(Dix
heures)
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) : Bonjour. Ayant constaté
le quorum, je déclare la séance Commission de la culture et de l'éducation
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le
mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre
de la consultation générale sur le projet de loi n° 14, Loi
modifiant la Charte de la langue française, la Charte des droits et libertés de
la personne et d'autres dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire :
Oui, Mme la Présidente. Mme Charbonneau (Mille-Îles) sera remplacée par
M. Reid (Orford) et M. Sklavounos
(Laurier-Dorion), par Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger).
Auditions (suite)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Pour ce qui est de l'ordre du jour, cet
avant-midi, nous allons débuter par des
auditions de M. Michel Paillé et M. Irwin Raporport... Rapoport,
je m'excuse. Cet après-midi, nous entendrons le Conseil canadien du commerce de
détail, le Comité des enseignants de français langue seconde des collèges du Québec et le Mouvement Montérégie
français. Finalement, ce soir, nous poursuivrons avec l'opposition de la
ville de Longueuil et la Centrale des syndicats du Québec. Bonjour,
M. Paillé.
M. Michel Paillé
M. Paillé
(Michel) : Bonjour.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je vais vous demander quand même, même si je vous ai présenté, de vous
identifier. Vous allez disposer d'un temps, pour faire votre présentation, de
10 minutes. Vers la fin, je vous ferai signe quand il vous restera une minute. Et, par la suite, il y aura un échange
avec les parlementaires. La parole est à vous, monsieur.
M. Paillé
(Michel) : Alors, merci, Mme la
Présidente. Je suis démographe, un ancien fonctionnaire de la fonction publique
ici, à Québec. J'ai travaillé 25 ans pour les organismes de la loi 101 et j'étais
souvent délégué ici comme observateur pour
le Conseil de la langue française sur des questions de langue de migration et
de famille. Je suis donc un habitué ici, et ça me fait toujours plaisir
de revenir. Je veux d'abord remercier la ministre et les membres de cette
commission de m'avoir invité et même d'avoir insisté pour que je vienne.
Je
n'aurai le temps que d'aborder trois aspects très brièvement : la
francisation des immigrants adultes, la
promotion du français et le contexte démographique dans lequel tout ça s'insère.
Sur
la francisation des immigrants adultes, je reconnais qu'au fil des décennies le
Québec a réussi à attirer de plus en plus d'immigrants qui savaient... qui
connaissaient le français en arrivant ici. Ce n'était que 36 % en 1997, c'est
maintenant plus de 63 %. Cependant, j'ai
remarqué que c'est en sélectionnant de plus en plus d'immigrants bilingues qu'on
est arrivés à ce résultat parce que le nombre d'immigrants qui
connaissent également l'anglais a lui aussi augmenté, passant de 32 % jusqu'à 53 %, 55 %. Et, parmi
ceux qui ne connaissent pas le français, de 40 % à 45 % connaissent déjà
l'anglais, et il est donc très important de les franciser rapidement.
Ce que j'observe, c'est
que traditionnellement le Québec ouvre des classes de français quatre fois par
année seulement, hein : de février à
avril, d'avril à juillet, de la fin août à novembre et de novembre à février
avec deux semaines de relâche au
temps des fêtes. Ce n'est pas suffisant à mon sens. J'ai déjà proposé un
calendrier beaucoup plus complexe. J'ai proposé qu'on mette sur pied une
agence de la francisation qui ne s'occuperait que de ce mandat-là.
Par
exemple, si on se donnait pour objectif d'ouvrir des classes de français… Avec
50 000 immigrants par année comme
actuellement, si on ouvrait des classes de français pour tous ceux qui ont
besoin de cours de français… à chaque semaine, on invite les immigrants arrivés
la semaine précédente, il faudrait ouvrir 19 classes. Si on faisait ça trois
fois par mois ou à tous les 10 jours, ce seraient 28 nouvelles classes. Et, si
on attendait aux deux semaines pour procéder, il faudrait 39 nouvelles classes.
C'est beaucoup, c'est gros, j'en conviens, et j'ai noté que le budget d'un tel
organisme qui s'occuperait seulement de ça serait plus gros que l'organisme...
que le budget réuni des organismes de la loi
101. Évidemment, ce ne serait pas des nouveaux montants; il faudrait tenir
compte de ce qui est déjà payé... ce qui est déjà investi dans le
domaine... dans le secteur.
Donc,
il me semble que d'attendre sept jours, 10 jours ou 15 jours avant d'avoir
des cours, ce serait beaucoup mieux que de lire, dans le rapport annuel du ministère,
que 86 % des immigrants ont commencé des cours de français 65 jours
ouvrables après être arrivés. Alors, c'est un objectif trop faible.
Le deuxième aspect que je veux traiter, c'est
la promotion du français. J'ai comme l'impression qu'on s'est relâchés de ce côté-là. Vous savez qu'en 1977,
quand Camille Laurin a présenté son projet de loi, il a fait de
nombreuses conférences avant la loi et après la loi. Le 2 mai, il s'adressait à
une association de manufacturiers et il disait ceci : «Il appartient aux non-francophones, dans les
situations de contact, d'utiliser la langue de la majorité pour permettre
la communication.» Alors, fin de la citation.
De
nos jours, je pense que Camille Laurin réaliserait, 35 ans plus tard, qu'il
devrait remplacer les mots «aux non-francophones»
par «à tous». Il faudrait dire : Il appartient à tous, y compris les
francophones, de parler français aux autres.
Et c'est là où le bât blesse, à mon sens. 35 ans plus tard, il y a... non
seulement beaucoup de francophones s'adressent spontanément en anglais à d'autres, surtout des personnes qui semblent
venues d'ailleurs, mais ça fait très prestigieux de parler l'anglais. Et même je soupçonne qu'un bon
segment de la population francophone du Québec est hostile à parler
français. Pour eux, le français, c'est resté une langue de porteurs d'eau,
comme on disait à une certaine époque.
J'ai
reçu, à l'automne 2010, un courriel d'une Ontarienne, hein, une Anglo-Ontarienne
qui s'est installée à Montréal, qui a appris
le français et qui me demandait comment il se faisait que... Quatre fois dans
son courriel, elle me dit : Personne ne veut me parler français à
cause de mon accent. On me parle en anglais. Je lui ai répondu : Madame,
insistez, vous êtes mieux placée que moi pour forcer ces gens-là à vous parler
en français.
Le 26 août 1977, quand la loi 101 a été
adoptée, Camille Laurin, dans son discours, disait ceci : «Ce n'est pas au nom d'une vénération inconditionnelle pour la langue
française prise comme une abstraction que le Québec se donne maintenant cette
loi[…]. […]ce qui est important, ce n'est pas de sauver la langue française,
mais bien de sauver ceux qui la parlent.» Eh
bien, ça, c'est encore vrai. Je dois reconnaître que, dans le contexte, Camille
Laurin parlait de... les différences de
revenus selon la langue parce que les francophones, à cette époque, comme l'a
montré la commission Gendron, étaient les
moins bien payés. Mais c'est vrai également... ça reste vrai aujourd'hui sur le
plan de l'identité, de la fierté de la langue. Il faudrait reprendre le
bâton du pèlerin pour inciter les francophones à parler français.
J'ai donné, dans mon mémoire, l'exemple d'Impératif
Français, qui, à même ses dons — c'est un organisme, une ONG, en quelque
sorte — fait de la publicité à la télévision et dans les journaux pour
inciter les francophones à parler français. Et
je note que, dans le projet de loi n° 14, il est écrit qu'on veut
«promouvoir la possibilité pour […] ceux qui le désirent de vivre en français».
Moi, je réécrirais ça dans ces termes suivants : en veillant à promouvoir
l'usage du français en tout temps et en tous lieux par quiconque sait le
parler. Ça serait beaucoup plus clair que les termes «possibilité» et «le
désirent».
Bon, là, je vois le temps filer. Pour le
contexte démographique, j'avais deux points. Rapidement, je vais traiter la sous-fécondité chronique. C'est très important
de traiter cette question-là. Voici notre portrait. C'est ce que nous avons l'air. J'ai imprimé cette pyramide des âges
assez contrastée pour que vous la voyiez. Remarquez qu'en bas de 40 ans
on a trois creux et trois pointes, mais que, dans l'ensemble, les pointes sont
de moins en moins importantes. Ça, c'est l'effet de notre sous-fécondité des 40
dernières années.
•
(10 h 10) •
La question que je pose est la
suivante : Si ça dure encore 10 ans, 20 ans, 30 ans, 40 ans, la question
qui se pose : Est-ce que notre avenir
démographique est assuré? La réponse est carrément non. Tôt ou tard, il faudra
bien que la fécondité remonte
substantiellement. Depuis 30 ans, elle n'est jamais remontée, malgré les
pointes qu'on a eues, n'est jamais remontée à 1,75 enfant par couple.
À
chaque fois que j'aborde cette question-là, on me regarde d'un œil… on me
regarde des fois de travers, en laissant...
on a l'impression que je fais un discours pour le retour des femmes au foyer.
Moi, je vous dirai bien franchement que,
quand je tiens ce discours-là, je m'adresse surtout à certains hommes. Et je
trouve la réponse dans Horloge biologique, un très beau
film paru en 2005, un film de Ricardo Trogi. Vous avez là-dedans trois couples
qui sont à différentes étapes de leur
vie : un couple, la femme veut un enfant, le mari n'en veut pas, le
deuxième couple, la dame est enceinte, et la troisième a déjà un enfant, alors… Et ça finit en catastrophe au
moment où les trois femmes découvrent l'hypocrisie de leurs conjoints. Et
j'ai des témoignages dans mes proches, ma parenté, de gens qui... de femmes qui
n'ont pas trouvé, qui ont mis du temps à trouver un conjoint qui ne partait pas
en peur quand elles parlaient progéniture. Bon.
Pour l'immigration, j'en parlerai dans... pendant
les réponses. Je dirais simplement, pour résumer pour l'immigration, que non pas fixer l'immigration en fonction
de ce qu'on appelait jadis la capacité d'accueil ou, un peu plus tard, la volonté d'accueil, mais je dirais
plutôt accueillir les immigrants en fonction de notre capacité d'investir
pour leur intégration linguistique, économique, sociale et culturelle. On est
braqués sur le linguistique, mais il y a les trois autres qui sont de beaucoup
plus importants.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Paillé. Nous
allons commencer les échanges, et je reconnais
maintenant Mme la ministre responsable de la Charte de la langue française. Mme
la ministre, vous avez la parole.
Mme
De Courcy : Bonjour, M. Paillé. Bonjour
aux collègues aussi. D'abord, vous remercier comme citoyen d'avoir choisi de
venir présenter un mémoire, même si vous n'êtes pas un citoyen ordinaire, parce
que vous y avez beaucoup travaillé dans le passé, à ces différentes lois. Je
vous ai lu aussi, vous participez et vous commettez certains écrits sur
Internet aussi, que j'ai suivis.
J'aurais deux questions. On a souvent, dans
les différents écrits ou ce que j'entends, et particulièrement dans les... certains
représentants de la minorité d'expression anglaise, des inquiétudes quant à l'exode
des personnes anglophones qui pourraient, par inquiétude ou par,
peut-être, dans certains cas, mauvaise compréhension de ce qui est sur la
table, soit pour la loi 101 ou le tout nouveau projet de loi n° 14… On
nous indique que des gens pourraient nous quitter, laisser le Québec, être très
découragés de cette affaire.
Et je sais que vous avez
fait — je ne dis pas qu'il faut qualifier de
recherche — sans doute des recherches à ce
sujet-là qui donnent un autre son de cloche. J'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
Et
la deuxième question que j'aimerais vous poser, si nous avons le temps, c'est
autour des indicateurs gouvernementaux. Je l'ai dit quand j'ai présenté le
projet de loi, j'ai été très surprise qu'il n'y ait pas d'indicateurs
gouvernementaux présentés à l'Assemblée nationale annuellement ou à tous les
deux ans, donnant un état de santé de la
langue et que ces données-là puissent être partagées par l'ensemble des
parlementaires pour éviter justement des fois des apprentis sorciers ou des gens qui émettent toutes
sortes de données et qui deviennent une vérité que tout le monde croit.
Alors, j'aimerais ça vous entendre sur la
question d'indicateurs gouvernementaux qui pourraient être présentés à l'Assemblée
nationale. Mais, avant toute chose, la question de l'exode des personnes d'expression
anglaise, potentiel, et dite par plusieurs intervenants.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme la ministre. M. Paillé.
M. Paillé (Michel) : Merci, Mme la ministre.
Effectivement, on remarque que, depuis très longtemps, bien avant la loi 101, bien avant la Révolution tranquille, le
solde migratoire des anglophones du Québec était négatif par rapport aux autres provinces canadiennes. Mais il y a eu
une pointe peu après l'avènement, l'élection du Parti québécois en 1976
et dans les années qui ont suivi, au moment
où on discutait de la loi 101. On est restés figés à ce tableau-là, mais
ça ne s'est pas reproduit; malgré que ça
reste toujours négatif, quoique ça a beaucoup diminué, on est resté marqués par
ça. Et ce que j'ai fait observer, c'est que,
au moment du référendum de 1995, il n'y a pas eu de... cet engouement vers
les autres provinces canadiennes. Ce n'est pas si simple que ça de quitter le
Québec pour trouver un nouvel emploi ailleurs, dans les autres provinces
canadiennes. Chez les anglophones du Québec, il y a tout de même un attachement
avec le territoire, avec la communauté, les communautés anglophones du Québec.
Concernant les indicateurs, effectivement on
publiait… à une certaine époque, c'était la mode... au Conseil de la langue française, on publiait des indicateurs
régulièrement sur la question linguistique, qui venaient de partout, de sondages, des recensements, des fichiers administratifs,
comme la langue d'enseignement, la langue des immigrants, et, en cette
matière, plus on a d'indicateurs, mieux c'est. Ça se faisait, à l'époque, au
Conseil de la langue française. Je pense que
le Conseil supérieur de la langue française n'a plus les ressources parce que c'est
devenu un très petit organisme, n'a plus les ressources pour continuer
cette oeuvre.
Mais,
vous avez raison, Mme la ministre, de parler des apprentis sorciers. Je ferais
même un cadeau à la commission
parlementaire : j'ai photocopié deux articles, que j'ai fait paraître en
2011 et en 2012, sur un indice de vitalité linguistique, dont certains ont exagéré la signification. Cet indice-là,
plusieurs de mes devanciers, à différentes époques, ont fait des mises
en garde et, malgré ces mises en garde là, j'ai dû intervenir en 2011 et j'ai
dû revenir à la charge en décembre dernier.
Cet indicateur-là... J'ai bien aimé... J'ai vu par Internet la présentation de
M. Curzi, et elle est très bonne, sauf
qu'il a commencé avec ça en insistant sur la difficulté que le français avait à
pénétrer au Québec à l'aide de cet indice-là. Dans le premier des textes
que j'ai soumis à la commission, je fais remarquer que, si on compare la
situation de l'anglais au Québec avec la
situation de l'anglais des autres provinces, on a l'impression que l'anglais se
porte mieux au Québec qu'ailleurs au
Canada. Si on procède par ville, si on compare Montréal, Toronto, Winnipeg,
Vancouver, etc., on a l'impression,
avec cet indice-là, que l'anglais se porte mieux à Montréal que dans ces autres
grandes villes canadiennes. Ça n'a aucun bon sens. Je préfère m'en
remettre, par exemple, à des projections au débat linguistique comme celles de Marc Termote, par exemple; il en est rendu à trois
ou quatre exercices. Le modèle est rendu à l'Institut de la statistique
du Québec, on pourrait continuer à le faire
là, mais semble-t-il qu'on manque de ressources pour poursuivre le travail de
ce côté-là. Donc, une brochette d'indicateurs.
Au
fait, ça me fait penser à la réponse de M. Sabourin, qui accompagnait M. Curzi.
M. Sabourin disait : Il n'y a pas qu'un...
on ne peut pas trouver un seul indicateur qui règle tout, qui lit tout en un
chiffre; c'est une brochette de chiffres qu'il nous faut. Gardons-nous
de faire la même erreur qu'en 1999. Le Conseil de la langue française, à la demande de la ministre, avait publié un indice de
langues diverses publiques, en 1999, et on avait lancé cet indice-là
comme si c'était l'indice magique qui allait
tout résumer en lui, et ça a été un flop monumental. Et cet indice qui devrait
être refait régulièrement ne l'a jamais été parce qu'on n'a jamais su
comment l'auteur avait calculé son indice, ce que... Un de mes collègues, au
Conseil de la langue française, avait baptisé ça «le secret de la Caramilk».
Documents déposés
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Paillé. Je veux juste vous
dire que nous avons accepté le dépôt de vos
documents et il sera sur le site de l'Assemblée. Merci. Oui.
•
(10 h 20) •
Mme De Courcy : Mon collègue Daniel Breton va
poursuivre. Je voudrais vous remercier de ces précisions-là. Et un dossier comme
celui-ci demande de la nuance, ce que vous mettez de l'avant, et qui m'apparaît
très rassurant pour la communauté d'expression
anglaise, à savoir que c'est… quand on travaille pour la progression du
français, on n'est pas en train de travailler contre la progression de l'anglais.
Merci.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme la ministre. Maintenant, la parole est au député de Bonaventure.
M. Roy : Merci, Mme la Présidente. Je salue la ministre, je vous
salue, Mme la Présidente, et mes collègues, je nous souhaite une bonne semaine.
Une
voix : ...
M. Roy : Oui, sainte, bien sûr. Bonjour, M. Paillé. Très
intéressant, votre exposé. J'aurais le goût de vous demander, en tant que
démographe, comment on fait pour augmenter le taux de natalité en passant de
1,75... Mais je pense qu'on en aurait pour quelques heures et quelques jours,
ça fait que je vais me rabattre un peu sur le sujet.
Donc,
en lisant votre mémoire, on voit à certains endroits que vous suggérez de
veiller «à promouvoir l'usage du français en
tout temps et en tout lieu par quiconque sait le parler». Donc, quelles
seraient, selon vous, les mesures de promotion susceptibles de produire l'effet
que vous nous suggérez? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M.
Paillé (Michel) :
Bon, alors, pour l'indice de fécondité, évidemment, on a plein d'exemples de
sociétés où dans l'une on a fait un effort,
dans l'autre on n'a rien fait, puis les deux ont monté en même temps ou sont
restées très basses. Il n'y a pas de solution magique.
Ce
que je regrette, c'est que le Québec en ce domaine-là a comme baissé les bras.
J'ai remarqué qu'au cours de trois décennies
trois gouvernements distincts se sont penchés sur cette question-là et n'ont
abouti nulle part. Dans les années 70,
Robert Bourassa avait parlé d'un ministère de la Population et avait commandé
un rapport sur notre démographie justement
à cause de la dénatalité qui venait de se produire et qui venait de défoncer le
plancher du 2,1 enfants nécessaire. Et c'est resté sur les
tablettes.
Dans
les années 80, le gouvernement du Parti québécois a fait la même chose :
il a recommencé moult travaux et ça n'a pas
abouti non plus.
Dans
les années 90, le nouveau gouvernement Bourassa est revenu à la charge, il a
confié la mission au ministre Claude Ryan. Claude Ryan a commandé des études, j'y
ai participé, parce que, rendu là, j'étais dans la fonction publique. Et
Claude Ryan n'a pas aimé les rapports qu'il
a reçus, et il ne les même pas publiés, il les a envoyés carrément sur les
tablettes.
Mais,
depuis ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait? On s'est rabattus sur la langue.
Alors, il y a eu le... un rapport, au milieu des années 90, il y a eu la commission
Larose. Et là finalement j'ai comme l'impression qu'on a littéralement
laissé tomber la question de la famille.
Vous avez raison, M.
le député, de souligner le fait que c'est très complexe. On parlait à une
certaine époque de garderie en milieu de travail pour éviter le transport... le
triangle entre la maison, la garderie et le milieu de travail. On a parlé d'horaire
de travail fixe, etc., toutes sortes de mesures... Et on n'est pas allés au
bout de nos moyens là-dedans.
J'avais des collègues, moi, dans la fonction
publique, qui se penchaient sur cette question-là, et ils recommençaient...
à chaque changement de ministre, ils
devaient toujours recommencer à zéro, parce qu'ils devaient toujours refaire à
peu près le même type d'analyse. Mais ça n'aboutissait
pas. C'est... ça... On dirait que ça n'a jamais été pris très, très au
sérieux.
Votre deuxième
question, je ne l'ai pas notée, mais c'était...
M.
Roy : Eh bien, c'est
concernant, bon, un énoncé que vous avez fait dans votre mémoire. Vous dites
que vous suggérez
de veiller «à promouvoir l'usage du français en tout temps et en tout lieu par
quiconque sait le parler». Donc, c'est
une question très simple : Quelles seraient, selon vous, des mesures de
promotion susceptibles de produire l'effet que vous escomptez?
M.
Paillé (Michel) :
Bien, il y a d'abord une chose que j'aimerais savoir, moi, c'est que... combien
de milliers de francophones bilingues, surtout
à Montréal, se comportent comme des anglophones dans le milieu public? Il y a à
peu près trois semaines, à Tout le monde en parle, il y avait une
animatrice télé qui est venue dire, comme ça, tout bonnement, qu'elle était pour l'aménagement linguistique, elle était
pour la promotion du français, mais, parce qu'elle habite dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, elle
fait tout en anglais. Il y en a combien, des gens comme ça? Si c'est
juste 10 000, ce n'est pas grave. Mais,
si c'est 150 000, 200 000, 300 000 francophones qui se
comportent comme s'ils étaient des anglos au Québec, bien, là il y a un
gros problème.
J'ai
donné l'exemple de Québec... de Impératif Français, qui fait de la promotion.
Ce serait à l'État québécois de faire la promotion, un peu comme on fait la
promotion... par exemple, le programme J'arrête, c'est sûr qu'on ne peut
pas interdire à quiconque de fumer, mais on fait de la promotion.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Paillé. Je suis désolée de vous interrompre, le temps qui était
alloué au gouvernement est maintenant terminé. Nous allons maintenant du côté
de l'opposition officielle. Je reconnais M. le député de LaFontaine,
porte-parole de l'opposition officielle pour la Charte de la langue française.
M. le député, la parole est à vous.
M.
Tanguay : Oui,
bon matin, merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est vrai, on ne doit plus dire
«bon matin», on doit dire «bonjour». Alors,
vous voyez, c'est très formateur, cette commission. Merci beaucoup, M. Paillé,
pour votre présence, merci, comme le
soulignait la ministre, à titre de citoyen, mais également à titre, ne nous
gênons pas des mots, d'expert du
domaine, que vous avez beaucoup étudié, et vous nous faites bénéficier aujourd'hui
de votre réflexion, qui est très importante.
Et
il y a deux choses, entre autres, moi, que je note en particulier, beaucoup d'autres,
mais deux choses que j'aimerais soulever. Évidemment, vous notez d'entrée de
jeu que l'importance de l'épanouissement du français peut passer, certes, par
la charte, par la loi, par des modifications législatives, mais, s'il n'y avait
que cela, ce ne serait pas suffisant. Autrement dit, il y a nécessité de mettre
en oeuvre d'autres moyens, tels que la réglementation, tels que des politiques, tels que des programmes. Et également j'ajouterais,
à la lumière des travaux que nous menons depuis maintenant deux semaines — c'est notre troisième semaine, à
moins que je me trompe — également développer ce que j'appellerais des partenaires, des gens qui font en
sorte qu'au jour le jour, face aux défis, entre autres, vous parlez de la
francisation des nouveaux arrivants, bien, fassent en sorte, ces gens qui
oeuvrent auprès des nouveaux arrivants, de leur enseigner le français et de
bien le faire.
Et ça m'apporte ma première question, mon
premier volet, ça m'amène vers cette première question-là au niveau d'une agence que
vous proposez. Nous avons rencontré vendredi dernier le Regroupement des
organismes en francisation du Québec, et, de mémoire, ils regroupent 56
entités, 56 organismes communautaires, qui sont partout au Québec, beaucoup à Montréal, beaucoup dans les grands
centres, mais qui sont partout sur le territoire, sur le territoire
québécois. Ils nous ont parlé de leur réalité. Et vous savez mieux que moi qu'une
personne qui arrive au Québec et qui a besoin d'apprendre à mieux parler ou à
parler le français, à l'écrire, à le comprendre, a également d'autres besoins.
Et c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre. Ne voyez-vous pas là, pour ces
organismes communautaires qui accueillent littéralement les nouveaux arrivants,
un espace, un moment, un lieu, je dirais même une expertise très importante de personnes qui vont les aider à se franciser, mais également
qui vont répondre à une foule de besoins, que ce soient des besoins
tangibles de tous les jours, lorsqu'on est citoyen canadien, au niveau de, bon,
bien, comment se trouver un loyer, un
logement, comment payer ses taxes, et ainsi de suite. Vous ne voyez pas là un
carrefour de réponses à des besoins, dont
la francisation, qui est très importante? Et vous ne voyez pas là un risque
dans votre proposition — puis ce n'est pas un jugement, c'est
une question qui fait appel à votre commentaire — où
le fait d'isoler dans une agence, et,systématiquement, les cours de francisation,
peut-être que l'on perdrait là un premier contact qui m'apparaît peut-être
des plus efficaces? Mais j'aimerais vous entendre là-dessus.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député. M. Paillé.
•
(10 h 30) •
M.
Paillé (Michel) : Merci, M. le
député. La question est très large. Et effectivement l'idée d'une agence de francisation, ça pourrait être plus que ça. J'ai
parlé de quatre types d'intégration; on est braqués sur la langue, mais
on oublie le reste. En Ontario, il n'y a pas
de problème d'intégration linguistique, mais les autres problèmes sont
là : social, culturel, économique. Et, cette agence-là, je l'ai
appelée agence de francisation, on pourrait l'appeler l'agence de l'insertion
ou… et ça serait plus englobant, ça irait très loin. Mais, au moins, il
faudrait régler certains problèmes.
Il y a un livre récent, que j'ai apporté ici,
de Tania Longpré, Québec cherche Québécois pour relation à long terme, il y a beaucoup là-dedans, il y a des remises en
question, il y a plusieurs boulons qui sautent, et il faut revoir toute
cette politique d'enseigner le français aux
immigrants. Et, en même temps, on le sent dans le livre… Un livre qui se
mériterait un prix, mais des prix, c'est écrit dans un langage très clair, à l'opposé
de la langue de bois. Alors, cet ouvrage-là déboulonne des choses sur le plan
culturel, sur l'image que l'immigrant se fait avant d'arriver ici. Il découvre
des choses comme, par exemple... Une
étudiante demande à Tania Longpré : Si tu n'es pas mariée, où est ton
père? Alors, dans l'esprit de bien
des immigrants, si on ne vit pas avec un mari, il faut vivre avec son père. On
ne peut pas être entre les deux. Alors, il faut au moins... Et ça
démontre très bien, ici, là, qu'il y a plus que la langue, il y a la culture
qui est liée à tout ça.
C'est
vrai qu'il faut encourager les partenaires. Vous parlez de 56 associations. Je
suis très conscient que ces choses-là existent. Mais, évidemment, ça coûterait
très cher de leur donner tout ce dont ils auraient besoin, ce dont ils seraient capables d'appliquer. Et ça revient à la
fameuse question d'ajuster nos objectifs d'immigration selon notre
capacité d'investir dans le social, le culturel, le linguistique, etc.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. Paillé.
M.
Tanguay : Dans...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui, allez-y.
M. Tanguay : Oui, merci, Mme la Présidente. M.
Paillé, j'aimerais vous entendre... Dans le comment faire, dans les outils, dans
les moyens, vous êtes un observateur privilégié. Que pensez-vous de ce qu'a été
l'oeuvre et les résultats des COFI, les centres d'orientation et de
formation des immigrants? Quel est votre regard sur ces COFI, qui n'existent
plus aujourd'hui?
M. Paillé (Michel) : Moi, je me souviens qu'on parlait
souvent, là, d'évaluer tout ce domaine-là. Et, à
chaque fois, il y avait comme une espèce de blocage. Ça n'a pas été vraiment
très analysé. Bon, on a remplacé les COFI par des carrefours d'intégration. Ça n'a pas duré longtemps, ça a été déplacé
dans les commissions scolaires, dans les cégeps.
Je demeure, moi, à trois kilomètres d'ici. Je
vois, sur mon coin de rue, là, beaucoup d'immigrants qui reviennent du cégep de
Sainte-Foy, là, leurs cours de français, et qui changent d'autobus pour
retourner chez eux. Alors, effectivement, ne reçoivent-ils que des
cours... dans ce cégep-là, ne reçoivent-ils que des cours de français, ou s'il
y a, en plus, une formation culturelle, sociale? C'est un fait que l'immigrant
est un peu perdu lorsqu'il arrive ici. Vous avez parlé, là, ouvrir un compte bancaire, se trouver un loyer,
etc. Il y a beaucoup à faire sur ce plan-là. Et je rêve de trouver, là,
une enquête qui ferait la mise au point là-dessus. Ça fait partie des comment.
M. Tanguay : Merci beaucoup, M. Paillé. Dernière question avec le temps
qui nous est alloué. Vous parlez de l'amélioration
de la qualité du français, qualité parlée, qualité écrite du français.
Avez-vous des moyens à suggérer? Ou parmi... Je suis persuadé que la réponse est
oui, mais, parmi ces moyens-là, sur lesquels aimeriez-vous attirer notre
attention? Souvent, souvent, ça fait partie des conversations que le manque de
qualité du français parlé et écrit. Et là la
question est extrêmement vaste, en partant de nos élèves sur les bancs d'école
jusqu'à... en passant par nos animateurs, parfois, à la radio et tous les intervenants et également dans notre vie
professionnelle. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous
plaît, M. Paillé.
M.
Paillé (Michel) :
Oui, sur la question, là, de... On parle plus, de nos jours, de la maîtrise du
français que de la qualité. Les linguistes, terminologues insistent là-dessus. Et, d'ailleurs,
je vous ferai remarquer, les chiffres que j'ai donnés, là, sur le nombre de classes qu'il faudrait créer
à chaque semaine ou à chaque quinzaine, ça, c'est appliqué uniquement à
ceux qui déclarent ne pas connaître le français en arrivant ici.
Mais on sait que, pour
les professionnels, pour exercer une profession, ça prend une qualité de
français écrit beaucoup plus poussée. Et ça, il faudrait pousser plus loin les
cours en milieu de travail qu'il faudrait donner à ces gens-là. C'est un fait
qu'il y a un problème là, et qu'il faudrait investir davantage.
Mais, malheureusement,
c'est quelque chose d'assez flou parce qu'on... dans les statistiques, on voit
quelle personne n'a pas été évaluée, ne sachant pas parler français en
arrivant. Mais, parmi ceux qui connaissent le français, il n'y a pas d'échelle, on ne peut pas faire ça. Ce n'est pas possible d'établir
une échelle, même si, dans la grille de sélection, il y a un nombre de
points qui est alloué, hein. Je ne sais pas si c'est 17 ou 19 points maintenant
que c'est rendu.
Du
temps que j'étais au conseil, j'avais demandé des données pour pouvoir analyser
cette échelle-là, mais on m'a imposé tellement de règles à suivre que j'ai
laissé tomber parce que je perdais... mon employeur perdait le contrôle
sur l'étude en question. Alors, c'est
dommage. Et personne... À ma connaissance, personne n'a analysé au moins les
ressources qu'on a dans nos statistiques pour tenter de déterminer une échelle
quelconque du degré de connaissance du français.
M. Tanguay : Tout à fait. Et effectivement je ne sais pas si vous avez
des études en particulier à nous recommander, mais je pense qu'une dernière
étude que j'avais regardée sur Statistique Canada, ou à laquelle participait Statistique Canada sur la littératie,
où la difficulté pour un adulte… Et les proportions sont assez, je vous
dirais, préoccupantes, et on ne parle pas d'une personne qui n'est pas capable
de lire un court article de journal. Mais lire et comprendre sont souvent deux
choses. Et, lorsqu'on parle entre autres d'une posologie, être capable de
reconnaître, dans un paragraphe de 80 mots, à quelle fréquence doit-on
administrer le médicament, pour une bonne partie de la population, c'est un
défi, ce n'est pas évident. Et, lorsqu'on parle de littératie, je crois qu'il s'agit
là également d'une préoccupation. Et,
là-dessus, je ne sais pas si vous avez une réflexion particulière, des études
auxquelles vous aimeriez nous référer.
Et ça, évidemment, on touche les gens qui sont nés au Canada mais également les
nouveaux arrivants également, là.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Paillé.
M.
Paillé (Michel) :
Oui, c'est un fait. On parlait d'un analphabétisme fonctionnel; les gens savent
lire et ils savent parler, mais ils ne
comprennent pas nécessairement le discours qui est rattaché à ça.
Moi,
je viens d'une famille où les gens, mes oncles, mes tantes, mes parents n'avaient
pas d'instruction; quelques-uns avaient un
métier, et, grâce à la Révolution tranquille, et tout ça, on a évolué. Mais
cependant je remarque que ce n'est pas tout
le monde qui a suivi et qu'il y a encore des milieux... des difficultés très,
très grandes. Moi, mon père était en affaires, et, quand il avait une
lettre à écrire, il me la faisait corriger parce que... Il m'arrivait avec
quelque chose de trois pages, je résumais ça
en trois paragraphes, puis tout était là. Alors, c'est le problème de la
littératie; effectivement, il y a des gens qui ont un niveau très bas.
