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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, May 11, 2004 - Vol. 38 N° 28

Étude des crédits du ministère de la Culture et des Communications (1): volets Charte de la langue française et Culture et communications


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Table des matières

Charte de la langue française

Culture et communications

Autres intervenants

 
M. William Cusano, président
Mme Dominique Vien
Mme France Hamel
M. Éric R. Mercier
Mme Diane Legault
M. Marc Picard

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare ouverte la séance de la Commission de la culture. Je demanderais à toute personne dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur téléphone cellulaire et je commencerai moi-même par en donner l'exemple.

La commission est réunie pour étudier les crédits budgétaires qui relèvent de la ministre de la Culture et des Communications pour l'année financière 2004-2005. Une enveloppe de deux heures a été allouée, ce matin, à l'étude du programme 3.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. André Boulerice, député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, est remplacé par M. Léandre Dion, député de Saint-Hyacinthe.

Charte de la langue française

Organisation des travaux

Le Président (M. Cusano): Merci. Étant donné que nos travaux ont débuté quatre minutes... on peut dire cinq minutes, avec cinq minutes de retard, pour ne pas interrompre les discussions, qui seront certainement intéressantes, vers la fin, je vous demanderais, à ce moment-ci s'il y a consentement pour terminer, au lieu de 11 h 30, mais terminer à 11 h 35. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

Et, avant de débuter avec les remarques préliminaires, j'aimerais inviter les membres à m'indiquer de quelle façon la commission procédera à l'étude des crédits. Est-ce que vous voulez procéder par discussion générale, avec la tenue d'un vote quelques minutes avant la fin? Le temps de parole serait alors réparti en blocs de 20 minutes, incluant les questions et les réponses.

Une voix: ...nous convient.

Le Président (M. Cusano): Très bien. On a fonctionné comme ça depuis le début. Alors, merci.

Remarques préliminaires

Alors, nous sommes prêts à commencer. À ce moment-ci, je demanderais à la ministre de bien vouloir débuter avec les remarques préliminaires.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): ...de 20 minutes.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Très bien. Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux indiquer à mon collègue député de Saint-Hyacinthe sincèrement avec quel plaisir je le retrouve. Vous vous souviendrez, M. le Président, que, pendant presque cinq années, quatre années du précédent mandat de son gouvernement, à ce moment-là nous avons eu l'occasion de partager de nombreuses heures de travail au sein de la Commission de la culture, et c'est avec beaucoup de joie que je le retrouve aujourd'hui pour discuter des crédits dans le domaine de la langue française, d'autant plus, et je pourrai y revenir, que je connais sa grande passion, je dirais, pour ce dossier, en fait pour cet enjeu important pour le Québec.

D'entrée de jeu également, je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent, soit M. Guy Dumas, qui est le sous-ministre associé responsable de l'application de la politique linguistique; également M. Jacques Gosselin, directeur au Secrétariat de la politique linguistique; également souligner la présence parmi nous de Mme la présidente du Conseil supérieur de la langue française, Mme Nadia Assimopoulos; et également de la présidente de l'Office québécois de la langue française, Mme Nicole René, qui, accompagnée d'un personnel émérite, viendra nous assister au besoin dans l'étude de ces crédits.

M. le Président, à titre de ministre de la Culture et des Communications, je tiens d'abord à rappeler l'engagement du gouvernement du Québec à promouvoir l'identité québécoise, sa langue, sa culture, ainsi que le mentionne notre plan d'action intitulé Briller parmi les meilleurs. Le premier ministre du Québec a rappelé à ce propos que, et je le cite, «tout au long de notre histoire, nous avons su avec brio affirmer notre culture, notre langue, porter notre voix et notre génie jusqu'aux plus hauts sommets». En effet, la langue française constitue le ciment de la spécificité du Québec.

L'affirmation et la promotion de l'identité québécoise reposent d'abord sur sa langue, sa langue officielle, qui fonde le sentiment d'appartenance à notre communauté. C'est pourquoi il est essentiel d'en assurer l'usage, d'en valoriser la maîtrise et d'en améliorer la qualité. À ce propos, je crois utile de rappeler que nous avions souscrit à ces valeurs il y a 30 ans cette année en fournissant à la langue française le premier cadre législatif conçu pour la protéger et lui conférer le statut de langue officielle du Québec. En effet, c'est en 1974 que le gouvernement, dirigé alors par M. Robert Bourassa, faisait adopter la Loi sur la langue officielle.

Aujourd'hui, nous entendons structurer cet engagement autour de trois grands axes: d'abord, en poursuivant et en intensifiant la francisation des milieux de travail et en veillant à ce que le français maintienne son statut de langue normale et habituelle du commerce et des affaires; puis, en attachant une importance particulière à l'apprentissage et à la diffusion d'une langue de qualité afin que la maîtrise du français continue de progresser dans tous les milieux; enfin, en favorisant une concertation soutenue et un suivi constant des actions gouvernementales dans le domaine linguistique. Pour ce faire, plusieurs défis nous interpellent en ce qui concerne le renforcement du français comme langue de travail, du commerce et des affaires.

n (9 h 40) n

La décroissance de la part que représentent les francophones au Canada, l'accroissement d'une immigration de plus en plus diversifiée et la baisse de la fécondité de la population francophone depuis le milieu des années soixante sont désormais considérés comme des tendances lourdes. À cela s'ajoutent les forces dominantes du marché linguistique nord-américain, le développement des nouvelles technologies de communication et l'expansion de l'anglais dans les communications internationales, autant de facteurs qui en favorisent l'usage. Au XXIe siècle, la situation de la langue française en Amérique du Nord doit donc toujours faire l'objet de vigilance. Dans ce contexte, il demeure nécessaire de promouvoir le français dans les milieux de travail ainsi que dans le domaine du commerce et des affaires, d'une part parce que le fait de pouvoir réussir économiquement et socialement en français représente sans doute l'un des meilleurs incitatifs pour favoriser la connaissance et l'usage de cette langue par tous les Québécois et, d'autre part, pour que les travailleurs et les consommateurs québécois, majoritairement francophones, puissent travailler et être servis en français.

D'autre part, la langue française, qui est le fondement essentiel de notre identité, est aussi le premier véhicule de la pensée et de l'expression. Depuis 30 ans, des progrès importants ont été accomplis au Québec pour accroître la qualité du français oral et écrit. De même, en matière de toponymie, les normes et les règles d'écriture à respecter dans la dénomination des lieux québécois se sont sensiblement raffinées au fil des ans. Mais il reste encore beaucoup à faire pour que les entreprises, l'Administration publique et la population en général soient suffisamment outillées pour répondre aux exigences d'une société et d'une époque de plus en plus axées sur le savoir et les communications.

Enfin, le Québec s'est doté d'une politique linguistique qui vise à promouvoir la langue française et à favoriser son épanouissement dans le contexte nord-américain. L'impulsion nécessaire pour donner sa pleine mesure à cette politique suppose d'assurer sa cohérence, notamment au sein de l'État québécois, dont les pratiques linguistiques doivent demeurer exemplaires. De même, cette politique doit s'accompagner de gestes officiels qui encouragent les initiatives issues de la population pour assurer la qualité et le rayonnement du français. Enfin, l'évolution de la politique linguistique doit tenir compte du contexte sociolinguistique qui façonne le Québec. À cet effet, il est indispensable de bien documenter l'évolution de la situation linguistique québécoise, canadienne et internationale.

Faire progresser le français au Québec, en Amérique et dans la francophonie, c'est cette volonté, M. le Président, qui guide le gouvernement en matière de politique linguistique. Les crédits alloués, en 2004-2005, à la coordination de la politique linguistique, assumée par le Secrétariat à la politique linguistique, ainsi qu'aux trois organismes de la Charte de la langue française, soit l'Office québécois de la langue française, le Conseil supérieur de la langue française et la Commission de toponymie du Québec, totalisent quelque 22 millions de dollars. Ce sont ces crédits que nous examinerons aujourd'hui.

L'Office québécois de la langue française dispose de 17,7 millions de dollars pour ses activités de production et de diffusion de terminologie, d'implantation du français dans les entreprises et l'administration, de suivi de la politique linguistique du Québec et de traitement des plaintes que lui adressent les citoyens en rapport avec le respect de la Charte de la langue française. La Commission de toponymie est rattachée administrativement à l'office. De ce fait, les crédits alloués à l'office englobent ceux qui sont attribués à la commission pour la poursuite de ses travaux d'inventaire, de traitement et d'officialisation des noms géographiques du Québec. Une somme de 1,5 million de dollars est attribuée au Conseil supérieur de la langue française, dont le mandat est de nous conseiller sur toute question relative à la langue française au Québec. Enfin, le Secrétariat à la politique linguistique dispose de 1,3 million de dollars pour assurer la cohérence entre les actions des organismes de la charte et les politiques et directives du gouvernement, ainsi que pour des activités de promotion de la langue française. Le secrétariat gère par ailleurs une provision d'un peu plus de 1,5 million de dollars afin de soutenir des mesures spéciales de francisation à l'intention des immigrants adultes, des actions de francisation en milieu de travail et des projets de recherche.

Cette année encore, le Secrétariat à la politique linguistique continuera de coordonner le développement et l'application de la politique linguistique ainsi que la mise en oeuvre des mesures qui en découlent. En outre, il m'appuiera dans mon action. Le secrétariat agira également comme soutien dans les dossiers judiciaires concernant la Charte de la langue française. Il poursuivra son rôle de conseiller auprès des universités et des collèges pour l'élaboration de leur politique linguistique qui doit être déposée auprès du ministère de l'Éducation d'ici le 1er octobre prochain.

Le secrétariat mettra aussi en oeuvre des actions visant à promouvoir et à mieux faire connaître la politique linguistique du Québec ici comme à l'étranger. À cet effet, il ajoutera aux traductions déjà faites de ses publications des versions en italien, en allemand, en arabe et en japonais. Il développera de nouveaux outils de promotion, notamment à l'intention des autochtones et des jeunes. Il poursuivra ses séances d'information auprès des visiteurs étrangers, du réseau de la culture et des communications ainsi que des délégations du Québec à l'étranger.

Le secrétariat veillera aussi à la diffusion et au développement d'un français de qualité au Québec. Il poursuivra à cet égard, de concert avec le ministère de la Culture et des Communications, sa collaboration aux travaux de la Table de concertation sur la qualité de la langue dans les médias, qui regroupe des représentants des médias publics, des médias privés et des médias communautaires, qu'ils soient écrits ou électroniques.

Le secrétariat maintiendra encore son aide à la diffusion et au développement de fonds québécois de données linguistiques et textuelles. Depuis sa mise sur pied en 1997-1998, ce programme a permis de soutenir les travaux de développement et d'exploitation et de diffuser dans Internet les recherches linguistiques de six groupes de chercheurs provenant de cinq universités québécoises.

En lien avec le développement et l'exploitation des corpus lexicaux québécois, le gouvernement, par l'entremise du secrétariat, maintiendra son appui financier au projet de description du français standard en usage au Québec, mené par le groupe de recherche Franqus, de l'Université de Sherbrooke. Il s'agit là d'un programme original et de grande envergure qui permettra à terme aux Québécois d'avoir une description scientifique de leurs usages de niveau standard et un dictionnaire de langue général où les mots définis seront illustrés avec des citations et des exemples tirés majoritairement de textes littéraires, scientifiques et journalistiques québécois mais aussi de textes étrangers. Le secrétariat poursuivra son appui financier au programme de tournées des écrivains dans les établissements d'enseignement collégial, programme appelé Parlez-moi d'une langue!, grâce auquel des écrivains, des journalistes et des communicateurs partagent avec les jeunes leur passion pour une langue française de qualité.

Finalement, je veux également souligner que le prix du Québec Georges-Émile Lapalme sera décerné, l'automne prochain, pour une huitième année, à une personne ayant contribué d'une façon exceptionnelle à la qualité et au rayonnement de la langue française.

L'essentiel des crédits alloués au dossier linguistique va à l'Office québécois de la langue française en raison de la mission centrale qu'il joue dans l'application de la Charte de la langue française et de l'importance des interactions de l'office avec l'ensemble de la population du Québec. Faire du français la langue de travail est l'un des incitatifs les plus puissants pour généraliser la connaissance et l'usage du français chez tous nos concitoyens et dans tous les domaines. L'office joue en la matière un rôle essentiel en soutenant l'application des programmes de francisation dans les entreprises. C'est ainsi que l'office continuera à mettre l'accent sur la certification des entreprises et d'exercer un contrôle rigoureux sur les programmes de francisation, notamment ceux qui s'échelonnent sur plusieurs années.

L'office mènera également des interventions sectorielles pour résoudre à la source les problèmes de francisation qui affectent un ensemble d'entreprises ou d'organismes de l'administration. Les secteurs prioritaires visés sont l'automobile, le camionnage, l'aérospatiale et l'informatique. Des interventions sectorielles sont aussi entreprises auprès des ministères et des organismes assujettis à la Politique d'utilisation du français dans les technologies de l'information relativement à la francisation de divers logiciels.

L'office a en outre prévu de se pencher particulièrement sur la langue des jeux vidéo et non plus uniquement sur l'emballage et la documentation accompagnant ces jeux. L'office interviendra aussi auprès des fabricants d'appareils électroménagers afin d'obtenir de leur part des engagements à franciser les inscriptions sur leurs appareils. À cette fin, il organisera une campagne de publicité pour inciter les consommateurs et consommatrices à s'abstenir d'acheter les appareils qui sont vendus sans aucune inscription en français et encouragera la population à toujours exiger des inscriptions en français sur les gros appareils électroménagers achetés au Québec.

En matière de terminologie et d'assistance terminolinguistique, l'office entend mener des travaux d'explicitation et de valorisation de la norme linguistique du français à promouvoir au Québec en la situant par rapport à celle des autres variétés de français. À cette fin, il procédera à la mise à jour des énoncés de politique sur les québécismes et sur l'emprunt linguistique. Il participera à l'Observatoire francophone du français contemporain, pour ce qui est des orientations touchant l'orthographe. Il maintiendra et développera des partenariats avec des centres de recherche québécois et enfin il continuera ses activités de coopération sur le plan international, notamment avec la maison Larousse et le réseau Realiter, de l'Union latine.

n (9 h 50) n

Par ailleurs, l'office entend répondre aux questions linguistiques et terminologiques qu'on lui adresse par l'entremise de son service de consultation téléphonique tarifé. Il fera la promotion d'@ssisterme, un service de consultation par voie électronique qui s'adresse à des publics spécialisés, de même que de son nouveau service Immédi@t qui donne un accès privilégié et gratuit d'assistance linguistique et terminologique aux représentants des médias. Il ajoutera aussi au contenu de la banque de dépannage linguistique accessible sur Internet 300 nouveaux articles et environ 100 exercices portant principalement sur des questions grammaticales et orthographiques.

M. le Président, est-ce que vous pouvez m'indiquer combien il me reste de temps? Je veux être sûre d'avoir le temps de parler également de...

Le Président (M. Cusano): Il reste environ six minutes.

Mme Beauchamp: J'accélère. L'office poursuivra l'enrichissement du Grand Dictionnaire terminologique par l'ajout de quelque 5 000 fiches et il développera un nouveau système de production de banques de terminologie à portée multilingue. Comme le démontre l'achalandage phénoménal, Le Grand Dictionnaire en ligne répond à un véritable besoin. Le nombre de recherches qui y font les internautes est passé de presque 18 millions en 2001-2002 à plus de 41 millions l'année dernière.

Afin d'assurer le suivi de l'évolution de la situation linguistique au Québec, l'office effectuera également des analyses et des recherches portant, entre autres, sur la langue de travail, du commerce, des affaires, sur les attitudes et les comportements des groupes linguistiques, sur l'utilisation du français à l'oral chez les lecteurs de nouvelles et les futurs enseignants ainsi que sur les opinions sur la norme. L'office poursuivra ses activités relatives à l'administration de l'examen de français aux futurs membres des ordres professionnels. Et, en ce qui concerne les plaintes, l'office poursuivra ses efforts pour informer et encourager les entreprises à franciser l'ensemble de leurs produits et à s'assurer que les documents publicitaires, les factures, les contrats d'adhésion sont conformes à la loi.

En matière d'activités publiques et de promotion du français, je souligne avec plaisir le succès de la huitième Francofête, réalisée en mars 2004 sous la responsabilité de l'office. Cet événement a été l'occasion de dévoiler des récipiendaires des Mérites du français qui, on s'en souviendra, visent à reconnaître l'excellence en français au travail, en éducation, dans les nouvelles technologies de l'information, dans la culture et les communications et dans l'intégration linguistique des nouveaux arrivants.

L'office a aussi remis, avec la collaboration du Publicity Club de Montréal, les prix Jacques-Bouchard qui reconnaissent la qualité du français en création publicitaire au Québec. Et enfin l'office a également décerné le prix Camille-Laurin qui souligne la contribution d'une personne qui s'est distinguée dans la promotion et le développement du français.

En ce qui concerne la Commission de toponymie, cette commission assure la gestion courante des noms de lieux du Québec. Elle réalise des inventaires toponymiques, elle attribue des noms de lieux à des lieux innommés et elle officialise et diffuse les noms géographiques du Québec, y compris les noms de voies de communication. Elle poursuivra son mandat au cours de la prochaine année. Elle compte officialiser quelque 2 000 toponymes au cours de la prochaine année. Elle assurera le traitement d'environ 3 500 noms de lieux et d'environ 50 noms d'ouvrages d'art, tels des ponts, des barrages, des digues, etc., en vue de les officialiser.

La commission participe aux travaux de la Commission de toponymie du Canada et elle héberge dans son site Internet le site de la division francophone du groupe d'experts des Nations Unies pour les noms géographiques. Elle en poursuivra l'alimentation en données susceptibles d'intéresser les pays de l'aire francophone.

Le Conseil supérieur de la langue française, maintenant. Il a pour mission de conseiller le titulaire du dossier de la Charte de la langue française sur toute question relative à la langue française au Québec et de le saisir de toute question qui appelle l'attention du gouvernement. À la suite des consultations qu'il a tenues tout au cours de l'année dernière pour examiner le processus de francisation des milieux de travail, le conseil devrait rendre publique sa réflexion à ce sujet. Il effectuera des études préparatoires à une réflexion sur l'intégration linguistique des immigrants, notamment sur les enfants de la loi 101. Le conseil mènera diverses études qui porteront, entre autres, sur la langue du travail des immigrants, le traitement informatique du français, l'évolution des transferts linguistiques et sur les facteurs favorisant l'usage du français ou de l'anglais à Montréal, chez les allophones scolarisés au Québec, avant ou après l'adoption de la Charte de la langue française.

Bien sûr, le conseil participera à diverses activités de coopération avec des organismes linguistiques. Et, encore cette année, le Conseil supérieur de la langue française remettra quatre grands prix soulignant les apports exceptionnels d'individus ou d'organismes à la société francophone, dans le cas du Prix du 3-Juillet-1608, et de l'Ordre des francophones d'Amérique ou encore de journalistes québécois, dans le cadre du prix Jules-Fournier et du prix Raymond-Charette. Toutes ces mesures permettront de faire en sorte que notre langue commune demeure au coeur de l'identité québécoise. Elles inscrivent l'action de notre gouvernement dans une volonté de continuité pour faire en sorte que l'usage et la qualité du français au Québec progressent. Il s'agit là d'une responsabilité historique que nous avons assumée dès la période de la Révolution tranquille par la mise en place d'un ministère et d'un système d'éducation ouverts à tous puis, quelques années plus tard, par la promulgation de la première loi linguistique faisant du français la langue officielle du Québec.

Bien sûr, rappelons également l'importance de l'adoption de la Charte de la langue française, également un moment bien sûr historique. Nous entendons poursuivre cet engagement avec enthousiasme, avec détermination et avec un sens des responsabilités que nous commande l'histoire du Québec.

M. le Président, en terminant, je désire souligner le travail fait par l'ensemble du personnel, des employés, de ces experts, parce qu'ils sont vraiment des experts à un niveau international, donc les différents employés des organismes responsables de la Charte de la langue française, de l'application de la Charte de la langue française au Québec. Je veux souligner le travail des dirigeants que je vous ai présentés un peu plus tôt et vous réitérer notre fierté de voir cette expertise québécoise en matière de langue française rayonner à travers les différentes actions menées à l'international par les employés des organismes de la langue.

Je termine en réitérant ma volonté de travailler dans une saine collaboration avec le député de Saint-Hyacinthe. Je vous disais que j'avais été témoin de son amour pour la langue française et je rappellerai à son bon souvenir un séjour qu'on a fait ensemble à Paris, dans le cadre de la Saison du Québec à Paris, où j'ai été témoin de son émotion lorsqu'il a entendu M. Gilles Vigneault faire certains poèmes et chanter certaines chansons. Cette émotion était évidente et elle témoigne, je crois, de son amour de la langue française. J'espère, moi, être à la hauteur de cette dévotion que vous avez pour la langue française, M. le député de Saint-Hyacinthe.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe.

M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Évidemment, ce plaisir est partagé, Mme la ministre, et je partage avec vous cette ferveur pour notre langue commune qui est une des plus belles langues du monde. Pour moi, c'est la plus belle, évidemment. C'est une langue qui est à la fois pleine de nuances, qui exprime avec tellement de précision sa pensée, en autant qu'on la connaisse et en autant qu'on sache ce que l'on pense, évidemment, et qui l'exprime d'une façon inégalée. Je sais que d'autres langues ont d'autres qualités, mais la langue française a cette grande qualité. Elle a aussi une grande qualité qui est extraordinaire, d'être une langue extrêmement douce. Toutes les nuances des vocales en français, des voyelles en français font en sorte que c'est une langue extrêmement douce, tellement douce que, quand on n'y prend pas garde et qu'on n'articule pas bien les consonnes, elles deviennent trop douces parfois.

Alors, c'est une langue extraordinaire, et, aujourd'hui, donc j'ai l'honneur de vous saluer, Mme la ministre, de saluer les gens qui vous accompagnent, les dirigeants du ministère qui sont ici et des organismes qui sont ici pour nous aider tous à prendre le plus grand soin de la langue française, de la langue commune. Cette langue a été consacrée... son statut a été consacré par l'adoption de la loi sur les langues officielles, et, je pense qu'il faut le reconnaître, ça a été un des beaux gestes du Parti libéral, et j'espère qu'il y en aura d'autres. Mais elle a été consacrée d'une façon aussi très efficace par l'adoption de la loi 101, qui est la Charte de la langue française, qui est un document, qui est une loi quasi constitutionnelle à mon avis et qui place la langue dans une situation où théoriquement elle devrait avoir certains moyens pour se défendre.

Évidemment, vous en avez parlé avec beaucoup d'émotion et beaucoup de brio. Je souhaiterais fermement que cet éclat enveloppe une réalité ferme, c'est-à-dire que je souhaiterais que vous vous engagiez d'une façon encore plus précise à préserver intégralement la Charte de la langue française qui a été si souvent attaquée et qui a été malmenée, en 1988, par des décisions de la Cour suprême, deux décisions sorties en décembre, juste à la veille de Noël, et qui faisaient bon compte des arguments du Québec pour arriver de toute façon à la décision que la Cour suprême avait de toute façon décidé de rendre. Alors, je pense que la Charte de la langue française mérite d'être protégée parce qu'elle sera toujours l'objet d'attaques, et j'aimerais aussi que vous puissiez vous engager aussi énergiquement à faire en sorte que son application soit intégrale.

n (10 heures) n

Comme vous l'avez mentionné, le Québec, la langue, étant donné la population du Québec ? 2 % du monde anglo-saxon qui nous entoure et à peine 1 % de la population des Amériques ? alors c'est certain que, dans un environnement comme celui-là, que je ne considère pas un environnement hostile mais un environnement extrêmement enveloppant, pour ne pas dire envahissant, il est certain que notre langue ne peut pas être autrement que menacée. Elle a besoin d'être protégée et pas seulement protégée, valorisée et développée. Et les institutions qui ont été mises en place et les instruments aussi comme Le Grand Dictionnaire terminologique, qui est un instrument utile mais aussi un instrument qui a beaucoup de prestige... Et le prestige pour une langue et pour ses instruments d'expression, c'est très important parce que la fierté qu'on a pour un instrument comme celui-là est importante pour sa préservation. Donc, il est important que toutes les instances qui ont été mises en place par la Charte de la langue française sachent que, Mme la ministre, vous êtes déterminée à les appuyer, à faire en sorte qu'ils puissent jouer leur rôle à 100 %, que ce soit l'Office de la langue française, le Secrétariat à la politique linguistique, le Conseil supérieur de la langue française de même que la Commission de toponymie, qui, elle aussi, joue un rôle très important. Donc, cette volonté de la protéger, j'aimerais ça qu'elle soit réaffirmée de façon plus évidente, plus forte, plus péremptoire.

Nous allons donc vous écouter avec beaucoup de respect dans vos engagements, les engagements que vous allez prendre, des engagements généraux mais aussi des engagements concrets; j'espère qu'il y en aura. Mon objectif, ce n'est pas de vous embêter, Mme la ministre, mais c'est de travailler avec vous à faire le travail que me confient la loi et les citoyens qui m'ont placé dans cette fonction. Donc, je le ferai dans un esprit de collaboration, en remplissant bien mon rôle dans l'opposition, parce que l'objectif, c'est la préservation, la promotion et l'illustration de notre langue commune.

Ce serait une erreur de croire que notre langue n'est plus menacée, qu'elle vogue doucement sur les eaux paisibles d'un consensus social, vers des rives verdoyantes d'un avenir assuré. Ce serait une erreur. La langue est menacée sur plusieurs fronts: celui de la démographie, le bas taux de natalité, l'anglicisation des francophones. On sait qu'à Montréal 52 % des francophones parlent l'anglais au travail et 16 % le parlent principalement. Alors, évidemment ça a des conséquences. Ça a des conséquences qu'il y a un transfert linguistique important qui se fait même chez les francophones, alors à plus forte raison chez les immigrants. 47 % des immigrants à Montréal, selon certaines études qui sont quand même crédibles, qui sont issues de vos services et de Statistique Canada, 47 % des immigrants à Montréal parlent principalement l'anglais au travail. Alors, vous voyez l'impact énorme que cela peut avoir sur le transfert vers l'anglais comme langue commune, comme langue généralement employée ou comme langue maternelle.

Alors, évidemment, dans la RMR, donc ? c'est la région métropolitaine de recensement... Alors, il faut se souvenir des sigles, hein, de ce que ça veut dire; autrement, seulement des sigles, parfois ça ne veut plus rien dire. Donc, dans la région métropolitaine de recensement, 1,6 % des francophones à Montréal de moins en 1996 qu'en 1986, et ça, malgré une migration importante des populations francophones vers Montréal, donc c'est énorme, la perte qu'il y a eu, que ce soit d'anglicisation ou d'autres... même chez les francophones. Alors donc, il y a des choses importantes à surveiller de ce côté-là.

On sait que, de 1996 à 1981, le nombre de francophones qui déclarent que maintenant leur langue à la maison, leur langue maternelle, c'est l'anglais est passé de 2 575 à 7 815. Le taux est assez considérable pour qu'on ne puisse pas dire que c'est seulement un chiffre aléatoire. Je pense que c'est quelque chose d'inquiétant. Malgré tous nos efforts, malgré tous les efforts des organismes, il y a un problème là. Alors, il y a besoin d'une volonté claire et réaffirmée de votre part de protéger la Charte de la langue française intégralement et d'assurer son application intégrale par les moyens qui sont en place, en particulier par le travail de l'office. Surtout dans le contexte des fusions, il y a là un danger réel.

Moi, ce qui me fait le plus de peine dans la question des fusions, parce que c'est vraiment de la peine ? ce n'est pas seulement une question que, nous, on a fait des choses, vous faites le contraire, ce n'est pas de ça qu'il s'agit ? bien sûr il y a un aspect de justice sociale. On ne voudrait pas reconstituer, sous prétexte de démocratie, des petits ghettos linguistiques de privilégiés économiques. Et, si c'est ce vers quoi ça nous conduit, Mme la ministre, vous serez certainement dans l'embarras. Alors, je pense que, même si ce n'est pas votre dossier, la question des fusions et des défusions, vous avez une responsabilité très importante pour vous assurer que le français reste la langue de la ville de Montréal, que ce soit une ville française. C'est très important pour tout le Québec, c'est très important aussi au plan économique parce que le fait que c'est une ville française contribue puissamment à toute l'industrie touristique. Alors, il est très important... et que ce soit une ville française pas seulement dans le premier article de la charte, mais dans les moyens qu'elle utilise et qu'elle utilisera.

Censément, il y aura des modifications, du moins d'après ce qu'on entend dire. Il y a des bruits qui courent. Tant mieux s'ils courent pour rien. Mais, s'ils ne courent pas pour rien, il faudrait éviter, Mme la ministre... il faudrait que vous vous engagiez à faire en sorte que Montréal reste une ville de langue française pas seulement dans le titre et dans l'affirmation de principes, mais dans les moyens employés pour assurer cette réalité.

Donc, Mme la ministre, j'aimerais vous poser tout de suite cinq questions auxquelles vous pourriez répondre. La première: Êtes-vous prête...

Discussion générale

Le Président (M. Cusano): ...préliminaires sont terminées, alors vous disposez d'un bloc de 20 minutes pour vos questions.

Intentions quant au respect intégral
de la Charte de la langue française

M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, je lui poserais tout de suite cinq questions parce qu'elles sont toutes liées l'une à l'autre, et je pense que, si vous voulez nous donner une présentation très précise et très chiffrée à chacune de ces réponses-là, je pense que les gens seront heureux de vous entendre, parce que ce n'est pas vrai qu'il n'y a personne qui nous écoute, il y a beaucoup de gens qui nous écoutent. La question de la langue inquiète beaucoup de gens et pas seulement inquiète, intéresse beaucoup de gens au Québec, et ils veulent savoir de façon plus précise, plus détaillée: Qu'est-ce que vous avez l'intention, comme gouvernement, de faire pour protéger, développer et illustrer notre langue commune? Donc, ma première question serait ceci: Est-ce que vous vous engagez à ne pas affaiblir la loi 101, la Charte de la langue française, d'aucune façon, et à assurer son application intégrale et efficace, première chose?

Éventualité de regroupements municipaux
en fonction de critères linguistiques

Deuxième chose, pouvez-vous nous assurer que jamais vous n'accepterez la reconstitution, à Montréal, de municipalités sur des bases linguistiques, quelles qu'elles soient?

Promotion du visage français de Montréal

Troisièmement, est-ce que vous vous engagez à préserver et à promouvoir le visage français de Montréal? C'est très important dans l'affichage et autrement.

Mesures visant à éliminer les listes d'attente
pour les cours de français donnés aux immigrants

Quatrièmement, vous engagez-vous à faire disparaître les listes d'attente pour les immigrants qui veulent apprendre l'anglais... le français, pardon? C'est une erreur, c'est le français que je voulais dire. Parce que ce qui se passe, c'est: quand ils sont trop longtemps sur des listes d'attente, ils occupent leur temps, entre autres, à apprendre une autre langue. Pourquoi pas l'anglais, hein? Je n'ai rien contre le fait qu'ils apprennent l'anglais, mais qu'ils apprennent d'abord la langue commune. Je pense qu'ils viennent ici pour faire partie de notre population et nous enrichir de leur culture, de leur apport traditionnel; bien, ils doivent apprendre notre langue. Et je sais que la très large majorité ne sont pas récalcitrants à cette idée, bien au contraire. Je trouve très dommageable qu'il y ait des listes d'attente dans ce domaine.

Mme la ministre, je vous dis tout de suite que je n'accepterai pas une réponse à l'effet que ça a commencé dans le temps qu'on était là. Je le sais, ça a commencé surtout depuis l'an 2000. Mais ce n'est pas parce que ça a commencé avant que ça doit continuer. Vous êtes là depuis un an, et je pense que la population compte sur vous pour que ça arrête et que les gens aient l'occasion d'apprendre le français le plus tôt possible, parce que le français, c'est la porte d'entrée pour la liberté au Québec.

Francisation des entreprises

Cinquième question, vous engagez-vous à prendre des mesures efficaces pour la francisation des milieux de travail, surtout à Montréal? Alors, ça fait beaucoup de questions, mais, vous voyez, ce n'est pas des questions... Je les ai posées toutes à la ligne parce qu'elles sont toutes imbriquées l'une dans l'autre et qu'elles forment un panorama. Et je pense que, si les gens pouvaient avoir l'assurance ferme sur des choses précises comme ça, bien ça pourrait être un signal important pour tous les gens qui vivent au Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député. Mme la ministre.

n (10 h 10) n

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je remercie le député de Saint-Hyacinthe. Je parlais de la conviction qu'il mettrait ? j'en étais sûre ? à défendre ce dossier dont il est devenu porte-parole. Ce sont nos premiers échanges d'ailleurs sur le dossier de la langue au Québec, et je suis très heureuse de pouvoir échanger avec lui. Vous allez remarquer comme moi la qualité de ses arguments et surtout la passion qu'il met à défendre ce dossier.

Je le disais avec beaucoup de sincérité, j'espère être à la hauteur de ses attentes et à la hauteur des attentes des Québécois et des Québécoises. Je ne vous cacherai pas que, lorsqu'on se fait confier par un premier ministre la responsabilité de devoir justement... avoir cette responsabilité de défendre et de promouvoir la langue française au Québec, je ne vous cacherai pas qu'on se sent un petit poids sur les épaules, parce que justement c'est une responsabilité historique et incontournable, et je souhaite personnellement... Puis, avec l'aide de toute l'équipe, je peux assurer le député d'une vigilance de tous les jours dans le dossier de la langue française et je l'invite, s'il a quelque dossier que ce soit à porter à notre attention, à le faire.

Intentions quant au respect intégral
de la Charte de la langue française (suite)

Ça me permet de répondre à sa première question sur le respect intégral de la Charte de la langue française et bien sûr de son application avec vigilance. Je le rassure tout de suite. D'ailleurs, dans mon discours d'entrée de jeu, j'ai indiqué, tout comme lui et tout comme il vient de le faire, cette vigilance de tous les instants que doit exercer l'État du Québec quant à la promotion et à la défense de la langue française. Donc, en ce qui concerne le respect de la Charte de la langue française et son application, je le rassure tout de suite en lui confirmant la position de notre gouvernement en ce qui concerne donc ce respect de la Charte de la langue française et son application.

Je prends le temps de lui dire d'ailleurs que, quelques mois après mon arrivée à la tête de ce dossier, j'ai pris le temps, par un mémoire au Conseil des ministres, de faire un rappel à l'ensemble des membres du nouveau cabinet formant le gouvernement, de faire un rappel des dispositions de la Charte de la langue française et aussi de la politique linguistique du Québec. Nous savons qu'également cette Charte de la langue française est, vous l'avez vous-même dit, un document fondateur, si je peux dire, de la position du gouvernement du Québec en ce qui concerne la langue française. Mais il y a également eu d'adoptée une politique gouvernementale concernant l'emploi et la qualité de la langue française dans l'administration. Et je peux aussi confirmer à mon collègue le fait que non seulement il peut être assuré de notre engagement total quant au respect de la Charte, l'application de la Charte de la langue française, mais également le respect et l'application de la politique gouvernementale, cette politique linguistique qui s'adresse à l'ensemble de l'administration du Québec.

