(Quatorze heures deux minutes)
Le Président (M. Cusano): Je déclare la séance de la commission de la culture ouverte. J'aimerais rappeler aux membres de la commission que le mandat de la commission pour cette séance est d'étudier le rapport annuel 2000-2001 de la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 119.1 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Aucun, M. le Président.
Le Président (M. Cusano): Il n'y a aucun remplacement. Avant de procéder aux remarques préliminaires, je demanderais à nos invités de prendre place, s'il vous plaît, et de bien s'identifier. Est-ce que nos invités sont ici?
Mme Stoddart, je vous demanderais de nous présenter les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît.
Mme Stoddart (Jennifer): D'accord. Je suis Jennifer Stoddart, présidente de la Commission d'accès à l'information. Je suis accompagnée par les deux directeurs de la Commission d'accès à l'information: à ma droite, le secrétaire de la Commission et directeur des services juridiques, Me André Ouimet, et, à ma gauche, le directeur général, directeur de l'analyse de l'information, Me Denis Morency.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Léandre Dion
M. Dion: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme la présidente et messieurs. Je voudrais dire seulement quelques mots sur l'importance du rôle que vous jouez à l'intérieur de nos institutions. Et, pour illustrer mon propos, je me référerai à une question très concrète à laquelle on a eu affaire et qui est publique, donc une question qui s'est posée en particulier l'année qui est écoulée, même si elle s'étale dans le temps à quelques années antérieures, à au moins jusqu'au moment où ici, à l'Assemblée nationale, on a voté une loi qui encadre les sociétés d'économie mixte.
Alors, vous voyez un peu de quoi il s'agit. Il s'agit donc de toute la question qui a été soulevée par le fait que les sociétés d'économie mixte sont des sociétés qui, théoriquement, ont un statut d'entreprise privée mais ont un fonctionnement qui ne l'est pas en tous points. Et évidemment l'objet de la Commission d'accès à l'information, je pense qu'un des objectifs qu'elle poursuit, c'est, quand il s'agit de documents d'ordre public, de faire en sorte que les citoyens puissent être informés en particulier de l'utilisation que l'on fait des fonds qui sont consentis... qui sont constitués par nos taxes, par nos impôts et qui sont des fonds, en fait, qui appartiennent au public et qui doivent être gérés dans l'intérêt du public. Et, pour que ce soit géré dans l'intérêt du public, évidemment, il y a un principe en vertu duquel le public peut exercer une surveillance sur la gestion.
Au niveau de l'ensemble du gouvernement, la surveillance se fait généralement par les députés ? et évidemment par les médias aussi, mais principalement par les députés ? qui ont cette fonction précise de surveiller l'administration publique. Mais, quand il s'agit des questions municipales, alors, qui doit surveiller? On peut penser que, normalement, ce sont les échevins, les conseillers municipaux, qui ont cette fonction de surveiller l'administration des fonds publics. Or, quand il s'agit de fonds qui sont impliqués dans des sociétés d'économie mixte, donc des sociétés qui ont un caractère d'entreprise privée et, donc, qui échappent aux prescriptions de la Commission d'accès à l'information, ça peut poser un problème.
Dans le cas de Compo-Haut-Richelieu, la cour, en première instance, a statué que, quel que soit le statut de Compo-Haut-Richelieu, qui est un statut de société d'économie mixte, donc qui fonctionne comme une entreprise privée, que, malgré cela, étant donné que plus de la moitié, environ 60 % du financement, c'est-à-dire des fonds de cette société-là sont constitués de fonds publics, donc sont mis là par les municipalités concernées, que, d'autre part, les services rendus par cette entreprise-là sont des services d'ordre public ? donc, toute la disposition des déchets ? et que, en dernier lieu, cette société-là a comme clientèle une clientèle captive, que, dans ces cas-là, cette société-là, bien que de statut d'entreprise privée, avait toutes les caractéristiques d'une entreprise publique et qu'en conséquence elle devait rendre publiques ces informations.
Si j'ai rapporté ces faits-là ? et je le fais de mémoire, donc j'espère que je n'ai pas trop fait d'erreurs ? c'est pour souligner l'importance d'une commission comme la vôtre dont l'objectif est de faire en sorte que le public puisse vraiment être à même de juger de l'administration qui est faite de ses fonds. Il n'y a pas de démocratie si la population ne peut pas juger de ce que les administrateurs élus font avec les fonds qui leur sont confiés. Alors, j'apporte ça pour vous dire à quel point je vais écouter avec beaucoup d'attention votre exposé parce que je pense qu'il y aura des lendemains à tout cela. Alors, je vous remercie.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Mme la députée de Jonquière.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Mme la présidente, messieurs, bienvenue. Mon propos à moi: je me questionne sur le double volet de la loi d'accès à l'information et la loi de protection des renseignements personnels. Personnellement, moi, j'ai toujours trouvé que cette loi-là est antinomique, dans le sens que, d'une part, on doit privilégier les renseignements des organismes publics, on doit privilégier qu'on puisse avoir accès facilement aux renseignements d'ordre administratif, et, d'autre part, l'autre volet de la loi, c'est de protéger effectivement les renseignements à caractère personnel.
Moi, je me demande s'il ne serait pas plus opportun qu'on divise carrément le mandat de la Commission, à savoir: une loi qui traiterait uniquement de la protection des renseignements personnels et une autre loi qui favoriserait l'accès à l'information. Et, dans ce sens-là, on pourrait peut-être aller plus loin aussi, concernant la loi d'accès à l'information, parce qu'on sait qu'aux États-Unis le principe, c'est que le citoyen a accès à l'information de l'administratif. Or, ici, au Québec, en région, on dirait que la loi d'accès à l'information a l'effet contraire, on a comme l'impression qu'on se sert du mécanisme de la loi pour retarder l'information aux contribuables du Québec, aux contribuables d'une municipalité, entre autres. Et, moi, il m'apparaît qu'on pourrait peut-être aller plus loin et faire en sorte de dégager un principe, que l'accès à l'information publique soit automatique et l'exception ne soit pas la règle, comme ça l'est présentement.
n
(14 h 10)
n
J'ai comme l'impression que, dans l'administration publique, l'administration municipale, on interprète la loi comme étant une loi d'exception. On va donner l'information après avoir écoulé le délai de 20 jours, avec la loi actuelle, et le délai supplémentaire de 10 jours qu'on prend. Et j'en tiens pour preuve ce qui se passe présentement au comité de transition de ville Saguenay, où on peut avoir des gens de tout acabit qui demandent des renseignements d'ordre administratif, et là on se réfugie derrière la loi pour éviter que ces renseignements-là soient donnés de façon ponctuelle.
Un autre aspect de la Commission, c'est son volet de tribunal quasi judiciaire. Étant une députée de région, je me questionne sur la célérité avec laquelle les gens des régions sont entendus lorsqu'ils veulent faire appel d'une décision qui leur refuse un accès à l'information. Je voudrais savoir aussi, parce que je ne l'ai pas vu dans le rapport, même si je l'ai lu avec beaucoup d'attention, je n'ai pas vu avec quelle célérité les audiences étaient tenues en région et avec combien... J'ai vu qu'il n'y avait pas beaucoup de pourcentage de journées d'audition de la Commission qui siège comme tribunal quasi judiciaire en région.
Et un autre aspect aussi, c'est le délai pour traiter les plaintes. On se rappellera, en Chambre, on a déposé... le Parti libéral a déposé une plainte concernant le fait que nous croyons que des renseignements ne nous avaient pas été donnés par le ministère des Services sociaux. On nous avait répondu que le document n'existait pas. Or, il s'est avéré que le document existait. Et on a déposé une plainte. La plainte a été logée le 29 novembre dernier et, au moment où on se parle, on n'a toujours pas de réponse à la plainte qui a été déposée, on ne sait pas, si tant est que vous avez fait peut-être une enquête, si tant est qu'il y ait eu un rapport d'enquête de déposé... Il me semble que le plaignant devrait être mis au courant des démarches que la Commission fait par rapport à une pareille plainte.
Et un autre exemple que je peux vous donner, c'est celui des 1 000 travailleurs d'élection dans la région de Québec qui avaient vu leurs renseignements personnels divulgués. Moi, j'avais vu dans les journaux que vous vous étiez saisi du dossier, mais c'est un autre aspect aussi sur lequel, en tout cas, vous êtes silencieux dans votre rapport. On ne connaît pas la façon dont les plaintes sont traitées et comment les plaignants, les gens sont informés du déroulement du processus de l'enquête. Et toujours concernant la plainte de ces travailleurs d'élection, je me demande si on ne pourrait pas davantage favoriser la publication... publiciser votre travail au niveau de la protection des renseignements personnels.
Je pense qu'il est du devoir de la Commission de faire savoir, de mieux faire connaître aux contribuables québécois l'importance de pouvoir garder leurs renseignements personnels. Et, pour les organismes aussi, la divulgation de ces renseignements personnels là ne devrait pas être l'apanage... Et des accidents comme on a vus à l'automne dernier à Québec, dans la région de Québec, m'apparaîtraient moins probables si on était mieux conscientisé au respect... Il y va, à mon avis, de l'intégrité de la Commission, il y va aussi de l'intégrité de tout notre système démocratique au Québec.
Moi, j'aurais souhaité... Je vais sûrement vous interpeller sur ces questions-là. Je vais aussi vous interpeller sur, effectivement ? et c'est surtout mon collègue qui va le faire ? au niveau... Parce qu'on voit dans le rapport que vous demandez davantage de soutien technique. Peut-être que les réponses que vous donnerez à ce moment-là répondront à mes questionnements concernant les délais. Je vous remercie.
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Lyse Leduc
Mme Leduc: Bonjour. À mon tour de vous souhaiter la bienvenue, Mme Stoddart, M. Ouimet, M. Morency. C'est évident qu'en prenant connaissance de votre rapport on a vu la somme de travail qui est fournie par la Commission, et je tiens à vous en féliciter.
Je me suis aussi un peu attardée à votre rôle, ou à vos deux rôles, qui sont l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Et je me suis aussi questionnée un peu en disant: Bien, est-ce que ça va de pair? Bien, moi, j'en suis venue à la conclusion que, oui, je pense que c'est important, parce qu'on doit faire des arbitrages et je pense que c'est important que ce soit la même instance qui soit responsable de l'accès à l'information mais aussi de la protection des renseignements privés parce que je pense qu'il y a un lien entre les deux, et ce lien-là doit se faire, et il y a des arbitrages qui doivent se faire. Alors, je trouve que vous êtes l'instance qui, avec toute l'information, est la mieux placée pour les faire.
C'est sûr que, personnellement, quant à moi, j'ai plus suivi vos travaux en ce qui a trait à votre deuxième mandat, qui est la protection des renseignements personnels, plus particulièrement dans le dossier de la carte à puce, dans le domaine de la santé, parce que c'est un dossier qui est encore... qui a fait l'objet de prises de position de votre part, qui est actuellement sous étude. Alors, c'est évident que je me suis plus attardée, à ce moment-là, à vos prises de position dans ce dossier-là.
Et mes attentes, quant à moi, suite aux audiences d'aujourd'hui, ce serait plus une clarification, dans le fond, parce que j'ai une attitude ambiguë, en tout cas pas définitive, par rapport à l'importance qu'on doit accorder à la protection de la vie privée face, finalement, au mieux-être que peut avoir la collectivité si on met en place des choses comme la carte santé, la carte à puce dans le domaine de la santé. J'ai lu plusieurs articles, il y en a qui vont dans votre sens, il y en a qui vont dans l'autre, et, dans le fond, je m'attends à un éclairage de votre part aujourd'hui là-dessus pour voir comment on peut, finalement, faire la balance entre les deux, entre les avantages et les inconvénients.
Je comprends que vos analyses, et c'est normal, c'est votre rôle, sont beaucoup sous le signe... de la protection de la vie privée. Je pense que c'est votre rôle, mais je pense que vous avez aussi un rôle plus général parce que, compte tenu que vous êtes très écoutés et, quand vous donnez des avis, ça a beaucoup d'impacts dans la population, donc ça peut avoir des impacts sur les décisions du législateur aussi. Alors, c'est dans ce sens-là que je m'attends, en tout cas, quant à moi, à ce que ça fasse cheminer ma réflexion personnelle, les audiences de cet après-midi. Je vous remercie.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Je cède maintenant la parole au député d'Iberville.
M. Jean-Paul Bergeron
M. Bergeron: Merci, M. le Président. Alors, Mme Stoddart, M. Ouimet, M. Morency, bonjour et bienvenue à cette commission. Je pense avancer sans trop me tromper en disant que la Commission d'accès à l'information, c'est un des fleurons de notre vie démocratique. Et c'est d'autant plus un fleuron, actuellement, que nous vivons une ère où la technologie avance beaucoup, fait des progrès et c'est que la technologie se permet des intrusions dans la vie privée.
Hier, je participais à une commission parlementaire où était présent le ministre de la Sécurité publique et on parlait des prisonniers qui étaient en... je ne dirais pas en liberté, mais qui avaient des congés, qui étaient en liberté conditionnelle ? il y a un terme comme ça ? et on parlait de technologie, on parlait de moyens électroniques pour pouvoir les localiser. On parlait, entre autres, d'un bracelet et on faisait l'analogie: Bien, ça se fait pour des voitures, on peut le faire pour des êtres humains. Et j'imagine que ça nous positionne dans un débat éthique où la réflexion ne fait que commencer. Et vous allez avoir, comme Commission d'accès à l'information, à vous prononcer, à émettre un avis là-dessus.
Ma collègue de Mille-Îles a parlé de la carte à puce, vous avez parlé là-dessus, et j'écoutais un reportage à la télévision où on disait que, sur ce sujet-là, le gouvernement ne peut pas improviser et surtout le gouvernement n'a pas le droit à l'erreur. Donc, c'est un débat qui est de grande actualité dans le contexte de la santé publique, avec toutes les restrictions et, disons, le panier de demandes qui est très sollicité.
En lisant votre rapport, je voyais que certaines de vos demandes n'ont pas été respectées, notamment du ministère du Revenu. Puis j'espère bien vous entendre là-dessus parce que, lorsqu'une commission d'accès à l'information émet un avis et c'est un sujet qui regarde la vie des citoyens ? parce que, comme citoyens, on fait tous ou à peu près un rapport d'impôts chaque année, le Revenu, ça fait partie de notre vie, c'est un passage obligé, donc c'est une question qui revêt une grande importance ? et, si ce que vous émettez comme avis, ce n'est pas respecté, je pense qu'il y a un questionnement comme société. Et, au premier chef, nous qui formons l'appareil gouvernemental, bien, on devrait se questionner et essayer de voir de quelle façon on peut y répondre adéquatement. Alors, c'est avec grand plaisir que je vais vous entendre, comme mes autres collègues. Merci.
n
(14 h 20)
n
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député d'Iberville. Je cède maintenant la parole au député de Marguerite-D'Youville.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir à mon tour de vous souhaiter la bienvenue à notre commission de la culture, qui s'est, dans le passé, démarquée par les initiatives assez originales qu'elle avait prises. Nous avions eu l'occasion de vous entendre lorsque vous avez été nommée, il y avait, je pense, deux ou trois mois après votre nomination. À ce moment-là, la commission s'était montrée moins exigeante en soulignant qu'il était normal que vous preniez connaissance de vos fonctions, des dossiers avant de pouvoir émettre une opinion plus éclairée et plus générale sur des questions plus particulières.
Comme nous avons eu l'occasion de le souligner lors de notre dernière rencontre et puis comme y ont fait référence mes collègues, au fond, la Commission d'accès à l'information a deux fonctions très importantes, qui sont la fonction quasi judiciaire, que vous décrivez très bien dans votre rapport, de même que la fonction de surveillance, de contrôle et de conseil. Les avis, les prononcés de la Commission prennent de plus en plus d'importance et sont reçus avec d'autant plus de sérieux au niveau du gouvernement que dans la société, chez les divers intervenants concernés que c'est suite à un avis de la Commission d'accès à l'information qui était contraire à ce que les fonctionnaires avaient recommandé à notre ancienne ministre du Revenu qu'elle a dû démissionner. Donc, dans les circonstances, les jugements que vous prononcez, les avis que vous donnez prennent de plus en plus d'importance dans notre vie sociale et notre vie politique au Québec. Ils sont donc pris très au sérieux.
Également, avec la multiplication et l'accélération des transformations technologiques en matière d'information, de communication et dans différents domaines, la question de la protection des renseignements privés est d'autant plus présente et pertinente.
Mais il y a également une autre dimension sur laquelle j'aurai peut-être l'occasion de vous interroger lors de nos échanges, c'est en ce qui concerne l'impact des fusions municipales, dans le sens où nous avons créé de vastes agglomérations et ? moi-même, représentant une circonscription de la Rive-Sud de Montréal dont une partie a été fusionnée avec la ville de Longueuil ? nous sommes à établir des paramètres de fonctionnement qui vont exiger, en contrepartie de l'ampleur de l'espace municipal qui a été créé dans diverses régions du Québec, une transparence dans l'administration publique. Et c'est ce qu'exigent les citoyens.
Je dois dire que, en regardant la manière dont se sont déroulés certains dossiers, la Commission d'accès à l'information, à mon avis, va être appelée à être interpellée de plus en plus. Nous sommes à étudier, à l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 122, qui vise à actualiser un peu en quelque sorte et à modifier certaines dispositions de la Commission d'accès à l'information. Il y a un article ? si ma mémoire est bonne, c'est l'article 2 ou 3 ? qui concerne l'assujettissement de certaines instances municipales à la Commission d'accès à l'information. Pour ma part, je souhaiterais que toutes les instances, toutes les corporations, sociétés de développement municipal qui gèrent des fonds publics soient assujetties à la Commission d'accès à l'information. Il m'apparaît que c'est là une exigence de transparence minimale en regard des grandes agglomérations qui ont été créées et qui ont comme résultat et comme impact d'inquiéter les citoyens quant à leur accessibilité au palier décisionnel. Donc, besoin de transparence de plus en plus forte au niveau municipal, surtout dans les grandes agglomérations et, par conséquent, le besoin de doter la Commission d'accès à l'information des outils nécessaires et des encadrements législatifs nécessaires pour atteindre cet objectif.
