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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, November 25, 2020 - Vol. 45 N° 74

Special consultations and public hearings on Bill 69, An Act to amend the Cultural Heritage Act and other legislative provisions


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Table des matières

Auditions (suite)

Ville de Québec

M. Charles Breton-Demeule

Table de concertation des organismes nationaux en patrimoine bâti du Québec (TCONPB)

Mme Phyllis Lambert

Autres intervenants

Mme Nancy Guillemette, vice-présidente

Mme Nathalie Roy

Mme Isabelle Melançon

Mme Kathleen Weil

Mme Ruba Ghazal

*          M. Régis Labeaume, ville de Québec

*          Mme Marie-Josée Savard, idem

*          M. Guy Bessette, TCONPB

*          Mme Lise Cyr, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-sept minutes)

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, bon matin, tout le monde. Donc, bienvenue à la Commission culture, éducation. Avant de commencer officiellement la captation, je vous demanderais à tout le monde de... Notre captation est débutée, M. le... D'accord. Donc, je demanderais à tout le monde de bien vouloir éteindre leurs appareils électroniques.

Donc, la commission est réunie afin de poursuivre les auditions sur le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme St-Pierre (Acadie) est remplacée par Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce); Mme Labrie (Sherbrooke), par Mme Ghazal (Mercier); et Mme Hivon (Joliette), par M. Bérubé (Matane-Matapédia).

La Présidente (Mme Guillemette) : Parfait. Est-ce qu'il y a des votes par procuration?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Lemieux (Saint-Jean) dispose d'un droit de vote par procuration au nom de M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) et M. Émond (Richelieu), et Mme Melançon (Verdun) dispose quant à elle d'un droit de vote par procuration au nom de Mme Rizqy (Saint-Laurent).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Guillemette) : Parfait. Merci beaucoup. Donc, avant de débuter, je vais vous mentionner que je vais être très stricte sur le temps aujourd'hui parce qu'on commence un peu en retard et on a un groupe parlementaire, là, qui doit vraiment quitter à l'heure. Donc, je vais être très, très stricte sur le temps.

Donc, je vous souhaite la bienvenue, M. Labeaume, ainsi qu'à votre équipe. Et vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé, et ensuite il y aura un échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite tout de suite à débuter.

Ville de Québec

(Visioconférence)

M. Labeaume (Régis) : Merci. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, messieurs dames les députés, je remercie la commission de nous permettre de présenter nos commentaires sur le projet de loi n° 29. Je suis accompagné de Marie-Josée Savard, vice-présidente du comité exécutif de la ville de Québec, responsable des dossiers d'aménagement du territoire et du patrimoine, ainsi que de Mme Alicia Despins, membre du comité exécutif et responsable des dossiers relatifs à la culture.

D'emblée, soulignons que nous accueillons favorablement le projet de loi. Dans ce mémoire, nous suggérons en premier lieu quelques bonifications au projet de loi dans le but d'améliorer la cohérence des interventions entre les paliers municipal et gouvernemental au plan de l'identification et de la protection du patrimoine culturel.

Nous proposons également d'améliorer les moyens nous permettant de veiller à l'entretien des bâtiments. Et vous trouverez, en fait, en annexe une série d'amendements que nous recommandons et qui, nous l'espérons, alimenteront de manière constructive les travaux de cette commission.

Il importe, d'entrée de jeu, de rappeler que, pour la ville de Québec, la préservation et la mise en valeur du patrimoine revêtent une importance capitale. Il est primordial d'assurer la pérennité de son caractère historique exceptionnel. Et la ville s'est d'ailleurs dotée d'une Vision du patrimoine 2027 afin de faire de Québec une capitale où le patrimoine est au coeur du développement urbain, culturel, social et économique.

• (11 h 40) •

Québec est la ville de la province qui compte le plus grand nombre de sites patrimoniaux déclarés, dont le site patrimonial du Vieux-Québec, berceau de l'Amérique française et joyau du patrimoine mondial de l'UNESCO. Notre ville compte trois autres sites patrimoniaux déclarés, situés à Beauport, Charlesbourg et Sillery. Ces quatre sites totalisent près de 2 700 bâtiments, témoins de quatre siècles d'histoire et d'évolution. Notre ville compte également plus de 1 000 sites archéologiques répertoriés, un patrimoine religieux d'importance comprenant plus de 60 églises et autant d'ensembles conventuels.

Consciente de l'importance et de la qualité de ce patrimoine, la ville de Québec s'applique depuis des décennies à le conserver, à l'étudier et à le mettre en valeur. Elle le fait en concertation avec ses citoyens et citoyennes, et soulignons d'ailleurs que, depuis sa création en mai 2012, la Table de concertation du Vieux-Québec s'emploie à établir des consensus sur les orientations, les interventions et les actions à mettre en oeuvre pour un développement équilibré du Vieux-Québec. Cette table regroupe des acteurs des secteurs public, culturel, institutionnel et associatif.

Au fil des ans, la ville de Québec a donc développé une vaste expertise en gestion du patrimoine, expertise dont bénéficie également la Commission d'urbanisme et de conservation de Québec, la CUCQ. Celle-ci exerce un contrôle sur l'implantation et l'architecture des constructions, et les travaux qui y sont reliés, dans tous les lieux visés par la Loi sur le patrimoine culturel et dans d'autres lieux désignés par le conseil de la ville de Québec.

Ce patrimoine, il faut le préserver, mais il faut également le garder vivant. Et, j'insiste là-dessus, le Vieux-Québec doit demeurer un milieu de vie habité par des résidents permanents, et cet objectif est inscrit dans le plan d'action adopté en 2016 par la table et dans notre Vision du patrimoine. Et nous déplorons qu'au cours des dernières années plusieurs projets résidentiels dans le Vieux-Québec aient essuyé un refus du ministère pour des motifs que nous ne partagions pas ou que nous ne comprenions pas. Parfois, les délais de traitement du projet ont été trop beaucoup trop longs. Dans d'autres cas, les modifications demandées lui faisaient perdre toute rentabilité. Ces projets avaient pourtant fait l'objet de consultations publiques. Ils avaient été rigoureusement analysés, discutés, bonifiés, à la demande de la ville de Québec, et, finalement, approuvés par la CUCQ. Et plusieurs de ces projets avaient été travaillés aussi en collaboration avec la table.

Au cours des cinq dernières années, neuf projets ainsi avalisés par la CUCQ auraient permis d'ajouter 430 logements de qualité dans le Vieux-Québec, ce qui nous aurait permis d'atteindre notre objectif d'ajouter 500 nouveaux résidents permanents nécessaires à la vitalité du Vieux-Québec. De ce nombre, seulement 189 logements verront le jour à l'issue du processus décisionnel du ministère. À lui seul, le projet sur le site de Saint-Louis-de-Gonzague, que nous jugions acceptable, aurait permis d'ajouter 205 logements, dont des logements sociaux, pour des clientèles diversifiées.

Par conséquent, la ville de Québec accueille favorablement les dispositions du projet de loi qui encadrent la discrétion ministérielle par des critères prévisibles et qui imposent un délai de 90 jours au ministre pour rendre une décision. Nous sommes aussi très favorables à la nouvelle procédure permettant de demander la révision de cette décision et la possibilité pour la personne lésée de pouvoir la contester devant le Tribunal administratif du Québec, le TAQ. Et, à ce sujet, nous réclamons que le projet de loi soit modifié pour permettre à la ville de Québec d'intenter elle-même une demande de révision et un appel devant le TAQ lorsqu'un projet qui a reçu son approbation se voit refusé par le ministère. Et cela nous fournirait l'occasion de présenter notre vision de l'aménagement du site patrimonial et notre analyse de la façon dont le projet s'y intègre. Et cela éviterait au demandeur de se débattre seul entre nos autorités décisionnelles parfois contradictoires.

Par ailleurs, il est important de maintenir une cohérence dans nos orientations respectives relativement à l'identification du patrimoine culturel. Nous nous réjouissons de l'adoption d'une politique de consultation par la ministre et de la création d'une table des partenaires. Nous y entrevoyons la possibilité d'échanger sur les orientations relatives au classement de sites et d'immeubles patrimoniaux et à leur catégorisation.

Le projet de loi prévoit aussi que le conseil d'agglomération devra adopter et tenir à jour un inventaire des immeubles construits avant 1940 et présentant une valeur patrimoniale. Le mode de réalisation de cet inventaire sera déterminé par règlement de la ministre. Pour nous, il est très important que le mode de réalisation qui sera imposé tienne compte de la méthode adoptée à la ville de Québec, qui a été révisée en 2014 et qui est appliquée depuis 2015. Et l'inventaire déjà réalisé est considérable, et nous souhaitons qu'il soit reconnu.

L'accélération de ce travail d'inventaire nécessitera l'injection à court terme de ressources humaines et financières additionnelles. Nous demandons au gouvernement d'assumer les coûts de cette nouvelle responsabilité qu'il impose au monde municipal. Considérant le coût moyen d'évaluation patrimoniale d'un bâtiment, nous estimons qu'il en coûtera aux environs de 5 millions de dollars additionnels pour compléter l'inventaire.

L'un des plus grands défis dans la protection du patrimoine est de veiller en temps utile à l'entretien des bâtiments. Lorsqu'un bâtiment présente un intérêt patrimonial suffisant pour être protégé par la Loi sur le patrimoine culturel, le propriétaire peut généralement bénéficier d'une aide financière pour son entretien. Incidemment, les programmes d'aide gouvernementaux à cette fin sont déjà insuffisants pour répondre à la demande à Québec. Ils doivent être...

La Présidente (Mme Guillemette) : M. le maire, il vous reste deux minutes.

M. Labeaume (Régis) : 2 min 30 s, peut-être? J'achève, là, O.K.? J'achève.

Mme Roy : Mme la Présidente, vous pouvez...

La Présidente (Mme Guillemette) : Oui?

Mme Roy : M. le maire, bonjour, c'est Mme la ministre.

M. Labeaume (Régis) : ...

La Présidente (Mme Guillemette) : Attendez une minute, M. le maire. Oui.

Mme Roy : Oui. Bonjour, M. le maire. Bonjour, tout le monde. Écoutez, prenez-le sur mon temps. Poursuivez, M. le maire, c'est trop important, ce que vous avez à dire dans ce mémoire.

M. Labeaume (Régis) : Ça achève, là, madame, là.

Mme Roy : Parfait. Allez-y, prenez mon temps.

M. Labeaume (Régis) : Merci, Mme la ministre. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci, Mme la ministre. Je vous cède la parole, M. Labeaume.

M. Labeaume (Régis) : Alors, l'un des plus grands défis dans la protection du patrimoine est de veiller en temps utile à l'entretien des bâtiments. Lorsqu'un bâtiment représente un intérêt patrimonial suffisant pour être protégé par la Loi sur le patrimoine culturel, le propriétaire peut généralement bénéficier d'une aide financière pour son entretien. Incidemment, les programmes d'aide gouvernementale à cette fin sont déjà insuffisants pour répondre à la demande à Québec. Ils doivent être bonifiés et pérennisés, et nous appuyons cette revendication de l'UMQ.

Par ailleurs, pour les immeubles représentant un certain intérêt sans toutefois bénéficier du statut de protection, il importe tout de même de veiller à ce qu'ils demeurent dans un bon état d'entretien. Et les municipalités disposent, bien sûr, de pouvoirs réglementaires et de recours judiciaires pour y parvenir. Toutefois, il est souvent plus avantageux pour un propriétaire de négliger d'entretenir un immeuble jusqu'à ce que sa démolition soit inéluctable. Les délais associés aux contestations judiciaires peuvent être fatals à la survie d'un bâtiment. L'arrêt de chauffage ou une infiltration d'eau peut entraîner de graves dommages en peu de temps. Et j'achève. D'ailleurs, les critères de décisions pour juger d'une demande de démolition prévus dans le projet de loi n° 69 tiennent compte de l'état de l'immeuble, de la détérioration de son apparence et du coût de sa restauration. Les municipalités doivent donc pouvoir agir rapidement et efficacement pour forcer leur entretien avant que cette détérioration ne conduise inévitablement à devoir en autoriser la démolition.

Dans les séries d'amendements que nous détaillons en annexe, nous demandons donc des moyens additionnels à cette fin, dont la possibilité d'augmenter les amendes de façon à dissuader les propriétaires qui négligent d'entretenir leurs immeubles, des mesures facilitant l'expropriation de tels immeubles et à un juste prix, et, finalement, le pouvoir de forcer le transfert d'un immeuble négligé à un propriétaire intéressé à l'entretenir.

Et, en conclusion, la ville de Québec réitère son accueil favorable au projet de loi n° 69. Il contient des moyens qui, selon nous, permettront d'assurer plus efficacement les objectifs de cohérence, de transparence, de prévisibilité auxquels nous souscrivons. Les mesures qu'il prévoit imposent toutefois un fardeau considérable au monde municipal et il est impératif qu'il soit accompagné d'un financement conséquent, tant pour la réalisation de l'inventaire des immeubles patrimoniaux que pour l'élargissement du régime de contrôle des démolitions et pour la bonification des programmes de subvention à l'entretien des bâtiments.

Nous avons le défi, en tant que ville du patrimoine mondial, de préserver et de garder vivant le Vieux-Québec, ce remarquable legs du passé, pour nos générations futures. Il faut y attirer un nombre significatif de nouveaux résidents permanents. C'est un défi plus compliqué que s'il suffisait d'y apposer une cloche de verre. Nous souhaitons le relever en partenariat avec la ministre de la Culture et le gouvernement du Québec.

Enfin, il faut que notre ville dispose de moyens plus rapides et plus efficaces pour assurer l'entretien des bâtiments sans que l'ensemble des contribuables ne soient tenus de payer pour la négligence volontaire de certains propriétaires mus seulement par l'appât du gain, et nous proposons des moyens, selon nous, novateurs en ce sens et nous espérons qu'ils trouveront écho chez le législateur. Nous vous remercions.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, M. Labeaume. Donc...

• (11 h 50) •

M. Labeaume (Régis) : Est-ce que j'ai fait 11 minutes? Ça m'aide de le savoir.

La Présidente (Mme Guillemette) : Vous avez fait 12 min 50 s. Mais ça va, Mme la ministre vous a offert du temps, aucun problème. Maintenant, j'inviterais Mme la ministre à débuter son échange avec vous.

Mme Roy : Oui, bonjour à vous tous. Je vais mettre mon petit chronomètre. Contente de vous voir ce matin, contente de lire votre mémoire. Je ne suis pas surprise, M. le maire, je ne suis pas surprise. Nous avons eu l'occasion et le plaisir d'en discuter à quelques reprises.

Naturellement, la ville de Québec, c'est particulier. Quel caractère spécifique, la ville de Québec, le nombre élevé de bâtiments patrimoniaux, vous nous en avez fait mention, des secteurs entiers. On pense au Vieux-Québec, à Sillery, à Charlesbourg. Votre mémoire témoigne vraiment d'une administration qui... elle est soucieuse du patrimoine. Et on comprend que vous cherchez à le faire vivre le plus possible. Et ça, M. le maire, je partage ce sentiment avec vous. Pour moi, un bâtiment patrimonial ne doit pas être vide, il doit vivre. Puis c'est d'ailleurs une remarque que nous pouvons lire dans le rapport de la Vérificatrice générale du Québec, qui se questionnait sur l'usage et la destination des bâtiments qui sont préservés, donc leur trouver une vocation.

Par ailleurs, vous parlez... vous nous faites des recommandations à l'annexe II. Et je comprends que les grandes orientations, les grandes lignes du projet de loi, c'est-à-dire l'élaboration d'un inventaire, le fait, entre autres... ça ne vous touche pas dans votre cas, là, les MRC, mais le fait qu'on puisse, par exemple... que les citoyens puissent avoir... faire appel au TAQ... Je sais que vous demandez que la ville puisse faire affaire au TAQ, mais là, c'est toute une question de qualité devant le tribunal en question. C'est une question juridique.

Par ailleurs, le fait qu'il y ait cet inventaire, on est à la même page. Je sais que vous avez fait des travaux importants, que vos inventaires sont pratiquement tous faits, M. le maire, à Québec.

M. Labeaume (Régis) : 1940. Marie-Josée.

Mme Savard (Marie-Josée) : ...

Mme Roy : On ne vous entend pas, madame. On n'entend pas le son de madame.

Mme Savard (Marie-Josée) : Là, je pense qu'on va m'entendre. Vous m'entendez?

Mme Roy : Oui.

Mme Savard (Marie-Josée) : Donc, oui, en fait, il y a plus de 14 000 bâtiments qui ont été déjà inventoriés à la ville. On continue également à mettre à jour nos inventaires. Et, je vous dirais, en fait, c'est un travail de longue haleine, parce que... puis c'est la raison pour laquelle on soulève ce point-là dans notre mémoire. C'est qu'on est très rigoureux. On souhaite également... Quand je disais qu'on est en train de... on continue, mais également on met à jour parce qu'on veut s'assurer d'avoir les mêmes critères pour tout notre inventaire, donc d'avoir une cohérence pour pouvoir, justement, avoir un meilleur portrait de la situation. Donc, oui, un inventaire qui est quand même assez important, mais... et tout à fait conscient de l'importance également de cet inventaire-là, tout à fait.

Je vous dirais même qu'on porte une attention particulière... Dans notre inventaire, on a différents niveaux de classification et, dernièrement, on a même ajouté les valeurs patrimoniales, bonnes à nos exceptionnels et nos supérieurs, pour pouvoir avoir encore plus de rigueur autour de ces maisons-là, pour les contrôler davantage au niveau de la démolition.

Mme Roy : Et vous faites une... Vous nous demandez, à la troisième recommandation, que les coûts de réalisation de l'inventaire soient assumés par le gouvernement du Québec. Actuellement, si je ne m'abuse, au moment où on se parle, il y a des ententes de développement culturel qui sont particulières pour Québec et Montréal, qui sont des enveloppes beaucoup plus importantes compte tenu de l'importance de cette capitale et de la métropole. Et je crois comprendre que, via les ententes de développement culturel, c'est là que vous pouvez puiser les sources financières pour réaliser, entre autres, ces inventaires, donc, qui sont financés actuellement à 50 % par le gouvernement du Québec.

Mme Savard (Marie-Josée) : En fait...

Mme Roy : Oui, allez-y.

Mme Savard (Marie-Josée) : Pardon...

Mme Roy : Allez-y. Non, non, allez-y, nous échangeons. Allez-y.

Mme Savard (Marie-Josée) : En fait, je pense que le point qu'on voulait surtout soulever, c'est que nous, présentement, à la ville de Québec, notre inventaire commence avec les... en fait, à partir de 1950, là. Dans votre proposition, on parle de 1940. Donc là, c'est sûr que, pour nous, ça amène un inventaire supplémentaire.

Et également, pour ce qui est des ententes, vous avez raison, on a des sous, mais on est quand même conscients que, si on doit refaire l'inventaire au complet, et c'est pour ça qu'on soulève ce point-là, c'est que c'est des coûts très élevés. Donc, pour nous, c'est des efforts, bien sûr, qui ont été mis, mais également des coûts qui seraient quand même très élevés puisque nous devrions recommencer tout le processus au complet.

