(Dix heures cinq minutes)
Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de la commission est de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 56, Loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Pagé (Labelle) est remplacé par Mme Richard (Marguerite-D'Youville).
Auditions (suite)
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ce matin, nous recevons le Regroupement des organismes Espace du Québec. Et après eux ce sera l'Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec.
J'inviterais immédiatement Mme Francine Gagnon à nous faire la présentation des gens qui l'accompagnement et aussi de nous parler du point de vue du Regroupement des organismes Espace du Québec sur le projet de loi n° 56. Madame, la parole est à vous.
Regroupement des organismes
Espace du Québec (ROEQ)
Mme Gagnon (Francine): Merci. Alors, je vous présente Odette Théberge, qui est coordonnatrice au programme du Regroupement des organismes Espace du Québec, que je vais appeler, à partir de maintenant, ROEQ. Ça va être plus court.
Alors, avant de vous faire part de ses commentaires, le ROEQ veut d'abord vous remercier pour votre invitation et aussi saluer la volonté du gouvernement du Québec d'agir pour contrer la violence.
Pour que toujours plus d'enfants puissent vivre une enfance en sécurité et sans violence, notre regroupement réunit 11 organismes communautaires Espace autonomes, répartis dans neuf régions administratives du Québec. Leur champ d'action se situe en prévention de la violence faite aux enfants de trois à 12 ans.
Nous exposerons d'abord brièvement notre analyse de la violence et comment nous travaillons auprès des enfants et des adultes pour la prévenir. Cet exercice préalable permettra de mettre en lumière les points d'ancrage du mémoire et des recommandations que nous vous présentons aujourd'hui.
Mme Théberge (Odette): Voici notre analyse. Pour Espace, il importe que les stratégies de prévention de la violence faite aux enfants soient basées sur la réalité des personnes qui en vivent ou en ont vécu. Plus la compréhension est précise et juste, plus les mesures préventives sont efficaces.
Afin de protéger les enfants contre toute forme d'agression, Espace a toujours traité de la violence de façon globale, c'est-à-dire sous toutes ses formes, qu'elle soit verbale, physique, psychologique, sexuelle, qu'il s'agisse de négligence ou encore d'intimidation et qu'elle soit le fait d'un adulte ou d'un autre enfant.
La violence est considérée comme un exercice abusif de pouvoir par une personne en situation de force pour contrôler par différents moyens une autre personne, et ce, dans le but de répondre à ses propres besoins et désirs sans égard à l'autre. Précisons que le pouvoir n'est pas mauvais en soi. C'est l'abus qu'on en fait qui est problématique.
Conséquemment, nos stratégies de prévention questionnent les inégalités de pouvoir entre les personnes. Elles misent sur la confiance en soi, l'affirmation de soi, le courage et l'entraide communautaire, et visent donc le renforcement des enfants, des adultes et des milieux de vie.
Espace tisse ou renforce les réseaux naturels d'aide et d'entraide autour des enfants, entre les enfants et les adultes, et entre les adultes eux-mêmes. Nous visons l'appropriation du pouvoir sur soi-même, son environnement et sa réalité. Cette approche se distingue nettement de celles, plus traditionnelles, qui visent plutôt le contrôle des victimes potentielles ou des agresseurs.
Espace sur le terrain. Depuis 1985, les organismes Espace travaillent auprès des enfants de trois à 12 ans avec le soutien des adultes et des milieux visités. En effet, Espace privilégie une approche par milieu de vie, par exemple une école, une garderie, en tentant de sensibiliser l'ensemble des adultes et des enfants qui s'y retrouvent, contribuant ainsi à créer un environnement plus sécuritaire pour les enfants et beaucoup moins attirant pour d'éventuels agresseurs.
Espace propose une approche et des méthodes pédagogiques efficaces qui suscitent la participation des enfants par le biais d'ateliers interactifs, de mises en situation et d'exercices adaptés aux différents groupes d'âge.
L'efficacité des ateliers pour enfants et pour adultes a été prouvée scientifiquement, et, suite aux recherches de Martine Hébert, Ph. D., les résultats ont fait l'objet de plusieurs publications scientifiques dans des revues et lors de congrès au Québec et ailleurs.
Mme Gagnon (Francine): Alors, la mise en contexte du projet de loi n° 56. Il nous apparaît clair que ce projet de loi s'inscrit dans la continuité d'un processus amorcé en 2008 alors que le MELS a adopté son plan La violence à l'école: ça vaut le coup d'agir ensemble! Plan d'action pour prévenir et traiter la violence à l'école 2008-2011.
Lors de son lancement, ce plan d'action avait suscité l'intérêt du ROEQ et de ses membres. Enfin, on reconnaissait que la violence posait problème et que l'école avait un rôle important à jouer. Nous le trouvions intéressant et prometteur. La violence y était abordée de façon globale. La vision en était une d'accompagnement et de soutien au milieu scolaire ainsi que pour tous les enfants, victimes, témoins ou agresseurs.
Nous avions aussi certaines réserves, notamment quant au soutien financier -- qui se traduit en réalité en ressources humaines -- qui nous semblait insuffisant pour que le milieu scolaire puisse concrétiser ce plan au quotidien pour les enfants et pour qu'il puisse véritablement travailler de concert avec la communauté.
**(10 h 10)** En 2008, on parlait de prévenir et traiter la violence à l'école. En 2012, on parle de lutter contre l'intimidation et la violence, et le thème de la stratégie, c'est L'intimidation, c'est fini. Moi, j'agis.
Tout ceci n'est pas sans avoir de conséquences sur le projet de loi, et notre analyse révèle certaines incohérences, que nous allons tenter d'illustrer le plus clairement possible.
Alors, on passe à notre analyse et à nos recommandations. Définitions. Le titre du plan d'action 2008-2011 référait uniquement à la violence à l'école et non à l'intimidation et à la violence. Les définitions retrouvées sur le site du MELS sont en concordance avec cette façon de voir et celle d'Espace puisque la violence y est définie de façon globale.
L'intimidation est incluse dans la définition de la violence retrouvée dans le premier bulletin -- c'est un bulletin, c'est ça, là, qui est sur le site, en tout cas j'en ai des copies -- qui apporte aussi une précision importante. Et je cite: «On parle d'intimidation lorsque deux individus de force inégale sont impliqués et que l'un d'entre eux exerce son pouvoir sur une victime.» Fin de la citation du bulletin du MELS. Il est décevant de constater qu'en 2012 des changements importants sont apportés sans toutefois retrouver d'explications pour les justifier.
Le projet de loi et la stratégie gouvernementale sèment une certaine confusion en mettant l'intimidation et la violence sur un même pied, alors que la première n'est qu'une des manifestations possibles de la seconde. La définition retrouvée à l'article 2 du projet de loi ajoute à la confusion, la définition de l'intimidation. Alors qu'on ne retrouve pas une définition globale de la violence, celle de l'intimidation manque de clarté en omettant de référer à la notion de force inégale, pourtant essentielle pour la distinguer d'une situation de conflit et ainsi réagir de la façon la plus adéquate, selon qu'il s'agit de l'une ou de l'autre. Des définitions exactes et fidèles à la réalité sont pourtant essentielles si l'on veut mettre en place des mesures préventives et d'intervention efficaces sur le terrain.
Nos recommandations: Définir la violence et l'intimidation. Alors, principalement à l'article 2: Définir la violence dans sa globalité en s'inspirant de la définition retrouvée dans le bulletin La violence à l'école: ça vaut le coup d'agir ensemble! Toujours au même article: Revoir la définition de l'intimidation pour la situer par rapport à la violence et pour faire une distinction nette avec les situations de conflit, de façon à ce que les références soient claires quant à la façon d'intervenir la mieux adaptée à la situation.
Mme Théberge (Odette): Maintenant, nous allons parler de la place de la prévention. Le premier axe du plan d'action 2008-2011 s'intitule Prévention et traitement. Et, à l'objectif 1.1, nous retrouvons, sous la rubrique Réalisation d'interventions efficaces, en vue d'agir tôt, qu'une allocation annuelle est prévue «pour permettre aux écoles, principalement à l'éducation préscolaire et au primaire, d'élaborer des interventions efficaces en prévention et traitement de la violence».
Dans cette lignée, le bulletin produit par le MELS au printemps 2011 consacrait un numéro au développement de l'enfant en lien avec les comportements agressifs et sur l'importance de la prévention et d'agir tôt. Vous en avez des extraits intéressants dans le mémoire, des extraits du bulletin. Cette façon de voir rejoint celle d'Espace, qui prône de commencer la prévention dès le préscolaire et de poursuivre tout au long du primaire. Voilà qui explique aussi notre étonnement et notre déception face à un projet de loi qui fait si peu de place à la prévention qu'elle n'apparaît plus dans son titre.
Dans le projet de loi, la prévention est bien nommée à quelques reprises mais sans jamais donner une vision claire de ce qu'elle devrait être. Ainsi, on ne retrouve aucune indication quant à l'importance que les mesures préventives s'adressent à l'ensemble des enfants dès leur plus jeune âge ainsi qu'aux adultes d'un même milieu de vie, voire de la communauté qui l'entoure, afin de développer une vision commune. Pourtant, développer une vision et un vocabulaire communs sont des préalables essentiels à la mise en place de mesures efficaces et qui se refléteront jusque dans la classe, sur la cour d'école, dans les transports scolaires et même à la maison.
Tout aussi étonnant, l'importance de travailler sur les rapports égalitaires avec les enfants dès le préscolaire est complètement absente, tout comme celle de développer leur pouvoir d'agir en les informant, en développant leur autonomie et en suscitant la création de réseaux d'aide. C'est pourtant la base pour que la situation s'améliore un jour.
Il est désolant de constater qu'on ne retrouve rien non plus sur la pertinence de travailler de concert avec les organismes de la communauté qui ont développé une analyse et une expertise pouvant soutenir efficacement les efforts du milieu scolaire.
Enfin, la notion de prévention nous semble pervertie quand elle est associée aux enquêtes policières, comme c'est le cas à l'article 16. Il est clair pour nous que, si nous en sommes à devoir faire une enquête, c'est qu'une situation grave s'est produite et a été signalée. Nous sommes donc loin de la prévention.
Alors, nos trois recommandations pour une prévention efficace: Préciser ce que doit inclure une prévention efficace et qu'elle doit s'appliquer dès le préscolaire et tout au long du parcours scolaire, en s'adaptant aux stades de développement et à la réalité des enfants. Elle doit viser non seulement les enfants, mais aussi les parents, le personnel éducatif, le transporteur scolaire et toute la communauté qui gravite autour de ce milieu de vie. Ce dernier élément est essentiel pour développer une vision commune et une cohérence dans les mesures qui seront mises en place ainsi que dans les façons de prévenir la violence ou d'y réagir;
Deuxièmement, assurer le soutien financier adéquat permettant la mise en place de mesures préventives et le recours aux ressources de la communauté pouvant soutenir les efforts du milieu scolaire;
Et, troisièmement, retirer, à l'article 16, la référence à la prévention en lien avec les enquêtes policières.
Mme Gagnon (Francine): Alors, mobiliser, soutenir ou punir? Même si la stratégie gouvernementale parle de mobilisation de la société québécoise, dans les faits, le projet de loi nous semble miser bien peu sur la mobilisation des communautés et davantage sur la punition. Par exemple, à l'article 16, le fait de mobiliser et de travailler de concert avec des organismes extérieurs au milieu scolaire sont préconisés uniquement une fois que des actes d'intimidation ou de violence ont eu lieu.
Notons également qu'aucune référence claire n'est faite quant au recours à l'expertise des organismes communautaires autonomes, dont l'apport est pourtant reconnu, notamment dans la Politique gouvernementale sur l'action communautaire.
L'article 4 établit à qui doivent s'adresser les mesures d'aide, en y incluant les enfants qui ont commis des actes violents, ce qui est de la première importance. Par contre, l'article 17 reste flou, en référant uniquement à l'élève, ce qui, dans un processus de traitement de plainte, peut laisser penser que cette mesure s'adresse uniquement à l'élève qui a été victime, sans inclure nécessairement les enfants qui ont posé les gestes violents et les témoins, qui devraient aussi avoir accès à ces mesures.
De plus, nous retrouvons plusieurs références à des pénalités, que ce soit pour les instances scolaires ou, pire, pour les enfants eux-mêmes quand ils sont ceux qui en intimident d'autres, comme par exemple à l'article 14. Cela nous semble un changement de ton très clair au regard du plan d'action 2008-2011. Ici, une vision légale prend le pas sur une vision axée davantage sur l'action sociale collective visant à prévenir, soutenir, outiller.
Soyons clairs, il ne saurait être question de tolérer ou d'excuser des comportements violents. Cependant, en quoi suspendre ou expulser un enfant l'aidera-t-il à adopter des comportements plus adéquats? Ces enfants auront-ils accès à des ressources pouvant réellement les aider ou seront-ils simplement laissés à eux-mêmes, stigmatisés, étiquetés et n'ayant finalement plus rien à perdre? Suspendre ou exclure un enfant, n'est-ce pas un constat d'échec quant aux mesures mises en place pour éviter d'en arriver là?
Enfin, la question des sanctions administratives pécuniaires prévues dans le projet nous interroge aussi. Sont-elles un moyen vraiment efficace? Remplaceront-elles le soutien dont certains milieux pourraient avoir besoin? Les enfants paieront-ils la note en voyant les services aux élèves réduits encore davantage? En lien avec ce qui précède, à la page 11 de notre mémoire, nous avons six recommandations misant sur le soutien plutôt que sur la punition.
Mme Théberge (Odette): Nous avons d'autres questionnements. Le projet de loi a le mérite de bien préciser les devoirs et les responsabilités des acteurs à tous les échelons du système scolaire. Il manque cependant de précision quant aux conditions essentielles à l'exercice de ces devoirs et responsabilités. Toutes ces personnes seront-elles outillées et formées adéquatement pour pouvoir efficacement jouer le rôle qu'on leur attribue?
Il est intéressant que le projet de loi oblige chaque école à se doter de procédures et de mesures à suivre qui soient claires et systématiques. Cependant, y a-t-il risque que tout cela devienne mécanique et bureaucratique au détriment des enfants qui ont besoin d'aide, qu'ils soient victimes, témoins ou agresseurs?
**(10 h 20)**Mme Gagnon (Francine): En conclusion, rappelons aussi que, sans les ressources humaines et financières essentielles à son déploiement, cette stratégie gouvernementale aura bien peu de retombées concrètes au quotidien pour les enfants. C'est pourtant ce que le projet de loi n° 56 vise, lorsqu'il précise -- je cite -- qu'«une commission scolaire doit veiller à ce que chacune de ses écoles offre un milieu d'apprentissage sain et sécuritaire de manière à ce que tout élève qui la fréquente puisse y développer son plein potentiel, à l'abri de toute forme d'intimidation ou de violence».
C'est aussi ce que nous visons, car depuis longtemps c'est à cela que nous travaillons avec les écoles qui ont déjà fait une priorité de la prévention de la violence, qu'elle soit verbale, physique, psychologique, sexuelle, qu'il s'agisse de négligence ou d'intimidation et qu'elle soit le fait d'un adulte ou d'un autre enfant.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup pour nous avoir donné votre point de vue. Nous allons débuter immédiatement la période d'échange avec le parti ministériel. Et je vais céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à mes collègues membres de cette commission. Je vous souhaite une bonne journée de travaux. Bienvenue, mesdames. Merci pour votre mémoire.
J'ai une première question concernant la définition de l'intimidation. J'ai compris, par l'intervention de plusieurs intervenants que nous avons reçus, qu'il y avait un rappel, on nous faisait le rappel que la définition de l'intimidation devait, entre autres, comprendre la notion de répétition, répétition de l'acte, pour que ce soit considéré comme de l'intimidation par rapport à la notion de conflit. Mais vous, vous le commentez plus aussi sous la notion du rapport de pouvoir, du rapport de force, puis je voudrais votre éclairage de façon un peu plus spécifique sur cette dimension-là.
Vous savez que malheureusement l'actualité, au cours des dernières années, a parfois été marquée par des histoires qu'on a qualifiées d'intimidation, qui, je pense, en termes de perception populaire, ont été identifiées, reconnues comme des épisodes d'intimidation et qui prenaient la forme, par exemple, de... Je vais, pour le moment, parler d'histoires entre deux jeunes filles qui se sont... Ça a commencé par un conflit, ensuite propos tenus via des médias sociaux. Mais, quand je regarde ce type de situation, je me dis: Est-ce qu'avec la définition que vous nous proposez, qui implique la notion, je dirais, de déséquilibre dans une relation de pouvoir, est-ce que vous trouvez que ce genre de situation, avec la définition que vous proposez, aurait été reconnue comme un épisode d'intimidation commandant les interventions prescrites par la loi de la part du directeur de l'école ou du personnel de l'école? Donc, c'est sur la dimension du déséquilibre entre le pouvoir entre deux personnes que je veux vous entendre. Quand, notamment, je suis dans une situation qui peut survenir entre deux élèves du même âge, dans une même école, dans une même classe, comment on doit interpréter la question du déséquilibre de pouvoir pour qualifier ça d'un geste d'intimidation?
Mme Théberge (Odette): ...commencer. Alors, bien, en tout cas, dans ce que vous nommez, je pense que, si j'ai bien compris votre question, vous illustrez une forme de continuum qu'il pourrait y avoir, quelque chose qui débute par un simple conflit entre deux élèves et qui, par la répétition, prendrait une envergure différente. En tous cas, moi, la réponse qui me vient à cette question-là, c'est que ça nous montre justement l'importance d'avoir un lien avec ces jeunes-là pour pouvoir intervenir de la bonne façon au moment où la situation... intervenir de la bonne façon quand c'est ce qui nous est amené et où on est rendus, là, dans le continuum, comprenez-vous? Parce que là je pense que, dans ce que vous illustrez... Moi, je le vois comme un continuum, et là on peut imaginer toutes sortes de choses qui font que ça devient un déséquilibre, le pouvoir. Quelque chose qui a commencé par une simple chicane, un conflit peut prendre une ampleur, quand on imagine que d'autres personnes se mettent de la partie, que les médias sociaux peuvent aussi être un moyen d'en mettre un petit peu plus.
Donc, c'est là où je trouve qu'il y a des subtilités, où ce n'est pas facile de trancher au couteau. Mais, quand ça devient de l'intimidation, là, je veux dire, je pense que ça, en tout cas, c'est difficile à remettre en question. C'est qu'il y a ce débalancement de pouvoir là qui est illustré par différentes... La force est inégale, là. Quand c'est répétitif, quand il y a plusieurs personnes d'impliquées, quand il y a différents moyens qui sont utilisés... Ça dépend aussi comment la personne visée se sent par rapport à cette situation-là. Donc, il y a vraiment une analyse de la situation à faire à chaque fois. Et c'est pour ça qu'il y a des erreurs d'interprétation aussi, parfois. Parce qu'on va parler d'intimidation dans une situation où, si les adultes autour interviennent rapidement, ça va se régler facilement, et il n'y aura pas eu un impact si grand.
Mme Beauchamp: Vous avez raison de dire, là: Dans la vraie vie on est interpellés par le personnel de l'école, qui nous dit: Il faut nous aider à différencier ce qui est de la notion d'un conflit ou d'une malheureuse bagarre entre enfants de deuxième année -- c'est malheureux, c'est une bagarre de cour d'école malheureuse, mais c'est une bagarre momentanée, je vais dire ça comme ça -- de la notion d'intimidation. J'ai besoin de votre éclairage sur... Est-ce qu'une définition doit comprendre la notion de répétition? Ça, je pense qu'il y a, il se dégage un consensus autour de ça. C'est le fait qu'on parle d'intimidation à l'école où je me questionne encore sur la notion de déséquilibre de pouvoir. Je veux savoir, de votre part, si vous considérez que ça prend et la notion de répétition et la notion de déséquilibre de pouvoir, ou si c'est un ou l'autre. Je reprends l'exemple typique, que l'on connaît, d'intimidation se produisant... je dis «d'intimidation», en tout cas d'action posée entre deux élèves du même âge -- prenons cet exemple-là -- même classe, même âge, même milieu socioéconomique. Prenons l'exemple ultime, là, exagéré, même gabarit physique, tout ça, là. Et donc, de par les caractéristiques propres aux deux personnes, on n'a pas l'impression qu'il y a un déséquilibre de pouvoir entre les deux personnes et pourtant on pourrait en arriver à qualifier des gestes d'intimidation. Donc, est-ce que ça me prend les deux? Est-ce que je dois dire: Ça prend et de la répétition et un déséquilibre de pouvoir ou si c'est l'un ou l'autre dans le contexte de l'intimidation à l'école?
Mme Gagnon (Francine): Bien, en tout cas, moi, je regarde les petits bulletins, là, qui sont vraiment intéressants, qui sont sur le site du ministère, et, dans la définition qui est là, à laquelle on réfère, c'est déjà entendu que l'idée d'inégalité des forces entre les parties... Puis, quand il y a intimidation, c'est rare que ça va se faire... Non, c'est vrai que ça peut arriver, mais souvent, en tout cas surtout avec les enfants, il va y avoir l'idée d'avoir des témoins qui viennent donner de la force à la personne qui intimide l'autre. Donc, la victime se retrouve plus isolée, bien souvent, en situation vraiment d'être en dessous. Comme vous disiez, là, ce n'est pas deux enfants de même force, là, qui sont choqués puis qui se bataillent, qui vont y aller à coups de poing. Ça peut être très violent, très raide, mais on ne parle pas d'intimidation, là. C'est comme... Ils sont de forces égales, un peu comme on a vu certains, au niveau fédéral, en fin de semaine. Bon, ils se battaient. C'était comme... Bon, il n'y a pas d'intimidation là-dedans. Mais je pense que l'idée de l'inégalité des forces, ça revient à quelques reprises dans les bulletins, je pense que c'est généralement admis. C'est une notion qui est importante, qui n'est peut-être pas toujours facile à déceler, mais c'est important de faire la différence, en tout cas le plus possible. Mais ça peut arriver qu'on se trompe puis ça se peut qu'à un moment donné -- un peu comme Odette disait, c'est un continuum -- qu'une situation qu'on va identifier de telle façon, ça va évoluer puis, woups, ce n'est plus tout à fait la même chose. C'est pour ça qu'il faut garder l'oeil ouvert et y aller où sont rendus les enfants qui sont aux prises avec la situation.
**(10 h 30)**Mme Beauchamp: Merci. Je voudrais maintenant aborder vos commentaires concernant l'article 16, qui concerne la signature d'ententes entre des commissions scolaires et les différents corps de police desservant leurs territoires. Vous nous demandez, en recommandation, en tout cas en page 9 de votre mémoire, de retirer, à l'article 16, la référence à la prévention en lien avec les enquêtes policières. Je voudrais aller plus à fond pour bien comprendre votre commentaire.
Je vais commencer en relisant l'article de loi pour voir si on se comprend bien sur l'intention du législateur. Ça dit: «Une commission scolaire et l'autorité de qui relève chacun des corps [policiers] desservant son territoire doivent conclure une entente concernant les modalités d'intervention des membres du corps de police en cas d'urgence ou lorsqu'un acte d'intimidation ou de violence leur est signalé et visant à mettre en place un mode de collaboration à des fins de prévention et d'enquêtes.» Je prends juste le temps de vous dire que, quand moi, je lis cet article-là, je ne l'interprète pas en disant qu'on dit qu'il n'y a de la prévention que dans un contexte d'enquête. Vous nous dites: «...la référence à la prévention en lien avec les enquêtes policières.» Si je lis bien l'article, l'article définit ce que doit comprendre l'entente, donc intervention en cas d'urgence, intervention lorsqu'il y a un acte d'intimidation ou de violence. Et ensuite on dit: L'accord, l'entente doit viser «à mettre en place un mode de collaboration à des fins de prévention et d'enquêtes». Et le «et» ne vient pas dire que c'est inclus. Le «et», c'est deux objets différents. C'est des modes de collaboration en matière de prévention et en matière d'enquêtes. C'est mon interprétation de l'article.
Je veux vous entendre plus là-dessus, parce qu'au moment où je vous parle, dans plusieurs écoles du Québec, il y a des corps policiers qui font des interventions de prévention, notamment, par exemple, par rapport à la cyberintimidation. Ils sont très actifs. Moi, je veux le souligner, je pense qu'il y a une très saine collaboration, à mes yeux, entre, par exemple, la Sûreté du Québec et plusieurs commissions scolaires, et avec franchement des contenus extrêmement précis, très intéressants sur la... Je donne juste l'exemple de la cyberintimidation, mais il y a d'autres contenus de prévention avec lesquels on peut faire des liens par rapport à des contextes d'intimidation. On pourrait même, par exemple, faire des liens entre les notions de toxicomanie, d'usage de drogues et des contextes d'intimidation. Les services policiers font plusieurs interventions dans les écoles en matière de prévention.
Donc, j'étais étonnée de lire votre recommandation parce que moi, je ne veux justement pas qu'on pense que les corps policiers québécois... que leurs actions ne concernent... ou sont limitées uniquement à des actions d'enquête et de répression, alors que je pense qu'on doit respecter le fait que les corps policiers sont déjà actifs en matière de prévention et sont utiles en matière de prévention. Donc, je me demandais si votre commentaire était sur la base d'une lecture de l'article où, je me dis... On n'est pas en train de dire que c'est de la prévention liée à des enquêtes. Et je veux savoir si on se comprend bien.
Mme Gagnon (Francine): Oui. Alors, peut-être qu'on ne se comprend pas bien, justement, parce que nous, on a vraiment... Quand on lit le début, c'est vraiment: «...conclure une entente concernant les modalités d'intervention des membres du corps de police en cas d'urgence ou lorsqu'un acte d'intimidation ou de violence leur est signalé...» Alors, nous autres, quand on est rendus là, on dit: O.K., là, on n'est plus en prévention, O.K.? Alors, on n'est pas en train de dire que les policiers ne peuvent pas ou ne devraient pas faire de prévention, mais, dans la façon ici où c'est libellé, moi, quand je le lis, c'est comme vraiment -- bien, je dis «moi», là, mais on était plusieurs à le lire puis à analyser la chose -- c'est dans un contexte où il y a déjà eu... on est déjà dans une situation d'urgence où il y a eu intimidation ou d'autres situations de violence, et donc, c'est ça, ça leur a été signalé et ça vise «à mettre en place un mode de collaboration à des fins de prévention et d'enquêtes». Nous autres, je pense que c'est vraiment le fait que c'est dans un contexte après qu'il y a eu quelque chose. Donc, ce n'est pas en lien avec la prévention en général mais vraiment ici.
Mme Beauchamp: Mais, si vous permettez, je pense sincèrement qu'on ne doit pas lire l'article comme vous le lisez. Ce n'est pas: C'est des collaborations visant leur intervention en cas d'enquête, puis après ça découlent de ça des collaborations «à des fins de prévention et d'enquêtes». L'article doit bien être lu. C'est: ...doit signer des ententes, puis là «concernant les modalités d'intervention», et là en cas de ci, de ça, là, de... et ensuite le «et». Ça relève toujours de l'entente: ...doit signer des ententes concernant ceci «et visant à mettre en place un mode de collaboration à des fins de prévention et d'enquêtes». Il ne faut pas le lire comme si je viens d'installer un contexte, et le «et» ensuite n'amène des interventions que s'il y a eu intervention du corps policier parce qu'il y aurait eu un geste grave posé. Ça décrit qu'est-ce que doit comprendre une entente. Ça fait que l'entente doit comprendre les modalités d'intervention des corps policiers et l'entente doit viser à mettre en place des collaborations à fins de prévention et d'enquêtes. Le «et» ici, là, il est important. Il fait le lien entre... C'est une entente concernant ceci et visant cela. Je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire.
Mme Gagnon (Francine): Oui. Oui, je comprends, mais...
Mme Beauchamp: Et donc c'est important pour moi qu'on se comprenne bien sur l'importance ici du mot «et». Ça arrive, quand on étudie une loi, qu'on dise -- le mot «et» ici est important: C'est concernant ceci et visant cela.
Et, dans le fond, je voudrais votre commentaire général maintenant, selon votre expérience, sur comment on doit considérer le rôle des corps policiers en matière de prévention?
Mme Théberge (Odette): Bien, moi, je poursuivrais peut-être, si tu me permets, là. Je ne voudrais pas insister trop longtemps sur la formulation de l'article, mais je pense qu'on aurait pu aussi... Là, ici, on a recommandé de le retirer de l'article 16, mais on aurait pu, à la limite, suggérer d'en faire un article séparé au niveau de mettre en place des ententes qui comprennent de la prévention, bon un mode de la collaboration et de la prévention. Donc, ça m'amène à dire que je pense que... Moi, je ne suis pas une spécialiste, là. On collabore avec des policiers sur des tables de concertation à l'occasion, mais, je veux dire, je ne me sens pas la compétence pour dire ce qu'ils doivent faire ou ne pas faire. Mais en tout cas, jusqu'à maintenant, je pense que les policiers font un bout de travail qui est intéressant et qui peut être complémentaire à un programme de prévention, par exemple comme le nôtre, puis leur impact est très différent. Donc, c'est ça. Donc, je reviens, là, je fais vraiment la boucle avec l'article pour dire qu'il pourrait y avoir un élément de l'article... Parce qu'ici, là, il est vraiment en lien avec «lorsqu'un acte d'intimidation ou de violence leur est signalé». C'est ça, dans le fond, qui, pour nous, posait problème, alors que, s'il y avait préalablement, indépendamment de tout signalement d'acte d'intimidation, des ententes entre la police et les milieux scolaires pour collaboration et prévention... je pense que c'est intéressant.
Mme Beauchamp: Donc, je veux juste être sûre qu'on se comprenne bien, parce qu'à la lecture de votre mémoire la façon dont il est rédigé est que vous recommandiez de retirer «la référence à la prévention en lien avec les enquêtes policières». Vous le rédigez ainsi. La lecture de ça est un jugement assez sévère où ça peut donner la perception, en tout cas une interprétation possible, que vous demandez qu'on enlève la référence à de la prévention en lien avec les actions des corps policiers.
Mme Théberge (Odette): Non.
Mme Beauchamp: Ce n'était pas votre intention, quand vous nous écrivez noir sur blanc: «Retirer [...] la référence à la prévention...»? Ce n'est pas un jugement que vous portez à dire que les corps policiers ne devraient pas être liés à des notions de prévention?
Mme Gagnon (Francine): Non, absolument pas.
Mme Théberge (Odette): Non, pas du tout. C'est plutôt en lien avec «enquêtes».
Mme Beauchamp: Merci. Deux éléments sur lesquels maintenant je veux vous entretenir, c'est bien sûr votre mémoire. Je dirais que le grand thème, c'est l'importance à accorder à la prévention. Je voudrais que vous commentiez le fait... Parce que je trouve, et c'est votre droit, là, je trouvais le jugement un peu sévère dans le contexte suivant. Vous avez, à l'article 4 du projet de loi, le fait qu'on dit, qu'on prescrit que chaque école -- c'est quelque chose, quand même -- chaque école du Québec devra avoir son plan de lutte contre l'intimidation. Et la loi -- et c'est particulier, cela -- la loi définit même ce que doit contenir un plan dans chaque école. D'ailleurs, il y en a qui nous ont dit: Vous allez trop loin. Laissez à chaque équipe-école définir ce qu'elle devrait mettre dans son plan. Vous êtes trop précis. C'est un bon sujet de discussion. Mais, au moment où je vous parle, dans la loi, nous définissons ce que doit comprendre le plan de lutte. Et le deuxième item...
Le premier item, c'est: Le plan doit comprendre une analyse de la situation au regard des actes d'intimidation et de violence. Ça, c'est la demande qu'on nous fait, qu'on soit capables de donner un portrait qualitatif aussi. Est-ce que dans l'école les actes se produisent surtout dans la cour d'école? Est-ce que c'est dans les vestiaires? Quel type... L'importance de la cyberintimidation. C'est que chaque école se donne son portrait. Et tout de suite le deuxième item, c'est que le plan doit comprendre les mesures de prévention visant à contrer toute forme d'intimidation et de violence. Donc, il y a une reconnaissance explicite, de la part du législateur, de la place que doit prendre la prévention dans chaque plan, dans chaque école.