En examinant les documents qui sont acquis suite à une décision ou à un avis rendu par la Commission d'accès à l'information, je me suis aperçu que souvent ces documents-là sont biffés, sont rayés de jaune ou de n'importe quelle sorte de couleur de sorte que, finalement, même le dépôt des documents ne veut strictement plus rien dire en termes des informations que ceux qui ont sollicité l'avis veulent obtenir. Alors, à ce niveau-là, je pense que nous aurons l'occasion d'échanger. Parce que c'est une chose de dire que, oui, un organisme, une instance municipale, provinciale ou de quelque nature qu'elle soit est assujettie à la Commission d'accès à l'information, encore faut-il que les documents qui sont déposés suite à un avis favorable de votre part contiennent un minimum d'informations que ceux qui ont demandé l'avis et qui ont demandé les informations puissent recevoir. Et je dois dire que je suis un peu déçu parfois quand je vois les documents qui sont obtenus grâce à l'accès à l'information, où enfin les renseignements les plus intéressants et les plus pertinents sont biffés. Donc, il y a quelque chose là à améliorer en termes d'efficacité du service rendu à la population en fonction des objectifs qui ont milité en faveur de l'établissement de la Commission d'accès à l'information.
Et finalement ? d'ailleurs, j'avais eu l'occasion de vous en faire part lors de notre première rencontre ? il me semble que, compte tenu des exigences et des pressions qui sont de plus en plus fortes sur la Commission d'accès à l'information en fonction des mandats qui vous sont confiés, on va vous interroger sur la pertinence et sur également les ressources dont vous disposez. Ma collègue de Jonquière a posé une question tout à fait pertinente, a émis un commentaire tout à fait pertinent tout à l'heure: il faut qu'il y ait des délais raisonnables de réponse lorsqu'on fait appel à la Commission. Et c'est relié bien sûr au budget dont vous disposez pour accomplir votre mission. Et c'est, pour la Commission ? en tout cas, pour moi, personnellement ? une préoccupation, puisque, au-delà de la rhétorique, au-delà de ce qui est écrit sur papier en termes de description d'objectifs, de mandats, ainsi de suite, encore faut-il avoir les ressources adéquates pour les mener à bien. Alors, voilà.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Marguerite-D'Youville. Je cède maintenant la parole au député d'Outremont.
M. Pierre-Étienne Laporte
M. Laporte: Merci, M. le Président. Mme Stoddart, M. Ouimet, M. Morency, je vais faire une brève remarque préliminaire qui s'inscrit dans les remarques que vient de faire mon collègue de Marguerite-D'Youville. J'espère qu'on va réserver du temps pour que vous nous explicitiez ou nous expliquiez davantage ce que vous dites à deux reprises, à la fois dans le rapport et dans le document qu'on nous a remis, à la commission, sur le plan quinquennal. Il y a tout de même deux inquiétudes puis il y a même un cri que vous lancez dans ce rapport-là lorsque vous dites, dans un premier temps: «Un point majeur demeure toutefois dans la balance. Pour remplir les nouvelles obligations contenues dans le plan stratégique, la Commission devra pouvoir compter sur de plus grandes ressources humaines et financières.» Et, dans le document, sous le titre Notre capacité organisationnelle, vous dites: «La réalisation de notre plan stratégique répond, croyons-nous, au besoin d'une société moderne et démocratique. Il est cependant évident que, sans l'ajout de ressources additionnelles, nous devrions réviser nos objectifs dès la fin de 2001.» On est déjà en 2002, donc il me semble que là vous faites appel à une... vous témoignez d'un besoin, d'un besoin pressant, d'un besoin urgent. Et j'ose espérer qu'on aura le temps de discuter de cette question-là parce que vous vous placez dans une perspective de croissance, là, et, lorsqu'on écoute les rapports, on a l'impression que c'est justement cette perspective de croissance de la Commission qui serait remise en question par l'absence de ressources financières additionnelles. Donc, j'aimerais qu'on puisse, M. le Président, réserver un petit bloc de temps pour qu'on puisse examiner cette question-là de plus près.
n(14 h 30)nLe Président (M. Cusano): Aucun problème, M. le député d'Outremont. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Non. Alors, Mme la présidente, la parole est à vous pour votre présentation.
Exposé de la présidente
de la Commission d'accès à l'information (CAI)
Mme Jennifer Stoddart
Mme Stoddart (Jennifer): Merci beaucoup, M. le Président. MM., Mmes les députés, je vous remercie de ces remarques préliminaires. J'ai essayé de les prendre en note, j'imagine que vous allez revenir là-dessus lors de vos questions, et effectivement on a des réponses, on va certainement essayer de vous donner des réponses à ces questions que vous soulevez déjà.
Alors, j'ai préparé une présentation formelle pour un peu essayer d'aborder de façon systématique nos réalisations dont je vous fais part dans ce rapport annuel et de regarder en même temps vers l'avenir par rapport à plusieurs des dossiers qui sont abordés dans le rapport annuel. Alors, je vais vous livrer cette présentation et ensuite on pourrait échanger si ça vous convient.
Le Président (M. Cusano): C'est exactement ça, madame.
Mme Stoddart (Jennifer): Merci. Alors, vous savez, comme vous l'avez mentionné, le rapport annuel que vous étudiez aujourd'hui couvre une année de transition, c'est l'année 2000-2001, et c'est en effet au cours de cette année que j'ai été nommée, selon votre appui, à la tête de la Commission d'accès à l'information. Alors, dès mon entrée en fonction, j'ai continué dans la voie déjà tracée par mon prédécesseur en tentant d'abord d'obtenir le personnel et crédits additionnels, et j'y reviendrai, comme vous m'invitez à le faire. J'ai aussi entrepris diverses réformes afin d'améliorer les services offerts aux citoyens.
Mais d'abord je veux vous rappeler que ma nomination a coïncidé avec l'adoption de la Loi sur l'administration publique, nouvelle loi dans la fonction publique québécoise. Et, dans son sillage, la Commission s'est dotée d'une déclaration de services aux citoyens et d'un plan stratégique portant sur les années 2001 à 2003, que je vais vous déposer pour qu'on puisse en discuter ensemble si tel est votre avis.
Trois orientations majeures émergent des réflexions et des consultations de la Commission: premièrement, accroître la performance de la Commission afin de permettre l'exercice des droits d'accès à l'information et de la protection des renseignements d'une façon plus efficace, plus efficiente et plus économique; deuxièmement, rendre des décisions éclairées en intégrant les principes d'accès à l'information et de protection des renseignements à l'utilisation des nouvelles technologies; et, troisièmement, revoir les règles d'accès à l'information dans un souci d'exercice des droits démocratiques et de transparence.
Et, d'ores et déjà, je suis en mesure de vous informer que certaines réformes ont déjà été réalisées au cours de l'année pour laquelle vous étudiez le rapport. Ainsi, presque un an après le dépôt de ce plan stratégique, je peux vous confirmer qu'effectivement le délai de traitement d'un dossier est réduit. De façon réaliste, cependant, je dois vous avouer que certains dossiers prennent plus de temps que d'autres, et on peut revenir là-dessus en échanges. Cela s'explique par plusieurs facteurs. Néanmoins, nous gardons comme objectif de traiter d'ici le mois de décembre 2002, donc dans plusieurs mois, tous les dossiers présentés à la Commission dans un délai d'un an ou moins. Et, pour ce faire, d'autres changements seront apportés dans quelques semaines à notre système de traitement des demandes.
Nous misons d'abord sur les modes alternatifs de solution des litiges soumis à la Commission. Au-delà des mots, cela signifie que la Commission fait en sorte que la majorité des dossiers soient traités sans procéder nécessairement par voie d'audience, qui, souvent, en raison de ces aléas, prend du temps. Nous sommes à établir une procédure précise qui fera en sorte que, dès son ouverture, un dossier cheminera à la Commission de façon à être traité dans un délai maximal d'un an. Déjà, à l'heure actuelle, c'est dans un délai de moins de neuf mois qu'est réglé un dossier qui ne fait l'objet d'aucune demande de remise.
Notre déclaration de services aux citoyens contient aussi l'engagement de la Commission et des membres de son personnel à l'égard des citoyens qui utilisent nos services. Cette déclaration ne reste pas lettre morte, un membre de notre personnel s'assure de son suivi et de son respect.
Et, dans le même ordre d'idées, nous avons remodelé notre site Internet afin notamment d'augmenter le bassin de personnes susceptibles de le consulter. Ce site, entré en ondes lundi, est très convivial. Je ne sais pas si vous avez pu le consulter récemment. Il contient beaucoup d'informations ainsi que des résumés des décisions de la Commission les plus significatives. Le site sera complété par un bulletin électronique qui permettra notamment de mieux faire connaître ce qui se passe en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.
En outre, régulièrement, nous poserons des questions aux internautes qui ont le goût de partager avec nous leurs préoccupations sur ces sujets. Nous visons plusieurs nouvelles clientèles. Par exemple, nous entendons développer un coin pour les jeunes. Par sa fréquentation, les jeunes pourraient, par exemple, apprendre à naviguer sans laisser de trace. La Commission jouit à cet égard d'une grande expertise, ayant publié il y a quelques années le dépliant Inforoute: Attention! Zone scolaire, qui a été largement distribué dans les écoles.
Je vous ai dit aussi que j'avais demandé au gouvernement des effectifs et budgets supplémentaires. Effectivement, la Commission a atteint, pour le donner dans le jargon gouvernemental, 53 équivalents temps complet ? c'est des ETC. Son budget a été augmenté. Cependant, comme vous l'avez souligné vous-même, la Commission trouve que ce n'est pas suffisant. En conséquence et en raison même des nombreux mandats que lui confient l'Assemblée nationale et le gouvernement, nous avons besoin de budgets additionnels. J'ai donc adressé une nouvelle demande au Conseil du trésor afin notamment de revoir les systèmes d'information de la Commission, qui sont devenus maintenant obsolètes. Cela s'impose en raison même du mandat de la Commission et des exigences que pose la Loi sur l'administration publique de rendre compte au citoyen. Elle lui permettra aussi de se doter d'indicateurs de résultat.
J'aborde maintenant le contenu de certains dossiers précis. En plus de ses activités quasi judiciaires, la Commission, dans le cadre de sa fonction de surveillance et de contrôle, veille au respect des obligations imposées par la loi aux organismes publics et entreprises privées concernant la collecte, la conservation, l'utilisation et la communication de renseignements personnels. La Commission exerce également, comme vous le savez, un rôle conseil important qui lui permet d'intervenir de façon préventive en donnant des avis sur des projets de loi, des règlements et autres projets gouvernementaux qui ont un impact sur l'accès aux documents, sur la protection des renseignements personnels.
Au cours de l'année 2000-2001, la Commission a été appelée, en outre du traitement des demandes verbales ou écrites, des plaintes et des autorisations de recherche, à rendre quelque 31 avis sur des projets de loi ou de règlement; 34 avis dits administratifs à des ministères ou organismes sur différents projets de cueillette, de consolidation de banques de données, d'implantation de systèmes, etc.; 10 avis sur les contrats du ministère du Revenu en vertu de la Loi concernant certains contrats du ministère du Revenu adoptée en 1999; 16 avis sur des projets de sondage; 19 avis sur des projets de directive de ministères et d'organismes concernant l'utilisation des renseignements nominatifs dans le cadre de sondages; et enfin 17 avis sur des projets d'entente d'échange de renseignements entre les ministères et organismes gouvernementaux. J'énumère cette liste plutôt fastidieuse pour vous donner une idée précise du travail que nous faisons.
Alors, derrière ces chiffres se cachent des réalités fort différentes. Par exemple, certains projets ou certains dossiers exigent de la Commission qu'elle y investisse beaucoup de temps et d'effectifs. Et c'est sur certains de ces dossiers qui ont dominé les activités de la Commission au cours de l'année, qui sont encore aujourd'hui au centre de nos préoccupations ? et vous y avez fait référence, plusieurs d'entre vous ? que je souhaite porter une particulière maintenant.
La première question que j'aimerais aborder avec vous, c'est le phénomène général de concentration des données au sein du gouvernement. Que ce soit au ministère du Revenu, où le législateur a permis à ce ministère, dans le cadre de la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir, d'obtenir de divers ministères et organismes des renseignements nominatifs nécessaires à l'application des lois fiscales, ou à la Régie de l'assurance maladie, où le législateur examine la possibilité de centraliser encore davantage des données de santé sur les citoyens québécois, la Commission exerce une vigilance constante pour rappeler les principes fondamentaux qui fondent notre régime de droit en matière de protection.
Tout d'abord, au ministère du Revenu, la Commission a donné, conformément à la Loi sur le ministère du Revenu, un avis sur le plan d'utilisation de tout fichier de renseignements que ce ministère entend obtenir à des fins de comparaison, de couplage ou d'appariement. Elle a également émis un avis sur le rapport d'activité de ce ministère à ce sujet.
Dans ces avis, la Commission déplore que le ministère du Revenu n'ait pas tenu compte de sa demande de différencier des renseignements reçus des ministères et organismes selon qu'ils servent à l'application de lois fiscales ou à la lutte contre l'évasion fiscale et le maintien en permanence du Bureau de lutte à l'évasion fiscale. De plus, dans un rapport de vérification qu'elle a rendu public en janvier 2002 ? le mois dernier ? la Commission invitait le ministère à poursuivre des efforts visant à éliminer du plan d'utilisation actuel tous les fichiers déjà inscrits qui ne répondent pas à des besoins immédiats et de n'inscrire au plan que les types de fichiers nécessaires à des projets dont la réalisation est sûre et même imminente.
n(14 h 40)n Enfin, la Commission rappelait, à l'instar du Vérificateur général, que le ministère n'est toujours pas en mesure d'établir les résultats financiers de la lutte contre le travail au noir et l'évasion fiscale ou, plus précisément, de se doter d'un système permettant d'évaluer les résultats découlant de l'obtention de fichiers externes.
D'autre part, dans le secteur de la santé et des services sociaux, la Commission suit de près l'évolution du projet carte santé et tout autre projet de constitution de banque de données au niveau des médicaments, du sang ou de la génétique. Vous comprendrez que mon but premier n'est pas ici de commenter aujourd'hui de façon particulière le mémoire que nous avons déjà déposé à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale sur l'avant-projet sur la loi sur la carte santé. La Commission est invitée à le présenter dans les prochaines semaines devant cette dernière. Nous venons de recevoir une invitation, nous sommes appelés à présenter ce mémoire le 13 mars. Toutefois, elle ne peut passer sous silence devant la présente commission sa plus profonde inquiétude devant les demandes répétées de la Régie de l'assurance maladie du Québec, la RAMQ, pour gérer dans ses banques de données les renseignements de santé.
Ainsi, au cours de l'année visée par le rapport annuel, 12 banques de données du ministère de la Santé et des Services sociaux ont été transférées à la RAMQ. L'accroissement de la concentration des données de santé à la Régie de l'assurance maladie du Québec soulève inquiétude et questionnement. Ainsi, le couplage d'un ensemble de données de santé, données administratives et données cliniques requises pour les fins de différents programmes gouvernementaux, fait craindre que leur utilisation potentielle outrepasse les fins pour lesquelles les citoyens ont donné ces renseignements. Au-delà des assurances au plan de la sécurité ou de l'étanchéité des fichiers, la Commission invite à la tenue d'un débat public éclairé au niveau des enjeux et des objectifs poursuivis par cette concentration avant de s'engager dans la mise en place d'un mégafichier. Il y a là des conséquences sociales structurantes pour plusieurs générations.
J'aimerais passer maintenant aux questions générales du développement de nouvelles technologies et son impact sur la vie privée. Tout à fait consciente de la capacité des nouvelles technologies de contribuer de façon significative à des services que le gouvernement, par ses ministères et organismes, rend à la population, la Commission, dans son plan stratégique, a retenu comme objectif en matière de protection des renseignements de s'assurer que les projets gouvernementaux de services électroniques ou d'utilisation de nouvelles technologies comportent des règles ou des mécanismes appropriés de sécurité et de protection des renseignements personnels. Dans notre plan stratégique, nous l'avons vu, elle s'est donné comme orientation de rendre des décisions éclairées en intégrant les principes d'accès et de protection des renseignements à l'utilisation des nouvelles technologies. Elle veut contribuer de façon active et positive à l'implantation de nouvelles technologies dans le respect des droits fondamentaux.
La Commission examine actuellement divers projets de développement technologique qui lui sont soumis pour avis par différents ministères et organismes. Dans le but de faciliter l'intégration des principes de la loi au moment de la conception même des nouveaux systèmes, la Commission devrait publier prochainement, dans un premier temps, à l'intention des ministères et organismes les critères d'évaluation sur lesquels elle se base pour faire son analyse et, dans un second temps, certaines exigences minimales en matière de cueillette, circulation, entreposage, etc., de données concernant les renseignements personnels.
Et par ailleurs la Commission s'est réjouie de l'adoption par l'Assemblée nationale de la nouvelle Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information, qui a reçu sanction en juin 2001, et de son entrée en vigueur très récente. Cette nouvelle législation confie à la Commission, à son article 45, des nouvelles responsabilités à l'égard de la création d'une banque de caractéristiques ou de mesures biométriques. Et nous entendons publier dans les prochains mois un guide faisant état des systèmes biométriques, des utilisations principales et des lignes directrices à l'égard de la constitution de telles banques de données biométriques.
Autre sujet qui nous a occupés beaucoup au cours de l'année pour laquelle nous faisons ce rapport, la question du bail de logement et la vie privée, et je pense que vous avez un exemple du... la documentation que nous avons préparée sur la question du bail. Chaque jour, les médias nous rappellent maintenant le faible taux de vacance des immeubles résidentiels, particulièrement dans les grands centres du Québec. Et, si la tendance se maintient, il est à craindre que la période de renouvellement des baux, la période actuelle, soulèvera encore cette année la problématique de la cueillette des renseignements personnels à des fins de location. La Commission a eu, au cours des dernières années, l'occasion de se pencher sur cette problématique à plusieurs reprises, et c'est dans ce cadre et notamment sur l'épineuse question du bail et la protection des renseignements personnels qu'on a développé une réflexion, qui est reprise dans la fiche qu'on distribue au public.
