(Onze heures dix-neuf minutes)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Bonjour, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission de la culture et de l'éducation ouverte.
La commission est réunie afin de poursuivre
l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la langue
officielle et commune du Québec, le français.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente.
M. Émond (Richelieu) est remplacé par M. Lévesque (Chapleau); Mme St-Pierre
(Acadie) est remplacée par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); et Mme Dorion
(Taschereau) est remplacée par Mme Ghazal (Mercier).
Étude détaillée (suite)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. Donc, aujourd'hui, nous débutons avec l'étude de l'article 38 du
projet de loi. Donc, M. le ministre, je vous laisse nous présenter l'article.
• (11 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la
Présidente, 38, hein?
Bon, l'article 49 de cette charte est
modifié :
1° par le remplacement de «salariés» par
«travailleurs»;
2° par l'insertion, après «écrites», de «et
orales»;
3° par le remplacement de «correspond avec un
membre en particulier» par «communique avec un membre qui lui en fait la
demande»;
4° par l'ajout, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«Il en est de même pour un comité paritaire
lorsqu'il communique avec les parties.»
Commentaire. Les modifications proposées à
l'article 49 de la Charte de la langue française par l'article 38 du
projet de loi font en sorte que les associations de travailleurs devront
communiquer en français avec leurs membres, tant à l'oral qu'à l'écrit. Elles
pourront toutefois communiquer dans une autre langue avec un de leurs membres
si ce dernier en fait la demande. Il en sera de même pour un comité paritaire
lorsqu'il communiquera avec les salariés et les employeurs professionnels
parties à une convention collective rendue obligatoire par la Loi sur les
décrets de convention collective.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. Donc, des interventions sur l'article 38? Pas
d'intervention. Donc, l'article 38 étant adopté, on passe à
l'article 39. L'article 39. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : 39.
L'article 50 de cette charte est modifié :
1° par le remplacement de «. Une stipulation de
la convention contraire à une disposition de la présente loi est nulle de
nullité absolue» par «ou de toute entente collective»;
2° par l'ajout, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«Malgré les articles 47 et 47.4, le
travailleur visé par une convention collective ou une entente collective doit faire
valoir ses droits conformément aux voies de droit que prévoit cette convention
ou cette entente, dans la mesure où de telles voies existent à son égard. À
défaut par l'association de travailleurs qui représente le travailleur de
soumettre le grief à l'arbitrage, celui-ci peut le faire.»
Commentaire. Les modifications proposées à
l'article 50 de la Charte de la langue française par l'article 39 du
projet de loi étendent la portée de la présomption irréfragable qui est prévue
pour qu'elle s'applique également aux ententes collectives. Elles prévoient
également que les travailleurs visés par une entente ou une convention
collective doivent faire valoir leurs droits conformément à ce qui est prévu
dans cette entente ou dans cette convention. Ainsi, ces travailleurs devront
faire valoir leurs droits auprès de leur association de travailleurs plutôt
qu'après... qu'auprès de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et
de la sécurité du travail, comme le prévoit actuellement le troisième alinéa
des articles 45 et 46 de la charte.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. Des interventions? Pas d'intervention. Donc,
l'article 39 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. Donc, l'article 39 étant adopté, nous passons à l'article 40.
M. Jolin-Barrette :
Oui. 40. Cette charte est modifiée par l'insertion, après l'article 50, du
suivant :
«50.1. Lorsque les personnes adhérant à un
groupe couvert par un contrat d'assurance collective sont toutes des
travailleurs qui ont un lien d'emploi avec un ou plusieurs employeurs,
l'assureur est tenu de remettre au preneur une copie de la police rédigée en
français; il en est de même des attestations d'assurance [lorsqu'elles]»...
pardon, «il en est de même des attestations d'assurance devant être distribuées
à ces travailleurs.
«Lorsque la police est également rédigée dans
une autre langue que le français, le droit de consulter la police et d'en
prendre copie, prévu au deuxième alinéa de l'article 2401 du Code civil,
s'exerce aussi bien à l'égard de la copie de la police rédigée en français que
[...] celle rédigée dans l'autre langue.
«En cas de divergence entre la version française
et celle dans une autre langue de ces documents, un travailleur peut invoquer
l'une ou l'autre, selon ses intérêts.
«Le présent article s'applique à un contrat de
rente collective, compte tenu des adaptations nécessaires.»
Commentaire. L'article 40 du projet Loi
propose d'ajouter un article 50.1 à la Charte de la langue française pour
que les travailleurs aient facilement accès à une version française des
documents relatifs à un contrat d'assurance collective ou un contrat de rente
collective qui les concerne.
En cas de divergence entre la version française
de ces documents et une version de ceux-ci dans une autre langue, un
travailleur pourra invoquer l'une ou l'autre, selon ses intérêts.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Des interventions sur l'article 40? Pas d'intervention. Donc, est-ce que
l'article 40 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Nous passons maintenant à l'article 41.
M. Jolin-Barrette : 41. Cette
charte est modifiée par l'insertion, après l'intitulé du chapitre VII qui
précède l'article 51, de l'article suivant :
«50.2. L'entreprise qui offre au consommateur
des biens ou des services doit respecter son droit d'être informé et servi en français.
«L'entreprise qui offre à un public autre que
des consommateurs des biens et des services doit l'informer et le servir en
français.»
Commentaire. L'article 50.2 de la Charte de
la langue française que propose l'article 41 du projet loi a pour objet de
rendre exécutoire le droit conféré aux consommateurs par l'article 5 de
cette charte d'être informés et servis en français. À cette fin, le premier
alinéa de l'article 50.2 prévoit que c'est l'entreprise qui offre des
biens ou des services aux consommateurs qui est débitrice de cette obligation.
L'article 50.2 a également pour objet
d'étendre ce droit d'être informé et servi en français au-delà des seuls
consommateurs visés à l'article 5. C'est pourquoi son deuxième alinéa
prévoit que les entreprises doivent également informer et servir en français le
public et les consommateurs.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui, des interventions? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Bon jeudi matin, dernier jour ici. Ce n'est pas qu'on ne vous aime
pas, tous, mais on travaille fort. Ce sont des grosses semaines, hein, pour le
ministre et son équipe... que pour nous. Alors, on va continuer à travailler
sérieusement.
Donc, l'article 41 qui parle de
l'article 50.2 de la charte parle d'un sujet qui, je l'ai dit, d'ailleurs,
en adoption de principe, est traité très, très, très rapidement, en une ligne
et demie, mais alors que c'était un immense débat de société où on parlait
d'être accueilli, informé en français dans les petits commerces. Alors, je ne
reviendrai pas sur l'ensemble de ce grand débat de société, qui a
principalement eu cours à partir d'enquêtes du Journal de Montréal au
centre-ville. Et c'est pour ça que, dans notre propre plan d'action sur la
langue française, nous avions, et c'est dommage que ça ne soit pas comme tel
dans le projet de loi... mais une intervention ciblée sur le centre-ville de
Montréal et même d'autres centres-villes qui s'anglicisent de plus en plus.
Alors,
l'importance d'être accueilli, servi, informé en français, bien, je sais qu'il
y a des mots tabous maintenant, comme le «Bonjour! Hi!», mais c'est
d'être vraiment accueilli, servi et informé en français. Alors, je vais
certainement m'intéresser aux moyens pour qu'on puisse répondre à ça, mais j'ai
aussi une question peut-être plus technique, la différence entre le premier
paragraphe et le deuxième paragraphe. On comprend bien, dans les commentaires,
que les entreprises doivent également informer et servir en français le public
autre que les consommateurs. Moi, je pensais que les consommateurs, c'était ça,
pas mal, le public. Alors, il y a certainement une idée, derrière cette
intention du législateur, que j'aimerais peut-être comprendre, pour commencer.
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors,
la distinction entre les deux... Dans le fond, «l'entreprise qui offre au
consommateur des biens [et] des services doit respecter son droit d'être
informé et d'être servi en français», donc, ça, c'est pour le consommateur qui
va s'acheter une paire de jeans, mais il a le droit d'être servi puis d'être
informé en français. Deuxièmement, le deuxième, c'est : «...qui offre à un
public autre que des consommateurs des biens et des services [doivent]
l'informer et le servir en français.» Donc, vous, votre question, c'est :
Qui est-ce que ça vise, «l'entreprise qui offre à un public autre que des
consommateurs»? Alors...
Mme David : ...là, ceux qui en
parlent le mieux, c'est le Conseil québécois de commerce de détail. On les
comprend parce qu'eux leur spécificité, c'est le commerce de détail.
M. Jolin-Barrette : Donc, c'est
d'une entreprise à une autre entreprise.
Mme David : C'est d'une
entreprise... Alors, eux autres ne comprennent pas trop, ils disent :
C'est ambigu, peut-être injustifié, c'est quoi, le même droit pour le
consommateur qu'envers le public autre que consommateurs? Ils trouvent que ça
n'accorde pas le même droit au consommateur qu'au public autre que
consommateurs.
M. Jolin-Barrette : Non, mais, en
fait, là, si vous êtes, exemple, un fournisseur d'une entreprise... Moi, je
suis un fleuriste, O.K., puis j'achète mes fleurs du grossiste. Bien, moi,
comme fleuriste, inc., là, Les fleurs de l'amour inc., O.K., j'ai pignon sur
rue. Alors, quand les gens viennent chez moi, aux Fleurs de l'amour inc., les
consommateurs qui viennent acheter leurs roses pour la Saint-Valentin, je dois
pouvoir les servir et les informer en français. Le consommateur qui vient puis
qui dit : M. le fleuriste, j'aimerais ça avoir une rose bleue, je dis...
je vais dire au consommateur : Bien, écoutez... en français, je vais lui
dire : Ça n'existe pas, des roses bleues, mais... bien, on peut vous en faire
une, mais il va y avoir un petit peu de peinture dessus, là, ça va me prendre
une canette de peinture. Parfait, je me retourne, j'appelle mon grossiste qui
me fournit les roses puis je dis : Pourriez-vous me fournir des roses
bleues dans ma prochaine commande? Bien, dans le fond, le grossiste, lui, pour
les fins de son commerce, doit pouvoir communiquer en français avec le
fleuriste, Les fleurs de l'amour.
• (11 h 30) •
Mme David : Bien, vraiment, là... et
c'est intéressant de regarder les commentaires du Conseil québécois de commerce
de détail parce qu'ils mettent le doigt sur une formulation qui a l'air
subtilement différente entre le premier et le deuxième paragraphe, et eux
trouvent ça injuste. Pour le deuxième paragraphe, c'est effectivement
entreprise versus entreprise, et ils disent... communément appelé B2B. En bon
français, B2B... Je ne connais pas l'expression, mais, en tout cas, B2B, ça
veut dire «business-to-business», peut-être? Est-ce que quelqu'un saurait... Ça
doit être «business-to-business». Ah! merci, M. le député qui connaît bien les
affaires. Alors, on a su quelque chose de plus, là, c'est
«business-to-business», en bon français, entreprise à entreprise.
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça.
Mme David : Donc, effectivement,
lisez attentivement le premier puis le deuxième paragraphe, ils ne sont pas
formulés... Quand c'est un consommateur, c'est : «Doit respecter son
droit». Donc, s'il veut ou si... De toute évidence, moi, quand je vais dans un
commerce, je demande mon jeans, si j'achète un jeans, en français. Alors, ça,
c'est... je m'attends... et c'est dit dans le projet de loi, ça doit... toute
entreprise, tout commerce de détail doit respecter mon droit d'être informé et
servi en français. Mais consommateur... pas consommateur, entreprise à
entreprise, c'est : «Doit l'informer et le servir en français». Là, ce
n'est plus la même chose. Il n'y a plus le mot «respecter», c'est : «Doit
l'informer et le servir en francais».
Alors, ils sont un peu... ils se demandent un
peu pourquoi il y a une distinction entre le premier paragraphe et le deuxième
paragraphe. Si l'entreprise avec laquelle le commerçant fait affaire souhaite
être informée et servie dans une autre langue, le premier B de B2B devra tout
de même, dans tous les cas, l'informer et le servir en français. «[Selon] le
cas, une telle obligation ne nous apparaît pas justifiée et raisonnable.» Donc,
ils voudraient le même genre de formulation pour le premier et le deuxième
paragraphe. Et là on revient à nos questions. Qui est la deuxième entreprise?
Votre fleuriste fait affaire avec un grossiste. Si le grossiste est Montréalais
francophone, ça va, mais, s'il est en Ontario...
La Présidente (Mme Guillemette) :
...quelques instants, si vous voulez?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Guillemette) : On
va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 32)
(Reprise à 11 h 34)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, la commission reprend ses travaux. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, pour
faire clair, Mme la Présidente, 50.2, premier alinéa, O.K. : «L'entreprise
qui offre au consommateur des biens ou des services doit respecter son droit
d'être informé et servi en français», donc, ça, c'est le consommateur, personne
physique, ça réfère à l'article 5 de la Charte de la langue française.
Donc, les Québécois et Québécoises ont le droit d'être
servis et informés en français. Donc, ça, c'est la personne physique, la
personne physique commande un bien, se fait servir, va se chercher un café, le
commerçant, l'entreprise doit le servir en français et l'informer en français.
Deuxième alinéa, on vient créer un droit pour
les entreprises. Donc, le deuxième alinéa de 50.2, c'est : «L'entreprise
qui offre à un public autre que des consommateurs des biens et des services
doit l'informer et le servir en français.» Donc, «autre que des consommateurs»
parce qu'en vertu de la Loi sur la protection du consommateur, «consommateur»
est défini comme étant une personne physique autre qu'une entreprise, donc ce
n'est pas une personne morale. Donc, là, ici, on vient couvrir les entreprises,
on vient dire : Vous êtes un inc. basé au Québec. Je suis fleuriste, Les
fleurs de l'amour inc., je commande à mon fournisseur qui est Tulipe du Québec
inc. Alors, Tulipe du Québec inc. doit me servir et m'informer en français.
Donc, on vient créer un droit exécutoire pour les entreprises, pour que la
langue des affaires, ça soit le français.
Mme David : Ah! on vient d'inverser
la proposition. Dans le B2B, là, qu'on rebaptise entreprise à entreprise, c'est
l'entreprise qui sert le commerce de détail qui doit le servir en français et
non pas le commerce de détail qui appelle l'entreprise grossiste de tulipes
pour venir nous porter des fleurs qui doit parler en français. Mais je... C'est
ça que j'essaie de comprendre.
M. Jolin-Barrette : Mais c'est parce
que l'enjeu, là... Moi, je suis fleuriste, là, dans le fond, je suis une
entreprise, parce que je vais revendre. Mais le détaillant, comparativement au
grossiste, le détaillant, c'est le client. Ça fait qu'on place toujours le
détaillant dans la position du client, du client personne physique. Donc,
exemple, le grossiste, lui, quand il va parler à son fournisseur, la personne
qui fait pousser les tulipes au Québec...
Mme David : Non, le grossiste ne
parle pas au fournisseur, c'est synonyme, ça.
M. Jolin-Barrette : Non...
Mme David : Le détaillant qui parle
au grossiste, slash, fournisseur, non?
M. Jolin-Barrette : Bien non, parce
que, des fois, vous avez trois niveaux : vous avez le détaillant, vous
avez le grossiste, puis ensuite vous avez le fournisseur, le producteur, si je
peux dire.
Mme David : O.K., on est rendus en
troisième, là.
M. Jolin-Barrette : Oui, supposons
qu'on est rendus au producteur, là, la personne qui met la graine... bien,
pas... C'est des bulbes, les tulipes?
Mme David : Oui.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas des
graines, c'est ça.
Mme David : C'est plutôt des bulles.
M. Jolin-Barrette : C'est des
bulbes, puis il faut les planter l'automne.
Mme David : À l'automne.
M. Jolin-Barrette : À l'automne.
Mme David : Vous n'en aurez pas sur
votre terrain, là, à Beloeil, sur votre terrain, si elles ne sont pas plantées.
M. Jolin-Barrette : C'est ça. Donc,
comme, pour le printemps prochain, puisque je n'ai pas planté mes bulbes, je
n'aurai pas de tulipes, là...
Mme David : Fini. Voilà.
M. Jolin-Barrette : Je pourrais
planter des annuelles.
Mme David : Peut-être.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je vais
mettre ça sur ma liste. Donc, le...
Mme David : Donc, détaillant,
grossiste, fournisseur ou détaillant, fournisseur, grossiste, là, dans la liste
de...
M. Jolin-Barrette : Bien, supposons,
vous avez le détaillant...
Mme David : Le
vendeur.
M. Jolin-Barrette : ...Les fleurs de
l'amour inc., madame vient m'acheter des fleurs. Ensuite, moi, je me retourne,
pour avoir les fleurs dans mon réfrigérateur, dans mon commerce, bien,
j'appelle mon grossisse : J'ai besoin des fleurs bleues pour la semaine
prochaine. Le grossiste, lui, appelle le producteur, le fournisseur de la
matière première. Donc, toute cette chaîne-là doit... En fait, on donne le
droit que ça se passe en français, donc...
Mme David : L'obligation, pas le
droit.
M. Jolin-Barrette : Bien,
«l'entreprise qui offre à un public autre que des consommateurs des biens et
des services doit l'informer et le servir en français»...
Mme David : Ce n'est pas : Doit
respecter son désir de parler français, là, c'est...
M. Jolin-Barrette : Non, mais, en
fait, s'il l'appelle dans une autre langue que le français... Si le client, là,
l'appelle dans une autre langue que le français, il peut le servir dans la
langue de son choix, là. Supposons, là, que l'entreprise, là, c'est des... Supposons,
le grossiste, là, ce sont des gens qui sont hispaniques puis que moi, je suis
hispanique aussi, dans ma...
• (11 h 40) •
Mme David : Moi étant qui, là? On
est...
M. Jolin-Barrette : Le commerçant,
le commerçant, là, moi...
Mme David : O.K., le fleuriste.
M. Jolin-Barrette : Le fleuriste, il
est hispanique.
Mme David : Il parle à un
fournisseur... non, à un grossiste, parce que, là...
M. Jolin-Barrette : Il parle à un
grossiste, il est hispanique aussi. Ils peuvent se parler en espagnol, s'ils
veulent, là. Mais par contre, si le détaillant, celui qui vend les fleurs,
parle en français puis souhaite se faire servir en français, le grossiste doit
le servir en français.
Mme David : Donc, c'est «le cas
échéant» qu'il faudrait rajouter. Parce que c'est : le cas échéant, si le
détaillant parle en français, et veut être servi en français, au grossiste, le
grossiste doit le servir et l'informer en français. Comprenez-vous mon petit
«cas échéant»? Ça fait toute la différence. Parce que, si jamais ils se parlent
en espagnol, bien, ça ne contrevient pas. Mais ce n'est pas si clair que ça, je
pense, dans ça.
Puis ce qui n'est pas clair non plus, c'est...
Tout ce temps-là, on parle entre gens qui résident et qui ont une adresse
civique au Québec, là, d'entreprise. Tout d'un coup que le grossiste est en
Ontario, pour fournir des tulipes, puis son fournisseur est à Amsterdam,
puisque c'est là qu'il y a la plus grosse production, là, on vient de mettre
pas mal de langues, là, dans le collimateur.
M. Jolin-Barrette :
Effectivement. Mais là on est dans une application des règles de droit privé
international.
Mme David : C'est autre chose.
M. Jolin-Barrette : C'est autre
chose. Mais, exemple, une entreprise de l'Ontario qui ferait affaire au Québec d'une façon soutenue... Puis il y a des tests, là,
là-dessus, là, pour savoir comment les lois s'appliquent, tout ça, en
vertu du droit international privé... Parce que, même si l'Ontario est dans le
même pays que le Québec, c'est quand même des règles de droit international qui
s'appliquent. C'est comme considéré comme si c'était un État étranger,
l'Ontario.
Mme David : Oh! ça doit vous
faire plaisir.
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, moi, ce qui est important, pour moi, c'est que le Québec ait le
maximum de compétences à tous les jours.
Mme David : Non, mais je ne savais pas, vous m'apprenez ça.
Je ne connais pas le droit commercial, là, mais... O.K.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, c'est les règles de droit international privé qui s'appliquent. Il y a
une section du Code civil là-dessus, je pense...
Mme David : Je vais finir par
l'acheter, ce Code civil là, à la fin du projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Je pourrais
vous en offrir une copie.
Mme David :
O.K.
M. Jolin-Barrette : Est-ce que
ça vous rendrait heureuse?
Mme David : Bien, une lecture
passionnante de vacances estivales, oui.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Signée de la main du ministre.
Mme David : Oui, avec une
dédicace.
M. Jolin-Barrette : Ah! bien,
je retiens la suggestion. Dans le fond, la jurisprudence parle de lien réel et
substantiel. C'est ça, le critère, en droit international privé.
Mme David : Ah mon Dieu! Oui,
mais là c'est parce que, dans le fond, vous calmez un peu leur inquiétude en
disant que, si le... Parlons de l'étape 1 et 2, là. Parce que, là, vous
avez rajouté l'étape 2 et 3, là, fournisseur versus grossiste. Là, ça
commence à être un peu compliqué, là. Mais c'est la même règle entre 1 et 2 et
2 et 3. C'est-à-dire que, si 1 veut être
servi en français par 2, 2 doit le servir en français, si c'est une entreprise
établie au Québec. Si 2 veut parler en français à 3 puis que tout ce
monde-là est au Québec, la même règle s'applique. Mais, si 1 et 2 se parlent en
espagnol, parce que les deux parlent espagnol, c'est permis, et, si 2 et 3
parlent italien ou néerlandais, parce que, là, on est rendus dans les tulipes,
là, bon, ils peuvent se parler en néerlandais. Donc, ce n'est pas «doit
l'informer et le servir en français» tous azimuts, c'est : Le cas échéant,
quand une des deux parties veut être servie en français. Est-ce que je suis
claire ou...
M. Jolin-Barrette : Oui. Dès
qu'une partie veut... En fait, dès que la personne qui achète, là, le produit
veut être servie en français, elle a le droit d'être servie en français.
Mme David : Je comprends. Que
ce soit un détaillant... un client, un détaillant, un grossiste ou un
fournisseur, celui le plus en dessous de l'autre a le droit d'être servi en
français et d'être informé en français.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Celui qui achète, là, celui qui sort l'argent de son portefeuille, là.
Mme David : C'est ça, le
client, au sens...
M. Jolin-Barrette : Le client,
c'est ça. Ça fait que l'entreprise se retrouve à être un client, à un moment
donné. Ça fait que, lorsque vous êtes le client, vous devez servir... vous avez
le droit d'être servi en français.
Mme David : Vous avez le droit.
Mais, si vous ne vous... Comment on dit ça, si vous ne vous...
M. Jolin-Barrette : Dans le fond,
l'idée, là, c'est...
Mme David : ...prévalez pas de votre
droit, vous avez...
M. Jolin-Barrette : Il n'y a
pas de problème.
Mme David : Il n'y a pas de
problème. Mais je trouve qu'ils ont raison de dire que ce n'est peut-être pas
aussi clair que ça avec les deux lignes.
M. Jolin-Barrette : Non. Parce
que, si on voulait que ça soit... si on aurait voulu empêcher que les
transactions d'affaires se fassent dans une
autre langue que le français, on aurait dit : «Doit être exclusivement en
français». Donc, la façon que c'est rédigé, ça permet d'y renoncer. Dans le
fond, quand tu n'invoques pas ton droit, là, bien, tu y renonces
implicitement.
Mme David : Bien là, vous
apportez une nuance que moi, je ne savais pas, que, s'il n'y a pas le mot
«exclusif», ça exclut le fait d'être exclusif.
M. Jolin-Barrette : Oui. C'est
pour ça qu'à certains endroits dans le projet de loi on est venus écrire :
L'État communique «exclusivement en
français». Tu sais, on l'a vu, là, préalablement, là, notamment au niveau de
l'exemplarité de l'État.
Mme David : Oui, oui. Mais là
vous, vous savez tout ça, mais je ne sais pas si le CQCD, conseil... comprend
ça. Parce qu'ils ne comprennent pas, ils ne comprennent pas, ils mettent,
même : «...recommandede modifier [...] de façon à ce que toute
entreprise qui offre des biens et des services, tant auprès du consommateur que
d'un public autre[...], doive respecter son droit d'être informé et servi en
français.» C'est un peu ça. Respecter le droit, ça veut dire que le
numéro 1 dit «moi, je parle en français» au numéro 2, puis je vais
être respecté dans ce droit-là, puis le numéro 2 qui parle en français au numéro 3 dit : Moi, je parle en
français puis je veux être respecté, puis l'autre doit respecter ça.
M.
Jolin-Barrette : Exactement, mais c'est de même depuis 1977, là. Dans
la loi, là, la Charte de la langue française, là, quand ce n'était pas écrit
«exclusivement en français», dans les différents articles, depuis 1977, ils
avaient la faculté d'utiliser une autre langue. Donc, c'est pour ça...
Mme David : Mais là pourquoi c'est
nouveau? C'est parce que c'est écrit en vert dans votre cahier, donc c'est du
nouveau droit, là, que vous faites.
M. Jolin-Barrette : Non, mais, en
fait, l'explication que je vous donne...
Mme David : Du «exclusivement»?
M. Jolin-Barrette : ...sur
«exclusif», ça, depuis 1977, c'est comme ça. Quand il était écrit «exclusif»,
depuis 1977 c'était uniquement en français. À certains endroits, avec le projet
de loi n° 96, on vient rajouter les termes «exclusif»
parce qu'on veut, notamment au niveau de l'exemplarité de l'État, que ça se
passe uniquement en français. Donc, on est venus rajouter ça dans le projet de
loi, dans les articles qu'on a déjà adoptés. Là, ici, 50.2, alinéa deux, on
vient créer le même droit que le consommateur, personne physique, peut exercer
pour les entreprises.
Mme David : Puis pourquoi, si c'est
le même droit, vous ne mettez pas la même formulation? Pourquoi le mot
«respecté» n'est plus là?
M. Jolin-Barrette : Parce qu'à 50.2,
alinéa un, là, pour le consommateur, personne physique, ça fait référence à
l'article 5 de la Charte de la langue française, qui parle de
consommateur, et un consommateur, c'est une personne physique qui n'exploite
pas une entreprise.
Mme David : Oui, ça je comprends.
M. Jolin-Barrette : C'est ça. Ça
fait que ça ne peut pas être la même formulation. Parce que, dans le fond,
50.2, alinéa deux, pour les entreprises qui ne sont pas couvertes par
l'article 5 de la loi, on vient...
Mme
David : Donc, «respecter son
droit», ça ne se dirait pas quand on parle d'une entreprise à une autre
entreprise?
M. Jolin-Barrette : Non, parce qu'il
n'y a pas d'assise législative qui existe actuellement. Dans le fond, là, à
l'article 5 de la loi, le consommateur a le droit d'être informé et servi
en français. Ça, c'est la personne physique. Le droit, il est créé à l'article 5,
O.K.? Ça fait qu'à 50.2 ce qu'on vient mettre, c'est : «L'entreprise qui
offre au consommateur des biens ou des services doit respecter son droit...»
Quand on parle de «son droit», c'est le droit qui est prévu à l'article 5.
C'est ça. Après ça, le deuxième alinéa, là on est... on vient créer un nouveau
droit pour l'entreprise, pour le inc., le droit d'être servi en français. On ne
peut pas la rattacher à l'article 5 de la loi comme le premier alinéa
parce que 5 de la loi vise juste le consommateur, personne physique. Ça fait
que c'est pour ça que la formulation n'est pas la même entre alinéa un et
alinéa deux.
Mme
David : Ce dont on discute
là, vous aviez tout pensé à ça, là, c'est tout réfléchi, là, chaque mot de tout
ça, là?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Donc, vous répondez
clairement au CQCD, le Conseil québécois de commerce de détail, que, comme il
n'y a pas le mot «exclusif» — puis là je ne sais pas s'ils nous
écoutent, ça doit — c'est...
M. Jolin-Barrette : Je suis convaincu
qu'ils nous écoutent.
Mme David : O.K. Quelqu'un nous
écoute, on a une belle audience, c'est ça, une cote d'écoute.
M. Jolin-Barrette : On va être
numéro un...
Mme David : Après District 31,
quand même.
M. Jolin-Barrette : ...d'un océan à
l'autre. Mais la saison n'est pas terminée? Ce n'est pas terminé?
Des voix : ...
Mme David : Oui? Elle est
terminée...
Une voix : ...
M.
Jolin-Barrette : En avril?
Excusez. Bien, c'est ça, parce qu'il n'y aura pas de prochaine saison, là,
exactement.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Ça fait qu'on deviendra numéro un.
M. Jolin-Barrette : Exactement, Mme
la Présidente.
Mme David : C'est ça, on est numéro
deux pour l'instant, mais, en avril... je serais étonnée que le ministre ne
dise pas : Bien, de toute façon, on aura fini avec le projet de loi n° 96 en avril. Ça, Mme la Présidente, je l'aurai dit avant
lui. Je ne le sais pas, mais on avance.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, la députée de Marguerite-Bourgeoys, elle est cohérente. Parce qu'en
avril, qu'est ce qu'on va faire? On va faire le projet de loi n° 2...
Mme David : Ah! bien là, ce n'est
pas...
M. Jolin-Barrette : ...sur le droit
de la famille, qui est très important. Et je sais que la députée de
Marguerite-Bourgeoys partage mon avis, parce qu'on traite notamment de violence
familiale là-dedans, puis ça fait écho à plusieurs recommandations de Rebâtir
la confiance.
Mme David : Donc, c'est réfléchi, et
c'est voulu comme ça, et vous rassurez les commerces de détail que, comme il
n'y a pas le mot «exclusif», et c'est comme ça depuis, je répète, là, 1977, ça
veut dire que ça peut se passer en espagnol, en chinois, en russe entre deux
personnes consentantes, si on dit ça comme ça, et que ça vaut de 1 à 2, ou de 2
à 3, ou de 3 à 1, mais, je pense, 3 à 1, ça n'arrive pas qu'un fournisseur
parle directement à un détaillant, d'habitude, il y a un grossiste entre les
deux, mais je comprends l'esprit de la chose.
M. Jolin-Barrette : Ça peut arriver,
là.
Mme David : Mais du fait que... et
là j'apprends vraiment quelque chose, du fait qu'il n'y ait pas le mot
«exclusivement l'informer et le servir en français», c'est moins contraignant
que s'il y avait le mot «exclusivement». Et donc, quand il n'y a pas de mot
«exclusivement, ça veut dire que ce n'est pas universel et aussi obligatoire
que le mot «doit» le laisse supposer.
M. Jolin-Barrette : Il y a la
faculté d'utiliser une autre langue.
Mme David : Oui, mais comme ce n'est
pas dit comme ça, c'est...
