(Neuf heures trente et une minutes)
5847
<R>Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 110, Loi concernant le régime
de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans
le secteur municipal.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. LeBel (Rimouski) est remplacé par M. Rochon (Richelieu).
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous débuterons cet avant-midi par des remarques
préliminaires puis nous entendrons
les organismes suivants : la
ville de Québec, la ville de Montréal, la Fédération des travailleurs et travailleuses
du Québec et la Confédération des syndicats nationaux.
Remarques préliminaires
Nous débutons avec
les remarques préliminaires. J'invite d'abord le ministre des Affaires
municipales et de l'Occupation du territoire
à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de six minutes. M.
le ministre.
M. Martin Coiteux
M. Coiteux : Oui. Alors, merci, M. le Président
et également député de Champlain. Donc, c'est toujours un plaisir de travailler avec vous. On a l'occasion de travailler
assez régulièrement depuis un certain temps. Vous savez, on est dans une ère de modernisation de beaucoup de choses
dans le secteur municipal, et donc on aura l'occasion, comme on a l'occasion
aujourd'hui, de se rencontrer assez souvent
dans cette commission au cours des prochaines semaines et des prochains mois,
comme vous le savez. Évidemment, je tiens à
saluer l'ensemble de mes collègues de la Commission de l'aménagement du territoire, les invités d'aujourd'hui, les
personnes qui les accompagnent, alors, autant du côté gouvernemental, en ce
qui me concerne, comme du côté des oppositions, content d'être avec vous
aujourd'hui également, et évidemment les groupes qui vont nous présenter des
mémoires, des positions aujourd'hui. Vous savez, c'est un exercice qui est très
important, c'est un exercice qui fait partie
de notre démocratie, et sachez que tous les groupes présents, qui feront valoir
un point de vue ici, vont être écoutés attentivement.
Alors, quelques remarques ici. Le projet de loi n° 110,
qui s'appelle Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des
différends dans le secteur municipal, projet de loi qui a été déposé à
l'Assemblée nationale le 10 juin
dernier, c'est un projet de loi qui s'inscrit dans un désir de moderniser le
cadre de négociation des relations de
travail dans le secteur municipal. On pense qu'à la lueur de ce qui a été vécu
au cours des dernières décennies il y
a un certain nombre de choses qui méritent d'être revues et qui méritent d'être
modifiées dans le sens de la modernisation, dans le sens de tenir compte de
l'intérêt de l'ensemble des citoyens, parce que c'est de ça qu'il s'agit, c'est
un projet de loi qui met le citoyen au coeur de nos préoccupations
d'abord et avant tout.
Lorsque le
gouvernement du Québec négocie le renouvellement des conventions collectives
dans le secteur québécois, dans le secteur
public québécois, tout le monde comprend bien, tout le monde comprend bien
qu'il négocie dans l'intérêt de
l'ensemble des Québécois, ce qui ne veut pas dire qu'il ne doit pas respecter
des principes fondamentaux dans notre
société, des principes fondamentaux dans notre société démocratique qui est
celui du droit des travailleurs, du
droit à une négociation de bonne foi, un certain nombre de principes qui
doivent être obligatoirement respectés, mais il n'y a personne qui met en doute le fait que le gouvernement du
Québec, comme entité démocratique dans une société démocratique, n'est pas en train de négocier dans
l'intérêt collectif de l'ensemble des Québécois. Or, nous avons dans nos mécanismes actuels, dans le secteur municipal,
un régime qui est à peu près calqué comme si une municipalité était une
entreprise privée qui négocie au bénéfice d'actionnaires privés. Nous, on croit
que cette façon de voir les choses doit être
revue. Il faut que la municipalité soit considérée pour ce qu'elle est, une
entité démocratique redevable devant l'ensemble de sa population, et il faut que les
principes mêmes à la base du régime de négociation mettent cette réalité au coeur du régime. Et c'est ce que vient faire le
projet de loi n° 110, c'est exactement ce que vient faire le projet de loi
n° 110.
Alors, l'article 1 du projet de loi est très important
parce que justement il jette les bases du principe d'équilibre entre les attentes des salariés, leurs droits et
les impératifs d'une gestion efficace et efficiente des ressources financières
municipales. Il introduit les principes directeurs qui devront guider les
parties et les personnes concernées dans la négociation
et la détermination des conditions de travail des salariés dans le monde
municipal. On y aborde les notions d'équité, de conditions de travail justes et
raisonnables, mais on y affirme également que la municipalité est une
institution démocratique qui détient
un pouvoir de taxation. C'est
particulier, là, ça n'existe pas dans le secteur privé, ce pouvoir de taxation; ce n'est pas une entité démocratique,
une entreprise privée. Ce principe est au coeur du projet de loi. Pour la première fois de l'histoire du Québec, un projet
de loi viendrait reconnaître qu'une municipalité a des caractéristiques qui lui sont propres et qu'ainsi elle ne doit pas
être vue comme une entreprise privée. Ainsi, les processus doivent tenir
compte de ces caractéristiques dans un
contexte où les élus sont redevables devant leurs contribuables et qu'ils
doivent respecter la capacité de payer des citoyens.
C'est
un projet de loi qui propose des règles propres aux deux groupes de salariés
syndiqués, soit celui des policiers et
des pompiers et celui composé par les autres salariés syndiqués. Il y a des
éléments communs aux deux groupes, ceci étant dit, comme par exemple le délai
minimal de 120 jours de négociation qui doit avoir été observé avant qu'on
puisse faire intervenir un tiers, il y a le
principe de la médiation obligatoire, mais, bien entendu, dans le cas des
policiers et des pompiers, il y a un régime particulier qui est celui de
la constitution d'un conseil de règlement des différends, avec trois arbitres nommés par le gouvernement en
fonction de compétences spécifiques en droit du travail mais également des connaissances en matière économique, des
connaissances en matière de fiscalité municipale. Pour les autres salariés,
évidemment, c'est un autre régime qui s'applique. Il y a des éléments communs,
mais il existe la possibilité, dans des circonstances
exceptionnelles, que l'une ou l'autre des parties puisse demander au
gouvernement de nommer un mandataire spécial, qui peut faire des
recommandations au gouvernement.
Alors,
nous aurons l'occasion de discuter de l'ensemble de ces questions, mais
aujourd'hui la place est aux groupes qui
viennent présenter leurs mémoires, et ça va évidemment, pour nous, être très
important d'écouter attentivement leur opinion, leur analyse et leur
vision des choses. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le
porte-parole de l'opposition officielle et député de René-Lévesque à faire ses
remarques préliminaires pour une durée maximale de 3 min 30 s.
M. le député.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors, permettez-moi de vous saluer en ce
retour en session parlementaire, M. le
ministre aussi — j'espère
que vous avez passé de bonnes et de grandes vacances parce que nous avons
effectivement un horaire chargé cet
automne — les
collègues députés aussi, collègue de l'opposition, mais spécifiquement mon collègue Sylvain Rochon, ministère du...
affaires municipales, pardon, et surtout affaires du travail. Et pourquoi je
veux souligner la présence du député de
Richelieu? La partie la plus
importante qu'on va regarder aujourd'hui, c'est que, dans le projet de loi en question, on est aux affaires municipales, mais on va réécrire une
grande partie du Code du travail. Dans
certains cas, on va charcuter des articles et, dans d'autres cas, on va créer une voie de
contournement. Alors, au Parti
québécois, nous trouvons plus qu'important que le responsable du travail soit
avec nous, ce que je déplore, du côté de la partie gouvernementale, de
ne pas avoir eu avec nous les gens issus du ministère du Travail.
Le
projet de loi en question est une réponse, M. le Président, du pacte fiscal, qui a effectivement demandé aux municipalités de faire un
effort de 300 millions annuel pendant quatre ans. Lors des questions que
nous aurons, nous allons effectivement évaluer si cette réponse satisfait les différentes parties à cette
promesse brisée. On a entendu beaucoup
parler dans les médias et on va le voir dans
les mémoires, la capacité de payer et de retrouver un certain équilibre dans
les relations
de travail, alors nos questions vont
assurément être orientées sur cette recherche d'équilibre et cette supposée
incapacité de payer des municipalités.
Lors
des commissions parlementaires, M. le
Président, nous allons assurément porter une attention très particulière
au mandataire spécial, sa notion semble un
peu floue dans le projet de loi du ministre. On lui confie certains pouvoirs.
