin : Pour.
La
Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin :
Pour.
La
Secrétaire : M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux :
Pour.
La
Secrétaire : Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David :
Abstention.
La
Secrétaire : M. Barrette (La Pinière)?
M. Barrette :
Abstention.
La
Secrétaire : Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal :
Abstention.
La Secrétaire : M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M. Bérubé :
Pour.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'article est adopté, le 107. Donc, pour la poursuite de nos
travaux, il va nous rester l'article 111 et 118, qui sont toujours
suspendus. Pour les gens qui ont les gros cahiers dans leurs mains, on retourne
dans le cahier n° 3, à l'article 125. Oui?
Mme David : On n'est pas à
l'article 111, qu'on avait aussi suspendu?
La Présidente (Mme Thériault) :
Bien, c'est parce que vous n'avez pas discuté. Normalement, on rouvre juste les
articles qui sont suspendus...
Mme David : ...bien, c'est ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
...lorsque les gens ont dit oui, ils sont prêts à... Puis là vous étiez sur cet
article-là la dernière fois. Donc, c'est soit qu'on retourne dans le vieil
article ou soit qu'on continue sur le nouvel article. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Moi, ce que je
vous proposerais, ce serait de continuer 125, et suivants, puis de revenir à
111 et à 118 au moment opportun.
Mme David : Et 118, parce que...
La Présidente (Mme Thériault) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Bien, dans le
fond...
Mme David : ...on se l'est dit, ça
va pas mal ensemble.
M. Jolin-Barrette : ...c'est ça, on
laisserait suspendu 118...
Mme David : Je vais accepter de ne
pas faire 111 si on ne fait pas 118 tout de suite...
M. Jolin-Barrette : Exactement, on
est...
Mme David : ...parce que c'est des
frères un peu jumeaux.
M. Jolin-Barrette : Bien, je vous
dirais que...
Mme David : C'est-à-dire que...
M. Jolin-Barrette : ...ils ne sont
pas de la même grossesse, là.
Mme David : Non, mais disons qu'il
faut...
M. Barrette : De la même grossesse?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Je ne peux pas discuter,
autrement dit, 118 sans discuter de 111 avant. C'est juste ça que je veux dire,
Mme la Présidente.
M. Jolin-Barrette : Bien, parce que
Mme la députée a dit : C'est des frères jumeaux. Moi, je ne pense pas que
c'est des frères jumeaux, ça fait que, là, j'ai dit : Ils ne sont pas de
la même grossesse. Donc, par inférence, ça veut dire que...
M. Barrette : Là, je comprends. Je
n'avais pas bien saisi le commentaire introductif.
M. Jolin-Barrette : C'est cela.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, je comprends que les articles qui étaient suspendus, 111 et 118,
demeurent suspendus et que nous continuons l'étude du projet de loi avec
l'article n° 125, qui n'a pas été lu. Donc, M. le ministre, je vous
demande de lire votre article, pour la poursuite des choses, 125.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 2984 de ce code est modifié par
l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :
«Les réquisitions d'inscription sont rédigées
exclusivement en français.».
Commentaire. Par concordance avec
l'introduction, par l'article 4 du projet de loi, de l'article 6.2 de
la Charte de la langue française, qui reconnaît que toute personne a droit à
une justice et à une législation en... à une législation en français — ça
devrait être «en français», pas «en française» — l'article 125 du
projet de loi vise à ce que les droits rendus opposables par leur publication
au registre des droits réels et personnels mobiliers ou au Registre foncier
sont publiés en français. À cette fin, il modifie l'article 2984 du Code
civil afin que les réquisitions d'inscription
soient rédigées exclusivement en français. Les dispositions de
l'article 125 entreront en vigueur trois mois après la sanction du
projet de loi, ainsi que le prévoit le paragraphe 1° de l'article 201.
La Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires sur l'article 125? Pas de question, pas de
commentaire? Est-ce que le 125 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. M. le ministre, 126.
M. Jolin-Barrette : Oui. 126.
L'article 3006 de ce code est modifié par la suppression de «ou
l'anglais».
Commentaire. Par concordance avec
l'article 125 du projet de loi, l'article 126 du projet de loi
modifie l'article 3006 du Code civil afin d'y prévoir que les documents
qui doivent être joints à la réquisition d'inscription, lorsqu'ils ne sont pas
rédigés en français, doivent eux-mêmes être accompagnés d'une traduction
vidimée au Québec. Les dispositions de l'article 126 entreront en vigueur
trois mois après la sanction du projet de loi, ainsi que le prévoit le
paragraphe 1° de l'article 201.
La Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires sur l'article 126? Je n'en vois pas. Est-ce que
l'article 126 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. On change de section : Loi sur l'administration financière. M. le
ministre, 127.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'annexe 1 de la Loi sur l'administration financière est modifiée par la
suppression de «Conseil supérieur de la langue française».
Commentaire. Par concordance avec l'abolition du
Conseil supérieur de la langue française, résultant du remplacement, par
l'article 113 du projet de loi, du titre IV de la Charte de la langue
française, comprenant les articles 185 et suivants, l'article 127 du
projet de loi supprime une mention de ce conseil à l'annexe 1 de la Loi
sur l'administration financière.
La Présidente (Mme Thériault) : En
commentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, si je comprends,
c'est parce qu'on abolit le Conseil supérieur de la langue française,
essentiellement?
M. Jolin-Barrette : Exactement.
Mme David : Puis c'est là que ça
passe?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
non. Ici, c'est une mesure de concordance. Dans le fond, c'est parce que là,
ici, on modifie la Loi sur l'administration financière, puis, dans la Loi sur
l'administration financière, on faisait référence au Conseil supérieur de la
langue française. Mais le Conseil supérieur de la langue française, on va
l'abolir un petit peu plus loin dans le projet de loi. Donc, c'est...
Mme David : On le définance avant de
l'abolir.
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est juste
parce que, quand on fait des lois modificatrices...
Mme David : Je comprends.
M. Jolin-Barrette : Tu sais, on est
rendus dans la section lois modificatrices. C'est par ordre alphabétique. Ça
fait que, loi sur l'administration, «administration» arrive avant les autres
lois. C'est pour ça que c'est écrit de cette façon-là. C'est de la structure
juridique.
Mme
David : Bien oui, mais j'espère que vous appréciez l'oeil
de lynx et la pertinence des questions, parce que...
M.
Jolin-Barrette : Tout à fait.
Mme David : ...on le définance avant
de l'abolir, donc dans la logique humaine, et non pas légistique.
M. Jolin-Barrette : Mais il ne faut
pas tout définancer.
Mme David : Ah! bien, ça, je suis
bien d'accord. Alors, ça va, Mme la Présidente, pour 127.
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
est-ce que 127... Si je ne vois pas d'autre commentaire, est-ce que 127 est
adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
M. le ministre, 128, et vous avez un amendement, si je ne m'abuse, et vous êtes
sur la Loi de l'administration fiscale cette fois-ci.
• (16 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Oui, sujet
intéressant. L'article 69.1 de la Loi sur l'administration fiscale est
modifié par l'ajout, après le paragraphe z.7 du deuxième alinéa, du paragraphe
suivant :
«z.8) l'Office québécois de la langue
française, dans la mesure où le renseignement est nécessaire à l'application
des dispositions des sections II ou III du chapitre V du titre II de
la Charte de la langue française.».
Commentaire. L'article 128 du projet de loi
propose de modifier l'article 69.1 de la Loi sur l'administration fiscale
afin de permettre la communication, à l'Office québécois de la langue
française, de renseignements contenus dans un dossier fiscal lorsque ce
renseignement est nécessaire à l'application des dispositions de la Charte de
la langue française concernant la francisation des entreprises.
Et l'amendement, Mme la Présidente, se lit
ainsi : À l'article 128 du projet de loi, remplacer «l'ajout» et
«z.8)» par, respectivement, «l'insertion» et «z.7.1)».
Commentaire. Cet amendement modifie
l'article 128 du projet de loi afin de tenir compte de dispositions de
projet de loi ayant été sanctionnées après la présentation du présent projet de
loi, de même que du projet de loi n° 21, dont l'étude détaillée a été
complétée le 5 avril dernier, ayant introduit, dans le deuxième alinéa de
l'article 69.1 de la Loi sur l'administration fiscale, les
paragraphes z.8, z.9, z.10 et z.11.
Alors, voyez-vous, c'est pour ça, entre autres,
qu'on continue tout le temps de travailler, parce que le Parlement continue de
fonctionner, puis il y en a d'autres qui terminent leurs lois avant nous.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires sur...
Mme David : ...ce serait :
Est-ce que le ministre pourrait nous vulgariser et faire preuve de la plus
grande pédagogie possible pour nous expliquer le contenu de cet amendement?
Parce que des z.8, z.7 et des 8, 9, 10, c'est un petit peu compliqué.
M. Jolin-Barrette : Alors, que
contiennent les paragraphes z.8, z.9, z.10 et z.11? Ce ne sera pas bien
long, on va vous dire exactement c'est quoi, les z.
Mme David : Non, non, ça va.
M. Jolin-Barrette : On est dans la
section des Zorros.
La Présidente (Mme Thériault) : Vous
les avez à la page 950 du gros cahier.
Mme David : Pardon?
La
Présidente (Mme Thériault) : Dans le gros cahier que vous avez, là, à la
page 950, vous avez les z, qui y sont, z.2... Donc, à 949, vous
avez probablement... À 948, vous avez le z.1, qui est abrogé, et le z.2 est à
la page 950, et ainsi de suite, jusqu'à z.7.
M. Jolin-Barrette : Alors, on me dit
que l'objectif, là, c'est de permettre à l'office d'obtenir le nom et l'adresse
des entreprises des tailles visées pour les fins de l'application des
dispositions de la charte, et ce, afin d'informer ces entreprises sur leurs
obligations linguistiques. Donc, z.8, c'est : «La Commission des normes,
de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, à l'égard d'un
renseignement nécessaire à l'application de la section 1 de la section
VIII.2 du chapitre IV de la Loi sur les normes du travail.» Z.9,
c'est : «La Commission des transports du Québec, mais uniquement dans la
mesure où le renseignement est nécessaire à l'exercice de son pouvoir de
suspendre ou de révoquer une autorisation qu'elle a accordée en vertu de la Loi
concernant le transport rémunéré de personnes par automobile.» Z.10,
c'est : «Un organisme public désigné comme source officielle de données
numériques gouvernementales en application de l'article 12.14 de la Loi
sur la gouvernance et la gestion des ressources informationnelles des organismes
publics et des entreprises du gouvernement, mais uniquement dans la mesure où
le renseignement est nécessaire à l'une des fins
administratives ou de services publics précisée par le gouvernement en
application de cet article.» Donc, ce sont les z.
Mme David : Bien, j'essaie quand
même de comprendre de quoi on parle, là, parce qu'il y a tellement de chiffres,
de ci, de ça. C'est quoi, là? C'est que l'OQLF peut avoir accès à des documents
si c'est nécessaire à l'application des dispositions des sections x, y, z, de
la charte, des titres II, III, IV, là. C'est quoi, là? C'est que ça donne
plus de pouvoirs à l'OQLF?
M. Jolin-Barrette : Dans le fond,
là, c'est... dans le Registraire des entreprises, là, dans le fond, toute
entreprise qui fonctionne au Québec, ils s'enregistrent au Registraire des
entreprises, le REQ, qui est disponible en ligne, notamment, puis, dans le
fond, ça permet à l'OQLF d'accéder à ces informations-là, qui sont précises.
Mme David : Mais en quoi c'est
nouveau, pertinent, c'est une belle addition?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est
parce que, dans le fond, les lois, elles ont bougé depuis le dépôt du projet de
loi, donc l'amendement vient arrimer la disposition de 128 aux nouvelles
dispositions, parce que... Exemple, là, le projet de loi n° 21.
Le projet de loi n° 21, c'est celui sur les forages,
là, l'interdiction des forages. On l'a adopté aujourd'hui en Chambre, on a voté
après la période des questions. Mais, dans le fond, quand on a... lorsqu'on a
déposé le projet de loi n° 96, le projet de loi
n° 21, il n'avait même pas encore été déposé, puis là il a été déposé au
printemps, puis il a été adopté aujourd'hui. Ça fait que c'est un ajustement,
là.
Mme David : O.K. Quand on explique,
ça va très bien. C'est très clair, merci.
La
Présidente (Mme Thériault) :
C'est beau? Donc, est-ce que l'amendement déposé par le ministre est
adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Est-ce que l'article 128 a des commentaires?
Mme David : Non.
La Présidente (Mme Thériault) : Non?
Est-ce que l'article 128, tel qu'amendé, est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. M. le ministre, l'article 129, pour une autre section, la Loi sur
le Centre de la francophonie des Amériques.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, à
l'article 129 : L'article 8 de la Loi sur le Centre de la
francophonie des Amériques est modifié par
le remplacement, dans les paragraphes 1° et 2° du premier alinéa, de «responsable de la
Charte de la langue française» par «de la Langue française».
Commentaire. L'article 129 du projet de loi
modifie l'article 8 de la Loi sur le Centre de la francophonie des
Amériques par concordance avec l'article 144 du projet de loi, qui établit
le titre de ministre de la Langue française.
La Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires, Mme la députée? Ça va?
Mme David : ...Mme la Présidente,
très clair.
La Présidente (Mme Thériault) : Très
clair? Merci beaucoup. Est-ce que l'article 129 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. M. le ministre, l'article 130.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 20 de cette loi est modifié par le remplacement, dans le
paragraphe 2°, de «responsable de la Charte de la langue française» par «de la
Langue française».
Commentaire.
À l'instar de l'article 129, l'article 130 du projet de loi modifie
l'article 20 de la Loi sur le Centre de la francophonie des
Amériques par concordance avec l'article 144 du projet de loi, qui établit
le titre de ministre de la Langue française.
La Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires? Ça va? C'est aussi clair? Merci. Donc, est-ce que
l'article 130 est adopté?
Mme David : Adopté. Bien, ce n'est
pas à moi de dire ça, je pense, mais...
La
Présidente (Mme Thériault) : Oui, oui, je vous demande si vous êtes
d'accord. Si vous me dites que c'est adopté, c'est adopté, sinon, c'est sur
division ou vous me demandez un vote. Quand vous êtes d'accord, c'est adopté.
Mme David :
Non, mais moi, je peux dire : C'est adopté, Mme la Présidente, puis le
ministre pourrait répondre : Sur division? Non, ça ne se peut pas.
La Présidente (Mme
Thériault) : Non, je ne penserais pas, c'est son projet de loi.
Mme David :
C'est plus le contraire, c'est pour ça.
La Présidente (Mme Thériault) : Je ne penserais pas, c'est son projet de loi. Par
contre, Mme la députée, il y a un autre député, d'une autre formation
politique, qui pourrait dire «sur division», et il y a quelqu'un d'autre
qui pourrait demander un vote. Alors...
Mme David :
D'accord. Mais c'est pour ça que je me sentais mal de dire
moi-même «adopté».
La Présidente (Mme
Thériault) : Non, vous pouvez.
Mme David :
Ce n'est pas moi, la ministre, dans ce cas-ci.
La Présidente (Mme
Thériault) : Non, vous êtes l'opposition officielle.
M.
Jolin-Barrette : Non, non, mais moi, j'aime ça quand vous dites :
Oui, je le veux.
Mme David :
Bien, des fois, le mariage est plus compliqué.
La Présidente (Mme
Thériault) : Bon, et, puisqu'on parle de mariage, on va aller dans la
Charte de la Ville de Longueuil pour le prochain article. M. le ministre, on
change de loi. Donc, l'article 131.
M.
Jolin-Barrette : Bien oui, il y avait eu un mariage à Longueuil, puis,
finalement, ça s'est divorcé après ça. À Montréal aussi.
La Présidente (Mme
Thériault) : Ah! je ne sais pas, je ne suis pas rendue là, là. Je peux
juste vous demander de lire l'article 131, M. le ministre.
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Bien non, mais les fusions, les défusions.
La Présidente (Mme
Thériault) : On passera à Montréal après.
M.
Jolin-Barrette : C'est des blagues de politique, là.
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Non, non, non. Ce que je constate...
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Mais c'est parce que ça a déjà été... Oui, mais
Chambly n'est pas avec eux autres.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Non, mais vous voyez que ça part vite, des rumeurs, hein? Vous l'avez vu,
là.
M.
Jolin-Barrette : Non, non, mais ça a déjà été défusionné.
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Ville Mont-Royal est-il toujours fusionné? Non, hein?
La Présidente (Mme
Thériault) : ...on va rester sur l'article 131. Si vous voulez
bien, M. le ministre, nous faire la lecture de l'article 131, qui, cette
fois-ci, touche la Charte de la Ville de Longueuil.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 12 de la Charte de la Ville de
Longueuil est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa et après «cette
charte», de «ou jusqu'à ce qu'elle soit retirée par l'effet de
l'article 29.2 de la même charte. La résolution prévue au deuxième alinéa
de cet article peut être prise par le conseil d'arrondissement».
Commentaire.
L'article 131 du projet de loi modifie l'article 12 de la Charte de
la Ville de Longueuil par concordance avec l'introduction, proposée par
l'article 19 du projet de loi, de l'article 29.2 de la Charte de la
langue française. Ainsi, la présomption selon laquelle l'arrondissement de
Greenfield Park est reconnu en vertu de l'article 29 de la Charte de la
langue française pourra prendre fin par le retrait de cette reconnaissance en
vertu de l'article 29.2 de cette charte, à moins que, conformément au
deuxième alinéa de cet article, le conseil d'arrondissement ne prenne une
résolution visant à ce qu'elle soit maintenue.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires? Si je n'en vois pas, je mets l'article 131 aux voix. Est-ce
que l'article 131 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
M. le ministre, la Charte de la Ville de Montréal, métropole du Québec,
l'article 132.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 11 de la Charte de la Ville de Montréal, métropole du Québec,
est modifié par l'insertion, dans le deuxième alinéa et après «cette charte»,
de «ou jusqu'à ce qu'elle soit retirée par l'effet de l'article 29.2 de la
même charte. La résolution prévue au deuxième alinéa de cet article peut être
prise par le conseil d'arrondissement».
Commentaire. À l'instar de l'article 131,
l'article 132 du projet de loi modifie l'article 11 de la Charte de
la Ville de Montréal, métropole du Québec, par concordance avec l'introduction,
proposée par l'article 19 du projet de loi, de l'article 29.2 de la
Charte de la langue française. Ainsi, la présomption selon laquelle
l'arrondissement de Pierrefonds-Roxboro... bien, par laquelle... est reconnu en
vertu de l'article 29 de la Charte de la langue française ne pourra
prendre fin que par le retrait de cette reconnaissance en vertu de l'article 29.2
de cette charte, à moins que, conformément au deuxième alinéa de cet article,
le conseil d'arrondissement ne prenne une résolution visant à ce qu'elle soit
maintenue.
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
questions, commentaires? Je n'en vois pas. Est-ce que l'article 133 est
adopté?
M. Jolin-Barrette : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
M. le ministre, nous passons maintenant à la Charte des droits et libertés de
la personne, article 133.
M. Jolin-Barrette : Oui. Le...
Mme David : C'était
l'article 132, Mme la Présidente. Là, vous m'avez fait faire des sueurs
froides.
La Présidente (Mme Thériault) : Ah!
excusez-moi. Est-ce que le 132 est adopté?
Des voix : Adopté.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme Thériault) : Merci
beaucoup. Hein, je vous ai fait peur?
Mme David : Vous m'avez fait très
peur.
La Présidente (Mme Thériault) : Mais
je vois que vous suivez. Parfait, donc c'est l'article 132 qui est bel et
bien adopté, sur la Charte de la Ville de Montréal, la métropole du Québec. On
change de section, Charte des droits et libertés de la personne. M. le
ministre, pour l'article 133, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui. Le
préambule de la Charte des droits et libertés de la personne est modifié par
l'insertion, après le troisième alinéa, du suivant :
«Considérant que le français est la seule langue
officielle du Québec ainsi que la langue commune de la nation québécoise et la
langue d'intégration à celle-ci;».
Commentaire. L'article 133 du projet de loi
ajoute au préambule de la Charte des droits et libertés de la personne un
considérant relatif au français en tant que langue commune et langue
d'intégration.
La
Présidente (Mme Thériault) : Questions, commentaires sur l'article 133? Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors là, on va prendre
un certain temps, Mme la Présidente, parce que ce n'est pas du tout banal, le
processus par lequel on travaille pour changer la Charte des droits et libertés
de la personne. Ce sera de même plus loin, dans d'autres enjeux. Le processus
ou la méthode retenue est de passer par le projet de loi n° 96
pour aller changer beaucoup, beaucoup de choses. Alors,
il y en a que c'est plus banal, c'est moins... les conséquences sont moins
grandes, mais là on s'en va vraiment s'attaquer à quelque chose qui a été voté
avant la Charte de la langue française, qui
est la Charte des droits et libertés de la personne. Ça a été vraiment un
fleuron législatif, dont tout le monde s'est enorgueilli pendant bien
longtemps. Mais là on s'en vient changer la Charte des droits et libertés à
travers le projet de loi n° 96.
Le processus
est particulier, très particulier, et il y a eu, depuis quand même... disons
qu'on remonte à 2006, là, alors ça veut dire quand même 25 ans,
presque, plus que ça, même... 2006, 2016... quatre, cinq, six... 26 ans.
M. Jolin-Barrette : Non, non :
2006.
Mme David : En 2006, par exemple, il
y a eu...