On me fait part également ? et c'est un fait ? que peut-être que la meilleure illustration de cet engagement gouvernemental à défendre la Charte de la langue française a eu lieu récemment, lorsque, une fois de plus, le gouvernement du Québec a défendu avec vigueur la Charte de la langue française devant la Cour suprême et devant diverses instances au cours des derniers mois. Je pense que cette défense, avec beaucoup de vigueur, de la Charte de la langue française devant la Cour suprême est peut-être l'exemple ultime qu'on peut lui amener de cette volonté gouvernementale de défendre la Charte de la langue française.

Le député a également donné quelques chiffres concernant la situation du français, et je veux avec lui m'entendre sur une chose: c'est qu'en ce moment nous sommes devant un net besoin au Québec d'avoir encore, je dirais... de faire de plus grands efforts et de faire encore un meilleur suivi de la situation linguistique au Québec. D'ailleurs, c'est un mandat qui a été confié à l'Office québécois de la langue française, que ce suivi de la situation linguistique du Québec, car il n'est pas sans savoir que, par exemple, dans les récents sondages de Statistique Canada, ils ont introduit de nouvelles questions, de nouvelles formulations de questions qui ne nous permettent pas en ce moment d'avoir un portrait tout à fait clair de la situation linguistique du Québec. Donc, il y a certaines données dont vous avez fait part, je pourrais vous faire part d'autres données également ici de Statistique Canada de 2001, par exemple qu'il y a 5,8 millions de francophones au Québec ? ça représente 81,4 % de la population du Québec, la même proportion que celle enregistrée cinq années auparavant, qui était à 81,5 % ? également que, bien que la proportion des Québécois déclarant le français comme langue maternelle soit demeurée stable, la proportion de personnes parlant le français le plus souvent à la maison a légèrement augmenté, passant de 82,8 % à 83,1 % entre 1996 et 2001.

Je lui amène ces chiffres pour indiquer que non pas que je veuille ici faire un plaidoyer comme si tout allait bien ? ce n'est pas là mon propos; mon propos est plutôt, et là je pense qu'on est tout à fait sur la même longueur d'onde, je pense que mon propos tourne plutôt autour de cette notion de vigilance de tous les instants qu'on doit exercer au Québec autour de la question de la langue française ? mais plutôt lui indiquer que les différents indicateurs à notre disposition en ce moment sont appelés, je dirais, à évoluer. Entre autres, l'Office québécois de la langue française, après la réforme, en fait après l'adoption de la loi n° 104, si je ne me trompe pas ? c'est bien ça, la loi n° 104, dirigée par votre gouvernement, c'était sous la responsabilité de la députée de Bourget ? après un peu une réforme, si je peux dire, une restructuration des organismes responsables de la langue, nous savons que cette question du suivi linguistique au Québec a été confiée à l'Office québécois de la langue française. Et je suis certaine que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il y a donc, je dirais, beaucoup de boulot à accomplir afin que nous nous donnions des indicateurs bien sûr inspirés des résultats obtenus, en fait des questions posées par Statistique Canada, mais également des recherches que pourra mener sur ses propres bases l'Office québécois de la langue française. D'ailleurs, ces recherches, plusieurs sont en cours sur des données sociolinguistiques, et je crois qu'au cours des prochaines années on sera en mesure d'avoir un meilleur portrait sur cette situation linguistique du Québec.

Éventualité de regroupements municipaux
en fonction de critères linguistiques (suite)

Par ailleurs, vous m'avez posé des questions sur la reconstitution, sur des bases linguistiques, de nouvelles entités municipales. Je crois que mon collègue responsable des Affaires municipales, le député de Châteauguay, a déjà eu l'occasion plus d'une fois de répondre à cette question qui a été soulevée souvent lors de la période de questions, pour donc vous indiquer ceci ? je pense qu'il l'a dit très clairement: le processus entamé est un processus où les citoyens et citoyennes pourront se prononcer sur leur communauté d'appartenance sur l'île de Montréal, mais il n'est pas dans l'optique du gouvernement de favoriser par la suite de nouveaux regroupements municipaux, et, entre autres, donc pas de regroupement sur une base linguistique.

La population pourra se prononcer, et je tiens à dire que c'est dans un cadre où, avant les fusions forcées, sur l'île de Montréal, je pense que nous pouvions parler d'une certaine paix linguistique. Encore là, sous ce vocable, je ne veux pas dire que la notion de paix linguistique ne veut pas dire que la situation du français était rassurante ou correcte, mais bel et bien que les instruments qu'on s'était donnés, soit nos lois, cette Charte de la langue française, telle qu'elle a dû être modifiée par la suite, suite à certaines décisions de la Cour suprême du Canada, également la politique linguistique du gouvernement du Québec... On s'était donné donc un certain corpus, là, de règles du jeu en termes linguistiques qui faisait en sorte qu'on vivait dans une certaine paix linguistique, qui ne faisait pas en sorte qu'on devait abdiquer sur la vigilance à exercer à tous les moments. D'ailleurs, cette notion de paix linguistique avait aussi été constatée lors des travaux justement de l'adoption de la loi n° 104 faisant une certaine réforme des organismes de la langue et faisant en sorte également qu'on a pu agir avec plus de vigilance quant à l'admission des enfants ayant, par exemple, fait un passage à l'école privée non subventionnée anglophone vers les écoles anglophones subventionnées.

Donc, c'est des instruments qu'on s'est donnés, mais dans un contexte, je crois, où toute cette discussion, à l'époque, faite avec l'accord de l'opposition officielle à l'époque, s'était faite dans un contexte, je crois, de sérénité tout en étant un contexte de vigilance, et c'est le même contexte qui prévaudra à l'avenir.

Promotion du visage français de Montréal (suite)

Quant à la question du visage français de Montréal, l'année dernière, lors de l'étude des crédits, j'ai pu également réaffirmer le fait que, pour moi, la ville de Montréal doit jouer un rôle exemplaire dans la promotion et l'usage de la langue française. La ville de Montréal est la métropole du Québec. En fait, c'est la deuxième ville en importance à travers le monde, si je ne me trompe pas. Je l'ai déjà entendu dire. M. Dumas, confirmez-moi. Chose certaine, c'est la ville d'importance en Amérique, ça, c'est extrêmement clair. Et donc je vais retirer mon petit bout de phrase. Si ce n'est pas la deuxième, il y a peut-être... Mais c'est une ville qui doit jouer un rôle moteur, un rôle de modèle pour la promotion et l'usage de la langue française.

n (10 h 20) n

Une politique linguistique est actuellement en discussion à la ville de Montréal, et le personnel du Secrétariat à la politique linguistique a déjà par le passé fait part de certains commentaires à la ville de Montréal quant à la définition de cette politique linguistique. Pour le moment, c'est un dossier qui a peut-être fait l'objet de moins de travail, au cours des derniers mois, de la part de la ville de Montréal. Le titulaire responsable de ce dossier vient de changer, d'ailleurs. Mais je peux vous assurer ceci, c'est que, dans nos discussions et notre collaboration pour faire part donc de nos commentaires quant à l'adoption de cette politique linguistique par la ville de Montréal, vous avez mon engagement que nous réaffirmerons haut et fort nos attentes contenues dans la loi, mais nos attentes comme quoi Montréal est une ville qui doit présenter un visage français. Et ça ne doit donc pas seulement être dans le paraître, mais ça doit aussi être dans la prestation de services, en respect bien sûr avec les citoyens et citoyennes qui peuvent avoir droit à des services en langue anglaise. Mais Montréal doit être exemplaire dans son rôle de promotion de l'usage d'une langue française de qualité.

Mesures visant à éliminer les listes d'attente pour
les cours de français donnés aux immigrants (suite)

Quant aux listes d'attente concernant avoir accès à des cours offerts en français... des cours de français, pardon, offerts aux nouveaux arrivants, deux points que je veux vous mettre en lumière. Le premier, c'est que les récentes décisions prises par ma collègue la ministre responsable des Relations avec les citoyens vont justement dans cette optique de favoriser une diminution des listes d'attente pour l'apprentissage du français. Donc, l'objectif poursuivi derrière la réforme, ou enfin les changements apportés par ma collègue, est justement un objectif de pouvoir consacrer plus d'efforts à la diminution des listes d'attente en ce qui concerne avoir accès à des cours de français pour les nouveaux arrivants.

Je m'empresse aussi de vous dire que le Secrétariat à la politique linguistique, à même les crédits à notre disposition, nous procédons, depuis quelques années déjà ? et ça va se poursuivre, je peux vous confirmer, au cours de la prochaine année ? à un transfert de crédits de l'ordre de 400 000 $ pour favoriser l'apprentissage du français chez les nouveaux arrivants, mais en milieu de travail. C'est des initiatives extrêmement intéressantes, puisque nous pouvons ? et je vous dirais que ce n'est pas toujours facile, mais finalement ça fonctionne ? faire en sorte aussi qu'un immigrant qui a trouvé du boulot, et c'est tant mieux, mais que cet immigrant qui a trouvé du boulot puisse aussi avoir accès à des cours de formation en français, et ça peut se donner dans son milieu de travail ou en tout cas en coordination avec son employeur. Le transfert de 400 000 $ vers le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration va se poursuivre cette année pour la francisation des immigrants donc en milieu de travail.

Francisation des entreprises (suite)

Votre dernière question concernait justement cette question de l'usage du français en entreprise. J'ai indiqué, dans mes remarques préliminaires, le fait que cette question de l'usage du français en entreprise, dans les milieux de travail et dans le commerce, doit demeurer et demeurera un axe prioritaire d'intervention de la part de l'Office québécois de la langue française, avec l'appui bien sûr du Secrétariat à la politique linguistique. Vous savez comme moi que nous sommes devant un phénomène mondial où les entreprises... nous sommes devant un phénomène de mondialisation qui fait en sorte que nous sommes devant de grands groupes constitués qui, de façon, je dirais, pragmatique, ont tendance à proposer l'anglais comme langue d'usage standard dans les entreprises. Cette problématique, nous la partageons même avec la France. Et je vous dirais que même une fois de plus nous avons interpellé la France pour qu'on puisse partager des réflexions, même des indicateurs quant à cette question de la présence du français même dans les grandes entreprises.

Il y aura un travail fait bien sûr par l'office. J'ai pu, dans mes remarques préliminaires, vous indiquer même un peu les secteurs du milieu du travail qui feront l'objet d'actions prioritaires au cours de la prochaine année, mais également vous dire que, en collaboration... En fait, je dirais, entre autres, avec des échanges avec l'État français, avec la République, nous voulons effectivement développer encore de meilleurs indicateurs quant à l'usage du français, entre autres dans les grandes entreprises.

Ce dossier a fait l'objet de discussions lors de la récente mission du premier ministre en France. Le relevé des décisions signées par le premier ministre français, M. Raffarin, et notre premier ministre, le premier ministre du Québec, comporte effectivement un élément sur cette question de la vigilance à exercer quant à l'usage du français dans les milieux de travail.

J'ai moi-même pu soulever la question avec mon vis-à-vis français, le nouveau titulaire du ministère de la Culture et de la Communication, comme ils disent là-bas, en France, qui est aussi responsable de la question de la langue, et nous nous sommes entendus sur le fait qu'au cours de la prochaine année, entre autres, ce sera plus sur la responsabilité du Secrétariat à la politique linguistique, mais il y aura des échanges entre la France et le Québec quant à la question du développement d'indicateurs de l'usage du français dans les grandes entreprises.

Je mets ça en lumière tout en vous indiquant que, déjà l'année dernière, un colloque international a eu lieu ici, à Québec. C'était au mois de mai...

Une voix: Juin.

Mme Beauchamp: ...juin 2003. Je pense que ça confirme le fait que le Québec est un chef de file dans cette préoccupation qu'on doit développer pour l'usage du français dans les milieux de travail. Ça a permis déjà de premiers échanges avec la France, la Belgique, la Catalogne, le Pays basque.

Et je m'arrêterai ici, M. le Président, en disant tout simplement au député de Saint-Hyacinthe que, sur cette question, il y a une nette continuité entre les différents gouvernements qui se sont succédé à la tête du Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Bellechasse.

Mme Vien: Merci beaucoup. Merci, M. le Président. Mme la ministre, bon matin et bienvenue évidemment aux gens qui vous accompagnent aujourd'hui pour l'étude de ces importants crédits.

Vous allez me permettre, M. le Président, d'entrée de jeu de saluer de façon toute particulière la ministre de la Culture et des Communications, que je tiens à féliciter pour l'ensemble de son oeuvre ? mais là on va rester sur le même thème ? pour l'ensemble de son oeuvre au cours de la première année de son mandat. Et on vous sent, Mme la ministre, très solide, sensible, en pleine possession de vos dossiers, et nous ressentons, croyez-moi, nous ressentons tous votre passion pour la culture sous toutes ses coutures. J'ai la chance, le bonheur et l'honneur d'être votre adjointe parlementaire et j'ai pu constater toute l'énergie et tout le professionnalisme avec lesquels vous vous investissez dans votre travail.

Que ce soit à Montréal, à Québec, dans les régions québécoises et par-delà aussi les frontières québécoises, Mme la ministre, vous portez haut et fort la culture et nous en sommes très fiers. Et je tiens à rappeler, M. le Président, que j'ai vécu des moments fort excitants, des moments très forts au cours des derniers mois, notamment en ce qui a trait aux travaux pour l'amélioration des conditions socioéconomiques des artistes, et certainement qu'on pourra avoir l'occasion d'y revenir.

Alors, je voulais prendre ces quelques instants, M. le Président, ces quelques secondes pour saluer de façon toute particulière la ministre, qui est une ministre, je pense, qui prend très au sérieux son travail. Je vois le député de Saint-Hyacinthe qui acquiesce; alors, j'en suis ravie. Je pense que tous reconnaissent l'ardeur avec laquelle elle travaille.

Qualité de la langue parlée

J'aimerais parler de qualité de la langue, M. le Président. Il y a actuellement... On le sait, Mme la ministre l'a dit aussi, que le fondement de notre identité, c'est la langue française. Tous le reconnaissent. Et également il y a différentes initiatives qui ont été mises en place au cours des dernières années, que l'on pense, par exemple, à la Table de concertation de la qualité de la langue dans les médias qui a été, je pense, une initiative fort heureuse. Il y a un programme qui existe actuellement, M. le Président, qui s'appelle Parlez-moi d'une langue!, et on sait que le Secrétariat à la politique linguistique poursuit son appui financier au programme de tournées des écrivains, et ça se passe, tout ça, dans les établissements d'enseignement collégial.

Moi, j'aimerais avoir davantage d'information là-dessus. Qu'est-ce que c'est que ce programme-là? Évidemment, bien sûr ce sont des tournées des écrivains. Mais quelle sorte de retombées effectivement on constate dans l'amélioration de la qualité de la langue? Et aussi qu'est-ce qu'on pourrait faire davantage pour améliorer la qualité de la langue au Québec?

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Bellechasse. Mme la ministre.

n (10 h 30) n

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je tiens à remercier la députée de Bellechasse pour ses bons mots, surtout pour l'appui indéfectible et tangible qu'elle apporte dans les dossiers culture et communications et langue française. Et je la remercie pour ses bons mots, tout en n'étant pas surprise de sa première question sur la qualité de la langue française.

La députée de Bellechasse a eu l'occasion, dans une autre vie, de manipuler la langue française en ondes. Elle a été donc reporter, journaliste à la radio dans la région de Bellechasse, et ça m'amène à mettre en lumière ce rôle important et exigeant que jouent les médias dans le domaine de la langue française.

La députée a porté à l'attention, là, de tous l'existence d'une table de concertation sur la qualité de la langue, en fait d'une table de concertation des médias, dans les médias, sur la question de la qualité de la langue. C'est une table de concertation qui est extrêmement importante, que j'ai décidé d'appuyer puisque je suis convaincue de l'importance qu'on puisse donner aux Québécois et aux Québécoises de bons exemples dans l'utilisation d'un français de qualité. Et je suis convaincue que ça passe, entre autres, par la présence d'un français de qualité en ondes, dans nos télévisions, dans nos stations de radio puis bien sûr également dans la presse écrite.

Cette table de concertation sur la langue utilisée dans les médias a déposé déjà un premier rapport, et c'est un rapport intéressant où elle a, entre autres, décidé d'interpeller le milieu universitaire, le milieu collégial, donc le milieu de formation où nous sommes en train donc de former ces futurs utilisateurs de nos ondes, en faisant en sorte, dans le contexte de la formation aux niveaux universitaire et collégial de nos futurs journalistes, par exemple, qu'il y ait du temps consacré à l'importance d'utiliser un français de qualité. C'est un exemple que je vous donne d'une des retombées de cette table de concertation sur la qualité du français dans les médias.

Vous m'avez également interpellée sur ce projet qu'on appelle le projet Parlez-moi d'une langue!. Et là ce ne sera pas long, je vais me retrouver. Voilà. C'est un projet qui a été mis sur pied en 1997, qui s'appelle Parlez-moi d'une langue! et qui dans le fond vise bien sûr à améliorer l'emploi d'une langue de qualité au Québec. Là où ce projet était innovateur et que nous sommes fiers d'en assurer la poursuite, c'est que c'est un projet qui est mené en collaboration avec l'Union des écrivaines et des écrivains québécois, le ministère de la Culture et des Communications et le ministère de l'Éducation. Donc, le programme vise à enrichir un groupe de personnes-ressources et à faire en sorte également que des écrivains soient mis en contact direct avec des jeunes dans nos établissements collégiaux. Donc, ce dont il est question ici, c'est la notion de rencontre. On propose donc une rencontre entre des écrivains... Ça peut être des écrivains, ça peut être également des journalistes, des présentateurs, des chroniqueurs. Au cours des deux dernières années, il y a également eu du matériel promotionnel et didactique qui a été proposé, ajouté pour vraiment s'assurer des retombées.

Il y a une évaluation annuelle qui est faite de ce projet, et jusqu'à maintenant les établissements d'enseignement collégial et l'Union des écrivains du Québec nous disent que les objectifs sont largement atteints. Selon l'UNEQ en tout cas, on nous parle d'un réel succès. On nous dit que les cégeps même sont de plus en plus nombreux à vouloir offrir ce genre de rencontres. Certains veulent maintenant même en offrir durant leur session d'été, tellement on considère que cette rencontre entre des écrivains, ou en fait des gens qui dans la vie ont à utiliser cette langue française, donc des écrivains, des journalistes, des présentateurs... sert en fait de levier pour l'utilisation d'un français de qualité ensuite auprès des étudiants, entre autres, du niveau collégial.

Votre question m'amène à dire que jusqu'à maintenant au Québec on a instauré, comme je disais tantôt, une série de mesures, de lois favorisant bien sûr et assurant la présence du français dans nos institutions. Mais je crois que cet avis sera partagé par plusieurs, que nous sommes peut-être maintenant à une autre étape, d'ailleurs initiée par ce genre de travaux comme le projet Parlez-moi d'une langue!, mais à une étape où on doit aussi s'assurer de la qualité du français utilisé au Québec. Donc, non seulement qu'il soit utilisé par le plus grand nombre de Québécois et Québécoises possible dans les milieux de travail, à l'école, mais également qu'on s'assure d'un français de qualité...

Donc, il y a des initiatives récentes, parce que je dirais que, pour moi, c'est quand même, je dirais, pas un axe nouveau, ce serait exagéré, il y a toujours eu des efforts en ce sens, mais quand même je crois que c'est maintenant un axe de travail qui doit être accentué. On le fait par des initiatives concrètes comme le projet Parlez-moi d'une langue!, on le fait par cette Table de concertation sur la qualité de la langue utilisée dans nos médias, on le fait également bien sûr en mettant à la disposition de l'ensemble des Québécois et des Québécoises des instruments, entre autres par Internet. L'Office québécois de la langue française met à la disposition des Québécois, sur Internet, des outils fabuleux permettant aux Québécois et aux Québécoises de s'approprier une langue française de qualité.

Je tiens aussi peut-être à mettre en lumière que, depuis maintenant quelques mois, l'Office québécois de la langue française met également spécifiquement à la disposition des médias une banque, enfin un service d'assistance qui est réservé aux médias québécois, donc aux journalistes. Je sens que ça vous aurait intéressée, hein, il y a encore quelques mois. Ha, ha, ha! Mais ce service est destiné vraiment aux médias québécois pour faire en sorte que maintenant ils aient tous les outils nécessaires pour s'assurer de la présence d'un français de qualité sur les ondes au Québec. Donc, on voit, ici, qu'il y a une panoplie de mesures possibles pour assurer l'utilisation d'un français de qualité, et, chose certaine, cet effort pour assurer un français de qualité se poursuivra au cours des prochaines années.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Est-ce que vous avez d'autres questions? Mme la députée de La Peltrie.

Francisation des entreprises (suite)

Mme Hamel: Merci, M. le Président. À mon tour de souhaiter le bonjour à mes collègues, Mme la ministre, et aux gens qui vous accompagnent.

Mme la ministre, moi, j'aimerais qu'on parle de francisation dans les entreprises. Dans une autre vie, je suis un petit peu ma collègue de Bellechasse. Moi, par contre, j'ai travaillé dans une multinationale du domaine de l'informatique. Je me rappelle très bien, dans ces années-là, que la tendance était très forte à adopter énormément l'anglais dans le milieu de travail.

Vous avez mentionné tout à l'heure qu'une des tâches de l'Office québécois de la langue française était le suivi de la politique, mais qu'elle s'assurerait ? j'ai pris quelques notes ? de la certification dans les entreprises puis du contrôle puis qu'il y aurait, entre autres, un effort soutenu, là, un effort particulier qui serait fait auprès des entreprises en informatique, particulièrement pour le français, là, en ce qui concerne les logiciels. Et il y a toutes sortes d'autres phénomènes aussi qui nous laissent croire que le français dans les entreprises fera face à des enjeux assez importants, le collègue de Saint-Hyacinthe l'a d'ailleurs mentionné tout à l'heure, là, l'accroissement de l'immigration, une décroissance que représentent les francophones au Canada, et tout ça, puis d'autant plus qu'il semble que la mondialisation de l'économie aura un effet.

Est-ce que c'est exact de dire ça? Est-ce qu'il y aura des efforts particuliers de notre gouvernement pour continuer, là, les efforts qu'on a faits jusqu'à maintenant pour le français en entreprise?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Mme la députée de La Peltrie, je peux vous dire que, comme je le mentionnais dans mes remarques préliminaires, la question de l'usage d'un français de qualité en entreprise, dans le milieu du commerce également, demeure et demeurera, au cours des prochains mois, un axe prioritaire d'intervention pour le gouvernement québécois et même, je dirais, un axe pour lequel beaucoup d'argent public sera investi pour assurer le succès.

n (10 h 40) n

Je peux peut-être vous mettre en lumière certains résultats obtenus par l'Office québécois de la langue française. L'office s'était fixé comme objectifs d'augmenter le nombre d'entreprises certifiées et de régulariser la situation de 35 % des entreprises dont le programme de francisation perdure depuis plus de 10 ans. Vous savez, donc ces entreprises peuvent entamer un processus pour obtenir leur certificat de francisation, mais on s'aperçoit que certaines d'entre elles sont dans ce processus de francisation depuis plus de 10 ans. L'office a décidé vraiment prioritairement de tenter d'encore mieux soutenir ces entreprises pour que finalement elles obtiennent leur certificat de francisation.

Je peux vous dire que, au cours de la dernière année, le taux de certification des entreprises au Québec a connu une croissance importante, passant de 72,8 % à 76 % d'entreprises certifiées au Québec. Donc, un nombre record d'entreprises sont maintenant certifiées, soit près de 4 000, en fait 3 957, pour être tout à fait précise, 3 957 entreprises de plus de 50 employés. C'est celles qui sont tenues d'obtenir leur certificat de francisation, donc, au moment où on se parle.

Je tiens, moi, d'emblée à féliciter tout le personnel de l'Office québécois de la langue française parce que l'office, au cours de la dernière année, a ainsi dépassé les objectifs qu'il s'était fixés. Nous pouvons être heureux de ce nouveau pourcentage du nombre d'entreprises ayant obtenu leur certification. Nous pouvons être heureux du fait que nous sommes maintenant devant un nombre record d'entreprises de plus de 50 employés ayant obtenu leur certificat de francisation.

Pour vous donner des chiffres, là, l'Office québécois de la langue française a accordé un certificat de francisation à 350 nouvelles entreprises au cours de la dernière année, mais bien sûr, étant donné qu'un certain nombre d'entreprises peuvent cesser leurs activités en cours d'année à cause de fermeture, de dissolution ou de fusion avec une autre entreprise, cela se traduit, en augmentation réelle, là, à un nombre de 255 nouvelles entreprises certifiées. Mais je crois que nous pouvons, ici, nous féliciter de cette priorité d'action que s'est donnée l'Office québécois de la langue française, mais surtout des résultats obtenus. Je tiens ici vraiment sincèrement à réitérer vraiment ma satisfaction quant au travail et à l'effort faits par le personnel de l'Office québécois de la langue française. Ce n'est pas toujours un travail facile, c'est un travail qui demande beaucoup, beaucoup d'accompagnement. Il faut accompagner les entreprises pour qu'elles s'engagent dans ce processus d'adopter un programme de francisation. Ça doit se faire au prix d'efforts financiers, de changements d'habitudes également qu'il faut amener dans l'entreprise. Vous savez que c'est parfois ça le plus difficile, c'est de vraiment adopter de nouveaux comportements au travail, d'amener ces changements d'habitudes.

Je vous disais qu'il y avait certains prix financiers de la part des entreprises, mais enfin il n'y a pas de prix. La position du gouvernement du Québec est de dire: Il n'y a pas de prix pour l'application de la Charte de la langue française et cette question de la francisation, de l'usage du français en entreprise, entre autres bien sûr dans les grandes entreprises de 50 employés et plus.

Je veux également souligner le travail fait par les syndicats au Québec dans ce domaine. Vous savez que nous soutenons financièrement certains syndicats pour qu'ils participent à des comités de francisation dans les entreprises. C'est aussi un travail important, puisque je vous parlais, là... Non seulement parfois il s'agit d'efforts financiers, mais il y a également ces changements d'habitudes qu'il faut adopter au travail, et il est clair également que de meilleurs résultats encore peuvent être atteints lorsqu'il y a un engagement de tous non seulement donc de la partie patronale, mais également des représentants des travailleurs.

J'ai déjà indiqué pour ma part mes attentes devant le fait qu'il y ait plus de comités de francisation actifs au Québec. Déjà, il y a une amélioration, mais récemment encore j'ai eu une rencontre avec M. René Roy, du syndicat de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, pour effectivement examiner des pistes d'avenir quant à une amélioration, là, du taux d'activité des comités de francisation. Pour moi, c'est un outil de travail très important que ces comités de francisation.

Vous m'indiquiez donc que nous sommes devant des défis importants. C'est tout à fait juste. Je pense qu'on ne peut pas porter d'oeillères. Nous travaillons... c'est un travail, je dirais, de moine, c'est un travail d'accompagnement de toutes ces entreprises de 50 employés et plus. Déjà il y a 30 ans, c'était tout un défi, mais ça l'est encore plus devant, entre autres, le phénomène de mondialisation qui amène effectivement dans de grandes entreprises, dans de grands groupes constitués la présence de l'anglais comme langue standard, d'usage standard dans les entreprises. Nous le voyons par l'utilisation de logiciels, nous le voyons par l'utilisation de cette langue lors des réunions qui se mènent.

C'est dans ce contexte que je vous disais que nous ne voulons pas porter d'oeillères. Le travail se fait, nous avons des résultats extrêmement encourageants obtenus par l'Office de la langue française, mais nous ne pouvons pas porter d'oeillères sur le fait que la pression est de plus en plus grande sur certaines grandes entreprises pour l'usage de l'anglais parce qu'elles sont membres d'un grand groupe international, parce qu'il y a eu fusion à l'international. Donc, nous ne porterons pas d'oeillères.

Et c'est dans ce contexte que je vous disais que nous avons établi des ponts de travail, de collaboration avec d'autres États pour, entre autres, partager certains indicateurs, qu'on soit plus capables encore de mesurer l'usage d'autres langues que le français dans nos grandes entreprises. Et je suis très heureuse de voir que, dans le précis des décisions signées par... dans le relevé des décisions signées par le premier ministre français, M. Raffarin, et le premier ministre du Québec, M. Charest, de nouveau les deux premiers ministres ont réaffirmé leur intérêt que nos experts dans ce domaine établissent une saine collaboration ? et je crois que c'est le mot clé de la journée de cette étude de crédits ? pour qu'avec beaucoup de vigilance nous puissions suivre la question de la présence du français, entre autres, dans les grandes entreprises.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, M. le Président. Mme la ministre, je vous écoute avec beaucoup d'attention. Je ne nierai pas qu'il y a... C'est intéressant de vous entendre, mais vous comprendrez que, si vos réponses sont trop générales et trop vaporeuses, les gens vont se dire: Bien, elle n'a pas répondu aux questions. Alors, j'aurais encore quelques questions à vous poser. Et là je vois que le temps a passé beaucoup, très rapidement, et je ne sais pas si je vais pouvoir vous poser plus qu'une ou deux questions, parce que... Enfin, je vous invite, Mme la ministre, peut-être à nous donner une chance pour qu'on puisse poser un peu plus de questions.

Actions entreprises concernant
la non-disponibilité de certains jeux
électroniques en français

Bon, ma première question touche l'apprentissage de la langue pour tout le monde, que ce soit pour les Québécois de souche francophone ou que ce soient les Québécois de souche récente. Enfin, je n'aime pas beaucoup l'expression «souche» parce que les souches arrivent seulement quand les arbres sont morts, mais mettons de racine, ce serait mieux. On sait que l'apprentissage d'une langue, ce n'est pas seulement un phénomène rationnel; c'est aussi un phénomène affectif. Et, une langue, on s'attache à une langue parce qu'elle transporte nos émotions, nos amours, nos relations avec les autres et le plaisir qu'on a de vivre.

Chez les jeunes en particulier, un élément qui n'est pas négligeable dans l'apprentissage de la langue, c'est les jeux, le jeu, et en particulier les jeux vidéo. Et vous savez qu'il est très difficile de trouver bien des jeux vidéo en français. Bien oui, il y en a en français qui sont très connus et qui sont très répandus, qui sont des classiques, mais il en sort constamment des milliers de jeux, et parmi ceux-là de très bons, et c'est difficile, pour les gens qui aiment le jeu vidéo, de trouver ce qu'ils cherchent.

J'ai ici des plaintes de gens sur le terrain qui disent: Les Espagnols, les Allemands, les Français ont les jeux en leur langue. Pourquoi pas nous, francophones d'Amérique? Alors donc, s'il vous plaît, faites quelque chose pour qu'il y ait des jeux en français le plus tôt possible. Pas dans 10 ans, 15 ans, 20 ans, le plus tôt possible.

J'ai une autre lettre ici de M. Lauzon. Elle est très éloquente. Elle est très éloquente, il dit ? je cite seulement un petit passage: «Après m'avoir confirmé...» Non, je vais commencer une phrase plus tôt. «À mon retour chez moi, j'ai communiqué avec l'Office de la langue française pour porter plainte ? il avait visité Renaud-Bray, Camelot, et tout ça, à Laval. Alors, après m'avoir confirmé que j'avais raison, parce que le texte sur le contenant d'un produit quelconque doit afficher le français, accompagné ou non de l'anglais, on m'a invité à porter plainte par écrit ou par courriel en mentionnant le produit fautif. Le problème, c'est qu'il y a sûrement près de 90 % de ces jeux qui ne respectent pas la Charte de la langue. Il me faudrait donc aller en magasin, et ce, pour chaque magasin fautif, et faire la liste de tous les produits fautifs, un véritable travail de moine pour décourager tout citoyen de porter plainte de façon efficace.»

n(10 h 50)n

Alors, je pense que vous pouvez répondre à cette question-là: Qu'est-ce qu'il faut faire pour quelqu'un qui a cette... Et comment faire ça? Parce que c'est sûr qu'on ne peut pas demander non plus aux gens de passer tout leur temps à faire le tour des magasins. Bon, on a donc un mécanisme. Comment ça se passe? Donc, je voudrais savoir, Mme la ministre, premièrement, depuis quand on a commencé à s'occuper de ça à l'Office de la langue française.

Le Président (M. Cusano): Merci...

M. Dion: Qu'est-ce qu'on a fait? Juste quelques petites questions précises, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Non, c'est parce que vous vouliez poser plusieurs questions, avoir plus de temps. Allez-y.

M. Dion: Oui, bien pour lui donner la chance de donner le portrait.

Le Président (M. Cusano): Allez-y.

M. Dion: Donc, quand on a commencé? Qu'est-ce qu'on a fait? Qu'est-ce que cela a donné? Est-ce qu'il y a eu des poursuites du Procureur général? Et est-ce qu'on va aboutir à quelque chose dans ce dossier-là dans un délai rapide?

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Si vous me permettez, il y a deux aspects. Concernant les jeux électroniques, il y a deux aspects à la question. Premièrement, vous confirmer que c'est depuis octobre 2001 que la ministre responsable de la Charte de la langue française, à l'époque, a interpellé l'office pour qu'il y ait du travail de fait, qu'on avance sur cette question, que les jeux vidéo soient conformes à nos attentes et, entre autres, à l'esprit et à la lettre de notre Charte de la langue française.

Il y a deux aspects à votre question: il y a l'aspect du respect de la Charte de la langue française en ce qui concerne l'emballage, les instructions données en français, et ensuite il y a la question de la présence de jeux en langue française sur nos tablettes. Je vous dirais que c'est quand même... c'est deux dimensions différentes. Jusqu'à maintenant, l'Office québécois de la langue française a déployé beaucoup, beaucoup d'énergie pour traiter de la première question, c'est-à-dire en ce qui concerne les emballages et les modes d'emploi, les certificats de garantie, par exemple, qui doivent être présents en français sur les rayons au Québec. Il y a eu des pourparlers, je dirais, un travail de concertation effectué par l'Office de la langue française avec des intervenants du milieu. Il y a donc eu des discussions, entre autres, avec les grands producteurs et distributeurs qu'on appelle donc Sony, Nintendo, Microsoft, également avec l'Association canadienne des jeux interactifs.

Là, vous allez me pardonner mon accent anglais, mais le Canadian Interactive Digital Software Association ? je l'ai dit une fois et je ne le répéterai pas, mais ? ...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beauchamp: ...donc l'Office québécois de la langue française s'est assis avec cette association canadienne pour effectivement en arriver à ce qu'il y ait des efforts nets, perceptibles de faits au niveau de la présence, dans l'emballage, dans le mode d'emploi, de certificats et garanties en français.

Il y a également eu du travail, mené en concertation avec le Conseil québécois du commerce de détail, d'effectué, et nous sommes devant une situation intéressante. Vous disiez vous-même donc comment ce citoyen vous a interpellé. Je suis heureuse de voir que l'office l'a invité à porter plainte. C'est important. Mais également donc la situation devant laquelle nous sommes... Il y a certains commerçants, certains distributeurs qui ont accepté vraiment de travailler de concert avec l'office et, par exemple, de retirer de leurs tablettes, en date de novembre dernier ? donc, nous sommes en novembre 2003... Après tout ce travail fait pour en arriver à ce que les emballages, les garanties, les modes d'emploi soient en français, plusieurs membres du Conseil québécois du commerce de détail ont accepté de retirer de leurs tablettes tout produit ne correspondant pas... enfin ne répondant pas à notre législation.