On
s'est aperçu d'ailleurs, avec le temps, dans l'immigration, que, par exemple,
la loi 101 originelle ne s'adressait qu'à des enfants. Mais on s'est aperçu par après,
avec les années 80, 90, qu'il y avait beaucoup d'adultes, 18, 19, 20
ans, qui arrivaient et qui n'avaient pas terminé leurs études secondaires, et
qui, eux, étaient libres de choisir leur langue d'enseignement parce qu'ils
sont arrivés adultes. Alors, c'était un des problèmes, on n'avait pas prévu
que, venus de l'étranger, il y aurait des gens, des adultes qui n'avaient pas
terminé leurs études secondaires et... Mais on n'a pas résolu ce problème-là
encore, on le traîne toujours finalement.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Malheureusement, c'est tout le temps qui était
disposé pour l'opposition
officielle. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition, et je
reconnais Mme la députée de Montarville,
qui est porte-parole pour le deuxième groupe d'opposition en matière de
culture, de communication, de la Charte
de la langue française et de l'éducation. Vous disposez d'un temps, Mme la
députée, de 3 min 20 s. La parole est à vous.
• (10 h 40) •
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Bon début de semaine tout le monde. M. Paillé, merci, merci beaucoup pour votre mémoire. C'est un
plaisir de voir et d'entendre ce que vous nous dites avec votre regard de démographe, et je trouve que c'est
d'une logique pratiquement implacable. Vous nous dites, et j'ai
cité : Accueillir dans notre capacité d'investir nos nouveaux immigrants…
Et ça, c'est quelque chose qui nous rejoint, nous
sommes tout à fait d'accord avec vous. Vous dites qu'il faut augmenter les
investissements en francisation des immigrants, nous pensons tout comme
vous que c'est là que tout commence. Et vous nous écrivez — et ma question arrive : «Ensuite, l'immigration
internationale a fait l'objet d'une forte augmentation ces dernières décennies
sans un véritable débat de société.» Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus
pour le temps qu'il reste : Que suggérez-vous, à quoi pensez-vous toujours avec cette citation que vous nous avez faite
à l'effet qu'il faille accueillir nos nouveaux arrivants dans notre
capacité d'investir? Alors, comment pourrait-on y arriver, selon vous?
M. Paillé (Michel) : Bon. Pour donner une image, là, de
notre passé récent, si on prend globalement les
années 70 et 80, donc une période de 20 ans, deux décennies, on avait, en
moyenne, par année, 22 400 immigrants. Et, avec les années 90, sans
débat — il n'y a pas eu de débat
dans les années 90 — on a augmenté l'immigration
de 57 %, pour atteindre 35 600.
Durant les années 2000, on a augmenté à près de 42 000 par année, pour une
augmentation, toujours par rapport aux années 70 et 80, là, globale de
87 %. Et là, si on maintient 50 000 par année pendant toute la
décennie 2010, on aura augmenté, en trois
décennies, de 123 % le nombre de nos immigrants qu'on reçoit, en moyenne,
par année.
C'est
beaucoup, et surtout qu'on a parlé d'étendre nos immigrants à travers toutes
les régions. Sauf que Montréal demeure toujours le lieu... Moi, j'ai fait des
calculs en gardant uniquement 65 % des immigrants dans l'île de
Montréal. On est loin de ça encore, c'est
toujours plus que ça. Ça déborde à Laval, ça déborde un peu sur la Rive-Sud.
Évidemment, il en vient plus à Québec. J'en
remarque à Sherbrooke, à Gatineau. Mais c'est parce que le nombre a augmenté,
ce n'est pas parce que vraiment ils s'étalent plus.
Il y a également, dans
tout ça, ce que Raymond Breton, un éminent professeur de sociologie à l'Université
de Toronto, qui est un Fransaskois… qui a démontré l'effet domino de l'immigration.
C'est que, dans toute grande société d'accueil,
c'est normal que, dans une grande ville, la population... les jeunes
générations s'étalent en banlieue. Il se fait un étalement urbain. Mais
l'immigration, quand elle est trop fortement concentrée dans un centre urbain,
elle a un effet domino, elle pousse
davantage vers les banlieues. Alors, vouloir retenir un bassin de population
francophone à Montréal tout en accueillant autant d'immigrants à
Montréal...
Je
vous signale, en passant, que, depuis l'an 2000, on accueille à Montréal
beaucoup plus d'immigrants qu'on compte de
naissances dans l'île de...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Paillé. Ce fut fort intéressant. Malheureusement, le
temps qu'on disposait pour votre intervention est maintenant terminé.
J'invite
maintenant M. Irwin Rapoport à prendre place,
et nous allons suspendre quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à
10 h 43)
(Reprise à 10 h 45)
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il
vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Bonjour, M. Rapoport. Nous allons vous demander de vous présenter, et
vous allez disposer d'un temps de 10 minutes. Par la suite, suivra un
échange avec les différents groupes parlementaires. Donc, la parole est à vous.
M. Irwin Rapoport
M. Rapoport
(Irwin) : OK. Good morning and thank you for hearing me. I
hope this discussion leads to a common solution.
Bill
14 will pass with CAQ help, a party that will soon join the PQ and give them a
majority. So the only way to stop Bill 14 is for all 1,7 million
non-Québécois to demand that Ottawa disallow Bill 14 which... and this… as it's
created, to protect our community from the tyranny of the French Canadian
majority.
I'm
only here because you, the Québécois, are trying to pass another language law.
When I say "the
Québécois", I mean people who are white, catholic and a French-Canadian
descent. It's clear that 99 % of French Canadians in Québec support language laws and nationalist
policies and they give their consent by their votes for the PQ,
Liberals, CAQ and Québec solidaire. It's
also clear that 99 % of the non-Québécois people support and consent to
the language laws via their votes for the Liberals and CAQ. In the last
election, Robert Libman, William Johnson publicly endorsed the CAQ. And many leaders from the, quote, anglo
community supported the Liberals as well. The Gazette, CBC,
CJAD, all editorially support Bill 101
and language laws and their impact on our community, which is negative. Hence
Jack Jedwab, a good friend, an
apologist for Bill 101 and Québec nationalism can say what he does and Julius
Gray, a major supporter of Bill 101 who says that it should not be
touched, agree with new liberal leader, Pierre... Philippe Couillard in that it's
balanced and necessary.
So
since the English community is full of, I would say, quislings to support the
language laws, and the community
votes for them repeatedly, and you will not repeal Bill 101 or any language law
which has become the third rail of Québec
politics, there's only one solution : the creation of a language law free
zone that would extend from the Ontario border to the mostly Eastern Townships, western Laurentians, two-thirds
of Montréal, half of Laval and a fair amount of the North Shore and the
South Shore. Thus we would be left alone and free of language laws and your
tyranny. You would benefit because
businesses and people would come back to the Greater Montréal region and you
could collect taxes from an improved economy and the creation of new
jobs. People and businesses would feel comfortable to return and invest in this
province. Your zone would be more French, your schools would be full of people
wanting to learn French and the quality of French instruction would improve.
You can be as racist and xenophobic as you desire. And I'm not the only one saying that about language laws in their fact and
their intent. So, for us, we are left alone in peace. Our community will start to rebound and attain its old
numbers, we will grow yet again, our school... our public schools...
will grow again, within a few years reach the 250 000 mark that it had in
1973-1974. Our various community institutions will
be secured, be they hospitals, public service groups, churches, synagogues,
associations, etc. The benefits for all are a de facto end to language politics division and a need for a, quote,
social or language peace. The Québécois would have their own area and that would
be 97 % French or more. The two groups would be separated by a virtual law
and no longer feel the need to worry about nationalism, upsetting each
other.
• (10 h 50) •
Some history. The original
plan for Confederation was to divide the province of Canada into three parts: Ontario, Québec and central Canada, from
Kingston to Montréal. This was proposed by John Sandfield Macdonald, the first premier of Ontario. If this had been adopted,
there'd be no need for Bill 101 and Bill 14 because we wouldn't be
worried about it, you wouldn't be worried about it, we would be left alone.
Christopher Duncan, an English MP from Eastern Townships, along with three other MPs, voted against Confederation
because he rightly predicted that the tyranny… the French Canadian majority would pass legislation
against our community and institutions. This allowance was supposed to protect us from bills 22, 101, and 178, and 14.
Neither Trudeau nor Mulroney used it and most likely Harper will not
defend us either. So basically Bill 14 will go ahead.
We do not need the PQ and
CAQ to hate and despise our community as Liberals and their Bourassa, Charest and Couillard
do an excellent job of it. Already by their support for 101, 178 and bills 103
and 104… had stolen an additional 500 hundreds students per year from
our schools. The Liberals see Bill 101 as necessary and balanced. They've never
repealed existing language laws and only strengthened them to demonstrate their
nationalist credentials. Thus the English
community is definitely guilty of supporting its own demise, although it has
been abandoned by Ottawa, the Liberal Party and its own leaders. And
they agree to language laws and nationalist policies. Sadly, it's divided, weak
and ineffectual, and many will vote Liberal
rather than stand up for their rights. And basically the community will
only get its rights and freedoms back if we stand up and fight back
appropriately and effectively.
So, in conclusion, let's
agree to live together in peace and harmony. Give us our language law free zone
and you will still collect our
taxes, enjoy economic growth and free us from the tyranny of the
French-Canadian majority. Your supporters include the Victor Goldblooms, Est-ce que ce pourrait être Will (William) Tetley? -
guylaineBill Tapleys, Julius Greys, Alex Patersons, Anne Lagacé-Dowsons,
Yolande James's, Kathleen Weils, Geoff Kelleys,
Lawrence Bergmans and many others. You can have them, it's no loss to
our community. They support laws which are creating our demise.
97% of the MNAs who vote
in favor of language laws are, alas, French Canadian, and you also bring them in, so it is
clearly your program. You're attacking our community. You support the notion of
collective rights and legislation to protect and promote the French
language by violating individual rights and freedoms and believe that it's the
duty of all Quebeckers to protect and
promote the French language and culture. And so free us from that and free
yourselves from us, and all will be better off.
You do not need to act like the people of
France when they persecuted the Huguenots in the 17th century or other von Bismarck's government, in the 1870s,
when he persecuted the German catholic community and attacked his own.
The Huguenots were driven away from France, France ceased to industrialize — when
it should have — it suffered grievous disasters and warfare.
And, you know, you're
driving our community out of Québec. It's very sad. My family's been here since 1905. I'm fifth generation. I love this
province, the people are great, except, when it comes to language, something
goes very wrong.
So, I'd like to thank you
for the time you've given me to present and I definitely look forward to your questions, unless I have a minute or two to
still speak.
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) :
Merci beaucoup. Nous allons débuter les échanges, et je vais maintenant du côté du gouvernement. Mme la ministre, la
parole est à vous.
Mme
De Courcy : Alors, merci, monsieur,
de vous être présenté à cette commission parlementaire. Je salue toujours le
fait que des citoyens décident de venir nous parler de leurs préoccupations.
Nous n'aurons pas d'autre commentaire. Je vous remercie.
M.
Rapoport (Irwin) : …
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Allez-y, monsieur, oui.
M. Rapoport (Irwin) : But, you know, it's really
important. Our community has been here since the 1700s. We love Québec, we've helped build this province. If we're
equal citizens, then why is it that you need language laws? If we're all
Québécois, why do you have access to English schools provisions that are based
on how you determined someone to be white in South Africa under apartheid and
how you determined who was a Jew during the Nazi era? It was based on who your parents were and a blood
test. If we're all citizens and we're all equal, there is no need for
people to be denied access to a publicly
funded institution that everyone pays for. Why is it... And please explain to
me that: Why people should not be allowed to attend English public
schools if that's the wishes of their parents?
And the Minister of Justice in Québec, under
the PQ, said: We believe in freedom of choice when it comes to marriage and
whether one wants to live... or whether one wants... two people who just live
together without being married, or have a
marriage. So if you believe in freedom of choice for couples to live together
without being married how come you
cannot agree to allowing parents, be they French Canadian, be they English, be
they immigrant, because the law is
not... access to English schools is not based on your language, it's based on
who your parents are. So why can't people be free to choose? I'd like to
know... I think myself and many others in the community would like to know
that.
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) :
Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de LaFontaine, vous avez la parole.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. First of all, Mr. Rapoport,
thank you very much for your time,
for having taken the time to draft your brief and to presented it to us this
morning. I think on many issues we're not sharing the same approach, the same
analysis. But, that being said, I think that it's important to hear all the
voices, obviously, it's about democracy, it's about this process and it's
important to see what are the differences and where everyone stand.
That being said, vous me permettrez,
M. Rapoport, de réaffirmer le fait que la loi n° 101 est une loi importante qui, au fil
des années, a su maturer, au fil des années, nous a permis d'atteindre nos
objectifs, je crois, collectifs, qui étaient l'épanouissement du français, et, en ce sens-là, la loi n° 101 nous
permet aujourd'hui d'avoir un équilibre, ce que nous appelons un
équilibre linguistique. Et, dans la mesure où nous ne sommes pas dans l'état de
nature, dans la mesure où Rousseau nous a enseigné qu'il était important d'avoir
des lois qui balisent de façon raisonnable et équilibrée le comportement de tout un chacun, sans être trop
philosophique — mais c'est peut-être vos
commentaires sur les Huguenots et Bismarck qui
m'auront inspiré Rousseau — je
crois qu'il est important de reconnaître cet objectif collectif là qui est important et également de faire en sorte que l'on
puisse atteindre cet objectif-là, mais en respectant toujours un
équilibre entre, d'une part, l'objectif
collectif d'épanouissement du français et, d'autre part, le respect des
libertés individuelles, ou — je devrais le dire
plus précisément — le fait de ne pas
trop empiéter dans les libertés individuelles, de manière raisonnée et équilibrée. Alors, c'était le
commentaire que m'inspirait votre présentation et votre mémoire. Merci
beaucoup.
M.
Rapoport (Irwin) : ...respond.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
...
M. Rapoport (Irwin) : But if you don't want us
and you feel the need that our presence is a threat to you, what is wrong with giving us a zone where there
are no language laws? We would flourish, you get the tax dollars, we're left alone, you don't have to oppress us, you don't
have to look bad in the rest of the country, in the rest of the world, and
you have your area which is primarily French
Canadian. I don't understand why you feel the need to attack us. Jean-François
Lisée recently spoke and said that he wants English speaking Quebeckers and
non-Québécois to feel like they want to be
in. We actually are in, we've been here for a long time. We just want to be
left alone and treated equally. But can you please explain why we can't have our particular area where we'll be
free to flourish and just enjoy individual rights? Cause you said you believe in individual rights
but you don't because you're using a law to tell people that they cannot
access publicly funded institutions for the education of their children.
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : Merci, M.
Rapoport. Oui, allez-y, M. le député.
M. Tanguay : …commentaires, Mme la Présidente.
Alors, là-dessus, je vous remercie beaucoup, M.
Rapoport, et, sans vouloir me répéter, c'est
en termes d'équilibre qu'il faut aborder, je crois, la question. Alors, je vous
remercie, ça complète, et je vais laisser ma collègue vous poser des questions.
Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe d'opposition. Mme la
députée de Montarville, vous avez la parole.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci, monsieur, merci pour votre mémoire, que j'ai lu, que je trouve audacieux, il y a des
choses surprenantes là-dedans, votre zone «free law»… Mais j'aimerais savoir comment, selon vous... puisque, pour nous,
il faut protéger la langue française, mais il faut aussi protéger la
minorité anglophone, alors comment faire, selon vous, pour protéger la langue
française dans ce Québec, où il y a davantage d'immigration et où il faut
toujours, toujours faire en sorte, s'appliquer... pour faire en sorte que la
langue française justement puisse survivre
dans cette marée anglophone qui est autour de nous? Comment faire pour protéger
la langue française puisque, tout au tour de vous, c'est une marée
anglophone? Alors, vous ne perdrez pas votre anglais, mais, nous, comment faire
pour nous protéger?
• (11 heures) •
M. Rapoport (Irwin) : I don't buy that argument
that you're in a sea of English; the Dutch are in a sea of many languages in Europe, they still speak
Dutch, the Swedes still speak Swedish. Why should immigrants be forced to join your community? I don't understand that. They're
coming to Canada. But more importantly is there any reason why the French Canadian population is not having as many
children as it used to in the past? Why would you want people to join your community against their will when you can
bring people in who do want to join your community? I mean my father
spoke Yiddish, my grandparents spoke Yiddish, I do not, my father did not teach
it to us, it's our loss. It was done via the family without any government
interference.
You have an opportunity to
improve the French language, to make sure that it has a future. But, the actual fact, it's not really threatened, and the only
languages threatened in Québec are the First Nations languages. But this
argument that you're in a sea of English… OK, let's say I buy that. Give us our
area, which is southwest Québec, and you have the rest of the province. We won't
have to speak to each other except at work or in... We're not...
Well, I don't like language laws, I don't
like... I believe in a primacy of individual rights protecting all. I've got a
feeling you believe in collective rights and imposing a desire and a need to
protect and strengthen the French language on everyone. In the English-speaking world, that's not the way
we do things. We fought very hard and very long for individual rights and freedoms in the 17th century. That's the basis
of western democracy. And the fight for that was key which means that the rights we have in Québec, aside from language
laws, are very important. Habeas corpus goes back to the Magna Carta in
1215. And I would say that the right of the individual to be protected from a
state is far stronger in the British
tradition than in the French tradition where, until recently, you were presumed
guilty and had to prove yourself innocent, whereas in the English
tradition, you're innocent until proven guilty. And our rights and freedoms go
back to 1215 and the Magna Carta...
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : Merci
beaucoup.
M.
Rapoport (Irwin) : OK.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Rapoport. C'est
maintenant tout le temps qui nous était
alloué.
Maintenant,
nous devons suspendre nos travaux jusqu'après les affaires courantes. Donc, bon
après-midi à tous et à toutes.
(Suspension
de la séance à 11 h 3)
(Reprise
à 15 h 22)
La
Présidente (Mme Vien) : Bon
après-midi, mesdames messieurs, et bienvenue pour les auditions de cette commission parlementaire qui porte sur le projet
de loi n° 14, Loi modifiant la Charte de la langue française, la
Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions
législatives.
Alors,
nous sommes prêts maintenant à entendre notre groupe prévu pour cet après-midi,
il s'agit du Conseil canadien du commerce de
détail. Bonjour et bienvenue. Alors, vous aurez 10 minutes pour présenter l'essentiel
de votre mémoire, après quoi suivront des discussions entre vous et les
parlementaires ici présents. Alors, on vous écoute.
Conseil canadien du commerce de
détail (CCCD)
Mme St-Pierre (Nathalie) : Parfait. Merci. Alors, Mme la
Présidente, Mme la ministre, Mmes, MM. membres
de la commission. Alors, mon nom est
Nathalie St-Pierre, je suis vice-présidente pour le Québec du Conseil canadien
du commerce de détail et je suis accompagnée
aujourd'hui de M. Jean-Guy Côté, directeur de relations
gouvernementales et affaires publiques.
Alors, j'aimerais d'abord vous remercier de
nous donner l'opportunité de présenter nos positions dans le cadre de ce projet de loi. Comme vous le savez, le Conseil
canadien du commerce de détail représente et défend les intérêts évidemment du commerce de détail partout à travers
le Canada pour quelques 45 000 établissements qui sont situés à
travers le Canada et dont le plus du quart sont situés ici au Québec. On
regroupe tous types de commerce : grands magasins, nationaux, régionaux,
aussi des indépendants, librairies, commerçants en ligne. Nous sommes également
la voix des représentants... de la distribution et du détail en alimentation du
Québec.
L'activité économique du commerce de détail,
c'est 20 milliards de dollars au Québec, 6,5 % du produit intérieur brut. L'industrie
a généré près de 1,5 milliard de dollars en investissements en 2011. Et,
vous le savez, le commerce de détail
emploie près d'un demi-million de Québécois et de Québécoises, dont quelques
120 000 dans l'industrie alimentaire seulement.
D'entrée
de jeu, je tiens à vous souligner que nos membres appuient le gouvernement dans
ses efforts pour défendre et promouvoir le
français. Pour un commerçant, c'est une question de respect de sa clientèle et
de prospérité en affaires. Nos membres ont donc tout un intérêt à servir
leurs clients en français partout au Québec. Ils s'efforcent aussi de les
servir dans d'autres langues quand c'est pertinent, par exemple, dans certains
quartiers ou dans des zones touristiques évidemment. Mais l'importance de
satisfaire la clientèle est au coeur du métier d'un commerçant.
Afin
de bien comprendre notre secteur en termes de main-d'oeuvre, quelques mots sur
sa composition. Évidemment, le secteur du
commerce de détail est de plus en plus multiculturel. De 9 % à 23 % des
personnes qui y travaillent proviennent des communautés, et ce,
certainement beaucoup des nouveaux arrivants également. La main-d'oeuvre est majoritairement féminine, à
58 %, et composée beaucoup de jeunes entre 15 et 24 ans. Près du
tiers de la main-d'oeuvre qui est à temps
partiel… et donc, comme vous pouvez le voir, ça pose des défis, et le secteur
expérimente en ce moment des difficultés à
recruter du personnel. 26 % des entreprises trouvent ça difficile de
trouver des personnes pour travailler
dans le commerce de détail. La clientèle est changeante et c'est souvent une
porte d'entrée évidemment pour des personnes d'entrer dans le commerce
de détail, éventuellement de transférer dans d'autres secteurs d'activité.
Les entreprises dans le commerce de détail
sont 96 % des entreprises qui ont peu moins de 50 employés. 72 % comptent moins de 10 employés, dans le commerce
de détail, et seulement 52 % des magasins ont un service de ressources
humaines. Alors, je pense que ça met un peu la table.
Évidemment, on ne veut pas faire un débat de
chiffres, ce qu'on souhaite présenter ce matin, c'est trois éléments... cet après-midi, pardon, trois éléments qui, d'après
nous, méritent l'attention de la commission. Et pour atteindre les objectifs…
Donc, l'accompagnent des entreprises, la transparence dans les règles d'application
et d'interprétation et la réglementation.
Alors, en matière d'accompagnement, à notre avis, on pense
que le nœud, c'est évidemment... dans le projet
de loi, c'est l'article ou les articles qui
font en sorte qu'on retire certains privilèges ou certaines pratiques qui se
sont instaurées plutôt… d'accompagner
les entreprises. On remet en principe cet accompagnement-là, par exemple, en
retirant la question de mise en
demeure préalable au dépôt d'une plainte. On pense aussi que l'octroi d'un
pouvoir, comme celui de saisir immédiatement des items pour pouvoir
constater les infractions, pose aussi un problème et lance un signal qui, à notre avis, est assez problématique. Évidemment,
ces mesures aussi ajoutent un fardeau excessif pour les petites
entreprises, qui sont plutôt contraignantes que des mesures d'accompagnement,
et on souhaite qu'on révise et puisse adopter des pratiques qui seraient plus facilitantes pour les entreprises. On a
proposé d'ailleurs, dans notre mémoire — je
pense que vous l'avez constaté — soit des suggestions de guides, d'infolettres ou de
moyens pour pallier à ça.
Évidemment,
ce qu'on souhaite au niveau des mesures qui touchent les règles d'application
et d'interprétation, je pense, qui, pour nous, étaient le coeur de notre
présentation de notre mémoire, on a constaté, au fil des ans, qu'il y
avait quand même beaucoup d'arbitraire dans l'interprétation. Et je pense que,
Mme la ministre, on a été très satisfaits d'entendre
qu'il y avait une révision du fonctionnement, une modernisation de l'office
et... incluant les règlements, et évidemment
on souhaite vous offrir toute notre collaboration à cet effet. Et,
effectivement, pour nos membres, il avait été souvent difficile de savoir à quoi réellement s'attendre, soit pour l'obtention
du certificat de francisation pour la gestion d'une plainte. Avoir en main toute l'information pertinente et
accessible et aussi disponible en anglais serait essentiel, à notre avis. Nous avons donné, par exemple, l'exemple
de la commission des droits de la personne et de la jeunesse, qui offre
de tels documents, qui les rend publiques, qui explique ses processus d'enquête,
de plainte, et on pense que ces éléments-là seraient intéressants, qu'on puisse
les retrouver au niveau de l'office et pour faciliter l'application. Alors, on souhaite donc travailler à réduire le degré de
subjectivité et on pense qu'à ce stade-ci il y a des choses qui
pourraient être améliorées dans le projet de loi qui est déposé.
On pense qu'il n'est
pas nécessaire d'imposer des évaluations de besoins linguistiques dans les
entreprises de moins de 50 employés puisqu'en
général, évidemment, avant d'embaucher, vous faites déjà le tour de la question
pour pouvoir embaucher les bonnes personnes. On pense qu'il faut aussi retirer
l'obligation qui est faite aux entreprises d'adopter des mesures de
francisation dans la mesure où, pour les petites entreprises, ça reste du rôle
de la société en général et de l'État de franciser et non pas à l'entreprise,
au commerce de détail, au détaillant de le faire.
• (15 h 30) •
Évidemment,
on se questionne, et, je pense qu'on l'a souligné dans notre présentation, sur
quelle base on jugera qu'est-ce qu'est le français... qu'est-ce qu'un bon français dans le
commerce de détail. Donc, si vous vous présentez dans un commerce et que
quelqu'un vous dit : Bien, écoutez, on pense que ce n'est pas... vous ne
parlez pas le bon français, sur quelle base
l'office pourrait juger? Donc, on trouve que les dispositions à cet effet ne
sont pas nécessairement claires et, compte tenu qu'on l'a vu
dernièrement, que l'interprétation peut parfois amener certaines
problématiques, on souhaite que ces dispositions-là soient évidemment
éclaircies.
Enfin,
le dernier point, c'était au sujet de la réglementation à venir. Donc, on
constate effectivement que le projet de loi laisse beaucoup de place à la
réglementation qui sera développée au suivi de l'adoption. Et, compte tenu en
plus de la modernisation qui doit se faire, il va sans dire que, de notre côté,
nous souhaitons que chaque règlement qui sera développé
puisse faire l'objet de discussions et de consultations préalables, notamment
avec l'industrie. Et évidemment à ce moment-là
on pourrait s'assurer de donner soit des... de mettre en place de la
réglementation qui est efficace et qui n'alourdit pas le fardeau des
entreprises.
Alors, bien que le
conseil et ses membres renouvellent leur appui au gouvernement dans ses
démarches pour protéger et promouvoir la
langue française, nous aurions souhaité que ces objectifs soient appuyés par un
encadrement qui est pratique et équitable,
et, dans ce sens, il nous apparaît que certains aspects du projet de
loi n° 14 dans sa version actuelle demeurent imparfaits et
doivent être retirés ou révisés pour les raisons suivantes.
Il
augmente la charge administrative sans clarifier les problématiques existantes
ou améliorer les pratiques, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur les
ventes au détail au Québec. Quand on parle d'ajouter 23 millions, c'est
quand même… dans une période où, l'économie étant ce qu'elle est, il faut faire
attention d'ajouter des coûts pour toutes les entreprises.
Plusieurs des
dispositions peuvent notamment résulter à des mesures pénales, qui... et il y a
plusieurs des dispositions qui manquent
aussi de précision et qui laissent trop de latitude soit à l'office, soit à la
réglementation à venir.
Comme
on l'a mentionné au départ, il remet en question le principe d'accompagnement
des entreprises mis de l'avant depuis des
décennies et le remplace par des mesures coercitives comme un pouvoir de saisie
et l'abolition de la mise en demeure au
préalable avant le dépôt d'une poursuite pénale, qui, à notre avis, était un
élément quand même intéressant qui permettait de travailler avec les
entreprises.
Enfin,
le projet de loi ne propose malheureusement pas d'amélioration pour les lacunes
que nous avons observées dans l'application. Et, à notre avis, ajouter
des millions de dollars en frais pour les entreprises dans un contexte où
les détaillants québécois subissent déjà une très forte concurrence, de la part
des États-Unis notamment, du commerce en
ligne et que, dans les régions frontalières, avec les augmentations de tarifs
qui permettent aux gens d'aller magasiner à l'extérieur du Québec,
évidemment, ça met beaucoup de pression. Et il faut donc s'assurer de ne pas
réduire la marge de manoeuvre d'un secteur, quand même, économique important et
surtout si on considère qu'à la demande de leur clientèle et par respect pour
elle les détaillants font les efforts nécessaires pour se conformer à la
charte, travailler et servir leur clientèle en français. Merci.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci à Mme
St-Pierre. Nous allons débuter les échanges, et je reconnais maintenant Mme la ministre responsable de la Charte de la
langue française. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme De Courcy : Alors, bonjour, Mme St-Pierre,
monsieur. D'abord, merci beaucoup d'avoir pris la peine de faire un travail
aussi fouillé, précis et très aidant pour la commission parlementaire, mais
surtout pour la bonification du projet de loi. Je rappelle que c'est un
projet de loi, donc, dans ce contexte, je vois toute l'attention que vous y
avez mise et je trouve très intéressantes
plusieurs, plusieurs des propositions que vous avez mises de l'avant, qui vont
dans le sens de précisions, qui vont dans le sens aussi de ce projet de loi là,
auquel, manifestement, à mon avis, vous souscrivez à l'intention des
législateurs ou du législateur qui est derrière ce règlement... ce projet de
loi.
Alors, je vais vous demander un certain
nombre de clarifications, par ailleurs, sur des choses que vous voudriez voir précisées.
La première sera sans doute la question de la mise en demeure. L'intention
derrière ce qui était mis de l'avant lors de l'écriture du projet de loi, c'était à partir des chiffres que nous
avions, qui étaient quand même assez éloquents. On va les retrouver, là,
pour me l'indiquer, que je vous les donne. On constatait un certain nombre de
choses et on a voulu, d'une certaine façon, simplifier — simplifier — et non pas provoquer
la réaction que vous mettez de l'avant.
Alors, on se disait que, s'il fallait
attendre une mise en demeure pour bien se comprendre, c'est que le mécanisme probablement
d'enquête… auparavant, les étapes n'étaient pas suffisamment claires,
manifestement. Et, dans le processus papier que nous avions eu, bien, on
pouvait considérer en effet que c'était une étape à sauter.
Maintenant, on sait... les dernières semaines
nous ont indiqué que ce processus-là méritait d'être regardé à nouveau. Et j'aimerais
comprendre, quand on est dans des étapes d'accompagnement, de discussion, etc.,
ce que vous souhaitez et ce qui est prévu dans le processus actuel, et,
comme je l'ai annoncé dans la modernisation, qui sera résolument dans ce contexte-là... Oui, je vais vous donner la
statistique. En 2010‑2011, il y a 97,6 % des dossiers qui ont été réglés
sans qu'il y ait envoi d'une mise en
demeure. C'est donc dire que, dans la majorité des cas, l'office convient avec
l'entreprise d'un correctif approprié
et c'est pour ça que cette étape-là, elle jugeait que, franchement, tu sais, ce
n'était pas utile d'avoir cette mise en demeure par la suite.
Comment concilier une approche comme celle-là
en se disant... Bon, on parle, là, de 96 %, 97 % pour faire un chiffre rond.
Comment concilier cela avec le fait qu'il reste peut-être, dans certains cas,
un 3 %, 4 % qui, manifestement, après la mise en demeure, ne changera pas non plus son fusil d'épaule,
et ça devra être judiciarisé? Je vous demanderais de me répondre brièvement. J'ai d'autres questions à
éclaircir avec vous, mais ce sujet-là me préoccupe plus
particulièrement.
Mme St-Pierre (Nathalie) : Alors, à notre avis... et on comprend
davantage, là, ce qui était derrière ça, mais,
bon, ça visait à simplifier le travail de l'office
et non pas le travail, finalement, des entreprises, là. C'est sûr qu'il y a
toujours des récalcitrants puis il faut aller jusqu'au bout de la démarche. Et
on le voit bien, là, quand même, 97 %, 98 % près des gens collaborent.
Donc, pour le reste, est-ce que c'est
nécessaire de retirer? C'est que le signal et la perception que ça donne dans l'industrie actuellement de retirer ça, c'est comme
le dernier rempart. Et là c'est de dire : Bien, finalement, est-ce que ça ne sera pas même avant qu'on ait fini les
discussions, avant qu'on sente qu'il y ait un ultimatum ou qu'on est
rendus au bout de la démarche, et l'office
ne pourrait pas déposer directement, donc, au niveau des poursuites pénales?
Alors, c'est sûr que ça crée un malaise, compte tenu peut-être aussi des
pratiques qui n'étaient pas très claires, effectivement.
Donc, je pense que le noeud est là. Et, si,
pour les gens, on dit : Il y a quand même une démarche qui est claire, et on sait
jusqu'où va aller, à ce moment-là, je pense que la mise en demeure, s'il y en a
pour 4 %, bien, ce n'est pas si...
Mme De Courcy : Pas tellement nécessaire, c'est ça.
Bien, je vous avoue que je suis… Et je prends tout de suite la balle au bond
en vous disant que je suis très contente de savoir que vous êtes disposée à
travailler sur l'amélioration du processus d'enquête. Et ça, nous allons
vous relancer le plus rapidement possible parce que c'est important d'avoir
votre son de cloche à cet égard.
Vous, dans... J'ai dénombré, là, au moins un,
deux, trois, quatre, cinq, six, six bonifications
que vous mettez de l'avant. Vous avez évoqué beaucoup les outils ou les mandats que vous
souhaiteriez voir exercés par les comités sectoriels de main-d'oeuvre,
auxquels je crois beaucoup. Nous croyons beaucoup aux comités sectoriels de
main-d'oeuvre.
Alors, pouvez-vous, pour le bénéfice de l'ensemble
des parlementaires, juste me préciser quels outils vous souhaitez que les comités sectoriels de main-d'œuvre…
travaillent avec la collaboration, dans leurs champs qui sont donnés, qui leur
sont propres… Quels outils vous souhaitez que les entreprises obtiennent d'eux?