M. Jolin-Barrette : 16 ans, 16.
Mme David : Dans les 15 dernières
années, il y en a eu, des modifications à la charte québécoise des droits et
libertés. Mais savez-vous quoi? À part l'autre projet de loi du ministre, la
loi n° 21, à part celle-là, les autres ont été faites
toujours, toujours... et probablement que vous vous en souvenez, Mme la
Présidente, ça a été fait par des lois particulières. Alors, en 2006, le projet
de loi n° 118, de Thomas Mulcair et feu notre cher
collègue Claude Béchard, vous devez vous en rappeler, probablement, c'était un
projet de loi pour... de 31 articles, consultations particulières, puis là
je parle juste de ce qu'on veut changer là, là, mais sept jours, sept jours...
c'est beaucoup, beaucoup, ça, pour le ministre, sept jours de consultations
particulières et l'ajout de 46.1 : «Toute personne a droit, dans la mesure
et suivant les normes prévues par la loi, de vivre dans un environnement sain
et respectueux de la biodiversité.» Biodiversité, ça a pris un projet de loi
pour modifier la charte de la... la charte... la Charte des droits et libertés.
Un projet de loi, 31 articles, sept jours de consultations particulières.
Pourquoi? Parce qu'on ne change pas la Charte des droits et libertés en se
levant le matin, en allant prendre sa douche, en disant : J'ai une bonne
idée, pas de consultation, pas rien de spécial. Ça, c'était le projet de loi
n° 118, Thomas Mulcair et Claude Béchard.
On continue. En 2008 — 2008,
vous étiez là aussi, 2008 — on
décide de faire une autre modification. C'est important de faire des
modifications de la Charte des droits et libertés si on pense qu'il y a des
ajouts qui suivent les enjeux de société, mais ça ne se fait pas de même autour
d'une table à 16 h 53, en quatre minutes. Ça aussi, projet de loi
n° 63, un projet de loi autoportant. La ministre, qui est la députée,
maintenant, de l'Acadie, projet de loi qui avait quatre articles, présence
d'une consultation, savez-vous quoi?, générale, Mme la Présidente, consultation
générale. Il n'y a même pas eu ça pour la Charte de la langue française. Cinq
jours de consultation générale. Pourquoi? Parce qu'on ajoutait au
préambule : «Considérant que le respect de la dignité de l'être humain,
l'égalité entre les femmes et les hommes et la reconnaissance des droits et
libertés dont ils sont titulaires constituent le fondement de la justice, [et]
de la liberté et de la paix.» Puis, on ajoutait... Alors, ça, c'est un
préambule qu'on ajoutait. Là, on ajoute plein de choses, on va voir les trois
prochains articles.
On ajoutait aussi, 50.1 : «Les droits et
libertés énoncés dans la présente Charte sont garantis également aux femmes et aux hommes.» Formidable! Je suis sûre
que vous vous en souvenez, ce n'était pas rien. Mais ça, là, quatre
articles, cinq jours de consultation générale. Ça, ça veut dire que les gens
viennent, ils écrivent des mémoires, le pour, le contre. Après ça, il y a des... il y a l'étude détaillée.
On discute de tout ça puis on adopte le projet de loi n° 63 en 2008. Autre
exemple.
Autre exemple. En 2016, le projet de loi
n° 103. Alors, ça, c'était notre ex-collègue Stéphanie Vallée, ministre de la Justice, qui était dans les souliers de
l'actuel ministre et qui, elle aussi, présente un projet de loi,
16 articles, celui-là, consultations particulières aussi, et la
modification est l'ajout de l'identité ou de l'expression de genre aux motifs
de discrimination de l'article 10. Un
ajout, identité de genre, un ajout. 16 articles, consultations
particulières. C'était en 2016.
Qu'est-ce qui arrive entre 2016 puis 2019? Il
arrive un nouveau ministre, un nouveau gouvernement puis le projet de loi n° 21. Alors, adoption non
seulement sous bâillon, projet de loi de 36 articles, et on modifie et le
préambule et l'article 9.1 pour ajouter la laïcité, sans autre forme et
sous bâillon. Mais là, cette fois-ci, ça n'a pas de bon sens de continuer à
fonctionner comme ça, Mme la Présidente. Sincèrement, là, aller jouer dans la
Charte des droits et libertés comme ça, sans autre forme de consultation, alors
que tous les prédécesseurs du ministre ont compris qu'il fallait faire quelque
chose de très particulier, que ce n'est pas quelque chose où on se lève le
matin puis on décide de changer la Charte des droits et libertés...
Bien, les trois articles qui suivent, là, 133,
134, 135, c'est exactement ça. On s'en va changer le préambule à 133. À 134, on
insère après l'article 3 : «Toute personne a [le] droit de vivre en
français...» Puis, à 135, on ajoute... on remplace, l'article 9.1,
«libertés et droits fondamentaux» par «droits et libertés de la personne» puis
par insertion, après «l'État,», «de l'importance accordée à la protection du
français». Ça, là, trois articles sans consultations particulières, sans projet
de loi autoportant, qui est séparé du reste, c'est un... c'est vraiment
incroyable, ça n'a jamais été fait avant.
Et là ça fait deux fois de suite, dans deux projets
de loi, qu'on introduit des changements à la Charte des droits et libertés de
façon, je dirais, un peu rapide et en accéléré, sans se rendre compte que l'on
touche à un des piliers de notre vie en société qu'est la Charte des droits et
libertés. Alors, oui, la Charte de la langue française est importante, mais je
voudrais que les gens se rendent compte qu'on joue dans quelque chose de
fondamental, un pilier de la société, par trois petits articles, comme ça,
qu'on change sans consultation.
Je peux parler encore longtemps, parce que la Commission
des droits de la personne, évidemment, a fait ses commentaires, on les a
entendus. Le ministre, il vient dire : On a entendu la Commission des
droits de la personne. Il n'y a pas eu cinq jours, il n'y a pas eu cinq jours
de consultations. Il n'y a pas eu de consultation générale, comme notre
collègue de l'Acadie. Il n'y a pas eu de consultations particulières, comme
Thomas Mulcair et Stéphanie Vallée. Ça n'a pas de bon
sens de fonctionner comme ça. Ça n'a pas de bon sens, Mme la Présidente, de
changer la Charte des droits et libertés à travers une autre loi comme on va
changer, plus tard, d'autres choses, aussi importantes, à travers ce projet de
loi là. Je veux bien croire que la langue française est importante, mais la
Charte des droits et libertés l'est autant. Puis il y avait eu un grand débat
dans les années 70 : Est-ce qu'on met la Charte des droits et
libertés avec la Charte de la langue française? Il a été décidé que c'était,
chacun, autoportant. Mais là ça n'a pas de bon sens d'aller jouer dans un puis
d'aller jouer dans l'autre avec une telle légèreté. C'est ça, ma conclusion,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien,
quelques commentaires. Dans le fond, dans tous les projets de loi qui ont été
déposés, là, et je ne les ai pas sous la main, mais je doute qu'ils contenaient
qu'un seul article, là. Dans les exemples que vous avez donnés, là, 2006,
2008... Peut-être celui de la députée de l'Acadie, là, je crois que ça doit
être l'égalité... ça doit être à l'époque où elle était ministre de la
Condition féminine, vous me corrigerez.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
c'est ça.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
bon. Ça, c'est possible que, dans ce projet de loi là, il n'y avait qu'un seul
article.
La Présidente (Mme Thériault) : Six,
je crois. Est-ce que c'est bien ça, Mme la députée?
Mme David : Il y avait quatre
articles.
La Présidente (Mme Thériault) : Quatre
articles.
M. Jolin-Barrette : Et est-ce
que les quatre articles touchaient uniquement la Charte de la... la Charte des
droits et libertés de la personne?
Mme David : Oui, c'était pour
changer la... c'était pour ajouter...
La Présidente (Mme Thériault) :
C'était dans la charte.
Mme David : ...la justice, liberté
et paix, et puis les femmes et les hommes.
• (17 heures) •
M. Jolin-Barrette : Oui, mais,
dans les autres projets de loi, là, je doute que ça touchait uniquement la
charte. Et on en a, des exemples, également, qui touchaient... où est-ce que la
charte a déjà été modifiée par d'autres véhicules législatifs qu'uniquement un
véhicule législatif portant uniquement sur la charte. Il n'est pas nécessaire
d'avoir un projet de loi uniquement sur les dispositions modificatrices par
rapport à la Charte des droits et libertés de la personne. La charte peut être
modifiée.
Et, lorsque
vous faites le parallèle, vous dites : Bon, dans les années 70, il y
avait des discussions à savoir est-ce que la Charte des droits et
libertés de la personne et la Charte de la langue française devraient être
ensemble, ça a été décidé que non à l'époque. Cependant, aujourd'hui, ce que
l'on constate, c'est qu'ils auraient peut-être dû être ensemble. Savez-vous
pourquoi? Parce que M. Laurin, là, quand qu'il était en commission
parlementaire, là, pour lui, là, c'était l'équivalent. Les droits fondamentaux
qui étaient dans la Charte de la langue française équivalaient aux droits
fondamentaux qui étaient dans la Charte des droits et libertés de la personne.
Or, qu'est-ce que les tribunaux ont fait? Ils ont minimisé les droits
fondamentaux qui étaient dans la Charte de la langue française et ils les ont
considérés comme des droits déclaratoires, donc c'est-à-dire des droits qui ne
veulent à peu près rien dire, et non pas comme des droits exécutoires. Et là on
est obligés de corriger, avec le projet de loi n° 96, cette dérive des
tribunaux, là, qu'ils n'ont pas considéré comme exécutoires les droits
fondamentaux prévus dans la Charte de la langue française.
Pour ce qui est de la Charte des droits et
libertés de la personne et les modifications qu'on y apporte, là, on vient très
clairement faire un lien entre la Charte de la langue française et la Charte
des droits et libertés de la personne pour que ces deux lois fondamentales du
Québec, là, se parlent, interagissent entre elles et s'influencent. Et c'est
important de comprendre que la Charte des droits et libertés de la personne,
c'est un peu l'assise du vivre-ensemble collectif qu'on a au Québec, hein,
c'est ce qui nous gouverne. Puis ce sera intéressant, fort probablement, dans
les prochains jours, on parlera du rapatriement illégitime de la Loi
constitutionnelle de 1982 et de l'insertion de la Charte des droits et libertés
à l'intérieur de celle-ci contre l'assentiment de l'État québécois et de toutes
les formations politiques qui sont rassemblées ici encore aujourd'hui. Mais,
nous, le choix que nous avons fait comme peuple, c'est d'avoir la Charte des
droits et libertés de la personne. Or, il est tout à fait normal et légitime
qu'elle puisse prendre en considération comment les droits et libertés doivent
être interprétés à la lumière des paramètres de la société québécoise, et c'est
exactement ce qu'on vient faire quand on vient modifier le préambule à
l'article 133. À 134, on vient également dire «droits et libertés de la
personne» et l'importance accordée à la protection du français.
Alors,
les droits et libertés, là, quand ils sont évalués puis qu'ils sont interprétés
par les tribunaux, ce qu'on fait, là, c'est que le législateur québécois,
l'Assemblée nationale vient dire : Écoutez, lorsque vous allez faire un
exercice de pondération entre les droits et libertés fondamentaux qui sont
notamment inscrits à la Charte des droits et libertés de la personne, vous
devrez prendre, dans votre pondération, les critères associés à la protection
du français, qui est fondamental au sein de la société québécoise, tout comme
la laïcité l'est aussi. La Charte des droits et libertés de la personne, là,
qui a été présentée par Jérôme Choquette en 1975, là, c'était du bon travail à
l'époque, mais ce n'est pas vrai que c'est figé dans le temps. Ce n'est pas
vrai que la société de 1975, c'est la même société dans laquelle on vit
aujourd'hui. Le fait d'actualiser la charte m'apparaît tout à fait normal si on
veut qu'elle reflète les valeurs de la société québécoise, les valeurs
québécoises, et c'est fondamental.
Et là je m'explique
mal, un peu, votre réaction, parce que vous devriez, tout comme moi, vouloir
valoriser la langue française, et lui conférer un statut tout aussi important,
et que ça... le français soit pris en considération à l'intérieur de la Charte des droits et libertés de la personne. Et
surtout la force de notre système juridique, dans ce cas-ci, le fait de
les mettre au même pied d'égalité, et je le dis très clairement, la Charte de
la langue française est au même pied d'égalité
que la Charte des droits et libertés de la personne, mais c'est qu'elles
peuvent dialoguer, interagir, et qu'on va retrouver, à l'intérieur de la
Charte des droits et libertés de la personne, des composantes associées à la
protection et à la valorisation du français et aux droits fondamentaux.
Alors, on vient,
comme Assemblée nationale, mettre sur le même pied d'égalité la Charte de la
langue française, la Charte des droits et
libertés de la personne. Il n'y aura pas de hiérarchisation entre les deux. Et
les tribunaux ont fait leur travail, et nous, maintenant, on fait le
nôtre et on vient corriger certains éléments, et surtout les deux chartes
doivent se compléter et doivent fonctionner ensemble. Ce n'est pas vrai qu'on
peut regarder juste d'un côté sans prendre en considération ce qui se passe
dans la Charte de la langue française. Alors, les deux doivent être intimement
liées.
Puis,
dernier commentaire, pourquoi est-ce qu'on ne dirait pas que la langue
officielle et langue commune du Québec, le français, ça ne se retrouve pas dans la Charte des droits et libertés
de la personne, qui est une de nos lois fondamentales?
Mme David : Bien,
je trouve que votre réplique est exactement... fait la preuve de ce que
j'avance, exactement. Vous parlez de dialoguer. Il est où, le dialogue? Il est
où, le dialogue de la société? Vous dites : Il faut réparer une erreur
historique. Ça, vous, vous le pensez. Ça n'a pas été présenté au public, ça n'a
pas été présenté en consultation.
M. Jolin-Barrette :
Bien oui!
Mme David : Bien
non! Mais là, il faudra... Voulez-vous qu'on prenne deux semaines à ça pour...
La Présidente (Mme
Thériault) : Attendez, attendez, s'il vous plaît!
Mme David : Vous
voulez qu'on aille vite, vite, vite, là.
M.
Jolin-Barrette : J'ai un dialogue, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Oui, mais là c'est parce que...
Mme David : Ce
n'est pas un dialogue avec l'habileté de...
La Présidente (Mme
Thériault) : Je sens... Non, je sens... Attendez une minute! M. le
technicien, vous allez me regarder, s'il vous plaît, puis on va ouvrir les
micros seulement quand je vais les reconnaître, parce que je connais autant le
ministre que la députée de Marguerite-Bourgeoys, qui sont très passionnés. J'ai
le député de Matane qui a levé la main aussi
pour prendre la parole. J'ai la députée de Mercier qui va aussi vouloir parler.
Et je sens que la Charte des droits
et libertés de la personne va chercher la fibre à l'intérieur de mes collègues.
Donc, pour s'assurer du bon déroulement de nos travaux, il n'y a qu'une
personne qui a la parole présentement, et c'était la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Et
je trouve, Mme la Présidente, que le ministre dit exactement ce que j'avance.
Il me confirme. Il faut, dit-il, actualiser la Charte des droits et libertés de
la personne. On va l'actualiser à travers une autre loi? Mais ce n'est pas
croyable de dire ça comme ça!
Il dit, bon, droits
collectifs versus droits individuels, mais, justement, la Charte des droits et
libertés de la personne est un peu plus du côté des droits individuels, puis là
on s'en va dans les droits collectifs. Puis je vais vous citer ce que la
Commission des droits de la personne dit, qui n'a pas l'air d'avoir aucun écho,
là, du tout, du tout du côté du ministre, et il dit : Il faut dialoguer.
Mais il n'y en a pas eu, de dialogue.
Ce n'est pas ça que
j'appelle un dialogue. Ce n'est pas la députée de Marguerite-Bourgeoys qui
prétend représenter l'ensemble de tous ceux qui réfléchissent à ces
questions-là. Ça a été... je veux dire, ça fait 40 ans, là, que ça a été
adopté, et puis ils n'ont pas voulu mettre... les mettre ensemble. Mais c'est
comme si le ministre disait : Bien, moi, je vais décider de les mettre
ensemble dans tous mes projets de loi, laïcité, langue française. Mais à qui il
a posé la question? À la société? Et il y a juste la Commission des droits de
la personne qui a déposé.
Parce qu'on parle de
secret professionnel, parce qu'on parle de collèges, parce qu'on parle
d'universités, parce qu'on parle d'entreprises, à travers toute cette montagne
d'enjeux que nous traitons sur la Charte de la langue française arrivent comme
ça, au détour, trois petits articles, puis qui ne sont pas petits du tout, du
tout. On change le préambule de la charte des libertés, puis la Commission des
droits de la personne le dit bien :
«Tel ajout serait
juridiquement incohérent avec la fonction du préambule : "Le
préambule permet de définir et d'interpréter les droits garantis par la Charte
[québécoise], entre autres parce qu'il énonce l'objet et la portée." Les
valeurs affirmées dans le préambule sous-tendent les droits et libertés que
contient la Charte des droits et libertés de la personne et elles permettent de
définir le contenu et la portée des droits et libertés reconnus à toute
personne sur le seul fondement de son humanité. [Alors] c'est pourquoi la
Commission avait appuyé, en 2008, l'ajout dans le préambule des mots "de
la liberté", mais aussi du principe de l'égalité entre les femmes et des
hommes. La Commission avait ainsi estimé que ces modifications reflétaient la
rédaction de plusieurs instruments de droit international des droits de la
personne et pourraient contribuer à définir et interpréter les droits protégés
par la Charte.
«Alors, aussi légitime soit-elle, l'affirmation
du statut officiel de norme ne constitue pas une valeur inhérente à la personne
humaine. Elle ne constitue pas non plus un droit de la personne protégé en
vertu du droit international, cadre qui a servi d'inspiration et d'élaboration
à l'adoption de la Charte des droits et libertés. Il serait donc contraire à la
logique de la Charte des droits et libertés de la personne d'introduire ce
considérant à son préambule.»
Ça, là, que ça soit... qu'on le débatte, c'est
une chose, mais qu'on lise ça venant de la Charte des droits et libertés de la
personne, du mémoire qu'ils ont déposé, puis que nous, on fasse fi de tout ça
puis qu'on dit : Non, on l'insère quand même au détour d'un... d'un coin
de rue, qui est un article 133 sur des tonnes d'articles dans ce projet de
loi là, moi, je trouve que c'est de...
Des voix : ...
Mme David : On ne parle pas du même
article 133.
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : ...la
parole.
M. Jolin-Barrette : ...
La
Présidente (Mme Thériault) : Non, non, non, M. le ministre, s'il vous plaît! Je
vais vous passer la parole après.
Mme David : C'est l'article 133
de la Charte de la langue française du projet de loi n° 96, Mme la
Présidente. Ce n'est pas l'article 133 de la Constitution, auquel,
probablement, le ministre a beaucoup... sur lequel il a beaucoup de réserves.
Ce n'est pas le même 133, comme le 21 d'aujourd'hui n'est pas votre 21 d'il y a
deux ans. J'étais là, mais ce n'était pas le même 21.
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
non, non, interpellez-vous pas! M. le ministre, quand bien même que vous
répondez, votre micro est fermé, donc il n'y a pas personne qui vous entend.
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
mais c'est ça, il n'y a pas... Donc, alors, on comprend que... Vous savez, ici,
il y a une présidente, qui a le droit de vie ou de mort sur les micros, donc...
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
il n'est pas brisé, ne soyez pas inquiet. Mme la députée va terminer son
argumentaire, puis je vais vous reconnaître après. Prenez des notes en
attendant.
Mme David : Alors, je veux juste
vous dire, Mme la Présidente, que je ne peux pas... je ne peux pas accepter
qu'on discute de choses aussi fondamentales dans notre société, de deux piliers
très importants, la langue française, les droits et libertés de la personne, sans
que les principaux... les principales parties constituantes, puis c'est toute
la société, les parties constituantes, c'est de la démocratie, n'aient pas été
entendues. C'est sur le processus que je trouve ça vraiment gênant. Alors, pour
cette raison-là, ainsi que 134, 135, c'est évident, évident, écrit dans le ciel
qu'on va voter contre, sur le processus.
La Présidente (Mme Thériault) : Je
vais permettre maintenant à M. le ministre un droit de réplique. M. le
ministre, la parole est à vous.
• (17 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Merci.
La Présidente (Mme Thériault) : Je
vais... Oui, regardez, il fonctionne, bien, hein?
M. Jolin-Barrette : Ça fonctionne,
ça fonctionne.
Bon, plusieurs éléments
par rapport à ce que la députée de Marguerite-Bourgeoys vient de dire, le
processus. Le processus, c'est celui que
nous avons, au Québec, pour modifier les lois, avec les différentes étapes. Les
gens, il y a 51 groupes qui sont venus ici, en commission
parlementaire. C'est la consultation particulière la plus étendue de toute la
législature entre 2014... 2018 et 2022. Il n'y a pas un projet de loi qui a
bénéficié d'autant de consultations plus que celui-ci, Mme la Présidente.
Deuxièmement, quant à nos façons de procéder
pour modifier, j'espère bien que vous êtes en accord avec la légitimité de
l'Assemblée nationale et des membres de cette Assemblée de modifier les lois ou
d'apporter des bonifications, parce que tous ensemble ici... Et c'est de la
façon dont nous tirons notre légitimité, celle des citoyens de votre
circonscription, des gens de Marguerite-Bourgeoys qui sont à ville LaSalle, des
gens de la circonscription de Borduas, des gens de Brossard, des gens du
Plateau, Plateau, des gens de Matane-Matapédia, Mercier... Bien non, mais ce
que je voulais dire, Mercier, c'est dans Le Plateau, Le Plateau est dans
Mercier...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Je
vais vous demander, tout le monde, de laisser le ministre faire son
intervention. Je l'ai repris, je vais vous reprendre. Merci. Ne déconcentrez
pas le ministre. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, moi, je
m'explique mal cet argument-là de dire : Je ne suis pas à l'aise avec les
consultations. Écoutez, il y a plein de groupes qui sont venus en parler,
notamment la FTQ : «Nous soutenons l'idée d'ajouter dans le préambule de
la Charte des droits et libertés de la personne, à l'article 3, le texte
suivant : "Toute personne a le droit de vivre en français, dans la
mesure prévue par la Charte de la langue française." Un message fort sera
ainsi envoyé aux tribunaux, qui ont souvent interprété de manière restrictive
la Charte de la langue française.»
