(Neuf heures trente-cinq minutes)
Le Président (M. Boulianne): Je déclare donc la séance de la commission de la culture ouverte étant donné que nous avons quorum. Alors, permettez-moi de rappeler le mandat de la commission pour cette séance qui est de poursuivre les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 104, Loi modifiant la Charte de la langue française.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Robert (Deux-Montagnes) remplace M. Beaumier (Champlain); M. Kelley (Jacques-Cartier) remplace M. Cusano (Viau); et M. Pelletier (Chapleau) remplace Mme Gauthier (Jonquière).
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci. Alors, notre ordre du jour sera le suivant. Ce matin, nous aurons l'audition du Conseil québécois du commerce de détail, du Conseil du patronat et du Mouvement national des Québécois. Et nous poursuivons cet après-midi avec l'Institut Missisquoi, le Québec Community Group Network et l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.
Auditions (suite)
Alors donc, j'invite les représentants du Conseil québécois du commerce de détail de prendre place et de nous présenter votre mémoire. Vous avez 15 minutes. Par la suite, la commission échangera 30 minutes avec vous. Alors, allez-y, M. Gaston Lafleur.
Conseil québécois du commerce de détail (CQCD)
M. Lafleur (Gaston): C'est ça. Alors, merci, M. le Président. M. le Président, Mme la ministre, MM. Mmes les députés membres de cette commission, je tiens à vous remercier au nom du Conseil québécois du commerce de détail de l'occasion qui nous est donnée, ce matin, d'échanger avec vous sur certains commentaires que nous aimerions faire en regard du projet de loi n° 104 qui modifie la Charte de la langue française.
Je vous ai remis un petit résumé papier, mais je pense qu'en m'écoutant, étant donné que ce n'est pas un document tellement long, ça va être peut-être plus agréable que de le lire. En passant, ceux qui ne connaissent pas le Conseil, nous sommes une association qui regroupe au-delà de 5 000 établissements commerciaux au Québec dans tous les secteurs d'activité du commerce de détail, exclusion faite du secteur automobile et de l'alimentaire, quoique nous ayons des distributeurs alimentaires au sein de notre organisation.
Les commentaires que nous allons faire vont porter sur deux aspects particuliers. Le premier concerne les modifications qui sont proposées à la Charte de la langue concernant la francisation des entreprises. Et le deuxième volet concerne certains commentaires relativement à la création de l'Office québécois de la langue française et celle du Conseil supérieur de la langue française.
Je tiens à vous indiquer que nous n'avons pas fait de commentaires en relation avec les autres modifications qui sont proposées en regard, surtout, à la langue d'enseignement, puisque le porte-parole que je suis... Pour le Conseil québécois du commerce de détail, ce n'est pas une préoccupation dans le cadre de nos mandats, c'est-à-dire toute la question de la langue d'enseignement.
Alors, le projet de loi, à l'article 23, propose de modifier l'article 139 actuel de la Charte en proposant de réduire de 12 à six mois le délai pour la transmission à l'Office de l'analyse de la situation linguistique pour les entreprises qui emploient 50 personnes ou plus. Évidemment, quand on parle de ce nombre, il s'agit de petites entreprises. La réduction du délai proposée à l'article 23 du projet de loi ne nous apparaît pas justifiée. Évidemment, il est souhaitable que le dépôt et l'analyse de la situation linguistique se fassent dans les meilleurs délais, et cette étape est très importante dans le processus de francisation et de certification, mais notre impression est qu'on souhaite, dans le fond, par la réduction des délais, exercer une pression sur les entreprises qui, éventuellement, pourrait avoir des conséquences même de nature pénale, puisque le simple fait de ne pas respecter les délais pourrait constituer une infraction et, donc, les assujettir à une peine pénale.
Cette restriction des délais, en ce qui nous concerne, ne nous apparaît pas comme la meilleure solution pour permettre l'atteinte de l'objectif. En effet, à moins que les données actuelles détenues par l'Office de la langue française ne démontrent qu'une très vaste proportion des entreprises visées à l'article 139 respectent les délais à l'intérieur d'une période de six mois, la réduction du délai actuel de 12 à six mois n'aura pour effet, en fait, que de créer une pression indue, et ce, malgré la bonne foi et la bonne volonté des entreprises assujetties.
Alors, à notre point de vue, il s'avère que les entreprises ont effectivement de la difficulté à respecter le délai actuel de 12 mois. Il faut donc considérer, selon nous, que le délai alloué actuellement est valable, mais qu'il faudrait plutôt prévoir des mesures de soutien et d'appui de la part de l'Office et un accompagnement plus serré qui permettraient le respect des délais. En réduisant les délais de 12 à six mois, on risque fort d'avoir des analyses de situation linguistique bâclées et probablement une augmentation significative des entreprises qui seront en infraction sans avoir atteint l'objectif recherché.
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(9 h 40)
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Notre commentaire suivant porte sur l'article 24. L'article 24 du projet de loi accorde un nouveau pouvoir discrétionnaire au nouvel Office qui lui permettrait d'ordonner la création d'un comité de francisation pour les entreprises qui emploient 50 personnes et plus. On sait que la Charte, actuellement, prévoit déjà la création d'un tel comité de façon obligatoire pour les entreprises comportant 100 personnes et plus à l'emploi de l'entreprise. De plus, l'article 24 vient réduire le délai pour la production du programme de francisation de 12 à six mois de la réception de l'avis d'adoption du programme de francisation, modifiant ainsi l'article 140 de la Charte actuelle.
Selon nous, le pouvoir qui est accordé à l'Office ou qui sera accordé à l'Office d'ordonner la création d'un comité de francisation devrait être mieux balisé. Actuellement, on n'a aucun élément, aucune piste, aucun barème ou norme qui permettrait de guider, d'une part, une ordonnance de cette nature. Et il n'y a actuellement aucune balise pour les 100 employés et plus, les entreprises de 100 personnes et plus, puisque c'est une obligation. Donc, il nous apparaît qu'un tel pouvoir discrétionnaire accordé à l'Office devrait faire l'objet de certaines balises qui pourraient être soit incorporées dans la législation ou qui pourraient être prévues par voie de règlement du gouvernement.
D'autre part, la diminution du délai pour la transmission du programme de francisation à l'Office, qui passerait de 12 à six mois, représente encore une contrainte supplémentaire qui, pour les mêmes raisons que je vous ai exprimées plus tôt, fait en sorte que le délai ne devrait pas être modifié. Mais, d'autre part, ce qu'il est important de souligner, c'est que la réduction du délai de 12 à six mois dans le cadre où un comité de francisation est créé exercerait des pressions supplémentaires sur l'entreprise qui devra en plus procéder à la convocation du comité de francisation et à l'organisation de réunions qui seront nécessaires à l'organisation du programme, ce qui représente une complexité de logistique supplémentaire et une contrainte dans le processus qui viendra créer un irritant et une pression indue à l'entreprise.
Que l'on pense, entre autres, au délai nécessaire aux négociations liées à la désignation des membres du comité de francisation; qu'à défaut d'entente une assemblée de travailleurs est nécessaire pour l'élection des représentants. Considérez aussi qu'une vaste proportion des entreprises qui sont visées ne sont pas nécessairement en milieu syndiqué, ce qui est nécessite évidemment la mise en place d'un processus auquel ni l'entreprise ni les travailleurs ne sont habitués; la nécessité de la tenue de réunions d'information; la préparation du cadre du programme de francisation; l'analyse des divers aspects devant être traités dans le programme de francisation; et l'élaboration proprement dite de ces programmes.
Pour le CQCD, il apparaît important que le délai actuel de 12 mois soit maintenu afin d'assurer une préparation harmonieuse des programmes de francisation, et qu'une pression indue associée à un délai insuffisant n'apporterait aucun élément positif.
Le deuxième point sur lequel nous aimerions faire nos commentaires concerne la création de l'Office québécois de la langue française et celle du Conseil supérieur de la langue française. Dans un premier temps, nous considérons qu'il est important effectivement, tel que le propose le projet de loi, de créer deux organismes et non pas, comme certains pourraient le souhaiter, de fusionner le Conseil supérieur ou de l'intégrer à l'Office de la langue. Le rôle du Conseil supérieur est très important. C'est un organisme aviseur, un organisme consultatif qui est en situation d'indépendance dans le cadre de l'application de la loi. L'intégrer à l'intérieur de l'Office pourrait éventuellement créer une perception de conflit d'intérêts, puisque l'orientation ou les recommandations qui pourraient être faites pourraient viser effectivement une certaine évaluation de performance de la part de l'Office, ce que le Conseil supérieur, en étant indépendant, pourrait émettre en toute crédibilité. Alors, évidemment, pour nous, la création de deux entités nous apparaît importante dans le contexte actuel.
Nous appuyons la création de l'Office québécois de la langue française, tel que proposé dans le projet de loi, ainsi que la création du Conseil supérieur de la langue française. Pour le Conseil, la réunion des trois organismes actuels que sont l'Office de la langue française, la Commission de la protection de la langue française et la Commission de toponymie au sein d'un nouvel organisme apportera une meilleure cohésion dans la mission fondamentale du nouvel organisme qui est prévu à l'article 29 du projet de loi actuel qui va introduire les nouveaux articles 157 à 164.
Fait intéressant à souligner, la mission et les pouvoirs du nouvel Office auront une portée beaucoup plus importante, puisque cet Office définira et conduira la politique québécoise en matière de francisation des entreprises et d'officialisation linguistique, en plus d'assurer le respect de la loi, alors que le mandat ou les pouvoirs actuels de la Charte conférés à l'Office se restreignent plus aux aspects de recherche au niveau de la terminologie et de la propagation d'un usage plus répandu du français. Donc, on sent ici qu'on a souhaité faire en sorte que la mission de l'organisme devienne beaucoup plus significative en termes de vision et d'orientation. Les pouvoirs de surveillance sur l'évolution de la situation linguistique et de veille donnent à l'Office une orientation nouvelle qui, à première vue, n'apparaît pas dans la Charte actuelle, qui est en référence à l'article 114 de la Charte.
En fait, notre perception est à l'effet que l'Office québécois de la langue française deviendra le fer de lance de la politique linguistique québécoise en matière d'officialisation linguistique au Québec. Alors, le Conseil appuie donc cette orientation de mission et de pouvoirs qui, nous l'espérons, permettra une application de la Charte avec discernement et une vision élargie, tout en assurant aussi une meilleure cohésion dans l'ensemble de l'application de la politique linguistique au Québec. Voilà.
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Gaston Lafleur, pour votre exposé. Alors, maintenant, nous allons faire la période d'échange. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, merci, M. Lafleur, de votre présence et de vos commentaires qui sont très intéressants. Et je voudrais revenir un peu à certains éléments... au sujet de certains éléments que vous avez abordés, vous dire également qu'on a eu l'occasion, il y a quelques mois, de travailler ensemble autour d'une problématique qui était assez complexe, la francisation des jeux vidéo, et j'avais été quand même assez fascinée du rôle extrêmement constructif et pertinent du Conseil québécois du commerce de détail. Je crois que votre Conseil, visiblement, partage cet objectif de francisation des entreprises, et il me semble que nos discussions, ce matin, seront beaucoup autour des moyens, et c'est là-dessus que je voudrais vous entraîner un peu avec moi dans les prochaines minutes.
D'abord, vous dites au sujet de l'article 24: Le pouvoir d'ordonner la création d'un comité de francisation par l'Office, donc, pour les entreprises de 50 à 99 employés devrait être mieux balisé, sauf que vous ne vous prononcez pas sur les balises qui devraient guider l'utilisation de ce pouvoir d'ordonnance. Est-ce que vous êtes capable d'avancer un certain nombre d'éléments?
Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Lafleur.
M. Lafleur (Gaston): Merci, M. le Président. Bien, Mme la ministre, voici, c'est qu'à notre point de vue, ça prendrait un certain cadre pour permettre à la présidente ou directrice générale de l'Office de pouvoir agir. En d'autres mots, ça prend certains paramètres, et ces paramètres-là, à notre point de vue, doivent être définis par un règlement approuvé par le gouvernement, par la ministre. Mais il faudrait créer un certain cadre, parce que là on n'a pas d'exemple, on n'a pas d'expérience là-dessus. Tout ce qu'on a actuellement en termes de la loi, c'est l'obligation de créer un comité pour les entreprises de 100 personnes et plus. Donc, il n'y a pas de discrétion là-dedans, la loi l'exige, et ce qui pourrait nous préoccuper, c'est qu'on arrive avec des balises qui, en fait, pourraient être établies uniquement par un processus arbitraire, malgré qu'il soit de bonne foi, O.K., par la personne qui va présider l'Office, parce que c'est elle qui va prendre la décision. Et il nous apparaît que ça prend un certain cadre qui permettrait à ce moment-là l'exercice discrétionnaire de façon à assurer certains paramètres qui nous permettraient de ne pas, d'une part, critiquer, parce que là on s'en va un peu dans la nébuleuse, qui nous permettraient de dire: Bien oui, voici les grands paramètres de l'exercice du pouvoir. C'est parce que là il y a un pouvoir discrétionnaire qui est important, et ce pouvoir-là se doit de s'exercer en fonction de paramètres qui devraient être fixés par le gouvernement.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Lafleur. Mme la ministre.
Mme Lemieux: M. Lafleur, je vous demande... C'est très difficile, la question que je vous pose, mais de quelles balises parlez-vous?
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(9 h 50)
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M. Lafleur (Gaston): Bien, je vais vous dire que, comme j'ai été convoqué à cette réunion il y a moins d'une semaine, je n'ai pas eu l'occasion d'en faire une réflexion étroite. Mais ce qu'il m'apparaît intéressant, par contre, de considérer ? et ceci n'empêcherait pas l'adoption du projet de loi ? c'est qu'on puisse prévoir dans la loi un pouvoir réglementaire, un pouvoir de réglementer cette question-là, quitte à ce que votre gouvernement puisse y établir les balises qu'il souhaiterait à propos.
Mme Lemieux: Mais, M. Lafleur, vous réalisez que les entreprises de 50 employés à 99 sont quand même assujetties à certaines obligations de la loi, elles doivent avoir un certificat de francisation, que cet article-là, tout ce qu'il dit, c'est la possibilité d'imposer la création d'un comité de francisation, mais ça ne les soustrait pas du processus de francisation. Alors, j'essaie de comprendre pourquoi on aurait besoin de baliser ça davantage, d'autant plus que vous aurez compris qu'une des raisons pour lesquelles on a inscrit cette possibilité-là, c'était dans le but d'un peu se sortir des situations où il y avait une entreprise dans un secteur x où il y a 98 employés ? n'est-ce pas, on s'approche de 100 ? donc des entreprises qui sont tout à fait dans le même... qui vivent dans le même environnement que d'autres entreprises qui ont 102 employés. Alors, c'est ça qu'on cherche à corriger.
M. Lafleur (Gaston): Bien, ça, effectivement, je vais vous dire, Mme la ministre, c'est une situation où déjà vous mettez une balise. Vous dites: Écoutez, dans le fond, une des balises à considérer, c'est que si on avait, par exemple, au-dessus de 85 employés, on devrait le considérer, mais, si on a une situation, effectivement, à 51 employés... Vous voyez ce que je veux dire? En d'autres mots, le nombre importe peu, le législateur l'a arrêté à 100, puis en bas de 100... Mais ce qu'il est important de considérer, Mme la ministre, c'est la complexité qu'on vient d'ajouter dans le processus pour l'élaboration du programme de francisation.
Donc, il faut faire attention dans l'exercice de la discrétion, il faut... Écoutez, si on a une situation où il y a vraiment des difficultés particulières, où... Là, je ne peux pas en inventer, mais il y a des paramètres, je suis convaincu, après les 15, 20 ans d'expérience qu'on a, qui nous permettent d'identifier certaines circonstances qui pourraient justifier la mise en place d'un comité de francisation sans nécessairement l'imposer à tous. Mais là, actuellement, tel que le projet de loi est préparé, en fait la direction pourrait imposer à qui mieux mieux, aussitôt qu'on a 50 personnes à l'emploi, un comité de francisation. Pour nous, ça prend des balises, parce qu'il y a des contraintes qui s'associent à ça, des contraintes de logistique.
Et aussi l'autre élément qui est important à reconnaître, Mme la ministre, c'est qu'on parle souvent d'entreprises qui ne sont pas nécessairement en milieu syndiqué. Or, l'organisation, strictement, d'une réunion d'employés pour commencer à s'élire des représentants, ce n'est pas nécessairement une culture connue, et tout ça fait en sorte qu'il nous apparaît important que, si le gouvernement souhaite effectivement dire qu'on donne ce pouvoir-là à l'Office, ce pouvoir-là devrait avoir certaines balises pour faire en sorte qu'on ne crée pas des situations perverses à l'atteinte de l'objectif qui est, dans le cas présent, si la loi était adoptée telle quelle, de produire un programme de francisation dans les six mois.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Lafleur. Mme la ministre.
Mme Lemieux: M. Lafleur, je veux revenir maintenant sur vos commentaires au sujet de l'article 23. Vous dites, en gros, que la réduction du délai ne semble pas justifiée, que ça risque de provoquer des analyses de situation linguistique bâclées. Je voudrais quand même vous rappeler, avant d'aller plus loin, que... Par exemple, prenons l'année 2001-2002, on m'indique qu'il y a eu 242 entreprises qui ont reçu leur certificat de francisation, et, sur ces 242, 182, donc 75 %, l'ont reçu sans avoir eu à développer un programme. Donc, on peut supposer que, pour le trois quarts des entreprises, il y avait... la situation au niveau de la francisation était adéquate ou alors il y avait des éléments fort mineurs qui se corrigeaient plutôt facilement.
Donc, quand on regarde, là, dans une perspective historique, sur plus ou moins 20 ans, là, depuis 1979, la moyenne est à peu près de 60 % des entreprises qui obtiennent leur certificat de francisation sans avoir à développer un programme de correctifs, un programme de francisation parce que les problèmes, ou ils sont absents ou ils sont mineurs, là, si bien que l'obtention de ce certificat se fait assez facilement. Donc, il reste des interventions à faire, si on y va sur cette base historique, autour de... Les bonnes années, c'est peut-être 25 %. Les plus difficiles, ça, c'est 40 % des entreprises qui ont des problématiques particulières de francisation.
Vous dites: Le délai est trop court. Moi, ce que je crois comprendre, c'est qu'au niveau de l'analyse linguistique ce n'est pas trop sorcier par ailleurs, là. Je pense que l'Office a l'expertise qu'il faut pour accompagner les entreprises et avoir ce diagnostic linguistique assez rapidement. C'est une opération qui se fait et qui est rodée, là, hein, où, en général, les gens savent bien ce qu'on doit repérer comme information pour avoir ce diagnostic.
Et vous dites, donc: Cette réduction de délai n'apparaît pas comme la meilleure solution pour atteindre l'objectif. Quelle est la solution? Si on ne s'impose pas des échéances... L'idée, ce n'est pas d'imposer des échéances plus courtes pour le plaisir de le faire, mais, l'idée, c'est de poser le défi rapidement à une entreprise en disant: Il faut que ça fonctionne. Il faut le faire, ce diagnostic, puis il faut le développer, le programme, puis on ne prendra pas 10 ans pour le faire. Et si... Moi, je présume de la bonne foi des entreprises, je pense bien que... Je ne pense pas me tromper en disant que la plupart des entreprises veulent se conformer aux dispositions de la loi, mais, vous le savez, on connaît le comportement humain, il y a des entreprises récalcitrantes, et, si on étire les délais, bien, évidemment, les résultats, on ne les a jamais. Alors, comment on résout ça?
Le Président (M. Boulianne): ...
M. Lafleur (Gaston): Pardon. Merci, M. le Président. Il faut prendre en compte que l'obtention des certificats de francisation, souvent, vient du fait qu'une entreprise répond déjà aux critères de francisation, parce que ce ne sont pas toutes les entreprises qui ne répondent pas aux critères. Alors, je fais un petit peu attention sur la valeur de la statistique en ce qui concerne l'obtention du certificat. Par contre, notre compréhension du processus d'analyse, c'était un peu pour vous ramener un peu dans...
Mme Lemieux: M. Lafleur, je voudrais juste vous dire, je veux bien... Vous dites... Vous remettez en cause la valeur, mais c'est ça, la statistique, là, hein?
M. Lafleur (Gaston): Oui. D'accord, oui. Je veux dire, je ne la remets pas en cause. Ce que je veux dire, c'est que là on parle quand même non pas de l'obtention du certificat, mais d'un processus qui, souvent, pour 40 %, ou 25 %, ou la différence, représente une problématique, et cette problématique-là peut être causée par divers facteurs. Mais, si on regarde l'expérience passée... Et, malheureusement, le dernier rapport auquel j'ai pu avoir accès au niveau de l'Office, c'est le rapport 1999-2000. On me dit que le 2000-2001 n'est pas disponible, donc je n'ai pas pu avoir l'information au niveau de l'Office. Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a une progression qui se fait. Mais la problématique est bien identifiée à l'effet qu'au niveau des entreprises de 50 employés et plus on a de la difficulté à arriver avec les échéanciers, probablement dans des situations où la complexité... où la situation de la francisation est dans un état plus déplorable, disons, et là où il y a plus de travail à faire.
La question, c'est de savoir qui on veut aider là-dedans. Les entreprises qui sont en mesure d'avoir leur certificat de francisation sans trop de complications, bien c'est très bien. Mais là, je pense, où il faut concentrer l'effort et les énergies, c'est ceux qui ont de la difficulté à l'obtenir parce qu'ils ont peut-être un cheminement à faire qui est beaucoup plus important, ou peut-être à cause de l'utilisation des technologies de l'information, ou à cause de la nature des postes puis des relations avec les fournisseurs, ça pose des problèmes très, très importants. Et là, dans ce cas-là, ce que nous proposons, c'est une situation d'accompagnement peut-être un peu plus ciblée de la part de l'Office pour permettre l'atteinte de l'objectif. Mais, à ce moment-là, ça veut dire que le délai doit être conforme à un objectif réaliste. Et réaliste, si on regarde l'expérience des dernières années, s'il s'est avéré que, bon an, mal an, dans les cas qui sont relativement difficiles ? et on sait qu'on en a ? on n'a pas été capable de livrer la marchandise dans six mois, bien, en imposant une réduction de délai de 12 à six, vous comprenez que ces gens-là vont être en infraction, et ce n'est pas l'objectif, je suis convaincu, que la ministre veut faire en imposant ce délai-là.
Donc, il faut regarder la balance des inconvénients entre la réduction du délai par rapport à l'atteinte de l'objectif. Et, si l'atteinte des objectifs, a posteriori, dans les cas difficiles... Si on avait 2 % de cas, on dit: Ce n'est pas énorme. Mais, si vous me dites 25 % ou même jusqu'à 40 %, là ça devient une proportion non négligeable. Alors, je ne pense pas que c'est le souhait de la ministre de faire en sorte qu'une législation va augmenter le nombre d'infractions. L'objectif, c'est de faire en sorte qu'une loi devienne applicable, gérable de la meilleure façon possible, et un des éléments là-dedans que nous proposons évidemment, c'est que, si on souhaite faire en sorte qu'on puisse atteindre les délais qui sont fixés, bien, au moins que l'Office, dans le cadre de ses stratégies et de ses actions, puisse faire des interventions plus ciblées et un accompagnement un peu plus efficace. Tu sais, on ne veut pas dire que l'Office n'est pas efficace, mais vous comprenez ce que je veux dire. Et, dans ce contexte-là, on ne peut pas voir, sur une balance d'inconvénients, la valeur de réduire le délai de 12 à six mois.
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(10 heures)
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Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Alors, j'ai la députée de Mille-Îles. Vous avez le temps de poser une question, Mme la députée.
Mme Leduc: Oui, c'est sur le même sujet, parce que, dans le fond, votre mémoire s'attarde beaucoup à la réduction de ce délai-là. Vous dites même à la page 5: «Selon le Conseil québécois du commerce de détail, il s'avère que les entreprises ont de la difficulté à respecter le délai de 12 mois.» Moi, dans le fond, le pourquoi... C'est sûr que vous avez dit: Ce n'est pas, sûrement, l'intention de la ministre de vouloir judiciariser ou aller en infraction pour les gens qui sont là, c'est de faire que les entreprises se francisent. Mais, moi, ça m'apparaissait intéressant, cette réduction-là, parce que je pense que les entrepreneurs sont des humains, et on sait, quand on a des délais, souvent, c'est au onzième mois qu'on commence à se préoccuper de la problématique. Alors, je me disais que, en réduisant ce délai-là, ça donnerait une impulsion pour que les entreprises se préoccupent assez rapidement et, finalement, au bout du 12 mois, aient vraiment fait le cheminement qu'elles devaient faire et non pas commencer à la toute fin du délai qui leur a été imposé.
Mais ma question plus précise, c'est quand vous dites: Les entreprises qui ont de la difficulté à respecter le délai de 12 mois... Est-ce que vous pourriez nous dire qu'est-ce qui leur arrive à ce moment-là, aux entreprises qui... Le 12 mois est écoulé, comment ça se passe si elle n'a pas réussi? J'imagine que ça serait à peu près la même chose si elle n'a pas réussi au bout de six mois, mais ça accélérerait un peu le processus d'atteinte d'objectif de francisation ou d'obtenir le certificat de francisation.
M. Lafleur (Gaston): Bon. Premièrement, madame, si vous permettez, ce que nous mentionnons dans notre mémoire, c'est qu'on n'affirme pas que les entreprises... On dit: «Selon le Conseil, s'il s'avère que les entreprises ont de la difficulté à respecter le délai de 12 mois.» Ça, c'est O.K.? Bon, correct, là...
Mme Leduc: ...
M. Lafleur (Gaston): ...un petit commentaire. Mais en lisant... Par contre, si vous prenez connaissance du dernier rapport de l'Office de la langue française qui est diffusé, on constate le fait que les questions du non-respect des dispositions de la Charte en ce qui concerne les entreprises de 50 employés et plus constituent un problème, une problématique d'envergure pour l'Office. Donc, je présumerais.
Quant à votre question, la question du délai est importante, d'une part, parce que, à l'application de la Charte telle qu'elle existe actuellement, vous auriez une entreprise qui serait en situation d'infraction déjà, au départ, O.K., malgré sa bonne volonté. Si l'expérience passée des 15 dernières années démontre effectivement qu'il y a une proportion significative d'entreprises qui sont capables de respecter le délai... Mais, si on comparait l'état de situation linguistique dans cette entreprise-là par rapport à une qui a excédé le six mois, on pourrait peut-être constater que celle qui est en situation positive est en situation de complète francisation, donc c'est une formalité, alors que celle qui n'est pas capable de rencontrer le délai a une problématique beaucoup plus sérieuse. Alors, vous comprenez que, avant de commencer à jouer avec les délais, on pourrait peut-être avoir une analyse plus précise de la nature des problématiques.
Et, d'autre part, il ne faut pas oublier que les ressources humaines d'une entreprise à 50 employés sont beaucoup moins importantes qu'une entreprise de 100 et plus. Donc, on n'a pas nécessairement de spécialiste linguistique, de spécialiste en francisation. Le nombre d'entreprises à couvrir est beaucoup plus important. Et, d'autre part, il faut regarder aussi les ressources restreintes que l'Office a à sa disposition pour pouvoir fournir l'aide et l'appui nécessaires. Donc, on s'en va quasiment dans un cul-de-sac.
Le Président (M. Boulianne): Alors, c'est bien, M. Lafleur, je m'excuse. Alors, M. le député d'Outremont, vous avez quelques minutes de plus que le 15 minutes aussi pour poser des questions et échanger avec M. Lafleur.
M. Laporte: Merci, M. le Président. M. Lafleur, je vous remercie au nom de l'opposition officielle et je dois vous dire que, en ce qui me concerne et, je pense, en ce qui concernera le caucus, nous partageons très largement les évaluations que vous faites des conséquences prévisibles, néfastes des modifications proposées aux articles 23 et 24. Je ne vous apprendrai peut-être rien en vous disant que c'est moi qui ai inventé les instruments d'évaluation dont se sert encore l'Office de la langue française, n'est-ce pas? Et ce sont des instruments d'évaluation que nous avions inventés à la suite de travaux de conseil qui avaient été faits par une firme importante de gestion de Montréal, et ce sont des instruments d'évaluation compliqués et complexes.
Par exemple, je pense que l'Office continue à procéder à l'analyse des situations linguistiques en fonction de la notion de groupes organisationnels. Je pense que c'est toujours en pratique à l'Office, et c'est une notion qu'on ne manipule qu'avec, disons, une certaine... je dirais une certaine lenteur d'esprit, vous savez, il faut du temps. Il faut du temps. Or, la ministre leur enlève du temps, et je pense que ça risque d'avoir un impact assez néfaste sur la qualité des analyses et des programmations et, ensuite de ça, que ça va créer exactement l'effet de mise en dérogation que vous avez mentionné plus haut. Donc, sur ça, je suis entièrement d'accord avec vous et je n'ai pas de question à vous poser.
