(Quinze heures vingt-neuf minutes)
La Présidente (Mme Thériault) :
Votre attention, s'il vous plaît. Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi n° 96,
Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
• (15 h 30) •
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Chassin
(Saint-Jérôme) sera remplacé par M. Lévesque (Chapleau); Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), par M. Provençal
(Beauce-Nord); Mme St-Pierre (Acadie), par M. Birnbaum (D'Arcy-McGee); Mme Dorion
(Taschereau), par Mme Ghazal (Mercier); et Mme Hivon (Joliette) par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
Documents déposés
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Merci beaucoup. Donc, avant de débuter, je vais déposer les mémoires qui ont été reçus depuis la fin des consultations particulières, qui sont les mémoires de la Fédération des
centres de services scolaires du Québec, de M. Charles Castonguay, du
Bureau d'assurance du Canada, le Syndicat canadien de la fonction publique au Québec,
la Société de formation à distance des centres de services scolaires et des
commissions scolaires du Québec et l'Association professionnelle des notaires
du Québec, ainsi qu'une correspondance, suite à une demande de la juge en chef
Manon Savard, qui nous a été adressée le 1er novembre dernier.
Je vais vous lire l'extrait du courriel, donc
c'est adressé à la secrétaire de la commission, Mme Cameron : «À la
suite de la rencontre des juges en chef avec le ministère de la Justice, qui
s'est tenue vendredi dernier, la juge en chef Manon Savard me prie de m'assurer
qu'elle pourra compter sur vous afin que la correspondance des juges en chef
jointe à son envoi du 1er octobre dernier sera déposée lors de l'étude
article par article du projet de loi n° 96. Je vous remercie et vous prie
d'agréer, Mme Cameron, l'expression de mes sentiments distingués.»
Donc, la correspondance signée de la juge en
chef sera déposée pour que les gens puissent en prendre connaissance. Parce
qu'en temps normal, la correspondance est dans un onglet Correspondance, ce ne
sont que les députés ainsi que leurs attachés qui y ont accès. Donc, ça
deviendra public, comme un mémoire.
Remarques préliminaires
Donc, je cède maintenant la parole au ministre
responsable de la Langue française pour ses remarques préliminaires. M. le
ministre, vous disposez de 20 minutes.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la
Présidente, aujourd'hui, nous amorçons une étape importante du processus
législatif entourant le projet de loi n° 96 sur la langue officielle et
commune du Québec.
Tôt cet
automne, nous avons tenu d'importantes consultations particulières. C'est en
effet plus de 50 intervenants, un nombre record pour la présente
législature, qui sont venus partager leurs commentaires relativement à cette
importante réforme de la Charte de la langue française que nous nous apprêtons
à étudier en détail. Nous les remercions toutes et tous d'avoir contribué à
enrichir le débat parlementaire. Ces consultations étaient l'occasion de
discuter de l'état du français dans les différentes sphères de la société
québécoise. Elles ont mis une fois de plus en lumière les reculs inquiétants
qu'accuse la langue française au Québec.
Force est
d'admettre que notre langue commune connaît une perte de vitesse alarmante, et
ce, tout particulièrement dans la grande région de Montréal. Nous sommes
en quelque sorte arrivés à un point de rupture. Si nous n'agissons pas
maintenant, si nous n'adoptons pas le projet de loi n° 96, ce déclin ne
pourra que s'accentuer.
L'Assemblée
nationale a d'ailleurs reconnu à plus d'une fois, au cours des derniers mois,
la nécessité d'intervenir et d'assurer la pérennité de la langue
française au Québec. En tant qu'élus de la nation québécoise, nous avons le
devoir de poser des gestes forts pour inverser la tendance du déclin du
français. Nous le reconnaissons tous ici, je crois, mais cela ne signifie pas
que nous n'aurons pas de bonnes discussions pour autant, j'en suis convaincu.
Quoi qu'il en soit, j'ai bien entendu les premiers commentaires et je vais demeurer
à l'écoute avec écoute, patience et ouverture, comme me l'invite à faire la
députée de Marguerite-Bourgeoys.
Je l'ai dit et je le répète, nous sommes ouverts
à toute proposition qui permettra de protéger et de valoriser notre langue
française et qui contribuera à renforcer son statut au Québec. Nous avons la
conviction que ce n'est pas le fait d'une seule mesure-phare.
La
question linguistique est transversale, elle nous concerne toutes et tous, et
ce, de multiples façons : comme individu, comme citoyen, comme
étudiant, comme nouvel arrivant et comme société d'accueil, comme employé ou
comme employeur, comme commerçant, comme grand patron et comme nation.
C'est ce qui explique qu'au moyen de ces
quelques 200 articles, le projet de loi n° 96 ratisse large, très
large. Il touche à toutes les sphères de la société, que ce soit
l'administration, les commerces, le marché du travail, les institutions
d'enseignement postsecondaire, la justice et plusieurs autres. C'est ainsi que
cette réforme d'envergure donnera l'impulsion pour freiner le déclin du
français et pourra susciter l'élan d'une relance linguistique au Québec.
Nous ne sommes pas les premiers à débattre du
sort de la langue française sur ce territoire et nous ne serons probablement
pas les derniers à le faire. Notre histoire nationale est profondément
imprégnée par ces discussions, parfois intenses et déterminantes, sur l'avenir
de notre langue nationale. C'est d'ailleurs sous la toile Le débat sur les
langues, du peintre Charles Huot, que les parlementaires québécois
débattent depuis plus d'un siècle. Cet oeuvre gigantesque, qui surplombe le
salon bleu, juste à côté, dans la salle qui est juste à côté, nous rappelle
avec éloquence que si nous pouvons encore
aujourd'hui nous exprimer en français, dans les murs de ce Parlement, dans
notre Assemblée nationale, c'est d'abord parce qu'en 1792, des élus ont
osé s'affirmer et défendre leur langue avec conviction. C'est aussi parce qu'en
1977, Camille Laurin et ses compagnons de l'époque ont eu le courage
d'agir.
Ce courage, le gouvernement du Québec l'a eu en
proposant, au mois de mai dernier, la plus importante réforme de la Charte de
la langue française depuis 1977. Nous leur devons d'agir, à notre tour, avec
fierté et d'assurer l'avenir de cette langue afin que les générations qui nous
succèdent puissent, elles aussi, contribuer en français à l'avancement de ce
Québec que nous aimons. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. Donc, sans plus tarder, nous allons avec la porte-parole de l'opposition officielle.
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, vos remarques préliminaires, vous avez
un total de 20 minutes à votre disposition.
Mme Hélène David
Mme David : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Alors, M. le ministre, les accompagnateurs compétents, experts devrait-on dire, en avant, en arrière, MM.
les collègues, mon collègue... mes collègues de l'opposition, bienvenue. Bienvenue à cette
extraordinairement importante conversation, échange, discussion que nous allons
avoir, historique, effectivement, qui n'a probablement pas eu lieu,
effectivement, depuis 1977.
En 1977,
était élu, depuis quelques mois, un gouvernement souverainiste, un gouvernement du Parti québécois, qui a décidé de poursuivre ce que Robert Bourassa avait commencé en
1974, c'est-à-dire de proclamer le français langue officielle du Québec et a présenté, donc, la
loi 22. Et après, en 1977, le premier
ministre de l'époque, René Lévesque, a dit à son ministre : Occupe-toi de redresser un peu
la situation. C'est à
peu près la commande qu'il a eue. Je
ne sais pas si le ministre actuel a eu le même genre de recommandation
ou de commande, mais c'est ce qui est arrivé à l'époque.
Et le ministre s'est adjoint, donc, des grands
sociologues, Fernand Dumont et Guy Rocher. Ce n'était pas rien comme
accompagnateurs, et ils se sont mis au travail. Et, en avril 1977, ils ont
produit un rapport, un rapport qui s'appelait un livre blanc sur la politique...
ça s'appelait La politique québécoise de la langue française,
60 pages, en 1977, quatre mois avant le dépôt du projet de loi.
Je l'ai dit en adoption de principe, je le
redis, c'est très dommage qu'avec les experts dont s'est entouré le ministre
cette fois-ci aussi, je dirais, il n'y a pas eu ce genre de document qui, je
pense, aurait satisfait tout le monde, y compris les députés au gouvernement,
députés de l'opposition, la population, parce que c'est avant tout pour la
population, citoyens, citoyennes du Québec que nous faisons... procédons à cet
exercice, que le ministre, je pense, a déposé le projet de loi. Nous aurions
tous bénéficié de... ce qu'on appelle, ça, un document d'orientation, un livre
blanc. Ça aurait montré les grandes orientations ministérielles, les grandes
orientations gouvernementales que le ministre voulait, donc, avoir et, à partir
de là, développer ce vaste projet de loi qu'il a développé.
Ça aurait permis de comprendre beaucoup de
choses : les données sur la langue française, où on en est avec la langue
française, les enjeux, les enjeux même constitutionnels, les enjeux liés au
travail, aux entreprises, enfin, bon, de l'éducation, tout ce qui a été traité
dans le livre blanc de 1977.
Je l'ai lu,
ce livre blanc. Le ministre l'a probablement lu aussi. J'ai relu récemment les
deux chapitres consacrés à la biographie de Camille Laurin sur
justement... et je vous enjoins d'aller lire ça. C'est assez intéressant, ça
donne une idée de ce à quoi nous nous
exposons tous volontairement, c'est-à-dire des discussions extrêmement
importantes, où les enjeux, ma foi, en 1977 et les enjeux maintenant, il y a
beaucoup de choses qui se ressemblent parce qu'il reste qu'il y a toujours deux peuples fondateurs au Canada et qu'il y a la
communauté anglophone, la communauté francophone, et qu'au Québec, c'est
majoritairement francophone. Il y a une constitution canadienne, nous sommes
encore dans la Constitution canadienne. Tout ça était présent, était très
présent en 1977, mais il y avait un esprit, à l'époque, d'aller vers un
référendum d'où, par exemple, la langue de la législation.
Camille
Laurin l'a dit, 20 ans après, très clairement. C'est cité dans la
biographie : «Écoutez, je le savais très bien que c'était
anticonstitutionnel, voyons donc, l'article 133, c'était évident, c'était dans
la Constitution. On le met quand même, parce que, de toute façon, nous
serons un pays indépendant.» Référendum 1980, on connaît la suite. On ne la connaissait pas nécessairement en 1977. Dans ce
cas-ci, on se retrouve donc, plusieurs décennies après, avec un projet
de loi où il y a toujours deux peuples fondateurs. Il y a toujours une
communauté anglophone inquiète, qui était inquiète en 1977, qui l'est encore maintenant pour toutes sortes de raisons, dont un
certain nombre, mais pas que ça, qui sont... qui ressemblent un peu à
celles de 1977, mais je laisserai mon collègue probablement parler de ça, mais des inquiétudes des communautés culturelles, des nouveaux
arrivants, des chambres de commerce. Enfin, vous y étiez là. On a entendu un
certain nombre d'inquiétudes des... les constitutionnalistes. Et ça, c'était
nouveau, les constitutionnalistes parce qu'il n'y avait pas la charte de 1982 à ce moment-là. Souvenez-vous, on est en
1977. Donc, ça, c'est un élément nouveau, le fameux article 45. Il n'y avait pas les dispositions de
dérogation, évidemment, qui va être un autre enjeu extrêmement
important.
En fait, le
ministre nous convie à, tous ensemble, monter un peu l'Everest, l'Everest
d'enjeux constitutionnels législatifs, sociaux, j'oserais dire
psychologiques, multiculturels ou interculturels, économiques, éducatifs. C'est
à tout ça que le ministre nous convie dans
son excursion ou dans son expédition en montagne. Et on va finir par se
connaître, je pense. On a commencé avec les
consultations particulières, on va continuer à travailler dans ce chemin avec,
je l'espère, «EPO», écoute, patience et ouverture. On va appeler ça
«l'EPO du ministre». Alors, écoute, patience et ouverture.
• (15 h 40) •
M. Jolin-Barrette : ...
Mme David : Ah! on pourrait dire
«PEO», patience, écoute et ouverture. Alors, on va dire patience, écoute et
ouverture pour ne pas qu'il n'y ait pas de confusion. M. le ministre, vous
voyez, mon amendement est modifié, puis je l'accepte avec grande humilité.
Donc, patience, écoute et ouverture, mais pour tout le monde, parce que je
pense que nous sommes conviés à un très long exercice, pas à un exercice de...
qui peut se régler... j'étais ici, même chaise, même ministre en face de moi,
quelques collègues qui étaient là aussi, pour un autre projet de loi, qui était
le projet de loi n° 21. En deux semaines, c'était expédié, et puis on
avait un bâillon rapidement, le 16 juin 2019, je m'en souviens,
parce qu'on est arrivés... je suis arrivée à la maison un petit peu fatiguée,
et c'était la fin de la session. Alors, on avait eu ce bâillon, et c'était
dommage, parce que, dans le fond, on s'est rendus à l'article 3, 4, 5,
quelque chose comme ça. Là, on en a 202, articles.
Alors, on a énormément de travail qui nous
attend, avec des enjeux extrêmement stimulants, on doit le dire, extrêmement
stimulants, avec des consultations très stimulantes que nous avons eues. Mais,
oh là là, quelle responsabilité nous avons de dessiner les contours, tous
ensemble, c'est ça, la démocratie, tous ensemble, de ce que nous voulons comme
société francophone, québécoise, inclusive, fière d'être québécoise, une nation
francophone qui accueille et qui vit depuis
toujours avec les Premières Nations, qui vit depuis toujours avec les communautés
autochtones, qui vit depuis toujours avec la communauté d'expression anglaise,
avec... depuis peut-être 1977, un peu plus présents qu'avant, plusieurs,
plusieurs communautés culturelles qui ont contribué de façon exceptionnelle à
l'avancement du Québec, qu'on pense... prenez un nom qui me vient, Yoshua
Bengio, c'est actuel, ça, c'est tout le développement de l'intelligence
artificielle, des données profondes; que je pense à Kim Thúy, qui a été
quelqu'un qui est venu dans des conditions
très difficiles et qui, finalement, est un apport considérable pour le Québec;
que je pense à Dany Laferrière, membre de l'Académie française, un fier
Québécois qui le dit qu'il est devenu inspiré et inspirant pour nous tous en
étant au Québec. Alors, j'étais à son intronisation à l'Académie française.
C'est difficile d'être plus fier que ça d'être Québécois, et il est venu
d'Haïti. Et on pourrait multiplier les exemples comme ça de gens qui ont
contribué, qui contribuent et qui contribueront à l'essor du Québec de façon
exceptionnelle, tous et toutes ensemble.
Et nous avons ici, jusqu'à maintenant... je ne
vois pourquoi nous ne pourrions pas continuer. Ce à quoi ce projet de loi nous
convie, c'est un exercice complexe, sensible, où on veut protéger la langue
française, oui, et la protéger pas pour les années à venir, pour les décennies,
les siècles à venir. Donc, on a des décisions importantes à prendre, on a des
décisions qui sont osées, qui ne vont peut-être pas faire l'unanimité pour
certains. Nous serons pour certains articles, nous serons contre certains
autres articles, mais une chose est certaine, nous allons travailler avec
énormément de rigueur. Ça prendra le temps que ça prendra, patience, écoute et
ouverture, Mme la Présidente, pour pouvoir aller au fond de tous les sujets.
Alors, ça fait... et j'ai adoré ça, mais ça fait
six mois, là, depuis le mois de mai, plus que six mois, je pense, maintenant,
que je me suis plongée dans ce projet de loi là, et ça m'a fait revoir
tout : l'histoire du Canada, l'histoire du Québec, l'histoire de la langue
française, notre histoire constitutionnelle, toute la question du développement
des entreprises, la question du développement avec le rapport Parent, et tout,
de l'éducation au Québec, toute la question des services aux minorités
linguistiques. Il y en a tellement qu'en même temps tu te dis : Bon, bien,
c'est formidable.
Est arrivé de façon surprenante... c'est ce qui
a fait, d'ailleurs, couler probablement 98 % de l'encre coulée depuis le
13 mai 2021 ou 14 mai, c'est essentiellement deux choses, que les
gens n'avaient pas vues venir, on doit le dire. Peut-être qu'on aurait pu voir
venir la deuxième parce qu'elle avait été massivement, disons, utilisée au projet
de loi n° 21, c'était la disposition mur à mur de dérogation, et l'autre chose,
c'était l'article 45 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Donc là, comme dit le ministre, il a émoustillé beaucoup les
constitutionnalistes. Alors, on les a tous connus, on les a tous lus, de a à z.
J'avais proposé au ministre, à l'étude des
crédits... puis je n'avais pas été si loin que ça de mes prédictions. J'avais
ma boule de cristal, qui s'appelle un livre publié par le conseiller du ministre.
On a le droit de le nommer, Mme la Présidente, ou on n'a pas le droit? Je ne
sais plus, dans les règles... M. Poirier, il mérite d'être nommé, Éric Poirier,
qui a écrit un livre sur...
M. Jolin-Barrette : Dr Poirier.
Mme David : Alors, appelez-moi Dre
David. Merci beaucoup, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Certainement.
Bien, je vais vous appeler la docteure de Marguerite-Bourgeoys, parce que sinon
je n'ai pas le droit.
Mme David :
C'est vrai, vous avez bien raison. Oui, avoir un doctorat, ça veut dire quelque
chose, et il en manquait beaucoup, des maîtrises, des doctorats, à la faculté
de droit. Les doyens me disaient toujours, à l'époque, dans mon ancienne
vie : Il faut qu'on ait plus d'étudiants aux études supérieures.
Alors, bravo, parce que la profession attire
beaucoup dans la pratique, et vous êtes très formé à la pratique. Or, là, vous
avez décidé d'aller dans, justement, un sujet qui est les politiques
linguistiques, et tout ça. C'est fait de façon très rigoureuse. Donc, je ne
suis pas ici pour faire l'apologie du livre de Dr Poirier, mais je peux
quand même dire que ça a contribué à l'ensemble de mes lectures, à comprendre
et à voir venir un certain nombre de choses parce qu'il me... il parlait beaucoup de constitution, justement, alors il y
a... je ne suis pas sûre qu'il est content que ça ne soit pas allé plus
loin, mais au moins il y a un petit recours à la Constitution. Donc, il a vu ça
ainsi que d'autres choses, mais il n'y a pas de livre blanc, et ça, on est un
peu déçu.
Alors, dans ces deux surprises, il y a effectivement
le recours à l'article 45. On en parlera, ça fait beaucoup, beaucoup, non
seulement jaser, mais il y a eu des motions à l'Assemblée nationale, aux
Communes, et il y a eu ce recours, dispositions de dérogation, qui elles,
vraiment, je pense, sont celles qui inquiètent le plus, j'oserais... je ne
pense pas me tromper en disant ça, particulièrement dans son côté que j'appellerais
mur à mur, Mme la Présidente. Mur à mur, ça veut dire partout, tout le temps,
tous les articles. Et il y a beaucoup de monde, beaucoup de gens sérieux, le
Barreau, la Commission des droits de la personne, des constitutionnalistes qui
sont venus dire : Mais pourquoi? Pourquoi aller si loin? Pourquoi utiliser
ça? Et particulièrement dans les pouvoirs donnés aux inspecteurs de l'OQLF, et
puis là c'est... moi, je m'incline devant le côté savant des juristes qui
disent : Mais ça n'a pas de bon sens, Mme la Présidente, qu'il n'y ait ni
mandat ni... et que tout ça soit sous une disposition de dérogation.
Et en plus, autre contradiction, alors
j'annonce, évidemment, là, où on se posera bien des questions, la Charte des
droits et libertés de la personne qui se voit ajouter un autre droit, et
suivez-moi bien, un autre droit qui est le droit de vivre en français.
Jusque-là on peut dire : Bon, droit de vivre en français, est-ce que c'est
un droit collectif? Charte des droits et
libertés, c'est un droit individuel — enfin, on en discutera — mais qui, lui-même, paradoxalement,
est soumis à la dérogation parce que la disposition de dérogation est mur à
mur. Donc, il y a une certaine incongruité, et je pense qu'on pourra avoir des
conversations, et des discussions, et des échanges forts importants, forts
sérieux. Et des gens de bonne volonté et de grande compétence sont venus nous
dire toutes sortes de choses.
• (15 h 50) •
Alors, nous parlerons évidemment des collèges,
nous parlerons des entreprises. Le ministre s'est montré déjà ouvert à un
amendement avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Nous en
aurons, évidemment, beaucoup plus que ça, puis ça, c'était assez technique sur
les contrats, mais quand même bien important, les contrats à l'international et
tout ça, mais j'espère que le ministre sera aussi intéressé par plein d'autres
amendements. Parce que, vous savez quoi? Les fois où j'ai participé à des
projets de loi, que ça soit d'un côté ou de l'autre, à quelque titre que ce
soit, j'étais toujours impressionnée par les propositions des oppositions. Ça
faisait des très bons projets de loi, finalement, d'être ouvert à ce que les oppositions
suggéraient. Alors, je remerciais les oppositions et je disais oui à beaucoup
de choses.
Alors, j'espère que le ministre, qui a été dans l'opposition,
qui en a sûrement suggéré beaucoup, se rappellera du rôle qu'il avait, assis en face d'un ministre, et qu'il dira :
Oui, mais j'en avais, des bonnes idées, moi, quand j'étais dans l'opposition. Alors, je nous souhaite tous d'être à la
hauteur. Nous sommes dans une salle, un salon qui est à la hauteur, je l'ai déjà dit au ministre, à la hauteur de la solennité des réflexions que
nous avons à faire, et j'espère que nous-mêmes,
comme parlementaires, nous serons
tous à la hauteur de la responsabilité qui nous incombe, très grande responsabilité,
Mme la Présidente, et je l'assume entièrement, mon parti aussi. Et j'espère que
nous nous retrouverons dans un avenir le plus lointain possible pour l'adoption
de ce projet de loi, parce que ça devrait prendre plusieurs mois, et non pas
deux semaines avec un bâillon. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Donc, j'invite maintenant la porte-parole
du deuxième groupe d'opposition en matière de langue française et la députée de
Mercier à faire ses remarques préliminaires. Vous aussi, vous avez
20 minutes à votre disposition.
Mme Ruba Ghazal
Mme Ghazal : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Alors, bonjour, M. le ministre, bonjour, chers collègues, les
députés, bonjour aussi à toute l'équipe qui a travaillé sur le projet de loi, à
nos équipes aussi qui ont travaillé très, très fort.
Écoutez, c'est un projet de loi qui est très,
très important, puisqu'il couvre énormément, énormément d'éléments et de secteurs dans la société. On l'a vu, puisque
les consultations particulières ont
été très, très populaires. En fait, il y avait peut-être juste les
groupes écologistes qui n'étaient pas venus. Vous savez, c'est un projet de
loi, je dis, qui est important. Est-ce qu'il va être historique? Ça, seulement
l'histoire nous le dira. C'est sûr que le projet de loi... la loi 101, dont on
parle encore aujourd'hui, la Charte de la langue française, qu'on modifie,
qu'on modernise, elle, elle a été historique, ça, c'est sûr et certain.
Et moi, je le dis, je le répète, je suis très
fière d'être dans cette commission, de travailler à la modernisation de la
Charte de la langue française, puisque je suis une enfant de la loi 101. Quand
je suis arrivée au Québec, il y a plus de 30 ans, la petite fille de
10 ans n'aurait jamais pensé qu'elle ferait partie d'une commission
parlementaire qui modifierait une loi sur une langue qu'elle ne parlait pas et
qu'elle ne connaissait pas. Donc, c'est quelque chose, pour moi, qui est très
important, et je vais mettre toute l'énergie et tous les efforts pour
travailler de façon rigoureuse, diligente, avec écoute,
patience et ouverture, moi aussi, de mon côté, et j'espère que ce sera le cas
aussi pour le ministre et tous les collègues.
Ça aussi, c'est quelque chose que j'ai répété à plusieurs,
plusieurs reprises. La langue française, son avenir sera assuré par la langue du travail. Oui, bien sûr, elle est très
importante dans tous les pans de la société, premièrement à l'école, et
c'est ce qui fait que je me définis comme une enfant de la loi 101,
puisque je suis allée à l'école primaire, secondaire en français, en commençant
par une classe d'accueil pour apprendre le français, mais pour apprendre aussi la culture québécoise. Donc, c'est un socle,
l'éducation, qui est extrêmement important pour l'avenir de la langue française.
Mais après, une fois qu'on sort de l'école, plus tard, on passe la grande
majorité de notre vie, comme le disait
Gérald Godin, ancien député de Mercier, on passe la grande majorité de notre vie au
travail. Et c'est très important que la langue du travail se passe en français.
Moi, je viens
du milieu privé. J'ai travaillé, pendant une quinzaine d'années, dans des entreprises
manufacturières privées. J'ai des gens, en ce moment, aujourd'hui, qui
travaillent dans les milieux privés, des anciens collègues qui voient le
travail que je suis en train de faire sur la langue française et qui me
disent : C'est incroyable à quel point beaucoup, beaucoup de choses se
passent en anglais dans le milieu du travail. C'est aussi le cas dans les entreprises
où j'ai travaillé, où, par exemple, le siège social était à l'extérieur du Québec.