De manière générale, on estime qu'un propriétaire peut recueillir à certaines conditions des renseignements personnels avant de conclure un bail avec quelqu'un. Et les tribunaux ont déjà reconnu le droit pour un propriétaire de s'assurer des habitudes de paiement des personnes qui désirent louer ses logements. Par ailleurs, l'article 5 de la Loi sur la protection des renseignements dans le secteur privé stipule qu'une personne qui recueille des renseignements personnels doit se limiter uniquement à ce qui est nécessaire à l'objet du dossier. Le mot «nécessaire» est utilisé dans la loi pour marquer le caractère absolument indispensable d'une action quelconque. Le propriétaire du logement doit donc s'assurer de ne recueillir que les renseignements absolument indispensables lors de ses échanges avec d'éventuels locataires.
La Commission considère que la démonstration des bonnes habitudes de paiement de la part du locataire éventuel est une exigence légitime dans le cas de l'éventuelle signature d'un bail. Cependant, afin de respecter le principe du consentement, l'éventuel locataire devrait pouvoir faire lui-même la preuve de ses habitudes de paiement et, s'il le désire, consentir à ce qu'un propriétaire fasse une vérification auprès d'un tiers, par exemple une agence de crédit. Dans ce cadre bien précis, le candidat locataire peut fournir au propriétaire des documents comme une attestation du respect de ses obligations par son institution financière ou par un propriétaire précédent ou encore des extraits pertinents de son dossier de crédit.
Je passe maintenant à une autre question, la question de la législation en matière d'accès et de protection des renseignements et les réformes qui sont actuellement devant l'Assemblée nationale. Plusieurs d'entre vous ont fait référence à ce projet de loi qui est devant vous. Nous avons été appelés à donner un avis sur le projet de loi n° 122, que vous connaissez sans doute. On a eu l'occasion de vous présenter un mémoire à deux reprises sur le projet de loi, qui est revenu en commission parlementaire deux années de suite.
Pour des raisons qu'il ne lui appartient pas de commenter, la Commission ne peut que constater qu'aucune réforme substantielle de la législation n'est survenue depuis plusieurs années. Les rapports quinquennaux que la Commission a présentés en 1992 et 1997 n'ont pas eu de suite jusqu'ici au plan législatif. La Commission s'inquiète du fait que notre législation en matière d'accès et de protection des renseignements personnels n'évolue pas au même rythme que des changements requis par la société québécoise.
Et j'aimerais terminer mon exposé en parlant un petit peu de l'avenir, de l'actualité, ce qu'on fait maintenant et ce qu'on espère faire au cours des prochains mois, et je réfère ici au rapport quinquennal que nous préparons. L'avenir de la Commission est plein de projets en voie de réalisation et qui peuvent, je pense, être d'une importance marquante pour l'évolution des droits à l'information et pour la protection de la vie privée au Québec. À notre avis, nous sommes en quelque sorte à une croisée des chemins dans l'articulation de ces deux droits-là.
n(14 h 50)n D'une part, on se demande de plus en plus, au Québec, comme ailleurs au Canada et dans les démocraties occidentales, si la première génération de législation en accès à l'information a véritablement rendu les actions des gouvernements plus transparentes. N'y a-t-il pas une approche plus simple, plus rapide, plus facile d'usage pour les citoyens qui désirent de l'information de l'État dans une de ses multiples formes, ministère, organisme, commission scolaire, hôpital, municipalité? Est-ce que l'information précise ne devrait pas être accessible aux citoyens sans qu'ils le demandent? À l'exemple de la législation américaine, notre législation ne devrait-elle pas contenir des dispositions qui définissent clairement des catégories de renseignements automatiquement accessibles sans que le citoyen n'ait à le demander? Dans cette foulée, la législation pourrait aussi énoncer les catégories de documents accessibles sans qu'il soit nécessaire de présenter une demande formelle. Et, dans la conjoncture actuelle, comment préserver le droit de savoir à une époque où les questions de sécurité nationale interrogent nos pratiques habituelles de circulation de l'information?
Le prochain rapport quinquennal, qui sera déposé à l'Assemblée nationale avant la fin d'octobre, cette année, portera surtout sur le thème de l'accès à l'information. Nous ferons d'abord un minibilan de la situation actuelle de l'application concrète de la loi et des conséquences observables chez les citoyens usagers et les organismes publics. Nous ferons aussi un inventaire des approches en matière d'accès à l'information: Sont-elles appropriées ou applicables pour le Québec? Et, si nécessaire, nous ferons des recommandations au législateur.
D'autre part, certaines questions demeurent incontournables, particulièrement celles relatives à l'effet des connaissances scientifiques sur la vie privée et notamment la protection des renseignements personnels. Il y a 20 ans, au moment de l'adoption de la Loi sur l'accès, ce sont surtout des identifiants quotidiens tels adresse, numéro d'assurance sociale qu'on avait en tête. Aujourd'hui, la biométrie nous fiche grâce à l'iris de l'oeil, la paume de la main, la forme du visage. Pour sa part, la génétique pointe vers le génome humain, lui-même, comme identifiant ultime des personnes. Notre législation de portée générale est-elle assez précise pour bien englober ces nouvelles dimensions de l'information sur les personnes?
Un autre exemple des défis que pose et posera de façon encore plus aiguë à l'avenir... est le développement des techniques de surveillance: l'utilisation de satellites ultrasophistiqués à des fins d'écoute ou encore de lecture des courriels à l'échelle mondiale, caméras de vidéosurveillance dans les lieux publics et privés, bracelets pour les détenus en liberté provisoire et, pourquoi pas, pour les jeunes enfants. C'est des questions qui sont posées actuellement. Quelle liberté est perdue en échange de ce nouveau savoir et de cette illusion de sécurité? Toutes ces questions formeront l'arrière-fond à d'autres chapitres de notre rapport quinquennal.
Un dernier mot ? et je conclus là, M. le Président ? sur un des chapitres de ce rapport quinquennal qui portera sur une problématique plus familière et plus près du coeur de beaucoup de Québécois et de Québécoises, la généalogie. Cette pratique de dresser l'arbre généalogique de sa famille se heurte, depuis moins de 10 ans, aux nouveaux défis légaux inattendus qu'ont mis en évidence l'adoption simultanée de la loi sur le secteur privé et du Code civil du Québec et même, encore récemment, les changements que vous avez faits au mois de novembre dans les pouvoirs de l'état civil.
Malheureusement, rien n'est prévu pour les généalogistes ou ceux qui ont choisi d'écrire l'histoire. Est-ce un simple oubli ou est-ce une volonté réelle de protéger la vie privée des citoyens en dépit de la volonté, aussi légitime, d'une société qui veut écrire son histoire, rechercher ses ancêtres? Les sociétés de généalogie hésitent à publier leurs travaux, truffés comme ils le sont de renseignements personnels, pour lesquels les titulaires n'ont pas donné leur consentement à l'utilisation. On se plaint que les tiers consultent dans les paroisses les registres des actes de naissance sans le consentement des personnes qui y sont décrites.
La Commission désire connaître l'opinion des gens sur ce sujet. N'y a-t-il pas lieu de permettre à une société de connaître son passé sans craindre l'illégalité et les poursuites? Est-ce que nos lois ne devraient pas accommoder expressément les pratiques des généalogistes? Le commissaire Me Michel Laporte entendra des représentations du public à ce sujet dès la mi-avril. On peut prévoir déjà qu'un de nos prochains rendez-vous sera au sujet de ce rapport quinquennal, et j'anticipe avec plaisir l'échange que nous pourrions avoir autour de ces questions passionnantes que nous allons aborder. Je vous remercie beaucoup de votre attention et je suis prête à répondre à vos questions.
Discussion générale
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup, Mme la présidente. Est-ce qu'il y a des questions de la part des membres de la commission à poser à nos invités? Du côté ministériel, est-ce qu'il y a des questions? M. le député de Saint-Hyacinthe.
Encadrement des pratiques
des historiens et des généalogistes
M. Dion: Merci, M. le Président. Merci, Mme la présidente, votre exposé est particulièrement intéressant et nous a laissés sur notre appétit, et c'était votre intention, en particulier sur toute la question des sociétés généalogiques. J'étais à la commission quand on a fait des consultations l'an dernier sur ce sujet-là et je vous avoue que j'ai été non seulement surpris, mais... je ne dirais pas scandalisé, le mot est un peu fort, mais vraiment très surpris des délais très considérables que l'on impose aux chercheurs dans l'établissement de la ligne généalogique. Je ne me souviens pas exactement, avec précision le nombre d'années, mais c'était considérable, ce qui rendait quasiment, sinon impossible, en tout cas extrêmement difficile l'étude de ces généalogies-là.
Et je réfléchissais à ça et je ne voyais pas l'intérêt qu'il y avait à cacher certaines informations concernant les gens qui sont venus avant nous et je ne voyais pas vraiment le bien-fondé de toutes les limitations qu'il y avait dans ce... qui étaient imposées aux spécialistes des généalogies. Alors, j'aimerais ça vous entendre davantage, un peu plus précisément sur toute cette problématique-là. Je ne sais pas si vous pouvez nous en dire davantage.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Mme la présidente.
Mme Stoddart (Jennifer): D'accord. Sans entrer dans des détails juridiques qui, jusqu'à maintenant, n'ont fait l'objet, je pense, d'aucune interprétation formelle, ce à quoi nous assistons, c'est l'effet vraiment inattendu du fait que le Québec, à peu près, quoi, il y a huit ans, en 1994, en même temps, a ajouté cinq articles au Code civil. Il y a eu de grandes révisions du Code civil. Et, voulant expliciter le droit à la vie privée qui existait dans la Charte québécoise depuis 1975, on a élaboré six articles qui développent un peu plus en détail le droit à la vie privée.
En même temps, le Québec a adopté la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. En le faisant, le Québec était extrêmement avant-gardiste, demeure avant-gardiste parce que, à mon avis, il n'y a aucune autre province canadienne qui a de telle législation qui protège la vie privée. Cependant, le problème qui a rapidement surgi, c'est qu'en adoptant ces deux lois-là, dans le cadre de la loi sur le secteur privé, on pensait surtout aux entreprises ? d'accord? ? aux entreprises commerciales qui voulaient faire du marketing, je pense que c'est à peu près ça, la situation qu'on avait en tête, et, dans le Code civil, on avait pensé à, bon, un grand principe de protection de la vie privée sans penser comment ça pourrait venir contrecarrer les pratiques des historiens et des généalogistes.
Alors, très tôt après, les historiens et les généalogistes se sont rendu compte qu'ils fouillaient, bref, dans les renseignements personnels d'autrui sans avoir le consentement ? qui est la base, hein ? sans permission. Mais ils l'ont toujours fait. Et, dans le cas... si on pense aux actes civils qui sont dans les paroisses depuis, quoi, 350 ans, tout d'un coup, ça devenait des actes civils qui n'étaient pas nécessairement soumis à la loi sur le secteur public. Alors, tout le statut... C'est-à-dire ils ne faisaient pas nécessairement partie de l'état civil, qui, lui-même, était extrait de la loi sur le secteur public, qui a un statut particulier qui le réglemente. Bref, tout ce qui était dans les églises, c'était de statut incertain par rapport à la possibilité pour quelqu'un de venir le consulter sans l'accord des gens qui étaient là. C'était complètement inattendu.
La situation aujourd'hui n'est pas plus claire parce qu'il y a eu peu de décisions des tribunaux là-dessus, et les avis des juristes ne sont pas unanimes, sinon, je pense, le problème serait réglé. Il y a, à mon sujet, une décision qui est une décision de la Cour du Québec qui dit qu'une congrégation religieuse n'est pas soumise à la loi sur le secteur privé, la Loi sur la protection des renseignements personnels sur le secteur privé, elle serait soumise simplement au Code civil, ce qui veut dire que les gens ne peuvent pas contester une décision de donner ou de ne pas donner devant la Commission d'accès, il faudrait qu'ils aillent aux tribunaux ordinaires. C'est ça, l'implication pour le citoyen.
n(15 heures)n Entre-temps, vous, les députés, on le sait par les lettres que vous nous envoyez, les gens dans vos comtés vous demandent de regarder cette problématique parce qu'ils se trouvent heurtés par cette problématique. Certains n'aiment pas que des généalogistes aillent dans les registres de paroisse et relèvent des choses, par exemple sur les baptêmes de leurs enfants. Pourtant, c'est la pratique traditionnelle depuis toujours au Québec. Alors, c'est autour de cette... Quelle est la solution? On ne sait pas pour le moment, mais on fait deux choses, on consulte le public, le commissaire Michel Laporte va tenir des consultations publiques, et on va aussi regarder des législations d'autres pays, des grands principes, par exemple de l'UNESCO, sur ces questions de recherche, des limites permissibles aux historiens en faisant la recherche tout en respectant la vie privée.
Je ne sais pas quelle serait la solution. Il est possible qu'on vous demande d'amender les lois pour faire un genre d'exception, comme on fait pour, par exemple, la vérification de crédit, les gens qui détiennent les renseignements, les agences de crédit, qu'on appelle. Vous savez, il y a des exceptions dans la loi pour certaines situations prévues. Ça, c'est une possibilité. Mais on va entendre le monde. Alors, voilà à peu près l'état de nos réflexions.
Le Président (M. Cusano): M. le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Oui. Est-ce que, actuellement, vous avez eu des plaintes ou des poursuites qui ont été déposées à l'égard des généalogistes pour utilisation de renseignements d'ordre privé comme ça ou si c'est seulement... on est encore dans le domaine de la crainte que quelque chose se produise? Est-ce qu'il y a eu vraiment des poursuites dans ce domaine-là?
Mme Stoddart (Jennifer): Bon, il y a une plainte qui a été déposée à notre attention sur quelqu'un qui se rebiffait à ce qu'un généalogiste relève un acte de naissance qui concernait des membres de sa famille, je pense, lui-même et des membres de sa famille. Et je veux vous dire, comme le problème est imminent et le problème est là depuis longtemps, on en prend connaissance dans les journaux, on entend les historiens et les généalogistes soulever cette question, la Commission s'est dit: On fait notre rapport quinquennal, pourquoi pas contribuer en essayant de cerner le problème en vous faisant des recommandations précises devant ces contradictions législatives actuelles? Alors, oui, il y a actuellement une plainte qui est en traitement.
M. Dion: Et ce que j'ai compris, c'est que votre délai pour remettre votre rapport, c'est à l'automne.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, voilà.
M. Dion: Merci, Mme la présidente.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Jonquière.
Mme Gauthier: Dites-moi, M. le Président, est-ce qu'on doit rester toujours... on peut changer de sujet?
Le Président (M. Cusano): C'est à votre loisir, madame.
Délais de traitement des dossiers
Mme Gauthier: Merci. Alors, Mme la présidente, à la page 3 de votre allocution, dernier paragraphe, vous parlez des délais, effectivement. Et, à la page 4 vous dites que vous êtes en train d'établir une procédure précise qui fera en sorte d'écourter les délais. Voulez-vous expliquer davantage c'est quoi que vous avez en tête?
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, mais je vous remercie de la question parce que ça va me permettre de vous expliquer à quel point la question des délais à la Commission d'accès me tient à coeur. C'est le premier grand dossier dont je me suis occupée en accédant à la présidence de la Commission et c'est un dossier qui est toujours très, très important, critique, névralgique pour la mise en vigueur de la législation. Et c'est encore un dossier dans lequel, malgré tous les efforts qu'on a mis... demeure un dossier très, très difficile pour nous, pour plusieurs raisons.
Nous avons commencé, à l'automne 2000, à faire une analyse des facteurs qui contribuent au cumul des délais dans des dossiers d'adjudication et nous avons ciblé plusieurs sources reliées à l'administration du processus d'adjudication, quand il y a des dossiers qui viennent à l'adjudication. Dans un premier temps, nous avons constaté qu'on met beaucoup de dossiers sur le rôle ? vous êtes avocate, je crois, et, donc, vous... On met beaucoup de dossiers sur le rôle et peu qui procèdent à l'audience, ce qui nous laissait dans les... Les commissaires se déplaçaient, justement, en région sans qu'il y ait d'audiences, finalement, et c'était peu efficace.
Alors, la première grande réforme que nous avons instituée, c'est que nous avons mené d'abord un projet-pilote pour doubler le nombre de dossiers mis au rôle. Et, à la lumière des résultats, ce qui permettait... Et la mise au rôle a l'effet, dans l'administration du système, de, on dirait, retenir l'attention des parties quant à l'imminence d'une décision de la Commission et aiguiser leur intérêt à venir à une solution à l'amiable grâce aux services des avocats médiateurs de la Commission. Si un dossier est mis au rôle dans deux, trois ans, les parties qui sont en litige ne sont pas intéressées à s'asseoir pour discuter d'un règlement. Donc, ceci avait eu le résultat d'avancer les dates et règlements des litiges et augmenter le nombre de litiges de la Commission.
Alors, nous avons mis plus de dossiers au rôle, pour l'ensemble de la Commission, depuis à peu près, je pense, huit mois maintenant. Mais nous avons fait le point sur ce processus-là il y a deux mois. Et nous voyons que, bien que nous avons réussi à éliminer, je pense, deux ou trois mois du délai moyen de traitement des plaintes, que, pour rejoindre notre objectif qu'on a marqué dans le plan stratégique, de rendre toute décision en bas d'un an, d'ici décembre 2002, donc à la fin de l'année, dans 10 mois, qu'il faudrait encore prendre des mesures peut-être assez significatives.
