(Neuf
heures cinquante-neuf minutes)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission
de la culture et de l'éducation ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le
mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre
de la consultation générale sur le projet de loi n° 14, Loi
modifiant la Charte de la langue française, la Charte des droits et libertés de
la personne et d'autres dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
• (10 heures) •
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente.
Mme Charbonneau (Mille-Îles) sera remplacée par Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger) et M. Sklavounos (Laurier-Dorion), par M. Kelley (Jacques-Cartier).
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci. Pour ce qui est de l'ordre du jour, cet
avant-midi, nous allons débuter par les auditions de M. Éric Barnabé, de
MM. Jacques Boulianne et Michel Leduc et de MM. Giuliano D'andrea et Richard Smith. Cet après-midi, nous entendrons la
Fédération québécoise des associations foyers-écoles inc., le Comité d'aide
aux femmes sourdes de Québec et l'Association multiethnique pour l'intégration
des personnes handicapées. Finalement, ce soir, nous poursuivrons avec la
commission scolaire Lester-B.-Pearson et l'Office québécois de la langue
française.
Bonjour. Dans un
premier...
Une voix : …langue anglaise.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je suis désolée, je suis désolée. La commission scolaire
Lester-B.-Pearson et l'Office québécois de la
langue anglaise.
Auditions (suite)
Nous allons débuter
par un premier intervenant. Bonjour. Bienvenue à la commission. Je vous invite
à vous identifier, et vous allez disposer d'un
temps de 10 minutes; par la suite suivront les échanges avec les
différents groupes parlementaires. La parole est à vous.
M. Éric Barnabé
M.
Barnabé (Éric) :
Bonjour. Merci, Mme la Présidente. Premièrement, je tiens à remercier… Bien,
mon nom, c'est Éric Barnabé. J'agis à titre
personnel. Premièrement, je tiens à remercier les membres de cette commission
de m'avoir invité. Je ne suis pas un expert
mais un simple citoyen pour qui la langue est importante, même si mon
opinion diffère de celle généralement
véhiculée. L'avantage d'une commission publique est de permettre à des
individus comme moi de pouvoir
émettre une opinion sans être dans une organisation structurée qui opère depuis
assez longtemps et qui a obtenu suffisamment de visibilité pour être
reconnue et invitée par une commission régulière.
Puisqu'en
10 minutes je ne pourrai pas vous lire mon mémoire, je vais plutôt
profiter de ce temps pour expliquer pourquoi
cette loi est ségrégationniste et nous amène vers une pente dangereuse.
Sur
Wikipédia, la ségrégation raciale est définie comme étant «la séparation
physique des personnes de couleurs différentes
dans les activités qu'elles exercent couramment». La ségrégation peut être
instaurée par la loi ou de façon illégale, par la discrimination dans l'embauche
ou la location d'un logement par exemple.
Au
Québec, nous connaissons la ségrégation linguistique. Je suis conscient que la
loi 101 a besoin d'être mise à jour, c'est
pourquoi je crois qu'il faut profiter de la loi n° 14 pour freiner une
pente très glissante que le Québec est en voie de prendre.
Pour vous illustrer mon point, je vais vous
lire le paragraphe sur l'histoire du nazisme sur Wikipédia. Je ne prétends toutefois pas
que nous sommes rendus là, mais la progression et les faits historiques sont
là, vous n'avez qu'à changer le mot «juif» pour le mot «anglais». Sur Wikipédia :
«Durant toute son existence, de 1920 à 1945, les idéologues nazis, appuyés par la lecture des Protocoles des sages
de Sion, développent l'idée d'un complot orchestré par les Juifs.
Ceux-ci, désignés par le terme générique de
"juiverie", sont perçus par les nazis comme coupables, collectivement
responsables de la défaite de 1918 et de la révolution en Russie, dans le cadre
d'un complot mené contre une Allemagne innocente. Celle-ci n'aspirerait qu'à se libérer de la tutelle exercée par les
Juifs et leurs alliés. Les Juifs sont perçus ainsi comme un sujet politique essentiellement défini par [la]
race, sujet contre lequel il est nécessaire de mener une guerre : la
propagande du NSDAP — le parti national-socialiste des ouvriers allemands — et [du] IIIe Reich présente le conflit qui s'ouvre en 1939 comme une
"guerre contre les Juifs", ces derniers donnaient de nombreuses
preuves — bombardements… — de leur volonté d'extermination
du peuple [juif]; de même, les Juifs, entendus comme un groupe fantasmatique
homogène, sont ainsi présentés comme les principaux responsables du conflit.»
J'ai relevé dans les mesures du nazisme…
entre autres, aucun Juif ne peut être frère de race, boycott des commerces juifs,
restriction dans les emplois de la fonction publique, interdiction de mariage
entre Juifs et Allemands, privation de la citoyenneté allemande, perte
du droit de vote, interdiction de certaines professions libérales. Si les
autorités nazies s'acharnent sur les
victimes du pogrom, elles font preuve d'une mansuétude toute particulière à l'égard
des auteurs des pires exactions. Les
incendies, les destructions et les brutalités sont conformes aux instructions
données successivement par les responsables de la SA.
J'exagère? N'est-ce pas toujours la faute d'Ottawa
ou des Anglais si tout va tout croche au Québec? N'y a-t-il pas une tentative de boycott des magasins anglophones,
surtout américains? N'y a-t-il pas de groupes qui traquent les affiches anglophones? Combien de fois j'ai lu ou
entendu dans les médias que les anglophones du Québec ne sont pas des
vrais Québécois, qu'ils ne devraient pas avoir le droit de vote aux référendums
et qu'ils devraient quitter le Québec?
Les
Anglais ont gagné sur les plaines d'Abraham, mais c'est la faute de la France,
qui a donné ces quelques arpents de neige à l'Angleterre dans le traité de
Paris en 1763. C'est à la France que nous devrions en vouloir, pas aux Anglais.
Et,
finalement, pour qu'un anglophone puisse exercer une profession libérale au
Québec, il faut qu'il passe un examen de français de son ordre professionnel. C'est
déjà dans la loi.
Comme vous pouvez le constater, nous nous
dirigeons vers le même chemin. L'étape suivante, c'est les émeutes et les attaques physiques. Il y a quelques années,
certains nationalistes extrémistes ont mis des lettres dans la boîte postale de certains anglophones, où il était
écrit : Si j'ai pu mettre une lettre, j'aurais pu mettre une bombe. Les
multiples manifestations — les plus récentes étant celles des carrés rouges — sont en train de nous habituer aux émeutes populaires. Ces
manifestations sont orchestrées par les groupes syndicaux, tout comme pour l'Allemagne
avec le parti national-socialiste des ouvriers allemands d'Adolf Hitler.
Actuellement,
probablement plus de la moitié des plaintes de l'Office québécois de la langue
française sont le résultat de moins de 10 personnes représentant trois ou
quatre groupes voués à la défense de la langue française qui, en réalité, ne font que s'attaquer aux mots
anglophones qu'ils trouvent. Pourtant, aucun d'entre eux ne s'insurge
contre le fait qu'un professeur peut
enseigner le français avec une note de passage de 70 % obtenue en quatre
essais au moins et avec les réponses sur le Net. Aucun d'eux ne
revendique le droit d'être servi en français à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal, alors que les médias le
rapportent régulièrement. Aucun d'eux ne fait de manifestation ou ne
tente de monter des groupes de professeurs
afin d'aider les immigrants à apprendre le français. Quand on est fier de sa
langue, on agit pour l'améliorer, la protéger et la supporter, pas en attaquant
son voisin simplement parce qu'il parle anglais.
Malheureusement,
depuis que, dans les médias, la loi n° 14 est jugée ségrégationniste,
discriminatoire et ne visant que les
anglophones, l'Office québécois de la langue française s'attaque maintenant aux
mots italiens. Il est peut-être vrai que le menu du restaurant
montréalais était unilingue anglais. Y avait-il une version française? À
Québec, un restaurant italien s'est vu aviser que son slogan depuis plus de 15
ans, Pizza, pasta & musica, devrait être cessé parce qu'il ne répond
pas aux règles. Il y a même un restaurant qui a son menu en sept ou huit
langues différentes pour les touristes. Est-ce légal? Pourtant, les boutiques
dont le nom est écrit au son ou avec le mot «boutique» avec un k à la fin du mot pleuvent au Québec. La Boutik Élektra
est mon meilleur exemple… la Boutik Électrik, pardon. Pas le droit d'utiliser des mots autres que français, mais le
français peut être écrit tout croche, là il n'y a aucun problème. Si tout
cela n'est pas de la discrimination et de la ségrégation contre la langue
anglaise, qu'est-ce que c'est?
Et,
même si un anglophone parle français, c'est un anglophone pour les
statistiques. Si cela fait quatre ou cinq générations que vous êtes au Québec,
de mère, grand-mère et arrière-grand-mère italienne, portugaise, grecque ou
arabe, vous êtes toujours un allophone. Mais quand deviendront-ils des
Québécois?
La deuxième langue parlée à Montréal est l'allophone,
ils sont plus nombreux que les anglophones. Il est vrai que le français recule à Montréal. Les francophones de
souche quittent la banlieue au point que 47 villes anglophones risquent de
perdre leur statut bilingue, parce qu'il y a trop de francophones dans la
place, mais à Montréal l'anglais recule dans la même proportion que le français
à cause de l'arrivée des allophones. Et comment cela se fait-il que le français
recule à Montréal si 80 % des jeunes anglophones sont bilingues, 85 %
des immigrants sont francophones, et que 100 % des Québécois de souche
sont francophones? Serait-il possible que les statistiques soient trompeuses?
L'affichage en anglais, évidemment que les
Anglais… les immigrants vont écrire en anglais. Le français est une langue difficile à écrire, et nous ne les formons pas
à leur arrivée au Québec. Les grandes entreprises qui affichent en anglais uniquement, est-ce que Bureau en Gros vend
plus pour autant? Lors de la Révolution tranquille, à la grosse Anglaise
de chez Eaton s'est ajoutée la grosse
Québécoise de chez Eaton, simplement parce que les Québécois voulaient acheter
chez Eaton. Le pouvoir d'achat est notre force, mais, à voir le stationnement
du Costco Wholehouse, nous ne faisons rien pour que cela change.
Nos
organismes voués à la langue française sont les principaux responsables du
recul du français au Québec. C'est à nous d'agir,
pas à réagir. Profitons de la loi n° 14 pour réorienter nos efforts pour
la langue française et non contre l'anglais. C'est la Charte de la
langue française, après tout.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Barnabé. Nous allons
commencer les échanges, et je vais du côté du
gouvernement. Mme la ministre responsable de la Charte de la langue française,
la parole est à vous.
Mme
De Courcy : Nous aurons un
commentaire et pas de question, M. Barnabé. Au Québec existe un grand privilège que nous avons tous et un droit, c'est
la liberté d'expression. Je déplore par ailleurs, dans votre
intervention, les comparaisons douteuses et les excès de langage. Merci d'avoir
participé.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de Bellechasse,
est-ce que vous avez des questions?
• (10 h 10) •
Mme
Vien : M.
Barnabé, on est ici en milieu de travail pour s'interroger sur une pièce
législative qui été déposée par le gouvernement du Québec, qui est, en l'occurrence,
le projet de loi n° 14, qui vient apporter, suggérer des
amendements à la Charte de la langue française. Dans la présentation que vous
nous avez faite, il y a beaucoup de réflexions
mais peu de suggestions — en tout cas, moi, je n'en ai pas
saisi aucune, peut-être ai-je mal compris — sur des changements que vous
voudriez apporter, des améliorations que vous souhaitiez, que vous… sur
lesquels on pourrait se pencher. Je
vous donne l'opportunité de nous en préciser peut-être quelques-unes, puis ça
se terminera là, mon intervention.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
députée. M. Barnabé.
M.
Barnabé (Éric) :
Bien, dans mon mémoire, j'ai proposé beaucoup d'amendements. Je ne voulais pas
tous les énumérer,
j'ai passé la loi n° 14 au complet. Ce que je déplore, c'est qu'actuellement
la langue française n'est pas mise en évidence. Ça fait 30 ans,
50 ans, même, qu'on a eu la Révolution tranquille, on écrit le français
tout croche. On ne privilégie pas le français, au Québec, on se contente de
vouloir éliminer l'anglais.
Je
peux comprendre qu'au Québec ça se passe en français, je suis d'accord. Les
anglophones sont d'accord, les allophones sont
d'accord. Moi, je ne demeure pas loin de l'Université Laval, je côtoie beaucoup
d'immigrants. Tous veulent le français, mais
ils ne se sentent pas acceptés au Québec. Ils arrivent au Québec, ils sont
laissés à eux-mêmes. Les anglophones,
80 % des anglophones sont bilingues, l'anglais... le français est mieux
enseigné aux écoles anglaises qu'aux
écoles françaises. Ce n'est pas logique. On est au Québec, on parle français.
Pourquoi on ne fait pas des efforts pour
l'amélioration de la langue française? Pourquoi l'éducation est si poche du
français à l'école? C'est-u normal qu'on arrive au cégep puis ne pas être capable de faire une phrase? Moi, dans
un café sur la rue Myrand, j'ai entendu une fille jaser avec une amie
sur sa thèse, dire : Je m'avais trompée. C'est ça, l'élite de notre
société? Ce n'est pas logique.
Moi,
je veux que le français soit bien écrit. J'écris mal le français et je suis un
privilégié, parce qu'il y en a que c'est pire que moi, il y en a que c'est écrit
carrément au son. C'est-u logique que le français écrit soit si mal écrit, si
mal enseigné? Moi, je veux ça. Puis là je
regarde aller, puis ce que je vois, là, c'est du racisme des organismes de
défense. J'étais ici mardi passé, puis ça
court après les affiches en anglais. Mais comment ça se fait qu'il n'y a
personne qui veut que le français
soit mieux écrit? Ce n'est pas logique. On est au Québec, il faut protéger
notre langue. Il n'y a personne qui veut le faire. Ce n'est pas logique,
c'est tout.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. Barnabé. Je vais maintenant du côté du
deuxième groupe de l'opposition. Mme la
députée de Montarville, vous avez la parole.
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Écoutez, je vais prendre la balle au bond, pour répéter l'expression de quelqu'un, et je... D'abord,
merci. Merci pour le mémoire, merci pour vous être déplacé. Et je vais
poursuivre dans la veine de ma collègue du premier groupe d'opposition.
Il y a
94 amendements qui sont dans le projet de loi n° 14. S'il n'y en
avait qu'un, selon vous, qui serait un irritant majeur, quel est l'article?
Quel est l'irritant? Quelle est la modification qu'on veut apporter à la charte
qui vous dérange particulièrement?
M.
Barnabé (Éric) :
Moi, je dirais plutôt que c'est un qui manque : privilégier le français.
Comment ça se fait qu'il n'y a rien qui dit que… mettre des efforts pour que les immigrants
qui arrivent, au lieu d'attendre un an avant d'avoir un cours de français qui dure 33 semaines de
jour, du lundi au vendredi… Ça fait que tu
attends un an. Tu es sur l'aide social ou bien
donc tu travailles. Tu travailles, tu ne peux pas aller suivre le cours. Ça
fait qu'ils sont tous laissés à eux-mêmes, les ressources ne sont pas là.
Puis, de l'autre côté,
on dit aux immigrants : Tu es né au Québec, mais ce n'est pas grave. Vu
que ta langue natale, c'est l'arabe, bien on
va te donner des cours d'arabe. Ils n'en ont rien à cirer. Excusez-moi, là,
mais je connais des gens qui sont nés
au Québec de parents arabes. Ils s'en foutent. Ils parlent en arabe avec leurs
parents, mais ils ne veulent pas de
cours. Ils veulent être considérés comme des Québécois, c'est juste ça qu'ils
veulent. Ils veulent être des Québécois, on leur dit : Tu es un
immigrant, tu es un enfant d'immigrant. Ils sont francophones, ils veulent être
en français, mais on ne les accepte pas. Ce n'est pas logique.
Comment ça se fait qu'un
professeur peut enseigner s'il passe à 70 % les cours de français? Moi, j'ai
conseillé de mettre l'accent... un professeur de français ne fait que du
français, et il y a des cours d'amélioration. Il se concentre sur le français pour qu'il soit un français parfait, pour
enseigner un bon français. Il faut enseigner le français, tout le monde veut enseigner le français. J'ai lu dans
le rapport annuel de l'Office québécois de la langue française qu'il y a
une année ils ont envoyé, pendant la Francophonie, 27 000 jeux sur la
langue française. Ils ont eu une demande pour en avoir plus encore, les gens
veulent ça.
Mardi
passé, j'étais ici. L'AMDEQ donne des cours de français à des immigrants
chinois qui achètent des dépanneurs parce qu'ils n'ont pas le temps d'aller
suivre 33 semaines de cours de français, ils ont un commerce à opérer. La plupart des
commerces qui écrivent en anglais, à Montréal, écrivent pourquoi? C'est des
immigrants qui arrivent, ils ne sont
pas capables d'écrire le français correctement. Mais l'anglais, c'est facile,
ils mettent des affiches en anglais. Moi,
je propose, pour l'Office québécois de la langue française, de mettre des
modèles sur leur site d'affiches en français pour qu'eux voient comment faire, pour qu'ils puissent soit les copier,
soit les reproduire, simplement pour qu'il y ait un modèle. Tu sais, une microentreprise, quand c'est
le propriétaire qui travaille, s'il parle seulement anglais, il va
répondre aux gens en anglais. S'il n'a pas d'argent
pour engager un employé, il ne l'engagera pas. Puis, en général, il va
engager un immigrant, parce qu'il y a rien qu'un immigrant qui engage un
immigrant, au Québec, surtout dans les petits commerces.
Puis ça, c'est un phénomène que j'ai vu beaucoup. J'ai fait 11 ans de taxi
à Québec; j'en ai vu, des immigrants. J'ai
travaillé dans la restauration; j'en ai vu, des immigrants. Il y a beaucoup d'immigrants…
En général, pour engager un immigrant, ça prend un immigrant. Ça fait que les petits
commerces d'immigrants engagent des immigrants, puis en général la langue de
travail est le français, parce que c'est la seule langue commune.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci beaucoup, M. Barnabé. C'est
malheureusement tout le temps qui était alloué
pour le deuxième groupe d'opposition.
J'invite
maintenant MM. Boulianne et Leduc à prendre place. Nous allons suspendre
quelques instants.
(Suspension
de la séance à 10 h 17)
(Reprise
à 10 h 18)
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Bonjour. Je vous demande de bien
vouloir vous identifier, d'identifier
également la personne qui vous accompagne. Vous allez disposer d'un temps de 10
minutes pour faire votre exposé, suivra une période d'échange avec les membres
de la commission. La parole est à vous.
MM. Jacques Boulianne et Michel Leduc
M. Leduc (Michel) : Merci. Mon nom est Michel Leduc,
résident de Laval. Je suis accompagné de M.
Jacques Boulianne, également résident de Laval. Nous allons prendre la parole
tour à tour à l'intérieur du 10 minutes qui nous est imparti. M. Boulianne
va avoir l'occasion de commencer, et je vais poursuivre. On voudrait remercier
la commission de nous donner l'occasion de nous exprimer sur le projet de loi
n° 14. Merci beaucoup aux membres de la commission.
•
(10 h 20) •
M. Boulianne (Jacques) : Alors, bonjour, mesdames et
messieurs. Ça nous fait plaisir... Bon, Jacques
Boulianne, comme M. Leduc vient de le dire.
Ça nous fait plaisir d'être avec vous pour vous soumettre nos réflexions sur le
projet de loi n° 14 qui vise à amender la loi 101.
En
ce qui concerne... A priori, on peut dire, d'emblée, que nous sommes favorables
au projet de loi dans son ensemble, car nous croyons qu'il est temps de
renforcer la loi 101, en particulier — puis nous sommes résidents de Laval — dans la région de Montréal, parce que cette région-là
connaît une diminution significative des citoyens qui ont comme langue
maternelle le français. Même si la minorité anglaise demeure à un niveau
stable — quand je dis «la minorité
anglaise», on parle de minorité de langue maternelle anglaise — donc, demeure à un niveau stable, à peu près
10 % de la population, l'anglais demeure malgré tout une langue qui attire
de plus en plus d'allophones.
Le
fait d'être en Amérique, un voisin puissant que sont les États-Unis, ne peut
que nous inciter à prendre des mesures qui
vont faire en sorte que le français demeure la langue commune au Québec. Nous
soumettons cependant des amendements
au projet de loi. Vous les avez, on les a libellés dans le mémoire. Pour l'instant,
je n'en fais qu'un résumé.
Donc,
dans le préambule, on vous suggère des modifications en rapport avec le
multiculturalisme; dans le domaine municipal aussi, où nous souhaitons plus de
fermeté par rapport au bilinguisme — on pourra en parler tantôt — et
par rapport également à la nécessité pour les municipalités de se doter d'une
politique linguistique qui devrait être
soumise pour consultation auprès de la population.
On
souhaite également un ajout substantiel à l'article 52.1 de la loi actuelle qui
touche la langue du commerce et des
affaires, en particulier sur les produits technologiques, qui font une place
considérable à l'anglais. Juste pour
illustration, une petite visite rapide dans un cinéma de Laval, dans la partie
des arcades, m'a fait constater, par exemple, que toutes les indications pour faire fonctionner ces arcades, dans à
peu près 80 % des appareils, étaient libellées en anglais.
Le
ministère de l'Immigration devrait également démontrer une volonté ferme d'inclure
les régions dans sa politique d'intégration
des immigrants, on ne voit pas cette mention-là dans le projet de loi, de telle
sorte que, forcément, les immigrants s'agglutinent dans la grande région
de Montréal.
Un nouveau chapitre devrait parler du
français et de l'informatique comme moyen de diffusion et de rayonnement du français. Des centres de recherche
devraient être mis à contribution pour la création de logiciels en français.
La situation à Laval — puis
nous sommes tous les deux résidents de Laval — est
décrite comme préoccupante, car il s'agit d'une des plus grandes villes du Québec
en termes de population, la troisième, en fait; or, l'anglais est de
plus en plus présent à Laval à cause de l'usage du bilinguisme public, ce
bilinguisme qui a tendance à se répandre autant dans l'affichage que dans la
publicité ou même dans les avis publics. Commencent à apparaître à Laval — et c'est un phénomène
relativement nouveau — des affiches, des panneaux
publicitaires, le long des artères, en anglais
uniquement. On n'avait pas ça il y a 10 ans. Le message envoyé aux
immigrants, aux allophones, aux gens qui arrivent ici est de plus en plus
ambigu, alors qu'officiellement le français est la seule langue commune
reconnue dans la loi.
Il ne faut pas oublier que la langue est le principal
véhicule de la culture, que la culture intègre les gens. Mais, si on s'entend pour dire que le français est la
langue de 80 % de la population au Québec, il faut donc tendre vers l'adoption
de mesures qui vont favoriser l'intégration des immigrants à la culture de la
majorité, qui demeure, selon l'expression de Fernand Dumont, la culture de
convergence.
Le
nouveau chapitre qui donne plus de pouvoirs au ministre, avec la collaboration
de tous les ministères, pour faire du français la langue commune constitue un
avenir… pour l'avenir, je m'excuse, à la condition que tout soit
dynamisé par une volonté politique soutenue par tous les partis politiques et
une opinion publique convaincue de la justesse de l'avenir du français en
Amérique et dans le monde. Michel.
M.
Leduc (Michel) :
Je vais surtout revenir sur la question du bilinguisme, qui nous préoccupe
beaucoup en tant que Lavallois et en tant que
résidents aussi de la région de Montréal.
D'abord, une
constatation qui fait, je dirais, l'unanimité : Le français, au Québec,
est la langue commune, la langue normale et habituelle du travail, de l'enseignement,
du commerce, des communications, des affaires. C'est la loi 101. C'est une
loi qui fait consensus, même du côté fédéral.
Or, c'est cela qui est
en train de s'effriter dans la région de Montréal dont fait partie Laval. Le
bilinguisme s'installe partout — et,
quand je dis «bilinguisme», je ne veux pas dire le bilinguisme individuel, je
parle de bilinguisme collectif — s'installe partout dans les
communications, les commerces, les affaires. Les municipalités, il y en a 84 qui sont bilingues, officiellement bilingues. À notre
avis, elles doivent être soumises à la règle du 50 %, sinon on crée deux
types de municipalité : celles qui ont le droit de pratiquer le
bilinguisme et celles qui n'ont pas le droit mais qui voudraient avoir le
droit.
Je souligne que, dans
le Montréal métropolitain, il y a seulement 11,6 % de langue maternelle
anglaise. Il y a 14 municipalités qui ont le statut bilingue et sept sur
14 qui ont moins de 50 %. Or, le bilinguisme collectif s'installe et
envoie un message comme quoi il y a deux langues communes dans les faits, le
français et l'anglais. Comme les allophones
s'installent très majoritairement dans la région montréalaise, on leur envoie
un double message : Le français et l'anglais sont tous les deux
nécessaires pour vivre et travailler au Québec.
Or,
le danger du bilinguisme, dans la région de Montréal en tout cas, c'est qu'il
devienne contagieux. Je vais vous donner une
preuve : à Laval, troisième ville du Québec, plus de 400 000
habitants, alors Laval agit comme une ville bilingue,
même si elle n'a pas le statut officiel. On parlait, dans le mémoire, de
10 %. En fait, c'est plus près de 7 % de population de langue maternelle anglaise, mais,
avec une population allophone en pleine croissance, on trouve normal, à
Laval, de s'adresser en anglais aux ethnies qui viennent s'ajouter à la
population francophone.
Un exemple : il y
a un quartier à prépondérance multiethnique, Chomedey. La ville envoie
systématiquement à toutes les maisons un
bulletin en anglais. Que vous soyez francophone, allophone, peu importe, vous
recevez le bulletin en anglais, jusqu'à
tout récemment. Maintenant que le gouvernement a mis les pieds à Laval, il y a
peut-être des changements auxquels on
va assister. Dans les entreprises, les commerces, les caisses populaires, etc. :
anglais et français. J'ai aussi apporté
avec moi des documents bilingues que les citoyens reçoivent à Laval, français
et anglais. Ajoutez à ce phénomène la
mondialisation, qui s'exprime en anglais. La preuve nous est faite par toutes
les bannières américaines qui envahissent les centres commerciaux et les
rues principales qui affichent leur nom en anglais.
Encore une fois — c'est important — rien n'interdit d'être
bilingue, on souhaite même que les gens soient bilingues. C'est cette dimension collective qu'on essaie de restreindre
par la loi n° 14 afin que le français soit reconnu comme langue
commune partout sur le territoire du Québec et en particulier dans la région de
Montréal, où son caractère de langue commune est sérieusement menacé, en tout
cas selon nos observations. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, MM.
Boulianne et Leduc. Nous allons commencer notre période d'échange, et je vais
du côté du gouvernement. Mme la ministre, la parole est à vous.
• (10 h 30) •
Mme
De Courcy :
Merci, Mme la Présidente. Alors, bien, bonjour, messieurs. Merci d'avoir
participé activement à cette commission
parlementaire, c'est un moment important pour nous toutes et tous.
J'aurai
un commentaire et puis une question. Dans votre mémoire, je note que vous vous
préoccupez du fait que vous n'y voyez pas de mesure quant à l'accueil et l'intégration des
personnes immigrantes, et vous le déplorez, vous le déplorez. J'aimerais vous mentionner d'abord que, malheureusement,
quand on est dans une commission parlementaire, et avec les règles qui nous régissent, je ne pouvais pas y associer l'ensemble
des 18 mesures qui touchent l'immigration et l'intégration des
personnes immigrantes telles que je les ai mises de l'avant lors de l'annonce
du projet de loi.
Alors, je vous indique
d'ailleurs que ma tournée dans les diverses régions du Québec — j'ai fait 16 régions sur 17 — a été très fructueuse quant aux
mesures concrètes qui doivent être mises de l'avant. Lors de l'annonce du projet de loi, j'avais mentionné, entre autres, la
question de la régionalisation de l'immigration, mouvement timide qui avait été
amorcé par mes prédécesseurs mais qui résolument a besoin, là, d'être accentué,
mais, sans son complément en intégration, ça s'avérait une opération plutôt
périlleuse, périlleuse pour les personnes immigrantes qui s'en iraient en
région puis périlleuse pour la société d'accueil aussi, qui n'aurait pas les
moyens et les façons de faire pour les accueillir. Alors, au printemps, je vais
être en mesure... tard au printemps, je vais être en mesure d'annoncer des
mesures plus concrètes.
Il
y en a une par ailleurs qui est déjà, elle, mise de l'avant, je vous l'indique,
c'est la modification à la grille de sélection. J'en ai parlé assez abondamment lors de
la mise... du lancement du projet de loi et je vous dirais que ça m'apparaît
une modification qui va donner des fruits
mais un peu plus tard. Il y a déjà eu une première modification, dont on ne
voit pas les fruits encore. Je dirais que, d'ici
trois ans à cinq ans, on verra, à travers la grille de sélection, ce qui se
passera.
Autour des conférences régionales des élus au
Québec, le ministère de l'Immigration a des ententes avec l'ensemble des
conférences régionales des élus, qui planchent actuellement, c'est le cas de le
dire, sur le dossier de la régionalisation,
l'immigration, accueil et intégration. Alors, je suis vraiment, vraiment très
confiante du complément des mesures en immigration par rapport au projet
de loi n° 14, pas uniquement par rapport au projet de loi mais en
partie en complément de celui-ci.
D'ailleurs, la première ministre avait une
vision assez particulière et partagée, je crois. Le lien entre immigration et langue est important, et vous savez que
dorénavant ces deux ministères ont été jumelés. C'était une vision d'avenir pour les 50 000 personnes immigrantes qui se
joignent à la société québécoise année après année, plan que nous avons
reconduit. Il est clair qu'il faut qu'il y ait ce lien-là.
Notre gouvernement a aussi ajouté un
troisième lien qui m'apparaît incontournable, et c'est probablement un des liens les plus
étroits, d'ailleurs, avec le projet de loi n° 14, c'est celui de l'emploi,
s'assurer que les personnes immigrantes aient un emploi, un emploi en français mais qui peut aussi leur
permettre d'utiliser, bien sûr, toutes leurs compétences et les autres
langues qu'ils possèdent.
Alors,
je voulais faire cette mise au point là avec vous pour vous rassurer quant à la
cohésion que nous souhaitons avoir dans le
projet de loi n° 14 mais dans l'activité gouvernementale du ministère
de l'Immigration aussi.
Ma deuxième question... en fait ma première
question, ça touche les technologies, la langue numérique, ce que vous avez mis de l'avant.
J'aimerais ça que vous m'en disiez davantage. Est-ce que je dois comprendre que
vous déplorez l'absence de mention
dans le projet de loi quant à toute la question technologique et numérique,
autant dans l'utilisation de logiciels
que dans la pratique que nous avons de ces logiciels-là? Voulez-vous préciser
votre pensée et quelles suggestions vous nous feriez à cet égard?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme la ministre. M. Leduc.
M.
Leduc (Michel) : C'est qu'on est
beaucoup, nous, francophones… et je pense que, la loi 101,
loi n° 14 également, il y a beaucoup d'éléments défensifs.