Et ça peut être normal que certaines fonctions nécessitent qu'on parle en
anglais, mais il y a quand même une exagération qui est faite. Et on l'a vu
avec l'exemple incroyable qui a... dans le fond, c'est un symbole de cette situation-là
et du problème de la protection du français dans le milieu du travail. Et ça a
été... bien, l'affaire qu'on appelle maintenant l'affaire Air Canada ou l'affaire Rousseau, puisque le P.D.G. a fait un
discours devant un parterre des gens du milieu des affaires. Il a été
applaudi à la fin et il l'a fait entièrement en anglais. Et ce qui a été encore
pire et qui a choqué les Québécois, c'est ça, mais c'est encore plus les
justifications qu'il a données. Et vraiment, ce que M. Rousseau a dit
publiquement, c'est ce que beaucoup de gens, malheureusement, dans le monde des
affaires, dans le milieu du travail, pensent secrètement.
Quand on regarde ce qui se disait dans les
revues de presse à l'époque, juste avant l'adoption de la loi 101, le milieu des affaires était totalement contre cette
loi en disant que ça allait être une catastrophe économique. Et ils n'y
allaient pas avec le dos de la cuillère, si je peux m'exprimer ainsi. Ils
disaient que c'était une loi qui ne devait pas voir le jour, et c'étaient des
mots extrêmement, extrêmement durs.
Aujourd'hui, ça a un peu changé dans le
discours, et on l'a vu aussi pour les gens du monde des affaires qui sont venus, que ça soit la Chambre de commerce du
Montréal métropolitain, le Conseil
du patronat, etc. Ils disent
qu'ils sont d'accord avec le principe du projet de loi n° 96, personne ne
la conteste, tout le monde est d'accord avec le fait qu'il faut protéger la langue française. Donc, le discours a changé depuis 40 ans,
mais, dans les faits, quand il s'agit de faire des efforts, eh bien, là,
on dit que c'est impossible, qu'on ne peut pas, qu'il ne faut pas trop demander
d'efforts aux entreprises, parce que ce n'est pas bon pour les affaires, ce n'est
pas bon dans un contexte de mondialisation.
Et ça, comme je le disais, moi, ayant été en entreprise,
je n'ai pas eu une seule entrevue que j'ai passée sans qu'on me demande si je parlais
anglais. Des fois, c'était nécessaire, d'autre fois, ça ne l'était pas. Donc, je sais
qu'il y a des modifications dans la loi par rapport à cet élément-là de
demander des compétences en anglais. Il faut les restreindre, il faut aller
encore plus loin.
Et, moi, c'est sûr et certain, je ne m'en suis jamais
cachée, je vais déposer des amendements qui vont aller dans le sens de renforcer encore plus la langue du travail, parce que,
quand on voit, par exemple, des personnes immigrantes qui sont déjà francophones et
qui ne se trouvent pas du travail parce qu'elles ne parlent pas l'anglais,
c'est un problème. Quel message on leur envoie?
Mais il y a aussi tous les autres qui, comme
moi, comme ma famille, on ne parlait pas le français en arrivant au Québec. Et il faut qu'on mette en place les
efforts, ils existent, mais il faut encore augmenter les efforts et faire
confiance à notre système d'intégration des personnes immigrantes et le
renforcer encore plus en leur permettant d'apprendre le français, d'apprendre
la culture québécoise et de s'intégrer. Donc, ça, ça va être quelque chose
d'important, mais, pour le faire, il faut, de l'autre côté, quand ces
personnes-là veulent vraiment s'intégrer, elles veulent apprendre le français,
bien, quand elles vont aller dans le milieu du travail, il ne faut pas qu'après
ça elles sentent qu'elles ont perdu leur temps, puis qu'elles ont appris le
français, et que finalement il faut qu'elles apprennent l'anglais, ou le monde
du travail se passe uniquement en anglais, ou, par exemple, dans les très
petites entreprises où beaucoup d'immigrants travaillent, bien, ça va se passer
même dans leur langue maternelle que ce soit l'espagnol, l'arabe, etc., parce
qu'ils vont rester dans leur communauté.
• (16 heures) •
Donc, renforcer la Charte de la langue française
dans le milieu du travail, c'est fondamental. C'est ce qui va assurer la survie
du français au Québec, je ne mange pas mes mots, j'en suis absolument
convaincue et je suis certaine que l'avenir va aussi le prouver. Si, pour
mettre du pain sur la table de la famille, la salle à manger, ça prend la connaissance du français, bien, vous pouvez
être assurés que tout le monde va l'apprendre et va s'intégrer. C'est ce
que la grande majorité des immigrants demandent, mais, à cause de cette
ambiguïté, ambivalence qu'on a dans le milieu du travail, du monde des
affaires, bien, c'est une menace à la protection et à la pérennité de la langue
française.
Donc, je vais
avoir des amendements là-dessus, c'est sûr et certain, notamment
d'appliquer la Charte de la
langue française aux entreprises de 10 employés et plus. Et non, ça ne
mettra pas à mal l'économie, j'en suis convaincue, puisqu'en 1977 c'était
l'argument principal du monde des affaires — je pourrais partager des articles
qui étaient écrits à l'époque, et aujourd'hui on trouverait que c'est
incroyable, ce qui se disait — et on a vu que ce n'est pas du tout ce
qui est arrivé.
Je voudrais, moi aussi, renchérir, comme ma collègue
de Marguerite-Bourgeoys, sur le fait qu'il aurait été intéressant d'avoir aussi
un livre blanc. Moi, je l'ai lu à plusieurs reprises aussi pour me préparer au
travail que je vais faire pour le projet de loi
n° 96. Il y a des choses intéressantes aussi qui sont écrites dedans,
notamment les principes que j'ai repris, les principes du... les quatre
principes de la loi 101 qui étaient mis dans le livre blanc de Camille Laurin, à l'époque. Je les ai repris et,
moi-même, j'ai déposé un livre orange pour nous rappeler ce document qui
était très, très important. Donc, ça aurait été intéressant que le gouvernement
ait un livre de n'importe quelle couleur, mais, dans le fond, l'important,
c'est qu'il définisse la vision du gouvernement par rapport à ce projet de loi
là.
Je sais que le ministre va pouvoir répéter, le
dire et parler de l'intention du gouvernement, de c'est quoi, l'objectif.
Pendant la commission, tout ça a été enregistré, mais ça aurait été quand même
intéressant d'avoir ce document. Ça aurait
pu aussi rassurer certaines communautés, par exemple, les communautés
anglophones. Moi, je l'ai toujours
dit, s'il y avait un élément ou un article dans le projet de loi qui menaçait
les droits historiques de la minorité anglophone,
Québec solidaire, on aurait été les premiers à nous insurger. Mais ça aurait
été bien, dans le livre blanc ou dans un
livre qui énonce les intentions et la vision du gouvernement par rapport à la
langue française, que ça soit mentionné.
Il aurait pu aussi rassurer les personnes issues
de l'immigration ou les groupes qui les accompagnent dans leur intégration ou dans la francisation sur les
intentions du gouvernement. On a eu des groupes qui ont émis certaines
inquiétudes, notamment par rapport au délai de six mois, où, après six mois, le
gouvernement, partout, les services de la
santé et de l'éducation vont s'adresser à eux et à elles, aux immigrants,
uniquement en français. C'est sorti dans les médias. Il aurait pu les rassurer, dire c'est quoi, l'intention du
gouvernement. Il aurait pu aussi parler... Ça aurait été une belle
occasion de parler aux Premières Nations et Innus, aux autochtones, parce
qu'eux aussi, comme les Québécois, font face au défi de protéger leurs langues.
Certaines langues sont mortes, elles sont de moins en moins parlées par les
plus jeunes. Donc, s'il y a un peuple au monde qui peut comprendre les
inquiétudes des Premières Nations et des Innus par rapport à leurs langues
maternelles, à leurs langues, bien, c'est vraiment... c'est les Québécois.
J'aurais aimé aussi... Je sais qu'on ne peut pas
parler de l'absence d'un député lors d'un discours. Je ne vais pas le faire. Ce
n'est pas du tout ça, mon intention. Mais moi, je sais que j'ai beaucoup lu et
j'ai même fait référence à des discours qui ont été faits par M. Camille
Laurin, ministre, donc, responsable de la Langue française à l'époque de l'adoption de la loi 101, et ça a été des
discours historiques. Il y a même eu une émission, une fois, à Télé-Québec,
je pense, où on parlait... où on analysait le discours de Camille Laurin. Il a
fait plusieurs discours tout au long de l'avancement du projet de loi.
J'aurais aimé... et, encore une fois, ce n'est
pas un reproche du fait qu'il était absent, je sais que le ministre est très,
très, très occupé, il a beaucoup de pièces législatives qu'il a sous sa
responsabilité, mais j'aurais aimé l'entendre,
lui, parler lors de l'adoption du principe. Ça aurait été une belle occasion.
J'espère que, lors des prochaines étapes de l'avancement du projet de
loi, qu'on va l'entendre et, qui sait, peut-être un jour, dans 40 ans,
d'autres parlementaires plus jeunes, nos
enfants, vont référer à ce discours. C'est rare qu'on réfère aux discours des
oppositions, malheureusement. On le fait un peu quand ça fait scandale ou quand
ça a été très gros, mais on fait référence beaucoup au discours du ministre qui
était en poste à l'époque. Et donc, c'est aussi une occasion pour le ministre
de marquer peut-être l'histoire ou de faire en sorte que les gens qui vont nous
suivre puissent y référer.
Donc, c'est une invitation, un appel que je
lance au ministre. Moi, je serai présente à toutes les étapes et j'espère que lui aussi, parce que ça nous
renseigne, nous aussi, lors de notre étude du projet de loi, sur certains
éléments importants. Et je pense que c'est des moments qui sont importants pour
tous les parlementaires et aussi, comme je le disais, pour les historiens du
futur.
Je pense que je ne l'ai pas mentionné, j'ai
envie de le répéter pour avoir à notre esprit la réflexion de Camille Laurin et
des gens qui l'ont entouré, notamment M. Guy Rocher. Dans le livre blanc, il y
avait quatre principes, et, comme je l'ai dit, je les ai répétés et je les ai
repris parce que ces principes-là sont toujours d'actualité, donc, dans le
livre orange que j'avais déposé au printemps dernier. Le premier
principe : «Au Québec, la langue française n'est pas qu'un simple mode
d'expression, mais un milieu de vie», et ça, c'est tout à fait vrai.
«On doit respecter... » Le deuxième
principe : «On doit respecter les minorités, leurs langues et leurs
cultures.» Donc, c'était une invitation à l'ouverture pour tous les peuples et
pour toutes les personnes qui viennent se joindre au Québec.
Le troisième principe : «Il est important
d'apprendre d'autres langues que le français», et moi, j'ai envie d'ajouter «et
que l'anglais», parce qu'à l'époque on apprenait peut-être moins souvent... les
jeunes étaient moins attirés par l'anglais, alors qu'aujourd'hui ce n'est plus
du tout le cas. Pourquoi ne pas apprendre d'autres langues? Gérald Godin avait
fait l'effort, quand il était député de Mercier, d'apprendre le grec, ce qui
n'est pas très, très facile. Il disait : Je n'étais pas très bon, mais il
a quand même fait cet effort. Donc, ça aussi, c'est un principe intéressant, de
dire : Bien, on s'ouvre à toutes les langues et pourquoi pas, non plus,
des langues autochtones.
Quatrième principe : «Le statut de langue
française au Québec est une question de justice sociale», et ça, ça revient à
toute la question de la langue du travail qui est si importante. Il ne faut pas
que la langue qu'on parle, le fait de ne pas parler anglais, crée des
inégalités économiques. Et les inégalités économiques, ça existe dans notre
société. On dirait qu'on en parle de moins en moins. On parle beaucoup d'identité,
de pays d'origine, d'ethnies, mais on oublie aussi que, des fois, quelqu'un qui
vient d'une famille pauvre à Rimouski ou dans le Bas-du-Fleuve, peut-être, a
des choses à partager qui sont beaucoup plus proches avec quelqu'un, par
exemple, qui n'est pas né ici et qui est dans une famille de Parc-Extension.
Peut-être qu'il partage des choses... beaucoup plus que deux personnes qui sont
ici et que leurs ancêtres sont ici depuis 400 ans, alors qu'il y en a un
qui vient d'une famille riche et aisée et l'autre d'une famille pauvre.
Donc, je trouve que la question de la justice
sociale dont faisait référence, dans le livre blanc de la Charte de la langue
française, Camille Laurin, des inégalités économiques, c'est un élément
important et c'est par la langue du travail, en faisant en sorte que ça se
passe en français au travail, qu'on va pouvoir assurer cette justice sociale.
Donc,
Mme la Présidente, je répète, je suis heureuse d'être ici. Je suis en mode
écoute, patience, ouverture, etc., et toutes les qualités possibles,
inimaginables et de collaboration, mais je veux être ferme par rapport à la
défense de la langue française en milieu de travail. Il y a urgence en la
demeure. On l'a vu avec les P.D.G. des grandes entreprises qui sont totalement
déconnectés de ce qui se passe au Québec. On l'a vu, malheureusement, même avec
la direction de l'Université McGill. Donc, j'espère que toutes ces personnes
écoutent notre commission et prennent des bonnes notes pour voir qu'est-ce qui
se passe dans la société québécoise et sur cet enjeu qui est extrêmement
important pour notre avenir, pour l'avenir de tous les enfants de la loi 101,
de tous les enfants québécois, peu importe leurs origines, peu importe leur
statut social, peu importe d'où ils viennent. Et j'ai très, très hâte de
commencer l'étude article par article. Merci beaucoup.
• (16 h 10) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, Mme la députée de Mercier. Donc, j'invite maintenant le
porte-parole du troisième groupe d'opposition en matière de langue française et
député de Matane-Matapédia à faire ses remarques préliminaires. La parole est à
vous.
M. Pascal Bérubé
M.
Bérubé :
Merci, Mme la Présidente. À mon tour, je veux saluer le ministre, et mes
collègues, et toutes ces personnes qui s'intéressent à cet enjeu et qui
vont nous écouter, soit en direct, soit en différé, sur cet enjeu important.
Aucune formation politique dans l'histoire du
Québec ne s'est autant intéressée à la langue française, que ça soit de ses
origines jusqu'à aujourd'hui. Le français, c'est à la base de l'engagement
politique des militants du Parti québécois. Camille Laurin était un membre du
Parti québécois, Gérald Godin était un membre du Parti québécois, Guy Rocher a
travaillé avec le Parti québécois à écrire la loi 101, et, encore
aujourd'hui, son message nous parle.
Le gouvernement a annoncé un projet de loi
costaud. Je ne partage pas sa conception de «costaud». C'est un projet de loi à
dose homéopathique. Il y en a beaucoup, mais sur très grand. Ce n'est pas un
projet de loi courageux, c'est encore moins un projet de loi historique. Ce
projet de loi n'est pas à la hauteur des défis qui sont les nôtres. Lors de la
commission parlementaire, de nombreux intervenants sont venus nous dire :
Ce projet de loi ne va pas permettre de renverser le déclin du français. Le
ministre le sait, mais le ministre est isolé, ne peut pas aller plus loin.
Camille Laurin, parce qu'on s'en réclame
souvent, est arrivé avec un projet de loi audacieux, courageux, non consensuel,
mais nécessaire. Il a convaincu son premier ministre d'aller de l'avant. Le
ministre a échoué. Le premier ministre n'a pas été convaincu par le ministre.
Encore récemment, lorsqu'on posait la question au premier ministre : Avec
ce qu'on a entendu en commission parlementaire, est-ce qu'on ne devrait pas
aller plus loin, notamment sur la fréquentation des cégeps? Non. Ça se termine
là, et on a appris qu'il y a une limite au nationalisme de ce gouvernement.
C'est le maximum où on peut aller.
Alors, si on
connaît les mesures essentielles, notamment la fréquentation des collèges,
notamment la connaissance du français
pour les immigrants, et qu'on refuse de le faire, c'est non seulement dommage,
mais c'est une occasion manquée.
Je ne doute nullement, Mme la Présidente,
des intentions du ministre. Je sais qu'il est en mesure... il serait en mesure
d'apprécier à peu près toutes les mesures qu'on a proposées, mais il est dans
un gouvernement où il y a une limite au
nationalisme et il l'a appris à ses dépens. Présentement, j'ai l'impression que
le premier ministre est davantage emballé par un ministre délégué aux
Nordiques qu'à la Langue. Je vous le dis très sincèrement.
Des démographes, des mathématiciens, des gens
qui ont étudié ces questions ont dit : Écoutez, on peut intervenir sur plusieurs fronts, mais il y a des
enjeux qui sont plus déterminants que d'autres. D'abord, l'immigration.
Avant même de parler de la langue du travail, parlons de l'immigration, la
connaissance du français des immigrants. Bien
sûr, on peut décider de franciser, mais la connaissance à l'entrée au Québec
est un gage supplémentaire de réussite de
sa vie au Québec, dans le domaine du travail, dans son quartier, dans sa
communauté. Vivre l'expérience québécoise, ça passe beaucoup par le
français.
Le Québec est une société fragile au plan
démographique, au plan linguistique. L'enjeu de l'immigration est important. Pourtant, personne d'autre que le Parti québécois n'en a parlé, personne d'autre. Bien sûr, le ministre pourra se dire :
Bien, deux des oppositions sont plutôt heureuses de notre projet de loi. Si
c'est l'étalon sur lequel il faut juger ce projet de loi là, c'est bien insuffisant, Mme la
Présidente. L'enjeu de l'immigration est essentiel, et on va en parler. L'enjeu
de la culture également. Il faut lier la culture et la langue. Ça s'impose. Si
on avait eu une vision, un livre blanc, probablement
qu'on aurait pu lier les deux. Alors, le Parti québécois va lier la
culture québécoise et la langue, ça va de soi.
À l'origine de la loi 101, et c'est un de
ses rédacteurs qui nous l'a dit ici, il aurait fallu inclure les cégeps.
Pourquoi? Parce que le parcours scolaire commence au primaire, voire même au
préscolaire, se poursuit au secondaire. Et
qu'est-ce qu'on découvre au collège, et on l'a découvert récemment dans un article du Journal de Montréal? Certains
cégeps québécois ont maintenant une majorité d'allophones. Alors, cette
information, on ne l'avait pas. On pourrait supposer qu'on ne l'avait pas lors
des consultations, mais le ministre l'a depuis ce temps-là. Le ministre a
rencontré le premier ministre, et il n'a pas bronché. Donc, on accepte, nous, en
tout cas, le Parti québécois est le seul parti qui ne l'accepte pas, qu'après
avoir investi un temps précieux pour faire connaître le français à des enfants,
à des jeunes issus de l'immigration, au collégial, financé par l'État
québécois, un moment important de socialisation, de choix professionnels, de...
on commence à être en couple, à choisir son lieu d'implantation, là on
abandonne tout. C'est le libre choix. Le gouvernement du Québec va financer sa
propre assimilation linguistique.
Ces données sont connues, mais personne d'autre
que le Parti québécois n'en a parlé. Pourquoi? Parce que nous considérons que
le but des mesures qu'on propose, ce n'est pas d'être populaires, ce n'est pas
de préserver des clientèles électorales.
L'objectif, c'est de faire ce qui est nécessaire pour renverser le déclin. Et
ça, c'est le vrai courage.
Tout à l'heure, le grand
Guy Rocher sera à la Bibliothèque de l'Assemblée nationale. Je vais vous faire
une prédiction, Mme la Présidente, il y a plein d'élus qui vont aller le
rencontrer et qui vont lui dire qu'ils l'admirent. Aucun de ceux-là, outre les
députés du Parti québécois, ne vont lui dire qu'ils ont retenu ce qu'il a dit
en commission à l'effet qu'il fallait appliquer la Charte de la langue
française au domaine collégial. Aucun ne le dira. Si on veut rendre hommage à
Camille Laurin, on fait preuve de courage. Si on veut rendre hommage à Guy
Rocher, on écoute son propos aujourd'hui. Fort de toute son expérience de vie,
il nous a dit de façon limpide qu'on est rendus là, qu'il a changé d'idée sur cette question, qu'il faut
l'appliquer au collégial. À partir du moment où, dans certains collèges il y a une majorité, je ne parle même pas
des francophones, une majorité d'allophones qui font le transfert linguistique
vers les cégeps anglophones, et qu'on le sait, et qu'on l'accepte, je me
questionne fortement sur l'exercice qu'on va vivre. Nos propositions sont connues, le gouvernement les a déjà refusées.
Alors, article par article, on va, à certains égards, valider des
définitions, proposer des choses, mais ça va être très secondaire, Mme la
Présidente. Donc, moi, je n'ai pas d'attentes élevées. La bataille, le
gouvernement l'a déjà perdue dans son caucus. Ils n'iront pas plus loin que ce
qu'ils ont proposé.
À peu près tous les groupes sont venus nous
dire... Le ministre a évoqué qu'il y en a eu une cinquantaine. Combien d'entre eux nous ont dit : J'ai
changé d'idée sur la fréquentation au cégep? Quand vous avez une coalition
qui part de Guy Rocher jusqu'à Christian Dufour, ça commence à faire assez
large dans le spectre, Mme la Présidente. Mais
pourtant, ils ont décidé de ne pas y aller. Encore une fois, je ne suis pas
dans le secret des dieux, mais je suis assez convaincu que le ministre
n'est pas rébarbatif à ça, mais le premier ministre ou les gens qui l'entourent
lui ont dit : Non, c'est le maximum. Ça a l'air nationaliste, ça a l'air
de s'occuper du français, mais on n'ira pas plus loin que ça.
Alors, je m'excuse d'avoir ce ton, mais il faut
dire les choses telles qu'elles sont. La langue, pour moi, c'est une conviction très profonde. Mon engagement
politique de 25 ans au Parti québécois est motivé fortement par cet
enjeu. Je connais très bien cet enjeu, j'ai à peu près tout lu ce qui existe
là-dessus.
Tout à l'heure, on a indiqué que c'est le plus
grand exercice depuis la loi 101. Pourquoi occulter la loi n° 14
du gouvernement de Mme Marois en 2013, loi n° 14 qui
n'a pas pu aller de l'avant, on était un gouvernement minoritaire? Pourquoi?
Parce que, notamment, le gouvernement de la CAQ, en fait qui était l'opposition
de la CAQ, disait que ça allait trop loin. Moi, je m'en souviens, j'étais au
Conseil des ministres, Mme la Présidente. Ça m'a fait mal d'entendre ça, parce
qu'on aurait pu avancer. Ça allait trop loin. Alors, je me souviens de ça.
En 1977, je n'y étais pas, mais j'ai
suffisamment lu pour savoir que ce n'était pas consensuel, que le Parti libéral
a voté contre la loi 101, avec tout ce que ça impliquait de critiques à l'égard
du Dr Laurin. Mais il y est allé quand même parce que c'était nécessaire. Pas
parce que c'était nécessairement populaire avec toutes les classes de la société,
il fallait le faire.
Le courage, c'est aussi de dire les choses
telles qu'elles sont. Il y a des municipalités qui ont un statut bilingue et
qui ne devraient pas l'avoir. Le ministre le sait, il a les statistiques. Qu'est-ce
qu'il fait avec le projet de loi? Il dit aux municipalités : Écoutez, on
va faire une entente entre nous, je vous enlève le statut, mais vous avez
120 jours, avec une motion, pour annuler ça. On le fait ou on ne le fait
pas. Ça, ce n'est pas le courage que moi, je souhaitais. Nous, on pense qu'à
partir du moment où vous avez le tiers de votre population qui est... en deçà
du tiers qui est anglophone vous perdez votre statut. Pourquoi on fait ça? De
quoi a-t-on peur?
Le gouvernement va nous dire : Ah! mais il
y a deux trouvailles, il y a deux trouvailles importantes. D'abord, le ministre
a bien pris note de la proposition du Pr Patrick Taillon, mon successeur
au Comité national des jeunes du Parti québécois à l'époque, qui dit : Il
y a une partie québécoise à la Constitution, puis on pourrait y insérer un
certain nombre de nos souhaits politiques, comme une carte de souhaits. Mme la
Présidente, de l'aveu même du Pr Taillon, cet exercice est loin d'être
assuré qu'il est voué au succès. Pourquoi? Parce qu'on est dans la fédération
canadienne. Puis on peut bien mettre des souhaits, le Canada a toujours le
dernier mot.
Moi, c'est un statut que je n'accepte pas. Je
travaille pour m'en libérer. D'autres l'accepteront. Ils vont se river le nez à
cette réalité comme si moi, je m'avançais vers ce plexiglas. Ça va arriver. Et
là il va rester quoi après cet émoustillage de constitutionnalistes? Qu'est-ce
qu'il va rester dans le réel à Montréal, à Laval pour protéger notre langue?
Seulement de la poussière, un peu de fumée.