Ça manque beaucoup de transparence, et, on va le voir dans les différents
mémoires qui seront déposés, effectivement, plusieurs parties demandent des éclaircissements à ce
sujet. Mais on est tentés d'avouer, présentement, que le mandataire spécial ou du moins sa mécanique n'offre pas ce que M. le ministre a toujours voulu démontrer, une plus grande autonomie
et un gouvernement de proximité. Avec le mandataire spécial, ça pourrait être l'Assemblée
nationale qui décrète les conditions de
travail, alors je ne vois pas en quoi
on donne de l'autonomie quand c'est un tiers qui décide à la place des municipalités. Et la seule proximité que je vois dans ce gouvernement-là, c'est de jouer le rôle à
l'intérieur d'une municipalité. Alors, j'aurai des questions à ce sujet.
Et
assurément, M. le Président, l'article 1, ses principes directeurs, et l'article 17,
qui doivent tenir compte de plusieurs
critères dans le cadre de la fixation des conditions de travail par le conseil
des différends des pompiers et policiers, amènent plusieurs interprétations, plusieurs
questionnements. Alors, nous allons être aux aguets pour assurer d'avoir l'ensemble des informations, pour pouvoir
avoir un travail... assurer notre pleine satisfaction dans ce dépôt de projet de loi. Alors, merci beaucoup, M. le Président.
• (9 h 40) •
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le député de René-Lévesque. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député de Blainville, pour
un maximum de 2 min 30 s.
M.
Mario Laframboise
M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le
Président. Je vous salue, M. le ministre, collègues députés gouvernementaux, collègues de l'opposition
officielle, représentants du milieu municipal, du milieu syndical.
Évidemment,
je suis heureux d'être ici parmi vous aujourd'hui au nom de ma formation politique, la Coalition avenir
Québec, d'autant plus qu'avant les années 2000, bien, j'étais assis dans le
siège des élus municipaux. Et, quand je fais un petit peu d'histoire, dans les années
2000, l'écart, que je défendais à l'époque, évidemment, au nom des élus municipaux, l'écart entre la rémunération des
employés de l'État et ceux du milieu municipal était entre 15 % et
25 %; aujourd'hui, c'est entre
20 % et 35 %, 36 %. Donc, on s'aperçoit que cet écart-là a
encore augmenté. Donc, il n'y a rien, je vous dirais, qui s'est emmieuté dans le milieu municipal, là, au cours
des 15 dernières années. Donc, je pense qu'aujourd'hui, avoir un projet de loi qui a pour but d'encadrer la
façon dont les négociations dans le milieu municipal se fait... je pense
qu'on est rendus là.
Souvenons-nous
qu'il y a eu un gouvernement courageux en 1982‑1983, le gouvernement de René
Lévesque, qui a adopté des séries de projets de loi, là, 68, 70, 72, 105, et
même le fameux projet de loi 111, pas loin du 110 qu'on dépose aujourd'hui, là. Mais il reste quand même que,
depuis 1982‑1983, cet écart-là entre les employés municipaux, qui n'étaient
pas visés par les projets de loi du
gouvernement Lévesque de l'époque... l'écart s'est toujours agrandi. Et c'est
ce qui fait qu'aujourd'hui on est
rendus à cette situation-là. Et il faut, et c'est ce qu'on défendra aujourd'hui...
il faut respecter la capacité de
payer des citoyens, puis c'est ce que M. le ministre dépose comme projet de
loi. On va juste nous assurer, en tant
que formation, notre formation politique, que, les nominations sur les
différents comités ou sur le conseil de règlement des différends, il n'y ait pas trop de nominations
partisanes, là, on va juste s'assurer que ça se fait respectueux, puis qu'il
n'y a pas de partisanerie politique
là-dedans, puis que c'est respectueux de toutes les parties, autant du milieu
municipal que du milieu syndical.
Mais, pour le reste, on va essayer de faire évoluer le projet de loi dans le
bon sens, M. le Président.
Auditions
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le député de Blainville. Nous allons
maintenant débuter les auditions. Je souhaite
la bienvenue aux représentants de la ville de Québec. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc, dans un premier temps, à vous
présenter, et par la suite vous pouvez commencer votre exposé.
Ville de Québec
M.
Labeaume (Régis) : Alors, M.
le Président, M. le ministre, MM. les députés — il n'y a pas de dame, d'après ce que je peux voir — permettez-moi tout d'abord de vous présenter
les gens qui m'accompagnent : M. Jonatan Julien, vice-président du comité exécutif de la ville,
André Legault, le directeur général de la ville, et Benoît Richer, le directeur
du Service des ressources humaines.
Alors,
d'entrée de jeu, évidemment, nous vous remercions pour votre invitation. C'est
un sujet qui, vous le savez, nous, à
Québec, nous préoccupe au plus haut point. Depuis mon entrée en politique, j'ai
le souci de placer tout d'abord l'intérêt
des contribuables au coeur des finances publiques, et sincèrement ce doit être
d'eux dont on doit se préoccuper dans nos discussions aujourd'hui.
L'existence
d'un écart salarial de près de 40 %, selon l'Institut de la statistique du
Québec, entre les employés municipaux et leurs collègues provinciaux constitue
un élément majeur dans l'objectif d'assainissement des finances municipales, et on ne peut pas l'ignorer. La
question que l'on doit se poser aujourd'hui est : Comment en sommes-nous
arrivés à un tel écart? Deux éléments
majeurs sont en cause : un déséquilibre dans le rapport de force lors des
négociations salariales et le
mécanisme d'arbitrage applicable à certains corps d'emploi du secteur municipal
qui a tiré les salaires vers le haut.
Alors, je remercie très sincèrement le ministre
et le gouvernement de s'attaquer à ce problème et d'avoir le courage — parce
que je pense que ça prend du courage — de présenter le projet de loi
n° 110.
Mon
intervention sera courte et simple. La question : Est-ce que les
dispositions de ce projet de loi permettront de régler le problème?
Le projet de loi se divise en deux
parties : les dispositions applicables aux policiers et aux pompiers et celles
applicables aux autres salariés. Pour les
policiers et les pompiers, le projet de loi vient modifier le mécanisme
d'arbitrage existant par un nouveau mécanisme renforcé, croyons-nous, et
composé d'un conseil de règlement de différends qui devra fonder ses
décisions sur des critères prévus par la loi. À cet égard, mes préoccupations
premières sont la qualité et l'indépendance
des membres de ce conseil et les critères que ces membres utiliseront pour
rendre leurs décisions. Dans l'éventualité
de former un conseil de règlement de différends dans le cas d'une négociation,
il est primordial que ces membres aient
tout d'abord, évidemment, les compétences, l'impartialité et surtout
l'indépendance des magistrats de nos tribunaux civils. Et, pour atteindre ce résultat, leur cheminement professionnel
ne doit pas dépendre des décisions qu'ils rendront.
En ce qui a trait aux critères à considérer par le conseil de règlement des différends, ils sont nombreux, peut-être trop nombreux, selon nous, et
tous sur le même pied d'égalité. Il nous apparaîtrait judicieux de faire comme
certaines autres juridictions et se limiter
aux critères suivants, c'est-à-dire la situation financière et fiscale de la municipalité, les conditions de travail applicables aux autres employés de la municipalité et finalement les exigences relatives à la saine gestion des finances publiques. Il faut surtout
éviter de référer aux conditions applicables aux autres municipalités. Une telle comparaison a
mené à un nivellement vers le haut dans le passé, un nivellement qui a coûté beaucoup
trop cher aux payeurs de taxes.
Finalement,
en toute transparence, quant à la l'imputabilité des élus municipaux
et de leur responsabilisation, il
serait judicieux que les dernières
propositions patronales, celles à être analysées par le conseil de règlement de
différends, aient d'abord été entérinées par le conseil municipal.
Le deuxième
volet du projet de loi introduit la possibilité qu'une tierce personne vienne
déterminer ou proposer les conditions
de travail dans le processus de négociation avec les autres employés. Avec ces
dispositions législatives, ne
serions-nous pas en train de reproduire peut-être ou réintroduire un mécanisme
que nous tentons de corriger pour les pompiers et les policiers? J'admets que ce mécanisme
est en grande partie optionnel, mais ne risque-t-il pas de devenir
éventuellement la norme?