Par ailleurs, dans le projet de
loi n° 14, il y a des éléments offensifs, c'est-à-dire qu'on parle de
la promotion de la langue française, on parle du rayonnement de la langue française, mais
il y a peu de moyens qui sont mentionnés. Or, un des moyens modernes, hypermodernes… Les jeunes sont tous aux nouvelles
technologies. Eh bien, pourquoi ne pas faire le rayonnement, utiliser ces nouvelles technologies pour établir un
meilleur rayonnement de la langue française d'abord en encourageant la
production de logiciels? Que ce soient des jeux, que ce soient des moyens d'apprentissage
du français, l'orthographe, le vocabulaire,
etc., il pourrait y avoir des applications. Pour les... enfin, les iPad, les
iPhone, enfin, de ce monde, il
pourrait exister à la disposition de... je pense en particulier aux jeunes qui
utilisent ces nouveaux moyens, ça n'existe
pas; à la disposition des écoles également. Dans les écoles, d'accord, il y en
a. Il pourrait y avoir plus, c'est-à-dire que c'est par le biais de ces technologies modernes qu'on peut faire
rayonner beaucoup le français et on ne le sent pas, à mon avis,
suffisamment dans le projet de loi.
Je sais que, par contre, le projet de loi
permet une collaboration d'autres ministères. On pense en particulier au ministère de l'Éducation, mais aussi au ministère des
technologies, Science et Technologie.
Mme De Courcy : ...je n'aurai pas d'autre question,
mais je voudrais vous remercier pour la qualité du mémoire et la vision positive et constructive dans les
amendements que vous proposez, j'y accorderai une attention particulière.
Merci, MM. Boulianne et Leduc.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, Mme la ministre. Je vais maintenant reconnaître le député de
Sainte-Marie—Saint-Jacques. La parole est à
vous, M. le député.
M.
Breton : Merci, Mme la Présidente. Je
veux saluer mes collègues d'en face. Bonjour, messieurs. Merci beaucoup de
participer à cette commission.
Écoutez, je trouve très intéressant ce que
vous dites. Et, bon, moi, je suis quelqu'un de Montréal, je suis quelqu'un qui a vécu...
qui a grandi dans un Montréal anglophone. Je me souviens, quand j'étais jeune,
d'aller dans le centre-ville puis de se faire servir beaucoup en
anglais. J'ai travaillé dans un contexte où la francisation s'est graduellement
faite grâce à la loi 101. Et peut-être
que vous ne l'avez pas entendu, mais les élus de la CAQ et de l'opposition
officielle en ont contre le caractère coercitif de la loi n° 14, et
moi, je vais vous dire, je trouve ça étonnant, parce que, dans la loi 101,
il y a des éléments coercitifs. Eux disent
qu'il faudrait juste faire la promotion du français et que le caractère
coercitif est un élément qui est... Dans le fond, ils voient ça comme
quelque chose de négatif. Et la semaine dernière je disais que, moi qui viens du milieu de l'environnement, je
sais par expérience que faire la simple promotion de l'environnement
sans qu'il y ait de règles pour faire en
sorte de protéger l'environnement, souvent ça a des résultats qui sont pour le
moins mitigés.
J'ai travaillé à Laval pendant un certain
temps, et ce que vous m'apportez là comme son de cloche par rapport, dans le fond, si je comprends bien, à une
certaine anglicisation de Laval, c'est quelque chose avec laquelle je n'étais
pas familier. Et là vous avez parlé de documentations municipales, si je ne m'abuse,
qui sont envoyées en anglais?
M. Leduc (Michel) : Dans le quartier Chomedey, oui.
Uniquement en anglais dans le quartier Chomedey,
oui.
M.
Breton : Ça, je dois vous avouer que
j'en... les deux bras m'en tombent.
M. Leduc
(Michel) : Nous aussi.
M. Breton : Oui, je n'en doute pas un instant. Et là, c'est ça, est-ce
que vous avez des indices, justement, qui témoignent,
outre ça… Parce que, dans le fond, ça — on va le dire en anglais — c'est un «smoking gun», je veux dire, ça nous dit de
façon très claire qu'il y a une anglicisation institutionnelle. Est-ce que vous
avez d'autres exemples comme ça à Laval ou ailleurs?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député. Oui.
M.
Leduc (Michel) : Ici, j'ai une lettre
qui a été envoyée aux résidents de Laval : «Dear residents, mesdames
messieurs…» Il n'y a pas de prépondérance, là, c'est caractère égal pour les
deux. J'ai ici un formulaire, Demande d'exclusion de la tarification des
services de l'eau, Water service fees exemption application, et tout
est en français et anglais, même niveau de caractère, il n'y a pas de
prépondérance du français. C'est deux exemples.
M.
Breton : Et là on parlait de villes
bilingues. Corrigez-moi si je me trompe, mais Laval n'est pas une ville
bilingue.
M.
Leduc (Michel) : Non, c'est 7 %
de langue maternelle anglaise.
M. Breton : Je vous le dis, je suis estomaqué. Je
n'ai pas d'autre question. Pour moi, la démonstration que vous faites montre l'importance du projet de
loi n° 14. Merci.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Je reconnais maintenant le député de
Saint-Hyacinthe.
•
(10 h 40) •
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Il
reste combien de temps, Mme la Présidente?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Environ deux minutes, questions-réponses.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Deux
minutes? O.K., je vais y aller rapidement.
Dans votre mémoire, à la page 3, vous
mentionnez qu'il y a un malaise avec le recours à des expressions comme «minorités ethniques»
ou «communautés culturelles» parce que, selon vous, en les employant on
reconnaît implicitement le concept du multiculturalisme. Alors, quelle
serait la formulation à privilégier, selon vous, dans nos...
M.
Leduc (Michel) : Dans le préambule,
vous voulez dire, hein?
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Bien, c'est
à la page 3, là, du...
M.
Leduc (Michel) : C'est dans le
préambule?
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Oui.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Boulianne… M. Leduc, c'est M.
Leduc.
M. Leduc (Michel) : Oui, bien on ne voit pas la nécessité
d'utiliser une expression «communautés
culturelles» ou «minorités ethniques». Je connais, moi, des citoyens d'origine
grecque qui sont ici depuis 50 ans, et on continue à les appeler des
communautés culturelles. Bien oui, mais à quel moment on va commencer à les
nommer «Québécois»? Québécois d'origine grecque, je veux bien, Québécois d'origine
italienne, mais Québécois.
Donc, il y a une anomalie de ce côté-là, et
le multiculturalisme, malheureusement, nous entraîne dans cette voie de catégorisation des citoyens. Alors, on le déplore
et on dit : Dans le préambule, au moins, de la loi n° 14, projet de
loi n° 14, on devrait parler simplement des citoyens venant d'ailleurs
ou issus de l'immigration, si on veut saluer leur contribution, mais pas les
qualifier… En les qualifiant, on les disqualifie.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci
bien.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci beaucoup. Nous allons aller maintenant du côté de l'opposition
officielle, et je reconnais le député de LaFontaine. M. le député, la parole
est à vous.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Alors, j'aimerais d'abord remercier M. Leduc et M. Boulianne pour le temps
que vous avez pris pour réfléchir sur cette importante question, rédiger un
mémoire, que nous avons lu, évidemment, avec la
plus grande attention, et de prendre le
temps ici ce matin de venir nous faire part de votre réflexion, de votre analyse et de vos suggestions.
Un
élément qui ressort entre autres : vous parlez du danger… des dangers,
devrais-je dire, du bilinguisme. Et vous citez quelques exemples et vous
suggérez quelques mesures pour faire en sorte que ce danger-là que vous avez
identifié soit arrêté… ou le limiter au maximum.
J'aimerais vous
entendre sur une réflexion qui a été rendue publique, de la bouche du député de
Rosemont, député de Rosemont qui est également ministre responsable de la
métropole et des relations avec la communauté anglophone. Le ministre avait donc dit le
19 janvier dernier dans son blogue, et je le cite : «Les
Anglo-Montréalais sont massivement
devenus bilingues, depuis un peu plus d'une génération. Ils voient, autour d'eux,
notamment à Montréal, une majorité de jeunes francophones bilingues.»
Fin de la citation.
Nous
convenons que, depuis les années 70, début 70, si nous prenons cette période
comme étant le début d'une période de référence, donc de 1971 à 2010, les
anglophones et allophones vont de plus en plus à l'école en français.
Et, à cet effet, en 1971 — prenons l'exemple des anglophones — 9,5 % des anglophones allaient à l'école en
français, et, en 2010, c'était tout près de
25 %. Chez les allophones, desquels, évidemment... groupe auquel
participent beaucoup de nouveaux Québécois
ou prennent part beaucoup de nouveaux Québécois, en 1971, 14,6 % des
allophones, c'est-à-dire des gens qui
n'ont pas le français ou l'anglais comme langue maternelle… en 1971,
14,6 % allaient à l'école en français et, en 2010, plus de
85 % allaient à l'école en français. Il y a également… Vous me permettrez
de citer cette dernière statistique. Pour ce qui est des allophones toujours,
au niveau de leur inscription au cégep en français, période moins grande, 1998 à 2009, 11 ans, 1998,
43,8 % des allophones allaient au cégep en français et, en 2009,
64,2 % étaient inscrits au cégep en français.
Alors, une fois que
nous avons jeté un oeil sur ce constat, cette photographie statistique, je
reviens donc à la citation du ministre responsable de la métropole, également
ministre responsable de la relation avec la communauté anglophone, où il disait que, de plus en plus — et
c'était un constat qu'il faisait, très ferme — on
constate de façon non équivoque que les jeunes
anglophones sont de plus en plus bilingues, autrement dit… la deuxième langue
étant le français. Et, à cet effet-là, il saluait comme étant une avancée ce
fait.
J'aimerais vous
entendre sur une déclaration toujours du même ministre responsable de la
métropole, donc responsable de Montréal et de la relation avec la communauté
anglophone, qui a affirmé, vous vous en rappelez, la fameuse citation : «STM, are
you listening?». Et, à une entrevue donnée à une radio anglophone, le ministre
avait pris position en faveur du bilinguisme des services de la Société de
transport de Montréal, la STM.
Alors,
vous, comment recevez-vous cette position très claire, très ferme du ministre
qui est responsable, oui, de la relation avec
la communauté anglophone mais qui est responsable également de la région de Montréal?
Comment recevez-vous cette prise de position
là très claire, très ferme à l'effet que la STM devrait pouvoir offrir et sans
équivoque, là, des services non seulement en français, mais également en
anglais? Y voyez-vous soit un égarement du ministre ou un double discours du
gouvernement?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. le
député de LaFontaine. M. Boulianne.
M.
Boulianne (Jacques) : Bien, ma première réflexion, suite à votre intervention, c'est une
question : Est-ce qu'on serait là, est-ce qu'on serait rendus là s'il n'y
avait pas eu la loi 101? Et est-ce que la loi 101 a été adoptée, à
l'époque, à l'unanimité par l'Assemblée nationale? Moi, je pense que la réponse
aux deux questions, c'est non. Et, si on arrive à ce taux de bilinguisme des anglophones, c'est parce qu'il y a eu la
loi 101 et parce qu'il y a eu des mesures claires pour favoriser le
développement de la langue française. Ça, c'est le premier volet de la réponse.
Le
deuxième volet, c'est : Est-ce que le fait de maîtriser deux langues fait
que je vais utiliser deux langues?, et à cela ma réponse, c'est non. Et ça se vérifie,
parce que de plus en plus, à Laval, on se fait aborder dans les commerces
en anglais. Alors, peut-être que la personne qui m'aborde en anglais, elle
parle l'anglais et le français, mais son premier réflexe, c'est de m'aborder en anglais… ou encore de parler entre eux en
anglais, d'aborder le client en anglais, et, dès qu'ils se rendent compte que le client parle français, là ils vont nous
parler en français. Ils sont peut-être bilingues, mais à quelque part il n'y a pas eu encore de vraie prise
de conscience qu'au Québec il faut que ce soit en français que ça se
passe.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M.
Boulianne. M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Oui.
Pour le premier volet, je vous remercie beaucoup. Sur le deuxième volet, double
discours ou égarement du ministre?
M. Leduc
(Michel) : Sur la STM?
M. Tanguay : Oui.
• (10 h 50) •
M.
Leduc (Michel) :
Sur la STM, ça dépend de l'interprétation. Moi, j'ai interprété cela... Il y
avait une certaine ambiguïté, mais je l'ai
interprété comme quoi la personne au guichet, étant donné qu'elle était abordée
en anglais par un anglophone, elle aurait pu... la personne aurait pu, au
conditionnel, répondre en anglais, bon, aurait pu. Elle ne l'a pas fait, la
personne a dit : Je vais lui répondre en français. C'est son droit de lui
répondre en français.
Je
me suis renseigné. Prenons un autre cas, par exemple les postiers. Saviez-vous
que les postiers, qui relèvent du fédéral, n'ont pas l'obligation d'être bilingues?
Les cadres, oui, mais pas les postiers. Donc, on ne peut pas généraliser
le bilinguisme. Dans un groupe comme les employés de la STM, on ne peut pas les
obliger à être bilingues.
D'ailleurs,
à ce propos-là, vous soulevez une question fort intéressante, fort importante.
J'ai ici un rapport qui date de 1998, une étude de 1998 commandée par le
Conseil de la langue française. Le chercheur Michel Pagé constatait que «les
services publics [...] servent généralement en anglais toute personne physique
qui demande d'être servie dans cette langue».
Les immigrants et les nouveaux arrivants sont dans une large mesure servis en
anglais parce que la définition de la clientèle anglophone dans les
documents publics ne fait aucune distinction entre des personnes de langue
maternelle anglaise depuis plusieurs générations… Les immigrants qui accèdent
aux services destinés aux anglophones, notamment en
matière de santé et de services sociaux, «profitent du caractère très libéral — très libéral — de la définition de la clientèle et de l'accueil à ces services»,
notait le chercheur. La seule règle appliquée
est la liberté de choix des individus. Alors, votre client était-il de langue
maternelle anglaise?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Et comment, donc,
recevez-vous aujourd'hui, à la lumière de ce que vous venez de nous dire, l'intervention
très ferme du ministre à l'effet que la STM devait s'assurer que le service
soit offert également, pour ceux qui le requièrent, en anglais?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Leduc.
M. Leduc (Michel) : Écoutez, encore une fois, si la loi
parle de langue maternelle anglaise, le droit est accordé à la minorité dite
historique de langue maternelle anglaise, point. Donc, on ne sait pas si la
personne qui s'adresse… est de langue maternelle anglaise ou si c'est un
allophone qui nous arrive des Indes et qui a l'obligation d'apprendre le
français. Donc, dans les circonstances, il vaudrait mieux s'adresser à tout le
monde en français.
Mais, encore une fois, l'individu qui est au
guichet, lui aussi, il a une liberté. Il a une liberté tout comme le postier, il n'est pas
obligé d'être bilingue. Mais, si une personne lui demande une information en
anglais, si le postier se sent capable de
répondre, bien, libre à lui de répondre. Au fond, on est dans une question...
dans une situation de liberté individuelle.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Par contre, quand on parle
de la STM et de la manière dont elle devrait pouvoir agir de façon systématique
ou d'avoir cette capacité-là systématiquement à répondre à une demande qui lui
est adressée en anglais, là on n'est plus
dans les libertés individuelles, mais on est dans l'institution et sa façon,
justement, de répondre aux clients.
Mais, mon point, j'aimerais que vous
précisiez la distinction que vous faites très nettement avec la découpure de journal de 1998 — et c'est ce que vous venez de dire — par rapport à la langue maternelle anglaise. Est-ce à
dire que donc le service ne devrait être disponible qu'à des gens dont nous aurions l'assurance
qu'ils sont de langue maternelle anglaise et que, dans les autres cas,
on devrait l'exclure?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Leduc.
M. Leduc (Michel) : Bien, ce n'est pas nécessaire… Bien,
les exclure, je comprends que ce n'est pas écrit
dans le front des gens qu'ils sont de langue
maternelle anglaise, mais ça veut dire ceci — j'interprète
la loi 101 de cette façon, la loi n° 14 aussi : On répond en
français. Si la personne insiste pour avoir une réponse en anglais, là on s'en
remet à la liberté individuelle de la
personne à qui on demande de répondre en anglais, c'est une question de liberté
individuelle. Parce qu'il faut que le cadre soit français, sinon on s'y perd et
en particulier avec les allophones, si on veut que les allophones aient une impulsion, sentent la nécessité d'apprendre le
français. C'est là qu'est le problème. S'ils ne sentent pas la nécessité, bien ils vont dire : Tout le
monde parle anglais, parlons anglais. C'est quoi, cette langue commune? Elle
est où, la langue commune, puisque tout le monde me répond en anglais? D'où l'importance
de répondre en français à tout le monde. Et,
si la personne insiste pour être... bien là c'est une question de liberté
individuelle de la part de la personne qui est employée. Mais on ne peut
pas bilinguiser le système, sinon on est en porte-à-faux non seulement par
rapport à la loi n° 14, mais par
rapport à la loi 101. Encore une fois, ce que le chercheur dit ici, c'est
qu'on a trop ouvert, on a trop ouvert
les portes, les portes sont grandes ouvertes, et il faut tranquillement les
resserrer et revenir à l'esprit de la loi 101, ce à quoi nous invite la
loi n° 14.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. M. le député de LaFontaine.
M.
Tanguay : Et, en regard de ce que
vous dites, donc, ça m'inspire deux éléments, le premier, donc, le fait que l'on
puisse... Et il faudrait définir, si la personne insiste pour être... il
faudrait définir ce que ce vous entendez par «insister».
Si on rephrase encore une fois, une deuxième fois en anglais la requête que
nous formulons à la personne au guichet?
Mais, essentiellement, ce que vous me dites, c'est que ce serait laissé dans la
sphère individuelle et aux aléas de la capacité, au-delà d'une politique
interne de l'institution, mais de l'employé et de son désir de répondre ou pas,
donc sa capacité et son désir aussi de répondre ou pas. Ça, c'est une chose.
Et, deuxième des choses, quand vous parlez de
porte-à-faux, d'être en porte-à-faux par rapport à votre… qui est tout à fait honnête et défendable, votre conception de l'application de la loi 101, je pense
qu'on peut peut-être y voir là également des
commentaires du ministre qui à tout le moins, vous l'avez dit, avaient l'ambiguïté
et cette influence-là de faire en sorte que la vision était qu'il était en
porte-à-faux, justement, par rapport à votre interprétation que vous partagez.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. le député de LaFontaine.
Malheureusement, messieurs, je dois aller du
côté du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Montarville, la parole
est à vous.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Peut-on me dire de combien de temps je
dispose?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) :
3 min 30 s, Mme la députée.
Mme
Roy (Montarville) : Oh là là! Merci.
Bonjour, messieurs. Merci d'être là. Merci pour votre mémoire.
Écoutez,
vous dites qu'il faut revenir à l'esprit de la loi 101. Nous, ce que nous
disons, au deuxième groupe d'opposition, c'est :
La loi 101 est bonne, et il y a déjà dedans plusieurs mesures coercitives.
Mon collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques trouvait que ce n'était pas suffisant; nous considérons
que des amendes pouvant aller jusqu'à 20 000 $,
c'est assez coercitif. Ce qu'on dit, c'est qu'on devrait les appliquer, puisqu'elles
n'ont pas été appliquées, ces mesures-là. C'est un gros problème.
Mais, cela dit, pour revenir à l'esprit de la
loi 101, que pensez-vous de ce règlement qui a été écrit à l'époque de la loi 101 et qui permet aux enfants de parents
militaires de choisir la langue ou l'école de leur choix? Ça fait partie de l'esprit
de la loi 101 initialement. Vous en pensez quoi, de cette mesure?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Leduc.
M. Leduc (Michel) : Vous avez raison, c'était permis dans
la loi 101, donc on n'a pas d'objection à
ce qu'on revienne à la loi 101 là-dessus, sauf que ce serait normal que
des militaires... Parce que, quand on dit «les militaires», c'est comme si on incluait 100 % des militaires, mais
il y en a sûrement un certain nombre qui s'installent au Québec pour plus qu'une génération. Il pourrait y
avoir une distinction de faite. Mais, si c'est là pour causer des
problèmes... Parce que notre principale préoccupation… Vous parlez de la région
de Québec. Je sais qu'ils sont beaucoup dans la région de Québec, 700, qu'on m'a
dit, c'est énorme, mais nous, on pense surtout que le problème, il est du côté
de la région de Montréal.
Encore
une fois, je veux apporter une autre statistique inquiétante : les
transferts linguistiques, ça, malgré la loi 101, les transferts linguistiques
se font à 54 % en faveur de l'anglais. C'est les dernières statistiques,
les dernières études. Alors, la loi 101
a fait son effet, mais elle n'est pas suffisante, c'est ça, la conclusion,
parce que, si c'était si fort, bien il n'y aurait pas 54 % des allophones
qui opteraient pour l'anglais en arrivant au Québec. C'est énorme. C'est des
transferts linguistiques, ça.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci. Oui, Mme la députée, il vous reste encore… moins d'une minute.
Mme Roy (Montarville) : Parfait. Il est important que vous
sachiez également que nous sommes tout à fait
en faveur des mesures qui sont dans la loi,
des mesures incitatives, et surtout l'amélioration de la francisation de nos
nouveaux arrivants. Et Laval est en train de
vivre une situation que Montréal a connue, et sachez que nous appuyons ces
mesures-là.
Et
on a peu de temps. Avez-vous un petit exemple, été témoins du fait que ces
nouveaux arrivants manquent de francisation ou de cours de francisation, de
français?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
M. Leduc, en quelques secondes. M Boulianne, oui.
M. Boulianne (Jacques) : Je sais que les commissions scolaires — parce que j'ai été associé aux commissions scolaires longtemps — n'ont pas suffisamment de ressources pour faire de la
francisation, parce que, dans la région de Montréal, il y a une grosse demande
des commissions scolaires pour franciser, sauf qu'il manque de ressources, et
effectivement je pense qu'il faudrait ajouter des ressources en francisation
dans le réseau scolaire. Ça, on partage tout à fait, parce que le message qu'il faut
qu'on envoie — puis je vais
terminer là-dessus, Mme la Présidente — le message qu'il
faut qu'on envoie, c'est : Il faut clairement envoyer le message qu'au
Québec c'est en français que ça doit se passer.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci beaucoup, MM. Boulianne et Leduc.
Nous
allons suspendre quelques instants pour permettre aux autres intervenants de
prendre place. Merci. Je vous demande, à la ministre et aux députés, après, de
rester.
(Suspension
de la séance à 10 h 59)
(Reprise
à 11 h 4)
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Bonjour. Nous reprenons nos travaux et nous accueillons M. Giuliano D'andrea et M. Richard Smith, qui va nous parler
par audioconférence, ce matin, du Japon. MM. D'andrea et Smith, vous
avez 10 minutes pour faire votre exposé, par la suite suivra un échange
avec les parlementaires. Donc, je vous demande, M. D'andrea, de vous présenter
et je vous cède la parole.
MM.
Giuliano D'andrea et Richard Smith
M. D'andrea (Giuliano) : Oui, bonjour. Merci beaucoup pour
nous donner l'opportunité d'être ici aujourd'hui.
C'est vraiment... Comment faire un sommaire en 10 minutes d'une position
qui va être tellement différente des positions que vous allez entendre d'autres
groupes allophones ou anglophones comme on est?
Je vais commencer par
un peu d'histoire, un petit texte de J. Hector St. John de
Crèvecoeur, un francophone qui habitait aux États-Unis, qui avait posé la question
que les Américains se posent encore aujourd'hui : «What then is the American, this new
man?» On peut se poser la même question aujourd'hui de l'Anglo-Québécois :
«What then is the Anglo-Quebecker,
this new man?», parce que le Québécois anglophone a changé, ce n'est plus le
même Québécois qu'il y avait 40 ou 50 ans, et tous ces changements
n'ont pas vraiment été reconnus encore, même dans le langage quand on le parle.
Exemple,
un peu de définitions. Faisons la définition d'«anglophone». C'est quoi, un anglophone?
On a entendu ce matin qu'un anglophone, c'est
une personne qui est née parlant anglais, et pourtant la loi 101 a donné
des droits à des Québécois où la langue maternelle n'est pas l'anglais.
Exemple, la loi 101 définit M. Giuliano D'andrea comme étant anglophone,
et pourtant ma langue maternelle n'est pas l'anglais.
De
plus, l'ironie : si la famille royale venait s'établir ici, au Québec, le
prince William — ou Guillaume — n'aurait pas le droit d'envoyer ses enfants à des écoles
anglaises. Certes, il a les moyens pour les écoles privées, mais quand
même il n'a pas ce droit, lui, descendant de
Guillaume le Conquérant, des Stuarts et des Windsor. Et moi, descendant peut-être
des Vivaldi, des Machiavelli… Et pourquoi ne
pas dire aussi Berlusconi? Mais c'est ça un peu, l'ironie. On connaît
très mal la communauté anglophone.
C'est
quoi, un Québécois? Une autre question qu'on se pose tellement. Je me rappelle
quand j'étais jeune, j'avais entendu Pierre
Bourgault — j'étais vraiment jeune à l'époque — qui disait : Un Québécois, c'est la personne qui
veut l'être. Intéressant comme concept, mais
quelque part ça veut dire que, si on ne veut pas l'être, qu'est-ce qu'on
est?
On
dit aujourd'hui qu'un Québécois, c'est toute personne qui habite sur le territoire
du Québec. C'est bien, mais des fois, si on est dans la communauté anglophone — et je peux témoigner de ça — tous ces symboles se perdent quand on entend certaines manières de caractériser,
disons, ce débat de langue française. Quand on nous dit que la langue est menacée, ça veut dire peut-être quelque chose d'autre
dans la communauté francophone qu'anglophone, parce que, pour nous, c'est :
«French language is threatened», qui pose la question : «Threatened by
whom?» Et, quand on se pose la question : «By whom?», on commence à
imaginer tout de suite : Eh voilà, encore une fois c'est nous autres. Les communications, les mots, j'ai entendu avant — j'ai pris une petite note, j'ai trouvé ça assez
charmant : Le bilinguisme devient contagieux, qui veut dire que l'anglais
est contagieux, qui veut dire que… Si j'utilise l'anglais, est-ce que je
suis un «disease»? C'est quoi? Je suis sûr que ce n'est pas l'image qu'on veut
donner, mais c'est l'image qu'on entend. Et le problème, ce n'est pas simplement d'avoir une langue commune mais de
comprendre le symbolisme derrière cette langue.
Or,
on est porte-parole, peut-être vous pouvez le savoir, on a carrément dit ça
dans les textes, mais d'un mouvement qui a
commencé ça fait 23 ans, Le Mouvement du Grand Québec, qui préconise ou
qui veut donner comme solution l'idée d'avoir une école commune pour
anglophones et francophones, hein? Si la langue du travail doit être la langue française, pourquoi pas la langue de l'éducation
aussi? Et le problème que nous, on voit, c'est un problème de diaspora.
Si on regarde les dernières 30 et 40 années, la communauté qui a souffert
le plus, ce sont les anglophones. Et ce n'est pas
des Anglais, c'est des Québécois. Ce sont des Québécois qui ont été formés par
l'État québécois. M. D'andrea qui parlait italien aujourd'hui est
anglophone, et c'est l'État québécois qui m'a fait un anglophone, comme il a
fait de dizaines de milliers d'autres
Québécois. Et, nous qui avons besoin... qui voulons travailler au Québec, la
qualité de notre français n'est pas à la hauteur.
Alors,
on ne peut pas s'imaginer. Pourquoi tellement d'anglophones ne sont pas
embauchés dans le «civil service», c'est simplement parce qu'on n'a pas laissé la
capacité, il faut le reconnaître. Alors, si les enfants peuvent jouer
ensemble, s'ils peuvent travailler ensemble, s'ils peuvent se marier, pourquoi
ces enfants ne pourraient pas aller à la même école?
Et l'école que nous, on préconise, c'est une école intégrée où normalement le
français va être prédominant mais où aussi l'apprentissage de la langue
anglaise va se faire, particulièrement à Montréal, où avoir une connaissance de
l'anglais, ce n'est pas une contagion, mais c'est plutôt un atout.
Et je voudrais passer
la parole à...
• (11 h 10) •
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je m'excuse. Juste vous dire que vous avez six minutes
et quelques secondes d'écoulées. Si vous
voulez que votre collègue reprenne la parole pour votre exposé…
M.
D'andrea (Giuliano) : Oui. Alors, je voulais en fait passer la parole à M. Richard Smith en
faisant une petite introduction. Quand Le
Mouvement du Grand Québec s'est présenté à l'Assemblée nationale, ça fait...
bon Dieu, ça fait presque 20 ans, on avait cinq ou six membres de l'exécutif.
Il n'en reste qu'un ici, à Montréal. Nos membres aujourd'hui sont au Japon, ils
sont rendus aux Bahamas, ils sont rendus en Ontario, aux États-Unis. Et un de
ceux-là, c'est M. Richard Smith. Alors, j'aimerais passer la parole à lui.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Parfait.
M. Smith, la parole est à vous pour trois minutes.
(Audioconférence)
M. Smith
(Richard) : OK, good. In
1979, when I was 15 years old, my father, who was then the president of the
parents' committee of the Mount Royal Catholic High School, signed some papers
that would allow my school to abandon its outdated facilities in favor of a
proposed cohabitation with the nearby, much better equipped French Catholic
school named polyvalente Pierre-Laporte. For him, this prospect offered more
than a mere possibility of cohabitation. He
told me privately that he envisioned it as an opportunity for anglophone and
francophone children to explore
something bigger : a chance to share common classes, to become fluent in
each other's language and be aware of each other's culture, a chance he
had never had when he was schooled in Québec. But, for the Pierre-Laporte
parents, the focus was much different. Mme Simone Landry, a then member of the
parents' «comité d'action» which opposed the plan, told
the Montréal Gazette, on March 19th, 1980, «We just want to protect the
French entity of Pierre-Laporte school, we never wanted to throw out or
segregate the English.» The move never happened.
For
my father, the shock of this setback and the warnings from his employer,
Montréal Trust, that his own real estate license could be subject to French testing
because of law 101 made him realize that language policy could have
dire consequences for him and his family. So, he worked very hard, too hard so
he could retire early, to avoid losing his license,
and, in 1980, he became Montréal Trust's second top-selling salesman across
Canada, ironically number one in Québec. Sadly, a year after the
cancellation of the move of my high school, and three months after his record
year at Montréal Trust, my father was dead
from heart disease, and my mother and I, the sixth generation of our family to
call Québec home, first moved away.
Now,
in all fairness, I am sure that Mme Landry's comments were honest and that she
didn't wish to segregate us, nor do
I think that the Lévesque Government wanted to help create the atmosphere, with
its passage of law 101...
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Smith, malheureusement je dois...
M. Smith (Richard) : ...which helped to take my father away from me
at age 16.
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) : M.
Smith, malheureusement j'ai dû vous couper la parole parce que votre temps alloué
était écoulé. Nous allons maintenant du côté du gouvernement. Mme la ministre,
la parole est à vous.
Mme
De Courcy :
Bien, d'abord, merci beaucoup, messieurs, d'avoir participé à cette commission parlementaire. Il m'apparaît important d'entendre
différents points de vue, surtout que le vôtre est le premier que nous
entendons sur la question d'un grand réseau scolaire intégré. Est-ce que j'interprète
bien ce que vous voulez dire?
M. D'andrea
(Giuliano) : Oui.
Mme
De Courcy : Ma
question va être... J'en ai deux. Ma première question va être la
suivante : Est-ce que vous avez eu l'occasion
de parler de votre idée de grand réseau intégré avec les autorités de la
fédération des commissions scolaires anglophones du Québec?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. M. D'andrea, je vais devoir demander à M. Smith s'il veut
répondre, parce que... M. Smith, est-ce que vous voulez répondre à la
question de la ministre ou vous laissez la parole à M. D'andrea?
M. Smith
(Richard) : Je repasse la parole à
M. D'andrea, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. D'andrea,
la parole est à vous.
M.