• (16 h 20) •
Le ministre, je l'ai entendu dire récemment,
dans l'histoire du P.D.G. d'Air Canada : Dans notre projet de loi, on va assujettir les entreprises fédérales à
la loi 101. Comment? Comment on va faire ça? Est-ce que le
gouvernement fédéral a abandonné sa juridiction? Est-ce qu'il nous a envoyé un
message qu'on pouvait le faire? Bien sûr que non. Alors, c'est un souhait, sans
plus. Ça mérite d'être dit.
Par contre, sur le réel, il avait l'occasion
d'agir. Cégeps en français, non, il ne faut pas s'aliéner les jeunes qui vont
là et leurs parents. C'est comme pour les... C'est la même chose qu'avec les
collèges privés avec la CAQ. C'est des clientèles qui nous aiment, il ne
faudrait pas aller là, on pourrait perdre du monde. Mais c'est regrettable.
Alors, moi, je n'ai aucune attente face à ce projet de loi là, aucune attente.
Sur l'essentiel, c'est un échec.
Sur l'immigration, le ministre est bien placé
pour en parler, il a été titulaire de ce ministère. Ils ont même identifié des
cibles à l'élection de 2018, des cibles qui sont révisées. Si c'est fragile, le
français au Québec, si notre capacité d'intégration est limitée, si le premier ministre
nous a dit, je le cite, qu'il a peur que ses petits-enfants ne parlent pas
français, une fois qu'on a dit ça, pourquoi on ne fait pas ce qui doit être
fait? Avoir un équilibre linguistique, notre capacité d'intégration en
français, la socialisation en français, il faut que ça soit plus que des
symboles, il faut que ça soit la réalité.
On a proposé
notre propre plan au mois de mai, d'accord, et on a proposé notre propre projet de loi récemment. Au mois de mai,
qu'est-ce qu'on disait? C'est intéressant parce que, dans l'actualité récente,
on a questionné le collègue du ministre, le ministre de
l'Économie, sur la connaissance du français pour faire affaire avec l'État.
Bon, j'ai entendu Québec solidaire en parler
récemment, mais notre proposition date du mois de mai, je l'ai là-dedans. Et
le ministre a dit quoi? Puis la question
était bien posée : Qu'est-ce que vous pensez des conditions qui ont été
proposées par Québec solidaire? Et sur celle du français, le ministre a
dit : Il n'en est pas question. Pas convaincu que le ministre responsable
de la Langue était heureux d'apprendre ça, pas convaincu du tout.
On l'avait écrit en mai dernier qu'une des
conditions essentielles pour faire affaire avec l'État, c'était de respecter la
Charte de la langue française. On pourrait s'imaginer que les entreprises ont
une liste d'exigences auxquelles elles doivent répondre, par exemple, de
s'assurer que ça se passe en français dans leur entreprise, les communications,
l'apprentissage, les saines pratiques, vraiment l'intégration au Québec, et
que, si vous respectez tout ça, bien, l'État fait affaire avec vous, si vous
n'êtes pas en contravention, par exemple, avec la Charte de la langue
française. Ça pourrait être sur l'affichage aussi, ça pourrait être sur
d'autres enjeux.
Bien là, là, j'ai su, parce qu'un article récent
nous a rappelé qu'il y avait des échanges au caucus là-dessus... bien là, je
sais dans quelle colonne placer au moins un ministre, le ministre de
l'Économie. Puis ça va compter, là, l'économie, pour ce qui est des entreprises
puis pour ce qui est de ce qu'on souhaite faire dans la langue du travail. Lui,
il n'est pas émoustillé, là, pour reprendre le terme de tout à l'heure, là. Ça
ne l'émoustille pas, le nationalisme et la langue. Ce n'est pas pour ça qu'il
est venu en politique. Mais moi, ça me touche, cet enjeu-là. Et comme je n'ai
pas accès aux discussions du gouvernement, bien, c'est par ces bribes-là que je
réalise qu'il y a des gens qui ne veulent pas qu'on aille plus loin que ça.
Pourtant, c'est nécessaire et c'est même gagnant
pour le Québec, parce qu'on peut apprendre une langue, deux langues, trois
langues, quatre langues, cinq langues, c'est souhaitable, mais l'État doit
avoir un caractère français, seule langue officielle. Puis c'est même un
avantage de faire le pont entre la francophonie et l'Amérique. On est
résolument Américains dans le sens continental, mais on a un avantage
supplémentaire, c'est la connaissance d'une
langue qui est parlée par 500 millions de locuteurs, une des langues les
plus apprises comme langue secondaire, une grande langue du monde. Moi,
je trouve que c'est quelque chose de beau. C'est non seulement un héritage,
c'est un actif actuel. Donc, il ne faut pas manquer notre coup avec le projet
de loi.
Le gouvernement, je vais lui accorder, dispose présentement
d'un capital de sympathie qu'il pourrait utiliser à des choses utiles comme la langue. Le moment est venu. J'aurais
souhaité qu'entre la fin de l'écoute des groupes et le début de ces
travaux il y ait des changements, notamment sur la fréquentation des collèges.
Non, le premier ministre a fermé la porte. C'était lors du congrès de la CAQ,
je crois, qui a eu lieu il y a quelques semaines à Trois-Rivières. J'aurais
aimé que d'autres des ministres disent : Nous sommes d'accord avec notre ministre,
il a raison d'exiger le français. Parce que, si le ministre de l'Économie avait
lu le projet de loi de son collègue, il aurait vu que le ministre est sensible
à ces questions-là aussi. C'est écrit dans le projet de loi. Alors, c'est tout
un camouflet.
Ce serait facile pour moi de vous dire :
J'espère qu'on va réussir, j'espère qu'on aura de bonnes discussions, j'espère
qu'on avancera. Ça dépend de vos attentes par rapport au projet de loi. Nous,
nos attentes, c'est de renverser le déclin. Ça n'arrivera pas avec le projet de
loi. Alors, ça nous place dans quelle situation? De dire : Bien, écoutez, bravo, M.
le ministre, vous êtes allé le plus
loin que vous pouviez avec le gouvernement que vous aviez. Pas pour nous, non. C'est
sérieux, l'affaire. Ce n'est plus Montréal seulement, c'est Laval, c'est
Saint-Lambert, c'est Brossard, c'est l'Outaouais, c'est l'Estrie, c'est les
réseaux sociaux, c'est le défi qu'on a avec la jeunesse québécoise.
C'est le défi également d'intéresser le français
en étant exemplaire à tous égards. Nous-mêmes, dans notre rôle de parlementaire,
on doit donner l'exemple à travers la qualité du français. Puis généralement,
je trouve que les parlementaires québécois ont un français assez exceptionnel,
dont on peut être fiers. Mais il faut être exemplaire à tous égards dans notre
conduite et aussi dans les gestes qu'on pose à travers les politiques, à
travers les projets de loi, à travers des événements de l'actualité qui sont
spontanés.
Quand arrive un événement comme l'affaire
Michael Rousseau, c'est quand même assez révélateur. Le ministre, à ce
moment-là, nous dit : Oui, ça va être réglé dans notre projet de loi parce
que les entreprises fédérales vont être assujetties. Sur quelles bases dit-il
ça? Un souhait, oui. Quelles sont ses chances de réussite? Je suis assez
convaincu qu'on lui a dit que c'était très faible. Mais il ne nous le dira pas
ici. Puis que le ministre de l'Économie nous
dise : Moi, je ne vais pas forcer personne, puis moi, quand je suis allé
en Chine, j'ai appris huit phrases en cantonais... l'histoire du Québec
ne va pas s'appuyer là-dessus pour dire que c'est assez. Je ne penserais pas,
non. Alors, cet enjeu-là est très important pour nous.
Le ministre a entre les mains notre projet de
loi. Peut-être l'a-t-il consulté, peut-être sait-il que c'est ce qui est nécessaire. Moi, je me porte volontaire, Mme la Présidente, pour rencontrer personnellement chacun des membres de son caucus qui est
contre ces enjeux que j'ai évoqués et que je sais le ministre sympathique à.
C'est sérieux, là. Je le dis pour vrai parce que je ne veux pas qu'on manque
notre coup. Je veux qu'à la fin de ce projet de loi là on puisse dire : On a avancé de façon significative. Ce
n'est pas la première fois que je débats avec le ministre, j'étais là sur la
loi n° 21.
D'ailleurs, je me permets de rappeler notre responsabilité
comme parlementaires face aux lois votées à l'Assemblée nationale. Une fois qu'elles
sont votées, il y a le respect qu'on doit avoir à l'égard de ces lois-là, à
l'égard des parlementaires. Et respecter une loi votée par l'Assemblée
nationale, c'est respecter les prérogatives de l'Assemblée nationale. Alors, la
loi n° 21, je serais allé de façon différente, plus
complète, plus cohérente. Mais, une fois
qu'elle est adoptée, je la défends, cette loi-là. J'ai voté puis,
même si j'avais voté contre, je la respecterais quand même.
Sur la langue, on
n'est pas au même endroit du tout. En partant, le ministre, et j'ai le regret
de le dire, j'ai beaucoup d'estime pour lui, mais il a perdu la bataille déjà. Il
y avait moins de nationalistes qu'on pensait à la CAQ. Je sais qu'ils le savent. Je sais qu'ils savent qui bloque au Conseil des ministres puis j'ai une bonne idée aussi, mais c'est
regrettable. J'aimerais qu'en cours de route on puisse les convaincre
d'appliquer les mesures qui ont été proposées. Guy Rocher
va rappeler tout à l'heure ce qu'il nous a dit ici. Il va encore le dire, avis
à ceux qui vont le voir au 5 à 7. Je vous avertis d'avance, il va le dire.
Si on se réclame de
Camille Laurin, il faut également avoir ce courage. Et ultimement, si on est vraiment
sérieux avec la langue, si on veut arrêter d'attendre après le gouvernement
fédéral, si on pense que l'avenir de la nation québécoise ne repose pas sur les
humeurs des ministres du gouvernement de Justin Trudeau, bien, il faut faire
l'indépendance du Québec. Il faut arrêter d'attendre. Il faut prendre toutes
nos décisions. Si on est un grand peuple, bien, on est capables d'assumer
pleinement notre destinée, et ça passe par la langue. Et la langue, à elle
seule, serait un argument pour faire l'indépendance. Mais vous savez quoi? Il y
en a beaucoup d'autres.
Alors, en résumé, Mme
la Présidente, je suis extrêmement déçu de ce projet de loi. Je constate, comme
bien des acteurs nationalistes qui avaient fondé des espoirs, que finalement on
est passés à côté d'une occasion qui, elle, aurait été historique. Mais ça ne
sera pas historique. Ça sera un projet de loi comme les autres. Je vais y
participer, mais j'ai le regret de voir que la Coalition avenir Québec, sur cet
enjeu, a vu ce dossier comme un dossier comme les autres. Puis c'est
regrettable, et on passe à côté du destin du Québec, et ça, c'est une occasion
manquée que je regrette tristement. Merci, Mme la Présidente.
• (16 h 30) •
La
Présidente (Mme Thériault) : Merci, M. le député de Matane-Matapédia. 20 minutes pile. J'ai trois députés qui ont l'intention de prendre la parole,
donc je reconnaîtrais, pour commencer, le député de Sainte-Rose. M. le député, vous
pouvez aller jusqu'à 20 minutes, si vous le désirez aussi.
M. Christopher Skeete
M. Skeete : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Très heureux de pouvoir intervenir à l'aube de la consultation...
bien, pas la consultation, mais l'étude détaillée d'un important projet
de loi qui, il faut se le dire, est
vaste comme chantier.
Vous le savez, chers collègues,
j'ai la responsabilité, qui m'a été donnée par le premier ministre, d'être
responsable des Québécois d'expression anglaise, une tâche qui, dans le
contexte actuel du projet de loi n° 96, est une
tâche, on va dire, délicate. Elle est délicate, cette tâche, parce que
l'histoire, du point de vue des deux solitudes et de la solitude anglaise, est
une histoire différente qui est vécue par la majorité francophone, mais elle
n'est pas pour autant indissociable. Il y a deux peuples, les anglophones et
les francophones, les deux solitudes, on le sait, et les 50 dernières
années n'ont pas été faciles pour les anglophones, qui, dans le discours
souverainiste, fédéraliste, ont été forcés de choisir entre leur lieu
d'appartenance, leur Québec, et leur pays. On sait le choix qu'ils ont fait.
Arrive un projet de
loi comme 96 qui, à mon sens, nous permet l'occasion de freiner le déclin du
français en misant sur des vecteurs importants d'anglicisation, sans pour
autant viser la communauté d'expression anglaise. Et, quand je dis ça, je le
dis sincèrement, parce que ce n'est pas négligeable d'avoir écrit et articulé
une vision dans le projet de loi n° 96 qui nous
permet de protéger à la fois la langue française et l'unicité du fait français
en Amérique du Nord, en même temps, de respecter la contribution, la place de
la minorité linguistique anglophone. Et ça, c'est vraiment spécial, il fait se
le dire.
D'un bord, le
ministre nous a créé un nouveau droit, un droit que nous avons tous maintenant,
un droit à vivre en français. Et c'est bizarre quand on le dit comme ça parce
que, tu sais, il me semble qu'on a toujours eu ce droit-là, mais la réalité, c'est que c'était difficile, à beaucoup
d'égards, de vivre, au Québec, en français. Et, en créant ce droit-là, on va aussi donner le droit à la
minorité linguistique historique au Québec d'apprendre le français pour y
vivre, pour mieux y vivre et pour mieux y réussir.
Dans mes
consultations, que j'ai faites auprès de la population en 2019, j'ai fait le
tour du Québec, j'ai rencontré plus de 140 groupes, et le constat était
unanime, la demande numéro un, Mme la Présidente, c'était un désir
profond d'apprendre davantage le français. Parce qu'on le réalise que, pour
avoir du succès au Québec, on doit maîtriser la langue française. Comment
peut-on penser vivre en Allemagne et ne pas apprendre l'allemand? C'est la même
chose pour le français et le Québec.
Le
projet de loi donne le droit aux Québécois d'expression
anglaise un nouveau droit de prendre... d'apprendre le français pour
bien y vivre et aussi il reconnaît ses institutions, notamment les institutions
comme les cégeps, où on va donner la première priorité aux Québécois
d'expression anglaise à leur réseau.
C'est une donnée qui
ne m'est pas très fier... qui ne me rend pas très fier, mais, quand je suis
sorti du secondaire, je n'avais pas une forte moyenne. Elle n'était pas si
bonne que ça, là, puis c'est un peu gênant de le dire aujourd'hui, parce que ma
fille, elle m'écoute certainement, et puis ça va lui donner des idées que c'est
acceptable d'avoir une moyenne comme ça. Ça fait que... mais j'avais une
moyenne de 73 % quand je suis sorti du secondaire.
Aujourd'hui, un jeune
anglophone qui veut fréquenter Dawson, Vanier, John-Abbott avec une moyenne de
73 % n'y a pas accès parce qu'il est en compétition avec d'autres
personnes qui viennent du réseau francophone, qui viennent augmenter la moyenne
générale de ces écoles qui sont limitées en nombre. Le projet de loi vient
corriger ça, vient donner un droit aux Québécois d'expression anglaise à
fréquenter leur réseau.
Donc, beaucoup a été
dit du projet de loi n° 96, mais rapidement, on constate la création de
deux nouveaux droits, et ça, je pense que
c'est spécial, compte tenu que c'est une loi qui est nécessairement pour la
protection du français.
But
that's not all. Because a lot has also been said about the scope of this bill
in terms of how it may be in the front to English-speaking Quebeckers' ability to be and remain in
Québec, but in which way? My colleague the MNA of Mercier has said it very eloquently, we looked, and we looked, and we
looked for where it was that the English community was impacted, and there was
no indication of that.
Section 15 of the health care... Health and Social
Services Act remains unaffected, which means English-speaking
Quebeckers, English tourists
from abroad, anybody wanting or needing services in health care in Québec has the right to receive those
services in English.
We've also said that access to
justice will be unaffected. Section 122 of the Charter of Rights and Freedoms
is out of scope of Bill 96. Therefore, your right to justice is
unimpacted.
So, what this bill does is it
gives you two new rights : the right to be successful in Québec by learning and mastering French, the
only French jurisdiction in North America, and also allowing you to have access
to your higher education network in priority.
So, we can look and look for
ways that this bill is an affront. I think we find none. What I do concede is
the fear. There is clearly concern, I think
my colleague... one of my colleagues in the Opposition mention that there is concern in the community, and I hear that concern, and I am not
deaf to it. I think that fear is largely rooted in the suspicion of the other,
rooted in our two solitudes, a gap that I have tried to bridge for the passed
three years.
So, the opportunity that we
have here, in front of us, is to analyze each disposition, and to make sure,
once again, that it doesn't affect the English community directly. And that's
my promise to the community, to the friends that
I grew up with, to the friends that I went to school with, that this law gives
you advantages in Québec as a linguistic minority. And it also has the
added advantage of keeping what makes this place special, what allows us to
brag to our friends who live in Toronto that, you know, Toronto might be nice,
but it's not as cool as Montréal and Québec. The thing that makes us proud,
when we fly back home from international... all the signs are in French, and we
know how to read them, and that je-ne-sais-quoi that we all have is maintained
because we all recognize that this place has always been and needs to always be
a French jurisdiction.
And the alternative is simple,
the alternative to that reality is Louisiana. Do we really want French to be a
cute little happenstance that happens by accident in a couple French names and
a couple French people who are left speaking
it, but really, it's an anecdote? I don't think anybody in the English
community wants that. I think the English community is committed to
protecting French. And when you look at the alternative, a clear example in the
United States in the State of Louisiana, I think we have our warning, and we
have the ability to act.
Donc, chers collègues, j'ai hâte d'échanger avec vous. Je suis sûr que ça va être
des heures et des heures de plaisir. Et je vous remercie pour votre
attention, et au plaisir d'échanger avec vous. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Sainte-Rose. Je reconnais maintenant M. le député de
Saint-Jean. La parole est à vous.
M. Lemieux : Et il reste combien de
temps autour de...
• (16 h 40) •
La Présidente (Mme Thériault) : Vous
pouvez avoir 20 minutes ,vous aussi. Les remarques préliminaires, c'est,
tout le monde, 20 minutes.
M. Lemieux : Je n'en prendrai pas
tant que ça, Mme la Présidente. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) : Vous
avez le droit, M. le député.
M. Louis Lemieux
M. Lemieux : Merci beaucoup. C'est
qu'en vous écoutant tous et en arrivant ici, tout à l'heure, j'avais envie de
crier : Enfin! pressé que j'étais d'aborder cette partie-là de ce projet
de loi là en particulier. Et, comme tout ce qui...
Comme la députée de Marguerite-Bourgeoys, dans le fond, tout m'interpelle dans
ce projet de loi là. Je l'avoue, je le confesse, même l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, quand on commence à parler de constitution,
j'en suis. Je veux en savoir plus, en tout cas. Pas sûr que je vais signer une
constitution demain matin, mais j'aimerais ça, en parler. Bref, tout
m'intéresse là-dedans.
Et les plus jeunes ou les moins vieux vont
dire : Ah! je me souviens, je n'étais pas là, en 1976, 1977, mais je m'en
souviens. Mais moi, j'étais là pour le bill 22. Ah! ça, je sais, les
libéraux s'en souviennent. 22, c'est un mauvais souvenir. Mais j'étais là pour
le bill 63 aussi. On disait «bill», à l'époque. Ce n'est pas un
anglicisme, c'est comme ça qu'on disait ça.
Et je me souviens du bill 63, parce que ce
que vient de dire mon collègue de Sainte-Rose au sujet de ce monde dans lequel
on vit... a vécu au cours des dernières décennies... parce que c'est un sujet
très sensible, c'est une corde très délicate pour les Québécois que de parler
de leur langue. Et de parler de comment organiser cette langue et comment la
légiférer, c'est vraiment... de tout temps et pour tous les gouvernements, ça a
été une chausse-trappe.
Par exemple, j'étais en train de vous parler du
bill 63 — ça,
c'est fin années 60, on est dans un gouvernement unioniste — et je
m'en souviens, pas que j'étais si vieux que ça à l'époque, mais parce que le
député de Saint-Jean, qui est décédé récemment, qui était là à l'époque, m'a
fait... m'a forcé, par la force des choses, pour lui rendre hommage, à aller lire ce que le député de
Saint-Jean de l'époque, Jérôme Proulx, avait fait et dit dans ce
gouvernement unioniste, fin années 60. Il avait démissionné de l'Union
nationale en disant, à propos de cette loi 63, qui était ni plus ni moins que
le libre choix de la langue d'enseignement, qui avait soulevé des tollés au
Québec... lui, il avait démissionné de son parti avec d'autres en disant qu'il
choisissait la patrie avant le parti. Inquiétez-vous pas, M. le ministre, ce
n'est pas ça que je m'en vais faire, là. Inquiétez-vous pas. Non, bien, c'est
parce que je voyais le député de Matane avec un grand sourire, il me voyait déjà arriver en courant.
Mais le député Proulx, à l'époque, à Saint-Jean, était... D'ailleurs, ça
a été le premier député du Parti québécois à siéger aux côtés de René Lévesque,
juste avant les élections de 1970. Ça ne l'a pas empêché de les perdre, ni en
1974, mais il est revenu en 1976 et il était là pour voter pour la loi 101,
bon.
Et c'est là que je reviens à notre histoire,
parce que cette Charte de la langue française va avoir 45 ans, probablement,
au moment où le lieutenant-gouverneur va s'apprêter à la signer, je l'espère,
cette mise à niveau qu'on va faire. Historique, c'est un bien grand mot, puis
vous aviez raison, Mme la députée de Mercier, c'est l'histoire qui va nous le
dire, ce n'est pas à nous de dire que c'est historique.
En passant, j'étais là en 1977 comme
journaliste. Je connais très bien le contexte de ce que vous parlez. Mais
souvenez-vous, Mme la députée de Mercier, que le contexte fait foi de tout. Effectivement,
il y a eu une révolution tranquille, il y a eu les lendemains de la Révolution
tranquille, et, comparer les textes de 1977 à aujourd'hui, il faut se souvenir
de comment ça se passait vraiment à l'époque. On en reparlera rendus là, si
vous voulez bien.
Et c'est ce que je veux faire avec vous, je veux
placer les choses dans leur contexte. Je veux comprendre exactement
jusqu'où on va et pourquoi on s'en va là. Effectivement, c'est
préoccupant, je l'ai dit, je l'ai répété, et pendant les audiences de consultations particulières,
combien c'était préoccupant que la protection du français chez nous. Et
c'était préoccupant à toutes sortes
d'égards, y compris au niveau de la culture, parce qu'on l'a probablement tous mieux compris, pendant les consultations particulières, que
culture et langue, ça va de pair, et l'un a vraiment besoin de l'autre.
Donc, j'étais sur Jérôme Proulx, parce que je
travaillais sur la prise de parole, l'allocution que j'ai faite, pour le
principe du 96. Et, pour moi, ça a réveillé plein de souvenirs de l'époque de
cette loi 101, mais ça a réveillé aussi les raisons pour lesquelles ce projet
de loi là est tellement important, on verra s'il est historique, mais est tellement
fondamental pour la suite des choses au niveau de ce que le Québec deviendra au
fur et à mesure qu'on prendra le contrôle de ce qu'on a appelé de transversal
dans ce projet de loi là. Parce qu'il ne faut jamais oublier qu'on n'est pas en
vase clos. Oui, on travaille sur un projet de loi sur la langue, et c'est un projet
de loi important, et qui est tentaculaire, 200 quelques articles. Bon, on
comprend tout ça, mais, en même temps, l'avenir du français ne tient pas qu'à
cette loi-là. Il tient à tout ce qui va autour de ça, tout ce que le Québec va
faire de sa société au fur et à mesure qu'on a ce courage de faire du français
pas seulement la langue officielle et commune, mais une langue de travail. Vous
avez tellement raison, Mme la députée de Mercier, et le droit de travailler en
français, c'est fondamental.
Donc, pour
moi, ce qu'on s'apprête à faire, chers collègues... et, désolé, là, on était
rendus en pleine conversation, je ne
vous ai pas salués et remerciés, comme il est de mise de le faire dans ces débuts de séance d'étude article par
article, mais je suis très content d'être avec vous pour m'attaquer à ce
travail. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le député de Saint-Jean. Je reconnais maintenant M. le député de Chapleau.
M. Mathieu Lévesque
M. Lévesque (Chapleau) : Oui.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'en profite pour vous saluer, également
saluer le ministre, bien, l'équipe qui vous accompagne et également les collègues,
autant de l'opposition que de la banquette ministérielle. Vous dire que je
suis, moi aussi, dans le même état d'esprit que le collègue de Saint-Jean,
un état d'esprit du fameux «enfin» qu'il nous a mentionné. J'avais bien hâte de
pouvoir débuter cette étude détaillée, là, du projet de loi n° 96,
un projet de loi qui est tellement important pour l'avenir de la nation
québécoise.