En fait, et
je me dois d'insister, il est de la responsabilité des élus municipaux de gérer
les dépenses et d'établir les conditions
de travail des employés selon la capacité de payer des citoyens. Pour cette
raison, je vois mal que l'on puisse encore
une fois les dépouiller de cette responsabilité en confiant ce devoir à un
tiers non élu lorsque d'autres voies peuvent être envisagées. Que ce soit un arbitre, un conseil de règlement des
différends ou un mandataire spécial, nous arriverons à la même
finalité : les conditions de travail et particulièrement leurs coûts sont
déterminés par d'autres que les élus municipaux.
Et n'oublions jamais que ce sont eux qui sont jugés tous les quatre ans sur la
gestion des deniers publics.
Je verrais plutôt qu'après négociation et
médiation les élus municipaux, par résolution du conseil municipal,
recommandent au ministre les conditions de travail qui devraient s'appliquer et
que le ministre les fasse examiner par un
mandataire spécial. La responsabilité de ce mandataire spécial serait de se
prononcer sur leur raisonnabilité en regard des mêmes critères arrêtés par le conseil de règlement de différends à
l'égard des policiers et des pompiers. En bout de piste, il
appartiendrait au ministre, en tant qu'élu, de trancher.
Je considère
que le projet de loi n° 110, bien qu'extrêmement courageux, ajusté en
fonction des observations dont je viens de vous faire part, constituerait un
autre pas important vers l'assainissement des finances publiques municipales
et la responsabilisation des élus
municipaux. Et je suis évidemment disposé, avec mes collègues, à échanger avec
les membres de la commission. Merci.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup, M. Labeaume, pour votre exposé.
Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre,
vous avez la parole pour 16 min 30 s.
M.
Coiteux : Merci pour la présentation, M. le maire, merci beaucoup. Je
voudrais juste vous entendre peut-être un petit peu plus sur la question suivante. Vous avez insisté sur
l'importance de l'indépendance et de l'expertise des membres du conseil de règlement des différends. Cette
expertise-là, les expertises qui sont nécessaires sont explicitement inscrites
dans le projet de loi. Quels sont les éléments qui vous apparaîtraient
insuffisants tel qu'il est écrit actuellement?
• (9 h 50) •
M. Labeaume (Régis) : Écoutez, on ne
dit pas qu'il y a des éléments insuffisants, on veut juste répéter notre inquiétude, parce qu'actuellement, pour nous...
C'est un métier, celui d'arbitre. À la limite, c'est un business. Vous savez,
un arbitre, lorsqu'il est choisi par la partie
patronale et syndicale, c'est parce qu'il est raisonnable, souvent un peu trop,
et ce qu'on comprend, nous autres,
des arbitres, ça fait neuf ans qu'on est là, là, c'est qu'ils donnent toujours...
rendent toujours des décisions un peu «wishy-wisha» pour faire en sorte d'être
toujours dans le milieu, tenter de plaire ou de ne pas trop déplaire à
toutes les parties. Et ça, ça fait qu'au long des années ça a créé l'écart de
40 % entre les employés municipaux et les employés du gouvernement du
Québec.
Un arbitre,
lorsqu'il rend sa décision, voudrait avoir d'autres mandats dans le futur,
alors ce qu'il fait, c'est de ne pas trop déplaire à toutes les parties pour
pouvoir être embauché de nouveau par ces mêmes parties. Nous, on considère
que ce ne sont pas des gens indépendants.
C'est clair pour nous, très clair pour nous. Alors, je vous dirais que, le
mandataire spécial, les membres du
comité de règlement des différends... nous, on exclut l'arbitre, mais
éventuellement un arbitre...
En passant,
l'arbitre, même si nous, on l'exclut, on sait que dans le Code du travail les
parties peuvent toujours demander
l'intervention d'un arbitre. Ces gens-là doivent être embauchés d'une façon
telle que jamais leur avenir professionnel
ne dépende des décisions qu'ils vont rendre. Ils doivent être totalement
indépendants de la partie patronale et
de la partie syndicale. Ça ne doit pas être des gens qu'on va chercher au
besoin. Je vous dirais, puis ce n'est pas tout à fait ma philosophie, que, s'ils devaient faire ce
travail-là, ce sont des gens qui devraient être embauchés comme les juges,
pour très longtemps, qui devraient être, à
la limite, permanents, quoique je ne suis pas trop pour les permanences, mais
ils doivent vraiment être choisis sur les mêmes critères que les juges, à long
terme, pour que jamais leur avenir professionnel ne dépende des décisions qu'ils vont rendre, et il ne faut pas que ces
gens-là se demandent si dans l'avenir ils vont pouvoir être embauchés ou
par les syndicats ou par les patrons pour intervenir dans des questions de
relations de travail.
Alors, c'est
ça, notre grand souci. Ce qui est prévu dans le projet de loi me semble très
correct, c'est juste que nous
insistons de nouveau sur notre très grande inquiétude parce que, chez tous les
élus municipaux, on est tous d'accord pour
dire, normalement, que les arbitres, malheureusement, ne sont pas impartiaux
parce qu'ils veulent être embauchés de
nouveau. Ce ne sont pas des gens qui sont malhonnêtes, mais, comme ils sont
embauchés au besoin, ils surveillent leurs arrières pour avoir de
l'ouvrage pour l'avenir.
Alors, quand on engage, on embauche des juges,
normalement ils n'ont plus d'inquiétude pour leur avenir professionnel, à moins qu'ils fassent une coche
mal taillée. Il faudrait que ce soit la même chose pour les membres, par
exemple, du comité de règlement des
différends, la même chose pour le ou les mandataires spéciaux. Alors,
l'indépendance totale de ces gens-là est primordiale, et c'est le
fondement même de leur capacité de rendre de bonnes décisions.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M.
Coiteux : M. le maire, j'aimerais vous entendre sur un autre aspect de
votre présentation. Vous avez parlé des critères qui sont énoncés dans la loi
pour guider les décisions du conseil de règlement des différends, d'une part,
mais qui doivent également guider le rapport qu'un éventuel mandataire
spécial soumettrait au gouvernement, le cas échéant, si une demande justifiée a été présentée et acceptée par le
gouvernement. Vous avez dit qu'il y a trop de critères, selon vous, et que ça devrait être réduit à un nombre plus
restreint de critères, et vous avez nommément questionné le critère de comparabilité avec d'autres municipalités. Vous le
savez, à l'heure actuelle il y a comme deux grands principes dans le mécanisme d'arbitrage existant, l'équité interne, l'équité externe,
et donc, lorsqu'on fait une comparaison, on se réfère au critère d'équité externe. Mais est-ce que vous
avez un inconfort face à, disons, le fait que cette équité externe ne
s'applique qu'à des situations de villes qui sont vraiment comparables, autrement
dit qui sont dans des situations économiques et fiscales qu'on puisse
comparer?
M.
Labeaume (Régis) : Le
critère qui nous semble le plus dangereux, c'est celui qui est de comparer les
conditions de travail applicables
dans des municipalités semblables. Je vais donner un exemple : Pour les
policiers de Québec, on n'a pas eu de
meurtre depuis 13 mois ici, là. Je ne sais pas combien qu'il y en a eu à
Montréal, mais je présume qu'il y en a eu
un peu plus, hein? Comment comparer le travail des policiers de Drummondville
avec ceux de Montréal? On ne parle pas de la même affaire. Montréal,
c'est la moitié de la ville... la moitié du Québec, avec la banlieue, c'est un
milieu totalement différent. Et donc comment négocier, comment le maire peut
négocier avec les policiers de la ville de Drummondville quand ils veulent
comparer leurs salaires avec ceux de Montréal? Ça n'a pas de bon sens, il n'y a
aucune comparaison à faire avec le même
métier ailleurs. Et ça, même malgré toute la... D'ailleurs, je veux dire, c'est
parce qu'ils sont compétents, si on
est en sécurité à Québec, mais le milieu urbain montréalais est plus dangereux,
je pense, que le milieu urbain québécois, la ville de Québec. Alors, par
exemple, c'est un exemple. Ce n'est pas le même travail. Et c'est
ça qui fait que, quand on va s'accoter sur le plus gros à chaque fois, bien, on s'accote... puis l'autre
monte, puis on s'accote, puis à un
moment donné on se ramasse avec 40 % de différence dans la rémunération
pour le même travail dans le domaine municipal et dans le domaine
provincial.