•
(15 h 40) •
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Alors, ce qu'on
a proposé, évidemment, à ce niveau-là, bien, d'abord, c'est dans la mesure où on considérait qu'ultimement il faut
réglementer ou légiférer dans ce domaine puisque c'est sûr qu'a priori
on souhaiterait davantage qu'il n'y ait pas d'imposition de procéder à des
diagnostics, des évaluations, etc., pour les entreprises de moins de 50.
Mais par ailleurs, bon, si c'était la
direction qui était choisie, effectivement, ce qu'on souhaite, c'est qu'il y ait des modèles qui soient développés, que ce soit dans l'ensemble,
là, de ce qui sera attendu, pour qu'on puisse faciliter le travail des petites
entreprises. Comme on l'a dit tout à l'heure, il y a quand même 52 % de
ces entreprises-là dans les commerces de
détail qui n'ont pas de département de ressources humaines, alors ils ne sont
pas aptes à faire ça, à faire ces outils-là,
à poser des diagnostics, alors c'est très difficile à ce moment-là pour eux d'évaluer
si l'emploi, quand on est soit caissière
dans un commerce ou qu'on est vendeuse sur un plancher ou vendeur, d'évaluer si
le poste doit être bilingue ou non.
Je veux dire, ce n'est pas très compliqué, là, mais, après ça, une fois que c'est
fait, ça devrait être fait pour longtemps, bon, mais les diagnostics qui
viennent… Donc, il y a beaucoup de choses qui pourraient être confiées, donc, à
ce niveau-là, au CSMO pour pouvoir aller de l'avant.
Mme
De Courcy : Je vais vous poser la
question directement parce que je trouve ça important qu'on le sache. Votre
commentaire et ce que j'ai pu lire à travers votre mémoire ne m'indiquent pas
que vous doutez de la confiance ou de la pertinence des
comités sectoriels de main-d'oeuvre pour conseiller les entreprises. Est-ce
que, ça, vous êtes d'accord avec cette affirmation-là?
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Oui, oui, tout
à fait.
Mme De Courcy : Ah! Bien, je suis bien contente de
vous entendre parce que c'est un instrument
gouvernemental, mais c'est d'abord un instrument de l'industrie et de ses
partenaires, hein, qui fonctionne très bien.
Un peu plus tôt, vous parlez... vous posez la
question, posez la question : Existera-t-il un examen de base public pour la qualité ou la connaissance de la langue
officielle? Est-ce que je dois comprendre que c'est une demande, une question
qui a une réponse sous-entendue ou c'est simplement une boutade disant :
Allez-vous le faire? Je n'ai pas bien saisi votre intention dans...
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Je dirais que
c'est de l'ordre plus, peut-être, effectivement, de la boutade envers l'office, qui est... Parce que, vous savez, c'est
éminemment complexe de... Les plaintes vont arriver. C'est ce qu'on dit.
C'est certain, on le sait. Et donc, si
quelqu'un se présente dans un commerce, il dit : Ah! Bien, moi, j'estime
que ce n'est pas un langage français — je ne sais pas, on
ne parle pas correctement — qui va évaluer ça?
Alors, qu'est-ce qu'on va faire? On va faire passer un test? Qui va faire ça? L'office?
Nous, à notre avis... on soulevait cette
question-là pour peut-être qu'on prenne conscience que par ailleurs on donne des droits et on
va dire... ou on va pouvoir faire une plainte à la Commission des droits de la
personne. Mais la personne, elle,
elle essaie de s'intégrer, là, dans le milieu du travail, d'apprendre le
français, puis, si les gens commencent à se plaindre que son français n'est pas adéquat puis qu'ils
font des plaintes à l'office, je pense que... on rate la cible, là, à notre
avis.
Donc, ce n'est pas qu'on souhaite qu'il y ait
un test, ou un examen, plutôt, pour les... Ce n'est pas ça du tout. On veut juste qu'on constate que l'office aura des
difficultés majeures d'appliquer une telle règle puis de permettre qu'il y ait
des plaintes pour évaluer le niveau de français de quelqu'un dans un
établissement.
Mme De Courcy : Bon. Je comprends le sens, là, de
votre intervention, le niveau de connaissance exigé aussi, bon, par rapport… sur les postes, etc. Mais on
comprend que, ça, le comité sectoriel de main-d'oeuvre pourrait en faire un bon
bout, là, en termes d'application.
C'est
sûr que, quand j'ai lu dans votre mémoire une phrase qui indiquait une
affirmation qui parlait de la connaissance
de l'anglais des personnes immigrantes... La connaissance de l'anglais des
personnes immigrantes faisait en sorte
que, bien, dans le commerce, il ne fallait pas s'étonner, là, que ce soit
largement utilisé. C'est sûr que ceci m'a bien indiqué que... une preuve par l'absurde, là, hein, une espèce de preuve
par l'absurde que le niveau de connaissance du français doit être maîtrisé et qu'à cet égard-là vous n'êtes pas en
désaccord avec le fait qu'il y ait une connaissance accrue du français,
mais que par ailleurs vous ne voulez pas que ça repose sur l'entrepreneur, la
responsabilité de franciser davantage. Est-ce que, ça, je vous traduis bien
quand je traduis ça?
Mme St-Pierre (Nathalie) : Tout à fait. Actuellement, dans
certains secteurs, il est très difficile de recruter déjà, mais il est
difficile aussi de recruter des gens qui parlent français. Et donc
effectivement on entrevoit, dans certains quartiers, dans certains
secteurs, qu'il y aura des difficultés à ce qu'il y ait, par exemple, quelqu'un
qui parle adéquatement le français — encore
là, je fais attention — mais en tout temps. Mais on
pense que, pour une petite entreprise, comme
je disais, qui a beaucoup d'employés à temps
partiel, beaucoup d'étudiants qui sont à l'école, qu'on ne peut pas mettre
en place des mesures de francisation comme
dans une entreprise ou dans un secteur où les gens sont permanents, à temps
plein, et pour lesquels... une entreprise pour laquelle ils vont travailler
pendant plusieurs années, ce qui n'est pas le cas dans le commerce de détail.
Mme De Courcy : Je vais citer la phrase qui est en
page 10 de votre mémoire, qui dit que, et c'est l'avant-dernier paragraphe, «étant donné qu'une large part des
immigrants ont déjà [eu] une connaissance de base de l'anglais à leur arrivée au Québec et puisque le secteur du
service à la clientèle leur permet d'entrer sur le marché du travail, il
est prévisible qu'une large part de cette
population se retrouve dans le commerce de détail de la grande région
métropolitaine». Vous avez tout à fait
raison dans cette affirmation-là, ce qui me conforte dans le fait de
dire : Bien là, il faut vraiment qu'on s'en occupe, qu'on s'en
occupe bien puis qu'on épaule tout à fait les entrepreneurs qui ont une large
part, hein, du marché, large part du marché du travail.
Je vais... Pour le bénéfice de l'ensemble des
membres de la commission parlementaire et pour vous aussi, pour vous aussi, j'ai voulu lever une ambiguïté autour de
la question de la francisation des entreprises de 26 à 49 employés en me posant des questions que, je dirais, que M. et
Mme Tout-le-monde peuvent se poser sur le fait d'ajouter de la
lourdeur administrative, etc. Je vais donc déposer officiellement ce
document-là à la commission pour que vous puissiez en prendre connaissance. Il s'agit d'un bloc de six questions, réponses, et
ça permet d'encercler la chose. Puis je vais demander à la commission de diffuser... donc déposer et
diffuser ceci, et à vous, bien sûr, et je demanderai qu'on le fasse à
chaque fois qu'on a des représentants des 26
à 49 employés. On a d'autres fédérations, là, qui vont venir, alors je vais
demander à ce que ça soit déposé à chaque fois.
Je
trouve ça important que vous sachiez que l'intention est très claire. Les
bonifications que vous apportez, pour moi, sont très précises puis méritent d'être
regardées une par une, bien sûr, avec vous et avec tous les autres qui partagez ces interrogations dans votre secteur. J'ai
eu l'occasion de rencontrer la Fédération québécoise des entreprises de commerce du détail, et je vous avoue qu'un certain
nombre de propositions rejoignent aussi ce que vous mettez de l'avant.
Je voudrais juste
savoir le nombre de minutes qu'il me reste, si c'est possible.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Il vous reste quatre minutes exactement.
Document déposé
Je
veux juste vous préciser, si vous me permettez, Mme la ministre, que j'accepte
le dépôt de votre document et qu'il sera diffusé.
Mme
De Courcy : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. J'apprécie beaucoup.
J'aimerais, si vous le permettez, dans ce contexte-là,
parce que c'est revenu aussi lorsque j'ai rencontré l'autre fédération, je ne vous mets pas en compétition les
uns, les autres, là, ce n'est pas du tout mon intention, mais on m'a beaucoup parlé du registre des entreprises, comme
quoi c'était un élément que... Et vous la reprenez, cette question-là.
Parlez-moi de ça un peu : Le registre des entreprises, comment vous
voudriez qu'on l'utilise?
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Alors, en
fait, le registre, c'est un acte qui est accompli annuellement par les entreprises et qui serait très facile d'utiliser
et d'y rajouter quelques lignes qui permettraient peut-être de satisfaire
aux besoins pour l'office, par exemple, de connaître qui est le responsable,
par exemple, des questions de la langue pour cette entreprise-là ou pour
justifier ou informer l'office qu'ils sont... qu'ils s'estiment conformes.
Donc, on pourrait fonctionner à partir d'une
autodéclaration, une autoévaluation. Et ce n'est que lorsqu'il y aurait une
plainte, par exemple, fondée, à ce
moment-là, qu'ils pourraient permettre à l'office d'aller voir, vérifier,
effectuer les vérifications, et d'identifier la personne responsable et
de pouvoir entrer en communication avec cette personne-là.
Donc,
le registre pourrait servir de point de départ, mais tout en étant facile et en
étant une obligation que les entreprises ont
déjà à remplir annuellement, ce qui fait qu'on n'ajoute pas de nouveau
formulaire. Et on n'ajoute pas non plus
à l'office de gérer des formulaires que ce n'est peut-être pas nécessaire de
faire puisqu'il y a déjà un registre central.
•
(15 h 50) •
Mme De Courcy : D'accord. Et puis, un dernier
élément, j'aimerais connaître votre avis sur une disposition que j'ai prise, une décision
que j'ai prise récemment pour l'Office québécois de la langue française en
installant un répondant pour les
entreprises. L'autre association... L'autre fédération aussi m'en avait parlé
en disant : Il faut qu'on ait comme un point de contact parce qu'actuellement
on n'est pas dans des eaux qui nous permettent la conciliation ou une meilleure
compréhension de notre dossier, où on est rendus, etc.
Est-ce
que vous pensez que cet ajout demeurerait nécessaire, même dans n'importe
quelle révision? Et, en présumant qu'on
appliquerait un certain nombre des fondements du projet de loi n° 14,
est-ce que vous pensez que cette mesure-là doit devenir moins que
temporaire, devrait même être permanente?
Mme St-Pierre (Nathalie) : C'est certain que, dans un contexte
où les entreprises pourraient disposer par
exemple d'une personne référence dans ce
dossier-là, dans tous les dossiers avec l'office, je pense que c'est absolument
nécessaire. Là où, pour nous, il y a quand même des choses encore à évaluer ou
à améliorer, c'est entre ces personnes-là, qui sont répondantes pour des entreprises, pour qu'elles aient la même
interprétation et la même application. Donc, ce n'est pas parce qu'on...
C'est bien, d'avoir un répondant. Mais, si j'apprends que mon répondant me
permet ou ne me permet pas de faire ça et que le répondant de l'autre
entreprise lui impose des choses différentes, vous comprendrez que...
Mme
De Courcy : ...madame, ce n'est pas à
ce répondant-là que je fais allusion. C'est à une espèce de... Actuellement, on a mis en place un poste qui
permet aux entrepreneurs de dire : Bon, je suis en contact avec des
répondants de l'office, mais je ne comprends pas ce qui se passe. Je... Bon.
Mme
St-Pierre (Nathalie) : ...parler de conseiller
spécifique. Vous parlez...
Mme
De Courcy : Exactement, exactement.
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Pardon.
Mme
De Courcy : C'est ce bout-là qui...
Comme si on avait un bureau des plaintes, là. C'est assez dur de le nommer
comme ça parce que, comme on est dans le royaume des plaintes, là, à l'Office
québécois de la langue française, j'hésite à utiliser l'appellation.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme St-Pierre. Maintenant, nous allons aller du côté de l'opposition officielle.
M. le député de LaFontaine, vous avez la parole.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Merci, Mme St-Pierre, et M. Côté également, d'avoir pris le temps de
rédiger avec votre groupe, les gens qui ont sûrement dû vous aider à rédiger ce
mémoire, qui est très, très, très étoffé,
étayé, qui est une excellente réflexion sur les impacts du projet de loi
n° 14. Et merci d'être ici présents aujourd'hui pour nous permettre
de vous poser quelques questions et de vous entendre plus amplement.
Moi, ce qui m'a beaucoup marqué d'entrée de
jeu, ce sont évidemment vous, le Conseil canadien du commerce de détail. Je
pense qu'il est utile de revenir sur des statistiques qui parlent énormément.
Vous représentez grosso modo un chiffre
d'affaires de 20 milliards pour le Québec, soit 6,5 % du PIB
québécois. En ce sens-là, je pense qu'il est excessivement important de
prendre la mesure de ce que vous nous dites et de ce que vous écrivez.
Et, en ce sens-là, je pense que, d'entrée de
jeu, ce qui parle beaucoup, et j'en suis aux pages 4 et 5 de votre mémoire,
lorsque vous dites… Et vous établissez très clairement votre position :
«Force est de constater, selon les études
menées par l'Office québécois de la langue française […] et par le Conseil
supérieur de la langue française, que la loi actuelle produit les effets recherchés.» Fin de la citation.
Autrement dit, l'épanouissement du français, vous y en êtes. Nous en sommes tous. Et c'est un objectif qui peut
être atteint soit en modifiant la loi, les règlements, les programmes,
les politiques gouvernementales, en créant
de nouvelles ententes pour avoir des partenaires comme vous l'êtes, des
partenaires. Et, en ce sens-là, je pense que
cette phrase, cette citation, est très claire : «La loi actuelle produit
les effets recherchés».
Plus loin dans votre mémoire, vous précisez,
il remet en question... Vous parliez du principe
d'accompagnement des entreprises, qui est un
principe — je suis au haut de la page 5 — excessivement important d'accompagnement des entreprises. Vous
citez des mesures où, là, on remet carrément en question ce principe d'accompagnement
des entreprises mis de l'avant par le
gouvernement depuis des décennies ici en proposant des mesures coercitives,
comme un processus de mise en demeure qui serait retiré et un pouvoir de
saisie, mesures qui nous semblent injustifiées.
Moi, je pense, Mme St-Pierre et M. Côté, que
vous avez soulevé des éléments extrêmement préoccupants que nous également, de
l'opposition officielle, nous avons soulevés et que nous aurons l'occasion de
continuer à soulever. J'entendais la ministre un peu plus tôt parler au
passé de cette modification à l'article 177 de la Charte de la langue française. Est-ce que la ministre reculera sur cet
aspect-là? Je pense qu'il faudrait, sur cet aspect-là. Et on a eu l'occasion
de vous entendre, comme d'autres groupes
également, sur l'importance, lorsque l'on s'en va vers une judiciarisation
d'un processus, d'avoir une étape de mise en
demeure qui dit — et en ce sens-là le Code civil
du Québec le dit même dans nos rapports privés — avant
de poursuivre : Vous devez envoyer une mise en demeure qui dit clairement
ce qui est à faire, donne un délai imparti
pour le réaliser. Et, en ce sens-là, je pense que c'est la moindre des choses
si on ne veut pas judiciariser à outrance. Mais malheureusement c'est ce que
fait le projet de loi n° 14, et là la ministre commence à en parler
au passé.
L'autre
élément également que vous soulevez, dans notre mémoire, il s'agit des pouvoirs
d'enquête qui non seulement... puis encore
là, pouvoirs d'enquête de l'Office québécois de la langue française, la
ministre a déjà reconnu que l'office
était tout à fait indépendant et faisait un travail d'enquête qui était
nécessaire, mais se l'octroie également au niveau politique. La ministre
pourrait nommer des enquêteurs et donc aurait un pouvoir de saisir des
documents pour une PME, une entreprise. Qu'est-ce
que cela, dans le tangible, dans le concret, ça voudra dire? Et quels seront
les impacts? Et qui dit saisir des documents
veut dire, bien, il faut se préparer pour bien répondre à la ministre parce
que, dans la mesure où la demande est faite, là, l'entreprise doit
répondre de façon claire, nette et précise, ne rien oublier, et ça, ça ajoute
des coûts, de la paperasserie et, je vous dirais, de la tracasserie également.
En ce sens-là, donc, pouvoir d'enquête
politique que la ministre se donne de nommer des enquêteurs, de un, et, de deux, il y a tout l'aspect discrétionnaire :
Quelles en seront les balises? Et, sur cet élément-là, là, aussi, vous en
faites la liste comme étant un des éléments qui vous préoccupent énormément.
Également, au niveau de l'évaluation des
postes, moi, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, Mme St-Pierre et M. Côté. On a déjà
entendu, entre autres, le Conseil du patronat du Québec et d'autres
intervenants nous dire qu'il relevait du niveau de gestion, de la
discrétion d'un propriétaire d'une PME ou d'une entreprise, de déterminer dans
son contexte très particulier que personne d'autre
ne connaît mieux que lui ou elle, et qui est un contexte, bien souvent,
comme vous l'avez dit… au niveau du transfert des postes des politiques de
transfert et de mutation, ce sont pour des petites entreprises des éléments qui
sont connus du gestionnaire, bien souvent du propriétaire, et qui ne sont pas
par écrit. Bien là, au niveau des politiques
de mutation, il faudra les mettre par écrit, s'assurer qu'au niveau de la
francisation ça rencontre les critères. Quels critères? Évidemment, nous
sommes également là dans le discrétionnaire ou dans le flou artistique, mais
également au niveau de justifier les postes, chacun des postes qui exigerait de
l'anglais.
Moi, là, je serais excessivement troublé si j'avais
à établir les critères dans votre cas. Vous avez une entreprise qui vend de
la vaisselle, vous avez 15 employés, vous exigez de l'anglais pour une personne
qui tantôt va parler... tantôt sera sur le plancher des ventes, tantôt sera dans l'administration. Comme
employeur, moi, vous ne m'aiderez pas, et je ne serai pas un partenaire de la francisation si vous me
demandez de mettre par écrit une justification de bilinguisme. Et en
vertu de quels critères? Puis est-ce que ça va satisfaire l'office?
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus — et je me résume, sur ce point-là, mais il y en a
tellement d'autres — au niveau de ce pouvoir
de gérer son entreprise tout en était prêt à être un partenaire de la
francisation. Mais ici la méthode employée n'est pas la bonne, elle est
davantage lourde et alourdit donc le fardeau de ces gens-là, et en bout de
piste je pense que ce ne serait pas du tout efficace. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
•
(16 heures) •
Mme
St-Pierre (Nathalie) : C'est certain
que, dans le contexte du commerce de détail, qui est différent peut-être d'une PME au sens strict de la chose,
mais, dans le contexte où on est en service à la clientèle en tout
temps, dans les activités, l'évaluation des
postes, la justification des postes, vous comprendrez que c'est très difficile
parce qu'on parle de commerces de
petite taille, puis, comme je le disais, beaucoup de gens à temps partiel et de
jeunes. Donc, d'avoir à faire un profil d'une entreprise dans le
commerce de détail et de dire que, par exemple, j'ai besoin uniquement de deux
postes dans lesquels il y aura des gens qui
ont une capacité d'être bilingues, par exemple, que le reste des postes n'a pas
besoin d'être bilingue... Mais ce n'est
peut-être pas comme ça parce que là, woup, il faut que je comble des périodes.
Les fins de semaine, le soir, il faut
que j'aie de la disponibilité, donc je dois avoir, par exemple, je ne sais pas,
sur les 12 employés, je dois en avoir
10 qui doivent parler anglais, par exemple, pour avoir la capacité de parler
anglais puisque, selon les plages horaires qu'ils vont occuper dans l'entreprise,
dans le commerce, c'est les moments où j'aurai besoin qu'il y ait en tout temps
au moins un employé qui parle anglais, par exemple. Bon, c'est sûr qu'ici on
parle dans la grande région de Montréal. Si
on est ailleurs, on n'a pas besoin de faire ça, donc on n'a pas besoin de faire
nécessairement d'évaluation non plus. Donc, à ce moment-là, je pense qu'il
n'y a pas d'évaluation à faire.
Mais c'est certain que,
dans certains secteurs, dans certains commerces, la justification des postes
pourrait être extrêmement difficile pour le commerce de détail, compte tenu, comme je
vous l'ai dit, de toutes les... que c'est un secteur quand même
atypique.
Par exemple, à Noël, vous ajoutez... dans la
période des fêtes, vous le savez, on ajoute du personnel. Comment on va évaluer?
Est-ce que ça va faire partie de l'évaluation? Est-ce qu'on va devoir les
compter comme des employés qui se rajoutent? Donc, ces questions-là, à
notre avis, doivent aussi être élucidées, là, avant de pouvoir définitivement
dire si c'est quelque chose qui est réaliste, mais... Oui.
M.
Côté (Jean-Guy) : Juste...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
...ajouter quelque chose, M. Côté?
M.
Côté (Jean-Guy) : Oui.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui, allez-y.
M. Côté (Jean-Guy) : Il faut comprendre aussi que, quand
on touche des entreprises de 26 à 49... Bon, c'est sûr que, dans les bonnes écoles de gestion, on nous
enseigne que la gestion des ressources humaines doit faire partie du
portefeuille de l'entrepreneur, du dirigeant en termes de préoccupations, mais
les vrais gestionnaires de ressources humaines
existent dans les grandes entreprises. Les définitions de poste, les
définitions de mutation, les procédures de mutation, ce n'est pas le propre de petites entreprises de 26 à 49, qui,
de toute façon, fonctionnent très bien de la manière où elles fonctionnent actuellement. Elles ont un
esprit un peu plus familial, un peu plus proche, donc... Et la définition
de poste, c'est peut-être une charge de travail qui n'est peut-être pas appropriée
pour ce type d'entreprise.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Mme la Présidente, également, au
niveau des... Donc, on vient de résumer, là, plusieurs, plusieurs écueils que ferait naître le projet de
loi n° 14 si d'aventure il était adopté. Également, au niveau de l'importance
que vous accordez à la francisation mais par
des mesures d'accompagnement, avez-vous des exemples de programme? Vous
dites : Cet exemple-là, là, ce n'était pas une modification à la charte,
là, mais c'était un programme qui nous a permis d'aider... Ou comment vous, vous voyez l'action du gouvernement, de l'Office
québécois de la langue française en ce sens-là?
Qu'est-ce qui serait, pour vous, de véritables mesures qui donnent des
résultats, parce que vous êtes sur le terrain à tous les jours, qui seraient de véritables mesures d'accompagnement par
opposition à dire : Bien, voici toute la paperasserie que vous
devez produire?
Puis
j'ouvre une parenthèse. Si vous en produisez... Vous avez 45 000 membres,
je crois, dans... Si vous en produisez
davantage, de la paperasserie, à l'autre bout, là, pour ce qui est de l'Office
québécois de la langue française, ça va prendre beaucoup de personnes
pour la lire, l'analyser, l'évaluer puis vous revenir là-dessus. Alors, on n'est
pas sortis de l'auberge.
Alors,
mesures d'accompagnement, pouvez-vous nous citer des exemples auxquels vous
pourriez référer?
Mme St-Pierre (Nathalie) : Alors, dans le contexte, par exemple,
des démarches pour l'obtention d'un certificat
de francisation ou le renouvellement des
certificats de francisation, c'est une étape importante pour une entreprise,
qui est toujours un peu... Bon, lorsque c'est
la première fois, évidemment, ça rend un peu craintif, alors je pense que là c'est
une étape où l'accompagnement est extrêmement important et, comme on l'a
mentionné dans notre mémoire, où des documents informatifs pourraient être
disponibles et des avis quant à quelles sont les attentes précises, ça, ce
serait extrêmement facilitant.
Dans
d'autres cas, par exemple, c'est, lorsqu'il y a effectivement une plainte, on a
constaté, sur le terrain, qu'il y a des
façons de procéder différentes, et donc on aimerait... on est plus en train de
se dire qu'il faut régulariser, avoir plus
de stabilité, que ça soit plus prévisible dans l'accompagnement pour que le
commerçant puisse savoir que, lorsqu'il y a eu une infraction, eh bien,
il y a des... tout le monde va être traité de la même façon. Je pense que c'est
ce sur quoi on voudrait miser.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui, M. Côté.
M. Côté (Jean-Guy) : Oui. On le mentionne dans notre
mémoire, une mise à jour des guides déjà présents sur les sites Internet — certains datent de 2002 — simplement expliquer comment faire affaire au Québec en français,
c'est déjà une bonne étape, et la moderniser.
Et nous, on voulait aussi ajouter aussi qu'il
ne faut pas avoir peur aussi de communiquer, dans un monde qui est très mondialisé au niveau du commerce, de le
communiquer en anglais, parce que ça éviterait aussi la barrière de la langue. Donc, comment faire affaire en français au
Québec, je pense que c'est déjà une bonne démarche que l'office pourrait
entreprendre dès le départ.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Oui. Merci, Mme la Présidente. Je suis à la page 20 de
votre mémoire, et vous faites référence à l'article
45 du projet de loi n° 14, qui, lui-même, ajouterait notamment un
article 151.5. Et vous parlez — j'aimerais vous entendre là-dessus — d'un nouveau pouvoir discrétionnaire de l'office et
qui serait remis ou dévolu à l'office. On y
lit, à l'article 151.5 nouveau : «L'entreprise visée à l'article 151 — ça,
c'est les 26-49 employés — sur demande de l'office,
lui rend compte du bien-fondé du diagnostic posé sur sa situation linguistique,
de la pertinence des mesures de francisation
identifiées, de leur mise en oeuvre et du suivi donné à celles-ci au sein de
son organisation.» Fin de l'article.
Vous dites : «Cet article ajoute encore
une fois un pouvoir discrétionnaire à l'office, qui pourra cibler les entreprises qu'elle veut bien cibler. Nous parlons aussi d'entreprises
dont la capacité administrative ne ressemble en rien à celle des entreprises de plus grande taille.» Vous dites
même, en conclusion, en caractères gras : «S'il doit y avoir une
reddition de comptes à l'office de la part des entreprises, celle-ci ne devrait
se faire qu'à la suite d'une plainte fondée.»
J'aimerais
vous entendre là-dessus par rapport à ce commentaire que vous avez émis.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Madame... oui, allez-y.
Mme St-Pierre (Nathalie) : Alors, bien, évidemment, ça fait
référence à l'approche qu'on souhaite, qui est
de permettre à l'entreprise de faire une
autodéclaration de conformité et que, par la suite, lorsqu'il y aurait
effectivement une plainte fondée, que l'on puisse aller obtenir les
informations et non pas... Évidemment, il faut se remettre dans le contexte que
ça, ça a été fait... la production de notre mémoire… la rédaction de notre
mémoire, pardon, a été faite il y a quelque
temps déjà. Et donc, avec l'annonce de la modernisation, c'est sûr qu'on pourra
voir à ce moment-là comment tout ça
pourrait se mettre en place. Mais effectivement qu'on était très craintifs,
dans l'industrie, des pouvoirs discrétionnaires de l'office, et que c'est
ce qu'on tentait de baliser ici en disant : Bien, attendons une plainte
fondée et demandons, à ce moment-là, à l'entreprise
si elle a pris ou elle a mis les mesures en place, et, sinon, qu'est-ce qu'il
y a à faire, et non pas demander toutes
sortes de diagnostics avant ou sur le bon vouloir de l'office sans qu'il n'y
ait derrière ça une raison justifiant la demande.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. le député.
M. Tanguay : Oui. Vous avez parlé d'une réalité à
laquelle vos membres doivent faire face qui est, bien souvent, lorsqu'un nouvel arrivant arrive, par définition,
au Québec, souvent, vos membres seront son premier employeur. Donc, vous avez à faire face à cette réalité-là.
On a rencontré des représentants des organismes communautaires qui
offrent des cours de francisation. On a eu l'occasion
de parler de, jadis, des COFI, de leur oeuvre, donc, de tout, je vous
dirais, le réseau de francisation des nouveaux arrivants. Vous, vous êtes, bien
souvent, une première carte de réussite vers l'intégration, entre autres l'intégration
économique, mais également l'intégration, je dirais, sous l'aspect linguistique
de cet élément-là.
Comment le gouvernement pourrait-il
réellement vous aider dans cet objectif-là, qui, vous, évidemment, est votre objectif, d'avoir
une entreprise qui soit rentable? Vous devez avoir des bons employés qui
répondent bien aux clients et qui
savent bien fonctionner, d'une part, mais, d'autre part, vous faites oeuvre
utile pour la société. Comment le gouvernement pourrait vous aider de
manière tangible?
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Alors, comme
on l'a suggéré, on pense que les efforts doivent être déployés au niveau de la
francisation des nouveaux arrivants, effectivement, et non pas dans le contexte
des entreprises de moins de 50 employés,
mais plutôt, effectivement, soit par le biais, là, des mécanismes qui existent
déjà ou... On a parlé des CSMO tout à l'heure, bon. Mais, donc,
effectivement, il y a eu une stratégie, il y a un besoin — je pense qu'on l'a bien noté dans notre mémoire — de main-d'oeuvre dans le secteur
du commerce de détail. Il y a eu une stratégie qui a été déployée de tenter de recruter des immigrants... des
nouveaux arrivants, parce que c'était un secteur où c'était peut-être une porte
d'entrée, effectivement.
Mais il faut les soutenir, puis,
effectivement, on reconnaît qu'il faut les soutenir, tout à fait. Mais on dit
que ce n'est
pas le rôle de l'entreprise, à ce stade-ci, surtout que, dans le commerce de
détail, le roulement est important. Ce sont des jeunes, ils sont déjà sur les bancs d'école, il y a d'autres moyens
de les rejoindre que par le biais de l'entreprise. Alors, je pense que l'important,
c'est la francisation au départ, tout à fait.
•
(16 h 10) •
M. Tanguay : Et vous aviez, je crois — corrigez-moi,
si je me trompe, mais je pense que vous l'avez même abordé verbalement un peu plus tôt — le fameux mode de calcul, beaucoup de... 30 % de
vos membres ont des employés, dans une
proportion de 30 %, qui sont à temps partiel. Alors, le fait de calculer,
par exemple, 50 employés ou 40 employés, dont 30 % de ce 40 là, 13, 14 seraient à temps partiel… mais ça
vous fait quand même 40 employés et non pas 27 employés à temps plein.
Alors, ça, avez-vous des commentaires plus spécifiques à cet effet-là?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
En quelques secondes.
Mme St-Pierre (Nathalie) : Tout ce qu'on souhaite en fait, c'est
que ça soit précisé sur quelles bases se fera
le calcul puisqu'il y a de nombreux employés
qui sont à temps partiel. Et, comme on le disait aussi, c'est cyclique,
pendant la période des fêtes, etc., donc il faut voir comment ça...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Montarville, vous avez la
parole pour un temps de 4 min 30 s.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci beaucoup,
madame, monsieur, merci pour votre rapport. Au
risque d'être redondante et de répéter ce
que mon collègue de la première opposition a dit, votre rapport est très bien
fait, précis et amène des pistes de
solution, et ça, ça fait plaisir à entendre quand on veut être constructifs
comme nous voulons l'être. Je suis d'accord
avec vous, et nous sommes d'accord avec vous, la deuxième opposition, qu'il ne
faut pas alourdir le fardeau administratif de nos petites entreprises 26
à 49 employés. Nous sommes tout à fait d'accord avec vous.
Il
y a une sur laquelle j'aimerais vous entendre parler cependant, puis vous n'en
avez pas parlé encore, le 12 mars dernier, lors de l'ouverture des travaux de la
commission, la ministre nous a donné, a déposé un document, une étude du
CIRANO sur les impacts financiers de l'application
du projet de loi n° 14 tel qu'il est là chez les entreprises. Vous
êtes là, c'est à vous que ça s'adressait. On
parlait d'environ 24 millions de dollars pour 12 000 à 13 000
entreprises de plus qui seront
soumises à la loi. J'aimerais vous entendre parler et élaborer là-dessus :
Que pensez-vous de cette étude et dans quelle mesure cela vous
handicaperait?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M Côté.
M.
Côté (Jean-Guy) :
Effectivement, l'étude, pour l'avoir visitée et relue, est très solide dans son
analyse. On considère
qu'elle représente un assez bon portrait de la réalité de l'impact financier.
Je mettrais simplement un bémol : on estime, dans l'étude, un taux de roulement qui est plus bas que le taux
de roulement réel que nous, on rencontre dans notre industrie. Le taux
de roulement, dans l'étude, est de 34.6 %, c'est un taux moyen, le taux de
roulement des employés. Dans l'industrie du service, c'est beaucoup plus élevé.
Au service à la clientèle, on est plus à 37 % et, pour les temps partiels, à 44 %. Donc, c'est sûr que l'impact
du taux de roulement pour le commerce de détail va être plus élevé qu'il
est estimé dans l'étude actuellement. C'est
le seul bémol qu'on ajouterait. Cependant, on présume que l'étude est un
portait assez réaliste de l'impact économique. C'est sûr qu'on peut considérer
que c'est un poids supplémentaire dans une industrie qui est très
concurrentielle, qui est la nôtre. Donc, voilà.