D'andrea (Giuliano) : On n'a pas nécessairement parlé avec la fédération comme telle mais avec
les commissions individuelles, que ce soit
Pearson, que ce soit English Montréal School Board. Il y a eu beaucoup de résistance à l'idée. C'est normal, parce que ce n'est
pas les commissions elles-mêmes qui ont des intérêts… comme on dit en
anglais, «vested interests», hein? They
would never give up that field for the uncertainty of something else.
Et c'est un peu… Je vous comprends
quand vous dites : C'est la première fois qu'on l'entend, cette idée, mais cette idée, elle
est vieille. Ça fait longtemps que beaucoup de gens, ils parlent, mais ce n'est
pas un discours d'institution, c'est
un discours de parents. On vient d'entendre avant que 25 % des Québécois
qui ont le droit d'envoyer des enfants dans l'école anglaise optent aujourd'hui de les mettre carrément dans le
système francophone, parce qu'ils savent ou ils sentent le besoin que leurs enfants doivent avoir tous les
atouts pour être compétitifs. It's not enough just to come here and speak in French, I have to have a professional
French where I can work and compete. And, in fact, when you're a minority, you
have to be better. Et, dans le système
anglophone aujourd'hui même qu'on a, hein, ils ont fait des efforts, ça va mieux que ça allait avant, mais aujourd'hui on
fait des «polls» de ces enfants-là, qu'est-ce qu'ils nous disent? Bien,
dans les prochains cinq ans, ils se voient peut-être en Ontario, peut-être en
Alberta, peut-être quelque part d'autre. Pourquoi? Ils sont nés ici, c'est leur chez eux. C'est parce que les institutions
n'intègrent pas non seulement sur la langue, mais aussi la culture
québécoise. Imaginez moi, comme anglophone, je vais dans une école, je vois d'autres
anglophones. Mais, le francophone, je le vois où? Alors, la raison que nous, on
préconise une école intégrée.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci,
M. D'andrea. Mme la ministre.
Mme
De Courcy : Une
sous-question. Lorsque j'ai eu l'occasion de faire beaucoup de consultations,
avant de déposer le projet de loi n° 14,
j'ai eu, bien sûr, des contacts avec des représentants de la communauté d'expression
anglaise, et ma première impression… Quand
je m'adressais à eux, c'est de vérifier s'ils étaient inquiets par rapport
au statut de l'anglais au Québec, et je vous
dirais que, de façon presque unanime… je ne dirai pas «unanime» parce que
ça impliquerait que j'ai vu tout le monde,
et ça n'a pas été le cas, mais, de façon presque unanime, on m'indiquait que
ce n'était pas, absolument pas l'avenir de l'anglais
au Québec qui préoccupait ces personnes. Ils trouvaient que l'anglais,
comme langue, se porte très bien au Québec, mais mentionnaient plutôt que c'était
l'avenir de leurs institutions, de leurs institutions, qu'ils étaient craintifs
de voir, au fur et à mesure des transferts linguistiques vers le français… comme vous venez de le
mentionner, 25 % des jeunes enfants anglophones qui transfèrent vers le
réseau francophone, ils étaient inquiets que, par toutes sortes de
mesures, les institutions puissent être remises en cause, voire fermées, et que
ça, ça les touchait énormément, et qu'ils étaient très préoccupés par cette
question-là.
Alors,
cette inquiétude-là de la communauté d'expression anglaise et ce que vous venez
de dire, vous le conciliez de quelle manière,
de quelle manière?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, Mme la ministre.
M. Smith, est-ce que vous souhaitez
répondre à la question ou vous laissez la parole à M. D'andrea?
M. Smith (Richard) : Oui. Répétez la question, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Mme la
ministre, est-ce que vous pouvez répéter la question?
Mme
De Courcy : Oui,
je vais répéter la question. Mais je vais prendre tout le temps, vous n'aurez
pas le temps de me répondre.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Peut-être que
M. Smith, pour… permettre à M. D'andrea de répondre…
Mme
De Courcy :
Peut-être y aller, M. Smith, parce qu'il ne nous reste pas beaucoup de
temps, malheureusement.
M. Smith
(Richard) : Non, non, non, je m'excuse.
Je suis éduqué au Québec, mais j'ai besoin que vous parliez un peu lentement, s'il
vous plaît.
Mme De Courcy : Je m'excuse, je ne vous ai pas bien compris, monsieur.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : M. Smith,
est-ce que vous voulez…
Une voix : …
Mme De
Courcy : Ah oui! Oui, je peux
reformuler. Je vais...
M. Smith
(Richard) : Ça, c'est la raison que
je suis ici. Je suis éduqué au Québec. Si j'ai un problème pour comprendre
votre français, ça, c'est la question vitale en ce moment.
Mme De
Courcy : D'accord. Je vais…
M. Smith
(Richard) : S'il vous plaît, parlez,
mais un peu lentement.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : D'accord.
Monsieur...
Mme De
Courcy : Bien oui, je vais... Je
parle déjà lentement, hein?
• (11 h 20) •
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) : M. Smith, je vais céder la parole à Mme la
ministre, qui va vous poser une question, et
vous pourrez y répondre par la suite.
Mme
De Courcy : Mais
oui. Alors, comment vous conciliez le fait que la communauté d'expression anglaise, en tout cas certains de ses membres, et ceux que j'ai consultés,
c'étaient, dans la majorité... que certains de ses membres puissent être
inquiets quant à leurs institutions, et non pas quant à leur langue mais quant
à leurs institutions, et la proposition que
vous faites de dire : Il faudrait que les deux réseaux scolaires soient
intégrés, le réseau francophone et anglophone?
Comment on comprend… À ce moment-là, comment on pourrait faire pour réconcilier
ces deux intentions-là? C'est ça, ma question.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
ministre. M. Smith, la parole est à vous.
M.
Smith (Richard) :
OK. I believe…
One way to integrate them, you can try to do it as a... you can keep the existing systems in place, it's not really
important. It isn't a question of structure, as long as you have an opportunity
for the children to come together. But Mr. D'andrea
will probably concur that, when we tried to propose this to the English
community, they have often felt that they could not trust themselves in a
common system with Québec Francophones because of their fear of a «québécois»
unilateralism where they would act... we would be a minority in that system, and it might act against our interests, so that,
in that case, it's better to stay segregated with French immersion
schools. This is where the language legislation you are proposing can be very
difficult for us, because it sort of supports what our opponents in the English community say, is that we cannot trust the
French majority in such a deal. This is what makes it so hard for us to
propose this solution.
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) :
Merci, M. Smith. Je vais maintenant... M. le député de Bonaventure, je vous reconnais. La parole est à vous, M.
le député de Bonaventure.
M.
Roy : Merci, Mme la Présidente. Il
nous reste combien de temps?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Il vous reste environ six minutes.
M. Roy : Six minutes. Merci beaucoup.
Salutations à mes collègues, Mme la ministre, je vous souhaite un bon début de semaine. MM. D'andrea et Smith, mes
salutations aussi.
Le titre de votre document : Les
Québécois auraient besoin d'un nouveau contrat linguistique. O.K. Donc, vous nous proposez de rechercher un nouveau contrat
linguistique entre les communautés anglophone et francophone. Donc, j'aimerais que vous nous donniez des
précisions sur votre vision. Quel serait le statut relatif du français et de
l'anglais dans cette proposition de contrat linguistique?
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. le député de Bonaventure. M. D'andrea.
M. D'andrea (Giuliano) : Merci beaucoup. C'est normal que,
dans ce nouveau contrat social, le français va
être prédominant. C'est normal. Le français, c'est la langue de la province du
Québec. Il n'y a pas de doute sur ça.
Ce que nous, on préconise plutôt, c'est d'entrer
en négociation en faisant que la communauté anglophone devient un participant dans ces discussions et dans ces,
comment je peux dire… dans les résultats d'une loi linguistique. La manière qu'on voit ça aujourd'hui, c'est qu'il y a
de l'anxiété dans la communauté francophone, on passe une loi, on impose
ça sur la communauté anglophone; la communauté
anglophone se sent menacée, on lève les boucliers, et on voit ce que vous voyez aujourd'hui, toutes sortes de
différentes opinions sur les mots, on se chicane sur tous les détails, les
menaces, et tout le reste. Pour nous, ce qui est important, c'est d'ouvrir des
discussions comme la discussion qu'on veut faire avec une école intégrée.
Pour répondre un peu à votre question et
aussi à celle de la ministre, il y a beaucoup d'anglophones qui veulent tenir leurs institutions, mais ce n'est pas la
majorité, parce que la majorité des anglophones, plutôt, ils vieillissent, et
leurs enfants sont ailleurs. Et on entend rarement ces gens-là, hein? Ça, c'est la majorité.
Ceux qui travaillent dans un système, c'est
normal qu'ils veuillent garder les choses... le statu quo, mais ce que nous, on
propose, c'est l'école intégrée qui
va aussi être l'école de l'anglophone, du Québécois, du Québécois, commun avec
l'autre Québécois. Alors, c'est ça. Si on peut avoir une équipe de
hockey pee-wee où il y a des anglophones et des francophones qui jouent
ensemble et veulent gagner ensemble, bien ils ne vont pas se poser la
question : Bien, je veux avoir mon équipe anglophone. Toi… Non. Il n'y a
pas de ségrégation là, c'est une équipe. L'école intégrée va être exactement la
même.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. D'andrea. M. le député de Saint-Hyacinthe, la parole est à vous.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente.
M. Smith, M. D'andrea, ma question est assez simple : En quoi
consisterait la préservation et la promotion de l'anglais, au-delà de ce qui
est déjà assuré par la charte et par les lois du Québec, par exemple,
dans le domaine de l'éducation, dans le domaine de la santé, dans le domaine
des services sociaux? Au-delà de l'intégration au niveau du scolaire, dans ces
institutions-là, comment vous verriez la survie des institutions anglophones?
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Je dois demander, M. D'andrea, à
M. Smith s'il veut répondre à la question du
député de Saint-Hyacinthe. M. Smith, en deux minutes, est-ce que vous voulez
répondre au député de Saint-Hyacinthe?
M. Smith (Richard) : M. D'andrea.
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : M. D'andrea,
allez-y.
M. D'andrea (Giuliano) : Pour nous, la question n'est pas les
droits institutionnels. Pour nous, c'est
vraiment la question d'avoir accès, d'être pleinement intégrés dans le Québec.
Comme anglophones, si on peut avoir l'opposé du Mouvement du Grand Québec, l'opposé
de Smith et moi-même… On n'est pas
des partitionnistes. We don't want out, we want in. Et c'est important que nous, on est dans l'action, on est
dans la société québécoise.
Quand ça vient à des droits acquis, pour
nous, ces droits acquis n'ont pas changé, ceux qui auront besoin de se faire servir en
anglais auront toujours cette capacité de se faire servir en anglais. Et, vous
savez, beaucoup d'anglophones vont dans
des institutions francophones où il y a un médecin, et, comme disait à l'époque
le premier ministre Bouchard, ce n'est pas un docteur qui tout d'un coup
va refuser de parler à un patient qui parle seulement en anglais. L'important,
pour la communauté anglophone, c'est d'être dans la communauté comme Québécois
à part entière, et ça doit passer par la maîtrise de la langue française.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci.
M. D'andrea
(Giuliano) : Et on garde aussi nos
droits anglophones, c'est normal.
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. D'andrea. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle, et je reconnais maintenant le
député de LaFontaine. M. le député, la parole est à vous.
M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la
Présidente. Alors, j'aimerais d'entrée de jeu, évidemment, remercier M. Smith qui
est sur la ligne également et M. D'andrea. Merci beaucoup à vous deux pour
avoir pris le temps, de votre temps personnel parce que la question vous
préoccupe, vous trouvez que c'est important d'ajouter votre réflexion. Alors, merci beaucoup de prendre le temps, d'avoir
rédigé et de nous envoyer… de nous avoir communiqué ce mémoire, et
aujourd'hui d'être, M. D'andrea, présent ici, et vous, M. Smith, d'être présent
par la magie du téléphone. Alors, merci beaucoup, d'abord et avant tout.
Et j'accueillais effectivement la référence
que M. D'andrea faisait à une citation d'un ancien premier ministre du Québec,
ancien premier ministre du Parti québécois qui effectivement avait dit :
En matière de santé, la personne veut un test sanguin, ne veut pas nécessairement un test linguistique, et je le
paraphrase. Alors, je pense que c'est une référence, en fait, qui nous
fait réfléchir et également nous démontre que, la vérité, là, personne ne peut
prétendre posséder la vérité. Et, en ce
sens-là, on a vu sous ce même premier ministre là un célèbre discours, le
discours du Centaur, qui avait été rédigé
par… l'actuel ministre de la métropole et en charge, responsable de la relation
avec la communauté anglophone avait rédigé et qui démontrait une tout
autre approche, une tout autre ouverture même chez les rangs de celles et ceux…
du gouvernement qui aujourd'hui présente le projet de loi n° 14.
On
parle, dans le cadre du projet de loi n° 14, d'éléments que certains
diront coercitifs, et, en ce sens-là, il est important
de voir que, si la Charte de la langue française avait également des impératifs
à respecter, ça revient toujours à la même notion d'avoir un équilibre,
la paix linguistique, et les résultats doivent y être. Et nous constatons, à la
vue des statistiques, que les résultats sont
là, il y a de plus en plus d'anglophones et d'allophones qui parlent le
français, et nous avons donc les
outils pour les accompagner. Et nous devons constamment parfaire ces outils-là.
Et, en ce sens-là, la coercition ne pourra jamais être le seul remède ni
même, je vous dirais, le remède dominant, ce qui est notre position et notre
lecture du projet de loi n° 14.
•
(11 h 30) •
J'aimerais vous entendre, ceci dit, M. Smith
et M. D'andrea. Dans le projet de loi n° 14, on parle... il est fait mention de politiques
dont devraient se doter, si le projet de loi n° 14 était adopté… des
politiques pour les cégeps anglophones notamment.
Ainsi, le projet de loi n° 14 exigerait que… un cégep anglophone devrait
rédiger une politique qui ferait en sorte que priorité serait accordée
aux élèves, aux étudiants anglophones, priorité sur les élèves francophones, et
l'on dit : «…[afin de] respecter la clientèle de langue anglaise pour
laquelle avait été constitué l'établissement par le gouvernement.» Je vous
avoue qu'il y a là des concepts nouveaux, quand on parle de clientèle de langue
anglaise, et il y a là un ajout dans les
critères de sélection qui relèvent des directions des établissements et qui
vont au premier titre regarder, entre
autres, le dossier académique. Autrement dit — je
vous donne un exemple — moi, ma fille la plus vieille, une fois qu'elle
aura terminé son primaire en français, son secondaire en français, si d'aventure
elle veut aller étudier les sciences
dans un cégep anglophone et qu'elle a un dossier académique de 85 %, bien,
si l'on impose à ce cégep anglophone là
de prioriser une clientèle — parce qu'il
y a toujours une capacité limite — une
clientèle anglophone, bien un étudiant
anglophone qui aurait un dossier académique moins bon, 65 % par exemple,
viendrait prendre la place de cette étudiante-là
francophone qui aurait 85 %. Et ici c'est une lame à deux tranchants. Je
pense qu'il est important, par contre, de faire attention à ne pas créer
une ségrégation basée sur un critère langue maternelle anglophone, langue
maternelle francophone et son application
comme étant le critère sine qua non pour avoir l'accès au cégep en anglais. Et
je pense que, là-dessus, tout le monde
y serait perdant, et ce n'est pas ce qui est demandé, aucunement, par les
personnes d'expression anglophone.
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. J'aimerais
savoir, de un, M. Smith, si vous aviez noté cette modification-là,
qui n'est pas anodine, et j'aimerais savoir comment vous, vous la recevez,
quels sont vos commentaires.
La Présidente (Mme Richard, Duplessis) : Merci, M. le député de LaFontaine. M.
Smith, vous avez la parole.
M.
Smith (Richard) : Yes. For restrictions on English CEGEP, good luck, I
suppose, because we saw what happened last
year with the demonstrations in Montréal. You're asking people that are young
adults… you're taking… you're restricting them from making the choices
they would like to make. And, as the gentleman, the «député» said, you know,
his daughter would like to go to an English CEGEP to improve her English.
But again, coming back to
what we said earlier, if the integrated school concept were explored, that
would make it less necessary to go
to a completely English CEGEP, there could be a possibility of further
integration at the CEGEP and university level. So, I would suggest that. And
again, it's not so important, how we structure it, as long as people have that
flexibility to learn in a mixed environment.
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : Merci,
M. Smith. M. D'andrea.
M.
D'andrea (Giuliano) : À première
lecture, ce que j'ai compris quand j'ai lu le texte, c'est : Est-ce que
les anglophones ont peur qu'il n'y ait pas
assez de places pour eux dans un cégep anglophone?, et je pense que non.
Alors, j'ai eu de la difficulté à le
comprendre. Mais, même sur le côté des cégeps et ce qu'on veut proposer pour
les écoles supérieures, on veut faire un examen de fin de session où on
doit tester les anglophones pour voir s'ils ont appris assez pour le marché du
travail. Et on pense que peut-être l'intention est bonne, mais on met le
chariot du mauvais côté. Moi, je ne pense pas qu'on doit s'intéresser vers la
fin de l'éducation s'ils sont prêts pour le marché du travail, mais plutôt il
faut le faire avant.
Et une autre chose qu'on a notée aussi dans le
projet de loi, c'est qu'on va donner le droit aux étudiants de demander, les Québécois qui sont dans des
institutions anglophones, de demander qu'ils ont tous les outils et toutes
les capacités, parce qu'ils ont un tel droit
à la fin de leur éducation, ils ont le droit d'être éduqués, je n'ai pas la
citation, mais avec tous les outils
pour faire partie du Québec de demain. Et ma question, c'est... You know, how
does a seven-year-old, how does a nine-year-old, how does a 12-year-old
turn around and say to the school commission where he goes, «Hey, I want
my rights»? Ça ne se fait pas. Je ne sais pas
quelle école vous avez fréquentée, vous autres, mais moi, quand j'étais à l'école
où j'étais, on pouvait demander toutes sortes de choses, et puis ils nous
traitaient comme : Oui, oui, Giuliano, va faire tes devoirs. On nous
considérait comme des personnes sans droits.
Alors, arrivé à 17 ans, on sort et on
réalise que, le français qu'on a eu, on le ballotte sur le marché du travail. Et une des raisons...
La question, même, on peut poser : Comment ça se fait il n'y a pas assez d'anglophones
qui vont aller dans des cégeps
francophones? Il y en a beaucoup qui vont dans l'autre sens. Et la raison que
nous, on a trouvée, c'est que c'est...
You
know, these graduates who are 17 years old don't have the confidence to be
able to go and study in a French CEGEP or a French university, by and large. Why?
Because they're scared of writing in French. How are you gonna be competitive to do, you know… Comment vous allez faire votre
dissertation en français si vous ne maîtrisez pas le français? Or, ça continue. On sort d'un «high school»
anglophone, on va dans un cégep anglophone, on fait l'université, on fait une
maîtrise et on se ramasse au Japon, ou aux États-Unis, ou en Europe.
La
Présidente (Mme Richard, Duplessis) :
Merci, M. D'andrea. M. le
député de LaFontaine.
M. Tanguay : Merci beaucoup. Mr. Smith,
I would like to hear from you. You talk a lot with respect to the quality of
the French and... So, what are your comments on this, with respect to the
quality of the French? And do you have any solutions? You already talked about, you know, the fact that it's
important not to segregate Anglophones and Francophones, but, other than
that, do you have any other suggestions to make it a reality, what is a main
objective, a very important objective to
make sure that our students, at the end of their passage within the establishment,
they will be able to talk and to write very, very well in French? Do you
have any other tangible suggestion to add to your comment?
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : Merci, M.
le député de LaFontaine. M. Smith.
Ne pas faire de correction. Le texte a été
corrigé par M. Smith lui-même et validé par la documentation - guylaine
M. Smith (Richard) : Yes. Well, I'd say... You
know, I teach English here, in Japan, and it's a huge industry here. And I
can say this much for certain based on the probably 24,000 English lessons I've
taught in Europe and Asia, is that
the older students get… every five years, their ability to learn, and speak,
and write a language diminishes. So, if we get a student even in their twenties getting serious about learning another
language, their ability to do so will be handicapped.
And, for instance, to be a
French teacher in Japan, you basically have to be conversational in English.
So, as much as the current system,
we think, doesn't completely equip Anglophones to work in Québec, obviously the
current system does not help Francophones to work internationally, which I
think is very sad because it deprives them of an opportunity. So, an
opportunity to mix will give an instance of… a way to learn more natural English.
My case in point, my
family now lives in Toronto area. As I've mentioned before, they left after my
father passed away. But my nephew is in a French immersion
school, and he's done excellent, and he's done it from the beginning of his education, but unfortunately a lot of the
immersion schools still have particular accents and twangs when they
speak French, and I'm sure for the
Francophones in the immersion programs in Québec it's a similar dynamic. So,
that's, again, coming back why we think that more of a mixed activities
and mixed learning environment would allow them to interact with real native
speakers of the language.
La Présidente
(Mme Richard, Duplessis) : Merci,
M. Smith. M. D'andrea.
• (11 h 40) •
M. D'andrea
(Giuliano) : Definitely, to go back to our point, integrated schools, get them
together early, have the
seven-year-old... You know, if I had a seven-year-old child who had to take a
bus, he should take the same bus as my francophone neighbor. They should get on
the same bus, go to the same school, come back from the same school. It's ridiculous to have one kid go somewhere else,
one kid go somewhere else. Both programs are almost the same, you have deep immersion on one side, you have an
international program on the other, and they are segregated. And, if you
want to make sure that anglophone kids… Or
even Francophones who want to learn English. If you want to make sure
that these language barriers drop, and that
we stop talking about the two solitudes, which, by the way, are very real
today, you know, we've got to find
ways to integrate, we've got to find ways to have them have a common existence.
You can't have kids growing up with two different cultural values. You
can't have them, on the one hand, listening to francophone pop music and all
the things that make Québec what it is, and, on the other hand, we just turn
around and say...
La Présidente (Mme Richard,
Duplessis) :
M. D'andrea, je suis désolée de devoir vous couper la parole, le temps alloué à l'opposition
officielle est maintenant écoulé. Nous allons vers le deuxième groupe d'opposition,
et je reconnais Mme la députée de Montarville. Vous avez la parole, Mme
la députée.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci beaucoup,
messieurs. Merci à vous pour le mémoire, c'était
très intéressant et surtout très original.
Et vous nous amenez dans toute une réflexion lorsque vous dites : Il faut
comprendre le symbolisme derrière une langue commune. Alors, c'est toute une
réflexion, une réflexion historique et philosophique que malheureusement on n'a
pas le temps de faire, j'ai très peu de temps. Sachez cependant que nous
considérons qu'il faut défendre la langue française, la protéger, mais tout en
respectant le droit de la minorité anglophone.
Alors, ma question est la suivante : Dans cette
optique, qu'est-ce que vous pensez des examens de français que le projet de
loi n° 14 veut imposer aux jeunes anglophones pour réussir leurs
cours du secondaire et leurs cours au collégial?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, Mme la
députée de Montarville. M. D'andrea.
M.
D'andrea (Giuliano) : I think it's a good idea to have exams, obviously you're
able to get feedback as to the
success of the program, but there lies not the problem. The problem is the
program. We have to make sure that it actually works.
The
other thing… I'm going to get back to your symbolism, you know, I'm glad you
picked up on that. Wouldn't it be wonderful if we could go to the anglophone
community and say, «Guess what, we want you to have the top jobs in Québec»? We're going to give you that opportunity.
And you know the way you're going to do it? Why don't you master the
French language, because there's jobs for you here? You don't have to emigrate,
you don't have to continue the diaspora. Those are positive ways that we can
get people to get on board.
Et la réalité est la suivante :
la majorité des anglophones au Québec veulent apprendre la langue française. Ce qui a résisté à cet
apprentissage, ce sont les institutions, qui ont des intérêts propres à eux
autres de ne pas changer. If you have teachers who cannot speak French, they have to go
through the system, hit their retirement before they're replaced.Qui souffre dans tout
ça? C'est la clientèle, c'est l'enfant. Et nous, ce que Richard et moi, on a
constaté, c'est que la génération qui
a souffert depuis la loi 101, c'est notre génération. C'est beau de parler
de la génération de la loi 101, «the Bill 101 generation»,
mais il y a l'autre génération aussi, celle qui n'a pas été touchée par cette
loi, qui était dans les écoles anglophones.
Et, encore une fois, pour nous, la logique : Si la langue du travail est
le français, comment on peut continuer d'avoir une langue primaire autre
que la langue du travail?
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci, M. D'andrea.
Quelques secondes, M. Smith, si vous voulez répondre.
M.
Smith (Richard) :
Non, non. C'est correct, non, non. Bien, peut-être pour la division. Je suis
aussi citoyen irlandais, et il est une blague en Irlande. La blague est comme
ça : Two men... An atheist goes into a bar and meets two Irish people,
and they ask him, «Are you Catholic or are you Protestant?» And he says, «I am atheist.» And they
go, «That's very good, but are you a
Catholic atheist or a Protestant atheist?» Et ça indique la situation, parce qu'en
Irlande du Nord toutes les institutions sont
divisées…
La Présidente (Mme
Richard, Duplessis) : Merci beaucoup,
M. Smith. Je dois vous interrompre, je dois vous interrompre. Merci,
M. D'andrea, M. Smith.
La commission suspend
ses travaux jusqu'après les affaires courantes.
(Suspension de la séance à
11 h 45)
(Reprise à 15 h 26)
La Présidente (Mme
Vien) : À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous reprenons nos travaux, mesdames messieurs. Je demande à toutes les
personnes ici présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs téléphones cellulaires.
Nous
allons poursuivre sans plus tarder les auditions publiques sur le projet de loi
n° 14, la Loi modifiant la Charte de la
langue française, la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres
dispositions législatives.
Alors, j'invite les
représentants de La Fédération québécoise des associations foyers-écoles inc. à
prendre place — c'est maintenant déjà fait — et déjà de débuter votre présentation, en vous rappelant
que vous avez 10 minutes pour procéder à
la présentation de votre mémoire.
La Fédération québécoise des
associations foyers‑écoles inc. (FQAFE)
Mme Chamberland
(Liette) : Mesdames et messieurs,
bonjour. La Fédération québécoise des associations foyers-écoles est heureuse d'avoir l'opportunité de présenter son
mémoire sur le projet de loi n° 14 aujourd'hui. Avant de commencer,
j'aimerais vous introduire mes collègues présents à la table avec moi aujourd'hui :
Mme Joyce Shanks, mère d'une fillette qui
fréquente l'école primaire, travailleuse autonome et siégeant en tant que
membre sur notre comité des droits; Mme Patricia Willis, mère de cinq
enfants dont un ayant des besoins spéciaux, avec handicap langagier,
travailleuse autonome, siégeant à titre de directrice au sein de notre
organisation; Mme Rickhey Margolese, mère monoparentale
de quatre enfants, a fait carrière à titre d'enseignante, maintenant retraitée
et vice-présidente exécutive de notre
organisation; ainsi que moi-même, Liette Chamberland, mère de deux enfants dont
un avec besoins spéciaux détenant une
exemption gouvernementale pour poursuivre ses études en anglais, exemption basée sur les problèmes de langage, avocate et présidente de La Fédération québécoise des
associations foyers-écoles inc.
Notre fédération est
un organisme bénévole, indépendant, incorporé, à but non lucratif qui a pour
mission de promouvoir l'éducation et d'améliorer
le bien-être des enfants et des adolescents. La fédération favorise la
participation des parents,
des élèves, des enseignants et de la collectivité tout entière à l'avancement
de l'apprentissage. Elle agit au nom des parents. La fédération
représente près de 5 000 familles.
En date du
21 avril 2012, lors de notre assemblée générale annuelle, nos membres nous
ont mandatés de promouvoir que tous les
parents aient le droit de choisir l'école qui convient le mieux à leurs
enfants. Forts de ce mandat, et pour les raisons qui suivront, nous vous
demandons de retirer ce projet de loi dans son intégralité.
• (15 h 30) •
Mme
Shanks (Joyce) :
La loi n° 14 est source de division et en plus d'être discriminatoire. Les
droits de nombreux citoyens québécois seront
floués avec la mise en oeuvre de cette loi. La nature même de cette loi est un
facteur de division, en plus d'être discriminatoire pour de nombreux résidents
et contribuables du Québec.
We'd like to start with the
generally accepted definition of «equality». «Equality» means the state of
being equal in status, and rights,
and opportunities. L'égalité est le principe
qui fait que les hommes doivent être traités de la même manière, avec la même
dignité, qu'ils disposent des mêmes droits et sont soumis aux mêmes devoirs.
Elle nuit directement
aux droits de tous les Québécois de vivre et d'être traités de manière
uniforme. Par conséquent, ces changements ne devraient pas être en compte.
Le
préambule de la Charte des droits et libertés de la personne stipule que «tous
les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité». Si les Québécois dont la
langue maternelle est différente ne peuvent profiter des mêmes
opportunités que les autres, cette égalité
est inexistante. Partout dans le monde, des barrières sont abolies, et le
concept de l'inclusiondomine. En
2013, les différences devraient être célébrées et non flouées. Aucune
différence au sein de la population ne devrait
servir à la création d'une loi, y compris de la langue parlée. Le respect et la
dignité des êtres humains, l'égalité entre les hommes et les femmes et
la reconnaissance des droits et libertés sont les bases de la justice, de la
liberté et de la paix. Une véritable société inclusive est une société
respectueuse envers tout.
L'adoption
des termes «communautés culturelles» en remplacement de «minorités ethniques»
est discriminatoire pour tous qui sont protégés par l'article 10 et 43 de la Charte des
droits et libertés du Québec et par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont le
Canada est signataire depuis 1976. Le Québec doit respecter sa propre
charte de même que le pacte international.
Si ce changement est adopté, nous craignons que les minorités ethniques, tout
comme leur droit de préserver et de
développer leurs propres intérêts culturels, ne soient menacées. De plus, un
tel changement créerait un dangereux
précédent pour les autres provinces ou le pays, qui pourraient être tentés de
changer leurs propres chartes au détriment de la population québécoise
qui constitue aussi une minorité au sein de la population canadienne.
Les
immigrants provenant de pays anglophones se voient refuser le droit de
permettre à leurs enfants de poursuivre leurs
études en anglais. Comment pouvons-nous revendiquer le titre de société libre
lorsque les parents ne peuvent profiter de ce droit humain fondamental qu'est
celui de pouvoir faire le meilleur choix pour élever leurs enfants?
De
plus, la majorité des Québécois n'ont jamais le droit de choisir la langue dans
laquelle leurs enfants sont instruits au sein du système scolaire public, même s'ils
paient pour ces services avec leurs impôts. Il s'agit non seulement d'une
discrimination fondée sur la langue, mais
également une façon de dicter comment les citoyens doivent vivre, ce qui
est inacceptable au sein d'une société démocratique.
La
culture québécoise n'est pas seulement fondée sur la langue, la nature
distincte du Québec se compose de bien…
beaucoup plus que les langues que nous parlons. En faisant de la langue le
fondement de la culture, cela divise les francophones des autres.
Dans
une société libre et démocratique, l'accès à l'éducation devrait être simple,
les parents devraient avoir le droit de choisir l'école la mieux située et qui répond
le plus adéquatement aux besoins de leurs enfants et leur famille. Au
Québec, les lois restrictives dont l'objectif
est de refuser le droit fondamental à l'éducation dans la langue choisie sont
conflictuelles, discriminatoires et contre-productives, en plus de priver le
système scolaire d'une part nécessaire de financement.