En analysant les dossiers ? et d'où l'importance des indicateurs de gestion dans des dossiers, dans la gestion d'un tribunal ? nous avons pu distinguer comme source majeure de délai global les demandes de remise. Les demandes de remise surviennent dans à peu près un tiers des dossiers. Les demandes de remise viennent non seulement de la partie intimée, c'est-à-dire en général l'organisme ou la compagnie qui détient des renseignements, elles viennent, dans 40 % des cas, de façon surprenante ? peut-être surprenante pour moi ? de la personne qui veut avoir le document. Il veut avoir le document, mais il est trop occupé pour venir à l'audience pour décider. Moi, personnellement, quand on a fait ces études-là, ça m'a beaucoup étonnée. Et, quand on distingue les dossiers dans lesquels il y a une remise, une ou plusieurs remises, du groupe de dossiers dans lequel il n'y a aucune remise, on voit évidemment que la Commission peut donner une décision finale, dans les dossiers où elle donne une décision finale ? parce qu'on règle à l'amiable à peu près 65 % des dossiers à la satisfaction des parties ? beaucoup plus vite. Actuellement, c'est autour de huit mois en moyenne, ce qui veut dire encore bien en dessous de notre cible.
Alors, nous nous sommes mis à réfléchir sur cette question-là, de la façon que la Commission rend ses décisions et le rôle de l'audience dans la prise de décision finale de la Commission. Nous avons aussi regardé particulièrement d'autres provinces qui ont une législation très similaire à la nôtre et qui semblent avoir un système, je veux dire, globalement plus efficace. Ils ont des délais plus courts que nous. Et nous voyons que ce n'est que très exceptionnellement que ces organismes-là, dans d'autres provinces, tiennent des audiences.
Alors, nous sommes actuellement ? et c'est à cette modification que je faisais référence ? en train de regarder comment, tout en respectant les droits des parties, évidemment, l'article 23 de la Charte, nous ne pouvons pas peut-être emprunter des aspects les plus efficaces de ce qui se fait dans d'autres provinces et voir si on ne peut pas tenir plus d'audiences sur papier, ce qu'on appelle des audiences sur papier.
Parce que, après tout, il faut voir le genre de décision qu'on rend. On rend une décision sur: Oui ou non, est-ce que le document est accessible? Ça concerne des documents, hein, c'est très différent de, je ne sais pas, une procédure criminelle où des questions de crédibilité sont primordiales. Nous avons rarement des questions de crédibilité personnelle, parfois d'experts mais... Alors, c'est très différent même du domaine où j'ai travaillé avant, les droits de la personne, où la crédibilité des présumées victimes d'actes discriminatoires est primordiale dans l'établissement de la preuve. Ici, nous sommes dans le concret. Les documents, les informations, il faut qu'ils existent, il faut qu'on puisse les examiner. Alors, c'est un processus qui se prête éminemment bien à ce genre d'examen sur dossier. Alors, nous sommes... Et nous espérons, avec ça, finalement, pouvoir encore enlever des mois de notre traitement moyen.
Le Président (M. Cusano): Mme la députée, est-ce que vous voulez continuer?
Mme Gauthier: Non, ça va. Merci.
n(15 h 10)nSignature d'un bail et droit à la vie privée
Le Président (M. Cusano): Ça va? Avant de passer la parole au député de Frontenac, j'aimerais vous adresser une question, Mme la Présidente, et ça concerne le bail et la vie privée. Vous avez une couple de pages dans votre document qui parlent justement du bail et de la vie privée. Mais, avant de vous poser la question, j'aimerais vous souligner que je représente un comté, le comté de Viau, où la grande majorité des propriétaires sont ce qu'on appelle des petits propriétaires, c'est-à-dire c'est des gens qui ont acheté un duplex et qui vont louer le haut de leur logement à des personnes. Je pourrais vous faire remarquer que des 25 logements et plus dans mon comté, c'est des HLM. Alors, il n'y a pas de gros propriétaires. Je ne parle pas au nom de gros propriétaires, je parle au nom des petits propriétaires.
Et, lorsque vous dites, au niveau de la cueillette de renseignements personnels, que ces renseignements doivent se limiter uniquement à ceux qui sont nécessaires à l'objet du dossier et, lorsqu'on considère que chez nous, dans mon comté, un haut de duplex va se louer pour un 500 $ par mois, ça veut dire un contrat, un bail d'une valeur de 6 000 $ par année, comment pouvez-vous réconcilier le fait qu'il y a une espèce de limite sur les renseignements qu'on peut recueillir lorsqu'il y a un contrat de 6 000 $ entre deux personnes et qu'Hydro-Québec, pour la location d'un chauffe-eau électrique qui est d'une valeur d'une couple de centaines de dollars, on demande aux personnes de fournir leur numéro d'assurance sociale?
Mme Stoddard (Jennifer): Ce sont des questions sensibles et difficiles. Je pense, le fait qu'on n'arrive pas à modifier la loi pour tenir compte de toutes ces réalités, souvent conflictuelles, en témoigne.
D'abord, le cas d'Hydro-Québec. Hydro-Québec est une des très rares exceptions à cette règle qui permet la cueillette du NAS. Et ça se justifie, cette exception, par le fait qu'en contre-partie Hydro-Québec est soumise à des obligations particulières, elle ne peut pas couper l'électricité pendant des mois d'hiver. Alors, c'est l'espèce de corridor particulier dans lequel on a mis Hydro-Québec. C'est-à-dire, on sait qu'Hydro-Québec est obligée de fournir le courant et donc probablement pas enlever le chauffe-eau même si on fait défaut dans ses paiements. Je ne sais pas jusqu'à quel mois, au mois de juin, ou combien de mois il y a cet embargo. Mais il s'agit d'une exception au principe, et je ne pense pas qu'il faudrait l'étendre jusqu'au bail résidentiel en général.
Le Président (M. Cusano): On ne peut pas aller aussi loin que ça, non? C'est juste pour pouvoir bien expliquer...
Mme Stoddard (Jennifer): Oui, c'est souvent posé comme question, oui.
Le Président (M. Cusano): ...à mes électeurs, à savoir jusqu'à quel point ils peuvent demander justement des renseignements. Parce que, tu sais, j'insiste à dire que ce n'est pas des grandes entreprises, là, qui ont des avocats et toutes sortes de personnes pour faire des enquêtes sur des individus, ainsi de suite, c'est de petits propriétaires, là, en fait, et que l'information nécessaire pour ces gens-là, c'est pour... Et la plupart de ces gens-là, ils ont des hypothèques sur ces maisons-là et qu'ils veulent bien s'assurer que justement la location se fait et que les personnes puissent respecter leur engagement, parce qu'il y a un engagement des deux côtés.
Alors, j'aimerais vous entendre sur le fait... C'est quoi que, vous, à la Commission, vous, à la Commission, vous considérez comme ? puis je vous cite, là ? comme étant absolument «indispensable», là, au niveau des informations.
Mme Stoddard (Jennifer): D'accord. Oui. Ce qu'on dit, et c'est peut-être ça, la difficulté, parce qu'on est déjà allé en commission parlementaire à ce sujet-là, il y a un projet de loi pour modifier le bail résidentiel... Ce qu'on dit, c'est que le propriétaire peut cueillir des renseignements nécessaires avec le consentement et en autant qu'ils sont vraiment indispensables à ce dossier. Personne n'oblige des propriétaires à prendre des gens dont les habitudes de paiement sont invérifiables ou qui se présentent comme un mauvais risque.
Ce sur quoi la Commission d'accès met en garde, c'est la cueillette automatique, machinale et obligatoire dans la loi de tout le monde qui ne va jamais signer un bail résidentiel au Québec. Et c'est ça qu'on trouve dangereux, qu'on donne des informations, des identifiants personnels automatiquement. On dit: Si vous avez besoin de vérifier les habitudes de paiement des gens, vous pouvez leur poser des questions, vous êtes en mesure de poser ces questions-là. D'accord?
Mais chaque cas est différent. Il faut tailler les questions, parce que les questions relèvent de la vie privée de la personne ? Êtes-vous capable de payer? Bref, c'est quoi, les états de vos finances? c'est ça que ça veut dire ? sur chaque personne qui veut louer chez vous. Vous ne pouvez pas, la Commission dit, appliquer une règle générale qui présume que tout le monde ne peut pas établir sa capacité de payer sans qu'on aille dans une banque de crédit à son sujet. Mais on peut, avec consentement, si on n'a pas d'autres façons de l'établir à la satisfaction du propriétaire, donner, par exemple, sa date d'anniversaire pour aller dans une banque de crédit, une agence de crédit pour établir qu'on a des habitudes de paiement qui feront de nous un bon locataire. Vous voyez?
Alors, ce n'est pas, peut-être, une position qui est d'une application simple parce que ça exige du propriétaire, pour respecter les droits du locataire, qu'il taille ses questions par rapport aux réponses qu'il reçoit et non pas si on veut présumer le pire, le pire qui envahirait, pas nécessairement avec raison, la vie privée des gens. Mais il peut poser ces questions-là si ces questions-là sont nécessaires.
Il y a l'autre position évidemment, qu'on n'a le droit de poser aucune de ces questions. Ce n'est pas ça. La Commission a répété plusieurs fois, les tribunaux ont reconnu à plusieurs reprises qu'on n'est pas obligé de louer à quelqu'un qu'on considère qui est un mauvais risque. Sans évidemment faire une discrimination automatique: parce que, nécessairement, ils sont sur le bien-être social ils sont des mauvais risques ? il y a une longue jurisprudence là-dessus ? parce qu'ils se présentent sous telle forme, ils ne peuvent pas payer, un étudiant, ou je ne sais pas quoi. Alors, on a quand même au Québec une expérience dans ces questions-là.
Mais, je pense, le problème, c'est qu'on ne peut pas dire: Oui, il y a une solution automatique. Et, nous, la Commission, on s'est opposés à ce qu'il y ait une solution automatique qui soit inscrite, par exemple, dans tous les baux résidentiels: En soumettant votre demande pour louer un logement, vous devez donner votre date de naissance. On continue de s'opposer à ça, parce qu'on dit: Ce n'est pas nécessaire dans tous les cas. Et que vont faire les gens ensuite avec votre date de naissance? C'est la clé de plusieurs banques d'information. Qui va superviser ça? Moi, je veux louer un logement et puis je recueille automatiquement une douzaine de dates de naissance des gens. Au moment où le vol d'identité devient un problème de plus en plus courant, qui maintenant, de nos jours, répand sa date de naissance si ce n'est pas nécessaire?
Alors, c'est une question qui a plusieurs angles. Et je pense que possiblement le projet de loi est toujours en discussion. Nous avons comparu en commission parlementaire au mois de décembre à ce sujet-là, et peut-être qu'il sera représenté sous une autre forme.
Le Président (M. Cusano): C'est bien. Merci, Mme la présidente. Je n'abuserai pas de mon droit de parole, alors je cède la parole au député de Frontenac.
M. Boulianne: C'était la même question, M. le Président, mais peut-être plus de précisions. Si une personne, si elle refuse de donner sa date de naissance et son numéro d'assurance sociale, et l'autre, le propriétaire refuse de lui louer le logement, qu'est-ce qui se passe? Parce que ça arrive.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, mais il faut voir pourquoi elle a refusée, dans quel contexte elle a refusé de donner ces deux identifiants-là. Est-ce qu'elle ne pouvait pas établir sa capacité de payer autrement? Hein? Ça ne devrait pas être un automatisme, c'est ça qu'on dit. Il y a d'autres façons, il y a des lettres, il y a des références auprès des gens auprès de qui on a loué des immeubles avant, des gens qui donnent, je ne sais pas, les références d'emploi pour montrer qu'ils ont un emploi ou une source de revenus et d'autres qui peuvent... C'est à la personne, la responsabilité est à la personne qui désire louer le logement à démontrer en quoi elle a les capacités de payer et les habitudes de payer. Et, donc, ça se peut que lui-même dise: Mais, écoutez, vous pouvez vérifier mon crédit, voici mon numéro de date de naissance. Mais, si le propriétaire ne peut pas le vérifier, si tout ce que je donne, moi, comme aspirant locataire, est insuffisant pour établir que je suis un bon risque, que je suis une personne fiable qui a un bon passé, que j'ai payé mon loyer dans le passé, bien, à ce moment-là, peut-être que le locateur irait plus loin puis dirait: Écoutez, madame, ce n'est pas assez, je dois vérifier d'autres choses. D'accord? Alors, ça dépend du contexte.
n(15 h 20)nM. Boulianne: O.K. Merci. J'ai une autre question. D'abord, je veux vous souhaiter la bienvenue. Vous avez parlé de l'âge tout à l'heure. L'âge, ça cause toujours un problème, évidemment, à un certain moment donné. Sur les cartes, que ce soit sur les permis de conduire, n'importe quelle carte, il y a toujours la date de naissance, toujours. Alors, à chaque fois qu'on donne, donc, notre carte, il y a une date de naissance. Même ici, quand on vient visiter, on amène quelqu'un pour visiter, il faut sortir encore, que ce soit la conjointe ou les enfants, l'âge encore. À chaque fois, on la demande partout, puis elle est imprimée partout. Puis, moi, je ne veux pas la donner, la mienne, puis d'autres ne veulent pas la donner non plus, mais on est pris. Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'enlever ça sur les cartes au moins? Je ne sais pas de quelle façon. Est-ce que, là, on ne viole pas justement le secret confidentiel d'un individu quand la carte... l'âge est imprimé sur toutes les cartes qu'on a?
Mme Stoddart (Jennifer): Je pourrais peut-être vous raconter ce que la Commission d'accès a fait à ce sujet avant mon arrivée. Nous avons une carte qui n'a aucun numéro. Alors, moi, je la présente, depuis que je suis là, je la présente, me disant: Je vais me faire refuser parce qu'il n'y a aucun numéro à relever. Quand on dit: On a besoin de carte d'identité, et je donne cette carte-là, je ne me fais jamais refuser.
Alors, oui, effectivement, on pourrait encourager l'utilisation de cartes qui n'ont pas de date de naissance. Mais la carte d'identité de la Commission ne sert qu'à nous identifier comme employés de la Commission. Ce n'est pas le permis de conduire ou d'autres cartes qui ont une existence légale et qui ont une importance pour attester de certains droits. Et, quand on demande la date de naissance, à des places particulières... Je pense, ici, s'il s'agit peut-être d'une exception à une règle sur la protection de la vie privée étant donné les événements qui se sont déjà passés à l'Assemblée nationale, je pense que la vérification de la sécurité est de mise. Et, avec notre date de naissance, on a un lien avec des banques de renseignements policiers.
M. Boulianne: ...l'Assemblée nationale, mais c'est la même chose dans les caisses populaires, c'est la même chose, on nous la demande toujours.
Mme Stoddart (Jennifer): C'est ça, oui. Mais la Commission ne cesse, si vous regardez nos écrits, ne cesse de rappeler qu'on devrait utiliser ces identifiants le moins possible, le numéro d'assurance sociale, l'âge, etc. Et, si vous demandez qu'est-ce qu'on fait dans les avis, je vous ai... la liste d'avis, vous voyez, à la fin de notre rapport, tous les avis qu'on donne, bon, bien, on regarde à chaque fois et on voit c'est quoi, le nombre de renseignements minimaux dont les différents organismes ont besoin pour faire des échanges, pour faire ce qu'ils ont à faire, éliminer ceux qui ne sont pas vraiment essentiels aux projets qu'ils ciblent.
M. Boulianne: Merci. M. le Président.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député de Frontenac. M. le député Laporte.
M. Laporte: D'Outremont.
Le Président (M. Cusano): Excusez, d'Outremont.
Effectif et budget
M. Laporte: Mme Stoddart, je voudrais revenir aux commentaires que j'ai faits plus tôt à partir de vos propres commentaires. À la page 5, vous dites: «Je vous ai dit aussi que j'avais demandé au gouvernement des effectifs et des budgets supplémentaires. Effectivement, la Commission a atteint, pour donner dans le jargon gouvernemental, les 53 ETC. Son budget a été augmenté. Ce n'est pas suffisant.» Alors, pourriez-vous élaborer là-dessus, sur le «ce n'est pas suffisant»?
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, certainement, avec plaisir, M. le député. Quand je suis arrivée à la Commission, j'ai remarqué ? je pense que je vous en ai fait part ? à mon très grand étonnement que, de tous les organismes qu'on penserait qu'ils seraient bien outillés au point de vue de l'informatique, et des appareils, et des réseaux, et des logiciels, ce serait la Commission d'accès. Bien, à ma très grande surprise, la Commission d'accès était très, très en retard de ce qu'on trouverait dans un bureau ordinaire du gouvernement. Et c'est encore le cas par rapport aux appareils qui sont sur le bureau de chacun des employés. Ils sont des générations, je ne suis pas informaticienne, mais ils sont des générations en retard de ce que même apparemment la moyenne des fonctionnaires a. Bon.
Alors, il s'agissait de combler ce retard historique et aussi de demander des ressources. La Commission d'accès a très peu d'employés, là. Une cinquantaine d'employés, c'est peu par rapport à tous ses mandats et à la complexité croissante des mandats. Nous avons eu à peu près un tiers des effectifs et des ressources demandés. Et ce qui nous manque actuellement, c'est surtout des ressources informatiques pour réviser notre système d'information, pour le rendre plus sensible pour dialoguer avec le public, par exemple, toute la question de la téléphonie, comment vous répondez aux demandes, à qui les gens sont référés, tout l'accueil du public fait partie de ça. Et les logiciels sont... C'est peut-être des détails un peu ennuyants, mais, dans la vie d'un organisme c'est important. Et, pour le public qui veut vous rejoindre, s'il est toujours en attente, si son appel ne peut pas se faire acheminer rapidement, bon, bien, c'est important. Ces logiciels coûtent des centaines de milliers de dollars.
Nous aimerions aussi pouvoir, grâce à des logiciels, de plus en plus chers, faire des sondages auprès du public sur ses opinions sur des questions de vie privée, sur la mise en vigueur de la loi d'accès. Et là encore, un certain logiciel sur notre site Web nous permettrait de gérer ce genre d'exercice qu'on voit de plus en plus, hein? Si vous voulez participer... La plupart des sites maintenant sont interactifs et vous pouvez participer à des sondages, on vous demande votre opinion. Et c'est une façon importante, je pense, en termes de service au public, de communiquer avec les gens.