La Centrale des syndicats du Québec : «Plus
encore, les amendements à la Charte des droits et libertés de la personne
proposés par le projet de loi n°96 (les articles 133 à 136) viendront
consacrer, dans le corpus juridique québécois, l'importance du français comme
langue officielle, le droit de vivre et de travailler en français, le droit à
une justice en français et le droit à l'apprentissage du français.»
Écoutez, il n'y a pas juste nous qui en parlent.
Mme David : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
Mme la députée! M. le ministre, continuez. Je m'excuse.
M. Jolin-Barrette : Est-ce que le
Parti libéral est contre les syndicats? Ce n'est pas des organes légitimes et
démocratiques qui font valoir les droits de leurs membres puis leurs opinions?
Est-ce que les gens qui sont dans les syndicats, ce ne sont pas des Québécois
aux yeux du Parti libéral? Bien non, mais je pose la question. Alors, c'est des
organisations qui sont venues nous rencontrer, nous dire qu'ils étaient en
accord. Alors, la Commission des droits de la personne n'a pas le monopole de
l'opinion.
Vous savez, ce qui est surtout important au-delà
de toutes les organisations qui existent, c'est d'écouter la population et que
le droit reflète notamment les valeurs d'une société, ce qui est fondamental,
puis la langue française, elle est
fondamentale au Québec et elle n'a pas été suffisamment protégée, et, surtout,
les droits fondamentaux associés à la langue française n'ont pas été
respectés et ils ont même été interprétés extrêmement restrictivement par les
tribunaux.
L'autre volet de ma réponse, je vous dirais, Mme
la Présidente, c'est relativement au rôle de législateur par rapport aux droits
et libertés. Dans toute société, il y a un encadrement des droits et libertés,
hein? N'importe quel régime juridique fonctionne de cette façon-là. Mais de la
façon qu'une démocratie fonctionne, c'est que le pouvoir de définir de quelle
façon les lois, les chartes sont définies, mais ça appartient à nous tous
autour de la table, comme législateurs. Mais certains, d'une approche, je
dirais, libérale, mais pas au sens de Parti libéral, libérale dans le sens...
M. Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
non, non, c'est le ministre qui a la parole. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, plus
ou moins, parce que, là, le député de La Pinière m'invite à dire des
choses qu'il ne faudrait pas que je
dise, Mme la Présidente. Mais là vous allez me dire : Dites-les pas. Ça
fait que, là, je ne m'embarquerai pas là-dedans, tout ça.
Mais, entre la distinction entre le législateur
et les tribunaux, il y a eu une approche, puis c'est le courant défendu par la
députée de Marguerite-Bourgeoys, que le législateur ne devrait pas se mêler, ne
devrait pas assumer ses responsabilités. Il devrait dire : Écoutez, c'est
les tribunaux, ça, puis on laisse tout le temps les tribunaux. Or, le rôle du
législateur, et notamment dans notre démocratie qui prend sa source au
Royaume-Uni, en Angleterre, bien, le législateur est fort présent. Puis,
lorsqu'il y a un correctif à apporter par rapport à l'interprétation des
tribunaux, par rapport à l'État du droit, bien, ça revient au Parlement de le
faire, puis c'est le principe de la souveraineté parlementaire.
Mme David : ...
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
savez-vous quoi?
La Présidente (Mme
Thériault) : Non.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente...
Mme David : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
non, non, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys!
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est...
La Présidente (Mme Thériault) :
Attendez une minute, M. le ministre. Je m'excuse. Je veux juste vous rappeler
qu'il y a d'autres interventions. Vous avez eu votre droit de parole, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys, je vais vous demander de ne pas interpeller le
ministre. Moi, j'écoute ce que le ministre dit et, quand il y a une autre
conversation, il y a d'autres remarques se posent, je ne suis plus la
conversation. Donc, je demande la collaboration de tous les parlementaires, de
garder vos commentaires pour vous, notez-les, puis, quand je vous redonnerai la
parole, vous pourrez vous exprimer à ce sujet là. M. le ministre, allez-y, la
parole est à vous.
M. Jolin-Barrette : Alors, oui, Mme
la Présidente, mon intervention, elle est prévisible. Savez-vous pourquoi, puis
jusqu'au moment où je vais prendre ma retraite, Mme la Présidente, je vais
plaider ça? Ça revient au Parlement à définir les normes dans notre société.
Les tribunaux sont là pour interpréter. Puis je le dis en ma qualité de
ministre de la Justice, il y a des gens qui sont des chartistes, et qui ont
fait comme Pierre Elliott Trudeau, et qui ont défini une constitution sans
l'aval même de l'Assemblée nationale, qui ont imposé une Charte des droits et
libertés sans l'aval même du peuple québécois, sans l'aval même des élus de la
nation québécoise. Comment voulez-vous, dans un système comme celui-ci,
légitimer alors qu'on tient le pouvoir des électeurs, des électrices, des
citoyens du Québec? Il y a un déficit démocratique dans cette façon de procéder
là, et moi, je défendrai toujours la souveraineté parlementaire parce que ce
n'est pas vrai qu'on doit abdiquer nos pouvoirs en tant que législateurs.
Vous savez, notre système démocratique repose
sur trois piliers : l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Chacun
doit jouer son rôle. Mais ce n'est pas vrai qu'on va annihiler le pouvoir du
législateur puis ce n'est pas vrai que le législateur ne prendra pas sa place
pour déterminer de quelle façon les lois vont être définies. Après ça, il y a
un contrôle judiciaire qui est effectué. D'accord. Mais le législateur est tout
à fait légitimisé... légitimé d'intervenir dans le cadre d'un débat public,
d'autant plus que le législateur tire son mandat de la nation.
Alors, bien entendu, il y en a qui ne voudraient
pas qu'on agisse. Il y en a qui voudraient dire : Bien, écoutez, on
n'interviendra pas, puis ça va être uniquement la jurisprudence. Or, qu'est-ce
qui est source de droit à la base? Bien, ce sont les lois, hein? C'est la
création d'une loi qui amène à une création jurisprudentielle par la suite.
Mais le fait générateur, la genèse de tout ça, c'est le fait qu'on s'est doté
des organes délibératifs au sein de notre démocratie, puis ça s'appelle
l'Assemblée nationale puis ça s'appelle du monde qui se présente aux élections,
qui représentent leurs citoyens puis qui disent : Bien, nous, on va voter
des lois, puis on va définir ce pour quoi on a été élu, puis on va venir faire
en sorte d'adopter des lois qui vont représenter notamment les valeurs de la
société, et ça se fait dans tous les pays démocratiques. Mais c'est bizarre,
quand c'est le Québec, on l'attaque, on dit aux élus de la nation
québécoise : Vous ne devriez pas légiférer là-dessus puis vous faites du
populisme.
Moi, jamais je ne vais pouvoir me réconcilier
avec ça, jamais, puis je vais toujours défendre le rôle d'un élu qui travaille
pour ses concitoyens, qui vient légitimement à l'Assemblée nationale, qui vote
des lois puis qui vient dire : Bien, le droit, le pouvoir du législateur
est le suivant. La loi pourra être contestée par la suite devant les tribunaux.
C'est de la façon... Mais il ne devrait pas y avoir de suprématie des tribunaux
sur la souveraineté parlementaire. La source de nos institutions, anglaise,
fonctionne comme ça. Et savez-vous même quoi? En Angleterre, il n'y a même pas
de constitution écrite. Ça fonctionne depuis 1215. Mais on vit dans un régime
où l'État canadien a décidé de faire fi de la volonté du Québec.
Puis je rappellerai, Mme la Présidente, que même
les gouvernements libéraux ont toujours refusé d'adhérer à cette constitution-là, qui a été imposée de force
au Québec. Puis qu'on soit autonomiste, souverainiste, fédéraliste, tous
les «istes» que vous voulez, je pense que
tout le monde doit se rallier sous ce consensus québécois là puis reconnaître
tout le temps la souveraineté de l'Assemblée nationale. Alors, pour la
charte, je suis passé un petit peu plus loin, mais ça fait en sorte que, oui,
on a le droit de modifier la Charte des droits et libertés de la personne,
comme ça s'est fait à visage découvert, ça
fait un an avec le projet de loi est déposé, puis je m'explique mal la
frilosité du Parti libéral sur ce point-là.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
J'ai le député de Matane qui s'était... qui avait levé la main. Après, la
députée de Mercier. Après, je reviendrai au député de La Pinière et,
après, Mme la députée de Marguerite-Bourgeois.
M. Bérubé : Merci...
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
je vous demande d'être patients, évidemment. M. le député de Matane-Matapédia.
• (17 h 20) •
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. Toujours pertinent de questionner l'intention du législateur, le
législateur est devant nous.
Alors, juste avant, j'ai bien
noté au passage que le ministre fait une description de ce qui est
souverainiste, fédéraliste, autonomiste. Je veux juste indiquer au passage que,
lorsqu'on préside le Conseil de la fédération canadienne, on est nécessairement
un fédéraliste, sinon on ne nous donne pas cette job-là. Donc, on peut bien
jouer sur les mots, mais on est soit dans l'ensemble canadien qu'on accepte, y
compris avec la trahison de 1982, M. le ministre, ou on cherche à en sortir
avec honneur, et avec intégrité, puis avec la fierté d'être autre chose qu'une
province canadienne. Je dis ça au passage.
Je veux questionner le législateur parce que la
députée de Marguerite-Bourgeoys pose des questions qui vont dans le sens de mon
intervention. À terme, qu'est-ce que le ministre veut faire? Or, le
26 février dernier dans La Presse, l'ex-journaliste retraité
Denis Lessard, je ne sais pas comment il a obtenu ça, je n'en ai aucune
idée, mais il prétend, et je cite : «[Le nom de famille du ministre]
planche sur une constitution du Québec». C'est spécial. Alors, les lecteurs du
journal La Presse et son caucus l'ont appris en même temps, je suis
assez convaincu de ça. Ça n'a pas été discuté en caucus, peut-être même pas Conseil
des ministres.
Donc, est-ce que le ministre peut nous indiquer
que le journaliste de La Presse dit vrai, qu'il planche sur l'idée
d'une constitution du Québec? Et, si c'est le cas, bien, ça devient intéressant
avec la conversation qu'on a eue tout à l'heure sur la Constitution de 1982,
sur la Charte des droits, sur la Charte de la langue française. Alors, est-ce
qu'à terme c'est la destination? Est ce
qu'il a... Je vais poser ma question très précisément parce que le ministre est
souvent habile pour les... les détourner un peu, les réponses. Est-ce
qu'il travaille, oui ou non, sur un projet de constitution du Québec?
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je travaille sur plusieurs projets, plusieurs projets de loi. Vous
connaissez mon intérêt aux travaux parlementaires, au cadre législatif, alors
je travaille sur plusieurs choses. Alors, malheureusement, je ne confirmerai
pas ou je n'infirmerai pas que je travaille sur les différents projets, et il
sera le premier informé, le député de Matane-Matapédia en tant que député,
parce que, si jamais...
M. Bérubé : Ah! bien... surprenant.
M. Jolin-Barrette : Attendez!
Attendez!
La Présidente (Mme Thériault) : Allez-y,
M. le ministre, c'est vous qui avez la parole.
M. Jolin-Barrette : Si jamais, un
jour, il y a un texte législatif en raison du privilège parlementaire, ce sont
les 125 élus de l'Assemblée nationale qui pourront le déposer, à
l'exception du député d'Hochelaga-Maisonneuve, qui le présente parfois aux
syndicats avant de le déposer à l'Assemblée, mais ça, c'est autre chose.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
merci, M. le ministre. On retourne au député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Bien, j'ai l'impression
que le prochain texte, on en entendra parler, ça ne sera pas législatif, ça va
être la suite du texte de M. Lessard, que je vais informer de la réponse
du ministre. Alors, c'est très intéressant.
Alors, je vous l'ai dit, c'est habile, il ne
répond pas à la question. Est-ce qu'il travaille là-dessus? Non. Probablement
que ça aurait intéressé ses collègues qui en apprennent souvent plus sur ses
intentions dans les journaux que dans les instances où ils siègent. C'est ce
que me confient certains de ses collègues. D'ailleurs, ce n'est pas mauvais,
moi-même, je suis un peu solitaire parfois, mais le ministre l'est aussi.
Alors, je pense qu'ils seraient intéressés à partager avec le ministre un peu
plus de lui-même, n'est-ce pas? Vous n'êtes pas obligés de répondre, les
collègues, vous savez ce que vous m'avez dit. Alors, vous vous connaissez.
Ceci étant dit...
Des voix : ...
M. Bérubé : Ah! ils se
connaissent. Ils sont soit ici ou ailleurs, urbi et orbi.
Donc, c'est parce que c'est important. Si la
destination, c'est une constitution, ce n'est pas nécessairement une mauvaise
chose, mais ça implique un certain nombre de trucs, c'est enchâsser des lois
fondamentales. Par exemple la loi n° 99, ça en
est une qui est fondamentale, la Charte de la langue française, la Charte des
droits et libertés, des éléments sur la laïcité. D'ailleurs, on n'en parle dans
l'actualité aujourd'hui, la laïcité. J'imagine que le gouvernement va
travailler fort à ce qu'on ne finance plus les institutions scolaires qui sont
confessionnelles. Il y en aurait 50. Alors, ça, c'est dans La Presse
aussi, si je ne me trompe pas — on aura des choses à dire là-dessus — donc
des éléments fondamentaux. Si on adopte cette loi-là, puis, manifestement, on
va l'adopter, puis je réitère au ministre que je souhaite qu'on l'adopte durant
cette session parlementaire, je lui ai dit en privé tout à l'heure, je vous
révèle et vous partage que je souhaite ça aussi. Est-ce qu'elle pourrait se
retrouver dans une constitution? Ce n'est pas une mauvaise chose, mais c'est
tellement un enjeu important que ça mérite d'être partagé.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre,
M. Jolin-Barrette :
La réponse à cette question-là, c'est, oui, la Charte de la langue
française fait partie de la constitution québécoise. Alors, il existe déjà une
constitution québécoise actuellement. Est-ce qu'elle est dans un document écrit
où tout est rassemblé? Actuellement, la réponse, c'est non. Mais est-ce que
l'État québécois dispose d'une Constitution? La réponse, c'est oui, et ce sont
les lois fondamentales du Québec, donc la Loi sur l'Exécutif, la Loi sur
l'Assemblée nationale, la Charte des droits et libertés de la personne, la
Charte de la langue française, la loi 99 également. Toutes ces
dispositions-là font partie de la Constitution québécoise, et ça inclut
également les dispositions qui sont dans le texte formel de la Loi constitutionnelle
de 1867, qu'on va voir un petit peu plus tard, tout à l'heure, la Loi
électorale aussi, je vous dirais également, qui en fait partie. Donc, les lois
qui sont vraiment, là, fondamentales pour la nation font partie de la
constitution québécoise d'une façon intangible.
La question du député de Matane-Matapédia,
c'est : Est-ce que tout se retrouvera dans un document rassemblé? Il y a
beaucoup d'auteurs qui ont écrit là-dessus, sur la pertinence d'une telle
chose. Les 50 États américains sont tous dotés d'une Constitution. Il y
a... Je crois que c'est l'Alberta ou la Colombie-Britannique qui a également
une Constitution. Alors, voyez-vous les amendements qu'on fait à la Loi
constitutionnelle de 1867 pour notamment faire en sorte d'inclure que la seule
langue officielle de l'État québécois est le français et que les Québécoises et
les Québécois forment une nation, bien, c'est versé à l'intérieur de la
Constitution québécoise parce qu'on a une Constitution qui existe. Est-ce
qu'elle est matérielle? Non. Est-ce que je peux la toucher actuellement? Non,
mais elle existe. Alors, comme État fédéré nous avons une Constitution comme
l'État fédéral a une Constitution. Mais est-ce que vous pouvez aller l'acheter
en librairie présentement? La réponse est non. Vous devrez avoir plusieurs
textes de loi pour la former, incluant les dispositions qui sont prévues à la
Loi constitutionnelle de 1867.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de Matane-Matapédia
M. Bérubé : C'est compliqué
être une province, hein? Ça donne ça. Effectivement, ça serait beaucoup plus
simple si on pouvait tout faire nous-mêmes, sans autorisation, sans la reine,
sans ses héritiers. Je crois que le conseiller à la gauche du ministre a aussi
écrit là-dessus, en tout cas, selon ce que j'ai ici, plein de choses dont on
peut s'inspirer. Ça pourrait être un autre... l'objet d'un autre débat, celui
de notre capacité, nous-mêmes, à signer nos lois sans l'aide de personne.
D'ailleurs, on peut être fédéraliste, comme le ministre, et ne pas être
monarchiste. Ce serait un beau positionnement. Moi, je ne suis pas ému, là,
quand je parle de la reine, le ministre, un peu plus, mais je me souviens de
son premier serment à l'Assemblée nationale, donc on le trouvera peut-être.
Juste dire que ça, ça serait quelque chose d'intéressant, ça, hein? Me Patrick
Taillon, quelqu'un de très respecté, que je connais bien, qui m'a déjà succédé
dans des fonctions politiques, il s'est prononcé là-dessus déjà. Rien n'empêche
la formation fédéraliste de la Coalition avenir Québec de pouvoir en faire
davantage sans lords britanniques, c'est possible de le faire. Il y a un guide
de sortie, alors il peut s'en inspirer. Je me permets de glisser ça au passage.
Merci.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, je voudrais juste, en toute amitié, Mme la
Présidente, corriger le député de Matane-Matapédia.
La Présidente (Mme Thériault) : ...
M. Jolin-Barrette : Non, c'est vrai,
il ne mérite pas tant que ça une correction.
La Présidente (Mme Thériault) : Non.
M. Jolin-Barrette : ...
M. Bérubé : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
essayez-vous pas.
M. Jolin-Barrette : Il se méprend
beaucoup, parce qu'il dit «fédéraliste». Les gens qui sont fédéralistes sont à
sa droite. Les gens d'en face, ce sont des nationalistes.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Est-ce
que vous avez terminé, M. le ministre? M. le ministre, est-ce que vous avez
terminé votre intervention? Oui?
M. Jolin-Barrette : Oui, oui, je
suis intéressé.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Je veux compléter. Mme
la Présidente, le chef du ministre s'est fait poser la question suivante :
S'il y avait un éventuel référendum, il voterait pour quoi? Il voterait pour le
Non. Il l'a dit à moi à l'étude des crédits, que le
Québec est pour toujours... il vaut mieux d'être dans la fédération canadienne.
Il a été président du Conseil de la fédération canadienne. Il a dit à la
communauté anglophone, lors de l'élection de 2018, qu'il y avait une
alternative pour les fédéralistes, que c'était la CAQ. Voulez-vous que je
continue la liste? Et là je ne la regarde même pas, je l'ai de mémoire. Alors,
je l'invite à demander à la ministre la Sécurité publique, à la présidente du
Conseil du trésor, au ministre de l'Économie, au ministre de la Santé si, eux,
se considèrent fédéralistes, oui ou non. Il pourra nous revenir avec les
réponses, on pourra les partager. Je vous remercie, madame.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre, ça va? Oui? J'ai la députée de Mercier qui a demandé la parole.
Mme la députée, c'est à vous.
• (17 h 30) •
Mme Ghazal : Bien, merci, Mme la
Présidente. Là, on est sur un article très, très, très important, et même le
ministre aussi l'a reconnu. Vous savez, moi, comme porte-parole en matière de
langue française pour Québec solidaire, évidemment, je suis tout à fait
d'accord avec le fait que, dans une loi fondamentale comme la Charte des droits
et libertés, qu'il soit inscrit que le français est considéré comme la seule
langue officielle et la langue commune. Ça, il n'y a aucun doute là-dessus,
totalement d'accord avec ça. Donc, je le dis tout de suite, je vais voter pour
l'article 133 du projet de loi n° 96 parce que c'est important aussi
de défendre les droits collectifs comme la langue française. Ça fait partie...
Le fait que les Québécois puissent parler en français publiquement partout,
c'est un droit collectif.
Mais c'est
quand même très, très important de respecter aussi les droits et libertés de la
personne. Je viens de lire, par exemple,
un article d'un professeur, au Bangladesh, qui a été arrêté par la police
simplement parce qu'il a fait une distinction entre la religion et la
science. C'est une chose qui n'arriverait pas ici, parce qu'on a un droit...
une Charte des droits et libertés de la personne. Donc, il ne faut pas prendre
à la légère, c'est une charte importante, une loi fondamentale.
Et donc moi,
j'ai une question pour le ministre : Le fait de passer par une loi
ordinaire, qui est le projet de loi n° 96, pour modifier la Charte
des droits et libertés, est-ce que ça ne l'affaiblit pas — je
parle du processus — de
le faire de cette façon-là, ça ne vient pas l'affaiblir, au lieu de le faire de
façon... par la voie législative, par un projet de loi, pour avoir ce débat-là
et cette discussion-là sur qu'est-ce qu'on modifie dans la Charte des droits et
libertés?