Je veux mettre ça en lumière en disant que par la suite, la loi, son objectif, c'est notamment, après ça, d'instaurer un régime d'obligation d'intervention, avec le lot d'actions qu'on s'attend de chaque intervenant et des conséquences possibles, là, du côté des commissions scolaires. Mais la vision de la loi n'est pas de mettre dans une loi ce que doit prendre une grande stratégie québécoise de lutte contre l'intimidation à l'école. La loi, elle est quand même là -- parce que c'est une loi, elle doit perdurer dans le temps -- elle est là pour obliger, l'obligation d'intervention, de poser certains gestes. Ça fait que je suis sensible, là -- j'ai un passé dans le milieu communautaire, etc. -- je suis sensible à cette notion de prévention. Je me pose juste la question: Est-ce que le fait que nous reconnaissons explicitement que chaque plan doit comprendre les mesures de prévention propres à chaque école et qu'ensuite la loi définit plutôt le régime d'obligation d'intervention, est-ce qu'on n'a pas là le bon contexte de travail, en se disant que plusieurs autres éléments à nommer autour de la prévention doivent plus s'incarner dans le cadre d'une stratégie, plan d'action, stratégie globale de la société québécoise? Ma question relève un peu à dire: Qu'est-ce qui appartient à une loi...
**(10 h 40)**Le Président (M. Marsan): Oui. Alors, le temps...
Mme Beauchamp: ...et qu'est-ce qui appartient à une stratégie par rapport à la prévention?
Le Président (M. Marsan): Le temps est presque écoulé. Je vais vous demander de répondre très rapidement, s'il vous plaît.
Mme Gagnon (Francine): Alors, c'est ça, on l'avait bien vu, à l'article 4, que c'est inscrit là. Mais en même temps, quand on regarde la liste de ce que doit comprendre le plan d'une école, il y a un item qui est la prévention, sur une liste de huit, puis il y en a six qui portent sur ce qui doit être fait une fois qu'un acte d'intimidation ou de violence s'est produit. Alors, en même temps que tout ça est quand même bien balisé, sur la prévention il n'y a pas tant que ça qui est donné. Alors, nous autres, notre interrogation, c'est ça: Jusqu'à quel point c'est suffisamment clair, pour le milieu scolaire, que, oui, ça doit être fait dès... et pas rendu au secondaire, là? Ce n'est plus le temps quand on est face à quelqu'un qui fait de l'intimidation depuis qu'il est à la maternelle. Il faut que ça soit fait tôt. Alors, c'est ça, on trouvait que ce n'est pas assez précis comparativement à d'autres précisions qui sont apportées par la suite.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup. Ceci termine le premier échange avec la partie ministérielle. Nous poursuivons avec l'opposition officielle. Et je vais céder la parole à M. le député de Jonquière, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire. M. le député.
M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je veux saluer les collègues du gouvernement, et ma collègue de Marguerite-D'Youville, et tout le personnel qui les accompagne.
Alors, bienvenue à cette commission parlementaire. C'est un plaisir de vous accueillir ici, à l'Assemblée nationale, et écouter votre présentation.
Écoutez, moi, en tout cas, ce sur quoi je veux vous entendre, dans un premier temps, c'est sur la définition. Je voudrais revenir un peu sur la définition que vous proposez. Entre autres, à la page 7 de votre mémoire, vous nous suggérez de «revoir la définition de l'intimidation». Bien, d'abord, sur la question de la violence, j'ai très bien compris votre propos. Et je pense que vous avez suivi un peu les travaux de la commission avant de venir ici. Vous avez sûrement constaté que d'autres intervenants proposent également d'inclure une définition de la violence, parce qu'effectivement, même par rapport au titre du projet de loi, qui vise à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école, on ne retrouve pas de définition du mot «violence». Alors, déjà là, c'est assez préoccupant.
Mais, sur le volet, comme tel, de l'intimidation, je voudrais vous entendre sur deux choses. D'abord, selon votre expérience et selon les recherches que vous avez faites, et vous vous référez quand même à des études assez importantes, pouvez-vous bien nous expliquer les nuances que vous faites entre «conflit» et «intimidation», d'une part? Et, deuxièmement, nous avons eu des propositions de modification des définitions, dont certaines nous suggèrent d'inclure des motifs reliés à l'intimidation, un peu faire du copier-coller avec les définitions de discrimination au sens de la Charte des droits et libertés, par exemple, qui sont reliées très clairement à des motifs comme la race, l'origine ethnique, l'orientation sexuelle, la grossesse, etc. Alors, est-ce que vous seriez d'avis qu'on devrait avoir une définition un petit peu plus inclusive, avec des motifs précis, ou une définition plus large?
Mme Théberge (Odette): Alors, pour commencer, avec la distinction entre le conflit et le rapport de force, bien je pense que... En tout cas, là, je me dis -- est-ce que c'est trop simple? -- je me dis: Quand il y a conflit, il n'y a pas de victime. Les deux protagonistes, disons, sont de force égale, pas nécessairement de la même façon, mais vont... Il n'y a pas de victime, il n'y a pas d'agresseur. Un conflit, on en vit régulièrement à chaque jour et on n'en est pas victime pour autant. Et généralement, aussi, un simple petit... Bien, ça peut se régler entre enfants, un conflit peut se régler par eux-mêmes. Parfois, l'intervention des adultes peut aider pour ne pas que ça dégénère. Mais, bon, c'est la question de la force égale, dans le fond. Nous, on en revient à la... La différence avec l'intimidation, c'est le rapport de pouvoir. Donc, il y a quelqu'un qui vraiment... L'image que j'ai -- c'est vraiment une image, là -- il y a quelqu'un qui est vraiment écrasé par la force de l'autre ou des autres, qui finalement n'arrive pas à s'en sortir seul. Je dirais que ça illustre assez bien la différence. Elle n'est pas si compliquée en définition, mais dans la réalité, par contre, là, ce n'est pas si évident de faire la distinction et ça prend vraiment... Je reviens sur la question de la relation avec les jeunes, pour discuter et savoir ce qui s'est passé et comment chaque partie se sent. C'est là où c'est plus compliqué.
Mme Gagnon (Francine): Alors, sur la question des motifs, là, je trouverais ça plus facile s'il y avait déjà une suggestion de comment ils le définissent, mais, j'imagine, si on fait une liste... Le risque, avec les listes de motifs, c'est d'en oublier, ou qu'éventuellement il y en ait auxquels on n'ait pas pensé, ou qu'il y ait des nouvelles formes. Alors, je ne sais pas, je trouverais ça plus facile si on avait vraiment quelque chose au départ: O.K., on suggère cette définition-là, puis là dire: O.K., oui, ça marche à cause de ça, ou non, là. Mais, c'est ça, quand on commence à vouloir énumérer, si on a oublié justement... C'est ce que je vois, là, comme possibilité.
M. Gaudreault: Donc, je comprends que vous souhaitez une définition qui est davantage reliée à -- comment je pourrais dire? -- à la situation de domination, de rapport de force comme tel, plutôt qu'à des motifs plus précis, là. Donc, pour vous, ce qui fait vraiment... qui est vraiment un signe d'intimidation, ce que je comprends, comme vous disiez, madame, c'est vraiment l'aspect de rapport de force déséquilibré qui est là. Alors, il faut faire ressortir ça. Puis j'ajouterais, comme on l'a déjà mentionné, l'idée de récurrence aussi, là, ou de répétition, quand même, des actes.
Mais en même temps, et là je poursuis sur ce que vous nous avez dit, pour bien nuancer ou pour bien distinguer, dans une cour d'école, ce qui relève du conflit de ce qui relève de l'intimidation, ça prend un jugement, ça prend une discrétion de la part de l'intervenant auprès du... une discrétion au sens de pouvoir discrétionnaire, là, d'évaluer, au sens... de la part, c'est-à-dire, des divers intervenants en milieu scolaire. Alors, ça, ça m'amène à vous questionner sur le fameux rôle du directeur d'école dans... directeur ou directrice d'établissement. Dans le projet de loi, à l'article 11, on parle du rôle du directeur de l'école qui «voit à la mise en oeuvre du plan de lutte contre l'intimidation». On lui demande d'agir également quand il y a une plainte. On a eu ici plusieurs représentations de la part des associations de directeurs d'école, qui plaident pour leur laisser une marge de manoeuvre, sinon... Bon, c'est l'oeuf ou la poule, là. Est-ce qu'on doit leur laisser une plus grande marge de manoeuvre ou est-ce qu'on doit bien encadrer leur pouvoir d'intervention, quitte à alourdir aussi leur tâche, là? Je sais que vous avez un propos aussi sur la bureaucratie.
J'aimerais, selon votre expérience, que vous nous expliquiez comment, selon vous, on doit accorder une marge de manoeuvre ou non, jusqu'à quel point on doit aller, dans la marge de manoeuvre des différents intervenants dans le milieu de l'éducation et en particulier les directeurs d'établissement.
**(10 h 50)**Mme Gagnon (Francine): C'est une question délicate, je trouve, parce qu'il y a déjà de l'excellent travail qui se fait en milieu scolaire, hein, il y a déjà des écoles qui ont bien balisé tout ça et qui font des interventions extrêmement intéressantes. Il y a des directions d'école qui sont très proches des enfants -- là, je veux vous rappeler que nous, on est au niveau primaire, hein, on n'est pas au niveau secondaire, donc je vais parler plus pour ce niveau-là -- alors, qui sont proches des enfants. Par contre, il y a des directions d'école qui couvrent plus qu'une école. Moi, je me suis fait dire: Écoute, on a été dans l'école pendant une semaine puis on n'a pas vu le directeur de l'école du tout. Il n'était pas là. Alors, jusqu'à quel point, effectivement, il aurait peut-être besoin d'une marge de manoeuvre pour pouvoir adapter à la situation qui est la sienne...
Maintenant, de quel ordre, là, je trouve ça difficile. Je pense que les directions d'école vous ont sûrement donné des indications très claires. Mais il y a aussi l'idée, là, d'avoir une personne qui coordonne, qui serait... qui coordonnerait, là, tout ce qui se fait par rapport à l'intimidation et à la violence dans chaque école. Alors, il va falloir qu'ils se parlent, eux autres aussi, pour voir qui fait quoi exactement. Mais je pense que la notion de marge de manoeuvre est importante, puis c'est ça. Mais il y aura toujours des gens, c'est ça, il y aura toujours des gens qui vont être plus à l'aise avec cette problématique-là, qui vont presque naturellement faire la bonne chose au bon moment, et il y aura toujours des personnes qui vont l'être moins, qui... Et ce que ça prend, c'est de l'information, de la formation. Un projet de loi, ça vient encadrer, ça vient baliser, mais ça ne fait pas tout non plus, là, je pense.
M. Gaudreault: Merci. Merci, madame. Dans le même sens, mais chez d'autres acteurs, les parents, le rôle des parents est fondamental dans ce projet de loi, puis là encore on a eu beaucoup de représentations. Alors, moi, j'aimerais vous entendre sur votre perception du rôle des parents. Et, encore une fois dans l'article 11, il y a une obligation, du directeur d'école, d'informer les parents. Est-ce que, selon votre expérience, c'est immuable, il faut absolument informer les parents? Si oui, comment? Sinon, pourquoi? Dans quelles circonstances? Comment on doit bien baliser cette information des parents? Puis je pousse un petit peu plus loin en disant aussi, en matière de prévention -- parce que vous avez un discours très fort là-dessus, et je le salue, et j'en suis, pour la prévention: Comment on peut également, du côté des parents, agir en matière de prévention?
Mme Théberge (Odette): Bien, d'abord, je veux vous dire qu'on a entendu certains intervenants qui parlaient de la délicate question d'appeler automatiquement les parents, parce que parfois il y a des parents qui peuvent apprendre des nouvelles qui ne font pas leur affaire et qui pourraient, au lieu d'être aidants, mettre, par exemple, un jeune à la porte, là. Mais là on va revenir à notre créneau, nous, qui est les enfants de trois à 12 ans, où on dirait que la grosse logique voudrait dire: Bien oui, il faut informer les parents tout de suite. Mais ce n'est pas le cas. Nous, dans notre intervention, quand on rencontre des enfants... Parce que, quand on fait des ateliers prévention, il y a des rencontres individuelles qui sont offertes aux enfants qui le désirent, après les ateliers, et on va toujours vérifier, et c'est ça que je recommanderais, on va discuter avec l'enfant qui nous dévoile une situation. Par exemple, qu'est-ce qui a été fait? Qu'est-ce que tu as fait? Qu'est-ce que je peux faire pour t'aider? Et c'est à ce moment-là qu'on vérifie avec l'enfant si c'est une bonne idée d'appeler à la maison. Ce n'est pas toujours une bonne idée. Donc là, la marge de manoeuvre, elle est vraiment très importante pour les plus jeunes aussi, pour les plus jeunes aussi.
Il me semble qu'il y avait d'autre chose au niveau de... Bien, enfin... Bien, c'est ça, c'est l'idée générale. Je pense qu'il faut vraiment prendre le temps. Ça revient encore à prendre le temps de discuter avec les enfants pour savoir ce qui s'est passé, savoir ce qu'on doit faire et qu'est-ce qu'on ne doit pas faire pour aider la situation, dans l'objectif d'aider l'enfant.
M. Gaudreault: Je comprends que... Là, on reconnaît votre option préférentielle, je dirais, à l'égard du jugement des enfants eux-mêmes, quand je vois dans votre mémoire... quand vous décrivez votre organisme et vous dites qu'«en général les enfants ont le potentiel pour résoudre eux-mêmes -- au fond -- des difficultés». C'est un acte de confiance à l'égard des enfants comme êtres humains, comme ils sont, et intelligents, tout à fait. Et vous dites: Bien, il faut d'abord utiliser cette façon-là ou cette ressource-là qui est dans l'enfant lui-même pour chercher à résoudre les conflits et éventuellement les problèmes d'intimidation. Mais vous comprenez que c'est très, très délicat, là. Moi, je ne pense pas qu'il faut que les parents soient tenus, dans certains cas, toujours dans l'ignorance de la situation. Moi, je cherche plutôt à trouver une voie de passage pour arriver à les informer, sans pour autant nuire à l'enfant, évidemment. Alors, c'est là, là, qu'il y a une nuance. Mais jusqu'où on doit aller, là-dedans, dans la définition d'un projet de loi, là?
Une voix: ...parler.
Mme Théberge (Odette): Je voudrais juste... je voudrais juste rajouter, suite à ce que...
M. Gaudreault: Gérez vos conflits entre vous.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Théberge (Odette): Oui, on a l'habitude. C'est ça, c'est parce que vous avez mentionné, là, je comprends, que, oui, notre approche nous fait voir les enfants comme une ressource, tout ça, mais ce n'est pas seulement ça. C'est aussi qu'on ne veut pas que l'enfant revive un abus de pouvoir. C'est très important dans la façon d'intervenir auprès de l'enfant. C'est de ne pas lui faire revivre: Moi, je suis l'adulte, je vais tout régler. Indépendamment de ce que tu ressens, de ce que tu vis, à limite, je dois faire ça. Nous, on est confrontés à ce «je dois faire ça», quand on arrive avec une situation que l'on doit signaler à la protection de la jeunesse, où là, bien, on va le mentionner habituellement, en tout cas, sauf exception, on va le mentionner à l'enfant, là, à moins que ça le mette en danger, qu'il va y avoir un signalement qui va être fait, parce que la loi nous oblige à le faire, justement, où là on entre dans les situations où parfois on est obligés de le faire et... Bien, c'est ça. Ce que je voulais dire, c'est que ce n'est pas seulement l'enfant comme ressource, c'est l'enfant comme personne intègre et à laquelle... la personne, oui, à laquelle on ne veut pas faire revivre un abus de pouvoir de la part de soit... Bien, en tout cas, j'allais dire «d'un autre adulte ou d'un enfant», là, mais là on est un adulte, dans ce cas-ci.
M. Gaudreault: Il me reste quatre minutes, puis j'ai une question que je veux vous poser. Après ça, je laisse la parole à ma collègue de Marguerite-D'Youville. Rapidement, on a eu des propositions, là... Parce que vous faites beaucoup référence aux ressources dans les milieux. On a eu des propositions de carrément ajouter une disposition dans la loi pour allouer aux écoles les sommes nécessaires pour lutter contre l'intimidation et évidemment travailler en prévention. Seriez-vous d'accord à ce qu'on soit aussi actif que ça dans la loi? Et à quoi devraient être dédiées ces ressources-là? Alors, en deux secondes, s'il vous plaît.
Mme Gagnon (Francine): Bien, je pense que les ressources... En tout cas, jusqu'à quel point il faut que ça soit aussi ciblé que ça, il y a plusieurs années, là, il y avait beaucoup plus de ressources en milieu scolaire, des psychologues, travailleurs sociaux qui étaient sur place et qui étaient là pour les enfants, peu importe c'était quoi, le besoin de l'enfant. Est-ce qu'on a besoin de cibler tellement tout ça ou est-ce que, le fait de ramener des ressources suffisantes en milieu scolaire, on ne réglerait pas plusieurs problèmes à la base?
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Marguerite-D'Youville.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Oui. Il reste un peu de temps. Merci, madame, de votre contribution. Moi, je vais revenir sur le volet de la prévention. Dans le projet de loi, on voit bien comment tout est... la séquence d'intervention, quand on est en situation d'intervention, et la répartition des rôles. Maintenant, dans le cas de la prévention, d'après vous, ça passe par qui, ça doit se faire comment? Parce que, quand on parle de prévention, on parle de sensibilisation, on parle d'information, on parle de travail auprès d'un certain nombre... des jeunes, bien sûr, mais y compris dès la petite enfance -- moi, j'ai eu une expérience avec une de mes petites-filles où ça a été absolument l'enfer pendant six mois en CPE -- alors, y compris pour les parents et pour les gens qui entourent ces enfants-là. Rapidement, bien sûr, mais...
**(11 heures)**Mme Théberge (Odette): Bien, dans le fond, nous autres, on s'était dit que, si cette question-là nous était posée, on n'était pas pour répondre de faire appel à nous autres tout le temps. Donc, on pouvait vous référer à la liste de ressources qu'il y a sur le site du MELS, au plan... -- je regarde Mme Marquis -- le site du plan de... le plan -- je cherche le nom, là -- Prévenir et contrer la...
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): ...qu'il y a un certain nombre de ressources, mais...
Mme Théberge (Odette): Ce n'est pas tout à fait ça.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): ...la responsabilité... Comment vous voulez que ces choses-là soient planifiées? Est-ce que ça revient aux directeurs d'école? Est-ce que ça revient à chacun des intervenants du milieu scolaire? Comment vous voyez ça?
Mme Théberge (Odette): O.K. Bien, dans les écoles... Là, nous, c'est toujours les écoles primaires. Il y a le conseil d'établissement, là, qui a un certain pouvoir de décider d'activités avec le personnel enseignant, les parents puis la direction, qui sont représentés. La communauté aussi est représentée au sein d'un conseil d'établissement. Puis en CPE c'est les conseils d'administration, je pense. Si je ne me trompe pas, c'est ça. Oui.
Mme Gagnon (Francine): Mais je pense... C'est ça, je pense que la... Au fond, plus les gens vont avoir une idée claire, là, de ce qu'on recherche comme comportement positif... Parce que là on est axé beaucoup sur l'intervention quand on est face à des actes d'intimidation, c'est beaucoup centré sur l'intimidation, moins sur la violence en général. Mais sur le fait de miser sur des rapports, des relations égalitaires entre enfants, entre adultes et enfants, sur le respect, sur le fait que moi, comme... -- bien là, je suis grande, mais, admettons, quand j'étais petite -- comme enfant, j'avais des droits, mais mes amis aussi ont des droits... Il y a des choses fondamentales. Les enfants ont à apprendre des comportements civilisés, si je peux dire, et donc ça commence tôt. Alors, dans ce sens-là, ça en est, de la prévention aussi que chaque professeur, à tous les niveaux, comme parents aussi, qu'on favorise ces choses-là. Après ça, il y a des besoins plus ciblés en termes de c'est quoi, la violence, qu'est-ce que je peux faire, comment je réagis. Face à une victime, on a des choses à lui apprendre sur quoi faire la prochaine fois ou... en tout cas. Donc, c'est vraiment à différents niveaux. Mais les enfants ont vraiment à apprendre c'est quoi, une situation de violence. Qu'est-ce que je peux faire? Comment je peux y réagir.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme Gagnon, Mme Théberge, de nous avoir donné le point de vue du Regroupement des organismes Espace du Québec.
J'inviterais maintenant les représentants de l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec à venir prendre place.
Je vais suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 3)
(Reprise à 11 h 5)
Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux. Il nous fait plaisir d'accueillir les représentants de l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec, représentée par M. Serge Laurendeau, à qui je vais demander de nous présenter la personne qui vous accompagne. Et vous aurez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous, M. Laurendeau.
Association provinciale des enseignantes
et enseignants du Québec (APEQ)
M. Laurendeau (Serge): Oui. Bonjour. Je suis accompagné de M. Alan Lombard, qui est le directeur exécutif de l'APEQ. J'y vais?
Bon, d'entrée de jeu, l'APEQ représente environ 8 000 enseignantes et enseignants du secteur anglophone, et nous desservons au-delà de 105 000 étudiants. On existe aussi depuis 1864, et c'est pour cette raison que j'ai trouvée déplorable qu'on ait dû faire des pressions auprès du sous-ministre adjoint des services anglophones et de l'attaché politique du cabinet de la ministre pour obtenir une audition. Ceci dit, nous sommes très heureux de pouvoir être entendus ici ce matin.
Nous sommes d'accord avec le principe que les institutions d'enseignement adressent la problématique de la violence et de l'intimidation, bon, afin d'augmenter la prise de conscience et de sensibiliser les jeunes, et également afin de développer un plan d'action pour contrer l'intimidation et la violence mais surtout de faire le suivi par l'analyse annuelle du plan par le conseil d'établissement, le rapport au directeur général, le rapport annuel au protecteur de l'élève et le rapport annuel à la ministre. Toutefois, la version initiale du projet de loi, bon, soulève certaines inquiétudes quant à sa faisabilité, dû au fait qu'elle laisse très peu de place au jugement professionnel de la direction. Puis j'y reviendrai tantôt.
L'APEQ sait qu'il existe déjà plusieurs initiatives dans le secteur anglophone. Il y a des initiatives, des actions concrètes qui ont été mises en place, des plans de prévention, dans le secteur anglophone, pour adresser toutes les situations d'intimidation, de violence et même de cyberintimidation. Je vous recommanderais de regarder le site de la commission scolaire Lester-B.-Pearson, qui ont une politique de sécurité scolaire incluant l'utilisation des appareils électroniques, qui s'appelle la Safe Schools Policy. Et, au moment où j'étais président du local du syndicat de Pearson, à la commission scolaire Lester-B.-Pearson, on avait fait plusieurs représentations pour qu'ils incluent dans leurs lois... pas dans leurs lois, mais dans leurs politiques tout ce qui avait trait à l'utilisation des appareils électroniques, tels l'ordinateur mais exactement aussi les caméras, les iPhones, et tout ça.
De plus, ce qui existe dans notre secteur, c'est des sondages qui sont faits auprès de tous les élèves, à partir du primaire jusqu'au secondaire, justement sur la sécurité scolaire, incluant leurs perceptions de l'école. Puis il y a un programme. Ce programme-là s'appelle Tell Them From Me, qu'on pourrait traduire par: Dites-leur de ma part. Donc, c'est un programme dans lequel les enfants remplissent... et parlent de la sécurité de l'école. Et c'est très bien parce qu'il y a un suivi qui est rapporté à l'école.
C'est pour ça que nous considérons que le recours excessif et spécifique d'une loi n'est pas nécessaire pour assurer que nos écoles traitent de ce sujet de façon responsable. De notre côté, on sait que c'est déjà fait. Il y a quelques années, il y a eu le plan... Je ne me souviens pas si c'était la ministre Courchesne ou la ministre de l'Éducation actuelle qui avait lancé le plan pour contrer la violence, un plan que nous avions accueilli de façon positive. Par contre, force est de constater qu'il n'y a pas eu de suivi et peu de résultats à cause du manque de reddition de comptes. Nous pensons que cette fois-ci les mesures viennent combler cette lacune. C'est la reddition de comptes, pour nous, qui était le volet qui manquait.
La définition de l'intimidation nous apparaît trop large puisqu'elle pourrait inclure tous les conflits qui émergent dans une école. J'ai entendu les intervenants précédents, et ça a été relevé. Basé sur cette définition, on pourrait dire que tous les enseignants peuvent être des personnes qui intimident. La loi ne permet pas de faire la distinction entre un simple conflit et de l'intimidation. Or, on sait que les conflits sont naturels et font partie de toutes les sociétés.
Ce qu'il faut développer, c'est plutôt la résolution de conflits avant que ça dégénère en violence. L'intimidation pourrait être un acte isolé mais pourrait devenir du harcèlement si c'est de façon répétée. C'est là que doit s'exercer le jugement professionnel de la direction pour évaluer s'il s'agit d'un acte isolé ou s'il s'agit de harcèlement, lorsque justement l'intimidation devient... est répétée, car ce manque de clarté là pourrait faire en sorte que les vrais actes d'intimidation, bien, vont être noyés dans un bassin d'incidents mineurs.
**(11 h 10)** Nous suggérons la définition suivante: L'action est posée -- donc, l'intimidation -- est posée avec l'intention de blesser la personne; la victime se sent blessée; il y a un pouvoir de force inégale entre la victime et l'agresseur -- l'agresseur peut faire partie d'une gang, d'un groupe, et ça devient pas mal plus intimidant; et l'action est généralement faite de façon répétitive, généralement, parce que un incident d'intimidation pourrait être de l'intimidation.
Bon, la loi accorde un nouveau rôle au conseil d'établissement pour adopter le plan, alors que normalement le conseil d'établissement approuvait le plan qui était développé par le personnel de l'école en collaboration avec la direction. C'était présenté au conseil d'établissement pour approbation. Là, on leur confère le rôle de l'adopter. Nous croyons qu'afin d'éviter les abus il serait préférable que certaines mesures soient balisées à l'intérieur d'une politique à la commission scolaire, donc une politique de sécurité scolaire au niveau de la commission scolaire, des balises, et ensuite, au niveau de l'école, on leur laisse la liberté pour développer les activités, les plans de résolution de conflits. Donc, ça, ça peut être développé au niveau de l'école, mais il faut qu'il y ait des balises au niveau de la commission scolaire.
Dans la loi, on parle que le directeur traite avec diligence tout signalement et toute plainte, et doit faire rapport de chaque plainte au directeur général et au protecteur de l'élève. Cette obligation laisse très peu de place au jugement professionnel du directeur afin de juger si la plainte est valide ou non, si elle est recevable. Mais, de la façon dont la loi est rédigée, il doit signaler toute plainte.
On parle aussi d'un travail de coordination au niveau de l'école. Nous, on dit qu'il devrait strictement être de nature pédagogique et devrait inclure aussi, également, une forme de compensation, alors que le travail administratif devrait demeurer sous la responsabilité de la direction d'école. On ne voudrait pas que le comité qui s'occupe de la coordination passe son temps à rédiger des rapports. Eux, c'est de développer des activités qui peuvent aider à l'ensemble des étudiants.
Il y a un changement au rôle du protecteur de l'élève qui, pour nous, semble être contradictoire au statut présent, alors qu'il servait de dernier recours pour les parents. Bon, ce qui existe en ce moment, c'est que, si un enfant ou un parent... la première chose qu'il va faire, il va se plaindre auprès de l'enseignant. Ensuite, s'il n'est pas satisfait, il va aller auprès de la direction, sinon à la commission scolaire et, en dernier recours, au protecteur de l'élève, pour s'assurer que la commission scolaire en fasse le suivi. Mais ce qu'on dit ici, c'est que la direction peut informer les parents qu'ils peuvent aller directement vers le protecteur de l'élève. Alors là, ils contournent tous les autres paliers que nous, on dit, peuvent probablement résoudre le conflit avant qu'il soit déposé au protecteur de l'élève.
Un autre problème qui est, bon, particulier au système anglophone, c'est que l'obligation de conclure une entente avec le corps de police pour développer un programme de prévention et d'intervention, et de développer un programme de soutien avec le réseau de santé et des services sociaux peut être problématique dans certains milieux anglophones, car elle crée déjà une obligation sans que les ressources soient disponibles. Ces services-là ne sont pas accessibles partout dans le secteur anglophone. C'est difficile pour nous d'avoir les services sociaux qui vont venir dans les écoles et pouvoir diffuser l'information en anglais pour nos jeunes.
Il faut également clarifier, dans la loi, le pouvoir de suspendre du directeur, à l'article 96.27, car présentement ce pouvoir n'est pas dans la LIP, bien qu'il soit exercé. En ce moment, toutes les directions d'école arrivent à suspendre des élèves, mais ce n'est pas écrit dans la loi telle quelle, en ce moment, dans la LIP. La nouvelle loi dit qu'il pourrait suspendre pour des cas d'intimidation et de violence. Mais là on semble garder ça seulement pour les actes d'intimidation et de violence. Qu'est-ce qui arrive, maintenant, pour le droit de suspendre, s'il y a eu du vandalisme, s'il y a eu d'autres incidents, des vols?
Au point suivant, nous croyons que le projet de loi met trop d'emphase sur les sanctions et la suspension, voire expulsion, alors que nos institutions travaillent plutôt dans un but de prévention et de résolution de conflits. Le travail communautaire pourrait être plus efficace que la simple suspension. Ça se fait dans certaines écoles. La recherche démontre que l'implication des étudiants et des parents dans des programmes de prévention et de résolution de conflits ont beaucoup plus de succès qu'une loi avec des mesures coercitives. Nous citons certaines recherches aux pages 9 et 10 de notre mémoire.
Quand on parle de cyberintimidation, on se questionne à savoir où s'arrêtent le rôle des enseignants et celui de l'école, et où commence celui des parents. Je pense que les parents ont une grande responsabilité, puis là de tout remettre sur les épaules de l'école ou des enseignants, c'est beaucoup demander.
Le projet de loi devrait faire référence à toutes les institutions de la commission scolaire. Parce qu'on mentionne les écoles primaires et secondaires, mais il y a aussi l'éducation des adultes, la formation professionnelle et des centres alternatifs qui sont une petite école en retrait ou avec des enfants qui ont des problèmes particuliers. Donc, la loi devrait inclure toutes les institutions.
Nous demandons le retrait de l'article 21 puisque les sanctions administratives pécuniaires suggérées nuiraient à l'ensemble des élèves. Moi, je pourrais vous faire une suggestion: de supprimer la prime de rendement des directions générales et des assistants directeurs généraux. À ce moment-là, ça ne nuirait pas aux élèves. Ça va juste couper leurs primes à eux.