Bon, la situation économique locale, Québec, ça
va bien, là, nous autres. Mais qu'est-ce que ça va être dans deux ans? Bien, dans deux ans, on va avoir la même
convention collective, là. Tu sais, si on se fie, pour négocier, sur la
situation circonstancielle temporaire, économique locale, bien, si on signe une
convention de cinq ans, si l'économie change
drastiquement en trois ans, puis ça se peut très facilement, bien, c'est un peu délicat, hein, c'est une
comparaison un peu subjective. Les
perspectives économiques, sauf le respect que j'ai pour les économistes, je ne
sais pas qui qui pourrait nous
garantir les perspectives économiques du Québec dans les cinq
prochaines années. L'avantage des économistes, c'est qu'ils oublient toujours ce qu'ils ont dit auparavant puis ils se projettent toujours dans le
futur; ils peuvent se tromper toute leur vie, tu sais. Alors, tu sais,
les perspectives économiques, ça me semble un peu subjectif.
Alors, moi, la politique de rémunération du
secteur public et parapublic, on pourrait l'inclure avec plaisir, parce qu'on se compare tellement facilement. Puis,
si ça peut vous être utile, M. le ministre, ça nous ferait plaisir aussi,
honnêtement.
Alors, c'est
à peu près ce qui nous titille un peu dans toutes ces conditions-là. Ceci dit,
les conditions que je vais énumérer,
peut-être, peuvent être prises en considération, mais on pense qu'à un moment
donné il faut que ce soit encadré assez serré, hein, avec le moins de
critères possible, puis parce que plus il y a de critères, moins ceux qui ont à
vous recommander, comment dire... Le
mandataire spécial, s'il y a un paquet de critères, c'est plus difficile
d'évaluer la raisonnabilité. Ceux qui
sont membres du comité de règlement des différends, s'il y a plein de critères,
ça va être plus compliqué aussi. Moi,
je pense que ce doit être encadré très serré. Alors, ça peut être des critères
absolus puis des critères optionnels.
Moi, j'aurais tendance à en garder à peu près trois ou quatre, ce serait mon
choix, parce que, la question des perspectives économiques puis de
l'économie locale, on est un peu souvent dans des sciences occultes, hein?
M. Coiteux : J'ai combien de temps
encore, M. le Président?
Le Président (M. Auger) :
7 min 30 s.
M.
Coiteux : J'ai encore sept minutes. Il se trouve, M. le maire, puis je
le dis comme ça... Dans une ancienne vie, j'étais économiste.
M.
Labeaume (Régis) : M. le ministre, je le savais, et c'est pour ça que j'ai gardé une petite retenue dans
ce que j'ai dit.
M. Coiteux : Dans une ancienne...
M. Labeaume (Régis) : ...
M.
Coiteux : Néanmoins,
ce qui apparaît raisonnable... Lorsque les perspectives sont difficiles, il arrive
parfois... le hasard des choses fait
en sorte qu'il y a des négociations qui se font en temps de récession, en temps de
crise financière, et il m'apparaît
sage, de ce point de vue là, même si l'avenir est incertain... il
m'apparaîtrait sage que ça puisse être un critère, de tenir compte de ça, parce
que sinon, à l'inverse... Parce que
vous évoquez la possibilité que, les perspectives paraissant très favorables, de l'avis des
économistes, qui projettent le passé dans l'avenir, puis on a eu un passé
glorieux à certaines époques, effectivement, puis l'avenir s'est avéré un
petit peu plus difficile dans
certaines circonstances, puis pas seulement
ici, au Québec, partout dans le monde... Il m'apparaît prudent
de maintenir un critère comme
celui-là si jamais, au contraire, on
allait dans l'autre sens, c'est-à-dire qu'on allait vers des conditions qui ne
tiennent absolument pas compte des perspectives, qui pourrait être très
difficile, là, du point de vue fiscal.
Mais je
reviens, si vous me permettez, à la question de l'équité externe, parce que le
projet de loi est rédigé d'une manière telle qu'il dit qu'il faut
comparer des comparables... Et vous nous disiez tout à l'heure : Bien, on
ne peut pas comparer Drummondville et
Montréal. J'en conviens. Surtout du côté des services policiers, c'est quand
même différent. Mais
est-ce qu'on peut comparer des villes de 100 000 habitants entre elles, par exemple, si elles avaient des perspectives fiscales semblables? Est-ce
que vous pensez que, là aussi, ça pourrait poser problème?
• (10 heures) •
M.
Labeaume (Régis) : Le Québec,
ce n'est pas grand, là, tu sais, tu as Québec, Montréal, tu es rendu à à peu près à 60 %
du Québec. Ensuite, des villes d'à peu près, je ne sais pas, 200 000,
250 000, jusqu'à 100 000, il n'y en a pas beaucoup, là. C'est sûr que tu peux comparer
Victoriaville, Drummondville, Saguenay, mais normalement les policiers de Saguenay, ils ne se comparent pas avec
Victoriaville, ils se comparent avec Montréal. Eux autres, leur argumentaire,
c'est qu'ils n'ont pas à être payés moins cher que ceux de Montréal,
éventuellement ceux de Québec.
Alors, les demandes syndicales, dans le cas des
policiers et pompiers, c'est toujours se comparer à ceux qui ont le plus haut salaire
au Québec et si ce n'est pas au Canada, éventuellement. Alors, tu sais, vous avez raison, mais, dans la pratique, ce n'est pas ça qui se passe. Le
policier de Saguenay va vous dire que lui, il travaille aussi fort que le
policier de Montréal,
que le milieu ambiant est peut-être plus difficile qu'on pense, parce qu'on ne fait pas ce métier-là, pendant
la nuit, par exemple, tu sais, et, bon,
ce sont des arguments, souvent, qui sont difficiles à réfuter. Alors, vous avez
raison. C'est juste que, dans la
pratique, tous les syndicats de policiers et pompiers vont tenter de décrocher
le même salaire que le plus haut
salarié dans le même métier dans la province ou sinon dans le pays. Alors, vous
avez raison, mais en même temps
moi, je pense que, dans la pratique, ça ne se passera pas tout à fait comme ça.
M.
Coiteux : Je comprends de
votre argumentaire ici que c'est dans la pratique actuelle que vous voyez qu'on
compare des fois des incomparables.
M. Labeaume (Régis) : Oui, mais je
pense que... Même dans le futur, je ne vois pas pourquoi le policier de Saguenay, à cause de la nouvelle loi, cesserait de
demander d'avoir la même rémunération que le policier de Montréal. Il
n'y a pas objectivement de raison de ne pas le faire, selon moi.
M. Coiteux : Est-ce que tu veux
poser une... J'ai mon collègue ici, le député de...
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont.
M. Rousselle : Merci.
Bonjour, M. le maire.
Dans votre
mémoire, vous parlez d'écart de 40 %
entre les employés municipaux et provinciaux. Certaines centrales syndicales semblent douter, justement, de
l'Institut de la statistique du Québec. Vous, vous en dites quoi, de ça, vous?
M.
Labeaume (Régis) : Les
centrales syndicales, leur travail, c'est de douter, là. Quand ça ne fait pas
ton affaire, il faut que tu doutes,
là. Mais je ne sais pas pourquoi on remettrait en question la compétence des
gens de l'ISQ, là. L'ISQ, ce n'est
pas patronal, ce n'est pas syndical. Nous, à la ville de Québec, pour tous les
travaux, à chaque fois qu'on a besoin de
statistiques, c'est la référence. On est toujours très bien servis, puis
normalement ils ont tout à fait raison. Mais c'est normal que les syndicats réfutent ça, parce que ce
n'est pas à leur avantage. Chacun fait sa job. Moi, je suis totalement d'accord, là. Puis je ne vois pas comment on peut
réfuter l'impartialité et la compétence des gens de l'ISQ. Il faut être
culotté, quand même, là, tu sais.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont.
M.
Rousselle : Sauf que vous, ville de Québec, est-ce que vous la
voyez, vous, chez vous, la différence entre les employés provinciaux?
M.
Labeaume (Régis) : Je pense
que tous les employés du gouvernement du Québec voudraient travailler à la
ville de Québec, parce qu'ils seraient mieux payés.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont... M. le ministre. Deux minutes.
M.