Mme Roy : Et c'est pour ça que je suis contente qu'on se parle, parce qu'effectivement ce n'est pas la mission et le but. Le but n'est pas de recommencer le travail rigoureux qui a été fait mais de le faire basculer éventuellement, centraliser éventuellement, pour que tout le monde voie ce qui existe au Québec. Parce qu'on n'a pas le portrait complet. Cependant, vous dites, chez vous, c'est 1950. Bien, écoutez, vous avez... c'est encore mieux. Et j'aimerais profiter de ce moment. Je pense que c'est l'article 120...

Mme Savard (Marie-Josée) : Si vous me permettez, je pense que c'est moi qui s'est trompé...

Mme Roy : Oui, allez-y.

Mme Savard (Marie-Josée) : ...c'est l'inverse, en fait. C'est ça qu'on me dit, là. On me regarde, là. Donc, pour nous, là, c'est l'inverse, là. Donc, ça demande un effort pour se rendre à 1940. Non?

Mme Roy : Non. En fait, vous allez me permettre, parce qu'on en parle beaucoup de ce 1940 depuis le début de cette commission. Donc, c'est le nouvel article 38 du projet de loi. Et je vais juste me permettre... On ne fait pas l'étude article par article, là, mais juste pour bien expliquer aux gens qu'un n'exclut pas l'autre, c'est un minimum. On demande à nos MRC, à nos villes : De grâce, mettez dans votre inventaire les bâtiments qui datent d'avant 1940, minimalement. Mais absolument rien n'empêche les villes de mettre dans l'inventaire des bâtiments de 1950, 1960, 1970, absolument rien, et c'est écrit textuellement que nous pouvons aller plus loin.

L'article 38, ici, nous dit, effectivement, voilà, l'article 38, qui introduit l'article 120 : «Une municipalité régionale de comté — ou toute autre municipalité, là, pour les besoins de la cause, là — doit adopter et mettre à jour périodiquement un inventaire des immeubles construits avant 1940 qui sont situés sur [le] territoire [...] qui présentent une valeur patrimoniale.» Et vous pouvez également y inclure des immeubles dont la construction est plus récente. Donc, il n'y a rien qui empêche les villes d'aller plus loin si elles le souhaitent et de dire : Bien, ce bâtiment-là, pour moi, de 1950, il est patrimonial pour les raisons que nous connaissons, que nous pouvons élaborer.

Donc, ce n'est pas... Et puis je pense que c'est le temps de le corriger, de mettre les pendules à l'heure parce que certains groupes ou certaines personnes comprennent que c'est un désaveu du reste du patrimoine après 1940 et qu'on ne s'en occupe pas, alors que c'est faux. Au contraire, c'est un minimum. On dit : Minimalement tout ce qui est avant 1940 doit impérativement, si ça a une valeur patrimoniale, être inventorié, mais vous pouvez mettre des constructions plus récentes. Alors, on axe vraiment sur l'autonomie des villes, l'autonomie des municipalités pour qu'elles nous disent ce que, selon elles, sont des bâtiments qui ont cette valeur patrimoniale, et qui datent d'années subséquentes et qui sont plus récents.

Alors, juste pour... Donc, vous, vous êtes déjà allés plus loin que ce que demandait la loi. Donc, c'est bon, vous n'aurez pas à recommencer, puis c'est parfait. Vous avez cette entière liberté. Alors, je voulais ici mettre les pendules à l'heure parce que certains ont cru comprendre que c'était... on envoyait balader les autres époques architecturales, et les autres courants architecturaux, et les autres immeubles patrimoniaux, ce qui n'est pas du tout le cas. C'est un minimum, et vous avez toute la liberté d'aller plus loin. Vous...

M. Labeaume (Régis) : Si je peux me permettre peut-être, Mme la ministre.

Mme Roy : Oui, oui, allez-y.

M. Labeaume (Régis) : Je veux insister sur la capacité de la ville de Québec d'aller en appel devant le TAQ. Parce que l'individu a le droit d'aller en appel, mais il n'est pas souvent équipé pour le faire. Et nous, cette capacité d'aller devant le TAQ, ça nous permet de contextualiser nos demandes et d'expliquer de quel environnement on souhaite accepter les permis de construction ou les projets qui nous sont soumis. Alors, je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, mais nous, honnêtement, ça nous aiderait beaucoup.

Mme Roy : Initialement, cet article-là a été mis là parce que, lors de nos discussions et à la suite aussi de la publication du rapport de la Vérificatrice générale, il était clairement énoncé qu'il y avait beaucoup... il y avait un... comment dirais-je, à l'égard des décisions, il y avait un manque d'information, un manque de clarté pour le contribuable ou le justiciable, le citoyen qui faisait une demande. Et c'est quelque chose que vous m'avez dit également. Et, pour ces motifs, nous nous sommes dit : Le citoyen, actuellement, n'a aucun recours, s'il se sent lésé, autre que les tribunaux de droit commun. Et vous savez comme moi qu'un tribunal de droit commun, bien, ça veut dire la Cour du Québec ou la Cour supérieure, et c'est excessivement cher. Je pense à un contribuable qui a...

M. Labeaume (Régis) : Mais on est tout à fait d'accord avec vous autres là-dessus, là.

• (12 heures) •

Mme Roy : Alors, je pense à un contribuable qui a un problème avec une décision, qui voudrait se faire entendre. Naturellement, il y aura le processus administratif, qu'on inclut parce qu'il n'y avait pas d'appel administratif ou de révision administrative qui existait. On en inclut un parce que ça n'existait pas dans l'ancienne loi. En fait, il n'y avait aucun recours pour le justiciable autre que le tribunal de droit commun, donc il n'y avait personne qui y allait.

Et par ailleurs, s'il n'a pas les réponses qu'il souhaite ou s'il n'y a pas de règlement qui lui convienne, il aura toujours la prérogative d'aller devant le Tribunal administratif du Québec, alors que c'est quelques... c'est très, très, très peu élevé, là.

M. Labeaume (Régis) : Mais on est tout à fait d'accord avec ça.

Mme Roy : Et c'était pour... l'idée était pour le justiciable, mais pour des décisions, comme je vous disais, à l'égard d'une décision pour une porte, une fenêtre, une toiture. Mais je vous entends. Je vois ce que vous nous dites et je...

M. Labeaume (Régis) : Parce que je pense vous l'avoir...

Mme Roy : On analysera toutes les demandes de modifications en temps opportun, mais je vois où vous voulez en venir avec cette proposition. Par ailleurs...

M. Labeaume (Régis) : ...là-dessus, Mme la ministre.

Mme Roy : Oui, allez-y.

M. Labeaume (Régis) : C'est très compliqué d'amener des résidents permanents dans le Vieux-Québec, ça coûte très cher, parce qu'il faut remettre à niveau le patrimoine. Et, si on perd le contrôle d'un centre-ville historique comme Québec, et c'est documenté, ça, c'est très difficile de le reprendre au long des années, par la suite. Et c'est pour ça que notre effort, nous autres, pour peupler le Vieux-Québec, est important. Et les projets qui sont amenés, à notre sens... Puis les gens de la Commission d'urbanisme à la ville de Québec, ce sont des gens de très grande qualité. Les gens étaient d'accord avec les projets dont je vous ai parlé, et, au ministère, on n'était pas d'accord. Et on a de la misère à comprendre pourquoi on ne l'est pas. On a l'impression qu'on est dans le discrétionnaire, et ce n'est pas vous, c'est vos fonctionnaires.

C'est compliqué, parce que notre objectif, nous autres, de peupler le Vieux-Québec, ça a beaucoup de conséquences, beaucoup de conséquences pour l'avenir, pour s'assurer que ce Vieux-Québec-là vit. Et, si les gens... Parce que les gens ont quitté le Vieux-Québec ça fait deux décennies. C'est un phénomène qui a commencé il y a très longtemps, et on fait notre effort pour tenter de repeupler, je vais le dire comme ça, de 500 individus, 500 individus, et honnêtement... et c'est pour ça qu'on veut avoir la chance de pouvoir aller défendre notre dossier auprès du TAQ, comme organisation. Je pense que c'est «fair». Parce que nous, c'est primordial, là. Perdre le contrôle du Vieux-Québec parce qu'il se dépeuple, là... Et on en pose, des gestes...

Mme Roy : Je pourrais employer la même expression que vous, être «fair», à l'égard des décisions qui sont prises et des critères, parce que vous me dites : Il semble y avoir beaucoup d'arbitraire, puis c'est nébuleux, puis c'est compliqué. Le projet de loi vise justement l'élaboration de critères. Ça va être écrit, ça va être public, ça va être clair. On veut donner une prévisibilité aux promoteurs, qu'ils sachent ce qu'ils pourront ou ne pourront pas faire. Construire une tour de 11 étages dans un site patrimonial déclaré, ça ne passe pas, puis ça va être écrit. Mais comment peut-on faire des ajouts? Comment peut-on... Les critères seront là, et ces critères-là seront définis, seront transparents.

Et il y a beaucoup de ça : la Vérificatrice générale parlait beaucoup d'un manque de transparence. Les gens sauront ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas faire avant de dire : Bon, on s'en va là, puis ensuite essayer d'avoir les autorisations. Ce besoin de transparence là, les administrations municipales les ont, les citoyens les ont, au premier chef, pour savoir ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas faire avec leur propre bâtiment, et tous, tous les entrepreneurs également qui ont des projets. Donc, c'est un souci de transparence auquel nous voulons répondre.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci, Mme la ministre. Je suis vraiment désolée, je dois passer la parole à la députée de Verdun pour continuer les échanges avec le groupe présent. Donc, Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Merci beaucoup. M. le maire, Mme Savard, Mme Despins, c'est un plaisir de vous recevoir ce matin à la commission.

J'ai lu attentivement, donc, le mémoire de la ville de Québec. En fait, j'aimerais ça qu'on puisse continuer justement sur le tribunal administratif, puis sur votre demande, parce que les gens qui suivent nos travaux... il y a sûrement aussi des résidents qui suivent les travaux actuellement, j'aimerais que vous puissiez expliquer, M. le maire, ce qui est compliqué justement d'aller au tribunal administratif. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, poursuivre là-dessus?

M. Labeaume (Régis) : Peut-être expliquer que, quand on a des projets dans le Vieux-Québec, c'est... tout d'abord, il y a des comités citoyens, il y a les conseils de quartier, en plus de ça, on a une table de concertation du Vieux-Québec, vous avez le conseil d'arrondissement, vous avez le conseil de ville, vous avez la Commission d'urbanisme. Tout le monde passe à travers de ça. C'est d'une transparence extraordinaire. Et, au bout du... Et, moi, je pense, tout d'abord, la culture des fonctionnaires de la ville de Québec, ça date de Gilles Lamontagne. Le patrimoine, c'est un diamant à Québec. Alors, la culture, à la ville de Québec, c'est qu'on préserve le patrimoine. Et, en plus de ça, on a une commission d'urbanisme qui est très compétente, avec des gens de très grande qualité.

Une fois qu'on a tout fait ça, où tout le monde est d'accord, on arrive au ministère, puis un fonctionnaire nous dit que ça n'a pas de bon sens. Et là on est à la merci de cette personne-là, et ça, c'est un grave problème. Puis là je ne parle pas des problèmes du promoteur. Puis, tu sais, les projets auxquels on dit oui, ce sont des projets pesés, dosés, balancés, avec plein de connaissances ici et ailleurs pour les évaluer, et là, nous, on est devant un refus et on est toujours dépourvus.

Et donc ce qu'on aime dans le projet de loi, c'est cette idée de pouvoir en appeler de ces décisions-là au TAQ. Sauf que c'est le propriétaire de l'édifice ou le promoteur qui peut y aller. Nous, à la ville de Québec, on veut avoir ce droit-là parce que c'est important de situer un projet dans son environnement patrimonial. Parce que, si on prend la bâtisse puis on fait juste parler de la corniche ou du demi-étage de plus, on n'y arrivera pas, si on n'explique pas l'environnement dans lequel ça se situe. Et ça, c'est la ville qui est équipée pour faire ça. Tu ne peux pas demander à un individu de dépenser des dizaines de milliers de dollars pour tenter de comprendre alors qu'à la ville on a cette connaissance-là. Et, moi, je pense que ce serait correct de le faire. Et tout le monde serait gagnant parce qu'on se comprendrait sur l'environnement patrimonial dans lequel on évolue et on vit et où ces gens-là, les promoteurs, doivent évoluer.

Et, vous savez, des promoteurs qui n'ont pas de bon sens, dans le Vieux-Québec, je vais vous dire, ils ne font même pas long, là, ils ne passent pas la première étape à la ville. Alors, ça, nous autres, là, ce n'est même pas compliqué pour nous autres, il n'y a personne qui n'a pas de bon sens qui arrive là avec un projet qui n'a pas de bon sens, il ne passerait même pas la première étape. On connaît notre ville, on connaît notre culture, on connaît notre sujet. Sauf qu'à un moment donné on ne peut pas être à la merci d'une personne alors que des dizaines de personnes intelligentes, compétentes ont passé à travers du projet. C'est ça, notre point.

Mme Melançon : Merci, M. le maire. C'est entendu. Concernant l'inventaire dont on parlait tout à l'heure, vous avez parlé de 5 millions de dollars, là, à l'intérieur du mémoire, de coûts demandés pour l'inventaire. Et, si je comprends bien, Mme Savard, le 5 millions pourrait devenir plus si la grille changeait, si on changeait les paramètres de la grille avec laquelle la ville a travaillé.

Mme Savard (Marie-Josée) : Exactement. En fait, j'ai très bien compris tout à l'heure tout ce que Mme la ministre a ajouté, mais, à la lecture, nous, de ce qu'on avait, notre conclusion, c'était... l'important, pour nous, ville de Québec, du fait qu'on a travaillé déjà énormément, comme je le précisais tout à l'heure, il y a déjà un bon inventaire de fait, on continue à faire cet inventaire-là qui date de 1950. Là, j'ai compris tout à l'heure de Mme la ministre que ce n'était pas nécessairement une obligation d'aller jusqu'à 1940. Mais, nous, au moment où on voit 1940 puis on se dit : Bon, bien, si c'est pour faire l'inventaire de tous les bâtiments à la ville de Québec de 1940 à 1950, qu'on n'a pas fait, de notre côté, puisqu'on a débuté en 1950, il y a un coût supplémentaire, c'est certain. Mais également le point que vous soulevez est très important, c'est au niveau du critère. Donc, les critères, pour nous, qu'on... Il faut s'assurer que les critères que nous... sur lesquels ont s'est basés soient acceptés par le ministère et que ça soit conforme à leurs attentes. Parce que, s'il faut refaire l'exercice avec de nouveaux critères, c'est certain que, pour nous, c'est un coût supplémentaire.

• (12 h 10) •

Mme Melançon : Très bien, merci. D'ailleurs, vous parlez aussi que vous voulez avoir les moyens pour que ce soit plus rapide, plus efficace de pouvoir entamer notamment des travaux de votre côté. Quels moyens vous recherchez pour être plus efficaces, plus rapides aussi?

Mme Savard (Marie-Josée) : Des travaux au niveau des inventaires, toujours, que vous...

Mme Melançon : Oui.

Mme Savard (Marie-Josée) : C'est ça... En fait, c'est que présentement, on y va par secteur, on priorise un secteur puis on se concentre sur ce secteur-là, et ça peut prendre facilement une année avant de terminer cet inventaire-là. Donc, pour nous, c'est sûr que plus on est capables d'aller rapidement, plus on est capables d'avoir accès à... je vous dirais, les sous, c'est toujours un peu la base, là, donc on est capables d'aller en contrat puis essayer d'aller faire un inventaire plus rapide ou une révision de l'inventaire.

Mme Melançon : Parfait. M. Labeaume, je veux revenir avec la table de concertation, notamment, celle du Vieux-Québec, là. Vous, est-ce que vous iriez jusqu'à dire que c'est une réussite, cette table de concertation là avec l'ensemble des gens qui y siègent? Puis là je vois qu'il n'y a pas que des citoyens, là, il y a aussi plein de professionnels qui siègent sur cette table-là.

M. Labeaume (Régis) : Bien, écoutez, ce sont des gens... bien, même l'opposition à la ville de Québec, c'est vous dire, ce sont des gens qui vivent dans le Vieux-Québec, qui souhaitent la vigueur du Vieux-Québec, qui souhaitent l'appréciation de leur patrimoine familial, évidemment, et qui souhaitent avoir des voisins au lieu d'avoir des bâtiments vides parce qu'ils savent que 500 citoyens de plus, ça veut dire... c'est comme l'oeuf et la poule, ça veut dire des services de plus. Un service de plus, c'est un citoyen de plus. Alors, ils y vivent, ils adorent y vivre, mais ils veulent qu'il survive, je vais le dire comme ça. Alors, cet objectif-là de 500 nouveaux résidents permanents, il est fondamental. Mais, si à chaque fois on se fait refuser des projets...

Puis, en passant, les promoteurs qui viennent travailler dans le Vieux-Québec, ce ne sont pas des colons, là. C'est généralement des gens de qualité. Nos gens sont de qualité. Les gens de la Commission d'urbanisme sont de qualité. Comment se fait-il que tout ce monde-là qui pense qu'il y a un projet de qualité se fait refuser par une personne? Je trouve qu'il y a une injustice. Mais je pense qu'on ne comprend pas la portée du geste, la portée du refus. Il est grave pour nous autres.

Et je le répète, là, allez voir, c'est documenté, une ville patrimoniale qui perd le contrôle de son centre-ville, son centre-ville patrimonial, parce que les gens le désertent, c'est compliqué après de reprendre ça et ça coûte très cher. Ce qu'on dit, c'est, honnêtement, il doit y avoir un moyen de faire un appel. Nous autres, la ville, parce qu'on est... Tu sais, le citoyen qui est propriétaire du bâtiment qu'il veut transformer, oui, mais, nous autres, on a un enjeu collectif, là-dedans, d'aménagement puis de survie du centre-ville. On est concernés, et donc on devrait, nous autres, pouvoir avoir le droit d'appeler devant le TAQ.

La Présidente (Mme Guillemette) : ...

Mme Weil : Oui. Bonjour, M. le maire. Bonjour, Mme Savard. C'est un grand honneur, M. le maire, de vous avoir devant nous pour parler de la magnifique ville de Québec. Évidemment, beaucoup d'entre nous, on vit ailleurs, mais on travaille à temps plein dans cette magnifique ville. Et chaque fois qu'on revient... D'ailleurs, je vous dirais, c'était avec beaucoup d'émotion que j'ai vu la ville décorée, comme vous l'aviez promis, pour Noël. Ça m'a fait du bien. Parce que je ne pense pas que Montréal est rendue là, et, vraiment, ça nous fait du bien. Alors, on a eu l'occasion, par le passé, de parler beaucoup d'immigration, mais là je suis vraiment contente d'être ici pour ce dossier-là.

Je veux en revenir sur cette question de votre capacité d'avoir le pouvoir de faire appel au TAQ lorsqu'il y a une demande qui est refusée, de révision. Et j'aimerais voir, avec la lumière du statut particulier de la Capitale-Nationale, il y avait un chapitre sur la culture et le patrimoine...

La Présidente (Mme Guillemette) : 30 secondes, Mme la députée.