Nous voulons aussi continuer et parfaire nos connaissances dans les domaines technologiques de l'heure ? j'en ai mentionnés quelques-uns dans ma présentation ? où on aura besoin non seulement de personnes, mais aussi parfois d'équipements ou d'études qui sont très coûteuses. Je parle des questions de biométrie. Nous avons des responsabilités particulières pour la biométrie. Bien, juste pour suivre l'évolution de la biométrie, qui est mue par la haute technologie américaine, vous comprenez que ça pourrait prendre une partie importante de notre budget à faire ça comme il faut. La surveillance vidéo, c'est un autre domaine où, idéalement, je pense, avec l'importance des caméras de surveillance partout, nous devrions attitrer une personne juste à suivre ce domaine-là, à peu près. On n'a pas ces ressources actuellement.
Et nous avons le nouveau domaine de la génétique, dont j'ai parlé, qui s'ouvre et sur lequel on espère pouvoir faire un avis. Mais tous les développements génétiques, pour bien les suivre, ça prendrait quelqu'un qui s'y connaît un peu en génétique et aussi en protection de la vie privée. Alors, c'est à peu près pour ça que nous continuons à demander des ressources.
M. Laporte: Le budget, c'est-u toujours 3,4 millions?
Mme Stoddart (Jennifer): Non, le budget est 3,8 millions, à peu près, ou 3,9. Nous avons eu 350 000 l'an dernier. Est-ce que c'est... Le directeur général... Oui?
M. Laporte: Parce que, ça, quand on calcule le traitement puis les loyers, ça vous fait à peu près 81 % qui passent à ces deux postes budgétaires, il vous reste 18 %. Si vous avez une augmentation de quoi, 3 millions quoi, 3,8 millions...
Mme Stoddart (Jennifer): 3,8 millions ou 3,9, entre 8 et 9, je pense.
M. Laporte: Ça vous fait quoi? Ça vous fait à peu près 725 000 piastres pour tout le reste, là.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, il y a peu, c'est ça.
M. Laporte: Compte tenu des objectifs ambitieux que vous annoncez dans votre plan, là, si, par exemple, vous avez besoin d'expertise en biométrie, ou en ingénierie génétique, ou je ne sais trop quoi, là, vous devez être pas mal... vous avez des carences de ressources qui sont considérables, non?
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Oui, c'est une grande source d'inquiétude non seulement en actes, comme vous dites, des ambitions, mais des ambitions parce que la loi doit continuer à évoluer aux nouveaux défis. On ne peut pas rester toujours aux dates de naissance, tu sais, il faut être dans la génétique aussi, mais aussi les mandats que le législateur nous donne. Si on pense à la biométrie, c'est un nouveau mandat qui nous est donné par le législateur. Bien, la biométrie maintenant, c'est accaparé par quelques firmes multinationales et les grandes études se font soit aux États-Unis ou en Angleterre sur l'utilisation de ces données-là. Alors, c'est excessivement coûteux pour un petit organisme d'essayer de suivre les études dans ce domaine-là.
M. Laporte: Est-ce que vous êtes en train de nous dire... Enfin, je ne sais pas, il faudrait qu'on soit clair là-dessus. Êtes-vous en train de nous dire que vos ressources, qui ont été accrues, demeurent encore nettement insuffisantes par rapport aux besoins que vous avez, compte tenu des objectifs de croissance?
Mme Stoddart (Jennifer): Voilà. Nous avons fait une demande pour près de 900 000 $; nous avons eu 350 000 $. Alors, nous retournons cette année pour la différence et nous avons toujours une demande active au Conseil du trésor.
M. Laporte: Très bien. Ça va.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants à ma droite?
Une voix: ...
Le Président (M. Cusano): Oui, oui, on va alterner. Si c'est le même sujet, je vais céder la parole à Mme la députée de Jonquière. Oui, Mme la députée de Jonquière, allez-y.
n(15 h 30)nMme Gauthier: Merci. Sur le même sujet. À ce moment-là, si on scindait la dualité du rôle de la Commission, c'est-à-dire si on consacrait à la Commission d'accès à l'information son rôle d'accès à l'information et on créait un autre organisme qui, lui, verrait spécifiquement puis de façon plus ponctuelle à voir à la protection des renseignements privés, pensez-vous qu'il serait plus facile, à ce moment-là, d'avoir des crédits supplémentaires?
Mme Stoddart (Jennifer): Ha, ha, ha! Je ne sais pas si ce serait plus facile. Je dirais que ce serait plus difficile parce que, avec deux organismes, il y a quand même l'infrastructure de base, hein, et, donc, on dédoublerait la même infrastructure de base sans...
Mme Gauthier: Bien, je vais vous dire ça différemment...
Mme Stoddart (Jennifer): ...pouvoir avoir les ressources spécialisées.
Mme Gauthier: ...M. le Président, différemment. Si on départageait, je ne sais pas comment... Parce que je ne peux pas voir dans votre rapport annuel. Effectivement, si on départage la partie qui va plus spécifiquement pour la protection des renseignements personnels et la partie qui va plus spécifiquement pour les renseignements d'ordre administratif, est-ce qu'à ce moment-là on ne serait pas en mesure d'avoir deux budgets à l'intérieur de votre organisme qui pourraient être en dualité?
Mme Stoddart (Jennifer): Si notre organisme pourrait être en dualité?
Mme Gauthier: Non, si on pouvait avoir deux budgets de fonctionnement?
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Je n'ai jamais vu ça, je dois dire, dans le secteur public, qu'on ait deux budgets, des budgets consacrés aux différents mandats. On peut, s'il y a des directions à l'interne d'un organisme, là, des fois, on dit: Bon, direction, telle direction qui correspond à tel mandat, on va diviser le budget comme ça, ou s'il y a une partie de son mandat qui est particulièrement en manque, on fait des demandes comme ça. Mais actuellement on ne distingue pas entre ce qui va à l'accès et ce qui va à la protection.
J'imagine que ce serait possible de dire: Bon, par exemple, les commissaires s'occupent surtout d'accès, on mettrait donc les salaires des commissaires... On pourrait faire une approximation. On ne l'a pas fait, à ma connaissance, parce que l'approche que le législateur québécois a choisie est une approche intégrée, que le droit à l'information est néanmoins modulé par le droit à la vie privée des gens sur qui porte l'information et sur les tiers. Et c'est un peu cette approche qui est l'approche non seulement québécoise, mais l'approche partout ailleurs au Canada, sauf au gouvernement fédéral. Et on a donc un organisme qui s'occupe des deux.
Parce que la difficulté pratique, c'est que, si vous devez rendre une décision sur l'accès aux documents... Vous voyez, un de vos collègues, je ne sais pas si c'est le député de Marguerite-D'Youville, a dit: Bon, mais on demande à la Commission quelque chose, on a la décision, et puis c'est rayé, on ne voit pas ce qui est là-dedans. Mais enfin, probablement, ce qui est là-dedans, c'est des informations qui, selon la loi, appartiennent conceptuellement aux tiers, concernent les tiers, sont les renseignements nominatifs des gens qui sont impliqués et qu'on ne doit pas rendre publics, qu'un organisme ne doit pas rendre publics pour protéger la vie privée de ces gens-là. Alors, cette approche intégrée est celle que nous appliquons dans l'administration de la Commission, ce qui ne nous empêche pas, par exemple, quand on fait une demande de ressources, de dire: Bon, bien, c'est pour le côté, tel côté, adjudication, accès à l'information. Par exemple, une des choses pour lesquelles on demande des ressources, c'est de soutenir le système d'adjudication en accès. Alors, ça, c'est pour le côté accès. La surveillance, biométrie, c'est plutôt le côté vie privée. Donc, on distingue nous-mêmes à l'intérieur, par projet.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce que vous avez d'autres questions, madame?
Mme Gauthier: Non, ça va.
Le Président (M. Cusano): Non? Alors, M. le député de Marguerite-D'Youville.
Assujettissement des organismes
municipaux à la Loi sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur
la protection des renseignements personnels
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, dans votre présentation, vous énumériez trois orientations majeures qui émergeaient de vos réflexions et de vos consultations. Une de ces trois conclusions, ou constatations, ou orientations majeures, et je vous cite, était de «revoir les règles d'accès à l'information dans un souci d'exercice des droits démocratiques et de transparence».
J'ai un peu annoncé mes couleurs tout à l'heure quand je vous mentionnais la nouvelle problématique créée par les fusions municipales. Ce matin, dans La Presse, dans le journal La Presse, on lit en première page: Les misérables de l'opposition longueuilloise, où à peine trois conseillers municipaux de l'opposition sur 42 ont été élus. Bon, ça, c'est le résultat de la conjoncture politique. Il demeure que, dans des circonstances comme celle-là, qui peuvent varier d'une municipalité à l'autre ? mais je pense qu'ici c'est un bon exemple, puisqu'il s'agit de la troisième ville en importance au Québec, de près de 400 000 habitants ? donc, l'orientation majeure que vous identifiez dans votre rapport, dans votre présentation et auxquels je souscris entièrement, qui consiste à établir des règles démocratiques et des règles de transparence dans la gestion... sont tout à fait pertinentes.
Nous avions amorcé, avant la conclusion de la session, l'étude du projet de loi n° 122, auquel quelques-uns ont fait allusion et vous-même. Nous avons à peine abordé l'étude du projet de loi. Mais, dès le début de ce projet, l'article 3 vise directement l'assujettissement de certaines instances municipales à l'accès à l'information. Je vous fais grâce de la lecture de cet article 3, mais le dernier alinéa, l'alinéa 2.1°, fait allusion ? et je cite ici ? à «tout organisme dont le conseil d'administration est formé d'au moins un élu municipal désigné à ce titre et dont une municipalité ou une communauté urbaine adopte ou approuve le budget ou contribue à plus de la moitié du financement». En d'autres mots, d'après ce projet de loi, on limite et on circonscrit le type d'instance municipale qui, en principe, serait assujettie à la loi d'accès à l'information.
Pour ma part ? et je parle ici à titre personnel ? comme membre de la commission, lorsque nous avons abordé ce projet de loi là, ces dispositions-là me semblaient insatisfaisantes. Elles me semblaient insatisfaisantes dans la mesure où un des objectifs qui a été invoqué pour procéder aux regroupements municipaux de taille, principalement dans les grandes agglomérations urbaines, visait entre autres la cohérence du développement et la promotion du développement économique, ce qui implique la mise sur pied et la création de sociétés de développement économique ou de corporations de développement économique. Appelez ça comme vous voudrez, il demeure que des instances sont en train d'être formées ou sont déjà formées dans ces grandes agglomérations, qui ont pour but la promotion économique.
Il me semble que, dans un souci de transparence et de rapprocher l'administration municipale des citoyens, ces dispositions de la loi n° 122 devraient être élargies à toute corporation ou toute société municipale qui gère des fonds publics, indépendamment du fait qu'un conseiller municipal siège sur le conseil d'administration ou non. C'est le principe de gestion de fonds publics, à mon avis, qui devrait être la base de l'application de cette transparence.
Et ma question est bien simple ? sans vous demander, bien sûr, de commenter sur le profil de chacune des municipalités ? sur le principe même, à savoir si l'assujettissement de toute corporation ou société municipale qui gère des fonds publics à la Commission d'accès à l'information vous paraîtrait recevable.
Le Président (M. Cusano): La question est posée. Mme la présidente.
Mme Stoddart (Jennifer): Si la... Pardon?
Le Président (M. Cusano): M. le député, voulez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?
M. Beaulne: Oui. C'est que, à l'heure actuelle, les dispositions du projet de loi n° 122 précisent, limitent le type de corporation municipale en vertu des dispositions, à savoir.. Bon, je ne vais pas toutes vous les énumérer.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, je comprends la question générale.
M. Beaulne: Mais, moi, le principe de l'affaire, ici, ce que j'aurais aimé voir, c'est, dans le projet de loi, en vertu justement du souci de transparence que vous avez énoncé vous-même, qu'on assujettisse toute corporation de développement économique ou société de développement économique qui gère des fonds publics, indépendamment de sa structure, à savoir s'il y a un conseiller municipal qui siège dessus puis, enfin, toutes les modalités qui sont explicitées ici, dans le projet de loi. Puis ma question est simple: Êtes-vous d'accord avec le principe que, du moment où on gère des fonds publics, on devrait être accessible à la Commission d'accès à l'information?
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député. Mme la présidente.
Mme Stoddart (Jennifer): D'accord. Je voulais juste être sûre que je comprenais la question. M. le député, la question que vous posez, je pense, est très, très intéressante et elle va au coeur d'une problématique que la Commission a abordée au cours des années sur les filiales, la question de l'assujettissement des filiales, des sociétés d'État.
n(15 h 40)n La Commission, dans un premier temps, a voulu un large assujettissement sous le vocable des principes que vous venez de citer, la transparence de l'État, etc. Cependant, elle s'est fait renverser, je pense, à plusieurs reprises par les tribunaux supérieurs ? il y a encore des décisions pendantes devant les tribunaux ? et elle suit donc la ligne édictée par les tribunaux supérieurs, ce qui ne l'a pas empêchée de soulever cette question et demander au législateur justement de le corriger dans le projet de loi n° 122.
Le législateur, si je me rappelle bien, n'a pas cru bon d'aller de l'avant, en général, avec l'assujettissement des sociétés d'État du Québec. Alors, on reste au statu quo, qu'une filiale d'une société d'État est une personne juridique distincte et pas, donc, assujettie à la Loi d'accès comme la filiale mère.
Quant aux organismes municipaux, si je me rappelle bien, la Commission était en faveur de l'élargissement qui était proposé dans la loi n° 122 tel que déposée, qui était, je pense, la majorité des membres ou la majorité des fonds provenant des fonds publics ? c'est ça ? et elle avait accueilli très favorablement cette modification, encore une fois, pour clarifier une jurisprudence un peu conflictuelle sur la qualification de cette société.
La Commission n'a pas eu à débattre spécifiquement la question que vous me demandez, à laquelle vous demandez de répondre, c'est-à-dire: Dans le cas des organismes municipaux, est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un principe général d'assujettissement? La Commission pourrait certainement regarder cette question et, je pense, elle va regarder cette question de transparence de l'État au sens plus large dans son prochain rapport quinquennal.
Alors, tout ce que je pourrais vous dire, c'est: La question, je pense, est très, très pertinente à la question de la transparence. L'ensemble des commissaires ne se sont pas penchés, alors je ne peux pas parler pour la Commission parce qu'on n'a pas pris position sur une question qui est plutôt hypothétique, pour le moment. Mais je sais très bien que, dans un des chapitres du rapport quinquennal, nous allons aborder justement la problématique que vous soulignez, M. le député, qui est: Comment il se fait que les fonds publics, lorsqu'ils transigent par différentes permutations et combinaisons juridiques, finissent à être à l'abri du regard du citoyen ? enfin, c'est ça ? que ce soit au municipal ou ailleurs? Et ça, c'est un phénomène que la Commission regarde, et on va vous livrer nos observations plus précises dans le rapport quinquennal.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la présidente. M. le député de Marguerite-D'Youville.
Documents faisant l'objet
de restrictions au droit d'accès
M. Beaulne: Oui, M. le Président, je prends bonne note de la réponse de la présidente, qui me semble très réconfortante pour la suite des événements. Ça m'amène un peu à revenir sur la question à laquelle vous avez fait allusion tout à l'heure en répondant à un collègue sur la nature des documents et la qualité des documents qu'on obtient en vertu de la loi d'accès à l'information. Tout à l'heure, en préambule, je faisais allusion que souvent, quand on reçoit certains de ces documents, au fond, par rapport à l'objectif qu'on recherche, ça ne veut rien dire; ils sont biffés, pour toutes sortes de raisons qui sont tout à fait légitimes et tout à fait légales en fonction des règles établies.
Mais il reste que, à mon avis, si la Commission d'accès à l'information doit avoir, au sein de notre société, toute la crédibilité qu'elle devrait normalement avoir, il ne s'agit pas tout simplement, comme on dit en anglais, «to go through the motion», c'est-à-dire traverser le processus, obtenir les renseignements et puis, après ça, les renseignements ne servent strictement à rien parce que, pour toutes sortes de raisons, ce qui est, au fond, fondamental et ce qu'on recherche est biffé. Et j'en ai vu, des exemples comme ceux-là, j'en ai eu sous les yeux. Malheureusement, je les ai oubliés dans mon comté puis je ne les ai pas apportés parce que je ne savais pas si on aborderait cette question-là. Je pourrai vous les faire parvenir si vous voulez. Vous en avez sûrement vu vous-même...
Mme Stoddart (Jennifer): ...sous la main, oui.
M. Beaulne: ...où, finalement, en fonction de l'objectif recherché, ça ne veut pas dire grand-chose. La question que je me pose, à ce moment-là, c'est que: Tout en respectant les exigences de confidentialité, n'y aurait-il pas lieu de réviser certaines pratiques pour faire en sorte que l'exercice maintienne toute sa crédibilité et que ce ne soit pas simplement un écran de fumée qui donne l'impression à la population qu'ils ont, en principe, accès à certaines informations, alors qu'en pratique pour toutes sortes de raisons, ce qui sort au bout du pipeline est assez insipide?
Le Président (M. Cusano): Merci. Mme la présidente.
Mme Stoddart (Jennifer): Merci, M. le Président. M. le député, voilà, vous touchez un des phénomènes importants de l'application de la Loi d'accès depuis 20 ans, un des phénomènes qui a décidé la Commission de faire de la question de l'accès le thème central de son prochain rapport quinquennal. Ce phénomène est l'importance qu'a prise avec les années, avec les interprétations... Et les interprétations de la Commission, vous vous rappelez qu'il y a un appel sur requête aux tribunaux supérieurs, qui, donc, rendent des décisions qui lient la Commission d'accès.
