(Neuf heures trente-deux minutes)
Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale à l'égard du document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Mercier (Charlesbourg) est remplacé par M. Cholette (Hull); M. Moreau (Marguerite-D'Youville) est remplacé par M. Marsan (Robert-Baldwin); Mme Vien (Bellechasse) est remplacée par M. Morin (Montmagny-L'Islet); et M. Bourdeau est remplacé par M. Dion (Saint-Hyacinthe).
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la secrétaire.
L'ordre du jour d'aujourd'hui est le suivant: cet avant-midi, nous entendrons la ville de Québec, puis conjointement le Service de la famille chinoise, le Centre Sino-Québec de la Rive-Sud et la Fédération des professionnels chinois, et enfin le Barreau du Québec; cet après-midi, nous entendrons le Conseil régional de concertation et de développement de la région de Québec, Québec Multi-Plus, l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais et le Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes.
Auditions (suite)
Alors, je vois que nos premiers invités sont déjà en place depuis quelques minutes. Pour les fins du Journal des débats, je demanderais à nos invités de s'identifier, s'il vous plaît.
Ville de Québec
M. L'Allier (Jean-Paul): Merci, M. le Président. Jean-Paul L'Allier, maire de Québec. Je suis accompagné de Mme Anne Bourget, qui est membre du comité exécutif de la ville de Québec et responsable d'une façon particulière de tous les dossiers reliés à l'immigration.
Le Président (M. Cusano): Merci et bienvenue, M. le maire. Je crois que vous connaissez assez bien le fonctionnement d'une commission parlementaire, mais je dois vous le rappeler quand même. Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation. Elle sera suivie d'un échange de 40... une période de 40 minutes maximum pour un échange avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous, M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je voudrais vous remercier de l'invitation que vous nous avez faite à faire le point avec vous sur l'action que la ville de Québec mène ou tente de mener en matière d'immigration. La dernière fois que nous avons participé à une commission parlementaire, je pense que c'était en l'an 2002, et à ce moment-là nous avions plaidé pour que Québec soit reconnue par le ministère de l'Immigration, quel que soit le nom qu'il avait à l'époque, là, comme étant le deuxième pôle d'immigration à développer au Québec. Pourquoi? Parce que la région de Québec, en population, et maintenant depuis la ville nouvelle, est la deuxième ville en importance au Québec, après Montréal, avec 500 000 et quelques habitants, et que nous sommes une région ? on va le dire dans la présentation sommaire du mémoire ? qui a besoin de l'immigration pour toute une série de raisons. Pour nous, ce n'est pas une politique d'esthétique, c'est une politique de vie et de développement.
Alors, si vous me permettez, je vais lire le sommaire de notre mémoire, le mémoire que nous avons préparé minutieusement, qui n'est pas très long. Je pense que vous l'avez en main sous forme de ce petit cahier qui s'appelle Québec, mon choix de vie. Le mémoire se trouve dans ce cahier, ainsi que le résumé du mémoire qui se fait sur deux pages. Je lirai ce sommaire pour ne pas vous ennuyer avec l'ensemble du mémoire. Non pas que c'est ennuyant, mais c'est que ce sera plus intéressant d'échanger avec vous sur les questions qui y sont soulevées. Le sommaire que je lirai résume bien la situation. Si vous êtes d'accord, je demanderai par la suite à ma collègue, Anne Bourget, de ramasser les quelques points forts que nous voulons porter à votre attention, et nous pourrons faire ça, le tout, à l'intérieur d'une quinzaine de minutes pour vous donner ensuite toute l'opportunité d'échanger avec nous.
Les enjeux associés à l'immigration pour Québec, pour la capitale, sont de trois ordres: démographique, économique, social. Démographique, puisque l'immigration contribue à ralentir les effets de la baisse du taux de natalité et du vieillissement de la population; économique, puisque les immigrantes et les immigrants combleront pour une large part l'augmentation prévue de main-d'oeuvre en entreprise dans les années à venir; social, puisque l'immigration contribue à l'ouverture de la capitale aux autres cultures et, par là, à son internationalisation.
Quelles sont les actions qui ont été menées de 2001 à 2003 par la ville de Québec en matière d'immigration? À la suite d'une première entente de collaboration avec le gouvernement du Québec, la ville a mis en oeuvre, en 2001, son premier plan triennal d'immigration. Très vite, elle assure un leadership régional dans les domaines de l'attraction des immigrants et des immigrantes, de l'intégration et du rapprochement culturel.
Quand on l'énonce, ça peut avoir l'air facile. Quand on le vit sur le terrain, c'est extrêmement difficile d'atteindre les objectifs. Donc, c'est un travail à long terme, un travail constant et permanent. Je voudrais le dire tout de suite pour ne pas donner l'impression que, bien, le plan triennal a réglé tous les problèmes et que finalement on n'en a plus. Les problèmes qu'on a voulu régler au début sont encore là, sont encore présents, et les circonstances dans lesquelles cette politique a été souhaitée et ce positionnement comme deuxième pôle a été souhaité et obtenu sont encore les mêmes.
Les faits saillants de l'action municipale sont la production de documents d'information faisant connaître Québec comme site d'établissement... Et, incidemment, hier, on faisait un point de presse pour rendre public un document que vous avez devant vous, qui est le petit guide à l'intention des immigrants à la recherche d'un logement. Et on pourra en parler tout à l'heure pour vous dire pourquoi on a fait ça, même si effectivement on est dans une région où il y a pénurie de logements. Il y a des motifs pour faire ce guide. Ne serait-ce que parce qu'il y a pénurie de logements, il faut aider ceux qui ont naturellement plus de difficultés à en obtenir à trouver un chemin qui peut conduire à un logement. Et on a aussi rendu public un cédérom, dont Mme Bourget va vous parler, sous le thème de La ville de Québec, mon choix de vie. Incidemment, on travaille toujours, dans ces questions-là, à chaque fois qu'on le fait en tout cas, dans les quatre langues des Amériques. Ça nous paraît important puisqu'une des cibles, si je peux employer cette expression, c'est de se montrer accueillants d'une façon particulière pour ceux qui viennent des Amériques, et en particulier l'Amérique centrale et l'Amérique latine.
Donc, la production de documents d'information, la réalisation de campagnes de promotion directe à l'étranger ? c'est une première, au Québec, qu'une ville le fasse, je pense ? un programme de stages pour immigrantes et immigrants à la ville de Québec ? Mme Bourget va vous parler d'un cas particulier tout à l'heure ? des activités de familiarisation des nouveaux arrivants avec la ville et les services municipaux ? et c'est dans ce contexte qu'on souhaite beaucoup, toujours, la Maison interculturelle ? la promotion de l'apport des immigrants et des immigrantes dans leur milieu, des activités de rapprochement interculturelles.
Par ailleurs, la ville initie des projets comme la Maison interculturelle de Québec et participe à divers projets de maison de transition pour immigrantes et immigrants, qui constituent l'infrastructure de demain, pour l'accueil des nouveaux arrivants.
n
(9 h 40)
n
Une large part des actions de la ville sont effectuées en partenariat avec le milieu, ce qui lui permet de maintenir des liens étroits avec les associations d'immigrantes et d'immigrants et les organismes offrant des services à cette clientèle. La création du Conseil interculturel de Québec permet d'établir une communication constante avec ses partenaires.
Quels sont les obstacles à l'immigration dans la capitale? Vous avez déjà entendu plusieurs fois l'énoncé de ces obstacles, mais il m'apparaît important de les rappeler.
Plusieurs obstacles persistent dans la gestion de l'immigration dans la capitale. Ces difficultés, qui contribuent à développer une perception négative de la population immigrante envers Québec, sont: une intégration en emploi difficile ? si j'étais en météo, je dirais «de difficile à extrêmement difficile» ? un accueil rendu difficile par l'éparpillement des ressources sur le territoire et un manque de synergie des intervenantes et des intervenants, une sélection des candidates et des candidats immigrants qui n'avantage pas la capitale, enfin le manque d'information en temps réel concernant les nouveaux arrivants à Québec.
Les orientations pour 2004 à 2007 des élus municipaux en matière d'immigration sont les suivantes. Étant donné les enjeux, la ville de Québec souhaite poursuivre son action en matière d'immigration notamment par la conclusion d'une nouvelle entente de collaboration avec le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Les élues et les élus municipaux souhaitent que la ville oriente ses actions de façon à agir comme maître d'oeuvre de la promotion de Québec, ville et capitale, comme site d'établissement, jouer un rôle de partenaire majeur de l'accueil des nouveaux arrivants sur son territoire, promouvoir et faciliter l'accès des services municipaux aux immigrantes et aux immigrants, développer des outils facilitant l'intégration au logement des nouveaux arrivants, favoriser le rapprochement interculturel entre toutes les communautés, et enfin contribuer à l'intégration en emploi des immigrantes et des immigrants.
Ce dernier point est toujours le point le plus complexe et l'obstacle principal. Ce que je veux vous dire, c'est qu'à chaque fois qu'on annonce un geste, à chaque fois qu'on fait un discours ou qu'on indique que l'on souhaite plus d'immigrants à Québec, que c'est répertorié dans les journaux ou à la télévision, je reçois toujours une petite flopée d'e-mails qui nous disent: Non, mais ça ne vous tente pas de commencer à vous occuper de ceux qui sont déjà là depuis x années, et qui n'ont pas d'emploi, et qui en cherchent, et pour lesquels on dit qu'il n'y a pas de travail dès qu'on décèle un accent quelconque? Et effectivement, cas par cas, on les regarde, et ce sont des gens diplômés habituellement à qui on est allé jusqu'à dire: Vous avez trop de diplômes, monsieur ou madame, pour faire tel travail. On s'excuse. Vous devriez cacher ces diplômes-là si vous voulez occuper l'emploi disponible pour lequel vous posez une candidature. Donc, on reviendra là-dessus tout à l'heure.
Définir des objectifs clairs et réalistes. La ville de Québec souhaite qu'à l'avenir tout objectif d'immigration pour la région de Québec soit établi de façon claire et réaliste par rapport aux moyens investis dans l'intégration des immigrantes et des immigrants dans la capitale et à la capacité d'accueil du milieu. La ville de Québec et d'autres partenaires du milieu contribueront à l'atteinte des objectifs fixés par le gouvernement du Québec.
La concertation des actions. La concertation des actions en immigration s'effectue davantage à un niveau spécialisé qu'au niveau global dans la région de Québec, de sorte que les actions s'effectuent souvent en silo. Considérant le mandat de la future Conférence régionale des élus, cet organisme pourra, je l'espère, contribuer à rapprocher les différents intervenants et intervenantes de ce secteur.
Établir un nouveau partenariat entre la ville de Québec et le gouvernement du Québec. En fait, c'est renouveler ce partenariat et le prolonger, quitte à l'amplifier, si c'est souhaitable et si les ressources sont disponibles. À l'heure où les 10 plus grandes villes canadiennes, dont Québec, discutent des nouvelles réalités auxquelles elles sont confrontées, dont leur adaptation à une immigration de plus en plus urbanisée, il est clair que les administrations municipales ont un rôle grandissant ? qu'elles le veuillent ou non ? à jouer dans ce domaine. Or, ces mêmes municipalités n'ont accès qu'à une fraction, par le revenu foncier, des revenus fiscaux engendrés par ces nouveaux arrivants et ont à fournir un nombre croissant de services spécialisés à leur population immigrante. Dans ce contexte, un partenariat renouvelé doit être établi entre la ville et le gouvernement du Québec.
À titre de deuxième pôle d'immigration au Québec, la ville souhaite que son rôle soit reconnu dans le futur plan d'action du MRCI. La légitimité, l'autonomie et la capacité de la municipalité à animer le milieu et à se faire connaître auprès des immigrantes et des immigrants devraient être au centre de futures ententes de collaboration à long terme. La reconnaissance claire des rôles et des responsabilités des deux paliers de gouvernement permettra une utilisation optimale des ressources.
Et j'ajouterais que, si on donne l'impression d'insister sur ce qu'on peut faire en matière d'accueil, l'accueil, pour nous, va jusqu'à l'accompagnement dans la recherche d'emploi et de l'immigrant ou de l'immigrante et éventuellement de son conjoint, ou même, dans certains cas, de ses enfants. Alors, c'est extrêmement important. Et ce qu'il y a de plus scandaleux effectivement, c'est d'avoir ici, sur notre territoire, Québec ou ailleurs, des ressources techniques professionnelles, des gens qui sont qualifiés pour faire du travail et à qui, pour toutes sortes de raisons qui vont de l'Office des professions en passant par chaque profession, qui vont de toutes sortes de motifs, à qui on empêche l'accès à un marché du travail qui leur donnerait l'occasion de se manifester comme étant vraiment ce que l'on souhaite, c'est-à-dire un gros plus dans la région.
Je ferais un dernier commentaire avant de demander à Mme Bourget de prendre la parole. Souvent, quand on parle d'immigration dans les médias, c'est parce que des problèmes se sont posés. Et effectivement ça vient colorer toute la perception de ceux qui ont déjà un préjugé à fleur de peau qu'ils n'osent pas manifester, par rapport à l'immigration, et qui ont un préjugé, qui ont des préjugés. Et ça leur donne l'occasion à ce moment-là d'exprimer ces préjugés et ça fait reculer non seulement le discours, mais l'action. On devrait, de ce côté-là, inviter les partenaires qui sont les plus ouverts à l'immigration, à leur réalité quotidienne ? je parle d'un certain nombre d'entreprises, un certain nombre d'institutions, et je pense en particulier à l'Université Laval ? on devrait les inviter et leur donner le moyen, l'occasion, le prétexte de nous parler de leurs «success stories» en immigration. Allez dans n'importe quelle université québécoise, enlevez d'une façon virtuelle toute la ressource immigrante qui s'y trouve en recherche et en enseignement, et vous allez pouvoir mesurer un taux d'appauvrissement considérable de nos institutions. À l'inverse, faites le bilan de ceux qui actuellement sont des docteurs, sont des professeurs, sont des chercheurs, sont des animateurs dans nos universités, dans les grands secteurs, et vous allez voir que l'immigration nous est essentielle.
Alors, je terminerai ma présentation sommaire là-dessus et je demanderais à Anne Bourget de synthétiser encore mieux que je peux le faire les grands objectifs que nous avons.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le maire. Mme Bourget.
Mme Bourget (Anne): Merci, M. le Président. Il n'y a pas un membre du comité exécutif qui aime ça, parler après le maire, parce qu'il fait tellement bien ça qu'on a l'air de pâles copies de... Mais je vais tenter sommairement de résumer mais peut-être davantage de bonifier tous les propos qui ont été dits par le maire en ce sens.
Dans le fond, la consultation présentement qui a lieu essaie de déterminer: Est-ce qu'on maintient le niveau d'immigration? Est-ce qu'on l'augmente? Est-ce qu'on le diminue? Tout ça, c'est une question qui est bien relative au fait de: Est-ce qu'on a... Est-ce qu'on met les moyens? Est-ce qu'on se donne les outils de concertation dont on a besoin? Évidemment, on connaît tous à Québec le choc démographique qui nous attend dans les prochaines années. C'est vrai, ça ne commence pas demain matin, mais ça commence dans quelques années, et ça, il faut voir venir le coup. Ce n'est pas dans 10 ans qu'il va falloir se réveiller: «Mon Dieu, il y a 10 ans, on aurait dû, on aurait donc dû!», c'est plutôt maintenant. Donc, pour nous, évidemment on encourage le gouvernement à adopter une attitude qui nous permettra d'augmenter le nombre d'immigrants à long terme sur le territoire. Pour la ville de Québec, évidemment l'enjeu... un des enjeux, c'est la francophonie. Attirer des immigrants ici qui ne parlent pas français, c'est un défi. C'est un défi parce qu'ils ont une difficulté supplémentaire quant à l'intégration, ils ont la langue à apprendre. Et, pour le vivre personnellement, mon conjoint est anglophone, et c'est difficile. Il ne peut pas commencer à travailler dans sa langue du jour au lendemain, et il y a un apprentissage qui est assez long à faire.
n
(9 h 50)
n
Le maire a mentionné aussi un certain nombre... bien, qu'on appelle irritants, mais qui sont plutôt des embûches que les immigrants ont à rencontrer, une fois arrivés, aussi, et donc il faudra mettre des efforts. Si on décide d'aller en mode proactif et d'augmenter le nombre d'immigrants, on dit: Oui, il y a la reconnaissance des diplômes, l'éternel point, la reconnaissance des diplômes. Il y a des gens qui nous envoient des courriels, qui viennent nous rencontrer au bureau, qui sont médecins, qui sont, bon, de toutes sortes de professions, qui nous disent... Écoutez, il y a un médecin, une dame qui vient du Chili. Elle me dit: Je vais être obligée de passer par les États-Unis pour passer mes examens, pour ensuite rentrer au Québec. Et, elle, ce qui la motive évidemment, c'est qu'elle a rencontré son conjoint à Québec. Il travaille dans une entreprise de haute technologie, et ils veulent vivre à Québec. Donc, elle va faire toutes ces démarches-là, qui vont probablement prendre au-dessus de trois ans, pour venir habiter à Québec et pratiquer le métier qu'elle aime le plus: la médecine. Donc, un certain nombre d'embûches, au niveau de la reconnaissance des diplômes, qui est à régler et à travailler avec les ordres professionnels. Évidemment, l'assouplissement des règles de ce côté-là.
Un autre obstacle aussi qui est à surmonter, c'est la méconnaissance ou la reconnaissance de Québec dans les pays qui... auprès des gens qui désirent immigrer. Souvent, ce qu'ils connaissent, c'est Montréal ? et, en passant, il y a une crise du logement aussi à Montréal ? c'est Toronto, c'est Vancouver, c'est d'autres villes au Canada et très peu Québec, très peu la capitale nationale. Bien qu'on soit reconnus comme le deuxième pôle d'immigration, il y a encore un pas à faire, et on pense qu'entre autres l'outil qu'on vient de développer, le cédérom, peut activer au moins la reconnaissance de Québec comme site d'immigration, au moins dans les Bureaux du Québec à l'étranger qui, eux, sont des transmetteurs d'information importants pour les gens qui choisissent d'immigrer.
Des ressources dispersées, le maire en a parlé, des ressources dispersées localement sur le territoire de la ville et où l'immigrant se perd. À un endroit, c'est le cours de français. On dit: C'est très bien, il va avoir à découvrir le territoire, mais je pense qu'il ne faut pas jouer à «trouve l'endroit, puis tu vas mieux connaître le territoire». C'est plutôt de dire aux immigrants: On va vous accompagner dans la démarche et on aimerait vous offrir les meilleurs services et de façon le plus regroupée possible. Pour éviter aussi les pertes de temps et pour éviter aussi que... Les femmes qui sont ici et qui ont des enfants, qui sont soit monoparentales ou dont le conjoint travaille, peuvent éviter des pertes de temps à se déplacer à un endroit, et à l'autre, et à l'autre dans une journée et y perdre beaucoup de temps. Donc, le projet Maison interculturelle s'inscrit dans cette démarche-là, et je pense qu'on veut en faire la promotion.
Mais tout ça doit se faire en partenariat, la ville de Québec ne peut pas agir seule. Évidemment, le leader dans le dossier, c'est le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, et, pour nous, c'est de jouer un rôle là-dedans, c'est de bien le déterminer. Les ententes de collaboration précédentes étaient, je dirais, peut-être précises, peut-être pas assez, donc il faut faire un pas. Il faut les améliorer, ces ententes de collaboration là, de façon à être capable ? et je sais que c'est cher à la ministre ? de mesurer les résultats. Parfois, c'est difficile, mais souvent on peut se donner des indicateurs assez clairs de performance et se dire... Ce n'est pas de se fouetter si on ne les atteint pas, c'est de se donner des indicateurs et marcher vers l'atteinte de ces résultats-là.
Le Président (M. Cusano): En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Bourget (Anne): Oui. En conclusion, je pense qu'on est ici pour voir ce que vous pensez aussi de l'importance de la collaboration de la ville de Québec. Et on est très ouverts, je pense que le maire l'a dit, à cette collaboration-là qui prendra, je l'espère, plus d'importance dans l'avenir.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Bourget. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, Mme Bourget, M. L'Allier, bienvenue à cette commission, mais surtout merci d'y être présents. M. L'Allier, j'apprécie votre présence en tant que maire. Je crois que ça démontre tout à fait la volonté de la ville de Québec. Moi, j'aime bien quand une ville me dit à quel point l'immigration, c'est important. Bien, je pense qu'à un moment donné le fait que vous vous déplaciez, que vous soyez devant nous en témoigne hautement, et c'est très apprécié.
Écoutez, j'ai bien écouté, ce matin, j'ai bien lu et je retrouve un peu l'essence de nos conversations des derniers mois et l'essence du travail qui s'est engagé entre nous pour justement renouveler cette entente qui vient à échéance. Je pense que vous cernez bien les problématiques. Je crois que nous avons et partageons la même lecture de la situation de la ville de Québec à l'égard des obstacles qui freinent cette immigration. J'ai eu l'occasion, lors de rencontres avec vous mais aussi sur des tribunes publiques, de dire que, pour nous, Québec doit certainement être un pôle d'immigration très important et qu'il faut donc activement travailler aux outils, aux moyens pour faire en sorte que les obstacles soient levés.
Je crois remarquer que vous partagez la préoccupation qui est la mienne à l'égard de l'intégration économique. Ce que j'apprécie, c'est que vous nous dites aussi que ça doit se faire avec des partenaires. Et ma compréhension des dernières semaines et des derniers mois, c'est que justement on est à déployer et identifier ces partenaires par rapport à l'emploi. Je vous dirais que je partage votre lecture aussi sur le fait que Québec n'est pas suffisamment promue à l'étranger. Je vous ai dit que nous allons remédier à ça et qu'on doit remédier aussi avec votre collaboration, et je pense que l'entente devrait donner certainement une grande importance à ça.
Et je salue, je salue ce guide que vous avez rendu public, qui a été fait dans le cadre de cette entente, d'ailleurs. Donc, si on le fait pour le logement, on pourrait le faire pour l'emploi puis on pourrait le faire aussi à l'intention des employeurs, et c'est aussi à ça qu'on travaille.
Alors, vous voyez, je pense que nous sommes sur la bonne voie. Comme vous, je suis impatiente, je vous le dis. Comme vous, je voudrais qu'on puisse mettre en oeuvre ces moyens le plus rapidement possible. Donc, la difficulté, c'est de créer cette synergie, pas tant entre nous mais avec l'ensemble des partenaires. Je pense qu'il ne faut pas non plus se mettre la tête dans le sable, il faut dire les choses comme elles sont, et il y a donc cet effort de mobilisation et de sensibilisation.
Je veux arriver aux questions parce que c'est de vous entendre qui est important. Quand vous nous dites qu'il faut revoir cet accueil et que la ville veut jouer un plus grand rôle dans l'accueil des nouveaux arrivants, bien que nous ayons eu des conversations là-dessus, j'aimerais ce matin, M. le maire et Mme Bourget, peut-être un peu plus de précisions de votre part: À quoi faites-vous référence quand vous parlez de la responsabilité de la ville dans cet accueil? Et je sais qu'il y a eu des efforts. Je dois louer vos efforts pour les services municipaux. Mais qu'est-ce que vous... À ce stade-ci de nos discussions, à ce stade-ci de nos lectures respectives, comment voyez-vous ça dans le rôle spécifique de la ville?
Le Président (M. Cusano): M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): M. le Président, si vous le permettez, je vais dire un ou deux mots, et Anne pourra aussi, plus précisément que moi, aller au fond des choses.
Mon expérience, là, des 15 dernières années à la mairie montre qu'il y a un décalage entre le discours rose et or qu'on peut avoir à l'extérieur, vantant les mérites du Québec comme terre de développement, comme terre de stimulation et terre d'accueil, et le Québec comme lieu d'accueil par rapport à l'emploi. Ça tourne autour de ça. Ceux qui quittent leur pays, qu'ils le fassent de force ou de gré, volontairement, ou par enthousiasme, ou par défi, la première chose qu'ils cherchent en arrivant, c'est à gagner leur vie dans la dignité. C'est plus facile pour certains, s'ils ont le même accent, la même peau, la même couleur. C'est plus difficile dès qu'on s'éloigne des paramètres de base de notre société occidentale. Il y a un effort à faire de ce côté-là. Mais c'est l'emploi, par l'emploi et, dans l'emploi, le stage, qui permet à un employeur de se familiariser avec une autre langue, une autre façon de faire mais aussi bonne que la sienne, la plupart du temps. C'est ça. Il faut concentrer... sur la recherche d'emploi, la facilité d'accès au stage de travail. La Maison interculturelle nous paraît le lieu effectivement de mixité le plus intéressant à développer, à ce moment-ci.
Comme je vous disais au début, le discours que nous faisons, d'ouverture à l'immigration, blesse des gens qui sont ici depuis sept, huit, neuf, 10 ans avec des diplômes, des doctorats, etc., et qui n'ont pas de travail pour eux. Alors, on se dit: Qu'est-ce qu'on fait? On diminue le volume du discours ou, au contraire, on essaie d'améliorer cette capacité d'accueil, briser le vrai préjugé là où il se trouve? Et c'est là-dessus qu'il faut miser.
n
(10 heures)
n
Quand on parlait de la population, dans le mémoire vous avez les chiffres. Les gens ne croient pas à cette réalité. Ils disent: Ça ne se peut pas. La croissance de la population à Québec... son taux de croissance démographique a été de 1,2 % à Québec... Non, a été de... La croissance de la population de la communauté métropolitaine a été la plus faible que celle de l'ensemble du Québec et de plusieurs villes canadiennes. Son taux de croissance de 1,2 % se compare désavantageusement à l'ensemble du Québec: 1,4 %-3 % pour Montréal; 5 à 10 % pour Halifax, Vancouver, etc.
Alors, on n'a pas de population, on a besoin d'emplois, mais, concrètement, c'est le stage, c'est le travail.
Mme Courchesne: Concrètement, si vous me permettez, M. le maire, vous voulez jouer un rôle très important dans la promotion, et ça, je partage cet avis-là. On aura à définir une modalité, mais là on est d'accord. Une fois qu'on développerait, par exemple, un outil comme celui-ci pour inciter les employeurs à être plus ouverts, est-ce qu'on pourrait penser aussi à un partenariat, peut-être tripartite ou je ne sais pas, je ne veux pas identifier, je ne veux pas nommer personne ce matin, ce n'est pas le but du propos, mais de dire, au fond: L'approche personnalisée, il faudra qu'il y ait un organisme qui fasse les liens entre les postes vacants, les entreprises et ceux qui arrivent ici? Est-ce que ? pour le bien-être des collègues parlementaires ? est-ce que c'est dans ce sens-là qu'on doit travailler? Est-ce que c'est ça que j'entends de votre propos, en disant: Bien, il faut qu'il y ait une sorte d'organisation beaucoup plus précise quant à cet arrimage entre les besoins de main-d'oeuvre et ceux qui ont les diplômes, dont vous parlez?
M. L'Allier (Jean-Paul): Le volume d'immigration que l'on reçoit est tellement petit, toutes proportions gardées, par rapport, par exemple, à des villes comme Vancouver, Toronto, Montréal, qu'on doit traiter ce volume homéopathique un par un, cas par cas. On doit faire un accompagnement quasi personnalisé vers l'emploi, vers le stage; c'est ça qu'il faut faire. On aura beau publier des cahiers, des cahiers, des cahiers, ce n'est pas suffisant, ça va rester sur les tables de ceux qui peuvent prendre des décisions. Anne, peut-être.
Mme Bourget (Anne): Oui.
Le Président (M. Cusano): Mme Bourget.
Mme Bourget (Anne): La question des stages pour immigrants, elle est fondamentale, effectivement, et il ne faut pas oublier d'associer les communautés qui ont immigré dans cette démarche-là. Et vous avez sur votre table un projet effectivement qu'on essaie de faire débloquer depuis plusieurs mois maintenant, et on a une rencontre demain matin là-dessus. Donc, vous entendez bien le message: oui, on veut faire débloquer ce genre de dossier là. On veut...
Mme Courchesne: Et de partenariat.
Mme Bourget (Anne): Et de partenariat. Et on veut associer la population immigrante à ces dossiers-là et on ne veut pas se faire dire que la ville n'a pas d'affaire dans ce dossier-là non plus, par ailleurs. Donc, ensemble, comme partenaires, de développer ces projets-là.
Il y a une autre chose, une autre réponse à votre question. Pour nous, ce serait important aussi, pour un meilleur accueil, d'avoir les données concernant les immigrants. C'est bon d'avoir une statistique, mais on ne sait pas, on ne connaît pas... Vous avez les noms de ceux qui arrivent. Bon, il y a toute la transmission des renseignements personnels, qui est importante pour vous, mais pour nous, pour avoir un accueil personnalisé, pour que ces gens-là connaissent les services municipaux, il faut savoir qu'ils arrivent quelque part dans la ville, donc d'avoir un mécanisme pas nécessairement de transmission des données, mais, bon, il y a peut-être quelque chose à regarder là. On vous envoie l'information, vous leur transmettez, bon, je ne sais pas, il y a toutes sortes de façons de le faire. Mais il faut savoir où s'installent les immigrants, il faut les connaître pour pouvoir jouer notre rôle, pour leur transférer...
Le kit du nouvel arrivant, là, il n'est pas encore réalisé. Bien, moi, j'y rêve, de ça. Puis cette année, j'espère que chaque immigrant puisse avoir son guide du logement pour se débrouiller dans la ville, choisir son milieu de vie, savoir comment se déplacer au réseau de transport en commun, etc.
Le Président (M. Cusano): Merci. Vous disposez de deux minutes.
Mme Courchesne: Bien, merci. Dans ce sens-là, je pense qu'effectivement c'est vers cette volonté que nous travaillons, à l'heure actuelle, la notion de guichet unique. Et ça aussi, je l'ai dit et je n'ai aucune difficulté à le dire publiquement aujourd'hui, j'ai été très séduite par le projet de la Maison interculturelle, au sens où, hein, quand on s'est vus la première fois, j'ai dit: Il me semble que Québec a besoin d'un lieu comme celui-là justement pour que les communautés puissent se reconnaître et se rassembler.
Donc, ce que vous dites, au fond, c'est un peu ça, c'est qu'on a une situation où le silo est très fort, très, très fort, très ancré; il faut le briser. Et ce lieu, c'est de partager nos ressources, partager nos efforts puis partager les renseignements. Mme Bourget, je partage votre préoccupation à cet égard-là. Donc, c'est de maximiser nos efforts pour que cet arrimage-là se fasse le mieux possible. Je crois comprendre que notre entente ira dans ce sens-là.
Tantôt, je voudrai vous entendre sur les stages. Vous avez des stages, que vous avez faits dans vos services municipaux. Est-ce que c'est ? en deux minutes ? concluant, pour vous? Est-ce que ça a donné de bons résultats? Et quelles sont les difficultés principales que vous avez rencontrées?
Mme Bourget (Anne): Je demanderais peut-être à...
Le Président (M. Cusano): Brièvement.
Mme Bourget (Anne): Pardon?
Le Président (M. Cusano): On peut revenir par la suite.
Mme Courchesne: D'accord. On reviendra...
Le Président (M. Cusano): On va revenir par la suite.
Mme Bourget (Anne): Parce que l'évaluation...
Mme Courchesne: Juste me dire si c'est positif.
Mme Bourget (Anne): C'est positif.
Mme Courchesne: D'accord.
Mme Bourget (Anne): De ce qu'on entend dans l'administration, c'est extrêmement positif, autant de la part des immigrants, parce que c'est une première chance de travail souvent pour eux, et de la part des services qui font affaire. Et on en redemande à chaque année. Donc, effectivement.
Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Prévost.
Mme Papineau: Bonjour, M. L'Allier. Mme Bourget, bonjour. C'est toujours, pour moi... Je suis toujours très fière de voir M. L'Allier, parce que M. L'Allier, c'est un peu des Laurentides, hein?
Moi, je vais vous amener... Justement, vous parlez de la création de la Maison interculturelle du Québec, où, d'après ce que vous me dites, ce serait un guichet unique où les immigrants pourraient arriver et s'enregistrer à la Maison interculturelle. Puis vous parliez, tantôt, de la difficulté aussi des immigrants qui arrivent qui ne connaissent pas le français, et vous parlez du Guide du logement, par exemple. Mais, avant même d'accompagner pour aller chercher un logement ou, en tout cas, de lui donner... ? vous avez dit tantôt: On pourrait lui donner le guide parfait de l'immigrant ? ne croyez-vous pas au départ qu'il faudrait lui offrir des cours de francisation? Et comment justement ce guichet unique là... Est-ce que, dans cette Maison interculturelle, il y aurait, par exemple, des cours de français?
Le Président (M. Cusano): Mme Bourget.
Mme Bourget (Anne): Le projet de Maison interculturelle... Bon. Le mot «guichet unique», d'abord, il faudrait tout de suite l'évacuer. Un guichet unique, c'est unique puis c'est difficile à rencontrer, comme objectif. On parle de «guichet intégré de services», mais aussi un lieu d'expression des différentes cultures.
Ce qui est important pour les gens, dans la ville de Québec, c'est de se rencontrer, aussi, donc avoir des services sur les immigrants mais se rencontrer: un mélange des cultures, une rencontre entre la communauté d'accueil et les communautés qui arrivent ici, qui sont de diverses nationalités, donc les deux objectifs à la fois. Le guichet de services, pour les services dont a besoin l'immigrant: d'abord, connaître le territoire, connaître les services, connaître le domaine de l'emploi, comment s'y trouver en matière d'emploi, comment s'y trouver en matière de langue.
Je vous rappellerais l'ancien COFI, qui était dans l'ancienne école Saints-Martyrs qui, en tout cas, est en train de changer encore de vocation. Bref, je passe rapidement pour dire que l'idée du COFI était intéressante. Pourquoi? Parce qu'elle offrait justement un certain nombre de services à la population immigrante. Mais, plus que ça, le COFI avait attiré le fait que des immigrants s'installaient, louaient des locaux dans le même édifice pour pouvoir offrir quoi? des cours de danse, des cours de cuisine, des cours de langue, l'espagnol, l'allemand, etc. Donc, il y avait l'émergence d'un dynamisme à Québec. Et qui ne se rappelle pas du COFI? En tout cas, ça fait maintenant trois ans ou quatre ans que ça n'existe plus, et on identifie encore le bâtiment de l'ancienne école Saints-Martyrs au COFI. Ah oui! l'ancien édifice du COFI. Donc, il y avait quelque chose là; c'est de recréer ça en bonifiant le concept.
Mme Papineau: Donc, si je comprends, c'est que cette maison ne serait pas un guichet unique, parce que vous m'avez dit, là, qu'on évacue ce terme-là, «guichet unique». Mais, dans votre mémoire, vous dites, à un moment donné, qu'il y a un éparpillement des ressources, hein, sur le territoire; j'imagine que ces ressources-là pourraient se retrouver dans la maison.
Mais, je reviens toujours au français, les cours de français, selon votre approche, seraient donnés par qui et où? Est-ce que ça pourrait être à l'intérieur de la Maison interculturelle? Parce qu'il ne faut pas... Québec, hein, c'est francophone, je veux dire, vous l'avez dit vous-même, quand un immigrant arrive ici, il faut quasiment qu'il parle le français parce que, sans ça, vous l'avez dit vous-même, c'est difficile, c'est très difficile pour... Alors, moi, je pense que la priorité, à ce moment-ci, ce serait peut-être, au départ, s'il veut se retrouver dans la ville de Québec, s'il veut être capable d'avoir de l'information, il faut quand même qu'il soit capable d'apprendre le français. Vous ne pensez pas que c'est une priorité?
Mme Bourget (Anne): Oui, M. le Président. Ce qu'on vous dit, ce matin, c'est qu'on espère avoir une proportion d'immigrants francophones plus importante que ce qui est présenté dans les perspectives du document que vous nous avez, de base, envoyé. Donc, 50 % francophones, 50 % qui parlent une autre langue, pour nous, on vous dit: C'est un obstacle. Ce n'est pas un obstacle dans le fond, pour moi, c'est un obstacle pour l'immigrant qui s'en vient ici et qui ne parle pas le français. Mais il y en aura toujours, des immigrants qui ne parleront pas français, donc c'est important, oui, la francisation.
n
(10 h 10)
n
Est-ce que ça doit se faire un peu partout sur le territoire ou à la Maison interculturelle? Il y a peut-être un mélange des deux. Donc, il ne faut pas déshabiller Paul pour habiller Pierre ou l'inverse, là. Est-ce qu'on peut dire que, dans la Maison interculturelle, à tout le moins, il y aura des services de francisation et que, si, là, c'est plein, bien, c'est ailleurs sur le territoire, le Centre Louis-Joliette, l'Université Laval, donc nos centres d'enseignement, mais sachant que, là où il y aura des cours de français, il n'y aura pas les autres services par ailleurs? Donc, il faut prendre ça... Et on est en étude de faisabilité aussi, donc on essaiera de reparler...
Mme Papineau: O.K. C'est parce que j'essayais de voir le partenariat que vous pourriez faire. Parce que, dans votre mémoire, vous dites que, bon, les organismes... il y a un éparpillement des ressources, qu'il y a un manque de synergie des intervenants, vous parlez que les organismes ne sont pas partie prenante de cet accueil. C'est dans votre mémoire. C'est pour ça que j'essayais de voir s'il n'y a pas lieu de faire un partenariat ? vous en parliez d'ailleurs, au départ ? un partenariat avec ces organismes pour peut-être justement donner le cours de français ou d'autres...
Mme Bourget (Anne): M. le Président?
Le Président (M. Cusano): Oui.
Mme Bourget (Anne): Oui, partenariat, et ne pas nécessairement enlever la mission de ces organismes-là, parce qu'ils remplissent un rôle, ils jouent un rôle extrêmement important concernant le logement, concernant l'apprentissage du français, concernant l'emploi, concernant l'accueil d'une communauté en particulier qui est hispanophone, par exemple. Donc, tout ça, oui, il faut que ça demeure, cette diversité-là doit demeurer, et le soutien gouvernemental aussi. Ce qu'on vous dit, c'est que la Maison interculturelle devrait peut-être regrouper, non pas fusionner les différentes entités, mais les regrouper dans un même lieu. C'est ce qui...
Mme Papineau: Ça va.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce que vous avez d'autres questions, madame?
Mme Papineau: Oui. Cécile.
Le Président (M. Cusano): Oui? Vous avez terminé?
Mme Papineau: Oui, j'ai terminé, je reviendrai plus tard.
Mme Vermette: Moi... Bonjour...
Le Président (M. Cusano): Bon. C'est bien. M. le député de Saint-Hyacinthe.
Mme Vermette: Ah! j'avais demandé avant, tantôt. Ah, c'est parce que vous m'avez demandé si je voulais continuer puis j'avais dit oui.
Le Président (M. Cusano): Bien, ça, ça fait longtemps de ça.
Mme Vermette: Oui, bien, c'est ça, c'est parce que je me pensais...
Le Président (M. Cusano): Allez-y, madame. Excusez-moi.
Mme Vermette: O.K. Excusez. Bon, ça me fait plaisir de pouvoir prendre la parole...
Le Président (M. Cusano): Je cède la parole à la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Merci beaucoup. Alors, écoutez, c'est toujours intéressant et surtout de voir les gens de la ville de Québec, qui est pour moi la ville du patrimoine, en fait. Alors, vous jouez un rôle encore plus prépondérant en ce qui concerne l'accueil au niveau de nos immigrants du Québec, puisque c'est une bonne partie de notre histoire qui est ici.
Mais ce dont je m'aperçois, par contre, c'est qu'il n'y a pas de solution mur à mur, en tout cas, dans l'ensemble des grandes régions du Québec. J'ai l'impression que, bon... un manque de leadership quelquefois, à quelques endroits, chacun s'est développé bon an mal an, selon les besoins, en fait, et là on essaie de trouver maintenant un encadrement plus structurel pour l'accueil. Chaque ville... on a vu d'autres villes qui sont venues nous voir qui nous ont parlé qu'ils avaient un plan d'accueil pour leurs immigrants. Certaines villes sont venues nous dire aussi qu'il y avait trop d'immigrants qui sont maintenant trop universitaires, trop formés; ce qu'ils ont besoin, c'est des immigrants de main-d'oeuvre, mieux pointus, formés, plus adaptés aux besoins du travail ici, bon.
Alors, tout ça m'amène à vous parler... Bon, c'est sûr, on parlait aussi avec les entreprises, l'emploi, qui est la priorité. L'emploi est la priorité: si on n'a pas d'emploi, les gens sont plus ou moins intéressés à venir ici, au Québec, bien sûr. Et tout ça m'amène à vous dire, à vous demander maintenant... La sélection des immigrants, c'est au moment où la sélection est faite qu'on attire, qu'on a un effet d'attraction chez les gens. Donc, ce qui m'amène à dire: On est peu... en tout cas, on est peu choisi ou, par rapport à la moyenne canadienne, on a moins d'immigration qu'ailleurs, en tout cas, il semblerait, le Québec. Donc, comment l'immigration... est-ce que la sélection joue correctement son rôle? Bon, ça, c'est très beau, mais est-ce qu'on pourrait le faire au moment de la sélection? Est-ce qu'on pourrait dire aux gens: Voilà, vous voulez venir au Québec, voilà, il y a des grands pôles et vous devez... c'est les grands pôles, on va vous donner tout de suite l'appréciation de ces grands pôles là pour que vous puissiez faire un choix éclairé? Ou, au moment de la sélection, devrait-on faire des quotas au niveau des régions puis dire: Selon les besoins des régions... on envoie finalement des individus selon les besoins des régions? Alors, c'est une grande problématique parce que les régions...
Le Président (M. Cusano): En terminant, Mme la députée.
Mme Vermette: ... ? oui ? parce que les régions nous demandent, justement, aussi de la main-d'oeuvre. Alors, votre vision des choses par rapport à cette...
M. L'Allier (Jean-Paul): Vous ne posez pas une question qui a une réponse simple, mais je vais essayer de...
Le Président (M. Cusano): Non, mais, M. le maire, vous disposez de 60 secondes pour la réponse.
M. L'Allier (Jean-Paul): 60 secondes? Alors...
Mme Vermette: Ah! alors, c'est correct, M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): Les quotas arbitraires, moi, j'ai toujours détesté ça, les quotas, que ce soit pour les femmes, les gens de couleur, etc. Par contre, si on veut aider une région, on peut dire: Ici, on va mettre plus de ressources financières pour favoriser l'accès à l'emploi. Alors, si vous allez vous établir dans telle région, vous aurez plus facilement accès à de l'emploi, s'il y a de l'emploi dans la région.
Vous avez parlé de la sélection. J'ai eu l'occasion de participer, parce que je m'étais offert puis que j'avais poussé un peu, à des rencontres de candidats à l'immigration du Québec à l'étranger, et notamment, une fois, en France, et je suis arrivé dans une salle, il devait y avoir ? c'était, si ma mémoire est bonne, dans la région lyonnaise ? 200 personnes qui étaient là parce qu'elles étaient intéressées éventuellement à venir au Québec. Et là tu vois toute la gamme, il n'y a pas de mur-à-mur là non plus.
Il y a des gens qui veulent prendre leur retraite chez nous, qui ont l'argent qu'il faut, qui ne demandent pas d'emploi, qui ne prendront pas d'emploi, qui vont tout simplement dépenser tout doucement, jusqu'à leur mort, chez nous, l'argent qu'ils ont gagné ailleurs. Il y a ensuite les gens qui sont des professionnels, qui veulent exercer un métier, une profession. Et là on entre dans le contingentement professionnel. Vous avez des jeunes qui disent: Nous autres, on est jeunes, on a de l'énergie, on a de la force, on veut travailler, on est prêts à faire du travail difficile. On va dire: Non, non, pas vous, parce qu'on a un taux de chômage élevé, on ne vous prend pas, on ne vous veut pas. Tu as d'autres qui viennent en disant: Moi, j'ai 500 000 $ ou un million, je veux émigrer, je suis un investisseur immigrant; j'ouvre un compte de banque, je m'achète un condo puis je m'en retourne, je reviens dans cinq ans, quand j'aurai eu mon passeport, parce que ce que j'achète, c'est un passeport. On dit: Oui, vous, vous pouvez venir. Ça n'apporte rien au Canada ni au Québec, mais il y en a encore beaucoup. Il y en a qui apportent, il y en a qui n'apportent rien dans ce domaine-là.
Puis, en bas, en bas, en bas, tu as l'enfant, tu as le petit couple québécois qui se ramasse ses sous pendant des années pour se trouver le 15 000 $, 20 000 $, 25 000 $ qui lui permet d'adopter un enfant chinois, ou vietnamien, ou cambodgien, mais pour lequel il y a zéro exposant zéro aide de l'État. C'est l'immigration la plus forte parce que c'est des pousses que tu installes à six mois, à huit mois, et qui vont grandir chez nous. On commence à les voir dans les différents milieux: théâtre, musique, à la télévision. Quand vous voyez quelqu'un qui n'a pas, de toute évidence, nos origines ethniques puis qui parle un québécois parfaitement sain, qui sont implantés, ça, ça en est, de la vraie immigration, aussi. Mais celle-là n'est pas ... elle tombe en dessous des radars de l'immigration, c'est dans un autre corridor.
Alors, il va falloir spécialiser, selon les besoins des régions, le discours sur ce qu'on veut attirer. Mais encore une fois, je reviens à ça, la clé, c'est l'emploi. Si vous débarquez puis vous dépensez tout votre argent... Moi, j'ai vu un couple repartir, ça m'a brisé le coeur, un jeune couple qui disait: On s'était ramassé de l'argent, on est venus ici; au bout de huit mois, on a tout dépensé ce qu'on avait ramassé, on doit repartir parce qu'on n'a pas d'emploi ici, dont dans l'enseignement, par exemple, en particulier. C'est effrayant de faire ça à des jeunes: leur faire croire qu'ils ont un avenir ici pour venir, ici, mesurer que finalement, pour toute une série de raisons, il n'y en a pas, d'avenir.
Alors, en ce sens-là, il faut être précis, et l'emploi... Ce n'est pas nécessairement la sécurité d'emploi qu'ils demandent, c'est la possibilité de montrer qu'ils savent travailler, c'est le stage, c'est le stage à court terme: Donnez-nous une chance de montrer à un employeur qu'on est capables de faire quelque chose, aidez-le à m'employer, prenez 20 %, 25 % de mon salaire ? qui va la plupart du temps être le salaire minimum ? pour que je puisse montrer que je peux faire quelque chose; ensuite, je taillerai ma place. Il suffit de partir la roue, et ça, c'est par le stage, dans l'emploi.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le maire. Je cède maintenant la parole à la députée de La Peltrie.
Mme Hamel: Merci, M. le Président. M. le maire, Mme Bourget. Je suis très contente de pouvoir m'adresser à vous. Vous avez terminé votre intervention sur l'emploi, puis, moi, effectivement, là, c'est ce qui m'intéresse le plus, là, puis je voudrais qu'on aille dans le tangible. Bien, je salue ça aussi, j'ai bien hâte, là, de passer à travers et de voir de quelle façon vous proposez la belle ville de Québec aux immigrants.
n
(10 h 20)
n
J'étais présente lors de la tournée de la ministre à Québec, et il y avait énormément de partenaires, là, de tous les milieux socioéconomiques, et tout ça. J'ai senti un certain dynamisme puis une bonne volonté des gens alentour de la table pour tout mettre en oeuvre, là, pour bien accueillir les immigrants, et tout ça. Question de travail, écoutez, moi, dans mon comté, je suis en périphérie ouest de la ville, du centre de la ville de Québec, je connais des immigrants dans mon comté. J'en connais, moi aussi, comme votre couple, là; je connais une personne, là, qui, malgré son curriculum vitae, là, qui est très alléchant, pense à repartir d'ici les deux prochaines années, là, si elle n'a pas trouvé d'emploi. J'ai une communauté bosniaque, aussi, qui ont... Ils se sont créé leur emploi, eux, ils ont une entreprise et, bon, évidemment, ils regroupent leur communauté dans cette entreprise-là. Il y a aussi des entreprises en haute technologie, qui n'attendent après personne puis qui vont eux-mêmes recruter à l'extérieur.
Ça fait que je me dis, avec ce que j'ai entendu au mois d'août puis les entreprises qui vont recruter elles-mêmes, là, à Québec, là, qu'est-ce qu'on pourrait faire de tangible, là? Puis ça m'ouvre la porte à vous dire: Écoutez, moi, je suis intéressée à être un partenaire avec vous, là, en tant que députée, à ce niveau-là, là. Mais qu'est-ce qu'on pourrait faire, demain matin, là, pour justement donner de l'emploi et aux immigrants qui sont déjà ici depuis un certain nombre d'années puis être capable aussi d'en attirer d'autres, de sensibiliser les entreprises ou même la population, hein? Je ne sais pas. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Cusano): M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): D'abord, il faut dire, à Québec, on a la chance d'avoir la Chambre de commerce du Québec métropolitain qui est ouverte à l'immigration, et ce n'est pas fréquent, dans ce milieu de chambres de commerce, d'avoir une ouverture sur quelque chose qui n'est pas immédiatement rentable pour l'entreprise dans leur perception, et donc on peut miser là-dessus.