Mme Weil : La question, oui, c'est : Comment fusionner les deux? Et, moi, je vois que peut-être ça vient refléter ce nouveau statut quand même, qui est assez récent, d'avoir ce pouvoir-là.

M. Labeaume (Régis) : Bien, c'est un tout cohérent et c'est une grande responsabilité d'avoir un quartier qui fait partie du patrimoine mondial de l'UNESCO. C'est une grande responsabilité. Elle est morale, la responsabilité. Mais, au-delà de la moralité et du fait qu'on soit... on fait partie de la... D'ailleurs, j'ai moi-même présidé l'Organisation des villes du patrimoine mondial pendant deux ans. Alors, je pense que je m'y connais pas pire, là. Et donc... Mais, au-delà de ça, il faut que ça s'articule avec des projets. Alors, une fois qu'on a le titre, il faut que ça vive. Et là on a de la misère à le faire vivre. Alors, le problème est là, on a de la misère à faire accepter des projets.

Puis honnêtement, tu sais, regardez la liste des membres de la Commission d'urbanisme à la ville de Québec, ce sont des gens de grande qualité qui vivent à Québec, qui connaissent l'architecture, ce sont des spécialistes dans leur domaine. Alors, ça nous embête. Puis, quand vous avez passé tout le processus démocratique, conseils de quartier, comités de citoyens, etc., puis que finalement on nous écrive, puis on nous dise non, puis qu'on doive envoyer quelqu'un pour comprendre ce que dit la lettre, on est là des fois, alors, ce que la ministre dit quand elle veut établir des critères, c'est parfait, il faut que ça se fasse, c'est fondamental, mais, en même temps, les critères, il faut les interpréter souvent. Puis, quand on tombe dans l'interprétation, bien, ça mène à l'arbitraire souvent.

Alors, nous, on pense qu'on doit pouvoir faire appel d'une décision qui n'est pas malhonnête, c'est une décision d'appréciation, d'interprétation, souvent, parce que le patrimoine, ce n'est pas une science pure, en passant, hein, ce n'est pas une science si exacte que ça, là, alors, il faut qu'on ait une seconde opinion, un second regard sur ces projets-là, s'il y a des problèmes.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup. Donc, nos échanges sont terminés pour ce matin. Merci, M. Labeaume. Merci, Mme Savard et tous les gens qui vous accompagnent. Ça a été très enrichissant. Et, oui, on a un beau Québec, c'est très agréable.

Donc, on va suspendre quelques minutes, le temps d'accueillir nos prochains invités.

(Suspension de la séance à 12 h 16)

(Reprise à 12 h 18)

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, nous reprenons nos travaux.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, merci, tout le monde. Donc, bonjour, M. Breton-Demeule, d'être avec nous ce matin. Je vous inviterais d'abord à vous présenter, et vous aurez un 10 minutes pour présenter votre exposé, et ensuite il y aura une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous cède la parole.

M. Charles Breton-Demeule

(Visioconférence)

M. Breton-Demeule (Charles) : Parfait. Bonjour. Charles Breton-Demeule. Je suis avocat et doctorant en droit à l'Université Laval et à l'ENS Paris-Saclay.

Dans le cadre de mes recherches de thèse, je m'intéresse à la protection juridique du patrimoine bâti, plus particulièrement au rôle des municipalités dans la protection de ce patrimoine. Alors, je dois vous dire que je suis très heureux d'être avec vous aujourd'hui pour discuter du projet de loi n° 69.

Mon exposé concernera principalement les pouvoirs des municipalités dans le projet de loi et sera divisé en deux parties. Dans la première, je reviendrai sur ce qui constitue, à mon avis, des avancées majeures pour la protection du patrimoine, donc des points positifs, et, dans la deuxième partie, je vous ferai part des modifications, des amendements qui, à mon avis, seraient essentiels pour rendre le projet de loi encore meilleur quant à la protection du patrimoine bâti.

Donc, en ce qui concerne les points positifs, j'en ai identifié trois principaux. Brièvement, là, le premier concerne la tenue obligatoire d'un inventaire pour les MRC, donc ce n'était pas obligatoire auparavant, et c'est une bonne nouvelle. Le deuxième concerne l'adoption obligatoire d'un règlement sur le contrôle des démolitions. Donc, ça permettra aux citoyens et aux citoyennes de participer au débat public entourant la protection du patrimoine. Et enfin le troisième point positif concerne l'octroi d'un pouvoir de citation aux MRC. Donc, ce sont des acteurs supplémentaires qui pourront protéger le patrimoine dorénavant.

Malgré ces avancées majeures, il y a certains éléments du projet de loi qui, à mon avis, devraient faire l'objet de certaines modifications pour que le projet puisse être encore meilleur quant à la protection du patrimoine. J'aimerais partager avec vous quatre principaux amendements qui me semblent essentiels.

Le premier concerne l'adoption obligatoire d'un règlement sur l'entretien des bâtiments par les municipalités. À l'heure actuelle, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme prévoit des dispositions qui permettent aux municipalités d'encadrer l'entretien des bâtiments. Or, ces dispositions ne sont pas d'adoption obligatoire, et ça peut conduire à une situation malheureuse qu'on a pu observer dans les dernières années, celle d'une personne qui achète un bâtiment patrimonial dans l'intention de le démolir et, pour arriver à cette fin, néglige l'entretien du bâtiment, et, au bout de quelques années, l'immeuble est tellement détérioré que la seule solution viable consiste à le démolir. Donc, pour remédier à ce problème, il devrait y avoir une adoption obligatoire de règlements sur l'entretien des bâtiments par les municipalités. Et c'est un processus, là, que le Vérificateur général qualifie de «démolition par abandon».

• (12 h 20) •

Et la raison pour laquelle ces règlements devraient être rendus obligatoires, c'est qu'actuellement, selon le MAMH, il y a 65 % des municipalités au Québec qui n'ont pas de règlement sur l'entretien des bâtiments. Alors, ça peut faire en sorte que dans 65 % des municipalités au Québec, il sera possible, en toute légalité, pour un propriétaire, de laisser un immeuble qui est non classé ou non cité se détériorer. Donc, ça concerne, à mon avis, là, le premier élément qui devrait être modifié : l'adoption obligatoire d'un règlement sur l'entretien des bâtiments.

Ensuite, le deuxième amendement qui, à mon avis, devrait être apporté concerne l'encadrement des pouvoirs du comité de démolition. Les notes explicatives du projet de loi indiquent que l'octroi de nouveaux pouvoirs aux municipalités relativement à la démolition a principalement pour objectif de protéger le patrimoine immobilier. Or, ce qu'on constate, c'est que dans le projet de loi, il n'y a aucune disposition qui précise que le rôle du comité de démolition devrait être de prioriser la protection du patrimoine dans ses décisions. Donc, je pense que ça devrait être inscrit dans les dispositions relatives au comité de démolition. Mais également il devrait y avoir un encadrement beaucoup plus précis des critères que doit prendre en considération le comité dans sa demande, parce qu'à l'heure actuelle ces critères sont beaucoup trop larges et ils ne permettent pas une analyse exhaustive de la valeur patrimoniale du bâtiment. Donc, dans mon mémoire, j'en propose quelques-uns, entre autres l'âge du bâtiment, son courant architectural, ses occupants, son histoire, son lien avec la trame urbaine dans laquelle il s'insère. Ce sont tous des éléments qui, à mon avis, devraient être pris en compte de manière obligatoire lorsque le comité analyse une demande.

Et la raison pour laquelle je crois qu'il revient au législateur québécois de prévoir ces critères de manière obligatoire, c'est que, selon le Vérificateur général du Québec, il y a 70 % des municipalités au Québec qui estiment ne pas avoir les compétences nécessaires pour intervenir adéquatement en matière de protection du patrimoine. Donc, grosso modo, il y a environ le trois quarts, là, des municipalités qui disent : Nous ne savons pas comment faire. Alors, je pense qu'il revient au législateur québécois de prévoir des critères beaucoup plus stricts pour que la démolition ne soit pas qu'une formalité.

Le troisième amendement, qui, à mon avis, est essentiel, concerne les recours qui sont disponibles pour les citoyens dans le cas où une maison, donc, ne ferait pas l'objet d'un classement ou d'une protection par les municipalités et que la démolition de cette maison est autorisée. Je vous explique. On a assisté, dans les dernières années, à plusieurs cas de bâtiments qui avaient fait l'objet d'une autorisation de démolition par la municipalité. Donc, je pense, par exemple, là, à la maison Déry à Charlesbourg, la maison Pasquier à Québec, l'église Saint-Coeur-de-Marie à Québec, mais aussi la maison Laporte à Saint-Ambroise-de-Kildare ou la maison Bissonnette à Saint-Malachie. Donc, ce sont des immeubles patrimoniaux pour lesquels la demande de démolition avait été autorisée, et ça a amené les citoyens à se mobiliser, à dire : C'est des bâtiments patrimoniaux, ils méritent d'être sauvés. Les citoyens se sont tournés vers le ministère. Le ministère a analysé le dossier, a conclu que ces bâtiments-là avaient une valeur patrimoniale, mais a indiqué que ces bâtiments avaient une valeur qui était d'intérêt local et donc qui n'était pas d'intérêt national, ce qui fait en sorte que le ministère n'a pas procédé au classement de ces biens-là.

Or, les municipalités, à l'heure actuelle, elles n'ont pas l'obligation de procéder à la citation des bâtiments patrimoniaux sur leur territoire. Alors, ça fait en sorte que, finalement, ces bâtiments-là dont je vous ai fait part tout à l'heure, ils ont disparu. Et ce qui est le plus triste, c'est qu'ils ont disparu non pas parce qu'ils n'avaient pas de valeur patrimoniale, mais bien parce qu'on n'arrivait pas à s'entendre entre le ministère et les municipalités sur qui devait protéger ces biens-là, et, pour cette raison, je crois qu'un recours en contestation devant le Tribunal administratif du Québec serait une option nécessaire pour dépolitiser les dossiers et permettre à toutes les parties de s'exprimer devant un organe neutre. Et le tribunal, à mon avis, serait chargé, dans un cas comme celui-là, de répondre à deux questions, d'abord : Est-ce que le bien a une valeur patrimoniale qui fait en sorte qu'il mérite d'être protégé et, si oui, à qui revient la tâche de le protéger? Et donc c'est essentiel de le prévoir, parce que je crois que le recours qui est prévu, là, pour les MRC, sur la possibilité de désavouer une décision d'un conseil qui autorise la démolition, ne constitue pas un rempart suffisant pour prévenir ces cas-là, parce que le maire ou la mairesse du conseil qui a autorisé la démolition fait partie du conseil de la MRC. C'est susceptible de placer, là, les élus du conseil de la MRC dans une position délicate, ce qui entraîne un risque non négligeable que ce pouvoir-là ne soit pas utilisé. Et donc c'est le troisième amendement, c'est prévoir un recours devant le Tribunal administratif du Québec dans ces cas-là.

Et je termine maintenant avec le quatrième élément qui, à mon avis, devrait être modifié dans le projet de loi, qui concerne l'encadrement des pouvoirs relatifs à la démolition sur le territoire de la ville de Québec. Il y a une exception qui est prévue, dans le projet de loi, relativement aux immeubles qui sont sous compétence de la Commission d'urbanisme et de conservation de Québec, et on prévoit que la ville peut adopter un règlement, à l'égard de ces bâtiments-là, qui ne prévoit pas, là, les garanties relatives à la participation citoyenne, donc l'affichage d'un avis public et la tenue d'une audition publique à laquelle les citoyens peuvent participer. Moi, je pense que cette exception-là devrait être mieux encadrée pour permettre que ces garanties relatives à la participation citoyenne s'appliquent sur le territoire de la ville de Québec, principalement pour deux raisons, la première, parce que c'est une question d'équité pour les citoyens de Québec par rapport à ceux du reste du Québec qui auraient la possibilité de se prononcer et, deuxièmement, parce qu'on a assisté, malheureusement, à plusieurs démolitions sur le territoire de la ville de Québec dans les dernières années. Je vous ai fait la liste dans mon mémoire.

Donc, ça conclut, là, les quatre amendements qui, à mon avis, seraient essentiels. Par contre, je l'ai précisé au tout début, c'est un projet de loi qui apporte des avancées majeures. Et je pense que ces avancées méritent d'être soutenues.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, M. Breton-Demeule. Maintenant, on passerait à la période d'échange avec Mme la ministre. Donc, je vous cède la parole, Mme la ministre.

• (12 h 30) •

Mme Roy : Je vais enlever ça. Ça va aller mieux. Bonjour, maître. Contente de vous voir. Merci pour votre mémoire. Attendez, je vais mettre mon chronomètre à l'instant. Voilà. Contente de vous voir.

Pour ceux qui l'ignorent et qui nous écoutent, vous avez commis un livre très important, un travail minutieux justement sur le patrimoine bâti au Québec. Éventuellement, c'est ce qui va s'appeler une doctrine, si on l'utilise, et que ce sera enseigné ou même utilisé dans des décisions jurisprudentielles pour la suite des choses. Donc, vous êtes un spécialiste de la question, j'avais hâte de vous entendre.

Le patrimoine, et vous le dites à juste titre, il y a plusieurs instances qui sont impliquées, autant le gouvernement du Québec, qui classe et qui déclare, les villes qui citent, et maintenant on souhaite que les MRC puissent citer également. Puis vous avez les citoyens, les citoyens qui sont au coeur de tout ça et qui, à certains moments, jouissent d'une mesure de protection pour une question x ou y, jouissent d'une mesure de protection pour un bâtiment puis, à d'autres moments, ont de magnifiques bâtiments qui n'ont aucune mesure de protection.

Depuis le début, les groupes... Depuis mon arrivée en poste, là, le principal... une des principales demandes qui nous ont été faites, c'était cet inventaire-là. Je pense qu'on est rendus à faire un inventaire unifié, mettre à jour ce qui existe, faire basculer ce qui existe, nous assurer que nous ayons tous le même discours.

Je vais... Donc, ce que vous faites avec ce mémoire-là, vous nous aiguillez, mais je pense que je vais aller tout de suite à vos recommandations. Ce sont des recommandations... Il y en a une — attendez, j'ai pris des notes ici — relativement à l'entretien des bâtiments. On sait que la loi permet... Attendez un petit peu, attendez un petit peu, attendez un petit peu. La loi actuelle permet et dit que les propriétaires de bâtiments, naturellement, doivent entretenir les bâtiments qui sont... qui ont cette mesure de protection. Que se passe-t-il quand les bâtiments n'ont pas de mesure de protection? Je pense que c'est à cet égard-là que vous nous dites que nous devrions forcer un règlement. J'aimerais que vous élaboriez là-dessus, parce que dans quelle mesure... Et c'est dans la LAU. Ce n'est pas dans la Loi sur le patrimoine culturel, mais nous l'ouvrons, là, actuellement. Dans quelle mesure, est-ce qu'il serait possible et opportun de forcer ce règlement pour qu'il y ait entretien de bâtiments? Et dans quelle mesure ce serait applicable? Parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de citoyens qui possèdent des bâtiments qui ne sont pas inventoriés et qui ne possèdent pas de mesure de protection.

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Merci pour votre question. Effectivement, c'est une question importante, parce que, comme vous l'avez mentionné, il y a l'article 203 de la Loi sur le patrimoine culturel qui permet d'ordonner l'entretien d'un bâtiment qui est cité. Mais, pour ce qui est inventorié, il n'y a pas de disposition actuellement, sauf celles qui sont prévues dans la LAU à l'article 145.41. C'est un régime complet, là, qui prévoit l'entretien des bâtiments, qui est déjà présent, mais ce régime n'est pas d'adoption obligatoire pour les municipalités. Et moi, je pense que, pour les mêmes raisons qu'on rend l'adoption d'un règlement sur les démolitions obligatoire avec le projet de loi, on devrait également rendre ce règlement obligatoire. Et ça permet non seulement de s'assurer, aux municipalités, qu'il y ait des normes obligatoires relativement à l'entretien des bâtiments... Et sans même que le règlement ne puisse s'appliquer, je pense que ça permet de prévenir la situation de la démolition par abandon. Parce que dorénavant les gens qui savent qu'ils souhaitent acheter un bâtiment pour négliger son entretien, ils sauront qu'il existe un règlement sur l'entretien des bâtiments et qu'ils ne pourront pas laisser le bâtiment se détériorer. Alors, c'est dans cette perspective-là, je pense, qu'un règlement sur l'entretien des bâtiments est essentiel, parce qu'autrement la démolition sera rendue facilitée. Donc, on interdit la démolition par règlement, mais on permet que le bâtiment se détériore, et, finalement, la seule solution possible, ça devient sa démolition s'il est trop détérioré.

Mme Roy : Il y a quelque chose d'intéressant. Vous nous parlez aussi dans le mémoire de permettre à toute personne intéressée de s'adresser au TAQ afin de contester une autorisation de démolition accordée par une municipalité en vertu de la LAU et vous nous dites qu'un recours semblable existe dans d'autres lois québécoises. Pouvez-vous me donner des exemples, par exemple?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Par exemple, dans la Loi sur la qualité de l'environnement, on prévoit que toute personne intéressée peut s'adresser à la Cour supérieure pour obtenir une injonction, là, pour faire cesser un acte qui est susceptible de porter à l'atteinte au droit à un environnement sain. Mais il y a d'autres exemples aussi, par exemple, dans la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, où on prévoit que toute décision de la commission peut faire l'objet d'une révision, là, à la demande de toute personne intéressée. Également, dans d'autres lois, je pense à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, à son article 227, qui prévoit pour... que toute personne intéressée peut s'adresser à la Cour supérieure pour obtenir, là, le respect d'un règlement de construction, par exemple, de la municipalité. Donc, c'est des mesures qui existent déjà en droit québécois. Et je suis d'avis que, puisqu'il en existe en urbanisme, en protection du territoire agricole, en protection de l'environnement, il devrait y en avoir aussi pour la protection du patrimoine, d'autant plus...

Et moi, je propose que ce soit le Tribunal administratif du Québec, parce que le projet de loi confère déjà des pouvoirs au TAQ relativement à la révision des décisions prises par le ministère, là, dans les sites patrimoniaux. Donc, le TAQ pourrait déjà disposer d'une certaine expertise en matière de patrimoine avec ce qui est prévu dans le projet de loi. Et je pense que c'est un volet qui viendrait compléter ça et qui permettrait, là, de combler un peu le vide juridique dont j'ai fait mention lorsqu'il s'agit d'un bâtiment qui n'est pas cité ni classé.

Mme Roy : Vous nous dites aussi qu'il sera opportun d'appliquer la Loi sur le patrimoine culturel de manière uniforme à toutes les municipalités du Québec. Et là vous faites allusion... parce que la ville de Québec — nous avions les gens de la ville de Québec juste avant vous — pourrait, dans la présente version du projet de loi, tenir à huis clos, sans avis public, les réunions de son fameux comité de démolition. Et ça, vous le dites, et il y a aussi un éminent journaliste qui suit nos travaux, M. Nadeau, que je salue, c'était une des premières questions qu'il avait posées, en disant : Bien, on laisse faire la commission de Québec, la commission d'urbanisme de Québec va pouvoir continuer à tenir ses travaux à huis clos, sans avis public. Pourriez-vous commenter à cet égard-là davantage votre proposition?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Bien, ce qu'on prévoit dans le projet de loi, c'est que l'ensemble des municipalités au Québec devront dorénavant rendre obligatoire l'affichage, là, d'un avis public relativement à la demande de démolition d'un bâtiment patrimonial. Donc, concrètement, ça, ça permet à la population de prendre conscience du fait qu'il y a une demande de démolition qui a été déposée, et il y a la tenue obligatoire aussi d'une audition publique. Ça, ça permet aux gens de faire valoir leur point de vue, de dire : Écoutez, cet immeuble-là a une valeur patrimoniale importante pour notre municipalité et il mérite d'être conservé.