Et en conclusion je vous dirais qu'il nous apparaît important que le projet de loi se base sur les résultats de la recherche, car ce que nous, on a trouvé, c'est que ce qui s'est fait en Europe, aux États-Unis et ailleurs au Canada, en Ontario, tout près de nous, démontre très peu de résultats et parfois même des effets négatifs: alors qu'on a tenté de contrer la violence, on a augmenté l'intimidation. Selon le Time Magazine, les statistiques ne démontrent pas que l'intimidation est en augmentation mais que la dénonciation fait en sorte qu'il y a plus d'incidents de rapportés. C'est ce qui ressort de cette recherche-là. Et la recherche conclut qu'après 13 ans d'application à New York ils ne sont pas arrivés à contrer le phénomène d'intimidation et de violence et que la solution ne se trouve pas dans une loi mais plutôt dans un changement d'attitude de société. C'est ma présentation.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup de nous avoir donné votre point de vue. Nous poursuivons immédiatement cette période d'échange. Et je vais céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Bonjour à vous deux et merci de votre contribution. Je voudrais clarifier un premier point. Dans votre présentation, vous avez dit que, selon vous, le recours à une loi n'est pas nécessaire parce que vous trouvez que le travail se fait déjà, à tout le moins dans votre réseau anglophone. Comment je dois interpréter cette phrase? Est-ce que vous appuyez par ailleurs le projet de loi? Parce que votre mémoire est plus nuancé, je vais dire ça ainsi. Les autres représentants de syndicats de professeurs ont, règle générale, dit qu'ils appuyaient la loi. Ça fait que je veux juste clarifier votre position. Une fois que vous me dites que le recours à la loi n'est pas nécessaire, est-ce que je dois comprendre que vous nous invitez à ne pas recourir à une loi, ou si c'est un jugement d'ordre général mais que par la suite vous appuyez la loi déposée à l'Assemblée nationale?
M. Laurendeau (Serge): Oui, bien, exactement, c'est qu'on dit qu'on ne croit pas qu'une loi soit nécessaire, parce que, ce qui avait été élaboré dans le plan antérieur, ce qu'il manquait, c'était la reddition de comptes. Et c'est pour ça qu'il n'y a pas eu de résultat comme on aurait espéré parce que les commissions scolaires n'ont pas fait ce qu'elles auraient dû faire. Donc, si on pouvait s'assurer qu'il y a une reddition de comptes, bien je pense que le plan qui a été mis de l'avant pourrait fonctionner et que la loi n'est pas nécessaire. Ceci dit, bien, si on arrive à une loi, on ne la rejette pas, mais on se dit que ce n'est pas nécessaire. Le plan qui était là pourrait être très bien et pourrait être poursuivi, mais en autant qu'il y a une reddition de comptes.
Mme Beauchamp: À partir de ce commentaire, j'ai deux questions pour vous. La première question, c'est... C'est un peu comme si vous dites: Bien, le plan d'action avait ses effets, alors qu'il y a un bon nombre d'élèves et bon nombre de parents également qui font des témoignages où ils nous disent qu'ils ont l'impression que parfois leur plainte ne fait pas l'objet de suivi. Ou encore je pourrais illustrer ça en disant que parfois ils nous disent que l'élève intimidé... ils ont l'impression que, pour l'école, la plainte ou l'élève intimidé devient le problème, plutôt que l'élève intimidateur soit vu comme l'enfant sur lequel on doit agir ou aider à changer le comportement et que ça a trop amené... Vous avez entendu comme moi, là, des témoignages où des parents vont dire: Moi, mon enfant était intimidé à l'école, puis finalement la seule solution amenée par l'école, c'était que je change l'enfant d'école. Je résume ça, là, j'image, mais je l'ai entendu plus d'une fois. Donc, je veux avoir vos commentaires. Quand vous me dites: Le plan d'action avait ses effets, qu'est-ce que nous, on fait avec le fait qu'un certain nombre de parents, eux, disent: Moi, je n'ai pas vu... je ne suis pas satisfait de la qualité de l'intervention qu'offrait le directeur d'école ou le personnel de l'école à mon enfant intimidé?
Mon autre question, là, j'avoue qu'elle est à deux volets, mais, une fois que vous dites: Le problème, c'était la reddition de comptes, vous n'êtes pas sans savoir que bon nombre d'intervenants ici, devant cette commission, sont passés en disant: La reddition de comptes prévue dans la loi de façon obligatoire, elle est trop importante et elle entraîne des effets de bureaucratie trop importants par rapport à l'objet, là, qu'est le problème de l'intimidation. Donc, je veux avoir vos... Une fois que vous, vous me dites: Le plan suffisait, il était bon, c'est un problème de reddition de comptes, vous répondez quoi au parent qui dit: Le plan n'était pas suffisant, il n'était pas si bon que ça? Et, une fois que vous me dites: Le problème, c'était la reddition de comptes, vous répondez quoi à ceux qui sont passés puis qui ont dit: Bien là, là, vous exagérez nettement avec la reddition de comptes dans cette loi?
**(11 h 20)**M. Laurendeau (Serge): Bon, sur la reddition de comptes, quand j'ai amorcé ma présentation, je vous parlais du suivi fait par le conseil d'établissement sur le plan, donc une révision annuelle. Donc, si justement le plan n'est pas efficace, bien il faut le changer. Puis, dans la reddition de comptes, c'est le fait que la direction doit en faire rapport à la direction générale -- et ça, on est entièrement d'accord -- et en faire rapport au protecteur de l'élève -- entièrement d'accord -- et rapport à la ministre. Donc là, il y a un suivi, il y a un suivi. Donc, les actes, il y a un suivi qu'on s'assure de ça.
Bon, la bureaucratie statistique, c'est sûr qu'il y a des éléments là-dedans où, s'il faut faire des rapports sur chaque plainte, là, ça va devenir de la bureaucratie encombrante. Mais le fait de faire une analyse globale, et que le conseil d'établissement en soit mis au courant et puisse le réviser, le plan, bien ça, ça met une obligation et une responsabilité de l'école et de la direction de faire le suivi des plaintes. Mais je continue de penser que je ne crois pas que c'est la loi qui pourrait engendrer ça, alors que le plan, en ajoutant des mesures puis en s'assurant qu'il est suivi... Moi, je trouve ça un petit peu aberrant que les commissions scolaires ne suivent pas, quand un plan est élaboré par le ministère, la ministre, et qu'ils ne le mettent pas en place, qu'il ne le mettent pas en pratique. J'ai de la difficulté à accepter ça, en tant qu'individu, en tant qu'enseignant, parce que je me dis: C'est pour le bien des enfants, donc ça devrait être mis de l'avant. De là à passer par une loi puis leur taper sur les doigts... C'est pour ça que je vous dis: Qu'on leur coupe leur prime de 6 %, à la fin de l'année, puis peut-être qu'ils vont agir.
Mme Beauchamp: Je voudrais maintenant vous entendre commenter un avis, je vous dirais, une recommandation faite par certains de vos collègues membres de la FAE, qui ont commenté le fait que dans la loi il y avait... dans ce qui est prévu à l'intérieur du plan d'action dans chaque école, il y a la mention que le plan d'action doit prévoir les mesures de soutien à du personnel, notamment du personnel enseignant, qui serait, ce personnel-là, victime d'intimidation. Et la FAE nous a fait remarquer que, selon eux, parce que la loi prévoit que ce plan est adopté par le conseil d'établissement, que, selon eux, on est en train de faire porter sur le conseil d'établissement des responsabilités qui font plutôt partie du grand contexte des relations de travail entre l'employeur et l'employé, donc entre la commission scolaire et l'employé. Ils nous ont demandé de revoir ce libellé pour qu'explicitement on continue à travailler dans un contexte où c'est la commission scolaire, comme employeur, qui doit apporter du soutien au personnel enseignant. J'ai considéré que le commentaire était intéressant, peut-être pertinent, mais là j'ai besoin de votre éclairage sur comment vous... quels seraient vos commentaires à vous, là, à partir de cet éclairage-là donné par la FAE.
M. Lombard (Alan): Bien, effectivement, on avait vu la même chose, on avait pensé à la même chose. On ne l'a pas trouvé suffisamment important pour le mettre dans un mémoire, mais il y a comme une incohérence ou une contradiction à ce niveau-là. Alors, on abonde dans le même sens.
Mme Beauchamp: Oui, allez-y.
M. Laurendeau (Serge): Si je peux rajouter, c'est que je sais pertinemment que plusieurs commissions scolaires, justement, elles ont une politique de sécurité et adressent cette situation-là, quand il s'agit d'enseignants ou entre enseignants, entre personnels. C'est adressé dans cette politique-là. Donc, c'est pour ça qu'on n'est pas arrivés à le mettre dans notre mémoire.
Mme Beauchamp: Je voudrais maintenant m'entretenir avec vous sur vos commentaires concernant la notion de suspension. Vous avez fait un commentaire, aussi, intéressant. Je veux revoir avec vous l'article 14 de la loi, qui parle donc du directeur de l'école, bon, l'article 14, qui introduit dans la grande loi, ce qu'on appelle la LIP, familièrement, un article 96.27 qui se lit: «Le directeur de l'école peut suspendre un élève lorsqu'il estime que cette sanction disciplinaire est requise pour mettre fin à des actes d'intimidation ou de violence ou pour contraindre l'élève à respecter les règles de conduite de l'école.» Ici, donc, une fois introduit dans la Loi sur l'instruction publique, ça devient un article d'ordre général, où ça dit: ...dans des cas d'intimidation «ou pour contraindre l'élève à respecter les règles de conduite de l'école». Cette définition-là, est-ce qu'elle vous convient? Parce qu'il ne faut pas la voir comme étant uniquement reliée au dépôt d'une loi contre l'intimidation à l'école. Ça devient effectivement un article général. Dans ce contexte où ca devient un article général introduit dans la LIP, est-ce que la définition de ce pourquoi on peut utiliser la suspension, est-ce que ça vous convient?
M. Laurendeau (Serge): Oui, mais il faudrait justement que la Loi sur l'instruction publique soit modifiée pour inclure tout ça, là, cette partie-là. Parce que notre crainte, c'était que le pouvoir de suspension se limiterait à l'intimidation et à la violence. Donc, nous... Parce que, comme je vous disais, c'est déjà utilisé par plusieurs administrateurs. Mais ce qui me faisait dire que... Bien, si maintenant on trouve la nécessité de le mettre dans la loi, est-ce que ça veut dire que ce qui était fait avant était illégal, s'il n'y avait pas ce pouvoir-là?
Mme Beauchamp: Non. La réponse est non, parce que, ce qu'on indique, ça a été balisé, ça a été codifié. C'est l'expression, je pense, utilisée. Là, je me fais vraiment un perroquet, vous me le permettez? Des fois, ça a été codifié par la jurisprudence, me glisse Me Oudar. Je fais confiance à Me Oudar, sous-ministre adjointe. Ça ne m'arrive pas souvent d'être perroquet, là, je prends juste le temps de le dire, là.
M. Laurendeau (Serge): Je voulais simplement ajouter que je me souviens d'une histoire de cyberintimidation, puis, peut-être, vous vous souvenez, il y a six ans, sept ans, à Lester-B.-Pearson, où une école, St. Thomas, avait fait ce qu'ils appelaient un «burn book», où ils déblatéraient contre tous les enseignants. Et il y a eu des accusations graves allant jusqu'à la pédophilie. Nous, en tant que syndicat, à ce moment-là, on avait exigé l'expulsion des élèves, qu'ils soient transférés dans une autre école. Par contre... Puis la direction était d'accord avec nous. Mais, quand c'est arrivé au niveau des commissaires, ils ont renversé la décision. Et là l'élève est revenu à l'école. Les deux autres, il y en a un qui graduait, il est en secondaire V, le troisième, lui, je pense qu'il a abandonné de lui-même. Mais l'autre individu est revenu à l'école, ce qui a fait en sorte que l'enseignante qui était accusée d'être homosexuelle n'est pas revenue, et l'enseignant aussi qui était accusé d'être pédophile n'est pas revenu, et il a démissionné à la fin de l'année, il a pris sa retraite. Donc, finir une carrière comme ça, bien c'est déplorable, mais le fait que la décision d'une école à laquelle le syndicat était d'accord a été renversée par une commission scolaire, là on a dit: Il y a quelque chose qui ne marche pas, là.
Mme Beauchamp: Est-ce que vous êtes en train... Parce qu'on a débordé du sujet de la suspension, là, par votre commentaire, votre exemple que vous venez de donner. Là, vous êtes sur le terrain de l'expulsion. Et ici ce qui est prévu dans la loi, ce qu'on a ajouté pour encadrer la notion d'expulsion est le fait que de façon diligente la commission scolaire ou même l'exécutif, le conseil exécutif des commissaires doit répondre à l'intérieur de cinq jours à une demande d'expulsion. Est-ce que ça vous va?
M. Laurendeau (Serge): Ça devrait aider. Ça devrait aider, mais sauf qu'ils ont encore le pouvoir de décider autrement que ce qui est recommandé par la direction et le personnel de l'école.
Mme Beauchamp: Je veux maintenant... Ah! pardonnez-moi. Allez-y.
M. Lombard (Alan): Juste pour compléter, c'est un peu reconnu dans le milieu qu'expulser, c'est tellement extraordinaire, ça ne se fait pas et surtout, rendu au niveau des commissaires, c'est normalement rejeté, ce qui peut être un problème.
Mme Beauchamp: Je comprends ce que vous me dites. Je pense en fait qu'on peut se dire que l'expulsion doit être vue comme un geste ultime, parce que notre boulot à tous, c'est de scolariser les jeunes, donc je... Mais je comprends aussi que des signaux doivent être envoyés comme quoi, si la loi reconnaît un pouvoir d'expulsion, c'est parce qu'elle reconnaît qu'il peut être utilisé, je pense. Allez-y.
M. Laurendeau (Serge): Oui. Sauf que l'expulsion était dans le sens d'un transfert dans une autre école de la commission scolaire. Ce n'était pas une expulsion en dehors de la commission scolaire, donc dans une autre école qui n'était vraiment pas loin.
**(11 h 30)**Mme Beauchamp: D'accord. Je veux vous entendre me parler de cette notion quand vous dites: La loi n'est pas assez précise pour délimiter le champ d'action, dans le temps, dans l'espace, de tout le réseau de l'école par rapport à la cyberintimidation. Dans le réseau anglophone, il y a plusieurs projets, plusieurs écoles qui ont adopté un mode de développement autour de ce qu'on appelle familièrement l'école 2.0, l'introduction des technologies, etc. Et j'ai visité des écoles. Plusieurs en viennent à dire que tout ça doit être accompagné de notions de cybercitoyenneté, vraiment qu'on travaille, là, en amont, en prévention, et tout. Mais je veux vous entendre, j'ai besoin de votre éclairage comme professeurs sur cette notion de cyberintimidation par rapport à ce que prévoit la loi. On retrouve cette notion dans différents éléments de la loi, mais pouvez-vous nous donner votre éclairage, quand vous dites, là: On doit mieux baliser entre la responsabilité des parents et la responsabilité de l'équipe-école? Est-ce que vous pouvez développer, nous donner le bon éclairage pour qu'on puisse faire les bons débats ici, autour de cette table, lors de l'étude article par article de la loi?
M. Laurendeau (Serge): Au niveau de l'école, dans les plans de prévention, je pense qu'il est primordial d'informer les jeunes sur les dangers, justement, de ce qu'on met sur les sites populaires comme Facebook, et tout ça, parce que, bon, ça prend une ampleur, mais les jeunes ne sont pas au courant de tout ça. Donc, c'est à partir d'un plan, d'une activité qui se fait dans les écoles qu'on peut les informer de tout ça, des dangers, leur parler aussi de ce qui peut devenir de la cyberintimidation, quand on écrit des commentaires disgracieux contre des personnes. Puis tout ça peut se faire à l'école. L'utilisation aussi des cellulaires, l'utilisation des textos, et tout ça. Ce qu'on écrit, à un moment donné, ça reste emmagasiné et ça peut revirer contre nous. Donc, les dommages que ça peut occasionner. Puis ça, je pense, c'est dans notre rôle d'éducation vers les enfants, c'est ce qu'il faut qu'on fasse.
À partir de là, les parents, il faut les sensibiliser à partir du conseil d'établissement, donc au conseil d'établissement, et s'assurer que cette information-là, elle est transmise aux parents. Il y a des groupes qui sont très actifs dans le secteur anglophone. Je vous donne l'exemple de la fédération des foyers-écoles, des parents qui sont très actifs dans les écoles et qui donnent, qui font des ateliers justement pour informer les parents sur tout ça. Il ne faut pas les mettre de côté, les parents. Il faut qu'ils fassent partie du plan. Je pense que c'est en travaillant avec eux qu'on peut arriver à les sensibiliser, leur faire comprendre aussi que ce n'est pas juste l'école. Quand ça arrive à la maison, ils doivent surveiller, ils doivent encadrer l'endroit où est situé l'ordinateur puis de faire de l'éducation avec leurs enfants. Seulement que le laisser, le rôle, à l'école, ce n'est pas suffisant. C'est à partir de ces plans-là, je pense, qu'on peut élaborer, amorcer la discussion avec les parents.
Mme Beauchamp: Avec d'autres intervenants, on a eu des échanges sur cette question puis on se posait la question, en mode exploratoire, là, mais si la loi ne devrait pas comprendre une notion d'exiger la collaboration des parents, un peu comme... On pourrait faire le parallèle, toujours imparfait, là, mais en disant: La Loi sur l'instruction publique prévoit que c'est de la responsabilité des parents que l'enfant fréquente l'école, qui est obligatoire. Est-ce que ça aide? On ne veut pas écrire des articles pour rien, des articles de loi pour rien, mais est-ce que cette notion qu'un directeur d'école puisse faire référence au fait que le parent doit collaborer dans les cas, par exemple, de cyberintimidation... Comment vous réagissez à ça? Parce qu'honnêtement on est vraiment à une frontière qui est délicate et on va être devant une situation, je pense, dans la vraie vie, où un directeur d'école peut appeler un parent, demander à un parent sa collaboration pour que soit, par exemple, fermée la page Facebook de son enfant parce que son enfant ne l'utilise pas de façon adéquate et l'utilise, par exemple, pour de l'intimation, puis qu'un parent réponde: C'est de l'ordre de ma famille, c'est de ma responsabilité et je ne le veux pas. On nous a raconté des histoires du genre. On a franchement besoin de votre éclairage entre ce qui appartient de la responsabilité... ce qui est de l'ordre de la responsabilité parentale... mais par ailleurs il y a un lien avec l'école, tout ça a des répercussions dans l'école. Donc, est-ce qu'un tel article, qui fait appel à la notion de la nécessité de collaboration du parent dans la lutte à l'intimidation, à la cyberintimidation, est-ce que ça serait utile, ou ce n'est pas ça, la solution?
M. Lombard (Alan): De notre point de vue, il ne faut pas trop exagérer non plus la cyberintimidation. Ce n'est pas quelque chose d'aussi généralisé qu'on peut penser. C'est souvent dans les médias qu'on en parle beaucoup, mais, dans la vraie vie, les enfants s'adaptent pas mal à tout ce phénomène-là. Et, si on veut donner à l'école ou à un directeur d'école tous les pouvoirs et toutes les responsabilités, nous allons noyer l'école. Il ne faut pas penser que l'école peut tout régler les problèmes de société. Ce qui nous fait peur un peu, c'est qu'avec l'arrivée de la cyberintimidation ou l'idée de... nous avons dit, ou la loi, les lois nous disent que quelque chose fait le samedi soir peut être sanctionné à l'école le lundi matin. Déjà, c'est ça. Mais d'étendre ce pouvoir-là, cette responsabilité-là nous semble beaucoup pour une école ou pour un directeur d'école.
M. Laurendeau (Serge): Je voulais rajouter que la FCE, la Fédération canadienne des enseignants, a fait une recherche justement sur la cyberintimidation, qui est, d'après leurs études... c'est que c'est en voie de diminution. Puis moi, je me souviens qu'en 2005 les incidents dont je vous ai fait part tantôt, à St. Thomas, ont eu un gros effet parce qu'il y a eu un impact médiatique. C'est allé dans les médias, puis on a dénoncé la situation, puis je pense que ça a eu un effet que, le fait qu'on demandait des suspensions, des expulsions, les parents ont réalisé que, hou, c'est grave, là, c'est important. Donc, ça a eu cet effet-là. Puis, un peu comme M. Lombard le disait, je crois qu'il y a beaucoup plus... les médias le dénoncent beaucoup plus que ce qui se produit réellement.
Je reviens à ce que vous parliez d'exiger la collaboration des parents. Vous savez, on a de la difficulté à exiger des parents qu'ils viennent pour les rencontres au sujet des plans d'intervention. Il y a des parents qui se refusent à ce que leurs enfants soient analysés, qu'on fasse des tests, tout ça. C'est pour le bien des enfants, puis il y a des parents qui refusent. Ces parents-là, je ne pense pas qu'on va arriver à les convaincre de collaborer. Mais je pense que généralement l'ensemble, l'ensemble des parents est ouvert à s'asseoir puis discuter. Donc, de l'exiger, je ne pense pas qu'on puisse arriver à l'exiger, mais de le recommander, de le recommander... Puis, je reviens à ce que je disais, par le biais des comités... des conseils d'établissement, il faut que les décisions soient retransmises aux parents, il faut que les parents soient mis au courant de toutes les règles de conduite qui existent dans l'école, les règles de vie. Ça, il faut que ce soit distribué. Puis j'ai l'impression que souvent des comités qui travaillent arrivent avec de bonnes idées, de bons plans, puis ce n'est pas diffusé.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine notre période d'échange avec le parti ministériel. Nous poursuivons avec l'opposition officielle. Et je cède la parole à M. le député de Jonquière. M. le député.
M. Gaudreault: Oui. Merci beaucoup, M. le Président, Merci, M. Laurendeau et M. Lombard. Ça fait plaisir de vous accueillir ici.
D'entrée de jeu, je veux que vous élaboriez davantage sur ce qui peut apparaître, à première vue, et c'est pour ça que je veux que vous élaboriez davantage... sur une contradiction dans votre propos, parce que vous nous dites qu'une des raisons des résultats mitigés, je dirais, du plan d'action du gouvernement 2008-2011, là, contre l'intimidation, c'est le fait qu'il n'y ait pas assez de reddition de comptes sur la mise en application du plan d'action, mais, d'un autre côté, je crois avoir compris que vous plaidez pour davantage de liberté ou de marge de manoeuvre quant au jugement professionnel de la direction. Et en même temps vous êtes assez critique également sur la lourdeur bureaucratique que peut apporter le projet de loi. Alors, je veux juste que vous nous expliquiez comme il faut où on doit situer la ligne, là, entre le jugement professionnel de la direction, auquel vous nous appelez, et l'obligation de reddition de comptes que vous réclamez également si on ne veut pas répéter l'erreur, à laquelle vous prétendez, là, du plan d'action 2008-2011. Alors, éclairez ma lanterne comme il faut là-dessus, s'il vous plaît.
**(11 h 40)**M. Laurendeau (Serge): Bon, justement, c'est que la loi dit que la direction doit traiter avec diligence toute plainte, toute plainte. Là, toute plainte, ça peut être un conflit entre deux individus, puis ça arrive à tous les jours, ça. Donc, la direction d'école doit être en mesure de pouvoir user de son jugement professionnel pour dire: Bien, ça, c'est simplement un conflit. On va les mettre ensemble avec quelqu'un, ils vont travailler ensemble puis essayer de trouver une solution à ce conflit-là. Le problème aussi avec la loi, c'est quand on parle de confidentialité. Donc là, il y a une plainte qui est faite et là il y a une confidentialité, donc on ne peut plus mettre les deux individus en face un de l'autre pour essayer de trouver une solution. Parce que la victime, celui qui se dit victime, bien là, si on garde sa confidentialité, jamais on ne pourra les mettre les deux ensemble, les confronter puis trouver une solution à l'école.
Il y a des programmes qui existent dans le milieu anglophone. C'est «behavior modification», c'est la modification du comportement des enfants. Et il y a des spécialistes qui viennent, qui travaillent avec les enfants. Mais il faut qu'ils se connaissent. Pour éviter justement... Là, j'arrive à la lourdeur, parce que, si toutes les plaintes doivent être traitées, bien là ça va créer une lourdeur, parce que là il remplit des rapports, puis tous ces rapports-là vont... Puis il faut aussi s'assurer que, s'il y a confidentialité, elle doit demeurer, là, que le conseil d'établissement, là, n'ait pas accès aux noms parce qu'il faut préserver la confidentialité des individus. Ça, c'est primordial.
M. Gaudreault: Donc, est-ce que, si on revient à l'article dont vous faites référence, l'article 11, on doit préciser davantage les nuances entre signalement et plainte? Parce que dans l'article on dit, en parlant du directeur, qu'«il reçoit et traite avec diligence tout signalement et toute plainte». Alors, c'est peut-être là qu'il y a une clé, là, pour jouer un peu plus sur la question de l'autonomie professionnelle du directeur mais, je dirais même, l'autonomie professionnelle des enseignants également.
M. Laurendeau (Serge): Exactement. C'est à partir du mot «signalement», là, que là il pourrait y avoir cette autonomie-là de dire: Bon, c'est seulement... c'est un conflit. Mais il doit le traiter pareil parce qu'un simple conflit pourrait dégénérer. Mais, à partir des interventions que la direction peut faire, bien elle peut mettre un terme à ce conflit-là.
M. Gaudreault: Dites-moi, pour mon information -- et excusez mon ignorance, là -- est-ce que votre organisation représente des enseignants aussi du secteur privé?
M. Laurendeau (Serge): Non, absolument pas.
M. Gaudreault: Non? Seulement du secteur...
M. Laurendeau (Serge): Secteur public.
M. Gaudreault: Seulement du secteur public. Parce que je ne sais pas si vous avez fait une analyse de la section du projet de loi qui porte sur l'enseignement privé. Vous n'en avez pas parlé dans votre mémoire. J'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus, parce qu'on a eu des représentations à l'effet qu'il y a des différences de traitement qui ont... dans la loi sur l'enseignement... c'est-à-dire, quant aux écoles dans le secteur privé versus les écoles dans le secteur public. J'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus.
M. Laurendeau (Serge): Bien, premièrement, dans le secteur privé, il y a beaucoup moins d'institutions anglophones. Je ne sais pas si c'est parce qu'ils sont satisfaits des services qu'on offre, mais beaucoup moins, beaucoup moins d'exode vers le système privé. Ça, c'est une chose. Et, bon, on n'en a pas parlé. Moi, j'en ai parlé un petit peu parce que je me dis: S'il y a des plans d'intervention qui vont exister, ça doit s'appliquer aussi dans le secteur privé de la même façon. Je pense qu'ils n'ont pas de conseil d'établissement au niveau des écoles privées. Bien, à ce moment-là, peut-être qu'ils devraient en avoir, si on veut s'assurer que le plan va être surveillé et transmis aux autres parents de l'institution. C'est dans ce sens-là qu'on dit que ce qui est bon pour nous devrait être aussi la même chose du côté des institutions privées.
M. Gaudreault: Considérant les adaptations nécessaires à faire, je comprends que vous êtes favorables plus à un copier-coller, je dirais, là, du projet de loi n° 56 sur les établissements publics quant aux établissements privés.
Vous avez également un propos concernant les sanctions pécuniaires qui sont apportées via l'article 21 et qui modifient l'article 477 de la Loi sur l'instruction publique. Pouvez-vous nous en parler un petit peu plus? Parce que nous, on s'est fait allumer, je dirais, ou on s'est fait brandir un carton jaune, là, un carré jaune sur la question que les sanctions pécuniaires pourraient ouvrir la porte à la ministre ou au ministre sur d'autres manquements, je dirais, quant à d'autres obligations, plus générales, sur la Loi de l'instruction publique.
M. Lombard (Alan): Oui. Ça nous apparaît être quelque chose d'ordre général, et ça pourrait permettre une punition à une commission scolaire, et cette punition-là aurait comme effet... Parce que ce n'est pas des corporations à but lucratif, mais c'est des commissions scolaires. Alors, si on coupe une subvention, bien c'est une classe ou un enfant qui va écoper et non pas... sauf dans l'exemple de mon collègue, le directeur général qui pourrait se voir couper... Mais à part de ça, si on coupe à une commission scolaire, on coupe dans quelque chose de réel et où il y a un besoin. Ce n'est donc pas une punition de cet ordre-là qui va aider, de notre point de vue.
M. Laurendeau (Serge): Pour poursuivre dans ce volet-là, si on coupe le 6 % de prime au directeur général et aux deux assistants, on vient de récupérer à peu près 18 000 $. Donc, peut-être qu'ils vont le réinvestir dans un plan et le mettre en place.
M. Gaudreault: C'est bien. J'aimerais vous entendre également sur, je dirais, l'espace d'application de la loi. Vous avez échangé quant à la question de la cyberintimidation. Quelle est votre compréhension quant au transport scolaire? Comment vous voyez l'application de la loi, là, dans le transport?
M. Laurendeau (Serge): Bon, j'ai travaillé également dans une école primaire où il y avait justement du transport scolaire et qu'il y avait beaucoup d'incidents qui se produisaient. C'est sûr que ça va demander du travail, du gros travail, de la part des conducteurs d'autobus, des chauffeurs d'autobus, d'en faire rapport à la direction puis qu'il y ait un suivi. Puis je trouve que c'est bien qu'il y ait le suivi, parce que dans le passé, souvent, bon, c'était souvent rapporté à la direction, et il n'y en avait pas, de suivi. Ma question: Je ne sais pas si le rapport qui va être fait à la direction va aussi être transmis, donc le rapport de la compagnie de transport, du chauffeur d'autobus, qui est transmis à la direction, s'il va aussi être transmis à la direction générale et au protecteur de l'élève. Parce que là je trouve que c'est important que ces rapports-là aussi soient... qu'il y ait un suivi pour s'assurer du suivi puis ensuite d'en faire une analyse. Je ne sais pas si la loi prévoit ça.
M. Gaudreault: Vous venez de faire mention du protecteur de l'élève. Vous êtes quand même assez... Bien, c'est-à-dire, vous avez un propos quand même assez élaboré, là. Vous dites qu'il faut prévoir que les tâches du protecteur de l'élève augmenteront considérablement avec le projet de loi n° 56. Vous dites également que le protecteur de l'élève doit demeurer le dernier recours pour toute plainte, dont l'intimidation. J'ai l'impression que vous n'allez pas complètement au bout de votre pensée quant à votre perception du rôle du protecteur de l'élève en vertu du projet de loi n° 56. Dites-nous-le clairement. Est-ce que vous croyez carrément qu'on ne devrait pas interpeller le protecteur de l'élève quant à ces situations-là ou que, oui, il devrait avoir un rôle dans le dossier, là?
M. Laurendeau (Serge): Moi, je le vois strictement en termes de rapports. Les incidents vont lui être rapportés à la fin, et le protecteur de l'élève peut juger, lui aussi, si le plan qui est à l'école est efficace ou non. Mais de lui faire rapport de chaque incident va considérablement augmenter sa tâche, ça, c'est évident.
M. Gaudreault: Mais de lui donner ce que vous venez de dire, là, un rôle d'évaluation à savoir si le plan est bon ou non, c'est quand même un élargissement assez considérable de son rôle actuel.
M. Laurendeau (Serge): Mais ça, c'est sur une base annuelle. Au lieu d'avoir une base qu'à chaque semaine, chaque jour, chaque fois qu'il y a un rapport de soumis au protecteur de l'élève, il doit... Là, c'est un rapport annuel, comme il est soumis à la ministre, au directeur général, pour voir, bon, est-ce que ce plan-là fonctionne ou non. Et là il peut intervenir auprès de la commission scolaire. C'est son rôle. Mais de lui mettre la responsabilité d'intervenir pour chaque action, parce que c'est la possibilité, là, ça n'a pas de bon sens.
M. Lombard (Alan): Nous, ce qui nous fait peur un peu dans tout cela, c'est l'idée qu'un parent va pouvoir se plaindre. Mais le parent mécontent -- puis ça existe -- va avoir, avec le projet de loi, un marteau pour frapper ici et là. Nous, on pense que le protecteur de l'élève, ça devrait être un dernier recours et non pas en ligne de compte dès le tout début, ce qui nous fait un peu peur. Pour certains cas, on peut exagérer énormément. Il ne faudra pas arriver à un résultat où tout le monde passe tout le temps sur quelques cas d'élèves non plus. C'est un peu ça que nous voulons dire.
