Journal des débats (Hansard) of the Committee on Culture and Education
Version préliminaire
42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Tuesday, November 23, 2021
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Vol. 46 N° 1
Clause-by-clause consideration of Bill 96, An Act respecting French, the official and common language of Québec
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Intervenants par tranches d'heure
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Jolin-Barrette, Simon
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Ghazal, Ruba
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Ghazal, Ruba
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Thériault, Lise
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Bérubé, Pascal
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Skeete, Christopher
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Skeete, Christopher
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Thériault, Lise
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Lemieux, Louis
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Lévesque, Mathieu
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Poulin, Samuel
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David, Hélène
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Jolin-Barrette, Simon
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Ghazal, Ruba
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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David, Hélène
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Ghazal, Ruba
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David, Hélène
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Thériault, Lise
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Jolin-Barrette, Simon
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Birnbaum, David
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Ghazal, Ruba
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Skeete, Christopher
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Lévesque, Mathieu
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Lemieux, Louis
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Provençal, Luc
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Guillemette, Nancy
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Lemieux, Louis
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Provençal, Luc
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Guillemette, Nancy
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Skeete, Christopher
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Ghazal, Ruba
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Bérubé, Pascal
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Ghazal, Ruba
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Jolin-Barrette, Simon
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Thériault, Lise
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David, Hélène
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Bérubé, Pascal
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Lévesque, Mathieu
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Lemieux, Louis
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Provençal, Luc
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Guillemette, Nancy
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Skeete, Christopher
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Birnbaum, David
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Thériault, Lise
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Bérubé, Pascal
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David, Hélène
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Jolin-Barrette, Simon
15 h (version révisée)
(Quinze heures vingt-neuf minutes)
La Présidente (Mme Thériault) :
Votre attention, s'il vous plaît. Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.
La commission est réunie afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur la
langue officielle et commune du Québec, le français.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
• (15 h 30) •
La Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente. M. Chassin (Saint-Jérôme) sera remplacé par M. Lévesque
(Chapleau); Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), par M. Provençal
(Beauce-Nord); Mme St-Pierre (Acadie), par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee);
Mme Dorion (Taschereau), par Mme Ghazal (Mercier); et Mme Hivon
(Joliette) par M. Bérubé (Matane-Matapédia).
Documents déposés
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Merci beaucoup. Donc, avant de débuter, je vais déposer les mémoires
qui ont été reçus depuis la fin des consultations particulières, qui sont les
mémoires de la Fédération des centres de services scolaires du Québec, de M. Charles
Castonguay, du Bureau d'assurance du Canada, le Syndicat canadien de la
fonction publique au Québec, la Société de formation à distance des centres de
services scolaires et des commissions scolaires du Québec et l'Association professionnelle
des notaires du Québec, ainsi qu'une correspondance, suite à une demande de la
juge en chef Manon Savard, qui nous a été adressée le 1er novembre
dernier.
Je vais vous lire l'extrait du courriel, donc
c'est adressé à la secrétaire de la commission, Mme Cameron : «À la
suite de la rencontre des juges en chef avec le ministère de la Justice, qui
s'est tenue vendredi dernier, la juge en chef Manon Savard me <prie de
m'assurer...
>
15 h 30 (version révisée)
<1355
La
Présidente (Mme Thériault) : ...suite à une demande de la juge en chef
Manon Savard qui nous a été adressée le 1er novembre dernier. Je vais vous
lire l'extrait du courriel, donc c'est adressé à la secrétaire de la
commission,
Mme Cameron : «À la suite de la rencontre des juges en chef avec le
ministre
de la Justice qui s'est tenue vendredi dernier, la juge en chef Manon Savard me
>prie de m'assurer qu'elle pourra compter sur vous afin que la
correspondance des juges en chef jointe à son envoi du 1er octobre dernier
sera déposée lors de l'étude article par article du projet de loi n° 96.
Je vous remercie et vous prie d'agréer, Mme Cameron, l'expression de mes
sentiments distingués.»
Donc, la correspondance signée de la juge
en chef sera déposée pour que les gens puissent en prendre connaissance. Parce
qu'en temps normal, la correspondance est dans un onglet Correspondance, ce ne
sont que les députés ainsi que leurs attachés qui y ont accès. Donc, ça
deviendra public, comme un mémoire.
Remarques préliminaires
Donc, je cède maintenant la parole au
ministre responsable de la Langue française pour ses remarques préliminaires.
M. le ministre, vous disposez de 20 minutes.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui.
Mme la Présidente, aujourd'hui, nous amorçons une étape importante du
processus législatif entourant le projet de loi n° 96 sur la langue
officielle et commune du Québec.
Tôt cet automne, nous avons tenu
d'importantes consultations particulières. C'est en effet plus de
50 intervenants, un nombre record pour la présente législature, qui sont
venus partager leurs commentaires relativement à cette importante réforme de la
Charte de la langue française que nous nous apprêtons à étudier en détail. Nous
les remercions toutes et tous d'avoir contribué à enrichir le débat
parlementaire. Ces consultations étaient l'occasion de discuter de l'état du
français dans les différentes sphères de la société québécoise. Elles ont mis
une fois de plus en lumière les reculs inquiétants qu'accuse la langue
française au Québec.
Force est d'admettre que notre langue
commune connaît une perte de vitesse alarmante, et ce, tout particulièrement
dans la grande région de Montréal. Nous sommes en quelque sorte arrivés à un
point de rupture. Si nous n'agissons pas maintenant, si nous n'adoptons pas le
projet de loi n° 96, ce déclin ne pourra que s'accentuer.
L'Assemblée nationale a d'ailleurs reconnu
à plus d'une fois, au cours des derniers mois, la nécessité d'intervenir et
d'assurer la pérennité de la langue française au Québec. En tant qu'élus de la
nation québécoise, nous avons le devoir de poser des gestes forts pour inverser
la tendance du déclin du français. Nous le reconnaissons tous ici, je crois,
mais cela ne signifie pas que nous n'aurons pas de bonnes discussions pour
autant, j'en suis convaincu. Quoi qu'il en soit, j'ai bien entendu les premiers
commentaires et je vais demeurer à l'écoute avec écoute, patience et ouverture,
comme me l'invite à faire la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Je l'ai dit et je le répète, nous sommes
ouverts à toute proposition qui permettra de protéger et de valoriser notre
langue française et qui contribuera à renforcer son statut au Québec. Nous
avons la conviction que ce n'est pas le fait d'une seule mesure-phare.
La question linguistique est transversale,
elle nous concerne toutes et tous, et ce, de multiples façons : comme
individu, comme citoyen, comme étudiant, comme nouvel arrivant et comme société
d'accueil, comme employé ou comme <employeur, comme...
M. Jolin-Barrette :
Nous
avons la conviction que ce n'est pas le fait d'une seule mesure-phare.
La question linguistique est
transversale, elle nous concerne toutes et tous, et ce, de multiples façons :
comme individu, comme citoyen, comme étudiant, comme nouvel arrivant et comme
société d'accueil, comme employé ou comme >employeur, comme commerçant,
comme grand patron et comme nation.
C'est ce qui explique qu'au moyen de ces
quelques 200 articles, le projet de loi n° 96 ratisse large, très
large. Il touche à toutes les sphères de la société, que ce soit
l'administration, les commerces, le marché du travail, les institutions
d'enseignement postsecondaire, la justice et plusieurs autres. C'est ainsi que
cette réforme d'envergure donnera l'impulsion pour freiner le déclin du
français et pourra susciter l'élan d'une relance linguistique au Québec.
Nous ne sommes pas les premiers à débattre
du sort de la langue française sur ce territoire et nous ne serons probablement
pas les derniers à le faire. Notre histoire nationale est profondément
imprégnée par ces discussions, parfois intenses et déterminantes, sur l'avenir
de notre langue nationale. C'est d'ailleurs sous la toile Le débat sur les
langues, du peintre Charles Huot, que les parlementaires québécois
débattent depuis plus d'un siècle. Cet oeuvre gigantesque, qui surplombe le
salon bleu, juste à côté, dans la salle qui est juste à côté, nous rappelle
avec éloquence que si nous pouvons encore aujourd'hui nous exprimer en
français, dans les murs de ce Parlement, dans notre Assemblée nationale, c'est
d'abord parce qu'en 1792, des élus ont osé s'affirmer et défendre leur langue
avec conviction. C'est aussi parce qu'en 1977, Camille Laurin et ses
compagnons de l'époque ont eu le courage d'agir.
Ce courage, le gouvernement du Québec l'a
eu en proposant, au mois de mai dernier, la plus importante réforme de la
Charte de la langue française depuis 1977. Nous leur devons d'agir, à notre
tour, avec fierté et d'assurer l'avenir de cette langue afin que les
générations qui nous succèdent puissent, elles aussi, contribuer en français à
l'avancement de ce Québec que nous aimons. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. Donc, sans plus tarder, nous allons avec la porte-parole
de l'opposition officielle. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, vos
remarques préliminaires, vous avez un total de 20 minutes à votre
disposition.
Mme Hélène David
Mme David : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Alors, M. le ministre, les accompagnateurs compétents, experts
devrait-on dire, en avant, en arrière, MM. les collègues, mon collègue... mes collègues
de l'opposition, bienvenue. Bienvenue à cette extraordinairement importante
conversation, échange, discussion que nous allons avoir, historique,
effectivement, qui n'a probablement pas eu lieu, effectivement, depuis 1977.
En 1977, était élu, depuis quelques mois,
un gouvernement souverainiste, un gouvernement du Parti québécois, qui a décidé
de poursuivre ce que Robert Bourassa avait commencé en 1974, c'est-à-dire
de proclamer le français langue officielle du Québec et a présenté, donc, la
loi 22. Et après, en <1977, le...
Mme David : ... un
gouvernement
du
Parti québécois, qui a décidé de poursuivre ce que
Robert Bourassa avait commencé en 1974, c'est-à-dire de proclamer le
français langue officielle du Québec et a présenté, donc, la loi 22. Et
après, en >1977, le premier ministre de l'époque, René Lévesque, a dit à
son ministre : Occupe-toi de redresser un peu la situation. C'est à peu
près la commande qu'il a eue. Je ne sais pas si le ministre actuel a eu le même
genre de recommandation ou de commande, mais c'est ce qui est arrivé à
l'époque.
Et le ministre s'est adjoint, donc, des
grands sociologues, Fernand Dumont et Guy Rocher. Ce n'était pas rien comme
accompagnateurs, et ils se sont mis au travail. Et, en avril 1977, ils ont
produit un rapport, un rapport qui s'appelait un livre blanc sur la politique...
ça s'appelait La politique québécoise de la langue française,
60 pages, en 1977, quatre mois avant le dépôt du projet de loi.
Je l'ai dit en adoption de principe, je le
redis, c'est très dommage qu'avec les experts dont s'est entouré le ministre
cette fois-ci aussi, je dirais, il n'y a pas eu ce genre de document qui, je
pense, aurait satisfait tout le monde, y compris les députés au gouvernement,
députés de l'opposition, la population, parce que c'est avant tout pour la
population, citoyens, citoyennes du Québec que nous faisons... procédons à cet
exercice, que le ministre, je pense, a déposé le projet de loi. Nous aurions
tous bénéficié de... ce qu'on appelle, ça, un document d'orientation, un livre
blanc. Ça aurait montré les grandes orientations ministérielles, les grandes
orientations gouvernementales que le ministre voulait, donc, avoir et, à partir
de là, développer ce vaste projet de loi qu'il a développé.
Ça aurait permis de comprendre beaucoup de
choses : les données sur la langue française, où on en est avec la langue
française, les enjeux, les enjeux même constitutionnels, les enjeux liés au
travail, aux entreprises, enfin, bon, de l'éducation, tout ce qui a été traité
dans le livre blanc de 1977.
Je l'ai lu, ce livre blanc. Le ministre
l'a probablement lu aussi. J'ai relu récemment les deux chapitres consacrés à
la biographie de Camille Laurin sur justement... et je vous enjoins d'aller
lire ça. C'est assez intéressant, ça donne une idée de ce à quoi nous nous
exposons tous volontairement, c'est-à-dire des discussions extrêmement
importantes, où les enjeux, ma foi, en 1977 et les enjeux maintenant, il y a
beaucoup de choses qui se ressemblent parce qu'il reste qu'il y a toujours deux
peuples fondateurs au Canada et qu'il y a la communauté anglophone, la <communauté
francophone...
Mme David : ...
nous
nous exposons tous volontairement, c'est-à-dire des discussions extrêmement
importantes, où les enjeux, ma foi, en 1977 et les enjeux maintenant, il y a
beaucoup de choses qui se ressemblent parce qu'il reste qu'il y a toujours deux
peuples fondateurs au Canada et qu'il y a la communauté anglophone, la >communauté
francophone, et qu'au Québec, c'est majoritairement francophone. Il y a une constitution
canadienne, nous sommes encore dans la Constitution canadienne. Tout ça était
présent, était très présent en 1977, mais il y avait un esprit, à l'époque,
d'aller vers un référendum d'où, par exemple, la langue de la législation.
Camille Laurin l'a dit, 20 ans après,
très clairement. C'est cité dans la biographie : «Écoutez, je le savais
très bien que c'était anticonstitutionnel, voyons donc, l'article 133, c'était
évident, c'était dans la Constitution. On le met quand même, parce que, de
toute façon, nous serons un pays indépendant.» Référendum 1980, on connaît la
suite. On ne la connaissait pas nécessairement en 1977. Dans ce cas-ci, on se
retrouve donc, plusieurs décennies après, avec un projet de loi où il y a
toujours deux peuples fondateurs. Il y a toujours une communauté
anglophone inquiète, qui était inquiète en 1977, qui l'est encore maintenant
pour toutes sortes de raisons, dont un certain nombre, mais pas que ça, qui
sont... qui ressemblent un peu à celles de 1977, mais je laisserai mon collègue
probablement parler de ça, mais des inquiétudes des communautés culturelles,
des nouveaux arrivants, des chambres de commerce. Enfin, vous y étiez là. On a
entendu un certain nombre d'inquiétudes des... les constitutionnalistes. Et ça,
c'était nouveau, les constitutionnalistes parce qu'il n'y avait pas la charte
de 1982 à ce moment-là. Souvenez-vous, on est en 1977. Donc, ça, c'est un
élément nouveau, le fameux article 45. Il n'y avait pas les dispositions de
dérogation, évidemment, qui va être un autre enjeu extrêmement important.
• (15 h 40) •
En fait, le ministre nous convie à, tous
ensemble, monter un peu l'Everest, l'Everest d'enjeux constitutionnels
législatifs, sociaux, j'oserais dire psychologiques, multiculturels ou
interculturels, économiques, éducatifs. C'est à tout ça que le ministre nous
convie dans son excursion ou dans son expédition en montagne. Et on va finir
par se connaître, je pense. On a commencé avec les consultations particulières,
on va continuer à travailler dans ce chemin avec, je l'espère, «EPO», écoute,
patience et ouverture. On va appeler ça «l'EPO du ministre». Alors, écoute,
patience et ouverture.
M. Jolin-Barrette : ...
Mme David : Ah! on pourrait
dire «PEO», patience, écoute et ouverture. Alors, on va dire patience, écoute
et ouverture pour ne pas qu'il n'y ait pas de confusion. M. le ministre, vous
voyez, mon amendement est modifié, puis je l'accepte avec grande humilité.
Donc, patience, écoute et ouverture, mais pour tout le monde, parce que je
pense que nous sommes conviés à un très long exercice, pas à un exercice de...
qui peut se régler... j'étais ici, même chaise, même ministre en face de moi,
quelques collègues qui <étaient là aussi...
Mme David : ... je l'accepte
avec grande humilité. Donc, patience, écoute et ouverture, mais pour tout le
monde, parce que je pense que nous sommes conviés à un très long exercice, pas
à un exercice de... qui peut se régler... j'étais ici, même chaise, même
ministre en face de moi, quelques collègues qui >étaient là aussi, pour
un autre projet de loi, qui était le projet de loi n° 21. En deux
semaines, c'était expédié, et puis on avait un bâillon rapidement, le
16 juin 2019, je m'en souviens, parce qu'on est arrivés... je suis arrivée
à la maison un petit peu fatiguée, et c'était la fin de la session. Alors, on
avait eu ce bâillon, et c'était dommage, parce que, dans le fond, on s'est
rendus à l'article 3, 4, 5, quelque chose comme ça. Là, on en a 202,
articles.
Alors, on a énormément de travail qui nous
attend, avec des enjeux extrêmement stimulants, on doit le dire, extrêmement
stimulants, avec des consultations très stimulantes que nous avons eues. Mais,
oh là là, quelle responsabilité nous avons de dessiner les contours, tous
ensemble, c'est ça, la démocratie, tous ensemble, de ce que nous voulons comme
société francophone, québécoise, inclusive, fière d'être québécoise, une nation
francophone qui accueille et qui vit depuis toujours avec les Premières Nations,
qui vit depuis toujours avec les communautés autochtones, qui vit depuis
toujours avec la communauté d'expression anglaise, avec... depuis peut-être
1977, un peu plus présents qu'avant, plusieurs, plusieurs communautés culturelles
qui ont contribué de façon exceptionnelle à l'avancement du Québec, qu'on pense...
prenez un nom qui me vient, Yoshua Bengio, c'est actuel, ça, c'est tout le
développement de l'intelligence artificielle, des données profondes; que je
pense à Kim Thúy, qui a été quelqu'un qui est venu dans des conditions très
difficiles et qui, finalement, est un apport considérable pour le Québec; que
je pense à Dany Laferrière, membre de l'Académie française, un fier Québécois
qui le dit qu'il est devenu inspiré et inspirant pour nous tous en étant au
Québec. Alors, j'étais à son intronisation à l'Académie française. C'est
difficile d'être plus fier que ça d'être Québécois, et il est venu d'Haïti. Et
on pourrait multiplier les exemples comme ça de gens qui ont contribué, qui
contribuent et qui contribueront à l'essor du Québec de façon exceptionnelle,
tous et toutes ensemble.
Et nous avons ici, jusqu'à maintenant...
je ne vois pourquoi nous ne pourrions pas continuer. Ce à quoi ce projet de loi
nous convie, c'est un exercice complexe, sensible, où on veut protéger la
langue française, oui, et la protéger pas pour les années à venir, pour les
décennies, les siècles à venir. Donc, on a des <décisions...
Mme David : ...je ne vois
pas pourquoi nous ne pourrions pas continuer. Ce à quoi ce
projet de loi
nous convie, c'est un exercice complexe, sensible, où on veut protéger la
langue
française, oui, et la protéger pas pour les années à venir, pour les décennies,
les siècles à venir. Donc, on a des >décisions importantes à prendre, on
a des décisions qui sont osées, qui ne vont peut-être pas faire l'unanimité
pour certains. Nous serons pour certains articles, nous serons contre certains
autres articles, mais une chose est certaine, nous allons travailler avec
énormément de rigueur. Ça prendra le temps que ça prendra, patience, écoute et
ouverture, Mme la Présidente, pour pouvoir aller au fond de tous les sujets.
Alors, ça fait... et j'ai adoré ça, mais
ça fait six mois, là, depuis le mois de mai, plus que six mois, je pense, maintenant,
que je me suis plongée dans ce projet de loi là, et ça m'a fait revoir tout :
l'histoire du Canada, l'histoire du Québec, l'histoire de la langue française,
notre histoire constitutionnelle, toute la question du développement des
entreprises, la question du développement avec le rapport Parent, et tout, de
l'éducation au Québec, toute la question des services aux minorités linguistiques.
Il y en a tellement qu'en même temps tu te dis : Bon, bien, c'est
formidable.
Est arrivé de façon surprenante... c'est
ce qui a fait, d'ailleurs, couler probablement 98 % de l'encre coulée
depuis le 13 mai 2021 ou 14 mai, c'est essentiellement deux choses,
que les gens n'avaient pas vues venir, on doit le dire. Peut-être qu'on aurait
pu voir venir la deuxième parce qu'elle avait été massivement, disons, utilisée
au projet de loi n° 21, c'était la disposition mur à mur de dérogation, et
l'autre chose, c'était l'article 45 de la Loi constitutionnelle de 1982. Donc
là, comme dit le ministre, il a émoustillé beaucoup les constitutionnalistes.
Alors, on les a tous connus, on les a tous lus, de a à z.
J'avais proposé au ministre, à l'étude des
crédits... puis je n'avais pas été si loin que ça de mes prédictions. J'avais
ma boule de cristal, qui s'appelle un livre publié par le conseiller du ministre.
On a le droit de le nommer, Mme la Présidente, ou on n'a pas le droit? Je ne
sais plus, dans les règles... M. Poirier, il mérite d'être nommé, Éric Poirier,
qui a écrit un livre sur...
M. Jolin-Barrette : Dr
Poirier.
Mme David : Alors, appelez-moi
Dre David. Merci beaucoup, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Certainement. Bien, je vais vous appeler la docteure de Marguerite-Bourgeoys,
parce que sinon je n'ai pas le droit.
Mme David : C'est vrai, vous
avez bien raison. Oui, avoir un doctorat, ça veut dire quelque chose, et il en
manquait beaucoup, des maîtrises, des doctorats, à la faculté de droit. Les
doyens me disaient toujours, à l'époque, dans mon ancienne vie : Il faut
qu'on ait plus d'étudiants aux études supérieures.
Alors, bravo, parce que la profession
attire beaucoup dans la pratique, et vous êtes très formé à la pratique. Or,
là, vous avez décidé d'aller dans, justement, un sujet qui est les politiques
linguistiques, et tout ça. C'est fait <de façon...
Mme David :
Les
doyens me disaient toujours, à l'époque, dans mon ancienne vie : Il faut
qu'on ait plus d'étudiants aux études supérieures.
Alors, bravo, parce que la profession
attire beaucoup dans la pratique, et vous êtes très formé à la pratique. Or,
là, vous avez décidé d'aller dans, justement, un sujet qui est les politiques
linguistiques, et tout ça. C'est fait >de façon très rigoureuse. Donc,
je ne suis pas ici pour faire l'apologie du livre de Dr Poirier, mais je
peux quand même dire que ça a contribué à l'ensemble de mes lectures, à
comprendre et à voir venir un certain nombre de choses parce qu'il me... il
parlait beaucoup de constitution, justement, alors il y a... je ne suis pas
sûre qu'il est content que ça ne soit pas allé plus loin, mais au moins il y a
un petit recours à la Constitution. Donc, il a vu ça ainsi que d'autres choses,
mais il n'y a pas de livre blanc, et ça, on est un peu déçu.
Alors, dans ces deux surprises, il y a effectivement
le recours à l'article 45. On en parlera, ça fait beaucoup, beaucoup, non
seulement jaser, mais il y a eu des motions à l'Assemblée nationale, aux
Communes, et il y a eu ce recours, dispositions de dérogation, qui elles,
vraiment, je pense, sont celles qui inquiètent le plus, j'oserais... je ne
pense pas me tromper en disant ça, particulièrement dans son côté que
j'appellerais mur à mur, Mme la Présidente. Mur à mur, ça veut dire partout,
tout le temps, tous les articles. Et il y a beaucoup de monde, beaucoup de gens
sérieux, le Barreau, la Commission des droits de la personne, des
constitutionnalistes qui sont venus dire : Mais pourquoi? Pourquoi aller
si loin? Pourquoi utiliser ça? Et particulièrement dans les pouvoirs donnés aux
inspecteurs de l'OQLF, et puis là c'est... moi, je m'incline devant le côté
savant des juristes qui disent : Mais ça n'a pas de bon sens, Mme la Présidente,
qu'il n'y ait ni mandat ni... et que tout ça soit sous une disposition de
dérogation.
Et en plus, autre contradiction, alors
j'annonce, évidemment, là, où on se posera bien des questions, la Charte des
droits et libertés de la personne qui se voit ajouter un autre droit, et
suivez-moi bien, un autre droit qui est le droit de vivre en français. Jusque-là
on peut dire : Bon, droit de vivre en français, est-ce que c'est un droit
collectif? Charte des droits et libertés, c'est un droit individuel — enfin,
on en discutera — mais qui, lui-même, paradoxalement, est soumis à la
dérogation parce que la disposition de dérogation est mur à mur. Donc, il y a
une certaine incongruité, et je pense qu'on pourra avoir des conversations, et
des discussions, et des échanges forts importants, forts sérieux. Et des gens
de bonne volonté et de grande compétence sont venus nous dire toutes sortes de
choses.
• (15 h 50) •
Alors, nous parlerons évidemment des
collèges, nous parlerons des entreprises. Le ministre s'est montré déjà ouvert
à un amendement avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Nous en
aurons, évidemment, beaucoup plus que ça, puis ça, c'était assez technique sur
les contrats, mais quand même bien important, les contrats à l'international et
tout ça, mais j'espère que le ministre sera aussi intéressé par plein d'autres
amendements. Parce que, vous savez quoi? Les fois où j'ai participé à des
projets de loi, que ça soit d'un côté ou de l'autre, à quelque titre que ce
soit, j'étais toujours impressionnée par les propositions des oppositions. Ça
faisait des <très bons...
Mme David : ...
contrats, mais quand même bien important, les contrats à l'international et
tout ça, mais j'espère que le ministre sera aussi intéressé par plein d'autres
amendements. Parce que, vous savez quoi? Les fois où j'ai participé à des
projets de loi, que ça soit d'un côté ou de l'autre, à quelque titre que ce
soit, j'étais toujours impressionnée par les propositions des oppositions. Ça
faisait des >très bons projets de loi, finalement, d'être ouvert à ce
que les oppositions suggéraient. Alors, je remerciais les oppositions et je
disais oui à beaucoup de choses.
Alors, j'espère que le ministre, qui a été
dans l'opposition, qui en a sûrement suggéré beaucoup, se rappellera du rôle
qu'il avait, assis en face d'un ministre, et qu'il dira : Oui, mais j'en
avais, des bonnes idées, moi, quand j'étais dans l'opposition. Alors, je nous
souhaite tous d'être à la hauteur. Nous sommes dans une salle, un salon qui est
à la hauteur, je l'ai déjà dit au ministre, à la hauteur de la solennité des
réflexions que nous avons à faire, et j'espère que nous-mêmes, comme parlementaires,
nous serons tous à la hauteur de la responsabilité qui nous incombe, très
grande responsabilité, Mme la Présidente, et je l'assume entièrement, mon parti
aussi. Et j'espère que nous nous retrouverons dans un avenir le plus lointain
possible pour l'adoption de ce projet de loi, parce que ça devrait prendre plusieurs
mois, et non pas deux semaines avec un bâillon. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Donc, j'invite maintenant la porte-parole
du deuxième groupe d'opposition en matière de langue française et la députée de
Mercier à faire ses remarques préliminaires. Vous aussi, vous avez 20 minutes
à votre disposition.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Alors, bonjour, M. le ministre, bonjour, chers collègues, les
députés, bonjour aussi à toute l'équipe qui a travaillé sur le projet de loi, à
nos équipes aussi qui ont travaillé très, très fort.
Écoutez, c'est un projet de loi qui est très,
très important, puisqu'il couvre énormément, énormément d'éléments et de
secteurs dans la société. On l'a vu, puisque les consultations particulières
ont été très, très populaires. En fait, il y avait peut-être juste les groupes
écologistes qui n'étaient pas venus. Vous savez, c'est un projet de loi, je dis,
qui est important. Est-ce qu'il va être historique? Ça, seulement l'histoire
nous le dira. C'est sûr que le projet de loi... la loi 101, dont on parle
encore aujourd'hui, la Charte de la langue française, qu'on modifie, qu'on
modernise, elle, elle a été historique, ça, c'est sûr et certain.