Coiteux : Deux minutes. Le mandataire spécial, peut-être juste...
j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus sur la question du mandataire spécial. Le projet de loi prévoit que la
demande peut être faite au ministre par la municipalité mais aussi par
le syndicat...
M. Labeaume (Régis) : ...l'arbitre.
M.
Coiteux : Pour le mandataire spécial, dans le cas du mandataire
spécial. Ça peut être l'un ou l'autre, s'il y a une impasse, alors, ça
peut être invoqué par l'une ou l'autre des deux parties.
M. Labeaume (Régis) : Le mandataire
spécial, il est présent de toute façon dans la loi, là.
M. Coiteux : ...ce que je veux dire,
c'est parce que...
M. Labeaume (Régis) : ...je vous
dirais que...
M. Coiteux :
Ce n'est pas un arbitre, le mandataire spécial n'est pas un arbitre.
M.
Labeaume (Régis) : Le
mandataire spécial, on est tout à fait d'accord avec ça. Je pense qu'avant que
ça arrive à vous quelqu'un doit évaluer,
analyser — le
critère qu'on préfère, qu'on suggère — la raisonnabilité. Tu sais, à un moment
donné, dans ces affaires-là, c'est raisonnable ou ça ne l'est pas.
Là où on
n'est pas à l'aise, c'est la question de l'arbitrage. Vous savez, l'arbitrage,
nous autres, dans les villes, là, c'est une phobie pour nous autres, ça
nous a menés à un écart de 40 % dans les conditions salariales. Et on
pense que l'arbitrage, ce n'est pas une
étape nécessaire à inscrire dans la loi, parce que de toute façon l'arbitrage
peut être demandé en tout temps, selon les lois du travail, par les deux
parties. Alors, c'est implicite dans la loi.
Quand on
parle de négociation, médiation, rapport au mandataire spécial puis le
ministre, ça fait déjà beaucoup, beaucoup,
c'est un itinéraire assez... avec plusieurs haies à sauter. Et, la question de
l'arbitrage, nous, comme chat échaudé craint
l'eau froide, on a toujours peur que, malgré que le gouvernement aurait fait
des efforts suprêmes pour trouver des arbitres
impartiaux, il se dégage une tendance dans les décisions, mais tendance qu'on
ne considérerait pas à notre avantage, et
qui pourrait inciter, par exemple, le syndicat à faire appel à l'arbitrage.
Puis, s'ils décelaient une tendance à leur avantage, ils auraient raison
de le faire. Alors, l'arbitrage, nous autres, c'est...
Puis, quand...
Et, si ça se fait, ça veut dire que c'est quelqu'un d'autre qui décide pour les
élus. Fondamentalement, nous autres, ce qu'on ne veut pas, c'est
quelqu'un...
Le
Président (M. Auger) : Merci.
C'est tout le temps que nous avions pour ce bloc d'échange, nous devons
poursuivre avec l'opposition officielle. M. le
porte-parole. À moins que vous décidiez de laisser M. le maire continuer la
réponse.
M. Ouellet : Oui, M. le maire, vous
pouvez terminer votre réponse.
M.
Labeaume (Régis) : Bien, ce
que je dis, c'est qu'on n'accepte plus qu'un tiers décide à notre place, c'est
assez simple, à part le ministre.
Parce que, vous savez, les villes auraient voulu avoir le droit de décréter;
constitutionnellement, elles ne
peuvent pas le faire. Et c'est pour ça qu'on a bien accueilli le projet de loi
du ministre. On trouvait ça brillant, intelligent, parce qu'à part le
droit de décréter c'est la meilleure chose qui puisse se faire, dans le fond,
c'est de transférer... Cette capacité-là que
nous n'avons pas, le gouvernement l'a, alors on était, constitutionnellement
parlant, casher.
Alors, nous,
les arbitres, honnêtement, on n'en veut pas, d'arbitre. On pense que, s'il y a
un arbitre, ça va travailler moins
fort aux négociations, ça va travailler moins fort en médiation, parce que, si...
À un moment donné, quand tu ne peux
pas t'entendre, tu peux toujours dire : On va aller à l'arbitre, puis, si
l'arbitre dit que ce n'est pas en ta faveur, tu peux mettre ça sur la faute de l'arbitre. Politiquement, autant pour les
villes que pour le syndicat, tu peux t'en débarrasser politiquement, tu dis : Coudon, on s'est fait
fourrer par l'arbitre. Tu sais, ça arrive des fois, là, que des syndicats puis
des villes disent : Bien, on va
aller là, puis il prendra les décisions à notre place; au moins, nous,
politiquement, hein — parce
que les gens des syndicats, ce sont des élus
aussi, comme nous autres — politiquement, ce ne sera pas de notre faute. C'est
malsain, selon nous, c'est malsain.
Alors, s'il n'y a pas d'arbitrage, ça va
travailler beaucoup plus fort dans la négociation, ça va travailler beaucoup plus fort dans la médiation, parce que,
si tu ne t'entends pas en négociant et dans la médiation, tu vas savoir que tu t'en vas — puis c'est ce qui va arriver dans les
faits — à la
merci de l'estimation d'un mandataire spécial qui va conseiller le
ministre. Tu n'as pas trop envie de finir avec une loi spéciale.
Moi, je pense
que, négociation, médiation, estimation, évaluation d'un mandataire spécial, on
ne se rendra pas au projet de loi,
excepté peut-être dans des cas extrêmes. L'arbitrage ne semble pas utile
là-dedans, ne semble pas nécessaire. Et,
philosophiquement, nous autres, on a des problèmes à avoir un arbitre dans le
processus, c'est-à-dire avoir quelqu'un qui a la capacité de décider à notre place. Ça a eu des vices dans le
passé, on ne veut pas revivre ça. Et en plus de ça, en termes de
responsabilisation, on trouve ça incorrect par rapport aux élus.
Le Président (M. Auger) : M. le
député, je vous rappelle que vous avez 7 min 30 s.
M.
Ouellet : Dans le cas du
mandataire spécial... Parce qu'à l'intérieur de votre mémoire vous faites
mention, M. le maire, de l'importance
de l'impartialité et de la transparence de ceux et celles qui doivent rendre
les décisions. Dans le cas du mandataire spécial, c'est le ministre qui va le
nommer. En quoi, selon vous, vous allez obtenir des garanties que cette
nomination-là sera impartiale et transparente?
Et,
deuxièmement, considérant le rapport du mandataire spécial, il est
confidentiel, il sera remis au ministre pour décision, alors l'appareil municipal, les gens du public ne pourront pas
connaître la teneur du rapport, et peut-être qu'en bout de course nous
aurons à voter sur quelque chose pour lequel nous n'aurions pas eu et su la
teneur.
M.
Labeaume (Régis) : C'est
pour ça que nous, on dit tout d'abord qu'à chaque fois ça doit être voté par le
conseil municipal de la ville. C'est,
à la ville de Québec, 39 % de la masse... du budget total, la ville de
Montréal, 45 %, 46 %, puis c'est toujours fait en catimini.
Quand le rapport... Quand le mandataire spécial
doit examiner l'issue des négociations et de la médiation et conseiller le
ministre, ce que nous disons, c'est que nous, on doit transmettre au médiateur...
mandataire spécial nos recommandations, et
ça doit passer par le conseil de ville, et voté par le conseil de ville. Parce
que, vous savez, le gros vice aussi des négociations, dans le secteur
municipal, c'est que c'est personnalisé, c'est Labeaume contre l'ensemble
des travailleurs, tu sais, c'est toujours
personnalisé, et les élus ne peuvent jamais savoir ce qui se passe. Ce n'est
pas normal, en
démocratie, ça. Alors, avant d'envoyer... avant que le médiateur spécial
analyse l'issue de ces discussions-là, nous, ce qu'on dit, c'est que la ville doit, par résolution du conseil
municipal — parce
qu'une ville, ça marche par résolutions — transmettre au médiateur spécial son offre finale, mais ça doit absolument,
absolument passer par le conseil municipal. Il faut que les élus...
Vous savez, dans une ville, on fait des résolutions
pour tout, les élus ont le droit de discuter de tout, à l'exception des négociations, ce qui n'a aucun sens. Chez nous, c'est 39 % à 40 % du budget. Ça n'a aucun...
C'est le plus gros poste budgétaire.