M. Laurendeau (Serge): Et il pourrait y avoir justement les plaintes contre des enseignants aussi. Et la possibilité du parent d'aller directement au protecteur de l'élève empêche toute forme de résolution de conflit qui pourrait se faire au niveau de l'école, avec l'enseignant lui-même, avec la direction et avec la... Là, on contourne tout ça, puis on pense que ça pourrait créer des abus.
Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Marguerite-D'Youville.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, M. le Président. Merci de votre contribution à ce débat fort important. Moi, je vais revenir à une partie de votre mémoire, en page 3. Vous référez aux articles 75.1, 75.2 et 75.3 sur les responsabilités du conseil d'établissement et vous parlez d'approbation plutôt que d'adoption du plan. Je voudrais vous entendre de façon beaucoup plus précise. Comment vous voyez le rôle du conseil d'établissement en lien avec la contribution du personnel, que ce soit de l'équipe, ou de la coordination, ou du directeur de l'école?
**(11 h 50)**M. Laurendeau (Serge): Oui, c'est un mot, le mot «adopté», sur lequel moi, j'ai accroché, là, parce que dans le passé... On veut, d'après ce projet de loi là, que toute l'école, toute l'équipe-école travaille ensemble. C'est le but. Donc, il faut que ça parte de là. Puis il faut que ça parte aussi à partir des comités des étudiants. C'est important que les étudiants... Ce qu'il y a dans cette loi-là, au sujet d'ouvrir la porte aux étudiants, je trouve ça formidable parce que ça leur permet de s'impliquer. Bon. Mais, à partir du moment où l'école, les enseignants et la direction élaborent un plan et le soumettent au conseil d'établissement, eux, c'est pour approbation. Mais, si on parle d'adopter, ça veut dire qu'à ce moment-là ça pourrait partir de là. Eux pourraient avoir certaines exigences avec lesquelles le personnel enseignant et la direction ne seraient pas d'accord. Et là, bien, ça créerait un débat, plutôt que d'arriver à partir de la base puis... quelque chose qui est approuvé. C'est là qu'on fait la distinction pour éviter justement des abus qu'il pourrait y avoir. Puis c'est pour ça aussi qu'on mentionne que ça serait préférable, une politique centrale à la commission scolaire, basée sur ce qui est élaboré par le ministère. Là, il y a une commission scolaire. Les commissions scolaires élaborent leurs politiques. Puis de là les écoles développent les activités.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Est-ce que vous pensez que le mot «approbation» est suffisamment important pour répondre à cette lecture qui dit que la violence ou l'intimidation à l'école, ça appartient bien sûr à l'école, mais ça n'appartient pas qu'à l'école, et il faut que la communauté, les gens qui interfèrent autour soient partie prenante de correctifs qu'on a à apporter, tant au chapitre de la prévention que de l'intervention? Et est-ce que vous pensez qu'avec le mot «approbation» on donne un rôle suffisant au conseil d'établissement pour se sentir partie prenante à porter le plan d'intervention ou le plan d'action qu'on leur aura proposé à partir du travail de l'équipe-école?
M. Laurendeau (Serge): Bien, dans la loi actuelle, les règles de conduite de l'école sont approuvées par le conseil d'établissement. Donc, c'est la même chose, ils sont partie prenante, ils sont informés des règles puis, quand on dit «les approuvent», peuvent faire des suggestions aussi. Ça ne veut pas dire que c'est final quand ça arrive au conseil d'établissement. Donc, elles vont l'approuver. Elles peuvent faire des recommandations. Parce qu'il y a quand même des enseignants qui siègent sur le conseil d'établissement puis la direction, puis ils vont le ramener au conseil d'école des enseignants pour dire: Bien, écoutez, il y a ce point-là puis il a du bon sens. C'est là. Mais c'est toute la distinction entre ce qui va provenir de la base, aller vers les parents, qui vont collaborer ensuite. Mais le fait de le faire adopter, pour nous, peut amener une distinction. Mais déjà ça existe qu'ils approuvent les règles de conduite, et, bon, je ne vois pas le problème.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci. Je vais aller à une autre partie de votre mémoire, qui dit que «la mesure législative proposée pourrait imposer des tâches qui ne sont pas du ressort du personnel enseignant». Vous êtes une organisation syndicale. Je comprends très bien et je suis très sensible, d'ailleurs, à cet élément-là de votre rapport, bien sûr.
Une voix: Je ne sais pas pourquoi.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Je ne sais pas pourquoi. Il y a quelque chose qui reste d'une vie antérieure. Mais en même temps j'aimerais que vous nous en parliez un petit peu plus. Parce qu'on sait très bien que, dans un volet d'engagement à l'égard des jeunes qu'on dit peut-être un peu plus social, l'apport des enseignants, du personnel de l'école est toujours très important. Alors, quelles sortes de balises vous voulez mettre à la mise en place d'une coordination et d'une équipe, et à la contribution... Comment vous voyez la contribution du personnel enseignant, particulièrement, puisque ce sont ces gens-là que vous représentez, à l'intérieur d'une démarche comme le propose le projet de loi?
M. Lombard (Alan): Effectivement, on s'est posé un peu la même question parce que c'est difficile d'y répondre. Il y a d'autres corps d'emploi qui ont des responsabilités. Il ne faudra pas les toucher trop, trop. Il y a cet aspect-là. Il y a aussi un alourdissement de la tâche, et déjà les enseignants ont une tâche assez difficile. Tout cela dit, les enseignants sûrement... Et nous voudrions travailler ensemble pour contrer l'intimidation et la violence à l'école. C'est un bien pour tout le monde. Est-ce un individu qui peut être nommé coordonnateur de force ou par une décision du directeur, ou est-ce que c'est plus une responsabilité collective des enseignants, que tous les enseignants devraient assumer? C'est des questions qu'on se pose. Nous n'avons pas des solutions arrêtées, mais vraiment on voulait signaler que ce n'était pas aussi simple que de tout simplement indiquer que, bon, vous allez faire ça, vous, et qu'il faudrait peut-être, à un moment donné, négocier certaines conditions de travail pour ces individus-là qui seraient appelés à faire d'autre chose.
Le Président (M. Marsan): M. Laurendeau.
M. Laurendeau (Serge): Je sais pour le... Bon, le comité de coordination, ça prend la collaboration des autres catégories de personnel, les professionnels, le soutien. Il faut que ces gens-là travaillent avec les enseignants. Il faut que tout le monde... C'est une équipe. L'école doit être formée d'une équipe, puis tout le monde doit travailler ensemble pour s'assurer que le plan, tu sais, il va avoir au moins des résultats. Souvent, c'est peut-être ce qui arrive, souvent, on travaille en silo, les enseignants, les professionnels. Ça prend vraiment ça, à ce niveau-là, qu'il y ait une collaboration d'équipe.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, merci.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Merci à M. Laurendeau et M. Lombard pour nous avoir donné le point de vue de l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec, the Quebec Provincial Association of Teachers.
Et je voudrais vous rappeler qu'on ne peut laisser nos documents ou nos effets ici, dans la salle, puisqu'il y a une réunion.
Et, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes, vers 15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 57)
(Reprise à 15 h 36)
Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte. Et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 56, Loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école.
Cet après-midi, nous recevons le Service de police de la ville de Québec, Mme Émanuelle Després, l'Association des propriétaires d'autobus scolaires et l'Association du transport écolier.
Alors, nous allons débuter immédiatement. Il nous fait plaisir d'accueillir les représentants du Service de police de la ville de Québec et son directeur, M. Michel Desgagné, à qui je vais demander de nous présenter les gens qui l'accompagnent. Et vous avez par la suite une période de 15 minutes pour nous faire votre présentation.
Service de police de la ville de Québec (SPVQ)
M. Gingras (François): Oui. Bonjour. Pour fins de présentation, je remplace M. Desgagné. Mon nom est François Gingras. Je suis directeur adjoint affecté à la surveillance du territoire. Je suis accompagné de l'inspecteur Réjean Pleau, à ma droite, qui est commandant de poste de l'arrondissement Beauport-Charlesbourg et responsable du volet intervention jeunesse au Service de police de la ville de Québec, et de Mme Mylène Boutet, qui est criminologue, analyste en prévention au sein du Service de police de la ville de Québec.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Allez-y.
M. Gingras (François): Mme la ministre, Mmes et MM. les députés membres de la commission, mesdames et messieurs, nous vous remercions de nous accorder la possibilité de vous transmettre notre réflexion à propos du projet de loi n° 56. Le Service de police de la ville de Québec appuie l'initiative de la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport afin de lutter contre l'intimidation et la violence à l'école.
Le Service de police de la ville de Québec est le troisième en importance au Québec. Nous offrons les services de police de niveau 4 prévus à la Loi de police. Nous assurons les services de sécurité publique dans les limites de la ville de Québec et dans l'agglomération de Québec. Subséquemment, le SPVQ dessert les villes de Québec, Saint-Augustin-de-Desmaures et L'Ancienne-Lorette. Notre service se compose d'environ 800 policiers et 150 employés civils, répartis dans six établissements, dont quatre postes de police: Québec, Sainte-Foy, Charlesbourg et Haute-Saint-Charles. Une école de formation et un centre d'urgence à Beauport s'ajoutent aux quatre postes.
Le plan d'organisation du SPVQ mis en place lors des fusions de 2002 a créé des unités d'intervention jeunesse et de prévention dans chacun des postes de police. Ainsi, quatre unités d'intervention jeunesse et prévention ont été créées, lesquelles accueillent des agents de prévention, des policiers-écoles et des enquêteurs jeunesse.
Sur le territoire desservi par le SPVQ, les policiers d'écoles sont présents dans chacune des écoles secondaires publiques. Quant à elles, les écoles primaires sont desservies par les quatre agents de prévention qui ont la responsabilité de coordonner les activités de prévention au sein des écoles de leurs arrondissements mais aussi de la communauté.
**(15 h 40)** À Québec, le programme des policiers-écoles existe depuis les fusions, c'est-à-dire depuis environ 10 ans. Concrètement, un policier est responsable de deux ou trois écoles secondaires publiques dans lesquelles il se présente quotidiennement et intervient à plusieurs niveaux, tout d'abord au niveau de la prévention, par la tenue d'activités d'information et de sensibilisation, telles que la diffusion de conférences, et par sa présence dissuasive dans l'établissement. Ensuite, il assure une collaboration dans la vie pédagogique de l'école et intervient dans les cas d'intimidation, de taxage, de vol, de voies de fait, de possession de drogue, de fugue, etc. Le policier-école conduit également certaines enquêtes pour les activités de criminalité juvénile qui surviennent dans son école.
La présence des policiers dans les écoles s'est effectuée de manière graduelle et sans cadre formel. Le commandant de poste, le sergent responsable de l'unité jeunesse et le policier-école entrent en contact avec la direction des commissions scolaires et des écoles afin de convenir d'un modèle d'intervention à l'intérieur des écoles. Ces dernières s'assurent, quant à elles, de mettre à la disposition de son policier un bureau ou une salle de rencontre et élaborent, dans une approche communautaire, un partenariat entre les divers intervenants et les policiers. Pour sa part, le SPVQ propose aux écoles diverses initiatives de prévention, notamment des conférences, selon les orientations et les priorités prévues dans notre Plan directeur en prévention.
Le volet prévention. Principalement, le projet de loi préconise l'obligation du conseil d'établissement d'adopter un plan de lutte contre l'intimidation et la violence, en référence à l'article 4. En matière de prévention, il est donc entendu que le corps de police doit collaborer avec les écoles quant à l'intimidation, à la cyberintimidation et à la violence, offrant des activités d'ordre général ou particulier, selon les besoins de l'école et les disponibilités du corps de police. À cet égard, le SPVQ collabore déjà avec les établissements d'enseignement qu'il dessert, tel que prévu dans son Plan directeur en prévention 2011-2014, lequel est renouvelable aux trois ans et précise les priorités de prévention établies en fonction d'un diagnostic complet de la sécurité et de la criminalité.
Parce qu'il s'agit présentement d'une priorité au SPVQ, les agents de prévention offrent des activités de sensibilisation portant sur l'intimidation, la cyberintimidation et la violence dans les écoles primaires au besoin et selon leurs disponibilités, alors que les policiers d'écoles le font dans l'ensemble des écoles secondaires. Nous sommes donc d'avis que nous devons collaborer avec les écoles en matière de prévention de l'intimidation, de la cyberintimidation et de la violence, dans le respect de notre mission, de notre champ de compétence et de nos disponibilités. Nous jugeons donc que le corps de police a sa place en tant que partenaire dans la prévention et la lutte, mais il importe que son intervention demeure dans son champ d'activité.
En ce qui a trait au signalement, il est également entendu que la commission scolaire, en collaboration avec le corps de police, détermine les modalités d'un signalement ou d'une plainte concernant un acte d'intimidation, de cyberintimidation ou de violence. Actuellement, nous constatons un manque d'uniformité quant aux protocoles d'intervention en matière d'intimidation et de violence dans chacune de nos écoles. Résultat en est que les signalements sont parfois trop hâtifs, ou, à l'inverse, parfois tardifs, ou encore tout simplement inopportuns. Nous estimons que la présence de nos policiers dans les écoles secondaires incite parfois les membres de l'établissement à impliquer automatiquement le corps de police, alors que nous croyons qu'une évaluation de l'acte devrait être préalablement effectuée.
À notre avis, chaque incident doit être évalué cas par cas mais selon une procédure uniforme. Nous croyons donc qu'une grille d'évaluation comportant des facteurs à considérer devrait être élaborée de concert entre la commission scolaire et le corps de police, laquelle permettrait de cibler le moment opportun pour effectuer le signalement en cas d'intimidation, de... ou de violence.
De plus, parce que nous percevons une zone grise à l'heure actuelle, nous croyons que la commission scolaire et le corps de police devraient aussi élaborer conjointement la procédure d'intervention, les rôles et les responsabilités de chaque partie, dans les cas où les événements d'intimidation, de cyberintimidation ou de violence surviennent à l'extérieur de l'établissement scolaire mais leur sont tout de même rapportés.
Finalement, nous considérons que l'appel le plus tôt possible aux autorités policières est obligatoire dans toute situation jugée urgente et lorsqu'il y a une arme à feu ou une imitation d'une arme à feu, et ce, directement au 9-1-1, même si des policiers sont présents en permanence dans certaines écoles secondaires, comme c'est le cas à Québec.
À cet égard, depuis quatre ans, le SPVQ offre au personnel scolaire le programme Tireur actif, qui porte sur la présence policière dans les établissements scolaires en contexte d'urgence. Par ce programme, nous collaborons à la mobilisation du milieu scolaire en leur donnant des conseils de prévention et de sécurité les sensibilisant à une intervention globale intégrée dans leurs plans d'urgence. Notre approche est donc de soutenir le personnel en les préparant mentalement à ce genre de situation.
De plus, la présence de nos policiers dans les établissements scolaires apporte un niveau de sécurité supplémentaire advenant une telle situation. Nos policiers sont formés afin d'intervenir, d'isoler ou de neutraliser toute source de danger qui pourrait se manifester dans ces institutions. Leur présence se veut donc rassurante, tant pour les élèves et leurs parents ainsi que pour le personnel scolaire.
Au niveau du volet entente, le projet de loi stipule qu'«une commission scolaire et l'autorité de qui relève chacun des corps de police desservant son territoire doivent conclure une entente concernant les modalités d'intervention des membres du corps de police» -- référence à l'article 16. Concernant cette disposition, nous tenons à préciser qu'en regard au Cadre de référence sur la présence policière dans les établissements d'enseignement, le SPVQ a déjà des ententes formelles, mais non écrites, avec les écoles qu'il dessert. Celles-ci précisent les rôles et responsabilités des deux parties mais permettent aussi de s'adapter à la réalité de chacune des écoles. Compte tenu de leurs particularités, que ce soit au niveau des problèmes vécus, de la clientèle qui fréquente l'établissement ou des ressources qui y sont disponibles, nous estimons que les modalités d'intervention diffèrent d'une école à l'autre, donc les ententes aussi. Ainsi, nous sommes d'avis que de telles ententes se doivent d'être conclues entre le corps de police et la commission scolaire mais qu'elles doivent laisser une latitude suffisante d'adaptation des interventions selon les particularités de l'établissement ou de l'acte commis.
Loi sur l'enseignement privé. Finalement, le projet de loi reprend les mêmes dispositions quant à la collaboration du corps de police dans l'adoption d'un plan de lutte contre l'intimidation et la violence pour les établissements d'enseignement privé -- référence à l'article 23. À Québec, nos policiers-écoles sont présents dans les écoles secondaires publiques seulement. Les écoles secondaires privées ne disposent donc pas de la présence dissuasive des policiers d'écoles dans leurs établissements. Par contre, toutes les écoles privées peuvent faire appel à nos agents de prévention afin d'obtenir toute forme de collaboration, entre autres sur l'intimidation, la cyberintimidation et la violence. Nous voulons tout de même préciser que ce service n'est pratiquement jamais utilisé, et nos policiers sont rarement appelés à l'intérieur des écoles privées de Québec. Puisque nous offrons déjà cette collaboration aux écoles privées, nous appuyons également ces dispositions du projet de loi.
En résumé, le SPVQ appuie l'initiative du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport afin de lutter contre l'intimidation et la violence à l'école. Parce que la lutte à l'intimidation et à la violence constitue actuellement une priorité pour le SPVQ et considérant les nombreux efforts qui sont déjà mis de l'avant dans les écoles que nous desservons, nous jugeons que le corps de police a effectivement sa place en tant que partenaire dans la prévention et la lutte à l'intimidation et la violence à l'école. Mais il importe que son intervention respecte sa mission et demeure dans son champ d'activité.
À notre avis, il est avantageux que des ententes soient établies entre le corps de police et les commissions scolaires qu'il dessert, lesquelles doivent cependant demeurer flexibles aux particularités des écoles. De plus, elles doivent préciser les modalités de signalement des incidents en se basant sur une série de facteurs à considérer pour optimiser les efforts de tous. Merci.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie beaucoup. Nous allons débuter immédiatement notre période d'échange. Et je vais céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Bienvenue. Merci de votre contribution à nos travaux. Vous savez que vous serez pratiquement les seuls représentants de forces policières qui viennent nous porter cet éclairage qui est vraiment nécessaire, donc je veux prendre le temps de remercier les services policiers de la ville de Québec d'être avec nous.
Vous insistez sur la notion de respecter les missions respectives du réseau de l'éducation et de la sécurité publique, des services policiers. Est-ce que vous pouvez m'illustrer de façon encore plus concrète ce que vous entendez par là? Quels seraient les engagements qu'on vous demanderait que vous considéreriez comme étant à l'extérieur de votre mission? Donc, j'aimerais ça avoir un éclairage supplémentaire sur cette affirmation, là, qu'on doit respecter les missions respectives.
M. Gingras (François): O.K. J'invite mon collègue M. Réjean Pleau, qui est dans le projet policier-école, intervention jeunesse depuis plus de 20 ans, à répondre à votre question, parce qu'on a fait certaines études ou certaines recherches en prévision de cette question.
Le Président (M. Marsan): Alors...
Mme Beauchamp: J'ai compris que votre collègue a sursauté en réalisant que ça faisait déjà 20 ans.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Marsan): M. Pleau.
**(15 h 50)**M. Pleau (Réjean): Mme la ministre, lorsqu'on a débuté avec nos policiers-écoles, il y avait une peur que nos policiers-écoles remplacent un peu les agents de sécurité, remplacent les travailleurs sociaux, les psychologues. Donc, lorsqu'on a fait la formation, on a précisé à nos policiers que leur rôle n'était pas de commencer à faire du travail social. Leur rôle est de rencontrer les jeunes, faire la prévention et par la suite de les reconduire aux ressources qui sont là pour ça. On a, à l'occasion, des cas où on nous demande d'intervenir. Comme par exemple, on a un jeune de huit ans qui fait de l'intimidation. Bon, huit ans, on ne peut pas accuser, on n'a aucun pouvoir dans ça. Donc, nous, on considère que c'est plus du travail social. Donc, c'est plus dans ce sens-là où on dit que chacun devrait avoir son champ d'expertise.
Et il y a des occasions où on utilise la police pour faire peur, et ça, de nos jours, on ne peut plus faire ça. J'espère que ça, c'est bien clair pour tout le monde ici. Donc, faire peur, c'est quelque chose qu'on ne fait plus depuis plusieurs années. Et vous comprenez probablement pourquoi.
Lorsqu'on a commencé à travailler de plus en plus avec les intervenants dans les milieux scolaires, on a essayé d'identifier quels étaient nos champs d'expertise, et, dépendamment avec qui on travaille, ce n'est pas toujours la même chose. Donc, on ne veut pas imposer, on ne veut pas arriver avec nos gros souliers. On veut collaborer, on veut vraiment aider la jeunesse. Mais des fois on a un petit peu de misère à s'entendre sur certains points. Donc, on peut travailler d'une certaine façon dans une commission scolaire et travailler d'une façon différente dans une autre. Donc, on aimerait ça, une certaine façon, peut-être en ayant des outils qui nous permettraient vraiment d'établir à quel moment on fait appel aux policiers et à quel moment c'est dans la cour de la commission scolaire, par exemple.
Au niveau du territoire, au niveau de ce qui touche l'école, est-ce qu'aux alentours de l'école... est-ce que ça appartient encore à l'école? Est-ce que c'est la police qui le fait? Est-ce qu'au niveau du trajet scolaire... est-ce que c'est encore la police? Est-ce que l'école a un bout là-dedans? Vraiment, l'autobus scolaire, ce qui se passe à l'intérieur, à qui ça appartient, tout ça? Donc, on aimerait que ce soit bien clarifié puis qu'on puisse travailler tous de la même façon, là, dans ces projets-là.
Mme Beauchamp: Premièrement, je veux vous remercier, parce qu'on sent, à travers votre mémoire, une volonté vraie de collaborer et d'être partenaires. Et je veux le souligner comme ministre de l'Éducation. Je pense que c'est vraiment apprécié.
Maintenant, est-ce que je peux avoir votre opinion sur les différents enjeux que vous venez de nommer? Il a été maintes fois ici question du fait que l'intimidation parfois se passe ailleurs qu'à l'école mais a des répercussions à l'école, et toute cette question entre les responsabilités de l'école et de l'équipe-école, la responsabilité parentale, la responsabilité de d'autres acteurs, dont, par exemple, le milieu communautaire, la prévention et la responsabilité des forces policières. Reprenons des exemples concrets que vous avez présentés, à savoir le transport scolaire ou encore ce qui se passe à proximité de l'école, dans un parc adjacent par exemple. Quel éclairage pouvez-vous nous proposer pour qu'on puisse rédiger un projet de loi, là, qui est le meilleur possible, qui est respectueux des missions respectives mais qui fait régner l'intérêt de l'enfant, là? Ça demeure ça, la volonté de tous.
M. Pleau (Réjean): Je vais faire une première partie de votre réponse, puis je céderai la parole, après ça, à Mme Boutet. La première partie, concernant l'intervention du policier-école, on a mis un policier-école là pour qu'il ait l'information de ce qui se passe à l'extérieur de l'école, pour qu'il soit en mesure d'intervenir dans l'école. Donc, les problèmes que les jeunes vont avoir, par exemple dans un parc la fin de semaine, bien c'est ces mêmes jeunes là qu'on retrouve à l'école et c'est les mêmes problèmes qui sont amenés à l'école, bien souvent. Donc, la proximité du policier-école dans ce milieu-là nous permet d'avoir l'information de nos patrouilleurs, qui la transmettent à notre policier-école, et que par la suite il y a de l'information qui est échangée avec les professionnels du milieu scolaire.
Mme Beauchamp: ...juste, avant de... une précision. Quand vous, vous parlez de policier-école, là, qu'est-ce qu'on doit comprendre? Est-ce que vous êtes en train de parler d'un policier qui à temps plein est à l'intérieur des murs de l'école...
M. Pleau (Réjean): Oui, Mme la ministre.
Mme Beauchamp: ...ou si vous parlez d'un policier qui est identifié pour être un peu l'intervenant auquel peut faire appel une école? Parce que moi, je ne sais pas, dans votre réalité à vous, ça veut dire quoi, un policier-école. Est-ce que c'est imaginable de retrouver ça dans toutes les écoles du Québec, là? Puis est-ce que c'est souhaitable, même? Donc, c'est quoi, le policier-école, pour vous?
M. Pleau (Réjean): Pour notre service, le policier-école est vraiment présent dans l'école. Il a un bureau là. Il a un horaire qui est fait, donc le directeur de l'école sait que, le lundi, il est là de telle heure à telle heure. Bon, c'est sûr qu'on n'en a pas assez pour couvrir l'ensemble de nos écoles. Donc, on essaie de regarder certains paramètres, par exemple sur le nombre d'élèves, sur les problématiques du milieu, sur le nombre de dossiers qu'on a dans ce secteur-là, et on essaie de donner le meilleur service possible avec les ressources qu'on a. Donc, un policier peut avoir quelquefois trois écoles. Il est vraiment présent dans l'école. Le matin à 8 heures, il est à l'école. Il a son bureau là et il rencontre des jeunes dans son bureau. Il fait partie de la vie étudiante, carrément.
M. Gingras (François): Juste pour préciser, le policier est en uniforme, équipement complet, véhicule identifié, gyrophares. Donc, c'est un patrouilleur qui est spécialisé pour travailler à l'école. Ça aussi, on questionne parfois la réaction... la présence, d'être en uniforme. Donc, c'est avec un horaire complet puis il va faire son travail quotidiennement, là.
Donc, pour répondre aussi à la question quand vous parlez de différentes problématiques -- je vais céder la parole -- c'est... juste au niveau des vitesses également, au niveau du parc, au niveau de toutes les problématiques autour de l'école, on traite de façon communautaire, de façon globale... on ne se limite pas à une intervention uniquement pour l'école. Puis même à la ville de Québec, souvent, on... le parc, le parc-école, tout ce qui se passe selon... il faut gérer même avec nos brigadiers scolaires, transporteurs... il faut travailler ça dans sa globalité.
Ça peut arriver également, dans certains cas, qu'un patrouilleur va aller assister son policier-école parce que la problématique ou l'activité est d'envergure. Ça fait qu'il y a un partenariat qui se fait à ce niveau-là également, au niveau du travail policier-école.
Le Président (M. Marsan): Mme Boutet.
Mme Boutet (Mylène): Non, mais je pense qu'en fait tout a pas mal été dit. Concernant le policier-école, qu'est-ce qu'on voit quand on interroge les membres... le personnel scolaire, c'est vraiment le côté légal, les informations que les intervenants n'ont pas ou des réponses à des questions des jeunes qui ne peuvent pas être données par l'intervenant, le TES ou l'enseignant lui-même. Donc, le policier-école va apporter un éclairage aux jeunes qui auraient des questions, vont être portés à aller dans son bureau, aller cogner, prendre des informations. Parfois, ils établissent une attitude de relation de confiance avec un policier qui est très bien identifié, en uniforme, mais ça va apporter... ça va répondre beaucoup à des questions des jeunes. Puis, je pense, juste en étant présent, ça a un côté dissuasif, ça a un côté informatif et ça apporte un petit plus, là, en ayant le policier très bien identifié, avec son bureau, puis très ouvert. Il est présent dans les salles, là, quand c'est des pauses, quand c'est l'heure du dîner, il va discuter avec les jeunes. C'est vraiment... c'est un membre de l'équipe de l'école, carrément.
M. Pleau (Réjean): On a également travaillé sur les problématiques des intrus, donc les jeunes qui vont essayer d'entrer dans l'école. Bien souvent, c'est des chums des jeunes demoiselles qui sont en secondaire IV, V. Donc, on a fait modifier nos règlements municipaux pour nous faciliter l'application de ce règlement-là. Donc, on s'est arrangés avec une commission scolaire. Il y a des plans et des mises en demeure, des déclarations qui sont faites, quand ils sont vus la deuxième fois, et nous, on émet carrément une infraction. Donc, on émet un billet, et la plupart du temps ça règle nos problèmes. Et ça, ça a été vraiment quelque chose, pour les commissions scolaires, qu'ils ont vraiment apprécié parce qu'ils avaient beaucoup de problèmes à contrôler ces jeunes-là. Donc, ça, c'est une façon qu'on a faite, mais c'est en parlant avec eux autres.
Un deuxième projet qu'on a commencé à travailler avec eux, c'est avec la table régionale, justement pour voir elle est où, la zone par rapport à la dénonciation pour l'intimidation. À quel moment ça relève de la commission scolaire et à quel moment on devrait faire participer les policiers? Donc, là-dessus, je laisserais encore la parole à Mme Boutet, pour vous expliquer un petit peu qu'est-ce qu'on a commencé à faire avec ça. Et on aimerait beaucoup ça que ça soit peut-être provincial un jour.
Mme Boutet (Mylène): C'était une volonté d'une commission scolaire en particulier. Donc, nous, au service, on a des conseillères en prévention qui sont des constables. Une de ces constables-là est allée s'asseoir avec eux pour voir à élaborer une espèce d'outil d'aide à la décision, donc, selon un cas d'intimidation qui survient dans l'école, des espèces de facteurs à considérer, où là il y aurait soit une pondération ou une évaluation qui serait faite, où là, bien ça, c'est un cas où automatiquement on appelle la police, alors que celui-là, c'est sûr que non, c'est plus au niveau de l'école. Ça fait qu'on a nommé une certaine série de facteurs qui étaient à considérer, oui, concernant l'incident: Est-ce qu'il y a des blessures? La gravité? Est-ce que c'est répétitif? Est-ce que c'est la première fois? Est-ce qu'il y a déjà eu des sanctions auprès de ce jeune-là au niveau de l'école? Et aussi les caractéristiques des jeunes, autant de la victime que du suspect: Est-ce que c'est un jeune qui est plus vulnérable, plus à risque selon sa condition?
Alors, on croit, avec cette table-là, qu'on serait capables de monter une espèce d'outil d'aide à la décision, pour les commissions scolaires et pour les écoles, qui serait assez uniforme pour que tout le monde s'entende sur les mêmes balises, là, de l'intervention de la police mais qui permet du cas par cas, selon chaque incident, selon chaque jeune, vraiment d'évaluer... Parce que chaque école a ses particularités et sa clientèle, donc on ne veut pas non plus cadrer mais laisser une liberté en donnant une structure assez commune, là, à toutes les écoles. Ça fait que ça, c'est une expérience, là, qui avait été faite avec une commission scolaire, là, qui est en travail, là, encore, présentement.
**(16 heures)**Une voix: Trois minutes...
Mme Beauchamp: Juste trois minutes? J'ai bien compris que vous étiez déjà ouverts à partager le fruit de ce travail-là avec l'ensemble... Ça pourrait être, par exemple, mis sur le site Internet du ministère comme un outil de plus à la disposition de l'ensemble des commissions scolaires qui ont à travailler dans le cadre des ententes qu'on propose.
J'ai besoin de vous entendre sur la cyberintimidation. On nous dit, par exemple, que, s'il y a un cas où on doit faire fermer des pages Facebook, prenons cet exemple-là, que les citoyens peuvent, je dirais, vous demander un support. Est-ce que c'est bien le cas? Et vous pouvez peut-être nous parler de ce que vous pouvez proposer comme service. Ou enfin quel est, là encore, le partage des missions entre le milieu de l'école, la responsabilité parentale et, par exemple, les services policiers dans des cas de cyberintimidation?
M. Pleau (Réjean): Nos policiers-écoles rencontrent déjà beaucoup de jeunes en prévention. Beaucoup de ces rencontres-là sont orientées vers la cyberintimidation. C'est quelque chose de très commun dans nos écoles, malheureusement. La plupart du temps, suite à ces rencontres-là, les problèmes se règlent à peu près à 80 %. Ça prend énormément de temps, énormément de ressources, et, lorsqu'on doit se mettre à enquêter tout ça, c'est là que ça devient compliqué. Parce que les serveurs peuvent se retrouver un peu partout dans le monde, donc l'obtention de mandats de perquisition, etc., c'est assez compliqué. Mais la plupart de nos dossiers sont réglés au niveau des policiers-écoles quand on parle d'étudiants qui intimident d'autres étudiants. Là, si on parle d'adultes qui font de la cyberintimidation, bien là c'est une autre problématique, qui est traitée de façon très différente par nos enquêteurs.