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je vous dirais,
au contraire, c'est le processus tout indiqué. On est dans le cadre d'un
processus législatif et on n'a pas à isoler la Charte de la langue... la Charte
des droits et libertés de la personne dans une... dans un projet de loi
distinct. Dans le fond, la Charte des droits et libertés de la personne peut
être modifiée par une loi du Parlement, ce que nous faisons actuellement. Donc,
il n'y a pas de formule consacrée.
Mme Ghazal : Qu'est-ce qui
distingue, donc, une loi ordinaire d'une loi fondamentale si on peut la changer
comme ça, au détour d'un article, avec une loi ordinaire?
M. Jolin-Barrette : Bien, le
Parlement fonctionne de cette façon-là. Mais ce qui est important, c'est le
statut qui y est consacré. La Charte des droits et libertés de la personne,
elle a un statut quasi constitutionnel, interprétation jurisprudentielle,
notamment. La Charte de la langue française, elle aura également un statut de
cette nature-là parce qu'elle sera prépondérante sur les autres lois également.
Alors, c'est le statut qu'on lui confère, donc c'est l'importance qu'on lui
donne en matière d'interprétation des lois qui est importante.
Mme Ghazal : Et donc même la Charte
de la langue française pourrait être modifiée par une autre loi, au détour d'un
article.
M. Jolin-Barrette : Comme nous
faisons actuellement. Le projet de loi n° 96, c'est
ça, il modifie la loi 101. Et c'est une
bonne chose que nous la modifiions, parce que ça a pris 40 quelques années
avant de faire une réforme globale.
Mme Ghazal : Mais j'aimerais...
J'ai entendu beaucoup le ministre parler de l'importance, par exemple, de la
langue française, je veux dire, tout le long, on l'a entendu parler, puis ça,
on est convaincus de ça. J'aimerais qu'il nous parle un peu plus de son
attachement à la Charte des droits et libertés de la personne.
M. Jolin-Barrette : Bien, elle
est tout aussi fondamentale dans notre société. Et, vous savez, j'ai un
attachement particulier à la Charte des droits et libertés de la personne,
beaucoup plus qu'à la charte des droits et libertés. Savez-vous pourquoi?
Mme Ghazal : ...comprendre la
distinction.
La Présidente (Mme Thériault) : ...
Mme Ghazal : Canadienne. O.K.
M. Jolin-Barrette : Oui. La
Charte des droits et libertés de la personne, c'est la charte québécoise. La
charte des droits et libertés, c'est la charte canadienne. Pourquoi j'ai un
attachement profond envers la Charte des droits et libertés
de la personne? Parce que cette charte a été adoptée par notre Assemblée avec
la volonté des élus de la nation québécoise et elle a été adoptée
démocratiquement, tandis que la Charte canadienne, elle a été insérée dans le
cadre d'un rapatriement, sans l'approbation d'un des partenaires fédératifs les
plus importants. Et ce que ça a fait, c'est que ça a amené une
constitutionnalisation des règles par une constitution qui n'a pas été adoptée
par un des partenaires fédératifs à l'intérieur d'une fédération. Voyez-vous
l'absence de... d'illégitimité de cette charte? Et ça a un impact concret sur les droits collectifs de la nation
québécoise, que les décisions soient basées sur la charte des droits et
libertés.
Or, dans notre société, idéalement, ce qu'il
faudrait, et la charte des droits de la personne est beaucoup plus complète que
la charte des droits et libertés, ça serait que notre droit, au Québec, soit
interprété à la lumière de la Charte des droits et libertés de la personne
uniquement et non pas en fonction de la charte des droits et libertés. Et ça,
comme parlementaires, on devrait vouloir travailler dans ce sens là pour
dire : Bien, écoutez, la constitutionnalité de nos lois, si elles ne sont
pas en accord avec les dispositions de la Charte des droits et libertés de la
personne, bien, qu'elle soit contestée sur cette base-là devant les tribunaux
québécois. D'accord. Mais l'organe de contrôle, le texte de contrôle sera la
Charte des droits et libertés de la personne.
Or, si l'administration contrevient aux droits
et libertés, bien, il y aura sanction de la part des tribunaux, mais elle sera
fondée sur la Charte des droits et libertés de la personne, charte qui représente
les valeurs de notre nation, les valeurs de notre société, en fonction des
valeurs québécoises qui vont y être intégrées, notamment la langue française.
Et c'est un exercice, toujours, de pondération. Dans toute société, là, il y a
toujours des règles. La question, c'est : Comment est-ce qu'on justifie l'atteinte à une liberté ou à un droit?
Parce qu'il n'y a aucun droit, dans n'importe quelle société, qui est
absolu. Il y a toujours des règles. Il y a toujours un encadrement, parce que,
sinon, ça serait le chaos, hein?
Puis c'est ça qu'on fait. Quand on vit dans une
collectivité, là, on se dote d'outils législatifs pour faire en sorte de
dire : Voici les paramètres dans lesquels on vit, hein? Et, à partir de ce
moment-là, nous, on dit : Au Québec, c'est de cette façon-là qu'on va
vivre dans notre société. Alors, notre droit doit refléter nos consensus
sociaux et la façon dont on vit au Québec, et avec tous les droits qu'on vient
y consacrer puis toutes les libertés également.
Mme Ghazal : ...la charte? Oui.
La Présidente (Mme Thériault) : Attendez
que le ministre ait terminé. Votre micro va s'ouvrir.
Mme Ghazal : C'est parce que
c'était long.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui.
Bien, le ministre, quand même, il peut prendre le temps qu'il veut. Si la
réponse est complète, moi, je suis... Vous avez du temps, le ministre peut
compléter comme il veut, pas de problème.
Mme Ghazal : O.K. Mais, c'est
vrai, la Charte des droits et libertés de la personne a été votée par les élus
du Québec. Mais le ministre est au courant qu'on est quand même dans une
démocratie représentative, et on peut avoir un pouvoir absolu, quasiment, à
l'Assemblée nationale, sans avoir eu des votes... plus de 50 % des votes.
Ça, on le sait, c'est notre système de représentativité. Donc, quand on fait
des changements à une loi aussi fondamentale que la Charte des droits et
libertés de la personne, c'est normal qu'il y ait un débat. Et là ça a été fait
deux fois; maintenant, sur le projet de loi n° 96.
Et, comme je vous le dis, je suis d'accord. Il y a eu aussi l'autre projet de
loi, n° 21, l'autre, le premier, et avec lequel, ça,
cette modification-là, nous n'étions pas d'accord. Mais ce qui est important,
c'est que, quand on vient modifier, si on veut avoir... Oui?
M. Jolin-Barrette : ...vous
n'étiez pas d'accord avec la loi n° 21.
Mme Ghazal : Avec le projet de
loi n° 21.
M. Jolin-Barrette : Mais vous étiez
d'accord, quand même, avec le fait qu'on insère dans la Charte des droits et
libertés de la personne...
Mme Ghazal : La laïcité.
M. Jolin-Barrette : ...la laïcité.
Ça, vous êtes d'accord avec ça?
Mme Ghazal : Oui, et même aussi pour
une constitution d'un Québec souverain et non pas d'une constitution dans une
province. C'est à ça que nous, nous aspirons. Il va y avoir aussi comme valeur
la laïcité, avec une assemblée constituante, etc. Je pense que le ministre est
au courant du programme de Québec solidaire.
Donc, ce que j'étais en train de dire, c'est que
c'est une loi tellement importante, alors que la façon qu'on... les
125 députés, comment on est élus, avec un mode de scrutin non
proportionnel du tout, du tout, du tout... Et ça, c'était entre les mains du
gouvernement de changer ça, mais ils ont refusé ou ils ont mis ça aux calendes
grecques en mettant ça sur le dos de la pandémie, qui a le dos large. Donc, à
cause de ça, c'est important, quand on change une loi aussi fondamentale et à
laquelle on tient, comme la Charte des droits et libertés, d'avoir un débat, un
débat de société beaucoup plus large que simplement par les 125 élus qui,
oui, représentent le peuple, mais, comme je le dis, avec un système qui a
beaucoup de défauts de représentativité. Est-ce que le ministre n'est pas
d'accord avec ça, que ça aurait été mieux pour ne pas l'affaiblir, pour ne pas
affaiblir cette Charte des droits et libertés de la personne?
La
Présidente (Mme Thériault) : M. le ministre...
Mme Ghazal :
Je comprends qu'il n'est pas d'accord, mais...
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Pas du tout, il n'y a absolument rien qui est
affaibli. Il y a eu des consultations, les travaux sont publics, c'est la façon
dont on adopte les lois au Québec. Est-ce que vous remettez en question la
façon dont notre Assemblée adopte ses lois...
Mme Ghazal :
...
La Présidente (Mme
Thériault) : Non, non, non! Vous l'interrompez, je déteste ça.
J'essaie d'être juste envers tout le monde, fonctionner de la même manière.
Quand le ministre...
Mme Ghazal :
...
La Présidente (Mme Thériault) : Non! Quand le ministre interpelle les collègues,
c'est très désagréable et, quand c'est
l'inverse, c'est la même chose, c'est aussi désagréable. M. le ministre, vous
avez... seul vous avez la parole. Allez-y.
M.
Jolin-Barrette : Alors, écoutez, Mme la Présidente, les modifications
que nous allons apporter, là, à la Charte des droits et libertés de la
personne, là, dans le cadre du projet de loi n° 96, peut-être, ce n'est
pas un engagement, là, mais peut-être
seront-ils approuvés par la formation politique formant le gouvernement, par le
deuxième groupe d'opposition et par le troisième groupe d'opposition.
Peut-être. Je sais que la députée de Marguerite-Bourgeoys souhaiterait
peut-être aussi l'appuyer, mais là, ça, c'est autre chose. Mais c'est de la
façon dont notre Assemblée fonctionne, c'est de la façon dont nos lois sont
adoptées puis c'est tout à fait légitime.
Et, lorsque vous
abordez le mode de scrutin, c'est une autre discussion. Si vous mettez en doute
la façon dont on adopte les lois à l'Assemblée, la légitimité que vous tirez...
• (17 h 40) •
Mme Ghazal :
...
M.
Jolin-Barrette : 35, 35... 36, je pense... 37?
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre, continuez, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : Bien, honnêtement, Mme la Présidente, je veux juste
rassurer la députée pour dire que c'est tout à fait démocratique, la société
civile peut s'exprimer, on a tenu des consultations. Ça fait plus qu'un an...
ça va faire un an que le projet a été déposé. Toute personne qui aurait voulu
se faire entendre aurait pu se faire entendre dans la société civile. Vous
retournez dans votre comté à chaque semaine, les députés retournent dans leurs
comtés à chaque semaine, ils portent la voix des citoyens au parlement, il y a
une élection à chaque quatre ans, à date fixe, ça ne peut pas être plus
démocratique que ça.
La Présidente (Mme
Thériault) : Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal :
Je ne remets pas en question la façon qu'on vote des lois ici, mais ce que je
dis, c'est qu'on peut toujours faire mieux si on veut être dans une société
vraiment démocratique. Et c'est la raison pour laquelle, par exemple, on tient
tout le temps des consultations particulières, ce qui n'est pas une obligation.
Mais on le fait parce qu'on sait que c'est
important de tenir ces débats-là et non pas seulement accepter, bien, que nous,
on a été représentants... on a été élus et, après ça, on fait ça vite,
vite, vite. C'est extrêmement important, parce que, des fois, on peut se
tromper, et ça fait partie aussi de la discussion puis de la conversation
démocratique, et c'est très important. La Charte des droits et libertés de la
personne, c'est une loi fondamentale, il ne faut pas la changer, je suis
d'accord avec la députée de Marguerite-Bourgeoys, comme ça, au détour d'un
article, comme si c'était n'importe quoi.
Par exemple, on a...
le projet de loi n° 21 a été adopté sous bâillon et
venait modifier la Charte des droits et libertés
de la personne. Donc, il y avait un article à l'intérieur. Je ne dis pas que
c'est ça qui va arriver avec le projet de loi.
M.
Jolin-Barrette : ...
Mme Ghazal :
Non, mais je vais terminer. Je ne dis pas que c'est ça qui va arriver avec le
projet de loi n° 96, mais, quand on touche à cette charte-là, pour montrer
tout le respect qu'on a... Parce qu'on est chanceux, au Québec, de vivre dans
une société qui a une charte comme celle-là, et il faut la respecter et il faut
la traiter avec soin et toucher à ça avec soin, surtout quand on se compare à
d'autres sociétés dans le monde, qui n'ont pas des chartes de droits et
libertés comme celle-là. Je suis née dans des pays où il n'y a pas... on ne
respecte pas les droits individuels. Et souvent on va, par exemple, peut-être
trop respecter les droits collectifs et faire fi des droits individuels, et
donc il faut un équilibre entre les deux. Les droits collectifs, c'est
extrêmement important. À Québec solidaire aussi les droits collectifs, de
justice sociale, etc., c'est très important, mais aussi les droits individuels,
qu'il faut traiter avec soin.
Et souvent, quand
j'entends le ministre, peut-être que... je ne veux pas lui prêter de mauvaises
intentions, mais c'est le sentiment que j'ai, quand il s'agit de défendre la
nation, par exemple, comme... des valeurs comme la laïcité, la langue
française, c'est comme s'il les plaçait au-dessus des droits individuels. Moi,
ce que je dis, c'est : Il faut que ça soit un équilibre. Il faut avoir à
coeur les droits collectifs autant que les droits individuels et en prendre
soin comme de la prunelle de nos yeux et non pas seulement dire : Bien,
nous, ici, on a été élus avec un mode de scrutin non proportionnel hérité des Britanniques
et dire : Bien, après ça, on peut faire ce qu'on veut, c'est terminé
pendant quatre ans. Non, ce n'est pas
vrai, ce n'est pas uniquement à chaque quatre ans que le débat
démocratique a lieu, c'est tous les jours, tout le temps.
Et même pendant qu'on a ces débats-là et ces
discussions-là, on fait aussi oeuvre de... je vais utiliser un terme utilisé par les organismes communautaires,
d'éducation populaire aussi, en même temps, pour que les gens
s'intéressent à ces sujets-là qui les touchent à tous les jours. Et la Charte
des droits et libertés de la personne, c'est beaucoup trop pas important pour
dire que ce n'est pas grave, nous, on est d'accord, tout le monde est d'accord
pour ajouter que la langue française, c'est la langue commune, la langue officielle,
donc on la met.
Mais des fois on n'est pas d'accord avec
certains aspects, comme le projet de loi n° 21, et le projet de loi
n° 21 est adopté sous le bâillon, et à l'intérieur duquel il y a un
article qui change la Charte des droits et libertés. Même si tout le monde est
d'accord avec le changement, il faut quand même prendre ça avec soin, et avec
sérieux, et avec rigueur dans une société démocratique comme la nôtre. Et,
c'est ça, j'essaie de sensibiliser le ministre avec ça, parce qu'il a l'air un
petit peu à prendre ça comme : Ce n'est pas grave, on la change, on a été
élus, c'est terminé, on peut faire ce qu'on veut. Je voulais juste le
sensibiliser.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je suis sensibilisé.
Trois choses. La députée de Mercier vient de dire qu'elle est d'accord avec la
modification, au sein de la Charte des droits et libertés de la personne,
d'inscrire la laïcité de l'État. Je le retiens bien. Deuxième élément, la
procédure législative d'exception est prévue à notre règlement. Troisièmement,
le débat démocratique...
Mme Ghazal : ...
La Présidente (Mme Thériault) : La
procédure d'exception. La procédure d'exception, dans le langage commun des
parlementaires, on appelle ça le bâillon.
Mme Ghazal : Merci.
M. Jolin-Barrette : Troisièmement,
la députée de Mercier nous dit : Écoutez, le débat démocratique est à tous
les jours, puis ce n'est pas vrai qu'on peut faire ce qu'on veut une fois qu'on
a été élu. Je suis d'accord avec elle. Puis la
démonstration qu'il existe un débat démocratique, c'est que la députée de
Mercier fait bien son travail. Depuis quatre ans, je l'observe à l'Assemblée, elle est dans son rôle
de porte-parole de l'opposition. Et c'est vrai, encore aujourd'hui, on
est en commission, on en débat, et elle exerce son contrôle... son rôle de
contrôleur de l'action gouvernementale, et ça tire sa source de son élection et de son rôle de députée, fondamental aussi.
Alors, moi, honnêtement, je trouve qu'à tous les jours, avec les questions qu'elle me pose, moi, mon
collègue de l'Économie, elle exerce bien son travail, et Finances
également.
Et donc le contrôle démocratique s'effectue,
oui, à l'extérieur du parlement, mais principalement au parlement par,
notamment, les questions, les interventions. On aura un exercice important au
cours des prochaines semaines, celui de l'étude des crédits budgétaires, qui,
vous en conviendrez, Mme la Présidente, est un exercice qui est fastidieux pour
plusieurs ministres et qui est sportif, si je pourrais dire.
La Présidente (Mme Thériault) : ...incontournable
de notre démocratie.
M. Jolin-Barrette : C'est cela.
J'ai terminé.
La Présidente (Mme Thériault) : Parfait.
Donc, ça va, Mme la députée de Mercier?
Mme Ghazal : Non.
La Présidente (Mme Thériault) : Vous
avez d'autres choses? Allez-y.
Mme Ghazal : Je ne sais pas
comment interpréter cette flatterie soudaine que le ministre a témoignée à mon
égard. Je ne sais pas comment interpréter ça, mais ce n'est pas pour couper le
débat, j'espère.
J'ai quand même une question, une question par
rapport à la Constitution. Étant donné qu'on ne sait pas encore s'il y aura une
constitution ou pas, j'ai quand même une question par rapport à ses
préférences. Est-ce que le ministre aime mieux les régimes... Parce qu'il a dit
tout à l'heure qu'on ne peut pas acheter la constitution du Québec, mais elle
existe. Et, par exemple, en Grande-Bretagne, il y a déjà une constitution non
écrite ou, en tout cas... et ça a toujours fonctionné comme ça. Lui, sa
préférence, est-ce que c'est les régimes avec constitution écrite ou les
constitutions de type convention? C'est une question de...
La Présidente
(Mme Thériault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Écoutez, je
ne me suis pas penché sur cette question-là. Encore faut-il que je travaille
sur une constitution.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
Mme la députée, allez-y.
Mme Ghazal : Oui,
je comprends que le ministre réfléchit au fait... s'il va travailler sur une
constitution ou non. Il est en réflexion pour travailler sur une
constitution pour une province... une province dans une fédération ou pas.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien,
honnêtement, moi, tout comme le député de Matane-Matapédia, je lis les journaux
et, parfois, j'apprends des choses dans les journaux. Et donc, Mme la
Présidente, l'avenir...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Comme les
procès secrets.
La Présidente (Mme Thériault) :
...M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : L'avenir
nous le dira, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) : Et
voilà.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est
sûr, je n'étais pas au courant, c'était secret.
La Présidente (Mme Thériault) :
Est-ce que vous avez d'autres commentaires, Mme la députée de Mercier, ou ça
va?
Mme Ghazal : Non, ça va.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va? D'accord.
Mme Ghazal : Merci, ça va.
Donc, on va attendre de voir ce qui va arriver avec cette constitution. Moi, ce
que j'interprète, mais peut-être que je lui prête des motifs... pas des motifs,
des intentions, merci, peut-être... Oui?
La Présidente (Mme Thériault) : ...des
initiatives, c'est correct.
Mme Ghazal : Oui, exactement.
Peut-être que lui, il a envie d'avoir une constitution écrite puis qu'il essaie
d'en parler avec ses collègues. Je les regarde. Très bien, merci.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça va. J'ai le député de La
Pinière. C'est votre tour maintenant, M. le député de La Pinière, et
après ça je reviendrai à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
• (17 h 50) •
M. Barrette : Merci, Mme la Présidente.
Je vais simplement faire un commentaire qui est en ligne avec les commentaires
qui ont été faits. Mais je vais commencer par dire que je ne comprends pas les
collègues des deuxième et troisième oppositions, parce qu'ils devraient être
heureux, le gouvernement actuel se comporte comme s'il était un pays. Toute la
démarche est telle qu'on va faire des lois et des règlements comme si on était
un pays, même si ce n'est pas le cas. Et puis peut-être qu'un jour leur rêve se
réalisera. Mais là, à date, tout ce que le gouvernement actuel fait, c'est de
mettre en place des lois et des règles qui seraient en place si on était un
pays. C'est intéressant à regarder. C'est un commentaire, Mme la Présidente, ce
n'est pas une question, et je ne souhaite ni débat ni réponse.
Maintenant, je vais faire un autre commentaire,
par exemple, puis ça, c'est un commentaire éditorial. Ça me déçoit un peu,
l'approche du ministre, puis je vais lui dire pourquoi. Le ministre est très
habile, c'est un excellent orateur — ça va lui faire plaisir — puis,
lorsque les Avengers l'auront mis dans leur groupe, ça sera... je ne sais pas
quel personnage on va lui donner, là, mais...
Une voix : ...
M. Barrette : C'est ça, une
affaire de même. Alors... Mais le problème, c'est qu'il a toujours une prémisse
qui est débattable. Le ministre, tout le temps, tout le temps, omet un certain
nombre de choses, puis je vais m'adresser à ça. J'ai un temps de parole, je
vais m'en servir. Je vais m'en servir parce que le ministre fait des discours
qui appuient, qui viennent... qui ont une portée de
validation de ses gestes. Et il omet une responsabilité, à mon sens, qui repose
sur les épaules de tout parlementaire.
Mme la Présidente, moi, quand je regarde la
planète, là, je vois plein de pays dans lesquels je ne souhaite pas habiter
parce que les dirigeants, même si ce sont des pays dits démocratiques, vivent
dans des régimes où les gens en poste changent leur constitution aux deux ans.