Et moi, je le dis, je le répète, je suis
très fière d'être dans cette commission, de travailler à la modernisation de la
Charte de la langue française, puisque je suis une enfant de la loi 101. Quand
je suis arrivée au Québec, il y a plus de 30 ans, la petite fille de 10 ans
n'aurait jamais pensé qu'elle ferait partie d'une commission parlementaire qui
modifierait une loi sur une langue qu'elle ne parlait pas et qu'elle ne
connaissait pas. Donc, c'est quelque chose, pour moi, qui est très important,
et je vais mettre toute l'énergie et tous les efforts pour travailler de façon
rigoureuse, diligente, avec écoute, patience et ouverture, moi aussi, de mon
côté, et j'espère que ce sera le cas aussi pour le ministre et tous les
collègues.
Ça aussi, c'est <quelque chose...
Mme Ghazal : ...
c'est
quelque chose, pour moi, qui est très important, et je vais mettre toute
l'énergie et tous les efforts pour travailler de façon rigoureuse, diligente,
avec écoute, patience et ouverture, moi aussi, de mon côté, et j'espère que ce
sera le cas aussi pour le ministre et tous les collègues.
Ça aussi, c'est >quelque chose
que j'ai répété à plusieurs, plusieurs reprises. La langue française, son
avenir sera assuré par la langue du travail. Oui, bien sûr, elle est très
importante dans tous les pans de la société, premièrement à l'école, et c'est
ce qui fait que je me définis comme une enfant de la loi 101, puisque je
suis allée à l'école primaire, secondaire en français, en commençant par une
classe d'accueil pour apprendre le français, mais pour apprendre aussi la
culture québécoise. Donc, c'est un socle, l'éducation, qui est extrêmement
important pour l'avenir de la langue française. Mais après, une fois qu'on sort
de l'école, plus tard, on passe la grande majorité de notre vie, comme le
disait Gérald Godin, ancien député de Mercier, on passe la grande majorité de
notre vie au travail. Et c'est très important que la langue du travail se passe
en français.
Moi, je viens du milieu privé. J'ai
travaillé, pendant une quinzaine d'années, dans des entreprises manufacturières
privées. J'ai des gens, en ce moment, aujourd'hui, qui travaillent dans les
milieux privés, des anciens collègues qui voient le travail que je suis en
train de faire sur la langue française et qui me disent : C'est incroyable
à quel point beaucoup, beaucoup de choses se passent en anglais dans le milieu du
travail. C'est aussi le cas dans les entreprises où j'ai travaillé, où, par
exemple, le siège social était à l'extérieur du Québec. Et ça peut être normal
que certaines fonctions nécessitent qu'on parle en anglais, mais il y a quand
même une exagération qui est faite. Et on l'a vu avec l'exemple incroyable qui
a... dans le fond, c'est un symbole de cette situation-là et du problème de la
protection du français dans le milieu du travail. Et ça a été... bien,
l'affaire qu'on appelle maintenant l'affaire Air Canada ou l'affaire Rousseau,
puisque le P.D.G. a fait un discours devant un parterre des gens du milieu des
affaires. Il a été applaudi à la fin et il l'a fait entièrement en anglais. Et
ce qui a été encore pire et qui a choqué les Québécois, c'est ça, mais c'est
encore plus les justifications qu'il a données. Et vraiment, ce que
M. Rousseau a dit publiquement, c'est ce que beaucoup de gens,
malheureusement, dans le monde des affaires, dans le milieu du travail, pensent
secrètement.
Quand on regarde ce qui se disait dans les
revues de presse à l'époque, juste avant l'adoption de la loi 101, le
milieu des affaires était totalement contre cette loi en disant que ça allait
être une catastrophe économique. Et ils n'y allaient pas avec le dos de la
cuillère, si je peux m'exprimer ainsi. Ils disaient que c'était une loi qui ne
devait pas voir le jour, et c'étaient des mots extrêmement, extrêmement durs.
Aujourd'hui, ça a un peu changé dans le
discours, et on l'a vu aussi pour les gens du <monde...
Mme Ghazal : ...
contre
cette loi en disant que ça allait être une catastrophe économique. Et ils n'y
allaient pas avec le dos de la cuillère, si je peux m'exprimer ainsi. Ils
disaient que c'était une loi qui ne devait pas voir le jour, et c'étaient des
mots extrêmement, extrêmement durs.
Aujourd'hui, ça a un peu changé dans le
discours, et on l'a vu aussi pour les gens du >monde des affaires qui
sont venus, que ça soit la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le Conseil du patronat, etc. Ils disent qu'ils sont d'accord avec
le principe du projet de loi n° 96, personne ne la conteste, tout le monde
est d'accord avec le fait qu'il faut protéger la langue française. Donc, le
discours a changé depuis 40 ans, mais, dans les faits, quand il s'agit de
faire des efforts, eh bien, là, on dit que c'est impossible, qu'on ne peut pas,
qu'il ne faut pas trop demander d'efforts aux entreprises, parce que ce n'est
pas bon pour les affaires, ce n'est pas bon dans un contexte de mondialisation.
Et ça, comme je le disais, moi, ayant été
en entreprise, je n'ai pas eu une seule entrevue que j'ai passée sans qu'on me
demande si je parlais anglais. Des fois, c'était nécessaire, d'autre fois, ça
ne l'était pas. Donc, je sais qu'il y a des modifications dans la loi par
rapport à cet élément-là de demander des compétences en anglais. Il faut les
restreindre, il faut aller encore plus loin.
Et, moi, c'est sûr et certain, je ne m'en
suis jamais cachée, je vais déposer des amendements qui vont aller dans le sens
de renforcer encore plus la langue du travail, parce que, quand on voit, par
exemple, des personnes immigrantes qui sont déjà francophones et qui ne se
trouvent pas du travail parce qu'elles ne parlent pas l'anglais, c'est un
problème. Quel message on leur envoie?
Mais il y a aussi tous les autres qui,
comme moi, comme ma famille, on ne parlait pas le français en arrivant au
Québec. Et il faut qu'on mette en place les efforts, ils existent, mais il faut
encore augmenter les efforts et faire confiance à notre système d'intégration
des personnes immigrantes et le renforcer encore plus en leur permettant
d'apprendre le français, d'apprendre la culture québécoise et de s'intégrer.
Donc, ça, ça va être quelque chose d'important, mais, pour le faire, il faut, de
l'autre côté, quand ces personnes-là veulent vraiment s'intégrer, elles veulent
apprendre le français, bien, quand elles vont aller dans le milieu du travail,
il ne faut pas qu'après ça elles sentent qu'elles ont perdu leur temps, puis
qu'elles ont appris le français, et que finalement il faut qu'elles apprennent
l'anglais, ou le monde du travail se passe uniquement en anglais, ou, par
exemple, dans les très petites entreprises où beaucoup d'immigrants
travaillent, bien, ça va se passer même dans leur langue maternelle que ce soit
l'espagnol, l'arabe, etc., parce qu'ils vont rester dans leur communauté.
• (16 heures) •
Donc, renforcer la Charte de la langue
française dans le milieu du travail, c'est fondamental. C'est ce qui va assurer
la survie du français au Québec, je ne mange pas mes mots, j'en suis absolument
convaincue et je suis certaine que l'avenir va aussi le prouver. Si, pour
mettre du pain sur la table de la famille, la salle à manger, ça prend la
connaissance du français, bien, vous pouvez être assurés que tout le monde va
l'apprendre et va s'intégrer. C'est ce que la <grande majorité...
>
16 h (version révisée)
<17933
Mme Ghazal :
...et je suis certaine que l'avenir va aussi le prouver. Si, pour mettre du
pain sur la table de la famille, la salle à manger, ça prend la connaissance du
français, bien, vous pouvez être assuré que
tout le monde va
l'apprendre et va s'intégrer. C'est ce que la >grande majorité des
immigrants demandent, mais, à cause de cette ambiguïté, ambivalence qu'on a
dans le milieu du travail, du monde des affaires, bien, c'est une menace à la
protection et à la pérennité de la langue française.
Donc, je vais avoir des amendements
là-dessus, c'est sûr et certain, notamment d'appliquer la Charte de la langue
française aux entreprises de 10 employés et plus. Et non, ça ne mettra pas
à mal l'économie, j'en suis convaincue, puisqu'en 1977 c'était l'argument
principal du monde des affaires — je pourrais partager des articles
qui étaient écrits à l'époque, et aujourd'hui on trouverait que c'est
incroyable, ce qui se disait — et on a vu que ce n'est pas du tout ce
qui est arrivé.
Je voudrais, moi aussi, renchérir, comme
ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, sur le fait qu'il aurait été intéressant
d'avoir aussi un livre blanc. Moi, je l'ai lu à plusieurs reprises aussi pour
me préparer au travail que je vais faire pour le projet de loi n° 96. Il y
a des choses intéressantes aussi qui sont écrites dedans, notamment les
principes que j'ai repris, les principes du... les quatre principes de la
loi 101 qui étaient mis dans le livre blanc de Camille Laurin, à l'époque.
Je les ai repris et, moi-même, j'ai déposé un livre orange pour nous rappeler
ce document qui était très, très important. Donc, ça aurait été intéressant que
le gouvernement ait un livre de n'importe quelle couleur, mais, dans le fond,
l'important, c'est qu'il définisse la vision du gouvernement par rapport à ce
projet de loi là.
Je sais que le ministre va pouvoir
répéter, le dire et parler de l'intention du gouvernement, de c'est quoi,
l'objectif. Pendant la commission, tout ça a été enregistré, mais ça aurait été
quand même intéressant d'avoir ce document. Ça aurait pu aussi rassurer
certaines communautés, par exemple, les communautés anglophones. Moi, je l'ai
toujours dit, s'il y avait un élément ou un article dans le projet de loi qui
menaçait les droits historiques de la minorité anglophone, Québec solidaire, on
aurait été les premiers à nous insurger. Mais ça aurait été bien, dans le livre
blanc ou dans un livre qui énonce les intentions et la vision du gouvernement
par rapport à la langue française, que ça soit mentionné.
Il aurait pu aussi rassurer les personnes
issues de l'immigration ou les groupes qui les accompagnent dans leur
intégration ou dans la francisation sur les intentions du gouvernement. On a eu
des groupes qui ont émis certaines inquiétudes, notamment par rapport au délai
de six mois, où, après six mois, le gouvernement, partout, les services de la
santé et de l'éducation vont s'adresser à eux et à elles, aux immigrants,
uniquement en français. C'est sorti dans les médias. Il aurait pu les rassurer,
dire c'est quoi, l'intention du gouvernement. Il aurait pu aussi parler... Ça
aurait été une belle occasion de parler aux Premières Nations et Innus, aux <autochtones...
Mme Ghazal : ...
où,
après six mois, le gouvernement, partout, les services de la santé et de
l'éducation vont s'adresser à eux et à elles, aux immigrants, uniquement en
français. C'est sorti dans les médias. Il aurait pu les rassurer, dire c'est
quoi, l'intention du gouvernement. Il aurait pu aussi parler... Ça aurait été
une belle occasion de parler aux Premières Nations et Innus, aux >autochtones,
parce qu'eux aussi, comme les Québécois, font face au défi de protéger leurs
langues. Certaines langues sont mortes, elles sont de moins en moins parlées
par les plus jeunes. Donc, s'il y a un peuple au monde qui peut comprendre les
inquiétudes des Premières Nations et des Innus par rapport à leurs langues
maternelles, à leurs langues, bien, c'est vraiment... c'est les Québécois.
J'aurais aimé aussi... Je sais qu'on ne
peut pas parler de l'absence d'un député lors d'un discours. Je ne vais pas le
faire. Ce n'est pas du tout ça, mon intention. Mais moi, je sais que j'ai
beaucoup lu et j'ai même fait référence à des discours qui ont été faits par M.
Camille Laurin, ministre, donc, responsable de la Langue française à l'époque
de l'adoption de la loi 101, et ça a été des discours historiques. Il y a même
eu une émission, une fois, à Télé-Québec, je pense, où on parlait... où on
analysait le discours de Camille Laurin. Il a fait plusieurs discours tout au
long de l'avancement du projet de loi.
J'aurais aimé... et, encore une fois, ce n'est
pas un reproche du fait qu'il était absent, je sais que le ministre est très,
très, très occupé, il a beaucoup de pièces législatives qu'il a sous sa
responsabilité, mais j'aurais aimé l'entendre, lui, parler lors de l'adoption
du principe. Ça aurait été une belle occasion. J'espère que, lors des
prochaines étapes de l'avancement du projet de loi, qu'on va l'entendre et, qui
sait, peut-être un jour, dans 40 ans, d'autres parlementaires plus jeunes,
nos enfants, vont référer à ce discours. C'est rare qu'on réfère aux discours
des oppositions, malheureusement. On le fait un peu quand ça fait scandale ou
quand ça a été très gros, mais on fait référence beaucoup au discours du
ministre qui était en poste à l'époque. Et donc, c'est aussi une occasion pour
le ministre de marquer peut-être l'histoire ou de faire en sorte que les gens
qui vont nous suivre puissent y référer.
Donc, c'est une invitation, un appel que
je lance au ministre. Moi, je serai présente à toutes les étapes et j'espère
que lui aussi, parce que ça nous renseigne, nous aussi, lors de notre étude du
projet de loi, sur certains éléments importants. Et je pense que c'est des
moments qui sont importants pour tous les parlementaires et aussi, comme je le
disais, pour les historiens du futur.
Je pense que je ne l'ai pas mentionné, j'ai
envie de le répéter pour avoir à notre esprit la réflexion de Camille Laurin et
des gens qui l'ont entouré, notamment M. Guy Rocher. Dans le livre blanc, il y
avait quatre principes, et, comme je l'ai dit, je les ai répétés et je les ai
repris parce que ces principes-là sont toujours d'actualité, donc, dans le
livre orange que j'avais déposé au printemps dernier. Le premier principe :
«Au Québec, la langue française n'est pas qu'un simple mode d'expression, mais
un milieu de vie», et ça, <c'est...
Mme Ghazal : ...il
y
avait quatre principes, et, comme je l'ai dit, je les ai répétés et je les ai
repris parce que ces principes-là sont toujours d'actualité, donc, dans le
livre orange que j'avais déposé au printemps dernier. Le premier principe :
«Au Québec, la langue française n'est pas qu'un simple mode d'expression, mais
un milieu de vie», et ça,> c'est tout à fait vrai.
«On doit respecter... » Le deuxième
principe : «On doit respecter les minorités, leurs langues et leurs
cultures.» Donc, c'était une invitation à l'ouverture pour tous les peuples et
pour toutes les personnes qui viennent se joindre au Québec.
Le troisième principe : «Il est
important d'apprendre d'autres langues que le français», et moi, j'ai envie
d'ajouter «et que l'anglais», parce qu'à l'époque on apprenait peut-être moins
souvent... les jeunes étaient moins attirés par l'anglais, alors qu'aujourd'hui
ce n'est plus du tout le cas. Pourquoi ne pas apprendre d'autres langues?
Gérald Godin avait fait l'effort, quand il était député de Mercier, d'apprendre
le grec, ce qui n'est pas très, très facile. Il disait : Je n'étais pas
très bon, mais il a quand même fait cet effort. Donc, ça aussi, c'est un
principe intéressant, de dire : Bien, on s'ouvre à toutes les langues et
pourquoi pas, non plus, des langues autochtones.
Quatrième principe : «Le statut de
langue française au Québec est une question de justice sociale», et ça, ça
revient à toute la question de la langue du travail qui est si importante. Il
ne faut pas que la langue qu'on parle, le fait de ne pas parler anglais, crée
des inégalités économiques. Et les inégalités économiques, ça existe dans notre
société. On dirait qu'on en parle de moins en moins. On parle beaucoup
d'identité, de pays d'origine, d'ethnies, mais on oublie aussi que, des fois,
quelqu'un qui vient d'une famille pauvre à Rimouski ou dans le Bas-du-Fleuve, peut-être,
a des choses à partager qui sont beaucoup plus proches avec quelqu'un, par
exemple, qui n'est pas né ici et qui est dans une famille de Parc-Extension.
Peut-être qu'il partage des choses... beaucoup plus que deux personnes qui sont
ici et que leurs ancêtres sont ici depuis 400 ans, alors qu'il y en a un
qui vient d'une famille riche et aisée et l'autre d'une famille pauvre.
Donc, je trouve que la question de la
justice sociale dont faisait référence, dans le livre blanc de la Charte de la
langue française, Camille Laurin, des inégalités économiques, c'est un élément
important et c'est par la langue du travail, en faisant en sorte que ça se
passe en français au travail, qu'on va pouvoir assurer cette justice sociale.
Donc, Mme la Présidente, je répète, je
suis heureuse d'être ici. Je suis en mode écoute, patience, ouverture, etc., et
toutes les qualités possibles, inimaginables et de collaboration, mais je veux
être ferme par rapport à la défense de la langue française en milieu de
travail. Il y a urgence en la demeure. On l'a vu avec les P.D.G. des grandes
entreprises qui sont totalement déconnectés de ce qui se passe au Québec. On
l'a vu, malheureusement, même avec la direction de l'Université McGill. Donc,
j'espère que toutes ces personnes écoutent notre commission et prennent des
bonnes notes pour voir qu'est-ce qui se passe dans la société québécoise et sur
cet enjeu qui est extrêmement important pour notre avenir, pour l'avenir de
tous les enfants de la loi 101, de tous les <enfants...
Mme Ghazal : ...avec
la
direction de l'Université McGill. Donc, j'espère que toutes ces personnes
écoutent notre commission et prennent des bonnes notes pour voir qu'est-ce qui
se passe dans la société québécoise et sur cet enjeu qui est extrêmement
important pour notre avenir, pour l'avenir de tous les enfants de la loi 101,
de tous les >enfants québécois, peu importe leurs origines, peu importe
leur statut social, peu importe d'où ils viennent. Et j'ai très, très hâte de
commencer l'étude article par article. Merci beaucoup.
• (16 h 10) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, Mme la députée de Mercier. Donc, j'invite maintenant le
porte-parole du troisième groupe d'opposition en matière de langue française et
député de Matane-Matapédia à faire ses remarques préliminaires. La parole est à
vous.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé
:
Merci, Mme la Présidente. À mon tour, je veux saluer le ministre, et mes
collègues, et toutes ces personnes qui s'intéressent à cet enjeu et qui vont
nous écouter, soit en direct, soit en différé, sur cet enjeu important.
Aucune formation politique dans l'histoire
du Québec ne s'est autant intéressée à la langue française, que ça soit de ses
origines jusqu'à aujourd'hui. Le français, c'est à la base de l'engagement
politique des militants du Parti québécois. Camille Laurin était un membre du
Parti québécois, Gérald Godin était un membre du Parti québécois, Guy Rocher a
travaillé avec le Parti québécois à écrire la loi 101, et, encore aujourd'hui,
son message nous parle.
Le gouvernement a annoncé un projet de loi
costaud. Je ne partage pas sa conception de «costaud». C'est un projet de loi à
dose homéopathique. Il y en a beaucoup, mais sur très grand. Ce n'est pas un
projet de loi courageux, c'est encore moins un projet de loi historique. Ce
projet de loi n'est pas à la hauteur des défis qui sont les nôtres. Lors de la
commission parlementaire, de nombreux intervenants sont venus nous dire :
Ce projet de loi ne va pas permettre de renverser le déclin du français. Le
ministre le sait, mais le ministre est isolé, ne peut pas aller plus loin.
Camille Laurin, parce qu'on s'en réclame
souvent, est arrivé avec un projet de loi audacieux, courageux, non consensuel,
mais nécessaire. Il a convaincu son premier ministre d'aller de l'avant. Le
ministre a échoué. Le premier ministre n'a pas été convaincu par le ministre.
Encore récemment, lorsqu'on posait la question au premier ministre : Avec
ce qu'on a entendu en commission parlementaire, est-ce qu'on ne devrait pas
aller plus loin, notamment sur la fréquentation des cégeps? Non. Ça se termine
là, et on a appris qu'il y a une limite au nationalisme de ce gouvernement. C'est
le maximum où on peut aller.
Alors, si on connaît les mesures
essentielles, notamment la fréquentation des collèges, notamment la
connaissance du français pour les immigrants, et qu'on refuse de le faire,
c'est non seulement dommage, mais c'est une occasion manquée.
Je ne doute nullement, Mme la
Présidente, des intentions du ministre. Je sais qu'il est en mesure... il
serait en mesure d'apprécier à peu près toutes les mesures qu'on a proposées, mais
il est dans un gouvernement où il y a une limite au nationalisme et il l'a
appris à ses dépens. Présentement, j'ai l'impression que le premier ministre
est davantage emballé par un ministre délégué aux Nordiques qu'à la Langue. Je
vous le dis très <sincèrement...
M. Bérubé : ...des
intentions
du ministre. Je sais qu'il est en mesure... il serait en mesure d'apprécier à
peu près toutes les mesures qu'on a proposées, mais il est dans un gouvernement
où il y a une limite au nationalisme et il l'a appris à ses dépens.
Présentement, j'ai l'impression que le premier ministre est davantage emballé
par un ministre délégué aux Nordiques qu'à la Langue. Je vous le dis très >sincèrement.
Des démographes, des mathématiciens, des
gens qui ont étudié ces questions ont dit : Écoutez, on peut intervenir
sur plusieurs fronts, mais il y a des enjeux qui sont plus déterminants que d'autres.
D'abord, l'immigration. Avant même de parler de la langue du travail, parlons
de l'immigration, la connaissance du français des immigrants. Bien sûr, on peut
décider de franciser, mais la connaissance à l'entrée au Québec est un gage
supplémentaire de réussite de sa vie au Québec, dans le domaine du travail,
dans son quartier, dans sa communauté. Vivre l'expérience québécoise, ça passe
beaucoup par le français.
Le Québec est une société fragile au plan
démographique, au plan linguistique. L'enjeu de l'immigration est important.
Pourtant, personne d'autre que le Parti québécois n'en a parlé, personne d'autre.
Bien sûr, le ministre pourra se dire : Bien, deux des oppositions sont
plutôt heureuses de notre projet de loi. Si c'est l'étalon sur lequel il faut
juger ce projet de loi là, c'est bien insuffisant, Mme la Présidente. L'enjeu
de l'immigration est essentiel, et on va en parler. L'enjeu de la culture
également. Il faut lier la culture et la langue. Ça s'impose. Si on avait eu
une vision, un livre blanc, probablement qu'on aurait pu lier les deux. Alors,
le Parti québécois va lier la culture québécoise et la langue, ça va de soi.
À l'origine de la loi 101, et c'est
un de ses rédacteurs qui nous l'a dit ici, il aurait fallu inclure les cégeps.
Pourquoi? Parce que le parcours scolaire commence au primaire, voire même au
préscolaire, se poursuit au secondaire. Et qu'est-ce qu'on découvre au collège, et
on l'a découvert récemment dans un article du Journal de Montréal? Certains
cégeps québécois ont maintenant une majorité d'allophones. Alors, cette
information, on ne l'avait pas. On pourrait supposer qu'on ne l'avait pas lors
des consultations, mais le ministre l'a depuis ce temps-là. Le ministre a
rencontré le premier ministre, et il n'a pas bronché. Donc, on accepte, nous, en
tout cas, le Parti québécois est le seul parti qui ne l'accepte pas, qu'après
avoir investi un temps précieux pour faire connaître le français à des enfants,
à des jeunes issus de l'immigration, au collégial, financé par l'État
québécois, un moment important de socialisation, de choix professionnels, de...
on commence à être en couple, à choisir son lieu d'implantation, là on
abandonne tout. C'est le libre choix. Le gouvernement du Québec va financer sa
propre assimilation linguistique.
Ces données sont connues, mais personne d'autre
que le Parti québécois n'en a parlé. Pourquoi? Parce que nous considérons que
le but des mesures qu'on propose, ce n'est pas d'être populaires, ce n'est pas
de préserver des clientèles électorales. L'objectif, c'est de faire ce qui est
nécessaire pour renverser le déclin. Et ça, c'est le vrai <courage.
M.
Bérubé
: Ces
données sont connues, mais personne d'autre que le
Parti québécois n'en
a parlé. Pourquoi? Parce que nous considérons que le but des mesures qu'on
propose, ce n'est pas d'être populaires, ce n'est pas de préserver des
clientèles électorales. L'objectif, c'est de faire ce qui est nécessaire pour
renverser le déclin. Et ça, c'est le vrai >courage.
Tout à l'heure, le grand Guy Rocher sera à
la Bibliothèque de l'Assemblée nationale. Je vais vous faire une prédiction, Mme
la Présidente, il y a plein d'élus qui vont aller le rencontrer et qui vont lui
dire qu'ils l'admirent. Aucun de ceux-là, outre les députés du Parti québécois,
ne vont lui dire qu'ils ont retenu ce qu'il a dit en commission à l'effet qu'il
fallait appliquer la Charte de la langue française au domaine collégial. Aucun
ne le dira. Si on veut rendre hommage à Camille Laurin, on fait preuve de
courage. Si on veut rendre hommage à Guy Rocher, on écoute son propos aujourd'hui.
Fort de toute son expérience de vie, il nous a dit de façon limpide qu'on est
rendus là, qu'il a changé d'idée sur cette question, qu'il faut l'appliquer au
collégial. À partir du moment où, dans certains collèges il y a une majorité, je
ne parle même pas des francophones, une majorité d'allophones qui font le
transfert linguistique vers les cégeps anglophones, et qu'on le sait, et qu'on
l'accepte, je me questionne fortement sur l'exercice qu'on va vivre. Nos
propositions sont connues, le gouvernement les a déjà refusées. Alors, article
par article, on va, à certains égards, valider des définitions, proposer des
choses, mais ça va être très secondaire, Mme la Présidente. Donc, moi, je n'ai
pas d'attentes élevées. La bataille, le gouvernement l'a déjà perdue dans son
caucus. Ils n'iront pas plus loin que ce qu'ils ont proposé.
À peu près tous les groupes sont venus
nous dire... Le ministre a évoqué qu'il y en a eu une cinquantaine. Combien
d'entre eux nous ont dit : J'ai changé d'idée sur la fréquentation au
cégep? Quand vous avez une coalition qui part de Guy Rocher jusqu'à Christian
Dufour, ça commence à faire assez large dans le spectre, Mme la Présidente.
Mais pourtant, ils ont décidé de ne pas y aller. Encore une fois, je ne suis
pas dans le secret des dieux, mais je suis assez convaincu que le ministre
n'est pas rébarbatif à ça, mais le premier ministre ou les gens qui l'entourent
lui ont dit : Non, c'est le maximum. Ça a l'air nationaliste, ça a l'air
de s'occuper du français, mais on n'ira pas plus loin que ça.
Alors, je m'excuse d'avoir ce ton, mais il
faut dire les choses telles qu'elles sont. La langue, pour moi, c'est une
conviction très profonde. Mon engagement politique de 25 ans au Parti
québécois est motivé fortement par cet enjeu. Je connais très bien cet enjeu,
j'ai à peu près tout lu ce qui existe là-dessus.
Tout à l'heure, on a indiqué que c'est le
plus grand exercice depuis la loi 101. Pourquoi occulter la loi n° 14
du gouvernement de Mme Marois en 2013, loi n° 14 qui
n'a pas pu aller de l'avant, on était un gouvernement minoritaire? Pourquoi?
Parce que, notamment, le gouvernement de la CAQ, en fait qui était l'opposition
de la CAQ, disait que ça allait trop loin. Moi, je m'en souviens, j'étais au
Conseil des ministres, Mme la Présidente. Ça m'a fait mal d'entendre ça, parce
qu'on aurait pu avancer. Ça allait trop loin. Alors, je me souviens de ça.
En 1977, je n'y étais pas, mais j'ai
suffisamment lu pour savoir que ce n'était pas consensuel, que le Parti libéral
a voté contre la loi 101, avec tout ce que ça impliquait de critiques à l'égard
du Dr Laurin. Mais il y est allé quand même parce que c'était nécessaire. Pas
parce que c'était nécessairement populaire avec toutes les classes de <la...