Mme Beauchamp: Il me reste peu de temps, puis j'ai une dernière question pour vous. Il y a des directeurs d'école, des associations de directeurs d'école qui sont venues nous dire que les ententes prévues dans la loi devraient être signées école par école plutôt qu'avec une commission scolaire. Je vous le dis, là, moi, ça m'apparaît fastidieux, pour les services policiers, de signer des ententes avec les écoles. Mais quel est votre éclairage? Est-ce que vous souhaiteriez, vous, être appelés à signer des ententes école par école? Parce que vous avez un plaidoyer pour que les modalités d'intervention soient quand même modulées pour chaque milieu puis en même temps vous avez un plaidoyer, en même temps, sur une forme d'uniformisation, avec une grille de décision, etc. Donc, je veux bien comprendre votre mémoire. Donc, qu'est-ce que vous répondez aux directeurs d'école qui disent: Ça devrait être école par école et non pas avec la commission scolaire?
Le Président (M. Marsan): En terminant.
M. Gingras (François): Moi, comme direction du service, c'est évident, quand j'ai rencontré tous les directeurs généraux de commission scolaire et les directeurs d'école, d'avoir un cadre commun, c'est plus facilitant. Quand je vais du côté terrain, eux me disent: École par école ont leurs particularités. Ça fait qu'il faudrait être un peu mitoyen, avoir peut-être une forme, ce qu'on dit dans notre mémoire, d'avoir une forme qui est plus provinciale, sans nécessairement laisser de côté certaines particularités qu'il y a dans certaines écoles. Et là je cède la parole. Concernant les particularités, on a des fois... c'est très différent d'un secteur à l'autre.
Mme Beauchamp: On a peu de temps, mais...
Le Président (M. Marsan): Oui, on pourrait revenir...
Mme Beauchamp: On a peu de temps, mais moi, j'ai compris que ça pourrait être un cadre général signé avec la commission scolaire, et rien n'empêche que des ententes formelles comme vous avez déjà, qui ne font pas l'objet d'une signature, pourraient être faites par école.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Nous poursuivons notre période d'échange. Et je vais céder la parole à M. le député de Jonquière, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire. M. le député.
M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup de votre présence. C'est très, très éclairant, parce qu'effectivement vous êtes les seuls constables, les seuls policiers à venir nous rencontrer dans le cadre de l'étude de ce projet de loi, et je vous en remercie.
Peut-être, juste en cascade quelques petites questions un peu plus techniques pour bien comprendre. Votre modèle d'intervention ici, dans la capitale nationale, à Québec, est-ce qu'il s'applique ailleurs, dans d'autres régions, à votre connaissance?
M. Gingras (François): Le même modèle, on nous dit que non. Donc, la...
M. Gaudreault: O.K. Vous avez vraiment un projet unique au Québec.
M. Gingras (François): Oui. La présence de policiers-écoles de façon aussi importante, c'est-à-dire de dégager nos... On a environ 13 policiers à temps plein qui ne font que ça dans une trentaine d'écoles secondaires publiques. On est uniques, je crois.
M. Gaudreault: Mais, selon ce que vous en savez avec vos contacts, j'imagine, dans votre fraternité, là, de policiers à travers le Québec, est-ce qu'il y a des initiatives, sans être tout à fait du copier-coller de ce que vous faites, qui se ressemblent dans d'autres commissions scolaires?
M. Pleau (Réjean): Au niveau de la Sûreté du Québec, eux, c'est plus un policier qui a la responsabilité des écoles. Donc, il a plusieurs tâches, et ça, ça en fait partie, d'une de ses tâches.
M. Gaudreault: O.K. Maintenant, est-ce que ça... Je comprends, dans votre mémoire, là, vous parlez, depuis la fusion de 2002, que vous avez créé des unités d'intervention jeunesse. Mais peut-être que je n'ai pas été assez attentif, là, mais dans votre... vous êtes présents dans les écoles avec ce modèle de policier-école depuis combien de temps?
M. Gingras (François): Je vous dirais que, dans l'ancien service de police de Sainte-Foy, le programme existait déjà. Mais on l'a pris à la fusion puis on le maintient depuis plus de 10 ans dans la formule actuelle, c'est-à-dire que toutes les écoles sont visitées.
M. Gaudreault: Alors, depuis 10 ans ou depuis que vous êtes capables de compiler les choses, êtes-vous capables, autant qualitatif que quantitatif, de nous communiquer ce que vous avez constaté comme évolution ou non, ou à tout le moins comme changement, dans les pratiques d'intimidation? Autant en termes de nombre et en termes de... -- peut-être, là, c'est Mme la criminologue qui peut plus le dire -- sur les causes de l'intimidation?
M. Pleau (Réjean): Je commencerais peut-être avec la notion de bilan. Ce qu'on a remarqué depuis 10 ans, premièrement, c'est qu'on a sorti les stupéfiants des écoles. Donc, avant, il se vendait beaucoup de stupéfiants à l'intérieur de l'école. Maintenant, avec les interventions des directeurs d'école et notre participation, il n'y en a presque plus à l'intérieur de l'école. Les jeunes vont aller à l'extérieur consommer, ils vont aller à l'extérieur pour vendre. Mais au moins le milieu est plus sécuritaire qu'il l'était il y a 10 ans, en ce qui nous concerne.
Maintenant, cyberintimidation ou intimidation tout court, lorsque le policier est à l'école, c'est difficile de commencer à intimider, le policier est là. Le policier va intervenir directement. Il va dire: Toi, viens avec moi, j'ai besoin de te parler. Donc, ça aussi, on a vu une différence au niveau de nos plaintes. Donc, bien entendu, l'intimidation va se faire beaucoup plus par Internet, maintenant, que l'intimidation directe. Ça, on s'est aperçus de ce changement-là aussi. Et, avec la cyberintimidation, bien la personne qui intimide, c'est un petit peu facile, en même temps, parce qu'elle est cachée en arrière de son écran. Donc, il y a comme un sens d'anonymat, si vous voulez.
Pour le reste, je laisserais Mme Boutet.
Mme Boutet (Mylène): Je n'ai pas... Je veux juste rajouter: Il y a comme deux sens à ça. C'est que, oui, le policier, en étant présent dans l'école, va être là pour constater beaucoup de choses qu'on n'aurait pas sues ou qu'on n'aurait pas vues s'il n'avait pas été là. Donc, oui, il va pouvoir régler le problème assez rapidement. Mais ça fait en sorte qu'on a l'impression qu'on a plus de cas de violence ou d'intimidation entre jeunes aussi. Ça fait que c'est difficile pour nous vraiment d'établir si ça a diminué ou augmenté, là, le nombre d'événements d'intimidation. Mais ce qu'on sait, c'est qu'ils règlent pratiquement toujours le cas, là, à la première intervention, étant donné qu'ils sont présents dans l'école.
M. Gingras (François): Si je peux compléter, monsieur, s'il vous plaît, moi, au niveau des directions d'école, ce qu'on me rapporte, de la part des directeurs d'école, c'est tout le lien qui se crée avec le policier. C'est difficile, dans une situation d'intimidation, même, des fois, de menace... Est-ce que j'appelle la police, je n'appelle pas la police? Souvent, on n'appelait pas la police. Maintenant, le fait d'avoir un policier dans l'école, le directeur d'école, ou son intervenant, ou un professeur va aller voir le policier, et ils vont convenir d'une approche communautaire, ce qui était difficile à faire, parce que, faire venir une voiture, on n'a jamais le même policier, on intervient comment? Il y a toute cette stratégie-là qui s'est développée avec les années. Il y a 10 ans, on est rentrés un peu sur le bout des pieds. Aujourd'hui, on est présents, on fait partie de l'école, on fait partie de la vie communautaire. Et il se crée un lien entre la direction d'école et le policier, en lien avec des problématiques. À quel moment j'appelle? Et c'est là, dans notre mémoire, qu'on dit à la ministre qu'on doit peut-être essayer de définir un cadre, parce que dans quelle situation on fait affaire ou dans quelle situation on ne judiciarise pas, et tout ça? Ça fait que c'est là que c'est... Moi, je pense que l'accessibilité et la bonne entente avec le policier-école et les directions ou le personnel de l'école ont facilité beaucoup les choses pour intervenir immédiatement.
**(16 h 10)**M. Gaudreault: Peut-être que j'ai une perception archaïque des policiers -- et je vous confesse que je suis moi-même fils de policier mais qui était d'une autre génération -- puis je joue l'avocat du diable, là, mais avoir un policier qui se promène dans l'école -- je ne sais pas si vous avez votre arme avec vous pendant que vous êtes à l'école...
Une voix: ...
M. Gaudreault: ...donc vous me dites que oui -- alors est-ce que ça ne peut pas, comment je pourrais dire, nuire à la prévention, d'une certaine manière? Je vous dis ça comme ça, parce qu'on identifie davantage le policier... Puis là, je vous le dis encore, c'est peut-être mon image archaïque de, bon, la coercition, la punition, faire peur, vous l'avez dit tout à l'heure. Alors, moi, j'essaie juste de m'imaginer, là, de me reporter dans les années 80, quand j'étais moi-même ado, là, s'il y avait un policier dans l'école. Est-ce que vous avez ce type de remarques là de la part des élèves ou même des parents? Ou est-ce qu'il y a des profs qui réagissent à ça? Et comment vous vous positionnez par rapport à ça? Et, peut-être plus globalement, quelle formation ont les policiers avant d'entrer dans l'école?
M. Pleau (Réjean): Il y a 10 ans, quand on a commencé le programme, on avait les mêmes commentaires: Un policier armé dans l'école, ça n'a pas de bon sens, ça va contre les règles de vie de l'école. Donc, on a commencé comme ça. On a expliqué aux directions d'école qu'on voulait démystifier un petit peu le policier, donc le policier bête et méchant, si vous me permettez, là. Donc, nos policiers, on les a formés d'une certaine façon. On les a formés avec les approches avec la nouvelle Loi sur le système de justice pénale pour adolescents. Et dans cette loi-là, bien, le policier a certaines mesures qu'il peut appliquer lui-même. Ensuite, on l'a impliqué dans la vie scolaire. Donc, le policier des fois, sur l'heure du dîner, il va jouer au basketball avec les jeunes, il va aller dîner avec eux à la cafétéria. Ce n'est pas un agent de sécurité. Notre policier, vraiment, il fait partie de la vie étudiante. Depuis 10 ans, on n'entend plus aucun de ces commentaires-là. C'est rendu normal. Et même qu'au début de l'année les parents sont contents de savoir qu'il y a un policier armé dans l'école pour sécuriser leurs enfants. Donc, on en est rendus là présentement dans cette mentalité-là.
Nos policiers, on les a formés également en enquête. Donc, ils ont un bloc d'enquête, là, qu'ils font. C'est des cours universitaires, donc droit pénal, tous les différents niveaux d'enquête. Donc, cette partie-là, c'est une partie qui est obligatoire pour des enquêteurs, et là on l'applique aux policiers-écoles, donc, dans les approches qu'ils font, pour être certains que l'approche qu'ils vont utiliser avec le jeune est légale. Et il y a toujours la collaboration avec les parents. Donc, la façon qu'on travaille avec les jeunes, c'est assez particulier, parce que bien souvent c'est nous autres qui vont appeler les parents pour expliquer ce qui se passe. Et les rencontres, bien, se font avec les parents aussi.
M. Gaudreault: Alors, je comprends que ce n'est pas une affectation non plus que vous faites de tous les policiers, là. Je veux dire, ça prend quand même un intérêt de la part du policier ou de la policière lui-même ou elle-même.
M. Pleau (Réjean): C'est un processus qui est très difficile. Donc, on a souvent une quarantaine d'applicants et on fait des listes d'environ 15 à 17. Donc, ce n'est pas n'importe qui qui peut devenir policier-école.
M. Gaudreault: Je veux poursuivre un peu dans le même sens que la ministre a abordé tout à l'heure et que vous n'avez pas eu le temps de compléter nécessairement. Je pense que vous faites souvent référence à votre cadre d'intervention. Vous parlez de l'importance d'une grille d'évaluation qui comporte des facteurs à considérer. Mais en même temps, un peu comme la ministre, moi aussi, j'ai constaté une apparente contradiction. Parce que vous dites, à la page 3, qu'il y a «un manque d'uniformité quant aux protocoles d'intervention en matière d'intimidation et de violence». Je considère que... Je comprends ça comme vous dites un manque d'uniformité sur l'ensemble du Québec. Et à la page 4, en bas, vous dites que là il faut «laisser une latitude suffisante d'adaptation des interventions selon les particularités de l'établissement ou de l'acte». Alors, comment on peut concilier le manque d'uniformité que vous déplorez et ce besoin de latitude là? Moi, il y a une contradiction là qui m'apparaît assez importante, là.
M. Pleau (Réjean): Dans les milieux scolaires, on a souvent des différences assez marquées. On a des écoles où il y a des cheminements particuliers, qui sont une catégorie un petit peu à part, et on a des écoles où il y a la francisation, donc on se retrouve avec un nombre élevé d'immigrants qui ont une culture bien souvent très différente de la nôtre, que bien souvent on doit s'adapter aussi pour intervenir. Moi, j'ai déjà intervenu chez une famille bosniaque. La dame était en panique quand je suis rentré chez eux, là. Elle pensait que je partais avec leur enfant. Donc, tout ça, là, on en tient compte quand on intervient. Donc, d'avoir un cadre très, très rigide qui nous obligerait à intervenir tout de la même façon dans chaque école, ça ne serait pas facilitant pour nous ni pour la direction de l'école. Donc, c'est dans ce sens-là. L'autre partie, c'est que ça nous prend un cadre qui va nous donner une partie de ce qu'on devrait faire. Puis peut-être que ma consoeur pourrait m'aider là-dedans.
Mme Boutet (Mylène): Bien, c'est peut-être juste de là, par exemple, l'espèce d'outil d'aide à la décision, de dire: Oui, on s'entend pour qu'au niveau de la commission scolaire tout le monde utilise une grille de facteurs à considérer qui sont sensiblement les mêmes, qui vont être utilisés partout au niveau des écoles qu'on dessert, mais que, selon le cas ou selon l'école, ils vont évaluer eux-mêmes la situation et là faire appel à nous, à quel moment et dans quelle situation. Ça fait que c'est plus d'amener des lignes directrices qui vont être pareilles partout, une espèce de façon de faire mais qui va être applicable, là, selon le cas et aux particularités des écoles.
M. Gaudreault: Mais est-ce que vous ne trouvez pas que l'article 4 de la loi, du projet de loi, où on parle... on détaille le plan de lutte et les éléments qu'il doit comporter, et la définition également -- quoiqu'il y a une définition qui est prévue dans le projet de loi sur l'intimidation, mais il n'y en a pas sur la violence -- est-ce qu'à la fois cette définition et le plan de lutte qui est prévu à l'article 4 du projet de loi ne seraient pas justement cette grille-là que vous réclamez?
Mme Boutet (Mylène): Oui, mais... En fait, peut-être que oui, mais, moi, le côté où il peut y avoir des disparités, c'est qu'il y a certaines commissions scolaires qui ont fait appel à nos services pour siéger sur leurs comités pour le plan d'action pour contrer la violence à l'école, alors que d'autres, non, c'est différent. Malgré le fait que chacun veuille mettre en place leur plan, certains ont fait appel à nous, d'autres, non. Certains ont des idées ou des façons d'écrire, d'autres, c'est différent. Alors, c'est là, dans le sens où il faudrait qu'il y ait une espèce d'uniformité.
Le Président (M. Marsan): Alors, Mme la députée de Marguerite-D'Youville, vous avez maintenant la parole.
Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, M. le Président. Bienvenue. Merci de votre contribution. Je comprends très bien le rôle que vous jouez comme policiers-écoles dans l'établissement scolaire avec l'équipe-école, à l'intérieur de l'équipe-école, comme faisant partie de l'équipe-école et auprès des jeunes. Maintenant, j'aimerais vous entendre un peu plus sur comment vous voyez votre responsabilité puis, à l'expérience de 10 ans, votre rôle auprès des parents. Et, sous-question, comment vous réagissez à un enfant qui, dans le cadre d'un échange avec vous, manifeste énormément de réserves à l'effet que ses parents soient informés, non pas... des réserves que vous pouvez jouer... juger sérieuses, qui peuvent mettre en péril... qui peuvent accentuer l'intimidation parce que le rapport avec la famille est difficile? Comment... Je veux vous entendre là-dessus.
M. Pleau (Réjean): Bien, premièrement, il y a toujours le côté légal. Donc, dépendamment de l'âge de la personne, on se doit d'informer les parents ou non, dépendamment de beaucoup de paramètres qu'on doit respecter, encore une fois, au niveau légal. Je crois que l'école a cette même obligation là. Donc, à partir de 14 ans, là, il y a des choses qui changent un petit peu au niveau légal. Donc, d'informer les parents contre le gré de l'élève, je pense qu'on aurait peut-être à approfondir ça un petit peu puis, encore une fois, à déterminer quelles sont les situations où on devrait le faire et quelles sont les situations où on ne devrait pas le faire. Sauf que, du côté légal, ça, c'est déjà tout très clair. Un jeune qui a commis un acte criminel, je vais l'arrêter, je vais informer les parents. Si je suis en mesure de l'interroger avec les parents, je vais le faire, mais, si je le détiens pour comparution, j'ai l'obligation d'informer les parents aussi. Donc, les parents sont toujours informés tout le long du processus légal. La problématique, c'est la fameuse zone grise qu'on parle depuis tantôt. Donc, cette zone-là, qui en a la responsabilité et qu'est-ce qu'on fait là-dedans? Et notre but, ce n'est pas de mettre le jeune en prison. Le but, à quelque part, c'est de ne plus avoir affaire à lui. Donc, c'est un petit peu ça qu'on essaie de faire avec la commission scolaire: à quel moment c'est à eux, à quel moment c'est à nous et comment on va intervenir.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup, M. Pleau, M. Gingras et Mme Boutet, de nous avoir donné le point de vue du Service de police de la ville de Québec sur le projet de loi n° 56.
J'inviterais maintenant Mme Émanuelle Després et les gens qui l'accompagnent à venir prendre place devant la commission.
Et je vais suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 20)
(Reprise à 16 h 21)
Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux. Et c'est avec grand plaisir que nous accueillons aujourd'hui Mme Émanuelle Després et les gens qui l'accompagnent. Je crois que c'est son père, M. Robert Després, le père d'Émanuelle, de même que M. Claude Alarie, qui est commissaire d'école à la commission scolaire Chemin-du-Roy. Alors, j'aimerais vous demander de nous présenter votre mémoire sur le projet de loi n° 56. Et je vous cède la parole pour une période d'environ 15 minutes. Mme Émanuelle Després.
Mme Émanuelle Després
Mme Després (Émanuelle): Bonjour. C'est avec grand honneur que j'ai accepté cette invitation pour venir m'exprimer sur le projet de loi n° 56. Je sais que je suis une personne privilégiée d'être ici aujourd'hui. Je m'appelle Émanuelle Després. Je suis étudiante en deuxième secondaire à l'académie Les Estacades, à Trois-Rivières.
Je suis l'initiatrice d'une marche qui s'est tenue le dimanche 11 décembre 2011 à Trois-Rivières et qui a réuni près de 300 personnes. Cette marche a permis de déposer à la députée de mon comté, Noëlla Champagne, une pétition contenant près de 3 000 noms. D'ailleurs, celle-ci a été déposée à l'Assemblée nationale le 14 février 2012 en ma présence. J'ai été accueillie très chaleureusement à l'Assemblée nationale et j'ai même eu droit à une ovation de tous les députés. Cela me prouve que, peu importent les partis, vous avez tous le même but: combattre l'intimidation.
Étant moi-même victime d'intimidation depuis la troisième année du primaire, cette démarche m'a permis d'augmenter mon estime de moi et ainsi de mettre fin à l'intimidation dont j'étais victime. Je ne trouve pas normal qu'il y ait des jeunes qui se suicident à cause de l'intimidation, comme Marjorie Raymond de Sainte-Anne-des-Monts -- ce suicide a été l'élément déclencheur de mon initiative -- tout comme je ne trouve pas normal qu'un jeune du primaire grimpe dans un arbre pour se sauver de ses intimidateurs.
Mme la ministre Beauchamp, je trouve bien correct votre projet de loi, sauf que les ressources que nous voulons, nous, les jeunes, sont des conférences dans les milieux scolaires pour sensibiliser les jeunes intimidateurs. Je réclame donc plus de conférences ou ateliers, car vous savez tout comme moi que certains étudiants ont des parents qui ne s'occupent pas d'eux et dont il faudrait, nous, en tant que société, s'occuper. Mais il faudrait aussi s'occuper des autres, notamment en les sensibilisant.
En espérant que les médias et les commissions scolaires ne se serviront pas de la liste du registre pour dénigrer les écoles, mais plutôt axer davantage la sensibilisation dans les écoles ciblées.
Il ne faut pas perdre de vue que le décrochage scolaire et le suicide chez les jeunes peuvent être reliés au problème de l'intimidation. Donc, plus vous investissez de l'argent pour contrer ce phénomène, plus vous faites en sorte que dans l'avenir notre société sera plus forte, plus instruite et plus riche intellectuellement. Vous savez que nous, les jeunes et la génération derrière moi, prendrons votre place plus tard. Et vous, les parlementaires ici réunis, pouvez, en prenant de bonnes décisions, changer la mentalité de notre monde.
Des ateliers comme ceux de mon ami Daniel Caux, alias Dan Coboy, devraient se donner dans toutes les écoles du Québec ainsi que dans tous les CPE, car plus nous commençons jeunes à prévenir l'intimidation, moins le phénomène sera présent. D'ailleurs, le site que vous avez fait, jagis.com, m'a beaucoup plu, parce que nous, les jeunes de la nouvelle génération, passons la plupart de notre temps sur Internet. En créant ce site, vous nous avez donné des ressources faciles à trouver pour nous ainsi que pour nos parents. Vous savez, mes parents ont été inquiets par rapport à ce que je vivais. Ce site Internet leur a donné des outils pour mieux me comprendre.
En terminant, je remercie les députées de Trois-Rivières, Mme Champagne ainsi que Mme St-Amand, de leur appui et de leur encouragement, ainsi que tous les médias pour la couverture médiatique qu'ils m'ont donnée. Cela a permis de sensibiliser la société au problème qu'est l'intimidation. Je remercie également ma famille, mes amis ainsi que les 3 000 signataires de la pétition. Grâce à eux, grâce à vous, nous allons peut-être tous ensemble rayer l'intimidation de notre société. Enfin, je vous remercie, papa et maman, de votre appui.
Pour conclure, je laisse la parole à un ami de mon père, qui est commissaire à la commission scolaire Chemin-du-Roy. En vous remerciant de votre écoute, je cède la parole à Claude Alarie.
Une voix: On peut applaudir...
Le Président (M. Marsan): Bien oui.
Des voix: ...
Le Président (M. Marsan): M. Alarie, vous voulez prendre la parole?
M. Alarie (Claude): Oui. Merci. M. le Président, Mmes et MM. les députés, permettez-moi tout d'abord de remercier Émanuelle ainsi que son père, Robert, de me permettre de vous entretenir sur le projet de loi n° 56.
Je prends quelques minutes pour me présenter à vous. Père de deux garçons de 19 et 17 ans, je suis impliqué dans les différentes structures scolaires, depuis la refonte de la loi n° 180 en 1998, où j'ai cumulé les fonctions de président de conseil d'établissement et de comité de parents à la commission scolaire du Chemin-du-Roy, commissaire-parent et aussi directeur régional à la Fédération des comités de parents du Québec. J'ai été élu commissaire en 2009 et j'y suis toujours, d'ailleurs, depuis ce temps, une bien longue feuille de route qui ne fait aucun doute quant à ma passion et mon désir de faire partie prenante du cheminement scolaire non seulement de mes enfants, mais de voir au bien-être de l'ensemble des jeunes à l'école.
C'est pourquoi je vois plus que d'un bon oeil cette initiative du gouvernement quant au projet de loi n° 56, car celui-ci viendrait en quelque sorte baliser tout ce qui a trait à l'intimidation et à la violence à l'école mais également initierait un processus de reddition de comptes en la matière. Il y a et il y aura toujours de l'intimidation et de la violence dans notre société, mais il importe que l'exemple soit donné en matière de protection des jeunes en éducation.
Que l'on soit simple parent -- et je ne dis pas ça ici de façon péjorative -- intervenant scolaire ou toute personne impliquée dans le monde de l'éducation, nous avons toutes et tous en tête d'offrir à nos jeunes un milieu sain et sécuritaire. Au cours de toutes mes années d'implication, j'ai vu et je vois toujours de très beaux programmes de prévention mis en place au sein de la commission scolaire, et, comme parent, ça m'a toujours rassuré, quoique ce n'était pas l'ensemble des parents qui étaient au courant de ce qui se faisait à l'école. Le projet de loi n° 56 obligera chaque conseil d'établissement à procéder à l'évaluation des résultats de l'école et devra de plus produire un document qui sera distribué non seulement aux parents, mais également aux membres du personnel et au protecteur de l'élève.
Quoique ceci permettra à l'ensemble des parents de connaître ce qui se fait et ce qui se passe à l'école, permettez-moi de vous signifier ma crainte par rapport à cette reddition de comptes. Depuis plusieurs années, une revue, dont je tairai volontairement le nom, produit un palmarès des écoles secondaires qui, à mon avis, ne donne aucunement l'heure juste quant à la qualité des services et de l'enseignement offert par les institutions scolaires. Vous comprendrez donc que je porte un intérêt plus que marqué quant à la logistique entourant la reddition de comptes qu'offriront les écoles.
Plus que jamais, notre commission scolaire, comme toutes les commissions scolaires d'ailleurs, tente par tous les moyens de valoriser l'école publique. Imaginez si un nouveau palmarès apparaissait dans les médias en mentionnant les pires écoles du Québec. J'aimerais donc que cette reddition de comptes parle plutôt de prévention, de gestes posés ou encore de cibles atteintes en matière de prévention, plutôt que de parler du nombre et du pourquoi des interventions survenues au cours de l'année de référence. Un autre point de réflexion que j'aimerais porter à votre attention est celui du rôle du protecteur de l'élève, qui pourrait prendre un nouveau virage avec la loi n° 56. Sa venue était plus que bienvenue, de la part des parents, qui voyaient en lui la possibilité de formuler une plainte totalement neutre, sans passer tout d'abord par l'école. À la base, le rôle du protecteur était d'agir à la demande des parents et de les assister dans leurs démarches. Le nouveau volet que la loi n° 56 semble vouloir lui conférer pourrait laisser penser, de la part des parents, une certaine perte de neutralité. Il faudrait, selon moi, laisser au protecteur son rôle primaire. Le premier rapport annuel du protecteur de l'élève présenté à la commission scolaire fait d'ailleurs état d'un rôle d'aiguilleur pour les parents. Il faudrait absolument que ce lien de confiance avec les parents demeure.
**(16 h 30)** Puisque la direction de l'école est le pivot ou la cheville de tout le processus, il importe de lui donner toute la latitude requise afin de mener à bien tout projet en matière de prévention de la violence et de l'intimidation dans son établissement. Cependant, dans le désir, de la part du MELS, de réduire la bureaucratie au sein des commissions scolaires, il faudrait s'assurer que le lot de rapports à compléter n'empêchera pas les directions d'écoles d'aller sur le terrain, là où tout débute et tout se passe.
En tout dernier lieu, je m'en voudrais aussi de ne pas vous parler de mon questionnement sur le fait que le conseil d'établissement fasse l'adoption de son plan de lutte contre l'intimidation et la violence. Sachant que le conseil d'établissement approuve déjà le code de vie et les règles de conduite de son école et que ce même code se retrouve dans l'agenda des élèves au vu et au su des parents, ne devrait-on pas inclure ces deux éléments dans un seul et même document, lequel serait adopté par la conseil d'établissement? Considérant leur importance de première ligne, il m'apparaît anormal d'en approuver un et d'adopter le second.
Dans la pochette que je vous ai remise, vous trouverez, entre autres, le plan d'action de la commission scolaire du Chemin-du-Roy pour prévenir et traiter l'intimidation à l'école de même qu'un guide à l'intention des parents, lequel a été reçu par des applaudissements de la part des membres du comité de parents lors de sa présentation, un bien bel exemple qui reflète la volonté de la loi: la mobilisation du milieu et de tous les intervenants en matière d'éducation.
La loi n° 56 a sa place plus que jamais, mais il ne faut pas perdre de vue que le monde de l'éducation a comme mandat de qualifier, instruire et surtout socialiser. Sur ce dernier point, il faudrait faire attention aux sanctions que les directions d'école pourraient donner.
Je pense fortement que l'éducation devrait primer sur la répression, et c'est une des valeurs que la commission scolaire du Chemin-du-Roy -- et moi-même -- prône. En tant que parent, quand on parle de lutter contre la violence et l'intimidation, c'est rassurant.
Je vous remercie de votre écoute et je salue une fois de plus le courage d'Émanuelle, qui malgré son jeune âge a fait preuve d'une bien grande maturité. Merci beaucoup.
Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. Alarie. Merci, Mme Émanuelle Després. Merci aussi à son père d'être avec nous.
Document déposé
Je vais d'abord déposer le document que vous avez fait allusion. C'est: Commission scolaire du Chemin-du-Roy. C'est une pochette avec les informations que vous avez mentionnées.
Et nous allons immédiatement commencer la période d'échange. Et je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue. Bienvenue à vous trois. J'ai une première permission à vous demander, Mme Després: Est-ce que je peux vous appeler par votre prénom puis est-ce que je peux vous tutoyer?
Mme Després (Émanuelle): Oui.
Mme Beauchamp: Ce n'est pas par manque de respect. C'est parce qu'on a l'impression de vous connaître déjà. Donc, tu permets, Émanuelle, que je m'adresse à toi en te tutoyant?
Mme Després (Émanuelle): Oui.
Mme Beauchamp: C'est gentil. Je veux prendre le temps de te dire merci. Je suis la ministre de l'Éducation. Je suis la vice-première ministre du Québec. Je veux vraiment te remercier au nom de nos concitoyens, au Québec. Je veux te remercier, je veux te féliciter, je veux prendre le temps de souligner, comme vient de le faire M. Alarie, je veux vraiment souligner ton courage...
Mme Després (Émanuelle): Merci.
Mme Beauchamp: ...qui, à mes yeux, est un courage exceptionnel, parce que tu as dénoncé une situation, mais tu es passée à l'action, également, en organisant la marche, en organisant la signature de cette pétition avec un très grand succès, en venant la déposer à l'Assemblée nationale. Et je pense que tu es en train de compléter en partie ton action, de boucler la boucle, en participant ici à ces travaux de consultation pour le projet de loi.
Tu sais sûrement qu'on a lancé une campagne de mobilisation où on dit, on veut dire à tout le monde dans le milieu scolaire qu'ils peuvent être des héros ordinaires, en disant: Il faut dénoncer puis surtout il faut intervenir. Parce que, quand on intervient, quand on dénonce et qu'on intervient, le geste d'intimidation, la plupart du temps, arrête. Moi, j'ai envie de te dire, Émanuelle, qu'il y a plein de héros ordinaires, mais je pense qu'aujourd'hui on peut dire de toi que tu es une héroïne extraordinaire, parce que tu as multiplié les gestes, et c'est extrêmement important. Puis je veux encore te remercier puis te féliciter.
Je veux maintenant t'entendre personnellement sur le fait que toi, tu as enclenché des activités de mobilisation dans ta communauté. Et tu m'interpelles directement, et on est là pour ça, en disant que ton principal souhait, c'est l'organisation de conférences dans les écoles. Donc, je comprends que c'est beaucoup comme en prévention, informer les gens, les outiller pour qu'ils sachent quoi faire dans des cas d'intimidation.