Et donc, le
mandataire spécial, s'il fallait que le gouvernement se trompe dans sa
nomination, c'est beaucoup moins dommageable
qu'un arbitre, parce que l'arbitre, il prend la décision; le mandataire, il
conseille le ministre. Alors, ça peut
toujours arriver, mais ce qu'on dit, nous autres, c'est : Autant pour les
membres du comité de règlement de différends que pour le mandataire spécial, on
souhaite que ce soit l'impartialité totale puis qu'il soit choisi selon les
mêmes critères que les juges. Mais, s'il y avait une erreur, c'est moins
pire que l'arbitre, qui, lui, va décider.
• (10 h 10) •
Le
Président (M. Auger) : Merci. Je vais recéder la parole à M. le député
de René-Lévesque parce que je dois équilibrer le temps entre la question
et la réponse. Donc, M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Oui. Donc, dans ce même principe là, M. le maire, je ne veux pas vous
mettre des mots dans la bouche, mais
vous seriez à l'aise aussi à ce que la partie syndicale puisse transmettre ses
recommandations au mandataire aussi.
M. Labeaume
(Régis) : Aucun problème.
M. Ouellet :
Aucun problème avec ça.
M. Labeaume
(Régis) : Absolument.
M. Ouellet :
Parfait. Je vais passer la parole à mon collègue de Richelieu.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. le maire.
Vous estimez que,
dans le régime actuel, le rapport de force est déséquilibré, hein, dans les
négos entre les municipalités et leurs
syndiqués. Vous trouvez courageux — c'est vos mots — que le gouvernement s'y attaque, courageux.
Vous
avez la réputation de parler franc. Le projet de loi qu'on a sous les yeux, M.
le maire, il rééquilibre le rapport de force ou il le déséquilibre à la faveur
des municipalités, à la défaveur des syndiqués, ce qui vous fait le trouver
courageux?
M. Labeaume (Régis) : C'est parce qu'il ne faut pas se tromper, là, il y a souvent une
confusion des genres. Là, on devrait parler des payeurs de taxes, là, on
parle de deux entités qui sont... Parlons des payeurs de taxes, c'est eux autres qui sont importants, là, ce n'est pas de
voir la ville comme un employeur, là. Puis il y a confusion des genres. Un
syndicat, c'est une organisation privée dont
le rôle est de défendre les intérêts d'un certain nombre d'individus, c'est une
organisation privée, puis c'est correct. Nous, on est des élus qui défendent
l'intérêt des citoyens, c'est bien différent. Il y a souvent une
confusion des genres.
Alors, idéalement,
moi, ce que j'aurais voulu, c'est le droit de décréter; je ne l'ai pas. Ce
droit-là, maintenant, appartient à
l'Assemblée nationale, et le projet de loi, là, si on ne s'entend pas, se rend
jusque-là. C'est parfait. Oui, c'est un
projet courageux, parce que personne n'a osé faire ce pas-là avant, et
honnêtement il est très courageux. Et, vous savez, l'idée qu'il n'y a pas de rapport de force... On
dit : Bien oui, mais on a toujours réglé. Bien, oui, mais on règle avec le
couteau sur la gorge. C'est sûr, on règle, là, tu sais. On règle avec le
couteau sur la gorge puis on sait que, si on dit non, ils ont toujours la balance du pouvoir, tu sais.
Alors, on règle, mais ça donne un écart éventuellement, au long des années,
40 % avec les travailleurs du
gouvernement. On règle, mais on règle avec le couteau sur la gorge, c'est comme
ça que ça se fait. Ça vient rééquilibrer, c'est certain.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Mais le couteau, pour reprendre votre image, il ne serait pas, avec ce projet
de loi là, sur la gorge de quelqu'un d'autre?
M. Labeaume
(Régis) : Qu'est-ce que vous voulez dire?
M. Rochon :
Vous dites que vous réglez avec le couteau sur la gorge.
M. Labeaume (Régis) : Moi, je pense que le projet de loi oblige tout le monde à être
raisonnable, correct, juste et les
force à négocier et à s'entendre. Ce que ça fait, le projet de loi, là, ça
force tout le monde à régler. Il n'y a personne qui va vouloir se rendre au
ministre avec une loi spéciale, et ça va rendre tout le monde plus raisonnable.
Et surtout, et c'est pour ça que
j'insiste, en plus de ça, il faut que le public, les payeurs de taxes sachent
ce qui se passe. Et c'est ça, la beauté du projet de loi, c'est qu'il
force les gens à s'entendre, ce qu'on n'était pas capable de faire avant.
Le Président (M. Auger) : Une
minute. M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet :
Merci, M. le Président. Rapidement, M. Labeaume, à l'intérieur de votre mémoire
vous faites référence — et à plusieurs reprises dans les
médias — à la
capacité de payer de vos contribuables dans les négociations. Sur quelle base vous évaluez, lorsque vous
négociez, cette capacité ou non de vos contribuables de payer? Parce qu'on sait que dans la colonne des dépenses il y a
effectivement la masse salariale, mais il y a tous les investissements que la
municipalité peut faire et tous les projets
que vous mettez de l'avant. Sur quelle base vous évaluez cette capacité ou
cette non-capacité de payer des citoyens? L'inflation?
M. Labeaume (Régis) : Si on a trois
quarts d'heure, on va en parler, là, mais...
Le Président (M. Auger) : On a 45
secondes.
M.
Labeaume (Régis) : Tu sais,
je pense que vous savez comme moi ce que ça veut dire, la capacité de payer,
là.
M. Ouellet : Mais pour vous?
M. Labeaume (Régis) : Pour moi,
c'est qu'à un moment donné c'est parce que ça suffit. Le monde est taxé jusqu'ici par tous les ordres de gouvernement, là,
ça suffit. Tu sais, à un moment donné, nous autres, des augmentations de taxes de 3 %, 4 % par année, c'est
trop. C'est ça qu'on doit faire parce qu'à chaque année, par exemple, s'il n'y
avait pas de règlement sur les fonds
de pension, on ne savait jamais ce qui nous pendait au bout du nez. Alors,
c'est une spirale, hein, c'est une escalade qui fait en sorte qu'à un
moment donné...
Le Président (M. Auger) : En
terminant.
M.
Labeaume (Régis) : ...la
majorité des taxes payées par les citoyens s'en vont dans la masse salariale,
ce qui est anormal, là.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant
poursuivre avec la deuxième opposition. M. le député de Blainville.
M. Labeaume (Régis) : Juste dire que
nous autres...
Le
Président (M. Auger) : Peut-être permettre... Juste un instant! Juste
un instant! Peut-être que le député pourra vous... Le temps est au
député de Blainville.
M. Laframboise : Vous pouvez
terminer, M. le maire.
M.
Labeaume (Régis) : Non,
mais, la capacité de payer, ce qui est normal, nous autres, c'est l'inflation,
c'est ce qu'on fait à Québec depuis
neuf ans. Mais, pour faire de l'inflation, on a coupé en tabarouette. À un
moment donné, on ne pourra plus là.
Ce qui serait
normal, là, la capacité de payer, c'est de ne pas aller au-dessus de
l'inflation, c'est vraiment ça. C'est notre
politique, à Québec, c'est ce qu'on fait depuis neuf ans, mais, je vais vous
dire, pour y arriver là, là, ce n'est pas pour rien qu'on a fait cette bataille-là, c'est parce que ce ne serait
plus possible aujourd'hui, là. C'est compliqué, il y a des limites à couper. À un moment donné, tu ne peux
pas toujours couper dans les services pour augmenter la masse salariale,
ça n'a plus de sens. Alors, moi, la limite, quelque part, c'est l'inflation.
Le Président (M. Auger) : Merci. M.
le député de Blainville. Six minutes.
M.
Laframboise : Merci
beaucoup, M. le Président. M. le maire, M. Julien,
M. Legault, M. Richer, merci d'être présents.
Ma première question va être... Pour que les
gens comprennent bien, là, la situation actuelle, parce que, pour qu'il y ait eu un écart jusqu'à 40 %, comme
vous dites, là, c'est parce qu'on a vécu une situation, puis, dans la vraie
vie, là, tu sais, quand on décide de
signer une convention... Parce que ce que vont vous dire les syndicats, c'est,
bon : Il y a des négociations,
puis ça se signe, là. Donc, théoriquement, ça va bien, là, le fonctionnement.