M. Bérubé : ...
je n'y
étais pas, mais j'ai suffisamment lu pour savoir que ce n'était pas consensuel,
que le Parti libéral a voté contre la loi 101, avec tout ce que ça impliquait
de critiques à l'égard du Dr Laurin. Mais il y est allé quand même parce que
c'était nécessaire. Pas parce que c'était nécessairement populaire avec toutes
les classes de >la société, il fallait le faire.
Le courage, c'est aussi de dire les choses
telles qu'elles sont. Il y a des municipalités qui ont un statut bilingue et qui
ne devraient pas l'avoir. Le ministre le sait, il a les statistiques. Qu'est-ce
qu'il fait avec le projet de loi? Il dit aux municipalités : Écoutez, on
va faire une entente entre nous, je vous enlève le statut, mais vous avez 120 jours,
avec une motion, pour annuler ça. On le fait ou on ne le fait pas. Ça, ce n'est
pas le courage que moi, je souhaitais. Nous, on pense qu'à partir du moment où
vous avez le tiers de votre population qui est... en deçà du tiers qui est
anglophone vous perdez votre statut. Pourquoi on fait ça? De quoi a-t-on peur?
Le gouvernement va nous dire : Ah!
mais il y a deux trouvailles, il y a deux trouvailles importantes. D'abord, le
ministre a bien pris note de la proposition du Pr Patrick Taillon, mon
successeur au Comité national des jeunes du Parti québécois à l'époque, qui dit :
Il y a une partie québécoise à la Constitution, puis on pourrait y insérer un
certain nombre de nos souhaits politiques, comme une carte de souhaits. Mme la
Présidente, de l'aveu même du Pr Taillon, cet exercice est loin d'être
assuré qu'il est voué au succès. Pourquoi? Parce qu'on est dans la fédération
canadienne. Puis on peut bien mettre des souhaits, le Canada a toujours le
dernier mot.
Moi, c'est un statut que je n'accepte pas.
Je travaille pour m'en libérer. D'autres l'accepteront. Ils vont se river le
nez à cette réalité comme si moi, je m'avançais vers ce plexiglas. Ça va
arriver. Et là il va rester quoi après cet émoustillage de
constitutionnalistes? Qu'est-ce qu'il va rester dans le réel à Montréal, à
Laval pour protéger notre langue? Seulement de la poussière, un peu de fumée.
• (16 h 20) •
Le ministre, je l'ai entendu dire
récemment, dans l'histoire du P.D.G. d'Air Canada : Dans notre projet
de loi, on va assujettir les entreprises fédérales à la loi 101. Comment?
Comment on va faire ça? Est-ce que le gouvernement fédéral a abandonné sa
juridiction? Est-ce qu'il nous a envoyé un message qu'on pouvait le faire? Bien
sûr que non. Alors, c'est un souhait, sans plus. Ça mérite d'être dit.
Par contre, sur le réel, il avait
l'occasion d'agir. Cégeps en français, non, il ne faut pas s'aliéner les jeunes
qui vont là et leurs parents. C'est comme pour les... C'est la même chose
qu'avec les collèges privés avec la CAQ. C'est des clientèles qui nous aiment,
il ne faudrait pas aller là, on pourrait perdre du monde. Mais c'est regrettable.
Alors, moi, je n'ai aucune attente face à ce projet de loi là, aucune attente.
Sur l'essentiel, c'est un échec.
Sur l'immigration, le ministre est bien
placé pour en parler, il a été titulaire de ce ministère. Ils ont même
identifié des cibles à l'élection de 2018, des cibles qui sont révisées. Si
c'est fragile, le français au Québec, si notre capacité d'intégration est
limitée, si le premier ministre nous a <dit...
M. Bérubé : ...
le
ministre est bien placé pour en parler, il a été titulaire de ce ministère. Ils
ont même identifié des cibles à l'élection de 2018, des cibles qui sont
révisées. Si c'est fragile, le français au Québec, si notre capacité
d'intégration est limitée, si le premier ministre nous a >dit, je le
cite, qu'il a peur que ses petits-enfants ne parlent pas français, une fois
qu'on a dit ça, pourquoi on ne fait pas ce qui doit être fait? Avoir un
équilibre linguistique, notre capacité d'intégration en français, la
socialisation en français, il faut que ça soit plus que des symboles, il faut que
ça soit la réalité.
On a proposé notre propre plan au mois de
mai, d'accord, et on a proposé notre propre projet de loi récemment. Au mois de
mai, qu'est-ce qu'on disait? C'est intéressant parce que, dans l'actualité
récente, on a questionné le collègue du ministre, le ministre de l'Économie,
sur la connaissance du français pour faire affaire avec l'État. Bon, j'ai
entendu Québec solidaire en parler récemment, mais notre proposition date du
mois de mai, je l'ai là-dedans. Et le ministre a dit quoi? Puis la question
était bien posée : Qu'est-ce que vous pensez des conditions qui ont été
proposées par Québec solidaire? Et sur celle du français, le ministre a dit :
Il n'en est pas question. Pas convaincu que le ministre responsable de la
Langue était heureux d'apprendre ça, pas convaincu du tout.
On l'avait écrit en mai dernier qu'une des
conditions essentielles pour faire affaire avec l'État, c'était de respecter la
Charte de la langue française. On pourrait s'imaginer que les entreprises ont
une liste d'exigences auxquelles elles doivent répondre, par exemple, de
s'assurer que ça se passe en français dans leur entreprise, les communications,
l'apprentissage, les saines pratiques, vraiment l'intégration au Québec, et que,
si vous respectez tout ça, bien, l'État fait affaire avec vous, si vous n'êtes
pas en contravention, par exemple, avec la Charte de la langue française. Ça
pourrait être sur l'affichage aussi, ça pourrait être sur d'autres enjeux.
Bien là, là, j'ai su, parce qu'un article
récent nous a rappelé qu'il y avait des échanges au caucus là-dessus... bien là,
je sais dans quelle colonne placer au moins un ministre, le ministre de
l'Économie. Puis ça va compter, là, l'économie, pour ce qui est des entreprises
puis pour ce qui est de ce qu'on souhaite faire dans la langue du travail. Lui,
il n'est pas émoustillé, là, pour reprendre le terme de tout à l'heure, là. Ça
ne l'émoustille pas, le nationalisme et la langue. Ce n'est pas pour ça qu'il
est venu en politique. Mais moi, ça me touche, cet enjeu-là. Et comme je n'ai
pas accès aux discussions du gouvernement, bien, c'est par ces bribes-là que je
réalise qu'il y a des gens qui ne veulent pas qu'on aille plus loin que ça.
Pourtant, c'est nécessaire et c'est même
gagnant pour le Québec, parce qu'on peut apprendre une langue, deux langues,
trois langues, quatre langues, cinq langues, c'est souhaitable, mais l'État
doit avoir un caractère français, seule langue officielle. Puis c'est même un
avantage de faire le pont entre la francophonie et l'Amérique. On est
résolument Américains dans le sens continental, mais on a un avantage
supplémentaire, c'est la connaissance d'une langue qui est parlée par
500 millions de locuteurs, une des langues les plus apprises comme langue
secondaire, une grande langue du monde. Moi, je trouve que c'est quelque chose
de beau. C'est non seulement un héritage, c'est un actif actuel. Donc, il ne
faut pas manquer notre coup avec le projet de <loi...
M.
Bérubé
: ...la
connaissance d'une langue qui est parlée par 500 millions de
locuteurs, une des langues les plus apprises comme langue secondaire, une
grande langue du monde. Moi, je trouve que c'est quelque chose de beau. C'est
non seulement un héritage, c'est un actif actuel. Donc, il ne faut pas manquer
notre coup avec le projet de >loi.
Le gouvernement, je vais lui accorder,
dispose présentement d'un capital de sympathie qu'il pourrait utiliser à des
choses utiles comme la langue. Le moment est venu. J'aurais souhaité qu'entre
la fin de l'écoute des groupes et le début de ces travaux il y ait des
changements, notamment sur la fréquentation des collèges. Non, le premier
ministre a fermé la porte. C'était lors du congrès de la CAQ, je crois, qui a
eu lieu il y a quelques semaines à Trois-Rivières. J'aurais aimé que d'autres
des ministres disent : Nous sommes d'accord avec notre ministre, il a
raison d'exiger le français. Parce que, si le ministre de l'Économie avait lu
le projet de loi de son collègue, il aurait vu que le ministre est sensible à
ces questions-là aussi. C'est écrit dans le projet de loi. Alors, c'est tout un
camouflet.
Ce serait facile pour moi de vous dire :
J'espère qu'on va réussir, j'espère qu'on aura de bonnes discussions, j'espère
qu'on avancera.
Ça dépend de vos attentes par rapport au projet de
loi. Nous, nos attentes, c'est de renverser le déclin. Ça n'arrivera pas avec
le projet de loi. Alors, ça nous place dans quelle situation? De dire :
Bien, écoutez, bravo, M. le ministre, vous êtes allé le plus loin que vous
pouviez avec le gouvernement que vous aviez. Pas pour nous, non. C'est sérieux,
l'affaire. Ce n'est plus Montréal seulement, c'est Laval, c'est Saint-Lambert,
c'est Brossard, c'est l'Outaouais, c'est l'Estrie, c'est les réseaux sociaux, c'est
le défi qu'on a avec la jeunesse québécoise.
C'est le défi également d'intéresser le français
en étant exemplaire à tous égards. Nous-mêmes, dans notre rôle de parlementaire,
on doit donner l'exemple à travers la qualité du français. Puis généralement,
je trouve que les parlementaires québécois ont un français assez exceptionnel,
dont on peut être fiers. Mais il faut être exemplaire à tous égards dans notre
conduite et aussi dans les gestes qu'on pose à travers les politiques, à
travers les projets de loi, à travers des événements de l'actualité qui sont
spontanés.
Quand arrive un événement comme l'affaire
Michael Rousseau, c'est quand même assez révélateur. Le ministre, à ce
moment-là, nous dit : Oui, ça va être réglé dans notre projet de loi parce
que les entreprises fédérales vont être assujetties. Sur quelles bases dit-il
ça? Un souhait, oui. Quelles sont ses chances de réussite? Je suis assez
convaincu qu'on lui a dit que c'était très faible. Mais il ne nous le dira pas
ici. Puis que le ministre de l'Économie nous dise : Moi, je ne vais pas
forcer personne, puis moi, quand je suis allé en Chine, j'ai appris huit
phrases en cantonais... l'histoire du Québec ne va pas s'appuyer là-dessus pour
dire que c'est assez. Je ne penserais pas, non. Alors, cet enjeu-là est très important
pour nous.
Le ministre a entre les mains notre projet
de loi. Peut-être l'a-t-il consulté, peut-être sait-il que c'est ce qui est nécessaire.
Moi, je me porte volontaire, Mme la Présidente, pour rencontrer personnellement
chacun des membres de son caucus qui est contre ces enjeux que j'ai évoqués et
que je sais le ministre sympathique à. C'est sérieux, là. Je le dis pour vrai
parce que je ne veux pas qu'on manque notre coup. Je veux qu'à la fin de ce
projet de loi <là...
M.
Bérubé
:
...je me porte volontaire,
Mme la Présidente, pour rencontrer
personnellement
chacun des membres de son caucus qui est contre ces enjeux que j'ai évoqués et
que je sais le ministre sympathique à. C'est sérieux, là. Je le dis pour vrai
parce que je ne veux pas qu'on manque notre coup. Je veux qu'à la fin de ce
projet de loi >là on puisse dire : On a avancé de façon
significative. Ce n'est pas la première fois que je débats avec le ministre, j'étais
là sur la loi n° 21.
D'ailleurs, je me permets de rappeler
notre responsabilité comme parlementaires face aux lois votées à l'Assemblée nationale.
Une fois qu'elles sont votées, il y a le respect qu'on doit avoir à l'égard de
ces lois-là, à l'égard des parlementaires. Et respecter une loi votée par l'Assemblée
nationale, c'est respecter les prérogatives de l'Assemblée nationale. Alors, la
loi n° 21, je serais allé de façon différente, plus
complète, plus cohérente. Mais, une fois qu'elle est adoptée, je la défends,
cette loi-là. J'ai voté puis, même si j'avais voté contre, je la respecterais quand
même.
Sur la langue, on n'est pas au même
endroit du tout. En partant, le ministre, et j'ai le regret de le dire, j'ai beaucoup
d'estime pour lui, mais il a perdu la bataille déjà. Il y avait moins de
nationalistes qu'on pensait à la CAQ. Je sais qu'ils le savent. Je sais qu'ils
savent qui bloque au Conseil des ministres puis j'ai une bonne idée aussi, mais
c'est regrettable. J'aimerais qu'en cours de route on puisse les convaincre
d'appliquer les mesures qui ont été proposées. Guy Rocher va rappeler tout à
l'heure ce qu'il nous a dit ici. Il va encore le dire, avis à ceux qui vont le
voir au 5 à 7. Je vous avertis d'avance, il va le dire.
Si on se réclame de Camille Laurin, il
faut également avoir ce courage. Et ultimement, si on est vraiment sérieux avec
la langue, si on veut arrêter d'attendre après le gouvernement fédéral, si on
pense que l'avenir de la nation québécoise ne repose pas sur les humeurs des ministres
du gouvernement de Justin Trudeau, bien, il faut faire l'indépendance du Québec.
Il faut arrêter d'attendre. Il faut prendre toutes nos décisions. Si on est un
grand peuple, bien, on est capables d'assumer pleinement notre destinée, et ça
passe par la langue. Et la langue, à elle seule, serait un argument pour faire
l'indépendance. Mais vous savez quoi? Il y en a beaucoup d'autres.
Alors, en résumé, Mme la Présidente, je
suis extrêmement déçu de ce projet de loi. Je constate, comme bien des acteurs
nationalistes qui avaient fondé des espoirs, que finalement on est passés à
côté d'une occasion qui, elle, aurait été historique. Mais ça ne sera pas historique.
Ça sera un projet de loi comme les autres. Je vais y participer, mais j'ai le
regret de voir que la Coalition avenir Québec, sur cet enjeu, a vu ce dossier
comme un dossier comme les autres. Puis c'est regrettable, et on passe à côté
du destin du Québec, et ça, c'est une occasion manquée que je regrette
tristement. Merci, Mme la Présidente.
• (16 h 30) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Matane-Matapédia. 20 minutes pile. J'ai trois
députés qui ont l'intention de prendre la parole, donc je reconnaîtrais, pour
commencer, le député de Sainte-Rose. M. le député, vous pouvez aller jusqu'à
20 minutes, si vous le désirez aussi.
M. Christopher Skeete
M. Skeete : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Très heureux de pouvoir intervenir à l'aube de la consultation...
bien, pas la consultation, mais l'étude détaillée d'un <important projet
de loi qui, il faut se le dire...
>
16 h 30 (version révisée)
<1355
La
Présidente (Mme Thériault) : ...Rose.
M. le député, vous pouvez
aller jusqu'à 20 minutes, si vous le désirez aussi.
M. Skeete :
Merci
beaucoup,
Mme la Présidente. Très heureux de pouvoir intervenir à l'aube
de la
consultation... bien, pas la
consultation, mais
l'étude
détaillée d'un >important projet de loi qui, il faut se le dire, est
vaste comme chantier.
Vous le savez, chers collègues, j'ai la responsabilité,
qui m'a été donnée par le premier ministre, d'être responsable des Québécois
d'expression anglaise, une tâche qui, dans le contexte actuel du projet de loi n° 96, est une tâche, on va dire, délicate. Elle est
délicate, cette tâche, parce que l'histoire, du point de vue des deux solitudes
et de la solitude anglaise, est une histoire différente qui est vécue par la majorité
francophone, mais elle n'est pas pour autant indissociable. Il y a deux
peuples, les anglophones et les francophones, les deux solitudes, on le sait, et
les 50 dernières années n'ont pas été faciles pour les anglophones, qui,
dans le discours souverainiste, fédéraliste, ont été forcés de choisir entre
leur lieu d'appartenance, leur Québec, et leur pays. On sait le choix qu'ils
ont fait.
Arrive un projet de loi comme 96 qui, à
mon sens, nous permet l'occasion de freiner le déclin du français en misant sur
des vecteurs importants d'anglicisation, sans pour autant viser la communauté
d'expression anglaise. Et, quand je dis ça, je le dis sincèrement, parce que ce
n'est pas négligeable d'avoir écrit et articulé une vision dans le projet de
loi n° 96 qui nous permet de protéger à la fois la
langue française et l'unicité du fait français en Amérique du Nord, en même
temps, de respecter la contribution, la place de la minorité linguistique
anglophone. Et ça, c'est vraiment spécial, il fait se le dire.
D'un bord, le ministre nous a créé un
nouveau droit, un droit que nous avons tous maintenant, un droit à vivre en
français. Et c'est bizarre quand on le dit comme ça parce que, tu sais, il me
semble qu'on a toujours eu ce droit-là, mais la réalité, c'est que c'était
difficile, à beaucoup d'égards, de vivre, au Québec, en français. Et, en créant
ce droit-là, on va aussi donner le droit à la minorité linguistique historique
au Québec d'apprendre le français pour y vivre, pour mieux y vivre et pour
mieux y réussir.
Dans mes consultations, que j'ai faites
auprès de la population en 2019, j'ai fait le tour du Québec, j'ai rencontré
plus de <140...
M. Skeete : ...
va
aussi donner le droit à la minorité linguistique historique au Québec
d'apprendre le français pour y vivre, pour mieux y vivre et pour mieux y
réussir.
Dans mes consultations, que j'ai faites
auprès de la population en 2019, j'ai fait le tour du Québec, j'ai rencontré
plus de >140 groupes, et le constat était unanime, la demande
numéro un, Mme la Présidente, c'était un désir profond d'apprendre
davantage le français. Parce qu'on le réalise que, pour avoir du succès au
Québec, on doit maîtriser la langue française. Comment peut-on penser vivre en
Allemagne et ne pas apprendre l'allemand? C'est la même chose pour le français
et le Québec.
Le projet de loi donne le droit aux
Québécois d'expression anglaise un nouveau droit de prendre... d'apprendre le
français pour bien y vivre et aussi il reconnaît ses institutions, notamment les
institutions comme les cégeps, où on va donner la première priorité aux
Québécois d'expression anglaise à leur réseau.
C'est une donnée qui ne m'est pas très
fier... qui ne me rend pas très fier, mais, quand je suis sorti du secondaire,
je n'avais pas une forte moyenne. Elle n'était pas si bonne que ça, là, puis
c'est un peu gênant de le dire aujourd'hui, parce que ma fille, elle m'écoute
certainement, et puis ça va lui donner des idées que c'est acceptable d'avoir
une moyenne comme ça. Ça fait que... mais j'avais une moyenne de 73 %
quand je suis sorti du secondaire.
Aujourd'hui, un jeune anglophone qui veut
fréquenter Dawson, Vanier, John-Abbott avec une moyenne de 73 % n'y a pas
accès parce qu'il est en compétition avec d'autres personnes qui viennent du
réseau francophone, qui viennent augmenter la moyenne générale de ces écoles
qui sont limitées en nombre. Le projet de loi vient corriger ça, vient donner
un droit aux Québécois d'expression anglaise à fréquenter leur réseau.
Donc, beaucoup a été dit du projet de loi
n° 96, mais rapidement, on constate la création de deux nouveaux droits,
et ça, je pense que c'est spécial, compte tenu que c'est une loi qui est
nécessairement pour la protection du français.
But that's not all.
Because a lot has also been said about the scope of this bill in terms of how
it may be in the front to English-speaking Quebeckers' ability to be and remain in Québec, but in which way? My colleague
the MNA of Mercier has said it
very eloquently, we looked, and we looked, and we looked for where it was that
the English community was impacted, and there was no indication of that.
Section 15 of the
health care... Health and Social Services Act remains unaffected, which means
English-speaking Quebeckers,
English tourists from <abroad...
M. Skeete :
...for where it was that the English community was impacted, and
there was no indication of that.
Section 15 of the
health care... Health and Social Services Act remains unaffected, which means
English-speaking
Quebeckers
, English tourists from >abroad,
anybody wanting or needing services in health care in Québec has the right to receive those services in English.
We've also said that
access to justice will be unaffected. Section 122 of the Charter of Rights and
Freedoms is out of scope of Bill 96. Therefore, your right to justice is
unimpacted.
So, what this bill does
is it gives you two new rights : the right to be successful in Québec by learning and mastering French, the
only French jurisdiction in North America, and also allowing you to have access
to your higher education network in priority.
So, we can look and look
for ways that this bill is an affront. I think we find none. What I do concede
is the fear. There is clearly concern, I think my colleague... one of my
colleagues in the Opposition mention that there is
concern in the community, and I hear that concern, and I am not deaf to it. I
think that fear is largely rooted in the suspicion of the other, rooted in our
two solitudes, a gap that I have tried to bridge for the passed three years.
So, the opportunity that
we have here, in front of us, is to analyze each disposition, and to make sure,
once again, that it doesn't affect the English community directly. And that's
my promise to the community, to the friends that I grew up with, to the friends
that I went to school with, that this law gives you advantages in Québec as a
linguistic minority. And it also has the added advantage of keeping what makes
this place special, what allows us to brag to our friends who live in Toronto
that, you know, Toronto might be nice, but it's not as cool as Montréal and
Québec. The thing that makes us proud, when we fly back home from international...
all the signs are in French, and we know how to read them, and that je-ne-sais-quoi
that we all have is maintained because we all recognize that this place has
always been and needs to always be a French jurisdiction.
And the alternative is
simple, the alternative to that reality is Louisiana. Do we really want French
to be a cute little happenstance that happens by accident in a couple French
names and a couple French people who are left speaking it, but really, it's an
anecdote? I don't think anybody in the English community wants that. I think
the English community is committed to protecting French. And when you look at
the alternative, a clear example in the United States in the State of
Louisiana, I think we have our warning, and we have the ability to act.
Donc, chers
collègues, j'ai <hâte...
M. Skeete :
...it's
an anecdote? I don't think
anybody in the English community wants that. I think the English community is
committed to protecting French. And when you look at the alternative, a clear
example in the United States in the State of Louisiana, I think we have our
warning, and we have the ability to act.
Donc,
chers collègues, j'ai >hâte d'échanger avec vous. Je suis sûr que ça va
être des heures et des heures de plaisir. Et je vous remercie pour votre
attention, et au plaisir d'échanger avec vous. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Sainte-Rose. Je reconnais maintenant M. le député de
Saint-Jean. La parole est à vous.
M. Lemieux : Et il reste
combien de temps autour de...
• (16 h 40) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous pouvez avoir 20 minutes ,vous aussi. Les remarques préliminaires, c'est,
tout le monde, 20 minutes.
M. Lemieux : Je n'en prendrai
pas tant que ça, Mme la Présidente. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous avez le droit, M. le député.
M. Louis Lemieux
M. Lemieux : Merci beaucoup. C'est
qu'en vous écoutant tous et en arrivant ici, tout à l'heure, j'avais envie de
crier : Enfin! pressé que j'étais d'aborder cette partie-là de ce projet
de loi là en particulier. Et, comme tout ce qui... Comme la députée de
Marguerite-Bourgeoys, dans le fond, tout m'interpelle dans ce projet de loi là.
Je l'avoue, je le confesse, même l'Acte de l'Amérique du Nord britannique,
quand on commence à parler de constitution, j'en suis. Je veux en savoir plus,
en tout cas. Pas sûr que je vais signer une constitution demain matin, mais j'aimerais
ça, en parler. Bref, tout m'intéresse là-dedans.
Et les plus jeunes ou les moins vieux vont
dire : Ah! je me souviens, je n'étais pas là, en 1976, 1977, mais je m'en
souviens. Mais moi, j'étais là pour le bill 22. Ah! ça, je sais, les
libéraux s'en souviennent. 22, c'est un mauvais souvenir. Mais j'étais là pour
le bill 63 aussi. On disait «bill», à l'époque. Ce n'est pas un
anglicisme, c'est comme ça qu'on disait ça.
Et je me souviens du bill 63, parce
que ce que vient de dire mon collègue de Sainte-Rose au sujet de ce monde dans
lequel on vit... a vécu au cours des dernières décennies... parce que c'est un
sujet très sensible, c'est une corde très délicate pour les Québécois que de
parler de leur langue. Et de parler de comment organiser cette langue et
comment la légiférer, c'est vraiment... de tout temps et pour tous les
gouvernements, ça a été une chausse-trappe.
Par exemple, j'étais en train de vous
parler du bill 63 — ça, c'est fin années 60, on est dans un
gouvernement unioniste — et je m'en souviens, pas que j'étais si
vieux que ça à l'époque, mais parce que le député de Saint-Jean, qui est décédé
récemment, qui était là à l'époque, m'a fait... m'a forcé, par la force des
choses, pour lui rendre hommage, à aller lire ce que le député de Saint-Jean de
l'époque, Jérôme Proulx, avait fait et dit dans ce gouvernement unioniste, fin
années 60. Il avait démissionné de l'Union nationale en disant, à propos de
cette loi 63, qui était ni plus ni moins que le libre choix de la langue
d'enseignement, qui avait soulevé des tollés au Québec... lui, il avait
démissionné de son parti avec d'autres en disant qu'il choisissait la patrie
avant le parti. Inquiétez-vous pas, M. le ministre, ce n'est pas ça que je m'en
vais faire, là. Inquiétez-vous pas. Non, bien, c'est parce que je voyais le
député de Matane avec un grand sourire, il me voyait déjà arriver en courant.
Mais le député Proulx, à l'époque, à <Saint-Jean...
M. Lemieux : ...en
disant
qu'il choisissait la patrie avant le parti. Inquiétez-vous pas, M. le ministre,
ce n'est pas ça que je m'en vais faire, là. Inquiétez-vous pas. Non, bien, c'est
parce que je voyais le député de Matane avec un grand sourire, il me voyait
déjà arriver en courant. Mais le député Proulx, à l'époque, à >Saint-Jean,
était... D'ailleurs, ça a été le premier député du Parti québécois à siéger aux
côtés de René Lévesque, juste avant les élections de 1970. Ça ne l'a pas
empêché de les perdre, ni en 1974, mais il est revenu en 1976 et il était là
pour voter pour la loi 101, bon.
Et c'est là que je reviens à notre
histoire, parce que cette Charte de la langue française va avoir 45 ans, probablement,
au moment où le lieutenant-gouverneur va s'apprêter à la signer, je l'espère,
cette mise à niveau qu'on va faire. Historique, c'est un bien grand mot, puis
vous aviez raison, Mme la députée de Mercier, c'est l'histoire qui va nous le
dire, ce n'est pas à nous de dire que c'est historique.
En passant, j'étais là en 1977 comme
journaliste. Je connais très bien le contexte de ce que vous parlez. Mais
souvenez-vous, Mme la députée de Mercier, que le contexte fait foi de tout. Effectivement,
il y a eu une révolution tranquille, il y a eu les lendemains de la Révolution
tranquille, et, comparer les textes de 1977 à aujourd'hui, il faut se souvenir
de comment ça se passait vraiment à l'époque. On en reparlera rendus là, si
vous voulez bien.
Et c'est ce que je veux faire avec vous,
je veux placer les choses dans leur contexte. Je veux comprendre exactement
jusqu'où on va et pourquoi on s'en va là. Effectivement, c'est préoccupant, je
l'ai dit, je l'ai répété, et pendant les audiences de consultations
particulières, combien c'était préoccupant que la protection du français chez
nous. Et c'était préoccupant à toutes sortes d'égards, y compris au niveau de
la culture, parce qu'on l'a probablement tous mieux compris, pendant les consultations
particulières, que culture et langue, ça va de pair, et l'un a vraiment besoin
de l'autre.