Mme
Roy (Montarville) : Dans quelle mesure justement cela handicaperait l'industrie,
dérangerait l'industrie ou causerait des
problèmes?
Mme
St-Pierre (Nathalie) : O.K. Dans certains secteurs évidemment, là, les marges de profit sont extrêmement minces, et
un ajout de quelques réglementations… et d'autant, là, on parle des petites et
moyennes entreprises, donc l'impact est
assez important, surtout si c'est… Les mesures de francisation doivent être
mises en place dans les entreprises, ça, ça aurait un impact majeur et ça serait extrêmement difficile. Et, à mon
avis, il pourrait y avoir un risque malheureusement que ça soit une barrière à l'embauche des personnes
qui pourraient nécessiter d'être accompagnées dans la francisation. Donc, ça...
Une voix : ...
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Bien, s'il y a des entreprises qui, par exemple, verraient des charges additionnelles, des
obligations de francisation, il pourrait arriver qu'elles choisissent de ne pas
embaucher ces personnes-là parce que ça va ajouter des coûts. Donc, il
faut faire attention pour pas... C'est la nature humaine, c'est… Il faut gérer,
les marges sont très minces. Dans certains secteurs, c'est extrêmement
difficile. C'est très concurrentiel. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a le commerce électronique, il y a
le commerce transfrontralier, les gens cherchent les meilleurs rabais,
la marge de manoeuvre... Le portefeuille du consommateur, il n'est pas
élastique, et on le voit tous les jours, donc les gens cherchent les meilleurs
rabais. Alors, c'est sûr qu'une entreprise qui fait face à ça va faire des
choix et pourrait, s'il y a des mesures trop
contraignantes, bien, évidemment, choisir ses batailles et peut-être aussi s'assurer
qu'il n'y ait pas des coûts excessifs
de francisation, par exemple. Donc, il faut faire attention. Malgré la pénurie
de main-d'oeuvre dans le secteur, c'est déjà difficile, je pense qu'il
faut avoir un équilibre pour offrir les services.
Mme
Roy (Montarville) : …très peu de temps, quel est le principal irritant de cette loi, si on
n'en avait qu'un à mettre le doigt dessus,
pour les entreprises? En 20 secondes.
Mme
St-Pierre (Nathalie) : Alors, pour nous, c'est le maintien et la bonification de l'accompagnement.
Et les mesures qui sont coercitives dans le
projet, pour nous, viennent diminuer cette vision-là qu'on avait puis qui a été
négligée dans les dernières années, malgré, là, ce qu'on a vu.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mme St-Pierre, M. Côté, pour votre présentation. J'invite maintenant le Comité des
enseignants de français langue seconde des collèges du Québec à prendre place.
Nous allons suspendre
les travaux durant quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h
16)
(Reprise à 16 h 17)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Bonjour, messieurs, bonjour, madame. Je vous demande de
bien vouloir vous identifier, d'identifier les gens qui vous
accompagnent également. Vous aurez 10 minutes pour faire
votre exposé. Par la suite suivra un échange avec les membres de la commission.
Donc, la parole est à vous.
Comité des enseignants de
français
langue seconde des collèges du Québec
M. Gagné (Philippe) : Alors, Mme la ministre, Mme la
Présidente, Mmes et MM. les parlementaires, nous tenons tout d'abord à remercier la commission
pour avoir convoqué les enseignants de français langue seconde du réseau collégial à ses audiences. Nous sommes
trois à les représenter aujourd'hui. Colette Noël et Alexandre Limoges sont respectivement coordonnatrice et
coordonnateur des départements de français langue seconde du collège
Champlain, Saint-Lambert, et du cégep
John-Abbott. Je m'appelle Philippe Gagné, j'enseigne au cégep Vanier et je suis
responsable du comité des enseignants de cette discipline dans le secteur
anglophone du réseau collégial.
Mme Noël rappellera d'abord la naissance de
la discipline en tant que matière obligatoire au milieu des années 90 jusqu'à l'abandon du projet de standards de
sortie par les collèges au milieu des années 2000. Je parlerai ensuite de la création de l'épreuve de langue seconde des
collèges du Québec avant de passer la parole à M. Limoges, qui abordera
la proposition d'offrir quatre cours de
français dans les cégeps anglophones, au même titre que dans le secteur
francophone. Je conclurai ensuite brièvement notre présentation.
•
(16 h 20) •
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, allez-y.
Mme
Noël (Colette) : Mesdames messieurs.
Alors, c'est la deuxième fois que je me retrouve ici, devant une commission
parlementaire pour traiter de l'enseignement du français langue seconde au
collégial. La première fois, c'était en
novembre 1992 devant la commission parlementaire sur la réforme de l'enseignement
au collégial. À l'époque, le mémoire
des enseignants de notre discipline proposait que les cours de français langue
seconde deviennent obligatoires. En effet,
jusque-là, seuls les élèves qui le voulaient bien prenaient des cours de
français en cours complémentaire. Or, le constat était qu'une proportion non négligeable des élèves issus des collèges
anglophones n'était pas en mesure de vivre et de travailler en français au Québec. La réforme qui a été instaurée en
septembre 1994 a permis de faire le changement en question et il est indéniable que cela a
représenté une avancée importante. La réforme instaurait deux cours
obligatoires de français pour tous les
étudiants dans les collèges anglophones. Étant donné la diversité des niveaux
de compétence des élèves, on a décidé
de créer trois niveaux de cours tout en prévoyant un niveau transitoire pour
les élèves qui n'étaient pas aptes à
suivre le premier niveau prévu. Ce niveau était sensé disparaître en 1997. La
période de trois ans se voulait une transition permettant aux écoles
secondaires de mieux préparer les élèves à entrer dans le niveau 1.
Sans s'étendre sur les événements qui ont
suivi, disons que le niveau transitoire n'est pas disparu en 1997 comme prévu. Le programme est donc sur quatre niveaux de
cours plutôt que trois encore aujourd'hui.
En
2001, Jacques L'Écuyer, alors président de la Commission d'évaluation de l'enseignement
collégial, commentait dans une entrevue le
rapport synthèse sur l'évaluation de la composante formation générale des
programmes d'étude, rapport qui venait juste
d'être publié. À la question portant sur le rehaussement des standards en
langue seconde, M. L'Écuyer signalait
que le mémoire recommandait au ministre de fixer, et je cite, «un standard
minimal pour l'obtention du DEC, car les seuils actuels sont trop bas,
étant donné les besoins qui se manifestent dans le monde aujourd'hui». Fin de
la citation.
La
même année, donc toujours en 2001, on pouvait lire ce qui suit dans le rapport
de la Commission des états généraux sur la
situation et l'avenir de la langue française au Québec, aussi connue comme la
commissionLarose, je cite : «La
maîtrise du français est particulièrement importante dans le cas des étudiants
du secteur technique[…]. Ils doivent
impérativement à la fin de leurs études posséder le vocabulaire français de
leurs domaines. La commission y voit une
condition essentielle pour réaliser la francisation des entreprises. Plus
largement, pourquoi le niveau collégial québécois, unpeu à l'image du Québec de demain, ne
deviendrait-il pas un lieu de maîtrise du français[…]? Le collégial offre la
possibilité exceptionnelle de créer un nouveau lieu d'appartenance linguistique
et culturelle, ouvert sur le monde.» Fin de la citation.
Dans la foulée des recommandations du rapport
Larose, un sous-comité du ministère de l'Éducation, dont je faisais partie, s'est mis au travail et a recommandé, en
2005, de créer un standard de sortie pour tous les étudiants du niveau collégial, en français comme en anglais. Le
standard s'alignait, à peu de choses près, sur le niveau 2 de nos cours
réussis. Malheureusement, cette recommandation, bien qu'ayant été parrainée par
le Comité-conseil de la formation générale auquel siègent entre autres des
représentants du ministère de l'Éducation, ne s'est pas concrétisée.
M. Gagné (Philippe) : Après l'abandon du standard de sortie,
les recommandations de la Commissiond'évaluation de l'enseignement collégial et de la
commission Larose demeuraient. Il fallait y donner suite autrement, et nous avons développé un instrument de mesure pour
situer les élèves sur une échelle de niveau de maîtrise en FLS. Donc, on utilisera souvent l'acronyme FLS pour français
langue seconde. Cette pratique d'évaluation est en phase avec ce qui se
fait ailleurs dans le monde en évaluation des langues secondes.
L'objectif
était de donner une idée précise de ces niveaux de maîtrise à chaque élève à la
fin de son dernier cours obligatoire, et ce, dans les quatre habiletés
langagières : écrire, parler, lire et écouter. Ces résultats, chiffrés de
1 à 12, 1 représentant le niveau le plus bas et 12 le plus élevé, devaient être
imprimés dans le bulletin, et nous avons d'ailleurs
eu le temps de le faire au moins une fois en 2011, mais le projet a ensuite été
mis en veilleuse. Pour reprendre les mêmes mots de Colette un peu plus
tôt, malheureusement, cette épreuve, bien qu'ayant été parrainée par le
Comité-conseil de la formation générale, auquel siègent entre autres des
représentants du ministère de l'Éducation, ne s'est pas concrétisée.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Limoges.
M. Limoges (Alexandre) : Merci. À mon tour, j'aimerais parler
d'un aspect crucial du mémoire que nous avons présenté, c'est-à-dire l'augmentation de l'offre
de cours obligatoires au collégial. Puis-je me permettre de rappeler à
la commission qu'en FLS il y a, au total,
deux cours obligatoires de 45 heures? C'est ce que doivent suivre les
étudiants dans les cégeps anglophones. Si on compare avec l'anglais langue
maternelle, il y a quatre cours de 60 heures, donc deux cours de 45 heures par rapport à quatre cours de 60 heures
obligatoires. Et, évidemment, nous recommandons que l'offre de cours
soit la même en français langue seconde et en anglais langue maternelle.
Nous ne sommes pas les seuls à faire cette
recommandation. C'est notamment la position de la Commission de l'éducation en langue anglaise. C'est aussi la position
du Conseil supérieur de la langue française, et je cite ici leur mémoire, intitulé La langue d'enseignement au
cégep, qui a été produit en 2011. «Quant à l'enseignement de la
langue seconde, les cégeps anglais et les
cégeps français ont actuellement la même obligation : les étudiants sont
tenus de réussir deux cours de français langue seconde de 45 heures
chacun, peu importe le niveau. Cependant, à notre avis, la langue française ne peut être mise sur le même pied qu'une
langue seconde au cégep anglais; elle est aussi la langue officielle du
Québec et la langue d'usage public commune. À ce titre, il est souhaitable qu'on
lui consacre davantage d'heures obligatoires
dans le cursus et que, conséquemment, les exigences linguistiques en français
soient renforcées. Pendant leurs études
collégiales, tous les étudiants, peu importe leur langue maternelle, seraient
ainsi amenés à améliorer leur maîtrise ou leur connaissance du
français.»
Dans les quelques minutes qui nous sont
allouées, je voudrais citer les arguments principaux qui appuient une telle mesure. D'abord,
et il s'agit d'une raison majeure, permettre aux étudiants qui sont au niveau
un, qui commencent au niveau un au
collégial d'atteindre le seuil recommandé, tel qu'on en a parlé ici. Sinon, on
établirait un seuil sans offrir les coûts
qui permettraient de l'atteindre. Or, avec une offre de cours obligatoires de
quatre cours de 60 heures, nous avons bon espoir qu'un étudiant pourrait
atteindre le seuil minimal.
Évidemment, l'augmentation du nombre de cours
obligatoires ne serait pas bénéfique qu'aux étudiants de niveau un, hein, j'insiste,
mais à l'ensemble des étudiants, notamment au cours de leur cheminement. Quatre
cours permettraient d'accorder une
attention soutenue à toutes les compétences énoncées dans le devis ministériel,
les quatre compétences étant compréhension orale, compréhension écrite,
production orale et production écrite.
Un autre objectif de l'augmentation serait de
valoriser et de promouvoir la langue et la culture française auprès des anglophones et allophones de manière continue,
ce qui est impossible avec les maigres 90 heures de cours de français exigées à l'heure actuelle. Si je peux me
permettre de le mentionner, il peut s'écouler parfois jusqu'à trois,
quatre, cinq semestres, dans le cadre d'une formation technique, entre le
premier cours de français et le deuxième cours de français, de sorte qu'il n'y a pas... si vous voulez, l'étudiant n'est
pas en contact... le contact est très ténu, hein? Donc, voilà pourquoi
on insiste.
Un
autre aspect important : introduire les étudiants anglophones à la culture
de l'expression francophone, à laquelle ils ont accès grâce à une maîtrise
fonctionnelle de la langue française, parce que les cours de français n'ont pas pour seul et unique objectif l'acquisition d'un
niveau linguistique minimal, mais également la pleine participation à la
société et à la culture québécoise. Le seuil
dont on parle est bel et bien un niveau plancher, non un niveau de
maîtrise, qu'on pourrait qualifier d'idéal.
Il est nécessaire que les étudiants qui sont en mesure de pousser plus loin
leur connaissance de la langue et de
la culture québécoise d'expression francophone le fassent. Ainsi, les cours de
niveau supérieur sont-ils tout aussi
importants que les cours de niveau inférieur en ce qui constitue l'horizon vers
lequel la formation en français langue seconde, de l'école primaire
jusqu'au collégial, doit tendre.
Et je termine en citant les mémoires du
Conseil supérieur de l'éducation, à la Commission des états généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au
Québec : «Le conseil a fait valoir […] l'importance cruciale de la
maîtrise du français tant comme facteur de
réussite scolaire, d'insertion sociale et professionnelle que de participation
active, libre et responsable à la vie
civique. La langue y est définie à la fois en tant qu'instrument de
communication entre les personnes et comme outil majeur d'initiation
culturelle, en tant que "force historique instituante" et lieu
premier d'enracinement dans le groupe, un
moyen d'identification à la culture d'une collectivité, un facteur d'appartenance.»
Et un peu plus loin : «De plus,
la maîtrise de la langue française dans le contexte plus spécifique de la
société québécoise doit s'inscrire dans un projet plus large d'éducation à la citoyenneté […] cet objectif devrait
faire partie d'un projet éducatif de chaque établissement, et ce, du
primaire à l'université.»
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons continuer les
échanges, et je vais vous reconnaître, Mme la
ministre responsable de la Charte de la langue française. Vous avez la parole.
Mme
De Courcy : Est-ce que vous aviez
terminé ou est-ce qu'il vous...
M.
Gagné (Philippe) : Oui, il me restait
un dernier commentaire sur...
Mme
De Courcy : Bien, si vous le
permettez, Mme la Présidente, faites-le sur notre temps.
M.
Gagné (Philippe) : D'accord. Donc,
nous tenons à souligner enfin l'importance de corriger, et je cite, «la
présomption de connaissances appropriées du français», fin de la citation, pour
les ordres professionnels. En effet, le
projet de loi n° 14, tel qu'il est rédigé actuellement, augmenterait
le nombre de professionnels n'ayant pas un niveau de maîtrise approprié
à l'exercice de leurs fonctions. Nous proposons de mesurer précisément le
niveau de maîtrise de chaque élève dont le programme mène à l'adhésion à un
ordre.
C'est un peu un drôle de paradoxe que l'État québécois, avec
la loi n° 101, fasse en sorte idéalement donc que le marché du travail se passe en français et que, d'un
autre côté, le même État diplôme des milliers d'étudiants, des techniciens, qui
s'en vont tout de suite, hein, travailler, souvent dans des taux de placement
de 100 %, dans certains programmes, sans avoir les connaissances et le niveau
de maîtrise pour respecter cette même loi là. Il y a donc un étrange paradoxe
ici.
Donc,
en terminant, nous espérons vivement que cette démarche changera la dynamique,
que nous ne sommes pas arrivés à changer au
cours des 15 dernières années avec les représentants du ministère de l'Éducation.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M.
Gagné. Mme la ministre.
• (16 h 30) •
Mme De
Courcy : Bien, d'abord, vous
remercier d'avoir pris le temps et l'énergie de présenter un mémoire concernant ce sujet. Et une commission
parlementaire revêt souvent des surprises, et il y a des découvertes. Et, pour
ma part, vous êtes de ces découvertes.
À
savoir... D'abord, une question que vous avez fouillée depuis belle lurette,
manifestement, cette compétence-là en français au niveau collégial, telle que vous l'exprimez…
Vous nous indiquez que c'est depuis 1994, en fait, hein, que vous aviez
soutenu ce genre d'exigences, qui m'apparaissent tout à fait importantes. Je
trouve... Sans que je sache… Votre dernier commentaire, il m'apparaît... c'est
ce qui nous a motivés, lorsque nous avons fait le projet de loi n° 14,
entre autres sur l'écart entre l'Office québécois de la langue française et ses
tests et ce qui se passait au niveau collégial.
Compte tenu du flux
migratoire très important, il est clair que nous sommes plus sévères pour les
personnes immigrantes qui arrivent d'ailleurs et qui ont à subir des tests que
pour les étudiants du collégial au Québec, qui, dans certains cas, là, sont nés ici, là, depuis... de génération en
génération. Alors, manifestement, vous éclairez davantage cette
question. Alors, j'apprécie beaucoup.
Je
comprends aussi que vous offrez votre collaboration et votre participation pour
aider l'Office québécois de la langue française
ou bien les instances qui verront à la passation... ou comment on pourrait
faire pour ces tests-là. Et vous faites des
suggestions. Vous dites : Soit cours de niveau 2, soit par l'atteinte
de l'échelon 7 d'un test de niveau de maîtrise que vous... produit par des professeurs de FLS de 2006 à 2012.
Vous n'indiquez pas de préférence autour de ces questions-là. Et ça va être ma seule question, mes autres collègues ont
le goût de vous parler : Pourquoi vous n'indiquez pas de
préférence?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Gagné.
M. Gagné
(Philippe) : Bien, en fait, un peu
plus loin dans le mémoire, nous disons que le test de niveau de maîtrise qu'on a développé, c'est quand même l'outil
le plus précis. On ne peut pas être plus précis que ça. On pourrait dire qu'un élève, par exemple, pour chacune des
habiletés, pour écrire, pour lire, pour parler, pour écouter, on aura
une mesure différente pour chacune. Et ça ne
sera généralement pas la même, hein? On n'aura pas des 6, 6, 6, 6 pour
chaque individu. Certains sont forts en
lecture, moins forts en expression orale. Et donc on a présenté les deux parce
que, d'une part, le niveau 2,
donc, de nos cours, lorsque ce fameux standard de sortie là avait été développé
au début des années 2000, bien, il
correspondait au niveau visé comme étant le seuil. Et alors on le ramène ici.
Et, bon, d'une façon pratique, et, si on
veut faire les choses un peu plus rapidement, bon, allons-y rapidement avec le
niveau 2, d'accord. Mais, si on veut faire les choses de façon beaucoup plus précise et de façon beaucoup
plus nette, bien, le test de niveau de maîtrise, lui, il est à la fois
valide et très fiable, alors que les évaluations dans nos cours, bien, ils font
en sorte que, dans un même niveau de cours,
on pourrait avoir des degrés de... une grande variabilité dans les niveaux de
maîtrise. Donc, on réussit le niveau 2 et on peut être de
niveau 5, 6, 7, 8 dans ce niveau-là, là. Donc, c'est très large, le...
comme on dit, le filet et les mailles du
filet sont très larges dans nos cours. Et la fiabilité des mesures d'un prof à
l'autre, d'un collège à l'autre, bien, c'est difficile d'arriver à un
degré de précision aussi grand qu'avec le test qui, lui, est validé
scientifiquement, est fiable. Voilà.
Mme De
Courcy : J'apprécie beaucoup cette
suggestion-là, qui trouve son écho pour ma part dans toutes les questions d'importance de la littératie. Mes
collègues, la députée de Montarville, ce matin, mon collègue le député
de LaFontaine, ont mentionné ces éléments-là
de littératie. Et, honnêtement, ce test-là, pour l'avoir vu, je sais qu'il est
assez précis. Alors, vraiment, une très
belle contribution, pour ma part, à laquelle j'accorderai une attention toute
particulière.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente. Je voulais
saluer M. Gagné, Mme Noël et M. Limoges.
Dans votre mémoire, à
la page 6, à un moment donné, il est question... Je suis surpris, parce qu'on
a eu beaucoup de gens qui sont venus déposer puis qui nous disent que le milieu
étudiant anglophone était bilingue à presque 80 %, puis, selon ma
compréhension, c'était qu'ils étaient capables de se débrouiller. Dans votre
remarque, vous mentionnez, à la page
6 : «…nos finissants du collégial anglophone ne partagent pas tous une
connaissance minimale commune de cette langue qui leur permettrait de
favoriser la cohésion sociale, d'en [assumer] le développement […] ou encore de contribuer au maintien de relations
harmonieuses entre toutes les composantes de la société.» Et puis, à la page 10, vous parlez de «corriger la
"présomption de connaissance appropriée" du français pour les ordres
professionnels».
Alors, ma question est
assez simple. J'aimerais ça vous entendre un peu plus en détail justement
sur... Le projet de loi vise justement à rehausser la maîtrise du français par
les membres des ordres professionnels. Or, vous avez
affirmé que cet amendement affaiblirait la portée de la charte. Pouvez-vous
préciser de quelle façon que cet article-là affaiblit la portée de la charte?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. le
député. M. Gagné.
M.
Gagné (Philippe) :
Oui. C'est-à-dire qu'actuellement la charte dit que — donc,
à l'article 35 — si on a un diplôme d'études secondaire... si on obtient ou a
obtenu un diplôme d'études secondaires après 1985-1986, on est réputé
avoir une connaissance suffisante du français pour travailler. On sait depuis
très longtemps que ce n'est pas le cas. C'est-à-dire
que — et c'est d'ailleurs ce qu'on observe
dans nos classes — les élèves qui ont fait leurs études secondaires au Québec au niveau le plus bas, le niveau 1,
sont assis à côté de nouveaux arrivants qui n'ont pas fait leurs études secondaires au Québec, qui ne peuvent donc pas se
prévaloir de ce privilège-là, entre guillemets. Donc, eux doivent passer
les tests de l'Office de la langue française lorsqu'ils font partie d'un
programme de nursing par exemple, aux soins infirmiers
ou inhalothérapie, ou un des 10 programmes qui mènent à un ordre professionnel.
Il y a donc là une iniquité claire.
Le projet de loi,
actuellement, prévoit de considérer le diplôme d'études collégiales comme la
nouvelle mesure. Mais donc, on a essayé de vous l'expliquer, tous nos élèves n'ont
pas cette compétence-là pour travailler en français. Donc, bon, ça fait partie
de notre réalité. Mais ce qui est clair pour nous, c'est que maintenant,
même... d'une part, ceux qui ont étudié au secondaire
au Québec n'ont pas tous le même niveau de compétence, et la majorité d'entre
eux, ceux qui ont fréquenté les commissions
scolaires anglophones, ne peuvent pas répondre aux besoins d'un patient
dans un hôpital, par exemple, leur expliquer leurs problèmes de santé, alors
que ceux qui arrivent... qui sont arrivés récemment
au Québec ne le peuvent pas nécessairement non plus, mais on va exiger qu'ils
atteignent le niveau minimal, donc,
que recommande l'office... que ne recommande pas l'office, mais que demande l'office.
Et ça, pour eux, bien, ça veut dire beaucoup plus d'heures de formation.
Ils doivent reprendre le test trois, quatre, cinq fois parfois parce que, s'ils
ne passent pas ce test, bien, ils ne peuvent pas travailler. Donc, la pression
qu'on met sur les uns et les autres n'est pas du tout la même.
Et le projet tel quel
viendrait dire à tout le monde : Ça y est, vous avez réussi vos deux cours
de français au collégial, au cégep Vanier,
John-Abbott ou ailleurs, pas de problème, vous n'avez pas à faire le test de l'office,
alors qu'on sait très bien qu'une bonne marge d'entre eux n'ont pas le
niveau. Donc, en ce sens, le projet de loi était meilleur avant puisqu'au moins, les nouveaux arrivants, on
pouvait contrôler, mesurer, tester et reconnaître leurs compétences une
fois qu'ils les avaient atteintes. Est-ce que je réponds bien à votre question?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci.
M. Pelletier
(Saint-Hyacinthe) : Oui, c'est assez
clair.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Oui, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci. Juste préciser au niveau de... Vous parlez de
niveau 1, niveau 2, ce qui veut dire que le
niveau 2 n'est pas atteint actuellement. C'est ce qui était dans la loi
antérieure. Le niveau 2 ne sera pas atteint au niveau du cégep. C'est ça?
M. Gagné
(Philippe) : C'est-à-dire que, quand
on parle de... Il faut faire attention. Quand on dit : Niveau 1, niveau 2 de nos propres cours à nous, ce ne sont
pas les mêmes niveaux, par exemple, qu'à l'Office de la langue
française, qui a une échelle à 12 niveaux, hein? Il faut bien faire attention.
Et donc, à notre
niveau 1, c'est le fameux seuil transitoire dont parlait Colette au départ, qui
ne devait pas exister au moment où, en 1994,
on a créé les cours obligatoires de langue seconde. C'est la même chose en
anglais langue seconde : on a toujours quatre niveaux, alors qu'on
devait en avoir trois. Mais on s'est retrouvés avec beaucoup trop d'élèves à ce
niveau 1 et on les tolère depuis tout ce temps-là.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M.
Gagné.
Une voix : Merci.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. le député de
Bonaventure.
• (16 h 40) •
M. Roy : Merci, Mme la Présidente. Mes salutations. Juste pour vous
dire que j'étais enseignant de cégep avant d'être ici.
Écoutez,
je vais y aller sur un aspect très pratico-pratique. Dans votre, bon,
mémoire... bon, dans le résumé, vous nous
dites : «Nous recommandons à la Commission de la culture et de l'éducation
de faire en sorte que les cégeps anglophones
offrent le même nombre d'heures de cours en français que dans les cégeps
francophones, soit quatre cours de 60
heures.» Ça, ça veut dire enlever les cours aussi, changer un peu le cursus
scolaire, changer l'horaire de cours. Et, connaissant les problématiques
que ça peut engendrer, concrètement, qu'est-ce que... comment vous pourriez
nous décrire ou nous expliquer quels cours qu'on
pourrait enlever ou comment on pourrait organiser l'horaire d'un
étudiant? Parce que ça veut dire ajouter des
cours, ça veut dire modifier le programme éducatif. Et est-ce qu'au niveau du
personnel… est-ce qu'on aurait les ressources nécessaires pour cette
augmentation de tâche liée à l'enseignement de l'anglais?
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. le député. Oui, M. Gagné.
M.
Gagné (Philippe) : Vous voulez dire
de l'enseignement du français?
M.
Roy : ...
M. Gagné (Philippe) : C'est tout ce qui revient
continuellement quand on nous parle. Donc, en fait, pour y répondre, on est bien
conscients que ça ne se ferait pas sans soit un réinvestissement ou un
investissementsupplémentaire. Ou, si
on prend pour... si on se dit que, le système étant une série de vases
communicants, on devrait nécessairement diminuer le vase d'une autre
discipline, par exemple, exactement comme ça s'est fait en 1994… C'est-à-dire
que c'est philosophie et éducation physique qui ont perdu un cours dans le
programme pour nous en donner deux.
C'est certain que ce n'est pas une approche
que nous, nous privilégions, non seulement parce que ça nous place dans une drôle de
situation par rapport aux autres disciplines, mais parce que le fait de perdre,
par exemple, deux cours complémentaires, hein, les fameux cours
complémentaires que les élèves peuvent suivre, ça revient d'une certaine façon à diminuer la nature même ou à modifier la
nature de ce qu'est un cégep : la possibilité de découvrir autre
chose pendant que j'étudie dans mon
programme, aller voir ailleurs s'il n'y aurait pas quelque chose d'intéressant,
et peut-être même découvrir une
passion nouvelle et réorienter sa formation. Donc, s'il s'agit de faire perdre
à d'autres disciplines une part de
leur marché, entre guillemets, ce n'est pas une situation qui nous apparaît
souhaitable si c'est la seule façon de faire.
Nous considérons qu'il est essentiel d'augmenter le niveau de maîtrise en
français pour toutes les raisons dont on a parlé, mais c'est clair que
nous privilégions un investissement supplémentaire.
Et, pour ce qui est de... et là je sais qu'on
a des problèmes financiers et il n'y a de l'argent pour personne, mais il y a tout de même des priorités qui peuvent être
effectuées dans l'investissement sur le plan linguistique. Et nous considérons que d'augmenter le niveau de maîtrise
des techniciens qui s'en vont travailler tout de suite, hein, ils
finissent et ils vont travailler… On a donc
une mesure très ciblée d'investissement qui aura un impact concret, réel, tout
de suite, dès le départ, en quelques années du moins, et donc ça nous
apparaît un investissement pertinent.
Pour ce qui est des embauches qu'on devrait
faire, effectivement il faudra en faire parce que, pour l'instant, si on double le nombre de cours qu'on offre, on aura à le
faire. Mais les universités sont là pour nous aider dans ce sens-là.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Oui, M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Juste une dernière question en
conclusion, Mme la Présidente. Vous
mentionnez, à la fin de votre... à la page 12 de votre mémoire : «…la
Commission de la culture et de l'éducation de corriger la "présomption de
connaissance appropriée" du français pour les ordres professionnels en
exigeant des étudiants qu'ils démontrent
leurs compétences en français lors d'un test standardisé, valide et fiable — alors — […]
car il offre l'avantage de partager un...» Pensez-vous que ce genre… Ce
serait coercitif pour les cégeps anglophones, j'imagine, ce genre de mesure là
serait acceptée dans tous les cégeps anglophones du Québec?
M.
Gagné (Philippe) : Bien,
voyez-vous...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui. Allez-y, M. Gagné.
M. Gagné (Philippe) : Voyez-vous, le projet sur lequel
Colette, et moi, et nos collègues avons travaillé pendant six ans, il était rendu
pratiquement en phase de mise en oeuvre. Comme je vous l'ai dit, nous avions
déjà commencé à imprimer les scores, les niveaux de maîtrise dans les bulletins.
On était donc rendus très, très loin dans le processus. Et, au moment où il y a eu une décision qui a été prise, il y a eu une
enquête qui a été menée dans le réseau collégial, et un tout petit peu plus de 50 % des directions des
études des collèges étaient d'accord avec le projet. Il y avait une
certaine résistance, mais, vous savez, les gens qui résistent sont ceux qui s'expriment;
généralement, les autres, bien, ils ne s'expriment pas nécessairement. Alors,
on avait entendu, oui, une résistance, mais, quand on a vu les résultats de cette enquête, bien, une mince majorité, mais,
tout de même, c'était beaucoup supérieur à ce qu'on s'attendait… et eux étaient d'accord avec le processus. Les gens
étaient d'accord avec le fait qu'on donne un indicateur précis, à la fois
en anglais langue seconde et en français langue seconde, pour que les gens
sachent que, s'ils ont réussi leurs cours obligatoires,
ils sont néanmoins de niveau 4 ou 5 sur une échelle à 12 niveaux. Et là on leur
donnait aussi un indicateur : Voici,
vous êtes de niveau 4, et voici le descripteur de ce que correspond votre
compétence ou votre niveau de maîtrise en français. Donc, quand on est niveau 10 sur 12, ça va, quand on est
niveau 4, on en prend conscience d'une façon un peu plus nette. Donc,
résistance, il y aurait peut-être, sans doute.
Forcément,
je crois que la Fédération des cégeps, d'ailleurs, vous a envoyé un mémoire
dans lequel ils reconnaissent... enfin, ils
ne sont pas d'accord. Forcément, ils ne sont pas d'accord; on le reconnaît, ça
fait 18 ans qu'on n'est pas d'accord
avec les administrateurs de cégep à cet égard-là. On s'entend assez bien avec
la direction de l'enseignement collégial,
qui nous aide à développer ces projets pour faire... pour répondre à ce que la
commission Larose et à ce que la Commission
d'évaluation de l'enseignement collégial a recommandé il y a plus de 10 ans. Ça
fait longtemps, là, qu'on travaille pour soulever, pour augmenter ce
niveau de maîtrise là. Mais, à chaque fois, ça tombe à l'eau. À la haute
direction du ministère de l'Éducation, on décide que ce n'est pas possible.
Donc, on est devant vous et on espère que, comme élus, vous pourrez nous aider
à changer cette situation-là.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle et la parole
est au député de LaFontaine. M. le député.
M.
Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, M. Gagné, merci beaucoup, de même que Mme Noël et M. Limoges, qui vous accompagnent. Et votre
dernière minute d'intervention me faisait penser, j'imagine à vous également, à la citation de Victor Hugo, dans ses
contemplations, qui disait : Ceux qui vivent, ce sont ceux qui
luttent. Alors, après autant d'années, vous
continuez, et je pense que c'est important. Vous amenez ici aujourd'hui un
message très important et je pense qu'il faut le capter.
Vous savez, on peut s'inscrire
dans le débat démocratique, dans le débat social de différentes façons. Le projet de loi n° 14 en est un pour vous, de
faire valoir le point qui est le suivant : autrement dit, oui, l'épanouissement
du français au Québec — 2 %
de francophones en Amérique du Nord — est extrêmement important,
louable et justifiable comme objectif
collectif. Et il paraît paradoxal — et j'ai bien retenu
le terme que vous avez utilisé — d'une part, d'exiger beaucoup en aval que les entreprises
puissent faire preuve, par a plus b, que les postes sont en français, que
les gens travaillent en français, que les
logiciels sont en français, et ainsi de suite, mais de faire ab initio en
amont, lorsqu'on parle de la
formation, lorsqu'on parle de la survie, et même plus que la survie, on veut l'épanouissement
du français, bien, votre message
aujourd'hui, qui s'applique tant au niveau primaire, secondaire, collégial,
universitaire, est également de la reconnaissance que les ordres
professionnels font de celles et ceux qui désirent avoir un permis pour
pratiquer une profession protégée par un ordre. Alors, en ce sens-là, je pense
que votre message est extrêmement important et je suis personnellement de ceux qui croient que beaucoup, pour beaucoup, l'épanouissement
du français sera tributaire de l'enseignement du français, de la qualité
du français de l'enseignement.