Vous dire également que ça a pris du courage
pour le ministre, pour le gouvernement, de pouvoir déposer un tel projet de loi
qui, avouons-le, soulève les passions. Et on n'a pas eu... Le ministre n'a pas
eu... n'a pas hésité, justement, à prendre à bras-le-corps ce dossier-là, puis
c'est tout en son honneur.
On le sait, les gens qui sont venus en
commission, en consultation particulière, nous ont dit : Il y a un déclin
qui se produit actuellement avec la langue française, il y a un risque que le
peuple québécois se folklorise. La survie de la nation québécoise est en fait
en jeu, et d'où l'importance d'agir. Ce n'est pas... puis on l'a vu avec
l'exemple de Michael Rousseau, tout récemment, ce n'est pas l'anglais qui
est à risque. La seule vraie minorité au Québec, sur le territoire québécois
puis dans l'ensemble de l'Amérique du Nord, c'est la nation francophone, c'est
le français au Québec. C'est ce qui est à
risque actuellement. Bon, on le voit, on peut vivre en anglais seulement à
Montréal, l'exemple dont j'ai fait mention, du P.D.G. d'Air Canada, puis
ça se répercute ailleurs, donc dans le Grand Montréal, la région où j'ai le plaisir et le privilège de représenter,
en Outaouais également, beaucoup d'anglicisation, en Estrie également.
Et donc vous dire l'importance de légiférer en ces matières, c'est essentiel, à
vrai dire.
Et, dans le projet de loi, il y a également
d'autres mesures fort importantes, puis on l'a mentionné d'entrée de jeu, mais
je pense que c'est important de le dire, la première mouture de la loi, à
l'époque, elle a été... elle a passé sous le regard des tribunaux, puis, à la
fin, il y a eu plusieurs éléments qui ont été retirés, ou modifiés, ou amendés,
et d'où l'importance de mettre des dispositions de souveraineté parlementaire,
Mme la Présidente. Je pense que c'est essentiel de protéger l'ensemble... de
respecter la volonté des élus de la nation québécoise, de respecter, en fait, la
démocratie québécoise. C'est un peu ça, l'idée des dispositions de souveraineté
parlementaire. Et également pouvoir s'affirmer en tant que nation, avec une
langue, la langue commune, le français, dans la Constitution, je pense, c'est
essentiel. C'est un geste d'affirmation fort, qui... On ne le fait pas contre
personne, mais on le fait pour soi-même, pour s'affirmer, et ça m'apparaît
essentiel également.
Puis
d'ailleurs j'ai eu l'occasion, là, tout récemment, lors de l'adoption du
principe, à titre d'adjoint parlementaire du ministre... le ministre
m'avait fait confiance pour pouvoir, justement, bien exprimer la pensée du
gouvernement à cet effet, donc j'ai pu parler de ces
enjeux-là lors de l'adoption du principe. Je remercie d'ailleurs le ministre de
sa confiance, puis ça a vraiment été un plaisir pour moi de participer aux
échanges du p.l. n° 96 qui risquent d'être fort
intéressants. Donc, merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Merci, M. le député de Chapleau. J'ai le député de
Beauce-Nord.
M. Poulin :
Sud.
La Présidente (Mme
Thériault) : Sud. Désolée. Pourtant, je sais que c'est Sud, hein?
M. Poulin :
Oui, je sais que vous le savez.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme
Thériault) : Oui. À vous, M. le député.
M. Samuel Poulin
M. Poulin :
Merci, Mme la Présidente. Je vous salue de présider ces travaux. Je sais que
vous le ferez d'une main de maître parce que vous êtes une femme d'expérience.
Alors, très hâte de vous voir mener le tout. Je veux saluer le ministre,
évidemment, qui, je sais, entame cette étude article par article avec
énormément de passion et le regard tourné vers le futur, parce que ce que l'on
fait, on le fait évidemment pour les générations qui nous suivront. Il est papa
une deuxième fois depuis peu, et je sais à quel point ça l'habite de pouvoir
léguer une loi qui va faire en sorte que les jeunes, au Québec, puissent être
encore plus fiers de leur langue française et, à terme, évidemment, on le sait,
d'être encore plus fiers d'être Québécois.
Et
je sais, tout comme lui, que l'un des derniers rapports de l'OQLF, dans les
dernières années, qui démontrait que les jeunes avaient une indifférence
face à la survie du français, particulièrement sur l'île de Montréal, que ça
l'a particulièrement préoccupé, tout comme l'ensemble des membres de notre
gouvernement. Et on ne s'en rend pas toujours compte, mais il est presque
minuit moins une pour l'importance de rappeler à nos jeunes le fait français.
D'ailleurs, l'OQLF, qui
est sous la responsabilité du ministre, a lancé récemment une campagne très
importante auprès des jeunes sur l'importance d'écrire en français, de
communiquer en français. Et, des fois, on dit, bon, une campagne de promotion, les unes après les autres, mais c'était
une des rares fois dans l'histoire du Québec qu'on a ciblé
particulièrement les jeunes sur l'importance du fait de parler en français et
de communiquer en français. Et, à terme, ce
qu'on souhaite, c'est qu'ils puissent davantage l'utiliser dans leur vie
personnelle, au travail, et pas seulement, Mme la Présidente, on le
sait, sur l'île de Montréal, où il y a des enjeux importants, mais dans
l'ensemble des régions du Québec. Parce que
personne n'est à l'abri d'un recul du français, qu'on se trouve dans la
Capitale-Nationale, chez nous en Beauce ou dans d'autres régions du
Québec, parce que, justement, on peut prendre cette langue-là pour acquis,
alors qu'il ne faut pas le prendre pour acquis.
Et le projet de loi
qui est devant nous, Mme la Présidente, il est important. C'est une des plus
grandes réformes qui ne s'est jamais
faite pour l'avenir de la langue
française au Québec,
qui couvre différents volets, et il faut le faire, oui, évidemment, en
prenant en compte le présent mais également les générations futures. Alors,
merci à vous. J'ai très hâte de participer à cette étude.
La Présidente (Mme
Thériault) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Il n'y en a pas. Donc, est-ce qu'il y a des motions
préliminaires? Je ne crois pas non plus. D'accord.
Étude détaillée
Donc, sans plus
tarder, j'appelle l'article 1 du projet de loi.
Mme David :
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Bien, je pense qu'il faut, si je trouve mes papiers, demander une sorte d'étude
article par article. Attendez une seconde.
M.
Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je crois que la députée de Marguerite-Bourgeoys
veut demander une étude article par article, paragraphe par paragraphe.
Mme David :
C'est en plein ça, mais, vous voyez, comme c'est un gros projet de loi, on
finit par être un peu mêlés. Mais voilà,
c'est le bon moment pour vous dire très formellement, tel que prévu à l'article 245
et conformément à notre jurisprudence, pour cette étude détaillée, je
demande que les articles de ce projet de loi soient étudiés alinéa par alinéa
et paragraphe par paragraphe là où c'est applicable et à ce que chacun des
articles qu'on propose de modifier ou d'ajouter dans les lois existantes soit
étudié séparément.
La
Présidente (Mme Thériault) : C'est conforme au règlement. Donc, ce
sera fait.
Donc, sans plus
tarder, M. le ministre, je vais vous demander d'appeler l'article n° 1 du projet de loi. La parole est à vous. J'imagine que
vous allez nous faire la lecture de l'article, et vous introduisez les
amendements au fur et à mesure?
M.
Jolin-Barrette : Certainement, Mme la Présidente. Alors, article
1 :
Le préambule de la
Charte de la langue française est modifié :
1° par l'insertion,
après le deuxième alinéa, du suivant :
«L'Assemblée
nationale reconnaît que le français est la langue commune de la nation
québécoise et qu'il est déterminant que tous soient sensibilisés à l'importance
de cette langue et de la culture québécoise comme liants de la société. Elle
est donc résolue à ce que chacun ait accès à l'apprentissage de cette langue
ainsi qu'à faire du français la langue de l'intégration.»;
2° par l'insertion,
après le quatrième alinéa, du suivant :
«Seul État de langue
française en Amérique du Nord, le Québec partage une longue histoire avec les
communautés francophones et acadienne du Canada. Il en découle une
responsabilité particulière pour le Québec, qui entend jouer un rôle de premier
plan au sein de la francophonie.»;
3° par l'ajout, à la
fin, de l'alinéa suivant :
«En vertu de la
souveraineté parlementaire, il revient au Parlement du Québec de confirmer le
statut du français comme langue officielle
et langue commune ainsi que de consacrer la prépondérance de ce statut dans
l'ordre juridique québécois, tout en assurant un équilibre entre les droits
collectifs de la nation québécoise et les droits et libertés de la personne.»
Commentaire. L'article 1
du projet de loi modifie le préambule de la Charte de la langue française.
L'article 1 du projet de loi modifie d'abord
le préambule de la Charte de la
langue française pour y introduire
un nouveau troisième alinéa. Ce nouvel alinéa établit que l'Assemblée nationale
reconnaît que le français est la langue commune de la nation québécoise.
Il rappelle également
qu'il est déterminant que tous les Québécois et les Québécoises soient
sensibilisés à l'importance du français
et de la culture québécoise en tant qu'éléments essentiels pour assurer la
cohésion de la société.
Enfin, il souligne
que l'Assemblée nationale est résolue à faire en sorte que tous les Québécoises
et tous les... pardon, tous les Québécois et les Québécoises aient accès à des
mesures qui leur permettent d'apprendre cette langue et que le français
devienne la langue de l'intégration au sein de la société.
L'article 1 du projet
de loi modifie ensuite le préambule de la Charte de la langue française pour y
introduire un nouveau sixième alinéa. Ce nouvel alinéa souligne que le Québec
se démarque en tant que seul État de langue française en Amérique du Nord.
Il rappelle également
que le Québec partage une longue histoire avec les communautés francophones et
acadiennes du reste du pays.
Enfin, il affirme que
ces particularités font en sorte que le Québec a la responsabilité de jouer un
rôle de premier plan au sein de la Francophonie.
Finalement,
l'article 1 du projet de loi introduit un nouveau huitième alinéa dans le
préambule de la Charte de la langue française. Ce nouvel alinéa souligne que le
principe de la souveraineté parlementaire permet sans équivoque au Parlement du
Québec de confirmer le statut du français comme langue officielle et langue
commune et de consacrer la prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique
québécois.
Il souligne également
que le Parlement du Québec doit exercer ce pouvoir en assurant un équilibre entre
les droits collectifs de la nation québécoise et les droits et libertés de la
personne.
La
Présidente (Mme Thériault) :
Est-ce que vous nous faites lecture du texte proposé avec vos modifications?
M.
Jolin-Barrette : Non. Ça, par contre...
La Présidente (Mme
Thériault) : Vous ne le faites pas? Parfait. Pas de problème.
Questions? Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Vous me le dites, hein, si je ne suis pas dans les formes puis je parle trop,
trop vite, pas au bon moment, mais je pense que c'est à moi à parler. Alors, je
vais vous informer que nous avons trois amendements à déposer dans cet
article 1 et je suis pas mal sûre que le ministre va être d'accord avec le
premier. C'est une erreur d'inattention, je pense.
Mais je ne sais pas si je dois le dire maintenant, si je dois déposer, si je dois discuter, si
c'est...
La Présidente (Mme
Thériault) : Si vous avez un amendement à proposer, on va vous
demander de le faire parvenir au secrétariat de la commission. Nous allons
suspendre...
Mme David :
On y va un par un, hein, c'est ça?
La Présidente (Mme
Thériault) : Oui, parce que... pour que vous en fassiez la lecture,
j'aimerais que tous les députés puissent avoir copie de l'amendement en main.
Oui, M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Excusez-moi. Par souci d'efficacité, Mme la
Présidente, si je peux... puisqu'il s'agit d'un volumineux projet de loi, ce
que je pourrais vous suggérer pour le fonctionnement de la commission, c'est,
si jamais les parlementaires ont les amendements et qu'ils sont prêts, ce qu'on
pourrait faire, dans un souci d'efficacité, c'est qu'avec nos différentes
équipes on puisse les faire parvenir à Mme la secrétaire de la commission, par
la voie d'Internet, qu'elle puisse le déposer sur Greffier, et qu'au moment où
tout le volet administratif est fait on puisse en faire la lecture et on puisse
cheminer, pour éviter de suspendre fréquemment la commission, si possible.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est une proposition qui est tout à fait louable. Évidemment, moi, je me range
au consentement de tous les collègues. J'imagine que, par proposition
d'amendement, pour les amendements qui sont prêts, ça inclut les amendements du
ministre aussi, j'imagine, ou si ça va juste du côté des parlementaires?
M. Jolin-Barrette : Non, non, de
toutes les oppositions. Ce que je dis, là, supposons, là, que...
La Présidente (Mme Thériault) : Que
des oppositions.
M. Jolin-Barrette : Pardon?
La Présidente
(Mme Thériault) : De déposer
les amendements que des oppositions, pour ceux qui sont prêts.
M. Jolin-Barrette : Non, non, non,
ce n'est pas ça que je dis.
La Présidente (Mme Thériault) : Non?
O.K.
M. Jolin-Barrette : Je dis, quand
nous avons une discussion, là, comme celle-ci, on ouvre l'article 1, la députée
de Marguerite-Bourgeoys nous dit : Je vais avoir trois amendements,
mais, ce que je veux dire, avant même qu'ils soient, supposons, déposés
publiquement aux parlementaires, tout ça, si, de façon informelle, on peut
envoyer le tout au secrétariat pour qu'on
n'ait pas à suspendre fréquemment à chaque fois que... Dans le fond, si on peut travailler en amont avec le secrétariat pour les
transférer déjà, c'est ce que je dis, pas de transférer tous les amendements tout
de suite, mais, quand on sait qu'on s'en vient avec un amendement, plutôt que
de suspendre la commission durant plusieurs minutes, si ça peut se faire...
La Présidente (Mme Thériault) : Je
comprends qu'il peut y avoir des amendements prêts, donc qui sont inspirés
souvent des discussions.
M. Jolin-Barrette : Ah! tout à fait.
La Présidente (Mme Thériault) : Mais
je vais quand même reconnaître les droits de parole des collègues avant de
statuer sur votre demande, M. le ministre. Mme la députée de Mercier.
Mme
Ghazal : Bien, en fait... parce que
moi... tu sais, le ministre a tout un ministère qui travaille avec
lui, beaucoup, beaucoup
de gens, beaucoup de personnel. Moi, c'était souvent le député de
Jonquière qui disait ça, mon ministère est ici, puis c'est une personne qui a beaucoup, beaucoup
de choses. Donc, je veux dire, même si, des fois, on sait qu'on va faire un amendement,
on n'est pas sûrs, puis, des fois, c'est la discussion, puis on ne sait pas
trop où le placer.
Mais moi, si je comprends bien, pour cet article-là,
le ministre n'a pas d'amendement, lui, à déposer. Moi, j'aurais aimé ça, qu'il
dépose tous ses amendements pour que nous, si on a... si, par exemple, mon ministère
d'une personne travaille très, très, très fort à faire des amendements, finalement,
son amendement, il ne marche pas parce que le ministre modifie ou amène des amendements.
Ça fait que, là, il faut tout retravailler.
Donc, si on veut vraiment être dans un souci
d'efficacité, et j'en suis, moi aussi, parce que j'ai aussi, moi, d'autres projets
de loi comme le ministre, bien, ça serait beaucoup, beaucoup plus profitable à
l'ensemble des membres de la commission de recevoir les amendements du ministre
en premier. Ça, ça va nous faciliter encore plus, nous, notre travail, au lieu
de modifier des articles qui, on ne le sait même pas, après, s'ils vont être
modifiés de toute façon par le ministre. Je fais cette proposition-là
d'efficacité en complément à celle du ministre.
La Présidente (Mme Thériault) :
J'entends la députée de Marguerite-Bourgeoys avant?
M. Jolin-Barrette : Bien,
j'accueille avec ouverture la proposition de la députée de Mercier et j'en
aurai un pour ajouter «sur le territoire du Québec» dans le préambule.
La Présidente (Mme Thériault) : Dans
le préambule. Donc, ça veut dire à l'article 1.
M. Jolin-Barrette : Donc, on va
pouvoir l'envoyer au secrétariat.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'accord. Est-ce que, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys...
• (17 heures) •
Mme
David : Bien, moi, j'en suis, efficacité, etc., là. On ne va pas trop
s'enfarger dans les fleurs du tapis. Je ne suis pas une spécialiste des
procédures parlementaires, mais, si le ministre a des amendements, effectivement,
je suis tout à fait d'accord avec ma collègue... Et puis moi, il y en a...
comme je dis, là, je ne pense pas que ça va poser problème. Alors, je n'ai pas
d'objection à déposer. De toute façon, on vote article par article, j'ai
compris, bon.
Alors, moi, je suis
prête à déposer, si... à moins qu'il y ait des choses que je ne vois pas, mais
pour l'instant... mais à condition que le ministre soit un peu dans la même...
La Présidente (Mme
Thériault) : O.K. Là, j'entends, M. le ministre, que vous avez, de
toute façon, un amendement au premier article. C'est ça?
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors...
La
Présidente (Mme Thériault) : En partant. Donc, plutôt que de laisser
la députée de Marguerite-Bourgeoys déposer son amendement, je vais vous
inviter à déposer le vôtre parce que ça... beaucoup plus rapidement quand on va
avec les amendements du ministre en premier.
Je vous demanderais
peut-être aussi, par souci d'efficacité, puis c'est à votre choix, là... si
nous, on sait là où il y a des amendements, bien, on va savoir comment gérer,
puis je pense que les députés aussi pourraient dire : Bien là, il y a un amendement. Donc, ils vont vous
dire : Bien, si on est d'accord avec votre amendement, on ne sortira pas
le nôtre, puis si... C'est parce que, souvent, c'est là que la discussion va se
faire. Je pense que ça serait peut-être logique de le faire comme ça. Si on peut avoir une indication à quel article
vous entendez peut-être faire des amendements, quitte à ce que vous le
fassiez section par section même, moi, je n'ai pas de problème. Vous n'êtes pas
obligé de faire tout le projet de loi. Je comprends qu'on rédige souvent...
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, pour informer les parlementaires, ce
que je vous proposerais, c'est d'y aller
dans l'ordre du projet de loi, parce que, comme je l'ai expliqué en briefing
technique, Mme la Présidente, c'est que le projet de loi, tel qu'il est construit, le projet de loi n° 96,
dans le fond, il suit, vu que c'est une loi modificatrice, il suit la
structure de la Charte de la langue française, de la loi 101. Donc, puisqu'on
commence au préambule puis on vient modifier la Charte de la langue française
tout le long, c'est logique, pour le 96, de l'étudier un article après l'autre.
La
Présidente (Mme Thériault) : Pas de problème pour l'ordre d'articles.
Au niveau des amendements, à ce moment-là, je vais suspendre quelques
instants. Je vais vous demander d'envoyer votre amendement au secrétariat.
M.
Jolin-Barrette : C'est déjà dans les Internets, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : C'est déjà fait. Donc, à ce moment-là, les députés ont
déjà copie, mais moi, je n'en ai pas. Donc, ça me prend... Pardon?
Une voix :
...
La Présidente (Mme
Thériault) : Ce n'est pas rentré encore, M. le ministre. Donc, on va suspendre
quelques instants. Et, à ce moment-là, je vous invite, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys également, peut-être même à avoir une discussion...
Une voix :
...
La
Présidente (Mme Thériault) : C'est dans les internautes... dans les
Internets, dans le nuage. Bien là, de toute façon, je vais demander de
suspendre parce que je dois prendre connaissance de l'amendement du ministre,
voir... à savoir s'il est recevable, dans un premier temps. Et évidemment,
bien, vous savez que vous pouvez toujours vous parler même quand les micros et
les caméras ne sont pas ouverts non plus. Donc, je vous invite à le faire.
Nous suspendons
quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 03)
(Reprise à 17 h 15)
La Présidente (Mme
Thériault) : Donc, nous allons reprendre les travaux de la commission.
Il
y a... Juste pour le bon fonctionnement, que tout le monde comprenne, c'est
qu'à chaque fois qu'il va y avoir des
amendements ils seront déposés, sur notre site Greffier,
dans Amendements à venir, et celui qu'on étudiera sera placé dans Amendement en cours. Donc,
pour éviter les suspensions à chaque fois, si je reçois à l'avance les
amendements, donc qui était la demande du ministre, à ce moment-là, ça me
permet de ne pas suspendre les travaux, parce que j'ai copie des propositions
d'amendement devant moi, donc je peux statuer de leur recevabilité
immédiatement.
Donc, pour l'article n° 1, dans l'ordre, le premier amendement sera l'amendement
du ministre. La députée de Marguerite-Bourgeoys avait annoncé trois amendements,
et la députée de Mercier a également un amendement. Donc, nous allons débuter avec l'amendement du
ministre à l'article n° 1.
Donc, M. le ministre, pour
la lecture de votre amendement et les commentaires.
M. Jolin-Barrette : Avec votre
permission, Mme la Présidente. À l'article 1 du projet de loi, insérer,
dans le dernier alinéa du préambule de la
Charte de la langue
française que propose le paragraphe 3° et après «langue commune», «sur le
territoire du Québec».
Donc, cet amendement modifie le préambule de la
Charte de la langue française afin de réaffirmer que la charte est fondée sur
le principe de la territorialité linguistique.
Donc, au troisième paragraphe, par l'ajout, à la
fin, de l'alinéa suivant, ça se lirait ainsi :
«En vertu de la souveraineté parlementaire, il
revient au Parlement du
Québec de confirmer le statut du français comme langue
officielle et langue commune sur le territoire du Québec ainsi que de consacrer
la prépondérance de ce statut dans l'ordre juridique québécois, tout en
assurant un équilibre entre les droits collectifs de la nation québécoise et
les droits et libertés de la personne.»
Donc, l'amendement vise à rattacher un caractère
territorial et de le nommer très clairement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors, c'est du grand Pr
Rousseau.
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait,
vous savez, on écoute les gens qui viennent en commission parlementaire, et
notamment, le Pr Rousseau nous a indiqué qu'il serait de bon aloi de rattacher
ça au caractère territorial de l'État québécois. Mais ce qui est fort important
là-dedans, et il faut le dire... et notamment, tout à l'heure, j'entendais le député
de Matane-Matapédia nous dire : Écoutez, comment est-ce qu'on va faire
pour dire que la loi 101, la Charte de
la langue française, s'applique aux entreprises de juridiction fédérale? Bien,
c'est justement en ayant une approche territoriale qui va faire en sorte
que les lois québécoises s'appliquent en matière... bien, sur l'ensemble du
territoire québécois. Et on peut faire le parallèle aussi avec les lois
environnementales québécoises. On souhaite qu'au Québec ça soit la Loi sur la
qualité de l'environnement qui s'applique sur l'ensemble du territoire
québécois.
Alors, je pense que c'est important de le
spécifier que, sur l'ensemble du territoire québécois, c'est la Charte de la
langue française qui s'applique.
Mme David : Si je peux continuer...
Je n'avais pas prévu de parler de l'approche territoriale du Pr Rousseau, mais,
comme je l'ai lu attentivement, dans tous ses écrits, je savais... et il le
disait très, très bien dans un entretien avec Mathieu Bock-Côté, très long
entretien sur le Web, que M. Bock-Côté aime beaucoup faire... il en a fait
un avec Guillaume Rousseau, qui nous avertissait, et je me demandais tellement,
il nous avertissait qu'il avait... Pourtant, il est le maître d'oeuvre avec son
ex-doctorant devenu docteur, Me Poirier, Dr Poirier. Donc, on est dans la
filière, clairement, clairement de cette théorie à laquelle tient beaucoup,
beaucoup le Pr Rousseau. Je ne suis pas sûre
d'avoir très bien compris l'importance incroyable de cette approche
territoriale, mais je comprends que, quand le Pr Rousseau disait : J'aurai
de nombreux amendements, il était presque aussi déçu, on dirait, du projet de
loi que peut l'être le député de Matane-Matapédia, à l'entendre. Mais pourtant
il était l'architecte de la loi n° 21 aussi et, là, l'architecte plus dans
l'ombre peut-être, mais très clairement, de cette loi n° 96. Alors, c'est
le fun parce que ça nous permet de voir venir comme nous permettait de voir
venir le livre de M. Poirier.
Donc, on va voir du territoire pas mal partout,
Mme la Présidente, pour être bien sûr qu'on est sur le territoire québécois, le
territoire québécois, le territoire québécois. Je n'ai pas de problème
fondamental, mais je trouve qu'on met ceinture, bretelle, cadenas et tout ce
qu'il faut. Mais je saurai vraiment... je vais aller relire comme il faut tous ses écrits et je vais prévoir d'avance quels
seront les amendements du ministre pour faire un peu plaisir au Pr
Rousseau.
La
Présidente (Mme Thériault) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Mme la députée de Mercier.