Puis ils changent leur constitution... Puis là je ne caricature presque pas,
là, il y a des pays, là, il y en a un, là, qui fait la guerre actuellement, là,
puis la Constitution, je ne me rappelle plus le nombre de fois, dans les
20 dernières années, où elle a changé pour laisser le président en place,
revenir, partir, revenir, et ainsi de suite. Il y en a un autre, pays, là, qui
a des milliards de personnes dedans, là, qui font la même affaire. Puis on les
dit, dans certains cas, démocratiques. Il y en a plein en Amérique du Sud.
Alors, ces gens-là, là, peuvent changer des lois fondamentales justement parce
qu'il n'y a pas de retenue. Il n'y a pas de retenue.
Et, quand j'écoute le ministre, c'est ça qui
m'inquiète, parce que lui se présente comme étant pur et sans reproche dans sa
procédure et son processus, puis je ne pense pas que ça soit le cas. Il n'y a
pas de régime parfait. Le nôtre n'est pas parfait. Et, comme il n'est pas
parfait, il commande des gens qui sont en place d'avoir la plus grande prudence
ou, du moins, de poser des gestes avec le maximum de transparence possible. Et,
quand on arrive à changer des chartes, je pense que, par définition, même si ce
n'est pas une obligation, ça devrait être une obligation pour le législateur de
consulter.
L'objet du débat, là, actuellement, depuis une
demi-heure, là, c'est la consultation. Bon, là, le ministre, je ne vais pas
reproduire son geste, qui est tout à fait correct, je n'ai pas de problème avec
son geste, mais le geste veut dire : Bien voyons! C'est clair qu'on a
consulté. Bien non, Mme la Présidente, ce n'est pas clair. Puis je vais le
dire, là, je vais le dire très ouvertement, c'est un commentaire éditorial, les
consultations auxquelles j'ai assisté pour le projet de loi n° 96
peuvent avoir été nombreuses, mais elles étaient surtout répétitives. Puis le
ministre sait très bien, Mme la Présidente, que bien d'autres groupes auraient
pu être entendus, bien d'autres, il y en a plein d'autres, dont bien d'autres groupes qui avaient des opinions contraires. On a
entendu beaucoup de groupes venir qui ont même participé eux-mêmes,
entre eux, aux mêmes mémoires, au pluriel.
Alors, on ne peut pas arriver ici, là, puis
dire : Bien, regardez, on était très démocratiques parce qu'on a entendu
plein de monde, puis... Oui, mais on ne peut pas dire cette phrase-là sans dire
qu'on a choisi, hein? On ne peut pas omettre le «qu'on a choisi». Comme on ne
peut pas omettre que la majorité des gens qui sont venus ici étaient en faveur
et même souvent collègues. On ne peut pas omettre ça. Et on ne peut pas arriver
puis dire : Bien, parce qu'on a fait ça et que ça fait partie de la
procédure démocratique, dans notre monde, on a le droit de faire ce qu'on veut,
puis c'est correct, on est inattaquables. Parce que c'est ça qui se passe ici,
là. Le ministre, lui, dans sa position, il nous dit : J'ai suivi une
procédure qui est prévue dans nos règles, il n'y a implicitement aucun biais,
et, conséquemment, la conséquence, qui est d'ouvrir, par un article d'une loi
qui arrive comme ça, c'est justifié.
Puis c'est ça qui est l'enjeu ici, là. Est-ce
que, parce qu'il y a une espèce de valeur démocratique et morale supérieure à
une charte, on a été légers envers cet élément-là? Est-ce qu'on n'aurait pas
dû, ne serait-ce que par principe, dire à la population, montrer à la
population : On fait des consultations? Et moi, quand on me répond, parce
que c'est une... ça a été échangé, le ministre l'a dit dans plusieurs
échanges : Bien, regardez, là, il y a d'autres moyens, le monde va... ta,
ta, ta, ta... Écoutez, là, il y a des travaux qu'on fait, là, que le monde ne
suit pas, là, on va juste dire ça comme ça, et il y a des travaux qu'on... puis
ce n'est pas péjoratif, il y a des travaux qu'on fait, je vais aller plus loin,
que le commun des mortels ne comprend pas, puis c'est normal. C'est donc d'autant
plus la responsabilité de l'État de s'assurer d'en faire plus que moins.
Le ministre a raison, là, quand il nous
dit : Écoutez, on est... l'Assemblée est souveraine, il y a un processus démocratique, on est élus, nous avons 37 %
des voix, nous avons la majorité puis on peut faire ce qu'on veut... de
sièges...
M. Jolin-Barrette : ...
M. Barrette : Ce n'est pas ça, la
question. Là, Mme la Présidente, je vais continuer, n'est-ce pas?
La Présidente (Mme Thériault) :
Continuez, continuez. M. le ministre, s'il vous plaît!
M. Barrette : Alors, c'est ça qui
est l'enjeu, là, ici, là. Je ne dis pas, moi, que notre processus démocratique
est parfait, je ne dis pas que les gouvernements, quels qu'ils soient, à un moment
donné, sont obligés de faire preuve de certaines imperfections. Il y en a qui
sont acceptables, il y en a qui sont moins acceptables. Mais plus on s'approche
du sujet des chartes, qu'elles soient canadienne ou québécoise, bien là on est
dans le fondamental — ce
sont des termes qui sont utilisés par le ministre — et ça, ça commande une
consultation, ne serait-ce que par principe, ne serait-ce, oui, j'irais même
jusqu'à dire par principe, pour s'assurer qu'il y ait une adhésion maximale de
la population, avec une transparence maximale, et c'est ça qu'on n'a pas, là.
Alors, je boucle ma boucle, là. Là, on commence
à ressembler, si on fait ça, à des pays dans lesquels je ne souhaite pas vivre. Si demain matin, à partir de
maintenant, là, avec des lois ordinaires, on change les chartes... Puis
on le fait, ce n'est pas la première fois,
on a des clauses dérogatoires. Je ne veux pas débattre de ça, là. C'est le
principe de la chose. Est-ce qu'en
démocratie on est, au Québec, dans une situation où on devrait se permettre,
comme gouvernement, de toucher aux
chartes, surtout si le sujet est fort, sans qu'il y ait une consultation
exhaustive? Et, quand je dis «exhaustive», là, ça veut d'abord et avant tout dire spécifique à la chose. La réponse à
ça ne peut pas être : Bien oui, on en a parlé, là, puis ils sont
d'accord avec nous autres. Les syndicats sont venus, puis il y en a 32 qui ont
été sur le même mémoire, qui nous ont dit qu'ils étaient d'accord. Je
caricature un peu, mais pas complètement. L'enjeu, pour moi, il est là.
Le ministre a raison, là,
il peut faire ce qu'il veut, l'Assemblée est souveraine, mais... et nos lois ne
prévoient pas ces affaires-là. Alors, revient, incombe à l'autorité en place de
s'assurer moralement, à mon sens, que cette procédure-là soit suivie dans ce
sens-là. Ce n'est pas la finalité qui compte, dans ce cas-là, c'est de
s'assurer que le chemin qui nous a amenés à la finalité ait été fait dans une
transparence maximale. La transparence maximale, là, c'est qu'on consulte pour
ça, bang! Pas noyé dans le reste. Parce que, veux veux pas, le reste, dans le
cas de 96, vient amener un biais sur la lecture de ce qui est changé dans la
charte. C'est intrinsèque, c'est intrinsèque, puis je dirais même c'est voulu.
Et je ne prête pas d'intention, je dis juste ça comme ça.
Alors, moi, je trouve ça plate que ça se passe
comme ça. Je comprends très bien tout le monde ici, là, de notre bord de la
table, qui disent : Remarque, là, c'est parce que, là, il y a une
certaine... disons qu'il y a une certaine... Je cherche le mot, là, qui ne sera
pas insultant, là. Je trouve ça agressif, sur le plan législatif, de faire ça.
Je trouve ça agressif parce que c'est une loi qui change les chartes, ce n'est
pas banal et ça fait des précédents. Qui va reprocher, la prochaine fois, à un
autre gouvernement d'aller un peu plus loin, puis un peu plus loin, puis un peu
plus loin, jusqu'à banaliser les chartes? Moi, je trouve ça inquiétant, je
trouve ça malheureux. Je comprends ce que les collègues disent, on l'a dit d'une
façon différente.
Mais, je termine là-dessus, le ministre a
raison, il peut faire tout faire ce qu'il veut, là, mais qu'il ne vienne pas invoquer, là, que ce qui a été fait actuellement,
là, est parfait, est absolument irréprochable, et, au bout de la ligne, là,
ça justifie tout ce que l'on fait. Voilà la
réponse, pour moi, là, à ça, la réponse, c'est non. Voilà, c'est tout ce que je
veux dire.
• (18 heures) •
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le ministre, ça va? M. le ministre, ça va. Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys, vous aviez un autre commentaire? Allez-y, la parole est à
vous.
Mme David : Bien, je trouve qu'on
commence à avoir des choses fort importantes, là, qui se disent autour de la
table, et c'est extrêmement, extrêmement sérieux, ce dont on parle en ce
moment. Ce n'est pas avec légèreté qu'il faut aborder ça, certainement pas.
On parle... je reprends des paroles du ministre,
un statut quasi constitutionnel à la Charte des droits et libertés, un statut
quasi constitutionnel, qu'on modifie au détour de trois articles sur 201. C'est
dans le cadre d'un débat public qu'il faut faire ça, un débat public. Je
n'appelle pas ça, ici, un grand, grand débat public. C'est un débat
parlementaire sans consultation générale. Consultation particulière, comme dit
mon collègue, à partir de gens choisis, même si le ministre va répondre que les
leaders se sont entendus, ta, ta, ta, ta, mais il n'y a pas eu de consultation
générale. Ce n'est pas une consultation centrée sur une modification majeure à
la Charte des droits et libertés de la personne. On change une charte, qui a un
statut quasi constitutionnel, à partir de quatre articles au détour des
pages... je ne sais plus quoi, ce n'est pas les pages qui sont importantes.
Alors, ce projet de loi touche tellement de
choses qu'on se... je dirais, on se donne la liberté d'aller changer une charte
de statut quasi constitutionnel avec quatre articles, et je trouve ça très,
très inquiétant, tout ça au nom du sacro-saint... enfin, le ministre le considère
comme sacro-saint, principe de souveraineté parlementaire. Mais je répondrais
quelque chose au ministre. La souveraineté parlementaire, ça ne permet pas de
faire abstraction d'un vrai débat, d'un vrai débat qui aurait pu inviter les
gens à se pencher spécifiquement sur ces articles-là, pas sur l'ensemble des
201 articles où il y a à la fois de la constitution, il y a de la charte,
il y a des collèges, il y a des universités, il y a les entreprises, il y a
l'article 46 sur l'affichage. Il y a tellement de choses qu'au détour on
met ça, on met ça.
Et moi, je trouve que les réponses... le
discours, le long discours que le ministre nous a fait tout à l'heure est assez
prévisible : la souveraineté parlementaire permet tout. Ça ne permet pas
tout. La souveraineté parlementaire ne peut pas se faire avec l'économie de la
consultation et de la consultation spécifique quand on touche à une loi quasi
constitutionnelle. Et ça, je trouve que c'est des réponses qui sont un peu
courtes. Échanger au détour d'un article, ce n'est pas très très
démocratiquement adopté, moi, je trouve, Mme la Présidente.
Et, quand le ministre dit à ma collègue que...
Elle lui demande c'est quoi, les procédures d'exception, bien, c'est un
bâillon. Puis la réponse du ministre, c'est : Oui, mais le bâillon existe
dans nos procédures. Bien oui, les dérogations existent, puis changer une loi
constitutionnelle existe. Puis là on additionne une loi quasi
constitutionnelle, plus une potentialité de bâillon, plus tout ça sous
dérogation. Alors là, mais, arrêtez, la cour est pleine, là, arrêtez, la cour
est vraiment pleine, parce qu'on va voir plus loin qu'il va y avoir des
dispositions de dérogation. Ça veut dire que tu ne peux plus revenir là-dessus
puis, en même temps, tu rajoutes un droit et liberté fondamental, le droit de
vivre en français, etc., mais, en même temps, tout ça va être sous dérogation.
Je veux dire, ça, je ne suis pas tellement sûre que c'est de la souveraineté
parlementaire, parce que la souveraineté parlementaire, comme disait mon
collègue, oui, c'est de dire : Les élus ont le droit de tout. Puis le
député de La Pinière a raison de dire que le ministre peut tout faire. Il est
majoritaire, mais majoritaire, ça ne veut pas dire que la population ne doit
pas être partie prenante de choses avec des conséquences aussi graves.
Alors, je le répète, on ne peut pas être
d'accord avec le processus. Ce n'est pas possible d'être d'accord avec le
processus. Puis on n'a pas beaucoup parlé de dérogation, mais ça s'en vient, et
le processus de modifier cette charte des droits et libertés est vraiment un
processus qui ne respecte pas toutes les consultations qu'il aurait dû y avoir
par rapport à des implications aussi grandes. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va, merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Je vais faire un court commentaire, Mme la Présidente. Je trouve ça
ahurissant, ahurissant, ce que j'entends, Mme la Présidente. Vous êtes en train
de remettre en compte le processus législatif que nous avons depuis
plus de 200 ans ici, depuis 1792. Vous dites : Nos débats ne sont pas
publics. Wo! N'importe quel citoyen peut venir s'asseoir ici, en commission
parlementaire. Nos débats sont diffusés en direct à la télévision, Mme la
Présidente. On reçoit des commentaires, par le biais du site de la commission,
qui sont partagés. Les gens qui ont voulu déposer des mémoires, ils en ont
déposé. Les gens qui sont venus témoigner sont venus témoigner. Votre formation
politique a consenti démocratiquement,
démocratiquement, au dépôt d'une motion à la Chambre d'Assemblée pour les
consultations, vous avez voté pour. Vous avez entériné la motion de
consultation.
Écoutez, si ça ne se
passe pas bien dans votre caucus, ça vous appartient, mais, comme député de
Marguerite-Bourgeoys, vous avez approuvé
cette motion-là. Vous aviez la légitimité, en tant que députée de Marguerite-Bourgeoys,
de dire : Je ne consens pas à l'adoption de la présente motion pour tenir
les consultations. Là, là, moi, je n'accepte pas ça qu'aujourd'hui en commission
parlementaire... Puis là je ne vous parle pas comme ministre qui porte un
projet de loi. Je vous parle comme élu de l'Assemblée nationale, comme membre
de l'Assemblée, comme vous, comme moi, là, comme tous les députés qui sont
assis ici, l'autre bord aussi. Vous ne pouvez pas attaquer la légitimité du
processus législatif que nous avons à l'Assemblée. C'est ça que vous faites.
Vous décrédibilisez une institution bicentenaire, l'Assemblée nationale. On se
donne des règles ensemble pour adopter nos lois.
Vous pouvez
dire : Écoutez, moi, j'aurais préféré entendre plus de groupes, j'aurais
préféré, tu sais, qu'il y ait des consultations générales. D'accord, je suis
d'accord avec vous, vous avez le droit de dire ça, mais, après ça, d'attaquer
la légitimité, alors que toutes nos lois sont adoptées de cette façon-là, puis
dire : Écoutez, c'est à la page 80 du projet de loi, là, ça fait que,
vu que c'est à la page 80, le texte de loi, il est moins important, voyons
donc! Quand vous faites ça, vous attaquez la légitimité de notre processus
démocratique, de notre processus législatif. Vous devriez, au contraire, comme
parlementaire, comme députée, le défendre, le chérir et le valoriser. Ce que
vous dites là, c'est de dire : Le rôle des législateurs, là, ce n'est pas
si important dans notre démocratie au Québec. Au contraire, vous représentez
chacun des citoyens de votre circonscription ici, qui, eux, vous écoutent puis
qui vous suivent peut-être sur Internet ou à la télé ou qui lisent les
chroniques dans vos journaux... que vous écrivez dans vos journaux locaux.
Honnêtement, je suis
ahuri de la position que vous prenez. Vous pouvez dire : Écoutez, moi,
j'aurais préféré avoir un projet de loi distinct juste pour modifier les
dispositions de la charte. O.K., je suis capable de vivre avec ça. Est-ce que
c'est moins légitime de l'avoir dans le projet de loi n° 96?
La réponse à ça, c'est non. Est-ce que le fait de dire, comme le député de La
Pinière : Écoutez, il y a des États, là, où est-ce qu'ils modifient leur
constitution, tout ça... Écoutez, on vit dans un État où il y a un premier
ministre, Trudeau, qui a dit : Ma constitution que j'impose à l'État
québécois, elle va être bonne pour 1 000 ans. Vous n'avez même pas
consenti, les Québécois n'ont pas consenti, l'Assemblée nationale n'a pas
consenti, mais le texte de loi, en 1982, va être bon pour 1 000 ans.
Comment vous appelez ça, un gouvernement qui fonctionne comme ça?
Puis, après ça, vous
nous reprochez de dire qu'on dépose des articles dans un projet de loi qui viennent
conférer le statut, là, à la Charte de la langue française, là, qui vient dire,
là, que la langue française est la seule langue officielle du Québec ainsi que
la langue commune de la nation québécoise et la langue d'intégration à celle-ci
puis vous critiquez ça. Honnêtement, je suis un peu éberlué dans mon rôle de
membre de l'Assemblée nationale, puis pas dans mon rôle de ministre, pas dans
mon rôle de leader, mais vraiment comme membre de l'Assemblée. À partir du
moment où vous adoptez une approche canadienne par rapport au rôle de nos
institutions, je trouve ça vraiment déplorable. Puis, honnêtement, quand ils
ont adopté les différentes chartes, que ce soit en 1975... que ce soit Jérôme
Choquette, que ce soit en 1977 avec Camille Laurin, bien, ils l'ont fait dans
une enceinte comme celle-ci avec ce processus-là. Je n'ai plus rien d'autre à
rajouter.
• (18 h 10) •
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
J'ai plusieurs interventions. Je vais aller avec le député de La
Pinière, Mme la députée de Mercier par la suite.
M. Barrette :
Bel effet de toge, que je comprends, mais c'est juste ça que c'est, là.
Alors, je n'ai pas prononcé ces mots-là, là. Je n'ai pas, moi, personnellement
remis en cause la légitimité. J'ai...
M. Jolin-Barrette :
...
La Présidente
(Mme Thériault) : S'il vous plaît, M. le ministre! Non! M. le
ministre, je vais vous demander, s'il vous plaît, de laisser le député de La
Pinière aller jusqu'au bout de son idée. Vous avez fait votre exposé, on ne
vous a pas interrompu. Je ne l'aurais pas permis non plus. Donc, je vais vous
demander, s'il vous plaît, d'écouter jusqu'au bout. Après le député de La
Pinière, si vous voulez en ajouter, vous pourrez. Si vous voulez laisser
passer, c'est beau. La députée de Mercier reprendra la parole. M. le député de
La Pinière, allez-y.
M. Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Je n'ai pas remis en cause la légitimité. J'ai
dit une chose bien simple, bien, bien simple. À l'instar de ce que ma collègue
de Marguerite-Bourgeoys a dit en commençant son intervention, pas la dernière,
la première, c'est arrivé qu'il y ait des changements à la Constitution par des
lois, mais qui ont été débattus individuellement. Et il y a eu une attention
particulière, ciblée là-dessus, parce que changer la Constitution, ça devrait
toujours être un événement en soi. J'ai dit... Je n'ai pas dit que le Québec
était la Russie. J'ai dit que... Je n'ai pas dit ça. Le ministre me regarde,
là, en insinuant que j'ai dit ça. Je n'ai pas dit ça, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Thériault) : Je vous écoute, je vous écoute. Allez-y.
M. Barrette :
Puis c'est ça, le problème. Le problème, c'est qu'on est incapables, sur ce
genre de sujet là, d'avoir une discussion basée sur les faits sans qu'on nous
prête des intentions. Alors, je n'ai pas dit ça. J'ai dit que, lorsque des pays
changeaient leur constitution aussi facilement, au bon vouloir du pouvoir en
place, ça me fatiguait, et je ne voulais pas vivre là. J'ai aussi dit qu'à chaque
fois qu'on fait un pas de plus dans cette direction-là on ne revient jamais en
arrière. J'ai dit ça. Je n'ai pas dit que le Québec était une dictature. Je
n'ai pas dit ça. J'ai insisté sur le fait que, lorsqu'on touche à un texte
fondamental, on devrait le faire de façon ciblée et de la façon la plus
transparente possible, en sachant, Mme la Présidente, que cette perfection-là
de la démocratie n'existe pas, mais on doit tendre vers. C'est tout ce que j'ai
dit.
Alors, si le ministre est ahuri que je fasse ce
commentaire-là, bien, moi, je le suis d'autant plus par sa réaction. S'il n'est
pas capable d'accepter un simple argument et qu'il réagit avec autant d'ampleur
et d'émotion, ça m'inquiète. Ça m'inquiète, ça. Ça m'inquiète parce que je n'ai
pas prêté d'intentions, accusé le gouvernement actuel. Non, j'ai juste émis une
opinion et j'ai commencé mon commentaire précédent en disant : Je vais
faire un commentaire éditorial. C'est tout. Alors, je n'ai jamais contesté la
légitimité du processus, jamais. Je n'ai pas remis en question nos fondements
démocratiques qui sont là depuis plus d'un siècle, jamais. J'ai simplement fait
un commentaire qui est, en soi, peut-être, un peu une mise en garde qui
m'apparaît légitime. Et de me renvoyer comme argument : Pierre Trudeau l'a
fait, bien, c'est quoi, cet argument-là? Il l'a fait, je vais le faire?