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
la loi de 1977, elle est rédigée comme ça, puis ça a toujours été interprété
comme ça, pour dire : Quand vous n'avez pas le terme «exclusif»... Puis...
Mme David : ...les gens qui ont
regardé ça n'ont pas compris, ou n'étaient pas là en 1977, ou je ne sais trop.
• (11 h 50) •
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais c'est pour ça qu'on est venus, notamment
au niveau de l'exemplarité de l'État, rajouter «exclusivement», parce
que c'est... Le fait qu'«exclusivement» n'était pas là, ça a permis à l'État
québécois d'instaurer un bilinguisme systématique au sein de l'État. C'est pour
ça, là, que n'importe qui parlait n'importe quelle langue, là.
Mme David : Parce que le verbe
«devoir» n'était pas exclusif.
M. Jolin-Barrette : Exactement.
Mme David : Tandis que, quand vous
dites «doit exclusivement», on met un double verrou.
M.
Jolin-Barrette : On dit : C'est de même que ça se passe uniquement,
vous n'avez pas la possibilité de déroger à ça.
Mme David : Bien, j'aurai appris
quelque chose ce matin, Mme la Présidente. C'est vraiment plus clair que jamais. J'espère que, les gens qui nous écoutent,
c'est devenu plus clair pour eux, parce que, je pense, c'est une
précision extrêmement importante que, grâce à mes questions, vous avez eu
l'occasion de préciser.
Maintenant, j'avais une autre question. C'est
quoi, déjà, l'autre enjeu? Ah oui! Comment... Non, écoutez, j'ai un blanc de mémoire.
On est vraiment jeudi, là.
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions... Oui.
Mme David : Ah! Non. Oui, oui, oui,
le mécanisme de plainte. On fait quoi quand on est un consommateur qui ne peut
pas se faire servir en français? On en a parlé hier : pour les
travailleurs, CNESST. Là, c'est l'OQLF directement, là, le bureau des plaintes?
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est une
plainte à l'OQLF...
Mme David : Ou
au gérant. Mais, une fois qu'on a parlé au gérant, il dit : Bien, madame,
je vais parler à mon patron. Mais, si la personne veut pousser un peu plus loin
sa réflexion et sa plainte...
M. Jolin-Barrette : Oui, une plainte
à l'OQLF. Donc, l'OQLF a le pouvoir de faire les vérifications nécessaires,
pouvoir d'inspection, ensuite... Oui, puis il faut bien comprendre, là, que
c'est envoyé à l'OQLF, mais on est vraiment
dans une logique d'accompagnement. Donc, le consommateur, lui, qui arrive dans
un commerce, supposons, au centre-ville de Montréal, puis il veut
acheter une paire de jeans, puis il n'est pas capable de se faire servir en
français : Je veux acheter des Levi's ou je veux acheter des Parasuco
ou... Ça existe-tu encore? Je ne sais pas.
La Présidente (Mme Guillemette) : Des
Lois.
M. Jolin-Barrette : Des Lois. Je
porte du 32, 32-30, 32-34, tout ça, je veux me faire servir en français, puis
le commerçant est incapable de servir en français. Le consommateur va pouvoir
appeler l'OQLF. L'OQLF va recevoir la plainte, et va contacter le commerce, et
va l'accompagner pour dire : Bien, écoutez, vous avez une obligation
légale de pouvoir servir et informer les clients en français; vous faites
commerce pignon sur rue, donc vous devez servir les clients en français. Et là
l'OQLF va être là pour les accompagner, pour voir comment est-ce qu'on peut
corriger la situation, l'accompagnement, formation également. On va avoir
Francisation Québec également, s'il y a des mesures à mettre en place pour
francisation. Puis on va amener l'entreprise à changer les pratiques actuelles.
Si l'entreprise ne veut rien savoir puis ils ne
se conforment pas aux demandes de l'OQLF puis à l'accompagnement, là, à ce
moment-là, bien, c'est le régime plus sévère qui s'applique pour faire en
sorte... Bien, écoutez, voici, on vous informe que vous ne respectez pas votre
obligation légale de servir les clients. Puis là il y a le pouvoir
d'ordonnancement de l'OQLF qui arrive. Mais, à prime abord, l'OQLF, et c'est ce
qu'elle fait déjà, l'OQLF, là, actuellement, c'est l'accompagnement. Donc...
Mme David : Je vais vous dire ce qui
va arriver, Mme la Présidente, de plus dans son projet de loi. Parce qu'on le
sait, qu'on construit, là, et on coconstruit quelque chose qui a beaucoup de
subtilités. Vous allez faire plus que ça avec nos amendements puis notre plan
d'action en 27 propositions, vous allez aller dans les campus universitaires,
d'universités autour desdits commerces, parce qu'on sait où ils sont, les
commerces qui sont plus... parce que ce sont des étudiants, souvent,
internationaux, qui n'ont pas l'occasion d'apprendre ou de pratiquer le
français. Alors, au lieu de juste demander gentiment aux collèges ou aux
universités de donner... de mettre des locaux à disposition puis, s'ils n'en
ont pas : Bon, bon, bon, ce n'est pas grave, on va aller ailleurs, vous
allez demander et peut-être exiger d'avoir des locaux et des services de
Francisation Québec sur place et de dire : Si vous voulez travailler dans
des commerces, ça serait peut-être vraiment bien que vous sachiez parler
français. Donc, on verra rendus là, mais je pense que Francisation Québec peut
avoir encore plus d'antennes que ce que vous prévoyez, parce que les petits
commerces, c'est là que se situe, je dirais, un très, très gros nerf d'une guerre
importante que vous voulez justement livrer sur la francisation.
M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je
suis ouvert que le ministère de l'Immigration implante, en collaboration avec
les universités, des services de Francisation Québec sur les campus, là.
Mme David : ...active, disons, pour
être sûr qu'il y ait... On va trouver la façon.
M. Jolin-Barrette : Je suis
convaincu que vous connaissez mon collègue ministre de l'Immigration. C'est
quelqu'un qui...
Mme David : Et de l'Enseignement
supérieur, parce qu'on parle de réseaux institutionnels où sont souvent, avec raison, la manne des jeunes employés qui
veulent être... qui vont accepter de vendre des jeans ou... au centre-ville,
que ça soit Laval, Montréal ou peut-être d'autres... et où on peut, à la
source, là où ils passent le plus clair de leur temps, comme on dit, donner des
cours de francisation pour ces étudiants-là, qui vont devenir des grands
adeptes de la langue française, qui vont peut-être vouloir s'installer plus, grâce
au Programme de l'expérience québécoise, qui vont pouvoir se faire des belles
relations amoureuses et qui vont vouloir rester au Québec, éventuellement, puis
ils seront très scolarisés, francisés, instruits et amoureux du Québec.
Bon, ça vous a permis de finir votre
dégustation. Donc, je vous annonce que j'irai... je trouverai de bonnes idées
pour vous.
M. Jolin-Barrette : C'est bien noté.
Mme David : Ça va, Mme la
Présidente.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Donc, d'autres interventions sur
l'article 41? Donc, l'article 41 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
l'article 41 étant adopté, nous passons à l'article 42. M. le
ministre.
M.
Jolin-Barrette : 42, Mme la Présidente : L'article 51 de
cette charte est modifié par l'insertion, à la fin du deuxième alinéa, de «ou
être accessible dans des conditions plus favorables».
L'article 42 du
projet de loi précise l'article 51 de la Charte de la langue française
afin de prévoir que les inscriptions afférentes à un produit, rédigées dans une
autre langue que le français ne doivent pas être accessibles dans des
conditions plus favorables que les inscriptions rédigées en français. Cette
précision trouvera notamment application lorsque le mode d'emploi d'un produit
est disponible en ligne.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Des interventions sur cet article? Donc, s'il n'y a pas
d'intervention... Oui, M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Juste une petite question. Parce que je
crois que le défi qu'on cible ici, qui est probablement le plus difficile, ce
n'est fort souvent pas les commerces ici, au Québec, mais les entreprises qui nous fournissent avec des biens et
des services qui sont de l'ordre de multinationales. Et, dans ces cas-là,
j'imagine que ce n'est pas aussi facile que ça d'assurer une adhérence.
Peut-être, mes
exemples sont souvent, peut-être, un petit peu originaux, mais je vais essayer
à nouveau. Nous sommes le 1er décembre 2023, et les jeunes sont très
fébriles parce que Grand Theft Auto édition LVI est disponible.
Moi, je hais ces jeux-là, mais, bon, un jour, j'aurai des grands... des
petits-enfants qui vont l'aimer. Alors, Grand Theft Auto
édition xxx, va être disponible. Comme souvent, des fois, des grandes
entreprises qui aiment bien notre marché, au Québec, mais qui ont d'autres
chats à fouetter et qui ne sont pas nécessairement toujours fameuses pour
adhérer à nos particularités, au Québec... Bon, on fait des gestes
intéressants, l'emballage, et tout est conforme, est en français, mais il y a
des manuels, il y a des promotions, des documents qui viennent avec Grand
Theft Auto édition x qui ne sont pas disponibles de façon parallèle en
français. Dans une telle situation, y a-t-il des sanctions, des leviers
qu'aurait l'État pour assurer l'adhérence à l'éventuel article 51?
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, l'objectif de l'article... C'est ça,
exemple, l'article 54 de la Charte de la langue française actuelle nous
dit : «Sont interdits sur le marché québécois les jouets ou jeux, autres
que ceux visés à l'article 52.1, dont le fonctionnement exige l'emploi
d'un vocabulaire autre que français, à moins que le jouet ou jeu n'y soit
disponible en français dans des conditions au moins aussi favorables.»
Donc, dans votre
exemple, les jeux, les ludiciels relèvent de l'article 52.1. L'objectif
de... si je reviens à 42, là, c'est de faire en sorte que la disponibilité en
français soit tout aussi disponible. Alors, bien entendu, l'entreprise doit
fournir cette information-là également en français. Puis là supposons qu'on
prend le cas du jeu en ligne qui est acheté puis qui vient d'une entreprise qui
est basée ailleurs, comme on discutait avec l'autre article, bien, c'est le
lien entre la place d'affaires... entre... le lien... comment on dit ça déjà? Le
lien réel et substantiel pour être assujetti.
Donc, les mêmes
modalités qui sont demandées lorsque vous vous retrouvez dans un commerce
doivent l'être également en ligne. Donc, dans le fond, il y a beaucoup plus
d'achats en ligne aujourd'hui que dans le passé, tu sais, si on... En 1977, il
y avait le catalogue Eaton, là, mais ce que je veux dire, tu sais, c'était pas
mal ça, là. Ça fait qu'Internet a amené d'autres réalités, puis on veut faire
en sorte que le consommateur québécois ait toute l'information qui est
disponible, autant dans une autre langue qu'en français.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Ça vous va, M. le député?
• (12 heures) •
M. Birnbaum :
Et là je comprends la nécessité d'ajuster le libellé parce qu'on n'est plus
en 1977, mais, bon, mes fournisseurs de Grand Theft Auto risquent de ne
pas être conformes en tout ce qui a trait à l'appui électronique, si je peux le dire comme ça, la disponibilité de tous
les documents, les jeux, les accessoires en français. Dans une telle
situation, qu'est-ce qui se passe? Où est la marge de manoeuvre de l'État pour
assurer une adhérence à cet éventuel article?
M.
Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, ça fait partie de la loi. Donc,
l'OQLF va contacter l'entreprise qui agit contrairement à la loi et va
l'accompagner pour rectifier la situation, pour faire en sorte, justement, que
le manuel soit disponible en français également. Donc, on se retrouve dans des
situations où ça arrive souvent que le produit, quand il est communiqué dans la
boîte, il n'y a pas les indications en français puis il réfère pour dire :
Allez télécharger l'information. Il faut que l'entreprise fournisse également
le manuel en français lorsque le produit est commandé.
M. Birnbaum :
Bon, deux précisions. Dans un premier temps, j'affirme : Si je suis
assez chanceux d'avoir des petits-enfants, ils ne vont jamais avoir un tel
cadeau de moi, même si c'est conforme en termes de cet article, là. Et,
deuxième chose, j'inviterais un futur ministre à se préparer pour les
manifestations organisées par des jeunes qui voudraient avoir leur Grand
Theft Auto, même si ce n'est pas 100 % conforme, juste avant
Noël 2023. Mais, comme on dit en anglais : «I guess
we could cross that bridge if we ever come to it.»
M.
Jolin-Barrette : Oui, puis je vais leur répondre : À qui sait
attendre...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, on a des lettres.
M. Jolin-Barrette : Mais il faut se
rappeler que, pour avoir ce cadeau-là, il faut être sage toute l'année. Puis le
père Noël, il nous regarde toute l'année.
La Présidente (Mme Guillemette) :
...mériter ici. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 42?
Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, l'article est adopté. Et je crois
que M. le ministre a un amendement à 42.1, qui est déjà dans le Greffier, si je
ne m'abuse.
M. Jolin-Barrette : Oui. Avec votre
permission, Mme la Présidente : 42.1. Cette charte est modifiée par
l'insertion, après l'article 51, du suivant :
«51.1. Malgré l'article 51, sur un produit,
une marque de commerce déposée au sens de la Loi sur les marques de commerce
(Lois révisées du Canada (1985), chapitre T-13) peut être rédigée, même en
partie, uniquement dans une autre langue que le français lorsqu'aucune version
correspondante en français ne se trouve au registre tenu selon cette loi.
Toutefois, si un générique ou un descriptif du produit est compris dans cette
marque, celui-ci doit figurer en français sur le produit ou sur un support qui
s'y rattache de manière permanente.»
Commentaire. Cet amendement propose d'inscrire
dans la Charte de la langue française l'exception prévue à la règle par
l'article 51 et de permettre d'inscrire sur un produit une marque de
commerce rédigée, même en partie, seulement dans une autre langue que le français
pourvu que les génériques ou descriptifs du produit compris dans cette marque
figurent en français sur ce produit ou sur un support qui s'y rattache de
manière permanente.
Alors, je m'explique. De plus en plus, au
niveau... Les marques de commerce, c'est de juridiction fédérale, O.K.? Donc,
les entreprises vont enregistrer leurs marques de commerce. Exemple, une marque
de commerce en anglais, Beauty Shop, supposons, ça serait marque de commerce.
La marque de commerce... Ils ont le droit d'utiliser la marque de commerce,
mais, de plus en plus, il y a des produits qui sont vendus où il n'y a pas
juste le nom de la marque de commerce qui est couvert, il y a également le
descriptif, O.K.? Donc, la marque de commerce, quand ils l'enregistrent, ils
enregistrent le nom de la marque de commerce mais tout avec le descriptif.
Je donne un exemple, du savon, du savon pour la
main, là, vous allez à la pharmacie où vous allez acheter du savon, du savon
pour les mains, là, du savon liquide pour les mains : «Softsoap Brand,
Lavender and Shea Butter, washes away bacteria, deeply moisturizes to hydrate
skin, refill 50 oz., 1.56 QT, 1.47 L, refill over 6,
73 oz., use 48 less plastic per ounce, 7.5 oz. pumps.» O.K.
Alors...
Une voix : ...
M.
Jolin-Barrette : Non, c'est... Dans le fond, la marque de commerce,
elle est enregistrée, tu sais, le nom du savon, c'est Softsoap Brand, O.K., le nom, là, c'est ça, là, comme vous voyez
ici. Mais par contre tout le reste qui est sur la bouteille a été inséré dans la marque de commerce. Donc...
Puis, dans le fond, ça, c'est du descriptif. Le nom, là, l'identification
du nom, c'est Softsoap. Mais par contre ce
qui arrive maintenant avec la Loi sur les marques de commerce, c'est qu'ils
viennent, oui, enregistrer le nom, mais ils
viennent également enregistrer tout le descriptif. Donc, le consommateur
québécois, quand il se retrouve à
acheter, sur les tablettes, ça, bien, la marque de commerce prévoit ça.
L'article 51.1 qu'on vient insérer, on dit : Écoutez,
c'est correct, vous avez enregistré votre marque de commerce avec tout ça, sauf
qu'on veut qu'il y ait un descriptif en français aussi. Et là actuellement ça
faisait en sorte qu'il n'y avait pas de descriptif en français.
Mme David : ...l'autre côté de la
bouteille en français?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ce
qu'on vient rajouter pour imposer...
Mme David : Mais, en ce moment, il
n'y en a pas.
M. Jolin-Barrette : Bien, pas
nécessairement, parce que ça rentre dans marque de commerce.
Mme David : Mais ça, ils disent
quoi, les compagnies que vous avez consultées, là, ou les... Je ne sais pas,
c'est-tu une révolution dans le monde des marques de commerce?
M. Jolin-Barrette : Non, mais c'est
parce que les entreprises font ça pour contourner les règles d'étiquetage.
Mme David : Puis donc la marque de
commerce, ce n'est plus juste Walmart, Costco, mais il peut y avoir un
paragraphe complet en dessous inclus dans la marque de commerce.
M. Jolin-Barrette : Exactement. Et
ça, ça fait en sorte de contourner l'esprit de la loi, et c'est ça qu'on vient
corriger. On vient dire : Bien, écoutez, si vous mettez le descriptif dans
la marque de commerce en anglais d'une façon générique, sachez que... malgré le
fait que vous l'avez enregistré en vertu de la marque de commerce, là, le
descriptif en anglais avec la marque de commerce, n'oubliez pas que vous allez
devoir mettre un descriptif en français aussi.
Mme David : De
l'autre bord, en dessous, à côté?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Puis ça, ça... On va
arriver à l'affichage, là, qui était le règlement que j'avais fait passer, mais
qui était un affichage extérieur, grandes marques de commerce, Costco, Walmart,
etc., où on demandait un générique en français. Mais ça ne touche pas, donc,
les petits génériques de petits objets, c'est ça que vous dites, par rapport à
l'affichage extérieur ou même intérieur, dans des centres d'achats. S'il est marqué,
je ne sais pas, moi, un commerce de détail dans un centre d'achats, il faut
qu'il y ait un accompagnement en français, mais un accompagnement de la marque
de commerce. Mais là ce que vous dites, c'est que la marque de commerce n'est
pas juste une marque de commerce, je viens de m'acheter du savon Softsoap,
c'est qu'il y a un texte qui va avec.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais parce
que, là, c'est le produit, notamment, tu sais, c'est un produit qu'on achète,
ce n'est pas de l'affichage. Tu sais, on n'est pas dans la marque de commerce
identificatoire pour...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : ...du commerce,
on est sur le produit lui-même. Ça fait que, tu sais, l'objectif, c'est la
protection du consommateur, pour éviter que les entreprises détournent... Dans
le fond, c'est ce qui arrive, là, ils mettent le descriptif en anglais dans la
marque de commerce puis, dans le fond, ils utilisent ça pour ne pas respecter
les règles sur l'étiquetage et l'affichage. Donc là, on vient renforcer ça pour
dire : Bien, écoutez, oui, vous allez... vous pouvez enregistrer votre
marque de commerce avec le descriptif en anglais, mais ce n'est pas normal
qu'au Québec vous n'ayez pas un descriptif en français ou qui soit
exclusivement ou pratiquement... quasiment la totalité du produit, qu'il n'y
ait pas d'explication en français parce qu'il y a la marque de commerce dessus.
Mme David : Mais ce qu'il y a
derrière, d'habitude, c'est les instructions d'utilisation, hein, mettez ça
dans la paume de votre main puis... Ça, ça ne change pas.
M. Jolin-Barrette : Ça ne change
pas.
Mme
David : Ça, ça doit être dans
les deux langues avec — je
ne suis pas sûre de ça, là, si j'ai raison — prépondérance du
français sur l'anglais. Il faut sortir une loupe, de toute façon, pour lire,
mais c'est supposé, je pense, être écrit en plus gros, les instructions en
français, qu'en anglais. Mais là vous rajouteriez au verso ou...
• (12 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Ça prend...
lorsqu'il y a un descriptif en anglais inclus dans la marque de commerce, ça
prend aussi un descriptif en français.
Mme David : Qui peut être de l'autre
bord du produit, là, il n'y a plus de place sur votre exemple.
M. Jolin-Barrette : Oui, bien, sur
le produit ou sur un support qui s'y rattache de manière permanente, donc il y
a une marge de manoeuvre pour l'entreprise.
Mme David : O.K. Je n'ai pas
remarqué ça, mais...
M. Jolin-Barrette : Donc,
voyez-vous, c'est important pour le législateur d'intervenir à certains moments
pour dire... Des fois, il y a des gens qui sont créatifs.
Mme David : Est-ce que vous savez si
c'est répandu? Est-ce qu'on a un peu de... Est-ce que quelqu'un s'est penché
sur la question, l'OQLF, ou autres, je ne sais pas?
M. Jolin-Barrette : On me dit que
c'est répandu.
Mme David : Bien, moi, je ne suis
pas contre. Je ne suis pas contre le fait qu'on exige du français sur un...
J'avoue ma méconnaissance du phénomène. On est peut-être tellement habitué
maintenant.
M. Jolin-Barrette : Mais à partir du
moment où vous notez cela, j'invite les gens à être attentifs, puis là ils vont
le constater.
La Présidente (Mme Guillemette) :
...régulièrement.
Mme David : Bon. Je n'ai plus le
temps de magasiner, je pense, c'est pour ça.
M. Jolin-Barrette : Et c'est pour ça
que la défense du français, il faut toujours être vigilant, il faut toujours
être aux aguets.
Mme David :
Donc là, on n'est pas dans la... bien, on est dans une sorte d'affichage, mais
d'affichage beaucoup plus... dans
l'affichage... dans le descriptif de la marque de commerce au détail, je
dirais, on n'est pas dans le grand affichage. Mais, je veux dire, il y a...
Ça m'intéresse quand même. Est-ce qu'il y a une limite au texte qui peut
accompagner une marque de commerce dans la LMC, Loi sur les marques de
commerce?
M. Jolin-Barrette : Ça, on peut
vérifier.
Mme David : Y a-tu une limite? Je veux
dire, il pourrait-tu écrire un chapitre complet, là, qui va avec sa marque de
commerce?
M. Jolin-Barrette : Bien, exemple,
dans l'exemple du savon que je vous ai donné, c'est...
Mme David : Il y a pas mal de texte.
Mais la bouteille serait plus grande qu'il pourrait y avoir encore plus de
texte. Il n'y a pas de...
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, on
peut vérifier c'est quoi au fédéral, mais manifestement c'est ce qu'on se rend
compte sur des barres de chocolat, des collations, donc sur le support,
comme... ça vient vraiment bien camper juste un texte en anglais.
Mme David : Bon. Bien, écoutez, ça
m'apparaît raisonnable.
La Présidente (Mme Guillemette) :
J'ai le député de D'Arcy-McGee qui a une intervention. M. le député.
M.
Birnbaum : Merci. Moi aussi,
il me semble raisonnable comme préoccupation. Mais ça m'étonne,
l'exemple de Softsoap que nous a offert le ministre. Comment, en vertu de la
loi pancanadienne sur les langues officielles, ça serait légal? Il me semble
que soit c'est un manque de bonne foi de ces fournisseurs. Mais comment ça se
fait que la Loi sur les marques de commerce serait à l'abri de l'obligation
pancanadienne de fournir ce genre d'information dans les deux langues?
M. Jolin-Barrette : Parce qu'en
vertu de la loi sur la marque de commerce fédérale, ils n'ont pas l'obligation,
en vertu de la Loi sur les marques de commerce fédérale, d'enregistrer dans les
deux langues. Vous pouvez enregistrer uniquement en anglais. Donc, il n'y a pas
d'obligation d'enregistrer une marque de commerce en français. Donc là, c'est
ça qui arrive, ils enregistrent le nom de la marque plus le descriptif en
anglais dans la marque de commerce. Ils disent : La marque de commerce,
c'est ça. Puis les règlements pris en vertu de la Loi sur les langues
officielles n'interviennent pas sur les marques de commerce. Et on attend
toujours la nouvelle proposition du fédéral sur la modernisation de la Loi sur
les langues officielles.
M. Birnbaum : Et, bon, alors, je
comprends, parce que c'est un comportement, bon, soit... bien, on va... pas nécessaire de donner des adjectifs, mais étonnant
de ces commerçants, d'essayer de... La notion de marque de commerce,
c'est une signature, ce n'est pas des modes d'emploi, de la manière que le ministre
nous a décrit, actuellement, dans ce produit-là. Alors, c'est surprenant. Bon,
merci.
La Présidente (Mme Guillemette) : Ça
va? Donc, pas d'autres interventions sur l'amendement? Donc, l'amendement est
adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
nous pouvons passer maintenant à l'article 43. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : 43, Mme la
Présidente : L'article 52 de cette charte est modifié :
1° par le remplacement de «Les» par «Quel qu'en
soit le support, les»;
2° par le remplacement de «et toute autre
publication de même nature» par «, les bons de commande et tout autre document
de même nature qui sont disponibles au public»;
3° par l'ajout, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«Nul ne peut rendre un tel document disponible
au public dans une autre langue que le français lorsque sa version française
n'est pas accessible dans des conditions au moins aussi favorables.»
Commentaire. L'article 43 du projet de loi
modifie l'article 52 de la Charte de la langue française d'abord afin de
préciser qu'il s'applique aux documents qui y sont visés sans égard à leur
support. La règle est donc la même qu'il s'agisse de documents sur support
papier ou de documents technologiques.
L'article 43 modifie ensuite
l'article 52 par concordance avec la modification apportée à
l'article 57 de cette charte par l'article 46 du projet de loi. Les
bons de commande seront désormais visés à l'article 52 parce que, comme
les catalogues, les brochures, les dépliants et les annuaires, ils visent la
vente d'un produit ou d'un service. De même, la notion de «publication de même
nature» est remplacée par «document de même nature disponible au public». Cette
dernière notion est un peu plus large, puisqu'une publication est, par
définition, un ouvrage... est, par définition, un ouvrage
de... ce qui n'est pas le cas d'un document. Aussi, il suffit que le document
soit rendu disponible au public pour que l'article 52 s'y applique.
Enfin, l'article 43 ajoute un deuxième
alinéa à l'article 53 de la charte afin d'exprimer clairement
l'interdiction découlant du principe établi
par le premier alinéa. Cette modification vise, entre autres, à empêcher toute
l'interprétation selon laquelle la prescription commence à courir à compter de
la rédaction du document.
La Présidente (Mme Guillemette) : Des
interventions sur l'article 43? Oui, allez-y, Mme la députée.
Mme David : Si ma mémoire ne me fait
pas défaut, puis là c'est compliqué parce qu'on revient à un article qu'on a
adopté, je ne me souviens même plus du... c'était dans... Aïe! Aïe! Aïe! Vous
allez m'aider, là, l'amendement demandé par... c'étaient les ordres
professionnels, je pense, ils voulaient justement cette formulation-là, «tout
autre document de même nature», parce que c'était une question de traduction,
puis là ce n'étaient pas «les documents de même
nature», il était marqué «tout autre document», hein? C'est dans... C'est «tout
autre document» plutôt que «tout autre document de même nature». Alors,
ça les a fait un peu... Ça les a inquiétés beaucoup parce que «tout autre
document», ce n'est pas de même nature, donc c'est tellement large qu'ils se
sont dit : Il va falloir traduire la terre entière.
M. Jolin-Barrette : Les documents
produits par le professionnel, là.
Mme David : C'est ça.
M. Jolin-Barrette : Dans le fond,
là, on a mis un amendement, lorsque le client est une personne morale, c'est
lui qui paie.
Mme David : C'est ça, mais pour les
documents qui ne sont pas de même nature, précisé, à ce moment-là, donc je
remarque juste qu'ici c'est précisé. Alors, peut-être, ma seule question, ça
serait : Pourquoi ici c'est précisé, puis on ne le précise pas pour les
professionnels?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
parce qu'avec les professionnels, dans le fond, c'est ce qui est fait comme
produit, comme document par le professionnel en lien avec le dossier de la
personne, là. Je mandate le professionnel. J'ai accès à ces documents-là. Il
faut que le professionnel puisse me les fournir en français. Ici, le lien,
c'est... on actualise, c'est en lien avec le
support : les catalogues, les brochures, les dépliants, les annuaires
commerciaux, les bons de commande ou touts autres documents de même
nature, exemple, qui sont apparentés aux bons de commande, aux annuaires, aux
catalogues, aux brochures, qui sont disponibles au public doivent être en
français.
Mme David : Parce que le mot «de
même nature» doit être précisé ici parce que, dans le cas des professionnels,
c'est intrinsèque à leur statut de professionnel.
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
c'est... dans le fond, «de même nature», c'est les documents qui sont... pour
52, là, c'est les documents qui sont disponibles au public, qui sont
communiqués au public. Donc, il faut qu'ils soient... doivent être rédigés en
français.
Mme David : O.K., ça va, Mme la
Présidente. On s'en vient bons.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci.
D'autres interventions sur l'article 43? Donc, s'il n'y a pas d'autre
intervention, est-ce que l'article 43 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, l'article 43 étant adopté, nous passons à l'article 44.
M. Jolin-Barrette : Oui, à
l'article 44, et j'aurai un amendement à l'article 44, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) : Il
est déjà au Greffier.
M. Jolin-Barrette : Oui, qui est
déjà sur Greffier.
44. L'article 55 de cette charte est
modifié :
1° par la suppression de «imprimées»;
2° par le remplacement de la deuxième phrase par
les suivantes : «Les parties à un tel contrat peuvent être liées seulement
par sa version dans une autre langue que le français si, après avoir pris
connaissance de sa version française, telle est leur volonté expresse. Les
documents se rattachant au contrat peuvent alors être rédigés exclusivement
dans cette autre langue.»;
3° par l'ajout, à la fin, des alinéas
suivants :
«Nulle partie ne peut, sans que l'autre n'ait
pris connaissance de la version française du contrat visé au premier alinéa et
en ait expressément exprimé la volonté :
«1° la faire adhérer à un
contrat d'adhésion rédigé dans une autre langue que le français;
«2° conclure avec elle un contrat où figure une
clause-type qui est rédigée dans une autre langue que le français;
«3° lui transmettre un document se rattachant à
l'un ou l'autre de ces contrats lorsque ce document est rédigé dans une autre
langue que le français.
«Nulle partie à un contrat visé au premier
alinéa ne peut exiger de l'autre quelque somme que ce soit pour la rédaction de
la version française de ce contrat ou des documents qui s'y rattachent.
«Le présent article ne s'applique pas à un
contrat de travail ou aux documents qui s'y rattachent.»
• (12 h 20) •
Commentaire. L'article 44 du projet de loi
modifie l'article 55 de la Charte de la langue française d'abord pour en
supprimer la mention de «imprimée» afin qu'il s'applique aux documents
technologiques qui ne sont pas imprimés.