• (17 h 20) •
Mme Ghazal : Juste pour
comprendre, parce que, souvent, ce qui est intéressant, quand on l'a dans le
cahier, c'est qu'on a toute la
justification. Là, on a l'amendement. La justification, le ministre nous l'a
donnée sommairement, mais elle n'est
pas écrite. Puis là je ne m'en rappelle pas par coeur de tout ce que
M. Rousseau a dit comme ma collègue.
Donc, si
possible, juste d'expliquer... Ça, ça a été ajouté pour permettre, par exemple,
de dire au gouvernement fédéral, l'article qui dit que les entreprises à
charte fédérale qui sont sur le territoire du Québec, bien, la charte, elles
sont soumises à la Charte de la langue française. Est-ce que c'est ça que ça
permet en le mettant de façon magique, faire en sorte que le fédéral va
dire : Bien oui, toutes les entreprises à charte fédérale... Est-ce que
c'est que ça permet ou c'est une moindre portée que ça? J'essaie de comprendre
vraiment qu'est-ce que ça donne.
M. Jolin-Barrette : En fait,
pour les entreprises de juridiction fédérale qui vont être assujetties à la
charte, on va voir l'article qui est un peu
plus loin dans le projet de loi où on vient assujettir nommément toutes les
entreprises qui sont sur le territoire québécois. Donc, l'article, pour faire
en sorte d'assujettir les entreprises, il va être plus loin.
Pourquoi est-ce que, dans le préambule, c'est
important d'indiquer l'approche territoriale? C'est pour bien nommer les
choses. Depuis 1977, la Charte de la langue française, elle est basée sur une
approche territoriale, du territoire qui est québécois, qui est uni et
indivisible. Donc, c'était important de venir souligner le fait que, dans le
cadre d'une loi linguistique comme la Charte de la langue française, bien, il
n'y a pas de partitionnisme linguistique au sein du Québec, il n'y a pas de
partitionnisme législatif non plus au sein de l'État québécois. Le Québec est
un tout unique et indivisible. Et on vient, par ce fait
même, en spécifiant l'approche territoriale, qui est une approche,
effectivement, qui a cours depuis 1977, bien, on vient nommer la chose
directement dans le préambule pour dire : sur le territoire québécois, la
langue officielle et commune, c'est le français.
Mme Ghazal : Et ça, ça ne touche
pas... Par exemple, si jamais votre collègue le ministre responsable des
Affaires autochtones décide de faire une loi pour protéger, admettons, là, les
langues autochtones, ça, ici, ça ne vient pas jouer là-dessus? Est-ce que ça a
un impact, le fait de dire c'est partout sur le territoire? Si, par exemple,
une communauté autochtone veut, je ne sais pas, faire quelque chose pour
valoriser sa langue dans une réserve ou sur un territoire où elle a... pas
juridiction, mais dont elle est responsable, est-ce que ça, ça vient jouer
là-dessus ou ça ne l'affecte nullement?
M. Jolin-Barrette : Ça ne l'affecte
pas. C'est le statut de la langue française qui est visé, notamment, puis dire clairement que «sur l'ensemble du territoire
québécois»... Et, sur la question des langues autochtones, la promotion
et leur valorisation aussi, il y a des outils législatifs qui pourraient être
mis en place par mon collègue le ministre des Affaires autochtones, et ça
n'entrerait pas en contradiction avec ce que nous faisons maintenant.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va? D'autres...
Mme Ghazal : Merci. Je n'ai pas
d'autre question.
La Présidente (Mme Thériault) : Pas
d'autres questions? Parfait. Donc, on est prêts à mettre aux voix l'amendement
du ministre.
Mme David : O.K., ça, c'est
seulement cet amendement-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est un vote... oui, juste l'amendement du ministre pour commencer. Donc, on y
va par vote... C'est des votes par appel nominal, hein, Mme la secrétaire?
M. Jolin-Barrette : ...Mme la
Présidente, quand ce n'est pas demandé, on peut voter...
La Présidente (Mme Thériault) : Non,
on vote?
M. Jolin-Barrette : Oui.
La Présidente (Mme Thériault) : O.K.
Parfait. Oui. Est-ce que l'amendement du ministre est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Parfait. Donc, on va passer à l'amendement qui a été déposé par la
députée de Marguerite-Bourgeoys. Oui, vous allez sur lequel de vos amendements,
Mme la députée?
Mme David : C'est le... bien, moi,
j'appelle ça le premier, mais je ne sais pas comment vous le dire, là. Il
concerne...
La Présidente (Mme Thériault) :
...le préambule, là...
Mme David : C'est celui où il est
marqué en gras «Premières nations et Inuit».
La Présidente (Mme Thériault) :
«Premières nations et Inuit», c'est le premier de vos amendements, oui.
Allez-y, vous pouvez nous en faire la lecture. On va le transférer...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Thériault) : Bon,
sauf qu'on m'a dit qu'il y a un petit problème au niveau de la forme, qu'on est
en train de le réécrire, celui-là. Donc, c'est ce qu'on vient de m'indiquer,
Mme la députée.
Mme David : ...qui a vu un problème?
La Présidente (Mme Thériault) : On a
indiqué à la secrétaire de la commission, donc j'imagine que c'est probablement
avec les gens qui sont en arrière de vous, là. Je vois qu'il manque quelqu'un.
Je vais suspendre quelques instants, juste le
temps de mettre au clair. Je m'excuse. On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
(Reprise
à 17 h 30)
La Présidente (Mme Thériault) : Nous poursuivons nos travaux. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys,
je vais vous demander de nous lire votre amendement, s'il vous plaît.
Mme
David : Oui, Mme la Présidente. Article 1 : L'article 1 du projet de loi est modifié par l'ajout du paragraphe suivant :
4° par le
remplacement, en son quatrième alinéa, des mots «Amérindiens et aux Inuits du»
par les mots «Premières Nations et aux Inuit au».
Commentaire. Le
préambule de la Charte de la langue française, tel qu'amendé, se lirait
ainsi... Ainsi, c'est ainsi, j'imagine, ce que je viens de lire.
La Présidente (Mme
Thériault) : Donc, ça donnerait : «L'Assemblée nationale
reconnaît...»
Mme David :
Ah oui! Excusez. Je n'avais pas descendu l'écran.
«L'Assemblée
nationale reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit au Québec, descendants
des premiers habitants du pays, le droit qu'ils ont de maintenir et de
développer leur langue et culture d'origine», Mme la Présidente. Alors...
La Présidente (Mme
Thériault) : Merci. Donc, questions, commentaires?
Mme David :
C'est vrai que c'est compliqué, parce qu'on est allés retrouver quelque chose
qui était mal... qui était formulé à la façon 1977. On parlait d'Amérindiens. Maintenant,
on ne parle plus d'Amérindiens, on parle de Premières Nations. C'est tout
simplement ça.
Et là se pose la question
de l'orthographe du mot «Inuit», et nous étions venus à la conclusion, avec nos
recherches, mon collègue
le député de D'Arcy-McGee pense la même chose, effectivement, qu'il ne devrait pas y avoir de s. La Protectrice du citoyen a
dit, en se fiant à la Charte de la langue française actuelle et à l'Office
québécois de la langue française, il n'y a pas de s. Mais, en même temps, il y
a, j'ai l'impression, d'autres propositions.
Alors, écoutez, je ne
suis pas une linguiste, je ne suis pas une spécialiste du singulier et du
pluriel pour les nations autochtones.
Alors, mon collègue apporte un argument valable, «les communautés
francophones et acadienne»,
«acadienne» se met toujours au singulier. Alors là, écoutez, je ne pense pas
qu'on puisse transformer en débat, ici, ça prend-tu un s ou pas de s. Je vais
laisser peut-être le ministre, avec son énorme équipe de plusieurs, plus qu'un,
parce que, nous aussi, notre équipe est un peu réduite, de statuer sur cette
question du s.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Alors, j'accueille favorablement l'amendement
qui est proposé par la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Sur la question de la
rédaction, à savoir si ça prend un s ou pas de s, dans la Charte de la langue
française, le terme n'avait pas de s. Par contre, on me dit que la pratique a
changé, et, selon le Grand dictionnaire terminologique de l'OQLF, on dit : «Pour une meilleure
intégration au système linguistique du français, l'emprunt "Inuit"
varie en genre et en nombre», donc
varie en genre et en nombre, et... attendez, «qui tend...», bon, «cette règle
est conforme à l'usage moderne du français, qui tend à abandonner, pour
les mots empruntés, les oppositions singulier/pluriel qui existent dans la
langue source.» Et la présidente de l'OQLF nous dit qu'on devrait mettre un «s»
également.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le député de D'Arcy-McGee, si vous avez terminé votre
intervention, M. le ministre. Oui, M. le député, allez-y.
M. Birnbaum :
Si je peux juste nous inviter à la prudence, parce que, malgré les
13 villages, la communauté inuite
s'identifie comme une nation. Il y a un parallèle, en quelque part, comme je dis, avec la communauté
acadienne, où le «s» n'apparaît pas. Alors, c'est intéressant que l'amendement
est accueilli. Et, si on peut inviter à la grande prudence de toute vérification,
parce qu'ils se déclarent comme seule nation.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Voyez-vous, ce qu'on va faire, on va voter
l'amendement tel qu'il est proposé par la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Puis, puisque j'imagine que ça ne se termine pas ce soir, l'étude du projet de
loi, ça me laissera le temps de faire toutes les vérifications. Donc, votons-le
comme ça, puis, si jamais ça prend un «s», bien, on reviendra avec des
précisions.
Mme David :
...j'accueille très favorablement et j'encourage à la très grande prudence et
au respect de la volonté des peuples en question de savoir s'ils mettraient,
eux, un «s» ou pas de «s», parce que ça...
C'est un projet de
loi, c'est un préambule. Ça a l'air petit comme enjeu, mais disons que ça
commencerait mal si, collectivement, nous faisions une erreur qui pourrait
quand même indisposer nos confrères et consoeurs inuits. Alors, je pense qu'il
faut faire très, très attention.
Alors, merci, M. le
ministre, d'aller prendre tous les moyens nécessaires pour bien vérifier auprès
des communautés. Vous avez un collègue aux Affaires autochtones, etc., donc on
pourra être rassurés.
La
Présidente (Mme Thériault) : J'ai la députée de Mercier. Je crois que
vous voulez faire une intervention, Mme la députée?
Mme Ghazal : Bien, en fait, oui.
Bien, vous allez le voir, là, il est en attente, là, mon amendement, je le déposerai quand ça sera le temps, qui va changer
ce paragraphe. Et d'ailleurs, ça me fait penser qu'il va falloir
suspendre pour le changer... en tout cas, on est au début, là, on est encore
rouillés, mais on va s'habituer.
Moi aussi, je veux réitérer que c'est très, très
important qu'on l'écrive comme il faut. Puis j'avais déjà... j'étais prête à
faire des amendements partout, puis je vois que je ne suis pas la seule, et je
suis contente de voir que je ne suis pas la seule à l'avoir vu.
Je regrette, par contre, que le gouvernement,
qui a travaillé sur le projet de loi, qui a changé toute la loi, qui l'a étudié
de fond en comble, n'ait pas profité de l'occasion pour le changer. Et, je veux
dire, c'est tellement un changement de base
de dire : Bien, on va utiliser la terminologie qui est utilisée
aujourd'hui pour les Premières Nations et les Inuits. Donc, je ne comprends pas pourquoi ça n'a pas été fait. Je
vais me dire que ce n'est pas fait par exprès, c'est juste parce qu'il
avait d'autres priorités. Ce n'est pas la question des Premières Nations et des
Inuits qui était dans l'esprit du gouvernement vu qu'ils se sont... Ce que j'ai
compris du ministre, c'est qu'il ne veut pas que, dans le projet de loi, on traite de cet aspect-là, même s'il a quand même eu l'ouverture d'inviter des représentants des Premières Nations et des Inuits.
Donc, je comprends qu'il va y avoir une
recherche pour s'assurer que ce soit écrit comme il faut et je comprends qu'il
va y avoir un dépôt d'amendements partout, partout, partout, dans la Charte de
la langue française, où on dit «Amérindiens et Inuits du Québec». Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Bien, je ne veux pas
m'attarder trop, mais ça donne une idée de l'importance de l'étude article par
article, de l'importance d'un regard extérieur. Ce n'est pas quelque chose
d'énorme, mais, de toute évidence, ça a échappé aux yeux de lynx du
gouvernement ou de l'équipe ministérielle. Ce n'est pas... On n'est pas dans le
reproche ici, mais on est dans... Ça donne quelque chose, l'étude détaillée. Ça
donne qu'on a un meilleur projet de loi.
Alors, je voulais juste profiter de l'occasion pour redire ce que j'ai dit en
propos introductifs, à quel point c'est important, cette étude
détaillée. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. D'autres interventions? Je n'en vois pas. Donc, à ce moment-là, nous
allons mettre... on procède pour la mise aux voix. Est-ce que l'amendement est
adopté?
Des voix : Adopté.
La
Présidente (Mme Thériault) : Adopté. Parfait. Donc, on va passer à
votre deuxième amendement, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme
David : Bien oui, déjà. Alors, mon deuxième amendement, je vais le
lire. Là, ça parle de l'apprentissage. Est-ce
que vous voulez savoir quoi lire, vers où je m'en vais, Mme la Présidente, ou
vous le savez? C'est celle où il y a...
La Présidente (Mme Thériault) :
...les choix?
Mme David : Non. C'est celle où il y
a le mot «perfectionnement» en grand, dans l'avant-dernière ligne.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. C'est beau.
Mme David : Alors, l'article 1 du
projet de loi est modifié par l'insertion, dans le deuxième alinéa introduit
par le premier paragraphe, après le mot «apprentissage», des mots «et au perfectionnement».
Commentaire. Le préambule de la Charte de la
langue française, tel qu'amendé, se lirait ainsi :
«L'Assemblée nationale reconnaît que le français
est la langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant que tous
soient sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture québécoise
comme liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun ait accès à
l'apprentissage et au perfectionnement de cette langue ainsi qu'à faire du
français la langue de l'intégration.»
Est-ce que vous voulez que je commente le commentaire?
La Présidente (Mme Thériault) :
Allez-y, oui.
Mme David : Alors, dans le projet de
loi — on
y viendra beaucoup plus loin, mais pas si loin que ça — dans
les ordres professionnels, il est bien dit, clairement, et on en discutera,
mais que les professionnels doivent non seulement avoir
une maîtrise de la langue française au moment d'entrer dans leur ordre
professionnel, c'est là depuis très longtemps, et les professionnels suivent des
cours de français, surtout quand ils ont étudié dans une langue autre que le
français, mais on demande aussi, dans le projet de loi, de maintenir, tout au
long de la carrière, le français pour être sûr qu'ils ne restent pas à un
niveau qui pourrait être, s'ils n'ont pas souvent l'occasion de le pratiquer,
un niveau assez de base qui ne leur permettrait peut-être pas d'être à la fine
pointe de la maîtrise du français.
Dans cet esprit-là, ce qu'on pense, c'est que le
mot «apprentissage», dans notre Québec d'aujourd'hui, avec une très, très
grande attraction pour des langues autres que le français et particulièrement
pour l'anglais, je pense... et nous l'avons dit beaucoup dans notre plan
d'action, les 27 propositions qu'on a déposées, il était très, très important
de non seulement parler français, mais de bien maîtriser la langue française.
C'est dans cet esprit-là que nous devons parler,
oui, de l'apprentissage, mais pas seulement l'apprentissage fonctionnel, de
pouvoir échanger deux, trois phrases ou des phrases pour accueillir des gens
dans les commerces, ou tout ça, mais de
pouvoir perfectionner ce français-là, qui montrerait leur réelle motivation, de
tous et chacun, de se dire...
Et c'est valable, Mme la Présidente, pas
seulement pour des anglophones ou des allophones, mais ce que je pourrais oser dire pour les francophones aussi, de
perfectionner, tout au long de la vie, la qualité de la langue
française. Ça, c'est autant à l'écrit qu'à
l'oral. Alors, c'est ce qui nous a inspirés pour ajouter «au perfectionnement
de cette langue».
• (17 h 40) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Commentaires? M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Je
comprends l'objectif de la députée de Marguerite-Bourgeoys avec son amendement. Cependant, au niveau du libellé, j'aurais
peut-être une suggestion à faire, parce que moi, je serais plus à l'aise
avec «que chacun ait accès à
l'apprentissage de cette langue et à en parfaire la connaissance et la
maîtrise», plutôt que seulement «perfectionnement». Parce que c'est
comme si «perfectionnement» était rattaché à la langue, tandis que le souhait,
je crois, que la députée de Marguerite-Bourgeoys... c'est de viser l'individu
qui, lui, vise à avoir un perfectionnement, donc à en parfaire la connaissance
et la maîtrise. Donc, si vous le souhaitez, on pourrait modifier votre
amendement pour aller en ce sens-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, à ce moment-là, on proposerait un sous-amendement qui viendrait amender?
Non? On retire l'amendement de la députée et on vous...
Mme David : Oui, je suis d'accord
avec sa suggestion.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en
fait, ce qu'on va faire, Mme la Présidente, si la députée de Marguerite-Bourgeoys
retire cet amendement-là... puis elle pourrait redéposer l'amendement que je
lui suggère et qu'on s'entend.
La Présidente (Mme Thériault) : Que
vous lui suggérez bien gentiment. Donc, ça vous va, Mme la députée de
Marguerite-Bourgeoys?
Mme David : Oui, Mme la Présidente.
Ça me va.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre, ça lui va?
M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, en
attendant que ça soit écrit, Mme la Présidente, on pourrait peut-être faire
l'autre amendement.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
on peut passer au troisième amendement. Donc, à ce moment... Oui? Ça me prend
un consentement pour retirer l'amendement qui avait été déposé.
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Thériault) :
Consentement. Parfait. Donc, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, le temps
que les légistes du ministre réécrivent votre deuxième amendement, vous nous
présentez votre troisième amendement, qui, cette fois-ci, c'est le mot «choix»
qui est en gras.
Mme
David : Voilà, Mme la
Présidente. Alors, l'article 1 du projet de loi est modifié par le
remplacement, dans l'alinéa introduit par le troisième paragraphe,
après les mots «équilibre entre», du mot «droits» par le mot «choix».
Le préambule de la Charte de la langue française,
tel qu'amendé, se lirait comme suit :
«En vertu de la souveraineté parlementaire, il
revient au Parlement du Québec de confirmer le statut du français comme langue
officielle et langue commune ainsi que de consacrer la prépondérance de ce
statut dans l'ordre juridique québécois, tout en assurant un équilibre entre
les choix collectifs de la nation québécoise et les droits et libertés de la
personne.»
Mme la Présidente, là, on est dans du plus
costaud comme amendement. Et là aussi, comme le ministre disait qu'il
s'inspirait des audiences publiques, des consultations particulières, nous
aussi, on s'inspire des consultations particulières et des mémoires que nous
avons reçus, alors, en particulier, évidemment, le professeur
Benoît Pelletier, qui nous a bien dit que le mot «choix» serait préférable
au mot «droits».
Là,
je vais rentrer dans un petit peu de revue de littérature pour expliquer ça. La
notion de droit collectif est plutôt
associée à un droit exercé par un groupe minoritaire, pas majoritaire,
minoritaire. Par exemple, le terme «droits collectifs» est souvent
associé aux droits des peuples des Premières Nations, justement, ou aux droits
des travailleurs de s'associer. Le terme «choix collectifs» réfère plutôt au
choix du législateur québécois d'adopter des lois dans le but de préserver le visage francophone de la
province, même si parfois ces choix interfèrent avec certains droits
individuels, comme la liberté d'expression commerciale, par exemple.
Jocelyn Maclure,
dont on se souviendra au projet de loi n° 21, professeur de philosophie à
l'Université Laval, mentionnait, dans un texte publié dans La Presse, à
ce moment-là, il parlait du projet de loi n° 21, mais ça s'applique au
projet de loi n° 96 : «L'argument de l'équilibre nécessaire entre les
droits collectifs et les droits individuels est rhétoriquement habile. Il
constitue néanmoins une mystification. Nous sommes plutôt en présence du
problème classique, théorisé, entre autres, par Alexis de Tocqueville et John
Stuart Mill, du rapport entre la volonté de la majorité et les libertés
fondamentales des citoyens touchés par une décision gouvernementale.» La même
logique s'applique en l'espèce avec le projet de loi n° 96.
Jean Leclair, qui est
venu nous voir, qui a écrit un mémoire passablement étoffé, je dirais,
mentionnait, dans un texte publié dans Le Devoir, donc pas nécessairement
dans son mémoire, mais il l'a redit dans son mémoire : «Nulle part, que ce
soit en droit national ou international, trouverez-vous un document où un texte
juridique qui justifie la limitation des droits des citoyens au nom des
"droits collectifs" de la majorité nationale.
«Les droits
collectifs permettent de se défendre contre les plus puissants que soi. Ils
n'autorisent pas la minorité qui les invoque à retourner son pouvoir collectif
contre ses propres ressortissants.
«Il faut donc appeler
un chat un chat. Quand l'État québécois limite les droits de ses concitoyens,
il le fait dans l'exercice de son pouvoir souverain de contrainte et non en
tant que mandataire d'une nation détenant des droits collectifs.» Et là on
revient au pouvoir souverain qui parle un peu aussi de la souveraineté
parlementaire.
Benoît Pelletier,
professeur de droit constitutionnel à l'Université d'Ottawa, mentionne aussi,
dans un texte publié dans La Presse : «Le législateur doit disposer
de la capacité de poser et même d'imposer ce que nous appellerons ici des choix
collectifs. C'est là sa vocation et sa fonction et les cours de justice ne
doivent pas usurper ces dernières.» On parle de choix collectifs.
Je continue. Je le sais
que c'est assez aride, mais j'ai trouvé que c'est suffisamment important parce
que les mots... on le dit beaucoup, dans la législation, chaque mot compte.
Alors, droit et choix, ce n'est pas la même chose.
Dans le renvoi
relatif à la sécession du Québec en 1998, au paragraphe 59, la Cour
suprême du Canada fait référence à la poursuite d'objectifs collectifs,
objectifs dans ce cas-ci, et non de droits collectifs par des minorités
linguistiques constituant la majorité dans une province. Je cite : «Le
principe du fédéralisme facilite la poursuite d'objectifs collectifs par des
minorités culturelles ou linguistiques qui constituent la majorité dans une
province donnée.» C'est pas mal nous, la majorité francophone dans une province
donnée. «C'est le cas au Québec, où la majorité de la population est
francophone et qui possède une culture distincte. Ce n'est pas le simple
fruit du hasard. La réalité sociale et démographique du Québec explique son
existence comme entité politique et a constitué, en fait, une des raisons
essentielles de la création d'une structure fédérale pour l'union canadienne en
1867. La structure fédérale adoptée à l'époque de la Confédération a permis aux
Canadiens de langue française de former la majorité numérique de la population
de la province de Québec, et d'exercer ainsi les pouvoirs provinciaux
considérables que conférait la Loi constitutionnelle de 1867 de façon à
promouvoir leur langue et leur culture.» Alors, c'est 1998, renvoi relatif à la
sécession du Québec qui parle donc d'objectifs collectifs.
Michel Bastarache,
qui est encore très actif, on l'a vu récemment dans un rapport, ancien juge à
la Cour suprême du Canada, indique, dans son ouvrage Les droits
linguistiques au Canada, en 2013, que « l'article 133 de la Loi
constitutionnelle de 1867 est une reconnaissance de droits collectifs des
minorités francophones et anglophones du Canada, compte tenu du contexte
historique et politique dans lequel s'inscrit l'adoption de la Loi
constitutionnelle de 1867. Il conviendrait plutôt de considérer que cette
disposition — l'article
133 — assure
la reconnaissance de droits collectifs en vue du développement et de la
préservation des minorités francophones et anglophones. D'ailleurs, la
participation à l'activité parlementaire est par nature foncièrement sociale et
collective.»
Tout ça pour dire,
Mme la Présidente, que ce n'est pas anodin, le recours aux mots dans ce cas-ci.
Je ne me prends pas pour une constitutionnaliste, certainement pas, je ne suis
pas juriste, mais je suis capable de lire des rapports et des avis de la Cour
suprême et de me faire alerter au fait que le mot «droits collectifs», pour une
majorité, n'est pas nécessairement judicieux et que c'est beaucoup mieux de
décrire ça en termes de «choix collectifs».
Maintenant, le ministre
a des avis, probablement, qui vont dans un autre sens, mais j'ai bien hâte de
l'entendre sur la réponse à un arrêt de la Cour suprême, un ancien juge de la
Cour suprême, des constitutionnalistes qui vont tous dans cette direction-là.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
Thériault) : Merci. Le député de Sainte-Rose m'a fait signe qu'il
voulait parler. M. le député de Sainte-Rose.
• (17 h 50) •
M. Skeete :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Rapidement, la collègue, elle a fait une
bonne recherche. Je pense que le point de départ, pour moi, et où est-ce que je
diverge de la collègue, son point de départ est de mettre une équivalence entre
l'anglais et le français et de ne pas reconnaître la fragilité du français même
au Québec.
Donc, de dire que la
langue majoritaire au Québec est le français, c'est peut-être vrai en termes de
nombre sur le territoire Québec, mais même le gouvernement fédéral,
aujourd'hui, reconnaît la symétrie du pouvoir entre les deux langues
officielles. Je ne suis pas certain qu'il y a une équivalence à donner et donc
je ne suis pas certain que c'est pertinent d'évoquer des arguments que les
francophones au Québec sont majoritaires comme argument premier.