Mais je reviens à l'idée des stages. Si on peut multiplier la chance qu'on peut offrir à un immigrant ? quand je dis «la chance», là, c'est «l'occasion» ? de montrer ce qu'il sait faire par des stages, en diminuant le coût pour l'entreprise qui accueille ? pas parce que l'entreprise n'a pas les moyens, c'est parce que, sinon, elle ne prendra pas la décision d'ouvrir un stage ? si on peut multiplier les stages en entreprise, on va multiplier l'accès à l'emploi. Parce qu'il y a de l'emploi dans la région; on est toujours fier de montrer qu'on a un des plus beaux taux... des plus bas taux de chômage, et c'est effectivement vrai. Et si vous ouvrez le journal, les offres d'emploi, il y en a beaucoup.
Donc, que les députés, que la chambre de commerce, que les organisations fassent les démarches nécessaires, les pressions nécessaires pour qu'une somme d'argent qui est administrée par le ministère, qui peut l'être dans l'entente avec la chambre de commerce... tout est possible, là, mais que cet argent aille pour favoriser les stages, favoriser les stages. Et je suis convaincu qu'une majorité d'immigrants, si ces gens-là, hommes ou femmes, ont l'occasion, pendant deux, trois mois, de travailler à quelque chose d'utile, pas arracher les fardoches, là, travailler à quelque chose d'utile dans une entreprise, l'entrepreneur va apprivoiser ce contact culturel, et je pense que dans biens des cas la bonne volonté que les gens manifestent dans la société, plus que jamais, à l'ouverture à l'immigration, même s'il y a encore beaucoup à faire, va se traduire par un maintien constant de l'emploi.
En tout cas, j'ai vu des gens témoigner comme ça, et c'est assez impressionnant de voir quelqu'un qui témoigne, qui est dans un chantier de fabrication de palettes de bois pour le transport, puis il dit: Bien, moi, j'ai trouvé mon emploi ici, qui est devenu contremaître.
Le Président (M. Cusano): Merci.
Mme Courchesne: M. le Président?
Le Président (M. Cusano): Oui. Vous avez la parole, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Puisque le temps file vite... Votre mémoire, et je salue l'initiative avec plaisir, parle justement du lien possible avec la conférence régionale des élus. Je vous avoue que vous allez très loin en disant que cette conférence devra jouer un rôle important en matière d'immigration, et vous nous dites que c'est ainsi que la ville et la région de Québec auraient avantage à utiliser la CRE afin de se doter à court terme d'un plan d'immigration.
M. le maire, là on va avoir une entente avec la ville de Québec, mais ce que vous nous dites, c'est qu'au niveau de la CRE on peut penser aussi à un excès de rayonnement, et ce que vous dites, c'est qu'au fond, à l'intérieur de la CRE, on peut créer cette synergie et ce partenariat. Est-ce que c'est ça que je comprends?
M. L'Allier (Jean-Paul): Moi, je vais dire un mot...
Le Président (M. Cusano): Allez-y, M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): ...dans une bulle, si vous permettez, M. le Président, au sujet de la CRE.
Mme Courchesne: Moi, je reprends les propos du mémoire.
M. L'Allier (Jean-Paul): Oui. Ce n'est pas Cré Basile, là, c'est CRE.
Mme Courchesne: Surtout pas, M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): La CRE est une organisation nouvelle, hybride, et que, dans un milieu comme la région de Québec, on a un peu de difficultés à apprivoiser, parce qu'on change des choses qui allaient bien, avec ça. Et ça, c'est contre... c'est un principe que je n'aime pas beaucoup, de dire: Ça va bien, mais on va le changer quand même. Bon. Et donc il y a un petit peu de sur-mesure dans tout ça, même s'il y a des exceptions pour Québec, Montréal sur la composition.
Ceci étant dit, à partir du moment où le gouvernement a décidé de faire ses conférences régionales des élus, on peut rêver en couleurs. Moi, je pense que ces conférences des élus doivent se tourner essentiellement dans la... favoriser la concertation mais sur des défis d'avenir. Pas régler les problèmes d'il y a 25 ans ? ça, on est capable de faire ça, on est capable de vivre avec, aussi, quand on ne peut pas les régler ? mais se retourner vers l'avenir. Pas régler le rase-mottes, là ? ça, ça se fait, on a ce qu'il faut pour ça ? mais penser immigration, penser diminution de population, penser à la vocation de la région de Québec, par exemple, comme ville des industries du savoir. Penser plus loin, ensemble, pour qu'ensuite, quand on revient dans nos entités, on tienne compte d'un peu de ça dans nos décisions. C'est ça, le rôle de l'accueil; c'est un lieu de convergence d'idées, c'est un lieu de partage de visions pour arriver à voir globalement dans même direction, mais pas d'une façon uniforme, mais dans la même direction.
Alors, si la CRE sert à ça, ça va être utile. Et en ce sens-là, c'est ça, mettre le dossier de l'immigration à la CRE. Ce n'est pas pour le gérer, c'est pour en parler, c'est pour faire l'éducation des décideurs, c'est pour s'assurer qu'une fois qu'on en a parlé ici, ici et ailleurs, ça ne demeure pas des danses incantatoires qu'on fait une fois par année pour acheter la paix puis on revient à faire les mêmes choses qu'avant. Mais, si c'est vrai que les stages ouvrent la porte à l'emploi puis s'il n'y a pas de contradiction là-dessus, que ça se traduise par des ressources pour favoriser des stages, et là on mesure, au bout d'un an ou deux, qui a fait le travail puis qui ne l'a pas fait.
Mme Courchesne: Excellent.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le maire. Vous disposez encore de deux minutes, là.
Mme Courchesne: Ah oui?
Le Président (M. Cusano): Oui.
Mme Courchesne: Si vous me permettez, mon deux minutes, je vais le prendre. Parce que vous avez parlé tout à l'heure, en parlant du français, en disant: On favorise l'immigration francophone. Et je comprends pourquoi. Mais on sait aussi que chaque région et Québec, le Québec doit faire sa part en immigration humanitaire. Donc, souvent, ce sont des réfugiés qui ne parlent pas français. Je voudrais vous entendre sur votre position à l'égard des réfugiés, d'accord? Parce qu'on a beaucoup parlé des travailleurs qualifiés, ce matin, mais parlez-moi des réfugiés. Comment vous voyez la chose pour Québec?
Le Président (M. Cusano): M. le maire.
M. L'Allier (Jean-Paul): Le réfugié, si vous me permettez, c'est quelqu'un qui a eu un problème dans son pays mais pas ici. Donc, une fois qu'il arrive ici, il est exactement comme les autres, il cherche un emploi, il cherche du travail. Et, si on passe notre temps à lui remettre sur le nez qu'il est réfugié, etc., on le cale plutôt que de l'aider. Ce n'est pas parce que quelqu'un était dans un pays où il pouvait difficilement s'exprimer que, rendu ici, il va rester silencieux; il va s'exprimer, bien sûr. Donc, il faut avoir pour le réfugié la même ouverture, une fois qu'il est sur place, qu'on a pour tous les autres.
Quand on parle d'une région francophone, attention, il ne s'agit pas de vouloir limiter l'immigration aux francophones. C'est que c'est plus facile pour les francophones qui arrivent à Québec que pour quelqu'un qui arrive d'Asie et qui est dans un pays ancienne colonie britannique; il a un peu de misère. Bon.
Quand on parle de francophone, je voudrais aussi qu'on parle de francophile. Si vous avez les pays, par exemple, de l'ancienne Indochine française, il reste des traces de la francophonie dans ces pays, et ça, c'est évidemment plus facile pour eux de s'installer ici, peut-être, qu'à Vancouver.
Si on parle des pays d'Europe de l'Est, il y en a qui sont plus francophiles. Je pense à la Roumanie, je pense à d'autres pays où la culture profonde est souvent commune avec la culture française. Le milieu de Québec est plus naturellement accueillant à ces gens-là, parce qu'on est à 97 % francophones. Mais, moi, je ne serais pas d'accord pour qu'on vise à ce que le 97 % passe à 98 %; ce n'est pas ça, le but. C'est de rester largement ouvert mais en disant que, si vous voulez venir ici et que vous êtes francophile, c'est un milieu d'accueil plus facile que si vous allez, je ne sais pas, moi, dans une ville anglophone dont le maire s'appelle Jones.
Le Président (M. Cusano): Merci.
M. L'Allier (Jean-Paul): S'appelait.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le maire. M. le député de Saint-Hyacinthe, en vous rappelant que vous disposez de 6 min 50 s.
M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, bonjour, M. le maire, madame. J'ai besoin de votre aide pour comprendre. Je vois ici des choses extrêmement intéressantes et, vous savez, on parle... Par exemple, on sait que le ministère des Relations internationales a la responsabilité de l'intégration des immigrants, donc la francisation au sens général, d'après l'entente Ottawa-Québec. Je ne connais pas actuellement de loi, d'article de loi qui précise qui doit faire quoi en termes de francisation des immigrants. Je sais qu'il y a des cégeps qui offrent des cours de francisation. Je sais qu'il y a des commissions scolaires qui offrent des cours de francisation de façon... plutôt pour les jeunes. Il y a des organismes communautaires qui offrent des cours de francisation.
Je sais qu'on va avoir ? ça paraissait dans La Presse de ce matin ? qu'on va avoir jeudi quelqu'un qui va venir nous parler au nom des organismes communautaires, qui va nous dire que les listes d'attente sont infinies. Donc, les gens attendent pour la francisation. Donc, il y a beaucoup de bonne volonté des gens qui arrivent ici de connaître la langue commune, mais semblerait qu'il manque de ressources pour franciser les immigrants. Alors, j'ai trouvé ça assez incohérent qu'on se plaint d'être seulement 2 % dans une mer d'anglophones en Amérique du Nord et on n'a pas les ressources qu'il faut pour franciser des immigrants qui veulent se franciser, donc qui veulent s'intégrer à la culture commune.
J'ai un très beau document ici, et, M. le maire, c'est vraiment très attrayant, je note qu'il est écrit en français. Je vous en félicite, ce n'est pas un reproche, mais, pour qu'il soit utile pour un immigrant, il faut qu'il sache le français. Alors donc, la question que je pose est la suivante: Est-ce que la ville de Québec, elle se retrouve dans tout ça? Qui fait quoi?
n
(10 h 30)
n
M. L'Allier (Jean-Paul): ...vous répondre là-dessus, je voudrais tout simplement dire un point. Si le document est en français parce que le milieu de mise en valeur de l'appartement, du logement, de la maison est en français, les journaux sont en français dans la région de Québec... Alors, si vous avez un guide en portugais, ça ne vous aidera pas à lire Le Soleil.
M. Dion: Vous comprenez bien que ce n'est pas un reproche, hein?
M. L'Allier (Jean-Paul): Non, non, mais je vous dis pourquoi on l'a fait comme ça.
M. Dion: Merci.
M. L'Allier (Jean-Paul): Par contre, le cédérom, si vous l'avez, lui, il est dans les quatre langues, si je me souviens bien.
Mme Bourget (Anne): Trois langues, plus le portugais qui s'en vient.
M. L'Allier (Jean-Paul): C'est ça. C'est une langue aussi?
Mme Bourget (Anne): Oui. Oui, oui, mais il n'est pas encore fait, là.
M. Dion: Il viendra. Il viendra.
Mme Bourget (Anne): Il n'est pas encore en portugais...
M. L'Allier (Jean-Paul): ...vas-y.
Mme Bourget (Anne): Bien, vous nous adressez une question comme si la ville de Québec avait la responsabilité de la francisation et vous vous posez la question de qui a la responsabilité de ça. Bon, je vais vous répondre en ce sens, je pense que je l'ai dit tout à l'heure, il faut probablement mieux organiser l'offre de service qu'on a à Québec pour les immigrants, y compris la francisation, y compris... Ce n'est pas de dire: C'est toi, le coupable, ou c'est l'un ou c'est l'autre. C'est de dire: Quelles ressources... On en a, une série de ressources sur le territoire, et il faut juste mettre un peu d'ordre dans tout ça, mieux l'organiser pour mieux reconnaître tout ce qu'on fait, dans le fond. Et c'est ce qu'on dit en faisant la promotion avec le ministère du projet de Maison interculturelle. Qu'est-ce qu'elle aura l'air après l'étude de faisabilité, cette maison-là? On en discutera, on verra, on regardera quelle est la pertinence de mettre tel ou tel service ou de ne pas mettre tel ou tel service au sein de la maison. Mais ça, c'est des discussions qu'il faudra qu'on ait dans les prochains mois, je dirais. Mais organiser les services, c'est certainement une bonne avenue.
Le Président (M. Cusano): Merci, madame. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Vous comprendrez que ma préoccupation n'est pas de l'ordre de lancer des pierres ou quoi que ce soit. Ma préoccupation est la suivante. Les immigrants sont ici. Je me dis: Si, nous, on se retrouve, on a des chances qu'ils se retrouvent; mais, si, nous, on ne se retrouve pas, les chances qu'ils se retrouvent, eux, sont minces. Alors, c'est dans ce sens-là que je posais la question. Et donc il y a un volet administratif à la langue, il y a un volet qui est celui de la perception qu'a l'immigrant quand il arrive à Québec: Comment je vais faire pour pouvoir parler à ce monde-là? Alors, vous comprendrez que c'est sûr que votre Maison interculturelle apparaît comme quelque chose de... en tout cas, d'extrêmement intéressant de ce point de vue.
Le Président (M. Cusano): Mme Bourget.
Mme Bourget (Anne): Je peux peut-être rajouter que, oui, c'était plutôt un commentaire que vous faisiez plutôt qu'une question. Et je voudrais insister sur le fait que ce n'est pas la Maison interculturelle de la ville de Québec, c'est la Maison interculturelle des partenaires qui s'y associeront. Alors, je veux juste être claire là-dessus. Même si on a mis des énergies, le ministère en met aussi, et quelque part, là, on va se rencontrer avec d'autres partenaires aussi. Mais ce n'est pas la Maison interculturelle de la ville de Québec.
M. Dion: Merci.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Bourget. Vous avez terminé? Il vous reste une minute, Mme la députée.
Mme Vermette: Alors, je vais être brève. Le plan d'accueil, est-ce que vous avez un plan d'accueil pour les immigrants? Que doit-il comporter? Et par qui doit-il être financé? Est-ce qu'il y a une participation aussi gouvernementale? À quelle hauteur?
Le Président (M. Cusano): Mme Bourget.
Mme Bourget (Anne): Est-ce qu'on a un plan d'accueil? On a un plan en immigration. En fait, c'est l'entente que l'on signe avec le MRCI de façon pluriannuelle depuis quelques années, et ce plan-là... La ville de Québec, son rôle, là, c'est de faire la promotion de Québec. Trois rôles à jouer: promotion de Québec comme lieu d'établissement, intégration des immigrants dans la sphère de ce qu'on a à jouer comme rôle ville, de faire connaître les services municipaux, de faire connaître, bon, ce type d'outils là, et aussi de rapprochement interculturel. Ça, c'est ce qu'on considère étant les trois bornes importantes de la mission de la ville. Donc, effectivement qu'on a un plan de match, c'est inscrit via l'entente et son plan d'action surtout. Et je vous dirais que c'est tellement important que c'est reconnu à travers le Québec. Sherbrooke nous appelle, Gatineau nous appelle pour s'inspirer de ce qu'on fait à Québec pour bâtir leur propre plan en immigration, et ça, c'est intéressant au Québec, d'avoir cette collaboration-là entre villes, où on s'inspire des meilleurs coups de l'un et de l'autre, dans le fond.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Bourget et M. le maire. J'aimerais, au nom de mes collègues, vous remercier.
J'aimerais ajouter une petite anecdote avant que vous quittiez. Lorsque mon père est arrivé à Montréal, de l'Italie, en 1951, il ne connaissait pas un mot de français et il a trouvé un travail dans le milieu de la construction dans l'est de Montréal. Et, après deux mois, il a pris connaissance ou il maîtrisait une connaissance fonctionnelle au niveau du travail, sauf que, puisqu'il travaillait avec des Beaucerons, il avait un accent de la Beauce.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. L'Allier (Jean-Paul): Mais, si vous me permettez, M. le Président, c'est par l'accès à l'emploi qu'on règle une grande partie des...
Le Président (M. Cusano): Exactement. Exactement.
Une voix: Voilà! Voilà!
M. L'Allier (Jean-Paul): Si vous êtes immigrant puis que vous avez un emploi à Québec, vous êtes en immersion permanente.
Le Président (M. Cusano): Exactement.
Une voix: Voilà!
Une voix: ...de la discrimination pour...
Le Président (M. Cusano): C'est ça. Alors, je vous remercie, M. le maire. Mme Bourget, merci beaucoup.
Je vais suspendre pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 36)
(Reprise à 10 h 41)
Le Président (M. Cusano): Alors, je demanderais à nos prochains invités de bien vouloir prendre place. Bonjour. Pour les fins du Journal des débats, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?
Service à la famille chinoise
du Grand Montréal (SFCGM), Centre
Sino-Québec de la Rive-Sud et Fédération
des professionnels chinois canadiens
Mme Chiu (May): Oui. Je m'appelle Mme May Chiu. Je suis la directrice générale du Service à la famille chinoise du Grand Montréal.
Le Président (M. Cusano): Merci.
Mme Li (Xixi): Mon nom est Xixi Li, je suis la directrice générale du Centre Sino-Québec de la Rive-Sud.
Le Président (M. Cusano): Merci. Alors, je vais vous expliquer un peu la façon qu'on procède. Vous avez une période maximum de 20 minutes pour faire votre présentation, et, par la suite, il y aura un échange de 40 minutes avec les membres de la commission. Alors, vous avez la parole.
Mme Chiu (May): Merci. D'abord, merci beaucoup à tous les membres de la commission parlementaire d'avoir accepté de nous accueillir. Je m'excuse, on est un peu nerveuses.
Le Président (M. Cusano): Sentez-vous à l'aise, madame.
Mme Chiu (May): Oui. En nous donnant le privilège de venir vous voir et présenter notre mémoire, nous sommes très contents de voir que, en effet, le gouvernement est en train d'effectuer leur plan d'action sur les communautés culturelles, parce que, ici, vous avez parlé beaucoup de la création... des partenaires avec les organismes communautaires qui viennent des communautés culturelles. Et donc, pour cette raison... et en plus, vous donnez un délai de deux ans pour mettre en action... pour effectuer ce plan d'action. Alors, on est très reconnaissants de votre engagement.
Alors, moi, je vais... Pour commencer la présentation, j'aimerais juste vous situer, vous donner un petit portrait de l'état d'immigration chinoise actuel. Alors, j'aimerais vous rappeler que, entre 1998 à l'an 2002, la Chine était toujours, pendant toutes ces années, le deuxième pays au Québec... le deuxième pays de provenance d'immigration au Québec, et, l'année passée, on était le premier. Alors, ça veut dire que nous représentons et nous travaillons avec un groupe de la population immigrante qui est très, très important au niveau du nombre actuellement au Québec. Et effectivement, on a vu également les augmentations de clients qui viennent chez nos deux centres. Vous remarquez l'importance de cette augmentation aussi; entre 1995 à l'an 2001, nous avons doublé le nombre d'immigrants chinois qui viennent de la Chine continentale. Alors, entre 1990 à 1995, il y avait seulement 5 000 immigrants... venaient de la Chine populaire. Mais, entre 1995 à 2002, on a accueilli 10 000. Alors, on a doublé le nombre d'immigrants chinois au Québec, mais... Remarquez que, malheureusement, on n'a pas doublé nos budgets pour aider ces gens. Et comme j'ai dit, effectivement, cette augmentation des immigrants chinois, ça se reflète dans nos statistiques quand on a accueilli des gens. Par exemple, juste pour l'année passée, on a donné plus... on a fait plus de 11 000 interventions auprès d'à peu près 300 nouveaux arrivés, et Centre Sino-Québec dessert la population asiatique à la Rive-Sud, on a accueilli 411 nouveaux arrivés.
Notre position, comme vous avez constaté dans notre mémoire, n'est pas de poser la question: Comment... ce sont quoi, les taux d'immigration... oui, ce sont quoi, les niveaux d'immigration et comment trouver des moyens pour les intégrer? Pour nous, à cause de toutes les raisons qu'on a entendues, des raisons démographiques, des raisons économiques, vraiment la question n'est pas comment... n'est pas si on devrait augmenter les taux d'immigration mais comment on va faire. Alors, moi, je vais vous présenter juste des principes généraux.
Premièrement, on trouve que l'accessibilité à tous les services dans toutes les structures et toutes les institutions de la société québécoise est primordiale pour nous pour bien intégrer les nouveaux arrivants. Dans votre plan d'action sur l'intégration des communautés culturelles, vous avez... le gouvernement a parlé de l'importance de travailler sur plusieurs terrains, pas juste à l'intérieur du MRCI, le ministère de l'Immigration et des Relations avec les citoyens, mais aussi on a parlé de l'importance de travailler sur le terrain au niveau de l'emploi, au niveau d'éducation, au niveau des services santé... le système de la santé et services sociaux. Alors, une recommandation que nous voulons vous présenter aujourd'hui, qui n'est pas dans notre mémoire parce qu'on a manqué de temps pour l'inclure, mais quelque chose que nous sentons très urgent est que... On pense que, pour effectivement travailler, atteindre les objectifs que vous avez énoncés dans votre plan d'action, on pense que le MRCI devrait avoir des pouvoirs atténués pour... Je vais vous expliquer. O.K.? Je vais vous donner un exemple très simple.
Par exemple, tout le monde est au courant du fait que maintenant tout le système de la santé et services sociaux est en train de restructuration. L'ACCESSS, un organisme qui se regroupe, qui s'associe pour la défense des droits d'accès à la santé et services sociaux des communautés culturelles, a présenté un mémoire, c'était un des deux seuls organismes à représenter les communautés culturelles qui ont été acceptés de faire... de déposer... de parler à la commission parlementaire. Maintenant, ça fait presque deux mois que le travail de la restructuration est commencé, mais, encore une fois, on n'est pas là du tout; encore une fois, on est complètement écartés de la réforme de la santé et services sociaux, qui est très, très, très importante pour nous.
Bon. Une autre faiblesse, une autre problématique que nous avons est que, puisqu'on est les minorités, il n'y a pas beaucoup de gens, des chercheurs qui veulent consacrer leur argent de recherche sur nous. Pour l'instant, ce que j'en ai avec moi est que nous avons une recherche qui a été effectuée par l'Université de Toronto et l'Université de Calgary sur la santé des aînés chinois à travers le Canada. Donc, c'est une étude nationale. Mais ils ont étudié les aînés au Québec. Puis, selon cette recherche, les aînés chinois ont, parmi toutes les villes... ils ont étudié comme sept villes à travers le Canada où il y avait la population importante chinoise, et on avait comme les moins... on utilise les moins services santé et moins services communautaires, donc ça veut dire des services sociaux.
n
(10 h 50)
n
On a le même problème avec le domaine de l'éducation. Avec l'augmentation de... Si vous connaissez un peu Montréal, dans les années très récentes, il y avait une grosse augmentation des Chinois qui déménagent dans la région de Verdun. L'année passée, on a reçu des dossiers de violence contre les Chinois... la violence raciste... Il y a toutes sortes de problématiques, mais... Parce que nous ne sommes pas seulement les clients du MRCI, nous sommes des citoyens et les usagers de services auprès de tous, tous, tous les départements et tous les ministères, l'aide sociale, et tout, et tout. Donc, nous, on pense que, pour aider à nous défendre, à sensibiliser les fonctionnaires dans les autres ministères, vraiment on a besoin... Si ce n'est pas le MRCI, il doit y avoir quelqu'un qui est responsable pour avancer nos dossiers, expliquer nos problématiques et sensibiliser leurs confrères, leurs collègues dans les autres départements, O.K.? Donc, ça, c'est nos premières propositions au niveau des principes généraux.
La deuxième que je vais faire et qui va être répétée par d'autres organismes sur toute la table est qu'on a vraiment besoin d'investissements dans les organismes communautaires des communautés culturelles. Encore une fois, dans votre plan d'action, le gouvernement, le Parti libéral a mis comme objectif, par exemple, de favoriser les échanges et les partenariats entre les organismes communautaires et les différents groupes, par exemple les institutions financières, les chambres de commerce, etc., et aussi, par exemple, de favoriser les partenaires entre les organismes communautaires et Emploi-Québec. Donc, ça, c'est deux objectifs que j'ai trouvés dans votre plan d'action. Mais comment on va faire ça? Si on n'a pas assez de ressources, comment on va faire ça?
Je vais vous donner une... J'aimerais partager avec vous un autre petit échange que j'avais avec une de nos supporters, une partenaire qui nous a supportés et nous a donné comme des... 1, 2 million... pas 2 millions, 2 000 $, 3 000 $ par année pour des activités très précises. Cette année, ils devaient couper leurs budgets, O.K.? Ils supportent, ils appuient beaucoup des communautés culturelles. Et la personne qui est responsable pour les dossiers avec les communautés culturelles, il m'a dit, parce qu'on a demandé une augmentation... J'ai eu une longue conversation avec lui. Il m'a dit: Je suis désolé, mais on a dû couper un peu partout, mais il faut peut-être... Peut-être, il faut être content avec le fait que, lui, il a décidé de couper même les autres communautés culturelles, mais pas les Chinois. Il m'a expliqué pourquoi. Il a dit: Dans les autres communautés que nous subventionnons, ils pourraient trouver les ressources à l'intérieur de leurs communautés. Ils ont leur réseau de gens d'affaires, les commerçants, des choses comme ça, qui les appuient. Mais, dans vos communautés, vous n'avez presque rien.
Alors, c'est quoi, la raison pour ça? Moi, j'ai commencé avec un contexte actuel, mais il faut regarder dans l'histoire aussi, il faut apprendre de l'histoire, et il faut rappeler que, même si la communauté chinoise, ça fait plus de 150 ans qu'on est ici, au Québec, et presque 200 ans qu'on est ici, au Canada, à cause des actes d'immigration racistes, nos communautés étaient empêchées de se développer, de former nos bases de soutien. Alors, ça veut dire que nos communautés, même si on est... Et j'ai des statistiques pour vous démontrer que... Alors, même si on était ici depuis 150 ans, 90 % de la population chinoise est toujours les premières générations, comme moi-même, comme Xixi Li. Et, avec les vagues d'immigration récentes, nous sommes une communauté qui est toujours en train de se rajeunir. Chaque jour, on accueille des nouveaux arrivés. Alors, c'est pour ça que, bien sûr, vous comprenez que, avec les nouveaux arrivés, on a besoin de plus de ressources pour les aider, et pour nous, c'est un investissement dans le court terme.
Dans notre mémoire, on a référé, on a mentionné aussi par rapport à la régionalisation et au niveau de taux d'immigration. Ce que nous trouvons clé de faire est de créer des masses critiques d'immigrants. Parce que, si vous voyez, si vous regardez les autres villes, grandes villes qui fonctionnent bien au niveau économique, qui accueillent bien leurs immigrants, on voit qu'ils ont des gros bassins d'immigrants, et, comme ces réseaux... les bases sont établies, les gens s'entraident.
Par exemple, mon père... Moi, j'ai grandi à Trois-Rivières, oui, et qui a donné... Où est-ce que les Chinois ont travaillé à Trois-Rivières? Dans les restaurants chinois. Ils n'étaient pas engagés dans les institutions éducatives, dans les hôpitaux, dans les Wabasso, alors c'étaient les gens de nos propres communautés qui s'occupaient de nous. Et je crois que ça, c'est un avantage qu'il faut profiter: quand on est là dans les masses critiques, on est capables de s'entraider. Mais aussi, entre-temps, au niveau du court terme, il faut qu'on ait des réseaux d'entraide, des organismes communautaires comme le nôtre qui pourraient aider les gens avec des besoins très immédiats et quotidiens.
Une autre raison pour laquelle c'est important de nous aider, de nous soutenir, c'est que nous sommes aussi les premiers à identifier des problématiques qui appartiennent au gouvernement. Donc, je viens de vous décrire comment on voit le partenaire avec le secteur privé, mais, avec le gouvernement, il y a beaucoup de... il ne faut pas que l'État se dégage de leurs responsabilités. Comme je viens de dire, par exemple, avec les incidences de la violence contre les Chinois dans les écoles, ça, on ne peut pas dire: Ah! ça, c'est votre responsabilité. Non. Le système scolaire, c'est un système public. Vous avez mentionné aussi dans le plan d'action l'importance d'ajouter au curriculum... la contribution des différentes communautés. Il faut avoir des programmes contre le racisme, contre le taxage, et tout ça. Alors, nous devons être là pour vous signaler quand il y a des problèmes, des gros problèmes importants. Et après, on aimerait travailler avec vous pour régler ces problèmes-là.
Alors, ça, c'est, en bref, ce que je veux présenter. Je suis sûr qu'il y aura beaucoup de questions. Mais je laisse la parole à ma collègue, Xixi Li, qui va vous parler des points plus ponctuels.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Chiu. Mme Li, j'aimerais vous aviser que vous disposez de cinq minutes pour le restant de la présentation.
Mme Li (Xixi): O.K. Bonjour. Premièrement, je vais vous demander d'excuser mon français parce que... j'ai appris tout mon français à Québec, j'étais... habité ici avant. O.K. J'ai étudié à l'Université Laval avant. O.K.
Je vais parler de... parce que Mme May Chiu vous avait donné un petit peu le profil de l'immigration chinoise à Montréal et la Montérégie, mais je vais vous parler un petit peu de la problématique spécifique dans notre communauté, puis on va vous proposer des résolutions qu'on est prêts à discuter. Parce que, comme vous le savez, les immigrants chinois... La première problématique qu'on a identifiée, c'est l'employabilité.
n
(11 heures)
n
Les immigrants chinois, les groupes d'immigrants chinois sont les plus nombreux nouveaux arrivants depuis l'année dernière, puis toujours notre communauté, nous... vécu... la problématique de l'accès, de l'intégration dans le marché du travail. Puis parce qu'on note... J'ai des statistiques ici, les taux de chômage sont plus supérieurs à celui de la population québécoise. Comme la population québécoise, c'est le 7,8 %, mais, pour les communautés culturelles, c'est le 15 % de taux de chômage. Mais par contre les immigrants chinois et les autres immigrants, sur le niveau de scolarisés, c'est beaucoup plus élevé que les autres.
Et ce sont des gens, c'est des travailleurs potentiels aussi. Donc, je pense que, parce que comme nos services à la famille chinoise, ils sont au Québec, on est... immensément de nos clients nous demandent des services d'employabilité, mais ils sont malheureusement... Comme, au MRCI, on a des programmes de PSIE, pour insertion à l'emploi, mais tous les deux, nos centres, on n'a pas cette sorte de service. J'ai fait beaucoup d'approches à Emploi-Québec, eux autres disent: On ne peut pas faire le doublement de services, on a déjà des services existants. Mais sauf qu'à l'occasion où j'avais demandé... et il y en a, des services existants, j'avais demandé: «Est-ce qu'il y en a beaucoup, de clients chinois que vous pouvez recevoir?», mais elle me dit que c'est le problème, c'est très rare que les Chinois peuvent profiter de ce service. J'ai dit qu'on me dit que le service public, c'est pour toute communauté, mais, si les Chinois ne peuvent pas profiter, c'est... Il y en a, des problématiques, là-bas, et on devrait identifier puis trouver la solution pour cette sorte de problématique.
Même, comme il y a beaucoup des Chinois qui sont professionnels, quand ils sont arrivés ici, ils disent: Ah! je ne peux pas entrer dans leur ordre professionnel comme médecin, comme ingénieur en Chine, mais où je peux aller? Il n'y a personne pour donner l'orientation pour ces groupes de gens. Alors, ils disent: Retournez à l'université, allez étudier comme technicien. Puis il y a des gens comme tout perdus. Puis je redis: À cause de la langue, à cause de la mentalité, l'intégration pour les Chinois, sociale, politique, est peut-être plus lente, mais, pour l'emploi, je trouve que c'est plus facile pour les Chinois, parce que les Chinois, on a dans notre mentalité qu'on ne veut jamais aller prendre le bien-être social ou autre chose, on va travailler. Même si je suis ingénieur en Chine, je peux travailler au restaurant. Mais ce n'est pas le but de l'immigrant, on ne veut pas... le Québec, on ne veut pas apprendre à l'ingénieur à travailler au restaurant. Ça, c'est la réalité, puis ça cause beaucoup de problèmes sociaux.
Comme... il y a beaucoup de divorcés aussi, parce que l'homme est supposé de travailler pour sa famille, puis maintenant il ne peut pas travailler, puis il perd la face devant la femme. Puis il y a beaucoup de divorces aussi, beaucoup de violence conjugale. Ça, c'est ce que je dis, que le gouvernement devrait investir dans les réseaux pour le moment au lieu d'attendre plus tard, de donner de l'argent pour résoudre le problème de la famille, de l'enfance puis le psychologue social. Ça, c'est... Je pense que je suis pour qu'il faut redemander au gouvernement d'investir dans ce côté-là pour l'employabilité de la communauté culturelle.
Je ne sais pas si j'ai encore du temps...
Le Président (M. Cusano): ...vous avez une minute.
Mme Li (Xixi): Ah! O.K. Je vais vous donner un exemple concret. Comme ma soeur, elle était en Chine, elle est pédiatre en Chine, elle a fait sa maîtrise, et elle a une expérience de 20 ans comme pédiatre en Chine, et elle est venue ici, elle ne peut rien faire. Même, elle veut travailler dans l'usine, ils ont demandé: Est-ce que vous avez de l'expérience comme ouvrier en Chine? Je n'en ai pas, je n'ai aucune expérience. Puis elle a dit: Je vais revenir à l'université pour étudier une autre fois, puis il a dit: Non, parce que vous êtes... déjà étudié en Chine. Vous ne pouvez pas entrer à l'université. Puis..
Une voix: ...
Mme Li (Xixi): Oui, oui. Ça, c'est comme quand j'avais proposé pour l'ordre professionnel, je vais vous proposer comme de reconnaître les compétences pour les gens qui ne parlent ni français, ni anglais, mais, s'ils parlent chinois, c'est une autre compétence. S'ils connaissent la communauté culturelle, c'est une autre compétence. Ils devraient donner le point pour cette compétence-là. Comme ma soeur, elle reste à la maison, quand même il y en a beaucoup d'amis de la communauté chinoise de téléphoner pour la consulter, elle dit: Je n'ai pas de licence. Mais les gens, quand ils allaient à leur hôpital, il a été dit que: On n'a plus de pédiatre pour vous. Il faudrait attendre 12 ans, puis, je trouve, c'est vraiment... C'est dommage, parce que le gouvernement investit beaucoup d'argent pour faire parvenir ces groupes de gens, et on les laisse, là, dans le côté. Puis il y en a beaucoup de même. Beaucoup de Chinois, ils veulent revenir en Chine ou aller aux États-Unis. C'est vraiment une perte.
Le Président (M. Cusano): Merci.
Mme Li (Xixi): J'ai beaucoup de points à dire, mais...
Le Président (M. Cusano): Oui, je comprends. Mais vous pourrez faire vos points lorsque les questions seront posées. Alors, je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, merci beaucoup. Mme Chiu et Mme Li, je suis tellement contente que vous ayez pris la peine de vous déplacer ce matin. Ce n'est pas la première fois que j'écoute, que je vous entends. J'ai beaucoup de préoccupations par rapport aux problématiques que vous soumettez, je dirais plus spécifiquement par rapport à la communauté chinoise.
Je veux juste faire peut-être une mise en situation ou un rectificatif par rapport à cette situation des médecins, où effectivement, dans le cadre, je dirais, de l'atteinte du déficit zéro, le gouvernement précédent avait demandé aux médecins qui venaient s'établir ici de signer une lettre pour renoncer à la pratique de la médecine. Là, je veux redire, pour la... plusieurs fois, que mon collègue Philippe Couillard, le ministre de la Santé, a levé cet obstacle-là et a fait les annonces requises ? on va ressortir les communiqués de presse. Mais ces obstacles-là n'existent plus au moment où on se parle.
Ce que nous faisons maintenant avec chacun des médecins qui sont sur place, on leur offre un service de cheminement personnel où on leur indique exactement ce qu'ils ont à faire s'ils veulent repratiquer la médecine, et ça, en collaboration avec le Collège des médecins. Le Collège des médecins a fait beaucoup d'ouverture par rapport à ça, et on travaille avec l'Université Laval, ici, pour accompagner dans la formation pédagogique. Maintenant, le cas de la Chine, les universités en Chine, je ne peux pas me prononcer là-dessus, mais je peux vous dire qu'il y a énormément de travail qui a été fait au cours des derniers mois pour au moins faire tomber ces obstacles d'ordre administratif.
Maintenant, à chaque fois que je vous rencontre, j'entends beaucoup justement cette préoccupation par rapport à la difficulté sociale que vivent de plus en plus certains membres des communautés chinoises. Je sens toujours un peu, Mme Chiu, Mme Li, un peu votre... je ne dirai pas désarroi, mais votre anxiété, votre inquiétude profonde par rapport à ce phénomène-là, et vous nous dites: Il faut que le gouvernement nous aide par rapport à ça. Moi, je sais qu'au ministère j'ai institué une équipe où il y a des répondants par continent qui accompagnent vos communautés.
Mais j'aimerais ça savoir, au-delà du fait que je comprends que vous voulez des moyens financiers, là... ça, j'ai bien compris, j'ai bien entendu le fait que vous demandez, mais ma perception, c'est que vous voulez aussi que vos organismes soient le lien, la courroie de transmission entre la personne et les services publics. Vous voudriez que le gouvernement passe par vos organismes puis vous nous dites: C'est un peu lié aux traits culturels de notre communauté. Vous nous dites: Ils sont plus à l'aise s'ils passent par nous. Mais en même temps, nous, on ne veut pas... on veut s'assurer qu'il y ait une réelle intégration à la société québécoise. C'est très important pour nous, ça, de sentir qu'il y a non seulement l'accessibilité, mais qu'il y a la compréhension et la volonté de vraiment non seulement utiliser nos services, mais de participer.
Alors, ma question, c'est: Qu'est-ce qu'on peut faire plus concrètement? Je comprends l'argent, là, puis je ne minimise pas l'importance de vous soutenir financièrement, mais vous recevez quand même de nous au-dessus de 200 000 $ par année, là, et vous recevez de la régie, vous recevez du Fonds de la pauvreté. Mais qu'est-ce que concrètement on peut faire pour que vous sentiez que vous avez tout l'appui et le soutien requis pour favoriser l'intégration de votre communauté? Et là je ne parle pas juste des nouveaux arrivants. Moi, j'irais jusqu'aussi loin que dire: ceux qui sont même parmi nous depuis quelques années et parfois plusieurs années.
Le Président (M. Cusano): Mme Li.
Mme Li (Xixi): Je vais essayer de répondre à cette question-là. Je pense que... Premièrement, je pense que ça, ce n'est pas seulement pour la communauté chinoise. Je pense que le gouvernement... il faudrait que le gouvernement fasse de la promotion publique, parle davantage des immigrants à tout le public. Parce que les gens pensent que les immigrants viennent ici pour venir travailler puis que, parce qu'on n'a pas de manger en Chine, on vient ici. Mais ce n'est pas vrai. Parce que, maintenant, beaucoup de Chinois se plaignent parce qu'on est... Pourquoi on est plus pauvres ici qu'en Chine? Parce qu'on y rêve, on y rêve pour venir ici pour améliorer notre vie, mais il y a une réalité, c'est: on est plus pauvres qu'en Chine. Mais je pense qu'il faut que le gouvernement fasse beaucoup de promotion publique, parle de l'importance de l'immigration puis les communautés culturelles.
n
(11 h 10)
n
Même... Parce que je me sentis que, sur les différents départements du gouvernement, surtout les fonctionnaires du ministère de l'Immigration, ils comprennent mieux que les autres départements. Comme le fonctionnaire à l'autre ministère, il ne comprend pas l'immigration, il ne peut pas identifier la problématique, même identifier le... Il ne pense pas que c'est important. Mais il faut leur faire connaître l'importance de l'immigration. Comme les immigrants, ça prend 28 % de la population de Montréal, Grand Montréal, ça, c'est...
Mme Courchesne: Ce que vous dites, c'est que vous souhaitez une plus grande et meilleure coordination des services gouvernementaux aussi. Ce que vous dites, ce qui est ardu pour vous, c'est d'aller d'un ministère à l'autre. Et je sais que vous travaillez beaucoup avec la Santé, mais aussi, vous dites, Emploi-Québec, et là vous souhaiteriez sentir que tous les ministères ont une même volonté de vous aider dans ces processus d'intégration. C'est ça que je comprends.
Mme Li (Xixi): Puis, je pense, ce n'est pas seulement le gouvernement, aussi le grand public, aussi...
Mme Courchesne: Le grand public.
Mme Li (Xixi): ...le secteur privé. Il faut connaître davantage les immigrants puis les difficultés des immigrants. Ça va nous aider beaucoup. Mais je pense que c'est la responsabilité du gouvernement de faire ça.
Mme Courchesne: Vous savez, vous avez dit, puis à juste titre, que la communauté chinoise est établie au Québec depuis plus de 150 ans. Et ce que je crois déceler dans vos propos ? et corrigez-moi si je me trompe, j'espère que je me trompe ? mais, même si on est très... Moi, je me rappelle, hein, un événement marquant dans ma vie. C'est que je suis trifluvienne, comme vous, et un événement marquant dans ma vie, c'est qu'à l'âge de six ans, un vendredi soir, très tard ? pour moi, il était très tard, mais peut-être qu'il était 10 heures le soir, il faisait très noir ? mes parents m'ont amenée manger dans le Chinatown, avec toutes les lumières. Je n'oublierai jamais ça. Ça m'avait tellement marquée comme événement. Donc, on a vécu avec la communauté chinoise, vous avez raison, beaucoup dans la restauration.
Mais est-ce que je comprends, dans vos propos, que vous sentez une discrimination à l'égard de la communauté chinoise? Est-ce que vous sentez que votre communauté est victime de plus de préjugés que d'autres? Comment vivez-vous ça? Est-ce que c'est ça que vous sentez de la population ou si par ailleurs, pour des raisons très culturelles, et valables probablement, votre communauté, comme vous l'avez dit, prend plus de temps, pour toutes sortes de raisons? Comment... Où est l'heure juste? Comment on vit cette réalité-là sur le terrain?
Le Président (M. Cusano): Mme Chiu.
Mme Chiu (May): O.K. Je crois que, comme minorité, on est toujours en train de balancer tous les facteurs que vous venez de mentionner. J'aimerais vous donner un petit exemple.
On a le projet avec Emploi-Québec, dans le placement des stages pour les nouveaux arrivés. Mais un des critères qui est toujours maintenu est que les personnes devraient être «recipients» de l'aide sociale. Donc, pour deux ans, on a essayé de convaincre nos gens d'aller faire la demande pour l'aide sociale, puis on est retournés... On a discuté plusieurs fois avec les gens d'Emploi-Québec: Écoute, ce règlement est discriminatoire, parce que, si vous obligez les gens de remplir cette obligation, il n'y a plus de placement pour les Chinois. Parce que, comme Xixi vient de dire, une de nos particularités est qu'on est très fiers, on est... La plupart des gens qui viennent ici sont des professionnels qui viennent d'un statut social très élevé en Chine, et personne ne veut aller faire la demande pour le BS. Donc, ça, c'est le manque de sensibilisation qui existe à l'intérieur des autres ministères.
En parlant de la discrimination, moi, je dois dire que... Je dois avouer que, comme vous venez de dire, j'ai grandi à Trois-Rivières, il n'y avait pas de... Je n'ai jamais expérimenté des incidents de racisme direct, mais la discrimination, ça pourrait être indirect. Parce qu'on était très, très peu à Trois-Rivières, on ne pouvait pas être accusés de voler les emplois, des choses comme ça, mais on était très isolés, très écartés de la vie participative dans la ville.
Mme Courchesne: Mais, si vous me permettez, puis je veux être très constructive, est-ce que c'est parce que vous étiez écartés ou si c'est parce que... puis je parle historiquement, là, je ne parle pas de ces années-ci, parce qu'il y a un progrès énorme. Je vous le dis tout de suite, là ? je fréquente beaucoup votre communauté, là, je serai encore parmi vous vendredi ? je sens qu'il y a un progrès. Mais est-ce que ce n'est pas aussi parce que votre communauté a tendance à rester plus dans ses mêmes services et dans son environnement, parce que c'est comme ça chez vous? C'est ça que je veux comprendre.
Et quels sont les efforts précis qui ont été faits? Est-ce qu'on ne voit pas un certain progrès? Est-ce qu'il n'y a pas un progrès malgré tout? Est-ce que c'est seulement d'un côté que vous vous sentez écartés ou si on n'a pas des efforts partagés à faire par rapport à ça? J'essaie juste de... Et quels sont les meilleurs moyens pour y arriver? Quels sont les meilleurs moyens pour y arriver? Est-ce que c'est par l'approche personnalisée, où il y aurait, par exemple dans le MRCI, une équipe qui comprendrait mieux votre façon de travailler? Est-ce qu'on ne devrait pas regarder la problématique de la communauté asiatique dans son ensemble, de façon plus approfondie, plus particulière?
Le Président (M. Cusano): En terminant, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Vous allez devoir répondre rapidement.
Le Président (M. Cusano): Oui, brièvement.
Mme Chiu (May): Mais c'est une question très complexe!
Le Président (M. Cusano): Vous pourrez revenir par après.
Mme Chiu (May): O.K. Moi, je pense que la ministre touche la question d'identité culturelle. Quand on parle... et aussi, avec tout respect pour la ministre, moi, je pense que ce que vous venez de dire n'est pas que, si les gens reviennent chez nous, on est comme moins Québécois que les autres organismes.
Mme Courchesne: Non, non, je n'ai pas dit ça, là. Je m'excuse, là, mais je n'ai pas dit ça. Je veux vraiment rectifier, je n'ai pas du tout prononcé ce terme-là, parce que je ne pense pas ça. Moi, je parle vraiment en termes d'intégration sur le terrain. Parce que je n'ai pas du tout, du tout... au contraire. Au contraire. Puis je vois beaucoup de progrès. Mais il faut cette compréhension-là pour trouver les bons moyens, c'est juste ce que j'ai...
Mme Chiu (May): O.K. Donc, très bref, je vais faire les deux points. Premièrement, comme on le sait, ça fait des années qu'on a été accusés d'encadrer, de vouloir embrasser nos comités pour les tenir dépendants sur la communauté chinoise. Mais, quand on a essayé de... Oui, on a accepté: O.K., maintenant on envoie toutes les demandes de services sociaux aux CLSC, mais les gens retournent les gens chez nous parce que la société d'accueil n'est pas préparée pour accueillir.
Mme Li (Xixi): Oui, ils ne sont pas prêts. Ils ne sont pas prêts. Comme on a référé notre client à un CLSC, puis après ils le réfèrent chez nous, puis entre... le client, il est entre les deux, comme il passe... pas d'un côté... mais au moins essayer de l'accepter. Mais on n'a pas... Mais le service du gouvernement comme celui-ci, il a... il n'y a pas de service. Ça, c'est...
Le Président (M. Cusano): Merci. Je dois maintenant céder la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Ça me fait plaisir de vous rencontrer, et je peux vous dire que, dans ma région, dans la région des Laurentides, entre autres à Saint-Jérôme, nous avons une communauté chinoise, très restreinte cependant, mais qui sont des gens d'affaires et qui s'intègrent très bien dans la communauté. Effectivement, ils arrivent connaissant très légèrement le français, mais le fait qu'ils sont, je vous dirais, à l'extérieur de Montréal, le fait qu'ils... c'est comme une immersion totale, une immersion dans un milieu francophone, et ils apprennent bien le français. Même s'ils arrivent ne connaissant que quelques bribes, ça va très bien.
Et comme votre... La question que je veux vous poser, c'est que votre organisme semble privilégier l'installation à Montréal et sur la Rive-Sud, entre autres: Est-ce que vous croyez qu'il n'y aurait pas lieu justement d'inciter des gens de votre communauté d'aller s'installer à l'extérieur de Montréal et de la Rive-Sud? Et je parle, entre autres, de la Rive-Nord, où on commence à connaître des succès par rapport à l'intégration de Chinois.
Le Président (M. Cusano): Mme Li.
n
(11 h 20)
n
Mme Li (Xixi): Ah! Ça, c'est ce qu'on est en train de faire, parce qu'on a un projet d'entrepreneurship en Montérégie. On a essayé de convaincre les investisseurs chinois et l'entrepreneur chinois d'aller dans la région. Mais sauf que le... Vous savez que, comme on parlait de régionalisation, s'il y a de l'emploi, c'est sûr que les gens vont y aller. S'il y a de... Comme pour les gens d'affaires, s'il y a une chance d'affaires, c'est sûr qu'il va y aller. Ça, c'est... On a essayé de promouvoir, mais sauf que, si on envoyait des gens à la région que les Québécois, ils ne voulaient pas y aller puis qu'il n'y en a pas, d'emploi, bien ça, ça n'a pas de sens de faire ça. C'est ce que, nous, on pense.
Mme Chiu (May): Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose?
Le Président (M. Cusano): Oui, vous pouvez.
Mme Chiu (May): Parce que... la question de régionalisation, c'est toujours la... c'est comme la question de qui vient d'abord: l'oeuf ou le poulet? Les gens ne veulent pas aller dans les régions avant qu'il y a assez de cours de... il y a des cours de français, avant qu'il y a une structure communautaire pour les accueillir. Mais, s'il n'y a pas de gens qui veulent y aller, il n'y aurait pas ces structures-là. Alors, l'année passée, on a fait des projets dont la promotion des... on a envoyé même les immigrants à Québec, on a fait des tentatives avec la région de Trois-Rivières et à Drummondville. Et, bon, on a eu des résultats mixtes.