Mais eux-mêmes se retrouvent devant une position un peu difficile, puisque par ailleurs certains commerçants et détaillants ne jouent pas le jeu, ne retirent pas de leurs tablettes leurs produits. Et là nous sommes devant une réalité, c'est que la seule façon... Et ça, ça vient en aide... Et j'espère que les gens qui nous écoutent, là, réalisent que la seule façon, un, de faire respecter notre loi, la seule façon d'assurer la présence d'emballages en français sur les tablettes et la seule façon d'appuyer les commerçants qui, eux, jouent le jeu et ont retiré de leurs étalages, de leurs tablettes des produits non conformes est de porter plainte quand on retrouve les produits non conformes encore sur nos tablettes.

L'Office québécois de la langue française donc a noté des progrès. C'est vraiment des progrès notables qui ont été réalisés quant à la présence d'emballages en français. Mais il continue avec vigilance d'examiner la situation, d'ailleurs en ayant lui-même mené sa propre enquête, au cours des derniers mois, pour examiner la situation.

Nous sommes conscients qu'il y a encore des produits sur des tablettes qui sont potentiellement dérogatoires à la Charte de la langue française, ce que nous constatons. Je le dis, l'office mènera encore plus à fond, au cours des prochains mois, ses enquêtes et ses analyses, mais on soupçonne ceci, c'est-à-dire que les grands producteurs et distributeurs se sont conformés. Nous sommes plutôt devant la présence de produits, je vous dirais, qui sont produits par de très petites boîtes de production, parfois asiatiques ou autres, où, là, on a eu plus de difficultés, au moment où on se parle, de faire appliquer notre charte. Mais il faut quand même se dire ceci: les grands joueurs ? je vous parlais de Sony, de Microsoft, de Nintendo, d'Ubisoft ? les grands joueurs et le Conseil québécois du commerce de détail ont offert une collaboration appréciée pour qu'il y ait vraiment des améliorations notables quant à la présence du français dans les emballages, les modes d'emploi, les certificats.

Maintenant, en ce qui concerne... Donc, je peux vous dire que l'office québécois va continuer son travail avec vigilance dans ce dossier. Il faut avoir le sain équilibre, un équilibre entre les mesures très coercitives et les mesures de concertation. Jusqu'à maintenant, le travail s'est fait dans une optique, depuis 2001, dans une optique de concertation avec les fabricants et les détaillants, mais bien sûr des mesures, comme je vous disais, peut-être plus coercitives devront peut-être être exercées avec certains détaillants qui, eux, ne semblent pas vouloir respecter les directives mêmes données par le Conseil québécois du commerce de détail.

Quant à la présence de jeux en français, les jeux en français, ce qu'on me rapporte, c'est le fait que nous croyons qu'avec certains changements technologiques... Et là je vous prie de m'excuser, mais, moi, sincèrement je ne suis pas de cette génération des jeux vidéo et je n'aurais sûrement pas toujours le bon vocabulaire. Là, je vois M. le président de la Commission de la culture qui, lui, est un grand, grand fan de tout ce qui est informatique et jeux vidéo. Je ne le suis pas, ce qui trahit un peu mon âge.

Mais tout ça pour dire que ce qu'on m'indique, c'est que, je dirais, les normes technologiques, par exemple, utilisées en France par rapport à ce qui est utilisé ici sont différentes. Jusqu'à maintenant, ça a rendu beaucoup plus difficile la tâche de rendre disponibles en français certains jeux vidéos. Mais ce qu'on m'indique, c'est qu'il semble y avoir maintenant des normes, je dirais, informatiques qui deviennent un peu plus mondiales et qui devraient permettre, de façon beaucoup plus simple et rapide, la présence de jeux vidéo en français.

Je vais dire ça encore plus simplement et comme je l'ai compris. Ce qu'on m'indique, c'est que, de plus en plus, le support du jeu vidéo va être le DVD, et cette utilisation du DVD fait en sorte ? et on le sait, là, par les films que l'on voit, et tout ça ? fait en sorte qu'il devient plus simple d'assurer la présence de la langue française aux côtés parfois de d'autres langues, mais la présence de la langue française dans l'offre, là, de jeux vidéo. Donc, c'est un dossier... Je l'ai indiqué dans mes remarques préliminaires, l'Office québécois de la langue française... Toute la question des jeux électroniques demeure un dossier, je dirais, prioritaire au cours de la prochaine année, mais, je dirais, dans une optique, là, de moyen terme, nous sommes plutôt optimistes, ne serait-ce que par les nouvelles avancées technologiques, de voir l'offre de jeux électroniques s'améliorer en français.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Combien?

Le Président (M. Cusano): Il vous reste huit minutes.

M. Dion: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Alors, si vos questions sont courtes, on pourrait inviter que les réponses soient courtes.

Employés de la Commission de toponymie

M. Dion: Oui, je vais essayer d'avoir une question... parce qu'il m'en reste au moins deux à poser, hein? Bon. Alors, la prochaine touche le visage français du Québec, de l'ensemble du Québec, et je pense qu'on s'entend sur le fait ? vous en avez parlé tout à l'heure ? que c'est important, c'est important que les documents officiels soient en français, c'est important que les noms soient affichés en français et c'est important que l'on voie à un affichage correct. C'est pour ça qu'on a une commission de toponymie au Québec depuis longtemps. Et, quand je regarde dans le document de l'an dernier, je vois qu'on avait, dans la Commission de toponymie ? ma copie est un peu difficile ? on avait, l'an dernier, au printemps, 11 professionnels, 11 professionnels, dont une personne que l'on dit qui était plutôt jeune, donc pour assurer la relève.

n(11 heures)n

Alors, ma question va être très simple et très rapide: Présentement, où en est-on? Combien y a-t-il de professionnels qui sont sur le terrain pour étudier toute la question de l'affichage? Ces gens-là ont quel âge? Et est-ce que la relève est assurée actuellement par les employés que la commission a actuellement, la Commission de toponymie? Alors, vous voyez, c'est des questions très, très claires.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je veux juste vous demander une précision, parce que... Est-ce que votre question porte uniquement et strictement sur la Commission de toponymie? Parce que, quand vous me demandez combien de gens sont sur le terrain en ce qui concerne l'affichage, toute la question de l'inspection ? je vais m'exprimer ainsi ? relève plutôt de l'Office québécois de la langue française. Là, votre question porte vraiment sur?

M. Dion: Sur la Commission de toponymie uniquement.

Mme Beauchamp: O.K. Vous me comprenez, je ne crois pas me tromper en disant que la Commission de toponymie ne va pas faire d'inspection sur le terrain. La Commission de toponymie...

M. Dion: Elle répond aux demandes des gens.

Mme Beauchamp: Pardon?

M. Dion: Elle répond aux demandes des gens. Donc, ce sont les professionnels qui répondent aux demandes des municipalités et...

Mme Beauchamp: O.K. Dans le fond, d'accord, on se comprend bien. Vous allez juste... Parce que votre question, elle est extrêmement précise. Je peux vous dire ceci: en 2003-2004 et pour la prochaine année, la Commission de toponymie a 21 postes. Et, si vous me donnez quelques secondes, là, je vais voir si on peut obtenir... Votre question était: Combien de professionnels et quel âge?

M. Dion: Oui.

Mme Beauchamp: Je vais voir, M. le député, si on peut vous...

M. Dion: Je vais préciser ma question, Mme la ministre, si vous permettez. Ma question ne porte pas seulement sur les postes, sur les postes qui sont occupés et qui sont comblés, parce qu'on peut avoir beaucoup de postes puis personne dedans.

(Consultation)

Mme Beauchamp: Le temps que la réponse arrive à cette question très précise, M. Dumas me soulignait que c'est une tradition historique au Québec. Mais notre Commission de toponymie, avec 21 employés, est la plus importante Commission de toponymie au Canada. Je peux même vous dire qu'avec 21 employés la Commission de toponymie a plus d'employés que l'ensemble de tous les effectifs consacrés à la toponymie à l'échelle du Canada. Donc, c'est pour vous dire qu'on est ici dans une tradition importante, là, de consacrer beaucoup d'effectifs à la question de la toponymie au Québec. Moi, on m'a déjà dit: Bien, c'est un des groupes d'experts les plus importants peut-être à travers le monde, là, consacrés à cette question de la toponymie. En tout cas, chose certaine, à l'échelle du Canada, les effectifs ne se comparent absolument pas, dans le sens qu'au Québec nous avons plus d'effectifs à la Commission de toponymie que l'ensemble des neuf autres provinces canadiennes.

M. Dion: Donc, pendant qu'on vous apporte cette... je vais préciser ma question, pendant qu'on vous apporte les informations. Quant à l'âge des personnes, des professionnels qui travaillent et qui répondent aux municipalités, je crois savoir que c'est des gens qui ont beaucoup servi le Québec, ce qui fait que le temps a passé et que bientôt un certain nombre d'entre eux sinon tous prendront leur retraite. Qu'est-ce que vous avez prévu pour assurer la suite, la relève? Quels sont les gens que vous avez actuellement à l'emploi de la Commission de toponymie, qui peuvent assurer la relève?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Peut-être vous donner un élément de réponse, je regarde Mme René. Je veux juste vous indiquer que, depuis l'adoption de la dernière loi, la loi n° 104, administrativement la Commission de toponymie, tout en existant en termes de dénomination ? parce qu'on a voulu garder officiellement ce niveau d'expertise et, à travers le monde, pouvoir continuer à dire que nous avons une commission de toponymie ? mais administrativement c'est intégré à l'Office québécois de la langue française. Donc, j'ai l'impression que c'est peut-être un peu pour ça... Quand vous posez des questions spécifiquement sur le personnel de la commission, peut-être que c'est pour ça qu'il faut aller fouiller un peu plus, puisque, depuis maintenant environ deux ans ? d'ailleurs, c'est Mme Nicole René qui est à la fois la présidente de l'office et de la Commission de toponymie ? c'est intégré administrativement.

(Consultation)

Mme Beauchamp: Bon, écoutez, sur les 21 postes autorisés à la Commission de toponymie, il y en a, en ce moment, 18 postes qui sont comblés, et nos projections nous indiquent que, pour la prochaine année, il y a un professionnel qui devrait prendre sa retraite. Donc, au moment où on se parle, vous connaissez le grand cadre dans lequel nous allons fonctionner sur les 10 prochaines années au niveau de la fonction publique québécoise, donc au niveau... Le grand cadre est le fait que nous allons remplacer un poste sur deux au cours des 10 prochaines années. Ça veut donc dire, entre autres, un nombre significatif d'embauches et un rajeunissement, je dirais, de la fonction publique québécoise. Bien sûr, ces chiffres font fi, là, du secteur de la santé et de l'éducation. La présidente du Conseil du trésor a bel et bien indiqué cet état de fait. Mais ce que je peux vous dire, donc c'est que la Commission de toponymie, ou en fait l'Office québécois de la langue française, a les crédits pour prendre sa décision quant au remplacement de la personne qui est appelée à prendre sa retraite, et bien sûr ce phénomène de remplacement devrait par lui-même amener un phénomène de rajeunissement de la fonction publique.

Juste à titre d'anecdote rapidement, lors de mes tournées à travers le Québec, je me fais un devoir d'aller saluer le personnel du ministère de la Culture et des Communications, et très souvent, dans les bureaux régionaux, le personnel de l'Office québécois de la langue française est intégré dans les locaux des directions régionales de la Culture et des Communications. Et, quand je fais le tour, c'est avec beaucoup d'amusement, mais c'est très significatif pour moi de voir les employés présents qui ont un certain âge ? il faut le dire, au ministère de la Culture et des Communications, nous sommes devant des employés fidèles et surtout des experts qui ont été engagés pour leurs connaissances dans certains domaines spécifiques ? et systématiquement, lorsque je visite les bureaux, le personnel prend le temps de me dire: Et là on vous présente notre bébé, et le bébé, c'est habituellement une personne dans les bureaux qui est âgée habituellement de moins de 35 ans mais que tout le personnel salue, là, de façon très positive.

Votre question, elle est intéressante et pertinente concernant cet enjeu que nous aurons de transférer l'expertise vers une relève, mais qui sera là, qui sera au rendez-vous.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Bellechasse.

Une voix: Mme la députée de Chambly.

Le Président (M. Cusano): De Charlesbourg, excusez-moi. J'avais pensé que vous vouliez intervenir, Mme la députée. Alors, excusez-moi, c'est le député de Charlesbourg.

Élaboration d'un dictionnaire
du français standard en usage au Québec

M. Mercier: Merci, M. le Président. Évidemment, c'est un plaisir pour moi d'être ici, ce matin, et de partager avec vous cette dimension fort unique de la culture qui est celle de la langue française. Également je tiens à saluer l'excellent travail de notre ministre et à me joindre à mes collègues pour lui signifier à quel point elle fait plus qu'un bon travail. Je vous dirais que c'est une excellente ambassadrice autant ici, dans la province, au Québec, qu'à l'étranger.

M. le Président, vous savez, dans mon comté, il n'y a pas très longtemps, il y a à peine quelques semaines, j'ai eu l'honneur d'être président d'honneur à un cours d'art oratoire organisé par le club Optimiste de mon comté, et là, M. le Président, j'y ai découvert quelque chose d'extraordinaire. Vous savez, notre relève, les jeunes ? et c'est un concours d'art oratoire organisé pour les jeunes ? j'ai découvert une jeunesse et une relève incroyables. À tort, on croit souvent que la langue française s'effrite ou du moins que les jeunes parlent de moins en moins bien notre langue. À mon grand étonnement, j'ai découvert, M. le Président, une jeunesse qui maîtrisait la langue française d'une façon exceptionnelle.

Vous savez que le français ? et je suis persuadé que mon collègue de Saint-Hyacinthe sera fort d'accord avec moi ? la langue française, la maîtrise de la langue française, c'est un art. Et c'est un art pourquoi? Parce que, évidemment, elle reflète l'âme de quelqu'un. Et maîtriser la langue française, ce n'est pas toujours facile. Mais, lorsqu'on réussit à la maîtriser, évidemment c'est un moyen de communication essentiel, évidemment, mais extraordinaire. Et j'ai vu en ces jeunes, M. le Président, un intérêt marqué, soit, de la langue française, mais également à quel point la langue française devait être supportée afin d'assurer une espèce de fidèle et perpétuel héritage autant informatif, éducatif que référentiel de notre langue, qu'elle avait besoin d'outils didactiques, référentiels, comme je viens de le dire.

n(11 h 10)n

En Amérique du Nord, je sais qu'il y a plusieurs sociétés qui ont élaboré et adopté des dictionnaires particuliers, souvent dits nationaux ou standards. Alors, ma question, M. le Président, évidemment s'adresse à la ministre, et je sais que notre gouvernement a à coeur notre langue commune. Et même je tiens à citer notre premier ministre qui disait, dans son discours inaugural, M. le Président, que notre langue commune demeure le coeur de notre identité québécoise. Nous honorerons cette responsabilité historique.

Je sais qu'au Québec on a élaboré un dictionnaire du français standard qui est en usage et qu'effectivement notre gouvernement et que notre ministre supportent ce projet. Alors, M. le Président, j'aimerais savoir de la ministre: D'abord, à quelle échelle l'État subventionne-t-il ce projet qui est plus qu'essentiel dans le support de la langue française en tant que référence didactique? Mais également qu'elle élabore davantage sur ce projet, M. le Président, qu'est le dictionnaire du français standard.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci. Merci. Je dois dire que mon collègue le député de Charlesbourg m'a rappelé de bons souvenirs, puisqu'il vient de nous parler de ce concours oratoire organisé par le club Optimiste. Ça doit faire maintenant environ 40 ans qu'ils organisent de tels concours, puisque vous avez ici deux gagnantes, dans nos régions respectives, de ces concours qui, je me souviens très bien, avaient marqué un peu ma jeunesse. Et, pour l'anecdote une fois de plus, je viens de la région de Valleyfield, et donc le club Optimiste avait organisé un tel concours, et, à la fin, le grand prix à gagner était de devenir maire d'un jour de la ville de Valleyfield. Et devinez qui a gagné. C'est moi. Donc, c'était le début de ma carrière politique. À l'âge de neuf ans, j'ai assisté au conseil municipal de Valleyfield, et, quand les journalistes m'ont interviewée à la fin, j'ai dit qu'ils parlaient beaucoup pour ne rien dire, comme quoi la vérité sort de la bouche des enfants parfois. C'est une histoire vraie. Mais j'ai essayé ici de dire quelque chose de tangible, et, s'il y a des enfants qui nous écoutent, qu'ils puissent bel et bien comprendre l'initiative du gouvernement du Québec en soutien à un projet d'envergure qui est le développement d'un dictionnaire du français standard en usage au Québec.

C'est un projet qui a été initié par le gouvernement précédent. Il me fait plaisir de le souligner, de souligner qu'en matière de langue française il est important de dire que la grande majorité des actions déployées par les gouvernements se font en continuité, puisqu'on est devant un enjeu qui, lorsqu'on forme le gouvernement du Québec, nous interpelle automatiquement et devient une responsabilité incontournable. Donc, en continuité, nous avons continué à soutenir les efforts développés, déployés par une équipe d'experts extraordinaires que j'ai eu la chance de rencontrer. C'est un groupe de recherche qui a été formé à l'Université de Sherbrooke et qui a été baptisé Franqus. Ce groupe de recherche mène donc ses travaux relatifs à la description scientifique du français standard en usage au Québec et à l'exploitation de corpus lexicaux.

Ici, les objectifs que l'on poursuit, c'est bien sûr de soutenir la recherche universitaire dans le domaine de la lexicographie, et aussi de favoriser le développement, le transfert technologique dans les industries de la langue, et ultimement de doter le Québec d'un dictionnaire du français standard en usage au Québec.

Il est intéressant de souligner que les différents États qui ont été, à une certaine époque, je vais employer le mot «colonisés», mais colonisés par des sociétés européennes, se sont tous donné, à travers leur histoire, leur propre dictionnaire. Je pense bien sûr à l'anglais américain. Bien sûr, assez rapidement, les Américains se sont dotés de leur propre dictionnaire, caractérisant leur anglais par rapport à l'anglais d'Angleterre. Les Mexicains bien sûr se sont donné leur propre dictionnaire espagnol, mettant en place donc les distinctions de l'usage de l'espagnol mexicain quant à la langue utilisée en Espagne. Et le Canada anglais s'est également doté d'un dictionnaire de l'anglais utilisé au Canada, se distinguant donc de l'anglais à la fois américain et l'anglais d'Angleterre. Et il est assez particulier ? et je suis heureuse de souligner que nous sommes en train de corriger cette situation ? de voir que le Québec ne s'était pas encore donné un ouvrage, produit par des universitaires, permettant de mettre en valeur le français utilisé de façon standard, le français en usage au Québec.

Ces chercheurs ont développé, depuis maintenant trois ans ? si je ne me trompe pas, ça fait trois ans ? ont accompli un travail extraordinaire. J'ai eu l'occasion d'aller sur place, à l'Université de Sherbrooke. Leur démarche est la suivante: ils ont constitué des corpus lexicaux où, à partir d'ouvrages bien sûr de la littérature, également des énoncés utilisés dans le monde des médias, par les journalistes... Mais également, M. le député de Saint-Hyacinthe, vous saurez qu'ils ont même aussi... ils se sont inspirés des discours des politiciens. Ça fait partie des corpus lexicaux qu'ils utilisent.

Cet ouvrage, qui sera donc un dictionnaire comprenant tous les termes habituels utilisés en français, aura la couleur du Québec, mettra en perspective le français standard utilisé au Québec, puisque, à l'intérieur de ce dictionnaire, nous pourrons retrouver, par exemple, des citations de journalistes, de politiciens, bien sûr d'écrivains québécois, mettant en lumière l'usage que l'on fait ici de certains mots. Ce travail met en place également un travail informatique colossal. L'Université de Sherbrooke a développé des moteurs de recherche et toute une plateforme informatique colossale pour traiter toutes ces banques, ces corpus lexicaux, et toute cette immense banque de données, là, qui va correspondre donc à répondre à nos besoins à nous, nos besoins linguistiques.

Pour moi, le fait qu'on appuie le développement de ce dictionnaire québécois est une façon de répondre à l'exigence d'améliorer la qualité du français utilisé, mais aussi d'être fier, d'être fier de notre français qui a pris racine ici et qui est caractérisé par certains emplois qui ici sont d'usage correct, et on pourra proclamer haut et fort ces usages qui sont bien sûr tout à fait corrects ici.

J'aimerais qu'on me confirme. La somme investie cette année est de 600 000 $?

(Consultation)

Mme Beauchamp: Excusez-moi, c'est 650 000 $ qui ont été investis dans le dernier budget pour le développement de cet ouvrage.

Et peut-être que je peux terminer en disant que... Juste vous donner quelques exemples de mots québécois qui sont utilisés ici, qui font partie de notre français correct et qui pourront maintenant être reconnus grâce à un ouvrage d'importance produit par des universitaires. Pensons à des mots comme «polyvalente», «dépanneur», «écotourisme», «maison unifamiliale», «nordicité». Voilà des mots tout à fait corrects et qu'on pourra retrouver dans ce dictionnaire du français standard en usage au Québec.

Je profite de l'occasion vraiment pour saluer les chercheurs de l'Université de Sherbrooke que j'ai eu l'occasion de rencontrer et qui mènent vraiment un travail vraiment extraordinaire. C'est assez palpitant d'assister à la naissance d'un nouveau dictionnaire. J'en profite également pour vous souligner, M. le député de Charlesbourg, le fait qu'au cours de la dernière année nous avons également investi une somme de 40 000 $ pour appuyer le développement d'un dictionnaire sur la terminologie employée dans le domaine des relations de travail. Donc, je vous indique cet investissement important pour le développement d'un grand dictionnaire québécois. Mais également, lorsqu'on parle de la qualité du français, il est important d'assurer l'usage d'un français de qualité dans ce qu'on appelle l'administration avec un grand A. Et je crois qu'il faut être humble et avouer que nous avons beaucoup de travail à faire pour améliorer l'usage du français dans l'administration publique. Entre autres, il y a certains passionnés de la langue française qui, année après année, vont écrire pour déplorer le français utilisé dans les conventions collectives et dans le grand domaine des relations de travail. Donc, nous avons décidé d'investir 40 000 $.

C'est la Centrale des syndicats démocratiques, la CSD ? et c'est important de le souligner ? ce syndicat qui consacre du temps à assurer l'usage d'un français de qualité dans les milieux de travail. C'est donc la CSD qui va pouvoir poursuivre son travail de développement de certains corpus lexicaux pour en venir à pouvoir vraiment se doter aussi au Québec d'un dictionnaire de qualité promouvant vraiment une langue française de qualité dans le domaine des relations de travail.

(Consultation)

Mme Beauchamp: Oui. M. Dumas me demande de souligner à juste titre le fait que le projet développé par l'équipe Franqus, à l'Université de Sherbrooke, appelle aussi à la collaboration de plusieurs intervenants, et souligner donc que l'Office de la langue française est engagé de près, est un collaborateur aux travaux menés à l'Université de Sherbrooke, également la Société Radio-Canada, le Conseil supérieur de la langue française. Donc, vous voyez que nous sommes, ici, devant un travail où quelques personnes bien sûr en assumeront la paternité et la maternité, mais néanmoins, lorsque cet ouvrage verra le jour, je pense que ses multiples applications, entre autres par les bases, les différentes bases informatiques, assureront vraiment le rayonnement du Québec à travers le monde, et cette fierté pourra rejaillir vraiment sur chacun d'entre nous.

n(11 h 20)n

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Chambly.

Mme Legault: Merci, M. le Président. Bonjour, Mme la ministre. À mon tour de vous saluer et de vous féliciter pour le travail accompli.

Étant donné que mon collègue de Charlesbourg s'est permis de partager une expérience récente, je vais le faire à mon tour. Il y a quelques semaines, j'ai eu le bonheur de visiter une école de mon comté, l'école du Parchemin, et j'ai été invitée dans une classe de cinquième et sixième année, et il y a des jeunes, là, qui ont partagé avec moi des critiques littéraires qu'elles avaient préparées, et puis je peux vous... J'ai été séduite du travail accompli et puis je peux vous dire, Mme la ministre, qu'il y a beaucoup de parents et d'éducateurs qui accompagnent merveilleusement nos jeunes dans l'apprentissage de notre langue.

Ampleur de la consultation du
Grand Dictionnaire terminologique

Ceci étant dit, on a discuté tantôt de dictionnaires et tout, et je comprends qu'il y a trois organismes qui veillent sur notre politique linguistique. Vous nous avez parlé de l'achalandage phénoménal du Grand Dictionnaire de l'office. Est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus?

Mme Beauchamp: Oui. C'est tout à fait phénoménal. Et je vous parlais de la fierté que nous pourrons avoir tous ensemble, dans quelques années, d'assister à la naissance d'un dictionnaire du français standard au Québec. Mais vraiment voilà un secret trop bien gardé que le succès phénoménal du Grand Dictionnaire terminologique de l'Office de la langue française.

En fait, je dis que c'est un secret trop bien gardé, mais en même temps c'est un succès phénoménal parce que justement on fait usage de ce dictionnaire de façon phénoménale. Mais néanmoins je considère que, en termes de rayonnement et en termes de fierté, c'est encore un secret trop bien gardé que ce Grand Dictionnaire terminologique qui est littéralement, là, le produit-vedette de l'Office de la langue française. On peut en être fiers. La qualité de ce Grand Dictionnaire terminologique est reconnue à travers le monde. C'est un travail qui est le fruit de 30 années de recherche effectuée par le personnel de l'Office de la langue française. C'est un dictionnaire qui comprend 3 millions de termes français et anglais du vocabulaire commercial, industriel, scientifique, reliés à quelque 200 domaines d'activité. Et on dit que ce Grand Dictionnaire terminologique, pour vous donner un élément de comparaison, il ne porte pas l'adjectif de «grand» pour rien, c'est qu'il équivaut à quelque 3 000 ouvrages de référence.

Le Grand Dictionnaire terminologique permet d'interroger en français ou en anglais et de trouver un terme correspondant dans une autre langue. Mais il comporte aussi des notes sur des définitions, des synonymes, et le tout est présenté sous la forme de fiches très, très faciles à consulter. C'est un dictionnaire... On me dit qu'il est mis à jour régulièrement. Ce sont plus de 5 000 mises à jour ou 5 000 ajouts annuellement. Donc, c'est un dictionnaire qui est toujours, toujours à la fine pointe des attentes des clients qui le consultent.

C'est important aussi de mentionner que c'est un dictionnaire qui est offert gratuitement. Donc, on peut avoir accès gratuitement par Internet... Si vous allez sur le site de l'Office de la langue française, depuis 2000 c'est un dictionnaire qui est offert gratuitement. Et l'Office québécois de la langue française évalue à environ 160 000 le nombre de requêtes quotidiennes que les internautes effectuent dans ce dictionnaire informatisé, c'est-à-dire plus de 4 millions de recherches par mois. C'étaient 5 millions de recherches dans le Grand Dictionnaire terminologique en mars 2004, donc tout récemment.

Quand je vous parlais d'un succès phénoménal, c'est un succès phénoménal. La moitié des internautes proviennent du Québec, 38 % sont en provenance de l'Europe et donc 12 % proviennent des autres régions du globe. Selon un sondage effectué récemment, 42 % des utilisateurs sont des traducteurs, des réviseurs, des rédacteurs, des éditeurs. Les autres proviennent surtout des domaines de haute spécialité comme la médecine, l'informatique, l'enseignement, le soutien administratif et documentaire, la gestion des affaires, le droit, les sciences sociales, les arts, la communication. Quant à la fréquentation, donc je vous disais: 5 millions de recherches en mars 2004, et, pour mars 2004, ça veut dire 306 000 visiteurs pour mars 2004. On dit que ce site, Le Grand Dictionnaire terminologique, il est au premier rang des sites qui contribuent directement au rayonnement du français.

Et peut-être aussi terminer en vous disant que tout récemment nous avons eu l'initiative, lors de la récente visite de représentants de la Francophonie, de l'Association de la Francophonie... Nous avons pris le temps, et c'était nécessaire, de faire une démonstration, dans les bureaux de l'Office québécois de la langue française de ce Grand Dictionnaire terminologique pour bien montrer aux représentants de la Francophonie tout le potentiel de rayonnement de la langue française à travers ce Grand Dictionnaire terminologique qui pourrait être mis en interface avec, par exemple, certaines langues africaines. Vous savez comme moi donc que le français est une langue partagée, entre autres, par plusieurs pays africains puis qui possèdent également leur propre langue, mais ce Grand Dictionnaire terminologique permet une interface conviviale, efficace qui peut vraiment assurer la présence, une présence accrue du français dans les différents sites Internet à travers le monde.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe, en lui rappelant qu'il dispose de cinq minutes pour les questions et les réponses.

Continuité de l'accès aux services en anglais
dans les établissements de santé et
de services sociaux fusionnés

M. Dion: Pour la question et la réponse. Merci, M. le Président. Comme d'habitude, je vais être bref. Je voudrais poser une question très importante et très précise. On sait qu'avec la réforme dans le milieu hospitalier il y a des établissements qui ont un statut bilingue et d'autres qui ont un statut d'établissement francophone. Alors, à Montréal, il va y avoir des regroupements. Je prends un exemple pour illustrer ma question. Le secteur 7, Centre de santé et de services sociaux d'Ahuntsic et Montréal-Nord, va regrouper deux institutions, le CLSC d'Ahuntsic et le CLSC de Montréal-Nord, qui ont tous les deux un statut bilingue, et les autres organismes qui ont un statut francophone, c'est-à-dire Centre hospitalier Fleury, Résidence Laurendeau, CHSLD Gouin, CHSLD Marie-Claret, Hôpital Marie-Clarac, Résidence Angelica, Résidence Berthiaume-Dutremblay.

Qu'est-ce qui va se passer? Est-ce que tous ces organismes-là vont être bilingues? Est-ce qu'ils vont être tous francophones? Est-ce qu'ils vont devoir recommencer le processus? Qu'est-ce qui va se passer?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. J'essaierai d'être aussi précise dans ma réponse que la question était précise. Vous avez rappelé à juste titre que notre Charte de la langue française, par son article 29.1, reconnaît qu'il peut y avoir donc des établissements dans le domaine de la santé pouvant fonctionner sur une base bilingue, c'est-à-dire pouvant offrir leurs services en anglais. Maintenant, dans les cas de fusion d'établissements avec la récente loi déposée par mon collègue ministre de la Santé, ce qui est prévu est ceci: les établissements... Donc, il y a la notion de regroupement dans une unité locale de service. Mais l'établissement qui était reconnu auparavant, par l'article 29.1 de la charte, comme étant un établissement pouvant offrir des services en anglais va continuer à être désigné comme étant un établissement pouvant donc offrir les services en anglais, mais cette possibilité, c'est-à-dire cette désignation de l'établissement comme pouvant offrir des services en anglais ne s'étendra pas aux autres établissements constituant la nouvelle unité de service dans le domaine de la santé.

Le Président (M. Cusano): M. le député de Saint-Hyacinthe.

Critères d'embauche dans les établissements
de santé et de services sociaux fusionnés
donnant des services en anglais

M. Dion: Alors, deuxième question très rapide: Qu'est-ce qui va se passer avec le personnel qui, lui, pourra passer d'un établissement à l'autre? Est-ce qu'on mettra comme condition préalable à l'embauche, étant donné qu'ils devront aller parfois dans un établissement bilingue, qu'ils soient tous bilingues?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je réponds ceci: l'établissement, donc... En fait, ce que vous m'amenez est une problématique de gestion que les gestionnaires des établissements auront à assumer et à relever. Ici, l'optique est une optique de services, et toute la réforme de la santé et des services sociaux est faite dans une optique du service au citoyen. Nous sommes tout à fait convaincus que la réforme en cours fera en sorte que les services seront de meilleure qualité vers le citoyen.

n(11 h 30)n

Donc, ce que je réaffirme, c'est ceci: L'établissement qui avait la possibilité d'offrir des services en anglais parce qu'il était reconnu selon l'article 29.1 de la Charte de la langue française, l'établissement en tant que tel, le lieu physique, les gens qui iront à cet établissement pourront continuer à recevoir leurs services tels qu'ils étaient prévus dans la loi. Ici, la problématique que vous m'amenez est une problématique donc de gestion qui est tout à fait un enjeu bien sûr qui peut être tout à fait relevé par les gestionnaires du réseau de la santé.

En fait, vous m'amenez cet enjeu de gestion comme on peut aussi l'amener pour certaines entreprises privées. On vient de parler de tout le défi de l'usage d'un français de qualité dans les entreprises de 50 employés et plus. Ces entreprises privées également de 50 employés et plus font partie d'un grand groupe international qui utilise l'anglais. Par contre, l'établissement ici, au Québec, utilise le français, et la compagnie internationale trouve les façons de faire pour assurer cette prestation de services vers les citoyens francophones conformément à nos lois. Donc, la même chose, bien sûr nos gestionnaires du réseau de la santé pourront relever ces enjeux de gestion conformément à nos lois.

Le Président (M. Cusano): M. le député de Saint-Hyacinthe, vous disposez d'un autre 50 secondes pour poser votre question.

M. Dion: Pour moi, ça?

Le Président (M. Cusano): 50 secondes. 48.

M. Dion: Bien, la conséquence, Mme la ministre, c'est qu'en pratique les gens qui vont être bilingues, ils vont être privilégiés par rapport aux autres. Donc, de là à ce qu'on mette le bilinguisme comme condition d'embauche, il n'y a qu'un pas, et je crains qu'on ne le franchisse allégrement.

Mme Beauchamp: Pour répondre, on me met en lumière: l'article 36 de la Loi sur les agences de développement des réseaux locaux de services de santé et de services sociaux prévoit ceci: «Une personne qui exerce ses fonctions ou exécute...» C'est l'article 36. «Une personne qui exerce ses fonctions ou exécute sa prestation de travail dans une telle installation ? on parle des installations réputées en vertu de l'article 29.1 de la charte; donc qui exerce sa prestation de travail dans une telle installation ? est [...] réputée être un employé de cette installation.» Donc, vous voyez que même la Loi sur la santé et les services sociaux, par l'article 36, prévoit des dispositions qui donnent déjà des indications aux gestionnaires du réseau de la santé pour prévoir donc les cas que vous nous soumettez aujourd'hui.

Adoption des crédits

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Le temps imparti pour l'étude des crédits du programme 3 étant terminé, je mets le programme aux voix.

Le programme 3, Charte de la langue française, des crédits budgétaires de la ministre de la Culture et des Communications pour l'année financière 2004-2005 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Dion: Sur division.

Le Président (M. Cusano): Adopté sur division. Alors, je suspends les travaux de la commission à cet après-midi, après la période des affaires courantes, à la salle du Conseil législatif.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

 

(Reprise à 15 h 9)

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la culture reprend ses travaux. À ce moment-ci, j'aimerais demander aux personnes qui sont dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, prendre deux minutes pour le faire, s'il vous plaît.

n(15 h 10)n

J'aimerais rappeler aux membres de la commission le mandat: la commission est réunie, cet après-midi, pour étudier les crédits budgétaires qui relèvent de la ministre de la Culture et des Communications, programmes 1 et 2, pour l'année financière 2004-2005. Nous disposons à cet égard d'une enveloppe de temps de cinq heures, soit trois heures cet après-midi et deux heures demain après-midi.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Lucie Papineau, députée de Prévost, est remplacée par M. André Boisclair, député de Gouin.

Culture et communications

Organisation des travaux

Le Président (M. Cusano): Merci. Il a été convenu, ce matin, d'étudier les crédits en procédant par discussion générale et en partageant le temps de parole en blocs de 20 minutes. Est-ce que le même consentement est accordé cet après-midi?