Dans le projet de loi, on prévoit que le directeur de l'école doit appuyer tout projet présenté par un regroupement d'élèves qui veulent faire quelque chose pour lutter contre l'intimidation. Est-ce que, pour toi, c'est une bonne réponse? Tu es une élève dans une école. Est-ce que le fait qu'on dise: Un directeur d'école, là, s'il y a un groupe d'élèves qui va le voir pour faire une activité, il doit appuyer cette activité, est-ce que tu y trouves une forme de réponse? Parce que moi, je me dis: Bien, ça permet... Par exemple, si toi, tu veux qu'il y ait des conférences dans ton école, le directeur de l'école doit appuyer de telles initiatives. Qu'est-ce que tu en penses? Est-ce que c'est un outil utile dans une école pour mobiliser les élèves contre l'intimidation?
Mme Després (Émanuelle): Bien, c'est sûr que oui, là. Il faudrait, dans le fond, qu'il appuie toujours ça parce que, tu sais, c'est sûr qu'il faudrait faire des choses comme ça, admettons, des conférences, des ateliers contre l'intimidation pour... et aussi prévenir puis dire... de dénoncer. Puis c'est ça, là.
Mme Beauchamp: Et tu penses que les élèves en profiteraient, tu sais? Est-ce que tu penses que les élèves vont en profiter pour organiser des activités ou...
Mme Després (Émanuelle): Bien, moi, je pense que oui, là. Je ne sais pas, je ne suis pas dans la tête de tout le monde, mais, tu sais, j'imagine que le monde, ils vont se dire: Ce serait une bonne opportunité de dénoncer, sans... bien, je ne sais pas, là, mais en tout cas, genre, de dénoncer, là.
Le Président (M. Marsan): Oui, Mme la députée de Trois-Rivières, la parole est à vous.
Mme St-Amand: Oui, bien, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je veux saluer mes collègues, Mme la ministre, mes collègues, collègues de l'opposition. Évidemment, M. le Président, vous savez comment je suis chauvine de mon comté de Trois-Rivières, alors c'est avec beaucoup de plaisir et avec beaucoup de fierté qu'on accueille aujourd'hui... je suis contente d'être là pour accueillir Émanuelle avec son père, Robert, et avec Claude Alarie aussi, qui est un monsieur très, très, très impliqué chez nous, à Trois-Rivières.
Évidement, dans un premier temps, M. Alarie a présenté un document. C'est important de dire que la commission scolaire du Chemin-du-Roy chez nous, à Trois-Rivières, est extrêmement impliquée. Ils sont créatifs, ils sont près de nos jeunes, et, dans le travail qu'ils font, je tiens à le saluer. Et, M. Alarie, je vais vous demander de ramener ça chez nous, à nos dirigeants, parce que c'est une belle fierté, c'est un beau modèle de commission scolaire, dans le travail qu'ils font.
Évidemment, Émanuelle, bien je salue ton père aussi. Parce que je sais que M. Després a été là pour soutenir Émanuelle tout au long de sa démarche, et ça, bien, il faut le dire. Quand on parle d'intimidation, ça fait une différence, quand nos parents sont là pour nous soutenir puis être près de nous. Maintenant, tu as eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de courage, on le sait, on t'a vue, tu n'as pas ménagé les efforts, tu as été créative. Moi, je veux savoir. Tu as dénoncé la situation. Qu'est-ce que ça a changé pour toi, à partir du moment où tu as dénoncé cette situation-là?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, il n'y a plus personne qui m'intimide, là. Ça fait que, dans le fond, ça a remonté mon estime de moi, là, parce que, dans le fond, je me renfermais, là. Puis là, bien, je suis un peu plus ouverte.
Mme St-Amand: O.K. Et dis-moi une chose... Une deuxième question, M. le Président. Ce sera ma dernière, mais je veux savoir. Parce que l'intimidation, là, ce n'est pas juste à l'école, hein? Est-ce que toi, tu voyages... Prends-tu le transport scolaire, Émanuelle?
Mme Després (Émanuelle): Oui.
Mme St-Amand: J'aimerais ça que tu nous dises... Parce qu'il y a un beau projet de loi qu'on présente aujourd'hui, puis notre ministre avec toute l'équipe, on a travaillé fort là-dessus. Est-ce qu'il y a des choses qu'on pourrait faire de plus, qui débordent le contexte de l'école? Puis, pour moi, ça peut être notamment l'autobus scolaire, ça peut être, je ne sais pas, le parascolaire. Y a-tu des choses que tu vois, que tu te dis: On pourrait en faire plus, on pourrait faire différemment?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, tu sais, des fois, dans les autobus, il y a du monde qui intimide, mais le chauffeur, il ne fait pas vraiment quelque chose. Bien, il faudrait peut-être qu'il fasse quelque chose, parce que ça pourrait changer, justement.
Mme St-Amand: O.K. C'est bon. Parfait. Et puis, bien, la dernière chose que je dirais, parce que l'intimidation, ce n'est pas juste à l'école, hein, c'est un peu partout, si on avait d'autres moyens à mettre en place, à part l'autobus et l'école, est-ce que tu aurais d'autres idées?
Mme Després (Émanuelle): Bien, pas là, là, non. Bien, pas vraiment, là.
Mme St-Amand: O.K. Bien, tu pourras me les envoyer par Facebook. Parce que c'est mon amie Facebook aussi, alors... Bien, merci beaucoup. Merci de m'avoir donné l'occasion... Puis je vous remercie encore une fois d'être ici.
Le Président (M. Marsan): ...la députée de Trois-Rivières. Et nous reprenons le dialogue avec Mme la ministre de l'Éducation.
**(16 h 40)**Mme Beauchamp: Moi, j'aimerais aussi savoir, Émanuelle. Tu as organisé une marche. Je disais que tu es passée à l'action, tu as organisé une marche. Nous, on est conscients qu'un projet de loi à lui seul, là, ne peut pas régler tous les cas d'intimidation. Il faut que chacun d'entre nous, là, chaque citoyen du Québec s'engage dans la lutte contre l'intimidation. C'est pour ça qu'on propose à tout le monde d'aller signer une déclaration -- c'est sur le site moijagis.com auquel tu as fait référence -- ou encore qu'on dit aussi qu'on veut... En ce moment même, on organise un concours dans les écoles du Québec pour que les gens, les jeunes nous envoient des textes ou des vidéos pour nous dire qu'est-ce qui se fait dans leurs écoles pour la lutte contre l'intimidation. Puis on a aussi décidé, on a annoncé qu'autour du 2 octobre, qui est la journée mondiale de la lutte contre la violence, qu'on veut que les écoles se mobilisent pour faire des semaines contre l'intimidation. Moi, je suis ministre, je souhaite ça. Je veux vraiment que le maximum de personnes participent et s'engagent. Mais j'ai devant moi quelqu'un qui a réussi à faire signer 3 000 personnes dans une pétition puis qui a réussi à amener des gens se manifester pour dire: Il faut lutter contre l'intimidation. Quels sont tes conseils? Comment on peut faire en sorte que toutes ces activités-là de mobilisation de nos villages, de nos villes, de nos écoles... C'est quoi, ton meilleur conseil pour que ça connaisse du succès?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, ça serait peut-être... Tu sais, admettons, il y a une personne qui décide de faire une marche. Bien, que ça soit médiatisé, dans le fond, pour que toute la population soit sensibilisée puis qu'ils se disent: Ah! bien, ça se fait de quoi, ça fait qu'il faudrait peut-être, tu sais, agir, puis dénoncer, puis des affaires comme ça, là. Puis c'est ça, là.
Mme Beauchamp: Donc, tu me dis que, toi, dans ta région, ça a beaucoup été par les médias? Tu me parles des journaux, et tout ça, qui t'ont beaucoup appuyée? Ça a été un ingrédient important, là, qui a aidé à ta mobilisation?
Mme Després (Émanuelle): Bien oui. C'est comme... Pour moi, dans le fond, bien, il y a eu Le Nouvelliste de Trois-Rivières, il y a eu L'Hebdo Journal, il y a TVA, Radio-Canada, les radios. Ça a beaucoup aidé à ce qu'il y ait du monde qui vienne signer la pétition puis qu'il y ait des personnes qui viennent à ma marche.
Mme Beauchamp: Donc, on va passer ton secret à tout le monde dans les commissions scolaires, dans les écoles, pour que ce soit un succès partout, le concours, la signature de la déclaration ou les activités durant la semaine. Si tu permets, Émanuelle, je vais maintenant m'adresser à ton père.
M. Després, premièrement, bienvenue. Puis, deuxièmement, tantôt, quand Émanuelle a fait sa présentation ici, en cette commission parlementaire, à l'Assemblée nationale, je vous le dis, là, comme c'est, moi, j'étais émue parce que je me suis dit que... Premièrement, je me mettais à votre place puis je me disais: Ça doit être tout un sentiment de fierté. Mais en plus c'est une étape, dans sa vie, qui est marquante et qui sera inoubliable. Et c'était vraiment... En tout cas, c'était vraiment émouvant, je trouve, puis je veux vous dire que vous devez être très fier, vous pouvez être fier. Je sais que vous l'êtes déjà.
M. Després (Robert): Ah! je suis très fier.
Mme Beauchamp: Mais encore, en plus, après aujourd'hui, vous pouvez être très fier. Je veux vous entendre. Vous êtes parent et vous êtes le seul parent directement touché par un épisode, oui, parent d'un enfant victime d'intimidation... On a eu la Fédération des comités de parents, mais vous êtes le seul parent, là, qu'on peut... qui a été aux prises avec une enfant victime d'intimidation, dont on peut avoir le témoignage puis l'éclairage. Pour vous, pouvez-vous nous raconter? Est-ce qu'à ce moment-là, quand vous avez appris qu'Émanuelle était victime d'intimidation... Comment ça s'est passé? Puis surtout c'est: Quels sont les... Enfin, quels sont les meilleurs conseils que vous pouvez nous donner sur le support de la direction d'école? Comment ça doit se passer à l'école? Puis comment on doit intervenir ou comment on doit impliquer le parent?
Puis je termine, M. Després, en vous disant: Il y a eu plusieurs éclairages qu'on a eus. En ce moment, la loi dit que le directeur de l'école doit informer le parent puis doit aussi rentrer en communication avec le parent de l'élève intimidateur. Mais il y en a qui sont venus nous dire: Ce n'est peut-être pas dans tous les cas qu'il est bon de communiquer avec le parent. Ça prend peut-être que la personne puisse exercer son propre jugement, là, le directeur d'école doit exercer son jugement. Mais franchement il faut qu'on profite de votre présence pour vous poser la question: Vous, là, vous souhaitez quoi? Quelle sorte de support vous souhaitez quand on est parent d'un enfant intimidé à l'école?
M. Després (Robert): Bien, nous, moi, en tant que parents, c'est qu'on ne savait pas comment réagir. C'est sûr qu'Émanuelle, elle me le disait qu'elle était intimidée, mais il y a des fois, cette année, même, elle me dit: Papa, ne va pas à l'école, parce que ça ne donne rien. L'année passée, on y avait été, à l'école, puis ça n'avait pas amélioré les choses. Émanuelle, elle était plus craintive là-dessus. Mais c'est de là qu'on a parti un peu l'idée de dire: la prévention. Tu sais, les jeunes qui intimident, des fois, ils ne savent pas qu'ils intimident, ils ne savent pas que ça peut blesser des gens. Tu sais, des fois, les jeunes disent des paroles qu'il y en a que ça ne dérange pas, puis il y en a d'autres que ça dérange. Puis moi, en tant que parent, c'est qu'Émanuelle, je le savais qu'elle était intimidée. Puis mon inquiétude, c'était de dire: Est-ce qu'elle va finir son secondaire? Est-ce qu'elle va réussir dans la vie, parce qu'elle se fait intimider? Elle était renfermée. Alors, on lui disait des choses, elle était, tu sais, agressive, elle était renfermée, elle avait une bonne carapace. Mais ce n'est pas toujours facile. Mais en prévention, tu sais, on travaille beaucoup.
Beaucoup de gens me disaient, là... Parce que j'ai toujours accompagné Émanuelle dans ses séances de pétition, etc., et beaucoup de gens me disaient: Ah! à la grandeur qu'elle a, elle devrait peut-être donner une volée à son intimidateur. J'ai dit: J'ai toujours prôné la non-violence. Ce n'est pas par la violence qu'on va régler les choses, c'est bien plus par la sensibilisation. Puis, quand Émanuelle a fait ses sorties publiques, Émanuelle, elle me disait: Ah! papa, tu sais, il y a un petit gars qui m'a écrit sur Facebook puis qui m'a dit qu'il s'excusait d'avoir dit que j'étais plus grosse, que j'étais... puis il s'est excusé. Puis je voyais Émanuelle, elle était fière de ça. Puis le message que, tu sais, quand... Je disais à Émanuelle: Tu sais, le message, Émanuelle, il passe. Puis moi, je travaille dans le public à Trois-Rivières, puis beaucoup de gens, ils me disent: Ta fille, elle a beaucoup de courage. Continuez votre démarche, continuez à sensibiliser la population.
Puis je trouve ça déplorable, des gestes comme que j'ai vus dans... un peu... quoi, la semaine passée, là, les gars de la construction, là, puis par rapport aux médias. Tu sais, on éduque nos enfants, mais de là à dire que, si on prenait, à leur jeune âge, au primaire, dans les centres de petite enfance... Puis peut-être que ces gens-là plus tard, quand ils vont vivre des frustrations, ils ne feront pas comme ces gens, là, qu'on voit à la télé. Je trouve ça... Tu sais, on travaille, on milite dans le sens... contre l'intimidation, puis, quand on voit des gestes comme ça à la télé, bien, c'est comme si on faisait un petit pas de reculons.
Mais, le projet de loi, je le trouve formidable, tu sais, je le trouve correct, tu sais, je le trouve bien encadré. Je ne connais pas beaucoup la politique, mais j'aime la politique. Puis, tu sais, moi, Émanuelle, là, à Trois-Rivières, là, c'est un modèle, là, c'est un modèle pour toute la communauté. Moi, j'entends, tout le monde dit: Ah! je t'ai vu à la télé, je t'ai vu avec Émanuelle. J'encourage ta fille. Tu sais, c'est le fun, qu'est-ce que ta fille a fait, c'est... Pour moi, c'est une fierté. Puis, tu sais, le fait qu'elle ait fait ça, je pense que ça va l'aider pour plus tard, parce que c'est... Moi aussi, j'ai donné énormément à ma fille.
Le Président (M. Marsan): En terminant, Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup pour votre témoignage. Puis, Émanuelle, en terminant... M. Alarie, c'est juste parce que j'ai manqué de temps. J'avais une question pour vous, mais...
M. Alarie (Claude): Ah! il n'y a pas de problème, je ne suis pas choqué du tout.
Mme Beauchamp: Je veux juste dire, Émanuelle, en terminant, que, moi, ça fait 14 ans maintenant que je suis députée à l'Assemblée nationale puis c'est la première fois que j'applaudis quelqu'un, en commission parlementaire, qui est notre invité. C'est parce que tu le mérites. Merci encore. Félicitations.
Mme Després (Émanuelle): Merci à vous.
Le Président (M. Marsan): Merci, Mme la ministre. Et je vais tout de suite donner la parole à M. le député de Jonquière, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue à cette commission. Et à mon tour je veux vous féliciter, je veux vous saluer, particulièrement toi, Émanuelle. Je me permets aussi, comme la ministre, de te tutoyer. Ça fait quelques fois qu'on se rencontre. Et je veux vraiment te féliciter et saluer le courage que tu as eu. Je profite de l'occasion également pour dire que ma collègue députée de Champlain s'excuse de ne pas être ici, parce que ça fait au moins deux mois qu'elle nous parle de la pétition à tous les jours, sinon plusieurs fois par jour, et, pour faire exprès, elle a une grosse grippe d'homme à soigner en plein aujourd'hui, là. Alors, malheureusement, elle ne pouvait pas être ici aujourd'hui, mais je sais, là, qu'elle est avec nous puis je pense même qu'elle essaie de nous écouter par Internet aujourd'hui, là. En tout cas, on se parlait de ça tout à l'heure. Alors, je sais que vous savez qu'elle est avec nous puis qu'elle aurait beaucoup aimé pouvoir t'accueillir ici, à l'Assemblée nationale.
Écoute, Émanuelle, moi, je sais que la démarche que tu as faite pour changer les choses autour de toi va sûrement marquer ton apprentissage. Je pense que tu vas te souvenir toute ta vie de ce que tu as fait. Et tu es la preuve que ça vaut la peine de s'impliquer socialement. Tu es la preuve que ça vaut la peine de s'engager politiquement. On entend souvent parler de la politique, malheureusement, en mal, pour les mauvaises raisons, mais, dès qu'on pose un geste à connotation sociale, dès qu'on pose un geste qui vise à changer le monde qui est autour de nous, aussi petit soit-il, c'est un geste politique. Et par ton action tu contribues à changer le monde autour de toi pour qu'il soit meilleur. Et ça, c'est profondément éducatif, c'est profondément pédagogique, ce que tu fais là, et je trouve ça très, très bien.
Et moi, j'ai beaucoup de reconnaissance également pour toi parce que je comprends, à la lecture de ton mémoire et à ta présentation, que tu es victime d'intimidation depuis la troisième année du primaire. Et là tu es rendue en secondaire II, secondaire III...
**(16 h 50)**Mme Després (Émanuelle): II.
M. Gaudreault: ...secondaire II, alors ça en fait, des années, ça, là, d'intimidation, et je pense qu'il fallait que tu aies toute une carapace pour supporter ça, pour vivre avec ce poids-là. Et je comprends également que ce qui s'est passé l'automne dernier, avec le suicide de Marjorie Raymond, du côté de Sainte-Anne-des-Monts, ça t'a beaucoup touchée, ça t'a beaucoup marquée. Et c'est extrêmement malheureux, le geste que Marjorie a posé. Et probablement que vous ne vous connaissiez pas...
Mme Després (Émanuelle): Non.
M. Gaudreault: Vous ne vous êtes jamais rencontrées, vous ne vous connaissiez pas, mais au moins le geste qu'elle a posé a servi à faire autre chose, a permis à toi de passer à l'action et de partir une pétition, de faire une marche, de mobiliser des gens autour de toi. Alors, c'est absolument... Je veux dire, c'est dramatique, là, ce qu'elle a fait, puis c'est terrible d'être obligé de... en tout cas, qu'elle se soit rendue là, après les années d'intimidation qu'elle a subies, elle aussi, mais, par le geste que tu as fait, d'une certaine manière, même si vous ne vous êtes jamais rencontrées, je pense qu'elle continue de vivre un petit peu, au fond, à travers le geste que tu as fait, puis ça contribue à changer les choses puis le monde autour de toi. Alors, j'ai beaucoup, beaucoup d'admiration et de reconnaissance pour ce que tu as fait, puis je veux que tu le saches, puis ton père aussi, les gens de la commission scolaire également.
Maintenant, j'ai des questions un petit peu plus précises puis j'aimerais que tu nous aides, parce que moi, je suis comme la ministre, j'ai besoin d'entendre des conseils de ta part, j'ai besoin que tu nous éclaires. On a eu plein de monde savant ici, on a eu plein de gens de toutes sortes d'instances, des commissions scolaires, des écoles, des directeurs d'écoles, etc., des représentants des travailleurs, mais là, là, on veut vraiment savoir ce que toi, tu en penses. Et dans le projet de loi il y a une définition qui est là. Je ne veux même pas qu'on la lise ensemble, je ne veux même pas qu'on la regarde. Moi, je veux que tu me dises, là, toi, venant de ton coeur, et de ta tête, et de ton corps à toi, là, quand je te dis «intimidation», tu penses à quoi? Dis-moi tout ce que tu peux. Puis je ne veux pas que tu nous racontes ton expérience à toi, personnelle, parce que ça, tu as tourné la page en te prenant en main puis en mobilisant ton monde. Mais, quand je te dis «intimidation», là, tu penses à quoi? Donne-moi des exemples, donne-moi à quoi ça ressemble, l'intimidation, dans ton école puis dans ce que tu connais.
Mme Després (Émanuelle): Bien, faire du mal à quelqu'un, dire des bêtises à propos de quelqu'un, partir des rumeurs, puis, tu sais, être méchant. C'est des choses comme ça, là.
M. Gaudreault: Puis, selon ce que tu en sais puis selon ce que tu dis, pourquoi tout d'un coup il arrive de l'intimidation envers quelqu'un? Qu'est-ce qui cause ça?
Mme Després (Émanuelle): Bien, d'après moi, ça serait la jalousie envers quelqu'un ou juste que, tu sais, ça... je ne sais pas, mais, la personne, ça lui tente de faire ça, là, je ne sais pas pourquoi, là.
M. Gaudreault: Est-ce que ça peut être basé sur le fait qu'il y en a qui se sentent... c'est comme, pour eux, une manière de se valoriser, je dirais, à travers l'intimidation, de la part des intimidateurs? Tu comprends ce que je veux dire?
Mme Després (Émanuelle): Oui, il y a du monde, dans le fond, ils intimident pour se remonter, eux, mais, dans le fond, tu sais, ce n'est pas tellement ça qu'ils font, là. Ils veulent, dans le fond, être plus populaires en intimidant du monde, mais, tu sais, ce n'est pas mieux, parce que ça rend des gens malheureux.
M. Gaudreault: O.K. Et puis peux-tu me parler un petit peu de la cyberintimidation? Est-ce que toi, personnellement, quand tu arrivais chez toi, le soir... Puis, encore une fois, je ne veux pas tomber dans le détail de ce que tu as vécu, mais, dans ce que tu sais par ton expérience et autour de toi, quand tu arrivais le soir chez toi, par exemple, est-ce que ça se poursuit sur Facebook, sur Twitter? Parle-moi un petit peu de la cyberintimidation, comment ça se passe.
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, oui, j'en ai déjà eu, là, sur Facebook. Dans le fond, tu sais, le monde, ils m'ont écrit des méchancetés, puis tout ça. Puis eux, ils pensent que ça disparaît, mais, dans le fond, ça ne disparaît pas, ça reste. Puis je suis allée, dans le fond... à cause de ça, je suis allée voir un monsieur, à mon école, qui règle ces affaires-là, puis j'ai imprimé les feuilles puis les messages que la personne m'avait envoyés, puis je lui ai montrés. Ça fait que, dans le fond, on a fait une rencontre, puis ça s'est réglé, là.
M. Gaudreault: Ah! O.K. Vous avez fait une rencontre avec les gens qui faisaient de l'intimidation sur Facebook.
Mme Després (Émanuelle): Oui, avec la personne puis l'intervenant.
M. Gaudreault: O.K. Puis après ça ça a arrêté à partir de ce moment-là?
Mme Després (Émanuelle): Oui, ça a arrêté.
M. Gaudreault: Peux-tu nous parler un petit peu... Moi, tu as piqué ma curiosité, quand tu dis dans ton mémoire -- je pense que c'est à la dernière page: «Des ateliers comme celles de mon ami Daniel Caux, alias Dan Coboy...» Tu peux-tu nous raconter c'est quoi, ça, ces ateliers-là, puis pourquoi toi, tu trouves ça important?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, c'est... Bien, Daniel Caux, c'est un monsieur qui a parti des... C'est comme des activités, dans le fond, pour les jeunes du primaire, dans le fond, puis c'est comme... dans le fond, c'est pour... ça donne des... des quoi?
Une voix: La prévention.
Mme Després (Émanuelle): Bien, c'est comme la prévention, dans le fond, puis ça donne des outils aux jeunes, pas... Il dit aussi de dénoncer, d'agir, puis des choses comme ça.
M. Gaudreault: O.K. Alors, je comprends que ces ateliers-là, c'est à toutes les années depuis le primaire? Comment... Tu as ça un après-midi durant ta session scolaire, avant Noël, après ça, ça revient? C'est combien de fois par année à peu près?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, je ne le sais pas vraiment, parce que... C'est ça. Bien, je ne le sais pas vraiment, là, mais il nous a fait... il nous a montré c'était quoi, dans le fond, puis c'est vraiment bien. Tu avais des petits personnages, admettons... Bien, il y avait un cheval avec une queue dans le ventre, puis lui, il se faisait intimider. Puis il y avait un loup, dans le fond, que c'était lui l'intimidateur, puis il fallait comme... qu'ils règlent les problèmes, les jeunes, là.
M. Gaudreault: C'était comme une fable, si on veut.
Mme Després (Émanuelle): Oui, c'est un peu ça.
M. Gaudreault: Oui. O.K. Monsieur, je pense que vous avez à ajouter un petit peu là-dessus.
M. Després (Robert): Oui, c'est ça. Bien, Daniel Caux, lui, dans le fond, il nous avait approchés. Il donne des... C'est un genre de spectacle qu'il donne dans les festivals pour les jeunes, tu sais, puis il voulait qu'Émanuelle participe à un des spectacles aussi. Puis c'est un genre de... Lui, son métier, c'est éducateur spécialisé, là, aussi. Je voulais juste spécifier un peu.
M. Gaudreault: Parfait. Émanuelle, depuis que tu as pris ce dossier-là en main puis que tu as décidé de faire la pétition, la marche d'abord, la pétition ensuite, est-ce que tu as senti des changements dans ton école? Est-ce que ça a fait en sorte que... Est-ce que tu as constaté, toi, des changements d'attitude sur cette question-là?
Mme Després (Émanuelle): Bien, oui, je vois de moins en moins de monde qui se font intimider à mon école. Je ne sais pas si c'est comme ça dans les autres écoles, mais à mon école je vois de moins en moins de personnes qui se font intimider puis je trouve ça bien, là.
M. Gaudreault: O.K. Bon, là, tu es en secondaire II. Dans trois ans, tu vas sortir de l'école parce que tu vas finir le secondaire V, tu vas quitter. Comment tu penses que ça pourrait continuer? Tu sais, tu dis que ça a diminué l'intimidation. Là, c'est parce que tu es là, puis, c'est sûr, tu es identifiée dans l'école, les gens savent que tu as pris les choses en main. Mais, pour que ça se continue, une fois qu'Émanuelle Després va avoir quitté l'école, là, comment tu penses qu'on pourrait faire ça, là, pour que ton action se perpétue?
Mme Després (Émanuelle): Bien, dans le fond, c'est ça. Bien, tu sais, comme je disais, toujours faire des conférences à chaque année dans les écoles, pour, dans le fond, sensibiliser, admettons, au début de l'année, puis au milieu de l'année.
M. Gaudreault: O.K. Peut-être une petite question à ton père, si tu permets? M. Després, je ne sais pas si vous avez suivi un peu nos travaux, mais on se pose beaucoup de questions sur les relations avec les parents. Puis, comme disait la ministre tout à l'heure, on va vous sauter dessus, là, parce qu'on a un vrai parent, là. Je vais aller vous toucher tout à l'heure.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gaudreault: Mais je voulais savoir votre point de vue. Des fois, il y en a qui sont venus nous dire: Il ne faut pas toujours informer les parents, parce que ça pourrait empirer la situation du jeune, si le parent est informé que le jeune vit de l'intimidation, par exemple, sur la base de l'homophobie, que ça soit vrai ou non, là, dans le cas du jeune en question, et donc il faut faire attention pour ne pas nuire au jeune plus que l'aider. Est-ce que vous pensez qu'il faut nécessairement que, dès qu'il y a un acte d'intimidation qui est porté à l'attention d'un directeur d'école ou qu'il y a une plainte, que le parent soit nécessairement informé? Comment vous voyez cette relation-là? Est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir des trucs, que je dirais, ou des manières d'agir pour impliquer les parents, en bout de ligne, mais progressivement, pas nécessairement tout de suite? J'aimerais ça vous entendre un petit peu plus là-dessus.
**(17 heures)**M. Després (Robert): Bien, d'abord, c'est sûr que, mettons, si le directeur de l'école, il est conscient que mon enfant, il subit de l'intimidation, c'est sûr que moi, en tant que parent, j'aimerais ça être avisé immédiatement pour voir, mettons, c'est quoi, le problème, c'est quoi, l'intimidation, et régler...
Mais qu'est-ce que j'aimerais aussi, c'est que... Tu sais, les enfants qui intimident, les intimidateurs, il y a des fois les parents, tu sais... Ah! c'est juste ça, tu sais, ce n'est pas grave, là. C'est une banalité, pour eux, mais, pour mon enfant à moi, Émanuelle, mettons, pour moi, ce n'est pas une banalité, là, tu sais. Puis c'est pour ça que sensibiliser l'enfant... Parce que des fois, les parents, tu sais, c'est une banalité, puis, d'autres parents, mettons, tu sais, les directeurs d'école... Moi, mettons, si le directeur d'école m'aurait appelé puis me dire: Aïe! ta fille, Émanuelle, elle intimide un petit gars, bien, je lui aurais parlé, moi, à Émanuelle, tu sais. J'aurais dit: Regarde, ce n'est pas correct, qu'est-ce que tu fais. Mais il y en a d'autres que... Ah! c'est juste ça que tu as fait, Émanuelle? Ah! O.K., ce n'est pas grave. Tu sais, c'est plus banalisé.
Mais, tu sais, dans le fond, ce n'est pas... c'est de sensibiliser le jeune. Parce que des fois le parent, de nos jours, c'est... Comme je disais tantôt, le travailleur de la construction, lui, il n'a peut-être pas été sensibilisé, quand il était jeune, à l'intimidation, puis, tu sais, il en a peut-être fait, de l'intimidation, puis là il en fait encore. Tandis que, s'il avait été sensibilisé aux dommages que ça peut causer, l'intimidation, quand il était jeune, peut-être que, quand il va être rendu adulte, il n'en fera pas, d'intimidation. Ça fait que, si on sensibilise nos jeunes aujourd'hui, qu'eux, quand ils vont avoir des enfants, ils vont sensibiliser leurs enfants... Ce n'est pas... Le projet de loi, moi, je ne le vois pas à court terme mais à long terme, tu sais. Ça fait que sensibiliser le monde à long terme, ça serait de quoi intéressant.
Puis c'est sûr qu'il y a des parents des fois qui s'occupent de leurs enfants, mais il y a d'autres parents qui ne s'en occupent pas, de leurs enfants. Puis il y a d'autres parents que, tu sais, on ne s'en cache pas... Même moi, je suis de la classe moyenne puis je travaille beaucoup, je travaille 50 heures-semaine. Tu sais, il y a d'autres parents qui travaillent beaucoup, qui ne sont pas jamais à la maison, qui sont... les enfants sont élevés seuls. Bien, c'est sûr que le rôle de l'État, c'est d'encadrer. Et, quand on dit... Moi, je... Tu sais, les parents, c'est... L'école éduque les enfants et enseigne aux enfants. Le parent guide les enfants et éduque leurs enfants. Et en quelque part les deux se rejoignent. Moi, j'essaie de guider Émanuelle, mais il y a des parents qui ne guident pas leurs enfants. Mais, si l'école peut éduquer au moins leurs enfants dans le respect, en faisant comme des ateliers, des choses... ça fait que ce serait «number one» dans la société.
Le Président (M. Marsan): Alors, M. Després, merci beaucoup. Émanuelle, merci et félicitations. Merci à vous, M. Alarie, pour nous avoir donné votre point de vue sur le projet de loi n° 56.
Et nous allons inviter maintenant les représentants de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec à venir prendre place à cette table.
Et je vais suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 3)
(Reprise à 17 h 6)
Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux. Et il nous fait plaisir d'accueillir les représentants de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec et M. Mario St-Laurent, qui est le directeur général. M. St-Laurent, je vais vous demander de nous présenter la personne qui vous accompagne. Et vous avez une période de 15... de 10 minutes, plutôt, pour faire votre présentation. La parole est à vous.