Par exemple, j'ai mentionné, dans notre mémoire, qu'il y avait une compagnie chinoise qui s'est installée à Drummondville, et ils voulaient recruter 40 employés. Donc, on a fait une session d'information; on a eu 240 personnes qui sont venues pour cette rencontre-là. Mais, à la fin, seulement la moitié des postes étaient remplis, premièrement parce que les gens avaient peur: s'ils achètent les maisons ou installent leurs enfants à Drummondville, si jamais ils perdent leurs emplois, qu'est-ce qu'il y a pour eux à faire? Alors, comme je viens de dire, c'est une question circulaire. Et c'est pour ça que, dans nos mémoires, on a dit que c'est très important d'avoir des masses critiques d'immigrants, surtout dans les régions. Parce que ce qu'on fait là...
Le Président (M. Cusano): Oui, Mme Li.
Mme Li (Xixi): O.K. Je vais prendre un autre exemple. Comme... Brossard avant était comme un village, mais après il y a beaucoup de Chinois qui sont arrivés, maintenant ils construisent des maisons. C'est beaucoup. Et maintenant les Chinois, ils ont trouvé que Brossard, c'est trop cher. Maintenant, il y a Candiac, il y en a beaucoup, de Chinois. Puis il y a beaucoup d'investissements de construction aussi pour leurs maisons. Beaucoup de gens après ça ont dit qu'on a développé encore, il y en a beaucoup, de Chinois, qui sont arrivés. Mais ça prend le temps. Comme Brossard, c'est un bon exemple: les gens voulaient aller plus loin, mais ça prend le temps puis ça dépend de la chance: chance de l'employabilité, chance d'affaires.
Mme Papineau: Je vais reprendre votre exemple de Drummondville. Vous dites qu'il y avait une entreprise chinoise qui voulait recruter 40 personnes. Est-ce que vous faites le même cheminement lorsqu'il y a une entreprise québécoise?
Mme Chiu (May): Oui, on l'a fait pour la compagnie La Tour Eiffel. Oui, oui. Mais sauf qu'il n'était pas... Est-ce qu'ils sont à Saint-Hyacinthe? Je ne me rappelle pas. Mais, eux, pour accommoder les travailleurs chinois, ils envoient, ils installent même un autobus pour les amener à l'usine et retourner à Montréal. Donc... et on a trouvé 20 employés dans une semaine pour eux.
Mme Papineau: Je veux être bien sûre...
Le Président (M. Cusano): Est-ce que vous voulez ajouter, Mme Li?
Mme Li (Xixi): Je vais ajouter une chose: parce que c'est beaucoup d'ouvriers qui travaillent à Drummondville, il est souvent venu ici, à notre centre, pour profiter de notre service, parce que, là-bas, à Drummondville, il n'y en a pas, de grande communauté, il n'y en a pas, de service, comme tel. Comme il est souvent venu chez nous pour profiter de notre service à la... on est à la Rive-Sud.
Mme Papineau: Mais c'est là où je me demande... Vous dites que c'est vous qui offrez les services, votre organisme offre les services. Mais là, si je comprends bien, le dialogue ne se fait pas tellement entre votre organisme et les centres locaux d'emploi. Si j'ai bien compris, il manque le dialogue. Et, quand vous voulez leur parler, on dit... Au cas qu'il y aurait un immigrant chinois qui se présente au CLE, on le réfère à votre organisme, si je comprends bien. C'est ça que vous avez dit tantôt?
Mme Li (Xixi): Non, parce que c'est eux autres qui amènent ces groupes de gens à aller là-bas pour s'installer. Mais comme, une fois, quand ils sont installés, s'il a... le document, il ne peut pas le lire ou s'il a demandé la carte de citoyenneté, il est venu... il veut profiter du service d'accueil. Il est venu chez nous parce que, nous, on est plus près.
Mme Papineau: Oui. Mais tantôt elle disait... Mme May Chiu disait que, quand il y avait...
Mme Chiu (May): Au lieu de passer par les CLE, ils vont chez nous.
Mme Papineau: Oui, ils vont chez vous, mais pourquoi est-ce qu'ils ne passeraient pas par les CLE? À cause de la langue ou si tout simplement...
Mme Chiu (May): Ah! Vous parlez des employeurs ou les employés? Parce que les deux passent chez nous.
Mme Papineau: Les deux passent chez vous.
Mme Chiu (May): Oui, oui.
Mme Papineau: Et avez-vous un lien avec les CLE, avec les centres locaux d'emploi, avec Emploi-Québec?
Mme Chiu (May): Oui. Oui, oui. On réfère les gens là-bas. Oui, oui, on les amène aux CLE pour montrer aux nouveaux arrivés comment utiliser les outils de recherche d'emploi chez les CLE.
Mme Papineau: Et ça se passe bien?
Mme Chiu (May): Oui, oui, sauf que, comme j'ai dit, c'était un budget discrétionnaire, et idéalement les... Parce que nous avons une banque d'emplois de 2 000 candidats. Je crois que comme 40 % sont des gens diplômés avec des maîtrises, 20 %, avec des doctorats... Alors, les gens aussi... Par exemple, dans la préparation d'une recherche d'emploi, il y a beaucoup d'aspects culturels qu'il faut conseiller les gens de faire ou de ne pas faire. Alors, nous, nous sommes sensibles à ça, mais les CLE, encore c'est une bureaucratie et ce n'est pas fait... ils n'aident pas nécessairement les gens qui sont sensibles à la communauté chinoise ou aux immigrants. Je vous donne, par exemple, pendant la période du SRAS, même quand on a amené les Chinois pour faire les tours de CLE, il y a un fonctionnaire qui nous a demandé de leur donner la liste de tous les gens qu'on voulait amener là-bas et de dire d'où viennent-ils. Alors, comme je viens de dire, il y a un manque de sensibilisation et l'ignorance un peu partout dans la fonction publique.
Mme Vermette: Moi, je vais continuer là-dessus, parce que je vous connais bien, ça me fait plaisir de vous accueillir ici...
Le Président (M. Cusano): Mme la députée de Marie-Victorin, vous avez la parole, oui.
Mme Vermette: Oui, merci. Parce que je vous connais bien, on a eu affaire quelques fois, vous êtes de la région, et je sais que vous êtes très impliquées au niveau de votre clientèle, mais aussi vous essayez aussi de vous faire connaître à d'autres niveaux. Donc, félicitations pour votre goût en fait d'implication dans la communauté, dans la société, en tout cas, Rive-Sud.
Ceci étant, au niveau, moi... On arrive toujours à une question culturelle finalement, et je sais que c'est le même problème que vous recevez au niveau des CLE que vous l'avez au niveau des affaires sociales. Là, je vais parler des affaires sociales parce que c'est un problème qui vous préoccupe énormément. Vous avez eu des difficultés au niveau du financement, en fait votre organisme, comme une bonne partie des organismes communautaires, et vous n'avez pas eu la reconnaissance du rôle que vous deviez jouer, parce que vous vous attardiez à des problématiques que vous connaissiez beaucoup plus, pour lesquelles les gens venaient vous voir, mais il n'y avait pas d'endroit à l'intérieur des programmes gouvernementaux pour le genre de services que vous donniez, et ça vous pénalisait et ça pénalisait la communauté pour laquelle vous vouliez donner des services. Et ça, actuellement, est-ce que ça s'est rétabli? C'est-u rétabli? Est-ce que c'est toujours la même problématique que vous devez faire face?
Parce qu'on revient toujours au même problème: le problème culturel, c'est-à-dire que les gens, même si ça fait 150 ans qu'ils ont été ici, ils ont toujours vécu dans leur quartier, dans le fond on appelle ça le quartier chinois, donc ont pu évoluer à l'intérieur de leur quartier, donc ce qui fait qu'ils avaient moins de chances de se mêler avec l'ensemble de la communauté. Bon. J'en sais une chose: ma mère a ramassé de l'argent pour votre hôpital chinois, donc je suis très au courant du fait. Alors, ceci étant, est-ce qu'actuellement, dans le fond... Bon.
Il y a une période de transition, les nouvelles générations sont en train de changer, c'est un peu ce qu'on est en train de dire. La francisation, est-ce que ça a un impact, ça a un effet sur nos jeunes, qui permet une intégration un peu plus forte qu'antérieurement? Et la mixité aussi, dans le fond, qu'on peut trouver à l'intérieur des différentes instances qu'on rencontre, nos jeunes sont moins enclins à certains chocs culturels que leurs parents, est-ce que c'est possible à ce moment-là de pouvoir compter que les nouvelles générations seront complètement différentes que celles qu'on a aujourd'hui?
Le Président (M. Cusano): Oui, Mme Chiu? Mme Li?
n
(11 h 30)
n
Mme Chiu (May): O.K. Alors, pour répondre à votre première question, la situation est restée pareille au niveau de notre accès à la santé et services sociaux. Et encore le problème là est d'essayer de sensibiliser encore une fois le fonctionnaire qui ne comprend jamais pourquoi on fait ci, pourquoi on fait ça, qui ne valorise aucune de nos expertises, dont les connaissances de nos communautés. Alors ça, c'est le problème majeur toujours: un manque d'accessibilité.
C'est très bien que vous signalez que notre communauté est très, très diverse, avec les différentes générations, les gens qui viennent de plusieurs pays d'origine. Mais, par rapport au niveau, par exemple, de nos enfants ? moi et Xixi, on a des enfants qui sont nés ici ? ce qu'on a remarqué est que, oui, au niveau de la langue, l'intégration linguistique, il n'y aurait pas de problème, mais il y a un autre phénomène de discrimination et d'exclusion que ce n'est pas facile de décrire, mais c'est comme un peu le phénomène d'assimilation. Les enfants bien sûr, ou les minorités, ne veulent pas être vus comme différents que les autres. Mais, moi, comme une révolte, je me suis habillée en exprès différente, comme vous autres. Mais ça prend une «confidence», ça prend une sécurité. Et de dire que, oui, je suis différente, mais c'est un atout, ce n'est pas une faiblesse.
Alors, beaucoup d'enfants... Et on travaille aussi avec les parents qui ont adopté des enfants chinois, on travaille avec les enfants de deuxième génération et on a fait la formation auprès de l'identité culturelle parce que chaque personne passe par ce cheminement d'identité culturelle de façon différente. Il y en a, des gens, qui vont toujours nier qu'ils sont différents, qu'ils sont Chinois, qui vont éviter nos communautés. Mais il y a d'autres qui vont dire: Même si je parle bien le français, même si je parle joual, les francophones ne vont jamais m'accepter comme égal. Alors là, il y aurait des réactions différentes encore une fois.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Chiu. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chambly.
Mme Legault: Merci, M. le Président. Bonjour. Ça me fait plaisir de vous rencontrer toutes les deux. Justement, la question que j'avais là est en lien avec celle que la députée de Marie-Victorin a posée. En fait, je voulais savoir votre lecture sur les progrès d'intégration des Chinois et Chinoises de deuxième et de troisième génération. Vous nous avez parlé de votre expérience personnelle. Vous progressez dans la collectivité, et on sait qu'il y a beaucoup de jeunes étudiants dans nos facultés, dans nos collèges qui font partie intégrante, là, de toute la vie scolaire. Et je voulais vous entendre pour savoir si de fait vous sentiez là une piste réelle et valable, là, d'une intégration encore plus réussie.
Le Président (M. Cusano): Mme Li.
Mme Li (Xixi): Je pense que la communauté chinoise, la situation, c'est qu'il y a progrès. Ça, c'est sûr parce que maintenant les gens viennent ici. C'est plus... qu'avant, ce n'est pas comme les gens venus ici 105 ans avant, où ils sont des gens pour faire le chemin de fer. Mais sauf qu'il y en a ... Les services de notre communauté, c'est encore très nécessaire.
Puis tantôt Mme Vermette... des jeunes, parce que... Tantôt, j'ai discuté avec Mme May Chiu en autobus. J'ai dit: Avant, je pense que notre jeune de deuxième génération, c'est moins de problématique. Mais ce n'est pas tout à fait ce que je pense parce qu'on a eu beaucoup d'appels depuis deux semaines... parce que le petit Chinois, il a des problèmes de communiquer avec ses parents, puis les parents, ils utilisent la mentalité, les valeurs de Chine pour pousser les enfants à étudier fort, mais les enfants, ils prennent la mentalité d'ici. Dans ce sens-là, nous, notre centre, on devrait jouer beaucoup de rôle parce qu'on est très près du client au CLSC, mais, au CLSC, la travailleuse sociale, elle ne comprend pas pourquoi, elle ne comprend pas la situation. Elle nous demande de faire l'interprétation, et c'est toujours... c'est comme ça.
Mme Legault: ...
Mme Li (Xixi): Oui. Mais, entre les parents et les jeunes, il y a une grande problématique aussi puis au niveau des psychologues, oui.
Mme Chiu (May): Si je peux ajouter une phrase qui décrit bien ce que Mme Li vient de dire, vous, vous vivez avec le problème d'écart de générations entre les jeunes et les adultes, oui, mais, nous, c'est l'écart de générations et culturel.
Le Président (M. Cusano): Effectivement, il est double chez les communautés culturelles. Est-ce qu'il y a d'autres questions? De ce côté-ci... Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, merci. Je peux vous dire merci à toutes les deux parce que vous avez ce matin, probablement encore une fois... Parce que je sais que vous le faites souvent, mais je pense qu'ici, c'est une belle tribune parlementaire et démocratique pour encore mettre le doigt davantage sur une forme de discrimination passive, et ça, c'est très sournois dans une société, une forme de discrimination passive. Et ce que vous nous dites aussi, c'est de faire en sorte que, dans tous les services gouvernementaux... L'exemple que vous venez de donner, je trouve qu'il est le plus imagé, le plus significatif, donc la nécessité de comprendre pourquoi, par exemple, un enfant aurait davantage besoin d'avoir recours à certains services en CLSC, et ça, j'apprécie ça énormément et je peux vous assurer qu'on complétera une réflexion à cet égard-là pour pousser cette dimension-là beaucoup plus en profondeur. Il faut continuer de nous dire ça.
Ma dernière question serait ? et je ne veux pas parler nécessairement de Montréal, mais je veux juste comprendre, soit Montréal, ou Brossard, ou la Rive-Sud où il y a une concentration importante: Est-ce qu'il y a de bons liens avec les villes, les municipalités? Est-ce qu'il y a des progrès, de ce côté-là, pour justement régler des situations du type que nous venons de décrire, dans certains quartiers, ou certains aspects plus sociaux? Est-ce que vous êtes en relation plus étroite? Est-ce que vous sentez un effort ou une ouverture de ce côté-là, que ce soit avec les services policiers ou autres?
Le Président (M. Cusano): Mme Chiu.
Mme Chiu (May): Oui. Nous, on fait... La semaine passée, j'ai assisté à la première réunion avec la police de la ville de Montréal, qui a créé des comités avec les différentes communautés pour parler et développer le concept de police communautaire. Alors, il y a des avances qui se font. Mais, l'autre chose, je regrette de revenir toujours à la question des ressources. Maintenant, c'est comme cinq réunions le soir, et, puisque je suis seule avec mon enfant, je dois amener mon enfant de quatre ans à toutes les réunions. Puis c'est la même chose, par exemple, au niveau de la violence aux écoles de Verdun. On n'a pas de ressources pour attaquer toute une... structure et une grosse bureaucratie. C'est pour ça qu'on demande si le MRCI pourrait revendiquer pour nous.
Mme Courchesne: C'est pour ça que je vous dis que nous allons pousser plus loin cette réflexion et voir comment on peut... et faire un effort, non seulement un effort, mais faire un accroissement de sensibilisation. C'est ce que j'entends ce matin, et j'apprécie le fait qu'on le fasse à partir de situations bien précises. Et je partage un petit peu, là, votre difficulté de ne pouvoir continuer à cheminer dans ce sens-là. Et je pense que, dans votre cas, il y a moins d'immigration chinoise. Donc, il faut s'attaquer aussi à tous ceux et celles qui sont parmi nous depuis longtemps. J'essaie juste de faire le lien avec l'objet de notre commission parlementaire sur les niveaux d'immigration, mais c'est ce qu'on dit. Qu'est-ce que ça donne d'augmenter les volumes d'immigration si on n'a pas les moyens de bien réussir notre intégration? Et votre exemple, ce matin, est très probant à cet égard-là. Et c'est pour ça que je vous dis sincèrement merci pour votre témoignage.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la ministre. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cusano): ...vous disposez de sept minutes.
M. Dion: Alors, c'est de la richesse. C'est de la richesse. Alors, merci, M. le Président.
Le Président (M. Cusano): Que vous pouvez partager avec vos collègues aussi.
M. Dion: Oui. Je vais essayer. Je vais essayer. Alors, d'abord je veux vous remercier pour être là. Vous savez, la situation n'est pas simple, et vous l'avez assez bien décrite tout à l'heure. Mais je voudrais continuer à réfléchir et je prendrais... Ma réflexion part de là où a terminé la première... les premières questions de Mme la ministre, où on a parlé de certaines perceptions qu'on peut avoir et qu'est-ce qu'est la réalité, et tout ça. Et, dans ma question, vous allez sans doute reconnaître un certain nombre de préjugés que nous avons, la majorité. Mais je voudrais vous demander de ne pas vous en offusquer parce que les préjugés, ça, c'est une mauvaise herbe. Ça pousse là où on ne fait pousser rien d'autre. L'esprit humain a horreur du vide. Alors, quand il ne sait pas, il s'invente une explication, et souvent c'est un préjugé. Alors, pour en sortir donc... Et la seule façon de sortir des préjugés, c'est d'abord d'en prendre conscience.
Alors donc, dans ce contexte-là, on a souvent, dans la population, la perception que la tendance à la ghettoïsation chez les... Chinois est très accentuée et qu'il n'y a peut-être pas ? je vais être un peu dur dans ma question, mais c'est parce que je veux avoir une réponse ? il n'y a peut-être... on doute qu'il y ait une volonté d'apprendre la langue, qu'il y ait une volonté vraiment de partager une certaine façon de vivre avec les gens qui sont d'ici traditionnellement, et tout ça. Donc, on a une perception parfois qui entraîne derrière elle évidemment une certaine ségrégation. La réaction face à des perceptions aussi négatives et sans doute injustes entraîne évidemment une certaine ségrégation. Alors, j'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus.
n
(11 h 40)
n
Le Président (M. Cusano): Mme Li.
Mme Li (Xixi): O.K. Vous avez mentionné la volonté d'apprendre une langue, la volonté d'intégration. Je pense que notre communauté, elle a essayé plus fort que les autres communautés. Ça, je suis sûre parce que, moi, ça fait 11 ans que j'ai été ici, je n'ai jamais arrêté d'apprendre la langue française. J'ai encore continué à l'université UQAM pour améliorer mon français. Mais la réalité est: mon français, peut-être toute ma vie, je ne peux pas parler bien comme vous autres, mais ça ne dit pas que je n'ai pas travaillé, je n'ai pas terminé mon effort. Parce que notre langue est tellement éloignée de la langue française. Mais, d'après mon observation, les immigrants chinois, maintenant ils sont beaucoup plus actifs d'essayer de s'intégrer, mais sauf que peut-être qu'ils ont besoin d'un pont pour traverser cette vague parce qu'ils ne peuvent pas traverser tout seuls dans la rivière, ils... être morts. Si on ne leur donne pas un petit pont pour les aider de traverser, ils vont mourir. Ça, ce n'est pas tous les Chinois. Peut-être que le pont pour la communauté chinoise, c'est un petit peu plus long qu'une autre communauté, mais, c'est sûr, si on a un pont pour aider ce groupe de gens, c'est sûr qu'il va s'intégrer. Mais je vois beaucoup de volonté de nos nouveaux arrivants à apprendre la langue française.
Mme May Chiu, tantôt, elle a mentionné que la liste d'attente, c'est plein. Puis, nous, on a des cours de français la journée, le soir et la fin de semaine. Imaginez, les gens travaillent toute la semaine. La fin de semaine, samedi et dimanche, ils viennent ici pour apprendre la langue française. Mais, après trois ans, ils ne peuvent pas parler français. Ce n'est pas qu'ils ne veulent pas, ils essaient, mais c'est difficile. Mais on voit une grande, très grande volonté pour apprendre la langue française, pour l'intégration du marché du travail. Sans doute, les immigrants chinois essaient très fort, parce que, pour le social, la culture, on a tous essayé fort.
Puis je pense qu'il faut qu'on laisse le temps. Comme moi, ça fait 11 ans que j'ai été ici. Toutes mes amies, c'est le même temps que moi. On est toutes... travaillé comme professionnelles, on a acheté des maisons à Brossard ou... mais on devrait nous laisser le temps. Puis on n'est pas souvent aidés d'un gouvernement, et la société doit nous aider à l'intégration, ça, c'est sûr. Il ne faut pas nous lâcher, et je pense que la société québécoise, elle a besoin de plus d'immigrants chinois aussi.
Mais tantôt le maire de la ville de Québec, il a parlé qu'on devrait avoir plus d'immigrants francophones, mais je ne suis pas d'accord avec ça et j'en ai deux preuves. Premièrement, les immigrants... on n'a pas de statistiques ou études et de preuve que les immigrants francophones, ils sont intégrés mieux que les communautés chinoises ou les non-francophones. La deuxième, est-ce qu'on a la capacité... on peut avoir assez de ? parce qu'on possède beaucoup d'immigrants ? est-ce qu'on peut attirer assez des immigrants francophones de venir ici? Je ne pense pas parce que je sais que le Québec, il fait beaucoup d'ouvrage, il fait des affaires pour attirer les gens qui viennent de l'Afrique du Nord pour qu'ils viennent ici. Mais je pense que les immigrants chinois, c'est encore une ressource pour les Québécois, pour le Québec. Donc, on devrait trouver le moyen d'intégrer ces groupes de gens, pour intégrer les gens existants puis pour attirer les gens qui s'en viennent aussi.
Le Président (M. Cusano): Merci. Brièvement, M. le député.
M. Dion: Oui. C'est tellement intéressant. On passerait pas mal de temps, je pense, hein, si ce n'était pas du temps qui passe lui-même.
Le Président (M. Cusano): Votre question.
M. Dion: Mais je voudrais... D'abord, je suis...
Le Président (M. Cusano): Posez votre question, ça va aller plus vite.
Une voix: Ça va être mieux.
M. Dion: O.K. Alors, je suis tout à fait d'accord avec vous que je pense que l'apprentissage d'une langue, pour un adulte, ce n'est pas dans la rue que ça se fait ? c'est bon pour un enfant de moins de cinq ans; pour les autres, ce n'est pas dans la rue que ça se fait ? et que souvent les méthodes d'enseignement des langues secondes sont calquées sur les méthodes d'enseignement de langues premières, alors que, dans la réalité, le processus est inverse. Pour être moi-même professeur de langue seconde, je sais que ce n'est pas la même façon de procéder. Et souvent on utilise des méthodes qui sont excellentes pour les professeurs parce que ça leur permet d'être professeurs longtemps, mais ce n'est pas très bon pour l'apprentissage.
Alors, ma question est la suivante: Est-ce que votre centre de la famille chinoise, Service famille chinoise, serait intéressé à établir des liens organiques ou des liens de collaboration, occasionnels ou plus organiques, avec des maisons de la famille ailleurs au Québec, comme à Saint-Hyacinthe par exemple, afin de piloter des programmes d'intégration qui seraient adaptés à la communauté chinoise dans ces lieux-là?
Le Président (M. Cusano): En terminant.
M. Dion: C'est tout.
Le Président (M. Cusano): C'est tout? Bon, alors vous avez 30 secondes pour répondre à la question.
Mme Chiu (May): Est-ce que ça veut dire le jumelage? Vous parlez du jumelage?
Le Président (M. Cusano): Parlez-vous de...
M. Dion: Oui. Peut-être jumelage ou d'autres ententes du genre.
Mme Chiu (May): Vous parlez de la régionalisation à travers le jumelage?
M. Dion: Oui.
Mme Chiu (May): Oui, mais bien sûr, comme je l'ai dit, il y a une volonté des nouveaux arrivés de s'installer dans les régions, sauf qu'il manque beaucoup de structures d'accueil là-bas et, comme je l'ai dit tantôt, c'est la question de l'oeuf ou du poulet.
Mme Li (Xixi): Est-ce que je peux continuer pour 10 secondes?
Le Président (M. Cusano): Oui. 15 secondes.
Mme Li (Xixi): Parce que le Service à la famille chinoise a déjà référé beaucoup de nouveaux arrivants au Québec pour apprendre la langue française. Mais c'est parce que, quand les gens déménagent ici, tous les gens, ils sont sur la liste d'attente, il n'y en a pas, de place, au Québec, pour recevoir ces groupes de gens.
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup, Mme Li, Mme Chiu. J'aimerais, au nom de mes collègues, vous remercier de votre présentation extrêmement intéressante. Et j'aimerais souligner que je suis très heureux que vous ayez mentionné la question de l'écart générationnel ? comme on dit en anglais, «the double generation gap» ? au niveau des communautés culturelles, et je crois que ça vient sensibiliser les membres de la commission. Alors, sur ce, je vous remercie, et bonne journée et bonne chance. Merci beaucoup.
Je vais suspendre pour quelques minutes afin de permettre à quelques personnes de dégourdir un peu leurs jambes.
(Suspension de la séance à 11 h 48)
(Reprise à 11 h 59)
Le Président (M. Cusano): Bon, la commission reprend ses travaux. Alors, messieurs, madame, bienvenue. Pour les fins du Journal des débats, si vous voulez vous identifier, s'il vous plaît.
Barreau du Québec
M. Gagnon (Pierre): Oui. Alors, M. le Président, mon nom est Pierre Gagnon. Je suis président du Barreau du Québec, bâtonnier du Québec. Je suis accompagné de Me Carole Brosseau, qui est de notre Service de recherche et législation, et Me Noël Saint-Pierre, membre de notre comité sur les communautés culturelles.
Le Président (M. Cusano): Bienvenue à notre commission. J'aimerais vous rappeler nos règles de procédure. Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation. Elle sera suivie par une période de 40 minutes d'échange avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous.
n
(12 heures)
n
M. Gagnon (Pierre): Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, le Barreau du Québec se réjouit de l'initiative du gouvernement qui invite la population du Québec à se prononcer sur le plan triennal envisagé. Les défis de la diversité culturelle ont interpellé le Barreau du Québec. La création d'un comité sur les communautés culturelles et l'établissement d'un plan d'action démontrent l'importance des enjeux professionnels entourant la prise en compte de la diversité culturelle.
Alors, plus récemment, la Fondation du Barreau du Québec finançait une importante recherche dont l'objectif était de mieux saisir les conditions et les difficultés associées à l'interaction des Québécois de diverses origines avec la normativité juridique de leur société d'accueil.
Quel bilan peut-on faire de l'immigration? Comme on le sait, l'article 95 de la Loi constitutionnelle donne aux provinces et au gouvernement fédéral une compétence législative mixte dans le domaine du droit de l'immigration. La nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés accorde une très grande importance aux accords fédéraux-provinciaux.
Compte tenu du fait que le Québec peut agir dans le cas des travailleurs qualifiés, des travailleurs autonomes, des entrepreneurs et des investisseurs, il demeure important de connaître les facteurs à l'origine des mouvements migratoires vers le Québec dans le contexte des années récentes.
Dans sa gestion de l'immigration, le Québec a quand même marqué des pas importants dans la bonne direction. En effet, en octobre 1996, des améliorations notables ont été apportées au Règlement sur la sélection des ressortissants étrangers. Cette grille a permis notamment de sélectionner des travailleurs sur la base de facteurs prometteurs d'insertion dans la dynamique québécoise. D'ailleurs, c'est un bilan plutôt favorable que certains auteurs ont fait à cet égard.
Par la suite, le ministre déposait, en 1999, le projet de loi n° 88 qui modifiait la Loi sur l'immigration au Québec en introduisant notamment des plafonds et des maximums en matière d'admission de sélection des ressortissants étrangers et en donnant également un pouvoir discrétionnaire au ministre de suspendre l'examen des demandes et de cesser de délivrer les certificats de sélection. Alors, le Barreau du Québec s'était alors inquiété de l'attitude du gouvernement à introduire des quotas. En ce domaine, il faudrait revenir à une politique à notre avis beaucoup plus souple.
Les enjeux auxquels est confrontée la société québécoise sont l'évolution démographique qui est caractérisée par un accroissement naturel déficitaire, le vieillissement de la population, les enjeux économique et linguistique et enfin tous les aspects de la régionalisation.
Parlant de la régionalisation, cet enjeu dépasse largement le débat sur la planification des niveaux d'immigration. En effet, un certain déclin démographique s'est déjà amorcé dans certaines régions du Québec.
Et, à notre avis, c'est l'emploi qui est vraiment le générateur de flux migratoire et qui fixera le choix de l'immigrant de s'installer dans une métropole ou dans une région. Or, le Québec mise beaucoup sur les ONG, les organismes non gouvernementaux, en région pour soutenir l'accueil et l'intégration des immigrants. Le Barreau estime cependant que les ONG n'ont pas le financement requis pour pouvoir efficacement accueillir et intégrer les nouveaux arrivants, et particulièrement dans les régions. Il demeure essentiel que le gouvernement québécois fasse des efforts significatifs à ce chapitre pour vraiment réaliser des objectifs de régionalisation.
Non seulement faut-il que ces immigrants se dirigent dans les régions, mais qu'ils y demeurent, qu'ils y restent. Dans le but de régionaliser davantage l'immigration, le Barreau du Québec avait déjà suggéré d'envisager un régime de parrainage civique par lequel une municipalité ou une municipalité régionale de comté ou autre s'engagerait à prendre sur son territoire une partie de l'immigration. La migration est souvent un acte individuel basé sur une stratégie familiale.
Pour créer un certain lien d'appartenance, il faut absolument que l'intégration des immigrants se fasse dès le moment où le certificat de sélection est délivré. En effet, plus les immigrants seront pris en charge rapidement par leur société d'accueil, plus leurs liens d'appartenance se créeront efficacement. Et l'insertion dans une nouvelle société est un phénomène multidimensionnel. Elle est économique, culturelle et sociopolitique.
Quelles sont maintenant les perspectives d'avenir? Le Barreau du Québec croit, à l'instar du gouvernement, que l'orientation adoptée doit tenir à la dynamique même des composantes et à la nature de la marge de manoeuvre du Québec en matière d'immigration. Le Barreau du Québec appuie également le gouvernement sur le fait que c'est la composante économique qui aura le plus d'impact sur le volume global des immigrants et de la réalisation des objectifs du Québec.
Le Barreau voudrait profiter de l'occasion pour soumettre qu'à l'heure actuelle il y a des difficultés de rétention, particulièrement des investisseurs, sur le territoire québécois.
Pour ce faire, pour favoriser cette intégration, il faut des mécanismes d'intégration précoces tels le jumelage avec des familles québécoises conforme aux expériences déjà réalisées et réussies, le financement adéquat des organismes chargés de l'accueil des nouveaux arrivants. De plus, lorsque les seuls moyens dont dispose le Québec pour influencer son immigration demeurent les critères de sélection, il faudrait peut-être envisager ceux-ci avec plus de souplesse pour permettre de rencontrer les orientations visées par le gouvernement à cet égard. En outre, compte tenu de l'apport économique important de la catégorie des investisseurs, il y aurait lieu de le reconnaître dans l'ordre des priorités de traitement prévu au règlement.
Il faudrait absolument écourter les délais de traitement des dossiers afin de ne pas décourager les personnes qui voudraient immigrer au Québec. De l'avis du Barreau, la planification des niveaux d'immigration suppose une juste répartition des effectifs afin d'éviter les goulots d'étranglement. De plus, la planification des bassins d'immigration relève de la présente consultation et ne saurait être un exercice discriminatoire. Un meilleur arrimage des processus administratifs entre le Québec et le gouvernement fédéral serait un atout.
Parlons maintenant de l'immigration et du droit professionnel. Alors, le Barreau du Québec ne pouvait passer sous silence l'arrimage de ces politiques au système de droit existant en regard plus particulièrement du système professionnel québécois.
L'encadrement législatif au Québec est particulièrement innovateur. Ce qui caractérise particulièrement notre système professionnel québécois, c'est qu'il attribue aux ordres professionnels, comme vous le savez, le mandat d'assurer la protection du public. En pratique, protéger le public dans le domaine d'exercice d'une profession signifie essentiellement veiller à la qualité de l'ensemble des services professionnels offerts, s'assurer des qualifications des candidats et candidates à titre de professionnels, en contrôlant cela par des mécanismes précis, en contrôlant l'intégrité et la compétence de ces professionnels.
Alors, pour devenir membre d'un ordre professionnel au Québec, le candidat doit être titulaire d'un diplôme reconnu valide à cette fin conformément au Règlement sur les diplômes délivrés par les établissements d'enseignement désignés qui donnent droit aux permis et aux certificats de spécialistes des ordres professionnels, à défaut de quoi la formation académique et les qualifications du candidat à l'exercice de la profession doivent être évaluées par l'ordre.
Alors, il nous apparaît conséquemment essentiel que le gouvernement, plus particulièrement le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, informe adéquatement les gens désireux d'immigrer au Québec. L'objectif est d'éviter toute confusion entre, d'une part, la reconnaissance par le gouvernement d'une équivalence d'études et, d'autre part, la reconnaissance d'une équivalence aux fins d'admission à la pratique d'une profession réglementée.
Le gouvernement doit s'assurer que ses politiques et directives favorisant une augmentation de la population professionnelle immigrante soient complémentaires à l'encadrement législatif et réglementaire du système professionnel québécois.
Enfin, le Barreau voudrait profiter de l'occasion pour souligner une situation de fait qui bouscule notre système professionnel tel qu'on le conçoit et qui nous préoccupe: c'est toute la question des consultants en immigration, le fameux règlement qui a été adopté. Nous avons communiqué avec le ministère, Mme la ministre, à ce sujet-là. Le Barreau du Québec considère que, en créant une société de consultants pour régler les problèmes ou les... les problèmes des consultants qui ambitionnent sur leurs clients et qui... On a tous des histoires d'horreur, là. Si vous avez deux heures à prendre à un bon moment donné, on pourrait vous en raconter, des histoires épouvantables.
n
(12 h 10)
n
Et, nous, on n'en revient pas que tout ce qu'on a trouvé de mieux à faire pour réglementer ça, c'est de leur donner des permis, de donner à ces gens-là des permis d'agir, alors que ? non, je ne parle pas de vous, mais je parle de la création de la société des consultants ? alors qu'on semble tenter de créer un pseudo ordre professionnel en faisant en sorte que ces gens-là puissent avoir de la formation, des assurances ? je ne sais pas s'ils vont réussir à trouver ça ? de l'inspection professionnelle. Sincèrement, ce qu'ils voudraient essayer de créer, c'est quelque chose qui ressemble au Barreau du Québec finalement, qui existe déjà. Et je prends à témoin les gens qui sont avec moi et Me May Chiu, qui était ici avant nous et qui est membre de notre comité sur les communautés culturelles, et les gens du Barreau qui oeuvrent en matière d'immigration sont prêts à... ils couvrent tout le champ, là, vraiment. Si vous les connaissez un peu, là, ce ne sont pas... ils ne représentent pas que des gens qui ont de l'argent, ils vont vraiment dans toute la gamme, et c'est un champ qui est très, très, très, très bien couvert, avec toutes les assurances que vous connaissez, jusqu'à 10 millions, un fonds d'indemnisation dans lequel on a 5 millions pour payer les gens qui feraient des mauvais coups, l'inspection professionnelle, le Bureau du syndic. Alors, quant à nous, ça nous interpelle beaucoup.
Et ça nous interpelle aussi, le fait que le gouvernement fédéral puisse créer, à la faveur de... pas des pseudos, des problèmes réels des consultants en immigration, l'équivalent d'un ordre professionnel. Nous interpellons le gouvernement du Québec parce que, à notre avis, c'est vraiment une juridiction provinciale. Le gouvernement fédéral peut, oui, décider de qui va aller faire des représentations devant ces instances, mais, à notre avis, ça ne lui donne pas le droit de créer un ordre professionnel ou ce qui devrait en tenir lieu.
Alors, c'est une préoccupation dont... vous allez dire que c'est un peu loin peut-être des niveaux d'immigration, mais je pense que tout est quelque part interrelié. Et, si le Barreau du Québec ne dénonce pas cette situation-là... On en voit régulièrement, on a vu encore dernièrement, là, les fameuses histoires de cartes dans l'est de... les cartes de réseau, les cartes d'assurance maladie, en tout cas il y a toutes sortes d'histoires comme ça. Et ce qui est fâchant, c'est qu'on ne semble pas voir que la solution, elle existe déjà, à savoir en faisant en sorte que ce soient des membres du Barreau qui puissent oeuvrer dans ce domaine-là, et pour nous c'est assez évident, et on demanderait que le gouvernement du Québec nous appuie dans cette contestation-là qui consiste à ne pas laisser le gouvernement fédéral créer un ordre professionnel parce que, après ça, ce sera un ordre professionnel de n'importe quoi d'autre par la suite. Alors, ça nous fait du bien de vous le dire en tout cas, de toute façon.
Si vous voulez que j'essaie un peu de résumer ce que je viens de vous livrer, c'est que, selon nous, bon, on aimerait que vous reteniez que... Selon le Barreau, l'immigration est un défi dont la responsabilité est collective et interpelle l'ensemble des structures de l'État, y compris l'administration de la justice ? alors, ce n'est pas uniquement un ministère où on a parfois la tentation de dire: Ah! bien, ça, c'est l'affaire de tel ministère, mais, finalement, ça interpelle vraiment l'ensemble des structures de l'État ? une meilleure intégration des immigrants sur tout le territoire québécois ? c'est vraiment important ? un meilleur arrimage entre les processus de reconnaissance des expertises professionnelles et le MRCI et les ordres professionnels. Et finalement le Barreau du Québec demande que le gouvernement du Québec exerce pleinement sa juridiction sur les professionnels exerçant en matière d'immigration. Merci beaucoup.
Le Président (M. Cusano): Merci, Me Gagnon. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, madame, messieurs, merci d'être devant nous ce matin. J'avoue que d'emblée vous abordez un sujet qui me touche mais qui me pique, qui est celui effectivement, et vous me permettrez, parce que le temps passe très, très vite en commission parlementaire, alors je vais l'aborder d'emblée, c'est celui des consultants en immigration.
D'abord, dans votre mémoire, vous dites à juste titre que vous n'êtes... et dans les commissions parlementaires précédentes, vous n'avez jamais été des tenants d'un système de quotas en immigration au Québec. Et je pense que vous connaissez suffisamment bien la loi et l'accord pour savoir que c'est une tentation à laquelle nous avons résisté. Mais, par ailleurs, vous nous dites en même temps, dans votre grille de sélection: On s'attend à ce que le gouvernement soit plus ouvert et que le gouvernement fasse très attention dans le choix de ses sélections, particulièrement provenant de certains pays, de ne pas donner l'image de la discrimination. Or, là, on touche vraiment... il y a un lien très grand entre ce que vous écrivez, ce que vous dites, et nos fameux consultants en immigration, parce que ces consultants sont ceux qui, à renfort de très grande publicité dans certains pays et en traitant même l'immigration à partir de rabais tarifaires, créent une demande, créent une demande accrue qui... et sous le couvert de toutes sortes d'affirmations. Et ça ne se fait pas au Québec, ça se fait dans les pays étrangers. Tout ce qu'on souhaite ? je vais être très, très transparente avec vous ? c'est que ça ne se fasse pas non plus avec... et je ne prétends rien, je n'accuse personne, c'est une réflexion que j'ai, en espérant fortement que ça ne se fasse pas non plus avec la complicité de certains avocats qui, eux, pourraient être québécois ou canadiens.
Je vous avoue que j'ai des grandes, grandes préoccupations très sérieuses à cet égard-là, et je voudrais vous entendre là-dessus, parce que, comme vous, je questionne la société fédérale, mon collègue Bellemare aussi ? on va le laisser travailler à cet égard-là. Mais qu'est-ce qu'on fait concrètement? Est-ce que vous nous suggérez, là, qu'au fond, en fonction de nos compétences mais aussi en fonction de notre juridiction, on devrait dire qu'on travaille exclusivement avec des membres du Barreau ou de la Chambre des notaires? C'est ce que vous dites. Mais comment on fait pour régler le problème des consultants qui sont à l'étranger, pour lesquels on n'a pas de contrôle? Alors, est-ce que vous avez une solution pratico-pratique?
Le Président (M. Cusano): Me Gagnon.
M. Gagnon (Pierre): Pour les consultants qui sont à l'étranger, je ne sache pas que... ni même que ce qui est suggéré va régler la question. Je ne sais pas comment on peut légiférer dans un autre pays. Moi, je ne connais pas encore la recette pour ça. Probablement que ça n'existe pas. Sauf qu'il reste qu'en leur fournissant une assiette ici, on les conforte finalement et on les rend... on leur offre à quelque part une crédibilité à l'étranger qui se base sur le fait qu'ils peuvent produire un permis, là, qu'ils ont obtenu ici, par exemple. Et vous mentionniez que, s'il y a des membres du Barreau qui agissent par exemple incorrectement ou qui font des choses... amenez-nous-les, on a tout ce qu'il faut pour s'en occuper. Et puis, s'il y a des gens qui détournent l'argent, vous le savez, on paie tout ça, là.
Mme Courchesne: Non, ça, je comprends que les codes d'éthique sont là, les codes de déontologie. Je comprends tout ça. Mais vous comprenez aussi que c'est difficile de briser des réseaux et des systèmes érigés, là. Puis c'est ça qui est très, très, très préoccupant. En jouant sur la vulnérabilité de certains candidats par ailleurs, mais surtout en extorquant les sous... Je ne prétends rien, là, je ne veux pas embarquer dans les ramifications, mais ce que je dis: Est-ce qu'il y a des solutions concrètes que vous nous suggérez, en disant par exemple... Parce que c'est sûr qu'on a la tentation de vouloir les régir, ces consultants en immigration, il va falloir le faire, on n'a pas le choix. Et, je vous le dis, je n'achète pas la formule fédérale. Donc, qu'est-ce qu'on fait concrètement par rapport à ces situations-là? Est-ce que ça veut dire qu'on ne transige qu'avec effectivement... Est-ce qu'on les régit, ces gens-là, ou si on exclut carrément puis on dit: On ne va qu'avec des avocats et des notaires?
M. Gagnon (Pierre): C'est la position du Barreau en tout cas qui est effectivement de dire qu'on... Il existe déjà des ordres professionnels qui sont là, qui ont fait leurs preuves. Si on nous disait, comme dans certaines provinces, où j'ai cru comprendre que c'était déjà très peu occupé, par exemple, par des avocats parce que... pour des raisons culturelles ou autres ou... ils n'occupaient pas ce champ-là. Alors, ce n'est pas le cas ici. Moi, je les connais bien, ces gens-là qui oeuvrent en immigration, j'ai négocié des tarifs de l'aide juridique avec eux depuis 20 ans, et je les ai vus sur le terrain, et je sais qu'ils sont... ils couvrent vraiment tout le spectre au complet. Alors, si on faisait mal le travail, je dirais, bien...
n
(12 h 20)
n
Mme Courchesne: Non, mais vous comprenez, Me Gagnon, c'est que l'AQAADI, l'AQAADI qui est une association d'avocats en droit de l'immigration, semble, même à l'intérieur de leurs membres, pas tout à fait au même diapason sur ce dossier-là. Ils ne semblent pas tous d'accord non plus entre eux sur tout ce dossier-là qui, effectivement, fait en sorte que... cette année, on avait 40 000 nouveaux arrivants, mais on pourrait presque accueillir 40 000 nouveaux arrivants des mêmes pays. Alors, votre mémoire nous dit: Non, non, non, attention, il faut équilibrer, mais, en même temps, ne mettez pas de quotas. Ça fait que c'est quoi, la réponse à ça?
M. Saint-Pierre (Noël): Si je peux répondre.
Le Président (M. Cusano): M. Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Merci. J'aimerais répondre à quelques aspects, parce qu'il y a effectivement des questions techniques.
La première question, en ce qui concerne les consultants à l'extérieur, d'accord, et effectivement, il y a des histoires d'horreur, des falsifications d'informations, de documents, et tout ça, et qui suivent les gens et qui créent des tragédies personnelles qui dépassent même des générations, des fois. Là, je parle de façon personnelle, comme quelqu'un qui pratique dans le domaine de l'immigration depuis quelques années. Il est clair qu'on ne peut pas empêcher certains ONG d'intervenir, ça, c'est très clair, sauf que ce n'est pas la même chose d'avoir un organisme non gouvernemental qui fait un tel travail de façon... sans chercher un profit, d'une part, et qui est connu et souvent accrédité auprès du ministère, ça, c'est une chose.
Le deuxième aspect, c'est les professionnels qui représentent les gens. Et là j'aimerais simplement parler très rapidement, faire référence, par hasard... Il y a un jugement de la Cour d'appel fédérale qui vient de sortir, qui touche la question des entrevues en matière d'immigration... avec les demandes de visa. La position du fédéral a toujours été à l'effet qu'un avocat ou un conseiller n'a pas le droit d'être présent pour ces entrevues-là. Ce que la Cour fédérale vient de dire, c'est que, très souvent, les questions en jeu sont suffisamment techniques, et importantes, et juridiques que le conseiller doit être présent pour respecter les principes de justice fondamentale. C'est ce qu'on dit. Alors, si c'est le cas, donc c'est un travail qui appartient en principe à un juriste. Ce n'est pas que des questions techniques. Lorsqu'on prépare un dossier d'immigration, il n'y a pas simplement un formulaire à compléter, à peu près n'importe qui peut le faire. Il faut regarder l'ensemble d'un dossier. Et très souvent d'ailleurs, dans notre expérience, les candidats, pour une demande de certificat de sélection du Québec par exemple, souvent, ne sont pas retenus pour une raison, c'est que le dossier, le conseiller du Québec à l'extérieur n'a peut-être pas compris vraiment comment cette personne pourrait s'insérer dans la société québécoise parce que la personne ne savait pas comment se présenter. Donc, il y a des questions souvent qui sont relativement complexes.
Alors, pour répondre à votre question, je pense que je pourrais suggérer quelque chose. Une personne qui représente une autre personne auprès des conseillers d'immigration du Québec à l'extérieur devrait être membre d'un ordre professionnel qui est contrôlable et qui contrôle ces gens et, en plus, qui a une capacité, au niveau des compétences professionnelles, pour le faire, et ça appartient effectivement, en principe, aux juristes. Ce n'est pas une question ici de corporatisme de la part du Barreau, c'est que ça prend nécessairement une structure qui va pouvoir contrôler ces gens. Le fait par exemple d'être radié du Barreau pour un avocat qui falsifierait les données d'un dossier, c'est relativement important comme sanction, comme possibilité de sanction, effectivement. Donc, les gens risquent... je ne veux pas dire que l'ensemble des avocats sont honnêtes, là, on n'est pas... autrement, on n'aurait pas un syndic du Barreau justement qui est assez occupé avec des dossiers.
Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Donc, dans ce sens-là, vous diriez au fond ? et nous, c'est là, j'essaie de voir l'applicabilité de ça, c'est-à-dire comment on fait justement... Donc, vous dites: Par l'entrevue, on pourrait peut-être contourner ces consultants en disant par exemple: Si vous avez un conseiller, même si vous êtes dans votre pays étranger, ne faites affaire qu'avec un membre du Barreau reconnu ? c'est ce que vous nous dites au fond ? et que, à cette entrevue, par ailleurs, n'aurait qu'un membre du Barreau reconnu et non plus de gens qui viennent des pays extérieurs. C'est un peu ce que vous nous dites.
M. Saint-Pierre (Noël): Oui. Il y a sans doute des choses concrètes ou techniques qu'il faudrait vérifier. Je ne sais pas, par exemple...
Mme Courchesne: Parce que ma question, c'est: Est-ce que, là, on est dans l'illégalité par rapport à leur pays ou par... les empêcher d'exercer un droit sur le choix de leur conseiller, ou je ne sais trop?
M. Saint-Pierre (Noël): Actuellement, du côté des ambassades canadiennes, il faut que la personne qui représente un candidat à l'immigration soit citoyen canadien actuellement. D'accord?
Mme Courchesne: D'accord.
M. Saint-Pierre (Noël): Donc, l'exigence, si c'est un citoyen canadien, logiquement, la personne, si je fais un pas de plus, devrait être membre d'un ordre professionnel.
Mme Courchesne: On pourrait ajouter cet aspect-là.
M. Saint-Pierre (Noël): Oui. Je pense que c'est faisable. Effectivement, ça va empêcher une chose, c'est que n'importe qui actuellement peut ouvrir une boutique face à une ambassade canadienne à l'extérieur, mettre la pancarte, louer des salles, ce que j'ai déjà vu, par exemple à Bogota, entre autres, et dans un pays comme la Colombie, avec la situation des guerres civiles, c'est assez tragique; il y a des milliers de demandes de personnes qui veulent partir. Donc, la tentation est très grande, effectivement. Et ce n'est pas de petites sommes d'argent, hein? Ce que j'ai vu, c'est que c'est un dépôt de 5 000 $ et, après ça...
Mme Courchesne: On a vu pire que ça.
M. Saint-Pierre (Noël): Le dépôt, je parle, je ne parle pas de l'ensemble.
Mme Courchesne: D'accord. Merci.
Le Président (M. Cusano): Je cède la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Madame, messieurs, bonjour. Auparavant, lors de cette commission, s'est présentée devant nous l'Association québécoise des avocats en immigration, et cette association travaille, à moins que j'aie mal compris, travaille avec des consultants et semblait positive à l'effet de travailler avec ces consultants. J'aimerais savoir comment se situe le Barreau par rapport à cette association d'avocats.