M. Boisclair: Est-ce que quoi?

Le Président (M. Cusano): ...que je le répète? Ce matin, on a décidé de procéder à l'étude des crédits par discussion générale, n'est-ce pas, et que le temps de parole serait distribué en blocs de 20 minutes.

M. Boisclair: Pardon? Par enveloppes de 20 minutes au global? Est-ce que c'est par blocs de 20 minutes? Donc, si j'ai la parole, je la prends pour 20 minutes, ou si on aura une discussion plus...

Le Président (M. Cusano): Vous avez le droit de parler pour un maximum de 20 minutes.

M. Boisclair: Oui. Et si je ne pose qu'une question 30 secondes?

Le Président (M. Cusano): Ça penche de l'autre côté et ça revient par après.

M. Boisclair: Parfait.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Cusano): Alors, puisqu'il y a changement de porte-parole, on est prêts à passer à des remarques préliminaires. Mme la ministre.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Bonjour à vous tous. D'entrée de jeu, je veux vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui: premièrement, vous présenter M. Harold Mailhot, qui est le sous-ministre du ministère de la Culture et des Communications; je suis également accompagnée de Mme Élisabeth Verge, qui est la directrice générale de l'administration; m'accompagnent également M. François Crête, mon directeur de cabinet, et M. Pierre Milette, mon directeur de cabinet adjoint. Peut-être également souligner la présence dans la salle, au moins, de Mme Paule Beaugrand-Champagne, qui est la présidente-directrice générale de Télé-Québec, ainsi que M. Nicolas Desjardins, qui est le directeur général des conservatoires, qui est donc une des directions du ministère de la Culture et des Communications, et ? est-ce que Mme Lemieux est là? ? Mme Lemieux, Sylvie Lemieux, des Archives nationales du Québec, de l'autre côté. Bonjour, Mme Lemieux. Je n'avais pas eu l'occasion de vous saluer d'entrée de jeu. Et je vais vous demander un service, s'il y a des gens qui s'ajoutent et qui sont sous la responsabilité du ministère de la Culture et des Communications, dites-le-moi, ça me fera plaisir de souligner la contribution de ces personnes à nos travaux et surtout à l'avenir et au développement de la culture au Québec.

M. le Président, j'ai le plaisir de soumettre à l'attention donc des membres de cette commission les crédits budgétaires accordés par le gouvernement du Québec au ministère de la Culture et des Communications pour l'année 2004-2005. La défense des crédits ? c'est ainsi qu'on l'appelle dans notre jargon ? marque un temps d'arrêt pour tirer les enseignements des derniers mois et nous projeter dans l'avenir. Il s'agit d'une démarche qui exige de nous intégrité, sincérité, lucidité, et ce sera au rendez-vous.

J'aimerais amorcer mon propos en vous confiant, M. le Président, les réflexions que m'ont inspirées un ouvrage des plus intéressants. Le 29 avril dernier, je trouvais sur mon bureau ? c'était une attention d'un de nos sous-ministres adjoints qui revenait de Paris ? donc je recevais un volume rappelant la brillante destinée d'André Malraux, écrivain, résistant, intellectuel, philosophe et politicien ? il ne s'en fait plus beaucoup, des gens comme ça ? qui fut donc un personnage marquant de l'histoire de la France du XXe siècle. La biographie dont je vous fais mention s'attardait en particulier sur le rôle qu'il a joué en tant que tout premier ministre français de la Culture.

Dans la préface du livre, on peut lire ceci ? je cite: «Ce qui ressort de ces pages est un grand dessein: non seulement construire un ministère à partir de presque rien et contre presque tous, mais lui donner une âme, une ambition majeure, un destin capable de transformer une société.» Cette citation à propos de l'auteur de La condition humaine pourrait aussi bien s'appliquer au Québec, M. le Président, et surtout à Georges-Émile Lapalme qui, inspiré par le pari de Malraux, a donné naissance au ministère québécois des Affaires culturelles en 1961, quelques mois après la France. M. Lapalme partageait avec André Malraux une même largeur de vue et une même conscience de la contribution de la culture à la société, dont elle incarne les idéaux, l'identité, la spécificité.

En introduisant les travaux de la commission de cette manière, mon but n'est pas de vous plonger dans une certaine nostalgie mais simplement de vous convier, vous, mes confrères, consoeurs de l'Assemblée nationale, à mesurer le chemin parcouru en quelque quatre décennies de vie politique au Québec. En moins de 43 ans, nous avons mis en place un encadrement législatif cohérent en matière de culture, nous avons fondé de grandes institutions nationales, nous avons permis que se développe chez nous un vigoureux secteur de l'édition et donné au Québec un cinéma qui nous ressemble et nous rassemble. Vous noterez, M. le Président, que, lorsque je dis «nous», je signifie par là la société québécoise dans son entier, telle qu'elle fut et telle qu'elle est aujourd'hui, sans distinction d'origine, de langue ou de disparité culturelle.

Nous avons favorisé l'émergence d'institutions muséales reconnues hors nos frontières pour leur expertise, mis en ondes une télévision publique, exercé la délicate responsabilité de maintenir notre conservatoire et son réseau de prestigieuses écoles de musique et de théâtre. Nous avons reconnu la contribution et le statut professionnel des artistes, établi les conditions propices à la formation de la relève dans nos arts et nos lettres et encouragé l'appropriation par nos concitoyennes et nos concitoyens de tous les aspects de nos expressions culturelles. Nous avons lancé, à la façon des grandes corvées de jadis, d'imposants chantiers de construction, de rénovation d'équipements culturels de diffusion, de création, de production. Nous nous sommes donné de solides outils de soutien et de développement pour nos artistes et nos industries culturelles, des outils tels le Conseil des arts et des lettres du Québec ou la Société de développement des entreprises culturelles, auxquels s'intéressent de près d'ailleurs d'autres nations. Nous avons dû relever des défis considérables liés à la place de la culture face aux modes de production industriels, à la croissance rapide des emplois culturels et à l'évolution des demandes et des aspirations de nos populations.

Au rappel de ces réalisations, M. le Président, nous pouvons constater que les titulaires du ministère de la Culture et des Communications ont eu du pain sur la planche. Aussi je veux prendre un bref instant pour rendre hommage, toutes couleurs politiques confondues, à ces hommes et à ces femmes qui ont exercé la fonction que j'ai le privilège d'occuper et fait du Québec une société comptant sur des acquis majeurs en culture, une société qui fait sans cesse preuve de créativité. C'est devenu une carte de visite pour les Québécois et les Québécoises. C'est donc en nous inspirant de la vision et des acquis que nous ont légués mes prédécesseurs que nous, du ministère de la Culture et des Communications, orientons aujourd'hui nos actions, et nous le faisons en prenant solidement assise dans la réalité. C'est d'ailleurs ce que mon gouvernement s'est employé à faire au cours de la dernière année et c'est ce vers quoi il maintiendra le cap au cours des prochaines années.

Nous avons pris acte que la culture avait d'ores et déjà une portée sociale aussi bien dans ses composantes que dans ses finalités. C'est pourquoi nous nous sommes attaqués en priorité à la question du filet de sécurité sociale des artistes et des créateurs. À cet égard, je suis très fière du progrès considérable que nous avons accompli dans nos efforts pour donner aux créateurs un filet de sécurité sociale qui tient compte de leur réalité quant à l'emploi, à la gestion des entreprises culturelles et à la vie associative des artistes. J'y reviendrai dans un moment.

Par-delà cette dimension sociale, nous n'oublions pas la portée internationale de la culture. Il est question, ici, du rayonnement de la société québécoise et de ses artistes, mais également du dialogue des cultures par l'échange de ce quelles ont de plus fondamental et de plus authentique, leur façon unique de s'exprimer, de vivre, de chanter, d'écrire, de créer.

Comme vous le savez, M. le Président, je me trouvais, la semaine dernière, à Paris, en compagnie du premier ministre. Nous avons eu un entretien très fructueux et fort positif avec le directeur général de l'UNESCO, M. Matsuura. Cette rencontre a renforcé notre conviction que la culture est devenue un des grands enjeux économiques et politiques auxquels est confrontée l'humanité tout entière, et nous pourrons, j'en suis certaine, revenir sur cet important dossier de la diversité culturelle au cours de nos travaux.

Enfin, M. le Président, nous sommes à pied d'oeuvre pour améliorer des aspects financiers liés à la culture qui prennent parfois des allures de casse-tête lorsqu'on considère la capacité de payer des gouvernements et des contribuables. Nous voulons et nous devons réussir à hausser les sommes globales consacrées à la culture en générant un effort financier collectif dans les secteurs donc de la culture et des communications. Le mot «collectif» doit-il être obligatoirement synonyme de «public»? Je ne crois pas. Nous sommes favorables à une hausse du niveau d'investissement en culture par les autorités gouvernementales. C'est une responsabilité incontournable du gouvernement du Québec que d'appuyer notre culture, et nous sommes au rendez-vous, mais dans le cadre d'une participation équitable également de tous les paliers de gouvernement et d'une nécessaire diversification des sources de financement. Nous en sommes donc à explorer de nouvelles avenues, comme les contributions privées, que l'État peut s'employer à stimuler, à l'exemple du gouvernement français, ou encore bien sûr par un accroissement de la consommation des produits et services culturels de qualité dans les familles québécoises.

Ce sont là, M. le Président, les pistes de réflexion et d'action que nous a inspirées la longue lignée d'excellence en culture incarnée par les ministres qui ont assumé les responsabilités de la culture et des communications en 40 ans. En conséquence, nous prenons soin d'orchestrer nos interventions en prenant en compte les trois dimensions structurantes inséparables de la notion même de la culture nationale: la dimension sociale de la culture, sa portée internationale et le niveau des investissements que nous devons y consacrer.

n(15 h 20)n

J'en arrive maintenant au bilan de notre première année d'exercice, après quoi je livrerai à la commission un énoncé de nos priorités pour les mois à venir. Je considère que la dernière année est une année charnière pour le ministère de la Culture et des Communications. C'est avec beaucoup d'enthousiasme que je me suis mise à l'oeuvre, il y a 12 mois, afin d'apporter ma contribution bien sûr modeste mais réelle, je l'espère, à la recherche de nouvelles manières de défendre cette façon unique et néanmoins multiple que nous avons de célébrer notre langue commune, notre identité, notre culture. Je l'ai fait avec ardeur, humilité, conviction.

Dès l'entrée en fonction du nouveau gouvernement du Parti libéral en 2003, le premier ministre du Québec affirmait avec fermeté que, et je cite, «notre culture est notre manière d'être et qu'elle imprègne notre façon de grandir et de prospérer», indiquant ainsi l'importance primordiale que nous accordons à cet aspect de notre vie québécoise. Le premier ministre a en outre réaffirmé notre intention de recentrer l'État québécois autour de cinq missions essentielles. Je vous les rappelle: santé, savoir, prospérité, sécurité et identité. Le premier ministre confirmait que nous accordons à notre identité la valeur de priorité nationale, un engagement qui a également été maintes fois réaffirmé par mes collègues ministre des Finances ou présidente du Conseil du trésor. Ce faisant, ils incarnent la foi du gouvernement du Québec dans la nécessité de soutenir cette identité telle qu'elle s'exprime dans nos arts visuels, nos lettres, notre théâtre, notre musique, nos arts de la scène, notre patrimoine. C'est là notre responsabilité incontournable comme gouvernement québécois.

J'ajoute que selon cette vision l'identité du Québec repose sur ceux et celles qui, pour ainsi dire, la défendent au quotidien: les créateurs, les artisans, les professionnels qui font de notre culture un héritage vivant. M. le Président, nous nous sommes employés, au cours des 12 derniers mois, à remplir avec diligence les engagements que nous avons pris envers notre population, nos créateurs, notre culture. Dans le court bilan que je dresse aujourd'hui, j'insisterai sur les réalisations structurantes que nous avons accomplies. J'entends par là les gestes et les interventions qui se distancient résolument des mesures temporaires, qui ont une autre portée que celle de mesures temporaires. Je me distancie des mesures temporaires. Voilà, ça résume l'idée. Il s'agit d'assurer l'avenir de notre culture en lui procurant des fondements solides ou, si vous préférez, des fondations solides, comme on le fait pour la construction d'une maison que l'on veut bâtie pour traverser le temps et les intempéries. C'est à cela que se résume notre contribution, travailler comme des bâtisseurs honnêtes et responsables qui ajoutent soigneusement les pierres à l'édifice en mesurant bien leurs décisions et leurs gestes.

Puisque nous abordons la question en termes de construction, j'en profite pour faire un court survol de nos investissements dans le domaine des équipements culturels, ainsi vous rappeler les investissements importants, par exemple, pour le Palais Montcalm ici, à Québec, également d'autres projets dans le domaine du patrimoine religieux, les salles de spectacle de Val-d'Or, de Ville-Marie, à Rimouski, à Sainte-Marie, le Musée ferroviaire de Saint-Constant, la bibliothèque de Sillery, le TNM, l'École de l'humour.

Parmi les gestes structurants que je suis très fière d'avoir posés au cours de cette année figurent les efforts considérables que nous avons consentis à l'amélioration des conditions de vie des artistes du Québec. Vous vous rappellerez, M. le Président, que, lorsque j'occupais le poste de critique de l'opposition en matière de culture et de communications, j'avais fréquemment évoqué la situation précaire de très nombreuses personnes oeuvrant en culture. Je me permets d'interpeller notre président, puisque nous avons travaillé ensemble pendant quatre ans dans cette Commission de la culture. Dès mon entrée en fonction donc comme ministre de la Culture et des Communications, je me suis attaquée à ce problème. Il m'est apparu que, pour venir en aide aux créateurs du Québec, nous devions trouver des solutions viables et durables pour qu'ils puissent vivre de leur art.

Au moment du budget présenté le 30 mars dernier par le ministre des Finances, nous leur apportions la preuve que nous tenons parole. Ainsi, le ministre des Finances a fait le choix d'inclure dans son budget une mesure d'étalement du revenu à l'intention des artistes et des professionnels de la culture. Comme vous le savez sans doute, la rémunération annuelle des artistes peut varier considérablement d'une année à l'autre en raison principalement de leur statut de travailleur autonome ainsi que des variations dans les engagements et les commandes. Entre les années 2000 et 2001, 29 % des artistes ont vu leurs revenus fluctuer de plus de 50 %. Afin de contrer ce phénomène de gains fluctuants, le ministre des Finances a, à ma demande, mis de l'avant une mesure permettant aux artistes reconnus d'étaler, sur une période maximale de sept ans, l'impôt applicable à la partie de leurs revenus d'artiste qui excède 50 000 $. Cette mesure, qui permettra de pallier aux aléas de la vie d'artiste, comme on l'appelle, semble déjà très appréciée dans les milieux culturels. Elle représente une économie globale de l'ordre de 4 millions pour les créateurs. Mais il faut surtout retenir le fait que nous leur donnons un outil pour éviter de subir, d'une année à l'autre, le sort de la cigale de la fable de La Fontaine. Quant aux créateurs dont les gains demeurent modestes, ils pourront se prévaloir de la Prime au travail, à laquelle sont admissibles les citoyens dont le revenu annuel n'excède pas 25 000 $, et ils sont nombreux en culture.

En outre, le ministre des Finances a choisi de venir en aide aux artistes interprètes en leur donnant accès au régime de déduction pour droits d'auteur. Désormais, ces personnes auront droit à une déduction annuelle à l'égard de leurs revenus de droits liés à une prestation ou à une rémunération pour copie à usage privé. Cette exemption liée à ce que d'aucuns nomment les droits voisins donnera, à raison d'un montant global de 3 millions de dollars annuellement, un coup de pouce à ces artistes interprètes qui occupent une place grandissante dans nos arts d'interprétation tout en corrigeant une situation inéquitable envers ces personnes.

Enfin, j'ai, en l'espace de quelques mois, convoqué deux fois les représentants des associations professionnelles d'artistes, de producteurs et de diffuseurs, la première fois pour leur présenter un portrait précis de la situation socioéconomique des artistes et la seconde pour leur soumettre des pistes d'action concrètes concernant la santé et la sécurité au travail, les régimes de retraite et l'amélioration du revenu par la fiscalité. Pour mieux vivre de l'art ? c'est le titre de notre cahier de propositions ? comprend également des données et des hypothèses sur la sécurité du revenu, la transition de carrière et la gestion des bourses et des subventions. Nos propositions ont été reçues très favorablement par les représentants d'associations d'artistes. Ces derniers savent désormais que, lorsque nous affirmons que nous travaillons pour eux, nous pensons et faisons ce que nous disions que nous allions faire.

Je prends ici un moment pour remercier mon adjointe parlementaire, Mme Dominique Vien, pour son grand travail, son précieux travail, son soutien dans une démarche exigeant la concertation et la collaboration soutenue de nombreux ministères et organismes gouvernementaux: je pense à Emploi, Solidarité sociale et Famille, Finances, Revenu, Travail, Commission de la santé et de la sécurité du travail, Régie des rentes. La députée de Bellechasse, par son grand travail, a su coordonner les actions gouvernementales, illustrant, je crois, de très belle façon la portée de la politique culturelle du Québec adoptée en 1992 qui disait que la culture devait être l'affaire de tous, pas seulement du ministère de la Culture et des Communications. Par ces travaux, nous en avons donné, je crois, un très bon exemple.

Depuis mon entrée en fonction, M. le Président, j'ai effectué plusieurs tournées. Peut-être juste avant, vous dire bien sûr que ces travaux sur le filet de sécurité sociale des artistes comprennent également des changements aux deux lois sur le statut professionnel des artistes de façon à donner aux créateurs un cadre juridique de relations de travail et de conditions de diffusion plus équitable, il me semble, mieux adapté surtout aux réalités du XXIe siècle, par exemple en reconnaissant le secteur du multimédia comme un domaine de création artistique.

Depuis mon entrée en fonction, j'ai effectué plusieurs tournées dans les régions du Québec. Lors de ces tournées, de ces visites, j'ai procédé au lancement de projets divers élaborés en partenariat avec les milieux culturels, municipaux, socioéconomiques, comme la signature d'ententes de développement culturel ou encore d'ententes de partenariat avec les instances régionales. Ces visites ont également été l'occasion d'annoncer le financement d'équipements culturels, la mise en route de projets liés au volet initiatives locales du Plan de soutien au cinéma, ou encore de souligner l'adhésion de villes au programme Villes et villages d'art et de patrimoine.

J'ai également pris le temps de rencontrer des artistes et des artisans, des créateurs, bien sûr également ? et je prends ici le temps de les remercier ? des membres du personnel du ministère de la Culture et des Communications dans chacun des bureaux régionaux du ministère, les représentants des conservatoires, des stations régionales de Télé-Québec ou encore des Archives nationales du Québec. Ces gens sont dévoués, ils sont nos yeux, nos oreilles et surtout notre expertise, et je crois, M. le Président, qu'il faut prendre le temps de les remercier très sincèrement pour cette culture québécoise qu'ils bâtissent au jour le jour.

Et bien sûr j'ai profité de mes périples en région pour conclure des ententes de développement culturel. Elles sont importantes à mes yeux. Elles ont pris naissance dans le cadre justement de cette politique culturelle québécoise, elles ont pris forme, en 1994, sous le leadership de Mme Liza Frulla, où donc ça nous permet de signer avec des collectivités, municipalités, MRC, CRD, qui sont maintenant devenus les CRE, des ententes de partenariat permettant de cibler de façon très précise les priorités d'une région.

n(15 h 30)n

M. le Président, je veux également prendre quelques instants pour parler du Plan pour un cinéma québécois vigoureux. L'année 2003 a été exceptionnelle à tous égards pour le cinéma québécois. Je vous ferai grâce de la nomenclature de tous ces titres ayant remporté un succès à l'international, mais les artisans du cinéma québécois méritent nos hommages. Mais le gouvernement du Québec a soumis, le 5 septembre dernier, un plan d'action pour les cinéastes, producteurs, artisans et pour les publics aussi en région grâce à un plan de soutien au cinéma et à la production audiovisuelle du Québec. Donc, c'est plus de 15 millions de dollars... en fait c'est 15 millions de dollars qui ont été accordés au Plan de soutien au cinéma sur une base ponctuelle, somme qui a été reconduite et intégrée, cette année, au budget courant du ministère de la Culture et des Communications. C'est là une excellente nouvelle pour nos arts de l'écran.

En plus, dans le dernier budget de mon collègue ministre des Finances, nous avons apporté des améliorations aux crédits d'impôt, redonnant l'admissibilité à certaines catégories de productions, un investissement public additionnel de 10 millions de dollars pour l'année en cours. En somme, les incitatifs fiscaux pour l'année 2004-2005 sont estimés à 105 millions de dollars, de véritables leviers qui nous ont permis d'offrir aux cinéphiles une production nationale de qualité et, ce qui ne gâte rien, de plus en plus populaire et rentable.

Quelques mots, M. le Président... Juste une minute, M. le Président? J'ai tellement à dire! Quelques mots pour vous dire également que nous avons assuré le rayonnement du Québec à l'étranger bien sûr en déployant beaucoup d'efforts dans le dossier de la diversité culturelle, mais également en appuyant les actions du milieu de la culture lors de la Feria del libro, ce deuxième plus grand salon du livre qui s'est tenu à Guadalajara, au Mexique. Nous avons été également présents à Pittsburgh, le ministère de la Culture et des Communications a accompagné les efforts déployés par le MRI dans ce dossier.

Et je tenais également à mettre en lumière les efforts déployés par le Conseil des arts et des lettres du Québec et la SODEC concernant le rayonnement de nos artistes, de nos entreprises culturelles, de nos organismes culturels, mais je pourrai y revenir, j'en suis certaine, dans le cadre des six heures qui nous sont allouées pour l'étude des crédits.

Je termine, M. le Président, en vous indiquant, sur le dossier de la diversité culturelle... Je me dois de prendre, dans ces remarques préliminaires, un instant pour remercier les intervenants de la société civile réunis au sein de la Coalition pour la diversité culturelle. Je pense nommément au coprésident de la coalition pancanadienne, M. Pierre Curzi, mais également au directeur général de la coalition, M. Pierre Pilon. Ce dossier de la diversité culturelle, c'est l'avenir du Québec. C'est l'avenir d'un Québec culturel. Nous déployons des efforts, mais ils seraient peut-être vains s'ils n'étaient pas accompagnés par cette société civile qui demeure très précieuse. Ce sont là les vrais artisans d'une culture québécoise de qualité.

M. le Président, le temps me manque, je le regrette, mais c'est avec plaisir que je pourrai échanger avec les membres de la Commission de la culture, entre autres, sur les divers volets de la modernisation de l'État qui sera entreprise au cours des prochaines semaines, au niveau du ministère de la Culture et des Communications. Mes derniers mots pour dire vraiment un merci tout particulier aux gens qui, à travers les différents titulaires du ministère de la Culture et des Communications... Et humblement, il faut bien que je le dise, ils ont été nombreux au cours des dernières années. J'ai dit à maintes reprises au personnel du ministère de la Culture et des Communications que, s'il y avait une culture québécoise vivante et prolifique au Québec, on la leur devait. En votre nom, je leur dis merci.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au leader de l'opposition officielle et porte-parole en matière de culture, le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Bonjour. Bonjour aussi aux membres de la commission. Je veux saluer la ministre, les gens de son cabinet qui l'accompagnent. Je veux adresser aussi des salutations particulières à tous les employés du ministère de la Culture, aux représentants de sociétés d'État et de différentes organisations qui accompagnent la ministre. Je veux à mon tour leur dire, en particulier aux fonctionnaires du ministère de la Culture, mon appréciation pour la qualité de leur travail. M. le Président, j'ai entendu la ministre, dans ses remarques préliminaires, d'abord faire un rappel historique, et je l'ai entendue nous parler des efforts de M. Lapalme, premier titulaire du ministère de la Culture. Je l'ai entendue aussi citer Malraux. Il y a quelque chose d'un peu cynique d'entendre l'actuelle ministre de la Culture citer Malraux. S'il y a bien un homme qui représente le volontarisme d'État, s'il y a bien un homme qui a réussi à donner de l'envergure et à plaider une mission de développement en s'inspirant sur ce que pouvaient signifier l'action collective et l'action solidaire, c'est bien Malraux. De voir la ministre aujourd'hui se draper dans les paroles de Malraux et se draper dans l'inspiration de l'époque, dans l'inspiration de De Gaulle, dans l'inspiration de Malraux qui avait cette idée de la France, cette idée de la France qui avait d'ailleurs amené les Québécois à se développer et à bâtir un modèle québécois... S'il y a ces gens qui, aujourd'hui, ont parlé et qui se sont exprimés, la ministre devrait davantage les citer pour s'en inspirer et rejeter tout propos démagogue sur la taille de l'État, propos démagogue comme ceux que cultivent bien des gens de son gouvernement. Je ne sache pas ou je ne pense pas que ni Malraux ni Lapalme auraient accepté le diktat du Conseil du trésor que subit le ministère de la Culture. Je ne pense pas non plus que ni Malraux ni Lapalme n'auraient accepté d'embarquer dans une dynamique politique simple sur le rôle de l'État comme celui que nous propose le gouvernement libéral.

La ministre a beau, dans ses discours et dans les paroles qu'elle vient de prononcer, trouver le bon ton et trouver les beaux accents, il n'en demeure pas moins qu'elle participe à un gouvernement d'inspiration conservatrice qui estime que le succès du Québec ? et je cite, là, le premier ministre du Québec ? que le succès du Québec est d'abord et avant tout le reflet du succès des individus, opposant en cela les individus et la capacité que la société québécoise a de faire des choses ensemble. Ce gouvernement est essentiellement d'inspiration conservatrice, et la ministre devrait marquer sa différence, devrait marquer son originalité et son attachement à la culture en rejetant les propos démagogues que cultivent bien des gens de son cabinet.

C'est cette ministre qui s'est fait élire en disant aux Québécois et aux Québécoises que nous étions, sur ce coin d'Amérique du Nord, les plus taxés en Amérique du Nord en oubliant du même souffle que nous nous étions donné, chez nous, un panier de services dont nous sommes fiers et que ce panier de services est, dans bien des cas, accessible bien plus qu'il ne peut l'être ailleurs dans le monde. Et, quand ce gouvernement utilise ces images simples qui font impact dans la population, elle s'écarte de son premier devoir, sa première responsabilité qui est de plaider, elle, comme ministre de la Culture, le sens que signifie l'action collective, encore en ce début de siècle.

La ministre pourra bien nous parler des volontés de concerter les nations pour plaider la diversité culturelle, elle pourrait aussi plaider pour concerter les forces progressistes pour que son ministère ne soit pas un ministère de résistance, comme il semble en être devenu un, mais plutôt que ce ministère soit véritablement un ministère de développement. Il s'agit de voir et d'entendre le bilan que la ministre vient de nous présenter pour comprendre les conséquences de ses choix et de ses discours. Jamais n'ai-je vu, n'ai-je entendu un ministre de la Culture se présenter devant les membres de la commission avec si peu de bilan à son actif.

C'est assez simple, M. le Président, ce ministère est maintenant dans une dynamique de résistance. Il gère les compressions et est incapable de nous proposer cette idée du Québec et de nous mobiliser dans quelque chose qui serait plus créateur et plus inspiré. Je le dis, M. le Président, et c'est assez simple de voir comment tout cela se traduit, d'abord par un transfert de responsabilités du ministère de la Culture vers d'autres ministères: l'autoroute de l'information au ministère de l'Industrie et du Commerce. Plusieurs programmes à l'époque administrés par le ministère de la Culture le sont dorénavant par l'Industrie et Commerce ou même par le ministère de l'Éducation. Cela se traduit aussi par l'exclusion des gens des conseils de la culture des lieux de concertation régionale, alors que cet acquis, reflet de batailles de développement régional fortes... Cet acquis menacé, les gens du secteur de la culture sont tassés des instances de développement régional. Ils n'ont plus la voix qu'ils avaient.

Cette ministre d'ailleurs cultive une espèce de logique manichéenne binaire où elle oppose le financement des institutions nationales à celui des artistes, comme si la diffusion ne participait pas de la création. Il y a là donc, dans ce propos, un aveu de capitulation qui me semble déplorable, venant de la bouche d'une ministre de la Culture.

Et ce qui est surtout frappant, M. le Président, c'est que la ministre ait fait le choix très conscient de ne pas dire un mot, pendant ses remarques d'ouverture, sur cette grande société d'État, Télé-Québec, que la ministre ait fait le choix de nier le problème, les difficultés auxquelles elle-même confronte Télé-Québec en imposant des compressions, dans le cahier de crédits, de 5 millions, auxquelles viennent s'ajouter des efforts non récurrents, financés par le ministère des Finances, qui n'ont pas encore vu le jour.

n(15 h 40)n

M. le Président, cette période d'échange que nous avons avec la ministre nous permettra de faire le point sur ces questions, mais je me permets à nouveau en conclusion, pour consacrer l'essentiel de mon temps à un échange avec les membres de la commission et avec la ministre à poser des questions et espérer avoir des réponses, je conclus en invitant la ministre à un devoir de transparence. Je ne doute d'aucune façon de l'intégrité de la ministre. Je salue son engagement. J'ai du respect pour sa personne et ce qu'elle fait. Sauf que je ne pourrai pas avoir la même idée de la personne politique qu'elle est si, à la fin de cette commission, elle ne nous a pas clairement dit sur quelles bases elle voulait établir des partenariats public-privé, que ce soit pour le financement d'institutions ou que ce soit pour le financement d'institutions nationales comme Télé-Québec.

La ministre ne pourra pas non plus quitter cette commission sans nous dire sur quelles bases, avec la Société immobilière du Québec, elle travaille pour développer ces partenariats public-privé et quels sont les repères qu'elle fixe à la fois sur ce que signifient sa propre responsabilité et la responsabilité nationale d'État, ce que signifie aussi sa responsabilité quant à la transparence de la gestion de sommes publiques. La ministre devra nous dire de façon concrète sur quelle grille d'analyse elle s'appuiera pour prendre une décision plutôt qu'une autre. Parce que c'est une chose d'évoquer des partenariats public-privé, mais vous aurez constaté, M. le Président, que sur cette question la ministre reprend pratiquement en copier-coller ce qu'elle nous a dit l'année dernière, sans d'aucune façon ajouter à notre réflexion à nous, les membres de la commission, sans présenter de livre vert ou de livre blanc, sans présenter de politique, sans présenter d'énoncé qui nous permettrait de porter un jugement sur la qualité de ces partenariats public-privé. Je suis d'autant plus inquiet, M. le Président, que, si la ministre voulait faire le choix de persister dans cette voie, comme elle semble le faire au sujet des partenariats public-privé, elle pourrait peut-être commencer par vanter ceux qui fonctionnent bien dans son ministère. Et, s'il y en a un qu'on peut tous saluer comme étant efficace, c'est bien celui de Télé-Québec. Je le rappelle, 80 % de la production est faite dorénavant dans le secteur privé. Donc, ce devoir de transparence, M. le Président, j'espère que ce sera celui sur lequel nous nous appuierons pour juger du travail de la ministre et pour procéder à l'adoption de ces crédits.

Discussion générale

Demande de moratoire sur
les compressions budgétaires à Télé-Québec

Et je demande, pour débuter... Sans doute d'autres collègues feront le souhait de s'exprimer en remarques d'ouverture, mais je demande d'entrée de jeu à la ministre de nous dire si, oui ou non, elle accepte d'imposer un moratoire sur les compressions à Télé-Québec tant et aussi longtemps que les consultations qu'elle a annoncées ne seront pas terminées. Je demande, M. le Président, avec insistance à la ministre de la Culture de lever toute compression à Télé-Québec tant et aussi longtemps que les consultations qu'elle nous a annoncées ne seront pas terminées et que les membres de cette commission n'auront pas eu le privilège de s'exprimer sur les recommandations qui lui seront faites.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Gouin, pour vos remarques préliminaires. Je suis prêt maintenant à débuter l'étude des crédits et je vous cède à nouveau la parole.

M. Boisclair: Ma question est posée, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Ah bon! O.K. Alors, c'est la question.

Mme Beauchamp: O.K. Excusez-moi, c'est parce que je croyais que... Le député de l'autre formation politique ne fait pas de remarques préliminaires?

Le Président (M. Cusano): Au niveau de la Commission de la culture et compte tenu du nombre d'heures que nous avons pour différents sujets que nous avons eus à traiter, on a établi une tradition où, au niveau des remarques préliminaires, c'est la ministre ainsi que le porte-parole de l'opposition. Vous avez le droit de parole, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, lorsqu'on arrive au niveau des crédits, mais, moi, je suis une personne extrêmement souple. On pourrait peut-être demander s'il y a consentement pour accorder la parole au député des Chutes-de-la-Chaudière pour des remarques préliminaires. Il y a consentement?

Une voix: ...

Le Président (M. Cusano): Il n'y a pas de consentement. Alors, la question du député de Gouin est posée. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Peut-être vous indiquer, lorsque j'écoute mon vis-à-vis, le député de Gouin, que je trouve qu'il a un discours assez incroyable, parce qu'on l'entend et on a l'impression qu'on est en train d'assister à un derby de démolition au ministère de la Culture et des Communications, alors qu'il faut quand même remettre les choses dans leur bon contexte. La question de l'identité étant une des cinq priorités sur lesquelles nous devons recentrer la mission de l'État du Québec, eh bien, le gouvernement a pris ses responsabilités. Une responsabilité que je qualifie d'incontournable lorsqu'on forme le gouvernement québécois, c'est d'être en appui à la culture québécoise, entre autres ? pas uniquement mais entre autres ? par une augmentation des crédits au ministère de la Culture et des Communications.

Je fais, ici, un aparté tout de suite pour vous indiquer dans quel état ils ont laissé les finances publiques et, entre autres, quel est l'impact de cela sur le ministère de la Culture et des Communications. Lorsque je suis arrivée au ministère, j'ai demandé d'avoir un état de situation au niveau du poids du service de la dette, donc le paiement des intérêts sur ce service de la dette au ministère de la Culture et des Communications. Parfois, les gens ne réalisent pas que nous sommes un ministère où on construit. Nous sommes des partenaires pour la construction d'équipements culturels. Or, la dernière année, le poids du service de la dette était environ à 18 %, 19 % du budget du ministère de la Culture et des Communications, et, même si mon gouvernement ? je suis très maternelle aujourd'hui ? même si le gouvernement dont je fais partie n'avait aucune initiative en termes d'équipements culturels ? et Dieu sait que ce n'est pas notre intention ? mais même si nous n'avions aucune initiative en termes d'équipements culturels, pour assumer le coût, le poids du service de la dette des initiatives du gouvernement précédent en termes d'équipements culturels, eh bien, nous devons trouver des dizaines de millions de dollars. Cette année, le poids du service de la dette au ministère de la Culture et des Communications aura grimpé à tout près de 22 %. Et encore, si cette année nous ne faisons rien, l'année prochaine il faut encore trouver quelques dizaines de millions de dollars, puisque les projections montrent que le service de la dette aura grimpé à plus de 25 % du budget du ministère de la Culture et des Communications.

Voici les choix qu'ils ont faits et cette pression extrêmement forte sur les crédits du ministère de la Culture et des Communications que prend le paiement des intérêts. Et ça, je vous mets dans le grand contexte, là, le service de la dette a augmenté depuis 1997 de 16 milliards de dollars. C'est un poids important qu'on a à assumer, puis bien sûr un jour ça se répercute dans le paiement du service de la dette et des intérêts dans chacun des ministères concernés.