Donc, j'étais sur Jérôme Proulx, parce que
je travaillais sur la prise de parole, l'allocution que j'ai faite, pour le
principe du 96. Et, pour moi, ça a réveillé plein de souvenirs de l'époque de
cette loi 101, mais ça a réveillé aussi les raisons pour lesquelles ce projet
de loi là est tellement important, on verra s'il est historique, mais est tellement
fondamental pour la suite des choses au niveau de ce que le Québec deviendra au
fur et à mesure qu'on prendra le contrôle de ce qu'on a appelé de transversal
dans ce projet de loi là. Parce qu'il ne faut jamais oublier qu'on n'est pas en
vase clos. Oui, on travaille sur un projet de loi sur la langue, et c'est un projet
de loi important, et qui est tentaculaire, 200 quelques articles. Bon, on
comprend tout ça, mais, en même temps, l'avenir du français ne tient pas qu'à
cette loi-là. Il tient à tout ce qui va autour de ça, tout ce que le Québec va
faire de sa société au fur et à mesure qu'on a ce courage de faire du français
pas seulement la langue officielle et commune, mais une langue de travail. Vous
avez tellement raison, Mme la députée de Mercier, et le droit de travailler en
français, c'est fondamental.
Donc, pour moi, ce qu'on s'apprête à
faire, chers collègues... et, désolé, là, on était rendus en pleine
conversation, je ne vous ai pas salués et remerciés, comme il est de mise de le
faire <dans...
M. Lemieux : ...de faire
du
français pas
seulement la langue officielle et commune, mais
une langue de travail
. Vous avez
tellement raison,
Mme la
députée de Mercier
, et le droit de travailler en français, c'est
fondamental.
Donc, pour moi, ce qu'on s'apprête à
faire, chers collègues... et, désolé, là, on était rendus en pleine
conversation, je ne vous ai pas salués et remerciés, comme il est de mise de le
faire >dans ces débuts de séance d'étude article par article, mais je
suis très content d'être avec vous pour m'attaquer à ce travail. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. Je reconnais maintenant M. le député de Chapleau.
M. Mathieu Lévesque
M. Lévesque (Chapleau) : Oui.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'en profite pour vous saluer, également
saluer le ministre, bien, l'équipe qui vous accompagne et également les collègues,
autant de l'opposition que de la banquette ministérielle. Vous dire que je
suis, moi aussi, dans le même état d'esprit que le collègue de Saint-Jean, un état
d'esprit du fameux «enfin» qu'il nous a mentionné. J'avais bien hâte de pouvoir
débuter cette étude détaillée, là, du projet de loi n° 96, un projet de
loi qui est tellement important pour l'avenir de la nation québécoise.
Vous dire également que ça a pris du
courage pour le ministre, pour le gouvernement, de pouvoir déposer un tel
projet de loi qui, avouons-le, soulève les passions. Et on n'a pas eu... Le
ministre n'a pas eu... n'a pas hésité, justement, à prendre à bras-le-corps ce
dossier-là, puis c'est tout en son honneur.
On le sait, les gens qui sont venus en
commission, en consultation particulière, nous ont dit : Il y a un déclin
qui se produit actuellement avec la langue française, il y a un risque que le
peuple québécois se folklorise. La survie de la nation québécoise est en fait
en jeu, et d'où l'importance d'agir. Ce n'est pas... puis on l'a vu avec
l'exemple de Michael Rousseau, tout récemment, ce n'est pas l'anglais qui
est à risque. La seule vraie minorité au Québec, sur le territoire québécois
puis dans l'ensemble de l'Amérique du Nord, c'est la nation francophone, c'est
le français au Québec. C'est ce qui est à risque actuellement. Bon, on le voit,
on peut vivre en anglais seulement à Montréal, l'exemple dont j'ai fait mention,
du P.D.G. d'Air Canada, puis ça se répercute ailleurs, donc dans le Grand
Montréal, la région où j'ai le plaisir et le privilège de représenter, en
Outaouais également, beaucoup d'anglicisation, en Estrie également. Et donc
vous dire l'importance de légiférer en ces matières, c'est essentiel, à vrai
dire.
Et, dans le projet de loi, il y a
également d'autres mesures fort importantes, puis on l'a mentionné d'entrée de
jeu, mais je pense que c'est important de le dire, la première mouture de la
loi, à l'époque, elle a été... elle a passé sous le regard des tribunaux, puis,
à la fin, il y a eu plusieurs éléments qui ont été retirés, ou modifiés, ou
amendés, et d'où l'importance de mettre des dispositions de souveraineté
parlementaire, Mme la Présidente. Je pense que c'est essentiel de protéger
l'ensemble... de respecter la volonté des élus de la nation québécoise, de
respecter, en fait, la démocratie québécoise. C'est un peu ça, l'idée des
dispositions de souveraineté parlementaire. Et également pouvoir s'affirmer en
tant que nation, avec une langue, la langue commune, le français, dans <la...
M. Lévesque (Chapleau) :
...la
volonté des élus de la nation québécoise, de respecter, en fait,
la démocratie québécoise. C'est un peu ça, l'idée des dispositions de
souveraineté parlementaire. Et également pouvoir s'affirmer en tant que nation,
avec une langue, la langue commune, le français, dans >la Constitution,
je pense, c'est essentiel. C'est un geste d'affirmation fort, qui... On ne le
fait pas contre personne, mais on le fait pour soi-même, pour s'affirmer, et ça
m'apparaît essentiel également.
Puis d'ailleurs j'ai eu l'occasion, là,
tout récemment, lors de l'adoption du principe, à titre d'adjoint parlementaire
du ministre... le ministre m'avait fait confiance pour pouvoir, justement, bien
exprimer la pensée du gouvernement à cet effet, donc j'ai pu parler de ces
enjeux-là lors de l'adoption du principe. Je remercie d'ailleurs le ministre de
sa confiance, puis ça a vraiment été un plaisir pour moi de participer aux
échanges du p.l. n° 96 qui risquent d'être fort
intéressants. Donc, merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Chapleau. J'ai le député de Beauce-Nord.
M. Poulin : Sud.
La Présidente (Mme Thériault) :
Sud. Désolée. Pourtant, je sais que c'est Sud, hein?
M. Poulin : Oui, je sais que
vous le savez.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. À vous, M. le député.
M. Samuel Poulin
M. Poulin : Merci, Mme la
Présidente. Je vous salue de présider ces travaux. Je sais que vous le ferez
d'une main de maître parce que vous êtes une femme d'expérience. Alors, très
hâte de vous voir mener le tout. Je veux saluer le ministre, évidemment, qui,
je sais, entame cette étude article par article avec énormément de passion et
le regard tourné vers le futur, parce que ce que l'on fait, on le fait
évidemment pour les générations qui nous suivront. Il est papa une deuxième
fois depuis peu, et je sais à quel point ça l'habite de pouvoir léguer une loi
qui va faire en sorte que les jeunes, au Québec, puissent être encore plus
fiers de leur langue française et, à terme, évidemment, on le sait, d'être
encore plus fiers d'être Québécois.
• (16 h 50) •
Et je sais, tout comme lui, que l'un des
derniers rapports de l'OQLF, dans les dernières années, qui démontrait que les
jeunes avaient une indifférence face à la survie du français, particulièrement
sur l'île de Montréal, que ça l'a particulièrement préoccupé, tout comme
l'ensemble des membres de notre gouvernement. Et on ne s'en rend pas toujours
compte, mais il est presque minuit moins une pour l'importance de rappeler à
nos jeunes le fait français.
D'ailleurs, l'OQLF, qui est sous la
responsabilité du ministre, a lancé récemment une campagne très importante
auprès des jeunes sur l'importance d'écrire en français, de communiquer en
français. Et, des fois, on dit, bon, une campagne de promotion, les unes après
les autres, mais c'était une des rares fois dans l'histoire du Québec qu'on a
ciblé particulièrement les jeunes sur l'importance du fait de parler en
français et de communiquer en français. Et, à terme, ce qu'on souhaite, c'est
qu'ils puissent davantage l'utiliser dans leur vie personnelle, au travail, et
pas seulement, Mme la Présidente, on le sait, sur l'île de Montréal, où il y a
des enjeux importants, mais dans l'ensemble des régions du Québec. Parce que
personne n'est à l'abri d'un recul du français, qu'on se trouve dans la Capitale-Nationale,
chez nous en Beauce ou dans d'autres régions du Québec, parce que, justement,
on peut prendre cette langue-là pour acquis, alors qu'il ne faut pas le prendre
pour acquis.
Et le projet de loi qui est devant nous,
Mme la Présidente, il est important. C'est une des plus <grandes...
M. Poulin : ...régions
du
Québec, parce que, justement, on peut prendre cette langue-là pour acquis,
alors qu'il ne faut pas le prendre pour acquis.
Et le projet de loi qui est devant
nous, Mme la Présidente, il est important. C'est une des plus >grandes
réformes qui ne s'est jamais faite pour l'avenir de la langue française au Québec,
qui couvre différents volets, et il faut le faire, oui, évidemment, en prenant
en compte le présent mais également les générations futures. Alors, merci à
vous. J'ai très hâte de participer à cette étude.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il n'y en a pas.
Donc, est-ce qu'il y a des motions préliminaires? Je ne crois pas non plus.
D'accord.
Étude détaillée
Donc, sans plus tarder, j'appelle l'article
1 du projet de loi.
Mme David : Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je pense
qu'il faut, si je trouve mes papiers, demander une sorte d'étude article par
article. Attendez une seconde.
M. Jolin-Barrette : Mme la
Présidente, je crois que la députée de Marguerite-Bourgeoys veut demander une
étude article par article, paragraphe par paragraphe.
Mme David : C'est en plein ça,
mais, vous voyez, comme c'est un gros projet de loi, on finit par être un peu
mêlés. Mais voilà, c'est le bon moment pour vous dire très formellement, tel
que prévu à l'article 245 et conformément à notre jurisprudence, pour
cette étude détaillée, je demande que les articles de ce projet de loi soient
étudiés alinéa par alinéa et paragraphe par paragraphe là où c'est applicable
et à ce que chacun des articles qu'on propose de modifier ou d'ajouter dans les
lois existantes soit étudié séparément.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est conforme au règlement. Donc, ce sera fait.
Donc, sans plus tarder, M. le ministre, je
vais vous demander d'appeler l'article n° 1 du projet
de loi. La parole est à vous. J'imagine que vous allez nous faire la lecture de
l'article, et vous introduisez les amendements au fur et à mesure?
M. Jolin-Barrette :
Certainement, Mme la Présidente. Alors, article 1 :
Le préambule de la Charte de la langue
française est modifié :
1° par l'insertion, après le deuxième
alinéa, du suivant :
«L'Assemblée nationale reconnaît que le
français est la langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant
que tous soient sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture
québécoise comme liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun
ait accès à l'apprentissage de cette langue ainsi qu'à faire du français la
langue de l'intégration.»;
2° par l'insertion, après le quatrième alinéa,
du suivant :
«Seul État de langue française en Amérique
du Nord, le Québec partage une longue histoire avec les communautés
francophones et acadienne du Canada. Il en découle une responsabilité
particulière pour le Québec, qui entend jouer un rôle de premier plan au sein
de la francophonie.»;
3° par l'ajout, à la fin, de l'alinéa
suivant :
«En vertu de la souveraineté
parlementaire, il revient au Parlement du Québec de confirmer le statut du
français comme langue officielle et langue commune ainsi que de consacrer la
prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois, tout en assurant
un équilibre entre les droits collectifs de la nation québécoise et les droits
et libertés de la personne.»
Commentaire. L'article 1 du projet de
loi modifie le préambule de la Charte de la langue française.
L'article 1 du projet de loi modifie d'abord
le préambule de la Charte de la langue française pour y introduire un nouveau
troisième alinéa. Ce nouvel alinéa établit que l'Assemblée nationale <reconnaît...
M. Jolin-Barrette :
...entre
les droits collectifs de la nation québécoise et les droits et libertés
de la personne.»
Commentaire.
L'article 1 du
projet de loi modifie le préambule de la
Charte de la langue
française.
L'article 1 du
projet de loi
modifie
d'abord le préambule de la
Charte de la langue française
pour y introduire un nouveau troisième alinéa. Ce nouvel alinéa établit que
l'Assemblée
nationale >reconnaît que le français est la langue commune de la nation québécoise.
Il rappelle également qu'il est
déterminant que tous les Québécois et les Québécoises soient sensibilisés à
l'importance du français et de la culture québécoise en tant qu'éléments
essentiels pour assurer la cohésion de la société.
Enfin, il souligne que l'Assemblée nationale
est résolue à faire en sorte que tous les Québécoises et tous les... pardon, tous
les Québécois et les Québécoises aient accès à des mesures qui leur permettent
d'apprendre cette langue et que le français devienne la langue de l'intégration
au sein de la société.
L'article 1 du projet de loi modifie
ensuite le préambule de la Charte de la langue française pour y introduire un
nouveau sixième alinéa. Ce nouvel alinéa souligne que le Québec se démarque en tant
que seul État de langue française en Amérique du Nord.
Il rappelle également que le Québec
partage une longue histoire avec les communautés francophones et acadiennes du
reste du pays.
Enfin, il affirme que ces particularités font
en sorte que le Québec a la responsabilité de jouer un rôle de premier plan au
sein de la Francophonie.
Finalement, l'article 1 du projet de
loi introduit un nouveau huitième alinéa dans le préambule de la Charte de la
langue française. Ce nouvel alinéa souligne que le principe de la souveraineté
parlementaire permet sans équivoque au Parlement du Québec de confirmer le
statut du français comme langue officielle et langue commune et de consacrer la
prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois.
Il souligne également que le Parlement du
Québec doit exercer ce pouvoir en assurant un équilibre entre les droits
collectifs de la nation québécoise et les droits et libertés de la personne.
La Présidente (Mme Thériault) :
Est-ce que vous nous faites lecture du texte proposé avec vos modifications?
M. Jolin-Barrette : Non. Ça, par
contre...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous ne le faites pas? Parfait. Pas de problème. Questions? Oui, Mme la députée
de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Vous me le dites,
hein, si je ne suis pas dans les formes puis je parle trop, trop vite, pas au
bon moment, mais je pense que c'est à moi à parler. Alors, je vais vous
informer que nous avons trois amendements à déposer dans cet article 1 et
je suis pas mal sûre que le ministre va être d'accord avec le premier. C'est
une erreur d'inattention, je pense. Mais je ne sais pas si je dois le dire maintenant,
si je dois déposer, si je dois discuter, si c'est...
La Présidente (Mme Thériault) :
Si vous avez un amendement à proposer, on va vous demander de le faire parvenir
au secrétariat de la commission. Nous allons suspendre...
Mme David : On y va un par un,
hein, c'est ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, parce que... pour que vous en fassiez la lecture, j'aimerais que tous les
députés puissent avoir copie de l'amendement en main. Oui, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Excusez-moi. Par souci d'efficacité, Mme la Présidente, si je peux... puisqu'il
s'agit d'un volumineux projet de loi, ce que je pourrais vous suggérer pour le fonctionnement
de la commission, c'est, si jamais les parlementaires ont les amendements et
qu'ils sont prêts, ce qu'on pourrait faire, dans un souci d'efficacité, c'est qu'avec
nos différentes équipes on puisse les faire parvenir à Mme la secrétaire de la commission,
par la voie d'Internet, qu'elle puisse le déposer sur Greffier, et qu'au moment
où tout le volet administratif est fait on puisse en faire la lecture et on puisse
cheminer, pour éviter de suspendre fréquemment la commission, si possible.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est une proposition qui est tout à fait louable. Évidemment, moi, je me range
au consentement de tous les collègues. J'imagine que, par proposition
d'amendement, pour les amendements qui sont prêts, ça inclut les <amendements...
M. Jolin-Barrette :
...tout
le volet
administratif est fait on puisse en faire la lecture et on
puisse cheminer, pour éviter de suspendre fréquemment la commission, si
possible.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est une proposition qui est tout à fait louable. Évidemment, moi, je me range
au consentement de tous les collègues. J'imagine que, par proposition
d'amendement, pour les amendements qui sont prêts, ça inclut les >amendements
du ministre aussi, j'imagine, ou si ça va juste du côté des parlementaires?
M. Jolin-Barrette : Non, non,
de toutes les oppositions. Ce que je dis, là, supposons, là, que...
La Présidente (Mme Thériault) :
Que des oppositions.
M. Jolin-Barrette : Pardon?
La Présidente (Mme Thériault) :
De déposer les amendements que des oppositions, pour ceux qui sont prêts.
M. Jolin-Barrette : Non, non,
non, ce n'est pas ça que je dis.
La Présidente (Mme Thériault) :
Non? O.K.
M. Jolin-Barrette : Je dis,
quand nous avons une discussion, là, comme celle-ci, on ouvre l'article 1,
la députée de Marguerite-Bourgeoys nous dit : Je vais avoir trois amendements,
mais, ce que je veux dire, avant même qu'ils soient, supposons, déposés
publiquement aux parlementaires, tout ça, si, de façon informelle, on peut
envoyer le tout au secrétariat pour qu'on n'ait pas à suspendre fréquemment à
chaque fois que... Dans le fond, si on peut travailler en amont avec le
secrétariat pour les transférer déjà, c'est ce que je dis, pas de transférer
tous les amendements tout de suite, mais, quand on sait qu'on s'en vient avec un
amendement, plutôt que de suspendre la commission durant plusieurs minutes, si
ça peut se faire...
La Présidente (Mme Thériault) :
Je comprends qu'il peut y avoir des amendements prêts, donc qui sont inspirés
souvent des discussions.
M. Jolin-Barrette : Ah! tout
à fait.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mais je vais quand même reconnaître les droits de parole des collègues avant de
statuer sur votre demande, M. le ministre. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Bien, en fait... parce
que moi... tu sais, le ministre a tout un ministère qui travaille avec lui, beaucoup,
beaucoup de gens, beaucoup de personnel. Moi, c'était souvent le député de Jonquière
qui disait ça, mon ministère est ici, puis c'est une personne qui a beaucoup, beaucoup
de choses. Donc, je veux dire, même si, des fois, on sait qu'on va faire un amendement,
on n'est pas sûrs, puis, des fois, c'est la discussion, puis on ne sait pas
trop où le placer.
Mais moi, si je comprends bien, pour cet article-là,
le ministre n'a pas d'amendement, lui, à déposer. Moi, j'aurais aimé ça, qu'il
dépose tous ses amendements pour que nous, si on a... si, par exemple, mon ministère
d'une personne travaille très, très, très fort à faire des amendements, finalement,
son amendement, il ne marche pas parce que le ministre modifie ou amène des amendements.
Ça fait que, là, il faut tout retravailler.
Donc, si on veut vraiment être dans un
souci d'efficacité, et j'en suis, moi aussi, parce que j'ai aussi, moi,
d'autres projets de loi comme le ministre, bien, ça serait beaucoup, beaucoup
plus profitable à l'ensemble des membres de la commission de recevoir les amendements
du ministre en premier. Ça, ça va nous faciliter encore plus, nous, notre
travail, au lieu de modifier des articles qui, on ne le sait même pas, après,
s'ils vont être modifiés de toute façon par le ministre. Je fais cette proposition-là
d'efficacité en complément à celle du ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'entends la députée de Marguerite-Bourgeoys avant?
M. Jolin-Barrette : Bien,
j'accueille avec ouverture la proposition de la députée de Mercier et j'en
aurai un pour ajouter «sur le territoire du Québec» dans le préambule.
La Présidente (Mme Thériault) :
Dans le préambule. Donc, ça veut dire à l'article 1.
M. Jolin-Barrette : Donc, on
va pouvoir l'envoyer au secrétariat.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'accord. Est-ce que, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys...
• (17 heures) •
Mme David : Bien, moi, j'en
suis, efficacité, etc., là. On ne va pas trop s'enfarger dans les fleurs du
tapis. Je ne suis pas une spécialiste des procédures parlementaires, mais, si
le ministre a des amendements, effectivement, je suis <tout à fait
d'accord avec...
>
17 h (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...dans le préambule.
La Présidente (Mme Thériault) :
Dans le préambule. Donc, ça veut dire à l'article 1.
M. Jolin-Barrette :
Donc, on va pouvoir l'envoyer au secrétariat.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'accord. Est-ce que, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys...
Mme David : Bien, moi, j'en
suis, efficacité, etc., là. On ne va pas trop s'enfarger dans les fleurs du
tapis. Je ne suis pas une spécialiste des procédures parlementaires, mais, si
le ministre a des amendements, effectivement, je suis >tout à fait
d'accord avec ma collègue... Et puis moi, il y en a... comme je dis, là, je ne
pense pas que ça va poser problème. Alors, je n'ai pas d'objection à déposer.
De toute façon, on vote article par article, j'ai compris, bon.
Alors, moi, je suis prête à déposer, si...
à moins qu'il y ait des choses que je ne vois pas, mais pour l'instant... mais
à condition que le ministre soit un peu dans la même...
La Présidente (Mme Thériault) :
O.K. Là, j'entends, M. le ministre, que vous avez, de toute façon, un
amendement au premier article. C'est ça?
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors...
La Présidente (Mme Thériault) :
En partant. Donc, plutôt que de laisser la députée de Marguerite-Bourgeoys
déposer son amendement, je vais vous inviter à déposer le vôtre parce que ça...
beaucoup plus rapidement quand on va avec les amendements du ministre en
premier.
Je vous demanderais peut-être aussi, par
souci d'efficacité, puis c'est à votre choix, là... si nous, on sait là où il y
a des amendements, bien, on va savoir comment gérer, puis je pense que les
députés aussi pourraient dire : Bien là, il y a un amendement. Donc, ils
vont vous dire : Bien, si on est d'accord avec votre amendement, on ne
sortira pas le nôtre, puis si... C'est parce que, souvent, c'est là que la
discussion va se faire. Je pense que ça serait peut-être logique de le faire
comme ça. Si on peut avoir une indication à quel article vous entendez
peut-être faire des amendements, quitte à ce que vous le fassiez section par
section même, moi, je n'ai pas de problème. Vous n'êtes pas obligé de faire
tout le projet de loi. Je comprends qu'on rédige souvent...
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, pour informer les parlementaires, ce que je vous proposerais, c'est d'y
aller dans l'ordre du projet de loi, parce que, comme je l'ai expliqué en
briefing technique, Mme la Présidente, c'est que le projet de loi, tel qu'il
est construit, le projet de loi n° 96, dans le fond, il suit, vu que c'est
une loi modificatrice, il suit la structure de la Charte de la langue française,
de la loi 101. Donc, puisqu'on commence au préambule puis on vient modifier la
Charte de la langue française tout le long, c'est logique, pour le 96, de l'étudier
un article après l'autre.
La Présidente (Mme Thériault) :
Pas de problème pour l'ordre d'articles. Au niveau des amendements, à ce
moment-là, je vais suspendre quelques instants. Je vais vous demander d'envoyer
votre amendement au secrétariat.
M. Jolin-Barrette : C'est
déjà dans les Internets, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est déjà fait. Donc, à ce moment-là, les députés ont déjà copie, mais moi, je
n'en ai pas. Donc, ça me prend... Pardon?
Une voix
: ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Ce n'est pas rentré encore, M. le ministre. Donc, on va suspendre quelques
instants. Et, à ce moment-là, je vous invite, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys également, peut-être même à avoir une discussion...
Une voix
: ...
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est dans les internautes... dans les Internets, dans le nuage. Bien là, de
toute façon, je vais demander de suspendre parce que je dois prendre
connaissance de l'amendement du ministre, voir... à savoir s'il est recevable,
dans un premier temps. Et évidemment, bien, vous savez que vous pouvez toujours
vous parler même quand les micros et les caméras ne sont pas ouverts non plus.
Donc, je vous invite à le faire.
Nous suspendons quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 03)
>
(Reprise à 17 h 15)
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous allons reprendre les travaux de la commission.
Il y a... Juste pour le bon
fonctionnement, que tout le monde comprenne, c'est qu'à chaque fois qu'il va y
avoir des amendements ils seront déposés, sur notre site Greffier, dans
Amendements à venir, et celui qu'on étudiera sera placé dans Amendement en
cours. Donc, pour éviter les suspensions à chaque fois, si je reçois à l'avance
les amendements, donc qui était la demande du ministre, à ce moment-là, ça me
permet de ne pas suspendre les travaux, parce que j'ai copie des propositions
d'amendement devant moi, donc je peux statuer de leur recevabilité
immédiatement.
Donc, pour l'article n° 1,
dans l'ordre, le premier amendement sera l'amendement du ministre. La députée
de Marguerite-Bourgeoys avait annoncé trois amendements, et la députée de Mercier
a également un amendement. Donc, nous allons débuter avec l'amendement du
ministre à l'article n° 1.
Donc, M. le ministre, pour la lecture de
votre amendement et les commentaires.
M. Jolin-Barrette : Avec
votre permission, Mme la Présidente. À l'article 1 du projet de loi,
insérer, dans le dernier alinéa du préambule de la
Charte de la langue française que propose le
paragraphe 3° et après «langue commune», «sur le territoire du Québec».
Donc, cet amendement modifie le préambule
de la Charte de la langue française afin de réaffirmer que la charte est fondée
sur le principe de la territorialité linguistique.
Donc, au troisième paragraphe, par l'ajout,
à la fin, de l'alinéa suivant, ça se lirait ainsi :
«En vertu de la souveraineté
parlementaire, il revient au Parlement du
Québec de confirmer le statut du français comme
langue officielle et langue commune sur le territoire du Québec ainsi que de consacrer
la prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois, tout en
assurant un équilibre entre les droits collectifs de la nation québécoise et
les droits et libertés de la personne.»
Donc, l'amendement vise à rattacher un
caractère territorial et de le nommer très clairement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors, c'est du
grand Pr Rousseau.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, vous savez, on écoute les gens qui viennent en commission parlementaire,
et notamment, le Pr Rousseau nous a indiqué qu'il serait de bon aloi de
rattacher ça au caractère territorial de l'État québécois. Mais ce qui est fort
important là-dedans, et il faut le dire... et notamment, tout à l'heure,
j'entendais le député de Matane-Matapédia nous dire : Écoutez, comment
est-ce qu'on va faire pour dire que la loi 101, la Charte de la langue
française, s'applique aux entreprises de juridiction fédérale? Bien, c'est
justement en ayant une approche territoriale qui va faire en sorte que les lois
québécoises s'appliquent en matière... bien, sur l'ensemble du territoire
québécois. Et on peut faire le parallèle aussi avec les lois environnementales
québécoises. On souhaite qu'au Québec ça soit la Loi sur la qualité de
l'environnement qui s'applique sur l'ensemble du territoire québécois.
Alors, je pense que c'est important de le
spécifier que, sur l'ensemble du territoire québécois, c'est la Charte de la
langue française qui s'applique.
Mme David : Si je peux
continuer... Je n'avais pas prévu de parler de l'approche territoriale du Pr
Rousseau, mais, comme je l'ai lu attentivement, dans tous ses écrits, je savais...
et il le disait <très...
M. Jolin-Barrette :
...sur
la qualité de l'environnement qui s'applique sur l'ensemble du
territoire québécois.
Alors, je pense que c'est important de
le spécifier, que, sur l'ensemble du territoire québécois, c'est la Charte de
la langue française qui s'applique.
Mme David : Si je peux
continuer... Je n'avais pas prévu de parler de l'approche territoriale du Pr
Rousseau, mais, comme je l'ai lu attentivement, dans tous ses écrits, je savais...
et il le disait >très, très bien dans un entretien avec Mathieu
Bock-Côté, très long entretien sur le Web, que M. Bock-Côté aime beaucoup
faire... il en a fait un avec Guillaume Rousseau, qui nous avertissait, et
je me demandais tellement, il nous avertissait qu'il avait... Pourtant, il est
le maître d'oeuvre avec son ex-doctorant devenu docteur, Me Poirier, Dr
Poirier. Donc, on est dans la filière, clairement, clairement de cette théorie
à laquelle tient beaucoup, beaucoup le Pr Rousseau. Je ne suis pas sûre
d'avoir très bien compris l'importance incroyable de cette approche
territoriale, mais je comprends que, quand le Pr Rousseau disait : J'aurai
de nombreux amendements, il était presque aussi déçu, on dirait, du projet de
loi que peut l'être le député de Matane-Matapédia, à l'entendre. Mais pourtant
il était l'architecte de la loi n° 21 aussi et, là, l'architecte plus dans
l'ombre peut-être, mais très clairement, de cette loi n° 96. Alors, c'est
le fun parce que ça nous permet de voir venir comme nous permettait de voir
venir le livre de M. Poirier.