Donc, actuellement, je l'ai dit, ça, c'est une avancée majeure qui est prévue pour l'ensemble des municipalités au Québec, sauf pour la ville de Québec, où on dit : Bien, il n'y a pas des garanties relatives à la participation citoyenne. Moi, je pense que cette exception-là, elle devrait être mieux encadrée pour permettre, justement, aux citoyens de prendre la parole et de prendre surtout connaissance d'une démolition ou d'une demande. Parce qu'autrement c'est uniquement quand les pépines sont rendues sur le terrain que les gens peuvent savoir qu'il y a une demande de démolition qui a été autorisée. Et ça, ça amène tous les intervenants à intervenir en pompiers, là, parce que tout est déjà fait, et c'est à la dernière minute qu'on l'apprend.

Donc, je pense que, par souci d'équité aussi pour les citoyens de la ville de Québec qui méritent d'avoir ce droit-là de se prononcer, de connaître les demandes de démolition, l'exception devrait être mieux encadrée.

Mme Roy : Donc, je suis ravie de voir que vous voyez d'un bon oeil le fait que nous voulons, nous souhaitons qu'il y ait ces règlements de démolition qui soient obligatoires pour tout le monde, qu'il n'y a pas de passe-droit, qu'on rend ça public pour que tous sachent partout. Et la décision sera prise en connaissance de cause, là, s'il y a démolition. Actuellement, en tant que ministre, et vous l'avez dit, j'apprends le matin qu'une pelle mécanique vient de défoncer un bâtiment patrimonial, alors...

Et le processus... J'aimerais que vous me parliez un peu du processus que je veux mettre de l'avant pour le reste du Québec aussi, ce processus-là qui nous assure que les MRC soient impliquées, qu'il y a ce règlement de démolition, et qu'il y a des comités qui sont là pour se pencher sur les demandes qui seront faites, et que la population puisse se prononcer dans un délai imparti. On n'attendra pas 10 ans, comme nous le disait la Vérificatrice générale. Peut-être y aura-t-il lieu de modifier les délais pour les rendre plus réalistes à la réalité puis à l'engorgement des demandes, mais... C'est un aparté que je fais là, mais j'aimerais que vous commentiez ce mécanisme-là qu'on tente de mettre sur place, c'est-à-dire, bien, minimalement, comme 65 % des villes n'ont pas de règlement de démolition, dans quelle mesure en obliger un, ça va aider à protéger le patrimoine. Je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Bon, actuellement, comme vous l'avez mentionné, ce n'est pas obligatoire, le règlement sur les démolitions. Donc, dans ce cas-là, lorsqu'une ville n'a pas de règlement sur les démolitions, il n'y a pas d'affichage, là, public de la demande et il n'y a pas de séance publique non plus. Et, dans ce cas-là, les villes, du point de vue juridique, elles n'ont pas la discrétion pour refuser la demande, c'est-à-dire que, si la demande respecte, là, des normes minimales, je pense, entre autres, au paiement des frais ou au règlement de zonage, bien, la municipalité, juridiquement, en vertu de la LAU, elle n'a pas le choix d'émettre le permis de démolition. Alors qu'avec un comité de démolition on confère à la municipalité une discrétion.

Donc, du point de vue juridique, ça fait en sorte que la municipalité peut accepter ou refuser la démolition sur la base de considérations d'opportunité, notamment des considérations relatives au patrimoine. Donc, ça permet, finalement, d'éviter des démolitions intempestives et surtout ça permet la tenue d'une audition publique à laquelle les citoyens peuvent participer pour faire valoir leur point de vue.

Par contre, et là je l'ai mentionné dans mes recommandations, je pense que les critères que doivent analyser le comité lors de la demande, ils devraient être mieux encadrés pour s'assurer que tout ce qui est relatif à la valeur patrimoniale du bâtiment, à son âge, à son courant architectural, ça soit pris en compte, de manière obligatoire dans le comité, en toute connaissance de cause, parce qu'actuellement les critères ils ne sont pas assez définis pour permettre cette décision plus approfondie.

Et donc il y a le fait aussi, et je l'ai mentionné, que 70 % des municipalités estiment qu'elles n'ont pas les compétences techniques pour intervenir. Je pense qu'il revient donc, là, au législateur de prévoir des critères plus stricts, parce qu'autrement il y a un risque que la démolition ne soit qu'une formalité. Et même s'il y a une audition publique, les critères relatifs au patrimoine ne sont pas nécessairement pris en compte, et on dit : Ah! bien, on autorise la démolition, il faut aller de l'avant.

• (12 h 40) •

Mme Roy : C'est extrêmement important, ce que vous venez de dire là, puis c'est le noeud du problème actuellement, je pense. Il y en a plusieurs autres, là, mais que des municipalités... et ce n'est pas nécessairement de la mauvaise foi. Et c'est pour ça, je vous dis, c'est un travail de collaboration, puis on veut que les municipalités puis les villes embarquent. Des municipalités, lorsqu'elles se font demander le permis et qu'elles n'ont pas, justement, de règlement de démolition, doivent le donner, alors... ce qui ne veut pas dire qu'elles le donnent nécessairement de gaieté de coeur, ou par négligence, ou parce qu'elles se fichent du patrimoine, mais que la loi est ainsi faite. Et c'est la raison pour laquelle on veut leur fournir un outil qui leur permettra de donner ce permis, si elles le jugent à propos, mais compte tenu de critères, et qu'elles puissent avoir le temps d'y réfléchir, et que la communauté, les citoyens le sachent et le gouvernement également pour ne pas agir en catastrophe. Et moi, je pense que c'est une des pierres angulaires de ce projet de loi, vous pourrez me le dire, mais, tu sais, c'est un outil supplémentaire.

Pour ce qui est des critères, ça aussi, on veut les rendre beaucoup plus clairs, précis, transparents. Vous les verriez où, les critères? Parce qu'ils sont dans la loi actuellement, il y aura ultimement des règlements, on va refaire les catégories, les classifications, mais vous les verriez où pour les municipalités et MRC?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Merci pour votre question. Les critères, je les verrais, là, tout de suite au début de la série de pouvoirs habilitants relatifs à la démolition dans la LAU, donc à l'article 148.0.1, où on prévoit le contenu du règlement, on dit sur quoi porte le règlement de démolition. Et je pense que les critères, c'est, dès le départ, où on devrait dire : Le règlement doit comprendre tel, tel, tel critère lors de l'analyse de la demande. C'est à ce moment-là que ça devrait être prévu. Actuellement, il y a de ces critères qui sont prévus de manière obligatoire, mais ne sont pas assez définis pour la protection du patrimoine, donc c'est à ce moment-là qu'on devrait les prévoir.

Et aussi, à l'article 148.0.2, on prévoit certains documents que la municipalité peut exiger avant le dépôt d'une demande, mais le projet de loi ne les rend pas obligatoires. Moi, je pense qu'il y a certains de ces documents qui devraient être obligatoires. Je pense, entre autres, à une étude d'expertise patrimoniale. Donc, le propriétaire qui souhaite faire une demande doit avoir une étude qui dit : Écoutez, il est impossible de restaurer le bâtiment. Il y a une personne indépendante qui s'est prononcée, et il dit : On ne peut pas le restaurer. Et il doit y avoir aussi des preuves relatives à l'entretien du bâtiment par le propriétaire. J'ai vu certaines villes, par exemple à Lévis, qui demandent des preuves que le bâtiment a été chauffé dans les dernières années, pour ne pas que la démolition soit autorisée, et qu'on soit face à un cas de négligence.

Et il y a aussi le fait... Moi, je pense qu'il y a un programme, là, de subventions qui a été mis en place récemment. Ce serait intéressant de prévoir que, lorsqu'il y a une demande de démolition qui est déposée, on ait la preuve que le propriétaire ait fait des démarches antérieurement pour voir si des subventions étaient disponibles pour restaurer son bâtiment. Je pense que ça serait essentiel que les municipalités l'exigent avant le dépôt d'une demande parce que ça permettrait de voir est-ce que la restauration a vraiment été considérée avant la démolition.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, M. Breton-Demeule. Merci, Mme la ministre.

Mme Roy : Merci, maître. Très, très intéressant.

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, on passerait maintenant à la partie d'échanges avec Mme la députée de Verdun pour 9 min 54 s.

Mme Melançon : Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Maître, bonjour. Merci beaucoup. Merci de partager avec nous, dans le fond, vos réflexions, qui sont bien étayées, je dois le mentionner, là. C'était... En lecture, là, à chaque fois, je me disais : O.K., mais où est-ce qu'on veut en venir? Puis il y a la réponse qui vient par la suite. C'était vraiment très intéressant.

Je voudrais continuer, justement, sur la discussion que vous aviez avec la ministre concernant les démolitions par abandon. Lorsque vous dites que ça prend la preuve d'entretien, moi, j'en suis, là, pour assurer, pour obtenir, dans le fond, le permis de démolition, mais vous savez que les municipalités, malheureusement, parfois vont être aux prises, bien, avec des édifices qui vont avoir été abandonnés, puis là, bien, il y a le service des incendies qui va venir puis qui va dire : Bien là, il faut vraiment démolir parce que ça devient dangereux pour la population. Même si on demande les preuves d'entretien, la suite, c'est qu'il va y avoir cette démolition-là tout de même. Vous, si j'entends bien, parce que là, on était dans cette discussion-là, c'est que, s'il y a démolition, peut-être qu'il peut aussi y avoir des charges, qui seront portées directement au propriétaire, supplémentaires? Est-ce que c'est ce que je comprends?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. En fait, moi, ce que je précisais, c'est qu'il faudrait agir plus en amont. Donc, pour éviter cette situation-là, où on arrive avec un bâtiment qui est trop détérioré, il faudrait prévoir un règlement sur l'entretien des bâtiments. Et ça, ça permettrait de s'assurer qu'un propriétaire ne puisse pas négliger l'entretien du bâtiment et ça éviterait de se rendre à ce cas-là, là, où le bâtiment est tellement détérioré que sa démolition doit être autorisée. Parce que le critère premier, lors d'une demande de démolition, ça devrait être la valeur patrimoniale du bâtiment, son lien avec la municipalité et pas nécessairement son état physique. Parce que je comprends, évidemment, il y a des cas où il y a des bâtiments, de manière accidentelle, ils sont incendiés, ou tout ça, là, mais, normalement, quand un bâtiment n'est pas entretenu, ça résulte d'une décision volontaire qui est celle de ne pas investir dans son entretien. Et ça, c'est possible quand il n'y a pas de règlement qui l'encadre.

Mme Melançon : Et, dites-moi, dans cette réflexion-là... Parce qu'on parle, depuis le début, bien sûr, de protection du patrimoine, depuis hier, on est beaucoup là-dedans, mais vous savez comme moi que, malheureusement, dans certaines municipalités, les maires sont aux prises avec... Parce qu'ils ont une façon, hein, d'obtenir des revenus, c'est par les taxes municipales. Et, tant et aussi longtemps où on ne trouvera pas une solution pour que la maison patrimoniale puisse avoir une valeur, une vraie valeur aux yeux de la municipalité, ce sera difficile parfois de protéger le patrimoine. Est-ce que vous avez réfléchi un peu, peut-être, sur des avantages fiscaux qu'on peut avoir, justement, pour donner une valeur? Puis là je vous le dis, là, moi, le patrimoine, là... je pense que tout le monde qui est ici dans la salle, là, on aime le patrimoine, on aime le patrimoine québécois. On ne remet rien de tout ça en cause, mais il faut quand même réfléchir et se mettre quelques minutes à la place des maires et mairesses de partout au Québec qui se disent, à un moment donné : O.K. Bon, bien là, j'ai le choix. J'ai cette maison-là, qui est probablement dans un état trop avancé. Qu'est-ce que je fais? Est-ce qu'on investit des sommes là? Ou j'ai un promoteur qui vient me voir puis qui me dit : Bien, nous autres, on va te raser ça, là, puis on va te monter des condos, puis ça va être payant, ça va être lucratif pour la municipalité. Est-ce que vous vous êtes penché là-dessus? Pouvez-vous m'éclairer un peu, s'il vous plaît?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. D'abord, je pense que la question de la protection du patrimoine découle d'une question de volonté. Des exemples, là, de bâtiments patrimoniaux qui sont habités, qui sont vécus et qui sont rentables, il y en a. Et je vais vous en donner quelques-uns. Par exemple, à Québec, pour ne pas la nommer, l'entreprise Chocolats favoris, qui opère une chocolaterie dans le site patrimonial de Charlesbourg, dans une résidence bourgeoise, et ça n'empêche pas les gens de venir acheter de la crème glacée parce que la maison est ancienne. Je pense à la Fromagerie du Presbytère, à Sainte-Élizabeth, dans le Centre-du-Québec. C'est une fromagerie qui attire 25 000 personnes par année. On a transformé un presbytère et une église en fromagerie. Et tout ça, c'est des immeubles patrimoniaux qui ont une deuxième vie, d'abord parce qu'il y a des gens qui ont cru à ce projet. Et donc c'est la raison pour laquelle c'est une question politique, de volonté. Mais cette volonté-là, on l'a constaté dans les dernières années, elle doit être encadrée juridiquement. Parce que, comme vous l'avez souligné, autrement, la pression est trop forte. Et ce n'est pas uniquement avec de la sensibilisation qu'on pourra convaincre quelqu'un que les 100 000 $ supplémentaires qu'il aurait pu faire avec son projet de démolition, bien, il ne devrait pas les faire à cause d'une sensibilisation. Ça prend des normes strictes. Et on l'a déjà fait au Québec par le passé. Je pense à la commission de protection du territoire et des activités agricoles, il y avait le même problème de spéculation foncière. Les municipalités voulaient faire du développement sur les terres, mais on a dit : C'est une question d'intérêt public, ces terres-là doivent être protégées. Alors, je pense, c'est la même réflexion qui s'applique pour le patrimoine. Et donc le premier volet de la réponse, c'est de dire : Il doit y avoir des règlements plus stricts pour faire en sorte que la démolition ne soit plus une possibilité.

Et, dans l'aide aux propriétaires, il y a l'article 241 de la Loi sur le patrimoine culturel qui, à mon avis, devrait être analysé plus en profondeur parce que cet article-là prévoit qu'on peut prévoir une réduction de taxes pour les propriétaires d'immeubles protégés. Mais c'est par règlement du gouvernement qu'on doit prévoir ça. Et malheureusement, ce que j'ai constaté, là, c'est que, depuis 2011, il n'a pas vraiment été adopté, ce règlement-là, par les gouvernements successifs. Donc, c'est une piste peut-être à analyser pour aider les propriétaires.

• (12 h 50) •

Mme Melançon : Intéressant. Très intéressant. Tout à l'heure, on avait avec nous le maire de Québec. Et, dans le mémoire de la ville de Québec, ils parlaient aussi, justement, pour... Là, je retourne un peu. Tout à l'heure, on parlait donc de l'entretien, hein, des bâtiments patrimoniaux. À l'intérieur du mémoire de la ville de Québec, il est question d'augmenter le coût des contraventions, justement, à partir du moment où il y a un propriétaire qui est réfractaire à vouloir, justement, faire les investissements nécessaires pour éviter la démolition par abandon. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette proposition-là?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Effectivement, je pense que ce serait positif de rendre moins attrayant, là, le manque d'entretien d'un bâtiment, mais ça prend aussi des outils supplémentaires pour les municipalités, donc non seulement de rendre obligatoire ce règlement sur l'entretien, parce qu'il y a 65 % des municipalités qui n'en ont pas, mais aussi de prévoir à l'article 145.41 que les municipalités peuvent demander à la Cour supérieure d'ordonner au propriétaire d'effectuer lui-même les travaux. Parce qu'actuellement cet article-là permet uniquement aux municipalités de demander qu'elles puissent exécuter elles-mêmes les travaux. Et ça, c'est difficile parce que, souvent, on investit des fonds publics dans un bâtiment qui est d'abord de propriété privée. Et, même s'il y a une hypothèque, il n'y a pas toujours une garantie que ces coûts-là seront récupérés. Alors, c'est une modification toute simple, là, je pense, qui pourrait se faire.

Mme Melançon : Et la petite dernière parce que là, je vois la présidente qui me regarde en me disant qu'il me reste moins de temps.

La Présidente (Mme Guillemette) : 1 min 30 s.

Mme Melançon : 1 min 30 s. Je vais faire rapidement. Concernant le pouvoir de désaveu, j'entends que vous êtes d'accord à savoir que les MRC vont avoir un pouvoir supplémentaire, donc ce pouvoir de désaveu, si jamais une municipalité... Mais vous nous dites quand même : Attention, ceci n'est pas un rempart suffisant parce qu'il y a une joute politique dans tout ça qui demeure possible. Et c'est pourquoi vous nous référez vers le Tribunal administratif du Québec en cas de litige, là. Selon vous, est-ce que le Tribunal administratif, parce que, moi, je ne suis pas avocate, va avoir suffisamment de pouvoirs à recevoir s'il y a de nombreuses plaintes en ce sens-là?

M. Breton-Demeule (Charles) : Oui. Bien, le Tribunal administratif du Québec, c'est un tribunal, là, qui est déjà reconnu, qui exerce dans plein de domaines. Et moi, je pense que la qualité principale que ce recours-là aurait, ce serait de dépolitiser le dossier. Donc, le Tribunal administratif, c'est un organe qui est neutre, et ça permettrait à toutes les parties intéressées de faire valoir leur point de vue relativement à une démolition.

Donc, c'est clair que, comme vous l'avez mentionné, ce n'est pas un rempart suffisant, le pouvoir de désaveu, et on doit prévoir un recours devant le TAQ, qui aura une expertise, parce qu'on prévoit dans le projet de loi que d'autres recours seront possibles devant le TAQ en matière de patrimoine. Alors, on pourra, je pense, améliorer au fil du temps cette expertise.

Mme Melançon : Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, M. Breton-Demeule.

M. Breton-Demeule (Charles) : Merci.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci à tout le monde. Donc, je vous remercie, tout le monde, de votre contribution aux travaux aujourd'hui. C'est très enrichissant et très agréable.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 h 50.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 15 h 51)

La Présidente (Mme Guillemette) : Alors, bonjour, tout le monde. À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux.

La commission est réunie cet après-midi pour entendre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions législatives.

Cet après-midi, nous entendrons, par visioconférence, la table de concertation des acteurs nationaux en patrimoine et Mme Phyllis Lambert. Donc, bienvenue à M. Bessette et Mme Cyr. Mme Cyr, vous êtes là également, on vous entend, mais on ne vous voit pas, je crois.

Mme Cyr (Lise) : C'est tout à fait cela. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Guillemette) : D'accord. Donc, si vous voulez intervenir, vous n'aurez qu'à vous manifester. Ça va être un petit peu plus compliqué, mais on va prendre le temps qu'il faut.