Il modifie ensuite l'article 55 afin de
prévoir que les parties à un contrat d'adhésion ou à un contrat où figurent des
clauses types peuvent choisir de n'être liées que par la version dans une autre
langue que le français seulement si, au préalable, elles ont pris connaissance
de la version française, qu'elles ont exprimé la volonté de n'être liées que
par la version dans une autre langue.
Le deuxième alinéa de l'article 55 que
propose l'article 44 du projet de loi est de même nature que le deuxième
alinéa de l'article 52 que propose l'article 43 du projet de
loi. Il vise à exprimer clairement les interdictions découlant du principe
établi par le premier alinéa et à empêcher toute interprétation selon laquelle
la prescription commence à courir à compter de la rédaction du contrat.
Le troisième alinéa de
l'article 55 que propose l'article 44 du projet de loi interdit
d'exiger toute somme que ce soit pour la rédaction de la version française d'un
document.
Enfin, le dernier alinéa précise que
l'article 55 ne s'applique pas à un contrat de travail et aux documents
qui s'y rattachent. Ces contrats et documents sont visés à l'article 41 de
la charte, tel que le modifie l'article 29 du projet de loi. S'il s'agit
de contrat d'adhésion ou comportant des clauses types, la protection offerte
par l'article 41 correspond à celle prévue à l'article 55.
Et l'amendement, Mme la Présidente.
À l'article 44 du projet de loi :
1° remplacer, dans le paragraphe 1°,
«imprimées» par «, les contrats où figurent des clauses-types imprimées,»;
2° dans le paragraphe 3° :
a) supprimer
le paragraphe 2° du deuxième alinéa de l'article 55 de la Charte de
la langue française qu'il propose;
b) remplacer, dans le paragraphe 3° de ce
deuxième alinéa, «l'un ou l'autre de ces contrats» par «ce contrat»;
c) remplacer le dernier alinéa de cet
article 55 qu'il propose par l'alinéa suivant :
«Le présent article ne s'applique pas aux
contrats énumérés ci-dessous ni aux documents qui s'y rattachent :
«1° un contrat de travail;
«2° un contrat visé au deuxième alinéa de
l'article 21 ou à l'article 21.5, sans égard aux cas et [aux]
conditions prévus par un règlement pris en vertu du paragraphe 1° du
deuxième alinéa de ce dernier article;
«3° un contrat utilisé dans les relations avec
l'extérieur du Québec.»
Commentaire. Cet amendement vise à clarifier la
portée de l'article 55 de la Charte de la langue française. Cet article
s'applique seulement aux contrats d'adhésion et, conséquemment, il ne
s'applique pas aux contrats de gré à gré.
Le premier alinéa de l'article 1379 du Code
civil du Québec prévoit qu'un contrat est d'adhésion «lorsque les stipulations
essentielles qu'il comporte ont été imposées par l'une des parties ou rédigées
par elle, pour son compte ou suivant ses instructions, et qu'elles ne pouvaient
être librement discutées».
Le second alinéa de ce même article prévoit que
«tout contrat qui n'est pas d'adhésion est de gré à gré».
Vu ces dispositions du Code civil qui
définissent clairement la notion de contrat d'adhésion et qui le distinguent,
même... avec la même clarté, du contrat de gré à gré, le paragraphe 1° de
l'amendement supprime la mention des «contrats où figurent des clauses-types
imprimées», puisqu'elle laisse entendre que les contrats de gré à gré sont visés s'ils comportent des clauses types,
même si les stipulations essentielles du contrat ont été librement
discutées.
Les modifications proposées par les
sous-paragraphes a et b du paragraphe 2° de l'amendement sont
apportées par concordance avec celles que propose le paragraphe 1°.
Enfin, l'alinéa proposé par le
sous-paragraphe c du paragraphe 2° vise à exclure certains contrats
de l'application de l'article 55, en plus du contrat de travail qui en est
déjà exclu. Les contrats... seraient nouvellement exclus sont les mêmes que
ceux dans la rédaction desquels un organisme de l'Administration n'est pas tenu
d'utiliser exclusivement le français. Cela permet d'éviter un conflit entre les
dispositions relatives à la langue des contrats de l'Administration et celle de l'article 55, lorsque ces contrats
sont des contrats d'adhésion. Du coup, les mêmes exceptions s'appliquent également à quiconque entend faire
adhérer une personne à l'un de ces contrats d'adhésion. L'Administration
ne bénéficie donc pas d'un régime plus souple que l'entreprise privée à cet
égard.
Notons finalement qu'une modification a été
apportée à l'article 29 du projet loi par concordance avec celle proposée
par cet amendement.
Alors, l'explication, Mme la Présidente. Vous
vous souvenez, il y avait eu une... je dirais une incompréhension relativement
à la portée de l'étendue de l'article 55. Alors, on vient clarifier les
choses, notamment par rapport aux entreprises qui peuvent contracter dans la
langue de leur choix. Donc, on avait eu l'exemple d'une entreprise privée qui
veut contracter avec une autre entreprise privée, elle peut le faire dans une
autre langue que la langue officielle si elle le souhaite. Même chose, une
entreprise ici qui fait affaire avec une entreprise aux États-Unis, en
Colombie-Britannique, en Chine, en Suisse, en Inde, l'entreprise peut
contracter dans la langue de son choix. Donc, on vient clarifier ça.
On
vient également clarifier le fait, pour les contrats, pour les clauses types.
Donc, on vient retirer les contrats pour les clauses types parce que, quand
c'est du gré à gré, puisque ça a été convenu... ça arrive des fois qu'il y a
des clauses types dans des contrats de gré à gré également, mais... puisqu'il y
a une liberté contractuelle, les parties peuvent l'inclure, mais ça faisait en
sorte que... si la clause type était présente, bien, ça faisait en sorte que,
là, ça ne devenait plus un contrat de gré à gré, et donc les parties ne
pouvaient plus déroger.
L'idée essentielle,
là, supposons pour le consommateur, c'est de faire en sorte que le
consommateur, quand c'est un contrat d'adhésion, O.K., je m'en vais faire...
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bien, il faut que la version puisse être en
français.
Mme David :
Bien oui, j'espère. Mais le gré à gré, ça, c'est un bail qu'on négocie, par
exemple.
M.
Jolin-Barrette : Exactement. Mais dans le cas du bail, par contre, il
y a des règles qu'on met en place. La version française, puis ce n'est pas dans
cet article-là, doit être offerte en premier, puis le locataire peut y renoncer
puis conclure le bail dans une autre langue.
Mme David :
Est-ce que tout ça, c'est le fruit de l'engagement que vous aviez pris avec la
Chambre de commerce du Montréal métropolitain? On peut penser que, quand ils
parlent de l'article 55, et tout ça, à la page 7 de leur mémoire,
c'est un peu à ça que ça répond, parce que...
M.
Jolin-Barrette : Ça répond exactement à ça.
Mme David :
Exactement à ça. Donc, on peut penser que la chambre de commerce serait plutôt
satisfaite de lire le libellé. Parce que je ne me prétends pas être la
superspécialiste en chef des contrats de gré à gré et d'adhésion, mais, si vous
me dites que...
M.
Jolin-Barrette : L'amendement vise à répondre à leurs préoccupations.
Mme David :
Parce que je me souviens que vous aviez dit, et c'est peut-être la seule fois
que vous l'avez dit aussi clairement : Je vais revoir cette question-là,
effectivement, et j'arriverai... je ne sais pas si vous aviez dit amendement ou
je ne sais trop, mais c'est pour ça que je veux juste m'assurer que c'est dans
le suivi de cet échange, de cette discussion-là que vous avez eue.
M.
Jolin-Barrette : Exactement. Puis il y a d'autres partenaires du
milieu des affaires, du milieu bancaire, des entreprises
en matière d'exportation qui souhaitent également une modification du libellé
conforme à ce qu'on a présenté.
Mme David :
Donc, vous nous dites que vous pensez que ça va les rassurer, les satisfaire.
M.
Jolin-Barrette : Tout à fait.
Mme David :
Bon. À moins que mes collègues soient beaucoup plus compétents en la matière,
moi, c'est surtout ça que je veux... Ce dont je veux m'assurer, c'est que ceux
qui étaient inquiets soient moins inquiets, soient rassurés et que... Donc,
tout le monde est plutôt content de cet amendement. C'est là que s'arrête un
peu ma compétence en la matière. Alors, je
pense qu'il faut dire que ça a été, donc, l'amendement... le ministre a donné
suite aux préoccupations.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, Mme la députée. Donc, d'autres interventions ou
commentaires sur l'amendement de M. le ministre? Donc, s'il n'y a pas d'autre
intervention, est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix :
Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce qu'il y a des interventions sur
44 amendé? Est-ce que la... S'il n'y a pas d'autre intervention,
est-ce que 44 amendé est adopté?
Des voix :
Adopté.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Donc, nous pouvons... L'article 44 amendé étant
adopté, nous pouvons passer à l'article 45. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Article 45, Mme la Présidente : Cette charte est
modifiée par l'insertion, après l'article 55, du suivant :
«55.1. Doivent être
rédigés en français :
«1°
le contrat de vente ou d'échange d'une partie ou de l'ensemble d'un immeuble
principalement résidentiel de moins de cinq
logements ou d'une fraction d'un immeuble principalement résidentiel qui fait
l'objet d'une convention ou d'une déclaration visée aux articles 1009
à 1109 du Code civil;
«2° la promesse de
conclure le contrat visé au paragraphe 1°;
«3° le contrat
préliminaire prévu à l'article 1785 de ce code;
«4° la note
d'information prévue à l'article 1787 de ce code.
«Les contrats et les
autres documents visés au premier alinéa peuvent être rédigés exclusivement
dans une autre langue que le français si telle est la volonté expresse des
parties.
«Le présent article
ne s'applique pas aux contrats et aux autres documents visés à
l'article 55.»
Commentaire.
L'article 55.1 de la Charte de la langue française que propose
l'article 45 du projet de loi prévoit que les contrats et certains autres
documents relatifs à des transactions immobilières doivent être rédigés en français.
Ils peuvent être
rédigés dans une autre langue que le français si les parties en expriment
expressément la volonté. Toutefois, s'il
s'agit d'un contrat d'adhésion ou dans lequel figurent des clauses types,
l'article 55 s'appliquera plutôt que l'article 55.1.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, M. le ministre. Des commentaires?
Mme David :
Bien, moi, je comprends que, quand on est dans l'adhésion, là, il faut que ça
soit en français. Mais, quand on vend notre... une partie d'un immeuble, notre
condo ou je ne sais trop, là, c'est plutôt du gré à gré parce qu'on négocie avec l'acheteur, ou tout ça, et là ça doit être fait
en français ou dans une autre langue si les deux parties en conviennent,
parce que là on est dans le gré à gré.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans le fond, le principe de base,
c'est : c'est en français, la transaction doit se faire en français, le
contrat doit se faire en français, à moins que les deux parties consentent à ce
que ça soit dans une autre langue.
Mme David :
C'est ça que j'ai dit, tout à fait, et donc... mais pas pour les contrats
d'adhésion. Mais un immeuble, quand on achète un condo, ce n'est pas un contrat
d'adhésion, ce n'est pas : tu vas payer tant, la preuve en est qu'il y a une
surenchère incroyable en ce moment, donc les gens offrent plus que ce qui est
affiché, donc là il y a de la négociation. C'est ça?
M.
Jolin-Barrette : Exactement.
Mme David :
Ça va, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Ça va? D'autres interventions? Donc, s'il n'y a pas
d'autre intervention, est-ce que l'article 45 est adopté?
• (12 h 30) •
Des voix :
Adopté.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Donc, l'article 45 étant adopté, nous passons à
l'article 46. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. L'article 57 de cette charte est remplacé
par le suivant :
«57. Les factures,
les reçus, les quittances et les autres documents de même nature sont rédigés
en français.
«Nul ne peut
transmettre un tel document dans une autre langue que le français lorsque sa
version française n'est pas accessible au destinataire dans des conditions au
moins aussi favorables.»
Commentaire.
L'article 46 du projet de loi propose le remplacement de l'article 57
de la Charte de la langue française d'abord par concordance avec les
modifications apportées à l'article 41 de la charte par l'article 29
du projet de loi. En effet, comme les formulaires de demande d'emploi sont
désormais visés à l'article 41 de la charte, il n'y a plus lieu de les
viser à l'article 57.
Le nouveau premier
alinéa de l'article 57 a aussi une portée plus large que l'ancien
article 57. En effet, plutôt que de comporter une liste limitative de cinq
documents, il s'étend désormais aux documents de même nature que ceux énumérés.
À cette fin, les bons de commande en ont été retirés pour être introduits à
l'article 52 de la charte afin que l'article 57 vise les documents
qui découlent d'une vente ou d'une autre transaction sur un produit ou un
service.
Le deuxième alinéa de
l'article 57, à l'instar du deuxième alinéa des articles 52 et 55 de
la charte, vise à exprimer clairement les
interdictions découlant du principe établi par le premier alinéa et à empêcher
toute interprétation selon laquelle la prescription commence à courir à
compter de la rédaction du document.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci, M. le ministre. Des interventions? Pas
d'intervention. Donc, l'article 46 est adopté?
Des voix :
Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, nous pouvons... L'article 46 étant adopté, nous pouvons passer à
l'article 47.
M.
Jolin-Barrette : 47. Cette charte est modifiée par l'insertion, après
l'article 58, du suivant :
«58.1. Malgré
l'article 58, dans l'affichage public et la publicité commerciale, une
marque de commerce peut être rédigée, même en partie, uniquement dans une autre
langue que le français, lorsque, à la fois, elle est une marque de commerce
déposée au sens de la Loi sur les marques de commerce (Lois révisées du Canada,
chapitre T-13) et qu'aucune version correspondante en français ne se
trouve au registre tenu selon cette loi.
«Toutefois, dans
l'affichage public visible depuis l'extérieur d'un local, le français doit
figurer de façon nettement prédominante, lorsqu'une telle marque y figure dans
une telle autre langue.»
Commentaire.
L'article 58.1 proposé par l'article 47 du projet de loi a pour objet
de consacrer dans la Charte de la langue française les principes gouvernant la
rédaction des marques de commerce dans l'affichage public et la publicité
commerciale.
Le premier alinéa de
l'article 58.1 autorise ainsi une dérogation à l'article 58 afin
qu'une marque de commerce puisse être rédigée seulement dans une autre langue
que le français si elle est une marque déposée et qu'il n'existe aucune version
correspondante en français.
Le
second alinéa prévoit cependant que, dans l'affichage public visible depuis
l'extérieur d'un local, lorsqu'il y figure une marque de commerce
rédigée même en partie seulement dans une autre langue que le français, le
français doit figurer dans cet affichage de façon nettement prédominante.
Les dispositions de
l'article 47 entreront en vigueur trois ans après la sanction du projet de
loi, ainsi que le prévoit le paragraphe 5° de l'article 201.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Des interventions sur... Oui, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Alors, 47 et 48, ça se ressemble un peu, sauf un change le 58.1 puis l'autre
change le 68.1 de la Charte de la langue française. Est-ce que je me trompe,
là? Pour être sûre que je fais la discussion au bon endroit.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, 47 introduit 58.1 puis 48 introduit
68.1. C'est des nouveaux articles.
Mme David :
Oui, mais on est dans l'affichage des marques de commerce, là?
M.
Jolin-Barrette : Oui.
Mme David :
Mais dans les deux cas.
M.
Jolin-Barrette : Le deuxième cas, 68.1, c'est... attendez, je vais
regarder ça.
Mme David :
«Dans l'affichage public visible depuis l'extérieur d'un local», ça, c'est mon
règlement, pour le dire vite, là. Mais le premier, c'est : «Malgré
l'article 58, dans l'affichage public et la publicité commerciale...»
Donc, c'est comme plus large, c'est pour ça que...
M.
Jolin-Barrette : C'est les deux.
Mme David :
Je veux être sûre que je fais la discussion au bon endroit.
M.
Jolin-Barrette : Donc, 68, c'est l'affichage du nom de l'entreprise,
puis, 58, on se retrouve dans affichage public et publicité commerciale. Donc,
c'est les deux, tandis que l'autre...
Mme David :
On n'est pas dans la Loi sur les marques de commerce, l'arrêt Best Buy, là.
M.
Jolin-Barrette : Oui, on est là, là.
Mme David :
On est là à 58.1 et à 68?
M.
Jolin-Barrette : Bien, on est là à 47 et à 68.1, dans les deux. On est
là dans les deux? L'affichage public, c'est plus 68.1, hein?
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Hein?
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : O.K. Dans les deux cas, c'est l'affichage public.
Mme David :
Donc, dans les deux cas, mais le 58.1 est comme plus large que le 68.1.
M. Jolin-Barrette : Oui, parce qu'on
vise également la publicité commerciale.
Mme David : La
publicité commerciale. Alors...
M. Jolin-Barrette : La publicité,
exemple...
Mme David : O.K. C'est quoi, la
différence, là? On va partir de là.
M. Jolin-Barrette : Bon,
affichage, c'est ce qui est sur le bâtiment, ou dans les fenêtres, ou dans la
vitrine du magasin.
Mme David : Oui. C'est ça. Oui.
M. Jolin-Barrette : Publicité
commerciale, là, à ce moment-là, ça, ça va être dans les autres... dans les
autres...
Mme David : Dans les Publi-Sac, non?
M. Jolin-Barrette : Dans les
Publi-Sac, à la télé, à la radio ou dans le journal.
Mme David : Mais c'est nouveau.
C'est-à-dire que... C'était quoi, l'ancien?
M.
Jolin-Barrette : Actuellement, vous avez déjà 58. 58, dans la Charte de la langue française, là, c'est : «L'affichage public et
la publicité commerciale doivent se faire en français.» Ça, c'est charte de
1977, là, loi 101. «Ils peuvent...»
Mme David : «Ils peuvent — hein,
on le lit en même temps — également
être faits [...]en français et dans une autre langue pourvu que le français y
figure de façon nettement prédominante.» On y est déjà, aux prédominances.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais là on
se retrouve dans, notamment, publicité commerciale.
Mme David : Bien oui, mais 58
actuel, là, il est... l'actuel de la charte, là : «L'affichage public et
la publicité commerciale doivent se faire en
français. Ils peuvent également être [...] à la fois en français [...] pourvu
que le français y figure...»
M. Jolin-Barrette : Parce que, 58,
c'est l'affichage sans marque de commerce.
Dans le fond, là, l'arrêt Best Buy, là, ce
qu'ils sont venus dire en gros, là, c'est que, puisque c'est une marque de
commerce — puis
le régime des marques de commerce, il est fédéral...
Mme David : ...oui, il faut protéger
la marque de commerce.
M. Jolin-Barrette : C'est ça, il
faut protéger, et donc...
Mme David : Donc, ça peut être en
anglais.
M. Jolin-Barrette : ...ça peut être
en anglais, ils peuvent l'enregistrer.
Mais ce qu'ils sont venus dire en gros à la Cour
d'appel, c'est qu'ils sont venus dire : Bien, écoutez, vu que c'est
fédéral, c'est la marque de commerce, il n'y a rien dans la Charte de la langue
française qui dit que vous visez la marque de commerce. La marque de commerce,
elle est protégée, là.
Donc, quand on parlait d'affichage... Ici, on
dit, à 58, là : «L'affichage public et la publicité commerciale doivent se
faire en français.» Mais on parle... Exemple, là, moi, là, je me partirais un
commerce, là, Better Flowers Incorporated, O.K.? Mais, si je ne l'enregistre
pas, la marque de commerce, il faut que mon affichage... Si c'est juste un nom
d'entreprise, là, que j'ai, qui n'est pas enregistré en vertu des marques de
commerce, bien, mon affichage public doit respecter 58. Mais là, nous, on
intervient à 58.1 puis à 68.1 quand c'est une marque de commerce qui est
enregistrée.
Mme
David : Parce que, c'est ça, vous dites : Malgré
l'article 58, dans l'affichage public, une marque de commerce peut
être rédigée dans une autre langue à condition que... que, que, que... bon,
visible depuis l'extérieur, «le français doit figurer d'une façon nettement prédominante».
Mais...
M.
Jolin-Barrette : Parce que — je reviens, là, sur
l'explication, là — pour
être en affaires puis avoir un commerce, supposons... Supposons, là, j'ai un
magasin de sport, O.K.? Je n'ai pas besoin que mon nom soit enregistré sous la
forme d'une marque de commerce. Je peux très bien enregistrer mon nom en vertu
de la Loi sur la publicité légale des entreprises, qui est la loi québécoise.
Dans le fond, quand vous allez au registre foncier, là... pas au registre foncier, au registre des entreprises du Québec,
pardon, vous tapez le nom de l'entreprise, puis là vous avez la
déclaration annuelle, puis vous allez voir : Est-ce que c'est enregistré
en vertu de la loi sur... On l'appelle la LPLE, la Loi sur la publicité légale
des entreprises. Donc, je réserve mon nom au Québec en vertu de ça. Donc, je
peux fonctionner toute la vie commerciale de mon entreprise juste en vertu de
la LPLE puis jamais j'enregistre le nom en vertu de la Loi sur les marques de
commerce, la loi fédérale. Donc là, il n'y a pas de problème avec ça. Parce
qu'au niveau de l'affichage c'est l'article 58,
actuellement, qui s'applique, où on dit : C'est la nette prédominance du
français. Donc, c'est ça qui est prévu.
Mon problème, il
arrive quand on a une entreprise qui a enregistré son nom en vertu de la Loi
sur les marques de commerce fédérale. Puis là, dans le fond, les tribunaux sont
venus dire, avec l'arrêt Best Buy : Ce n'est pas écrit dans la charte que
vous encadrez la marque de commerce fédérale. Puis eux, ils ont le droit de le
faire juste en anglais parce que la loi fédérale le permet.
Mme David : Mais
non, moi, j'ai fait passer un règlement pour que, justement, dans la charte, ce
soit encadré par un générique aussi visible en français.
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais, c'est ça, vous auriez eu la possibilité
d'ouvrir la charte parce que vous ne pouviez pas...
Mme David :
Mais je l'ai mis en règlement.
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais il...
Mme David :
Ça, vous me dites que c'est une coche au-dessus du règlement?
M.
Jolin-Barrette : C'est ça. Je vous dirais : Il vous manquait une
petite swing.
Mme David :
Oui, mais la swing était quand même là. La balançoire a balancé un petit peu,
là.
M.
Jolin-Barrette : Oui, sauf que...
Mme David :
Parce que tout le monde... Parce que, là, les commerces vont vous dire :
Ça fait trois ans qu'on se conforme, là, puis vous nous redemandez autre chose.
• (12 h 40)
M.
Jolin-Barrette : Oui, sauf que le niveau que vous avez mis pour la
présence suffisante du français est en dessous de la nette prédominance. Puis,
pour mettre la nette prédominance, il aurait fallu que vous ouvriez la charte
comme je fais.
Mme David :
Et donc c'est ça, essentiellement, vos articles 58.1 et 68.1.
M.
Jolin-Barrette : Exactement.
Mme David :
De passer de «aussi visible» à «nettement prédominant».
M.
Jolin-Barrette : De «présence suffisante» à «nette prédominance».
Mme David :
Présence suffisante. Mais il n'y avait pas juste ça, là, il y avait «aussi
visible que». Là, vous ne dites pas «aussi visible», alors ça peut être
«nettement prédominant», mais noir, noir, noir comme le charbon le soir quand
on est sur l'autoroute.
M.
Jolin-Barrette : Non, non, il va y avoir un règlement qui découle, là.
Mme David :
Ah! Ha! Vous aussi, vous aimez les règlements, alors. Vous allez avoir un
règlement. Vous allez reprendre mon «aussi visible que»?
M.
Jolin-Barrette : Me Champagne?
Mme David :
Ah! Ha!
M. Jolin-Barrette :
C'est dans le détail, mais fort probablement qu'on va s'inspirer de vous.
Mme David :
Puis là pourquoi il faut que cette partie-là soit dans le règlement puis
l'autre soit dans la charte? Ça, c'est une question que j'aie depuis que je
suis née, là. C'est quoi?
M.
Jolin-Barrette : C'est le pouvoir habilitant pour le faire. Là,
puisque la Cour d'appel vous a dit : Bien, écoutez, ce n'est pas prévu
dans la charte, donc vous ne pouvez pas exiger la nette prédominance, donc, si
on veut le faire, c'est qu'on vient poser le
grand principe dans la charte pour les marques de commerce également. Parce
qu'il y avait déjà le principe dans la charte pour l'affichage, mais
l'affichage qui ne vise pas les marques de commerce. C'est ce que la Cour
d'appel est venue dire.
Dans le fond, l'OQLF,
au fil des années, avait toujours dit : Ça s'applique également aux
marques de commerce. Puis finalement Best
Buy puis toute leur gang, ils sont venus dire : Non, non, non, ça ne vise
pas les marques de commerce, il y a une chicane
constitutionnelle, tatati, tatata, ça fait qu'on n'est pas assujettis. Puis la Cour
d'appel leur a donné raison.
Mme David :
Quelle est la différence entre «la présence suffisante» et «aussi visible»,
dans le règlement, puis la «nette prédominance»? Pourquoi un passe par le
règlement puis l'autre doit passer par la charte?
M.
Jolin-Barrette : Parce que, là, on vient donner l'assise législative
pour le faire, pour venir viser la nette prédominance.
Mme David :
Mais vous n'auriez pas pu le faire ou je n'aurais pas pu le faire par
règlement, de dire «nette prédominance»?
M.
Jolin-Barrette : Non, parce que, sinon, vous l'auriez fait,
probablement.
Mme David :
Oui, mais la... Je ne me souviens plus de la réponse pourquoi on ne pouvait pas
mettre «nette prédominance» dans le règlement.
M.
Jolin-Barrette : Parce que la Cour d'appel vous dit : Vous n'êtes
pas habilités par la loi à le faire.
Dans le fond, le
critère, là, de nette prédominance pour venir couvrir la marque de commerce, il
fallait que vous ayez l'habilitation dans la loi pour le faire.
Mme David :
Oui, mais l'effet est le même sur le terrain, là. Toutes les entreprises ont eu
trois ans pour se conformer. Ils se sont conformés. Même encore le Conseil
québécois de commerce de détail dit : «La règle de présence suffisante du
français a été le fruit d'un long débat, qui a perduré — bien
avant que et vous et moi soyons en politique, je pense — pendant
une décennie [...] il s'agit d'un excellent compromis». Puis là ils
disent : Ce n'est pas vrai, il ne faut pas qu'on recommence. «Il va sans
dire que l'image de marque de certains détaillants serait complètement remise
en question dans le paysage québécois eu égard à la règle de la nette
prédominance...» Donc, il y avait eu cette discussion,
j'imagine, importante entre les entreprises qui ont des marques de commerce et
les gouvernements précédents, parce que plus d'une décennie, ça... il y
a eu quelques partis au pouvoir.
Et donc j'essaie de
voir la différence maintenant. Parce que, dans les faits, moi, je ne suis pas
nécessairement contre la nette prédominance, là, ce n'est pas tant ça que de
repartir le bal auprès de toutes les entreprises pour leur donner un autre
trois ans pour passer de présence aussi visible et suffisante, éclairée, sur
les quatre côtés du Costco... C'est assez exigeant. Et puis, là, bien, on leur
dit : Oublie tout ça, tu refais tes grosses pancartes puis tu as un autre trois
ans pour le faire. Alors, ça, ils ne sont pas tellement de bonne humeur, là,
évidemment, les... Ils trouvent que ce n'est pas long, encore, trois ans,
parce qu'ils viennent de sortir... ils viennent de sortir de ça, septembre
2019, je pense. Ça va faire trois ans, là, en... Puis là il y a eu la pandémie.
Puis là ils ont de la misère à joindre les deux bouts. Puis là ils
disent : Oh! non, ce n'est pas vrai, on recommence dans l'affichage.
Alors, peut-être qu'à
vos yeux, effectivement, vous réparez une erreur ou une façon de faire qui
n'est pas celle que vous, vous auriez faite si vous aviez été à notre place,
mais, quand on pense aux détaillants, eux disent : Un, trois ans, c'est
bien trop court, puis, deux, on vient de faire ça. Puis là ils semblent exprimer
des inquiétudes pour le fait que ça soit
nettement prédominant, et que ça diminue peut-être la valeur de leur marque de
commerce dans cet affichage-là, puis que ce qu'on met autour devient
plus important que ce qu'eux autres veulent vendre, c'est-à-dire le produit de
la marque de commerce.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, tu sais, historiquement, ça a toujours
été la nette prédominance, hein? Puis, dans le fond, ça signifie qu'il y a
plusieurs entreprises qui ne la respectaient pas. Parce que, suite aux recours,
dans le fond, c'est ça, on a constaté qu'ils ne respectaient pas la nette
prédominance. Puis la position de l'office a toujours été claire comme ça, que
c'était la nette prédominance.
Arrive la décision
Best Buy. La cour nous dit : Bien, écoutez, c'est marque de commerce, tout
ça. Ça fait que, là, il faut venir encadrer tout ça.
Mais le critère qui a
été pris par votre gouvernement au niveau de la présence suffisante, c'est en
dessous de la nette prédominance. Et ça veut déjà dire qu'en 2016 il y avait
déjà des entreprises qui ne respectaient pas la nette prédominance. Parce que
celles qui s'y auraient été plus... qui se seraient conformées à la nette
prédominance, bien, ils ont eu 30 ans pour le faire aussi. Ça fait que,
là, nous, on veut s'assurer que, dans la loi, le principe soit inscrit pour la nette
prédominance, puis le règlement va suivre également sur les normes d'affichage,
comme vous avez fait, la visibilité, et tout ça. Mais il faut inscrire dans la
loi que c'est la nette prédominance, incluant les marques de commerce. À cela
la cour semble nous dire que... la cour semble nous dire qu'il fallait modifier
la loi pour le faire.
Mme David : Mais
je me souviens de la revue de presse, en 2019, où, justement, on disait... Je
lisais ça avec intérêt parce que c'est le fun, quand on fait quelque chose, que
ce soit un règlement, une loi, de voir la vie qui suit notre passage, notre
court passage dans cette vie de ministre, court, moyen ou long. Et, dans ce
cas-ci, bien, les gens avaient l'air assez satisfaits puis avaient l'air de
dire qu'ils ont travaillé très fort, puis que c'étaient même des... Société
Saint-Jean-Baptiste, ou d'autres, Impératif Français, tout ça, trouvaient que
c'était quand même une belle avancée.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas nécessairement
aller vers la nette prédominance pour tout le monde, mais c'est juste, dans le
temps... il me semble qu'on recommence à leur demander quelque chose, avec deux
ans de pandémie où ils en arrachent, puis là on leur
dit : Tu as trois ans encore pour refaire tes pancartes. Grosso modo, c'est
ça qu'on dit. Il y a peut-être des compagnies, vous allez me dire, qui ont les
reins bien assez solides pour recommencer leurs trucs, mais il va quand même
falloir qu'ils changent le lettrage, même si le règlement, c'est «aussi
visible», etc.