Là où j'ai une question à vous poser, c'est sur l'article 24. Là vous avez mis, à mon avis, M. Lafleur, le doigt sur un gros, gros, gros bobo de la loi n° 104. La ministre vous pose des questions, elle vous dit: Oui, je comprends, vous voulez qu'on balise, mais on balise comment? Vous avez fait un certain nombre de suggestions là-dessus, vous avez mentionné que l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire... Ça ne sera pas nécessairement par la présidente ou le président de l'Office, ça va être par l'Office de la langue française, c'est-à-dire par les fonctionnaires, le plus haut fonctionnaire ou la plus haute fonctionnaire, plus avec l'assistance du conseil d'administration, là, ce qu'on appelle les membres de l'Office. Là-dedans, il y a des gens qui sont tout à fait compétents pour savoir quels sont les grands problèmes du jour, et on peut compter sur leur sagesse pour ne pas prendre des décisions du pire, c'est-à-dire qui seraient vraiment motivées par une envie discrétionnaire, l'exercice discrétionnaire de l'autorité qui serait condamnable. Je ne pense pas que ça va se faire, ça.
Mais il y a un grave problème, et je suis très content que vous l'ayez soulevé, et c'est à ce sujet-là que je vais vous poser ma question. L'exercice d'un pouvoir discrétionnaire non balisé, comme vous dites, crée toujours un risque d'arbitraire, un risque d'abus. Or, à mon avis ? et là je donne un conseil; je vous pose une question puis je donne un bon conseil à la ministre ? à mon avis, la seule façon de baliser et de prévenir ce risque d'exercice arbitraire de l'autorité, c'est de ressusciter l'ancienne Commission d'appel qui a été abolie en 1992, ou 1993, ou 1994, je ne me rappelle pas trop quoi, par quel gouvernement d'ailleurs, mais qui était le dispositif présent dans la Charte, selon l'esprit du ministre Laurin, parce que c'est lui qui l'avait créée, à l'adresse duquel on pouvait diriger une demande d'appel en vertu d'une perception d'abus.
Évidemment, dans ce cas-là, puisque l'Office aura un pouvoir discrétionnaire ? je vais terminer là-dessus, là ? ce n'est pas seulement les entreprises qui sont prises ou potentiellement... Les gens diraient virtuellement, mais je trouve qu'on met le mot «virtuel» à peu près à toutes les sauces. Les entreprises sont potentiellement en risque de subir un abus dans ce cas-là. Puis, je ne parle pas des bonnes intentions des personnes, je me dis: Comment fonctionnent les bureaucraties puis les organisations, là? Mais il n'y a pas seulement les entreprises. Moi, dernièrement, dans mon comté... Et, j'ai soulevé une question à l'Assemblée nationale à laquelle la ministre n'a pas cru bon de répondre, dans mon comté, j'ai un monsieur d'origine grecque qui dirige un petit établissement qui s'appelle Le nettoyeur à la grecque, et dernièrement je vous assure, sans vouloir élaborer, que cette personne a été l'objet d'un abus. Mais il n'y a aucune fonction d'appel à l'intérieur de la structure administrative de la Charte qui fait qu'on peut se plaindre que la Commission de protection de la langue française est arrivée chez soi pour une plainte qui lui avait été déposée par quelqu'un qui est allé vous porter sa chemise, et à qui vous n'avez pas parlé en français standard, et qui a porté une plainte contre vous en disant que, oui, vous parliez français, mais la qualité de votre français était insuffisante. Ça, si vous ne trouvez pas que c'est un abus, là, vraiment, là, on s'en va dans de la réglementation dure.
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(10 h 10)
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Donc, ma question, c'est la suivante: Que diriez-vous... Que pensez-vous, parce qu'on va avoir un caucus du Parti libéral après ça, là, de la suggestion de recréer... Appelez-la une commission. Eux autres, ils aiment plutôt le mot «comité», parce qu'ils ont tout éliminé les commissions. Ils ont tout créé des comités, ce qui pose un problème, j'en mentionnerai plus haut. Mais que pensez-vous de la suggestion qui consisterait à recréer cette instance d'appel de sorte que là on puisse baliser, en tout cas, de cette façon, sans exclure d'autres façons, l'exercice du pouvoir discrétionnaire qui, évidemment, disons, contient toujours des risques d'arbitraire? Vous comprenez ma question?
M. Lafleur (Gaston): Oui, oui, je la comprends.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député d'Outremont. M. Lafleur, vous avez la parole.
M. Lafleur (Gaston): Merci, M. le Président. Bien, M. Laporte, voici, c'est que dans le contexte actuel la création d'une telle structure serait quasiment impossible à faire parce que déjà la loi ne donne aucune balise, donc c'est une entière discrétion. Et, à ce moment-là, ce n'est quasiment pas appelable, ce n'est pas traitable devant un tribunal, c'est un pouvoir discrétionnaire qui est conféré, d'où, au départ, vient l'importance d'un certain cadre et de certaines balises.
Mais je pense que ce qui est important ici... Ce n'est pas une question d'imposer des contraintes à l'Office, ce qui est important, c'est d'y donner une transparence et une meilleure crédibilité dans de le processus de décision. Et c'est ça qui est important. Vous pouvez certainement vous imaginer que l'exercice de ce type de pouvoir là non cadré, non encadré, pourrait amener un processus de décision qui manque d'équilibre, où on pourrait avoir des situations fort désobligeantes sur lesquelles on pourrait même concevoir qu'on applique deux poids, deux mesures, toutes sortes de circonstances qui font en sorte que l'exercice du pouvoir discrétionnaire, à ce moment-là, pourrait être fort critiqué. Alors, la nécessité de balises devient importante et, en fait, vient, à toutes fins pratiques, assurer une certaine, je dirais, cohérence dans l'exercice du pouvoir.
M. Laporte, vous comprendrez que créer une institution... En tout cas, je vous dirais que, nous, si la situation était bien encadrée, on préviendrait plutôt que d'essayer de guérir. Et on dit toujours: Un bon règlement vaut mieux qu'un bon procès, mais là, dans le contexte actuel... Je pense que votre proposition, quoique fort intéressante, ne pourrait pas voir le jour dans le contexte où on a un pouvoir totalement discrétionnaire. Et, si on a une situation d'abus de droit, bien là c'est quasiment un tribunal de droit commun, mais on sait comment les tribunaux de droit commun vont traiter un bref d'évocation ou quoi que ce soit. Dans le contexte actuel, c'est quasiment impensable. Et c'est ça, d'ailleurs, j'aimerais souligner, qui vient sous-tendre davantage la nécessité des balises, parce que là on est en situation de pouvoir discrétionnaire total.
Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député d'Outremont.
M. Laporte: Merci beaucoup, M. Lafleur. C'est vraiment fort éclairant. Vos propos sont fort éclairants. Il y a aussi un autre terrain sur lequel, évidemment, là, on est totalement d'accord, mais presque totalement, totalement d'accord, et vous êtes en... On est en sacrée bonne compagnie, parce que, hier, on a même eu l'aval de Guy Rocher, qui est un de nos grands savants nationaux, même sociologues, qui a été à l'origine, qui a été l'inspirateur, avec Fernand Dumont, le regretté Fernand Dumont, de la Charte ? les trois étant des proches, Camille Laurin, Fernand Dumont et Guy Rocher. Et voilà que Guy Rocher, n'est-ce pas, nous dit ce que vous venez de nous dire, à savoir que la décision de transférer la fonction d'évaluation de la situation linguistique à l'Office plutôt qu'au Conseil, ça crée un risque de conflit d'intérêts quasiment... Je ne sais pas comment est-ce qu'ils ont fait pour ne pas le voir. J'en parlais l'autre jour à mon caucus, vous avez peut-être été... Vous êtes peut-être au courant de ce qu'on appelle le principe de Drucker, qui dit que «the priority of managers is the management of their career». Alors, quand vous donnez une fonction d'évaluation à un opérateur... Comme j'ai dit à mon caucus, si vous voulez m'évaluer, là, le meilleur conseil que je vous donnerais, c'est: Ne me demandez pas de m'évaluer moi-même. O.K.?
Donc, vous avez un office, nouvel office, Office québécois de la langue française et non pas, comme je l'ai dit hier, un office de la langue du français québécois. O.K. Il y a quelque chose, il y a une nuance intéressante au niveau de l'idéologie, là. Donc, en donnant à l'opérateur la responsabilité d'évaluer à la fois, disons... Je ne dis pas qu'il ne devrait pas évaluer ces programmes, mais on évalue les grandes politiques, les grands équilibres, les grands résultats sur la situation linguistique. Écoutez, j'en sais quelque chose, j'ai été président du Conseil de la langue française puis j'ai fait cette job-là durant cinq ans, essayer de comprendre si la situation linguistique s'en allait en avant, ou si elle piétinait sur place, ou si elle ne reculait pas un certain temps. Si j'avais été président de l'Office, j'aurais été très mal avisé d'informer mon ministre que, malgré tous les efforts de cet appareil, n'est-ce pas, comme on dit, «nothing goes», ou bien ça ne va pas aussi bien qu'on souhaiterait que ça aille. Donc, il y a... Écoutez, le conflit d'intérêts là-dedans, c'est gros comme l'Assemblée nationale, mais Mme Lemieux, pour une raison ou pour une autre que je ne connais pas, elle ne l'a pas vu.
Alors, je voudrais, sur ça, vous demander puis vous dire: On est vraiment d'accord sur ce que vous avez voulu nous dire, et, si vous avez des commentaires... Avant, je vais vous poser une autre question. Vous n'avez pas mentionné dans votre exposé, peut-être parce que ce n'est pas tellement du domaine de vos activités, la décision qui est prise dans la loi de réévaluer les ententes particulières avec les sièges sociaux après cinq ans. Vous savez, ça veut dire que là... Évidemment, c'est dans le même esprit qu'on le mentionnait tantôt, c'est-à-dire que, si vous contrôlez, si vous contrôlez, si vous contrôlez, si vous montez les délais, puis si vous contrôlez plus, vous allez probablement faire que le monde vont sortir d'une certaine paresse naturelle, là, mais ça alourdit drôlement le poids de la paperasse et ça crée drôlement un risque accru d'interventions arbitraires de la part de l'opérateur. Donc, sur ça aussi, j'aimerais avoir votre opinion, parce que je pense qu'il y a une décision là qui n'est pas anodine.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de d'Outremont. M. Lafleur, vous avez la parole.
M. Lafleur (Gaston): Bon, écoutez, si on regarde, en ce qui concerne le volet des délais... du renouvellement aux cinq ans, l'article 144, actuellement, n'en fait pas mention effectivement. L'application des programmes de francisation à l'intérieur des sièges et des centres de recherche indique qu'on peut faire l'objet d'ententes particulières afin de permettre l'utilisation d'une autre langue que le français comme langue de fonctionnement. «Tant qu'une telle entente est en vigueur, le siège ou le centre de recherche est réputé respecter les dispositions du présent chapitre.» Et là on ajouterait: «Ces ententes sont valables pour une période de cinq ans renouvelable.» Possiblement... Là, je spécule, mais je vous dirais que probablement l'intention que je peux y voir, c'est qu'il y a une nécessité de faire une révision, probablement, de l'évolution de la situation à l'intérieur des sièges sociaux et qu'on considère qu'une période de cinq ans est un délai raisonnable de réévaluation.
Évidemment, est-ce que ça présuppose que ces ententes-là... On dit «est en vigueur». Est-ce que le législateur, quand il a édicté l'article 144 actuel, prévoyait que cette entente-là était en vigueur ad vitam aeternam ou s'il y avait une période de temps? L'article 144 actuel ne le prévoit pas. Là, ce qu'on prévoit, c'est qu'on dit: Écoutez, ça sera maintenant des ententes renouvelables aux cinq ans. Honnêtement, là, je ne sais pas qu'est-ce que ça peut comporter dans le cas où elles ne seraient pas renouvelées.
M. Laporte: ...je peux vous répondre parce que j'ai été celui qui a inventé le cadre intellectuel de ces ententes-là suite à deux grandes missions que j'ai faites en Europe avec, entre autres, Brian Mulroney et puis d'autres éminentes personnes, n'est-ce pas? C'est sûr qu'au moment où on a fait la réglementation on n'avait pas prévu, à ce moment-là, un délai. On était peut-être naïf, mais on baignait dans la confiance des entreprises. On a fait des missions, on a consulté avec des hommes d'affaires, et on a décidé qu'on pouvait demander aux sièges sociaux d'accepter la réglementation dans certaines conditions, et on a dit: On vous fait confiance pour que ça avance. Et, puis s'il y a jamais des plaintes là-dessus, bien, mon Dieu, parce qu'on peut en faire des plaintes aussi sur les sièges sociaux à ma connaissance, bien on agira à ce moment-là.
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(10 h 20)
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Donc, je pense que cette loi, là, elle transpire l'esprit de soupçon. On soupçonne qu'il y a du monde, en quelque part, qui ne feront pas leurs devoirs comme ils s'étaient engagés à les faire. Ça, ce n'est pas dans l'esprit du Parti libéral de soupçonner le monde de malice et de mauvaises intentions, de paresse, de faiblesse et de tout ce que vous voudrez, n'est-ce pas? Parce que c'est ça, il faut raccourcir les délais, il faut renouveler les ententes. Pourquoi? Parce que le monde, ils ont l'espèce de tendance naturelle au laisser-aller, n'est-ce pas? Ce qui va faire que, si on les laisse aller, la francisation, ça ne se fera pas. Ce n'est pas dans cet esprit-là qu'on a fait la loi 101 au moment où j'étais aux affaires, n'est-ce pas? Et ce n'est certainement pas dans cet esprit-là que le Parti libéral, à mon avis, devrait s'en aller pour une réforme qui, par ailleurs, a des intentions qui, je l'ai dit hier, me paraissent fort louables et qui nous sont tout à fait acceptables. C'est au niveau des moyens qu'on n'est pas d'accord.
Donc, encore là, là, est-ce que vous avez une réaction?
M. Lafleur (Gaston): Bien, moi, écoutez, je vous dirais... Pardon, M. le Président. Je vous dirais que le contenu de l'entente pourrait, par exemple, prévoir le fait que le siège social doit atteindre certains objectifs dans cinq ans et, à ce moment-là, l'entente devienne caduque ou vienne à son terme après cinq ans. Je pense que la notion du renouvelable, ici, impose une réflexion sérieuse avant de dire qu'on ne renouvelle pas, parce que l'intention du législateur, ici, prévoirait que cinq ans, oui, mais renouvelable, oui. Donc, si on ne veut pas renouveler...
Excusez-moi, on me coupe. On m'a dit...
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, merci beaucoup, M. Lafleur. Merci, M. député d'Outremont. Vous avez eu... Merci.
Alors, nous allons suspendre quelques minutes. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 10 h 22)
(Reprise à 10 h 25)
Le Président (M. Boulianne): Alors, bienvenue, M. Prévost, à la commission de la culture. Alors, vous avez 15 minutes pour nous présenter votre mémoire. Par la suite, il y aura échange avec les ministériels et l'opposition officielle. Alors, vous avez la parole, M. Prévost.
Conseil du patronat du Québec (CPQ)
M. Prévost (Pierre): Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, je désire vous remercier de recevoir le point de vue du Conseil du patronat du Québec sur un aspect aussi fondamental de notre vie collective, l'usage et la promotion de la langue française.
Le CPQ s'est toujours impliqué dans le débat sur la langue française, car nous avons jugé, il y a de cela très longtemps déjà, qu'il s'agissait là d'un élément distinctif de notre paysage socioéconomique. En effet, le caractère français du Québec, l'importance de le préserver et la spécificité culturelle qui s'y rattache ont toujours été au coeur des préoccupations du Conseil. Au fil des ans, dans différents mémoires produits sur ce sujet, nous avons plaidé pour la promotion des entreprises québécoises francophones et nous avons souscrit à l'évolution de la société en ce qui a trait à la préservation de la langue de la majorité. Notre démarche a toujours été accompagnée de la défense et de la sauvegarde des droits des minorités et de leurs institutions.
Pour le CPQ, la question de la langue s'associe invariablement à l'amélioration du niveau de vie et le développement économique dans un contexte nord-américain où domine l'anglais et, j'ajouterais, dans un contexte de l'hémisphère américain où l'espagnol et l'anglais dominent de très loin. Le CPQ est bien conscient que la langue française ne peut être laissée au jeu de la libre concurrence qui la conduirait directement à sa mise au rancart. Si les interventions du CPQ en matière linguistique ont toujours été guidées par un souci de promotion du français et de maintien de la paix sociale, elles l'ont été tout autant par celui qui nous apparaît bien légitime de ne pas alourdir inutilement le fonctionnement des entreprises.
La Charte de la langue française a maintenant 25 ans, et le consensus veut qu'elle ait contribué fortement au fil des ans à l'épanouissement culturel du Québec. Aujourd'hui, le projet de loi n° 104 vient modifier certains éléments de la superstructure qui encadre l'application de cette Charte, ce qui donne suite à une recommandation de la Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec dont le rapport a été déposé au mois d'août 2001. Ce projet de loi vient également donner suite au rapport de la Commission en ce qui concerne l'accès à l'enseignement en anglais et à la nécessité pour les établissements d'enseignement supérieur de prévoir l'adoption d'une politique relative à l'utilisation et à la qualité du français.
En ce qui a trait à la situation du français dans les entreprises, le projet de loi donne également suite à plusieurs recommandations incluses au rapport de la Commission. Il nous apparaît essentiel de rappeler aux membres de la commission parlementaire que le Conseil du patronat a participé au processus de consultation de la commission Larose. Cependant, lorsqu'il s'est présenté devant la commission, il y a plus d'un an, le CPQ a plaidé pour la mise en oeuvre d'une approche incitative à la francisation dans les entreprises qui ne détiennent pas encore leur certificat de francisation. Le CPQ faisait notamment valoir qu'il serait important pour l'Office la langue française de rétablir un service de soutien en région qui a été coupé et qui était pourtant fort apprécié des entreprises qui utilisaient ce service.
Malheureusement, cette voie, qui se voulait incitative et axée sur le soutien, n'a pas été suivie par la commission Larose non plus que par l'actuel projet de loi à l'étude. À la lecture du projet de loi tout comme à la lecture du rapport de la commission Larose, on a le sentiment étrange que les entreprises s'ingénient à inventer des entourloupettes afin de ne pas se conformer à l'esprit de la Charte. Pourtant, notre opinion est à l'effet que la réalité de la vie économique québécoise est tout autre que ces courtes affirmations. Ainsi, jamais auparavant la vie économique québécoise n'a-t-elle été aussi francophone qu'aujourd'hui, ce qui est remarquable étant donné le contexte accru d'ouverture aux marchés internationaux et aux fournisseurs étrangers.
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(10 h 30)
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L'évolution des 10 ou 15 dernières années a fait en sorte que le paysage d'affaires, et à Montréal en particulier, est devenu aussi français qu'il est possible de l'être. Certes, il reste encore une partie des entreprises qui ne détiennent pas leur certificat de francisation, mais ce n'est pas un bastion, car, vous allez comprendre pourquoi, il y a là évidemment de nouvelles entreprises, parce que les entreprises naissent et meurent. Alors, il y a des entreprises qui sont en phase de démarrage. Il y a celles qui sont issues de fusions. Et, il y en a de plus en plus des fusions, on le sent très bien, nous, dans l'évolution de notre membership, et donc ces entreprises doivent ajuster leurs politiques internes, notamment en matière de francisation. Il y a les entreprises qui, grâce à une croissance soutenue ces dernières années, viennent de passer dans la catégorie des entreprises qui, dorénavant, doivent obtenir un certificat de francisation. Il y a enfin celles qui vivent des situations précaires. Et, malgré le fait que le climat économique est meilleur qu'on aurait pu le souhaiter il y a quelques mois, il ne faut pas oublier que les profits des entreprises ont chuté dramatiquement pendant l'année 2001, et il y a plusieurs entreprises qui se retrouvent dans des situations précaires. Comme quoi la vie économique ne mène pas toujours aux vallées les plus verdoyantes. Ces gens-là, vous le comprendrez aisément ? je parle des gens qui luttent pour la survie de leur entreprise ? ont évidemment autre chose en tête actuellement que d'initier ou de mener à bien la francisation de leur entreprise. Bref, ce 30 % d'entreprises qui ne détiennent pas leur certificat de francisation ne doit pas être considéré comme un nid de délinquants qu'il faut punir. D'ailleurs, plusieurs d'entre elles utilisent sans doute tout autant de français que si elles détenaient leur certificat.
En matière de francisation des entreprises, le projet de loi n° 104 n'est malheureusement rien de plus que l'écho d'une recommandation que nous n'avons pas soutenue qui veut, dans l'esprit, mettre au pas les méchantes entreprises. L'État québécois, relayé dans ce cas-ci par les organisations syndicales, viendra donc mettre de l'ordre dans ce dossier. Au passage, il va encore une fois rogner sur les prérogatives de gestion des entreprises et imposer des délais qui sont plus courts.
Qu'accompliront pour la promotion du français en entreprise les nouveaux comités paritaires de francisation? Est-ce qu'on a posé cette question a priori hors de toute partisanerie? Est-ce qu'on a pensé appliquer d'abord au sein de quelques entreprises qui auraient été prêtes à tester sur une base volontaire une telle mesure pour, par la suite, comparer le résultat avec le reste de leur secteur industriel? De notre point de vue, la question de la langue est fondamentale à l'équilibre sociodémographique et à la paix sociale qui règnent au Québec. Quel intérêt y a-t-il à forcer cet équilibre inutilement en transformant ce qui était déjà une obligation, c'est-à-dire la mise sur pied des comités de francisation pour les entreprises de plus de 100 employés, en un lieu d'affrontement potentiel entre employeurs et représentants des employés?
Le fait de travailler en français au Québec est un droit que nous reconnaissons volontiers et que nous appuyons. Nous-mêmes, au CPQ, nous consacrons, depuis des années, une part de nos maigres ressources à nous assurer de la qualité du français dans tous nos documents et dans toute notre correspondance par le recours à un service de révision linguistique. Mais suspecter d'emblée de nombreuses entreprises de ne pas vouloir collaborer à l'atteinte des objectifs de la Charte, multiplier les procédures administratives, introduire un biais paritaire au sein des comités de francisation, voilà une approche que nous ne pouvons pas soutenir et que nous nous empressons de dénoncer.
Nous aurions préféré, il va sans dire, nous présenter devant cette commission et féliciter le gouvernement d'avoir adopté une approche de support, de soutien ou de conciliation envers les entreprises désireuses d'améliorer l'usage et la qualité du français en milieu de travail. Ça aurait été une approche qui aurait misé davantage sur le concept d'émulation. Peut-être que le projet de loi sera modifié par les bons soins des parlementaires de façon à le rendre plus acceptable aux gens d'affaires qui, il faut le répéter, n'ont jamais été réfractaires aux efforts requis pour franciser le milieu du travail. Mais on ne doit pas oublier que ces efforts doivent s'ajouter à un encadrement réglementaire qui est déjà très lourd au Québec et qui oblige les entreprises à consacrer de plus en plus de ressources à satisfaire différentes agences gouvernementales qui ont toutes leurs priorités et les délais qui vont avec.
Alors, je vous remercie de votre attention. Je suis maintenant prêt à répondre.
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Pierre Prévost, du Conseil du patronat. Alors, nous avons maintenant un échange de 30 minutes. Mme la ministre, vous avez la parole pour 15 minutes.
Mme Lemieux: Merci. Merci, M. Prévost, de votre présentation. J'ai relu certains extraits du mémoire du Conseil du patronat du Québec qui avait été déposé à l'occasion des États généraux, et, en substance, vous aviez dit que le CPQ était conscient que la langue ne peut être laissée au jeu de la libre concurrence qui la conduirait directement à sa mise au rancart. Vous avez dit: Nous croyons que l'intervention de l'État est indispensable à la préservation de l'espace francophone au Québec. Bon. Alors, il y avait tout de même à ce moment-là une certaine adhésion au fait que, si nous voulions nous assurer que le français soit une langue vivante et significative au Québec, on ne pouvait pas ne pas s'en préoccuper, on ne pouvait pas même imaginer certaines interventions de l'État. Cependant... Alors, voilà, ça, c'était en toile de fond, plutôt une toile de fond sympathique de la part du CPQ.
Cependant, lorsque je vois et j'entends les remarques que vous faites au sujet du projet de loi n° 104, je ne voudrais pas avoir une pensée trop réductrice de vos propos, mais, je dois vous dire, vous n'êtes pas d'accord avec grand-chose, hein? Et c'est comme si, enfin, bien que vous ayez dit qu'il fallait avoir un certain nombre d'interventions parce que le jeu de la libre concurrence tuerait le français probablement, il n'y a aucune intervention que vous reconnaissez pertinente dans le projet de loi n° 104.
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. M. Prévost.
M. Prévost (Pierre): Oui. Je le comprends comme une question ou comme une affirmation?
Mme Lemieux: J'émets une hypothèse. Vous pouvez la commenter.
M. Prévost (Pierre): D'accord. Dans le document qui vous a été remis, nous nous déclarons en accord avec deux dispositions du projet de loi n° 104, c'est-à-dire celle qui concerne la langue d'enseignement et la politique d'utilisation et de la qualité de la langue française dans les établissements supérieurs d'enseignement.
Mme Lemieux: Oui, mais je ne voudrais pas être trop malcommode, M. Prévost, mais ce sont des dispositions qui n'affectent en rien le patronat. C'est assez facile d'être en faveur de ces dispositions. Et tout ce qui concerne les entreprises, ce regard qu'on essaie d'avoir sur le fait qu'il y a des gains que nous avons faits, mais il y a aussi des éléments difficiles auxquels on fait face, il y a des murs qu'il faut arriver à traverser, aucun des moyens que nous proposons trouve un minimum d'adhésion de votre part.
M. Prévost (Pierre): C'est vrai. À cet égard-là, c'est tout à fait vrai. D'ailleurs, je pense que là-dessus c'est... le mur que vous avez identifié, il s'en est créé un autre. C'est qu'entre le dépôt du rapport de la commission l'année dernière, au mois d'août, et la préparation du projet de loi, et notre rencontre d'aujourd'hui je pense que le gouvernement a décidé d'aller de l'avant dans la philosophie qui animait le rapport de la commission sur la situation et l'avenir du français au Québec. Je pense que, quand on parle d'une politique linguistique, on doit regarder ça avec un... Je dirais, il faut se dépêcher lentement. Donc, c'est un sujet qui est toujours... où il y a toujours possibilité de déflagration lorsqu'on veut aller trop vite, et on ne voudrait pas que ça se retrouve prisonnier de toutes sortes d'enjeux qui ne sont pas à proprement parler des enjeux linguistiques. J'ai...
Mme Lemieux: Vous pensez à quoi lorsque vous dites cela?
M. Prévost (Pierre): Bien, c'est-à-dire que n'importe quelle situation où on prendrait en otage une question proprement linguistique, c'est-à-dire la francisation. Pour donner l'exemple des entreprises, le degré auquel une entreprise... ou la rapidité avec laquelle une entreprise va arriver à franciser ses différents logiciels ou, enfin, son milieu de travail en général et le fait que ça puisse donner lieu à de la contestation. Lorsque vous allez introduire... Ce n'est pas moi qui invente les chiffres, c'était dans le rapport de la commission Larose, il y a seulement 6 % des comités, semble-t-il... des comités de francisation d'entreprises qui sont actifs, entre guillemets. Là, on va, en les rendant paritaires...
Une voix: ...
M. Prévost (Pierre): Oui, c'est à la page, je pense, 103 du rapport.
En les rendant actifs, je dirais même hyperactifs, parce que là c'est des comités paritaires ? on a cette habitude du paritarisme dans d'autres secteurs d'activité ? on va donc activer ou réactiver, si vous voulez, 94 % de ceux qui, entre guillemets, là, semblaient en dormance, là, puisque... Et, c'est une affirmation qui ne vient pas de moi, ça vient du rapport de la Commission. Ça n'a quand même pas empêché le paysage linguistique, économique d'évoluer de façon exceptionnelle au Québec depuis 25 ans ou 30 ans, et donc on viendrait changer la façon de fonctionner dans 100 % des entreprises pour finalement essayer de... Puis, je comprends vos arguments, puis on est tout à fait sensible au fait qu'il y a encore un 30 % d'entreprises qui ne détiennent pas leur certificat de francisation, on pense seulement que sur les moyens... Et probablement que, sur la philosophie de base et les moyens pour arriver à atteindre ces objectifs-là, on pense que là on fait fausse route en allant davantage dans la philosophie qui veut intégrer au droit du travail les questions linguistiques.
En fait, on est ici pour vous donner notre point de vue et on vous dit: Attention à cette voie-là. C'est dans le... Je pense que c'est dans l'intérêt de personne au Québec de faire en sorte que la situation du français au travail n'évolue pas favorablement. Si je peux me permettre, d'ailleurs, dans les 30 % d'entreprises qui n'ont pas leur certificat, il y en a environ 7 % qui sont identifiées comme étant laxistes ou retardataires, et donc on parle de 7 %. Alors, on est en train de changer une norme, enfin une règle du jeu pour l'ensemble des entreprises, alors qu'on sait que...
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(10 h 40)
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Et l'Office de la langue française a fait une analyse qui me semble, en tout cas, pertinente de la situation. C'est vrai qu'il y a des entreprises, il y a des secteurs d'activité qui sont plus difficiles à franciser. Bon, évidemment, toutes les technologies de l'information, le manufacturier... Et le manufacturier s'en va vers des... Vous savez, l'organisation du travail évolue. Je ne suis pas le premier à le dire, vous avez eu un échange le 26 avril 2001 avec votre collègue d'Outremont où effectivement vous avez discuté de ces choses-là, là, l'évolution de l'organisation du travail qui fait en sorte que les entreprises manufacturières, dans certains secteurs d'activité, sont arrivées à faire de plus en plus sous-traiter ce qui auparavant était le centre de leur activité et dans un réseau mondial, de plus en plus mondialisé. Alors, ces problèmes-là, je pense, ne seront visiblement pas réglés ou, enfin, on ne s'en va pas dans le sens d'une amélioration avec les dispositions du projet de loi n° 104 qui concernent la francisation des entreprises, puisque ces dispositions-là concernent, bon, les délais. Je pense que la présentation qu'a faite M. Lafleur tantôt... Bon, je ne voudrais pas renchérir là-dessus, mais a été, je pense, éclairée sur les problèmes que ça peut poser, le fait de réduire les délais. Bon, je ne reviendrai pas là-dessus, mais vous pouvez comprendre qu'on partage le même point de vue.