Mme
Willis (Patricia) : Nous aimerions soulever quelques contradictions et redondances du
projet de loi qui nous inquiètent. Les parties
d'une loi réfléchie et bien pensée devraient toujours être claires, simples et
exemptes de contradictions, sans quoi des
problèmes d'interprétation peuvent survenir comme c'est le cas avec le projet
de loi n° 14.
Le
projet de loi n° 14 prévoit insérer à l'article 40 du
chapitre IV de la Charte des droits et libertés de la personne que «toute personne a droit de recevoir cette
instruction en français». Tout le monde a déjà droit à l'instruction publique gratuite en français. En insérant cette
partie à la charte, cela sous-entend que certaines personnes se sont vu
refuser l'instruction en français, ce qui n'a jamais été le cas. Toutefois,
dans les faits, une majorité de la population se voit refuser le droit d'accès à l'instruction publique en anglais, même s'il
s'agit de l'une des deux langues officielles du pays. En fait, le projet de loi n° 14 ne propose
pas un nouveau droit mais plutôt impose une loi implicite qui semble aller
comme suit : Toute personne devait
poursuivre ses études en français seulement, même si cela limite ses choix. La
connaissance de plus d'une langue est pourtant vue comme un atout dans la
plupart des pays du monde.
Nous
sommes sidérés par l'ajout de l'article 73.0.1 à la Charte de la langue
française. Celui-ci dit clairement que les
parents utiliseront, entre autres, un subterfuge pour contourner la loi en
confiant l'instruction de leurs enfants à des
écoles privées anglaises de façon illégale, dans le but d'obtenir illégalement
une déclaration d'admissibilité. Depuis quand est-il illégal de
fréquenter une école anglaise privée? Sur qui reposera le fardeau de la preuve?
Considérant que l'article 73.1 de la
Charte de la langue française est extrêmement subjectif et stipule que des
raisons d'ordre humanitaire peuvent
être prises en compte dans le meilleur intérêt de l'enfant lors de l'étude des
dossiers d'admissibilité, l'article 73.0.1 semble débuter en tenant
pour acquis que les parents créent une situation artificielle causée par la
déception.
Lorsqu'il
est question d'instruction, le seul objectif des parents québécois est de faire
passer le bien-être de leurs enfants bien
au-delà des questions de langue et des aspirations souverainistes. Pourquoi le
désir d'inscrire ses enfants à l'immersion
française Option plus, ou dans des écoles bilingues, ou des écoles anglaises
privées ou subventionnées est-il perçu comme un
subterfuge? Le souhait de ces parents est de permettre à leurs enfants de
profiter du meilleur des deux mondes, d'un avenir au sein, au sein d'un Québec
et d'un monde entièrement à leur portée.
En fait, ces lois créent
une société à deux vitesses parmi ceux qui ont les moyens de se payer le droit
de faire instruire leurs enfants dans la langue de leur choix et ceux qui n'en
ont pas et se résignent à leur sort ou quittent la Belle Province.
De plus, puisque l'article 73.0.1 stipule qu'il
ne doit pas être tenu compte, etc., d'une fréquentation scolaire, pourquoi
la modification apportée à l'article 73.1
nous dit qu'«aucun point ne peut être attribué dans le cadre de ce
règlement»?
La
Présidente (Mme Vien) : Merci. Merci beaucoup, mesdames, pour cette présentation. Alors, c'est
le temps qui vous était alloué pour la
présentation, je vous remercie. C'était 10 minutes, c'est bien ça. Alors,
nous sommes prêts maintenant à procéder à la période d'échange entre vous toutes
et les parlementaires, en commençant avec le côté ministériel et Mme la
ministre.
Mme
De Courcy :
Bonjour. Bonjour, mesdames. J'ai l'impression que vous n'avez pas terminé votre présentation. C'est ce
qui vous arrive? Est-ce que c'est pour beaucoup de temps qu'il vous reste… Bon.
Alors, sur le temps du gouvernement, terminez, et après je vous
reparlerai. Vous permettez, Mme la Présidente?
Mme
Margolese (Rickhey) : O.K. En nous référant de nouveau aux articles 88.0.1 à 88.0.6, nous
trouvons la situation
inquiète pour les élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage — EHDAA — les
élèves à risque et ceux bénéficiant d'un plan d'enseignement individualisé — le PEI — particulièrement en
ce qui a trait aux exigences en matière de
maîtrise du français qui seront plus élevées pour tous les élèves des écoles
publiques du Québec, du niveau primaire au niveau collégial. En effet,
ces attentes-là peuvent n'être pas réalisées et pourraient nuire au taux de
diplomation de tous les élèves, autant francophones qu'anglophones.
Au
moment où les coupures budgétaires touchent directement nos systèmes d'éducation,
comment peut-on justifier les dépenses qui devront être allouées pour mettre
en oeuvre cette nouvelle bureaucratie pour soutenir la nouvelle loi?
Nous préférerions que l'argent soit investi dans l'élaboration de programmes et
de matériel qui contribueraient à la réussite
de nos enfants et à l'amélioration du taux de diplomation au secondaire.
Permettez aux étudiants, aux enseignants et aux administrateurs de
concentrer leurs efforts sur l'instruction de nos enfants, au lieu de leur
demander de soumettre au gouvernement un rapport à leur sujet.
Le projet de loi
n° 14 limite la croissance et le développement de notre population,
particulièrement de nos jeunes, et, par le
fait même, nuit à l'économie et à l'avenir de la province de Québec. La
croissance démographique et économique
du Québec est tributaire de l'arrivée des nouveaux Québécois provenant de pays
étrangers. Nous pouvons soutenir l'immigration et l'investissement si
nous permettons à ces nouveaux arrivants provenant de certains pays de choisir l'école qui répond le plus adéquatement
aux besoins de leur famille. Il est difficile d'inciter les immigrants à
venir s'installer au Québec en tant que
résidents permanents. Nous voulons que ces gens choisissent le Québec pour
travailler, établir leurs racines, élever leur famille, investir dans l'avenir
et pour devenir Québécois.
De
plus, nous estimons que les parents doivent être en mesure d'aider leurs
enfants à faire leurs devoirs et doivent
pouvoir être capables de discuter avec les professeurs, les répondants de l'administration
et, au besoin, avec les représentants des
commissions scolaires. Il a été prouvé que le taux de réussite de l'enfant est
directement proportionnel à la participation
des parents à l'instruction et à la vie à l'école. Si les parents sont
incapables de discuter dans la langue qu'ils comprennent, la
participation à l'instruction de leurs enfants sera limitée, le succès de l'étudiant
sera compromis, et cette famille ne choisira
pas le Québec pour établir. L'accès à l'école de leur choix est donc nécessaire
pour la croissance et la prospérité du Québec.
Dans
l'article 1 de la modification de la Charte de la langue française
attribuable à la loi n° 14, on retrouve l'enjeu suivant : «Il constitue le fondement de l'identité
québécoise et d'une culture distincte, ouverte sur le monde.» Si c'est réellement
le cas et que le Québec est ouvert au monde... and strives to attract and
welcome immigrants of all ethnic and national origins, the Québec
Government needs to allow all Quebeckers and recently settled immigrants the
choice of the linguistic school in order to retain them for generations to come
and have them prosper and thrive, in this 21st century, in a Québec
society. This is our vision of a future in Québec, la Belle Province.
• (15 h 40) •
Mme
Chamberland (Liette) : Une charte des droits est un répertoire des droits les plus importants
des citoyens d'un
pays. Une telle charte a pour but de protéger ces droits contre toute atteinte.
Les droits de l'homme sont entendus comme étant des droits fondamentaux,
innés, inaliénables auxquels une personne a droit intrinsèquement juste parce
qu'elle est humaine.
La
Charte des droits et libertés du Québec, à son article 10, énonce que «toute
personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et
libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée — entre autres — sur [...] la langue, l'origine ethnique ou nationale», etc.
L'article 26.3 de la
Déclaration universelle des droits de l'homme déclare que «les parents ont, par
priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants».
L'article
599 du Code civil du Québec énonce entre autres ce qui suit : «[Le] père
et [la] mère ont, à l'égard de leur enfant, le
droit et le devoir[...], de surveillance et d'éducation.» Il ne s'agit pas d'un
privilège mais bien d'un droit et d'un devoir.
En
tant que parents, comment pouvons-nous accepter que l'État se subjugue à nos
droits et devoirs eu égard à l'éducation de nos enfants lorsque la
responsabilité de ceux-ci repose sur nous? Comment pouvons-nous accepter passivement que l'État, à toutes fins utiles, décide de l'éducation
qui convient le mieux à nos enfants alors qu'il n'a aucune connaissance
personnelle de ceux-ci?
Les parents devraient avoir le droit de
choisir l'école publique ou subventionnée qui leur semble la plus appropriée pour leurs
enfants, qu'on y enseigne en français ou en anglais. Il est temps que l'État
redonne à tous les parentsquébécois et non pas seulement aux parents anglophones le droit de
choisir l'école qui convient le mieux à leurs enfants.
Considérant qu'il y a discrimination lorsqu'une
distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre un de ces droits et considérant que la
liberté des uns se termine là où la liberté des autres commence, nous soutenons
que le projet de loi n° 14 porterait atteinte à ces droits et n'est
certainement pas justifiable dans notre société libre et démocratique. Par
conséquent, nous soumettons respectueusement que le projet de
loi n° 14 devrait être retiré dans son intégralité. Merci, Mme la
Présidente.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup, Mme Chamberland. Je, maintenant, cède la parole à Mme la ministre.
Mme
De Courcy : Alors, bien, mesdames, c'est
délibérément que j'ai choisi de vous entendre et que nous puissions tous vous
entendre sur le temps du gouvernement pour vous poser des questions, parce que
j'ai jugé que votre engagement personnel dans une organisation bénévole, je
suis certaine, depuis
65 ans qu'elle a, cette... bon, on devait vous accorder toute l'attention requise.
Votre mémoire est très clair, est très clair,
nous indique par ailleurs que nous sommes très éloignés en termes de vision. Alors, comme
tous les mémoires que nous recevons, je vais prendre le temps de lire, et de
relire, et de repenser à votre intervention. Mes collègues ont quelques
questions à vous poser. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup. M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
M.
Breton : Oui, bonjour. Merci d'être
venues faire votre présentation.
J'ai quelques questions pour vous. Donc, vous
dites que, si je comprends bien, en fonction du respect des droits individuels des
parents et des enfants, on brime les enfants si on dit aux parents dans quelle
langue ils doivent éduquer leurs enfants. C'est bien ce que je comprends?
Une
voix : Oui.
M. Breton : O.K.
Donc, si on part de cette logique-là, et que quelqu'un vienne du Bangladesh ou
du Pakistan, on le brime si lui décide qu'il
voudrait enseigner à son enfant et élever son enfant avec une éducation en bengali
ou en pakistanais, si on part de votre logique.
Mme Chamberland (Liette) : Bien, notre logique est aussi basée
sur le fait qu'il y a deux langues officielles
au Canada, qui sont le français et l'anglais.
M. Breton : …mais je pars quand même de votre
logique. Vous dites que toute intervention de l'État pour dicter la langue d'apprentissage des enfants ne peut être
régie par l'État. Or, le Québec est un État où il y a une langue officielle qui est le français. Est-ce que je dois
comprendre, selon votre logique, que vous vous opposez aussi à la
loi 101?
Mme Willis (Patricia) : Est-ce que je peux répondre? Si vous permettez, je veux revenir aux mots que vous avez utilisés, c'est «brimer les enfants». On ne veut pas
brimer les enfants. On veut leur ouvrir… leur donner tout ce qui est possible
dans ce monde.
Donc, premièrement, les commissions scolaires
anglaises, je vais parler, sont devenues des écoles où on enseigne les deux langues. Toutes les écoles dans les
commissions scolaires sont devenues 60 % en français, 70 % en
français, même allant jusqu'à 80 % d'enseignement en français, parce que
la réalité est qu'on vit au Québec et que la langue principale que l'on parle
est le français.
Par contre, on veut que ce Bangladais ou cet
Indien de… ou cette personne puisse avoir accès aux deux. Pourquoi le limiter?
Puis ce n'est pas limiter la langue. On ne parle pas qu'ils parlent le bengali,
il y en a beaucoup qui vont apprendre l'arabe,
le bengali, etc., les samedis dans leur communauté, mais on veut leur donner
cette possibilité d'apprendre dans les deux langues, sûrement, pour qu'ils
puissent rester au Québec. On veut qu'ils restent au Québec et on veut qu'ils
aient accès aux deux langues. C'est le choix du parent, ce n'est pas le
gouvernement qui devrait choisir pour...
M.
Breton : Mais...
Mme
Shanks (Joyce) : …d'ajouter un tout
petit quelque chose…
M.
Breton : Oui, allez-y.
Mme Shanks (Joyce) : Dans la loi n° 14, vous disiez
que le Québec est ouvert au monde. Mais pourquoi le monde du Québec ne sont
pas capables de partir du Québec pour travailler n'importe où dans le monde?
Parce que, si le monde ont plus qu'une langue pour continuer leur vie,
ils ont le monde dans leur main. On veut le meilleur pour nos enfants, et le
meilleur pour nos enfants est d'avoir plus, pas d'avoir moins.
M.
Breton : Moi, écoutez, je vais vous
dire, je suis très étonné, parce que je ne suis jamais allé à l'école en anglais, aucun de mes amis n'est allé à l'école en
anglais… still, we speak perfect English, and we've learned it through
French schools. Ça fait que… Ce qui montre qu'à l'école en français on est très
capables d'apprendre l'anglais, ça ne nous
ferme aucune possibilité. Et, comme on dit, c'est qu'il y a une question très
importante qui est la survie de la nation francophone du Québec. Et donc, pour moi, ce que je vois, c'est que vous
dites : Il ne faut pas brimer les enfants, mais, si on vous prend au pied de la lettre, dans le fond, on
les brime en leur donnant accès simplement à deux systèmes d'éducation,
un en français, un en anglais. Les anglophones ont accès à une éducation en
anglais. Nous, ce qu'on dit aux gens qui viennent de pays… d'ailleurs : de
pouvoir parler français. Et ils peuvent apprendre l'anglais à l'école
francophone.
Mme Chamberland
(Liette) : Si je pourrais ajouter, c'est
que les anglophones au Québec ont un choix, les anglophones au Québec peuvent envoyer leurs enfants soit à l'école
française ou soit à l'école anglaise, et ce choix-là est fait sur la
base de ce qui est mieux pour cette famille-là, pour chaque famille. J'ai des
voisins et voisines qui sont anglophones et
que leurs enfants vont dans des écoles francophones. C'est un choix familial, c'est
un droit qu'ils ont. Et il y a des
familles anglophones qui envoient leurs enfants dans une école dans ce qu'on
appelle le système anglais, mais je pourrais vous dire que le système
anglais n'est plus le système anglais qu'on était.
Mon
enfant a une exemption gouvernementale parce que, pour lui, apprendre une
langue, peu importe laquelle, c'est difficile. Alors, on a choisi l'anglais
parce que c'est plus facile à apprendre que le français, puis je pense qu'on
peut tous s'entendre là-dessus.
Une voix : …
• (15 h 50) •
Mme
Chamberland (Liette) : Eh bien, ça sera votre opinion. Mon garçon était à l'école anglophone publique et coulait la
géographie, l'histoire ou toutes les matières qui étaient enseignées en
français. Pourquoi? Parce qu'il n'était pas jugé sur la matière, il
était jugé sur la langue, sur son français. Sa connaissance du français est
minime. Ma fille, elle, pas de problème. Mon garçon, lui, c'en est un,
problème.
Les
écoles anglophones d'aujourd'hui, ce n'est plus des écoles anglophones, c'est
50-50, ou 85-15, ou avec option plus. C'est
presque des écoles francophones. Les étudiants qui sortent maintenant des
écoles anglophones sont bilingues, ils sont…
Une voix : …
Mme
Chamberland (Liette) : Oui, mais, si c'est justement ce que vous dites, pourquoi ne pas donner
le choix aux parents
de décider dans quelle école ils vont? Parce que, de toute façon, quand ils
vont graduer, ils vont être bilingues, qu'ils soient à l'école française
ou à l'école anglaise. Mais donnez le choix aux parents.
M. Breton : …parce que le Québec est une nation francophone.
Mme
Chamberland (Liette) : Parce que c'est une nation qui respecte les droits des parents de
choisir ce qui est le mieux pour leurs
enfants. C'est ça, une société libre et démocratique. The human right to
choose.
M. Breton : Vous savez, il y a les droits individuels et les droits
collectifs. Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Quelqu'un du côté… Oui, M. le
député de Saint-Hyacinthe. Ou monsieur… Peu importe.
Une voix : …
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de
Bonaventure.
M. Roy : Merci beaucoup. J'aimerais citer le dernier... Bonjour,
mesdames, premièrement. J'aimerais citer le dernier paragraphe de votre
document : «Nous croyons que le véritable désir de l'ensemble des
Québécois et Québécoises — francophones et anglophones — consiste à préserver la richesse de la langue et de la
culture françaises, sans intervention
politique. Tous les Québécois et Québécoises sont animés de la même volonté que
les choses se passent ainsi.»
Dans
le contexte, bon, de la langue française au Québec et en Amérique du Nord, vous
croyez réellement qu'on peut préserver la
langue française, lui permettre de progresser sans aucune intervention
étatique? Pouvez-vous nous expliquer cette position-là?
Mme Shanks
(Joyce) : Vous m'excuserez. Est-ce
que je peux vous demander de reposer la question à la fin?
M.
Roy : La
question, c'est : Compte tenu de la précarité de la langue française dans
le contexte nord-américain, croyez-vous
réellement que le Québec pourrait continuer de se développer en français sans
intervention de l'État? Parce que la dernière
ligne de votre mémoire, c'est : «Nous croyons que le véritable désir de l'ensemble
des Québécois etQuébécoises — francophones et anglophones — consiste à préserver la richesse de la langue et de la
culturefrançaises, sans
intervention [étatique]»… ou politique, plutôt, excusez. Est-ce qu'on peut
préserver la langue sans intervention politique?
Mme Shanks
(Joyce) : Absolument. Je suis allée
déjà visiter La Nouvelle-Orléans en Louisiane. C'est français, et il y a une culture, une dynamique qui est spéciale. Et c'est
français, et j'étais capable de parler en français. Et c'était bien
préservé, absolument.
Mme
Willis (Patricia) : Aussi, je vais vous parler de moi. Moi, je viens d'une culture
trilingue, on apprend les trois langues dès la
maternelle. Et on parle bien l'arabe, on le lit bien, on le comprend bien, on
rédige des documents, et, quand on va en
cours, on peut présenter en arabe, en anglais et en français. C'est bien
entendu que l'arabe est la langue officielle de l'État, mais n'empêche
que les enfants sont enseignés dans les trois langues.
Et,
en fait, si je reviens à votre question, pour nous, c'est l'intervention de l'État
dans ce qui est le droit du parent, c'est ça
qui un peu nous offusque, si je peux utiliser ce mot. C'est aux parents de
choisir là où ils veulent envoyer leurs
enfants. Le français ne sera pas en danger, parce que le français est enseigné
dans toutes les commissions scolaires. La seule chose, c'est que, pour nous, on voit un désavantage pour le
parent, qui n'a pas le choix d'aller dans une école de son choix. Bien,
il se trouve... Bien, tu n'as pas le choix, tu vas à l'école anglaise. Il n'y a
aucun mal d'aller dans l'école française — pardon,
je voulais dire l'école française — ou la commission française. Il n'y
a aucun mal, au contraire. C'est vrai, c'est une langue qui est très difficile,
mieux vaut l'apprendre depuis le début. Mais la réalité, c'est qu'on
empêche... l'État prend ce droit. C'est
comme, l'État, me dire : Tu choisis ce pain et non pas ce pain. Est-ce que
tu sais ce qui me convient? Est-ce que l'État sait ce qui convient aux
parents ou à la famille? C'est ça.
M. Roy : …une question : Est-ce que vous êtes pour ou contre
la loi 101?
Mme Shanks (Joyce) :It's
not on the table, it's not something we're talking about.
Mme Willis (Patricia) : On ne parle pas de la loi 101, on parle du projet de
loi n° 14.
La Présidente (Mme
Vien) : Merci beaucoup, merci à tous.
Nous allons maintenant passer du côté de l'opposition officielle pour un
échange avec nos invités.
M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Pourriez-vous nous
indiquer d'entrée de jeu de combien de temps disposons-nous?
La Présidente (Mme
Vien) : 18 min 30 s.
M. Tanguay : Pour l'opposition officielle?
La Présidente (Mme
Vien) : Absolument.
M.
Tanguay : D'accord,
merci beaucoup. Alors, merci beaucoup, mesdames, pour le temps que vous avez pris à rédiger ce
mémoire. C'est du travail bénévole. Par vos convictions, par votre désir de
faire entendre votre voix, d'étayer votre
position, je pense que vous participez directement à notre démocratie, et c'est
dans ce processus-là que l'on s'inscrit aujourd'hui. Il est important, par de telles interventions, d'apporter
de la lumière ou d'apporter notre éclairage pour que l'on puisse, vous savez, en société démocratique,
justement, s'il y a des écarts qui sont proposés par un gouvernement
donné, bien, faire en sorte qu'à la lumière
des représentations qui sont faites l'on puisse envoyer les bons signaux au
gouvernement, qui a toujours l'option de
faire marche arrière et de reculer, lorsque l'on pense et lorsque l'on réalise
que l'approche n'est pas la bonne,
que l'approche est peut-être exclusivement ou essentiellement coercitive, alors
que l'épanouissement du français peut se réaliser aussi notamment... pas
uniquement par des amendements à la loi, mais peut se réaliser par des programmes, des soutiens, faire en sorte que
le service que l'on veut donner et que l'on est prêt à rendre soit le
chemin par lequel on puisse acquérir des notions, tel le fait de bien parler et
de bien écrire le français.
En
ce sens-là, vous recommandez, comme d'autres, je dois vous dire... Certains
auront porté notre attention, en commission,
sur certaines dispositions du projet de loi n° 14, en disant : Bien
là, le gouvernement fait fausse route, et il
y en a plusieurs, jusqu'à maintenant, qui ont eu l'occasion de le souligner au
gouvernement. Et aujourd'hui vous ajoutez votre voix en disant :
Écoutez — au gouvernement — vous faites fausse route, vous devriez retirer tout
simplement le projet de loi n° 14, et votre message à cet effet-là est
très clair.
Vous
avez parlé un peu plus tôt — j'aimerais vous entendre
là-dessus — de ressources financières. Vous
avez parlé d'un certain débalancement, si
vous me permettez l'expression, entre, d'une part, la bureaucratie qui sera
exigée par certains aspects du projet
de loi n° 14… La bureaucratie, madame, tout à l'heure, parlait des
articles 88.0.1 et suivants, qu'ils allaient nécessairement occasionner
une bureaucratie. D'autres avant vous et après vous... D'autres ont dit avant
vous — et d'autres le diront également — que des articles telle l'imposition systématique aux
milliers de PME de 26 à 49 employés d'un
fardeau administratif de paperasse, bien ça vient alourdir non seulement leur
fardeau administratif, mais il y a un coût lié à ça. Et plusieurs, comme vous,
ont eu l'occasion de souligner que c'est de faire fausse route.
Je
reprends donc au bond un élément que vous mettez à l'intérieur de votre
mémoire, que nous avons tous lu, j'en suis
persuadé, tant au point de vue de l'opposition qu'au niveau de la banquette
ministérielle. Votre mémoire, vous parliez, entre autres,
de l'enseignement du français. Je suis à la page 8. L'enseignement du
français, vous faisiez la recommandation
très vive... donc : «…recommande vivement que les nouvelles normes
proposées soient assorties des ressources financières accrues
nécessaires pour les atteindre.» Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, au
niveau de l'importance… Si l'on dit que c'est
important de bien enseigner le français, tout comme c'est important de bien
enseigner l'anglais et les autres matières
pour que nos enfants puissent avoir un coffre d'outils, un coffre de
compétences complet, et que ce soient
les bonnes, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur l'importance que vous
soulignez d'accorder suffisamment de ressources financières pour
atteindre les objectifs au niveau de l'enseignement du français. Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Mme Chamberland ou…
Mme Chamberland
(Liette) : Ça va être Mme Willis qui
va répondre.
La Présidente (Mme
Vien) : Mme Willis, on vous écoute.
Mme Willis
(Patricia) : Reposez-moi la question
à la fin, s'il vous plaît, juste…
M. Tanguay : Je suis à la page 8 de votre mémoire.
Mme Willis
(Patricia) : Oui, oui. J'ai lu ça,
oui. Et vous demandez?
M.
Tanguay : Alors,
j'aimerais vous entendre au niveau de l'importance que vous avez reconnue...
Vous dites dans votre mémoire : Pour ce qui est de l'enseignement du français, il
faudrait mettre plus d'argent. Alors, j'aimerais que vous me parliez de ça. Quel constat avez-vous fait pour
dire : Il manque de l'argent, il faudrait en mettre plus? Et quelle
justification? Si vous pouvez étayer là-dessus, j'aimerais vous entendre.
Merci.
• (16 heures) •
Mme Willis
(Patricia) : Bien, en fait, vous
savez que toutes les commissions scolaires, que ce soient des commissions scolaires françaises ou anglaises, ont
eu de grosses coupures budgétaires, et ceci a vraiment… En fait, même si
le gouvernement a dit que ça ne nuirait pas
à l'enseignement et que les services ne seront pas coupés aux enfants, les
enfants qui ont besoin de ressources, les enfants qui ont des troubles d'apprentissage,
bien ces coupures-là le font. Qu'on le veuille ou ne le veuille pas, ça arrive.
Alors,
vous demandez aux écoles d'élever ou de donner de meilleurs… bien en fait au
fur et à mesure de hausser les compétences, mais où est le soutien du
gouvernement pour ce qui est de donner toute la… vous savez,
développement pédagogique, les journées
pédagogiques où il y a des développements professionnels? Il faut de l'argent pour
faire tout ça, et les commissions scolaires n'en ont plus. Et encore c'est
pour toutes les commissions scolaires, je ne parle pas de l'une ou de l'autre mais des deux. Donc, comme on
dit, en très simple, c'est bien beau, mais il faut soutenir ça avec le
financement. Merci.
M.
Tanguay : Oui,
Mme la Présidente. Également, aussi, vous avez souligné, comme bien d'autres
avant vous et comme d'autres continueront de le faire également, autre élément du
projet de loi n° 14, les enfants de parents servant dans les Forces armées canadiennes. Le gouvernement,
dans sa grande sagesse, a décidé de prendre cette exception-là et de la mettre de côté. Il y a toujours, en vertu du
règlement, d'autres exceptions disponibles. Autrement dit, si on
explique pour les gens qui nous regardent à la télévision, l'article 72 de
la Charte de la langue française fait en sorte que l'enseignement primaire et secondaire se donne en français. L'article 3
du règlement concernant, justement, cet article 72 là fait en
sorte… et même ce règlement-là fait en sorte d'identifier certains cas, cas d'espèce
où il y a des exemptions à ce principe. L'une
d'elles, l'une d'entre elles était l'exemption accordée aux enfants des
militaires, des pères et mères qui servent
dans les Forces armées canadiennes, faire en sorte que, lorsqu'ils sont
stationnés de façon temporaire, pour une période n'excédant pas trois
ans, ces parents puissent envoyer leurs enfants à l'école anglophone. On parle
ici de quelques centaines d'enfants au Québec, population de 8 millions.
Le gouvernement, dans sa sagesse et dans sa recherche — j'en suis persuadé — d'un
équilibre et d'une paix linguistiques, a décidé de prendre cette exception-là sur les parents des
Forces armées canadiennes et de dire : Bien, ça, là, on tire un trait
là-dessus. Et, encore une fois, vous n'êtes pas les seuls à l'avoir souligné, c'est un des nombreux éléments que l'on
dit coercitifs du projet de loi n° 14 et pour lesquels nous sommes
donc loin d'être en faveur. Nous sommes en défaveur de cet élément-là et du
projet de loi n° 14 dans son approche.
Alors, j'aimerais vous
entendre là-dessus. Qu'est-ce que ça vous inspire, vous, de telles mesures
comme ça, lorsque... Et vous en faites état dans votre mémoire.
Mme Chamberland (Liette) : Bien, en tant qu'organisme qui
favorise la participation des parents dans la
vie scolaire des enfants, on trouve qu'ici c'est
imposer aux enfants une misère non nécessaire. On sait tous que les
enfants des militaires vont être temporairement ici, temporairement là,
temporairement ici, temporairement là. Se refaire de nouveaux amis à chaque
fois, un nouvel environnement, le stress de : Papa ou maman va-t-il venir?, où ils vont être envoyés, c'est un stress continuel, une vie très
mouvementée pour des jeunes enfants, puis là on va les prendre puis on
va dire : Bon, l'école en français pour six mois, un an, deux ans. Ces
enfants-là vont perdre deux ans. On parle d'un enfant qui a 10 ans, qui n'a
jamais parlé français, qui s'en va à l'école française. On a beau lui donner
des ressources, comment peut-on vraiment apprendre la matière qui est enseignée
si on ne connaît pas la langue? C'est comme si on s'imagine nous-mêmes, en tant qu'adultes, assis
dans une classe où on enseigne l'histoire du Québec en chinois. Est-ce
qu'on va comprendre? Non. Et je trouve, en plus, que c'est très disrespectueux
pour ces familles qui mènent cette vie pour protéger le Canada.
La
Présidente (Mme Vien) : M. le député
de Jacques-Cartier.
M.
Kelley : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
À mon tour, bienvenue. Moi, je peux constater que l'école primaire où mes cinq enfants ont assisté, l'école
primaire publique Beacon Hill, elle bénéficie beaucoup de l'existence d'un chapitre très actif du Québec Family of Home
and School Associations. J'ai acheté les oranges, les pamplemousses, les tablettes de chocolat et toutes les autres
activités de bénévolat. Mais je veux mettre ça en évidence parce qu'on
est dans une présentation très politique aujourd'hui et je veux souligner que,
dans le quotidien, c'est une association qui est
vouée avant tout d'améliorer la qualité de l'enseignement dans nos écoles — moi comme quelqu'un qui aime la lecture et les bibliothèques — notamment dans l'achat de livres additionnels pour nos
bibliothèques dans nos écoles mais beaucoup
d'autres activités qui sont vraiment là pour enrichir les enfants. Alors, je
veux saluer votre bénévolat, parce que, je pense, c'est quelque chose qu'on encourage dans l'ensemble de nos
commissions scolaires, que les parents s'impliquent davantage, qu'ils sont vraiment aidants avec leurs
enfants, faire les devoirs, et tout le reste. Alors, bravo pour le
travail quotidien de l'association.
Et, en passant, j'ai peut-être un autre
commentaire et une question. Je vois le commentaire que vous avez soulevé pour les
enfants avec les difficultés et les exigences d'une deuxième langue. Comme
député depuis un certain temps, ça n'arrive
pas souvent, mais parfois… il faut toujours chercher une exemption que… Quelqu'un
qui a complété son diplôme de secondaire V, sauf le français
secondaire V, est-ce qu'on veut vraiment, comme société, les empêcher d'aller
au cégep? Non. Alors, il faut le baliser. Et
je ne dis pas que c'est un bar ouvert, mais par contre le point que vous avez
soulevé est très important, et je peux,
juste dans mon comté, citer les cas où… Un enfant qui a essayé, essayé, essayé
de nouveau d'obtenir le
secondaire V, c'est quelqu'un qui avait peut-être de la misère à écrire dans
sa langue maternelle aussi. Alors, je pense
que les points que vous avez soulevés sur, je pense, 88.0.2 et 88.0.3 sont des
points qui sont très importants et je pense qu'on invite tout le monde à
regarder ça attentivement, parce que, dans les règles du jeu existantes, ce n'est
pas toujours évident, et je pense qu'on a
tout intérêt de ne pas empêcher quelqu'un qui a tous les autres critères pour
aller au cégep et les empêcher… Il y
a quelque chose qu'il faut faire, il y a de sensibiliser. Merci beaucoup de l'avoir soulevé.
