(Neuf heures trente-sept minutes)
La Présidente (Mme Hamel): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission est de tenir une consultation générale à l'égard du document intitulé La planification des niveaux d'immigration 2005-2007. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Aucun, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hamel): L'ordre du jour d'aujourd'hui est le suivant. Cet avant-midi, nous entendrons Accès travail et la ville de Sherbrooke. Vous noterez qu'en raison d'un désistement tardif nous suspendrons à 11 h 30. Cet après-midi, nous entendrons la Jeune Chambre de commerce de Montréal, la Chambre de commerce de Lévis, le Conseil des relations interculturelles et la Confédération des syndicats nationaux.
Alors, mesdames, si vous voulez prendre place. Je vous souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale et je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour faire votre présentation, la présentation de votre mémoire, puis ensuite il y aura un échange de 20 minutes de chaque côté en périodes, en blocs de 10 minutes. Alors, la parole est à vous, madame.
Auditions (suite)
Accès travail
Mme Coutel (Catherine): Merci. Merci, Mme la Présidente. Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, donc, mon nom est Catherine Coutel. Je suis conseillère en emploi et agente de liaison auprès d'Accès travail. Mon travail consiste principalement au projet et au volet de la régionalisation.
Donc, dans un premier temps, j'aimerais vous faire une brève description de mon organisme. Donc, Accès travail est un organisme sans but lucratif impliqué depuis 1984 en intégration et en maintien en emploi pour des clientèles faisant face à des barrières systémiques, donc les jeunes fortement défavorisés, des personnes de 45 ans et plus, les personnes immigrantes et des chômeurs, et chômeurs de longue date.
Donc, Accès travail a développé une expertise auprès des personnes immigrantes depuis environ 1996, avec l'arrivée du territoire... au Centre-du-Québec des réfugiés de l'ex-Yougoslavie. Donc, on est mandaté depuis par le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration pour dispenser des services spécialisés de qualité aux nouveaux arrivants qui s'établissent dans la région des MRC d'Arthabaska, de L'Érable et de Bécancour.
n(9 h 40)n Donc, à ce niveau-là, pour Accès travail, comme je le disais précédemment, je travaille en régionalisation. Mon travail consiste principalement à faire la promotion du Centre-du-Québec auprès des nouveaux arrivants, et principalement en partance de Montréal. Donc, ce que je fais ? je vais décrire un petit peu mon travail ? c'est que je me rends à Montréal, je fais la promotion du Centre-du-Québec. Suite à ça, je rencontre des nouveaux arrivants qui sont éventuellement intéressés à intégrer la région ou des régions.
Jusqu'à maintenant, nous avons... Le projet de régionalisation a commencé officiellement il y a un an, et on relève des problématiques déjà à l'heure actuelle, des problématiques, des réticences qui viennent, qui émanent de la part des personnes immigrantes qui sont installées à Montréal et des réticences aussi au niveau des employeurs. Donc, j'essaierais d'expliquer les réticences qui émanent des personnes immigrantes à Montréal dans un premier temps et, ensuite, je viendrais au niveau des entreprises.
Il est sûr et certain que les personnes immigrantes que je rencontre à Montréal ont déjà fait une première migration, donc celle de partir de leur pays et de venir s'installer. Ils arrivent pratiquement tous à Montréal et ils s'installent dès leur arrivée dans un grand centre urbain. Il est sûr et certain que d'arriver à présenter dans un court délai à ces personnes nouvellement arrivées l'option d'une deuxième migration automatiquement, au départ, c'est une grande problématique, parce que le défi de partir d'un pays pour arriver dans un autre pays est déjà... demande énormément d'énergie, demande déjà énormément une volonté d'intégration, une volonté d'adaptation. Et on les installe à Montréal, on commence à les adapter à un certain milieu, et surtout à un milieu qui a énormément de services, hein, il faut s'entendre. Les régions ne peuvent pas offrir les mêmes services qu'on retrouve à Montréal, le transport en commun, etc. Donc, ils s'habituent déjà à tous ces services-là et, en plus, ils commencent à se créer un réseau, un réseau dans la communauté de Montréal.
C'est sûr et certain que tout immigrant qui arrive ? surtout, moi, je parle au niveau des immigrants indépendants, il faut s'entendre, et souvent ils parlent la langue ? le premier défi, ça va être la recherche d'un emploi. Les personnes immigrantes qu'on reçoit présentement, c'est des personnes qui sont qualifiées. Donc, c'est des personnes spécialisées ou sinon professionnelles. Donc, l'emploi qu'ils vont rechercher, c'est en lien avec leurs compétences. Depuis leur arrivée à Montréal, ce qu'on peut constater, c'est qu'ils ont de grandes difficultés à faire reconnaître leurs compétences, même leurs diplômes. Donc, automatiquement, ils ont commencé déjà à entrer en choc. Donc, entrer en choc, j'expliquerais, c'est le choc du fait qu'ils ne sont pas reconnus, ils ont de la difficulté à trouver des entreprises, à entrer en lien avec les entreprises, ils n'ont pas ou peu d'information sur le marché du travail ici. Donc, automatiquement, moi, en me présentant devant eux, en leur offrant une deuxième chance, entre guillemets, de trouver un emploi, ils deviennent très... ça devient très conditionnel. Je m'explique.
Souvent, la première question que je vais me faire poser par ces immigrants, c'est: Qu'est-ce que vous avez de plus à m'offrir? Donc, aussi, je leur parle d'une qualité de vie. Que je leur parle de logement, que je leur parle d'une vie autre que Montréal, donc une vie familiale, et tout ça, je les atteins très peu, parce que les gens que j'ai en avant de moi, ce qu'ils veulent entendre, c'est parler de travail. Donc, si je les amène à parler travail, ils vont... la première chose que je leur demande souvent, c'est: Comment vous faites votre recherche d'emploi ici, à Montréal? Et on se rend compte très vite que ces personnes-là cherchent le travail, mais toujours en référence avec leur propre culture de travail antérieure. Et ils prennent et ils font... Leur façon de fonctionner en recherche d'emploi ressemble énormément à leur recherche d'emploi qu'ils faisaient auparavant dans leur pays, et ce qui ne ressemble pas du tout à notre recherche d'emploi à nous.
Donc, je vais vous donner comme exemple, une personne va me dire: J'envoie... Je regarde les offres d'emploi, j'envoie mon C.V. Et je leur dis: Et après? J'attends. Et quand on sait très bien qu'au Québec il y a... le marché ouvert ? ce qu'on appelle le marché ouvert, c'est toutes les annonces qui apparaissent dans les journaux, les guichets d'emploi ? c'est 20 % des emplois disponibles. On a 80 % des chercheurs d'emploi qui cherchent dans ce 20 %. Et, en contrepartie, on a 80 % des emplois qui sont cachés, il faut aller les chercher. Et on a 20 % des gens qui cherchent dans le 80 %, et, moi, je mise... Le marché ouvert, j'y vais. Comme toute conseillère en emploi, je vais y aller, mais très peu. Ce n'est pas là que je vais viser. Et ce n'est pas là que je vise pour mes candidats, mes candidates, les gens avec lesquels je travaille pour les insérer en emploi, je vais viser sur le 80 % de marché caché. Mais, en contrepartie, automatiquement, la participation de la personne immigrante à ce 80 % d'emplois cachés devient en contradiction avec sa propre culture de recherche d'emploi.
Donc, il y a une notion que je voudrais amener ici ce matin, on parle énormément ? et je suis le dossier, c'est normal, ça me tient à coeur ? on parle énormément d'intégration des personnes immigrantes, mais je pense qu'il y a une notion qui est importante aussi, c'est l'adaptation, et elle est oubliée. On ne peut pas penser à intégrer des personnes immigrantes qui n'ont pas reçu les éléments essentiels de leur adaptation première. Et je parle: au marché de l'emploi. Si on parle au niveau social, ce sera un autre volet, mais, moi, mon volet, c'est le marché de l'emploi. Donc, pour arriver à adapter une personne immigrante au marché du travail d'ici, il faut qu'elle soit appuyée, qu'elle reçoive les éléments essentiels d'un bon chercheur d'emploi. Et ça, pour moi, c'est une lacune qui est évidente. Ces gens-là vont faire une recherche d'emploi, ils envoient des masses, des tonnes de e-mails, de fax, ils sont en attente de réponses et, quand l'employeur ne leur répond pas, à ce moment-là ils sont réactifs. D'accord?
Donc, il y a une autre notion qui s'ajoute à ça, c'est la notion du racisme. Je suis en accord qu'il y a... Oui, il y en a, du racisme. Il ne faut pas se leurrer, il y en a dans tous les pays. Mais il y a une notion que, moi, je pourrais appeler le choc des cultures, et ça, c'est une notion que, moi, je... que j'appuie là-dessus, parce que, quand une personne n'a pas de réponse d'un employeur, automatiquement elle me dit: C'est du racisme. C'est mon nom, c'est parce que je viens de l'extérieur, c'est parce que les employeurs ne veulent pas d'immigrants. C'est que vous nous avez fait venir ici, puis on ne voulait pas de nous. Et automatiquement cette personne-là est en choc culturel. Si je m'assois avec elle et que je lui brosse le tableau d'un chercheur d'emploi d'ici qui... Eux aussi envoient des... répondent à des offres d'emploi et restent en attente; il n'est pas différent des autres, il est un chercheur d'emploi.
La lacune première qu'ils ont ? et c'est incontournable ? c'est que leurs compétences, c'est sûr, sont difficilement reconnues. Et ça, une personne qui ne peut pas se faire reconnaître ses compétences, c'est qu'on ne reconnaît plus rien en elle. C'est souvent des professionnels qui arrivent, qui avaient un statut... qui arrivent ici, se retrouvent souvent prestataires de la sécurité du revenu. Le statut, ils l'ont plus que perdu. Ils sont immigrants, donc ils sont en... Ils doivent faire le chemin, se faire reconnaître et, de l'autre côté, ils sont en plus marginalisés, d'une certaine façon. Il faut qu'on s'entende, que la population en général, quand on voit une personne qui est prestataire de la sécurité du revenu, on a un léger recul. Il y a toutes sortes d'idées préconçues sur les prestataires de la sécurité du revenu, et ils en sont eux-mêmes dans cette partie-là.
n(9 h 50)n Donc, cette personne-là est en réaction. Le problème qu'on a, c'est de faire reconnaître les compétences. Ça fait drôle un petit peu, parce qu'on est à l'ère des communications, on a de la difficulté à communiquer présentement. J'ai de la difficulté à communiquer avec les gens qui devraient s'investir avec moi, là, au niveau de l'intégration de ces personnes. On parle de 640 000 emplois, si je me trompe ? ça se peut, là, mais en somme ? en gros. Je crois que, à partir de là, c'est un problème de société qu'on va... et on va de plus en plus vers ça. Ça fait quelques années qu'on en parle, et je n'ai pas vu encore vraiment de changement des personnes qui sont concernées.
Ici, on parle de la Commission de la culture qui est concernée par le problème d'intégration des immigrants, mais aussi vous êtes interpellés par les problèmes éventuels qu'on va connaître au Québec. Mais, pour ma part, vous n'êtes pas seuls, vous avez aussi le marché de l'emploi qui est interpellé, vous avez le ministère de l'Éducation qui est interpellé, vous avez le ministère de la Santé qui est interpellé. Tous ces travailleurs qui potentiellement pourraient éventuellement participer activement à la société québécoise, à son enrichissement, sont des prestataires, pour la majorité... sont des prestataires de la sécurité du revenu.
Et ce qui m'aberre un peu, c'est que, en contrepartie, que nous, les gens qui travaillons auprès de ces personnes-là pour arriver à trouver des moyens et à trouver surtout du financement adéquat pour être en mesure d'établir des programmes gagnants, donc des mesures adéquates pour susciter l'intégration de ces personnes-là en emploi... parallèlement à nous, on voit des gens se débattre à... en fin de compte, de trouver des budgets. Je ne suis pas contre la rétention des employés plus âgés du marché du travail, de la rétention qu'on veut faire au niveau de l'emploi. On veut éventuellement garder nos travailleurs âgés plus longtemps en emploi. J'en suis d'accord, jusqu'à une certaine une limite, mais ce que je trouve un petit peu aberrant, c'est que j'ai un potentiel de main-d'oeuvre de jeunes, ça veut dire de jeune génération, des gens dans la trentaine en moyenne, qui sont prêts, qui sont dynamiques, qui pourraient faire en sorte de faire un bassin de travailleurs potentiels et pour un grand... pour quand même peut-être 30 ou 40 ans à venir, et qu'on n'axe pas assez là-dessus, mais on veut axer sur la rétention d'un travailleur qui, peut-être, aura 50 ans et, peut-être, sera fatigué et devra travailler autrement. Mes jeunes sont dynamiques, mes jeunes immigrants, mais sauf que j'ai peu de moyens pour les supporter.
Donc, au niveau de la personne immigrante, c'est ce qu'on retrouve souvent. On les incite à rechercher de l'emploi en région. Vu qu'ils connaissent mal le marché de l'emploi et ils connaissent mal la façon de chercher en région, surtout parce qu'ils ont déjà de la difficulté à chercher à Montréal, donc, automatiquement, le projet de régionalisation, ce qu'on peut s'apercevoir, c'est qu'il est reçu comme une opportunité. Et je m'explique là-dessus.
C'est que je m'en vais à Montréal, je fais la promotion du Centre-du-Québec avec un agent. Suite à ça, je recueille les curriculum vitae de ces personnes-là, j'analyse les compétences. C'est moi qui rejoins les employeurs, je leur offre les compétences. Je rejoins le candidat, je lui dis où j'ai envoyé son C.V., avec qui j'ai parlé. C'est moi qui vais faire la relance, c'est moi qui décroche l'entrevue, c'est moi qui l'amène à l'entrevue, c'est moi qui... Donc, ces personnes-là me reçoivent comme une opportunité, en fin de compte comme une ramification à leur propre recherche d'emploi qu'ils font à Montréal. Donc, je suis un plus à leur recherche d'emploi.
Le fondement de la régionalisation n'est pas reçu, dans son fondement, de dire: Je m'investis, j'ai le goût d'aller vivre en dehors de Montréal, alors je mets tous mes efforts à l'extérieur, vers cette région que j'ai choisie. Et c'est assez comprenable aussi, parce que, si on pense à une deuxième migration, c'est difficile. Ce n'est pas difficile juste pour le client, c'est difficile pour la famille. Ça implique énormément de volonté, et leur volonté a déjà été cassée à l'arrivée. Alors, on demande un second souffle.
Au niveau des entreprises, donc, ce que j'arrive à me rendre compte, c'est que souvent les entreprises, ils vont... Antérieurement, l'immigrant arrivait, on disait: Bon, on engage un homme, en n'engage pas un papier. Aujourd'hui, il faut qu'on prouve par le papier, souvent, qu'on est qualifié pour intégrer un emploi. Donc, je parle de diplômes. Le diplôme est émis... Dans un premier temps, l'équivalence est faite par le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Donc, automatiquement, il est validé, il est... Bon, toutes les opérations sont faites pour voir qu'est-ce que c'était, la correspondance entre ce qu'ils ont étudié et ce qu'il y a ici. Sauf que les entreprises, dans notre système actuel, ce qu'on reconnaît souvent dans un diplôme, c'est le sceau du MEQ, et on ne peut pas... je ne peux pas dire à un employeur: Oui, ce papier-là est valide, par le ministère de l'Éducation du Québec. Automatiquement, je crée déjà un questionnement auprès des entreprises: Comment se fait-il que, si la personne est compétente, qu'elle a suivi des cours, que ses cours sont correspondants à notre système actuel, que le sceau du MEQ n'est pas encore apposé? Pourquoi le ministère de l'Éducation a des réticences à vouloir faire ça? Ça, c'est une première question.
Une deuxième question, c'est que l'entreprise ? on est en région ? elle me dit: Ton candidat est où? À Montréal. Pourquoi, qu'il dit... Pourquoi ton candidat te dit qu'il est intéressé à ici s'il n'est pas ici? Donc, je commence encore à réexpliquer, en fin de compte, la venue de cet immigrant-là, et tout ça. Et ça, là, ça devrait être des choses qui auraient dû précéder... Je m'excuse, mais avant l'entrée... de monter les taux d'intégration des immigrants, ça aurait dû être une des choses premières qui auraient dû être enseignées au niveau de la société québécoise, au niveau surtout du milieu du travail, pourquoi on fait venir ces gens-là, pourquoi on veut augmenter les taux, d'où ils viennent, d'où ils partent, pourquoi ils viennent, etc. J'ai même des questions qu'on va me demander: Est-ce qu'ils sont... Est-ce que ces gens-là sont légaux? Donc, c'est beaucoup... Les employeurs n'ont pas axé... ne se sont pas focussés sur l'immigration, ils se sont focussés, dans les dernières années, à maintenir leur entreprise sur le marché de l'emploi, sur les marchés internationaux. Et aujourd'hui je leur arrive en leur disant: Il va y avoir 600 quelques mille emplois qui vont manquer, il faut être proactif, et, moi, je vous présente une nouvelle clientèle, les immigrants.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Coutel, permettez-moi de vous préciser qu'il vous reste un peu plus de deux, trois minutes.
Mme Coutel (Catherine): Oh, mon Dieu!
La Présidente (Mme Hamel): Alors, si vous voulez conclure.
Mme Coutel (Catherine): Je vais faire ça.
La Présidente (Mme Hamel): Merci.
Mme Coutel (Catherine): Mon Dieu! qu'il y en aurait à dire. Je m'excuse. Bon. Donc, l'entreprise n'est pas prête, parce qu'elle manque d'information elle-même. Elle n'a pas de reconnaissance, elle n'a pas de prise de référence au niveau ni des compétences ni des références de cette personne-là qui arrive. Donc, c'est une problématique pour l'entreprise.
Pour nous, au niveau du travail, la problématique, bien c'est d'avoir et d'obtenir les outils adéquats pour pouvoir soutenir tant bien l'entreprise que le candidat, donc de faire des... d'arriver à faire l'arrimage réussi. Et ça, là, ça dépend de bien des facteurs, et ça dépend toujours d'une volonté d'adaptation première, des outils qui vont être adéquats pour susciter l'adaptation et les harmoniser au milieu du marché du travail et, ensuite, les intégrer. Donc, c'est ce qui nous manque énormément présentement. Et depuis qu'on attend... Et, si on attend encore, je pense que, à ce moment-là, on va peut-être être rendu un peu trop loin, ça va être beaucoup trop dur à reprendre.
Parce que, veux veux pas, avec le temps, ces personnes-là s'usent, ces personnes-là deviennent légèrement sinon aigries, et les employeurs, de l'autre côté, font des pieds puis des mains pour essayer de voir qu'est-ce qu'ils vont faire pour arriver à pallier au manque de mise à niveau des candidats que je leur présente. Beaucoup de travail à faire. On est prêt à le faire, mais c'est sûr et certain que je manque d'outils, et c'est ce que je viens essayer d'obtenir. C'est ce que je viens susciter d'intérêt envers nous, de nous outiller pour être en mesure de répondre aux besoins.
La Présidente (Mme Hamel): Je vous remercie, Mme Coutel, pour votre présentation. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Mme Coutel, c'est la deuxième fois que je vous rencontre, puis, je vous le dis, là, ce matin, vous m'avez encore au coeur comme la première fois. Vous êtes quelqu'un qui avez beaucoup de conviction, de passion, mais vous êtes surtout quelqu'un qui connaissez tellement bien votre terrain. Vous savez de quoi vous parlez et vous le documentez, vous êtes très précise dans vos remarques.
Et je peux vous dire que j'apprécie encore une fois... La première fois, vous aviez parcouru une distance pour venir me rencontrer. Puis, ce matin, vous parcourez encore une même distance pour venir rencontrer mes collègues parlementaires avec moi. Et je veux sincèrement vous remercier pour votre témoignage et surtout vous dire que, la première fois, je vous ai entendue. Je ne vous ai pas écoutée, je vous ai entendue, et la même chose aujourd'hui.
n(10 heures)n Et vous savez comment je vais mettre beaucoup, beaucoup d'espoir dans ce plan d'action qu'on va définir, parce que, je vais vous dire franchement, ce plan d'action là, il va être vraiment à l'intention de gens, de personnes comme vous et d'organismes comme le vôtre, parce que la régionalisation, j'y crois, j'y crois dans la mesure du réalisme. Et ce que je crois surtout, c'est que vous avez raison: on n'a pas, au cours de toutes ces années, défini de moyens précis et concrets pour vous aider dans ce sens-là. Tout en se disant, par ailleurs, que vous avez raison aussi, c'est, je le répète, une responsabilité partagée, il faut qu'il y ait une concertation entre tous les intervenants.
Victoriaville est une ville que je connais bien, très, très bien. Mon fils y a vécu; donc, toutes les semaines, je suis allée à Victoriaville pendant presque deux ans. Je connais son dynamisme, mais je vous sens loin, je vous sens très loin. À chaque fois que vous venez nous rencontrer, c'est ce que je ressens.
Et vous touchez des bons points, comme, par exemple, le fait que vous allez chercher votre bassin à Montréal. Je comprends que, ces gens-là, leur demander de redéménager une deuxième fois dans le Centre-du-Québec, c'est loin d'être évident. Ce que vous nous suggérez, avec raison, c'est de dire: Est-ce qu'on ne peut pas dès le départ dire à ces gens-là... et les intéresser dès le départ à s'installer chez vous, avec un organisme comme le vôtre et d'autres qui pourraient prendre charge, et ça ferait cette étape-là de moins, et vous auriez des énergies pour directement faire le lien avec les employeurs? C'est ce que je comprends de votre présentation.
J'aimerais ça qu'on... parce que vous savez à quel point pour moi le nerf de la guerre, c'est l'emploi. Bon, la francisation, je le répète, c'est très important, mais, bien qu'on ne soit pas parfaits, là, on a un bon bout de chemin de fait puis on pense qu'on va encore améliorer, mais on sait assez bien, là, qu'est-ce qu'on doit corriger. Mais le nerf de la guerre, c'est l'emploi.
Moi, j'aimerais ça que vous nous disiez ce matin quelles sont les véritables réticences. C'est-à-dire, comment on peut s'assurer que les employeurs vont vous et nous suivre? C'est-à-dire, qu'est-ce qui serait le plus urgent à mettre sur pied dans votre région pour faciliter, là, la réponse des employeurs? Parce qu'il y en a, des besoins dans votre région, là; vous êtes une région où il y en a, de l'emploi. Or, qu'est-ce qu'on peut, de façon importante et urgente, là, offrir aux employeurs pour vous aider?
Mme Coutel (Catherine): Bien, disons que, au niveau de mon document, je l'avais spécifié...
Mme Courchesne: Oui, oui, je...
Mme Coutel (Catherine): ...je le réitère encore une fois...
Mme Courchesne: Oui.
Mme Coutel (Catherine): ...et je le réitère souvent, et c'est un incontournable: Au niveau des compétences de ces personnes-là qui ne sont pas reconnues, il faut dire que... je vais donner un exemple très simple, je vais prendre un électromécanicien. Qui dit électromécanicien dit mécanique-électricité, on s'entend. Au niveau mécanique, cette personne-là, elle se présente: Je suis électromécanicien, j'ai une reconnaissance de diplôme émanant du MRCI comme électromécanicien; oui, les cours sont correspondants. Sauf que souvent, exemple, au niveau de l'emploi, ce que je fais, moi, j'ai pris des candidats... j'ai pris des rendez-vous avec les entreprises, je suis allée m'asseoir, même dernièrement ? la semaine passée ? et j'ai demandé à l'entreprise de discuter avec la personne pour aller voir ce qu'il avait fait et ce qui se faisait ici.
Et la lacune n'est pas au niveau mécanique, souvent, parce que... Bon. O.K., ils ont travaillé souvent sur des machines peut-être, disons, européennes ? ici, c'est plus nord-américain ? mais, au niveau mécanique, ça s'adapte très rapidement.
Au niveau électrique, c'est différent, c'est différent, le niveau de voltage, etc. Je ne pourrais pas tout vous expliquer, parce que je ne suis pas électromécanicienne, mais, au niveau du voltage, on sait très bien qu'en Amérique du Nord on a une différence.
Donc, à ce moment-là, c'est un incontournable de dire: Il faut absolument mettre à niveau cette personne-là au niveau électrique pour qu'elle puisse pleinement appliquer des compétences en entreprise.
Mme Courchesne: Ce que vous favoriseriez, c'est, par exemple, des stages de préemployabilité...
Mme Coutel (Catherine): Voilà. Voilà.
Mme Courchesne: C'est un peu ce que vous dites. C'est que, au fond, il faudrait peut-être mettre sur pied des programmes en partenariat avec les entreprises, avec une forme de financement des uns et des autres, pour essayer de prévenir ou de donner la formation prérequise avant qu'ils commencent l'emploi ou une fois qu'ils sont intégrés en emploi.
Mme Coutel (Catherine): C'est ça. Moi, ce que je préconise, c'est des stages justement, des stages au niveau d'aller valider les compétences tant génériques que spécifiques. Parce que les compétences spécifiques, c'est bien; les compétences génériques souvent relèvent du savoir-être aussi. Il ne faut pas oublier que, si vous parlez avec des entreprises, elles vont dire: Amenez-moi la personne la plus compétente sur un poste de travail. Si elle n'a pas de savoir-être, ça ne fonctionnera pas, aussi. Donc, moi, j'en viens à ça, Mme Courchesne, parce qu'on a fait, nous... En tout cas, antérieurement, on a fait un projet pilote qui s'appelait Parcours pour jeunes personnes immigrantes, et c'est moi qui y ai travaillé. On a pris 25 candidats jeunes, des immigrants qu'on avait intégrés en emploi, et on est allé voir, après trois ans, où ils en étaient au niveau de leur employabilité. Et, par ça, on a établi d'aller valider, d'aller faire... des instruments de validation de compétences génériques et spécifiques à l'emploi en lien avec l'objectif de développement de carrière pour cette personne-là.
On s'est rendu compte que... et tout ça avec les entreprises, et elles participaient activement à ça, et, par ça, on a réussi justement à travailler le savoir-être, s'il y en avait qui en avaient besoin, parce qu'il y en a qui en ont besoin. Et ceux qui avaient besoin de savoir-faire, on a commencé à essayer justement de trouver des pistes de formation sinon internes ? on essayait le plus possible que ce soit à l'interne ? sinon externes, puis d'aller retrouver le financement disponible pour justement que cette personne-là reçoive cette formation-là le plus rapidement possible.
Donc, c'est un outil de validation de compétences, et cet outil de validation de compétences qu'on peut arriver à établir en rentrant ces personnes-là comme stagiaires en entreprise avec la, en fin de compte, la collaboration de l'entreprise immédiate, pourrait servir éventuellement, je me dis, d'instrument aussi de repère pour les formations de mise à niveau.
Mme Courchesne: ...dans votre esprit puis selon votre expérience, là, c'est quoi? Ce serait laissé à, quoi, trois mois ou six mois ou... C'est quoi, à peu près, d'après vous, la moyenne d'un stage pour la validation de la compétence et le savoir-être, parce que je suis d'accord avec vous, là, c'est aussi important. On peut s'attendre à réussir, à rencontrer les objectifs en combien de mois?
Mme Coutel (Catherine): Nous, on établit ça à environ...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Coutel, s'il vous plaît, très rapidement. Une réponse rapide, s'il vous plaît.
Mme Coutel (Catherine): Oui. Je vous dirais que... ce serait à réévaluer, mais on a déjà fait... auparavant, on établissait ça à environ 20 semaines maximum.
Mme Courchesne: 20 semaines?
Mme Coutel (Catherine): Maximum...
Mme Courchesne: D'accord.
Mme Coutel (Catherine): ...dépendamment du candidat. Il y en a qui en ont besoin de plus.
Mme Courchesne: D'accord. Merci.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Prévost, la parole est à vous.
Mme Papineau: Oui. Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Mme Coutel, bonjour. C'est hier soir que j'ai lu votre mémoire, et j'avais hâte de vous voir ce matin, parce que j'ai trouvé votre mémoire très éloquent.
Et il est aussi... il insiste aussi sur le fait que la concertation et la communication entre les acteurs institutionnels, selon vous, elle serait déficiente. Et vous ajoutez, à la page 6 de votre mémoire, que «les principales difficultés que nous constatons régulièrement sont le manque de sensibilité et la méconnaissance de la question de l'immigration, du processus migratoire, de la gestion de la diversité dans l'ensemble de nos entreprises».
Et il faut effectivement reconnaître qu'il reste du chemin à faire à ce sujet. Puis il existe un programme de soutien à l'insertion à l'emploi, au MRCI, que je prendrai en exemple. Le programme de soutien à l'insertion à l'emploi subventionne les organismes partenaires du gouvernement qui offrent des services liés à l'intégration à l'emploi. Ce que je constate, c'est qu'il existe plusieurs fonds dédiés à l'immigration. On pourrait ajouter le Fonds à l'initiative régionale en immigration et d'autres encore.
Dans le fond, vous ne demandez pas des nouveaux fonds et de nouveaux programmes pour l'insertion en emploi, mais ce que vous souhaitez, c'est que tous ces programmes soient intégrés de façon à ce que votre organisme soit adéquatement financé et que vous puissiez intervenir directement auprès des nouveaux arrivants afin de les accompagner dans leur intégration. Ainsi, l'État pourrait se concentrer à rendre disponibles les outils et faciliter l'intégration à l'emploi auprès des entreprises. Est-ce qu'on est d'accord?
Mme Coutel (Catherine): Je serais d'accord avec vous. Oui, c'est ce que, moi, je demande. C'est les fonds nécessaires à créer des outils. À ce moment-ci, c'est très difficile d'obtenir des fonds supplémentaires.
n(10 h 10)n Je vais vous donner un exemple très simple. C'est que, si on parle de la gestion de la diversité, c'est des programmes qu'il faut qui soient mis et adaptés... parce que, qu'on les adapte pour une région donnée, ce n'est pas les mêmes réalités pour une autre région. Il faut les adapter, ces outils-là, bien qu'il y en ait déjà de faits, là, je suis en accord. Il faut avoir le temps de les adapter, il faut avoir le temps de se les approprier pour pouvoir les transmettre et les donner. Il faut aller dans les entreprises, susciter l'entreprise à prendre le temps de venir avec nous chercher cette information-là. Quand ils sont pris dans une course aussi à soutenir leur entreprise au niveau financier, et tout ça, il faut aller les chercher. Il faut aller susciter tout ça.
Alors, il faut... C'est une question temporelle, c'est une question d'adaptation et souvent c'est une question de ressources, donc d'être en mesure de mettre quelqu'un... d'avoir la possibilité de prendre une personne, de l'engager et qu'elle se mette à fond là-dessus.
Je suis... Je pourrais vous dire que présentement les fonds dont, nous, on dispose, au niveau... soutient une personne, dont moi, et c'est moi qu'il faut, en fin de compte, qui réponde à toute cette question-là. Je suis volontaire, je suis dynamique, mais je suis essoufflée.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Papineau: En début de votre allocution, vous avez parlé, vous avez dit: L'immigrant doit recevoir des éléments essentiels de la part d'un chercheur d'emploi pour bien s'adapter. C'est quoi, en deux, trois points, les éléments essentiels, pour vous? Vous avez dit que c'est le chercheur d'emploi... ces éléments essentiels là, l'immigrant doit recevoir des éléments essentiels de la part d'un chercheur d'emploi. Vous avez dit ça.
Mme Coutel (Catherine): Oui.
Mme Papineau: C'est quoi, pour vous, les éléments essentiels?
Mme Coutel (Catherine): Les éléments essentiels, c'est ce que j'ai un petit peu expliqué au départ. Moi, je vais vous dire: Présentement, au Québec, on a des clubs de recherche d'emploi. On prend les personnes immigrantes, parce qu'elles parlent français, et on les intègre dans les clubs de recherche d'emploi où ils sont avec la généralité des personnes québécoises qui connaissent déjà de fond le marché du travail et nos façons de faire.
Je m'excuse, mais c'est inadapté pour eux. Pourquoi? Parce qu'il y a une notion qu'il faut entendre. Moi, j'appellerais ça, ou si j'aurais à le transformer demain matin, si j'aurais les outils adéquats, donc un financement adéquat... je veux dire, on parle toujours de financement, là, et, veux veux pas, il va falloir en arriver là: les ateliers de recherche d'emploi adaptés à la clientèle immigrante. Et ça, ça fait toute une différence de notion. Je vais les prendre, je vais les mettre avec moi, je vais leur transmettre ce que c'est, le marché du travail ici, comment on intègre une équipe de travail ici, au Québec. C'est quoi, la CSST? C'est quoi, un syndicat, ici, au Québec? C'est comment on arrive, en fin de compte, à faire une recherche d'emploi efficace? Comment on appelle un employeur, on se présente? Comment on fait une relance employeur ici, au Québec? D'accord? Et tout ça en prenant soin éventuellement d'être en alerte sur le choc culturel que je vais lui transmettre, parce que je vais lui en transmettre un, et c'est sûr.
J'ai des personnes, madame, qui sont présentement en recherche d'emploi, et, juste de leur parler, et je fais juste leur parler, exemple, de faire une liaison employeur ou une relance employeur, bien, je suis pour trois semaines à ne pas le revoir parce qu'il a des brûlements d'estomac. Donc, c'est un choc culturel, mais il faut passer au-dessus de ça. Mais, pour passer au-dessus de ça, il faut l'appuyer et il faut prendre le temps, le temps de parler avec lui, d'échanger. Moi, je vais voir avec ses lunettes et il va voir avec les miennes, et, à partir de là, ce n'est plus un problème pour lui, c'est un problème pour moi, c'est un problème qui est sur la table, on va passer au travers de ça. Et, à partir de là, je vais avoir une personne outillée non pas à recommencer... Parce que je vous dirais que présentement c'est nous qui faisons beaucoup de démarches en recherche d'emploi pour eux. Ils sont démunis, ils sont dans des clubs de recherche d'emploi qui ne sont pas adaptés, de un.
De deux, ces personnes-là, il faut dire qu'en arrivant au Québec elles ont cinquante services, et c'est normal. Ils peuvent avoir cinquante services, mais récurrent... c'est récurrent de les voir revenir, parce que, s'ils intègrent un emploi et qu'ils ont une perte d'emploi au bout d'un an, au bout de deux ans, je suis convaincue que je vais les revoir assis avec moi, parce qu'ils n'ont pas reçu à la base et au départ ce qu'ils avaient besoin.
Mme Papineau: Ma collègue...
La Présidente (Mme Hamel): Oui, Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui. Alors, je suis heureuse de pouvoir prendre la parole, parce que je suis dans un comté qui est tout de même reconnu pour être à tendance très francophone et québécoise. De plus en plus, on a à faire face à un lot d'immigrants, puisque je suis proche de Montréal, donc la banlieue de Montréal, la Rive-Sud plus particulièrement, et on a beaucoup de clubs de recherche d'emploi de ce type-là.
Mais ce dont, moi, je me rends compte, c'est que les gens qui viennent nous voir à nos bureaux de comté, qui sont en recherche d'emploi ? et ce sont des immigrants ? ne comprennent pas pourquoi on ne reconnaît pas leurs compétences et pourquoi que, à défaut de reconnaître au moins leurs certificats, de reconnaître leur expérience de travail passée. Et ça, c'est très dur pour eux, parce que c'est comme, vous l'aviez mentionné tantôt dans une... tantôt en parlant, c'est comme rejeter du revers de la main tout ce qu'ils sont et tout ce qu'ils peuvent apporter comme contribution ici, au Québec. En tout cas... parce qu'ils viennent avec une bonne intention, ils veulent apporter une contribution.
C'est ce que je ressens, moi, à chaque fois quand ils viennent me voir. Ils disent: Écoutez, j'avais un diplôme universitaire; tout ce qu'on voit quand je vais dans les clubs de recherche d'emploi, c'est que je peux travailler dans la restauration, faire du taxi. C'est toujours les choses qu'on m'offre en fin de compte, en disant: Bien, il faut que tu prennes compte que là tu es dans un nouveau pays puis que, ici, bien là on ne reconnaîtra plus tes diplômes.
Et, moi, je trouve ça... en tout cas, je vous le dis, à chaque fois, je viens malheureuse, parce que je me dis: Comment peut-on se priver de grandes compétences? Je sais que ça nous arrive aussi pour des Québécois ici, mais comment peut-on se priver collectivement de compétences? Et ça, ça m'interpelle à chaque fois.
Et je vous pose la question: Comment peut-on faire changer cette dynamique-là, d'abord, un, pour la collectivité en général, mais aussi dans le monde du travail? Parce que le monde du travail, vous le savez, vous avez parlé que, bon, ça passe par l'emploi, tout le monde dit oui, c'est vrai, puis on va faire des réformes pour ça puis on va faire des partenariats avec le monde de l'entreprise, mais c'est eux-mêmes qui ont réclamé à forts cris de leur enlever le 1 % de la formation professionnelle dans leurs entreprises. Puis là, maintenant, on va établir des partenariats. Ils ne veulent même pas le faire avec des Québécois puis ils vont vouloir le faire avec l'immigration? J'ai un petit peu de difficulté.
Est-ce que, d'après vous, il faut qu'on oriente d'une façon beaucoup plus... avec, comme des journées de la citoyenneté, des choses comme ça, à faire en sorte que collectivement on considère que ces immigrants-là, c'est un plus pour nous dans notre société et qu'ils peuvent apporter un dynamisme nouveau dans notre collectivité puis une façon différente de voir les choses et de faire les choses aussi?
La Présidente (Mme Hamel): Rapidement, en une minute, Mme Coutel, s'il vous plaît.
Mme Coutel (Catherine): Pour répondre à votre question, je suis tout à fait en accord avec vous que la promotion, au niveau de l'immigrant qui apporte quelque chose au pays, doit être faite par la société en général, donc tous les acteurs principaux qui ont la moindre influence au niveau de la société québécoise ? et Dieu sait qu'on en a ? justement de faire la promotion.
Au niveau des compétences, madame, je vais encore une fois... c'est sûr, la personne à laquelle je vais dire: Écoute, au niveau mécanique, tu as les compétences; au niveau électrique, tu ne les as pas. Je reviens encore sur mon exemple, parce que je pourrais en prendre d'autres. Cette personne-là, elle est en choc parce qu'elle est prestataire de la sécurité du revenu. Elle est marginalisée, elle est immigrante, elle est victime de toutes sortes de choses, et puis elle avait des grands espoirs en arrivant ici, même que je lui dirais: Qui détient la vérité? Moi, la deuxième, qui vient après la première immigration? La seconde immigration? C'est sûr qu'elle va être bloquée vis-à-vis de moi.
Mais, si je prends cette personne-là et je la rentre en entreprise, validation de compétences, elle a une expérience, elle-même, directement en lien avec ses compétences dans un milieu de travail, et si elle a à faire le constat qu'il lui manque un élément pour bien intégrer un marché du travail qui est le sien, en lien avec sa propre formation, elle va s'en rendre compte elle-même.
Donc, c'est beaucoup moins difficile de faire le deuil...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Coutel, excusez, je suis désolée. Je cède la parole maintenant à Mme la députée de Chambly.
Mme Legault: Oui, voilà. Merci. Merci, Mme la Présidente. Mme Coutel, je vous remercie beaucoup pour la présentation et les témoignages que vous nous faites ce matin. Je trouve que c'est très, très éloquent et puis c'est très instructif aussi.
J'aimerais que vous nous parliez de votre lecture des motivations des employeurs à ce moment-ci de recruter chez eux des personnes immigrantes. Avec l'expérience que vous avez, comment avez-vous vu évoluer la situation?
n(10 h 20)nMme Coutel (Catherine): Au départ, je pourrais vous dire que... je partirais non pas de la régionalisation, parce qu'il y avait aussi les réfugiés, en premier lieu, qu'on avait beaucoup d'accent pour les intégrer en emploi.
Au départ, je vous dirais qu'on a... moi, je considère qu'on a fait des progrès, vraiment des progrès, avec ce qu'on a eu de contribution au niveau du MRCI pour nous aider justement à percer des entreprises, et tout ça. Les entreprises ne sont pas fermées et... C'est qu'on a l'impression que les entreprises sont fermées. Les entreprises ne sont pas plus fermées que les immigrants sont fermés. D'accord? Il faut s'entendre là-dessus.
L'immigrant, il est en réaction, comme je vous dis, parce qu'on ne reconnaît pas ses compétences. Donc, il se ferme lui-même aussi, dans un certain niveau, parce que, quand on devient conditionnel à l'intégration d'un emploi, on devient relativement fermé.
Le fait qu'on ne reconnaisse pas ces gens-là ? par le MEQ et par leurs papiers, et tout ça ? bien, ça freine l'entreprise, ça ne la ferme pas.
Si j'arrive avec des conditions adéquates, donc... J'arrive devant une entreprise et je dis: Écoutez, ce candidat-là, il est bon, mettez-le en emploi. Catherine, tu m'assures-tu de ses compétences? Bien, voyons, je ne peux pas faire ça non plus. Donc, essayez-le. Comment? Oui. Mais, s'il ne fait pas dans mon entreprise?
Il ne faut pas oublier, là, on pense que les entreprises n'ont pas de conscience sociale, mais elles en ont une. En tout cas, moi, pour les entreprises que je côtoie, ces entrepreneurs-là ont une conscience sociale. Donc, ils vont me dire: Oui, mais, si, au bout de, exemple, quatre mois, je me rends compte que vraiment il y a une lacune et puis que je ne peux pas fonctionner avec ça, je vais être obligé de le mettre dehors? C'est une responsabilité. Ils savent très bien, ils sont quand même au courant que les immigrants vivent des... en tout cas, vivent des problèmes au niveau de leur intégration et au niveau de leur reconnaissance. Donc, les entreprises ne sont pas fermées, il s'agit d'aller les attirer et d'aller leur demander d'être des collaborateurs, non pas les approcher en leur disant: Vous allez devenir le responsable de la réussite de l'intégration de cette personne-là. Non. Collaborez avec moi. Je vais valider les compétences, je vais vous soutenir.