Et, évidemment, l'autre élément c'est les comités paritaires, comités paritaires de francisation. Et on vient de vous donner le point de vue du patronat là-dessus, et je peux vous dire que les échos que j'ai eus en consultant un échantillon de nos membres à cet égard-là étaient assez négatifs. Et, ça n'a rien à voir avec le fait d'être négatif envers la francisation des entreprises, il faut se comprendre, là, hein? Les gens se disaient: Ah non! On va encore être pris avec un monstre, là, quelque chose qui... Alors, c'est la raison pour laquelle... Je sais que ce n'est pas de la musique à vos oreilles, ce que je vous dis là, mais c'est un point de vue qui doit être entendu, je pense.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Prévost. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Mais, écoutez, la question, ce n'est pas de savoir est-ce que c'est de la musique à mes oreilles. La question, c'est d'être dans un mode de solution. Moi, je prends pour acquis ? je reprends le fil conducteur de votre présentation au moment des états généraux ? je prends pour acquis que le CPQ dit: On ne peut laisser la langue au jeu de la libre concurrence. À ce moment-ci, 25 ans plus tard, considérant les succès, considérant les acquis, considérant également les obstacles et les noyaux durs, le noyau dur qu'on a besoin de traverser pour une plus grande francisation des entreprises, qu'est-ce que vous proposez?
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. M. Prévost.
M. Prévost (Pierre): Alors, nous proposons d'abord de ne pas aller de l'avant avec les deux dispositions concernant la francisation des entreprises qui sont dans le projet de loi n° 104.
Des suggestions, évidemment il faut... Et, revenons à ce que l'Office de la langue française a identifié comme éléments, on dit: Les secteurs les plus vulnérables, l'automobile, les technologies de l'information, l'aérospatiale, les produits électriques et électroniques. Donc, ça, c'est le grand manufacturier. Et est-ce qu'il y a des suggestions à faire? Bon, tantôt, j'ai parlé d'un système qui serait basé davantage sur l'émulation par secteur d'activité. On pourrait penser à ce que l'Office développe... Je sais qu'il y a un programme qui a été mis en place de développement à frais partagés de logiciels français. Bon, ça, ça pourrait être quelque chose qui serait davantage... Et on ne parle pas de sommes énormes, là. Je sais que le programme était autour d'un quart de million, mais, peut-être que, si on l'amenait à un million, on aurait peut-être suffisamment d'argent pour aller chercher une entreprise phare dans chacun de ces secteurs d'activité là, les aider, les accompagner. En fait, c'est plus une démarche d'accompagnement qu'on souhaite faire.
Et je peux vous dire que, bon, pour baigner dans ce milieu-là, la francisation des entreprises, ce n'est pas un objet de contentieux du tout dans le secteur patronal actuellement, là. Et je pense que ça ne l'a pas été. Si vous relisez l'ensemble des mémoires produits par le CPQ au fil des ans, on a toujours joué le jeu en se disant: Ça, c'est une priorité comme société, on doit y aller. Maintenant, on y va... Évidemment, il y a d'autres priorités dans la vie, là, on ne peut pas y aller aux dépens de ce qui doit être la base de notre activité.
Maintenant, vous demandez des suggestions, je pourrais peut-être vous en faire une. J'en ai déjà fait une, déjà, dans l'allocution d'ouverture, mais est-ce qu'on ne pourrait pas adopter une réglementation qui ferait en sorte que les comités paritaires pourraient être imposés au cas par cas à des entreprises qui, semble-t-il, ne... Parce qu'il doit y en avoir des réfractaires, là. Il doit y en avoir des exemples, dans la société il y en a toujours. Alors, une fois qu'on les identifie, celles-là, on peut très bien, à ce moment-là, les amener vers un régime spécial et, donc, on ne punit pas... Enfin, on ne change pas l'ensemble de la réglementation pour les autres qui se sont conformées, comme elles se conforment à l'ensemble de leurs obligations, mais ça donne des outils à l'Office pour voir à ce qu'on passe graduellement peut-être de 71, 72 à 80, 85, 90. Vous-même, vous avez dit il n'y a pas si longtemps que 100 % de francisation, ce serait à peu près impossible, là, mais que, si on pouvait monter à 85, 90 %, ce serait merveilleux. Et, encore une fois, il y a un an vous disiez en Chambre que l'Office de la langue française dispose désormais de méthodes raffinées pour identifier les entreprises qui ont des problèmes de francisation. Donc, moi, je me dis: Effectivement, puisqu'on les a, ces méthodes, pourquoi légiférer ? comment dire? ? pourquoi légiférer en général alors qu'on sait que ce sont des cas particuliers?
Mme Lemieux: M. Prévost, seriez-vous favorable à la mise sur pied relativement imposée de comités sectoriels, sachant que tous les secteurs d'activité n'ont pas à faire face aux mêmes défis quant à la francisation, un peu comme on l'a fait pour les comités sectoriels au sujet de la formation de la main-d'oeuvre où on décontamine un peu ces comités-là de d'autres dimensions, relations de travail, négos, de je ne sais quoi? On concentre, dans le fond, des experts, qu'ils soient du côté patronal... du côté des travailleurs ou tout autre expert et qui permettent de développer des... appelons-ça un plan de match quant à la francisation de certains secteurs. Seriez-vous favorable à ça? Est-ce qu'on devrait inscrire ce type de mécanisme là dans la loi?
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. M. Prévost.
M. Prévost (Pierre): Oui. Si c'était une alternative à ce qui est proposé là, je pense que ce serait extrêmement intéressant. Ceci dit, n'oubliez pas que les comités sectoriels... Je pense que vous référez aux comités sectoriels qui existent déjà, là, dans l'environnement d'Emploi-Québec, là, la Commission des partenaires?
Mme Lemieux: Oui.
M. Prévost (Pierre): Bon. Ils sont paritaires, donc c'est seulement employeurs-employés. Ils font effectivement un excellent travail, puis ne je vois pas pourquoi ça ne pourrait pas être possible. Et je pose même la question: Est-ce qu'il serait envisageable de leur donner un mandat supplémentaire, à ces mêmes comités paritaires? Puisqu'il y en a 23, je pense, ou 26, ils couvrent l'essentiel des secteurs industriels.
Et, pour avoir jasé récemment avec plusieurs membres patronaux de ces comités-là, il y a un intérêt puis il y a une tradition qui est inscrite. Et, en général, puisqu'on ne parle pas de... Ce sont des... Bien, vous les connaissez, vous avez été ministre de l'Emploi. Donc, ce sont des instances qui sont évidemment consultatives, mais qui, de par leur travail, peuvent faire beaucoup pour faire avancer des choses qui, par ailleurs, ne sont pas conflictuelles. On s'entend? Ces comités-là sont débarrassés, comme vous l'avez dit, de toute question relative à la négociation des conditions de travail, mais... Ça m'apparaît être une bonne suggestion, et j'ajoute, en remplacement de ce qui est prévu dans le projet de loi n° n° 104 à l'égard des entreprises.
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. Prévost. Merci, Mme la ministre. J'ai été un peu trop généreux tout à l'heure dans le temps. Alors, M. le député d'Outremont, vous avez la parole.
M. Laporte: Merci, M. le Président. D'abord, je veux vous remercier, M. Prévost, parce que vos commentaires ont été très pertinents. Je veux aussi vous rassurer, parce que ce n'est pas seulement la ministre qui est en mode de solution, moi aussi, je suis en mode de solution. Ça fait bien des années, à part de ça, que je suis en mode de solution sur la politique de la langue au Québec. Donc, ce n'est pas parce qu'on n'est pas en mode de solution, c'est qu'on n'est pas sur le même mode de solution que d'autres. C'est ça que je veux qu'on comprenne maintenant, que ce soit très clair, parce qu'on ne peut pas se faire accuser d'être hurluberlus qui critiquent, mais sans avoir fait une oeuvre. C'est Bourdieu, le sociologue français, qui critiquait ceux qui le critiquaient en disant: C'est beaucoup plus facile de critiquer l'oeuvre des autres que faire sa propre oeuvre. Eh bien...
Mme Lemieux: Je veux la citation. Ha, ha, ha!
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(10 h 50)
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M. Laporte: On va prendre le pouvoir un jour, puis vous verrez bien ce qu'on en fera de cette question-là, n'est-ce pas? Mais vous avez fait un commentaire extraordinairement pertinent, et je pense que je voudrais bien m'assurer d'avoir compris, parce que c'est fondamental. Vous avez même référé à certains propos que j'ai faits là-dessus. Je pense que cette question du raccourcissement des délais... C'est-à-dire que la décision de raccourcir le délai est une erreur pour les raisons que vous avez indiquées, mais, entre autres, parce que la transformation du système de production qu'on pourrait appeler industrielle ? mais, si on veut, capitaliste parce que ça va chercher les services bientôt ? avec recours à l'impartition ? ce que les Américains appellent «electronic management services», O.K.? ça, ça veut dire que Motorola, contrairement à ce qu'il faisait il y a 10 ans, il ne fabrique plus ses cellulaires, IBM ne fabrique plus ses ordinateurs, Cisco Systems ne fabrique plus ses switches, c'est tout fabriqué dans des ateliers industriels répartis à l'échelle mondiale à sous-contrat puis à l'impartition. Ça veut dire que ça, ça complique grandement la tâche de faire une analyse linguistique d'un programme de francisation, parce qu'il y a des produits qui sont utilisés par les installations par les filiales de ces multinationales au Québec et qui sont évidemment... qui portent évidemment la marque ou qui pourraient porter la marque de ces producteurs qui sont à Hong-Kong, en Chine ou en Thaïlande, ou nommez-les. Donc, raccourcir les délais, ça ne donnera pas à celui qui est responsable de l'analyse une meilleure qualité de travail.
Et, vous avez parfaitement raison, et je pense que c'est là que je veux savoir si on s'est bien compris, ce que les entreprises au nom desquelles vous parlez ont besoin, ce n'est pas de contrôle accru, mais d'aide accrue. L'Office a une grande expertise dans ce domaine-là, et cette expertise-là peut servir les entreprises. Les entreprises sont en demande pour ça. Alors que si on rétrécit les délais puis on demande de faire des nouvelles ententes après cinq ans, et ainsi de suite, là... C'est de l'aide qu'ils ont besoin. Et, là on n'est plus dans le mode de l'aide, on est dans le mode du contrôle. Et ça, c'est un des aspects de la loi sur lequel vous avez fait des commentaires, et j'espère que je vous ai bien compris, là. Parce que, si ce n'est pas ça que vous voulez dire, vous êtes mieux de me le dire, parce que là je vais avoir des problèmes d'écoute.
M. Prévost (Pierre): Vous avez très bien compris. Oui, oui.
M. Laporte: Bon. Là, j'ai une question à vous poser. Cette question concerne la décision de transférer, je dis bien, à l'Office québécois de la langue française et non pas à l'Office de la langue française québécoise... Ils ont fait un choix idéologique ? choix idéologique ? de transférer à l'Office québécois de langue française, tel que prévu dans les concoctions de la commission Larose, n'est-ce pas, le pouvoir d'évaluer la situation linguistique qui, jusqu'à maintenant...
Mme Lemieux: ...
Le Président (M. Boulianne): Mme la ministre, on va laisser exprimer M. le député.
M. Laporte: ...d'assurer le suivi de la situation linguistique. Si vous n'avez pas personne pour évaluer la surveillance, vous n'avez personne pour l'évaluation, je ne sais pas qu'est-ce que vous faites quand vous évaluez. C'est ça que j'ai fait. J'ai fait ça durant cinq ans, de l'évaluation de suivi de situation linguistique, puis je n'avais pas honte de dire que je faisais de l'évaluation puis, des fois, dire que ça avançait, puis d'autres fois que ça reculait, puis d'autres fois que ça piétinait sur place. Bon.
Mais est-ce que vous ne trouvez pas que le transfert de cette fonction à un opérateur, qui, bien sûr, doit évaluer ses programmes comme tous les opérateurs, ne risque pas de créer un risque de conflit d'intérêts? J'ai dit tantôt: C'est quasiment gros comme l'Assemblée nationale, mais ils ne l'ont pas vu passer. C'est-à-dire que je ne répéterai pas ce que j'ai dit tantôt, vous étiez là, vous m'avez entendu. Mais, en boutade, je l'ai dit, si vous voulez m'évaluer, le meilleur conseil que je peux vous donner, c'est: Demandez-moi pas de m'évaluer moi-même. Trouvez-vous que là il y a un vice dans la loi, là, qui mérite d'être examiné? D'autant plus que certaines personnes éminentes se sont prononcées en disant que ce risque était là, alors que... Disons que je ne suis pas un voyant, là, je ne vois pas des affaires, là, il y a du monde qui les ont vues avant moi. Mais êtes-vous d'accord avec ça, vous, cette évaluation qu'on fait, ce jugement qu'on porte sur la décision de transférer?
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. le député d'Outremont. M. Prévost.
M. Prévost (Pierre): Oui. Je vais vous avouer que ce volet-là du projet de loi n'a pas reçu un examen aussi attentif de la part de mes collègues étant donné, évidemment, qu'on a été convoqué à quelques jours d'avis.
Ceci dit, c'est vrai qu'en revenant sur les recommandations de la Commission sur la situation et l'avenir du français on allait vers la mise en commun des quatre instances, là, quatre organismes vers un seul, puis on sent que, comme ça arrive souvent dans la présentation d'un projet de loi, il y a eu à un moment donné du... Il faut faire plaisir un peu à tout un chacun, et donc on a conservé un conseil, mais qui est vidé d'une partie de sa substance. Ceci dit, je ne suis pas un grand clerc dans ces questions-là.
Maintenant, la question fondamentale qui va se poser pour nous, c'est: Est-ce qu'on va changer notre nom comme devenant le Conseil québécois du patronat, puisqu'on aura un Office québécois de la langue française? Alors, ça va être très, très fondamental comme enjeu. Mais j'ai une question à cet égard, puisqu'on n'a pas réussi à trouver toutes les solutions là-dedans: Est-ce que le fait de devenir un Conseil supérieur de la langue française... Est-ce que ça donne d'emblée quelque chose de plus à un conseil?
M. Laporte: Ah, mais ça, c'est une question que vous allez poser à la ministre et non à moi, n'est-ce pas?
M. Prévost (Pierre): Non, mais je...
Le Président (M. Boulianne): Mais, normalement, là, c'est ça... M. le député.
M. Laporte: Mais là j'ai mon temps de parole. J'ai mon temps de parole. Si la ministre veut y répondre tantôt, on accordera le temps nécessaire.
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, on va continuer la même procédure. Nous autres, on pose les questions, et vous répondez, M. Prévost. Alors, oui. Alors, allez-y.
M. Prévost (Pierre): Non. Ça va, j'ai conclu.
M. Laporte: Mais je veux revenir sur le point que vous avez fait sur vos propos, là, parce que c'est très important qu'on l'entende, ça. Vous semblez dire que... Enfin, je vous ai peut-être mal compris, là, mais vous semblez dire qu'il y a une carence du côté de l'Office québécois de la langue française dans sa dispensation de services d'aide. Par exemple, vous avez mentionné la décision que le gouvernement a prise de fermer les bureaux régionaux de l'Office. Donc, vous dites: Il y a une carence, là, dans l'offre de service de la part de l'Office. Et vous pouvez me donner des exemples de ça, de cette carence-là?
M. Prévost (Pierre): C'est, écoutez... Excusez-moi.
Le Président (M. Boulianne): Oui, allez-y, M. Prévost, vous avez la parole.
M. Prévost (Pierre): C'est un exemple qui m'a été donné par un manufacturier de bois de sciage et qui me disait que son entreprise faisait souvent, dans le passé, affaire avec le bureau régional et qu'une fois que ça a été fermé ils n'ont jamais réussi à retrouver quelqu'un qui réussissait à offrir ce type de... le même niveau de service, la même qualité de service, bien que, je présume, comme c'est le cas quand le gouvernement ferme des bureaux régionaux, il doit y avoir une ligne 1-800, là, où il est possible d'avoir des... Mais, ceci dit, comme je vous ai dit, je ne suis pas un grand clerc dans ces choses-là, là, je ne peux pas vous éclairer davantage.
M. Laporte: Donc, vous n'avez pas d'autres...
M. Prévost (Pierre): Mais des suggestions, par contre, j'en ai si c'est ça que vous voulez.
M. Laporte: Ah, bien, allez-y, allez-y. Je vous donne mon temps.
M. Prévost (Pierre): Ha, ha, ha! D'accord.
Le Président (M. Boulianne): Allez-y, M. Prévost, on vous écoute.
M. Prévost (Pierre): Oui. Alors, des suggestions, bon, évidemment, s'assurer que l'Office de la langue française ou l'Office québécois de la langue française va bel et bien rendre disponible au moins un service téléphonique pour tous les secteurs d'activité; offrir un service de référence pour dénicher les logiciels en français qui soient les plus adaptés aux entreprises en fonction des secteurs d'activité; mettre en place une vitrine gouvernementale sur la francisation par secteur d'activité. Et là la proposition qu'a faite Mme la ministre peut peut-être être intéressante dans le sens où il y a déjà une structure qui existe, un comité paritaire qui... des comités paritaires sectoriels qui traitent de disponibilité de main-d'oeuvre et de formation de main-d'oeuvre pour le marché du travail. Donc, ça, ça pourrait être un mandat qui leur soit ajouté. Évidemment, rendre davantage disponibles des conseillers de l'OLF, mais là, évidemment, ça signifie peut-être augmenter les ressources de cet Office. Le rapport de la commission Larose, si je ne m'abuse, parlait de la possibilité, même, d'introduire un ensemble de normes, vous savez, à l'exemple d'ISO, des normes où il y aurait adhésion volontaire évidemment, mais où on pourrait facilement reconnaître la qualité de la prestation en français, là, des entreprises.
Donc, tantôt, j'ai dit aussi que l'économie même, là, des dispositions du projet de loi n° 104 en ce qui concerne la francisation des entreprises pourrait être modifiée, mais on pourrait réserver aux entreprises délinquantes, vraiment délinquantes, sur décision de l'Office, un type de sanction qui serait effectivement de dire: Bien, si l'entreprise se rit de l'autorité, elle ne pourra pas le faire éternellement, et donc il y aura une espèce d'enchaînement jusqu'à faire en sorte que le comité de francisation devienne paritaire dans ces cas-là, des cas d'espèce. Nous, nous sommes convaincus que ce sont des cas d'espèce. Alors, pourquoi légiférer à l'ensemble quand ce sont des cas d'espèce?
J'ai parlé du programme à frais partagés entre l'OLF, et le futur OQLF, et les entreprises pour franciser des logiciels, bien, ça, on pourrait peut-être l'étendre à tous les secteurs d'activité. Donner également aux employés de l'Office québécois le droit d'aller sur place si des soupçons existent quant à la véracité des déclarations d'entreprises, ça pourrait peut-être justement être le type d'approche ciblée avec lequel nous, nous pourrions être d'accord. Alors, c'est un ensemble de suggestions qu'on vous fait.
Le Président (M. Boulianne): Alors, M. Prévost, si ces recommandations-là ne sont pas comprises dans votre mémoire, vous pouvez, par la suite, les faire parvenir à la commission, en remettre une copie, alors, qu'on pourra distribuer. Alors, M. le député d'Outremont, vous avez la parole.
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(11 heures)
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M. Laporte: Oui. Juste une opinion, la vôtre bien sûr, là-dessus, là. J'aurais peut-être pu soulever la question à M. Lafleur tantôt, là, mais il y a un vaste ignoré dans la loi n° 104, c'est l'article 51. Moi, je n'ai rien vu dans le projet, là, qui concerne l'étiquetage des produits, des affaires de même, là, mais c'est plein de problèmes, ça. Moi, comme député d'Outremont, puis comme porte-parole, puis comme expert, on m'approche continuellement pour me dire: Ça n'a pas de sens. Dernièrement, par exemple, il y a quelqu'un qui m'a approché et qui est un petit industriel du Québec qui fabrique des consoles et des boîtes pour les amplificateurs, et dont le marché est à 5 % au Québec, sur lesquelles évidemment il y a des incrustations, comme on dit, des messages incrustés, n'est-ce pas, qui sont «power» puis des choses comme vous obtenez sur les boîtes d'IBM, des fois, en arrière de la boîte, là, puis ils leur demandent de changer ça. Alors, le pauvre monsieur, il dit: Écoutez, vous me demandez de changer pour 5 % de ma clientèle une pratique...
Un autre exemple, c'est Tyco System, pour ne pas le nommer, n'est-ce pas? Apparemment, ils sont en train de s'entendre, là, avec la Commission de protection. Madame veut la mettre à l'Office, mais ça a l'air que c'est pas mal, la Commission de protection. Je commence à trouver que la police de la langue, après quelques années, ils ont pris de la civilité. Mais là ils sont devenus, disons, du monde... Des fois, ils font encore des erreurs, là, mais ils sont devenus du monde parlable. Puis là, bing, bing, bang, on leur donne une récompense, on les transfère à l'Office québécois de la langue française et non pas à l'Office de la langue française québécoise. Je le répète, n'est-ce pas?
Donc, sur l'article 51, là, avez-vous des messages à nous transmettre, à transmettre à Mme Lemieux?
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député d'Outremont. M. Prévost.
M. Prévost (Pierre): Oui. Merci, M. le Président. Nous n'avons pas de message comme tel, parce que, évidemment, ça n'a pas fait l'objet des rencontres que j'ai tenues pendant la semaine. Maintenant, votre suggestion est bonne, on va l'étudier puis, dans les documents que nous transmettrons aux membres de la commission, si vous le permettez, nous pourrions peut-être avoir un avis là-dessus.
Le Président (M. Boulianne): Aucun problème. Tous les documents que vous voulez déposer à la commission, vous pouvez les déposer immédiatement ou plus tard.
M. Prévost (Pierre): Est-ce que nous avons... Excusez-moi, M. le Président, est-ce que nous avons une date limite à respecter pour... Évidemment, avant l'adoption du projet de loi, mais est-ce que... Ça serait cette semaine. C'est ça?
Mme Lemieux: Si vous voulez vous assurer qu'on puisse le considérer dans le cadre des travaux actuels, évidemment je vous dirais qu'on termine normalement les consultations particulières la semaine prochaine. Si vous arrivez dans un mois, ça va être un peu plus difficile.
M. Prévost (Pierre): Non, non, dans un mois...
Le Président (M. Boulianne): Alors, étant donné que vous les avez déjà énoncés, donc je pense que ça ne sera pas un problème pour la commission. Alors, je vous remercie beaucoup, M. le député d'Outremont. Merci beaucoup, M. Prévost, pour votre exposé.
Alors, je demanderais au Mouvement national des Québécois de s'approcher, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Boulianne): Alors, la commission, donc, continue ses travaux. Alors, bienvenue au Mouvement national des Québécois. Mme Louise Paquet, présidente, alors donc, je demanderais de nous présenter votre mémoire ? vous avez 15 minutes ? et, si vous avez quelqu'un avec vous, de nous le présenter. Par la suite, il y aura un échange.
Mouvement national
des Québécoises et Québécois (MNQ)
Mme Paquet (Louise): Alors, bonjour, Mme la ministre, Mmes et MM. les commissaires. Alors, je suis la présidente du Mouvement national des Québécoises et Québécois et je suis accompagnée aujourd'hui par M. Jean Dorion, qui est trésorier du Mouvement et militant de la langue de longue date.
Un mot rapide sur le Mouvement national, bien que je pense que vous devez avoir une petite idée de qui on est. Alors, on regroupe 18 sociétés nationales ou Saint-Jean-Baptiste réparties dans autant de régions du Québec. Le Mouvement existe depuis plus d'une cinquantaine d'années, et, évidemment, la question de la langue a toujours été une question cruciale parmi l'ensemble de nos préoccupations.
Alors, le Mouvement national des Québécoises et Québécois accueille avec prudence et réserve le projet de loi n° 104. À certains égards, ce projet apporte des modifications importantes et nécessaires, bien qu'insuffisantes, à la législation linguistique, mais, sur d'autres points, il nous semble qu'il risque de l'affaiblir.
En général, nous sommes d'avis que le projet de loi n° 104 manque d'audace. Plusieurs améliorations nécessaires n'ont pas été faites bien qu'elles soient permises à l'intérieur même du cadre fédéral. Par ailleurs, le MNQ s'inquiète des conséquences de l'abolition de la Commission de protection de la langue française et ne voit pas la nécessité de certains changements dans les noms des organismes. De plus, notre Mouvement s'interroge sur la raréfaction des ressources mises en oeuvre pour soutenir la politique linguistique. Enfin, nous nous devons de profiter de l'occasion pour rappeler à quel point la Constitution canadienne demeure un facteur d'anglicisation du Québec.
Dès sa publication, le projet de loi n° 104 a obtenu un appui de taille, celui du quotidien The Gazette. Dans son éditorial du 9 mai, tout en exprimant quelque déplaisir à l'égard des dispositions sur la langue d'enseignement, le journal a salué chaleureusement le document dans son ensemble comme une victoire de la modération. Nous ne partageons pas cet enthousiasme du quotidien anglophone pour le projet. Par contre, nous sommes d'accord avec son éditorialiste lorsqu'il écrit que le projet de loi en dit plus par les choses qu'on n'y trouve pas que par celles qu'on y trouve.
Notre mémoire, aux états généraux, contenait 79 pages et 30 recommandations. Nous comprenons que la politique est l'art du possible et que la politique linguistique résulte de différents arbitrages, d'où le ton modéré et conciliant que, malgré notre déception, nous voulons garder au cours de cette présentation, dans l'espoir qu'on voudra bien au moins écouter ce que nous dirons et en tenir compte.
À propos des choses qu'on ne trouve pas dans le projet de loi, nous reviendrons brièvement sur quelques-unes des recommandations que nous avions formulées dans notre mémoire. Nous indiquerons ensuite ce que nous aimons dans ce projet de loi et qui, pourtant, devra être amélioré. Tout au long de cet exercice, nous avons choisi délibérément d'attirer votre attention sur des recommandations que même des gens plus modérés que nous aimeraient voir apparaître dans la nouvelle Charte de la langue française.
Alors, ce que nous n'aimons pas dans ce projet de loi. Le projet ne constitue pas une refonte en profondeur de la Charte de la langue française. Pourtant, une telle refonte s'imposerait. D'une part, la loi 101 de 1977 n'avait pas tout prévu, et, même si elle avait donné tous ses fruits, il conviendrait aujourd'hui de l'adapter aux nouvelles réalités. D'autre part, depuis bientôt 25 ans, ses dispositions essentielles ont été affaiblies ou dénaturées par les interprétations judiciaires, par les interventions fédérales et par les amendements proposés par notre Assemblée nationale elle-même. C'est la loi 86 qui a porté le coup le plus dur à la Charte de la langue française. Or, le projet de loi n° 104 ne donne aucun souffle nouveau à la législation linguistique, pas plus qu'il ne vient réparer tous les torts causés depuis 1993 à la langue française au Québec.
Une refonte en profondeur de la Charte impliquerait que soient reformulés le préambule ainsi que les dispositions relatives au statut de la langue française et aux droits linguistiques fondamentaux. Ces chapitres de la Charte ont, en effet, une grande portée symbolique. Dans le Québec d'aujourd'hui, il conviendrait de faire ressortir davantage l'inspiration démocratique, civique et humaniste de la Charte ainsi que la vision inclusive de la nation québécoise.
Il y aurait lieu également de réaffirmer la volonté de l'État québécois de garantir la liberté des langues dans la vie privée, de promouvoir l'égalité entre eux des citoyens de langues maternelles diverses, de les protéger contre la discrimination sous toutes ses formes. Le français devrait être proclamé seule langue officielle et langue nationale du Québec.
Au chapitre des droits linguistiques, on devrait retrouver le droit de chaque citoyen de recevoir l'assistance des pouvoirs publics pour acquérir de la langue nationale et officielle une connaissance appropriée à l'exercice de ses devoirs civiques et de ses obligations professionnelles.
En vertu de la Charte, telle qu'elle a été modifiée par la loi 86 de 1993, l'anglais a le même statut que le français comme langue de la loi et des tribunaux. Il arrive même ? on l'a vu récemment dans un procès opposant la commission scolaire de Montréal à un groupe de parents du quartier montréalais de Notre-Dame-de-Grâce ? qu'une partie francophone n'a droit qu'à un jugement rendu en anglais seulement. Résultat, le français n'est pas la seule langue officielle du Québec.
Une refonte en profondeur de la Charte de la langue française suppose, au chapitre de la langue de la législation et de la justice, un retour à l'esprit de la loi 101 de 1977. Depuis plusieurs années, nous demandons à l'Assemblée nationale de prendre l'initiative du processus de modification constitutionnelle afin d'en arriver à l'abrogation de l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 et à la reconnaissance constitutionnelle du français comme seule langue officielle du Québec.