Il y a eu, au cours des 20 dernières années d'interprétation de la Loi d'accès, un agrandissement ou une croissance peut-être inattendue des exceptions à l'accès. Et je ne parle pas, là, des questions de renseignements personnels ? ça implique un tiers, une personne ? je pense qu'on s'entend tous, il y a quelques nuances à faire, mais que, quand il s'agit d'une personne, une autre personne... Ce n'est pas parce qu'on se trouve dans le dossier d'un voisin que nécessairement on devrait, tu sais, trouver nos informations sur la place publique.
Mais tout ce qui est exception pour d'autres raisons, par exemple, des secrets industriels, des secrets d'affaires, des secrets de négociations gouvernementales, et j'en passe, je ne sais pas, les litiges imminents ? bon, il y en a plusieurs ? ont finit par prendre une telle importance dans l'interprétation de la loi ? et nous sommes obligés de suivre les consignes qui nous sont données ? que, effectivement, vous pouvez avoir une feuille dans laquelle la plupart des renseignements sont biffés. Alors, vous vous posez la question, si je comprends bien: Est-ce que la loi n'est pas en quelque sorte dénaturée?
M. Beaulne: Bien oui. Au fond, c'est un peu le principe de la question.
Mme Stoddart (Jennifer): C'est ça. Bien, nous aussi, on se pose cette question-là: Est-ce que, effectivement, il n'y a pas lieu de resserrer? Et ce n'est que le législateur qui peut le faire; nous, on ne peut pas le faire par interprétation. C'est plutôt élargi, je dirais, les exceptions, au cours de 20 ans, par interprétation. Est-ce qu'il n'y a pas lieu de revenir là-dessus et de demander au législateur de rétrécir les exceptions à l'accès parce qu'elles viennent occuper beaucoup de place? Je ne sais pas si mon collègue juriste, le directeur des services juridiques, pourrait ajouter des choses parce qu'il s'agit d'une question éminemment légale sur les exceptions.
Le Président (M. Cusano): M. Ouimet.
M. Ouimet (André): Oui, merci. En fait, pour aller dans la même foulée que ce que disait Mme Stoddart, c'est que, dans d'autres législations qu'on est en train de comparer actuellement, on s'aperçoit qu'il y a des droits d'accès plus grands qui sont donnés. Et tantôt on parlait de ce qu'il est convenu d'appeler dans les lois, par exemple, américaines, l'«automatic routine disclosure», où on oblige les administrations publiques à divulguer de l'information sans qu'il y ait même de demandes d'accès. Alors, le citoyen n'est pas obligé de présenter une demande pour que certains types de documents que, par exemple... le président américain décide que ça doit être accessible, ça l'est automatiquement. Alors, ça, c'est des voies à explorer pour reconnaître éventuellement un plus grand droit d'accès aux citoyens et resserrer en même temps les restrictions.
Parce que la Loi d'accès, dans le fond, elle a, en matière d'accès, dans son volet accès aux documents, un grand principe: tous les documents de l'État sont accessibles et le reste de la loi, sous ce chapitre, ce sont des exceptions. Alors, l'interprétation de la Commission a été traditionnellement d'interpréter de façon très restrictive les exceptions qui sont prévues dans la loi. Mais on s'aperçoit, comme disait Mme Stoddart, au fil des ans, avec les interprétations des tribunaux, avec les habitudes d'application, que les restrictions, finalement, prennent de plus en plus de place. Et notre angle d'attaque, je dirais, du côté du rapport quinquennal, cette année, c'est de voir s'il n'y a pas moyen de restreindre plus les restrictions pour que le grand principe de l'accès ait toute sa valeur.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Non. Mme la députée de Jonquière.
Révision de la loi en matière d'appel
d'une décision de la Commission
Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Mme la présidente, vous l'avez dit et votre collègue Me Ouimet le dit aussi, la jurisprudence de la Cour du Québec, qui siège en révision de la décision de la Commission, a, je pense, majoritairement cassé des décisions et on a élargi, comme vous l'avez dit, la notion d'exception.
n(15 h 50)n Moi, je suis avocate, vous le savez, j'ai pratiqué en droit du travail et j'ai toujours pensé qu'un tribunal spécialisé était le meilleur tribunal pour décider de l'application, de l'applicabilité d'une loi. Ne serait-il pas opportun que, dans la loi, dans le projet de loi n° 122, on donne à la Commission... que la décision de la Commission soit sans appel, et voire même avec une clause privative, et si tant est qu'on pense qu'ils ont débordé de leur juridiction, bien, on ira en révision judiciaire, comme on le fait pour les décisions arbitraires en matière de relations de travail?
Mme Stoddart (Jennifer): Bon, enfin, c'est sûrement une suggestion qui me fait plaisir. Évidemment, la question, en venant à la Commission d'accès à l'information, m'est venue: Pourquoi un organisme ne venant pas nécessairement des relations de travail mais connaissant un peu les principes de ces organismes et les principes en droit administratif qui ont été évalués en défère devant une expertise acquise d'un tribunal administratif qui oeuvre dans le champ, que ce soit en matière de travail ou d'autre chose?
La Commission d'accès a 20 ans d'expérience, maintenant, c'est notre 20e anniversaire que nous fêtons cette année, et nous avons récemment, la semaine dernière, fait un relevé des décisions qui sont portées en appel depuis cinq ans, je pense, pour le rapport quinquennal, et nous voyons que majoritairement nos décisions sont soutenues, sont accueillies favorablement. Alors, c'est, je pense, deux tiers en général. Bon, ça varie un peu, la Cour du Québec, les évocations à la Cour supérieure, tout ça, mais, en général, nos décisions sont maintenues. Peut-être qu'on entend parler de celles qui sont renversées parce que, en général, c'est les...
Mme Gauthier: Il y a un avocat qui avait fait une étude qui avait été publiée, je pense, dans La Presse, en décembre, j'avais lu, un avocat d'une grande firme de Montréal, qui soutenait effectivement que vos décisions n'étaient pas maintenues en Cour du Québec.
Mme Stoddart (Jennifer): Bien, écoutez, on vient de compiler les décisions, on pourrait peut-être vous en faire part, si nécessaire. On va les publier dans le rapport quinquennal parce que ça fait partie de notre questionnement sur le système. Si on est renversé tout le temps, bon, bien, ça devient un peu une perte de temps pour la personne. Peut-être sur des questions pointues, nos décisions sont renversées, justement des questions... Il y a un dossier qui est devant la Cour suprême actuellement. ce n'est pas nécessairement des questions, je dirais, faciles, c'est des nouvelles questions, hein: vie privée, accès à l'information. Alors, on peut avoir plusieurs opinions là-dessus, c'est du droit nouveau. Mais, en tout cas, nous, on a compté toutes les demandes, toutes les requêtes, et c'est clair qu'on est maintenus la plupart du temps.
Alors, effectivement, la question d'une clause privative est une question qui sera à l'ordre du jour parce que... pas particulièrement en ce qui concerne la Commission, mais en ce qui concerne les justiciables, parce que, ce qu'on remarque... Et on a fait ce décompte dans la perspective de voir pour le justiciable qu'est-ce que c'est de venir à la Commission. Tu sais, ça prend trop de temps. Bon, on essaie de faire en sorte que ça va vite, que c'est simple, que c'est accessible, etc. Mais qu'est-ce qui arrive si on porte le dossier en appel? Et là peut-être ceux d'entre vous qui étaient ici quand on est revenu sur le projet de loi n° 122, vous vous rappellerez qu'on a mis l'accent sur les changements, dans le projet de loi n° 122, qui justement aideraient le citoyen à avoir une justice plus rapide et plus accessible. Parce que, qu'est-ce qu'on voit, qui apporte les dossiers en appel? Ce n'est pas les citoyens, c'est les grands organismes qui ont beaucoup de moyens. Et là on voit le phénomène que souvent le simple citoyen, lui, il abandonne même s'il a, pour s'exprimer simplement, gagné chez nous, si, nous, on donne raison au citoyen, souvent l'organisme le porte en appel, et là il n'a pas les reins assez solides pour aller devant tous ces dédales-là sans se payer un avocat qui peut lui coûter très cher.
Alors, on a fait plusieurs recommandations. On a recommandé qu'il n'y ait pas de requête pour permission d'appeler parce que, bon, ça étire les procédures en général. On a recommandé que le gouvernement assume, ou que, nous, on assume, ou via un fonds quelconque on assume les frais, les dépenses, parce qu'il y a des dépens. Le citoyen peut être condamné aux dépens, il peut avoir un jugement contre lui puis être condamné aux dépens. Des citoyens qui gagnent en première instance et qui sont renversés par la cour, parce qu'il s'agit de droits assez fondamentaux; chez nous, c'est gratuit, mais qu'est-ce qui arrive? Souvent, il se fait renverser.
Alors, on est très sensible à cette question-là. Et, si votre suggestion de clause privative était mise en vigueur, ça éliminerait ce phénomène pour les citoyens, et le critère de révision devrait être donc beaucoup plus étroit, qui serait celui de la décision raisonnable ou manifestement déraisonnable. Et, moi, je pense personnellement, en termes d'accessibilité pour les citoyens, que ce serait une très grande amélioration.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Est-ce qu'il y a d'autres questions à ma droite? M. le député d'Iberville.
Protection de renseignements
ayant des incidences sur l'économie
M. Bergeron: Merci. C'est très intéressant, Mme Stoddart, ce que vous venez de dire, suite à la question de la députée de Jonquière, l'accessibilité. Et je vais revenir encore avec l'article 3 de la loi n° 122, puisque la société d'économie mixte dont on a parlé tantôt, elle est dans ma circonscription: 60 % détenus par la MRC et 40 % des parts détenues par une entreprise belge ou française dans le cas de la gestion des déchets.
Et les gens de cette société-là, leur principal argument, ce qu'ils disent: Si la société d'économie mixte, elle est soumise à la loi d'accès à l'information, c'est que le jeu de la concurrence ne fonctionne plus. Vous avez tantôt parlé des secrets industriels, mais il me semble bien que, par une autre loi, ce genre de sociétés-là sont protégées de certains... pour que tout ne soit pas dit, que les prix, entre autres, soient divulgués aux concurrents. Est-ce que c'est vrai?
Mme Stoddart (Jennifer): Dans d'autres lois, vous dites?
M. Bergeron: Oui. Écoutez, c'est parce que vous êtes trois juristes en avant et je ne le suis pas. Mais c'est qu'il me semble qu'on disait que, dans des cas où il y a certains secrets industriels à protéger...
Mme Stoddart (Jennifer): Oui.
M. Bergeron: Il y a des articles, il y a des lois qui protègent ça. Là, je ne peux pas vous dire quelles lois, mais donc, probablement, vous venez de...
Mme Stoddart (Jennifer): D'accord. Oui. Et effectivement ce qu'on voit, enfin, l'argument qu'on voit pour contrer les demandes que la Commission a faites au cours des années de clarifier ou d'élargir l'assujettissement, malgré des décisions qui disent, par exemple, les filiales d'Hydro-Québec ne sont pas assujetties, etc., ou des sociétés mixtes n'étaient pas assujetties, la Commission a tenu à rappeler qu'il y a quand même ces exceptions dans la loi, les exceptions dont je viens de vous parler qui ont pris tellement de place dans l'année.
Alors, même si vous assujettissez un organisme, ça ne veut pas dire nécessairement qu'il doit ouvrir tous ses tiroirs à tous ses compétiteurs. Il peut, dans un deuxième temps, dire: D'accord, je suis assujetti à la loi, mais, quand même, je vais plaider ces articles ? 23, 24, etc. ? qui donnent les exceptions pour les secrets financiers, des secrets de commerce qui vont nuire à ses affaires, etc. Alors, ce n'est pas comme s'il n'y avait pas quand même ces recours-là. C'est sans doute à ce phénomène-là que vous...
M. Bergeron: Oui, oui. Et, si j'essaie de résumer et peut-être de tourner les coins un peu ronds, ce qui veut dire que l'argument de la concurrence ne tient pas parce que ces sociétés-là peuvent justement avoir recours à des articles de loi qui les protègent, comme vous venez de dire.
Mme Stoddart (Jennifer): Ça a toujours été la position de la Commission au cours des années que, dès qu'il y a des fonds publics et certainement quand c'est majoritairement les fonds publics, ce sont ces filiales à toutes fins pratiques contrôlées par des tests qu'on exerce, qu'on applique habituellement, il devrait y avoir au moins la reconnaissance du principe de transparence.
Ensuite, on peut dire dans un deuxième temps: Bon, on ne peut cependant pas partager ça avec vous parce que nous sommes en train, sur l'échelle internationale, de conclure un contrat avec, etc., puis, bon. Il y a quand même un deuxième niveau de protection, mais, au moins, on reconnaîtrait la question de transparence qui s'appliquerait à tout ce qui n'était pas vraiment névralgique. Et, nous, on pense que c'est important, puisqu'il s'agit de fonds publics.
Signature d'un bail et droit à la vie privée (suite)
M. Bergeron: O.K. Parfait. Merci. J'aimerais revenir à la question qui a été abordée par le député de Viau concernant le bail et les petits propriétaires. C'est parce que c'est un sujet qui revient avec beaucoup d'acuité de façon régulière dans ma circonscription. À toutes les semaines, j'en reçois un ou deux, des propriétaires, qui ont mis souvent des économies de toute une vie pour acheter un duplex ou un triplex, quelque chose comme ça, et c'est qu'ils ont des mauvais payeurs.
Et vous avez dit tantôt, lors de la signature du bail, il fallait établir l'identité des gens. Vous avez dit: On peut établir sa capacité de payer autrement. J'aimerais vous entendre expliciter «la capacité de payer autrement».
n(16 heures)nMme Stoddart (Jennifer): Je suis contente que vous demandiez de revenir là-dessus parce que, aussitôt que je l'ai dit, je me suis dit: Non, ce n'est pas «la capacité» que j'aurais dû dire, c'est «les habitudes de paiement», on s'entend, parce que des fois «capacité de payer», ça a pour implication que certaines catégories de personnes sont exclues parce qu'on présume qu'elles ne pourraient pas payer, par exemple les personnes qui bénéficient de la sécurité du revenu. Et on minimise aussi le choix des gens, en consommateurs, de payer certaines choses. Moi, je peux payer mon logement, mais pas, je ne sais pas, une grosse voiture. Un autre peut porter sur la... Il y a ces choix-là, ces patterns de paiement qui peuvent différer. Alors, ce n'est pas sa capacité parce que ça veut dire qu'on se mettrait à la place de l'autre pour décider comment il devrait dépenser son argent et on alloue arbitrairement des parties de son revenu à son loyer, ce qui n'est pas correct. C'est plutôt ses habitudes de paiement. Si on voit, dans le passé, qu'il a payé son logement, je pense qu'on a des bons indices de comment il va payer à l'avenir. Alors, pour ça, vous pouvez lui demander justement.
M. Bergeron: O.K. Concrètement, là.
Mme Stoddart (Jennifer): Concrètement, c'est quoi, son itinéraire comme locataire, hein? Est-ce que c'est la première fois qu'il est locataire? Ça doit être rare, la plupart des gens ont loué d'autres choses. D'accord? Est-ce qu'il peut vous montrer son bail, son ancien bail, ou est-ce qu'il peut vous donner des références? Est-ce qu'il vous permet de communiquer avec une autre personne pour lui donner une référence? Est-ce qu'il y a d'autres engagements financiers majeurs qu'il acquitte bien, par exemple son compte d'Hydro ou d'autres paiements mensuels qu'il fait régulièrement qui établissent sa fidélité comme locataire?
Utilisation des nouvelles
technologies de l'information
M. Bergeron: Parfait. Une dernière question. À la page 15, vous avez parlé de la sécurité nationale. Vous savez, autant au niveau des nouvelles technologies et des progrès technologiques, il n'y a personne, le 10 septembre, qui aurait pu prédire ce qui est arrivé le 11 septembre à New York. On est dans l'inédit et c'est que d'une certaine façon on taille dans du neuf, on gère des choses qui ne sont jamais arrivées, des domaines non conventionnels. Et c'est que les gouvernements, un peu partout à travers la planète, doivent gérer la sécurité pour ne pas que se reproduisent de telles catastrophes. Et j'imagine que, dans tout l'arsenal de mesures qui doivent être mises sur pied par les gouvernements, bien, des fois, il va sûrement y en avoir qui ne respecteront probablement pas les principes de base qui sont prônés par la Commission d'accès à l'information.
Vous êtes des légistes et vous devez vous être penchés sur toute cette question-là de la futurologie ? je pourrais utiliser ça entre guillemets. Vous savez, c'est pour qu'il y ait une certaine forme d'encadrement et que le futur soit géré de façon convenable, acceptable et qu'on ne lèse pas le droit des gens.
Mme Stoddart (Jennifer): Absolument. Et, en vous parlant de, par exemple, ce qu'on souhaite faire en biométrie et en vidéosurveillance, ce sont deux questions, justement, qui ont pris une importance accrue à cause du 11 septembre. C'est-à-dire on trouve de plus en plus de justifications pour appliquer ces techniques-là, mais elles existaient puis elles étaient poussées de l'avant bien avant le 11 septembre. La biométrie, notamment, peut être utilisée pour sécuriser une signature électronique dans le cadre de la loi sur la normalisation des nouvelles technologies de l'information. La surveillance par vidéo peut avoir des effets bénéfiques, on en convient, mais peut aussi être extrêmement nocive par rapport à la vie privée des gens. Alors, ce sont deux dossiers qu'on veut suivre à l'avenir avec beaucoup, beaucoup d'intérêt.
Le mois prochain, on espère ? ou dans les prochains mois peut-être ? nous allons adopter un avis. Nous travaillons sur un avis sur l'utilisation de la biométrie, la collecte de données dans une banque de biométrie, en marge de ces nouveaux pouvoirs qui nous ont été donnés dans la loi sur la normalisation juridique.