Dans ce contexte, le gouvernement du Québec, cette année, a choisi d'augmenter les crédits du ministère de la Culture et des Communications, je le répète, a choisi d'augmenter les crédits du budget du ministère de la Culture et des Communications de belle façon. C'est un des ministères avec le plus fort pourcentage d'augmentation de ses crédits, à 3,9 % d'augmentation des crédits, alors que le niveau moyen d'augmentation des crédits du gouvernement est de 2,9 %, donc totalisant des crédits de 535 millions de dollars. On est loin d'une abdication, on est loin d'un derby de démolition, on est loin de l'expression employée, qui était «de la capitulation». Les crédits du ministère de la Culture et des Communications ont augmenté. Nous répondons en cela à nos engagements et à la responsabilité incontournable que nous avons.

Non seulement les crédits du ministère de la Culture et des Communications ont augmenté, mais également il y a eu des initiatives fiscales consacrées aux créateurs, artistes, artisans, producteurs du milieu culturel québécois. Je vous rappelle donc ces mesures fiscales en soutien aux revenus des créateurs québécois. Ma préoccupation, je pourrais même dire mon obsession ? c'est un mot cher d'ailleurs souvent à la bouche du chef de l'opposition ? mon obsession à moi, ce n'est pas l'augmentation des crédits du budget du ministère de la Culture et des Communications; mon obsession à moi, c'est l'augmentation de la capacité de travail et de création des créateurs québécois. Mon obsession à moi, c'est de faire en sorte que les créateurs et les artistes québécois puissent mieux vivre de leur art. Nous y avons répondu, entre autres, par des mesures fiscales permettant, par exemple, l'étalement des revenus des artistes gagnant plus de 50 000 $, permettant la soustraction des revenus de droits d'auteur, des droits voisins des artistes interprètes. Nous avons également bonifié les crédits d'impôt en cinéma.

Tout ça totalise plusieurs millions de dollars qui n'apparaissent pas bien sûr dans la colonne comptable des crédits du ministère de la Culture et des Communications, mais, quand je vous fais ce tour d'horizon, M. le Président, c'est pour bien indiquer que le vocabulaire employé jusqu'à maintenant par le député de Gouin, que je respecte par ailleurs... Je respecte également l'homme politique qu'il est. Je voulais lui échanger ce compliment. Mais je dois dire que le vocabulaire utilisé jusqu'à maintenant n'est absolument pas approprié par rapport aux actions menées par ce gouvernement depuis 12 mois, et j'en prends à témoin l'augmentation des crédits du ministère de la Culture et des Communications et les mesures fiscales déployées.

n(15 h 50)n

Il me reprochait d'avoir cité Malraux. Je vais lui avouer bien candidement que j'ai hésité à le faire. Je savais que d'entrée de jeu les gens auraient l'impression que je voulais m'y comparer et j'espérais que les propos seraient bel et bien compris selon mon intention, à savoir de mettre en lumière le travail accompli par les différents artisans du ministère de la Culture et des Communications au cours des 40 dernières années, bien sûr inspiré par M. Malraux. Mais c'est intéressant de faire ce travail de comparaison des sociétés québécoise et française. Il est clair que, comme société québécoise, grâce à cette langue commune que nous partageons avec beaucoup de fierté, nous nous sommes bien sûr inspirés du modèle français...

M. Boisclair: ...

Mme Beauchamp: Je vais répondre à votre question.

M. Boisclair: Question de règlement, parce que là, moi, j'ai posé... J'ai fait exprès...

Le Président (M. Cusano): M. le leader de l'opposition, vous savez qu'il n'y a pas de question de règlement au niveau de l'étude des crédits.

M. Boisclair: Non, mais je veux juste qu'on soit clairs, là, sur la façon de procéder. J'ai fini mes remarques préliminaires, je n'ai même pas pris le temps de poser la question. J'ai un bloc de 20 minutes qui m'a été octroyé. Si la ministre prend tout ce temps pour répondre à la question, vous comprenez que jamais nous ne pourrons avoir, dans cette commission, une discussion ouverte comme vous l'avez souhaité. Je voulais simplement espérer une réponse pour qu'on puisse poursuivre l'échange, sinon c'est la ministre qui va prendre mon 20 minutes.

Le Président (M. Cusano): Je comprends votre intervention. J'inviterais tous les membres de la commission à poser des questions qui sont brèves. Je demanderais aussi, au niveau de la ministre, de donner des réponses brèves, je pense que ça va susciter beaucoup plus d'intérêt. Mais le règlement dit que chaque député a le droit de parole de 20 minutes, et le temps de réponse de la ministre est inclus dans son temps. Ça, c'est le règlement. Alors, je demande la collaboration de tout le monde, s'il vous plaît.

Mme Beauchamp: Je peux assurer les membres de cette commission que vous aurez ma collaboration. Il est clair que cette première intervention est une forme de réaction à l'ensemble des remarques du député de Gouin, mais j'arrive à la réponse à sa question pour prendre le temps de lui dire ceci: lorsqu'on examine le modèle français, qui est un modèle donc qui a inspiré la construction de notre ministère de la Culture et des Communications, on s'aperçoit que ce modèle français a évolué, a évolué avec, par exemple, des mesures incitatives au mécénat privé, a évolué avec des modèles de partenariat public-privé pour les équipements culturels. Donc, je crois qu'il ne faut pas rester justement attaché à un statu quo qui ne correspond plus à la modernité de nos sociétés et, entre autres, particulièrement bien sûr le Québec.

En ce qui concerne donc la base budgétaire de Télé-Québec, j'indique ceci au député de Gouin: le budget octroyé cette année est de 57 millions de dollars. C'est 2 millions de dollars de plus que la moyenne des budgets octroyés à Télé-Québec au cours des 10 dernières années. J'ai bien dit 2 millions de dollars de plus que les moyennes des 10 dernières années, et ça correspond tout à fait à la somme des crédits qui avaient été octroyés à Télé-Québec dans le livre des crédits à l'année 2002-2003.

J'indique ceci au député de Gouin pour mettre en lumière les actions menées par mon gouvernement l'année dernière: compte tenu des élections qui se sont déroulées le 14 avril, compte tenu des budgets déposés un peu plus tard et surtout de l'adoption finale des crédits qui nous amenait en juillet, de façon responsable j'ai pris note des projets déjà engagés par Télé-Québec et j'ai octroyé, l'année dernière, des crédits supplémentaires à Télé-Québec, tout ça de façon responsable puis correspondant aux engagements déjà pris bien sûr par Télé-Québec en cours d'année.

Depuis le mois de décembre dernier, nous sommes en discussion avec Télé-Québec, et Télé-Québec connaît les orientations de notre gouvernement, a fait des propositions quant à la somme des crédits budgétaires qui lui est actuellement octroyée. Ça fait donc déjà de nombreux mois que les gestionnaires de Télé-Québec connaissent la somme qui leur est octroyée. Il faut considérer l'année dernière comme une année, je dirais, exceptionnelle, considérant justement le moment où ont été adoptés les crédits par le gouvernement du Québec. Mais le budget octroyé, cette année, à Télé-Québec est en toutes lettres ou à quelques fractions près exactement la somme octroyée il y a 24 mois, en début d'année financière. Donc, lorsque l'on se compare, nous sommes au même niveau. Je crois effectivement qu'il serait exagéré, ici, de parler d'un désengagement de l'État, d'un retrait de l'État. Nous soutenons à bonne hauteur en consacrant plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications à cette mission qu'a à remplir Télé-Québec.

Maintenant, oui, il y a un travail également de modernisation à faire dans cette société d'État. Je pourrai bien sûr vous en donner plus d'exemples. Mais, à sa demande d'imposer un moratoire, je dirais que, s'il y a moratoire, c'est à la hauteur des crédits que son propre gouvernement avait octroyés il y a à peine 24 mois.

Le Président (M. Cusano): ...Mme la ministre. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: J'épargnerai à la ministre un cours sur l'économie, mais tout le monde ici, dans cette salle, peut-être sauf elle, comprendra qu'il y a une différence entre des dollars courants et des dollars constants. Et, lorsqu'elle fait ses comparaisons, elle ne tient d'aucune façon compte de l'inflation, première chose.

Deuxièmement, elle devrait expliquer aux membres de la commission comment il se fait que sa collègue ministre au MRCI a réussi à obtenir l'engagement de la présidente du Conseil du trésor qu'il y aurait réinvestissement dans les efforts de francisation malgré le cahier de crédits et qu'elle a échoué dans sa tentative d'aller chercher des sommes supplémentaires alors que sa collègue ministre des Relations avec les citoyens est intervenue. Et elle oublie aussi de rappeler que les coûts de production ont considérablement augmenté, donc ce qui affecte directement la grille.

La question est donc de savoir: Qu'est-ce que la ministre attend de cette télévision d'État? Déjà, 80 %... La question est de savoir: Qu'est-ce que la ministre attend de cette télévision publique, et non pas télévision d'État, M. le Président? Je me suis fait reprendre et corriger puis j'ai promis que plus jamais... Mais la question est donc de savoir: Qu'est-ce que la ministre attend de cette télévision publique? 80 % déjà de la production est faite à l'extérieur par le secteur privé, 20 % vient de l'intérieur, à l'initiative de Télé-Québec.

L'autre question que je veux donc poser à la ministre, c'est: Alors qu'elle dit ? et c'est ce qu'on peut lire dans les journaux ? qu'elle souhaite que Télé-Québec augmente ses revenus autonomes, je lui pose la question: Qu'est-ce qu'elle attend et quels sont les objectifs qu'elle souhaite sur les revenus autonomes? Et où envoie-t-elle Télé-Québec pour aller chercher ces revenus supplémentaires?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je tiens à mettre aussi en perspective... Le député de Gouin rappelait donc que nous avons confié 57 millions de dollars à Télé-Québec, et j'assume entièrement cette décision. Je considère que confier à Télé-Québec les crédits qui lui étaient confiés il y a 24 mois est tout à fait approprié pour que Télé-Québec puisse remplir sa mission éducative et culturelle.

Je veux aussi mettre en lumière le fait que le gouvernement du Québec, au cours des derniers mois, a posé d'autres gestes reconnaissant la place que nous accordons comme diffuseur à cette télévision publique ? et merci d'avoir fait le lapsus avant moi, puisqu'il sera sûrement inévitable de mon côté aussi ? mais des gestes posés au cours des derniers mois, reconnaissant le rôle de cette télévision publique dans la diffusion de la culture québécoise et aussi bien sûr dans sa mission d'éducation. Je prends en exemple le fait que nous avons investi 6 millions de dollars d'argent en immobilisations à la fois pour le maintien d'actif à Télé-Québec et également pour les défis concernant la numérisation des équipements de Télé-Québec. Donc, c'est une somme de 6 millions cette année?

Une voix: 3 millions.

Mme Beauchamp: 3 millions. C'est ça. Mais c'est 6 millions, au cours des derniers mois, 6 millions qui ont été investis, là, au cours des derniers mois, dans Télé-Québec juste pour ses équipements et le maintien d'actif. Ce n'est pas un signal de retrait, ça, ce n'est pas un signal de capitulation, c'est un signal que nous croyons en cette télévision publique, dans sa mission culturelle et éducative.

Également, au cours des dernières semaines, mais avant le dépôt du budget, nous avons investi 200 000 $, nous avons confié à Télé-Québec 200 000 $ pour le développement d'un portail culturel, d'une vitrine culturelle, Télé-Québec étant déjà précurseur d'un gouvernement en ligne, Télé-Québec mettant en ligne plusieurs outils éducatifs. Et là je crois qu'on va pouvoir être capables même de développer encore plus la mission culturelle de Télé-Québec par une présence en ligne, par les nouveaux médias que déjà Télé-Québec utilise, et, moi, je considère qu'il y a là même un secret trop bien gardé au Québec.

Donc, lorsque vous me posez la question sur quel est le rôle que l'on entend confier à Télé-Québec, Télé-Québec doit bien sûr assumer sa mission culturelle et éducative, et ma vision des choses est le fait que je dois m'assurer, comme ministre de la Culture et des Communications, je dois m'assurer que les crédits confiés à Télé-Québec soient au maximum utilisés en soutien à sa mission culturelle et éducative, entre autres bien sûr à la création. Et c'est dans ce contexte que nous allons confier à un comité ? tel que d'ailleurs d'autres mandats sont confiés à de tels comités à l'intérieur du travail de la modernisation de l'État ? c'est dans ce contexte que nous allons confier à un comité composé de gens de l'interne et de l'externe le mandat de la révision des processus d'affaires de Télé-Québec, afin, comme nous l'écrivions d'ailleurs nous-mêmes dans notre programme électoral, de s'assurer que les dollars que nous confient les contribuables québécois en soutien à la culture deviennent au maximum des dollars création plutôt que des dollars gestion.

Je termine en racontant une anecdote. Lorsque j'étais porte-parole de l'opposition et qu'on a fait la dernière étude du plan stratégique de Télé-Québec, je me souviens pertinemment que, dans l'organigramme de cette société, il n'y avait nulle part une case, quelqu'un en charge, par exemple, du marketing ou du développement des affaires. La situation a été corrigée depuis, et je pense que ça illustre le fait qu'il y a là, je pense, du travail à accomplir dans les processus de gestion d'affaires de Télé-Québec pour l'augmentation de ses revenus autonomes.

n(16 heures)n

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Rapidement, je repose à nouveau la question: Où, dans l'esprit de la ministre, il y a des marges de manoeuvre pour augmenter les revenus de ventes? Selon les conditions de licence, Télé-Québec a droit à huit minutes à l'heure de publicité. Les revenus de publicité ont crû, dans le rapport annuel, le dernier qui nous est fourni, à la page 28, ont crû... Croissance: 45,8 %; montant des ventes: 6,5 millions. Alors, qu'est-ce que la ministre souhaite? Est-ce que la ministre souhaite de la publicité pendant les émissions pour enfants, est-ce que la ministre souhaite de la publicité pendant le cinéma ou est-ce que la ministre souhaite qu'il y ait de la publicité au moment où sont diffusés, sur les ondes de Télé-Québec, des documentaires d'auteurs où il y a un propos journalistique qui se tient? Quels choix la ministre fait? Quel signal donne-t-elle à Télé-Québec?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Lorsque l'on parle de l'augmentation des revenus autonomes, ce peut être par la publicité. Mais le député de Gouin sait comme moi qu'il y a plusieurs sources de revenus autonomes possibles. Il y a bien sûr, par exemple, la recherche de commandites, de commanditaires de prestige associés à des émissions. Télé-Québec a déjà depuis quelques années ? vous l'avez vous-même souligné ? a développé, a accru ses efforts dans la recherche de tels partenaires pour permettre la production de certaines émissions, de certaines séries. Il y a bien sûr les questions de la location des locaux de Télé-Québec, des équipements, de la réalisation, parfois de la production d'émissions ou de projets audiovisuels qui ne sont pas nécessairement destinés à aller en ondes à Télé-Québec mais pour lesquels Télé-Québec peut vendre ses services ou son expertise. Donc, il voit bien, ici, qu'il y a des services de différentes natures possibles pour l'augmentation des revenus autonomes.

Mais c'est toute cette question qui sera confiée... L'examen de ces questions, entre autres, des revenus autonomes diversifiés à Télé-Québec sera soumis à l'examen de ce comité qui pourra, je crois, justement faire certaines propositions à Télé-Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: M. le Président, en comprenant que le propos de la ministre se résume à souhaiter simplement de la bonne gestion, il n'y a pas, dans ce que je viens d'entendre, de nouvelles orientations politiques sur lesquelles à la fois Télé-Québec mais à la fois elle, comme ministre de la Culture, pourrait s'appuyer pour dire: C'est par là que je voudrais aller. Je comprends que, d'une façon d'habile politicienne, elle fait le choix de tout reporter à un comité; certains jugeront.

Avenir des émissions
d'affaires publiques à Télé-Québec

Mais je m'essaie avec une autre question qui, elle aussi, mérite une réponse, M. le Président. Télé-Québec, environ 20 % de sa production est faite à l'interne. Essentiellement, dans ce 20 %, on compte des émissions d'affaires publiques, des émissions d'affaires publiques qui ne pourraient pas être faites avec le même enthousiasme et la même énergie par les producteurs privés parce que ceux-ci sont exclus du crédit d'impôt auquel d'autres émissions auraient droit. Je pense à toutes les émissions d'information et les émissions d'affaires publiques, des émissions d'ailleurs qui permettent à Télé-Québec de se vanter d'être le reflet des régions puisque ce sont ces émissions qui permettent de renvoyer à l'écran les images des régions.

Est-ce que la ministre tient à ce segment fondamental dans Télé-Québec ou est-elle prête, lorsqu'elle nous parle d'un réenlignement sur une mission éducative, à saborder cette mission d'information et d'actualité que nous avons fait le choix à ce jour de confirmer pour Télé-Québec?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Je pense que le député de Gouin sait comme moi...

Le Président (M. Cusano): Il reste une minute pour donner la réponse.

Mme Beauchamp: ... ? d'accord ? que Télé-Québec joue plus son rôle en termes d'affaires publiques que d'information. On sait que confier à Télé-Québec, par exemple, la production d'un bulletin d'informations n'a pratiquement jamais été envisagé par les différents gouvernements, peu importe leur formation politique, à cause bien sûr du coût énorme que ça sous-tend.

Moi, je suis très fière du travail fait dans le cadre de sa mission éducative, culturelle et, dans le cadre de cette mission éducative, du travail fait en termes d'affaires publiques. D'ailleurs, ça m'amène à redire que les crédits confiés à Télé-Québec ? 57 millions de dollars ? qui correspondent en tous points aux crédits octroyés, il y a 24 mois, par votre propre gouvernement à l'époque, permettent à Télé-Québec de remplir cette mission culturelle et éducative.

Les travaux du comité doivent être vus à la lumière d'un travail de modernisation qui est incontournable et qu'on avait dit qu'on ferait pour chacune de nos sociétés d'État. Le ministère de la Culture et des Communications fait son propre travail de modernisation à l'interne ? et je pourrai y revenir ? et également bien sûr Télé-Québec, qui représente plus de 10 % du budget de notre ministère, est appelée à faire ce travail de réflexion. Je pourrai y revenir, mais vous savez comme moi, M. le député de Gouin... Pardon. M. le Président, le député de Gouin sait comme moi que déjà sa formation politique, des membres de sa formation politique se posaient des questions, ont émis leurs commentaires concernant l'avenir de Télé-Québec. Je pense à l'ancien président du Conseil du trésor, je pense à l'ancien député de Fabre, M. Facal, qui eux-mêmes bien sûr ont interpellé Télé-Québec, et ça, peu de temps après ce que vous avez qualifié de dernière modernisation de Télé-Québec. J'agis de façon responsable comme ministre responsable des crédits qui me sont confiés, j'agis de façon responsable en demandant à Télé-Québec de s'assurer que ces crédits aillent au maximum à ses missions éducative et culturelle.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Bellechasse.

Mme Vien: Merci, M. le Président. D'abord, dire que, ce matin, j'ai eu l'occasion ? je ne reviendrai pas sur la question ? Mme la ministre, j'ai eu l'occasion de vanter votre travail effectué au cours de la dernière année, mais quand même je pense qu'il est important de nous inscrire en faux par rapport à la lecture que fait le député de Gouin de cette dernière année à laquelle vous avez consacré beaucoup d'énergie et de temps pour faire de la culture une priorité à tous égards. Et au premier chef j'ai été témoin de ça, étant, tout le monde le sait, votre adjointe parlementaire. Tout à l'heure, vous ne pensiez pas si bien dire, Mme la ministre, quand vous disiez que vous aviez une obsession pour les artistes de voir augmenter leur capacité à créer au Québec. Et je pense que vous nous avez bien transmis cette préoccupation que vous aviez, parce qu'on a pu sentir, dès après l'élection, votre insistance, votre insistance à faire de cette question une de vos priorités, et priorités d'ailleurs ? et j'aime bien le dire et le rappeler ? qu'on retrouvait dans la plateforme électorale du Parti libéral.

Ceci étant dit, moi, je salue, je salue, je tiens à le dire, votre déférence dans l'administration de tous vos dossiers, l'efficacité avec laquelle aussi vous jouez bien votre rôle et la sensibilité aussi que vous mettez dans vos dossiers. Je trouve que c'est important, là, parce qu'on entend toutes sortes de choses qui nous déconcertent un peu. Quand on regarde toute la question de la diversité culturelle, on aura certainement l'occasion d'y revenir, parce que vous en avez glissé un mot ? on voyait que le temps vous pressait un peu dans vos remarques préliminaires ? et ce sera important, je pense, qu'on puisse y revenir au cours de cette étude de crédits.

Actions entreprises pour l'amélioration
des conditions socioéconomiques des artistes

Il y a toute cette question aussi des conditions socioéconomiques des artistes qui a monopolisé une partie de mon temps aussi, parce que vous avez eu confiance en votre adjointe pour lui donner la présidence, en fait de lui demander d'occuper la présidence de ce comité. On a fait beaucoup de choses, on a travaillé énormément. Vous avez dit, et vous aviez bien raison de le rappeler, qu'on a réussi à asseoir à une même table différentes personnes en provenance de différents ministères ? je pense qu'en tout cas c'était là une percée assez extraordinaire ? pour en arriver finalement à des résultats tout à fait probants et qui seront pertinents pour les artistes et les artisans au Québec.

Moi, j'aimerais que vous reveniez sur cette question-là, parce que c'est fondamental, sur votre action que vous avez posée au cours de la dernière année. Ce n'est pas rien, ce n'est pas banal, et c'est visionnaire en quelque part, et c'est d'être de bons accompagnateurs pour nos artistes. Alors, moi, la question que je vous pose, c'est: Effectivement, qu'est-ce que ces travaux vont changer dans le quotidien de nos artistes et de nos artisans et quelle est la suite des choses à partir d'aujourd'hui?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci. Je rougis.

Mme Vien: Vous n'avez pas à rougir.

Mme Beauchamp: Non, mais je vous remercie, Mme la députée. Puis surtout prendre le temps de vous remercier parce que vous m'avez envoyé des fleurs, c'est gentil, mais je prends le temps à mon tour de souligner le travail que vous avez fait, à titre d'adjointe parlementaire, qui est trop souvent un travail fait dans l'ombre mais très précieux. J'ai effectivement confié à la députée de Bellechasse la présidence d'un comité de travail dès notre arrivée, comité de travail sur l'amélioration des conditions socioéconomiques des artistes.

n(16 h 10)n

Premièrement, indiquer que ce travail s'inscrit dans une tradition, une tradition dont, moi, je suis très fière, qui est une tradition des différents gouvernements qui ont été formés par le Parti libéral du Québec. Ce souci, je pense qu'on peut le dire, c'est une ligne de force des interventions de notre gouvernement en matière de culture, c'est ce souci d'appuyer l'individu créateur, l'artiste, l'artiste professionnel, l'artisan, pour une raison bien simple mais fondamentale, c'est que, s'il n'y a pas, aujourd'hui même, au Québec, des gens ? et je pense particulièrement à des jeunes ? qui décident, malgré l'image parfois un peu négative qu'on peut avoir d'une profession dans le domaine culturel, s'il n'y a pas, aujourd'hui, un jeune qui décide qu'il consacre son talent à écrire une chanson, pondre un scénario de film, faire une sculpture, peindre un tableau, il n'y a plus de culture québécoise. Le fondement même de notre culture, c'est le créateur, et bien sûr les producteurs, les distributeurs, les diffuseurs sont extrêmement importants. Je ne nie pas que nous sommes devant une chaîne qui est fondamentale, chacun est un maillon de la chaîne, mais tout de même le premier maillon qui fait en sorte qu'on peut se reconnaître comme Québécois, comme Québécoises, que, lorsqu'on voit un film, lorsqu'on écoute une chanson, ça nous interpelle. Vous savez, ça résonne un peu. Ça résonne en dedans de vous parce qu'on se reconnaît comme Québécois et comme Québécoise. Le fondement de ça, c'est des individus qui décident de créer.

Et d'ailleurs cette notion de création ? très proche de la notion d'innovation ? qu'on transporte dans des milieux plus industriels doit devenir une carte de visite, doit devenir une carte maîtresse de notre peuple. On sait que nous sommes appelés à vivre de grandes transformations au Québec. Entre autres, notre structure, notre base industrielle est appelée à se transformer, et le vrai avenir du Québec réside dans cette capacité d'innovation et de création. Je crois que cette carte de visite qui doit être la marque de notre société, cette carte de visite prend racine dans ce que, comme société, on valorise et on privilégie... la création et donc les créateurs, les artisans québécois.

Dans cette ligne de force qu'on a toujours défendue comme formation politique, je vous rappellerai donc qu'historiquement c'est sous Mme Lise Bacon qu'ont été adoptées les lois, les deux lois confirmant le statut professionnel des artistes, qui ont été des lois innovatrices dont maintenant on s'inspire un peu partout. Également, la politique culturelle du Québec est l'oeuvre de Mme Liza Frulla. Elle a été adoptée en 1992. C'était la première fois en Amérique du Nord qu'un État se dotait d'une politique culturelle, cette politique qui dit justement que la culture doit être l'affaire de tous. Cette politique a fait en sorte, par exemple, qu'on a mis en place, sous un gouvernement libéral, le Conseil des arts et des lettres du Québec, cette instance qui appuie nommément les créateurs, les créatrices dans une formule que j'appellerais à distance, l'expression anglaise «the arm's length», mais donc dans une formule à distance des impératifs politiques. Donc, c'est dans cette vision que l'on s'inscrit, et pour ma part j'étais sûre et certaine que l'on pouvait mener des actions de soutien aux créateurs québécois, et ce, vraiment... C'est le titre, d'ailleurs, vous vous rappelez, c'est le titre de notre document, c'est Pour mieux vivre de l'art, afin que les créateurs et les artistes québécois puissent mieux vivre, carrément mieux vivre de leur art.

Avec la collaboration de ? je le dis de mémoire ? 14 ou 16 associations professionnelles ? je crois que c'est 16 ? ces associations professionnelles, dans les règles de l'art de la confidentialité des renseignements, ont accepté de nous transmettre les données nominatives de leurs membres. Ça nous a permis de faire une étude sur la base des rapports d'impôts des membres de 16 associations professionnelles d'artistes et de créateurs. Ça nous a permis de dessiner un portrait qu'on a rendu public, le 24 février dernier, dans ce document, Pour mieux vivre de l'art.

Et vous vous rappellerez avec moi, Mme la députée, que ce portrait était... Pour une première fois, on avait une image très précise, quasi chirurgicale de la situation, des conditions de vie, de revenus des artistes professionnels. Et j'ai résumé ça en mes mots, peut-être un peu cavalièrement, mais en disant ceci: dans le fond, les artistes professionnels au Québec, nous savons maintenant qu'ils sont un peu appelés à vivre ce qu'on pourrait appeler cette double vie alors qu'on s'aperçoit qu'ils sont à la fois des salariés et à la fois des travailleurs autonomes dans une proportion beaucoup plus grande qu'on pouvait l'imaginer. Plusieurs ont un double statut nous amenant à conclure que plusieurs menaient une double vie.

Pour imager ça, on pourrait dire: On connaît... En fait, j'en ai rencontré dans les régions du Québec. On connaît, par exemple, des poètes qui sont aussi professeurs au cégep. Nous connaissons des chanteurs, auteurs-compositeurs, chansonniers qui sont aussi des travailleurs dans le domaine de la restauration. On voit que les artistes sont appelés à vivre cette double vie. À partir de ce portrait très précis de la fluctuation des revenus, des sources de revenus des artistes, dès le dernier budget déposé par notre collègue ministre des Finances, il y a eu tout de suite des actions menées d'un point de vue fiscal, c'est la question de l'étalement des revenus. Donc, un artiste qui gagne plus de 50 000 $ par année va pouvoir ? c'est la seule catégorie de citoyens au Québec qui a ce droit ? va pouvoir étaler ses revenus provenant de ses activités artistiques sur les sept prochaines années. Également nous déduisons de l'impôt les droits d'auteur. Les 15 000 premiers dollars perçus en droits d'auteur pourront maintenant être déductibles de la part également des artistes interprètes, ce qu'on appelle les droits voisins. Mais le travail, donc c'est déjà...

Dans le fond, les annonces faites par notre collègue ministre des Finances ont confirmé ces actions de soutien pour améliorer les revenus, les conditions de vie des artistes et des créateurs, mais nous avons fait également un travail que parfois je dis de dentelle, mais c'était peut-être justement ce qui était difficile à faire ? nous étions un peu dans la dentelle ? faire en sorte, par exemple, que certaines catégories d'artistes professionnels soient mieux couvertes par, par exemple, la CSST.

Nous connaissons les bas revenus de nos danseurs professionnels mais également les exigences terribles de cette vie, de cette pratique professionnelle lorsqu'on est, par exemple, un danseur. Or, le danseur est appelé, je dirais, à s'entraîner, à être en formation continue tout au long de sa vie. Mais parfois, lorsqu'il n'était pas sous contrat, il n'était pas protégé en cas de blessure alors que c'est des athlètes, c'est des artistes qui sont malheureusement appelés très souvent à se blesser. Nous avons pu identifier, avec la collaboration de la CSST ? et vous étiez autour de la table à ce moment-là ? certaines ouvertures permettant, par exemple, de penser que certains lieux de pratique, dans le domaine de la danse, pourraient être identifiés comme des lieux de formation, reconnus comme tels et pouvant être couverts donc par la CSST.

Il y a des mesures comme cela, dans le domaine des rentes, de la santé et sécurité au travail, dans le domaine de la transition de carrière, qui ont été discutées lors d'une rencontre qui a eu lieu le 15 avril dernier avec plus de 70 représentants des différentes associations professionnelles. Je crois que les gens ont confirmé effectivement, ont bel et bien senti cet engagement que nous avions à traduire notre vision des choses dans des actions maintenant tangibles qui vont faire une réelle différence pour eux non seulement dans leur portefeuille, non seulement en matière de revenus et de conditions de vie, mais justement également en matière de conditions de pratique, et ça, j'en suis très fière.

Les différentes propositions ont été discutées, et ça m'avait frappée d'ailleurs d'entendre M. Curzi, qui est le président de l'Union des artistes, dire: Bien, enfin on n'a pas juste parlé d'argent ? même s'il était question d'argent ? enfin on a parlé de ce qu'on faisait, de ce que nous faisons comme artistes professionnels. Et il a trouvé les échanges extrêmement féconds, là, entre, entre autres, les différents représentants des artistes.

Peut-être que je peux vous le citer. M. Curzi, après la journée du 15 avril, a dit ceci: «C'était une journée très féconde. Tout d'un coup, on ne parlait plus juste de comment on pouvait avoir plus d'argent, on parlait de notre métier, de comment se vit notre métier.» Et effectivement notre gouvernement veut accompagner, dans cette logique, je vous disais, de soutien à la création et aux créateurs, veut accompagner les artistes et créateurs québécois.

Vous me posez des questions sur les autres étapes. On en a connu des très tangibles avec les annonces que contenait le dernier budget de notre collègue ministre des Finances, mais les autres étapes sont, à la suite de ce cahier de propositions, discutées. Il y aura dépôt d'un plan d'action tangible autour de la question des conditions de vie et de pratique des artistes. Un morceau très important de cette réforme, c'est bien sûr la réforme législative. Nous voulons apporter des modifications aux deux lois sur le statut de l'artiste. J'espère bien sûr qu'avec la collaboration du député de Gouin on pourra procéder à l'adoption du principe de ce projet de loi très bientôt, chose qui n'a pas pu être faite jusqu'à maintenant. Donc, il y a ces mesures législatives et il y a également des mesures en matière de filet de sécurité sociale.

En terminant, vous parler de deux futures actions qui seront contenues dans notre plan d'action, à savoir la mise en place d'un secrétariat au sein du ministère de la Culture et des Communications, en fait donc d'une cellule, d'une équipe de travail dédiée à cette question de l'amélioration des conditions de vie et de pratique des artistes. Parce que le cahier de propositions comprend les premières étapes, le fruit de premières discussions ayant été menées avec la CSST, la Régie des rentes, par exemple, le ministère des Finances, le ministère de l'Emploi, mais nous sommes conscients que la créativité doit être à l'honneur. Par exemple, les musiciens professionnels nous ont aussi interpellés sur les problèmes de santé et sécurité au travail. Plusieurs musiciens professionnels ont des problèmes de blessures. On n'est pas habitués de parler de ça, mais c'est réel. Or, eux ont plutôt, dans leur pratique, une tendance à pratiquer à la maison, par exemple, leurs instruments. Comment peut-on faire pour les couvrir? C'est une excellente question. On n'a pas tout à fait les réponses encore, mais, par la constitution de cette équipe, de ce secrétariat sur la condition de vie et de pratique des artistes au sein du ministère, nous entendons donc poursuivre, au cours des prochains mois, des prochaines années, tout ce travail pour l'amélioration des conditions de vie et de pratique des artistes.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Bellechasse.

Mme Vien: Oui, rapidement. L'étalement du revenu, c'était une demande qui était faite avec insistance depuis un certain temps?

n(16 h 20)n

Mme Beauchamp: Cette question de l'étalement du revenu, et cette question plus globale dans le filet de sécurité sociale, était une demande historique de la part, entre autres, par exemple, de l'Union des artistes et d'autres représentants du milieu des arts et des lettres, et, cette demande historique, nous l'avions écoutée, et c'est pour cela qu'on s'est mis au travail dès le lendemain de l'élection. Ça m'amène donc à vous dire que le dernier budget livré par notre collègue ministre des Finances nous a valu des commentaires très positifs de la part du milieu de la culture, il faut le dire, donc, par exemple, Le Devoir qui titrait Grande satisfaction des artistes et des organismes, l'Union des artistes qui disait ceci: «C'est un début réel de réponse aux préoccupations de l'Union des artistes quant au filet de sécurité sociale des artistes et au soutien à la culture. Des gestes concrets viennent d'être accomplis», ou encore l'ADISQ qui disait: «C'est un geste du gouvernement qui traduit l'engagement électoral du gouvernement de faire de la culture une mission privilégiée de l'État québécois.» Également peut-être vous citer l'Association nationale des éditeurs de livres qui disait: «Nous sommes très heureux du résultat, notamment la hausse des budgets du CALQ et de la SODEC et les nouvelles mesures fiscales qui aideront les auteurs.»

Donc, je crois que ces réactions qui ont accompagné les annonces contenues dans le dernier discours du budget montrent jusqu'à quel point c'étaient des réponses à des demandes historiques du milieu de la culture et bien sûr plus spécifiquement du milieu des créateurs et des artistes québécois.

Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée Bellechasse.

Mme Vien: C'est donc dire que... Pardon?

Le Président (M. Cusano): Oui, oui, vous pouvez poursuivre.

Mme Vien: Oui, la députée de Bellechasse, oui. Excusez-moi, je parlais en même temps que vous. C'est donc dire, Mme la ministre, que les représentations que vous avez faites auprès du collègue ministre des Finances ont porté fruit, notamment en ce qui a trait à l'étalement du revenu.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, écoutez, le ministre des Finances, le député d'Outremont, était membre de l'équipe libérale lorsque l'équipe libérale, à la fin des années quatre-vingt, a mis en place ces lois sur le statut de l'artiste, a été un complice de la ministre de l'époque, Lise Bacon, pour la mise en place de ces lois, et je vous dirais que, dès le lendemain de l'élection... Il connaissait bien nos engagements électoraux, et, dès le lendemain de l'élection, il a tout de suite dit ? et lui l'a baptisé ainsi: Nous allons faire le statut de l'artiste II. Je crois que, dans la vision des choses, ces lois qui confirment un statut professionnel à nos artistes se devaient d'être accompagnées de séries de mesures qui leur sont dédiées.