Association des propriétaires
d'autobus du Québec (APAQ)
M. St-Laurent (Mario): Je vous dirais en blague que je ne me déplace jamais sans mon avocate. Alors, je vais laisser Mme Frenette se présenter.
Mme Frenette (Geneviève): Oui. M. le Président, mon nom est Geneviève Frenette, avocate pour l'Association des propriétaires d'autobus du Québec.
M. St-Laurent (Mario): Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, à titre personnel, je sors un peu du contexte de notre témoignage par rapport au projet de loi n° 56 pour manifester toute l'admiration, à titre personnel, que j'éprouve par rapport au dernier témoignage. Même si j'ai des cheveux gris, je me considère encore comme jeune parent -- enfants au primaire de huit ans et cinq ans -- et je peux vous dire que ça demande du courage, autant du côté des parents que de l'enfant, et encore plus, peut-être même, des enfants. J'ai trouvé ça tout à fait admirable.
Alors là, maintenant, ça va être peut-être un petit peu plus aride, mais on y va.
M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, l'Association des propriétaires d'autobus du Québec, communément appelée l'APAQ, représente 175 entreprises privées en transport de personnes par autobus. Ses membres sont présents dans l'ensemble des régions du Québec et jouent un rôle important dans le développement des communautés du Québec, en assurant des services notamment en transport scolaire mais aussi en transport nolisé, interurbain, périurbain, adapté, médical. L'APAQ célèbre cette année son 85e anniversaire d'existence, ce qui en fait l'une des plus anciennes associations au Québec.
Notre association appuie le principe du projet de loi n° 56. Un élève qui subit de l'intimidation physique et/ou psychologique peut en garder des séquelles importantes et peut malheureusement commettre des gestes irréparables. C'est donc toute la société, les acteurs du réseau de l'éducation y compris les transporteurs qui sont interpellés par ce projet de loi qui vise à donner un meilleur milieu de vie pour l'enfant dans le cadre de ses études scolaires.
Afin de s'assurer d'atteindre l'objectif commun de tolérance zéro en matière d'intimidation et de violence à l'école, l'APAQ propose des recommandations d'amendement au projet de loi n° 56. Toutefois, ces recommandations se limiteront à l'un de nos champs d'expertise, soit le transport scolaire.
L'article 5 du projet de loi prévoit, selon notre compréhension, que les règles de conduite et les mesures de sécurité proposées par le directeur de l'école et approuvées par le conseil d'établissement doivent prévoir les gestes et les échanges proscrits notamment en transport scolaire. En raison du nombre de commissions scolaires et d'écoles qu'elles regroupent, nos transporteurs scolaires et leurs conducteurs auraient, selon nous, un défi de taille si chaque conseil d'établissement adopte des règles de conduite et des mesures de sécurité différentes les unes des autres.
C'est pourquoi nous recommandons à cette commission que le ministère et ses partenaires du réseau de l'éducation élaborent une politique commune de règles de conduite et de mesures de sécurité qui pourrait être intégrée au contrat type en transport scolaire et modulée, évidemment, selon les réalités locales.
Notre deuxième point concerne l'article 19. Nous sommes en faveur du principe énoncé à cet article, car il vise à clarifier les rôles et les responsabilités de chacun. Toutefois, à notre avis, des précisions devraient être apportées à cet article. Nous vous soumettons cordialement trois recommandations quant aux obligations faites au transporteur.
**(17 h 10)** Nous lisons, à l'article 19 du présent projet de loi: «Ce contrat doit prévoir l'obligation, pour le transporteur, d'adopter des mesures visant à prévenir et à contrer toute forme d'intimidation ou de violence lors du transport des élèves...» Nous suggérons plutôt que ces mesures soient convenues au contrat de transport scolaire entre le transporteur et la commission scolaire ou l'établissement privé. L'inclusion de ces mesures dans le contrat type permettrait une meilleure cohésion nationale des actions contre l'intimidation et la violence.
Nous continuons la lecture de l'article 19: «...et, le cas échéant, d'informer le directeur de l'école fréquentée par un élève qu'il transporte de tout acte d'intimidation ou de violence qui survient lors de ce transport.» Nous proposons plutôt que le transporteur ait l'obligation d'informer son répondant en transport scolaire et non le directeur d'école. Ce répondant aura l'obligation d'informer le directeur d'école afin d'assurer une continuité dans l'échelle des communications.
Exemple, dans le plan d'urgence qui est convenu entre un transporteur et une commission scolaire, c'est souvent le régisseur qui est le répondant. Donc, afin de s'assurer de l'ensemble... que l'information... il n'y ait pas de coupure au niveau des communications et que celui qui est répondant pour le transport scolaire dans les écoles soit au courant de tout acte d'intimidation ou de violence dans le service de transport, on suggère que ça soit plutôt le répondant que le directeur d'école, qui a peu de contacts avec le transporteur dans les opérations jour après jour.
L'article 19 se termine comme suit: «Ce contrat doit également prévoir l'obligation, pour le transporteur, d'assurer la formation, à cet égard, du personnel travaillant au transport des élèves.» Dans un souci d'efficience, nous proposons à cette commission que cette formation additionnelle aux conducteurs, traitant spécifiquement de l'intimidation et de la violence, soit intégrée dans la formation obligatoire pour l'obtention ou le renouvellement de leurs certificats de compétence prévu à la Loi sur les transports, à l'article 48.13.
Nos recommandations suivantes ne sont pas des propositions d'amendement. Elles visent à bonifier le projet de loi ou à tout le moins à apporter certains éclaircissements, notamment lorsqu'il y a entente entre les institutions scolaires pour organiser le transport des élèves.
En vertu de l'article 294 de la Loi sur l'instruction publique, une commission scolaire peut conclure une entente pour organiser le transport des élèves d'une commission scolaire ou d'un établissement privé.
Nous nous interrogeons à savoir si les transporteurs auront des obligations contractuelles à respecter, en matière d'intimidation et de violence, lorsqu'une commission scolaire organise le transport des élèves d'une autre commission scolaire ou d'un établissement privé. Selon notre interprétation, la législation semble muette sur cette question, concernant le projet de loi n° 56. En effet, l'alinéa 1 de l'article 62 de la Loi sur l'enseignement privé ne permet pas de répondre à notre interrogation en ce qui concerne un établissement privé.
De plus, j'attire l'attention des membres de la commission à l'article 291 de la Loi sur l'instruction publique, qui permet à une commission scolaire... Je lis l'article: «Une commission scolaire peut, avec l'autorisation du ministre, organiser le transport de tout ou [en] partie de ses élèves.
«Elle peut effectuer elle-même ce transport...» Les obligations qui sont mentionnées à l'article 19 du projet de loi n° 56 parlent de contrat. On comprend que c'est exceptionnel. Il est rare qu'une commission scolaire va contracter avec elle-même. Donc, est-ce qu'il y a des obligations légales pour une commission scolaire qui désire effectuer elle-même le transport? Il semble qu'on n'a pas de réponse, selon notre lecture, et peut-être que les gens qui accompagnent Mme Beauchamp seront en mesure de nous répondre, de nous rassurer là-dessus.
En terminant, nous comprenons la volonté de la ministre d'indiquer clairement, par un projet de loi, qu'il y aura une politique de tolérance zéro en regard de tout geste d'intimidation ou de violence dans le réseau scolaire au Québec, et nous sommes d'accord.
Toutefois, avant de répondre plus adéquatement aux différents besoins qui s'exprimeront, dans l'avenir, en matière d'intimidation et de violence, nous sommes d'avis que les amendements proposés pour le projet de loi n° 56, concernant l'industrie du transport scolaire, devraient peut-être être faits au Règlement sur le transport des élèves et non à la Loi sur l'instruction publique. En effet, selon nous, il serait plus aisé d'ajuster ces obligations, au besoin, dans le cadre d'un règlement plutôt que dans une loi. D'ailleurs, le législateur a prévu à l'article 31, et suivants, du Règlement sur le transport des élèves ce qui doit être inscrit au transport de transport scolaire.
En conclusion, notre association réitère son appui au projet de loi n° 56 et à ses objectifs. Les membres de notre association ont à coeur la sécurité des élèves qu'ils transportent quotidiennement et désirent contribuer à éliminer tout geste d'intimidation et de violence par des mesures concrètes touchant le transport scolaire. Nous vous remercions de votre attention.
Le Président (M. Marsan): Merci, M. St-Laurent. Et nous débutons immédiatement la période d'échange. Et je donne la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci. Bienvenue à M. St-Laurent. Bienvenue, Mme Frenette. Je comprends de vos interventions qu'il y a un appui au principe de la loi et je vous en remercie. Je n'en doutais pas, mais je vous remercie de cette ouverture et de cette volonté de contribution et de collaboration et, je dirais même, de... Vous acceptez d'emblée de dire que vous allez avoir des obligations de lutte contre l'intimidation de par votre rôle de transporteur scolaire.
Maintenant, dans votre mémoire, je distingue trois éléments. C'est-à-dire, c'est comme si vous nous faites des recommandations pour loger vos obligations à trois endroits, possiblement. Vous nous parlez du contrat qui lie le transporteur à la commission scolaire. Ensuite, vous nous parlez du Règlement sur le transport des élèves. Puis ensuite il y a la loi. À la fin, ma conclusion, c'est comme si vous me disiez, je trouve, mais peut-être que j'ai mal compris: Bien, dans le fin fond, peut-être qu'on n'est pas obligé de parler de ça dans la loi. Ça serait suffisant dans le contrat qui lie le transporteur à la commission scolaire ou encore dans le règlement. Deux questions: Qu'est-ce qui appartient où, là? Pouvez-vous me résumer rapidement, là, selon vous, qu'est-ce qui devrait être du contrat, qu'est-ce qui devrait être du règlement? Et à la fin est-ce qu'il y a un problème à ce que la loi de lutte contre l'intimidation nomme des obligations du transporteur scolaire? Est-ce que ça vous pose problème que la loi aborde cela? Et, sinon, qu'est-ce qui appartient à la loi? Donc, finalement, je veux que vous m'aidiez à redémêler le tout entre le contrat, le règlement et la loi.
M. St-Laurent (Mario): Nous sommes d'accord avec le projet de loi n° 56, et ce, sans réserve. Toutefois, lorsqu'on mentionne, à la fin de notre mémoire, le règlement, c'est simplement pour éclairer les membres de cette commission qu'il est possible aussi d'agir par règlement en matière d'obligation contractuelle par rapport au transport scolaire. C'est une voie, mais ce n'est pas une voie nécessairement nécessaire. C'est une voie parmi tant d'autres, comme une loi est une autre voie. Et on comprend également qu'une loi est plus forte, en termes de geste politique, qu'un règlement. Alors, simplement, notre commentaire à ce niveau a été simplement de dire: Il existe un règlement, il serait plus facile d'ajuster au besoin, mais on comprend fort bien qu'au niveau d'une loi c'est plus fort. Chacun a ses avantages et désavantages. Mais on croyait important d'informer les membres de la commission de ces deux possibilités.
Maintenant, quant aux obligations, le projet de loi n° 56, de la façon dont on le lit, donne des obligations au transporteur. Ce n'est pas qu'on ne cherche pas à avoir d'obligation, au contraire, mais je crois que ce devrait être dans le cadre d'un exercice de concertation entre le transporteur, et les commissions scolaires, et les écoles, pour établir ce que j'appellerais un tronc commun de gestes, de politiques qui devraient être implantées et comprises par tous dans le cadre d'un contrat type. Parce que dans des opérations quotidiennes un transporteur peut desservir plusieurs commissions scolaires. Il serait plus aisé, afin d'atteindre nos objectifs communs, qu'on établisse ensemble ce tronc-là, que ça ne soit pas le transporteur qui ait une obligation, d'une part, qu'une commission scolaire ait d'autres obligations, que le conseil d'établissement établisse autre chose. Je pense qu'il est important que tous les acteurs s'assoient ensemble et définissent ces mesures qui pourraient être, comme je vous le disais, un tronc commun et à moduler selon évidemment les réalités locales: Mes enfants fréquentent un milieu défavorisé, et il y a certaines réalités qui sont différentes, évidemment, de l'école voisine. C'est cette notion-là qu'on veut apporter dans le cadre de notre mémoire.
**(17 h 20)**Mme Beauchamp: Merci. Je veux maintenant vous entendre sur votre recommandation d'une modification de l'article 19 pour que le transporteur avise plutôt son répondant à la commission scolaire plutôt que le directeur de l'école. Je me questionne, parce que, l'esprit de la loi, il y a une notion d'obligation d'intervention avec diligence lorsqu'arrive un geste, lorsque sont posés des gestes d'intimidation dont on est témoin. Je veux vous entendre, parce que je me dis: Où est vraiment le problème de demander que l'intervention se fasse avec le directeur de l'école? Parce que mon souci, donc, c'est de dire: Un enfant est intimidé, et là on demande au directeur de l'école d'intervenir avec diligence. Le fait que ça passe par un répondant à la commission scolaire, qui devra aviser le directeur, est-ce que je ne suis pas devant une mécanique un petit peu compliquée quand il est question d'un enfant intimidé? Donc, je veux vous entendre sur la difficulté que ça représente pour vous, si c'est une vraie difficulté insurmontable. Parce que je veux qu'on reste dans l'esprit de la loi. L'esprit de la loi, c'est une intervention diligente si on est témoin d'actes d'intimidation.
M. St-Laurent (Mario): L'objectif poursuivi, justement... On poursuit le même objectif, c'est-à-dire que le message soit transmis de la façon la plus diligente possible, mais non pas juste le message, mais qu'il y ait des actions aussi qui soient exercées le plus rapidement possible. Je reprends l'exemple des plans d'urgence. C'est souvent le régisseur, là, qui est le répondant pour la commission scolaire vis-à-vis du transporteur, et ils ont des numéros de téléphone qu'ils connaissent, ils savent comment rejoindre la personne presque 24 heures sur 24. Et je crois aussi qu'il est important que la personne qui est responsable du transport scolaire dans une commission scolaire ou à une école soit au courant de ce qui se passe dans le service qu'il organise pour la commission scolaire, de un. De deux, compte tenu, à mon avis, que c'est le rôle de tous dans une école, je trouverais déplorable que le répondant ne fasse pas diligence dans la transmission du message parce que c'est le rôle de chacun et de chacune dans l'école d'agir de façon diligente. Ce n'est pas en fonction d'un titre qu'on doit agir d'une façon, d'un degré x ou y. Je crois que, peu importent le titre ou les fonctions qu'on exerce dans une école, on doit agir de façon diligente en matière d'intimidation et de violence. Dans le fond, on vise le même objectif, mais c'est peut-être la façon dont on voit, au niveau des opérations... Mais, pour nous, ce n'est pas insurmontable. C'est simplement une recommandation en termes, justement, d'action rapide.
Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup.
M. St-Laurent (Mario): Merci.
Le Président (M. Marsan): Ceci termine le premier échange avec le parti ministériel. Nous poursuivons, et je vais donner la parole à M. le député de Jonquière, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire. M. le député.
M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, à votre tour, à l'Assemblée nationale du Québec. Merci d'avoir pris le temps de préparer ces recommandations et ce mémoire.
Je veux juste bien comprendre. Un peu dans le même esprit que vous avez déjà discuté avec la ministre, je comprends que vous souhaitez que les mesures -- je pense que c'était votre recommandation 2, là -- que les mesures visant à prévenir et contrer toute forme d'intimidation ou de violence «soient convenues au contrat de transport scolaire entre le transporteur et la commission scolaire ou l'établissement privé». Ce que je connais de la réalité du transport scolaire au Québec, c'est que c'est un milieu qui est très, très fragmenté, mais je ne le dis pas de façon péjorative, au contraire. Mais moi, je connais des milieux régionaux ou locaux où c'est de père en fils quasiment, là... pas quasiment, c'est la réalité, qui ont un autobus dans le village puis ils ont un contrat avec la commission scolaire, mais pourtant c'est une grande commission scolaire. Un peu plus loin, ça va être une autre entreprise familiale, qui a peut-être trois autobus puis... Est-ce que ça ne serait pas trop des règles qui viendraient de haut en bas, alors qu'il faut quand même donner une marge de manoeuvre à chacun des milieux pour adopter des règles, là, qui leur conviennent?
M. St-Laurent (Mario): Pour vous donner peut-être un exemple très concret de ce qui pourrait arriver, si les règles ou les obligations devaient venir du transporteur, exemple, une entreprise qui possède un, deux autobus n'a pas nécessairement non plus les capacités, tant en ressources humaines qu'en termes d'expertise, pour développer un plan d'action en matière... contre l'intimidation, etc. Je crois que c'est là qu'il est important que l'ensemble des acteurs concernés définissent des actions que je dirais nationales, si on peut les appeler ainsi, mais modulées selon les réalités locales ou selon les établissements pour lesquels le transporteur a un contrat, et ça, je pense que c'est important. La pire chose qu'on pourrait faire, c'est de faire du mur-à-mur, et ça, ce n'est certainement pas souhaitable. Toutefois, il y a certainement des points communs qui nous rassemblent et qui font en sorte qu'au Québec on ne devrait pas tolérer telle chose, et ça, je crois que ça devrait... nous croyons que ça devrait être inscrit dans le cadre qu'on appelle communément le contrat type entre une commission scolaire et ses transporteurs.
M. Gaudreault: Est-ce que, dans le plan de lutte qui est prévu et qui est nommé, là, je dirais, à l'article 4 du projet de loi, est-ce que vous pensez qu'on devrait avoir un petit alinéa ou un paragraphe concernant nommément le transport scolaire, à ce moment-là, ou ce qui est convenu, disons, à l'article 19, c'est suffisant, ou est-ce qu'on devrait plutôt y faire référence... Parce que c'est quand même un élément important, ce qui se passe dans l'autobus, là. Donc, est-ce que déjà, dans les éléments du plan de lutte, là, qui sont nommés à l'article 4, on devrait nommer le transport scolaire? Avez-vous analysé ça?
M. St-Laurent (Mario): Nous ne l'avons pas analysé. Alors, j'aimerais peut-être prendre le temps, peut-être, de revenir, dans le cadre du secrétariat à la commission, pour faire parvenir nos commentaires à ce sujet-là, parce que je ne voudrais pas livrer une réaction à chaud et je voudrais également consulter nos membres à ce sujet. Mais l'objectif poursuivi, c'est qu'il y ait une action concertée de l'ensemble des intervenants, que ce ne soient pas uniquement le conseil d'établissement d'un côté, les transporteurs de l'autre, le directeur... mais qu'il y ait vraiment une action vraiment commune pour arriver à un objectif commun.
M. Gaudreault: Très bien. Oui, si vous avez effectivement des choses à ajouter, je pense que la commission se fera un plaisir de les recevoir...
M. St-Laurent (Mario): Si vous nous le permettez, dès demain matin on vous fera parvenir nos commentaires à ce sujet-là.
M. Gaudreault: Oui, oui, oui. Ça peut être après-demain, il n'y aura pas de problème.
M. St-Laurent (Mario): Parfait. Je vous remercie. Vous êtes bien bon.
M. Gaudreault: Je voulais peut-être une petite information technique -- et vous excuserez ma méconnaissance du secteur: Quand on parle du transporteur au sens de la Loi sur l'instruction publique et des contrats avec les transporteurs, est-ce que «transporteur», ça inclut également les régies municipales? Parce que je sais qu'il y a certaines régies municipales qui font du transport d'élèves. Est-ce qu'on doit précisément, là, nommer les régies municipales, ou c'est inclus dans la définition de «transporteur», pour vous? Puis j'imagine que dans votre association il y a des régies municipales qui sont membres.
Mme Frenette (Geneviève): Pour ce qui est de la définition comme telle du mot «transporteur», malheureusement je n'ai pas la loi en entier avec moi, mais on pourrait également vous répondre en même temps, demain ou après-demain, à savoir si la définition de «transporteur»... Mais de mémoire il n'y a pas une définition comme telle du terme «transporteur» dans la Loi sur l'instruction publique.
M. Gaudreault: Parce que ça, remarquez que ça sera notre travail également en étude article par article avec le soutien des gens du ministère, mais c'est parce que je veux être sûr de ne pas échapper, là, aucun transporteur. On connaît tous des exemples de régies municipales qui font affaire même avec des commissions scolaires ou avec des écoles privées et...
M. St-Laurent (Mario): ...sociétés de transport aussi qui pourraient contracter avec des commissions scolaires. Et on s'est d'ailleurs demandé, en s'en venant ici -- est-ce que ça rejoint un peu votre interrogation: Est-ce que les...
M. Gaudreault: ...je parle de régies municipales, je parle de...
M. St-Laurent (Mario): ...sociétés de transport sont incluses dans la définition du mot «transporteur» dans le cadre du projet de loi n° 56?
M. Gaudreault: C'est ça. Quand je parle de régies municipales, là, je pense à... C'est un vieux terme que j'ai, là, mais je pense à des sociétés de transport, effectivement, comme le RTC ici, la STS chez nous, etc. O.K.
J'aimerais savoir... Vous parlez... Il me reste combien de temps, M. le Président? Une minute? Ouf! ça va vite. Rapidement, là, donc -- vous voyez, il me reste une minute, incluant votre réponse -- la formation...
Une voix: ...il m'en reste 48.
M. Gaudreault: La formation, vous voyez ça comment? Vous avez quelques mots là-dessus, rapidement?
M. St-Laurent (Mario): Oui, pour nous, très important, il existe un... qu'on appelle un cours de métier unique, qui est une formation de 15 heures, si je me souviens bien, qui, comme le mentionnait le mémoire, qui est sous l'égide du ministère sur... la Loi sur les transports à l'article 48.13, et on trouverait dommage, dans le cadre justement d'un exercice de concertation, qu'il y ait deux formations distinctes qui ne soient pas imbriquées les unes les autres. Je pense à des entreprises qui sont en région, qui doivent faire déplacer leurs employés dans les grands centres urbains pour obtenir ces formations. Je crois qu'il serait utile que le ministère de l'Éducation échange avec leurs vis-à-vis du ministère des Transports afin d'inclure cette formation-là dans le métier unique.
Mme Frenette (Geneviève): C'est une formation qui est renouvelable également aux trois ans, donc il y a un six heures à faire à chaque trois ans, donc ça s'intégrerait bien dans le renouvellement.
Le Président (M. Marsan): Alors, merci, Mme Frenette, M. St-Laurent, de nous avoir donné le point de vue de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec.
J'inviterais maintenant les représentants de l'Association du transport écolier du Québec à venir prendre place.
Et je vais suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 30)
(Reprise à 17 h 31)
Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux. Et il nous fait plaisir d'accueillir les représentants de l'Association des propriétaires d'autobus du Québec... excusez, l'Association du transport écolier du Québec. Et, M. Gaston Lemay, le président, je vais vous demander de nous présenter la personne qui vous accompagne. Et je vous demanderais aussi... Vous avez une période de 10 minutes pour faire votre présentation.
Association du transport écolier du Québec (ATEQ)
M. Lemay (Gaston): Merci beaucoup, M. le Président. Je suis accompagné du directeur général de l'association, M. Luc Lafrance. M. le Président, MM. les membres de la Commission des transports et mesdames, Mme la ministre, l'Association du transport écolier du Québec existe depuis 50 ans. On fête cette année notre 50e anniversaire. L'ATEQ représente 90 % des transporteurs écoliers du Québec. On a 650 membres, et plusieurs entreprises sont des entreprises familiales, deuxième et troisième génération, de un à 1 200 autobus, si vous voulez, comme propriétaires.
Je ne vous en parlerai pas plus longtemps, de l'association. Je pense qu'elle est connue. Je vais laisser tout de suite... Vu qu'on a seulement 10 minutes pour faire la présentation, je vais donner la parole au directeur général pour vous faire la lecture de notre position.
M. Lafrance (Luc): Alors, merci, M. le Président, Mme la ministre. Concernant la problématique de l'intimidation, l'autobus n'est pas différent de la cour d'école ou des lieux de rassemblement d'élèves. Il se produit aussi des cas d'indiscipline, de violence, d'intimidation. Sans dire que cela est généralisé dans l'ensemble des autobus, il faut quand même admettre que ces cas se produisent de temps à autre.
Alors, l'ATEQ a déjà, depuis plusieurs années, décidé de s'impliquer dans cette problématique-là. Déjà, en 1999, une première formation a été offerte aux membres de l'ATEQ, qui a été appelée Respect à bord. Cette formation traitait de l'harmonie à bord, de la mauvaise conduite, du comportement violent, du comment amener les élèves à bien se conduire, des rapports de discipline et du comment faire partie de la solution et des trucs à découvrir. Ça s'adressait davantage aux conducteurs d'autobus scolaires.
Aussi, en 2005, l'ATEQ a travaillé avec l'Association sectorielle transport entreposage, qui est une association paritaire qui intervient en matière de santé et sécurité au travail, et on a élaboré une formation sur la prévention et la violence, qui s'intitulait Stop à la violence!. Cette formation a connu un grand succès. Elle s'est adressée aux conducteurs d'autobus scolaires et a été diffusée à plus de 3 400 conducteurs entre 2005 et 2011. Les objectifs de cette formation étaient: les aider à prévenir les situations de crise avant qu'elles ne se produisent, leur permettre de conserver leur autorité auprès des élèves, favoriser des attitudes et des comportements positifs visant à les soutenir, lorsqu'une situation de crise survient, et faciliter l'amélioration de la qualité de vie, dans l'exercice de leurs fonctions, par une meilleure gestion du stress.
Puis, en décembre 2011, l'ATEQ a lancé un bracelet visant à contrer l'intimidation en milieu scolaire et en transport scolaire. On a d'ailleurs tout ça. C'est un peu suite aux événements qui se sont produits dans le Bas-du-Fleuve à l'automne dernier. Le conseil d'administration de l'ATEQ s'est penché sur la situation et a décidé de prendre l'initiative de produire des bracelets afin de contrer l'intimidation et passer le message de dire non à l'intimidation. D'ailleurs, M. le président, en a amené quelques-uns pour ceux qui voudraient s'en procurer. Ça va nous faire plaisir de vous en donner. Jusqu'à présent, on a environ 20 000 bracelets qui sont en circulation. Et ce bracelet-là se vend à coups de 2 $, et les profits de cette vente-là vont à la Fondation de l'ATEQ, fondation qui existe depuis à peu près cinq ans. Et on a décidé, au conseil d'administration, que la fondation viendrait en aide aussi à des projets pour venir contrer l'intimidation. D'ailleurs, tout récemment, on a eu un premier projet qui a été déposé et sur lequel la Fondation de l'ATEQ va investir. C'est dans le coin du Bas-Saint-Laurent, naturellement, et c'est la commission scolaire des Monts-et-Marées qui nous a présenté un projet, et la fondation a accepté de participer financièrement à ce projet-là.
Finalement, toujours en termes de prévention, l'ATEQ est à produire une nouvelle vidéo. Pour ceux qui sont plus anciens un peu, comme moi, on se rappelle beaucoup de Bubusse en autobus. C'est une vieille cassette de prévention qui roule, je pense, depuis les années 80. L'ATEQ a décidé, en collaboration avec le ministère des Transports, avec la SAAQ, avec le ministère de l'Éducation, de mettre à jour cette vidéo-là de prévention en matière de sécurité, et il va y avoir différentes capsules, dont une capsule qui est faite spécifiquement sur l'intimidation, sur le respect à bord entre élèves. Donc, on a voulu, dans le cadre de ce projet-là, là aussi faire une démarche pour travailler à faire en sorte qu'on diminue les cas d'intimidation dans les autobus.
En ce qui a trait au projet de loi n° 56, l'ATEQ est d'accord avec les grands principes du projet de loi, les objectifs visés. Par contre, elle émet quelques réserves, notamment en ce qui concerne le paragraphe 19, où l'article 297 est modifié par l'addition, à la fin du troisième alinéa, des phrases suivantes: «Ce contrat doit prévoir l'obligation, pour le transporteur, d'adopter des mesures visant à prévenir et à contrer toute forme d'intimidation ou de violence lors du transport des élèves et, le cas échéant, d'informer le directeur de l'école fréquentée par un élève qu'il transporte de tout acte d'intimidation ou de violence qui survient lors de ce transport. Ce contrat doit également prévoir l'obligation, pour le transporteur, d'assurer la formation, à cet égard, du personnel travaillant au transport des élèves.» Ce n'est pas qu'on est contre le principe qu'il y ait une certaine forme d'obligation de rapporter ou de mettre en place des mesures ou un programme dans les autobus. C'est que ça existe déjà. En vertu de l'article 18 qui est contenu dans le contrat type qui est mis en place par la Fédération des commissions scolaires, il y a déjà une obligation qui existe, à cet endroit-là, pour le transporteur et le conducteur, de s'assurer qu'il y a une politique sur la discipline dans chaque véhicule et elle doit appliquer les règlements à cette fin décrits par la commission scolaire. Alors, il y a une obligation contractuelle, et, comme on disait tout à l'heure dans l'autre présentation, ce n'est pas du mur-à-mur. Ça permet aux commissions scolaires d'avoir ses propres politiques en matière de discipline et d'intervention, et ces mesures-là sont adaptables en fonction des régions et des besoins locaux. Et, contractuellement, le transporteur est déjà obligé de respecter ce volet-là. Alors, on se dit: Bien, pourquoi l'enchâsser dans une loi? On n'est pas nécessairement contre qu'il soit dans la loi, mais pourquoi aller si loin que ça? Déjà, ça se fait, et on pense qu'à certains égards ça fonctionne bien.
En ce qui a trait à la notion de formation obligatoire, l'ATEQ suggère plutôt que le volet violence et intimidation soit inclus dans la formation obligatoire des conducteurs et conductrices d'autobus scolaires. Comme vous le savez sans doute, pour conduire un autobus, un véhicule scolaire, un conducteur ou une conductrice doit détenir non seulement un permis de classe 2, mais aussi, en vertu de l'article 48.12 de la Loi sur les transports, un certificat de compétence pour les conducteurs et conductrices d'autobus scolaires, mieux connu sous son appellation d'origine, qui était «métier unique». Cette formation obligatoire est entrée en vigueur en 1995 et comporte deux volets, c'est-à-dire une formation initiale de 15 heures pour un nouveau conducteur ou conductrice et une formation d'appoint de six heures à tous les trois ans.
Ce serait, à notre avis, une assurance que tous les conducteurs et conductrices reçoivent une formation afin de prévenir et contrer le phénomène de violence et d'intimidation à bord des autobus scolaires. D'ailleurs, lors de la prochaine série de cours de six heures, prévue à l'automne 2012, la majorité des conducteurs et des conductrices devront suivre leur formation d'appoint. Il y a une cohorte qui en 1995 a suivi la formation et qui, à tous les trois ans, ont une formation d'appoint à suivre. On est rendus à l'échéance de la sixième édition, je dirais, du six heures et qui devrait commencer en septembre. Alors, ce serait peut-être opportun déjà de prévoir, avec le ministère des Transports, un volet concernant l'intimidation et la violence dans l'autobus scolaire.
Voilà pour les élèves qui sont transportés par le réseau d'autobus scolaires. Mais qu'en est-il des élèves qui sont transportés par les réseaux publics de transport? Vous en parliez tout à l'heure. Ceux-ci sont intégrés à travers une clientèle adulte qui n'a aucun lien avec les réseaux scolaires et sur lesquels les conducteurs n'ont aucun contrôle.
D'ailleurs, le conducteur d'autobus du réseau public n'a reçu aucune formation en matière de sécurité et d'intégrité des élèves transportés. S'il survient une situation de violence ou d'intimidation, qu'adviendra-t-il? Qui avisera l'école ou la commission scolaire?
Alors, pour nous, ça pose un problème, ce type d'opération de transport là. L'élève qui est dans le milieu traditionnel du transport scolaire est très bien encadré en matière de sécurité, en matière aussi de discipline à bord de l'autobus, mais qu'en est-il dans le réseau public? Alors, nous, on se questionne beaucoup là-dessus. Ça nous inquiète aussi parce qu'il y a de plus en plus de transferts d'élèves vers ce réseau-là.