Sur la surveillance vidéo, c'est intéressant que la Commission québécoise s'est prononcée, je pense, parmi... peut-être la première ? la première, oui? ? au Canada sur cette question-là il y a 10 ans, quand la ville de Sherbrooke avait un projet pour surveiller la rue principale avec les marchands du coin, pour surveiller les allées et venues sur la rue principale, en réponse à des problèmes, je pense, de délinquance. Et la Commission d'accès a donné un avis qui a essayé de délimiter les occasions d'utilisation de la vidéosurveillance, les occasions légitimes et les occasions qui n'ont pas été légitimes.
Par la suite, on voit que d'autres collègues canadiens ont publié des avis. Et on trouve que maintenant, 10 ans après, il faut revenir sur cette question-là, la clarifier de nouveau parce qu'on voit une recrudescence de cette question de vidéosurveillance un peu partout. Les caméras sont devenues très bon marché, il est très facile de les installer maintenant, c'est une technologie à la portée de tous. Et je pense que ce serait important de rappeler un peu les normes en vidéosurveillance avant qu'on se trouve tous dans, je ne sais pas, la bibliothèque privée de films de quelqu'un. Tu sais, c'est... On en voit en public de plus en plus. Et la Commission a des plaintes contre l'utilisation de la vidéosurveillance. Est-ce qu'on a eu des plaintes récentes que...
Une voix: Non.
Mme Stoddart (Jennifer): Non. Mais on en a reçu dans le passé. En général, comme on règle la plupart de nos plaintes, on a réussi à s'entendre à l'amiable sur l'utilisation de la caméra de surveillance. Mais c'est une question très importante pour nous tous.
M. Bergeron: Mais c'est parce que c'est une question de sécurité. Et je présume que, des fois, il pourrait y avoir des écarts sinon des abus. Écoutez, je suis allé en vacances en janvier. À l'aéroport, c'est qu'on fouillait les valises des gens. On nous faisait ouvrir nos bagages devant tout le monde. On était en file, puis, moi, j'ai vu les bagages de celui d'en avant, puis celui d'en arrière a vu... tu sais, puis on y allait assez allégrement. C'est sûr que ce n'est pas au Québec. Mais, je me dis, je ne sais pas, moi, on est en 2002 en fin de compte, c'est que la porte est ouverte. C'est sûr qu'il faut gérer quelque chose d'aléatoire et de potentiellement dangereux, mais c'est qu'il va falloir qu'il y ait un encadrement, je pourrais dire, éthique.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Et justement la loi antiterroriste a été un événement important dans l'évolution des droits ou possiblement leur recul. C'est trop tôt pour dire exactement comment ça va s'appliquer, mais vous savez que la Commission... Moi, j'ai écrit à Mme McLellan, qui était la ministre de la Justice à ce moment-là, pour demander qu'il y ait une révision après un certain temps et pour insister qu'il y ait un tiers neutre qui peut regarder dans les dossiers qui seraient gardés secrets sous la loi antiterroriste pour voir qu'effectivement il n'y avait pas ...on ne brimait pas les libertés indûment par l'application de cette loi-là. On va continuer de regarder avec nos homologues.
Et justement, si la biométrie nous intéresse tellement, c'est parce que maintenant, on le sait, dans les aéroports américains et canadiens, on développe, au cours de ces jours-ci, de vastes systèmes supposément pour aider les gens, par lesquels les gens qui prennent l'avion très souvent pourraient choisir de participer, par exemple, à une banque dans laquelle nos caractéristiques biométriques seraient relevées et ça serait relié à toutes sortes d'autres banques, banques de police, passeport, citoyenneté, les habitudes de paiement, etc., le tout qui déterminerait si, oui ou non, on est à risque pour la sécurité aéronautique et nationale, et là on pourrait peut-être faire partie de ce programme ou non. Et il y a d'autres plans pour que tout le monde qui prendrait un avion, justement pour ne pas avoir des substitutions ou des vols d'identité, par ses empreintes digitales ou un autre identifiant biométrique, soit relié à toutes ces banques-là qui diraient automatiquement, bon, est-ce qu'on fréquentait des groupes suspects, terroristes, etc., ou est-ce qu'il y a quelque chose...
n(16 h 10)n Alors, c'est extrêmement inquiétant. Et qui va superviser ça? Est-ce que ça va être remis, par exemple, au secteur privé, ça va devenir une activité commerciale comme une autre, surveiller les banques biométriques du monde, savoir... Ça vient avec... L'entreprise devient l'éthique, alors que, nous, par exemple, au Québec et au Canada, on est habitués à ce que toutes ces questions-là au moins relèvent de l'État, hein? C'est l'État qui n'a qu'accès aux dossiers de police, aux dossiers les plus sensibles. Mais, si maintenant les compagnies commerciales... veulent s'assurer de la sécurité, bien peut-être qu'on va le privatiser, puis là, à ce moment-là, on va se promener... On peut faire des liens avec tout, hein, nos cartes de crédit, nos comptes de taxes, nos... je ne sais pas. C'est remarquable. Alors, ça se développe ces jours-ci, et c'est un développement inquiétant.
M. Bergeron: O.K. C'est ça, c'est que vous avez dit «remarquable». Et je suis content d'entendre dire «inquiétant».
Mme Stoddart (Jennifer):«Remarquable» dans le sens «à remarquer».
M. Bergeron: Oui, c'est ça. Mais c'est qu'à un moment donné on est fichés, puis de plein de choses. Vous parlez de biométrie, vous parlez d'empreintes, vous parlez d'iris, il doit y en avoir d'autres, j'imagine, je ne sais pas. La biométrie, ça fait plusieurs fois que vous abordez ce sujet-là.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, le visage. Il y a... Qu'est-ce qu'on a lu? Le Super Bowl... Il y a un nom maintenant pour les gens qui s'occupent de la vie privée aux États-Unis. J'ai lu ça dans un courriel, c'est le Spy Bowl ou le... Pourquoi? Parce que maintenant, aux États-Unis, on s'est servi des grands rassemblements publics pour, via les détecteurs biométriques... on fait le relevé des visages et là on voit, tiens, si c'est un suspect qui passe. Alors, tous les gens qui assistaient, par exemple, au Super Bowl l'an dernier, là, ils ont été soumis à cette procédure. Ça n'a pas donné grand-chose, semble-t-il, ce qui peut réjouir les défenseurs des droits et libertés.
M. Bergeron: Il ne s'est rien passé.
Mme Stoddart (Jennifer): C'est que la procédure n'est pas à point. Mais il y a des procédures plus sophistiquées. Ceux qui vendent des appareils biométriques veulent nous convaincre que, si on était tous soumis à ce genre de surveillance, c'est que la société serait plus sécuritaire. Alors, maintenant, quand on va au match de football, il faut surveiller, aux États-Unis, par qui on est surveillé.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. le député d'Iberville. Mme la députée de Mille-Îles.
Projet d'implantation de la carte santé
Mme Leduc: Merci, M. le Président. Évidemment, je vous avais annoncé dans mes remarques préliminaires que j'aimerais que vous abordiez un peu la question de la carte santé, la carte à puce en santé. Vous avez un mémoire qui s'en vient, je ne vous demanderai pas de me révéler le contenu de votre mémoire, mais vous avez donné un avis précédemment qui a été largement commenté. Et, moi, il y a quand même ce côté de la carte à puce, ce que je vous avais demandé, dans le fond, où est-ce que j'ai exprimé un questionnement de ma part, c'est quand vous donnez ce type d'avis là sur... Et j'avais exprimé que vous regardiez l'implantation de la carte à puce du point de vue strict de la protection des renseignements privés et je me disais: Est-ce qu'il y a dans vos... Avant que vous donniez un avis, est-ce que vous prenez en compte d'autres paramètres qui seraient les côtés utiles de cette carte-là? C'est ça que je voudrais que vous m'expliquiez un peu, comment vous procédez quand vous donnez un avis. Je comprends que vous le regardez du strict point de vue de la protection des renseignements privés, mais, comme je vous expliquais, vos avis ont beaucoup d'importance et sont écoutés, alors je crois qu'ils devraient prendre en compte aussi d'autres paramètres que strictement ceux-là. En tout cas, c'est ce que je vous pose comme question.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Je commencerais par vous donner peut-être une réponse générale et mes collègues qui supervisent le travail d'analyse et juridique et administratif pourraient ajouter des choses. La Commission, pour justifier selon les normes par lesquelles la loi d'accès et de protection des renseignements est interprétée, se sert du critère de la nécessité, entre autres: Est-il nécessaire de faire telle chose avec des renseignements et notamment de les concentrer? Dans le cas actuel, on parle de concentration. Une des questions qu'on regarde avec la carte santé, c'est la question de la concentration des données. Et je vous en ai parlé dans mes remarques, hein, sur le phénomène de la concentration des données qui nous inquiète beaucoup ces temps-ci.
Alors, pour voir si ce mouvement se justifie ou non, on voit s'il est nécessaire, c'est-à-dire indispensable. C'est-à-dire on ne peut pas en faire autrement ou que c'est à peu près impossible d'en faire autrement, que ce ne serait pas pratique dans une société, pas réalisable de faire autrement, qu'il n'y a qu'une seule voie qui se dresse devant nous, et c'est la voie qui est proposée, et, à ce moment-là, ça devient nécessaire. Et, quand on considère pourquoi c'est nécessaire dans la pratique et dans le cas de la carte santé, on tient compte justement des arguments qui nous sont soumis avec l'avis. Ce n'est pas à nous de chercher ces arguments, les justifier et de dire: Oui ou non, ça pourrait être une bonne chose ou non. Ça, ce n'est pas notre rôle. C'est le rôle du proposeur, qui dit: Il est nécessaire pour telle raison. Et, à ce moment-là, les critères qu'on voit le plus souvent sont des critères qui ont rapport au niveau de bien-être des citoyens.
Et c'est pour ça, dans une société moderne, qu'on dit: Bon, bien on va continuer à évoluer, on va peut-être traiter des renseignements un peu autrement. On les a donnés à l'État pour certaines fins et on voit que globalement, comme société, nous pensons que nous pourrions mieux organiser nos affaires, ou accroître notre niveau de bien-être, ou même mieux préserver nos droits et libertés en, par exemple, utilisant des renseignements pour d'autres fins que celles pour lesquelles ils ont été acquis, qui est une autre règle de l'interprétation de la loi. C'est pour cette raison que le législateur, il y a à peu près cinq ans, a dit: On va maintenant permettre aux différents organismes du gouvernement de faire des échanges de renseignements et notamment au ministère du Revenu de recueillir des renseignements de beaucoup, beaucoup d'autres organismes et ministères afin de contrer l'évasion fiscale et le travail au noir, lequel était devenu un phénomène qui rongeait la santé monétaire de l'État.
Alors, à ce moment-là, on a fait l'équilibre entre le fait que les gens, par exemple, déclarent une certaine chose à la Société de l'assurance automobile du Québec, par exemple que, je ne sais pas, ils ont immatriculé trois Cadillac, et déclarent à ce moment-là au ministère du Revenu qu'ils n'avaient pas de revenus pour l'année. Bon, bien là, maintenant, avec le croisement des fichiers, ce genre de phénomène, que je viens d'inventer ? c'est un cas fictif ? permet au ministère du Revenu d'essayer de cerner un peu plus le phénomène de l'évasion fiscale. Mais on a donné ces renseignements à la SAAQ en toute confidence, pensant que ça servait juste à ça. Et maintenant ça sert au ministère du Revenu pour voir si on fait de l'évasion fiscale, c'est détourné.
Alors, pour décider si, oui ou non, ce détournement de la finalité pour laquelle un renseignement a été cueilli est approprié, la Commission regarde donc la nécessité de ça. Et, dans ce cas-là, le législateur, en interprétant les différentes lois en question, a dit: Bon, bien, maintenant, dorénavant, j'autorise le ministère du Revenu de faire ce genre de choses là parce que c'est un problème tellement général et tellement, finalement, de justice fiscale, et donc des renseignements, toutes sortes de renseignements sont envoyés maintenant au ministère du Revenu. Un premier phénomène de concentration des renseignements qui nous a inquiétés, on a beaucoup parlé de ça à ce moment-là et on continue d'être inquiétés sur ce phénomène.
Dans le cas de la carte santé, justement, des questions qu'on va aborder dans notre avis quand il sera rendu public, lors de notre prochaine audience devant la commission des affaires sociales... traitera des arguments qui nous sont soumis ou qui ne sont pas soumis, le cas échéant, qu'est-ce qu'on voit comme argumentation qui peut se rapporter aux bienfaits du projet en question, hein ? on présume qu'il y a des bienfaits pour proposer, par exemple, une carte à puce, il y a des bienfaits qu'on escompte avoir ? et est-ce qu'on a fait la démonstration que c'est nécessaire, que c'est ça, la façon, c'est ça, la seule voie qui s'ouvre et, donc, la voie qui est nécessaire pour ainsi dévier des règles normalement applicables à la question. Mais le directeur de l'analyse et de l'évaluation voit beaucoup de ces projets-là, est-ce qu'il aimerait ajouter quelque chose sur...
M. Morency (Denis): En fait, lorsqu'on regarde...
Le Président (M. Cusano): M. Morency.
M. Morency (Denis): Oui, M. le Président. Lorsqu'on regarde ce projet de carte santé, en fait, on procède de la même analyse qu'on fait lorsqu'on a d'autres projets gouvernementaux, que ce soient des services gouvernementaux en ligne ou... On passe à travers une grille de principes qui émanent de la Loi sur l'accès et qu'on tente d'appliquer, bien entendu. Comme on l'a dit dans... lorsqu'on a élaboré notre plan stratégique, on a une vision qu'on sait que les nouvelles technologies sont là, puis, si elles peuvent aider le citoyen dans ses relations avec les autorités gouvernementales, tant mieux. Dans le domaine de la santé également, si des nouvelles technologies peuvent favoriser une meilleure circulation d'information pour aider à traiter les patients, le rapport des professionnels de la santé, on va y souscrire.
Cependant, il y a plusieurs façons de faire les choses, et le rôle de la Commission, bien entendu, à partir de la loi qui nous gouverne et dont la Commission est le chien de garde, c'est de voir de quelle façon on peut tenter de concilier les choses. Et on va, bien entendu, toujours favoriser les architectures, les conceptions qui permettent de mieux protéger la vie privée tout en permettant d'atteindre les objectifs. Donc, là on rentre dans un processus d'échange et de discussion.
n(16 h 20)nLe Président (M. Cusano): Merci. Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Leduc: Oui. Vous avez dit, en parlant justement de concentration, là ? pour ne pas parler de concentration de la presse, mais concentration des informations ? que vous souhaitez un débat public éclairé. J'imagine que vous pensez que la commission des affaires sociales, le débat, les audiences de la commission des affaires sociales ne toucheront pas suffisamment à ça, vous souhaitez un autre débat sur la concentration des fichiers ou les mégafichiers. Est-ce que c'est ça que je comprends à la page 9: «Au-delà des assurances au plan de la sécurité ou de l'étanchéité des fichiers, la Commission invite à la tenue d'un débat public éclairé au niveau des enjeux et des objectifs poursuivis par cette concentration»?
Mme Stoddart (Jennifer): Ce débat peut se faire à travers les audiences de la commission des affaires sociales, parce que ce qu'on nous propose, je pense, c'est une nouvelle concentration de données et on va élaborer un peu plus lors de notre comparution. Mais on attire votre attention sur le fait qu'on a déjà permis une première concentration très importante au ministère du Revenu. Il y aurait donc un pôle de concentration de données fiscales. Là, la question avec la carte santé: Est-ce qu'on n'est pas en train d'ériger un deuxième pôle d'informations dans le domaine de la santé et est-ce qu'il est justifié en termes de protection? C'est la question à laquelle on va répondre.
Est-ce que le débat devrait s'élargir et se continuer au-delà? Oui. Je pense que oui. Je pense que oui, parce qu'il est très facile, de nos jours, de concentrer les données, hein, technologiquement, c'est maintenant très, très facile, et ça semble être d'une facilité administrative, et donc réduire les coûts de gouvernance. Est-ce qu'ensuite on va voir qu'il y a un autre pôle justice, toutes les données de justice toutes ensemble? Qu'est-ce que ça voudrait dire pour la préservation de nos droits et libertés, hein? Maintenant, la justice est assez morcelée, il y a le dossier de police, ce n'est pas le dossier des tribunaux, n'est pas les dossiers d'état civil, n'est pas... bon. Mais, si tout ce qui a une consonance justice peut être jumelé...
Mme Leduc: Ici, j'aurais une...
Le Président (M. Cusano): Merci pour votre... Brièvement, s'il vous plaît.
Assujettissement des entreprises
et juridiction applicable
Mme Leduc: Une dernière question. À votre rapport annuel, à la page 28, vous parlez... La Commission et la législation fédérale, et vous vous référez à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé entrée en vigueur en 1994 au Québec. Vous mentionnez qu'il y a une nouvelle loi par le gouvernement fédéral en janvier 2001 et vous dites: «La loi québécoise sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé semble être bien respectée.» Cependant, vous dites que la loi fédérale «impose des règles moins sévères». Puis votre conclusion, vous dites: «Il nous faut souhaiter que les entreprises se conforment à la norme la plus exigeante.» Est-ce que vous croyez que c'est ce qui va se passer sur le terrain ou si les entreprises vont plutôt se conformer à la norme la moins exigeante? Et, à ce moment-là, quels sont vos recours? Parce qu'il y a quand même une loi de juridiction du Québec, alors comment ça va fonctionner, là?
Mme Stoddart (Jennifer): Bien, c'est une très bonne question, et nous attendons tous de voir comment l'application de ces deux lois va se conjuguer à l'avenir. La position du Québec... je n'étais pas à la Commission, mais, on me dit: La position du Québec au moment où cette législation fédérale a été adoptée était d'être exempté de la législation fédérale étant donné que nous étions la seule province... enfin, la première province et une des seules à avoir une législation sur le secteur privé, donc vraiment de bénéficier d'une exemption.