Est-ce que le
compromis, ce ne serait pas d'essayer de leur donner un peu plus de temps que
ce que nous-mêmes, on leur avait donné, c'est-à-dire trois ans ou...
Parce que vous avez fait le copier-coller du trois ans, mais peut-être que,
compte tenu des circonstances et pandémiques et financières, et autres...
M. Jolin-Barrette : En fait, c'est
un délai raisonnable qu'on donne. C'est un délai raisonnable de trois ans. Puis, historiquement, ça a toujours été la nette
prédominance du français. Donc, ceux qui n'étaient pas conformes en
2016, dans le fond, c'est parce qu'ils n'avaient jamais appliqué la nette
prédominance du français. Puis, moi, ça m'apparaît un délai raisonnable, parce
que ce qui est important, notamment, c'est le visage linguistique du français.
Donc, il faut assurer la nette prédominance du français. Et c'est ce qu'on
vient faire puis c'est pour ça qu'on modifie la norme.
Mme David : J'entends, j'entends. Je
trouve ça un petit peu peut-être plate pour ceux qui se sont évidemment conformés...
M. Jolin-Barrette : Oui, mais...
Mme David : ...et à qui on
dit : Bien là, on resserre un tour, on fait un tour de vis supplémentaire
et...
M.
Jolin-Barrette : Ce que je
veux dire, là, c'est que moi, je ne peux pas refaire le passé, là. Votre
gouvernement a choisi de mettre juste «présence suffisante du français». Pour
le Québec, pour la société québécoise, pour la pérennité du français, c'est
fondamental de revenir au critère de la nette prédominance. Puis je pense que
vous êtes d'accord avec moi là-dessus.
Mme David : Moi, c'est sur le temps
qui est donné que ça... Je trouve ça un peu plate pour eux. Mais, tu sais...
Alors, je vous demande de faire un petit... peut-être un petit compromis. Un
quatre ans au lieu de trois, est-ce que ça va changer quelque chose? Est-ce
que... Mais ceux qui nous disent : Écoutez, on vient de passer un deux ans
vraiment pas le fun, là, peut-être que... vous nous imposez ça en plus. Même
si, sur le fond, peut-être même qu'eux-mêmes sont d'accord, que c'est correct,
nette prédominance. Il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne le sont pas,
mais c'est ça que je trouve un peu... un peu dur pour eux. Je suis mal.
Évidemment, je suis dans une drôle de position
parce que c'est moi, à l'époque... Il y avait mon collègue aussi. Je me
souviens de l'avoir annoncé devant un Walmart. Mais... mais c'est ça, je me
sens un peu mal de leur dire : O.K., vous recommencez et vous avez
trois ans.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
les entreprises ont été beaucoup soutenues par l'État québécois au cours des
deux dernières années. On sait que c'est un contexte qui est difficile.
Cependant, un délai de trois ans pour se conformer aux dispositions de la
charte est tout à fait raisonnable. Et ils vont être accompagnés également,
pour l'OQLF, pour toutes leurs questions et pour la mise en application de
cette disposition-là.
Puis, l'autre élément, rappelez-vous, là, ça
fait depuis le 13 mars... 13 mai 2021 que j'ai déposé le projet
de loi. Là, on est rendus en février. Fort probablement qu'on se retrouvera pas
loin de la date anniversaire du dépôt du projet de loi au moment de l'adoption
de ce projet de loi là, donc c'est pratiquement quatre ans.
Mme David : Et vous allez devoir
passer un règlement?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme David : Mais ça, des fois, ça
prend un certain temps, à faire le règlement, le 45 jours, etc. Donc, ça
pourrait même mener encore un peu plus loin... ou dès la sanction de la loi? C'15379 15379 est dès la sanction?
M. Jolin-Barrette : C'est trois ans
à partir de la sanction.
Mme David : 15379 Oui, mais, si vous... Eux autres, ils ne sauront pas, là,
s'ils n'ont pas le règlement pis qu'ils ne savent
pas que vous voulez aussi aller dans le «aussi visible que» ou d'autres
détails. Ils ne vont pas partir une commande de pancartes sans être sûrs
du détail du règlement.
M. Jolin-Barrette : Je comprends,
mais ça va aller rapidement.
Mme David : Cet été, avant le
1er octobre?
M. Jolin-Barrette : Ça va aller très
rapidement. Bien, ce n'est pas une cachette. Ce n'est pas une cachette, là.
Mme David : Non, non, je le sais. Je
le sais, mais...
• (12 h 50) •
M.
Jolin-Barrette : C'est dans la loi de...
Mme David : Non, non, mais ce qui
est peut-être nouveau, c'est que vous allez peut-être avoir des idées
supplémentaires dans le règlement.
M. Jolin-Barrette : Ah! bien, je
suis toujours heureux d'entendre vos suggestions, si vous en avez à formuler pour
le règlement.
Mme David : Non, non, mais c'est
parce que... ce que je veux dire, c'est que, tout d'un coup, vous avez des idées créatives et que, là, ils ont commandé leurs
pancartes parce qu'ils veulent prendre de l'avance puis être sûrs qu'ils
rentrent dans le trois ans. C'est pour ça que je disais : Quand est-ce que
viendrait le règlement, pour être sûr qu'ils fassent les bonnes commandes de
pancartes d'affichage? Donc, je comprends que vous allez avoir des
règlements...
M. Jolin-Barrette : Rapidement.
Mme David : ...le plus rapidement
possible.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme
David : Parce que, des fois, ça prend quand même un
certain temps. Ce n'est pas un petit projet de loi, là. Il va y avoir
toutes sortes de règlements sur toutes sortes de sujets. Ça va, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci.
Donc, d'autres interventions sur l'article 46? Donc, s'il n'y a pas
d'autre intervention, est-ce que l'article 46 est adopté?
M. Jolin-Barrette : On n'était pas
rendus à 47?
La
Présidente (Mme Guillemette) : 46! Excusez, 47, oui. 46, il est déjà adopté, 46.
Donc, 47. Est-ce que l'article 47 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
l'article 47 étant adopté, nous passons à l'article 48.
M. Jolin-Barrette : 48. Cette charte
est modifiée par l'insertion, après l'article 68, du suivant :
«68.1. Dans l'affichage public visible depuis
l'extérieur d'un local, le français doit figurer de façon nettement
prédominante, lorsqu'y figure le nom d'une entreprise qui, en vertu de
l'article 67, comporte une expression tirée d'une autre langue que le
français, même si cet affichage est par ailleurs conforme au deuxième alinéa de
l'article 68.»
L'article 68.1 de la Charte de la langue
française qu'il propose... que propose l'article 48 du projet de loi
poursuit le même objectif que l'article 58.1, il s'applique cependant au
nom d'une entreprise afin de lui appliquer la même règle que celle applicable
aux marques de commerce. Ainsi, dans l'affichage public visible depuis
l'extérieur d'un local, le nom d'une
entreprise qui n'est pas une marque de commerce sera assujetti aux mêmes règles
que ces marques.
Les dispositions de l'article 48 entreront
en vigueur trois ans après la sanction du projet loi, ainsi que le prévoit le
paragraphe 5° de l'article 201.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le ministre. Donc, des interventions sur l'article 48?
Mme David : Bien là, on parle de la
même chose, là. On est... Je ne suis pas sûre que je comprends pourquoi qu'il
faut que vous rajoutiez le 68.1 au 58 qu'on vient d'adopter, là. Répétez-moi
donc pourquoi on rajoute le 68.1.
M. Jolin-Barrette : Donc, ça, c'est
dans l'affichage public visible depuis l'extérieur d'un local. Donc, c'est
notamment les façades.
Mme David : ...n'ont pas... Donc,
c'est vraiment pour l'affichage extérieur.
M. Jolin-Barrette : C'est ça. Donc
là, on vient... C'est l'article pour l'affichage extérieur.
Mme David : O.K. C'est pour ça que
je pensais que c'était celui-là qui changeait vraiment la donne. O.K. Ça va,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 48? Donc, s'il n'y a
pas d'autre intervention, est-ce que l'article 48 est adopté?
Des voix : Adopté.
La
Présidente (Mme Guillemette) : L'article 48 étant adopté, M. le
ministre, vous nous présentez l'article 49, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : L'article 49 : Cette charte est modifiée
par l'insertion, après l'intitulé du chapitre VIII qui précède
l'article 72... qui suit :
«Section I.
Enseignement dans les classes maternelles et les écoles primaires et
secondaires.»
Commentaire. Par
concordance avec l'introduction, proposée par l'article 58 du projet de
loi, d'une nouvelle section relative à l'enseignement collégial et
universitaire, l'article 49 du projet loi insère avant l'article 72
un nouvel intitulé pour faire des dispositions actuelles du chapitre VIII
et du titre I de la Charte de la langue française la section I de ce
chapitre.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci. Des interventions sur l'article 49?
Mme David : ...Mme
la Présidente, c'est rendu que je n'attends même plus que vous me donniez la
permission.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Allez-y, Mme la députée.
Mme David :
O.K. On rentre dans une énorme section, une section d'une très, très, très
grande importance, alors nous allons y accorder, évidemment, toute l'attention
nécessaire. Évidemment, là, on revient, dans plusieurs pages, sur des choses
qui ne sont pas nécessairement modifiées. Donc, je voulais juste souligner que
ce n'est pas banal, la section que nous sommes en train d'aborder, et que le
ministre devrait quand même être satisfait que nous soyons rendus à
l'article 49.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci. D'autres interventions? Donc, s'il n'y a pas
d'autre intervention, est-ce que l'article 49 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Donc, M. le ministre, l'article 49 étant adopté,
présentez-nous l'article 50, s'il vous plaît.
M.
Jolin-Barrette : Je vous demanderais juste une courte suspension, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Oui. Parfait.
Donc, une suspension,
s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à
12 h 55)
(Reprise à 12 h 56)
La Présidente (Mme
Guillemette) : Nous reprenons les travaux. M. le ministre, je vous
cède la parole pour l'article 50.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors, suite aux demandes du deuxième groupe
d'opposition, je vous demanderais, Mme la Présidente, de suspendre
l'article 50 parce que je crois que la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
veut venir faire des représentations sur l'article 50 la semaine dernière,
et je crois que nous avons consentement. Pardon?
Mme David : La
semaine prochaine.
M.
Jolin-Barrette : Qu'est-ce que j'ai dit?
Mme David :
La semaine dernière.
M. Jolin-Barrette :
Vous voyez comment... C'est...
Mme David : Quel
beau lapsus!
M.
Jolin-Barrette : C'est ma psyché, ça, qui me dit ça, que j'aimerais
ça, qu'on l'ait fait la semaine dernière?
Mme David :
Absolument.
La Présidente (Mme
Guillemette) : Donc, la semaine prochaine, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques
va venir faire des représentations sur cet
article-là. Donc, s'il y a consentement, nous allons passer à
l'article 51. Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre
l'artiste 50?
M.
Jolin-Barrette : Consentement.
La Présidente (Mme Guillemette) : Parfait.
Donc, M. le ministre, l'article 51.
M. Jolin-Barrette : Oui,
l'article 51 : L'article 73.1 de cette charte est modifié par le
remplacement, dans le troisième alinéa, de «responsable de l'application de la
présente loi» par «de la Langue française».
L'article 51 du projet de loi modifie
l'article 73.1 de la Charte de la langue française par concordance avec
l'article 144 du projet de loi qui établit le titre de ministre de la
Langue française.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Donc, des interventions sur
l'article 51? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que
l'article 51 est adopté?
Des voix : Adopté.
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, l'article 51 étant adopté, M. le ministre, présentez-nous
l'article 52.
M. Jolin-Barrette : L'article 74
de cette charte est modifié par le remplacement, dans le premier alinéa, de «au
présent chapitre» par «à la présente section».
Commentaire. L'article 52 du projet de loi
modifie l'article 74 de la Charte de la langue française par concordance
avec l'article 58 du projet de loi qui introduit une nouvelle section dans
le chapitre VIII du titre I de la charte et en conséquence duquel les
dispositions actuelles de ce chapitre en deviennent la section I.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Donc, des interventions sur
l'article 52? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que
l'article 52 est adopté?
Des voix : Adopté.
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. Donc, l'article 52 est adopté. M. le ministre, l'article 53,
s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : 53.
L'article 75 de cette charte est modifié par le remplacement, dans le
deuxième alinéa, de «du présent chapitre» par «de la présente section».
Commentaire. L'article 53 du projet de loi
modifie l'article 75 de la Charte de la langue française par concordance
avec l'article 58 du projet de loi qui introduit une nouvelle section dans
le chapitre VIII du titre I de la charte et en conséquence duquel les
dispositions actuelles de ce chapitre en deviennent la section I.
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce
qu'il y a des interventions sur l'article 53? Donc, nous pouvons...
L'article 53 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre, nous pouvons passer à l'article 54.
M. Jolin-Barrette : Les articles 78.2
et 79 de cette charte sont modifiés par le remplacement, partout où ceci se
trouve, de «du présent chapitre» par «de la présente section».
Commentaire. L'article 54 du projet loi
modifie les articles 78.2 et 79 de la Charte de la langue française par
concordance avec l'article 58 du projet de loi qui introduit une nouvelle
section dans le chapitre VIII du titre I de la charte et en
conséquence duquel les dispositions actuelles de ce chapitre en deviennent la
section I.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Des interventions sur l'article 54? Pas d'intervention.
Donc, est-ce que l'article 54 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, M. le ministre, l'article 54 est adopté. Présentez-nous
l'article 55, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette :
L'article 83.4 de cette charte est modifié par l'insertion, après «81,»,
de «84.1,».
Par concordance avec l'article 56 du projet
de loi qui propose l'introduction de l'article 84.1 de la Charte de la
langue française, l'article 55 du projet de loi modifie
l'article 83.4 de la charte afin de prévoir que la décision rendue en
application de ce nouvel article 84.1 peut être contestée devant le Tribunal
administratif du Québec.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. Donc, étant donné l'heure...
Une voix : ...
La Présidente
(Mme Guillemette) : Bien, si personne n'a de commentaire, on va
adopter le 55, parfait, s'il n'y a pas d'autre intervention. Donc, est-ce que
l'article 55 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Parfait. Merci. L'article 55 est adopté.
Donc, compte tenu de l'heure, je suspends les
travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi. Merci, tout le monde. Bon
appétit.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 14 h 05)
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, bon après-midi, tout le monde. La Commission de la culture et l'éducation
reprend ses travaux, et nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi
n° 96, loi sur la langue française... sur la langue officielle et commune
du Québec, le français. Lors de la suspension de nos travaux, nous étions
rendus à l'article... à l'étude de l'article 56, et je crois que M. le
ministre a une intervention.
M. Jolin-Barrette : 56, puis juste
nous rappeler... La députée de Mercier souhaitait qu'on suspende également 57,
ça fait que, quand on va être à 57, on va suspendre 57.
La Présidente (Mme Guillemette) : Exactement,
57 et 58.
M. Jolin-Barrette : Bien, pas
58 au complet. Elle avait un article spécifique dans 58, ça fait qu'on va
faire 58, sauf l'article en question.
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Dans 58? O.K. On le spécifiera en tout début. Donc, on y va avec 56, M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : O.K. 56. Cette
charte est modifiée par l'insertion, après l'article 84, du suivant :
«84.1. L'enfant qui est un ressortissant
étranger et qui séjourne au Québec de façon temporaire peut, à la demande de
l'un de ses parents, être exempté de l'application du premier alinéa de
l'article 72 et recevoir l'enseignement en anglais dans les cas
suivants :
«1° il est titulaire d'un permis l'autorisant à
travailler ou à étudier au Canada délivré en vertu de la Loi sur l'immigration
et la protection des réfugiés (Lois du Canada, 2021, chapitre 27);
«2° il est l'enfant à charge d'un ressortissant
étranger autorisé à travailler ou à étudier au Canada en vertu d'un tel permis;
«3° il est exempté de l'obligation d'obtenir le
consentement du ministre de l'Immigration, de la Francisation et de
l'Intégration pour séjourner au Québec lorsque le titulaire de l'autorité
parentale y séjourne à titre de travailleur étranger temporaire ou d'étudiant
étranger.
«L'exemption est valide pour une durée qui ne
peut excéder trois ans et ne peut être renouvelée. Néanmoins, elle est
prolongée au 30 juin de l'année scolaire au cours de laquelle se termine la
période de validité si cette période prend fin avant cette date.
«Le gouvernement prévoit par règlement les conditions
de l'exemption de même que la procédure à suivre en vue de son obtention.»
Commentaire. L'article 56 du projet de loi
propose l'introduction dans la Charte de la langue française de
l'article 84.1 prévoyant la possibilité pour certains enfants qui sont des
ressortissants étrangers et qui séjournent temporairement au Québec d'être
exemptés de l'application de l'article 72 de la charte afin d'être
admissibles à l'enseignement en anglais.
De plus, l'article 56 du projet de loi
vient enchâsser dans la Charte de la langue française, au deuxième alinéa de
cet article, 84.1, que cette exemption est d'une durée maximale de trois ans et
ne peut être renouvelée.
Enfin, l'article 84.1 confère au
gouvernement le pouvoir de prévoir les conditions de l'exemption et la
procédure à suivre pour l'obtenir.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le ministre. Donc, Mme la députée de...
Une voix : Marguerite-Bourgeoys.
La Présidente (Mme Guillemette) :
...Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Il fait déjà chaud,
hein? Bon, alors, commençons par le commencement. Moi, j'ai une question très,
très, très complexe, qui fait appel à la loi 101 dans toute sa complexité
et sa... c'est ça, son histoire, je dirais. Ça, ça vient de cas de dérogation
par rapport à ce qui est enfant issu de l'immigration, mais donc ça, ce ne sont
pas des enfants issus de l'immigration. Ce sont des
enfants qui sont des enfants de parents qui séjournent au Québec de façon
temporaire, qui est, on pourrait dire, très, très... un statut qui est de plus
en plus important au Québec, l'immigration temporaire. Je pense que c'est une
des... Enfin, c'est un des recours que peut avoir le gouvernement pour combler
des postes qui sont très, très, très nombreux à combler. Cet enfant-là pouvait,
jusqu'à maintenant... Et on parle souvent d'enfants... de postes bien
rémunérés, je dirais, de parents qui ont des... qui viennent au Québec parce
que, des exemples que moi, je connais bien, le père, la mère termine ou fait
des études doctorales, par exemple, dans une université. La langue maternelle
des parents, c'est plus l'anglais que le français, et souvent, même, c'est la
langue seconde, je dirais.
Par exemple, des enfants de ressortissants
d'origine asiatique, d'origine brésilienne, chilienne, mexicaine, là, on ne parle pas nécessairement de la langue
anglaise, là, on parle de ces parents-là qui viennent, qui ont un enfant
d'âge scolaire, qui viennent pour trois ans
ou pour six ans, parce que, d'habitude, un doctorat, c'est comme entre quatre
et six, et qui inscrivent leurs
enfants à l'école anglaise parce que l'anglais est comme la langue seconde du
pays d'où ils viennent et puis... déjà que ce n'est pas leur langue
première, l'anglais, bon, bien, ils vont à l'école anglaise, et c'est
renouvelable.
• (14 h 10) •
Bon, ma première question au ministre, ça va
être : Ces enfants-là qui restent trois ans ou qui restent six ans... Alors, on va faire les deux cas de figure, parce
que je ne suis pas certaine, mais peut-être que la réponse va être
différente dans un... avec trois ans ou avec six ans. Les parents tombent en
amour avec le Québec, décident qu'ils veulent faire leur vie ici. Le parent qui
est arrivé, exemple, faire un stage ou des études postdoctorales, comme ça
arrive très, très souvent, et le Québec est une destination très prisée pour
des études supérieures, on le sait, il se fait offrir un poste de professeur
dans une université. Alors, il dit : Là, moi, j'adore le Québec, j'adore
l'hiver, j'adore tout et j'accepte l'emploi. La question que j'ai besoin de
savoir, c'est : Cet enfant qui a été, disons, renouvelé, qui est en
cours... qui est renouvelé une fois puis qui est rendu à cinq ans, disons, ça
fait cinq ans qu'il est au Québec, qui a étudié en anglais, est-ce que, oui ou
non... À partir du moment où le père ou la mère, la famille décide de rester au
Québec, donc, de changer de statut, ils ne sont plus des ressortissants
étrangers. Ils demandent un statut de résident permanent. À ce moment-là, la
loi 101 dit : Tu dois transférer à l'école française. Ça, c'est clair
dans... Vous me... D'ailleurs, corrigez-moi si je me trompe, c'est ce que j'en
comprends, le parent... l'enfant, automatiquement, perd son statut prévu par la
loi actuelle, là, la Charte de la langue française. Il est obligé de transférer
au système français dès que le parent n'est plus un ressortissant étranger mais
bien un demandeur de résidence permanente. À ce moment-là, l'étudiant... enfin,
l'enfant a fait cinq ans, disons, au primaire, ou au secondaire, ou un mélange
de primaire et de secondaire, est-ce qu'il aura droit... un droit acquis de
poursuivre ses études en anglais et qu'il deviendra un ayant droit au sens de
la loi 101 actuelle pour que lui, ses frères, soeurs et ses descendants
puissent fréquenter l'école française... anglaise, tel que la loi 101 le
dit, non pas pour eux, le dit pour les enfants de parents qui ont étudié en
anglais ailleurs au Canada?
Donc, moi, je veux savoir si, en vertu de la
fameuse clause, mais qui s'applique aux enfants de parents canadiens... mais la
clause de la majorité de ses études au primaire ou au secondaire, dépendant si
tu es... si c'est l'enfant lui-même ou ses parents, là, mais a été fait soit au
primaire ou au secondaire en anglais... est-ce qu'il acquiert un statut d'ayant
droit d'étudier en anglais, statut qui lui confère une pérennité dans le temps
et dans la fratrie? Je ne sais pas si c'est clair, ma question.
M. Jolin-Barrette : C'est très
clair. Partons du début. Dans le fond, actuellement, le statut temporaire est...
c'est de trois ans en trois ans, mais c'est renouvelable indéfiniment. Donc,
pour les enfants qui sont visés par les exceptions, donc, si vous êtes en
situation temporaire sur le territoire québécois, il n'y a pas de limite, dans
le fond, au nombre de renouvellements.
Ce qu'on a constaté aux dernières années, c'est
que le nombre d'enfants qui sont sur des permis temporaires justement comme ça,
bien, c'est une bonne augmentation du nombre de personnes. À votre question, à
savoir : Est-ce que, pour bénéficier... pour devenir un ayant droit,
est-ce que les immigrants en situation temporaire peuvent le devenir? La
réponse, c'est : Oui, à partir du moment où ils acquièrent la citoyenneté
canadienne. Donc, le droit s'acquiert lorsque vous avez la citoyenneté canadienne.
Mme David : Attention, c'est
important, ce qu'on se dit là, là, parce que les avis sont partagés. Des gens
qui ont joué là-dedans depuis 10 ans, 15 ans... Alors, je veux être
sûre que moi, je comprends bien. Si l'enfant... parce qu'on a sauté les pages,
là, parce que, comme vous ne faites pas de changement, les pages... Je vais
aller dans la loi actuelle, dans la
loi 101 actuelle. On l'appelle la loi 101, puis je tombe sur la
page 101, mais c'est la loi 101 actuelle. Je vais relire les articles pertinents qui sont dans mon
document et je vous dirai l'article... c'est l'article 73 de la charte
actuelle : «Peuvent recevoir l'enseignement en anglais, à la demande de
l'un de leurs parents : les enfants dont le père ou la mère est citoyen canadien et a reçu — bon, lui-même,
le père ou la mère — un
enseignement primaire en anglais au Canada...»
Bon, ça, ça ne concerne pas ces enfants-là,
c'est le deuxième alinéa : «Les enfants dont le père ou la mère est
citoyen canadien — dans
le cas de figure, il devient citoyen canadien, disons, le ressortissant
étranger, donc, l'enfant — et
qui ont reçu ou reçoivent un enseignement primaire ou secondaire en anglais au
Canada — là,
est-ce que le Québec, pour les fins de la discussion, fait partie du Canada
dans ça? — de
même que leurs frères et soeurs, pourvu que cet enseignement constitue la
majeure partie de l'enseignement primaire ou secondaire reçu au Canada.»
Alors, moi, je prends le cas de figure qui
aurait eu un renouvellement, pas huit, là, un renouvellement, parce que trois
ans, ce n'est pas suffisant pour répondre aux critères, bien que, là, il va
falloir que je demande au ministre... «La majeure partie», je sais que ça a été
débattu jusqu'en Cour suprême. Moi, je ne suis pas... Je ne connais pas tous les
détails, mais est-ce que majeure... c'est 50 plus un d'après moi, mais est-ce
que c'est trois ans plus une année? «La majeure partie de l'enseignement
primaire reçu au Canada»... Ça dure six ans, l'enseignement primaire. J'espère
que vous me suivez. Ce n'est pas simple, tout ça. La
moitié de six, c'est trois, jusqu'à preuve du contraire, puis, comme par
hasard, là, c'est trois ans, un permis d'étudiant, d'enfant qui peut aller
à l'école. Là, il y a... Est-ce que «la majeure partie», c'est trois ans, ou quatre ans,
ou c'est trois ans plus un mois, plus deux mois? Ça, je n'ai pas la
réponse, mais c'est clair qu'il y a plein de jurisprudence là-dessus.
Et, deuxièmement, ces enfants-là dont le père ou
la mère deviendra citoyen canadien, puisque, là, ils sont en train de faire la
demande... Et on m'a dit qu'à partir du moment — ça, je demande au
ministre de me le confirmer — où le ressortissant étranger dit :
Moi, j'aime tellement ça, j'ai une offre d'emploi, je dépose ma demande au
ministère de l'Immigration, j'imagine, pour avoir, par étapes, ma résidence
permanente, probablement, puis, après ça, de citoyen canadien... mais, dès qu'il dépose sa demande, l'enfant doit changer
d'école puis changer de réseau, aller vers le français, ça, il faut me
le confirmer aussi, même si c'est en plein milieu d'année. Peut-être qu'on lui
laisse finir son année. Bon.
Puis, tout ce temps-là, le temps coule dans le
trois ans, ou dans le quatre ans, ou dans le cinq ans. Admettons qu'il est au
premier renouvellement, est-ce que cet enfant-là, quand le père va devenir
citoyen canadien, ou la famille, ou la mère, ou tout le monde... Est-ce que, si
l'enfant a fait quatre ans, qui est la majeure partie d'un primaire,
disons, il devient automatiquement un ayant droit jusqu'à la fin des jours de
sa descendance? C'est vraiment une question très importante, parce que, pour
être le plus transparent possible, j'ai eu des réponses totalement
contradictoires par des gens qui pratiquent ça depuis longtemps. Donc là, c'est
parce que ça va beaucoup dépendre, ce que vous allez répondre... de la suite
des choses.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors,
ce qui est intéressant dans tout ça, là, la Charte de la langue française
faisait en sorte, là, d'avoir une clause Québec au moment, là, de la rédaction,
en 1977, là, puis tout le monde qui a suivi les débats à l'époque, là, on
regardait ça. Donc, le gouvernement du Parti québécois a adopté une clause
Québec.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, je
n'étais pas né, mais...
Mme David : Il dit : On
regardait ça. Mais ça, c'est la clause Québec avant la clause Canada, ça a été
tous les recours en Cour suprême, tout à fait.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Bien, en fait, c'est vrai que je n'ai pas regardé ça, mais j'ai lu un peu
là-dessus pour m'informer adéquatement. Donc, le gouvernement du Québec adopte
une clause Québec en 1977, mais qu'est-ce que fait le fédéral en 1982 avec le
rapatriement unilatéral de la Loi constitutionnelle de 1867 puis en insérant la
charte, c'est qu'il vient insérer la disposition de 23 dans la Loi
constitutionnelle de 1982, à laquelle le Québec n'a pas adhéré. Donc, ça, c'est
la clause Canada qui fait...
Mme David : ...instruction dans
la langue de la minorité...
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
on vient également dire...
Mme David : ...qui est non
protégée par des dispositions de dérogation, mais ça...
M. Jolin-Barrette : Exactement,
parce qu'on ne veut pas y déroger, donc, qui ont reçu... Donc : «Les
citoyens canadiens qui ont reçu leur instruction, au niveau primaire, en
français ou en anglais au Canada et qui résident dans une province où la langue
dans laquelle ils ont reçu cette instruction est celle de la minorité
francophone ou anglophone...» Bon, ça, c'est le premier paragraphe.
Ensuite : «(2) Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit son
instruction, au niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au Canada
ont le droit de faire instruire tous leurs enfants, aux niveaux primaire et
secondaire, dans la langue de cette instruction.» Donc, ça, c'est la clause
Canada.
Donc, à votre question : Si moi, je suis en
situation temporaire au Québec...
• (14 h 20) •
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, je ne
suis pas Canadien, mais je fais toute mon instruction en anglais, supposons, je
deviens citoyen canadien, ça peut ouvrir la porte au fait que mes enfants, les
descendants de mes enfants, puis tout ça, ça devient des ayants droit.
Mme David : Ça peut. Pourquoi
vous ne dites pas : Ça va donner?
M. Jolin-Barrette : Bien, la
conséquence, c'est que ça pourrait donner ouverture à ça.
Mme David : Bien non, mais là
ça ne peut pas répondre ça, là, ça peut ou ça le fait, ça le donne, le droit,
ou ça ne le donne pas, le droit. Parce que, je vous dis, je n'ai pas eu de
réponse claire, moi, des juristes, et tout, là. Je n'en reviens
pas. La clause Canada, ça fait 40 ans. Je ne peux pas croire... Puis on a
un ancien directeur général des commissions scolaires anglophones qui l'a été
pendant 10 ans puis qui a une lecture, puis il y en a d'autres qui n'ont
pas nécessairement la même lecture. C'est très, très embêtant.
M. Jolin-Barrette : Alors, ce
qui est surtout important dans un dossier comme celui-ci, puisque vous indiquez
que ce n'est pas clair, l'important, c'est de clarifier la chose, et ce qui
est...
Mme David : Oui, mais moi, je
veux... je ne peux pas croire, M. le ministre, sincèrement, là, ça fait
40 ans qu'on vit avec la clause Canada, qu'il n'y a pas de réponse claire
là-dessus.