Peut-être,
ma question, m'expliquer… Vous n'êtes pas le premier témoin qui a fait cette
distinction entre une minorité ethnique et une communauté culturelle. Moi, je
ne suis pas avocat, alors peut-être d'expliquer davantage la nuance, ou la
menace, ou toutes les questions que vous avez dites entre ces deux expressions.
Pourquoi vous avez une nette préférence pour une formulation plutôt que l'autre?
Mme
Shanks (Joyce) : Merci de votre question. C'est énorme. This is a very big issue. For the
longest time — and
I'm sorry, I'm just going to go back to my notes — for
the longest time, back in 1976, Canada signed the UN pact… En français,
c'est le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Canada
est signataire depuis 1966, pas 1976. Et, en plus de ça, il y a la Charte des
droits et libertés du Québec aussi, les communautés culturelles sont protégées…
Une
voix : Ethnies, les ethnies.
Mme Shanks (Joyce) : …les ethnies sont protégées. Le nom
des ethnies, communautés… Excusez. Les
minorités, les minorités ethniques sont
protégées. Quand on change le nom, il n'y a plus de protection, plus de
protection dans le monde, moins de
protection au Canada. Et en plus vous ouvrez une porte ici, parce que les
Québécois sont une minorité aussi au
Canada. Donc, quand vous changez le terme, vous avez déjà une discrimination,
vous oubliez une grande partie de nos...
You
lose a huge part of this province. They don't have the opportunity to develop
the way that they used to, they don't
have the support, and they don't have the protection. And you're opening a door
for other provinces and the country of Canada to say, «Oh, we don't protect
minorities anymore.» And that's going to be a problem for Québec.
• (16 h 10) •
Mme Chamberland (Liette) : Si je pouvais ajouter, c'est qu'encore
en vertu de la Charte des droits et libertés
du Québec, à son article 10, tantôt j'ai énoncé une partie des droits qui sont
garantis et l'origine ethnique ou nationale. Dans
l'article 10, il n'y a aucune mention des communautés ethniques. Mais, à
ce moment-ci, actuellement, nos minorités ethniques ont droit à la reconnaissance et à l'exercice en pleine
égalité des droits et libertés de la personne, mais, dès qu'on enlève ce nom-là puis qu'on le remplace par
«communautés culturelles», ils viennent de perdre le droit à la
reconnaissance et à l'exercice en pleine égalité des droits et libertés de la
personne, sans distinction, exclusion ou référence.
M.
Kelley : Si je peux résumer, parce
que je ne suis expert, mais… la notion de minorités ethniques va nous attacher à certaines protections qui existent dans
la Charte des droits du Québec mais également dans certaines
déclarations internationales, de l'ONU, et tout le reste. Alors, il y a un
certain bagage qui vient avec l'expression «minorités ethniques» qu'on ne
trouve pas avec l'expression «communautés culturelles», qui n'a pas la même
résonance au niveau juridique, si j'ai bien compris.
Mme
Chamberland (Liette) : C'est ça.
M. Kelley : Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Vien) : Il reste exactement deux minutes.
M.
Tanguay : Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Et, pour poursuivre sur cet aspect également qui... si le
gouvernement le met dans son projet de loi n° 14, c'est sûrement
parce qu'il y a une utilité, parce qu'on ne pourrait pas accuser le gouvernement de vouloir faire des modifications sans qu'il
y ait des impacts tangibles. Donc, je pense que vous soulevez là, avec l'échange que vous avez eu avec le député de
Jacques-Cartier, un élément important de réflexion. Il y a donc les accords internationaux, «minorités
ethniques» étant le concept juridique et la réalité également des gens
que nous voulons voir protégés, que nous
voulons protéger, versus, on vous répondra, peut-être un jour on vous
répondra… Un des éléments de la réponse qu'on vous donnera : C'est par
concordance à d'autres lois, tout simplement, et que les droits sont également protégés. Par contre, je
suis d'accord avec vous que cette modification-là peut ne pas être
uniquement que de concordance et anodine, et
c'est important de façon initiale, en amont, aujourd'hui, de se poser ces
questions-là, parce qu'il y a des
obligations internationales signées par le Canada qui ont été évidemment
reconnues au Québec et qui font en
sorte que, «communautés culturelles» versus «minorités ethniques», il pourrait
bien y avoir des modifications de façon tangible et pas uniquement par
concordance.
Et là aussi, également, où je partage votre
questionnement : l'article 10 nous dit, nous enseigne, de la Charte des droits et libertés de la personne, qu'il n'y aura pas
de discrimination au Québec basée sur le sexe, l'âge sauf dans la mesure prévue
dans la loi — puis c'est le seul
qui l'a — le groupe ethnique,
l'appartenance à un groupe ethnique et la
langue également. La langue est un des critères, un des aspects, un des
éléments, une des réalités par lesquelles on ne peut pas discriminer.
Le
gouvernement précédent avait, en introduisant un nouvel article 50.1 à la
Charte des droits et libertés de la personne du Québec...
Une
voix : ...
M. Tanguay : 30 secondes? «Les droits et
libertés énoncés dans la présente charte sont garantis également aux femmes et aux
hommes.» Donc, nous venions, si vous voulez, réaffirmer qu'au Québec, entre les
hommes et les femmes, il y avait une égalité qui devait être tangible.
Par l'article 50.1, nous venions réaffirmer ce principe-là. Et là ce que l'on fait, c'est que l'on vient prendre un élément de l'article
10 puis on vient dire : Bien, les distinctions se feront là-dessus.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup.
M.
Tanguay : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup, M. le député. Mme la députée de Montarville, droit de parole pour
vous.
Mme
Roy (Montarville) : Oui, merci.
Pourrais-je savoir combien de temps…
La
Présidente (Mme Vien) : Bien entendu.
4 min 30 s.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci beaucoup,
mesdames, merci d'être ici. Merci d'avoir
déposé ce mémoire, de vous être déplacées.
Il est important que vous sachiez d'entrée de
jeu que, pour nous, au deuxième groupe d'opposition, il est important de protéger la langue française et de protéger
aussi les droits de nos minorités. Il y a des choses dans votre mémoire qui nous interpellent. Entre autres, on est tout à
fait d'accord avec vous en ce qui a trait aux enfants de militaires. Mon
collègue de la première opposition en a parlé un peu.
J'aimerais savoir : Parmi votre regroupement,
avez-vous des parents qui sont militaires et qui ont des enfants dans les écoles? Sur les bases, en connaissez-vous? Je me
posais la question comme ça, à tout événement.
Mme
Chamberland (Liette) : Juste comme
ça, on ne pourrait pas vous dire. Il faudrait qu'on recherche.
Mme
Roy (Montarville) : Parfait.
Mme
Chamberland (Liette) : Mais je ne
crois pas, mais je ne suis pas sûre.
Mme Roy (Montarville) : Parfait. Mme la ministre, lorsque
questionnée par un de mes collègues du
deuxième groupe d'opposition sur cet article, justement… Comme je vous dis,
nous, nous ne voulons pas de cet article, nous voulons que les enfants de militaires puissent bénéficier de cette
exemption-là. Nous avons dit à la ministre que les parents s'inquiétaient, les parents que nous avons
rencontrés, à qui nous avons parlé, et la ministre nous a répondu en
Chambre qu'il ne devait pas y avoir d'inquiétude.
Je ne reprends pas exactement les mots, mais c'était... on pourrait sortir le
script, mais vous ne sembliez pas inquiète plus qu'il ne faut à cet
égard-là, pour ces gens-là.
Une
voix : ...
Mme Roy (Montarville) : Que l'inquiétude était petite ou qu'elle était... enfin,
que ce n'était pas une grande inquiétude. Mais je…
Une
voix : ...
Mme
Roy (Montarville) : Alors,
pouvez-vous me redire le terme que vous avez employé?
La
Présidente (Mme Vien) : Mme la
ministre, allez-y.
Mme De Courcy : Bien, en fait, ce que je disais, c'est
que, la période d'inscription étant somme toute
terminée, les inscriptions pour septembre prochain, on ne pouvait pas avoir d'inquiétude,
puisque la période d'inscription était terminée. C'est ce que je disais.
Mme
Roy (Montarville) : Alors, voilà pour
la précision.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci. Mme la
députée de Montarville.
Mme Roy (Montarville) : Alors, en conclusion — puisque c'est très court — moi, j'aimerais savoir, à cet égard-là, si vous êtes inquiets pour ces parents, pour ces
enfants si ce projet de loi est adopté tel quel, si cet article est adopté.
Mme Chamberland (Liette) : Je ne crois pas que la date d'inscription
compte pour les parents. Il y a une date d'inscription que les parents se doivent de
respecter, mais ce n'est pas parce qu'on a manqué la date d'inscription
qu'on ne peut pas s'inscrire à une école, l'inscription
à une école se fait à l'année longue. Ça, ça n'a pas d'impact sur la
nervosité des parents.
Mais il y a toujours une nervosité des
parents dès qu'on se fait retirer un droit, dès qu'il faut qu'on se batte pour nos enfants. Nous sommes la voix de nos enfants. Nos
enfants ne peuvent pas venir puis… ils sont trop jeunes. Ils sont peut-être assez vieux pour jouer de la casserole,
mais ils ne sont pas capables de venir s'exprimer. C'est des jeunes
enfants, tous en bas du secondaire... bien c'est-à-dire
secondaire en descendant. Ils n'ont pas la capacité et la maturité de
venir s'exprimer, c'est encore nous qui avons le devoir et le droit à leur
éducation.
Sur un côté, on nous donne un droit et un
devoir et, sur l'autre, on va nous dire quoi faire. Puis des fois on va nous dire quoi faire,
puis nous, on sait très bien que ce n'est pas la bonne chose, mais on est
obligés de le faire. Puis c'est nous qui vont être responsables, mais ce n'est pas nécessairement ce qui est bon.
Ce qui est bon pour un n'est pas toujours bon pour l'autre, et un
soulier pour tout le monde, «one size fits all», ça ne marche pas, ça ne fitte
pas.
Mme Margolese (Rickhey) : Et c'est pour ça qu'il y a à peu près
10 000 enfants qui viennent de...
anglophones qui sont dans des écoles françaises, parce que les parents pensent
que ça, c'est la meilleure chose pour leurs enfants. Et ça, c'est correct, c'est son choix. On vous dit que, tous les parents
au Québec, il faut avoir ce choix-là. Et je ne pense pas qu'il va y
avoir 10 000 enfants qui vont changer pour le système anglophone, je ne
pense pas que ça va arriver.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup,
mesdames. Merci.
La Présidente (Mme Vien) : Ça complète, Mme la députée de
Montarville? Merci infiniment, mesdames, de
vous être déplacées aujourd'hui. Merci et bonne continuité.
On
va suspendre quelques instants pour accueillir l'autre groupe.
(Suspension
de la séance à 16 h 18)
(Reprise
à 16 h 22)
La Présidente (Mme Vien) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors,
nous sommes maintenant prêts pour l'audition d'un
second groupe cet après-midi, il s'agit du Comité d'aide aux femmes sourdes de
Québec. Alors, bienvenue à votre Assemblée
nationale. Je demanderais à l'une ou l'autre d'entre vous de vous présenter et
de bien vouloir présenter les personnes
qui vous accompagnent. Déjà, nous reconnaissons une collègue qui est à vos
côtés. Alors, on vous écoute, madame.
Comité
d'aide aux femmes
sourdes de Québec (CAFSQ)
Mme
Rivard (France) : (S'exprime par la
langue des signes).
[Interprétation] Bon,
excusez-moi, mais d'abord j'aimerais vous mentionner qu'en étant sourdes, là,
pour nous, les personnes sourdes, le regard est très important, ça fait partie
de notre culture, alors la façon d'écouter aussi. Merci d'en prendre note. [Fin de l'interprétation]
Mme Paquin
(Caroline) : Donc, bonjour à tous.
Nous représentons le Comité d'aide aux femmes sourdes de Québec, donc un
organisme autonome qui supporte les femmes sourdes dans toutes les sphères de
leur vie, donc nous avons
une approche conscientisante et féministe. Donc, je vous présente Mme France
Rivard, qui est coordonnatrice au sein de notre organisation; Mme
Maritza Côté, qui est une intervenante sourde. Moi-même, je suis Caroline
Paquin, la directrice du Comité d'aide aux
femmes sourdes. Et puis nous avons Mme Marguerite Blais qui nous appuie dans
notre démarche et nous sommes très contentes de l'avoir avec nous aujourd'hui.
La Présidente (Mme
Vien) : Alors, la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne, bien entendu.
Alors, on vous écoute, madame, pour la présentation de votre mémoire.
Mme Paquin (Caroline) : Oui.
Mme Rivard
(France) : (S'exprime par la langue
des signes).
[Interprétation] Aujourd'hui, nous sommes venues en
lien avec le projet de loi sur la Charte de la langue française. On est en accord avec la protection de la
langue française, avec le projet de loi, mais, en tant que personnes sourdes, notre façon de s'exprimer, notre langue, c'est la
LSQ, la langue des signes québécoise, qui est une vraie langue et qui
est en lien avec sa culture aussi. C'est la
langue qu'on utilise, c'est la LSQ, donc, québécoise, langue des signes
québécoise. C'est sûr que notre identité est également québécoise, comme la
vôtre.
En ce moment, au
niveau mondial, il y a un mouvement de reconnaissance de la langue des signes.
Bon, par exemple, il y a des recherches et
des débats qui sont menés à l'intérieur du Canada, par exemple en Ontario, au
Manitoba, en Alberta, et, à l'international,
dans d'autres pays comme en Finlande, en Nouvelle-Zélande, en Catalogne, les
langues des signes sont déjà reconnues à plusieurs endroits, dont ceux que je
vous ai nommés. Il y a même aussi à l'intérieur de la convention des droits des personnes handicapées où on reconnaît la
langue et la culture, mais au Québec ce n'est pas fait encore. Nous, on
croit que c'est important de profiter de ce moment, de ces débats qui ont lieu
pour parler de la reconnaissance de la LSQ. Alors, merci. [Fin de l'interprétation]
Mme
Côté (Maritza) : (S'exprime par la langue
des signes).
[Interprétation] Nous, on ne sait pas si, à ce
moment-ci, la langue des signes devrait devenir officiellement une langue, ou être incluse dans la charte des langues un
peu au même titre que les langues autochtones, ou obtenir un autre statut qui serait à définir, mais ce qu'on
sait, c'est que nous voulons des actions concrètes. On a des rêves puis
on sait qu'ils peuvent devenir réalité, on sait que c'est possible. On
aimerait...
Bien,
si je peux... Par exemple, un enseignant qui serait lui-même sourd, qui aurait
la culture, la langue sourde pourrait devenir tellement un bon modèle, pour un
enfant sourd, qu'il pourrait, à l'aide de ce modèle-là, développer une
identité forte et solide puis ensuite prendre ses décisions dans sa vie plus
tard, au fil du temps.
Un
autre exemple qui serait possible, c'est, par exemple, à l'école en général. Un
peu partout, là, les enseignants qui enseignent aux élèves ordinaires pourraient, même
s'il y a un enfant sourd d'intégré dans une classe… ou qu'il n'y en ait pas, mais que la langue des signes soit enseignée,
des mots de base à tous les enfants qui entendent, comme le mot«jouet», le mot «manger», etc. Alors, l'enfant
sourd qu'on voit, qui est à part, qui est symbolisé par mon doigt tout
seul, et ma main gauche qui vous montre tous
les enfants qui entendent, si ce que je vous dis devenait réalité, on pourrait
faire ce signe-là que je vous montre, qui
veut dire «intégration», et améliorer la vie en société de ces enfants-là et de
ces personnes sourdes. Alors, pour un
enfant sourd, l'intégration, c'est bien, mais garder son identité et
communiquer avec les personnes sourdes… avec les entendants, ça aussi, c'est
primordial.
Alors,
présentement, là, si je vous donne un autre exemple concret, on est à l'Assemblée
nationale, les caméras nous filment. Elles me
filment présentement, je parle en langue des signes, mais la caméra, aussi,
peut passer sur les interprètes. Mais,
lorsqu'il y aura des questions, quand les députés parleront, la caméra les
filmera, et l'interprète ne sera pas complètement visible pour les
personnes sourdes qui le voient de l'extérieur. Donc, en ce moment, les sourds
peuvent manquer d'accès à ce qui se passe ici. Alors, ça, c'est un exemple
concret du manque d'accessibilité.
Une personne sourde
aussi ici, au Québec, qui demande des services gouvernementaux, municipaux
devrait avoir tout de suite des accès en langue des signes à l'intérieur des
services.
Ce qu'on demande, là,
en final, c'est de créer une commission où on parlerait de l'éducation, de... — pardon, l'interprète s'est
trompée — où est-ce que, dans la commission, il
y aurait des personnes qui vivent en langue des
signes, des personnes qui sont sourdes, des
éducateurs, des personnes qui travaillent au gouvernement, qui aurait comme butde reconnaître la LSQ, et ce comité-là
aurait comme mandat clair d'écrire un projet de loi qui soit déposé, qui
modifierait la Charte de la langue française ou qui contienne un amendement au
sujet de la LSQ et qui soit déposé au début de l'année 2014. Ça, c'est
possible, parce que ça fait plusieurs, plusieurs années qu'on en parle.
Maintenant, c'est le moment de passer de la parole aux gestes. [Fin de l'interprétation]
La Présidente (Mme
Vien) : Merci beaucoup. Est-ce que ça
complète la présentation du mémoire? Oui? Merci beaucoup, mesdames. Alors, nous
allons procéder à une période d'échange, qu'on entame tout de suite avec Mme la
ministre.
• (16 h 30) •
Mme
De Courcy :
Alors, bien, bonjour. Bonjour, mesdames. Bonjour, Mme la députée. D'abord, vous
dire que vous faites suite à d'autres
personnes de la communauté sourde qui sont venues faire une présentation qui a
touché une majorité des parlementaires ici
par l'engagement des personnes qui se sont présentées et qui avaient des
revendications très légitimes à cet égard. Alors, au nom de mes collègues
parlementaires, j'aimerais vous dire combien j'ai apprécié cette présentation.
Maintenant, vous me
permettrez, même si nous ne sommes pas dans la même formation politique, de souligner l'engagement
de Marguerite Blais comme personne dans cette cause et dans plusieurs causes
humanitaires. Marguerite, je me permets de le souligner.
En conséquence, à la suite de la présentation
que nous avions eue, j'ai convenu avec mes collègues parlementaires du Parti
québécois et ceux de la CAQ qu'une motion pourrait être présentée à l'Assemblée
nationale. Nous travaillons à cette
motion pour s'assurer que… Nous ne sommes, je dirais, pas nécessairement dans le
projet de loi n° 14, on n'est pas nécessairement dans ça, on n'est
pas nécessairement dans la charte, mais on est absolument dans donner un
souffle à la reconnaissance de la LSQ, des oralistes aussi, de tous ceux qui
oeuvrent autour d'une oeuvre de communication absolument nécessaire de ce qu'ils
nous relient, c'est-à-dire communiquer ensemble, et de prévoir résolument des installations et ce qu'il faut. Maintenant, on
travaille en accéléré, là, avec le ministère de l'Éducation, tel que je
l'avais dit à mes collègues, le ministère de l'Éducation, pour s'assurer, là,
qu'on fait bien les choses, et puis, bien, vous aurez des nouvelles sous peu. Notre intention, c'est de ne
pas laisser traîner cette motion-là et aussi de ne pas essayer d'entrer
une reconnaissance de la langue des signes
ou d'autres possibilités nécessairement dans la charte, pour qui ce serait
peut-être un peu étrange de l'insérer
là, mais la façon de reconnaître cette façon-là de communiquer qui est votre
langue peut très bien se faire, là, pas nécessairement par le procédé
qui est actuellement à l'étude.
Alors, quoi vous dire de plus que, pour ma
part, l'importance de la communication à tous égards fait en sorte que je suis extrêmement sensible à cette question-là.
Marguerite le sait, je sais que la députée de Verdun est une alliée très sûre
dans ce dossier-là. Et j'ose impliquer ma collègue la députée de Montarville
autour de cette question-là, puisque nous en avions vraiment convenu.
Alors,
mesdames, ce sera avec un réel plaisir, je suis certaine, par la députée de
Verdun que nous... Saint-Henri — à chaque fois je dis «Verdun» — la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, que nous pourrons vous
inviter à nouveau
pour, cette fois-là, assister à une vraie motion à l'Assemblée nationale. Je
vous remercie donc d'être venues, par mauvais temps quand même, hein,
par mauvais temps. Il n'y a rien pour empêcher de faire valoir cette cause-là,
je le sais. Alors, vraiment un profond merci d'avoir été présentes. Je n'ai pas
d'autre question.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup, Mme la ministre, en se rappelant respectueusement que nous devons
nous appeler et nous interpeller par le titre tout simplement. Mais on ne vous
en tiendra pas rigueur.
Du
côté ministériel, d'autres questions? M. le député de Saint-Hyacinthe, s'il
vous plaît.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je
salue les gens de l'opposition officielle, les
gens de la deuxième opposition. Je vous
salue, mesdames. Je tiens à souligner... à vous féliciter et vous remercier
pour la qualité du mémoire que vous avez présenté.
Vous savez, quand j'étais dans l'opposition,
j'étais le porte-parole pour les personnes handicapées, et je suis très, très sensibilisé,
et je continue de travailler dans ma circonscription et au niveau du caucus
pour sensibiliser davantage mes collègues
aux personnes… à ce que vivent les personnes handicapées, parce qu'on a une
politique d'intégration pour les personnes handicapées dans nos milieux
de vie, dans nos communautés, et je pense que c'est important que cette politique-là, qu'on appelle la politique À part
entière, soit, on peut dire, le phare des personnes qui ont une
déficience. Et je pense que vous êtes les exemples parfaits de gens qui s'occupent,
vous vous êtes occupées, vous vous occupez, et je pense que ça, c'est
important.
J'aurais
une question quand même pour juste un petit peu alimenter la conversation puis
en même temps m'alimenter afin que je puisse mieux comprendre l'environnement
dans lequel évoluent les élèves, les jeunes enfants sourds. Pourriez-vous m'en dire davantage sur l'offre de services qui
existe dans les écoles du Québec pour les personnes...
Mme
Paquin (Caroline) : Bien, pour être
honnête, malheureusement, nous, on travaille avec un organisme communautaire, donc nous soutenons les femmes
principalement. Je vais vous avouer que je ne connais pas nécessairement
les écoles en profondeur, là.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Ah!
O.K., O.K. Merci.
Bien, à ce moment...
Mme
Paquin (Caroline) : Je peux laisser
madame… notre alliée en discuter.
La
Présidente (Mme Vien) : Oui, Mme la
députée.
Mme Blais : Si vous le permettez, je pourrais
peut-être dire que les sourds gestuels se reconnaissent par leur langue et leur culture,
au détriment de leur handicap. Et ça, c'est important de le dire, parce que c'est
très différent que certaines personnes
qui sont devenues sourdes après avoir entendu. Et les sourds, notamment,
demandent à ce que l'éducation pour les personnes sourdes profondes et
gestuelles se fasse sur le mode du bilinguisme, et on parle de bilinguisme LSQ-français écrit, pour permettre aux enfants sourds
qui n'ont pas la possibilité d'apprendre à parler de pouvoir apprendre à
lire et à écrire, pour être en mesure de faire
des études supérieures. Et ça, c'est fondamental, et on pourrait développer
une offre de services un peu plus large, un
peu plus grande et reconnaître ça. Quand madame a parlé de professeurs sourds,
ça fait en sorte qu'il y a des
modèles, et ces modèles sourds permettent aux jeunes d'avoir un sentiment aussi
de pouvoir accomplir quelque chose dans la vie. Et je pense que c'est
important aussi qu'il y ait ces modèles sourds pour notre jeunesse.
La Présidente (Mme
Vien) : Mme Côté ou Mme Rivard, pour
un complément d'information… ou si ça… C'est complet pour cette question? M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci. Est-ce qu'il existe quand même
dans certaines institutions scolaires… Est-ce
qu'il existe une approche, comme vous disiez tantôt, pour ces personnes, les
jeunes, les jeunes et les adultes aussi qui veulent se perfectionner ou qui
veulent apprendre le langage? Est-ce qu'il existe des approches dans nos
institutions, l'éducation des adultes, l'éducation à tous les niveaux?
La Présidente (Mme
Vien) : Oui, Mme Paquin.
Mme
Paquin (Caroline) : Je sais que, dans la région de Montréal, il y a des institutions qui
sont quand même... bien, qu'il y a une
insertion, là, qui est faite et une certaine forme de bilinguisme, mais je vous
dirais que c'est quand même très, très restreint, là, c'est minime, là.
Une voix : Lucien-Pagé.
Mme Paquin
(Caroline) : Oui, Lucien-Pagé, entre
autres.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de Bonaventure.
M. Roy : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Vien) : Vous avez une
question?
M.
Roy : Oui, une
question : En proportion, chez toutes les personnes qui ont des problèmes
de surdité, combien de personnes maîtrisent la
langue des sourds du Québec? Puis quelles sont les autres stratégies pour
communiquer chez les autres personnes?
Mme Côté
(Maritza) : (S'exprime par la langue
des signes).
[Interprétation] On n'en
a aucune idée, il manque de recherche à ce niveau-là. [Fin de l'interprétation]
Mme Rivard
(France) : (S'exprime par la langue
des signes).
[Interprétation]
Moi-même, je n'ai pas de chiffres. On ne tient pas la comptabilité de ça nulle
part. [Fin de l'interprétation]
La Présidente (Mme
Vien) : Merci, M. le député de
Bonaventure. Du côté ministériel?
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : …une autre question. Merci, Mme la Présidente. Vous avez
proposé dans votre exposé la création d'un comité de travail pour modifier la Charte de la
langue française, pour y inclure le statut de la LSQ. Comment ce statut
pourrait s'inscrire dans la Charte de la langue française? Avez-vous des
pistes, des solutions que vous pourriez amener, là, puis nous suggérer?
Mme Rivard
(France) : (S'exprime par la langue
des signes).
[Interprétation] Bien, c'est une bonne question, mais,
comme on dit, c'est de créer un comité qui pourra y répondre. Il y a une bonne réflexion à y avoir, mais c'est
par un comité qu'on pourrait avoir cette réflexion-là puis répondre à cette
question-là. [Fin de l'interprétation]
La Présidente (Mme
Vien) : Mme Paquin.
Mme Paquin
(Caroline) : Je pourrais rajouter en
complément que c'est le but ultime de notre démarche aujourd'hui, c'est la création de ce comité. Nous croyons fermement que
le débat n'est pas encore clarifié au niveau de quel statut que les personnes sourdes veulent
réellement. Est-ce qu'elles veulent un amendement? Est-ce qu'elles
veulent un statut particulier? Je crois qu'on ne le sait pas encore. Donc, c'est
pour ça qu'on voulait vraiment qu'un comité de travail soit formé, autant de la
communauté sourde que du gouvernement, du milieu de l'éducation, pour que tout
le monde ensemble puisse discuter adéquatement, là, de ce sujet-là. Je crois qu'il
reste encore beaucoup à faire, là.
La Présidente (Mme
Vien) : Madame…
Une voix : …
La Présidente (Mme
Vien) : Bien entendu. Il vous
reste encore 8 min 30 s.
• (16 h 40) •
Mme
De Courcy : Sans
vouloir occuper toutes les huit minutes, vous dire que je trouve votre idée de
comité de travail intéressante, tout à fait,
et nécessaire, mais je pense qu'il faut qu'il y ait des gestes de posés. Et
souvent, dans le projet de
loi n° 14… Bien, souvent… On va constater dans le projet de
loi n° 14 le rôle d'exemplarité de l'État, rôle d'exemplarité de l'État. J'en ai souvent fait
référence, c'est important, pour notre part, que l'administration publique
soit le plus impeccable possible, tant au
sujet de la langue. Et, dans ce contexte-là, je pense sincèrement que l'État
peut faire avancer
cette cause par un exemple à donner et au premier chef par l'Assemblée
nationale, premier chef par l'Assemblée nationale.
Alors,
je suis certaine, je le répète, que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne
est un appui très précieux pour faire avancer cette cause. Quant au comité de
travail, je considère qu'il est nécessaire et qu'il devrait être au-dessus
de tout intérêt partisan et nous permettre de faire avancer une cause très importante
pour les personnes sourdes. Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Un élément de réponse, Mmes
Paquin, Rivard ou Côté? Ça va comme ça?
Une voix : …
La Présidente (Mme
Vien) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Mme
Blais : Bien, je
trouve très sage ce que la ministre vient de dire. On pourrait très bien
commencer par... On l'a fait pendant trois ans consécutifs pour une
période de quatre jours, à l'Assemblée nationale, pour souligner la
Journée mondiale des sourds, où la période
de questions était interprétée en LSQ. L'Assemblée nationale pourrait poser un
geste significatif qui ferait en sorte que
la période de questions serait à la fois interprétée en LSQ et sous-titrée pour
les personnes qui sont malentendantes. Ce serait un premier pas.
Le
deuxième pas, il pourrait y avoir ce comité qui ferait en sorte… Quels sont les
coûts rattachés à une éducation bilingue plus largement déployée qu'à l'école
secondaire Lucien-Pagé ou à l'école primaire Gadbois? Vous connaissez
ça, Mme la ministre. Et il faut dire aussi qu'à l'Université du Québec à
Montréal il y a le certificat en interprétation, qui fait en sorte qu'aujourd'hui nous avons des interprètes formés.
Donc, ce comité pourrait se pencher plus largement pour faire un deuxième pas via tout le système de l'éducation
avant d'inclure, comme vous l'avez dit si sagement, la reconnaissance,
immédiatement, de la LSQ dans la charte.
La
Présidente (Mme Vien) : Je vous remercie, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Ça complète de ce côté-ci. Je vais aller du
côté de l'opposition officielle pour un bloc de 18 min 30 s.
M.
Tanguay : Oui.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais également souligner le
travailremarquable
que vous avez fait pour rédiger votre mémoire et vous remercier pour votre
temps, le temps que vous prenez cet
après-midi pour venir nous expliquer quelle est la réalité des femmes sourdes
au Québec, quels sont vos défis. Et, en ce sens-là, évidemment, je joins ma voix à la ministre et je salue l'apport
qu'apporte également aujourd'hui la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.
Et,
comme l'a bien souligné Mme la ministre, l'importance est d'abord, je crois, de
reconnaître, justement, l'impact de la diffusion de la LSQ, de la langue des sourds
du Québec, de faire en sorte qu'elle soit enseignée, qu'elle soit
accessible et que les services puissent être accessibles. Et ça, je pense que
tous les partis représentés à l'Assemblée nationale reconnaissent cette
importance-là, également que la façon d'atteindre l'objectif ne requiert pas
nécessairement un amendement à la Charte de la langue française, mais plutôt,
dans un cadre législatif ou autres, faire en sorte que cette reconnaissance-là existe et que, par la suite, il
découle des mesures très, très, très tangibles. Et, à cet effet-là, une
mesure qui a été initiée par la ministre, à laquelle la CAQ joindra sa voix, j'en
suis persuadé, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne aura l'occasion également de se joindre
à la motion, qui, dans un délai très court, permettra aux parlementaires du Québec de faire en sorte que cette
motion puisse unanimement être adoptée.