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(11 h 10)
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En ce qui concerne la langue du commerce et des affaires, la ministre a jugé bon de ne pas toucher aux dispositions de la Charte. En ce domaine également, des améliorations seraient souhaitables. En voici quelques-unes:
Qu'une règle analogue à celle qui régit l'étiquetage ou le fonctionnement des jeux et des logiciels, selon le cas, s'applique de façon rigoureuse aux appareils électroménagers, aux équipements de bureau et aux tableaux de bord des automobiles;
Que soient restaurées les dispositions de la loi 101 de 1977 relatives à la langue des raisons sociales et que soit ajoutée une règle générale afin que les marques de commerce soient aussi en français, quitte à prévoir un régime d'exception administré par l'Office pour répondre à des situations exceptionnelles;
Que l'Office de la langue française soit tenu d'indiquer dans son rapport annuel toutes les dérogations aux règles de la langue du commerce et des affaires qu'elle aura accordées, accompagnées de recommandations précises pour que de telles exceptions ne se prolongent pas indûment.
Le MNQ s'inquiète au plus haut point de la restructuration des organismes de mise en oeuvre de la politique linguistique. D'abord, nous sommes contre la disparition de la Commission de protection de la langue française. L'expérience de la loi 86 a montré que le cumul des fonctions de conseil et de contrôle au sein d'un même organisme entraîne des contradictions. Nous craignons que le nouvel organisme ne tente de les résoudre en renonçant, en pratique, à son rôle de surveillance. On constate d'ailleurs qu'aucun article du projet de loi ne précise la manière dont seront traitées les plaintes des citoyens, qui, en principe, devraient être acheminées au nouvel organisme.
De plus, nous accueillons avec scepticisme la création d'un Conseil supérieur de la langue française. Nous voyons mal quelles seront ses fonctions réelles, puisque les mandats exercés jusqu'ici par l'organisme qu'il est censé remplacer seront désormais confiés à l'Office. On peut même craindre que le nouveau Conseil ne soit vidé en grande partie de ses ressources. Comment alors pourra-t-il jouer son rôle?
Finalement, la nouvelle composition du conseil de direction de l'Office ouvre la porte à l'interventionnisme politique dans l'application de la loi et dans la recherche.
Nous nous interrogeons aussi sur les ressources qui seront déployées pour mettre en oeuvre la politique. En effet, pour que cette politique linguistique prenne tout son sens, il importe de lui consacrer des ressources financières significatives. Nous savons que, depuis 1994, des compressions importantes ont affaibli les organismes responsables de l'application de la Charte. Nous n'avons aucune assurance que cette situation sera corrigée.
Enfin, nous nous interrogeons sur la pertinence de changer les noms de l'Office de la langue française et du Conseil de la langue française compte tenu des frais que ces changements entraîneront alors même qu'on invoque, pour les effectuer, la rareté des ressources financières.
Ce que nous aimons, mais qui pourrait être amélioré. Nous appuyons toute mesure visant à réaffirmer le rôle moteur et exemplaire de l'administration dans la promotion du français. Nous sommes également favorables aux nouvelles exigences qui seront imposées aux collèges et aux universités en matière linguistique.
Aussi, le MNQ accueille favorablement le changement apporté à l'article 16 de la Charte qui vient rétablir l'obligation pour l'État de n'adresser qu'en français ses communications écrites aux personnes morales établies au Québec. Nous pensons toutefois que cette obligation devrait aussi s'appliquer aux personnes morales elles-mêmes lorsqu'elles s'adressent à l'administration. Il faudrait donc que tous les formulaires qui leur sont destinés soient en français seulement.
Nous demandons également que soit rétabli ? l'article 20 ? l'exigence d'une connaissance appropriée du français pour être nommé ou promu à une fonction dans tout organisme de l'administration, y compris dans les organismes reconnus en vertu de l'article 29.1. La disposition originale de la loi 101 à cet effet a été remplacée en 1983 par une exigence faite à ces institutions de fournir les services en français au besoin, c'est-à-dire selon la demande. Mais, quand vous entrez à l'hôpital avec une crise d'appendicite ou autre, vous n'êtes guère porté à demander plus que ce qu'on veut bien vous offrir à cet égard.
Nous demandons également, puisque le français est censé être la langue commune normale et habituelle des activités de l'ensemble de la société québécoise, que l'enregistrement des droits réels des personnes morales, des organismes de l'administration et des organismes parapublics se fasse entièrement en français.
Nous demandons enfin que tout membre d'un ordre professionnel ne soit réputé, en vertu de l'article 35, avoir la connaissance du français appropriée à l'exercice de sa profession que s'il a réussi en français l'examen d'admission à la profession.
Nous appuyons les correctifs apportés en matière de langue du travail. Voici d'autres améliorations que nous jugeons aussi pressantes: Que soit reformulé l'article 41 afin qu'il soit incontestable que l'employeur doit communiquer en français non seulement avec le personnel en général, mais également avec chaque employé, quelle que soit sa langue maternelle.
Par ailleurs, nous déplorons que le projet de loi ne contienne aucune mesure visant à limiter l'exigence abusive de connaître l'anglais pour travailler au Québec. Il suffit de lire les offres d'emploi dans les journaux pour constater que l'exigence de l'anglais dépasse immensément ce que pourrait justifier le contexte international et s'explique plutôt par le désir d'accommoder des gens qui vivent au Québec mais ne veulent pas se donner la peine de fonctionner en français. Aussi, nous souhaitons que soient renforcés les articles 45, 46, 47 relatifs à l'interdiction faite à l'employeur d'exiger abusivement la connaissance d'une autre langue que le français pour accéder à un emploi ou à un poste, pour conserver son poste, pour être maintenu en emploi ou pour obtenir une promotion.
Nous estimons également que les entreprises devraient être tenues de justifier leurs exigences linguistiques auprès de l'Office. Par ailleurs, l'Office devrait publier des directives claires sur ce qui peut justifier la connaissance d'une autre langue que le français. Il devrait, en outre, pouvoir enquêter sur cette question et, bien sûr, disposer des ressources adéquates pour le faire.
Nous souhaitons aussi que soit rétablie, pour les entreprises de 50 employés et plus, l'obligation de détenir un certificat de francisation ainsi que les sanctions applicables à celles qui ne prennent pas les mesures nécessaires pour l'obtenir. En effet, aucun article de la loi ne précise plus cette obligation et plus aucune disposition ne sanctionne le fait de ne pas avoir de certificat ou de ne pas prendre les moyens appropriés pour l'acquérir dans le délai prescrit. La substance des articles 136, 137, 206 de la loi 101 de 1977 est disparue. Nous souhaitons enfin que l'obligation de détenir un certificat de francisation soit progressivement étendue à d'autres catégories d'entreprises, notamment aux entreprises de 50 employés et moins.
Le MNQ accueille favorablement les nouvelles dispositions sur la langue d'enseignement. Nous constatons, en effet, que la plupart des anomalies ont été corrigées au primaire et au secondaire. Nous applaudissons tout particulièrement au fait que la fréquentation, au Québec, d'une école privée non subventionnée ne puisse plus servir de passerelle vers l'école anglaise. Nous sommes également satisfaits des resserrements apportés aux dispositions touchant les enfants qui éprouvent des difficultés d'apprentissage et ceux qui séjournent temporairement au Québec. Les mesures annoncées devraient ralentir le recul de la proportion d'écoliers qui fréquentent l'école française au Québec, recul qui se poursuit sans interruption depuis 1993. Elles ne pourront cependant pas l'arrêter complètement. Il faudrait, pour cela, une modification de la Constitution imposée de force au Québec en 1982, ce que nous indiquons déjà dans notre mémoire aux États généraux.
Il est certain que cette Constitution sera invoquée à l'encontre des mesures partielles proposées dans le projet de loi n° 104. Le gouvernement doit s'attendre à des procédures judiciaires à ce sujet. Pour nous, il est clair que l'Assemblée nationale doit prendre l'initiative d'une modification constitutionnelle afin que l'article 23 de la Loi constitutionnelle de 1982 ne s'applique plus au Québec. Nous souhaitons que le chapitre de la Charte de la langue française sur la langue d'enseignement soit restauré dans son esprit original de 1977.
En conclusion, nous demandons au gouvernement d'affirmer une volonté politique claire et non équivoque en matière linguistique et de répondre aux grandes attentes soulevées l'année dernière lors des audiences de la Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française.
Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup, Mme Paquet et M. Dorion. Alors, nous passons à l'échange. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Merci, Mme Paquet, pour la présentation de ce mémoire. Je salue également M. Dorion. C'est un mémoire où il y a beaucoup de substance, il y a beaucoup d'éléments que vous apportez. Je ne sais pas si ça vous fera plaisir d'entendre ça, mais j'apprécie tout de même la mise en garde de la page 3 quand vous dites: Bon, on sait qu'il y a différents éléments à concilier, et nous, on fait le choix aussi d'avoir un ton modéré. Moi, j'appellerais ça aussi une approche la plus pragmatique possible pour faire face aux enjeux d'aujourd'hui.
Il y a beaucoup de choses que je voudrais aborder. La première, je me permettrai... Je ne veux pas vous prendre à partie, mais mon collègue député d'Outremont a fait une affirmation à plusieurs reprises que je veux tout de suite corriger. Et on pourra en reparler à un autre moment, mais, lorsqu'il parle de la question de l'évolution de la situation linguistique, je voudrais lui rappeler que les indicateurs sur l'évolution des enjeux qui concernent l'éducation ne sont pas de la responsabilité du Conseil supérieur de l'éducation, mais bien du bras agissant. Et, ce n'est pas péjoratif quand je dis ça, dans ce cas-là, c'est le ministère de l'Éducation. C'est un peu cette même dynamique qu'il m'apparaissait important de mettre de l'avant pour la question de la langue française. Enfin, on pourrait y revenir à d'autres moments.
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(11 h 20)
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J'ai une question de fond. À plusieurs moments, vous faites des recommandations, des recommandations... Ce n'est pas un reproche, là, mais des recommandations qui font un peu... qui ne tiennent pas compte soit de jugements que nous avons eus en défaveur, là, de certaines dispositions de la loi 101 ou soit de réalités constitutionnelles. Bon, par exemple, sur la question de la langue de la législation et de la justice, c'est vrai qu'il y avait une disposition à l'origine dans la Charte, mais qui a été invalidée par les tribunaux clairement. Donc, il y a eu des tentatives, effectivement, de dépasser ces obstacles constitutionnels, mais, à un moment donné, il y a eu rappel à la réalité. Donc, vous faites fi, dans certains cas, donc, de jugements antérieurs ou alors de contraintes constitutionnelles. Par exemple, sur la question des raisons sociales, vous savez que le Conseil de la langue avait produit un avis à l'effet que la question des raisons sociales ne pouvait pas être traitée sans considérer le fait qu'on est aussi dans une dynamique de conventions internationales et que, si on s'avance là-dessus, mais que par la suite on perd... Je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire, mais il y a là une dynamique profonde, là, sur laquelle je voudrais vous entendre, parce qu'on est dans un cadre et juridique... On a une jurisprudence, on a une Constitution, on en connaît les limites. Moi, je veux bien, là, qu'on mette des articles en se disant: Bien, coudon, on ira devant les tribunaux puis on va s'essayer, mais il y a des réponses qu'on a déjà, et on sait déjà que c'est un mur.
Le Président (M. Boulianne): Oui, M. Dorion.
M. Dorion (Jean): Oui. En ce qui concerne la langue de la justice, il serait possible, à l'Assemblée nationale, d'entreprendre une procédure pour faire modifier l'article 133, puisque c'est un article qui ne s'applique qu'au Québec et il est possible, d'après la Constitution canadienne, si le gouvernement fédéral est d'accord... Et je suis bien conscient que le gouvernement fédéral ne sera sans doute pas d'accord, mais il serait possible à l'Assemblée nationale d'entreprendre cette démarche et de demander que, par accord du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec, on modifie cette disposition de la Constitution canadienne. Ce serait possible certainement de le demander. Et de l'obtenir, sans doute pas, mais je pense que ce ne serait pas exclu d'entreprendre cette démarche-là. C'est d'ailleurs ce que nous disons, et rien d'autre, dans notre mémoire.
Le Président (M. Boulianne): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Mais on gagne quoi, M. Dorion ou Mme Paquet? Vous savez qu'on introduit, là, dans le projet de loi n° 104 un certain nombre de dispositions qui risquent d'être contestées par les tribunaux. Certains porte-parole de groupes anglophones ont signifié qu'ils avaient l'intention de contester. C'est leur droit le plus légitime, mais c'est notre droit également de dire: Nous, on veut... Comme on dit en bon français, on veut aller par là. Par contre, on ne sait pas encore le résultat de tout ça. Pour d'autres éléments, on les connaît, les résultats, et vous venez de les illustrer vous-même en disant: On pourrait demander un amendement à la Constitution, etc., c'est plutôt certain qu'on ne l'aurait pas. Qu'est-ce qu'on gagne à faire ça?
Le Président (M. Boulianne): Oui, allez-y, Mme Paquet.
Mme Paquet (Louise): Je dirais, en tout cas, que, dans une approche pragmatique, on ne gagnera probablement pas beaucoup de choses. Dans une approche politique, ce qu'on peut gagner, c'est de faire et de refaire, je dirais, la démonstration aux Québécoises et Québécois que notre politique linguistique, elle est sous tutelle, elle est sous tutelle de la Constitution qui nous est imposée et que, dans ce sens-là, on doit faire, en tout cas, à notre avis, une action pédagogique et politique de démontrer qu'on n'est pas maître chez nous.
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme Paquet. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Autre question, qui est moins d'ordre philosophique, quoique je ne néglige pas du tout cet aspect-là, concerne... À la page 11, vous dites: On devrait étendre l'obligation de détenir un certificat de francisation progressivement à d'autres catégories d'entreprises, notamment aux entreprises de 50 employés et moins. On a eu une discussion hier avec un certain nombre d'intervenants sur cette question-là où nous disions, par exemple, que le volume, le nombre d'entreprises de 50 employés et moins, on parle d'à peu près 400 000 au Québec. C'est énorme. Et j'ai posé la question, je dirais, avec un élan du coeur: On commence par où? Ce serait une catastrophe d'assujettir tout le monde au même jour, au même moment. On se donne quelle méthode? Quel outil la loi peut nous donner? Est-ce qu'il y a d'autres moyens? Mais il y a quelque chose d'ordonné qu'on doit se donner comme objectif. Est-ce que vous avez des réflexions sur ce sujet?
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Mme Paquet.
Mme Paquet (Louise): Oui. La première chose sur la question de la francisation des entreprises, ça fait quelques fois qu'on le mentionne, puis probablement qu'on ne l'explique pas assez bien, mais je ne sais pas à quelle époque, avec toutes les modifications qui ont été faites à la Charte de la langue française, on dit d'abord, nous, que l'obligation du certificat de francisation a disparu. Il n'y a pas une phrase qui dit clairement que les entreprises doivent détenir un certificat de francisation et qu'il y a des mesures si elles ne le détiennent pas. Et il faudrait d'abord remettre cette phrase-là, parce qu'on parle des certificats de francisation, mais en aucun endroit on ne dit que c'est obligatoire. Ça, c'est une première chose qui, à notre avis, pourrait être corrigée très, très facilement.
Mme Lemieux: Si vous me permettez, madame...
Mme Paquet (Louise): Je vais répondre à la question des petites, là.
Mme Lemieux: Oui, oui, mais, juste sur cette question-là, d'ailleurs, au paragraphe précédent, ce que vous dites là, vous venez de l'exprimer, je vais demander à mes collaborateurs de le préciser, mais c'est clair que, pour les entreprises de 50 employés et plus, il y a une obligation de détenir un certificat de francisation.
Mme Paquet (Louise): Monsieur peut regarder la lettre. En tout cas, nous, on ne voit plus cette phrase-là qui a disparu. C'est pour ça que je dis... Je ne sais pas à quelle époque exactement, qui dit que c'est obligatoire. On parle toujours des certificats de francisation, mais on ne dit jamais que c'est obligatoire puis on ne dit pas c'est quoi, les mesures dans le cas où une entreprise ne l'obtient pas ou ne travaille pas à l'obtenir.
En ce qui concerne les petites entreprises de moins de 50 employés, vous le savez, c'est sûr, que c'est souvent dans ces petites entreprises là qu'on retrouve les nouveaux arrivants, et il y a un enjeu majeur, au niveau des nouveaux arrivants, d'intégration à la société québécoise. Et l'intégration à notre société québécoise va se faire plus facilement par l'intégration au niveau de la langue du travail. Alors, l'enjeu est majeur. Comment le faire? On est bien conscient que c'est des centaines de milliers d'entreprises, sauf que dire, parce qu'il y en a tellement, qu'on ne peut pas commencer, c'est comme de baisser les bras ou de démissionner.
Dans d'autres domaines, en tout cas, il me semble que le gouvernement agit pour que... Par exemple, la question de l'équité salariale, toutes les entreprises doivent travailler dans ce sens-là. Alors, si on se donne un objectif à atteindre pour les prochaines années, il va falloir y aller progressivement. L'approche sectorielle est peut-être une piste intéressante. Je pense que vous avez déjà commencé à réfléchir dans une perspective comme celle-là. S'il y a une approche sectorielle pour les plus grandes entreprises, il pourrait y en avoir une possiblement pour les plus petites, et là d'identifier des secteurs où justement la problématique de la langue est problématique, j'allais dire, dans le sens où là on retrouve plus une difficulté de travailler en français.
Le Président (M. Boulianne): Merci. Juste vous rappeler, Mme la ministre, qu'il y a deux de vos collègues qui ont demandé aussi la parole.
Mme Lemieux: Une dernière question.
Le Président (M. Boulianne): Merci.
Mme Lemieux: Je suis terrible, hein? Vous avez situé l'importance de faire des tentatives de francisation dans les plus petites entreprises en faisant le lien avec l'immigration. Vous avez dit: Il y a beaucoup de ces petites entreprises qui ont une main-d'oeuvre dite immigrante. Question philosophique: Est-ce que la francisation... Est-ce que le poids, la responsabilité de la francisation des immigrants doit appartenir à ces petits employeurs?
Le Président (M. Boulianne): Merci. Mme Paquet.
Mme Paquet (Louise): Pas totalement, parce que la francisation de tous ces nouveaux arrivants, je pense, peut se faire par l'école ? la langue d'enseignement est un milieu privilégié pour, en tout cas, les enfants évidemment ? mais par aussi le milieu du travail. Et, dans ce sens-là, je dirais que la francisation ou le fait d'arriver à ce que le français soit la langue commune de tous les Québec ? langue du travail, langue du commerce et des affaires, langue de l'administration, langue de l'enseignement ? c'est la préoccupation du gouvernement, mais aussi de l'ensemble de la société québécoise. Je ne voudrais faire porter un poids énorme sur les entreprises, mais juste le poids qui leur revient.
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Merci, Mme Paquet. M. le député d'Iberville.
M. Bergeron: Merci, M. le Président. Mme Paquet, M. Dorion, bienvenue. Je veux vous parler d'une de vos plus grandes craintes, la restructuration des organismes. Récemment, je suis allé à une causerie de Michel Venne, celui qui a écrit Les porteurs de liberté, qui a évoqué aussi cette crainte-là et qui n'a pas développé. Vous parlez, là, du cumul des fonctions de conseil et de contrôle, vous dites que dans les faits il y aurait renoncement au rôle de surveillance. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que l'esprit du législateur pourrait être davantage de cohérence, que la main gauche sache ce que fait la main droite fait, quelque chose comme ça? Mais j'aimerais vous entendre au sujet de cette crainte-là que vous avez évoquée en début de page 7 et que vous n'avez pas nécessairement développée beaucoup. Mais je pense que verbalement vous pouvez le faire.
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(11 h 30)
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Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député d'Iberville. M. Dorion?
M. Bergeron: Oui, ça marche.
M. Dorion (Jean): Eh bien, vous savez, dans le passé, enfin jusqu'à maintenant, les entreprises qui avaient des difficultés à se franciser pouvaient s'adresser à l'Office de la langue française ? vont pouvoir continuer à le faire d'ailleurs ? pour demander de l'aide, des conseils, etc. Et, en ce faisant, évidemment elles exposent des lacunes, c'est bien sûr. Mais, comme ce n'est pas le rôle de l'Office de la langue française que d'amener leur cas devant les tribunaux, il y a une certaine confiance qui existe. Et l'Office peut vraiment exercer un rôle de conseiller à ce moment-là sans qu'il y ait crainte indue de la part de l'entreprise.
Lorsque l'Office aura le rôle de contrôler la délinquance, forcément l'entreprise va être beaucoup plus réticente à exposer ses lacunes parce qu'elle va craindre ? c'est logique, elle va craindre ? que, en ce faisant, elle s'expose éventuellement à avoir des ennuis, à se retrouver devant les tribunaux un jour. Bon.
Bien sûr, qu'est-ce qui va se produire? C'est que l'Office va chercher à régler ce problème de confiance. Il va y avoir un problème de confiance; l'Office va chercher à le régler. Comment l'Office va-t-il chercher à régler ce problème? À mon avis, en poursuivant le moins possible. Ça doit être ça le résultat de cette fusion des deux fonctions. Il y a un conflit d'intérêts: je ne peux pas être le conseiller de quelqu'un puis, en même temps, être son policier. Le résultat, c'est qu'il n'y aura plus de poursuites ou pratiquement ou extrêmement peu.
On a l'expérience. La loi 86 du gouvernement libéral précédent a aboli la Commission de protection de la langue française et confié ses responsabilités à l'Office. Et, à partir de ce moment-là, il y a eu extrêmement peu de poursuites. Alors, c'est ce que nous craignons, c'est la source de nos appréhensions.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Dorion. M. le député d'Iberville.
M. Bergeron: Une dernière question, parce que vous abordez la francisation. Récemment, un entrepreneur de ma région, une petite ville complètement francophone, Marieville, pour ne pas la nommer, m'a téléphoné parce qu'il y avait un problème avec la francisation. Bon. Ils font de l'équipement très sophistiqué qui est exporté surtout aux États-Unis et qui avait des logiciels anglais.
Mais j'essayais de le rassurer, et il me disait: Expliquez-moi dans les faits qu'est-ce que ça va me donner, qu'est-ce que ça va rapporter à mes employés puis à mon entreprise un certificat de francisation.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. M. Dorion. Mme Paquet?
M. Dorion (Jean): Bien, évidemment, M. Pierre Laporte a même écrit un article assez important, il y a une vingtaine d'années, sur le sujet.
Des voix: ...
M. Dorion (Jean): On a constaté que ? je ne suis pas d'accord avec toutes les études de M. Pierre Laporte, soit dit en passant.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Dorion (Jean): Mais je pense que Pierre Laporte avait constaté dans cette étude que l'intérêt pour le travail augmente quand les gens peuvent travailler dans leur langue.
Alors, je pense que c'est un aspect qu'il faut faire valoir aux entreprises: que la motivation, l'intérêt pour le travail du personnel est meilleur là ou les gens travaillent dans leur langue. Je pense que ça, on peut faire valoir ça.
Quelqu'un qui a un rôle de conseiller à l'Office peut certainement faire valoir ça à une entreprise mais quelqu'un que l'entreprise perçoit comme un personnage qui peut les amener, leur amener des amendes un jour ou leur amener des problèmes avec la justice, ne sera pas écouté, et, d'ailleurs, on ne le consultera pas non plus. Vous, on vous a consulté parce qu'on ne s'attendait pas à avoir des problèmes, j'imagine.
Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup, M. Dorion, M. le député d'Iberville. Alors, il y a le député de Chapleau qui avait demandé la parole mais je vois qu'il est en conversation. Alors... ou le député d'Outremont?
M. Pelletier (Chapleau): Non, non... Ah bon!
Le Président (M. Boulianne): M. le député d'Outremont, vous avez la parole, en sachant que votre collègue veut intervenir aussi.
M. Laporte: Merci, M. le Président. Je vais être très bref pour laisser la parole à mon collègue de Chapleau, là. Je voudrais d'abord saluer Mme Paquet que j'avais déjà rencontrée mais sans l'avoir connue, n'est-ce pas? Les Chinois ont une distinction importante, ils font une distinction là-dessus, les Chinois, Jean, mais je ne la ferai pas en chinois. O.K.? Bon. Et puis Jean Dorion, évidemment, que je connais depuis, ah! depuis qu'on s'est vu chez Gérald Godin dans les années... fin des années soixante-dix. Bon.
Alors, évidemment aujourd'hui, je suis un peu en état de choc parce que, tout à coup, je me sens en convergence avec le Mouvement national des Québécois. C'est donc le signe d'un mouvement du soi qui est assez étonnant, n'est-ce pas? Parce que, au fond, là, l'une des divergences de fond qu'il y a entre madame et moi et vous et madame, c'est que, moi, je suis un partisan de ce que j'appelle le modèle non ministériel de la différenciation des fonctions dans des organismes relativement autonomes mais néanmoins coordonnés par une structure administrative...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laporte: ...qui était le modèle du Dr Laurin, n'est-ce pas, qui était le modèle du Dr Laurin. Et je dois ajouter que, ce que vous venez de faire comme commentaire, là, M. Dorion, là, sur le conflit que va vivre le conseiller en étant à la fois l'expert-conseil et le contrôleur, c'est fort intéressant, et, moi, je retiens ça parce que c'est fort intéressant.
Mais la question que je veux vous poser ? parce qu'après ça je vais passer la parole à M. Pelletier ? ça concerne l'un des points que vous faites, que je trouve très intéressant, à la page 5, qui dit: «Au chapitre des droits linguistiques, on devrait retrouver le droit de chaque citoyen de recevoir l'assistance des pouvoirs publics pour acquérir de la langue nationale et officielle une connaissance appropriée à l'exercice de ses devoirs civiques et de ses obligations professionnelles.» Je trouve que, ça, c'est vraiment un bon objectif. Mais voulez-vous préciser comment on va mettre cet objectif-là en application, en pratique, autrement que ce qu'on fait encore actuellement? Et je pense que tout ça, votre recommandation reposent sur une croyance, en tout cas, qui est à peu près, disons... qui est vérifiable en tout cas, à savoir que l'apprentissage, pour ce qui est de ces personnes-là, fait preuve d'un certain nombre de carences.
Donc, est-ce que vous pourriez, pour mon éclairage personnel, préciser un peu la recommandation que vous faites à la page 5, et, ensuite de ça, je passerai la parole au député de Chapleau?
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député d'Outremont. Mme Paquet.
Mme Paquet (Louise): Oui. C'est évident que c'est un grand principe. Alors, il faut voir ensuite comment ça peut s'appliquer dans la réalité. Je dirais que, avec la langue d'enseignement, une partie du problème est réglée en obligeant les enfants à aller à l'école française. Mais, pour, par exemple des personnes adultes puis des nouveaux arrivants, ce n'est pas évident, la francisation des nouveaux arrivants. Et, dans ce sens-là, je sais bien que ce n'est pas nécessairement la responsabilité directe au niveau de la Charte parce que, là, il y a aussi l'autre ministère qui est impliqué, mais au niveau des programmes de francisation, il y aurait certainement des efforts majeurs à faire pour que ces nouveaux arrivants-là, adultes, qui, eux, n'ont pas été interpellés par l'école, puissent s'intégrer à la société québécoise, et, eux aussi, ils ont le droit d'apprendre et de maîtriser la langue commune, si on veut que ce soient des citoyens intégrés à notre société et qui sont capables soit de travailler mais pas seulement de travailler, mais d'accomplir leurs devoirs civiques. Alors, il y a certainement une mesure de ce côté-là pour les nouveaux arrivants, entre autres en passant au niveau de... en ce qui concerne les adultes.
M. Laporte: ...une mesure sociale? Vous voulez dire une mesure qui serait appliquée dans les milieux de travail, en particulier?
Mme Paquet (Louise): Bien, ils ne sont pas toujours dans les milieux de travail. Ça dépend. Il y en a...
M. Laporte: Bien, si c'était à l'extérieur du travail, ça serait quoi?
Mme Paquet (Louise): Bien, c'est d'intensifier tous les programmes de soutien à la francisation pour permettre à ces gens-là de s'intégrer plus rapidement, et je dirais, encore plus profondément à la société.
M. Laporte: Vous voulez dire, par exemple ? puis je termine là-dessus ? ça veut dire que, dans mon comté, là, vous confieriez à soeur Ménard, n'est-ce pas, de PROMIS et à soeur Angèle, de Petites-Mains, n'est-ce pas, des mandats accrus d'acquisition du français, parce qu'elles le sont déjà pas mal, eux autres, la soeur Ménard puis la soeur Angèle, avec les immigrants de la partie ouest de mon comté. Vous diriez: On utiliserait les organismes communautaires de ce genre-là pour pénétrer, pour assurer une meilleure pénétration du français, la connaissance du français et son usage évidemment chez les populations immigrées. Et ça, c'est une chose qu'on pourrait faire.
Mme Paquet (Louise): Je dirais que, globalement, pour une politique linguistique vivante, il doit y avoir une loi qui soit forte; il faut que cette loi-là soit appliquée, donc avec des ressources pour l'appliquer. Il faut qu'on ait, je dirais, une vision globale de promotion, de mise en valeur de la langue, de recherche, de soutien ou d'animation même, et, pour répondre plus spécifiquement à votre question: Oui, l'ensemble des acteurs de la société québécoise doivent contribuer, que ce soient les institutions d'enseignement, que ce soient les milieux de travail, l'État, les municipalités, etc., et y compris les organismes communautaires qui, eux, pourraient effectivement jouer un rôle accru dans cet objectif particulier là d'intégration et de francisation des nouveaux arrivants.