Donc, on va voir du territoire pas mal
partout, Mme la Présidente, pour être bien sûr qu'on est sur le territoire
québécois, le territoire québécois, le territoire québécois. Je n'ai pas de
problème fondamental, mais je trouve qu'on met ceinture, bretelle, cadenas et
tout ce qu'il faut. Mais je saurai vraiment... je vais aller relire comme il
faut tous ses écrits et je vais prévoir d'avance quels seront les amendements
du ministre pour faire un peu plaisir au Pr Rousseau.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Mercier.
• (17 h 20) •
Mme Ghazal : Juste pour
comprendre, parce que, souvent, ce qui est intéressant, quand on l'a dans le
cahier, c'est qu'on a toute la justification. Là, on a l'amendement. La
justification, le ministre nous l'a donnée sommairement, mais elle n'est pas
écrite. Puis là je ne m'en rappelle pas par coeur de tout ce que
M. Rousseau a dit comme ma collègue.
Donc, si possible, juste d'expliquer... Ça,
ça a été ajouté pour permettre, par exemple, de dire au gouvernement fédéral, l'article
qui dit que les entreprises à charte fédérale qui sont sur le territoire du
Québec, bien, la charte, elles sont soumises à la Charte de la langue
française. Est-ce que c'est ça que ça permet en le mettant de façon magique,
faire en sorte que le fédéral va dire : Bien oui, toutes les entreprises à
charte fédérale... Est-ce que c'est que ça permet ou c'est une moindre portée
que ça? J'essaie de comprendre vraiment qu'est-ce que ça donne.
M. Jolin-Barrette : En
fait, pour les entreprises de juridiction fédérale qui vont être assujetties à
la charte, on va voir l'article qui est un peu plus loin dans le projet de loi où
on vient assujettir nommément toutes les entreprises qui sont sur le territoire
québécois. Donc, l'article, pour faire en sorte d'assujettir les entreprises,
il va être plus loin.
Pourquoi est-ce que, dans le préambule,
c'est important d'indiquer l'approche territoriale? C'est pour bien nommer les
choses. Depuis 1977, la Charte de la langue française, elle est basée <sur...
M. Jolin-Barrette :
...on
vient assujettir nommément toutes les entreprises qui sont sur le
territoire québécois. Donc, l'article, pour faire en sorte d'assujettir les
entreprises, il va être plus loin.
Pourquoi est-ce que, dans le préambule,
c'est important d'indiquer l'approche territoriale? C'est pour bien nommer les
choses. Depuis 1977, la Charte de la langue française, elle est basée >sur
une approche territoriale, du territoire qui est québécois, qui est uni et
indivisible. Donc, c'était important de venir souligner le fait que, dans le
cadre d'une loi linguistique comme la Charte de la langue française, bien, il
n'y a pas de partitionnisme linguistique au sein du Québec, il n'y a pas de
partitionnisme législatif non plus au sein de l'État québécois. Le Québec est
un tout unique et indivisible. Et on vient, par ce fait même, en spécifiant
l'approche territoriale, qui est une approche, effectivement, qui a cours
depuis 1977, bien, on vient nommer la chose directement dans le préambule
pour dire : sur le territoire québécois, la langue officielle et commune,
c'est le français.
Mme Ghazal : Et ça, ça ne
touche pas... Par exemple, si jamais votre collègue le ministre responsable des
Affaires autochtones décide de faire une loi pour protéger, admettons, là, les
langues autochtones, ça, ici, ça ne vient pas jouer là-dessus? Est-ce que ça a
un impact, le fait de dire c'est partout sur le territoire? Si, par exemple,
une communauté autochtone veut, je ne sais pas, faire quelque chose pour
valoriser sa langue dans une réserve ou sur un territoire où elle a... pas
juridiction, mais dont elle est responsable, est-ce que ça, ça vient jouer
là-dessus ou ça ne l'affecte nullement?
M. Jolin-Barrette : Ça ne
l'affecte pas. C'est le statut de la langue française qui est visé, notamment,
puis dire clairement que «sur l'ensemble du territoire québécois»... Et, sur la
question des langues autochtones, la promotion et leur valorisation aussi, il y
a des outils législatifs qui pourraient être mis en place par mon collègue le
ministre des Affaires autochtones, et ça n'entrerait pas en contradiction avec
ce que nous faisons maintenant.
La Présidente (Mme Thériault) :
Ça va? D'autres...
Mme Ghazal : Merci. Je n'ai
pas d'autre question.
La Présidente (Mme Thériault) :
Pas d'autres questions? Parfait. Donc, on est prêts à mettre aux voix
l'amendement du ministre.
Mme David : O.K., ça, c'est
seulement cet amendement-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est un vote... oui, juste l'amendement du ministre pour commencer. Donc, on y
va par vote... C'est des votes par appel nominal, hein, Mme la secrétaire?
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente, quand ce n'est pas demandé, on peut voter...
La Présidente (Mme Thériault) :
Non, on vote?
M. Jolin-Barrette : Oui.
La Présidente (Mme Thériault) :
O.K. Parfait. Oui. Est-ce que l'amendement du ministre est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Parfait. Donc, on va passer à l'amendement qui a été déposé par la
députée de Marguerite-Bourgeoys. Oui, vous allez sur lequel de vos amendements,
Mme la députée?
Mme David : C'est le... bien,
moi, j'appelle ça le premier, mais je ne sais pas comment vous le dire, là. Il
concerne...
La Présidente (Mme Thériault) :
...le préambule, là...
Mme David : C'est celui où il
est marqué en gras «Premières nations et Inuit».
La Présidente (Mme Thériault) :
«Premières nations et Inuit», c'est le premier de vos amendements, oui.
Allez-y, vous pouvez nous en faire la lecture. On va le transférer...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Bon, sauf qu'on m'a dit qu'il y a un petit problème au niveau de la forme,
qu'on est en train de le réécrire, <celui-là...
La Présidente (Mme Thériault) :
Allez-y, vous pouvez nous en faire la lecture. On va le transférer...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Bon, sauf qu'on m'a dit qu'il y a un petit problème au niveau de la forme,
qu'on est en train de le réécrire, >celui-là. Donc, c'est ce qu'on vient
de m'indiquer, Mme la députée.
Mme David :
...qui a vu un problème?
La Présidente (Mme Thériault) :
On a indiqué à la secrétaire de la commission, donc j'imagine que c'est
probablement avec les gens qui sont en arrière de vous, là. Je vois qu'il
manque quelqu'un.
Je vais suspendre quelques instants, juste
le temps de mettre au clair. Je m'excuse. On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
>
(Reprise à 17 h 30)
La Présidente (Mme Thériault) :
Nous poursuivons nos travaux. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, je
vais vous demander de nous lire votre amendement, s'il vous plaît.
Mme David : Oui, Mme la
Présidente. Article 1 : L'article 1 du projet de loi est modifié
par l'ajout du paragraphe suivant :
4° par le remplacement, en son quatrième
alinéa, des mots <«Amérindiens et aux Inuit du»...
>
17 h 30 (version révisée)
<1355
La
Présidente (Mme Thériault) : ...donc,
Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys,
je vais vous demander de nous lire votre
amendement,
s'il vous
plaît.
Mme David : Oui,
Mme
la Présidente. Article 1 :
L'article 1 du
projet de loi est
modifié par l'ajout du
paragraphe suivant :
4° par le
remplacement, en son quatrième
alinéa, des mots >«Amérindiens et aux Inuits du» par les mots «Premières
Nations et aux Inuit au».
Commentaire. Le préambule de la Charte de
la langue française, tel qu'amendé, se lirait ainsi... Ainsi, c'est ainsi,
j'imagine, ce que je viens de lire.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça donnerait : «L'Assemblée nationale reconnaît...»
Mme David : Ah oui! Excusez. Je
n'avais pas descendu l'écran.
«L'Assemblée nationale reconnaît aux Premières
Nations et aux Inuit au Québec, descendants des premiers habitants du pays, le
droit qu'ils ont de maintenir et de développer leur langue et culture d'origine»,
Mme la Présidente. Alors...
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Donc, questions, commentaires?
Mme David : C'est vrai que c'est
compliqué, parce qu'on est allés retrouver quelque chose qui était mal... qui
était formulé à la façon 1977. On parlait d'Amérindiens. Maintenant, on ne
parle plus d'Amérindiens, on parle de Premières Nations. C'est tout simplement
ça.
Et là se pose la question de l'orthographe
du mot «Inuit», et nous étions venus à la conclusion, avec nos recherches, mon collègue
le député de D'Arcy-McGee pense la même chose, effectivement, qu'il ne devrait
pas y avoir de s. La Protectrice du citoyen a dit, en se fiant à la Charte de
la langue française actuelle et à l'Office québécois de la langue française, il
n'y a pas de s. Mais, en même temps, il y a, j'ai l'impression, d'autres propositions.
Alors, écoutez, je ne suis pas une
linguiste, je ne suis pas une spécialiste du singulier et du pluriel pour les
nations autochtones. Alors, mon collègue apporte un argument valable, «les communautés
francophones et acadienne», «acadienne» se met toujours au singulier. Alors là,
écoutez, je ne pense pas qu'on puisse transformer en débat, ici, ça prend-tu un
s ou pas de s. Je vais laisser peut-être le ministre, avec son énorme équipe de
plusieurs, plus qu'un, parce que, nous aussi, notre équipe est un peu réduite, de
statuer sur cette question du s.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Alors, j'accueille favorablement l'amendement qui est proposé par la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Sur la question de la rédaction, à savoir
si ça prend un s ou pas de s, dans la Charte de la langue française, le terme
n'avait pas de s. Par contre, on me dit que la pratique a changé, et, selon le Grand
dictionnaire terminologique de l'OQLF, on dit : «Pour une meilleure
intégration au système linguistique du français, l'emprunt "Inuit"
varie en genre et en nombre», donc varie en genre et en nombre, et... attendez,
«qui tend...», bon, «cette règle est conforme à l'usage moderne du français,
qui tend à abandonner, pour les mots empruntés, les oppositions singulier/pluriel
qui existent dans la langue source.» Et la présidente de l'OQLF nous dit qu'on
devrait mettre un «s» également.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee, si vous avez terminé votre intervention, M. le <ministre...
M. Jolin-Barrette :
...cette
règle est conforme à l'usage moderne du français, qui tend à
abandonner, pour les mots empruntés, les oppositions singulier/pluriel qui
existent dans la langue source.» Et la présidente de l'OQLF nous dit qu'on
devrait mettre un «s» également.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de D'Arcy-McGee, si vous avez terminé votre intervention, M. le
>ministre. Oui, M. le député, allez-y.
M. Birnbaum : Si je peux juste
nous inviter à la prudence, parce que, malgré les 13 villages, la communauté
inuite s'identifie comme une nation. Il y a un parallèle, en quelque part,
comme je dis, avec la communauté acadienne, où le «s» n'apparaît pas. Alors,
c'est intéressant que l'amendement est accueilli. Et, si on peut inviter à la
grande prudence de toute vérification, parce qu'ils se déclarent comme seule
nation.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Voyez-vous, ce qu'on va faire, on va voter l'amendement tel qu'il est proposé
par la députée de Marguerite-Bourgeoys. Puis, puisque j'imagine que ça ne se
termine pas ce soir, l'étude du projet de loi, ça me laissera le temps de faire
toutes les vérifications. Donc, votons-le comme ça, puis, si jamais ça prend un
«s», bien, on reviendra avec des précisions.
Mme David : ...j'accueille très
favorablement et j'encourage à la très grande prudence et au respect de la
volonté des peuples en question de savoir s'ils mettraient, eux, un «s» ou pas
de «s», parce que ça...
C'est un projet de loi, c'est un préambule.
Ça a l'air petit comme enjeu, mais disons que ça commencerait mal si,
collectivement, nous faisions une erreur qui pourrait quand même indisposer nos
confrères et consoeurs inuits. Alors, je pense qu'il faut faire très, très
attention.
Alors, merci, M. le ministre, d'aller
prendre tous les moyens nécessaires pour bien vérifier auprès des communautés.
Vous avez un collègue aux Affaires autochtones, etc., donc on pourra être
rassurés.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'ai la députée de Mercier. Je crois que vous voulez faire une intervention,
Mme la députée?
Mme Ghazal : Bien, en fait,
oui. Bien, vous allez le voir, là, il est en attente, là, mon amendement, je le
déposerai quand ça sera le temps, qui va changer ce paragraphe. Et d'ailleurs,
ça me fait penser qu'il va falloir suspendre pour le changer... en tout cas, on
est au début, là, on est encore rouillés, mais on va s'habituer.
Moi aussi, je veux réitérer que c'est
très, très important qu'on l'écrive comme il faut. Puis j'avais déjà... j'étais
prête à faire des amendements partout, puis je vois que je ne suis pas la
seule, et je suis contente de voir que je ne suis pas la seule à l'avoir vu.
Je regrette, par contre, que le
gouvernement, qui a travaillé sur le projet de loi, qui a changé toute la loi,
qui l'a étudié de fond en comble, n'ait pas profité de l'occasion pour le
changer. Et, je veux dire, c'est tellement un changement de base de dire :
Bien, on va utiliser la terminologie qui est utilisée aujourd'hui pour les
Premières Nations et les Inuits. Donc, je ne comprends pas pourquoi ça n'a pas
été fait. Je vais me dire que ce n'est pas fait par exprès, c'est juste parce
qu'il avait d'autres priorités. Ce n'est pas la question des Premières Nations
et des Inuits qui était dans l'esprit du gouvernement vu qu'ils se sont... Ce
que j'ai compris du ministre, c'est qu'il ne veut pas que, dans le projet de
loi, on traite de cet <aspect-là...
Mme Ghazal : ...comprends
pas
pourquoi ça n'a pas été fait. Je vais me dire que ce n'est pas fait par exprès,
c'est juste parce qu'il avait d'autres priorités. Ce n'est pas la question des
Premières Nations et des Inuits qui était dans l'esprit du gouvernement vu
qu'ils se sont... Ce que j'ai compris du ministre, c'est qu'il ne veut pas que,
dans le projet de loi, on traite de cet >aspect-là, même s'il a quand
même eu l'ouverture d'inviter des représentants des Premières Nations et des
Inuits.
Donc, je comprends qu'il va y avoir une
recherche pour s'assurer que ce soit écrit comme il faut et je comprends qu'il
va y avoir un dépôt d'amendements partout, partout, partout, dans la Charte de
la langue française, où on dit «Amérindiens et Inuits du Québec». Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je ne veux
pas m'attarder trop, mais ça donne une idée de l'importance de l'étude article
par article, de l'importance d'un regard extérieur. Ce n'est pas quelque chose
d'énorme, mais, de toute évidence, ça a échappé aux yeux de lynx du
gouvernement ou de l'équipe ministérielle. Ce n'est pas... On n'est pas dans le
reproche ici, mais on est dans... Ça donne quelque chose, l'étude détaillée. Ça
donne qu'on a un meilleur projet de loi. Alors, je voulais juste profiter de
l'occasion pour redire ce que j'ai dit en propos introductifs, à quel point c'est
important, cette étude détaillée. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. D'autres interventions? Je n'en vois pas. Donc, à ce moment-là, nous
allons mettre... on procède pour la mise aux voix. Est-ce que l'amendement est
adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Parfait. Donc, on va passer à votre deuxième amendement, Mme la députée
de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien oui, déjà.
Alors, mon deuxième amendement, je vais le lire. Là, ça parle de
l'apprentissage. Est-ce que vous voulez savoir quoi lire, vers où je m'en vais,
Mme la Présidente, ou vous le savez? C'est celle où il y a...
La Présidente (Mme Thériault) :
...les choix?
Mme David : Non. C'est celle
où il y a le mot «perfectionnement» en grand, dans l'avant-dernière ligne.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. C'est beau.
Mme David : Alors, l'article 1
du projet de loi est modifié par l'insertion, dans le deuxième alinéa introduit
par le premier paragraphe, après le mot «apprentissage», des mots «et au
perfectionnement».
Commentaire. Le préambule de la Charte de
la langue française, tel qu'amendé, se lirait ainsi :
«L'Assemblée nationale reconnaît que le
français est la langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant
que tous soient sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture
québécoise comme liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun
ait accès à l'apprentissage et au perfectionnement de cette langue ainsi qu'à
faire du français la langue de l'intégration.»
Est-ce que vous voulez que je commente le commentaire?
La Présidente (Mme Thériault) :
Allez-y, oui.
Mme David : Alors, dans le projet
de loi — on y viendra beaucoup plus loin, mais pas si loin que ça — dans
les ordres professionnels, il est bien dit, clairement, et on en discutera,
mais que les professionnels doivent non seulement avoir une maîtrise de la
langue française au moment d'entrer dans leur ordre professionnel, c'est là
depuis très longtemps, et les professionnels suivent des cours de français,
surtout quand ils ont étudié dans une langue autre que le français, mais on
demande aussi, dans le projet de loi, <de...
Mme David : ...avoir
une
maîtrise de la langue française au moment d'entrer dans leur ordre
professionnel
, c'est là depuis très longtemps, et les professionnels
suivent des cours de français, surtout quand ils ont étudié dans une langue
autre que le français
, mais on demande aussi, dans le projet de loi,
>de maintenir, tout au long de la carrière, le français pour être sûr qu'ils
ne restent pas à un niveau qui pourrait être, s'ils n'ont pas souvent l'occasion
de le pratiquer, un niveau assez de base qui ne leur permettrait peut-être pas
d'être à la fine pointe de la maîtrise du français.
Dans cet esprit-là, ce qu'on pense, c'est
que le mot «apprentissage», dans notre Québec d'aujourd'hui, avec une très,
très grande attraction pour des langues autres que le français et
particulièrement pour l'anglais, je pense... et nous l'avons dit beaucoup dans
notre plan d'action, les 27 propositions qu'on a déposées, il était très,
très important de non seulement parler français, mais de bien maîtriser la
langue française.
C'est dans cet esprit-là que nous devons
parler, oui, de l'apprentissage, mais pas seulement l'apprentissage
fonctionnel, de pouvoir échanger deux, trois phrases ou des phrases pour
accueillir des gens dans les commerces, ou tout ça, mais de pouvoir
perfectionner ce français-là, qui montrerait leur réelle motivation, de tous et
chacun, de se dire...
Et c'est valable, Mme la Présidente, pas
seulement pour des anglophones ou des allophones, mais ce que je pourrais oser
dire pour les francophones aussi, de perfectionner, tout au long de la vie, la
qualité de la langue française. Ça, c'est autant à l'écrit qu'à l'oral. Alors,
c'est ce qui nous a inspirés pour ajouter «au perfectionnement de cette
langue».
• (17 h 40) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Commentaires? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Je
comprends l'objectif de la députée de Marguerite-Bourgeoys avec son amendement.
Cependant, au niveau du libellé, j'aurais peut-être une suggestion à faire,
parce que moi, je serais plus à l'aise avec «que chacun ait accès à
l'apprentissage de cette langue et à en parfaire la connaissance et la
maîtrise», plutôt que seulement «perfectionnement». Parce que c'est comme si
«perfectionnement» était rattaché à la langue, tandis que le souhait, je crois,
que la députée de Marguerite-Bourgeoys... c'est de viser l'individu qui, lui,
vise à avoir un perfectionnement, donc à en parfaire la connaissance et la
maîtrise. Donc, si vous le souhaitez, on pourrait modifier votre amendement
pour aller en ce sens-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, à ce moment-là, on proposerait un sous-amendement qui viendrait amender?
Non? On retire l'amendement de la députée et on vous...
Mme David : Oui, je suis
d'accord avec sa suggestion.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, ce qu'on va faire, Mme la Présidente, si la députée de Marguerite-Bourgeoys
retire cet amendement-là... puis elle pourrait redéposer l'amendement que je
lui suggère et qu'on s'entend.
La Présidente (Mme Thériault) :
Que vous lui suggérez bien gentiment. Donc, ça vous va,
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys?
Mme David : Oui, Mme la
Présidente. Ça me <va...
La Présidente (Mme Thériault) :
...sous-amendement qui viendrait amender? Non? On retire l'amendement de la
députée et on vous...
Mme David : Oui, je suis
d'accord avec sa suggestion.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, ce qu'on va faire, Mme la Présidente, si la députée de
Marguerite-Bourgeoys retire cet amendement-là... puis elle pourrait redéposer
l'amendement que je lui suggère et qu'on s'entend.
La Présidente (Mme Thériault) :
Que vous lui suggérez bien gentiment. Donc, ça vous va,
Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys?
Mme David : Oui, Mme la
Présidente. Ça me >va.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre, ça lui va?
M. Jolin-Barrette : Oui.
Donc, en attendant que ça soit écrit, Mme la Présidente, on pourrait peut-être
faire l'autre amendement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, on peut passer au troisième amendement. Donc, à ce moment... Oui? Ça me
prend un consentement pour retirer l'amendement qui avait été déposé.
Des voix
:
Consentement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Consentement. Parfait. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, le temps
que les légistes du ministre réécrivent votre deuxième amendement, vous nous
présentez votre troisième amendement, qui, cette fois-ci, c'est le mot «choix»
qui est en gras.
Mme David : Voilà, Mme la
Présidente. Alors, l'article 1 du projet de loi est modifié par le
remplacement, dans l'alinéa introduit par le troisième paragraphe, après
les mots «équilibre entre», du mot «droits» par le mot «choix».
Le préambule de la Charte de la langue
française, tel qu'amendé, se lirait comme suit :
«En vertu de la souveraineté
parlementaire, il revient au Parlement du Québec de confirmer le statut du
français comme langue officielle et langue commune ainsi que de consacrer la
prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois, tout en assurant
un équilibre entre les choix collectifs de la nation québécoise et les droits et
libertés de la personne.»
Mme la Présidente, là, on est dans du plus
costaud comme amendement. Et là aussi, comme le ministre disait qu'il
s'inspirait des audiences publiques, des consultations particulières, nous
aussi, on s'inspire des consultations particulières et des mémoires que nous
avons reçus, alors, en particulier, évidemment, le professeur
Benoît Pelletier, qui nous a bien dit que le mot «choix» serait préférable
au mot «droits».
Là, je vais rentrer dans un petit peu de
revue de littérature pour expliquer ça. La notion de droit collectif est plutôt
associée à un droit exercé par un groupe minoritaire, pas majoritaire,
minoritaire. Par exemple, le terme «droits collectifs» est souvent associé aux
droits des peuples des Premières Nations, justement, ou aux droits des
travailleurs de s'associer. Le terme «choix collectifs» réfère plutôt au choix
du législateur québécois d'adopter des lois dans le but de préserver le visage
francophone de la province, même si parfois ces choix interfèrent avec certains
droits individuels, comme la liberté d'expression commerciale, par exemple.
Jocelyn Maclure, dont on se
souviendra au projet de loi n° 21, professeur de philosophie à
l'Université Laval, mentionnait, dans un texte publié dans LaPresse, à
ce moment-là, il parlait du projet de loi n° 21, mais ça s'applique au
projet de loi n° 96 : «L'argument de l'équilibre nécessaire entre les
droits collectifs et les droits individuels est rhétoriquement habile. Il
constitue néanmoins une mystification. Nous sommes plutôt en présence du
problème classique, théorisé, entre autres, par Alexis de Tocqueville et John
Stuart Mill, du rapport entre la volonté de la majorité et les libertés
fondamentales des citoyens touchés par une décision gouvernementale.» La même
logique s'applique en l'espèce avec le projet de loi n° 96.
Jean Leclair, qui est venu nous voir, qui
a écrit un mémoire passablement <étoffé...
Mme David : ...du
rapport
entre la volonté de la majorité et les libertés fondamentales des citoyens
touchés par une décision gouvernementale.» La même logique s'applique en
l'espèce avec le projet de loi n° 96.
Jean Leclair, qui est venu nous voir,
qui a écrit un mémoire passablement >étoffé, je dirais, mentionnait,
dans un texte publié dans Le Devoir, donc pas nécessairement dans
son mémoire, mais il l'a redit dans son mémoire : «Nulle part, que ce soit
en droit national ou international, trouverez-vous un document où un texte
juridique qui justifie la limitation des droits des citoyens au nom des "droits
collectifs" de la majorité nationale.
«Les droits collectifs permettent de se
défendre contre les plus puissants que soi. Ils n'autorisent pas la minorité
qui les invoque à retourner son pouvoir collectif contre ses propres
ressortissants.
«Il faut donc appeler un chat un chat.
Quand l'État québécois limite les droits de ses concitoyens, il le fait dans
l'exercice de son pouvoir souverain de contrainte et non en tant que mandataire
d'une nation détenant des droits collectifs.» Et là on revient au pouvoir
souverain qui parle un peu aussi de la souveraineté parlementaire.
Benoît Pelletier, professeur de droit
constitutionnel à l'Université d'Ottawa, mentionne aussi, dans un texte publié
dans La Presse : «Le législateur doit disposer de la capacité de
poser et même d'imposer ce que nous appellerons ici des choix collectifs. C'est
là sa vocation et sa fonction et les cours de justice ne doivent pas usurper
ces dernières.» On parle de choix collectifs.
Je continue. Je le sais que c'est assez
aride, mais j'ai trouvé que c'est suffisamment important parce que les mots...
on le dit beaucoup, dans la législation, chaque mot compte. Alors, droit et
choix, ce n'est pas la même chose.
Dans le renvoi relatif à la sécession du
Québec en 1998, au paragraphe 59, la Cour suprême du Canada fait référence
à la poursuite d'objectifs collectifs, objectifs dans ce cas-ci, et non de
droits collectifs par des minorités linguistiques constituant la majorité dans
une province. Je cite : «Le principe du fédéralisme facilite la poursuite
d'objectifs collectifs par des minorités culturelles ou linguistiques qui
constituent la majorité dans une province donnée.» C'est pas mal nous, la
majorité francophone dans une province donnée. «C'est le cas au Québec, où la
majorité de la population est francophone et qui possède une culture
distincte. Ce n'est pas le simple fruit du hasard. La réalité sociale et
démographique du Québec explique son existence comme entité politique et a constitué,
en fait, une des raisons essentielles de la création d'une structure fédérale
pour l'union canadienne en 1867. La structure fédérale adoptée à l'époque de la
Confédération a permis aux Canadiens de langue française de former la majorité
numérique de la population de la province de Québec, et d'exercer ainsi les
pouvoirs provinciaux considérables que conférait la Loi constitutionnelle de
1867 de façon à promouvoir leur langue et leur culture.» Alors, c'est 1998,
renvoi relatif à la sécession du Québec qui parle donc d'objectifs collectifs.
Michel Bastarache, qui est encore très
actif, on l'a vu récemment dans un rapport, ancien <juge...
Mme David : ...que
conférait
la Loi constitutionnelle de 1867 de façon à promouvoir leur langue et leur
culture.» Alors, c'est 1998, renvoi relatif à la sécession du Québec qui parle
donc d'objectifs collectifs.
Michel Bastarache, qui est encore très
actif, on l'a vu récemment dans un rapport, ancien >juge à la Cour
suprême du Canada, indique, dans son ouvrage Les droits linguistiques au
Canada, en 2013, que « l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 est
une reconnaissance de droits collectifs des minorités francophones et
anglophones du Canada, compte tenu du contexte historique et politique dans
lequel s'inscrit l'adoption de la Loi constitutionnelle de 1867. Il
conviendrait plutôt de considérer que cette disposition — l'article
133 — assure la reconnaissance de droits collectifs en vue du
développement et de la préservation des minorités francophones et anglophones.