M. Jolin-Barrette : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
non, M. le ministre! Continuez, M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Alors, c'est ça,
l'affaire, Mme la Présidente. J'ai émis un commentaire. Je n'ai pas dit ce que
le ministre me reproche, insinue que j'ai dit. Je n'ai pas fait ça. Je n'ai pas
fait ça du tout, du tout, du tout. Je dis, puis je vais terminer
là-dessus : Quand on arrive dans ces sujets-là, ça commande qu'on ait un
maximum de précautions, et là, bien là on n'est pas au maximum. On a le droit
de le faire. Puis je l'ai dit au moins 10 fois, il a le droit de faire ce
qu'il fait. C'est légitime. C'est peut-être transparent, mais pas complètement,
parce que les gens ne sont pas tous au fait de notre procédure puis comment ça
fonctionne, et j'émets certaines réserves. C'est tout, ça s'arrête là.
Alors, qu'on arrête de me mettre... de me prêter
des intentions ou de faire des affirmations, malheureusement, Mme la
Présidente, qui sont non fondées, ne tiennent pas la route et sont
dérogatoires, là. Je ne mérite pas ça, moi, là, là. Si ici, dans cette
enceinte, ici, là, je ne suis pas autorisé à faire ces commentaires-là, bien,
je pense que le ministre de la Justice, il a un petit problème, là. C'est tout.
La
Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre, est-ce que ça va
ou vous... Parfait. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : On parle de
démocratie puis de l'Assemblée nationale ici, le travail de parlementaire, tout
ce qu'on fait. Si les gens écoutent en ce moment ce genre de discours, de
dialogue de sourds, bien, ça ne fait qu'augmenter le cynisme dans la
population, puis ça, moi, ça m'inquiète profondément, puis le fait de soulever,
de dire... Puis je le dis, là, je vais voter pour l'article 133, mais je
n'aime pas la façon dont le ministre traite avec légèreté de la Charte des
droits et libertés de la personne. Je n'aime pas ça et je le dis.
Puis, après ça, on a cette discussion-là. Il dit
que ça fait des siècles que ça dure comme ça, donc c'est correct, on ne change
pas ça. Comment le cynisme de la population augmente? C'est quand on a ce genre
de débat là puis quand on est pour le statu quo. Je veux dire, la Constitution
canadienne s'applique en ce moment sur nous, qu'on le veuille ou pas. Le
ministre, lui, il trouve que c'est illégitime, mais il l'accepte, puisqu'il
veut rester dans la fédération. Il est contre l'indépendance du Québec, et ça
continue, et ce n'est pas plus démocratique.
Donc, de poser la question sur la façon qu'on va
adopter cet article-là, c'est tout à fait légitime, et, cette discussion-là, on
ne devrait pas l'avoir juste entre nous, en dialogue de sourds, de façon
ultrapartisane, mais en ayant des gens, des groupes. Et j'ai senti que... Par
exemple, la Commission des droits de la personne, j'ai senti que le ministre ne
la tient pas en très grande estime et j'aimerais savoir pourquoi, pour quelles
raisons, et il a dit : Ils sont venus, ils ont dit ce qu'ils ont à faire,
et je ne tiens pas du tout compte de leur mémoire.
Et, moi, ça m'inquiète, c'est un sujet... Je le
dis, je vais voter pour l'article 133, mais la façon qu'on le fait et la
façon qu'on traite de la Charte des droits et libertés avec autant... de la
personne avec autant de légèreté de la part de ce gouvernement, que ce soit
avec le projet de loi n° 21, le premier, et avec le projet de loi
n° 96, moi, je n'aime pas ça, et ça m'inquiète. Et je ne comprends pas
pourquoi le ministre n'en revient pas que des gens posent des questions puis
disent : Vous trouvez qu'il n'y a rien à changer dans nos débats
parlementaires? Je veux dire, la députée de Taschereau aussi, elle l'a dit.
Elle a dit : C'est parle, parle, jase, jase, de toute façon, ça ne change
rien, ils ont 35 %, même pas 35 %, je pense, si on enlève les... non,
même moins que ça, 25 %, si on enlève les indécis, des gens qui ont voté
pour eux et ils décident de tout. Ça augmente le cynisme. C'est ça qui est
inquiétant, ça augmente le cynisme, et je suis inquiète que le ministre ne soit
pas inquiet.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Je note que
la députée de Mercier est mal à l'aise avec le fait que ce ne soit pas un
projet de loi distinct. Elle aurait préféré un projet de loi distinct
précisément pour modifier les dispositions relatives à la Charte des droits et
libertés de la personne. C'est ce que je retiens de son intervention. Je
respecte son opinion. Je retiens aussi qu'elle va voter
en faveur et je retiens qu'elle était en faveur également de la modification de
la Charte des droits et libertés de la personne pour y inclure également la
laïcité, malgré le fait qu'elle a voté contre l'entièreté du projet de loi.
Donc, je retiens, pour mes futurs projets de loi, que, si je veux inclure des
choses dans la Charte des droits et libertés de la personne et que je veux le
concours et l'approbation de la députée de Mercier au vote final, j'aurais
intérêt à déposer un projet de loi distinct pour ces modifications-là, parce
que, là, ça fait deux en deux qu'elle me dit qu'elle est d'accord avec la
modification. Alors, je remercie les membres de cette commission pour m'avoir
informé de cela, puis je le garde en tête, puis, pour la prochaine législature,
si j'ai la possibilité de déposer d'autres projets de loi, je vais le
considérer.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de... oui?
Mme Ghazal : Donc, je comprends
qu'il retient... le ministre retient ça, cette préférence, et il reconnaît que
c'est une erreur de ne pas passer par un projet de loi distinct pour modifier
une loi aussi fondamentale que la Charte des droits et libertés de la personne.
Je suis contente de ça.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non, je
retiens votre suggestion, mais je ne reconnais pas... Je ne partage pas votre
point de vue, mais je le prends en délibéré, puis peut-être que ça va alimenter
mes songes nocturnes.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la
Présidente, vous avez constaté que, dans les cinq dernières minutes, l'état
émotif du ministre avait beaucoup changé. Il est maintenant beaucoup moins
éberlué, et je ne sais plus quel autre qualificatif... qui ont mené à son effet
de toge. Est-ce que je dois comprendre que le ministre, actuellement,
considère, compte tenu de son changement de ton, qu'il avait été excessif
précédemment?
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non, pas du
tout, parce que la teneur des propos de la députée de Marguerite-Bourgeoys
m'invitait à réagir de cette façon-là.
M. Barrette : C'est différent,
Mme la Présidente, mais ce n'est pas... je ne veux pas en faire un débat, mais
j'en fais le constat.
La Présidente (Mme Thériault) : D'accord.
M. Jolin-Barrette : Mais vous
avez quand même parlé de la Russie puis vous avez comparé le Québec à certains
pays.
• (18 h 20) •
M. Barrette : Mais non, Mme la
Présidente, là, là, c'est...
La Présidente (Mme Thériault) : Attendez!
On va laisser le ministre terminer son intervention.
M. Jolin-Barrette : Non, mais
je ne veux pas repartir dans tout ça.
La Présidente (Mme Thériault) : Si
vous voulez revenir, vous reviendrez après.
M. Jolin-Barrette : Bien,
honnêtement, vous dites que c'était la même chose. Non, ce n'est pas la même
chose en ce qui a été dit par vous, par la députée de Marguerite-Bourgeoys puis
ce que la députée de Mercier vient de dire. Ce n'était pas la même
intervention. Alors, oui, je réagis en fonction de la teneur des propos qui
sont tenus devant moi parce que je vous écoute.
La Présidente (Mme Thériault) : Merci.
M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Bien, j'invite,
Mme la Présidente, le ministre à vraiment écouter puis à ne pas répéter les
mêmes propos complètement inappropriés. «Boy», de «boy», de «boy», que j'aurais
pu utiliser un terme non parlementaire!
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
je vous invite à ne pas aller sur cette voie-là.
M. Barrette : Alors, j'ai
utilisé un exemple, et le ministre en fait un axiome : C'est ça, sa
position, il a mentionné le mot «Russie». J'ai l'impression d'être au fédéral
avec le député conservateur Gourde. Ce n'est pas ça, là, Mme la Présidente. Je
ne le comprends pas, le ministre. En fait, on le comprend tous, on le connaît
tous, là, il veut avoir le dernier mot, là, mais peut-il avoir le dernier mot
en ne déformant pas le sens des propos qui sont tenus et ne pas
arriver et dire : Il affirme telle chose lorsqu'il prend quelque chose en
exemple? Facile, répétez après moi : Il n'affirme pas une chose parce
qu'il la prend en exemple. On peut l'écrire, le dire 100 fois. Ça serait
juste une question de fair-play, là.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va pour votre commentaire? Madame, ça va? Donc, M. le ministre, c'est beau? Ça
va aussi? D'accord. Donc, je comprends... Est-ce que j'ai d'autres
interventions? Oui, allez-y, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Est-ce qu'on s'en
va au vote pour cet article-là?
La Présidente (Mme Thériault) : C'est
là où je m'en allais, si vous aviez...
Mme David : Parce que je
voudrais mettre des mots avant d'appeler le vote nominal.
La Présidente (Mme Thériault) : Avant
le vote? Oui, absolument, il n'y a pas de problème, vous avez droit de prendre
la parole. Allez-y.
Mme David : Je voudrais vous
dire pourquoi on va s'abstenir de ce côté-ci, pas complètement. Je ne sais pas,
je ne veux pas parler au nom de ma collègue. On va s'abstenir à cause du
processus, à cause de tout ce qui a été dit, à cause du fait qu'on ne va pas
aller sur le fond de cette chose-là, parce qu'on considère que la réflexion
n'est pas aussi engagée qu'elle devrait l'être, avec tout le temps que ça
aurait dû prendre, et qu'on touche à une loi quasi constitutionnelle. Alors, on
ne peut pas être pour. On ne peut pas être contre. On va vouloir s'abstenir
pour dire justement à quel point on trouve qu'on n'a pas pu avoir, et entendre,
et faire un débat aussi poussé qu'on avait voulu. Ça va être la même chose pour
133, 134, 135, 136.
La Présidente (Mme Thériault) : D'accord.
Mme David : Et je demande le
vote par appel nominal.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Donc, un vote par appel
nominal est demandé. Mme la secrétaire, allez-y.
La Secrétaire : M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Pour.
La Secrétaire : M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Pour.
La Secrétaire :
M. Allaire (Maskinongé)?
M. Allaire : Pour.
La Secrétaire :
M. Chassin (Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Pour.
La Secrétaire :
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin : Pour.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Pour.
La Secrétaire :
Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Abstention.
La Secrétaire : M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette : Abstention.
La Secrétaire : Mme Ghazal
(Mercier)?
Mme Ghazal :
Pour.
La Secrétaire :
Et Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente
(Mme Thériault) : Abstention. Donc, l'article 133 est
adopté. M. le ministre, l'article 134.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Cette charte est modifiée par l'insertion, après l'article 3, du
suivant :
«3.1. Toute
personne a droit de vivre en français dans la mesure prévue par la Charte de la
langue française.»
Commentaire.
L'article 134 du projet de loi vise à introduire dans la Charte des droits
et libertés de la personne les droits
linguistiques fondamentaux reconnus par la Charte de la langue française. À
cette fin, il propose l'introduction de l'article 3.1, qui
reconnaît le droit de toute personne de vivre en français dans la mesure prévue
par cette charte.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires sur l'article 134.1? Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Bien, vous ne serez pas étonnée que je répète les mêmes commentaires...
La Présidente
(Mme Thériault) : Non, allez-y.
Mme David :
...absence, absence...
La Présidente
(Mme Thériault) : Vous allez vous abstenir pour le vote?
Mme David :
Voilà.
La Présidente
(Mme Thériault) : D'accord. Pour les mêmes raisons qu'à
l'article 133?
Mme David :
Exactement.
La Présidente
(Mme Thériault) : D'accord. Est-ce que j'ai d'autres commentaires
concernant l'article 134? Si je n'en ai pas, je vais mettre aux voix
l'article 134. Est-ce qu'il est adopté?
Mme David :
Nominal.
La Présidente (Mme Thériault) : Alors,
on me demande un vote par appel nominal. Allez-y, Mme la secrétaire.
La
Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
La Secrétaire :
M. Émond (Richelieu)?
M. Émond :
Pour.
La Secrétaire :
M. Allaire (Maskinongé)?
M. Allaire :
Pour.
La Secrétaire :
M. Chassin (Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Pour.
La Secrétaire :
M. Poulin (Beauce-Sud)?
M. Poulin :
Pour.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux :
Pour.
La Secrétaire :
Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David :
Abstention.
La Secrétaire : M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette :
Abstention.
La Secrétaire : Mme Ghazal
(Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) : Abstention.
L'article 134 est adopté. M. le ministre, l'article 135.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors,
l'article 9.1 de cette charte est modifié, dans le premier alinéa :
1° par le remplacement de «libertés et droits
fondamentaux» par «droits et libertés de la personne»;
2° par l'insertion, après «l'État,» de
«l'importance accordée à la protection du français,».
Commentaire. L'article 135 du projet de loi
propose de modifier l'article 9.1 de la Charte des droits et libertés de
la personne d'abord pour y préciser que ce sont l'ensemble des droits et
libertés de la personne qui sont visés par cet article plutôt que seulement les
libertés et droits fondamentaux et ensuite pour y prévoir que ces droits et
libertés de la personne s'exercent dans le respect, entre autres, de
l'importance accordée à la protection du français.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Questions, commentaires sur
l'article 135? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, encore une
fois, on ne rentrera pas sur le fond, parce qu'il y aurait probablement
beaucoup, beaucoup de questions et de débats à faire, et, de toute façon, nous
nous abstiendrons.
La Présidente (Mme Thériault) : D'accord,
pour les mêmes raisons qu'à l'article 133 tel qu'instruit précédemment.
Est-ce que j'ai d'autres commentaires? Je n'en ai pas. Oui, Mme la députée de
Mercier, allez-y.
Mme Ghazal : Je ne suis pas
sûre de comprendre la différence, là. Je la lis, là, ça a l'air général. On
enlève «libertés et droits fondamentaux»... par «droits et libertés de la
personne». Pourquoi ce changement-là?
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Parce que,
notamment, auparavant, c'étaient les articles 1 à 9 qui étaient visés,
donc les droits et libertés fondamentaux, alors que ça enlevait la section des
articles 10 et suivants. Donc, c'est pour faire en sorte de pouvoir
inclure l'article 10 à l'intérieur de l'article 9.1.
Mme Ghazal : Et
l'article 10, il n'est pas là? O.K. Puis après... O.K. Puis j'avais oublié
de poser une autre question tout à l'heure à 133, où on parlait de la langue
d'intégration. Est-ce qu'il y a une définition juridique quand on dit «une langue d'intégration»? Parce que, dans
la vie de tous les jours, on va dire : Oui, il faut intégrer les
immigrants, intégrer les immigrants, mais est-ce qu'il y a quelque chose de
plus spécifique quand c'est écrit dans une loi?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, il n'y a pas de définition spécifique. C'est sous l'angle de la langue
commune, d'envoyer un message très clair qu'au Québec la langue dans laquelle
on accueille, la langue dans laquelle on intègre au Québec, c'est le français,
par opposition au Canada, supposons, où la langue d'intégration, c'est
l'anglais. Donc, je pense que c'est important, dans notre Charte des droits et
libertés de la personne lorsqu'on a consacré, exemple, le droit de vivre en
français, c'est notamment également un message de société, de dire qu'on
intègre en français, on accueille en français. Donc, la langue d'intégration,
comme État-nation, c'est en français.
Mme Ghazal : Mais ça n'aurait
pas été suffisant de dire : Bien, la langue officielle du Québec est la
langue commune, bien, c'est le français puis ça finit là. Pourquoi est-ce qu'on
trouvait que c'était important de dire que c'est aussi la langue d'intégration? Puisque c'est la langue officielle,
automatiquement, ça devrait être la langue d'intégration.
M. Jolin-Barrette : Bien non,
parce que, voyez-vous, depuis 1974, la langue officielle du Québec, c'est le
français, puis, manifestement, on a des grosses, grosses lacunes par rapport à
l'accueil puis à l'intégration en français.
Mme Ghazal : À cause de la
concurrence du Canada.
M. Jolin-Barrette : Bien là, il
y a plein de facteurs conjoncturels, là, mais, entre autres, comme État-nation,
on se doit d'envoyer un message très clair qu'on intègre en français. Puis c'est
notamment dans le préambule de la Charte des droits et libertés de la personne
de le dire. Donc, c'est un message, c'est... On vient l'indiquer dans une loi
fondamentale, de dire que, sur le territoire québécois, on accueille et on
intègre en français. Puis surtout il faut le voir aussi dans une perspective
avec le droit à l'apprentissage du français qu'on a mis préalablement, que,
comme société, on fait un choix. On fait un choix de dire : On a un liant
social et on veut donner les outils, notamment, à toute personne qui vient au
Québec de pouvoir travailler, vivre sa vie en français, donc, pour participer à
la vie collective. C'est une formule d'inclusion.
La Présidente (Mme
Thériault) : Ça va?
Mme Ghazal : Très bien, oui, merci.
La Présidente (Mme Thériault) : Parfait.
Est-ce que j'ai d'autres commentaires sur l'article 135? Non, je n'en ai
pas. Donc, on est prêts à mettre aux voix l'article 135.
Mme David : Nominal.
La Présidente (Mme Thériault) : Avec
un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Pour.
La Secrétaire : M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Pour.
La Secrétaire : M. Allaire
(Maskinongé)?
M. Allaire : Pour.
La Secrétaire : M. Chassin
(Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Pour.
La Secrétaire : M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Pour.
La Secrétaire : M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Pour.
La Secrétaire : Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Abstention.
La Secrétaire : M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette : Abstention.
La Secrétaire : Mme Ghazal
(Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) : Abstention.
Donc, l'article 135 est adopté. L'article 136, M. le ministre, qui va
venir clore la section Charte des droits et libertés de la personne.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 50 de cette charte est modifié par l'ajout, à la fin, de
l'alinéa suivant :
«Elle doit également être interprétée de manière
à ne pas supprimer ou restreindre la jouissance ou l'exercice d'un droit visant
à protéger la langue française conféré par la Charte de la langue française.»
L'article 136 du projet de loi ajoute à
l'article 50 de la Charte des droits et libertés de la personne un nouvel
alinéa afin que cette charte soit interprétée de manière à ne pas supprimer ou
restreindre la jouissance ou l'exercice d'un droit visant à protéger la langue
française.
La
Présidente (Mme Thériault) : Questions, commentaires sur l'article 136? Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, même commentaire,
on va s'abstenir, Mme la Présidente.
• (18 h 30) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce que j'ai d'autres commentaires sur 136? Je n'en vois pas.
Donc, on est prêts à mettre aux voix l'article 136? Est-ce qu'il est
adopté? Madame...
Mme David : Nominal.
La Présidente (Mme Thériault) : Avec
un vote par appel nominal, comme les précédents articles qui touchent la
charte. Mme la secrétaire, allez-y.
La Secrétaire : M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Pour.
La Secrétaire : M. Allaire...
Pardon, excusez-moi, M. Émond (Richelieu)?
M. Émond : Oui, pour.
La Secrétaire : M. Allaire
(Maskinongé)?
M. Allaire : Pour.
La Secrétaire : M. Chassin
(Saint-Jérôme)?
M. Chassin :
Pour.
La Secrétaire : M. Poulin
(Beauce-Sud)?
M. Poulin : Pour.
La Secrétaire : M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Pour.
La Secrétaire : Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Abstention.
La Secrétaire : M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette : Abstention.
La Secrétaire : Mme Ghazal
(Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) : Abstention.
Donc, l'article 136 est adopté. M. le ministre, Loi sur les cités et
villes, l'article 137.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 335 de la Loi sur les cités et
villes est modifié par la suppression du troisième alinéa.
Commentaire. L'article 137 du projet de loi
modifie l'article 335 de la Loi sur les cités et villes afin d'en
supprimer le troisième alinéa. Les dispositions de la Charte de la langue
française relatives à la langue de l'administration s'appliqueront aux
municipalités et prévoiront les cas où elles peuvent utiliser une autre langue
que le français. Les dispositions de l'article 137 entreront en vigueur un
an après la sanction du projet de loi, ainsi que le prévoit le paragraphe 3° de
l'article 201. Donc, c'est de la concordance, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires sur l'article 137? Je n'en vois pas. Donc, est-ce que
l'article 137 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
M. le ministre, Code de procédure civile pour les quatre prochains articles.
Allez-y.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Le Code de procédure civile est modifié par
l'insertion, dans le premier alinéa de la disposition préliminaire et après «en
harmonie avec la», de «Charte de la langue française (chapitre C-11), la».
Commentaire. À
l'instar de l'article 120 du projet de loi, l'article 138 propose la
modification de la disposition préliminaire du Code de procédure civile afin
que la Charte de la langue française s'y trouve, comme la Charte des droits et
libertés de la personne, au rang des lois fondamentales du Québec.
La Présidente (Mme
Thériault) : Questions, commentaires sur l'article 138? Je n'en
vois pas. Donc, on est prêts à mettre aux voix l'article 138. Est-ce que
l'article 138 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
Thériault) : Adopté. L'article 139, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 496 de ce code est modifié par le
remplacement, dans le deuxième alinéa, de «rédigé ni en français ni en anglais»
par «pas rédigé en français».
Commentaire. Par
concordance avec l'article 9 de la Charte de la langue française proposé
par l'article 5 du projet de loi,
l'article 139 du projet de loi modifie l'article 496 du Code de
procédure civile afin d'y prévoir que l'acte de procédure émanant d'un
État étranger doit être accompagné d'une traduction certifiée s'il n'est pas
rédigé en français.
La Présidente (Mme
Thériault) : Questions, commentaires sur l'article 139?
M. Barrette :
...Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Oui, si vous regardez à la page à côté, vous allez
voir : «Cet acte doit être certifié par un officier de [...] cour de
justice...»