Le Président (M. Boulianne): Merci.
n(11 h 40)nM. Laporte: Coudon! En dernier lieu, je demande: Y a-tu des cartes de membre dans le Mouvement national des Québécois?
Mme Paquet (Louise): Oui, oui, bien sûr.
M. Laporte: Si vous prenez votre carte au Parti libéral, je prends la carte du Mouvement.
Mme Paquet (Louise): Ha, ha, ha!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Boulianne): C'est bien. S'il vous plaît! Alors, merci, M. le député d'Outremont. Alors, M. le député de Chapleau, vous avez la parole.
M. Pelletier (Chapleau): Cher collègue, madame a déjà sa carte de membre du Parti libéral.
M. Laporte: C'est-u vrai? Bien, à ce moment-là, moi, je vais prendre le... du Mouvement national.
M. Pelletier (Chapleau): Ah, bien, voilà! Très bien.
M. Laporte: Ha, ha, ha!
M. Pelletier (Chapleau): Monsieur, madame, bonjour, bienvenue. Merci d'être ici. Vous suggérez dans votre rapport que soit, en fin de compte, si je pourrais dire, amender l'article 23 de la Charte canadienne de façon à ce que le Québec en soit soustrait, donc faire en sorte qu'il y ait une modification constitutionnelle qui fasse en sorte que l'article 23 ne s'applique plus au Québec. Vous êtes-vous penchés sur la question de savoir comment un tel amendement pourrait être apporté?
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député. M. Dorion.
M. Dorion (Jean): Nous voyons la chose comme une affaire très politique, et ce n'est pas une affaire juridique et constitutionnelle. C'est à peu près impossible d'amender vraiment l'article 23 dans le système actuel, à moins d'obtenir le consentement d'autres partenaires, qui ne viendra pas tout de suite. Mais je pense qu'il serait important que le gouvernement québécois fasse comprendre à la population que c'est ça la cause première du problème.
Parce que, vous savez, j'ai écrit trois articles dans Le Devoir, il y a quelques mois, sur la croissance continue du secteur anglais d'enseignement depuis huit ans, neuf ans au Québec. Et le déplacement dans les effectifs est d'à peu près 2 à 3 000 par année. Or, avec les remèdes qu'on apporte ici, on va peut-être rediriger vers l'école française 400, 500 ou 600 enfants par année. Donc, il va continuer à y avoir... Même avec ce qu'on fait ici en matière de langue d'enseignement, on va continuer à assister à une décroissance du secteur français d'enseignement qui va être plus lente que maintenant.
L'article 23 est le vrai problème parce que vous avez au Québec actuellement à peu près 17,5 % de toute la population anglophone du Québec qui est née dans d'autres provinces du Canada, et, en plus, vous avez les enfants de ces gens-là, c'est-à-dire qu'il y a peut-être... 25 % des effectifs des écoles anglaises au Québec provient d'immigration interprovinciale. Et, dans la première version de la loi 101, c'était contrôlé, ça. Les gens qui venaient d'autres provinces devaient aller à l'école française. Ce n'est plus le cas maintenant. C'est ça le vrai problème de la décroissance du secteur français ? décroissance relative en pourcentage, là.
Alors, il faut rendre les gens conscients que l'article 23, c'est le problème numéro un. Je suis conscient que c'est très difficile de faire changer, mais il n'y a pas de papier qui résiste quand il y a vraiment une volonté populaire, quand la population devient consciente qu'il y a un gros problème. Et je pense qu'on devrait s'employer à aider la population à le comprendre en l'expliquant davantage. C'est certainement le rôle du gouvernement que de fournir de telles explications.
Le Président (M. Boulianne): M. le député de Chapleau.
M. Pelletier (Chapleau): Moi, je comprends très bien votre thèse, là. Vous nous dites que la Constitution du Canada impose des limites au Québec en matière linguistique. Vous voulez conscientiser la population de cela. Vous dites: Nous allons proposer des amendements à l'article 133, nous allons proposer des amendements à l'article 23. Le Québec va frapper un mur, le Québec va se faire dire non, et, comme ça, les gens vont comprendre. C'est ça en gros, votre thèse. O.K.?
M. Dorion (Jean): C'est en plein ça.
M. Pelletier (Chapleau): C'est ça? Qui est une thèse légitime.
Cela dit, on en vient à se demander: Qu'est-ce que vraiment le Québec gagnerait de se faire dire non, qu'est-ce que le Québec gagnerait de se frapper à un mur, politiquement parlant, à moins que ça ne serve la cause ultime de défendre la souveraineté du Québec, qui est peut-être l'objectif non avoué dans votre démarche?
Le Président (M. Boulianne): Merci.
M. Dorion (Jean): Cet objectif n'est pas inavoué de notre part. Nous sommes une organisation souverainiste. Cependant, je pense qu'il y a même des gens qui sont fédéralistes, qui pourraient accepter de participer à un mouvement pour dénoncer l'article 23, puisque, en principe, il serait possible de changer l'article 23. Si tous les partenaires canadiens sont d'accord, il est possible de le changer. Donc, on peut concevoir que quelqu'un qui est fédéraliste veut qu'on change la Constitution canadienne pour permettre au Québec de garder le contrôle des critères d'admissibilité à l'école anglaise en fait au Québec. On peut concevoir ça. J'admets qu'il n'y en a pas beaucoup, mais il peut y en avoir. C'est intellectuellement, conceptuellement tout à fait pensable.
Le Président (M. Boulianne): Merci. M. le député de Chapleau.
M. Pelletier (Chapleau): Est-ce que je vous comprends bien lorsque je pense que ce que vous êtes en train de nous dire, c'est que, si le Québec se départit de la Constitution canadienne, c'est-à-dire devient souverain, vous allez vouloir que la seule langue de la justice et de la législation au Québec soit le français, que ce soit la langue exclusive? Est-ce que je vous comprends bien?
M. Dorion (Jean): Et ça, ça n'empêche pas au droit à un interprète lorsqu'on a un procès et qu'on ne comprend pas le français; ça n'empêche pas du tout. Mais oui, la langue de la justice, dans notre option, dans notre optique à nous, serait le français, la langue des institutions judiciaires, la langue des tribunaux.
M. Pelletier (Chapleau): La seule langue.
M. Dorion (Jean): Oui.
M. Pelletier (Chapleau): Est-ce que je vous comprends bien en interprétant vos paroles comme signifiant que, si le Québec devient souverain, il n'y aura plus d'écoles anglaises au Québec?
M. Dorion (Jean): Non, ce n'est pas notre position.
Des voix: Non.
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, mesdames...
M. Pelletier (Chapleau): Alors, pouvez-vous apporter des nuances?
Le Président (M. Boulianne): O.K. Allez-y, M. Dorion.
M. Dorion (Jean): Oui.
M. Pelletier (Chapleau): Puisque vous proposez que le Québec soit soustrait à l'article 23, c'est quoi que vous proposez en échange?
Mme Paquet (Louise): C'est la loi 101 d'origine.
M. Dorion (Jean): C'est le retour à ce que prévoyait la loi 101, la Charte de la langue française, en 1977, c'est-à-dire que les personnes qui, jusqu'en... les familles qui, jusqu'en 1977, avaient fréquenté l'école anglaise au Québec pourraient indéfiniment garder ce privilège-là mais les autres qui viendraient d'ailleurs ne pourraient pas le réclamer. Parce que je ne vois pas pourquoi quelqu'un qui habite Moose Jaw peut dire: Moi, j'ai le droit d'avoir une école française au Québec. Il a le choix de venir au Québec ou de ne pas y venir. S'il vient, ce sera à l'école française; s'il décide qu'il n'est pas intéressé à éduquer ses enfants en français, il serait préférable qu'il ne vienne pas s'installer ici. C'est notre façon de voir les choses.
M. Pelletier (Chapleau): Donc, ce serait un retour à la clause Québec, si je comprends.
M. Dorion (Jean): Très exactement.
M. Pelletier (Chapleau): Bon. O.K. Non, je vous pose ces questions-là, parce que c'est important qu'on sache le fin fond de votre thèse, en quelque sorte, de votre point de vue, qu'on connaisse le fin fond de tout cela.
Qu'est-ce que vous pensez... Ce sera ma dernière question, M. le Président: Qu'est-ce que vous pensez du fait que la Charte de la langue française, l'article 73 prévoyait que, pour avoir droit à l'école anglaise au Québec, il fallait avoir reçu la majeure partie de l'enseignement en anglais? C'était une espèce de pondération, de nuance au principe de la clause Canada, à la clause Canada.
La clause Canada s'applique, mais le Québec disait: Attention! ça ne s'applique pas intégralement. Pour avoir droit aux bénéfices de la clause Canada, il faut avoir reçu la majeure partie de l'instruction, de l'enseignement en anglais. Ça, c'était l'article 73 avant qu'il soit invalidé par la Cour supérieure, jugement de la juge Grenier. Et là on est en attente, tout le monde, du jugement de la Cour d'appel dans l'affaire Solski. Et donc, qu'est-ce que vous pensez de ce principe-là de la majeure partie de l'enseignement en anglais?
Le Président (M. Boulianne): M. Dorion.
M. Dorion (Jean): C'était une façon de limiter les dégâts causés par l'article 23, mais les tribunaux ont décidé que c'était une façon, une limitation qui n'était pas compatible avec l'article 23. Alors, je pense que c'était une façon de limiter les dégâts; ce n'est pas l'idéal, mais c'est une façon de limiter les dégâts. Cependant, les tribunaux ne l'ont pas retenue.
M. Pelletier (Chapleau): On va voir... On va...
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci...
M. Pelletier (Chapleau): Oui.
Le Président (M. Boulianne): Oui, c'est terminé.
M. Pelletier (Chapleau): Ha, ha, ha! Très bien.
Le Président (M. Boulianne): Mme Paquet, M. Dorion, alors, merci beaucoup.
Alors, la commission donc suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 49)
(Reprise à 15 h 49)
Le Président (M. Boulianne): Étant donné que nous avons quorum, alors nous allons débuter. Je déclare donc la séance de la commission de la culture ouverte. Je rappelle que le mandat de la commission pour cette séance est de poursuivre les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 104, Loi modifiant la Charte de la langue française.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Aucun nouveau remplacement annoncé.
n(15 h 50)nLe Président (M. Boulianne): Alors, merci beaucoup. Alors donc, dans un premier temps, j'invite l'Institut Missisquoi avec ses représentants, d'abord, de vous présenter et, par la suite, votre mémoire. Alors, vous avez la parole.
Institut Missisquoi
Mme Saber-Freedman (Sara): Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre et membres de la commission, je m'appelle Sara Saber-Freedman. Je suis la directrice générale de l'Institut Missisquoi. Et je suis accompagnée cet après-midi par M. Jack Jedwab, qui est notre vice-président. Je présente en même temps les excuses de notre président qui, malheureusement, n'a pas pu venir.
Et j'aimerais juste vous parler d'abord un petit peu sur l'Institut Missisquoi. L'Institut Missisquoi a été fondé en 1991 et a comme mandat la recherche sur les communautés d'expression anglaise du Québec. Nous avons constaté dans ce temps un manque flagrant d'information fiable sur nos communautés, que ce soit au niveau démographique ou au niveau de nos avis et expériences en tant que communautés. Étant convaincus que la recherche est le fondement de la bonne planification sociale et communautaire, nous avons établi l'Institut avec l'objectif d'offrir aux décideurs nationaux, régionaux et locaux des informations factuelles sur nos communautés et leurs institutions. C'est pourquoi nous avons reçu avec beaucoup de plaisir l'invitation de cette commission.
Avant de procéder, permettez-moi de vous dire, en plus de qui nous sommes, qui nous ne sommes pas. Nous avons un mandat pour faire la recherche sur les communautés d'expression anglaise du Québec, mais nous n'avons pas de mandat dit politique, c'est-à-dire que nous n'avons pas l'intention de vous proposer des modifications au projet de loi n° 104, mais plutôt de vous offrir les informations que, nous, nous trouvons pertinentes et que nous espérons que vous allez trouver pertinentes aussi.
Nos remarques aujourd'hui ciblent deux grands sujets: la situation démographique des communautés d'expression anglaise du Québec et la fréquentation par les différents groupes linguistiques des écoles anglophones et francophones. Nous entendons aussi identifier les informations manquantes que nous pensons indispensables à une bonne décision sur le projet de loi n° 104.
Vous avez devant vous un certain nombre de grilles et de tableaux, mais nous n'avons pas l'intention de passer de l'un à l'autre. Nous souhaitons plutôt mettre en relief quelques faits qui nous semblent particulièrement intéressants et nous espérons que vous profiterez de l'ensemble des données qui sont devant vous.
Je voudrais d'abord vous expliquer ce que nous voulons dire par «une personne d'expression anglaise» et pourquoi nous parlons de nos communautés dans le pluriel. Les personnes d'expression anglaise sont, pour nous, les personnes qui choisissent l'anglais comme langue de communication, c'est-à-dire les Québécois et les Québécoises qui tendent à utiliser l'anglais. Le chiffre de Statistique Canada qui correspond le mieux à cette notion est ce de première langue officielle parlée, ce qui regroupe les personnes qui parlent l'anglais ou l'anglais et une troisième langue à la maison, plus la moitié de ceux qui parlent l'anglais et le français à la maison.
Nous parlons des communautés d'expression anglaise plutôt que d'une communauté parce que nous constatons qu'il y a un monde de différence entre la réalité vécue par un anglophone en Gaspésie ou à Rimouski contre celle de Montréal ou de l'Estrie. Ces réalités tendent à avoir une influence sur les avis des personnes d'expression anglaise, au point que ces communautés sont loin d'être homogènes au niveau de ses perceptions et de ses préoccupations. Il s'agit là du principal constat de notre sondage mené en 2000 par CROP, dont les résultats étaient rendus publics l'année passée, et vous en avez quelques-uns dans vos documents.
Les communautés d'expression anglaise sont présentes dans toutes les régions administratives du Québec, concentrées bien évidemment dans la région de Montréal. Sur le plan d'âge, nous sommes plus vieux que la communauté d'expression française du Québec. Une partie plus grande de notre communauté a plus de 65 ans, une partie plus petite a moins de 24 ans. Dans plusieurs régions administratives, l'écart est extrêmement prononcé. Nous avons des régions, par exemple la région du Québec, où le pourcentage âgé chez la communauté d'expression anglaise est très, très, très grand.
Nos communautés sont très bilingues. Dans certaines régions où la masse critique d'anglophones est très faible, ce bilinguisme frôle de 100 %, et les plus jeunes sont beaucoup plus bilingues globalement que les plus vieux. Il s'agit là d'un constat majeur. Comme nous allons vous l'expliquer, il y a, quant à nous, un lien direct entre le bilinguisme, le mariage exogame, c'est-à-dire entre anglophones et francophones, et l'augmentation appréciable dans le nombre d'étudiants francophones qui sont admissibles à l'école anglaise.
Le mariage entre anglophones et francophones n'est plus l'exception dans notre communauté. Laissant pour un instant de côté la région administrative du Nord-du-Québec où la population d'expression anglaise est massivement autochtone, le taux de mariages exogames chez les personnes d'expression anglaise varie entre 15 % à Montréal à 66 % dans la Mauricie. Soulignons que ces nouvelles familles adoptent très souvent le français comme langue parlée à la maison. Les enfants sont donc de langue maternelle française, mais ils ont le droit, légué du parent anglophone, de fréquenter l'école anglaise. La perte nette de membres dans la communauté d'expression anglaise de plusieurs régions administratives du Québec est donc ironiquement accompagnée d'une augmentation dans le nombre d'élèves inscrits aux écoles anglaises de ces régions.
Soulignons que ce sont les régions à l'extérieur de Montréal où ce phénomène, c'est-à-dire le nombre d'étudiants francophones en école anglaise, est le plus augmenté. Ce sont les mêmes régions où le taux de mariages entre anglophones et francophones est le plus élevé. Ce sont des régions où, à notre connaissance, il y a peu ou pas d'écoles privées anglaises.
En même temps, nous constatons une diminution dans le nombre d'élèves anglophones qui fréquentent l'école française. Nous pensons que cette diminution est due à l'amélioration dans la qualité de l'enseignement du français dans les écoles anglaises.
Mais, si nous savons bien des choses à l'égard de l'inscription dans les écoles privées et publiques anglophones, il y a un certain nombre de données que nous n'avons pas. Il s'agit de l'information qui est, quant à nous, essentielle pour toute décision éclairée à l'égard d'une modification proposée aux dispositions de la Charte de la langue française en ce qui a trait à l'admissibilité aux écoles anglaises. L'objectif identifié des modifications proposées est de mettre fin à la possibilité qu'un élève passe une année dans une école anglaise privée et, par la suite, passe à l'école publique anglaise tout en transmettant le droit d'admissibilité bien évidemment à ses frères et soeurs ainsi qu'à l'ensemble de leurs enfants.
Pour comprendre, donc, si le projet de loi obtiendra les résultats escomptés sans avoir des retombées imprévues, les informations suivantes sont, quant à nous, nécessaires. D'abord, combien de certificats d'admissibilité ont été émis suite à une inscription d'un ou deux ans dans une école privée non subventionnée pour un enfant qui ne serait pas autrement admissible à l'école anglaise? Combien de ces enfants demeurent à l'école privée pendant l'ensemble de ses années primaires et secondaires, c'est-à-dire combien de personnes utilisent réellement l'école privée anglaise comme voie d'accès à l'école publique anglaise? Ce nombre représente quel pourcentage de l'augmentation dans l'inscription dans les écoles publiques anglaises? Combien d'enfants seraient obligés de sortir de leurs écoles privées lors du début du secondaire parce que les années passées en école anglaise privée ne seront plus considérées pour un certificat d'admissibilité au secondaire? Combien de places existent en école secondaire anglaise privée non subventionnée? Il s'agit d'informations que nous ne pouvons pas vous fournir, mais nous vous encourageons fortement de vous assurer de connaître tous les impacts de ce projet de loi avant de l'adopter.
Alors, nous vous remercions de votre attention et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le Président (M. Boulianne): Alors, c'est très bien. Je vous remercie beaucoup, Mme Freedman. Maintenant, nous allons procéder à l'échange. Alors, Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lemieux: Merci, Mme Freedman, M. Jedwab. Vous avez dit, d'entrée de jeu, dans votre mémoire que vous n'aviez pas l'intention de proposer des modifications au projet de loi n° 104. Alors, je ne vais pas essayer de vous entraîner sur ce terrain, mais je veux vous dire que je trouve tout de même votre présence très importante. Et votre Institut, je le reconnais, je ne le connais pas beaucoup. J'ai déjà lu un certain nombre de choses plus récemment, mais sans le connaître en profondeur. Mais je crois que c'est important qu'il y ait également un échange à partir de données les plus fiables pour nous appuyer dans les choix que nous avons à faire. Alors, même si vous ne vous situez pas nécessairement dans une discussion autour de modalités techniques et pratiques du projet de loi n° 104, je crois que c'est tout à fait justifié que vous soyez présents à cette commission parlementaire.
n(16 heures)n Vous dites... En fait, l'objet de mes questions, c'est, je crois... Essayons un peu d'échanger sur les données que nous avons et celles que nous n'avons pas, parce que, sur un certain nombre de questions que vous posez, vous émettez l'hypothèse que cette information-là n'existe pas. Évidemment, on ne va pas envahir notre conversation de statistiques, mais entendons-nous sur ce qu'on a, sur ce qu'on n'a pas et sur ce qu'il faudrait peut-être éventuellement développer. Vous dites d'abord, je vous réfère à la page 4 de votre mémoire, à l'avant-dernier paragraphe: «Combien de certificats d'admissibilité ont été émis suite à une inscription d'un ou deux ans dans une école privée non subventionnée, pour un enfant qui ne serait pas autrement admissible à l'école anglaise?» Je vois, dans vos tableaux, que vous avez accès à plusieurs données qui viennent du ministère de l'Éducation. Je suis un peu surprise que vous posiez cette question-là parce que, à ma connaissance, ces informations sont disponibles.
Mme Saber-Freedman (Sara): Mme la ministre, pour nous, les écoles privées sont ensemble, les subventionnées avec les non subventionnées. Alors, votre projet de loi touche, dans un sens, les étudiants, les élèves qui sont inscrits dans les écoles non subventionnées parce qu'un enfant qui n'a pas le droit d'admissibilité à l'école publique n'a pas plus le droit d'admissibilité à une école privée subventionnée. Dans les chiffres du ministère, nous avons vu le titre «privée». Pour moi, ça veut dire à la fois les places subventionnées et non subventionnées. Alors, c'est pour ça que je vous pose la question: Avez-vous accès à l'information pour ce qui est des places non subventionnées?
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme Freedman. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Donnez-moi une seconde.
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, prenez une seconde.
(Consultation)
Mme Lemieux: Écoutez, je crois comprendre... puis peut-être que, éventuellement, nos experts en statistiques ? c'est un art, ça, les statistiques ? pourront avoir des échanges avec vous. Moi, je n'ai absolument pas d'objection à partager ces informations-là, mais je vous donne ce que j'ai qui provient... Bon, c'est une analyse des statistiques du ministère de l'Éducation: «Les enfants déclarés admissibles à l'enseignement en anglais, en vertu de l'article 73 paragraphe 2° de la Charte, à la suite de la fréquentation d'une école privée non subventionnée ? je comprends que ça ne comprend pas les écoles privées subventionnées, mais vraiment les écoles privées non subventionnées ? seraient jusqu'à maintenant de 7 524, y compris ? parce qu'on le sait que ce droit à une personne donne le droit à d'autres personnes ? 3 099 frères et soeurs.» Alors, ça, c'est l'information qui est disponible et qui m'apparaît clairement disponible.
Autre... Enfin, je ne veux pas qu'on s'envahisse non plus, là... on ne fera pas un concours de stats, là...
M. Kelley: Si la ministre cite les chiffres d'un document, peut-être qu'elle peut le déposer pour l'éclairage des membres de la commission?
Document déposé
Mme Lemieux: Oui. Alors, je vais les déposer. Et l'autre chose que je me permettrais d'ajouter là-dessus, c'est qu'il y a nettement une augmentation depuis un certain nombre d'années. Par exemple, en 1995, il y a eu 481 enfants qui ont été déclarés admissibles à la suite de la fréquentation d'une école privée non subventionnée. En 1996, il s'agissait de 563 ? je saute quelques années ? en 1999 de 819 et en 2001 de 1063. Alors, c'est un phénomène, il faut le dire. Donc, on est, sur sept ans, en croissance. On est passé de 490 à 1 000. Voilà.
Autre chose. Vous dites ? parce que j'ai déjà lu des écrits là-dessus ? vous semblez dire qu'un des phénomènes qu'il ne faudrait pas négliger et qui aurait beaucoup d'influence dans le choix de la fréquentation du réseau francophone ou du réseau... du réseau d'enseignement français ou anglais, c'est le fait qu'il y a de plus en plus de mariages entre des anglophones et des francophones et que, ça, ça colorerait beaucoup la situation. J'aimerais ça vous entendre un peu plus sur cette question.
Le Président (M. Boulianne): Mme Freedman, vous avez la parole.
Mme Saber-Freedman (Sara): Avec plaisir. Ce que nous avons constaté, de façon très anecdotique, depuis longtemps, c'est que les écoles anglaises, surtout dans les régions, ont une population très grande d'enfants de langue maternelle française. Ce sont des enfants carrément francophones qui sont à l'école anglaise justement pour apprendre l'anglais. Il y a une école dans la région de l'Estrie, par exemple, qui nous dit que 80 % de ses étudiants sont des enfants de langue maternelle française.
En regardant d'où vient ce phénomène, on a regardé deux choses: premièrement, le taux de mariages entre les anglophones et les francophones. On a posé une question dans notre sondage: Votre conjoint est-il, est-elle, anglophone ou francophone? Quelle langue est-ce que vous parlez avec votre conjoint? Et on a en même temps regardé les chiffres de Statistique Canada pour la langue maternelle et la langue parlée à la maison, et vous avez ces chiffres devant vous. Ce que nous avons pu constater, c'est qu'un grand nombre d'anglophones en région disent être mariés à un francophone. Et ce que nous constatons aussi, c'est que, dans certaines régions, la moitié des personnes de langue maternelle anglaise parlent le français et uniquement le français à la maison. Je ne fais pas mention ici des gens qui nous disent parler anglais et français à la maison, uniquement le français à la maison. À Rimouski, par exemple, c'est la moitié. Au Saguenay, c'est la moitié. Alors, c'est bien évident que les enfants qui sont élevés dans ces maisons sont des enfants de langue maternelle française, mais ils ont le droit, de par leur parent anglophone, de fréquenter l'école anglaise. C'est un choix qu'ils prennent à peu près 75 % du temps, donc massivement.
Mme Lemieux: ...parce que vous faites des distinctions, visiblement, il y a des distinctions importantes. J'ai feuilleté les tableaux sans en saisir toute l'ampleur, la portée, là, mais il y a des distinctions importantes en région par rapport à Montréal et, si vous aviez votre grille d'analyse par rapport à la situation de Montréal, quant à cette situation-là, elle serait différente.
Mme Saber-Freedman (Sara): Ce que nous avons vu, c'est que, si on regarde les chiffres de l'inscription à l'école anglaise pour la province dans son ensemble, on voit, oui, une augmentation depuis un certain nombre d'années. Mais, si on regarde les chiffres pour la région de Montréal ? ce sont les chiffres du ministère de l'Éducation, O.K. ? si nous examinons les chiffres pour la région de Montréal, d'une part, puis les chiffres pour les autres régions prises dans leur ensemble, on voit que l'augmentation est massivement à l'extérieur de Montréal. Et nous savons, nous, qu'il y a très peu d'écoles privées anglaises, privées non subventionnées anglaises, en région. Je ne dis pas qu'il n'y en a pas, mais la majorité des écoles privées sont à Montréal. Alors, pour nous, il s'agit d'une augmentation globale qui est plutôt due aux mariages entre anglophones et francophones.
Le Président (M. Boulianne): Merci, Mme Freedman. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Est-ce que... Écoutez, vous avez le choix de répondre à ma question, hein, on n'est pas devant un tribunal, là, on le fait avec ouverture, mais tout de même. Est-ce que... Dans le fond, votre thèse, c'est de dire que cette nouvelle réalité de contacts très privilégiés via le mariage, hein ? il n'y a rien de plus privilégié ? entre des francophones et des anglophones, c'est probablement l'explication la plus importante qui expliquerait la plus grande fréquentation du réseau anglais. C'est ce que vous dites. Bon. Est-ce que vous convenez tout de même ? parce que j'imagine qu'il doit y avoir des débats d'experts et de statisticiens sur ces questions-là, mais... Est-ce que vous êtes quand même troublés par le fait que ce n'est pas par un phénomène de rapprochement humain que l'école privée non subventionnée est utilisée, mais vraiment comme une manière d'avoir accès volontairement au réseau régulier, qu'il soit privé subventionné ou public anglais? Est-ce que ça ne créée pas un inconfort de savoir qu'il y a comme un truc qui s'est installé? Puis je ne blâme pas les gens, je le constate. Mais il y a un truc qui s'est installé, qui fait en sorte que les gens se retrouvent avec un droit qu'ils n'auraient pas si ce truc-là n'avait pas fonctionné. Est-ce que ça ne provoque pas chez vous ? vous semblez quelqu'un d'assez rigoureux, méticuleux ? un certain inconfort?
n(16 h 10)nLe Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Mme Freedman.
Mme Saber-Freedman (Sara): Mais la réaction personnelle, c'est une chose, la réaction de l'Institut, c'est autre chose, bien évidemment. Et, comme j'ai dit au début, l'Institut n'a pas d'avis de ce genre-là. Nous, on a un mandat pour examiner les chiffres, les faits, de les mettre devant vous et devant d'autres décideurs. Bien évidemment, le choix des données, c'est quand même... il y a une certaine discrétion, là, mais on a choisi les donnés qui sont pour nous intéressantes. Alors, c'est ça, ma seule réponse.
Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Oui. Peut-être une dernière remarque. Je veux juste dire que, si le phénomène de fréquentation plus élevée de l'école anglaise est dû au fait du mariage entre des francophones et des anglophones, un parent anglophone, qu'il soit le père ou la mère, pourra toujours qualifier son enfant. Ça, on ne remet pas en cause ce principe-là dans le projet de loi n° 104. On se comprend bien, là? D'accord.
Le Président (M. Boulianne): Alors, M. le député de L'Assomption.
M. St-André: Oui. C'est juste brièvement, là, suite à la réponse que vous venez de donner à la question précédente de la ministre. Vous avez dit qu'il y a des données qui sont plus intéressantes que d'autres. Qu'est-ce qui fait, selon vous, que des données sont plus intéressantes que d'autres? J'aimerais comprendre.
Le Président (M. Boulianne): Mme Freedman.
Mme Saber-Freedman (Sara): Avec plaisir. Pour nous, les communautés d'expression anglaise globalement sont souvent connues comme s'il s'agit uniquement de la région de Montréal. Pour nous, il y a des réalités, il y a plusieurs communautés. La réalité de certaines régions est beaucoup différente que les réalités d'autres, tant pour les francophones, j'imagine, que pour les anglophones. Mais, lorsqu'on généralise au sujet de la communauté d'expression anglaise, on a souvent la tendance de dire: Les anglophones sont comme ça. Et, oui, ils sont comme ça quelque part, mais ils ne sont pas comme ça partout. Alors, pour nous, les chiffres intéressants, ce sont les chiffres qui nous permettent de clarifier les différences d'une région à une autre, ce qui permet une planification publique sociale qui est à la mesure des besoins d'une communauté donnée.