M. Gagnon (Pierre): Nous, on n'est pas d'accord avec la position de l'AQAADI sur ce point-là. Fondamentalement, eux pensent aussi que les consultants, ça n'a pas de sens, tout ce qu'on voit qui se fait par des consultants, mais ils croient, comme le ministre Coderre semblait le croire, que la façon de régler ça pourrait être de les réglementer finalement et surtout pensent ? ils sont un peu défaitistes, quant à moi ? pensent que c'est là, ça existe, ça va exister, vivons avec plutôt que de dire: On a une position de principe puis on ne vit pas avec. C'est comme ça qu'on l'explique.
Il y a aussi... ça change aussi selon les personnes qui sont à l'association. Par exemple, le président, je pense, de l'association a été nommé par le ministre Coderre sur la société qui a créé... le groupe de travail qui a créé cette société-là. Alors, c'est leur position à eux, mais on en diffère. On en diffère, et le Barreau du Québec pense qu'on ne doit pas, pour des préoccupations peut-être immédiates de commodité, laisser se créer des ordres, des sous-ordres que j'appelle, des sous-ordres professionnels.
Je n'ai jamais compris comment on peut faire en sorte que quelqu'un puisse cesser par exemple de voler les gens ou de... en lui donnant un permis d'agir. À ce moment-là, on fait semblant, on se voile la face, puis on dit: Bon, bien, nos consultants maintenant ont des permis, ont des permis de consultants; ils ne sont pas meilleurs qu'avant, là, ce sont les mêmes, mais là ils ont des permis. Alors, cherchez l'erreur. C'est une solution de facilité qui est de...
Comment voulez-vous qu'ils s'assurent? Nos gens sont assurés pour 10 millions. Comment voulez-vous que ces gens-là s'assurent pour la peine? Il va se créer, comme on a vu dans les cautionnements, des sociétés d'assurance bidon qui donnaient des cautionnements bidon. Je ne sais pas si vous avez vu ça dans la construction. Moi, j'en ai poursuivi, de ces compagnies-là. Vous comprenez, ils vont se donner une apparence de, et puis quelqu'un va dire un bon jour: Bon, bien, on a agi, on a discipliné ça, mais les gens vont continuer d'avoir les mêmes problèmes. Ils ne deviendront pas avec une moralité meilleure que celle qu'ils ont eue ou qu'ils ont présentement.
Mme Papineau: Donc, ce que je comprends, vous êtes contre la formation d'un ordre professionnel de consultants en immigration...
M. Gagnon (Pierre): Absolument.
Mme Papineau: Également.
M. Gagnon (Pierre): Absolument.
M. Saint-Pierre (Noël): Si je peux peut-être... Excusez-moi.
Le Président (M. Cusano): Me Brosseau, vous voulez ajouter?
Mme Brosseau (Carole): Je me permets de compléter par rapport aux préoccupations que vous aviez, Mme Courchesne, ainsi que vous-même. C'est que, dans le cadre des discussions sur la multidisciplinarité et de la réglementation qui va en découler, cette réflexion et ces préoccupations par rapport à des consultants qui se trouvent à l'extérieur, qui font de la sollicitation, et le contrôle de l'avocat vis-à-vis ces personnes-là, tout est sur la table, et c'est une des préoccupations et c'est un des points d'achoppement d'ailleurs que l'AQAADI et le Barreau ont justement. Donc, je pense que les orientations... Il ne faut pas oublier que les orientations dans ce domaine-là vont être prises par le Conseil général du Barreau. Donc, ça va être une préoccupation globale. Et ça s'inscrit dans une perspective de protection du public et non pas d'une perspective purement lucrative, là. Il faut le comprendre.
Le Président (M. Cusano): Merci. Me Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Oui, très rapidement. Il faut comprendre que, pour certains avocats qui pratiquent surtout en droit des réfugiés, ce qui est quand même... c'est une partie du droit de l'immigration, mais c'est une partie relativement importante en ce qui concerne le volume. Il y a certains consultants qui servent un peu de, comment dire, de canal pour amener des clients à certains avocats d'une part. Il y a...
Une voix: ...
n
(12 h 30)
n
M. Saint-Pierre (Noël): Je n'ai pas fini. Il y a certains... Donc, on pourrait parler de rabatteurs, ce terme qu'on utilise assez souvent. Il y a certains de ces consultants également qui viennent de la communauté d'origine et qui, par exemple ? c'est ce qu'on a déjà vu dans certains cas ? fabriquent carrément des histoires. Donc, et là la personne arrive, donc, déjà, avec tout cela déjà tout fait, au bureau de la personne qui va agir finalement comme conseiller devant le tribunal.
Il y a un problème bien sûr avec ça. Du moins, un des problèmes que nous avons, c'est d'identifier les avocats avec des dossiers concrets qui permettent éventuellement d'amener tout ça au bureau de syndic du Barreau. Il y a eu un certain nombre de cas, un certain nombre de cas que moi-même, par exemple, que j'ai envoyés pour indiquer qu'il y avait une histoire qui avait été falsifiée, et parce que la responsabilité finalement demeure bien sûr du côté de l'avocat qui travaille avec des gens peu scrupuleux comme ça.
Il y a un problème cependant qui existe, et c'est un petit peu la question de la pratique, devant le tribunal en question, par les personnes qui reçoivent l'argent. Le fait, par exemple, de préparer la fiche de renseignements personnels; c'est un document qui est très volumineux et qui comprend l'histoire qui a entraîné la demande du statut de réfugié. C'est un travail juridique. Alors, en principe, cela aussi devrait être fait par les professionnels qui sont régis par un ordre professionnel.
Le Président (M. Cusano): Merci.
Mme Brosseau (Carole): Vous me permettez... 30 secondes?
Le Président (M. Cusano): Oui, brièvement.
Mme Brosseau (Carole): Il ne faut pas oublier que, dans le cas de l'immigration, ce n'est pas seulement que la demande pour devenir un immigrant qui est importante, c'est toutes les conséquences juridiques à ça. Et c'est ça qu'on semble oublier. Ce n'est pas dénaturé. Quand on parle d'intégration, c'est au niveau du logement, au niveau du travail, c'est toute cette aide-là au niveau des relations personnelles, au niveau de la Loi sur l'instruction publique. C'est plus globalisant. Et ça, ces ressources-là ou ces connaissances-là ne sont pas limitées à la simple Loi sur l'immigration, à la simple réglementation et à la simple... à l'Accord Québec-Canada. Ça dépasse ça. Et c'est ça qu'il faut saisir, aussi, quand on parle de notion de protection du public, c'est l'ensemble de ces services-là. Et je pense que ça peut-être un élément, quand on parlait d'intégration, ça peut être un élément déterminant ou un élément certainement catalyseur pour l'intégration de ces personnes-là qui arrivent chez nous.
Le Président (M. Cusano): Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, M. le Président. Vous parlez...
Le Président (M. Cusano): En vous rappelant qu'il vous reste environ trois minutes.
Mme Papineau: Parfait. Vous parlez, dans votre mémoire, du parrainage civique. Et je pense que c'est très intéressant, là, quand on regarde... Mais j'aimerais ça si vous pouviez élaborer sur votre vision d'un tel parrainage. Puis qu'est-ce que ce serait, les conditions idéales pour un tel parrainage puis pour aussi que cette initiative-là en soit une réussie, hein?
Le Président (M. Cusano): Me Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Je pense que, pour les questions techniques, c'est un peu pourquoi que je suis ici.
Le Président (M. Cusano): Oui, oui. Non, non...
M. Saint-Pierre (Noël): J'aimerais d'abord, si vous permettez, répondre indirectement. J'étais à Toronto en, je pense, septembre 2002, à une conférence qui était organisée par l'Institut de recherche en politique publique, qui a son siège à Montréal, et c'était un peu pour regarder toutes les questions d'immigration, l'arrivée des gens depuis la demande. Et d'ailleurs le sous-ministre de votre ministère y était. Ce qui est sorti des quelques études qu'on a présentées, c'était que, très souvent, si les gens ne retrouvent pas un travail dans leur profession dans les deux années de leur établissement au Canada, ils font d'autre chose, ils deviennent chauffeurs de taxi, ils ouvrent un dépanneur, etc. Et ce n'est pas des caricatures nécessairement, d'accord? Mais ils ne... Si on n'arrive pas rapidement, par exemple avec un ingénieur, de trouver un travail là-dedans ? en général, on a sélectionné quelqu'un parce qu'il était ingénieur ? il ne le sera pas.
Ce qui était suggéré, c'est une... En fait, ce qu'on a discuté, il y a toute une série de mesures, il y avait une question, par exemple, qui était le système de mentorat et qui pourrait s'établir déjà avant l'arrivée de la personne ici. Un professionnel pourrait, par exemple, être en contact avec quelqu'un de la même profession ici, à partir du moment, par exemple, que le Québec aura émis un certificat de sélection. Il y a des solutions comme ça qui seraient intéressantes et qui faciliteraient par la même occasion, par hasard, des initiatives pour établir les gens en région. Si je suis en contact déjà avec un professionnel de ma profession à Chicoutimi, par exemple, le lien va être beaucoup plus évident, après, que je puisse m'établir dans la région en question. Donc, il y a ça, c'est une des initiatives qu'on pourrait envisager.
La question, effectivement, de parrainage en région, c'est une idée qu'il faudrait explorer à peu près de la même façon mais de façon relativement ouverte. On pourrait penser, par exemple, à cela pour faire face à certaines situations de crise. Bon, tantôt, j'ai parlé de la Colombie; il y a une demande immense, et c'est très clair qu'on pourrait dans certains cas ? et d'ailleurs il y a beaucoup de réfugiés colombiens qui sont établis dans la région de Drummondville ou à Sherbrooke ? on pourrait penser à certains quotas. Et là c'est très clair, parce qu'il y a les capacités financières. Si une région veut accueillir des gens, que ce soit un plus.
Le Québec, actuellement, a déjà un système de son propre pouvoir, qui s'appelle le Parrainage collectif, discrétionnaire. On pourrait penser à cela. Ça n'accepte pas des personnes qui n'ont pas un minimum de qualifications, mais ça rajoute, parce que c'est une demande comme indépendant qu'il faut faire, d'abord, et ça rajoute finalement et facilite bien sûr l'intégration de la personne après.
Le Président (M. Cusano): Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Chambly.
Mme Legault: Merci. Madame, messieurs. D'abord, j'ai une petite question, là, toute simple: Quel est le mandat du comité sur les communautés culturelles du Barreau? De quoi on y traite?
Le Président (M. Cusano): Me Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Oui. Le mandat est assez large. Le mandat ? et parfois, malheureusement, on s'est cantonné un peu trop, par la force des choses, dans la critique ou l'examen de certains projets de loi; c'est un des mandats, mais c'est un petit mandat, je dirais ? c'est tout ce qui touche les communautés culturelles dans l'interface avec le système judiciaire.
Il y a un plan de travail qui a été approuvé par la direction du Barreau en 2000, je pense, et ça va de choses qui peuvent paraître aussi évidentes pour n'importe qui que d'inciter le gouvernement à nommer des juges qui proviennent des communautés culturelles, par exemple ? d'accord?; de voir, dans les cabinets d'avocats, à ce qu'il y ait des programmes effectivement d'accès à l'égalité qui fonctionnent, O.K., parce que tous les grands en ont, mais, si on regarde effectivement qui est retenu après les stages, ce n'est pas nécessairement vraiment la représentation correcte de l'ensemble de la population québécoise ou, du moins, montréalaise. Donc, ça touche tout ça.
Il y a un peu de travail... Me Brosseau en fait beaucoup, de travail, avec la magistrature. Il y a d'ailleurs, dans l'étude qui vient de sortir... C'est très intéressant, c'est fait par un professeur de l'Université de Montréal qui s'appelle Pierre Noreau ? et une des choses, je pense, qu'on va faire autour, c'est d'abord envoyer une copie à vous, Mme la ministre ? mais on remarque, par exemple, que les communautés culturelles utilisent beaucoup moins les services publics et, en particulier, la justice. Il y a une méfiance mais également une espèce... Il y a un respect et une crainte des institutions, qui sont aussi très réels. Et souvent l'un des problèmes, c'est que les institutions en question sont assez difficiles à aborder. Bon, Me Chiu vous a parlé, il y a quelques minutes, d'expériences de la communauté chinoise.
Mais ce qu'on voit ? et si vous permettez que je termine avec ça ? depuis environ 30 ans, il y a eu je ne sais pas combien de recommandations concernant l'éducation interculturelle des fonctionnaires du gouvernement du Québec, et on se retrouve, 30 ans plus tard, à entendre les mêmes choses que, pour n'importe qui qui a un contact quotidien avec les communautés, c'est un peu aberrant. Donc, si vous voulez, ça touche tout ça et, bien sûr, plus dans les systèmes juridique et judiciaire, parce que c'est notre spécialisation.
M. Gagnon (Pierre): Il y a toute, aussi, la question de la formation qui est donnée par le Barreau au cours de nos congrès, là, de formation auprès de nos membres, sensibilisation à la question des communautés culturelles. Alors, il y a toujours, dans chacun de nos réunions ou de nos congrès, il y a toujours des ateliers, là, qui sont animés par le comité sur les communautés culturelles, et puis on sent le besoin que ce soit répété et répété. Et on n'en est pas encore, malheureusement, rendu où on a le sentiment que tous nos membres ont cette sensibilité-là, et on travaille là-dessus vraiment beaucoup.
M. Saint-Pierre (Noël): Si vous permettez, M. le Président, très rapidement.
Le Président (M. Cusano): Oui.
M. Saint-Pierre (Noël): Parmi les choses qu'on essaie d'aborder, et c'est souvent très frustrant, c'est que la formation des avocats tienne compte des réalités interculturelles. Ce n'est pas juste à l'École du Barreau; même au niveau universitaire, il n'y a rien, à peu près. C'est une réalité qui n'existe pas. C'est comme si on apprenait le droit dans un vide. Sauf que, évidemment, le vide n'est pas réel pour les gens qui viennent d'un milieu québécois, francophones ou anglophones de souche. Cependant, si on ne se frotte pas avec d'autres réalités, on ne peut pas comprendre, souvent, ce que les gens nous disent lorsqu'on est professionnel.
Mme Brosseau (Carole): Je sais que le temps passe...
Le Président (M. Cusano): Oui, vous voulez ajouter, madame?
Mme Brosseau (Carole): Oui. Ce que je voulais ajouter, c'était une dimension qu'on voit moins, parce que c'est un comité, comme je vous dis... Le mandat est très large. Mais il y en a un qu'on a moins exploré, mais sur lequel on a travaillé mais, je dirais, peut-être pas de façon aussi continue que la formation qu'on fait auprès de nos membres actuellement: c'est vraiment d'établir des liens de communication avec les organismes non gouvernementaux pour leur donner aussi une certaine formation sur les règles minimales en droit. On l'avait fait aussi, une approche aussi pour solliciter les jeunes à venir aussi dans la profession juridique, pour qu'il y ait une pluralité de personnes, etc. Donc, c'est très large.
n
(12 h 40)
n
Mme Legault: Merci beaucoup. C'était une petite question; vous avez été bien généreux dans la réponse. Mais j'avais une question aussi qui m'interpelle et qui nous interpelle tous, je pense, beaucoup, c'est celle de la reconnaissance des équivalences de diplômes et de formation. Et j'aurais aimé que vous nous brossiez un tableau ? bien, rapide, on verra ? sur l'état de la situation et le traitement d'une demande. Comment vous qualifiez l'expérience d'un candidat étranger qui veut devenir membre du Barreau? Qu'est-ce qui fonctionne? Qu'est-ce qui fonctionne moins bien? Qu'est-ce qui pourrait être fait? On en aurait eu pour 10 minutes...
Le Président (M. Cusano): La parole... Oui, Me Brosseau.
Mme Brosseau (Carole): Je vais répondre à cette question. Je ne vous cacherai pas que je m'y étais préparée un petit peu, alors je suis allée chercher des informations à cet égard-là.
Le système d'équivalences, tel qu'il fonctionne, il y a un règlement qui prévoit, en ce qui concerne la France, une possibilité qu'il y ait seulement un accord de réciprocité. C'est la seule exception. Donc, je commence par l'exception, et après on passera pour les autres niveaux.
Il y a à peu près, règle générale, à peu près 60 à 70 demandes d'équivalences, bon an mal an, chaque année, qui est demandé et qui est traité par le comité des équivalences. Donc, ce n'est pas des demandes d'information, mais essentiellement des demandes.
Cela dit, dans le cas de la France, il y a une réciprocité. Les gens qui proviennent de la France doivent demander... passer quatre examens, qui sont des examens d'équivalence, et ils doivent les passer, et ça, s'ils réussissent les examens, ils sont automatiquement admis à la profession juridique au Québec, et vice et versa, c'est la même chose pour la France. Et ça, c'est prévu par le règlement, par notre réglementation. Dans les autres cas, ces demandes-là, c'est des demandes... c'est du cas par cas, on les traite du cas par cas. J'ai essayé de savoir s'il y avait des critères établis; ils disent: Non, ça dépend du candidat, ça dépend... C'est vraiment traité du cas par cas.
On demande des équivalences. Dans 1 % des cas, il y a des refus d'équivalences. Dans toutes les autres qui sont demandées, il y a des équivalences qui peuvent varier entre l'obligation... Et là je vais parler d'obligation de suivre une formation au niveau universitaire, qui est de l'ordre de 30 crédits à 75 crédits. Donc, ça peut être assez lourd; quand on parle de 75 crédits, c'est presque recommencer son cours de droit. Et ça, c'est en excluant l'école professionnelle du Barreau où, là, ils doivent... C'est très lourd, c'est très lourd et très coûteux, aussi, les coûts sont énormes. Mais je pense que ce n'est pas juste nous, c'est tous les ordres professionnels qui exercent...
M. Gagnon (Pierre): Le fait que c'est un comité ? si tu permets ? c'est un comité... Notre comité des équivalences est formé de professeurs d'université, de certains praticiens, des gens de l'École professionnelle du Barreau, et ça va aller, par contre... là on prend les cas les plus lourds, mais il y a des cas aussi où ça va aller tout simplement à faire certaines lectures. Par exemple, quelqu'un qui revient, c'est le même comité qui va donner le profil pour quelqu'un qui revient à la pratique, par exemple, tu sais ? qu'est-ce qu'il devrait faire ou... Tu sais? Eux, autrement dit, là, ils dessinent un profil, là, pour que... cette personne-là, qu'est-ce qu'elle devrait faire pour pouvoir revenir à la pratique ou y avoir accès.
Mme Legault: Est-ce que le Barreau a une carte des compétences de ce qu'est un avocat, ou est-ce que le processus d'équivalence s'appuie actuellement sur un processus de comparaison avec les cursus québécois que nous avons?
M. Gagnon (Pierre): Je crois qu'ils ont un peu leur jurisprudence, entre guillemets, là, tu sais, ils se fient sur des cas où... C'est toujours, naturellement, le problème de ne pas laisser n'importe qui pouvoir... qui n'a pas la formation pour pouvoir avoir accès à la profession. Et c'est aussi vrai d'ailleurs avec les autres... même avec les autres provinces, là, où on le fait présentement.
Mme Legault: Dernière question. Vous abordez, là, rapidement, la responsabilité, là, ou en tout cas la sensibilité qu'on doit avoir relativement à une information de qualité, claire à l'étranger. Et, moi, je me demande évidemment, avec tout ce qu'on a comme moyens technologiques actuellement ? des demandes d'information peuvent être adressées directement au Barreau ? quelle est la participation, quel est le rôle que vous pouvez jouer pour faciliter cette diffusion d'information là, et comment vous la voyez s'articuler, là, autour d'autres actions?
M. Gagnon (Pierre): Bien, j'imagine que ce serait peut-être de résumer un peu ou de mettre un certain nombre... de rendre publiques, si on veut, peut-être, ces exigences-là ou qu'est-ce qui est demandé, peut-être, le plus souvent. Mais là je réfléchis tout haut, là, peut-être que ça existe déjà, là, cet espèce de cadre là qui dit: Bien, si tu t'en viens chez nous puis que tu veux aller au Barreau, voici, là, ça ressemble à peu près à ça, là, il faut que tu penses à tel, ou tel, ou tel type de... Ça, je pense que ça devrait pouvoir se faire. Mais c'est toujours un petit peu dangereux, parce que chaque cas est un cas d'espèce. On voit des gens, par exemple, qui n'ont pas été près de l'ordre professionnel depuis 20 ans, mais qui ont été, tu sais, dans une fonction qui les a tenus très, très près du droit, et de voir...
Une voix: ...
M. Gagnon (Pierre): ...ils reviennent assez facilement, alors que d'autres ont été partis depuis moins longtemps. Je veux dire, c'est un peu les mêmes critères qu'on prend, là, pour...
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci beaucoup, M. le Président. Moi, je voudrais revenir sur le parrainage collectif, parce que je suis en région, on demeure en région. Et même la ville de Laval, à un moment donné, est venue en commission puis nous a un peu entretenus là-dessus, sur le parrainage collectif. Mais, moi, je voudrais avoir votre... Comment vous pensez qu'une municipalité... Parce que vous mentionnez, dans votre mémoire, que même une municipalité ou une MRC pourrait effectuer un parrainage collectif...
Le Président (M. Cusano): Me Saint-Pierre...
Mme Papineau: C'est parce que ce serait eux, là, qui assumeraient le leadership, mettons, la municipalité ou la MRC. Vous le voyez comment, ce parrainage collectif là?
M. Saint-Pierre (Noël): Moi, je pense que les outils existent déjà, sauf que les outils sont actuellement très mal utilisés. Le Québécois s'est donné, il y a déjà quelques années, une possibilité de parrainage discrétionnaire, c'est d'ordre humanitaire. Moi-même, j'ai fait personnellement beaucoup de travail avec l'ancien ministre Boulerice, lorsqu'il était ministre responsable justement pour une partie du domaine de l'immigration, parce que les fonctionnaires ne savaient pas comment utiliser le pouvoir qui existe. Ils disaient, par exemple, à Mexico: Bien, on n'a pas de directive, on n'a pas vraiment rien pour nous aider. Et j'ai cherché à faire en sorte que les gens puissent, à l'intérieur même du ministère, commencer à se parler là-dessus.
C'est qu'actuellement, pour un parrainage discrétionnaire, il faut que ce soit un organisme non gouvernemental, souvent, donc une église, un syndicat, etc. ? il faudrait simplement élargir ça ? ou encore un groupe de cinq personnes, d'accord, qui collectivement constitue un groupe de parrainage. Et on pourrait facilement simplement dire: Bon, bien, si une municipalité voudrait accueillir des personnes, elle aurait le droit effectivement de parrainer au même titre, par exemple, qu'une église. Sans doute une municipalité aurait autant de ressources, sinon plus, qu'une église, d'autant plus que les exigences, en fait, face au ministère, c'est de rembourser l'aide sociale que la personne pourrait demander dans les cinq années de son établissement. Donc, en général, ce n'est pas un fardeau particulièrement lourd.
Par la suite, le ministère pourrait, en matière de coordination de tout ça, identifier les priorités. Exemple, à l'extérieur du Canada, il y a des populations déplacées où il y a énormément de femmes qui n'ont plus de mari, les femmes qui ont des enfants, et on pourrait déjà dire: Bon, bien, là, on voudrait accueillir un certain nombre de ces personnes-là avec un programme semblable. Et collectivement, on aborderait ça avec des mesures qui pourraient faire en sorte que ces femmes-là, peu de temps après leur arrivée ici, auraient déjà été francisées au niveau linguistique et commenceraient à travailler.
Donc, il y a des mesures effectivement qu'on pourrait... mais c'est vraiment une responsabilité collective qui exige de la part du ministère vraiment une coordination. Et malheureusement l'expérience que j'ai eue avec M. Boulerice là-dessus, c'est un peu frustrant. Il y a beaucoup d'idées qu'on a avancées et il n'y a pas eu de résultat. Alors, si je peux passer un message aujourd'hui... d'autant plus qu'il y a une personne que je connais très bien, qui est assise derrière la ministre, là. C'est un dossier qui est prioritaire, parce qu'il y a des dossiers humanitaires qui pourraient être résolus beaucoup plus facilement.
Mme Papineau: Merci beaucoup.
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Moi, je vais continuer au niveau des régions et de l'emploi, parce que, en fait, c'est une des choses les plus importantes; si on veut garder nos immigrants ici, il faut leur trouver de l'emploi, en tout cas... pour tout le monde d'ailleurs, mais plus particulièrement pour ces gens. Et il semblerait y avoir problème au niveau, en fin de compte, des permis temporaires de travail, en fait, là, avec le fédéral. Et vous en faites une préoccupation importante, aussi, puis il me semblerait que les négociations se font assez au ralenti, n'accélèrent pas tellement. Donc, qu'est-ce qui fait qu'en sorte que ça ne fonctionne pas aussi rapidement que ça devrait fonctionner, dans ces négociations-là entre le fédéral et le provincial, qui fait qu'en sorte que ça nous permettrait d'avoir un effet de rétention au niveau de notre immigration?
Le Président (M. Cusano): Me Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Oui. Je ne pense pas que je peux vraiment répondre en ce qui concerne les négociations entre le fédéral et le provincial. Ce qui est clair, c'est qu'il y a... Il y a eu à certains moments, lorsqu'il y avait une volonté politique du ministère québécois, il y a des dossiers qui ont débloqué. Je donne l'exemple, même si ce n'est pas une question de permis de travail temporaire, le dossier des ressortissants algériens, il n'y a pas très longtemps. C'était parce que le ministre québécois, à un moment donné, a dit: «Nous sommes prêts à faire quelque chose» que le fédéral a finalement accepté un règlement, et ça a désamorcé une crise aussi.
n
(12 h 50)
n
Il est clair qu'il faut... Et je pense qu'une des choses à retenir de cette commission, c'est que parfois le ministère québécois a peur parce qu'il voit un peu la menace du fédéral d'essayer de récupérer une juridiction. C'est des choses que j'ai entendues de l'intérieur du ministère, et déjà plusieurs fois, et pas nécessairement juste des fonctionnaires. Donc, il y a effectivement une volonté politique qui est nécessaire.
Du côté du fédéral, il est très clair que les ressources qui sont perçues pour traiter les demandes d'immigration, les différents frais ne sont pas réinvesties dans le traitement des demandes; ça, c'est très clair. Donc, il y a une bataille que nous cherchons à faire là. Mais, de votre côté, c'est vraiment de faire ce qui est nécessaire pour pousser.
Le Président (M. Cusano): Merci.
Mme Vermette: Moi, c'était une de mes préoccupations, parce qu'en fin de compte il y a un autre groupe qui est venu en fait nous dire exactement la même chose: le fait que les gens n'ont pas... Ça prend tellement de temps, d'abord, un, avant d'avoir une réponse, d'avoir un permis, et tout ça, ce qui fait qu'à un moment donné ils sont complètement découragés, on les perd, pour s'en aller à l'extérieur, ou à d'autres endroits, ou d'autres... où ça va beaucoup plus rapidement. Donc, effectivement, donc c'est important, ce que vous nous dites, il faut être un peu plus vigilants ou avoir un peu plus... se tenir debout par rapport à certains aspects de notre immigration et de les imposer, à un moment donné, si on veut les garder.
M. Saint-Pierre (Noël): Quand je parlais tout à l'heure d'une question, par exemple, de contact avant que les personnes arrivent, une des difficultés qu'on rencontre ? et je n'ai pas vu ça souligné directement, peut-être parce que les gens ont un peu peur d'en parler ? c'est que, pour un étranger, il est très difficile de pénétrer le marché du travail québécois. Et ce n'est pas une question de racisme en soi, c'est le fait qu'on est une société où les gens très souvent fonctionnent par connaissances. Alors, si je suis un parfait inconnu, et même si j'ai un très beau C.V., il est plutôt exceptionnel qu'on va effectivement, même, me donner une entrevue.
J'ai eu d'ailleurs des candidats pour des stages d'avocat, certains... et je posais carrément la question: Pourquoi vous avez demandé de faire un stage dans un petit cabinet qui est vraiment tout sauf riche? Et, dans deux cas ? c'est des Africains ? ils disaient: Parce qu'avec vous, au moins, on pensait qu'on aurait une chance d'avoir une entrevue. Donc, il y a ce genre de barrière, et c'est pour cela que très souvent il faut se situer en amont, non pas une fois que les gens sont ici puis commencent à frapper les barrières, et surtout si on parle de la région. Moi, je n'aimerais pas débarquer en Gaspésie, si je connais personne, puis commencer à chercher une job. Je pense que, ça, il faut déjà régler ou commencer à régler ça avant que les gens mettent les pieds ici.
Mme Vermette: Oui, mais, en Gaspésie, je vais vous dire, il y a... c'est La Grande Séduction.
Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: J'imagine qu'il me reste très peu de temps. Alors, je vais poser une question...
Le Président (M. Cusano): Oui. Vous disposez de deux minutes, M. le député.
M. Dion: Ah, bien, c'est bon, c'est bon. Je vais poser une question courte mais qui peut-être demande une explication un peu plus longue: Qui, au Québec, a la responsabilité principale et peut-être la responsabilité déléguée ou la mission d'assurer la francisation des immigrants? Quelle est la structure légale, réglementaire, normative? Qui fait quoi là-dedans? Pouvez-vous m'éclairer un petit peu? J'aimerais ça voir clair.
Le Président (M. Cusano): Me Saint-Pierre.
M. Saint-Pierre (Noël): Je vais essayer d'être bref, effectivement. C'est le ministère, ici, qui a la responsabilité centrale. C'est souvent un travail de coordination, dans le sens qu'il y a beaucoup de cours de francisation d'adultes qui se font dans les commissions scolaires, et non plus comme dans les COFI uniquement, comme ça a été le cas à une certaine époque. Mais c'est le ministère en fait qui a cette responsabilité-là, qui a les fonctionnaires qui y sont effectivement attitrés.
M. Dion: Mais, dans le concret, ce n'est pas nécessairement le ministère. Chez nous, je ne pense pas que ce soit le ministère qui donne les cours directement. Comment ça fonctionne?
M. Saint-Pierre (Noël): Non. Normalement...
Une voix: ...
M. Saint-Pierre (Noël): Pardon. Oui. C'est normalement la commission scolaire qui aura effectivement des budgets qui d'ailleurs découlent de l'Entente Canada-Québec en matière d'immigration.
Le Président (M. Cusano): Merci. Et, sur ce, je voudrais vous remercier de votre participation à notre commission.
Compte tenu de l'heure, les travaux sont ajournés à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
(Reprise à 14 h 7)
Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. En cet après-midi, nous entendrons le Conseil régional de concertation et de développement de la région de Québec; par la suite, Québec Multi-Plus; à 16 heures, l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais; à 17 heures, le Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes.
Alors, j'aimerais demander à nos premiers invités de bien vouloir s'identifier pour les fins du Journal des débats.
Conseil régional de concertation
et de développement de la région
de Québec (CRCDQ)
M. Fortin (Jean): Oui. Bonjour. Alors, mon nom, moi, est Jean Fortin; je suis président du conseil du CRCD de la région de la Capitale-Nationale, de Québec. À mes côtés, il y a Josée Tremblay, qui est directrice générale du CRCD et, avec nous également, en arrière, il y a Mme Lapointe, Mme Lapointe qui est là, qui nous accompagne, là, qui a travaillé sur plusieurs dossiers, entre autres, en immigration, sur les dossiers avec la ville de Québec et avec d'autres intervenants également, pour le CRCD.
Le Président (M. Cusano): Bienvenue à notre commission. J'aimerais vous faire part de nos règles très brièvement. Vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura une période d'échange avec les membres de la commission pour une période maximale de 40 minutes. Alors, la parole est à vous.
M. Fortin (Jean): Alors, je vous remercie de nous donner l'occasion de pouvoir intervenir sur un sujet qui est très important pour nous, pour le CRCD, pour la région de la Capitale, pour la région de Québec et évidemment pour le Conseil régional de concertation et de développement de la région de Québec. Ce que je vais faire, là, je vais simplement lire en bonne partie le mémoire. Je ne sais pas si vous en avez des copies, mais, en tout cas, vous en avez sûrement un résumé. Je vais vous en faire la lecture. Évidemment, nous, ce qu'on a décidé, étant donné qu'on n'a pas toute l'expertise pour se prononcer sur ce dont on... le but principal, les niveaux dont on parle ici, nous, on veut quand même faire quelques observations sur la situation dans la région, étant donné le travail sur lequel... les différents projets sur lesquels on a travaillé au cours des dernières années.
Donc, le CRCDQ est une corporation sans but lucratif qui oeuvre depuis 1971 dans les domaines de la concertation et du développement régional. Il est reconnu officiellement par le gouvernement du Québec comme son interlocuteur privilégié en matière de développement régional pour la région administrative de la Capitale-Nationale.
n
(14 h 10)
n
Tel que défini dans la Loi sur le ministère des Régions, adoptée en décembre 1997, le CRCDQ a principalement pour mandat de favoriser la concertation entre les partenaires régionaux et de donner des avis au ministre sur tout ce qui touche le développement de la région. Pour ce faire, le CRCDQ établit un plan stratégique définissant les grands objectifs de développement de la région, appelés axes de développement, et des objectifs plus particuliers, appelés priorités de développement. Sur la base de ce plan stratégique, le conseil conclut avec le gouvernement une entente-cadre dans laquelle les parties conviennent des axes et priorités de développement de la région. Il conclut également, avec les ministères ou organismes du gouvernement et, le cas échéant, avec d'autres partenaires, des ententes spécifiques pour la mise en oeuvre de l'entente-cadre ou pour prévoir des mesures en vue d'adapter aux particularités de la région l'action gouvernementale en matière de développement régional. Le CRCDQ regroupe les décideurs et décideuses des municipalités, des municipalités régionales de comté et des principaux secteurs socioéconomiques de la région de Québec.
Le 17 décembre dernier, le gouvernement du Québec a adopté la Loi sur le ministère du Développement économique et régional et de la recherche, qui prévoit la création, dans chacune des régions du Québec, d'au moins une conférence régionale d'élus, une CRE. Ces nouvelles instances prendront le relais des actuels conseils régionaux de développement et se verront confier des mandats presque semblables à ceux assumés actuellement par les CRD. Les CRE auront notamment comme responsabilités de favoriser la concertation entre les partenaires et de donner, s'il y a lieu, des avis au ministre sur le développement de la région. Elles auront également à établir un plan quinquennal définissant, dans une perspective de développement durable, les objectifs généraux et particuliers de développement de la région et pourront conclure des ententes spécifiques avec les ministères ou organismes du gouvernement et, le cas échéant, avec d'autres partenaires. Il importe enfin de souligner que la loi prévoit que les droits et obligations d'un conseil régional de développement, à l'exception des droits et obligations relatifs aux dépenses de fonctionnement, seront transférés à la conférence régionale des élus. Dans la région de la Capitale-Nationale, une seule CRE sera mise en place. Celle-ci devrait succéder au CRCDQ au plus tard le 31 mars 2004.
Au cours des dernières années, les interventions du CRCDQ dans le dossier de l'immigration ont pris plusieurs formes. Ainsi, le conseil a participé à la réalisation du colloque Les communautés culturelles: des partenaires économiques à découvrir, qui s'est déroulé le 1er mai 1996. Certains des éléments de problématique identifiés lors du colloque ont par la suite été intégrés dans la planification stratégique régionale. Le CRCDQ s'est également impliqué dans la préparation et la tenue du Colloque sur la régionalisation de l'immigration, tenu le 6 juin 1996 par le Conseil des communautés culturelles. Cet événement initiait le processus en vue de la réalisation d'un plan d'action régionalisé de l'immigration au Québec. Il devait en outre conduire à l'établissement des bases devant servir à l'élaboration d'une entente spécifique portant sur la régionalisation et l'intégration de l'immigration ainsi que sur le développement de la cohésion sociale.
Une première entente spécifique en immigration a été signée en octobre 1997. Impliquant le MRCI, le CRCDQ et le ministère des Régions, elle avait pour objet, d'abord, la réalisation de projets visant l'intégration culturelle, sociale, linguistique et économique des personnes issues de l'immigration présentes dans la région de Québec et, ensuite, la régionalisation de l'immigration dans la région. L'entente, qui a pris fin en juillet 1999, a notamment permis de familiariser un nombre important d'organismes aux problématiques liées à l'immigration et aux actions à entreprendre pour que la région de la Capitale-Nationale puisse un jour en arriver à accueillir une proportion d'immigrants et d'immigrantes égale à son poids démographique au Québec. Elle a également conduit à l'inscription de huit objectifs stratégiques portant sur l'immigration dans la planification stratégique de la région de Québec. De plus, elle a permis de soutenir six projets qui ont bénéficié d'une aide financière globale de 193 680 $.
Le 22 novembre 2001, le CRCDQ et le gouvernement du Québec ont procédé à la signature officielle de l'Entente-cadre de développement de la région de la Capitale-Nationale 2001-2006. Dans ce document, sept grands axes de développement ont été identifiés, dont l'un qui consiste à accroître la contribution des immigrants au développement de la région. Trois priorités d'action ont en outre été associées à cet axe de développement, soit: faire de la région de la Capitale-Nationale le second pôle d'établissement des immigrants au Québec; diversifier et intensifier les activités d'attraction et d'intégration des immigrants; et poursuivre la sensibilisation de la population à la contribution de l'immigration au développement de la région.
Avant même que l'entente-cadre ne soit officiellement signée, soit dès le printemps 2001, le CRCDQ a entrepris des démarches avec la direction régionale du MRCI et d'autres partenaires dans le but d'élaborer une deuxième entente spécifique en matière d'immigration. Le projet d'entente avait principalement pour objet l'attraction et l'établissement durable des personnes immigrantes dans la région de la Capitale-Nationale. Impliquant le MRCI, le Bureau de la Capitale-Nationale, Emploi-Québec, le Conseil régional des partenaires du marché du travail de la région de la Capitale-Nationale et le CRCDQ, il avait pour objectifs d'augmenter, au cours des trois années de sa mise en oeuvre, le nombre de personnes immigrantes accueillies dans la région de la Capitale-Nationale à 2 500 par année, de favoriser l'intégration sociale et professionnelle des personnes immigrantes et de répondre aux besoins de main-d'oeuvre des employeurs de la région et d'assurer une relève dans les secteurs en émergence. Et je pense que ces trois objectifs sont toujours d'actualité aujourd'hui, à l'heure où on se parle.
Des investissements totaux s'élevant à 1 million de dollars étaient associés à la réalisation de cette entente, dont une contribution de 300 000 $ du CRCDQ répartie sur trois ans. La participation financière du conseil était possible en raison de l'existence du Fonds de développement régional, enveloppe dont il dispose pour assurer son fonctionnement, soutenir la réalisation de projets régionaux structurants et mettre en oeuvre des ententes spécifiques.
L'entente spécifique sur l'attraction et l'établissement durable des personnes immigrantes dans la région de la Capitale-Nationale n'a finalement jamais été signée. Malgré les bonnes intentions de la direction régionale du MRCI d'en venir à une entente, la culture institutionnelle du ministère, résolument centralisatrice, a pris le pas, de sorte que les travaux se sont avérés particulièrement lourds et complexes. La direction régionale devait régulièrement en référer au central, ce qui a significativement ralenti le processus et souvent donné l'impression qu'on cherchait davantage, au ministère, à trouver la petite bête noire qu'à permettre à la région d'avancer.
Les travaux, qui se sont étirés sur une période de temps plus longue que prévu, ont finalement été affectés par l'annonce de la tenue d'élections provinciales et la fébrilité qui a suivi. Une nouvelle exigence a été formulée par le ministre de l'époque, soit celle d'impliquer un nouveau partenaire, la ville de Québec, en toute fin de parcours. Intervenant de premier plan dans la région en matière d'immigration, la ville avait déjà une entente avec le MRCI et s'apprêtait à signer celle-ci pour une troisième année consécutive. Compte tenu de l'état d'avancement des travaux de l'entente spécifique et des objectifs poursuivis par la ville, il n'a pas été possible de parvenir à un accord avant la tenue des élections. Le CRCDQ espérait bien pouvoir reprendre les travaux sur des bases différentes lorsque le nouveau gouvernement aurait fait son lit à ce sujet. Malheureusement, aucun développement n'a été enregistré dans ce dossier depuis le printemps 2003. Il faut dire enfin que le conseil a entrepris des discussions avec la ville de Québec en vue du financement possible, dans le cadre du Fonds de développement régional, d'autres projets associés au secteur de l'immigration.
Donc, les implications du CRCDQ en matière d'immigration l'amènent à faire les observations suivantes.
L'immigration constitue sans conteste un enjeu de taille dans la région de la Capitale-Nationale, puisqu'il s'agit d'un levier de première importance pour assurer le développement de cette dernière. Dans un contexte de déclin démographique où des pénuries de main-d'oeuvre sont appréhendées, il importe de mettre en place les moyens nécessaires pour attirer et retenir un plus grand nombre de personnes immigrantes dans la région, notamment en facilitant leur intégration à la société d'accueil. De plus, l'apport incontestable des personnes immigrantes à l'enrichissement de la société québécoise sur les plans culturel et social constitue également un atout dont la région ne saurait se passer.
Les attentes à l'égard de l'immigration apparaissent très élevées. Il en est régulièrement question dans les médias, et plusieurs acteurs de la région en ont fait leur cheval de bataille. L'immigration n'est toutefois pas une panacée et ne pourra résoudre à elle seule tous les problèmes de la région sur les plans du renouvellement de la population et de la réponse aux besoins de main-d'oeuvre.
L'objectif formulé par le MRCI de faire de la région de la Capitale-Nationale le deuxième pôle d'établissement des immigrants au Québec semble toujours faire consensus. C'est un objectif auquel le CRCDQ adhère sans restriction.
Malgré l'ampleur des efforts consentis par une multitude d'intervenants et d'intervenantes au cours des dernières années, les objectifs poursuivis en matière d'attraction et de rétention des personnes immigrantes dans la région n'ont pas toujours été atteints.
L'une des difficultés rencontrées dans le domaine de l'immigration touche la concertation. Sans être absente, cette dernière apparaît néanmoins déficiente dans la région. Là encore, les efforts déployés ne semblent pas porter fruit.
Dans un contexte de régionalisation de l'immigration, l'approche centralisatrice du ministère ne facilite pas toujours les choses. Celle-ci peut nuire aux initiatives mises de l'avant par les acteurs de la région ainsi qu'à une véritable décentralisation.
Donc, pour nous, ça devient une nécessité de mieux structurer la concertation dans la région. Compte tenu des constats présentés dans la section précédente et des mandats qui lui ont été dévolus par le gouvernement du Québec, le CRCDQ croit qu'il pourrait contribuer activement au dossier de l'immigration dans la région de la Capitale-Nationale en jouant un rôle accru sur le plan de la concertation.
n
(14 h 20)
n
Le conseil soutient déjà plusieurs tables de concertation oeuvrant dans des secteurs d'activité fort variés. Ainsi, il supporte le Forum jeunesse de la région de Québec, la Table régionale sur les transports, le Comité régional d'économie sociale de la région de Québec, la Table régionale de concertation sur le milieu forestier, le Comité consultatif sur les services de garde et le Comité de suivi en développement social. Soucieux de mieux encadrer son intervention, il s'est même doté d'une politique relative à la reconnaissance des tables de concertation dans laquelle il confirme son engagement à offrir un soutien professionnel et technique aux tables officiellement reconnues. Cette politique poursuit les objectifs suivants: permettre à des intervenants et intervenantes de se regrouper dans le but de planifier, d'organiser, de proposer et de réaliser des actions concertées favorisant le développement de la région dans un secteur donné; mettre en commun l'expertise des personnes siégeant à une table de concertation au profit du développement de la région; associer les membres d'une table de concertation à la réalisation de la planification stratégique régionale, de l'entente-cadre de développement et, s'il y a lieu, des ententes spécifiques de régionalisation.
Dans ce contexte, il apparaît naturel pour le CRCDQ de vouloir s'engager à mettre en place et à soutenir une table de concertation réunissant les principaux acteurs associés au secteur de l'immigration dans la région, d'autant que la concertation figurait déjà parmi les moyens privilégiés pour assurer la mise en oeuvre de la deuxième entente spécifique.
Le CRCDQ croit en outre que le fait qu'il ne participe pas au financement des organismes intervenant en immigration constitue un avantage non négligeable. En effet, il est raisonnable de croire que ceux-ci se trouveront dans une situation moins inconfortable et se sentiront plus libres d'intervenir si la table de concertation est placée sous la responsabilité d'une organisation autre que le ministère.
En conclusion, l'immigration figure sans l'ombre d'un doute parmi les outils essentiels au développement économique mais également social et culturel de la région de Québec. À ce titre, toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour faire en sorte que les objectifs poursuivis dans ce domaine soient atteints. Le CRCDQ espère pouvoir contribuer à sa façon à l'atteinte de ces objectifs en mobilisant les principaux acteurs concernés par ce dossier autour d'une table de concertation régionale dont il est prêt à assumer le leadership. Bien qu'il sera remplacé prochainement par la Conférence régionale des élus, il anticipe que l'immigration s'imposera d'elle-même comme une priorité aux administrateurs et administratrices de la nouvelle instance. Alors, voilà.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. Fortin. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mme Tremblay, M. Fortin, merci d'être là. Ma compréhension, M. Fortin, c'est que ça n'a pas été facile pour vous dans le dossier de l'immigration au cours des dernières années. Ma compréhension, c'est qu'effectivement vous avez voulu beaucoup, mais il n'y avait pas de répondant. C'est ce que je comprends. Je me rappelle que vous étiez présent à la table de consultation, hein, où, effectivement, il y avait une quarantaine d'organismes, sinon plus, autour de la table, où cette notion de concertation a été abordée d'emblée. Et je vous dirais que j'ai revu plusieurs de ces organismes-là au fil des mois.
Pourquoi c'est si difficile, la concertation, dans la région de Québec, là? On reviendra sur votre remarque sur le ministère, que j'entends très, très bien. Puis j'avais été très transparente au moment de cette consultation-là sur le ministère, donc je ne reviendrai pas là-dessus aujourd'hui. Mais pourquoi c'est si difficile? Avez-vous une explication, vous?
Le Président (M. Cusano): M. Fortin.
M. Fortin (Jean): Là, vous parlez de la concertation en général...
Mme Courchesne: Non...
M. Fortin (Jean): ...ou vous parlez juste en immigration?
Mme Courchesne: ...je vais parler en immigration, parce que la commission a vraiment pour but les niveaux d'immigration.
M. Fortin (Jean): O.K. C'est beau.
Mme Courchesne: Donc, on ne va pas régler le sort de la région de Québec aujourd'hui, mais...
M. Fortin (Jean): C'est beau. O.K. Écoutez, il y a peut-être plusieurs raisons. Il y a quand même, malgré ce qu'on dit là-dedans, qu'il y a des efforts qui ont été faits, il y a quand même aussi des choses qui ont été réalisées, il y a quand même des discussions qu'on a eues, puis on ne peut pas donner comme constat complet de dire: Il n'y a aucune concertation possible et il n'y en a aucune qui se fait. D'ailleurs, sur notre conseil d'administration, il y a des représentants des différentes... des communautés. Il y a des gens qui viennent, même qui participent à nos discussions sur le C.A. et qui participent à plusieurs... au niveau de nos instances, et avec lesquels on a quand même réussi à avancer certaines choses. Il ne faudrait pas non plus dire que c'est infaisable, que c'est impossible.
Pourquoi les difficultés? Évidemment, écoutez, la région de Québec, c'est particulier aussi. On se retrouve avec la ville de Québec, avec l'ensemble... un très vaste territoire aussi. Ce n'est pas toujours évident de vendre cette notion-là de l'importance de l'immigration. Au niveau de la ville de Québec, je pense que c'est assez facile. Au niveau de l'ensemble du reste du territoire, ce n'est pas toujours aussi évident que ça en a l'air, et même si, maintenant, ça semble un peu plus... Les dernières discussions qu'on avait pour la dernière entente spécifique, on sentait, là, chez les intervenants qui sont un peu en périphérie de la ville, qu'il y avait quand même une plus grande... il y avait quand même une écoute, là, par rapport à ça, il y avait quand même un goût de participer. Mais je pense que cette situation-là globale fait que ce n'est pas... c'est une des problématiques, là. Ça en est une.
Les autres? Écoutez, bon, il y a peut-être plusieurs organismes impliqués, il y a peut-être des dédoublements parfois, des petites luttes de pouvoir aussi parfois par rapport au contrôle de certains programmes ou à l'attrait de certains programmes, et qu'il est difficile peut-être de pouvoir trouver, là, un certain... dégager un leadership par rapport à ça. Et là-dessus, bien, nous, c'est ce que... c'est qu'on en a discuté plusieurs fois évidemment, suite au fait que l'entente spécifique... on n'a pas pu signer l'entente spécifique. Évidemment, on était un peu déçu et on a essayé de voir d'où tout cela venait. Mais je pense que c'était... Et une des explications aussi qu'on donne là-dedans, nous, c'est qu'on pense également, au niveau du ministère, qu'il y a peut-être... il faudrait peut-être donner un peu plus de chances...
Mme Courchesne: À la direction régionale.
M. Fortin (Jean): ...à la concertation régionale, à la direction régionale puis à la concertation régionale aussi, peut-être un peu plus croire à ça, aux possibilités qu'on peut avoir.