D'ailleurs, on en a parlé régulièrement, de ce dossier-là, et on en profite ici, de l'occasion, pour vous sensibiliser à ce phénomène-là, pour faire en sorte qu'il y ait le moins d'élèves possible... Pour nous autres, au nom de la sécurité et de l'intégrité, c'est important de garder les élèves dans le réseau traditionnel du transport scolaire.
Autre élément que j'ai peut-être passé ou j'ai sauté tout à l'heure, c'est tout le lien de communication qui existe entre le conducteur, le transporteur, la commission scolaire et l'école. Je pense que, s'il y a quelque chose sur lequel on doit mettre l'emphase, c'est sur ce lien de communication. Je me rappelle, il y a quelques années, au ministère de l'Éducation, il y avait eu une table de travail sur la violence à bord des autobus scolaires, où... Plusieurs partenaires y étaient. Nous y étions, l'ATEQ. Et on avait fait l'inventaire de ce qui se faisait de bien, ce qui se faisait de moins bien dans différents secteurs, différentes commissions scolaires, pour vraiment aller préciser l'importance du canal de communication qui doit exister. Et je pense que, s'il y a quelque chose, s'il y a un message qu'on voudrait passer aujourd'hui, c'est mettre l'emphase sur ce canal-là, de façon à contrer le plus possible tout geste puis s'assurer qu'il y ait des suivis.
**(17 h 40)**Le Président (M. Marsan): ...beaucoup pour cette présentation. Nous allons débuter immédiatement la période d'échange. Et je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.
Mme Beauchamp: Merci. Bienvenue, M. Lemay et M. Lafrance. Merci pour votre contribution. Là, là, je dois vous présenter mes excuses. Puis la vie est mal faite, puis j'ai un brin honte. J'ai porté mon bracelet pendant tout le temps de la commission parlementaire. Plus que ça, je l'ai porté depuis... je l'ai porté... Là, je ne peux pas vous révéler tous mes secrets, mais j'ai dormi avec, j'ai pris ma douche avec. Je me suis dit... j'ai pris l'engagement personnel que j'allais le porter au moins jusqu'à la fin de l'adoption de cette loi. Puis là je ne sais pas si c'est parce que j'ai mis deux gros bracelets ce matin, mais là je suis là, je me dis: Ça ne se peut pas, je ne l'ai pas. Je ne comprends pas. Donc...
Une voix: Ce n'est pas grave, on en a.
Mme Beauchamp: Non, non, mais... Enfin, je ne veux pas prendre trop de temps là-dessus, mais ça ne se peut pas que je sois prise en défaut. La seule journée où je suis prise en défaut, c'est quand on vous reçoit à la commission parlementaire. C'est incroyable. Je n'en reviens pas.
Je prends juste le temps de vous dire que, par votre fondation, les différentes activités de mobilisation que vous avez mises en place, je pense, elles ont leur importance. Ça a donné l'objet de reportages. Je suis sûre que je ne suis pas la seule à porter ce bracelet. Ça fait que je voulais souligner que... c'est une initiative que je veux saluer.
Et d'ailleurs ma première question est d'ordre vraiment général. Vous avez spontanément contribué à la volonté de dire: Ça prend des activités de mobilisation dans l'ensemble de l'action... de la société québécoise, et vous avez joué votre rôle. Maintenant, j'aimerais ça vous entendre un peu plus sur le fait que nous, par exemple, on veut inciter les gens à signer une déclaration d'engagement contre la lutte contre l'intimidation ou encore, dans le cadre de la semaine que l'on propose autour du 2 octobre, qu'on propose des semaines de lutte contre l'intimidation. Comment voyez-vous votre rôle? Pouvez-vous nous en parler un peu plus, votre rôle de partenaire dans cette mobilisation de l'ensemble de la société dans la lutte contre l'intimidation?
M. Lafrance (Luc): Bien, je vous dirais, sur la première partie de votre question, à savoir sur la signature du registre, déjà nous, on a incité nos membres, par le biais de notre réseau électronique, d'aller signer cette adhésion-là. Je pense que c'est une bonne façon de s'impliquer directement. Alors, c'est sûr qu'on met beaucoup de choses, pour nos membres, en place, on s'implique beaucoup, je dirais, corporativement. Mais chacun des transporteurs... Comme vous le savez, ce sont des petites entreprises, des entreprises familiales, pour d'autres, des plus grosses entreprises, mais on veut que chacun, chacune des entreprises, chacun de leurs chauffeurs s'impliquent dans ce dossier-là. Je pense que c'est important et je pense que nous, on incite énormément à aller signer ce registre-là.
Pour ce qui est de la semaine sur... pour contrer l'intimidation, je pense qu'on ne peut qu'applaudir cette initiative-là. On avait déjà, nous, une semaine ou une quinzaine de sécurité, où on fait la promotion de la sécurité en transport scolaire. Que d'en faire une strictement pour la violence et l'intimidation, je pense que c'est une excellente idée, de ce côté-là.
Mme Beauchamp: Puis vous me pardonnez de ne pas porter mon bracelet?
M. Lafrance (Luc): Ah oui! tout à fait.
Mme Beauchamp: Je veux revenir sur un sujet qu'on a abordé aussi avec vos prédécesseurs lors de cette commission, là, tout l'aspect d'où doit être logée l'obligation qui concerne le transporteur scolaire dans la lutte contre l'intimidation. Et dans votre mémoire vous parlez que, pour vous... vous dites: Ça se fait déjà puis c'est inscrit dans un contrat type. Maintenant, un contrat type, c'est un contrat type. C'est une proposition de contrat qui peut inspirer bien du monde, mais ce n'est pas une obligation légale. Je veux vous réentendre sur cette dimension-là. Je posais tantôt la question: Est-ce qu'il y a un obstacle, est-ce qu'il y a une préoccupation particulière au fait d'en faire une obligation légale? Parce que la portée n'est pas la même, honnêtement, entre un article de loi puis un contrat type proposé à l'ensemble des commissions scolaires. Donc, je veux vous entendre sur est-ce que, pour vous, c'est un irritant. Est-ce que ça serait un irritant que la loi soit adoptée telle quelle? Est-ce que ça représente une difficulté particulière? Je comprends qu'on ne doit pas légiférer pour rien, ça, je comprends ça, mais en même temps, là, on est dans un dossier où le propre de la loi est d'instaurer un régime d'obligation d'intervention. Donc, je veux juste vous entendre sur cette dimension-là entre le contrat type, le loi et le règlement.
M. Lafrance (Luc): Je vous dirais: Au départ, vous avez raison, la loi a préséance sur des règlements, ou un contrat type, ou une entente contractuelle. Ce n'est pas un irritant pour nous. Le message qu'on vient vous dire, c'est que, oui, ça existe déjà. Ce qu'on ne voudrait surtout pas -- puis je pense qu'on l'a entendu un peu tout à l'heure par mes prédécesseurs -- c'est que ça devienne un mur-à-mur. En l'enchâssant dans la loi, notre crainte, à l'ATEQ, c'est que ça devienne une norme mur à mur. On voudrait qu'il y ait une certaine latitude auprès des commissions scolaires, qu'ils soient capables d'adapter la réglementation, ou l'entente, ou les suivis, ou le contrôle qu'ils veulent faire avec leurs contractants que sont les transporteurs scolaires, qu'ils soient adaptables à leur réalité locale. Notre crainte, c'est plus de dire: Bien, advenant la loi, ça pourrait peut-être empêcher cette adaptation locale là.
Mme Beauchamp: Si je lis l'article 19, il est rédigé en disant: Le «contrat doit prévoir l'obligation, pour le transporteur, d'adopter des mesures visant à prévenir et à contrer toute forme d'intimidation». Le fait qu'on dise... On fait référence au contrat puis on dit que ce contrat doit prévoir des mesures. Ça ne me semble pas très prescriptif. Ça ne me semble pas imposer un modèle unique. Ça vient juste nommer une obligation maintenant légale de dire qu'un contrat signé entre une commission scolaire et un transporteur doit comprendre des mesures, doit identifier des mesures de lutte contre l'intimidation.
M. Lafrance (Luc): Dans la mesure où ça reste aussi général que ça, on n'a pas de problème. Mais, s'il découle de ça un projet de règlement où on vient enchâsser précisément qu'est-ce que doit contenir le contrat, c'est là qu'on a un petit peu une crainte d'arriver avec un programme mur à mur.
Mme Beauchamp: Peut-être juste un... Il reste-tu du temps ou il n'en reste pas? Une minute? Juste vous entendre parler de la formation. Votre recommandation sur la formation, juste pour notre éclairage, est-ce qu'en ce moment, dans la formation obligatoire prévue pour l'obtention du certificat de compétence, à votre connaissance, est-ce qu'on aborde la dimension d'intimidation déjà?
M. Lafrance (Luc): Malheureusement, non. Initialement, au tout premier cours, je dirais, dans le 15 heures, pour tout nouveau conducteur qui veut accéder au métier de conducteur, il y a un aspect gestion de la discipline à bord. Mais ça ne va pas aussi loin que parler de violence ou de parler d'intimidation. Alors, nous, ce qu'on propose, c'est que, dans le six heures complémentaire à tous les trois ans, qu'il y ait une capsule spécifiquement sur l'intimidation. Comme ça, on s'assure que tout le monde est formé.
Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, M. Lafrance. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle. Et je vais donner la parole à M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. Alors, merci de votre présence ici et du temps que vous avez pris pour préparer votre présentation. J'aimerais vous entendre sur un élément particulier de l'article 19, quand on dit que le contrat doit prévoir «d'informer le directeur de l'école fréquentée par un élève qu'il transporte de tout acte d'intimidation ou de violence qui survient lors de ce transport». Comment vous interprétez ça, vous? Au-delà, là, du fait qu'il faut informer le directeur ou le répondant... Ça, c'est une chose, mais moi, je vous parle, là, de la compilation des actes, là. Là, peut-être que je fais appel un peu plus à votre expérience terrain dans l'autobus, là. Il me semble que, quand on a un autobus de 40 ou 45 élèves turbulents ou à moitié turbulents, bien, en tout cas, une bonne partie turbulents...
Une voix: Ça dépend de l'heure.
M. Gaudreault: Est-ce qu'il est possible de compiler tout acte d'intimidation, puis, quand le chauffeur arrive à l'école, il débarque puis il va dire ça au directeur?
M. Lafrance (Luc): Je vais laisser mon président répondre à cette question-là. Ça fait 40 ans qu'il conduit lui-même un autobus scolaire, alors il est en mesure de témoigner.
M. Gaudreault: Des générations d'élèves.
Le Président (M. Marsan): M. Lemay.
**(17 h 50)**M. Lemay (Gaston): Je fais partie des générations. Non, regardez, ce matin, j'ai fait mon parcours comme d'habitude, moi, là, avant de m'en venir. Je peux vous dire que, selon les commissions scolaires, comment les commissions scolaires réagissent face à des situations de même... Je vais amener un exemple de ma commission scolaire à moi. Moi, mon chauffeur, ou moi, quand je conduis mon autobus, si j'ai un élève qui fait de l'intimidation, qui fait des actes qui ne sont pas corrects dans l'autobus, j'ai un formulaire qui est fourni par la commission scolaire, que je remplis. Quand le jeune débarque, je lui donne puis je lui dis: Le lendemain matin, tu me l'amènes signé. Donc, s'il ne me l'amène pas le lendemain, là, je lui donne une journée de tolérance. J'ai une autre copie, moi. Lorsque je reçois le papier, je le faxe à mon directeur des transports à la commission scolaire, qui, lui, automatiquement en prend connaissance, faxe une lettre à la direction de l'école et aux parents, leur disant que le comportement de cet enfant-là n'est pas tolérable dans un autobus scolaire.
J'ai amené un exemple qui est arrivé justement le 21 mars, que le chauffeur m'a amené le 22, que j'ai faxé le 23, et le 27 la lettre a été envoyée aux parents, au transporteur et à la direction de l'école. Ça, lorsque les commissions scolaires ou les directions d'école, lorsque le service du transport de la commission scolaire prend les choses en main, moi, je peux vous dire, où que je travaille, à ma commission scolaire, que ça fait des années que ça existe de même et que ça va très, très bien. Il y a un suivi immédiat. J'entendais tout à l'heure parler, mettons, des directions d'école. Dans mon cas à moi, le directeur de mon école, il fait trois écoles. Donc, le problème que j'ai, si j'ai affaire à lui, il n'est pas là. Il va venir dans deux jours ou dans trois jours. Là, il se perd du temps. Tandis que, si la commission scolaire a un système de même, puis automatiquement moi, je le faxe quand je l'ai, puis que deux ou trois jours après ça fonctionne, il y a un suivi qui est envoyé aux parents immédiatement, à la direction d'école et à moi, comme transporteur.
M. Gaudreault: Est-ce que, pour... Je m'excuse de vous interrompre. Est-ce que, pour vous, ce que vous venez de nous décrire comme procédure dans votre commission scolaire, ça répond à l'obligation d'informer... je ne veux pas qu'on regarde la directeur pour l'instant, là, mais que le chauffeur doit informer de tout acte d'intimidation ou de violence? Ou est-ce que, selon vous, cette notion qui est amenée dans l'article ajouterait à ce que vous fournissez déjà ou est-ce que ce que vous fournissez, pour vous, ça convient pour dire que c'est tout acte d'intimidation ou de violence?
M. Lemay (Gaston): Ça comprend tout ce qui peut se passer dans l'autobus. Bien, en tout cas, moi, pour mes 40 ans d'expérience au niveau de conduite d'autobus scolaire, l'intimidation, elle est sous toutes sortes de formes, hein? Tu sais, arrache la tuque, agace ou donne un coup de poing, ça, ça peut être un exemple. Mais par contre dans mon autobus je peux avoir un jeune qui est tout le temps debout puis qui ne respecte pas la consigne d'être assis, c'est un manquement. Mais la violence fait partie de ça, l'intimidation fait partie de ça, donc ça couvre tout. Puis ça, c'est... Puis on a des petites coches à faire, pour ne pas que les chauffeurs aient trop d'ouvrage à faire non plus, là, mais il peut y avoir des commentaires de marqués dans le bas lorsque tu l'envoies à la commission scolaire.
Puis je peux vous dire qu'en plus de cela, bien, je n'ai pas été plus loin que ça tout à l'heure, mais ils ont le droit à trois avis de manquement. Le premier, il est averti. Le deuxième, là, il est averti que, s'il y en a un troisième, il est en dehors du transport pour une journée. Puis il est obligé d'aller à l'école, donc le parent, il s'en occupe. Puis, si ça arrive une quatrième fois, bien ça peut aller à cinq jours de suspension. Donc, lorsque tu as un appui, comme conducteur ou comme transporteur, de même de ta commission scolaire, tu as réellement de quoi dans les mains. Tu te dis: Bien, regarde... Puis tu le rapportes tout de suite, tu n'attends pas, là, que... Tu ne tolères pas. Tu vas... Moi, en tout cas, je n'en ai jamais émis personnellement, parce qu'apparemment j'ai l'air d'un gars bien malin quand je conduis un autobus, là, les jeunes me respectent. Mais c'est peut-être parce que je suis rendu à la troisième génération que je transporte. Les grands-parents m'ont connu. Ça va très bien, mais il reste que c'est un système qui est très efficace.
M. Gaudreault: Est-ce que vous accepteriez de déposer ce document-là à la commission pour qu'on puisse le consulter?
M. Lemay (Gaston): Oui, bien, je pourrais... Bien là, c'est parce que lui, c'en est un qui a des noms dessus, parce que j'en ai pris un qui... un véridique.
M. Gaudreault: Ah! c'est plus délicat, oui.
M. Lemay (Gaston): Mais je peux m'organiser pour avoir les copies de ça puis vous les déposer. Il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Marsan): ...parvenir au secrétariat de la commission.
M. Lemay (Gaston): Oui, avec plaisir.
M. Gaudreault: Écoutez, j'aimerais vous entendre... Je trouve ça bien parce qu'on a quelqu'un devant nous qui a 40 ans d'expérience de conduite d'autobus scolaires, là. Comment ça se passe, la conciliation, là, sécurité routière, que le chauffeur doit avoir, puis en même temps gérer, là, les 40 élèves en arrière? Je veux dire... Parce qu'on met beaucoup, beaucoup l'attention, depuis les dernières années, puis c'est correct, sur la sécurité autour de l'autobus, les affiches qui ouvrent... Je veux dire, il n'y a quasiment rien qui... hein, c'est très, très fort puis c'est correct. Mais en même temps, là, il y a ça, la sécurité routière, mais il y a aussi les phénomènes d'intimidation. Alors, dans le concret, là, un chauffeur, comment qu'il agit? Il attend-tu quand l'élève intimidé ou intimidateur débarque, descend de l'autobus, ou... Comment ça marche?
M. Lemay (Gaston): Non, bien, disons qu'on intervient lorsque... Il faut dire, lorsqu'on fait un parcours scolaire... excusez l'expression anglaise, mais on fait du «stop-and-go», là, on part puis on arrête, puis on n'est pas tout le temps à grande vitesse. Donc, lorsqu'il se passe de quoi, si tu vois dans ton miroir qu'il se passe de quoi, au prochain arrêt tu peux avertir, puis tu ne déranges pas la sécurité, là, tu peux avertir le jeune. Mais en principe, moi, là, ma méthode à moi, c'est que j'avertis, mais, lorsque le jeune arrive pour débarquer de l'autobus, je lui parle. J'en garde au moins un autre dans l'autobus pour être certain qu'il ne m'accuse pas de l'avoir touché ou fait de quoi, parce qu'il faut faire attention aux droits de la personne maintenant, mais on s'organise pour parler au jeune mais pas nécessairement le «blaster» devant tout le monde. Je pense que les jeunes, ils veulent le respect, comme moi, comme chauffeur, je veux le respect. Je pense qu'il faut le respecter aussi, mais, lorsque tu parles à un jeune calmement, puis tu lui expliques le pourquoi que tu fais ça, puis tu l'avises que... Regarde, si tu continues, là, tu sais qu'est-ce qui va arriver. Pour la sécurité routière, comme vous dites, ça ne pose pas de problème. Il y a peut-être des endroits plus urbains ou en ville que c'est peut-être plus le «free-for-all». Moi, je suis en campagne. Je fais de la ville un peu, mais ça va très bien, je n'ai pas de problème de ce côté-là. Mais je ne dis pas qu'il n'en existe pas ailleurs, par exemple.
Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. Lemay, M. Lafrance, de nous avoir donné le point de vue de l'Association du transport écolier du Québec.
Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 56)
(Reprise à 17 h 58)
Le Président (M. Marsan): Alors. nous reprenons nos travaux. Et nous sommes rendus à l'étape des remarques finales.
Mémoires déposés
Mais, avant de passer aux remarques finales, je vais procéder au dépôt des mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions. Il s'agit des mémoires suivants: le Comité d'orientation pédagogique du réseau scolaire anglophone du Québec, la commission scolaire des Patriotes, la Commission de l'éducation en langue anglaise, l'Association québécoise des psychologues scolaires, le commission scolaire Marie-Victorin, la commission scolaire de Montréal, la Fédération québécoise des associations foyers-écoles, la Confédération des syndicats nationaux, l'Option Justice réparatrice, l'Association des écoles juives, l'association des directions d'établissement de la Rive-Sud, la Fondation de la tolérance, le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles, le Réseau international humaniste et enfin Mme Claire Beaumont, psychologue. Alors, le dépôt est fait.
Remarques finales
Et j'invite maintenant le porte-parole de l'opposition en matière d'éducation primaire et secondaire, le député de Jonquière, de faire ses remarques finales.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault: Oui. Merci, M. le Président. Écoutez, juste par le dépôt de mémoires supplémentaires que vous venez de faire, je pense que ça démontre combien ce projet de loi et cet objectif de lutter ensemble contre l'intimidation et la violence à l'école soulèvent l'intérêt.
**(18 heures)** Je veux profiter de ces remarques finales pour dire que nous avons fait un travail très, très sérieux, je pense, autant du côté du gouvernement que de notre côté. Je le dis humblement, mais je crois que nous avons fait un travail sérieux, qui a demandé beaucoup d'attention, beaucoup de réflexion, beaucoup d'écoute. Mais l'importance de l'objectif qui est visé par le projet de loi n° 56 commandait ce sérieux, je pense, et cette réflexion que nous avons faite ensemble et, je crois, dans un esprit de franche collaboration et de camaraderie que j'ai beaucoup apprécié. Ça a été extrêmement intéressant. Je pense qu'on a vraiment touché à tout le spectre de l'intimidation et de la violence. On aurait pu continuer encore sûrement le double de ce qu'on a fait quand j'entends les mémoires qui sont déposés.
À ce moment-ci, j'aimerais vous dire quelques éléments sur lesquels, je pense, nous aurons à réfléchir sérieusement et à intervenir lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 56. Je veux juste nommer les questions qui m'apparaissent importantes, sans que ce soit interprété évidemment comme une position définitive, à ce moment-ci, sur les éléments, évidemment, que je vais nommer. De toute façon, dans l'espace qui m'est alloué, cinq minutes, vous comprenez que c'est quand même assez bref.
Je pense qu'à partir de ce que nous avons entendu en audition nous aurons à réfléchir et à revenir certainement sur la définition de la violence et de l'intimidation.
On a parlé évidemment de la question de la récurrence, de la répétition de l'intimidation. Je pense que ça a été quand même quelque chose d'important, là, qui est ressorti ici.
Autre élément, la question de la prévention. Je pense que c'est un élément qui est très important et sur lequel nous devrons réfléchir pour voir si ça ressort suffisamment.
On s'est fait également interpeller beaucoup sur le manque de ressources qui est accordé dans les écoles, dans les divers établissements, pour vraiment être capable d'accomplir tout le travail qui est demandé autant aux directeurs d'établissement qu'aux divers intervenants, que ce soient des professionnels, ou des enseignants, ou même à l'intérieur des commissions scolaires. Je pense qu'on aura une réflexion à faire sur l'allocation des ressources mais évidemment en tenant compte du fait qu'on a un projet de loi devant nous.
Tout l'aspect de la bureaucratie. Je pense que la ministre l'a mentionné. Elle le mentionne souvent dans ses interventions publiques. De notre côté, nous le faisons également. Alors, il faut s'assurer que le projet de loi n'alourdisse pas de façon éhontée, je dirais, là, la lourdeur bureaucratique qui est déjà vécue à l'intérieur de nos établissements et de nos commissions scolaires.
Nous aurons à amorcer une réflexion et à atterrir, pas juste amorcer mais à conclure également une réflexion très sérieuse sur la limite qu'on veut accorder aux directions d'établissement quant à leur marge de manoeuvre en matière d'intervention, là, sur les questions d'intimidation.
Le rôle du protecteur de l'élève, également. Je ne vous dis pas que je me réveille la nuit pour y réfléchir, là, mais pas loin. Je ne suis pas encore totalement arrêté, là, sur cette question-là. Je pense qu'on aura à élaborer longuement là-dessus en commission parlementaire détaillée.
Le rôle des parents, M. le Président, effectivement, on a été interpellés beaucoup là-dessus. On a eu un beau témoignage, tout à l'heure, de la part d'Émanuelle et de son père, M. Després, sur le rôle des parents.
Pour la question de la cyberintimidation et de la limite de l'application ou de ce qu'on appelle l'espace-temps, là, de l'application de la loi n° 56, du projet de loi n° 56, qui deviendra loi sûrement, je pense qu'on aura vraiment... on a eu des beaux témoignages de la part des transporteurs, mais il y a aussi l'élève qui marche, l'élève marcheur, je dirais, là, et il y a également la cyberintimidation.
Sur la question de la sanction pécuniaire, j'informe tout de suite la ministre que nous aurons effectivement des interventions importantes à faire là-dessus, considérant qu'il y a déjà beaucoup d'éléments qui sont couverts par l'article 477 de la Loi sur l'instruction publique.
Et je termine, M. le Président, en vous disant que sur l'enseignement privé, évidemment, on n'en a pas assez parlé, je trouve, mais on aura à réfléchir sérieusement là-dessus.
Et je termine pour vrai en remerciant tout le monde du ministère, qui était là durant toutes les auditions et les audiences -- je vous voyais scribouiller et rédiger, alors je vous remercie de votre travail -- les collègues du gouvernement, les gens du cabinet de la ministre, la ministre aussi. Je vous remercie, M. le Président. Je remercie le personnel de la commission, les pages, évidemment mon cabinet, le ministère qui m'accompagne, moi, Jean-Louis Tedone, le recherchiste, qui a été très présent, très utile, et ma collègue de Marguerite-D'Youville, qui a fait évidemment, avec toute son expérience, des interventions extrêmement intéressantes. Alors, merci. Et je suis disposé à étudier rapidement article par article le projet de loi.
Le Président (M. Marsan): Merci. J'invite maintenant la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport à nous faire ses remarques finales.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. C'est rare que ça arrive, mais est-ce que je pourrais tout simplement faire bis? Non, mais pour vrai il y a de très, très nombreux points de rencontre entre les commentaires du porte-parole de l'opposition et mes propres réflexions lors de cette consultation.
Premièrement, moi, à titre de ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, je veux vraiment prendre le temps de remercier tous les groupes qui ont participé à la consultation, tous ceux qui ont envoyé des mémoires complémentaires ou supplémentaires. J'ai vraiment sincèrement le goût de dire que, pour moi, cette consultation, elle était essentielle et elle aura été utile. Parce que je pense que le projet de loi a été rédigé au mieux de notre connaissance mais qu'il y a eu plusieurs éclairages terrain, là, des acteurs sur le terrain qui nous ont amené les bons sujets de réflexion pour l'avancée et en fait les différents amendements que ce projet de loi là connaîtra. Parce que je pense qu'on peut à l'avance annoncer que le projet de loi connaîtra des amendements qui, je pense, vont nous donner la conviction, ensemble, d'adopter le meilleur projet de loi possible pour la lutte contre l'intimidation. Donc, mes premiers mots sont pour remercier tous ceux qui ont contribué à cette consultation.
Un peu comme le porte-parole de l'opposition, le député de Jonquière, vient de le faire... et ma liste n'est pas une liste, non plus, définitive ou exhaustive, là, des sujets que je retiens, mais également je veux juste nommer la question de la définition. Je pense qu'on doit reconnaître qu'assurément la définition sera sûrement amendée. Et on a eu différentes propositions pour l'amélioration de la définition. Les groupes de lutte contre l'homophobie nous ont demandé qu'on y inscrive ou qu'on s'assure qu'on n'oublie pas de faire le lien avec l'homophobie. Mais on sait qu'on aura le choix, je veux juste dire ça comme ça, entre différentes définitions, mais je suis d'accord avec le député de Jonquière que la notion de répétition assurément doit mieux apparaître. Il y a la question du déséquilibre du rapport de pouvoir entre les deux acteurs de l'intimidation, etc. Je pense qu'on aura du travail à faire là-dessus.
J'ai également pris en note la question du rôle des parents, notamment, plus précisément la question, en ce moment, dans la loi, de l'obligation de contacter le parent, et les invitations à la prudence, et l'invitation à l'exercice du bon jugement, de la part du directeur de l'école, et en fait l'invitation qui nous a été faite à camper l'intérêt de l'enfant toujours au coeur de ce que déclenchent ensuite les obligations dans le projet de loi. Je pense que, moi, en tout cas, c'est un sujet de réflexion important.
Je partage les préoccupations ou enfin le questionnement du député de Jonquière sur le protecteur de l'élève, honnêtement. Je ne me lèverai peut-être pas non plus la nuit -- mais il y a d'autre chose qui me réveille la nuit, ces temps-ci -- mais j'y porterai attention.
Il y a effectivement, quand on parlait du rôle des parents, comme le député de Jonquière l'a dit, toute la question de la cyberintimidation, et les frontières entre la responsabilité parentale, la responsabilité qui appartient parfois à d'autres acteurs dans la société, dont les forces policières, par exemple -- on a eu des démonstrations de ça -- et la question de ce qui appartient à l'école doivent faire l'objet de discussions.
Et finalement toutes les questions... Et moi, je vais appeler ça l'équilibre à atteindre entre des enjeux liés à la transparence, qui demeure vraiment une préoccupation qui m'habite. Je continue à penser que, quand il est question d'intimidation, il y a une notion de transparence qui demeure nécessaire et efficace, parce que c'est proche de la dénonciation puis ensuite parce que je pense que c'est efficace. En passant, le dernier témoignage qu'on a eu, de M. Lemay, pour moi, c'est une démonstration de ça. La consignation, le rapport de l'événement nous amène à penser que c'est une forme de transparence mais qui amène ses effets.
Mais c'est l'équilibre nécessaire entre la notion de transparence puis ensuite la question de lutter contre la bureaucratie et ne pas vouloir amener une lourdeur bureaucratique, qui n'est pas nécessaire et qui n'est pas du tout l'objectif poursuivi. Et il faut nommer aussi la préoccupation qu'ont eue les gens qu'à travers la nécessaire transparence on donne des outils pour un palmarès des écoles, de l'école la plus violente au Québec, toute cette préoccupation légitime qu'ont eue des gens.
Je n'ai pas les réponses à toutes ces préoccupations-là. Je veux juste parler de la recherche de l'équilibre et qu'on ne pourra pas, au nom de la lutte à la bureaucratie, abandonner l'objectif de transparence qui est par ailleurs réclamé. Donc, il y aura de bons sujets, je pense, de discussion. Et toutes les questions donc liées à la transparence, la reddition de comptes, les notions de pénalité, les notions de lutte à la bureaucratie en soi font l'objet, là, de... feront l'objet sûrement de beaucoup de discussions.
Je veux juste nommer que j'ai apprécié l'apport de mes collègues et franchement l'esprit, vous dites, de collaboration et de franche camaraderie. Je pense que le climat au sein de cette commission -- et je sais à l'avance que ce sera vrai pour l'étude article par article -- est peut-être la démonstration de l'antithèse de l'intimidation, et c'est la collaboration, et je l'ai beaucoup appréciée. Et comme vous je souhaite -- tant mieux si c'est vraiment possible, je pense que c'est l'objectif qu'on se donne ensemble -- de voir ce projet de loi adopté pour la présente session.
Je termine en disant: Il faut bien camper le rôle de cette loi par rapport à l'ensemble des mesures d'une stratégie qui ne comprend pas juste une loi, qui comprend d'autres éléments. Juste rappeler à tout le monde que moi, je suis la gardienne de la stratégie au complet, qui amène aussi d'autres activités de mobilisation. Il y a un concours. La date limite est le 4 mai. Il y a l'organisation d'une semaine au mois d'octobre prochain. Je voulais juste le renommer pour dire que le vrai succès ne tient pas juste à la loi, bien qu'elle va nous occuper, demander beaucoup d'heures, mais tient au déploiement de l'ensemble de la stratégie.
Puis je veux remercier, donc, effectivement, les parlementaires, mes collègues, les parlementaires membres de l'opposition. Merci effectivement à toute l'équipe du ministère pour votre contribution. Quand, tantôt, j'ai dit que la commission... la consultation avait été essentielle et utile, je pense que j'ai parlé au nom de tout le monde qui nous accompagne au ministère. Tout le monde a beaucoup apprécié l'apport de cela. Donc, un grand merci. Vous n'avez pas fini de travailler. Ça fait que... Et à vous, M. le Président, et au personnel de la commission, plus sincères remerciements.
**(18 h 10)**Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Et à mon tour de vous remercier, tous et chacun, de votre collaboration, et surtout de l'atmosphère, et tout ce que nous avons pu entendre mais dans une atmosphère extrêmement sereine. Et c'est prometteur par rapport à l'étude article par article.
Et je voudrais vous signifier aussi qu'il y a eu 39 mémoires en tout qui ont été déposés. Comme on l'a mentionné, c'est...
Une voix: ...
Le Président (M. Marsan): On est rendus à 40. On m'informe que c'est 40.
Et maintenant, bien, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 18 h 12)