Même, actuellement, quand je rentre une personne... les personnes que j'ai rentrées, que j'ai attirées de Montréal dans ma région, je n'en ai pas une, personne, qui ne travaille pas comme spécialiste. Je ne les ai pas attirées de Montréal pour les mettre en manoeuvre, ce n'est mon but. Je contribuerais encore, en fin de compte, je pense, à l'échec puis au ressentiment de ces personnes-là, et ce n'est vraiment pas mon but. Ils en ont déjà eu assez. Je vais leur offrir autre chose, mais je vais prendre l'entreprise comme des collaborateurs avec moi. On va aller voir ce qu'il y a, et, si vous avez à les... En fin de compte, ça va être plus connu, ils vont les avoir à côté d'eux, et, si vous avez à les apprécier, vous allez le faire directement, mais en liberté, avec une certaine liberté d'approche.
Si on impose, on va être... les conditions vont être beaucoup plus grandes, ça va être très conditionnel que, si on demande une collaboration... et, en fin de compte, on s'apprécie mutuellement.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, madame. Mme la députée, est-ce que vous avez un complément, une question?
Mme Legault: Un petit complément. Vous avez dit quelque chose tantôt que je trouve très intéressant relativement au fait qu'un immigrant qui serait en emploi pendant un certain temps puisse s'autoévaluer dans l'emploi en question puis avoir... tu sais, développer une autocritique relativement aux besoins plus spécifiques de formation qu'il doit aller chercher pour pouvoir évoluer, puis ça, je trouve que ça amène une notion de responsabilité, de partage de responsabilité, et tout ça. Et trouvez-vous actuellement que ces formations-là, ces mises à niveau sont faciles d'accès, difficiles d'accès? Qu'est-ce qu'il faudrait faire pour que ce soit mieux? Quelles pistes vous verriez?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Coutel.
Mme Coutel (Catherine): Présentement... Excusez.
La Présidente (Mme Hamel): Non, ça va.
Mme Coutel (Catherine): Ça va? Présentement, je vous dirais que c'est plus difficile d'accès parce que ce n'est pas encore vraiment à point. Ce qu'on se rend compte, c'est souvent que, quand la personne a besoin de la mise à niveau, on va lui dire: Bon, écoute, d'après ce qu'on voit, d'après ce qu'on a présentement d'établi, il faudrait que tu retournes aux études un an, deux ans, trois ans. Ça fait lourd, hein, pour une mise à niveau électrique, là, de retourner aux études trois ans; c'est de refaire leur cours au complet. Je m'excuse, là, mais je comprends que la personne va dire: Une minute, là, je veux bien, mais je veux... Il faut vouloir, mais, quand même, je veux dire, on peut être souple, mais pas contorsionniste, là, à un certain moment. Excusez-moi l'expression, mais c'est ça, je pense.
Mais je pense que, avec une validation de compétences, justement, et, de parallèle, un développement de formation de mise à niveau, des outils référents, ça va être beaucoup plus facile d'établir des formations de mise à niveau. Là, on s'en va... on n'a pas de bilan de compétences, on s'en va un petit peu, excusez, à l'aveuglette, et je pense qu'on met la coche très haute, alors qu'on pourrait avoir des programmes d'appoint qui seraient vraiment adaptés et beaucoup... moins longs, peut-être beaucoup moins coûteux aussi, je pense que ce serait beaucoup moins coûteux aussi au niveau de la société ici d'intégrer les gens... bon, rapidement, il faut se le dire, entre guillemets, en emploi, mais de les réintégrer à partir qu'ils vont être adaptés et adéquats à l'emploi, donc pour répondre aux normes.
Mme Legault: Alors, si j'ai bien compris, vous parlez d'un accompagnement qui soit plus personnalisé. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la députée. Mme la députée de Bellechasse dispose de quatre minutes, questions, réponses.
Mme Vien: Comprises?
La Présidente (Mme Hamel): Oui.
Mme Vien: J'avais trois questions, Mme Coutel. Bienvenue ce matin. Alors, ce sera trois questions courtes. Quel est le taux de rétention actuellement dans les entreprises, d'après votre expérience? Deuxième des choses, est-ce que vous pensez que c'est possible de faire cette évaluation de compétences en amont, c'est-à-dire avant que les gens arrivent ici? Peut-être que c'est rêver en couleurs, peut-être que ce n'est pas applicable, mais j'aimerais vous entendre là-dessus.
Et, troisième des choses: d'entrée de jeu tout à l'heure vous avez dit: Les gens arrivent, dans la très, très grande majorité, à Montréal et doivent faire face à un deuxième choc, finalement, hein, c'est bien comprenable, quand ils veulent migrer en région. Alors, est-ce que c'est possible de les faire atterrir ailleurs plutôt qu'à Montréal? Est-ce que c'est pensable? Est-ce que c'est envisageable? Alors, trois petites questions pour vous ce matin.
M. Coutel (Catherine): Donc, vous répondre très rapidement. Pour la formation... Première question, c'était sur la formation, c'est ça?
Mme Vien: Le taux de rétention en entreprise.
M. Coutel (Catherine): Le taux de rétention. Notre taux de rétention au Centre-du-Québec, au niveau d'intégration en emploi, notre taux de rétention est de plus de 80 %. C'est important, je pense, aussi... Excusez, je vais ouvrir une parenthèse sur le taux de rétention.
On axe beaucoup sur le taux de gens qu'on fait rentrer dans les régions, mais on entend peu parler du taux de rétention des régions, et je pense que c'est un élément important. Je peux en faire venir 1 000 demain matin, mais, dans un an, il m'en restera 200. Donc, c'est important d'aller voir ça. Donc, on a à peu près un taux de rétention de 80 %.
Et, au niveau... Je vous dirais qu'on a... Au niveau de la partie que je m'occupe, on a moins de personnes immigrantes qui sont prestataires de la sécurité du revenu que des propres Québécois de souche. On s'en occupe; ça, je peux... On s'en occupe.
Mme Vien: Je n'en doute pas.
M. Coutel (Catherine): Donc, d'un autre côté, vous me demandiez, des formations... Si ce serait possible de...
Mme Vien: Au niveau des compétences.
M. Coutel (Catherine): Des compétences.
Mme Vien: Bien, d'agir avant le processus d'arrivée, et tout ça.
La Présidente (Mme Hamel): En deux minutes, madame, s'il vous plaît.
M. Coutel (Catherine): J'agis beaucoup plus, là, présentement sur les gens que j'ai ici. Je pense que ce serait possiblement... Oui, ce serait peut-être faisable, mais je pense qu'il faut commencer par ici. La seule chose, au niveau avant, avant la migration, qui serait importante, je crois, c'est éventuellement ? et je ne sais pas si c'est possible, c'est une idée, comme ça, que je lance ? les équipes qui se rendent dans le recrutement des pays, s'ils pouvaient simplement... c'est simplement, mais c'est beaucoup... multidisciplinaires. Ce serait d'une importance...
Mme Vien: ...
M. Coutel (Catherine): Donc, ça veut dire une personne qui connaît bien l'immigration, oui, mais une personne qui connaîtrait le marché de l'emploi ici. Quand ils font les entrevues, il y a des choses qu'on cerne, au niveau de l'emploi, qu'une personne qui est spécialiste en immigration ne cernera pas. Et, quand on parle de faire participer des cultures, oui. Faire participer, oui, les gens de communautés culturelles; oui, mais pas exclusivement.
Donc, moi, en tout cas, si j'aurais une recommandation à faire, ce serait beaucoup plus peut-être de regarder pour des équipes multidisciplinaires.
Mme Vien: En un clin d'oeil finalement, est-ce que c'est irréaliste de penser que les immigrants qui entrent au Québec doivent nécessairement passer par la porte d'entrée de Montréal?
M. Coutel (Catherine): Non, ce n'est pas irréaliste. Pourquoi? Parce que, aussi, encore une fois, on a des grilles de sélection. Je ne sais pas, peut-être l'amener d'une autre façon, la bonifier, exemple, avec l'incitation, aller dans les régions. On marche par barème de pointage, à ce que je sache. On pointe sur toutes sortes de choses, sauf peut-être sur un élément crucial qui aujourd'hui devrait être présent: leur intérêt vers les régions du Québec.
La Présidente (Mme Hamel): Merci. Merci, Mme la députée. Je cède la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Dans notre premier entretien, Mme Coutel, on a parlé un peu de fonds, et vous avez dit: Ça nous prendrait des fonds nécessaires pour créer des outils.
Est-ce que ce serait plausible que, dans le cadre d'une entente entre les organismes de votre région, par exemple, et le gouvernement, on pourrait vous donner des fonds et que vous-même, que la communauté ou que votre région puisse développer une stratégie en insertion en emploi? Est-ce que ce serait, pour vous, idéal?
M. Coutel (Catherine): C'est... Excusez. Ce n'est pas idéal, mais c'est incontournable. J'ai besoin de ça. Si je n'ai pas ça ? je suis déjà essoufflée ? bien, je n'aurais plus de souffle, et eux non plus.
n(10 h 30)n Il ne faut pas... Ces personnes-là vivent et espèrent encore parce qu'il y a des gens qui sont proactifs et qui sont actifs en avant d'eux. Donc, automatiquement, on est... Je pense que je ne suis pas en emploi dans un organisme comme le mien parce que je suis une personne en attente. Beaucoup de personnes qui travaillent dans des organismes comme le mien sont des personnes de défi. Et c'est ça qui me fait vivre. Donnez-moi des défis, on va les relancer, on va les faire. On est en attente. Ce n'est pas drôle, je suis en attente de pouvoir créer. On nous dit qu'on est peu créatifs. C'est faux, je n'ai pas les moyens. J'ai plein de dessins, mais je n'ai pas de crayon. Vous voulez voir, en fin de compte, un beau tableau? Donnez-nous les outils, et on va en partir un. Et, à partir de là, je pourrai même aller plus loin. On est loin d'être un petit peu... Comme on dit, on n'a pas d'esprit de conservation. Je suis prête à échanger n'importe quand avec qui veut bien être... et s'investir, tous les outils qu'on aura créés.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Masson.
M. Thériault: Oui. Alors, je suis très touché par vos propos, parce que j'ai l'impression qu'on entre vraiment dans le vif du sujet. On ne peut pas prétendre faire venir des gens chez nous si, une fois entrés, on les laisse comme ça dans le décor sans leur donner les moyens de faire ce qu'est... et d'avoir accès à ce qu'est l'activité principale des individus en société, à savoir le travail. Et c'est d'ailleurs... tu sais, dans les moeurs, c'est d'ailleurs ce que les gens... la façon, l'activité par laquelle les gens se définissent dans une société. La première chose qu'on demande à quelqu'un, c'est: Qu'est-ce que tu fais dans la vie? Bien, à ce moment-là, je pense qu'il faut vraiment y aller vers la responsabilité qu'on a à cet égard-là et à permettre à ces gens-là de pouvoir effectivement répondre à cette question-là. Qu'est-ce que je fais dans la vie? Bien, je suis en train de travailler à telle, telle, telle chose. Bon, évidemment, le travail n'est pas la seule chose dans la vie, mais, je veux dire, c'est fondamental, hein? Bon. O.K.
Et donc vous touchez vraiment des questions qui sont pertinentes à cause de votre expérience de terrain. Vous parliez tout à l'heure, et j'aimerais ça peut-être avoir un exemple... Peut-être que ça m'a échappé, là, vous parliez de difficultés d'arrimage, là. O.K.? Donnez-moi un exemple de difficultés d'arrimage entre les différents intervenants qui font en sorte qu'à un moment donné on n'arrive pas à obtenir un succès dans le placement de quelqu'un, là. Vous parliez de problèmes de communication, moi, j'ai parlé d'arrimage. Donnez-moi un exemple concret, là.
Mme Coutel (Catherine): Je vais donner un exemple concret. Au niveau de... Quand je dis «d'arrimage ou de communication entre instances», que ce soit même au niveau, bon, des compagnies, on va aller à Emploi-Québec, on va aller en formation, on va toucher un petit peu... J'ai une personne qui doit intégrer un... bon, qu'il faut qu'il intègre un emploi, une personne immigrante. À ce moment-ci, l'entreprise, je commence à négocier avec l'entreprise et puis je dis: Écoutez, on pourrait essayer, on va voir. Validez-le avec moi, puis, bon, alors... Et ça, ça ne durera pas juste cinq minutes, hein? On y va, et on retourne, et on y retourne. Et à un moment donné l'entreprise dit: Bon, écoute, oui, je vais le faire, je le rentre en entreprise. Il l'essaie, il s'aperçoit, exemple... Je vais vous donner un exemple très concret, un architecte, et on l'entre en entreprise, et l'entreprise se rend compte que, au niveau de l'évaluation des coûts, il ne répond pas à ça, et c'est un incontournable pour continuer, en fin de compte, à maintenir son emploi.
Bien, à ce moment-là, il faut que j'arrive à trouver une formation et puis il faut que ce soit rapide, il ne faut pas qu'il perde son emploi. Alors, je m'entends avec l'entreprise pour, en fin de compte, trouver un formateur qui va venir donner la formation, et à l'interne. Mais c'est un coût, c'est un coût. Et l'entreprise, lui, cette personne-là, quand il l'a reçue, il était architecte. Et, d'après l'équivalence de diplôme, il l'était, comprenez-vous? Mais, à ce moment-là, je me retourne où? Sur Emploi-Québec. Mais Emploi-Québec ont des fonds pour la formation, mais ils ne sont pas... ils sont comme pas préparés à ce que là, oh! il faut répondre à de la formation, même pour les immigrants, et puis... Alors là ça devient conditionnel: Ah, bien oui, mais il est en entreprise. Mais, s'il l'a pris, il aurait dû être... Et puis là on commence les négociations. C'est long, c'est lourd, c'est énorme. C'est énorme, je me suis même fait... J'ai négocié avec une entreprise, et tout ça, et puis à un moment donné j'ai dit: Écoutez, cette personne-là, ça me prendrait une subvention juste pour le départ, juste pour que... je veux dire, pour susciter mon entreprise à le prendre. Je me suis déjà fait répondre: Bien, si l'entreprise... Puis elle avait besoin d'une formation, ils m'ont dit: Si l'entreprise te signe une promesse d'embauche, on la formera. Mais je vais-tu demander à une entreprise de signer un chèque en blanc? Alors là je me retrouve où? À la case départ. Je n'ai pas de formation, je n'ai pas de moyens, puis j'ai une entreprise qui a des besoins, puis j'ai un candidat, lui, qui désespère à vouloir s'intégrer.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député, il reste 2 min 30 s, à peu près.
M. Thériault: Oui. Autre préoccupation, celle-ci, c'est par omission, je n'ai pas... Plusieurs intervenants sont venus nous dire... sont venus nous parler de la francisation comme un élément essentiel à l'intégration. Chez vous, ça se passe comment, l'accès à la formation, aux services de francisation? Est-ce qu'il y a des problèmes? Est-ce qu'il y a des délais? Est-ce que c'est une problématique que vous vivez aussi?
Mme Coutel (Catherine): ...de la francisation, moi, je pourrais vous dire que, bon, je ne travaille pas en francisation, je travaille en régionalisation, mais toute mesure, oui, c'est sûr qu'il y a des délais d'attente, parce que, veux veux pas, ce qui arrive, c'est qu'il y a de plus en plus d'immigrants qui rentrent ? d'accord? ? au niveau réfugiés. Moi, je travaille beaucoup plus avec des candidats de régionalisation qui connaissent déjà le français. Mais on se rend compte en région que... dans notre région même, on a des problèmes, oui, c'est sûr, c'est que les délais d'attente sont longs.
Mais, de toute façon, au niveau... quand Mme Courchesne nous a visités, il y a eu justement, de toute façon, des ajustements qui ont été soulignés avec Mme Courchesne à ce niveau-là, pour les délais d'attente. Mais je pourrais vous dire que oui. Mais, de toute façon, c'est sûr et certain qu'il va falloir faire que les délais... bon, qu'il y ait plus de cours. Pourquoi? Parce qu'on a... le niveau d'entrée des réfugiés a augmenté. D'accord?
De deux, toutes proportions gardées des personnes qu'on reçoit, s'ajoute à ça souvent la réunification familiale, donc le parrainage, qui vient gonfler encore ce niveau d'entrée là. Et, après ça, il y a les gens qui se marient, donc qui amènent leur conjointe, leur conjoint. Donc, ça fait... Au départ, le taux qu'on pensait avoir besoin... le nombre de cours qu'on pensait avoir besoin se retrouve qu'il y en a besoin de plus. Et le délai d'attente, il ne peut pas s'allonger et s'allonger. Donc, c'est sûr qu'il y a des besoins de francisation. Mais je vous réponds vraiment, là, je vous dis, c'est sous toutes réserves parce que ce n'est vraiment pas mon domaine directement.
M. Thériault: Merci. Vos propos ce matin étaient très éclairants. Merci.
Mme Coutel (Catherine): Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hamel): Effectivement, Mme Coutel, merci de votre présence. Merci de votre présentation, c'était très éloquent.
Alors, je suspends pour quelques instants, le temps de permettre aux représentants de la ville de Sherbrooke de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 39)
(Reprise à 10 h 41)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la ville de Sherbrooke. Je vous rappelle que vous avez une période de 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission, deux périodes de 10 minutes. Alors, je vous demanderais de vous identifier et d'identifier les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît.
Ville de Sherbrooke
M. Boisvert (Pierre): Mon nom est Pierre Boisvert. Je suis avocat en pratique privée de profession, mais également conseiller municipal à la ville de Sherbrooke, responsable des dossiers communautaires. Avec moi, à ma gauche, Jean-Yves La Rougery, qui est coordonnateur à la vie communautaire de Sherbrooke, et Mme Pascale Chanoux, qui est agente de recherche, qui, entre autres, a rédigé le diagnostic qu'on pourra vous déposer par la suite.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, bienvenue. La parole est à vous.
M. Boisvert (Pierre): Merci. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre Courchesne, mesdames et messieurs de la commission, bonjour, merci de l'invitation. En fait, le fait que vous nous invitiez à partager avec vous nos commentaires sur le mémoire ou le dossier d'immigration que vous avez mis sur pied tombe bien ou s'inscrit bien dans la démarche que nous poursuivons depuis quelques années.
Sherbrooke, dans un premier temps, a un bel historique ? vous le voyez d'ailleurs dans notre présentation ? a un bel historique dans le domaine de l'immigration. Ceci dit, c'est surtout en 1996 que des écrits ont commencé à suivre, c'est-à-dire que la politique communautaire a commencé à faire mention de l'importance de s'adresser à l'immigration. Par la suite, en 2002, il y a eu une négociation et la signature d'un contrat avec le MRCI, qui a été suivie pas longtemps après par un diagnostic, à l'été 2003, sur la situation de l'immigration à Sherbrooke. Et d'ailleurs on a apporté suffisamment de copies pour la commission si...
Une voix: ...
M. Boisvert (Pierre): Une copie pour... si les membres sont intéressés. Et nous sommes présentement en travail sur la politique elle-même, le projet de politique, qui est déjà passé par une première consultation dans les instances politiques et plusieurs ateliers de travail, samedi dernier, a abouti avec une grande consultation publique qui a duré toute la journée. D'ailleurs, cette consultation publique là qui devait réunir 75 à 80 personnes, finalement on a eu plus de 200 personnes. On a été surpris par l'enthousiasme, par la quantité de gens qui voulaient nous parler et ce qu'ils voulaient nous dire.
Il faut dire qu'avec le regroupement des villes, des municipalités, on est à réécrire ou à harmoniser plusieurs politiques, que ce soit dans le domaine de la culture, du sport, de la famille, etc. On était donc habitué aux consultations publiques, mais on a été surpris ? c'est notre première politique d'accueil et d'intégration des immigrants ? on a été surpris par la quantité de gens qui voulaient nous parler, mais surtout par ce qu'ils voulaient nous dire, ce qu'ils avaient hâte de nous dire, ce qu'ils insistaient pour nous dire, leur expérience personnelle, les obstacles qu'ils ont rencontrés, les suggestions qu'ils veulent nous faire, le fait qu'ils sont aussi enthousiastes que la ville à ce que ça fonctionne, à ce qu'on veut faire avec nos nouveaux arrivants ait du succès. Et maintenant la commission, rendu à ce moment-ci de notre développement, nous demande de commenter sur ce qu'ils veulent faire, et, comme je disais tout à l'heure, ça s'inscrit bien dans notre démarche.
On comprend ? et je pense qu'en lisant notre mémoire vous l'avez bien senti ? qu'à Sherbrooke l'immigration, c'est ? comme on a compris aussi dans vos écrits ? c'est une grande richesse. Je ne parle pas juste au point de vue humanitaire, mais économique, culturel. C'est non seulement une richesse, mais c'est un besoin. Dernièrement, comme par hasard ? on dirait que tous les ingrédients tombent en même temps souvent ? la chambre de commerce sort avec des statistiques d'emploi dans les cinq à 10 prochaines années, là où on nous dit: La région se porte bien, elle est victime un peu de ses succès. Et, sachant qu'on a beaucoup d'emplois qui s'en viennent et qui sont très prometteurs, on a un problème qui s'appelle la dénatalité, qui est semblable au restant de la province sinon du pays. Mais on a une solution qui, même si elle ne répond pas à tous les maux, qui est quand même une solution intéressante qui est celle de l'immigration. On était d'ailleurs... on aurait peut-être dû arriver plus tôt, mais on était d'ailleurs très intéressé par les propos de celle qui nous précédait dans le domaine de l'emploi, parce que c'est effectivement... ça va devenir un besoin dans la région, et particulièrement à Sherbrooke.
Donc, on a des besoins, mais, sachant qu'on est tous d'accord avec la richesse que vont nous apporter nos nouveaux arrivants, on s'est rendu compte... Parce que plus de la moitié des immigrants recensés dans notre diagnostic nous sont arrivés depuis 10 ans; donc, on s'est aperçu que, oui, il y a une richesse, mais il y a plusieurs écueils, il y a des récifs assez importants. Et on profite du fait que vous nous permettiez d'en parler pour vous faire part des écueils, qui sont peut-être légèrement différents à Sherbrooke. Et je ne dirai pas «en région», parce que je ne peux pas parler pour les autres régions, mais qui sont peut-être un peu différents à Sherbrooke qu'ils peuvent être ailleurs dans la province. Pascale mentionnait que ? puis je trouvais l'image très intéressante ? à Sherbrooke, on n'a peut-être pas les mêmes clés pour ouvrir les portes aux immigrants, on n'a peut-être pas toutes les clés non plus pour ouvrir les portes aux immigrants qu'on voudrait avoir ou dont on a besoin pour être capable de répondre à l'augmentation de l'immigration qu'on voudrait. On vous en fait part.
Le premier et l'incontournable, évidemment, on l'a mentionné avant, c'est l'emploi. Ce n'est pas seulement pour les immigrants, c'est pour tout le monde, là, mais l'emploi est effectivement un problème, même si on parle quand même de niveaux qui ne sont pas détestables. Par exemple, on a 7 % de chômage, ce qui n'est quand même pas monstrueux. Évidemment, pour les immigrants, c'est beaucoup plus élevé, à 11 %.
Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on a des immigrants ? et, encore une fois, vous pouvez le voir dans notre mémoire ? qui sont plus instruits, en pourcentage, que la population locale. Chez nous, c'est un petit peu plus de 20 %, et ceux qui nous arrivent, c'est 40 % qui ont été à l'université, et deux tiers, incluant les 40 %, qui ont un diplôme postsecondaire. Vous nous envoyez vraiment des gens de qualité, on ne peut pas se plaindre là-dessus. Le problème, c'est que les emplois ne semblent pas correspondre à la qualité des immigrants qui viennent chez nous. Ils ne semblent pas correspondre, parce que ce n'est pas nécessairement tous des professionnels qu'on a besoin; on a besoin peut-être d'un peu plus de techniciens. Ils ne semblent pas correspondre, parce que, oui, on a des médecins, mais on ne veut pas reconnaître leurs compétences. Donc, on ne les a pas, là. On a des ingénieurs qui conduisent des taxis, mais ce n'est pas ça qu'on veut. Ce n'est pas ça qu'ils veulent non plus. La première occasion qu'ils vont avoir... D'ailleurs, il y avait un Noir, quand je suis allé voir à la fédération, qui nous disait qu'un de ses copains qui venait de finir des cours très avancés en informatique, malgré qu'il avait passé six mois à envoyer des C.V. partout à Sherbrooke, n'avait jamais réussi à se trouver un emploi, alors qu'il en a envoyé un en Nouvelle-Angleterre, et il est parti quelques mois plus tard. On a de la qualité, mais on semble manquer de synchronisation, de reconnaissance des compétences.
n(10 h 50)n La francisation, ça va toujours être un problème, je pense. Ça, on ne peut pas le nier. De ce côté-là, je pense que ce qui nous manque, ce n'est pas le premier 1 000 heures ou, dépendant... 200 à 1 000 heures. Ce n'est pas ça qui manque, c'est le suivi. Tout le monde sait, et moi particulièrement pour... Dans ma vie précédente, j'étais pilote militaire. Pour avoir passé 20 ans un peu partout au Canada, on oublie notre français quand on parle seulement anglais. Bien, là, c'est encore plus évident quand on vient d'apprendre une nouvelle langue et que, tout d'un coup, on n'a pas de suivi pour l'accompagner. Qu'une mère de famille se retrouve avec ses enfants à la maison et qu'il n'y a pas d'ouverture, par exemple, à parler la nouvelle langue apprise, et ça part vite. Quand c'est arrivé vite, ça part aussi vite. Donc, au point de vue francisation, il y a peut-être un peu de travail à faire du côté de la continuité.
Les employeurs... Et c'est là que notre grand désarroi arrive, c'est que la ville, quand elle consulte ? et, 200 personnes alors qu'on en attendait beaucoup moins, je le répète parce que, pour nous, ça a été important ? ces gens-là, on crée des attentes, on crée beaucoup d'attentes, et eux ne comprennent pas que la ville ne peut pas s'arranger pour qu'il y ait des emplois. Eux ne savent pas... On se sent un petit peu comme le messager qui se fait tirer, là. J'imagine que ça arrive assez souvent, mais ils ne comprennent pas pourquoi qu'on ne leur donne pas de l'argent quand ils ont un projet pour créer deux emplois. Ils ne comprennent pas, quand ils ont une compétence et qu'ils pourraient être engagés, et qu'il n'y a pas personne qui les engage. Ils ne voient pas les nuances, les subtilités de la personne qui était là avant nous, et qui doit contacter Emploi-Québec, et qui doit faire des pirouettes un peu partout.
Donc, quand vous nous avez demandé d'écrire une politique, le ministère nous a demandé de s'impliquer près de nos gens, la partie qui était... pas une attrape, mais qu'on n'avait pas prévue, c'est que finalement on se retourne beaucoup vers nous parce qu'on est proche. C'est nous qu'on voit, c'est à nous qu'on parle. C'est moi qui reçois des appels au bureau pour dire: Oui, je viens de voir dans le journal que vous avez écrit une politique, et j'aimerais ça, vous en parler. Donc, quand on parle d'emplois, nous, ça fait doublement mal, parce qu'on sent tellement que c'est hors de notre contrôle. On ne peut pas reconnaître des emplois, on ne peut pas... On peut parler aux employeurs, on peut influencer et on peut venir ici pour vous demander: S'il vous plaît, donnez-nous un coup de main, mais on ne peut pas aller aussi loin que les immigrants, quand ils nous parlent, le font, et c'est dans ce sens-là que, quand on voudrait augmenter le nombre, on dit oui, mais pensez-y, à l'emploi, et aidez-nous à créer des emplois.
Et on en a besoin, des ingénieurs, des architectes, des médecins, à Sherbrooke comme à... probablement plus que dans les régions centres, dans les métropoles. Et, à ce moment-là, si vous reconnaissez... si on trouve un mécanisme pour les reconnaître ou un mécanisme pour leur ajouter ? et, elle avait absolument raison là-dessus ? un mécanisme pour ajouter ou complémenter leurs compétences, parce que, s'ils sont médecins là-bas, c'est sûr qu'ils ont la base. Maintenant, c'est sûr qu'il faut des ajustements aussi, et, nous, on ne peut pas les donner, vraiment pas, à la ville.
Il y a aussi évidemment le problème du logement. Vous n'en avez pas parlé beaucoup, et on ne s'en est pas parlé beaucoup, mais il faut parler aux gens du service d'aide aux néo-Canadiens ? Mme Mercédez Orellana, qui, j'espère, va venir vous jaser aussi. Il faut comprendre qu'il y a des limitations physiques qui sont importantes partout, mais Sherbrooke, à 140 000, ce n'est pas énorme, là. Nous, ce n'est pas long que, quand on commence à avoir un problème de logement, c'est un vrai problème. Et c'est des logements qu'on peut commencer à compter sur nos doigts qui manquent, là, où on a même pensé à dire: On va organiser un service d'autobus pour les loger à Asbestos parce qu'on n'a pas de place à Sherbrooke, là, et ça devient sérieux.
Je sais qu'on en a parlé et que, là-dessus, il y a eu... pas des promesses, mais on a senti des idées intéressantes qui pouvaient supporter la création ou la construction de logements sociaux. Ça va très bien de l'autre côté. Le problème avec les logements sociaux ? et, nous, on le sait, moi, pour être membre de l'Office municipal d'habitation ? c'est que les chiffres ne suivent pas la tendance du marché. C'est-à-dire qu'on nous donne un certain montant par unité d'habitation, mais qui ne correspond plus à ce que ça coûte maintenant si on veut acheter des nouvelles habitations. Et la ville en paie toujours 10 %, donc la ville fait toujours sa part. Vous allez dire: 10 %, ce n'est pas beaucoup, mais, quand même, dans le domaine de l'habitation, on ne parle plus des services ordinaires pour la ville.
Donc, il y a du travail à faire de ce côté-là, il y a du travail à faire sur le logement en général, étant donné qu'on est rendu à 7/10 de 1 % d'inoccupation, mais il y a un problème... pas un problème, mais il y a un travail à faire du côté du genre d'habitation, des caractéristiques de l'habitation qui doivent correspondre à la population qu'on accueille. Or, cette population-là, pour des raisons x, mais que j'approuve beaucoup, a des familles souvent beaucoup plus nombreuses. On les a eues, mais on ne les a plus. Bien, là, on semble avoir oublié ce que ça prend comme habitation. Et, si le privé ne le fait pas, bien, évidemment, nous qui les accueillons, ça va être à nous de s'impliquer.
Il y a le transport, qu'on n'a pas fait beaucoup mention dans les lectures qu'on a faites. C'est rare que les gens, qu'ils soient étudiants... Malgré que les étudiants ont de plus en plus d'autos, là, c'est rare que les étudiants ou les immigrants, les nouveaux arrivés, qui sont dans bien des cas ? c'est une question de pourcentage ? pas très en moyens, vont avoir une auto la première année. Donc, le logement, d'une part, doit être à proximité du transport en commun, mais le transport en commun, aussi, doit répondre aux attentes. Et, si on sent le besoin dans la métropole, on peut imaginer qu'avec des quantités moindres ça devient très, très difficile, très dispendieux de soutenir et d'être capable d'avoir un système de transport en commun qui répond aux besoins grandissants d'une population de nouveaux arrivants qui en a grandement besoin.
Il y a les voisins, les amis. On dit beaucoup que ce n'est pas tout d'avoir un emploi, ce n'est pas tout de bien avoir appris ses leçons de français, ce n'est pas tout de pouvoir se déplacer, il faut toujours que les voisins nous sourient, il faut que les voisins soient là pour nous accueillir. C'est un peu comme la ville. La ville, c'est celle qu'on voit, mais eux, ceux qu'ils voient tous les jours, ce sont les voisins, les voisins de palier. Dans bien des cas, ils vont commencer avec un appartement, et il ne faut jamais prendre pour acquis ? même si la population sherbrookoise est très chaleureuse ? il ne faut jamais prendre pour acquis qu'ils vont accueillir à bras ouverts et qu'ils ne souffrent pas des mêmes difficultés qu'une population peut avoir en général, c'est-à-dire des gens qui sont plus intolérants que d'autres.
Donc, il y a beaucoup de travail à faire pour préparer notre population. Il y a du travail qui peut se faire de façon immédiate. On parle même d'aller faire beaucoup de... sinon de conférences, de présentations, que ce soit à l'âge d'or, ou aux clubs sociaux, ou peu importe. Et il va falloir le faire, parce que, pour les toucher immédiatement, c'est comme ça. Mais, nous, on pense à beaucoup plus long terme, il faut vraiment qu'avec le ministère de l'Éducation on commence à préparer nos jeunes à partir de la maternelle et de les habituer à vivre avec des gens d'autres cultures. Non seulement les habituer, mais leur faire connaître... leur faire reconnaître les richesses que ça a, et ça demande du temps, ça demande des efforts, ça demande beaucoup de partenariats.
Même chose avec les CPE, il faut aller faire des présentations. Souvent, dans le cas des CPE, ce n'est pas les enfants ? les enfants vont jouer, à 4 ans, à 5 ans, avec n'importe qui ? mais c'est aux éducateurs des CPE qu'on a besoin de dire: Bien, regarde, là, il y a des particularités qui viennent du fait que, par exemple, au Brésil, au Sénégal, les gens ont des habitudes de vie. Quand tu vas parler aux parents, il faut que tu sois capable de les comprendre, de les rassurer. Donc, il y a du travail à faire pour préparer notre population aussi à les accueillir, pas seulement le logement, le transport, l'emploi.
Dans tout ce que je vous ai énuméré, la grosse difficulté, c'est que, nous, on sent qu'on peut influencer, et on va pousser à en être fatigant, on est bien prêts à faire ça, il n'y a pas de problème, mais le seul acte d'intervention qu'on voit vraiment, qu'on a... Ou il y en a deux, si on peut dire, où on sent vraiment qu'on a une influence directe, et ça, vous pourrez nous le reprocher demain, si on ne le fait pas, c'est dans le fait d'adapter nos services à la population immigrante.
La Présidente (Mme Hamel): ...je m'excuse, M. Boisvert, c'est juste pour vous mentionner qu'il vous reste deux minutes pour conclure, s'il vous plaît.
M. Boisvert (Pierre): O.K. J'avais peur d'avoir trop de temps, là je vais me faire taquiner en revenant.
Rapidement, les deux choses qu'on peut intervenir ? et ça, vraiment, on va y travailler fort ? c'est, un, dans l'adaptation de nos services... Et, l'adaptation de nos services, ça veut dire que, quand les nouveaux immigrants arrivent, qu'ils vont à Hydro-Sherbrooke et qu'ils ont besoin de numéro d'assurance sociale, bien on va trouver un mécanisme pour que... Ils ne l'ont pas avant trois semaines, donc vous allez être obligé de trouver quelque chose pour être capable de les accueillir. Même chose avec le service de sécurité publique, adaptation, par exemple, de l'accueil, être capable d'avoir accès à une banque de traducteurs, etc.
Mais il y a aussi le fait de donner l'exemple. On a presque 5 % de notre population qui est immigrante, et il n'y a pas un seul policier de minorité visible, là, il n'y a pas un seul pompier non plus; il n'y a pas de conseiller municipal ? bien, ça, c'est une autre histoire. Mais il va falloir qu'on adapte et qu'on traduise ça par une proportionnalité, par une représentativité. Et il va falloir aussi qu'on comprenne des notions comme l'accommodement raisonnable. Ça, on est prêt à le faire, et on va le faire, et c'est sous notre contrôle.
Mais, tout le reste, on se dit, oui, on est d'accord avec le grand projet qu'on veut, d'augmenter l'immigration, mais on aimerait beaucoup, on apprécierait beaucoup qu'en n'étant pas trop enthousiastes... ou, en étant trop enthousiastes, on a peur qu'il y ait un effet pervers, c'est-à-dire qu'en voulant trop bien faire et en accueillant trop de monde, qu'on brise les structures déjà fragiles et que, finalement, l'effet soit l'effet inverse: c'est que maintenant les gens ne veulent plus aller à Sherbrooke, les gens de Sherbrooke commencent à haïr les immigrants, etc.; là, c'est ça qu'on veut éviter.
Il faut vraiment qu'il y ait une vision, une très grande vision, et que vous ne passiez pas trop, trop aux côtés de la cible, au ministère. Si vous êtes capables d'ajuster les deux: notre capacité de recevoir avec le fait qu'on ait besoin et qu'on veut avoir beaucoup d'immigrants, ça va bien aller. Et je termine là-dessus. Je vous remercie beaucoup.
n(11 heures)nLa Présidente (Mme Hamel): Merci, M. Boisvert, pour votre présentation. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Monsieur, madame, bienvenue ce matin. M. Boisvert, je retrouve votre éloquence et vois aussi votre passion.
Moi, ce qui me fait plaisir dans cette commission parlementaire, c'est que les gens qui sont devant nous démontrent de véritables convictions et beaucoup de passion à l'égard du sujet, puis, moi, je trouve ça très encourageant pour l'avenir.
Nous savons, et j'ai été à même de le constater personnellement, que la ville de Sherbrooke, depuis tellement d'années maintenant, accueille très ouvertement et chaleureusement... maintenant, plus de 40 communautés sont installées chez vous. C'est énorme. On vous cite souvent en exemple. Vous avez une grande longueur d'avance sur toutes les régions du Québec. Et la ville, comme administration et au niveau de l'ensemble de ses élus, de son personnel, s'implique aussi énormément, et je pense qu'il faut le souligner. Il faut le souligner, parce que c'est important que ça se sache et que ça crée un effet d'entraînement sur d'autres villes et d'autres régions.
Vous avez des activités comme le Festival des traditions du monde, auquel j'ai participé; j'ai été impressionnée. Écoutez, il y avait là au-dessus de 1 000 Québécois, Québécoises, mais, je dirais, c'était extraordinairement diversifié. C'était l'été. Il y a 1 000 personnes qui très spontanément se sont levées pour danser pendant plus d'une heure sur des danses grecques. Et quel... En tout cas, c'était... c'est incroyable, j'avais... Tu sais, tu ne vois même pas ça, là, dans la région de Montréal, là, très honnêtement. Et ça, je pense que c'est votre détermination puis c'est un effet de toute la population qui fait en sorte qu'il y a cette implication-là. Le Buffet des nations est un autre bel exemple.
Moi, je veux revenir à l'entente qu'on a avec vous, qui a été une entente assez pionnière à cet égard-là aussi et qui, quand je suis arrivée, il y avait de grands principes généraux, et la question, c'est de dire: Bien, est-ce qu'on a l'obligation de résultat puis est-ce qu'on est capables de mesurer si ce qu'il y a dans cette entente procure les bons moyens? Là, ce matin, vous nous dites, après une consultation, après avoir entendu les gens, vous êtes un peu de notre avis, qu'un des nerfs de la guerre, c'est l'emploi.
Vous avez entendu tout à l'heure la dame de Victoriaville, Mme Coutel, nous parler de son organisme, Accès travail. Ma question, c'est: Est-ce que, dans une entente comme celle que nous avons, on pourrait penser qu'on déploie ? avec vous mais peut-être avec des organismes de la région, parce que j'en ai rencontré plusieurs, là, il y en a qui font cet arrimage avec l'emploi ? mais est-ce qu'on pourrait participer, dans une entente, à l'élaboration ou au déploiement de quelque chose qui ressemble à Accès travail? C'est-à-dire où il y a un focus de mis avec des intervenants et la participation de la ville sur cet arrimage, mais cette capacité, là, de faire non seulement l'intégration, l'insertion, mais l'adaptation en emploi. Est-ce que c'est quelque... Quand vous dites: On a besoin de clés, là, pour réussir, est-ce que, ça, ça peut être l'exemple d'une clé gagnante?
La Présidente (Mme Hamel): Est-ce que vous désirez donner la parole à M. La Rougery? Alors, M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): Je faisais juste confirmer que ma connaissance, c'était qu'on n'en avait pas. On n'a pas d'accès-emploi. Mais je voulais confirmer avant pour être sûr.
Ce qu'on a, c'est... On a fait participer la chambre de commerce à notre comité de rédaction du projet. Et je ne peux pas vous répondre tout de suite, mais ce que j'ai compris du représentant de la chambre de commerce, c'est que c'est probablement ce genre de possibilité là qui serait étudiée. Il faut vraiment qu'il y ait un lieu de concertation, un lieu d'arrimage avec... pas seulement la ville. La ville pourrait servir de catalyseur, mais je vois vraiment la chambre de commerce avec le MRCI, avec le ministère de l'Éducation, avec... Puis, si les ajustements sont à faire, ils sont à faire à Emploi-Québec, etc., là. Tu as quelque chose à rajouter?
La Présidente (Mme Hamel): M. La Rougery.
M. La Rougery (Jean-Yves): Oui, très bien. Bien, en complément à ce que M. Boisvert vient de mentionner. Effectivement, la chambre de commerce est présente sur notre comité d'élaboration de la politique. Alors, à ce moment-là, ça donne une bonne vue d'ensemble, parce qu'ils ont travaillé avec nous sur le diagnostic et aussi sur le projet de politique. Alors, à ce moment-là, ils sont au fait, là, de ce qui peut se passer, puis les clés qu'on peut se doter aussi.
Une voix: Mme Chanoux, qui avait quelques mots...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Chanoux.
Mme Chanoux (Pascale): Je voulais quand même vous signaler qu'il existe le SATI, qui est quand même un organisme de partenariat, si on peut dire, entre Emploi-Québec, le ministère, le Centre Saint-Michel, je pense, et puis c'est à peu près ça. Il y a des lieux de concertation entre le ministère et Emploi-Québec également, mais c'est sûr que, notamment sur la question de la reconnaissance d'acquis et compétences, actuellement il y a... je pense qu'on a une très bonne connaissance de la problématique et... Mais il n'y a pas encore de projet concret. Je dirais qu'il y a de la collaboration, mais il n'y a pas de partenariat autour de projets concrets. Je pense que c'est cette étape-là que doivent franchir les lieux de concertation en employabilité à Sherbrooke.