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci. Merci, M. le député de L'Assomption. Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Jacques-Cartier, vous avez la parole.
M. Kelley: Oui. Mais, juste très rapidement, je pense que la ministre a fait une autre référence à un autre chiffre de 4 000 enfants qui n'est pas dans le tableau qui a été déposé. Est-ce qu'il y a un autre tableau aussi? Juste parce qu'il y a beaucoup de chiffres dans ce dossier, et je pense que c'est bon que tous les membres de la commission soient sur la même page.
Le Président (M. Boulianne): Alors, merci, M. le député de Jacques-Cartier. Mme la ministre, est-ce que vous avez d'autres chiffres?
Mme Lemieux: 4 000 enfants? Je ne sais pas de quel chiffre vous parlez.
(Consultation)
Mme Lemieux: Ces 4 000 là. Non. Bien, j'ai un petit tableau maison que je pourrai rendre disponible, mais il est un petit peu trop maison.
Le Président (M. Boulianne): Alors donc, vous allez nous le rendre disponible.
M. Kelley: Mais il y avait un calcul, on est passé de 420 à 1 000.
Mme Lemieux: Oui. C'est ça que je vous dis.
M. Kelley: O.K.
Mme Lemieux: 481 enfants.
M. Kelley: Parce qu'on a un document du ministère de l'Éducation, et les chiffres sont différents, et c'est pourquoi je veux avoir une précision parce que les chiffres, dans un document intitulé: Statistiques sur les élèves des écoles privées non subventionnées qui étudient en anglais de 1994-1995 à 2000, les chiffres sont nettement inférieurs. Alors, je pense que c'est important, si on veut avancer sur un chiffre de 1 000, d'avoir la preuve de ce chiffre parce que ça contredit carrément les chiffres qui ont été déposés dans un document du ministère de l'Éducation.
Mme Lemieux: Mais, M. le Président, si je peux me permettre, là, de réconcilier les chiffres, le tableau dont le député fait allusion concerne les enfants individuellement mais ne couvre pas les chiffres... parce que, en admettant un enfant, on admet également des frères et des soeurs. Alors, nos chiffres couvrent cette réalité-là.
M. Kelley: O.K. Juste pour mettre les choses au clair, si on peut avoir accès à ces données, je pense que ça pourra éclairer les membres de la commission.
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors... Bien, merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, est-ce qu'on va avoir les chiffres pour une séance subséquente?
Mme Lemieux: Oui. Une séance subséquente.
Le Président (M. Boulianne): Merci beaucoup. Alors, M. le député de Jacques-Cartier, vous avez la parole.
M. Kelley: Merci beaucoup. Merci, M. Jedwab, Mme Saber-Freedman, pour la présentation. Au-delà de tous les chiffres, parce qu'on a les tableaux, je vais les lire attentivement après, c'est difficile de les absorber sur le coup, comme ça, mais c'est quoi, la grande tendance? Il y avait un choc démographique des inscriptions dans les écoles anglaises après 1977 où le nombre, de mémoire, a chuté d'environ 250 000 à 100 000 élèves dans des écoles anglaises. Dans le net-net, depuis un certain temps, les dernières 15 années, mettons, où ces chiffres sont stabilisés, de mémoire, c'est quoi, le... Est-ce que c'est à peu près neuf sur un, ou 10 sur 1? C'est quoi, les tendances sur le nombre de personnes qui étudient dans le réseau anglophone et le nombre d'élèves qui étudient dans le réseau francophone?
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, Mme Freedman. Alors, si vous pouvez vous identifier, monsieur, puis répondre.
M. Jedwab (Jack): Oui, c'est M. Jedwab. Effectivement, comme vous avez constaté depuis l'adoption de la loi 101, la Charte de la langue française, en 1967, il y avait un recul assez important dans le nombre des effectifs dans le réseau anglophone, il y avait aussi un recul dans le réseau global, si on veut, au Québec, grâce surtout au taux de natalité en déclin, on dit, entre autres facteurs. Mais dans le réseau anglophone, la diminution était telle que, mettons, on pouvait parler de plus de 200 000 inscriptions à l'école anglophone, près de 250 000. Et le déclin est allé jusqu'à, au début des années quatre-vingt-dix, un peu moins de 100 000. Je me rappelle, je ne regarde même pas les chiffres sur les tableaux que vous avez devant vous.
Depuis à peu près une dizaine d'années, on voit une augmentation dans le réseau anglophone d'à peu près 10 000. C'est ça qu'on constate. Et, si on le divise, par rapport au... sur la langue maternelle, en fonction des chiffres qui sont issus par le ministère de l'Éducation, on voit que l'augmentation provient assez largement des personnes de langue maternelle française. C'est-à-dire que le bassin des personnes de langue maternelle anglaise est stable, devenu relativement stable dans le réseau public depuis à peu près huit ans, neuf ans. C'est l'augmentation chez les gens issus, comme j'ai dit, de langue maternelle française.
Par ailleurs, il y a aussi une légère augmentation depuis trois ans dans le nombre des allophones dans le réseau anglophone, c'est-à-dire le réseau anglais public, et qui fait que, en général, il y avait cette augmentation. Ce n'est pas aussi majeur. En termes de pourcentage, je dirais que c'est assez négligeable, ça ne donne pas une augmentation, comme je dis, en termes de pourcentage, qui est très importante, parce que, en chiffres réels, c'est loin de ce qu'a été le réseau anglophone. Ça fait 20 ans, plus que 20 ans. Et, en termes de réseau francophone, conversement, il n'y a pas une diminution importante non plus dans le pourcentage que représente le réseau francophone à l'intérieur de l'ensemble du réseau des écoles publiques du Québec. Et ça demeure que c'est ce réseau qui accueille le plus important nombre d'allophones, qui est le bassin le plus en développement, si on veut, grâce à l'immigration au Québec.
Alors, je ne sais pas si ceci répond à votre question. J'imagine que vous serez en mesure d'éclairer ça avec les tableaux qui sont présentés dans notre rapport aujourd'hui.
Le Président (M. Boulianne): Alors, M. le député de Jacques-Cartier, en vous rappelant que le député de Chapleau a demandé la parole aussi.
M. Kelley: Oui, juste très rapidement. Mais, sur le 10 000, cette augmentation dans ces tableaux, vous avez dit que le fait qu'un anglophone et un francophone se marient explique en grande partie cette augmentation, que c'est vraiment le fait qu'on peut voir ça en passant à l'école secondaire St. Patrick, ici, à Québec, où clairement la langue devant l'école, le matin, c'est le français, mais ce sont des personnes surtout qui sont de l'ancien réseau des écoles catholiques où, les anglophones et les francophones, on va souvent faire l'échange d'une école à l'autre. Notre collègue le député de Chomedey est un excellent exemple, parce que, avec ses neuf frères et soeurs, quelques-uns ont fait l'école primaire en français, les autres ont fait l'école primaire en anglais. Ils ont fait l'échange à l'école secondaire. Pour déclarer qui est admissible à l'école anglaise dans la famille Mulcair, c'est loin d'être évident, M. le Président, parce que c'était une pratique courante dans le passé qui explique un petit peu. Alors, sur les 10 000, M. Jedwab, combien peuvent être expliqués par ce phénomène d'intermariages? Est-ce qu'on peut le chiffrer?
n(16 h 20)nLe Président (M. Boulianne): M. Jedwab.
M. Jedwab (Jack): Non, c'est extrêmement difficile à faire effectivement. Ça prendrait des études spéciales pour éclairer la situation quant au pourcentage qui est représenté par les gens issus de ces mariages interlinguistiques versus ceux qui, on dit, aujourd'hui représentent jusqu'à 7 000 qui sont passés à travers quelques années, etc., d'école privée en anglais dans le réseau public. C'est difficile d'estimer avec exactitude quel pourcentage à l'intérieur de cette augmentation provient de mariages interlinguistiques versus quel pourcentage provient de...
C'est des informations extrêmement intéressantes et importantes, nous croyons, pour nous donner un meilleur portrait de ce qui est relié à l'adoption de la loi d'aujourd'hui, parce que, effectivement, comme la ministre l'a mentionné, c'est un phénomène en augmentation depuis quelques années.
Ceci étant dit, si vous me permettez, c'est non plus clair quant à qui est dans les groupes de langue maternelle, quel pourcentage a utilisé le phénomène de mariage interlinguistique versus quel groupe est passé par le réseau privé pour passer à l'école publique anglaise. Ça, non plus, ce n'est pas très clair.
Le Président (M. Boulianne): Merci, monsieur. Alors, M. le député de Chapleau, vous avez la parole.
M. Pelletier (Chapleau): Oui, merci, M. le Président. Madame, monsieur, je vais risquer une question. Je ne sais pas dans quelle mesure vous allez pouvoir y répondre cependant. Mais, connaissant M. Jedwab et connaissant enfin ses qualités en termes de juriste et d'expert des questions linguistiques, vous me permettrez de soulever un point qui est le suivant: dans le journal Le Devoir de ce matin, on cite donc Mme la ministre de la Culture et des Communications où on dit ceci: «La ministre de la Culture et des Communications [...] n'exclut aucunement le recours à la clause nonobstant pour soustraire de l'application de la Charte canadienne des droits et libertés les dispositions de l'actuel projet de loi n° 104 qui empêcheront un enfant d'accéder à l'école anglaise après un passage d'un an dans une école privée non subventionnée.» En d'autres termes, ce que dit Le Devoir, c'est que la ministre donc n'exclut pas le recours à la clause nonobstant pour venir cautionner ces amendements en ce qui concerne l'accès à l'école anglaise.
Or, ce qui m'étonne, c'est que la clause nonobstant ne s'applique pas à l'égard de l'article 23 de la Charte canadienne; la clause nonobstant s'applique à l'égard des articles 2 et 7 à 15 de la Charte canadienne. Ne sachant pas ce qu'avait au juste en tête la ministre, j'aimerais savoir ce que vous, à tout le moins, comprenez de ce que l'on rapporte aujourd'hui dans Le Devoir et comment vous interprétez donc ces propos.
Mme Lemieux: ...
Le Président (M. Boulianne): Mme la ministre, s'il vous plaît...
Mme Lemieux: ...
Le Président (M. Boulianne): S'il vous plaît! Alors, M. le député de Chapleau a la parole.
M. Pelletier (Chapleau): Mme la ministre va pouvoir répondre par la suite.
Le Président (M. Boulianne): S'il vous plaît, oui. S'il vous plaît, est-ce que vous avez terminé, M. le député? Oui. Alors, oui, si vous voulez répondre, Mme Freedman.
Mme Saber-Freedman (Sara): Oui, s'il vous plaît. Alors, je dirai tout simplement que, M. Jedwab et moi, on a toutes sortes de mauvaises qualités mais, heureusement, on n'est pas avocat ni l'un ni l'autre. Alors, on n'est pas en mesure de répondre malheureusement à vos questions. Et j'imagine que vous avez d'autres experts qui seront devant vous qui pourraient peut-être répondre plus clairement à cette question, mais ce n'est pas pour nous autres.
M. Pelletier (Chapleau): Je pourrais adresser la question à la ministre. Vous ne voulez pas répondre, Mme la ministre?
Le Président (M. Boulianne): S'il vous plaît! Alors donc, on garde notre procédure. Alors, vous posez des questions. Il vous reste trois minutes pour poser des questions aux personnes pour comprendre leur mémoire. Si la ministre tout à l'heure, dans son temps, veut répondre, elle pourra répondre. Mais, pour l'instant, continuez à poser des questions aux personnes qui sont là pour leur mémoire.
M. Pelletier (Chapleau): Alors, la question est posée.
Le Président (M. Boulianne): Est-ce que vous avez terminé?
M. Laporte: Bien, non, mais je voulais seulement dire...
Le Président (M. Boulianne): Oui. Alors, M. le député d'Outremont, vous avez encore du temps.
M. Laporte: Je voulais vous dire, M. le Président, que, si la ministre veut prendre mon temps, dans l'éventualité où elle n'en aurait plus, je suis bien prêt à lui donner mon temps pour qu'elle réponde à la question de mon collègue de Chapleau, n'est-ce pas.
Moi, je vais poser juste une petite question, là. À la fin de votre mémoire, à la page 5 de 5, vous dites: «Il s'agit des informations que nous...» Vous parlez des questions que vous avez énumérées plus haut, là: «Il s'agit des informations que nous ne pouvons pas vous fournir, mais nous vous encourageons fortement de vous assurer connaître tous les impacts de ce projet de loi avant de l'adopter.» Bien, disons, l'un des impacts, ou deux des impacts, ou trois des impacts que vous n'avez pas mentionnés dans ça, là, on pourrait-u en connaître? On pourrait-u savoir un peu de quels impacts vous parlez? Vous avez certainement des...
Le Président (M. Boulianne): Alors, Mme Freedman, vous avez la parole.
Mme Saber-Freedman (Sara): Oui, bien sûr. Les écoles secondaires privées anglophones sont, selon ce que, moi, je comprends, très majoritairement subventionnées un petit peu. C'est-à-dire qu'un enfant qui commence à la maternelle dans une école privée anglophone... Et, soyons clairs, au niveau primaire, les écoles anglophones souvent ne sont pas subventionnées. Donc, il commence en maternelle jusqu'en sixième année. Avec les modifications proposées, ces années ne seront plus considérées pour un certificat d'admissibilité. Ce certificat est cependant exigé s'il veut demeurer dans son école, parce qu'au niveau secondaire les classes sont très souvent subventionnées. C'est pourquoi on avait posé la question: Combien de classes existe-t-il en écoles secondaires privées non subventionnées anglophones?
Le Président (M. Boulianne): Merci. Alors, s'il y a consentement donc de la part des deux parties, je vais permettre à la ministre de répondre à la question du député de Chapleau. Alors, pas plus que trois minutes, maximum, Mme la ministre.
Mme Lemieux: Pardon, j'ai perdu... J'étais concentrée...
Le Président (M. Boulianne): Je fais un acte d'exception, on vous donne... Il y a consentement pour que vous puissiez répondre à la question.
Mme Lemieux: Oui, d'accord, oui. J'étais très concentrée. Non, je veux dire rapidement ? puis je ne voudrais pas qu'on entraîne nos invités dans un débat qui nous appartient, à nous, je crois que c'est important de respecter le temps de parole qu'on alloue à nos invités ? que je sais très bien ce que la Charte canadienne et la Constitution nous permettent. Ce matin, on a eu une conversation avec le Mouvement national des Québécois qui l'ont dit à leur manière, et on sait qu'il y a des limites que nous posent la Charte et la Constitution à pouvoir... à notre capacité de pouvoir diriger notre propre politique linguistique.
Et je sais très bien également que le recours à la clause nonobstant ne peut pas s'appliquer à l'article 23, je le sais, ça. Ce que je dis, c'est que nous discutons actuellement de nouvelles dispositions dans le projet de loi n° 104, que certains intervenants ont annoncé, ont signifié ? j'en suis franchement désolée, mais c'est ça, la vie ? qu'ils avaient l'intention de les contester dans le cas où nous déciderions d'aller de l'avant et de les adopter.
Alors, je dis: À terme, au bout de ce processus de judiciarisation, on prendra nos décisions et on utilisera au maximum ce que nous proposent comme moyens et la Charte et la Constitution. Mais il y a d'autres possibilités, on en a discuté ce matin, hein, la possibilité d'essayer de faire lever cette hypothèque de l'article 23. Bon. On n'est pas rendus là, c'est ce que je dis. Je suis parfaitement consciente des limites dans lesquelles notre politique linguistique peut être conduite.
n(16 h 30)nLe Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Alors, merci beaucoup, Mme Sara Saber-Freedman et M. Jack Jedwab, pour votre mémoire. Je demanderais maintenant au Québec Community Group Network de s'avancer, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Boulianne): Alors, bienvenue donc à la commission de la culture. Alors, si vous voulez vous présenter et présenter votre mémoire.
Québec Community Groups Network (QCGN)
M. Maynard (Hugh): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je m'appelle Hugh Maynard, et, à titre de président de Quebec Community Groups Network, je veux d'abord vous remercier d'avoir accepté de nous entendre. J'aimerais également vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui: M. Don Myles, qui est membre du Comité aviseur du English Speaking Catholic Council, et Mme Deborah Hook, qui est la directrice du QCGN.
Actif depuis sept années, le Quebec Community Groups Network est une organisation à but non lucratif qui rassemble 20 organismes communautaires anglophones à travers le Québec. Notre but est de soutenir la vitalité des communautés anglophones minoritaires partout au Québec. Nous voulons également promouvoir et appuyer l'usage de la langue anglaise au Québec. Notre secrétariat a été établi dans la ville de Québec pour permettre une meilleure intégration et coopération avec le gouvernement provincial, puisque nous sommes la seule organisation importante de la communauté anglophone à avoir pignon sur rue dans la Vieille capitale.
À l'instar de toutes les présentations faites par les organismes anglophones à l'occasion des états généraux sur le français, nous sommes conscients que la situation de la langue française et du fait français au Québec est une question qui nous interpelle tous. Nous vivons et choisissons de demeurer dans une province à majorité francophone, et la réalité du fait français nous touche continuellement dans notre vie quotidienne. Nous sommes aussi très fiers de la collaboration enrichissante qui est le fait de la cohabitation de nos deux communautés. Au cours des 30 dernières années, les Québécois d'expression anglaise se sont remis en question, cherchant à redéfinir le rôle et les responsabilités de leur communauté dans le Québec d'aujourd'hui et à revoir leurs attentes face aux citoyens francophones et au gouvernement provincial.
Aujourd'hui, de plus en plus d'anglophones parlent maintenant le français et la génération montante des anglophones du Québec démontre des taux passablement plus élevés de bilinguisme que l'ensemble de la population québécoise. De façon générale, les anglophones utilisent aussi le français beaucoup plus fréquemment dans leur milieu de travail et fréquentent beaucoup plus de francophones. Le nombre de mariages entre anglophones et francophones s'est d'ailleurs multiplié au cours de la dernière décennie.
Oui, nous pouvons aussi affirmer que, depuis 30 ans, la communauté québécoise d'expression anglaise a profondément changé mais ces changements se sont parfois faits au détriment de sa vitalité. De 1971 à 1996, le nombre de Québécois dont la langue maternelle est l'anglais a diminué de façon importante, passant de 13,1 % à 8,8 % de la population du Québec. Concrètement, la population dont la langue maternelle est l'anglais a diminué de 20 % depuis 1971. Le recensement de 1996 fixait à près d'un million le nombre total d'anglophones au Québec. Causée par un taux de natalité à la baisse, une immigration élevée et des restrictions en matière d'accès aux écoles anglaises pour les immigrants anglophones, ensuite pour des citoyens canadiens de langue anglaise et domiciliés au Québec, un fait trop souvent ignoré partout, cette diminution a eu des effets considérables sur les caractéristiques socioculturelles de la population anglophone.
L'évolution de la situation des institutions d'enseignement de notre communauté est également un bon indicateur de l'avenir de cette communauté. Au Québec, la communauté de langue anglaise a vu le nombre d'élèves fréquenter ses établissements de niveaux préscolaire, primaire et secondaire tomber de plus de 250 000 en 1972, à un peu plus de 100 000 en 2001, soit une baisse de 60 % en 25 ans.
Si la protection de la langue française est essentielle, il a été clairement reconnu que celle-ci devait se faire dans un esprit de justice, d'ouverture, dans le respect des institutions de la communauté québécoise d'expression anglaise et celui des minorités ethniques. Or, l'analyse du projet de loi n° 104, qui est présentement à l'étude, démontre que l'intention initiale de la loi 101, qui était de protéger et promouvoir la langue française, intention que nous partageons, a été supplantée par l'introduction de mesures qui ne serviront qu'à pénaliser la communauté anglophone.
Je donne un exemple des mesures qui réduiront l'accessibilité à l'école anglaise publique, et, du fait même, affaibliront le réseau scolaire anglophone. Est-il vraiment nécessaire d'adopter une tolérance zéro pour l'accès à l'école anglaise afin de protéger la langue française? Le législateur doit se poser la question. S'il est adopté, l'article 3 du projet de loi fera en sorte qu'on ne reconnaîtra plus l'enseignement reçu en anglais pour un enfant, ses parents ou ses frères et soeurs dans une école privée non subventionnée aux fins d'admissibilité dans le réseau public anglophone.
Lorsque le gouvernement a annoncé son intention de modifier la Charte de la langue française, il a toujours déclaré que ces modifications avaient pour but de freiner une échappatoire, selon leurs propres mots, qui permettait à un enfant inscrit pendant une courte période de temps, par exemple un an, à l'école anglaise non subventionnée de devenir automatiquement admissible à l'école anglaise. Les modifications inscrites aujourd'hui dans le projet de loi vont beaucoup plus loin que simplement freiner une échappatoire. En effet, on ne reconnaîtra pas la validité des études primaires d'un enfant ayant fréquenté l'école privée anglaise non subventionnée au primaire pour lui accorder l'autorisation de continuer ses études en anglais au niveau secondaire. Que penser du désarroi dans lequel seront plongés plusieurs enfants forcés de s'adapter à un nouvel environnement scolaire, dans une nouvelle langue, lors de leur passage à l'école secondaire, un moment critique de leur développement.
Quant à l'enseignement donné en anglais pour faciliter la scolarisation d'un enfant aux prises avec des difficultés d'apprentissage, il ne sera pas plus reconnu aux fins d'admissibilité à des frères et soeurs. C'est dire que cet enfant avec des besoins particuliers importants ne pourra donc plus compter sur l'aide et l'appui de ses frères et soeurs dans l'environnement scolaire, appui qui est souvent de la plus haute importance pour l'enfant plus démuni. Le QCGN dénonce les modifications apportées sur cette question alors que cette dérogation a été introduite, à l'origine, pour protéger les jeunes anglophones parmi les plus vulnérables. Là encore, combien d'enfants seront touchés par cette mesure?
Further, with regards to the application of the same amendment to sections 81, 85 and 85.1, we must bring to the attention of the commission the serious consequences that arise when applied to children exempted under section 81. The amended Charter would now read: Should these children who are in a special program be ready to move into a regular program, they would no longer be able to continue in English school.
De plus, le QCGN souhaite porter à l'attention de la commission que l'application de la Charte de la langue française oblige les enfants et leurs parents qui vivent au sein de familles reconstituées de souvent faire face à la dure réalité de deux systèmes scolaires, puisque le remariage de parents francophones élimine le droit à l'école anglaise pour l'enfant issu de cette union, et ce, même si ses frères et soeurs nés d'une union précédente sont admissibles à l'école anglaise. Nous croyons que la promotion de la langue française serait beaucoup plus efficace en fournissant des incitatifs plutôt qu'en pénalisant ceux qui, après tout, ne veulent qu'assurer un enseignement de qualité adapté à leur contexte familial et aux besoins de leurs enfants. Nous croyons qu'il n'est pas nécessaire de sortir l'artillerie lourde au nom de la protection de la langue française.
Outre les modifications apportées à l'admissibilité à l'école anglaise, les articles 11 à 28 du projet de loi prévoient la création du Conseil supérieur de la langue française. En ce qui concerne cette section, le Québec Community Groups Network s'interroge d'abord sur la signification du mot «officialisation». Si Le Petit Robert le définit comme étant l'action d'officialiser, nulle part n'avons-nous pu trouver son équivalent anglais «officialization». Nous aimerions que soit clarifiée la question des pouvoirs d'officialisation.
n(16 h 40)n Par ailleurs, lors des représentations de la communauté anglophone devant la commission Larose, les membres ont fait la mise en garde de cesser de franciser le nom de places, de rues ou d'institutions fondées par les membres de la communauté anglophone. Nos ancêtres ont participé à bâtir la province et nous en sommes fiers. Que leurs noms aient été attribués à des rues ou que des villes aient un nom à résonance anglaise leur rend hommage et nous en sommes fiers. Le gouvernement a malheureusement une tendance marquée à modifier les noms anglophones de villes, villages ou municipalités partout au Québec. On arrive ainsi à transformer les noms de Black River ou de English River en Rivière Noire et Rivière des Anglais, alors que ces cours d'eau tenaient leur nom des familles Black et English. Encore une fois, nous rappelons au gouvernement que la participation des anglophones du Québec à l'histoire de la province est une réalité et leur reconnaissance par des désignations toponymiques ne devrait pas être éliminée.
En ce qui concerne un nouvel Office québécois de la langue française, créé par les articles 28 à 33 du projet de loi, son mandat prévoit notamment qu'il fait rapport au ministre, notamment en ce qui concerne les comportements et attitudes des différents groupes linguistiques. Le QCGN s'inquiète de la portée et des effets d'un tel pouvoir.
Le projet de loi prévoit également que «l'Office veille à ce que le français soit la langue normale et habituelle de travail, des communications, du commerce et des affaires dans l'Administration et les entreprises». Par ailleurs, tout ce qui concerne les inspections et les enquêtes demeure inchangé. À cet effet, nous vous rappellerons que la commission Larose avait clairement établi qu'il valait mieux promouvoir la Charte en éduquant plutôt qu'en punissant.
Enfin, on prévoit que l'Office est composé de huit membres, sans donner aucune précision quant à sa représentativité. Pourquoi ne pas stipuler que sa composition devra refléter la société qu'il dessert? De même, la diminution de 12 à huit du nombre de membres au sein du Conseil supérieur de la langue française ne risque-t-elle pas de diminuer la variété des opinions au sein du Conseil en diminuant encore une fois la diversité de la société que le Conseil dessert? Et, lorsqu'on spécifie que la nomination de sept autres membres se fait «après consultation d'organismes [...] représentatifs [...] des communautés culturelles», pourquoi ne pas spécifiquement faire référence à la communauté anglophone? Compte tenu de notre longue tradition et notre rôle dans la fondation de cette province, le QCGN considère inacceptable que la communauté anglophone soit simplement incluse dans la mention générale des communautés culturelles, avec tout le respect que nous avons pour les Québécois qui sont membres des communautés culturelles.
En conclusion, je rappellerais que l'attachement de la communauté anglophone au Québec et sa compréhension du besoin et de la nécessité de protéger et défendre la langue française dans ce dernier bastion francophone en Amérique du Nord ont toujours été clairement réitérés par toutes les associations membres du QCGN qui ont présenté des mémoires devant la commission Larose. Toutefois, nous avons également affirmé notre désir de voir le gouvernement du Québec appuyer sa communauté anglophone et la langue anglaise au Québec.
Au cours des ans, le gouvernement a démontré qu'il était à l'écoute des organismes et institutions de la communauté anglophone. La récente décision de suspendre l'application des changements législatifs prévus pour réduire l'étendue des garanties consenties pour les services en anglais dans le réseau de la santé et des services sociaux le démontrent bien. À la lumière de ces commentaires, le Québec Community Groups Network souhaite vivement que les modifications qui seront apportées à la Charte de la langue française feront en sorte de calmer les inquiétudes de la communauté anglophone qui doit continuellement se battre pour maintenir ses droits au Québec et qui craint que ses membres les plus touchés par les modifications proposées soient ses éléments les plus vulnérables, particulièrement les enfants. Je vous remercie.
Le Président (M. Boulianne): Merci, M. Maynard. Alors, nous allons procéder à une période d'échanges. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lemieux: Alors, merci, M. le Président. Je voudrais saluer donc M. Maynard, M. Myles et Mme Hook, vous remercier de votre présentation, de la qualité de votre mémoire, également. Je dois vous le dire que ça m'apaise de vous entendre parce que, malheureusement, lorsqu'il est question de ce type de discussions, il arrive que quelquefois le ton soit tout à fait inapproprié et ne nous amène pas dans les débats de la manière la plus sereine que nous devrions avoir. Alors, j'apprécie beaucoup la contribution que vous avez aujourd'hui.
Je ferais quelques petites remarques qui sont un peu accessoires mais pour après atterrir sur une question un peu plus importante. Bon. D'abord, vous soulignez des aspects un petit peu plus techniques, du genre le mot «officialisation» et son équivalent en anglais. Ce n'est peut-être pas ce qui est le plus sûr, là; c'est le genre de chose que je vais vérifier.
Vous parlez des questions qui ont un lien avec la toponymie. Il n'y a pas beaucoup de gens qui s'en préoccupent mais c'est pourtant une question très, très, très importante. Je vous rappellerai que, d'abord, moi, je partage tout à fait votre préoccupation, et je rappellerai que la toponymie n'a pas pour objet de franciser; la fonction de la toponymie a pour objet de nommer des lieux selon les règles de l'art, et je crois comprendre que les gens qui travaillent dans cette fonction de toponymie à l'Office sont des gens qui utilisent, qui s'appuient sur ces règles de l'art: quel est l'usage du nom d'un lieu et quelle est l'histoire, etc.? Et l'objectif, ce n'est pas de franciser; l'objectif, c'est de reconnaître et de nommer des lieux avec le plus de rigueur possible. Et, quand vous dites à la page 10, en conclusion à cet élément: «Nous rappelons au gouvernement que la participation des anglophones du Québec à l'histoire de la province est une réalité, leur reconnaissance par des désignations toponymiques ne devrait pas être éliminée», je partage tout à fait cette préoccupation-là, et, s'il vous était signalé des situations qui vous apparaissaient troublantes, j'apprécierais de le savoir. Bon.