M. Jolin-Barrette : ...oui,
mais, écoutez-moi, et ce qui est surtout important, c'est de mettre un message
très clair pour dire que les... pour éviter qu'une telle situation se produise,
que des personnes en situation temporaire puissent acquérir le droit à
l'instruction publique en anglais, parce que le principe même la de Charte de
la langue française, c'est de faire en sorte que les personnes immigrantes que
nous accueillons, et ça a été la force de la Charte de la langue française, et
c'est pour ça qu'on a réussi à augmenter le taux de substitution linguistique,
c'est que les enfants issus de l'immigration aillent dans les écoles
francophones, en français, premier élément. Il ne faudrait pas que, par un
mécanisme de la Charte de la langue française qui permet un trou... de faire en
sorte que les enfants qui sont en situation temporaire pourraient acquérir ce
droit-là, de faire en sorte qu'elles puissent, par la suite, devenir des ayants
droit et de faire instruire leurs enfants en langue anglaise pour leurs
descendants, et puis tout ça.
Puis, vous
savez, la langue d'instruction, on l'a vu également avec les écoles passerelles
à l'époque, hein, il y avait des trous. Il y avait des trous. Vous en
voyez payer pour avoir une instruction en anglais au primaire. Un enfant, au
départ, là, il n'y avait pas vraiment de critère avant Solski.
Mme David : Ça a été réglé en 2010.
M. Jolin-Barrette : Oui, avant Solski, là, mais ça faisait en sorte,
là, que vous pouviez vous acheter un droit à...
Mme David : Mais je sais, là...
M. Jolin-Barrette : Non, mais
je veux juste bien poser les choses de pourquoi est-ce qu'on intervient. Vous
pouviez acheter le droit, dans le fond, pour pouvoir... que vos enfants
étudient en anglais. Donc, un enfant qui allait à l'école pour une année,
c'était ça avant, là, une année au primaire, vous payez au privé une année,
puis toute la fratrie puis leurs descendants
avaient le droit d'aller en anglais à l'école, c'était un détournement de
l'esprit de la loi. Ça a été resserré
en 2010, vous l'avez bien dit, avec le test... puis c'est un test qualitatif,
puis c'est un test quantitatif. Entre 1977 puis aujourd'hui, qu'est-ce qui a changé par rapport aux situations
temporaires? Les exceptions prévues à la loi, là, à la Charte de la
langue française de 1977, la loi 101, c'était notamment pour viser les cas
de diplomates, les cas de militaires.
Mme David : Militaires, diplomates.
Ça, vous l'avez au prochain...
M. Jolin-Barrette : Ceux, là, qui
bougeaient, puis ça, on ne change pas ça, puis les personnes en situation
temporaire, mais... Puis la députée de Mercier le dit très bien, le volume de
personnes en situation temporaire, au cours des 10 dernières années, a
explosé.
Mme David : Mais vous l'avez fait
exploser aussi, là, récemment. C'est très, très prisé, les ressortissants
étrangers temporaires.
M. Jolin-Barrette : Bien, ce n'est
pas le Québec qui donne les permis temporaires. C'est le fédéral qui donne les
permis temporaires. C'est le Canada qui autorise les gens à venir sur le sol
québécois, c'est le fédéral, là. Nous, on n'a pas de contrôle là-dessus.
Mme David : Puis là...
M. Jolin-Barrette : Mais je veux
juste finir, juste bien finir, parce que le fédéral accorde des permis temporaires
sur lesquels le Québec n'a pas juridiction, O.K., il ne faudrait pas qu'à cause
de cette explosion-là ça vienne permettre de garantir un droit à l'instruction
publique en anglais, ce qui signifie qu'il ne faut pas faire par la porte d'en
arrière ce qui n'est pas permis de faire par la porte d'en avant. Et là-dessus,
là, ça va être très clair, il faut garantir l'esprit de la loi 101 et ne
pas détourner son objectif. Alors, c'est pour ça qu'on met ces dispositions-là,
pour faire en sorte que, lorsque vous êtes en situation temporaire, ça soit
limité à une période de trois ans. Si vous avez l'intention de venir d'une façon permanente au Québec, vous pensez venir
plus que trois ans au Québec, il y a un incitatif à aller à l'école
française, inscrire vos enfants à l'école française.
Mais on comprend que, pour les militaires, les
diplomates, c'est une situation qui est temporaire et de passage. Là, on
dit : Bien, écoutez, c'est un permis de trois ans, mais il sera non
renouvelable désormais. Ça évite notamment de faire en sorte que la
progression, pour les personnes qui sont en situation temporaire, soit soutenue
à l'école anglaise. Et surtout, et on se tire dans le pied en faisant ça, si la
personne décide, au bout de quatre ou cinq ans, de... décider d'immigrer au Québec de
façon permanente, bien, l'enfant qui aura été scolarisé pendant cinq ans en
anglais, là, ce n'est pas lui rendre
service, là. Donc, on souhaite, après une période de trois ans, que, s'il y a
poursuite au Québec, ça se passe dans les écoles françaises pour les
enfants des personnes immigrantes, parce que c'était ça, l'objectif de la
loi 101.
Mme David : Pour en revenir à ma
question, pour laquelle je n'ai pas eu vraiment de réponse, vous avez même
parlé de trous dans la loi, c'est encore... ça me confirme une chose, Mme la
Présidente, c'est que c'était... Les gens qui n'ont pas les mêmes opinions
confirment qu'il y a comme un trou, une faille, je ne sais trop, et je n'en
reviens pas, de ça, je n'en reviens pas. Après 44 ans de pratique de cette
loi-là, vous me confirmez que l'enfant qui a... qui passe plus que
trois ans... et d'où probablement ce chiffre de trois ans non
renouvelables, parce que, comme on a fait le grand calcul mathématique, tout à
l'heure, de six divisé par deux égale trois, trois étant la moitié d'un cours
primaire, donc n'étant pas, j'imagine, la majorité des études en langue
anglaise... et à ce moment-là vous avez choisi trois ans non renouvelables,
parce que vous me répondez, puis c'est là où je veux revenir : Je ne suis
pas certain que cet enfant-là, après cinq ans ou six ans, aurait le
droit acquis, comme un anglophone, comme la clause Québec au Canada, de faire,
avec ses frères, et soeurs, et toute sa famille, et pour le restant de la
dynastie, son cours... étudier en anglais. Vous n'êtes pas sûr de votre coup.
Vous dites qu'il y a un trou, mais, au cas où, on va combler le trou en mettant
trois ans.
Et je vais vous reposer la question. Est-ce
qu'un enfant qui aura étudié cinq ans en anglais parce qu'il aura eu un
renouvellement, puis c'est à ce moment-là que les parents décident de déposer
une demande d'immigration, parce qu'il a eu une offre d'emploi qu'il ne pouvait
pas refuser, le papa, disons, ou la maman... Est-ce que cet enfant-là,
automatiquement, ayant fait, disons, cinq ans à l'école primaire, a un
droit acquis de la clause Canada? Parce qu'on ne peut pas dire que ses parents
ont étudié au Canada quand il était au primaire. On peut juste dire que, selon
73(2), les enfants dont le père ou la mère est citoyen canadien en devenir ou
qui ont reçu ou reçoivent un enseignement... Disons que le papa et la maman
font la demande d'immigration, la réponse arrive un ou deux ans après, l'enfant
va être rendu à six ans en anglais, il sera automatiquement devenu un ayant
droit. Moi, ça me semble un peu particulier. Est-ce que c'est une bonne idée
qu'il devienne un ayant droit jusqu'à la fin de ses jours? Je ne pense pas. Je
suis très transparente avec vous, mais ça ne me satisfait pas d'avoir une
réponse qui dit : Bien, je ne le sais pas, puis il y a peut-être un trou,
donc on va faire... on ne va pas prendre de chances puis on va mettre
trois ans. Je ne sais pas si vous me suivez.
M. Jolin-Barrette : Alors, la
réponse à votre question ne se répond pas par oui ou par non, mais
plutôt : Oui mais ou non mais, parce que chaque situation est un cas
d'espèce en fonction du nombre d'années d'études, en fonction... Ce n'est pas
juste un critère quantitatif, mais c'est également qualitatif, en fonction
de...
Mme David : ...écoles passerelles?
M.
Jolin-Barrette : ...la notion de parcours authentique. Donc, la
majeure partie des études n'est pas uniquement un critère mathématique,
et c'est ce que nous dit Solski, ce n'est pas... il n'y a pas d'automatisme, ce
n'est pas le fait uniquement...
Mme David : ...là, c'était un enfant
qui étudie un an, là, je le connais, mais de parents canadiens, pas
nécessairement de parents étrangers avec un statut de ressortissant étranger.
M. Jolin-Barrette : Oui. Ce que
23(2) nous dit : «Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit
son instruction, au niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au
Canada ont le droit de faire instruire tous les enfants, aux niveaux primaire
et secondaire, dans la langue de cette instruction.»
Mme David : Oui, mais un citoyen
canadien... Il n'est pas encore canadien, mon ressortissant étranger.
M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça,
mais ce que je veux dire, c'est qu'à votre question : Est-ce qu'une
personne en situation temporaire qui a étudié au Canada sans être résident
canadien à l'époque... sans être citoyen canadien à l'époque mais qui le
devient par la suite et qui a fait la totalité de ses études primaires en
anglais... oui, il pourrait invoquer ce droit-là pour ses enfants, ses
petits-enfants, ses petits-petits-enfants.
Mme David : Pourrait, puis il
arriverait quoi s'il le faisait, invoquer ça, quelle serait la réponse?
M.
Jolin-Barrette : En fonction des différents... du cas d'espèce, il
pourrait arriver que ce droit-là lui soit reconnu.
Mme David : Mais, il me semble,
c'est clair, ce n'est pas la couleur de ses yeux, ce n'est pas sa taille, ce
n'est pas parce qu'il joue au hockey plutôt qu'au soccer. C'est quoi, les
critères?
M. Jolin-Barrette : La majeure
partie, son parcours authentique, c'est une analyse...
Mme David : Non, mais qu'est-ce qui
est authentique ou pas authentique? Il a étudié six ans, là.
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas moi
qui a écrit l'arrêt de la Cour suprême, ce n'est pas moi qui a écrit Solski.
• (14 h 30) •
Mme David : Oui,
mais est-ce que ça s'appliquait aux ressortissants étrangers puis aux enfants
que ça fait... qui ont eu un renouvellement, par exemple?
M. Jolin-Barrette : Oui, le test
s'applique, mais il faut regarder la situation familiale de la personne. Donc,
c'est pour ça que je ne peux pas vous donner une réponse. Est-ce que ça
s'applique à tout le monde de cette façon-là? Ce n'est pas blanc ou noir. Il
faut regarder chacune des analyses pour voir... chacun des cas d'espèce pour
voir est-ce que la personne peut bénéficier de ce droit-là. C'est pour ça que
je vous dis que ça pourrait arriver que la personne pourrait bénéficier, et
c'est ça qu'on veut verrouiller, et c'est ça qu'on veut empêcher. On veut
éviter de faire en sorte, d'une façon détournée... Parce que le principe de la
loi 101, c'est de faire en sorte que les enfants des personnes immigrantes
vont à l'école française et qu'ils ne sont pas des ayants droit, O.K.? On ne
veut pas élargir le bassin, c'est très clair là, c'est ça, l'objectif, depuis
1977. Puis notre responsabilité, c'est de faire en sorte de nous assurer très
clairement que ça ne crée pas ce droit-là. Alors, on vient clarifier les choses
et on vient s'assurer que c'est trois ans à l'école anglaise sans
renouvellement. Si votre situation temporaire perdure au-delà de
trois ans, l'enfant devra aller à l'école française.
Mme David : Donc, le but de votre
non-renouvellement de votre juste un mandat, c'est que... ce que vous dites,
c'est qu'actuellement... Il doit bien y avoir de la jurisprudence. Ça fait 40 ans
qu'on vit avec le renouvelable indéfiniment. Il doit bien y avoir des cas, vos
équipes ont dû regarder tout ça avec le ministère de l'Éducation, je ne le sais
pas, des cas d'espèce qui sont exactement l'exemple que je dis, qui,
finalement, ont décidé de devenir résidents permanents et citoyens canadiens.
Et donc l'enfant, il a fait tout son parcours primaire en anglais, mais il est
arrivé quoi? Je ne peux pas croire qu'on n'a pas d'études de cas, là. Ils
ont-tu le droit acquis jusqu'à fin de leurs jours?
M.
Jolin-Barrette : Si la personne fait valoir ce droit, elle pourrait
l'avoir. Alors, j'espère que vous êtes d'accord avec moi qu'il ne faut
pas ouvrir cette porte-là.
Mme David : C'est votre conditionnel
qui me rend folle, parce qu'elle pourrait l'avoir. C'est quoi... Alors, je vais
vous poser la question, peut-être, je devrais avoir la réponse, vous allez me
dire c'est quoi, le parcours authentique, le critère, là-dedans.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
le parcours authentique est propre à la situation de chaque personne, de chaque
cas, et c'est ce que nous dit Solski. Il y a le nombre d'années, mais il y a
également le parcours authentique. Donc, ce n'est pas un critère uniquement
mathématique, c'est son parcours authentique.
Mme David : Votre article m'oblige à
creuser puis à vous demander c'est quoi, le parcours authentique, puis c'est
quoi, les situations où ça peut arriver. C'est une fois sur 1 000? Vous
comprendrez que c'est bien différent comme authenticité qu'un sur un qui
l'obtient, ou quatre sur cinq. Je ne peux pas croire que le ministère de
l'Éducation ne vous a pas accompagné là-dedans, là. Ça ne se peut pas, ils
doivent avoir des chiffres.
M. Jolin-Barrette : On ne légifère
pas sur... On ne se dit pas, quand on légifère : Ah bien! Il va juste y
avoir un cas, ce n'est pas grave. Lorsqu'on légifère, on légifère notamment sur
l'objectif de la loi et on doit s'assurer de faire en sorte que l'objectif de
la loi ne soit pas contourné, ne soit pas détourné. Au cours des dernières
années, des 10, 15 dernières années, le nombre de personnes au Québec en
situation temporaire a explosé. L'immigration, auparavant, c'étaient des
personnes qui remplissaient leurs demandes d'immigration puis qui arrivaient au
Québec avec une situation permanente. On leur délivrait un certificat de
sélection du Québec. Ils venaient au Québec de façon permanente. Ils quittaient
leur pays, ils arrivaient ici. Là, de plus en plus, puis vous le savez, avec la
sélection en matière d'immigration économique, près de 90 % des personnes
immigrantes que nous sélectionnons, ce sont des gens qui sont déjà sur le
territoire québécois, et qui ont déjà une expérience au Québec, et qui ont vécu
trois, quatre, cinq, six, sept, huit ans déjà au Québec.
Mme David : ...avec un statut de
ressortissant étranger.
M. Jolin-Barrette : 90 % de la
sélection qui est faite parce qu'ils passent...
Mme David : Alors, combien ont
demandé le... Combien ont eu ce bulletin de parcours authentique? Ils ont des
enfants, ces gens-là, souvent.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
l'analyse, elle est propre au cas de chacun. C'est ça, le parcours authentique.
Dans le fond, dans chaque famille... Moi, je ne sais pas combien de temps il
l'envoie à l'école anglaise, il l'envoie à l'école française, de quelle façon
la personne, elle est instruite. Il y a différents facteurs qui doivent être
évalués selon les années... pas seulement les années passées en anglais, mais
aussi les étapes et la situation de chaque famille. C'est ça que la décision de
la Cour suprême dit. Ce n'est pas blanc ou noir.
Mme
David : Mais, concrètement,
comment c'est appliqué? Concrètement, c'est appliqué comment par le
ministère de l'Éducation depuis Solski?
M.
Jolin-Barrette : C'est la démonstration du parcours authentique.
Mme David :
...démonstration du parcours authentique.
M.
Jolin-Barrette : Dans chaque cas... Dans chaque, c'est le nombre...
Comme je vous dis, c'est le nombre d'années, la situation aussi, les étapes de
la situation familiale à chaque étape, ce n'est pas la question : Est-ce
que vous êtes un ayant droit ou non? La question, c'est qu'on souhaite que les
enfants des nouveaux arrivants étudient en français.
On peut comprendre, là, que, pour une situation temporaire au Québec, là, bien,
vous êtes de passage au Québec, parfait,
vous avez la possibilité d'envoyer vos enfants à l'école anglaise, mais nous,
on dit : Maximum trois ans. Si vous demeurez au Québec au-delà de
trois ans, sachez qu'ils devront aller à l'école française. Donc, si vous avez
l'intention de rester au Québec pendant cinq ans, vous auriez un avantage à
envoyer vos enfants en français à l'école dès le départ.
Mme David : Mais
le ministère de l'Éducation n'est pas capable de vous donner un portrait de la
situation de ces enfants-là dont vous dites
que le nombre explose. Ce n'est quand même pas rien, là, que le nombre explose,
ça veut dire quelque chose, là. Ils doivent être suivis quelque part. Il
y a tellement de données et de statistiques, au ministère de l'Éducation.
M.
Jolin-Barrette : Le nombre de personnes avec un statut temporaire au
Québec a beaucoup augmenté au cours des dernières années. Si on veut colmater
cette brèche-là dans la loi 101, on se doit de légiférer.
Mme David :
Donc, pour vous, c'est une brèche, parce que votre réponse dit... est au
conditionnel, que ce n'est pas évident qu'ils ont un droit acquis, mais ils ont
peut-être un droit acquis, c'est pour colmater une brèche dont je ne connais
pas beaucoup les contours de cette brèche-là.
La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce
que vous voulez qu'on suspende quelques instants, M. le ministre? Ça va?
Une voix :
...
La Présidente (Mme
Guillemette) : Non, on est prêts, allez-y.
M.
Jolin-Barrette : Alors, l'objectif est de faire en sorte de colmater
cette brèche. Il y a une brèche.
Mme David :
Alors, répétez-moi la définition de cette brèche-là, qu'on la comprenne bien.
M.
Jolin-Barrette : Bien, comme je vous le dis, on veut éviter...
Premièrement, l'intégration des personnes immigrantes doit se faire en
français. Quel est l'objectif de la loi 101? C'est que les enfants des
personnes immigrantes étudient en français au Québec. Les permis de travail
temporaires, ils sont en forte augmentation au Québec, et ce qui fait en sorte
de permettre aux étudiants, aux enfants d'aller à l'école anglaise durant tout
le temps du permis temporaire et du renouvellement du permis temporaire. Ce que
nous voulons, puisque l'intégration passe par le français et que nous ne
voulons pas créer de nouveaux droits à l'instruction en anglais pour les
personnes immigrantes qui arrivent en situation temporaire, et, par la suite,
vont obtenir leur résidence permanente, et vont devenir citoyens canadiens...
pour ne pas faire en sorte que, justement, ils acquièrent le droit de faire
instruire les générations futures en anglais, parce que l'intégration des
personnes immigrantes doit se passer en français.
Mme David : Donc,
Mme la Présidente, ma question de départ était très fondée. J'avais raison de
vous poser la question : Est-ce qu'il est possible qu'avec un renouvellement
on obtienne la majorité de l'éducation dans un cycle ou l'autre, primaire ou
secondaire, et que, dans ce scénario-là, ça donne automatiquement le droit aux
ayants droit? Parce que c'est une autre histoire que si ça ne le donne jamais.
Admettons que vos enfants, ils étudient, ils restent neuf ans ou... et que lui,
là, cet enfant, là, O.K., il aura étudié en anglais, mais jamais, jamais ni ses
frères et soeurs ni ses enfants à lui et ses descendants auront ce statut, ce
n'est pas la même chose que s'il y a... il donne le statut à tous ses
descendants. Là, on parle d'autre chose.
M.
Jolin-Barrette : Alors, je réitère ma réponse : Ça pourrait.
C'est une réponse au conditionnel.
Mme David : Ce
n'est pas clair, hein? La loi, je pensais que c'était...
M.
Jolin-Barrette : Bien non, parce que la loi, elle est générale, mais,
lorsqu'elle devient un cas d'application précise, il faut regarder quelle est
la situation devant moi, puis c'est pour ça qu'on a des juges. Ils interprètent
la loi.
Mme David : Bien
oui, mais, voyons donc, ce n'est pas compliqué, tu achètes une pinte de lait à
2,49 $ ou c'est... tu ne l'achètes pas, mais là c'est comme... Le parcours
authentique, ça veut dire que l'étudiant, il a-tu été gentil à l'école, il a-tu
été...
M. Jolin-Barrette : Non, non, non.Bien, honnêtement, ce n'est pas moi qui est à la Cour suprême puis ce n'est
pas moi qui ai défini ce terme-là, là, le parcours authentique, là.
Mme
David : Oui, mais c'est vous qui êtes le ministre de la
Justice, puis le Procureur général, puis le connaisseur de tout ça, avec
toutes vos équipes.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais, vous
l'aurez bien constaté, ce n'est pas moi qui est membre de la magistrature puis
ce n'est pas moi qui ai défini le test de la Cour suprême là-dessus.
• (14 h 40) •
Mme David : Je le sais, mais vous
pourriez au moins me l'expliquer. Je ne comprends vraiment pas et je trouve que
ça a une incidence importante parce que ça... Si vous me disiez : Non,
jamais, jamais ils ne vont pouvoir avoir de droits acquis, O.K., bien là, je
dirais : O.K., peut-être qu'on peut vous proposer qu'il y ait un
renouvellement, donc que ça fasse six ans, mais qu'on n'aille pas plus loin que
ça, après ça il peut aller à l'école française. La différence... ou il doit
aller à l'école française. La différence entre un amendement que je pourrais
déposer et l'amendement que je ne déposerai pas si on a une réponse claire,
c'est... Bien là, si on le passe de trois à six années où ça serait permis, un
seul renouvellement, là, automatiquement, il tombe dans l'espèce de magma du
parcours authentique de peut-être que oui, peut-être que non. Moi, j'aurais
voulu que vous me répondiez : Il n'y aura jamais, jamais de ses
descendants qui pourront avoir de droits acquis. Ce n'est pas comme un droit
acquis de la clause Canada, là, ce n'est pas un parent canadien au moment où
l'enfant étudie.
M. Jolin-Barrette : Avec les
dispositions que je propose, il n'y aura pas de droit acquis.
Mme David : ...ce que vous faites en
bas de la majorité. Si l'école primaire, un jour, là... Ah! je vais vous en
donner une bonne. On décide que le primaire, ça se fait maintenant en quatre
ans, grand changement dans l'éducation, ça veut dire que votre affaire ne
marche plus, parce que, là, en trois ans, il aura fait la majorité de son cours
primaire.
M. Jolin-Barrette : Les critères,
là, dans Solski, là : combien de temps a été passé dans chaque programme,
à quelle étape des études le choix de la langue d'instruction a-t-il été fait,
quels programmes sont offerts ou l'étaient, existe-t-il des problèmes
d'apprentissage ou d'autres difficultés des enfants. Ça fait notamment partie
des critères qui ont été développés par Solski.
Mme David : Je savais pour les
enfants qui ont peut-être des problèmes, des difficultés d'apprentissage. Les
autres, c'est quoi, là, quel programme... bien, quel programme, un cours
primaire, c'est pas mal un cours primaire.
M. Jolin-Barrette : Oui, puis il y a
toujours la possibilité, dans l'éventualité où les personnes en situation
temporaire souhaitent poursuivre l'éducation en anglais de leurs enfants,
d'aller au privé-privé.
Mme David : ...qui est enfant de
joueur de hockey, là. Je comprends qu'un doctorant en...
M. Jolin-Barrette : Je comprends,
mais il y a un avantage à, au Québec, étudier en français pour les enfants.
Puis, dans votre cas, là, vous m'avez parlé d'une situation de neuf ans. Est-ce
que nous, comme État, on se dit qu'on veut accepter deux renouvellements? Et,
si on mettait deux renouvellements, oui, ça peut entraîner, en vertu du
parcours authentique, en vertu de Solski, le droit à faire instruire... dans le
fond, l'obtention du droit à ce que ses enfants soient instruits en langue anglaise.
Mme David : Après un renouvellement?
M. Jolin-Barrette : Ça pourrait.
Mme David : Parce que ça arrive à
six ans.
M. Jolin-Barrette : Ça pourrait.
Mme David : Jusqu'à preuve du
contraire, on est au moins sûrs d'une chose, vous et moi, c'est que deux fois
trois égale six. Un renouvellement, ça donne six ans. Six ans, c'est un
parcours de primaire, ou de secondaire, ou un mélange des deux, dépendant de
l'âge auquel arrive l'enfant. Mais le parent qui demande sa citoyenneté
canadienne, même s'il n'est pas citoyen canadien au moment où l'enfant fait ses
études... il serait considéré comme un enfant quand même de citoyen canadien
éventuel, qui aurait fait son parcours en anglais.
M. Jolin-Barrette : Il pourrait. Et
nous, là, on vient d'adopter l'exemplarité de l'État. L'État québécois finance
déjà la scolarisation en anglais de travailleurs étrangers temporaires. On peut
comprendre pour une période de trois ans, mais ce n'est pas vrai que l'État va
financer ça sans limite.
Mme David :
...votre collègue de l'Économie, parce que le collègue de l'Économie, là, il
veut... puis de l'Emploi, ils veulent plein, plein, plein de monde qui
viennent, là, plein de monde. On manque de monde partout, partout. Et, de se
faire dire au bout de trois ans : Il va falloir que tu ailles étudier en
français... Est-ce qu'il a peur que ça soit un frein à plusieurs ressortissants
qui vont décider d'aller dans un autre pays, dans une autre province, en
disant : Bien là, c'est un peu compliqué? Parce que,
là, il va falloir qu'au bout de trois ans ils changent de langue... et puis je
ne suis pas sûr de rester là plus que trois ans, puis, si jamais je reste,
bien là, il va falloir que... Ça ne l'inquiète pas du tout, dans la vie
économique du Québec, avec la pénurie de main-d'oeuvre, et tout ça?
M.
Jolin-Barrette : Non. Savez-vous pourquoi? Parce qu'on a des règles
qui vont être claires, qu'il n'y aura pas d'ambiguïté, c'est trois ans. Vous
pouvez envoyer votre enfant à l'école anglaise, si vous le souhaitez, pendant
trois ans, mais on vous incite quand même à l'envoyer à l'école française pour
l'intégration, là, parce que, l'objectif, puis on a eu cette discussion-là, là,
au cours des derniers jours, là, on veut les garder, là, les gens, ici, qui
décident de venir au Québec de façon temporaire, là. On veut faire en sorte
qu'ils aiment tellement le Québec, là, qu'ils demeurent au Québec puis qu'ils
s'intègrent. Quel est le facteur d'intégration à la société québécoise... le
facteur d'intégration le plus fondamental? C'est la langue. Quel message
envoie-t-on si on dit : Vous pouvez venir au Québec pendant neuf ans,
12 ans, vos enfants vont aller à l'école anglaise, puis vous décidez de
devenir résident canadien, devenir citoyen canadien, puis vous n'aurez jamais
fréquenté le réseau public francophone? C'est complètement illogique, surtout
où il y a de plus en plus de temporaires.
Les gens, là... De la
façon que l'immigration s'est transformée, les gens vont de façon temporaire...
ils arrivent de façon temporaire parce qu'ils arrivent beaucoup plus
rapidement, contrairement aux programmes réguliers des travailleurs qualifiés,
ça fait que c'est pour ça qu'ils fonctionnent comme ça, puis ensuite ils
décident de continuer. Mais, si on veut être en mesure d'accueillir les
personnes immigrantes en français, l'incitatif est beaucoup plus grand.
L'enfant, là, qui vient ici, là, puis qui va à l'école publique française, là,
en langue française, là, puis qui arrive à la maison, là, puis qu'il parle en
français à son parent parce qu'il a appris le français à l'école, là, ça, pour
les parents, c'est un gros facteur d'attachement envers le français, c'est un
facteur également pour convaincre d'utiliser la langue française comme langue
commune.
On se doit, comme
société, de prendre les moyens nécessaires pour faire en sorte que, les
personnes immigrantes, on va les franciser. Puis, si on ne commence pas par les
enfants, comme c'était voulu en 1977 par la loi 101, bien, on passe à côté
de l'objectif même de la loi 101, parce qu'en 1977 les temporaires
n'étaient pas présents comme ils étaient présents aujourd'hui. Alors là, on a
un gros trou comme ça, là, puis, si on ne le colmate pas, bien, ça fait en
sorte que nos efforts seront vains.
Mme David :
Les sources de votre colmatage, on pourrait dire, c'est parce que vous
trouvez... Puis là j'imagine que vous avez des chiffres, là. Vous avez quand
même eu quelques connaissances en immigration. Il y a de plus en plus de
ressortissants étrangers temporaires, ça, c'est documenté, là, au Québec.
M. Jolin-Barrette : Il y a beaucoup plus d'étudiants en situation... qui ont un permis
temporaire que dans le passé.
Mme David :
Avez-vous des chiffres? Est-ce qu'on sait un peu de quel ordre... parce qu'on
ne parle pas d'étudiants, mais on parle d'enfants de parents qui ont le statut
de ressortissants étrangers.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Le nombre d'inscriptions est plus important
aujourd'hui que dans les années 90, que dans les années 80.
Mme David :
Ça, j'imagine qu'ils ont ça quelque part, le nombre d'étudiants qui sont...
avec statut... le nombre d'enfants, là, parce que, primaire, secondaire, on
n'appelle pas ça des... bien, primaire, non, des élèves...
M.
Jolin-Barrette : Entre 2003‑2004, on est passés de
1 296 personnes à, 2018‑2019, 3 835.
Mme David :
Qui... Ça, c'est des enfants ou des parents?
M.
Jolin-Barrette : C'est des enfants...
Mme David :
Des enfants qui ont... qui sont de parents avec...
M.
Jolin-Barrette : ...en situation temporaire, qui se sont inscrits dans
le réseau anglophone.
Mme David : Temporaire. Puis est-ce que c'est des chiffres par unité, ça,
c'est-à-dire c'est le nombre d'enfants?
M. Jolin-Barrette :
C'est le nombre d'enfants. Donc, 1 296, 2003‑2004. 15 ans plus tard,
on est rendus à plus du double, 3 835.
Mme David : On parle quand même... Ce n'est même pas 1 % de la fréquentation
scolaire, là. On se comprend que ce
n'est pas un énorme chiffre, là. Il y en a des centaines... des centaines de
milliers, là, d'étudiants au primaire, secondaire.
M. Jolin-Barrette :
En 15 ans, on a doublé. Vous ne trouvez pas ça préoccupant?
Mme David : Oui, mais on va
passer de 1 000 à 3 000 sur 1 million je ne sais pas quoi, là.