Mme Courchesne: Je connais bien le SATI pour les avoir rencontrés et je connais ce qu'ils font, mais le but de ma question, c'est de dire, peut-être, qu'effectivement, si, par le biais d'une volonté politique des intervenants du milieu, en collaboration avec nous, mais si on incluait dans cette entente avec le SATI, avec la chambre de commerce, des objectifs à rencontrer et des moyens dont on a besoin pour favoriser les obstacles qui sont encore devant nous, il me semble que ça vient aussi apporter un appui à SATI. Ça crée une mobilisation sur le terrain, puis ça crée une mobilisation au niveau de tous, parce que là finalement on s'est mis d'accord sur une entente de partenariat et on se donne x temps pour obtenir les résultats. C'est pour ça que je vous posais la question, au sens de dire: Bien, au fond, ça veut dire ça, la concertation, ça veut ça, de vraiment créer la synergie, mais ça vient appuyer les organismes du milieu et ça vient leur donner un poids et une volonté pour peut-être faire bouger davantage les choses.
Alors, c'était dans ce sens-là, parce que je disais: Cette entente, elle peut être réouverte, elle peut être réexaminée, elle peut être reprécisée et, certainement, en accord avec votre politique, forcément. Nous sommes partenaires, hein, on ne fait pas qu'octroyer des fonds, on est partenaires dans l'atteinte de ces résultats.
Sur un autre sujet, si vous me permettez. J'ai beaucoup de préoccupations sur le logement, comme vous, j'apprécie que vous l'abordiez. Vous savez qu'on a aussi hérité de cette situation où il y a un manque énorme de logements sociaux au Québec, mais je vous dirais qu'en région ce qui est beaucoup ressorti, c'est la problématique du transport. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, bien sûr, les gens restent... les communautés sont pas mal dans la ville de Sherbrooke, mais on voit que ça s'étend, ce que j'ai pu constater, tranquillement, là, ils s'éloignent un peu. Ou alors l'emploi n'est pas nécessairement au centre-ville de Sherbrooke.
Est-ce qu'il y a des solutions autres que le transport en commun, quand on est un peu en périphérie? Comment... Et, moi, j'ai vu ça comme un réel obstacle, le transport. Je ne sais pas si vous partagez mon opinion, mais peut-être nous dire un peu comment... encore là, comment pouvons-nous aider?
La Présidente (Mme Hamel): Alors, M. Boisvert.
n(11 h 10)nM. Boisvert (Pierre): Merci. Effectivement, je dirais que c'est plutôt le deuxième problème qui est le problème exact. Je prends l'exemple de Waterville TG, qui emploie beaucoup de monde, est très loin de Sherbrooke. Ça prendrait une forme de transport, minibus, peu importe, là, pour peut-être 20 travailleurs immigrants qui n'ont pas les moyens. Moi, je dois admettre que pendant la consultation, c'est là qu'on s'est aperçus qu'il y avait des petites choses de ce genre-là ? qui étaient des grandes choses, mais... ? et que certains employeurs pouvaient adresser, mais qu'il y aurait vraiment un intérêt à ce que le transport public, la Société de transport de Sherbrooke adresse... Mais on a plutôt vu le problème et on n'a pas encore commencé à adresser sérieusement la solution. On a vu plusieurs solutions possibles, comme, présentement, il y a des employeurs qui paient, il y a des travailleurs qui covoiturent, et il y en a qui n'acceptent pas l'emploi parce qu'ils ne peuvent pas y aller. On voit qu'il y a toutes sortes de situations présentes, mais il n'y a pas eu de... ça reste à faire.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. Boisvert.
Une voix: À moins qu'il y ait d'autre chose?
Mme Courchesne: Oui.
La Présidente (Mme Hamel): Dans le deuxième bloc...
Mme Courchesne: O.K.
La Présidente (Mme Hamel): ...sinon on reviendra dans le deuxième bloc. Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, Mme la Présidente. M. Boisvert, Mme Chanoux et M. La Rougery, alors, ça me fait plaisir de vous rencontrer ce matin. Vous semblez souhaiter, dans votre mémoire, et à la page 9 entre autres, vous dites que: «Comme le Québec au niveau du Canada, notre région aura-t-elle un jour la faculté de fixer le volume et la composition annuels ou triennaux de son immigration?» Bon, je crois savoir que dans votre région vous avez une entente spécifique, donc, vous avez une entente avec le MRCI.
Mais j'aimerais mieux comprendre ce qui motive votre volonté de planifier de façon plus autonome la régionalisation de l'immigration en Estrie. Et j'aimerais savoir aussi si vous comptez vous associer, par exemple, à la Conférence régionale des élus afin de faire en sorte que des services soient intégrés dans toute la région de l'Estrie et que tous soient impliqués?
M. Boisvert (Pierre): La deuxième question est facile, on est vraiment au stade embryonnaire pour la Conférence régionale des élus. Présentement, ils sont à discuter la représentativité; il y a deux votes pour Sherbrooke sur 25, alors que ça représente 48 % de la population, donc on est loin de savoir jusqu'où ils vont aller, mais c'est sûrement le genre de chose qui va devoir être adressée, mais c'est prématuré, je pense, à ce moment-ci de savoir...
La première question est plus intéressante. Et je pense... bien, je ne pense pas, il y a un besoin de contrôler son avenir, qui ne vient pas du fait qu'on ne veut pas participer avec les autres, mais que, quand on commence à bien s'approprier de certains dossiers comme celui de l'immigration, on pense peut-être être mieux en mesure, étant sur le terrain.
Et d'ailleurs c'est pour ça que j'apprécie, quand Mme la ministre Courchesne l'avait mentionné, c'est pour ça que j'apprécie qu'on nous suggère d'avoir un accès-emploi plutôt que ça vienne du provincial, qu'on nous dise, étant donné nos particularités... Et, nous, on croit avoir des particularités, être un peu uniques dans certains domaines, c'est pour ça qu'on aime ça, contrôler un peu les cordes d'influence qui peuvent, par exemple, déterminer: c'est ça, la quantité, selon ce qu'on voit dans nos études sur l'emploi, selon ce qu'on voit sur le logement. Je pense que de le contrôler, le mot était peut-être fort, mais certainement de participer à l'établissement d'un nombre optimal, je pense que oui. Et ça montre d'ailleurs notre intérêt, c'est qu'on ne se laisse pas imposer, pourquoi? parce que ça nous intéresse, parce que c'est quelque chose qui nous préoccupe, et on veut que ce soit bien fait. Et, à ce moment-là, on aimerait au moins avoir une voix, là, quand ça va se produire. Je sais que c'est un peu vague, mais...
Mme Papineau: De ce que je comprends, c'est que vous ne voulez pas qu'on crée de nouvelles mesures, vous voulez qu'on s'adresse à vous et que vous soyez vous-mêmes les...
M. Boisvert (Pierre): Mais présentement c'est prématuré, on ne sait pas les volumes qu'on aurait besoin.
Une voix: Oui, vas-y.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Chenoux... Mme Chanoux.
Mme Chanoux (Pascale): À travers la lecture qu'on a faite de ce document de la planification, là, le document de base, je vous dirai que c'est quand même une vision assez provinciale, finalement; les données qu'il y a dans le portrait statistique sont essentiellement provinciales. Les régions sont évoquées à de multiples reprises, quand même, dans le document, mais c'est comme encore connexe.
Et je pense qu'on a eu la chance que ça tombe effectivement, comme disait M. Boisvert, à une étape où on élabore une politique. Donc, un état de situation diagnostique a été fait et on a pu utiliser les données de cet état de situation, donc localiser finalement plein d'affaires qui sont à la fois dans votre document principal et dans votre portrait statistique. Mais ces éléments-là de décision, je dirais, ils n'étaient pas suffisamment présents dans tout ce que vous nous avez donné comme documents de décision, en quelque sorte. Et, je pense, c'est aussi cette idée-là, étant donné que de plus en plus on va avoir une connaissance fine, sur mesure, de Sherbrooke et de l'Estrie. À partir de là, avec Emploi-Québec, avec d'autres acteurs, on est plus à même de vous dire, d'une manière très régionale, qu'est-ce qui serait souhaitable comme volumes et comme types d'immigrants. Je pense, c'est l'idée aussi derrière cette proposition, cette demande-là.
Mme Papineau: En fait, c'est que vous seriez capable d'établir votre propre stratégie, que ce soit au niveau...
Mme Chanoux (Pascale): ...toute seule, hein? Je veux dire, aussi avec les autres acteurs directement concernés, là.
M. Boisvert (Pierre): Et on y arrive.
La Présidente (Mme Hamel): M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): On pense être capables d'y arriver avec ce qu'on s'est fixé comme objectifs dans notre politique. On pense être capable de le mesurer. Et si on peut régler certains petits problèmes, autant systémiques que les problèmes de logement, etc., on pense même pouvoir être plus ambitieux que ce que la province nous propose. Donc...
Mme Vermette: Alors, moi, ça...
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée de Marie-Victorin. Je m'excuse, c'est que je dois identifier pour des fins de transcription.
Mme Vermette: Oui. Alors, moi, ça allait un petit peu dans le même sens que la question qui vous a été posée, parce que je me posais la question à savoir: Qui doit assumer le leadership au niveau, en fin de compte, d'une ville et d'une région? Parce que je me mets à la place de l'immigrant, pour savoir à quelle porte je dois aller frapper pour savoir leurs services que je dois recevoir. Vous me dites, tantôt vous avez dit: Au niveau de l'emploi, ce n'est pas notre job, nous autres, là, d'y trouver de l'emploi. Par contre, ça commence par l'emploi, parce que ce qui va l'attirer, ça va être de retrouver un emploi. Une fois qu'il aura trouvé un emploi, c'est tout ce qui est autour: il y a la famille, il y a le logement, il y a le transport, etc. Donc, effectivement, qui doit assumer le leadership?
Si on regarde maintenant dans les nouvelles structures dans lesquelles on est en train de travailler, avec les CRE, ce seront les maires et les préfets des MRC qui devront finalement prendre des décisions au niveau du développement... du développement économique, hein? Et donc j'en conclus que c'est du développement économique, de vouloir finalement l'accueil des immigrants, puisque c'est en fonction du travail. Donc, c'est ça qui va faire la différence, dans le fond, qui va avoir une attraction sur cette population-là.
Donc, moi, je me pose sérieusement la question. Malgré toutes les belles planifications qu'on peut faire, si on n'assume pas un leadership, si ce n'est pas clair qui est l'autorité, en fin de compte, puis qui va avoir la coordination et un rôle important, avec des outils et des budgets nécessaires, bien on va nulle part. Alors... Bien, en fait, c'est plus difficile, en tout cas. Et on tourne en rond un petit peu, puis on met de l'argent dans... c'est comme jeter des cailloux dans l'eau, là, un petit peu.
Donc, moi, je me demande et je vous pose la question: Qui, au niveau... comment doit s'assumer un leadership? Et comment, quel rôle de coordination on doit établir, en fin de compte, quel est le modèle qu'on devrait réellement établir pour que, mon Dou! on ait un effet escompté? Parce que ce que j'entends, ce n'est pas juste: il faut avoir bien rentré des immigrants, puis là ça va tout sauver le Québec au complet. Je ne pense pas que c'est là la solution, à mon avis. Il y a un terrain à préparer, vous l'avez dit. Si on ne prépare pas le terrain ? c'est un peu quand on veut des belles routes, il faut avoir le tablier en bas. Si le tablier n'est pas bien fait, à chaque année, il faut recommencer, puis on recommence des routes, puis on ne s'enrichit pas, on s'appauvrit. Alors, ma question est posée.
La Présidente (Mme Hamel): M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): Sans connaître les tenants et les aboutissants de la Conférence régionale des élus, moi, je dirais que, pour assumer le leadership de la création d'emplois, de la venue d'entreprises, où ils vont être situés, qu'est-ce qu'on va développer, est-ce qu'on va développer des spécialités, etc., ça, ça va. On peut assumer le leadership.
Quand arrive, par exemple, le soin d'imposer, que ce soit à des commerçants, à des entreprises, à des industries, que ce soit à des institutions, quand arrive le temps d'imposer qu'ils engagent des immigrants, là c'est dangereux de marcher sur les pieds et de dire: Nous, on va assumer le leadership, alors qu'on se voit plutôt comme catalyseur. Mais un bon catalyseur qui justement permet à chacun d'exercer son autorité... Il ne faut pas non plus se leurrer en disant: Bien, la ville va prendre le leadership dans le domaine de l'immigration.
D'abord, aujourd'hui, au moment où on se parle, au moment où on se parle, le leadership dans l'immigration, c'est le MRCI qui l'a, là. Quand on dit: Est-ce qu'un jour on va pouvoir participer à la prise de décision sur le nombre qui vient? c'est qu'on voudrait le partager. Mais on ne l'a pas, le leadership. Est-ce qu'on veut le prendre? Je pense qu'à ce moment-ci on souhaiterait rien de mieux. Mais il y a un danger à... qui trop embrasse mal étreint, là. Il y a un danger à dire: Nos ambitions sont telles qu'on va toutes prendre les rênes et on va être capables de bien le faire.
n(11 h 20)n Bon. L'emploi, ça va. Et beaucoup d'autres infrastructures régionales, ça va. Mais l'adaptation, dans le domaine de l'immigration, qui d'abord était de compétence fédérale et qu'on a transportée ou transférée au provincial ? et chapeau au provincial là- dessus ? maintenant, le transfert au municipal peut se faire, mais on a loin de la coupe aux lèvres, là. On n'est pas arrivé proche de ça, là, et, nous, il nous manque tellement d'outils pour y arriver, aussi.
Je ne sais pas si j'y réponds bien, mais ce n'est pas le leadership au sens de: Nous, on va imposer aux autres, mais c'est: oui, on va créer un climat ? d'où l'expression «catalyseur» ? où on va pouvoir permettre que ça se réalise, et même stimuler, là, tu sais, aller un petit peu plus loin, là.
Mme Vermette: Non, ma question est à l'effet... parce que, écoutez, on sait que de plus en plus, avec les CRE, on est en train... ce seront les municipalités qui auront de plus en plus à dire un mot sur le développement économique de leur région. C'est correct, ça, ça va. Mais, en fait, on sait qu'il y a beaucoup de partenaires qui ont été éliminés, donc vous allez avoir un rôle accru, en fin de compte, parce que... Et vous allez chercher des partenaires, ça ne se fait pas sans partenaires, vous venez de le dire. En fin de compte, vous avez besoin de la participation de l'ensemble des partenaires, parce qu'il faut avoir le profil de la région. Vous avez dit: On ne peut pas faire de mur-à-mur, parce que finalement il n'y a pas une région qui se développe de la même façon. Donc, il faut beaucoup de flexibilité, et, moi, j'en suis, que c'est le milieu qui doit se prendre en main, en fin de compte, à partir de son profil, de ses besoins, pour aller chercher les populations dont ils ont besoin ou, en tout cas, les compétences dont ils ont besoin pour compléter, dans le fond, ce qu'ils ont à répondre pour faire face aux services d'une population en général. Bon, c'est ce que je comprends bien.
Et il faut que ce soit clair, à ce moment-là, parce que l'immigrant, lui, quand il arrive, là, il veut avoir une porte, hein, un genre de guichet unique pour savoir où il s'en va, là, hein? Il ne peut pas frapper à toutes les portes puis penser que là il est dans des... Il ne connaît pas ça. Donc, il faut savoir exactement, une fois qu'il arrive dans une ville, ça va être qui, son répondant, avec qui il va faire affaire, avec qui il va travailler. Parce que, une direction régionale, ce n'est pas nécessairement la même chose que d'aller voir des gens dans une municipalité puis qu'il y a une agence de développement qui va lui dire: Écoutez, voilà, on passe par ci, on passe par ça, bon. Il faut, en quelque part, qu'on l'oriente correctement, cette personne-là.
Mais, moi, ce que je vous demande, c'est: Bon, bien, qui va jouer ce rôle-là finalement? Est-ce que, bon... il y a le MRCI, mais il y a tellement d'organismes qui travaillent là-dedans, en tout cas, il y a de tout... En tout cas, moi, j'en connais, des organismes qui font... Les clubs de recherche d'emploi les accueillent, en tout cas, bon, ils sont intégrés. Moi, j'ai une pépinière de groupes communautaires, ça fait que je peux tous vous les nommer, il y a 350 groupes communautaires juste dans mon comté. Ça fait que c'est pas... il y en a, là, qui donnent tous les services possibles et impossibles, mais il faut qu'il y ait une coordination quelque part. C'est ce que je vous pose comme question.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, le temps est largement écoulé. Je vais passer la parole maintenant au député de Charlesbourg.
M. Mercier: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Bienvenue dans la capitale et à cette commission. Évidemment, on reconnaît le dynamisme de la ville de Sherbrooke, et je pense que ça se traduit bien dans votre mémoire, là, quant à la rigueur de vos propos.
Je voudrais peut-être enchaîner sur ce que ma collègue vient tout juste d'élaborer, mais plus spécifiquement sur le volet gens d'affaires. Et vous dites, à la page 5, évidemment vous relevez ça, les avantages économiques, gens d'affaires venant de l'extérieur, et également, à la page 7 de votre mémoire, vous parlez plus spécifiquement d'opportunités d'affaires à l'extérieur.
Pour peut-être faire une petite récapitulation, un petit topo de l'endroit d'où je proviens, la ville de Charlesbourg, il y a une dizaine d'années, avait initié un jumelage avec la ville d'Ovalie, au Chili, et, tout à l'heure, Accès travail parlait de choc culturel, le groupe qui vous a précédés, et cette initiative permettait dans le fond d'amenuiser ou de peut-être devancer un petit peu le choc culturel, c'est-à-dire à l'extérieur du Québec. Et ça, ça permettait tant aux gens politiques, hommes et femmes politiques de Charlesbourg, qu'aux acteurs socioéconomiques d'aller voir ce qui se passe à Ovalie, mais de permettre aux gens d'Ovalie, au Chili, de pouvoir mieux nous connaître. Et, eux, évidemment, ça partait d'un très large principe: qu'est-ce que le Canada? qu'est-ce que le Québec? et ensuite, évidemment, après quelques semaines, on en venait à des points très spécifiques tant au niveau municipal qu'au niveau socioéconomique.
Alors, moi, ce que je voudrais savoir, c'est quant à l'attraction et la rétention, si vous avez, vous ? parce que vous parliez de leadership tout à l'heure, et ça, je pense que c'est bien important de créer un climat favorable et des partenariats ? est-ce que vous avez initié, notamment en Amérique latine ? je sais que vous l'avez en France, je pense, à la lecture de votre mémoire ? mais est-ce que vous avez initié des missions économiques, vous, la ville de Sherbrooke, ou des jumelages en Amérique latine ou dans des endroits qui n'avaient pas été explorés auparavant?
La Présidente (Mme Hamel): M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): De mémoire, il y a déjà eu des démarches qui ont été faites auprès de plusieurs villes et continents, pas nécessairement dans un but spécifique, mais dans un but autant économique que d'attirance des immigrants, d'événements spéciaux, etc. Mais présentement... et d'ailleurs c'est identifié aussi dans notre politique. Vous voyez le mot «attirer» qui a été rajouté là, qui n'existait pas. On avait «accueil» et «intégration», mais le mot «attirer» vise un peu ce que vous dites, au-delà, et je m'explique.
On reçoit... L'an passé, on a reçu presque 1 200 immigrants, dont 600 étaient réfugiés. On remarque, à la lecture de vos statistiques, que c'est plus autour de 20 % que le Québec reçoit en termes de réfugiés. Donc, on comprend qu'il y a une disparité de pourcentages, mais on comprend aussi que le ministère n'a pas la capacité de diriger tout le monde. Il a peut-être une plus grande influence sur les réfugiés, où ils vont aller. Donc, si on veut approcher les pourcentages qui sont recherchés...
Donc, nous, on a un travail à faire en termes d'attirance pour faciliter le travail du ministère quand va venir le temps de guider les catégories d'immigrants, pour qu'on puisse recevoir des pourcentages qui sont peut-être plus... qui correspondent peut-être plus aux pourcentages généraux du Québec. Comme, de toutes les catégories d'immigrants, qu'on ait notre proportion, mais pas plus d'une catégorie qui serait peut-être plus fragile que d'autres.
Donc, dans ce sens-là, c'est un besoin. Mais, au-delà de ça, il y a aussi, si tu as des Sénégalais chez toi et qu'il y a des opportunités pour certaines entreprises sherbrookoises d'aller exporter au Sénégal, bien pourquoi pas? Donc, ce que vous nous mentionnez a beaucoup de... on y a pensé. Mais ce n'est pas... ce n'est pas formalisé. On n'a pas de commission qui, chaque année, va au moins visiter un pays, parce qu'on est encore au stade de la politique. Ce qui va suivre, c'est un plan d'action. L'aspect attirance va être traité dans le plan d'action: qu'est-ce qu'on peut faire, qu'est-ce qu'on devrait faire autant avec les gens d'affaires qu'avec nos...
D'ailleurs, on a beaucoup de nos écoles qui sont visitées par des gens d'un peu partout dans le monde. J'ai moi-même assisté à plusieurs visites, incluant des gens du Chili, là. À Saint-Michel, la formation des adultes qu'on avait là semblait les intéresser beaucoup, etc. L'université attire un nombre incroyable de chercheurs de partout dans le monde et de groupes qui viennent visiter. Donc, il y a moyen, avec les institutions, les employeurs, la ville, de certainement faire quelque chose d'intéressant pour accueillir des gens, donc les inviter, et pour aller les voir aussi. Mais c'est au stade du plan d'action qu'on va pouvoir être plus concrets avec vous.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Charlesbourg.
M. Mercier: Alors, Mme la Présidente, c'est quelque chose que vous envisagez à moyen et à long terme, évidemment, éventuellement.
M. Boisvert (Pierre): Oui, au moins moyen terme. J'espère que ça va être au moins à moyen terme.
M. Mercier: Au moins à moyen terme.
M. Boisvert (Pierre): Oui, c'est ça.
M. Mercier: Est-ce... Je suis très curieux de savoir si, à la ville de Sherbrooke, vous avez quelqu'un qui est spécifiquement attitré justement à la question immigration ou communautés culturelles, à la ville.
La Présidente (Mme Hamel): M. La Rougery.
M. La Rougery (Jean-Yves): Oui. Bien, en fait, c'est au niveau de la vie communautaire. Moi, justement, je suis coordonnateur à la vie communautaire, et, à l'intérieur du service des loisirs, culture, sports et vie communautaire, la division vie communautaire s'occupe du dossier de l'immigration.
Là, maintenant, tout récemment, avec la signature de l'entente avec le MRCI, on a... justement, on est en train de travailler sur la politique. Et c'est Mme Pascale Chanoux qui travaille essentiellement au niveau du dossier de l'immigration, mais particulièrement dans l'optique de la politique. Alors, effectivement, dans mes dossiers, j'ai la... tout le dossier immigration, et c'est pour ça que je me retrouve sur différentes tables, le comité des partenaires, avec le MRCI, le comité de vigilance, d'action et d'harmonisation des relations interculturelles et différents comités comme ça.
M. Mercier: Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. le député. Mme la députée de Chambly, trois minutes.
n(11 h 30)nMme Legault: Merci, Mme la Présidente, messieurs, madame. Ma première question, parce que j'en ai deux, s'adresse à M. Boisvert. Vous nous avez dit avec beaucoup d'éloquence que vous apprécieriez jouer un rôle de catalyseur, de partenaire relativement aux objectifs, par exemple, quantitatifs relativement à l'immigration. Et ça m'amène à vous parler des objectifs qualitatifs que vous soulevez un peu, je pense, à la page 8 du mémoire, au point 4.3, la deuxième puce. Vous posez des questions, et, quand on pose des questions, moi, j'aimerais entendre vos réponses. À la deuxième puce, vous dites: «Faut-il à l'avenir sélectionner des immigrants ayant un profil intermédiaire ou technique [...] alors que la main-d'oeuvre locale ayant ces niveaux est peu mobile géographiquement?» Et je me suis demandé si cette question-là vous venait aussi du fait que, bon, il y a une université à Sherbrooke qui joue certainement un rôle moteur avec la venue de gens, de chercheurs, et tout. Est-ce que ça a... Comment cette question-là vous vient et quelle réponse y donnez-vous?
La Présidente (Mme Hamel): M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): Je vais donner une première partie, je vais laisser, après ça, Pascale, je sais qu'elle a beaucoup de choses à dire là-dessus. Mais la première partie, c'est... Et on l'a vécu avec l'exemple de Lennoxville. Plus les gens sont instruits, plus ils semblent avoir de facilité à se déplacer, et, s'il est pour y avoir des mouvements de population à un moment donné parce qu'ils deviennent de plus en plus minoritaires, bien, les premiers qui vont partir, ça va être souvent ? un peu comme on s'est retrouvé historiquement ici ? ça va être les gens avec beaucoup d'éducation. Ce qu'on dit, c'est que les techniciens, les gens de formation secondaire ont beaucoup plus de difficultés à se déplacer. Donc, là où on a un... pas un conflit, mais un arrimage à faire assez sérieux, c'est: Si on fait venir beaucoup de techniciens ? on en a besoin, là, il en manque ? est-ce qu'on ne va pas déplacer des emplois existants? Dans la mesure où ces emplois-là, comme, par exemple, dans les 20 000, les vingt quelque mille qu'on veut créer, il y en a seulement un pourcentage minime qui va être du travail à temps plein ou du travail permanent, c'est tout du travail temporaire.
Donc, on pose la question, et vraiment c'est une question à nuances qu'il faut adresser, et ça prend des gens qui sont à la fine pointe des connaissances. Alors qu'il y a une certaine population qu'on peut faire venir et qui, si l'emploi se déplace, va se déplacer avec, dans le cas de certains métiers, certains groupes de travailleurs, c'est plus difficile. Est-ce que la population... Comment la population va être affectée de façon différente? Moi, je n'ai pas assez la finesse d'information pour être capable d'y répondre. Est-ce que tu voulais rajouter quelque chose?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Chanoux, malheureusement, en une minute, s'il vous plaît.
Mme Chanoux (Pascale): Je dirais que les personnes qui travaillent à l'Université de Sherbrooke, c'est comme un monde parallèle par rapport à la population immigrante dont on vous parle aujourd'hui, qui est, comme vous le disiez tout à l'heure, très scolarisée et qui ne correspond pas de façon assez directe aux besoins les plus criants qu'on a actuellement en Estrie, qui sont en formation professionnelle, en formation technique. Donc, le noeud, il est comme là. D'ailleurs, on a un problème de rétention, aussi, par ailleurs, d'étudiants étrangers. Donc, ça, j'ai vu que Mme Courchesne en parlait, la question des minorités visibles qui étudient ici, on a cette problématique aussi, la rétention des gens qui étudient à l'Université de Sherbrooke et qui sont issus de l'immigration.
Mais je pense que l'idée, c'est de dire: Va-t-on uniquement systématiquement sélectionner les gens les plus scolarisés, des doctorants, alors qu'on sait pertinemment que, quand même, le gros des besoins, et puis pour les années à venir, sont en formation professionnelle et technique? C'est quand même ce paradoxe-là, je pense, qu'il faut...
La Présidente (Mme Hamel): Merci, madame. Je cède la parole au député de Masson.
M. Thériault: Oui. Alors, je vais vous permettre d'en parler plus qu'une minute, parce que c'est là-dessus que je veux qu'on puisse discuter, là, parce qu'il me semble que c'est fondamental, là. C'est une problématique universelle que celle de faire en sorte qu'il puisse y avoir un minimum d'arrimage entre les qualifications des gens en société et les emplois disponibles.
Je me souviens que, moi, avant même qu'on puisse étiqueter les générations, x, y, z, je faisais partie de la génération sacrifiée, on n'avait même pas de lettre pour être nommés. Alors, les cerveaux qu'on mettait au congélateur, après des diplômes de doctorat, etc., c'est une problématique universelle.
Par contre, ce que vous nous dites ? et c'est là où on a un défi particulier ? c'est qu'il y a des gens qui disent: On aimerait bien venir vivre chez vous. Et, nous, on a à déterminer, bon, combien vont venir vivre chez nous. Mais il faut prendre en compte cette problématique-là, parce que, si on ne la prend pas en compte, finalement on les trompe, on les trompe carrément. La chance qu'a quelqu'un qui naît au Québec de s'orienter, en tout cas, autant qu'il peut le faire, pour à un moment donné dire: Bien, je vais essayer de tracer un chemin qui va me conduire à un plan de carrière et à l'accession au marché du travail, ça peut se faire sur plusieurs années. D'ailleurs, au niveau collégial, on le voit, parfois il y a une réorientation, et elle est tout à fait normale. Mais, lorsque quelqu'un part de l'extérieur, on ne peut pas juste être utilitariste, là, et dire: Oui, oui, oui, venez-vous-en, on a besoin de main-d'oeuvre, alors qu'on fait rentrer des gens surqualifiés et, là, qu'on va leur demander finalement de faire des emplois à temps partiel. C'est ça que je comprends, là.
Alors, moi, je voudrais vous entendre sur... Avez-vous pensé aux moyens... à des moyens par rapport à ça, à cette problématique-là d'un meilleur arrimage? Et, sur les 600 réfugiés, là, dont vous parliez, là, est-ce que ces gens-là se sont trouvé un emploi à temps plein? Est-ce qu'ils ont des emplois précaires? Parce que c'est une problématique universelle, l'emploi précaire. Je veux dire, à ce moment-là, il faut dépasser juste le cadre de l'immigration. L'immigration, c'est un dossier horizontal, hein, ça touche plusieurs ministères, plusieurs compétences, etc., mais cette question de la précarité de l'emploi, c'est aussi une problématique universelle. Alors, j'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus, par rapport à un plan stratégique, là, de développement.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. le député. M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): Il y a effectivement des études qui ont été faites sur comment ça prend de temps, une fois que tu es arrivé, pour qu'un certain pourcentage trouve un emploi, et, après cinq ans, est-ce que c'était un pourcentage qui ressemblait... ou après combien de temps finalement c'était un pourcentage qui ressemblait à la population locale, combien de temps ça prenait.
C'est sûr que, au bout de 10 ans, les pourcentages sont proches, là. Là, on dit 7 %, 11 %, il y a une différence, mais on comprend que c'était à peu près ça probablement qui va rester. Maintenant, est-ce que, au bout de cinq ans, c'est plutôt 17 % et 7 %? Je ne le sais pas. Mais, après un an, si la personne n'avait pas déjà identifié un employeur, qu'elle n'était pas déjà francisée, qu'elle n'avait pas déjà fait reconnaître son diplôme, non, c'est impossible, après un an, de se trouver un emploi. Mais, par contre, si toutes les barrières que je viens de mentionner ont été faites, là il n'y a pas de problème, l'intégration est là. Je vais laisser Pascale...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Chanoux.
Mme Chanoux (Pascale): Oui, excusez-moi. Il n'y a pas une seule solution à votre question. Je pense qu'il y a des mesures à prendre au niveau de la sélection pour un meilleur arrimage dès le départ, bien qu'on sait très bien que, à l'exercice de planification au niveau de la main-d'oeuvre, c'est aussi difficile peut-être que de planifier des niveaux d'immigration. C'est comme... Il y a une part aussi d'imprévisionnel là-dedans, je dirais, là.
Et il y a aussi... Pour avoir travaillé de nombreuses années à Montréal sur la question de la reconnaissance des acquis et compétences, ce n'est pas des problématiques qui sont «irrésolvables» non plus. C'est sûr que ça demande de multiples partenaires autour d'une même table, ça demande des moyens financiers également, mais il n'y a pas de fatalité au niveau de la reconnaissance des acquis et compétences. Il y a des projets concrets ? Mme Courchesne doit certainement les connaître ? qui ont été développés à la fois par le CAMO-Personnes immigrantes et par le ministère à Montréal. Pourquoi ne pas envisager qu'un certain nombre de... Ce type de projet pourrait aussi être développé de façon très concrète dans les régions, donc, parce qu'il y a aussi des besoins de professionnels à Sherbrooke. Donc, que va-t-on faire avec l'ingénieur immigrant? On en a beaucoup dans la communauté serbe, par exemple. Il y a des réfugiés qui sont aussi très qualifiés. Est-ce qu'on va lui dire: Bien, non, désolé, ad vitam aeternam, ton profil est trop élevé par rapport à nos besoins, alors qu'on sait qu'il y a quand même des besoins d'ingénieurs à Sherbrooke, là, puis la ville travaille avec de nombreux sous-traitants qui sont des boîtes d'ingénieurs, aussi, là.
n(11 h 40)n Donc, peut-on aussi, avec cette population déjà installée chez nous, développer des projets concrets de formation d'appoint? Je pense que là il y a Emploi-Québec puis il y a le réseau de l'éducation. Parce que la difficulté, c'est que, même si, comme la dame disait, les acquis sont évalués, par exemple, par les ordres professionnels, ensuite le relais ne se fait pas au niveau du réseau de l'éducation, au niveau de la formation d'appoint. Parce que je pense que la plupart des immigrants savent en arrivant ici qu'ils auront quand même à actualiser leurs compétences. Ils sont prêts pour ça, mais ils ne sont pas prêts à ne pas savoir... ne pas voir le bout du chemin quelque part en termes d'accès à leur métier. Ça, par contre, c'est un trop gros sacrifice, un trop gros gâchis, je pense, pour notre société.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député, je vous avise qu'il reste deux minutes pour la question et la réponse.
M. Thériault: Oui. Vous démontrez un intérêt particulier pour recevoir chez vous des immigrants réfugiés. Ça crée, j'imagine, au niveau de cet arrimage-là, une problématique supplémentaire, puisque, bon, ils ne seront pas nécessairement sélectionnés en fonction, là, des emplois. Comment vous conciliez cet intérêt-là avec les moyens dont vous disposez présentement pour arriver à les intégrer?
La Présidente (Mme Hamel): M. Boisvert.
M. Boisvert (Pierre): Oui, une réponse en deux parties. L'intérêt à recevoir des réfugiés, je pense que c'est certain. Je pense qu'il faut cependant mettre l'image comme elle est. Je pense que, si on peut comparer la ville à une éponge, il y avait beaucoup de place pour les réfugiés dans les derniers 10 ans, peut-être parce qu'on était sous-alimentés en immigrants, mais là on réalise que l'éponge est moins sèche qu'elle l'était. Est-ce qu'il va falloir ajuster en conséquence? Est-ce que, en multipliant par 10, on voit que le problème de Sherbrooke, c'est un problème de métropole, et donc, en divisant par 10, on arrive au même résultat? Ce que je veux dire par là, c'est que, si les réfugiés sont plus fragiles, donc ils demandent des infrastructures, des services qui sont plus grands, et que, nous, on ne les a pas ou on les a moins, bien, si vous voulez envoyer plus de population immigrante, bien, il ne faut peut-être pas envoyer toute la population fragile du même côté.
Et, d'autre part, quand vous parlez des emplois, on est peut-être un an trop tôt avant de vous répondre de façon précise. Le plan d'action n'est pas rédigé. Ou les plans d'action, dépendant comment on va le... On a la politique, on est d'accord sur les grands enjeux, sur les orientations, sur les concepts, les principes, ça va bien. Maintenant, comment ils vont être identifiés, quelles solutions vont être identifiées et quels montants vont être donnés à chaque solution, ce n'est pas fait. On ne se donne pas plus qu'un an pour le faire, mais ce n'est pas fait. Donc, je suis obligé d'être un peu vague avec vous.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. Boisvert. Merci, madame, messieurs, pour votre présentation. Merci de vous être déplacés. On a apprécié énormément votre dynamisme. Alors, bon retour dans votre belle région. Merci.
J'avise les membres de la commission que nous suspendons les travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi, et que vous pouvez laisser vos effets sur place, qu'ils seront surveillés. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 43)
(Reprise à 14 h 5)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, nous reprenons nos travaux avec comme premier invité M. Nicolas Savoie, de la Jeune Chambre de commerce de Montréal.
Alors, je vous rappelle, M. Savoie, que vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire, après quoi il y aura un échange de 20 minutes de chaque côté avec les membres de la commission. Alors, la parole est à vous.
Jeune Chambre de commerce
de Montréal (JCCM)
M. Savoie (Nicolas): Merci. Je vais me présenter d'abord puis présenter ensuite la Jeune Chambre avant d'aborder, avant de commencer ma présentation. Donc, Nicolas Savoie, président de la Jeune Chambre de commerce de Montréal. Dans mes temps libres, je suis également directeur en stratégie chez SECOR, une firme de conseillers en management qui va accompagner le gouvernement d'ailleurs dans certaines de ses réformes, là, notamment au niveau de coût des défusions des villes et partenariats public-privé.
Donc, la Jeune Chambre de commerce de Montréal, c'est un organisme qui est constitué de 1 400 jeunes gens d'affaires de tous horizons, jeunes entrepreneurs, travailleurs autonomes, cadres, employés, une moyenne d'âge de 30 ans. 1 400 membres fait de nous, en fait, le plus grand regroupement de jeunes gens d'affaires en Amérique du Nord. On existe depuis 73 ans et on est complètement indépendants de tout autre organisme, comme, par exemple, la Chambre de commerce de Montréal; il n'y a aucun lien entre nous.
Notre mission est simple: générer le succès de nos membres, les aider dans leurs parcours professionnel et personnel. On le fait via plus d'une soixantaine d'activités, programmes de mentorat, etc. Également, générer le succès de nos membres, ça veut dire promouvoir leurs intérêts, et ça, on le fait en prenant position sur des questions d'affaires publiques comme celle qui nous concerne aujourd'hui. On a publié plus d'une douzaine de mémoires, là, depuis cinq ans sur des thèmes variés, comme l'immigration, la conciliation travail-famille, etc.
Pourquoi la Jeune Chambre s'est penchée sur la question de l'immigration? Eh bien, comme représentants de la nouvelle génération, en fait, la situation démographique nous préoccupe. On voit avec appréhension venir les impacts du vieillissement, de la dénatalité et tout ce que ça peut impliquer en termes de pénurie de main-d'oeuvre et ce que ça peut impliquer au niveau du support des programmes sociaux, auxquels la nouvelle génération tient également. Donc, c'est pour ça qu'on se penche là-dessus.
On s'était déjà penchés, sachez-le, sur la question de l'immigration. En 2001, on avait déposé un mémoire, là, dans le cadre de la revue du cadre législatif qui entoure les ordres professionnels, un mémoire que je me ferai fort de faire parvenir à la commission, là, après ma présentation et un mémoire auquel je vais faire référence parce que certaines des mesures qui sont dans ce mémoire s'appliquent très bien à ce qu'on discute aujourd'hui.
Écoutez, je vais attaquer tout de suite avec le scénario que la Jeune Chambre préconise, puis je vous expliquerai ensuite pourquoi et quelles sont nos recommandations ou suggestions, en fait, à la commission pour s'assurer du succès du scénario retenu.
Le scénario retenu, c'est le scénario 3, donc celui qui vise à maximiser l'immigration tant en termes de quantité ? le nombre ? qu'en termes de sa qualité, soit le scénario qui met l'emphase sur les immigrants qualifiés et francophones.
Pourquoi le scénario numéro 3, pourquoi on retient celui-là? Bien, il y a deux raisons principales. La première, j'y ai fait allusion déjà, mais on est préoccupés par le fait qu'il faut planifier la relève. On voit la pénurie de main-d'oeuvre qui se pointe à l'horizon. C'est bien documenté dans les documents, là, qui avaient été fournis pour élaborer nos mémoires. La population active vieillit, la proportion des 45-64 ans s'est accrue de 29 % dans les dernières années. À l'inverse, les 25-34, ça a décru d'à peu près 26 %. Donc, clairement, on a une population active qui vieillit puis, en plus, à long terme, elle est amenée à décroître, puis on dit moins 2 % d'ici ans versus plus 43 % hors Québec. Donc, on est dans un contexte où il y a de moins en moins de population active à terme, et ça nous différencie du reste du Canada, avec lequel on est souvent en compétition, là, à différents égards. Donc, ce n'est pas une situation qui nous satisfait, vu tous les impacts que ça va entraîner sur, comme je le disais, pénurie de main-d'oeuvre, relève en entreprise, ce qui est particulièrement préoccupant quand on sait que seulement un tiers des propriétaires d'entreprises familiales ont planifié leur relève, et, de ces gens-là qui prennent la relève, là, d'ici 10 à 15 ans, seulement un tiers l'a planifiée.
n(14 h 10)n J'ai parlé du support des programmes sociaux. C'est particulièrement important aux yeux de la jeune génération, parce que, évidemment, nous aussi, on veut avoir accès aux mêmes genres de programmes sociaux, là, dont aura bénéficié la génération actuelle et celle qui l'a précédée. Pour nous, c'est une question d'équité intergénérationnelle que de maintenir ces acquis. Donc, c'est là une des principales raisons.
La deuxième raison, c'est que le scénario, en tant que tel, nous apparaît le plus intéressant de par ses caractéristiques ? c'est le nombre le plus élevé, on parle de viser 48 000 immigrants par année, au lieu de 45 000 ou en bas de 40 000 ? et sa composition surtout: on met l'accent sur les travailleurs qualifiés, on met l'accent sur les travailleurs francophones. À nos yeux, c'est les catégories d'immigrants qui sont les plus susceptibles de s'intégrer à la société québécoise. C'est également ceux qui sont les plus susceptibles de contribuer à la société québécoise. Donc, on fait d'une pierre deux coups, tout le monde y gagne. Et, avantage non négatif, c'est aussi un scénario où le Québec est davantage en contrôle, par rapport aux deux autres scénarios où la portion immigrants qui tombent sous la juridiction fédérale, là, est plus forte.
Une nuance qu'on apporterait, par contre, au scénario 3: on voit que le nombre d'entrepreneurs, de gens d'affaires, est à 2 600 pour l'ensemble des années, et c'est le même nombre que pour les deux autres scénarios. Là on encouragerait la commission à considérer une augmentation du nombre de gens d'affaires, dans le scénario 3, entre autres via les programmes existants d'immigrants investisseurs, là, qui existent déjà, qui sont en place.
On apprécie aussi la diversification... la diversité, enfin, des sources d'immigrants, en termes de pays d'origine. On pense que c'est quelque chose qui est à maintenir. On pense que c'est mieux ça que de maximiser une immigration d'une région ou d'un pays en particulier, quand on pense aux problèmes qu'a connus la France avec son immigration, qui est d'abord d'origine maghrébine ? d'un seul pays ? en fait, ou l'Allemagne, où là le gros de l'immigration, c'est la Turquie; il faut diversifier les sources d'immigration.