Et
moi, je ne veux pas être réducteur, je ne veux pas être condescendant par
rapport au projet de loi n° 14, mais je
pense que là vous ouvrez tout un chantier qui est nécessaire à, autrement dit,
faire en sorte que, oui, dans certains cas — vous donniez l'exemple — deux cours de 45 heures FLS au sein des cégeps anglophones
et quatre cours de 60 heures d'anglais
langue maternelle. Et, en bout de piste, les attestations pourront faire en
sorte que l'on doive qualifier d'équivalents
des étudiants qui n'auraient pas eu le même parcours et qui, en bout de piste,
je pense, ne nous assureraient pas
que l'on ait atteint l'objectif qui est l'épanouissement du français, mais par
la qualité de l'enseignement. Puis qui dit qualité dit nombres
suffisants, ressources, et ainsi de suite.
• (16 h 50) •
Il y a des questions
extrêmement importantes, puis mon collègue de Bonaventure le démontrait, il s'agit
également de faire cette analyse — quand
je parle de chantier, c'est à ça que je fais référence — de
cette analyse qui aurait des impacts
nécessairement, si on veut modifier ou s'assurer que les parcours soient
standards — avant d'en arriver à
une évaluation, qui, elle, serait standard, il faut s'assurer d'un minimum de standardisation,
si vous me permettez l'expression, au préalable — et il faisait
mention entre autres des ressources de la grille horaire des cours, ressources
financières, les ressources également en termes d'enseignants et d'enseignantes.
La
Charte de la langue française a des objectifs qui, je crois, ne nous
permettraient pas d'aventure de dire :
Bien, on a réglé la situation — loin de là — en modifiant
deux articles, d'où mon commentaire plus tôt, qui ne se veut pas être condescendant ou réducteur, mais je pense entre
autres à l'article 18 de la Loi sur les collèges d'enseignement général et
professionnel, qui prévoit que «le gouvernement établit, par règlement, le
régime des études collégiales», notamment «l'évaluation des apprentissages et
la sanction des études». Il y a beaucoup là aussi, je crois, qui doit être fait, beaucoup de législation, de règlements que
les intervenants, les partenaires — moi, je vous appelle les partenaires dans l'atteinte de cet objectif-là — puissent de façon beaucoup plus large que les deux
articles… Parce que c'était l'exercice
auquel vous étiez conviés, l'article 13 et 30, si ma mémoire m'est fidèle, du
projet de loi n° 14. Je pense, c'est beaucoup plus large que
ça, ce à quoi vous nous conviez, et, en tout cas, le message, c'est dans ce
sens-là que moi, je le prends. Je ne sais pas si vous avez des commentaires à
cet effet-là.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. le député,
est-ce que ce serait à M. Gagné ou... de répondre? M. Gagné.
M.
Gagné (Philippe) :
Oui. Merci. Bien, écoutez, je suis content de voir que ce message-là vous
semble pertinent. Quoi ajouter d'autre? De
notre part, nous connaissons très bien notre situation, la situation de nos
élèves et les niveaux, d'où ils viennent, où
ils s'en vont. Ce qu'on sait, c'est que très peu de gens connaissent cette
situation-là. Même dans le réseau collégial, quand on rencontre des
collègues du secteur francophone ou du secteur anglophone, mais particulièrement dans le secteur francophone,
parfois ils ne savent pas que la discipline français langue seconde
existe, par exemple. On ne parle pas de... on parle de gens qui travaillent
dans le milieu collégial. Ou alors ils disent : Ah! Oui, d'accord, comme anglais langue seconde. Ils font
tout de suite, comme vous avez fait tout à l'heure, le rapport avec
anglais langue seconde. Donc, le
questionnement ou la prise de conscience sur nos réalités, bien, elle concerne
130 enseignants du collégial et quelques personnes qui gravitent autour.
Mais, sinon, c'est une situation méconnue.
Et,
quand on a lu le mémoire de la Fédération des cégeps, on a eu l'impression en
fait que ce qu'ils vont venir vous dire bientôt, c'est : On n'a pas besoin
d'un test, on n'a pas besoin de mesurer quoi que ce soit, le D.E.C. est
déjà très exigeant, nos élèves ont deux cours obligatoires de français à
réussir. C'est comme nier, nier les 18 dernières années au cours desquelles on a tenté de démonter… enfin, on n'avait pas besoin
de le démontrer, tout le monde savait autour de nous qu'il y avait un
problème avec le niveau de maîtrise d'une bonne part de nos élèves. Maintenant,
si on a déposé le mémoire, c'est aussi pour
ça justement, pour ne pas que ça tombe dans l'oubli, pour pas qu'on considère
que, ce niveau de maîtrise là, il n'est pas suffisant pour une bonne
part de nos élèves.
Ce que j'aimerais peut-être ajouter, c'est que,
même pour les plus forts, donc mon collègue en a parlé tout à l'heure, même pour les francophones qui viennent
étudier chez nous, il est important qu'ils aient un nombre important de
cours. C'est-à-dire que, même pour les francophones qui sont peu nombreux, mais
qui sont... ou qui sont très forts en français,
il faut assurer une permanence du français dans cette formation qui dure deux
ou trois ans. Donc, si on suit un premier cours de 45 heures et qu'on en
suit un deuxième deux ans plus tard, même si on est un francophone, il va se produire un phénomène normal, qu'il se trouve à
perdre d'une certaine façon la finesse de son français puisqu'on est en anglais de neuf à cinq et lorsqu'on étudie le soir
aussi. Donc, on en vient à chercher ses mots en français, ils nous
viennent naturellement en anglais, ce qui est normal. C'est un phénomène
normal. Mais ce qu'on aimerait donc, c'est que la permanence du français dans
un programme permette justement de contrebalancer cet effet-là pour faire en
sorte que même les plus forts aient accès à une formation rigoureuse à leur
niveau tout au long de leur formation. Voilà.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député.
M.
Tanguay : Merci beaucoup. Et, à vous
entendre, je pense que, dans l'atteinte de cet objectif-là et dans le chantier
auquel vous nous conviez, qui est nécessaire et dont, moi, je participe, j'en suis
également, un interlocuteur de premier choix, sinon l'interlocuteur de premier
choix serait le ministre de l'Enseignement supérieur.
M.
Gagné (Philippe) : On peut l'appeler,
si vous voulez.
M.
Tanguay : On va vous aider à faire
ça. C'est tout, Mme la Présidente. Merci.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Je vais maintenant du côté du
deuxième groupe d'opposition. Mme la députée
de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 4 min 30 s.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup.
4 min 30 s. Bonjour madame, messieurs. Merci pour votre apport, merci pour vos commentaires.
Et, tout comme mes collègues, j'ai été très
surprise de lire ce qu'il y avait là-dedans et particulièrement, si vous me permettez, lorsque vous écrivez : «L'absence
de standard fait en sorte que 30 % des étudiants des grands collèges anglophones de Montréal, surtout, ne sont pas
fonctionnels en français à la fin de leurs études.» 30 %, c'est
beaucoup, c'est une personne sur trois, c'est un finissant sur trois. Je suis
surprise, je suis vraiment surprise, d'où votre intervention.
J'aimerais que vous me parliez un petit peu
plus de ce que vous préconisez. Parce qu'on sait qu'il y a une certaine réticence du
côté de la population anglophone au fait d'offrir un examen uniforme, et au
secondaire et au collégial, pour faire
en sorte que l'anglophone, l'étudiant anglophone pourra recevoir son diplôme et
du secondaire et également du collégial. Pouvez-vous me parler de ça
face à la réalité que vous vivez?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Gagné.
M. Gagné (Philippe) : Oui. Réticence de la part des élèves,
on ne l'a pas ressentie véritablement quand on était dans les collèges pour
justement monter le projet, hein, en phase de projet pilote. Les élèves, au
fond, se posaient laquestion,
oui : Pourquoi passer ce test-là? Simplement pour vous donner une
information précise sur votre niveau de maîtrise. Une fois qu'ils l'avaient
compris, bon, bien, ils étaient assez ouverts à faire ce test-là. Mais une fois
que le...
Mme Roy (Montarville) : ...je me suis mal exprimée. C'est
dans le milieu anglophone de façon générale.
Certaines personnes ont soulevé des réticences à l'effet que les étudiants
anglophones devraient subir un test, et au secondaire et au collégial, pour
pouvoir obtenir leur diplomation, mais un test de français. C'est à cet
égard-là la réticence.
M.
Gagné (Philippe) : Donc, c'est le
fait qu'il soit certificatif qui entraîne une réticence. Forcément, là, à ce moment-là, je vous comprends mieux. Bien sûr,
puisque, pour l'instant, c'est possible d'avoir son D.E.C. sans avoir
atteint le seuil minimal. Alors, forcément,
c'est... Les gens qui ont le niveau ne vont pas se plaindre, ils savent qu'ils
ont le niveau. Mais, si on ajoute cette contrainte, bien sûr, il y aura
une résistance, tout comme il pourrait y avoir une résistance pour... le fait
qu'on aurait plus de cours à suivre, par exemple. C'est un peu un argument qu'on
entend, ça aussi.
Mes
collègues qui étaient là au moment où les deux cours ont été ajoutés nous
rappellent qu'il y a eu cet argument-là qui
a été mentionné en 1993‑1994 : Oui, mais les élèves, ils vont critiquer
puisqu'on leur ajoute deux cours. Mais non. C'est-à-dire que, quand la
grille horaire arrive, bon, il y a deux cours de français à faire. Bon, d'accord,
on les fait. Il s'agit que ça rentre dans les moeurs pour que la situation soit
acceptable ou acceptée.
Oui,
Colette, vas-y.
Mme Noël (Colette) : Oui, bien, c'est ça, oui. La
résistance, moi, c'est ce que… J'insiste sur ce que Philippe vient de dire : la résistance ne vient pas des
étudiants. Les étudiants, ils suivent le parcours qu'on leur suggère, qu'on
leur propose. La résistance vient plus,
peut-être, un peu du milieu, qui est la résistance au changement qu'on voit
toujours.
En 1994, effectivement, les étudiants n'ont
pas posé de problème du tout quand on est devenus matière obligatoire. Bon, il y a eu un petit peu de
brasse-camarade autour des disciplines qui perdaient des cours, autour de
certains administrateurs qui voyaient ça un petit peu comme une nouvelle
contrainte qui n'était pas là. Mais ça n'a pas été une résistance qui a duré...
qui a été lourde à gérer. Ça s'est réglé assez rapidement, et je crois que,
cette fois-ci, ça serait un peu la même chose.
Moi, je voulais aussi
insister sur… bon, le fait d'avoir un standard de sortie et un test de sortie
change beaucoup de choses par rapport à la
situation actuelle. En ce moment, les étudiants, on l'a dit, sont classés dans
quatre niveaux et ils doivent réussir leurs
deux cours, hein? Un étudiant qui réussit le cours du niveau 1 à 80 %, si
on le compare à celui du niveau 4, qui réussit son cours avec une note
de 75 %, le premier est beaucoup plus faible que le deuxième. Mais ça, il
y a juste nous qui le savons. Parce que, dans le bulletin de notes, c'est
écrit : Français langue seconde, 75 % pour le deuxième puis 80 %
pour le premier, puis tout le monde pense que le premier est plus fort que le
deuxième, hein?
Alors, en sachant que, en instaurant un test
de sortie qui vérifie le niveau et qui décrit un niveau réel de l'apport pour tout le monde mais non pas une note qui est
associée à un cours, on change complètement la vision des choses, la perspective, et les étudiants eux-mêmes vont se
placer dans une position... vont devoir travailler en fonction de
réussir ce test-là. Les étudiants, ils
veulent l'avoir, leur D.E.C., hein? Ils veulent finir avec leur D.E.C., là.
Alors, les examens, les épreuves
uniformes, les épreuves de programme et tout ça, ils veulent les réussir; ce
test-là aussi. Donc, ça nous donnerait un sérieux coup de pouce parce
que l'orientation et la vision des choses changeraient de la part de tout le
milieu.
•
(17 heures) •
Mme
Roy (Montarville) : ...merci beaucoup
pour votre réponse.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
...Noël. M. Limoges, le mot de la fin.
M. Limoges (Alexandre) : Bien, rapidement ajouter... De toute
façon, ça s'ajoute à ce que vient de dire
Colette, que le seuil... Vous avez parlé d'une
crainte, d'une crainte vague, une crainte quand même assez floue, je pense,
mais il ne faut pas oublier qu'accompagnée
justement de l'augmentation de l'offre de cours on prend l'étudiant, on l'amène
à ce niveau, hein, et c'est là qu'une
crainte peut être dissipée. C'est-à-dire que, bon, en ce moment, de toute
façon, ils doivent réussir des cours. On le rehausse et on se donne les
moyens d'amener l'étudiant au niveau où on veut l'amener, et c'est beaucoup
mieux.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Merci, Mme Noël, merci à MM.
Gagné et Limoges.
Nous allons
maintenant recevoir le Mouvement Montérégie français et, le temps que les gens
prennent place, nous allons suspendre les travaux pour quelques minutes.
(Suspension
de la séance à 17 h 2)
(Reprise
à 17 h 4)
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Bonjour
madame, bonjour monsieur. Bienvenue à la commission. Je vais vous demander de
bien vouloir vous identifier, de présenter
aussi votre organisme, votre mouvement. Vous aurez un temps qui va vous être
alloué de 10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite suivra
un échange avec les membres de la commission. Donc, la parole est à vous.
Mouvement Montérégie français
Mme
Cloutier (Luce) : Oui, bonjour. Je
suis Luce Cloutier, je suis présidente du Mouvement Montérégie français, lequel mouvement existe depuis le
printemps 2009, et qui est composé de bénévoles. Le travail qui y est fait
est accompli par des volontaires et des
bénévoles. Alors, ce n'est pas un... Comment je pourrais dire? C'est un
mouvement qui est parti d'une volonté citoyenne de faire quelque chose pour
travailler à la protection du français, à la mobilisation et à l'intégration
des immigrants. Alors, je laisse...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui. M. Pichette.
M. Pichette (Pierre) : Pierre Pichette, je suis secrétaire du
même mouvement et aussi vice-président du
Mouvement Québec français. Aujourd'hui, je suis ici à titre du Mouvement
Montérégie français.
Mme
Cloutier (Luce) : C'est ça. Nous
avons fait parvenir un mémoire à la commission parlementaire, mais, compte tenu du temps qui nous est alloué, nous en
avons fait une synthèse. Alors, c'est ce que je vais vous lire, vous présenter.
Alors,
tout d'abord, le Mouvement Montérégie français aimerait remercier les membres
de la Commission de la culture et de l'éducation, qui, dans le cadre de la
consultation générale et des auditions publiques sur le projet de loi n° 14, nous donne l'occasion de pouvoir
se faire entendre. En présentant ce mémoire, le Mouvement Montérégie
français espère contribuer positivement au
débat concernant principalement les dossiers des organismes reconnus, en
l'occurrence des villes au statut bilingue, de l'affichage et des capacités de
l'Office québécois de la langue française à assurer le respect de la
loi 101.
Il
nous semble opportun de mentionner ici que le Mouvement Montérégie français a
une expérience pratique de ces dossiers. En
effet, nous menons depuis 2010 un combat pour la francisation du statut de la
ville d'Otterburn Park. Nous avons entrepris à l'été 2012 le survol des
problèmes d'affichage en Montérégie. Il va de soi que nous y avons acquis une
solide expérience pratique de ces questions en plus d'être appelés à bien
connaître le fonctionnement de l'office. Alors, comme j'ai déjà dit, le
Mouvement Montérégie français a été créé au printemps 2009 et il est membre à
part entière du Mouvement Québec français, dont il assume la vice-présidence.
Juste un tout petit rappel sur la Montérégie comme espace
hétérogène. Alors, selon le ministère de l'Immigration
et des Communautés culturelles du Québec, la
Montérégie a accueilli 8,5 % des immigrants au Québec entre 1997 et
2006. Ils ne représentent aucunement un bloc homogène. En effet, seulement
26,3 % parlaient français.
Actuellement,
la Montérégie comporte également 15 organismes au statut de ville reconnue
bilingue, soit plus de 10 % de toutes les
institutions municipales bilingues du Québec. De ces 15 villes, une seule,
la ville de Hudson, avec une majorité de 66,17 % d'anglophones, peut
justifier légalement de son statut bilingue. Il y aurait lieu, en outre, de mentionner les velléités de certaines villes de
contrecarrer la loi 101 et de pratiquer un certain bilinguisme de fait,
telles les municipalités de Brossard, de Châteauguay, de Huntingdon et de
Saint-Lambert.
Les
expériences terrain du Mouvement Montérégie français dans la défense de la
loi 101. Alors, les deux dossiers majeurs
sur lesquels nous nous sommes engagés furent celui de la francisation de la
ville d'Otterburn Park et celui de l'affichage en Montérégie.
Le
dossier de la francisation du statut de la ville d'Otterburn Park. À l'automne 2010,
le Mouvement Montérégie français a entrepris des démarches en vue de
franciser le statut de la ville d'Otterburn Park. Cette municipalité, avec
un pourcentage d'anglophones de 7 %,
bénéficie encore d'un statut bilingue. À cet effet, le comité pour la
Francisation du statut de la ville d'Otterburn
Park fut créé. La francisation du statut des municipalités bilingues est vue
par le Mouvement Montérégie français
comme une très grande... une importante entreprise de démocratisation qui vise
à briser les enclaves, voire les ghettos culturels existants dans le
milieu municipal. Elle s'oppose fermement contre toute ségrégation et elle
désire inviter toute la population à participer et à s'intégrer dans la vie de
sa municipalité dans le cadre d'une langue commune, le français.
Or, malgré toutes les
activités générées par le comité de Francisation du statut de la ville d'Otterburn
Park, ces démarches ont échoué. La cause
principale de cet échec est la loi 101 et plus spécifiquement son
article 29.1, qui fait obligation
à l'organisme lui-même de demander au gouvernement l'abrogation de son statut
bilingue. Quelle municipalité, en effet, se risquerait à prendre une
telle initiative? On n'en connaît aucune jusqu'à maintenant.
• (17 h 10) •
Le
deuxième dossier, celui de l'affichage en Montérégie. En juillet et août 2012,
nous avons entrepris le survol de l'affichage dans la région. La base de notre
analyse reposa sur la réglementation de la loi 101, où il est mentionné
que ne correspond pas à la loi une affiche écrite dans une autre langue que le
français et ne comportant aucun descriptif en français. Nous avons identifié un
total de 964 manquements à l'esprit et à la lettre de la loi 101 dans la
région. Nous estimons qu'un survol complet de la région devrait voir ce chiffre
augmenter d'au moins 20 %.
Et comment fut faite l'évaluation
de notre dossier affichage par l'office? Les réponses apportées par l'Office
québécois de la langue française plusieurs mois après le dépôt de nos plaintes
nous laissent perplexes quant à l'interprétation de la loi 101 relative à l'affichage.
Par exemple, il semble que, sur les 1 000 plaintes déposées à l'office par le Mouvement Montérégie français, la
plupart soient refusées sous prétexte que les commerces identifiés comme
contrevenants respectent les articles de la charte, alors qu'ils ne se
conforment pas aux articles 63, 66, 67 et 68 de ladite Charte de la langue
française relatifs à l'utilisation d'un générique ou descriptif en français.
Nous remettons en question cette
interprétation de la loi. En effet, le personnel de l'office semble privilégier
certains articles au détriment de ceux qui nous apparaissent comme
fondamentaux. Il s'agit donc bien ici d'une interprétation.
Quant
au dossier de l'organisation et du fonctionnement de l'Office québécois de la
langue française, suite à notre expérience pratique acquise à la dure sur le
terrain, il nous semble manifeste que l'Office québécois de la langue
française n'ait pas les moyens de ses
politiques. L'office, en effet, ne semble pas avoir la capacité juridique, ni
administrative, ni la capacité
organisationnelle, ni finalement les ressources financières et humaines pour
bien remplir sa mission. Il semblerait en
outre que sa structure et le mode de nomination de ses cadres supérieurs soient
trop politisés. L'office semble bénéficier d'une trop grande marge de manoeuvre dans l'interprétation qu'elle fait
de certains articles de la charte; cela demanderait à être mieux
encadré.
Alors,
nos recommandations. Alors, à partir d'une bonne connaissance des dossiers des
organismes reconnus, de l'affichage et du fonctionnement de l'Office
québécois de la langue française acquise par une pratique terrain
intensive, nous vous proposons quelques
recommandations. Alors, la première a trait aux organismes reconnus, aux
municipalités. Alors, quant au maintien de l'article 11 de la proposition de la
loi n° 14 de l'alinéa 1 de l'article 29.1 de la charte, qui stipule que l'office doit reconnaître, à sa
demande, une municipalité lorsque plus de la moitié des résidents de son
territoire sont de langue anglaise, notre commentaire, c'est que nous craignons
ici que la communauté anglophone ne veuille inclure,
parmi ces ressortissants de langue anglaise, l'ensemble des immigrants qui,
pour une raison ou une autre, se sont anglicisés. Notre
recommandation : nous proposons ici de faire référence à la minorité
anglaise historique. L'article serait donc
modifié ainsi : L'office doit reconnaître, à sa demande, une municipalité
lorsque plus de la moitié des résidents de son territoire font partie de
la minorité historique de langue anglaise.
Quant
à l'obligation faite à l'office, selon l'article 12.29.2, de conduire tous les
10 ans une évaluation du maintien des
conditions ayant permis de reconnaître un statut bilingue à un organisme
municipal, nous sommes tout à fait d'accord et recommandons de maintenir l'article
proposé.
Quant
à l'article 12.29.4, qui stipule que le gouvernement peut aussi, à la suite de
la production d'un état de la situation par l'office,
en application de l'article 29.2, sur recommandation du ministre et lorsque l'organisme
visé ne satisfait plus à la condition qui lui a permis d'être reconnu, retirer
une reconnaissance, s'il le juge approprié, compte tenu de l'ensemble des
circonstances, on y ajoute en plus l'éventuelle prise en compte des
considérations historiques.
Nos commentaires. Ici, on note un changement important
par rapport à la loi 101 et on voit que le
gouvernement tient à reprendre une certaine
initiative. Mais quelle sera la portée de cette dernière? Nous sommes portés à
croire que les organismes visés par
le processus de francisation de leurs statuts se feront fort de plaider les
circonstances atténuantes et des considérations historiques. Et, dans les faits,
quel gouvernement, face à la pression des lobbys et au pouvoir
médiatique de la communauté anglophone, aura
le courage et la possibilité politiques de bel et bien franciser quelconque
statut reconnu?
Il
nous semble que la seule façon de s'en sortir honnêtement est de dépolitiser le
dossier. Il s'agirait donc de déplacer tout
le processus de la prise de décision du niveau gouvernemental au niveau
administratif de l'office. Ainsi, l'office,
à l'abri de la pression des lobbys, pourrait, suite à ses évaluations
décennales, statuer administrativement sur le maintien ou non du statut.
Elle pourrait donc prendre sa décision en se basant sur les résultats de son
évaluation faite sur la base objective de la présence ou non de 50 % et
plus d'anglophones de la minorité historique.
Notre recommandation, c'est que l'office,
suite à ses évaluations décennales, doit retirer le statut d'organisme reconnu à toute municipalité dont la minorité
historique anglophone ne justifie plus de 50 % de la population de ladite
municipalité.
Nos recommandations quant à l'affichage.
Alors, on voit qu'il y a quand même une grande omission par rapport à l'affichage
dans la loi n° 14. Notre commentaire, c'est que la majorité des
plaintes déposées à l'office relèvent une absence de prédominance du
français dans l'affichage public ainsi qu'un manque général de générique en
français pour les commerces contrevenants.
Et pourtant, malgré ce que la loi précise à cet effet, l'office, bien souvent,
privilégie d'autres articles dans ses interprétations.
Nous
recommandons que les articles de la charte relatifs à l'affichage soit, d'une
part, portent mention de l'obligation, pour
toute affiche dans une autre langue que le français, d'avoir un descriptif en
français et de faire clairement apparaître le texte français de façon
prioritaire, puis, d'autre part, que ces obligations aient préséance sur toutes
les autres lors de l'interprétation d'une plainte par l'office.
Et
nos recommandations quant au fonctionnement de l'Office de la langue française
quant au manque de ressources : nous recommandons que l'office se voie
dotée de moyens financiers et humains suffisants pour remplir son mandat d'application
de la charte.
Quant
à la trop grande marge de manoeuvre relative à l'interprétation, nous
recommandons que les différents articles de la loi soient présentés et que l'on
y procède, à leur ordonnancement, en fonction de la prépondérance de certains
articles.
Quant à la trop grande politisation de l'office,
nous recommandons que les cadres supérieurs de l'office soient nommés par le Parlement.
Puis, quant à la capacité générale de l'office,
nous recommandons que, dans le cas d'une politique et d'une nouvelle loi linguistiques, les structures
politicoadministratives régionales se voient confier un mandat élargi et
conséquent quant à l'application de la loi, qu'il leur soit donné la capacité
et les ressources nécessaires pour ce faire.
En
guise de conclusion générale, le Mouvement Montérégie français tient à réitérer
ses remerciements aux membres de cette commission pour l'occasion qui lui est
fournie de pouvoir se faire entendre, et nous osons espérer que notre expérience terrain de l'application de
la loi telle que dénombrée tout au long du présent mémoire puisse être d'une
quelconque utilité. Nous vous remercions.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Je tiens juste à préciser que
vous avez dépassé le temps qui vous était alloué,
mais, avec le consentement de la ministre, le temps sera amputé du côté du
gouvernement. Je veux juste le préciser.
Nous allons débuter les échanges avec les
membres de la commission, et je commence du côté du gouvernement. Mme la ministre responsable de la Charte de
la langue française, vous avez la parole.
Mme De Courcy : Bonjour, madame, monsieur. Alors,
bien, d'abord, merci de vous être présentés, de vous avoir donné la peine de
nous transmettre votre savoir acquis au fil de l'expérience terrain, comme vous
dites, dans la Montérégie.
Il
y a certains éléments qui nous interpellent, bien sûr, entre autres votre
préoccupation entourant l'Office québécois de la langue française. Vous
comprenez que, dans le cadre de la modernisation que j'ai annoncée au cours des dernières semaines, manifestement, tout ce qui
peut enrichir la vision d'une modernisation de l'office, bien, me touche
beaucoup. Indépendamment de ce qu'il y a
dans le projet de loi n° 14, cette modernisation-là était tellement
nécessaire que les avis que vous nous donnez seront étudiés, bien sûr, quant à
la question de l'OQLF.
Sur
les villes bilingues, je vous ai écoutés avec beaucoup d'attention. Je vous
avoue que nous avons reçu beaucoup de gens,
en tout début de la commission parlementaire, qui nous ont parlé de la question
du statut des villes bilingues. Ce
soir aussi, nous allons en recevoir. Le positionnement que vous prenez... et je
ne statuerai pas moi-même, là, sur le bien-fondé ou non des solutions
que vous mettez de l'avant, mais mets en évidence, à mon avis, la difficulté
que j'avais déjà notée pour un milieu municipal de prendre ces décisions-là, de
prendre ces décisions-là, qui sont relativement difficiles.
Par ailleurs, j'entends aussi, à travers ce
que vos propos, l'autre volet de cette question-là, qui est l'importance de l'opinion
des citoyens et de la démocratie municipale... Alors, je reçois ça dans cette
balance, ce que vous mettez de l'avant.
Votre
mémoire est très clair, vos propos aussi, et le caractère soigné du travail que
vous avez mis de l'avant font en sorte que je n'aurai pas d'autre question,
mais encore des remerciements pour votre contribution, madame et monsieur.
Merci.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant le député de Bonaventure. M. le
député.
•
(17 h 20) •
M.
Roy : Merci, Mme la Présidente.
Bonjour. C'est très intéressant, votre présentation. Dans votre mémoire, à la page 13, bon, on voit un certain libellé.
Vous dites, dans vos recommandations, qu'il faudrait «étendre les
prérogatives ci-dessus des pouvoirs
municipaux régionaux à la surveillance du fait français dans les lieux de
travail, d'enseignement et d'affichage
public, et de promouvoir une langue publique correcte». Est-ce que ça ne
viendrait pas dédoubler un peu le rôle de
l'Office québécois de la langue française? On ne crée pas une autre structure
qui vient... ou un autre ordre de pouvoir?
Une voix : Vas-y.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Pichette,
oui.
M. Pichette
(Pierre) : Le Québec est un grand
pays...
M. Roy : Effectivement.
M.
Pichette (Pierre) : ...et, on le sait... que la région de la Montérégie et l'expérience qu'on
a avec l'office, on ne voit pas comment l'office aura un jour les moyens d'appliquer la loi
dans tout le Québec. Ça nous semble impossible. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'il existe actuellement des structures
régionales, les municipalités régionales de comté, à la rigueur la conférence régionale des élus, qui est un niveau
un peu plus regroupant, mais on croit que les municipalités régionales
de comté, qui ont déjà une structure administrative, pourraient très bien
accueillir, avec un minimum de ressources additionnelles,
des mandats visant à, disons, aider l'office à remplir son mandat. On parle
déjà, dans la loi, d'aider les municipalités
à mettre en place des politiques linguistiques. C'est déjà ça. Donc, elles
pourraient, avec quelques ressources additionnelles,
qui ne seraient pas trop lourdes, vraiment seconder l'office. Ou l'office se
décentralise dans chaque région, ce qui
ne me semble pas possible, ou les régions donnent un appui à l'office. C'est un
peu comme ça qu'on voit le problème.
Mme Cloutier
(Luce) : Puis il y a un autre avantage
qu'il faudrait considérer, c'est que ça permettrait de rapprocher la situation
ou la question du français... de rapprocher ça du citoyen. L'Office québécois
de la langue française, c'est quelque chose
qui est loin, que la plupart des gens ne connaissent pas. Alors, quand, par
exemple, on entend des gens qui veulent formuler des plaintes, la
plupart des gens ignorent quel est le processus, ignorent par exemple qu'il y a
un office qui existe et puis qui est là pour protéger les droits linguistiques.
Alors, c'est une façon aussi de rapprocher l'office avec les pouvoirs
linguistiques des citoyens eux-mêmes.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député de Saint-Hyacinthe, vous avez la parole.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci. Bienvenue aux gens de la Montérégie. C'est ma
région, donc j'en suis fier. Maintenant, je sais que vous travaillez... vous faites du travail
bénévole au niveau de l'office, au niveau du Mouvement Québec français
Montérégie. C'est bien entendu que vous couvrez tout le territoire de la
Montérégie. C'est un vaste territoire. Vous
avez mentionné dans votre mémoire que vous avez relevé quand même un nombre de
plaintesimpressionnant, là, pour un
territoire comme, moi, je juge qui est quand même francophone à au-delà de
90 %, je pense. Et, quand vous
parlez de — je vais parler de mon coin — Montérégie-Est, vous mentionnez
356 plaintes. Montérégie-Est, ça regroupe
quand même plusieurs municipalités. C'est quand même intéressant. Et puis
comment vous avez fait? Comment vous faites
votre relevé? Vous faites ça bénévolement, j'imagine. Mais comment vous faites
ça? Vous vous promenez puis vous décelez des...
Mme Cloutier
(Luce) : On prend des photos.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Puis, dans ces plaintes-là, est-ce qu'il y a des
plaintes concernant l'utilisation du français dans les entreprises, utilisation du
français au niveau de différents... dans les commerces, des choses comme ça?
Mme Cloutier
(Luce) : On a...
M. Pelletier
(Saint-Hyacinthe) : Ou si c'est juste
l'affichage?
Mme
Cloutier (Luce) :
C'est juste l'affichage. On s'est concentrés uniquement sur l'affichage. Puis,
comme on disait
dans notre rapport, on a... Disons qu'il y a 20 % du territoire qui n'a
pas été couvert. Alors, c'est ça, on se promène et on regarde tout simplement les magasins. On prend
des photos. Et on a déposé une photo avec chaque plainte qui a été remplie par des gens qui ont travaillé sur le
territoire de la Montérégie. Ça nous a pris... Un de nos constats généraux,
c'est qu'on voit que plus un secteur se
développe, plus ça s'anglicise. Par exemple, vous prenez... on va prendre, par
exemple, la ville de Saint-Jean avec son
centre industriel ou un centre commercial, mais la plupart des magasins ou des
commerces qu'on trouve ont presque tous des
libellés en anglais. Qu'on se trouve à Granby, ou à Saint-Hyacinthe, ou à
Saint-Bruno, ce sont les mêmes
commerces, mais avec les appellations en anglais et… Déjà, la plupart des
plaintes qu'on a déposées, c'est qu'on
s'est basés sur le fait qu'il n'y avait pas de descriptif en français, et, vous
savez, quand on reçoit des commentaires de l'office… ça a pris beaucoup
de temps, et la plupart des commentaires qu'on nous renvoie ne sont pas signés
non plus. Alors, on ne sait pas exactement la façon dont les plaintes sont
traitées.