Mais, quand vous analysez, vous, à la
ville, là, avant de signer, vous analysez la possibilité d'aller en arbitrage,
vous regardez ce qui se passe, puis à un
moment donné votre contentieux vous recommande de signer parce que, finalement,
la fameuse capacité de payer, vous ne
l'atteindrez pas, mais vous risquez de dépenser plus d'argent dans d'autre
chose. C'est ça, le principe, je crois, là.
M.
Labeaume (Régis) : Bien,
quand on est devant des résultats de négociation puis on doit décider, on sait
qu'on ne peut pas... on n'a pas le droit au lock-out, on n'a pas le
droit de décréter. De l'autre côté, ils ont le droit d'aller en grève puis ils peuvent même, à la limite, puis
c'est à eux que ça revient... ils peuvent même décréter les services
essentiels. Qu'est-ce que c'est qu'il
te reste? Il ne te reste rien. Quand même que tu diras non, tu peux bien te
péter la tête après les murs, ils ont
le droit d'aller en grève, puis ultimement c'est eux autres qui décrètent les
services essentiels. Tu n'as pas le
droit de lock-out puis tu n'as pas le droit de décréter. Tu n'as rien, là.
Alors, tu te dis juste : Bon, est-ce que je dis non, puis le bordel va prendre dans la ville, les
vidanges ne seront plus ramassées, le neige ne sera plus grattée, juste les
services essentiels
que les syndiqués, le syndicat vont décrire eux-mêmes? Tu n'en as pas, de
moyen, c'est assez simple, tu n'as aucun moyen.
Quand on dit
qu'on a le couteau sur la gorge, c'est ça qu'on veut dire. Quand tu n'as pas le
droit de lock-out comme n'importe
quel employeur, puis comme gouvernement municipal tu n'as pas le droit de
décréter, ton choix, c'est : Ou je dis oui ou je tourne la vis puis en nous souhaitant bonne chance; il va y
avoir une grève, puis on va se ramasser avec des services essentiels sur lesquels ultimement je n'ai pas un
droit de regard. Ça fait que tu n'en a pas, de moyen, tu as le couteau sur la
gorge.
M.
Laframboise : Donc, c'est
pour ça qu'il y a beaucoup de conventions qui se signent puis que les villes
signent. Elles n'ont pas le choix, tu sais, c'est le principe, là.
M.
Labeaume (Régis) : Bien, on
ne les signe pas quand ça... On s'obstine quand vraiment c'est interplanétaire,
là, mais, à un moment donné, quand ça se rapproche du normal... Les maires qui
m'ont précédé, ils ont fait ce qu'ils pouvaient, là, ils ne voulaient pas de
bordel en ville, là.
M.
Laframboise : Et, bon, vous
apportez, dans vos recommandations... J'aime l'idée, là, d'avoir une résolution
du conseil, là, expliquez-nous ça, là, parce
qu'il faut vraiment, là, comprendre que... il faut que les citoyens sachent que
toute la ville est d'accord avec la position, là, c'est ça.
M.
Labeaume (Régis) : Bien,
premièrement, une négociation, jusqu'à temps que ça se signe, ça se rende
public, ça peut durer cinq ans, puis
le citoyen ne sait jamais ce qui se passe. Il y a le maire qui va être
démagogue, il y a le président du
syndicat qui va être démagogue, mais il ne saura jamais ce qui se passe,
jamais, jamais. Les élus, hein, peut-être que les élus de l'équipe Labeaume vont savoir, il faut que
je fasse attention; les gens de l'opposition ne le sauront jamais. C'est la
démocratie, ça? C'est antidémocratique, ça. On peut s'obstiner cinq ans, être
démagogue d'un bord puis de l'autre, le citoyen ne saura jamais ce qui se passe, et tous les membres du conseil
municipal élus ne sauront pas ce qui se passe. C'est ça, la démocratie?
C'est complètement antidémocratique.
À un moment donné, il faut que ça finisse, cette
affaire-là, il faut que les élus aient la chance de débattre des négociations, parce que les élus, moi, les gens de
l'opposition, ils posent des questions, mais ils ne savent pas de quoi ils
parlent. Normalement, ils sont «feedés» par
les syndicats, mais ils n'ont aucune idée de quoi ils parlent, ils ne sont pas
au courant, ils n'ont pas
l'information. Puis ça, c'est le plus gros poste budgétaire de la ville. Ça n'a
aucun sens, ça ne se peut pas.
Et ça, c'est
essentiel, là. Dans les deux cas, autant pour le comité de règlement des
différends puis le médiateur spécial,
il faut qu'il y ait une résolution du conseil municipal, sinon on va encore...
on va rester dans le système actuel. Puis
c'est extrêmement malsain, hein, parce que, quand il n'y a pas d'information,
tout le monde devient démagogue, puis ça atteint des niveaux assez
originaux, hein?
Le Président (M. Auger) : Deux
minutes, M. le député de Blainville.
• (10 h 20) •
M.
Laframboise : Tout à fait. Et c'est ce qui vous fait dire que, bon, finalement, la résolution de conseil pourrait... Autant, tantôt, quand vous avez répondu au PQ, vous avez dit : Le syndicat fera aussi sa proposition, nous, on passera notre résolution de conseil... Allez-y.
M.
Labeaume (Régis) : Est-ce que
je peux ajouter quelque chose? Les syndicats peuvent faire une assemblée
syndicale, dire à leur syndicat ce qui se passe; le maire ne peut pas faire la
même affaire avec les membres du conseil et les citoyens. C'est fou
raide, cette affaire-là, là, c'est fou raide.
M. Laframboise : Ah! c'est sûr,
c'est sûr.
M. Labeaume
(Régis) : Le chef syndical
peut envoyer... à tout le monde : Voici où est-ce qu'on est rendus, ils
m'offrent tant, tatati, tatata, tout le monde le sait. Le maire ne peut pas
même dire ça au conseil municipal, aux élus. C'est fou raide, ça n'a aucun sens.
C'est antidémocratique.
M.
Laframboise : Tout à fait.
Ça fait que c'est pour ça que vous proposez, vous, la résolution au conseil
puis qui irait directement au
médiateur, qui ferait sa recommandation, comme le syndicat pourra faire la même
chose, on...
M.
Labeaume (Régis) : Mais
pourquoi qu'on aurait peur que la population le sache? Pourquoi qu'on aurait
peur que les élus le sachent? Pourquoi?
Le Président (M. Auger) : Une
minute.
M.
Laframboise : Une minute.
Et, bon, quand on... Vous parlez des nominations, vous là, là, vous voulez que
ce soit vraiment
indépendant, là, vous avez insisté là-dessus, là. Vous souhaitez avoir des nominations... vous
n'aimez pas le mot «permanent», là,
mais, juste terminer là-dessus, là, vous voulez vraiment... c'est la seule
façon que vous voyez pour...
Le Président (M. Auger) : 30
secondes.
M. Labeaume (Régis) : Bien, écoutez, quand on nomme un juge, on s'organise pour qu'il
soit indépendant puis qu'il ne soit jamais
influencé dans ses décisions. Bon, je ne sais pas si ça peut aller jusque-là,
parce que, bon, un juge, c'est un
juge, là, mais prenons cet exemple-là puis tentons de s'y rapprocher le plus
possible, parce que l'indépendance, l'impartialité,
c'est très important. Puis, vous savez, dépendamment des gouvernements, on peut avoir des goûts différents aussi, hein, je pense qu'on
se comprend bien.
M.
Laframboise : ...fait partie de la confiance que vous voulez avoir
dans...
M. Labeaume (Régis) :
Oui.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, M. Labeaume, M. Julien, M. Richer et
M. Legault, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de
la commission.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre aux représentants de la ville de Montréal
de prendre place.
(Suspension de la séance à
10 h 22)
(Reprise à 10 h 26)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en souhaitant la
bienvenue aux représentants de la ville de Montréal. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc, dans un premier temps, à vous présenter, et par la suite vous
pourrez commencer votre exposé.
Ville de Montréal
M.
Coderre (Denis) : M. le Président, c'est toujours un plaisir. Merci de nous accueillir. Alors, je
vous présente M. Pierre Desrochers, qui est mon président du comité
exécutif et aussi particulièrement responsable des ressources humaines
à la ville de Montréal, ainsi que Mme Diane Bouchard, qui est la
directrice des ressources humaines. Voilà.