D'ailleurs, la participation à l'activité parlementaire est par nature
foncièrement sociale et collective.»
Tout ça pour dire, Mme la Présidente, que
ce n'est pas anodin, le recours aux mots dans ce cas-ci. Je ne me prends pas
pour une constitutionnaliste, certainement pas, je ne suis pas juriste, mais je
suis capable de lire des rapports et des avis de la Cour suprême et de me faire
alerter au fait que le mot «droits collectifs», pour une majorité, n'est pas
nécessairement judicieux et que c'est beaucoup mieux de décrire ça en termes de
«choix collectifs».
Maintenant, le ministre a des avis,
probablement, qui vont dans un autre sens, mais j'ai bien hâte de l'entendre
sur la réponse à un arrêt de la Cour suprême, un ancien juge de la Cour
suprême, des constitutionnalistes qui vont tous dans cette direction-là. Merci,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Le député de Sainte-Rose m'a fait signe qu'il voulait parler. M. le
député de Sainte-Rose.
• (17 h 50) •
M. Skeete : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Rapidement, la collègue, elle a fait une bonne recherche. Je
pense que le point de départ, pour moi, et où est-ce que je diverge de la
collègue, son point de départ est de mettre une équivalence entre l'anglais et
le français et de ne pas reconnaître la fragilité du français même au Québec.
Donc, de dire que la langue majoritaire au
Québec est le français, c'est peut-être vrai en termes de nombre sur le
territoire Québec, mais même le gouvernement fédéral, aujourd'hui, reconnaît la
symétrie du pouvoir entre les deux langues officielles. Je ne suis pas
certain qu'il y a une équivalence à donner et donc je ne suis pas certain que c'est
pertinent d'évoquer des arguments que les francophones au Québec sont
majoritaires comme argument premier.
La langue française, elle est fragile au
Québec. Donc, tout ce qui en découle, de cet argument-là, je suis dubitatif...
j'ai de la misère avec ce mot-là. Alors, peut-être qu'on pourrait entamer une discussion
là-dessus parce que je ne suis pas sûr de voir, même sur le territoire du
Québec, les francophones comme une majorité. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, sur
celui-là, Mme la Présidente, je ne serai pas en accord avec la députée de
Marguerite-Bourgeoys parce qu'il y un élément important pourquoi est-ce qu'on
utilise le terme «droits» plutôt que <«choix»...
M. Skeete : ...comme
une
majorité. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Bien, sur celui-là, Mme la Présidente, je ne serai pas en accord avec la
députée de Marguerite-Bourgeoys parce qu'il y un élément important pourquoi
est-ce qu'on utilise le terme «droits» plutôt que >«choix», parce que...
Ce qu'on fait avec la Charte de la langue française, c'est important. La nation
québécoise, elle est titulaire de droits collectifs. Il faut que ça apparaisse
dans nos lois. Il faut que ça apparaisse clairement que, pour protéger le français,
bien, ça fait partie des droits qui sont inhérents à la nation québécoise.
Et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est
un choix, entre parlementaires. La notion de choix réfère davantage à l'aspect
sociologique de la chose.
Mais là on vient mettre dans une loi un
aspect juridique. Alors, il y a des droits individuels, les droits et libertés
existent, mais également des droits collectifs, et moi, je pense que c'est important
de le nommer, et que la Charte de la langue française fait partie des droits
collectifs de la nation québécoise de pouvoir s'exprimer en français aussi.
Alors, c'est pour ça que je ne retiendrai
pas la suggestion relativement à remplacer la notion de «droits» par la notion
de «choix».
Mme David : J'entends ce que
vous dites, mais la notion de... C'est vrai que c'est un choix, en même temps,
le choix qu'on fait de collectivement valoriser la langue française, mais ce
qu'on entend beaucoup des gens que j'ai cités, entre autres, mais d'autres, c'est
que la notion de droits collectifs est une notion qui est contestable en soi.
La Charte des droits et libertés de la personne, c'est beaucoup plus pour des
individus. D'ailleurs, quand la Commission des droits de la personne est venue
dire que le droit de vivre en français n'était pas nécessairement un droit et
liberté de la personne et se demandait un peu pourquoi un droit comme ça serait
mis dans la Charte des droits et libertés de la personne... parce que c'est
beaucoup plus fait pour protéger les minorités.
Alors, j'ai l'impression que c'est un peu
dans le même esprit que;Les auteurs que j'ai cités, qui ne sont quand même pas
les moindres, se posent des questions sur la question des droits collectifs en
disant : Ce n'est peut-être pas un mot, juridiquement, qui veut dire ce
que ça veut dire dans le contexte de ce projet de loi là, où, qu'on le veuille
ou pas... Le député de Sainte-Rose disait : On n'est pas une majorité,
mais... On est peut-être une majorité fragile au sein du Canada, mais là c'est
une loi provinciale, donc on est une majorité.
M. Jolin-Barrette :
...québécoise.
Mme David : On n'est peut-être
pas majoritaires au sein du Canada, mais c'est une loi provinciale.
M. Jolin-Barrette : Mais
québécoise, une loi québécoise.
Mme David : Bien oui. Bien
oui, provinciale, province de Québec. Je veux dire, on n'est pas à la Chambre
des communes, ici. Ce n'est pas une loi qu'on adopte à la Chambre des communes.
M. Jolin-Barrette : Je suis
d'accord, mais ce que je souhaite dire par mon commentaire, c'est qu'il est
établi que le Québec est un État, et ce, depuis, je vous dirais... L'appréciation
d'État a été beaucoup développée par le Parti libéral dans les années 60 avec
Jean Lesage, et notamment par Paul Gérin-Lajoie. Alors, je crois que le statut
d'État fédéré du Québec est important.
Oui, c'est une loi qui est québécoise. Par
contre, la nation québécoise, elle est titulaire de droits collectifs, et <certains...
M. Jolin-Barrette :
...l'appréciation
d'État a été beaucoup développée par le Parti libéral
dans les années 60 avec Jean Lesage, et notamment par Paul Gérin-Lajoie. Alors,
je crois que le statut d'État fédéré du Québec est important.
Oui, c'est une loi qui est québécoise.
Par contre, la nation québécoise, elle est titulaire de droits collectifs, et
>certains le nient, ça, le nient. Puis, dans les auteurs que vous avez
cités, beaucoup de ceux-ci disent : Bien non, l'État québécois, la nation québécoise
n'est pas titulaire de droits collectifs. C'est le ratio de leur argumentaire
de dire : Bien, tout ce qui compte dans la vie au Canada, au Québec, tout
ce qui compte dans la vie, c'est les droits individuels.
Mais, dans tout ça, ils oublient que la
nation québécoise est titulaire de droits collectifs. Et ce n'est pas pour rien
également que, dans chacune des chartes, à la fois la Charte des droits et
libertés de la personne, donc la charte québécoise, et la charte des droits et
libertés, la charte canadienne, bien, dans les deux cas, que ce soit l'article 1
de la charte canadienne ou à 9.1 de la charte québécoise, bien, il y a un
mécanisme qui fait en sorte, pour la charte canadienne, que, dans une société
libre et démocratique, les droits peuvent être limités, hein? C'est la disposition
qui fait en sorte que ce n'est pas des droits et libertés absolus dans notre
État fédéral qui sont mur à mur parce que la limite de vos droits s'arrête à
celle des autres, où elle commence. Puis également, comme, au sein d'une
collectivité, on ne peut pas faire n'importe quoi, il y a un régime juridique
qui s'applique.
Or, il ne faut pas oublier que, comme
nation, comme peuple, celui-ci est également titulaire de droits collectifs, et
c'est pour ça qu'on vient l'inscrire ici. Comme nation, on a le droit de
défendre la langue officielle, la langue commune du Québec, et c'est le sens de
la portée de l'ajout que l'on fait au préambule, parce qu'il est fondamental
que, comme nation, on puisse exprimer les choix collectifs qu'on fait par le
biais des droits collectifs que nous avons. Alors, on fait un choix d'exprimer
les droits collectifs que nous avons.
Dans le dossier de la laïcité, l'Assemblée
nationale est venue consacrer les droits collectifs de la nation québécoise.
Les peuples autochtones également ont des droits collectifs. Et ça, c'est toujours
intéressant d'entendre ces différents auteurs que vous citez venir dire :
Écoutez, ça n'existe pas, les droits collectifs. Par contre, pour les nations
autochtones, ça existerait. Alors, pour la nation québécoise, ça n'existerait
pas? Alors, moi, je m'inscris en faux avec cette approche et je crois que,
comme Assemblée, on doit le souligner qu'il existe des droits collectifs.
Et là, ici, ce qu'on vient faire, c'est
qu'on vient amener un équilibrage entre les droits individuels et les droits
collectifs parce que c'est tellement important de protéger le français. C'est
important également que la nation québécoise puisse s'exprimer en français,
pour maintenant et pour le futur, pour assurer sa pérennité, qu'il faut le dire
que ça fait partie des droits collectifs de la nation.
Mme David : Bien, évidemment,
je comprends qu'il n'y aura pas d'accord pour ça, mais ce que je trouve
intéressant, c'est qu'on revient à des discussions qui ont eu lieu en 1977. Il
y avait un article qui s'appelait l'article 172, que Camille Laurin voulait absolument
faire adopter, qui donnait, et là vous allez trouver ça intéressant, le même
statut à la Charte de la langue française <que...
Mme David : ...je comprends
qu'il n'y aura pas
d'accord pour ça, mais ce que je trouve
intéressant, c'est qu'on revient à des discussions qui ont eu lieu en 1977.
Il
y avait un
article qui s'appelait
l'article 172, que Camille
Laurin voulait
absolument faire adopter, qui donnait
, et là vous
allez trouver ça intéressant, le même statut à la Charte de la langue française
>qu'à la Charte des droits et libertés de la personne, qui avait été
votée deux ans plus tôt, en 1975. Et là il y a eu une telle discussion,
conversation, puis, vous savez, il a retiré son projet de loi, et il en a
déposé un autre avec des amendements, et il avait complètement effacé l'article 172
parce que ça créait trop de tollé et de tension au sein du Parti québécois
entre : Est-ce que... parce que, là, on va y arriver un jour, au fait que
la charte des droits... et même c'est déjà mentionné ici, là, qu'ils vont avoir
le même statut législatif, les deux chartes. Puis on voit bien que ça tiraille
un peu du côté de la Charte des droits et libertés, mais ça tiraillait déjà
énormément en 1977, tellement que cet article 172 a été retiré. Donc, je
pense, Camille Laurin, là-dessus, n'a pas eu le dessus sur son Conseil des
ministres parce qu'il y avait beaucoup de gens qui plaidaient pour : Non,
non, non, on ne s'en va pas là. On ne s'en va pas là.
Là, on est 50 ans plus tard quand
même, là, je ne sais plus, 44 ans plus tard. Alors, écoutez, moi, je ne
peux pas aller plus loin que ça dans la discussion. Je comprends que le
ministre n'acceptera pas. Alors, j'ai terminé mon intervention, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : J'avais une
question. Moi, je suis totalement d'accord à ce qu'on garde «droits
collectifs». Je trouve que c'est une notion importante qui doit être
mentionnée, pas juste les droits et libertés de la personne, mais il y a des
droits collectifs, notamment que ça soit par rapport à la langue française pour
la nation québécoise et d'autres droits qui peuvent être reconnus.
Mais j'avais une question. Est-ce que, la
notion de droits collectifs, c'est la première fois que ça apparaît dans un
texte législatif ou c'est déjà présent?
M. Jolin-Barrette : Dans
la loi sur la laïcité qu'on a adoptée en 2019, c'était présent.
Mme Ghazal : C'est les
seuls, les deux seuls?
M. Jolin-Barrette :
Est-ce que c'est les deux seuls? Je vais pouvoir vous revenir.
Mme Ghazal : Oui, très
bien. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux
voix. Est-ce que l'amendement est adopté?
Une voix
: Rejeté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Rejeté. L'amendement est rejeté.
Mme Ghazal : Mais est-ce
que... O.K. Non, c'est bon. Je voulais qu'on... Est-ce qu'on peut faire un...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous voulez faire un vote par appel nominal?
Mme Ghazal : Bien oui.
La Présidente (Mme Thériault) :
Un vote par appel nominal. Il n'y a pas de problème. Mme la secrétaire... C'est
parce qu'il faut que vous me le demandiez. Sinon, je dis «adopté» ou «rejeté».
C'est la pratique. C'est normal, on est en début de commission. Donc, le vote
par appel nominal, Mme la secrétaire.
La Secrétaire
: Oui.
Veuillez répondre pour, contre ou abstention. Mme David
(Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire
:
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Pour.
La Secrétaire
:
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
:
M. Provençal (Beauce-Nord)?
M. Provençal : Contre.
La Secrétaire
:
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
• (18 heures) •
La Secrétaire
:
Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Contre.
La Secrétaire
:
<M. Bérubé
(Matane-Matapédia)...
>
18 h (version révisée)
< La Secrétaire: ...
M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
:
M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
:
M. Provençal
(Beauce-Nord)?
M.
Provençal :
Contre.
La Secrétaire
:
Mme
Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
:
M. Skeete
(Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire
:
Mme Ghazal
(Mercier)?
Mme Ghazal : Contre.
La Secrétaire
: >M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Contre.
La Secrétaire
: Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, c'est rejeté.
Est-ce qu'on revient à l'amendement de la
députée de Marguerite-Bourgeoys, qui aurait dû être corrigé?
M. Jolin-Barrette : Il a été
envoyé.
La Présidente (Mme Thériault) :
Ça a déjà été envoyé. Donc, on va vider les amendements de la députée et, après
ça, on viendra à votre amendement, Mme la députée de Mercier. Donc, on nous
indique que ça a été envoyé, mais là je n'ai pas le texte.
Donc, je vais vous demander une très
courte suspension, le temps qu'on puisse me donner une copie du texte, s'il
vous plaît.
(Suspension de la séance à 18 h 01)
>
(Reprise à 18 h 15)
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous poursuivons nos travaux. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys,
pour l'amendement de l'article qui a été... pardon, de l'amendement qui a été
retiré et remplacé par un nouvel amendement, allez-y, je vous écoute.
Mme David : Alors, à l'article
1 du projet de loi, insérer, dans l'alinéa du préambule de la Charte de la
langue française que propose le paragraphe 1° et après «l'apprentissage de
cette langue», «, et à en parfaire la connaissance et la maîtrise,».
La Présidente (Mme Thériault) :
...enlève le «et».
Mme David : ...«, à en
parfaire la connaissance et la maîtrise,». Excusez-moi, Mme la Présidente.
Donc, le texte amendé de l'alinéa du
préambule proposé par le paragraphe 1° se lirait comme suit :
Le préambule de la Charte de la langue
française (chapitre C-11) est modifié :
1° par l'insertion, après le deuxième
alinéa, du suivant :
«L'Assemblée nationale reconnaît que le
français est la langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant
que tous soient sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture
québécoise comme liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun
ait accès à l'apprentissage de cette langue, à en parfaire la connaissance et
la maîtrise, ainsi qu'à faire du français la langue de l'intégration.»
La Présidente (Mme Thériault) :
Voilà pour l'amendement. Commentaires?
Mme David : Alors, écoutez, je
suis bien d'accord avec cette formulation. Je pense que c'est même mieux que la
première formulation. Donnons le mérite au ministre. Et je pense que ce n'est
pas banal comme ajout, parce que c'est non seulement, comme j'ai dit,
l'apprentissage, mais, «en parfaire la connaissance et la maîtrise», ça nous
touche tous et toutes à tous les jours : relire nos courriels, relire nos
textos, avoir Antidote, se dire : Est-ce que je passerais, là, l'épreuve
uniforme de français du secondaire... du secondaire, oui, mais du collégial? Est-ce
que j'échouerais, moi aussi, comme malheureusement 40 %, souvent, des
étudiants au collégial? Bien, écoutez, pour moi, c'est extrêmement important. C'est
une affaire de tous les jours, cette maîtrise du français. Ce n'est pas une
fois pour toutes.
Et on doit tous s'inclure là-dedans.
Comment ça s'écrit, «vigilance»? C'est-tu avec un «a» ou avec un «e»? Comment
ça s'écrit... Ce n'est pas que les autocorrecteurs, là, il y a tout un grand
débat autour des accords de participes passés, la nouvelle orthographe. Est-ce
qu'il devrait y avoir... on fait sauter ça, les participes passés liés au verbe
avoir et garder seulement le verbe être? Une langue vivante, c'est une langue
qui doit s'intégrer à notre culture, mais il faut constamment y penser.
Donc, Mme la Présidente, je suis très
heureuse de voir apparaître, dans le préambule, la notion du droit à en
parfaire la connaissance et la maîtrise, parce qu'un préambule ça veut dire quelque
chose. Alors, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Puisqu'il n'y en a pas, nous <allons...
Mme David : ...très heureuse
de voir apparaître, dans le préambule, la notion du droit à en parfaire la
connaissance et la maîtrise, parce qu'un préambule ça veut dire
quelque
chose. Alors,
merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Puisqu'il n'y en a pas, nous
>allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Donc, nous sommes rendus au cinquième amendement sur l'article, celui
déposé par la députée de Mercier. Mme la députée de Mercier, si vous voulez
nous faire la lecture de votre amendement, s'il vous plaît.
Mme Ghazal : L'article 1 du projet
de loi est modifié par l'ajout du paragraphe suivant :
4° par le remplacement du quatrième alinéa
par :
«Dans une relation de nation à nation, l'Assemblée
nationale reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit du Québec le droit
d'enseigner, de valoriser et défendre leur langue et leur culture[...]»
Donc, je sais qu'on vient d'adopter un amendement
pour changer l'appellation «Amérindiens» par «Premières Nations et Inuit du
Québec», mais moi, l'amendement, dans le fond, je le prends textuellement du
mémoire de l'APNQL.
Vous savez, à l'époque, en 1977, le
ministre de l'époque, le gouvernement de l'époque aurait pu ne jamais faire
mention, dans le préambule, de la question des premiers peuples, mais ils ont
trouvé que c'était important, dans un esprit innovateur, progressiste,
inclusif, d'en faire mention et de dire que... j'essaie de retrouver la
formulation d'origine, excusez-moi, et donc de dire, à l'époque, de reconnaître
aux Premières Nations et Inuits du Québec, descendant des premiers habitants du
pays, le droit qu'ils ont de maintenir et de développer leur langue et culture
d'origine. Et ça, ça répond, dans le fond, au principe de dire qu'il faut que ça
soit inclusif, la question de la langue, s'intéresser aux autres cultures, etc.
• (18 h 20) •
Mais plus de 40 ans plus tard, c'est
important de moderniser et d'amener une formulation qui, dans le fond,
représente là où on est rendus aujourd'hui, de cette relation de nation à
nation et, encore plus important, d'écouter ce que les Premières Nations et
Inuits nous ont dit. Ils sont venus, on les a invités en commission pour nous dire
ce qu'ils pensaient du projet de loi n° 96, et là la
moindre des choses aurait été, peut-être, de prendre le temps de modifier, et
peut-être que le ministre avait déjà l'intention de le faire, je ne le sais
pas, pour les autres articles où on dit «Amérindiens». Ça, c'était la moindre
des choses.
Mais là, moi, ce que j'amène, c'est
vraiment de reprendre leur formulation et de dire qu'ils ont le droit, en fait,
le droit de l'enseigner, de la valoriser, de défendre leur langue et leur
culture d'origine, mais toujours dans une relation de nation à nation. Et que
ça soit écrit dans le préambule de la Charte de la langue française, bien,
c'est un message très fort et important qu'on leur dit qu'on vous <écoute.
Mme Ghazal : ...formulation
et
de dire qu'ils ont le droit, en fait, le droit de l'enseigner, de la valoriser,
de défendre leur langue et leur culture d'origine, mais toujours dans une
relation de nation à nation. Et que ça soit écrit dans le préambule de la
Charte de la langue française, bien, c'est un message très fort et important
qu'on leur dit qu'on vous >écoute. Nous voulons défendre la langue
française, mais nous sommes aussi conscients de la fragilité de votre langue,
et nous vous écoutons, et nous l'ajoutons aussi, dès le préambule. Donc, ça
envoie un message de bienveillance, d'ouverture, d'écoute, de patience, etc. Voilà.
La Présidente (Mme Thériault) :
Commentaires? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Alors, je comprends très bien l'objectif de la députée de Mercier en lien avec
sa proposition d'amendement. Là, désormais, avec l'amendement qu'on vient
d'accepter de la députée de Marguerite-Bourgeoys, le... un, deux, trois,
quatre, cinq, cinquième alinéa se lit ainsi :
«L'Assemblée nationale reconnaît aux Premières
Nations et aux Inuit du Québec, descendants des premiers habitants du pays, le
droit qu'ils ont de maintenir et de développer leur langue et culture
d'origine.»
Alors, l'essence même de ce qui est
proposé par la députée de Mercier s'y retrouve déjà. Le souhait de rajouter
«dans une relation de nation à nation», actuellement, ça n'apparaît pas dans
aucune loi québécoise. Les négociations, les ententes se font de nation à
nation, puis c'est un principe bien établi.
Par contre, ce n'est pas l'endroit, dans
la Charte de la langue française, pour l'inscrire. Le collègue aux Affaires
autochtones a tout le loisir de le faire éventuellement dans un projet de loi.
Et l'objectif de la Charte de la langue française, c'est de protéger la langue
française, précisément, mais ça n'enlève rien aux nations autochtones. Et
justement, l'article, il est là pour faire en sorte... bien, pardon, l'alinéa,
il est là pour faire en sorte, justement, de permettre aux nations autochtones
de faire en sorte de maintenir et de développer leur langue et leur culture
d'origine. Donc, lorsqu'on parle de valoriser, de défendre leur langue, c'est
déjà ce qui est indiqué aussi.
Donc, le concept, il est là, mais je ne
crois pas que c'est l'endroit approprié pour inscrire ce concept-là, de nation
à nation, à l'intérieur de la Charte de la langue française.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui, Mme la députée de Mercier. J'aurai le député de Matane après.
Mme Ghazal : Si je me fie à
l'argument du ministre, qui dit qu'ici c'est... on est là pour défendre, et
valoriser, et protéger la langue française au Québec, si cet argument-là était...
ou cette façon de réfléchir là était utilisée à l'époque, en 1977, en disant :
Bien là, l'objectif, c'est la langue française, probablement que cet alinéa-là
ne se serait jamais retrouvé là à l'origine. Et là on serait venu le modifier,
puis peut-être qu'on l'aurait ajouté ou pas. Et je me demande, avec l'argument
du ministre, s'il l'aurait lui-même ajouté, s'il n'était pas déjà là
depuis 1977, à cause de l'argument qu'il vient de me donner.
Je comprends que c'est ça, l'objectif de
la loi, c'est de protéger la langue française, mais à l'époque, dans un esprit
innovateur, progressiste, d'inclusion, de bienveillance <envers...
Mme Ghazal : ...avec
l'argument
du ministre, s'il l'aurait lui-même ajouté, s'il n'était pas déjà là
depuis 1977, à cause de l'argument qu'il vient de me donner.
Je comprends que c'est ça, l'objectif
de la loi, c'est de protéger la langue française, mais à l'époque, dans un
esprit innovateur, progressiste, d'inclusion, de bienveillance >envers
les premiers peuples, même à l'époque, il y a 40 ans, sans même qu'il y
ait toute une organisation ou, si je peux dire, des gens des Premières Nations,
des autochtones qui étaient organisés pour demander que ce soit là, ce n'était
même pas là à l'époque. Ça a été fait par le gouvernement de l'époque, par
lui-même.
Donc, moi, je fais appel au même esprit
qui existait à l'époque, d'ouverture, d'inclusion, et de ne pas rester
restreints et fermés en disant : Ah! mais ici, je suis dans... c'est juste
la langue française, donc je ne peux pas parler d'autre chose, ce n'est pas ça,
l'objectif du projet de loi. On ne peut pas réfléchir comme ça. Bien, le
ministre peut le faire, mais, selon moi, ce n'est pas une bonne façon de
réfléchir à la protection de la langue française au Québec. On ne peut pas
faire fi des langues des premiers peuples en disant : Bien, c'était déjà
écrit, on ne va pas le changer.
Et, en plus, moi, ce que je propose ici, c'est
vraiment... pas juste de faire des Premières Nations et des Inuits des acteurs
passifs, mais plutôt des acteurs actifs et même qui participent aux changements
de la loi qu'on est en train de faire ici, en tant que législateurs. Et ils
l'ont fait, cet effort-là, ils l'ont proposé. Ils ont... C'était écrit : «Afin
de moderniser les termes descriptifs applicables aux Premières Nations, il est
proposé de modifier le préambule» de cette façon-là. Ils ont proposé d'ajouter
«une relation de nation à nation», un peu comme «droits collectifs» a été
ajouté dans la Charte de la langue française. Le ministre m'a dit qu'il a été
ajouté aussi dans le projet de loi n° 21. Peut-être que ça existe ailleurs
ou peut-être non. Le gouvernement a décidé d'innover puis de dire : Il
faut aussi reconnaître les droits collectifs, c'est important. Alors que, là,
on parle de la langue française, je comprends qu'on peut dire : Bien, la
langue française, c'est un droit collectif, on peut en discuter, mais je trouve
que c'est important d'écouter cette main tendue et de ne pas dire : Bien,
on va pelleter ça pour le ministre qui est responsable des Affaires
autochtones.
En plus, ils ont été invités, et c'était
la seule chose à faire. Bien, maintenant, on ne peut pas juste leur dire :
On vous écoute. Il faut aussi les entendre. Et moi, c'est dans cet esprit-là
que je demande au ministre d'accepter l'amendement, mon amendement, qui est
celui de l'APNQL et des Premières Nations.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'ai le député de Matane qui voulait faire une intervention.
M. Bérubé : Mme la Présidente,
je suis d'accord avec les arguments invoqués par le ministre. Certes, ça peut apparaître
très vertueux de faire ça, mais ce n'est pas l'endroit pour ça. Le français, sa
protection, ne va pas à l'encontre des langues autochtones. Je ne crois pas ça.
J'ai beaucoup étudié cet enjeu-là et j'ai étudié aussi les raisons initiales
dans la loi 101 pour lesquelles on a considéré ça. Il y a plein de moyens
de faire des relations d'égal à égal. Reconnaître les 11 nations, c'en est
un, ça a été fait en 1985 par le gouvernement de M. Lévesque. Signer des
ententes, dans l'usage, ça se fait <régulièrement...
M. Bérubé : ...je ne crois
pas ça. J'ai beaucoup étudié cet enjeu-là et j'ai étudié aussi les raisons
initiales dans la loi 101 pour lesquelles on a considéré ça. Il y a plein
de moyens de faire des relations d'égal à égal. Reconnaître les
11 nations, c'en est un, ça a été fait en 1985 par le gouvernement de
M. Lévesque. Signer des ententes, dans l'usage, ça se fait >régulièrement.
Je suis d'avis que les langues autochtones
mériteraient un projet de loi à part entière qui pourrait être initié par
n'importe quelle formation ici présente, mais je suis plutôt en accord avec le ministre,
il me semble qu'on embarque dans quelque chose qui ne rendrait pas justice, justement,
à la cause qu'on veut servir, c'est-à-dire les lois autochtones... en fait, les
langues autochtones. Donc, je souscris aux arguments du ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le député de Sainte-Rose.