M. Pichette (Pierre) : Mais le... Évidemment, c'est des équipes, on a des équipes
sous-régionales qui sont membres du
Mouvement Montérégie français, et, tous ensemble, avec l'aide de d'autres
bénévoles de d'autres associations, on a pu couvrir le territoire.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Pichette.
M. Pichette (Pierre) : Et ce qui est étonnant de remarquer,
c'est que ce n'est pas vraiment le petit
commerçant qui pose problème, mais les
chaînes et les... pas les concessionnaires, les... Comment est-ce qu'on les
appelle? Les chaînes, les chaînes de magasins, quoi.
Une
voix : Les franchisés.
M. Pichette (Pierre) : Les franchisés. Ce sont surtout eux
qui causent problème. Le petit commerçant, lui,
semble se conformer à la loi 101 assez généralement.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Oui, M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Dans le même ordre d'idées, mais le
processus, il avait été entamé, il a déjà été entamé avec l'OQLF pour... au niveau de l'analyse
des plaintes et tout ça. Comment vous... Êtes-vous satisfaits, là, du
processus entamé puis de ce que le projet de loi n° 14 va apporter,
mettons, comme solution?
M.
Pichette (Pierre) : Je ne crois pas
que la loi n° 14 se penche spécifiquement sur l'affichage.
Une
voix : Non, c'est les...
M.
Pichette (Pierre) : Elle aurait dû,
elle aurait dû. C'est un dossier très important, et puis on a cru bon le mentionner parce que c'est une expérience qu'on a
de l'application de la loi 101 avec spécifiquement l'affichage et les
organismes bilingues, et on a voulu en faire part à la commission.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Ça va? Merci. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le
député de LaFontaine, c'est à vous la parole.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord,
merci beaucoup, Mme Cloutier et M. Pichette, d'être
ici présents aujourd'hui.
Par
rapport au processus des plaintes, je tiens absolument, en toute justice pour
le gouvernement, à vous rassurer : le
projet de loi n° 14 touche au processus des plaintes. Vous savez, avant,
le processus des plaintes faisait en sorte que l'office, avant d'envoyer un dossier à la direction des enquêtes
criminelles et pénales, il avait au moins la décence d'envoyer une mise
en demeure. Alors, rassurez-vous, sur cet aspect-là, ça a été touché par l'article
52 du projet de loi n° 14. On enlève la
mise en demeure puis on fait en sorte que, dès qu'il y a une infraction qui est
commise, il n'y a plus de nécessité d'envoyer
une mise en demeure au préalable disant : Bien, vous, commerçant, vous
devez corriger le tir, faire telle,
telle, telle modification, et on vous donne un délai de 30 jours ou 60 jours
pour ce faire; bien, cette mise en demeure là est mise carrément de côté
puis on va envoyer tout ce beau monde là directement via le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alors, l'article
52 du projet de loi n° 14 touche effectivement au processus des
plaintes, en toute honnêteté intellectuelle, avec le gouvernement. Je tenais à
le mentionner.
Vous avez parlé, un peu plus tôt, d'environ
1 000 plaintes, 964 manquements. J'aimerais savoir, de un — je prends pour acquis
évidemment que c'est sur votre territoire, le territoire, là, de la Montérégie — combien de personnes qui, par
quel processus et sur quel laps de temps… J'aimerais ça que vous m'étayez un
peu, là, si mes chiffres sont corrects, là, 1 000 plaintes, 964
manquements, ça s'est fait sur quelle période de temps, et comment, par qui?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député. Oui, Mme Cloutier?
•
(17 h 30) •
Mme Cloutier (Luce) : Ça s'est fait sur une période de deux
mois, en juillet et août derniers, et puis ça s'est fait avec une douzaine de bénévoles et de personnes qui
sont membres du Mouvement Montérégie français. Alors, nous nous sommes partagé
le territoire et puis on a sillonné le territoire d'une façon aussi simple que
d'entrer dans les centres commerciaux, de
prendre des photos, de bien relever tout, là, toutes les coordonnées de chacun
des commerces, et ainsi de suite, sur
presque tout le territoire de la Montérégie. Ça s'est fait à partir... on a
couvert... on a presque tout couvert. Il y a des endroits où on n'a pas
eu le temps de finir parce que, bon, c'était la période, mais presque tout le
territoire de la Montérégie a été couvert.
Puis,
comme on vous disait tantôt, comme le territoire de la Montérégie est quand
même immense, il y a des sous-comités qui sont... qui oeuvrent dans certaines
régions, comme, par exemple, il y a le Comité Pierre-de-Saurel français, un comité à Brossard, alors ça a été les
membres de ces comités-là aussi qui se sont chargés de faire le travail.
Et après on a mis ça ensemble et on a déposé les plaintes avec une... en
faisant une conférence de presse officielle en septembre à Montréal.
M. Tanguay : Parfait. Merci beaucoup. On a eu l'occasion
d'entendre le ministre responsable de la
Métropole et également ministre responsable de la Relation avec la communauté
anglophone. Deux éléments à cet effet-là. Il s'est fait entendre, entre autres, là, le 19 janvier dernier, dans le cadre de
son blogue, et je le cite, on peut le lire sur son site Internet, le ministre de la Métropole écrivait ce
qui suit : «Les Anglo-Montréalais sont massivement devenus
bilingues depuis un peu plus d'une
génération. Ils voient, autour d'eux, notamment à Montréal, une majorité de
jeunes francophones bilingues.» Fin de la citation.
Deuxième élément où on a eu l'occasion d'entendre
la vision du ministre responsable de la métropole etresponsable de la
relation avec la communauté anglophone, sur les ondes d'une radio anglophone,
vous vous rappelez : «STM, are you listening?» Autrement dit, pour
lui, il est important, pour la Société de transport de Montréal, de pouvoir
effectivement offrir un service non seulement en français, mais également en
anglais.
Alors,
par rapport à votre action, par rapport à ce que vous venez tout juste d'affirmer,
comment qualifieriez-vous ces prises de position très claires du ministre de la
métropole? Est-ce qu'il s'agit d'une mauvaise analyse ou d'un double discours?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Oui, est-ce que... Mme Cloutier.
Mme Cloutier (Luce) : Moi, j'aurais tendance à suggérer de
référer à l'étude de Gérald Paquin sur la vitalité de la langue, qui a fait une étude sur tout le Québec, où
il monte justement que... ou l'étude qui a été faite au bureau de Pierre Curzi, qui montre que le Grand Montréal s'anglicise,
et c'est la même chose qui est prouvée à travers l'étude de Gérald Paquin, qui l'a fait pour des régions
précises, même pour la Montérégie, où on nous montrait que ça s'anglicisait,
aussi, tout ce qui est autour de Montréal, et même que peut-être Laval est
encore dans une situation d'anglicisation plus avancée.
Alors,
moi, je pense qu'il y a une réalité qui est différente, et que, quand on
regarde les études qui sont... qui fouillent,
qui analysent sérieusement, on se rend compte qu'il y a une situation qui est
différente que celle qu'on présente, là, avec ce discours.
Alors,
il y a les études qui sont faites aussi par l'IRFA, l'Institut de recherche sur
la situation du français en Amérique, qui nous montre justement qu'au niveau de
l'emploi le nombre d'emplois qui sont occupés par des non-anglophones... en anglais, qui sont occupés par
des francophones ou des allophones, qui passent leurs journées à
travailler dans une autre langue que leur langue maternelle, dans un milieu
francophone, ça montre aussi qu'il y a une situation qui est différente que celle dont on nous dit que les anglophones se
sont francisés. Puis je pense que, quand on regarde d'autres personnes
qui ont présenté ici, à la commission, on voit aussi que c'est la situation qui
existe. Ce n'est pas les anglophones qui se francisent, on dirait que c'est
plutôt le contraire qui se passe : c'est les francophones qui deviennent
davantage anglicisés par le milieu du travail, et partout, là, les médias,
partout où est-ce qu'on voit, tout ce qui nous entoure quotidiennement.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci.
M. Tanguay : Si je vous comprends bien, par votre
intervention aujourd'hui, vous inviteriez le ministre à mieux se documenter ou,
à tout le moins, à se référer, comme vous le dites vous-même, là, à ces études,
afin de ne pas, selon votre vision,
étayer ou mettre de l'avant de telles positions. C'est ça que je... Est-ce qu'on
vous comprend bien là-dessus?
Mme
Cloutier (Luce) : Oui. Est-ce que tu
as autre chose à ajouter?
M.
Pichette (Pierre) : Non.
Mme
Cloutier (Luce) : Moi, j'ajouterais
que...
M.
Pichette (Pierre) : ...
Mme
Cloutier (Luce) : Vas-y.
M.
Pichette (Pierre) : Vas-y. Non, je n'ai
pas rien à ajouter.
Mme
Cloutier (Luce) : Non.
M.
Pichette (Pierre) : Non. La réalité
qu'on vit, en tant que mouvement pour la promotion et la défense du français,
tend à prouver le contraire dans le quotidien et dans les études auxquelles on
peut faire référence.
M. Tanguay : Et, dernière question peut-être sur
le sujet : Est-ce que vous notez, vous, ceci dit, parce que tout le monde est de bonne foi, est-ce que vous notez qu'il
y a... C'est un débat, évidemment, qui est complexe, c'est un équilibre qui est délicat. Il faut faire
attention, quand on dépose surtout un projet de loi tel que le projet de
loi n° 14, il faut d'abord faire
les études avant de le déposer, et ne pas le déposer le 5 décembre, et sortir
analyses et études par la suite, qui ont été pondues deux, trois mois
par la suite.
Ceci dit,
reconnaissez-vous qu'il s'agit d'un dossier, donc, qui est complexe et qui nécessite
des analyses fines — j'utiliserais ce mot-là,
des analyses fines — des analyses
également qui soient basées sur des statistiques qui soient vérifiables, constantes et sur lesquelles
on devrait s'entendre? Parce qu'il y a beaucoup d'éléments qui sont
mesurés et, des fois, à tort et à raison, on essaie de faire dire des choses
aux chiffres.
Alors,
reconnaissez-vous qu'il y a importance d'avoir... de préciser peut-être notre
banque d'analyse statistique dans tel dossier? J'aimerais vous entendre là-dessus
parce qu'on a déjà entendu des groupes qui nous ont dit : Effectivement,
pour avoir un portrait, là, fiable, il faudrait s'entendre sur des concepts qui
sont majeurs, là, qui sont importants.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Mme Cloutier.
Mme
Cloutier (Luce) :
Moi, je suis pleinement d'accord avec ça, mais j'ajouterais aussi que je ne
mettrais pas seulement
des chiffres là-dessus. Je ne mettrais pas seulement de l'analyse quantitative,
j'ajouterais aussi de l'analyse qualitative
à l'intérieur de ça et puis qu'il faudrait toucher à peu près à tous les
secteurs pour avoir une réalité, un portrait actuel, là, de la
situation. Et puis, comme vous dites, bien, qu'on s'entende clairement sur les
concepts et sur la façon de les traiter et puis la façon d'interpréter aussi,
par la suite.
Et il y a ça qui doit
être fait, mais il y a aussi… c'est très clair, c'est qu'on vit dans une
situation où il y a une question de prendre
des décisions et d'être capables de les adapter. Et on n'est pas le seul pays
au monde à avoir une loi linguistique;
il y a 190 pays qui ont des lois linguistiques pour protéger leurs acquis. Et,
quand on en parle, ici, on en parle évidemment d'une question de langue
au niveau institutionnel, de la langue de la cohésion sociale, de la cohésion
publique. Il n'en est pas du tout question, de parler de situations
individuelles.
Alors,
oui, je pense que ça doit être très documenté et que, de toute façon, si on
regardait des tas de documents qui sont déjà faits, on a déjà la preuve à l'appui que
la situation est quand même défavorable au français actuellement et que
ça demande finalement une prise de décision politique et claire et précise.
M.
Tanguay : Et,
quand vous parlez de... quand vous faites la distinction institutionnel,
collectif versus individuel, qui relève, si je vous lis bien, puis corrigez-moi
si j'ai tort, de choix parfois qui sont personnels — et, là-dessus, il y a une
statistique qui revient régulièrement — j'aimerais vous
entendre, vous, quant à la valeur que vous lui accordez, la langue parlée à la
maison.
La
Charte de la langue française, adoptée en 1977, parle de la langue de l'enseignement,
langue du commerce, langue du travail, évidemment
langue de l'administration publique. Langue parlée à la maison, est-ce que vous
le mettriez donc du côté de la liberté individuelle minimale, qui fait en sorte
que l'État n'a pas besoin d'aller dans les résidences
des gens pour s'assurer qu'ils vont parler... ils ne parleront pas d'autre
langue que le français? Quelle valeur, vous, à cette statistique-là
accordez-vous, que la langue parlée à la maison?
Mme
Cloutier (Luce) :
Mais c'est sûr que lorsque les gens apprennent une autre langue et qu'ils l'ont intégrée, qu'ils vont
la parler à la maison, c'est toujours une intégration qui va se faire d'une
manière plus approfondie. C'est clair.
Mais
moi, je vous réponds en mon nom personnel, là, je me dis : Bon, la langue
que les gens parlent à la maison, je pense que
ça devient, jusqu'à un certain point, une affaire individuelle. C'est sûr que,
si on est habitués de parler chinois, c'est
beaucoup plus simple de parler entre nous en chinois à la maison que de
commencer à parler une autre langue. Mais,
bien entendu, si les gens l'étendent jusqu'à la maison, c'est une façon de l'approfondir
d'une manière différente. Mais je pense que je le mettrais, ça, dans les
questions individuelles.
M. Tanguay : Merci beaucoup. Il n'y a pas d'autre question, Mme la
Présidente. Merci.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci. Nous
allons maintenant du côté du deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée de
Montarville, vous avez la parole.
• (17 h 40) •
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup. Merci
madame, merci monsieur pour votre mémoire, le rapport. Je suis heureuse de lire que vous mentionnez — et,
ça, je pense que c'est important de le dire — pour nos commerçants et nos entrepreneurs en Montérégie, il n'y a
pas que de grandes chaînes, il y a aussi les petits commerces, qui semblent respecter davantage la loi. Alors, ça, c'est
intéressant que vous le souligniez également. On sait que les grandes
chaînes défendent actuellement leurs marques
de commerce en cour. Donc, je n'embarquerai pas là-dedans. Mais j'apprécie
le fait que vous souligniez ça, qu'il y a des efforts qui sont faits par nos
commerçants locaux.
Outre
cela, vous le mentionnez ici : «L'office — et
on parle de l'Office de la langue française — semble bénéficier d'une trop grande
marge de manoeuvre dans l'interprétation qu'elle fait de certains articles de
la charte. Cela demanderait à être mieux encadré.» Alors, je vous pose
la question : Encadré par qui? Si vous considérez que l'office a une trop
grande marge de manoeuvre, qui devrait prendre ça en main?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Pichette.
M. Pichette
(Pierre) : Il y a beaucoup d'articles
qui font référence à l'affichage. Il faudrait qu'ils soient ordonnés par type
des priorités. C'est-à-dire que, quand deux articles entrent en contradiction
un avec l'autre, lequel a priorité? Nous
croyons, nous, que les articles de la charte qui ont rapport à la langue, la
priorité devrait être accordée à la priorité du français et au
descriptif en français. Nous croyons que les autres articles devraient être
subordonnés à la priorité du français et au
descriptif en français dans l'affichage, subordonnés, par exemple, à la marque
de commerce. Parce que, s'il n'y a pas de priorité, de priorisation qui
sont faites de toutes ces lois, bien là, l'office, ou l'individu, ou le fonctionnaire qui
interprète la plainte, en toute bonne foi, y va de la directive
administrative du jour, il y va de la tendance politique du gouvernement
au pouvoir. Alors que, si la loi était plus précise et qu'elle disait :
Une affiche doit comprendre un descriptif en
français et cette affiche doit avoir... doit prioriser le français, et c'est ça
qui prime sur tous les autres articles de la loi, l'interprétation
laissée, la marge de manoeuvre laissée aux fonctionnaires de l'office serait
réduite. Et on aurait l'heure juste à ce moment-là.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. Je vous
comprends. Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci beaucoup,
Mme Cloutier et M. Pichette.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 42)
(Reprise à 19 h 32)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bonsoir. Nous reprenons nos
travaux, et je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
Nous
allons poursuivre sans plus tarder les auditions publiques sur le projet de loi
n° 14, Loi modifiant la Charte de la
langue française, la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres
dispositions législatives.
Nous
recevons le groupe d'opposition de la ville de Longueuil. Bonsoir. Je vais vous
demander de vous présenter ainsi que de présenter également la personne qui
vous accompagne. Vous allez disposer d'un temps de 10 minutes, et, par
la suite, il y aura des échanges avec les membres de la commission. Je vous
cède la parole.
Opposition de la ville de Longueuil
M.
Grégoire (Gilles) : Bonsoir, madame. Bonsoir, les membres de la commission. Mon nom est
Gilles Grégoire, chef de l'opposition à la ville de Longueuil, et je suis accompagné de
M. Robert Myles, qui est conseiller municipal de l'arrondissement de
Greenfield Park dans la ville de Longueuil.
Écoutez,
d'entrée de jeu, Mme la Présidente, je veux juste mentionner que — puis
il faut bien comprendre — je ne suis pas le
représentant de la ville de Longueuil, je suis le porte-parole de l'opposition
officielle à la ville de Longueuil. Donc, c'est simplement pour
éclaircir la séance que nous allons avoir ce soir, la présentation.
Je
viens parler d'une communauté que je connais très bien. J'ai été à l'époque
président de l'arrondissement... lors des fusions municipales, président de l'arrondissement
Saint-Lambert-LeMoyne, qui est la voisine de Greenfield Park. Donc, des contacts au niveau politique, c'était au
quotidien. J'ai également été propriétaire d'un commerce dans la ville voisine de Greenfield Park. Une grosse partie de
ma clientèle venait de Greenfield Park. J'ai fait du sport. Je jouais au
hockey avec Greenfield Park aussi. Donc, je
connais assez bien, même, je dirais, très bien la communauté de Greenfield Park.
Mon
collègue et moi venons vous parler d'une situation qui est, je considère, très
locale. Je ne veux pas faire de débat au niveau provincial sur le projet de loi,
mais, ce qu'on veut, nous, c'est de parler strictement de l'arrondissement
de Greenfield Park et de la situation que vivent les gens de Greenfield Park.
Nous sommes ici en tant que personnes très proches de cette communauté. Nous
souhaitons défendre l'intérêt de cette communauté.
La
ville de Longueuil a adopté à l'unanimité une résolution demandant au
gouvernement de renoncer à modifier la charte de Longueuil afin d'enlever le droit à l'arrondissement
de Greenfield Park de décider eux-mêmes de conserver ou non leur statut bilingue. La ville de Longueuil
appuie le mémoire de l'UMQ, qui demande également au gouvernement de
renoncer à l'article 12 du projet de loi n° 14. Toutefois, M. Myles et moi
croyons qu'il est nécessaire de venir vous parler spécifiquement de l'arrondissement
de Greenfield Park.
Pour comprendre l'importance
de la présence de la population anglophone à Greenfield Park, il faut bien
comprendre l'historique de leur arrivée sur ce territoire. La présence de la
population anglophone de Greenfield Park remonte
au début du XXe siècle. À partir des années 1870, les immigrants ont quitté l'Angleterre
pour fuir les conditions de vie
difficiles. Ces immigrants se sont installés à Montréal dans l'espoir de fonder
une famille dans de meilleures conditions. Ils se sont principalement
installés dans des quartiers au sud-ouest de Montréal, soit à proximité d'autres
immigrants anglais et d'usines leur
permettant de travailler. Ces immigrants se sont fait à l'esprit que les
meilleures conditions de vie recherchées ne se trouvaient pas à
Montréal. Ils ont alors cherché un nouvel endroit pour s'installer.
Leur arrivée à
Greenfield Park, Mme la Présidente, remonte à 1907. Le développement des
banlieues, la construction du pont Victoria
et le développement du transport en commun permirent à ces immigrants anglais
de s'établir de façon permanente à
Greenfield Park. En 1910, un service de tramway permettait aux ouvriers de se
rendre au travail à Montréal
rapidement, tout en leur permettant d'avoir un endroit où rester qui était
propre, calme et paisible. Des efforts effectués
par des développeurs immobiliers afin d'attirer une clientèle ouvrière dans ce
secteur portèrent fruit,contrairement,
si vous voulez, avec sa voisine, la ville de Saint-Lambert, qui est un milieu
aussi qui est un milieu anglophone, mais un peu plus bourgeois. Donc,
Greenfield Park, c'était un milieu avec une clientèle ouvrière. C'est dans ce
contexte particulier que cette forte présence anglophone… que Greenfield Park
fut fondée en 1911.
La
charte de la ville fut signée par l'Assemblée législative du Québec le 11 mars
1911, après plusieurs efforts politiques des résidents du secteur. Il existe
donc un contexte historique bien particulier du fait anglophone à Greenfield
Park, qui existe depuis plus d'un siècle. Cette présence et l'héritage
anglophone de Greenfield Park sont encore très présents.
Ce fait anglophone se reflète aussi dans les différentes organisations et
institutions qui existent encore aujourd'hui;
que ce soient les paroisses, les loisirs, la légion canadienne, le milieu
anglophone est très, très présent dans
ces organismes-là. Juste pour vous donner un exemple, au niveau de la toponymie,
ce sont les noms des premiers colonisateurs
qu'on rencontre en grosse majorité, le nom des rues à Greenfield Park. Je vous
donne quelques exemples : Springfield, Fairfield, Miller, Parker,
Millington, Davis, Churchill et plusieurs autres.
Vous savez, sur la Rive-Sud, on a vécu une
période excessivement difficile lors des fusions et défusions. Nous avons abordé le
sujet dans notre mémoire, mais je tiens, si vous me le permettez, à le
développer davantage. Les périodes... l'épisode des fusions-défusions a
laissé sur la Rive-Sud, principalement dans Longueuil, de profondes cicatrices
sur plusieurs municipalités de Longueuil.
Et, je viens de le dire, Longueuil ne fait pas exception à cette problématique-là.
Des communautés avec des parcours complètement différents apprennent tous les
jours à vivre ensemble et à s'entendre.
L'arrondissement de Greenfield Park est
également une exception au Québec : seulement trois arrondissements au
Québec ont un statut bilingue. Il faut rappeler que le statut bilingue de
Greenfield Park est une promesse faite par le gouvernement du Québec lors de la période de ces fusions. Cette promesse
a été également réitérée lors de la période des défusions et insérée
dans la Charte de la Ville de Longueuil. Comme je l'ai mentionné, cette
promesse a été faite par le Parti québécois à l'époque des fusions et, lors des
défusions, par le Parti libéral.
•
(19 h 40) •
Il faut bien comprendre qu'il n'a jamais eu d'échéancier
ni de pourcentage minimal pour établir le statut
bilingue de Greenfield Park. Rappelons que
Greenfield Park n'a pas tenu de référendum pour se défusionner de Longueuil.
Nous sommes clairement convaincus qu'une de ces raisons est que les citoyens
ont considéré que leur statut bilingue allait protéger la langue anglaise, qui
occupe une place importante dans cette communauté depuis le début du XXe
siècle. Il faut mentionner également que, lors de cette promesse, la population
anglophone de Greenfield Park atteignait le pourcentage
de 38 %, loin du 50 % prévu par la loi. Nous croyons que les
promesses faites doivent résister aux circonstances changeantes.
Dans
ce cas, nous comprenons mal comment le gouvernement pourrait intervenir et
enlever le statut bilingue de Greenfield
Park sous prétexte qu'il n'atteint pas le 50 % requis puisqu'en 2011 il ne
l'atteignait pas non plus... 2001, pardon, il ne l'atteignait pas non
plus.
L'équilibre de la nouvelle ville de
Longueuil, suite aux fusions, défusions, était encore fragile. Il faut laisser du temps aux gens de se
faire... de se créer de nouvelles appartenances. Pour ce faire, il faut
toutefois leur laisser les acquis qui leur ont été promis.
Également, il faut bien comprendre que l'arrondissement
de Greenfield Park n'a pas d'autre statut juridique que celui inscrit dans
la Charte de la Ville de Longueuil. Contrairement à d'autres municipalités au
Québec qui envoient leurs documents dans les deux langues, même si elles
n'ont pas de statut bilingue, Greenfield Park, à elle seule, ne pourrait prendre cette décision, si son statut bilingue lui
était enlevé. Et je vous donne... C'est très personnel, ce que je vous
dis là, mais j'ai la crainte qu'avec l'abolition
du statut bilingue en général une administration de la ville de Longueuil en
vienne à abolir les trois arrondissements. Donc,
moi, je pense sincèrement que les trois arrondissements ont encore leur
place aujourd'hui, à Longueuil, et, si le
statut bilingue de Greenfield Park était enlevé, je pense qu'il n'y aurait
pas... il n'y a plus rien qui
empêcherait une future administration d'abolir les arrondissements dans la
ville de Longueuil, et ce qui ferait en sorte que Greenfield Park
perdrait son statut bilingue et perdrait son statut d'arrondissement en même
temps.
Il
faut dire aussi que la carte électorale a été modifiée pour les prochaines
élections. De trois conseillers sur 26
conseillers, ce qui représente 12 %, l'arrondissement de Greenfield Park
va passer à un conseiller sur 15, soit 7 %. Dès que la
représentation de Greenfield Park sera diminuée au conseil de ville, il est
important que le statut bilingue soit à l'abri de la politique, autant du
niveau provincial que municipal.
Merci.
Maintenant, je vais laisser la parole à mon confrère, Bob Myles.
M. Myles (Robert) : Bonjour. Mon nom, c'est Robert Myles.
Je demeure dans l'arrondissement de Greenfield
Park, dans le district 17, dans la grande ville de Longueuil. Je vis à
Greenfield Park depuis 49 ans et j'ai grandi là, à Greenfield Park.
Le bilinguisme se vit comment, à Greenfield
Park? Bien, le bilinguisme se vit très bien, à Greenfield Park. Si on regarde nos jeunes, comme mes jeunes, mes amis, mes
amis avec leurs jeunes, tout le kit, ils ont été élevés à parler en anglais,
ils ont été à l'école, ils ont parlé très bien maintenant. Les jeunes sont
bilingues.
Quand on se parle aujourd'hui à Greenfield
Park, les citoyens, les jeunes, même s'ils parlent leur anglais cassé ou français cassé, tout le monde, tous les citoyens,
ils se comprennent entre eux.
Pourquoi les gens viennent de Greenfield Park
pour déménager dans notre arrondissement? Notre
arrondissement est très populaire pour cette
simple raison : parce qu'on a un statut bilingue. Il y a des familles
francophones qui viennent à Greenfield Park pour demeurer à Greenfield
Park, que leurs jeunes peuvent parler en anglais. Ils vont commencer à parler avec leurs amis, voisins, dans les parcs,
des affaires de même. Aussi, en même temps, quand ils vont aller à l'école,
bien, il y a des écoles à Greenfield Park qui ont deux commissions scolaires
dans une école. Il y a de l'anglais et le français qui est instruit dans ces
écoles-là. C'est très important pour nous.
L'arrondissement de Greenfield Park a adopté
à l'unanimité une résolution demandant au gouvernement de ne pas leur retirer le
droit de décider eux-mêmes à leur avenir culturel. Le fait de pouvoir être
servi en français et en anglais dans les bâtiments municipaux de Greenfield Park rencontre fort les deux groupes
linguistiques. Les anglophones considèrent que Greenfield Park reste un
endroit où est-ce qu'ils peuvent construire et exprimer dans leur langue
maternelle, et les francophones considèrent que le fait français est également
respecté.
Tel
que mentionné dans le mémoire, plusieurs institutions de Greenfield Park
viennent prouver que cette expérience de
bilinguisme fonctionne pour cette communauté. Parmi les écoles, les loisirs,
les sports, hockey, football, soccer, la pétanque, tout fonctionne bien,
chez nous, à Greenfield Park.
Le
changement au statut bilingue de Greenfield Park pourrait troubler la paix
sociale et avoir un impact direct sur les relations entre les anglophones et les
francophones, qui collaborent très bien ensemble, à Greenfield Park.
Décourager le sentiment des exclusions des
Anglais, des anglophones, excusez-moi, les francophones et les anglophones, ils
ont... ils vivent très bien ensemble,
ici, à Greenfield Park. Ils comprennent c'est quoi, l'histoire, l'héritage de
Greenfield Park. On vient de fêter
100 ans dans l'arrondissement de Greenfield Park. Tout le monde est fier. Quand
on a fêté le 100e anniversaire de Greenfield Park, ça ne fêtait pas
juste en anglais, ça fêtait en français aussi.
Le
gouvernement ne doit également pas ignorer le 34 % de citoyens qui parlent
anglais à la maison et la masse importante, même si elle n'obtient pas 50 %
prévu actuellement par la loi. Pourquoi il faut marcher avec des
pourcentages pour déterminer si on va maintenir le statut bilingue? «Like we say in english, if it's not broken,
leave it alone.» Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Je vous ai donné un peu plus de temps pour faire
votre exposé, avec l'accord de la ministre. Ce
temps a été amputé du côté du gouvernement.
Nous allons procéder
maintenant aux échanges et, Mme la ministre responsable de la Charte de la langue
française, vous avez la parole.
Mme
De Courcy : Bien,
merci beaucoup d'abord — bonsoir, messieurs — de vous être inscrits à cettecommission
parlementaire, et j'ai bien compris que votre positionnement, ce soir, touche
votre arrondissement, vous l'avez dit en début de la présentation. Vous
nous fournissez, à travers votre mémoire, des données historiques intéressantes
sur Greenfield Park.
Simplement
vous mentionner par ailleurs, et ceci ne dispose pas de la suite des choses,
mais vous rappeler que l'article 12 du projet
de loi n° 14 prévoit explicitement que la décision quant au maintien ou au
retrait du statut de ville ou d'arrondissement
bilingue prendra en compte la présence historique d'une communauté d'expression
anglaise. Il y a des questions de patrimoine aussi qui... Et manifestement,
dans le cas de Greenfield Park, vous l'exprimez avec beaucoup d'éloquence, il y
a des questions patrimoniales importantes. Quand le nom des rues, puisque je
suis aussi responsable de la Commission de toponymie,
quand le nom des rues relate notre histoire à ce point-là, je peux
comprendre toute l'importance que vous accordez au patrimoine.
Je
trouve aussi courageux le fait que l'opposition à l'hôtel de ville de Longueuil
décide de venir faire une présentation d'un
point de vue. Et je vous dirais que nous pourrions dire : Oui, mais vous
ne représentez pas, que l'ensemble de l'équipe
majoritaire… mais il y a eu des résolutions, il y a eu tout ce qu'il faut pour
que vous soyez tout à fait légitimement reçus ici.
Je
vais vous poser une seule question, parce que votre mémoire est très explicite.
Je veux vous la poser parce que c'est une idée
qui circule depuis l'étude des crédits concernant le ministère que je
représente. On a beaucoup parlé de l'importance de la démocratie municipale. J'ai
posé la même question, avec tout le respect que je dois d'ailleurs aux élus municipaux… Pour avoir moi-même été une élue
scolaire, avec tout le caractère pénible d'une démocratie difficile à
mettre en place, vous comprendrez que, pour ces démocraties de proximité, la
démocratie scolaire et la démocratie municipale, j'ai beaucoup de respect. Je
considère que les gens font preuve de beaucoup de courage.
Maintenant, les
discussions entourant le caractère bilingue de votre arrondissement, à votre
connaissance, ont-elles fait l'objet de
discussions avec l'ensemble des citoyens dans le cadre d'une consultation
publique quelconque? Et, à cet
égard-là, est-ce que vous croyez que les citoyens de Greenfield Park
appuieraient les élus du conseil de ville à travers, par exemple, une
consultation qui pourrait leur être soumise à ce sujet pour étayer, par
exemple, une décision gouvernementale? Comment vous anticipez le résultat d'une
consultation comme celle-là? Et, si elle a déjà été faite, dites-moi-le. Sinon,
si elle avait lieu, comment vous l'anticipez?
• (19 h 50) •
M.
Grégoire (Gilles) : Écoutez, en tant que représentant de l'opposition, vous savez que je n'ai
pas le pouvoir de faire des consultations publiques «at large», comme on dit, à Greenfield
Park. Mais il reste que, dans le processus politique de l'arrondissement de Greenfield Park et dans le
processus politique lors des assemblées, quand on est sur le terrain et qu'on rencontre les gens, quand les gens, que ce
soit du milieu francophone ou anglophone, nous appuient... Écoutez, on
va à une cérémonie religieuse, puis, dans la
salle, il y a 25, 30 personnes. Puis, sur le 25, 30, il y en a 15 ou 20 qui
viennent nous voir puis qui nous
disent : Merci beaucoup de nous appuyer, et de nous protéger, et de faire
en sorte que le statut bilingue de Greenfield Park soit protégé. Moi, si
vous me demandez mon opinion, puis je pense que ça rejoint l'opinion de Robert
Myles, s'il y avait une consultation publique ou un référendum, appelez-le comme
bon vous semble, je pense que la population de Greenfield Park voterait en
grosse majorité pour garder son statut bilingue.
Mme De
Courcy : C'est comme ça que vous
anticipez les choses?
M.
Grégoire (Gilles) : Bien, écoutez, moi, c'est plus en étant sur le terrain presque au
quotidien. Ce n'est pas... Bon, on peut appeler ça de l'anticipation. Mais
moi, je pense que c'est une réalité, que les gens sont fiers de ce
statut-là et puis qu'ils veulent le
conserver. Que ce soit du milieu francophone ou du milieu anglophone, sur les
deux côtés, ces gens-là...