Bon, cela étant dit, il y a des questions qu'il faut se poser quand on préconise de maximiser l'immigration comme on le fait. La première, c'est: Est-ce qu'on est capables, est-ce qu'on a la capacité pour accueillir ces immigrants? Nous, on pense que oui, sur la base du fait que la proportion d'immigrants au Québec demeure très faible comparativement aux autres régions du Canada, notamment les provinces très dynamiques comme l'Alberta, qui est à 15 %, l'Ontario, qui est à 25 % et plus, puis la Colombie-Britannique. Et, en plus ? on le voit dans ce que vous aviez indiqué dans le document de mise en contexte ? l'opinion publique québécoise est de plus en plus favorable à la question de l'immigration. Donc, on pense qu'il y a deux éléments, là, qui font en sorte qu'on est capables d'en prendre plus.
Être capable, c'est une chose. Encore faut-il les attirer et les intégrer, et, pour ça, on propose trois axes sur lesquels il faut jouer pour y arriver. Puis c'est particulièrement important dans un contexte de concurrence accrue, là: toutes les sociétés occidentales vivent le même vieillissement, tous vont vouloir miser sur l'immigration, sans doute. On est à côté du géant américain, donc il faut vraiment être très intéressant pour attirer les immigrants. Et, au niveau des immigrants francophones, on est en compétition contre la France, qui est plus près des régions qu'on vise politiquement et géographiquement.
Donc, les trois axes sont les suivants: d'abord, l'intégration économique, miser sur un enseignement de qualité et, également, se distinguer par nos politiques de conciliation travail-famille novatrices.
Je les prends un par un: l'intégration économique, pour nous, c'est l'axe numéro un, parce que la meilleure façon, à nos yeux, d'intégrer un immigrant, c'est que la personne ait un emploi. Via un emploi, elle est valorisée, elle est heureuse, elle est en contact avec la société d'accueil et, du coup, elle contribue également à la société d'accueil. Donc, la société y gagne et, en plus, ça facilite l'acceptation publique de la question de l'immigration parce que les immigrants sont perçus comme contribuant à la société et non comme vivant en marge ou vivant au dépens de.
Comment y arriver pour favoriser une intégration sur le marché du travail? Là je vais faire référence au mémoire qu'on a déposé sur les ordres professionnels: Mais ça passe par une meilleure reconnaissance de leurs qualifications. C'est le grand frein, puis nos membres nous en parlent, parce que, à la Jeune Chambre, il y a beaucoup de jeunes gens d'affaires qui sont des immigrants. Donc, ça passe par amener les ordres professionnels, par exemple, à permettre une espèce de statut transitoire pour les immigrants qualifiés qui n'ont pas encore répondu à l'ensemble des critères des ordres mais qui pourraient pratiquer sous certaines conditions ou avec certaines restrictions leur métier en attendant de compléter leur formation pour ensuite devenir professionnels, là, en rencontrant 100 % des critères. Donc, création d'un statut transitoire dans chacune des différentes professions.
Révision des critères d'acceptation des immigrants par ces ordres, donc les amener à mettre leurs critères à jour pour s'assurer qu'il n'y a pas de discrimination indue envers les immigrants.
Troisièmement ? et ça, c'est peut-être plus au ministère à mettre ça en oeuvre: mais de voir peut-être à la création d'un programme d'aide financière pour les immigrants qualifiés, qui leur permettrait de payer pour leurs études ou pour le complément de formation qu'ils doivent obtenir pour devenir membres en bonne et due forme d'une profession.
Et finalement peut-être considérer la mise en place d'incitatifs fiscaux pour encourager les immigrants dans leur statut transitoire, quand ils ne sont pas 100 % acceptés par une profession ou un ordre quelconque ou pour s'établir en région. Donc, un certain nombre de mesures pour accélérer leur intégration au niveau de leur profession. Ça, c'était le premier axe.
Deuxième axe: enseignement de qualité. Et le Québec, Montréal en particulier, est très bien positionné à ce niveau. Il y a une étude récente de la Chambre de commerce de Montréal qui indiquait que Montréal compte le plus d'étudiants per capita par rapport aux grandes métropoles nord-américaines. C'est un centre de recherche reconnu, puis on est particulièrement forts dans certains secteurs. Donc, pour nous, il faut renforcer ça parce que c'est un pôle d'attraction important pour les immigrants. Que ce soient des étudiants ou des chercheurs ou des immigrants qualifiés, là, les professionnels, ils vont être attirés par un milieu universitaire dynamique, un milieu de recherche dynamique.
Pour y arriver, deux choses: un, améliorer le financement des universités. Et je sais qu'il y a une commission qui se penche là-dessus; on a déposé un mémoire également à cet effet. Mais c'est un des éléments sur lesquels on peut travailler pour attirer les immigrants. Et ensuite il faudrait songer à faciliter l'accès au permis de travail aux étudiants étrangers pour que, une fois qu'ils aient fini leurs études ici, qu'on les garde, qu'ils ne partent pas. Même s'ils paient le plein coût de leurs études contrairement aux autres Québécois, c'est une perte malgré tout de les voir partir, parce que, de par le temps qu'ils passent ici, les contacts qu'ils s'y font, ils commencent déjà à s'intégrer. Donc, c'est bête de les perdre en fait au moment même où ils sont prêts à maintenant contribuer à la société québécoise.
Troisième et dernier axe: conciliation travail-famille. Ce n'est pas par vertu qu'on l'amène, mais par pragmatisme. Je l'ai mentionné tantôt, le Québec est en compétition contre les États-Unis, la France, le Canada anglais. C'est des pays qui ont des niveaux de vie ou des niveaux de revenu plus élevés que le Québec, là, on ne s'en cachera pas. Donc, ça peut être difficile pour nous de jouer la carte de l'enrichissement ou la carte du «American Dream», si vous voulez. Donc, on peut la jouer, là; c'est clair qu'on a un niveau économique intéressant, là, mais, comparativement à eux, il est moindre.
Donc, quelle autre carte jouer? Pourquoi ne pas jouer celle de la qualité de vie, celle qu'on affiche souvent déjà de toute façon? Et, qualité de vie pour nous, ça veut dire des politiques de conciliation travail-famille qui sont novatrices, et on pense qu'on peut se distinguer à cet égard. Encore une fois, la Jeune Chambre s'est déjà positionnée là-dessus. Ici, on parle, par exemple, de favoriser les horaires flexibles, les horaires réduits, de s'assurer de rapatrier les argents du fédéral pour la mise sur pied d'une caisse parentale, et ainsi de suite. Donc, c'est là, je vous dirais, les trois grands axes que la Jeune Chambre estime devoir privilégier.
n(14 h 20)n En conclusion. Pour terminer, juste rappeler les éléments clés: on fait face à une problématique démographique importante, qui préoccupe la jeune génération, de par ses impacts sur la main-d'oeuvre, sur nos acquis sociaux, nos programmes sociaux. Donc, parmi les trois scénarios, celui qui est le plus susceptible de répondre ou de solutionner en partie le problème démographique, c'est le scénario 3, et il est particulièrement intéressant de par sa composition: immigrants qualifiés, immigrants francophones. Et, pour voir à la bonne mise en oeuvre de ce scénario, trois axes: l'intégration économique, qui passe notamment par une meilleure reconnaissance des diplômes de ces immigrants qualifiés; l'enseignement, assurer un meilleur financement aux universités, renforcer tout le domaine de la recherche, à Montréal en particulier mais dans le Québec en général, et des politiques de conciliation travail-famille novatrices.
Donc, je vous remercie de m'avoir écouté, et je suis prêt à répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. Savoie. Alors, nous allons débuter avec Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Alors, bienvenue. Merci d'être parmi nous cet après-midi. D'abord, je dois vous dire d'emblée que j'ai eu l'occasion de suivre un peu l'évolution de la Jeune Chambre depuis 10 ans, et c'est assez fantastique, les pas qui ont été accomplis. À l'époque, j'étais membre de la plus vieille chambre, du conseil d'administration, et je dois vous dire que je trouve ça très encourageant de voir que notre relève s'empare activement des dossiers qui constituent des enjeux de société. Et, que vous participez aux débats, je pense que c'est prometteur pour l'avenir du Québec, et je tiens sincèrement à vous remercier d'avoir franchi la distance pour venir nous faire part de vos propos.
J'aborderai bien sûr votre préoccupation au sujet de l'intégration économique. Vous nous dites que vous avez déposé jadis un mémoire sur les ordres professionnels. Je n'ai pas eu le plaisir de le parcourir, mais... D'abord, j'aimerais vous poser une question. Est-ce que vous savez, à la Jeune Chambre, si vous avez de nombreux membres québécois mais issus de pays... d'origines différentes? À peu près, là, grosso modo.
M. Savoie (Nicolas): Grosso modo, ça peut tourner autour de 15 % ou 20 %, à peu près.
Mme Courchesne: Bien, ce n'est pas pire, c'est un début.
M. Savoie (Nicolas): Non, non, c'est très bien. Je vous dirais que de plus en plus... Mais c'est un pourcentage qui va grandissant, on le voit de plus en plus. Il y a beaucoup de jeunes Français ou Maghrébins, on en croise énormément, ou Haïtiens, par exemple. Beaucoup, beaucoup.
Mme Courchesne: Est-ce que, dans cette problématique des ordres professionnels, la Jeune Chambre a déjà posé des gestes concrets auprès des ordres ou auprès du Conseil interprofessionnel? Est-ce qu'il y a des actions que vous avez entreprises ou si... C'est très bien de déposer le mémoire, là, mais est-ce qu'il y a un petit plan d'action que vous avez? Est-ce qu'il y a quelque chose que vous auriez tenté, et, si oui, quelles ont été les réactions? Où est-ce que... Quel est votre diagnostic réel par rapport à cette problématique? Pourquoi les ordres sont si réticents, d'après vous?
M. Savoie (Nicolas): Bien, je vais répondre aux deux questions. D'abord, quels gestes on a posés. Le mémoire a été déposé en novembre 2001, et, chaque fois qu'on dépose un mémoire, on tente d'interpeller les acteurs concernés ? dans ce cas-ci, les ordres ? évidemment, le ou la ministre de l'Immigration de l'époque et également les journalistes. Et je sais qu'à l'époque on avait eu des discussions avec l'espèce de responsable de l'ensemble des ordres, là, au niveau québécois, là.
Mme Courchesne: Le président de l'Office des ordres des professions, c'est ça... ou de l'Office des professions?
M. Savoie (Nicolas): Oui, c'est ça. C'est ça, exactement.
Mme Courchesne: C'était M. Samson, oui, à l'époque.
M. Savoie (Nicolas): Donc, on a eu des discussions avec eux, puis on avait fait des lettres ouvertes, des choses comme ça. Puis je pense qu'à l'époque on avait également rencontré votre prédécesseur.
Pour répondre à la deuxième question, le diagnostic, bien, le diagnostic qu'on pose est assez simple. C'est parce que les ordres ont un objectif officiel qui est de, évidemment, s'assurer, là, du bien-être du public, protéger le public, etc., mais, en même temps, en tant qu'organisme qui représente ses membres, ils ont aussi à coeur de défendre les intérêts des membres. Et, vu que le fait de devenir... L'acquisition de la profession, si vous voulez, ou la reconnaissance de la profession, c'est une barrière à l'entrée. Puis, comme tout groupe du genre, c'est sûr qu'en limitant l'offre les lois du marché font en sorte que les prix montent, donc ceux qui sont... c'est ceux qui ont la profession actuellement qui en bénéficient donc. On peut penser qu'ils n'ont peut-être nécessairement intérêt, de par eux-mêmes, là, à vouloir le plus possible qu'il y ait de gens qui se joignent à leur profession. Donc, ils jouent un peu avec ces deux éléments-là. Donc, on peut comprendre qu'ils soient réticents à vouloir davantage d'immigrants, par exemple, là, qui acquièrent la profession, là.
Mme Courchesne: Sauf que vous représentez des employeurs, vous représentez des entreprises, au niveau de la Jeune Chambre, évidemment des jeunes entrepreneurs, peut-être, là, on se comprend, mais principalement. Mais vous êtes quand même... C'est très varié, là.
M. Savoie (Nicolas): Oui.
Mme Courchesne: Donc, est-ce que, d'après vous, la Jeune Chambre poursuivrait une action peut-être plus ? ce n'est pas méchant...
M. Savoie (Nicolas): Non, non.
Mme Courchesne: ...là ? tenace à cet égard-là, c'est-à-dire plus significative? Parce que, moi, je me dis que plus nous serons nombreux à vouloir convaincre les ordres qu'il est grandement temps d'agir, encore une fois, sur les volets administratifs, là ? moi, je ne veux pas, par exemple, que le gouvernement s'immisce dans la définition des qualités standard, de qualité de pratique, là, je ne crois pas que ça relève d'un ministère ou d'un gouvernement ? au niveau, par ailleurs, de l'abolition de certaines procédures administratives, ou alors de faciliter la reconnaissance des équivalences, ou alors de mettre en commun pour que ça aille plus vite, au fond.
Est-ce que, d'après vous, comme vous représentez des employeurs qui vont faire face possiblement à des pénuries de main-d'oeuvre, est-ce qu'on peut s'attendre à... ou est-ce que c'est un sujet qui est suffisamment discuté, dans vos ordres du jour, pour penser qu'il y aurait d'autres suites de votre part?
M. Savoie (Nicolas): Bien, certainement. En fait, la Jeune Chambre a peut-être trois ou quatre chevals... chevaux de bataille, pardon, et les principaux sont les suivants, là: l'immigration, c'en est définitivement un, pour reprendre ce qu'on a fait précédemment et pour quoi on est là aujourd'hui aussi. Et je ne l'ai pas mentionné, mais on a un certain nombre d'activités, à la Jeune Chambre même, qui visent à tisser davantage de liens avec les différentes communautés culturelles, notamment, évidemment, les immigrants. Donc, et ça, c'est... Et, cette année d'ailleurs, la Jeune Chambre a commencé à se bilinguiser; donc, toutes nos communications dorénavant vont se faire en anglais, etc. Donc, c'est juste pour vous démontrer que tout le volet culturel, immigration, est important. Ça, c'est un cheval de bataille.
Le deuxième, c'est la conciliation travail-famille. Le troisième, toute la question, là, le système de santé, le financement du système de santé. Et, le quatrième, le financement des universités, de l'enseignement supérieur.
Mme Courchesne: Je vais changer de sujet, si vous me permettez, parce que le temps passe.
M. Savoie (Nicolas): Oui, oui, certainement.
Mme Courchesne: Vous avez beaucoup parlé de l'importance de conserver, d'attirer et de garder les étudiants étrangers. Encore là, vous êtes dans le milieu des affaires. Souvent, les entreprises ont des liens avec des pays, font des affaires partout dans le monde. Est-ce que... Comment réagissez-vous à la problématique où certains pays sont très réticents, qu'on aille trop loin? D'ailleurs, c'est pour ça qu'on ne peut pas travailler hors campus, hein? C'est pour s'assurer que... Souvent, les étudiants retournent chez eux, parce qu'on se fait... pas accuser ? le terme est fort ? mais il y a toujours cette problématique de garder, ce qu'on appelle en anglais, le «brain drain», c'est-à-dire garder le haut savoir chez nous, alors que d'autres pays en ont besoin, et, chez eux, ils ont aussi ces pénuries de main-d'oeuvre. Donc, comment vous réagissez à une problématique comme celle-là qui s'inscrit dans un champ international plus vaste? Vous, comme homme d'affaires, là, est-ce que ça vous pose des problèmes?
n(14 h 30)nM. Savoie (Nicolas): Ça fait un... Le débat est intéressant, parce que je pense qu'il introduit une notion de conscience sociale, si on veut, de volonté d'aider les pays en voie de développement, par exemple, en faisant en sorte qu'on puisse leur retourner les gens qui ont été formés chez nous. C'est peut-être une façon efficace, là, d'aider ces pays-là, je ne le sais pas, puis il faudrait voir, là, si effectivement c'est ça, la façon la plus efficace, ou, encore mieux, leur permettre, eux, de développer les institutions de savoir qui vont leur permettre de garder leurs gens. Puis d'autant plus que le fait de garder leurs gens ou non, ça dépend très peu de nous, beaucoup d'eux.
Donc, cela étant dit, à moins que ce soit ça, notre première volonté, moi, je ne pense pas qu'il faille être très sensible à cet argument. Je pense que, si on a ce qu'il faut pour les retenir... En fait, parce qu'il ne faut pas oublier non plus, en bout de ligne, que c'est une décision de l'individu. Et, si l'individu choisit de rester ici, bien tant mieux pour lui et tant mieux pour nous. Ce qu'il faut faire en sorte, c'est de pouvoir offrir à l'individu le choix. En ce moment, ils n'ont pas vraiment le choix, parce qu'on leur dit: Quand tu as fini, tu retournes chez vous. Donc, donnons-leur au moins le choix, ils choisiront. S'ils retournent chez eux, tant mieux. De toute façon, je ne serais pas surpris qu'il y en ait beaucoup qui restent un temps ici puis qu'après ils retournent.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, Mme la Présidente. Moi, je voudrais un petit peu continuer sur ce que Mme la ministre avait commencé avec la Jeune Chambre quand elle a vous a demandé si, à l'intérieur de la Jeune Chambre, vous aviez justement cette préoccupation-là d'intégrer ? parce que vous êtes des employeurs, hein, vous êtes un groupe d'employeurs ? d'intégrer à l'intérieur des entreprises des personnes immigrantes.
Est-ce que vous avez des débats? Est-ce que vous avez vraiment ce débat-là à l'intérieur de la Jeune Chambre? Est-ce que vous avez des ateliers ou est-ce que vous avez vraiment une volonté ferme... Est-ce que vous en parlez ou est-ce que... J'aimerais ça, si vous pouviez un petit peu élaborer là-dessus.
M. Savoie (Nicolas): ...m'assurer de bien comprendre. Vous voulez savoir si on débat, par exemple, avec nos membres de la question de savoir s'il faut plus d'immigration ou moins ou...
Mme Papineau: Est-ce que vous prenez position, par exemple, comme Jeune Chambre? Puis est-ce que vous... justement avec vos membres, quand vous avez des rencontres, que vous avez, je ne sais pas, des colloques, est-ce qu'il y a cette partie-là de dire à vos employeurs: Écoutez, on a des personnes immigrantes qui sont qualifiées et qui pourraient justement subvenir aux besoins des entreprises? Est-ce que vraiment vous avez ce genre de débat là à l'intérieur de la Jeune Chambre?
M. Savoie (Nicolas): On l'a de deux façons, en fait. La première, c'est via les débats qui entourent le développement de mémoires comme ça, mémoires qu'on ? sachez-le ? approuve en C.A. et, ensuite, diffuse à l'ensemble de nos membres. On les sensibilise donc à ces questions-là. Ça, c'est le numéro un. Le numéro deux, c'est de par les différentes activités, notamment celles qu'on fait où on cherche à tisser des liens plus serrés avec les différentes communautés culturelles et les immigrants. Dans le fond, à travers ça, on sensibilise tout le monde à la chose.
Il faut voir, par contre, qu'au niveau des jeunes la question de l'immigration n'est pas très controversée, parce que, les gens, ce qui compte, c'est... La question de l'immigration est peu controversée, dans le sens où ce qui compte, c'est la qualification: est-ce que la personne est qualifiée ou non? Si elle l'est, peu importe l'origine ou... Donc, c'est... Les gens, en fait... J'allais dire, il n'y a pas grand débat, parce que c'est entendu et accepté que ce qui compte, c'est la qualification et non l'origine.
Mme Papineau: O.K. Maintenant, vous nous parlez de l'opportunité du Québec et de Montréal d'attirer des milliers d'étudiants étrangers par la présence du réseau universitaire, par les centres de recherche puis les secteurs d'activité économique qui vont bien à Montréal. On a rencontré, plus tôt cette semaine, la FEUQ, qui disait qu'une hausse probable des frais de scolarité pourrait nuire justement à l'arrivée ou, en tout cas, à la venue d'étudiants. Est-ce que vous adhérez à cette thèse-là?
M. Savoie (Nicolas): Bien, corrigez-moi si je me trompe, mais, ma compréhension, c'est que les étudiants étrangers en ce moment paient le plein prix et donc...
Mme Papineau: Oui, mais...
M. Savoie (Nicolas): Donc, si hausse de frais il y a, je pense qu'elle serait d'abord concentrée sur les étudiants québécois. Peut-être que les deux seraient...
Mme Papineau: Non, non...
M. Savoie (Nicolas): Parce que je n'ai pas l'impression qu'il y a en ce moment des subventions pour les étudiants étrangers. Bien, peut-être que je me trompe.
Mme Papineau: Non, ce n'est pas ça.
M. Savoie (Nicolas): Tout ça pour dire que la hausse des frais... il n'y aurait pas de hausse des frais qui freinerait l'arrivée d'étudiants ici.
Mme Papineau: C'est parce que, pour les étudiants québécois, c'est gelé, mais, pour les étudiants étrangers, il y a des augmentations.
M. Savoie (Nicolas): C'est ça, il y a des augmentations.
Mme Papineau: Et c'est là-dessus que je vous amène, parce que la FEUQ, cette semaine, nous disait que, s'il y avait encore... que ces augmentations-là faisaient en sorte que ça freinait l'arrivée d'étudiants étrangers. Et je voulais vous demander si, vous, vous avez perçu ça.
M. Savoie (Nicolas): Bien, d'abord, je vais vous dire qu'on n'a pas étudié la question. Par exemple, dans le mémoire qu'on a déposé sur le financement de l'université, on a très peu parlé du volet, là, étudiants étrangers. Mais, de par ma connaissance de la situation, je pense que la plupart des universités québécoises rapportent des contingents d'étudiants étrangers en augmentation malgré le fait qu'ils paient un prix largement supérieur à celui des étudiants québécois. Donc, je n'ai pas l'impression que ça changerait grand-chose. En fait, les frais de scolarité demeurent, là, très intéressants pour quelqu'un qui... C'est beaucoup moins cher ici, par exemple, qu'aux États-Unis, donc on demeure très intéressants. Puis il y a une certain élasticité associée au prix, là, des études universitaires.
Donc, je ne pense vraiment pas qu'une hausse de frais éventuelle freinerait... Ce n'est pas le facteur premier; les gens, ils viennent d'abord et avant tout pour la formation qu'ils vont avoir, qui est de meilleure qualité, pour le fait que par la suite ils pourraient se trouver un emploi intéressant, puis ainsi de suite. Et ça, c'est bien plus porteur qu'une hausse de 1 000 $, 2 000 $ de frais de scolarité sur... C'est rien, quand on regarde ça sur l'étendue d'une vie.
Mme Papineau: Vous soulevez... vous avez soulevé, en tout cas, avec raison, la difficulté de faire reconnaître les diplômes, là, les reconnaissances... les diplômes acquis à l'étranger, et il y a plusieurs groupes qui sont venus ici qui sont aussi de votre avis, qui disent que c'est difficile pour un immigrant qui a un diplôme ou qui a, en tout cas, une profession de faire reconnaître les acquis ici. Vous dites que vous avez présenté un mémoire en 2001. Pour le bénéfice des membres de la commission, pourriez-vous nous rappeler les grandes lignes de ce mémoire?
M. Savoie (Nicolas): Certainement. C'était, cela dit, là, les mêmes que j'ai ramenées dans la discussion, mais je le fais avec enthousiasme. Les grandes lignes, c'étaient les suivantes, c'était... il y avait trois... disons, on a proposé des pistes de solution auprès de trois intervenants. Le ministère des Relations avec les citoyens; à ce niveau-là, on proposait qu'il y ait une forme de suivi qui soit mise en place auprès des immigrants qui doivent compléter une formation auprès d'un ordre professionnel, pour s'assurer, là, que ça fonctionne, qu'ils ne sont pas laissés lousses... laissés à eux-mêmes, pardon, excusez-moi.
Ensuite, bon, il y avait aussi peut-être l'idée de lancer une campagne de sensibilisation auprès des employeurs pour les amener à, bon, à être plus favorables à l'idée d'embaucher des immigrants. Deuxièmes acteurs, évidemment, concernés, c'étaient les ordres professionnels, et là ce qu'on proposait, c'est, comme je le disais, les amener à faire l'exercice de revoir leurs critères d'admission. Certains diront: Ils sont très à jour. Tant mieux. Mais certainement qu'il y en a, parmi l'ensemble des ordres, là, où les critères n'ont peut-être pas été revus depuis 10 ans, 15 ans, puis, évidemment, l'immigration est beaucoup plus importante maintenant à nos yeux, donc pourquoi ne pas profiter de l'exercice pour revoir et voir si c'est effectivement adapté à la situation d'un immigrant? Donc, révision des critères.
Création d'un statut intermédiaire pour les immigrants qui ont été formés dans leur pays d'origine. Donc, ça, par «statut transitoire», j'entends quelqu'un qui ne rencontrerait pas tous les critères pour être, par exemple, ingénieur ou médecin, mais suffisamment pour pratiquer, mais dans un... avec des contraintes ou avec des conditions. Donc, si on parle d'un médecin, peut-être qu'il y a certains actes qu'il ne pourrait pas poser, mais il y en a plusieurs autres qu'il pourrait poser. Et le grand avantage, c'est que là on a quelqu'un qui a une job, qui travaille, qui établit son réseau, qui profite du fait qu'il a un emploi rémunérateur pour se payer les études qu'il a besoin de faire pour compléter sa formation et donc qui, en bout de ligne, est plus susceptible de mieux s'intégrer, plutôt que d'avoir un médecin qui est chauffeur de taxi le temps de payer ses études puis qui, à un moment donné, ou bien il se tanne, ou bien il lâche, ou bien il finit par se trouver une autre job pas dans son domaine, puis là on n'est pas avancé. Donc, statut transitoire.
Et finalement, au niveau du ministère des Finances, on avait parlé peut-être d'incitatifs fiscaux pour soit permettre aux immigrants de plus facilement financer leurs études ? leur complément de formation, j'entends ? ou bien pour les inciter à s'établir en région, où il y a un exode des jeunes, là, qui est particulièrement préoccupant.
Mme Papineau: Je vous remercie beaucoup.
M. Savoie (Nicolas): Merci, madame.
La Présidente (Mme Hamel): Il reste 1 min 30 s. Mme la députée de Marie-Victorin.
n(14 h 40)nMme Vermette: Alors, je vais faire ça très rapidement. Il semblerait que tout passe par l'emploi, au niveau de l'immigration. Donc, je dois faire distinction dans les étudiants immigrants. Il y en a qui viennent ici parce que ça coûte moins cher, les frais de scolarité, et qui veulent réellement partir chez eux, là-bas, après, puis il y a ceux qui veulent rester ici, mais en autant qu'on leur offre de l'emploi. On nous dit qu'il y a trop de professionnels, ce n'est pas ce dont nous avons besoin, il y a beaucoup d'emplois qui n'ont pas preneur, et qu'à l'heure actuelle... Je trouve que votre position est un petit peu timide, parce que vous représentez la relève, et, demain matin, on va avoir de la difficulté à remplir certaines fonctions. Et là je vous trouve, surtout au niveau des ordres professionnels, parce que c'est la clé du problème jusqu'à un certain point... Puis, vous, vous avez écrit un mémoire, mais je vous trouve timides.
M. Savoie (Nicolas): Timides dans le sens de...
Mme Vermette: Bien, au niveau de...
M. Savoie (Nicolas): ...nos efforts par rapport aux ordres ou dans le sens... C'est parce que je vous rappelle qu'on privilégie quand même le scénario qui nous ferait accueillir le plus d'immigrants.
Mme Vermette: Oui. Ça, une fois qu'on a dit qu'on... Ça, c'est rien, il faut passer à l'action à un moment donné. On peut parler beaucoup, mais il faut passer à l'action, il faut poser des gestes concrets, où qu'il faut faire des pressions aux bons endroits pour que les choses changent.
Donc, c'est simplement ce que je vous pose comme question: quels sont... Et, je pense, ma collègue vous a demandé à un moment donné: Bon, à part de faire des colloques ou des choses, y a-tu des gestes concrets vis-à-vis des ordres professionnels autres qu'un mémoire? Est-ce qu'il y a des actions concrètes qui ont été posées ou que vous allez tenter de poser pour favoriser un changement de mentalité ou une ouverture de mentalité auprès des entreprises, ne serait-ce que par des prises de position, mais aussi par des actions concrètes pour aider vraiment l'ensemble de ces jeunes immigrants qui sont un plus pour notre société?
M. Savoie (Nicolas): Bien, à cet égard, c'est certain qu'on va continuer nos représentations, entre autres auprès de Mme la ministre, auprès des ordres professionnels. Deuxièmement, dans le cadre de toutes nos activités, on va continuer à favoriser l'intégration de nos jeunes membres, là, qui sont immigrants, et on en a plusieurs. Et on a des activités, comme je le mentionne, là, qui leur sont spécifiquement dédiées. Et également on est à bonifier notre programme de parrainage pour permettre à des immigrants, là, d'y participer plus facilement, disons. Donc, ils auraient un accès privilégié à notre programme de parrainage. Donc, il y a un certain nombre de choses qui sont sous notre contrôle, qu'on peut faire, soit au niveau de la représentation soit au niveau de nos activités. Cela étant, je vous rappelle quand même qu'on est un organisme essentiellement de bénévoles, moi le premier. Donc, on a un pouvoir d'influence qu'on va continuer d'exercer, mais...
Mme Vermette: Alors, avez-vous des liens...
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée.
Mme Vermette: Ah, c'est fini?
La Présidente (Mme Hamel): Oui, c'est ça, à moins... Vous pourriez peut-être y revenir au prochain bloc. Alors, la parole est maintenant à la députée de Bellechasse.
Mme Vien: Merci, Mme la Présidente. M. Savoie, bonjour, bienvenue. M. Savoie, moi, je suis une fille qui vient des régions, de Bellechasse plus particulièrement. Évidemment, je suis très préoccupée par tout ce qui concerne... et enthousiasmée aussi par tout ce qui concerne les régions, bien évidemment. On sait que Montréal est pratiquement la terre première où les immigrants foulent le terrain du Québec, et je ne vous cacherai pas que, nous, en région on aimerait aussi avoir des immigrants, et ce n'est pas nécessairement une tâche très facile. On a eu des gens qui sont venus nous dire aussi qu'ils avaient une préoccupation au niveau de la régionalisation. D'ailleurs, dans le document de présentation, il en était question.
Vous êtes à Montréal. Je vois que vous ne vous êtes pas nécessairement exprimé sur la question de la régionalisation de l'immigration. À la chambre de commerce, à la Jeune Chambre de commerce, vous vous gouvernez de quelle façon par rapport à la régionalisation? Est-ce que vous voyez ça d'un bon oeil? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?
M. Savoie (Nicolas): Bien, dans le mémoire sur les ordres professionnels, on suggère que le ministère des Finances songe à la mise en place d'incitatifs fiscaux qui encourageraient les immigrants à s'établir en région. Donc, je pense ça pourrait aller dans le sens de vos préoccupations.
Deuxième élément, bien sûr, la Jeune Chambre est constituée d'abord de gens, là, qui viennent de la région de Montréal. Donc, on reflète d'abord leurs préoccupations. Cela dit, comme principale jeune chambre au Québec, on participe très activement aux regroupements de l'ensemble des jeunes chambres et on a contribué activement, là, à un mémoire sur l'exode des jeunes en région, où on s'est montré très sensible à la question. Donc, je pense qu'on est tout à fait, là, ouvert et je pense que fondamentalement c'est une bonne idée, là, qu'il y ait davantage d'immigrants qui aillent en région. La question de la pénurie de main-d'oeuvre, tout ce qu'on a dit sur le problème démographique est accentué dans les régions. Donc, tout ce qu'on a dit vaut encore plus pour les régions. Donc, dans ce sens-là, on vous rejoint, là, à 100 %.
Mme Vien: Merci, M. Savoie.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée de Chambly, vous avez une question?
Mme Legault: Oui, j'ai une question brève. M. Savoie, bonjour. J'avais envie d'aller un petit peu plus loin dans votre réflexion, les pistes de solution, là, que vous suggériez dans vos notes d'introduction relativement au fait que justement les ordres pourraient consentir un statut transitoire avec des conditions particulières, modalités pour encadrer l'exercice... Tantôt, à la suggestion de... la question de ma collègue, vous avez donné l'exemple, par exemple, d'un médecin qui pourrait poser certains actes et pas d'autres. Moi, je me questionne sur la capacité d'en arriver là quand, en médecine, au fond, le noyau dur de médecine, c'est le diagnostic, puis que souvent dans l'exécution des actes on est entouré d'une équipe multidisciplinaire. En tout cas... Mais je comprends un peu le sens, là, de votre propos.
Je voulais savoir si vous considériez les 45 ordres sur le même pied, au fond, relativement à l'évaluation que vous en faites, relative aux solutions, ou si vous pouviez... vous aviez imaginé que les ordres soient regroupés selon les fonctions, par exemple, de leurs membres. Est-ce que vous êtes allés jusque-là dans la réflexion?
M. Savoie (Nicolas): Bien, la question de est-ce qu'il faut tous les traiter de la... Enfin, peut-être, j'interprète, là, mais, sur la question de comment aborder la question avec les ordres ou comment les traiter ? parce que, évidemment, un médecin ne fait pas ce qu'un ingénieur, ou un avocat, ou autre, là, peut faire ? on pense que la question d'un statut transitoire est valable pour l'ensemble et on pense qu'il faut laisser une certaine marge de manoeuvre évidemment aux ordres, là, pour définir ce que serait le statut puis quels seraient les critères associés, puis ainsi de suite. C'est sans doute ceux qui sont les mieux placés pour déterminer justement ce qu'un médecin peut faire et ne pas faire quand il n'a pas nécessairement l'ensemble de la formation requise.
Cela étant dit, là, le statut transitoire peut s'appliquer à tous. Peut-être qu'il y en a, comme les médecins... Ce n'était peut-être pas le meilleur exemple, par ailleurs, là, à cause des vies qui sont en jeu. C'est plus sensible, vous en conviendrez. Donc, un médecin, peut-être qu'on a de la difficulté à avoir un statut transitoire, là, mais, un ingénieur ou un avocat, c'est peut-être... parce que les conséquences sont moins dramatiques sur les gens, c'est peut-être plus facile à l'envisager, là. Mais, peu importe, le statut transitoire peut exister, mais il prendrait des formes variées. Mais on laisse aux ordres, là, le soin de déterminer lequel est plus approprié, là.
Mme Legault: Merci, M. Savoie.
M. Savoie (Nicolas): Mais on ne prendrait pas un non pour... on n'accepterait pas un non. S'il dit: Ah non, on ne peut pas créer de statut transitoire, il y a sûrement moyen de trouver quelque chose, et il y en a qui seraient plus élargis, là, ou moins élargis.
Mme Legault: Merci.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la députée. M. le député de Charlesbourg, vous avez une question?
M. Mercier: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Savoie. Bienvenue à Québec, dans la capitale, à l'Assemblée nationale évidemment. M. Savoie, à la lecture de votre mémoire, à la page 5 ? et vous l'avez maintes fois répété lors de votre allocution ? vous avez dit qu'il fallait maintenir ? et je lis, évidemment, là ? la compétitivité du Québec comme territoire de destination auprès des clientèles dans les bassins comme le Maghreb et la France. Et je vous cite ici dans votre mémoire: «La concurrence entre les pays susceptibles d'accueillir des immigrants sera demain plus difficile et plus grande que jamais. Ce risque est d'autant plus inquiétant pour le Québec, qui recherche et encourage prioritairement une immigration francophone, qu'un certain nombre de ses territoires de recrutement de prédilection vont se voir courtisés par d'autres et que le choix risque de se faire à ses dépens, notamment de la part des populations francophones venant du Maghreb ? et, j'y reviens, vous l'avez souvent mentionné tout à l'heure ? qui verront en l'Europe une terre d'immigration plus proche géographiquement, voire culturellement.» Si je prends l'exemple de Charlesbourg, par exemple, mon comté, j'ai plusieurs... évidemment, j'ai plusieurs immigrants, et de plus en plus, et c'est tant mieux, mais je vous dirais que j'ai des immigrants, pour les connaître, qui ne viennent pas nécessairement du Maghreb ou de la France. Plusieurs viennent de l'Australie, viennent du Mexique, viennent de l'Amérique latine. Et, là où je veux en venir, c'est que vous... dans votre mémoire, vous semblez dire que le français, comme langue, devrait être la première langue, mais, pour les gens dont je viens de vous énumérer, c'est la deuxième langue ou la troisième langue. Alors, quelle est votre position là-dessus? Est-ce que d'autres territoires ou d'autres pays devraient être pointés, puisque évidemment vous avez... Puis c'est sur ça que vous avez retenu mon attention, vous disiez que 15 % à 20 % des membres de votre chambre de commerce étaient de communautés culturelles ou immigrants, mais particulièrement des Maghrébins français?
n(14 h 50)nM. Savoie (Nicolas): Et Haïtiens. Bien, je rappellerais un certain nombre d'éléments. Oui, ça, on le dit clairement. Puis c'est d'ailleurs pourquoi on aimait bien le scénario 3, entre autres, on favorise une immigration d'abord francophone. Maintenant, comment la définir? Je pense qu'il faut être relativement ouvert d'esprit, parce que je ne suis pas certain que, juste à partir de pays francophones, on arriverait à rencontrer les cibles qu'on se met. Mais on peut penser, bon, d'abord viser les pays où la langue est effectivement le français ou viser des pays où la langue a déjà été le français ou, enfin, a déjà été... la deuxième langue a déjà été le français. Je pense à la Roumanie, par exemple. Ensuite, il y a d'autres pays qui... c'est ni le français ou ni même l'anglais, mais ils ont peut-être une affinité plus proche, comme les Sud-Américains, par exemple. Bon. Donc, il faut privilégier une immigration francophone ou, peut-être j'apporterais la nuance, là, qui est plus facilement susceptible, là, d'apprendre le français et donc de s'intégrer à notre société qui est largement francophone. Et je pense que c'est comme ça qu'on le veut. En tout cas, c'est comme ça que la jeune chambre le veut.
Donc, je... Je ne sais pas si ça répond à votre premier point, mais on n'est pas pour garder à l'esprit qu'on vise que le Maghreb ou qu'Haïti, là; non, non, c'est assez... D'autant plus que j'ai mentionné que... Une chose qu'on avait notée et appréciée, c'est que historiquement le Québec a réussi à attirer des immigrants de différents pays et n'a pas eu à se concentrer sur une région, ce qui, à nos yeux, est très bien, parce que, quand on regarde des exemples comme la France ou l'Allemagne, où, eux, ils ont une immigration qui est fortement concentrée en provenance d'une région, soit le Maghreb dans le cas de la France ou la Turquie dans le cas de l'Allemagne, on a vu que ça a créé beaucoup de tensions, alors qu'au Québec on n'a pas ces tensions-là. Pourtant, en France, ils ont beaucoup moins d'immigrants, en pourcentage, que nous. Je pense que c'est 5 %; nous, on a 10 %. Donc, tu sais, si on privilégie une certaine diversité tout en respectant le fait français, comme j'ai mentionné, là, je pense qu'on y gagne, là. Ça va être plus facile de les intégrer, puis la société dans son ensemble va être plus réceptive que s'il y a un bloc, hein, d'un groupe, là, en particulier qui ressort. Je pense que je réponds à vos deux points?
La Présidente (Mme Hamel): Merci.
M. Mercier: Est-ce que le temps est écoulé, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Hamel): Le temps est écoulé.
M. Mercier: D'accord.
La Présidente (Mme Hamel): Je cède la parole au député de Masson.
M. Thériault: Merci, Mme la Présidente. Alors, mon collègue de Charlesbourg m'a précédé dans mon questionnement, parce que j'étais préoccupé sur la dimension de la francisation, qui est soulevée... qui a été soulevée dans le mémoire, mais, je trouvais, très peu, compte tenu que vous êtes tout de même la Jeune Chambre de commerce de Montréal et que la problématique de la francisation, pour plusieurs intervenants, est identifiée comme étant le point fondamental d'une intégration réussie. Donc, la problématique de la francisation, à Montréal, est un peu plus aiguë, je dirais, d'autant plus qu'on sait très bien qu'il existe des études qui démontrent encore aujourd'hui, malgré toutes les dispositions qu'on a pu mettre en place avec la loi 101, etc., que la force d'attraction de l'anglais est quand même encore six fois plus grande que le français, à Montréal.
Et je me demandais ce que vous préconisiez pour essayer justement de favoriser cette francisation-là et cette intégration-là. Est-ce qu'il n'y a pas une stratégie spécifique qui devrait être mise en place? Et, si oui, avez-vous un peu d'idées là-dessus? Est-ce que ça pourrait faire partie éventuellement, à la Jeune Chambre de commerce de Montréal, d'une préoccupation qui ferait en sorte que vous puissiez faire des ateliers, des débats là-dessus? À mon avis, il y a là une spécificité incontournable qui devrait être prise en charge, parce que, tout de même, on ne peut pas passer à côté, là, de la réalité.
Et ce qui m'a un petit peu... Dans un deuxième ordre d'idées ? on pourra échanger, là, ce n'est pas... vous n'êtes pas obligé de répondre à toutes mes interrogations ? dans un deuxième ordre d'idées, j'ai cru entendre que... à un moment donné, vous avez dit dans votre présentation, tout à l'heure, que la jeune chambre se bilinguisait. Alors, j'aimerais comprendre vos orientations là-dessus.
M. Savoie (Nicolas): Certainement. Ça va me faire plaisir, d'autant plus que l'orientation de bilinguisme, c'est grandement moi qui l'ai démarrée. Je vais commencer par le premier point. Sur la question de la francisation, est-ce qu'il faut une stratégie spécifique? Je dirais deux choses. D'abord, oui, certainement, puis, encore une fois, je le rappelle, c'est pour ça qu'on privilégie le scénario 3, qui est le scénario où il y a le plus d'immigrants francophones, hein? C'est ce que les chiffres, en tout cas, indiquent. Donc, c'est ce qu'il faut viser, puis on le redit. Donc, on est... Et on pense, entre autres, que c'est comme ça qu'ils vont être à la fois plus facilement acceptés par la société, mais, à la fois, ils vont s'intégrer davantage, plus facilement, là, à notre société qui demeure largement francophone. Donc, c'est une chose.