Mme Courchesne: Et dans ce sens-là, si vous me permettez, ça a été l'objet de la consultation où on a dit qu'effectivement c'est vers ça qu'il fallait tendre, et sont arrivés en même temps le projet de loi qui a créé la Conférence régionale des élus... Ce matin, vous savez que le maire de Québec, M. L'Allier, était devant nous, et il a fait cette ouverture à la région en disant qu'à travers les conférences régionales des élus, où, là, normalement, les élus de l'ensemble de la région pourraient être sensibilisés, il a fait l'ouverture d'un plan d'immigration qui voit un volet plus large et plus inclusif à l'ensemble de la région. Donc, je comprends d'où vous êtes partis. Vous savez comment je suis d'accord avec là où vous voulez aller, puis je peux vous dire qu'on a commencé à travailler beaucoup au cours des derniers mois et on s'est aperçu un peu de cette résistance des concertations quand on essaie de mettre les organismes autour de la table.
Alors, moi, j'aimerais ça que vous nous parliez davantage, si vous voulez, des moyens concrets, parce que je sais que vous dites: Bien, que l'organisme régional gère. Mais là on ne peut pas en parler dans ces termes-là parce que le portrait va changer par rapport à ça. Mais qu'est-ce que ça pourrait être, pour vous, des moyens concrets pour attirer, mais surtout... pas juste les attirer, mais garder ces nouveaux arrivants dans la région de Québec?
Le Président (M. Cusano): M. Fortin.
M. Fortin (Jean): Bien, écoutez, c'est sûr que, nous, sur cette notion-là... nous, on travaillait plus sur l'aspect concertation, c'est-à-dire qu'un des premiers volets, c'est justement d'apprendre à travailler ensemble, de s'asseoir ensemble à une même table, asseoir l'ensemble des intervenants et pouvoir vraiment apprendre à travailler ensemble et pouvoir arriver avec... effectivement arriver avec des projets concrets. Le fait de pouvoir s'asseoir ensemble, de pouvoir dégager aussi des sommes à travers une entente spécifique, nous, ça nous permettait d'avoir à ce moment-là... de pouvoir déboucher rapidement sur des projets très concrets.
n
(14 h 30)
n
La petite discussion qu'on avait avec la ville de Québec, évidemment c'était nous effectivement, parce qu'on disait: Nous, on veut avoir une vision plus régionale, encore plus loin, là. Je suis bien content. Puis d'ailleurs les dernières discussions qu'on avait avec la ville étaient qu'on voulait aller élargir cette notion-là. Moi, je pense que le jour où on va élargir ça puis qu'on va pouvoir ensemble réellement se donner un plan de match, mais un véritable, au-delà justement d'une entente-cadre, dans laquelle on met des axes, avec deux, trois choses, mais au-delà de ça, là, on va pouvoir dégager des stratégies, là, et peut-être dégager les véritables moyens de faire non seulement qu'on va faire venir des gens ici, mais qu'on va surtout les garder, parce que, effectivement, là est une de nos grandes problématiques. La région de Québec, je pense, est une région... si on la regarde, je pense, dans l'ensemble, là, au Québec mais aussi au Canada, je pense que c'est une des régions qui est la plus... où c'est le plus difficile, je pense, là, d'après certaines statistiques, là. Puis je vais vous avouer que... est-ce que... il y a plein d'analyses là-dessus, il y a plein de choses qui ont été faites, et, moi, je ne pense pas que ce soit notre compétence... On n'a pas été assez loin là-dessus. Nous, où est-ce qu'on voudrait aller, c'est plus vers l'avenir, vers les moyens qu'on a de faire que...
Mme Courchesne: Mais, si on a tant de difficultés avec la concertation entre les organismes, là, est-ce que c'est aussi parce qu'il y a un manque de sensibilisation sur le dossier de l'immigration? C'est-u parce que... Est-ce que ça, ça peut être un facteur que vous ressentez? Parce que, autour de la table, quand, moi, j'ai fait la consultation, on a mis tous les intervenants socioéconomiques, pas uniquement les organismes communautaires qui avaient l'expertise dans l'intégration, et c'était voulu, là. C'était voulu parce qu'on voulait justement mesurer le niveau d'implication ou de volonté, de volonté autour de la table. Est-ce que c'est un manque de sensibilisation, là? Si on exclut la ville de Québec, parce qu'on le sait, eux, ils le sont, mais quelle est la nature de...
Le Président (M. Cusano): Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Josée): Bien, si je peux me permettre de replacer ça dans un contexte un petit peu plus global, moi, je ne crois pas qu'il s'agisse d'un manque de sensibilisation. Je pense que tout le monde est très, très sensibilisé. Tout le monde est très, très sensibilisé parce que la régionalisation de l'immigration, c'est un défi remarquable à relever. Depuis 1991 qu'on en parle, et les chiffres ne changent pas.
Alors, dans la région de la Capitale-Nationale, à partir du moment où on a été reconnus deuxième pôle d'immigration, je veux dire, tout le monde a dit: Bien là il faut qu'on fasse tous quelque chose pour réussir. Alors, ça a été comme une course pour que tout le monde fasse son affaire pour que ça marche, mais sans jamais vraiment le faire ensemble, sentant que peut-être que nécessairement il n'y avait pas assez d'efforts du ministère. Ça, je ne fais pas de... je ne juge pas de ça. Ce dont je peux juger, c'est que la régionalisation de l'immigration, c'est un défi. C'est un défi pour Québec. C'est un défi pour l'Est-du-Québec, un peu moins en Outaouais parce qu'on est à proximité de la capitale fédérale. Mais, dans les régions qui sont plus à l'est, c'est complexe, la régionalisation de l'immigration. Et tout le monde a sa solution et tout le monde a son projet.
Et on est dans une situation où il y a plusieurs groupes qui sont à la recherche de financement. Alors, ça n'a pas nécessairement aidé à travailler en collaboration, cette situation-là. Vous savez, on a eu... Plusieurs personnes ont dénoncé: Québec n'est même pas sur le site du ministère. Bref, il y avait toutes sortes de commentaires de ce type-là: On ne sait pas comment vient d'immigrants dans la région chaque année. On n'a pas les chiffres. Il y a un certain nombre de critiques, mais c'est parce que tout le monde veut beaucoup, beaucoup, beaucoup, puis tout le monde finit par ne plus s'écouter parce qu'ils veulent vraiment, vraiment, vraiment beaucoup puis, tous, aller chercher leur argent pour réaliser les projets.
Je pense qu'il faut prendre le temps, moi, de s'asseoir, de regarder ce qu'on fait puis qu'on se parle vraiment sur ces questions-là.
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, M. le Président. Monsieur, madame. Ce matin, la ville de Québec était devant nous, et le maire nous disait que, bon, c'était un petit peu plus difficile pour l'immigration à l'extérieur de Québec. On sait qu'à la fin mars le CRCD deviendra... ou, en tout cas, il y aura une CRE, sur laquelle siégera des élus. Et, comme il disait, ce matin, que l'immigration était un petit peu plus difficile à l'extérieur et que la société civile ne sera pas là... Tantôt, Mme la ministre disait qu'elle avait réuni, alentour d'une table, les organismes qui s'occupaient justement d'immigration. Mais, si on y va avec la CRE, les organismes, est-ce que... qui s'occupent d'immigration seront présents sur la CRE? Et je me demande... Ma question, c'est: Comment vous voyez?
M. Fortin (Jean): Écoutez, moi, d'abord je peux dire que, moi, étant maire... moi, je suis déjà un maire. Je m'en vais à la CRE... Je suis maire de Baie-Saint-Paul, je vais aller siéger à la CRE moi-même. Moi, je pense qu'on a une belle occasion, par la CRE... Avant, sur les organismes d'immigration, on a une belle occasion, là, avec la CRE... Ce que Mme la ministre disait tout à l'heure, sur la question de l'opportunité qu'on a justement de sensibiliser, là tu as tous les maires qui sont assis là, on a une opportunité de sensibiliser tout le monde autour, d'aller plus loin dans la sensibilisation des élus autour de cette problématique-là. Et je pense qu'on a... Là, vraiment, on va avoir la véritable volonté régionale par rapport à ça.
Mais, moi, écoutez, on ne le sait pas encore. Au niveau de la société civile, de la présence de la société civile au niveau de la CRE, il va y avoir des discussions. On sait qu'il y a... Actuellement, il y a quatre sièges qui sont prévus. Mais il va y avoir des discussions. L'objectif qu'on a, je pense, la CRE ? on va avoir une rencontre bientôt ? ça va être de voir quels secteurs de la société civile vont être invités. Évidemment, la discussion, ça va faire partie de la discussion: Est-ce qu'il va y avoir le volet... le secteur de l'immigration va être là? Ça va être dans les discussions, c'est bien sûr.
Mais ce que je voudrais dire par contre par rapport à ça, puis ça va au-delà de ça, c'est qu'il est possible... Même si je le mets autour du conseil d'administration, il n'y a pas quelqu'un qui représente l'immigration. Je pense qu'au niveau du CRCD d'ailleurs on l'a fait dans les dernières années, puis la CRE, j'ose espérer, je pense, va travailler là-dessus. Il est possible aussi d'avoir des organismes de concertation, et ça va être le rôle aussi de la CRE d'organiser la concertation dans la région. Et un des rôles, ça va être de créer des organismes de concertation. Et, même s'il n'y a pas de... Même s'il y avait quelqu'un à la CRE, il va falloir qu'il y ait quand même... et ça ne viendra pas régler tout ça, il va falloir qu'il y ait un organisme de concertation régional à ce niveau-là. Et j'ose espérer, je pense... Et d'ailleurs c'est ce qui fait que, nous, on se présente ici pour en parler. On veut en même temps... Notre objectif aussi, évidemment, c'est en même temps... puis on en a parlé à notre C.A. puis on va en reparler, c'est de sensibiliser en même temps la future Conférence régionale des élus par rapport à cette problématique-là et à l'importance que ça peut avoir, là.
Mme Papineau: Vous avez commencé votre réponse en me disant: Il va y avoir une véritable volonté. Est-ce parce qu'il n'y en avait pas?
M. Fortin (Jean): Il y en avait une, mais ce que je veux... c'est qu'on était... Je pense que le fait que les élus soient là sur l'ensemble... Le portrait qu'on a, c'est des élus de l'ensemble de la région. Sur un ensemble, ça... C'est sûr qu'au niveau du CRCD il y en a eu, des... il y avait des élus, on était déjà regroupés avec des élus. Mais le fait que l'ensemble soit là, je pense, il va y avoir un... ça va être un bon moyen, rapidement, je pense, que ces gens-là soient sensibilisés. Il faut que les élus soient sensibilisés à ça. Nous, on a fait un travail, comme CRD, par rapport à ça, mais je pense que, là, on va avoir... on a une occasion, là, une occasion de faire... d'aller plus loin, je pense, dans les discussions par rapport à ça. Mais ça n'enlèvera jamais la nécessité de la concertation. Et ce sur quoi... Pour que ce soit un CRD, ou une CRE, ou une autre organisation, il va falloir y travailler de toute façon.
Mme Papineau: O.K. Mais je reviens toujours à ce que vous disiez. C'est que, là, vous dites que les élus vont être sensibilisés, sauf qu'ils siégeaient sur le CRCD. Est-ce que...
M. Fortin (Jean): Ils siégeaient, mais on a... Et là, écoutez, là, j'en ai 26, là. Actuellement, il y en avait... On est six actuellement, il y en a 26. C'est un autre portrait, là. C'est un portrait différent.
Mme Papineau: Donc, il n'y avait pas vraiment...
M. Fortin (Jean): Non, il y en avait une. Ce que je veux dire, il y en avait une, mais on était quand même six, là, et on avait l'ensemble... Sur le conseil d'administration de 26, on était six élus. Et c'est sûr qu'il y avait un travail qui était fait, mais, quand on parle d'aller... de concerter aussi, puis de sensibiliser les élus de l'ensemble de la région, bien, on a, entre autres, entre autres cette possibilité-là, là, qui est quand même plus grande que ce que l'on avait, mais... que des possibilités qu'on avait auparavant.
Mme Papineau: Vous sensibilisez entre vous, donc.
M. Fortin (Jean): Non, on... bien non, ce que...
Mme Papineau: Parce que, moi, ce que j'essaie de comprendre, c'est qu'au CRCD c'est un organisme de concertation, hein?
M. Fortin (Jean): Oui.
Mme Papineau: Et, sur ce conseil d'administration du CRCD, il y a des élus qui siègent, des élus municipaux, entendons...
M. Fortin (Jean): Oui, on est... il y en a six. Il y a six sièges...
Mme Papineau: Bon. Mais quand même...
M. Fortin (Jean): ...sept avec moi, sur 26.
Mme Papineau: Et, ce matin, le maire de Québec nous disait qu'il y avait une difficulté dans les... à l'extérieur de Québec, pour... Pensez-vous parce que maintenant...
M. Fortin (Jean): Oui, puis on partage cette analyse-là, oui, ce constat-là évidemment, on l'a dit, oui. Et vous dites: Si... excusez-moi, là, votre fin de la question, vous disiez...
Mme Papineau: En tout cas, je l'ai perdu, là, mais... Vas-y, Cécile.
Le Président (M. Cusano): Oui, Mme la députée, vous avez la parole.
Mme Vermette: Oui, c'est parce que, là, je n'étais pas... mais je vais aller dans le même sens qu'avait commencé ma collègue, en fin de compte. C'est parce que tout le monde considère qu'il faut de la concertation si on veut faire de l'accueil et de l'intégration, tout en considérant qu'il faut maintenir les différences. En tout cas, c'est assez compliqué, mais c'est un peu ça. Alors, moi, je veux savoir: au niveau de la concertation, il y en a qui nous disaient: Vous savez, on pourrait faire du parrainage civique, beaucoup de... surtout le maire L'Allier est venu, il nous a parlé du parrainage. Donc, pour faire du parrainage, il faut qu'il y ait beaucoup d'intervenants là-dedans. Ce n'est pas juste des maires, mais c'est l'ensemble de la société civile en fait qui s'implique et qui veut jouer un rôle, que ce soit dans le monde de l'emploi, donc tous les partenaires économiques et les partenaires sociaux, là, plusieurs doivent travailler à cette dynamique pour arriver à produire, en fin de compte, un effet d'attraction au niveau de ces différentes communautés là pour qu'ils s'intègrent le mieux possible.
n
(14 h 40)
n
Donc, la question est à savoir: Bien, comment on peut assumer, dans une région donnée ? moi, je ne connais pas trop les régions, donc c'est pour ça que je vais vous poser la question ? pour assumer un leadership, pour qu'il y ait vraiment quelqu'un qui est leader, qui d'office favorise cette concertation-là, mais avec l'ensemble des groupes impliqués à ce moment-là, et qui fait qu'en sorte, bon, bien, on va tenir compte des besoins d'une région? Parce qu'on peut bien dire: On a des quotas, mais, si on a des quotas, ça ne répond peut-être pas aux besoins. Donc, il faut une structure d'accueil, et là où la voyez-vous, cette structure d'accueil là? Comment devrait-elle prendre forme, la structure d'accueil? Est-ce qu'elle est exclusive aux CRD où on élimine un peu plus la participation civile, maintenant qui est plus des maires? C'est ça que je vous posais comme question.
Le Président (M. Cusano): M. Fortin... Oui, Mme Tremblay.
Mme Tremblay (Josée): Si on parle de façon concrète de la structure d'accueil, il y a bon nombre d'organismes dans la région de la Capitale-Nationale qui s'occupent d'accueil puis d'intégration des personnes immigrantes. Ça, ça ne pose pas vraiment un problème.
Le deuxième élément dont vous parlez, et là, je veux dire, on entre dans un débat qui est un petit peu plus politique, là, la question de la présence ou non de la société civile à la Conférence régionale des élus, bon, évidemment il y a toutes sortes de points de vue qui existent sur cette question-là. Ce que nous croyons, au CRD, et ce que nous comprenons du mandat de la prochaine Conférence régionale des élus: c'est un mandat de concertation encore, là. Alors, on comprend qu'il y a un conseil d'administration avec des élus, mais ce n'est pas une fin en soi, un conseil d'administration.
Ce qui est très important autour de ça, puis je pense qu'on a un petit peu de chemin à faire aussi avec quelques élus, là, pas tous, mais quelques-uns, c'est qu'au-delà de la décision qu'on prend au conseil d'administration, pour faire du développement régional, il faut se donner des moyens de se concerter. Avec un conseil régional des élus, il y a un conseil d'administration formé majoritairement d'élus, on en convient, mais ça ne nous empêchera pas de faire des tables de concertation, du moins je l'espère. J'espère que la prochaine Conférence régionale des élus va faire ça. C'est sûr que ça fait en sorte qu'il y a moins de personnes de la société civile qui participent aux décisions, mais le développement régional, à mon sens, c'est plus qu'une question de décision, c'est une question de mouvement, c'est une question de participation, ça va un petit peu au-delà de ça.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme Tremblay. Je cède maintenant la parole à la députée de Chambly.
Mme Legault: Oui. Eh bien, pour reprendre... en fait, je me réjouis de l'interprétation et de la compréhension que vous avez décrites, parce que ce qu'on en comprend et ce que M. L'Allier nous disait ce matin, c'est qu'au fond cette entité de maires, de gens élus imputables à la population ont développé, en matière d'immigration notamment, une vision et une mobilisation qui va pouvoir ensuite être reprise et mise en oeuvre dans les différentes régions, avec les acteurs du milieu. Alors, je pense que, dans cette perspective-là, il y a un moteur, il y a une concertation puis il y a une volonté, là, d'aller de l'avant qui peut être multipliée.
Maintenant, j'ai une autre question sur l'emploi, hein, parce qu'on s'entend que, pour une intégration réussie, ça passe aussi par l'emploi, l'emploi de qualité, l'emploi durable. Et puis je voulais vous entendre, avec l'expérience que vous avez acquise au fil des ans, sur ce que vous voyez en fait de mesures concrètes qui pourraient être mises à la disposition du ministère et puis des intervenants relativement à l'identification, là, d'emplois, dans les secteurs d'émergence, par exemple, qui peuvent être pressentis ou anticipés sur le terrain. Est-ce que vous pouvez nous donner des pistes de réflexion sur ces sujets-là?
Le Président (M. Cusano): M. Fortin ou Mme Tremblay.
M. Fortin (Jean): Moi, là-dessus, on n'a pas... Écoutez, on n'a pas vraiment travaillé bien précisément sur des secteurs, sauf que c'est clair: nous, au niveau, entre autres, de l'expérience qu'on a au CRCD depuis quelques années, on travaille beaucoup avec certaines organisations, on travaille même sur des organisations, par exemple l'Université Laval, par exemple dans le milieu de l'éducation, avec plusieurs organismes, plusieurs organisations. On a... au niveau de notre conseil d'administration, on a également... Au niveau du marché de l'emploi, on a des gens qui sont impliqués directement, concrètement, à ce niveau-là. Et, dans les projets d'ententes spécifiques, dans les projets dans lesquels on travaillait bien concrètement, ces intervenants-là étaient là. Et c'est clair que, pour nous, l'emploi, c'était majeur dans les projets qu'on a, puis qu'on avait, puis qu'on continue d'avoir.
Et ça, là-dessus, comme tel, on n'a pas de piste précise, sauf que c'est clair qu'avec nos partenaires, l'objectif, c'est de travailler avec nos partenaires, d'être très près de nos partenaires et de créer des situations qui font qu'avec nos partenaires on est capables de dégager les pistes intéressantes. Et le fait qu'on puisse avoir des mécanismes pour le faire, bien, je pense que déjà il va y avoir... Il y a déjà des possibilités, des solutions concrètes que déjà ces organisations-là ont travaillées et sont capables de mettre en branle, là. Et je pense que ce qu'il faut, puis je reviens là-dessus, c'est simplement qu'on puisse s'asseoir puis vraiment travailler dans un but commun, et c'est l'objectif qu'on va rechercher.
Et, pour revenir à la CRE, sur votre première intervention, vous disiez que vous voyiez ça... bien, moi, j'espère... ce qu'on espère, c'est que, par la CRE, on puisse aller plus loin par rapport à ça. Et d'ailleurs, actuellement, c'est ce qu'on dit des fois dans la région de Québec, dire: Tu sais, ne discutons pas trop de questions de transfert puis de toutes sortes d'affaires, puis allons directement sur des actions, des actions concrètes. Puis ça, c'en est un, des secteurs dans lequel on doit, là, assez rapidement arriver avec des solutions concrètes aussi.
Le Président (M. Cusano): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?
Mme Courchesne: Oui, vous permettez, M. le Président?
Le Président (M. Cusano): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Vous, M. le maire, vous êtes maire de Baie-Saint-Paul. Puis, dans le dossier de l'immigration, c'est vrai qu'on parle beaucoup de la ville de Québec. Ma question, là, parce que la région de Québec, elle est très vaste, hein, puis, au niveau de la CRE, c'est quand même un territoire assez grand: Est-ce qu'en dehors de la ville de Québec... puis j'exclus Sainte-Foy, Sillery, là, hein? Mais, en dehors, là, comme vous, là, à Baie-Saint-Paul, mais peut-être Portneuf, vous connaissez, Charlevoix, ils en veulent-u, de l'immigration? Est-ce qu'il y a de la place pour de l'immigration dans ces sous-régions-là, d'après vous?
Le Président (M. Cusano): M. Fortin.
M. Fortin (Jean): Bien, moi, je vais vous dire, moi, je pense que oui. En veulent-ils? Ça, c'est une autre affaire. Moi, je pense que oui. Et d'ailleurs, dans Portneuf, M. Bouillé, qui est sur notre exécutif au CRD, qui est préfet de la MRC, nous en parlait déjà puis il disait qu'il y avait même certaines possibilités, ils aimeraient qu'on puisse regarder cette alternative-là. C'est pour ça, tantôt je vous disais: On sent... chez les élus même qui sont actuellement au niveau du CRD, on sent que ça élargit tout ça, il y a une prise de conscience, il y a des possibilités qui s'ouvrent. Moi, je pense qu'il faut ouvrir ces possibilités-là. On doit le faire.
Et, moi, je donnais en exemple quand il y a eu ? on participait à une activité il y a quelques semaines, là, au niveau de l'accueil des personnes ? une réflexion, il y avait une réflexion sur l'immigration, vous savez, un colloque. Et c'est ce que je disais, je disais... Moi, je donnais des exemples, dans Charlevoix, de gens, de gens de l'extérieur, qui sont venus chez nous amener des expertises et qui sont venus enrichir notre coin. Puis là je donnais des exemples évidemment au niveau, entre autres, de la gastronomie et que certains chefs qui sont venus chez nous, ce n'est pas nécessairement des Québécois ou des Canadiens, c'est des gens de l'extérieur, qui sont venus enrichir notre coin.
Moi, j'ai travaillé aussi au centre hospitalier à Baie-Saint-Paul, où les éducateurs en éducation spécialisée et les gens qui travaillaient beaucoup sur la désinstitutionnalisation étaient des gens qui venaient parfois de l'extérieur, qui ont amené des expertises, qui sont restés chez nous, qui ont continué, qui continuent de travailler. Puis, vous savez... Donc, il y a des possibilités. Puis il y a des possibilités aussi que ces gens-là... C'est sûr que, bon, entre autres, il y a certaines populations que c'est plus facile de s'intégrer. Bon, la langue, bon, différentes choses font que c'est plus facile. Mais il reste quand même que Charlevoix, qui est quand même réputé... à un moment donné, on disait: C'est un peu fermé, c'est tricoté serré, Charlevoix, ce n'est pas évident. Non, ce n'est pas... mais il y a quand même des personnes, il y a plusieurs personnes de l'extérieur qui sont venues, qui ont réussi à travailler, qui y vivent et qui sont là depuis plusieurs années. Donc, il y a des possibilités, il y a quelque chose là.
n
(14 h 50)
n
Il y a des possibilités, c'est évident. Il s'agit par contre... c'est toujours de... Je pense qu'on ne peut pas juste attendre, il y a des opportunités qu'il faut créer aussi. Bon. Je prenais l'exemple de la gastronomie, bien, c'en est un partout, mais chez nous c'en est un en particulier, autour... Le tourisme, bon, il y a des expertises un peu partout, il y a des choses qu'on peut... je pense, autour desquelles on peut travailler. Donc, moi, j'y crois. Moi, je crois qu'on est rendus là: il y a des possibilités, il y a beaucoup de travail à faire et il y a beaucoup de travail... l'autre fois, je parlais d'animation du milieu aussi à faire, de notre propre milieu.
Mais, juste pour finir là-dessus, moi, l'autre jour, je parlais à quelqu'un justement de ça autrement, dans un autre cadre. On parlait de la possibilité peut-être, pourquoi pas, puis la personne m'a dit: Ah! bien, moi, je serais intéressé à ce qu'on travaille à faire un comité d'accueil peut-être à Baie-Saint-Paul, puis faire des choses. Ça fait que déjà il y a quand même... et c'était quelqu'un qui me l'a dit tout bonnement comme ça et qui avait un intérêt. Donc, il y a quand même des possibilités. Mais, comme n'importe quoi, ça doit être soutenu et travaillé, et il y a beaucoup de travail à faire.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions à ma gauche? Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui, merci. Alors, moi, je vais continuer, parce que j'avais d'autres questions par rapport à ce que je vous avais posé. C'est... Au-delà de la politique, c'est qu'on essaie de savoir qu'est-ce qui aide le plus la population au niveau de ses besoins et dans les prises de décision. Antérieurement, quand on regarde ce qui se passait... je suis sûre que vous allez faire de la consultation ? vous avez l'air d'un bon maire, ça fait que je n'en doute pas ? mais, antérieurement, antérieurement en fait, c'est qu'il y avait différentes instances qui participaient au conseil d'administration du CRD pour prendre des décisions et non pas pour être consultées, ce qui est très différent à mon avis, et là c'est une nuance fort importante. Et je comprends que vous allez aller les consulter maintenant, ces différents groupes là, mais ils n'auront plus le droit de décision, ce qu'on leur a enlevé. C'est beaucoup ça que je voulais vous dire. C'est beaucoup plus que simplement une participation passive. C'était une participation décisive, alors décisionnelle, alors qui est tout à fait différente.
Ceci étant maintenant, je me demande, au niveau... La question que je vous avais posée, c'est au niveau du leadership. Parce que les besoins, chaque... Vous êtes des maires, vous avez chacun des besoins dans vos villes respectives, en fin de compte. Mais, quand on arrive à une vision beaucoup plus globale, beaucoup plus générale, alors il faut un genre... une planification, j'imagine, là-dedans, puis vous n'êtes pas prêts, tous, les mêmes, puis de la même façon. Il y a des endroits beaucoup plus prêts que d'autres finalement à accueillir. Qui doit assumer le leadership à ce niveau-là? Parce qu'il faut avoir des indications claires. Tout le monde nous ont dit ça: Il faut que ce soit clair. Alors, voilà!
M. Fortin (Jean): Ça, c'est une bonne question. Je vais vous avouer que j'ai été un de ceux... Moi, je suis président du CRD depuis trois ans. J'ai été un de ceux qui a fait valoir d'ailleurs à Mme Normandeau, quand elle était venue dans la région de Québec pour sa consultation, l'importance de faire que la société civile soit sur la CRE, soit... puis même, j'espère, va être décisionnelle sur la CRE. En tout cas, moi, je suis l'un de ceux qui a une place pour la société civile et certains intervenants, puis, là-dessus, on va continuer de le travailler. Et, ça, je l'avais fait valoir, je l'ai toujours fait valoir. Effectivement, il y a certaines organisations... Actuellement, dans la composition de la CRE, je vais vous dire, dans la région de Québec, on risque... la possibilité, c'est d'aller jusqu'à 13 sièges des différents secteurs socioéconomiques. Donc, on est quand même en... on risque d'avoir une bonne représentation, là. C'est sûr qu'il... Mais il va falloir... Le choix va être important.
Mais ce que je disais... Puis je reviens à ce que j'ai dit tantôt, moi, c'est vrai que ce n'est pas un poste décisionnel. Mais, l'autre jour, à ma séance, moi, à mon assemblée régionale de concertation, il y a quelqu'un qui est venu me dire, puis je reprends l'exemple parce que je l'ai trouvé... Parce qu'il y a quelqu'un du loisir, M. Desjardins, qui me disait qu'il était venu trois, quatre fois pour être sur le C.A. Nous, là, au CRD, on était 72 au C.A. avant et là on a baissé ça à 24, parce que 72, ça n'avait pas de bon sens. Tu as beau dire que tu es... Là, ça changeait, bon, on était à 24. Et lui, le loisir, lui, il voulait être là, puis, nous, on a dit: Non, il faut faire un choix, puis, toi, tu vas être là. Mais, lui, il est venu nous dire alors que, même s'il n'a pas été au C.A., il a réussi. Et on a travaillé avec eux, puis ils ont réussi. Et plusieurs projets au niveau du FDR étaient en loisir, et il disait... il dit: Jamais on n'en a eu autant, parce qu'on s'est pris en main puis on a poussé des affaires.
Ça fait que, moi, je dis: On a un rôle, et, tantôt Josée en parlait, le rôle de concertation de la CRE demeure, hein, et est d'autant plus important. Puis c'est un défi. Là, on est face au défi, et ça, là-dessus, moi, quand je parle... on a une occasion. Moi, je vais vous dire, le CRD, je suis fier de ce qu'on a fait puis je continue de le dire, mais, avec la CRE, écoutez, c'est une nouvelle donne, on a une occasion. Mais c'est un gros défi de pouvoir faire qu'on travaille avec les gens de la société civile aussi et aussi qu'on dégage un leadership de la région de Québec.
La région de Québec, c'est particulier. On a un bon défi. Là, vous venez de toucher à quelque chose auquel je peux... Est-ce que je peux répondre qui va prendre le leadership, qui va le faire? J'ai hâte de voir, moi aussi, qui va le prendre et comment. Mais c'est un défi qu'on a de dégager du leadership à travers tout ça et de faire qu'on puisse vraiment réaliser la concertation de l'ensemble des intervenants. C'est un bon travail qu'on a à faire. Ça, je ne vous le cacherai pas, on a un gros travail à faire. Mais, nous, on travaille positivement dans ce sens-là et on veut essayer de faire qu'on va réaliser des choses concrètes. Il va falloir rapidement passer à l'action par rapport à ça.
Mme Tremblay (Josée): Si je peux juste me permettre d'ajouter, c'est effectivement un défi, je dirais, de sortir le leadership de ça, mais un autre défi qu'on a puis, moi, en tout cas, qui m'apparaît important pour la concertation, c'est la période de transition actuelle, qui à mon sens peut menacer certains acquis. Et il faut faire attention, c'est un petit peu long, on ne sait pas trop comment ça va se passer. Certaines régions, puis même un peu Québec, là, on est, je dirais, un peu sur la corde raide. Moi, j'ai peur, si la transition est trop longue, qu'on perde des acquis, qu'on perde des habitudes qu'on a mises en branle. On a beau, là, dire: Bon, c'est une structure, mais il y a quand même, dans notre cas, presque 34 ans d'expertise de concertation. Alors, le plus longtemps qu'on tarde à mettre en place les choses... Puis, ça, il y a un problème avec ça à mon avis, parce que les directives n'ont pas été toujours très claires. Là, on menace, je dirais, l'initiative en développement régional. On menace le mouvement. On menace aussi, je dirais, les activités qui existent et la mobilisation de certains partenaires, qui va être utile aussi à la Conférence régionale des élus, et ça, je pense que c'est un des dangers, là, de la situation actuelle.
Le Président (M. Cusano): Merci, madame.
Mme Vermette: On a-tu du temps? Oui?
Le Président (M. Cusano): Oui, oui, brièvement, par exemple.
Mme Vermette: O.K. Non, c'est ça, je reviens toujours au niveau du leadership, parce que vous m'avez fait peur quand vous m'avez dit: Je ne sais pas qui va puis j'ai bien hâte de voir ça. Je me suis demandé comme question: Est-ce que ça va être les plus forts qui vont l'emporter puis les autres n'auront rien? Et ça, ça me fait vraiment peur. Donc, ma vraie question de leadership est à savoir: D'où doit venir le leadership à ce moment-là? Parce qu'il faut que quelqu'un soit capable d'avoir... en sorte, si on veut un développement harmonieux, que ce soit assez équitable... donc, il faut qu'il y ait des directives qui viennent de quelque part, à un moment donné.
M. Fortin (Jean): Écoutez, dans la région de Québec, c'est notre éternel défi, ça. Vous savez, on est une ville de 500 000 habitants, avec une périphérie très vaste, mais avec moins de gens, mais riche de plein de choses, mais pas... riche de sa population aussi, mais en moins grand nombre, et c'est l'éternel défi.
Et, un jour, écoutez, au CRD, on m'a... Moi, j'ai pris la présidence justement pour essayer de faire que... et je pense qu'on m'a appuyé même au niveau de la ville de Québec quand j'ai... justement pour qu'on puisse avoir une bonne représentation. Et, dans la représentation qu'on avait du CRD, on a essayé d'avoir... Sur notre exécutif, on a un préfet d'une MRC, on a quelqu'un des commissions scolaires, on essaie d'avoir une représentation qui soit la plus large possible, et je pense qu'on l'a quand même réussie assez bien.
Mais, dans la région de Québec, et dans d'autres régions probablement aussi, mais d'autant plus chez nous étant donné la configuration de territoire et la façon dont c'est organisé, c'est un défi continuel, là, de vouloir dégager un leadership par rapport à certaines positions. Mais, ça, je pense que, dans certains domaines, on a réussi à le faire puis on va y travailler, là. Écoutez, c'est un bon défi. Moi, j'ai déjà dit: La CRE, c'est un défi de notre maturité, là, politique, c'est un grand défi à notre maturité politique. Mais je pense qu'on est capables. Moi, je suis optimiste par rapport à ça.
n
(15 heures)
n
Mme Vermette: Est-ce que c'est envisageable, le parrainage civique assumé par une CRE? Le parrainage civique un peu comme la ville de Québec voudrait le faire ou à Longueuil... pas Longueuil, excusez-moi, à Laval ? c'est ma ville, donc je l'ai en tête ? la ville de Laval en fait, où tout le monde s'implique, donc avec les partenaires économiques, avec les partenaires industriels, on s'implique pour les infrastructures d'accueil aussi, donc tout le monde s'implique à faire en sorte qu'ils ont un rôle à jouer. Bon. Alors, c'est pour ça, je revenais toujours au leadership, moi, il faut qu'en quelque part on... Bon, je comprends qu'il peut y avoir des batailles, là, de territoire, mais indépendamment des batailles de territoire, à un moment donné, il faut qu'à quelque part on décide où on veut s'en aller, dans quelles orientations on veut s'en aller et, à partir de ça, est-ce que, bon, finalement... Ça, ça en est, de la grande concertation.
M. Fortin (Jean): Moi, je pense que, si... L'initiative du parrainage civique, comme d'autres initiatives, là, en immigration, quelque chose d'intéressant, moi, je pense qu'effectivement au niveau d'une CRE, si on parle de régionalisation, de possibilité d'avoir une région puis qu'on puisse travailler à élargir tout ça dans le cadre d'une vision régionale, je ne vois pas pourquoi la CRE n'embarquerait pas par rapport à un projet qui est intéressant puis qui peut se concrétiser. Et je pense, là-dessus, ça va faire partie sûrement des discussions qu'on va avoir, là, et des possibilités. Ça peut être une possibilité comme d'autres projets bien concrets qui peuvent être intéressants, là. Moi, je ne vois pas où il pourrait y avoir de difficultés par rapport à ça, là. Si la CRE décide, dans le cadre de ses discussions puis la planification stratégique, dit: Aïe, ça, ça peut être un projet qui peut être intéressant, pourquoi pas? Pourquoi on ne pourrait pas le réaliser au niveau régional? Je pense que c'est possible. Je suis convaincu.
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme Tremblay, M. Fortin. Au nom de mes collègues, j'aimerais vous remercier pour votre présentation. Et je suis sûr que votre optimisme se traduira à un grand succès avec la nouvelle structure. Alors, bonne chance.
M. Fortin (Jean): Merci.
(Changement d'organisme)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je souhaite la bienvenue au groupe Québec Multi-Plus. Je vous rappelle que vous avez une période de 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y a un échange avec les membres de la commission, de 40 minutes. Alors, je vous demanderais de vous identifier et de présenter la personne qui vous accompagne.
Québec Multi-Plus
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mon nom est Ana Luisa Iturriaga, je suis directrice-formatrice à Québec Multi-Plus, et je suis accompagnée de Javiera Arroyo, agente de développement à Québec Multi-Plus.
Alors, nous n'allons pas lire; c'est très succinct. C'est plus un mémoire qu'on a voulu présenter en tant que travailleurs, formateurs terrain. Donc, on va plutôt enrichir qu'est-ce que vous avez reçu dans le mémoire par des expériences, des anecdotes qu'on vit à tous les jours avec les immigrants.
Quand on a lu les documents du ministère, il nous semblait très intéressant de voir les trois scénarios possibles que vous avez envisagés. À notre avis, en tant que formateurs et en suivant déjà, depuis 1984, au niveau terrain, la formation, on a déjà été consultés à... reprises et on a toujours vu l'intégration des immigrants dans une volonté, au Québec. Donc, nous, on avait vu le troisième scénario, avec une augmentation de... comme envisageable. Par contre, on constatait quand même, en tant que formateurs, qu'il pouvait y avoir certains obstacles au... Il faut mettre des actions concrètes au niveau terrain. Et je vais vous l'expliquer.
Nous, on a centré beaucoup notre mémoire sur l'intégration socioéconomique, parce que qu'est-ce qu'on a remarqué dans la dernière décennie, c'est l'arrivée de professionnels immigrants, francophones principalement, et, même si c'étaient des francophones professionnels, beaucoup de difficultés à l'emploi. Donc, en tant que formateurs, on a travaillé avec les employeurs québécois, je dirais plus le personnel gouvernemental ? parce que les entreprises, c'est encore très difficile à essayer de travailler ensemble ? on a constaté, donc, qu'il manquait de moyens d'intégration dans les entreprises québécoises pour cette main-d'oeuvre professionnelle. Et, un peu en suivant l'actualité québécoise sur la pénurie de main-d'oeuvre et en voyant qu'il y a la place pour l'intégration des professionnels immigrants, surtout francophones, comme je vous dis, on rencontre des gens de la France, de l'Algérie, du Maroc, de Tunisie, donc des gens qu'on n'a pas à investir beaucoup d'efforts au niveau de la francisation, et, même à ça, ces gens-là, ils se trouvent avec beaucoup de difficultés d'intégration au marché de l'emploi québécois.
Donc, on a constaté, donc, qu'il y avait un manque de volonté... on ne veut pas dire des entreprises, mais c'est comme si les programmes qui ont été mis en place pour l'intégration et pour l'équité en emploi, ils n'ont pas vraiment donné de résultats concrets pour l'intégration des minorités visibles et des immigrants professionnels. Donc, qu'est-ce qui touchait le marché de l'emploi au niveau des emplois précaires, on peut dire, ou des emplois non professionnels, c'était correct. L'immigration des années quatre-vingt, c'était une immigration... même si c'étaient des professionnels, les gens, ils acceptaient des postes moins importants. Dans la dernière décennie, le fait de sélectionner une main-d'oeuvre, des candidats à l'étranger avec un profil francophone et professionnel, ça a donné un défi énorme dans l'intégration socioéconomique. Et nous avons remarqué, au niveau de ces immigrants-là, beaucoup d'attentes. Les gens, ils arrivent comme si le Québec leur avait promis la terre... le paradis.
Donc, avant, l'immigration, qu'est-ce qu'on constatait en formation, c'est que les immigrants, ils acceptaient d'aller travailler à des postes précaires, comme un transit ou comme un tremplin à l'intégration socioéconomique. Mais les dernières immigrations, les gens, ils viennent avec des grandes attentes, ce qui... On a vu dans le terrain beaucoup de frustration, beaucoup de colère, parfois, de révolte des immigrants, parce qu'on leur avait promis qu'il y avait l'emploi et l'emploi dans le secteur professionnel, donc, en génie... On a eu des vagues de génie en informatique, génie en électronique, en électricité, génie civil, bon, il y avait des gens aussi qui venaient... chimistes, biologues, donc des professionnels, vraiment, avec énormément d'attentes, francophones, et les statistiques le montrent au niveau du ministère. Donc, nous, on pense que le Québec, il s'est enrichi effectivement de l'immigration, c'est une terre d'immigration. Mais on pense qu'il a manqué des efforts au niveau de la stratégie auprès de l'entreprise, l'entreprise québécoise.
Et en préparant... Justement, on est en train de préparer un colloque sur les professions réglementées, mode d'emploi, diversité culturelle, pour le 1er avril; on voit qu'au niveau des corporations professionnelles, il y a un effort qui se fait, depuis les années 2000, 2001, parce qu'on est conscient qu'on a une main-d'oeuvre intéressante, professionnelle, qui attend justement pour tester ses compétences. On voit qu'il y a beaucoup de dangers, dans le sens que ces immigrants-là, qui se trouvent marginalisés d'une certaine manière ? parce qu'après quatre, cinq mois de séjour au Québec, leurs ressources financières épuisées, ils vont devenir des prestataires de l'aide sociale, des fois sans le vouloir et en se sentant un peu humiliés du fait qu'ils avaient des grandes attentes ? ils nous demandent qu'est-ce que souvent les agents d'immigration nous prônent dans l'extérieur du pays, avant de venir. Nous, on ne peut pas parler pour les fonctionnaires, on sait qu'il y a une politique pour encourager les gens et que la sélection est très... assez exigeante. Donc, on voit un danger parce qu'on constate de plus en plus de révolte, des gens frustrés et des gens que, si ont perd au niveau de l'intégration, au niveau de l'intégration socioéconomique, c'est des gens qui peuvent devenir exclus socialement et donc un fardeau économique, ce qui n'était pas envisageable pour la société québécoise, c'était supposé être des gens potentiellement rentables, on peut dire, au niveau de l'intégration socioéconomique et culturelle.
n
(15 h 10)
n
Donc, notre colloque et notre action quotidienne, c'est d'essayer d'aider ces gens-là à comprendre que, pour les employeurs québécois, c'est sûr qu'ils cherchent toujours la crème, comme on dit, on cherche toujours des gens qui vont être assez rapidement opérationnels. Et on comprend très bien que, pour les gens qui viennent d'arriver, c'est très difficile. Avant, on disait: C'est parce qu'ils ne maîtrisent pas la langue; maintenant, ce n'est plus la raison, la maîtrise de la langue française, parce que les gens qui arrivent du Maghreb, ils parlent et écrivent parfaitement bien le français. D'ailleurs, on voit déjà de plus en plus des fonctionnaires qui travaillent au niveau de cette région-là, Haïti, Afrique noire, francophone. Donc, on voit que la langue, ça n'a pas été vraiment le véritable problème.
Mais, quand on parle à des entreprises, les entreprises ? et je vais peut-être laisser Javiera vous expliquer un peu qu'est-ce qu'on constate en préparant les colloques ? c'est que les entreprises sont liées aussi à qu'est-ce qui est tous les syndicats, et, quand on parle de syndicats, c'est encore très blanc, francophone, très québécois, comme quand on va parler à des décideurs, comme quand on va parler à des cadres. Je parlais avec des gens qui travaillent dans les entreprises, ils disent: Nous, on n'a pas de problème à intégrer les immigrants, ils se trouvent toujours dans le travail non qualifié, non professionnel. Mais quand on regarde tous les postes, professionnels et cadres, ça veut dire... dans les entreprises québécoises, c'est toujours très blanc. Donc, il manque encore l'embauche des professionnels dans les entreprises québécoises.
Si on est conscients que la petite et moyenne entreprise québécoise est très francophone, est très familiale et qu'il manque une ouverture sur le monde, qu'il y a beaucoup d'ignorance, que malheureusement tous les efforts de l'État québécois pour aller choisir des immigrants à l'étranger ne sont pas connus par la population en général, donc, nous, en tant que formateurs, on se trouve toujours à faire l'information auprès des entreprises, auprès des gens, par le biais de la participation physique et la formation interculturelle. Et on doit également travailler avec les nouveaux arrivants tout le volet des valeurs québécoises à l'emploi et décoder certaines exigences du marché du travail québécois.
Donc, c'est un peu le pourquoi, nous, on a centré beaucoup l'intégration socioéconomique. Peut-être laisser Javiera vous expliquer. En préparant les colloques, on constate également que, quand on parle d'entreprises, on parle syndicats et, syndicats, on est loin encore des actions concrètes pour l'intégration socioéconomique des immigrants professionnels. Je te laisse, Javiera...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Arroyo.
Mme Arroyo (Javiera): Oui. Je voulais juste dire, par rapport à... Puisqu'on parle des ordres professionnels, bon, le Québec va recruter des professionnels à l'extérieur, mais une fois rendus ici, ces professionnels, bon, même s'ils l'ont su quand ils ont fait leurs démarches à l'étranger, qu'ils devaient faire reconnaître leur titre par certains ordres, il y a quand même beaucoup de difficultés. Un, on parlait tout à l'heure de l'épuisement des ressources financières; une fois qu'on fait les étapes pour la reconnaissance des titres acquis à l'étranger, on se rend compte qu'on n'est pas reconnu entièrement, qu'il y a une formation manquante, que les places dans les universités sont limitées, que l'admission coûte tel montant et puis, bon, il y a beaucoup de déceptions à ce niveau-là. Une fois que les gens passent par ce processus, il y a la question de l'embauche, qui n'est pas automatique non plus.
Alors, nous, on organise un colloque, justement, on va rencontrer plusieurs paliers, l'entreprise, les ordres professionnels, des immigrants qui sont en train de passer par le processus ou qui ont déjà passé par le processus et des professionnels qui sont déjà intégrés, et, bon, le plus difficile, c'est l'ouverture de l'entreprise face à cette immigration, qu'elle soit professionnelle, qu'elle soit en reconnaissance de titre ou qu'elle soit déjà reconnue. Et leur intégration aux emplois est encore difficile en ce moment.
Nous, comme formateurs, on essaie, bon, on essaie peu à peu de donner des formations à l'entreprise pour que, bon, pour qu'elle puisse gérer la diversité ou qu'elle puisse, bon, ouvrir même le personnel à l'arrivée de professionnels immigrants. Puis on voit que, bon, il y a toujours: Non, la formation est plus importante à d'autres niveaux, et pas nécessairement à la question de gérer la diversité, qui va devenir de plus en plus importante au Québec, surtout quand on parle de pénurie et qu'on va chercher des gens à l'extérieur pour les intégrer.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Alors, quand on parlait des syndicats, on a vu le travail de certains syndicats au niveau de l'intégration socioéconomique, mais il reste qu'on essaie d'aller vers les syndicats, et ce n'est pas un milieu facile. On a fait déjà une formation auprès des... le syndicat ? attendez ? Conseil des syndicats nationaux ? c'est ça? ? la CSN, et eux, c'était dans le cadre d'un projet avec les jeunes, le Fonds Jeunesse, et c'était pour les agents de recrutement. Et, en faisant la formation, nous, quand on fait la formation, on rentre dans la culture organisationnelle un peu, donc on avait étudié un peu l'historique et on regardait vraiment que c'était très, très fermé, que c'était très, très, très québécois et que la culture organisationnelle, parfois, va bloquer, même, donc, l'ouverture vers la diversité, même si... On a, on peut dire, des quotas ou des objectifs pour essayer d'intégrer les immigrants; il reste encore que, si les mentalités ne changent pas, on recule encore au niveau du maintien.
Parce que, d'après qu'est-ce qu'on constatait, des fois on fait un plan, le maintien n'est pas facile, et toutes sortes de préjugés et des tensions qui se vivent dans le milieu de travail. Donc, il y a un travail vraiment qui doit se faire pour créer, dans les syndicats, dans les entreprises québécoises et auprès de la clientèle également ? parce que l'individu, il a une responsabilité aussi dans son intégration ? le désir vraiment de s'intégrer. Si les gens ne travaillent pas, ils ne peuvent pas adhérer à une appartenance québécoise et ils sont décrochés totalement.
Donc, c'est pour ça que, nous, on a centré notre mémoire sur l'aspect de l'intégration socioéconomique, parce que c'est les gens qu'on reçoit en formation. Ça va avec le plan d'action du dernier énoncé de politique, c'était l'intégration dans tous les paliers de la société québécoise. Et puis à notre avis, autant les programmes d'action à l'égalité, autant ce plan d'action là, ils ont resté un peu... ils n'ont pas évolué autant que le recrutement, ça a été fait à l'étranger. Il aurait fallu vraiment des sections qui soient plus mobiles, plus évolutives et progressistes pour permettre justement l'intégration des immigrants. Alors, c'est tout.
La Présidente (Mme Hamel): Merci pour votre présentation. Je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci beaucoup à toutes les deux d'être là. Je reconnais votre conviction, votre verve. Ça me fait plaisir qu'on se revoie dans le contexte par ailleurs de la commission parlementaire. C'est évident que, quand vous touchez l'intégration socioéconomique, c'est évident que, pour nous, c'est un peu le nerf et le coeur de ce qu'il y a à faire pour connaître davantage de succès.