Mme Cyr (Lise) : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, je vous souhaite la bienvenue. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour présenter votre exposé, et qu'à la suite de ce 10 minutes il va y avoir un échange avec les membres de la commission. Donc, je vous laisse la parole immédiatement.

Table de concertation des organismes nationaux
en patrimoine bâti du Québec (TCONPB)

(Visioconférence)

M. Bessette (Guy) : Merci. Mme la ministre, Mme la Présidente et les membres de la commission, d'abord, permettez-nous de vous remercier de votre invitation à participer à cette consultation.

Nous représentons la Table de concertation des organismes nationaux en patrimoine bâti. Cette table regroupe des organismes nationaux oeuvrant pour la sauvegarde, la mise en valeur et l'interprétation du patrimoine bâti. Ces organismes rassemblent des milliers de citoyens de partout au Québec intéressés, interpelés ou impliqués dans le milieu du patrimoine. La table se veut un espace de discussion ouvert sur des enjeux communs aux organismes participants en matière de conservation, de protection et de valorisation du patrimoine. En concordance avec cette mission, nous avons tenu, notamment, le Sommet national du patrimoine en 2017. Deux grands constats faisaient consensus au terme de ce sommet : nous devons envisager le patrimoine bâti dans une perspective intégrée d'aménagement du territoire et nous devons substantiellement modifier notre discours sur le patrimoine pour parler de lui comme d'un levier de développement local et régional durable.

Permettez-moi un préambule à notre discussion. D'abord, nous tenons à souligner que nous sommes en accord avec l'esprit du projet de loi. Nos interventions s'appuient sur deux principes fondamentaux à nos yeux. Premièrement, nous croyons que le patrimoine a besoin de professionnels et d'organismes pour l'encadrer mais aussi de bénévoles, de passionnés et de propriétaires exemplaires pour le mettre en valeur. L'implication des citoyens, nous la retrouvons à deux niveaux : les organismes locaux liés au patrimoine, qui regroupent des passionnés avec une grande connaissance de leur milieu, et les organismes nationaux, qui mobilisent une grande expertise dans leur domaine et une vision d'ensemble à l'échelle du Québec. Nous croyons que la loi doit explicitement reconnaître les organismes et s'engager à les soutenir adéquatement afin qu'ils puissent jouer pleinement leur rôle.

Le second principe est le suivant. Nous présumons de la bonne foi des municipalités et des MRC, comme vous, mais, sur le terrain, nous constatons combien les besoins de développement et la sauvegarde du patrimoine peuvent être des sources de tension. Nous estimons que, même avec la meilleure volonté du monde, être juge et partie dans une cause peut facilement amplifier ces tensions.

Quelques observations et suggestions d'ordre général relatives au projet de loi. Certaines causes peuvent opposer des visions différentes entre élus et citoyens. Nous croyons que la création d'un poste d'ombudsman du patrimoine donnerait aux citoyens lésés une possibilité d'intervention de... (panne de son) ...recours évitant des aberrations comme nous en avons tous vues dans le passé.

En concordance avec le rapport du Vérificateur général du Québec, nous croyons que les propriétaires de biens classés, et nous ajoutons cités et inventoriés, devraient bénéficier de la part de l'État d'un support logistique et financier mieux adapté. Nos expériences nous permettent de l'affirmer, l'intérêt pour le patrimoine par les autorités locales peut changer radicalement aux quatre ans. C'est pourquoi nous disons que la décitation d'un bien ne devrait pas suivre le même chemin que sa citation, que celle-ci devrait nécessiter une autorisation gouvernementale.

De nombreux inventaires ont été réalisés par l'État. Ils sont des sources importantes de connaissances. Les grilles utilisées pour les réaliser devraient être améliorées et servir de base aux inventaires que les autorités locales seront appelées à produire. Dans la perspective où ces biens seront placés dans des catégories dont nous ignorons encore la teneur, il faudra prendre garde que ces biens, qui ne s'inscrivent pas dans la catégorie d'intérêt national, ne soient pas perçus comme n'ayant pas d'intérêt local. On a vu trop souvent des administrations locales dire : Ce bien n'est guère important, il n'est même pas classé par Québec, alors que, localement, il était important et a passé ainsi entre deux chaises. Nous recommandons de publier les inventaires passés et à venir et de créer des grilles d'évaluation standardisées pour l'ensemble des inventaires.

Finalement, l'État doit voir les éléments patrimoniaux d'un même type mais dispersés sur un territoire comme s'ils étaient d'un seul... comme s'il s'agissait d'un seul élément patrimonial national.

Nous reconnaissons la bonne foi de l'ensemble des intervenants, mais il existe assez de mauvaise foi dans notre domaine pour qu'il soit nécessaire de mettre en place des mécanismes pour les contrer. À nos yeux, quatre actions doivent être entreprises pour maintenir la confiance et la participation du public. La création, par l'État, d'une certification pour les firmes d'ingénieurs et d'architectes qui se spécialisent en patrimoine. Des rapports d'évaluation concernant la qualité structurelle d'un bâtiment doivent être réalisés par des professionnels possédant cette certification, et nous ajoutons que, pour recommander la démolition d'un bâtiment, un professionnel à l'emploi d'un service des incendies devrait avoir aussi cette certification. Pour éviter toute apparence de conflit d'intérêts, une firme qui fournit un avis sur la qualité structurelle d'un bâtiment ne devrait pas pouvoir soumissionner sur aucun projet de remplacement de ce bien. Le ministère devrait, à notre avis, renforcer son équipe de... (panne de son) ...afin d'offrir un soutien aux organismes qui travaillent à la préservation d'un bien menacé de démolition. Si cette menace repose sur un certificat qui laisse croire à une complaisance, l'État pourrait ainsi fournir à ces organismes des contre-expertises crédibles. Grâce aux médiateurs, le rôle des institutions muséales et des lieux d'interprétation est crucial pour transmettre au public le savoir-faire et la valeur d'un patrimoine donné. La protection et la valorisation de ces professionnels et institutions doivent faire partie de la réflexion des décideurs.

Sur le principe des pouvoirs inclus dans la loi pour faire corriger des travaux non conformes exécutés sur un bien classé, nous croyons que la loi devrait explicitement prévoir que le propriétaire d'un bien classé ou cité a l'obligation de protéger celui-ci minimalement contre les intempéries, les avaries structurelles et intrusions, faute de quoi le ministère ou la ville ont l'obligation de faire exécuter ces travaux, et le coût de ceux-ci constituent une créance prioritaire.

• (16 heures) •

Nos observations plus spécifiques à des articles du projet de loi. À notre avis, la table des partenaires devrait comprendre une représentation régionale afin de faire ressortir les particularités du territoire, et les organismes nationaux en patrimoine bâti doivent être partie prenante de celle-ci. Pour une plus grande implication des citoyens, nous croyons que tous les avis de déclassement, de démolition, etc., devraient, en plus de la publication dans les journaux, être affichés en bordure de rue sur le lieu concerné. L'abandon des plans de conservation devrait, selon nous, être suivi d'une bonification du support apporté aux propriétaires. De telles balises sont importantes pour les petits organismes ou les municipalités moins bien outillées.

Nous croyons qu'il est primordial de favoriser les fouilles archéologiques et, en ce sens, nous estimons qu'il serait plus rentable socialement d'annuler les frais des permis et d'offrir, en lieu et place, une première expertise gratuite, mais le ministère de la Culture devrait développer une façon de faire plus aidante, plus collaborative, moins mur à mur et moins coûteuse pour le propriétaire.

Afin d'augmenter la participation citoyenne et pour une question de plus de transparence de l'État, nous croyons que les recommandations du Conseil du patrimoine culturel devraient être publiques a priori. Il nous semble normal que le conseil demande au requérant de formuler des observations avant de transmettre son avis au ministre, mais il serait tout aussi pertinent de demander des observations aux organismes locaux liés au patrimoine et aux organismes sectoriels nationaux lorsqu'ils existent.

Les MRC doivent se doter d'un inventaire des biens patrimoniaux construits avant 1940. Nous croyons que les MRC ont besoin d'un inventaire de l'ensemble de leur patrimoine, que celui-ci soit ancestral ou moderne. Le patrimoine moderne est moins bien compris, moins bien protégé, tant par la structure municipale que par les citoyens et même par les organismes, beaucoup plus axés sur le patrimoine ancestral. Nous croyons important que l'État exerce un leadership à ce chapitre. Nous croyons que le ministre non seulement... le ministère, excusez, non seulement peut, mais doit exiger la publication des inventaires réalisés par les MRC. Nous considérons que c'est essentiel pour une participation citoyenne active, certes, mais surtout pour une participation citoyenne pertinente.

Lorsqu'il existe une menace à un bien, la municipalité peut ordonner une série de mesures. Nous sommes d'avis que, s'il y a menace, non seulement elle peut agir, mais elle doit agir. Particulièrement pour les villes, la composition de la CLP devrait être différente de celle de la CCU. Pour rendre transparentes les interventions en patrimoine et pour favoriser la participation des citoyens à sa protection, nous croyons que la CLP devrait minimalement comprendre un professionnel du domaine du patrimoine, des membres issus des organismes d'histoire et de patrimoine, des personnes nommées par le conseil, certes, mais à partir de listes fournies par les 10 organismes, et être en nombre paritaire à ceux provenant d'autres milieux.

En conclusion, nous espérons que ces observations puissent vous guider dans la révision de la loi. Les organismes membres de la table réitèrent leur espoir de voir l'État reconnaître et financer les organismes locaux et nationaux actifs pour la sauvegarde du patrimoine. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup. Nous passerons maintenant aux échanges avec Mme la ministre. Je vous cède la parole.

Mme Roy : Oui. Et Mme Cyr ne voulait pas intervenir? On va juste s'en assurer.

Mme Cyr (Lise) : Oui, je suis toute là. Merci.

Mme Roy : D'accord. Je vous laissais la parole, si vous vouliez intervenir. Parfait. Bien, bonjour à vous deux, M. Bessette, Mme Cyr. Merci pour votre présentation. D'abord, vous allez me permettre de vous remercier pour toutes ces années de travail, parce qu'on sait que, bien souvent, les groupes de défense du patrimoine portent le flambeau très, très fort pour beaucoup de monde, et c'est un travail passionné que vous faites et il est important.

Donc, je veux vous remercier pour le travail qui est fait et je veux aussi souligner le fait qu'au fil des ans les groupes et la table de concertation, les groupes que vous représentez et même des groupes locaux, pas uniquement des groupes nationaux, on toujours demandé d'avoir plus de collaboration, plus d'interactions avec le ministère de la Culture ou le patrimoine de façon générale, avec ceux qui auront les rênes du patrimoine, et j'ai voulu marquer pas le pas dans ce projet de loi en vous y incluant.

Vous dites que vous souhaitez que nous reconnaissions les organismes, ce que nous avons fait. Et, tout au début du projet de loi, nous avons créé — et je vais y aller ici — naturellement, un nouvel article, l'article 5, et on introduit le fait que nous allons créer une politique de consultation à 11.1. Et un petit peu plus loin, à 11.2, on dit : Et pour tout ça, bien, nous prévoyons la formation d'une table des partenaires, et nous allons déterminer la composition, le fonctionnement, les sujets qui seront soumis à la consultation de ses membres.

Donc, j'ai voulu qu'on écrive dans la loi que le travail que vous faites est tellement... que vous faites est crédible et important à ce point que vous ferez partie de la solution puis vous allez nous partager votre expertise. Donc, on crée cette table des partenaires. Et c'est depuis des années et des années que vous demandiez d'être entendus d'une voix plus forte. Bien, on vous a inclus dans la loi. Alors, j'espère que vous voyez le geste qui est posé, et que la protection du patrimoine, c'est l'affaire de tous, des groupes, du gouvernement, des différents paliers de gouvernement, des citoyens, et qu'il faut trouver un équilibre dans tout ça.

Puis ce n'est pas facile parce qu'il y a souvent des motifs qui s'affrontent, je vais dire ça comme ça, des motifs qui s'affrontent, des réalités différentes pour les uns et les autres. Bien, il faut trouver des façons de s'entendre et de parler ensemble pour trouver des solutions pour le protéger. Parce que, la réalité... moi, je voudrais bien, ce serait mon souhait le plus cher, protéger absolument tout et de donner des centaines de millions pour tout restaurer. C'est impossible. C'est impossible. Donc, il y a des choix, il y a de l'arbitrage, et c'est sûr qu'on ne peut pas tous s'entendre, mais il faut arriver à des terrains d'entente pour nous assurer qu'on le protège, ce patrimoine. Donc, je voulais juste vous dire que... c'est juste pour vous dire jusqu'à quel point... On a dit : Ça, les groupes nous le disent, nous le demandent, puis on va travailler ensemble parce que moi, j'ai confiance.

Par ailleurs, vous parliez, puis là c'est juste une petite note que j'ai prise ici, puis je veux... J'ai oublié de partir mon chronomètre, Mme la Présidente. Vous me ferez signe. Vous disiez que le patrimoine doit être vu, puis là j'ai pris des notes, dans une perspective intégrée d'aménagement du territoire. Je veux vous dire que nous y travaillons. Je travaille main dans la main avec ma collègue la ministre des Affaires municipales, et, tout comme elle... c'est-à-dire, tout comme moi, elle croit qu'il est important de préserver notre patrimoine et de le prendre en considération dans un ensemble plus grand et dans une perspective intégrée d'aménagement du territoire. Et ça, c'est ma vision, et c'est notre vision.

Et j'irais même un peu plus loin à l'égard de ma vision. Je suis de ces gens qui prônent la réutilisation des bâtiments, faire vivre les bâtiments, leur donner une vocation. Protéger ou classer un bâtiment qui ne sert à rien ni à personne, c'est triste. Il faut qu'il vive. Alors, il y a tout cet arbitrage-là à faire, mais moi, je veux faire vivre le patrimoine. Voilà. Voici pour les apartés et les introductions.

Maintenant, je vais vous poser une question relativement... Je vous disais : Nous avons créé, bon, bien, cette table des partenaires, c'est une nouveauté, alors, je voulais voir comment vous verriez le rôle de cette table des partenaires relativement à la politique de consultation que nous voulons élaborer.

M. Bessette (Guy) : Bien, écoutez, d'abord, merci. C'est heureux de voir que nous avons beaucoup de perspectives communes. Et, pour revenir à votre question, la participation, c'est sûr que nous pensons, peut-être qu'on l'a spécifié, que, notamment, pour la représentation des régions, les réalités... et je pense que c'est important qu'au niveau de la consultation de la table des partenaires que les organismes, particulièrement les organismes nationaux, à ce moment-ci, puissent être présents pour être en mesure d'apporter un éclairage spécifique en fonction des différents types de biens dont il est question et aussi d'apporter un éclairage en termes de région. Parce que vous êtes certainement très sensible au fait que ce n'est pas la même réalité pour le patrimoine qu'on soit en milieu urbain, en milieu périurbain et en milieu rural, par exemple. Et il y a quand même une partie relativement importante du patrimoine qui se retrouve dans chacun de ces types de zonage là. Bon, quand on pense, par exemple, à des moulins, on les retrouve plutôt en milieu éloigné, en milieu rural. Évidemment, le milieu urbain en a beaucoup. Et le milieu périurbain, bien, avec toutes les problématiques de densification de territoire, par exemple, pour les municipalités qui sont membres de la CMM, ça implique des enjeux sur le patrimoine qui sont extrêmement importants puis pour lesquels je pense que les organismes pourraient être un éclairage et un support important.

Mme Roy : Parfait.

La Présidente (Mme Guillemette) : Est-ce que Mme Cyr voudrait intervenir?

• (16 h 10) •

Mme Cyr (Lise) : Non, je n'ai pas demandé la parole, mais je peux intervenir quand même, dans le sens où j'appuie tout à fait ce que Guy dit, parce qu'on est beaucoup appelés à intervenir, justement, peut-être dans des régions éloignées où il n'existe pas beaucoup de ressources au niveau professionnel. On est appelés à intervenir non seulement sur les créneaux qu'on a à coeur, comme... moi, c'est la Corporation des gestionnaires de phares, donc, toute la dimension des phares, je pense qu'on n'intervient pas seulement sur les créneaux qui nous concernent, mais on a une certaine sensibilisation et on est appelés à jouer un rôle-conseil dans tous ces groupes-là. Donc, cette voie-là aussi, d'un patrimoine élargi, d'un patrimoine de paysages culturels, d'un patrimoine de conservation en région, je pense que c'est à ce niveau-là, je pense, que peut-être le poids de nos interventions pourrait faire la différence.

La Présidente (Mme Guillemette) : Parfait, merci. Mme la ministre.

Mme Roy : Oui, merci. À cet égard-là, vous avez constaté aussi, à la lecture du projet de loi, que nous voulons redéfinir les critères, la grille pour cette raison-là entre autres, parce que Québec classe, les villes citent, les MRC pourront citer, nous le souhaitons également, donc davantage d'organismes soucieux de la protection du patrimoine, cependant, actuellement, pour qu'un bien soit classé par Québec, avec la grille qu'on a puis les évaluations que nous faisons, il faut absolument que le bien soit d'intérêt national et réponde à certains critères. À cet égard-là, ils doivent être modifiés, selon moi, puisqu'en région on peut avoir des bâtiments absolument exceptionnels, mais, vu certains matériaux, vu certaines composantes, vu certains lieux, vu certains critères, ils ne répondent pas à la définition d'intérêt national, alors qu'ils sont quand même d'intérêt national de par leur histoire. Donc, nous ajoutons des valeurs qui seront prises en considération, et ce qui permettra entre autres d'avoir quelques bâtiments classés de plus, donc qui auront une protection. Donc, là-dessus, je pense que... j'espère que vous saluez ce changement pour pouvoir protéger des édifices qui ne répondent pas nécessairement aux actuels critères, donc modifier et moduler les critères avec des réalités des régions entre autres.

J'avais une question. Parce que vous êtes, naturellement, des organismes, pour la plupart des bénévoles et des professionnels, des spécialistes, le soutien financier... Je regarde, ma collègue députée juste en face m'a déjà interpelée sur le soutien financier à vos organismes, pour vos organismes. Ma question est : De quel type de soutien financier auriez-vous besoin?

M. Bessette (Guy) : Je pense que la réponse simple et courte, c'est : On a besoin d'un support financier au fonctionnement. La plupart des organismes, on est admissibles à différents programmes, des programmes spécifiques, mais ce qui manque à l'ensemble des organismes, c'est d'avoir un minimum vital pour assurer d'avoir une... si ce n'est une permanence, au moins une permanence partagée avec quelques organismes entre eux, parce qu'on est quand même plusieurs qui avons des éléments assez similaires. Mais, c'est ça, donc, on a besoin vraiment de pouvoir être épaulés par un minimum, là, au niveau du fonctionnement. C'est là le problème majeur pour l'ensemble des organismes.