Ceci
dit, j'aimerais permettre... faire un pas en arrière, parce qu'on arrive déjà à
la réalisation de ces objectifs-là par des petits pas, mais des pas tangibles et très
concrets, mais j'aimerais revenir sur votre message, qui est très
important aujourd'hui. Et je m'adresse, entre autres, à la députée de
Saint-Henri—Sainte-Anne, pour lui donner l'occasion...
et n'hésitez pas si vous voulez également
ajouter, mais lui donner l'occasion de clairement dire aux Québécoises et
Québécois qui nous écoutent aujourd'hui toute l'importance dans la vie non
seulement des femmes sourdes, mais des personnes sourdes au Québec, toute l'importance qu'a la connaissance de la LSQ, l'accessibilité
de la LSQ et l'impact très tangible que ça a dans la vie de tous les
jours des personnes sourdes au Québec. Alors, j'aimerais entendre, entre
autres, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne sur cet impact-là qu'a la LSQ dans la vie des gens.
La Présidente (Mme
Vien) : Allez-y, Mme la députée.
Mme Blais : On pense à tort que les sourds... que c'est une langue
universelle. Il y a plus de 150 langues répertoriées
à travers le monde. Et c'est la Suède, le premier pays qui a reconnu la langue
des signes de Suède comme étant une langue officielle, et qui fait en
sorte que, si vous êtes un entendant et que vous voulez passer un examen, votre
thèse doctorale en langue des signes de Suède, vous pouvez le faire.
On
pense que la langue des signes québécoise est la langue uniquement des
personnes sourdes. Or, imaginez-vous que vous êtes un entendant et que vous êtes né de
parents sourds. Votre langue maternelle est effectivement, si vous êtes d'origine francophone, au Québec, la langue des
signes québécoise… ou si vous êtes interprète, vous travaillez et vous signez une très grande partie de votre journée,
parce que ça fait partie aussi de votre vie, et il y a plusieurs de ces
interprètes qui sont issus de parents
sourds. Donc, ce n'est pas une langue qui touche uniquement les personnes
sourdes. Et il y a aussi des entendants qui sont extrêmement curieux de
cette langue qui est visuelle, qui est touchante, attachante, qui suivent des
cours. Et je citerai Judi Richards, qui a des interprètes pendant qu'elle
chante en spectacle et qui signe très bien la LSQ.
Donc, je disais tout à l'heure
que les sourds ne se sentent... n'étaient pas handicapés, mais c'est quand même un handicap invisible, et on ne voit pas nos sourds nulle
part. On ne les voit pas à l'Assemblée nationale, on les voit rarement dans les
milieux de travail, et ils ont besoin aujourd'hui, en 2013, de se sentir partie
prenante de la société québécoise. Si nous,
les entendants, on se retrouve avec des sourds et qu'on ne connaît pas la LSQ,
par exemple, nous sommes les
personnes en situation de handicap, parce que la seule chose, la seule
différence entre les sourds et nous, c'est une question de langue. Quand moi, je me retrouve avec des Chinois, si
je ne parle pas le mandarin, je suis vraiment mal prise, et c'est la même chose pour les entendants
quand ils se retrouvent avec les sourds. Mais les sourds ont une
culture. Ils font du théâtre, de la poésie,
ils ont des journaux silencieux, ils ont une histoire. Il y a même une
université, à Gallaudet à Washington,
l'Université Gallaudet, où les sourds peuvent se rendre jusqu'au doctorat dans
toutes sortes de matières. Donc, je
crois qu'au Québec nous sommes rendus à un point qui va permettre de faire en
sorte qu'un jour la langue des signes québécoise sera reconnue à part
entière comme étant la langue des sourds francophones du Québec.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup, madame…
Mme
Blais : Mon cri du coeur.
La Présidente (Mme Vien) : Oui. M. le député, d'autres questions
du côté… Mme la députée de Montarville, c'est
maintenant votre tour.
Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Bien, je serai brève,
mais d'abord merci, merci beaucoup de vous
être déplacées, merci pour votre mémoire. C'est touchant, et vous êtes une
inspiration. J'ai
dit la même chose de vos collègues masculins la semaine dernière. Vous êtes
impressionnantes.
Et
j'aurais une petite question très quantitative : Est-ce que je pourrais
savoir quel est le pourcentage de la population qui souffre de surdité?
Mme
Paquin (Caroline) : Au niveau de la
surdité, on dit environ 10 %.
Mme
Roy (Montarville) : Et petite
question sous-jacente. On parle de bilinguisme, la langue des signes du Québec, la LSQ, et le français. Dans quelle
proportion — je ne sais pas si on a des estimés — un enfant qui pourrait
avoir l'éducation bilingue dans ces deux langues pourrait-il accéder ou
espère-t-on qu'il accède aux études supérieures? Quelle est la proportion de
jeunes qui accèdent aux études supérieures qui ont cet outil-là, ce
bilinguisme-là?
Mme Paquin (Caroline) : Je vous dirais que je n'ai pas de
quantitatif, mais nous, dans nos expériences de
vie, on rencontre beaucoup de jeunes femmes qui comme, par exemple, ces deux
femmes-là ici ont grandi dans l'oral, donc
ont été forcées à apprendre à parler avec leur voix, et puis à l'adolescence,
souvent, elles vont changer de cap. Pour continuer leurs études postsecondaires, elles n'ont pas le choix de
revenir aux signes, parce qu'elles ne sont pas capables de suivre les professeurs, les travaux d'équipe, les
cours. Donc, elles sont obligées de faire une communication… un vrai
bilinguisme, finalement, le français avec les signes, donc une expérience, là,
qu'on a constatée.
Mme
Roy (Montarville) : Parfait. Bien, je
vous remercie beaucoup. Oui. Oui, allez-y.
•
(16 h 50) •
Mme
Côté (Maritza) : (S'exprime par la
langue des signes).
[Interprétation] Si je peux ajouter, parler de mon expérience, moi, j'ai
grandi avec l'oralisme comme méthode de communication jusqu'à l'adolescence, puis quand
ensuite, là, j'ai connu la langue des signes, là je me sentais vraiment mieux, je me sentais plus épanouie. Pour apprendre
au moyen de l'oralisme, ça prend une concentration incroyable. De lire sur les lèvres, ce n'est aucunement naturel. Ça prend tellement d'énergie! C'est comme vous autres, là,
vous parlez, c'est
tout à fait naturel, vous avez vos deux oreilles, vous faites ça sans effort,
mais nous, là, apprendre… Je ne sais pas, moi. Si vous appreniez dans
une langue étrangère, comme une langue qui se parle en Chine ou ailleurs, vous
seriez épuisés. Bien, pour nous, c'est un peu comme ça, on essaie d'apprendre
des choses nouvelles et en plus d'essayer de comprendre
ce qui se dit. C'est trop difficile. Puis, quand on va vers la langue des
signes, la LSQ, là on conserve notre énergie
pour faire autre chose. C'est notre langue qui est tout à fait naturelle puis à
laquelle on a accès. Pour moi, c'est ce que j'ai vécu, c'est mon
expérience. [Fin de l'interprétation]
Mme
Rivard (France) : (S'exprime par la
langue des signes).
[Interprétation] Si je peux faire du pouce là-dessus, là, c'est qu'au
niveau de l'oralisme, là, on passe beaucoup,
beaucoup de temps à essayer de comprendre ce qui se dit puis on n'a plus d'énergie
pour apprendre, exemple, les matières comme
le français, les mathématiques. Si on m'explique le français et les
mathématiques en langue des signes, je comprends
au moins ce qui se dit, je comprends du premier coup, puis après ça je peux
étudier, je peux garder mon énergie. Quand c'est fait juste avec la
lecture labiale, la lecture sur les lèvres de façon... avec la méthode
oraliste, là, j'ai toute l'énergie à
déployer pour comprendre ce qui se dit. Ça
fait que c'est complètement l'opposé, là. Quand c'est en langue des signes, je comprends tout, puis après ça j'ai
ce qu'il faut pour étudier. [Fin de l'interprétation]
Mme
Côté (Maritza) : (S'exprime par la
langue des signes).
[Interprétation] J'ai aussi vu, j'ai été témoin de plusieurs personnes,
femmes ou hommes, qui sont immigrants puis qui
ne connaissent rien dans la langue, qui, à 30 ans, ont commencé à
apprendre la langue des signes, qui sont des personnes
immigrantes qui ont une surdité, puis ils voient tout de suite, là, qu'ils sont
capables de communiquer rapidement avec la langue des signes, puis ça leur
permet de sentir une identité en eux puis une fierté. Puis je les vois s'épanouir
tellement, ces personnes-là, qui deviennent beaucoup plus heureuses à cause d'une
langue, de cette langue-là. [Fin de l'interprétation]
Mme
Roy (Montarville) : Merci. Je sais que j'ai très peu de temps. Merci de nous avoir partagé
votre réalité et, justement, des contraintes que vous avez à vivre que, pour nous, bien on
ne les voit pas, ces contraintes-là. Alors, merci infiniment de votre
temps.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, Mme la députée de Montarville. Merci, mesdames, de vous être déplacées cet
après-midi, c'est très apprécié. Merci, chère collègue, d'avoir assisté ces
dames avec beaucoup d'attention.
Je suspends quelques
instants.
(Suspension de la séance à
16 h 53)
(Reprise à 16 h 55)
La
Présidente (Mme Vien) : Alors, nous sommes prêts à reprendre nos travaux. Nous avons le plaisir
de recevoir Mme Teresa Peñafiel — j'espère que je prononce bien votre nom. Vous êtes de l'Association
multiethnique pour l'intégration des
personnes handicapées. Alors, vous jouissez de 10 minutes pour nous livrer
l'essentiel de votre mémoire, chère madame, après quoi il y aura un
échange avec les parlementaires.
Association multiethnique pour l'intégration
des personnes handicapées (AMEIPH)
Mme
Peñafiel (Teresa) : Merci beaucoup de l'accueil que vous nous faites. Ce n'est pas la
première fois que l'association multiethnique
se présente en commission parlementaire pour des sujets qui concernent
effectivement une partie que nous appelons la… une minorité invisible de la
population québécoise.
D'abord,
je vais faire un petit portrait de l'association. C'est un organisme qui existe
déjà depuis 1981 et qui, dans ses années de travail, a tenue forte la
représentation des personnes pour lesquelles et avec lesquelles elle travaille.
Nous sommes un organisme qui a un soutien financier qui vient de l'agence de la
santé et services sociaux et de Centraide, et notre lien financier avec le
ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles est justement dans l'aspect
francisation. Je vais revenir là-dessus un peu plus tard.
Pour
l'association multiethnique, le français, c'est le moyen de collaborer, d'accomplir
sa mission. Sa mission est d'améliorer les conditions de vie et faciliter l'intégration
des personnes handicapées des communautés culturelles. Donc, le français est le moyen qu'elle utilise, et ça, dans
de multiples formes, comme ce sont les services directs, les réunionssociales, les séances d'information puis bien d'autres
activités comme des réunions sociales. Et pourquoi on tient tellement à participer à cette commission parlementaire, c'est
justement parce que le français, c'est le moyen d'intégrer les
personnes, qui vivent très difficilement ce processus d'intégration, entre
autres, à cause de la barrière linguistique.
Malheureusement
pour les personnes handicapées des communautés culturelles, l'accès à la langue
française est un peu difficile quand on a, par exemple, une limitation sensorielle, soit
visuelle, auditive, comme nous avons vu avec les personnes sourdes, mais il y a eu des progrès en ce sens-là. Même chose
au début de l'association : les centres de formation pour les personnes immigrantes, les COFI, n'étaient
même pas accessibles pour les personnes avec une limitation physique. Alors, les conditions se sont améliorées, mais
reste une partie des personnes handicapées qui n'ont pas de services
adaptés, ce sont les personnes adultes avec une déficience intellectuelle. Ceux
qui arrivent avant l'âge de 18 ans peuvent être scolarisés; ceux qui arrivent après, ils n'ont pas accès à ces services-là,
et donc ils sont complètement coupés de toute forme d'accès à la langue et donc d'intégration. Nous
croyons que le Québec, sans tendre la main à ces personnes-là, se prive
de main-d'oeuvre, parce que ce sont des
personnes qui parfois sont bien qualifiées. Et, même si elles ne le sont pas,
le Québec peut faire en sorte pour qu'elles se qualifient pour un
travail, qui peut être très valorisant pour la personne et qui peut apporter à
la société dans laquelle ils veulent vivre.
• (17 heures) •
Le pourcentage des
personnes qui ne participent pas, parmi les personnes handicapées des
communautés culturelles, est assez
important, malheureusement, à cause de ces barrières-là. L'association
multiethnique a essayé de présenter
dans ces brèves pages les points qui, pour nous, sont importants à retenir, et
je vous amènerai… Par exemple, quand vous parlez de mesures raisonnables
d'accueil et d'intégration à la vie québécoise, pourquoi on demande que ce soit explicite, la mention, c'est parce que,
dans les années précédentes, sans cette mention-là, à chaque fois qu'il y
a un changement, à chaque fois que nous devons parler des personnes handicapées
des communautés culturelles, il y a la même
chose : il n'y a pas une protection automatique. Donc, pour nous, que la représentation
soit spécifique, ça ouvre la porte à bien des avantages et à l'obtention
de beaucoup de changements pour nos personnes.
Et, les besoins d'adaptation,
si je vous réfère dans le texte à la politique À part entière, le gouvernement
est tenu de suivre la politique À part
entière, qui mentionne les personnes handicapées des communautés culturelles à
plusieurs reprises justement parce que c'est
nécessaire de les mentionner. Et, en ce sens-là, pourquoi on les appelle une
minorité invisible, c'est, entre autres,
parce qu'il n'y a pas de statistiques nulle part, il n'y a pas de statistiques
en partant, parce que le gouvernement fédéral ne les inclut pas, au moment de l'arrivée, avec
une petite étiquette qui dit qu'il y a un handicap. De ce fait-là, quand la personne arrive au Québec,
il n'y a aucun moyen de l'accompagner, de faciliter le cheminement de la
personne qui a une limitation vers les
services qui lui sont nécessaires. Ainsi, la personne peut perdre des années
avant d'être suivie, et accompagnée, et
outillée pour son intégration. Les statistiques, c'est quelque chose que nous
demandons depuis longtemps, sans avoir obtenu gain de cause à aucun moment ou
espace. Donc, pour nous, cet aspect est très important, comme je disais.
J'essaie de faire vite. Une chose que, pour
nous, c'est très important, c'est quand vous parlez du continuum de services. Il existe déjà un précédent — et Mme De Courcy le connaît très bien — dans l'entente entre le ministère de l'Éducation et le ministère des Services sociaux
et de la Santé pour les enfants handicapés qui sont en âge de
scolarisation. Une même sorte de travail
pourrait permettre d'arrimer les services sociaux et de santé qui sont
essentiels à ces personnes-là pour améliorer leur francisation et donc
leur intégration.
Et j'ajoute qu'une place doit être faite aux
organismes de francisation. Les organismes de francisation connaissent les
besoins, connaissent bien leur clientèle, savent comment aller de l'avant avec
des programmes qui sont pas mal plus diversifiés
que ceux qui ont été conçus, parce qu'avec une population diversifiée, avec des
problématiques très diversifiées, on
ne peut pas tout simplement donner un bloc académique. Et ça, c'est une des
richesses de la francisation offerte par l'Association multiethnique. On
allie à un cours qui se veut académique, pour les personnes avec une déficience
intellectuelle, des ateliers d'expression artistique. On double ainsi le temps
de francisation. Ces personnes-là qui ont une
déficience intellectuelle ont de rares occasions de parler français chez eux,
donc, si on les laisse avec six heures de français par semaine, ils n'iront nulle part. Pour nous, c'est très
important de conserver ce programme Je découvre pour les personnes
adultes avec une déficience intellectuelle, et c'est une de nos craintes de le
voir disparaître par manque de financement.
Le ministère de l'Immigration finance exclusivement les heures données de
cours. En ce moment, là, notre enseignante est une personne à la
retraite. Donc, elle accepte d'être payée pour les heures données, mais, le
moment où elle partira de chez nous, que c'est probablement dans peu de temps,
embaucher une autre personne pour offrir… Quatre
fois trois, c'est 12 heures-semaine de cours. Sans payer des heures de préparation,
que, pour le type de clientèle, c'est une préparation assez ardue, ça va
être impossible avec un budget serré comme ça. Alors, ça, c'est une de nos
inquiétudes.
J'aimerais rejoindre un peu les présentations
précédentes quant au soutien pour les enfants et aux parents. Les parents des communautés culturelles, on sait qu'ils
ont de la difficulté à soutenir leurs enfants. Et je vais vous donner un exemple d'une famille anglophone dont l'enfant
a été scolarisé en français. La famille a très bien accepté ça, mais la langue de communication avec les parents s'était
établie à travers l'anglais, et l'enseignante fonctionnait comme ça avec
les parents, mais la direction de l'école a
connu cet échange, des courriels et des conversations en anglais, et a interdit
à l'enseignante de communiquer en anglais avec les parents. Le seul perdant,
dans cette situation-là, a été l'enfant, parce
que l'école a besoin de communiquer avec les parents, et un parent qui ne sent
pas accueilli va se retirer, et donc l'enfant va être encore perdant.
Et
je reviens à l'importance pour les personnes sourdes aussi, des personnes qui n'ont
jamais connu la langue des signes, qui parlent une autre langue des signes et
qui sont accueillies ici… Mais il y a un point sur lequel je veux marteler, c'est
que les services de francisation pour les personnes sourdes ne sont pas
nécessairement bien promus dans les services d'accueil.
La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, madame, pour votre
présentation. Le temps vous étant dévolu est maintenant écoulé. Nous allons entreprendre un
échange entre vous et les parlementaires, d'abord avec Mme la ministre.
Mme De Courcy : Bien, bonjour, madame. Beaucoup de
courage pour venir nous voir aujourd'hui, alors
merci. Mes salutations à Mme Soave, qui est une femme remarquable, et vous
aussi, qui la soutenez très bien. J'ai connu l'association par mon travail dans
une ancienne vie et je sais toute l'énergie que vous menez pour faire
reconnaître, justement, ces besoins-là en
francisation. Je suis certaine que nous avons beaucoup à faire ensemble. Et
sachez que ça va trouver écho au ministère de l'Immigration, bien
entendu.
Mais votre message va au-delà du besoin de l'association.
Et, de ce que vous avez vu des personnes
handicapées, manifestement il y a une
reconnaissance plus explicite. Et nous avons assisté, au cours des derniers
tours de la commission parlementaire, à des personnes qui profitent
aussi de l'ouverture de la charte et du projet de loi n° 14 pour obtenir une reconnaissance de particularités sur le plan
linguistique, et ce n'est absolument pas mauvais. Au contraire, ça nous permet justement de voir toute la nuance à
laquelle nous arrivons maintenant, 35 ans plus tard après la loi 101.
Alors, les choses se sont raffinées,
et des besoins nouveaux aussi apparaissent. Alors, sachez que ça trouve écho
dans la formation que je représente et au ministère que je dirige.
Vous faire un raccord aussi. Vous avez parlé
de la déficience intellectuelle, et, à cet égard-là, nous savons toute la difficulté.
Vous serez sûrement d'accord avec moi que, si j'extrapole, les aînés fragilisés
qui sont d'autres origines, et qui étaient
là bien avant la loi 101, et qui, eux, n'ont pas appris le français, ont
travaillé toute leur vie au Québec en anglais, ont, au moment de la
vieillesse, des handicaps sérieux, et on doit leur porter, à mon avis, une
attention toute particulière, notamment pour qu'ils puissent bien se mouvoir — c'est le cas de le dire — dans le réseau de la
santé, entre autres, réseau de la santé et réseau d'hébergement aussi.
Alors, sachez donc que je vais tenir en
compte de façon toute particulière votre présentation d'aujourd'hui. Et puis le ministère de l'Immigration, par la voie des
administrateurs, va vous recontacter, au niveau de l'association, pour s'assurer
que vous ne soyez pas inquiets indûment autour des services de francisation.
Mme Peñafiel (Teresa) : Je vous remercie, Mme De Courcy. J'aimerais ajouter à ce
que vous venez de dire, vous me tendez une perche : Les personnes handicapées
des communautés culturelles n'ont pas été nécessairement admises comme immigrantes. Elles l'ont été comme
conséquence d'accidents de travail, accidents de la route,
vieillissement… ou ce sont des enfants nés ici de parents immigrants. Et, à ce
niveau-là, la CSST et l'Association multiethnique
ont eu une longue période dans laquelle nous avons offert des cours de français
à des accidentés de travail. Malheureusement,
la commission, la CSST, a donné fin à cette entente-là, et c'est avec regret de
notre part, parce que c'est justement
des personnes arrivées à l'âge adulte, qui ont travaillé dans des milieux comme
le milieu de la construction, entre autres, et qui n'avaient pas eu l'occasion
d'apprendre le français.
Mme De Courcy : ...madame. Bien, merci beaucoup. Nous
nous entendons très bien autour de ces questions-là. Merci.
La
Présidente (Mme Rotiroti) :
Merci. M. le député de Bonaventure.
•
(17 h 10) •
M. Roy : Merci, Mme la Présidente. Mes
salutations, madame. Je vous trouve très courageuse et très dévouée.
Mme
Peñafiel (Teresa) : D'avoir pris l'autobus?
M.
Roy : Oui. Surtout de vous retourner
en autobus.
En tant qu'organisme communautaire actif sur le
terrain, j'aimerais vous entendre sur l'adaptation des cours de français aux personnes immigrantes ayant des handicaps
puis j'aimerais savoir ce qui fonctionne bien et ce qui fonctionne moins bien.
Mme Peñafiel (Teresa) : Bien, comme je vous ai déjà dit, l'association,
elle a créé un programme pour les adultes parce que ça n'existe pas, et au fil des ans on a
vu que c'était impossible de pouvoir faire rentrer les caractéristiques
de ces personnes dans le cadre d'un cours de
francisation comme ça se donne au ministère. Alors, je peux vous en parler, de
ça en particulier. Et il s'agit d'avoir
adapté tout un programme, parce que ces personnes-là ne peuvent pas suivre un
programme pour adultes et ne sont pas non
plus des enfants pour être suivis dans un programme conçu pour apprendre une
langue à un enfant. Donc, l'association a
bâti de A à Z tout le contenu de cette formation, qui est offerte sans limite
de temps, parce qu'une personne qui a une limitation intellectuelle va
très lentement, et, quand elle commence à entrer à un âge, elle commence à
perdre les acquis.
Donc, l'association a créé ce cours-là, qui s'offre
deux matins par semaine à deux groupes différents, donc on a les plus faibles
et ceux qui sont moyens. Mais on a voulu renforcer ces heures académiques avec
les ateliers d'expression artistique,
et là on se retrouve avec un groupe beaucoup plus ouvert, beaucoup plus axé sur
la sociabilité, qui fait grand défaut à ces personnes-là qui ont vécu la
plupart du temps assez isolées, qui se retrouvent à mieux se connaître.
Je
vais vous donner le nom au complet de ce programme, qui s'appelle Je découvre
ma nouvelle langue, mon nouveau pays, moi-même, et ça représente exactement ce
qu'est ce programme. C'est la langue qui permet d'accéder à la société québécoise et d'accéder à la personne
elle-même. Les familles de ces personnes-là connaissent pour la première
fois les capacités et les habilités des personnes qui ont été considérées, à l'intérieur
de la cellule familiale, comme quelqu'un qui
n'avait pas de possibilité dans la vie. Alors, ça, ce sont les grandes lignes.
Le fait que ces gens-là puissent interagir avec d'autres groupes… Ils
vont au musée, ils vont au Biodôme, ils participent à nos activités sociales,
ils apprennent à manipuler l'argent. Et ils sont reconnus, parce qu'entre
autres les tableaux qu'ils font, qui sont des peintures
naïves mais dans le plus beau de cette expression — et
Mme de Courcy sait de quoi je parle — ces peintures-là sont
exposées et sont achetées. Et les familles, au départ, ne peuvent pas croire
que quelqu'un puisse s'intéresser à ça, et là ils commencent à valoriser
la personne pour ce qu'elle est.
Je pourrais vous en parler longuement, des
succès, mais je pourrais aussi vous parler des déceptions, parfois, et des difficultés de
ces gens. Et, je veux vous mentionner, on vient de perdre deux de nos
participants, qui ont été déportés parce que les familles n'ont pas été reconnues comme réfugiés. Alors, ça, c'est
une autre partie de la chose, mais ça fait mal.
M.
Roy : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci. Alors,
M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour,
madame. Je souligne votre courage d'être ici
aujourd'hui et de présenter… C'est un mémoire qui est intéressant. Et, comme de
raison, comme je disais tantôt pour le
groupe qui était là avant, j'ai eu l'occasion quand même de rencontrer l'association
il y a quelques années, lors d'un souper-bénéfice à Montréal, et j'avais
rencontré la présidente, et c'est une femme qui est super active, bien active,
puis qui a été reconnue même au niveau de l'Italie pour des prix intéressants.
Et, comme de raison, vous mentionnez… Ce que
j'aime dans votre affirmation, c'est que vous dites que… selon laquelle l'adaptation des mesures de francisation
est importante pour l'intégration à part entière des immigrants ayant une
limitation. La société québécoise est une société démocratique ayant à coeur la
dignité humaine et l'égalité des personnes. Ça, je pense, c'est quand même bien
souligné.
Vous
apportez un éclairage nécessaire sur l'accessibilité des services de
francisation à toutes et tous. Je vous remercie de le rappeler, parce que, dans
le contexte de cette commission parlementaire, l'importance de l'égalité des
personnes est une valeur chère à la société québécoise. Il faut que, l'intégration,
ce ne soient pas que des mots, il faut que ce soit l'action aussi.
Est-ce que vous estimez qu'une priorité devrait
être accordée à un secteur ou à une clientèle en particulier dans le domaine de
l'intégration des immigrants ayant une limitation? Est-ce que vous avez…
Mme Peñafiel (Teresa) : Évidemment, je vais vous dire que,
oui, il y a une priorité : ce sont les personnes qui ont déjà une
formation et qui espéraient, en arrivant ici, de se placer. Les personnes
handicapées — et je parle de toutes les
personnes handicapées du Québec — ne veulent pas être au bien-être, monsieur, elles veulent accéder
au marché du travail, mais la société
québécoise, comme toute société, prend du temps à reconnaître les capacités de
ces personnes et faciliter l'adéquation
des postes de travail, l'accueil des personnes handicapées, beaucoup plus quand
la personne devant vous est une
étrangère. On s'entend que l'intersectionnalité est un fléau pour les personnes
handicapées des communautés culturelles.
C'est très difficile de dire, quand la personne devant vous est une personne
femme, noire, monoparentale, en fauteuil
roulant, sur quel de ces quatre chapeaux elle va être discriminée, mais, juste
par hasard, cette personne n'a jamais été
capable de travailler depuis son arrivée au Québec. C'est un exemple. Je
connais plusieurs personnes qui n'ont jamais été capables de travailler,
et, comme je l'ai dit tantôt, c'est le Québec qui perd.
Évidemment, ce sont les personnes, elles
aussi, qui perdent, parce que, quand on est une immigrante — et
je sais de quoi
je parle parce que ça fait 34 ans que j'habite le Québec — on
a un rêve, un rêve pour nous-mêmes, un rêve pour
nos enfants. Lorsque j'arrive ici, et que j'ai
des enfants, et que mes enfants voient que je ne suis pas capable de
travailler, quel est le message que je transmets à mes enfants? Comment
moi, je me vois moi-même en tant que mère, en tant que père et en tant qu'individu dans une société dans laquelle la carte de
présentation, c'est : Que faites-vous dans la vie? Je suis au bien-être. Ça me disqualifie même en tant que
mère. Et ça, c'est une réalité non pas parce que je suis immigrante. C'est
une réalité, point à la ligne.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Merci.
Merci, ça va.
La Présidente (Mme Vien) : Messieurs, du côté ministériel, ça
complète de votre côté? Mme la ministre aussi?
Alors, M. le porte-parole, député de LaFontaine, ça va être à vous pour une
période de 22 minutes.
M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la
Présidente. Merci beaucoup, madame… Penafield? Est-ce que je...
Mme
Peñafiel (Teresa) : Penafiel.
M.
Tanguay : Penafiel, excusez-moi.
Mme
Peñafiel (Teresa) : En fait, c'est
Peñafiel.
M.
Tanguay : Peñafiel.
Mme
Peñafiel (Teresa) : Oui.
M. Tanguay : Alors, je vais essayer de bien
prononcer, par marque, évidence de bienséance et de respect. Alors, Mme Peñafiel, merci beaucoup pour votre temps, le
temps de rédaction — et je reviens
toujours là-dessus — parce qu'il n'y a pas que les minutes que vous passez
devant nous qui sont extrêmement importantes, mais il y a toute votre expérience, je dirais, sur le terrain, une
expression qui illustre bien votre réalité, et de savoir et de prendre le temps
de le mettre en mots comme vous l'avez fait
dans votre mémoire, de nous le communiquer au préalable, et de vous
entendre aujourd'hui, je pense que c'est
très important et je vous en remercie. Et je joins ma voix à celles de mes
collègues en ce sens-là.
Votre
association, donc, s'appelle Association multiethnique pour l'intégration des
personnes handicapées. Vous faites référence
là-dedans à des programmes qui mériteraient justement d'être bonifiés quand on
parle d'accessibilité, de rendre le
service accessible, et vous faites bien, donc, de l'inscrire à l'intérieur de
la commission qui traite du projet de loi
n° 14. Et je pense que vous soulignez bien et on déduit très bien de votre
mémoire que faire en sorte que le français soit enseigné, que la francisation soit une réalité pour les immigrants mais,
qui plus est, les immigrants personnes handicapées peut passer par une modification de la loi. C'est
un élément parmi d'autres, les autres étant à l'intérieur de la
réglementation qui découle de cette loi-là, également à l'intérieur de
politiques que le gouvernement pourrait adopter et aussi de programmes
tangibles, auxquels on doit justement accorder des crédits qui font en sorte
que ça devienne des réalités à tous les jours.
Vous soulignez dans votre mémoire, à la
page 3, entre autres, que «la francisation repose, en grande partie, entre les mains des
organismes communautaires». J'aimerais vous entendre là-dessus, lorsque vous
soulignez : En grande partie, ce sont
les organismes communautaires qui font en sorte de dispenser les cours de
francisation. Est-ce que vous avez une réflexion
quant à l'opportunité de poursuivre en ce sens-là? Ou y aurait-il lieu de faire
en sorte de leur… non seulement ajouter
des ressources financières, mais également de leur accorder une assistance
accrue, à ces organismes communautaireslà, qui pourraient aussi, par de l'aide accrue… Et ça peut ne pas uniquement
être financier. Ça peut être financier, mais ça peut être autre. Mais, les organismes
communautaires, qui sont en quelque sorte les maîtres d'œuvre pour beaucoup,
est-ce que vous, vous avez une réflexion par rapport à cela?
•
(17 h 20) •
Mme
Peñafiel (Teresa) : Je ne voudrais
pas parler au nom du regroupement, je pense qu'ils doivent passer en commission
parlementaire aussi, mais je peux vous assurer que les cours de langue offerts
par les organismes communautaires sont très bien adaptés aux personnes
immigrantes.