On se comprend que c'est quand même... Comparé au nombre d'étudiants en
général, je pensais que vos chiffres seraient beaucoup plus élevés
que ça, du nombre de ressortissants étrangers qui envoient des enfants à
l'école. Moi, je m'attendais que vous disiez, je ne sais pas, moi, 20 000,
25 000, là, tu sais, ça explose, le nombre de ressortissants étrangers. Il
n'y a pas tant de ressortissants étrangers que ça, donc, qui viennent avec des
enfants...
M. Jolin-Barrette : Bien, il
n'y en a pas tant.
Mme David : ...statut, je
parle, temporaire, là.
M. Jolin-Barrette : Il n'y en a pas tant, nécessairement, qui
viennent avec des enfants, parce que... Si, supposons, dans votre
exemple, là, vous êtes doctorante, tout ça, vous êtes quand même...
• (14 h 50) •
Mme David : ...encore
nécessairement.
M. Jolin-Barrette : Bien, pas
nécessairement. Puis les personnes immigrantes, la majorité, c'est des
personnes qui sont plus jeunes. C'est bien rare qu'on arrive... c'est plus
rare, pas bien rare, c'est plus rare qu'on arrive à 45 ans.
Mme David : Les chiffres que vous m'avez donnés, ça, c'est
des vrais ressortissants étrangers, des vrais enfants de ressortissants
étrangers.
M. Jolin-Barrette : En
situation temporaire.
Mme David : En situation
temporaire. Puis là, comme la loi permet qu'ils soient renouvelés indéfiniment,
vous ne savez pas vraiment depuis combien de temps ils sont là avec ce
statut-là, dans le fond. Puis ceux-là vont pouvoir demeurer parce qu'ils ont
comme, j'imagine, une sorte de droit acquis... bien non... oui, ceux qui sont
là déjà, là, comme ressortissants, le...
M. Jolin-Barrette : Là, avec le
projet de loi n° 104, là, en 2002, là, relativement, là, aux écoles
passerelles, là, quand la loi avait été adoptée avant Solski, là, il y avait
1 000 enfants par année, puis l'Assemblée nationale, à l'unanimité,
incluant votre formation politique, a voté en faveur de mettre fin à cette
brèche-là, les écoles passerelles.
Mme David : Bien, ça, c'était
autre chose, c'était : tu envoies ton enfant un an au privé-privé, là,
puis, avec ce un an-là, tu peux l'envoyer au public après.
M. Jolin-Barrette : Pas juste
l'enfant, sa fratrie, puis la descendance, puis les petits-enfants.
Mme David : Oui, oui, je sais. C'est pour ça que je vous pose
la question sur le fait... Est-ce qu'automatiquement l'enfant qui aura
passé six ans, pas neuf, 12, 15 ans, là, un renouvellement, ça donne
automatiquement à l'ensemble de la
fratrie... Admettons que, je ne sais pas quoi... parcours authentique, il n'y a
pas de trouble d'apprentissage, admettons, on va prendre le critère le plus facile, là, à ce moment-là, ce que vous
me dites, c'est qu'il est fort probable qu'il donne un droit acquis à
tout le monde de la famille, et de sa future famille, et de ses petits-enfants,
et de ses arrière-petits-enfants.
M. Jolin-Barrette : ...être
reconnu. Il y a une brèche dans la loi. On vient la colmater. Il ne faut pas
attendre d'avoir un plus gros enjeu pour
intervenir. On le sait, qu'il y a une brèche. Vous me dites : Ce n'est
pas... c'est un nombre négligeable de personnes. Moi, je trouve que
3 800, le nombre d'enfants qui sont inscrits, c'est une nette
augmentation, et, si on veut s'assurer de ne pas créer une problématique et de
colmater cette brèche-là, il faut agir maintenant.
Mme David : Là-dessus, je pense
que j'ai posé les bonnes questions pour vous amener à dire ça. C'est que je
sentais qu'il pouvait y avoir probablement une brèche dans la loi 101,
mais que personne ne m'a confirmée.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
vous l'ai confirmée.
Mme David : Au conditionnel.
M. Jolin-Barrette : Oui, il y a
une brèche. Votre question, c'est : Oui ou non sur est-ce que ça confère
des droits acquis à l'instruction en anglais? La question, c'est... la réponse,
c'est : Ça pourrait, en fonction des circonstances propres à chacun des
dossiers, en raison du test, en raison du parcours authentique, en raison des
critères que je vous ai énoncés. Ce n'est pas un carré qui est simple, oui,
non, là.
Mme David : Oui, mais, vos
1 000, 2 000, 3 000, là, vous n'avez aucune étude du ministère
de l'Éducation qui vous dit ce que sont devenus les enfants de ces enfants-là.
Ils ont-tu le droit acquis ou ils ne l'ont pas? Je ne peux pas croire que le
ministère de l'Éducation n'a pas ça.
M. Jolin-Barrette : Un enfant,
là, entre 2003 puis 2018, qui est à l'école, là, oui, mais il n'a peut-être pas
encore d'enfant.
Mme David :
Bien oui, mais quelqu'un doit bien savoir quelque part... Vous allez avoir
tellement de coches, là, droit acquis, pas acquis, pour avoir les services de
santé, les services de ci, les services de ça, là... On le sait, là, toute la
question de l'article pour les anglophones...
M. Jolin-Barrette : La demande, là,
de droit acquis, là, elle se fait à un moment dans la vie. Souvent, elle peut
être faite lorsque la personne a des enfants elle-même.
Mme David : Donc, l'enfant de son
parent qui était ressortissant étranger, il est arrivé en 2004, depuis ce
temps-là il a fait toutes ses études au primaire, secondaire en anglais, bon,
puis là il est rendu à 22 ans, ce que vous dites, c'est qu'il n'a pas encore eu
d'enfant, il n'a pas encore, donc, demandé si c'est... Alors, vous êtes en
train de me dire que, depuis 1977, on a à peu près zéro exemple de cas
d'enfants de ressortissants étrangers qui auraient eu des enfants puis on n'a
pas suivi ça. C'est évident qu'il y en a eu, des enfants, là.
M. Jolin-Barrette : Je ne dis pas
qu'il n'y en a pas eu. Je vous dis qu'il y a une nette augmentation du nombre
d'enfants en situation temporaire qui étudient dans des établissements
anglophones. Il y a une brèche dans la loi, et nous l'avons constatée, et moi,
je souhaite la colmater.
Mme David : Ça, je comprends, mais
est-ce que vous la colmatez parce que vous avez peur que ces enfants-là aient
des enfants, et donc des droits acquis, ou vous la... Puis vous ne pouvez pas
me répondre sur... Depuis 1984, disons, on ne le sait pas, combien d'enfants
ont tous fait leur parcours en anglais, ont eu leurs propres enfants. J'ai
besoin juste d'un cas, dans le fond, pour savoir est-ce qu'il a eu le droit
d'aller à l'école anglaise, cet enfant-là. Votre réponse, c'est : Oui,
peut-être, mais, non, peut-être que...
M. Jolin-Barrette : C'est :
oui, il y en a qui l'ont obtenu, mais la réponse à votre question, c'est...
Est-ce que ça donne automatiquement le droit à l'instruction en anglais pour
les descendants? La réponse, c'est peut-être.
Mme David : Je savais que le droit
était quelque chose de très... O.K., je pense que...
M. Jolin-Barrette : Non, mais...
Mme David : ...je vais laisser la
place à quelqu'un d'autre avec plaisir.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Parfait. Merci. J'ai la députée de Mercier qui m'a demandé la parole.
Mme Ghazal : J'écoutais avec
attention l'échange entre le ministre et la députée de Marguerite-Bourgeoys,
et, dans le fond, moi, je suis totalement d'accord qu'il faut que les enfants
des immigrants aillent à l'école en français si on veut qu'ils s'intègrent ici,
au Québec. C'est extrêmement important, pour les parents, pour les gens qui
viennent à l'âge adulte, de s'intégrer, d'apprendre le français, de s'intégrer
en français, de travailler en français, mais aussi pour leurs enfants. Et là ce
qui se passe en ce moment, c'est que le nombre d'immigrants temporaires a
explosé, et c'est ce qui fait que, de plus en plus, on est en train de voir et
de constater, même si, en ce moment, c'est encore peu, le nombre d'enfants de
ces immigrants temporaires aller à l'école anglophone. Et là je comprends que
le ministre veut que ça, ça s'arrête après trois ans pour colmater la brèche,
mais, quand on pose la question au ministre... Oui?
M. Jolin-Barrette : ...une
subtilité, là, dans le réseau public anglophone financé par l'État.
Mme Ghazal : Oui, parce qu'ils ont
le droit d'aller...
M. Jolin-Barrette : S'ils veulent
payer, au privé, je ne sais pas combien c'est, là, 20 000 $,
25 000 $, s'ils veulent payer 25 000 $ par année...
Mme Ghazal : Au privé subventionné?
M. Jolin-Barrette : Bien non, c'est
du privé-privé.
Mme Ghazal : Pardon?
M. Jolin-Barrette : C'est des écoles
privées non subventionnées...
Mme Ghazal : Non subventionnées,
c'est ça, c'est la fameuse...
M.
Jolin-Barrette :
...privées-privées, là, non subventionnées, ils peuvent continuer à le faire,
mais le trois ans, il est limité au public.
Mme Ghazal : O.K., là, ça pose
d'autres problèmes, mais ce n'est pas grave, je ne vais pas aller là...
M. Jolin-Barrette :
Non, mais je vous donne un exemple.
Mme Ghazal : ...parce que, si les
gens sont riches, ils peuvent contourner puis... Tiens, vu qu'on est là-dessus,
est-ce que le ministre est d'accord avec ça?
M.
Jolin-Barrette : Le choix
que nous faisons, c'est que, dans le réseau public, l'exception se limite à
trois ans.
Mme Ghazal : Mais est-ce que le
ministre est d'accord avec le fait que ceux qui peuvent payer dans les écoles
privées non subventionnées, même si leur nombre est très, très, très minime,
ces privilégiés-là puissent s'intégrer au Québec en anglais?
M.
Jolin-Barrette : Moi, ce que
je vous dis, c'est qu'actuellement ce régime-là, il est offert à tous les
Québécois. Une personne, au Québec, qui souhaite faire instruire ses enfants en
anglais peut le faire au privé-privé, mais ça va lui coûter 25 000 $
par année, par enfant.
Mme Ghazal : Dans le livre orange
qu'on a déposé, même si c'était peu, le livre orange des propositions de Québec
solidaire pour renforcer la langue française, on parlait aussi de ces écoles
privées non subventionnées. Même si c'est minime, on trouve que, juste par le
principe, ça devrait être interdit. Le ministre ne me dit pas s'il est d'accord
ou pas. Il me dit le choix que nous avons fait. Donc, peut-être que je... mais
je ne veux pas prêter d'intentions. Donc, je vais revenir à mon sujet par
rapport à l'immigration temporaire, et, à chaque fois qu'on pose la question,
le ministre me dit que c'est le fédéral qui a fait que ce nombre a augmenté.
Donc, je comprends que le ministre n'est pas d'accord avec le fait qu'on
augmente le nombre d'immigrants temporaires.
M. Jolin-Barrette : Ce que je
dis, c'est que la présence sur le sol québécois... lorsque vous êtes en
situation temporaire, de la façon dont les lois sont faites, c'est que le droit
de séjourner, il est émis par le gouvernement fédéral.
Mme Ghazal : Parce que, là,
oui, il est émis par le gouvernement fédéral, et ça a augmenté. Et, si je
regarde, par exemple, un article du 2 novembre 2021, Québec veut
stimuler l'immigration temporaire, donc, 2 novembre 2021, c'est encore
le gouvernement de la CAQ, ça ne fait pas longtemps : «Québec presse
Ottawa de faire sauter les plafonds de l'immigration temporaire.»
Donc, au lieu de dire : Bien, il y a un
problème en ce moment parce qu'on a de plus en plus d'immigrants temporaires,
donc fermons le droit d'aller à l'école publique en anglais pour ces
immigrants-là après trois ans... Au lieu de dire : Bien, arrêtons d'avoir
de l'immigration temporaire et faisons de l'immigration comme on l'a toujours
faite avant, cette volonté d'aller combler des postes de façon temporaire pour
des gens qui viennent et qui, peut-être, vont rester, peut-être que non, et là
est-ce qu'ils vont vraiment s'intégrer à la société québécoise en français...
En ce moment, ce choix-là, ce choix-là qui a
été fait par le gouvernement, peut-être pas par le ministre, mais par le
gouvernement de la CAQ, d'augmenter... de presser le fédéral d'augmenter
l'immigration temporaire, ça nuit à beaucoup de choses pour les immigrants,
pour leurs droits, mais aussi ça nuit à l'intégration en français.
• (15 heures) •
M. Jolin-Barrette : Non, la
réponse, c'est non, c'est non. Ce que l'on dit, c'est qu'il faut ajuster nos
lois à la nouvelle réalité. Il y a plus d'immigrants en situation temporaire
qui viennent au Québec parce qu'on a des besoins de main-d'oeuvre, notamment,
puis l'immigration des personnes immigrantes en situation temporaire peut être
une réponse aux besoins de main-d'oeuvre que
nous avons dans toutes les régions du Québec, et c'est une bonne chose. Il
y a des personnes immigrantes qui ont décidé de venir temporairement au Québec
parce qu'ils veulent venir vivre une expérience puis ensuite quitter. Ça va. Il
y en a d'autres qui vont décider de venir au Québec, puis ils vont décider de
vouloir rester au Québec puis de passer par la voie permanente parce qu'ils
auront été, à la lumière de l'expérience vécue au Québec, heureux, puis ils
disent : Je veux m'établir ici avec ma famille de façon permanente. Il y
en a d'autres qui viennent au Québec de façon temporaire, mais ils savent déjà
qu'ils vont venir de façon permanente puis ils passent par le système
temporaire parce que c'est par là qu'il faut passer pour pouvoir être
sélectionné par la voie permanente.
Mme Ghazal : Mais ce n'est pas
ça, le problème? C'est ça, le problème.
M. Jolin-Barrette : Bien, pas
nécessairement, parce qu'il y en a beaucoup...
Mme Ghazal : Pourquoi ne pas
s'assumer et dire : Bien, nous voulons de l'immigration, nous la voulons
ici pour longtemps, nous la voulons de façon permanente, et, dès le début, ils
savent qu'en venant ici, bien, ça va se passer en français, ils vont s'intégrer
au français, ils vont avoir un sentiment d'appartenance pas après trois ans ou
quand ils auront décidé... ou je ne sais pas trop... un sentiment
d'appartenance beaucoup plus rapidement qu'en ce moment, au lieu de dire :
Nous ne voulons pas augmenter les seuils d'immigration, mais, par la porte d'en
arrière, on va augmenter l'immigration temporaire?
M. Jolin-Barrette :
Parce qu'on permet actuellement de faire en sorte de donner l'opportunité à
quelqu'un qui ne parle pas français, mais qui veut venir au Québec... On lui
permet de venir au Québec, d'aller dans toutes les régions du Québec,
d'apprendre le français et de contribuer à la société québécoise. Ça, c'est le
fait, qu'on permet à des gens qui ne sont pas
nécessairement des francophones, qui peuvent être des francotropes, notamment,
de venir puis de s'intégrer en français au Québec.
Alors, moi, je trouve
ça positif, ça, de dire : Bien, écoutez, oui, le bassin de personnes qui
peuvent venir au Québec, il est plus grand, mais sachez que, si vous voulez venir
à titre permanent au Québec puis vous voulez passer dans le PEQ, supposons,
vous devrez avoir un niveau 7 de français. Donc, ça stimule également les
gens à faire des efforts pour apprendre le
français pour avoir la résidence permanente. Ça, c'est un élément qui est
important, également. Mais le défi que nous avons, c'est d'intégrer en
français, puis c'est pour ça notamment qu'on met ces mesures-là. Le fait
d'envoyer les enfants des personnes immigrantes en français, c'est un facteur
qui amène la substitution linguistique importante, mais...
Mme Ghazal :
Ça, je suis totalement d'accord et je suis d'accord avec ça, mais je...
M. Jolin-Barrette :
C'est ça, mais c'est pour ça qu'on le fait pour les temporaires. Mais je veux
juste vous dire... Sur la politique d'immigration, c'est un débat fort
intéressant, mais je ne suis plus ministre de l'Immigration. Donc, mon collègue
le ministre de l'Immigration, désormais, il est disponible pour en discuter
avec vous.
Mme Ghazal :
Mais ce que les collègues du ministre font et prennent comme décisions, avec
lesquelles j'imagine que le ministre responsable de la Langue française,
ministre de la Justice, est d'accord avec ça, j'imagine, parce qu'il est
solidaire de son équipe. Donc, ces décisions-là viennent augmenter les défis,
augmenter... Au moins, il pourrait être d'accord avec moi que cette politique
d'immigration vient augmenter les défis de l'intégration en français. Elle ne
vient pas la faciliter.
M.
Jolin-Barrette : Non.
Mme Ghazal :
Ça vient mettre plus d'embûches. On va avoir des projets pilotes, là, à ne plus
finir, dans certains secteurs, pour satisfaire le milieu économique, pour avoir
de la main-d'oeuvre rapidement. Et là ils viennent, ça va se passer en anglais, c'est sûr, pendant le temps qu'ils décident
qu'ils aiment le Québec, qu'ils ont envie de rester, etc. Leurs enfants
sont en anglais pendant ce temps là, les trois ans. Ça va se passer, dans le
milieu du travail, en anglais, de plus en plus, avec ce type d'immigration là,
pour leurs collègues, malgré toutes les dispositions qu'on a vues. Donc, on
vient augmenter les défis pour que l'intégration se fasse plus rapidement en
français. Donc, ce qui est fait par la main droite ou gauche, là, peu
importe... la main droite du gouvernement vient nuire à ce qui est fait par la
main gauche du gouvernement.
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, les taux des personnes qu'on a accueillies,
sous le Parti libéral, des gens qui connaissaient le français, il a diminué
autour de 52 %, 54 %. Nous, on veut augmenter le nombre de personnes
immigrantes qu'on accueille de façon permanente, avec la connaissance de la
langue française. Le marché...
Mme Ghazal :
Sauf, sauf s'ils ont des salaires de plus de 100 000 $.
M. Jolin-Barrette :
Non, vous êtes dans le cadre d'un programme pilote limité de
300 personnes. On accueille, annuellement, au Québec,
50 000 personnes.
Mme Ghazal :
Mais on ouvre la porte. C'est la volonté, c'est vers ça, c'est ça, la tendance.
Parce qu'avec le nombre... avec le chiffre...
M.
Jolin-Barrette : Non, non. Non, mais, Mme la Présidente, je vais juste
terminer mon intervention, là.
Mme Ghazal :
Oui.
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, là, l'exemple que vous me donnez, là, les
gens en technologies de l'information à hauts salaires, qu'on a de besoin
notamment, entre autres, pour développer cette partie-là de l'économie, eux,
là, ils viennent avec leurs enfants, là, en situation temporaire, là. On leur
dit, là, comme, en bon québécois : «Time out», là, vous pouvez venir
expérimenter le Québec, mais, si vous venez plus que trois ans, vos enfants
vont aller à l'école française, puis on
souhaite vous garder, parce que vous apportez une plus-value, mais sachez
que... si vous avez l'intention de rester, envoyez vos enfants à l'école
française dès le départ parce que vous n'aurez pas le choix de les envoyer en
français après trois ans de toute façon.
Quel est le meilleur
incitatif que j'ai que ce que je fais présentement, de dire : Les enfants
des personnes en situation temporaire devront aller à l'école en français? La
règle, elle, sera très, très claire, là. Puis là, je vous dis, vous venez au Québec de façon temporaire... Supposons, ça
se peut que vous ne le sachiez pas, là, dès le départ si vous voulez
rester, mais ça se peut qu'il y en a qui disent : Aïe! Moi, je veux venir
au Québec, mais la société québécoise, elle me dit : Ça va se passer en
français, dans mon milieu de travail, ça va se passer en français, je vais
avoir des cours de francisation, puis, mes enfants, en plus, la société me
dit : Après trois ans, si vous avez, au départ, décidé de les envoyer en
anglais, ils vont aller en français. J'espère que vous êtes d'accord avec ça.
Mme Ghazal :
La modification de la loi vient régler un problème que le gouvernement lui-même
crée. Ça a commencé avec le Parti libéral, d'augmenter les immigrants
temporaires, et ça continue, et encore de plus en plus. Donc, le problème, on l'augmente
puis on dit : On va venir le réparer...
M. Jolin-Barrette : Non, mais on est
sur un autre débat, on est...
Mme Ghazal : Bien, je vais finir...
Mais là je vous ai laissé...
M.
Jolin-Barrette : Mais on
n'est pas dans une loi sur l'immigration, là, on est sur la Charte de la langue
française.
Mme Ghazal : Mais c'est important,
c'est extrêmement lié. Parce que, là, on est en train de parler d'enfants
d'immigrants temporaires, ça fait que je ne peux pas ne pas parler de
l'immigration temporaire, c'est le sujet de l'article qu'on traite. Et là on
dit : Les gens, si vous restez après trois ans, etc. Des fois, les gens,
ils ne le savent pas. Pourquoi ne pas, dès le début, avoir de l'immigration
permanente, où les gens viennent... Parce que ça crée aussi plein, plein de
problèmes. Là, je comprends que c'est une autre politique, un autre sujet, mais
est-ce que le ministre est d'accord avec moi qu'il y a plus de défis...
M. Jolin-Barrette : Juste un élément
d'information pour la députée de Mercier, là. Ce n'est pas le Québec qui
détermine le nombre d'immigrants...
Mme Ghazal : Québec presse Ottawa...
M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est
pas le Québec qui détermine le nombre d'immigrants en situation temporaire au
Québec, c'est le fédéral.
Mme Ghazal : Mais, je veux dire, le
gouvernement... Donc, le gouvernement de la CAQ, et le ministre, il n'est pas
d'accord avec ça, avec le fait d'avoir autant d'immigrants temporaires. C'est
ce que je comprends?
M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ce
que je vous ai dit. Ce que je vous dis, puis écoutez-moi bien : La façon
d'intégrer toutes les personnes immigrantes, au Québec, à la société
québécoise, en français, qu'ils soient des réfugiés, qu'ils soient des
demandeurs d'asile, qu'ils soient des personnes issues du regroupement
familial, qu'ils soient des immigrants économiques, des... de façon permanente
ou des travailleurs étrangers temporaires, c'est en français dans toutes les sphères
de la société et c'est également par l'école, s'ils ont des enfants. C'était
ça, l'esprit de la loi 101. C'est pour ça que les taux de transfert
linguistique sont passés de, quoi... de 26 % à 55 %, à peu près...
53 %, de substitution linguistique. C'est pour ça qu'entre 1977 puis
aujourd'hui on a réussi à faire ça. Puis il faut se servir de ça aussi, par
rapport aux personnes en situation temporaire, pour envoyer un signal très
clair aussi. Ça fait que ça, c'est une partie des pierres que nous avons pour
construire, dans le fond, la maison québécoise, pour dire que c'est en
français. C'est une kyrielle de mesures, notamment, qui vont contribuer à ça.
Mme Ghazal : Mais on fait des
mesures... comme je le dis, d'une main, on fait des mesures pour augmenter
l'intégration en français, mais, de l'autre côté, on augmente les défis pour
que ces gens-là... on augmente les défis. Parce que, pour ces personnes-là, ça
pourrait être encore plus difficile de s'intégrer...
M. Jolin-Barrette : Bien, non.
Mme Ghazal : ...en français dans la
vraie vie, dans la vraie vie...
M. Jolin-Barrette : Bien non, mais
c'est le contraire.
Mme Ghazal : Ils arrivent, pendant
trois ans, leurs enfants sont à l'école anglaise, parce qu'ils ont prévu, par
exemple, de ne pas rester plus que trois ans, ou ne le sachant pas, ou ils
trouvent que c'est peut-être un peu plus difficile, ils ont envie... Ils ne
parlent pas le français et ils ont envie de s'impliquer dans l'éducation de
leurs enfants. Ils sont inquiets, par exemple, que, leurs enfants, ça soit plus
difficile pour eux et qu'ils ne soient pas capables de les aider si c'est en français. Donc, ils décident d'y
aller avec la facilité, en anglais, puis c'est permis pendant trois ans.
Après ça, le défi pour faire le saut, il va
être plus difficile. Peut-être qu'il va être fait, mais il va être plus
difficile. Mais on ne veut pas qu'ils s'en aillent ailleurs au Canada,
on ne veut pas, on veut les garder. Et ça, c'est avec l'immigration permanente.
M. Jolin-Barrette : Moi, je veux
vous dire, là : Les immigrants non francophones ne sont pas nécessairement
anglophones, hein, on va se le dire.
Mme Ghazal : Je sais. Moi-même, je
l'ai dit souvent, mais...
• (15 h 10) •
M. Jolin-Barrette :
Bon, bien, vous enfoncez des portes ouvertes, là. L'immigration, elle a
changé depuis 1977. La mobilité internationale, elle est beaucoup plus grande.
Nous, notre défi, là, c'est de conserver les gens ici. Puis
ce qu'on fait pour les personnes en situation temporaire... Parce qu'ils
peuvent venir beaucoup plus rapidement puis beaucoup plus facilement. Vous
l'avez vu, là, avec Ottawa, les délais qui sont imposés à l'immigration
permanente, là. Puis moi, j'ai réduit énormément les délais. Vous vous souviendrez
du projet de loi n° 9 que j'ai déposé — d'ailleurs,
je pense, votre formation politique a voté contre le projet de loi n° 9 — pour,
justement, diminuer le nombre de dossiers qu'on avait, pour faire en sorte que
ça soit arrimé avec le marché du travail, là. Puis, partout au Québec, les gens
ont besoin des personnes qui vont venir contribuer rapidement. L'immigration
temporaire permet de faire ça, venir rapidement au Québec, déjà s'implanter au
Québec, dans les différentes régions. Puis, par la suite, ça permet également
de les permanentiser. Puis, vous savez...
Mme Ghazal : Peut-être...
M. Jolin-Barrette : Non, attendez.
L'immigration permanente, aussi, où elle est pertinente... pardon,
l'immigration temporaire, où elle est pertinente, c'est que ça permet d'assurer
une régionalisation, ce que vous ne pouvez pas faire avec l'immigration
permanente. Puis, si on veut réussir...
Mme Ghazal : Pourquoi?
M.
Jolin-Barrette : Bien, parce que c'est une immigration qui fonctionne
comme ça. Bien, en fait, l'immigration temporaire permet d'avoir un lien avec
l'employeur et donc de faire en sorte que, l'employeur en région, le permis de travail est avec cet employeur-là,
notamment, puis d'inviter la personne immigrante à aller là.
L'immigration permanente ne vous permet pas de faire ça. Puis on a un défi avec
Montréal, par rapport à l'immigration. Écoutez, à Québec, ici, là :
4 % d'immigration.
Mme Ghazal : Oui,
c'est ça, on veut qu'ils aillent ailleurs...
M. Jolin-Barrette :
Ce n'est pas normal, là, la deuxième plus grande ville du Québec qui a
4 % d'immigration. Il faut agir. L'immigration temporaire contribue à
faire ça. Puis comment est-ce que les personnes immigrantes vont s'intégrer?
Amener une personne immigrante à Québec, travailler à Québec, ça va être
beaucoup plus facile de s'intégrer, parce que tout le monde, à Québec, parle
français, principalement. À l'école, ça va être en langue française également.
Alors, oui, c'est une solution aux différents enjeux que le Québec vit, le fait
d'avoir de la régionalisation de l'immigration puis de l'immigration
temporaire. Mais ce que je vous dis, c'est que je ne veux pas...
Mme Ghazal : Mais
on veut qu'ils restent en région. Par exemple, ils ont un lien d'emploi, mais
ça ne prend pas juste un emploi, dans la vie, pour s'intégrer.
M.
Jolin-Barrette : Mais non, mais...
Mme Ghazal : Ils
ont un lien d'emploi...
M.
Jolin-Barrette : Ça, on est d'accord. Mme la Présidente, juste le
dire, là, on est d'accord. L'idéal, là, c'est que vous avez...
Mme Ghazal :
...permanente.
M.
Jolin-Barrette : ...un permis de travail en région, temporaire, vous
tombez en amour avec un gars, une fille en région, vous avez des enfants, ils
s'en vont à l'école française en région. C'est la recette gagnante.
Mme Ghazal : On
va tirer des cartes du tarot pour s'assurer que ça arrive, là, je veux dire...
M. Jolin-Barrette : Bien
non, on prend les mesures pour le faire. Puis qu'est-ce que je fais dans
l'article présentement?
Mme Ghazal : ...puis
on se croise les doigts : ils vont rester, ils vont rester.
M.
Jolin-Barrette : Bien non, bien non. Savez-vous quoi? Parce qu'on
agit. J'ai agi quand...
Mme Ghazal :
C'est quoi, les chiffres depuis... C'est quoi, les chiffres de la
régionalisation de l'immigration puis que les gens restent? Bien là, c'est
parce qu'on n'a pas assez de temps, là, il n'y a pas...
M.
Jolin-Barrette : Bien, on est en pandémie, là, tu sais?
Mme Ghazal :
Oui. Mais on va le voir après. Donc là, on est sur les souhaits du...
M. Jolin-Barrette :
Bien, c'est ça. Bien, vous aurez noté que, quand j'ai ouvert les cours en situation
temporaire, là, le taux d'inscription est monté, en 2019, d'à peu près
25 % également. Ça fait que, voyez-vous, quand on prend des moyens
d'action...
Mme Ghazal :
Moi, je veux que ça reste, mais le ministre dit...
M. Jolin-Barrette :
Bien non, mais moi aussi, je suis d'accord pour que ça reste...
Mme Ghazal :
...moi, j'aimerais que ça soit...
M. Jolin-Barrette :
...mais il y a un trou dans la loi, Mme la Présidente.
Mme Ghazal :
Bien oui... Il faudrait que je dise un mot...
M. Jolin-Barrette :
Il faut combler le trou. C'est ça qu'on fait. Là, on n'est pas dans une loi sur
l'immigration, on est dans une loi sur la langue française.
Mme Ghazal :
Sur les enfants des immigrants temporaires. On est... Moi, je parle des enfants
des immigrants temporaires. C'est là-dessus qu'on est.
M. Jolin-Barrette :
Il y a un trou dans la loi par rapport aux enfants en situation temporaire.
Mme Ghazal :
Je suis d'accord à le combler, mais je ne veux pas qu'on creuse le problème
parce qu'on augmente les défis.
M. Jolin-Barrette :
Bien là, on vient colmater la brèche.