Mme Cyr (Lise) : Peut-être pour compléter, Mme la ministre, si vous permettez, il n'y a pas si longtemps, les organismes comme la Fédération Histoire Québec, plusieurs organismes avaient quand même une base où on pouvait minimalement avoir un local, pouvoir se payer le téléphone, pouvoir au moins ranger les principales archives, ce qui a complètement été abandonné depuis quelques années et qui fait en sorte que tout risque de s'éparpiller. Et ça, ce serait vraiment dommage. Donc, comme mon collègue Guy le souligne, c'est vraiment d'avoir une base qui nous permet d'avoir au moins une structure minimale de fonctionnement.

Mme Roy : Je vais être hyperhonnête et transparente avec vous, il y a des gens qui n'aiment pas ça. Moi, je vous le dis tout de suite, je vais voir tout ce que je peux faire pour essayer de vous aider. Je ne vous dis pas là que je m'engage à vous donner au fonctionnement demain matin, là, comprenez-moi bien, mais on est... je suis très sensible à vos propos et nous réalisons qu'effectivement il y a des besoins.

Cela dit, c'est un équilibre, hein? Le ministère de la Culture soutient au financement... on parle de centaines et de centaines, voire de milliers d'organisations culturelles. Donc, il y a des choix qui s'imposent. Et actuellement la réalité financière, mon collègue le ministre des Finances nous a dit que nous étions 15 milliards de dollars en déficit cette année, huit l'année prochaine et sept la suivante. Alors, vous comprenez qu'il y a des arbitrages à faire. Mais j'entends votre message et je vais faire tout ce que je peux pour vous aider, mais il n'y a aucune garantie et aucune somme, et je voulais vous le dire tout de suite.

Vous avez soulevé quelque chose tout à l'heure. Vous disiez que, bien, le propriétaire d'un bien classé, cité ou d'un site déclaré devrait avoir l'obligation de protéger ce bien. Vous allez me permettre de vous souligner qu'il a déjà cette obligation, qui est dans la loi et qui n'est pas modifiée, à l'article 26 pour les biens classés, à l'article 136 pour les biens cités. Donc, ça existe déjà. Je pense, ce à quoi vous faisiez référence, c'est que trop peu de fois les citoyens sont, comment dirais-je, rappelés à l'ordre pour remplir leurs obligations. C'est peut-être ça, parce que l'obligation, elle existe déjà.

Par ailleurs, vous avez soulevé... vous parliez d'inventaire. J'ai une petite observation. L'article 38, qui dit que les MRC, les municipalités, etc. devront se doter d'un inventaire, il est bien important de comprendre ici qu'on n'arrête pas d'inventorier après 1940. L'article dit : C'est un minimum. Obligatoirement, ce qui a été bâti avant 1940 qui est patrimonial devra être dans l'inventaire, ce qui n'empêche en rien les MRC, les villes, les municipalités d'aller plus loin, et ce qu'elles font pour la plupart. Certaines... plusieurs l'ont déjà fait. Donc, ce n'est pas limitatif, mais bien au contraire, et ça n'exclut pas le patrimoine postérieur, bien au contraire. Là, je veux le souligner, parce qu'il y a eu comme, je pense, une interprétation à l'effet qu'on ne voulait pas protéger tout autre type de patrimoine, et ce n'est pas le cas du tout, c'est une... — vous me faites signe, deux minutes, Mme la Présidente — c'est une base pour travailler.

Il me reste deux minutes. Je veux juste vérifier si Mme Cyr veut dire quelque chose, puis j'irai d'une autre petite question.

Mme Cyr (Lise) : Effectivement, je voulais dire quelque chose sur la notion des inventaires.

Mme Roy : Allez-y, allez-y.

Mme Cyr (Lise) : Je vous ai entendue dire un mot qui est très important pour nous, c'est le mot «valeur». Alors, je pense que, lorsque va venir le temps d'intervenir au niveau de fiches standardisées d'inventaires ou tout ça, le mot «valeur» va prendre toute son importance, dans le sens que les valeurs sont multiples. Il n'y a pas juste la valeur de la date, mais il y a la valeur ethnologique, la valeur historique, la valeur d'intérêt régional. Il y a beaucoup de valeurs qui prennent sensiblement un autre éclairage lorsqu'on les regarde, et qui viennent faire en sorte qu'on peut faire ressortir beaucoup d'éléments d'importance par rapport à ces systèmes-là. Donc, les grilles qui vont nous amener à des évaluations et qui vont nous amener à des catégorisations, le jeu de ce qui va être dans l'inventaire va être très important au niveau des notions qui vont y être inscrites. Merci.

Mme Roy : Et également la façon dont seront faits les inventaires et les inventaires, ce qui est bien fait, qui a été... qui est à jour, et, naturellement, est conservé, puis nous tenterons de bonifier... Et, vous avez sûrement remarqué, le programme patrimoine et municipalités que nous avons mis sur pied permettait à des MRC de se regrouper, justement, ensemble pour embaucher un agent en développement patrimonial pour faire ces inventaires puis pour faire le lien entre le citoyen, la ville et le ministère. Donc, on s'en va vers ça. Je crois qu'il me reste à peine 10 secondes pour vous... Il ne m'en reste plus, hein?

La Présidente (Mme Guillemette) : Il ne vous reste plus de temps, mais je vous laisse 10 secondes.

Mme Roy : M. Bessette, merci beaucoup. Mme Cyr, merci pour votre contribution aujourd'hui.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je passerais maintenant la parole à Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Cyr, M. Bessette, bienvenue. Heureuse de vous entendre. Surtout, très émouvant d'entendre votre passion, votre implication et les heures et les heures de bénévolat que vous faites parce que vous croyez tellement à votre mission.

À plusieurs égards, vous mettez l'accent sur le citoyen et l'importance que le citoyen soit informé, que le citoyen soit impliqué, connaissant. Il y a une éducation, mais une sensibilisation qui fait que ce citoyen devient un acteur de protection. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que c'est vraiment un fil conducteur dans votre vision qui rejoint une... C'est drôle, hein, dans un sens, c'est un concept qui est là depuis des centaines d'années, vraiment. Quand la société a voulu bouger, elle n'a pu que bouger et avancer avec l'appui des citoyens. Mais on revalorise actuellement, en donnant des outils, par des expertises, et ces citoyens deviennent des experts.

Parlez-moi un peu, si vous pouvez, de cette importance, pour vous... parce que la question de financement est là aussi, le financement pour assurer votre pérennité et votre... cette implication continue. Il y a un tout là-dedans, il me semble. Évidemment, la ministre, là, l'a souligné, son intention, sa volonté, et c'est un pilier pour le gouvernement aussi.

• (16 h 20) •

M. Bessette (Guy) : Bien, on pourrait dire à ce sujet-là que c'est déjà bien que des citoyens, là, la considèrent importante, parce que, malheureusement, au cours des dernières décennies, comme société, on n'a pas été très actifs dans la valorisation. Souvent, on va parler de patrimoine suite à un désastre pour... on va se rassembler autour d'une maison qui vient d'être démolie, alors que nous, ce qu'on dit : Il faudrait être beaucoup plus proactifs, il faut valoriser, il faut que les gens réalisent... En fait, on croit, ce n'était pas l'objet du projet de loi, mais on croit que le gouvernement aurait tout avantage à faire des campagnes de sensibilisation, d'information, comme on en a faites pour le tabac, la ceinture de sécurité pour les autos, et tout.

Les citoyens... Si on veut que les citoyens s'impliquent, il faut les informer, donc les animer par, peut-être, de la publicité, mais surtout les informer. Et les informer, bien, malheureusement, dans la société, souvent, on a la perception que, dans le domaine du patrimoine, les choses sont faites, peut-être, par les pouvoirs locaux un peu quand ils y sont forcés, quand ils arrivent au bout, parce qu'il n'y a comme pas d'autre alternative. Et nous sommes conscients que c'est la pression du milieu, et c'est normal aussi.

Vous savez, on ne veut surtout pas jeter le blâme sur les municipalités, par exemple, qui sont prises entre l'arbre et l'écorce. Les citoyens demandent de plus en plus de services, ne veulent pas trop payer de taxes. Donc, en quelque part, l'argent, ils n'en impriment pas, donc ils sont obligés de faire des choix. Et bien sûr que les amants du patrimoine trouvent que, des fois, les choix se font trop au détriment du patrimoine par rapport à ce qu'il pourrait être.

Mme Weil : Et, dans quelques pages suivantes, vous attachez à cette notion de l'implication, un peu, du citoyen et de la crédibilité des processus... vous proposez quatre actions et vous dites : La confiance du public, ça revient à ça aussi, la confiance du public dans les processus pour favoriser son implication, que ça va de pair. Donc, parmi vos recommandations, vous recommandez la création par l'État d'une certification pour les firmes d'ingénieurs et d'architectes spécialisés en patrimoine, parce que vous dites : Malheureusement, il y a beaucoup de gestes de mauvaise foi. Donc, parlez peut-être de cet élément aussi.

M. Bessette (Guy) : Bon, on voudrait peut-être corriger. Ce n'est peut-être pas beaucoup, mais il y a des gestes de mauvaise foi. Peut-être qu'ils sont plus mis... ils sont souvent, peut-être, mis davantage de l'avant, hein, parce que... bon, par les médias, puis tout ça, c'est peut-être plus facile de parler des gestes de mauvaise foi, mais ça existe.

Et pour redonner confiance... Vous savez, les citoyens, par exemple, dans un organisme qui protège le patrimoine, quand ils voient une firme d'ingénieurs qui dit : Bien, la maison devant vous, nous devons la démolir parce qu'elle présente des conditions inacceptables, et que c'est la même firme qui fait la proposition du projet de remplacement, bien, le citoyen est à même de se poser la question : Est-ce que la firme était vraiment indépendante dans son avis? Et c'est pour ça que nous disons... Et l'autre élément qu'on voit souvent quand on veut se débarrasser d'un bâtiment : Ah! ça va coûter des millions, réparer ça, ça va coûter des millions à restaurer, ça.

C'est pour ça que nous disons que le certificat de validation structurelle et l'évaluation des coûts de remplacement ou d'amélioration d'un projet devraient être donnés par des firmes que le ministère reconnaîtrait comme étant des firmes qui ont de l'expérience dans le domaine du patrimoine et qui sont indépendantes, parce que cette même firme-là ne pourrait pas proposer de projet de remplacement.

Mme Weil : Ça, c'est intéressant. Donc...

La Présidente (Mme Guillemette) : Mme la députée, je vous demanderais de vous enligner avec votre micro pour les besoins de la... pour la télédiffusion...

Mme Weil : Oh oui! bien oui, je suis très loin du micro...

La Présidente (Mme Guillemette) : ...pour que tout le monde entende bien vos propos.

Mme Weil : ...en direct avec M., mais loin du micro.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci, vous pouvez continuer.

Mme Weil : Merci, Mme la Présidente. Oui, c'est ça, donc, vous avez quatre principes. Donc, ces principes-là, vous n'avez pas retrouvé quelque part dans le projet de loi... je veux dire, c'est sûr que tout peut être rajouté au projet de loi, mais vous voyez ça comme un élément quand même important... étant donné la volonté du gouvernement, de la ministre de, justement, moderniser et sécuriser le patrimoine, que c'est des éléments importants du schéma, si on veut.

M. Bessette (Guy) : Exactement.

Mme Weil : D'accord.

M. Bessette (Guy) : C'est ça. C'est des éléments sur lesquels nous croyons important d'insister. Peut-être que, par certains aspects, ils se retrouvent dans le projet de loi, mais nous croyons important de s'assurer, d'insister sur le fait qu'ils doivent prendre une place prépondérante.

Mme Cyr (Lise) : Peut-être...

Mme Weil : Oui, Mme Cyr.

Mme Cyr (Lise) : ...dans une certaine campagne de promotion du patrimoine, faire ressortir qu'il y a aussi un impact positif, économique et social, un sentiment d'identité qui est très valorisant, donc d'amener le citoyen, en tout cas, par une campagne promotionnelle, à comprendre l'importance de ce patrimoine-là, et non pas juste de le voir comme étant toujours des coûts faramineux pour arriver tout près de réaliser ou de sauver ces bâtiments-là.

Et, à ce niveau-là, on parle... on a un article un petit peu plus loin qui parle, justement, des plans de conservation qui devraient, quand on aura vraiment les grilles et la catégorisation, avoir des recommandations pour aider et les citoyens et tous les gens à comprendre vers quoi ils devraient tendre pour être capables de sauvegarder ces bâtiments-là avec... Bon, les plans de conservation, c'est vrai que c'était contraignant, c'est vrai qu'il y avait quand même des... c'était lourd pour le citoyen, mais en ajoutant, avec la catégorisation, des orientations pour l'aider à atteindre des objectifs de conservation, je pense que ça, ça sera vraiment intéressant.

La Présidente (Mme Guillemette) : ...

Mme Weil : Deux minutes, O.K. C'est beaucoup de temps, c'est formidable, Mme la Présidente. Avant de revenir sur le rôle du citoyen parce que, dans plusieurs de vos recommandations... il y a vraiment une cohérence dans votre plan de match, si on veut, les aires de protection, il y a plusieurs... quelques organismes qui en ont parlé, mais je ne peux pas dire que les gens qui nous écoutent ont beaucoup, peut-être, compris, et je pense que c'est un aspect bien important. Et c'est à la page 6 de votre document, vous parlez de l'article 40 de la LPC, les aires de protection, donc, géohistorique des territoires avec une trame territoriale. Peut-être vous pourriez en parler, parce qu'on se rapproche aussi du développement durable un peu, hein, quand on arrive sur ...c'est un peu la croisée des chemins entre le patrimoine et le développement durable.

M. Bessette (Guy) : C'est ça, exactement. Dans notre position, c'est que les aires de protection, on comprend qu'elles sont déjà comprises dans la loi, qu'il y en a, mais on pense que, si elles ne sont pas généralisées, il faut au moins s'assurer que, dans l'analyse du bien qu'on va classer, on tienne vraiment compte de l'ensemble de ce qui est autour du bien qu'on va classer. Un moulin, ce n'est pas un bâtiment de pierre dans lequel il y a des meules. Un moulin, c'est aussi un lieu dans lequel... autour duquel, bon, il y a le barrage, il peut y avoir des dépendances. Et ce sont ces éléments-là. Parce que c'est ce qui permet souvent aux citoyens de comprendre le fonctionnement, de comprendre l'importance, de comprendre comment ça s'intégrait, comment c'était inclus dans le mode de vie qui est mis de l'avant par le bien qu'on veut protéger.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup.

Mme Cyr (Lise) : C'est ce qui fait aussi qu'on peut... Pardon. Je veux intervenir un peu.

La Présidente (Mme Guillemette) : Allez-y, Mme Cyr.

Mme Cyr (Lise) : Au niveau des aires de protection, c'est souvent, on va dire, le bien... je parle... par exemple, justement, un phare, un phare, c'est une station de phare. Souvent, on va classer ou on va reconnaître seulement que la tour, mais tout l'environnement est important. De créer des fenêtres sur la notion du patrimoine, de l'espèce d'environnement culturel, du patrimoine culturel qui le contextualise, c'est aussi très important. C'est ce qu'on... Sans créer nécessairement... Parce que je sais qu'au niveau des trames urbaines, c'est beaucoup plus compliqué d'avoir des aires de protection. Souvent, on va avoir une maison qui va être reconnue, qui va être entre des édifices en hauteur, et tout ça, mais, en tout cas, en région, c'est peut-être plus facile de créer... de voir comme étant des ensembles et de voir si l'interférence, justement, de ce qui peut être amené autour va créer ou va diminuer l'importance ou la lecture historique de cet ensemble-là.

Mme Weil : Merci. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci. Donc, je passerais maintenant la parole à la députée de Mercier pour son échange avec vous. La parole est à vous.

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. J'ai à peu près deux minutes quelque chose. J'ai une question par rapport à... Dans votre rapport, ou votre mémoire plutôt, à la page 4, vous parlez d'un ombudsman du patrimoine. Est-ce que c'est la même chose ou c'est quelque chose de différent qu'un commissaire au patrimoine, qui a été une recommandation du rapport Corbo-Courchesne?

• (16 h 30) •

M. Bessette (Guy) : En fait, pour être honnête, là, on n'a pas analysé, on ne l'a pas mis en parallèle ou en comparaison avec la proposition du rapport Corbo. Mais, pour nous, l'ombudsman, là où c'est différent, en tout cas, il y a un tribunal administratif dont il est question aussi, pour nous, c'est très différent, parce que, l'ombudsman, le tribunal, on n'est pas obligés, la plupart du temps, d'être représentés par un avocat. Sauf que, si je ne m'abuse, je crois que, quand c'est contre un corps public, ça nous en prend un. Et donc il faut s'imaginer qu'un tout petit organisme, une société d'histoire locale, par exemple, bien, elle n'a pas la possibilité de s'embaucher un avocat pour aller faire sa représentation. L'ombudsman, dans notre vision à nous, c'est vraiment une procédure plus simple, pour le citoyen ou le tout petit organisme, d'aller dire : Écoutez, il y a quelque chose là qui nous chicane, on pense qu'il y a quelque chose en arrière de cette position-là qui n'est pas correcte, puis elle devrait... ce bâtiment-là, par exemple, devrait être protégé pour telle, telle raison, puis il ne le sera pas, puis on demande à l'ombudsman de nous aider.

Mme Ghazal : Très bien. Comme un levier, là, pour les citoyens, oui. Très bien.

M. Bessette (Guy) : C'est ça. Pour les... c'est surtout à l'intention des citoyens et des tout petits organismes.

Mme Ghazal : Oui. Puis j'avais une autre question. Parce que, dans le fond, quand vous parlez, par exemple, d'«un support étatique mieux adapté pour les propriétaires» Parce que, ce qu'on entend, ce qu'on voit, là, le pattern, c'est qu'un propriétaire achète un bâtiment soit classé ou qui a une importante valeur, il le laisse dépérir à travers les années — personne ne voit rien, hein, ça se fait de façon invisible — et là, tout d'un coup, c'est tellement, tellement, tellement en décrépitude qu'il décide de... bien, je veux dire, qu'il n'y a aucune autre solution qu'il soit détruit.

Moi, en fait, ma question, c'est : Est-ce qu'avec le projet de loi puis les dispositions qui sont dans le projet de loi ça empêcherait que ce genre de pattern là se reproduise dans le temps?

M. Bessette (Guy) : Bon. Écoutez, je pense qu'il y a des bons aspects du projet de loi qui permettent une protection qui n'existait pas avant. Il y a une amélioration de la protection.

Cependant, je souhaiterais vous souligner qu'il y a comme deux éléments dans votre intervention. Parce que, oui, il y a des propriétaires de mauvaise fois, mais il y a aussi beaucoup de propriétaires de bonne foi. Parce que, le début de votre question, quand vous faisiez allusion à un meilleur support, hein, nous, c'est à ça qu'on fait référence. On croit qu'il y a beaucoup de propriétaires qui, de bonne foi, investissent dans leur bien pour le garder, pour le promouvoir, et que ces propriétaires-là ont besoin d'une aide.

Juste pour vous donner un exemple très, très simple, si j'ai une maison patrimoniale, que je refais la toiture en bardeau d'asphalte, que ça coûte 20 000 $, si je la refais en baguette, une couverture de tôle à baguette pour la rendre conforme puis lui donner vraiment ce qui lui revient, ça va m'en coûter 70 000. Une des problématiques, c'est que le 50 000 de plus, je vais payer des impôts fonciers à vie sur ce 50 000 $ là, ma maison a eu une augmentation de la valeur de 50 000 $. Donc, au lieu de supporter puis d'aider le citoyen qui a injecté plus d'argent dans son bâtiment, on vient le pénaliser. Et c'est juste un exemple parmi d'autres, là, d'éléments qu'il faut que la société, elle réfléchisse à ce niveau-là.