J'ai vécu la période des COFI. J'imagine que les plus jeunes
ne savent même pas ce que c'était, les COFI,
mais les COFI étaient des centres d'orientation
et de formation des personnes immigrantes. C'était sept mois. À l'époque,
c'était payé par une entente
fédérale-provinciale qui permettait aux personnes qui arrivaient… Et c'était
presque la majorité des personnes
récemment arrivées qui suivaient ces sept mois de cours, parce qu'il y avait un
montant alloué qui permettait de vivre
sans tracas. Si vous pensez à la possibilité de ces familles-là qui ont passé
par ces cours-là d'apprendre à vivre au Québec sans souci pendant sept mois, vous comprendrez que la réussite de
l'intégration de ces personnes et la francisation, qui plus est, de ces
familles-là étaient assurées. Je peux vous dire que, si la communauté chilienne — qui est ma communauté d'appartenance — est si bien intégrée au Québec, c'est, entre autres,
grâce aux COFI. Je ne dis pas que c'était la perfection, mais c'était un temps d'arrêt. C'était
la parenthèse entre le déchirement du moment de quitter son pays et le
moment de faire face à la réalité, parce que c'est une réalité à laquelle on
doit faire face une fois que les cours de français se terminent.
Aujourd'hui,
il y a une proportion énorme de nouveaux arrivants qui ne prendront pas le
cours de français ou qui le prendront plus
tard. Il y a tellement de mesures diverses que parfois on se perd. C'est vrai,
il y a des niveaux qui sont très intéressants pour ceux qui sont au niveau
universitaire, qui, dans le temps, pouvaient être tannés un peu, mais la
difficulté de la langue est énorme lorsqu'on veut rentrer à l'université
directement.
Donc,
moi, je suis pour des cours de français qui puissent donner un temps de s'habituer
à la vie au Québec. Et je suis certaine que,
financièrement, ça va aider le Québec et les nouveaux arrivants.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay : Merci, Mme la Présidente. Vous parlez, Mme Peñafiel, des
COFI, et je pense que vous en reconnaissez
les aspects bénéfiques. Et on se rappelle que les COFI ont été abolis en 1998,
et un des éléments qui avaient été soulevés par le gouvernement de l'époque,
en 1998, était le fait qu'ils étaient trop coûteux. Alors, j'aimerais vous entendre sur cette décision de 1998. Et pensons à
l'avenir pour vous, pensons à l'avenir. Les COFI, donc, vous aimeriez...
vous y voyez là une marche à suivre qui pourrait être bénéfique?
Mme
Peñafiel (Teresa) : Je n'ai pas des connaissances pour vous dire dans quelle direction il
faudrait s'en aller, je fais un rappel des bienfaits de ce type de cours.
Loin de moi de juger quelles sont les possibilités financières du Québec
pour continuer sur cette voie-là. Mais il faut… Et il y a un dicton québécois
que j'adore : Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Donc,
peut-être qu'il est question de revoir certaines mesures.
M.
Tanguay : Bien,
je vous remercie beaucoup, madame. Votre message, j'en suis persuadé, a été
entendu à 100 % par la banquette
ministérielle. Merci beaucoup, encore une fois, pour votre présence. Merci.
Portez-vous bien.
La Présidente (Mme Vien) : Merci, M. le député. La parole est
maintenant à vous, Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, madame, pour votre mémoire, je l'ai
trouvé très intéressant, et surtout c'est qu'on
parle d'une clientèle qu'on voit peu, qu'on connaît peu, et vous nous amenez
une réalité qui, moi, m'était étrangère. Je me doutais bien, mais là vous l'avez
très bien articulée.
Et
vous dites dans votre mémoire — et là je
vais citer ici : «Lorsqu'on…» Attendez, je vais vous citer ça ici : «…il faudra s'assurer
que l'offre de cours adaptés aux diverses limitations soit diffusée amplement
auprès des services d'accueil et que
les personnes ayant ce besoin soient bien renseignées…» Alors, ici, on parle de
diffusion de l'information mais surtout
d'un manque de diffusion de cette information-là des cours, de l'offre de
services. Pouvez-vous nous en parler un petit peu davantage?
Mme Peñafiel
(Teresa) : …je disais tout à l'heure,
il n'y a pas de statistiques. Quand une personne arrive, handicapée ou pas, il
n'y a rien dans son dossier d'immigration qui mentionne «limitation», et ça
pour l'enfant qui accompagne comme pour la personne qui, elle-même, est
handicapée.
Le
danger de ça, c'est que, quand on arrive dans les organismes d'accueil qui sont
désignés, on donne à la personne qui arrive
une pile comme ça de documents d'information. Vous comprendrez qu'outre la
barrière de la langue la personne qui arrive
n'a pas le temps ni la patience pour passer à travers toutes ces
informations-là, lesquelles contiennent peut-être le nom de l'Association multiethnique pour l'intégration des
personnes handicapées du Québec quelque part. Donc, comme l'agent à l'accueil ne voit aucune mention de handicap — et peut-être que cet agent, non plus, il ne connaît pas l'existence
de l'Association multiethnique — rien ne va permettre à cette famille ou à la personne qui
a une limitation de s'adresser à des services
spécifiques pour les personnes qui ont une limitation. Rappelons-nous que ces
gens-là viennent de pays, souvent, dans
lesquels les services aux personnes handicapées n'existent pas. Donc, comment
peuvent ces personnes-là le demander? L'autonomie
est une valeur très chère au Québec, et donc les agents des divers
services s'attendent à ce que la personne
demande, et non pas offrent le service. Donc, c'est une impasse. S'il n'y a pas
d'information, s'il n'y a pas d'accompagnement
dès le départ, il y a perte de temps. Donc, c'est dans ce sens-là que je parle
de diffusion.
Mme Roy
(Montarville) : Et comment
pourrions-nous, justement, faire en sorte que cette problématique-là soit résolue?
Mme Peñafiel
(Teresa) : Nous avons essayé...
Mme
Roy (Montarville) : À quelle étape, à
quel moment pourrait-on aider?
Mme
Peñafiel (Teresa) : Nous avons essayé de faire intégrer le nom de l'association parmi les 11 organismes d'accueil
des personnes immigrantes. Étant donné que nous ne sommes pas financés, la
mission globale de l'association, par
le ministère, le nom de l'association n'est pas intégré à cette liste-là. Si au
moins l'Association multiethnique était mentionnée comme un organisme d'accueil,
les gens qui arrivent pourraient vraiment... Parce que, quand on passe à travers 11 noms, on peut le voir; quand on passe à
travers une pile de documents, on ne le voit pas. Alors, ça, ce serait
le premier pas, et l'autre, c'est toujours
la formation, la formation des agents d'accueil, qu'ils soient conscients qu'il
y a — et ça, c'est un estimé que nous avons — 11 % des personnes des communautés culturelles qui
ont une limitation. Alors, c'est peu que de poser la question : Est-ce que
vous avez des besoins spéciaux, est-ce que vous auriez une personne dans
votre groupe familial qui a une limitation?, et qu'on puisse le référer. C'est
juste ça que ça prendrait.
Mme Roy
(Montarville) : Merci infiniment. C'est
très clair, merci.
La Présidente (Mme
Vien) : Ça complète, Mme la
députée? Chère madame, merci beaucoup de vous être déplacée aujourd'hui, c'est
très apprécié. On vous souhaite un bon retour, soyez prudente sur les routes.
Alors, c'est ainsi que
nos travaux prennent fin pour le moment. Nous reprendrons ce soir, à
19 h 30. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 30)
(Reprise à 19 h 31)
La
Présidente (Mme Vien) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux là
où nous les avions
laissés un peu plus tôt aujourd'hui pour poursuivre les auditions sur le projet
de loi n° 14, Loi modifiant la Charte de la langue française,
la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres dispositions
législatives. Si vous avez des appareils électroniques, des cellulaires, je
vous demande de les mettre en sourdine.
Alors, nous sommes
prêts à entendre le groupe de courageux qui sont venus nous voir ce soir. Il s'agit
de la commission scolaire Lester-B.-Pearson.
C'est exact? Alors, vous aurez 10 minutes pour nous présenter votre point
de vue, en vous demandant d'abord de vous identifier — je présume, madame, que vous êtes la
porte-parole — et de nous présenter les
personnes... ces messieurs qui vous accompagnent. La parole est à vous.
Commission scolaire
Lester-B.-Pearson
Mme
Stein Day (Suanne) : Mme la Présidente, Mme la ministre, députés membres de la commission, mesdames et messieurs.
Je suis Suanne Stein Day, présidente de la commission scolaire
Lester-B.-Pearson, et j'ai avec moi M. Linton Garner, commissaire, et mon garde du corps, M. Steven Colpitts,
directeur de regroupement d'écoles. Nous apprécions l'occasion qui nous
est donnée de nous adresser aux membres de la Commission sur la culture et l'éducation.
Laissez-moi
tout d'abord vous parler de la commission scolaire Lester-B.-Pearson. Notre
commission scolaire est la plus grande des neuf commissions scolaires
anglophones et elle compte cette année environ 22 000 élèves au
secteur des jeunes, notre secteur de l'éducation des adultes et de la formation
professionnelle comptant maintenant plus de 8 000 personnes, pour un total
de près de 3 400 élèves équivalents temps plein. Nous desservons un
territoire de plus de 800 kilomètres carrés qui s'étend de l'arrondissement de
Verdun, au centre-sud de l'île de Montréal, jusqu'à la frontière de l'Ontario.
Notre conseil des
commissaires a toujours favorisé la transparence, l'innovation et la prise de
décision axée sur les élèves. Nous avons été les premiers à diffuser des
séances de conseil sur le Web et nous comptons de 700 à 1 200
visionnements de chaque séance. Nous avons été les premiers d'avoir des
réunions publiques du comité exécutif. Nous avons établi les normes de
consultation publique dans les commissions scolaires et des réunions de consultation. Nous étions les premiers au Québec à
lancer un programme de citoyenneté numérique, pour accompagner la
croissance inévitable de l'usage de la technologie dans les écoles, et nous
avons été les premiers au Québec à inviter des élèves à siéger au conseil des
commissaires.
Depuis
sa fondation en 1998, la CS Lester-B.-Pearson a toujours eu un taux de
diplomation de plus de 80 %, et en 2012 le taux est de 83,7 %, ce qui nous hisse
au troisième rang de la province. 86 % de nos élèves de première ont
réussi l'épreuve d'anglais de la fin du troisième cycle, et 89 % ont
réussi l'épreuve de français de la fin du troisième cycle. Ce taux de réussite est encore plus impressionnant
si vous considérez que nous intégrons avec succès plus de 98 % de
tous les élèves handicapés ou en difficulté de la commission scolaire dans les
classes ordinaires comme le demande le MELS, un pourcentage plus élevé que
toute autre commission scolaire du Québec. En plus, nous n'avons jamais eu de
déficit budgétaire.
Enfin,
les chiffres de la Direction générale des programmes d'appui aux langues
officielles concernant les élèves de langue
maternelle anglaise du Québec de cinq à 24 ans indiquent que 77,45 % d'entre
eux sont bilingues et plus que capables de
fonctionner et de travailler en français. Les statistiques concernant la région
métropolitaine de Montréal sont encore
plus impressionnantes, car 80,05 % de ces jeunes personnes sont bilingues.
Notre compétence dans l'enseignement du français ne peut être mise en doute,
étant donné que la majorité de ces jeunes fréquentent ou ont fréquenté des
écoles du secteur anglophone.
Nous comprenons que les
commissions scolaires francophones ont le devoir supplémentaire d'intégrer et d'éduquer les nouveaux
arrivants au Québec. Laissez-nous les aider, spécialement les immigrants
provenant de pays anglophones comme les Caraïbes, l'Asie du Sud et, bien
entendu, l'Australie, l'Angleterre et les États-Unis. Nous avons maîtrisé l'enseignement de langue seconde et nous sommes
sûrs que nous pouvons enseigner aux nouveaux arrivants avec le même
degré de succès que nous connaissons actuellement.
Le
projet de loi n° 14 nous préoccupe à plusieurs égards. Il y a d'abord des
insinuations indiquant que nous n'aurions pas été coopératifs. Cela est faux.
Puis, le surcroît de bureaucratie proposé,
jumelé avec les compressions budgétaires incessantes, Mme De Courcy, vous n'avez
sûrement pas oublié la quantité de bureaucratie exigée d'une commission
scolaire qui subit des réductions budgétaires et doit composer avec des
gestionnaires surchargés.
Ensuite,
la loi proposée est déguisée en question culturelle à des fins de gain
politique. Elle ne prend pas en compte, ne
reconnaît pas ni ne soutient les changements qui se sont produits dans la
communauté anglophone et dans le système scolaire anglophone ces 30
dernières années.
Il y a 30 ans, le français, langue
seconde, était une matière de programme à laquelle on consacrait une période de 45 minutes
par jour. À la fin de leurs études secondaires, la plupart des finissants
anglophones, comme moi, avaient une connaissance rudimentaire du
français et pouvaient probablement le parler un peu dans des situations
sociales ou commerciales. Dans les années qui ont suivi, bien avant l'adoption
de la loi 101, la communauté avait évolué grâce à des programmes très efficaces et mondialement reconnus d'enseignement de
la langue seconde, allant d'un enseignement minimum enrichi à une immersion à temps plein de la maternelle à la
quatrième année. Le pourcentage de programmes enseignés en français dans nos écoles secondaires est maintenant
50 % ou plus. Nous continuons à développer l'usage du français dans nos écoles en incluant des échanges
avec les écoles francophones avoisinantes et des interactions
culturelles et éducatives. Nos écoles ont
été à l'avant-garde de l'enseignement du français et l'ont amélioré au moyen de
l'immersion, tant et si bien qu'on vient du monde entier pour étudier nos
méthodes d'acquisition d'une langue seconde.
Au cours des années, nous avons adapté nos
programmes aux réalités de la prédominance du français au Québec. Nous n'avons
jamais refusé de reconnaître ce fait et, en conséquence, nous avons amélioré
continuellement notre capacité à préparer
nos élèves à vivre, à travailler et à prospérer au Québec. Nous soutenons et
nous défendrons cette affirmation. Nous
avons l'impression d'être perçus comme des ennemis, alors que nous avons fait
tant de chemin et que nous avons travaillé
si fort pour parler français dans notre communauté. Nous sommes fiers de ce que
nous avons accompli, et il est temps que nous soyons reconnus comme un
partenaire important qui contribue à la francisation du Québec, ce fait a
besoin d'être célébré.
La croissance future du Québec, tant
démographique qu'économique, dépend de l'arrivée de nouveaux Québécois de pays
étrangers. Nous pouvons encourager l'immigration et les investissements si nous
permettons à quelques personnes provenant de certaines régions du monde
d'avoir une option. Nous voulons que les immigrants choisissent le Québec non seulement pour venir y travailler, mais pour s'y
installer, y élever leur famille, investir dans l'avenir d'ici et
devenir Québécois.
J'ai assisté au spectacle musical intitulé Mahalia
Jackson la semaine dernière au Centre Segal de Montréal, une représentation très
inspirante. Lors du spectacle, le discours du grand Martin Luther King a été
prononcé. J'ai pensé à paraphraser ses paroles célèbres. Moi aussi, j'ai
un rêve. Je rêve d'enfants francophones, anglophones et allophones qui sont
tous tout simplement québécois. Merci.
•
(19 h 40) •
La
Présidente (Mme Vien) : Ça complète
votre présentation, Mme Day?
Mme
Stein Day (Suanne) : Oui, madame.
La
Présidente (Mme Vien) : Bien. Alors,
on va entreprendre maintenant les échanges entre vous trois et les
parlementaires, en commençant par Mme la ministre.
Mme De Courcy : Alors, bonsoir. À mon tour de vous
dire tout le courage que je salue d'être venus nous voir à Québec dans les circonstances de la température. Et
vous me permettrez, si vous êtes encore en contact avec lui, de saluer par votre voix Marcus Tabachnick, qui a été
un collaborateur très important pour moi et un homme d'innovation à la
commission scolaire Lester-B.-Pearson, hein? Ça a été important, on lui doit beaucoup de ce virage dont
vous parlez, mais que vous avez contribué
largement à accentuer, je crois, m'a-t-on dit, m'a-t-on dit. Alors, dans ma vie
pas si ancienne que ça, en effet, je me souviens beaucoup de cette
collaboration-là entre les commissions scolaires.
Je
me souviens aussi par ailleurs — et simplement pour
être bien sûre que ma mémoire n'a pas failli — la commission scolaire Lester-B.-Pearson a dans ses
rangs probablement les familles les mieux nanties de l'île de Montréal. Le statut socioéconomique de la majorité des
familles… pas toutes, parce que Marcus m'a souvent parlé de secteurs,
mais globalement il s'agit de la commission scolaire au statut socioéconomique
le plus élevé de l'île, hein, c'est bien ça? C'est bien ça? D'accord. Ça ne
veut pas dire que c'est un tort, au contraire. Tout le monde devrait prospérer
de cette manière sur l'île de Montréal.
Je crois que vous avez fait aussi, en effet,
beaucoup d'efforts sur l'enseignement de la langue seconde. À cette époque-là, la
commission scolaire de Montréal est même allée voir comment vous faisiez, et c'est
vrai, ce que vous avez dit, je crois que vous avez probablement le
secret le mieux gardé qui… à la commission scolaire Lester-B.-Pearson. Et je souhaite souligner votre contribution pour l'essor
économique aussi de l'île. Et il y a une préoccupation que vous avez qui m'a toujours frappée, c'est celle de l'intégration
des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Vous avez
même reçu un prix, je crois, hein, à cet égard-là.
Bon, j'ai lu par ailleurs
votre mémoire. Je comprends que vous êtes en désaccord avec le projet de
loi n° 14. J'ai même compris que vous avez même un hyperlien, là,
pour une pétition contre le projet de loi n° 14. Et je constate
aussi que vous êtes beaucoup, beaucoup
impliqués dans les différentes lois au cours des dernières années, pas ce
gouvernement-ci mais même les autres. Vous
avez même, en 2008, là, intenté des poursuites, un procès au gouvernement après
l'adoption de la loi n° 104, et vous avez aussi déposé un mémoire au moment de
la loi n° 104 et au moment de la loi n° 103. Alors, c'est manifeste que vous avez de grandes préoccupations. Il est
manifeste aussi que nous sommes assez éloignés dans nos préoccupations…
en fait pas dans nos préoccupations, dans les manières, je pense, d'y arriver,
ce serait plus juste.
J'ai vu dans votre mémoire que vous nommez le
fait que votre organisation s'oppose à la disposition touchant la langue d'enseignement d'enfants de militaires.
Je veux vérifier une information que j'ai pour m'assurer qu'elle est
bonne : on me dit que, dans votre commission scolaire, il n'y a que deux
enfants qui sont concernés par cette... qui pourraient être concernés par cette
mesure, mais qu'à cet égard-là ce n'est pas en votre nom, cette fois-là, que
vous parlez mais au nom de la commission
scolaire Central Québec. Est-ce que c'est bien ça? Donc, c'est bien deux
enfants?
Mme
Stein Day (Suanne) : Je pense que c'est
moins de 10.
Mme
De Courcy : Bon, alors...
Mme
Stein Day (Suanne) : J'ai entendu
sept, mais ce n'est pas exact.
Mme
De Courcy : Bon, très bien, c'est très bien.
Mme Stein Day (Suanne) : Mais, oui, nous parlons pour la commission scolaire de
Central Québec et aussi pour la commission scolaire Riverside.
Mme De Courcy : D'accord, d'accord. O.K. Alors, bien,
merci, d'abord, ça me le clarifie pour m'assurer
que je n'avais pas des données qui étaient mauvaises.
Mme
Stein Day (Suanne) : …je suis la mère
de deux enfants qui sont dans le militaire.
Mme De Courcy : …je comprends, il n'y a pas de
problème. Puis vous avez tout à fait… C'est légitime, votre sensibilité, là, à cet égard. Je ne remettrai pas ça
en cause, c'est certain.
J'aimerais creuser avec vous, parce que ça
fait deux fois aujourd'hui que nous entendons cette affirmation-là, et mes collègues en ont reparlé, d'ailleurs vous… Je ne me
souviens pas du comté, là.
M.
Kelley : Jacques-Cartier.
Mme
De Courcy : Jacques-Cartier. Le
député de Jacques-Cartier en a parlé. Alors, vous dites que vous vous opposez à l'appellation «communautés culturelles»
en remplacement de «minorités ethniques» dans la Charte des droits et libertés de la personne, et les informations que j'ai,
c'est que nous sommes plus de l'ordre de la sémantique, mais ce n'est pas ce que j'ai entendu aujourd'hui. Aujourd'hui,
on faisait allusion à des liens, voire des hyperliens avec la charte des
droits et libertés canadienne, même avec des
instances internationales, etc. Alors, j'aimerais ça que vous m'expliquiez
davantage votre point de vue sur ce sujet-là, si vous le voulez bien.
Mme
Stein Day (Suanne) : Je vais demander
à M. Garner d'adresser ce sujet.
M.
Garner (Linton) : Merci. Merci pour
la question, Mme la ministre. Oui, effectivement, je pense que les communautés ethnoculturelles refusent d'être
classifiées en tant qu'un terme si homogène ou si, comment vous dites
dit ça… si facile que des communautés
culturelles. Toutes les communautés ont une culture, toutes les communautés
ont des aspects culturels qu'ils donnent à la vie quotidienne de la société
dont ils font partie. Moi, je suis une personne de la communauté noire, je parle anglais, j'ai des racines américaines. J'apporte
des éléments, je suppose, qui contribuent à la société, à la vie quotidienne, et j'aimerais que… s'assurer qu'en tant
que minorité qui vient d'un groupe ethnique on ait les mêmes protections
concernant les lois nationales et internationales en termes de reconnaissance
de l'importance de la contribution des
minorités ethniques et comment leurs droits peuvent être «abridgés», si vous
voulez, par la société majeure.
Mme De Courcy : Est-ce que vous rattachez ça à des
concepts internationaux ou vous... Qu'est-ce qui fait, à votre avis, la
différence de «communautés culturelles» et «minorités ethniques» pour… Je peux
comprendre la préférence un peu que vous avez, mais je ne saisis pas bien
la nuance que vous en faites.
M. Garner (Linton) : Oui. Bien, tout à fait, des accords
internationaux reconnaissent que c'est les personnes issues de ces communautés ethniques qui le définissent
elles-mêmes, ce n'est plus le cas de la société en général ou la société majeure qui définit qui c'est, ces
personnes, c'est plus ou moins les personnes elles-mêmes qui le définissent,
et c'est dans cet esprit que nous voulons s'assurer que nous sommes…
reconnaître aussi, comme partout dans le monde et partout dans le pays, comme
des minorités ethniques, et pas un terme inventé comme «communautés
culturelles».
Mme De
Courcy : Bien, je vous remercie.
Merci.
La Présidente (Mme Vien) : M. le député de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Une
voix : …
La
Présidente (Mme Vien) : Vous allez
mettre votre téléphone sur la vibration? Une excellente idée.
•
(19 h 50) •
M.
Breton : Bonjour. Je vous remercie d'être
venus dans une température pareille. Supposé que ça va être le printemps
demain.
J'ai
quelques questions par rapport à votre mémoire. Vous avez parlé de l'enseignement
du français, langue seconde, vous avez dit
que vous avez fait de ça un volet important de votre enseignement à votre
commission scolaire. Par rapport aux
gens qui viennent de pays étrangers et que vous voudriez continuer à faire en
sorte de pouvoir enseigner à ces
gens-là le français comme une seconde langue, si je comprends bien — c'est ce que voulez dire? — moi, évidemment, j'apprécierais que… pour eux, ce serait une belle
langue seconde, pour eux autres, à apprendre, l'anglais. Et, comme j'ai
dit tout à l'heure, je ne suis pas allé à l'école anglaise, jamais, et aucun de
mes amis n'est allé à l'école anglaise, sauf peut-être
un ou deux… And yet I speak perfect English. I can express myself very well and
understand you very clearly. So, it means that I can go to French school, and yet
learn to speak English. Mais l'idée, pour nous, lorsque les gens
arrivent d'un pays étranger, c'est de faire
en sorte que ces gens-là fassent de la base, de l'essence de leur dialogue, de
leur discours, de leur culture une culture qui soit basée sur ce qu'est
le Québec, c'est-à-dire une nation à prédominance française. Vous comprenez ce
que je veux dire?
Je suis allé au gala des Jutra dimanche — vous connaissez les Jutra — et puis j'ai noté ceci, j'aimerais que vous me fassiez un
commentaire là-dessus, j'ai remarqué les félicitations qui ont été
faites : Kim Nguyen, Jutra du meilleur réalisateur et meilleur scénario — Nguyen,
origine vietnamienne; Rachel Mwanza, Jutra de la meilleure actrice; meilleur acteur de
soutien, Serge Kanyinda; trophée de la soirée, Sabrina Ouazani; et meilleur
court métrage, Myriam Magassouba. Pas
beaucoup de noms québécois là-dedans. Bien, pourtant, ces gens-là, de toute évidence,
se sont bien intégrés au Québec et
ont développé une culture française du cinéma québécois. Considérant tout ça,
je me pose la question… C'est-à-dire que
je comprends que vous vouliez que la communauté culturelle anglophone continue
à prospérer et à vivre, tu sais, au Québec,
c'est tout à fait normal. Et les députés de l'opposition officielle, les
députés de la deuxième opposition ont dit qu'ils étaient contre le
caractère coercitif de la loi n° 14. Ce que j'ai dit, c'est que, moi qui
viens du milieu de l'environnement, lorsqu'on ne fait que la promotion
de l'environnement, sans qu'il y ait quelque loi coercitive que ce soit, «you
know what», ça ne va pas si bien que ça. Et je vous ai entendus parler du fait
que le français que vous avez enseigné dans vos écoles avant la loi 101 a
fait en sorte qu'il y avait beaucoup d'anglophones qui parlaient français déjà dans les années 70. Je m'excuse, mais ce
n'est absolument pas ce que j'ai vu sur le terrain, parce que j'ai
beaucoup d'amis anglophones qui ne parlaient
pas du tout français avant la loi 101. Il y a eu un gros, gros changement
avec la loi 101.
Ma question, c'est : Est-ce que vous
vous êtes aussi opposés à la loi 101, d'abord? Et est-ce que vous voyez des pistes de solution dans la loi n° 14 qui
pourraient faire en sorte qu'on pourrait trouver un terrain d'entente?
La
Présidente (Mme Vien) : Alors, est-ce
que je comprends que M. Colpitts est désigné pour répondre… ou M. Garner?
Mme
Stein Day (Suanne) : Non, ça dépend
de la question. M. Garner.
M. Garner (Linton) : Oui, bien, bon, je peux traiter la
première partie de votre intervention d'abord. Oui, c'est bien ça qu'on voit sur la scène populaire, la scène…
la société, on voit beaucoup plus d'implication des gens issus des communautés ethnoculturelles, mais aussi c'est des
personnes… des Québécois, ce n'est pas différent que des Québécois. Même
s'ils ne partagent pas les noms comme de racine française, ils sont des
Québécois.
Je me rappelle bien aussi des années, il n'y
a pas longtemps, que… l'affaire avec l'anglais sur les cérémonies, l'ADISQ — je ne sais pas si tu te rappelles ça — ou toute cette bagarre autour de la question de
chanter en anglais. Est-ce qu'une personne qui chante en anglais, c'est
vraiment quelqu'un du Québec? Ça, c'était… Et c'était un gros problème même
pour Céline Dion, si je me rappelle bien. Dans ce sens-là, oui, il y a eu un
certain mouvement depuis ce temps-là, on
avait progressé. Et c'est même ça, on avait progressé depuis les années 70 en
ce qui concerne le français, et notre
capacité de parler français, et l'enseignement du français. On avait pris à
coeur que la prédominance du français, c'est un fait ici, au Québec, et on avait essayé, à notre part, de s'assurer
que nos enfants vont continuer d'être des participants pleinement dans
la société québécoise, parce que nous ne voulons perdre.
Moi, maintenant, j'en ai, des enfants, de 24
et 19 ans, et j'aimerais s'assurer que leur futur soit ici, je ne veux pas que ces gens-là disparaissent. Mais, dans certains cas,
ça présente des problèmes, parce que ce sont des personnes issues de la communauté d'expression anglaise et
aussi avec d'autres éléments, comme communauté noire. Dans certains coins, c'est deux prises contre eux. Moi, en tant
qu'immigrant, par exemple, l'immigrant noir anglophone, des fois c'est trois prises contre moi. Mais j'avais, depuis
1964, décidé de rester ici, à Québec, comme plusieurs dans notre
communauté, et s'assurer qu'on peut vivre
ensemble avec la majorité, et donc c'est là où nous avons pris à coeur en tant
que devoir, si vous voulez, pour s'assurer que les personnes comme moi
peuvent rester et participer pleinement dans notre société ici, à Québec.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci. M. le
député, avez-vous une autre question?
M. Breton : Bien, en fait, j'avais deux questions...
La Présidente (Mme Vien) : Je sais.
M.
Breton : ...auxquelles je n'ai pas eu
de réponse. Donc, ma première question, c'est : Est-ce que vous êtes, finalement, aussi contre la loi 101? Et, deux,
est-ce que vous voyez des pistes de solution qui pourraient faire que
vous pourriez considérer des éléments de la
loi n° 14 ou une façon d'aborder la loi n° 14, tu sais, des… Qu'est-ce
que vous pourriez proposer comme
pistes de solution, dans le cadre de ce nouveau projet de loi là, qui
pourraient faire votre affaire?
M. Garner (Linton) : D'abord, en termes de la question de
la loi 101, on est ici dans une majorité
démocratique, et la majorité a décidé que la
loi 101 s'applique et devrait s'appliquer dans la société québécoise, et
nous ne sommes pas ici pour protester
cet aspect de loi, comme tel. C'est les mesures que donc on voit peut-être qui
peuvent nuire à la communauté, c'est
plutôt nos préoccupations. Et la chose que nous, on voulait voir, c'est qu'en
termes de piste de solution on serait capables
de siéger avec les instances pour voir comment on peut travailler ensemble,
pour vous démontrer qui nous sommes et
notre volonté de faire des choses, avancer l'enseignement du français, avoir
des réseaux, si nécessaire, pour le faire et travailler étroitement avec
la société en général pour bâtir un meilleur Québec. C'est seulement notre
préoccupation.
M. Breton : Donc, j'entends bien que… Bien, je me
rends bien compte que vous êtes des gens parlables, puis il y a moyen de travailler ensemble pour faire en
sorte de faire avancer le Québec dans ce sens-là.
M.
Garner (Linton) : …et que nous
faisons partie prenante...
M.
Breton : Absolument.
M. Garner (Linton) : ...de l'avenir et de cette société,
et il faut que tu tiennes ça en... en tenir compte, de ça, pour...
M.
Breton : Parfait. Je vous remercie beaucoup.
M.
Garner (Linton) : De rien.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci
beaucoup, M. le député. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M.
Pelletier (Saint-Hyacinthe) : Il
reste combien de temps, Mme la Présidente?
La
Présidente (Mme Vien) : Un peu moins
que cinq minutes.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : O.K., merci. Bonsoir, messieurs
dames. À la page 3 de 14 de votre
mémoire, moi, il y a une donnée qui me fait
sursauter un peu, et je veux clarifier si je comprends bien. C'est
marqué : «…des élèves allophones éduqués au secteur francophone,
seulement [55,6 %] peuvent parler français.» Je veux bien comprendre. Ces élèves allophones là qui arrivent sont
inscrits au primaire, inscrits au secondaire. Quand ils finissent leur
secondaire, il y en a seulement 55 % qui parlent français? Moi,
celle-là, j'aimerais ça avoir une explication.
Et j'aimerais ça voir qu'est-ce que vous
pensez aussi de la vision. Je pense que… Est-ce que vous ne croyez pas que la vision est
trop optimiste, compte tenu du fait que l'anglais… On vit dans une mer
anglophone, là, en Amérique du Nord. Les francophones, c'est 2 %.