Autre chose qui est probablement... Alors, c'était donc des questions à la marge, là. Autre chose qu'il m'apparaît important d'échanger avec vous, c'est le fait que... Je crois que vous convenez ? c'est ce que je comprends, là, à votre propos ? vous convenez qu'il a été légitime pour un gouvernement de faire en sorte de préserver la langue française. Je ne comprends pas que vous nous reprochez et que vous reprochez qu'il y a 25 ans il y a eu des gestes en ce sens-là.
Pour ce qui est de l'accès à l'école anglaise, je me permets de redire que notre projet de loi ne remet pas en cause des principes de base élémentaires, les principes à l'effet par exemple que, s'il y a un ou des parents qui sont eux-mêmes anglophones, qui ont étudié dans le réseau primaire anglais, peuvent transmettre ce droit-là à leurs enfants. On ne remet... d'aucune manière, on ne remet en cause ce principe. Si des enfants qui, pour toutes sortes de raisons, ont étudié en grande majorité au niveau primaire en anglais, ils continueront de le faire. D'aucune manière, on ne remet ça en cause.
On a réussi ? et je crois que ça a été une décision... et un geste qui a été sage ? à organiser notre réseau scolaire autour des commissions scolaires linguistiques permettant d'être au clair sur le réseau scolaire francophone, les services devant être donnés, le réseau scolaire anglophone et les services devant être donnés, on a réussi à le faire. On a investi autant d'argent dans le réseau des commissions scolaires qui ont une vocation publique ? francophone ou anglophone. Je veux dire, ces services-là sont accessibles, on ne remet aucunement en cause ces principes-là.
Ce que notre projet de loi dit, pour ce qui est de la question donc de l'accès au réseau d'enseignement anglais, c'est: Il y a un truc, il y a une astuce qui s'est développée ces dernières années qui font en sorte que les gens, de manière indirecte, se retrouvent avec un droit constitutionnel. Il faut arrêter ça. C'est une mesure qui est limitée, qui concerne, ça dépend des points de vue, mais somme toute pas un très grand nombre de personnes. Je disais des chiffres: Cette année, on parle d'à peu près 1 000 nouvelles admissions qui auraient été faites à partir de cette astuce. On a donc un article qui limite ça, c'est une mesure limitée pour régler un problème limité avant de se retrouver devant une situation qui n'est plus gérable et qui ne sera plus défendable. Et j'irais même jusqu'à dire que, pour la communauté anglophone, je crois qu'on les préserve aussi d'un charriage qui pourrait, à terme, vous entraîner peut-être dans des réalités que vous ne voulez pas. Moi, je crois qu'on est mieux de régler ce problème limité maintenant, alors qu'il est sous contrôle, puis éviter de se retrouver dans 10 ou 15 ans embourbés dans une situation où, là, on mélangera tout, y compris les droits fondamentaux des minorités. Alors, j'aimerais ça vous entendre à ce sujet.
n(16 h 50)nLe Président (M. Boulianne): Merci, Mme la ministre. Oui. Alors, M. Maynard ou Mme Hook.
M. Maynard (Hugh): Je passe la parole à M. Myles.
Le Président (M. Boulianne): Oui.
M. Myles (Don): Oui. J'aimerais parler sur deux points, Mme la ministre. Premièrement, brièvement, sur la question de truc. Nous ne le voyons pas comme un truc, nous le voyons comme l'application de la loi, telle qu'elle existe. Et nous trouvons difficile à comprendre pourquoi nous voulons trouver encore des mesures pour restreindre l'accessibilité à l'école anglaise. Alors, ça, nous ne le voyons pas comme un truc.
L'autre exemple que je crois qui est très important: vous avez dit que vous voulez, comme gouvernement évidemment, respecter les droits de la minorité anglophone en ce qui concerne si les parents sont anglais puis ils ont des enfants évidemment qui sont anglais, on doit les recevoir dans les... on peut les recevoir dans les écoles anglaises; alors ils peuvent avoir l'admissibilité. Et c'est là qu'on trouve une contradiction, parce que ce n'est pas ça qui se passe.
On refuse, on refuse à des enfants l'accessibilité à l'école anglaise, dont les deux parents sont des citoyens canadiens. Les deux parents sont anglais, sont anglophones, les deux parents ont fait toutes leurs études en anglais mais leurs enfants ne sont pas admissibles à l'école anglaise ici, selon les dispositions de la loi.
Le Président (M. Bergeron): Oui, Mme la ministre.
Mme Lemieux: On a eu un petit échange tout à l'heure sur certains chiffres, et ? je ne sais pas, je crois que vous étiez dans la salle ? l'Institut Missisquoi a mis sur la table un certain nombre de chiffres, et, grosso modo, on se rend compte que... parce que ce que je crains beaucoup... Enfin, ce que je crois que vous craignez, c'est qu'il y ait de moins en moins d'anglophones qui soient dans le réseau scolaire anglophone alors qu'on voit que les projections sont plutôt de stabilité. Quand on regarde, là, les projections, région par région, pourquoi dites-vous, à votre mémoire: «Sachant que nous sommes dans un univers de stabilité»? Je veux comprendre cette crainte-là, là.
Le Président (M. Bergeron): Est-ce que M. Myles, c'est vous qui répondez?
M. Myles (Don): Oui.
Le Président (M. Bergeron): Vous avez la parole.
M. Myles (Don): Bon. Disons que, si vous me dites que, là, nous sommes stables, alors c'est fini, plus d'enfants permis à l'école anglaise dans le contexte de stabilité. Nous avons sûrement... Quand on croit que c'est l'éducation qui est l'outil privilégié ? hein? ? de maintenir et d'aider à épanouissement de la langue et la culture... Alors, c'est évident que nous croyons que de prendre d'autres mesures pour restreindre l'accès à l'école anglaise, dans notre vue, n'est pas nécessaire et n'est pas juste. Mais, plus important, plus important encore ? et je reviens là-dessus, si vous me permettez ? c'est qu'on refuse des enfants dont les parents sont anglophones, sont des citoyens, ils ont fait leur éducation en anglais, mais les dispositions de la loi ne leur permettent pas d'aller à l'école anglaise. Et c'est dans ce contexte-là quand vous avez mentionné ? évidemment, je suis complètement d'accord avec vous ? qu'on doit respecter l'accès à l'école anglaise pour les anglophones.
Le Président (M. Bergeron): Merci. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Bien là, je ne veux pas... je ne suis pas sûre que je vais vous convaincre puis vous ne me convaincrez pas non plus. Alors, je veux qu'on reste quand même dans un ton civilisé et respectueux. Mais, vous savez, il y a des distinctions à faire à l'affirmation que vous faites.
Des gens qui, à l'extérieur du Canada, auraient étudié en anglais, effectivement ça ne donne pas de droit particulier ici, parce qu'on aurait été dans une dynamique où, finalement, la plupart des allophones auraient étudié dans le réseau anglais. Je veux dire, on est parti d'une situation... c'est clair, c'est clair qu'on est parti d'une situation où la majorité de ce qu'on appelle assez gauchement les allophones fréquentaient le réseau anglophone, le réseau d'enseignement anglophone. Et c'est clair qu'il y avait un objectif d'essayer de faire en sorte qu'un beaucoup plus grand nombre étudie dans le réseau francophone. Ça a été un choix de base. Et ça, visiblement, on ne s'entend pas sur ce choix de base.
Je reviens tout de même à ma question. On le sait et vous savez qu'aujourd'hui il y a eu un certain nombre de décisions qui ont été rendues publiques par la Cour d'appel du Québec qui me font dire qu'on n'est pas, vous connaissez l'expression, on n'est pas complètement dans le champ, puisque la Cour nous confirme que le fait que dans notre propre loi nous imposions un critère d'avoir étudié en majeure partie, n'était pas un critère incompatible avec la Charte canadienne des droits. Donc, on n'est pas complètement dans le champ lorsqu'on dit qu'on ne peut pas tolérer cette dynamique où des gens s'achètent un droit constitutionnel par un truc. Et, éthiquement parlant, bon, je comprends que vous ne me direz probablement pas votre niveau de confort par rapport à ça, mais l'enjeu, il est là. Je crois qu'on ne peut pas s'acheter un droit par un truc.
Le Président (M. Bergeron): M. Maynard, vous voulez parler.
M. Maynard (Hugh): Oui. J'apprécie le point de vue. Mais, de notre part, dans les dernières 25 années, nous avons perdu 150 000 élèves dans nos écoles. Bon. Ça, c'est une grande réduction pour n'importe quelle communauté.
On voit les changements à une autre restriction, et on pose la question: Est-ce qu'on doit faire face à une autre réduction dans le nombre d'étudiants dans nos écoles? Ce n'est pas une question constitutionnelle; c'est une question particulièrement pour les familles et pour les enfants.
Deuxièmement, il y a deux communautés anglophones. Je ne veux pas diviser, mais, dans les régions, les écoles sont à risque. En Gaspésie, j'ai parlé à des gens. Il y a trois petites écoles, c'est en phase de fermeture. Et ça, ce n'est pas de la stabilité.
S'il y a une loi pour la province, c'est pour tout le monde. Et pourquoi faire pour régler ? s'ils acceptent qu'il y a un problème avec le truc ? pourquoi faire des règlements qui posent une pénalité aux autres en même temps pour fermer le trou? Ça, ce n'est pas juste.
Et je pense qu'il ne faut pas... un peu d'équité. Et ça, c'est difficile à écrire dans une loi. Parce que ce n'est pas exact pour tout le monde et ce n'est pas une question que c'est clair, noir et blanc. Mais, effectivement, notre point de vue, c'est: Il y a des problèmes dans notre système de réseau d'enseignement, et, une partie de ça, à cause de la loi qui est en place. Et, maintenant, on voit que les changements sont des restrictions en plus. Peut-être pour des raisons valables, mais aussi, ça impose des problèmes en plus des restrictions qui sont là.
Le Président (M. Bergeron): Parfait. Merci, M. Maynard. Le temps est terminé, de ce côté-ci. Pour le deuxième bloc, du côté de l'opposition officielle, M. le député d'Outremont, vous avez la parole.
M. Laporte: Merci, M. le Président. Je vais être bref. La ministre nous a donné tantôt, là, une distribution de transferts passant de l'école privée à l'école publique. Vous avez dit: En 1995, il y en a eu 481; en 1996, il y en a eu 566; 1999, 819, puis 2001, 1 063. Ça, mathématiquement, je pense que c'est ce que les mathématiciens appellent un «ensemble de taille limitée à progression rapide».
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Laporte: C'est ça. Ce sont de petits chiffres. Vous êtes d'accord, M. le Président, puisque que vous êtes mathématicien vous-même. Bon.
Le Président (M. Bergeron): Oui.
M. Laporte: Au fond, ce qui vous sépare ? et je n'aime pas le terme «nous» ? mais ce qui nous sépare de Mme la ministre, c'est que vous, vous n'avez pas l'air à trouver ça dangereux, le fonctionnement de cet ensemble de taille limitée à croissance rapide, puis elle, elle trouve que c'est bien dangereux et que c'est en train, à terme, de remettre en question les grands équilibres du régime d'enseignement au Québec.
Mme Lemieux: ...pas pire, par exemple.
M. Laporte: Moi, je ne vous donnerai pas mon opinion là-dessus...
Mme Lemieux: C'est de valeur, hein? Ha, ha, ha!
n(17 heures)nM. Laporte: ...mais je vais certainement la donner à mes collègues. Puis, si la ministre veut que je lui donne, je lui donnerai, mais il va falloir qu'elle me la demande. O.K.? À mon avis...
Mais je voudrais savoir... Ma question, c'est: Coudon, vous, est-ce que vous pensez que ces chiffres décrivent une tendance dangereuse pour l'avenir du français, l'équilibre des grands équilibres du régime linguistique d'enseignement, et ainsi de suite? Vous nous avez dit que, pour ce qui est des... Il y a un certain nombre d'inconvénients pour les écoles anglaises, là, mais il y a un jugement de dangerosité qui vous sépare, et moi, je voudrais savoir, vous autres, trouvez-vous ça dangereux, ces chiffres-là? Parce que, Mme la ministre, elle trouve que c'est bien dangereux, elle, ces chiffres-là.
Le Président (M. Bergeron): Qui répond? M. Maynard? M. Myles? M. Maynard.
M. Maynard (Hugh): Je pense... Dangereux, je pense que non. Et j'ai fait le point au début que la population anglophone au Québec est plus bilingue. C'est l'intégration dans tous les comportements de la société. Et, dans ce sens-là, dans les écoles, ils ont plus... Et plus des francophones dans le mariage et l'intégration. Mais, deuxièmement, je pointe dans le sens que la grande réduction du nombre des élèves... Et si ça augmente un peu... Parce que, si on compare l'augmentation de la réduction, bon, pour moi, ce n'est pas dangereux.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Maynard. Autre...
M. Laporte: M. Myles, est-ce que vous avez un commentaire, vous, là-dessus?
M. Myles (Don): J'appuie les commentaires de M. Maynard.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bergeron): M. le député d'Outremont, avez-vous une autre question?
M. Laporte: Non, mais je trouve... Enfin, je suis très, très, très content d'apprendre qu'il y a des gens ici, là, au Québec, qui sont de bonne foi, là, et des gens qui sont généreux, qui sont remplis de bienfaisance et de bienveillance, n'est-ce pas, à l'égard du français, qui trouvent que ces données-là, qui effraient évidemment la ministre, ne les effraient pas. Parce que c'est du point de vue des grands équilibres, là, on ne parle pas... Si les chiffres de la ministre étaient 5 280, 17 324, 34 642 puis 47 363, là je dirais: La tendance, là, ce n'est plus un ensemble de taille limitée à progression rapide, là, on est en présence d'un grand ensemble ou d'un ensemble à taille élargie à croissance rapide. Ça, ça peut produire ce qu'on appelle un effet de déboulement. À un moment donné, ça grimpe d'une façon asymptotique. Mais là on n'est pas devant des grands chiffres comme ça, là. Donc, le jugement fondamental qui nous confronte, c'est la question du porter un jugement sur la dangerosité d'un phénomène. Je n'ai pas d'opinion là-dessus... J'en ai une, mais je la garde pour moi. Mais il semble que ça vous divise. Ça vous divise.
Le Président (M. Bergeron): Mais j'ai l'impression, M. le député d'Outremont, que c'était davantage du commentaire. Et, puisque la durée de temps imparti n'est pas asymptotique, je vais passer la parole au député de Jacques-Cartier pour une première question. M. le député.
M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue. C'est, je pense, la première fois dans ma vie que je dois questionner un ami de classe de l'école secondaire. Mais M. Maynard et moi, on se connaît très bien.
Mais on va revenir au sérieux de l'affaire, et je pense qu'il y a un passage très important dans le mémoire, sur la page 8, qui est soulevé. Laisse de côté le grand débat sur est-ce que c'est un truc ou non, il y a un deuxième alinéa dans l'article 3, et ça, c'est beaucoup moins... Pour moi, ça pose des problèmes graves, parce qu'on touche l'article 81 et l'article 85.1. Et c'est dommage que le ministre responsable, le ministre de l'Éducation, n'est pas parmi nous, parce que, ça, c'est les choses qui touchent des familles qui sont en énorme difficulté. Et qu'est-ce qu'il faut faire pour avoir un enfant accepté? Selon l'article 81, c'est une dure épreuve pour ces familles, parce qu'il faut que votre enfant ait deux ans d'échec, deux ans en arrière de sa classe à l'école avant d'être accepté dans 81.
La ministre a dit tantôt, M. le Président, qu'on n'a pas à remettre en question les grands principes de la Charte. Or, il y a un principe qui était là dès le départ, de garder les familles ensemble, et on a toujours dit que les familles, on va les garder avec la même journée pédagogique, les mêmes problèmes, et tout le reste. Il faut garder ces familles ensemble. Alors, quand je vois le deuxième alinéa qui est souligné dans votre mémoire, ça soulève des problèmes très graves, parce que, de toute évidence, ce sont les familles anglophones, pour une raison ou une autre, qui ne sont pas admissibles à l'école anglaise qui ont, après deux ans d'échec avec un enfant qui est en énorme difficulté, réussi de convaincre les psychologues, et c'est... Il faut sortir le règlement pour le lire, ce n'est pas quelque chose à la légère d'être admissible selon l'article 81, qu'est-ce qu'il y a d'écrit. Je sais, M. Myles, l'a appliqué parce qu'il a travaillé longuement pour la commission scolaire Baldwin-Cartier à l'époque, mais 81...
Deuxièmement, 85.1, c'est où il y a une difficulté grave d'ordre familial ou humanitaire, 500 cas depuis 25 ans. Alors, on ne parle pas ici d'un énorme nombre de personnes, mais qu'ils ont fait la preuve, ils ont passé par tout le processus: la personne désignée à Montréal qui l'a refusé, un comité de révision qui a donné une approbation qui est envoyée au ministre, parce que, au bout de la ligne, c'est le ministre lui-même qui signe ce genre de lettre.
Alors, pourquoi les mettre dans le projet de loi? Je ne comprends pas, mais je veux... Soit M. Maynard ou M. Myles qui ont... Surtout M. Myles, qui a appliqué, c'est quoi, les genres de familles, c'est quoi, les genres de situations qui sont couvertes par les sections 81 et 85.1? Parce que, de mon expérience comme député, ce sont toujours les familles qui sont en crise. Alors, les mettre à côté du soi-disant truc de la ministre, je trouve regrettable, parce que vraiment, ici, ce sont des familles qui sont en énorme difficulté, et pourquoi elles sont associées avec ce soi-disant truc, je ne comprends pas, M. le Président.
Le Président (M. Bergeron): Alors, si je comprends, moi, c'est que M. Myles, c'est vous qui allez formuler une certaine forme de réponse.
M. Myles (Don): Oui.
Le Président (M. Bergeron): Vous avez la parole.
M. Myles (Don): Merci. Oui, sûrement, il y a plusieurs choses, et j'aimerais revenir sur l'exemple que nous donnons dans le mémoire. Si on était pour appliquer la loi telle que présentée dans la loi n° 104, on pourrait avoir un élève en trouble d'apprentissage, bon, qui est exempté, alors cet enfant-là puisse fréquenter l'école anglaise pour avoir les services nécessaires. De un. Il y a de l'amélioration dans la situation de cet enfant, la recommandation c'est: Nous allons essayer cet enfant-là dans le programme régulier maintenant. Si... Et peut-être que je me trompe, mais, si je lis la loi telle que rédigée, cet enfant-là doit transférer à l'école française maintenant pour essayer, pour voir si qu'est-ce que nous avons fait à l'école anglaise, qu'est-ce que...... l'amélioration qu'il y a eu à l'école anglaise, est-ce qu'on peut le continuer dans l'école française. Je pense que ce n'est pas raisonnable, ce n'est pas réaliste de prendre un enfant qui a déjà des difficultés...
Et aussi cette famille-là... On prend ces articles-là, les familles ont des frères puis des soeurs. Alors, si les frères puis les soeurs ne suivent pas l'enfant, tel qu'on pouvait faire avec la loi existante, là, maintenant, avec l'organisation des commissions scolaires sur la base linguistique, non seulement que les frères puis les soeurs doivent changer d'école dans le même système, ils doivent changer de système complètement. Alors, tant qu'à nous, les familles ont déjà assez... Ces enfants-là ont déjà assez de difficultés, de problèmes, de leur en imposer d'autres, nous croyons que ce n'est pas réaliste, ce n'est pas juste sur le plan humain, sur le plan familial, sur le plan des jeunes enfants. Alors, c'est pour ces raisons-là que nous avons signalé ce problème-là. Espérons que nous allons apporter des changements.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Myles. Vous avez une autre question, M. le député de Jacques-Cartier?
M. Kelley: Oui. Très rapidement, je sais que mon collègue de...
Le Président (M. Bergeron): Parce que le député de Vaudreuil a demandé la parole.
M. Kelley: Oui, je suis conscient, mais...
M. Marcoux: Vas-y.
Le Président (M. Bergeron): Allez-y.
M. Kelley: Je vois également, M. Myles, que vous soulevez un autre point qui est important, parce que souvent, dans les systèmes scolaires, il y a les méthodes d'apprentissage différentes pour les personnes qui ont des problèmes auditifs, pour les problèmes qu'il y a d'autres handicaps. Souvent, dans une même région, il y a une commission scolaire qui est mieux adaptée, mieux équipée. Et, quand je vois dans l'article 6 qu'on veut refermer davantage pour la possibilité de... Parce que c'est peu de gens qui sont en crise, et je veux le signaler. Et, j'invite tous les membres de la commission de lire le règlement sur l'application de l'article 81, ce n'est pas quelque chose qui est pris à la légère, c'est vraiment... On cerne les enfants en énorme difficulté. Et, moi, comme parent, quand je vois les enfants en difficulté, je sais à quel point la frustration d'un enfant qui a des difficultés en classe, qui a des difficultés dans ses devoirs, et tout le reste, et le mettre ici, dans ce projet de loi, je ne comprends pas. Mais ça va causer énormément de problèmes au niveau humain.
n(17 h 10)n Même pour le 85 heures, moi, pratico-pratique, M. le Président, moi, j'ai eu un fonctionnaire, une fois, me dire de chercher les dossiers des cas de la mère de l'enfant en question, sa mère était une prostituée sur le boulevard Saint-Laurent. Alors, crois-le ou non, une prostituée sur le boulevard Saint-Laurent, elle n'a aucun intérêt dans son enfant et n'avait pas ses papiers de l'école primaire non plus. Mais il faut passer par tout un régime, parce qu'il faut ce genre de flexibilité. Heureusement pour ce jeune enfant, une tante était prête à le prendre dans sa maison, et l'envoyer à l'école, et essayer de lui donner une vie normale. Mais il faut passer par tous les appels et les motifs humanitaires, et tout ça. Mais, maintenant, c'est de mettre ça dans un article comme un autre truc dans le propos de ministre. Je pense, c'est quelque chose que je questionne.
Je suis heureux que M. Myles a souligné que, également sur la question des méthodes qui, souvent, sont différentes d'une commission scolaire à l'autre, qu'est-ce qu'on veut faire, c'est chercher un moyen d'aider ces enfants et garder les familles ensemble, qui était toujours un principe de la loi 101 dès le départ, qu'on garde les enfants ensemble. Alors, si un enfant peut aller dans une école anglaise, l'ensemble de la famille peut aller. C'est l'économie de la loi dès le départ, et remettre ça en question ici pour un très peu nombre de cas, je ne comprends pas pourquoi. C'est, à mon avis, «mean-spirited».
Le Président (M. Bergeron): M. Myles, vous voulez intervenir? Ou M. Maynard? M. Myles.
M. Myles (Don): Bien, je pense que M. Kelley l'a bien dit. Ça reflète très bien nos pensées sur cette question-là.
Le Président (M. Bergeron): Parfait. Merci. S'il y a consentement, puisque vous n'êtes pas membre de la commission. Il y a consentement pour que M. le député de Vaudreuil puisse poser une question?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Bergeron): Alors, M. le député de Vaudreuil, posez votre question, en vous disant qu'il reste moins de 2 minutes.
M. Marcoux: Merci. Merci, M. le Président. Je m'excuse d'avoir manqué le début de la commission, j'ai dû retourner vaquer à d'autres occupations. D'abord, un premier commentaire, je sais que mon collègue d'Outremont a cité des chiffres qui, je comprends, ont été énoncés par la ministre au début de l'après-midi. Et je comprends également que la ministre doit déposer un tableau, je pense, en ce qui a trait aux élèves, là, aux enfants qui transfèrent à l'école publique, parce que ça ne paraissait pas concorder, en tous les cas, avec certains tableaux que nous avions du ministère de l'Éducation, et je comprends que nous aurons ces tableaux-là de la ministre.
Simplement une question, dans votre mémoire, M. Maynard, à la page 7, vous parlez, vous indiquez que vous aviez compris que la ministre voulait fermer une échappatoire et vous dites: Bien, là, c'est plus que fermer une échappatoire, et vous semblez indiquer, à moins que ce ne soit pas correct, que, s'il y avait une période de définie, par exemple, si on disait: Il faudrait qu'un enfant fasse tout son primaire... Si un enfant avait fait tout son primaire, on serait d'accord d'exiger, par exemple, qu'un enfant fasse tout son primaire. Je ne sais pas si ça correspond à ce que vous mentionnez quand vous dites: On ne reconnaîtra pas la validité des études primaires, par exemple, d'un enfant ayant fréquenté l'école. Alors, est-ce que vous pourriez nous donner un peu plus d'explications?
Le Président (M. Bergeron): Il ne reste que 20 secondes.
M. Marcoux: Oui. Quand vous dites fermer l'échappatoire, c'est plus que ça ou il y aurait des conditions qui feraient que ça pourrait fonctionner pour vous?
Le Président (M. Bergeron): M. Maynard, vous avez à répondre... M. Myles.
M. Myles (Don): Bon, je pense, quand on dit fermer l'échappatoire, c'est entre guillemets, là, parce que, comme on l'a mentionné tantôt, nous autres, on ne voyait pas ça comme... On ne voit pas ça comme un truc. On ne voit pas ça comme si vous faites deux ans, ou trois ans, ou quelque chose. Il y a dans la loi des prévisions qui permettent l'accessibilité à l'école anglaise. Alors, on a décidé, avec la loi 101, de restreindre l'accessibilité à l'école anglaise et on a choisi... Bien, on a été voir cette question-là. Pour nous, on ne comprenait pas ou... Nous savons qu'est-ce que vous recommandez ou qu'est-ce que le projet de loi dit, mais nous ne voyons pas la nécessité de fermer comme une boutique de cette échappatoire.
Le Président (M. Bergeron): Parfait. Merci bien, M. Myles, M. Maynard, Mme Hook.
Alors, j'appellerais à se présenter l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Bergeron): Alors, messieurs dames, bonjour et bienvenue. Dans un premier temps, si vous pouvez vous présenter, s'il vous plaît.
Association des commissions scolaires
anglophones du Québec (ACSAQ)
M. Paterson (Ron): Oui. M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, j'aimerais d'abord vous remercier de nous avoir invités...
Le Président (M. Bergeron): Pardon, excusez-moi, j'aimerais connaître votre nom dans un premier temps.
M. Paterson (Ron): O.K. Mon nom, c'est Ron Paterson. Je suis le président de l'Association des commissions scolaires anglophones pour la province de Québec.
Le Président (M. Bergeron): Et vous êtes accompagné de madame et de monsieur?
M. Paterson (Ron): Oui, à ma gauche, Mme Aline Visser, la vice-présidente; et, à ma droite, M. Jeff Polenz, directeur général.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Paterson. Vous pouvez commencer l'exposé de votre mémoire, et je vous rappelle que vous avez 15 minutes pour le faire.
M. Paterson (Ron): Merci. L'Association des commissions scolaires anglophones du Québec représente les neuf commissions scolaires anglophones du Québec. Parmi les principaux mandats qui lui sont confiés, l'Association a comme objectif de défendre les intérêts de ses membres et de faire avancer la cause de l'éducation au Québec. À cette fin, l'Association est souvent appelée à réagir aux initiatives du gouvernement et, à la suite de la consultation des commissions scolaires membres, à formuler des recommandations concernant les projets de loi affectant le système d'éducation.
Le projet de loi n° 104 intitulé Loi modifiant la Charte de la langue française affecte directement les commissions scolaires, les parents et les élèves desservis par le réseau des écoles anglophones. Par le présent mémoire, l'Association veut manifester l'accord général au sein de l'Association qui a fait l'objet d'une résolution adoptée à l'unanimité le 11 mai, lors de l'assemblée générale annuelle de l'Association.
Le projet de loi n° 104 apporte des modifications à la Charte de la langue française au chapitre de la langue d'enseignement, en ce qui a trait à l'admissibilité à l'enseignement en anglais. Ces dispositions nous préoccupent et sont traitées dans ce mémoire.
D'abord, il est important de se rappeler que les dispositions actuelles de la Charte de la langue française en ce qui a trait à l'admissibilité à l'enseignement en anglais s'appliquent à toutes les écoles publiques relevant des commissions scolaires anglophones et à tous les établissements d'enseignement privés agréés aux fins de subventions. Ces dispositions définissent des règles précises qui tiennent compte du principe selon lequel l'enseignement constitue la majeure partie de l'enseignement reçu en anglais ainsi que le principe que les enfants qui se trouvent dans des situations exceptionnelles méritent une attention particulière. Par la définition de ces exceptions, le législateur a reconnu, à compter de 1977, que certains enfants, pour des raisons reliées à leur développement social ou scolaire, méritaient d'être exemptés. Le législateur a aussi reconnu l'importance de l'unité familiale en permettant aux frères et soeurs d'un enfant ainsi exempté d'être exemptés aussi.
n(17 h 20)n L'impact des dispositions concernant l'admissibilité à l'enseignement en anglais sur la taille relative et la composition du réseau des écoles anglophones au cours des 25 dernières années est bien documenté. En 1976-1977, un an avant l'adoption de la Charte de la langue française, la proportion des élèves en éducation préscolaire et en enseignement primaire et secondaire fréquentant l'école anglaise était de 16,6 %. En 1997-1998, cette proportion a diminué à 10 %, taux qui est demeuré ? ça, c'est important ? stable au cours des dernières années.