Mme Ghazal :
Moi, je suis convaincue. Le ministre, il dit : On a envie qu'ils restent,
c'est important que les gens restent de façon permanente. Donc, qu'est-ce qu'on
fait? On va ouvrir l'immigration temporaire, en souhaitant puis en se croisant
les doigts que ça devienne permanent et que ça soit en français. Le ministre peut
vivre sur des souhaits, moi, je sais... moi, ce que je sais, c'est qu'il
augmente les obstacles pour que l'intégration se fasse en français dès le
début, et non pas avec des délais de trois ans ou des...
M. Jolin-Barrette :
Ah! ça fait que votre proposition, c'est de dire : Pour toutes les
personnes en situation temporaire, leurs enfants ne peuvent pas aller à l'école
autre que l'école française. C'est ça, votre proposition?
Mme Ghazal :
Moi, ma proposition, c'est qu'il y ait moins d'immigrants temporaires et
qu'on les transforme en immigration permanente. Et ça, c'est ça que j'essaie de
faire comprendre le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Mme la Présidente, juste pour illustrer, là, même, là, si on réduisait, là, le
nombre d'immigrants en situation temporaire au Québec, là, il en restera
toujours, là. La députée de Mercier est d'accord avec moi, il va toujours y
avoir des cas où il va y voir des personnes en situation temporaire pour x, y
raisons.
Mme Ghazal :
Oui, mais il ne faut pas augmenter leur pourcentage, il ne faut pas que ça
devienne la norme.
M. Jolin-Barrette :
Oui, mais laissez-moi finir là-dessus, O.K.?
Mme Ghazal :
Mais vous parlez beaucoup, il y a... impossible de placer un mot.
M. Jolin-Barrette :
Il va toujours y en avoir. Puis le trou dans la loi va demeurer si on n'agit
pas. Ça fait que, peu importe le nombre d'immigrations en situation temporaire,
c'est pertinent, la disposition qu'on met.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci...
M. Jolin-Barrette :
Je pense qu'on peut voter.
Mme Ghazal :
Bien non, attendez...
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci. Bien, écoutez, Mme la députée, je vous
ramènerais...
Mme Ghazal :
C'est bien aussi de respecter, comme, le temps qu'il parle, le temps que moi,
je parle. Il me semble qu'il a parlé plus que moi.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Je vous ramènerais sur le projet de loi n°
96...
Mme Ghazal :
Et je suis sur le projet, là. Là, je me sens insultée, là.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Parce qu'on ne réglera pas l'immigration temporaire versus
l'immigration permanente ici, dans ce projet de loi là.
Mme Ghazal :
L'article parle des enfants d'immigrants temporaires. Je ne peux pas parler des
enfants d'immigrants permanents, je ne peux
pas parler des enfants de... Je veux dire, c'est ça, l'article, donc je n'ai
pas le choix que de parler de ces gens-là.
Moi, je suis d'accord avec l'article, je vais
voter pour, je vais voter pour. Et je veux qu'on aille plus loin. Même les
immigrants temporaires qui viennent puis qui vont dans l'école anglophone non
subventionnée, ils soient aussi obligés, pas parce que... et ne pas leur
permettre de s'acheter le droit de s'intégrer en anglais au Québec. Le
ministre, lui, il est d'accord à ce que des gens qui sont en moyens, quand ils
viennent ici, qu'ils s'achètent le droit de ne pas être intégrés en français. C'est exactement ce qu'il désire, et ça va à
l'encontre du fait qu'on veut protéger le français au Québec, et on veut
que tout le monde s'intègre en français au Québec.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Parfait. Merci. D'autres interventions? Oui, j'ai...
Mme Ghazal : ...est-ce qu'on
veut mettre fin à ça? Est-ce que... Je veux juste poser une dernière question.
M. Jolin-Barrette : ...
Mme Ghazal : Mais je veux juste
poser... Je veux vous poser une dernière question. Est-ce que le ministre est
d'accord d'augmenter l'immigration temporaire? Il est d'accord avec ça? Qu'il
me le... À chaque fois qu'on pose la question,
il dit : Le fédéral veut ça, c'est le fédéral. Est-ce qu'il est d'accord
qu'il faut augmenter l'immigration temporaire?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Mme la députée, je vous rappellerais qu'ici on n'est pas... Oui, on parle
d'immigration, mais on n'est pas dans les taux et on ne réglera pas le
problème, si vous jugez que c'en est un, là. Dans ce projet de loi là, on est
ici pour parler de la langue française, et je vous rapporterais à la langue
française.
Mme Ghazal : ...vous avez
raison, Mme la Présidente, on ne réglera pas le problème de l'intégration en
français en augmentant l'immigration temporaire.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Donc, si vous...
Mme Ghazal : ...
La
Présidente (Mme Guillemette) : S'il n'y a pas... Je céderais maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee,
qui a un amendement, je crois.
M. Birnbaum : Non.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Non?
M. Birnbaum : Si je peux, Mme
la Présidente, j'ai mes 20 minutes sur l'article.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui, allez-y, M. le député, je vous cède la parole.
M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente.
Une voix : ...
M. Birnbaum : Je vous avoue
que, si j'étais ici actuellement en séjour temporaire et j'écoutais ça, je
serais pas mal insulté par les allusions qui suggèrent... qui suggèrent que,
par définition, on est hostiles au fait français du Québec et on fait partie
d'une armée spontanée qui descend sur le Québec pour assurer qu'on puisse
s'angliciser dans ce coin d'Amérique du Nord, où ça se passe surtout en
français ainsi que dans d'autres langues. En tout cas, ça m'a dépassé. Le
ministre, qui se donne la fierté de s'imposer une rigueur, continue d'utiliser
des qualificatifs et, malgré les questionnements, ne réussissait pas trop à les
préciser : «brèche», «explosion», et tout ça.
Première question, et, pour moi, c'est ça, la
question pertinente : Est-ce que le ministre peut quantifier pour nous la
tendance, un chiffre précis, sur un nombre d'années qu'il veut, je l'invite de
choisir une cible... est-ce qu'on peut avoir quelques chiffres sur le nombre de
gens qui sont ici, qui sont arrivés ici en séjour temporaire, qui se sont mutés
en famille ou dont les enfants se sont prévalus d'un droit d'aller à l'école
anglaise en permanence? Y a-t-il quelques chiffres sur cet aspect-là qui est au
noeud de l'affaire? Y a-t-il 10, y a-t-il 1 000, y a-t-il 100, y a-t-il 10
par année, y a-t-il zéro? Combien de gens
ici, au Québec, en vertu d'un statut de séjour temporaire, se sont mutés en
gens éligibles pour l'école anglaise publique ou subventionnée?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci. M. le ministre.
• (15 h 20) •
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme
la Présidente, c'est toujours surprenant, parce que, vous savez, est-ce qu'on
reconnaît qu'il y a une brèche dans la loi? Première question. La réponse,
c'est oui. Deuxièmement, l'argument qu'on souhaite faire,
c'est de dire : Bien, écoutez, s'il n'y en a pas beaucoup, on ne devrait
pas légiférer, ce n'est pas si grave que ça.
Donc, on laisse perdurer une brèche. Que ça soit 10, que ça soit 100, que ça
soit 1 000, que ça soit 3 000, est-ce que c'est une question
de chiffre ou c'est une question de principe? Est-ce que l'on veut permettre,
au Québec, de faire d'une façon détournée ce qu'on ne peut pas faire d'une
façon directe? Alors, c'est ça, la question. Et je l'ai exposée là-dedans,
préalablement, dans la discussion qu'on a eue, à savoir que l'objectif est de
faire en sorte d'éviter de produire une situation qui n'est pas désirée. Et
c'est pour ça qu'on intervient.
M. Birnbaum : Très intéressant. Je me demande si le collègue du
ministre, le ministre des Finances, proposerait une mesure fiscale sans
être en mesure de quantifier l'étendue de sa mesure, sans être en mesure de
comprendre les gens qui sont ciblés, sans être en mesure de quantifier
l'ampleur de son geste. Donc, très intéressant.
Mais est-ce que je peux, Mme la Présidente,
répéter ma question jusqu'à tant que j'aie une réponse? Combien de gens ici, en
vertu d'un séjour temporaire, ont eu à avoir déjà muté en ayants droit pour
l'école anglaise au Québec? C'est ça, l'enjeu. «How many?»
La Présidente (Mme Guillemette) :
M. le ministre a répondu à la question, mais...
M. Jolin-Barrette : Oui. Le
député de D'Arcy-McGee nous dit : Combien? C'est quoi, le chiffre, pour
lui, qui est satisfaisant pour légiférer? Est-ce que c'est 100? Est-ce que
c'est 500? Est-ce que c'est 1 000? Est-ce que c'est 1 500? Est-ce que
lui, il accepte d'avoir un trou dans la loi? Je lui retourne la question :
Quel est le chiffre qui est pertinent, pour lui, pour agir, sachant ce que je
lui ai exposé avec le raisonnement? Actuellement, il y a un trou, dans la loi,
qui fait en sorte que certaines personnes pourraient bénéficier de l'exception
de droits acquis. Est-il à l'aise avec ça? Ou est-il plutôt d'accord avec le
principe qu'on doit accueillir en français et que les enfants d'immigrants
doivent aller à l'école française?
M. Birnbaum : Il faut que je
m'informe sur comment on dit en français «red herring», parce qu'il y en a un
de 500 kilogrammes dans la salle. On ne parle pas de l'intégration des
immigrants en langue française, ce qui est la pierre angulaire de la Charte de
la langue française. Quelqu'un peut m'aider? «Red herring» veut dire un sujet
qui n'a aucunement, aucunement pertinence
dans la discussion. Voilà un «red herring», j'ai fait ma petite pédagogie pour ma
journée.
Nous ne sommes pas, aucunement, aucunement, je
m'adresse à tous les députés, à, comme je dis, la pierre angulaire de notre
Charte de la langue française, c'est-à-dire que les immigrants se dirigent à
l'école française. Là, ce que j'essaie d'établir, ce n'est pas un petit point,
là. En soi, et on va... j'aurai des questions là-dessus aussi, en soi, le
nombre de gens qui ont un statut de séjour temporaire, en soi, j'ose croire,
même dans la perspective du ministre, n'est pas, en soi, un problème. Est-ce
que je peux connaître s'il y a un phénomène de quantifiable, de démontrable de
gens ici, au Québec, en séjour temporaire, qui se dirigent en permanence... qui
obtiennent le droit de poursuivre leur vie au Québec et, automatiquement,
d'aller à l'école anglaise, de transférer ce droit à leurs enfants? Y a-t-il un
chiffre sur le nombre de personnes qui auraient fait ça, ce geste-là, depuis
1977? Bon, est-ce qu'on peut avoir un chiffre sur l'année passée? Est-ce qu'on
peut comprendre le phénomène qu'on essaie de corriger ici, en ayant quelques
chiffres sur l'étendue de la problématique identifiée par le ministre?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, il y a des cas qui existent, au Québec, O.K., je l'affirme, il y a
des situations qui existent, où est-ce que les permis sont renouvelés
indéfiniment, et qui créent des droits acquis. Est-ce que le député de
D'Arcy-McGee est à l'aise avec ça, avec le fait que des personnes immigrantes
envoient leurs enfants à l'école anglaise et qu'ils bénéficient de droits
acquis pour envoyer leurs enfants à eux à l'école anglaise, leurs
petits-enfants, leurs petits petits-enfants? Est-ce qu'il est d'accord avec ça?
M. Birnbaum : Bon, Mme la Présidente,
vous risquez de dire que je répète la même question, alors on va comprendre
qu'il n'y a pas de réponse, il n'y a pas de chiffre sur la pierre angulaire
d'une politique qui est proposée. On n'est pas en mesure de dire à quel
problème on attaque. Alors donc, une autre question...
M. Jolin-Barrette : Non, non, je
veux juste répondre.
M. Birnbaum : Mme la Présidente,
pour être clair...
M. Jolin-Barrette : C'était une
question, c'était une question, je veux répondre. Je veux répondre...
La Présidente (Mme Guillemette) :
...temps pour répondre.
M. Birnbaum : Le micro est à moi, et
je n'ai pas la moindre obligation ni l'inclination de répondre aux
questionnements du ministre. S'il veut retourner à l'opposition officielle, il
va avoir l'opportunité.
Bon, je poursuis mes questions, sur une autre
pierre angulaire de l'affaire. Est-ce que le ministre, pour les gens qui nous
écoutent, peut nous éclairer sur les critères qui doivent être joints afin de
se procurer le séjour temporaire? Je ne sais pas si on a l'impression que voilà
un cheval de Troie qui se stationne dans chaque pays du monde, là, et les immigrants, qui n'ont qu'un but, d'aller à l'école anglaise
au Québec, se mettent en ligne pour échapper le processus d'immigration, oui,
partagé comme juridiction. Est-ce que c'est ça qui se passe? Ou est-ce qu'on
peut comprendre comment on se procure un séjour temporaire et si, comme je
soupçonne très fort, il y a des critères pas si faciles que ça à joindre?
Est-ce que le ministre peut nous éclairer là-dessus?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre, je vous cède la parole...
M. Birnbaum : Comment on se procure
un séjour temporaire?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le député, c'est M. le ministre qui a la parole présentement.
M. Jolin-Barrette : Bien, il y a
plusieurs façons parce qu'il y a plusieurs programmes, il y a plusieurs
programmes fédéraux. Vous avez, supposons, les emplois à bas salaires, qui
viennent d'être augmentés. Auparavant, c'était 20 % dans l'entreprise.
Maintenant, c'est plus que ça. Donc, vous avez les PTET, vous avez le PMI, puis
vous en avez un autre, le...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, ça, c'est
permanent. Vous avez le PTET, le PMI, puis vous en avez un autre...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui, ça, c'est
le PMI, Programme de mobilité internationale, puis l'autre, là, le... En tout cas, vous en avez un autre. Alors, il y en a que
c'est en fonction des métiers, il y en a qui doivent être sur la liste, il y
en a d'autres que c'est certaines formations, c'est exonéré, puis il n'y a pas
de besoin de prépublication de la part de l'offre d'emploi, d'employeurs
également. Donc, généralement, les emplois à bas salaire, il faut faire une
démonstration qu'il y a eu une étude qui a été faite pour retrouver un
travailleur. Vous conviendrez avec moi qu'actuellement, avec le manque de
travailleurs, ils peuvent être exonérés. Puis, pour les emplois à plus haute
valeur ajoutée, si je peux dire, le... Bon, Programme de mobilité
internationale plus, permis de travail ouvert transitoire, permis de travail
étranger temporaire, Programme de séjour temporaire, également. Donc, il y en a
plusieurs.
M. Birnbaum : Est-ce que le ministre
va, avec moi, convenir qu'il y a des critères à combler qui démontrent de façon
assez rigoureuse que notre séjour est temporaire, y compris des attestations
d'exigées par un futur employeur?
M. Jolin-Barrette : Non. Ce que je
conviens, c'est que 90 % de la sélection d'immigration permanente au
Québec provient de personnes qui sont en situation temporaire au Québec.
• (15 h 30) •
M. Birnbaum : Oui. Bon, bien, voilà
une autre réponse à une question que je n'ai pas posée. Je veux savoir — c'est
ma compréhension de l'affaire — que c'est un processus rigoureux, et pas
ce que tendent de suggérer le ministre ainsi que la députée de Mercier, qu'on a
une espèce d'échappatoire. Je veux établir s'il y a des critères, en quelque part, exigeants qui doivent être comblés
avant qu'on peut être éligible pour un séjour temporaire ici, au Québec.
Et, comme je dis, un des critères dont je suis
très familier, c'est que l'employeur prospectif, qui est souvent des
Bombardier, des universités, McGill, des instances à la fine pointe des coins
névralgiques de notre expertise au Québec, qui n'écrivent pas... qui
n'écriraient pas des lettres sur le coin d'une table, là... qu'un séjour
temporaire exige ce genre d'affirmation de l'employeur prospectif que, oui,
c'est un séjour temporaire.
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre, avez-vous une réponse?
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est un
permis temporaire, mais, à partir du moment où la personne est là, elle peut
soumettre sa candidature dans les autres programmes permanents. C'est parce
qu'à un moment donné je demande un permis temporaire, je viens temporairement
au Québec. D'accord. Ensuite, vous êtes admissible à soumettre votre
candidature dans un programme permanent. C'est comme un drôle de débat.
M. Birnbaum : ...on est dans les
réponses conditionnelles que ma collègue a suscitées. Deuxièmement, on est dans
un principe légal beaucoup plus large, je me permets, qui est la présomption
d'innocence, là. Alors, de décider que, dès le début, chacun de ces postulants
a un agenda caché, je trouve surprenant.
Mais, à ma question, à ma question, et là on
peut aller sur les éventualités où les réponses, jusqu'à date, n'étaient pas si
satisfaisantes que ça, je veux établir si c'est, en quelque part, assez
difficile de se procurer un séjour temporaire, au Québec, et que, même si les
chiffres augmentent, en quelque part, c'est à titre exceptionnel. Ce n'est pas
n'importe quel immigrant qui souhaite venir au Québec qui va se procurer un
séjour temporaire. Premièrement, ça ne serait souvent pas ses souhaits, il veut
venir ici en permanence. Mais est-ce qu'on peut comprendre qu'il y a des
exigences assez rigoureuses, quand même, avant qu'on puisse se procurer un
séjour temporaire?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, je ne sais pas c'est quoi, rigoureux, mais la
réponse, c'est non. C'est assez simple, pour une entreprise qui souhaite
acquérir un... qui souhaite accueillir un travailleur à l'intérieur de son
entreprise... Écoutez, on se retrouve, là,
23 300 dans le Programme des travailleurs étrangers temporaires,
39 715 dans le Programme de
mobilité internationale, 56 000 dans la catégorie étudiants
internationaux. Donc, 15 000 dans le PTET, au 31 décembre, là, physiquement sur le territoire, 15 000
dans le PTET, 56 000 dans le PMI, 87 000 dans la catégorie étudiants
étrangers. Là, on est... ça veut dire 56 000, 61 000, 71 000,
75 000, à peu près 75 000 travailleurs, 87 000,
150 000 personnes, au Québec, qui sont en situation temporaire. C'est
quand même beaucoup, on s'entend? Alors, le rigorisme des critères, il y a des
critères à respecter, puis, si c'était si dur que ça, je ne pense pas qu'on
accueillerait 150 000 personnes par année au Québec en situation
temporaire.
Alors, ce qui est bien important de comprendre,
c'est que vous avez des gens qui viennent au Québec à titre temporaire. Puis
l'autre élément qui est important, Mme la Présidente, quand le député de D'Arcy-McGee
dit : Ils n'ont pas un plan à venir de façon permanente, nous, on veut les
accueillir de façon permanente...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Non, mais
attendez, attendez, on veut qu'ils s'intègrent en français au Québec, alors
c'est pour ça qu'il y a une flexibilité. Ils viennent rapidement au Québec, ils
s'intègrent dans toutes les régions du Québec. Ils apprennent le français, Mme
la Présidente, puis ils sont sélectionnés par le Québec parce que, notamment,
ils parlent français, et ils sont bien intégrés.
Et là vous n'avez pas besoin, quand vous faites
votre demande permanente, contrairement peut-être à ce que le député de D'Arcy-McGee
pense, de retourner dans votre pays d'origine. Vous pouvez obtenir votre
résidence permanente en demeurant ici et en ayant votre renouvellement de
permis temporaire. Parce que ça arrive fréquemment, Mme la Présidente, que les
gens ont un renouvellement de permis temporaire puis finalement décident de
faire leurs demandes, que ce soit la deuxième année de leur premier permis,
pour dire : Ah! finalement, moi, j'aime ça, le Québec, je veux demeurer immigrant
permanent, mais, par contre, que ça prenne un deuxième permis temporaire parce
que les délais à Ottawa sont trop longs. Dès le départ, la personne peut avoir
l'intérêt de demeurer de façon permanente au Québec, mais elle vient sur le
permis de travail temporaire au départ. Auparavant, Mme la Présidente, c'est
vrai que ça arrivait que, parfois, la demande d'immigration permanente, il
fallait qu'elle se fasse du pays de l'origine, et la personne immigrante
devait, qui est en situation temporaire, quitter le Canada et faire la demande
d'un autre pays tiers et ensuite revenir. Ça, ça se faisait. Mais là on n'est
plus là aujourd'hui.
La Présidente (Mme Guillemette) : Merci,
M. le ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.
M. Birnbaum : Merci, Mme la
Présidente. Le ministre l'a bien dit en réponse à ma collègue députée de
Mercier, qu'il n'est pas contre les séjours temporaires. Il y a le Conseil du
patronat, d'autres qui ont parlé de l'importance de ces séjours-là afin que le
Québec peut bénéficier de l'expertise, souvent, comme je dis, des professeurs,
des experts dans une industrie névralgique ou une autre, qui ont souvent
l'option d'aller ailleurs, s'ils sont pour quitter leur pays pour
trois ans ou six ans. Ils peuvent aller ailleurs. Ils choisissent de
venir nous accompagner ici, au Québec, avec leur grande expertise.
Alors, moi,
je prends pour acquis que, quand on parle d'une explosion ou une brèche, et
tout ça, c'est... il n'y a, jusqu'à date, aucun problème de démontrable
dans ces chiffres en soi. La question qui se pose : Y a-t-il des légions,
des nombres très importants qui décident... et on le souhaite, le ministre l'a
dit lui-même, et moi aussi, qui décident de poursuivre la possibilité de
devenir citoyennes, citoyens du Canada ici, au Québec. On souhaite ça, mais
j'essaie de comprendre l'étendue de la problématique. Combien de ces gens... on
sait déjà que c'est juste une chose facultative qu'ils peuvent peut-être, dans
certaines circonstances, se rendre éligibles pour l'école anglaise après. On va
mettre ça à côté. Mais combien...
Deux choses. Dans un premier temps, combien de
ces gens avec ce statut là, cinq ans plus tard, deviennent citoyennes et
citoyens? Deuxième chiffre à chercher : Combien exploitent cette nouvelle
statut pour rendre leurs enfants ou leurs petits-enfants éligibles à l'école
anglaise? Troisième question qui devrait être très pertinente pour le ministre,
et c'est là où je m'en fais pour les personnes dont on parle, parce que je
trouve qu'on sous-estime leur attachement croissant au Québec une fois
arrivées : Combien de ces gens auraient cherché un statut permanent et,
suite à ça, la citoyenneté, et, je
soupçonne, c'est un grand numéro... non, chiffre, auraient après choisi
d'envoyer leurs enfants, leurs petits-enfants aux écoles françaises ici,
au Québec? Y a-t-il quelques chiffres pour nous aider à évaluer comme il faut
l'article devant nous?
La Présidente (Mme Guillemette) :
J'ai la députée de Mercier qui aurait une petite intervention.
Mme Ghazal : Très rapidement, tout à
l'heure, en répondant, le ministre, en répondant aux questions du... Là, je ne
sais pas si mon micro est ouvert, là. Tout à l'heure en répondant aux questions
du ministre de D'Arcy-McGee le ministre a nommé... a donné des chiffres sur
différentes catégories, là, d'immigrants temporaires. Est-ce que c'est possible
de le déposer?
M. Jolin-Barrette : Déposer quoi?
• (15 h 40) •
Mme Ghazal :
Déposer les chiffres que le ministre a listés tout à l'heure sur les types
d'immigrants. Je sais qu'il les a dits, mais si c'est possible de le déposer,
de déposer...
M. Jolin-Barrette : Oui, ils sont
disponibles sur le site Web du ministère de l'Immigration, je crois. Alors, on
va vous...
La Présidente (Mme Guillemette) :
Elles sont déjà publiques, donc on peut...
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, Fiche
synthèse sur l'immigration au Québec, elles sont sur le site Web du MIFI,
mais on va vous les déposer, là.
Mme Ghazal : Merci.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Parfait. Merci. Merci, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Alors, on
revient à la question du député de D'Arcy-McGee. Le député de D'Arcy-McGee fait
un argument de chiffres. Donc, je comprends que, pour lui, si c'est en bas d'un
certain nombre, il ne voudrait pas légiférer sur la disposition. Convient-il
avec moi qu'il y a une brèche dans la loi? Est-ce que c'est... parce qu'il y a
500 personnes qui bénéficient de l'exception, ça ne justifie pas
d'intervenir? Est-ce que son chiffre est à 1 000? Est-ce que son chiffre
est à 100? Il y a un trou dans la loi, veut-il combler le trou dans la loi?
C'est ça, le coeur de l'article.
M. Birnbaum : Est-ce que le ministre
peut m'éclairer sur une autre question. De ma lecture, il y a certaines
situations, dans la Charte de la langue française, telle qu'elle est
aujourd'hui, où la personne désignée ou le ministre de l'Éducation peut, pour des raisons humanitaires, suite à un appel au
tribunal qui ne serait pas réussi, accorder un accès exceptionnel à l'école anglaise pour des raisons
humanitaires. Je crois bien que c'est le cas actuellement. Est-ce que,
dans ces cas-là, le droit acquis n'est pas accordé, c'est-à-dire que c'est une
exemption pour raisons humanitaires qui est uniquement,
uniquement pour l'enfant en question et ne serait aucunement transférable aux
petits enfants, aux frères et soeurs?
La Présidente (Mme Guillemette) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, le ministre
de l'Éducation dispose de cette faculté, pour des raisons humanitaires, de
faire en sorte qu'un enfant peut être instruit en anglais. Alors, c'est
l'article 85.1 de la charte : «Lorsqu'une situation grave d'ordre
familial ou humanitaire le justifie, le ministre de l'Éducation, du Loisir et
du Sport peut, sur demande motivée et sur recommandation du comité d'examen,
déclarer admissible à l'enseignement en anglais un enfant dont l'admissibilité
a été refusée par une personne désignée par le ministre.
«La demande doit être produite dans les
30 jours de la notification de la décision défavorable.
«Elle est soumise à l'examen d'un comité formé
de trois membres», ta, ta, ta.
M. Birnbaum : Donc, le ministre confirme
que le législateur aurait d'autres outils devant lui pour adresser la situation
devant nous actuellement. Le ministre me demande combien il y a... me demande
quelques chiffres. Je me permets d'aller dans une autre direction qui est assez
fondamentale aussi. Bon, si on veut parler de quelques chiffres... et, comme je
dis une autre fois, on n'a pas été en mesure de dire combien de ces gens
risquent de devenir citoyens ou... citoyennes, citoyens et/ou combien de ce
nombre de gens risquent de se prévaloir de cette possibilité assez nébuleuse
d'avoir un droit acquis. On ignore tout ça.
On va parler pour une seconde des chiffres, et
je me permets de dire que je suis placé pour en parler, j'ai été directeur
général de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec pour
10 ans et, antérieurement à ça, j'ai travaillé pour des commissions
scolaires dans les années 80. Juste quelques chiffres, pour une seconde,
et je vais revenir à ma question. En 1971, il y avait un quart de million
d'élèves aux écoles primaires et secondaires de langue anglaise au Québec. En
2021, il y a à peu près 85 000 élèves. Je précise qu'une forte, forte
proportion de ces 85 000 font le choix, leurs parents se mettent en ligne,
des fois toute la nuit, pour exercer ce choix de se prévaloir des programmes
d'immersion française. Alors, ils ne sont pas en train de saluer la reine
chaque jour, à 16 heures, ils sont en train de se franciser. Mais je me
permets de... Et j'ose espérer que j'identifie a une problématique qui est préoccupante
pour le plus grand nationalisme au Québec, comme c'est préoccupant pour moi,
parce qu'on parle d'un réseau financé par l'État, qui nous appartient tous,
dont sont des élèves qui contribuent au Québec, dont il y a plusieurs qui font
des familles où ça se passe surtout en français après, qui tiennent à leur
place ici.
On veut parler des
chiffres. Voilà quelques chiffres : 85 000 là où il y avait un quart
de million il y a une génération et demie. Parmi ces chiffres, c'est les
chiffres du ministre probablement aussi, il y a actuellement peut-être quelque
3 000 qui sont là en vertu de leur statut temporaire. Là, on parle de
3 000 des 85 000 élèves dans ces écoles publiques de langue
anglaise. Est-ce qu'on peut juste situer ça en se rappelant qu'il y a quelque
963 000 élèves dans les écoles françaises publiques du Québec? Donc,
est-ce qu'on peut comprendre... Si le ministre veut parler des chiffres... Et,
oui, on ne s'en fait pas, il y aurait le principe derrière ces chiffres après.
Est-ce qu'on peut comprendre qu'on parle donc de 0,33 % des élèves qui
sont à l'école anglaise actuellement en vertu d'un séjour temporaire, dont le
ministre, comme moi, ignore si 100 % de ces élèves vont se retrouver en
Turquie, en Grande-Bretagne, en Australie après leur séjour temporaire, après
que leurs parents auraient contribué au Québec? On ignore si 50 % de ce
petit pourcentage, qui décideraient de franchir toutes
les étapes pour devenir citoyennes ou citoyens, vont continuer à poursuivre
leurs études en français parce que leurs parents auraient appris qu'ils adorent
notre Québec et ils veulent pleinement participer. Donc, de mon 0,33 %, y
a-t-il 0,03 % qui vont, «oh my God!», après les étapes à franchir, en
respectant l'arrêt Solski... qui risquent de se trouver dans une école anglaise
en quelque permanence
Et c'est là où je me
permets de parler d'un principe, et... You'll allow me, Mme la
Présidente, to ask it in both languages because it's fundamental, it's
fundamental. Can we understand... for those who are listening to us, can we
understand where and when and if there are certain moments, certain moments,
when our absolutely essential and legitimate efforts to promote, protect and
insure the growth of our French common language will be modestly, modestly
limited by our common efforts supported by Quebeckers of good faith, of any
language, including our common language, will be balanced against the essential
idea, that I'm convinced a vast, vast majority of Quebeckers share... to insure a safe, secure and promising
future for English-speaking Quebeckers who want to stay here and live
here.
Je
me permets de poser la question, si je peux, en français aussi. Et voilà le
principe derrière les chiffres, que je viens d'illustrer. Y a-t-il, dans
l'esprit du ministre, tout en respectant sa détermination, que je salue, sa
détermination, la détermination de son
gouvernement, de bonifier la charte actuelle afin d'assurer la pérennité, la
force, le rayonnement de notre langue commune, le français, y a-t-il, en
même temps, des gestes ici, et on voit là une possibilité, des gestes
nécessairement modestes et circonscrits... y a-t-il de la place pour de tels
gestes que... oui, je veux être conséquent, oui,
les conséquences d'un tel geste, dans ce... — à ce moment-ci, on va parler d'un amendement — un
geste qui, oui, de façon très
modeste, va exiger un compromis très modeste sur nos efforts de protéger et
faire rayonner la langue française?