Et, vous savez, ça peut amener des questionnements, nous en sommes conscients. Pourquoi est-ce que, par exemple, les artistes professionnels peuvent se prévaloir de mesures d'étalement du revenu et pas d'autres travailleurs autonomes? Je réponds ceci: parce que, premièrement, il y a une loi qui les encadre et qui les identifie. Cette loi, elle est précieuse, elle nous permet de poser ces gestes spécifiquement pour les artistes et les créateurs. Et par ailleurs pour les raisons suivantes ? je vous le mentionnais d'entrée de jeu: les créateurs et les artistes sont la base même de notre identité. Comme gouvernement, comme société, on se doit d'envoyer le message que la création, les créateurs sont la source de notre identité et qu'ils sont importants. Donc, dans ce contexte ? et je suis très heureuse de le souligner ? nous avons pu, au sein du comité qui a travaillé tout au long de la dernière année pour ces mesures de filet de sécurité sociale pour les artistes, nous avons, au sein du comité, pu bénéficier de la présence d'un représentant du cabinet du ministre des Finances.

Et également, je le mentionnais, ce travail de très saine collaboration... Je pense que le message envoyé était très clair de la part de notre gouvernement: nous voulions obtenir des résultats. Et je tiens à souligner... puis à les remercier, des gens qui ont travaillé très fort, qui n'ont pas nécessairement l'habitude de se pencher sur les enjeux que vivent les artistes et les créateurs. Mais je pense, par exemple, à ces gens provenant de la Commission de la santé et sécurité au travail, les gens, les experts provenant de la Régie des rentes du Québec, d'Emploi-Québec. Tous ces membres de la fonction publique provenant de ces différentes instances ont collaboré de très belle façon, et, pour moi, je crois qu'on a vécu, au cours des derniers mois, peut-être les plus belles images, les plus beaux instants de l'aboutissement de cette politique culturelle du Québec qui, entre autres, interpellait un ensemble de ministères pour faire en sorte que la culture devienne l'affaire de tous.

Mme Vien: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole au député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Merci, M. le Président. Mme la ministre, chers collègues, d'entrée de jeu je veux vous indiquer que c'est la première fois qu'en commission parlementaire le parti que je représente, on n'a pas le droit à des remarques préliminaires. J'ai bien compris tout à l'heure, pour le bénéfice des téléspectateurs, que les députés du Parti libéral acquiesçaient pour m'accorder des remarques préliminaires. C'est là qu'on reconnaît les grands démocrates péquistes: le parti avant la patrie. Qu'est-ce qui me surprend le plus, bien ce n'est pas la décision du député de Gouin ? je suis habitué à ce genre de tactique ? mais c'est beaucoup plus qu'il veuille prendre tout le temps de parole, toute la visibilité.

Mais je vais vous conter une petite histoire. En avril, en avril 2004, lors d'un cocktail, dans la région de Montréal, avec le monde culturel, le député de Gouin a pris la parole et il a indiqué aux gens du monde culturel qui étaient là qu'il n'y avait rien à faire dans le domaine culturel sans la souveraineté. Donc, s'il n'y a rien à faire sans la souveraineté, je comprends mal pourquoi il veut avoir tout le temps de parole et toute la visibilité à cette commission.

Objectifs communs des programmes du ministère

Ceci étant dit, on va aller aux questions pour la ministre. M. le Président, il faut souligner, vous savez qu'il faut souligner jusqu'à quel point le gouvernement libéral a suscité des attentes dans le milieu de la culture et des communications soit en s'appuyant sur des actions passées ou par des belles paroles. On peut même dire qu'il a suscité des espoirs pour les années à venir. Rappelons-nous qu'en campagne électorale le Parti libéral avait un cadre financier qui s'est vite retrouvé sous le tapis, suite au rapport Breton. Mais le discours en culture est resté le même ? ça, je dois le dire ? soit que les actions prioritaires du gouvernement seraient d'améliorer les conditions de vie et de création des artistes, c'est-à-dire les conditions socioéconomiques des artistes.

Ces objectifs sont très louables, M. le Président, sauf que nous sommes ici pour discuter des crédits 2004-2005 alors que peut-être que la ministre, elle devrait déjà être au front pour discuter des crédits de 2005-2006, parce que vous savez que, pour les gens qui s'intéressent aux affaires de l'État au niveau des finances, le ministre des Finances actuel aura des choix déchirants à faire pour équilibrer le prochain budget. La ministre devrait selon moi s'activer dès maintenant, car le ministère des Relations avec les citoyens... excusez, car, après le ministère des Relations avec les citoyens, il m'apparaît que le ministère de la Culture et des Communications sera probablement dans la mire du ministre des Finances.

Mais revenons aux crédits 2004-2005. Nous savons tous que ce ministère manque grandement... et ça, depuis plusieurs années de gouvernance péquiste et libérale. Il n'y a pas de ligne directrice claire à l'intérieur du ministère. Chaque entité fonctionne en vase clos, que l'on parle de l'aide aux artistes, aux entreprises, aux régions, au développement des publics, aux musées urbains et aux musées ruraux. Tout ça pour dire qu'il n'y a pas de direction claire.

La ministre s'est pendant quatre ans évertuée à rencontrer les organismes culturels lorsqu'elle était dans l'opposition. Maintenant ministre, nous n'avons toujours pas de direction claire pour ce ministère. Elle parlait beaucoup, lors des études des crédits où elle était dans l'opposition, de la politique du livre. Pourtant, il n'y a pas un sou de plus dans ces documents.

Ma question: La ministre pourrait-elle nous dire quels sont les objectifs communs des différents programmes et de grâce ne pas nous faire le discours de la démocratisation de la culture, de l'accessibilité ou de la politique culturelle de 1992?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je suis désolée, je vous ai bien suivi, mais votre question précise, c'est de vous indiquer quels sont les...

M. Picard: Quels sont les objectifs communs des différents programmes. Actuellement, qu'est-ce que les gens perçoivent dans le ministère, les gens de l'extérieur aussi, c'est qu'il y a différents programmes, ça travaille en silo, il n'y a pas d'objectif commun de vision.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Jusqu'à un certain point, je pourrais partager l'analyse du député de Chutes-de-la-Chaudière. Dans le contexte suivant, il faut aussi mentionner que, depuis 1994, je le dis de mémoire, on pourra me corriger, mais, si je ne me trompe pas, je suis la septième ministre de la Culture en 10 ans, huitième ou septième ministre de la Culture en 10 ans. Je vous soumets ceci. Il y a eu des aléas, là, qui ont fait en sorte que les titulaires de ce ministère se sont succédé à un rythme qui ne peut pas être sain pour un ministère.

Là où je partage une certaine vision des choses, c'est que, moi, je peux vous confirmer qu'il y a un travail de modernisation à faire au sein de ce ministère, et c'est un travail qui va être, je dirais, développé, là, à un rythme accéléré au cours des deux prochaines années.

n(16 h 30)n

Mais là où vos commentaires... là où je ne voudrais pas rejoindre vos commentaires... J'espère que ce n'est pas ça que vous avez voulu dire. Je ne crois pas. Mais c'est que derrière vos commentaires on aurait pu entendre un reproche aux gens qui travaillent au ministère, et je crois sincèrement qu'il faut dire ceci: dans un contexte politique particulier où les titulaires du ministère se sont succédé à un grand rythme, j'estime que la formation politique que je représente, par, entre autres, la mise en place de cette politique culturelle en 1992, par la mise en place du Conseil des arts et des lettres du Québec et ensuite la SODEC qui a été mise en place, qui était prévue dans la politique culturelle mais mise en place par l'ancienne députée de Chambly, Louise Beaudoin, je crois que le ministère de la Culture et des Communications et ses artisans avaient quand même certaines lignes directrices de travail.

Vous me demandez de ne pas faire référence à la politique culturelle du Québec alors que ça demeure, pour moi en tout cas, sincèrement une forme de document fondateur. C'était un travail colossal. La politique culturelle du Québec est, encore aujourd'hui, dans l'histoire de l'Assemblée nationale, la plus grande consultation qui s'est déroulée dans ces murs. Tout près de 500 mémoires avaient été déposés. C'est une politique qui a fait l'unanimité à l'époque et, je dirais, qui tient la route, sincèrement qui tient la route dans ces grandes missions. Et je crois que, dans un contexte politique comme je viens de vous le décrire, qui a eu cours depuis 1994, une chance qu'il y avait la politique culturelle du Québec pour rappeler au ministère les axes de travail de fond en termes effectivement de démocratisation, d'accessibilité à la culture!

Je veux juste vous mettre en lumière, par exemple, quelque chose qui s'est déroulé au cours des dernières années. C'est extrêmement intéressant. C'est, par exemple, le développement de partenariats d'ententes avec les municipalités. Ça n'existait pas avant 1994, et je crois que ça a été un travail de fond extrêmement intéressant, puisque les municipalités ont été appelées à se doter elles-mêmes d'une politique culturelle. Pour que le ministère de la Culture et des Communications puisse signer une entente avec une municipalité ou une MRC, la municipalité doit se doter d'une politique culturelle et...

Écoutez, moi, je vous dirais, sur le terrain, je n'étais pas là il y a 10 ans, mais, moi, j'ai l'impression qu'on a assisté à une certaine transformation du Québec avec une appropriation, de la part des élus municipaux, de façon encore plus précise et tangible, de l'avenir culturel de leurs communautés. Lorsque vous avez des élus municipaux qui doivent partager, débattre, consulter et adopter une politique culturelle, je crois que c'est tout le milieu de la culture qui est très gagnant. Et ça, ça s'est passé au cours des dernières années, puis les fonctionnaires et les responsables du ministère de la Culture et des Communications y ont consacré énormément d'énergie, c'était nouveau.

Maintenant, laissez-moi effectivement vous parler du travail qui sera fait dans le cadre de la modernisation du ministère, entre autres le travail de fait sous un vocable, là... C'était déjà présent au ministère, c'est un processus qui s'appelle Diapason et qui va se poursuivre et, je dirais même, s'intensifier.

Juste avant, je veux juste donc vous dire, là, les axes prioritaires que nous avons identifiés dans le cadre de cette modernisation de l'État. Il y a: soutenir la création, la production, la diffusion, l'accès aux oeuvres et au contenu. Il y a: de favoriser la participation active des citoyens et citoyennes à la vie culturelle. Il y a: de soutenir le développement des communications au profit de la vie démocratique. Il y a: de contribuer au rayonnement et à la défense des intérêts du Québec en matière de culture et de communications. Et il y a: d'adapter le réseau public d'action culturelle et l'industrie des communications.

Sur ce dernier vocable, il y a tout le travail qui sera fait, de modernisation du ministère de la Culture et des Communications. Ce travail s'appelle donc, je vous le disais, Diapason. C'est un travail extrêmement important. Je vous donne l'exemple suivant: en ce moment, le ministère, strictement le ministère ? je ne vous parle même pas des 12 sociétés d'État qui sont sous notre responsabilité ? mais le ministère gère une quarantaine de programmes. Ça met en place plus de 70 formulaires à remplir et juste pour les programmes actuellement gérés par le ministère de la Culture et des Communications. On me rapportait, là, que ? les gens auront de la difficulté à croire ça, à la maison ? mais en ce moment quelqu'un, par exemple une radio communautaire, un organisme culturel, qui adresse une demande au ministère doit remplir de nouveau le formulaire, avec le nom, les lettres patentes, les états financiers, pour chacune des demandes qu'il adresse parce que tout est géré, comme vous le disiez, effectivement en silo. Il y a là ? et ça, je peux vous le dire puis vous commencez sûrement à l'entendre ? il y a là une perte de temps et d'énergie incommensurable de la part des artisans du milieu culturel sur le terrain et aussi au sein du ministère de la Culture et des Communications.

Donc, ce que nous avons décidé de faire ? ça fait l'objet de beaucoup d'échanges, d'un travail appuyé de la part, entre autres, bien sûr des gens à l'interne du ministère de la Culture et des Communications ? c'est un travail de restructuration de ces programmes autour de quatre grands programmes génériques.

Qu'est-ce que nous demandent nos clients finalement quand ils s'adressent au ministère de la Culture et des Communications? Un, ils demandent un soutien au fonctionnement, premier programme générique. Deux, ils demandent un soutien à des projets ponctuels, deuxième grand programme générique. Trois, ils demandent un soutien pour réaliser des équipements culturels, les immobilisations. Et, quatre, ils demandent un soutien en termes de partenariats, les partenariats signés, qui en ce moment prennent la forme beaucoup de partenariats avec le milieu municipal, régional et qui pourront prendre la forme de partenariats bien sûr avec le secteur privé. Voilà les quatre grands... la refonte, je dirais, des programmes.

Dans la vie de tous les jours, qu'est-ce que ce sera? Nous espérons qu'à terme ? ça doit se terminer en 2006 ? le client ? et j'utilise ce terme avec beaucoup de respect parce qu'un client a droit donc à du service de qualité ? le client du ministère de la Culture et des Communications aura son propre fichier-client. Les intervenants appelés à lui rendre des services auront accès à un fichier-client dans lequel on retrouvera l'ensemble des demandes que l'organisme, par exemple, a faites au ministère de la Culture et des Communications, les acceptations, les refus, l'histoire de cet intervenant culturel, sans que ce soit divisé, parce que c'est là, en ce moment, je vous dirais, un peu comme un saucisson dans les classeurs des différents responsables des différents programmes du ministère. Il y a donc une approche client qui sera développée.

C'est un travail important, c'est un travail qu'on peut considérer comme étant très administratif, alors que je le vois comme un travail d'une offre de service enfin efficace et qui répond à des demandes qu'on a entendues sur le terrain, et je peux vous dire que les sociétés d'État sous notre responsabilité savent aussi qu'elles auront à suivre le rythme de ces changements.

Nous parlons maintenant, dans notre jargon à nous, d'un réseau culture. Donc, le ministère de la Culture et des Communications gère des programmes, mais le Conseil des arts et des lettres le fait également, la SODEC. Parfois, il y a des clients qui s'adressent justement à plusieurs structures. Nous plaidons vraiment pour une meilleure coordination de ces programmes, de cette offre de service, avec une diminution de la paperasse, une meilleure efficacité, un vrai service à la clientèle. Mais ça, ça commence... Nous-mêmes, le ministère sera le leader, un peu la locomotive, servira de modèle, je l'espère ? j'y crois ? servira de modèle auquel pourront se greffer par la suite l'ensemble des composantes de notre réseau culture-communications, et ça, c'est selon les axes que je vous ai décrits plus tôt, les quatre grands programmes génériques, là, en fonction de nos priorités d'action.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Picard: Oui. Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Cusano): Bien, chaque député a un total maximum de 20 minutes, M. le député. Alors, voulez-vous savoir combien de temps il vous reste?

(Consultation)

Le Président (M. Cusano): Il vous reste six minutes.

M. Picard: C'est beau. C'est pour balancer questions-réponses.

Mme la ministre, étant moi-même un ancien employé de l'État, mes propos ne visaient pas du tout les employés de l'État, je visais beaucoup plus les politiciens qui donnent les orientations. Pour ce qui est de la modernisation, vous savez que le parti que je représente prône pour une vraie modernisation de l'État, donc il n'y a aucun problème.

Soutien accordé aux écoles
de musique et aux maîtrises

Donc, si je reviens à un dossier plus précis, le Programme de soutien à la formation des jeunes, Écoles de musique et maîtrises, c'est un programme qui a été gelé en 1988. Les fonds ont été gelés, l'enveloppe pour ce programme-là a été... Il y a eu un moratoire d'annoncé par Mme Bacon, elle a imposé un moratoire sur l'enveloppe budgétaire. Donc, depuis 16 ans il y a 64 organismes qui reçoivent la même subvention, peu importe la clientèle qu'ils doivent desservir actuellement. Et aussi, bien là vous me voyez venir, disant que ça fait 16 ans qu'ils reçoivent les mêmes sous, mais il y a des organismes qui seraient admissibles à ces sous-là, mais, vu qu'il y a un moratoire, là, eux autres, ils n'ont rien puis ils ont une clientèle.

Il y a eu un rapport qui vous a été déposé en février 2004 suite à une commande qui avait été présentée par l'ex-ministre de la Culture et des Communications, Mme la députée de Bourget. Tout simplement, dans les crédits, j'ai vu qu'il y a... en tout cas on a retracé une ligne de... Peut-être qu'il y a un 500 000 $ de plus, mais je ne suis pas certain si c'est vraiment ce programme-là.

Ma question tout simplement, là, c'est: Quand vous allez lever le moratoire sur ce programme-là, sur le Programme de formation des jeunes, Écoles de musique?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

n(16 h 40)n

Mme Beauchamp: M. le Président, d'entrée de jeu vous indiquer que la question de la formation pour dans le fond former nos futurs créateurs, artistes professionnels, c'est quelque chose que j'ai à coeur et qui me préoccupe, je le dis en toute transparence. Je veux juste vous dire que les actions que l'on mène, entre autres, pour relocaliser les étudiants et les professeurs des conservatoires de musique et d'art dramatique à Montréal font partie de cette préoccupation. C'est une institution majeure et qu'on doit relocaliser.

Mais je sais que votre question concerne plus ces écoles de formation qu'on retrouvent en région. Je peux vous confirmer le fait que je vous disais, là, que j'ai fait plusieurs tournées à l'échelle du Québec et que j'ai pris le temps, lorsque c'était possible, mais de m'asseoir, d'échanger avec des artistes, des créateurs des régions, et je peux vous confirmer que systématiquement la question de l'importance de l'école de formation dans une région revient, systématiquement.

J'ai pu moi-même constater jusqu'à quel point une école de formation fait partie un peu... Et là c'est un clin d'oeil à M. Gérald Tremblay, mais sa notion de grappes, hein, sa notion de différentes institutions qui forment un tout entre elles mais qui permettent à des artistes professionnels de vivre dans une région... Et un exemple que j'aime bien donner, c'est, par exemple, à Rimouski. Le fait qu'il y ait un conservatoire mais aussi des écoles privées de musique et également l'Orchestre de l'Estuaire fait en sorte qu'il y a environ un peu plus de 40 musiciens professionnels capables de vivre dans la région de Rimouski et de Rivière-du-Loup.

Votre question, donc je peux juste vous dire que c'est une question qui me préoccupe. À la fin, au cours des dernières semaines, j'ai pu débloquer un montant total de 325 000 $ qui a permis, là, d'avoir des actions ponctuelles en soutien aux écoles de musique reconnues et également à quelques écoles qui ne le sont pas parce que exclues du moratoire. C'est un budget total ? je veux juste l'indiquer ? de tout près de 1,5 million de dollars, là, qui sont consacrés au soutien de ces écoles en région.

Et je terminerai en disant que j'ai pris bonne note du rapport qui nous indique l'importance de ces écoles. Je sais, honnêtement, parce que le député de Rivière-du-Loup m'en a parlé mais aussi parce que je suis allée sur le terrain à Rivière-du-Loup, comment, par exemple, l'École de musique à Rivière-du-Loup est un partenaire majeur de cette région, reconnue par tous les intervenants, qui n'est pas admissible, au moment où on se parle, à un soutien financier de la part de l'État. J'ai pris bonne note de cette situation et je peux vous dire ? et je prends à témoin mon équipe parce qu'ils le savent ? que, pour la prochaine année, j'ai l'intention d'appliquer beaucoup d'efforts pour qu'on soit capables de trouver une solution au soutien aux écoles de formation.

Je termine en vous disant ceci: l'ancienne titulaire du ministère, la députée de Bourget, avait débloqué une somme ? je le dis de mémoire ? de 200 000 $ pour la production, un, de l'étude, enfin de l'évaluation qu'on dit nationale, et également débloqué des sommes qui ont permis des projets pilotes, la tenue de ce qu'on appelle des projets pilotes dans trois régions du Québec, et la piste est intéressante. Peut-être qu'on pourra en reparler plus tard. Ça fait penser un peu à l'action qu'on veut mener par rapport aux musées. C'est le fait également d'être capable de parler d'un regroupement d'expertises, d'un regroupement de fonctions entre des institutions d'une région qui peuvent partager des ressources, qui peuvent partager des fonctions.

Après, le rapport dont vous parlez nous indique que ces projets pilotes semblent porteurs. Des actions également devraient être déployées au cours des prochains mois pour être capable d'appuyer aussi la poursuite de ces projets pilotes où des institutions de formation sont appelées à mieux travailler entre elles et à être complémentaires.

Un exemple tangible de ça ? je veux être très concrète ? dans une région donnée, vous pouvez trouver, sur un très grand territoire, deux à trois écoles de formation, parfois plus. Je pense à la Côte-Nord. Une école a de la difficulté à recruter un bon professeur de violoncelle et ne peut pas, sur cette seule base, penser être capable de payer le voyagement qu'implique le transport d'un professeur professionnel entre Québec et Sept-Îles, par exemple. Par contre, lorsqu'on est capable de favoriser une concertation entre différentes institutions de formation, là ils s'aperçoivent qu'ils sont capables entre eux d'établir certains objectifs et, par exemple, de se mettre ensemble pour être capables de payer un professeur qui vient tant de journées.

Je termine en disant... Et je vous donnais cet exemple-là, mais le vrai impact que ça devrait avoir, c'est l'établissement d'artistes professionnels dans les régions du Québec, et ça, je suis tout à fait convaincue que les écoles jouent un rôle important dans ce sens-là.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au leader de l'opposition, M. le député de Gouin.

Impact du budget de Télé-Québec
sur sa programmation

M. Boisclair: M. le Président, je reviens sur Télé-Québec. En premier commentaire, la ministre fait une lecture très, très obtuse de la situation en parlant de son cahier de crédits. Les chiffres qu'elle relate sont effectivement les bons lorsqu'on se réfère uniquement au cahier de crédits, mais tous ici doivent savoir que les budgets de Télé-Québec, crédits votés plus ajouts du ministère des Finances qui se sont faits, elle sait très bien que l'effort public de l'État ? 56,4 millions en 2001-2002, 59,3 millions en 2002-2003 et, 2003-2004, 61,8 ? c'est de l'argent des contribuables qui a bien sûr passé par différents chemins, mais au net ce sont des sommes, des piastres sonnantes et trébuchantes qui ont permis à Télé-Québec de se développer.

Le 5 millions de compressions, M. le Président, a un impact. La présidente de Télé-Québec est... la directrice de Télé-Québec est parmi nous aujourd'hui. Je comprends que vous... Je salue sa présence. Je ne voudrais pas la mettre dans une situation inconfortable et la confronter en votre présence, Mme la ministre, mais je veux savoir quel sera l'impact de la compression de 5 millions, où dans les employés, où dans la programmation, quel sera, vous qui vous drapez dans la transparence, quel sera l'impact de la compression de 5 millions, à laquelle il faut ajouter aussi les efforts d'autofinancement, puisque les coûts de système devront être financés par Télé-Québec, sachant aussi que le coût des productions a augmenté.

À l'Assemblée nationale, vous m'avez dit: Nenni! pas d'impact, Télé-Québec... Vous avez l'occasion de vous reprendre, de répondre à votre devoir de transparence. Où? Quelles portes ouvrez-vous à Télé-Québec? Les employés? Donc, réouverture de conventions collectives? Programmation? Quel est votre choix? Quel sera l'impact de cette compression?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je tiens à dire au député de Gouin, M. le Président, que ce dont il est question ici, c'est de chiffres comparables. Nous confiions à Télé-Québec 57 millions de dollars des argents des contribuables québécois pour que Télé-Québec remplisse cette mission de télévision publique, ayant cette mission culturelle et éducative, il y a 24 mois. L'année dernière, c'était une année exceptionnelle, compte tenu bien sûr de l'adoption tardive du budget du gouvernement du Québec, et Télé-Québec avait pris des engagements, et de façon responsable j'ai voulu éviter bien sûr des situations qui auraient été très dramatiques, justement d'avoir à réfuter des signatures de contrats, etc. De façon responsable, nous avons fait en sorte que Télé-Québec puisse assumer les décisions qu'elle avait prises en cours d'année dans cette année financière très avancée, lorsque, exceptionnellement, le budget du Québec est adopté en juillet comme l'année dernière.

Maintenant, nous comparons des situations tout à fait comparables. Il y a 24 mois ? ça ne fait pas cinq ans, ça ne fait pas 10 ans, il y a 24 mois ? Télé-Québec avait 57 millions de dollars, enfin un peu plus de 57 millions de dollars, pour assumer sa mission culturelle et éducative. En cours d'année, il s'est présenté peut-être des projets, certaines situations exceptionnelles, mais j'avais exactement décrit la même chose il y a quelques instants. Sous notre administration, il y a quelques mois, Télé-Québec nous a, par exemple, soumis un projet pour développer une vitrine culturelle au moyen des nouveaux médias, et nous y avons répondu en injectant 200 000 $ d'argent public qui n'était pas nécessairement prévu en début d'année financière, alors qu'en plus Télé-Québec, à ce moment-là, avait connu une hausse de crédits tout à fait exceptionnelle. Donc, je vous invite effectivement à comparer ce qui est comparable. Nous sommes en début d'année financière, à l'adoption des crédits, et, en ce début d'année financière, Télé-Québec a la même enveloppe budgétaire pour réaliser sa mission qu'elle avait il y a 24 mois.

Maintenant, on indiquait également que Télé-Québec a bien sûr cette possibilité de prendre des initiatives pour augmenter, par exemple, ses revenus autonomes. Donc, vous constaterez comme moi que le conseil d'administration de Télé-Québec, qui est l'instance qui prendra les décisions sur la gestion et l'administration des budgets de Télé-Québec, le conseil d'administration de Télé-Québec prendra également ses décisions à la lumière de cibles qui pourront être déployées, et j'imagine qu'il y aura des indicateurs pour voir si Télé-Québec rejoint bien ses cibles budgétaires, et les différentes décisions seront prises en cours d'année comme elle l'a fait il y a deux ans, lorsqu'on lui confiait le même montant.

n(16 h 50)n

Moi, j'affirme ceci: comme il y a 24 mois, Télé-Québec se voit confier plus de 10 % du budget du ministère de la Culture et des Communications. C'est une somme importante que nous lui confions avec plaisir. Elle a un rôle important, une mission culturelle et éducative d'importance, mais nous croyons qu'elle a, tout comme il y a 24 mois, les moyens de rencontrer ses objectifs en termes de programmation. Les décisions que vous m'invitez à commenter sont des décisions qui n'ont pas encore été prises au niveau du conseil d'administration de Télé-Québec. Mais je vous rappelle également que Télé-Québec connaît sa marge de manoeuvre pour cette année, elle connaît la marge de manoeuvre qui lui est confiée depuis déjà de nombreuses semaines, je dirais même de nombreux mois. En ce sens, je suis certaine que les administrateurs chevronnés de Télé-Québec ont construit les projets de cette année à la lumière d'une information qu'ils détiennent depuis déjà de nombreuses semaines et de nombreux mois.

Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Je comprends que la ministre dit simplement: Le conseil d'administration fera le boulot sale, le sale boulot; ils prendront les décisions. Moi, de mon point de vue, dit-elle, tout va pouvoir continuer comme avant. Comment la ministre peut-elle expliquer alors, si tout va si bien, que Télé-Québec puisse remplir son mandat alors qu'elle sait très bien que les coûts de production ont augmenté, et ce, indistinctement de ce qui peut se passer? Puis, les coûts de production, comment peut-elle expliquer que Télé-Québec sera capable de maintenir une diversité aussi grande dans sa grille alors qu'elle sait comme moi que les coûts de production ont augmenté?

Je donne juste un exemple. Pour 21 millions investis dans les licences et prestations de services, une valeur des devis de 54 millions pour cette année, alors que, l'an dernier, pour une somme de 25 millions, ils sont allés chercher 70 millions de devis. Augmentation donc considérable des coûts de production.

Alors, comment la ministre peut dire: Rien ne changera, alors qu'à ces coûts de production elle ajoute des compressions? Comment Télé-Québec pourra donc maintenir une diversité aussi grande dans sa programmation? Laquelle des émissions ? la question se pose ? laquelle des émissions devra sauter? Quel sera l'impact sur la grille dès cet été pour Télé-Québec? Est-ce que la ministre peut, par exemple, me confirmer qu'il n'y aura pas de production originale sur la grille horaire de l'été?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

M. Boisclair: Ou est-ce qu'elle préfère passer la parole à Mme la présidente de Télé-Québec?

Mme Beauchamp: Non, je... Comme je vous ai indiqué...

M. Boisclair: Est-ce que vous refusez qu'elle prenne la parole pour répondre à la question?

Mme Beauchamp: ...comme je vous ai indiqué d'entrée de jeu, comme l'année dernière, comme la députée de Bourget, avant moi, il y a deux ans, j'assume en totalité les décisions prises pour les crédits du ministère de la Culture et des Communications et je les défendrai.

M. Boisclair: Est-ce que vous refusez que la présidente de Télé-Québec s'adresse aux membres de la commission?

Mme Beauchamp: Les membres de la commission peuvent interpeller la présidente de Télé-Québec de différentes façons. Nous sommes dans un exercice budgétaire que j'assume entièrement comme membre de ce gouvernement. Je l'ai fait l'année dernière, j'ai assumé en totalité la défense de ces crédits. Et j'ai bel et bien remarqué que la députée de Bourget, avant moi, deux années consécutives, l'a fait de la même façon, en assumant entièrement la défense des crédits budgétaires qu'elle avait à défendre, et j'entends poursuivre dans la lignée de la députée de Bourget et assumer pleinement mes responsabilités en défendant les crédits qui me sont confiés.

Je vous indique ceci: je tiens à souligner ? je vous le disais ? que le 57 millions de dollars confié à Télé-Québec des argents des contribuables québécois est une somme comparable à ce qui lui avait été confié il y a 24 mois, 24 mois à peine, et également que c'est une somme de 2 millions de dollars supplémentaire à la moyenne confiée à Télé-Québec au cours des 10 dernières années. Mais justement votre question, elle est intéressante justement parce que le milieu télévisuel change, parce qu'il y a des défis colossaux à relever. Je pense juste à la question de la numérisation, la question de cette transformation technologique que devra vivre Télé-Québec. La question de la numérisation des équipements, vous savez comme moi que votre collègue le député de Richelieu avait livré à un journaliste ses réflexions en disant ceci, et je vous les rappelle. Les questions se posent. Il disait...

M. Boisclair: ...façon à décider autrement parce qu'il y avait des gens qui étaient capables de faire un débat au Conseil des ministres.

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, M. le député! M. le député, la ministre a la parole. Une personne à la fois, s'il vous plaît.

Mme Beauchamp: À ce que je sache, le député de Richelieu...

M. Boisclair: ...

Mme Beauchamp: Mais c'est intéressant, on s'entend.

Le Président (M. Cusano): Madame...

Mme Beauchamp: On vous promet ça pour une prochaine fois, ça, c'est sûr.

Le Président (M. Cusano): Madame... Un instant. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Beauchamp: Je vais donc vous rappeler ceci parce que c'est des enjeux fondamentaux puis qu'on ne peut pas porter des oeillères. On ne peut pas choisir de porter des oeillères et de se dire que le statu quo est la solution. Le statu quo pour moi n'est pas la solution, bien sûr, compte tenu de l'état des finances publiques du Québec mais aussi des enjeux qui nous interpellent.

Vous le savez comme moi, on sera moins à payer au Québec pour l'ensemble de notre État québécois. Il n'y a pas, ici, un discours idéologique, c'est la stricte réalité, et dans ce sens-là je considère que, par les sommes que nous confions à Télé-Québec ? 57 millions de dollars des argents des contribuables ? par l'investissement récent que l'on a fait ? 6 millions de dollars ? qui sera renouvelé l'année prochaine, en 2004-2005, de nouveau 6 millions de dollars pour soutenir la transformation, la numérisation des équipements, nous posons des gestes qui témoignent de cet attachement et de cette responsabilité qu'on assume pour que le Québec soit doté d'une télévision publique.

Mais maintenant il n'est pas question, ici, de porter des oeillères et, oui, il faut faire l'exercice de regarder comment Télé-Québec peut examiner ses processus d'affaires pour faire en sorte que le maximum de cet argent public soit dévolu à la mission culturelle et éducative. Moi, je suis sûre et certaine que les contribuables québécois, qui, oui, sont parmi les plus imposés en Amérique du Nord, que ces contribuables québécois sont d'accord pour payer de l'impôt pour appuyer cette mission incontournable qu'on a, comme gouvernement québécois, d'assurer une présence de la culture québécoise et un développement puis un rayonnement de la culture québécoise. J'ai cette profonde conviction qu'ils sont prêts à l'appuyer. Mais justement il faut s'assurer que ces deniers, que ces argents de l'effort de travail des contribuables québécois soient vraiment associés à une mission culturelle et éducative. Et, moi, j'invite, à l'aide de ce comité de travail, nous inviterons Télé-Québec à justement examiner s'il y a des pistes possibles de transformation de ses façons de faire pour justement faire en sorte qu'un maximum de l'engagement des Québécois et des Québécoises derrière Télé-Québec lui assure de remplir pleinement sa mission.

M. Boisclair: Mais, M. le Président, ce n'est pas ça, la question que je pose. Est-ce que la ministre maintient devant tous les membres de cette commission qu'il n'y aura pas d'impact sur les programmations, du fait des compressions qu'elle impose à Télé-Québec? Oui ou non? Et, si c'est oui, quel est cet impact?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Les discussions et la décision n'ont pas encore été prises au conseil d'administration de Télé-Québec. Mais j'affirme ceci: à même hauteur de crédits, 24 mois plus tard, 57 millions de dollars confiés en début d'année budgétaire par le gouvernement du Québec. Nous savons que Télé-Québec aura à sa disposition assurément le même montant pour réaliser sa programmation.

L'autre chose à mettre en lumière, c'est le fait que Télé-Québec connaît déjà depuis plusieurs mois le fait qu'elle reviendra à une base budgétaire correspondant à la base budgétaire de 2002-2003. J'estime donc que de façon responsable Télé-Québec se sera déjà préparée à cette mission que nous lui confions en ce moment avec 57 millions de dollars.

Je réitère le fait que, oui, nous serons à l'écoute ? et présents ? non seulement des résultats de ce comité de travail qui se penchera sur les processus d'affaires de Télé-Québec, mais nous serons également à l'écoute des projets qu'aura Télé-Québec. Nous l'avons été il y a à peine quelques semaines en appuyant Télé-Québec avec une somme supplémentaire de 200 000 $ pour une vitrine culturelle, donc l'utilisation des nouveaux médias, mais là vraiment plus liés à sa mission de promotion de la culture québécoise, et nous sommes ouverts. Mais ici, là, nous parlons des crédits. Au livre des crédits, la somme est comparable à celle d'il y a 24 mois. Il y a 24 mois, Télé-Québec a été capable de remplir sa mission culturelle et éducative, et nous croyons que nous l'appuyons de belle façon. Nous assurons la pérennité de cette télévision publique justement par les efforts demandés en termes de modernisation de ses façons de faire.

M. Boisclair: M. le Président, moi, ce que je demande à la ministre...

Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député.

M. Boisclair: ...M. le Président, c'est d'être à l'écoute des plus de 25 000 Québécois et Québécoises qui ont signé une pétition, qui demandent à la ministre de donner à Télé-Québec les moyens d'offrir à la population québécoise une alternative significative en télévision. La ministre sait comme moi ? et pourtant elle refuse de l'admettre ? qu'il y aura des impacts sur la programmation. Parfait. Changeons de sujet, elle ne veut pas en parler.