M. Barrette :
O.K.
La Présidente (Mme
Thériault) : Ça va?
M. Barrette :
Ça va.
La Présidente (Mme
Thériault) : Parfait. Est-ce que l'article 139 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
Thériault) : Adopté. M. le ministre, 140.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 508 de ce code est modifié par
l'ajout, à la fin du troisième alinéa, de la phrase suivante :
«La
traduction doit être en français lorsque la partie qui demande la
reconnaissance ou l'exécution de la décision étrangère est une personne
morale.»
Commentaire. Par
concordance avec l'article 9 de la Charte de la langue française proposé
par l'article 5 du projet de loi, l'article 140 du projet de loi
modifie l'article 508 du Code de procédure civile afin d'y prévoir que les
documents visés à cet article doivent être accompagnés d'une traduction
certifiée s'ils ne sont pas rédigés en français lors de la... lorsque la demanderesse
est une personne morale.
La Présidente (Mme
Thériault) : Questions, commentaires? Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Quand
on parle de l'article 9 de la Charte de la langue française proposé par
l'article 5 du projet de loi, on parle de langue de la justice?
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : L'article 5 du projet de loi... l'article 5
du projet de loi...
La Présidente (Mme
Thériault) : C'est par concordance avec l'article 9 de la Charte
de la langue française, proposé à l'article 5.
M.
Jolin-Barrette : Oui. C'est les pièces de la procédure des personnes
morales.
La Présidente (Mme
Thériault) : Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Mais c'est parce qu'il y
a une concordance avec un ensemble d'articles à l'article 5 sur les
traductions, et tout ça, là. Mais je voudrais savoir les conséquences de ça,
là.
M.
Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, là, les documents dans une autre
langue que le français sont accompagnés d'une traduction certifiée au
Québec, la traduction doit être en français lorsque la partie qui demande la
reconnaissance ou l'exécution... étrangère est une personne morale. Vous vous
souviendrez que, pour les personnes morales, maintenant, pour faire un acte de
procédure, il faut qu'il y ait la traduction en français. Donc, s'ils déposent
leur acte de procédure en anglais, elle prend absolument une traduction en
français. Donc, c'est de la concordance avec ce qu'on a déjà fait
antérieurement.
Mme David : Oui, mais là on parle de
domaines, de trucs internationaux, là.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais,
exemple, un État étranger, c'est une personne morale. Donc, l'État étranger,
lui, quand il fait des procédures judiciaires, s'il dépose en anglais, il doit
également avoir une traduction en français, comme une personne morale.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de La Pinière.
M. Barrette : Excusez, je n'avais
pas compris. C'est juste judiciaire?
La Présidente (Mme Thériault) : Là,
c'est parce qu'on est en train de modifier le Code de procédure civile.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
M. Barrette : Non, j'avais compris,
là, mais, quand on fait référence à la procédure qui émane d'un État étranger,
par définition, dans cet article-là, c'est une procédure judiciaire.
M. Jolin-Barrette : C'est une
procédure judiciaire, oui.
M. Barrette : Est-ce que c'est une
procédure... Oui, O.K. Non, c'est correct. J'aurais posé une question qui ne
s'applique probablement pas là. C'est État à État ou c'est État à un
particulier?
M. Jolin-Barrette : Ça peut être
État à un particulier.
M. Barrette : N'importe quoi, là.
O.K.
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
ce qui veut dire, exemple...
M. Jolin-Barrette : Bien, exemple,
un État...
M. Barrette : Une compagnie.
M. Jolin-Barrette : À une compagnie
ou à un État...
M. Barrette : Mettons, Bombardier.
M. Jolin-Barrette : Oui, ou un État
qui veut saisir des biens d'une personne physique dans un autre pays.
La Présidente (Mme Thériault) : Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Dans les questions de
relations internationales, qu'est-ce que ça peut avoir comme effet ou comment
les gens d'autres pays peuvent accueillir cette disposition de traduction? Quel
est l'état actuel puis qu'est-ce que ça va changer?
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, l'état
actuel, c'est qu'ils peuvent le déposer en français ou en anglais. Là, ils vont
pouvoir continuer de le déposer en anglais s'ils veulent, mais ils ne peuvent
pas juste la déposer en anglais, il va falloir qu'ils le déposent aussi en
français.
Mme David : «Ils» pouvant même être
un État?
M. Jolin-Barrette : «Ils» étant un
État.
Mme David : «Ils» étant un État ou
une compagnie, comme disait mon collègue.
M. Jolin-Barrette : Non.
M. Barrette : Non,
non, non, l'État contre une compagnie.
Mme David : C'est l'État contre une
compagnie.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Mme David : «Ils», donc, c'est
toujours un État qui poursuit une compagnie, disons, au Québec.
M. Jolin-Barrette : Ou une personne
civile
Mme David : Ou une personne civile.
Mais c'est cet État-là qui doit déposer obligatoirement...
M. Jolin-Barrette : L'État
étranger...
Mme David : ...une partie en
français, même si...
Une voix : La Russie...
M. Jolin-Barrette : La Russie...
Prenons exemple, le Maine. Le Maine veut contester un contrat survenu entre
Hydro-Québec et une compagnie américaine pour l'établissement, supposons, d'une
ligne et le lieu d'introduction, la disposition est dans le district de
Saint-François, supposons. Mais l'État du Maine devrait... ils peuvent déposer
leurs procédures en anglais, mais ils devront avoir une traduction en français
au moment de déposer.
Mme David : Puis ça, c'est accueilli
comment, là, je veux dire, quand les États vont avoir cette exigence-là?
M. Jolin-Barrette : Bien, ils vont
se plier au droit québécois dans nos tribunaux. Bien, on est un État-nation au
Québec...
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de La Pinière... Poursuivez, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : M. le député de
La Pinière me souffle à l'oreille qu'il souhaite que le Québec devienne un
pays.
M. Barrette : Vous voyez, Mme la
Présidente, il recommence.
M. Jolin-Barrette : Mais c'est ce
que j'ai entendu.
La Présidente (Mme Thériault) : Bien,
moi, j'ai compris ce qu'il a dit puis il n'a pas souhaité, il vous a juste
susurré à l'oreille «pays», un mot. Il y a une petite différence, mais ça va.
M. Barrette : Ce qu'il fallait
démontrer.
M. Jolin-Barrette : Écoutez, Mme la
Présidente, le son voyage mal dans cette salle.
La Présidente (Mme Thériault) : C'est
pour ça que c'est important que j'écoute tous les débats pour pouvoir rectifier
des propos, des fois...
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
M. Barrette : Mme la Présidente,
est-ce que je peux prendre la parole? Je veux juste informer le ministre que
l'oreille est un organe involontaire, c'est l'esprit qui décide de filtrer et
de modifier les choses. Il avait bien compris, comme vous d'ailleurs, vous êtes
même plus loin de moi que lui.
La Présidente (Mme Thériault) : Mais
j'ai l'oreille fine. Donc, M. le ministre, pour répondre à la question de Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys, par rapport à un État qui pourrait
contester n'importe quoi, dorénavant, on va avoir une copie certifiée, point à
la ligne.
M. Jolin-Barrette : En français.
La Présidente (Mme Thériault) : Puisque
nous sommes au Québec, ce sera une copie en français parce que c'est nos lois
qui ont préséance ici.
M. Jolin-Barrette : Exactement. Et
il faut être certain d'avoir tous les outils d'un quoi? D'un forgeron dans
l'oreille, hein?
La Présidente (Mme
Thériault) : Ça va? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, j'essaie de voir,
parce que, dans l'article actuel, la première phrase qui précède... pas l'amendement, mais, oui, enfin, l'ajout, «les
documents dans une autre langue que le français ou l'anglais sont
accompagnés d'une traduction certifiée au
Québec», c'est quoi qu'on ajoute? Une traduction certifiée, ce n'est pas
implicitement en français?
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non, mais il
pourrait y avoir une traduction en anglais.
Mme David : C'est ça que ça veut
dire? Admettons que c'est en mandarin, donc c'est autre que le français ou
l'anglais sont accompagnés d'une traduction certifiée au Québec.
M. Jolin-Barrette : Exemple, là,
quelqu'un qui est... en mandarin, bien, ce n'est pas une traduction en anglais
qu'il va avoir, c'est une traduction en français.
• (18 h 40) •
Mme David : Mais ça, là, si ça date
de la Charte de la langue française initiale, là, le ministre de l'époque,
Camille Laurin, avait accepté tout ça. Vous devez être très, très déçu, non?
M. Jolin-Barrette : Bien, je vous
ramènerais aux dispositions que Camille Laurin avait introduites et qui ont été
invalidées par la Cour suprême avec l'arrêt Blaikie I. Donc, Camille Laurin
avait dit : La seule version officielle des lois et de la justice est le
français, donc il avait retiré toute notion d'anglais.
Mme David : Mais en quoi, là, on est
avec Blaikie ou pas? On n'est pas contre Blaikie, alors, si c'est absolument
français?
M. Jolin-Barrette : Non, on n'est
pas contre Blaikie. Dans le fond, là, les parties peuvent toujours déposer en
anglais leur procédure, mais, puisque c'est une personne morale, ils devront
joindre une copie certifiée en français dans tous les cas.
Mme David : Et ça, ça ne contrevient
pas à Blaikie?
M. Jolin-Barrette : Non.
La Présidente (Mme Thériault) : Donc,
ça fait que ce n'est pas au gouvernement du Québec à payer pour faire traduire
les documents en français.
Mme David : Bon, bien, Mme la
Présidente, vous nous dites comment voter cet article-là. C'est bien.
La Présidente (Mme Thériault) : Bien,
moi, c'est de même que je l'interprète, là. Ça veut dire que, dorénavant, vous allez faire vos traductions puis
vous allez les payer, point, au lieu que le gouvernement le fasse. Est-ce
que ça vous va? Est-ce que j'ai d'autres interventions sur l'article 140?
Si je n'en ai pas, on est prêt à mettre au vote l'article 140. Allez-y,
Mme la secrétaire... Excusez-moi. Est-ce que l'article 140 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
Donc, vous voyez, hein, ça ne prend pas grand-chose pour recréer une habitude.
Ça a pris quatre votes pour que je pense que le cinquième se faisait par vote
aussi, alors que c'est tout le monde qui adopte l'article, là. Donc, M. le
ministre, l'article 141.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 652 du code est modifié par l'ajout, à la fin du deuxième
alinéa, de la phrase suivante : «La traduction doit être en français
lorsque la partie qui présente la demande est une personne morale.».
Commentaire. Par concordance avec
l'article 9 de la Charte de la langue française proposé par
l'article 5 du projet loi, l'article 141 du projet loi modifie
l'article 652 du Code de procédure civile afin de prévoir que les documents
visés par cet article doivent être accompagnés d'une traduction certifiée s'ils
ne sont pas rédigés en français lorsque la demanderesse est une personne
morale.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires sur l'article 141?
Mme David : C'est un peu la même
chose, Mme la Présidente, que le précédent article. Là, on est dans les
sentences arbitrales, donc on est dans le droit. Je ne sais pas quelle sorte de
droit, là, mais, en tout cas.
M.
Jolin-Barrette : Mais ma réponse, c'est, exemple, en droit
international privé, lorsqu'on fait homologuer une sentence arbitrale d'un État
étranger, pour qu'elle puisse être homologuée au Québec, elle devra être
déposée... Exemple, vous avez une sentence arbitrale aux
États-Unis, supposons, elle est en anglais, mais, pour qu'elle rentre en force
puis qu'elle puisse être déposée, elle devra être traduite également.
Mme David : Donc,
on est dans la même logique que le précédent...
M.
Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : ...c'est-à-dire
que, jusqu'à maintenant, ça pouvait être le français ou l'anglais. Là, ça va
être... ça peut être l'anglais, mais il doit y avoir automatiquement le
français d'ajouté.
M. Jolin-Barrette :
Oui.
La Présidente (Mme
Thériault) : Ça va?
Mme David :
Oui.
La Présidente (Mme Thériault) : Donc, je suis prête à mettre aux voix
l'article 141. Est-ce que l'article 141 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
Thériault) : Adopté. Donc, M. le ministre, on change de section, Code
des professions, l'article 142. Allez-y.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Avec la permission des parlementaires, peut-être
que je suspendrais cet article-là et que je passerais au suivant.
Mme David :
Je voudrais savoir pourquoi.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
j'ai des collègues qui demandent : On aimerait savoir pourquoi. M. le
ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, considérant que, fort probablement, nous aurons des discussions sur
cet article-là...
Mme David : On s'en garde beaucoup
pour la fin, là, des grosses discussions. Parce que, là, il y a eu
effectivement des échanges importants. Moi, ça ne me dérange pas, mais ce que
ça veut dire, c'est qu'il va falloir être en forme pour tout ce qu'on met de
côté.
La Présidente
(Mme Thériault) : M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Dites-moi le moment où vous êtes le plus en forme.
Mme David :
Bien non, mais c'est parce que... C'est ça.
M. Jolin-Barrette :
Bien, si vous me dites : Ça va prendre cinq minutes, là...
Mme David :
Non, non, c'est plus long que ça, là, vous le savez. Ça aussi, c'est
costaud, là, 35.1, on le sait depuis le début, là.
M. Jolin-Barrette :
Alors, je nous suggère de passer au suivant en attendant.
La Présidente
(Mme Thériault) : Avant de suivre votre suggestion, d'avoir le
consentement, j'ai le député de La Pinière qui a un commentaire. Allez-y.
M. Barrette :
Est-ce que le ministre pourrait être un petit peu plus... élaborer un petit
peu plus? Parce que, là, il y a comme une tendance à l'effet que tout ce qui
est très lourd ou peut être suffisamment lourd dans les articles suspendus pour
la fin, ça va être une fin difficile.
M. Jolin-Barrette :
Non, je ne pense pas.
M. Barrette :
Est-ce que ça va être une fin dérogatoire? Est-ce c'est comme ça que le
ministre le voit?
M. Jolin-Barrette :
Qu'est-ce que vous voulez dire par «une fin dérogatoire»?
M. Barrette :
Ce n'est pas le bon mot...
La Présidente
(Mme Thériault) : Une procédure d'exception, vous voulez dire.
M. Barrette :
Une procédure d'exception. Est-ce que ça va être une fin exceptionnelle?
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, le fait d'adopter ce projet de loi, oui, je pense que ça va
être une situation exceptionnelle, mais pas au sens de la procédure législative
d'exception, mais au sens du fait que ça va être une avancée significative pour le français. Puis je vais être
heureux de vous serrer la main lorsqu'on aura adopté ce projet de loi là
ensemble.
M. Barrette :
Les mesures sanitaires ne le permettent pas.
M. Jolin-Barrette :
Je vais vous donner...
La Présidente
(Mme Thériault) : Un coup de coude.
M. Barrette :
J'apporterai des gants.
M. Jolin-Barrette :
D'accord.
La Présidente
(Mme Thériault) : Donc... Oui.
M. Barrette :
Mais je veux juste quand même terminer là-dessus, là, je ne veux pas faire
un débat, là, mais là le ministre comprend que, là, on en met à la fin des
éléments qui peuvent prendre un certain temps, là.
M. Jolin-Barrette :
Mais j'en suis conscient, justement pour qu'on puisse avancer sur d'autres
éléments, puis le temps que la réflexion se poursuive.
M. Barrette :
Parce qu'on est encore dans le mystère.
M. Jolin-Barrette :
De la foi?
M. Barrette :
Non, de la réflexion.
La Présidente
(Mme Thériault) : On est en temps de Pâques, mais ce n'est pas le
mystère de la foi.
M. Barrette :
Bon, est-ce que le dernier commentaire... l'avant-dernier commentaire du
ministre était à l'effet qu'il ne souhaite pas d'utilisation exceptionnelle?
M. Jolin-Barrette :
...je ne souhaite pas de recours à la procédure législative d'exception,
puis je nous l'ai toujours dit, puis je l'ai
dit à de multiples reprises à la députée de Marguerite-Bourgeoys. Je pense
qu'on peut adopter ce projet de loi de façon régulière. Écoutez, je
n'aurais pas passé 115 heures avec vous de façon soutenue et approfondie,
hein?
La Présidente
(Mme Thériault) : ...quand même.
M. Jolin-Barrette :
Énormément.
M. Barrette :
...parce que, moi, étant venu de façon ponctuelle, il est possible que ça
ait généré en moi des doutes. Bien là...
La Présidente
(Mme Thériault) : Des intentions.
M. Barrette :
Bref, vous comprenez ce que je veux dire. Maintenant, le ministre me
libère.
M. Jolin-Barrette :
Le député de La Pinière conviendra que c'est quand même curieux qu'un
projet de loi modificatif de la Charte de la langue française prenne plus de
temps que l'adoption même de la Charte de la langue française en 1977.
M. Barrette :
Oui, mais il faut faire...
Mme David :
...
La Présidente
(Mme Thériault) : Attention! Attention! Attention! C'est parce
que, là, ce que vous dites, ce n'est pas enregistré, il y a juste le ministre
qui a le micro ouvert. Donc, juste me signifier...
M. Jolin-Barrette : L'étude
détaillée de la loi 101, l'étude détaillée en commission parlementaire,
l'été 1977, a pris moins de temps que l'étude du projet de loi n° 96
à ce jour, et le temps court.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de La Pinière.
M. Barrette :
...comme me l'a fait remarquer ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, qui est
plus au fait de la chose... Je ne sais pas si ça marche.
La Présidente
(Mme Thériault) : ...
M. Barrette :
L'autre qui est ouvert?
La Présidente
(Mme Thériault) : Non, l'autre côté.
M. Barrette : L'autre,
O.K. Comme elle me l'a fait remarquer, la loi 101 était le résultat d'un
processus en deux étapes.
La Présidente
(Mme Thériault) : Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Il y a eu une loi n° 1 avant, avec toutes les
consultations, avec étude détaillée. Le ministre, à l'époque, est revenu avec
une cinquantaine d'amendements. Et là il y a eu les cinq semaines de
discussions.
M. Jolin-Barrette :
Alors, quand vous me dites...
Mme David :
Mais vous n'avez pas fait le processus de revenir avec des amendements,
puis etc.
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous n'arrêtez pas de...
Des voix : ...
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, la députée de Marguerite-Bourgeoys n'arrête pas de me
dire que j'arrive avec des amendements, puis là elle me taxe de comparer ça
avec à l'époque. Moi, là, je veux juste qu'on se remette dans la situation, là.
Encore, en 1977, le PLQ était contre la loi n° 1,
était contre la loi 101, a voté contre. On est 42, 43 ans plus tard,
45 ans plus tard, le PLQ est à la même place qu'avant, même, même place.
Il va voter contre la loi, contre la protection du français encore une fois.
Écoutez, c'est l'histoire qui se répète. L'Histoire sans fin. Vous
rappelez-vous de ça, Mme la Présidente? Il y a... peut-être, vos enfants ont regardé
ça.
La Présidente (Mme
Thériault) : J'étais pas mal jeune à cette époque-là, je n'avais pas
d'enfants.
M.
Jolin-Barrette :
L'Histoire sans fin?
La Présidente (Mme
Thériault) : Non, non, pas L'Histoire sans fin, mais vous me parliez
de...
M.
Jolin-Barrette : Avec le chien, là. Vous vous souvenez de ça?
La Présidente (Mme
Thériault) : Mon fils n'a pas regardé ça. Je ne me souviens pas de ça,
moi non plus.
M.
Jolin-Barrette : Non? Vous êtes sûre?
La Présidente (Mme Thériault) : Je
n'écoutais pas ça. Mais n'empêche que j'avais quand même des
interventions de l'autre côté, et je veux juste vous rappeler qu'on est en
train de discuter... Est-ce qu'on étudie un article ou on suspend? Donc, M. le
député de La Pinière
M. Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Mais le ministre ne nous donne pas le choix. Il
vient de faire une belle démonstration de diversion sur un point à propos
duquel il a tort par omission. La procédure parlementaire, dans un mandat qui a
mené à la loi 101, avait deux étapes. Et quand il comprend 96, qui est un
processus parlementaire d'aujourd'hui, qui est constitué d'une seule étape, à
une seule étape de l'autre, c'est un petit peu particulier sur le plan
intellectuel. S'il veut comparer les deux processus parlementaires, il doit
additionner les heures de la charte avec les heures du 1 et il ne le fait
jamais. Et, s'il le faisait, il constaterait qu'on est bien, bien, bien en deçà
de ce que ça a pris comme temps parlementaire à l'époque pour adopter la
charte, en toute honnêteté.
La Présidente (Mme
Thériault) : Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien
moi, je n'ai pas d'objection à suspendre le 142, mais je vais demander une
suspension, point à la ligne, parce que j'ai besoin de discuter pour la suite.
La Présidente (Mme
Thériault) : Pour la suite des choses? Donc, on va faire une
suspension. Je veux juste vous rappeler que nous terminons les travaux à
19 h 15.
Donc, on fait une
suspension, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 18 h 50)
(Reprise à 18 h 56)
La Présidente (Mme Thériault) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous poursuivons nos travaux. Et nous étions
rendus à l'article 143. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Oui, je vais juste
demander de suspendre, Mme la Présidente, l'article 143, parce qu'on aura
peut-être un amendement puis, le temps de peaufiner, on aimerait mieux revenir
demain, ce n'est pas trop compliqué.
La Présidente (Mme Thériault) : À
la prochaine séance, parfait. Il y a consentement, M. le ministre?
M. Jolin-Barrette : Consentement.
La Présidente (Mme Thériault) : Consentement
pour suspendre l'article 143. Je prends note que, lorsque nous poursuivrons
les travaux demain, je vous poserai la question : Est-ce que vous voulez
qu'on poursuive la séance où on revient avec l'article?