Une stratégie spécifique; pour ça, là, vous êtes peut-être mieux placés que nous, là, de par les différents programmes qui peuvent exister au MRCI, là. Au-delà des mesures qu'on a mentionnées, pas nécessairement, mais on pense que la question de l'intégration via le travail est la meilleure. Puis, avec toutes les autres lois au niveau du travail qui ont fait en sorte que les milieux de travail sont plus francophones qu'avant, bien je pense qu'on fait d'une pierre deux coups.
Ensuite, sur la question de la volonté de la jeune chambre de devenir bilingue, eh bien, c'est bien simple, il y a plusieurs raisons. La première, c'est qu'il y a tout un volet, là, de la communauté d'affaires de Montréal, le volet, en fait, anglophone, qui n'est pas desservi vraiment par une jeune chambre. Il existait notre équivalent, là, qui était le West Island Junior Board of Trade, qui est malheureusement disparu. Donc, il y a une opportunité pour nous puis pour ces gens-là de joindre un réseau qui est existant, qui... Bon, ça, c'est une chose.
Deuxième chose, je pense que ça envoie un message d'ouverture qui est fortement apprécié tant par les... Puis on a eu beaucoup de réactions de nos membres, tant francophones qu'anglophones, là-dessus. Beaucoup de francophones viennent nous voir en disant: C'est bien que vous fassiez ça, ça démontre une ouverture qui caractérise Montréal, hein, et qui rend Montréal comme terre d'accueil, là, très intéressante. Ensuite... Et par ailleurs, là, cette notion d'ouverture est non négligeable pour faciliter l'arrivée des immigrants dans notre réseau à nous. Qu'ils soient francophones ou anglophones, ils ont juste... C'est parce que souvent ils parlent d'autres langues, hein? Donc, là, ils ont le sentiment qu'on est comme eux, on parle plein de langues, on est ouvert sur le monde, puis ils se sentent beaucoup plus à l'aise d'embarquer.
Et, troisièmement, c'est au bénéfice de tous, hein, parce que, en ce moment, on a un réseau de jeunes gens d'affaires qui est d'abord francophone, alors qu'il y a également des jeunes gens d'affaires anglophones, qui se retrouvent plus ou moins dans notre réseau, et qui malheureusement parfois quittent pour aller à Toronto. Plutôt que de perdre ces énergies-là, aussi bien les embarquer avec nous, les mettre en contact avec le réseau d'affaires principal pour les jeunes à Montréal. Et, inversement, nous, on s'ouvre vers eux. En fait, j'ai de la difficulté à voir, là, des éléments négatifs dans une volonté d'ouverture comme ça, là, envers la communauté qui nous entoure.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député de Masson.
M. Thériault: Oui. Bon, moi, j'ai de la difficulté un peu avec ce que j'entends, je vous dirais. J'ai l'impression de retourner dans les années soixante et soixante-dix, très honnêtement, au sens où... Il faut bien comprendre qu'on est 2 % de parlant français en Amérique et qu'en quelque part l'Assemblée nationale, donc les représentants du peuple, de la nation du Québec, se sont dit à un moment donné qu'il faudrait faire en sorte que le français soit la langue de l'espace public, la langue commune au Québec, la langue de travail, et ce que j'entends, c'est qu'il y a une communauté de jeunes gens d'affaires anglophones qui, en quelque part, préféreraient s'en aller en Ontario, à Toronto, plutôt que de s'intégrer à cette culture et à cette volonté de faire du français la langue de l'espace public et la langue de travail. Ça me questionne énormément. Je peux comprendre vos stratégies de marketing, là, entre guillemets, mais ça me questionne sur le message que ça envoie à l'ensemble de la jeunesse québécoise.
Parce qu'il faut distinguer les problématiques. On sait d'abord que ? je ne vous apprends rien ? l'anglais est quasiment devenue la novlangue des affaires. Alors, moi, je trouve que ça envoie un message plutôt négatif et de fermeture, plutôt que d'ouverture, et de fermeture à la culture française en Amérique du Nord. Alors, ça crée, à mon avis, peut-être même une logique de l'enclave. C'est une chose de défendre le fait français, c'en est une autre de parler trois, quatre langues s'il le faut et de s'ouvrir au monde. Sauf que l'humanisme mondial passe par la reconnaissance de la différence et passe par la reconnaissance des personnes que nous sommes. On ne pourrait pas faire une chaîne humaine à travers le monde et se donner la main si, lorsqu'on se donne la main, on ne reconnaît pas la spécificité de la différence que nous sommes comme culture.
Alors, c'est pour ça que j'ai beaucoup, beaucoup de difficultés avec une... pour avoir une perception positive de votre positionnement, mais je ne suis pas un de vos membres, là... Mais je vous dis: Il me semble que j'aimerais ça, pouvoir discuter plus longuement avec vous là-dessus ultérieurement.
n(15 heures)nM. Savoie (Nicolas): Bien, ça me ferait plaisir, d'autant plus qu'on s'écarte sans doute un peu du thème premier qui est l'immigration. Mais, cela dit, là, ça va me faire grand plaisir. Juste noter que les plus grandes réactions positives viennent des...
La Présidente (Mme Hamel): M. Savoie, je m'excuse de vous interrompre.
M. Savoie (Nicolas): Non. Allez-y.
La Présidente (Mme Hamel): Il faudrait conclure en 30 secondes, s'il vous plaît.
M. Savoie (Nicolas): Bien, je vais simplement... Vous voulez que je conclue, ou les gens ont encore des questions?
La Présidente (Mme Hamel): Non. Vous avez 30 secondes.
M. Savoie (Nicolas): Moi, que je conclue? O.K.
La Présidente (Mme Hamel): Les échanges seront terminés par la suite.
M. Savoie (Nicolas): Merci beaucoup. Bien, écoutez, d'abord, je vais rappeler... je vais focusser surtout sur les axes de recommandations, parce que la problématique, je pense que vous la connaissez très bien.
Je les rappelle simplement, trois axes: favoriser l'intégration économique, et ça passe par convaincre les ordres ? puis on vous aidera là-dedans ? à mettre en place, par exemple, des statuts transitoires; révision de leurs critères et suivi au niveau de la formation qui est donnée. Ça passe également par peut-être des mesures d'aide de la part du MRCI, soit au niveau financier ou d'accompagnement, pour aider les immigrants à compléter leur formation pour acquérir leur profession et être reconnus par l'ordre. Et peut-être des incitatifs fiscaux de la part du ministère des Finances ? je sais qu'il n'est pas trop réceptif à l'idée ces jours-ci, mais, quand même ? pour soit amener les immigrants à plus facilement financer la formation complémentaire qu'ils ont besoin et/ou les amener en région, et ça, c'est le premier axe.
Deuxième axe, donc: favoriser un enseignement supérieur de qualité. Donc, ça passe par un meilleur financement des universités et ça passe également par faciliter l'obtention de permis de travail pour les étudiants étrangers. Ça, c'est l'axe de l'enseignement supérieur.
Et le troisième axe: une politique de conciliation travail-famille novatrice, réduction du temps de travail, comme ce qui avait été repris d'ailleurs par le PQ dans la dernière campagne électorale, et les horaires flexibles, etc.
Donc, pour faire en sorte qu'on ait un Québec qui est à la fois attrayant comme terre d'accueil, parce qu'on est en compétition contre des joueurs importants: les États-Unis, la France, le Canada anglais, et également pour faire en sorte que, une fois qu'on les a... on a réussi à les attirer chez nous, qu'on les garde, qu'ils s'intègrent et qu'ils soient... et donc qu'ils en viennent à contribuer à la société québécoise et qu'également eux-mêmes en retirent le plus possible.
Donc, sur ce, je vous remercie beaucoup de nous avoir invités. On a très apprécié l'offre et ça nous a fait plaisir de venir vous voir aujourd'hui.
La Présidente (Mme Hamel): C'est nous qui vous remercions, M. Savoie, puis on vous souhaite un bon retour à Montréal.
M. Savoie (Nicolas): Merci, madame.
La Présidente (Mme Hamel): Je suspends quelques instants de façon à permettre à nos invités suivants, la Chambre de commerce de Lévis, de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 4)
(Reprise à 15 h 7)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je vous souhaite la bienvenue, membres de la Chambre de commerce de Lévis.
Alors, je vous demanderais de vous présenter, et je vous rappelle que vous avez une période de 20 minutes pour présenter votre mémoire, après quoi il y aura un échange de 20 minutes avec les membres de la commission.
Chambre de commerce de Lévis
M. Gagnon (Michel): O.K. J'aurais cru que c'étaient 40 minutes d'échange avec la commission. C'est 20 minutes?
La Présidente (Mme Hamel): C'est 20 minutes de chaque côté.
M. Gagnon (Michel): Ah! excusez-moi, je comprends.
La Présidente (Mme Hamel): Ce qui fait 40. Et, vous, votre présentation, c'est 20 minutes.
M. Gagnon (Michel): Parfait. Alors, merci, Mme la Présidente. Mon nom est Michel Gagnon. Je suis président de la Chambre de commerce de Lévis. Je ne sais pas si je parle assez fort. Vous m'entendez bien?
La Présidente (Mme Hamel): Certainement, on vous entend très bien.
M. Gagnon (Michel): Parfait, merci. Je suis architecte de profession. Je milite au sein de la Chambre de commerce de Lévis depuis cinq ans, et je voudrais présenter mon confrère, qui est M. Jean-Marie Touré. D'origine sénégalaise ? si vous me permettez, ça va être un petit peu plus long, mais je pense que c'est important ? M. Jean-Marie Touré, coordonnateur de projets à la Chambre de commerce de Lévis, est arrivé au Québec voilà plus de 20 ans et, depuis plusieurs mois, est responsable dans notre organisation de la régionalisation de l'immigration en Chaudière-Appalaches. Détenteur d'une maîtrise en gestion des ressources humaines de l'Université Laval, membre de l'Ordre des conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agréés du Québec, marié à une Québécoise de souche, tricotée serré, d'après ce qu'il me dit, et père de trois enfants, M. Touré, dont la devise est Le monde de demain appartient au métissage, s'est voué tout au long de sa carrière professionnelle à miser sur le capital humain comme facteur de développement. Son expérience et ses connaissances en matière d'immigration, particulièrement en accueil, intégration, adaptation, sensibilisation, pour ne citer que ces volets, font de lui une ressource incontournable pour notre organisation, voire notre région.
n(15 h 10)n Différents projets d'insertion socioéconomique pour les immigrants: jumelage, mentorat, sensibilisation, etc., et j'en passe, lui valent la paternité. Sa volonté et sa détermination de faire de notre sous-région une destination de choix pour les nouveaux arrivants ainsi que des actions et son implication auprès des intervenants socioéconomiques régionaux ont changé toute la dynamique, la perception et l'approche auprès d'une clientèle dite immigrante. Connaître, apprivoiser et gérer la différence sont devenus d'ores et déjà l'approche que nous privilégions pour une saine intégration, et notre volonté de faire de notre sous-région une destination de choix pour les immigrants potentiels en est des plus fortes.
Alors, c'est un peu vous livrer l'essence de notre message en présentant M. Jean-Marie Touré.
J'aimerais aussi vous présenter sommairement ? je sais, vous avez, j'imagine, tous en main le rapport, je ne vous relirai pas le rapport, je vais essayer d'en faire un bref résumé. J'ai essayé, vous me permettrez, si j'ai... la phraséologie des fois n'y est pas, mais je vais essayer de faire un résumé directement.
Alors, je voudrais présenter un peu la Chambre de commerce de Lévis. La chambre est un leader et un rassembleur de la communauté des affaires. La Chambre de commerce de Lévis contribue activement au développement de sa région dans un esprit de concertation. La Chambre de commerce de Lévis forme le plus grand réseau de contacts d'affaires de la Rive-Sud de Québec. Je m'arrête là; je pourrais en mettre et en mettre un peu plus. Mais, voilà, ce n'est pas le sujet de la réunion d'aujourd'hui.
Alors, notre mémoire est constitué principalement de cinq principaux chapitres, c'est-à-dire, un préambule; deuxièmement, les enjeux; puis, troisièmement, nos commentaires sur l'approche; quatrièmement, nos impressions sur l'immigration au Québec, quelques constatations; finalement, nos conclusions et recommandations.
Dans notre préambule. D'abord, les objectifs poursuivis par le gouvernement du Québec doivent répondre à des besoins démographiques, économiques et culturels. Ces trois principaux éléments sont intimement reliés, puisque la pérennité de la culture québécoise et de la langue française dépend du développement économique et que ces deux éléments sont également tributaires de la représentation de la population québécoise dans l'ensemble canadien. Quel que soit l'avenir politique du Québec, le maintien de son poids démographique par rapport au reste du Canada et la défense de la langue française demeurent prioritaires pour l'existence d'un Québec fort aux plans politique, culturel et économique. La Chambre de commerce de Lévis a piloté, en collaboration avec le MRCI, un projet de régionalisation de l'immigration en Chaudière-Appalaches. Notre point de vue est pour une planification à la hausse de l'immigration. Voilà pour le préambule.
Les enjeux. Il y en a cinq: la natalité, ou plutôt la dénatalité, l'économie, la culture et la politique. Pardon, il y en a quatre.
Alors, au niveau de la natalité, si la tendance se maintient ? expression bien connue ? cette situation pourrait avoir des conséquences considérables sur le développement du Québec. Sur le plan économique, un faible taux de fécondité, combiné au vieillissement de la population, entraîne une diminution de la main-d'oeuvre active et une réduction du volume des activités économiques. Sur le plan de la culture, le Québec a fait preuve que ses habitants sont faits forts. Les Québécois intègrent chaque année plusieurs dizaines de milliers d'immigrants. Sur le plan politique, notre poids politique est déterminé par notre poids démographique.
Nos commentaires. Premier commentaire: l'intégration. L'intégration des immigrants est un travail de longue haleine, qui peut même parfois s'étendre sur une génération, et qui requiert l'implication de toute la population. Les communautés culturelles servent de passerelle vers l'immigration.
Je vais très rapidement. On aura peut-être plus de questions et plus d'échanges.
L'immigration est de trois types, à savoir les réfugiés et les demandeurs d'asile, les immigrants illégaux ? et, à ce propos, nous convenons que cette politique d'asile doit être resserrée pour freiner la traite des êtres humains. Nous souhaitons que ce resserrement soit accompagné d'un mécanisme permettant d'augmenter les niveaux d'admission des réfugiés sélectionnés à l'étranger et demandeurs d'asile et de mesures incitatives encourageant l'immigration légale et favorisant l'intégration.
Finalement, une autre catégorie d'immigrants qui est celle de la famille dans son ensemble.
La régionalisation de l'immigration est souhaitable et souhaitée. On devrait idéalement s'appuyer sur une véritable politique de développement régional, c'est-à-dire avoir des ressources structurées. Enfin, il serait souhaitable que les municipalités soient incitées à développer ou à adopter une politique d'accueil et d'intégration.
La capacité d'accueil du Québec. Bien, on sait que le Canada vise annuellement 300 000 nouvelles admissions, soit 1 % de sa population; le Québec, 75 000, ou 72 000, pour maintenir le poids démographique.
Le volume d'admissions présenté dans le document de consultation, on y parle de 48 000 nouveaux arrivants ? d'admissions ? en 2007. Nous estimons cependant que, sans provoquer une mutation brusque de la dynamique démographique, le Québec serait en mesure d'accueillir et d'intégrer beaucoup plus de nouveaux immigrants que dans les scénarios présentés. Et on s'appuie, là-dessus, sur un sondage, le sondage Ekos, qui a été réalisé en 2002, à savoir que le sondage montre que 70 % des Québécois considèrent que le nombre d'immigrants qui s'installent au Canada n'est pas trop élevé; que 84 % des Québécois estiment que le nombre de personnes issues des minorités visibles n'est pas trop élevé au Canada; que 73 % des répondants estiment que l'immigration représente une richesse pour le Québec. De plus, 70 % des répondants considèrent que le Québec devrait maintenir ou augmenter le nombre d'immigrants qui viennent s'installer au Québec; que le poids relatif de la population immigrée au sein de la population québécoise, à savoir 9,9 %, demeure nettement inférieur à celui observé dans l'ensemble du Canada. De même, la proportion des minorités visibles dans la population québécoise est nettement moins importante ? 7 % ? que dans l'ensemble du Canada.
Ainsi, bien planifiée et bien gérée, une politique d'immigration peut donc servir efficacement les plans que la société se donne.
L'immigration au Québec. L'Est du Québec est un vaste territoire. Je ne vous le décrirai pas, c'est inscrit dans le mémoire, et je pense que tous connaissent ce territoire. Selon les statistiques de 2001, la population immigrée de ce vaste territoire ne représentait que 3,6 % des 706 965 personnes immigrées recensées dans l'ensemble du Québec. Et la très grande majorité des 26 155, soit 65 % de la population immigrante, restait dans la région de Québec.
La région Chaudière-Appalaches plus particulièrement ? ce qui nous intéresse, nous ? avait 390 765 habitants. La région de Chaudière-Appalaches est le deuxième principal pôle démographique de l'Est du Québec; elle comptait, en 2001, 3 820 personnes nées hors Canada. Selon la règle du 1 %, cela signifie 3 908 immigrants, soit environ 45 fois plus que le nombre de nouveaux arrivants qu'elle reçoit en moyenne par année: 3 460 nouveaux arrivants entre 1961 et 2001. Un flux annuel de 3 460 nouveaux arrivants causerait certainement des difficultés d'absorption ou d'intégration.
Les activités d'information et de sensibilisation réalisées depuis 1991 par le MRCI commencent à donner des résultats tangibles: l'apport économique, exemple, et démographique de l'immigration... Pardon. Je savais que je m'enfargerais en quelque part, mais ce n'est pas grave.
Dans son mémoire déposé en août 2000, L'immigration au Québec 2001-2003: Un choix de développement, la Chambre de commerce de Lévis concluait notamment qu'un plus grand nombre d'organismes à vocation sociale ou économique sont désormais sensibilisés à l'importance de l'immigration pour le développement régional et que le projet de collaboration entre le MRCI et la Chambre de commerce aura servi certainement à jeter les bases à l'élaboration d'un plan d'action régional visant la régionalisation de l'immigration, qui engage plusieurs organismes publics communautaires et privés.
n(15 h 20)n Les objectifs pour la région de la Chaudière-Appalaches. Avec ses 390 765 habitants, dont la seule ville de Lévis contient 126 315 habitants ? donc, vous constatez que c'est une partie importante de Chaudière-Appalaches ? elle pourrait possiblement égaler, voire doubler le nombre de nouveaux arrivants qu'elle reçoit... que reçoit toute la région. Il ne serait donc pas tout à fait déraisonnable de planifier l'accueil de 75 immigrants par année pour la ville de Lévis, ce nombre ne représentant dans les faits que un demi... ou enfin 0,059 % de la population totale de la ville de Lévis. Une telle augmentation doit forcément être combinée à des mesures appropriées. Le processus d'accroissement de la régionalisation de l'immigration doit sous-entendre que la région, la Chambre de commerce de Lévis soient impliquées.
C'est d'ailleurs dans cette optique que nous avons récemment proposé au ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration un projet visant le développement de la concertation et de la mobilisation des organisations de la région afin de coordonner et de mettre en place les structures d'attraction et d'accueil nécessaires à l'établissement, l'intégration et la rétention de nouveaux arrivants. Le rôle du gouvernement du Québec serait, à notre avis et essentiellement, de sensibiliser l'opinion publique ? il y a un gros travail à faire, je crois, de ce côté-là ? afin de faire connaître les avantages de la politique d'immigration.
Les conclusions, finalement. Le MRCI doit donc non seulement être mandaté pour fixer les niveaux d'admissions et déterminer les qualités des immigrants, mais il doit également être investi du pouvoir d'interpeller les autres ministères. On pourrait peut-être y revenir dans les questions, à tout le moins à la fin de mon intervention.
Deuxièmement, et pour résumer notre opinion sur la planification des niveaux d'immigration 2005-2007, ce qui est l'objet de notre... ce pour quoi on est ici aujourd'hui, nous recommandons que le volume d'immigrants soit augmenté; que la Chambre de commerce de Lévis soit reconnue par le ministère comme un partenaire important, reconnue officiellement comme une ressource de la société d'accueil, davantage mise à contribution pour l'insertion sociale et économique des personnes issues de l'immigration, financée de façon récurrente et suffisante; que le gouvernement du Québec reconnaisse la pertinence du projet du carrefour d'intégration aux immigrants que nous voulons mettre sur pied; que le gouvernement du Québec reconnaisse que la ville de Lévis et ses localités avoisinantes souhaitent accueillir plus d'immigrants; que le processus d'accroissement et de régionalisation de l'immigration implique la Chambre de commerce de Lévis tout au long de l'exercice; que le MRCI participe à la promotion, l'identification, le recrutement des candidats à l'immigration; que le gouvernement du Québec mette en place davantage de mesures et de moyens pour mieux informer et mieux sensibiliser toute la population.
Finalement: nous sommes convaincus que la région de la Chaudière-Appalaches et particulièrement la ville de Lévis sont en mesure, avec l'appui du MRCI, de se donner des outils afin de mettre en place une structure d'accueil qui permettra non seulement d'accueillir de nouveaux arrivants, mais aussi de les intégrer et de les garder. Merci.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. Gagnon. Je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. M. Gagnon, M. Touré, c'est un plaisir de vous retrouver, je vous remercie d'être parmi nous. On s'est vus il y a quelques mois à peine, où on a eu l'occasion d'échanger un peu sur certains éléments de votre mémoire, mais j'apprécie le fait, aujourd'hui, que vous allez plus loin. Vous êtes très précis, vous êtes francs, puis c'est correct, c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui.
Mais ça me suscite aussi beaucoup de questions, d'une certaine façon. Parce que, quand je suis allée dans votre région et à la ville de Lévis aussi, j'ai senti que ? en tout cas, certainement de la part de la chambre de commerce ? il y avait une volonté réelle de pouvoir participer activement et, surtout, de recevoir, vouloir recevoir votre juste part des nouveaux arrivants, parce qu'il y a des situations de main-d'oeuvre qui pourraient le commander, qui seraient très intéressantes aussi à combler.
Maintenant, on l'a dit, la chambre de commerce... et dans toutes les régions et dans toutes les villes, lorsque les chambres de commerce en manifestent la volonté, c'est évident qu'on considère que vous êtes des partenaires privilégiés d'emblée et que, à partir d'un projet précis, on est toujours ouverts à pouvoir collaborer, mais de façon spécifique, via des ententes, et tout et tout.
Par ailleurs, dans votre mémoire, vous dites ? et vous venez juste de le mentionner ? que vous voulez que le gouvernement reconnaisse que la ville de Lévis et ses localités avoisinantes souhaitent accueillir plus d'immigrants. Je me rappelle très bien, et vous étiez présents, hein, d'avoir lancé un appel au maire de Lévis en disant: Écoutez, M. le maire, si ça vous intéresse d'avoir une entente avec nous où on pourrait élaborer des objectifs, des moyens et un soutien, bien, on est là. On va répondre: Présents.
Alors, tout ça pour vous dire qu'habituellement par ailleurs ? et je l'ai dit en début de commission: c'est évident que la volonté, la volonté d'une ville de s'y associer est aussi une volonté très importante, souvent très déterminante, parce que habituellement il y a un partage dans le soutien. Il ne faut pas se le cacher, là, il y a un partage qui fait en sorte qu'on puisse arriver à signer les ententes. Et, très honnêtement, jusqu'à maintenant, bien, il faudrait voir cette volonté manifestée.
Souvent, on doit y aller par étapes. Et ce que vous nous proposez aussi, et la chambre de commerce peut être une de ces premières étapes, ce que vous dites, c'est que: Nous voudrions être reconnus comme structure d'accueil. C'est ça que je comprends. Ce que vous nous dites, c'est que vous êtes prêts à consacrer, moyennant un soutien, là, on se comprend, vous seriez prêts à devenir cette structure d'accueil des nouveaux arrivants. C'est ça que je comprends? Vous auriez, là... comme à temps plein, là, vous seriez prêts à fournir les services aux nouveaux arrivants. C'est ça que j'entends?
M. Gagnon (Michel): Absolument. Absolument.
Mme Courchesne: Et sans nécessairement avec la ville. Vous le feriez d'une façon autonome? C'est ce que j'essaie de voir, là, de comprendre, par rapport à la liste de demandes très précises.
C'est que parfois vous parlez de la ville, des localités avoisinantes, parfois vous parlez de vous-même en tant que structure d'accueil. J'essaie juste de saisir exactement la nature de votre demande et avec qui.
M. Gagnon (Michel): O.K. Bon. Je me souviens très bien, lors de votre passage, l'hésitation de notre maire. Je ne veux pas jouer un rôle politique, je veux jouer un rôle en tant que représentant de la chambre de commerce.
Mme Courchesne: Il n'est pas là, là. Ça fait que je ne veux pas nécessairement le mettre en cause.
M. Gagnon (Michel): Absolument, non.
Mme Courchesne: Mais, moi, j'essaie d'avoir votre position par rapport à ça.
M. Gagnon (Michel): O.K.
Mme Courchesne: Est-ce que vous voulez y aller seuls...
M. Gagnon (Michel): Non, non. Je comprends.
Mme Courchesne: ...ou vous croyez que vous allez y aller avec d'autres intervenants de votre région? C'est ça, ma question.
M. Gagnon (Michel): Non, je comprends. Je voulais juste mettre au clair mon intervention. Mon intervention est pour le milieu économique. Je pense que l'immigration est un plus pour le développement de l'économie de notre région. On pourra en discuter plus longuement; ce n'est peut-être pas l'objet, l'immigration.
Mais l'immigration fait partie d'une stratégie de développement de notre région, je pense. On n'a pas le choix.
Maintenant, directement à votre question: non, bien sûr qu'on ne doit pas être les seuls intervenants. Dans le projet qu'on a déposé au ministère, si on regarde, on demande aussi à des partenaires tels que la ville de Lévis d'en faire partie. On veut être les maîtres d'oeuvre puis on veut être accompagnés de d'autres organisations, toutes les organisations sur le territoire.
On a dit que la chambre de commerce était un lieu de concertation. On veut que tous les intervenants du territoire embarquent avec nous dans cette grande entreprise qui serait la mise en place d'un carrefour de l'immigration. On ne fera pas ça tout seuls, bien sûr.
Mme Courchesne: Mais ce que vous dites par ailleurs, c'est que vous seriez prêts à en assumer le leadership à titre d'intervenants socioéconomiques.
M. Gagnon (Michel): Absolument, oui.
Mme Courchesne: Et j'imagine que, à cet égard-là, vous avez déjà la sensibilisation d'employeurs, par exemple, ou de d'autres intervenants qui seraient prêts à vous suivre dans cette démarche-là. C'est un peu ça que je comprends, là.
M. Gagnon (Michel): Je pourrais peut-être demander à ce moment-ci à M. Touré, là.
M. Touré (Jean-Marie): En effet.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, M. Touré, s'il vous plaît.
M. Touré (Jean-Marie): En effet. Nous avons fait une tournée des intervenants socioéconomiques de la région. Tout le monde est prêt, tout le monde prend conscience de cette problématique-là. Et, même, pour faire un petit retour concernant l'avis lors de votre dîner, M. Garon, si je cite l'article, l'article dans Le Soleil, M. Garon, ce que M. Garon disait, que son administration est disposée à signer une entente comme Québec.
n(15 h 30)n Ce que M. Garon a précisé dans une certaine mesure, c'est qu'il ne voulait pas, et, nous aussi, nous ne voulons pas, au niveau de Lévis, avoir un guichet unique pour Québec et Lévis.
Mme Courchesne: J'avais dit non.
M. Touré (Jean-Marie): Et vous aviez dit non, effectivement. Et vous aviez dit non et vous avez dit qu'il n'en était pas question.
Mme Courchesne: Si vous me permettez, M. Touré, vous faites aussi dans votre mémoire la corrélation du 1 % de la population que vous seriez prêts à accueillir, mais, là, passer du coup de 75 ou à peu près à 3 900 ou 3 500, vous ne trouvez pas que c'est une grosse bouchée à avaler, là?
M. Touré (Jean-Marie): C'est une très grosse bouchée. On dit: Si on devait la respecter.
Mme Courchesne: O.K.
M. Touré (Jean-Marie): Mais, si on le faisait, ça amènerait des problèmes. Nous ne voulons pas le faire, le 1 %. Mais ce qu'on dit, par exemple, dans une certaine mesure, si on se fie, par exemple, à Statistique Canada et au Bureau de la statistique du Québec, depuis 2000, il y a eu 160 immigrants qui sont venus à Lévis. D'accord? On pense que, avec 75 arrivées, on peut les intégrer tranquillement, car notre façon de voir les choses, c'est: Avant d'intégrer qui que ce soit, c'est de préparer le terrain par de la sensibilisation «at large». Et notre objectif, notre cheval de bataille est à ce niveau-là, dans un premier temps.
Mme Courchesne: Je crois comprendre que vous avez déjà, par le passé, là, obtenu un projet du MRCI. C'est ça?
M. Touré (Jean-Marie): Oui.
Mme Courchesne: Est-ce que ça avait bien été? Est-ce que vous étiez satisfaits de ce projet-là?
M. Touré (Jean-Marie): Oui, la collaboration avec le MRCI a bien été, sauf que la différence qu'il y avait, c'est que ce projet-là devait couvrir tout Chaudière-Appalaches...
Mme Courchesne: Ah! D'accord.
M. Touré (Jean-Marie): ...d'où on a eu certaines difficultés. On a passé à peu près une première année à faire de la préparation, sauf qu'il n'y a aucune structure sur place, et c'est là l'importance d'avoir une porte d'entrée.
Mme Courchesne: Et c'est là ma question. Je veux juste m'assurer que vous seriez cette structure d'entrée sur place, parce que... La raison pour laquelle j'insiste, là, je vais être plus précise, c'est que, dans toutes les régions et les villes où je suis allée, la chambre de commerce est toujours un partenaire mais n'est jamais la structure proprement dite d'accueil, et c'est pour ça que je vous posais... j'insistais pour m'assurer que nous avions et partagions la même compréhension. Et, moi, je ne suis pas... je n'ai pas d'a priori à l'égard de ça. Je veux juste m'assurer, par exemple, que vos membres vous suivraient dans cette dimension-là, puisque vous seriez assez unique comme chambre de commerce à cet égard-là, et dire: Est-ce que vous considérez que c'est vraiment votre rôle et votre mandat de vous transformer pour ce volet-là ? ça ne vous empêcherait pas de faire d'autres activités, bien sûr, mais, pour ce volet-là ? de devenir vraiment la structure d'accueil?
Et, encore une fois, soyez assurés que... Moi, vous savez... C'est tellement difficile, l'immigration en région, que, moi, quand j'ai des partenaires qui sont volontaires, selon certaines conditions et certains critères, je suis partante. Parce que là où je suis d'accord avec vous, c'est qu'il faut commencer quelque part. Donc, il faut commencer quelque part, dans la mesure où c'est bien encadré, bien balisé. Vous demeurez des partenaires fort valables. Je n'ai pas d'a priori, mais je veux juste m'assurer que vous auriez aussi l'adhésion de vos membres.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Michel): Je ne veux pas déborder du cadre mais juste peut-être tisser un portrait de la problématique, si problématique il y a... Mais, d'après ma perception, il y en a une, et j'ai beaucoup d'appréhensions face à ça. Là, je parle au niveau de la région Chaudière-Appalaches, parce que je fais aussi partie de la Chambre de commerce régionale Chaudière-Appalaches, le problème et la définition de Chaudière-Appalaches, c'est qu'on a beaucoup d'industries qui font appel à des bras, la main-d'oeuvre. On se comprend? Et le danger, demain, c'est que, avec la compétition internationale, mondiale, la mondialisation, c'est qu'on va frapper un mur si nos entreprises ne se modernisent pas, ne se mécanisent pas. On pourrait très bien... Ce que je veux dire, c'est qu'ils doivent devenir plus efficients. Pour ça, il faut d'abord les informer qu'il faut qu'ils fassent ça, il faut les soutenir dans cette démarche-là, les soutenir en termes de consultation, puis il faut aussi... il va peut-être falloir aller jusqu'à les aider financièrement. Bon.
Ceci étant dit, une fois qu'on les a mécanisés... Parce que actuellement le problème, c'est qu'on manque de main-d'oeuvre. Enfin, plusieurs de nos membres se sont regroupés, ils ont essayé de trouver... de définir des mécanismes ou des moyens pour trouver de la main-d'oeuvre. Disons, par exemple, simplement pour résumer, qu'on a beaucoup de maraîchers dans notre secteur. Qu'est-ce qu'on fait pour récolter les fruits, les légumes, peut-être moins les fruits, mais beaucoup plus les légumes, à l'automne? On n'a pas de main-d'oeuvre, il faut aller chercher à l'extérieur. Je pense que c'est bien connu.
Il y a des entreprises manufacturières de portes et fenêtres qui cherchent de la main-d'oeuvre. Il y a Teknion, qui fabrique des meubles, qui cherchait de la main-d'oeuvre, qui en cherche encore. Passez chez nous, sur le bord de la 20, dans la région, il y a des grandes pancartes de 24 X 24, ou je ne sais pas quelles dimensions: Nous embauchons. C'est extraordinaire! On cherche du monde. On a besoin de monde. Alors, c'est pour ça que je dis que l'immigration n'est pas la panacée à tous les problèmes. C'est une partie de la solution, une partie de la solution.
Pourquoi la chambre de commerce veut être maître d'oeuvre? Parce qu'elle répond aux besoins de ses membres, c'est simple. Et est-ce que c'est une... Comment je dirais ça? Eh, boy! Est-ce que c'est le rôle d'une municipalité de répondre aux besoins des entreprises? Oui, sur certains plans, mais, sur le plan de la main-d'oeuvre, je ne sais pas, je l'ignore. Peut-être que oui, peut-être que non. Mais, nous, on veut que ça avance, on veut que ça bouge, et c'est pour ça qu'on vous demande cette chose-là.
Mme Courchesne: Oui, j'apprécie. Je suis d'accord avec vous que ce n'est pas nécessairement le rôle d'une ville de devenir une sorte de placement par rapport à ça, mais habituellement, par contre, ils peuvent avoir un rôle à jouer dans l'intégration des nouveaux arrivants sur le plan social.
M. Gagnon (Michel): Pas de problème avec ça.
Mme Courchesne: Vous pourriez être la structure d'accueil qui favorise et fait le lien avec les entreprises pour l'emploi. Mais on sait aussi, par expérience, qu'il faut qu'il y ait une complémentarité dans l'intégration de d'autres volets, et c'est souvent là où les municipalités désirent participer, pour toutes sortes de raisons, ou, si ce n'est pas les villes, parce que parfois ce ne sont pas les villes, parfois ce sont d'autres types d'organismes communautaires ? et, M. Touré, vous le savez, hein, vous avez une bonne expérience à cet égard-là ? qui participent aussi. C'est pour ça que parfois on peut faire des ententes spécifiques avec un organisme comme le vôtre, mais on peut aussi, peut-être dans un effort de concertation du milieu, l'élargir pour s'assurer qu'on ne rate pas aucun des volets d'intégration, mais que, au contraire, tout le monde travaille dans la même direction et en synergie.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Michel): Oui. Juste dire que je ne voudrais pas que mes propos soient mal interprétés ici, là. On n'est pas contre la participation de la municipalité dans le projet, au contraire, on la souhaite très fortement.
Et, d'autre part, juste un autre commentaire. Quand vous êtes passée ? je le transmets et j'espère que je le fais de façon correcte ? c'est que M. Garon, notre maire, vous avait demandé: Bien, faites la même chose que l'entente qu'il y a eu avec la ville de Québec, et on est partants. Alors là je ne connais pas les paramètres. Il y a toute une discussion entre vous puis... Ce côté-là est politique, mais, nous, ce n'est pas ça qu'on veut jouer, c'est qu'on vous dit: Il y a un besoin pressant et il faut qu'on le remplisse.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la ministre. La parole est à la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, Mme la Présidente. M. Boisvert, Mme... M. Touré, pardon, vous avez défini dans votre mémoire... vous parlez de votre projet pilote de 1999 et, tantôt, vous avez semblé dire que vous aviez rencontré certaines difficultés parce que c'était tout Chaudière-Appalaches. C'est bien ce que j'ai entendu. Et là, en annexe, on voit qu'il y a un autre projet qui est strictement réservé à la ville de Lévis, si je comprends bien.
Dans un premier temps, est-ce que le premier projet pilote que vous aviez est sensiblement le même que celui qu'on retrouve à la fin mais qui est seulement pour la ville de Lévis? Et quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées par rapport à la région Chaudière-Appalaches? Parce que, quand on parle de régionalisation de l'immigration, c'est une région, ce n'est pas nécessairement une municipalité. Alors, j'aimerais vous entendre.
La Présidente (Mme Hamel): M. Touré.
M. Touré (Jean-Marie): Oui. Ce que nous avons fait durant ce premier projet là, c'est d'essayer de faire une régionalisation mur à mur. Or, l'erreur, c'est que, d'une sous-région à l'autre, les réalités ne sont pas pareilles. D'accord? Il y a eu un manque... on n'a pas eu le temps, je devrais plutôt dire, de faire une campagne de sensibilisation adéquate. Nous avons amené des gens et nous sommes allés les chercher de Montréal, d'accord? les nouveaux arrivants qui arrivaient de Montréal, pour aller les mettre en région, les amener en région. Une fois arrivés en région, ils ont déjà connu la ville de Montréal, ils savent comment ça fonctionne à Montréal, ils viennent en région. Il y avait un principe qui était là: Je me lève le matin, je vais travailler, je finis, je retourne chez moi. La vie sociale, j'en fais quoi? Donc, la région n'était pas préparée, on n'avait pas fait la campagne de sensibilisation.
Or, je pense... nous pensons, en tout cas, que le principal souci pour garder les immigrants en région, parce que c'est un partage, hein, de toute la société pour garder les immigrants en région, c'est comme si vous invitez quelqu'un chez vous, vous ne pouvez pas l'inviter et lui dire... bon, O.K., lui montrer les affaires et lui dire: Bon, bien, maintenant, débrouille-toi. D'accord? On les invite à venir, mais il faut sensibiliser la population. Il faut que la population soit prête à ça, chose où on a manqué de temps pour pouvoir de le faire dans toute la région Chaudière-Appalaches.
n(15 h 40)n Ce que nous devons faire maintenant au niveau de Lévis, c'est-à-dire... On se dit: De sous-région en sous-région, il y a des problématiques qui sont là, d'accord? Essayons, dans un premier temps, de sous-région en sous-région, d'essayer de canaliser, de faire le contour de notre problématique et peut-être, dans un second temps, de réunir nos efforts ensemble entre les sous-régions pour faire quelque chose de régional.
La Présidente (Mme Hamel): Oui, M. Gagnon.
M. Gagnon (Michel): Dans mes discussions avec mes confrères et consoeurs des autres chambres de commerce de la région Chaudière-Appalaches, pas plus tard qu'il y a deux semaines, on a discuté de ça, et, comment dire, la difficulté dépend effectivement des cellules qui existent dans la région, si on peut appeler ça des sous-régions dans la région. Si je donnais un exemple, par exemple, je ne nommerai pas de municipalités, mais imaginons une municipalité en Beauce, par exemple, où les gens sont habitués à se connaître, ils se connaissent tous, le dépanneur du coin connaît tout le monde. Il se passe de quoi, tout le monde sait ce qui se passe, et vous arrivez avec un immigrant dans le milieu, ce n'est pas facile. Il y a toute une préparation, là, pour arriver à intégrer quelqu'un dans ce milieu-là. Bon. Ils ne sont pas rébarbatifs a priori, mais il y a un choc, il y a un choc.
Ces villes-là, ce n'est pas Montréal, ce n'est pas Québec, c'est des petites villes, avec tout le respect, là, je ne veux pas décrier ces endroits-là, absolument pas, mais c'est pour ça que je dis qu'il faut faire de l'information, il faut les intégrer. On peut les intégrer dans des entreprises, parce qu'il y a des grosses entreprises dans ces petites villes là. À savoir: est-ce que l'individu doit, lui, rester près de l'entreprise? Peut-être, je n'ai rien contre. Peut-être aussi qu'il peut rester un petit peu plus loin pour mieux s'intégrer dans un milieu, avoir un lieu de travail, mais ça, ça suppose d'autres interventions, ça suppose le transport, ça suppose des... il y a beaucoup de notions qui interviennent, là, dans le projet d'immigration.
Et je reviens au transport. Je veux dire, c'est beau d'avoir des immigrants. Quand ils arrivent chez nous... Puis j'en connais, je connais M. Touré, mais j'en connais d'autres aussi d'autres nationalités qui sont des ? comment je dirais bien ça? ? des «success story», si vous me permettez l'expression, qui ont parti des entreprises, comment dire, en lavant la vaisselle dans les restaurants et qui aujourd'hui sont devenus des propriétaires de restaurants florissants, hein, d'excellents endroits, des gens très intégrés au milieu, qui ont été supportés par des gens du milieu, parrainés par des gens du milieu, intégrés par la paroisse, supportés par des organisations, et aujourd'hui ils sont super bien intégrés, ils sont des éléments économiques, des moteurs de notre milieu. Alors, on est capable, on l'a prouvé, puis on est capable de le faire encore. Puis je pense que c'est la voie, je veux dire, c'est comme ça qu'il faut procéder.
Mais il faut trouver des mécanismes. Et ce qu'on vous dit, c'est qu'il faut créer ce qu'on appelle, nous, un carrefour, vous appellerez ça comme vous voudrez, mais un milieu qui va préparer le terrain pour amener des gens. Si on prépare bien le terrain, les gens vont arriver, ils vont se sentir mieux accueillis puis ils vont rester. Mais, si on les amène puis on ne prépare rien, c'est sûr qu'ils vont repartir. Ils vont dire: Coudon, je ne me retrouve pas, c'est clair.
Mme Papineau: Mais là, devant nous, on a la Chambre de commerce de Lévis, et, si on parle de la région, c'est Chaudière-Appalaches. Est-ce que, quand même, même si vous êtes la Chambre de commerce de Lévis, vous avez une volonté de travailler la région... J'essaie de comprendre, là, parce que tantôt on disait qu'il y avait les sous-groupes ou...