Quand je vous écoute et que vous parlez de ces gens qui sont en colère, moi, ça me perturbe énormément. Je sais qu'il y a des gens en colère, j'en rencontre régulièrement. Est-ce que je ne crois pas comprendre qu'on parle davantage des gens du Maghreb? Est-ce que c'est plus de ces personnes-là que vous parlez? Parce que je sais que vous travaillez beaucoup avec ces gens-là. Est-ce que vous ne pensez pas... Parce que, moi, vous savez, j'ai fait beaucoup de vigie, à l'intérieur du ministère, pour voir quel était le niveau d'information qu'on pouvait donner. Mais est-ce que, à votre connaissance, les consultants qui vendent le Québec ou qui vendent le Canada... mais disons le Québec, en l'occurrence, parce que les publicités que je vois concernent le Québec puisque ce sont des publicités francophones, est-ce que, ça, ça n'induit pas en erreur beaucoup les gens? Est-ce qu'il n'y a pas un effet de boule de neige aussi au niveau de ces gens qui croient franchement, puis, quand ils arrivent ici, ils ont une telle déception? Est-ce que c'est quelque chose que vous côtoyez? Est-ce que c'est une lecture que vous avez? Est-ce que c'est une préoccupation que vous avez?
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Moi, Mme la ministre...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui. Je m'excuse. Je vais vous répondre en vous disant: C'est vrai qu'on rencontre beaucoup plus les gens du Maghreb qui sont francophones avec des grandes attentes et qui ont passé par ce qu'ils appellent le «téléphone arabe», c'est-à-dire le bouche à oreille. Mais il reste non moindre que, si je regarde dans l'ensemble de nos interventions, et ça, vous m'excuserez, mais c'est normalement le MRCI qui revient beaucoup, souvent.
Une voix: ...
n
(15 h 20)
n
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Le MRCI, le ministère. Parce qu'on rencontre aussi des Français, dans nos formations, des gens qui ont tout sacrifié, et pourtant c'est des cousins germains, et qui nous expliquent que c'est très difficile parce qu'ils viennent ici parce que justement au niveau de l'emploi, c'est beaucoup... C'est des campagnes de promotion qui ont été faites dans les régions en France et donc... Je me rappelle d'un jeune, je pense que lui est ingénieur en programmation, et il expliquait que, lui, il avait quitté parce que vraiment on lui avait montré une image très intéressante du Québec, et il avait toujours rêvé de venir dans cette terre de grands espaces. Donc, il y a un peu le rêve individuel de la personne. Et qu'est-ce qu'il me disait, c'est qu'il avait économisé pendant... Ça lui a pris un an et demi, à lui, pour venir, il avait économisé dans ce temps-là, il avait travaillé fort.
Donc, quand on vous parle des colères, c'est justifiable d'une certaine manière dans le sens que ces gens-là... Ça peut être nous-mêmes, que ça nous arrive, on envisage d'aller ailleurs, et on va épargner, et on va sacrifier pendant un an. Au Maghreb, c'est des fois trois ans d'attente. Donc, pendant ce temps-là, il sacrifie des sorties, des vacances pour chérir le rêve d'arriver au Québec. Et, au MRCI, d'après qu'est-ce qu'ils nous disent, ils vont parfois leur dire que, oui, il y a une période d'adaptation, qu'il y a des difficultés au niveau des équivalences, mais ce n'est jamais vu de la manière qu'ils vont les vivres dans le terrain. Parce que, dans le terrain, ceux qui vont arriver, il faut s'habiller pour l'hiver ? donc pas juste du français ? donc il faut s'habiller, il faut payer les billets, il faut aussi se trouver...
Dernièrement, j'ai vu quelqu'un qui venait d'une région que ce n'était pas Paris, il ne venait pas de Paris, donc juste la démarche, il fallait qu'il voyage à Paris, ce qui était très cher pour lui. Donc, il m'expliquait toute sa démarche, et là, comme, lui, il avait vécu aux États-Unis, il avait vécu ailleurs, il fallait aussi qu'il y ait des dossiers criminels de ces deux pays là, ce qui lui a pris six mois encore davantage. Donc, il m'expliquait chaque démarche, ça allait coûter de l'argent, mais ce n'était pas grave, lui, il rêvait de venir ici, il rêvait de venir se réaliser au Québec. Et lui, ça va faire neuf mois qu'il est au Québec et qu'il ne trouve pas d'emploi. Et il me disait: La première semaine, ça a coûté 100 $ par jour, l'hôtel, parce que, lui, ne connaissait personne. Donc, une fois qu'il a pu sortir de l'hôtel, une semaine après, il s'est trouvé un logement à ville Saint-Laurent. C'est difficile se loger, maintenant, à Montréal, même, je pense, au Québec, et dans certaines régions, c'est devenu un problème, se trouver un logement. Et qu'est-ce qu'il m'expliquait: il paie 750 $ pour un trois et demie. Je lui ai dit: Mais ce n'est pas vrai! je paie moins pour ma maison. Il me dit: Oui, mais je n'ai pas de nom; juste pour ouvrir un dossier à Laval, c'était toute une histoire. Juste pour les chèques que lui envoyait sa famille pour le premier mois ? ils lui ont envoyé 5 000 $ ? la compagnie Western Union ou je ne sais pas quelle compagnie, ils n'ont pas voulu le débourser parce qu'il n'avait pas un nom au niveau de la banque.
Donc, il y a plein de réalités. Quand on parle de l'immigration, souvent, on oublie que c'est des gens qui commencent à prendre racine et que parfois ils ont des démarches au niveau de la banque, au niveau du logement, au niveau de l'emploi, et ils veulent travailler. Je vous assure que, s'ils ont la chance de faire un premier travail, ils vont mettre tout l'effort possible. Donc, c'est vrai qu'on rencontre beaucoup plus de gens du Maghreb, mais, moi, je vous dirais, c'est l'opinion de la plupart, parce qu'on a constaté aussi de plus en plus de Latino-Américains qui parlent français, qui sont professionnels et qu'on leur a vendu le rêve du Québec. Donc, l'attente est pareille pour tout le monde.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Dites-moi, quand vous avez parlé, tantôt, du programme d'accès à l'emploi puis l'accès à l'égalité... l'accès à... vous avez dit: Au fond, il y a un peu un constat d'échec ou de non-réussite. Vous l'attribuez à quoi? Qu'est-ce que ça prendrait? Je comprends que vous parlez de sensibilisation auprès des entreprises, là, mais est-ce qu'il y a autre chose, selon vous, qui peut être fait à cet égard-là, surtout face aux entreprises? On peut faire de la sensibilisation, mais de la sensibilisation, avant d'atteindre tout le monde, c'est parfois très long. Qu'est-ce que...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Moi, je vais vous répondre...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Je m'excuse, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hamel): Non, ce n'est rien. C'est que...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Je vais vous répondre: c'est exactement comme les femmes québécoises elles ont fait. Je suis en formation sur la démocratie québécoise au Service à la famille chinoise, et on parlait justement des droits et devoirs du citoyen, et je leur disais: Ça fait 1940, le droit de vote des femmes, au Québec, c'est tout à fait récent, et c'était une lutte des femmes, hein? Pendant la Deuxième Guerre, les femmes québécoises ont été actives dans le marché de l'emploi, et pourtant, ça n'a pas changé la mentalité. Les programmes d'accès à l'égalité, c'est 1985 qu'ils ont été adoptés et qu'on a commencé à faire une promotion ? et je reconnais les visages des gens qui ont travaillé fortement pour ce programme-là ? et malheureusement, et je ne veux pas vous agresser, mais, si on regarde la fonction publique québécoise, c'est un triste bilan.
La ville, bon, ils ont fait des efforts parce que...
Mme Courchesne: Qu'est-ce qu'on peut faire concrètement...
La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Je m'excuse.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): C'est les...
Mme Courchesne: Je m'excuse, Mme la Présidente, mais c'est parce que le temps passe vite.
La Présidente (Mme Hamel): Non, non, c'est bien...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Moi, je me dis: C'est les structures mêmes qui ne sont pas... On n'a pas fait une pensée... La sensibilisation, vous avez raison, si ça reste comme un petit boum ou... ça ne va jamais en profondeur. C'est les structures mêmes qu'ils doivent analyser et avoir des actions à l'intérieur même. Et ça, ça ne peut pas venir quand on reste... Et encore, les changements pour la lutte des femmes, au Québec, ça s'est fait quand les femmes, elles ont commencé à être à l'intérieur.
Mme Courchesne: Vous avez raison, mais il y a eu aussi de la discrimination positive à l'égard des femmes; moi, je peux en témoigner, ça m'est arrivé. Alors, est-ce que vous allez aussi loin que de dire: Il faudrait avoir une discrimination positive envers les communautés? Je vous pose volontairement la question.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui, mais au niveau...
La Présidente (Mme Hamel): En deux minutes, s'il vous plaît, madame...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Moi, je vais dire: Oui, mais il faut absolument que ça soit dans les postes décideurs, pas dans les postes à la base. Parce qu'il y a des programmes, depuis 1985, et ça n'a rien donné.
Mme Courchesne: Merci.
La Présidente (Mme Hamel): Ça va, Mme la ministre?
Mme Courchesne: Oui, merci.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je cède la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, Mme la Présidente. Moi, je veux revenir avec les employeurs. J'imagine que vous leur parlez régulièrement, aux employeurs.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): On parle des employeurs des entreprises privées?
Mme Papineau: Oui, des entreprises privées. Parlons des entreprises privées. Vous leur...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Malheureusement, non. On les rencontre quand on fait des colloques, parce que, malheureusement, nous, on a une deuxième étiquette, on est un organisme sans but lucratif, donc ils ne font pas affaire avec les organismes sans but lucratif. On fait des colloques pour inviter les entreprises à venir travailler avec les gens de terrain, les organismes communautaires et rencontrer la clientèle immigrante.
Mme Papineau: O.K. Quand vous rencontrez l'entreprise privée ? on va l'appeler comme ça ? quand vous la rencontrez, l'entreprise privée, vous la sensibilisez au fait qu'ils devraient considérer les candidatures de personnes immigrantes; qu'est-ce qu'ils vous répondent? Parce qu'il semble que ce n'est pas un succès. À l'heure actuelle, on nous dit... en tout cas, de ce que vous nous dites, c'est que les employeurs, les gens de l'entreprise privée n'embauchent pas vraiment des gens issus des communautés culturelles. Qu'est-ce qu'ils vous répondent, ces gens-là, quand vous leur proposez d'embaucher du personnel des communautés culturelles?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): La réponse, souvent... on va cibler des origines. On va dire: Bon, si j'embauche une telle ethnie, bien, ils n'ont pas la notion nord-américaine du temps, ils n'ont pas l'efficacité, la productivité que, nous, on désire. On va aller chercher à culturaliser parfois les travailleurs, sans voir que, dans le fond, ça n'a rien à voir; c'est parce qu'il y a la réticence à l'intérieur, et on ne veut pas...
Je vais vous dire, par exemple, au niveau du recrutement, il y en a qui disent: Mais je n'embauche pas de Noirs, parce que, comme ça, je ne vais pas être accusé de racisme; je ne veux pas aller faire affaire avec la Commission des droits de la personne, parce que, malheureusement, j'ai eu un incident, et je me suis retrouvé au tribunal, et je ne veux plus en avoir, donc, je n'embauche plus de cette ethnie-là; je n'embauche plus de telle croyance religieuse parce que ça fait des problèmes dans les toilettes.
Donc, on a des exemples parfois que... C'est parfois des exemples malheureux, mais on ne va pas citer qu'il y a les entreprises, des petites et moyennes entreprises québécoises qui ont utilisé la main-d'oeuvre... Je vous donne l'exemple. On a fait un colloque, on avait une petite entreprise de Longueuil qui embauchait des informaticiens de l'Algérie, et ils disaient: Moi, je ne sais pas pourquoi, les autres entreprises, ils n'embauchent pas, j'ai eu des bons résultats, ils sont loyaux, ils se donnent à plein, je ne comprends pas les autres. Parce que, dans ce colloque-là, il y a Bell qui disait: On n'a pas de candidats, on ne sait pas où on peut aller chercher les candidats. Donc, il y a un manque aussi, je dirais, de connexion entre les milieux différents et il y a beaucoup de méconnaissance de la politique québécoise.
Tout qu'est-ce que les décideurs québécois ont fait depuis toujours au niveau de l'immigration, c'est comme l'entreprise, c'est déconnecté complètement. Les programmes d'accès à l'égalité, d'ailleurs: on mélange communauté culturelle, minorité visible, on ne sait pas pourquoi il y a des minorités visibles. Donc, tout est comme confus, il faut toujours commencer pour expliquer, expliquer dans quel contexte, dans quel cas. C'est pour ça, je dis: C'est la structure même qui... À la base, les entreprises, ils doivent être un peu plus, je dirais, au diapason de l'immigration québécoise. Parce que c'est comme... L'immigration, c'est le Canada qui gère ça, et nous, on ne s'en occupe pas. Bien, ça fait longtemps que le Québec, il a pensé à s'occuper de son immigration. Donc, on informe beaucoup les gens.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée.
Mme Papineau: Merci. Mais, oui, donc, c'est vrai que les entreprises ne sont peut-être pas sensibles à l'embauche. Mais qui, qui aurait le rôle de les sensibiliser? Est-ce que c'est, par exemple, le gouvernement, ou est-ce que ce serait des organismes comme vous, qui entrerez, par exemple, dans les chambres de commerce, aller dans les associations de gens d'affaires ou de femmes d'affaires ? parce qu'il y a une association de femmes d'affaires, au Québec? Et est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, pour des associations... des organismes comme le vôtre, d'entrer dans ces milieux-là et d'aller les sensibiliser non seulement juste à l'immigration, mais aussi à l'embauche de personnes issues des communautés culturelles? Ou si ça devrait être le gouvernement qui, par des... est-ce que, par exemple, par des incitations financières, pourrait ? ça, c'est de la discrimination positive, comme disait Mme la ministre, mais c'est... Où est-ce que vous vous voyez? Comment vous voyez ça?
n
(15 h 30)
n
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Merci, Mme la Présidente. Je pense que ce n'est pas juste à l'État québécois, parce que les efforts de l'État, ils ont été faits. Je pense que c'est un travail de tout le milieu, de toutes les sphères à s'impliquer. Et je pense que, même si ça commence, les syndicats québécois, ils doivent de plus en plus... parce que c'est eux... Et Javiera, en préparant le colloque, a eu la chance d'en parler avec certaines entreprises qui lui ont dit: Pour qu'il y ait du changement, il faut aller vers les syndicats. Parce que parfois, dans l'entreprise, c'est le syndicat qui va avoir du poids. Donc, moi, je pense que l'État, il a fait des efforts. Dans l'énoncé de politique de 1991, il y avait un plan d'action dans lequel on ciblait toutes les sphères sociétales et, je pense, les facteurs sociaux, les entreprises, les organismes. On ne peut pas laisser tout à l'État. Je pense qu'il faut, le travail, que ce soit fait.
Aussi, l'individu, j'en parlais un peu, des barrières qu'il va rencontrer au niveau social, au niveau des entreprises, mais il reste aussi que certains immigrants, ils ont aussi un devoir au niveau de l'intégration et que parfois ils décrochent facilement. Ça dépend, je ne veux pas paraître que c'est toutes des bonnes personnes. Il y a aussi un effort qu'on doit faire pour conscientiser l'individu que le marché de l'emploi québécois est exigeant même pour les Québécois. Et on doit tous être... Et je pense que c'est un peu qu'est-ce qu'on fait avec Multi-Plus, on est très petit comme organisme, hein, et on fait un travail quand même assez important, parce qu'on essaie de mettre en relation plusieurs acteurs. Donc, c'est pour ça qu'on organise des colloques, parce qu'on peut aller chercher les entreprises, les milieux gouvernementaux pour qu'ils viennent expliquer les programmes. D'ailleurs, le MRCI est invité à notre colloque pour venir expliquer tout le travail qui se fait au niveau des conseils interprofessionnels, au niveau des professions réglementées.
Il manque les organismes communautaires, que souvent ils sont négligés. Ils ont une expertise intéressante au niveau de l'immigration. Alors, moi, je ne pense pas... je ne veux pas prétendre prêcher pour les organismes communautaires, mais je pense qu'on doit de plus en plus travailler ensemble pour l'intégration socioéconomique des immigrants et ne pas laisser juste à l'État le soin...
Mme Papineau: Vous êtes situés à quel endroit?
Mme Iturriaga (Ana Luisa): On est au Vieux-Montréal.
Mme Papineau: Parfait. Merci. Mon collègue a une question.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, mesdames. C'est très intéressant de vous entendre parler. Toute cette question-là est tellement délicate, hein? Le seul fait d'avoir à s'intégrer à une nouvelle société, avec tout ce que ça comporte, pour avoir vécu pendant quelques années dans un autre pays, je sais que ce n'est pas toujours facile. Par contre, c'est fascinant aussi, fascinant aussi de découvrir un monde nouveau.
Moi, j'ai une question à vous poser, qui me préoccupe. Vous avez beaucoup parlé des immigrants d'origine d'Afrique du Nord, de pays francophones, tout ça. Vous avez parlé d'une certaine facilité qui devrait correspondre à ces gens-là pour s'intégrer dans la société québécoise. Et, moi, je ne suis pas encore convaincu de ça. Alors, je vais vous demander de m'en convaincre.
Parce que je me demande si parfois ce n'est pas un piège que d'arriver en connaissant très bien la langue. Parce que, si on ne connaît pas la langue, on sait qu'on ne connaît pas la société, et déjà on commence à apprendre la langue, et, en apprenant la langue, on a des chances d'apprendre un peu... on a des points de référence, des personnes qui vont nous expliquer comment ça fonctionne. Tandis que, si on connaît déjà la langue, on n'a pas ces références-là. Alors, on arrive, on arrive dans une société, on parle la même langue que tout le monde et cependant, souvent, on ne se comprend pas. On croit connaître l'environnement et, à tout bout de champ, on est rebuté par des réactions, par des choses, parce que ce n'est pas notre milieu, ce n'est pas notre culture. Et il faut s'acculturer. On n'a pas de personne qui va nous enseigner l'histoire de ce pays où on est arrivé, où on désire vivre. Et les gens vont avoir toutes sortes de références qu'on n'a pas. Alors, est-ce que vous ne trouvez pas que c'est parfois un piège pour les gens de langue française que d'arriver comme ça, sans aucun apport pour aider leur intégration?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga, en deux minutes, s'il vous plaît.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui. Quand on avait... L'énoncé de politique, 1991, il a suivi aussi nos consultations, et c'était, l'impact, de mettre sur l'immigration francophone. Moi, je me rappelle, j'avais dit: Attention! Parce que je ne suis pas francophone, je suis hispanophone, mais c'est quand même latin. Je suis mexicaine d'origine. L'Amérique latine, en général, on a quand même une latinité qui nous approche à la culture québécoise. J'ai dû apprendre la langue dès mon arrivée. Je suis passée par le COFI et j'ai fait toute la démarche. Tout ce que vous dites... j'ai passé par des fêtes de la Saint-Jean au COFI, que j'ai appris beaucoup sur les autres cultures, parce que, aussi, on fête des cultures... et de la fête nationale. Donc, c'est vrai que le fait d'apprendre la langue, ça m'a permis aussi d'approfondir au niveau des connaissances au niveau de la culture.
Et je l'avais dit en assemblée que je ne trouvais pas que le fait de mettre l'emphase sur le francophone, c'était... Ça fait déjà 10 ans de ça, ou 12 ans, et, quand vous me posez la question, je me rappelle, je l'avais mentionné. Parce que justement il y avait eu la guerre du Golfe en 1991, et, en étant sur le terrain, j'avais constaté: après les Noirs, les Arabes devenaient de plus en plus, pour la population québécoise, une réticence, un préjugé envers ces populations-là. Moi, je travaille depuis 1989 à Québec Multi-Plus, et souvent, en formation, c'étaient les Noirs qui... les gens sont pleins de préjugés. Et le pire...
La Présidente (Mme Hamel): En conclusion, s'il vous plaît, madame.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Conclusion. Donc, malheureusement, après les attentats de 2001 et après la guerre du Golfe, 1991, malheureusement pour les musulmans et les Arabes, la population québécoise s'est beaucoup fermée, et, je dirais, à l'immigration en général. Mais, malheureusement pour les arabophones, désolée, c'est devenu très compliqué pour l'emploi, et juste avoir un nom arabe, ça porte préjudice pour ces personnes-là, c'est dommage. Et on en parlait un peu dans le mémoire.
La Présidente (Mme Hamel): Merci. La parole est à M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Bonjour, madame. J'aimerais savoir, à vous écouter parler au niveau de l'immigration, là, quel est le pourcentage de ceux que ça va bien? Est-ce que la problématique est pour tous les immigrants? Je suis un petit peu... J'aimerais savoir le pourcentage des gens que ça va bien.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): D'après l'étude qu'a faite l'Université de Montréal, 90 % des immigrants s'intègrent bien dans la société québécoise. C'est un bilan qui a été fait, une étude pendant 10 ans. Bon. La preuve, je ne veux pas me vanter, mais Javiera et moi, on étudie et on est actives dans le milieu social québécois, donc il y a une intégration qui se fait. C'est dommage que, dans les médias et dans l'ensemble de la population, on n'en parle pas, de la réussite de bien des immigrants.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): J'aurais aimé vous entendre sur la réussite aussi, un petit peu. C'est pour ça que je vous pose la question. Donc, il y a 90 % d'immigrants que ça va bien, il y a 10 % où est-ce qu'il y a une problématique. C'est déjà bien.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui. On va en parler, des problèmes, parce que, évidemment, comme on a mis l'emphase sur... Nous, on dit, dans notre mémoire, qu'on est pour une augmentation, c'est la troisième... Donc, ça veut dire qu'on ne voit pas que l'immigration, c'est une problématique. Qu'est-ce qu'on voit comme problème, qu'on a constaté, c'est le fait qu'il y a certains professionnels qui trouvent des barrières, des difficultés à l'emploi, et parfois... Avant, on pouvait dire: C'est l'effet de la non-équivalence, de la non-reconnaissance. Mais parfois c'est une question d'attitude et de fermeture des entreprises à la main-d'oeuvre immigrante, qualifiée, parce que, avant, on disait: Mais c'est du «cheap labor», c'est des gens qui ne sont pas qualifiés. Donc, nous, on a présenté le mémoire en disant: On est optimistes, dans le sens qu'on croit que l'immigration est un plus pour le Québec, qu'ils sont un potentiel pour les entreprises. Mais il faut que les entreprises s'ouvrent à cette diversité-là, parce que les entreprises québécoises, ils sont en train de perdre de l'argent. Je vous le dis, je suis optimiste, certain.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Parce que souvent, aussi, les entreprises, dans nos petites PME, ils n'ont pas le temps de vraiment s'occuper de la problématique des immigrants, l'intégration, tout ça. Donc, il devrait y avoir un effort, là, d'aide d'organismes ou, je ne sais pas, de l'État pour aider les PME à faire le passage dans, comme on parlait avant-midi, des stages, mais en région. Puis, en PME, nos PME, nos propriétaires de PME, ils pensent à produire puis à contrer la compétition dans le moment.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. le député. Mme la députée de Chambly.
Mme Legault: Merci, Mme la Présidente. Moi, j'ai une question relative aux équivalences des diplômes et de formation de nos nouveaux arrivants professionnels. Et j'aimerais vous entendre, avec l'expérience que vous avez, sur des pistes de solution ou des actions concrètes qui pourraient être mises de l'avant pour faciliter, là, soit le travail des ordres ou en tout cas la préparation des candidats qui font une demande équivalente. Pouvez-vous nous entretenir un petit peu là-dessus?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): On est un organisme quand même qui est chanceux, parce que, en étant formateur, on se promène dans tous les milieux. Et on vient de faire une formation au Conseil interprofessionnel du Québec et on a eu la chance de rencontrer, je dirais, une bonne quinzaine d'ordres professionnels. En tout cas, le plus important c'est que la demande a augmenté. Et je me rappellerai toujours de ceux que j'ai toujours des jugements, des préjugés contre eux, c'était le Barreau, parce que ça a toujours été la mafia à mes yeux, et, je vais vous dire, j'ai changé d'attitude quand j'ai vu tous les efforts qu'ils font.
n
(15 h 40)
n
Parce que c'est ça, le problème, c'est que parfois on ne se parle pas. Quand madame demandait: Qu'est-ce qu'on peut faire? C'est qu'on n'est pas informés des efforts que chacun, il entreprend dans son milieu. Et le Barreau, il nous donnait l'exemple: beaucoup d'immigrants, comme j'expliquais, ils arrivent avec peu de ressources financières, ils ont tout laissé derrière, donc ils arrivent avec un certain nombre d'argent, et le fait de faire une démarche auprès des ordres, c'est coûteux. Donc, il nous donnait l'exemple, le Barreau.
Comme ils ont vu cette problématique, juste le fait de payer chaque examen et la décision, et tout, ils ont pris des ententes de paiements égaux. Bon. C'est un geste très concret mais très valable pour les autres ordres. Comme on fait avec les étudiants québécois. Je pense qu'il y a des prêts étudiants qui se font à vie, parfois c'est symbolique, mais ça permet aux gens d'avoir accès. Parce que, pour beaucoup d'immigrants, c'est le fait de payer qui est difficile, payer quand il faut penser à manger, à se loger, à 730 $ pour un trois et demie. Il me semble... J'ai déjà vu des couples avec enfants dans un un et demie parce qu'il n'y a pas de logement ou parce que ça coûte moins cher. Donc, je trouvais ça très intéressant. Et la dame du Barreau a été très dynamique et nous a dit qu'il faut analyser chaque cas, cas par cas. Ils ne vont pas généraliser. Et là j'ai changé beaucoup mes préjugés, je me suis dit: Maintenant, je vais faire attention quand je parle du Barreau du Québec.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Et c'est très intéressant, c'était très agréable de voir. Mais on a eu d'autres exemples de corporations professionnelles. C'est un peu pourquoi on fait le colloque, parce qu'on s'est dit: Souvent, les immigrants, ils vont juste lire immigration.com, que c'est toute la poubelle pour aller vider son sac pour les immigrants qui n'ont pas réussi. Mais on n'en parle jamais, des petites démarches comme ça, réussies, qui vont permettre de voir l'initiative des corporations pour l'intégration. Donc, je pense que le fait que les immigrants viennent voir ce que font les ordres... Il y avait aussi l'Ordre des audiologistes...
Mme Arroyo (Javiera): Et orthophonistes.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): ...orthophonistes, qui ont fait beaucoup d'efforts également. Mais on n'entend pas parler malheureusement des bons coups au niveau des corporations. Donc ça, ça a été très intéressant, cette formation qu'on a faite.
Parce qu'on a eu aussi les géomètres-arpenteurs, que c'est une corporation qui se trouve, je pense, ici, à la ville de Québec, le siège, et qui nous expliquait... Lui, il était très ouvert, il a trouvé ça hyper intéressant. Il a dit: Même nous, Emploi-Québec, il nous disait que ce n'était pas une profession à venir. Et ce n'est pas vrai. Il dit: On a beaucoup de demandes et, nous, on est intéressés par l'immigration, parce qu'on a un énorme besoin de main-d'oeuvre. Et, eux, ils disent: On est intéressés à la formation. Et on a resté en bon contact avec eux, mais c'est une corporation qui n'est même pas à Montréal. Ils vont recruter, ils se promènent et ils vont faire la formation, ils nous ont dit «probablement 2005», pour cinq régions. Donc, une bonne volonté déjà des ordres professionnels.
Mme Arroyo (Javiera): Je voudrais rajouter...
La Présidente (Mme Hamel): Madame... je m'excuse... Arroyo.
Mme Arroyo (Javiera): Oui, voilà.
La Présidente (Mme Hamel): Je m'excuse, je dois vous identifier pour les fins de la transcription.
Mme Arroyo (Javiera): Je voudrais juste rajouter, par rapport aux ordres professionnels, que, malgré qu'il y a des belles initiatives qui se font pour... bon, je ne dirais pas accommoder les gens qui viennent faire leurs demandes... pas une demande... de reconnaissance de leurs titres et, bon, l'adhésion aux ordres, il y a souvent ce qu'on appelle la formation manquante. Je vous donne un exemple. On vous dit: O.K., vous êtes pharmacien, on reconnaît, sauf qu'il vous reste deux cours à faire à l'université pour compléter votre équivalence parfaite. Le problème, c'est que ce cours-là, s'il se donne une fois par année et qu'il y a deux places, ces deux places sont souvent... c'est juste deux places allouées pour les gens de l'extérieur, parce que c'est les gens du cégep qui ont la priorité et les gens qui sont déjà en cours. Donc, attendre un an ou deux ans pour terminer deux cours, c'est extrêmement long. Donc, il y a un travail de concertation à faire également.
La Présidente (Mme Hamel): Merci. Mme la députée.
Mme Legault: Merci. Petite question brève: Quel est le type de formation exactement que vous faites, là, auprès des ordres? Quelle est la nature?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga. Je m'excuse, hein, de la façon que je prononce votre nom, je suis désolée.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): C'est parfait. Alors, la formation qu'on donne, c'est une formation de deux jours permettant justement de faire un survol sur tout l'impact de la différence dans la culture de l'entreprise envers le milieu. Par la suite, on travaille beaucoup la communication interculturelle, comment gérer justement nos façons relationnelles d'entrer en relation, et on travaille aussi tout ce qui touche... Quand c'est institutionnel, on va aller vers les services à la clientèle dans un milieu pluriculturel et on finit avec la discrimination justement parce que c'est un aspect important à travailler. Donc, c'est deux journées complètes qu'on fait. Aux ordres, ça a été vraiment très agréable, les gens, ils ont beaucoup apprécié.
Juste pour vous dire un autre exemple, parce que tantôt j'ai trouvé intéressant... j'ai rencontré une chimiste algérienne qui m'a donné l'exemple d'un monsieur pathologue, un pathologiste, qui est arrivé à l'urgence de Charles-Lemoyne comme bénévole, parce que, lui, il voulait être dans la médecine. Lui, il n'est pas venu pour décrocher, il voulait être médecin. Mais, lui, il a dit: Moi, je vais commencer par faire du bénévolat. Et donc il est allé à l'urgence, en sachant qu'il y avait un problème dans les urgences. Il y était comme bénévole, mais il était tellement efficace et tellement bon que finalement le directeur ? et c'est une histoire qu'elle m'a racontée ? le directeur de l'hôpital, il a payé toute sa démarche dans l'ordre des collèges des médecins, pour les examens, il a payé les examens, il l'a embauché et jusqu'à l'obtention, qu'il puisse exercer, parce qu'il y a une pénurie de pathologistes au Québec. Donc, c'est un exemple. Je vous dis, des fois trouver des pistes pratiques et concrètes, ce n'est pas si grand quand il y a l'ouverture, quand il y a une volonté. Mais il faut que ça vienne de sa structure.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Hull, question-réponse en deux minutes.
M. Cholette: En deux minutes, c'est dur pour un politicien, ça, hein, une question-réponse en deux minutes. Bien, tout d'abord, merci de votre présentation. C'est extrêmement intéressant.
Je veux aborder, moi, la question de la fonction publique. Vous nous en avez parlé brièvement. Vous savez que, d'ici les 10 prochaines années, il y aura un exode massif de nos employés: 40 % de la fonction publique quittera, bien qu'on est en train de revoir pas mal de façons de faire. Vous nous identifiez qu'il existe quand même un problème, qu'il existe une pénurie d'immigrants à l'intérieur de notre fonction publique, malgré toutes sortes de programmes que nous avons mis de l'avant, que les gouvernements successifs ont mis de l'avant.
Alors, en maintenant une minute pour vous, quelle est la solution miracle? Puis j'ai compris votre réponse de tantôt, c'est la question de structure. Mais je vais vous demander d'aller plus loin que ça, je vais vous demander, là, une recette miracle à appliquer. Dans le cadre d'une diminution globale de la fonction publique, comment on fait pour augmenter le nombre d'immigrants, concrètement?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): J'ai déjà dit à M. Facal, l'année passée, quand il a présenté ce programme, que, pour plusieurs communautés, c'est difficile, les examens, les concours, les fameux concours. Déjà, bien des Québécois échouent les concours. Quand on doit faire avec le temps, il y a moins de facilité à comprendre les questions de ces examens-là et en plus décoder, parce qu'il y a toute une culture à l'intérieur.
Je me rappelle, j'en ai passé, deux concours, à la fonction publique et je n'ai jamais reçu les examens. Il y en avait un qui m'a marquée, c'était toute la relation avec les clients et avec les collègues, et je me suis dit: C'est là qu'on doit échouer, certain, certain, parce que la manière qu'on voit l'autorité, la manière qu'on gère les relations... Je me rappelle d'un Africain qui était agronome qui m'a dit: Moi, dans mon examen, dans mon concours, on me demandait: Si ton fermier qui arrive, il te dit: «J'ai dépensé tout le budget qu'on m'a donné», qu'est-ce que tu fais? Lui, il avait répondu très bonnement, en étant collectiviste comme société: Hé! Je vais lui donner la chance et je vais l'augmenter un petit peu pour cette année, pour qu'il passe à travers. Donc, c'était avec son bon coeur samaritain. Il m'a dit: Qu'est-ce qu'il fallait que je réponde? Je vais te donner un bon cours de budget pour que tu apprennes à gérer tes finances.
Vous voyez, c'est banal, c'est simple, mais on échoue les concours facilement parce qu'on n'interprète pas toujours. Et je pense qu'il y a déjà une étude qui est en train de se faire ? parce que j'ai siégé dans le comité du Conseil du trésor ? pour les biens culturels qu'il y a dans les examens. Mais, même encore là ? je m'excuse, je vole encore du temps ? il y avait...
La Présidente (Mme Hamel): ...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): ...il n'y avait pas juste les examens. Parce qu'il y en a bon nombre qui réussissent les examens, et, même à ça, c'est dans l'entrevue qu'ils échouent.
La Présidente (Mme Hamel): Merci. M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Merci, Mme la Présidente. Alors, je voudrais continuer à la suite de la question que j'ai posée tout à l'heure, bien que vous ayez déjà donné une partie de la réponse à la question que je vais vous poser. S'il est vrai que ce n'est pas parce qu'on parle la langue que c'est facile de s'intégrer à une culture différente, qu'est-ce que ce serait ce qu'on devrait faire pour aider ces immigrants qui parlent déjà le français à s'intégrer? Qu'est-ce que ce serait, un programme de formation, mais adapté à des gens qui n'ont pas un problème de langue?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Moi, je me rappelle que le MRCI avait mis des programmes d'intégration en place et j'avais proposé... Moi, je pense que le fait de... On passe plus de temps au travail qu'avec notre famille ou que dans notre voisinage, qu'à la maison, et je crois que l'emploi est vraiment un facteur d'intégration. Et, moi, je travaille avec toutes les origines ethniques et souvent je rencontre des gens ou les gens m'appellent pour me dire: On a été bien intégrés parce qu'on a passé par le communautaire. Souvent, les organismes communautaires, on est un tremplin dans la société d'accueil, parce qu'on a la chance de recevoir ces gens-là et d'utiliser leur main-d'oeuvre, de l'utiliser parce que c'est des gens qui sont prêts à travailler pour n'importe quel salaire. Dommage parce que c'est du «cheap labor», et, nous, on n'a pas de finance pour les payer à juste valeur.
Moi, je pense, sans insister sur des stages, parce que ça a déjà été aussi essayé, mais je pense que, dans certains milieux où ils ont une ouverture, où les personnes peuvent acquérir une appartenance à la société dans l'emploi, dans l'action sociale, dans l'action culturelle, c'est très intéressant. L'emploi, on y passe huit heures.
Moi, je vais vous dire, j'étais arrivée à Charlemagne quand je suis arrivée au Québec et je n'avais pas le choix, il fallait que je parle français, il fallait que je m'intègre, c'était simple. Et, je vais vous dire, ça a été un choc très dur, parce que je viens de Mexico, et Charlemagne, c'est un petit village que j'ai trouvé plate. Mais ça m'a permis de m'intégrer.
n
(15 h 50)
n
Mme Vermette: Oh! Oh!...
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Il est caché longtemps à part ça. Donc, juste pour vous dire, revenir, je pense que la vie de quartier, le bénévolat, mais pour... Moi, souvent j'ai dit, en formation, à mes nouveaux immigrants: Allez vers le bénévolat, ça peut vous ouvrir des portes, ça peut vous faire du réseau-contact. L'emploi, c'est par les contacts. Tu dis au voisin que tu cherches un emploi, il va dire: Ah! de l'embauche! Vidéotron embauche. Bon, c'est comme ça que ça marche. Mais parfois, eux, ils disent: Oui, mais j'ai besoin de manger. Donc, on revient encore sur le fait qu'ils ont besoin de travailler. Moi, je crois que la vie des quartiers... Moi, je m'implique dans ma ville. À Saint-Hubert, je suis coach de soccer. Mais, moi, ça fait 22 hivers que je suis au Québec, ce n'est pas pareil.
Mme Vermette: Vous comptez ça par les hivers!
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais, moi, j'avais dit: Il m'ajoute l'intégration politique, et je suis intégrée à 100 %. Mais, je vous dis, vraiment pour adhérer à une culture, il faut vraiment qu'on sente qu'on participe, qu'on est à la table et qu'on partage les décisions. Et, tant qu'on est à côté, qu'on est «out», on ne peut pas jouer la game.
Moi, c'est simple, c'est que ce soit à l'emploi, que ce soit dans le quartier, que ce soit dans la vie politique, mais surtout dans la politique, je trouve qu'il y a un manque de diversité, on ne pourra pas parler d'une société pluriculturelle. On vend le Québec comme une société de droits pluriculturels, pluriculturels mais, quand on regarde le chômage et la marginalisation, il y a beaucoup de pauvreté chez les immigrants. Donc, même s'il y avait réussite, hein, parce qu'il y a des immigrants que je connais qui font de bons salaires, mais ils ont dû foncer, ils ont dû faire d'énormes efforts, donc ce n'est pas facile.
Vous l'avez dit, c'est enrichissant. Je n'ai rien à me plaindre. Moi, j'ai été de ces gens qui ont foncé, mais j'ai eu la chance d'avoir un propriétaire de McDonald's qui a cru en moi et qui m'a donné la chance de travailler chez McDonald's, premier emploi au Québec, donc deux ans. C'est triste à dire, et je le dis des fois aux professionnels, mais ça ne leur tente pas d'être qualifiés chez McDonald's quand ils sont médecins. Moi, je l'ai fait parce que je finissais mes études, donc c'est différent. Je faisais comme les Québécois étudiants. Donc, il y a du travail à faire. On a des idées, mais il s'agit de s'asseoir et en discuter.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député.
M. Dion: Merci. Alors, j'apprécie d'avoir votre point de vue là-dessus. J'aimerais maintenant qu'on parle des immigrants pour qui l'apprentissage de la langue est un besoin, est une nécessité, ce qui vous est arrivé. Vous parlez beaucoup avec les immigrants présentement, vous savez ce qui se passe à Montréal, vous savez ce qui se passe un peu partout. Est-ce que les immigrants qui veulent apprendre la langue trouvent rapidement les ressources dont ils ont besoin ou si c'est très compliqué?
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Mais maintenant on est supposé d'être plus efficace dans la francisation parce qu'on a mis, pour les professionnels, les universités, les cégeps. Avant, on allait tous au COFI, donc parfois on se plaignait de la qualité du français qu'on avait. Je me rappelle, on a revendiqué pendant des années cet aspect-là. Je ne sais pas la difficulté actuelle, je sais que c'est un petit peu plus raffiné pour les professionnels qui veulent aller apprendre. Je connais plusieurs Mexicains qui le font, mais il faut qu'ils travaillent à part ça, et je ne sais pas s'ils paient les cours. Je ne suis pas au courant, pour le MRCI, comment c'est maintenant.
Il y a le Carrefour d'intégration, qui offre aussi des cours, les organismes communautaires toujours, mais je suis moins au courant pour les cours de français. Je sais que c'est mieux parce qu'on se plaint moins de qu'est-ce que c'était avant, au niveau de la qualité du français qu'on apprenait. Parce que c'est vrai qu'avant c'était comme l'a b c et ils vont travailler. Donc, on sent que maintenant il y a le... comme professionnel puisse bien maîtriser son français écrit. Ce qui prend beaucoup de temps à faire, hein?
M. Dion: Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui, bonjour. Alors, je viens de comprendre, vous êtes tout près de chez moi, en fin de compte. Vous êtes à Saint-Hubert, donc ce n'est pas très loin, puis effectivement il y a beaucoup de gens issus des communautés culturelles, de l'immigration. Mais ceci m'amène... Vous avez dit deux choses assez importantes tantôt dans votre élaboration. Vous avez dit: C'est important en autant qu'on les fait part à la... qu'ils participent à la décision. Ça, c'est une chose que vous avez dite qui était très importante, en tout cas qui m'a frappée. Et aussi l'autre place, c'est le milieu communautaire, l'importance du milieu communautaire, parce qu'il est très local, donc il touche davantage les gens. Donc, l'importance du milieu communautaire.
Et ça m'appelle à cette question... à vous poser cette question, à savoir: Quel espace vous aimeriez occuper pour qu'on vous consulte davantage? Et quel rôle vous pourriez jouer en fait pour qu'on prenne en compte votre expérience, votre nombreuse expérience, et la façon de reconnaissance qu'on pourrait vous accorder, en titre justement d'experts dans le milieu communautaire, auprès de ces clientèles-là?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Iturriaga.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): S'il s'agit au niveau des entreprises, je pense qu'on est déconnectés complètement. Elles ne viennent pas vers nous. Si ce n'est pas nous qu'on va vers les entreprises, c'est certain que les entreprises ne viennent pas vers nous. Et il est vrai qu'au début, quand on avait la plan d'action, après l'énoncé de politique, 1991, il y avait eu comme une certaine ouverture des entreprises à aller vers les organismes. Nous-mêmes, on pouvait aller... Moi, je me rappelle, on a déjà fait affaire avec Gaz Métropolitain parce qu'ils voulaient embaucher des personnes arabes, et ils voulaient bien le faire, donc ils voulaient savoir, etc.
Mais, dans les dernières années, le MRCI, il a coupé tout qu'est-ce qui était consultation gratuite auprès de l'entreprise privée. On pouvait faire des actions, mais il fallait qu'on fasse payer. Et donc, ça, les entreprises, tout qu'est-ce qui est interculturel, les voient accessoires. Donc, c'est malheureux, mais je pense que... Et ça, je reviens encore quand vous me demandez: «Est-ce que l'État doit?», oui, au niveau de l'entreprise, je pense que l'État, il a le pouvoir d'exiger ou de nous faciliter l'entrée dans le milieu. Parce qu'il y a une expertise qu'on peut partager avec l'entreprise, et malheureusement on a beaucoup de préjugés à défaire. Ce n'est pas juste au niveau de l'immigration, mais au niveau du réseau communautaire. En général, au Québec, on est vus comme un milieu... qui ne font rien, ils ne sont pas professionnels. Donc, on doit montrer à chaque fois.
Donc, on a une expertise, mais je pense qu'il va falloir vraiment qu'il y ait un milieu où qu'on puisse se rencontrer, avec les entreprises, pour qu'ils puissent voir qu'on est... Le milieu communautaire peut partager cette expertise, parce qu'on a embauché la main-d'oeuvre immigrante. Et la représentativité dans le milieu communautaire, elle existe, elle est vraie. Alors, ça veut dire que c'est possible de travailler avec la diversité.
Mme Vermette: Alors, si je comprends bien, vous faites un souhait...
La Présidente (Mme Hamel): En deux minutes, s'il vous plaît, Mme la députée.
Mme Vermette: En fait, vous faites un souhait pour que, dans cette nouvelle orientation qu'on est en train d'élaborer dans l'avenir, il y a une partie en tout cas qui touche à tout l'apport que peut faire le communautaire, et particulièrement à l'intérieur de vos communautés respectives puis dans le monde de l'emploi aussi. Donc, c'est un peu un genre de... civique, là ? comment on appelle ça? ? parrainage civique, mais par les gens eux-mêmes, là, mais pas de la même façon qu'au point de départ, mais on peut l'améliorer. C'est une formule améliorée, si je comprends bien. Alors... Non? Mais... Parce que je trouve ça aussi... Et, dans vos communautés, en fin de compte, aussi c'est d'avoir le financement et de la reconnaissance aussi dans vos différents... les communautés locales, c'est-à-dire dans les territoires sur lesquels vous travaillez, notamment.
La Présidente (Mme Hamel): Je vous laisse conclure, Mme Iturriaga. Il reste une minute à peine.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui. Dans les premières questions que vous m'avez posées sur l'entreprise, vous m'avez demandé qu'est-ce qu'ils nous disent, et je viens de me rappeler d'un colloque qui est organisé dans la semaine de dialogue interculturel, où je participais, il y avait des entreprises, et qu'est-ce qui m'avait marquée, c'est qu'est-ce qu'ils ont dit, pourquoi ils n'embauchent pas les immigrants, ils disaient: C'est un risque.
Des voix: C'est quoi?
Mme Iturriaga (Ana Luisa): C'est un risque.
La Présidente (Mme Hamel): Un risque.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Embaucher un immigrant, c'est un risque. Et, eux, on a posé... C'étaient des gens des ressources humaines, et on leur a posé la question: Risque, qu'est-ce que vous voulez dire? Mais, quand j'embauche un Tremblay, je suis sûr de mon Tremblay. Mais, quand j'embauche un Hassan ou un Oussama, bien là j'ai moins l'ouverture.
Et il y avait quelqu'un, si je me rappelle bien, c'était de la Commission de transports, qui était très ouvert et que, lui, il disait: J'écoute des fois des commentaires qui me...
Mme Courchesne: Hérissent.
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Oui. Et, lui, il disait: Je ne comprends pas pourquoi, pourtant on en a embauché. Et on a posé la question: Oui, vous avez embauché dans quel cadre? Entretien, chauffeurs et sécurité. Et les autres ordres professionnels, ingénieurs ? pourtant, ils commencent à embaucher, parce qu'ils ont besoin de main-d'oeuvre ? ils disaient: Ça, c'est moins ouvert.
La Présidente (Mme Hamel): Je vous demande de conclure, je suis désolée.
n
(16 heures)
n
Mme Iturriaga (Ana Luisa): Donc, juste pour revenir, c'est sûr que les organismes communautaires, ils ont besoin de soutien. Je pense qu'on a une mission sociale qui est intéressante et qu'on peut la mettre davantage pour les entreprises québécoises parce que... Je ne veux pas paraître qu'on fait les jugements des entreprises, mais il manque un certain travail de concertation avec les... communautaires. J'espère que la ministre va en tenir en considération. Merci.
Mme Courchesne: ...plan d'action.
La Présidente (Mme Hamel): On vous remercie infiniment, mesdames, de vous être déplacées, vous avez été très convaincantes, et bon retour chez vous. Merci.
Alors, je suspends les travaux pour quelques minutes, cinq minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 1)
(Reprise à 16 h 9)
Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. À ce moment-ci, nous sommes prêts à entendre l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais. Alors, pour les fins du Journal des débats, je demanderais à nos invitées de bien vouloir s'identifier, s'il vous plaît.
Association des femmes immigrantes
de l'Outaouais (AFIO)
Mme Apollon (Mireille): D'accord. Je m'appelle Mireille Apollon, je suis la présidente de l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais, et je suis accompagnée de Mme Tina De Luca, qui est la directrice de l'association.
n
(16 h 10)
n
Le Président (M. Cusano): Bienvenue à notre commission. J'aimerais vous expliquer notre façon de procéder. Vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation et, par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission pour une période maximale de 40 minutes. Alors, la parole est à vous, Mme Apollon.
Mme Apollon (Mireille): Merci beaucoup, M. le Président. Nous vous remercions pour l'invitation qui nous avait été faite de présenter à la Commission de la culture de l'Assemblée nationale du Québec notre opinion sur les niveaux d'immigration pour la période 2005-2007. Nous vous dirons d'entrée de jeu qu'en tenant compte du développement économique de la région de l'Outaouais, de ses besoins en capital humain, de son déficit démographique, je vous dirais donc que l'immigration est appréciée comme une impérieuse nécessité. Conséquemment, nous supportons le scénario visant à augmenter progressivement à 48 000 le nombre d'immigrants à accueillir par année à l'horizon 2007.
Notre présentation se fera en deux temps. Je vous parlerai de l'association et de sa clientèle et, ensuite, Tina continuera avec les programmes qui viennent supporter nos objectifs et nos intérêts pour l'intégration des femmes immigrantes. Je reviendrai probablement par la suite pour la conclusion très brièvement.
L'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais a été créée en 1984. Nous avons donc 20 ans d'existence déjà. L'association est un organisme multiethnique qui regroupe des femmes immigrantes originaires de 52 pays. Elle regroupe aussi des femmes québécoises. Notre bureau est situé à Gatineau, dans le même édifice que le MRCI et le Centre de francisation, ceci dans une recherche de synergie et de complémentarité des actions entourant l'immigration. Nous avons cinq employés à temps plein et nous jouissons de la collaboration de plus de 100 bénévoles.
Notre organisation compte plus de 400 membres actifs qui habitent principalement les secteurs urbains de la ville de Gatineau. Cette région compte quelque 17 000 immigrants, soit 7 % de la population. Le taux de saturation n'est donc pas atteint encore et il est loin de l'être, comparativement au taux d'immigrants qu'on retrouve dans d'autres régions du Canada et même du Québec. Nous accueillons environ 500 à 700 immigrants par année, ce qui est très peu compte tenu des besoins, mais ce qui nous donne quand même une certaine latitude en matière de mécanismes à mettre en place pour l'accueil et l'intégration.