Écoutez, il y a eu un
changement démographique les dernières années. Il y a beaucoup de gens des
autres villes environnantes, particulièrement de Saint-Lambert, qui ont fait l'acquisition
de maisons à Greenfield Park. Et, vous savez, à Saint-Lambert, il y a un statut bilingue. Ce n'est pas un
statut légal, mais les gens vivent et ils se font servir dans la langue
anglaise ou française quand ils vont aux assemblées publiques ou ils ont besoin
d'avoir des services de la municipalité.
Greenfield
Park ne peut pas décréter ça. Donc, les gens qui viennent chez nous, qui
partent de Saint-Lambert en grosse partie, qui
viennent s'établir à Greenfield Park, sont fiers, sont très fiers de dire à
leurs enfants : Écoutez, vous allez aller jouer au football, vous allez
aller jouer au soccer. C'est un mélange d'anglophones et de francophones. Je mentionnais ça tout à l'heure à un
journaliste : On a eu une petite fête, une espèce de petit carnaval à un
parc, René-Veillet, à Greenfield Park. Il y avait une cinquantaine d'enfants
avec des animateurs. Puis les animateurs parlaient français puis ils sautaient à l'anglais et ils revenaient
au français. Puis les jeunes, ils bougeaient, ils faisaient exactement ce
que l'animateur leur demandait dans les deux
langues, puis tout le groupe au complet. Donc, j'ai été jaser avec une
couple de jeunes après. Puis c'étaient des
anglophones. Il y avait cinq, six anglophones à qui j'ai parlé, des jeunes qui
s'exprimaient dans un français des fois
mieux que les jeunes francophones. Donc, c'est juste pour vous dire, madame,
comment c'est important pour le
milieu. Puis les gens qui acceptent de vivre à Greenfield Park, ils acceptent
de vivre avec le statut bilingue.
Mme
De Courcy : Vous
comprenez que j'entendrai votre remarque pour illustrer l'importance du bilinguisme individuel de la population. Je ne crois pas
que le statut bilingue de la ville ait de l'influence sur le fait que des gens
puissent se comprendre en anglais, en français. En Montréalaise que je suis, je
vois des gens de toutes les langues communiquer ensemble de toutes les façons
possibles et de façon très, très aisée.
Je
vous remercie beaucoup de votre contribution. Je n'aurai pas d'autre question.
Puis j'accorderai une attention toute
particulière, je vous dirais, à l'effort que vous avez fait de venir nous
parler de la question du statut bilingue de votre arrondissement, en tenant
compte de l'histoire bien entendu.
Une voix : ...
Mme De Courcy : Je vous en prie.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. Nous allons maintenant du côté de l'opposition. M. le député de
LaFontaine, vous avez la parole.
M.
Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais également remercier M. Grégoire
et M. Myles également pour le temps que vous
avez pris de mettre par écrit votre vision, votre position, qui est très
claire, très étayée. Vous faites appel à l'historique
de Greenfield Park et également à ce que j'appellerais un bien-vivre
ensemble de la communauté francophone et anglophone qui font en sorte que, oui,
très bien, ça se fait en 2013 au Québec, des communautés, des gens qui n'ont
pas la même langue maternelle ou langue première d'expression, mais qui vivent très bien ensemble. Et, comme vous le disiez si
bien, si ce n'est pas un problème, pourquoi inventer une solution qui,
en bout de piste, n'est pas souhaitable ni souhaitée?
Et, premier point que
j'aimerais... Détrompez-moi si j'ai tort : Est-ce qu'une résolution a été
passée par rapport à Greenfield Park? J'aimerais que vous me précisiez :
Est-ce qu'elle a été votée, pardon, par...
M. Grégoire
(Gilles) : Au départ, nous avons, au
conseil municipal de la ville de Longueuil, fait un avis de proposition. L'avis de proposition, c'est assez
complexe, là, l'avis de proposition a été débattu et le parti au pouvoir
est arrivé avec une autre proposition qui
est similaire à celle de l'Union des municipalités du Québec. Nous, notre
résolution à nous, elle était beaucoup plus
locale. On n'a pas voulu prendre la place de l'UMQ. On a simplement voulu
démontrer à la population qu'on avait une
vision qui était locale. Donc, nous, notre débat, ce n'était pas les
arrondissements à l'extérieur de Greenfield Park, ou les municipalités,
ou la loi au complet. C'est que notre but, c'était local. Donc, il y a eu la
résolution qui a été adoptée à l'unanimité à la ville de Longueuil, et une
résolution similaire a été adoptée également à l'unanimité par le conseil d'arrondissement.
M.
Tanguay : Alors,
merci beaucoup, M. Grégoire. En tenant compte, évidemment… les précisions que vous avez apportées, je
pense qu'il y a là une voix très claire, très forte, qui transcende également,
voyons-le, là, les partis politiques.
J'aimerais
vous entendre justement sur le vivre-ensemble. Comment vous, dans Greenfield
Park, vous vivez ça, ce statut-là? Est-ce que le statut qu'on veut vous
enlever est cause de chicane, est cause de plaintes, est cause de...
Comment vous vivez ça, vous? Parce qu'on essaie de régler un problème, là. Y
a-tu un problème?
M.
Myles (Robert) :
Pour le moment, il n'y a aucun problème. Mais j'ai un feeling que, si on va
perdre notre statut bilingue, il pourrait y avoir des problèmes. Puis, selon moi… Regarde, veux
veux pas, il y a beaucoup de respect parmi tout le monde, O.K.? Quand je m'en vais... Des fois, je m'en vais voir... Tu
sais, je participe à quasiment toutes les affaires dans l'arrondissement,
puis, quand je m'en vais voir les aînés jouer à la pétanque, là, je commence à
parler avec eux, puis j'ai tenté de parler
avec un monsieur, puis il parle très bien en français. Bien là, à un moment
donné, peut-être qu'ils savent à cause
de mon petit voix anglophone, mon petit accent anglophone, ils répondent en anglais.
Mais là je continue à parler en français,
mais là ils disent : Ah, tu peux parler en anglais, Mr Myles, vas-y! J'ai
dit : Oui, pas de problème. Anyway, merci quand même, mais... Tu
sais, on est habitués; on a été élevés avec ça.
Moi, mes parents... mon père, c'était un
francophone, ma mère, c'est une anglophone, tu sais. Mais, moi puis mon frère, c'est la vie, on parlait les deux langues. Mes
enfants — j'ai deux enfants — eux autres, ils sont bilingues. Tout le monde s'entend très bien ensemble. Au football... les
Packers, à l'époque, à Greenfield Park, c'était un organisme anglophone. Mais
tu vas voir l'équipe aujourd'hui, c'est moitié-moitié, 50-50 en français puis
en anglais. Tu sais, c'est des affaires de même.
Regarde
qu'est-ce qui se passe, pourquoi, Greenfield Park, il y a moins d'anglophones
maintenant, dans la masse, à Greenfield
Park? C'est parce qu'il y a beaucoup des francophones qui ont venu déménager à
Greenfield Park pour être dans un
secteur où ce que les jeunes peuvent parler les deux langues, peuvent aller à l'école
facilement. Ils vont avoir déjà une base, à l'école. Mais ce pourquoi
maintenant, à Greenfield Park, le pourcentage anglophone a baissé, parce qu'il y a beaucoup de familles francophones
qui demeurent à Greenfield Park… mais tu vas voir leurs enfants, tout le
monde est bilingue. Facilement.
Mais, avec tout le contexte, veux veux pas,
là... Tout le monde lisent les journaux. Tu sais, tout le monde est éduqué à qu'est-ce qui
se passe, puis je pense que, si on va perdre notre statut bilingue à Greenfield
Park, ça va être une journée très
triste, «a very sad day for everybody». Et je pense que je parle de mon coeur,
quand je dis ça maintenant, parce que chez nous... Je ne vois pas
comment qu'on peut vivre chez nous juste en français ou juste en anglais. Ça
prend les deux. Puis je ne peux pas vous dire plus que ça, puis c'est ça que
mes sentiments de mes citoyens me donnent.
M. Tanguay : Oui. Et, moi, M. Myles, là, puis M.
Grégoire, là, ce que vous venez de dire, là, votre conclusion, M. Myles, là, vous ne pouvez pas être plus
éloquent que ça, là. Vous ne pouvez pas être plus éloquent que ça. Quand on dit : Quand il n'y a pas de problème puis
qu'on vient avancer une solution qui est plus dogmatique qu'autre chose
puis qui vient créer un problème, on est en
droit de se poser, là : Où va le gouvernement? Alors, c'est extrêmement
éloquent. Merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous parler ce soir.
Puis moi, Mme la Présidente, là, je n'ai plus rien à ajouter après ce qu'a dit
M. Grégoire, M. Myles. Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant vers le deuxième groupe d'opposition.
Mme la députée de Montarville, vous avez la parole.
Mme
Roy (Montarville) : Pour une durée...
s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Une durée de 5 min 30 s, mais je peux
quand même vous allouer un petit peu plus de
temps, quelques minutes supplémentaires, vu que l'opposition officielle n'a pas
pris tout son temps.
•
(20 heures) •
Mme Roy (Montarville) : Parfait. Merci à vous. Merci,
messieurs. Bonsoir. Merci d'être là. Merci pour
votre mémoire. D'entrée de jeu, je vous
dirai que, la position que vous défendez, nous la défendons également, au
deuxième groupe d'opposition. Et ça, c'est
important pour nous que vous le sachiez, que cet amendement, qu'on retrouve
dans le projet de loi n° 14...
pardon, ce projet de loi, lorsqu'il touche les municipalités au statut
bilingue, nous, ça nous dérange.
Vous dites, dans votre mémoire — et
là je vais vous citer, parce que moi, je trouve que c'est très précis — vous dites : «Dans l'arrondissement de Greenfield
Park, il existe une paix sociale sur la question linguistique. L'expérience
du bilinguisme fonctionne dans cette
communauté. [Alors, le projet de loi n° 14,] avec le projet de
loi n° 14, le gouvernement du Québec vient s'attaquer à un
problème qui n'existe pas dans l'arrondissement de Greenfield Park.» Et plus
loin vous poursuivez : «Les élus de l'opposition [de] la ville de
Longueuil croient qu'il ne faut pas chambarder cette paix sociale. Le statut bilingue de Greenfield Park est
une richesse pour ses résidents, et la protection de leur statut
bilingue doit être préservée.»
Nous
pensons comme vous, il y a une paix sociale, actuellement, il y a une paix
linguistique au Québec dans plusieurs villes qui ont ce statut bilingue, villes
et arrondissements. C'est important de protéger cela.
Vous parliez, dans votre mémoire, de quelque
chose qui m'a interpellé, et c'est écrit ici, des promesses qui vous ont été faites lors des fusions et des défusions,
promesses, tant par le Parti libéral que par le Parti québécois.
Comme
le Parti québécois est maintenant au pouvoir — et c'est à la
ministre du Parti québécois que vous vous
adressiez — pourriez-vous nous rappeler les
promesses qui vous ont été faites sur votre statut bilingue à l'époque par le PQ?
M.
Grégoire (Gilles) : Écoutez, on se
souvient, madame, que, lors des fusions municipales, on avait eu le plaisir de venir à l'Assemblée nationale, ici, au
salon rouge, avec un mémoire aussi. Moi, j'étais conseiller municipal à Saint-Lambert, et Greenfield Park était venu, avec
M. Duclos, qui était le maire de Greenfield Park à l'époque aussi,
déposer son point de vue. Selon nous, là, puis jasez avec les gens qui ont
travaillé, là, pour essayer d'avoir un référendum pour défusionner, pour... pas pour défusionner, mais pour ne pas entrer
dans la ville de Longueuil, pour rester une ville indépendante, le gouvernement leur avait promis de
conserver ce statut bilingue là. Donc, c'est ce qui a fait que la ville
de Greenfield Park, selon nous, qui est...
Je pense qu'il manquait 1 % ou 2 % pour qu'ils puissent avoir le
droit de revenir... de reprendre leur statut juridique de municipalité,
et ils ne l'ont pas fait parce que le gouvernement leur avait promis,
justement, que le statut bilingue était pour demeurer. Donc, ça a été inscrit
dans la Charte de la Ville de Longueuil.
Lors
des défusions municipales, le Parti libéral a dit la même chose. Je me souviens
d'avoir rencontré, à l'époque, c'était
M. Audet, je pense, qui était ministre… qui était député de Laporte, et
puis il nous l'avait garanti. Il avait dit :
Écoutez, le statut bilingue à Greenfield Park, il est là pour rester. Il va y
avoir des votes sur le droit de défusionner, et Greenfield Park va garder son statut bilingue. Il n'y avait pas d'échéancier,
il n'y avait pas de chiffre minimal, il y avait 38 % de la population qui
était anglophone, et ils leur ont accordé, dans la Charte de la Ville de
Longueuil, le droit d'être une entité
à part, une entité bilingue dans la ville de Longueuil, et je crois que les
citoyens ont cru aux politiciens puisqu'ils ont décidé de rester dans la
ville de Longueuil et d'avoir des services de proximité de la ville de
Longueuil.
Aujourd'hui,
une dizaine d'années plus tard, on arrive avec un projet qui, moi, selon moi,
qui renie la parole des élus de l'époque, et
ça, j'ai de la difficulté avec ça, comme élu. Moi, j'ai toujours dit, madame,
que, quand je donnais ma parole… je
suis un chef de parti, et, quand le parti a donné sa parole, la seule chose qui
peut changer cette parole-là, c'est
que la population de Greenfield Park se prononce, comme c'est stipulé dans la
Charte de la Ville de Longueuil, que Greenfield Park se prononce sur son
statut bilingue. S'il décide d'en sortir, ça sera à la population de décider,
et non à des élus. Moi, je le vois comme ça
puis je crois que, les citoyens de Greenfield Park, c'est ce genre de promesse
là qui leur avait été faite par les
deux partis au pouvoir, et je crois qu'on devrait, madame, la garder et laisser
le soin aux citoyens de se prononcer si éventuellement ils veulent
sortir de ce statut bilingue là.
Mme
Roy (Montarville) : Merci... Oui. Je pensais que vous vouliez parler. Écoutez, je vous
remercie de votre réponse. Je suis tout à fait
d'accord avec ce que vous disiez. C'est aux gens à décider pour eux, c'est à la
ville... à l'arrondissement de décider pour lui. Merci, messieurs.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Grégoire, M. Myles. Et nous
allons maintenant recevoir la Centrale des
syndicats du Québec.
Et, le temps que les
gens s'installent, nous allons suspendre nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
20 h 5)
(Reprise à 20 h 12)
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Rebonsoir. Nous
allons reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant la Centrale des
syndicats du Québec, bienvenue. Je vous invite à vous présenter, présenter
également les personnes qui vous accompagnent. Vous allez avoir 10 minutes pour
nous faire part de votre exposé, et, par la suite, suivra un échange avec les
membres de la commission. Donc, la parole est à vous.
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Mme
Chabot (Louise) :
Bien, merci beaucoup. Merci, Mme la ministre, Mmes MM. les parlementaires. Merci de l'invitation à
cette importante commission parlementaire, quand même, hein, sur notre belle
Charte de la langue française. Ça fait que ça nous fait plaisir de venir
vous exprimer nos principales recommandations.
Les
personnes qui m'accompagnent : à ma gauche, Gabriel Danis, Gabriel est
conseiller aux dossiers qui sont liés à l'enseignement
supérieur; Nicole de Sève à ma droite, conseillère aux dossiers
sociopolitiques, notamment la question de la langue.
Bien, la CSQ, au cas
où que vous nous connaissiez moins, c'est parce que ça fait depuis longtemps
que nous militons en faveur de la langue
française, de sa place dans notre société, de son caractère unique et distinct
dans notre société québécoise, et nous avons été à peu près de toutes
les luttes et de toutes les batailles pour faire en sorte que le statut de la
langue française ait toute sa place au sein de notre société québécoise.
Et,
d'entrée de jeu, d'entrée de jeu, la CSQ tient à le dire : Nous tenons à
souligner notre appréciation à l'égard de ce
projet de loi. Le projet de loi qui est devant nous prend fait et cause pour un
renforcement de la Charte de la langue française et de la Charte des droits et
libertés de la personne, et inscrit une cohérence entre les obligations à l'égard du français qui vont se retrouver dans
plusieurs législations, et aussi propose des amendements, que nous
trouvons nuancés. C'est un bel équilibre.
Certains diront : On ne va pas assez loin. D'autres diront : Nous
allons trop loin. Nous, on pense que,
bien sûr, avec certaines bonifications, il y a là un projet qui est devant
nous, qui nous permet d'avancer, et on pense
qu'au niveau de la langue on n'a pas les moyens de reculer. Donc, si on n'avance
pas, on recule. Ça fait que, dans ce sens-là, nous saluons ce qui est
devant nous.
Donc, notre mémoire se
veut une contribution à cette consultation, et on espère que les mesures
proposées vont permettre d'améliorer la
situation, particulièrement en ce qui concerne la langue de l'enseignement,
enjeu sur lequel nous allons
concentrer notre présentation pour ce soir. Vous avez notre mémoire, vous l'avez
eu deux fois parce qu'on l'a bonifié avant de vous rencontrer.
La place de la langue
française à l'école ne relève pas de l'autorité de la ministre responsable de
la Charte de la langue française, mais de sa
collègue ministre à l'éducation. Donc, on trouve important aussi que le relais
puisse se faire, parce qu'on pense
que les deux ministères doivent tendre vers les mêmes résultats en ce qui
concerne la langue de l'enseignement, et on va vous inviter à encourager
les milieux scolaires à faire du français leur langue d'usage et de l'inscrire dans le code de vie. C'est une mesure
incitative parce que, bien que, dans nos écoles, on réussit à franciser,
donc à prôner et à faire en sorte que nos
élèves apprennent et parlent le français dans nos salles de classe, il faudrait
en faire aussi une règle d'usage dans
nos codes de vie, afin que parler la langue française se traduise aussi dans
les cours d'école, dans les espaces communs. Là, on ne vous demande pas
de jouer à la police, mais on fait juste demander que... je pense que les
parents, avec les équipes-écoles, peuvent faire en sorte que, dans le code de
vie, on puisse traduire cette réalité-là.
On
vous demande aussi de s'assurer que les mesures d'acquisition de l'anglais
langue seconde n'entravent pas l'acquisition
du français langue officielle — ça, pour nous, c'est
majeur — aussi, d'assurer le
financement adéquat des commissions scolaires pour des mesures de francisation des
élèves allophones comme les classes d'accueil, le soutien linguistique. Je
pense que c'est important de le noter, c'est qu'aujourd'hui l'école primaire et
secondaire québécoise accueille un peu plus d'un million
d'élèves, et, de ce nombre, près de 900 000 jeunes utilisent le français comme langue d'enseignement. Ce n'est quand même
pas rien, ce que nous avons réussi. Mais on sait qu'il y a une réalité
au niveau des élèves, au niveau de nos élèves allophones qu'il faut prendre en
compte, donc assurer le financement des commissions scolaires.
C'est
sûr qu'on aurait souhaité que le projet de loi aborde de front la situation des
écoles passerelles. On a compris que ce serait à un autre moment, mais on vous
annonce tout de suite qu'on va demander qu'à ce chapitre, lorsque le
temps sera venu, la centrale vous demande d'assujettir
les écoles privées non subventionnées à la Charte de la langue
française.
Au
niveau de la langue officielle pour la sanction des études, on soutient l'article
88, qui établit clairement que les
établissements d'enseignement et les ministres responsables doivent prendre les
moyens raisonnables pour s'assurer que les
étudiantes et les étudiants reçoivent une formation qui vise à leur permettre d'acquérir
des compétences suffisantes en français, et là-dessus on vous souligne
qu'autant à l'enseignement secondaire qu'à l'enseignement collégial il devient impératif d'exiger que, lorsqu'ils sont
disponibles, les logiciels, le matériel, les versions françaises, lorsqu'elles
sont disponibles, qu'ils soient présentes.
Ça, ça nous apparaît un incontournable, sinon on envoie le message
nécessairement que tout sera... que, si le matériel n'est pas disponible, bien,
tu vas te retrouver en situation de travailler dans des milieux où c'est l'anglais
qu'on va exiger.
On
va appuyer le principe aussi d'imposer des exigences de maîtrise du français
pour l'obtention d'un diplôme secondaire ou
collégial sans pour autant étendre l'application de la charte à l'enseignement
collégial. Je pense que ça, c'est heureux.
Mais,
en ce qui concerne les collèges anglais, je pense qu'on peut renforcer le fait
français, et nous devons, dans les collèges
anglophones — donc, pour nous — élever les seuils de compétence linguistique en français
dans les cégeps anglais, par exemple, par la
bonification de l'offre de cours en français, et là on pense à la littérature
québécoise, où c'est une question de
culture, ou par l'obligation de la réussite d'une épreuve de français langue
seconde, comme l'attestation d'études collégiales. C'est important.
Souvent, pour les immigrants, donc les allophones, c'est leur premier contact
avec le milieu de l'éducation, puis souvent
leur dernier. Donc, au niveau de l'attestation d'études collégiales chez les
étudiants inscrits à cette formation-là,
intégrer des cours donnés en français ou offrir des cours d'appoint, ça nous
apparaît essentiel. Souvent, ils se retrouvent dans les milieux, là, ils
connaissent à peine le français puis ils ne sont pas outillés pour le monde du
travail.
On souscrit aussi à l'exigence
d'une révision périodique des régimes pédagogiques, comme vous le soutenez, au
niveau des programmes, des règles et des directives, et, en ce sens, la CSQ
exige du ministère de l'Enseignement supérieur, cette fois-ci votre autre
collègue, qu'il ajoute les ressources nécessaires afin de bonifier l'aide
disponible, notamment les ressources destinées aux étudiants allophones au sein
des différents centres d'aide en français dans les cégeps.
• (20 h 20) •
Pour
les services éducatifs à la petite enfance, nous appuierons l'idée qu'au niveau
de nos CPE… que les services éducatifs à la petite enfance, au niveau du projet
éducatif... l'idée de la nécessité d'initier nos enfants à la langue
française. C'est aussi vrai pour les bureaux coordonnateurs. Le projet de loi n'en
témoigne pas nécessairement, mais, lors de votre
discours, Mme la ministre, de présentation, vous avez clairement exprimé que le
renouvellement des permis serait lié au fait que les responsables
devraient démontrer qu'ils peuvent communiquer en français. On vous l'a dit, on
le répète : pour nous, ça doit être
plus une mesure incitative d'accompagnement, de renforcement qu'une mesure
punitive. De lier l'obtention ou le
renouvellement du permis à l'exigence de parler la langue française, je pense
qu'on va venir peut-être créer une perte de places
disponibles, puis là je parle particulièrement pour la région de Montréal,
où, souvent, les parents choisissent le bureau de coordonnateur en fonction d'une
langue et de la communauté. Puis je pense qu'il faut y aller, il faut aller de l'avant, mais, en même temps, de... au
même titre qu'on va le faire pour la petite entreprise, y aller par des
mesures de soutien, d'accompagnement pour la francisation de ces femmes qui
travaillent dans nos milieux et qui offrent la moitié des places dans le réseau
public.
Le
français langue du travail : on note que les mesures pour renforcer la
langue publique commune dans les milieux de travail, et on pense qu'elles doivent être
renforcées... Nous aurions souhaité que les comités de francisation s'appliquent
dans les entreprises de 50 employés et plus — c'est ce que nous demandons — comme vous avez émis l'idée que les certificats de
francisation pour les 28-49, les entreprises de 28-49 employés, auraient pu s'appliquer
dès le nombre de 10 employés.
Et, en terminant sur
cette question, l'article 42 du projet de loi nous inquiète un peu, nous
inquiète beaucoup, du fait qu'on permet à l'employeur,
avec l'approbation... on pourrait permettre à l'employeur, avec l'approbation
de l'Office de la langue française, de substituer aux comités de
francisation qui existent maintenant, pour les employés... pour les entreprises
de 100 employés et plus, un autre mécanisme de consultation ou de participation
de son personnel.
Très honnêtement, on
ne comprend pas. Pour nous, ça, c'est un affaiblissement d'une mesure déjà
existante pour les 100 employés et plus, et on vous invite à maintenir les
comités de francisation pour ces employeurs. Voilà.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, Mme Chabot. Nous allons débuter les échanges. Nous allons maintenant du côté du gouvernement.
Mme la ministre responsable de la Charte de la langue française, vous avez la
parole.
Mme
De Courcy : Bien,
Mme la présidente, et ceux qui vous accompagnent, bonsoir. D'abord, merci d'avoir accepté de participer à la commission
parlementaire. C'est une commission parlementaire importante, une consultation
importante.
Vous avez raison, la langue, c'est fondamental. Et la CSQ
est un organisme qui représente, et je le rappelle, je le nomme, parce qu'il s'agit là d'un pan de notre
société qui est tout tourné, tout tourné vers le futur, puisque vous formez des cerveaux. Alors, il y a plus de
200 000 membres, dont près de 130 000 font partie du personnel de
l'éducation. Vous êtes l'organisation la
plus importante en éducation au Québec. Honnêtement, votre mémoire, d'ailleurs,
traduit le savoir de votre organisation. Alors, je vous en remercie.
J'apprécie aussi la franchise
du propos et le fait que vous pointez un certain nombre de choses auxquelles il
faille faire attention. Et je serai évidemment très vigilante autour de ce que
vous avez mis de l'avant.
Je
voudrais vous faire une mise au point que j'ai faite publiquement dans un
quotidien montréalais à la suite des
interventions d'un sociologue éminent que vous connaissez, qui est Guy Rocher,
qui tournait autour, justement, de la question des comités de francisation. Un
projet de loi — et j'indique bien que c'est
un projet de loi — permet aussi de révéler,
par moments, des intentions qui ne sont pas nécessairement bien traduite, et,
une des intentions qui était moins bien traduite était celle autour des comités
de francisation.
Alors, les comités de
francisation, bien sûr, pour nous, sont indiscutables, indiscutables. Ils m'apparaissent
absolument... important que vous le sachiez.
Notre intention, puis on l'a probablement mal libellé, on l'a
probablement mal écrite, notre intention
était surtout de voir à ceux et celles qui ne sont pas avec des groupes
syndicaux, dans des entreprises qui ne sont pas syndiquées et où les
comités de francisation, nous a-t-on dit, n'étaient pas nécessairement les bons
instruments ou c'était plus difficile de les
mettre en place, et qu'il y ait là un choix possible, un choix possible. Donc,
je pense qu'on a voulu marier, dans ce
libellé-là, deux intentions… qui n'était malheureusement pas un résultat
heureux.
J'ai bien indiqué que
les comités de francisation, pour ma part, sont indiscutables, et que, s'il
fallait qu'une entreprise décide de changer
de moyens, bien, il faudrait qu'elle ait l'accord du syndicat dans ce cas-là.
Et c'est tellement vrai que les
comités de francisation… d'ailleurs, quand j'ai eu l'opportunité de discuter
avec des gens d'affaires autour de ces questions-là… considèrent que ce sont
de très bons instruments. Vous avez une vision partagée autour de ces questions-là. Cependant, ça demeure entier là où
il n'y a pas de syndicat; dans des entreprises où il n'y a pas de
syndicat, là, le problème demeure entier. Il
faudra y réfléchir, là, au cours des prochaines semaines. Alors, je tenais à
vous rassurer parce que, bien évidemment, on soutient de façon très
importante les comités de francisation.
Vous
avez mentionné, dans le début de votre... ou dans votre présentation, l'importance
de la qualité du français et des exigences en
français au collégial. Vous l'avez mentionné. Aujourd'hui, nous avons reçu
la... je ne me souviens plus si c'est l'association ou la fédération... c'est...
On me l'écrit, c'est plus facile.
Une voix : ...
Mme
De Courcy : Oui,
exactement, exactement. Ils sont venus, donc, nous mentionner avec beaucoup, beaucoup d'acuité l'importance de leurs travaux, d'abord,
et, en plus de ça, des travaux qui datent, là, qui datent, et qui n'ont jamais
eu l'heur de trouver leur réalisation, leur actualisation.
Alors,
je présume que je dois bien comprendre que votre mémoire va dans le même sens
que ce regroupement-là d'enseignants, qui, ma
foi, nous indique qu'il faut une relève significative des exigences en
français. Ils ont soulevé une iniquité qui est très importante entre ceux et
celles, par exemple, qui passent des tests de français dans des ordres
professionnels, par rapport à ceux qui sont dans les diplômes d'études
collégiales, les D.E.C., ce à quoi je souscris. C'est une des motivations que
nous avions quand nous avons mis le projet de loi en place.
Est-ce
que je dois comprendre, dans les faits, que c'est à ça que vous faites
allusion, d'aller dans le sens de ces travaux-là et de se servir d'épreuves
standardisées, de... bon, etc., donc d'aller dans le sens de ce que ces
enseignants-là ont mis de l'avant? Vous n'avez
peut-être pas pris connaissance de leur mémoire, auquel cas, si ce n'est pas le
cas, je vous le ferai parvenir avec
grand plaisir. Je vais demander à la présidente de la commission de vous le
faire parvenir pour que vous puissiez donner un avis à cet égard-là.
Alors,
je n'aurai que cette question. Somme toute, j'avais une mise au point à faire,
et je vais conclure, pour ma part, avant de céder la parole et la réponse à notre
question, je vais réitérer le fait que c'est avec beaucoup d'humilité que
j'ai pris connaissance de votre mémoire, compte tenu du savoir des enseignants,
des enseignantes, du milieu, du personnel de l'éducation
que vous représentez. Il faut toujours savoir d'où on vient pour savoir où on
va. Vous comprendrez que d'où je viens fait en sorte que je suis
particulièrement sensible aux propos que vous avez tenus.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. Oui, Mme Chabot.
• (20 h 30) •
Mme
Chabot (Louise) :
Oui. En réponse : non, nous n'avons pas pris connaissance du mémoire des enseignantes et enseignants de langue seconde... de
français langue seconde, donc, dans les cégeps anglophones. Par contre, les
collègues ont eu, peut-être, l'occasion d'entendre leurs propos.
Écoutez, je ne pense
pas que vous allez retrouver dans notre mémoire des mesures aussi précises que
celles qu'on a pu entendre dans leur
présentation. Pour nous, on a avancé l'idée qu'il faut absolument, avec
quelques mesures à l'appui, là,
rehausser et imposer des exigences de maîtrise du français pour l'obtention de
ces diplômes-là. Et ce que nous soumettons,
c'est les deux exemples que je vous ai donnés tout à l'heure, soit l'obligation
de donner preuve de réussite ou la question de bonifier l'offre de cours
en littérature québécoise, par exemple. On n'est pas... On a réfléchi... Je
sais qu'ils ont proposé l'idée de mettre
quatre cours, je crois, là, mais on n'a pas avancé... On a réfléchi à ces
questions-là, mais on n'est pas allés
aussi loin que de dire : Ça prendrait tel nombre de cours. C'est une
question de curriculum aussi puis de
regarder dans le parcours, mais c'est de regarder divers moyens pour renforcer,
puis je pense que ça, on peut continuer de travailler, mais une chose est claire, une chose est claire, c'est
que, sur le principe, nous sommes assez intentionnés.
Mme
De Courcy : Oui, puis les remarques
que vous avez faites tout au long du mémoire sont à ce point rigoureuses et organisées, et c'est très
pédagogique comme mémoire, je vous dirais. Alors, bien, je vous fais suivre,
donc, ce mémoire-là pour que vous puissiez...
Une voix : ...
Mme De
Courcy : Bien, très bien, très bien.
Une voix : ...
Mme Chabot
(Louise) : Bien, d'accord. On va
attendre.
Mme
De Courcy :
Bien, ça ne sera pas long. Vous allez l'avoir avant de partir, c'est certain,
et nous allons faire suivre aussi et votre
mémoire et celui de... aux ministres de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, pour aller dans le sens de ce que vous nommez. Je vous remercie, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre. M. le député
de Sainte-Marie—Saint-Jacques, vous avez la parole.
M. Breton : Merci. Écoutez bien ceci, Mme la ministre, Mme la
Présidente... Mme la Présidente. Je trouve ça intéressant. Non, je trouve ça
très bien. Écoutez, je voulais commencer par, d'abord, saluer la CSQ, la
Centrale des syndicats du Québec et je
voulais en profiter aussi pour saluer M. Réjean Parent, que je connais bien,
depuis des années, M. Pierre Jobin, M. Daniel B. Lafrenière, avec qui j'ai
beaucoup travaillé depuis des années. Peut-être le savez-vous, je pense que j'en
ai un petit doute, que j'ai travaillé beaucoup au niveau de l'environnement.
Mme Chabot
(Louise) : ...encore.
M. Breton : Oui, effectivement. Et puis je sais que la CSQ, dans le
fond, il y a toutes les écoles vertes Brundtland.
Et moi, je vais vous avouer que je suis très impressionné par le travail que la
CSQ fait depuis des années à bien des égards, et je considère qu'en tant
que syndicat vous êtes exemplaire.
Moi
qui travaille beaucoup dans le domaine de l'environnement depuis longtemps, je
voulais parler de deux petites choses. Dans le
fond, j'ai dit, lors de cette commission parlementaire, que moi et à peu près
tous mes amis sommes tous allés à l'école
française et nous avons tous appris l'anglais. Nous parlons à peu près tous
anglais. Et puis moi, j'ai pris mes premiers cours d'anglais à l'école
française en cinquième année, au primaire.