M. Skeete : Merci beaucoup.
Pas mal en accord avec le collègue de Matane-Matapédia et le ministre. Mais
surtout, au-delà de la bonne idée qu'a la collègue de Mercier, je pense que ce
serait, encore une fois, un autre exemple d'une instance qui décide pour des
groupes sans les consulter. Je pense qu'il faut éviter ça. Je pense que cette
nomenclature-là, et tout ce qui en devient, doit être négociée avec respect de
nation à nation, et ce n'est pas la place pour faire ça. Donc, je m'inscris en
accord avec les deux collègues.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : ...ce n'est pas
la place pour faire ça. Pourquoi est-ce qu'on les a invités? On leur a demandé
de présenter, déposer un mémoire pour pouvoir, après ça, utiliser ça ailleurs.
Pourquoi on les a invités à le faire ici, si ce n'était pas la place? Pourquoi
est-ce qu'on n'aurait pas attendu de, justement, présenter une autre pièce
législative sur les Premières Nations? C'est parce que c'est la place, parce
qu'on est à la bonne place pour en discuter. C'est pour ça qu'on les a invités.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, je
comprends que c'est la prétention de la députée de Mercier de dire, lorsque... Dans
le fond, on entend tous les groupes qui viennent en commission parlementaire,
mais on ne donne pas suite à toutes les demandes des groupes qui viennent en
commission parlementaire. Ça, je crois que tout le monde en est conscient. On
écoute les gens, mais parfois, il y a certains choix du législateur qui sont
effectués.
En l'occurrence, ici, l'alinéa cinq, là,
déjà de la Charte de la langue française fait déjà en sorte, et depuis 1977, de
construire... puis la Charte de la langue française a été construite dans une
notion de respect, hein, de la culture, et des langues, et de la valorisation
qu'on reconnaît dans la culture et dans les langues autochtones. Et surtout,
l'amendement que la députée de Mercier propose, en fait, supprime l'aspect qui
est «descendant des premiers habitants du pays». Ça, je pense que c'est
important de le maintenir également.
• (18 h 30) •
Et tout ce qui est souhaité par la députée
de Mercier s'y retrouve également, le droit qu'ils ont de maintenir et de
développer leur langue et leur culture et culture d'origine. Donc, ça veut
dire, déjà, ce qui est souhaité par la députée de Mercier. Et le <véhicule
approprié, par rapport à la Charte de la langue française, c'est...
>
18 h 30 (version révisée)
<15359
M.
Jolin-Barrette :
...
également.
Et tout ce qui est souhaité par la
députée de Mercier s'y retrouve également, le droit qu'ils ont de maintenir et
de développer leur langue et leur culture et culture d'origine. Donc, ça veut
dire, déjà, ce qui est souhaité par la députée de Mercier. Et le >véhicule
approprié par rapport à la Charte de la langue française, c'est pour la langue
française. Nous, on dit : On protège, valorise la langue française dans le
respect de la langue et de la culture d'origine des nations autochtones
également. Alors, sur cet aspect-là, il n'y a pas d'enjeu. C'est déjà là, et
l'alinéa le dit déjà.
Pour ce qui est de l'enjeu de nation à
nation, bien, écoutez, c'est un principe qui est établi, mais ce que je dis, c'est
que, pour le faire, ce n'est pas le véhicule législatif approprié pour le
faire, de venir inscrire ça, «de nation à nation», dans la Charte de la langue
française, et des impacts juridiques qu'il peut y avoir découlant de tout ça.
Mme Ghazal : Bien, j'aimerais
savoir c'est quoi, les impacts juridiques découlant d'écrire, dans un texte de
loi, «relations de nation à nation».
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, il y en a plusieurs. Il y en a plusieurs, et ce n'est pas dans le corpus
actuellement. Donc, le fait de venir modifier cela a certainement un impact
juridique. Et déjà le gouvernement du Québec, depuis plusieurs années... Et, à
juste titre, le député de Matane-Matapédia l'a souligné que c'est le
gouvernement du Parti québécois qui l'a reconnu en 1985, les nations
autochtones. Il y a des accords avec les différentes nations autochtones qui se
font également.
Mais, pour ce qui est de l'aspect de la
Charte de la langue française, ce n'est pas là qu'on va venir établir
légistiquement ce principe-là, à l'intérieur de la Charte de la langue
française. Je crois que c'est beaucoup mieux d'avoir une loi destinée
précisément aux relations avec les autochtones, basée sur ce concept-là, plutôt
que de venir le mettre dans la Charte de la langue française.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'ai la députée de Marguerite-Bourgeoys qui veut faire une intervention.
Mme David : O.K. Oui, écoutez,
je vais être bien humble dans mes propos par rapport à ça parce
qu'effectivement c'est un sujet extrêmement délicat. J'avais l'impression qu'on
y référait par le paragraphe qu'on a changé, justement, en parlant de Premières
Nations.
Mais j'insiste pour dire qu'il va falloir
parler d'enjeux autochtones quand on va arriver à certains articles du projet
de loi n° 96 qui touchent particulièrement les
anglophones... les anglophones, excusez, les Premières Nations, les
autochtones. Je donne un exemple. L'épreuve uniforme de français, on va y
arriver éventuellement, ça, ça touche la question de l'apprentissage de
l'anglais, souvent, qui est langue seconde, et du français, qui est langue
tierce pour eux. Et je suis... j'ai été très sensible à un certain nombre
d'arguments mais très liés au projet de loi n° 96.
Donc, ça, j'annonce déjà qu'évidemment on
interviendra à ce moment-là, au moment où on pense qu'il peut y avoir
amélioration, aide, sensibilité à des enjeux qu'ils vivent, qui, entre autres,
provoquent du décrochage scolaire, ce qu'on ne veut pas, évidemment, avec les
communautés autochtones.
Donc, ici, je ne me prononce pas vraiment,
bien que je suis sensible aux arguments aussi du député de Matane-Matapédia,
qui dit : Ce n'est peut-être pas le bon véhicule et ce n'est peut-être pas
rendre <justice...
Mme David : ...qu'ils
vivent
qui, entre autres, provoquent du décrochage scolaire, ce qu'on ne veut pas,
évidemment, avec les communautés autochtones.
Donc, ici, je ne me prononce pas
vraiment, bien que je suis sensible aux arguments aussi du député de
Matane-Matapédia,
qui dit : Ce n'est peut-être pas le bon véhicule et ce n'est peut-être pas
rendre >justice, justement, à l'immense complexité des enjeux. C'est là
que mon humilité prend le dessus, et je dis : Je ne m'y connais pas assez.
Mais il ne va pas falloir oublier, à plusieurs endroits dans le projet de loi,
ordre professionnel, collégial, etc., qu'il y a des enjeux, effectivement, pour
les autochtones d'application du projet de loi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : Bien, je voudrais...
Dans le fond, le ministre refuse de mentionner «dans une relation...» Ce qui
dérange, là, dans mon amendement, c'est «relation de nation à nation». C'est ce
que je comprends. C'est la raison principale pourquoi il refuse mon amendement.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, je ne donne pas suite à votre amendement parce que, dans un premier
temps, je vous ai expliqué le concept de «nation à nation», ce... ne se
retrouvera pas... on ne va pas l'incorporer dans la Charte de la langue
française, dans un premier temps.
Deuxièmement, ce qui est visé relativement
au reste de votre amendement, défendre la langue française, l'enseignement
également, c'est déjà couvert par le libellé actuel du cinquième alinéa. Donc :
«L'Assemblée reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit du Québec,
descendants des premiers habitants du pays, le droit qu'ils ont de maintenir et
de développer leur langue et leur culture d'origine.» Donc, c'est implicite que
ça... partie les autres éléments.
Puis l'autre point, c'est que, dans votre
amendement, vous supprimez l'aspect «descendants des premiers habitants du
pays», puis je pense que c'est important de le reconnaître aussi. Donc, c'est
pour ça, notamment, qu'on ne donne pas suite à l'amendement.
Mme Ghazal : Donc, il y a des
aspects qui sont inclus. Il y a quelque chose que j'ai enlevé. Je ne l'ai pas
enlevé, je ne l'ai pas fait par moi-même. J'ai pris ce que les groupes qui ont
été consultés ont amené. Mais ce que je comprends... Parce que j'aurais pu, par
exemple, le garder, mais le ministre... Supposons que j'avais gardé
«descendants des premiers habitants du pays» ou, supposons, si j'avais mis «dans
une relation de nation à nation» et j'aurais gardé exactement le même libellé,
sauf, évidemment, «Amérindiens», qui est là actuellement, est-ce que le
ministre l'aurait accepté?
M. Jolin-Barrette : Moi, je
suis très à l'aise avec la proposition qu'on a acceptée, de la députée de
Marguerite-Bourgeoys, de modifier les termes, de les actualiser par «Premières Nations
et aux Inuit du Québec», et, dans le fond, je ne donnerai pas suite aux autres
amendements.
Mme Ghazal : Mais est-ce que
la raison principale, c'est «relation de nation à nation» qui... parce que ça
amène des implications? Quelles implications ça amène? Parce que c'est quelque
chose qu'on tient beaucoup dans le discours. Et je suis certaine que,
peut-être, soit le ministre ou quelqu'un du gouvernement l'a déjà dit, relation
de nation à nation, à nation, à nation... tout le temps dans le discours. Mais,
dans une loi, pourquoi est-ce qu'on ne le met pas? Parce que ce n'est pas le
bon véhicule? Ça serait quoi, le bon véhicule?
M. Jolin-Barrette : Mais ce
que je vous dis, c'est que ce n'est pas... le projet de loi n° 96, ce n'est
pas le véhicule approprié pour incorporer ça dans le corpus législatif de
l'État québécois.
Mme Ghazal : Parce que moi,
dans mes anciennes responsabilités, <je...
Mme Ghazal : ...
est-ce
qu'on ne le met pas? Parce que ce n'est pas le bon véhicule? Ça serait quoi, le
bon véhicule?
M. Jolin-Barrette :
Mais ce que je vous dis, c'est que ce n'est pas... le projet de loi n° 96,
ce n'est pas le véhicule approprié pour incorporer ça dans le corpus législatif
de l'État québécois.
Mme Ghazal : Parce que moi,
dans mes anciennes responsabilités, >je m'occupais aussi d'environnement,
et il y a eu, à plusieurs reprises, dans des projets de loi, des discussions
sur les autochtones, parce qu'on en faisait référence dans des lois qui
concernaient l'environnement, protection du territoire, etc., puis j'ai eu toujours
la même discussion : Ah! bien, ce n'est pas la place, ce n'est pas le
temps. Là, on ne parle pas des autochtones, ce n'est pas ça, le sujet, ce n'est
pas le bon véhicule. Et là je me suis dit : Bien, c'est où, le bon
véhicule?
Là, on m'a dit la même chose, que ce n'est
pas le bon véhicule. C'est quoi, le bon véhicule pour parler de cette notion de
nation à nation dans un texte législatif?
M. Jolin-Barrette : Bien, manifestement,
ce n'est pas à moi à vous dire ça, quel est le bon véhicule, mais il y a un
ministre responsable des Affaires autochtones, puis c'est à lui à porter le
dossier.
Mme Ghazal : Puis est-ce que c'est
possible de... Je ne sais pas si...
M. Jolin-Barrette : Puis
l'autre point, là, qui est important, là, c'est que le préambule, là, annonce
le contenu de la loi. Et donc le contenu de la loi, de la loi 101, c'est la
protection puis la valorisation de la langue française. C'est ça, l'objectif du
préambule.
Mme Ghazal : Mais il y a
d'autres articles, là, qui parlent aussi des autochtones, d'autres articles.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais
sous forme d'exclusion.
Mme Ghazal : Comme la Charte
de la langue française ne s'applique pas sur les réserves, etc.
M. Jolin-Barrette :
Exactement.
Mme Ghazal : Est-ce que c'est
possible que quelqu'un... un juriste peut-être, si le ministre ne peut pas le
faire, m'expliquer c'est quoi, les implications juridiques de dire «de nation à
nation»?
M. Jolin-Barrette : Non, le
gouvernement du Québec ne donnera pas d'opinion juridique à la télévision comme
ça.
Mme Ghazal : Mais comment
est-ce que vous pensez que les... ceux qui ont travaillé, qui ont déposé un
mémoire, qui l'ont présenté, qui sont venus en commission pour le présenter,
comme, par exemple, M. Ghislain Picard et les autres, comment est-ce que vous
pensez qu'ils vont percevoir votre refus d'inclure leur amendement?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, là on n'est pas dans une séance de questions-réponses sur comment les
gens vont percevoir ça. Il y a eu 50 groupes qu'on a entendus. Tout le
monde a fait des recommandations. Certaines recommandations vont être
acceptées, d'autres ne seront pas acceptées. Ça fait partie du travail
législatif que nous effectuons.
À titre d'exemple, l'actualisation des
termes «Amérindiens» pour «Premières Nations», ça faisait partie de leurs
recommandations, notamment, et je l'ai accepté. Alors, voyez-vous, je fais
preuve d'ouverture. Et je l'avais annoncé, parfois, on accepte certains
amendements, parfois, on n'en accepte pas pour les raisons qui incombent.
Mme Ghazal : Moi, ce que je
trouve dommage, c'est que c'est une occasion manquée d'envoyer un message aux
autochtones pour leur dire : On vous écoute, et ça va commencer
maintenant. Mais, à chaque fois, c'est : plus tard, à un moment donné,
quelque chose va venir plus tard, ou : oui, plus tard, et, pendant ce temps-là,
ils attendent.
Par exemple, de dire que ce n'est pas <le...
Mme Ghazal : ...dommage,
c'est que c'est une occasion manquée d'envoyer un message aux
autochtones pour leur dire : On vous écoute, et ça va commencer
maintenant. Mais, à chaque fois, c'est : plus tard, à un moment donné,
quelque chose va venir plus tard, ou : oui, plus tard, et, pendant ce
temps-là, ils attendent.
Par exemple, de dire que ce n'est pas
>le bon véhicule, moi, ce que j'avais compris au début, et c'était sorti
dans les médias, du ministre aux Affaires autochtones, il a dit : On ne
touchera pas à ça, les lois autochtones, ça ne nous intéresse pas. Puis là,
après ça, j'ai senti une évolution. Il y a eu un changement d'idée, c'est ce
que je comprends. Je ne sais pas si c'est lui qui l'a dit ou c'est le ministre,
je ne le sais plus, où il a dit : Ah! finalement, peut-être qu'on va faire
quelque chose.
Maintenant qu'on parle de langue française,
on va peut-être parler aussi des langues des premiers peuples qui étaient ici
avant nous aussi. Puis on est les mieux placés, au Québec, pour comprendre leur
sentiment d'inquiétude et de fragilité identitaire, si je peux l'appeler comme
ça. On est les mieux placés en Amérique du Nord pour le comprendre. Et donc,
ils attendent cette main tendue. Ils l'attendent.
• (18 h 40) •
Là, il y a une occasion. Dans les lois environnementales,
le ministre de l'Environnement me disait que ce n'était pas le bon véhicule, ce
n'était pas la bonne place, ce n'est pas là qu'on va en parler, à chaque fois
qu'il y avait des articles sur les autochtones. Et là, maintenant, je pensais
que c'était la bonne place puisqu'on les a invités. Tu sais, on n'a pas invité,
par exemple... je disais à la blague, tout à l'heure, les groupes écologistes, environnementalistes,
on ne les a pas invités. On a invité les Premières Nations parce que la langue
française, et la protection de la langue française, et les dispositions qui
sont dans la Charte de la langue française, c'est aussi important, et ça a un
impact sur eux. Et c'est aussi une opportunité pour leur offrir cette... une
main, leur tendre la main pour dire : On vous entend, on vous écoute.
Là, on me dit que ce n'est pas le bon
véhicule, ce n'est pas la bonne place, il faut le faire ailleurs, plus tard, un
jour. Je ne sais pas quand viendra ce jour. Le ministre me dit que ce n'est pas
maintenant et ce n'est pas à lui de répondre. On a hâte d'entendre le ministre
aux Affaires autochtones l'annoncer, parce que la dernière fois qu'il en a
parlé, il a dit : On n'a pas l'intention de ne rien modifier par rapport
aux langues autochtones. Moi, c'est ce que j'ai entendu. C'est un message de
fermeture que j'ai entendu.
Et là on dit que, oui, il y a quelque
chose qui s'en vient, et je trouve que c'est vraiment une occasion manquée de
ne pas reprendre, non pas l'amendement de la députée de Mercier, mais l'amendement
qui a été amené et déposé par l'APNQL, et je trouve ça très, très, très
dommage.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre. Après ça, ça sera le député de Matane.
M. Jolin-Barrette : Je
veux juste qu'on s'entende sur un point superimportant sur notre fonction de parlementaire.
J'espère que c'est l'amendement de la députée de Mercier, que ce n'est pas sous
la dictée d'un tiers, parce que quand on est assis ici, à l'Assemblée nationale,
là, on représente les citoyens du Québec, mais on a une responsabilité
individuelle de ce qu'on propose, comme députés, que ça soit nos amendements.
Ça, c'est extrêmement important.
Parce que moi, Mme la Présidente, je
n'accepterai pas qu'on dise : Bien, ce n'est pas mon amendement, c'est
l'amendement d'un tiers. Non, non. Vous avez une responsabilité. Vous avez un
siège comme députée puis, à ce titre-là, vous agissez en tant que députée de
Mercier.
Alors, il faut faire bien attention. On a
une responsabilité comme parlementaire de dire : Les choses que je
présente, là, je suis en accord et je vais les défendre. Donc, ça, c'est fort
important. C'est <lié..
M. Jolin-Barrette :
Vous
avez une responsabilité. Vous avez un siège comme députée puis, à ce titre-là,
vous agissez en tant que députée de Mercier.
Alors, il faut faire bien attention. On
a une responsabilité comme parlementaires de dire : Les choses que je
présente, là, je suis en accord et je vais les défendre. Donc, ça, c'est fort
important. C'est >lié au siège, à la personne qui représente ses
concitoyens. Alors, je veux juste qu'on ramène ça...
Mme Ghazal : Je n'ai pas
besoin d'avoir une leçon sur mes responsabilités, je les connais très bien,
comme législateur.
M. Jolin-Barrette : Bien non,
mais vous dites...
Mme Ghazal : Et c'est sûr que
je n'aurais pas déposé un amendement avec lequel je ne suis pas d'accord.
M. Jolin-Barrette : ...vous
dites que ce n'est pas votre amendement, vous dites que ce n'est pas mon amendement.
Ce n'est pas mon amendement, c'est l'amendement du groupe. Attention, là, c'est
votre amendement, là. Il ne faut pas vous dissocier puis dire que ce n'est pas
vous.
Là-dessus, la Charte de la langue
française vise à faire en sorte, hein, de protéger le statut du français. L'alinéa,
il est là pour justement dire que le statut du français est protégé en tout
respect des droits des nations autochtones. Ça a toujours été comme ça depuis
1977.
Puis depuis tantôt j'entends la députée de
Mercier me dire : Ah! bien, j'entends un signe de fermeture, j'entends
dire que ce n'est pas le bon endroit, tout ça. Ce n'est pas ça que j'ai dit. Ce
n'est pas un signe de fermeture. J'ai dit que le statut du français, c'est
là-dessus qu'on travaille présentement. Puis, sur les autres questions
rattachées aux nations autochtones, que ce soit la relation de nation à nation,
que ça soit relativement à l'enseignement ou aux autres... bien, en fait, l'enseignement,
c'est couvert, justement, par le libellé actuel, mais ce n'est pas le véhicule
approprié. Puis il ne faut pas mélanger l'environnement avec le statut du français.
C'est tout ce que je dis. Je ne dis pas que la proposition de la collègue de
Mercier, elle n'est pas légitime, je dis juste que je ne la retiens pas dans le
cadre de la loi 101. C'est tout ce que je dis.
Mme Ghazal : Moi... Oui.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je vais vous donner la parole, Mme la députée de Mercier. Je vais juste vous
rappeler que, jusqu'à date, ça fonctionne bien, les échanges vont bien. Je
laisse les députés, ministre se parler. Il y a une franche discussion. Tant que
c'est respectueux, je n'interviendrai pas. Par contre, je vais vous demander quand
même d'écouter jusqu'au bout et de ne pas vous interpeler et de vous couper la
parole, autant pour un que pour l'autre. Puis, à ce moment-là, on va continuer
comme on est bien partis au début de la commission.
Si je vois que ça commence à déraper, bien
là, je vais devoir vous dire : Bien, adressez-vous à la présidente, puis
vous allez passer par moi. Vous allez attendre les droits de parole, puis je
vais demander qu'on n'ouvre pas les micros tant que je ne vous ai pas donné la
parole. Donc, je veux juste que tout le monde soit respectueux.
Mme la députée de Mercier, et, après, je
reconnais le député de Matane-Matapédia.
Mme Ghazal : Oui. J'entends très,
très bien, Mme la Présidente. Absolument. C'est juste que ça m'a choquée un
petit peu que le ministre me donne des leçons sur mes responsabilités. Nous
sommes aussi le relais de la société civile et des gens qui viennent en commission.
C'est sûr que, si je n'étais pas d'accord, je n'aurais jamais déposé cet amendement-là.
Quand je dis que ce sont eux qui l'ont
écrit, c'est que c'est aussi important, quand on dit, justement, «de nation à
nation», même si on ne va pas l'écrire, on peut le pratiquer, puisque c'est
souvent mentionné dans les discours du gouvernement de parler de nation à
nation. Et tout le monde est d'accord lorsqu'il s'agit des beaux discours. Mais
c'est de faire d'eux aussi une sorte de législateur, de dire qu'ils sont
actifs, les autochtones, dans notre société, par rapport à des questions qui <les...
Mme Ghazal : ...discours du
gouvernement
de parler de nation à nation. Et
tout le monde est
d'accord
lorsqu'il s'agit des beaux discours. Mais c'est de faire d'eux aussi une sorte
de
législateur, de dire qu'ils sont actifs, les autochtones, dans notre
société, par rapport à des questions qui >les concernent, et que ce n'est
pas uniquement nous qui disons comment les choses doivent se passer.
Et c'est dans esprit-là... Moi, c'est ça
que j'aurais aimé voir. C'est de dire : Bien, dans un message d'ouverture
et d'écoute envers les autochtones, j'accepte ce qu'ils déposent comme amendement.
Et, oui, ça serait la bonne place de dire : Bien, c'est à la Charte de la
langue française, puisqu'à l'époque, en 1977, on a cru bon d'ajouter cet
alinéa-là dans le préambule et d'autres articles, alors que l'objectif, c'était
de protéger le français. On n'a pas vu que c'était le mauvais véhicule, on a
trouvé que c'était une bonne place, quand on parle de la langue française,
d'ajouter aussi la reconnaissance des autochtones, de maintenir, développer
leur langue.
Et j'aurais aimé ça qu'ici, bien, on fasse
un pas plus loin, car, plus de 40 ans plus tard, avec tout le contexte et
les discussions qui ont lieu actuellement dans la société et le sentiment, peut-être,
de non-écoute du gouvernement actuel, ça aurait été une belle occasion, une
opportunité de dire : Bien, on vous entend, on vous écoute. Et, au-delà
les technicalités, est-ce que c'est le bon véhicule, est-ce que ça prend un
autre projet de loi, ça aurait été une belle occasion, qui est malheureusement
manquée ici.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de Matane-Matapédia.
M. Bérubé : Tout à l'heure, notre
collègue de Mercier indiquait qu'on les a invités. Juste une précision :
Est-ce que le gouvernement a sollicité la participation ou, dans les groupes
qui se sont inscrits, ils ont été sélectionnés? Ça, c'est juste une nuance qui
est importante pour moi. Est-ce qu'il y a eu une approche en disant : On
aimerait que vous puissiez venir nous présenter vos propositions ou, de tous
les groupes, on a choisi ce groupe-là? Juste pour qu'on soit clairs sur comment
ça s'est fait.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Là-dessus, je ne pourrais pas vous dire précisément, là. Il y a toujours des
négociations entre les différentes formations politiques à savoir qui soumet
les listes de groupes, tout ça, alors je ne pourrais pas vous dire précisément.
Il faudrait que je retourne dans mes souvenirs. Puis, à cette époque-là...
M. Bérubé : On doit y revenir
parce que ça fait une distinction. Puis, tu sais, moi, j'accepte l'argument de
la députée de Mercier, puis c'est important. S'ils ont été sollicités, ils ont
des attentes légitimes, c'est sûr.
D'ailleurs, une des attentes légitimes qui
va revenir plus tard, puis moi, je vais vouloir en discuter, c'est la
question... je l'annonce, là, parce que ça va revenir, l'examen du ministère en
français. Ça, c'est un enjeu important. Je me souviens qu'on a entendu parler
de ça. Ça, c'est une demande très concrète. On aura d'autres occasions d'en
parler. Moi, j'ai retenu cet enjeu-là. Ça, c'est le genre d'enjeu qui a un lien
avec les langues autochtones, direct, avec la Charte de la langue française ou
la loi n° 96, parce que c'est la connaissance du français, qui est plus
complexe si on part d'une langue autochtone que si on part de l'anglais ou
d'une autre langue. C'est la démonstration qui nous a été faite comme quoi,
oui, les enjeux autochtones peuvent être <discutés...
M.
Bérubé
:
...qui
a un lien avec les langues autochtones, direct, avec la Charte de
la langue française ou la loi n° 96, parce que c'est la connaissance du
français, qui est plus complexe si on part d'une langue autochtone que si on
part de l'anglais ou d'une autre langue. C'est la démonstration qui nous a été
faite comme quoi, oui, les enjeux autochtones peuvent être >discutés
dans le cadre du projet de loi lorsqu'ils ont un lien direct.
Mais je termine en disant que les langues
autochtones, qui sont des langues millénaires, méritent, je dirais, un exercice
comme celui-là à part entière qui rendrait justice à la hauteur de ce que la députée
veut faire, et d'autres aussi, et... Bien, voilà. Moi, je serais intéressé à
participer à l'exercice, par exemple. J'aurais beaucoup d'intérêt à faire ça.
Mais je comprends que le message que la députée veut envoyer...
Mais je ne vois pas d'opposition, par
contre, là, entre ce qu'on veut faire puis rassurer. Donc, je voulais envoyer
ces nuances-là au centre des échanges pour préciser qu'on peut continuer sans
l'amendement, puis ça va être correct. Mais on peut l'avoir en tête, comme
législateurs, aussi pour la suite, cette sensibilité-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'autres commentaires? Donc, s'il n'y a pas d'autre commentaire, on est prêts à
mettre aux voix l'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix
: ...
La Présidente (Mme Thériault) :
Rejeté, mais on me demande un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
La Secrétaire
:
Veuillez répondre pour, contre ou abstention. Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
La Secrétaire
: M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire
: M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire
: M. Provençal
(Beauce-Nord)?
M.
Provençal : Contre.
La Secrétaire
: Mme
Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire
: M. Skeete
(Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire
:
Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Abstention.
La Secrétaire
: M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Abstention.
• (18 h 50) •
La Secrétaire
: M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé
:
Abstention.
La Secrétaire
: Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Puisque...
Est-ce qu'il y a d'autres amendements à l'article
n° 1? Je ne crois pas. Donc, à ce moment-là, on peut
faire la discussion sur l'article n° 1. On est rendus
à faire la discussion sur l'entièreté de l'article tel que nous venons de
l'amender à quatre reprises. Oui, M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé
: Là,
on revient sur le n° 1. C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
On revient sur le n° 1, oui.
M.
Bérubé
: Bon,
vous allez me dire si je suis correct en disant ça. Quand c'est écrit, puis ça
va nous guider pour l'ensemble du projet de loi : «L'Assemblée nationale
reconnaît que le français est la langue commune de la nation québécoise»,
d'accord. Ma question au ministre, tiens : Pourquoi on n'indique pas,
partout dans le projet de loi, «la seule langue commune de la nation
québécoise»? Moi, c'est une précision qui m'importe et qui pourrait nous guider
tout au long de l'étude du projet de loi.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, vous aurez noté qu'à l'article 2, O.K., là, je vais un petit peu
plus loin, mais on vient dire que... Excusez-moi, pas à l'article 2. On vient
indiquer précisément «la seule langue officielle»...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui, à l'article 2
du projet de loi, pardon, c'est ça, on vient ajouter : «Le français est
aussi la langue commune de la nation québécoise et constitue l'un des
fondements de son identité et de sa culture distincte. Seule cette langue <a...