Notre clientèle provient, celle qu'on reçoit, provient de l'Amérique latine à 38 %, de l'Europe de l'Est à 26 %, de l'Afrique à 23 %, du Proche-Orient et du Moyen-Orient à... 66 %, des Antilles à 4 % et de l'Asie à 3 %. Les tranches d'âge où les femmes sont les plus nombreuses à avoir reçu des services de l'AFIO se situent entre 18 et 39 ans, soit 56 %, et les femmes entre 40 et 64 ans, soit 40 % de notre clientèle. La moitié des femmes que nous recevons ne connaissent ni le français ni l'anglais. Dans notre région, ces deux langues sont essentielles. Elles ont par contre un niveau élevé d'instruction: 58 % ont fait des études postsecondaires et 14 % ont fait des études postsecondaires.
Les femmes immigrantes appartiennent de plus en plus à la catégorie dite économique, c'est-à-dire les groupes indépendants. Elles ont fait un choix délibéré de venir au Québec et encore plus délibéré de venir à Gatineau. Leur objectif principal est d'améliorer leurs conditions de vie et celles de leurs familles. Cependant, dans leur cheminement d'intégration, elles se heurtent à un certain nombre d'obstacles dont je vais vous entretenir brièvement.
L'AFIO concentre ses ressources pour les appuyer dans leurs démarches. La première porte d'intégration où il y a beaucoup de difficultés, c'est la porte de l'intégration économique. Malgré leurs qualifications élevées, elles rencontrent beaucoup d'obstacles à ce niveau-là. Le profil de pauvreté de l'Outaouais indique que 50 % des immigrants d'origine africaine vivent sous le seuil de la pauvreté. 40 % des personnes originaires du Liban, de l'Asie, de l'Amérique du Sud et des Caraïbes sont dans cette situation et seulement 20 % d'origine européenne le sont. Or, nous savons que le niveau de revenus d'une personne est largement tributaire de sa scolarité et des possibilités d'emploi qui s'offrent à elle. Mais, à qualification et expérience professionnelles équivalentes, les femmes immigrantes rencontrent de plus en plus de difficultés à mesure que leur peau s'assombrit, malgré leur niveau d'instruction et de qualification supérieur à la moyenne. Le profil racial constitue à notre avis un obstacle à l'emploi.
Les obstacles rencontrés dans la recherche d'emploi sont parfois incontournables. Ainsi, la reconnaissance des diplômes et des acquis est soumise à un lourd processus, et ce processus est parfois aussi arbitraire. Ainsi, des employeurs potentiels font obligation à ces femmes d'avoir une expérience canadienne qu'elles n'ont pu en toute logique acquérir dans leur pays d'origine. L'exigence de la maîtrise de la langue française ne peut être satisfaite que par l'intégration de l'immigrant à la société d'accueil et la meilleure porte d'intégration demeure l'accès à l'emploi. Donc, je redis que l'intégration économique, à nos yeux, est de loin le problème fondamental que vivent les femmes immigrantes, et ceci a des conséquences sociales importantes, d'autant plus qu'elles s'accompagnent d'isolement, et voire d'exclusion.
Au niveau de l'intégration culturelle et sociale, si les immigrants transforment la société québécoise, celle-ci provoque tout autant des mutations importantes au sein des familles immigrantes, principalement chez les femmes et les enfants, qui s'approprient plus rapidement les valeurs sociétales de la société. Cette situation entraîne des conflits au sein des familles pouvant se traduire par des violences conjugales parfois, allant même jusqu'à l'éclatement de la cellule familiale. Pour les femmes immigrantes, les risques d'être victimes de violence sont supérieurs à ceux rencontrés chez les femmes québécoises, d'autant plus qu'elles sont souvent ignorantes des recours que leur donne la loi et des services de support auxquels elles peuvent référer. L'intégration politique et la participation citoyenne est peut-être une voie.
Les femmes immigrantes sont souvent chefs de famille monoparentale et elles doivent faire face souvent seules aux problèmes que pose l'éducation de leurs enfants, mais ces enfants-là par contre affichent un taux de réussite et un intérêt particulier pour la réussite scolaire.
S'il est vrai que la démocratie exige que les femmes et les hommes aient un égal accès à la participation citoyenne et à l'exercice du pouvoir, il faut reconnaître que les femmes immigrantes, au cours des premières années de vie au Québec, sont beaucoup plus préoccupées par des questions de survivance économique. Ce n'est qu'après, au fil du temps, qu'elles s'impliquent plus dans les lieux de décision politique et participent au pouvoir de décision.
Pour ces lieux d'intégration, nous avons mis en place plusieurs programmes à l'AFIO. Ces programmes contribuent à faciliter l'intégration des femmes immigrantes à la société québécoise, et je laisse à Tina le soin de vous exposer l'ensemble de ces programmes.
Le Président (M. Cusano): Mme De Luca.
Mme De Luca (Tina): Oui. Pour illustrer mon propos, moi, je voudrais d'abord vous faire part de mon propre parcours, parce que vous avez sûrement déjà constaté que Tina De Luca, ça ne fait pas très québécois. Alors, c'est ça.
Moi, mon père est Italien, né à Montréal d'un père italien et puis d'une mère qui est née en Albanie. Ils se sont rencontrés je ne sais où, là, mais je pense que c'est en Italie. Enfin, bref. Et puis, du côté de ma mère, elle est native du Nouveau-Brunswick. Ils se sont rencontrés au Nouveau-Brunswick. Les parents de ma mère sont nés au Nouveau-Brunswick, mais ses grands-parents du côté de son père étaient d'origine française, est un Français d'origine allemande. Et puis, du côté de sa grand-mère, bien, elle était Irlandaise. Alors, c'est pour vous dire que je me retrouve aujourd'hui devant vous et je suis fière d'être Québécoise parce que je me considère Québécoise, mais quand même élevée avec une mère qui est native du Nouveau-Brunswick et d'un père qui a été élevé par des Italiens dans un quartier, de Rosemont plus précisément, à Montréal.
n
(16 h 20)
n
Le Président (M. Cusano): Pas loin de chez nous.
Mme De Luca (Tina): Oui, pas loin de chez vous, probablement. C'est ça. Mais pour vous dire que, moi, c'est justement, je suis fière d'être Québécoise, je suis fière de parler français, je parle d'autres langues également. Je suis maintenant dans l'Outaouais depuis plus de 20 ans, je suis allée faire des études universitaires, et puis, bon, moi, ça m'a pris environ deux ans pour me sentir chez moi, puis me construire un réseau, et puis savoir où aller faire mon marché, et puis, hein, apprendre où sont les choses, etc. Alors, justement pour illustrer mon propos, les femmes que nous accueillons à l'Association des femmes immigrantes de l'Outaouais viennent de partout, alors on peut facilement s'imaginer à quel point ce n'est pas facile de trouver de nouveaux référents justement pour s'adapter et s'intégrer à une nouvelle société, à un nouvel environnement.
Alors, pour poursuivre, je vous dirais que la mission de l'Association des femmes immigrantes consiste essentiellement à promouvoir une intégration harmonieuse au sein de la société québécoise mais à différents niveaux: aux niveaux social, culturel, économique et maintenant public. On dit «public» parce que «politique», ça choque encore, mais, finalement, c'est un programme de participation publique, À égalité pour décider, qui va très bien d'ailleurs.
Alors, il est à noter que l'Association des femmes immigrantes, c'est un organisme de services qui offre une structure d'accompagnement qualifiée et disponible, visant à répondre aux besoins des femmes immigrantes et leurs familles. Alors, plusieurs types de services, programmes et activités sont proposés en collaboration avec divers partenaires afin de faciliter leur adaptation et par conséquent augmenter leur bien-être. Quand je parle de partenaires, je parle de l'Accueil-parrainage Outaouais, qui a contribué au mémoire de la Table de concertation de Montréal, dont on est membre aussi. On est membre d'ACCESSS également. On travaille avec SITO, Service Intégration Travail Outaouais, qui va venir vous présenter la semaine prochaine aussi leur propre mémoire, puis Carrefour jeunesse-emploi, et beaucoup d'autres organismes dans la communauté.
La majorité des demandes d'aide individuelle qui nous sont adressées consistent à obtenir des renseignements, à fournir des informations sur place ou par téléphone. Viennent ensuite des demandes d'orientation, de soutien social, d'aide technique, d'accompagnement et d'interprétariat. Je vous dirais que, par le biais de l'aide technique, les femmes se présentent d'abord chez nous pour ce type d'aide, mais c'est par le biais de ce type d'aide justement qu'on va pouvoir aller plus loin avec elles. Parce que c'est très pratique parce qu'on est situé sur le même niveau, sur le même plancher, le même étage que le Centre de francisation, alors c'est facile pour elles de venir, alors c'est stratégique dans ce sens-là.
Bon, je vais vous résumer, là, rapidement les services, programmes et activités. Bon, on offre des services de première ligne comme l'accueil, l'information, le soutien, l'accompagnement, référence et aussi l'interprétariat. Parce que je crois que Mireille tout à l'heure a mentionné qu'on était une équipe de cinq, bientôt six, mais toutes les personnes qui travaillent chez nous proviennent de différents endroits, et puis je vous dirais que c'est ce qui fait que ça attire les personnes, les femmes immigrantes. Actuellement, on n'a personne qui est d'origine chinoise, mais je suis assurée que, si on avait quelqu'une d'origine chinoise, les personnes d'origine chinoise viendraient davantage chez nous. Alors ça, c'est... on est convaincues de ça.
On fait aussi de la sensibilisation dans les écoles justement pour réduire les préjugés, sensibiliser à la diversité culturelle. On fait aussi de l'intervention auprès des femmes victimes de violence conjugale, c'est-à-dire qu'on travaille avec les centres d'hébergement sur place. Le projet de participation politique. Nos cafés-rencontres, jumelage, assistance à la recherche d'emploi. Il y a un club d'entraide aussi qui a été mis sur pied à l'automne.
Alors, quand on parle de français, on n'offre pas nécessairement des cours de français ni des cours d'anglais, parce qu'on se dit: Bon, chez nous, il y a le Centre de francisation du ministère de l'Immigration qui en offre, les centres de formation aux adultes aussi, les organismes communautaires. Alors, nous, ce qu'on fait, on reçoit les demandes puis on les réfère. D'ailleurs, on n'offre pas de cours comme tels, sauf qu'avec nos cafés-rencontres, jumelage, le club d'entraide... Justement, le club d'entraide, c'est un prétexte, ils ont confectionné une oeuvre artisanale, qui est très belle d'ailleurs, qui nous a impressionnées. Mais, par le biais de ces activités-là, par une variété d'activités, elles pratiquent le français. Elles se rencontrent, elles échangent et elles pratiquent le français. Alors, c'est là, notre contribution, nous, pour l'apprentissage de la langue.
Alors, aussi, bon, on est en train de mettre un réseau d'échange de services. Parce qu'on est convaincues que les femmes immigrantes possèdent des savoir-faire, des compétences, alors on veut mettre ça en commun pour qu'elles s'entraident. Et puis, aussi, on organise différents événements comme la Semaine québécoise des rencontres interculturelles; c'est nous, cette année, qui l'avons organisée. À toutes les années, on a une fête de Noël des enfants, justement pour faire connaître un petit peu comment, nous, on célèbre cette fête-là. La Journée internationale de la femme, justement on est en train de l'organiser. La Semaine de prévention du racisme. Puis, actuellement, c'est le Mois de l'histoire des Noirs, auquel on contribue aussi.
Puis c'est ça, aussi, on offre de la formation autant aux intervenants concernés que... en tout cas, on souhaite devenir un chef de file par rapport à la formation pour sensibiliser la population. Et puis on a un appui de la ville de Gatineau à ce niveau-là. Puis on a soumis un nouveau projet aussi pour aider davantage les personnes immigrantes dans leur quotidien par rapport à l'éducation des enfants. Parce qu'on sait, on connaît le phénomène de la biculturalité où est-ce que c'est plus difficile pour les enfants aussi qui sont aux prises avec deux cultures, celle des parents et celle de la société. Et puis le mode d'éducation aussi des parents n'est pas nécessairement le même, alors on essaie de... en tout cas, on souhaite travailler davantage à ce niveau-là.
Alors, je passerais maintenant à quelques enjeux de l'intégration, puis Mireille va enchaîner puis va conclure. Je crois que le temps avance.
Le Président (M. Cusano): Il reste cinq minutes.
Mme De Luca (Tina): Il reste cinq minutes? Bon, d'accord. Bon. Alors, il y a plusieurs conditions qui doivent être réunies pour être en mesure d'accueillir et d'intégrer convenablement des nouveaux immigrants partout au Québec, pas seulement dans notre région.
Alors, il faut d'abord prévoir ou accentuer un certain nombre de mesures concrètes pour accélérer notamment l'accès à l'éducation, à l'emploi, à la reconnaissance des acquis, au processus de francisation. Parce que je crois que Mireille le mentionnait tout à l'heure, mais on est quand même dans une région frontalière, alors le bilinguisme est un atout important chez nous. Aussi, justement faciliter l'aide sociale, l'obtention d'une aide sociale, le logement social, des soins de santé appropriés. Parce qu'on connaît la situation de la pénurie des logements et puis aussi des médecins. C'est difficile pour les personnes qui arrivent d'avoir un médecin de famille. Alors, quand on a des enfants, bien, c'est essentiel. Et aussi je dirais les services de garde. Alors, on travaille à aider des femmes immigrantes qui veulent mettre en place des services de garde, avec l'Association des centres de la petite enfance. Puis aussi l'aide juridique.
Alors, ce qu'on souhaite, nous, c'est de voir davantage des programmes de tutorat ou bien, par exemple, des programmes de mise à niveau en région. Parce que je le sais, qu'il y en a à Montréal. C'est ça, il y a tout à Montréal. Mais, avec la politique de régionalisation, on dit que c'est important qu'il y ait ces services. Si on veut justement avoir une plus grande capacité d'accueil, bien, il faut avoir des services qui leur conviennent. Alors, je pense qu'il faut séduire ces gens-là, il faut les convaincre de venir s'installer chez nous.
Une voix: ...
Mme De Luca (Tina): Pardon?
Mme Papineau: La grande séduction.
Mme De Luca (Tina): Oui, c'est ça.
Mme Apollon (Mireille): ...on en parlait justement.
Mme De Luca (Tina): Oui, c'est ça. Alors, je pense qu'un des moyens, c'est d'avoir des services, et puis qu'ils n'aient pas à se déplacer. Parce que je le sais qu'il y a des gens de notre région qui se sont déplacés vers Montréal pour suivre des programmes de tutorat, etc., pour faire partie d'un ordre quelconque. Mais, moi, ce que je souhaite, c'est qu'il y ait des services dans notre région.
Alors, effectivement, si je poursuis, la maîtrise du français s'avère un élément incontournable à une pleine participation à la société québécoise. C'est sûr que ce qu'on dit, finalement on se répète, je suis pleinement consciente de ça, que c'est le français, le logement, alors des choses qui ont déjà été dites, là. Alors, il importe de privilégier les candidats connaissant déjà le français ou ayant amorcé une démarche préalable de francisation, ce qui pourrait devenir un prérequis à l'acceptation lors de la sélection à l'étranger, par exemple pour les hispanophones. Il s'agit en fait aussi d'adapter la politique de francisation en région aux nouvelles réalités de l'immigration, je pense que ça a été mentionné aussi déjà, où est-ce qu'il pourrait y avoir des mesures de francisation en milieu de travail. Alors, nous, on est en faveur de ça évidemment, de développer un français fonctionnel, en fonction du domaine de la profession.
n
(16 h 30)
n
Alors, il est suggéré également de s'assurer que les nouveaux arrivants connaissent et respectent les lois et les valeurs fondamentales de la société québécoise, alors particulièrement en matière de droits et libertés à l'égard des rapports entre hommes et femmes. Oui, l'AFIO pourrait sensibiliser davantage les différentes communautés ethnoculturelles à cet effet et soutenir les familles afin de réduire les tensions occasionnées par l'intégration. Alors, on dit qu'un accompagnement personnalisé pourrait aussi être offert pour diminuer l'isolement des familles immigrantes.
Alors, je vais m'arrêter là, parce que vous avez le mémoire en main et que vous pourrez en prendre connaissance, si ce n'est déjà fait, mais je vais laisser Mireille conclure.
Le Président (M. Cusano): Madame, je regrette, votre temps est écoulé, alors je cède... Je peux vous accorder un maximum de deux minutes pour...
Mme Apollon (Mireille): D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, vous avez les conclusions au niveau du choix du scénario, donc je ne les reprendrai pas. J'ajouterais seulement que, nous, à l'AFIO, on pense qu'on ne peut pas agir seules. Au cours des dernières années, nous avons bâti beaucoup de relations de partenariat avec d'autres organisations qui travaillent avec nous dans le dossier de l'immigration dans la région de l'Outaouais. Nous souhaiterions voir mettre en place une table de concertation pour l'Outaouais qui regrouperait ces intervenants. Et nous serions même disposées à en prendre le leadership, de ce mouvement, parce que nous pensons effectivement qu'avec une table de concertation dans l'Outaouais il y a une grande synergie et des complémentarités importantes et stratégiques qui pourraient être dégagées pour une meilleure intégration des immigrants à tous les niveaux, que ce soit économique, culturel, social et, maintenant, politique ou public. Merci.
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup, Mme Apollon. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. D'abord, un grand merci d'être venues, moi, je dis si loin...
Mme De Luca (Tina): Deux heures, deux heures de route.
Mme Apollon (Mireille): Cinq heures.
Mme De Luca (Tina): Non, c'est vrai, cinq heures, cinq heures.
Mme Courchesne: Cinq heures, c'est ça, cinq heures de route.
Une voix: ...
Le Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Apollon (Mireille): Non, elle a une nouvelle voiture, 160...
Mme Courchesne: Non, mais sérieusement, cela dit, j'apprécie énormément, parce que vous savez que je suis allée dans votre région, et on s'est rencontrées d'ailleurs, et je dois vous dire que j'ai été impressionnée par le dynamisme de l'ensemble des organismes. Nous sommes allés un samedi matin, et tout le monde était là, et je dois dire que ça a été une rencontre extrêmement dynamique, et que vous preniez la peine de revenir pour nous parler plus longuement de la situation des femmes immigrantes est d'autant plus apprécié. Je dois vous dire que j'ai beaucoup d'admiration, puis je ne vous le dis pas, là, facilement, je ne lance pas des fleurs gratuitement, mais, vous savez, le dossier des femmes en soi est un dossier important, mais c'est un dossier difficile. Alors, quand on conjugue le dossier des femmes à celui des femmes immigrantes, je comprends tout à fait l'ampleur des enjeux et des problématiques. Et vous avez une offre de service qui est très large, très variée, c'est encore donc d'autant plus impressionnant, parce qu'il faut comprendre chacun de ces éléments-là, et vous devez ramener ça à... véritablement dans votre problématique de l'Outaouais.
Et ça m'amène aux questions suivantes. Vous dites: Déjà, le nombre de personnes qu'on accueille n'est pas suffisamment nombreux; nous, on pense que l'Outaouais peut faire davantage. Donc, si l'Outaouais fait davantage, il y aura davantage aussi de femmes. Davantage de femmes, on sait qu'une des difficultés, c'est l'isolement, c'est... et là vous rajoutez une dimension qui est celle de la violence conjugale, dont on n'a pas beaucoup parlé depuis le début de cette commission. C'est pour ça que je me permettrai, comme première question, d'aller sur cet élément-là en vous disant: Comment on fait, comment on fait pour rejoindre ces femmes qui souvent restent très, très, très isolées? Je comprends que vous avez certainement des réseaux qui parfois vous permettent de les identifier, parfois elles viennent, mais est-ce que... la concertation, c'est une chose, mais est-ce qu'on a tous les bons outils, les bons moyens en main pour pas juste sensibiliser, mais aussi, moi, je dirais, enrayer...
Parce que, moi, je crois que la violence, ça ne doit pas exister. Une femme violentée est une femme de trop, je veux dire, on ne peut pas accepter ça comme société. Mais, à partir du moment où cette problématique-là est peut-être plus intense, en fait c'est ce que j'entends, qu'est-ce qu'on peut faire pour non seulement enrayer, mais accélérer le processus de...
Le Président (M. Cusano): Mme Apollon.
Mme Apollon (Mireille): Je vais y aller, et puis tu vas continuer si tu veux.
Le Président (M. Cusano): Oui.
Mme Apollon (Mireille): Merci beaucoup, Mme la ministre, pour cette question. Relativement à la violence conjugale et à l'isolement des femmes immigrantes, je pense que, à l'AFIO, nous avons, au bureau, une équipe de femmes très impliquées dans le milieu, très connues dans le milieu, et qui appartiennent elles-mêmes à diverses origines ethniques. L'association existe depuis une vingtaine d'années et, au cours de ces 20 dernières années, elle a réussi quand même à construire une renommée, une crédibilité dans la région, et elle est relativement connue.
Nous avons une gamme d'activités qui rejoint plusieurs disponibilités temporelles de ces femmes. Et il y a des activités de week-end par exemple qui s'adressent non seulement à la femme, mais aussi à sa famille, donc où le mari et les enfants peuvent venir, car nous considérons que la femme immigrante est peut-être un des vecteurs les plus actifs pour rejoindre à la fois les hommes et leurs enfants au niveau de l'intégration. Ces activités de week-end s'accompagnent aussi de formations qui peuvent se donner la journée, à des moments où, soit le matin ou l'après-midi, où elles ont des disponibilités, et ces formations-là, ces cafés-conférences rencontrent des sujets d'intérêt pour elles, dont la violence conjugale, et, à ce moment-là, des gens impliqués dans le milieu, même des policiers, viennent les entretenir de ces aspects. Et comme nous travaillons au niveau de l'intégration, nous ne faisons pas nécessairement, je dirais, une intervention pour enrayer la violence conjugale, mais, comme nous sommes un organisme qui facilite l'intégration, nous allons donc les référer à des maisons, à des spécialistes qui peuvent les aider au niveau de ce type d'intervention précis, et nous faisons un suivi pour nous assurer que cela est fait.
Mme Courchesne: Vous avez aussi parlé d'un jumelage. Je me rappelle, on avait beaucoup discuté de ça chez vous. En quoi il consiste, ce jumelage? C'est un jumelage dans le but bien sûr d'intégrer, mais est-ce qu'il y a un but de sécuriser? Est-ce qu'il y a un but d'accompagner? Est-ce qu'il y a un but... Dans quelles circonstances précises, on retrouve... Là, je parle toujours chez les femmes, hein? Pour moi, c'est ce qui m'intéresse, là. Donc, comment ça se passe concrètement? Est-ce que ça touche tous les sujets? Est-ce qu'une femme par exemple qui serait plus menacée pourrait être jumelée? Est-ce qu'il y a des secteurs d'activité particuliers que vous touchez dans le jumelage ou est-ce que c'est large, ou étroit, ou...
Mme Apollon (Mireille): Le jumelage est très ouvert. Ce sont des femmes bénévoles qui offrent de leur temps. Et le jumelage joue dans les deux sens en termes de retombées positives; à la fois, il permet à des femmes québécoises d'avoir une ouverture sur d'autres cultures, mais aussi à des femmes immigrantes, qui viennent de l'étranger, d'avoir un accès facilité et personnalisé à de l'information sur la société québécoise. Le jumelage est donc relativement large. C'est un jumelage qui est suivi au cours des deux premières années, mais, par la suite, qui peut durer toute une vie. Et le jumelage, au-delà d'un jumelage entre deux femmes, c'est le jumelage entre deux familles souvent qui se fait et le jumelage entre deux cultures qui se fait.
Tina, tu veux peut-être compléter?
Mme De Luca (Tina): Oui. Moi, je dirais que c'est la théorie des petits pas, ça se fait progressivement, parce que, avec les employés, avec notre équipe, il se crée un lien de confiance, alors ça peut être, par le biais d'activités comme les cafés-rencontres qu'on offre à toutes les deux ou trois semaines, où est-ce que, bon, on ne nommera pas l'activité violence conjugale ? ça, je pense qu'il n'y a personne qui viendrait à ce moment-là ? mais, par exemple, relations homme-femme, où ces cafés-rencontres-là servent de prétexte justement à parler, à échanger, à créer des liens, etc. Alors, petit à petit, les femmes en viennent à se confier.
n
(16 h 40)
n
C'est sûr que ça ne se fait pas ouvertement comme ça, parce que c'est encore tabou chez nous. Alors, vous imaginez que, pour les femmes, elles ont l'habitude de faire affaire avec la famille élargie qui servait de médiation ou qui aidait justement dans les relations homme-femme, mais là elles ne peuvent plus s'appuyer sur la famille élargie parce qu'elles sont seules ici. Alors, la femme se retrouve encore plus isolée justement par rapport à sa relation, parce que ça modifie la relation homme-femme, ça modifie les relations parents-enfants. Alors, il y a un ajustement par rapport à ces deux niveaux-là.
Mme Courchesne: Est-ce que c'est compliqué sur le terrain d'organiser les jumelages? Est-ce que ça demande... bien, des ressources, vous n'en avez pas beaucoup, ce n'est pas... Mais est-ce que la mécanique de l'instaurer et de l'installer... Est-ce que vous faites des suivis? Est-ce que...
Le Président (M. Cusano): Mme De Luca.
Mme De Luca (Tina): Officiellement, il y en a environ 25 par année, hein, on a un protocole d'entente avec le ministère, et tout ça, parce qu'on reçoit des fonds du PSPC puis aussi du programme d'aide à l'établissement de l'immigration. Alors, environ 25. Mais ceux de l'année précédente se poursuivent aussi. Alors, on fait du recrutement par différents moyens, et puis une des employées chez nous est responsable de mettre ensemble des femmes d'ici et d'ailleurs, et puis...
Mme Courchesne: Donc, ce que vous dites, c'est qu'il y a des critères, je veux dire, de qualité, là, et...
Mme De Luca (Tina): Oui, c'est ça. Les femmes ont à compléter un formulaire, parce que, justement, on y va par affinités, là. On n'ira pas jumeler une femme de 20 ans, qui n'a pas d'enfants, qui est intéressée par je ne sais quoi, et une femme de 45 ans, qui a des enfants puis qui est une autre réalité complètement différente. Alors, on va essayer de les jumeler par rapport à des affinités.
Mme Apollon (Mireille): Ou bien le profil professionnel, par exemple.
Mme De Luca (Tina): Aussi. Oui, justement.
Mme Courchesne: Il me reste du temps, M. le Président? Dans un autre ordre d'idées, parce que, après, je vais laisser la parole à mes collègues. Vous avez beaucoup parlé du pouvoir politique, vous avez beaucoup parlé de l'intégration politique. Bon, bien sûr, on connaît À égalité pour décider. Mais avez-vous du résultat? Est-ce que, concrètement, il y a des femmes immigrantes qui se présentent ou qui occupent des postes de décision, d'influence, parce que... qui peuvent participer à du bénévolat, c'est une chose, qui peuvent participer dans des organismes, c'est une chose, mais est-ce que... Comment ça se passe chez vous?
Mme Apollon (Mireille): C'est un programme qui a beaucoup de succès chez nous. Il est très nouveau, on a commencé cette année, et on a eu une quinzaine de femmes immigrantes qui étaient intéressées à participer et qui ont suivi le curriculum. C'est un programme qui a été vu en étapes. La première étape, c'était une étape de compréhension du système québécois, et cette étape-là a été très bien réussie. Et il y aura une autre étape où il s'agira vraiment de les préparer et de les aider à identifier un lieu de pouvoir ou un lieu décisionnel, où elles seraient plus à l'aise et pourraient être au niveau du quartier, de la ville, au niveau des commissions scolaires, ou ailleurs. Mais ce qui est intéressant dans ce programme, c'est l'enthousiasme qu'il a suscité tant chez les femmes immigrantes que chez... non pas seulement les femmes de la société d'accueil, mais aussi des hommes de la société d'accueil. Plusieurs des femmes immigrantes, puis on parlait de jumelage tout à l'heure, plusieurs des femmes immigrantes ont réussi à... ce n'est pas encore un jumelage officiel, mais disons que plusieurs sont en relation d'affinités et d'actes de compagnonnage avec des hommes ou des femmes qui occupent des responsabilités politiques dans la région.
Le Président (M. Cusano): Sur ce, je dois maintenant céder la parole au député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Merci, M. le Président. J'aurais tellement envie simplement d'écouter ce que vous avez à dire, c'est tellement intéressant...
Des voix: ...
M. Dion: ...et je crains, en posant une question, d'interrompre... Oui, madame, vous avez quelque chose à ajouter? Je vous écoute.
Mme De Luca (Tina): Oui, parce qu'on est très satisfait des résultats jusqu'à maintenant, parce qu'il y a tout un programme d'activités justement pour sensibiliser les femmes à se rapprocher davantage des instances. Actuellement, on n'a pas de résultat que... sont déjà membres d'un conseil d'administration. Non. On est à la phase I. Alors, plusieurs activités dont, par exemple, la visite au parlement, des gens du secteur municipal, scolaire, de la santé, alors elles ont participé à des conseils d'administration. Alors, elles sont en train de démystifier peu à peu, hein, de se rapprocher des instances, c'était l'objectif, puis je pense qu'on l'a atteint largement.
Mais là, dans la phase II, on voudrait pouvoir mieux les outiller pour prendre leur place justement, pour participer aux instances, et puis... Mais, actuellement, il y a des jumelages qui se font, puis déjà ça donne des résultats, parce que, à toutes les personnes à qui on a demandé d'accompagner des personnes immigrantes, par exemple, lorsqu'elles se présentent à une réunion, ou quoi que ce soit, leurs activités, la réponse a été positive. Alors, elles sont déjà sensibilisées à ça, puis elles répondent à nos demandes. Et puis, ces femmes-là sont privilégiées dans un certain sens parce qu'elles sont très informées, peut-être mieux que nous, par rapport à tout ce qui existe. Et puis, bon, elles ont l'occasion de faire du bénévolat, parce qu'une personne a des connaissances, et puis une autre, bon, elle a été mise sur la piste d'un emploi, ou quoi que ce soit, mais elles sont en train de se créer des réseaux, ce qu'on considère très important, là, comme phénomène d'intégration. Oui, c'est avoir un réseau. Alors, dans ce sens-là, je pense qu'on a atteint nos objectifs puis on souhaite poursuivre. Puis que, oui, éventuellement, ce sont des femmes qui, pour certaines, s'impliquaient déjà dans leurs pays, et puis ce sont toutes des femmes, ou presque, très scolarisées...
Mme Apollon (Mireille): Oui, oui.
Mme De Luca (Tina): ...très scolarisées, puis des femmes qui ont des choses à dire, qu'on considère qu'elles devraient participer justement aux décisions qui se prennent parce qu'elles auront à se prononcer justement, parce qu'on sait que de plus en plus les personnes immigrantes vont faire partie de la société québécoise. Alors, on veut les encourager dans ce sens-là.
Le Président (M. Cusano): M. le député.
M. Dion: C'est très intéressant. Je voudrais toucher à un autre aspect de la question, j'aimerais avoir votre... Je ne sais pas si vous avez des données absolument chiffrées, mais j'aimerais avoir votre point de vue sur tout le phénomène de... On sait que la femme dans la famille, c'est le centre de toutes les familles ? je pense que c'est vrai chez les immigrants comme chez ceux qui sont ici, hein? ? et, dans ce sens-là, c'est beaucoup leur orientation qui oriente l'ensemble de la famille, en termes de comportement culturel, et tout ça.
Alors, la question que je me pose, c'est la suivante: Quelle est votre perception du transfert linguistique ou du transfert culturel dans le temps chez les immigrants, les familles immigrantes de l'Outaouais? Est-ce que c'est un transfert plutôt vers la culture de la langue commune ou si c'est plutôt un transfert vers la culture qui les rapproche des possibilités d'avoir un emploi, par exemple, de l'autre côté de l'Outaouais? Alors, avez-vous des données là-dessus? Ou, sinon des données, au moins une perception?
Le Président (M. Cusano): Mme Apollon.
Mme Apollon (Mireille): Ah! je ne pense pas qu'on ait de données chiffrées au niveau du transfert linguistique. Peut-être que Tina, dans ses contacts avec l'université ? parce qu'on travaille beaucoup avec ce genre de partenaires ? l'Université du Québec en Outaouais, en aurait. Par contre, il y a un attrait très fort d'Ottawa, de l'Outaouais par rapport à la région d'où nous sommes. C'est sûr qu'il y a une dizaine ou une vingtaine d'années l'Outaouais québécois n'avait pas le profil de dynamisme économique qu'il a aujourd'hui. Ça va peut-être, au cours des prochaines années ou de la prochaine décennie, servir à capter ou à retenir l'immigration qui arrive dans cette région. Mais Ottawa, l'Outaouais, il va sans dire, affiche un attrait très fort sur la population immigrante, et c'est pour nous un grand défi. Il y aurait, semble-t-il, beaucoup plus de facilité administrative à aller travailler en Outaouais, du côté d'Ottawa, du côté de l'Ontario, et les procédures administratives et les coûts aussi seraient beaucoup moins élevés, pour ceux qui veulent se partir une petite ou une moyenne entreprise, de le faire du côté d'Ottawa que dans la province de Québec. La taxation est différente. Alors, tu as des informations à ajouter là-dessus?
Le Président (M. Cusano): Mme De Luca.
Mme De Luca (Tina): Oui. C'est sûr que c'est attirant pour eux que d'aller travailler de l'autre côté, d'autant plus qu'ils ont une plus longue expérience que nous par rapport à l'accueil des immigrants. Eux, ils ont l'habitude; nous, c'est assez récent. Nous, on parlait de 7 % de la population, tandis qu'à Ottawa c'est 21 % de la population, puis, si on parle de Toronto, je pense que c'est 44 %. Alors, on a du chemin à faire, disons. Mais, bon, elles sont conscientes qu'elles doivent apprendre les deux langues, comme je disais précédemment, et puis... Mais elles ont d'abord à apprendre le français, parce qu'on se dit... Moi, en tout cas, je privilégie le français d'abord puis, ensuite, la langue seconde. Mais il y a les enfants aussi qui sont accueillis dans les écoles, dans les classes d'accueil, et puis que... Alors, ça se fait.
M. Dion: Alors, la question que je me pose, c'est la suivante: Si la situation est telle que vous la dites, que vous la décrivez présentement ? j'ai cru comprendre que vous êtes en faveur du scénario de croissance, page 4, hein, de votre document... Est-ce que ce scénario de croissance va empirer cette situation ou va permettre de la corriger? Comment vous évaluez la situation pour dans 10 ans, 15 ans, par rapport au scénario de croissance de l'immigration dans l'Outaouais?
Mme Apollon (Mireille): Le scénario de croissance de l'immigration dans l'Outaouais n'est pas uniquement fondé sur l'attrait linguistique, il y a une question de qualité de vie qui est accrochée à l'imaginaire de l'immigrant par rapport au Québec. Le Québec est vu, est vécu comme une terre d'accueil où les libertés fondamentales sont respectées et où aussi la population québécoise a une attitude très accueillante, tolérante vis-à-vis de l'immigrant qui arrive. Dans la région de l'Outaouais, l'autre facteur, c'est que les immigrants qui arrivent veulent améliorer leur statut économique, et la région de l'Outaouais offre de plus en plus cette possibilité-là.
n
(16 h 50)
n
Il faut dire que l'immigrant qui arrive dans une région va y rester selon la qualité de relations humaines qu'il va y trouver. Est-ce que cette personne-là a déjà un relais en place qui va lui faciliter son intégration? Il y a un ensemble de conditions qui existent dans l'Outaouais qui peuvent faciliter, qui peuvent aider à la rétention du niveau d'immigration qui y arrive.
Maintenant, c'est associé à un coût, et, jusqu'à présent, on n'a pas eu nécessairement toutes les ressources qu'il aurait fallu pour aider à retenir les immigrants dans cette région-là. L'immigration qui arrivait il y a une dizaine d'années, une vingtaine d'années était surtout une immigration européenne. Aujourd'hui, celle qui arrive est beaucoup plus africaine ou asiatique, et des mécanismes, des facilités doivent être mises en place pour les accompagner, parce que le choix premier du fait qu'ils arrivent, c'est qu'ils pouvaient aller en premier en Ontario, mais ils ont décidé de venir au Québec parce qu'il y avait des raisons qui les incitaient à venir à Québec. Il faut donc raffermir cette conviction et faciliter leur décision de rester avec nous.
Le Président (M. Cusano): Brièvement, M. le député.
M. Dion: Oui, une petite question. Vous avez parlé tout à l'heure que le jumelage se fait... c'est un jumelage des femmes, hein, et de là vous touchez les familles par la suite. Est-ce que c'est difficile de trouver des femmes d'ici, qui sont ici depuis toujours, là, qui sont de racine québécoise depuis longtemps, qui soient intéressées à accueillir des femmes de l'extérieur ou si c'est compliqué?
Mme Apollon (Mireille): On a à peu près 7 % d'immigration dans l'Outaouais québécois et le taux d'intérêt, de curiosité, je dirais, de découvrir une autre culture est très fort chez nous. Les Québécoises donnent assez facilement, quand elles ont le temps de le faire, donnent assez rapidement leur assentiment pour accompagner une femme immigrante dans un processus d'intégration. On n'a pas trop de difficultés à les identifier.
Le Président (M. Cusano): Merci. Avant de passer la parole au député de Hull, je vais me permettre de poser une question, c'est très rare.
Vous avez dit, Mme De Luca, que, dans votre cas, lorsque vous êtes arrivée dans l'Outaouais, ça vous a pris presque deux ans pour vous sentir vraiment, là, comme partie de l'ensemble. On est tous des individus, on a des façons de s'intégrer qui sont peut-être différentes une de l'autre, et ma question est la suivante: Selon vous, combien de temps, avec les services que vous donnez, combien de temps faut-il suivre ou accompagner ces femmes-là avant qu'elles se sentent intégrées comme vous vous sentez intégrée dans l'Outaouais?
Mme De Luca (Tina): Le mandat qu'on a, c'est de trois à cinq ans. C'est sûr qu'on va mettre plus d'énergie au départ avec les femmes qui sont nouvellement arrivées, et puis on peut continuer à avoir des contacts. Mais la façon pour nous de continuer à être en contact avec elles, c'est de leur offrir des activités justement puis qu'on... Il y a un suivi aussi, mais ça dépend de...
Le Président (M. Cusano): De l'individu.
Mme De Luca (Tina): ...ça dépend de l'individu, de sa capacité d'adaptation parce que... C'est ça, avant de vraiment se sentir chez soi puis de s'installer, ça peut être assez long parce que... dépendant d'où on vient aussi, là, du pays d'origine, puis du processus migratoire, et puis comment on l'a vécu, etc. Mais, bon, au moins quelques années. Puis dépendant aussi si la personne a obtenu un emploi, parce qu'on sait que l'emploi, c'est central, mais, quand même, je ne veux pas réduire l'intégration à l'emploi parce que ce n'est pas uniquement ça, mais... Puis on cherche des moyens aussi de rejoindre des candidats d'immigration économique, des candidats indépendants, parce qu'on se dit, bon, par où ils passent, hein, si... ils ne viennent pas nécessairement chez nous. C'est Accueil-Parrainage qui s'occupe de les accueillir, leur chercher un logement, etc. Nous, ça arrive qu'on puisse offrir ce service-là, mais ce n'est pas dans notre mandat premier, alors... avec l'immigration aussi qui devrait remettre une trousse... bien, qui devrait, qui le font, supposément, qu'ils font de remettre une trousse d'information.
Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Hull.
M. Cholette: Merci, M. le Président, merci à mes collègues de me donner un peu d'espace. Les gens de l'Outaouais... je suis content d'être ici, je ne suis pas membre de la commission de façon permanente, mais ça tombe bien que je puisse participer à vos travaux aujourd'hui. Donc, merci d'avoir accepté de participer aux travaux de la commission.
Un petit commentaire en passant pour renchérir sur ce que la ministre disait. Félicitations, hein, quand l'Outaouais se déplace pour venir en commission parlementaire... c'est beau de dire, en Outaouais: Ah! Québec, c'est loin de nous autres. Mais ça prend aussi des gens qui disent: Bien, on va aller à Québec puis on va aller leur dire ce qu'on pense. Et merci de le faire, on peut compter sur vous assurément. Alors, merci pour cela.
Vous avez fait un bon topo, je pense, des enjeux que l'on vit chez nous, avec une région frontalière, particulièrement avec la question de l'immigration. Vous avez 20 ans d'expérience, vous fêtez votre vingtième cette année, je pense. Ça, c'est gage de réussite, hein? Quand ça fait 20 ans qu'on est capable de persévérer puis de produire des résultats dans une région, ça, c'est parce que vous avez réussi à bien travailler, travailler en fonction des besoins de la clientèle. C'est tout à votre honneur, je vous en félicite.
Vous décrivez aussi le portrait de l'Outaouais sur plusieurs facettes, toujours sous l'ornière de l'immigration, mais vous décrivez la situation difficile que l'on vit avec le personnel médical. Vous décrivez aussi la situation difficile au niveau du logement, des places en garderie. Vous nous décrivez également l'attrait et la compétition/complémentarité avec la région d'Ottawa. Quelquefois, c'est complémentaire; quelquefois, c'est compétitif. Et ça, ce n'est pas étranger à la question que je vais vous poser.
Vous nous dites qu'il y a 7 % d'immigration dans notre population et qu'on en accueille environ 500 par année ? c'est à peu près les chiffres que j'ai notés ? et qu'il y a place à plus, et on pourrait accueillir plus d'immigrants. De par les faibles taux de natalité, c'est une mesure concrète, là, pour continuer à faire progresser notre courbe démographique, et vous identifiez certaines pistes. Mais, moi, je voudrais savoir, comme première question, là: Par rapport au reste du Québec, premièrement, on reçoit combien en termes d'immigration, présentement, les derniers chiffres, on reçoit quel pourcentage, puis qu'est-ce qu'on doit faire comme région pour attirer davantage d'immigrants chez nous?
Le Président (M. Cusano): Mme Apollon.
Mme Apollon (Mireille): Les chiffres que je vous ai donnés sont ceux-là. On accueille entre 500 à 700 immigrants par année, selon ceux qui se présentent dans notre région. Effectivement, ils sont autour de 7 % de la population. Les contacts qu'on a avec notre environnement nous disent qu'il y a une grande demande au niveau de l'emploi pour des ressources humaines qualifiées et que l'immigration peut nous les apporter. Donc, la porte d'intégration dans la société d'accueil étant le travail, étant l'intégration économique, on pense que les immigrants qui viennent dans notre région pourraient avoir accès à un emploi au cours des mois qui suivent leur arrivée. C'est sûr que cet emploi qu'ils décrochent ne correspond pas nécessairement à leurs qualifications ou à leur profil parce que, là encore, il y a des barrières au niveau de la reconnaissance des diplômes ou la reconnaissance des acquis, mais l'emploi est disponible dans notre région, et les immigrants peuvent venir en plus grand nombre qu'ils arrivent présentement et ils vont réussir à trouver leur place, à y faire leur nid.
Maintenant, la question demeure par rapport à l'Ontario: Comment les retenir? Parce qu'ils peuvent s'en aller dans d'autres régions du Canada. Il n'y a pas de contrat d'engagement au niveau de la sélection des immigrants qui les oblige, entre guillemets, à rester dans la région de l'Outaouais pendant un certain nombre d'années. On n'en est pas encore là.
M. Cholette: Peut-être pouvez-vous donc m'expliquer. Si je fais des choses en parallèle, on a entendu des gens de Montréal tantôt nous dire: Notre grave problème, là, c'est qu'on n'est pas capables de trouver des jobs pour nos immigrants, puis ça prend des années avant qu'ils intègrent le marché du travail. Si je mets ça en comparaison avec ce que vous venez de nous dire, oui, il y a des emplois, nos employeurs sont prêts à accepter des immigrants comme employés, bon, il y a des problèmes techniques d'accréditation puis de reconnaissance, mais, une fois ça passé, on est capable de trouver de l'emploi, on est une terre d'accueil qui a fait ses preuves, on a un historique d'immigration, il y a déjà des bassins importants, que ce soit, par exemple, les Portugais, dans mon comté, ou même des gens d'ailleurs dans d'autres comtés de l'Outaouais, alors, si on a ce plateau-là devant nous, comment se fait-il qu'on a plus de difficultés à attirer plus d'immigrants?
n
(17 heures)
n
Le Président (M. Cusano): Mme De Luca.
Mme De Luca (Tina): O.K. Bien, on sait très bien que ce qui attire le plus les personnes immigrantes ou bien même nous, c'est d'aller vers les centres, hein, les grands centres. Alors, on sait que... On disait tout à l'heure qu'il y a 17 000 personnes immigrantes; bien, il y en a 15 000 dans les secteurs Hull, Gatineau, Aylmer. Ça fait que les 2 000 autres, là, sont répartis, mais ils vont près des services, ils vont là où il y a des services. Puis on se dit: Bon, il y a 12 %... Disons, il en arrive à peu près 40 000, au Québec, il y en a 12 % qui vont en région; il faut adapter aussi notre main-d'oeuvre.
Parce qu'actuellement, bon, comme je vous disais tout à l'heure, le SITO va venir la semaine prochaine puis il va y avoir des chiffres à l'appui, j'imagine, mais c'est qu'on a besoin davantage de techniciens. Mais, au Québec, la difficulté qu'on connaît, c'est qu'il y aurait peut-être 10 ingénieurs pour un technicien, mais on a besoin de 10 techniciens puis peut-être d'un ingénieur. Alors, il faut tenir compte davantage des besoins spécifiques de notre région. Puis ces données-là existent. On a eu des présentations d'Emploi-Québec aussi. Alors, c'est de faire un arrimage entre les besoins spécifiques de la région puis lors de la sélection aussi.
M. Cholette: Merci.
Le Président (M. Cusano): Merci. Vous avez terminé, M. le député de Hull?
M. Cholette: Ça va, oui. Merci.
Le Président (M. Cusano): Alors, je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Bien, bonjour. Ça me fait plaisir. Et puis je vais continuer en fait dans ce que vous étiez parties en ce qui concerne comment on arrive à avoir un effet de rétention et de maintenir nos gens chez nous, en fait, au niveau de l'emploi. Et je pense que vous avez tout à fait raison, il y a plusieurs groupes qui sont venus nous dire que, finalement, il y a des endroits qui avaient des emplois, on a vu que c'était marqué «Nous embauchons», mais les gens n'allaient pas là parce que ce n'étaient pas nécessairement des centres assez gros, assez importants, et les gens veulent se retrouver entre eux, en fin de compte. Donc, effectivement, ce n'est pas toujours facile ou évident. Et vous avez terminé en fait en disant: Bien, il y a des statistiques qui démontrent la nature des emplois, les besoins en fait, bon, etc.
À partir de ça, chez vous, dans votre région, quel est le rôle de la municipalité? Comment voyez-vous le rôle d'une municipalité? Qui devrait jouer le rôle, en fin de compte, de coordinateur ou de leader par rapport à tout ça? Parce qu'évidemment, il y a beaucoup de gens qui donnent des services, ça, je suis convaincue de ça. Les groupes communautaires sont excessivement très proches de leurs clientèles, ils travaillent très fort avec eux. Ils les suivent, vous l'avez dit, vous avez fait du suivi trois ans, cinq ans, bon, pour une personne. Alors, à partir de ça, en fait, parce qu'on a toutes... les conditions gagnantes en tout cas sont là, jusqu'à un certain point, alors qu'est-ce qui reste, en fin de compte, pour faire que ce soit vraiment une formule gagnante?
Le Président (M. Cusano): Mme Apollon.
Mme Apollon (Mireille): Oui. Je vais commencer. Au niveau de la municipalité de Hull, il faut dire que nous avons une équipe très dynamique et qui est consciente de l'intérêt de l'immigration pour le développement de la région. Nous avons un maire qui croit là-dedans et qui a mis sur ce dossier des gens qui, vraiment, vont au-delà de leur mandat, qui s'impliquent activement.
Il y a eu plusieurs activités menées par la mairie pour favoriser le fait migratoire en Outaouais. Par exemple, l'année dernière, je me rappelle que le maire avait réuni plusieurs immigrants qui avaient réussi leur intégration économique dans la région et qui occupaient de donner des services à la société d'accueil dans plusieurs créneaux, que ce soit le créneau alimentaire ou d'autres créneaux de services. Cette année aussi, en particulier, la mairie a investi un certain niveau d'effort pour faire reconnaître l'apport de la communauté noire au développement économique et culturel de la région, et la population haïtienne a été mise à l'honneur puisque, depuis une cinquantaine d'années, elle était présente dans l'Outaouais et avait contribué à la Révolution tranquille et au développement de la région, en particulier dans les secteurs de l'éducation et de la santé.
Il y a donc une reconnaissance par la municipalité, par la mairie, de l'intérêt et de l'impact positif de l'immigration sur le développement de la région et elle est encouragée par divers programmes.
Le Président (M. Cusano): Mme De Luca, voulez-vous ajouter?
Mme De Luca (Tina): Oui. On souhaite également mettre en place une table de concertation justement pour travailler davantage ensemble et puis s'entendre à mieux répartir ou sur les actions à poser. Bon, il est question aussi d'une commission, mais on en parle actuellement seulement, une commission à la ville de Gatineau. Mais il y a quelqu'un d'embauché et qui nous soutient beaucoup justement à la ville de Gatineau, alors on sait qu'on a leur appui, qu'on peut travailler davantage ensemble. Il y a un comité des partenaires aussi qui existe au ministère de l'Immigration, où est-ce que les gens du secteur de l'emploi, scolaire, communautaire qui se réunissent, là, je crois que c'est quatre fois par année. Mais nous, on voudrait davantage, alors c'est ce qu'on va proposer: qu'il y ait une table de concertation dans la région.
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée.
Mme Vermette: Non?
Le Président (M. Cusano): Oui, oui, continuez.