La langue française, elle
est fragile au Québec. Donc, tout ce qui en découle, de cet argument-là, je
suis dubitatif... j'ai de la misère avec ce mot-là. Alors, peut-être qu'on
pourrait entamer une discussion là-dessus parce que je ne suis pas sûr de voir,
même sur le territoire du Québec, les francophones comme une majorité. Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bien, sur
celui-là, Mme la Présidente, je ne serai pas en accord avec la députée de
Marguerite-Bourgeoys parce qu'il y un élément important pourquoi est-ce qu'on
utilise le terme «droits» plutôt que «choix», parce que... Ce qu'on fait avec
la Charte de la langue française, c'est important. La nation québécoise, elle
est titulaire de droits collectifs. Il faut que ça apparaisse dans nos lois. Il
faut que ça apparaisse clairement que, pour protéger le français, bien, ça fait
partie des droits qui sont inhérents à la nation québécoise.
Et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est un
choix, entre parlementaires. La notion de choix réfère davantage à l'aspect
sociologique de la chose.
Mais là on vient mettre dans une loi un aspect
juridique. Alors, il y a des droits individuels, les droits et libertés existent, mais également
des droits collectifs, et moi, je pense que c'est important
de le nommer, et que la Charte de la langue française fait partie des
droits collectifs de la nation québécoise de pouvoir s'exprimer en français
aussi.
Alors, c'est pour ça que je ne retiendrai pas la
suggestion relativement à remplacer la notion de «droits» par la notion de
«choix».
Mme David : J'entends ce que vous
dites, mais la notion de... C'est vrai que c'est un choix, en même temps, le
choix qu'on fait de collectivement valoriser la langue française, mais ce qu'on
entend beaucoup des gens que j'ai cités, entre autres, mais d'autres, c'est que
la notion de droits collectifs est une notion qui est contestable en soi. La Charte
des droits et libertés de la personne, c'est beaucoup plus pour des individus. D'ailleurs,
quand la Commission des droits de la personne est venue dire que le droit de
vivre en français n'était pas nécessairement un droit et liberté de la personne
et se demandait un peu pourquoi un droit comme ça serait mis dans la Charte des
droits et libertés de la personne... parce que c'est beaucoup plus fait pour
protéger les minorités.
Alors, j'ai l'impression que c'est un peu dans
le même esprit que;Les auteurs que j'ai cités, qui ne sont quand même pas les
moindres, se posent des questions sur la question des droits collectifs en
disant : Ce n'est peut-être pas un mot, juridiquement, qui veut dire ce
que ça veut dire dans le contexte de ce projet de loi là, où, qu'on le veuille
ou pas... Le député de Sainte-Rose disait : On n'est pas une majorité,
mais... On est peut-être une majorité fragile au sein du Canada, mais là c'est
une loi provinciale, donc on est une majorité.
M. Jolin-Barrette : ...québécoise.
Mme David : On n'est peut-être pas
majoritaires au sein du Canada, mais c'est une loi provinciale.
M. Jolin-Barrette : Mais québécoise,
une loi québécoise.
Mme David : Bien oui. Bien oui,
provinciale, province de Québec. Je veux dire, on n'est pas à la Chambre des
communes, ici. Ce n'est pas une loi qu'on adopte à la Chambre des communes.
M. Jolin-Barrette : Je suis
d'accord, mais ce que je souhaite dire par mon commentaire, c'est qu'il est
établi que le Québec est un État, et ce, depuis, je vous dirais...
L'appréciation d'État a été beaucoup développée par le Parti libéral dans les
années 60 avec Jean Lesage, et notamment par Paul Gérin-Lajoie. Alors, je crois
que le statut d'État fédéré du Québec est important.
Oui, c'est une loi qui est québécoise. Par
contre, la nation québécoise, elle est titulaire de droits collectifs, et
certains le nient, ça, le nient. Puis, dans les auteurs que vous avez cités, beaucoup
de ceux-ci disent : Bien non, l'État québécois, la nation québécoise n'est
pas titulaire de droits collectifs. C'est le ratio de leur argumentaire de
dire : Bien, tout ce qui compte dans la
vie au Canada, au Québec, tout ce qui compte dans la vie, c'est les droits
individuels.
Mais, dans tout ça, ils oublient que la nation québécoise
est titulaire de droits collectifs. Et ce n'est pas pour rien également que,
dans chacune des chartes, à la fois la Charte des droits et libertés de la
personne, donc la charte québécoise, et la charte des droits et libertés, la
charte canadienne, bien, dans les deux cas, que ce soit l'article 1 de la
charte canadienne ou à 9.1 de la charte québécoise, bien, il y a un mécanisme
qui fait en sorte, pour la charte canadienne, que, dans une société libre et
démocratique, les droits peuvent être limités, hein? C'est la disposition qui
fait en sorte que ce n'est pas des droits et libertés absolus dans notre État
fédéral qui sont mur à mur parce que la limite de vos droits s'arrête à celle
des autres, où elle commence. Puis également, comme, au sein d'une collectivité,
on ne peut pas faire n'importe quoi, il y a un régime juridique qui s'applique.
Or, il ne faut pas oublier que, comme nation,
comme peuple, celui-ci est également titulaire de droits collectifs, et c'est pour ça qu'on vient
l'inscrire ici. Comme nation, on a le droit de défendre la langue officielle,
la langue commune du Québec, et c'est le sens de la portée de l'ajout
que l'on fait au préambule, parce qu'il est fondamental que, comme nation, on puisse exprimer les choix collectifs qu'on fait
par le biais des droits collectifs que nous avons. Alors, on fait un
choix d'exprimer les droits collectifs que nous avons.
Dans le dossier de la laïcité, l'Assemblée
nationale est venue consacrer les droits collectifs de la nation québécoise.
Les peuples autochtones également ont des droits collectifs. Et ça, c'est toujours
intéressant d'entendre ces différents auteurs que vous
citez venir dire : Écoutez, ça n'existe pas, les droits collectifs. Par
contre, pour les nations autochtones, ça existerait. Alors, pour la nation québécoise,
ça n'existerait pas? Alors, moi, je m'inscris en faux avec cette approche et je
crois que, comme Assemblée, on doit le souligner qu'il existe des droits
collectifs.
Et là, ici, ce qu'on vient faire, c'est qu'on
vient amener un équilibrage entre les droits individuels et les droits
collectifs parce que c'est tellement important de protéger le français. C'est
important également que la nation québécoise puisse s'exprimer en français,
pour maintenant et pour le futur, pour assurer sa pérennité, qu'il faut le dire
que ça fait partie des droits collectifs de la nation.
Mme David : Bien, évidemment, je
comprends qu'il n'y aura pas d'accord pour ça, mais ce que je trouve intéressant, c'est qu'on revient à des discussions
qui ont eu lieu en 1977. Il y avait un article qui s'appelait l'article 172, que
Camille Laurin voulait absolument faire adopter, qui donnait, et là vous allez
trouver ça intéressant, le même statut à la
Charte de la langue française qu'à la Charte des droits et libertés de la
personne, qui avait été votée deux ans plus tôt, en 1975. Et là il y a
eu une telle discussion, conversation, puis, vous savez, il a retiré son projet
de loi, et il en a déposé un autre avec des amendements, et il avait
complètement effacé l'article 172 parce que ça créait trop de tollé et de
tension au sein du Parti québécois entre : Est-ce que... parce que, là, on
va y arriver un jour, au fait que la charte
des droits... et même c'est déjà mentionné ici, là, qu'ils vont avoir le
même statut législatif, les deux chartes. Puis on voit bien que ça tiraille un peu du côté de la Charte des droits et libertés,
mais ça tiraillait déjà énormément en 1977, tellement que cet article 172 a été retiré. Donc, je
pense, Camille Laurin, là-dessus, n'a pas eu le dessus sur son Conseil des
ministres parce qu'il y avait beaucoup de gens qui plaidaient pour : Non,
non, non, on ne s'en va pas là. On ne s'en va pas là.
Là, on est 50 ans plus tard quand même, là,
je ne sais plus, 44 ans plus tard. Alors, écoutez, moi, je ne peux pas
aller plus loin que ça dans la discussion. Je comprends que le ministre
n'acceptera pas. Alors, j'ai terminé mon intervention, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Thériault) :
Oui. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal : J'avais une
question. Moi, je suis totalement d'accord à ce qu'on garde «droits
collectifs». Je trouve que c'est une notion importante qui doit être
mentionnée, pas juste les droits et libertés de la personne, mais il y a des
droits collectifs, notamment que ça soit par rapport à la langue française pour
la nation québécoise et d'autres droits qui peuvent être reconnus.
Mais j'avais une question. Est-ce que, la notion
de droits collectifs, c'est la première fois que ça apparaît dans un texte
législatif ou c'est déjà présent?
M. Jolin-Barrette : Dans la loi
sur la laïcité qu'on a adoptée en 2019, c'était présent.
Mme Ghazal : C'est les seuls,
les deux seuls?
M. Jolin-Barrette : Est-ce que
c'est les deux seuls? Je vais pouvoir vous revenir.
Mme Ghazal : Oui, très bien.
Merci.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux
voix. Est-ce que l'amendement est adopté?
Une voix : Rejeté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Rejeté. L'amendement est rejeté.
Mme Ghazal : Mais est-ce que...
O.K. Non, c'est bon. Je voulais qu'on... Est-ce qu'on peut faire un...
La Présidente (Mme Thériault) :
Vous voulez faire un vote par appel nominal?
Mme Ghazal : Bien oui.
La Présidente (Mme Thériault) : Un
vote par appel nominal. Il n'y a pas de problème. Mme la secrétaire... C'est
parce qu'il faut que vous me le demandiez. Sinon, je dis «adopté» ou «rejeté».
C'est la pratique. C'est normal, on est en début de commission. Donc, le vote
par appel nominal, Mme la secrétaire.
La Secrétaire : Oui. Veuillez
répondre pour, contre ou abstention. Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Pour.
La Secrétaire :
M. Birnbaum (D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Pour.
La Secrétaire :
M. Jolin-Barrette (Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire :
M. Lévesque (Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) :
Contre.
La Secrétaire :
M. Lemieux (Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire :
M. Provençal (Beauce-Nord)?
M. Provençal : Contre.
La Secrétaire :
Mme Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire :
M. Skeete (Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
• (18 heures) •
La Secrétaire :
Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Contre.
La Secrétaire :
M. Bérubé (Matane-Matapédia)?
M. Bérubé : Contre.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, c'est rejeté.
Est-ce qu'on revient à l'amendement de la députée
de Marguerite-Bourgeoys, qui aurait dû être corrigé?
M. Jolin-Barrette : Il a été envoyé.
La Présidente (Mme Thériault) : Ça a
déjà été envoyé. Donc, on va vider les amendements de la députée et, après ça, on viendra à votre amendement,
Mme la députée de Mercier. Donc, on nous indique que ça a été
envoyé, mais là je n'ai pas le texte.
Donc, je vais vous demander une très courte suspension,
le temps qu'on puisse me donner une copie du texte, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 18 h 01)
(Reprise à 18 h 15)
La
Présidente (Mme Thériault) :
Donc, nous poursuivons nos travaux. Mme
la députée de Marguerite-Bourgeoys, pour l'amendement de
l'article qui a été... pardon, de l'amendement qui a été retiré et remplacé par
un nouvel amendement, allez-y, je vous écoute.
Mme David : Alors, à l'article 1 du
projet de loi, insérer, dans l'alinéa du préambule de la Charte de la langue
française que propose le paragraphe 1° et après «l'apprentissage de cette
langue», «, et à en parfaire la connaissance et la maîtrise,».
La Présidente (Mme Thériault) :
...enlève le «et».
Mme David : ...«, à en parfaire la
connaissance et la maîtrise,». Excusez-moi, Mme la Présidente.
Donc, le texte amendé de l'alinéa du préambule
proposé par le paragraphe 1° se lirait comme suit :
Le préambule de la Charte de la langue française
(chapitre C-11) est modifié :
1° par l'insertion, après le deuxième
alinéa, du suivant :
«L'Assemblée nationale reconnaît
que le français est la langue commune de la nation québécoise et qu'il est
déterminant que tous soient sensibilisés à l'importance de cette langue et de
la culture québécoise comme liants de la société.
Elle est donc résolue à ce que chacun ait accès à l'apprentissage de cette
langue, à en parfaire la connaissance et la maîtrise, ainsi qu'à faire
du français la langue de l'intégration.»
La Présidente (Mme Thériault) :
Voilà pour l'amendement. Commentaires?
Mme David : Alors, écoutez, je suis
bien d'accord avec cette formulation. Je pense que c'est même mieux que la
première formulation. Donnons le mérite au ministre. Et je pense que ce n'est
pas banal comme ajout, parce que c'est non seulement, comme j'ai dit,
l'apprentissage, mais, «en parfaire la connaissance et la maîtrise», ça nous touche tous et toutes à tous les jours :
relire nos courriels, relire nos textos, avoir Antidote, se dire : Est-ce
que je passerais, là, l'épreuve
uniforme de français du secondaire... du secondaire, oui, mais du
collégial? Est-ce que j'échouerais, moi aussi, comme malheureusement 40 %, souvent, des étudiants au collégial?
Bien, écoutez, pour moi, c'est extrêmement important.
C'est une affaire de tous les jours, cette maîtrise du français. Ce n'est pas une
fois pour toutes.
Et on doit tous s'inclure là-dedans. Comment ça
s'écrit, «vigilance»? C'est-tu avec un «a» ou avec un «e»? Comment ça
s'écrit... Ce n'est pas que les autocorrecteurs, là, il y a tout un grand débat
autour des accords de participes passés, la nouvelle orthographe. Est-ce qu'il
devrait y avoir... on fait sauter ça, les participes passés liés au verbe avoir
et garder seulement le verbe être? Une langue vivante, c'est une langue qui
doit s'intégrer à notre culture, mais il faut constamment y penser.
Donc, Mme la Présidente, je suis très heureuse
de voir apparaître, dans le préambule, la notion du droit à en parfaire la
connaissance et la maîtrise, parce qu'un préambule ça veut dire quelque chose.
Alors, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Thériault) :
Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Puisqu'il n'y en a pas, nous
allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) :
Adopté. Donc, nous sommes rendus au cinquième amendement sur l'article, celui
déposé par la députée de Mercier. Mme la députée de Mercier, si vous voulez
nous faire la lecture de votre amendement, s'il vous plaît.
Mme Ghazal : L'article 1 du projet
de loi est modifié par l'ajout du paragraphe suivant :
4° par le remplacement du quatrième alinéa
par :
«Dans une relation de nation à nation, l'Assemblée
nationale reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit du Québec le droit
d'enseigner, de valoriser et défendre leur langue et leur culture[...]»
Donc, je sais
qu'on vient d'adopter un amendement pour changer l'appellation «Amérindiens» par
«Premières Nations et Inuit du Québec», mais
moi, l'amendement, dans le fond, je le prends textuellement du mémoire de
l'APNQL.
Vous savez, à l'époque, en 1977, le ministre de
l'époque, le gouvernement de l'époque aurait pu ne jamais faire mention, dans
le préambule, de la question des premiers peuples, mais ils ont trouvé que
c'était important, dans un esprit innovateur, progressiste, inclusif, d'en
faire mention et de dire que... j'essaie de retrouver la formulation d'origine,
excusez-moi, et donc de dire, à l'époque, de reconnaître aux Premières Nations
et Inuits du Québec, descendant des premiers habitants du pays, le droit qu'ils
ont de maintenir et de développer leur langue et culture d'origine. Et ça, ça
répond, dans le fond, au principe de dire qu'il faut que ça soit inclusif, la
question de la langue, s'intéresser aux autres cultures, etc.
Mais plus de 40 ans plus tard, c'est
important de moderniser et d'amener une formulation qui, dans le fond,
représente là où on est rendus aujourd'hui, de cette relation de nation à
nation et, encore plus important, d'écouter ce que les Premières Nations et
Inuits nous ont dit. Ils sont venus, on les a invités en commission pour nous
dire ce qu'ils pensaient du projet de loi n° 96, et
là la moindre des choses aurait été, peut-être, de prendre le temps de
modifier, et peut-être que le ministre avait déjà l'intention de le faire, je
ne le sais pas, pour les autres articles où on dit «Amérindiens». Ça, c'était
la moindre des choses.
Mais là, moi, ce que j'amène, c'est vraiment de
reprendre leur formulation et de dire qu'ils ont le droit, en fait, le droit de
l'enseigner, de la valoriser, de défendre leur langue et leur culture
d'origine, mais toujours dans une relation de nation à nation. Et que ça soit
écrit dans le préambule de la Charte de la langue française, bien, c'est un
message très fort et important qu'on leur dit qu'on vous écoute. Nous voulons
défendre la langue française, mais nous sommes aussi conscients de la fragilité
de votre langue, et nous vous écoutons, et nous l'ajoutons aussi, dès le
préambule. Donc, ça envoie un message de bienveillance, d'ouverture, d'écoute,
de patience, etc. Voilà.
• (18 h 20) •
La Présidente (Mme Thériault) :
Commentaires? M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, je
comprends très bien l'objectif de la députée de Mercier en lien avec sa proposition d'amendement. Là, désormais, avec
l'amendement qu'on vient d'accepter de la députée de Marguerite-Bourgeoys,
le... un, deux, trois, quatre, cinq, cinquième alinéa se lit ainsi :
«L'Assemblée nationale reconnaît aux Premières
Nations et aux Inuit du Québec, descendants des premiers habitants du pays, le
droit qu'ils ont de maintenir et de développer leur langue et culture
d'origine.»
Alors, l'essence même de
ce qui est proposé par la députée de Mercier s'y retrouve déjà. Le souhait de
rajouter «dans une relation de nation à nation», actuellement, ça n'apparaît
pas dans aucune loi québécoise. Les négociations, les ententes se font de
nation à nation, puis c'est un principe bien établi.
Par contre, ce n'est pas l'endroit, dans la
Charte de la langue française, pour l'inscrire. Le collègue aux Affaires
autochtones a tout le loisir de le faire éventuellement dans un projet de loi.
Et l'objectif de la Charte de la langue française, c'est de protéger la langue
française, précisément, mais ça n'enlève rien aux nations autochtones. Et justement,
l'article, il est là pour faire en sorte... bien, pardon, l'alinéa, il est là
pour faire en sorte, justement, de permettre aux nations autochtones de faire
en sorte de maintenir et de développer leur langue et leur culture d'origine.
Donc, lorsqu'on parle de valoriser, de défendre leur langue, c'est déjà ce qui
est indiqué aussi.
Donc, le concept, il est là, mais je ne crois
pas que c'est l'endroit approprié pour inscrire ce concept-là, de nation à
nation, à l'intérieur de la Charte de la langue française.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui,
Mme la députée de Mercier. J'aurai le député de Matane après.
Mme
Ghazal : Si je me fie à l'argument du ministre, qui dit qu'ici
c'est... on est là pour défendre, et valoriser, et protéger la langue
française au Québec, si cet argument-là était... ou cette façon de réfléchir là
était utilisée à l'époque, en 1977, en
disant : Bien là, l'objectif, c'est la langue française, probablement que
cet alinéa-là ne se serait jamais retrouvé là à l'origine. Et là on
serait venu le modifier, puis peut-être qu'on l'aurait ajouté ou pas. Et je me
demande, avec l'argument du ministre, s'il l'aurait lui-même ajouté, s'il
n'était pas déjà là depuis 1977, à cause de l'argument qu'il vient de me
donner.
Je comprends que c'est ça, l'objectif de la loi,
c'est de protéger la langue française, mais à l'époque, dans un esprit
innovateur, progressiste, d'inclusion, de bienveillance envers les premiers
peuples, même à l'époque, il y a 40 ans,
sans même qu'il y ait toute une organisation ou, si je peux dire, des gens des Premières Nations, des autochtones qui étaient organisés pour demander que ce soit
là, ce n'était même pas là à l'époque. Ça a été fait par le gouvernement de
l'époque, par lui-même.
Donc, moi, je fais appel au même esprit qui
existait à l'époque, d'ouverture, d'inclusion, et de ne pas rester restreints
et fermés en disant : Ah! mais ici, je suis dans... c'est juste la langue
française, donc je ne peux pas parler d'autre chose, ce n'est pas ça,
l'objectif du projet de loi. On ne peut pas réfléchir comme ça. Bien, le
ministre peut le faire, mais, selon moi, ce n'est pas une bonne façon de
réfléchir à la protection de la langue française au Québec. On ne peut pas
faire fi des langues des premiers peuples en disant : Bien, c'était déjà
écrit, on ne va pas le changer.
Et, en plus, moi, ce que je propose ici, c'est
vraiment... pas juste de faire des Premières Nations et des Inuits des acteurs
passifs, mais plutôt des acteurs actifs et même qui participent aux changements
de la loi qu'on est en train de faire ici, en tant que législateurs. Et ils
l'ont fait, cet effort-là, ils l'ont proposé. Ils ont... C'était écrit :
«Afin de moderniser les termes descriptifs applicables aux Premières Nations,
il est proposé de modifier le préambule» de cette façon-là. Ils ont proposé
d'ajouter «une relation de nation à nation», un peu comme «droits collectifs» a
été ajouté dans la Charte de la langue française. Le ministre m'a dit qu'il a
été ajouté aussi dans le projet de loi n° 21. Peut-être que ça existe ailleurs ou peut-être non. Le gouvernement a
décidé d'innover puis de dire : Il faut aussi reconnaître les droits collectifs, c'est important. Alors que,
là, on parle de la langue française, je comprends qu'on peut dire :
Bien, la langue française, c'est un droit collectif, on peut en discuter, mais
je trouve que c'est important d'écouter cette main tendue et de ne pas
dire : Bien, on va pelleter ça pour le ministre qui est responsable des
Affaires autochtones.
En plus, ils ont été invités, et c'était la
seule chose à faire. Bien, maintenant, on ne peut pas juste leur dire : On
vous écoute. Il faut aussi les entendre. Et moi, c'est dans cet esprit-là que
je demande au ministre d'accepter l'amendement, mon amendement, qui est celui
de l'APNQL et des Premières Nations.
La Présidente (Mme Thériault) : J'ai
le député de Matane qui voulait faire une intervention.
M. Bérubé : Mme la Présidente, je
suis d'accord avec les arguments invoqués par le ministre. Certes, ça peut
apparaître très vertueux de faire ça, mais ce n'est pas l'endroit pour ça. Le
français, sa protection, ne va pas à l'encontre des langues autochtones. Je ne
crois pas ça. J'ai beaucoup étudié cet enjeu-là et j'ai étudié aussi les
raisons initiales dans la loi 101 pour lesquelles on a considéré ça. Il y
a plein de moyens de faire des relations d'égal à égal. Reconnaître les
11 nations, c'en est un, ça a été fait en 1985 par le gouvernement de
M. Lévesque. Signer des ententes, dans l'usage, ça se fait régulièrement.
Je suis d'avis que les langues autochtones
mériteraient un projet de loi à part entière qui pourrait être initié par
n'importe quelle formation ici présente, mais je suis plutôt en accord avec le ministre,
il me semble qu'on embarque dans quelque chose qui ne rendrait pas justice, justement,
à la cause qu'on veut servir, c'est-à-dire les lois autochtones... en fait, les
langues autochtones. Donc, je souscris aux arguments du ministre.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le député de Sainte-Rose.
M. Skeete : Merci beaucoup. Pas mal
en accord avec le collègue de Matane-Matapédia et le ministre. Mais surtout,
au-delà de la bonne idée qu'a la collègue de Mercier, je pense que ce serait,
encore une fois, un autre exemple d'une instance qui décide pour des groupes
sans les consulter. Je pense qu'il faut éviter ça. Je pense que cette
nomenclature-là, et tout ce qui en devient, doit être négociée avec respect de
nation à nation, et ce n'est pas la place pour faire ça. Donc, je m'inscris en
accord avec les deux collègues.
La
Présidente (Mme Thériault) : Merci. Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal :
...ce n'est pas la place pour faire ça. Pourquoi est-ce qu'on les a invités? On
leur a demandé de présenter, déposer un mémoire pour pouvoir, après ça,
utiliser ça ailleurs. Pourquoi on les a invités à le faire ici, si ce n'était
pas la place? Pourquoi est-ce qu'on n'aurait pas attendu de, justement,
présenter une autre pièce législative sur les Premières Nations? C'est parce
que c'est la place, parce qu'on est à la bonne place pour en discuter. C'est
pour ça qu'on les a invités.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, je comprends que c'est la prétention de la
députée de Mercier de dire, lorsque... Dans le fond, on entend tous les groupes
qui viennent en commission parlementaire, mais on ne donne pas suite à toutes
les demandes des groupes qui viennent en commission parlementaire. Ça, je crois
que tout le monde en est conscient. On écoute les gens, mais parfois, il y a
certains choix du législateur qui sont effectués.