M. Gagnon (Michel): Sous-groupes ? comment je dirais bien ça? ? parce qu'une région est faite de ses sous-ensembles, comme le Québec est fait de ses régions. Alors...
Mme Papineau: Vous êtes concernés, là, par le fait d'étendre à la région...
M. Gagnon (Michel): ...on a des entreprises chez nous qui ne sont pas nécessairement des entreprises à l'intérieur des limites de la ville de Lévis. Elles sont membres de la Chambre de commerce de Lévis, pourquoi? Parce que la Chambre de commerce de Lévis représente quelque chose pour eux, j'imagine. Parce que la Chambre de commerce de Lévis possède 945 membres. Parce que... Peut-être que la chambre de commerce locale, pour eux, il y a 50 membres, puis qu'il y a une activité par année. Mais, à Lévis, ils trouvent d'autre chose, ils trouvent, quelque part... Peut-être aussi qu'ils sont membres de la Chambre de commerce de Québec. Tu sais, ça dépend de ce qu'on veut et ça dépend de ce qu'on recherche. On n'est pas bloqués au territoire, là, on est ouverts sur notre région sinon sur le monde. Oui?
M. Touré (Jean-Marie): Pour vous donner rien qu'une petite précision, si on prend une entreprise comme IPL, qui est dans le comté de Mme Vien, d'accord, qu'il y ait des immigrants qui travaillent chez IPL, ils peuvent habiter à Lévis. On va se parler, la ville de Lévis va parler avec la sous-région de Bellechasse, parce que notre objectif, notre intérêt, c'est de faire en sorte que, quand les immigrants arrivent, qu'ils soient à Lévis, à Bellechasse ou à Saint-Georges de Beauce, c'est qu'ils restent en Chaudière-Appalaches. Donc, on n'aura pas le choix, de sous-région en sous-région, de se parler et d'essayer d'échanger entre nous nos bons coups.
Mme Papineau: Vous voulez rajoutez, monsieur...
M. Gagnon (Michel): Si vous me permettez...
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Michel): Oui. Juste pour vous permettre peut-être de comprendre comment fonctionne le réseau des chambres de commerce. Il y a des chambres de commerce qui sont importantes et qui ont des permanences au niveau des employés, d'autres n'ont pas d'employés, ce ne sont que des bénévoles. Alors, dans la région, chez nous, je ne voudrais pas en oublier, je ne les nommerai pas, mais, d'après ce que je connais, il y a... sur, je ne sais pas, moi, 30, 35 chambres de commerce, je pense qu'il y en a quatre ou cinq qui ont des permanents, dont la ville de Lévis; les autres, il y a un ou deux permanents. Est-ce qu'ils sont capables de supporter une telle entreprise? Je ne veux rien leur enlever, là, mais disons que...
Mme Papineau: J'ai une autre petite préoccupation. À la page 6 de votre mémoire, vous déplorez qu'on a fait disparaître le concept de communauté culturelle pour le remplacer par celui de citoyen. Et, des deux côtés, on s'entend très bien pour dire que l'intégration des immigrants doit être faite et par le gouvernement et par la société en général, et pas seulement par les communautés culturelles. Est-ce que c'est ça que j'ai compris? Vous semblez dire que ce sont... Vous dites: «Les communautés culturelles servant en quelque sorte de passerelle [...] devraient plutôt être considérées comme une partie intégrale de la politique...» J'ai l'impression, comme si vous disiez... peut-être que je me trompe, mais j'ai l'impression que vous dites qu'il faut que ce soient les communautés culturelles qui accueillent les personnes immigrantes ? et je veux bien ? parce qu'il semble que vous avez une approche d'intégration qui privilégie les communautés culturelles plutôt qu'une approche citoyenne.
La Présidente (Mme Hamel): M. Touré.
M. Touré (Jean-Marie): Oui. Si vous permettez, c'est le mot en tant que tel, c'est le mot, mais ce n'est pas l'approche. Et les communautés culturelles, quelles que soient les communautés culturelles, que ce soient les citoyens, l'accueil, l'intégration et la rétention des immigrants, c'est une affaire de tout le monde. Moi, je vais prendre un exemple sur les gens comme nous. Ça fait au-dessus de 20 ans que nous sommes là. Doit-on être toujours considérés comme étant des communautés culturelles ou doit-on être considérés comme étant des citoyens? Moi, je me considère comme étant un citoyen en tant que tel, d'accord, mais, les communautés culturelles, peut-être pour Montréal, ça peut être bon. Il ne faut pas prendre ces différences et puis en faire, je veux dire, des règles mur à mur, car chaque région a sa sous-région avec sa propre spécificité. C'est dans ce sens-là qu'on essaie de...
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée, c'est tout?
Mme Papineau: Ça va. Oui.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la ministre. Il reste six minutes au total pour le bloc ministériel.
n(15 h 50)nMme Courchesne: Je veux remercier la députée de Prévost de parler de cette nuance-là, parce que, moi, je la comprends bien, ce que vous dites par rapport à «citoyen» et «communauté culturelle», puis je vais vous dire très simplement que c'est ressorti très clairement lors de la commission parlementaire sur les crédits. C'est que le gouvernement précédent avait une approche très républicaine, dixit le député de Gouin, qui a déjà été ministre d'ailleurs de ce ministère-là. Cette approche républicaine voulait dire effectivement: Tous, nous sommes citoyens québécois, québécoises lorsque nous foulons le sol du Québec. Et ce que ça voulait dire... Et je vous invite à relire les galées, là, je le dis sans partisanerie, mais je trouve que c'est important de comprendre ça, parce que, moi, ça a été très révélateur, et je pense qu'on va mieux se comprendre si je vous explique ça, et, je pense, M. Touré, j'aimerais ça que vous disiez si c'est ce que je veux dire. Et que donc, si on est citoyens québécois, très rapidement, dès qu'on foule les pieds du Québec et qu'on veut arriver, bien, on a là une série de services publics qui sont offerts par le Québec, et que donc, quand on arrive en région, ou quand on arrive à Montréal ou à Québec, on apprend le français parce que c'est incontournable, il faut s'exprimer en français, mais, une fois qu'on maîtrise la langue, voici la liste des services publics qui sont offerts à tous les citoyens du Québec, parce que tous les citoyens du Québec sont égaux. Ça, c'est l'approche républicaine.
Mais, quand on traite avec les communautés culturelles, et c'est ce que j'ai appris depuis 10 mois, 11 mois et c'est ce que le Parti libéral avait appris dans ses tournées de consultation, c'est que c'est impossible de penser que, le premier six mois, la première année, on comprend que quand on est malade on fait le 9-1-1 puis que, quand on veut un job, on va à Emploi-Québec, puis qu'on comprend toute la réalité québécoise.
Et ce que les communautés culturelles ont demandé au gouvernement et demandent au gouvernement, c'est de dire: Pouvez-vous établir des partenariats? Mais communauté culturelle ne veut pas dire ethnocité. Communauté culturelle veut dire organisme qui comprend plusieurs représentants de communautés culturelles qui ont passé par là. Est-ce qu'on peut avoir un accompagnement personnalisé? Est-ce qu'on peut avoir un accompagnement, comme dit M. Touré ? c'est ce que je comprends, corrigez-moi si j'interprète mal ? où, selon les villes, selon les régions, il y a des besoins spécifiques? On veut juste permettre à ces nouveaux arrivants d'être accompagnés dans leur compréhension du Québec pour que le plus rapidement possible ils deviennent des citoyens à part entière. Et je pense que c'est un peu ça que... Et c'est à ça que la commission parlementaire sert, c'est d'essayer de dégager les moyens qui vont nous permettre d'arriver là. C'est pour ça, un plan d'action. C'est pour ça qu'on essaie d'aller vers cette approche personnalisée.
Maintenant, la question que je pose, c'est: Jusqu'où doit aller l'accompagnement personnalisé, cela dit? Parce que c'est aussi très ambitieux, dans l'accompagnement personnalisé. Et, je ne sais pas, M. Touré, vous qui avez cette expérience, est-ce qu'il y a des indications par rapport à ça? Est-ce que, si on va dans cette approche personnalisée, on empêche les communautés de devenir rapidement des citoyens québécois qui ont accès à tous les services, ou si, au contraire, on favorise cette volonté que l'on recherche?
La Présidente (Mme Hamel): M. Touré.
M. Touré (Jean-Marie): Oui. Ça me rappelle une phrase avec un ami asiatique avec lequel... à peu près dans les mêmes années, avec lequel on était arrivés, et qui me disait... son seul problème, c'est qu'il comprenne comment ça fonctionne, pour être autonome. C'était son seul problème. D'accord? Ça lui a pris, par exemple, à lui, ça lui a pris 18 mois. Moi, pour comprendre et pour être autonome, ça m'a pris moins de trois mois. Ça dépend où est-ce que je suis allé au départ. Et quand je suis arrivé, au départ, mes premiers trois mois, je les ai passés en Gaspésie. D'accord? Je n'avais pas le choix, j'habitais chez l'habitant. Donc, pour pouvoir être autonome, je fonctionnais comme lui. Donc, une date fixée dans le temps, cela devient difficile. Ça dépend de l'individu, de sa volonté, de sa détermination et des gens qu'il rencontre autour de lui.
Mme Courchesne: ...
M. Touré (Jean-Marie): Exactement. D'où l'importance de la sensibilisation à la base. Quand on sensibilise le citoyen, quand l'immigrant lui-même est sensibilisé à la réalité du Québec en tant que tel, il est plus facile pour lui et beaucoup plus rapide de pouvoir se prendre en charge. C'est comme ça que nous voyons les choses et, selon mon expérience à moi, c'est comme ça que je l'ai vécu.
Mme Courchesne: En terminant, il reste une minute. Par où on commence?
Une voix: Par où on commence?
M. Touré (Jean-Marie): Où vous voulez. Demain matin, on est prêts.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Courchesne: Alors, c'est un rendez-vous. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je cède la parole maintenant au député de Masson.
M. Thériault: Tantôt, vous avez dit: On se promène dans la région, puis il y a des pancartes partout «Ici, on embauche». C'est quoi, l'offre? Quelle est l'offre d'emploi chez vous, en région? C'est quoi, les conditions de travail qui sont offertes chez vous, en région?
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Michel): Oui. Effectivement, je comprends... Je pense comprendre très bien votre question, et ce genre d'emploi, évidemment, ce sont des emplois de manoeuvre. Ce ne sont pas nécessairement des emplois spécialisés. Mais il reste un fait, puis je l'ai dit, c'est que beaucoup d'industries sont basées sur la main-d'oeuvre avec des bras, dans la région Chaudière-Appalaches plus particulièrement. On n'en sort pas. Le genre d'emploi qui est offert, beaucoup de ces emplois-là sont de ce type. Par exemple, dans les manufacturiers de portes et châssis; par exemple, dans les services alimentaires, qu'il ne s'agisse que de transporter des quartiers de viande dans un abattoir, par exemple, où il fait froid, c'est humide. Les conditions de travail... ce n'est pas des salaires exorbitants. On leur transmet le message que: Écoutez, peut-être que vous avez un besoin de main-d'oeuvre, peut-être que vous ne payez pas assez cher, peut-être qu'il faut qu'il y ait quelque chose à quelque part, là, qui soit harmonisé. On comprend ça, on comprend ça. Mais il n'en demeure pas moins que, si la main-d'oeuvre n'est pas présente, c'est bien sûr que l'offre va devoir augmenter, je veux dire les salaires, il va falloir qu'ils augmentent le paiement s'ils veulent avoir quelqu'un. S'ils baissent les paiements, c'est l'inverse qu'ils vont avoir, il n'y aura personne qui va arriver. Résultat: l'entreprise va être en difficulté, elle va produire moins, va être moins efficiente, elle ne sera plus compétitive puis elle va péricliter, c'est clair. Le chef d'entreprise, bien, je ne sais pas, je pense qu'il faut qu'il décèle les messages, là.
M. Thériault: Bon. Je sais bien que vous avez de bonnes intentions, mais, tu sais, admettons qu'on se laisse aller un petit peu, là, bon. Et puis là vous êtes une chambre de commerce, puis là vous me dites: Ici, on embauche, puis on a besoin de main-d'oeuvre, on a besoin de bras. Bien, il faut surtout éviter que les gens qu'on veut intégrer à notre société n'aient d'autre travail que ce que les gens ici ne veulent pas faire, c'est-à-dire ce qu'on appelle le phénomène du «cheap labor». Il faut dire les choses comme elles sont. Donc, moi, ça me questionne beaucoup. Et, bon, quand on questionnait l'intérêt de la chambre de commerce, j'espère que ce n'est pas ça, l'intérêt. Mettons que je le formalise comme ça. Ce n'est pas cela. Bon, on va s'entendre. Sauf que c'est quand même... C'est un phénomène qui est universel au Québec, ce n'est pas un phénomène qui doit nécessairement concerner juste la problématique de l'intégration des immigrants que cette question de l'offre et des conditions d'emploi dans certaines régions du Québec et dans certains secteurs manufacturiers ou de l'industrie. Vous êtes d'accord avec moi là-dessus?
M. Gagnon (Michel): Absolument. Mais ce que je veux vous dire, par contre, c'est que vous faites une association entre l'immigration et le «cheap labor», ou la main-d'oeuvre pas chère, si vous voulez. Je ne la fais pas aussi rapidement. Je veux dire, ce n'est pas parce qu'on fait de l'immigration qu'on veut combler des besoins de main-d'oeuvre pas chère. Et ce n'est pas ça qu'on veut, là. Ce qu'on veut, c'est que des gens, idéalement, soient des gens actifs. Mais on ne peut pas... Ce n'est pas nous qui allons faire les choix, là. On va recueillir les gens qui vont bien vouloir venir dans notre région. De quel type seront-ils? Je ne sais pas, moi. Ça peut être un investisseur, ça peut être un promoteur, ça peut être un architecte comme moi, ça peut être un médecin, ça peut être un manoeuvre, ça peut être un mécanicien, ça peut être n'importe quoi. Ça peut être une famille, hein, de réfugiés qui, bon, n'a pas de formation du tout. Et tout est possible. Mais ce n'est pas ciblé parce qu'il y a un besoin d'emplois de bras qu'il faut absolument que l'immigration comble ce besoin. Ce n'est pas ça, là. On se comprend, là?
La Présidente (Mme Hamel): M. Touré, vous voulez compléter?
M. Touré (Jean-Marie): Oui, si vous voulez. Pour une petite précision. Indépendamment du programme immigration, depuis quelques années aussi, nous pilotons des programmes que nous appelons les programmes Jeunes stagiaires ? Jeunes stagiaires ? du gouvernement fédéral. D'accord? Et, depuis ces années-là, partout où nous plaçons des jeunes travailleurs, dès que c'est un salaire, comme on dit, ou un emploi de «cheap labor», comme on dit, on refuse de placer le jeune là. D'accord? Donc, on a un travail aussi de sensibilisation par rapport aux employeurs, que nous faisons. Et pour les immigrants, ça va être encore beaucoup plus. Je veux dire: On sera beaucoup plus, sur l'aller, à surveiller ce type de travail là, en fait.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député.
n(16 heures)nM. Thériault: Oui. Ce sera peut-être davantage une intervention... un commentaire que je voudrais vous voir cautionner ou pas. Tantôt, Mme la ministre parlait de l'approche républicaine. Moi, je pense que ça a toujours été la volonté de faire en sorte que tous les citoyens soient des citoyens à part entière, ça a toujours été une fin. L'approche républicaine, dans ce sens-là, est une fin. Ici, on discute des moyens pour y arriver. Et pour qu'effectivement on puisse parler des nouveaux arrivants, un jour, comme ne faisant pas partie d'un sous-ensemble social qu'on appelle la communauté culturelle, comme si les communautés n'étaient pas fondamentalement culturelles, je pense qu'en quelque part, sans perdre nos assises culturelles, sans perdre ce avec quoi on a dû couper ou abandonner pour aller s'installer dans une terre, une nouvelle terre, bon, etc. ? et je sais de quoi je parle, parce que la cause que je soutiens politiquement est justement liée à la reconnaissance de ma différence ? sans cela, il est clair qu'on veut faire en sorte qu'un jour le nouvel arrivant nous dise lui-même... qu'il se définisse lui-même non pas en fonction de la terre qu'il a abandonnée, mais en fonction de la communauté dans laquelle il appartient, c'est-à-dire je suis Québécois, je suis Canadien. Et c'est à lui de se définir, et donc de se définir autrement que par un sous-ensemble qui s'appellerait une communauté culturelle.
Par contre, si l'on dit: Il y a des gens qui ont passé par ce cheminement-là, il y a des gens qui ont vécu des choses, une trajectoire, et, avant d'arriver, de se sentir partie prenante, citoyens de cette nouvelle communauté là, ils ont une expérience à partager avec eux pour les accompagner, alors là, ça, c'est une autre chose, et je pense qu'il n'y a pas personne ici, il n'y a pas personne ici qui est contre ça. Et depuis, je pense, qu'on siège, depuis le moment où on siège, on ne parle que des conditions d'accompagnement de ces gens-là, parce que l'objectif qu'on vise, c'est effectivement l'intégration à la grande communauté que nous formons. Et je pense qu'on se comprend là-dessus encore.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon, en deux minutes, s'il vous plaît.
M. Gagnon (Michel): En réponse ou... Enfin, c'est un commentaire, ce n'était pas une question...
La Présidente (Mme Hamel): Comme vous voudrez. La parole est à vous.
M. Gagnon (Michel): O.K. D'accord. Merci, Mme la Présidente. Ce que je rajouterais là-dessus, c'est un peu comme ? on va faire un parallèle ? un peu comme les fusions municipales. On a fait des fusions municipales, il y a des cultures dans les... il y avait des cultures dans les anciennes municipalités. On peut les définir de toutes sortes de natures, elles étaient tout à fait différentes d'un endroit à l'autre. On les a connues chez nous également. Mais, avant que ce soit intégré... C'est correct qu'on ait fait des fusions, à mon avis, mais, avant qu'on intègre les cultures des anciennes municipalités à une grande municipalité, je pense qu'il faut se laisser du temps. Il faut laisser le temps aux cultures de s'entremêler et d'en avoir plusieurs pour qu'elles ne deviennent qu'une seule. Je fais le parallèle avec l'immigration, c'est la même chose. Ce n'est pas parce que quelqu'un vient d'un pays étranger qu'automatiquement en arrivant au Québec, au Canada, dans 15 jours ou, je ne sais pas, moi, 15 mois, il va s'intégrer facilement. Il faut lui donner l'espace-temps. Certains vont le faire rapidement; d'autres, ça va être plus long. Je dirais même que je pense, pour l'intégrer complètement ? «intégrer», dans le sens positif du terme, là ? ça peut peut-être prendre une génération facilement. Et c'est peut-être les enfants de ces gens-là qui vont devenir de véritables Québécois.
Alors, il ne faut pas aller trop vite. Vous savez, l'individu... la personnalité des gens, ça ne se change pas, là, comme on veut, là. Chacun a droit à sa liberté, et je pense qu'avant qu'ils s'intègrent il faut laisser le temps faire son oeuvre.
La Présidente (Mme Hamel): En 20 secondes, M. Touré?
M. Touré (Jean-Marie): 20 secondes. Je pense que, pour la question de l'intégration... je pense que je représente un très bon exemple. Tantôt je suis Sénégalais, tantôt je suis Québécois. Je suis assis sur deux chaises. Et, comme je dis, tout en étant assis sur deux chaises, je reconnais le Québec comme étant ma patrie, je reconnais le Sénégal aussi comme étant ma patrie.
Mais mes enfants, que j'appelle mes petits cafés au lait et qui sont des petits Québécois, pour moi, ce sont des Québécois de souche, parce que, de ma culture, ils ne connaissent pas grand-chose. Et c'est eux qui vont bâtir le Québec de demain, mais, moi, j'aurai contribué à les pousser à bâtir le Québec de demain.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, on vous remercie infiniment, M. Gagnon, M. Touré, pour votre témoignage, votre présentation. J'inviterais... Si vous permettez, pour les participants suivants, nous prendrons une pause. Nous reprendrons à 4 h 15 précisément. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 5)
(Reprise à 16 h 17)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je souhaite la bienvenue au Conseil des relations interculturelles. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission, deux blocs de 20 minutes. Alors, je vous demanderais de vous identifier pour les fins de la transcription, s'il vous plaît.
Conseil des relations interculturelles
Mme Rimok (Patricia): Merci, Mme la Présidente. Alors, je vous présente... Ou je vais saluer d'abord Mme la ministre et MM. les députés. J'ai, à ma gauche, Sophie Therrien, agente de recherche; et j'ai, à ma droite, M. Louis-René Gagnon, qui est secrétaire au conseil; et j'ai, à ma droite, Mme Helena Seckarova, qui est membre du conseil. Et nous avons un grand plaisir aujourd'hui à vous présenter les vues du Conseil des relations interculturelles.
Le conseil a comme vocation d'être un lieu d'échange d'idées et d'information entre les divers acteurs de la société depuis 20 ans dans le domaine de l'immigration, l'intégration et des relations interculturelles.
C'est la neuvième fois que le conseil rend publiques ses recommandations sur le volume planifié d'immigration et la capacité du Québec d'accueillir de nouveaux immigrants. Nous en sommes au cinquième exercice de planification triennal depuis 1991. Le conseil est maintenant convaincu qu'il est nécessaire de penser autrement notre approche de la planification des politiques publiques en matière d'immigration.
À l'égard des trois scénarios de volume d'immigration que l'on nous invite à choisir, le conseil réaffirme sa position de septembre 2000 à l'effet que le niveau d'immigration doit être déterminé en fonction d'une capacité d'accueil correspondant à une saine gestion de la diversité.
Les enjeux de l'immigration se doivent d'être envisagés dans une perspective à long terme. C'est pourquoi l'approche actuelle de planification des niveaux qui fixe à l'avance un nombre prédéterminé d'admissions nous semble de moins en moins efficiente. Après plus de 15 ans de planification triennale, le temps est donc venu, selon le conseil, d'adopter un nouveau regard et des outils adéquats pour assurer à la fois l'intégration des nouveaux arrivants, l'atteinte des objectifs identifiés dans l'énoncé de 1990 et le maintien d'un climat social serein, car, même si, pour un individu, l'immigration précède l'intégration, pour une société, il faut préparer l'intégration avant de procéder à l'immigration.
n(16 h 20)n Pour le conseil, l'importance de bien cerner les réalités de l'intégration constitue le fil conducteur de sa réflexion. C'est pourquoi il recommande de modifier l'article 3.1 de la Loi sur l'immigration ou l'un des articles de la Loi sur le Conseil des relations interculturelles pour que se fasse au moins à tous les trois ans un rapport à l'Assemblée nationale sur le bilan de l'intégration et les ressources qui y sont consacrées, à la suite duquel on procéderait à la détermination des niveaux.
Pourquoi est-ce que aujourd'hui on insiste tant sur ce changement de paradigme? C'est que les défis qui attendent aujourd'hui la société québécoise ne sont plus exactement les mêmes que ceux qui les confrontaient il y a 15 ans, lors de l'élaboration de l'énoncé de politique. Le Québec réussit à atteindre ses objectifs de recrutement à l'égard de l'immigration sélectionnée et recrute une majorité de personnes parlant déjà le français, mais les cohortes récentes d'immigrants éprouvent plus de difficultés à s'intégrer économiquement que celles plus anciennes, et ce, en dépit du fait que ces personnes possèdent généralement une scolarité et des expériences professionnelles plus élevées qu'autrefois.
Alors que le Québec sélectionne à l'étranger à l'aide d'un processus exigeant des candidats très scolarisés et hautement qualifiés, le taux de chômage des immigrants récents, selon les données du dernier recensement canadien, en 2001, était de 20,5 %, comparé à 7,8 % au sein de la population native. Cette situation crée une frustration croissante au sein des personnes immigrées, qui ne comprennent pas pourquoi, après les avoir incitées à venir s'installer au Québec en valorisant leurs compétences, on les laisse dans l'inactivité ou dans des emplois pour lesquels ils sont surqualifiés.
Le document de consultation du ministère indique qu'un nombre important d'immigrants continuent à éprouver de sérieuses difficultés d'intégration en emploi. Il cite les données censitaires de 2001 suivantes. Le taux de chômage de la population immigrée, de 11,7 %, demeure bien supérieur à celui de la population non immigrée, de 7,8 %, et l'écart relatif entre ces deux taux a eu tendance à s'élargir au cours de la dernière décennie. La proportion de chômeurs est encore plus forte chez les membres des minorités visibles, immigrés comme nés ici, respectivement à 15,1 % et 14 %.
Il faut se rendre à l'évidence, une sélection et une approche d'intégration qui ne s'attachent qu'aux attributs élevés en termes de capital humain ? et, par «capital humain», on parle de scolarité postsecondaire, ou expérience professionnelle, ou connaissances linguistiques, et j'en passe ? ne sont peut-être plus suffisantes pour intervenir efficacement sur la performance des immigrants. Il faut envisager différemment la sélection et les mécanismes d'intégration.
Si on devait regarder d'abord la pertinence de nos outils de sélection, lors des activités de consultation qu'il a menées, le conseil a entendu plusieurs critiques à l'égard de la grille de sélection. On lui reproche son inadéquation par rapport aux besoins du développement économique, démographique et régional du Québec et la confusion qu'elle sous-tend entre le niveau d'éducation atteint par un candidat et les qualifications nécessaires sur le marché de l'emploi pour exercer sa profession ou son métier. Elle serait un mécanisme déconnecté de la réalité.
Comme le Québec fait du recrutement actif et que le recours à la grille entraîne la sélection des candidats hautement scolarisés, ces derniers arrivent avec des attentes très élevées. Ne les a-t-on pas choisis pour venir au Québec? Ils sont cependant peu préparés à affronter la compétition féroce du marché du travail. Aussi se retrouvent-ils surpris et déçus, dans bien des cas, de devoir se réorienter professionnellement alors qu'ils sont déjà chimistes, biologistes ou gestionnaires. Plusieurs acceptent des emplois moins qualifiés, alors que d'autres, découragés de la situation, doivent recourir à l'assistance-emploi ou songent à quitter le Québec.
Au cours des 15 dernières années, la tendance dominante consistait à vouloir constamment raffiner la pondération et perfectionner la détermination des seuils de passage de la grille, donnant ainsi l'illusion de sélectionner des immigrants faits sur mesure pour s'intégrer au Québec. Le conseil estime que le temps est venu de réexaminer la grille en vue de la simplifier. Une attention plus grande doit être portée aux qualités personnelles de l'individu, dont sa capacité d'adaptation. La mise au point de profils de qualification ne comportant qu'un nombre limité de critères de base éliminatoires permettrait aussi un arrimage plus rapide et plus réaliste avec les besoins du marché du travail québécois.
De plus, le conseil croit opportun d'étudier en profondeur la question de la distinction entre l'immigration permanente et temporaire long terme. En effet, le but de la politique canadienne et québécoise de l'immigration permanente a été depuis longtemps d'établir des personnes au Québec pour toujours et de les transformer rapidement en citoyens. La filière temporaire est conçue dans cet esprit pour le tourisme, les affaires, le travail saisonnier et les études. Cela concerne environ 40 000 personnes au Québec. Jusqu'à maintenant, la problématique des niveaux d'immigration et des ressources d'intégration a toujours été abordée uniquement en fonction des résidents permanents. Or, les réalités émergentes du XXIe siècle, sous la poussée de la mondialisation et du transnationalisme croissant, font en sorte que le parcours de vie d'un nombre grandissant de personnes, ici comme ailleurs, comporterait une mobilité internationale. À terme, ces réalités pourraient, pour certains, rendre surannée l'idée de se fixer pour toute une vie dans un pays. Le conseil est heureux de constater que le MRCI vient lui-même de faciliter le passage du statut d'étudiant étranger temporaire au Québec à celui de candidat à l'immigration permanente en levant pour eux le caractère éliminatoire de l'absence d'expérience de travail dans la grille de sélection.
Pour être en mesure de se prononcer en toute connaissance de cause sur les avantages et les inconvénients de maintenir ou d'affaiblir la distinction traditionnelle entre l'immigration permanente ou temporaire, il serait nécessaire d'étudier cette question en profondeur. À la lumière des résultats d'une telle étude, il sera possible d'évaluer l'opportunité de revoir le maintien de la distinction de statut entre l'immigrant permanent et le temporaire long terme.
Par ailleurs, le conseil recommande d'examiner l'opportunité de faire un effort de recrutement auprès du bassin d'étudiants étrangers séjournant actuellement aux États-Unis. Le resserrement des conditions de séjour qui leur est imposé actuellement par les autorités américaines inciterait, semble-t-il, plusieurs de ces étudiants à considérer le Canada comme une alternative d'établissement temporaire ou permanent.
Nous considérons également que la grille de sélection devrait comporter une dimension régionale, mais j'y reviendrai lorsque j'aborderai la question de la régionalisation.
Si on examine maintenant la pertinence de nos outils d'intégration, sur cette question, il apparaît important pour le conseil de faire connaître à la commission l'essentiel du point de vue de ceux qui sont confrontés quotidiennement au défi de l'intégration. À votre demande, Mme la ministre, le conseil a organisé une journée de consultation, le 15 septembre 2003, qui a permis de réunir 135 représentants provenant d'institutions publiques, d'organismes communautaires et des communautés culturelles afin d'identifier des mesures concrètes d'action en matière d'accueil, d'intégration des immigrants et de pleine participation des Québécois de toute origine.
Les pistes de solution et les priorités d'action proposées le 15 septembre 2003 s'inscrivent à l'intérieur d'au moins cinq grands chantiers, soit l'insertion en emploi ? et, à l'intérieur de l'insertion en emploi, nous trouvons la francisation des nouveaux arrivants, la reconnaissance des acquis et des compétences, et l'équité en emploi et lutte aux inégalités socioéconomiques affectant certaines communautés visibles et vulnérables; deuxième, le partenariat avec les organismes du milieu ethnoculturel; en trois, l'accès au logement; en quatre, la lutte contre le racisme et toute autre forme de discrimination; en cinq, une meilleure représentation de la diversité dans la sphère publique. Outre ces chantiers, plusieurs recommandations spécifiques ont été formulées. Le conseil endosse ces recommandations et les a regroupées en annexe du mémoire déposé. Vous pourrez trouver ça à la page 39.
n(16 h 30)n Si je devais approfondir certains aspects, je commencerais d'abord par la question linguistique. Comme il est expliqué dans le texte du mémoire, si le pourcentage des immigrants parlant français est en croissance, le nombre absolu de personnes susceptibles de solliciter des cours de français est aussi à la hausse. On devrait donc s'attendre à ce que l'État ajuste en conséquence les services disponibles. Pourtant, lors de la consultation du 15 septembre 2003, plusieurs intervenants ont fait mention de listes d'attente pour l'inscription à un cours de français. On pourrait être tenté d'évoquer les coûts croissants rattachés à ces cours pour expliquer cette baisse de service, mais le Québec reçoit du fédéral une compensation financière qui est censée couvrir cette hausse de coûts. En effet, un des facteurs d'indexation de la formule de compensation financière versée par le gouvernement fédéral au fonds consolidé du Québec pour l'accueil et l'établissement est basé justement sur la variation du nombre d'immigrants non francophones d'une année à l'autre. Cela explique en partie pourquoi ces montants ont augmenté substantiellement depuis quelques années.
Cette croissance du nombre des personnes ne connaissant pas le français doit être accompagnée par des augmentations proportionnées des ressources destinées à leur francisation. Il reste à s'assurer que le gouvernement consacre proportionnellement les montants requis pour que l'offre de services de francisation soit augmentée en fonction des besoins.
Le conseil recommande d'accroître, en fonction des besoins croissants, les ressources consacrées à la francisation.
De plus, l'accès à la francisation pour les immigrants arrivés depuis plus de cinq ans est aussi préoccupant. Selon les renseignements disponibles dans le rapport de gestion de 2002-2003 du MRCI, le taux de pénétration de la clientèle, de la francisation, n'a pas encore dépassé 65 %. Autrement dit, année après année, 35 % des personnes requérant des cours de français n'en ont pas obtenu. Cumulativement, ce pourcentage représente des milliers de personnes qui sont laissées de côté par un service pourtant considéré comme essentiel pour l'avenir du Québec.
Parmi les facteurs expliquant cette situation, le fait que l'accès aux cours de français devienne beaucoup plus difficile pour les immigrants arrivés depuis plus de cinq ans peut être montré du doigt. En fait, la majorité des programmes d'accueil, d'établissement et de francisation considèrent que la période pendant laquelle l'État doit soutenir les immigrants se limite à cinq ans. Or, la complexité des situations vécues par les migrants au moment de leur arrivée rend cette limite assez arbitraire.
Ainsi, par exemple, certains immigrants, particulièrement des femmes, poussées par des pressantes nécessités économiques, peuvent devoir se trouver dès leur arrivée un travail peu qualifié où le français ne sera pas requis. Cependant, au fur et à mesure qu'elles s'arriment à leur nouveau milieu et que les divers besoins de la famille évoluent, la nécessité de développer des capacités de communication s'impose.
Ces femmes auront-elles facilement accès à une francisation à peu de frais? Trouveront-elles des programmes capables de tenir compte de leurs horaires de travail et de leurs responsabilités familiales? Bien sûr, il aurait été souhaitable que toutes ces femmes puissent apprendre le français dans les premiers mois de leur installation, mais faut-il les pénaliser parce qu'elles manifestent ce besoin après 60 mois de résidence? Faut-il limiter leurs possibilités de s'intégrer davantage et de participer pleinement à leur nouvelle société?
Le conseil recommande donc une plus grande souplesse dans la durée de l'offre de francisation, ce qui permettrait au MRCI de rejoindre davantage une clientèle actuellement laissée pour compte.
Je voudrais aussi attirer l'attention de la commission sur le besoin de soutenir l'apprentissage linguistique requis par le marché du travail du nombre croissant de nouveaux arrivants unilingues francophones. Leur nombre est maintenant supérieur au nombre de ceux parlant uniquement l'anglais. Alors que, de 1989 à 1998, les unilingues francophones admis étaient au nombre de 76 332 par rapport à 77 946 unilingues anglophones, de 1999 à 2002, nous avons admis 42 681 unilingues francophones et 28 127 unilingues anglophones. Vous pouvez voir ce tableau à l'annexe 4.
Cependant, un regard sur l'intégration économique des personnes arrivées durant cette période indique qu'elles rencontrent des difficultés à s'insérer sur le marché du travail, et ce, malgré une formation et des qualifications très poussées. On peut légitimement se demander si la méconnaissance de l'anglais ne constitue pas un obstacle à leur insertion en emploi dans un marché du travail où le bilinguisme constitue un atout indéniable. La situation minoritaire du Québec en tant que société francophone en Amérique du Nord l'oblige à se montrer très vigilant et à assurer constamment la promotion de l'usage du français comme langue commune de la vie publique. L'énoncé de politique de 1990 considérait d'ailleurs l'immigration comme un facteur permettant d'assurer la pérennité du français au Québec. Cependant, l'apprentissage de l'anglais comme langue seconde est obligatoire dans les écoles du Québec afin de préparer adéquatement les jeunes Québécois aux réalités du marché du travail. Selon le conseil, il est urgent de se pencher sur les impacts de l'unilinguisme français chez les cohortes d'immigrants récents et de prendre au besoin les mesures qui s'imposent, y compris de faciliter l'accès à des cours d'appoint en anglais.
Je voudrais maintenant aborder la question de la régionalisation. Comme le recommandait le conseil dans son avis de 1996, sous le titre de L'immigration et les régions au Québec, une expérience à revoir et à enrichir, la détermination des niveaux devrait être une opération qui associe toutes les régions où l'on souhaite voir s'établir des immigrants. Les instances...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok, je m'excuse de vous interrompre. Je veux juste vous dire qu'il vous reste trois minutes pour conclure.
Mme Rimok (Patricia): Je vais aller directement dans les propositions... les formules de recommandations suivantes sur la régionalisation. Ce que le conseil propose, c'est de déterminer la capacité d'accueil du Québec dans le cadre des plans triennaux d'immigration à partir des estimations régionales et prioriser, dans la sélection, les destinations hors de l'île de Montréal, de Longueuil et de Laval.
On propose de respecter la dynamique interrégionale en cours au Québec et privilégier, pour ce qui est des régions hors de la RMR de Montréal, les régions centrales: la Capitale-Nationale, l'Estrie et l'Outaouais, régions qui ne sont pas perdantes en termes de population.
Vous avez d'autres recommandations qui sont dans le mémoire; j'en passe parce que je voudrais aborder aussi la problématique du logement. Nous constatons que cette question est passée sous silence dans le document de consultation du MRCI. Il est nécessaire de faire une évaluation la plus réaliste possible de l'impact sur la demande du logement pour la période 2005-2007, qui implique les objectifs d'admissions envisagés. La recherche d'un logement adéquat a toujours été l'un des premiers défis que rencontre un nouvel arrivant dans son parcours d'intégration. Selon une récente étude, 48 % des immigrants arrivés dans la région de Montréal entre octobre 2000 et septembre 2001 ont déclaré avoir eu des difficultés à se trouver un logement convenable. J'en passe sur les chiffres, vous les retrouverez dans le mémoire.
Je voudrais aller sur les difficultés sur le marché de l'emploi pour mettre en perspective la performance du Québec par rapport au reste du Canada. Il est intéressant de prendre connaissance des premiers résultats de l'enquête longitudinale sur l'intégration des immigrants admis sur notre sol entre octobre 2000 et septembre 2001, que Statistique Canada a rendu publics le 4 septembre 2003.
Le taux d'emploi est nettement plus faible, 31 % au Québec, par rapport à 44 % en moyenne pour l'ensemble du Canada...
La Présidente (Mme Hamel): Je m'excuse, Mme Rimok, il faudrait vraiment conclure. Le temps est écoulé.
Mme Rimok (Patricia): Bon. Alors, je suis en conclusion. Le Québec ne peut s'offrir le luxe de laisser les personnes compétentes et motivées se déqualifier par le sous-emploi et le chômage. À terme, c'est tout un bassin de citoyens qu'on repousse discrètement mais inexorablement vers la marginalisation. Alors, le prix à payer pour une telle situation peut s'avérer très élevé, car notre climat social dépend directement de la capacité de la société québécoise d'assurer à tous ses citoyens le plein accès à l'égalité, à l'équité et la prospérité. Pour ce faire, il nous apparaît essentiel que les débats sur la planification de l'intégration et les ressources qu'elle requiert précèdent ceux sur la planification des niveaux d'immigration. Merci.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, madame. Je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme Rimok, Mme Seckarova, M. Gagnon, Mme Therrien, je veux sincèrement vous remercier d'être présents aujourd'hui, mais je veux surtout vous remercier pour la qualité de votre mémoire. C'est un mémoire qui est très complet, très fouillé, qui témoigne d'une longue analyse et réflexion, mais je vois aussi que vous avez tenu compte effectivement de cette journée de consultation que vous avez tenue à Montréal. Et je crois que vous avez bien su synthétiser, mais en même temps bien cerner les différentes problématiques qui se posent, et ça, partout, dans toutes les régions du Québec.
Je vais tout de suite, parce que vous avez remarqué que le temps file quand on a la parole, cerner la page 1. Je crois que vous abordez d'emblée un aspect important, c'est-à-dire que vous dites qu'on doit... «l'orientation exigeant que l'on détermine le niveau d'immigration en fonction d'une capacité d'accueil répondant à une gestion réaliste des facteurs qui conditionnent l'intégration de la diversité».
J'aimerais peut-être que vous soyez plus précis, là, je comprends que c'est probablement l'ensemble du mémoire, mais quels sont ces facteurs les plus importants, pour vous, qui doivent conditionner cette intégration de la diversité? À quels facteurs précisément faites-vous référence dans cette phrase?
Mme Rimok (Patricia): Je vais demander à M. Louis-René Gagnon de répondre.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Louis-René): Merci, Mme la Présidente. Je pense que fondamentalement les facteurs les plus importants sont évidemment la capacité économique du Québec, les facteurs qui permettent aux gens de se retrouver dans les divers... notamment le marché de l'emploi, mais aussi le marché du logement, comme on l'a souligné, et aussi la volonté de placer les questions d'intégration à l'intérieur des politiques de population et de peuplement du Québec pour les mettre... vraiment pour faire en sorte qu'ils soient pris en compte dans l'ensemble des politiques de développement et de gestion de la société québécoise.
n(16 h 40)n Il y a aussi le fait qu'il faut tenir compte des facteurs sur lesquels le Québec a peu de prise en matière de planification, soit les facteurs qui expliquent les raisons pour lesquelles les gens décident de partir, et notre attractivité comme société, qui est basée fondamentalement sur notre compétitivité économique et sur notre qualité de vie.
Mme Courchesne: Dans le fond, ce que vous dites, c'est que effectivement il serait temps qu'au gouvernement, par exemple, dans chacune des politiques ou des prises de décisions que nous avons devant nous, que cette variable ou ce facteur d'intégration soit beaucoup plus spontanément inclus à la fois dans les enjeux comme dans les solutions.
Ce que vous dites, au fond, c'est que, si, par exemple, on fait un plan d'action, il faudrait rappeler à l'ensemble des ministères et organismes que dorénavant le phénomène de l'intégration doit faire partie intégrante du processus décisionnel.
M. Gagnon (Louis-René): On le fait, par exemple, pour les enjeux environnementaux.
Mme Courchesne: Tout à fait, mais liés davantage à une problématique démographique. Je trouve ça intéressant, mais je vous dirais que, par ailleurs... Une recommandation précise, dans le fond. Je prends ce que vous dites, puis c'est comme si je rajoutais une recommandation additionnelle à votre mémoire, si vous me permettez, parce que je trouve qu'effectivement présenter sous l'angle, comme... que vous le faites, pourrait certainement contribuer à faire avancer le dossier ou à faire avancer la préoccupation, là, dans toutes les décisions que nous avons à prendre dans un gouvernement.