Mme Ghazal : ...par plusieurs, là, de revoir la fiscalité, qui est vraiment le problème, là, la fiscalité, que ça soit pour les municipalités ou aussi pour les propriétaires, pour les encourager, qu'il y ait des incitatifs. Des incitatifs pour qu'ils le gardent, mais des désincitatifs, c'est-à-dire que, pour empêcher ceux qui veulent... le laissent dépérir et le font détruire. Vous, vous pensez que c'est par la fiscalité, dans le fond, que ça passe?

M. Bessette (Guy) : Bien, il n'y a pas uniquement la fiscalité. Comme le disait tantôt Mme la ministre, oui, la loi prévoit déjà une obligation pour les propriétaires de garder leurs biens, mais ce qu'il faut, c'est renforcer le... Il faut rendre obligatoire l'intervention de l'État, de la ville, s'il est cité, ou du gouvernement, s'il est... c'est-à-dire l'inverse... non, s'il est classé, du gouvernement, s'il est cité, de la ville, et qu'ils interviennent d'une façon proactive, qu'on n'attende pas que le bâtiment soit en train de tomber avant d'injecter... de forcer le propriétaire à le maintenir. Il faut être proactifs à ce niveau-là.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup. Désolée... Merci beaucoup, M. Bessette, merci beaucoup, Mme Cyr, de votre présence, de vos contributions à nos travaux.

Nous allons suspendre quelques instants, le temps d'accueillir nos futurs invités. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 39)

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, bienvenue, Mme Lambert, merci d'être avec nous aujourd'hui. Donc, comme mentionné, vous disposez de 10 minutes pour votre exposé et, suite à ça, il y aura un échange avec les parlementaires. Mais ne soyez pas inquiète, on va s'ajuster dans notre temps. Donc, je vous laisse déjà, d'emblée, la parole.

Mme Phyllis Lambert

(Visioconférence)

Mme Lambert (Phyllis) : Je vous remercie beaucoup, Mme. Alors, premièrement, je... féliciter la ministre de la Culture et des Communications d'avoir entrepris de déposer le projet de loi qui est si nécessaire, et je n'ajoute plus rien, mais merci. Mais c'est-à-dire que nous reconnaissons qu'il y a des choses tout à fait intéressantes là-dedans, mais nous voulons présenter ce que nous trouvons... les lacunes.

• (16 h 40) •

Alors, en premier lieu, nous voulons élaborer sur un point fondamental à la dynamique en cause dans les municipalités à l'égard de la protection du patrimoine qui n'est pas reflété dans le projet de loi, et c'est le suivant : les municipalités sont placées en conflit d'intérêts vis-à-vis les développeurs et promoteurs immobiliers. Les municipalités cherchent toujours et avant tout à élargir la base de revenus des taxes foncières et autres taxes auxquelles elles ont accès pour se financer. Plusieurs se trouvent à devoir choisir entre protéger un édifice ou un site qui ne leur rapporte pas financièrement... que peut être la perspective d'un projet de développement, plantureux, d'ailleurs. Elles vont plutôt opter spontanément pour favoriser la démolition ou encore ne pas intervenir, laisser un édifice vacant être squatté ou pas et de devenir éventuellement un danger pour la sécurité publique.

Alors, je donne l'exemple de la municipalité de Mascouche qui a laissé dépérir le manoir de Repentigny qu'ils avaient acquis en 2015. Et c'est tout à fait pas bon, parce que rappelons que le manoir figurait déjà à l'inventaire des édifices historiques en 1929, par le gouvernement du Québec, évidemment, et qu'il a commencé à se détériorer quand la municipalité l'a acquis en 2015. C'est un geste d'abandon délibéré et, d'une certaine manière, un cas de négligence quasi criminelle.

Alors, il y a d'autres municipalités, il y a d'autres problèmes, mais je passe par-dessus. Mais je veux parler que... je veux dire que les villes sont les juges... dans la position de juge et jury en même temps, et il est absolument essentiel qu'il y ait une autorité capable de dénouer des conflits d'intérêts incontournables. Et pour... le projet de loi n° 69 fait référence aux MRC, mais les MRC ne sont rien d'autre qu'un rassemblement des mêmes représentants de villes et villages sur un territoire donné. Donc, on déplace le conflit de l'intérêt d'un autre niveau avec les mêmes joueurs. Il est donc nécessaire qu'il y ait un tribunal administratif, c'est-à-dire un arbitre indépendant dédié spécifiquement à cette responsabilité d'adjuger entre protéger l'intérêt public et conserver les édifices ou un site. Tant qu'on ne dénouera pas ce noeud inextricable pour obtenir la nomination d'un arbitre neutre pour protéger l'intérêt public dans la préservation du patrimoine, on perpétuera la même dynamique, le combat reprendra de plus belle entre les municipalités et les individus et les organisations voués à la défense du patrimoine. Autrement, je crois... je crains qu'on ne fasse que déplacer les problèmes à un autre niveau.

Alors, en deuxième lieu, je passe aux lacunes de communication, de la gestion et des critères de classification. Alors, je parle du problème de défaut de ne pas reconnaître l'importance fondamentale des inventaires — Héritage Montréal avait d'autres idées là-dessus — et la manière de les constituer, c'est-à-dire que... les critères à impliquer et les normes professionnelles à suivre. Le manque de compréhension de la nécessité de l'éducation du public est terrible. Les panneaux existent, évidemment, dans certains cas, surtout à Montréal — en tous les cas, nous les érigeons — et les textes explicatifs des éléments historiques et architecturaux sur ou à proximité des bâtiments et sites reconnus sont nécessaires aux règlements. En même temps, une petite publication attrayante et bien distribuée offrant l'histoire des bâtisses et indiquant... incluant les acteurs, analyses et vocabulaire architectural est essentiel. C'est par ce moyen que l'organisation Sauvons Montréal et Héritage Montréal nous ont amenés à aimer notre patrimoine, c'est-à-dire, il faut l'aimer comme un portrait de famille, c'est ça qui est important. À cet égard, de l'excellente information se trouve sur les sites Web spécialisés de Montréal et de la MCC, mais méconnue du grand public, vous voyez. Et puis alors, je donnais l'exemple de la maison Alcan, que les acheteurs qui ont acheté la maison Alcan ne savaient pas du tout que, la maison, les éléments composants étaient classés monuments historiques. Alors, comment est-ce que ça se trouve? Incroyable. L'imprécision des critères déterminants, la classification, comment sont-ils établis? Quel est le rôle des administrateurs des villes et des MRC et des organismes voués à la définition... à la défense, pardon, du patrimoine dans les régions? Quel est le rôle et comment impliquer le public, les architectes et les historiens professionnels qui dévouent leur vie à l'étude et à l'enseignement sur les questions et les problématiques liées au patrimoine?

Je parle du rapport de Claude Corbo, qui parlait du manque d'information, et Mme Michelle Courchesne, de 2016, qui... «...l'information dont dispose le gouvernement sur les propres immeubles à caractère patrimonial est fragmentée, non uniformisée — je cite — éclatée entre plusieurs détenteurs. Faute d'une information de nature comparable et accessible, les décisions que pourrait prendre le gouvernement pour bien gérer son propre patrimoine immobilier à valeur culturelle et celui des organismes ou réseaux dépendant de ses ministres reposent — tout ça repose — sur des bases très fragiles.»

Je parle plus tard aussi du manque de complicité entre les éléments dans le ministère des Affaires culturelles et Communications, parce qu'il y a des questions de tellement de... c'est-à-dire, il y a le patrimoine, il y a la question de... je vais lire ça tout à l'heure parce que je ne veux pas inventer.

Alors, je veux faire... parler d'une note personnelle. Quand j'ai siégé sur la Commission des biens culturels, les critères se résumaient en typologie, une église ou une maison par secteur, mais pas plus, pas deux, pas trois. Cependant, les édifices sont au coeur de nos communautés, et c'est également une connaissance de l'histoire qui est en cause. Si on continue la politique suivie jusqu'ici, ça pourrait être dévastateur. Alors, je donne un exemple aussi, un problème de contemporanéité parce que c'est les immeubles contemporains qui sont le patrimoine du futur. Par exemple, Habitat-67, à Montréal, pourrait être démoli selon le projet de loi n° 69 puisqu'il est postérieur à 1940. C'est absurde de ne pas avoir la flexibilité nécessaire pour ajuster au temps qui s'écoule. Il faudra une catastrophe à venir pour qu'on rende compte que la vue qu'on a du patrimoine, dans le projet de loi, est trop limitée dans le temps, et autres éléments dont je parle.

Pour la supervision des sites et édifices cités, qui s'occupe d'assurer le maintien, de suivre les règlements, et dans le cas d'un ajout d'une construction? Je parle, ici, le problème de la maison Mount Stephen, à Montréal, qui a été sérieusement affectée lors de la construction d'un hôtel commercial adjacent, et d'une lecture insuffisante des documents de construction et de la supervision du site. Et c'était un endroit même que, moi, je connaissais. Qui aura la responsabilité d'évaluer et d'autoriser une telle construction tout en protégeant l'intégrité architecturale et historique du site? Alors, il y a un exemple positif... Je passe par-dessus parce que je ne veux pas perdre de temps.

• (16 h 50) •

En troisième lieu, questions posées par un propriétaire de bâtiments et sites classés. Au Centre canadien d'architecture, nous avons acquis une expérience, comme gestionnaires, dans la maison Shaughnessy, qui fut classée monument historique avec son aire de protection en 1974. En ce qui concerne les ressources humaines affectées au secteur du patrimoine du ministère de la Culture, le CCA ressent la diminution d'équipe de direction du patrimoine, ce qui joue sur l'efficience, l'efficacité et l'expérience pertinente et suffisante. Ce manque de ressources humaines indique une insuffisance chronique de fonds alloués au ministère de la Culture et des Communications. Le CCA conclut aussi que le répertoire... il faut des répertoires sur les sites, et que cette information soit largement diffusée. Voilà encore le cas de l'Alcan qui brille là-dedans. La documentation, le projet de loi... Je parlais des connaissances et des documentations sur les bâtiments, mais le projet de loi ne semble pas prévoir une obligation ou d'autres mécanismes de documentation sur le processus de restauration et de sauvegarde de certains biens patrimoniaux et la documentation à compléter et à archiver. L'éducation du public et la sauvegarde des métiers traditionnels qu'on lègue aux générations futures dépendent de ça.

Alors, aussi, le déficit de l'entretien. Le ministère ne devrait-il pas imposer le dépôt, par le propriétaire, d'un plan de maintenir des actifs pour tous les sites patrimoniaux classés? Ça, c'est très important dans le maintien de n'importe quel bâtiment, et c'est l'expérience énorme là-dedans, pas dans des bâtiments qui sont classés, mais les bâtiments de grande valeur.

Partenariats, comités de concertation. Où se situe le citoyen, et même plus, où sont les propriétaires des sites patrimoniaux lors des consultations, des travaux de comité ou encore des tables de réflexion?

Alors, maintenant, je viens à la fin de mes questions, mais ces questions importantes à soulever. En quatrième lieu, la question des interactions entre les secteurs connexes, c'est ça dont je voulais parler tout à l'heure, connexes au patrimoine immobilier. Dans les lois sur l'aménagement et l'urbanisme, sur le paysage et sur le patrimoine immobilier, surtout les archives, la ministre parle de décloisonnement touchant la diversité des disciplines dans Le Devoir et, dans le projet de loi n° 69, des liens inévitables entre le patrimoine et les autres responsabilités des ministères. Je donne un exemple. Ces problèmes qui surviennent, récemment, avec l'hôpital de l'Hôtel-Dieu et l'Université McGill, tous les deux à Montréal, où les discussions, et les démarches, et les clarifications rebondissaient continuellement comme une balle entre les ministères impliqués.

La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme s'occupe plutôt des questions de démolition des édifices, page 24. Mais, pour les sites ou les quartiers comme le quartier de Maisonneuve ou encore le Square Mile et bien d'autres à Montréal, qui... comment les protéger, ainsi que tous les autres sites authentiques à Montréal et à travers la province? Dans la même Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, comment peut-on protéger les édifices et quartiers sans tenir compte des espaces verts, des squares et des parcs? Je présume qu'il y a une loi sur l'urbanisme, mais elle doit être liée aux intérêts et interprétée en tenant compte de la nécessité de protéger et de mettre en valeur le patrimoine, et vice versa, pour toutes, toutes, toutes ces lois. Comment peut-on conserver des édifices, si on ne sauvegarde pas les archives? Il faut que toutes les cités... on fait référence, dans la loi, dans le chapitre des objets ou biens... pardon, ou biens immobiliers, les archives doivent être liées au patrimoine sans lesquelles il ne peut pas y avoir de connaissance et de compréhension réelle de la conception des édifices et des lieux à protéger.

Je vous remercie de votre attention et de la compréhension véritable et essentielle de l'importance du patrimoine, non pas comme de vieilles bâtisses ou de vieilles pierres d'un autre âge, mais comme des éléments de vie distincte, dans le Québec, qui nous donnent notre identité, dans nos villes et nos villages. On fait les choix. Le patrimoine du Québec est notre raison d'être. L'économie, la santé, la morale, la créativité, tout s'en suit. Merci.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, Mme Lambert. Donc, on va maintenant passer à la période d'échange avec la ministre.

Mme Roy : Pour une période de...

La Présidente (Mme Guillemette) : 14 min 51 s.

Mme Roy : Parfait. Bonjour, Mme Lambert. Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Je pense que... je vois les visages des autres collègues, on est ravis que vous soyez là, de nous partager votre expertise, votre expérience. C'est vraiment un privilège de vous avoir.

J'ai beaucoup aimé vous entendre. Et vous nous avez dit ce qu'il fallait améliorer, et, effectivement, j'ai pris beaucoup de notes, parce qu'on est là pour l'améliorer, ce projet de loi, parce qu'ultimement ce qu'on veut, c'est le protéger, notre patrimoine, puis le sauvegarder pour les générations futures. C'est notre histoire, c'est notre identité, vous avez tout à fait raison. C'est ce qui fait notre unicité, c'est ce qui fait la beauté du Québec, c'est ce qui fait qu'il est différent. Et c'est une raison, c'est la raison, c'est à nous, c'est notre histoire et il faut en prendre soin.

Mme Lambert, vous avez commencé en disant : Il y a des choses tout à fait intéressantes là-dedans, mais je vais vous dire tout de suite ce qu'il y a à améliorer. Mais, moi, j'aimerais que vous me disiez quelles sont les choses que vous trouvez intéressantes là-dedans, dans ce projet de loi, qui vont nous aider à préserver notre patrimoine.

Mme Lambert (Phyllis) : Oh! Mme, j'aimerais bien donc vous le dire, mais je n'ai pas noté ça, parce que je le lisais avec l'oeil critique. Et il y avait des choses, oui. Je suis navrée. Je pourrai le regarder et envoyer un petit mot, mais je ne peux pas vous le dire comme ça.

Mme Roy : D'accord. Alors, c'est bien que vous me disiez ça parce que je pense que ça va pouvoir ouvrir la discussion. Parce que vous soulevez des points et, effectivement, quand on le lit comme ça, on peut penser qu'on s'en va dans une direction, mais je veux vous rassurer à plusieurs égards.

Quand vous nous parlez, par exemple, à la page 3 de votre mémoire, du fait que nous avons introduit, à l'article 38 du projet de loi, un nouvel article, l'article 120, qui nous dit qu'«une municipalité [...] doit adopter et mettre à jour périodiquement un inventaire des immeubles construits — c'est écrit avant 1940, mais on poursuit — qui sont situés sur son territoire [...] qui représentent une valeur patrimoniale. Elle peut également — elle peut également — y inclure [les] immeubles dont la construction est plus récente», alors, on ne dit pas qu'on arrête à 1940, bien au contraire, mais ce qu'on dit, c'est... Parce qu'actuellement il y a déjà des inventaires qui sont faits et qui vont bien, bien, bien après 1940, et c'est parfait. Ce que nous donnons, c'est que nous donnons ici la latitude aux administrations municipales, qui sont aussi des gouvernements, nous leur laissons cette autonomie de pouvoir aller plus loin. Donc, on permet d'aller plus loin. Alors, on ne dit pas : Tout ce qui est après, on ne le répertorie pas, bien au contraire.

Et quand vous nous dites, et ça me faisait un peu de peine : «Par exemple, Habitat-67, à Montréal. Cet ensemble pourrait être démoli selon le projet de loi n° 69 puisqu'il est postérieur à 1940», eh bien, non, pas question. Et c'est impossible pour Habitat-67, comme vous le savez, parce que c'est un édifice, vous le savez, qui est classé depuis 2009, et les articles de la loi qui disent qu'on ne peut pas toucher à un édifice classé demeurent, là. Alors, il n'est pas possible que quelqu'un fasse quelque chose ou démolisse Habitat-67. Par ailleurs, il est répertorié également.

• (17 heures) •

J'aimerais vous entendre sur le fait que, dans la loi, il y a cette obligation de faire un inventaire. Et ce que nous avons tenté de faire, c'est de créer un mécanisme, un mécanisme pour ne pas que le ministère et la ministre, au premier chef, soient informés le matin même qu'il y a une pelle mécanique, et c'est la raison pour laquelle ça se fait en plusieurs étapes. On demande... On dit que les MRC pourront citer, alors on rajoute une administration municipale qui pourra protéger des bâtiments, vouloir les protéger. Par ailleurs, on dit : Il faut faire un inventaire, et, lorsque quelqu'un voudra avoir un permis de démolition, il faudra également qu'il y ait des règlements de démolition. Parce que c'est un gros problème, plusieurs villes, municipalités n'ont pas de règlement de démolition et font un peu... aussitôt qu'on leur demande un permis, ils doivent le rendre. La loi est ainsi faite.

Alors, en ayant un règlement de démolition, en ayant le fait qu'il faille... qu'il y ait des inventaires, le projet de loi crée un processus qui fait en sorte qu'avant de donner ce permis de démolition la ville devra, et c'est ça qui est vraiment nouveau, procéder avec un processus, avec des audiences, avec une analyse, parce que le bien est un bien patrimonial. Les citoyens, les élus, les groupes pourront être interpellés. Il y aura une audience, il y aura un délai, et là une décision sera prise, et le gouvernement... la ministre sera informée. Et ultimement, si une municipalité souhaite démolir un bâtiment d'une grande valeur patrimoniale pour des raisons qui lui sont propres, après tout ce processus-là, ultimement, la ministre peut toujours intervenir et dire non, utiliser son pouvoir discrétionnaire.

Donc, nous mettons en place un processus pour nous assurer qu'il n'y ait pas de démolitions sauvages en série à contrôler, et ça commence par la création... l'obligation, pardon, de se doter d'un règlement de démolition, ce qui va aider pour la gestion, l'administration du patrimoine bâti, parce que c'est une lacune actuellement. Donc, je veux vous rassurer à cet égard-là.