Renouvellement du contrat
de certains employés de Télé-Québec

Sur les employés, la ministre peut-elle confirmer qu'il y a une quarantaine d'employés de Télé-Québec qui en ce moment ont vu leurs contrats reconduits pour une seule période de trois mois? Si le conseil d'administration ne l'en a pas informée, j'aimerais qu'elle vérifie et qu'elle me dise quel sera l'impact, dans les prochains mois, des compressions qu'elle impose sur le nombre de personnes qui travaillent à Télé-Québec à la fois comme employés temps plein et sur le nombre d'employés contractuels.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je peux confirmer qu'il y a des contrats de travail à durée déterminée qui se terminaient, qui n'ont pas été renouvelés, et je vais demander qu'on me fournisse le chiffre exact à votre question.

Maintenant, le processus de gestion d'une télévision, compte tenu qu'il y a des revenus autonomes possibles, est un processus de gestion, et la décision ne se prend pas, vous le savez comme moi, ne se prend pas très longtemps d'avance, puisque la base d'embauche est justement sur la base de la réalisation de projets de production à l'interne ou pas à l'interne, etc. Donc, je vous dirais que le conseil d'administration de Télé-Québec va toujours suivre, à l'aide d'indicateurs, l'évolution, par exemple, des revenus autonomes.

Nous sommes très fiers de voir que Télé-Québec, au cours de la dernière année, a fait des efforts qui ont été couronnés d'un certain succès pour augmenter ses revenus autonomes. Qui sait, à la lumière des recommandations du comité de travail, de pistes qui pourront déjà être identifiées, s'il n'y a pas transformation au niveau des revenus autonomes, au niveau de la location de studios, etc., qui vont permettre, au fur et à mesure des semaines et à la lumière des projets de programmation, de décider du nombre d'employés nécessaires? Bien sûr, les employés permanents et les conventions collectives sont entièrement respectés, et la présidente du Conseil du trésor, dans son grand processus de modernisation, a affirmé ceci: les conventions collectives sont entièrement respectées.

Le Président (M. Cusano): Alors, M. le...

M. Boisclair: Alors, si elles sont respectées, quels sont les privilèges que la ministre...

Le Président (M. Cusano): M. le député. M. le député. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: ...veut enlever aux employés...

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Elle a été élue...

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin, s'il vous plaît! On va laisser la ministre terminer, et après ça je vais vous céder la parole.

n(17 heures)n

Mme Beauchamp: Je disais donc que les conventions collectives sont entièrement respectées, c'est un engagement de notre État. Maintenant, c'est clair que Télé-Québec a toujours fonctionné avec un certain nombre d'employés occasionnels avec des contrats à durée déterminée, c'est le propre d'une station de télévision de fonctionner ainsi, compte tenu des projets de programmation ou pas. Et donc c'est à la lumière justement, entre autres, soit d'une transformation des façons de faire à l'interne ou d'une augmentation des revenus autonomes que le conseil d'administration sera à même de prendre des décisions précises comme vous nous donnez. Maintenant, je veux...

M. Boisclair: Et, pendant que la ministre vérifie, est-ce que je peux lui demander... On a lu, dans les journaux, une de ses déclarations à l'effet que la ministre, M. le Président, souhaitait enlever des privilèges aux employés. La ministre peut-elle nous dire qu'est-ce qu'elle estime être un privilège qui ne devrait être accordé aux employés, qui l'est? Il y a tout ce débat sur la question des stationnements. Est-ce que la ministre plaide pour le maintien des conventions collectives, pour la réouverture des conventions collectives, ou si elle indique au conseil d'administration et à la direction de Télé-Québec de revoir d'autorité des dispositions de la convention collective, ouvrant ainsi la porte à des griefs?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Le message sera clair: tel qu'affirmé par la présidente du Conseil du trésor, dans tout le processus de modernisation de notre État, il doit y avoir respect des conventions collectives.

M. Boisclair: Est-ce que je peux inviter la ministre, qui, dans une logique que j'ai appelée manichéenne binaire, oppose les conditions de vie des artistes à des investissements dans les institutions, est-ce que je peux rappeler à la ministre que Télé-Québec, par son effort de réalisation, verse, bon an, mal an, à des comédiens, des artistes dont elle se soucie du revenu, des sommes de l'ordre annuellement de 4,6 millions, le plus bas en 2000-2001, montant jusqu'à 6,9 millions? Sur les cinq derniers exercices financiers, c'est près de 27 millions que Télé-Québec a offerts à des comédiens, aux artistes. Donc, 27 millions aux comédiens et, en musique, près de 4 millions qui ont été versés, 2,5 millions qui ont été versés à la figuration. Est-ce que la ministre, qui se soucie de la diversité des choix culturels offerts aux Québécois, ne devrait pas prendre la défense de cette institution, rappeler qu'elle contribue à la qualité de vie des artistes et que, par des émissions, par exemple, comme Belle et Bum, plusieurs artistes québécois ont accès à la télévision, télévision à laquelle ils ont de moins en moins accès, compte tenu du débat que vous savez sur la concentration? Un chiffre qui me vient sous les yeux: en 2003-2004, Belle et Bum a accueilli 153 invités, 26 émissions de saison, 153 invités, deux animateurs pour 26 émissions, environ 205 prestations réparties entre l'Union des artistes et la Guilde des musiciens. S'il n'y a pas là un effort fantastique pour soutenir la création québécoise, pour soutenir la condition de vie des artistes, je me demande quel exemple plus efficace elle peut nous proposer.

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Non, mais le député de Gouin a tout à fait raison, et c'est pour ça que nous confions 57 millions de dollars à Télé-Québec. C'est qu'elle joue pleinement son rôle de diffuseur public ayant une mission culturelle et éducative. Donc, ce n'est pas rien, c'est 57 millions de dollars. C'est exactement la somme que vous lui aviez confiée en début de mandat, dans le livre des crédits, lorsque votre formation politique formait le gouvernement, il y a 24 mois de ça.

Moi, je peux, ici, déclarer mon engagement à la préservation d'un réseau public dédié à la culture, au débat, à l'éducation, aux enjeux de notre société. Je considère qu'en confiant à Télé-Québec 57 millions de dollars et en l'interpellant dans la modernisation de ses processus d'affaires c'est la meilleure façon de garantir la pérennité de cette télévision publique, parce que nous sommes dans un contexte, comme je vous le disais, où le statu quo, que ce soit au ministère de la Culture, que ce soit dans différentes sociétés d'État, le statu quo ne peut pas être l'option défendue. Je vous rappelle...

M. Boisclair: Il reste une minute. Puisqu'il reste une minute et que je n'ai pas eu la réponse à ma question...

Mme Beauchamp: Oui, elle est ici.

M. Boisclair: Ça fait 10 minutes que j'assiste à un va-et-vient entre les gens du cabinet et la direction de Télé-Québec.

Le Président (M. Cusano): M. le député. M. le député de Gouin. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Son cabinet ne sait même pas quel sera l'impact des compressions sur les ressources humaines..

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: La ministre ne sait même pas quel sera l'impact des compressions.

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Ça, ça en dit long sur la qualité de la gestion, 10 minutes de discussion pour avoir la réponse à une question pourtant si simple.

Le Président (M. Cusano): Un instant. M. le député de Gouin, calmez-vous.

M. Boisclair: ...

Le Président (M. Cusano): Oui, oui. Calmez-vous, calmez-vous. Vous savez, vous pouvez poser la question de n'importe quelle façon que vous voulez, je n'ai pas à intervenir. La personne qui répond à la question répond à sa façon...

M. Boisclair: ...même pas l'impact de ses compressions, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Non, non, non. Non, non. Un instant. M. le député, ça fait assez longtemps que vous siégez dans cette Chambre pour savoir que vous avez le choix de poser la question à votre façon, et que la ministre a le choix d'y répondre à sa façon, et qu'on n'a pas à interpréter à savoir si c'est la bonne question et la bonne réponse ou la mauvaise question et la mauvaise réponse. Alors, Mme la ministre, 30 secondes pour terminer.

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je suis sûre que le député de Gouin tient à avoir une information précise qu'on va lui confirmer. Il y a donc neuf contractuels dont le contrat a pris fin le 31 mars dernier. 40 contractuels ont vu leur contrat renouvelé pour une période de trois mois.

M. Boisclair: Elle confirme qu'elle vient de l'apprendre, M. le Président. Catastrophe!

Le Président (M. Cusano): ...la parole à la députée de Chambly.

Mesures de protection
de la diversité des expressions culturelles

Mme Legault: Merci, M. le Président. Permettez-moi d'abord de vous dire que je partage entièrement l'opinion du député des Chutes-de-la-Chaudière quand il dit que la culture, que tout ce qui touche l'identité québécoise, c'est l'affaire de toutes les Québécoises et de tous les Québécois. Et pour ma part je suis confiante que Mme la ministre, avec son équipe, saura promouvoir puis contribuera d'une façon positive au rayonnement de notre culture, de nos créateurs ? en fait, j'ai envie de dire «de ce que nous sommes ici puis bien au-delà de nos frontières».

Ceci étant dit, ça m'amène à poser une question sur la diversité culturelle. On entend beaucoup parler de diversité culturelle puis de l'importance, hein, que ce principe revêt pour nous au Québec. C'est en octobre dernier, à l'UNESCO, que tous les États membres ont voté à l'unanimité... En fait, ils ont mandaté le directeur général de procéder à l'élaboration d'un avant-projet de convention sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques pour adoption à la prochaine conférence générale en 2005.

Ma question est la suivante: Que comptez-vous faire? Et comment comptez-vous contribuer à cette démarche?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci, Mme la députée. D'entrée jeu, je veux quand même me permettre de dire au député de Gouin que sa tactique me fait sourire parce que, juste pour vous dire, je lui ai dit que j'avais la réponse et il a poursuivi avec d'autres questions. J'avais le morceau de papier devant moi depuis déjà quelques minutes, il m'a posé d'autres questions, et je trouve sa tactique parlementaire plutôt amusante. Mais j'y reviendrai un peu plus loin dans notre étude de crédits. Je suis sûre que j'en aurai l'occasion, avec certaines déclarations qu'il a faites récemment sur la culture québécoise. Et je trouve que lui-même, aujourd'hui, de se draper dans ses élans de grande dignité concernant la culture québécoise me fait un peu sourire. Le député des Chutes-de-la-Chaudière a fait allusion à une récente rencontre, et je me fie à ses propos, où le député de Gouin a donc dit que, ah oui, la seule façon d'assurer le développement de la culture québécoise, c'était par la souveraineté. Et d'ailleurs le député de Gouin ne nous a toujours pas fait savoir sa position concernant l'appui qu'il donnera ? je l'espère ? dans la tradition de l'Assemblée nationale du Québec. Mais lui n'a toujours pas fait savoir s'il allait appuyer ou pas le projet de loi modifiant le statut professionnel de l'artiste afin de donner encore une meilleure assise à la protection de ce statut professionnel.

Dimanche dernier, dans le journal La Presse, on pouvait lire ceci ? c'est le député de Gouin qui parle: «...je crois que nous vivons dans une société qui produit de grands créateurs, de grands talents, mais nous ne vivons pas dans une société de culture.» Il parle, ici, du Québec. Permettez-moi de dire que je suis en complet désaccord avec lui, et je suis assez fière de voir un gouvernement du Québec qui prend ses responsabilités, qui investit plus de crédits en culture, qui le fait, entre autres, en appuyant une société d'État, une télévision publique, en y injectant plus de 10 % du budget de son ministère, en assurant la poursuite de sa mission culturelle et éducative, parce que, moi, à l'encontre de lui, je crois que le Québec est une société de culture, je le crois fermement, je le crois avec beaucoup de conviction, et je trouve que, à la lumière de cette déclaration qu'il a faite, lorsqu'il dit même que le Québec est une société qui ne se distingue pas des autres... Il a dit ça, qu'on n'est pas une société de culture, qu'on n'est pas une société qui se distingue des autres.

n(17 h 10)n

Je trouve que ses élans parlementaires d'aujourd'hui ne portent pas et que, ses vraies convictions, il les a dévoilées non seulement à la lumière de la récente rencontre qu'il a menée avec des gens du milieu culturel, où bien sûr à ce milieu culturel on offre toujours la même solution du côté du Parti québécois, mais également il les a dévoilées dans cette entrevue qui n'était pas politique, qui était intimiste. Mais là il a vraiment dévoilé sa vraie position, sa vraie opinion: le Québec n'est pas une société de culture, ne se distingue pas des autres. C'est vous, le porte-parole en matière de culture et communications du gouvernement du Québec, qui affirmez une telle chose. Je crois que vos élans d'aujourd'hui sonnent faux, tout simplement.

Mme la députée, je dois faire un lien. Puisque le Québec est une société de culture, puisque c'est si important quant à l'avenir même de notre identité, oui, le dossier de la diversité culturelle est un dossier extrêmement important. Je souligne ici d'entrée de jeu que, s'il y a un membre de la formation politique du Parti québécois qui croit que le Québec n'a pas vraiment de culture, n'est pas une société de culture ? je vais reprendre ses mots exacts ? bien je dois souligner ? ça me fait plaisir de le faire dans le même élan ? qu'il y a eu par contre de ses anciens collègues qui ont cru autrement.

Donc, c'est sous l'ancien gouvernement qu'il y a eu les premières actions de menées. Je pense, entre autres, à l'action de l'ancienne députée de Chambly, Mme Louise Beaudoin, des actions menées pour que le Québec soit un leader dans ce dossier de la diversité culturelle. Vous la remplacez admirablement, Mme la députée de Chambly. Mais il faut quand même rendre à César ce qui appartient à César, et c'est important, ici, de mentionner jusqu'à quel point ? et on doit en être fier ? jusqu'à quel point l'ensemble des intervenants de la société québécoise parlent ici d'une seule voix. J'espère bien sûr que le député de Gouin un jour se joindra à cette voix. Ça n'a jamais été très évident.

Mais voici la situation. Il y a donc cette préparation, cette discussion entourant la signature de grands accords de commerce au niveau international, et la tentation est forte que la culture, que les produits culturels soient intégrés à la table de discussion des services, que ce soit vu comme des services comme les autres. Et donc, dans ces accords de libéralisation du commerce, si ça devait être vu comme un service, un produit culturel, on sait que ça pourrait entraver la possibilité d'action des États en soutien à leur industrie culturelle, à leurs créateurs, à leurs produits culturels.

Je vous rappelle qu'au Canada, au Québec nous intervenons en soutien au milieu culturel de différentes façons, par exemple par des quotas. Par exemple, le quota de diffusion de chansons francophones sur les radios francophones au Québec, c'est extrêmement important comme mesure d'État pour le soutien à une chanson d'expression francophone, par des réglementations, par des subventions, par des crédits d'impôt.

Il est très clair, il faut se le dire, que, si on veut au Québec faire des films de qualité, ce n'est pas avec un marché francophone nord-américain d'environ 7 millions ou un peu plus de francophones en Amérique du Nord qu'on sera capable, que les producteurs de films seraient capables, sur cette stricte base de marché, de produire des films correspondant aux plus hauts standards auxquels on est habitués. Donc, il est important qu'un État comme l'État du Québec puisse conserver sa pleine marge de manoeuvre pour soutenir sa culture nationale.

Et je tiens aussi à préciser, Mme la députée, qu'il ne s'agit pas, ici, d'un discours de protectionnisme économique; il s'agit bel et bien... parce que nous savons où est notre intérêt au Québec. Nous avons toujours appuyé des principes de libre-échange. Nous avons 60 % de notre PIB qui s'appuie sur nos exportations. 85 % de ces exportations vont vers les États-Unis. Donc, nous savons que nous sommes une société qui prône la libéralisation des marchés et du commerce et nous y avons intérêt. Mais nous avons toujours affirmé ceci et nous l'avons confirmé par une décision au Conseil des ministres, le 3 septembre dernier: jamais, en matière de libéralisation du commerce, on n'abdiquera nos responsabilités et notre possibilité d'agir pour soutenir notre culture nationale. C'est ce qu'on appelle le thème de la diversité culturelle, parfois mépris au nom des notions d'intégration de communautés culturelles ? ce n'est pas ça dont il est question véritablement ? mais il est bel et bien du soutien de l'État au développement de sa propre culture.

Ce dossier a été piloté avec beaucoup de détermination non seulement par des membres du gouvernement précédent, mais également par l'actuel premier ministre du Québec, la ministre responsable des Relations internationales, le ministre responsable de l'Économie et bien sûr également par moi-même, la titulaire du ministère de la Culture et des Communications. Nous avons assisté, l'automne dernier, à un premier pas qu'on peut appeler une victoire, mais, il faut le mettre dans son bon contexte, c'est un premier pas autour du développement d'une convention internationale à signer entre plusieurs États. Cette convention, c'est maintenant l'UNESCO qui s'est vu confier le mandat de développer ce projet de convention internationale, ce que l'UNESCO appelle maintenant la diversité des expressions culturelles, je tiens à vous le souligner. Peut-être que, ce nouveau vocable, on doit aussi se l'approprier. Et il permet peut-être de se rapprocher un peu plus d'un discours relié vraiment à la notion de création, l'expression culturelle, plutôt qu'à des discours qui sont un peu plus assimilés aux enjeux reliés, par exemple, à l'intégration de nouveaux arrivants de communautés culturelles. Nous sommes bel et bien, ici, en matière de création artistique, d'expression culturelle.

Ce premier pas est extrêmement important, et je dois vous dire jusqu'à quel point le Québec est un État qui est leader dans ce dossier. Premièrement, le directeur général de l'UNESCO, M. Matsuura, a demandé à un Québécois, Me Ivan Bernier, à qui le gouvernement précédent avait confié le mandat de développer une étude sur la portée juridique d'un instrument, d'une convention sur la diversité culturelle... Eh bien, Me Ivan Bernier a été invité à titre d'expert dans le comité d'experts formé par M. Matsuura à l'UNESCO. C'est tout à son honneur, mais je pense également que c'est un honneur qui rejaillit sur les Québécois et les Québécoises.

Ce qui est extrêmement intéressant, c'est que, lors de la dernière mission du premier ministre du Québec à Paris, la semaine dernière, le premier geste posé ? et je vous dirai que c'est en débarquant d'avion ? ça a été d'aller à la rencontre du directeur général de l'UNESCO, M. Matsuura. Le premier ministre, je l'accompagnais, ainsi que la ministre des Relations internationales, et on a pu avoir la confirmation de l'état d'avancement du dossier. Ce qui est extrêmement intéressant ? puis on peut en être fier, mais également c'est un signal vers le futur ? c'est que l'aspect du développement d'une convention ? parce qu'il y a des gens qui planchent, là, en ce moment sur le développement d'une convention sur la diversité des expressions culturelles ? l'aspect qui semble le plus porteur et le plus fort en ce moment, c'est tout le chapitre consacré aux droits et obligations des États. Et ce qui est extrêmement intéressant ? et, je pense, c'est éloquent ? c'est qu'on a là-bas évoqué la contribution exceptionnelle du comité franco-québécois sur ce chapitre. C'était M. Ivan Bernier, c'était également Me Ruiz Fabri, pour la France, qui ont travaillé déjà, il y a quelque temps, au développement de cette notion de la responsabilité et des droits des États en matière d'expression culturelle, et on s'aperçoit que ces travaux, hein, ces travaux commandés par le Québec et la France ont une répercussion immédiate sur ce chapitre de la convention qu'on nous décrit en ce moment comme étant le plus fort.

Je vous disais que c'était percutant parce que non seulement nous déployons beaucoup d'efforts diplomatiques sur le dossier de la diversité des expressions culturelles, mais nous déployons également beaucoup d'efforts en termes de développement d'argumentaires. Et non seulement ce premier document issu du comité franco-québécois semble avoir porté des fruits, mais ça nous inspire pour continuer le travail de développement d'argumentaires pour bien alimenter et pour bien guider... Je le dis humblement, mais c'est quand même ça, l'impact, c'est de bien guider les travaux qui ont cours à l'UNESCO.

Donc, en ce moment même, le Québec travaille avec la France, le Canada, la Francophonie au développement d'argumentaires, par exemple, sur toute la notion de l'articulation de cette convention en matière d'expressions culturelles, l'articulation entre culture et commerce, comment doit se faire l'articulation entre cette convention et les autres accords dans le domaine du commerce, parce que, ici, au Québec, nous avons une position claire, unanime de tous les membres de l'Assemblée nationale, une position également en droite ligne avec les revendications de la société civile, c'est le fait que le développement de cette convention pour la diversité des expressions culturelles doit avoir un poids juridique suffisant pour être une convention qui va pouvoir être, je vous dirais... qui va pouvoir vivre de façon parallèle, par exemple, par rapport aux accords de libre-commerce. Il ne faut pas qu'on se retrouve, à la fin de tout ce processus, avec une convention qui serait subordonnée, par exemple, aux accords de libre-commerce, nous aurions échoué. L'idée, ici, est d'avoir une convention qui est à un même niveau, qui se situe en parallèle aux accords de libre-commerce. Mais bien sûr les débats sont inévitables sur ce lien entre le commerce et la culture, et autant se préparer par de bons argumentaires à déployer, et, en ce moment même, le Québec y travaille.

Le Québec travaille également à examiner comment, dans des sociétés, par exemple, comme la société américaine qu'on voit beaucoup comme une société ayant peu d'interventions de l'État et beaucoup d'interventions du secteur privé en soutien à la culture, comment derrière ça il y a des interventions de l'État, par exemple par des mesures fiscales, comment il y a des réglementations. Le secteur américain des télécommunications et des communications est extrêmement réglementé, faisant en sorte, par exemple, que, sur un même marché, un propriétaire ne peut pas être propriétaire à la fois d'une station de radio, d'un journal, d'une station de télévision, de magazines. Donc, nous voyons que même des États prônant haut et fort la libre circulation des idées et des images, même sur leur propre territoire, ont des réglementations. Donc, nous sommes en train de développer ces argumentaires, également des argumentaires, et ceci est extrêmement important...

n(17 h 20)n

Je vous dirais que je reviens de mon séjour à Paris, des rencontres avec l'UNESCO. J'ai tenu une rencontre de travail également multilatérale. À l'invitation du Québec, les représentants du Canada, du Liban, de la France à l'UNESCO étaient autour de la table, des représentants de la société civile, et nous avons identifié là où il y a encore beaucoup de travail à faire en accéléré, et c'est toute la question du soutien aux pays en développement. Bien sûr, les États comme le Québec qui ont des politiques culturelles savent bien où est leur intérêt, mais encore faut-il pouvoir dire à des pays qui n'ont pas les ressources financières pour se doter de politiques culturelles où peuvent être leurs intérêts dans le futur, dans une telle convention.

Certaines pistes de travail sont très prometteuses. On nous indique la sensibilité de certains États qui semblent aujourd'hui s'opposer à une telle convention, leur sensibilité autour d'enjeux, par exemple, de lutte au piratage, et il sera intéressant ? on va tenter de le faire ? de développer des argumentaires indiquant, par exemple, aux États-Unis que les États qui ont des politiques culturelles, qui défendent leur propre culture nationale par différents moyens, sont des États beaucoup plus sensibles à la lutte au piratage qu'un État qui ne soutient aucune industrie culturelle, aucun produit culturel, pas de culture nationale... aura très peu d'enjeux ou très peu d'incitatifs à lutter contre le piratage. Donc, on voit qu'il y a comme ça des argumentaires où le Québec est en ligne de front, je vous dirais, vraiment au premier rang pour le développement de ces argumentaires, mais en collaboration avec le Canada, la France, la Francophonie, notamment.

J'indique également que le premier ministre du Québec, Jean Charest... pardon, le premier ministre du Québec, le député de Sherbrooke, a, sur toutes les tribunes et sans exception, sur toutes les tribunes qu'il a occupées au niveau international, dans toutes les rencontres diplomatiques qu'il a menées jusqu'à maintenant, sans exception, soulevé la position du Québec en matière de développement de cette convention sur la diversité culturelle. Il l'a fait sur des tribunes qui n'étaient pas toujours évidentes, comme devant 500 gens d'affaires à New York, mais il n'a jamais raté une occasion de réaffirmer la position du Québec.

Nos instances diplomatiques, les différentes délégations du Québec à l'étranger, sont également mobilisées sur cette question. Il y a maintenant une lettre d'information périodique accessible pour nos responsables dans nos différentes délégations pour qu'ils... le rôle de chef de pôle pour pouvoir enfin rejoindre différents intervenants dans les différentes zones géographiques qu'ils desservent.

Et je termine en vous invitant à consulter le site Internet. Le gouvernement du Québec a investi dans un site Internet extrêmement important, très prolifique, un des meilleurs sur la question de la diversité culturelle. Je vous invite à aller le consulter. Vous allez y trouver jour après jour une multitude d'informations sur ce qui se passe à l'échelle de la planète dans ce dossier. Mais soyons fiers que le Québec parle d'une seule voix non seulement entre les titulaires du ministère de la Culture, des Finances, du Commerce, Relations internationales, premier ministre, mais parle également d'une seule voix à l'Assemblée nationale, d'une seule voix avec la société civile. Et, ce travail extraordinaire fait par la société civile québécoise, nous pouvons être fiers de cela. C'est avec beaucoup d'énergie qu'on va y consacrer notre sens des responsabilités, notre dévouement. Cette énergie, elle est déjà là parce que c'est un dossier extrêmement vital.

Je termine en disant qu'on est là, en train de débattre des crédits du ministère de la Culture. Moi, je suis fière de la hausse des crédits du ministère de la Culture, je suis fière des mesures fiscales en appui aux artistes, aux créateurs, à l'industrie du cinéma et de la télévision, mais je dis également sur toutes les tribunes que, dans le cours du mandat qui m'est confié, le dossier le plus important... la façon la plus tangible que je peux aider la culture québécoise, c'est en m'assurant du succès des travaux menés à l'UNESCO pour le développement de cette convention. Imaginez, dans cinq ans d'ici, ou dans deux ans, ou dans cinq ans, ou dans 10 ans d'ici, un État québécois qui ne serait plus en mesure de poser des gestes de soutien à sa culture nationale. Ce serait tout à fait tragique pour l'avenir de notre société. Donc, ma meilleure façon d'appuyer les créateurs, l'industrie québécoise, c'est par cet appui au développement de cette convention à l'UNESCO.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre.

Mme Legault: Je voudrais juste vous remercier pour la générosité de votre réponse.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole au leader de l'opposition et député de Gouin.

M. Boisclair: M. le Président, je souhaite autant de succès à la ministre à Ottawa qu'elle en a eu à l'UNESCO, parce que l'enjeu, il est bien sûr à l'UNESCO, mais il est beaucoup à Ottawa. Faut-il se rappeler qu'à chaque jour ? et la période de questions d'aujourd'hui était assez instructive ? nous avons vu le premier ministre, le ministre des Finances, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité, chacun à leur façon, expliquer leur colère à l'endroit du gouvernement fédéral qui est en train de conduire le Québec dans le fond d'un entonnoir, où le Québec, dans quelques années, financera de la santé, de la sécurité du revenu et quelques autres de l'éducation? Et la différence québécoise, bien elle sera gommée, parce qu'on n'en aura pas les moyens. Et je maintiens, et j'en suis fier, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, de penser que nous serions capables de mieux faire si, plutôt que d'envoyer 60 % de nos taxes et impôts à gouverner par une autre nation, la nation québécoise prenait la responsabilité de la gestion de cet argent. C'est une opinion qui est la mienne et qui est aussi celle de bien des Québécois. Nous n'avons pas la même, mais il me semble qu'il y a là une piste pour la suite des choses.

Forme de partenariat privilégiée
entre Télé-Québec et le secteur privé

Je veux ouvrir, M. le Président, sur la question des partenariats public-privé parce que la ministre en parle dans des termes très flous. Elle se fait incantatoire, la ministre, qui a appris, là, aujourd'hui, l'impact de ces compressions sur les employés. Elle avait bien sûr le papier devant elle, mais encore a-t-il fallu qu'on lui soumette un papier parce qu'elle ne le savait pas.

Est-ce que je peux demander à la ministre de s'informer ou elle-même de nous dire de son propre chef qu'est-ce qu'elle entend par un partenariat public-privé? Parce que, en termes d'actif, quand on regarde le bilan de Télé-Québec, on s'aperçoit qu'il n'y a pas là mer à boire. En termes d'actif en immobilisations, il y a pour 18 millions d'immobilisations. Puis, des immobilisations, si on va à la note 8, c'est pour apprendre qu'elles sont pour la plupart amorties, un amortissement accumulé significatif, un coût de remplacement de 60 millions, 46 % d'amortissement. Au net, donc, valeur au livre: 14 millions au niveau des actifs. Donc, qu'est-ce que la ministre souhaite? Quel genre de partenariats public-privé elle appelle pour Télé-Québec? Une cession des actifs? La gestion de certains actifs par le secteur privé? Davantage de productions privées par rapport à des productions maison? Qu'est-ce que la ministre veut dire lorsqu'elle parle de partenariats public-privé dans le cas de Télé-Québec?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Premièrement, M. le Président, vous rappeler le contexte dans lequel on travaille et jusqu'à quel point les sociétés modernes ont maintenant adopté de telles façons de faire des partenariats public-privé. Lorsqu'on entend ce vocable dans la bouche du député de Gouin, on a toujours l'impression qu'on assiste là à une forme de corruption de la façon de faire de l'État québécois. Alors que je reviens à cette visite que l'on a menée en France, à Paris, la semaine dernière, c'est une façon de faire qui a été adoptée dans certaines provinces canadiennes, en Angleterre et en France. En France, il y a des partenariats public-privé. Même dans cette société ? vous-même, vous décriviez d'entrée de jeu la République française comme étant cette société avec un fort engagement collectif en matière de culture ? eh bien, il y a eu une adaptation à des façons de faire plus modernes interpellant des partenaires privés pour la gestion des équipements. Donc, cette notion de partenariat public-privé, c'est une notion que nous allons examiner dans un ensemble de domaines.

Et je prends le temps d'indiquer au député de Gouin que le premier secteur où on va l'examiner, c'est bien sûr en matière de gestion et d'établissement d'équipements culturels. Je vous le rappelais, M. le député, mais il y a là une pression énorme sur le ministère de la Culture et des Communications. Même si on ne faisait rien comme développement d'équipements culturels au cours de notre mandat, au cours des deux prochaines années, même si on ne faisait rien au cours de ce mandat...

Là, ça ne vous dérange pas trop qu'on m'apporte des papiers, là? Ça va? Vous ne commenterez pas à chaque fois qu'on m'amène un papier?

M. Boisclair: ...parle de Télé-Québec.

Mme Beauchamp: Oui. Bien, moi, je vous amène le grand contexte dans...

M. Boisclair: Qu'est-ce que ça veut dire?

Mme Beauchamp: Non, c'est parce que ça m'amuse. On m'amène un papier, puis le député de Gouin est comme sur les ergots en disant: On lui amène un papier! Mais je suis en train de vous parler avec beaucoup de conviction de ce poids énorme que vous nous avez laissé sur les épaules, qu'est le service de la dette du ministère de la Culture et des Communications. Même si on ne faisait rien... Et là je vous signale qu'on a fait de quoi: au cours des derniers mois, nous avons investi 6 millions en immobilisations dans Télé-Québec pour ses équipements et le virage au numérique. Nous faisons de quoi, nous prenons nos responsabilités.

Mais, même si nous n'avions rien fait, si je ne fais rien au cours de la présente année, de l'autre année, le service de la dette passe de 18 % à 25 %. On reçoit les crédits du ministère de la Culture et des Communications, là, et d'entrée de jeu le quart... la situation que vous nous avez laissée fait que d'entrée de jeu le quart des crédits du ministère de la Culture et des Communications va en paiement d'intérêts. Moi, je n'appelle pas ça appuyer une culture québécoise vivante, surtout quand il y a d'autres façons de faire.

n(17 h 30)n

Nous allons donc examiner effectivement des partenariats public-privé en matière, entre autres, d'équipements culturels. Je vous signale, par exemple, que le projet de salle pour l'OSM et l'établissement de conservatoires de musique et d'art dramatique de Montréal fait l'objet en ce moment d'un développement de projets. Sept groupes se sont montrés intéressés par... En fait, 43 lettres d'intérêt avaient été annoncées d'entrée de jeu, puis ensuite sept groupes se sont montrés intéressés au développement d'infrastructures culturelles d'importance, d'équipements culturels majeurs pour la région de Montréal. Donc, vous voyez ici que c'est une façon de faire qu'on n'a pas le choix d'adopter. C'est une façon de faire qu'on se doit d'examiner. Donc, c'est le contexte que vous nous avez laissé.

Je vous indique ceci: le groupe de travail qui portera sur la mission culturelle, éducative et les processus d'affaires de Télé-Québec aura pour mandat effectivement, s'il y a ce genre de partenariats public-privé à établir en matière de gestion d'équipements, les antennes, etc. Je vous le dis d'entrée de jeu, moi, je veux laisser ce comité, qui sera composé de gens internes et de gens externes, examiner les possibilités. Autant ma collègue la présidente du Conseil du trésor a affirmé la chose suivante, que je partage: il n'y a pas, ici, de sine qua non, nous ne sommes pas en train de dire qu'il y a une obligation de procéder par partenariats public-privé. Ce ne sera pas vrai pour doter des régions du Québec d'équipements culturels, et nous verrons les conclusions des possibilités qui seront examinées par ce comité de travail. Moi, je ne présume de rien. Nous allons confier un mandat clair à un comité de travail où seront assis non seulement des gens de l'interne, mais également des gens provenant bien sûr du milieu éducatif, du milieu culturel pour examiner les différentes façons de faire, les différents processus d'affaires de Télé-Québec. Et, s'il y a des possibilités de partenariat avec le secteur privé dans certains domaines, ce comité sera invité à les examiner.

Je vous rappelle le processus: ce comité devrait, au tout début de l'automne ? je l'espère à la fin du mois d'août, par exemple, début du mois de septembre ? livrer, je dirais, un cahier de consultation, et ensuite, et c'est important pour moi, le soutien à notre télévision publique doit passer par des débats qui doivent se tenir de façon transparente, et donc il y aura consultation publique menée par ce comité de travail sur la base d'un document de consultation où les différents sujets que vous amenez aujourd'hui pourront être examinés.

Moi, je vous dis ceci: je n'ai pas dessiné au pouce carré à quoi ressemblera Télé-Québec au terme de ce processus. Ma préoccupation, c'est que les 57 millions de dollars qu'on lui confie cette année et les sommes qui lui seront confiées à l'avenir aillent le plus possible ? et nous l'avions écrit dans notre plateforme électorale ? soient le plus possible des dollars qui iront à la création, donc à la mission culturelle et éducative de Télé-Québec, plutôt qu'à la gestion. Si nous pouvons faire appel à des partenaires privés sur certains éléments des processus d'affaires administrés en ce moment par Télé-Québec, il faut examiner ces pistes. Elles seront soumises à la consultation publique, elles pourront être débattues.