Vous dites aussi... et vous nous mettez en garde de plus en plus d'ailleurs sur les dangers de perturbation de l'harmonie sociale ? j'imagine que vous pensez davantage à la grande région de Montréal, ou alors peut-être pas; si ce n'est pas le cas, peut-être nous le mentionner ? mais quels sont les indices, là, qui vous portent à croire que ces dangers-là augmentent, ou alors qu'on serait devant, là aussi, une problématique plus imminente que, par exemple, il y a quelques années? Qu'est-ce qui a changé au fil des dernières années pour que vous sentiez le besoin de nous mettre en garde sur ces dangers-là? Puis quels sont ces dangers-là plus précisément?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Merci. Je vous dirais pour commencer que les anciennes cohortes d'immigration venaient beaucoup plus du bassin européen et donc avaient une sous-jacente de judéo-christianité, alors que aujourd'hui les nouvelles cohortes proviennent plus particulièrement de l'Asie du Sud-Est, viennent de l'Europe de l'Est, viennent des pays latinos et d'arabo-musulmans, dont un fort pourcentage ont une religion autre. Et l'appréciation de l'intégration de ces cultures-là est beaucoup plus longue que dans le passé, parce qu'il y a des cas de référence qui sont très différents.
D'ailleurs, on travaille sur un avis sur la diversité religieuse justement pour comprendre un petit peu mieux ces différentes cultures et ces différentes façons de faire et les religions qui y sont rattachées. Et je pourrais même demander à Mme Therrien de peut-être élaborer sur cet avis actuellement.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Therrien.
Mme Therrien (Sophie): Effectivement, actuellement ce qu'on a constaté ? et je pense qu'il faut être conscient de l'impact que peut avoir la conjoncture internationale sur la situation au Québec ? on a constaté, par exemple, depuis le 11 septembre, que certaines communautés, particulièrement les communautés qu'on associe au monde arabo-musulman ? et, là-dedans, des personnes se retrouvent associées à cet univers-là sans nécessairement en faire partie, je pense, par exemple, aux chrétiens du Moyen-Orient, qu'on va associer à l'univers musulman alors que ce n'est pas nécessairement leur croyance ? on constate donc depuis le 11 septembre des difficultés plus grandes pour ces personnes-là rattachées à la perception qu'on peut avoir de l'Islam, de leur appartenance, etc. Donc, ça fait partie des indices qui nous laissent croire qu'il y a une préoccupation plus grande à y avoir comme société à l'égard de l'intégration. Ajoutez à ça que les cohortes récentes comprenaient un pourcentage important de personnes provenant du Maghreb qui appartiennent à ces communautés-là. On peut supposer que les chiffres récents concernant le chômage regroupent beaucoup de ces personnes-là.
Donc, quelque part, s'il y a une adéquation entre des problématiques de discrimination, des problématiques d'insertion en emploi, le potentiel d'intégration de ces gens-là, ajouté à ce que peut représenter pour... le cheminement de l'intégration pour ces gens-là devient à ce moment-là plus problématique et peut créer chez les gens l'impression qu'ils n'ont pas de place dans la société d'accueil. Il y a donc nécessité pour le Québec de renforcer ses messages d'intégration à l'égard de ces communautés-là et de travailler à la sensibilisation de la société québécoise pour s'assurer que les conditions d'intégration soient réunies.
Mme Courchesne: Donc, ce que vous dites, c'est, au fond, qu'il faut porter une attention plus grande peut-être, là, si je vous comprends bien, vous interprète bien, une attention plus grande à ces communautés. Est-ce qu'il y a donc des éléments de solution ou des pistes d'action plus précises auxquelles vous songez particulièrement pour ces communautés-là? Et est-ce qu'il n'y a pas un danger par le fait même peut-être de les isoler encore davantage? C'est toujours... en tout cas, moi, j'avoue que je trouve toujours de la délicatesse... la situation délicate, quand on aborde ce sujet-là, parce que ce qu'on ne veut pas, c'est justement les rendre encore plus marginalisés ou plus visibles. Alors, quelle serait votre solution à cet égard-là?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Therrien.
Mme Courchesne: Ou vos suggestions.
La Présidente (Mme Hamel): Pardon. Mme Therrien, en deux minutes, s'il vous plaît.
Mme Therrien (Sophie): D'accord. En fait, l'avis sur lequel on travaille actuellement porte sur la diversité religieuse, pas particulièrement sur le port du voile islamique, par exemple, qui occupe une grande place dans l'espace médiatique actuellement, mais bien sur la diversité religieuse comme une préoccupation que doit prendre en charge la société québécoise. Il n'y a donc pas une marginalisation d'un groupe en particulier, mais une préoccupation à y avoir pour la société québécoise. Donc, l'approche qui est à chercher est une approche inclusive pour l'ensemble des groupes qui peuvent présenter des difficultés, et je pense qu'à ce niveau-là on n'a pas intérêt effectivement à avoir des approches qui vont mettre l'éclairage sur une communauté particulière en supposant qu'elle a une responsabilité plus grande dans sa possible non-intégration. Donc, ce sera ce qu'on recommandera. Ça ira sûrement dans le sens d'une prise en charge globale des préoccupations de diversité religieuse, une approche qui va proposer une redéfinition de la laïcité, donc qui interpelle la société québécoise et ses institutions bien plus que les groupes eux-mêmes.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la ministre. La parole est à Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci, Mme la Présidente. Mesdames, monsieur. Nous trouvons également très intéressant l'idée de décentraliser l'immigration en confiant les pouvoirs et les moyens aux instances régionales. Il y a plusieurs groupes qui ont passé depuis le début de cette commission et nous ont fait part de leur volonté, justement. La volonté de ces groupes, qui était d'intervenir directement... mais aussi nous ont fait part de leur manque de moyens et... mis à leur disposition. Quelle prendrait cette forme de décentralisation, par rapport au MRCI d'abord et par rapport aux régions?
Mme Rimok (Patricia): Je demanderais à M. Louis-René Gagnon pour répondre.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Louis-René): Écoutez, la meilleure forme de décentralisation, là, qui pourrait être prise, c'est celle qui répond aux aspirations des gens et des régions vers lesquelles on veut décentraliser. Quand on parle de régionalisation de l'immigration, je pense qu'il faut dépasser le simple concept de dispersion des immigrants sur le territoire. Ça, c'est la dispersion des immigrants, on régionalise les individus. Mais il faut aussi, quand on parle de régionalisation... dans l'univers administratif québécois, depuis quelques années, ça veut dire aussi adapter les politiques en fonction des besoins des régions. Alors, même si on ne changeait pas ? et on veut le faire ? la proportion des immigrants qui s'établit en région, il faudrait quand même se dire que les fonctions d'accueil et d'établissement, ce sont des fonctions essentiellement locales. Personne ne vit au Québec, on vit dans une ville, on vit sur une rue, on vit dans une petite municipalité. Déjà, le Québec a obtenu une décentralisation importante au cours des années en matière d'intégration dans la fédération canadienne, pourquoi s'arrêter en si bon chemin?
n(16 h 50)n Mais aussi, pourquoi vouloir avoir un modèle tout à fait égal dans les 17 régions du Québec? On peut moduler les diverses régions.
Alors, nous, on croit que, et c'était le sens de l'avis de 1996, que l'on doit vraiment faire une décentralisation des responsabilités et des ressources vers les instances locales. On croit aussi que les municipalités, dans la mesure où elles le veulent, sont peut-être les organismes qui ont la légitimité politique la plus forte pour être les récipiendaires de cette décentralisation.
Mme Papineau: À la page 14 de votre mémoire, vous dites que la régionalisation a remporté des succès mitigés, et je pense qu'il faut le reconnaître. Mais vous parlez également d'incitatifs qui pourraient être offerts pour justement que ces immigrants s'établissent hors de la région métropolitaine. Quels seraient ces incitatifs?
M. Gagnon (Louis-René): Il y en a de deux ordres. Vous savez, actuellement, la grille de sélection québécoise est neutre par rapport à la régionalisation. Actuellement, il n'y a rien dans la grille de sélection qui va favoriser l'établissement en région par rapport à une autre.
Pour avoir déjà fait moi-même, quand je travaillais au ministère, des entrevues de sélection et avoir dû répondre à des questions des immigrants qui me disaient: Si je veux me diriger en région, est-ce que ça va faciliter mon processus d'immigration? Je devais leur répondre que non, il n'y avait pas de point accordé.
Alors, d'une part, on pourrait regarder si la grille de sélection ne pourrait pas être un instrument ? c'est un incitatif réglementaire ? d'autre part, on peut aussi regarder si on ne pourrait pas avoir des incitatifs de nature à rendre l'établissement en immigration plus attrayant pour les immigrants. À ce moment-là, les meilleurs incitatifs devraient... il faut faire place à l'imagination et laisser les régions, nous-mêmes, nous proposer des formes d'incitation adaptées à ces régions-là, qui pourraient faire. Mais accepter...
Ça a un prix, cependant, faire ça, c'est accepter que toutes les régions ne seraient pas sur le même pied. Et c'est un réflexe qui est difficile pour l'administration publique québécoise qui a souvent... qui a toujours son réflexe d'avoir des normes mur à mur dans les 17 régions administratives.
Mme Papineau: J'ai encore du temps, Mme la...
La Présidente (Mme Hamel): Oui, Mme la députée, si vous voulez poursuivre.
Mme Papineau: Oui. Vous parlez d'immigration temporaire presque comme étant une opportunité de développer l'immigration au Québec, et en particulier en ce qui a trait aux étudiants étrangers. Pouvez-vous élaborer sur ce que devraient être les mesures mises en place par l'État afin de profiter de l'opportunité de l'immigration temporaire?
M. Gagnon (Louis-René): Actuellement, il existe une grande distinction, fondamentale, dans la loi fédérale et la loi québécoise sur l'immigration, entre l'immigration temporaire et l'immigration permanente. L'avantage de l'immigration temporaire, c'est que ce sont... elle se fait généralement plus rapidement, elle se fait en fonction de besoins rapides, que ce soit de l'étude ou du travail. Mais le principe, c'est qu'il faut toujours faire une demande d'immigration de l'extérieur du Canada ou du Québec, et que le fait de faire une demande alors qu'on est sur place, c'est découragé. Il y a des exceptions. On fait de plus en plus d'exceptions.
Je pense qu'il y aurait peut-être lieu de réviser ce principe classique de l'immigration au Canada et au Québec et d'être beaucoup plus ouverts à la possibilité pour des gens qui sont ici, dans un statut qui n'est pas un statut d'immigrant, qui est un statut différent, de faire des demandes d'immigration et de leur permettre de rester au Québec sur d'autres statuts pendant qu'ils font leur demande d'immigration.
C'est une tendance qui dans les faits se réalise de plus en plus dans la réalité de l'immigration au Québec. Mais les principes classiques sont toujours que c'est deux choses différentes. Ce qu'on propose ? on n'a pas vraiment de solution tout de pied en cap là-dessus ? mais que plusieurs intervenants ? et, là-dessus, il faudrait évidemment impliquer le gouvernement fédéral, qui est le gardien des frontières et des statuts, à une réflexion en profondeur là-dessus... C'est ce qu'on invite dans notre mémoire, d'essayer de se pencher sur les opportunités qu'on pourrait avoir d'une révision de notre façon de faire de l'immigration depuis 40 ans au Canada et au Québec.
Mme Papineau: Mais comment on fait pour les retenir, ces immigrants temporaires?
M. Gagnon (Louis-René): Il n'y a pas de différence entre retenir un immigrant temporaire puis un immigrant permanent, parce que, comme il y a une absolue liberté de circulation à l'intérieur des frontières canadiennes et de plus en plus à travers, à travers le monde, ce qui va retenir un immigrant temporaire ou un immigrant permanent, c'est le fait qu'il va considérer que son standard de vie et que ses opportunités de se réaliser sont mieux servis sur notre territoire qu'ailleurs.
Mme Papineau: Merci, monsieur.
La Présidente (Mme Hamel): Deux minutes? Si vous avez une autre question, le député de Masson. En deux minutes?
M. Thériault: Oui. Je peux peut-être... Bien, je peux peut-être commencer, puis je continuerai tantôt.
La Présidente (Mme Hamel): Certainement. On déduira sur le bloc suivant.
M. Thériault: Je ne vais pas commencer avec la question de l'intégration de la diversité, parce que tantôt il restait deux minutes, puis je voulais en avoir un peu plus.
Mais vous avez soulevé mon attention à propos de la francisation, des difficultés qu'il y a encore, et notamment en fonction des femmes. Pourriez-vous, avec un exemple concret, m'expliquer, bon, comment une femme, après cinq ans, se retrouve dans une situation où elle a besoin de cours de francisation. Je le vois là, mais j'aimerais ça que ce soit verbalisé et qu'on puisse partir de là tantôt, parce qu'il ne restera pas beaucoup de temps pour essayer de faire le chemin, là, de ce besoin-là, là, qui me semble tout à fait réel.
La Présidente (Mme Hamel): Madame...
Mme Rimok (Patricia): J'inviterais Mme Seckarova à répondre à cette question, qui s'occupe d'ailleurs d'intégration auprès des femmes.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Seckarova.
Mme Rimok (Patricia): Dans la région de Québec, oui.
Mme Seckarova (Helena): Pourquoi une femme... si je comprends bien votre question, c'était: Pourquoi une femme, après cinq ans, se retrouve...
M. Thériault: Donnez-nous un exemple concret, qu'on puisse partir de là pour approfondir la problématique.
Mme Seckarova (Helena): Oui. Regardez... Une femme immigrante qui s'installe à Québec a la possibilité de suivre un cours de français. Par contre, souvent, dû à des raisons économiques, elle va trouver un travail très facile, facilement, où elle n'a pas besoin de son... le français, d'accord?
Alors, elle commence à travailler sans nécessairement utiliser le français. Par la suite, il y a aussi des enfants qui naissent. Donc, souvent c'est le mari qui va plutôt aller prendre les cours puis la femme va rester à la maison avec les enfants. Donc, c'est que le temps avance, les enfants naissent, alors la femme reste dans le milieu familial, si vous voulez, pour élever les enfants.
Puis, quand les enfants commencent l'école, là elle peut revenir puis elle peut quand même... revenir pour le français parce qu'elle en a besoin puis aussi pour son intégration, pour sortir un peu de son isolement, d'une certaine façon. Alors, je ne sais pas si j'ai bien expliqué, mais c'est souvent ça qui arrive.
La Présidente (Mme Hamel): Vous voulez poursuivre, et on déduira sur l'autre bloc ou...
M. Thériault: Ah, d'accord, oui.
La Présidente (Mme Hamel): ...parce que le temps est écoulé, là.
M. Thériault: Ah bon! O.K.
La Présidente (Mme Hamel): De votre côté, la première portion, là.
M. Thériault: Est-ce que je peux continuer?
Une voix: Puis on déduira sur l'autre?
La Présidente (Mme Hamel): Oui, c'est possible.
M. Thériault: Oui. Mais alors, quand vous dites: Elle peut avoir un emploi qui ne nécessite pas de travailler en français, c'est ça que vous me dites? Alors, elle travaille dans quelle langue?
Mme Seckarova (Helena): Elle n'a pas besoin, c'est...
M. Thériault: Et vous parlez de quel emploi?
Mme Seckarova (Helena): Regardez, elle peut travailler comme... elle peut travailler comme aide domestique. Souvent, on travaille, on fait avec des signes, ou bien elle va travailler dans une manufacture où un individu qui fait ça... on fait une démonstration; donc, elle a aussi beaucoup de personnes qui peuvent l'aider, qui connaissent déjà la langue. C'est un peu dans ce sens-là. Et ce n'est pas parce qu'elle le veut, elle n'a pas d'autre choix à ce moment précis.
M. Thériault: O.K. Donc, il n'y a pas... il n'y a pas de lien nécessaire entre la francisation, qui est, dans le fond, une clé de l'accueil à la société d'accueil, et l'intégration au travail, c'est-à-dire qu'à partir du moment où quelqu'un se trouve un travail il peut ne pas bénéficier du service de l'intégration linguistique, de la francisation. Il peut passer à côté de ça, dans la manière dont on fonctionne, avec la manière dont on fonctionne présentement.
Il ne doit pas y avoir un gros pourcentage, mais il y en a assez pour dire que c'est un phénomène qui fait en sorte qu'il y a un besoin, là, de francisation après cinq ans qui est manifeste, là.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok.
n(17 heures)nMme Rimok (Patricia): Oui. C'est-à-dire que les femmes qui se retrouvent dans des travaux de ce genre sont quand même limitées par ces travaux sans la langue, donc, qui pourraient se retrouver à travailler cinq ans ou 10 ans ou 15 ans en manufacture, alors que potentiellement elles ont peut-être... elles sont plus scolarisées que ça et auraient pu profiter de cette francisation plus tôt.
Donc, c'est dans cet esprit-là que ça devient difficile comme parcours, en termes d'intégration et d'employabilité, parce que son employabilité est limitée par les tâches qu'elle sera obligée de faire.
M. Thériault: Oui, ça, je comprends, mais ce que je trouve particulier, c'est que, lorsqu'on accueille des gens chez nous, que la possibilité de se franciser, ce ne soit pas un service qu'on leur donne indépendamment du fait qu'ils ont ou non trouvé un travail. C'est ça que je veux dire. Ça, il me semble que ça ne devrait pas être seulement que lié au fait de l'intégration au travail. C'est ça que je suis en train de dire, là.
Bon, évidemment, si on faisait ça dès le départ: monsieur n'a pas trouvé encore d'emploi ou, je ne sais pas... il faudrait donc ne pas dire qu'on le francise strictement parce qu'il faut qu'il s'intègre sur le marché du travail, alors que... ou vice et versa, ou madame qui a trouvé un travail, donc, on ne lui offrira pas la francisation. Ça, je trouve ça un peu particulier que la francisation soit liée nécessairement au fait de s'intégrer au travail. Parce que l'exemple, c'est un peu comme ça que je le comprends.
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon.
M. Gagnon (Louis-René): Oui, mais peut-être que le ministère pourra vous répondre, mais... et c'est ce qu'on dit dans notre mémoire. C'est que, actuellement, le ministère, dans son dernier rapport de gestion, disait qu'il voulait dépasser 65 % de pénétration de gens qui pensent... Alors, sur le 100 % de gens qui requièrent... qui pourraient demander des cours de français... Parce que les cours de français, quand on arrive, ils sont offerts, mais ils ne sont pas obligatoires au sens qu'on ne vous assoit pas de force dans une classe en disant: Vous ne sortez pas d'ici tant que vous ne prenez pas le cours.
Donc, il y a des gens qui ne viennent pas au cours de français, qui ne les prennent pas même si on leur offre. Ils y ont droit, mais, pour des situations de vie réelle ? et on voit ça notamment dans le cas des femmes qui ne sont pas sur le marché du travail ? ils se trouvent un emploi ou ils s'occupent des enfants avant d'aller à des cours de français. Et, comme l'offre de service de francisation pour les immigrants est pensée dans les cinq premières années, on en échappe un certain nombre. C'est ce qu'on disait dans la présentation de la présidente, à l'effet que la pénétration n'est pas à 100 %. Elle ne sera jamais à 100 %, mais 65, ce n'est peut-être pas fantastique encore.
M. Thériault: Non, bien, en fait, je comprends.
La Présidente (Mme Hamel): M. le député...
M. Thériault: Je comprends maintenant.
La Présidente (Mme Hamel): ...on va aller de l'autre côté, puis vous pourrez poursuivre par la suite.
M. Thériault: Bien, je peux... Oui. Allez-y.
La Présidente (Mme Hamel): Oui? Je cède la parole au député de Charlesbourg.
M. Thériault: On était bien parti.
M. Mercier: Merci, Mme la Présidente, et je suis assuré que mon collègue va renchérir davantage tout à l'heure, à l'autre période qui lui sera accordée.
Mme la présidente, mesdames, monsieur, bienvenue ici, à cette commission parlementaire, et je dois, dans la même foulée que la ministre, vous féliciter pour votre mémoire étoffé, rigoureux et que je considère très bien documenté.
Et peut-être pour relancer un peu mon collègue et dans cette même lancée, on a parlé de francisation; il y a un mot cependant qui ? et vous en avez bien parlé tout à l'heure ? qui revient dans votre mémoire très souvent, c'est «l'anglais». Et, évidemment, vous avez dit tout à l'heure que le bilinguisme était un atout indéniable sur le marché du travail dans la métropole, mais je vous dirais que, peut-être ailleurs même au Québec, notamment la ville de Québec qui est une ville qui repose largement sur l'industrie touristique ou même d'autres régions du Québec, comme le Bas-du-Fleuve, par exemple... Alors, évidemment, vous proposez d'inclure l'apprentissage de l'anglais parmi les mesures de soutien, dans le fond, qui seraient financées par le ministère.
Dans votre mémoire, vous demandez ? et je vous cite, là: «On peut légitimement se demander si la méconnaissance de l'anglais [...] ne constituerait pas un obstacle à leur insertion en emploi dans un marché du travail où le bilinguisme constitue un atout indéniable.» Ensuite, un petit peu plus loin, vous dites que: «Selon le conseil, il est urgent de se pencher sur les impacts de l'unilinguisme français chez les cohortes d'immigrants récents et de prendre au besoin les mesures qui s'imposent, y compris de faciliter l'accès à des cours d'appoint en anglais.» Alors, il y a le mot «mesures» ici qui m'intrigue, et j'aimerais savoir quelles sont ces mesures plus précisément.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Des mesures pour inciter...
M. Mercier: Les mesures qui s'imposent, y compris de faciliter l'accès à des cours d'appoint en anglais. Alors, il y a certaines mesures au niveau de l'apprentissage de l'anglais. Précisément, qu'est-ce que ça veut dire pour vous?
Mme Rimok (Patricia): Bien, il faudrait qu'il y ait un soutien financier qui soit au préalable fait par le MRCI ou en partenaire avec le MRCI pour permettre à ces personnes-là à pouvoir se trouver de l'emploi ou aller vers les entreprises pour faire la même chose. Je ne suis pas sûre si ça répond à votre question. Je ne suis pas...
M. Mercier: Non, non, ça va, ça va. Je voulais simplement savoir, avoir plus de précisions là-dessus, là, tout simplement; c'est à la lecture de votre mémoire.
Mme Rimok (Patricia): O.K. O.K.
M. Mercier: Alors, y a-t-il... parce qu'il y a beaucoup de données dans votre mémoire sur l'admission croissante d'unilingues francophones, etc. Avez-vous d'autres données, par exemple, pour la ville de Québec, dont je vous parlais tout à l'heure, ou les régions du Québec?
Mme Rimok (Patricia): C'est une bonne question. Je vous avoue que l'apprentissage de l'anglais, sans dire que c'est régional, touche évidemment beaucoup plus la région du Grand Montréal que peut-être le reste du Québec. Ceci dit... Je crois que j'ai... je ne m'entendais plus, là. Mais on n'a pas ces chiffres-là actuellement.
M. Mercier: D'accord. Merci, madame.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre du côté ministériel? Mme la députée de Bellechasse.
Mme Vien: Oui. Bonjour, mesdames, bonjour, monsieur. Peut-être une question qui porterait davantage sur la notion de la régionalisation.
Vous apportez l'idée de revoir la grille en rapport avec cette régionalisation. J'aimerais en apprendre davantage de cet aspect-là, également de l'aspect aussi de décentralisation des budgets, des outils de sélection. Comment ça peut s'arrimer, tout ça, comment ça peut se faire dans le concret, là?
Mme Rimok (Patricia): Je demanderais à M. Louis-René Gagnon de répondre.
M. Gagnon (Louis-René): Je ne sais pas si, dans cette discussion-là, les membres de la commission ont déjà été amenés à la regarder, la grille de sélection, hein? C'est un document public, ça existe. Et, dans la grille, par exemple, qui est applicable aux travailleurs, il y a des points, il y a des sous-critères pour les professions en demande, pour les besoins particuliers.
On pourrait imaginer... Ceci dit, c'est le MRCI qui ont les meilleurs spécialistes là-dessus, mais on pourrait imaginer d'avoir un ? pardonnez-moi l'expression ? un input régional dans la grille. Je me souviens, puis ceux qui sont intéressés à l'histoire du développement de l'immigration au Canada, au Québec, quand le Québec a commencé à négocier, il y a 30 ans, pour avoir une marge de manoeuvre en matière de sélection d'immigration, la première réaction des fonctionnaires fédéraux là-dessus, ils disaient: Il ne peut pas y avoir deux grilles de sélection au Canada, c'est impossible, voyons! alors que c'est possible. On vit, à l'intérieur d'un même État, avec deux grilles de sélection qui ne sont... qui n'est pas totalement différente mais qui est distincte.
Alors, ce qui est concevable pour une région du Canada ? le Québec par rapport au Canada ? il peut être concevable pour des régions du Québec. Alors, on pourrait avoir... on pourrait penser... on peut aller plus ou moins loin, mais on pourrait penser qu'il y ait des grilles modulées en fonction des besoins régionaux. C'est un élément sur lequel on peut se pencher en termes de grille de sélection. Et, là-dedans, la détermination des besoins, la détermination de la pondération et des sous-critères pourrait se faire en prenant compte des volontés, des prévisions faites par les instances régionales. C'est un peu, là, faire de l'administration-fiction, là, mais ce serait difficile demain matin d'appliquer ça, mais, en faisant un effort de vouloir aller là-dessus et d'accepter le concept que la grille pourrait être variable un peu d'une région à l'autre, on pourrait le faire.
Mme Vien: Merci, M. Gagnon. C'est là quelque chose que j'avais... compris. Ce que je vous demande, c'est: À quoi vous pensez, par exemple, comme critère nouveau qui pourrait être intégré et être en relation avec la régionalisation? Qu'est-ce qu'on devrait retrouver, par exemple, de neuf, de nouveau dans cette grille-là?
n(17 h 10)nM. Gagnon (Louis-René): Par exemple, des professions en demande en fonction des besoins régionaux et non en fonction des besoins généraux du Québec. Et aussi, dans les critères de motivation, de connaissance du Québec et de projets du Québec, on pourrait peut-être surpondérer des volontés d'aller dans certaines régions où on veut diriger davantage de gens, entre autres. C'est un exemple parmi d'autres possibilités.
Mme Vien: ...quelqu'un qui montre de l'intérêt pour aller en région, est-ce qu'il pourrait y avoir, dans la grille, un pointage particulier pour ça, ou...
M. Gagnon (Louis-René): Pourquoi pas?
La Présidente (Mme Hamel): M. Gagnon, s'il vous plaît, en deux minutes.
M. Gagnon (Louis-René): Pourquoi pas? Mais ce n'est pas le cas actuellement. Dans la demande de sélection actuellement, il n'y a pas de points supplémentaires pour une région ciblée, mais ce ne serait pas impossible.
Mme Vien: Est-ce qu'on a encore quelques secondes?
La Présidente (Mme Hamel): Deux minutes.
Mme Vien: Deux minutes? C'est l'abondance.
La Présidente (Mme Hamel): Oui.
Mme Vien: Décentraliser budgets, outils, vous l'arrimez comment? Comment vous le pensez? Comment vous l'imaginez? Comment, sur le terrain, ça s'applique, ça?
M. Gagnon (Louis-René): Il y a actuellement des ententes... Il y avait, dans la politique actuellement de régionalisation, des ententes spécifiques qui sont signées avec des régions; on pourrait enrichir ces ententes-là. Il existe aussi des ententes en matière... avec des municipalités, notamment la ville de Montréal, la ville de Québec. Nous avons maintenant au Québec de plus nombreuses villes de 100 000 habitants qu'on avait autrefois. Ces villes-là ont peut-être maintenant les populations et les intérêts pour être les délégataires de fonctions d'accueil et d'établissement, avec des budgets récurrents, et, dans ce cas-là, le gouvernement provincial assurerait les normes nationales québécoises, les objectifs et la livraison des services. Il n'y a pas de raison pour laquelle ils ne seraient pas assumés par la municipalité.
Mme Vien: Merci, M. Gagnon.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme la députée. Est-ce que le député de Masson désire poursuivre?
M. Thériault: Tout à fait, Mme la Présidente. Je vais essayer de faire vite parce que je veux aller à l'autre point, là, sur la question de l'équilibre et de la capacité d'accueil.
Est-ce que le fait de dire qu'il faudrait absolument développer les moyens d'angliciser, dans le fond, les gens, c'est-à-dire de leur offrir des cours d'anglais, ce n'est pas un peu un constat d'échec que vous faites, une vision un peu pessimiste de la capacité qu'a le Québec d'assurer un droit fondamental qui est de travailler en français au Québec?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Écoutez, le fait est qu'il y a 26 % des gens qui sont unilingues français qui se retrouvent à ne pas pouvoir trouver de l'emploi. De faire une corrélation entre le fait qu'ils ne parlent pas anglais pourrait constituer un des obstacles, à l'intérieur surtout du Grand Montréal. Donc, on demande à ce que ce soit envisagé et analysé.
M. Thériault: La capacité d'accueil liée à la recherche d'un équilibre, tantôt on l'a abordée un petit peu. Vous parlez d'une gestion réaliste des facteurs qui conditionnent l'intégration à la diversité. Vous parlez du fait de développer un nouveau regard et des outils adéquats pour éviter des tensions interethniques.
Moi, je voudrais vous entendre davantage là-dessus, parce que tantôt vous avez soulevé un indice, ou ? je ne sais pas comment l'appeler ? un facteur de risque. Vous avez nommé le religieux... bien, la religion ? pas le religieux, la religion ? comme un facteur de risque.
Je voudrais vous entendre un peu là-dessus, parce qu'on a l'impression que sensibiliser la majorité des gens pour bien intégrer et bien accueillir les nouveaux arrivants, ça peut débloquer... ça peut nous amener à une tolérance. Mais, moi, je trouve que la tolérance est une valeur de second ordre. Moi, je pense que la valeur fondamentale qu'il faut viser, c'est le respect de la différence. Alors, je veux vous entendre là-dessus.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): La capacité d'accueil et d'intégration pour... pas la société d'accueil, mais pour celui qui le vit, c'est-à-dire quelqu'un qui vient d'un autre pays et qui arrive ici et qui suit un parcours qui lui permet d'aller chercher un certain nombre de services en matière d'accueil et d'intégration, notamment la francisation, l'explication au niveau de, disons, l'accès au logement, l'ensemble des services qui lui viendraient, par exemple, des services sociaux, constituent pour plusieurs des notions et des cadres de référence qui sont différents de ceux qu'ils ont eus dans leur pays d'origine. Donc, souvent, au départ, quand l'ensemble de ces informations-là et l'ensemble de ces outils leur sont proposés, surtout à l'intérieur des premiers six mois, elles ne sont pas nécessairement des références qu'ils reconnaissent, même sans savoir comment les utiliser.
La plupart des services qui sont donnés sont des services qui sont donnés sur papier. Certains ne parlent même pas ni français ni anglais, donc ne comprennent même pas en fait l'ensemble des informations qui leur sont données, et normalement viennent avec un cadre... s'ils n'ont personne sur place, ici, en termes de famille ou en termes de réseautage, cette capacité d'intégration est d'autant plus difficile.
Donc, il y a un souci qui devrait être marqué pour essayer de voir dans quelles mesures ces gens-là pourraient être accompagnés. Et l'ensemble des différentes communautés qui existent sur le territoire, beaucoup plus évidemment dans la région du Grand Montréal, font qu'ils arrivent souvent à repérer des choses qui leur sont similaires. Et le temps d'intégrer l'ensemble de tous les services et tous les cadres de référence de la démocratie québécoise prend des fois une génération, des fois deux générations. Et c'est dans cet esprit-là que nous souhaiterions voir comment le MRCI va travailler un petit peu plus dans l'accompagnement et la reconnaissance de ces différences.
M. Thériault: Sur le nouveau regard...
La Présidente (Mme Hamel): ...secondes, malheureusement, M. le député.
M. Thériault: Sur le nouveau regard, là...
La Présidente (Mme Hamel): 30 secondes, Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Sophie Therrien voudrait répondre là-dessus.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Therrien.
Mme Therrien (Sophie): Sur le nouveau regard, je pense que la société québécoise a à porter un regard cumulatif sur ses efforts concernant les niveaux d'immigration depuis qu'il les a, depuis même plus longtemps que ça. La société québécoise est une société d'immigration depuis toujours.
Actuellement, la société se diversifie; cette diversification-là est de plus en plus visible. Actuellement, vous avez à l'école de nombreux petits Québécois qui vont s'appeler Souma, N'guyen ou bien Mohamad, et ces gens-là doivent avoir leur place.
La Présidente (Mme Hamel): Il faut conclure, Mme Therrien, je suis désolée.
Alors, je remercie le Conseil des relations interculturelles de s'être déplacé, ça a été fort intéressant, et je demanderais au groupe suivant, la Confédération des syndicats nationaux, de prendre place, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
La Présidente (Mme Hamel): Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je vous rappelle que vous disposez d'une période de 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission, durant 40 minutes.
n(17 h 20)n Mais, avant de commencer, je vous demanderais de vous identifier, s'il vous plaît.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
Mme Poulin (Lise): Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis Lise Poulin, secrétaire générale de la CSN. Les personnes qui m'accompagnent: à ma gauche ? votre droite ? Josée Roy, qui est adjointe au comité exécutif de la CSN; à ma droite, au bout de la table, Abraham Lara, qui est membre de notre comité confédéral, comité sur les relations interculturelles et raciales, et Mme Louise Corriveau, qui est une travailleuse terrain ? alors, les exemples terrains comme on en a entendus, on en aura à vous donner si vous le souhaitez ? qui est aussi membre du comité.
Alors, Mme la ministre, MM. et Mmes députés, alors, la Confédération des syndicats nationaux est très, très heureuse de présenter à la Commission de la culture... en fait, d'exposer notre point de vue, là, dans le cadre de cette consultation. Et la Confédération des syndicats nationaux regroupe 2 700 syndicats qui représentent 280 000 membres, et je dirais que entre 15 % et 20 % de nos membres proviennent des communautés culturelles. Alors, ces membres sont répartis sur l'ensemble du territoire québécois et canadien et oeuvrent dans la plupart des secteurs d'activité.
La proportion des membres immigrants ou issus des communautés culturelles se situe, à différentes périodes, là, comme je le disais, entre 15 % et 20 %, et ils sont particulièrement présents dans les secteurs de la santé et des services sociaux, l'hôtellerie, la construction, notre fédération de la métallurgie, dans les usines de métallurgie.
La CSN s'est toujours intéressée aux grands débats de la société québécoise en ayant à coeur le développement de notre société et l'épanouissement des individus. Elle a depuis longtemps porté une attention toute particulière aux questions relatives à l'immigration. Miroir de la société québécoise, la composition de plusieurs syndicats affiliés à la CSN s'est transformée au cours des dernières années, et on y retrouve un nombre croissant de travailleuses et de travailleurs issus des communautés culturelles. Dans la région de Montréal, un bon nombre de nos syndicats regroupent une majorité de membres des communautés culturelles, dont plusieurs immigrantes et immigrants récemment arrivés au Québec.
Nous sommes conscients des problèmes rencontrés par ces travailleuses et travailleurs dans leur intégration sociale et économique, plus particulièrement dans leur intégration au travail, et des défis qui sont à relever. Alors, beaucoup de travail reste à faire pour éliminer toutes les formes de discrimination dans les entreprises, favoriser une plus grande participation des membres issus des communautés culturelles aux activités du syndicat local et assurer une plus forte présence dans les différentes structures syndicales.
Afin d'alimenter notre réflexion et de développer nos orientations et de supporter les syndicats dans ce travail, la CSN s'est dotée depuis de nombreuses années d'un comité confédéral sur les relations interculturelles et raciales dont le mandat est d'agir comme conseiller en ces matières et sur l'immigration et de travailler de concert avec nos instances de la Confédération à définir les orientations sur ces questions.
Au cours des dernières années, le comité a travaillé à favoriser les rapprochements interculturels dans le cadre du projet Les bâtisseurs du Québec, qui en est à sa troisième année. Il a contribué à faire connaître l'apport des communautés culturelles à l'histoire du Québec et, pour ce faire, il invitait les membres des syndicats à s'ouvrir à leur environnement et à proposer des personnes immigrantes ou issues de communautés culturelles qui sont significatives dans leur région comme candidats à cette activité de reconnaissance.
Se préoccupant de l'intégration, les membres du comité ont participé à diverses activités de formation et de sensibilisation et ils ont assuré un suivi du dossier de la francisation en milieu de travail. De plus, ils ont commandé une recherche dont l'objectif est de permettre à la CSN de développer les meilleurs moyens pour supporter les syndicats en ce qui a trait à l'accueil des personnes issues des minorités ethnoculturelles dans les milieux de travail et leur intégration à la vie syndicale.
La CSN est aussi présente au conseil d'administration du CAMO-Personnes immigrantes ? le Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre ? et a participé au fil des ans aux différentes consultations qui ont porté sur ces questions. Compte tenu de l'expertise développée par la CSN dans la sphère des relations ethnoculturelles et de l'intégration en milieu de travail des nouveaux arrivants et des membres des communautés culturelles, nous évaluerons, dans le cadre de ce mémoire, les enjeux identifiés. Par la suite, nous aborderons très succinctement les scénarios proposés, pour circonscrire nos commentaires sur certaines conditions qui sont essentielles pour la réussite de tels objectifs.
Pour les enjeux identifiés, la CSN partage les enjeux qui prennent en compte les problématiques démographiques, les problématiques linguistiques, économiques et régionales et qui s'inscrivent dans un contexte mondial en mouvance et dans un cadre canadien défini. Le contexte de l'immigration aux niveaux international et canadien a changé. Les conflits et les difficultés économiques chroniques à plusieurs endroits du globe entraînent plus de déplacements de personnes. De plus, la plupart des pays industrialisés sont aux prises avec des situations de déficit démographique qui font qu'une compétition s'installe pour la recherche de candidats qualifiés et compétents répondant à leurs besoins de main-d'oeuvre.
Dans le cadre de l'Entente Québec-Canada, le Québec est responsable de fixer ses objectifs en termes d'immigration et de donner tous les services d'accueil et d'intégration aux immigrants de toutes les catégories. Il s'occupe de la sélection de ceux qui composent ce qu'on appelle l'immigration économique et reçoit des réfugiés et des personnes bénéficiant des programmes de réunification des familles, dont le Canada s'occupe du cheminement de ces dossiers. Il n'a donc de réel contrôle que sur le nombre d'immigrants qu'il sélectionne et qui représente, bon an mal an, autour de 60 % du total.
Au Québec, le déficit démographique, qui est bien documenté par ailleurs, interpelle la société québécoise toute entière et touche déjà de façon tangible le marché de l'emploi. De plus, ses conséquences ont des impacts particulièrement importants dans certains secteurs de l'économie déjà aux prises avec des pénuries de main-d'oeuvre et dans certaines régions qui se retrouvent dans le cercle vicieux de la baisse démographique et de l'exode.
L'évaluation de la demande de main-d'oeuvre pour 2002-2006 d'Emploi-Québec situe les besoins à 640 000 postes, dont plus de la moitié en remplacement de départs à la retraite, ce qui illustre bien l'importance des enjeux démographiques et économiques. La planification de l'immigration au Québec 2001-2003: un choix de développement fixait comme objectif de faire reposer l'essentiel de l'augmentation du nombre d'immigrants sélectionnés sur un accroissement du nombre et de la proportion des immigrants connaissant le français, afin qu'à moyen terme la majorité des immigrations admis connaissent le français. Bien que leur nombre ait augmenté, l'objectif d'accroissement de la proportion n'a pas été atteint. Le document de consultation en explique bien les raisons, qui sont en partie reliées aux phénomènes internationaux énumérés plus haut.
Ainsi, le nombre d'immigrants ne connaissant pas le français a lui aussi augmenté. Sachant que la connaissance du français représente un facteur d'intégration important, cet enjeu linguistique est donc double: attirer des candidats qui répondent aux besoins de main-d'oeuvre et qui parlent français et développer des moyens pour permettre l'apprentissage rapide du français aux autres immigrants.
Nous partageons aussi l'analyse qui est faite de l'enjeu de la régionalisation. Il faudra à cet égard renforcer les mesures et innover, car le défi nous semble double ici aussi. En effet, outre le fait qu'il faille lutter contre une tendance en demandant aux nouveaux arrivants de s'installer hors des grands centres, il faut aussi parfois les convaincre de s'installer dans les régions que les Québécoises et Québécois désertent eux-mêmes. Pour encourager ces personnes à s'installer en région et à y demeurer, nous croyons qu'ils devront avoir accès à des emplois de qualité, qu'il faudrait penser à des programmes qui permettent à des groupes d'une même communauté de s'installer en même temps pour atténuer les sentiments d'isolement et augmenter les chances que ces personnes s'adaptent à leur nouvel environnement.
La capacité d'accueil sur ces enjeux appelle des réponses et des mesures qui parfois pourraient s'opposer et s'inscrivent dans l'environnement québécois actuel qui nous oblige à considérer aussi les besoins de la société québécoise et l'état de sa capacité d'accueil. Nous devons reconnaître que la société québécoise et sa population ont beaucoup évolué au cours des dernières années. D'ailleurs, nous pouvons observer cette situation à l'intérieur de notre mouvement, où l'on note un changement qualitatif important tant en ce qui concerne l'évolution des mentalités que l'atténuation des préjugés. Toutefois, force est de constater que, malgré les exigences de sélection qui mettent l'accent sur la recherche de candidats ayant une connaissance du français et possédant les compétences professionnelles devant favoriser une insertion rapide dans le marché du travail, il persiste des problèmes qui freinent l'intégration à l'emploi des nouveaux arrivants et des personnes des minorités visibles, qu'elles soient nouvellement arrivées ou non.
Les chiffres du recensement de 2001 sur le taux de chômage de ces populations sont éloquents: le taux de chômage de la population immigrée demeure bien supérieur à celui de la population non immigrée, et l'écart relatif entre ces deux taux a eu tendance à s'élargir au cours de la dernière décennie. Le taux de chômage de la population récemment immigrée dépasse largement celui de l'ensemble de la population immigrée et celui de la population non immigrée. La proportion de chômeurs est encore plus forte chez les membres des minorités visibles, immigrés comme nés ici.