Vous parlez également des critères... Vous parliez de l'État. Vous faites allusion, dans votre rapport, dans votre document, à la Vérificatrice générale. Et c'est, entre autres, beaucoup pour répondre aux critiques du rapport de la Vérificatrice générale, qui remonte jusqu'en 2012 dans ses analyses et ses critiques, pour répondre à ses critiques que nous mettons des dispositifs en place, et à l'égard de l'information, et à l'égard du gouvernement.

Vous nous parlez du fait que le gouvernement n'est pas au fait de tout ce qu'il a, n'entretient pas nécessairement ses bâtiments. Bien, dans la loi, on crée justement une obligation, on crée cette table gouvernementale interministérielle pour essayer de tendre vers l'exemplarité de l'État. Est-ce que vous pensez que c'est un pas dans la bonne direction puis qu'il est temps qu'on se parle entre ministères et entre organismes?

Je ne vous entends pas. Je ne sais pas... Le son de Mme... On a perdu votre son, Mme.

La Présidente (Mme Guillemette) : On a perdu le son de Mme Lambert. Peut-être votre ordinateur, Mme Lambert. On ne vous entend plus.

Une voix : ...suspendre.

Mme Roy : Oui, on pourrait faire ça, le temps qu'elle retrouve... Ah! il y a quelqu'un qui va l'aider, je pense.

Une voix : C'est bon.

Mme Roy : Ah oui!

Mme Lambert (Phyllis) : O.K., parfait.

La Présidente (Mme Guillemette) : Parfait, on vous entend bien, vous pouvez y aller.

Mme Lambert (Phyllis) : Je trouve que c'était absolument... J'ai fait référence au fait que vous avez parlé d'amener tous ces... d'ailleurs, les ministères variés ensemble, mais je disais, un des problèmes que je trouve dans toutes les composantes des départements de votre ministère, on ne lie pas le bâtiment aux archives, on ne lie pas les endroits verts, la verdure, on ne lie pas tous ces éléments ensemble, ils sont tous dans un silo, alors... et puis évidemment l'aménagement paysager, l'aménagement urbain, tout ça. Alors, ce n'est pas lié, c'est tout... c'est un peu séparé, alors l'un peut faire quelque chose sans que l'autre le sache. Alors, je sais, dans les organismes, c'est très difficile, mais il faut amener...

Mme Roy : Et, oui, il faut travailler ensemble, il faut créer cette conscience, c'est plus qu'une concertation, c'est une conscience de l'importance du patrimoine. Et je disais aux gens qui étaient juste avant vous, tout à l'heure, qui nous disaient, entre autres, qu'il fallait approcher le patrimoine dans une perspective intégrée d'aménagement du territoire... alors, moi, ce que je vous dis, Mme Lambert, puis on s'en était parlé, vous m'aviez, parlé entre autres, de l'importance de garder les jardins lorsqu'on a, par exemple, des couvents, lorsqu'on a de grands ensembles, etc., puis j'étais tout à fait avec vous, tout à fait sur la même page, c'est important, c'est un tout, c'est un ensemble.

Et dans cette perspective, ces bâtiments qui nous parlent, qui sont notre histoire, qui reflètent un passé, qui sont des témoins de notre histoire, moi, j'en parle avec ma collègue la ministre des Affaires municipales, et il faut intégrer et avoir cette vision d'intégrer le patrimoine dans l'aménagement du territoire. Et moi, je suis...

Mme Lambert (Phyllis) : Oui, absolument, absolument.

Mme Roy : Et c'est notre vision, Mme, et nous allons dans cette direction. Et ça, ça se fait avec différents ministères parce que c'est plus grand qu'une loi, c'est une vision plus globale des choses. Alors, nous travaillons déjà dans cette direction. Et je vous dirais que je suis de celles qui prônent le fait que nous utilisions des bâtiments patrimoniaux pour leur donner vie. Classer pour classer ou citer pour citer un édifice qui ne sert pas et qui ne sera pas utilisé, c'est dommage et c'est triste. Il faut, par ailleurs, qu'il y ait... que nous soyons conscientisés à l'importance de donner vie à ces bâtiments et de permettre des usages, pas nécessairement...

Mme Lambert (Phyllis) : Mais qu'est-ce qui arrive à des quartiers, comme je disais... est un endroit absolument merveilleux, et puis il y a des... Je vous ai parlé déjà, il y a longtemps, de la problématique des quartiers...

Mme Roy : Oui, dans le coin de McGill.

Mme Lambert (Phyllis) : ...qui sont authentiques à Montréal, alors... Et puis ça, c'est... Mais comment est-ce qu'on peut... Je sais qu'on peut faire quelque chose avec ça, un peu au niveau de la ville avec le... qu'est-ce que c'est, les lois de contrôle, mais comment est-ce qu'on peut faire ça? Je crois que la ministre doit... le ministère du Patrimoine doit vraiment donner le goût, la compréhension de l'importance de ces endroits.

Mme Roy : Absolument, je suis d'accord avec vous. Et vous parliez du...

Mme Lambert (Phyllis) : ...

Mme Roy : Il faut aussi... et vous en parliez tout à l'heure, vous nous disiez : Le manque d'information... Vous parliez des nouveaux propriétaires de la maison Alcan qui ignoraient qu'elle était classée. Cette information-là... et vous nous parlez qu'il faut tenir un répertoire des sites protégés, les sites actuels, les sites classés pour que les gens savent qu'ils sont là et sachent à quoi s'attendre. Je suis tout à fait d'accord avec vous.

Et ça, ce n'est pas nécessairement dans la loi. Sachez que nous avons, et nous allons... nous avons commencé à entreprendre un plan d'action pour répondre à ces observations et ces critiques qui ont été faites dans le rapport de la Vérificatrice générale. Et le manque d'information, ça revenait beaucoup, beaucoup, beaucoup, et ça, ça n'a pas besoin d'être dans une loi.

Mais la ministre que je suis, et j'en parle depuis un bout, là, il faut absolument que nous fassions... que nous puissions faire — puis je regarde les équipes — que nous puissions faire part aux citoyens, aux élus aussi, de la loi, bien entendu, mais de ce qui existe, de ce qu'ils peuvent faire, de ce qu'ils ne peuvent pas faire, informer les gens de leurs droits, de leurs obligations aussi pour donner de la prévisibilité. Et c'est la raison pour laquelle, entre autres, nous souhaitons avoir cet inventaire qui soit ultimement versé au ministère de la Culture, qu'il soit mis à jour et versé pour que nous puissions tous y avoir accès et connaître l'étendue, l'ampleur de notre patrimoine bâti. C'est... je pense que... Allez-y, allez-y, Mme.

Mme Lambert (Phyllis) : Mais, vous savez, à propos, les petits pamphlets ou les livres, le CCA a fait des livres sur une période de Montréal qui n'était pas connue du tout, et puis, en plus de ça, il y a des tas de chercheurs dans les universités qui font un travail magnifique. Mais on ne voit pas les livres maintenant, on ne voit pas... Quand c'est publié, c'est une espèce de chose très moche qui n'a pas de caractère. Alors, ça, c'est tellement important. Alors, c'est sûrement... vous savez sûrement l'importance de leadership à faire là-dedans, parce que même dans... que ce soient les inventaires, très important, O.K., mais, en même temps, il faut que ça parte dans le public. Et comment est-ce que ça part dans le public? Comme je disais, il faut connaître les gens qui étaient dans le... un peu l'histoire, comme une histoire de famille. Comment... C'est ça que le... Comment est-ce que vous pouvez... Vous devez le faire, surtout, mais comment?

• (17 h 10) •

Mme Roy : Je pense qu'il y a déjà beaucoup de ressources extérieures. Il y a aussi les nouveaux moyens technologiques que nous pourrions utiliser davantage. Je pense — et là ça me vient comme ça à brûle-pourpoint — à Trois-Rivières, à des travaux absolument magnifiques qu'ils ont faits dans un ensemble, je crois que c'est un ancien couvent ou c'est un ensemble religieux, et ils ont tout fait ça de façon informatique dans un programme. Vous entrez dans... Vous prenez votre ordinateur et vous voyez...

Mme Lambert (Phyllis) : Superbe.

Mme Roy : ...l'ampleur du bâtiment, la richesse architecturale qui s'y trouve, les beautés qui y sont.

Mme Lambert (Phyllis) : Voilà. Voilà.

Mme Roy : Le nom m'échappe, malheureusement. Je suis convaincue que vous connaissez les gens dont je parle, c'est dans le Vieux-Trois-Rivières, c'était... pas un monastère, je pense. C'est absolument sublime, ce qu'ils ont fait pour faire connaître le patrimoine.

Mme Lambert (Phyllis) : Formidable.

Mme Roy : Ici, au ministère de la Culture, nous avons des outils pour le faire connaître. Et vous avez raison, je pense qu'il faut les utiliser davantage, et je dis ça depuis déjà plusieurs mois.

Donc, ce sont des efforts concertés que nous faisons, mais nous allons sur différents fronts. La loi, c'est un front pour améliorer la loi qui est déjà là, mais améliorons-la pour nous assurer que nous nous retrouvions avec de moins en moins de démolitions sauvages en catastrophe. Et par ailleurs il y a un plan d'action qui a été élaboré... est en voie de l'être, là, il est en processus d'élaboration. Et, moi, j'ai la ferme intention de nous assurer qu'il y ait davantage d'information qui soit communiquée. Déjà, on pense à une forme d'information auprès des villes, des municipalités pour qu'elles sachent ce qui existe, pour qu'elles connaissent les recours, les obligations, les devoirs. Je suis tellement surprise de parler à certaines personnes qui sont des élus, qui ignorent qu'ils ont le pouvoir de protéger. Ce n'est pas normal. Ils ont les mêmes pouvoirs que la ministre a au niveau municipal et ils l'ignorent. Alors là, il y a eu un grave manquement d'information, je suis tout à fait d'accord avec vous, Mme, à cet égard-là. Et je vois le temps qui a filé, et on me fait des gros yeux. Mme Lambert, c'est trop agréable, discuter avec vous. Merci. Et je sais que mes collègues ont beaucoup de questions à vous poser également. Merci pour votre collaboration à nos travaux.

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci, Mme la ministre. Donc, nous allons maintenant passer à l'échange, la période de discussion avec Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Oui. Alors, bonjour, Mme Lambert. Un grand honneur, un grand plaisir de vous avoir avec nous. Sachez que moi, j'ai grandi dans le Golden Square Mile et j'ai eu une mère qui était très, très, comment dire, attachée à l'héritage, et tout, qui était dans la rue lorsqu'ils ont détruit la maison Van Horne, Van Horne Mansion. Et ça a été mon éveil, à l'époque, aussi, de toute cette question.

Alors, je commence avec vos commentaires où vous parlez d'un conflit essentiel, fondamental, un conflit d'intérêts : développement, municipalités et protection du patrimoine. Donc, vous préconisez un tribunal administratif, un arbitre neutre, et d'ailleurs vous n'êtes pas la seule à le proposer. Donc, je pense qu'on aura l'occasion d'en parler. J'aimerais vous entendre sur l'importance de cette entité neutre pour prendre ces décisions comme arbitre. Mais aussi je trouve votre... l'importance que vous attachez à connaître son histoire. Et vous parlez des inventaires du ministère, que le ministère doit connaître, donc, mais que vous dites, selon... vous citez le rapport Corbo-Courchesne, que l'inventaire du ministère doit être, bon, modernisé, amélioré, mis à jour, etc.

Donc, ces deux questions-là, arbitre indépendant et connaître son histoire, j'aimerais peut-être vous entendre là-dessus.

Mme Lambert (Phyllis) : Alors, pour l'arbitre indépendant, comment est-ce qu'il y a... comment est-ce qu'on peut gérer ce grand problème? J'ai essayé, pendant qu'on faisait le... et que beaucoup d'autres personnes ont fait aussi, j'espère, la loi sur Montréal, le nouveau, c'était la loi... j'oublie le nom, et puis ça n'a rien donné parce qu'il y avait ce problème, toujours, que les taxes sont... Ça, ce n'est pas votre département, mais vous pouvez parler aussi avec le ministre des Finances, parce que les taxes, alors, ça, c'est toujours un problème. Ça marche très bien à Montréal en ce moment, il n'y a pas de problème, mais, si on a un maire qui veut changer les choses, qui ne veut pas... qui veut faire démolir pour avoir plus de l'argent de taxes, il n'y a rien qui contrôle ça. C'est ça, le problème. Et c'est le... c'est encore pire.

Mme Weil : On avait quand même un maire, ce matin, de Québec, qui plaidait aussi pour peut-être d'autres raisons... Mais, d'une manière ou d'une autre, on a eu cette discussion, donc je pense qu'on... C'est une recommandation intéressante, je pense, pour nous, les députés de l'Assemblée nationale, et peut-être pour la ministre aussi, pour voir s'il y a lieu d'avoir une instance, un arbitre. Mais il y a eu plusieurs demandes dans ce sens, parce que je pense que vous rejoignez beaucoup d'intervenants disant que, des fois, être juge et partie... évidemment, ça prend une entité neutre.

Maintenant, vous parlez, donc, de... «"L'information dont dispose le gouvernement sur ses propres immeubles à caractère patrimonial est fragmentée, non uniformisée, éclatée entre plusieurs détenteurs. Faute d'une information de nature comparable et accessible, les décisions que pourrait prendre le gouvernement pour bien gérer son propre patrimoine"» ferait défaut, essentiellement. Donc, ça, c'est votre lecture de la situation actuelle de l'inventaire ou de l'information qu'a le gouvernement.

Mme Lambert (Phyllis) : Alors, je crois que pour la gestion des... Bien, O.K., laissez-moi donner un exemple. Vous savez, ce n'est pas une question de gouvernance, je ne sais pas, je ne donne pas l'exemple pour ça, mais je pense à l'église Notre-Dame à Montréal et que... il n'était pas classé, pas classé. Alors, il y a ce grand feu, et tout ça, et puis il n'y avait pas encore les supervisions parce que c'était... de ce qui se passait, alors il y a un grand feu qui a démoli, vraiment, cette merveilleuse chapelle de mariage. Alors, il y a des choses comme ça. Et, moi, j'ai cité le rapport de 2016 de M. Corbo et Mme... J'oublie son nom.

Mme Weil : Courchesne.

Mme Lambert (Phyllis) : Oui, Courchesne, merci. C'est un exemple de... je disais ça pour renforcer un peu ce que je disais sur l'information qui n'est pas... Et nous trouvons ça aussi au CCA en gestionnant la maison Shaughnessy qui... j'ai donné les exemples là aussi.

Mme Weil : J'aurais une autre... ça va?

La Présidente (Mme Guillemette) : Allez-y, il reste quatre minutes.

Mme Weil : Bon, très bien. Griffintown. Bon, j'aimerais... en parlant, justement, de... Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire l'histoire An Irish Heart. Mais après avoir lu ce livre, An Irish Heart, sur l'histoire de Griffintown, et quand on se promène à Griffintown puis on regarde tout ça, tout ce qui a disparu de ce qu'était Griffintown et son histoire, est-ce que, ça, ça serait un exemple pour vous, quand vous dites : Connaître son histoire pour être capable de valoriser ces sites et l'histoire qui nous a précédés, les gens qui nous ont précédés? Moi, je vois ça un peu comme le symbole de ce dont vous parlez.

Mme Lambert (Phyllis) : Je ne peux pas qu'être d'accord avec vous, c'est vraiment lamentable. Mais ça va arriver à Maisonneuve bientôt et ça va être la même chose, parce que ce n'est pas protégé, O.K.? Et ça va arriver à Saint-Henri et à beaucoup d'autres quartiers avec une histoire de grand intérêt et avec... et qui sont aussi des quartiers de vie intéressants, O.K.? Ça va arriver, la même chose, si on ne fait pas quelque chose.

Mme Weil : Très bien. Merci.

Une voix : Est-ce que...

La Présidente (Mme Guillemette) : Oui, vous pouvez y aller, Mme.

 (17 h 20) •

Mme Melançon : Merci, Mme Lambert, d'être avec nous. Je vais prendre la suite de ma collègue quelques instants à peine. Ce que j'aimerais savoir de votre part : Qu'est-ce que l'on devrait retrouver? Bref, comment est-ce que l'inventaire doit être formulé? Là, je vous ai... j'ai bien lu, pour vous, le 1940... la ministre a donné une explication, nous étions plusieurs à avoir une lecture... je pense qu'on va devoir retravailler un peu la façon peut-être dont c'est écrit, mais ça, on y viendra, on va être là pour bonifier le projet de loi. Mais, pour vous, les critères de classement, on a besoin de votre éclairage là-dessus. Et est-ce que vous pourriez nous parler un peu de ce que vous voyez, sur quoi on pourrait se baser?

Mme Lambert (Phyllis) : Vous savez, je crois qu'on commence avec la vie du quartier, la vie d'endroits. Par exemple, Milton Park, c'est un exemple formidable, O.K.? Et alors il y avait un quartier qui a été fait à la fin du XIXe siècle, quartier des gens de moyenne capacité, des avocats, des gens qui gestionnaient, qui venaient par le chemin... «streetcar» dans le Vieux-Montréal, O.K.? Alors, quand il y avait cette fausse idée de faire... de changer ce quartier complètement, parce que c'était le genre de TOD, O.K., ils croyaient. Le TOD n'existait pas à cette époque-là. Alors, on a dit : Voilà, on va faire un endroit où on peut... on n'a pas besoin de sortir de cet endroit sans... on peut être... tout ça. Alors, on a... il y avait les gens qui ont défendu ce quartier. Et finalement c'était un cas de... il n'y avait rien à Québec, c'était avec le fédéral qu'on a pu faire ça, on a pu faire ça, mais c'était quelque chose d'invraisemblable. Mais votre question...

Mme Melançon : C'était sur la classification, sur quoi on doit commencer à se baser. Là, je vois la présidente qui...

La Présidente (Mme Guillemette) : ...

Mme Melançon : On a 30 secondes, là, je sais qu'on ne réglera pas ça en 30 secondes, mais pour mieux classifier, la première idée qui vous vient en tête, là, sur laquelle on devrait vraiment mettre le temps et l'énergie, qu'est-ce que c'est?

Mme Lambert (Phyllis) : Est-ce que c'est la classification? Est-ce qu'il y a d'autres façons de faire? Ça, c'est pour commencer. Il faut avoir des quartiers où il y a... ce n'est pas un bâtiment qui est fantastique, mais c'est la somme des... qui est importante. Et ça, c'était quelqu'un de notre époque... beaucoup d'autres choses. On doit... Et ce qui est important pour les gens, en tout cas, dans le temps, je ne sais pas maintenant, parce que les gens changent de mentalité, mais j'avais une autre idée dans ma tête, mais je l'ai perdue, mais, en tout cas, je crois qu'il y a beaucoup à voir comment protéger ces...

La Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup, Mme Lambert. C'est tout le temps qu'on avait.

Mme Melançon : Merci.

La Présidente (Mme Guillemette) : Donc, on en aurait pris encore plus longtemps, mais c'est tout le temps qu'on avait. Merci beaucoup de votre contribution aux travaux de la commission. C'est très apprécié. Donc, ce sera tout pour aujourd'hui.

La commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, jeudi le 26 novembre, à 12 h 20.

(Fin de la séance à 17 h 24)

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