En l'occurrence, ici,
l'alinéa cinq, là, déjà de la Charte de la langue française fait déjà en sorte,
et depuis 1977, de construire... puis la Charte de la langue française a été
construite dans une notion de respect, hein, de la culture, et des langues, et de la valorisation qu'on reconnaît dans la
culture et dans les langues autochtones. Et surtout, l'amendement que la députée de Mercier propose, en
fait, supprime l'aspect qui est «descendant des premiers habitants du
pays». Ça, je pense que c'est important de le maintenir également.
Et tout ce qui est
souhaité par la députée de Mercier s'y retrouve également, le droit qu'ils ont
de maintenir et de développer leur langue et leur culture et culture d'origine.
Donc, ça veut dire, déjà, ce qui est souhaité par la députée de Mercier. Et le
véhicule approprié par rapport à la Charte de la langue française, c'est pour
la langue française. Nous, on dit : On
protège, valorise la langue française dans le respect de la langue et de la
culture d'origine des nations autochtones également. Alors, sur cet
aspect-là, il n'y a pas d'enjeu. C'est déjà là, et l'alinéa le dit déjà.
Pour ce qui est de
l'enjeu de nation à nation, bien, écoutez, c'est un principe qui est établi,
mais ce que je dis, c'est que, pour le faire, ce n'est pas le véhicule
législatif approprié pour le faire, de venir inscrire ça, «de nation à nation»,
dans la Charte de la langue française, et des impacts juridiques qu'il peut y
avoir découlant de tout ça.
• (18 h 30) •
Mme Ghazal :
Bien, j'aimerais savoir c'est quoi, les impacts juridiques découlant d'écrire,
dans un texte de loi, «relations de nation à nation».
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, il y en a plusieurs. Il y en a
plusieurs, et ce n'est pas dans le corpus actuellement. Donc, le fait de venir
modifier cela a certainement un impact juridique. Et déjà le gouvernement du Québec, depuis plusieurs années... Et, à juste
titre, le député de Matane-Matapédia l'a souligné que c'est le
gouvernement du Parti québécois qui l'a reconnu en 1985, les nations
autochtones. Il y a des accords avec les différentes nations autochtones qui se
font également.
Mais, pour ce qui est
de l'aspect de la Charte de la langue française, ce n'est pas là qu'on va venir
établir légistiquement ce principe-là, à l'intérieur de la Charte de la langue
française. Je crois que c'est beaucoup mieux d'avoir une loi destinée
précisément aux relations avec les autochtones, basée sur ce concept-là, plutôt
que de venir le mettre dans la Charte de la langue française.
La Présidente (Mme
Thériault) : J'ai la députée de Marguerite-Bourgeoys qui veut faire
une intervention.
Mme
David : O.K. Oui, écoutez, je vais être bien humble dans mes propos
par rapport à ça parce qu'effectivement c'est un sujet extrêmement
délicat. J'avais l'impression qu'on y référait par le paragraphe qu'on a
changé, justement, en parlant de Premières Nations.
Mais j'insiste pour
dire qu'il va falloir parler d'enjeux autochtones quand on va arriver à
certains articles du projet de loi n° 96 qui touchent
particulièrement les anglophones... les anglophones, excusez, les Premières
Nations, les autochtones. Je donne un exemple. L'épreuve uniforme de français,
on va y arriver éventuellement, ça, ça touche la question de l'apprentissage de
l'anglais, souvent, qui est langue seconde, et du français, qui est langue
tierce pour eux. Et je suis... j'ai été très sensible à un certain nombre
d'arguments mais très liés au projet de loi n° 96.
Donc, ça, j'annonce
déjà qu'évidemment on interviendra à ce moment-là, au moment où on pense qu'il
peut y avoir amélioration, aide, sensibilité à des enjeux qu'ils vivent, qui,
entre autres, provoquent du décrochage scolaire, ce qu'on ne veut pas,
évidemment, avec les communautés autochtones.
Donc, ici, je ne me
prononce pas vraiment, bien que je suis sensible aux arguments aussi du député
de Matane-Matapédia, qui dit : Ce n'est peut-être pas le bon véhicule et
ce n'est peut-être pas rendre justice, justement, à l'immense complexité des
enjeux. C'est là que mon humilité prend le dessus, et je dis : Je ne m'y
connais pas assez. Mais il ne va pas falloir oublier, à plusieurs endroits dans
le projet de loi, ordre professionnel, collégial, etc., qu'il y a des enjeux,
effectivement, pour les autochtones d'application du projet de loi.
La Présidente (Mme
Thériault) : Mme la députée de Mercier.
Mme Ghazal :
Bien, je voudrais... Dans le fond, le ministre refuse de mentionner «dans une
relation...» Ce qui dérange, là, dans mon amendement, c'est «relation de nation
à nation». C'est ce que je comprends. C'est la raison principale pourquoi il
refuse mon amendement.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, je ne donne pas suite à votre
amendement parce que, dans un premier temps, je vous ai expliqué le concept de
«nation à nation», ce... ne se retrouvera pas... on ne va pas l'incorporer dans
la Charte de la langue française, dans un premier temps.
Deuxièmement, ce qui est visé relativement au
reste de votre amendement, défendre la langue française, l'enseignement également, c'est déjà couvert par
le libellé actuel du cinquième alinéa. Donc : «L'Assemblée
reconnaît aux Premières Nations et aux Inuit du Québec, descendants des
premiers habitants du pays, le droit qu'ils ont de maintenir et de développer leur langue et leur culture d'origine.» Donc,
c'est implicite que ça... partie les autres éléments.
Puis l'autre point, c'est que, dans votre amendement,
vous supprimez l'aspect «descendants des premiers habitants du pays», puis je
pense que c'est important de le reconnaître aussi. Donc, c'est pour ça,
notamment, qu'on ne donne pas suite à l'amendement.
Mme
Ghazal : Donc, il y a des aspects qui sont inclus. Il y a quelque
chose que j'ai enlevé. Je ne l'ai pas enlevé, je ne l'ai pas fait par moi-même. J'ai pris ce que les groupes qui ont été
consultés ont amené. Mais ce que je comprends...
Parce que j'aurais pu, par exemple, le garder, mais le ministre... Supposons
que j'avais gardé «descendants des premiers habitants du pays» ou,
supposons, si j'avais mis «dans une relation de nation à nation» et j'aurais
gardé exactement le même libellé, sauf, évidemment, «Amérindiens», qui est là
actuellement, est-ce que le ministre l'aurait accepté?
M. Jolin-Barrette : Moi, je suis
très à l'aise avec la proposition qu'on a acceptée, de la députée de
Marguerite-Bourgeoys, de modifier les termes, de les actualiser par «Premières
Nations et aux Inuit du Québec», et, dans le fond, je ne donnerai pas suite aux
autres amendements.
Mme Ghazal : Mais est-ce que la
raison principale, c'est «relation de nation à nation» qui... parce que ça
amène des implications? Quelles implications ça amène? Parce que c'est quelque
chose qu'on tient beaucoup dans le discours. Et je suis certaine que,
peut-être, soit le ministre ou quelqu'un du gouvernement l'a déjà dit, relation
de nation à nation, à nation, à nation... tout le temps dans le discours. Mais,
dans une loi, pourquoi est-ce qu'on ne le met pas? Parce que ce n'est pas le
bon véhicule? Ça serait quoi, le bon véhicule?
M. Jolin-Barrette : Mais ce que je
vous dis, c'est que ce n'est pas... le projet de loi n° 96, ce n'est pas
le véhicule approprié pour incorporer ça dans le corpus législatif de l'État
québécois.
Mme Ghazal : Parce que moi, dans mes
anciennes responsabilités, je m'occupais aussi d'environnement, et il y a eu, à
plusieurs reprises, dans des projets de loi, des discussions sur les autochtones,
parce qu'on en faisait référence dans des lois qui concernaient l'environnement,
protection du territoire, etc., puis j'ai eu toujours la même discussion :
Ah! bien, ce n'est pas la place, ce n'est pas le temps. Là, on ne parle pas des
autochtones, ce n'est pas ça, le sujet, ce n'est pas le bon véhicule. Et là je
me suis dit : Bien, c'est où, le bon véhicule?
Là, on m'a dit la même chose, que ce n'est pas
le bon véhicule. C'est quoi, le bon véhicule pour parler de cette notion de
nation à nation dans un texte législatif?
M.
Jolin-Barrette : Bien, manifestement, ce n'est pas à moi à vous dire ça,
quel est le bon véhicule, mais il y a un ministre responsable des
Affaires autochtones, puis c'est à lui à porter le dossier.
Mme Ghazal : Puis est-ce que c'est
possible de... Je ne sais pas si...
M. Jolin-Barrette : Puis l'autre
point, là, qui est important, là, c'est que le préambule, là, annonce le
contenu de la loi. Et donc le contenu de la loi, de la loi 101, c'est la protection
puis la valorisation de la langue française. C'est ça, l'objectif du préambule.
Mme Ghazal : Mais il y a d'autres
articles, là, qui parlent aussi des autochtones, d'autres articles.
M. Jolin-Barrette : Oui, mais sous
forme d'exclusion.
Mme Ghazal : Comme la Charte de la
langue française ne s'applique pas sur les réserves, etc.
M. Jolin-Barrette : Exactement.
Mme Ghazal : Est-ce que c'est
possible que quelqu'un... un juriste peut-être, si le ministre ne peut pas le
faire, m'expliquer c'est quoi, les implications juridiques de dire «de nation à
nation»?
M. Jolin-Barrette : Non, le
gouvernement du Québec ne donnera pas d'opinion juridique à la télévision comme
ça.
Mme Ghazal : Mais comment est-ce que
vous pensez que les... ceux qui ont travaillé, qui ont déposé un mémoire, qui
l'ont présenté, qui sont venus en commission pour le présenter, comme, par
exemple, M. Ghislain Picard et les autres, comment est-ce que vous pensez
qu'ils vont percevoir votre refus d'inclure leur amendement?
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, là on n'est pas dans une séance de
questions-réponses sur comment les gens vont percevoir ça. Il y a eu
50 groupes qu'on a entendus. Tout le monde a fait des recommandations.
Certaines recommandations vont être
acceptées, d'autres ne seront pas acceptées. Ça fait partie du travail
législatif que nous effectuons.
À titre d'exemple, l'actualisation des termes
«Amérindiens» pour «Premières Nations», ça faisait partie de leurs
recommandations, notamment, et je l'ai accepté. Alors, voyez-vous, je fais
preuve d'ouverture. Et je l'avais annoncé, parfois, on accepte certains
amendements, parfois, on n'en accepte pas pour les raisons qui incombent.
• (18 h 40) •
Mme Ghazal : Moi, ce que je trouve
dommage, c'est que c'est une occasion manquée d'envoyer un message aux
autochtones pour leur dire : On vous écoute, et ça va commencer
maintenant. Mais, à chaque fois, c'est : plus tard, à un moment donné,
quelque chose va venir plus tard, ou : oui, plus tard, et, pendant ce
temps-là, ils attendent.
Par exemple, de dire que ce n'est pas le bon
véhicule, moi, ce que j'avais compris au début, et c'était sorti dans les médias, du ministre aux Affaires
autochtones, il a dit : On ne touchera pas à ça, les lois autochtones, ça
ne nous intéresse pas. Puis là, après ça, j'ai senti une évolution. Il y
a eu un changement d'idée, c'est ce que je comprends. Je ne sais pas si c'est
lui qui l'a dit ou c'est le ministre, je ne le sais plus, où il a dit :
Ah! finalement, peut-être qu'on va faire quelque chose.
Maintenant qu'on parle de langue française, on
va peut-être parler aussi des langues des premiers peuples qui étaient ici
avant nous aussi. Puis on est les mieux placés, au Québec, pour comprendre leur
sentiment d'inquiétude et de fragilité
identitaire, si je peux l'appeler comme ça. On est les mieux placés en Amérique du Nord pour le comprendre. Et donc, ils attendent cette main tendue.
Ils l'attendent.
Là, il y a une occasion. Dans les lois environnementales,
le ministre de l'Environnement me disait que ce n'était pas le bon véhicule, ce n'était pas la bonne place, ce n'est pas
là qu'on va en parler, à chaque fois qu'il y avait des articles sur les
autochtones. Et là, maintenant, je pensais que c'était la bonne place puisqu'on
les a invités. Tu sais, on n'a pas invité, par exemple... je disais à la
blague, tout à l'heure, les groupes écologistes, environnementalistes, on ne les a pas invités. On a invité les Premières Nations parce que la langue
française, et la protection
de la langue française, et les dispositions qui sont dans la Charte de la langue française,
c'est aussi important, et ça a un impact sur eux. Et c'est aussi une opportunité pour leur offrir cette... une main, leur tendre
la main pour dire : On vous entend, on vous écoute.
Là, on me dit que ce n'est pas le bon véhicule,
ce n'est pas la bonne place, il faut le faire ailleurs, plus tard, un jour. Je
ne sais pas quand viendra ce jour. Le ministre me dit que ce n'est pas maintenant
et ce n'est pas à lui de répondre. On a hâte d'entendre le ministre aux
Affaires autochtones l'annoncer, parce que la dernière fois qu'il en a parlé, il a dit : On n'a pas l'intention de
ne rien modifier par rapport aux langues autochtones. Moi, c'est ce que j'ai
entendu. C'est un message de fermeture que j'ai entendu.
Et là on dit que, oui, il y a quelque chose qui
s'en vient, et je trouve que c'est vraiment une occasion manquée de ne pas
reprendre, non pas l'amendement de la députée de Mercier, mais l'amendement qui
a été amené et déposé par l'APNQL, et je trouve ça très, très, très dommage.
La Présidente (Mme Thériault) :
M. le ministre. Après ça, ça sera le député de Matane.
M. Jolin-Barrette : Je veux
juste qu'on s'entende sur un point superimportant sur notre fonction de parlementaire. J'espère que c'est l'amendement de la députée
de Mercier, que ce n'est pas sous
la dictée d'un tiers, parce que quand on est assis ici, à l'Assemblée nationale, là, on représente
les citoyens du Québec, mais on a une responsabilité individuelle de ce
qu'on propose, comme députés, que ça soit nos amendements. Ça, c'est
extrêmement important.
Parce que moi, Mme la Présidente, je
n'accepterai pas qu'on dise : Bien, ce n'est pas mon amendement, c'est
l'amendement d'un tiers. Non, non. Vous avez une responsabilité. Vous avez un
siège comme députée puis, à ce titre-là, vous agissez en tant que députée de
Mercier.
Alors, il faut faire bien attention. On a une
responsabilité comme parlementaire de dire : Les choses que je présente,
là, je suis en accord et je vais les défendre. Donc, ça, c'est fort important.
C'est lié au siège, à la personne qui représente ses concitoyens. Alors, je
veux juste qu'on ramène ça...
Mme Ghazal : Je n'ai pas besoin
d'avoir une leçon sur mes responsabilités, je les connais très bien, comme législateur.
M. Jolin-Barrette : Bien non, mais
vous dites...
Mme Ghazal : Et c'est sûr que je
n'aurais pas déposé un amendement avec lequel je ne suis pas d'accord.
M. Jolin-Barrette : ...vous
dites que ce n'est pas votre amendement, vous dites que ce n'est pas mon amendement.
Ce n'est pas mon amendement, c'est l'amendement du groupe. Attention, là, c'est
votre amendement, là. Il ne faut pas vous dissocier puis dire que ce n'est pas
vous.
Là-dessus, la Charte de la langue française vise
à faire en sorte, hein, de protéger le statut du français. L'alinéa, il est là
pour justement dire que le statut du français est protégé en tout respect des
droits des nations autochtones. Ça a toujours été comme ça depuis 1977.
Puis depuis tantôt
j'entends la députée de Mercier me dire : Ah! bien, j'entends un
signe de fermeture, j'entends dire que ce n'est pas le bon endroit, tout
ça. Ce n'est pas ça que j'ai dit. Ce n'est pas un signe de fermeture. J'ai dit
que le statut du français, c'est là-dessus qu'on travaille présentement. Puis,
sur les autres questions rattachées aux nations autochtones,
que ce soit la relation de nation à nation, que ça soit relativement à l'enseignement
ou aux autres... bien, en fait, l'enseignement, c'est couvert, justement, par le libellé actuel, mais ce n'est pas le
véhicule approprié. Puis il ne faut pas mélanger l'environnement avec le
statut du français. C'est tout ce que je dis. Je ne dis pas que la proposition de la collègue de Mercier, elle n'est pas légitime, je dis juste
que je ne la retiens pas dans le cadre de la loi 101. C'est tout ce que
je dis.
Mme Ghazal : Moi... Oui.
La Présidente (Mme Thériault) : Je
vais vous donner la parole, Mme la députée de Mercier. Je vais juste vous rappeler que, jusqu'à date, ça fonctionne
bien, les échanges vont bien. Je laisse les députés, ministre
se parler. Il y a une franche discussion. Tant que c'est respectueux, je
n'interviendrai pas. Par contre, je vais vous demander quand même d'écouter
jusqu'au bout et de ne pas vous interpeler et de vous couper la parole, autant
pour un que pour l'autre. Puis, à ce moment-là, on va continuer comme on est
bien partis au début de la commission.
Si je vois que ça commence à déraper, bien là,
je vais devoir vous dire : Bien, adressez-vous à la présidente, puis vous
allez passer par moi. Vous allez attendre les droits de parole, puis je vais
demander qu'on n'ouvre pas les micros tant que je ne vous ai pas donné la
parole. Donc, je veux juste que tout le monde soit respectueux.
Mme la députée de Mercier, et, après, je
reconnais le député de Matane-Matapédia.
Mme
Ghazal : Oui. J'entends très, très bien, Mme la Présidente. Absolument. C'est juste que ça m'a choquée un petit peu
que le ministre me donne des leçons sur mes responsabilités. Nous sommes aussi le relais de la société civile et des gens qui
viennent en commission. C'est sûr que, si je n'étais pas d'accord,
je n'aurais jamais déposé cet amendement-là.
Quand je dis que ce sont eux qui l'ont écrit,
c'est que c'est aussi important, quand on dit, justement, «de nation à nation»,
même si on ne va pas l'écrire, on peut le pratiquer, puisque c'est souvent
mentionné dans les discours du gouvernement de parler de nation à nation. Et tout
le monde est d'accord lorsqu'il s'agit des beaux discours. Mais c'est de faire
d'eux aussi une sorte de législateur, de dire qu'ils sont actifs, les
autochtones, dans notre société, par rapport à des questions qui les
concernent, et que ce n'est pas uniquement nous qui disons comment les choses
doivent se passer.
Et c'est dans
esprit-là... Moi, c'est ça que j'aurais aimé voir. C'est de dire : Bien,
dans un message d'ouverture et d'écoute envers les autochtones,
j'accepte ce qu'ils déposent comme amendement. Et, oui, ça serait la bonne
place de dire : Bien, c'est à la Charte de la langue française, puisqu'à l'époque, en 1977, on a cru bon
d'ajouter cet alinéa-là dans le préambule et d'autres articles, alors
que l'objectif, c'était de protéger le français. On n'a pas vu que c'était le
mauvais véhicule, on a trouvé que c'était une bonne place, quand on parle de la
langue française, d'ajouter aussi la reconnaissance des autochtones, de
maintenir, développer leur langue.
Et j'aurais aimé ça qu'ici, bien, on fasse un
pas plus loin, car, plus de 40 ans plus tard, avec tout le contexte et les
discussions qui ont lieu actuellement dans la société et le sentiment, peut-être,
de non-écoute du gouvernement actuel, ça aurait été une belle occasion, une
opportunité de dire : Bien, on vous entend, on vous écoute. Et, au-delà
les technicalités, est-ce que c'est le bon véhicule, est-ce que ça prend un
autre projet de loi, ça aurait été une belle occasion, qui est malheureusement
manquée ici.
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Tout à l'heure, notre collègue de Mercier indiquait qu'on les
a invités. Juste une précision : Est-ce que le gouvernement a
sollicité la participation ou, dans les groupes qui se sont inscrits, ils ont
été sélectionnés? Ça, c'est juste une nuance qui est importante pour moi.
Est-ce qu'il y a eu une approche en disant : On aimerait que vous puissiez
venir nous présenter vos propositions ou, de tous les groupes, on a choisi ce
groupe-là? Juste pour qu'on soit clairs sur comment ça s'est fait.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Là-dessus, je ne
pourrais pas vous dire précisément, là. Il y a toujours des négociations entre
les différentes formations politiques à savoir qui soumet les listes de
groupes, tout ça, alors je ne pourrais pas vous dire précisément. Il faudrait
que je retourne dans mes souvenirs. Puis, à cette époque-là...
M. Bérubé : On doit y revenir parce
que ça fait une distinction. Puis, tu sais, moi, j'accepte l'argument de la
députée de Mercier, puis c'est important. S'ils ont été sollicités, ils ont des
attentes légitimes, c'est sûr.
D'ailleurs, une des attentes légitimes qui va
revenir plus tard, puis moi, je vais vouloir en discuter, c'est la question...
je l'annonce, là, parce que ça va revenir, l'examen du ministère en français.
Ça, c'est un enjeu important. Je me souviens qu'on a entendu parler de ça. Ça,
c'est une demande très concrète. On aura d'autres occasions d'en parler. Moi,
j'ai retenu cet enjeu-là. Ça, c'est le genre d'enjeu qui a un lien avec les
langues autochtones, direct, avec la Charte
de la langue française ou la loi n° 96, parce que c'est la connaissance du
français, qui est plus complexe si on part
d'une langue autochtone que si on part de l'anglais ou d'une autre langue.
C'est la démonstration qui nous a été faite comme quoi, oui, les enjeux autochtones peuvent être discutés dans le cadre du projet de loi lorsqu'ils
ont un lien direct.
Mais je termine en disant que les langues
autochtones, qui sont des langues millénaires, méritent, je dirais, un exercice
comme celui-là à part entière qui rendrait justice à la hauteur de ce que la députée
veut faire, et d'autres aussi,
et... Bien, voilà. Moi, je serais intéressé à participer à l'exercice, par exemple. J'aurais beaucoup d'intérêt à faire ça. Mais je comprends
que le message que la députée veut envoyer...
Mais je ne vois pas d'opposition, par contre,
là, entre ce qu'on veut faire puis rassurer. Donc, je voulais envoyer ces
nuances-là au centre des échanges pour préciser qu'on peut continuer sans
l'amendement, puis ça va être correct. Mais on peut l'avoir en tête, comme
législateurs, aussi pour la suite, cette sensibilité-là.
La Présidente (Mme Thériault) :
D'autres commentaires? Donc, s'il n'y a pas d'autre commentaire, on est prêts à
mettre aux voix l'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Thériault) :
Rejeté, mais on me demande un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
La Secrétaire : Veuillez
répondre pour, contre ou abstention. Mme Ghazal (Mercier)?
Mme Ghazal : Pour.
La Secrétaire : M. Jolin-Barrette
(Borduas)?
M. Jolin-Barrette : Contre.
La Secrétaire : M. Lévesque
(Chapleau)?
M. Lévesque (Chapleau) : Contre.
La Secrétaire : M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
La Secrétaire : M. Provençal
(Beauce-Nord)?
M.
Provençal : Contre.
La Secrétaire : Mme
Guillemette (Roberval)?
Mme Guillemette : Contre.
La Secrétaire : M. Skeete
(Sainte-Rose)?
M. Skeete : Contre.
La Secrétaire :
Mme David (Marguerite-Bourgeoys)?
Mme David : Abstention.
La Secrétaire : M. Birnbaum
(D'Arcy-McGee)?
M. Birnbaum : Abstention.
La Secrétaire : M. Bérubé
(Matane-Matapédia)?
M.
Bérubé :
Abstention.
La Secrétaire : Et Mme Thériault
(Anjou—Louis-Riel)?
La Présidente (Mme Thériault) :
Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Puisque...
Est-ce qu'il y a d'autres amendements à l'article
n° 1? Je ne crois pas. Donc, à ce moment-là, on peut
faire la discussion sur l'article n° 1. On est rendus
à faire la discussion sur l'entièreté de l'article tel que nous venons de
l'amender à quatre reprises. Oui, M. le député de Matane-Matapédia.
M.
Bérubé : Là, on
revient sur le n° 1. C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault) : On
revient sur le n° 1, oui.
• (18 h 50) •
M.
Bérubé :
Bon, vous allez me dire si je suis correct en disant ça. Quand c'est écrit,
puis ça va nous guider pour l'ensemble du projet de loi : «L'Assemblée
nationale reconnaît que le français est la langue commune de la nation
québécoise», d'accord. Ma question au ministre, tiens : Pourquoi on
n'indique pas, partout dans le projet de loi, «la seule langue commune de la
nation québécoise»? Moi, c'est une précision qui m'importe et qui pourrait nous
guider tout au long de l'étude du projet de loi.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, vous aurez noté qu'à l'article 2,
O.K., là, je vais un petit peu plus loin, mais on vient dire que...
Excusez-moi, pas à l'article 2. On vient indiquer précisément «la seule langue
officielle»...