Mme Vermette: Ah oui? C'est intéressant, mais la plupart des gens demandent justement de pouvoir infléchir, dans le fond, certaines décisions et d'avoir un pouvoir direct sur les décisions par rapport à cet aspect-là. Et il y a beaucoup de partenaires, notamment au niveau... vous parliez de l'emploi, donc, avec les CLD et les CLE au niveau de l'emploi, et particulièrement pour les femmes ? parce que là on veut revenir au sujet qui nous intéressait, c'était les femmes, effectivement. Et au niveau des femmes, on sait que beaucoup de femmes font du travail à la maison, ou font du travail au noir, ou en tout cas, bref, pour plusieurs raisons, là, qui fait où elles ont souvent du travail atypique.
Alors, quels sont là-dessus les gestes concrets qu'on pourrait faire pour aider ces femmes-là à se sortir de ces ghettos-là, dans le fond? Parce que c'est un ghetto qui nous permet un travail, oui, mais finalement elle n'aura jamais de reconnaissance. Alors, comment on arrive justement à sortir de cette façon de procéder pour ces femmes-là ? surtout les femmes?
Mme De Luca (Tina): Bien, c'est de leur offrir autre chose, hein?
Mme Vermette: Oui, mais voilà...
Mme De Luca (Tina): C'est ça, oui...
Mme Vermette: ...mais avec qui vous travaillez pour leur offrir autre chose? Parce qu'il faut avoir des partenaires, il faut avoir...
Mme De Luca (Tina): Oui, mais, c'est ça que je dis, ce n'est pas nous qui travaillons directement, mais justement, on travaille avec d'autres partenaires comme Emploi-Québec, le SITO, carrefour jeunesse-emploi, les centres de formation aux adultes, je mentionnais tout à l'heure les organismes communautaires. Alors, avec toutes ces personnes impliquées, je pense que c'est possible justement d'offrir autre chose à ces femmes-là. C'est de les rejoindre et puis pour les informer que ça existe. Mais il y a déjà plusieurs services en place, là, plusieurs organismes en place, déjà.
Mme Apollon (Mireille): Mais si je peux me permettre, Tina.
Mme De Luca (Tina): Oui.
Mme Apollon (Mireille): Nous avons développé, au cours des années, une relation renforcée avec le SITO, à tel point que le SITO est en train de mettre chez nous, dans nos bureaux, une console informatique qui va permettre aux femmes qui viennent à l'AFIO d'avoir accès, via cette console informatique, aux offres d'emploi qui sont disponibles dans la région. Il y a aussi une proposition qui a été faite à la municipalité, par SITO, que nous avons supportée, de mettre en place une commission au sein de la mairie, une commission qui s'occuperait de l'immigration et en particulier de la question de l'emploi des immigrants. Donc, ce sont des gestes qui viennent... Parce que l'Outaouais est une région d'immigration, mais cette immigration prend de plus en plus d'ampleur ou a pris de plus en plus d'ampleur, au cours des 10 dernières années, et le système est en train de réagir pour harmoniser leur intégration économique, sociale et culturelle.
Mme Vermette: Merci.
Mme De Luca (Tina): J'ajouterais...
Le Président (M. Cusano): Merci, madame... Vous voulez ajouter, Mme De Luca? Oui, brièvement.
n
(17 h 10)
n
Mme De Luca (Tina): Oui. C'est qu'il y a quelque chose de particulier dans la région de l'Outaouais, parce que, bon, moi, je suis allée faire des études et puis je ne voulais pas rester là, je voulais revenir à Montréal ou bien même venir à Québec. C'était mon projet, puis ça doit faire 22 ans que j'habite l'Outaouais, alors je pense que j'aime ça. Mais il y a une grande facilité d'accès aux gens. C'est facile de se parler, puis d'échanger, puis de communiquer entre nous. Je ne sais pas, le fait que c'est plus petit, c'est plus convivial, mais c'est facile pour nous d'avoir des contacts avec nos partenaires et puis de discuter.
Mme Vermette: ...il n'y a pas une région qui est pareille, de toute façon, il n'y a pas un coin qui travaille de la même façon. Puis, même à l'intérieur des régions, il y a encore des sous-groupes, alors, oui, effectivement.
Mme De Luca (Tina): Oui. Mais je dois dire que c'est très agréable puis que c'est facile, les contacts. Oui, c'est un atout.
Le Président (M. Cusano): Alors, merci, Mme la députée. Alors, le temps est écoulé. Je tiens à vous remercier, au nom de mes collègues, pour votre participation. Et c'est un échange extrêmement intéressant. Alors, bonne chance dans vos travaux, et avec le député de Hull, je suis sûr que vous allez être bien servies.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre à nos invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 11)
(Reprise à 17 h 18)
Le Président (M. Cusano): À l'ordre! Alors, nous reprenons nos travaux. À ce moment-ci, je demanderais à nos invités de bien vouloir s'identifier pour les fins du Journal des débats.
Centre d'encadrement pour jeunes filles
immigrantes (CEJFI)
Mme Alende (Régine): Je suis Régine Alende Tshombokongo, je suis la directrice du Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes.
M. Touchene (Karim): Je m'appelle Karim Touchene, je suis chargé de projet au niveau du Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes.
M. Opula (Lambert): Je suis Lambert Opula, je suis conseiller auprès de la direction.
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Bienvenue à notre commission. Je vais vous expliquer brièvement notre façon de procéder: vous disposez d'une période de 20 minutes pour faire votre présentation; par la suite, il y aura une période de 40 minutes qui sera partagée par les membres de la commission, qui vous poseront des questions, il y aura un échange entre vous puis les membres de la commission. Alors, vous pouvez procéder immédiatement.
Mme Alende (Régine): Oui. Merci beaucoup. Nous avons travaillé sur la planification des niveaux d'immigration, mais je vais prendre juste une minute pour présenter le CEJFI et ce que nous faisons. Et le CEJFI, comme je viens de le dire, c'est le Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes et ça a été fondé en 1998, mais nous sommes entrés en fonction effectivement en 2001. Et la mission du CEJFI, c'est d'oeuvrer pour l'amélioration des conditions de vie des jeunes filles immigrantes de 12 à 35 ans. Et les jeunes filles immigrantes, c'est une portion de la société qui est invisible parce qu'elle est à la fois femme, jeune et immigrante.
n
(17 h 20)
n
Nous avons un autre de nos objectifs qui est d'informer les jeunes filles immigrantes afin de prévenir le choc culturel et ses conséquences, et les aider à développer et à acquérir leur habileté afin de valoriser leur potentiel distinctif, et les aider aussi à la vie citoyenne et démocrate, et défendre les droits et les intérêts des jeunes filles immigrantes. Et je ne vais pas m'éterniser là-dessus, mais nous faisons tout un éventail d'activités, comme activités d'accompagnement et l'accompagnement psychosocial. Il y a des jeunes filles qui arrivent déprimées, isolées; il y a des cas qu'on ne sait même pas soigner et que le... est fatigué. Mais, dès qu'on nous les réfère, on voit à leur rétablissement. Ce n'est pas ce qui se trouve un cadre idéal qu'elle se trouve à elle seule.
Et nous avons aussi accompagnement à logement, parce que nous savons, quand les jeunes filles arrivent, elles sont accueillies et puis, après trois semaines seulement, on leur demande de quitter, de se débrouiller dès qu'elles ont leur chèque d'aide sociale. Alors, cette étape-là est très, très difficile pour les jeunes filles immigrantes, et c'est là où l'État perd beaucoup, parce qu'elles sont mal accueillies. Mais nous avons organisé un système: on les loge ? on l'appelle le logement de transition ? avec nos partenaires, et le logement, là, elles ne paient rien, pour celles qui sont le plus démunies: ce sont avec les congrégations religieuses. Comme vous le savez, il n'y a pas beaucoup de religieuses pour le moment. Alors, on a fait des ententes avec elles et on résout le problème de logement comme ça.
Et puis, pour l'isolement et d'autres choses, nous avons des programmes de formation et nous avons tout un éventail d'activités. On a regardé, parce qu'il y a des filles qui, en arrivant ici, elles sont fatiguées, elles sont déçues du Québec, mais le centre est là pour leur donner l'espoir de vivre bien à Québec. On dit: Vous êtes jeunes, il y a un espoir pour le Québec. Et alors, nous faisons des activités d'information, de formation aussi, de visite dans les lieux de décision. Et elles sont très, très contentes pour ces activités-là.
Et nous avons actuellement 350 jeunes filles immigrantes. Alors, nous faisons aussi des actions, parce que dans nos objectifs, c'est la défense de leurs droits, et les actions que nous faisons, par exemple, nous avons des besoins de filles mais nous voulons vérifier si effectivement... vérifier par des recherches scientifiques... Alors, nous travaillons avec l'Université de l'UQAM pour... Il y a une recherche, que nous avons appelée «moseka», c'est-à-dire le Profil de jeune fille immigrante de CEJFI, et c'est avec le service aux collectivités de l'Université du Québec à Montréal et avec ARIR.
Alors, nous avons un travail aussi de recherche avec la Condition féminine Canada sur l'emploi des jeunes filles immigrantes dans la fonction publique municipale de la ville de Montréal. Pourquoi est-ce qu'on ne voit pas les jeunes filles immigrantes dans l'emploi municipal, dans la fonction publique? Alors, on a financé cette recherche pour chercher les causes et les barrières pour ça.
Alors, nous avons aussi une recherche avec Patrimoine Canada sur la sous-représentation des jeunes filles immigrantes dans les lieux de décision. Et nous avons un forum, nous avons déjà organisé des forums et que nous appelons la Journée des filles immigrantes. Le premier forum, c'était sur la fille immigrante et le développement socioéconomique du Québec; et le deuxième forum, c'était sur l'entreprenariat, les défis de l'entreprenariat. Et la troisième Journée des filles immigrantes que nous organisons, le 20 mars prochain, c'est sur la représentation des filles immigrantes dans les lieux de décision, enjeux et pistes d'action. Et là, tout ce que nous faisons, nous faisons par consultation avec les filles immigrantes, et elles nous disent ce qu'elles veulent faire.
C'est pour cela que nous avons établi un plan d'action qui va nous aider à travailler. D'ici, c'est plus de cinq ans dans l'avenir. Et, dans ce plan d'action, les jeunes filles immigrantes ont trouvé qu'il faut mettre l'accent sur la formation et le maintien à la formation, sur l'emploi et maintien à l'emploi, sur l'entreprenariat et sur la participation civique. Et nous avons vu qu'il y a vraiment des difficultés à ces niveaux. Mais je ne vais pas m'étaler sur les difficultés. Le niveau de la formation, par exemple, il y a l'inaptitude aux cours de formation d'ici, il y a le manque de maîtrise de la langue, et etc. ? si vous voulez, au moment des questions, je peux énumérer toutes les difficultés. Et, au niveau de l'emploi, il y a la discrimination qui est là, la reconnaissance des acquis et la demande de l'expérience canadienne de travail. Il y a plusieurs difficultés qu'on a énumérées, même dans le plan d'action. Et, au niveau de l'entrepreneuriat, il y a le manque de motivation qui joue, et il y a aussi les traditions: ils ne sont pas habitués à créer des entreprises; soit qu'elles sont habituées à être dirigées par un mâle, un père ou encadrées par l'oncle ou le frère. Et, au niveau de la participation civique, elles ne trouvent pas d'intérêt à participer civiquement aussi longtemps qu'elles vivent dans la pauvreté. Et elles n'ont pas de moyens, elles n'ont pas d'argent. Alors, la participation civique et démocratique vient en second lieu ou n'existe pas du tout.
Alors, nous essayons de les valoriser et de les pousser. C'est pour cela que nous organisons des ateliers que... Nous mettons ensemble les décideurs et les jeunes filles immigrantes, nous mettons ensemble les femmes et le politique, on invite les ministres, les députés et les jeunes filles immigrantes dans nos locaux et nous mettons ensemble le modèle de femmes immigrantes ayant réussi dans la société québécoise et les jeunes filles immigrantes. Et elles apprennent beaucoup. Et maintenant elles sont vraiment décidées de rester au Québec, et elles croient vraiment que le Québec leur appartient maintenant, et c'est une réussite pour nous.
Et c'est ça que nous faisons en gros. Alors, je veux passer au dossier du jour; ce n'est pas pour parler de CEJFI spécialement que nous sommes venues ici, mais c'est pour ce que nous avons fait, présenté dans notre mémoire. Et, si vous avez des questions pour le CEJFI même, nous allons répondre en même temps.
Alors, vous nous aviez présenté trois scénarios, qui est: est-ce que... la réduction de volume global des admissions, la stabilisation des admissions ou la croissance de volume des admissions. Alors, il y a les enjeux que nous avons analysés: enjeux démographiques, linguistiques, économiques et régionalisation. Alors, pour arriver au scénario que nous avons choisi, nous avons fait une analyse critique de ces quatre enjeux, et ça nous a comme chronologiquement amenés à notre scénario.
Alors, nous avons commencé par l'enjeu démographique et nous avons dit que la situation actuelle du Québec dans le Canada transparaît à partir de l'évolution de certains paramètres démographiques: il y a le poids démographique de la province du Québec au sein du Canada, l'accroissement naturel et l'immigration au Québec par rapport au Canada. Est-ce que je parle trop rapidement?
Le Président (M. Cusano): Non, non, continuez. Vous faites bien ça.
Mme Alende (Régine): Alors, pour le poids démographique du Québec au sein du Canada, nous avons... les statistiques montrent, comme vous le savez tous, qu'il y a une nette diminution de démographie, de poids démographique au Québec. Ça a passé de 27 % à 23 %. Alors, étant donné... cette nette diminution a des répercussions financières pour le Québec et des répercussions aussi politiques: alors, des répercussions financières comme la diminution des recettes budgétaires dans le cadre de péréquation et, en même temps, la qualité des services offerts, la qualité des services collectifs diminue; alors, du point de vue politique aussi, cette diminution pèse sur le poids politique du Québec. Alors, c'est pour cela qu'on dit: Il s'avère nécessaire d'envisager les mesures susceptibles d'enrayer le recul démographique au Québec au sein du Canada.
n
(17 h 30)
n
L'accroissement naturel. Comme on le sait, la fécondité diminue. D'ici une décennie, on aura un accroissement naturel négatif. Alors, qu'est-ce que nous avons dit? Pour parer à cette situation, il paraît opportun de recourir à une alternative incontournable que constitue l'apport migratoire, alors l'immigration au Québec par rapport au Canada. Face à la diminution du poids démographique, il n'est pas envisageable à court terme, en raison du très faible indice de fécondité. Il nous semble paradoxal que l'immigration au Québec, par rapport au Canada, décroît. Ça décroît, ça passe de 17 % à 16 %, et même il y a des statistiques qui parlent de 14 %. Et pourtant la fécondité diminue et la démographie diminue, mais maintenant l'immigration aussi diminue. Alors, nous croyons que le Québec devrait se servir de l'immigration comme un moyen privilégié pour retrouver sa position démographique au Québec.
L'enjeu linguistique face aux trois scénarios. La proportion des immigrants connaissant le français à leur arrivée augmente. Alors, nous pensons qu'il est bien, il est nécessaire de maintenir cette augmentation de la population francophone, mais, étant donné que cette augmentation est surtout attribuable à la croissance du nombre de travailleurs qualifiés et aux nouvelles compétences, nous pensons qu'il faille poursuivre cette politique en orientant l'augmentation du volume des admissions en faveur de l'immigration économique, et particulièrement celle en provenance des pays francophones.
Et l'enjeu économique face aux trois scénarios. Nous savons qu'il y a le vieillissement et que, d'ici 2006, il y aura libération de 650 000 emplois. Alors, maintenant le Québec devra pourvoir 640 000 postes, pour lesquels l'immigration devrait être mise grandement à contribution. C'est une recommandation, mais... c'est une proposition, mais cela ne suffit pas, cela ne nous réjouit pas pour autant qu'il y aura libération de 640 postes dans l'avenir, mais est-ce que l'immigration va en profiter? L'enjeu de la régionalisation. Le Québec est en déséquilibre, parce que maintenant il y a 78 % de la population immigrante qui vit à Montréal. Alors, le Québec ne veut pas être une province injuste. Il faut aussi compenser avec les régions. Ça, c'est bien. Mais ce que, nous, nous voulons, nous voulons que le Québec crée des incitatifs, des mesures incitatives en région pour que la population immigrante parte librement en région et non décider de vous-mêmes. Oui, nous voulons cette compensation-là, mais que ce soit sur base volontaire, et, s'il y a des mesures incitatives, mais il n'y a rien qui va m'empêcher de rester à Montréal si je n'ai pas de travail et qu'il y a du travail en Outaouais, comme on vient de le dire. Alors, c'est ça que nous voulons.
Mais maintenant le choix proprement dit de scénario. Il y a trois scénarios, et je vous ai montré le cheminement. Mais maintenant qu'est-ce que le Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes a choisi comme scénario? En raison des arguments évoqués ci-haut, nous recommandons fortement au gouvernement du Québec de privilégier le troisième scénario, à savoir une croissance du volume d'admissions actuel. Cette augmentation devrait se faire de façon particulière au sein de la catégorie des immigrants économiques.
Le Québec devrait user davantage de ses compétences en matière de recrutement et de sélection des immigrants pour accroître le nombre de ressortissants des pays francophones. Alors là, j'insiste, le Québec devrait user davantage de ses compétences en matière de recrutement, donner toute l'information nécessaire aux pays ? et avant que les immigrants arrivent ici ? et privilégier les ressortissants des pays francophones.
Le recrutement des immigrants francophones devrait accorder plus d'importance à la diversité de leurs origines, avec une particularité aux régions jusque-là défavorisées, notamment les pays francophones subsahariens. Il n'existe jusqu'ici qu'une seule représentation de la Délégation du Québec dans le Canada, à savoir Abidjan, mais qui ne traite pas des dossiers d'immigrants pour toute l'Afrique. Alors, s'il y a plusieurs bureaux d'immigration dans ces pays francophones, ça va alléger le travail d'immigration, ça va diminuer les délais d'attente de papiers, de visa, de résidence permanente, et ça va augmenter le nombre des immigrants au Québec d'ici 2006. Parce que, sinon, en 2006, il y aura des postes où il n'y aura pas de gens qui vont occuper ces postes-là.
La nécessité d'accroître le nombre d'immigrants en provenance de pays francophones va de pair avec la reconnaissance des acquis faits à l'extérieur, notamment l'expérience professionnelle et les diplômes. L'accroissement des immigrants devrait s'accompagner de mesures visant à renforcer complètement leur insertion sur le marché de l'emploi, étant donné que de nombreuses politiques ont été annoncées, mais leur application reste insuffisante. Je pense que plusieurs organismes qui sont passés avant nous ont parlé de ça, et vous savez déjà que les immigrants sont mal employés. Et les immigrants que le Québec recrute, ce n'est pas n'importe quel immigrant, ce sont des immigrants diplômés. Ils se trouvent ici avec de la surqualification. Même au Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes, 95 % de notre clientèle est constituée de filles immigrantes universitaires, et 90 % n'ont pas d'emploi ou bien sont sous-employées. Est-ce que le Québec va continuer avec cette politique-là ou bien il va améliorer cette politique-là?
L'accroissement des immigrants devrait s'accompagner de mesures visant à renforcer complètement... Là, c'est ce que je viens de dire. À titre d'exemple, les pratiques de discrimination tacite lors de recrutement et de promotion. On nous parle de ça, il y a de la discrimination tacite, on ne sait pas juger, on n'a pas de preuve au moment de recrutement et au moment de promotion, une sorte de prédilection des immigrants pour les emplois mal rémunérés, quelles que soient leurs compétences. Alors, c'est sûr qu'on met les immigrants, des ingénieurs, à faire des chauffeurs de taxi et des médecins à travailler dans les champs de fraises.
Le Président (M. Cusano): En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Alende (Régine): Alors, conclusion, la politique incitative à l'établissement en région devrait être renforcée en raison de dépenses connexes à l'accroissement du volume d'admissions actuel. Le ministère impliqué devrait prendre en compte les frais connexes à cet accroissement.
Le Président (M. Cusano): Merci, madame. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Bienvenue. Merci. Ce n'est pas facile à cette heure-ci, hein, alors nous apprécions d'autant plus votre présence parmi nous. Mais je retrouve la verve et la fougue de notre présentatrice. Vous avez beaucoup de passion, puis je vous félicite. À chaque fois que je vous rencontre, ça me frappe tout le temps, parce que vous en parlez avec tellement de coeur!
Mais j'aurais des questions à vous poser, cela dit, parce que, quand vous parlez du Centre de jeunes filles immigrantes, qu'est-ce que c'est «jeunes»? C'est combien jeune? C'est jusqu'à quel âge, «jeunes»?
Le Président (M. Cusano): Il ne faut pas poser cette question-là, Mme la ministre.
Mme Alende (Régine): Je m'en vais répondre à toutes les questions, et toutes les questions nous reviennent toujours. Alors, les jeunes filles immigrantes ici, l'âge, c'est de 12 à 35 ans. Alors, de 12 à 35 ans, pourquoi? On n'est pas en dehors de la marge de Québec, là on parle jusqu'à 30 ans. Alors, parfois on retrouve des filles, des jeunes femmes qui s'habillent comme des jeunes, qui n'ont pas de travail, qui sont à l'université, qui restent avec leurs parents, alors elles disent: Mais le Centre d'encadrement veut nous exclure, nous autres. Nous aussi, nous sommes jeunes! On n'est pas mariées, on ne travaille pas encore, on étudie, on est chez les parents. Alors là, les jeunes filles immigrantes, c'est âgé de 12 à 35 ans. Alors, c'est ça.
Mme Courchesne: Mais c'est des jeunes qui arrivent avec leurs familles généralement, là, ou... Est-ce que ce sont majoritairement de jeunes femmes réfugiées ou c'est des jeunes femmes qui arrivent avec leurs familles, c'est ça, de toutes les cultures? Ou si...
Mme Alende (Régine): Non, majoritairement, ce sont des jeunes filles qui arrivent seules. Il y a des jeunes filles qui arrivent avec leurs familles, mais il y a des jeunes filles qui arrivent seules. Alors, nous avons 128 pays qui sont représentés, et la plus grande partie, ce sont des Maghrébines, et puis de l'Afrique noire, et l'Asie, l'Europe de l'Est et puis l'Amérique latine.
Mme Courchesne: D'accord. Et c'est pour ça que vous dites que la majorité sont diplômées, c'est ça?
Mme Alende (Régine): Oui, diplômées.
Mme Courchesne: Donc, elles ont demandé résidence permanente en vertu du statut de travailleur qualifié, c'est ce que je comprends?
n
(17 h 40)
n
Mme Alende (Régine): Oui, oui.
Mme Courchesne: Et elles sont parties comme ça, toutes seules, et elles sont parmi nous?
Mme Alende (Régine): Oui. Nous, notre problème, on ne veut pas s'occuper des raisons pourquoi, comment est-ce qu'elles sont arrivées ici, elles sont réfugiées, elles ne sont pas réfugiées, mais elles viennent là pour être encadrées. Pour nous, elles ont leurs papiers, et, nous, nous ne les refusons pas. Nous laissons à l'immigration...
Mme Courchesne: Non, non, je comprends. Non, non, je comprends ça, là, puis le but de mon propos n'était pas celui-là. Le but de mon propos, ce n'était pas ça du tout, du tout. Mais j'essayais de comprendre, là, quel était le type de jeune femme, pour essayer d'identifier aussi le type de problématique. Parce que, moi, vous savez, hein, ce qui m'intéresse, ce sont les solutions. Alors, vous nous dites que vous avez élaboré... Vous avez consulté d'abord et vous nous dites: On a élaboré des plans d'action. Moi, j'aimerais connaître les principales mesures de votre plan d'action. Moi, j'aimerais ça que vous me disiez, là, en quoi il consiste, ce plan d'action là.
Mme Alende (Régine): Oui, mais le plan d'action que nous avons élaboré, ça consiste autour... je l'ai dit et peut-être que je l'ai dit rapidement, autour de quatre points principaux auxquels les jeunes filles veulent trouver des solutions.
Mme Courchesne: Quelles sont ces solutions?
Mme Alende (Régine): Alors, les quatre points principaux, c'est la formation, le maintien aux études, l'emploi et le maintien à l'emploi, l'entrepreneurship et la participation civique. Alors, nous, qu'est-ce que nous faisons chaque fois que nous abordons un point? Nous commençons par... cette année, avec le point de participation civique: alors, participation civique à la vie démocratique, la représentation de jeunes filles immigrantes dans les lieux de décision. Alors, qu'est-ce que nous faisons? Nous commençons par des activités incitatives, et ce n'est pas seulement des mesures incitatives, il y a aussi des activités incitatives. Alors, elles viennent à ces activités-là, comme je l'ai décrit.
Alors, ce que nous faisons aussi, c'est une recherche-action. On commence par la recherche-action pour trouver les causes et les barrières. Et, dans toute recherche-action, nous allons trouver des solutions à la fin, proposer les actions à la fin de la recherche-action. C'est cette année... C'est l'année passée que nous avons élaboré ce plan d'action, et nous sommes à notre deuxième... Nous faisons deux recherches parallèles: sur l'emploi et sur la représentation civique. Alors, les actions vont venir après, au bout de la recherche.
Mme Courchesne: Ah bon! D'accord. Comme par exemple, sur l'emploi, vous êtes en train d'élaborer les solutions et les actions. C'est ça?
Mme Alende (Régine): Oui, nous sommes en train d'élaborer les solutions et, s'il y a des gens à interpeller, nous allons interpeller, s'il y a des ministères à interpeller, nous allons les interpeller.
Mme Courchesne: Bien, oui, c'est beau, c'est un peu ça, là, le sens de ma question. Oui?
M. Touchene (Karim): ...prendre juste une minute, parce que je crois que, là, par rapport à l'ordre des recherches, c'est plus spécifiquement au niveau de la fonction publique municipale.
Mme Courchesne: Oui, d'accord, j'ai compris ça, là, sur la...
M. Touchene (Karim): Donc, par l'emploi en général.
Mme Courchesne: O.K., d'accord. Alors, pourquoi les jeunes femmes immigrantes ne sont pas employées, par exemple, par la ville de Montréal? C'est ce que vous dites?
M. Touchene (Karim): On a pris le cas de la ville de Montréal parce qu'on ne pouvait pas... il n'y a pas d'étude actuellement sur ça.
Mme Courchesne: Donc, ça veut dire que des solutions devraient normalement être élaborées avec la ville de Montréal?
Mme Alende (Régine): Oui, à la ville de Montréal. Et ce qu'on va proposer: s'il n'y a pas de filles immigrantes, qu'est-ce que la ville voit? Alors, ce que nous recherchons est qu'il y ait des filles immigrantes dans la fonction publique. Nous savons qu'elles sont compétentes. Si on ne peut pas aller par leurs compétences, mais peut-être qu'on va suggérer le système de quota. Il faut qu'elles soient représentées dans la fonction publique.
Mme Courchesne: Ce que vous dites, c'est que vous êtes prêts... possiblement, peut-être, que vous allez... Ce que vous appelez quota, vous appelez, j'imagine, discrimination positive, c'est-à-dire que vous allez demander, par exemple à la ville, de carrément favoriser l'embauche d'une jeune fille immigrante, j'imagine, à compétence égale, mais, à compétence égale, l'obligation de la ville de choisir une jeune fille immigrante. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire par le mot «quota»?
Mme Alende (Régine): Oui. Si jamais... Moi, je dis: On parle d'abord, on va, si on nous permet de regarder l'offre d'emploi, dire: Quelles sont les conditions de la ville de Montréal? Pourquoi? Et on va regarder, là, ces conditions. Est-ce que les jeunes filles ne sont pas là parce qu'elles ne sont pas compétentes? Pourquoi est-ce qu'il n'y en a pas? Il y a des jeunes filles immigrantes là-dessus... il n'y a pas de jeunes filles immigrantes là-dessus, alors on va suggérer qu'il y ait des jeunes filles immigrantes. Mais, s'il y a moyen... Parce que le quota, ce n'est pas moi qui en parle pour le moment, mais c'est votre politique aussi, on parle aussi de quota, je pense, là. Alors, on va suggérer qu'il y ait des...
Mme Courchesne: Non, non, on ne parle pas de quota. Je m'excuse, là, c'est très important de préciser que le gouvernement du Québec n'a jamais parlé de quota.
Mme Alende (Régine): Oui, mais, peut-être, nous, on va...
M. Opula (Lambert): Oui, je m'excuse. Oui. Je pense que l'essentiel du problème, ici, c'est de dire que nous sommes... sur ce dossier précis, nous sommes dans la phase de recherche. Parce qu'à travers cette recherche nous n'allons pas seulement nous limiter à constater la faible présence des filles immigrantes dans la fonction publique municipale, mais aussi chercher à voir si les filles elles-mêmes sont intéressées par ce secteur d'emploi et pour quelles raisons ne le seraient-elles pas.
On va aussi chercher à savoir quelle est la procédure d'information utilisée au niveau de l'Hôtel de Ville pour annoncer les vacances à pourvoir. Est-ce que le circuit de diffusion de l'information touche aussi le milieu des jeunes filles immigrantes? Si ça les touche, pourquoi ne sont-elles pas intéressées à demander ces genres d'emploi? Mais, si ça leur arrive de demander ces emplois, pourquoi sont-elles si rares dans ce milieu? Donc, on veut d'abord savoir qu'est-ce qui se passe et, avec tout le milieu concerné, chercher à savoir pourquoi, alors qu'il existe un certain nombre de mesures administratives, voire politiques, tendant à favoriser la présence des minorités invisibles, voire même des personnes féminines dans ces genres d'emploi. Mais, au niveau de l'application, on a l'impression que ça ne fonctionne pas.
Mme Courchesne: Oui, bien, je trouve ça intéressant parce que...
Le Président (M. Cusano): Brièvement, Mme la ministre.
Mme Courchesne: ...vous savez qu'on a le même problème dans la fonction publique québécoise: le taux de participation est faible. Mais ce qu'on remarque, c'est la difficulté de réussir les concours, et j'aurais été intéressée à voir si vous aviez des solutions par rapport à ça et quel type de concours et l'entrevue. Il y a le concours écrit, mais il y a aussi l'entrevue qui fait en sorte que souvent ce n'est peut-être pas adapté aux communautés culturelles. Malheureusement, mon temps est écoulé, alors on verra si on revient là-dessus après.
Le Président (M. Cusano): Je m'excuse, je dois passer maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe. Mais le député de Saint-Hyacinthe étant tellement généreux, peut-être qu'il peut permettre.
M. Dion: C'est exactement ce que j'allais dire. Alors, ma première question, c'est d'écouter la réponse que vous voulez donner à la question de la ministre. C'est vraiment... J'aimerais ça que vous puissiez continuer, là, ce que vous avez commencé.
Le Président (M. Cusano): ...
M. Touchene (Karim): Je crois que... Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais il y a un programme, donc, pour l'égalité d'emploi au niveau de la fonction publique, qui a été révisé en 1997, pour 33 %, pour le cas de la ville de Montréal, mais concernant les minorités visibles, mais 33 %. 25 % pour la ville de Québec. Mais la question qui se pose: Quelle est la part des jeunes filles dans ces 33 %? C'est ça, la question. Parce qu'il y deux cas: il y a un programme pour l'emploi des femmes, il y a un programme d'emploi pour les minorités visibles, il y a un programme pour l'emploi des anglophones et un programme pour les emplois des handicapés. Donc, dans ces quatre volets, on peut retrouver la femme immigrante. Dans les quatre volets, on peut retrouver la femme immigrante, mais réellement la femme immigrante en tant que telle, en tant que personne, quelle est sa part? Là, actuellement, il n'y a pas d'information, il n'y a pas de statistique sur ce point-là. Voilà.
Le Président (M. Cusano): M. le député de Saint-Hyacinthe, vous pouvez poursuivre.
M. Dion: Oui. D'abord, je veux vous remercier d'être là pour nous informer de toutes ces choses-là que vous vivez et qui peuvent nous aider à mieux comprendre la situation des immigrants, des immigrantes, en particulier des jeunes filles immigrantes. Et on a vu avant vous... Vous étiez là quand le groupe... des associations des femmes immigrantes de l'Outaouais sont venues devant nous, ils nous ont parlé de jumelage entre des femmes immigrantes et des femmes qui sont ici depuis longtemps, de génération en génération. Est-ce que vous avez tenté certains jumelages de ce genre-là entre les jeunes filles qui sont issues du Québec profond ou du Québec traditionnel et jeunes filles qui sont issues de l'immigration?
n
(17 h 50)
n
Mme Alende (Régine): Oui, ce que nous avons tenté, et ça a beaucoup réussi, et nous le faisons au travers de nos activités, nous avons des activités de cuisine et nous avons des activités de danse. Alors, c'étaient des activités qu'on a lancées comme ça. On a lancé la danse baladi, par exemple, et curieusement il y avait beaucoup plus de filles et de femmes québécoises qui se sont inscrites à ces activités-là. Et ça marche très, très bien. Alors, ça va qu'il y a la valorisation des cultures, d'une part. Et, d'autre part, les activités de cuisine, ce que nous faisons, c'est: un pays vient avec son plat, et puis il y a le chef cuisinier qui supervise, et tout, mesures... hygiène, et tout ça, et on prépare. Le pays explique c'est quoi, et puis on le met ensemble et on mange, et tout le monde... Je n'ai jamais vu, dans ces activités-là, personne refuser quelque chose venant d'autres. Par contre, on demande qu'est-ce qu'on a fait, et puis, dans l'activité suivante, il y en a, des femmes québécoises, qui sont parties appliquer ça. Évidemment, moi, je l'ai appliqué chez moi, et ça a réussi. Mes soeurs ont aimé, et j'ai invité toute ma famille.
Et on a trouvé que c'est une bonne occasion même de lutter contre le racisme. C'est une bonne occasion. Alors, à la fin, là, on a posé la question: Est-ce que le racisme existe au CEJFI? Mais tout le monde: Non, ça n'existe pas. Et, le 14 décembre, on a organisé un banquet multiethnique. Tous ces plats-là, on les a préparés. On a invité les personnalités politiques, et tout ça. Il y a eu plus de 130 personnes pour goûter ça, et on était à court de mains. Alors, nous trouvons que ces activités de jumelage, comme ça, ça marche, que de forcer les gens et dire: On va vous apprendre comment vivre ici, ou bien... C'est ça, ce sont des activités de jumelage que nous faisons.
M. Dion: Très intéressant. Alors, dans ces rencontres-là, évidemment c'est sûr que, ces filles-là, il y a beaucoup... Plusieurs filles vont devenir très amies, et tout ça. Est-ce que ces filles-là sont invitées à vos activités de formation pour les jeunes filles immigrantes? La question que je me pose, c'est: Est-ce que les jeunes filles immigrantes partagent avec les jeunes filles québécoises le genre de difficulté par rapport à l'intégration à l'emploi?
Mme Alende (Régine): Oui, je vois... Elles sont... Quand nous faisons nos activités, il y a des filles québécoises qui viennent souvent demander: Est-ce que je peux assister à vos activités? Alors, nous disons oui. Alors, ce qui fait notre... j'oublie le terme, là...
Une voix: Spécificité.
Mme Alende (Régine): ...spécificité est que nous prenons aussi le Québec et nous intégrons aussi ? bon, si je peux dire «intégrer» ? le Québec aussi dans nos activités. Et ça fait quelque chose de bien, d'homogène et qui fait la différence entre le CEJFI et les autres organismes, et tout ça. Je ne dis pas que nous sommes mieux, là. Nous sommes jeunes, là. Alors, ce que nous remarquons est que les jeunes filles et les jeunes femmes québécoises se mettent aussi à la recherche de solutions pour les filles immigrantes. S'il y a injustice... elles voient qu'il y a injustice, elles proposent des solutions. On lutte ensemble, avec le Québec, et là on n'est pas seuls.
M. Dion: Je vous remercie beaucoup. D'ailleurs, dans toute votre présentation, j'ai remarqué le haut niveau de responsabilité sociale dans la perception des problèmes. Ce n'est pas une perception pointue mais une perception qui vise à rayonner sur l'ensemble du Québec, et c'est très impressionnant. Je vous en félicite et je vous en remercie.
Mme Alende (Régine): Merci beaucoup.
Le Président (M. Cusano): Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Merci. C'est que, si je comprends bien, c'est des jeunes filles de 12 ans à 35 ans, une bonne partie, vous avez dit, qui avaient des études universitaires, ou en tout cas c'est des gens avec des grandes... Bon. Alors, j'imagine que la majorité d'entre elles, quand elles arrivent ici, soit qu'elles sont étudiantes universitaires ? une bonne partie, j'imagine ? et l'autre partie, ce sont des jeunes femmes qui sont en recherche d'emploi, qui sont venues seules et qui sont en recherche d'emploi. C'est ça, un petit peu, votre clientèle?
Mme Alende (Régine): ...aide sociale, tous les niveaux.
Mme Vermette: Oui. Mais... Oui, O.K., c'est ça. Et ce sont peut-être des jeunes filles, si je comprends bien, issues de familles, peut-être, ici, mais qui se sont retrouvées seules, à un moment donné, parce qu'elles ont laissé leurs familles et que finalement elles se retrouvent seules, sans argent et absolument rien. Ce n'est pas exclusivement des réfugiées qui sont dans votre...
Mme Alende (Régine): La plupart des jeunes filles qui arrivent, elles arrivent seules, elles n'ont pas de famille ici. Alors, le problème que nous avons, et la solution, ça se trouve de soi-même: il y a des jeunes filles immigrantes nées de parents immigrants ici et qu'à un certain moment de leur cheminement, de leur parcours, elles se retrouvent devant les mêmes besoins que les filles immigrantes. Et qu'est-ce qu'elles prennent comme décision? Il n'y a pas de différence entre vous et nous qui sommes nés ici: nous venons au CEJFI pour chercher, profiter de solutions que vous proposez aux autres aussi. Alors, nous avons des jeunes filles immigrantes ici de tous les niveaux: il y a celles qui ne travaillent pas, il y a celles qui ont des enfants, des monoparentales, et il y a des célibataires, il y a des travailleuses, mais pas beaucoup, là, et il y a des travailleuses sous...
Mme Vermette: ...
Mme Alende (Régine): Non, non. Beaucoup sont à la manufacture avec un salaire minimum, beaucoup à la manufacture, un travail précaire, un travail sans lendemain, là. Alors, c'est ça.
Mme Vermette: Alors, ça me fait mieux connaître votre organisme, parce que vous disiez qu'il y en avait beaucoup qui étaient avec des hauts niveaux de scolarité, hein?
Mme Alende (Régine): Oui, oui, oui.
Mme Vermette: Donc, généralement, c'est parce qu'ils ont fui, parce qu'il s'est passé quelque chose dans leurs pays, qu'ils n'ont pas pu continuer. Donc, ils s'en viennent ici avec l'espoir de pouvoir trouver. Alors, comme ce sont des... pour celles qui sont universitaires ou celles qui sont passées par des études à l'université, avez-vous des rapports avec les universités? Parce qu'on a déjà rencontré des gens, je pense que c'était à la ville de Sherbrooke, qui travaillaient beaucoup en collaboration avec l'université. Avez-vous des rapports avec les universités en ce qui concerne le placement étudiant, ou la capacité de trouver des emplois, ou de travailler avec des entreprises pour permettre à des jeunes finissants ou des jeunes diplômés de pouvoir trouver de l'emploi?
Mme Alende (Régine): ...de rapport avec l'université, surtout l'université... l'UQAM et puis l'Université de Montréal. Alors, ces jeunes filles qui arrivent avec des diplômes, la plupart ? on ne dit pas: La balle est dans tous les côtés, là ? elles ne veulent pas recommencer leurs études ici et prendre un diplôme et le mettre dans leurs valises, elles veulent trouver immédiatement de l'emploi. Mais, nous, ce que nous faisons avec elles, on les aide à trouver de l'emploi, mais pas nécessairement l'emploi qui correspond à son diplôme, parce que c'est l'emploi de soutien. Alors, quand elle travaille pendant un temps et que maintenant elle veut travailler pour utiliser son diplôme, on les réfère aux carrefours jeunesse-emploi. Mais, nous, c'est: on a comblé un besoin qui était immédiat, là. Alors, pour les étudiantes étrangères, nous nous sommes butés devant une difficulté: elles ne peuvent pas travailler ici, il faut une autorisation, et tout ça.
Le Président (M. Cusano): Merci. Avant de passer la parole à la députée de Chambly, puisqu'il est presque 6 heures, je présume qu'on va dépasser 6 heures, ou 18 heures, alors il me faut le consentement pour pouvoir continuer. Est-ce qu'à ma droite il y a consentement? À ma gauche, il y a consentement?
Des voix: Oui, ça va.
Le Président (M. Cusano): Oui? Bon. Alors, je cède la parole à la députée de Chambly.
Mme Legault: Merci, M. le Président. Je vais être brève. On a parlé tout à l'heure un peu des difficultés, là, puis on en a parlé beaucoup, pendant les travaux de la commission, du processus de reconnaissance des acquis puis de la formation de nos nouveaux arrivés. Et je me demandais: Avec l'expérience que vous avez, la lecture que vous faites du terrain, quelles solutions pourraient être mises d'avant pour faciliter le travail des ordres ou cette reconnaissance des diplômes?
Mme Alende (Régine): Mais c'est une question dont la réponse va provenir du Québec tout entier. Et on a eu la consultation avec Mme Courchesne, là, au mois de novembre, cette question a été soulevée. Dans toutes les conférences, la question est soulevée, et je ne pense pas que la réponse va venir du Centre d'encadrement pour jeunes filles immigrantes. Et maintenant je pense que, sur cette question-là, la réponse viendra d'en haut, par exemple. Parce que, même quand on a invité Mme Bakopanos, elle est venue, et il y a des députés qui sont venus, cette question-là, c'est difficile. On dit: Les ordres sont fermés, et même le gouvernement n'a pas de pouvoir sur les ordres. C'est vrai ou faux? On ne sait pas. Alors, c'est ça.
Et je ne pense pas que la solution... Nous, on veut la solution, là. C'est maintenant, là, on vous propose... Maintenant, on veut la solution, mais, si ça dépend de moi, là, mais toutes les jeunes filles immigrantes vont travailler, des infirmières, des médecins qui travaillent dans les champs, là, ils vont travailler demain. Et je pense que Mme Courchesne a fait un effort, là, avec 300 médecins. Alors, la prochaine fois, demandez-moi aussi les médecins qui sont les jeunes filles immigrantes; des médecins, j'en ai aussi. Parce qu'on se demande comment est-ce que vous avez fait pour prendre le 300, là, et pourtant nous avons des jeunes filles immigrantes médecins aussi.
n
(18 heures)
n
M. Opula (Lambert): Et je peux peut-être ajouter quelques mots. En fait, comme madame l'a dit, c'est une question difficile. Et il est vrai aussi qu'il existe deux formes d'employeurs: il y a le privé, il y a le public. Et, avec le privé, c'est difficile de pouvoir imposer une solution, parce que déjà nous sommes dans une société de la libre-entreprise, on ne peut pas prendre une décision au niveau du gouvernement sur ce que les entreprises devraient faire. Mais, néanmoins, le secteur public pourrait envisager certaines ouvertures, et nous savons que les cas comme celui des médecins, des ingénieurs, c'est très difficile parce qu'il y a des ordres très puissants qui mettent toujours des barrières, mais il y a aussi d'autres compétences qui ne sont pas organisées en ordre et pour lesquelles le pouvoir public aurait pu donner un exemple. Et je prends l'exemple de quelqu'un qui a eu une expérience dans la fonction publique, mettons, en environnement, dans des pays comme la France, disons, dans des pays où l'administration est très outillée, où on ne peut pas craindre que la personne ne soit pas directement opérationnelle. Je pense que la fonction publique pourrait donner des exemples d'embauche des personnes arrivées avec un certain bagage, une certaine compétence pratique et organiser une certaine promotion autour de ce genre de chose. Une fois que des exemples sont donnés et qu'ils connaissent des promotions, ça peut aussi se propager vers d'autres sphères sous forme de tache d'huile.
Le Président (M. Cusano): Est-ce qu'il y a d'autres questions à ma droite? Oui, Mme la ministre.
Mme Courchesne: J'apprécie beaucoup votre commentaire, le dernier, parce que c'est sûr qu'on se questionne par rapport à nous-mêmes et par rapport justement à cette capacité des immigrants, immigrantes dans ce cas-ci... ce que je disais plus tôt, de réussir les concours, ce qu'on constate... D'abord, la fonction publique embauche beaucoup moins qu'elle embauchait, hein, ça, il faut se dire ça; depuis 10 ans, il y a eu beaucoup moins d'embauche dans la fonction publique, mais il y a quand même cet obstacle des concours. Ce qu'on constate, c'est que c'est très difficile de réussir parce que c'est tout le code, le code de travail, de la façon de travailler. Les questions qui sont posées ne sont pas nécessairement celles qui sont les mieux comprises, soit à l'écrit ou soit à l'entrevue, et je pense qu'on a un effort à faire de ce côté-là et qu'au fond... ce que j'entends de la commission parlementaire depuis trois semaines, c'est ça, c'est qu'il faut peut-être revoir notre façon de présenter les concours à... Puis là c'est à tous les immigrants, ce n'est pas plus un que l'autre, là. Je vous dirais que même les Français de France ont parfois des difficultés à être capables de répondre adéquatement parce que les façons de faire ne sont pas les mêmes et les questions sont posées beaucoup en fonction des façons de faire. Je crois que vous aviez un commentaire, je ne veux pas vous...
Le Président (M. Cusano): M. Touchene.
M. Touchene (Karim): Pour rejoindre ce que vous avez dit, il y a une étude qui a été faite par CAMO, une étude qui a été faite par CAMO-PI concernant ce point-là précis, c'est-à-dire les concours dans le cadre de la fonction publique. Mais c'est une étude qui est restée sans réponse, c'est-à-dire ils ont présenté les concours, les spécimens de concours, ils ont donné le nombre de personnes, de candidats aptes, mais, en dernier... c'est-à-dire le nombre de personnes qui ont réussi, mais les raisons, ils ne les ont pas avancées. Donc, je crois qu'on reste... on est encore... le problème reste toujours posé ou bien la question reste encore posée. Mais je vous signale qu'il y a une étude qui a été faite dans ce sens par CAMO-PI.
Une voix: ...
M. Touchene (Karim): Tant mieux.
Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Oui. Bonjour. On parle d'incitatifs. Je vous trouve un emploi à Saint-Pamphile dans le comté, chez nous, à 100 km en haut du fleuve, une population de 3 000 habitants, un terrain de golf. Dans votre profession, est-ce que vous venez chez nous?
Mme Alende (Régine): Bien oui. Je voudrais répondre. Alors, ma réponse est oui, je viendrais, parce que qu'est-ce que je gagne en restant à Montréal avec le salaire minimum ou bien à l'aide sociale... et, qui sait, je vais améliorer mon niveau de vie à 1 000 km d'ici. Et j'irais parce que ça me valorise. C'est ça, l'humain. Et je ne vois pas qui peut refuser, à moins qu'il y ait des raisons vraiment fortes pour que la personne ne parte pas là-bas. Mais je ne dis pas qu'en allant là-bas il n'y a pas... il faut s'y préparer, les régions à recevoir les immigrants, parce qu'il y a des cas... on a appris beaucoup de choses qui se font là-bas. C'est pourquoi, l'autre fois, avec Mme Courchesne, là, moi, j'ai dit... je parlais de la déportation. Je ne veux pas déporter les immigrants, en quelque sorte. Et ma demande, ce n'est pas la déportation que nous faisons, mais on va aller préparer aussi les régions à nous accueillir.
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Est-ce que vous connaissez les emplois disponibles en région?
Mme Alende (Régine): Je ne dis pas que je les connais maintenant, mais, si je veux les connaître, je peux les connaître.
M. Opula (Lambert): Oui. Les emplois sont connus, d'autant plus que maintenant, avec le système de recherche par Internet, c'est pratiquement à la disposition de tout le monde, et je peux vous informer que certains de mes compatriotes qui ont trouvé du travail dans les territoires du nord sont partis. Donc, on ne voit pas comment quelqu'un qui est là depuis cinq ans à la recherche d'un emploi et il ne trouve pas et qu'il apprend: Vous aurez un emploi à 1 000 ou 1 500 km de Montréal... c'est à la première heure qu'on partirait. On ne resterait pas à Montréal parce qu'on a le plaisir de rencontrer les siens. Tout le monde sent ce besoin-là de se valoriser au sein de la société.
Mme Alende (Régine): Tout le monde a dû vivre son deuil en se séparant de son pays, alors...
M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci.
Le Président (M. Cusano): Avez-vous terminé, M. le député? Oui? Il vous reste une minute, Mme la ministre.
Mme Courchesne: Ça va.
Le Président (M. Cusano): Ça va bien? Est-ce qu'il y a des questions à ma gauche?
M. Dion: Non, merci. C'était très intéressant.
Le Président (M. Cusano): Non. Alors, merci. Alors, à ce moment-ci, j'aimerais vous remercier de votre participation et d'être venus ici, à Québec, et bonne chance dans vos travaux.
Et avant d'ajourner nos travaux, je voudrais rappeler aux membres de la commission que demain matin, 9 h 30, il y a une séance de travail, demain matin à 9 h 30, c'est au 3.31 pour ceux qui ont la mémoire courte.
Alors, j'ajourne les travaux de la commission au mercredi 25 février, à 14 heures, dans la salle du Conseil législatif.
(Fin de la séance à 18 h 7)