Compte tenu du taux de natalité bas et de l'immigration interprovinciale, rien ne nous suggère que la taille relative du réseau des écoles anglophones augmentera de façon significative dans un proche avenir. En effet, dans bon nombre de régions du Québec, le ministère de l'Éducation prévoit une baisse de la population étudiante des commissions scolaires anglophones au cours des prochaines années. Compte tenu de ce contexte et des principes qui sous-tendent les règles actuelles d'admissibilité, l'Association croit que les modifications proposées ne sont pas justifiées et vont à l'encontre du meilleur intérêt de certains enfants et de leurs familles.
Le projet de loi n° 104 apporte des modifications qui, en général, ne répondent à aucune crise en matière de langue d'enseignement ni augmentant les chances de réussite de certains élèves. De plus, nous croyons que certaines modifications ne répondent pas aux exigences constitutionnelles établies en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés et, si elles sont adoptées, feront l'objet sans doute de poursuites judiciaires.
Avant d'entreprendre une analyse plus détaillée du projet de loi n° 104, nous aimerions conclure nos remarques préliminaires en attirant l'attention au préambule de la Charte de la langue française qui précise que l'Assemblée nationale est résolue à faire du français la langue commune du domaine public et entend poursuivre cet objectif dans un esprit de justice et d'ouverture et dans le respect des institutions de la communauté québécoise d'expression anglaise. Selon nous, le projet de loi n° 104 n'a pas atteint cet objectif louable.
L'article 3 du projet de loi n° 104 modifie l'article 73 de la Charte de la langue française par l'insertion d'une disposition selon laquelle l'enseignement en anglais reçu au Québec dans un établissement d'enseignement privé non agréé aux fins de subventions n'est plus reconnu comme critère d'admissibilité valide. Cette disposition s'applique non seulement à l'enfant concerné, mais aussi à ses frères et soeurs et, éventuellement, à une date à être déterminée par le gouvernement, à la mère et au père de l'enfant concerné.
De plus, selon l'article 3, il n'est pas tenu compte non plus de l'enseignement reçu en anglais en vertu des articles 81, 85 et 85.1 comme critère d'admissibilité de l'enfant à l'enseignement en anglais.
L'article 5 du projet de loi n° 104 explique davantage l'intention du deuxième alinéa de l'article 3 en éliminant des références aux articles 81 et 85.1 comme critères d'admissibilité aux fins de l'application de l'article 73. Encore une fois, cela entraîne une perte de droits individuels et réduit le bassin de personnes admissibles à recevoir l'enseignement en anglais.
L'article 6 du projet de loi n° 104, qui modifie l'article 81 par l'insertion d'une prérogative, permet l'obtention d'une dérogation lorsqu'une telle mesure est requise pour favoriser l'apprentissage de l'enfant. Cet article empêche aussi les frères et soeurs de l'enfant d'obtenir une dérogation.
L'Association prétend que cet article ne tient pas compte des dispositions constitutionnelles, car l'alinéa 2 de l'article 23 de la Charte ne fait aucune distinction quant à l'enseignement dans la langue de la minorité reçu dans un établissement d'enseignement public ou privé ni à la situation particulière de l'enfant. L'introduction de cet article remet en question les droits des personnes en vertu de l'article 23 et, dans le cas du deuxième alinéa, élimine le droit des enfants qui présentent des difficultés d'apprentissage de recevoir l'enseignement en anglais, des enfants qui séjournent de façon temporaire au Québec ou des enfants qui se trouvent dans une situation grave d'ordre familial ou humanitaire d'être admissibles, ainsi que leurs descendants, à poursuivre leur enseignement en anglais. Selon nous, cette modification n'est pas justifiée.
D'abord, il est important de se rappeler que l'article 81 prévoit que les enfants qui présentent des difficultés graves d'apprentissage peuvent recevoir l'enseignement dans un environnement linguistique qui accroîtra leurs chances de réussite. À l'heure actuelle, le gouvernement définit par règlement les catégories d'enfants admissibles ainsi que la documentation à l'appui en vertu d'obtenir une exemption.
À la lumière du règlement actuel, nous nous demandons la raison d'une telle prérogative. Est-ce que le but est de restreindre l'admissibilité des enfants potentiels en basant les critères d'admissibilité uniquement sur le rendement scolaire sans tenir compte de leur développement comportemental ou social? Si cela est le cas, nous aimerions rappeler à la commission que, conformément à l'article 36 de la Loi sur l'instruction publique, l'école «a pour mission, dans le respect du principe de l'égalité des chances, d'instruire, de socialiser et de qualifier les élèves». Or, la loi confie à l'école un mandat qui va au-delà du rendement scolaire formel.
En général, les élèves qui présentent des difficultés graves d'apprentissage peuvent aussi manifester des problèmes d'ordre social. Afin de résoudre ces problèmes, il faut tenir compte non seulement de l'intervention du personnel professionnel spécialisé, mais aussi de l'appui de la famille. La modification proposée à l'article 81, qui ne permet pas aux frères et soeurs de l'élève ayant des difficultés graves d'apprentissage d'être admis à l'enseignement en anglais, ne fait qu'exacerber une situation difficile que vivent ces familles. Cette modification aurait pour effet de diviser les membres de familles en deux systèmes scolaires différents dotés de politiques, de pratiques, de langues de communication et d'horaires différents. En bref, ces familles méritent l'appui de la société et non pas d'autres complications.
En plus des considérations familiales et sociales, nous nous demandons si la modification à l'article 81 est justifiée en ce qui concerne le quantum. Une analyse préliminaire de l'application de l'article 81 actuel relève que, pour les deux commissions scolaires anglophones de Montréal qui représentent 60 % des élèves anglophones du Québec, le nombre total d'élèves déclarés admissibles en vertu de l'article 81, y compris les frères et soeurs, est moins de 300 par année. Cela représente à chaque année moins de 5 % du nombre total d'élèves déclarés admissibles aux écoles anglaises.
Le Président (M. Bergeron): Je vous rappellerais, M. Paterson, qu'il vous reste deux minutes.
n(17 h 30)nM. Paterson (Ron): Ah oui? En terminant, l'Association croit que, compte tenu de l'évolution démographique du système scolaire du Québec, l'ensemble des modifications proposées au chapitre de la langue d'enseignement ne sont pas justifiées. Concernant bon nombre de modifications, les droits fondamentaux minoritaires en langue d'enseignement garantis par la Charte des droits et libertés sont en jeu, et ces modifications ne satisferont pas, à notre avis, aux exigences imposées par les tribunaux. De plus, un nombre restreint de familles auront maintenant à faire face à d'autres fardeaux et complications qui ne peuvent pas être conciliés avec les situations difficiles qu'elles vivent déjà.
En bref, nous faisons appel au gouvernement de retirer les articles 3 à 9 du projet de loi n° 104. Merci.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Paterson. Et nous entrons dans le vif des débats, dans un premier bloc de 15 minutes réservé à la majorité ministérielle. Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. Paterson, je vous remercie de votre présentation. Je vous salue ainsi que les gens qui vous accompagnent. Un certain nombre de remarques. Disons que je constate qu'on n'est pas d'accord. Ça, ça m'apparaît assez clair. On peut le faire en tout respect, mais je crois qu'on s'entend sur le fait qu'on ne s'entend pas, hein?
Par ailleurs, je voudrais quand même apporter un certain nombre de précisions. Vous dites assez rapidement dans votre mémoire: «La taille relative du réseau des écoles anglophones augmentera de façon significative.» Non, pardon, excusez-moi, vous posez la question du fait qu'il y aura de moins en moins d'enfants dans le réseau d'enseignement anglais. Je voudrais tout de même vous signifier que les enjeux de la démographie, ils touchent autant la communauté anglophone que les francophones au Québec. Alors, cette problématique-là, qu'il y ait moins d'enfants dans les écoles anglaises, elle est aussi vécue dans les écoles françaises. Vous en convenez avec moi, les enjeux de démographie, nous les partageons, et je vous signalerais que les données et les projections du ministère de l'Éducation que j'ai sous les yeux nous disent que, d'ici cinq ans, donc 2006, 2007, nous passerions de 877 000 enfants dans le réseau des commissions scolaires francophones à 809 000, donc une perte de 70 000 enfants, et que, par ailleurs, les prévisions dans le réseau des commissions scolaires anglophones feraient en sorte que nous passerions de 103 000 enfants à 102 000, donc une perte d'à peu près 1 000 enfants dans le réseau des commissions scolaires anglophones. Toutes proportions gardées, je crois qu'il y a plus de pertes liées probablement à la démographie dans le réseau d'enseignement francophone.
Autre chose, vous dites dans votre mémoire, à la page 4: «L'introduction...» Troisième paragraphe, vous dites: «L'introduction de cet article ? en parlant de l'article 3 du projet de loi n° 104 ? remet en question les droits des personnes en vertu de l'article 23 ? évidemment, on parle de l'article 23 de la Charte canadienne des droits de la personne ? et, dans le cas du deuxième alinéa, élimine le droit des enfants qui présentent des difficultés d'apprentissage de recevoir l'enseignement en anglais.» J'évite, là, la lecture du reste du paragraphe, mais je voudrais dire clairement que votre interprétation est erronée. L'exception... C'est-à-dire le droit de recevoir l'enseignement en anglais pour un enfant qui présente des difficultés d'apprentissage, il est conservé. Ça, il faut être clair. Mais c'est vrai que ce que nous apportons comme modification, c'est que ce droit ne peut être transmis à d'autres qu'à l'enfant pour qui il a été accordé. Mais je trouvais que c'était important d'avoir cette distinction-là. Les exceptions qui étaient prévues à la Charte demeurent, mais on limite le droit des autres personnes ou l'admissibilité de d'autres personnes que pour les personnes pour lesquelles il était accordé.
Autre chose que je voudrais vous signaler, vous dites en conclusion que... Vous émettez l'hypothèse qu'un certain nombre de modifications que nous proposons ne satisferaient pas, selon vous, les exigences imposées par les tribunaux. Je voudrais vous signifier, sans qu'on entre dans le détail, là, qu'il y a eu aujourd'hui... la Cour d'appel a rendu des décisions dans huit dossiers et que... Puis ce n'est pas une question, on a gagné, on a perdu, mais elle a donné raison aux dispositions qui étaient prévues par la Charte de la langue française adoptée par le gouvernement.
Je termine en vous posant cette question. Vous dites à la page 3... En fait, vous décrivez l'article 3 qui modifie l'article 73 de la Charte. Vous le décrivez, vous dites: «L'article 3 [...] modifie l'article 73 de la Charte par l'insertion d'une disposition selon laquelle l'enseignement en anglais reçu au Québec dans un établissement d'enseignement privé non agréé aux fins de subventions n'est plus reconnu comme critère d'admissibilité valide.» Bon, vous synthétisez cet article-là. Le député d'Outremont, tout à l'heure, a posé la question en termes de danger. Je vous rappellerais que le nombre d'enfants qui ont eu accès à l'enseignement en anglais via des écoles privées non subventionnées, non reconnues a augmenté. En très peu de temps, on est passé de 481 enfants en 1995 à 1 063. C'est exponentiel, parce que ce droit ne concerne pas que ces enfants, il concerne également les enfants de ces enfants, hein? Ça donne des droits à la descendance. Donc, c'est exponentiel, et à la question du député de d'Outremont: Oui, c'est très, très, très inquiétant.
Mais la question que je vous poserais, parce que vous commentez plusieurs des modifications, mais, sur cette modification-là, vous ne vous prononcez pas, vous n'apportez pas de commentaire sur cette modification: Est-ce que c'est un choix délibéré? Est-ce que vous apprécieriez que je ne vous pose pas la question? Ou aucune de ces réponses?
Le Président (M. Bergeron): M. Paterson.
M. Paterson (Ron): Oui.
Le Président (M. Bergeron): Vous avez la parole.
M. Paterson (Ron): Merci bien, M. le Président. Est-ce qu'on peut reculer un peu sur...
Mme Lemieux: Oui, oui, vous pouvez faire ce que vous voulez.
M. Paterson (Ron): Vous avez... Comme les enfants qui sont en difficulté, on est d'accord que ces enfants vont continuer à avoir le droit de faire leurs études en anglais si c'est vraiment des problèmes graves, et j'en connais plusieurs qui sont, hélas, dans cette situation. Mais, nous autres, on parle de la famille aussi, parce que souvent ces enfants, ils ont des problèmes assez sérieux, et puis ça a un impact sur la famille aussi. Et puis, c'est ça, dans notre mémoire, on voudrait vous encourager de donner considération à continuer à laisser les enfants... les frères, les soeurs à continuer dans les mêmes programmes que l'enfant qui est en difficulté aussi. Ça, c'est une telle chose.
Oui, on ne s'est pas prononcé fortement sur le... J'ai entendu le mot «truc» qui a été employé il y a peut-être une demi-heure, mais ce n'est pas juste ça. Le gouvernement, sûrement, vous allez faire ce que vous allez faire, c'est sûr, mais, la semaine passée, à une autre commission parlementaire, ils avaient posé des questions à moi-même, et j'habite à Montréal, entouré de beaucoup de monde, de toutes sortes de monde, je vois que ces jours-ci tout va bien, il y a une... C'est plus ou moins stable, tout le monde s'entend très bien ensemble, et, franchement, je trouve ça triste qu'on ouvre cette chose encore pour une autre fois à un temps où on est rendu à une situation, d'après moi, plus ou moins d'équilibre et puis... On pourrait dire des choses, mais ça, c'est un point de vue personnel. Peut-être, je vais passer la parole ici, si M. le Président est d'accord, pour répondre ici...
Le Président (M. Bergeron): Oui, Mme Visser.
Mme Visser (Aline): Oui. Sûrement, on ne va pas s'attarder sur ce point-là, sauf que les statistiques que vous m'avez données, Mme la ministre Lemieux, c'est que dans quelques années la population anglophone aurait passé de 103 000, la population scolaire... de 103 000 à 102 000, c'est-à-dire une perte de 1 000, tandis que l'autre population, d'expression française, aurait passé de 877 000 à 809 000. Alors, je veux seulement souligner que 1 000 personnes de perte, quand même, c'est assez important pour la population anglophone.
n(17 h 40)n Alors, comme je vous ai dit, on ne s'attardera pas sur ce point-là, le point qu'on veut fixer, c'est surtout sur l'article 81 qui va, je pense, créer plus de problèmes pour ces jeunes en difficulté en les séparant de leur famille, dans le sens qu'eux vont pouvoir aller dans une école anglaise, mais leurs frères et soeurs ne pourront pas les suivre, et ce qui pourrait causer une division assez importante pour ces jeunes-là.
Le Président (M. Bergeron): Avez-vous quelque chose à rajouter, M. Paterson?
M. Paterson (Ron): Non. Merci.
Le Président (M. Bergeron): Mme la ministre.
Mme Lemieux: Non, ça va, j'étais en réflexion. Mais je ne veux pas vous harceler, non, non, puis on n'est pas un tribunal. Peut-être que j'ai tort, mais je déduis que vous avez quand même peut-être un certain inconfort avec le fait qu'il y a comme un système en parallèle qui s'est développé, qui s'appelle des écoles privées non subventionnées, pour que les gens puissent avoir un droit. Je ne sais pas si votre silence, j'ai raison d'interpréter en un inconfort quant à ce système. Mais, en même temps, ce n'est pas un drame non plus, là, que vous ne vous prononciez pas là-dessus, là. Mais je l'interprète, ce silence-là.
Le Président (M. Bergeron): Mme Visser, s'il vous plaît.
Mme Visser (Aline): Oui. S'il vous plaît, Mme la ministre, c'est qu'il faut aussi se rendre compte que ce phénomène existe seulement sur l'île de Montréal. Moi, je représente une commission scolaire hors de Montréal, Central Québec, et là nous n'avons pas d'écoles privées primaires, ce qui veut dire qu'on n'a pas ce phénomène-là.
Le Président (M. Bergeron): M. Paterson.
M. Paterson (Ron): Aussi, c'est un phénomène aussi des écoles privées, et on pense que sûrement les écoles privées, peut-être la semaine prochaine, vont se prononcer là-dessus, eux autres.
Le Président (M. Bergeron): Vous avez... Merci, M. Paterson. Mme la ministre.
Mme Lemieux: Ça va pour l'instant.
Le Président (M. Bergeron): Ça va? Alors, je passe la parole à l'opposition officielle. M. le député d'Outremont.
M. Laporte: Merci, M. le Président. Madame, messieurs, je pense qu'au nom du Parti libéral du Québec, étant porte-parole de ce parti dans ce dossier, n'est-ce pas, je peux déclarer que nous sommes entièrement d'accord, mais entièrement d'accord avec vous sur vos commentaires relatifs aux articles 6, 7, 8 et 9. Ce que vous avez mentionné, 81... Ce que vous venez de mentionner au sujet des enfants qui ont des problèmes... Vous savez, je regrette, mais je ne comprends pas les motivations du gouvernement.
Écoutez, vous nous avez dit dans votre mémoire qu'il s'agit d'un tout petit nombre, de 300 enfants par année. Qu'est-ce que vous voulez, 300 enfants par année multipliés par 30 ans, ça fait 9 000 enfants. Ce n'est pas ça qui va modifier les grands équilibres, là. Puis 30 ans, c'est long. Multiplié par deux ans, par trois ans, par quatre ans, vous allez vous retrouver avec 1 500 enfants. Je ne peux pas comprendre pourquoi votre argumentation ou votre argumentaire sur le besoin d'un traitement humanitaire, compassionnel et particulier de ces enfants-là... C'est extraordinaire pour eux de pouvoir aller à l'école et de pouvoir y être accompagnés par leurs frères et soeurs cadettes. Je ne comprends pas la logique de l'abolition de la transmission aux frères et soeurs cadettes, parce que vous avez parfaitement raison. Moi, si j'étais un père de famille qui avait un enfant autiste, n'est-ce pas ? évidemment, c'est peut-être un cas extrême ? et que je l'envoyais dans une école privée anglophone pour, disons, obtenir... pour mettre en marche ce que la ministre appelle une création de droit, n'est-ce pas, quand je verrais mon enfant autiste passer à l'école publique anglophone, je pense que je serais prêt à dire: Bien, les autres enfants vont passer... vont faire le même parcours puis ils vont aboutir à la même situation, parce que c'est clair que, pour cet enfant autiste, la présence de ses frères et soeurs génère des bénéfices. On est-u d'accord là-dessus? C'est ça que vous dites, là.
Donc, moi, je ne comprends pas. Je ne comprends pas. Si c'était 30 000, 3 000, 2 000 enfants, je dirais: Il y a peut-être un problème là. Mais c'est 300 enfants, 300 enfants. Puis vous dites, et je suis d'accord avec vous puis je pense que mes collègues partagent mon opinion... Qu'est-ce que vous voulez, l'argumentation que vous faites est tellement convaincante que je ne peux pas comprendre comment ça se fait que vous n'êtes pas capable de les convaincre. C'est ça, ma... Donc, comprenez-vous mon propos? Est-ce que je vous ai bien compris?
M. Paterson (Ron): Absolument.
M. Laporte: Bon. Alors, voilà.
Le Président (M. Bergeron): M. Paterson, est-ce que vous voulez rajouter au commentaire question ou à la question commentaire du député d'Outremont? Mme Visser, s'il vous plaît.
Mme Visser (Aline): C'est pour aussi ajouter qu'il y avait un premier ministre qui s'appelait René Lévesque. Et, j'enseignais dans le temps, et c'est pour dire que M. René Lévesque, c'était lui qui avait pensé à l'idée de compassion et d'humanitaire, parce qu'il avait dit: Il ne faut pas diviser les familles. Si ces enfant-là vont à une certaine école anglaise, il faudrait permettre aux autres membres de la famille, pour toutes les bonnes raisons de compassion, de suivre. Alors, c'est la loi qui a été fabriquée dans le temps, et on a toujours pensé que c'était très juste.
Le Président (M. Bergeron): Merci. Est-ce que, M. le député d'Outremont, vous avez une autre question avant de passer la parole au député de Jacques-Cartier?
M. Laporte: Non, M. le Président. Je souhaiterais que mes collègues prennent la parole, parce que, je vous répète, je suis dans un état de choc. Alors, j'aime autant me calmer.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Bergeron): Ha, ha, ha! Alors, M. le député de Jacques-Cartier, vous avez demandé la parole.
M. Kelley: Oui. Et sur le même sujet, mais, moi, je veux dire merci beaucoup pour une phrase dans votre mémoire. C'est la dernière phrase sur la page 5, en parlant de ces familles qui sont dans les situations difficiles, et vous avez dit: En bref, ces familles méritent l'appui de la société et non pas d'autres complications.
Je veux rappeler... Au-delà des chiffres, ça fait 200, 300, 400, I don't care, moi, je pense, une chose qui est importante, ce sont les familles en énorme difficulté, ce sont les familles en crise. Et après avoir fait tout un cheminement... Parce que, moi, j'ai eu les familles que leur enfant est juste 18 mois en retard, ce n'est pas suffisant, il faut faire un autre six mois d'échecs avant que l'enfant puisse passer à l'école anglaise. Pourquoi? Parce que, règle générale, ses parents parlent anglais, l'anglais est la langue parlée à la maison, et les parents ont l'espoir que peut-être ? peut-être ? si on peut le mettre dans une école, on peut l'aider mieux avec ses devoirs et peut-être...
Mais, j'invite la ministre et j'invite tous les membres de la commission de relire le règlement sur l'article 81, on parle de choses qui sont très graves, des handicaps et les autres choses comme ça. De mettre ça, ici, dans la loi, moi, je ne le comprends pas. Moi, je pense que c'est beaucoup plus facile, et Mme Visser l'a expliqué avec beaucoup de... Elle pense que garder les familles ensemble était un toujours un principe de base de la loi 101. Et, si un enfant peut aller et si on a fait la preuve qu'il y a une situation grave de l'ordre familial existe... Et ce n'est pas un processus léger. Et, j'invite Mme la députée de Mille-Îles de regarder le processus comme il faut, ce sont les situations qui sont très difficiles, ce sont les familles en crise, et que, on peut garder la famille ensemble, moi, je ne vois pas l'objection. Alors, ce n'est pas une question du nombre de familles, et j'invite tous les membres de prendre connaissance ça veut dire quoi, 81, ça veut dire quoi 85.1. Je vois M. Polenz qui a travaillé au cabinet du ministre de l'Éducation, qui a d'énormes connaissances de ces questions et ces crises, parce que les familles, souvent, sont en détresse au Québec.
Alors, je veux faire écho aux commentaires de mon collègue d'Outremont. Mais, encore une fois ? et peut-être M. Paterson peut nous alimenter davantage ? c'est quoi, les genres de situations qui sont couvertes par 81 et 85.1? On parle de qui dans les vraies personnes, les identités?
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. M. Paterson, vous désirez répondre?
M. Paterson (Ron): Bien, on parle des enfants qui ont des vrais problèmes d'apprentissage, on ne parle pas juste de ce qui était décrit d'avance. Mais il y en a beaucoup de situations où se trouvent des enfants, dans des situations de comportement, toutes sortes de choses. Je ne sais pas si vous pouvez ajouter.
Mme Visser (Aline): Déficience mentale, déficience physique.
Le Président (M. Bergeron): Est-ce que, M. Polenz, vous avez quelque chose à ajouter?
n(17 h 50)nM. Polenz (Jeff): Oui, peut-être, je vous donnerai un exemple dans le cadre du 85.1. Pour donner un exemple très concret de quoi on parle lorsqu'on parle d'une situation d'ordre familial grave, je me rappelle très bien d'un cas d'une mère québécoise qui s'est mariée avec un Américain. Malheureusement, son mariage, c'est tombé en divorce. Elle s'est décidée de retourner au Québec pour rejoindre sa famille. Elle avait un fils qui a fait ses 10 premières années en anglais aux États-Unis, il lui restait un an pour terminer son secondaire V. Et, s'il n'y avait pas l'article 85.1, il aurait été obligé de s'inscrire dans une classe d'accueil et avoir probablement passé un échec, ou décroché, ou «whatever». Mais, grâce à cette clause-là puis qu'il était considéré une situation grave d'ordre familial...
Une voix: ...
Le Président (M. Bergeron): Continuez, M. Polenz.
M. Polenz (Jeff): ...cet élève-là a pu fréquenter... a pu terminer son secondaire V en anglais.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Polenz. On est du côté de l'opposition officielle. Est-ce que, M. le député de Jacques-Cartier, vous voulez continuer?
M. Kelley: Non, non, je comprends le propos de M. Polenz, on ne remet pas l'existence de 85.1 dans le projet de loi qui est devant nous, mais la chose que je ne comprends pas, surtout 81, pourquoi on ne veut pas garder les familles ensemble. Je ne comprends pas. Comme j'ai dit, j'invite tous les membres de la commission d'aller lire le règlement pour avoir une meilleure idée de quel genre de familles on parle. De toute évidence, un des... ce seraient les ménages anglophones, et c'est pourquoi on pense que peut-être le transfert dans une école anglaise aidera un enfant en échec de mieux faire. Et avoir la possibilité de garder la famille ensemble, pour moi, a été toujours un principe de base. Et on parle des familles anglophones. Ce sont les familles anglaises, oui, mais il y avait cette possibilité qu'on veut fermer ici. Moi, je ne comprends pas et, je pense, c'est quelque chose que... De mélanger ça avec l'autre débat sur l'école privée qu'on va faire à un autre moment, je ne comprends pas. Et, à titre d'exemple, ça, c'est le genre de choses... Parce que la vie des familles est toujours complexe, est beaucoup plus compliquée qu'on peut imaginer comme législateurs, et pourquoi on brise ce principe de base de garder les familles ensemble? Je ne comprends pas, M. le Président, et ça va prendre beaucoup pour me convaincre. Merci.
Le Président (M. Bergeron): J'ai compris que c'était un commentaire et je vois mon bon ami le député de Vaudreuil qui aurait une question à poser. Une question ou un commentaire, M. le député de Vaudreuil?
M. Marcoux: M. le Président, peut-être les deux. Vous formulez, à la page 6 de votre mémoire, M. Paterson, des commentaires sur l'abolition du comité de révision. Je dois vous dire que, nous aussi, nous avons des inquiétudes à cet égard-là quant à l'impact sur les personnes qui veulent en appeler d'une décision, et l'impression que nous avons, c'est qu'en amenant ça au Tribunal administratif directement on va compliquer les choses pour les gens concernés.
Est-ce que vos commentaires sont basés sur justement des cas que vous avez pu vivre ou dont vous avez entendu parler à cet égard-là? Nous avons la même inquiétude, nous, que celle que vous exprimez dans votre mémoire en référant directement au Tribunal administratif du Québec.
Le Président (M. Bergeron): Est-ce que c'est M. Paterson ou M. Polenz? M. Polenz, vous avez la parole.
M. Polenz (Jeff): Merci. Non, je ne peux pas dire qu'on a actuellement des exemples concrets par rapport des délais ou bien l'échéancier qu'une personne doit subir, là, en faisant un appel devant le Tribunal administratif du Québec. À ce que je sache, le système actuel, avec la commission de révision, fonctionne assez bien, dans un délai très respectable, et c'est en plus un processus qui est simple et transparent pour le parent. La plupart des parents ne se présentent pas devant la commission de révision actuellement avec des conseillers juridiques ou des avocats. Ça arrive de temps en temps, oui, c'est vrai, mais la plupart des parents ont l'occasion de se présenter dans une période de temps raisonnable et d'avoir une décision assez rapidement.
Je ne suis pas familier avec le processus devant le Tribunal administratif du Québec, mais il me semble qu'on introduit ici une disposition qui va compliquer le processus pour du monde, et ce sera peut-être plus intimidant aussi pour plusieurs parents. Alors, c'est ça qu'on veut souligner dans notre mémoire par rapport du processus.
Le Président (M. Bergeron): Merci, M. Polenz. Oui, il vous reste deux minutes, et utilisez-les à bon escient. Vous avez une autre question, M. le député de Vaudreuil?
M. Marcoux: Oui, oui. Mais est-ce que ma question était...
M. Pelletier (Chapleau): Non, c'est toujours à bon escient...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Marcoux: Simplement un commentaire, M. le Président. Nous avons également les mêmes inquiétudes quant à la réduction du délai, et je pense que de réduire de 60 à 30... On se demande pourquoi, parce que ce sont des dossiers qui sont toujours un peu compliqués, et les parents n'ont pas nécessairement, non plus, la faculté de recourir à des avocats, etc. Alors, nous avons également les mêmes inquiétudes sur la réduction du délai qui semble être proposée dans le projet de loi.
Le Président (M. Bergeron): M. Paterson, est-ce que vous voulez ajouter à ce commentaire? Vous voulez répondre? Mme Visser?
Mme Visser (Aline): Oui, j'aimerais aussi ajouter à qu'est-ce que M. Marcoux vient de dire, c'est toujours d'essayer de faciliter le processus et non pas de causer des obstacles pour M. Tout-le-monde. C'est déjà très compliqué, la loi, et tout ça, et il ne faut pas les épeurer avec complication. Le système que nous avons en place, le comité de révision, fonctionne très bien, très transparent, et, comme qu'on pourrait dire: «If it ain't broke, don't fix it.» Alors, c'est quelque chose qui va très bien, on devrait penser à le garder.
Le Président (M. Bergeron): Parfait. Je vous remercie. Il restait un 30 secondes pour l'escient de tantôt. Alors, M. Paterson, Mme Visser, M. Polenz, merci bien. Et, ceci étant dit, j'ajourne les travaux de cette commission sine die.
(Fin de la séance à 17 h 57)