Petite précision à ma
question aussi, est-ce qu'on peut se comprendre que le genre de geste dont je
parle risque d'avoir un impact qui n'est pas modeste, qui n'est pas modeste sur
la communauté d'expression anglaise? J'en ai vu des quarantaines, d'écoles
anglaises publiques, qui ont dû fermer leurs portes au fil des derniers
30 ans. Si on parle de ce 0,33 %
dont peut-être 0,03 % vont se prévaloir d'un droit d'accès à l'école
anglaise, je risque de parler de la survie d'une école de plus et une modeste contribution à la pérennité de notre réseau
d'écoles anglaises au Québec. Et j'insiste qu'en posant la question... je me sens appuyé par la vaste majorité des
Québécois de langue française quand je pose la question.
• (15 h 50) •
La Présidente (Mme
Guillemette) : Merci. M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, c'est intéressant, ce qui dit le
député de D'Arcy-McGee, parce que le projet de loi n° 96, là, c'est pour
faire en sorte d'envoyer un signal très clair que le français, c'est la langue
d'intégration. Et je vais retourner aux sources de la loi 101 de 1977.
Quel était l'objectif de la loi 101, notamment? Faire du français la
langue commune. Faire en sorte également que les enfants des personnes
immigrantes étudient en français, soient scolarisés en français. On comprend
que le Parti libéral, en 1977, il a voté contre la loi 101. Maintenant, on dit, au Parti libéral : Ah, on est
d'accord avec la loi 101. Mais c'est toujours un peu comme ça, le Parti
libéral, Mme la Présidente, quand vient le temps, là, de vraiment faire
des gestes pour la défense du français, c'est un petit peu difficile. Alors, il faut saisir toutes les occasions
d'envoyer le signal : langue du commerce, langue du travail, langue de
l'État. Chaque mesure a un impact sur la vitalité et la protection de la
langue française. Et il ne faut surtout pas mélanger les choses.
Et je comprends la
position du député de D'Arcy-McGee, il fait son travail. Mais par contre c'est
important de renseigner adéquatement les
gens. Quand je vois que... la semaine passée, Mme la Présidente, le député de D'Arcy-McGee, là, il a tweeté, là : «Our Official Opposition secured a significant amendment to Bill 96
in commission today, changing a CAQ-proposed article that would have threatened
access to designated Government services in English. The difficult but
necessary work continues.» That tweet is false, is false.
M.
Birnbaum : ...
M.
Jolin-Barrette : And I see it. You know what?
And you know why? Because that's not true what was said on that tweet. So, I
understand that...
M. Birnbaum :
Mme la Présidente, excuse, question direction. On n'est pas devant les mêmes
règles parlementaires qui s'imposent dans le salon bleu? Le ministre me...
Une voix :
...
M. Birnbaum :
Est-ce que je peux finir, s'il vous plaît, M. le député de Chauveau?
La Présidente
(Mme Guillemette) : Allez-y, M. le député.
M. Birnbaum :
Je pose une question en bonne foi. Peut-être que les règles sont différentes
devant les commissions parlementaires. Le ministre vient de dire que ce que je
dis est faux, ce qu'il n'a pas le droit de dire devant le salon bleu, alors je
pose la question : Est-ce qu'il a le droit d'utiliser un tel libellé ici,
en commission?
La Présidente
(Mme Guillemette) : Oui, M. le député de Chapleau.
M. Lévesque
(Chapleau) : Oui, Mme la Présidente. Le ministre tente justement de
rectifier le tir, rectifier les propos qui ont été écrits, je pense que,
lorsqu'on s'exprime publiquement, il faut que ce soient des propos qui soient
justes et avérés. Donc, voilà.
La Présidente
(Mme Guillemette) : Merci, M. le député. Merci, tout le monde.
Tout le monde est de bonne foi ici. Je sais qu'on est jeudi, sur la fin de la
journée. Je vous demanderais de faire attention à vos propos et de garder sur
un ton respectueux, comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme
la Présidente, ce que je disais, c'est que les interventions du député de D'Arcy-McGee...
Et je comprends leurs objectifs très clairement, là, je comprends très
clairement ses objectifs. Mais il y a une finalité qui doit se poser. Est-ce
que c'est important ou non, la protection de la langue française? Et, sur
plusieurs interventions, le député de D'Arcy-McGee, dans le fond, il m'apparaît
très clairement qu'il est en opposition avec ce qui est proposé par le gouvernement
pour faire en sorte de mieux protéger la langue française.
Et je le redis, Mme la Présidente, rien, dans le
projet de loi, n'affecte les droits des membres de la communauté d'expression
anglaise. Je l'ai dit, je l'ai redit et je vais toujours le redire.
Alors, moi, je trouve ça, Mme la Présidente, un
petit peu insultant, à toutes les fois où on essaie de protéger la langue
française, de mettre en place des mesures qui sont raisonnables et
raisonnées... Et le député de D'Arcy-McGee le sait très bien. Pourquoi est-ce
qu'on inclut l'article 56? Parce qu'il y a un trou dans la loi.
There's a breach in the law.
You don't want to fix it? You want to let it happen. Let's go, there's a hole. Let's
go, don't fill the hole.
C'est ça, on constate un problème puis on n'agit
pas. Pourquoi le Parti libéral a un problème avec ça? Il y a une situation qui
est avérée, puis on trouve toutes les raisons pour ne pas donner son appui à
ça. Je trouve ça un petit peu malheureux, Mme la Présidente, de toujours fonctionner
de cette façon-là.
Puis, vous savez, ça me renvoie, Mme la
Présidente, à depuis 2003. Si on est dans la situation avec le déclin
linguistique que nous connaissons, bien, c'est parce qu'il n'y a pas eu les
actions nécessaires pour protéger le français et le faire, et ce, en tout
respect des membres de la communauté anglophone. Et je l'ai dit, moi, mon
objectif avec le projet de loi n° 96, ce n'est pas d'opposer la communauté
d'expression anglaise au Québec à la protection du français. La démonstration,
c'est qu'il n'y a rien qui affecte les droits de la communauté anglophone au
Québec, et même on rajoute des droits pour le niveau collégial, Mme la
Présidente, en donnant la priorité.
Et je vous annonce même que j'aurai un
amendement pour encore plus clarifier ça, Mme la Présidente, parce que, dans le
projet de loi, il était écrit «cégeps anglophones vont favoriser», je dois le
changer pour «prioriser» pour que ça soit encore plus clair, le droit aux
membres de la communauté d'expression anglaise. Alors, on ne me taxera pas
d'affecter les droits de la communauté anglaise. Ce qu'on fait, par exemple,
c'est qu'on s'assure de la pérennité du français. Puis j'aimerais ça que le
député de D'Arcy-McGee dépense la même énergie à la protection du français.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui, M. le député.
M. Birnbaum : Mme la
Présidente, juste une petite précision. Le ministre parle des trous. J'ai
amorcé mes questionnements en essayant d'établir comment quantifier, qualifier
ce trou. Est-ce qu'on parle d'un nid de poule ou est-ce qu'on parle du genre de trou qui va être creusé pour le tunnel du
Québec? On ignore. Et le ministre, après trois reprises, n'a pas répondu
à cette question-là. Bon.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, M. le député. D'autres interventions? Oui, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys. Vous avez un amendement, je crois, à nous présenter, qui
est déjà déposé sur le Greffier.
Mme David : C'est en plein ça,
Mme la Présidente. On n'arrête pas de travailler même à 4 heures.
La Présidente (Mme Guillemette) :
...la parole.
Mme David : Alors, s'il est sur
Greffier, les gens peuvent en prendre connaissance. Alors, je le lis, c'est ça
que je comprends, hein?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui.
Mme David : Alors,
article 56 : L'article 84.1 de la Charte de la langue française
introduit par l'article 56 du projet de loi est modifié par :
1° le
remplacement, à son deuxième alinéa, des mots «ne peut être renouvelée» par les
mots «peut être renouvelée une seule fois»;
2° l'insertion, à la fin de l'article, de
l'alinéa suivant : «L'exemption prévue au présent article ne s'applique
pas au parcours authentique.»
Commentaire. L'article 84.1 de la Charte de
la langue française, introduit par l'article 56 du projet de loi tel
qu'amendé, se lirait ainsi :
«L'exemption est valide pour une période qui ne
peut excéder trois ans et peut être renouvelée une seule fois. Néanmoins, elle
est prolongée [jusqu'au] 30 juin de l'année scolaire au cours de laquelle
se termine la période de validité si cette période prend fin avant cette date.
«L'exemption prévue au présent article ne
s'applique pas au parcours authentique.»
Alors, Mme la Présidente, je suis une femme qui
essaie toujours de trouver la bonne voie de passage. J'avais un papa qui
n'aimait pas du tout la chicane, comme on disait, alors il essayait toujours
d'être conciliant. Je pense qu'il m'a donné ça un peu. Et
cet amendement-là a pour but de colmater ce fameux trou identifié dans la loi. Parce
que vous avez dû remarquer que, dès le début, j'ai essayé de comprendre si ça
menait au parcours authentique. La réponse, c'est : oui, ça se peut. Ça se
peut, pas nécessairement à 100 %, mais ça se peut. À partir du moment où
on se dit ça et qu'on se dit... Parce que là le ministre a parlé de
renouvellement illimité tout à l'heure. Moi, moi, ce n'est pas de ça dont je
parle, je parle d'un seul renouvellement. On est dans une situation où, oui, ça
coupe la poire en deux, disons.
• (16 heures) •
Au lieu d'être trois ans, ça pourrait aller
jusqu'à six ans, dans des situations, justement, où, l'exemple de l'étudiant,
papa ou maman au doctorat, ça dure cinq ans. Alors, au bout de trois ans, c'est
clair qu'ils veulent retourner dans leur pays d'origine, qu'ils ont un poste
qui les attend, ou tout ça. Donc, oui, peut-être qu'ils aiment bien la langue
française puis ils auront décidé, de toute façon, d'envoyer à la langue
française.
Moi, ce qui m'embête, ce n'est pas
nécessairement cet enfant-là dont on sait qu'on est à peu près à 0,33 de
1 % ou... je ne sais plus, en tout cas un tout petit chiffre, mais, quand
même, je dis : Si on mettait qu'il ne faut pas que ça donne accès au
parcours authentique, que, cet enfant-là qui aurait pu étudier six ans,
bien, ça va s'arrêter à lui, la dynastie va s'arrêter à lui, il va devenir
citoyen canadien, admettons, parce que ses parents le sont devenus, bien, il
n'aura pas le droit d'envoyer ses enfants à l'école anglaise. Moi, c'est ça qui
m'embête le plus, c'est la question de la dynastie que ça peut créer, parce
que, là, sincèrement, à ce moment-là, je trouve qu'il y a probablement une
iniquité entre le ressortissant étranger qui vient pour un temps x limité et
l'immigrant de bonne foi qui vient ici et dont on dit : Tu vas aller... tes enfants vont aller à l'école
française, ce qui, depuis 1977, je pense, a été un plus dans notre société.
On a vu comment l'immigration... le
transfert linguistique s'est opéré de façon importante et pour le bien de la
langue française.
Alors, j'essaie de trouver le juste milieu qui
dit : O.K., il y a un trou, il y a une brèche, convenons-en, bien,
empêchons, empêchons ces gens-là d'avoir le droit acquis, empêchons... Alors,
comme tout peut se mettre dans une loi, moi, je suis téméraire, je me
dis : Regardez, on va proposer ça, de dire : ça ne s'applique pas au
parcours authentique, et puis il pourra, au plus des plus des plus, avoir fait
un seul renouvellement. Je pense que ça peut répondre à des tonnes et des
tonnes de ressortissants étrangers qui viennent quelque part entre trois et
six ans soit à l'École nationale de cirque, soit à travailler pour
Bombardier, soit pour une banque, soit... Il y a toute sorte de cas d'espèce,
mais peut-être que c'est un compromis qui pourrait être réaliste.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Écoutez, la
députée de Marguerite-Bourgeoys présente un amendement, mais qui pourrait avoir
des conséquences importantes, notamment le fait que ça pourrait venir créer ce
droit-là et de venir le confirmer, le fait de pouvoir instruire les enfants et
les descendants en langue anglaise. Je ne pense pas que c'est ce qui est
souhaité. La conséquence à ça, d'amener un renouvellement, ça favorise cet aspect-là.
Mme David : Ah! bien là, je ne
comprends pas. Moi, c'est le contraire que je veux avoir...
M. Jolin-Barrette : Laissons ça à
trois ans.
Mme David : ...que le parcours
authentique ne s'applique pas.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais sauf
que 23 de la charte canadienne s'applique quand même, donc ça pourrait avoir
pour effet que 23 l'emporte sur la disposition que vous proposez.
Mme David : Bien, c'est là que je
vous pose très humblement la question, parce que vous êtes entouré de juristes
de grande compétence : Est-ce qu'on peut, avec une loi que vous allez
mettre supralégislative, etc., bon, d'un niveau supérieur à... même à la loi de
santé et services sociaux ou à des lois qu'on appelle ordinaires, est-ce qu'on peut
trouver une façon ou pas de faire en sorte qu'il n'y ait pas de parcours
authentique qui suive la fréquentation pendant, disons, six ans au lieu de
trois ans?
M. Jolin-Barrette : Non. L'objectif,
les critères des arrêts Nguyen puis Solski sont là, et donc, si on accepte
votre amendement, ça pourrait avoir pour effet de légitimer... de légitimiser
une voie de contournement pour pouvoir avoir accès à l'école anglaise, pour les
générations futures.
Mme David : C'est drôle parce que...
Il faut que vous m'expliquiez mieux. Comme si, moi, mon amendement crée
exactement l'effet contraire à celui que je veux créer.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais, ce
que je veux dire, ultimement, là, quelqu'un, là, qui va passer, là, avec un
renouvellement de six ans, là...
Mme David : C'est à cause du six
ans.
M.
Jolin-Barrette : Dans le fond, trois ans plus trois ans, ça donne six
ans, ça pourrait faire en sorte qu'il se retrouve dans une situation où il a
suivi la majorité de l'éducation en langue anglaise, avec les autres critères
également. Puis, même si, dans votre article, il est écrit que ça ne peut pas
être interprété comme un parcours authentique, la Constitution
prime... bien, la Constitution, la Loi constitutionnelle de 1982 prime sur la
Charte de la langue française dans tous les cas. Alors, votre proposition fait
en sorte que ça pourrait nous amener à un débat qui aurait pour effet d'ouvrir
le cadenas que nous tentons de mettre.
Mme David : Donc,
au lieu de regarder les deux paragraphes, un et l'autre, les gens ne
regarderaient que le premier paragraphe, et, le deuxième, vous pensez qu'il
serait invalidé, qu'il ne serait pas tenable en cour, en disant : On a mis
ça dans la loi, donc ça ne mène pas au parcours authentique parce que
l'article 23 de la Constitution fait en sorte que le jeune qui a fait six
ans, c'est quand même la majorité qui prime.
M.
Jolin-Barrette : C'est un risque juridique avec lequel je ne veux pas
vivre.
Mme David : Bien oui, bien, j'ai l'impression... moi,
j'apprends qu'il y a tellement de risques, là, il y a tellement de risques
juridiques dans toutes les lois. Comme là, vous dites : C'est un risque
juridique aussi, la question des droits acquis, parce qu'on n'est pas sûrs,
puis ça dépend du parcours, il est-tu authentique, il n'est-tu pas authentique.
M. Jolin-Barrette :
Chaque cas est un cas d'espèce.
Mme David : Bien,
c'est ça, mais là ce n'est pas le cas, là, ça serait automatique que ça ne
marcherait pas, mon affaire.
M.
Jolin-Barrette : Sous réserve de contestation.
Mme David : Ça
marcherait sous réserve de contestation. Ça veut dire: quelqu'un qui aurait
fait six ans... disons, un enfant qui a fait six ans, ses parents pourraient
dire : Aïe! Attention, moi, je m'en vais en cour pour dire : Il va
avoir le droit acquis.
M. Jolin-Barrette :
C'est une des possibilités qui existent.
Mme David : Bien,
c'est drôle, dans tout ce domaine-là, on est dans tellement le mou, là, c'est
incroyable, parce qu'on a commencé l'après-midi avec peut-être que oui, il
y a un trou...
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, je vous l'ai dit, c'est : chaque
cas est un cas d'espèce et doit être analysé à la lumière des circonstances
propres à chacune des situations. Ce n'est pas comme...
Mme David : Et
celui-là, le parcours authentique pourrait dire : Bien, un est plus
authentique que l'autre. Donc, votre seule solution, pour ne pas qu'on se
chicane avec l'article 23, disons, c'est que ça soit trois ans, parce que
ça... Sauf mon hypothèse qu'on réduise le temps du cours primaire avec la
maternelle quatre ans, admettons.
M.
Jolin-Barrette : Écoutez, il est peu envisageable que l'État québécois
réduise le nombre d'années de scolarité obligatoire au Québec.
Mme David : Oui,
mais disons qu'on met cinq ans de secondaire puis cinq ans de primaire, là, on
ne sait pas.
M.
Jolin-Barrette : Il y a déjà cinq ans de secondaire.
Mme David : Bien,
on met six ans comme aux États... comme en Ontario et partout, le «high
school», bon.
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais je ne pense pas que c'est votre souhait
d'abolir les cégeps, là.
Mme David : Bien,
pas le mien, mais on ne sait jamais ce que l'avenir réserve.
M.
Jolin-Barrette : Pas le mien...
Mme David : Pas
le mien.
M.
Jolin-Barrette : Ah! pas le mien, pas votre souhait, pas votre cégep.
O.K. Je pensais que vous aviez dit pas votre cégep.
Mme David : Non,
non, ce n'est pas le mien au sens que moi, je crois très fermement au parcours
collégial, là, alors... Mais ce que vous dites, c'est : Entre tous ces
risques... Parce que, là, je comprends, là, que, cet après-midi, on est
vraiment dans du droit, là, où il y a beaucoup, beaucoup de possibilités puis
de... On n'a pas trop de chiffres, on n'a
pas trop... Ceci peut arriver, cela peut arriver. Comparativement à tous les
autres qu'on a étudiés jusqu'à maintenant... on est quand même rendus,
et je le répète, à la page 308 de votre premier cahier, c'est beau, on a
quand même fait du chemin. Mais, dans tout ça, il me
semble que ce n'était pas aussi... Peut-être que ça peut aller d'un bord, ça
peut aller de l'autre. On dirait qu'on tombe en éducation, puis là c'est
comme... Alors, moi, je propose quelque chose qui a l'air plus clair, bien
établi, mais vous me dites : Bien non, même ça, non, ça pourrait être
contesté.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Vous savez, moi, je vis avec ceci, auquel le
Québec n'a pas adhéré, hein, que ça soit la Loi constitutionnelle de 1867, qui
n'a pas été passée au plébiscite du peuple, et la Loi constitutionnelle de
1982, dont le Québec... toutes formations politiques ont rejeté cette
disposition-là. Et il y a un article, là-dedans, qui est venu contrecarrer la
clause Québec, hein, l'article 23, c'est une attaque en règle directe
contre une loi québécoise, contre la Charte de la langue française.
Alors, on se retrouve
dans une situation où, pour atteindre les objectifs de la loi 101, il est
important de limiter, en fait, de ne pas avoir de renouvellement d'exception
pour les permis temporaires. On n'est pas dogmatique, là, on le sait, qu'il y a
des personnes en situation temporaire qui viennent au Québec, qui vont être de
passage et qui pourront faire instruire leurs enfants dans une autre langue que
le français. Ça va. Mais c'est un cas limité parce que le législateur québécois
ne souhaite pas que cet article-là et le fait que la scolarisation se passe en
anglais servent à créer des droits pour que les générations futures aient accès
à l'école anglaise, parce qu'on a fait le choix au Québec que les personnes
immigrantes doivent être scolarisées en français. Or, avec la jurisprudence qui
existe, avec l'article 23 de la Loi constitutionnelle de 1982, auquel le
Québec n'a pas adhéré, il existe des risques juridiques. Et nous souhaitons
nous assurer, et vous devriez partager mon avis là-dessus, d'être bien sûrs de
faire en sorte que les objectifs de la loi 101 soient respectés et
puissent être exécutés. Et c'est la solution que je vous propose dans mon texte.
• (16 h 10) •
Mme David :
Et je comprends que la seule chose qui est sûre et certaine puis le chiffre qui
est vraiment clair, c'est le trois ans. Parce que, si c'est plus que ça, on
tombe dans le peut-être que, etc., autant, pour mon amendement, on tombe dans
le peut-être que. Le trois ans, à moins qu'il y ait des changements dans le
cursus scolaire... le mot «majorité» ne reste jamais plus défini que ce que ça
veut dire, c'est-à-dire c'est plus que la moitié, plus que la moitié d'un
parcours.
Donc, c'est la seule
chose qu'on peut prédire dans l'avenir. Il y a bien des choses qu'on ne peut
pas prédire dans l'avenir. Votre chiffre trois, vous avez l'impression que
c'est ça qui sécurise le plus votre trou béant, comme vous dites. J'entends
tout ça. Je dirai, juste à la fin, qu'on est tous le mollo de quelqu'un. Parce
que vous avez dit qu'on était très mollo, mais vous vous êtes fait traiter de
très mollo, vous aussi, par le PQ. Donc, on est tous le mollo de quelqu'un.
Vous êtes le mollo du PQ, puis le PLQ est le mollo de la CAQ et probablement du
PQ aussi.
M.
Jolin-Barrette : Bien, savez-vous quoi, Mme la Présidente? J'accepte
le fait que le PLQ est pas mal plus mollo que la CAQ, ça, je suis d'accord.
Mme David :
Non, pas moins mollo. C'est lui, c'est le député de Matane-Matapédia qui vous a
dit que vous étiez très mollo dans votre projet de loi.
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais vous m'avez mis... vous avez évoqué une
gradation des mollos. Donc, oui, le Parti libéral et très mollo sur la langue.
Où je n'accepte pas l'adjectif et le qualificatif du mollo que le député de
Matane-Matapédia nous attribue, c'est que nous, on agit. Nous, on dépose un
projet de loi n° 96, qui est le plus costaud depuis
1977. Le PQ, quand il était au pouvoir entre 2012‑2014, ils n'ont pas agi, là,
concrètement là-dessus.
Mme David :
P.l. n° 14, quand même.
M.
Jolin-Barrette : Pardon?
Mme David :
P.l. n° 14.
M.
Jolin-Barrette : Oui, mais ça n'avait rien à voir avec ce qu'on a
déposé, ça n'avait rien à voir.
Mme David :
Bien non, je sais, mais quand même.
M.
Jolin-Barrette : Alors, il y a un terme... une expression qui
s'applique bien, «grand parleur, petit faiseur», pour le PQ.
Mme David : Oui,
mais, en tout cas, on rejasera un jour de...
M.
Jolin-Barrette : Moi, j'aime mieux agir, Mme la Présidente, et c'est
ce que je fais avec le projet de loi n° 96. La
démonstration, là... Puis je vais vous le citer, là... Parce que je pense que
c'est important de le dire, là, je le sais, que, dans votre formation
politique, il y a plusieurs personnes qui auraient souhaité faire ce qu'on est
en train de faire. Puis je sens l'appui que j'ai de certaines personnes au sein
du Parti libéral. Notre collègue de l'Acadie, là, dans sa biographie, que j'ai
lue avec bonheur, là, elle nous a dit, là : «Pendant que les juristes planchent
sur les textes, mon chef de cabinet, Philippe Cannon, et mon conseiller en
langue, Antoine Godbout, imaginent un scénario qui nous donnerait
l'occasion d'aller plus loin dans la protection du français. Puisque nous
allons rouvrir la Charte de la langue française, pourquoi ne pas accoucher d'un
grand projet rassembleur inspiré du rapport Larose publié en 2001 et intitulé Une
langue pour tout le monde? Nous pourrions réunir l'Office québécois de la
langue française et le Conseil supérieur de la langue française pour créer une
nouvelle commission de protection de la langue française. L'organisme aurait le
même statut que la commission des droits et libertés de la personne, et ses
membres seraient nommés par l'Assemblée nationale aux deux tiers des voix. On
voit ainsi une manière d'éloigner ce dossier de la joute politique. En plus
d'élever le statut des organismes de protection, nous pourrions modifier le
préambule de la Charte des droits et libertés de la personne pour y inclure le
français — point
d'exclamation.
«Je suis
immédiatement emballée. J'y vois une occasion unique de nous démarquer. Mes
collègues Michelle Courchesne et Line Beauchamp trouvent l'idée
intéressante. Je présente mon projet au premier ministre Charest, qui se montre
ouvert mais qui me prévient que je devrai avoir l'appui du caucus avant d'aller
plus loin. Il savait quand même que je n'avais pas le poids politique suffisant
pour mener ça sans lui. Mais je suis un peu naïve, je me lance dans une série
de rencontres individuelles et je reçois parfois un accueil assez froid, pour
ne pas dire glacial»... et je reçois parfois un accord... un accueil assez
froid, pour ne pas dire assez... pour ne pas dire glacial. «Pour ses collègues,
le parti a déjà avalé une grosse bouchée en acceptant la loi 101. Pour
eux, on peut accepter de la défendre, mais pas question d'aller plus loin.
Finalement, deux ou trois poids lourds du cabinet me font comprendre que je
n'aurai pas leur appui. Le timing est mauvais, puisque nous sommes déjà à
mi-mandat. Comme me dit l'un d'eux, notre marque de commerce, c'est l'économie,
pas l'identitaire.
«Mon projet est
foutu. J'ai échoué et aujourd'hui je le regrette encore. Je pense que nous
aurions fait un pas important et que notre parti se serait rapproché de
l'électorat francophone. Nous aurions démontré un nationalisme sincère. Mon
manque d'expérience a joué contre moi.»
Alors, je comprends
que j'ai des appuis au sein du Parti libéral du Québec. Alors, lorsque j'ai des
discussions avec le député de D'Arcy-McGee, je le référerais à sa collègue la
députée de l'Acadie.
Mme David :
...vous avez fait une belle lecture, là. On en fait, nous autres aussi, toutes
sortes de belles lectures.
M.
Jolin-Barrette : C'était très intéressant.
Mme David : Et
on a fait toutes sortes de belles choses aussi, dont... commençant en 1974,
avec la loi sur les langues officielles. Le français est une langue officielle
avec Robert Bourassa. Et après ça...
M.
Jolin-Barrette : Ah! bien là, mais moi, je suis d'accord.
Mme David : ...et
dans mon 27... mon plan en 27 points, là, j'avais une structure qui
ressemblait pas mal à ça. Puis j'ai été la première à vous poser des questions
sur l'abolition du Conseil supérieur de la langue française, créer un
commissaire à la langue française, faire un C.A. de l'OQLF, que vous n'avez pas
fait, donner trois cours en français au cégep, que vous n'avez pas fait, il y a
plein de choses, mettre plus de qualité du français dans votre projet de loi,
travailler avec le centre-ville de Montréal, rien de ça dans le projet de loi.
Alors, on se rejasera sur mon plan d'action et votre projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Alors, Mme la Présidente, je constate que j'ai l'appui de la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien,
pour les partis... L'OQLF, il n'y a pas de C.A., c'est sûr que je vais vous
challenger, c'est sûr, c'est sûr.
M.
Jolin-Barrette : Allons-y. Alors, quand c'est des articles...
Mme David :
Bon, bien, j'ai hâte d'y arriver.
M.
Jolin-Barrette : Alors, quand c'est des articles comme celui-ci, qui
sont importants, où il y a une brèche, tout le monde devrait comprendre, autour
de la table, que c'est important, ce qu'on fait là-dessus, sur ce point-là,
pour la protection du français. Il y a même
des députés au sein du Parti libéral qui souhaitent qu'on aille dans cette
direction-là, la députée de l'Acadie.
Mme David :
Alors,Mme la Présidente, je vais demander une courte suspension...
La Présidente (Mme
Guillemette) : Oui, tout à fait.
Mme David : ...s'il
vous plaît, pour différents ordres de...
La Présidente (Mme
Guillemette) : Tout à fait, on va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 17)
(Reprise à 16 h 28)
La Présidente (Mme Guillemette) : Donc,
la commission reprend ses travaux. Mme la députée.
Mme David : Oui, merci beaucoup.
Écoutez, ce n'est pas... Je ne pense pas que j'ai péché par excès de
suspensions. Alors, c'est le premier que je demande, je crois. Et donc je vais
ressortir de cet après-midi avec peut-être plus de questions que de réponses.
Le ministre a beaucoup éclairé un certain nombre de choses dans sa motivation,
mais je ne suis pas encore au clair complètement sur la question des enjeux
constitutionnels par rapport à l'amendement, etc. Alors, je pense que j'ai
besoin d'encore un peu de réflexion. Il nous reste quelques minutes.
La Présidente (Mme Guillemette) :
Deux minutes.
Mme David : Il reste deux minutes.
Alors, je peux vous parler de toutes sortes de choses pendant deux minutes,
mais ce dont j'aurais besoin surtout, c'est peut-être d'un peu de réflexion
jusqu'à mardi matin pour revenir et voir vraiment les différences, le parcours
authentique, l'article 23 de la Loi constitutionnelle, la question de
renouvellement, pas renouvellement, les chiffres, etc., et puis, à ce moment-là,
je me sentirais beaucoup plus confiante de ma position.
M. Jolin-Barrette : Là, est-ce qu'on
a un amendement qui est au jeu présentement?
La Présidente (Mme Guillemette) :
Oui, c'est l'amendement de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
• (16 h 30) •
M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ça,
on est-tu prêts à voter sur l'amendement, puis après vous aurez votre temps sur
l'article?
Mme David : Non, c'est ça que je
dis, je ne me sens pas prête à voter sur l'amendement parce que je voudrais...
Vous savez qu'on fait des cours accélérés de constitution ici et qu'il me reste
encore quelques questions que je me pose, et, surtout, de métaboliser tout ce
dont on a parlé cet après-midi. Ce n'est pas des concepts qui sont
nécessairement simples. La question scolaire est une question très, très
complexe, très complexe, je le savais, mais je... particulièrement au primaire,
secondaire, particulièrement. Le collégial, vous allez voir, on est ailleurs,
là, ce n'est pas dans des complexités constitutionnelles. Les contestations
constitutionnelles ont été beaucoup sur la fréquentation du primaire,
secondaire. La loi 101 s'applique au primaire, secondaire. Alors là, on
est vraiment dans les choses qui nous font remonter à 1977, on se promène avec
des arrêts de Solski et d'autres. Ce n'est vraiment pas simple. Alors, je
voudrais aller, je pense, réfléchir moi-même à l'amendement puis dormir un peu
là-dessus.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci, Mme la députée. Donc, merci, tout le monde,
pour votre collaboration.
Et, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux au mardi 21 février 2022, à 11 heures. Bonne fin
de semaine, tout le monde.
(Fin de la séance à 16 h 31)