Ce qui est arrivé, c'est que les provinces où la législation est reconnue comme rencontrant la norme fédérale peuvent être exemptées par le gouvernement fédéral. Cependant, ceci n'est pas arrivé encore ? ça relève du ministère de l'Industrie et du Commerce du gouvernement fédéral ? d'une part. D'autre part, la loi fédérale vient en vigueur par étapes. Elle est à sa deuxième étape, il reste une troisième étape, qui est l'étape la plus englobante, où toutes les entreprises qui envoient des renseignements personnels en dehors de la province tombent sous la compétence fédérale.
Alors, il est impossible de prédire comment tout ceci va se jouer. Il peut y avoir des conflits sur la compétence du fédéral, du provincial non seulement au Québec, mais dans d'autres provinces où on s'apprête... comme en Ontario, on s'apprête à légiférer sur le secteur privé justement. Il peut y avoir des conflits par rapport à l'assujettissement de différentes entreprises. Est-ce qu'ils sont assujettis à cette loi fédérale pour la première fois ou toujours assujettis à la loi québécoise?
Mme Leduc: J'ai tendance à croire que les entreprises vont plutôt aller au plus facile. C'est pour ça, le sens de ma question, là. Disons que...
Mme Stoddart (Jennifer): Oui, mais, c'est intéressant, venant à la Commission, moi, j'ai été étonnée de voir le nombre d'entreprises qu'on penserait étaient de compétence fédérale qui collaborent activement avec la Commission d'accès. Et, quand j'ai demandé pourquoi, on ma dit... Peut-être, le directeur des services juridiques a quelque chose à ajouter. Mais, par exemple, on est étonné peut-être de voir une banque...
Je vois des banques dans les dossiers. Bon. Les gens qui ont fait du droit savent que les banques, c'est l'exemple: normalement elles sont régis par législation fédérale. Cependant, il y a des exceptions où ils se conforment à la législation provinciale. Mais, en pratique, les banques, comme d'autres organismes qui pourraient possiblement soulever le fait qu'ils ne sont pas de notre compétence, veulent à toutes fins pratiques collaborer avec nous parce qu'elles veulent régler les problèmes avec les consommateurs, hein? Il s'agit de l'image de l'entreprise. Les gens sont sensibles par rapport à la protection de leurs renseignements personnels. Et la Commission, qui est sur place ? non seulement on a des bureaux à Québec et à Montréal, on se déplace en région pour entendre des causes, on offre un service de médiation ? on aide donc les entreprises à résoudre des problèmes avec les citoyens. Et on voit que beaucoup d'entreprises qu'on serait peut-être étonnés de voir là, donc, travaillent avec nous. Ça ne veut pas dire, légalement, ils admettent qu'ils sont assujettis. Ça, c'est une autre affaire. Mais ils ont recours à notre service. Et le consommateur part ayant reçu une réponse à sa satisfaction. Mais je ne sais pas si... M. le Président, je ne sais pas si Me Ouimet a des choses à ajouter sur cette question de la loi fédérale.
Le Président (M. Cusano): M. Ouimet.
M. Ouimet (André): Merci. Honnêtement, pour compléter la réponse, les entreprises, qu'elles soient de juridiction très clairement fédérale, comme les banques, ou des entreprises qui seraient à cheval entre les deux juridictions, elles ont toutes tendance à appliquer la loi la plus sévère pour éviter d'avoir des normes différentes dans chacune des provinces du Canada.
Donc, depuis l'entrée en vigueur, par exemple, de la loi, au Québec, sur la protection des renseignements personnels, depuis 1993 ? 1994, en fait, l'entrée en vigueur ? il y a certains types d'entreprises qui font affaire à travers le Canada qui appliquent la loi québécoise même à l'extérieur du Canada pour uniformiser leurs pratiques...
Une voix: ...
M. Ouimet (André): ...celles du Québec, pardon, pour uniformiser leurs pratiques, pour éviter d'avoir, par exemple, au Manitoba, une pratique différente que celle qu'ils font au Québec. Donc, la loi québécoise, dans ce sens-là, a fait des petits ailleurs sans qu'on s'en aperçoive trop, mais, à l'évidence, c'est la règle maintenant.
Le Président (M. Cusano): Merci, M. Ouimet. Madame... Oui? Mme la députée de Jonquière.
Mémoire déposé à la commission
des affaires sociales sur le projet de carte santé
Mme Gauthier: Je veux juste revenir sur votre mémoire que vous allez déposer devant la commission des affaires....
Une voix: ...
Mme Gauthier: Dans 15 jours. C'est-à-dire qu'il est...
Mme Stoddart (Jennifer): C'est déposé.
Mme Gauthier: Il est déposé?
Mme Stoddart (Jennifer): Oui.
Mme Gauthier: Est-ce qu'on peut le rendre public immédiatement? Parce qu'il est demandé comme de l'eau dans le désert, les gens le demandent beaucoup. Est-ce qu'il vous est possible de le rendre public immédiatement, votre mémoire?
Mme Stoddart (Jennifer): Écoutez, on est un peu embêtés, on aimerait savoir, l'Assemblée nationale elle-même, quelles sont les pratiques. Nous, on comprend, d'après la tradition parlementaire, que, lorsqu'on dépose un mémoire à une commission parlementaire, il n'est rendu public, par respect pour les parlementaires, qu'au moment où la commission parlementaire en question l'entend. Alors, moi, je me remettrais à votre avis dans cette question-là parce que nous voulons surtout respecter le protocole de l'Assemblée nationale. Et j'avoue qu'entre deux commissions parlementaires ce n'est pas clair quel est...
n(16 h 30)nMme Gauthier: Ce que je comprends de votre réponse, c'est que, quelque part, si le président de l'autre commission n'a pas d'objection, votre mémoire pourrait être rendu public avant.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. Si l'autre, la commission parlementaire devant laquelle on l'a déposé nous lève de cette retenue traditionnelle, je comprendrai qu'on pourrait, mais vous pourrez nous éclairer là-dessus.
Le Président (M. Cusano): Est-ce que vous avez d'autres questions, Mme la députée de Jonquière?
Mme Gauthier: Pas sur ce sujet-là.
Le Président (M. Cusano): Bon. Mais est-ce que vous avez d'autres questions?
Mme Gauthier: Non, pas immédiatement. Mais est-ce qu'on a terminé?
Le Président (M. Cusano): C'est parce qu'on achève, là. Il reste les remarques finales à faire. Alors, je vous demande...
Mme Gauthier: J'aurais une dernière question.
Le Président (M. Cusano): C'est ça. Si vous avez des questions, c'est le temps de les poser.
Délais de traitement des dossiers (suite)
Mme Gauthier: Je ne veux pas revenir en arrière, mais on a parlé du traitement des demandes de révision pour avoir accès aux documents. Moi, je voudrais parler du traitement des plaintes, quand on croit que la loi a été éludée. Je vous réfère toujours à la plainte que mon collègue le député de Châteauguay vous a adressée le 29 novembre dernier, pour laquelle on a reçu un accusé de réception puis sans plus. Je veux savoir comment vous traitez ce genre de plainte là.
Mme Stoddart (Jennifer): Bien, cette plainte-là est traitée activement, comme on essaie de le faire avec toutes nos plaintes à l'heure actuelle. Effectivement, on recueille la plainte, on voit son admissibilité, mais on ne tient pas la personne nécessairement au courant au cours de son traitement, à moins que ce soit quelque chose qui nécessite une adjudication.
Dans ce cas-ci, je pense qu'il s'agit d'un genre de dénonciation d'une pratique qu'on croyait régulière. Donc, il y a un commissaire qui fait une vérification. Alors, ce n'est pas, donc, une procédure nécessairement contradictoire. Elle a fait son enquête, et je peux vous dire que son ébauche de rapport a été envoyée aux parties concernées par le commentaire. C'est là notre pratique traditionnelle, 15 jours, et donc, selon notre secrétaire, ce serait revenu dans une semaine. Alors, à la fin février, on devrait être en mesure de rendre public, donc rendre aux parties justement qui ont fait la dénonciation, ça serait envoyé expressément aux gens qui ont signalé ce qu'ils pensent être une irrégularité dans l'application de la loi, ça reviendrait à cette partie-là. Alors, ça devrait être dans une semaine, 10 jours, là. Nous sommes le 20. C'est ça.
Mme Gauthier: Mais, généralement, un délai pour traiter ce genre de plainte là, c'est quoi, si on parle... Là, on parle ici de deux mois.
Mme Stoddart (Jennifer): Oui. C'est ça. C'est assez rare, je dois dire, ce genre de... Souvent, il y a une plainte contradictoire, comme on vient d'en... enfin, une plainte qui met la personne en opposition à une entreprise, ou quelque chose, où chacun a son côté à raconter. Ici, le type de dénonciation fait en sorte que le traitement approprié, c'est une vérification ? d'accord? ? des pratiques. Alors, on n'en a pas, je pense, assez pour dire, en moyenne, qu'est-ce que ça prend. Mais, si on exempte la saison de Noël, je pense que ça va relativement rapidement.
Mme Gauthier: Merci.
Le Président (M. Cusano): Si vous avez d'autres questions sur d'autres sujets, Mme la députée de Jonquière, vous pouvez poser des questions.
Mme Gauthier: Ça va.
Le Président (M. Cusano): Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres questions? M. le député.
Effectif et budget (suite)
M. Beaulne: Juste une petite question. Mon collègue d'Outremont a abordé tout à l'heure la question des budgets. On n'en a pas tellement parlé. Vous nous avez dit que votre budget avait été augmenté de 300 000 $, 400 000 $ pour passer de 3 point quelque chose à 3,8 millions. Sans vouloir porter de jugement sur l'ampleur de ce budget, il me semble que, par rapport aux missions non seulement que vous vous donnez, mais aux missions qu'on vous confie de plus en plus, quand j'écoute les interrogations qu'avaient mes collègues sur le rôle que pourrait être amenée à jouer la Commission d'accès à l'information par rapport à toutes les nouvelles technologies, toutes les nouvelles mesures de surveillance dont on connaît très peu l'impact encore sur la vie privée, il me semble que c'est un budget relativement modeste.
Alors, vous, comment voyez-vous ça, là? Pour atteindre vos objectifs, aussi bien en termes d'équipements, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, et en termes de personnel, de ressources humaines pour accomplir efficacement votre mandat avec des délais raisonnables, à quoi estimeriez-vous un budget adéquat pour exercer votre mandat?
Mme Stoddart (Jennifer): Merci beaucoup de la question. On a actuellement une demande devant le Conseil du trésor pour... enfin, pour les besoins qu'on a déjà identifiés. Nous espérons une réponse, quoi, dans quatre, cinq mois. Pour répondre précisément à votre question, je demanderais au directeur général de détailler qu'est-ce qui exactement est dans notre demande actuelle, que nous pensons une demande réaliste. Parce que, nous savons, le gouvernement n'a pas des argents à jeter à la fenêtre, nous savons que c'est important de faire une bonne administration des deniers publics, alors on essaie de vraiment réduire nos demandes au strict minimum pour s'acquitter de notre mission. Alors, actuellement, Me Morency...
Le Président (M. Cusano): Me Morency.
M. Morency (Denis): Actuellement, l'effort budgétaire qui est demandé est autour de la révision de ce que j'appellerais nos applicatifs en matière de gestion, à la Commission. Notre système d'information date de plus de 10 ans. Donc, lorsqu'on s'adresse au Conseil du trésor ? vous allez comprendre fort correctement leur boulot ? ils veulent avoir des indicateurs de résultat, donc: Comment coûte tel type de dossier? Y a-t-il des hausses à ces dossiers-là? Quelle est la durée de traitement? Quels sont les engagements? Et, là-dessus, c'est une première étape qu'il faut absolument franchir pour tenter de démontrer effectivement, par rapport aux travaux qu'on a à faire, la charge de travail, quelle ressource dans quelle période de temps doit être affectée. Ça, c'est la première démarche.
Quant aux autres démarches en termes de ressources, une fois qu'on aura bien quantifié, effectivement, les effectifs, je crois que ça va être plus facile de discuter avec les autorités du Conseil du trésor là-dessus. Donc, dans les démarches qu'il faut faire, il faut se donner d'abord des indicateurs de résultat. Et c'est ce que le Conseil du trésor nous a conviés à faire l'an passé en nous allouant quatre ressources, il reconnaissait immédiatement un besoin. Quant aux ressources additionnelles, il nous a indiqué: Présentez-vous avec des indicateurs de résultat. Or, pour présenter ces indicateurs de résultat, il faut effectivement se mettre les outils informatiques en place pour pouvoir le faire.
Le Président (M. Cusano): Merci.
M. Beaulne: En termes de chiffres, c'est combien, ça?
M. Morency (Denis): On parle de 400 à 600 000 $.
Remarques finales
Le Président (M. Cusano): Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres questions? S'il n'y a pas d'autres questions, Mme la présidente, si vous le souhaitez, vous pouvez faire quelques remarques, brièvement, finales.
Mme Stoddart (Jennifer): Je tiendrais à vous remercier, M. le Président, ainsi que les députés de l'invitation à présenter notre rapport annuel et donc à partager avec vous notre travail, à recueillir vos commentaires. Personnellement, je les apprécie beaucoup parce que vous représentez... vous êtes en contact avec la population. Et on a pris bonne note de plusieurs de vos interrogations, de vos suggestions pour le rapport quinquennal, pour l'orientation future de nos travaux. Alors, je vous remercie beaucoup de votre intérêt dans le travail de la Commission d'accès à l'information et de toutes vos observations et votre soutien. Merci.
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la présidente. J'inviterais... Est-ce qu'il y a des remarques finales à faire? Mme la députée de Jonquière?
Mme Gauthier: Oui, si vous permettez. D'abord, merci pour le rapport; c'était un travail colossal, j'en conviens. Je remarque aussi que la tâche de la Commission est extrêmement importante et extrêmement élaborée aussi, et j'en ai fait l'objet de certaines de mes remarques. Moi, je souhaite sincèrement que vous ayez soin d'atteindre vos objectifs parce que, à quelque part, vous êtes le rempart d'une démocratie au Québec. Et je pense qu'il faut être de plus en plus conscient de vos besoins et être plus conscient que vos besoins répondent à un souci de démocratie au Québec. Je vous remercie beaucoup pour votre travail.
Le Président (M. Cusano): Merci. Est-ce que du côté ministériel il y a des remarques? On va commencer par le député de Saint-Hyacinthe.
M. Dion: Merci, M. le Président. Sans doute ce qui me vaut l'honneur de commencer, c'est que je suis plus près de vous, madame, mais c'est purement géographique, hein? Je veux seulement dire que j'ai beaucoup apprécié toutes les informations que vous nous avez transmises et j'ai beaucoup apprécié aussi le ton avec lequel tout ce travail-là s'est déroulé. Je pense que ça nous aide à remplir le travail pour lequel nous avons été élus et ça nous aide à travailler ensemble à l'amélioration de notre système démocratique. Merci.
Le Président (M. Cusano): Merci. M. le député d'Iberville.
n(16 h 40)nM. Bergeron: On ne s'éternisera pas sur les remerciements, il me semble qu'il y en a eu beaucoup. J'ai beaucoup apprécié le climat de travail, l'ouverture, le ton. Il me semble qu'on est arrivé à une forme de partenariat intéressante. On est tous... on est des parlementaires ici, vous appartenez à un organisme, Mme la députée de Jonquière l'a dit, essentiel, et c'est qu'il y va de notre intérêt à tous que le travail qui est enclenché continue. Et on sait bien qu'il y a des défis énormes qui arrivent qui vont peut-être demander des allocations substantielles. Bien là on verra ce que, comme gouvernement, on peut faire. Mais, moi, j'ai beaucoup apprécié cette session de travail parce qu'il y a un désir de votre part de remplir la mission qui vous a été dévolue. Merci bien.
Le Président (M. Cusano): Mme la députée de Mille-Îles.
Mme Leduc: Oui, alors, bien, moi aussi, je vais être assez courte, parce que j'avais indiqué certains objectifs personnels que je voulais atteindre, et les informations que vous m'avez données m'ont permise vraiment de cheminer sur cette question-là. Et je vais peut-être terminer par une boutade. Je remplissais un questionnaire que l'Assemblée nationale me demande de remplir, et on me demande ma date de naissance. Est-ce qu'ils ont le droit?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Stoddart (Jennifer): Si c'est nécessaire?
Mme Leduc: S'il est nécessaire, oui.
Mme Stoddart (Jennifer): Demandez-leur pourquoi.
Mme Leduc: C'est bien.
Mme Stoddart (Jennifer): C'est peut-être par habitude qu'ils le demandent, hein?
Le Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée. M. le député de Marguerite-D'Youville.
M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Moi aussi, j'aimerais joindre ma voix à celle de mes collègues pour vous remercier. Nous avions eu déjà un avant-goût de votre présidence lorsque vous avez brièvement comparu devant nous quelque temps après votre nomination, mais je vois que, le temps s'étant écoulé, non seulement vous avez pris un contrôle très professionnel de tout votre secteur d'activité, mais, en plus de ça, vous semblez aimer ça. Et c'est ce que vous nous avez transmis aujourd'hui. C'est probablement ce qui a fait que les échanges que nous avons eus ont pris cette tournure tout à fait conviviale qu'ils ont eue. Et, sur ce, je vous remercie de votre collaboration puis je vous souhaite bonne chance dans la continuation de votre mandat.
Le Président (M. Cusano): Merci. C'est à mon tour, Mme la présidente, de vous remercier de votre participation à nos échanges. Et je vous demande, de ma part et, je pense, de la part de tous nos collègues, d'être très vigilants en ce qui concerne les renseignements personnels non seulement des députés, mais de tous les citoyens.
Alors, le mandat d'étudier le rapport annuel 2000-2001 de la Commission d'accès à l'information étant accompli, la commission de la culture ajourne ses travaux à demain matin, 9 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin d'entendre la ministre responsable des Aînés, Mme Linda Goupil, relativement au suivi donné au rapport de la commission de la culture de juin 2000 sur le Conseil des aînés. Bonne soirée!
(Fin de la séance à 16 h 43)