Mais ce processus de modernisation... Et je tiens aussi à le dire, c'est important. Les partenariats public-privé ne sont pas synonymes de privatisation. Nous sommes devant des partenariats public-privé. Et, dans les nouvelles façons de faire ou les nouveaux enjeux qu'a à relever Télé-Québec, je pense qu'il est important de se rappeler ceci: je crois qu'il y a 10 ans, par exemple, lorsque s'est faite la dernière grande modernisation de Télé-Québec, je crois sincèrement qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui auraient pensé qu'un jour Télé-Québec aurait été partenaire avec Radio-Canada dans une nouvelle chaîne consacrée à une mission entièrement culturelle. Mais on voit jusqu'à quel point le monde télévisuel s'est modifié, jusqu'à quel point les façons de faire devront se modifier, entre autres par les grands enjeux liés à la numérisation, jusqu'à quel point vos propres collègues, des gens qui siègent encore à côté de vous, ont indiqué à une époque que les enjeux, entre autres, liés à la numérisation étaient des enjeux d'importance que devrait relever Télé-Québec. Nous sommes à la recherche de façons de faire qui vont permettre de relever ces enjeux.

Mais je voudrais également, pour le bénéfice de tous... parce que j'ai déjà entendu le député de Gouin... Non seulement il a dit donc que la société québécoise n'était pas une société de culture, mais je l'ai aussi déjà entendu dans le fond prôner le statu quo, dire qu'il ne fallait toucher à rien parce que la dernière grande modernisation de Télé-Québec avait eu lieu et que tout était correct comme ça. C'est à peu près ça qu'il a dit en Chambre. Or, je veux lui rappeler... je veux lui lire un extrait du rapport Facal. Ça a été fait sous son administration, c'est en 1997. C'est un collègue à lui qui a examiné l'avenir de différentes sociétés. Et voici ce qu'écrivait M. Facal. Il dit ceci: «Le groupe de travail ? parlant de son groupe ? est d'avis que Télé-Québec devrait revenir à sa mission éducative et la développer. Il invite Télé-Québec à devenir un centre de production d'émissions éducatives visant les clientèles des écoles du niveau primaire et secondaire. Cette production devrait notamment s'appuyer sur le faire-faire, permettant ainsi à un plus grand nombre d'artisans de cette industrie de participer à l'élaboration des contenus télévisuels. Le groupe convie également la société à prendre le virage multimédia afin de devenir un fournisseur important de matériel pour l'autoroute de l'information ? on s'approche bien sûr ici du gouvernement en ligne, vous l'aurez compris. Par ailleurs, le groupe de travail a constaté que Télé-Québec ne jouissait pas d'une très grande latitude en gestion des affaires, notamment en matière contractuelle. Le groupe estime qu'une société de cette envergure devrait être plus autonome sur le plan administratif. Il propose donc de maintenir la société de télédiffusion du Québec, mais il invite la ministre de la Culture et des Communications à prendre les moyens nécessaires afin que Télé-Québec corrige sa trajectoire et réalise pleinement son mandat éducatif.»

Je vous donne ceci à titre indicatif en vous disant qu'à peine deux ans après la grande transformation qu'a connue Télé-Québec ? c'était d'ailleurs, à ce moment-là, sous Jacques Parizeau, qui était titulaire du ministère de la Culture et des Communications ? à peine deux ans après cette très importante transformation, un membre de votre gouvernement signait un rapport disant ceci, mais je vais vous en lire un autre extrait pour vous indiquer certaines idées que je ne partage pas avec M. Facal. Le rapport Facal disait également ceci: «Le groupe de travail observe que Télé-Québec tente de concurrencer, dans certains domaines, les autres grands réseaux de télévision québécois, ce qu'elle ne pourra sans doute jamais faire. Même après avoir fait l'objet d'une restructuration pour la recentrer sur sa mission première, Télé-Québec a renoué avec le vedettariat. Ces initiatives sont coûteuses, rejoignent une faible portion de l'auditoire et l'éloignent de son mandat.»

Ça, voyez-vous, je ne partage pas tout à fait la vision des choses du groupe Facal. Premièrement, j'espère que Télé-Québec sera une télévision forte, capable de concurrencer dans ses secteurs, en matière éducative et culturelle, n'importe quelle autre chaîne de télévision. Télé-Québec, d'ailleurs, dans ses résultats ? et c'est important de le dire ? en termes d'auditoire, réussit de belle façon quand on la compare à des chaînes de télévision comparables. Donc, je n'ai absolument pas peur que Télé-Québec puisse concurrencer d'autres chaînes. C'est une télévision publique, les Québécois et les Québécoises la méritent et elle peut concurrencer d'autres chaînes. Le vedettariat à Télé-Québec, moi, personnellement, je n'ai aucun problème avec ça. Que Télé-Québec ait ses propres vedettes, puisse mettre en scène ? vous le disiez vous-même ? des artistes québécois, des animateurs et animatrices de grand calibre, ça ne permet que de mettre plus en lumière...

M. Boisclair: C'est une période d'échange, pas une période de discours, là. C'est une période d'échange, M. le Président.

Mme Beauchamp: ...ça permet de mettre plus en lumière encore...

M. Boisclair: J'ai posé une question simple, ça fait 10 minutes qu'elle parle.

Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais la collaboration de tout le monde. Vous savez fort bien, M. le député ? je vous l'ai dit tantôt ? que vous posez des questions à votre façon. La personne à qui la question est posée y répond à sa façon. Mais je demanderais la collaboration de tout le monde pour que les questions soient brèves et aussi que les réponses soient brèves.

M. Boisclair: Les questions sont brèves, M. le Président, c'est les réponses qui sont longues.

Le Président (M. Cusano): Plus de commentaire, M. le député, là. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: C'est amusant que le député de Gouin perde un peu de son calme au moment où on lui rappelle, justement au moment où on lui rappelle qu'à peine deux ans après la dernière restructuration majeure qu'a vécue Télé-Québec, sous les auspices de l'ancien premier ministre Jacques Parizeau, à peine deux ans après, voilà le rapport que signait un de ses collègues qui était assis à côté de lui, dans ces banquettes. Je lui indique donc que ce débat sur les nouvelles façons de faire de Télé-Québec... Sincèrement, je crois que M. Facal était responsable. Qu'au moins le débat se fasse sur des nouvelles façons de faire que peut adopter Télé-Québec. C'est un débat nécessaire. Même en 1997, votre formation politique, par le rapport Facal, écrivait en toutes lettres que c'était nécessaire. Je l'indique, vous avez écrit d'autre chose avec lequel je ne suis pas en accord. Moi, je crois que Télé-Québec ? la concurrence, j'y crois ? je crois que Télé-Québec peut concurrencer d'autres stations de télé. Je crois qu'il peut y avoir des vedettes en ondes à Télé-Québec. Je ne fais pas voeu de pauvreté pour Télé-Québec et je n'ai rien contre, entre autres, que des gens puissent y gagner leur vie de belle façon. Ça met juste plus en lumière la mission culturelle et éducative. Mais, vous, vous avez abdiqué devant la responsabilité qu'on doit relever, d'assurer l'avenir de Télé-Québec. Vous, vous avez abdiqué. Nous, on n'abdiquera pas. Et c'est la meilleure façon d'assurer la pérennité de cette télévision culturelle et éducative.

n(17 h 40)n

M. Boisclair: ...M. le Président, à laquelle je viens d'assister est aussi insignifiante que celle que je pourrais faire si je citais le ministre des Finances, M. Séguin, qui, lui, à pleines pages, a plaidé la privatisation de Télé-Québec. Alors, prenons que nous sommes, sur cette question, si vous voulez poursuivre dans cet exercice de politiciens politicailleux, tout simplement que nous sommes quittes, 1-1, puis on peut changer à d'autre chose puis revenir au fond des choses. J'essaie de participer de bonne foi et je demande à la ministre qu'est-ce qu'elle envisage comme type de partenariats public-privé. La cession de certains actifs? L'impartition dans le privé de certaines tâches faites en ce moment par des employés de Télé-Québec? Plus de programmation faite par le privé par opposition à de la programmation qui est faite à l'interne? Quels choix privilégie-t-elle? Parce qu'elle nous parle de ces grands partenariats public-privé, elle nous parle des grands principes, mais, dans la vie de tous les jours, elle ouvre la porte à quoi? Plus de programmation faite par le privé? Cession d'actif au secteur privé qui les gérerait, entre autres peut-être les antennes, ou délégation de certaines tâches faites à l'interne qui pourraient être faites par le privé? Dans tel cas, il faudrait une réouverture des conventions collectives. Quelle voie la ministre ouvre-t-elle?

Le Président (M. Cusano): La question est posée. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: M. le Président, je reconfirme ceci: le député de Gouin nous interpellait récemment pour que ce débat sur les nouvelles façons de faire de Télé-Québec, ce processus d'affaires sur, entre autres, les pistes possibles de partenariat public-privé fasse l'objet d'un débat public. Je réponds à sa demande, il y aura débat public. Mais, je vous dis, laissons travailler les experts dans le domaine, les gens qui ensemble, à la fois de l'interne et de l'externe, développeront une certaine vision des choses sur ce type de partenariat possible à développer. Ils soumettront un cahier soumis à la consultation sur les possibilités. Moi, je ne présume de rien. Vous voulez enferrer la discussion, enfermer la discussion en fermant, dans le fond, les possibilités et les hypothèses de travail. Je confirme ceci: le groupe de travail sera appelé, entre autres choses, non seulement, par exemple, sur l'avenir, comment on fait pour répondre à cet enjeu au niveau des équipements et de la numérisation de Télé-Québec, mais tout l'avenir du développement de services culturels et éducatifs en ligne et bien sûr les partenariats public-privé. Mais je ne vais pas, ici, enfermer le groupe de travail dans quelque hypothèse que ce soit, je pense que ce groupe de travail pourra examiner différentes pistes, faire preuve de créativité, comme d'ailleurs on est appelé à le faire également dans d'autres domaines, dans d'autres secteurs.

Donc, j'indique ceci au député de Gouin: la discussion aura lieu de façon publique, transparente. Je peux comparer peut-être le processus à celui qui avait été adopté par la députée de Bourget au moment où il y a eu cette discussion autour d'une politique du cinéma, donc un groupe de travail composé de gens de l'interne, de l'externe, débat public. Et je suis sûre que c'est une façon... On l'a vu dans le domaine du cinéma. J'ai par la suite, moi, validé les pistes d'atterrissage, si je peux dire, de cette consultation qui avait été menée à l'automne 2002, je les ai validées à la lumière des sommes qui m'avaient été confiées pour le milieu du cinéma et je suis sûre que c'est une façon de faire où de façon responsable nous serons en mesure d'identifier s'il y a ou pas de nouveaux processus d'affaires et des partenariats avec le secteur privé à établir pour la pérennité de Télé-Québec. Le débat se fera de façon publique à la lumière d'une réflexion qui sera faite, au cours des prochains mois, par un comité de travail où il y aura des gens à la fois de l'interne et de l'externe, provenant, entre autres, du milieu culturel et éducatif.

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Le problème est le suivant: pendant toute la campagne électorale, la députée de Sauvé a dit à tous les Québécois et Québécoises qu'elle était prête, qu'elle savait où elle s'en allait. Pendant plus d'un an, elle a travaillé avec les autorités centrales du Conseil du trésor, du ministère des Finances, dans des comités ministériels sur ce que devait être la grande oeuvre de réorganisation. Aujourd'hui, force nous est de constater qu'elle n'est pas capable de nous donner un seul exemple de ce que pourrait signifier le partenariat public-privé dans le cas de Télé-Québec. Elle dit: Je laisse le soin au comité... discussion transparente, ouverte. Ce qui serait transparent et ouvert, M. le Président, c'est que la ministre dépose les plans qu'elle a remis au Conseil du trésor. Ce qui serait transparent et ouvert, c'est qu'elle prenne un certain leadership et qu'elle balise le débat plutôt que d'évoquer comme ça l'appellation «partenariat public-privé» comme si c'était là une nouvelle idéologie qui venait d'être trouvée puis c'était la solution à tous nos maux. Elle devrait prendre du leadership, mettre des balises.

Je repose la question: Est-ce que la ministre souhaite davantage de productions au secteur privé? Est-ce qu'elle souhaite la cession de certains actifs? Est-ce qu'elle souhaite l'impartition de certaines fonctions actuellement faites par Télé-Québec? Quelle fasse preuve de cette transparence dans laquelle elle se drape, M. le Président, et qu'elle nous indique son choix. Elle était prête. Ça fait un an qu'elle travaille avec les autorités centrales. Elle ne peut pas, ici, simplement bégayer et nous dire: J'attends, je verrai, le comité décidera. Des gens dans son entourage discutent avec les autorités centrales du Conseil du trésor et des Finances. Des gens de son entourage discutent avec des gens du secteur privé. Elle ne peut nier que des rencontres ont lieu en ce moment avec des gens du secteur privé qui déjà veulent mettre la main sur certains actifs de Télé-Québec. En ce moment, des discussions ont lieu, qui vont aussi loin que dans son entourage et des membres de son cabinet. Qu'elle soit transparente et qu'elle nous dise où elle veut aller, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député. Mme la ministre, vous disposez de 30 secondes pour répondre à la question du député.

Mme Beauchamp: Le député vient de dire quelque chose qui est grave, et je l'interpelle. S'il a des noms à nommer, des membres de mon cabinet rencontrant... Je ne sais pas, vous dites, là, que ce seraient des grands méchants du secteur privé. Qu'il le dise. Moi, je confirme ceci: personnellement, comme ministre de la Culture et des Communications, je n'ai eu aucun échange. Je vous ai lu dans le journal, vous avez dit ça. Je me suis dit: Mon Dieu! je pense être toujours la mieux placée pour savoir avec qui je discute. Comme ministre de la Culture et des Communications, je n'ai eu aucun échange avec des représentants du secteur privé concernant Télé-Québec. Ici, le processus sera mené de façon transparente et avec l'aide effectivement de ressources provenant de l'interne de Télé-Québec et de l'externe.

Une voix: ...

Mme Beauchamp: Non, mais vous agitez des épouvantails, et je crois que ce n'est pas à votre honneur. La discussion sera menée de façon transparente. Vous avez plaidé. Vous demandez à la fois un débat puis une discussion menés de façon transparente, mais à la fois vous voudriez que je vous dépose un plan de travail où tout est fixé, puis là vous pourriez dire: Bien là ça ne vaut pas la peine d'aller consulter puis d'aller discuter. Non. Il y aura un processus avec des gens de l'interne et de l'externe...

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Votre temps est écoulé. Merci beaucoup. Et, avant de céder la parole à ma droite, j'aimerais vous rappeler que le mandat pour cet après-midi était d'une durée de trois heures, et, puisque nous avons commencé à 15 h 9, pour pouvoir poursuivre au-delà de 6 heures, j'ai besoin de votre consentement pour... Au-delà de 18 heures, pardon. Alors, on terminerait nos travaux à 18 h 9. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

M. Boisclair: ...je propose que le temps... parce que, demain, il y aura sans doute aussi un retard, compte tenu de l'ordre. Est-ce qu'on ne pourrait pas tout reprendre ça demain? C'est ce que je suggère aux membres de la commission, ça évite de briser des blocs. Sinon, j'accepte votre proposition, M. le Président.

Le Président (M. Cusano): Ça va? Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on finisse à 18 h 9? Merci. Alors, je cède la parole au député de Charlesbourg.

M. Mercier: Merci, M. le Président. Évidemment, toujours aussi rafraîchissant d'entendre les réponses de notre ministre, et donc c'est pour ça que ça passe très vite. Et merci, M. le Président. Vous permettrez de saluer également, par le fait même, le travail exemplaire de notre ministre, et je tiens aussi à saluer les efforts considérables de nos fonctionnaires, ici, qui font un travail exceptionnel.

Je l'ai dit ce matin, M. le Président, notre ministre est une excellente ambassadrice du Québec, et je le réitère, c'est excessivement rafraîchissant. Mais je ne saurais avoir autant d'éloges, M. le Président, pour le député de Gouin. Vous savez, le député de Gouin me surprend toujours de par ses remarques, et j'aurais cru tout à l'heure, en remarques préliminaires qu'il a faites, assister à une pièce de Molière, ou peut-être assister à des prouesses des Fourberies de Scapin, ou même peut-être à certains ébats de la Comédie humaine. Ça me surprend toujours d'entendre un parlementaire parler de grands hommes comme Malraux, De Gaulle, des grands bâtisseurs, des gens qui ont été à la défense de la grande et fière France dans le respect et la défense du respect des Français, de leur milieu de vie, de leur territoire ? bien important ? le respect des droits, des libertés, au nom de l'égalité, des droits démocratiques.

n(17 h 50)n

Alors je me surprends, je vous dirais, M. le Président ? toujours en remarques préliminaires, très rapidement ? que le député de Gouin nous fasse des leçons de science politique et d'histoire politique. Ce sont les mêmes gens, les mêmes parlementaires, à l'époque où ils étaient au pouvoir, qui ont étouffé les principes fondamentaux de la démocratie. Ce sont les mêmes gens, M. le Président, qui vont nous faire des leçons aujourd'hui. Et, pour employer une expression chère au député de Gouin qui dit vouloir se draper ou porte à Mme la ministre plusieurs intentions sous le mot «draper», ce sont les mêmes qui se sont drapés sur leur plateforme électorale afin de bâtir en quelque sorte leurs engagements, mais qui ont en même temps étouffé les Québécoises et les Québécois sous une dette accumulée qui, je vous dirais, est plutôt honteuse. Et ce sont les mêmes parlementaires, M. le Président... et c'est le même parlementaire en face de moi qui a refusé le droit de parole en préambule à mon collègue ici, en face de moi, des Chutes-de-la-Chaudière. Alors, je vous dirais, M. le Président, qu'on na pas de leçons à recevoir en histoire politique et en démocratie parlementaire. Et, si j'ai une petite suggestion peut-être, M. le Président, à faire à mon collègue d'en face, ce serait peut-être de lire ou relire Jean-Jacques Rousseau dans son très bon livre, son chef-d'oeuvre, De la démocratie.

M. le Président, je reviens à la culture...

M. Boisclair: ...

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin, vous n'avez pas la parole. Alors, vous pouvez continuer, M. le député de Charlesbourg.

M. Mercier: Alors, relisez Tocqueville en plus et Jean-Jacques Rousseau.

M. Boisclair: Ce n'est pas Rousseau qui a écrit De la démocratie.

Le Président (M. Cusano): M. le député de Gouin, s'il vous plaît.

M. Boisclair: Non, non, mais ça en dit long sur la compétence.

Le Président (M. Cusano): Non, non. Écoutez, là, c'est le député de Charlesbourg qui a la parole. M. le député, vous pouvez continuer dans votre allocution.

Soutien à l'industrie du cinéma
et de la production audiovisuelle

M. Mercier: Jean-Jacques Rousseau et Tocqueville. M. le Président, vous savez, la culture, c'est l'identité d'un peuple. La culture se transpose, M. le Président, dans l'expression artistique évidemment de ses artistes, de ses artisans, et résolument c'est l'artiste qui tend la main, de par son art, à nos citoyens et citoyennes.

Vous savez, nous avons parlé tout à l'heure de la culture télévisuelle, de la communication électronique par le biais de Télé-Québec et qui tend littéralement la main à toutes les Québécoises et à tous les Québécois, puis j'aimerais aborder, M. le Président, la question de la culture cinématographique. Évidemment, le Québec s'est démarqué, M. le Président, à plusieurs égards, cette année et depuis les deux dernières années, avec des chefs-d'oeuvre comme La grande séduction ou Gare Bar... Gaz Bar Blues, pardonnez-moi, M. le Président. Il y avait également Le piège d'Issoudun, Ma voisine danse le ska, 20 h 17 rue Darling, Les fils de Marie, et j'en passe.

Alors, j'aimerais savoir, M. le Président, de Mme la ministre: Qu'est-ce qui est fait concrètement pour que le public ait accès aux oeuvres cinématographiques québécoises?

Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. M. le Président, un petit commentaire d'entrée de jeu, parce qu'on peut bien vouloir, comme le député de Gouin, étaler sa culture comme il l'a fait dans un article récent, dans le journal La Presse donc de dimanche, quand sa conclusion, après avoir étalé toute cette culture, c'est le fait que nous ne vivons pas dans une société de culture, quand c'est sa conclusion pour le Québec qu'on connaît d'aujourd'hui, je pense qu'on ne peut pas se permettre effectivement de faire la leçon à grand monde et surtout pas s'amuser comme il le fait ici comme membre temporaire ? heureusement ? de la Commission de la culture et des communications. Je le rappelle, c'est ça, sa conclusion. C'est quand même... Il est le porte-parole du Parti québécois en matière de culture et de communications, et sa conclusion, sa conclusion à lui, c'est que nous ne vivons pas dans une société de culture. Comment est-ce qu'il peut dire ça du Québec? Comment est-ce qu'il peut dire ça du Québec, des créateurs québécois?

M. Boisclair: ...

Une voix: ...c'est fatigant, on n'entend pas.

Le Président (M. Cusano): Non, je suis très conscient de ça. M. le député de Gouin, je vous demanderais de...

M. Boisclair: Qu'on m'invite à faire un débat. Moi, je suis prêt n'importe quand.

Le Président (M. Cusano): Non, non, non! Non, non, non! Vous savez fort bien que la parole maintenant est à la ministre, et elle n'est pas à aucun autre député. Mme la ministre, vous pouvez poursuivre.

Mme Beauchamp: Mais il a aussi dit qu'on n'était pas une société qui se distinguait des autres. Il faut le faire, là, parler comme ça du Québec, quand même, quand on est porte-parole en matière de culture et de communications! Je réitère: il a beau vouloir étaler sa culture, quand sa conclusion personnelle, c'est celle qu'on peut lire dans le journal La Presse de dimanche, moi, je pense que le Parti québécois a un problème comme défenseur quand son porte-parole a cette propre vision du Québec, n'est pas capable plus que ça d'être à la défense de la culture québécoise.

En matière de cinéma, vous l'avez indiqué, le Québec a connu des succès sans précédent dont on peut être fier. Mais le gouvernement du Québec a choisi par ailleurs d'investir 15 millions de dollars en aides qu'on appelle des aides sélectives pour soutenir certains aspects de la production cinématographique québécoise audiovisuelle, mais également tout cet aspect de l'accessibilité au cinéma dans les différentes régions du Québec. Je dirais: L'effort le plus important fait en matière de soutien à la production audiovisuelle, cinématographique, télévisuelle, c'est au moyen de crédits d'impôt. Donc, je vous l'indiquais dans mes remarques préliminaires, ce sera environ 110 millions de dollars, l'effort de l'État québécois en soutien à la production audiovisuelle par des crédits d'impôt.

Maintenant, les crédits d'impôt, c'est une aide qu'on appelle automatique. Donc, le producteur du film doit faire la démonstration qu'il répond à certains critères, que c'est une production québécoise donc en termes de présence de créateurs québécois dans sa production, mais ensuite il a droit à un remboursement sur la base des emplois qu'il a créés. Donc, c'est une aide automatique, et, après beaucoup de discussions avec le milieu du cinéma québécois et à la lumière aussi, je dirais, de l'augmentation exponentielle des crédits d'impôt, qui sont passés, là, en 10 ans ? je le dis de mémoire ? mais de 10 ou 13 millions à 120 millions de dollars lorsque nous sommes arrivés, le milieu du cinéma québécois, je dirais, avec beaucoup de maturité, a compris qu'il y avait peut-être un réajustement à faire, d'autant plus si on veut, comme État québécois, être capable d'intervenir sur certaines cibles particulières.

Une des choses qui m'est apparue évidente et qui m'a préoccupée, qui m'est apparue évidente, c'est qu'on s'aperçoit que les films québécois tournés en anglais, ce sont des films québécois ? on peut en être fier, ils sont tournés en anglais ? mais les productions tournées en langue anglaise bénéficient de budgets de production systématiquement plus élevés qu'un film produit en français. C'est l'effet du marché. Ils sont capables d'établir des alliances, des partenariats avec des diffuseurs, et tout ça, sur un plus grand marché où l'oeuvre a une certaine valeur, et donc ça fait en sorte que les budgets de production sont systématiquement plus élevés. Et, devant cet état de fait, je pense que l'État québécois, qui, entre autres, a prôné une culture où on met en valeur avec beaucoup de fierté notre langue commune qui est le français, se devait d'agir avec des aides sélectives pour être capable de bonifier les budgets de production des longs métrages tournés en français. Donc, c'est le genre d'actions que nous avons menées, là, au cours des derniers mois.

Ça ne veut pas dire nécessairement donc beaucoup plus de films tournés. Vous savez, avec cette enveloppe, ça ne veut pas dire nécessairement beaucoup plus de films tournés, mais ça veut dire assurément de meilleurs budgets de production pour les films tournés en français. Et c'est quelque chose d'important parce que les artisans du milieu du cinéma, puis entre autres les comédiens et les comédiennes, nous ont souvent parlé, vous savez, de ces productions faites dans un temps extrêmement rapide, très contraignant, très exigeant pour les artistes québécois, où une production auparavant tournée en 40, 45 jours est maintenant tournée en 29, 30 jours. Donc, cette bonification des devis de production aide également à assurer une meilleure condition de pratique de la part des artisans et des artistes québécois.

Je veux également vous souligner qu'on a accordé des montants supplémentaires pour les arts médiatiques, également pour le développement de projets, et je peux vous dire aussi que mes discussions avec des vis-à-vis en France m'amènent à réitérer cette conclusion: le succès de notre cinéma repose sur la qualité des projets, c'est-à-dire le développement de scénarios. Aux États-Unis ? mais on sait qu'on parle, ici, un peu de la mecque, si vous me permettez l'expression, de la production cinématographique ? on me rapportait qu'un producteur avait au moins environ 10 projets de scénario avant d'en réaliser un, et récemment on me disait que c'était encore plus que ça, alors qu'au Québec un producteur qui veut faire vivre sa boîte de production, conserver son emploi, ses artisans, et tout ça, doit pratiquement mettre en production un projet sur trois. Donc, on voit, ici, que parfois peut-être que les projets de scénario n'ont pas atteint leur pleine maturité, mais les gens sont comme un peu pressés de passer à la production. Et donc nous avons ajouté des sommes à la fois de soutien pour le développement de projets chez les producteurs mais également auprès des individus, c'est-à-dire des scénaristes, qui ont aussi droit maintenant à certaines aides en termes de développement de projets, on pourrait dire carrément développement de scénarios.

n(18 heures)n

Il y a des volets de ce plan, au niveau du soutien au cinéma, qui me sont très importants. Je vous parlais de favoriser la production en français, de stimuler la création ? c'est un peu ça ? par, entre autres, l'aide aux projets, mais il y a également le fait d'encourager la diversité et l'accès. On parlait de diversité culturelle, tantôt, de la diversité des expressions culturelles, qu'on doit assurer notre propre capacité à exprimer notre culture nationale, mais au Québec ça doit se traduire également par une ouverture à la culture des autres, à notre propre culture puis à la culture des autres à l'échelle de la planète. C'est Robert Pilon, de la Coalition pour la diversité culturelle, qui me disait qu'au moment où on se parle, à l'échelle de la planète, il y a environ 87 % des films projetés sur les écrans qui proviennent des États-Unis. Ici même, au Québec, je l'avais entendu en commission parlementaire, dans mes visites, dans mes tournées faites dans des régions du Québec, malheureusement il est parfois difficile, pour des citoyens de certaines régions du Québec, d'avoir accès au film québécois ou encore au film étranger, par exemple, qui n'est pas le «blockbuster» américain. Donc, nous avons fait en sorte de pouvoir encourager la diversité du cinéma sur nos écrans, l'accès au cinéma sur nos écrans, entre autres, par une panoplie de projets qui ont pu naître dans différentes régions du Québec.

Je suis particulièrement fière, pour vous donner un exemple, d'un projet sur la Côte-Nord où quatre municipalités ? je vais les dire de mémoire ? Sept-Îles, Forestville, Fermont et...

Une voix: Port-Cartier.

Mme Beauchamp: Port-Cartier ? merci beaucoup, merci beaucoup ? n'avaient pas accès, sur des écrans, à un cinéma québécois, et là, d'ailleurs avec la collaboration de propriétaires privés de salles, peuvent maintenant faire venir des copies de films qui ne seraient pas autrement projetés sur leurs écrans. Il y a certaines de ces populations ? je pense à Port-Cartier ? qui n'avaient pas accès du tout même à un écran de cinéma et qui, là, maintenant y auront accès, et également la même chose à Fermont. Donc, on voit que c'est des initiatives locales, régionales faites en partenariat avec les gens des régions, parfois en partenariat avec le secteur privé, avec des propriétaires privés de salles, qui permettent de donner accès à ce cinéma québécois dans différentes régions du Québec.

Il y a des actions également pour, par exemple, tout simplement aider à la circulation de copies de films. Les gens ne réalisent pas toujours qu'une copie de film, c'est quelque chose qui coûte extrêmement cher, qui est extrêmement onéreux pour le producteur. C'est pour ça que, dans les articles, vous allez voir... Par exemple, on se vante que La grande séduction est sur 150 écrans et même maintenant un peu plus en France ou que Les invasions barbares était projeté sur 300 écrans lors de sa sortie. Ça signifie un investissement pour avoir 150 ou 300 copies de films. C'est un investissement important qui traduit dans le fond l'espérance du producteur et du diffuseur dans le succès du film. Mais donc au Québec parfois on avait des problèmes à tout simplement aider le plus petit producteur, par exemple, à avoir un nombre suffisant de copies de films, de courts métrages, de longs métrages pour la diffusion dans les salles, et nous sommes intervenus par des aides également donc dans la copie de films.

Une action importante, très importante, c'est en matière de patrimoine. Nous avons, dans la dernière année, confié 650 000 $ à la Cinémathèque québécoise pour qu'elle puisse se préparer à un mandat fort important qu'elle aura, un mandat au niveau de la conservation, donc d'assurer le patrimoine québécois en matière cinématographique. J'ai rencontré récemment le ministre de la Culture du Liban, qui me disait: Est-ce qu'on peut avoir votre aide en matière de conservation du patrimoine cinématographique? Et je lui disais que j'étais très fière de la Cinémathèque québécoise, mais qu'il était peut-être questionnant de voir qu'au Québec nous n'avions toujours pas de loi obligeant au dépôt légal des copies de films ou des productions vidéo, cinématographiques. C'est quelque chose qui sera corrigé au cours des prochains mois, et déjà donc la Cinémathèque québécoise, grâce à un investissement ? j'ai dit «650 000 $», c'est 550 000 $, hein? merci, Mme Verge ? donc de 550 000 $ est en train de préparer ses réserves pour pouvoir accueillir donc le dépôt légal.

Je termine en soulignant, parce que ça aussi pour moi c'est important, le fait qu'on a reconnu l'importance de procéder à l'éducation cinématographique, et il y a donc une somme de 100 000 $ qui a été...

Une voix: ...

Mme Beauchamp: 150 000 $? Merci. C'est le 50 de tantôt, là. Il y a une somme de 150 000 $ qui a été investie en termes d'éducation cinématographique. Plus particulièrement, nous avons accordé grande confiance à l'organisme L'Oeil cinéma. Et j'ai assisté moi-même à des activités éducatives scolaires ? je pense que j'étais à Rimouski, si je ne me trompe pas ? où on éduque nos enfants à être capables de lire de façon intelligente ce qu'ils voient se dérouler sous leurs yeux. Le cinéma est une carte de visite puissante pour les différentes cultures. C'est un objet de consommation culturelle d'importance chez nos jeunes, et je crois qu'il faut les habiliter à pouvoir exercer un esprit critique, à pouvoir apprécier à sa juste valeur l'effort de création qu'ils ont sous les yeux et à mieux lire finalement les productions cinématographiques. C'est le genre d'efforts qui ont été faits par les mesures de soutien pour le cinéma et l'audiovisuel québécois.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Bellechasse, en vous indiquant...

Mme Vien: Vous m'accordez combien?

Le Président (M. Cusano): ...qu'on dispose de trois minutes.

Aide apportée aux régions en matière de culture

Mme Vien: C'est l'abondance, trois minutes. Alors, on va faire... Sans doute, le chemin sur lequel je veux vous amener, Mme la ministre, on devra le continuer demain parce que je pense que c'est un sujet qui est trop vaste pour le circonscrire à l'intérieur de trois minutes. Ceci étant dit, vous savez qu'à chaque fois que j'en ai l'occasion je parle des régions. Je ne suis pas d'une région éloignée, mais je suis d'une région intermédiaire qui est Bellechasse, à l'intérieur de Chaudière-Appalaches. Il y a beaucoup de choses qui se font en culture chez nous, dans nos petits villages, dans nos petits patelins. Entre autres, la semaine dernière, vendredi, je suis allée à la polyvalente de Saint-Anselme pour voir une pièce de théâtre tout à fait fabuleuse montée par un nombre incroyable d'étudiants de la première à la cinquième secondaire, des décors tout à fait fabuleux, donc toute une chaîne d'artisans qui ont collaboré à cette initiative heureuse.

Moi, ce que je veux savoir, Mme la ministre... Et en même temps je sais qu'il y a des signatures d'ententes, de protocoles qui se signent actuellement entre le MCC et différents intervenants dans chacune des régions. Dernièrement, si ma mémoire est bonne, la MRC de Bellechasse a signé une entente d'ailleurs avec le ministère de la Culture et des Communications. C'est bien, c'est encourageant. En fait, à quel genre d'approche, d'outils on doit s'attendre pour la suite des choses? Parce que c'est bien, Montréal, c'est bien, Québec, mais il y a ailleurs aussi en même temps, et les gens ont envie de développer de la culture en région.

Le Président (M. Cusano): Alors, la question est posée. Il vous reste une longue minute, Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, on va y revenir demain, mais vous indiquer que c'était dans mes priorités de pouvoir faire une tournée des régions lorsque je suis arrivée, là, à la tête du ministère de la Culture et des Communications. Tout comme vous, je partage... Je suis une députée montréalaise, mais tout comme vous je partage la conviction qu'on ne peut pas parler d'une culture québécoise saine si elle ne se déploie pas pour vrai dans toutes les régions du Québec. Entre autres ? je l'indiquais tantôt au député de Chutes-de-la-Chaudière ? entre autres, je suis préoccupée par la présence d'artistes professionnels dans les régions capables de vivre de leur art dans les différentes régions. Il y a là un défi important, mais il faut absolument le relever. Je pense également aux communautés autochtones qui également peuvent être très prolifiques pour contribuer, là, au développement de la culture québécoise.

Il y a beaucoup de choses à dire, mais je me contenterai d'indiquer ceci: dans la dernière année, nous avons fait le choix d'investir 1 million de dollars supplémentaires dans le budget de signature de ces ententes de partenariat entre le ministère de la Culture et des Communications... Ça a permis la signature d'environ ? je le dis de mémoire ? 14 nouvelles ententes, incluant, par exemple, Matane, Rimouski, Kamouraska, Val-d'Or, Montmagny, Sainte-Marie, Bellechasse, Chambly, Val-Saint-François, etc.

Je prends le temps de dire ceci: ce qui est intéressant pour moi, c'est que ces communautés de vie, ces régions, ces municipalités, ces MRC se sont dotées d'une politique culturelle. Elles ont des cibles de travail très précises, élaborées avec leurs communautés culturelles, et les argents que nous investissons dans ces ententes sont des argents supplémentaires aux investissements faits par le ministère, le CALQ et la SODEC. Il y a là un véritable effet de levier où en partenariat nous sommes capables d'accomplir des projets significatifs supplémentaires dans les différentes régions du Québec.

Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. Et, sur cela, j'ajourne les travaux de la commission à demain, mercredi le 12 mai, après les affaires courantes, ici même, à la salle du Conseil législatif. Bonne soirée!

(Fin de la séance à 18 h 9)


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