Mme David : Je
peux vous jurer, Mme la Présidente, que ce sera tout de suite au début, demain,
en reprenant. O.K.
La Présidente (Mme Thériault) : Il
n'y a pas de problème, on comprend. De toute façon, demain, il y a deux
séances, matin et en après-midi, les deux. Donc, l'article 143 est
suspendu, comme le 142. M le ministre, l'article 144.
M. Jolin-Barrette : Oui.
L'article 4 de la Loi sur l'exécutif est modifié par l'ajout, après le
paragraphe 39° du premier alinéa, du paragraphe suivant :
«40° un ministre de la Langue française.».
Commentaire. L'article 144 du projet de loi
modifie l'article 5 de la Loi sur l'exécutif pour établir le titre de
ministre de Langue française.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires sur l'article 144? Ça va sur l'article 144? On est prêts
à le mettre aux voix. Est-ce que l'article 144 est adopté? Adopté M. le
ministre, 145, sur la Loi sur l'Institut de la statistique du Québec.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors,
l'article 3.1 de la Loi sur l'Institut de la statistique du Québec est
remplacé par le suivant :
«3.1 Dans le cadre de sa mission, l'institut
doit entre autres recueillir, produire et diffuser les informations
statistiques nécessaires aux fins suivantes :
«1° aider à l'élaboration et au suivi de la
stratégie de développement durable du gouvernement, dont les informations
statistiques requises pour les indicateurs de développement durable;
«2° réaliser les rapports prévus par la Loi sur
le développement durable;
«3° aider au suivi de la situation linguistique
au Québec, dont les indicateurs de l'usage du français dans la sphère publique
par la population québécoise;
«4° réaliser les rapports, recherches, analyses,
études et avis prévus par la Charte de la langue française.»
Commentaire. L'article 145 du projet de loi
propose le remplacement de l'article 3.1 de la Loi sur l'Institut de la
statistique du Québec afin d'y prévoir que l'institut doit recueillir, produire
et diffuser les informations statistiques nécessaires pour aider au suivi de la
situation linguistique au Québec et pour réaliser les rapports, recherches,
analyses, études et avis prévus par la Charte de la langue française.
La Présidente (Mme Thériault) : Questions,
commentaires? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je sais qu'on a
souvent parlé de l'Institut de la statistique du Québec. Je regarde l'actuelle
charte, et c'est, comme souvent, là, d'ailleurs, beaucoup plus large et moins
détaillé. Là, on ajoute beaucoup, beaucoup de détails avec 1°, 2°, 3°, 4°, tout
ce qu'il doit faire. Est-ce que c'est parce qu'il trouvait que ce n'était pas
assez contraignant, pas assez précis, ce que
l'Institut de la statistique a à faire? C'est quoi, les raisons d'aller autant
dans les détails alors que c'est leur mission, à eux, de faire ce qu'ils
ont à faire, là, de par le fait qu'ils sont un institut de statistique?
• (19 heures) •
M. Jolin-Barrette : Bien, en partie,
c'est une reformulation. Tout ce qu'il y avait dans le paragraphe, vous le retrouvez également à 3.1., mais on ajoute
également la partie sur l'usage des langues, donc «aider au suivi de la
situation linguistique au Québec, dont les
indicateurs de l'usage du français dans la sphère publique par la population
québécoise». Donc, on ajoute une composante linguistique spécifiquement à
l'Institut de la statistique du Québec. Donc, pour...
Mme David : Donc, ça se rajoutera à
l'OQLF, au commissaire, il va y avoir beaucoup de monde qui va faire beaucoup
de chiffres là-dedans.
M. Jolin-Barrette : Exactement, mais
l'Institut de la statistique a une compétence particulière en matière de
statistiques.
Mme
David : Et à qui ça va servir le plus? Au commissaire ou à l'OQLF?
M.
Jolin-Barrette : Bien, au public, parce que les rapports de l'Institut
de la statistique sont rendus publics, les données. Ça fait que les
chercheurs... l'OQLF va pouvoir les utiliser. Oui, le commissaire, mais
également les chercheurs universitaires.
Mme David : O.K.
Ça va, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Ça va? S'il n'y a pas d'autre commentaire, on met aux
voix l'article 145. Est-ce que l'article 145 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
Thériault) : Adopté. M. le ministre, pour les suivants, c'est la Loi
d'interprétation. Vous avez l'introduction de trois articles à 146. On commence
par 40.1.
M.
Jolin-Barrette : Oui. La Loi d'interprétation est modifiée par
l'insertion, après l'article 40, des suivants :
«40.1. Les lois
doivent être interprétées de manière à ne pas supprimer ou restreindre la
jouissance ou l'exercice d'un droit visant à protéger la langue française
conféré par la Charte de la langue française.»
Commentaire.
L'article 146 du projet de loi modifie la Loi d'interprétation afin d'y
ajouter trois nouveaux articles prévoyant chacun une règle d'interprétation.
L'article 40.1 de la Loi sur l'interprétation que propose
l'article 146 du projet de loi reprend la même règle d'interprétation que
celle introduite au deuxième alinéa de l'article 50 de la Charte des
droits et libertés de la personne par l'article 136 du projet de loi en la
rendant applicable à toutes les lois au Québec.
La Présidente (Mme
Thériault) : Questions, commentaires sur l'article... sur le 40.1?
Mme David : ...j'aimerais
ça savoir c'est quoi, une loi d'interprétation. Sincèrement, là...
M.
Jolin-Barrette : Dans le fond, au Québec, il y a la Loi sur
l'interprétation... pardon, la Loi d'interprétation. Donc, c'est une loi qui
vient... parce que, vous savez, dans le corpus — quand je dis le
corpus, c'est toutes les lois au Québec — il y en a de multiples, lois,
puis, pour assurer une cohérence d'interprétation, le Québec a adopté une Loi
d'interprétation qui fait référence... de quelle façon est-ce qu'on interprète
les lois. Donc, exemple, le terme «conjoint», supposons, s'il n'est pas défini
à l'intérieur d'une loi spécifique, bien, il va y avoir une définition dans la
Loi d'interprétation qui dit ce à quoi on entend le terme générique de
«conjoint», supposons.
Dans
le fond, la Loi d'interprétation sert à guider le législateur... pardon, sert à
guider le juge dans l'interprétation des termes développés par le
législateur. Dans le fond, là, c'est comme un guide, là, la loi... Pour
l'imager, là, vous avez la série de lois, là, toutes les lois qu'on a ici, puis
vous avez une loi à part qui s'appelle la Loi d'interprétation, qui dit :
Écoutez, c'est comme un guide pour faire la lecture des lois en termes
d'interprétation. Donc, dans les pays de tradition britannique, c'est courant.
Mme David : ...des
avocats pour, justement, interpréter les lois. Ça se chicane toujours, des
avocats, là, ils ont la même loi, puis il y a deux interprétations différentes
tout le temps, tout le temps, tout le temps. C'est basé là-dessus.
M.
Jolin-Barrette : Ça ne se chicane pas...
Mme David : Ça
s'oppose. Ça donne une interprétation différente. Ça essaie de convaincre un
jury que, non, ce n'est pas exactement ça, que c'est plutôt ça, que...
M.
Jolin-Barrette : Bien, c'est ça, mais la Loi d'interprétation, c'est
un outil à la portée des juges.
Mme David : Oui,
mais, si la Loi d'interprétation répond à tout ce que c'est, un conjoint, un
ci, un ça.
M. Jolin-Barrette :
Non, mais pas à tout. C'est des formules génériques. Je vous donne un
exemple. L'article 54 de la Loi d'interprétation dit, puis qu'on en a
discuté plus préalablement dans le projet de loi : «Le nombre — supposons
sur la façon que c'est rédigé — singulier s'étend à plusieurs personnes
ou à plusieurs choses de [la] même espèce, chaque fois que le contexte se prête
à cette extension. Le nombre pluriel peut ne s'appliquer qu'à une seule
personne ou à un seul objet si le contexte s'y prête.»
Donc, quand le
législateur dit : Le particulier fait ça, mais, puisque le terme singulier
est utilisé dans la rédaction législative, il pourrait y arriver, tu sais,
quand le juge va interpréter, est-ce que ça s'applique aux particuliers avec un
s? La réponse à cette question-là, c'est l'article 54. Ça fait que ça
donne à un guide, lorsque le juge et sur le banc puis il doit interpréter,
supposons, un litige ou il doit interpréter la loi, bien, la Loi
d'interprétation est un guide supplémentaire pour l'accompagner dans
l'interprétation que le législateur a voulu donner au texte législatif.
Mme David :
...si tout est interprété d'avance, on lui dit comment penser, comment...
Là, on va lui dire à 40.2 : «Toute loi est présumée permettre d'utiliser
seulement le français dans l'exécution des obligations qu'elle prévoit.»
M. Jolin-Barrette :
C'est un guide.
Mme David :
Mais un guide, c'est une instruction, c'est une loi qu'on vote, là.
M. Jolin-Barrette :
C'est une loi, mais...
Mme David :
On va voter tout à l'heure, pour, contre, abstention.
M. Jolin-Barrette :
...savez-vous, s'il y a autant de... si les juges ont autant de travail,
là, c'est parce qu'il y a beaucoup de lois puis il y a des gens qui demandent
des interprétations. Il y en a qui demandent des jugements déclaratoires :
M. le juge, pouvez-vous nous dire ce que ça veut dire, cette loi-là? Ça fait
que...
Mme David :
La même chose que moi.
M. Jolin-Barrette :
Oui, mais ce que je veux dire, pour arriver... pour accompagner le juge
dans son interprétation, bien, le législateur lui donne des outils pour
interpréter. Mais, tu sais, vous savez, les juges, là, ils ne naissent pas fontaine de justice, là, hein? C'est
des humains comme vous et moi, puis ils ont une formation, puis ils
apprennent, puis il y a des bons juges, puis, avec l'expérience, ils deviennent
encore meilleurs, puis...
La Présidente
(Mme Thériault) : On pourrait presque comparer avec le guide de
la procédure parlementaire quand on devient un parlementaire.
M. Jolin-Barrette :
Exactement, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Thériault) : On a un guide de procédure parlementaire pour
les députés, mais les juges ont un guide qui s'appelle la loi sur
l'interprétation.
Mme David :
...parce que ça me semble extrêmement important. Dans la loi actuelle,
encore une fois, c'est beaucoup plus, je dirais, concis. Il n'y a que
l'article 40. Il n'y a pas 40.1, 40.2, 40.3, puis ça dit : «Le
préambule d'une loi en fait partie et sert à expliquer l'objet et la portée.
«Les lois doivent
s'interpréter, en cas de doute, de manière à ne pas restreindre le statut du
français.»
Mais il me semble que
ça dit ce que ça dit. Mais pourquoi rajouter autant de détails? Parce que, là,
quand on va voter, on va voter l'article 40, là, pas 40.1, 40.2, 40.3,
mais il me semble que ça va... ça va pas mal loin, là, puis le juge, il n'aura plus bien, bien... rien à
réfléchir, là, quand il va avoir 40.1 : «40.1. Les lois doivent être
interprétées de manière à ne pas supprimer ou restreindre la jouissance
[...] visant à protéger la langue française conféré par la charte...»
Deuxièmement :
«40.2. Toute loi est présumée permettre d'utiliser seulement le français dans
l'exécution des obligations — puis :
«40.3. Toute loi
[est] interprétée de manière à favoriser l'utilisation et la protection du
français.»
Qu'est ce que ça rajoute de plus ou que ça dit à
un juge qui a toute cette énorme loi-là puis qui est présumé la posséder?
M. Jolin-Barrette :
Si jamais la loi, elle est contestée ou lorsqu'une disposition, elle est
contestée, on vient guider le juge pour dire : Écoutez, là, vous avez un
doute, là, vous questionnez sur la façon d'interpréter, bien, voici, on vous
accompagne, puis voici des éléments supplémentaires à votre portée, voici les
outils de votre coffre à outils en termes d'interprétation. Puis, vous vous
souvenez, on a eu des longues discussions sur la portée des versions française
et anglaise. Puis là on a abordé les règles ordinaires d'interprétation, tout
ça. Alors, avant d'arriver aux règles ordinaires d'interprétation pour un juge,
bien, avant ça, il y a la Loi d'interprétation qui est une loi adoptée puis qui
dit : Voici, quand vous avez une situation x, y ou z, bien, voici des
règles d'interprétation qui vous guident. Je donne un exemple, là. On en a discuté
ensemble aussi préalablement. Le fait que les lois sont écrites au masculin,
bien, dans la Loi d'interprétation, il y a une disposition qui dit que le
masculin emporte le féminin également.
Mme David :
Inclut, j'espère, parce qu'«emporter», surtout que... si vous dites
«l'emporte sur le féminin», ça serait moins le fun...
M. Jolin-Barrette :
Non, non, qu'il l'inclut.
Mme David :
...en valeur épicène.
M. Jolin-Barrette :
Je me suis mal exprimé.
Mme David : Mais
je n'ai pas... mais je n'ai pas terminé. Ça va être quoi, ça, l'impact de
«toute loi est présumée permettre d'utiliser seulement le français dans
l'exécution des obligations qu'elle prévoit»? Il y a le
mot «présumée», là, ce n'est pas «réputée», en tout cas, mais pourquoi il faut
mettre ça? Donnez-moi un exemple.
La Présidente
(Mme Thériault) : M. le ministre. On est rendus dans 40.2. Je
comprends que vous avez...
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est
ça, hein?
Mme David : Mais moi, je
travaille tout le 146, là. C'est ça que je comprends?
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
bien, c'est parce que, normalement, on devrait faire chacun des alinéas pour
pouvoir bénéficier du temps de parole qui est accordé. Par contre, si vous me
dites : On va tout faire le 146, bien, on peut cumuler le temps, là, c'est
ce que je comprends aussi.
Mme David : Ah! je ne pense pas
que je vais passer une heure, là, mais...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
bien, je ne pense pas non plus, mais, si c'est plus facile, on peut l'étudier
dans son entièreté, le 146. On a juste plus... On a le même nombre de temps,
mais dans l'ensemble. C'est juste pour ça.
Mme David : O.K. Je comprends.
Merci.
M. Jolin-Barrette : Ici, là, ce
que fait 40.2, c'est que ça permet de faire en sorte qu'une personne peut
fonctionner uniquement en français dans le cadre de l'exécution des obligations
que prévoit une loi du Québec. Ça veut dire que vous n'avez pas besoin de
recourir, pour une personne qui a des obligations en vertu d'une loi, à une
autre version que le français. Une personne est présumée, là, pour pouvoir
fonctionner dans le cadre d'une relation de nature juridique ou dans le cadre d'un
texte qui est imposé par une loi, une obligation par une loi, qu'il puisse
fonctionner unilatéralement en français, qu'il n'ait pas besoin nécessairement
d'aller voir la version anglophone... anglaise de la loi et qu'il puisse... Son
obligation, elle est complète en français.
• (19 h 10) •
Mme David : Mais je pensais
qu'on avait tout discuté ça dans l'article 5, là, que... il me semblait...
M. Jolin-Barrette : Mais, oui,
sauf que, parallèlement...
Mme David : C'est comme si le juge
n'était pas assez connaissant pour interpréter lui-même.
M. Jolin-Barrette : Non, ce
n'est pas ça, ce n'est pas ça. Dans le fond, le juge est chargé de
l'interprétation, mais, pour pouvoir être chargé de l'interprétation, bien, il
y a une loi qui l'accompagne, c'est comme un guide d'interprétation à côté.
Exemple, quand vous rédigez un texte puis vous avez votre Bescherelle à
côté pour vous guider, ça peut arriver, des fois, qu'on a des trous, ou tout
ça, ou la grammaire, ou tout ça. Alors, on regarde puis on dit : Ah! bien
oui, c'est vrai, les règles. Voici le cadre, puis moi, je viens interpréter à
la lumière de la Loi d'interprétation.
Mme David : Et, si je comprends
bien, c'est une loi, c'est une loi.
M. Jolin-Barrette : C'est une
loi. C'est une loi.
Mme David : Une loi, c'est
contraignant. Donc, une loi vient contraindre une autre loi.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, dans le corpus, là, toutes les lois s'interprètent les unes par rapport
aux autres, puis la constitution prime. Mais, dans le fond, c'est des outils à
la portée. Parce la Loi d'interprétation ne vient pas dire : Dans telle
situation spécifique, voici ce que vous allez décider, M. le juge, voici ce que
vous allez interpréter. Par contre, ça va lui donner des outils quand il est
face à une situation où il doit interpréter. Puis il se questionne puis il
dit : Oui, O.K., dans la loi, là, il est écrit : Le chien blanc ne
peut pas... ne peut pas quoi?
Une voix : Être gris
M. Jolin-Barrette : O.K., ne
peut pas être gris, mais ça s'adonne qu'il y a plus qu'un chien. Puis là le
juge, il se dit : Bien là, c'est-tu une infraction, supposons? Mais là il
va aller voir sa Loi d'interprétation, puis il va se casser la tête, puis il va
dire : Bien, coudon. Ah! puis, oui, le singulier emporte le pluriel, même
si le législateur n'a pas écrit «le ou les chiens». Il va tirer une inférence
de la Loi d'interprétation, il va dire : Bien oui, c'est vrai, le
législateur dit, dans un texte, «le» peut être interprété comme «les», si le
contexte s'y prête. Donc, c'est comme un guide, c'est comme des lignes
directrices, mais, oui, c'est dans une loi.
Mme David : Et, comme par
hasard, là, il n'est pas marqué «toute loi doit être interprétée de manière à
favoriser l'utilisation et la protection de l'anglais», là, c'est vraiment le
français. Donc, c'est... ça répète ce qu'il y a dans le projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Entre
autres.
Mme David : Et,
quand on... C'est quoi, l'impact, par exemple, du 40.2, là, «toute loi est
présumée permettre d'utiliser seulement le français dans l'exécution des
obligations qu'elle prévoit», les conséquences de ça, là, ou...
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, c'est un tout cohérent. Dans le fond, on a dit : Quelqu'un peut
vivre en français au Québec. Donc, quand il y a des obligations légales qui lui
sont imposées, bien, ces obligations légales là peuvent être uniquement en français. Je donne un exemple, là, dans les
lois d'interprétation. Vous vous souvenez, il y a fort longtemps...
bien, pas si longtemps que ça, pour siéger au Sénat, on disait qu'il fallait
être une personne pour siéger au Sénat. Puis ça s'adonne qu'il y en a qui
contestaient le fait qu'une femme n'était peut-être pas une personne. Donc...
Non, non, mais, honnêtement, ça ne fait pas si longtemps, là, tu sais, dans le
dernier siècle, là.
Mme David : Mais qu'est-ce que
ça apporte de plus?
M. Jolin-Barrette : Bien, ce
que ça apporte, c'est que ça indique au juge clairement... C'est un chemin, un
accompagnement, c'est une main tendue, on l'accompagne, là. C'est comme une
canne, là, quand il marche sur la voie de l'interprétation.
Mme David : Mais vous ne
trouvez pas que vous balisez un peu trop votre sentier du juge, là? Il va
dire : Je suis capable de réfléchir tout seul, non?
M. Jolin-Barrette : Non.
Honnêtement, la Loi d'interprétation, ce n'est pas moi qui l'a inventée, là.
Donc, elle est déjà existante, puis j'aime beaucoup mieux que le sentier soit
très bien balisé, parce que le législateur ne parle pas pour rien dire.
Mme David : O.K. Alors, si le
juge est lié par la loi, parce que ça, c'est une loi, là, on va voter cet
article-là, lui-même pourrait être poursuivi
pour ne pas avoir suivi cette loi-là? Il pourrait... Les gens pourraient
contester en appel?
La Présidente (Mme Thériault) : Son
jugement sera contesté.
M. Jolin-Barrette : Exemple,
là, si le juge fait une erreur de droit, là, bien oui, mais, nonobstant la Loi
d'interprétation, là, lorsqu'un juge interprète une disposition, puis c'est
contraire au droit ou c'est déraisonnable, les justiciables peuvent aller en
appel.
Mme David : ...il y a comme
deux lois, il y a la loi qu'il doit prendre, la Charte de la langue française,
plus la Loi d'interprétation, qui lui dit comment penser.
M. Jolin-Barrette : Ça ne lui
dit pas comment penser, ça le guide dans son interprétation.
Mme David : Bien, guide, un
guide qui est dans une loi, c'est pas mal un guide constructif... contraignant.
M. Jolin-Barrette : Mais
je veux juste vous dire que c'est ça, l'État du droit actuellement, depuis fort
longtemps. La Loi interprétation, il faudrait ressortir elle date de quelle
année, mais ce n'est pas nouveau, là.
La Présidente (Mme Thériault) : Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Mais c'est parce
que je ne vois pas l'impact, par exemple, de 40.2. J'ai peur qu'on dise oui,
là, parce qu'on est fatigués, puis on s'en va, puis...
Une voix : ...
Mme David : Bien, ça va aller à
demain si je parle encore 40 secondes, là. Mais, sur le fond, c'est
plus... Je veux être sûre que ce n'est pas quelque chose, encore une fois, qui
est comme un peu quelque chose qu'on adopte vite, là, puis qu'on ne sait pas
trop les conséquences, là. Puis...
La Présidente (Mme Thériault) : Votre
questionnement, il est tout à fait légitime, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys. M. le député de La Pinière.
M. Barrette : Mme la
Présidente, tout simplement vous informer que c'est sûr que, demain, je vais
faire une intervention. Alors, je vous propose de nous envoyer souper, tout le
monde.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
ça fait un petit bout de temps que vous aviez le doigt levé pour signifier
votre intention de prendre la parole.
Donc,
effectivement, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux. Je vous souhaite
une bonne soirée. À demain.
(Fin de la séance à 19 h 15)