Et puis il a été
question, de la part de l'opposition officielle et de la deuxième opposition,
de parler du projet de loi n° 14
comme d'un projet de loi coercitif, c'est-à-dire qu'ils disaient : Nous,
on pense qu'il y a un équilibre, à ce stade-ci, entre le français et l'anglais,
et on pense que toute mesure coercitive serait une mesure qui nuirait à la paix
linguistique.
Et
ce à quoi j'ai apporté, comme réflexion, la protection de l'environnement, c'est-à-dire
que, d'expérience, j'ai vu, et je suis certain que vous êtes en mesure de
répondre à cette question-là, que, lorsqu'il n'y a pas de loi coercitive
pour protéger l'environnement, c'est bien beau de faire des campagnes, mais,
des fois, il y a de la pollution pareil. Et, bref, moi, je pense que des
mesures coercitives pour protéger l'environnement sont incontournables, mais
tout ça doit s'accompagner de mesures de
promotion de l'environnement. Mais, dans le fond, je vois ça dans le même sens
pour la promotion du français, c'est-à-dire que, oui, la carotte, mais
inévitablement on a aussi besoin du bâton.
Et vous avez parlé
ici, vous dites que... vous exprimez le souhait que les mesures d'acquisition
de l'anglais langue seconde n'entravent pas
l'acquisition du français langue officielle, que ce soit au niveau primaire ou
secondaire. Moi, qui ai appris mon anglais dans des institutions françaises, j'aimerais
entendre votre son de cloche là-dessus. Qu'est-ce que vous voulez dire
précisément parlant?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. le
député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Chabot (Louise) :
Oui. Deux choses. Premièrement, je serai en accord avec vous que, tant en environnement que sur
la question de la langue — j'ajouterais
un dossier au Québec aussi comme l'équité salariale — parfois, ça prend des mesures proactives. On parle de coercition. Moi,
je verrais plus ça comme d'être proactifs, d'avoir des lois qui ont des
dents. Je le répète : Au Québec, là, il faut être... J'espère que tout le
monde est sensible que le Québec est la seule province
francophone en Amérique du Nord. Et ce seul fait mérite qu'on ne baisse pas la
garde. Et, dans ce sens-là, s'il n'y avait pas de charte... Puis, cette
charte-là, on n'a pas besoin de... Avons-nous besoin de nous rappeler qu'il y a
eu plus de 200 amendements qui ont tenté d'en
réduire sa portée? Donc, je pense que le projet de loi qui est devant
nous, honnêtement, il vient juste renforcer sa proaction, mais ne vient d'aucune
manière amener un aspect coercitif au sens de barrière. Je pense qu'il y a un juste
équilibre, là. Puis c'est pour ça qu'on l'appuie.
Là, ce qu'on revendique... Bien, c'est par
cohérence, la question. Tu sais, on va être très clairs, on aborde par là tout le projet. Vous
êtes chanceux, M. Breton, vous êtes plus jeune que moi. Moi aussi, j'ai appris
mon anglais à l'école primaire, mais
ça n'a pas été vraiment une réussite. Bon. D'où l'idée sur l'apprentissage d'une
langue seconde. Est-ce qu'elle doit se faire de manière intensive?
Est-ce qu'elle doit se faire de façon saupoudrée tout au long du parcours? On sait qu'il y a eu des débats. Nous, on était plutôt de l'école
de dire qu'il vaut mieux privilégier l'intensif que du saupoudrage. Mais, cela
dit, la position des enseignantes et des enseignants à la CSQ à ce chapitre-là
est très claire : prenons le temps.
Quand
on regarde ce qui se passe au niveau de la francisation, des programmes et du
parcours scolaire de nos jeunes, il faut prendre le temps avant de mettre en
place et de continuer à mettre en place l'anglais intensif en sixième année du
primaire, de mettre un frein sur le développement. Je pense qu'il y a le
ministre qui est venu dire : On va faire les bilans de ce qui se passe,
puis regardons. Nous, on a une préoccupation, oui, linguistique, mais aussi pédagogique à l'égard des enfants, à l'égard de la
disponibilité aussi des ressources. Je pense qu'il y a quelque chose...
Le fait que ça ne soit plus une mesure mur à mur, ça, ça a été salué. Mais, en
même temps, on a lancé un cri, un cri du coeur clair : Avant de continuer
le développement, prenons le temps de s'arrêter, puis de regarder quel bilan
nos programmes ont donné, puis comment on peut les renforcer s'il y a lieu.
Parce
qu'on n'est pas contre l'apprentissage d'une langue seconde, mais il faut voir
dans quel but. Mais certainement pas dans le but — il faut regarder ces questions-là — de fragiliser notre langue commune, qui est le français. Puis je vous dirais que c'est cohérent.
Au même titre que ce qui est proposé, ça s'inscrit dans la cohérence
entre le français langue commune au Québec
et l'équilibre. Bien, au même titre, cette mesure-là au niveau de l'apprentissage
d'une langue seconde, de la manière dont elle doit être faite, on pense qu'il
faut prendre le temps de le faire.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.
•
(20 h 40) •
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci,
Mme la Présidente. Alors, je salue d'entrée de jeu Mme Chabot, Mme de Sève et M. Danis. Bienvenue. Et puis, comme
de raison, la Centrale des syndicats du Québec, c'est un syndicat qui
est quand même important au niveau du Québec, qui représente beaucoup de
membres, près de 200 000 membres.
Vous avez présenté un mémoire qui est quand
même très, très, très positif, très complet. Puis, à ce que j'en lis, vous êtes
favorables dans son ensemble au projet de loi. Vous proposez quand même des
ajouts, une bonification à ce projet de loi là dans vos recommandations
pour assurer justement le concept de la pérennité de la langue et tout ça. Et
je pense que c'est quand même une orientation qui est bonne.
Tout à l'heure, mon collègue parlait de
coercition au niveau des moyens à entreprendre pour préserver une langue. C'est sûr qu'alentour
du... au niveau de la commission, il y a des gens qui nous disent que le projet
de loi sur la langue ne devrait pas être coercitif et tout ça. Mais sauf
qu'on ne peut pas atteindre des résultats bien souvent quand on est en danger si on ne met pas des règles bien établies,
des balises aussi. Alors, il faut s'assurer que quelqu'un respecte les
balises aussi. Donc, à ce moment-là, ça
devient coercitif. Mais il n'y a pas un projet de loi qui ne l'est pas non
plus, je pense. Alors, vous
exprimez... En tant qu'alliés de longue date du dossier de la langue française — je pense que vous avez déposé des mémoires dans le passé aussi — croyez-vous que le projet de loi proposé répond bien aux
attentes de la majorité des Québécoises et Québécois et en matière de
protection du français? Et, s'il y avait des améliorations encore à apporter ou
à suggérer, qu'est-ce que vous y apporteriez de nouveau?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député. Oui, Mme Chabot.
Mme Chabot (Louise) : Il y aura certainement une
appréciation de l'ensemble des citoyennes et des
citoyens. Étant une microsociété, nous, on pense que oui, le projet de loi en
tout cas devrait être bien reçu par les citoyennes et les citoyens. Je le disais d'entrée de jeu : Certains voudront
aller plus loin, avec raison. D'autres vont vouloir dire : Bien, je pense que oui, une loi comme ça, on ne passe
pas à côté, que ce soit une loi qui ait des dents, qui ait des règles, qui
ait des mesures, sinon on ne serait pas
rendus là, là. On serait loin d'être rendus là, puis on aurait sonné des
cloches, parce que je pense qu'on ne
se parlerait peut-être plus dans cette langue, cette belle langue commune
aujourd'hui, si on n'avait pas eu la Charte de la langue française.
Maintenant,
je pense que nous aussi, on propose quand même certaines modifications. Là, on
vous a présenté particulièrement sur la
question de la langue d'enseignement, mais, au niveau de l'administration
publique, au niveau de la langue d'affichage,
au niveau de la langue du travail... Peut-être qu'on réussit bien en matière de
langue d'enseignement, mais on a beau
réussir, si ça ne se traduit pas en termes de langue au travail, bien, on n'aura
pas réussi non plus. C'est pour ça qu'on vise à renforcer aussi la
langue du travail.
Et,
dans ce sens-là, nous, on n'est pas d'accord avec ceux qui prétendent que ce qu'on
veut renforcer au niveau de la langue du
travail, actuellement ce que vous proposez… Puis même on aurait été prêts à
dire : On peut aller plus loin.
On vous a parlé des comités de francisation des 50 et plus, on aurait pu
assujettir les entreprises de 10 à 50 aussi en termes de
certification... des propositions claires que nous faisons. Mais, déjà, ce qui
est proposé pour les 28-49… Nous, ce que
nous avons entendu… et, pour être membre de la commission de partenaires du
marché du travail également, je pense que la ministre responsable à l'Emploi
et à la Solidarité sociale a pris le temps d'expliquer que ce qu'on veut de
plus pour les entreprises de 28 à 49 salariés, c'est aussi avec des mesures d'accompagnement.
Je pense qu'il y a de la souplesse
là-dedans. Je ne veux pas reprendre des propos que vous avez déjà évoqués ou
votre première ministre, mais je pense qu'il faut être fermes dans les
intentions de ce projet de loi là puis, à certains égards, être souples dans les moyens. Je pense qu'il y en a, de la
souplesse, là-dedans, dans ce projet de loi là. Puis on aurait pu aller plus
loin dans certaines mesures. Je viens d'en nommer en termes de langue du
travail. Il y a un enjeu là.
Quand
on passe de l'école dans le milieu de travail… Puis, on va se le dire, à
Montréal particulièrement, c'est inquiétant,
les statistiques qui s'annoncent en termes de langue d'usage. Déjà, vers les
années 2030, où le français atteindrait la barre des 50 % ou le
fait qu'à Montréal c'est courant que ce n'est pas la langue d'usage, il faut
presque exiger de se faire parler en
français puis de répondre en français… Oui, on peut comprendre que la
mondialisation va inciter des entreprises à avoir des atouts au sein de son personnel, mais est-ce
que ça veut dire qu'on bannit puis qu'on prône la bilinguisation? Ce n'est
pas notre point de vue du tout. Je pense qu'il faut que le fait français demeure
une force et la langue commune et avoir des
mesures d'accompagnement ou de souplesse effectivement pour répondre à des
besoins. Mais les besoins du marché ne doivent pas être un prétexte pour
affaiblir la langue.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Il reste 20 secondes.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Je
voulais juste finir avec la conclusion. Vous l'avez mise, je la trouvais intéressante, les mots du chroniqueur Stéphane
Laporte, à la fin : «Une langue, c'est l'empreinte du coeur de ceux
qui la parlent. C'est le répertoire des
réflexions, des émotions, des expériences et des rêves partagés par une
communauté.» Et je pense que le restant du paragraphe est toujours dans
cette saveur-là. Je pense que c'est très bien comme... C'est du très positif.
Merci.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Nous allons maintenant du côté
de l'opposition officielle. M. le député de
LaFontaine, vous avez la parole.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord,
j'aimerais... J'aimerais d'abord vous remercier
pour votre présence, vous remercier d'avoir
rédigé votre mémoire, de l'avoir soumis et de, ce soir, prendre le temps de
venir discuter avec nous, d'en faire la présentation, et, donc, d'apporter
votre voix à l'étude du projet de loi n° 14.
Peut-être juste quelques statistiques, et,
encore une fois, je pense que c'est important de reconnaître l'équilibre, et vous
faisiez mention, vous également, un peu plus tôt, vous-même, de l'équilibre
linguistique. C'est un dossier, la langue, qui est un dossier délicat, qui est très important. Nous sommes tous
pour l'épanouissement du français, et, maintenant, comment réaliser l'épanouissement
du français, c'est le défi, le défi auquel nous devons faire face.
Et
il y a plusieurs outils. Il y a l'outil législatif pour modifier la Charte de
la langue française, il y a l'outil réglementaire,
par règlement, il y a également la possibilité, pour une action
gouvernementale, par programmesuffisamment
financé. On parlait un peu plus tôt de la qualité du français, de l'enseignement.
Alors, nous, donnons-nous les outils
dans le système d'éducation également d'enseignement supérieur, comme on a pu
en discuter un peu plus tôt, avec les professeurs de français langue
seconde au collège anglophone. Et, également, il y a tout ce qu'on appelle le
volet avec les partenaires, comment faire en sorte que tous emboîtent le pas et
soient outillés, justement, pour faire en sorte que l'épanouissement du
français soit une réalité.
Alors, en ce sens-là aussi, il y a des
statistiques qui, je crois, sont importantes à resouligner. Prenons, par exemple, le fait que les anglophones et les allophones
vont beaucoup plus à l'école en français. Prenons la statistique des allophones : en 1971, 14,6 % des
allophones allaient à l'école en français, alors que cette proportion atteint,
en 2010, plus de 85 %. Également, quand on parle de l'inscription
au cégep francophone par les allophones, en 1998, 43,8 % des allophones — en 1998 — allaient au
cégep en français, et, en 2009, 64,2 % y allaient. Donc, il y a
réellement, là... Et, même chose, les statistiques se confirment pour l'augmentation au niveau
de l'école en français pour les anglophones : lorsqu'on compare
1971 à 2010, les statistiques démontrent une tendance très, très lourde et qui
est venue confirmer, je vous dirais, en 1977, la Charte de la langue française,
qui, au fil des ans, a maturé, a su trouver un équilibre, et qui fait en sorte
qu'aujourd'hui on atteint nos objectifs.
On parle entre autres de la langue du
travail. Vous me permettrez de souligner que 89 % des Québécois utilisent principalement le français en 2010, alors qu'en
1971 c'était 83 %. Évidemment, les domaines évoluent rapidement, les
domaines sont davantage complexes, qu'on parle, comme le faisait le député de
Sainte-Marie—Saint-Jacques, de l'environnement,
du domaine financier, de tous les domaines, médical... Les domaines font en
sorte que nous devons toujours être
vigilants en termes de possibilité d'avoir des outils en français, d'avoir l'enseignement
en français et de faire en sorte que l'on puisse, donc, par un
accompagnement, faire en sorte que l'épanouissement du français soit une
réalité.
Et, en ce sens-là, il s'agit d'avoir un
équilibre également au niveau de la coercition. C'est important de faire en sorte qu'il y ait
une application de la loi et que celles et ceux qui ne respectent pas la loi
puissent être, évidemment, rappelés à
l'ordre, entre autres par des lettres de mise en demeure, qui seraient incluses
dans un processus qu'on ne modifierait pas — je ferme la parenthèse… mais faire en sorte, donc, qu'il
y ait un équilibre dans la coercition. Et le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques parlait avec verve de la carotte et du bâton,
et il m'a inspiré une réflexion, donc...
•
(20 h 50) •
Et, en passant, votre mémoire touche beaucoup
de sujets, mais j'aimerais vous entendre sur un sujet, pages 5 et suivantes de votre mémoire, lorsque vous traitez du
rôle de l'administration, d'une part, et, d'autre part, du rôle de la ministre
chargée de l'application de la Charte de la langue française. Vous dites — et je vous cite — au bas de la page
5 : «Le projet de loi ajoute un nouveau chapitre à la Charte de la langue
française qui définit clairement les pouvoirs et les responsabilités du ministre. Cela permet de préciser ce qui revient
au ministre et ce qui relève de l'Office québécois de la langue française.» Donc, quand vous dites :
Définit clairement les pouvoirs, d'une part, de la ministre, et, d'autre
part, de l'Office québécois de la langue française,
j'aimerais vous entendre… à la lumière du fait qu'en vertu du nouveau
chapitre introduit par le projet de loi n° 14 auquel vous faites
référence, la ministre est chargée de l'application de la Charte de la langue française, et, en ce sens-là, elle
exerce tous les mandats que lui confie le gouvernement d'une part, et, d'autre
part, l'actuelle Charte de la langue française, l'article 166 : «L'office
peut, pour l'application de la présente loi, effectuer des inspections et des
enquêtes.»
Alors, j'aimerais vous entendre
là-dessus, lorsque vous dites qu'il y a à ce chapitre-là une précision très
claire de ce qui revient
à la ministre, d'une part, et ce qui revient de l'office d'autre part. Parce
que moi, personnellement, j'ai de la difficulté à m'y retrouver, avec l'ajout de ce nouveau chapitre qui fait
double emploi avec les responsabilités de l'office.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député. Mme Chabot.
Mme
Chabot (Louise) :
Je vais répondre à deux choses, puis après je vais laisser ma collègue Nicole
compléter, là, vu que vous adressez clairement
des articles.
À
votre première... Bien, avec respect, M. Tanguay, je vous dirais que les
statistiques que vous donnez, lors de... Bien, ça témoigne effectivement qu'il y a eu un
avancement, dans une certaine mesure, puis, pour nous, s'il y a eu cet avancement-là, c'est parce que justement il y a eu
des outils assez fermes pour permettre ces avancements-là. Comme je vous
disais tout à l'heure, on n'en serait pas là.
Toutefois, je veux
corriger une de vos statistiques, là, qui a d'ailleurs été donnée par le
Conseil supérieur de la langue française dans son étude... qui avait révisé ses
chiffres. Ça fait que, lorsque vous parlez qu'en 2009 ce que c'est, dans une
proportion de 64,2 %, au niveau cégep, la fréquentation des allophones, c'est
inexact. C'est 53 %. Ça fait que ça, je
pense que ça mérite d'être corrigé. Nous l'avons fait nous-mêmes parce que nous
avions eu, à une autre époque, beaucoup de difficultés à avoir des
chiffres clairs du ministère malgré nos nombreuses demandes.
Et
finalement autour du forum sur la langue française, on a... la lumière fût sur
les données exactes. Ça fait que c'est encore
préoccupant, il y a quand même un 10 % d'écart avec vos chiffres.
L'autre, au niveau de
la page 5 et 6 de notre mémoire, ce que nous avons voulu illustrer... Pour
nous, l'Office de la langue française, c'est
l'office, c'est cet organisme qui est chargé de voir à l'application de la loi
et en toute autonomie. Et là on a vu
dans les pouvoirs de la ministre que, dans ses pouvoirs de délégation, on
comprend qu'un de ses pouvoirs de délégation,
c'est de confier à l'Office de la langue française l'application... la
gardienne ou l'application de la loi. Mais, en même temps, comme ministre responsable de la Charte de la langue
française, en termes d'administration publique, je pense qu'il faut donner un message fort à l'ensemble
de l'administration publique, de l'importance de cette charte-là, et nous, on n'avait aucun problème avec les... pas
les prérogatives, mais le partage des responsabilités entre la ministre
et son pouvoir de délégation à l'office.
Donc, pour nous, ça
nous semblait clair. Mais Nicole pourrait compléter.
Mme de Sève
(Nicole) : Je peux compléter en
disant que c'est important. À chaque fois qu'on nous dit : La ministre est
responsable de l'application de la Charte de la langue française, c'est très
bien, mais où est-ce que c'est défini, les
pouvoirs de la ministre, ses fonctions, ses prérogatives? C'est quelque part dans
un flou juridique. Nous l'avons fait
regarder par notre contentieux, de toute façon. Ce qui est là n'est pas
différent de d'autres pouvoirs. Bien, oui, parce que là, on traite de la langue française. Mais ce n'est
pas différent de ce qu'on va pouvoir déléguer à un ministre. Un ministre
est responsable, et il a des fonctions, des responsabilités, ce que vient
préciser là-dessus…. Et, comme disait très bien Mme la présidente de la CSQ, oui, il y a des pouvoirs de délégation, et
ils sont importants. Mais qui est imputable devant l'Assemblée
nationale? C'est la ministre qui est responsable. Et actuellement, jusqu'à
preuve du contraire, l'Office de la langue
française n'est pas nécessairement imputable devant l'Assemblée nationale. La
personne qui est responsable de l'office n'est pas nommée par l'Assemblée
nationale. Donc, c'est la ministre qui est imputable, et on ne lui a pas défini
des fonctions, des pouvoirs et tout.
Donc, au moins, on a
ça, on peut toujours discuter de l'ensemble des fonctions, mais au moins nous
savons maintenant que cette ministre non seulement a le titre, mais elle est
imputable. Et c'est important de savoir sur quoi doit-elle être questionnée non
seulement eu égard à ses budgets, mais eu égard à ses responsabilités
politiques. Donc, c'est un peu pour ça que nous soutenons cette question-là.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme de
Sève. M. le député.
M.
Tanguay : Oui.
Mme la présidente, Mme Chabot, par rapport à la statistique, je suis obligé de
vous dire que je communiquerai avec le Conseil supérieur de la langue française, parce
que les statistiques que je vous ai données, je vous les répète, je vous donne l'occasion peut-être de confirmer, en
1998, 43,8 %, c'est ce que j'ai bien dit, des allophones inscrits au cégep allaient au cégep en français,
et, en 2009, je vous le réitère, la statistique que j'ai donnée est exacte,
64,2 %, en 2009, des allophones
allaient au cégep en français. Ma source : l'étude du Conseil supérieur de
la langue française, La langue d'enseignement au cégep, qui était
un avis à la ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. Cette étude-là a été déposée en 2011,
et je vous réfère à la page 11 de 40, le graphique I, première des
choses.
Deuxième
des choses, j'aimerais tout simplement revenir sur… je crois, Mme de Sève? Mme
de Sève, ce qui est assez extraordinaire dans
le projet de loi n° 14, c'est qu'il y a un double emploi, et prenons l'exemple
des enquêtes où non seulement l'Office de la
langue française a un pouvoir d'enquête quant à l'application — et l'enquête est liée à
son pouvoir général d'enquêter au niveau de
l'application de la Charte de la langue française, alors c'est tout à fait très
large, comme pouvoir d'enquête — l'Office de la langue française nomme des enquêteurs,
revoit des demandes de production de documents, les gens qui sont visés, les entités et
les individus, doivent produire les documents, à défaut de quoi, bien,
il pourrait y avoir un outrage au tribunal. Ça, ce sont les pouvoirs aux
articles 166 et suivants de la Charte de la langue française qui sont dévolus à
l'office, et on reconnaît, la ministre a déjà reconnu que l'office avait ce
pouvoir-là et l'exerçait très bien, de façon indépendante.
Là,
avec le nouveau chapitre où vous affirmez qu'il y a là un équilibre et une
bonne définition des tâches, d'une part de
la ministre et d'autre part de l'office, on vient faire un copier-coller. La
ministre, à l'article nouveau 1.2 du projet de loi, est chargée de l'application
de la présente loi. Le neuvième alinéa du troisième paragraphe nous dit qu'elle
peut exercer tous les mandats qui lui sont donnés par le gouvernement, donc c'est
extrêmement large, même largeur, même grande discrétion que l'office, et
également l'article 1.3, elle également peut nommer des enquêteurs, elle-même, elle peut se constituer enquêteur, de un. De
deux, elle-même peut déléguer son pouvoir, comme l'office, d'enquêter à des
personnes de son choix, et elle les nomme en vertu et elle leur donne des
pouvoirs, en vertu des articles 9, 10 et 11
de la Loi sur les commissions d'enquête, qui sont, là également, le pouvoir de
dire à un individu ou à une entreprise, par exemple : Vous allez
produire tel, tel document. Vous devez le faire, sinon il y a un outrage au tribunal. Vous devez répondre de façon très claire
et complète à toutes les questions, sinon il y a un outrage au tribunal.
Et, en ce sens-là, ce pouvoir d'enquête là
est un dédoublement, d'où un peu ma surprise quant à votre affirmation qu'il y
a là deux sphères d'action qui sont clairement définies. Moi, je vois que c'est
exactement la même sphère d'action très, très large, puis, dans un dossier
délicat comme la langue, je trouve ça hasardeux.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui, Mme Chabot.
•
(21 heures) •
Mme
Chabot (Louise) : J'introduis, on va
répondre clairement à M. Tanguay à la question du chiffre avec une correspondance du Conseil supérieur de la
langue française émise en mars 2013, qui fait un correctif tant qu'à ses
statistiques, donc c'est disponible.
La
question que vous nous posez à l'égard des pouvoirs, très honnêtement, je ne
sais pas s'il a une question précise, mais
ce n'est pas par hasard que vous avez cité les pages 5 et 6 de notre mémoire.
Pour nous, page 5, c'est un paragraphe, et, page 6, un haut de
paragraphe. Très honnêtement, on l'a regardé, mais, dans les pouvoirs tant de
la ministre que de l'Office de la langue
française, nous n'y avons pas vu de menace en la demeure. C'est notre lecture.
On a vu, là aussi, un équilibre entre les pouvoirs. Est-ce que vous avez une
question précise ou il y a quelque chose qui vous apparaît devoir être corrigé?
Puis parfois on prend notre appui sur d'autres
modèles. Ce n'est peut-être pas le même modèle, mais je regarde la Loi sur l'équité
salariale, où nous avons une commission chargée d'appliquer la loi en toute
indépendance et un ministre responsable
de la loi, de voir à... Nous, on a compris que c'est à peu près le même modèle
qui est proposé là, on a regardé les
articles dont vous nous parlez et, très honnêtement, on ne voit pas en quoi ça
vient entraver ou donner des pouvoirs indus ou... à un quelconque
organisme. Puis, en même temps, nous, on va défendre bec et ongles l'idée que l'Office
de la langue française continue d'être l'office chargé de l'application de la
loi avec les pouvoirs qui s'imposent, en étant redevable effectivement au ministre, et qu'il y ait des rapports
réguliers dans l'application, puis que la ministre puisse, au besoin, regarder le rôle de l'office et venir le
présenter à l'Assemblée nationale puis qu'on puisse en débattre, là.
Pour nous, ça... Mais, si vous avez une question précise, ça va nous faire
plaisir d'y répondre. Gabriel.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Oui, M. Danis.
M.
Danis (Gabriel) : Oui, petite
précision sur les statistiques du Conseil supérieur de la langue
française : effectivement, les statistiques dont vous faites référence
sont tirées d'une étude du Conseil supérieur de la langue française, qui a été effectivement publiée en
2011. Par contre, si vous lisez bien la note en bas de page de l'étude
2011, ces données sont provisoires et doivent être officialisées par le MELS.
Et ces données-là, à l'époque, avaient fait sursauter
plusieurs groupes, dont nous. Les données… La fréquentation des allophones des
cégeps français avait augmenté beaucoup entre 2007 et 2009. On avait
questionné cette augmentation-là.
Or, le Conseil supérieur de la langue
française a publié une étude il y a deux semaines, à la mi-mars 2013, et on peut y lire, j'ai les faits saillants ici : «De
plus, depuis 2001, on constate que les allophones étudient de plus en plus en
français au collégial. Cette proportion a progressé lentement pour atteindre
53 % en 2010...» Donc, on est loin du 64,2 %,
là, et c'est une étude qui date de la mi-mars 2013. Donc, le conseil est venu
un peu se repentir sur ses chiffres, là, qu'il avait publiés en 2011, un
peu à la va-vite, je dirais.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. Danis. M. le député.
M. Tanguay : Merci beaucoup pour la précision.
Alors, j'en prends bonne note, de cette précision de mars 2013.
Et, sur mon point, juste pour m'assurer de
bien comprendre, Mme la Présidente, donc à la lumière des deux pouvoirs, si je pourrais dire, et de la façon dont les
deux pouvoirs s'articulent, vous, je veux juste m'assurer de bien vous
comprendre, vous n'y voyez pas de dédoublement possible et/ou d'abus de pouvoir
qui pourrait en résulter dans la mesure où, dans les deux cas, tant la ministre
que l'office ont le pouvoir de nommer des enquêteurs en vertu de la Loi sur les
commissions d'enquête. Alors, je veux juste... Puis, encore une fois, je prends
bonne note du fait que vous n'en faites pas un point central, mais que vous n'en
faites que quelques paragraphes dans votre mémoire, mais je veux juste m'assurer
de bien vous comprendre.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Mme Chabot.
Mme
Chabot (Louise) : Vous aviez... Oui,
vous m'avez bien compris. On a vu, dans le pouvoir de la ministre, un pouvoir de délégation, et, ce que
nous disons, donc, dans son pouvoir de délégation, nous avons compris
que...
Une
voix : ...
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. le député, vous avez terminé?
M. Tanguay : Pas d'autre question. Merci beaucoup, madame... merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Nous allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition.
Mme la députée de Montarville, vous avez la parole pour un temps de 5 min
30 s.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci mesdames, merci
messieurs, merci pour votre mémoire. Tout comme vous, ici, au deuxième groupe d'opposition,
nous avons à coeur la qualité du français. C'est une préoccupation pour nous. Également, la francisation de ces nouveaux
arrivants, dont nous avons tant besoin, très important; vous avez des
points intéressants au niveau de la francisation et de tous ces organismes, ces
différents paliers qui se multiplient en offres de service.
Plus
loin, dans votre mémoire, à la page 9 de la nouvelle version, vous nous
écrivez : «En ce qui concerne la fréquentation
des collèges anglophones, nous saluons l'approche modérée du projet de loi. Il
n'aurait pas été opportun d'étendre l'application de la Charte de la
langue française à l'enseignement collégial.»
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus,
élaborer : Pourquoi dites-vous qu'il n'aurait pas été opportun d'étendre la charte... la loi 101 au collégial?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Mme Chabot.
Mme Chabot (Louise) : Bien, peut-être pour quelques
raisons, lorsque nous avons fait ces débats, parce que c'est une question au-delà du projet de loi qui est devant
nous, c'est une question qui a déjà été adressée. Puis il y a, là... Ce qu'on peut observer, c'est que, quand on parle
des cégeps, en tout cas, pour nous, quand on parle des cégeps, on parle
de l'enseignement supérieur, hein? Pour
nous, les cégeps, comme les universités, font partie de l'enseignement
supérieur. Donc, c'est une clientèle adulte,
qui ont des choix. Et, pour nous, on veut que ces choix-là s'expriment
librement. Donc, appliquer la loi 101
dans les cégeps, bien, pour nous, on trouvait que la mesure était pondérée, de
ne pas aller jusque-là, même si je vous dirais que, dans nos rangs,
certains y auraient vu, là, une occasion justement de renforcer encore plus. Mais, pour la CSQ, cela dit, ça nous a
amenés à nous questionner beaucoup sur : s'il n'y a pas l'application de
la loi 101 dans les cégeps — puis c'est ce que le
projet de loi préconise — ça ne veut pas dire
que nos cégeps, là, que nos réseaux d'enseignement supérieur ne doivent pas
être à la hauteur du fait français, et donc du raffermissement de la langue
française.
C'est comme ça qu'on a regardé diverses
mesures qui peuvent renforcer le fait français dans les cégeps. Puis on se dit, en mes
termes, ce soir, un tien vaut mieux que deux tu l'auras. Renforçons les
mesures. Allons voir. Observons sur le terrain
si ça a donné des résultats. Puis, si on voit qu'on stagne encore sur des
questions comme ça, bien, on pourra se dire, à une autre étape : Bien, peut-être qu'on est rendus à l'étape d'appliquer
la loi 101 dans nos cégeps. Mais là donnons-nous la chance au moins de... Puis, c'est comme ça qu'on
proposait des mesures, là, de renforcer les cours... de l'offre de cours
en français, ou l'obtention d'une diplomation liée à l'obligation d'avoir
réussi. Bien, c'est comme ça qu'on le présente.
Mme Roy (Montarville) : Et ce que vous dites rejoint
justement des gens à qui nous parlions cet après-midi, ces enseignants du français langue seconde au cégep. C'était
très intéressant, ce qu'ils disaient d'ailleurs.
Le temps est court. Comme c'est un projet de
loi qui est volumineux, vous avez plusieurs opinions sur plusieurs de ses
articles. Quel est pour la CSQ le principal irritant avec le projet de loi
n° 14, l'élément qui, pour vous, n'a pas sa place, ne va pas assez loin, vous dérange? Quel est… Si
on en avait, là… malheureusement, on a peu de temps, qu'un seul... Ce
serait à quel égard qu'il faudrait...
Mme
Chabot (Louise) : Je pourrais vous
dire, c'est renoncer, hein?
Mme
Roy (Montarville) : C'est une
question de temps malheureusement.
Mme
Chabot (Louise) : Bien, en tout cas,
l'idée que le projet de loi demeure proactif, il pourrait l'être plus
effectivement. Puis l'idée de la nuance. Quand on a parlé d'équilibre, là,
je... Au même titre qu'on va nous plaider, pour
les entreprises, d'être souples, d'être accompagnateurs, je pense, j'ai lancé
un message clair quand on parle de nos services
de garde éducatifs à la petite enfance, où on veut appliquer la loi 101, là, il
y a un message clair : Appliquons la loi 101. Mais, du côté des
bureaux coordonnateurs, en milieu familial, je pense qu'il faut avoir là une
mesure d'accompagnement pour renforcer le français, qu'elle possède et qu'elle
maîtrise bien la langue, mais qu'elle se sente soutenue et accompagnée plutôt
que d'être sous la loupe d'un risque de perdre leur droit d'exercer au nom
de...
Je pense que, là-dessus, aux métiers qu'on
veut proactifs, d'aller un peu plus loin dans certaines mesures, comme la langue du travail, comme les outils dans nos
milieux, dans nos écoles, les classes d'accueil, les outils qu'on veut
franciser, les logiciels, et tout ça, donc des moyens qu'on veut de plus, des
ressources humaines et financières de plus aussi au même titre qu'on veut
pour... Si on veut avancer, je pense que vous devez avoir les bonnes mesures au
niveau de nos services de garde.
Mme
Roy (Montarville) : Je vous remercie
beaucoup. C'est clair, votre souci d'équilibre. Merci.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci beaucoup, Mmes Chabot et de Sève, M. Danis.
Sur ce, la commission ajourne ses travaux au
mercredi 27 mars 2013, après les affaires courantes, afin de poursuivre ce mandat. Je vous souhaite une bonne fin de
soirée. Merci.
(Fin de la séance à
21 h 10)