C'est pourquoi il devient de plus en plus urgent de développer le plan d'action qui devait être rendu public l'automne dernier par la ministre... par vous, Mme la ministre. Alors, ce plan d'action devrait privilégier une approche qui tienne compte des conditions d'accueil et d'intégration des personnes immigrantes dans la société québécoise et conséquemment de notre capacité de mettre en place et d'offrir des services facilitant une intégration harmonieuse, et ce, tant aux plans linguistique, résidentiel, scolaire, professionnel que social.
n(17 h 30)n Comme la connaissance du français est un atout important pour le Québec et un facteur déterminant pour une intégration réussie, il faut poursuivre les efforts de recrutement d'immigrantes et d'immigrants connaissant le français, et ce, malgré les difficultés. Il faut aussi que les entreprises se responsabilisent à cet égard et embauchent les immigrants francophones sélectionnés qui n'ont pas une connaissance de l'anglais. Le français étant la langue de travail au Québec, les exigences de connaissance de la langue seconde ne devraient exister que pour certains emplois bien particuliers.
Parallèlement, nous croyons qu'il faut augmenter l'offre de services en apprentissage du français pour les immigrants non francophones de toutes les catégories et offrir un plus grand nombre d'outils pour leur permettre de le maîtriser plus rapidement.
D'autres besoins doivent être pris en compte et exigent une intervention du gouvernement: le perfectionnement en français pour les personnes qui en ont une connaissance insuffisante, l'apprentissage du français en lien avec une formation professionnelle, l'apprentissage d'un vocabulaire professionnel et technique et la formation linguistique en milieu de travail.
Les fédérations de la CSN, en particulier les fédérations du commerce, de la construction et de la métallurgie, ont développé dans les années passées une expertise en collaboration avec divers organismes pour offrir des cours de français en milieu de travail. Ces programmes de formation ont suscité beaucoup d'intérêt chez nos membres. Malheureusement, on note un relâchement dans les efforts investis dans ces programmes. Il faut poursuivre et intensifier les programmes de francisation en milieu de travail et inciter fortement les employeurs à procéder à des ententes portant sur la mise en place de tels programmes, car la formation en milieu de travail nécessite une étroite collaboration entre l'employeur et le syndicat.
Nous considérons donc que l'apprentissage du français doit être une priorité et que le gouvernement doit accentuer les programmes d'apprentissage du français en milieu de travail et rendre disponibles les ressources nécessaires et en assurer le financement.
Une politique d'immigration qui favorise les travailleuses et travailleurs étrangers présentant de fortes possibilités d'employabilité et de mobilité professionnelle, donc des personnes scolarisées, spécialisées, qualifiées et compétentes, devrait en principe permettre à ces nouveaux arrivants de s'intégrer rapidement au marché du travail.
Cependant, il faut se prémunir contre une vision économique et utilisatrice qui peut engendrer certains effets pervers: attentes irréalistes, désillusion, processus d'intégration plus difficile, etc. De même, il faut éviter le piège d'être exclusivement à la recherche de candidates et de candidats présentant le profil idéal et répondant à des besoins spécifiques de main-d'oeuvre et de ne pas prendre en compte l'apport que pourraient avoir pour la société québécoise des personnes ayant des caractéristiques différentes.
Le Québec cible son recrutement dans des secteurs de pointe qui exigent des compétences et des qualifications spécifiques, tout particulièrement dans ceux où il y a actuellement une pénurie de main-d'oeuvre. Il ne faudrait pas que le recrutement des personnes qualifiées pour ces emplois entraîne un certain laxisme de la part du gouvernement, plus spécifiquement du ministère de l'Éducation, en ce qui a trait à l'offre de formation professionnelle et technique dans ces secteurs. Il faut que les Québécoises et Québécois, jeunes et adultes, aient accès aussi à ces emplois grâce à des programmes de formation qui les qualifient. Ces brèves observations invitent donc à la vigilance quant au scénario à retenir.
Compte tenu de l'importance de l'enjeu démographique et des défis qu'il pose, nous sommes tentés, comme plusieurs, à pencher pour un scénario qui viserait à accélérer de façon importante le nombre d'admissions. Nous croyons cependant que les récents chiffres sur le taux de chômage des nouveaux arrivants, malgré un programme de sélection qui devrait faciliter leur intégration au marché du travail, doivent nous alerter sur l'efficacité des mesures et le niveau des ressources mises en place. Le scénario retenu doit tenir compte de ces données objectives et surtout de la volonté gouvernementale de remédier à cette situation.
Nous sommes très sensibles au fait que des augmentations massives du volume des admissions pourraient avoir des conséquences non désirées pour la société québécoise. C'est pourquoi nous appelons à un choix conséquent. Comme il est souligné à juste titre dans le document de consultation, l'exercice de planification des niveaux d'immigration consiste donc à trouver le point d'équilibre optimal entre des besoins et des contraintes, sachant que le consensus social par rapport à l'immigration dépend en grande partie de l'atteinte de ce point d'équilibre.
Peu importe l'hypothèse privilégiée, il nous apparaît urgent de procéder à la mise en oeuvre de certaines conditions qui sont des incontournables pour contrer les obstacles et atteindre une intégration harmonieuse des nouveaux arrivants. Il faut, entre autres, augmenter les ressources disponibles à l'accueil, au soutien à l'établissement, à la francisation, à la reconnaissance des acquis et des compétences, à la recherche d'emploi. L'augmentation du nombre d'admissions nécessite, en corollaire, que des efforts supplémentaires soient faits pour rendre accessibles les services répondant à l'ensemble des besoins. C'est pourquoi nous attendons avec impatience les consultations sur le plan d'action promis, et nous y participerons avec plaisir.
Nous reprenons et actualisons ici, puisqu'elles nous apparaissent encore pertinentes, certaines des recommandations que nous faisions lors de notre participation à la consultation de 2000 quant aux conditions qui nous apparaissent essentielles à l'insertion socioprofessionnelle des nouveaux arrivants et qui nécessitent des interventions particulières.
Nous voulons d'abord indiquer qu'encore trop d'immigrants et d'immigrantes, certains possédant des compétences et des qualifications extrêmement valables, se retrouvent à occuper des emplois de peu de valeur, avec des conditions de travail terribles. Pensons à des secteurs comme celui du textile, qui profite, dans un climat d'indifférence généralisée, d'une main-d'oeuvre captive à travers tout un réseau de sous-traitants, façon de faire qui permet à bien des acteurs de se déresponsabiliser.
La reconnaissance des compétences professionnelles et des équivalences scolaires demeure un problème de taille pour les nouveaux arrivants, malgré le consensus qui semble établi autour de cette question. Nous avons accueilli comme un pas dans la bonne direction les mesures annoncées en mai 2002 dans la politique gouvernementale d'éducation des adultes et de formation continue et le plan d'action qui l'accompagnait.
Dans la suite de ce plan d'action, des travaux sont actuellement en cours au ministère en collaboration avec les acteurs concernés, dont les ordres professionnels et le ministère de l'Éducation. Il serait intéressant d'en connaître l'avancement. D'autre part, la ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration annonce que le plan d'action attendu en matière d'immigration, d'intégration et de relations interculturelles contiendra des mesures concrètes, simples et axées sur les résultats pour répondre à ce problème.
Alors, nous croyons que ces mécanismes doivent être facilement accessibles...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Poulin... Mme Poulin, je m'excuse de vous interrompre. C'est juste pour vous indiquer qu'il vous reste un peu moins de quatre minutes pour conclure.
Mme Poulin (Lise): D'accord. Alors, nous croyons que ces mécanismes doivent être facilement accessibles afin de permettre une réponse rapide aux demandes pour que les immigrants puissent utiliser leur plein potentiel et intégrer le milieu de travail dans les plus brefs délais.
Alors, il y a les stages en milieu de travail. Peut-être y aller rapidement sur ces stages, puisque nous avons, à la CSN, une expérience qui est en cours. Alors, on aimerait vous en faire part. À la CSN, on participe actuellement à un projet de cet ordre, d'intégration en milieu... de stage en milieu de travail. Avec le concours du Fonds jeunesse, du CAMO-Personnes immigrantes et de plusieurs organismes d'intégration à l'emploi, nous accueillons un certain nombre de stagiaires, 13 personnes plus précisément, dans plusieurs catégories d'emploi. Et notre objectif est de pouvoir en bout de ligne embaucher ces personnes dans un contexte où nous faisons face actuellement à de nombreux départs à la retraite et où nous souhaitons ardemment augmenter la présence des communautés culturelles dans les rangs de nos salariés. Et on soutient les recommandations du CAMO-Personnes immigrantes visant à faire de ce type de projet une mesure permanente accompagnée de financement récurrent.
Et le gouvernement doit informer les personnes immigrantes potentielles, et ce, avant leur arrivée, des réalités sociales et politiques québécoises. Et une attention toute particulière devrait être apportée pour renseigner les nouveaux arrivants sur le fonctionnement, les exigences et les pratiques du marché du travail.
Alors, pour aller plus rapidement, vous avez, dans les pages 11 et 12, les revendications de la Marche mondiale des femmes concernant les difficultés plus spécifiques des femmes immigrantes, soit l'accès universel pour les néo-Québécoises à des cours de français, les conditions, l'accès à un financement pour les groupes de femmes afin de favoriser leur participation à la société québécoise, la réduction du temps de parrainage de 10 à trois ans pour toutes les femmes immigrantes et que ce droit s'applique à toutes les femmes parrainées par un membre de la famille et non pas uniquement par un conjoint ou une conjointe... un conjoint, pardon.
Les programmes d'accès à l'égalité. Là aussi, on a accueilli favorablement, disons, l'ensemble de la loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics et modifiant la Charte des droits de la personne, mais je vous dirai qu'on est très préoccupés sur l'application de cette loi, compte tenu de la loi n° 30, qui a été adoptée récemment, et n° 25, dans le secteur de santé et services sociaux où il y aura une perturbation importante sur des fusions d'accréditations, sur des, des, des... la mobilité qui va se passer dans les prochains mois. Comment on va être capables d'appliquer un programme d'accès à l'égalité, ça nous préoccupe énormément.
Alors, peut-être en conclusion. Les défis actuels et futurs nécessitent que l'admission des nouveaux arrivants se fasse en synergie avec la société québécoise et que l'ensemble des partenaires et la population soient mis à contribution. La consultation démocratique sur cette matière est un apport important au développement d'un consensus et d'une plus grande solidarité entre la société québécoise et les nouveaux arrivants. Et la réussite d'un tel projet nécessite de se donner les moyens pour concrétiser nos aspirations. Et, dans cette perspective, nous sommes en attente du plan d'action annoncé et souhaitons participer à la consultation qui l'accompagnera.
n(17 h 40)n Mais, outre l'élaboration de ce plan d'action, nous souhaitons avant tout sa concrétisation. Depuis notre dernière présentation sur ce sujet, en 2000, peu de choses ont réellement avancé et la situation de l'intégration au travail des nouveaux arrivants s'est détériorée, malgré un programme de sélection qui vise des candidats qui devraient être aptes à entrer au travail rapidement. Alors, tout appelle donc à une mise en place urgente de mesures efficaces et simples, et nous en serons certainement des acteurs importants. Alors, merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme Poulin. Je cède la parole à Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Mesdames, monsieur, d'abord, je veux vous remercier sincèrement d'être parmi nous, parce que je vais vous avouer que, quand on fait des commissions parlementaires, ce sont de longues journées, et je suis toujours un peu ? je vais vous le dire comme je le pense ? un peu mal à l'aise avec le dernier groupe parce que je trouve toujours que c'est tard. Vous êtes venus de loin, et je veux vous assurer que ce n'est pas parce que vous êtes le dernier groupe que notre intérêt n'est pas aussi grand que lorsqu'on commence, le matin. Je tiens à vous le dire parce que je trouve toujours que c'est le moment le plus ingrat pour un groupe d'être devant nous. Alors, c'est d'autant plus apprécié.
Je veux vous dire aussi d'emblée que je suis très contente que la CSN ait pris la peine de nous présenter un mémoire. D'abord, je le trouve très pragmatique et je le trouve très concret, et vous allez voir que j'ai beaucoup de questions sur chacun des éléments que vous avez mis devant nous.
Je suis aussi ravie de savoir que depuis de nombreuses années vous avez un comité confédéral des relations interculturelles et raciales, et je crois comprendre qu'il y a deux représentants parmi vous qui sont là. Je serais très intéressée de voir qu'est-ce qu'il vous a appris, ce comité-là. Et je sens que vous avez développé une expertise et j'aimerais ça, savoir, à travers ce comité-là, quels sont les plus grands obstacles que vous rencontrez soit du côté de l'employeur, mais soit aussi, peut-être, de certains de vos membres, et quels sont ces... On va commencer par ça, là, pour lancer la discussion. Quels sont ces premiers... Quand vous regardez l'insertion, par exemple, en emploi, puis si vous avez senti le besoin de créer un tel comité, c'est pour qu'il réponde à des problématiques, j'imagine, pour qu'il apporte des solutions à des questions que vous aviez ou à des situations que vous aviez.
Mme Poulin (Lise): Peut-être Mme Roy pour débuter, qui est responsable du comité des relations interculturelles et raciales, puis j'ajouterai...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Roy, juste vous rappeler qu'on a 10 minutes. Merci.
Mme Roy (Josée): Oui. On a vu ça. Bien, le comité, ça fait longtemps qu'il existe, et au départ il s'est appelé comité sur l'immigration parce que, bon, effectivement, on avait de plus en plus de membres qui étaient issus des communautés culturelles et il y avait une demande pour qu'on puisse... pour pouvoir traiter ces sujets-là plus précisément. Puis, bon, dans le temps, ça a évolué. En 1986, on a changé le nom du comité, parce que le travail qu'on souhaitait faire, étant donné la présence de plus en plus grande des communautés culturelles dans nos syndicats, était de rapprocher les gens entre eux et de développer des moyens pour intégrer plus facilement les gens en milieu de travail, les faire s'impliquer plus activement dans la vie syndicale et au niveau des milieux de travail.
On a actuellement une recherche en cours, pour répondre un peu spécifiquement à votre question, on en parle un peu dans le mémoire, on devrait avoir les résultats au mois de mars. Mais, à travers cette recherche-là, on a eu des «focus groups» avec des gens, des membres qui ne sont pas sur les exécutifs syndicaux, donc des membres ordinaires qui venaient des communautés culturelles, et aussi avec les conseillers de nos fédérations dans les différents secteurs. Et ce qui ressort beaucoup... Bon, quand on parle d'obstacles à l'embauche, il y a de l'obstacle à l'embauche, mais, une fois que les gens sont embauchés, dans la plupart du temps où les milieux sont syndiqués, ce que les gens nous ont dit, c'est qu'ils ne veulent pas avoir une approche systémique pour voir à répondre à leurs problèmes ou trouver des solutions à leurs problèmes, ils veulent plutôt traiter les choses cas par cas. Et dans la plupart des milieux de travail, surtout dans les milieux où il y a beaucoup de communautés culturelles, les gens... Bon, souvent, il y a des gens qui ne parlent même pas la langue française, qui est notre langue commune, et les gens, pour les assemblées générales, se sont donné des moyens. Ils se regroupent en sous-groupes, ils se mettent des traducteurs. La vie syndicale s'organise tranquillement.
Ce qu'ils ont souhaité plus, c'est qu'on leur donne des moyens qui vont plus évaluer le cas par cas, parce que ce qu'on va rencontrer maintenant... Bon, dans les régions, c'est des problèmes d'intégration en milieu de travail ou d'intégration à la vie syndicale. C'est sûr que plus la proportion des gens issus des communautés culturelles dans un milieu de travail est grande, plus l'implication est grande. Mais, dans les milieux, en tout cas, montréalais, où il y a des syndicats, où la majorité du monde sont issus des communautés culturelles, là, ce qu'on rencontre plus, c'est des problèmes de relations entre les différentes communautés, et c'est à ça qu'on voudrait plus... qu'on est rendus à vouloir plus traiter.
Mme Poulin (Lise): Il y a peut-être un ajout, si vous me permettez. Aussi, dans les années... au début des années quatre-vingt, les membres des communautés culturelles dans nos syndicats, dans les débats qu'il se faisait dans nos syndicats et aux comités, étaient beaucoup sur: prendre notre place. Alors, il y a eu les débats que les femmes ont faits sur prendre notre place. Alors, les membres des communautés culturelles, au niveau syndical, dans nos assemblées, dans nos rencontres, c'est un débat qui était assez fort dans ces années-là. Et je pense que le fait qu'on ait un comité qui a été maintenu toutes ces années-là... Parce qu'un comité de travail, bon, on sait que ça peut travailler peut-être quelques années, mais c'est un comité permanent qui fait... recommande à l'exécutif de la CSN, donne des avis, fait des recommandations, les programmes d'accès à l'égalité, même à l'interne de notre organisation, puisqu'on a 600 salariés qui y travaillent. Alors, c'est un lieu de travail syndiqué à la CSN. D'ailleurs... Or donc, le comité est beaucoup, disons, consultatif, si on peut dire, mais aussi, dans les congrès de la CSN, amène des recommandations, amène des débats, des réflexions à faire partager à l'ensemble des syndiqués qui viennent de partout au Québec.
M. Lara (Abraham): Si je pouvais juste ajouter. Le résultat de cette démarche-là...
La Présidente (Mme Hamel): M. Lara.
M. Lara (Abraham): ... ? oui ? c'est que, dans plusieurs fédérations, oui, les membres des communautés culturelles, ils ont pris leur place dans l'exécutif de leur syndicat, ce qui a enrichi énormément la discussion syndicale.
Mme Courchesne: Je dois vous avouer que je trouve ça très important que ça se fasse comme ça et qu'effectivement ils puissent partager les réalités qui sont les vôtres. Et je vais aller plus loin, je me demande même à quel point on ne pourra pas être, peut-être, les premiers à faire un partenariat avec vous. Je vous le dis très sincèrement. Moi, je suis très ouverte à explorer notamment en français, en francisation. Vous dites que vous avez développé des programmes spécifiques pour la francisation en emploi. Je vous dirai que, dans le plan d'action, là où on va devoir ouvrir, c'est sur effectivement une francisation qui va permettre de mieux travailler en français. Il y a des réalités différentes entre le français de la vie quotidienne puis le français en emploi.
Est-ce que ça se peut, ça, par exemple, une entente de collaboration entre vous, la CSN, et le SPEQ, qui est le syndicat des professeurs de l'État? Ça se peut-u? Est-ce que ça se peut qu'il y ait des partenariats qui, par exemple, en région... Parce que, vous savez, on enseigne le français à Montréal, mais on ne l'enseigne pas juste à Montréal. Mais est-ce qu'il peut y avoir des échanges d'expertises ou des échanges de problématiques par rapport à l'adaptation de cours de français? Puis, moi, je vous dirais, là, peut-être plus en région. Je comprends que Montréal, c'est une autre réalité, mais là où il y a des pénuries de main-d'oeuvre puis il y a des possibilités de combler des postes... Vous savez, nous, on est obligés d'aller beaucoup avec nos professeurs, puis c'est correct, là, il y a 121 professeurs syndiqués. Mais, s'il y avait cette possibilité peut-être de profiter un peu de cette expérience que vous avez et d'adaptation de l'enseignement du français en milieu de travail, ça se peut-u, ça?
Mme Poulin (Lise): Tout se peut dans la vie, ça, c'est certain...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Poulin, en deux minutes, s'il vous plaît.
Mme Poulin (Lise): ...dans le sens où, nous, l'expérience qu'on a eue il y a plusieurs années, c'était avec l'Office de la langue française, où on a développé des cours de formation en lien avec des institutions publiques, là. Alors, ce n'est pas nous qui donnions les cours, et les contenus ont été préparés. Mais ce qui était bien important ? et ça, les personnes nous le disaient, je vous dirais ? 95 % des personnes qui ont assisté à ces cours étaient des femmes, dans les hôtels particulièrement. Les premières sessions de formation, il fallait que ça se donne sur les lieux de travail, donc on a convenu avec l'employeur un temps de libération du temps de travail pour que ça ne se passe pas à la fin de la journée, où c'est le temps d'aller à la garderie chercher les enfants et de partir à la maison, mais bien sur les heures de travail, un temps sur le temps de travail puis un temps sur le temps des salariés.
Mais je vous dirais que les expériences précédentes à ça, où on a voulu faire en sorte que ça se passe en dehors du lieu de travail, dans une institution, là il n'y en avait pas, de résultat, parce que les personnes ne se déplaçaient pas. Alors donc, c'est bien important d'organiser ça le plus près, là, de... Alors, il y a peut-être des endroits où ce n'est pas possible, mais c'est certain que ces expériences-là... Juste vous donner un exemple, Mme la ministre. On se demandait si on aurait beaucoup de personnes ? à la première session qu'on a donnée, qui était une expérience pilote ? qui viendraient à cette formation. On a dû refuser du monde, et on a repris la formation en triple dans cet établissement hôtelier, puis on a fait le tour de l'ensemble des hôtels à Montréal pour que ces cours se donnent là.
n(17 h 50)n Donc, il y a un besoin important. Les gens veulent... Parce que, dans des secteurs où il y a plusieurs communautés culturelles, Mme Roy le disait tantôt, les gens se tiennent, je dirais, en groupe, les Latinos ensemble, les francophones du Québec ensemble, les Haïtiens ensemble, Haïtiennes ensemble, chaque communauté se tient ensemble. Alors, notre travail, c'est de faire en sorte qu'ils puissent communiquer entre eux, hein? Alors, c'est ça, donc, c'est des expériences qu'il faut reprendre, mais peut-être les rendre plus permanentes que par expériences pilotes où on passe, puis, bon, 10 ans plus tard, c'est des nouveaux, des nouvelles travailleuses, et on revient au même problème.
La Présidente (Mme Hamel): ...Mme la ministre. Avant de céder la parole à la députée de Prévost, je comprends qu'il y a eu entente de part et d'autre pour poursuivre nos travaux au-delà de 18 heures, ce qui va sûrement arriver, mais j'aurais besoin du consentement des membres. Ça va? Alors, je vous cède la parole, Mme la députée de Prévost.
Mme Papineau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames, monsieur, bonsoir, je devrais vous dire. Vous retournez à Montréal ce soir? Oui? Bon voyage! Nous aussi.
Mme Poulin (Lise): ...depuis un an, donc on connaît bien le chemin.
Mme Papineau: Vous connaissez le chemin. Écoutez, on sait que, d'abord, la CSN est présente dans toutes les régions du Québec. Et la régionalisation de l'immigration, ça représente certainement une façon, une belle façon de dynamiser les économies régionales. Mais il y a des difficultés et, à la lumière de groupes qui ont passé avant vous, on perçoit... nous percevons que la solution serait de donner plus de pouvoirs et plus de moyens aux intervenants locaux et régionaux. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette idée.
Mme Poulin (Lise): Je vais demander à Mme Corriveau, si vous souhaitez...
La Présidente (Mme Hamel): Mme Corriveau.
Mme Poulin (Lise): ...sur le terrain des régions, de vous répondre à ça.
Mme Carrier-Corriveau (Louise): Oui, moi, je viens de Sherbrooke, alors la régionalisation, on en parle beaucoup. J'entendais tout à l'heure le groupe qui est passé avant nous, je trouvais que... bon, au niveau de la sélection, je pense que ça pourrait être intéressant d'avoir des incitatifs à ce niveau-là, dans le questionnaire. Par contre, je ne sais pas comment on pourrait garantir que les gens vont demeurer en région, tu sais, une fois qu'ils sont arrivés. En tout cas, il faudrait voir. Les gens, habituellement... on a quand même un très bon taux de rétention dans la région et on est très fiers de recevoir des gens d'un peu partout. Je ne sais pas qu'est-ce qui pourraient être les autres incitatifs, mais je pense que ça pourrait être... il faudrait faire attention aussi. Parce que, entre autres, avec le FDIR, qui est le programme de régionalisation, les gens nous ont dit: Bon. O.K. On paie le déménagement, etc. Alors, il y a des gens qui sont venus s'installer dans la région. Par contre, il y a des Québécois d'origine qui ont dit: Bien, moi, j'aimerais ça aussi, aller m'installer, et, bon, on ne m'a pas payé mon déménagement. Alors, il faudra peut-être faire attention aux types d'incitatifs.
Mais, les régions, quand il y a des bonnes infrastructures, quand tout le monde travaille ensemble, et l'éducation, et les organismes communautaires, et les CLSC, et le MRCI, je pense que c'est très bien, les gens restent aussi d'ailleurs dans les régions. Et, moi, je parle au niveau de Sherbrooke, mais je pourrais parler au niveau de plusieurs autres régions, entre autres, parce que je fais partie d'autres comités aussi.
La Présidente (Mme Hamel): Mme la députée.
Mme Papineau: Oui. Mais je reviens sur ma question. Est-ce qu'une région donnée pourrait se doter elle-même si elle avait plus de moyens et plus d'outils aussi pour accueillir des immigrants?
Mme Poulin (Lise): C'est parce qu'on n'a pas fait ce débat-là, nous; on a beaucoup plus travaillé sur l'intégration au travail, sur la francisation, sur l'accueil des nouveaux et nouvelles immigrantes. Bon, l'emploi doit être un facteur assez important. On a beau avoir des moyens d'accueil, mais... Si je prends la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, où j'étais la semaine dernière, disons, on aura beau avoir des moyens pour accueillir, ils ne resteront pas s'il n'y a pas d'emploi, puis des emplois de qualité.
Alors, ce n'est pas un débat qu'on a fait en soi pour être en mesure d'analyser tous les éléments. On aura à le faire, par ailleurs. D'ailleurs, on se déplace en région justement pour faire ces débats-là sur l'emploi dans les prochaines semaines. Mais, par rapport à la question de l'immigration, on n'a pas fait ce débat-là, au comité.
Mme Papineau: Merci. Vous notez avec raison que la population du Québec a beaucoup évolué sur le plan des mentalités et de l'atténuation des préjugés. Mais force est de constater que la situation n'est pas parfaite sur le marché du travail, notamment. Selon vous, quels sont les problèmes les plus importants à cet égard et comment les régler?
M. Lara (Abraham): Vous faites référence aux relations interethniques?
Mme Papineau: Oui.
M. Lara (Abraham): Je crois que la méconnaissance des... Si on part à la base, O.K., de la société d'accueil, c'est un peu le manque d'information sur l'importance de l'immigration. O.K.? Parce que l'aperçu que les gens ont des immigrants, malgré que cette opinion-là a beaucoup évolué, c'est que les jeunes immigrants, ils viennent pour voler les jobs, tandis que la réalité, c'est toute une autre. L'immigration, c'est le développement aussi de ce pays, comme des autres pays qui sont des pays qui reçoivent des immigrants et qui ont besoin de population.
Par après, c'est un peu des effets comme... on pourrait parler du racisme. O.K.? Puis aussi, nous, cet aspect-là, on l'a analysé en comité, c'est-à-dire que le racisme, pour nous, il y a un facteur important qui est l'ignorance qu'il y a aussi dans la société d'accueil, comme nous, les immigrants, de notre propre histoire. Et c'est à cause de cela aussi qu'on a fait le projet Bâtisseurs du Québec. C'est aussi pour faire une campagne de lutte contre le racisme, de manière positive, de dire: Bon, on va regarder notre histoire, puis, dans notre histoire, on va se rendre compte qu'on a fait ce pays ensemble, et depuis des années. Les difficultés qu'on trouve, c'est ça, c'est l'ignorance des gens qui ne connaissent pas le fait qu'on a besoin l'un de l'autre. Et c'est cette difficulté-là que... À la CSN, à travers notre comité, on a essayé de lutter et de faire des démarches et des activités pour arranger ça et promouvoir l'idée d'une société harmonieuse.
Mme Papineau: Et ces démarches et ces activités, elles sont quoi?
M. Lara (Abraham): Entre autres, je voulais...
Mme Roy (Josée): Oui, je vais compléter. Ce qu'on pense, c'est qu'il y a besoin de beaucoup d'information et de sensibilisation. Bon. Nous, on s'est plutôt centrés sur le milieu de travail. On parle que les employeurs n'embauchent pas. On pense qu'il y a une campagne de sensibilisation à faire auprès des employeurs pour l'embauche, parce qu'une fois que ces personnes sont embauchées, il y a beaucoup de chemin qui se fait, mais on dirait qu'il faut casser une glace à un moment donné.
Et par rapport... Pour vous donner l'exemple du projet qu'on a en ce moment avec le Fonds Jeunesse et le CAMO-Personnes immigrantes, ce qu'on s'est donné, dans la foulée de ce qu'Abraham a dit par rapport au problème d'ignorance et de préjugés, autant les personnes qu'on reçoit comme stagiaires ont reçu une formation ? on a travaillé avec les organismes communautaires en intégration à l'emploi ? autant les personnes stagiaires ont reçu des formations par rapport à comment elles doivent s'attendre à être reçues, les préjugés, les actions des gens qui vont les recevoir qui pourraient démontrer des préjugés, et autant les parrains ont été formés par rapport aux différentes communautés culturelles qui font partie du groupe de stagiaires qu'on a reçu. Et ça, avant même que les gens arrivent. Nous, on pense que c'est quelque chose qui va certainement aider à l'intégration de toutes ces personnes-là dans le milieu de travail, puis on... Bon, c'est un projet, et on souhaite bien se servir de cette expérience-là pour le travail qu'on fait avec nos syndicats aussi, mais beaucoup... la plupart... Souvent, le problème, c'est l'ignorance, le manque d'information, le manque de sensibilité. Alors, ça passe beaucoup par des mesures qui vont dans ce sens-là.
La Présidente (Mme Hamel): Merci, Mme Roy. Je cède la parole à Mme la ministre.
n(18 heures)nMme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Sur un autre sujet, ce qui est intéressant aussi, et vous l'avez mentionné, vous avez des stages d'immersion en milieu de travail. Je vous dirai que c'est une problématique qui est évidente quand on va en région particulièrement, dans Montréal aussi, dans toute entreprise, toutes les communautés culturelles. Encore là, ma question est: Si, par exemple... De deux ordres. Est-ce que c'est bien accueilli? Est-ce que, dans un cadre de pénurie de main-d'oeuvre... est-ce que vous allez vraiment, dans des entreprises où il y a un besoin de main-d'oeuvre justement, faire en sorte que l'ensemble des employés réagissent bien à ce qu'il y ait des stages en immersion? Et, encore là, est-ce que ça peut être pensable, dans certaines régions ou dans certaines entreprises où vous avez des membres, de croire à un partenariat avec peut-être des organismes de la région, des organismes socioéconomiques de la région, mais via aussi le MRCI, et l'employeur, et le syndicat? Ça se peut-u, une entente employeur-syndicat-MRCI ou si, comme vous êtes très bien rodés, comme vous avez vos propres membres, au fond, vous n'avez pas besoin d'implication du gouvernement comme tel?
Moi, comprenez ce que j'essaie de faire, j'essaie de créer une dynamique régionale là où il y a un besoin de main-d'oeuvre. C'est un peu ça qui est sous-jacent, là, à mon intervention, mais en disant: Plus on va avoir de partenaires qui vont accepter cette mise en commun des efforts et des ressources, il me semble que ça va créer un effet d'entraînement pas uniquement chez l'employeur où vous avez des membres, mais sur l'ensemble d'une réalité économique dans une région donnée. Vous comprenez ce que je veux dire? Les syndicats aiment bien le terme de la «mobilisation», je vous dirais qu'en immigration j'ai la conviction profonde qu'il faut la mobilisation de tous les intervenants, et rapidement, pour être capable, comme disait monsieur, d'avoir des résultats concrets sur le terrain. Je voudrais vous entendre là-dessus.
La Présidente (Mme Hamel): Mme Poulin.
Mme Poulin (Lise): Bien, je dirai que, d'abord, on est au début d'une expérience qui se passe directement dans notre organisation, donc on est en mesure de mesurer, c'est le cas de le dire, comment ça va se passer jusqu'à la fin. Comment ça peut se transporter dans d'autres entreprises? Moi, je dirais que, pour avoir été longtemps dans les débats d'intégration des communautés culturelles, mais des stages de formation en milieu de travail pour favoriser, bon, l'apprentissage, le transfert des connaissances, on a vu souvent dans les entreprises les employeurs, oui, prendre des stagiaires pour le temps de la subvention, puis, quand c'est fini, bien ils n'ont pas d'emploi.
Alors, ça, on n'a jamais été d'accord avec ça, dans le sens... Et ce qu'on est en train de faire, nous, avec les 13 personnes... D'abord, c'est des jeunes de moins de 30 ans. Le critère est important pour nous aussi, parce que c'est des jeunes qui ont moins de 30 ans qui sont embauchés à la CSN avec les conditions de travail de la CSN, et c'est un projet du Fonds Jeunesse. Alors, on a soumis ce projet-là, et je vous dirai que ce qu'on va souhaiter, c'est qu'ils veuillent bien travailler à la CSN. Alors, le stage, qui va durer neuf mois, ce n'est pas pour remplacer des gens que, nous, on a besoin. Il sont en plus de tous ceux qu'on a. Alors, ce soutien-là permet l'intégration, donc. Et c'est des jeunes qui connaissent bien la langue française, bien le français ? pas parfaitement, là, bien sûr, mais une bonne connaissance du français ? qui ont déjà un emploi, qui ont déjà... c'est-à-dire, ils ont déjà des connaissances. On a des archivistes documentalistes, deux médecins qui sont à l'emploi chez nous, dans nos services, des conseillers économistes.
Alors, ces personnes-là, ils sont en stage d'intégration en emploi. Ils ont moins de 30 ans, alors... Et on va bien souhaiter qu'ils veuillent bien travailler chez nous quand il y aura des postes qui vont s'afficher, puisqu'on a, nous, plusieurs personnes qui vont partir à la retraite, comme dans beaucoup d'entreprises au Québec. Le départ massif à la retraite doit permettre... On doit trouver des moyens, des exemples comme ça ou des soutiens pour faire en sorte d'intégrer. Puis, si c'est des jeunes, des membres des communautés culturelles, encore mieux. Et ça, ça peut s'installer partout en région, mais il ne faudrait pas que les stages ou les ententes fassent en sorte que c'est un stage de sept mois et, après, la personne, bien, elle s'en va chez elle.
Mme Courchesne: J'ai bien compris, sauf que si, par exemple, on était implanté dans une région, on avait des ententes de partenariat et que, par exemple, un employeur veut, a besoin de main-d'oeuvre, ce que vous dites, c'est que si on... eux ou nous, là, vous proposaient un stage aux conditions que vous mentionnez, avec lesquelles je suis d'accord ? moi, j'ai beaucoup de difficultés avec la précarité de la notion de projet, là, je suis tout à fait d'accord avec ça ? mais votre syndicat, par exemple, ne s'objecterait pas à ce qu'une entreprise fasse un stage dans le sens où vous le décrivez. C'est ce que je comprends. Évidemment, une entreprise où vous êtes déjà implantés comme syndicat.
Il y a une dernière question, parce que le temps file. Je veux vous dire que j'ai une préoccupation aussi grande que la vôtre à l'égard des femmes immigrantes. J'ai bien reçu vos recommandations et vos suggestions, je les trouve très intéressantes. Vous avez parlé de la Loi de l'accès à l'égalité en emploi. Je vous dirais, là ? puis je vais être très transparente ? que ce n'est pas un secret pour personne, on a, dans la fonction publique, une difficulté à recruter des gens des communautés culturelles. C'est-à-dire que... est-ce qu'on a de la difficulté à recruter, parce qu'il y en a plusieurs qui sont sur liste d'attente, ou est-ce que ce n'est pas plutôt une difficulté, comme employeur, à faire en sorte que, après les concours, non seulement ils se qualifient, mais qu'ils passent l'étape de l'entrevue puis qu'on les embauche? Il y a là une difficulté, il y a là une problématique.
Est-ce que vous auriez des suggestions par rapport à ça? Puis là je vais dire quelque chose de très gros. Je vous dis tout de suite, moi, j'ai beaucoup de réserves à ce que je vais dire, mais je veux quand même vous entendre là-dessus, parce qu'il y a quand même eu, il y a une quinzaine, une vingtaine d'années, des programmes, je dirais, de discrimination positive à l'égard des femmes, hein, on s'en rappelle, on est de cette génération-là, est-ce que vous croyez que, chez un très gros employeur, puis peut-être comme nous, ici, à la fonction publique, il faudrait aller vers ce type de mesure? Comment peut-on briser cette résistance énorme, ou comment se fait-il qu'on ne réussit pas à embaucher des gens qui réussissent les concours? Et comment ça se fait que ça ne passe pas?
Moi, je vous dirais... Puis là je ne le fais pas dans des termes... Tu sais, ce n'est pas le gouvernement, gros employeur, je pense que ça se passe sur le terrain, je pense qu'il y a comme des résistances sur le terrain, là. Ce n'est pas nécessairement la volonté du gouvernement qui n'est pas là. Tu sais, on sent dans le quotidien qu'il y a d'autres... Est-ce qu'il y a des choses à faire? Est-ce qu'il y a des suggestions précises? Ou quelle est votre lecture?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Roy, en moins de trois minutes...
Mme Roy (Josée): Oui, d'accord. Bien, moi, je pense que c'est un ensemble de choses. On a un projet en ce moment pour intégrer des gens, mais, nous aussi, ça fait longtemps qu'on cherche à embaucher des gens des communautés culturelles. Au niveau du service des ressources humaines, avant qu'on ait le projet avec le Fonds Jeunesse, on a rencontré à maintes reprises le CAMO-Personnes immigrantes, les organismes communautaires, il y a... Puis je pense que ça doit être comme ça aussi par rapport à la fonction publique, il y a une certaine réticence, même des gens des communautés culturelles, à appliquer sur les postes, mais il y a aussi une certaine réticence des gens en place pour embaucher... Les préjugés sont présents partout, y compris, je pense, dans les ministères, etc. Je pense que la sensibilisation des employeurs, c'est aussi la sensibilisation des structures administratives gouvernementales. C'est une grosse machine, c'est une machine qui est assez assise aussi. Je pense qu'il y a de la sensibilisation et de l'information à faire là aussi.
Mme Courchesne: Vous ne seriez pas d'accord avec une discrimination positive? Vous comprenez ce que je veux dire par ça? Est-ce que ça....
Mme Roy (Josée): Un programme d'accès à l'égalité.
Mme Courchesne: Oui. Est-ce que, ça, c'est recevable ou acceptable? C'est-u même éthique? Moi, je vous avoue que j'ai des problèmes avec ça, mais est-ce que c'est souhaitable?
Mme Poulin (Lise): On en a un chez nous. On en a un programme d'accès à l'égalité pour les personnes immigrantes, depuis 1995, et pour les femmes et pour les personnes immigrantes. Puis je vous dirais qu'on aura beau avoir 35 programmes, ce n'est pas ce qu'il y a de parfait pour... Ce n'est pas magique, parce qu'on a eu de la difficulté à recruter des personnes des communautés culturelles, pour parler de ces personnes-là. Et c'est vraiment avec le projet puis à travailler avec les réseaux de personnes immigrantes, là, où ils ont, eux aussi, comme travail à intégrer ces personnes-là au travail. Alors donc il faut être sur le terrain, recruter en fonction des besoins, pas uniquement en fonction d'avoir l'image, là, en fonction des besoins, et des besoins des personnes.
La personne qu'on a, nous, documentaliste, elle travaille à la documentation à la CSN, cette stagiaire-là. Elle n'est pas dans un bureau à faire du classement, à se promener pour avoir un revenu pendant neuf mois. Celle qui est médecin, bien elle travaille au niveau des expertises médicales, en santé et sécurité, dans notre service. Alors, ces gens-là, ils travaillent dans ce qu'ils ont appris. Alors, ça, là, les stages et l'intégration, il faut faire attention quand on les prend, même avec un programme d'accès à l'égalité.
La Présidente (Mme Hamel): Merci. Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Prévost.
n(18 h 10)nMme Papineau: Oui. Mesdames, monsieur, j'ai deux questions puis je vais vous les poser tout de suite. La première, c'est qu'on entend beaucoup parler depuis le début de la commission qu'on devrait avoir un certain arrimage avec les besoins en main-d'oeuvre au Québec et le recrutement des immigrants à l'étranger et, je vous dirais même, l'arrimage entre les besoins des régions et le recrutement à l'étranger. Vous n'en faites pas beaucoup état dans votre mémoire, mais j'aimerais vous entendre. Quelle devrait être, selon vous, la meilleure stratégie à cet effet?
La Présidente (Mme Hamel): Mme Roy.
Mme Roy (Josée): Bien, dans notre mémoire, on met un bémol là-dessus. On dit que c'est bien, là, de recruter les gens en fonction des besoins de main-d'oeuvre et des besoins de main-d'oeuvre en région aussi, en fonction des pénuries actuelles, mais on met un bémol là-dessus aussi, parce que, un peu comme le conseil l'a mentionné tout à l'heure, bon, d'avoir le bon diplôme pour le bon emploi, c'est une chose, mais est-ce que la personne a les capacités d'adaptation qu'il faut? Est-ce que... Il faut nuancer ça, et, des fois, on pourrait peut-être se priver de gens qui pourraient aller très loin dans la vie une fois rendus ici, même s'ils n'ont pas le diplôme qui correspond aux besoins exprimés. Alors, on avait quand même un certain bémol là-dessus. C'est sûr que, à cause du problème démographique actuel et des pénuries de main-d'oeuvre dans certains secteurs, il faut effectivement chercher le plus possible à recruter des gens qu'on pense qu'ils vont se trouver un emploi rapidement, mais il ne faut pas limiter la recherche ou l'accueil à des gens qui ont sur papier la réponse aux besoins, là.
Mme Papineau: Vous avez répondu à ma deuxième question, parce que je me dis: Est-ce qu'on doit se priver des gens qui possèdent d'autres qualités? C'était ma deuxième question que je voulais vous adresser. Alors, je vous remercie beaucoup, mesdames, monsieur.
La Présidente (Mme Hamel): Alors, vous avez... vous n'avez pas d'autres questions? Non? Alors, on vous remercie énormément de votre présence et on vous invite à être prudents à votre retour.
Une voix: ...
La Présidente (Mme Hamel): Oui. Alors, j'ajourne les travaux au mardi 17 février, à 9 h 30, dans cette même salle.
(Fin de la séance à 18 h 12)