M. Jolin-Barrette :
...on
vient indiquer précisément «la seule langue officielle»...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette :
Oui, à
l'article 2 du
projet de loi, pardon,
c'est ça,
on vient ajouter : «Le français est aussi la langue commune de la nation
québécoise
et constitue l'un des fondements de son identité et de sa culture distincte.
Seule cette langue >a ce statut.» Donc, à 1, à l'article 1 de la
Charte de la langue française, mais à l'article 2 du projet de loi
n° 96, on vient dire : «Le français est la langue officielle du
Québec. Seule cette langue a ce statut.»
Donc, la langue officielle du Québec, c'est
la langue de l'État, la langue des lois, la langue de la justice. C'est la
langue officielle du Québec. Il n'y a qu'une seule langue officielle au Québec.
Le concept de langue commune, c'est un concept qu'on vient insérer à la fois
dans la loi 101 et dans le projet de loi n° 96. Et l'objectif, c'est
qu'on vient dire : La langue commune au Québec, c'est le français. C'est
la langue publique commune, c'est elle qui permet de tisser des liens. C'est
elle qui, dans l'espace public... bien, c'est elle qui fédère les gens et c'est
la langue d'intégration. La langue publique, là, c'est lorsque vous sortez
travailler, lorsque vous discutez avec des gens de différentes origines, de
partout à travers le monde. C'est la langue qui nous unit, c'est le tronc
commun de la société québécoise, c'est l'assise de la société québécoise.
M. Bérubé : Alors, Mme la
Présidente, pourquoi je dis ça au ministre? Parce qu'il se trouve des personnes
qui choisissent la position canadienne et qui disent : Ah non! Moi, je
suis au Canada, et il y a deux langues officielles. Alors, comment on répond à
ça, quand quelqu'un nous dit ça? Moi, j'ai choisi de venir habiter au Canada,
puis, quand j'ai prêté serment, on m'a dit que c'était un pays bilingue. Donc,
je suis au Québec, le Québec est au Canada, donc il y a deux langues
officielles.
Il m'apparaît que, si on le précise, qu'il
y en a une seule, ça enlève toute ambiguïté. En tout cas, moi, je vais pouvoir
m'appuyer sur cet article-là du projet de loi en disant : Oh non! Voici le
projet de loi n° 96, il précise que c'est la langue officielle, mais c'est
la seule. On ajoute de la force, parce que cet argument-là, il est bien réel.
Vous pouvez dire ce que vous voulez. D'ailleurs, on se le fait dire sur les
réseaux sociaux lorsqu'on est indépendantiste ou le moindrement intéressé à la
langue : Au Canada, il y a deux langues. C'est pour ça que je l'évoque au
bénéfice du ministre et des collègues.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : C'est
bien noté.
M. Bérubé : Bien, en fait,
c'est noté, mais allez-vous faire quelque chose avec ça?
M. Jolin-Barrette : Bien,
dans le fond, c'est très bien établi que la seule langue officielle du Québec,
c'est le français. Puis avec le... dans le libellé, là : «L'Assemblée
nationale reconnaît que le français est la langue commune de la nation
québécoise», donc on dit c'est quoi, la langue de la nation québécoise. La
langue commune de la nation québécoise, c'est le français.
M. Bérubé : Je repose ma
question différemment : En quoi d'ajouter «seule» rendrait les choses
moins claires qu'avec la formulation actuelle?
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente. Ce ne sera pas bien <long...
M.
Bérubé
: ...
repose
ma question différemment : En quoi d'ajouter «seule» rendrait les choses
moins claires qu'avec la formulation actuelle?
M. Jolin-Barrette :
...Mme la Présidente. Ce ne sera pas bien >long.
M.
Bérubé
: Vous
ne m'avez pas vu venir.
M. Jolin-Barrette : Bien, si le
député de Matane-Matapédia souhaite que nous spécifiions «seule langue commune
de la nation québécoise», moi, je n'ai pas d'enjeu à le faire, parce que c'est véritablement
ça. La nation québécoise s'exprime en français, c'est la langue officielle de
l'État et c'est la seule langue commune au Québec, à ne pas confondre avec la
langue d'usage.
M.
Bérubé
:
Exact. D'ailleurs, ça a déjà fait l'objet d'un débat, la langue d'usage, dans
les excuses de M. Rousseau, vous vous souvenez?
Donc, comme le ministre l'utilise, lui,
verbalement, de sa position dans cette commission, il peut dire «seule», et
qu'il accueille favorablement cet argument, puis-je évoquer que ça pourrait
faire l'objet d'un amendement qui serait accepté par le ministre? Est-ce que c'est
ce qu'il nous suggère?
M. Jolin-Barrette : Je suis
très ouvert à accepter un tel amendement.
M.
Bérubé
:
Pourrait-il m'en donner une garantie pour ne pas que je travaille pour rien?
M. Jolin-Barrette : On
pourrait même, Mme la Présidente, le rédiger et le soumettre au député de
Matane-Matapédia pour qu'il puisse le déposer.
M.
Bérubé
: Je
pourrais même laisser la paternité de cet amendement-là au ministre puis je
n'aurai pas de problème. Il a plus de monde pour l'aider à monter ça.
M. Jolin-Barrette : Écoutez,
ma paternité est déjà établie à deux reprises. Je peux... À la guise du député
de Matane-Matapédia. Je n'en serai pas jaloux. Écoutez, on peut avoir un projet
parental, Mme la Présidente, ensemble.
La Présidente (Mme Thériault) :
Coparentalité.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, je comprends, M. le ministre, que...
M.
Bérubé
: Bien,
si le ministre... (panne de son) ...un amendement, je l'appuie.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est ça. Je comprends, M. le ministre, que vos légistes vont s'affairer à
préparer un amendement qui sera déposé par le député de Matane-Matapédia.
M. Jolin-Barrette : Exactement.
M.
Bérubé
: Vous
suivez avec intérêt nos travaux. Vous comprenez pourquoi je propose ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Je suis toujours avec beaucoup d'intérêt ce qui se dit.
M.
Bérubé
: Mais
vous avez compris pourquoi je propose ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui.
M. Bérubé : Parce qu'il y a
des petits malins, là... Puis d'ailleurs ça fait l'objet d'une de nos propositions
qui va venir plus tard, que les députés de l'Assemblée nationale repassent
après les cérémonies d'assermentation des nouveaux arrivants en disant :
On vous a dit que c'était bilingue, mais, au Québec, ce n'est pas tout à fait
ça, puis il n'y a personne pour le dire. Mais là il y aura l'amendement qui va
le dire dans la loi.
Puis, plus tard, je vous parlerai de ma proposition
que les députés de l'Assemblée nationale rencontrent les immigrants québécois
après les fédéraux pour leur dire : égalité entre les hommes et les
femmes, primauté du français, laïcité, et ça, je pense que ce sera pertinent. Mais
ça, c'est un autre projet.
La Présidente (Mme Thériault) :
...donc je me fie sur l'équipe des légistes pour préparer l'amendement qui aura
votre paternité, avec coparentalité du ministre.
Mais j'ai quand même une intervention sur
l'article 1, avec la députée de Marguerite-Bourgeoys. Donc, ça permet aux
légistes de nous faire la rédaction. Quand ça sera prêt, vous l'enverrez au
secrétariat. À ce moment-là, on reviendra voter l'amendement qui sera déposé
par le député de <Matane-Matapédia...
La Présidente (Mme Thériault) :
...l'
amendement qui aura votre paternité, avec coparentalité du
ministre.
Mais j'ai quand même une intervention
sur l'article 1, avec la députée de Marguerite-Bourgeoys. Donc, ça permet
aux légistes de nous faire la rédaction. Quand ça sera prêt, vous l'enverrez au
secrétariat. À ce moment-là, on reviendra voter l'amendement qui sera déposé
par le député de >Matane-Matapédia. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Merci. Bien, moi,
c'était pour faire suite à la discussion, où je trouve que le ministre a dit
oui vite, très, très vite. Mais je reviens au départ. Il faut écouter les mots,
là. Le député de Matane-Matapédia a dit : Ça, là, ça va avoir des
conséquences sur toute la suite des choses.
Alors, j'ai comme l'impression... L'adage
qui me revient, c'est : Qui trop embrasse mal étreint. On est dans la
coparentalité, on va continuer dans ça. Quelle est l'intention du ministre...
du député de Matane-Matapédia de faire adopter ça au ministre? Et est-ce que le
ministre a entendu la même chose que moi? Est-ce qu'on va mettre cette
insistance partout, partout, partout dans le projet de loi? J'ai l'impression
que c'est un peu ça que je vois venir.
Moi, je savais, on le sait tous, qu'il y a
l'article 2, «seule la langue officielle — je ne sais pas trop,
là — est le français». C'est la seule langue officielle, ou je ne
sais pas quoi. Je veux dire, à un moment donné, ça insiste, comme on dit, là. Ça
insiste, là. C'est comme...
Alors, je veux comprendre la facilité, la
rapidité. Parce que, si vous l'aviez voulu, vous l'auriez mis, j'imagine, dès
le départ. Est-ce que c'est le seul endroit, ou partout on va faire un «Ctrl+F»,
ou je ne sais pas quoi, puis, dès qu'on va parler de français, on va mettre le
mot «seule»? Je m'inquiète un petit peu de l'étendue que ça va prendre.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : En fait,
pourquoi ne pas l'avoir spécifié dès le départ? Simplement parce que le concept
même de langue commune, pour la nation québécoise, fait état du fait que c'est
la seule langue de rencontre, de connexion, que ça soit au niveau du travail,
que ça soit dans la sphère publique, que ça soit la langue des communications
interculturelles, que ça soit la langue d'intégration. Donc, c'est
sous-entendu. Lorsqu'on parle de langue commune, au Québec, on s'entend
que c'est le français, donc que c'est la seule langue commune à travers
laquelle les gens de toutes les régions, les gens de partout à travers le
monde, lorsqu'ils sont au Québec, bien, ça se passe en français.
Donc, vous avez la langue officielle de
l'État, le français, mais vous avez également ce que nous souhaitons faire au
Québec, de faire en sorte que, dans les différents pans de la société, lorsque
les gens se retrouvent dans l'espace commun, bien, le tronc commun, il soit
cimenté et supporté par la langue française. Ce que l'on souhaite, c'est que la
langue publique commune, ça soit le français.
Alors, moi, quand le député de
Matane-Matapédia dit : On devrait mettre «seule», bien, c'est implicite
que c'est à l'intérieur de tout ça. Et donc, dans le projet de loi... On ne
fait pas référence souvent à la langue commune, hein? C'est ça. On fait
référence dans le préambule mais pas dans le reste du projet de loi.
• (19 heures) •
La Présidente (Mme Thériault) :
<J'ai le député de...
>
19 h (version révisée)
<15359
M. Jolin-Barrette :
...la langue publique commune, ça soit le
français. Alors, moi, quand le
député de
Matane-Matapédia dit : On devrait mettre «seule»,
bien, c'est implicite que c'est
à l'intérieur de tout ça.
Et donc, dans le
projet de loi,
on ne fait pas référence souvent à la langue commune, hein? C'est ça. On fait
référence dans le préambule, mais pas dans le reste du
projet de loi.
La Présidente (Mme Thériault) :
>J'ai le député de Matane-Matapédia qui voulait intervenir, puisque c'est
à sa suggestion qu'il y a un amendement qui est en rédaction.
M.
Bérubé
:
Comme on m'interpelle, j'entends le questionnement de la députée de Marguerite-Bourgeoys,
mais je n'entends pas sa crainte, à la députée, pourquoi ça serait problématique
pour la députée qu'on l'ajoute. Moi, je vous ai dit pourquoi j'aimerais qu'on
l'ajoute. Parce que, notamment, pour les nouveaux arrivants au Québec, cette
précision-là n'existe pas. Et je vous mets au défi de voir combien de fois c'est
entendu que... Il y a le Canada puis il y a le Québec qui est distinct à telle
enseigne, que sa langue officielle, sa langue commune, c'est le français. Ce n'est
pas si clair que ça dans la cérémonie d'assermentation.
Alors, j'ai reprécisé pourquoi, moi, je
voulais le faire. Je me réjouis que le ministre soit intéressé à aller de l'avant,
mais j'aimerais entendre la députée de Marguerite-Bourgeoys sur qu'est-ce qui
serait problématique à le faire. Ça serait préjudiciable pour qui de préciser
que c'est la seule langue officielle?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors, écoutez,
ce n'est pas préjudiciable, et puis que le député de Matane-Matapédia soit
rassuré, ma question, c'est... On pourrait mettre «seule et unique». Je
pourrais faire un autre sous-amendement, «seule et unique langue commune», à la
limite, là, on... mais ça s'en vient dans l'article 2.
Alors, je me disais... Je ne suis pas nécessairement
contre, mais, si ça se retrouve partout dans le projet de loi... ce que je
n'ai jamais fait, moi, là, de faire un... on appelle ça un «Ctrl+F» ou je ne
sais pas quoi. Si vous me rassurez que ça ne vient pas 50 fois puis
qu'on va avoir 50 fois cette conversation-là, cet échange-là, bien, écoutez,
c'est... Comme on le dit à l'article 2 puis qu'on n'est pas contre l'article 2,
ça serait un peu... ça serait superfétatoire de dire qu'on est contre l'article 1
avec la modification du député de Matane-Matapédia. Mais je voulais souligner
que je m'inquiétais un peu d'en mettre trop, d'être trop insistant, parce que j'avais
l'impression que c'était assez clair avec l'article 2.
M. Jolin-Barrette : En
fait, ce que l'on va faire, dans le fond, déjà, comme avec la langue
officielle, on vient spécifier à l'article 1 que le français, c'est la
seule langue officielle de l'État, donc, on va faire un amendement à l'article 2
également pour dire que c'est la seule langue commune. Puis, pour le reste de
la loi, à cause de l'interprétation légistique, on n'a pas besoin de le
réécrire partout à travers la loi. Donc, ça ne revient pas. Puis on parle peu
de langue commune dans le projet de loi, à l'exception d'un titre d'une
section, qui parle de langue commune, notamment sur la langue d'intégration des
personnes immigrantes. Donc...
Mme David : Donc, est-ce
qu'on peut s'attendre à ce que le titre va changer puis... être la seule langue
commune d'intégration? C'était un peu le sens de...
M. Jolin-Barrette : Où
ça?
Mme David : Bien, dans...
Vous dites que ça revient plus loin, là.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bien, dans le fond, il y a une section qui... qu'on parle de langue commune,
mais ça ne sera pas nécessaire d'indiquer, dans le titre, «seule langue
commune».
Dans le fond, vous me demandiez... La députée
de Marguerite-Bourgeoys me demandait : Est-ce que ça revient à plusieurs
reprises? <Non...
Mme David : ...d'intégration?
C'était un peu le sens de...
M. Jolin-Barrette :
Où ça?
Mme David : Bien,
dans... Vous dites que ça revient plus loin, là.
M. Jolin-Barrette :
Oui. Bien,
dans le fond,
il y a une section qui... qu'on parle de
langue commune, mais ça ne sera pas
nécessaire d'indiquer, dans le titre,
«seule langue commune».
Dans le fond, vous me
demandiez... La
députée de
Marguerite-Bourgeoys me demandait :
E
st-ce que ça revient à
plusieurs reprises? >Non, ça ne
revient pas à plusieurs reprises, mais on va juste le faire à l'article 1
puis à l'article 2. Mais, en fait, pour la langue commune, à l'article 2,
on va venir spécifier là puis on n'aura pas besoin de venir le spécifier dans
le reste du projet de loi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça va? Donc, je comprends que, la discussion, elle est close. On attend
de recevoir l'amendement de l'équipe des légistes du ministre, qui portera la
paternité du député de Matane-Matapédia. Nous avons compris également, M. le
ministre, que, dans l'article 2, vous nous annoncez un amendement. C'est
ce qu'on comprend.
M. Jolin-Barrette : ...il va
y avoir l'ajustement pour répercuter la modification.
La Présidente (Mme Thériault) :
Absolument. Donc, c'est ce qu'on appelle une modification de concordance pour
que le... autant dans le préambule que dans la loi, qu'on ait le même terme aux
deux endroits. Donc...
M. Jolin-Barrette : Ça ne
sera pas bien long avant que ça s'achemine. Je peux répondre à d'autres
questions, s'il y a d'autres questions sur l'article.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres questions ou commentaires sur l'article 1,
dans d'autres paragraphes? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Ça aussi, un peu
comme l'introduction du député de Matane-Matapédia, ça fait partie de la
doctrine... vous savez, pour écrire ce projet de loi là, le concept de
souveraineté parlementaire, il revient assez souvent, et c'est un concept qui
vient même du droit britannique, et puis, bon, c'est quand même... vous ne l'avez
pas inventé, mais vous l'utilisez avec plaisir, ce concept-là, disons-le comme
ça, et...
Mais je voulais vous entendre là-dessus.
Je voulais un petit cours 101 du ministre sur son appréciation de ce
concept-là, parce que ça va vous servir à plusieurs sauces et dans plusieurs
articles. C'est toujours en filigrane de votre réflexion, votre pensée puis de
la rédaction de la loi. Alors, comme c'est quand même... et particulièrement, pour
le recours aux dispositions de dérogation, particulièrement pour ça, c'est une
des conséquences, je dirais, directes. On est souverains. C'est le Parlement. Le
gouvernement... les juges, on n'en veut pas, etc. C'est très, très... Bon, on
sait votre appréciation du rapport avec la justice, mais la souveraineté
parlementaire, c'est quelque chose qui dit : Ce sont les parlementaires
qui sont souverains avant le recours aux chartes et puis aux... que les juges
décident pour nous. Ça, c'est beaucoup, beaucoup dans la réflexion aussi du
rapatriement de la Constitution, là, la question du recours aux dispositions de
dérogation qui, je le répète, ne venaient pas du Québec, venaient de provinces
anglophones, mais dont le Québec s'est beaucoup... a beaucoup utilisé entre
1982 et 1985 et après ça. Mais, la souveraineté parlementaire... je vais
m'arrêter de parler parce que je voudrais vous entendre sur votre appréciation
de ce concept-là.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, je vous dirais, dans un premier temps, <que...
Mme David : ...anglophones, mais
dont le Québec s'est beaucoup... a beaucoup utilisé entre 1982 et 1985 et après
ça. Mais, la souveraineté parlementaire... je vais m'arrêter de parler parce
que je voudrais vous entendre sur votre appréciation de ce concept-là.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, je vous dirais, dans un premier temps, >que ce n'est pas
en lien avec les rapports avec la justice, mais plutôt c'est dans une
conception de rapport avec la démocratie. Et ça, je pense que c'est fondamental,
parce que le rôle que l'on joue tous aujourd'hui... On est dans une démocratie
élective, représentative, et je pense que la nation, hein, les Québécoises et
les Québécois qui font le choix de leurs représentants, notre système
fonctionne du fait que la légitimité des élus provient de la nation, provient
du peuple, provient des citoyens. Et on est dans un régime parlementaire qui
fait en sorte que nos lois sont votées par un parlement élu. On est tous élus
comme législateurs, dans un premier temps. Ensuite, certains se retrouvent à
l'exécutif, désignés par le premier ministre, et le troisième pouvoir, c'est le
pouvoir judiciaire.
Vous l'avez bien dit, la députée de Marguerite-Bourgeoys
l'a bien dit, il est arrivé un événement traumatique en 1982 avec le
rapatriement de la Loi constitutionnelle de 1867 et l'adoption de la Loi
constitutionnelle de 1982, avec l'instauration d'une charte, la charte des
droits et libertés, donc la charte canadienne, auxquelles l'État québécois n'a
jamais adhéré. Et on s'entend, à la fois les gouvernements successifs du Parti
québécois, du Parti libéral de Robert Bourassa, à nouveau du Parti québécois, à
nouveau du Parti libéral et désormais de la Coalition avenir Québec, aucune des
formations politiques, de quelle couleur politique qu'elle soit, n'a adhéré à
ce rapatriement, à cette modification constitutionnelle là. Et il y a des décisions
de la Cour suprême là-dessus. Et ce que ça fait comme nation, comme État fédéré
à l'intérieur du Canada, c'est qu'on doit s'assurer de protéger les droits de
la nation québécoise.
On est dans une situation où on est une
minorité. Il y a 8,5 millions de Québécois, environ 7,5 millions de
Québécois de langue française. La langue commune au Québec, c'est le français. La
langue officielle du Québec, c'est le français. On doit, dans l'océan
anglo-saxon nord-américain, mettre en place des mesures pour protéger la langue
française. On voit le déclin qu'il y a de la langue française, et tout le monde
l'a constaté... qui sont venus en commission parlementaire, à part quelques
personnes qui mettaient en doute la vigueur du français au Québec, mais ça fait
pas mal l'unanimité que le français est en déclin.
Partant de là, c'est nécessaire d'adopter
une loi qui va freiner le déclin, mais, pour ce faire, il faut assurer cet...
en fait, je vous dirais, il faut garantir à la nation québécoise que cette
loi-là pourra <s'appliquer...
M. Jolin-Barrette :
...que
le français est en déclin.
Partant de là, c'est nécessaire
d'adopter une loi qui va freiner le déclin, mais, pour ce faire, il faut
assurer cet... en fait, je vous dirais, il faut garantir à la nation québécoise
que cette loi-là pourra >s'appliquer. Et surtout, sur le principe de
souveraineté parlementaire, on dit : C'est tellement important, le français,
pour le Québec, c'est tellement important pour l'identité de la nation québécoise,
la spécificité du Québec, les valeurs sociales distinctes qui sont associées à
l'État québécois, que l'on dit : Bien, ce choix-là, là, ce choix
fondamental de protéger l'identité québécoise, ce choix fondamental de protéger
l'identité de la nation québécoise, nation inclusive par rapport... par
ailleurs, qui inclut les Québécois d'expression anglaise, qui inclut les
membres des nations autochtones, qui inclut l'ensemble des personnes qui ont
choisi de venir s'établir au Québec, bien, ce choix-là de cette nation
québécoise là, elle s'exprime en français. Et ça revient aux élus de la nation
québécoise de dire : Bien, c'est comme ça que la langue française sera
protégée au Québec, donc d'où l'importance de référer à la souveraineté
parlementaire du mandat électif que nous avons eu par rapport, notamment, au
rôle du judiciaire.
Et vous l'avez dit, vous avez dit :
Il y a une disposition de dérogation qui existe, à la demande des provinces
anglophones, bien entendu. Mais il ne faut pas oublier de dire que, dans le
fond, c'est un deal qu'il y a eu sans le Québec, puis, encore aujourd'hui, on
subit les conséquences dommageables, tristes et affligeantes de ce choix-là qui
a été fait à l'époque. Puis, comme élus de la nation québécoise, on doit tous
faire en sorte de permettre à la spécificité québécoise de s'exprimer, d'où la
référence à la souveraineté parlementaire.
• (19 h 10) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Mme la députée.
Mme David : Non, c'est parce
que j'attendais la petite lumière rouge.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est parfait.
Mme David : Mais, O.K.,
j'entends tout ça, puis c'est exactement ce que j'avais... la lecture que je
faisais de la réflexion que vous vous êtes faite et de tout ce que j'ai lu
là-dessus. Il ne faudra pas, cependant, que ce recours justifie tout et son
contraire, et c'est ça... et c'est là que nous serons très vigilants, quand il
sera question du recours aux dispositions de dérogation, que ça ne brime pas un
certain nombre de choses fondamentales auxquelles vous croyez autant que moi,
par exemple, le secret professionnel, par exemple, des enquêtes qui seraient
nettement exagérées, sans aucun mandat. Et ça, c'est comme emporté, inclus dans
un — oh! j'allais dire un mot anglais — dans un... je
cherche le mot... dans un tout, sous le prétexte de la souveraineté
parlementaire.
Alors, je comprends ce que vous dites, je
comprends l'histoire, je comprends tout ça, <mais...
Mme David : ...inclus
dans
un — oh! j'allais dire un mot anglais — dans un... je
cherche le mot... dans un tout, sous le prétexte de la souveraineté
parlementaire.
Alors, je comprends ce que vous dites,
je comprends l'histoire, je comprends tout ça, >mais il ne faut pas
mettre sur les épaules ou le dos de la souveraineté parlementaire des processus
qui pourraient être nettement exagérés et qui, là, peuvent venir brimer... Et
ça, ce n'est pas que des anglophones qui l'ont dit, d'expression anglaise, c'est
plein de monde qui sont venus dire : Attention, parce que c'est une
tempête qui peut frapper fort et qui emporte sur son passage des choses qu'on
ne veut pas nécessairement qui soient emportées.
On n'a pas besoin d'en discuter tout de
suite, mais c'est clair qu'il ne faut pas automatiquement associer... parce
qu'on dit qu'on est d'accord que le Parlement peut être souverain à l'égard de
l'adoption des lois, que ça ne donne pas une clé universelle, un passe-partout
pour tout ce qui peut être soumis aux dispositions de dérogation. C'est juste
ça que je veux dire. Et je l'ai annoncé, de toute façon, on l'a dit plusieurs
fois, mais plusieurs sont venus nous dire : Attention, il y a quand même
des choses où les droits peuvent être très menacés. Je n'ai pas dit «tous», j'ai
dit «certains droits».
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, rapidement.
Je crois que l'amendement est prêt, mais, pour le député de Matane-Matapédia,
juste en réponse à ça, il faut juste distinguer «souveraineté parlementaire» et
«utilisation de dispositions de souveraineté parlementaire», parce qu'on vient
insérer également les droits individuels versus les droits collectifs aussi.
Alors, c'est un équilibrage et c'est un message également qu'on envoie au monde
judiciaire pour dire : Écoutez, ce sujet-là, il est important, et c'est
important de protéger la langue française. Mais on aura l'occasion d'en
discuter abondamment.
Alors, pour l'amendement, je ne sais pas
si le député de Matane-Matapédia...
La Présidente (Mme Thériault) :
...Matane-Matapédia, est-ce que vous avez l'amendement devant vous? Si vous
nous en faites la lecture, on aura peut-être le temps de le voter. Il reste une
minute.
M.
Bérubé
: Je
pars : «L'Assemblée nationale reconnaît que le français est la seule
langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant que tous soient
sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture québécoise comme
liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun ait accès à
l'apprentissage de cette langue, à en parfaire la connaissance et la maîtrise,
ainsi qu'à faire du français la langue de l'intégration.»
C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça, c'est l'article qui serait tel qu'amendé...
M.
Bérubé
: Oui,
oui, je l'ai lu au complet, là.
La Présidente (Mme Thériault) :
...mais l'amendement, c'est : À l'article 1 du projet de loi, insérer,
dans l'alinéa du préambule de la Charte de la langue française que propose le
paragraphe 1° et après «français est la», «seule». Donc, c'est l'amendement qui
est proposé.
M.
Bérubé
:
C'est-tu correct ou...
La Présidente (Mme Thériault) :
Ça va. Oui, je viens de vous le lire pour la bonne compréhension de tout le
monde. Donc, est-ce qu'il y a des interventions ou on met aux voix? On peut
mettre aux voix? Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté.
Donc, compte tenu de l'heure, j'ajourne
les travaux <sine die.
(Fin de la séance à 19 h 15)
La Présidente (Mme Thériault) :
...l'
amendement
est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté.
Donc,
compte tenu de l'heure,
j'ajourne les travaux >sine die.
(Fin de la séance à 19 h 15)