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : Oui, à l'article 2 du projet de loi, pardon, c'est
ça, on vient ajouter : «Le français est aussi la langue commune de la
nation québécoise et constitue l'un des fondements de son identité et de sa
culture distincte. Seule cette langue a ce statut.» Donc, à 1, à
l'article 1 de la Charte de la langue française, mais à l'article 2
du projet de loi n° 96, on vient dire : «Le français est la langue
officielle du Québec. Seule cette langue a ce statut.»
Donc, la langue
officielle du Québec, c'est la langue de l'État, la langue des lois, la langue
de la justice. C'est la langue officielle du Québec. Il n'y a qu'une seule
langue officielle au Québec. Le concept de langue commune, c'est un concept
qu'on vient insérer à la fois dans la loi 101 et dans le projet de loi
n° 96. Et l'objectif, c'est qu'on vient dire : La langue commune au
Québec, c'est le français. C'est la langue publique commune, c'est elle qui
permet de tisser des liens. C'est elle qui, dans l'espace public... bien, c'est
elle qui fédère les gens et c'est la langue d'intégration. La langue publique,
là, c'est lorsque vous sortez travailler, lorsque vous discutez avec des gens
de différentes origines, de partout à travers le monde. C'est la langue qui
nous unit, c'est le tronc commun de la société québécoise, c'est l'assise de la
société québécoise.
M. Bérubé :
Alors, Mme la Présidente, pourquoi je dis ça au ministre? Parce qu'il se trouve
des personnes qui choisissent la position canadienne et qui disent : Ah
non! Moi, je suis au Canada, et il y a deux langues officielles. Alors, comment
on répond à ça, quand quelqu'un nous dit ça? Moi, j'ai choisi de venir habiter
au Canada, puis, quand j'ai prêté serment, on m'a dit que c'était un pays
bilingue. Donc, je suis au Québec, le Québec est au Canada, donc il y a deux
langues officielles.
Il m'apparaît que, si
on le précise, qu'il y en a une seule, ça enlève toute ambiguïté. En tout cas, moi,
je vais pouvoir m'appuyer sur cet article-là
du projet de loi en disant : Oh non! Voici le projet de loi n° 96, il
précise que c'est la langue
officielle, mais c'est la seule. On ajoute de la force, parce que cet
argument-là, il est bien réel. Vous pouvez dire ce que vous voulez. D'ailleurs, on se le fait dire
sur les réseaux sociaux lorsqu'on est indépendantiste ou le moindrement intéressé à la langue : Au Canada, il y a
deux langues. C'est pour ça que je l'évoque au bénéfice du ministre et des
collègues.
La Présidente (Mme
Thériault) : M. le ministre.
M.
Jolin-Barrette : C'est bien noté.
M. Bérubé :
Bien, en fait, c'est noté, mais allez-vous faire quelque chose avec ça?
M.
Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, c'est très bien établi que la
seule langue officielle du Québec, c'est le français. Puis avec le... dans le
libellé, là : «L'Assemblée nationale reconnaît que le français est la
langue commune de la nation québécoise», donc on dit c'est quoi, la langue de
la nation québécoise. La langue commune de la nation québécoise, c'est le
français.
M. Bérubé :
Je repose ma question différemment : En quoi d'ajouter «seule» rendrait
les choses moins claires qu'avec la formulation actuelle?
M.
Jolin-Barrette : ...Mme la Présidente. Ce ne sera pas bien long.
M.
Bérubé :
Vous ne m'avez pas vu venir.
M.
Jolin-Barrette : Bien, si le député de Matane-Matapédia souhaite que
nous spécifiions «seule langue commune de la nation québécoise», moi, je n'ai
pas d'enjeu à le faire, parce que c'est véritablement ça. La nation québécoise
s'exprime en français, c'est la langue officielle de l'État et c'est la seule
langue commune au Québec, à ne pas confondre avec la langue d'usage.
M.
Bérubé : Exact. D'ailleurs,
ça a déjà fait l'objet d'un débat, la langue d'usage, dans
les excuses de M. Rousseau, vous vous souvenez?
Donc,
comme le ministre l'utilise, lui, verbalement, de sa position dans
cette commission, il peut dire «seule», et qu'il accueille favorablement
cet argument, puis-je évoquer que ça pourrait faire l'objet d'un amendement qui
serait accepté par le ministre? Est-ce que c'est ce qu'il nous suggère?
M.
Jolin-Barrette : Je suis très ouvert à accepter un tel amendement.
M.
Bérubé :
Pourrait-il m'en donner une garantie pour ne pas que je travaille pour rien?
M. Jolin-Barrette : On pourrait
même, Mme la Présidente, le rédiger et le soumettre au député de
Matane-Matapédia pour qu'il puisse le déposer.
M.
Bérubé : Je
pourrais même laisser la paternité de cet amendement-là au ministre puis je
n'aurai pas de problème. Il a plus de monde pour l'aider à monter ça.
M. Jolin-Barrette : Écoutez, ma
paternité est déjà établie à deux reprises. Je peux... À la guise du député de Matane-Matapédia.
Je n'en serai pas jaloux. Écoutez, on peut avoir un projet parental, Mme la
Présidente, ensemble.
La Présidente (Mme Thériault) :
Coparentalité.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, je comprends, M. le ministre, que...
M.
Bérubé : Bien, si
le ministre... (panne de son) ...un amendement, je l'appuie.
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est ça. Je comprends, M. le ministre, que vos légistes vont s'affairer à
préparer un amendement qui sera déposé par le député de Matane-Matapédia.
M. Jolin-Barrette : Exactement.
M.
Bérubé : Vous
suivez avec intérêt nos travaux. Vous comprenez pourquoi je propose ça.
La Présidente (Mme Thériault) : Je
suis toujours avec beaucoup d'intérêt ce qui se dit.
M.
Bérubé : Mais vous
avez compris pourquoi je propose ça.
La Présidente (Mme Thériault) : Oui.
M. Bérubé : Parce qu'il y a des
petits malins, là... Puis d'ailleurs ça fait l'objet d'une de nos propositions
qui va venir plus tard, que les députés de l'Assemblée nationale repassent
après les cérémonies d'assermentation des nouveaux arrivants en disant :
On vous a dit que c'était bilingue, mais, au Québec, ce n'est pas tout à fait
ça, puis il n'y a personne pour le dire. Mais là il y aura l'amendement qui va
le dire dans la loi.
Puis, plus tard, je vous parlerai de ma proposition
que les députés de l'Assemblée nationale rencontrent les immigrants québécois
après les fédéraux pour leur dire : égalité entre les hommes et les
femmes, primauté du français, laïcité, et ça, je pense que ce sera pertinent.
Mais ça, c'est un autre projet.
La Présidente (Mme Thériault) :
...donc je me fie sur l'équipe des légistes pour préparer l'amendement qui aura
votre paternité, avec coparentalité du ministre.
Mais j'ai
quand même une intervention sur l'article 1, avec la députée de
Marguerite-Bourgeoys. Donc, ça permet aux
légistes de nous faire la rédaction. Quand ça sera prêt, vous l'enverrez au
secrétariat. À ce moment-là, on reviendra voter l'amendement qui sera
déposé par le député de Matane-Matapédia. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Merci. Bien, moi,
c'était pour faire suite à la discussion, où je trouve que le ministre a dit
oui vite, très, très vite. Mais je reviens au départ. Il faut écouter les mots,
là. Le député de Matane-Matapédia a dit : Ça, là, ça va avoir des
conséquences sur toute la suite des choses.
Alors, j'ai comme l'impression... L'adage qui me
revient, c'est : Qui trop embrasse mal étreint. On est dans la
coparentalité, on va continuer dans ça. Quelle est l'intention du ministre...
du député de Matane-Matapédia de faire adopter ça au ministre? Et est-ce que le
ministre a entendu la même chose que moi? Est-ce qu'on va mettre cette
insistance partout, partout, partout dans le projet de loi? J'ai l'impression
que c'est un peu ça que je vois venir.
Moi, je savais, on le sait tous, qu'il y a l'article 2,
«seule la langue officielle — je ne sais pas trop, là — est
le français». C'est la seule langue officielle, ou je ne sais pas quoi. Je veux
dire, à un moment donné, ça insiste, comme on dit, là. Ça insiste, là. C'est
comme...
Alors, je veux comprendre la facilité, la
rapidité. Parce que, si vous l'aviez voulu, vous l'auriez mis, j'imagine, dès
le départ. Est-ce que c'est le seul endroit, ou partout on va faire un
«Ctrl+F», ou je ne sais pas quoi, puis, dès
qu'on va parler de français, on va mettre le mot «seule»? Je m'inquiète un
petit peu de l'étendue que ça va prendre.
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M.
Jolin-Barrette : En fait, pourquoi ne pas l'avoir spécifié dès le
départ? Simplement parce que le concept même de langue commune, pour la nation québécoise,
fait état du fait que c'est la seule langue de rencontre, de connexion, que ça
soit au niveau du travail, que ça soit dans la sphère publique, que ça soit la
langue des communications interculturelles, que ça soit la langue
d'intégration. Donc, c'est sous-entendu. Lorsqu'on parle de langue commune, au Québec, on s'entend que c'est
le français, donc que c'est la seule langue commune à travers laquelle les gens de toutes les régions, les gens de
partout à travers le monde, lorsqu'ils sont au Québec, bien, ça se passe en
français.
Donc, vous avez la langue officielle de l'État,
le français, mais vous avez également ce que nous souhaitons faire au Québec,
de faire en sorte que, dans les différents pans de la société, lorsque les gens
se retrouvent dans l'espace commun, bien, le tronc commun, il soit cimenté et
supporté par la langue française. Ce que l'on souhaite, c'est que la langue
publique commune, ça soit le français.
Alors, moi, quand le député de Matane-Matapédia
dit : On devrait mettre «seule», bien, c'est implicite que c'est à
l'intérieur de tout ça. Et donc, dans le projet de loi... On ne fait pas
référence souvent à la langue commune, hein? C'est ça. On fait référence dans
le préambule mais pas dans le reste du projet de loi.
• (19 heures) •
La Présidente (Mme Thériault) : J'ai
le député de Matane-Matapédia qui voulait intervenir, puisque c'est à sa
suggestion qu'il y a un amendement qui est en rédaction.
M. Bérubé : Comme
on m'interpelle, j'entends le questionnement de la députée de Marguerite-Bourgeoys,
mais je n'entends pas sa crainte, à la députée, pourquoi ça serait problématique
pour la députée qu'on l'ajoute. Moi, je vous ai dit pourquoi j'aimerais qu'on
l'ajoute. Parce que, notamment, pour les nouveaux arrivants au Québec, cette
précision-là n'existe pas. Et je vous mets au défi de voir combien de fois
c'est entendu que... Il y a le Canada puis il y a le Québec qui est distinct à
telle enseigne, que sa langue officielle, sa langue commune, c'est le français.
Ce n'est pas si clair que ça dans la cérémonie d'assermentation.
Alors, j'ai reprécisé pourquoi, moi, je voulais
le faire. Je me réjouis que le ministre soit intéressé à aller de l'avant, mais
j'aimerais entendre la députée de Marguerite-Bourgeoys sur qu'est-ce qui serait
problématique à le faire. Ça serait préjudiciable pour qui de préciser que
c'est la seule langue officielle?
La Présidente (Mme Thériault) :
Merci. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David : Alors, écoutez, ce
n'est pas préjudiciable, et puis que le député de Matane-Matapédia soit
rassuré, ma question, c'est... On pourrait mettre «seule et unique». Je
pourrais faire un autre sous-amendement, «seule et unique langue commune», à la
limite, là, on... mais ça s'en vient dans l'article 2.
Alors, je me
disais... Je ne suis pas nécessairement contre, mais, si ça se retrouve partout dans le projet de loi... ce que je n'ai jamais fait, moi, là, de faire
un... on appelle ça un «Ctrl+F» ou je ne sais pas quoi. Si
vous me rassurez que ça ne vient pas 50 fois puis qu'on va avoir
50 fois cette conversation-là, cet échange-là, bien, écoutez, c'est...
Comme on le dit à l'article 2 puis qu'on n'est pas contre l'article 2,
ça serait un peu... ça serait superfétatoire de dire qu'on est contre l'article 1
avec la modification du député de Matane-Matapédia. Mais je voulais souligner
que je m'inquiétais un peu d'en mettre trop, d'être trop insistant, parce que
j'avais l'impression que c'était assez clair avec l'article 2.
M. Jolin-Barrette : En fait, ce
que l'on va faire, dans le fond, déjà, comme avec la langue officielle, on
vient spécifier à l'article 1 que le français, c'est la seule langue
officielle de l'État, donc, on va faire un amendement à l'article 2 également
pour dire que c'est la seule langue commune. Puis, pour le reste de la loi, à
cause de l'interprétation légistique, on n'a pas besoin de le réécrire partout
à travers la loi. Donc, ça ne revient pas. Puis on parle peu de langue commune dans le projet de loi, à l'exception
d'un titre d'une section, qui parle de langue commune, notamment sur la
langue d'intégration des personnes immigrantes. Donc...
Mme David : Donc, est-ce
qu'on peut s'attendre à ce que le
titre va changer puis... être la seule langue commune d'intégration?
C'était un peu le sens de...
M. Jolin-Barrette : Où ça?
Mme David : Bien, dans... Vous
dites que ça revient plus loin, là.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans
le fond, il y a une section qui... qu'on parle de langue commune, mais ça ne
sera pas nécessaire d'indiquer, dans le titre, «seule langue commune».
Dans le fond, vous me demandiez... La députée de
Marguerite-Bourgeoys me demandait : Est-ce que ça revient à plusieurs
reprises? Non, ça ne revient pas à plusieurs reprises, mais on va juste le
faire à l'article 1 puis à l'article 2. Mais, en fait, pour la langue
commune, à l'article 2, on va venir spécifier là puis on n'aura pas besoin
de venir le spécifier dans le reste du projet de loi.
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça va? Donc, je comprends que, la discussion, elle est close. On attend
de recevoir l'amendement de l'équipe des légistes du ministre, qui portera la
paternité du député de Matane-Matapédia. Nous avons compris également, M. le ministre,
que, dans l'article 2, vous nous annoncez un amendement. C'est ce
qu'on comprend.
M.
Jolin-Barrette : ...il va y avoir l'ajustement pour répercuter la
modification.
La Présidente (Mme
Thériault) : Absolument. Donc, c'est ce qu'on appelle une modification
de concordance pour que le... autant dans le
préambule que dans la loi, qu'on ait le même terme aux deux endroits.
Donc...
M. Jolin-Barrette : Ça ne sera pas bien long avant que ça s'achemine. Je peux répondre à
d'autres questions, s'il y a d'autres questions sur l'article.
La Présidente (Mme
Thériault) : Parfait. Est-ce qu'il y a d'autres questions ou
commentaires sur l'article 1, dans d'autres paragraphes?
Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.
Mme David :
Ça aussi, un peu comme l'introduction du député de Matane-Matapédia, ça fait
partie de la doctrine... vous savez, pour
écrire ce projet de loi là, le concept de souveraineté parlementaire, il
revient assez souvent, et c'est un concept qui vient même du droit
britannique, et puis, bon, c'est quand même... vous ne l'avez pas inventé, mais
vous l'utilisez avec plaisir, ce concept-là, disons-le comme ça, et...
Mais je voulais vous
entendre là-dessus. Je voulais un petit cours 101 du ministre sur son
appréciation de ce concept-là, parce que ça va vous servir à plusieurs sauces
et dans plusieurs articles. C'est toujours en filigrane de votre réflexion,
votre pensée puis de la rédaction de la loi. Alors, comme c'est quand même...
et particulièrement, pour le recours aux
dispositions de dérogation, particulièrement pour ça, c'est une des
conséquences, je dirais, directes. On est souverains. C'est le
Parlement. Le gouvernement... les juges, on n'en veut pas, etc. C'est très,
très... Bon, on sait votre appréciation du rapport avec la justice, mais la
souveraineté parlementaire, c'est quelque chose qui dit : Ce sont les parlementaires qui sont souverains avant
le recours aux chartes et puis aux... que les juges décident pour nous.
Ça, c'est beaucoup, beaucoup dans la réflexion aussi du rapatriement de la
Constitution, là, la question du recours aux dispositions
de dérogation qui, je le répète, ne venaient pas du Québec, venaient de
provinces anglophones, mais dont le Québec s'est beaucoup... a beaucoup
utilisé entre 1982 et 1985 et après ça. Mais, la souveraineté parlementaire...
je vais m'arrêter de parler parce que je voudrais vous entendre sur votre
appréciation de ce concept-là.
M.
Jolin-Barrette : Bien, en fait, je vous dirais, dans un premier temps,
que ce n'est pas en lien avec les rapports avec la justice, mais plutôt c'est
dans une conception de rapport avec la démocratie. Et ça, je pense que c'est
fondamental, parce que le rôle que l'on joue tous aujourd'hui... On est dans
une démocratie élective, représentative, et je pense que la nation, hein, les
Québécoises et les Québécois qui font le choix de leurs représentants, notre
système fonctionne du fait que la légitimité des élus provient de la nation,
provient du peuple, provient des citoyens. Et on est dans un régime
parlementaire qui fait en sorte que nos lois sont votées par un parlement élu.
On est tous élus comme législateurs, dans un premier temps. Ensuite, certains
se retrouvent à l'exécutif, désignés par le premier ministre, et le troisième
pouvoir, c'est le pouvoir judiciaire.
Vous l'avez bien dit,
la députée de Marguerite-Bourgeoys l'a bien dit, il est arrivé un événement
traumatique en 1982 avec le rapatriement de la Loi constitutionnelle de
1867 et l'adoption de la Loi constitutionnelle de 1982, avec l'instauration
d'une charte, la charte des droits et libertés, donc la charte canadienne,
auxquelles l'État québécois n'a jamais adhéré. Et on s'entend, à la fois les
gouvernements successifs du Parti québécois, du Parti libéral de Robert
Bourassa, à nouveau du Parti québécois, à nouveau du Parti libéral et désormais
de la Coalition avenir Québec, aucune des
formations politiques, de quelle couleur politique qu'elle soit, n'a adhéré à
ce rapatriement, à cette modification
constitutionnelle là. Et il y a des décisions de la Cour suprême là-dessus. Et
ce que ça fait comme nation, comme État fédéré à l'intérieur du Canada,
c'est qu'on doit s'assurer de protéger les droits de la nation québécoise.
On est dans une
situation où on est une minorité. Il y a 8,5 millions de Québécois,
environ 7,5 millions de Québécois de langue française. La langue commune
au Québec, c'est le français. La langue officielle du Québec, c'est le
français. On doit, dans l'océan anglo-saxon nord-américain, mettre en place des
mesures pour protéger la langue française. On voit le déclin qu'il y a de la
langue française, et tout le monde l'a constaté... qui sont venus en commission
parlementaire, à part quelques personnes qui mettaient en doute la vigueur du
français au Québec, mais ça fait pas mal l'unanimité que le français est en
déclin.
Partant de là, c'est
nécessaire d'adopter une loi qui va freiner le déclin, mais, pour ce faire, il
faut assurer cet... en fait, je vous dirais, il faut garantir à la nation
québécoise que cette loi-là pourra s'appliquer. Et surtout, sur le principe de
souveraineté parlementaire, on dit : C'est tellement important, le français,
pour le Québec, c'est tellement important pour l'identité de la nation québécoise,
la spécificité du Québec, les valeurs sociales distinctes qui sont associées à l'État québécois, que l'on dit :
Bien, ce choix-là, là, ce choix fondamental de protéger l'identité québécoise,
ce choix fondamental de protéger l'identité de la nation québécoise, nation
inclusive par rapport... par ailleurs, qui inclut les Québécois d'expression
anglaise, qui inclut les membres des nations autochtones, qui inclut l'ensemble
des personnes qui ont choisi de venir s'établir au Québec, bien, ce choix-là de
cette nation québécoise là, elle s'exprime en français. Et ça revient aux élus
de la nation québécoise de dire : Bien, c'est comme ça que la langue
française sera protégée au Québec, donc d'où l'importance de référer à la
souveraineté parlementaire du mandat électif que nous avons eu par rapport,
notamment, au rôle du judiciaire.
Et vous l'avez dit,
vous avez dit : Il y a une disposition de dérogation qui existe, à la
demande des provinces anglophones, bien entendu. Mais il ne faut pas oublier de
dire que, dans le fond, c'est un deal qu'il y a eu sans le Québec, puis, encore
aujourd'hui, on subit les conséquences dommageables, tristes et affligeantes de
ce choix-là qui a été fait à l'époque. Puis, comme élus de la nation
québécoise, on doit tous faire en sorte de permettre à la spécificité
québécoise de s'exprimer, d'où la référence à la souveraineté parlementaire.
La Présidente (Mme
Thériault) : Mme la députée.
Mme David : Non, c'est parce que
j'attendais la petite lumière rouge.
• (19 h 10) •
La Présidente (Mme Thériault) :
C'est parfait.
Mme David : Mais, O.K., j'entends
tout ça, puis c'est exactement ce que j'avais... la lecture que je faisais de
la réflexion que vous vous êtes faite et de tout ce que j'ai lu là-dessus. Il
ne faudra pas, cependant, que ce recours justifie tout et son contraire, et
c'est ça... et c'est là que nous serons très vigilants, quand il sera question
du recours aux dispositions de dérogation, que ça ne brime pas un certain
nombre de choses fondamentales auxquelles vous croyez autant que moi, par exemple, le secret professionnel, par
exemple, des enquêtes qui seraient nettement exagérées, sans aucun
mandat. Et ça, c'est comme emporté, inclus dans un — oh! j'allais dire un
mot anglais — dans
un... je cherche le mot... dans un tout, sous le prétexte de la souveraineté
parlementaire.
Alors, je comprends ce que vous dites, je
comprends l'histoire, je comprends tout ça, mais il ne faut pas mettre sur les épaules ou le dos de la souveraineté parlementaire des processus qui pourraient être nettement exagérés et qui, là, peuvent
venir brimer... Et ça, ce n'est pas que des anglophones qui l'ont dit,
d'expression anglaise, c'est plein de monde qui sont venus dire :
Attention, parce que c'est une tempête qui peut frapper fort et qui emporte sur
son passage des choses qu'on ne veut pas nécessairement qui soient emportées.
On n'a pas besoin d'en discuter tout de suite,
mais c'est clair qu'il ne faut pas automatiquement associer... parce qu'on dit
qu'on est d'accord que le Parlement peut être souverain à l'égard de l'adoption
des lois, que ça ne donne pas une clé universelle, un passe-partout pour tout
ce qui peut être soumis aux dispositions de dérogation. C'est juste ça que je
veux dire. Et je l'ai annoncé, de toute façon, on l'a dit plusieurs fois, mais
plusieurs sont venus nous dire : Attention, il y a quand même des choses
où les droits peuvent être très menacés. Je n'ai pas dit «tous», j'ai dit
«certains droits».
La Présidente (Mme Thériault) : M.
le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui, rapidement.
Je crois que l'amendement est prêt, mais, pour le député de Matane-Matapédia,
juste en réponse à ça, il faut juste distinguer «souveraineté parlementaire» et
«utilisation de dispositions de souveraineté parlementaire», parce qu'on vient
insérer également les droits individuels versus les droits collectifs aussi. Alors, c'est un équilibrage et c'est un
message également qu'on envoie au monde judiciaire pour dire :
Écoutez, ce sujet-là, il est important, et
c'est important de protéger la langue française. Mais on aura l'occasion d'en
discuter abondamment.
Alors, pour l'amendement, je ne sais pas si le
député de Matane-Matapédia...
La Présidente (Mme Thériault) :
...Matane-Matapédia, est-ce que vous avez l'amendement devant vous? Si vous
nous en faites la lecture, on aura peut-être le temps de le voter. Il reste une
minute.
M.
Bérubé : Je
pars : «L'Assemblée nationale reconnaît que le français est la seule
langue commune de la nation québécoise et qu'il est déterminant que tous soient
sensibilisés à l'importance de cette langue et de la culture québécoise comme
liants de la société. Elle est donc résolue à ce que chacun ait accès à
l'apprentissage de cette langue, à en parfaire la connaissance et la maîtrise,
ainsi qu'à faire du français la langue de l'intégration.»
C'est ça?
La Présidente (Mme Thériault) :
Donc, ça, c'est l'article qui serait tel qu'amendé...
M.
Bérubé : Oui, oui,
je l'ai lu au complet, là.
La Présidente (Mme Thériault) :
...mais l'amendement, c'est : À l'article 1 du projet de loi, insérer,
dans l'alinéa du préambule de la Charte de la langue française que propose le
paragraphe 1° et après «français est la», «seule». Donc, c'est l'amendement qui
est proposé.
M.
Bérubé : C'est-tu
correct ou...
La Présidente (Mme Thériault) : Ça
va. Oui, je viens de vous le lire pour la bonne compréhension de tout le monde.
Donc, est-ce qu'il y a des interventions ou on met aux voix? On peut mettre aux
voix? Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Thériault) : Adopté.
Donc, compte tenu de l'heure, j'ajourne les
travaux sine die.
(Fin de la séance à 19 h 15)