Donc, ne pensez-vous pas que c'est normal qu'on trouve des moyens de protéger
notre loi par de la coercition — il
y en a qui appellent ça de la coercition, mais c'est par une loi — pour
que justement on continue de subsister en
Amérique du Nord?
La
Présidente (Mme Vien) : Mme Day, M.
Colpitts?
•
(20 heures) •
M. Colpitts (Steven) : Oui, je pense, quand on parle du
56 % dont vous parlez, c'est plutôt à propos des allophones qui arrivent
au Québec et qui ne parlent pas ni français ni anglais. Alors, on parle de ces
gens-là, on ne parle pas au point de vue
de finissants qui ont passé à travers le système ou qui ont été là pendant
quelques années puis qui n'ont pas appris le français du tout. Ça se réfère vraiment au
fait que, quand ils arrivent ici, ils ne parlent pas français. C'est ça que ça
voulait dire dans le texte.
Pour
ce qu'il en est de la question sur... la deuxième question, c'était à propos
du...
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : …vous estimez que le français n'est
plus menacé au Québec, de telle sorte qu'on peut dorénavant laisser aux parents le choix de la
langue d'enseignement, mais on vit dans une mer anglophone, donc c'est
normal, je pense, qu'on puisse...
M. Colpitts (Steven) : Je ne pense pas qu'on dit que le
français n'est pas menacé, dans le sens qu'il faut protéger le français au Québec, on est d'accord avec ça.
Ce qu'on essaie, nous, de dire, c'est qu'on est partenaires dans cette mission-là, c'est qu'on veut travailler avec vous
pour, justement, travailler avec nos élèves pour qu'ils puissent travailler,
et vivre, et rester ici, au Québec. Alors, c'est ça, notre but, c'est de
travailler en partenariat.
M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : J'avais peut-être mal compris au
début, mais c'est bien marqué «allophones
éduqués au secteur francophone», c'est ça qui est écrit. Quand on dit «éduqués
au secteur francophone», ça veut dire que c'est des enfants qui sont inscrits aux écoles
francophones. Alors, c'est un petit peu ma remarque. Mais je vais
laisser la parole à mon collègue ici qui a une autre question.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de Bonaventure,
pour un peu moins de deux minutes.
M. Roy : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Bonsoir, plutôt.
Dans votre document, à
la page 11, j'ai vu un petit paragraphe qui m'a interpellé et j'aimerais
vous le citer : «Nous croyons que le
projet de loi n° 14 est bel et bien une tentative d'inhiber et de
ghettoïser encore plus la communauté anglophone et de resserrer les
restrictions déjà étouffantes imposées aux écoles anglophones.»
Qu'est-ce
qui vous permet de penser que cette loi-là est une menace pour votre
communauté? Parce que les termes sont un peu
forts, on parle d'inhiber et de ghettoïser, ce qui est...
La Présidente (Mme
Vien) : Rapidement. Rapidement, M.
Garner ou madame... M. Garner.
M.
Garner (Linton) :
Oui, bien je pense qu'on comprend très bien, avec les différentes
réglementations en termes des municipalités, en termes de, comment vous
dites ça… de demandes supplémentaires pour l'enseignement en français dans les cégeps et universités, de demandes
expresses, que les cégeps ont d'abord une mission, les cégeps
anglophones ont d'abord la mission d'enseigner.
Les anglophones vont commencer à diminuer, la population de ces personnes-là,
et ce serait uniquement nous, en tant que la communauté d'expression
anglaise, qui se trouvent à l'intérieur de ces choses-là. Donc, on se sent
séparés et… en termes de la progression, parce que c'est la mixité...
La Présidente (Mme
Vien) : Merci.
M. Garner
(Linton) : ...la diversité qui ajoute
au goût quotidien d'une communauté.
La
Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, M. Garner. Si vous voulez bien, on va passer maintenant
la parole du côté de l'opposition officielle
pour un temps d'environ 18 min 30 s.
M.
Tanguay : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous de prendre le temps ce soir de venir
nous faire part
de votre analyse, des fruits de votre analyse, que nous avons lue, entre
autres, dans votre rapport, dans votre mémoire que vous avez déposé à la
commission. Donc, merci beaucoup pour votre éclairage que vous nous apportez et
que vous apportez au débat.
Je
pense que vous avez dit, quelqu'un, je pense, un peu plus tôt…
M. Colpitts, je crois, vous avez dit : Il faut nous voir comme des
partenaires, et je pense que vous en êtes absolument, l'épanouissement du
français, et vous le reconnaissez. Il
faut demeurer vigilants, au Québec, afin de faire en sorte que l'épanouissement
du français soit une réalité, et, en ce sens-là, vous faites bien, je crois, et à juste titre vous le soulignez,
que vous êtes des partenaires de choix et importants. Et le fait que vous le reconnaissiez vous-mêmes, je
pense, parle beaucoup quant à votre bonne foi, votre volonté d'en faire
une réalité. Et un peu plus tard je pourrai
le démontrer, puis je vous demanderai de commenter, entre autres, sur les
réussites que vous enregistrez année après année, sur la qualité de l'enseignement
du français que vous dispensez et des résultats tangibles que vos élèves
obtiennent.
Au
niveau des statistiques, effectivement, nous avions eu l'occasion un peu plus
tôt de souligner le fait que les élèves de langue maternelle anglophone ou
anglophones vont de plus en plus à l'école en français, quand on se
compare sur une période des 20, 30, même, dernières années. Et c'est la même
chose également au niveau des enfants allophones, tant au niveau primaire,
secondaire, et les statistiques, également, ne mentent pas au niveau des cégeps
en français. Donc, il y a de plus en plus de
jeunes qui vont à l'école en français, et ça, c'est un élément qui explique et
qui justifiait, je crois — on l'a tous entendu et on l'a tous lu — qui justifiait le ministre responsable de la métropole et
ministre responsable de la relation avec la
communauté anglophone lorsque, le 19 janvier dernier, il écrivait sur son
blogue, et je le cite : «Les Anglo-Montréalais sont massivement devenus
bilingues, depuis un peu plus d'une génération. Ils voient, autour d'eux, notamment à Montréal, une majorité de
jeunes francophones bilingues.» Fin de la citation. Alors, ce constat-là,
non seulement on le voit dans les
statistiques, le ministre de la métropole et responsable de la relation avec la
communauté anglophone le voit également, et, en ce sens-là, je pense que c'est
important de le souligner.
Ceci
dit, votre mémoire est très clair à l'effet que l'approche qui est préconisée,
qui est mise de l'avant au niveau du projet de
loi n° 14 n'est pas celle que vous privilégieriez mais une approche
qui fait en sorte que vous demandez tout simplement
que le gouvernement retire le projet de loi n° 14 et puisse proposer
sur d'autres bases, sur d'autres approches plus proactives plus de
soutien, des mesures qui feront en sorte effectivement que le français et l'épanouissement
du français soient une réalité.
J'aimerais donc... Et
j'aurai deux questions. La première, j'aimerais vous demander… Et je fais
référence, évidemment, à votre mémoire, à la page 2 de 14. Lorsque vous
parlez des résultats de la commission scolaire Lester-B.-Pearson, vous parlez,
entre autres, que 86 % de vos élèves du primaire ont réussi l'épreuve d'anglais
de fin de troisième cycle. Commission
scolaire Lester-B.-Pearson, épreuve en anglais, 86 % de vos élèves ont
réussi à la fin du troisième cycle l'épreuve, donc, d'anglais. L'épreuve
de français, ce n'est pas 86 %, ce n'est pas 87 %, c'est 89 %. 89 % des élèves de la commission scolaire
Lester-B.-Pearson ont réussi l'épreuve de français de la fin du troisième
cycle. J'aimerais, s'il vous plaît… Vous, partenaires dans notre objectif
commun, comment vous y arrivez? Comment vous expliquez un tel succès?
M. Colpitts (Steven) : La première chose à dire : Je
pense qu'on a des enseignants extraordinaires. Malgré tout, je dois admettre
que c'était une difficulté aussi dans le cheminement qu'on a fait. Malgré le
fait qu'on reste à Montréal, avoir
des enseignants qui sont formés en langue seconde n'est pas facile. Je pense, l'année
dernière, l'Université McGill a gradué
ou diplômé 25 élèves dans cette faculté-là, alors on fait ce qu'on peut.
On a même engagé à la commission scolaire quelqu'un qui travaille à plein temps maintenant pour avoir plus de
communications avec les universités francophones, pour pouvoir attirer
le plus possible d'enseignants francophones dans notre commission scolaire
comme stagiaires, et, comme ça, ça fait
connaître notre programme. Alors, c'est le travail des gens sur le plancher, c'est
le travail aussi de la commission scolaire.
C'est
aussi le fait qu'on a changé nos programmes, qu'on est passé de français,
langue seconde, à un programme d'immersion,
puis même, au primaire, à un programme de français Plus. On a quelques écoles
maintenant qui font du français à 80 % de la maternelle jusqu'à la
quatrième année.
Alors,
il y a eu des gros changements. Alors, avec ces changements-là, qui ont été
demandés, en passant, par nos parents, parce qu'ils veulent que leurs enfants
restent ici, au Québec… Ils ne veulent pas qu'ils s'en aillent une fois
qu'ils vont être diplômés, ils veulent qu'ils
restent ici pour vivre et y travailler. Alors, on doit s'ajuster à ça, à cette
mission-là, à cette demande-là. Alors, c'est ce qu'on a fait. Et on a des très
bons résultats, comme vous avez mentionné, 89 % au primaire, mais je voulais dire qu'au secondaire, cinquième secondaire, c'est
la même chose, on a des très bons résultats aussi où est-ce que les
élèves réussissent.
Alors, c'est beaucoup
de travail. C'est un focus qu'on s'est donné, c'est une mission qu'on s'est
donnée, et ça fait partie de notre plan stratégique.
• (20 h 10) •
M.
Tanguay : Mme la
Présidente, j'aimerais également revenir sur un élément qui a été soulevé un
peu plus tôt. Quelqu'un a parlé de surcroît de bureaucratie par rapport au projet de
loi n° 14. Alors, je vous poserais la question : À quel
endroit voyez-vous ce surcroît de bureaucratie? Et quelle est sa nature, en
quoi il consiste?
Mme
Stein Day (Suanne) : Je vais répondre, je pense. Dans le projet de loi, c'est mentionné, on
doit faire des rapports chaque trois années, c'est mentionné qu'on doit refaire la
politique sur la langue française, linguistique. Nous avons fait cette
politique juste l'année passée et nous avons beaucoup de rapports à faire pour
le MELS chaque année et de moins en moins d'administrateurs dans le siège
social pour le faire. C'est de ça que nous parlons.
La Présidente (Mme
Vien) : M. le député de
Jacques-Cartier.
M.
Kelley : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. À mon tour, bienvenue. On est dans l'ère du «full disclosure» et de la
transparence pour les élus. Alors, moi, je suis un finissant de la commission
scolaire Lakeshore, qui était la version protestante, si vous voulez, de
la commission scolaire Lester-B.-Pearson. Mon épouse est commissaire scolaire à
la commission Lester-B.-Pearson. Alors, je
pense, je mets tous mes intérêts sur la table. Mes cinq enfants sont des
finissants de l'école… de la commission
scolaire Lester-B.-Pearson. Alors, je pense, tous mes intérêts personnels sont
dévoilés, Jacques St-Laurent peut dormir en paix, et tout le reste.
Alors, je pense, j'ai dévoilé tous mes intérêts.
La Présidente (Mme
Vien) : On vous connaît mieux
maintenant, on vous connaît mieux maintenant.
M. Kelley : Oui. Et j'ai peut-être deux questions. Je pense qu'il y a
deux messages dans votre mémoire, et, le premier, pour répondre un petit peu à
notre collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
oui, de toute évidence, le français que j'ai
appris dans les années 60 à l'école primaire était beaucoup inférieur à l'offre
de français d'aujourd'hui. Et moi, j'ai
constaté ça via mes enfants, qui avaient les cours d'immersion, la capacité d'étudier
l'histoire, la géographie et d'autres
sujets en français. Moi, c'était limité à la demi-heure par jour… ou
45 minutes, je ne me rappelle pas, où on a répété, répété et répété
les mêmes 10 phrases dans l'école primaire : Quel âge avez-vous? Je m'appelle
Geoff, et tout le reste. Alors, c'était
ancré dans mon cerveau en tout temps. Alors, je veux — et blague à part — souligner le travail des
commissions scolaires, parce que ce n'était pas toujours avec le soutien du
ministère de l'Éducation. Au niveau de développer les programmes, au niveau de
développer le matériel pédagogique, et tout le reste, ça a été tout un travail
de longue haleine, alors, je pense, c'est une preuve.
Et un petit peu on est
revenu sur… On n'est pas ici pour faire un débat sur la loi 101. Les
choses ont changé. Peut-être il y a des
mesures qui étaient nécessaires dans les années 70, mais on est en 2013 aujourd'hui,
et c'est pourquoi on prône parfois une approche autre, parce que, je
pense, il y a une évolution. Et, je pense, peut-être une des frustrations dans le réseau scolaire anglophone, c'est qu'il n'y
a pas toujours la reconnaissance des efforts très importants qu'ils ont
faits pour le fait français. Alors, je pense, ici on a des personnes qui sont
venues ici témoigner comme partenaires dans ça.
Et je vais vous poser une question, Mme Day,
mais je sais qu'un de vos grands défis… Parce que moi aussi, je prône l'école publique
dans la mesure du possible. Moi, je suis finissant d'une école publique
québécoise, mes enfants sont tous des finissants des écoles publiques.
Il y a une place pour les écoles privées, on n'est pas ici ce soir pour faire
le procès, mais ma préférence toujours, dans
notre société, est de prôner l'école publique. Je pense que ça doit être
privilégié, pour notre société, d'avoir des
écoles publiques fortes dans nos quartiers. Et un de vos concurrents, c'est les
anglophones qui décident d'aller à l'école
publique française, et vraiment ça doit avoir une influence sur votre offre de
services. Je sais qu'il y avait la
grande consultation en 2008‑2009 de vos parents pour vraiment développer un
nouveau plan stratégique pour la commission scolaire. Alors, c'est quoi,
les mesures, ou comment est-ce qu'on veut répondre au fait que… De mémoire, ce
n'est pas loin de 10 000 étudiants aujourd'hui dans le réseau scolaire
francophone qui ont leur fameux papier bleu, qui peuvent aller à l'école anglaise, mais leurs parents
ont fait le choix de les envoyer à l'école française. C'est quoi, les
conséquences pour votre commission scolaire?
M.
Garner (Linton) : …les conséquences
pour notre commission scolaire, c'est une diminution de notre population propre à l'intérieur, et qui est donc
une diminution des ressources qui viennent à nos écoles pour reprendre
ce défi-là. Je pense qu'il y a une certaine perception publique que les
commissions anglophones ne sont pas capables d'enseigner le français, ou que
les gens préféreraient aller ailleurs, dans la communauté française, pour
apprendre du français, et, oui, que…. et que
peut-être, dans le passé, c'était pas mal la vérité, et que… Pour rejoindre
Geoff, oui, vraiment, je me rappelle
bien mes journées de français où on avait appris : Comment allez-vous?,
ou : Quelles sortes de légumes avez-vous d'aujourd'hui?, que c'était
presque la limite de notre capacité, mais la réalité… Et c'est actuel depuis
des années. C'est pour ça que je dis que notre communauté continue à rester au
Québec. Ça a donné une énergie à la communauté pour mettre leurs enfants dans
une école francophone, pour s'assurer qu'eux, ils allaient apprendre du
français. Maintenant, nous voulons les assurer que nous sommes capables, nous
sommes prêts à les enseigner et nous sommes
vraiment habiles en termes de préparer les jeunes pour vivre, et rester, et
participer pleinement dans la société quotidienne du Québec.
M. Kelley : Peut-être d'autres déclarations d'intérêts :
Linton et moi jouons au hockey ensemble depuis
40 ans. Alors, ça, c'est une autre... je n'ai pas mis ça sur la table non
plus, mais...
Et la deuxième est plus compliquée, parce que
ce n'est, à mon avis, pas vraiment touché par la loi n° 14, mais on a, je pense,
tout intérêt de garder un réseau des écoles anglophones au Québec. Je pense qu'ils
ont leur place. Je regarde mon collègue
de Bonaventure, il y a une communauté là qui est très fragile. Alors, de
maintenir une offre de services dans les écoles anglaises dans le comté de Bonaventure... On avait le cri du
coeur des Townshippers la semaine passée, qui ont un intérêt de
conserver leur communauté, et, avec les inscriptions, ils sont à la baisse.
Alors, comment corriger le tir?
Il n'y a pas de solution facile, on a jonglé
à beaucoup de recettes. Mme Chambers, à un certain moment, a fait un rapport qui a
proposé un genre de clause, des personnes qui viennent des pays du
Commonwealth, plus les États-Unis, peuvent
inscrire... C'est difficile à cerner ça dans la loi, et il n'y avait pas une
volonté pour le faire. Mais je comprends, dans la présentation ce soir
et d'autres qui ont été faites, que, si on ne fait rien, la clientèle pour les
neuf commissions scolaires anglophones au Québec va continuer à être à la
baisse, ça va être de plus en plus difficile de garantir qu'à New Carlisle on
va aller à l'école en anglais, qu'à Lennoxville on peut le faire, et ainsi de
suite.
Donc,
la réaction, on dit : C'est juste quelques centaines d'étudiants, des
militaires, par exemple, mais c'est l'existence même d'une commission scolaire
qui est plus ou moins en jeu avec la démarche. Alors, c'est 16 % de la
population. Alors, amputer 16 % dans une toute petite commission scolaire,
oui, on peut dire… oui, on peut survivre à ça, mais je pense qu'à un certain
moment c'est les choses qui ont un impact qui est beaucoup plus important pour l'objectif recherché. Alors, je pense qu'il faut
toujours un équilibre. Et moi, je n'ai pas de solution à proposer ce soir,
mais moi, je vais plaider quand même qu'on a intérêt de garder un réseau
scolaire anglophone et sa vitalité.
Alors,
on a la phrase creuse qu'on met dans tous nos discours, «dans le respect de la
communauté historique anglophone», mais juste un avis que, si on ne fait rien au
niveau de faire une discussion, comment est-ce qu'on peut s'assurer qu'il y aura des clientèles
intéressantes pour ces écoles? On aura un problème à court et moyen terme parce
qu'elles sont en déclin, on peut fermer les écoles. Et, une fois qu'on ferme une
école anglaise dans une communauté, dans
votre comté, à Bonaventure, par exemple, le monde va quitter pour Montréal, ils
vont quitter pour Toronto, ils vont aller
au Nouveau-Brunswick et... Alors, c'est juste une cause. C'est triste et
parfois c'est inévitable. Mais la conclusion de tout ça : on va perdre une présence historique des anglophones dans
Gaspé, qui ont toujours forgé l'identité gaspésienne avec les Micmacs, avec les francophones, avec tout
le monde, et ça fait partie de qui nous sommes comme Québécois.
Alors, j'ai un problème. Et, comme je dis,
une solution ce soir, je ne sais pas, ce n'est pas vraiment dans le cadre du projet de
loi n° 14, mais il y a une question très importante de la vitalité du
réseau scolaire anglophone. Je pense, la preuve est faite ce soir qu'ils
sont des alliés au niveau du défi de : on est 2 % de la population
francophone dans une marée anglaise en
Amérique du Nord. Alors, je pense, depuis les 10 phrases que j'ai
maîtrisées à l'école primaire il y a quelques années, on a fait d'énormes
progrès comme partenaires, comme des personnes qui veulent faire la promotion
du fait français. Une fois que nous avons
dit ça, il y aura l'enjeu de la vitalité que tôt ou tard nous devrons trouver
des solutions, parce que c'est un enjeu qui est réel. Il y a un certain
cri du coeur au fond du mémoire qui ne touche pas vraiment le projet de
loi n° 14 mais quand même la vitalité des communautés anglophones à
travers le Québec.
•
(20 h 20) •
M. Garner (Linton) : Si je peux prendre un petit peu l'argument
qui est présenté par M. Kelley — et merci pour cette clarification — une des pistes de
solution peut-être, ce serait de nous aider à garder notre masse critique. On a
presque la même problématique en termes… que
les francophones, le 2 % en Amérique du Nord, et, les anglophones,
le 16 % ici dans le milieu francophone, c'est de garder notre masse
critique, et un des volets peut être de donner l'opportunité aux francophones à
choisir d'y aller, à des écoles anglophones, ce qui est bloqué présentement,
que ça représente un échec, et que peut-être que c'est une piste de solution.
Et nous voulons travailler étroitement avec le gouvernement pour réaliser cet
objectif-là.
Et
même dans mon expérience personnelle... Moi, je suis un coach de basketball. C'est surprenant, j'imagine.
Mais, parmi les activités, l'année passée, j'ai participé dans les Jeux du
Québec. J'ai eu 14 jeunes de la région de Lac-Saint-Louis, j'ai eu à peu près huit francophones sur l'équipe parmi
les 14, et le grand désir de la part de leurs parents : tenir les
sessions de pratique en anglais pour permettre aux jeunes d'apprendre mieux,
parce qu'ils viennent d'un milieu beaucoup... qui est presque uniquement en
français, et eux autres veulent avoir l'opportunité d'apprendre l'anglais et
même améliorer leur anglais.
Donc, j'imagine que le taux de représentation qu'on voit des
anglophones à l'intérieur des écoles
francophones, ce serait le même si ce serait permis par la loi pour les
francophones parmi nous autres, en termes de la communauté d'expression
anglaise, et ça peut vraiment aider nous à continuer la masse critique de nos
commissions scolaires.
La Présidente (Mme Vien) : Merci beaucoup, M. Garner. Je
cède maintenant la parole à la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci. Pour combien
de temps, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme
Vien) : 4 min 35 s.
Mme Roy
(Montarville) : Merci. C'est court.
Merci à vous. Merci pour votre mémoire, merci de vous être déplacés. J'ai lu le
mémoire avec beaucoup d'intérêt, il est très bien fait, très articulé, et, en
lisant ce mémoire, il y a vraiment des
choses où on se rejoint. Nous considérons qu'il faut protéger la langue
française mais dans le respect des droits de la minorité anglophone,
bien entendu. Entre autres, vous êtes contre cette nouvelle mesure qui pourrait
interdire aux enfants de militaires d'aller à l'école de leur choix; nous
aussi.
Et,
comme je vous disais, je lisais ça et, les mots que vous avez choisis, j'ai
trouvé que dans vos mots il y avait beaucoup d'inquiétude
et même un peu d'amertume. Et, si je peux citer une phrase — puis j'aimerais que vous commentiez là-dessus — vous dites : «À la lumière des amendements proposés,
on voit clairement que le présent gouvernement
perçoit la communauté anglophone et ses institutions comme des secteurs non
coopératifs de la population québécoise
en matière d'enseignement du français dans nos écoles primaires et
secondaires...» Alors, c'est un gros mot, «non coopératifs». Plus loin,
vous dites même : Nous ne sommes pas des ennemis, nous sommes des alliés.
Alors, pouvez-vous m'expliquer le sentiment qui prévaut ici?
M.
Colpitts (Steven) : Je pense qu'on en a parlé un petit peu avant que... En réalité, on se
sent comme si on devait tout le temps se défendre. C'est pour ça qu'il y a
peut-être ce sentiment-là dans le mémoire, parce qu'on a tout le temps
le sentiment qu'il faut se battre, puis pourtant on a tellement mis d'efforts
pour pouvoir être un partenaire, justement, essayer
de faire notre part pour contribuer à la francisation de notre clientèle. Et,
je pense, ça vient de ça, ça vient de ces émotions-là qu'il semble qu'on fait des efforts, mais pourtant à chaque
fois il y a quelque chose d'autre qui s'en vient, puis il y a quelque
chose d'autre qu'il va falloir se battre. Alors, ça vient de ça.
Mme
Roy (Montarville) : Et il y a quelque chose d'autre ici. Dans le projet de loi n° 14,
pour vous, c'est surtout des irritants, à cet
égard-là, qu'on y retrouve.
M. Colpitts (Steven) : Oui, ça fait partie des irritants.
Mme
Roy (Montarville) : Est-ce que vous êtes d'accord, cependant, sur le fait qu'il faille
donner davantage de cours de français, franciser davantage les étudiants anglophones mais
aussi et surtout nos immigrants, nos nouveaux arrivants?
M.
Colpitts (Steven) : Oui, absolument, on pense que c'est important que les immigrants
puissent, comme nos élèves, être capables de fonctionner, être capables de travailler et de
vivre au Québec en français. Ce qu'on essaie de dire, c'est qu'on pense
qu'on fait une bonne job là-dedans, on pense qu'on est capables. On le fait
avec nos élèves, on est capables de le faire avec les allophones aussi. Alors,
on ne voit pas pourquoi qu'on ne pourrait pas faire le même travail avec eux.
S'il
y a une population… On a parlé d'une population pour essayer de ressourcer nos
commissions scolaires, on parle des allophones qui viennent… pas des
allophones, plutôt des gens qui viennent de pays anglophones ou qui
parlent anglais, qui arrivent ici et qui
parlent anglais. On peut les amener dans nos écoles et on peut leur apprendre
le français. On a prouvé qu'on est capables, on a des bons résultats.
Mme
Roy (Montarville) : Oui. À la lecture, justement, des chiffres que vous nous avez soumis,
lorsqu'on sait que le taux de décrochage et de
diplomation au Québec est bien inférieur à 80 %, vous dépassez les
80 %, je pense que c'est quelque chose qu'il faut souligner, le travail
qui est fait dans vos commissions scolaires.
Outre les bons
résultats, moi, je me posais une question : Que pensez-vous du fait que,
dans ce projet de loi n° 14, on veut faire en sorte qu'il y ait un
examen, un genre d'examen — mais on n'a pas
encore tous les tenants et les aboutissants, là — un examen qui serait
unifié pour l'obtention du diplôme de secondaire V et ultimement du collégial?
Qu'en pensez-vous?
M.
Colpitts (Steven) : On n'a pas d'objection qu'il y ait un examen. Nous, on est prêts à
relever le défi, notre but a tout le temps été
que… Encore je le dis, on ne veut pas que les élèves soient fonctionnels dans
la langue française, on veut qu'ils soient capables, qu'ils soient complètement
à l'aise en milieu de travail et pouvoir vivre en français d'une façon très à l'aise
et confortable. Alors, c'est ce qu'on a comme but.
Une des choses, comme
on parlait...
La Présidente (Mme
Vien) : En terminant, M. Colpitts, si
je veux être équitable envers tous les groupes parlementaires.
M.
Colpitts (Steven) : Oui. Je vais
résumer tout ça très vite.
La Présidente (Mme
Vien) : Rapidement, hein, c'est...
M. Colpitts
(Steven) : C'est que, si on est pour
faire ça, on espère d'avoir les ressources aussi pour pouvoir atteindre ces
buts-là. S'il y a des nouveaux buts à donner, c'est ce qu'on demande.
La Présidente (Mme
Vien) : Merci beaucoup. Merci. Alors,
Mme la députée de Gouin, le dernier mot est pour vous.
Mme David : Merci.
La Présidente (Mme
Vien) : 4 min 35 s
pour le faire.
Mme David : C'est ce que j'allais vous demander. Bonjour. Bonsoir.
Deux
choses. La première, c'est que je comprends très bien que, sur certains sujets
qui soulèvent de l'émotion et tous les sujets
autour du vivre-ensemble, le vocabulaire a de l'importance, et, par exemple, on
devrait éviter d'utiliser le vocable
«communauté culturelle» lorsqu'on parle de la minorité historique anglophone. C'est
une minorité historique, et je pense qu'on doit en parler comme ça.
Sur
la question de savoir si, pour les autres, on doit parler de communautés
culturelles, communautés ethnoculturelles,
groupes issus de l'immigration ou minorités ethniques, je comprends la
sensibilité. Moi, ma tête n'est pas faite
là-dessus, je vais y réfléchir. On a un questionnement, à Québec solidaire, sur
cette question-là. Donc, il nous reste encore quelques semaines pour y
réfléchir, mais je suis très sensible à ce que vous apportez.
Maintenant,
j'aurai une question, parce que, même si je comprends très bien cette
inquiétude exprimée d'en quelque sorte disparaître, une inquiétude que les
francophones devraient comprendre très bien, d'ailleurs, et comprennent très
bien, il reste que de vous voir proposer
que, finalement, tous les parents, qu'ils soient francophones ou allophones,
aient le choix d'envoyer leurs enfants à l'école anglaise, permettez-moi
de vous dire que c'est quand même une remise en question de la loi 101 — si on ne veut pas jouer avec les mots, là, c'est quand même
ça — et là moi, j'ai un problème,
parce que je pense quand même que la
loi 101 a permis au Québec francophone de progresser énormément. Et je dis
ça sans rien vous enlever des efforts
que vous avez faits, là, vraiment rien. Et moi, je pense donc qu'on doit
maintenir les dispositions de la loi 101 qui sont confirmées par le
projet de loi n° 14. Puis j'aimerais vous entendre là-dessus. Vous
craignez de disparaître, je comprends, mais, vous, est-ce que vous comprenez
que la majorité francophone, qui est une infime minorité en Amérique du Nord, a
peur aussi de disparaître?
• (20 h 30) •
M. Garner (Linton) : C'est sûr et certain, j'aimerais
vous le dire, sans doute on reconnaît la menace que les francophones ont sentie
en termes de leur avenir ici, dans l'Amérique du Nord, et on avait pris ça à
coeur que, oui, il y avait vraiment
inquiétude là. Ce que nous voulons faire, c'est de ne pas nier cet aspect-là
mais de vous rejoindre en termes du bâtiment de cette société. Et nous,
on se sent que, si long que nous travaillons ensemble en tant que partenaires,
et évidemment
avec des accommodations peut-être plus raisonnables en termes de l'entrée à des
écoles anglaises, on va bâtir une société
qui va aussi, dans son ensemble, appuyer cet effort-là que le fait français
resterait ici, au Québec, et que ce soit
préservé en tout temps. Et je pense que c'est la meilleure façon de rejoindre
les gens. Et, dans cet effort, je pense
que, depuis des années, on a entendu des paroles, qu'il y a certains groupes
qui ne rejoignent pas cette idée-là, le fameux discours de M. Parizeau lorsque... les minorités et l'argent, et
c'est un sentiment au coeur que nous ne partageons pas, qui nous ne
rejoint pas, mais peut-être c'est à cause de ne se sentir pas comme partie
prenante, à cause que le partenariat, il n'est
pas «extendé» à nous autres comme on se sent qu'il faut. Et, au moment que ça
soit réalisé, je pense que de plus en
plus les francophones, en majorité, vont s'entendre que nous voulons aussi
promouvoir le fait français du Québec.
La Présidente (Mme
Vien) : 30 secondes, Mme la
députée.
Mme David : O.K. Alors, une question extrêmement courte. Je vois que la
maîtrise du français est un critère obligatoire d'embauche pour beaucoup des
postes à la commission scolaire. Dans quelle proportion, s'il vous plaît?
M.
Colpitts (Steven) : Tout ce qui... l'enseignement du français surtout, naturellement, mais,
à la commission scolaire, beaucoup de postes. Voilà peut-être cinq ans, même
10 ans, quelqu'un qui voulait être en administration à la
commission scolaire n'était pas nécessairement bilingue. Maintenant, on ne peut
pas accéder à un poste à mon niveau sans être bilingue.
La Présidente (Mme
Vien) : Merci infiniment. Merci à
vous trois de vous être déplacés ce soir.
Alors,
les travaux de la commission sont terminés, et nous ajournons à demain, après
les affaires courantes. Merci à tout le monde.
Bonne nuit, bonsoir. Merci.
(Fin de la séance à
20 h 32)