Alors,
la ville de Montréal tient à remercier les membres de la Commission de l'aménagement du territoire de l'avoir
conviée aux consultations relatives au projet de loi n° 110
concernant le régime de négociation des conventions
collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal.
La ville de Montréal
salue l'initiative du gouvernement quant au dépôt du présent projet de loi, qui
introduit plusieurs changements importants dans le processus
de négociation collective des municipalités. C'est avec
satisfaction que nous constatons que
le gouvernement donne suite à l'engagement qu'il a pris dans
l'accord de partenariat avec les municipalités 2016‑2019.
Le projet de loi
n° 110 reconnaît les municipalités comme des gouvernements de proximité en
mettant à leur disposition un régime
spécifique de négociation de convention collective. Il s'agit pour nous d'une
avancée importante qui contribuera à
rééquilibrer le rapport de force dans les relations de travail entre les
municipalités et leurs employés. Vous
avez entendu mon collègue de Québec, vous allez entendre aussi mes collègues de
l'Union des municipalités du Québec, on parle d'une seule et même voix.
Il
est primordial pour la ville de Montréal de bien contrôler l'augmentation de
ses coûts de main-d'oeuvre afin de
restreindre la pression exercée sur le budget de fonctionnement et de préserver
sa compétitivité fiscale, c'est pourquoi nous réclamons depuis plusieurs
années de nouveaux outils pour nous aider à contrôler la croissance de nos
coûts de main-d'oeuvre en fonction de la
capacité de payer des contribuables montréalais. À cet égard, le projet de loi
comporte des gains très intéressants, notamment en ce qui concerne le
régime d'arbitrage des policiers et des pompiers.
Nous pensons
toutefois que le projet de loi doit être amélioré pour accroître nos chances
d'atteindre l'objectif recherché, à savoir
réduire la croissance des coûts de main-d'oeuvre dans le monde municipal. C'est
donc dans un esprit de collaboration
et de recherche des meilleures avenues possible que la ville de Montréal
formule aujourd'hui les recommandations qu'elle porte à l'attention du
gouvernement.
D'entrée
de jeu, nous tenons à préciser que la négociation demeure la voie privilégiée
par la ville de Montréal, je veux être très clair à ce sujet. Quelles
que soient les dispositions qui seront adoptées au final, l'objectif demeure de
favoriser une négociation saine et équilibrée entre les parties.
Pour l'essentiel, la
ville de Montréal adhère aux principes généraux énoncés à l'article 1, qui
traite de l'objet de la loi. Nous estimons
cependant que cet article devrait être plus explicite en regard des intentions
du législateur. Ainsi, cet article
devrait spécifier clairement que l'objectif de la loi vise la création d'un
régime de négociation et de règlement des
différends plus propice au respect de la capacité de payer des contribuables et
à l'atteinte d'un traitement équitable entre les salariés d'un même
employeur public.
Concernant le conseil
de règlement des différends proposé par le projet de loi, on sait que ce n'est
pas un tribunal composé de membres à temps
plein. Nous, M. le Président, ce n'est pas compliqué, ce qu'on dit, dans le
fond, là, c'est que... oui à cette
façon d'arbitrer, c'est correct pour les policiers et les pompiers, je
reviendrai pour les autres par la suite, mais ce qui est essentiel, pour nous,
c'est le caractère, moi, je dis, permanent et autonome, parce que, si ces
gens-là peuvent faire, entre-temps, d'autre chose en même temps, on ne
change rien avec le système d'arbitrage actuel.
• (10 h 30) •
Donc, pour nous, là, le processus est
essentiel. On est tout à fait d'accord avec le principe et la façon dont vous
le proposez, mais la qualification de ces arbitres-là, pour nous, c'est
essentiel. Donc, ils doivent être permanents et autonomes. Comme ça, ça enlève toute ambiguïté, tout problème de perception.
Et puis, à ce moment-là, quand on va embarquer,
par la suite, au niveau des critères, ça va nous donner les coudées beaucoup
plus franches. Et je pense que ça va
donner... En termes de justice naturelle, ça va créer une situation beaucoup
plus propice à une résultante, comme tel.
Donc,
la qualification des arbitres, pour nous, c'est extrêmement important. Donc,
cette saine indépendance va... L'avenue
de l'intégration du conseil de règlement des différends à une structure déjà
établie permettra, pour nous, une importante économie des coûts.
Concernant
les critères de décision, maintenant, le projet
de loi propose huit critères dont le
conseil de règlement des différends
doit tenir compte dans l'exercice de son mandat, d'où l'importance que ces gens-là doivent être indépendants et autonomes. Cependant,
le projet de loi n'établit aucune interrelation entre les
principes de l'article 1 et les articles de l'article 17. De plus, il ne propose aucune hiérarchisation de ces
critères, laissant le tout à la seule appréciation des membres du conseil
de règlement des différends.
On
est évidemment... Nous aussi, on sait qu'on a subi beaucoup, là, ce phénomène
d'arbitrage, là, dans le passé, puis
qu'il y a eu une... les coûts, le 40 %, ça s'explique là-dedans aussi, là.
Donc, pour nous, la question de l'équité externe, on oublie ça, je pense qu'il faut l'oublier. Ça
fait que, si vous voulez faire des comparables avec la ville de Montréal, je ne
sais pas avec lesquels, là, mais, dans le pratico-pratique... on comprend le
principe, et tout ça, mais nous, dans le pratico-pratique, on pense que
l'équité externe devrait être enlevée.
On
devrait avoir des critères obligatoires, donc les trois premiers, c'est des
critères obligatoires, puis, hormis la question
de l'équité externe, les autres critères qu'on utilise devraient, à ce
moment-là, être des critères facultatifs, pour donner quand même une latitude au travail de l'arbitrage, comme tel.
Donc, critères obligatoires et critères facultatifs.
Dans
le cas, donc, des salariés et pompiers, on est très heureux. Concernant les
autres, à ce moment-là, bien, on pense
qu'on devrait, étant donné que le Code du travail est clair, laisser tomber la
question de l'arbitrage. Si vous voulez quand même garder l'arbitrage, à ce
moment-là, bien, la position que Montréal défend, d'avoir des arbitres
autonomes et indépendants, je pense
que ça pourrait passer adéquatement, ça pourrait devenir une solution de
compromis. Mais, à l'instar de l'UMQ et de la ville de Québec, on pense
qu'on n'a pas besoin de cet arbitrage.
Pour
le mandat spécial, nous souscrivons totalement à cette question. Vous savez, on
parle beaucoup d'autonomie des
municipalités. Donc, le fait d'avoir une résolution qui passe au niveau de la
ville va envoyer un message très clair. Donc, le mandataire spécial est là pour voir à la raisonnabilité, il
n'est pas là pour refaire le tout puis réouvrir le tout. Donc, ça enverrait un message, puis on souscrit sur la
question publique. Ça envoie un équilibre, je dirais, entre... J'entendais
tantôt, votre collègue de René-Lévesque
disait : Oui, mais on ne pourra pas regarder ça, au niveau de l'Assemblée
nationale. Bien, je m'excuse, ce
n'est pas à l'Assemblée nationale à négocier ce qui se passe au niveau de nos
villes. Cependant, on n'a pas le
pouvoir de décréter. Et, si on veut passer par le mandataire spécial, bien, à
ce moment-là, vous allez avoir une résolution
entre les mains où vous allez savoir exactement ce qui se passe du côté de la
ville. Donc, on pense que c'est un équilibre entre... sur le plan
démocratique, tout en respectant l'autonomie.
Concernant
l'application de la loi, moi, je pense qu'on devrait l'appliquer seulement au
niveau du MAMOT. Pourquoi? Parce que,
ça semble peut-être paradoxal par rapport au Code du travail, et tout ça, nous,
on pense qu'étant donné que dans la
réalité de la vie, dans... le fait d'avoir le ministre qui connaît, qui a la
sensibilité puis qui sait exactement comment ça se passe du côté du monde
municipal, bien, c'est quelque chose à part, ce projet de loi là peut... on
pourra s'assurer, à ce moment-là,
qu'il relève du ministre des Affaires municipales comme tel, parce que de toute
façon, avec les processus qui vont jusqu'au mandataire spécial, déjà, je
pense que ça va de soi.
En
terminant, la ville de Montréal souhaite exprimer sa préoccupation en regard de
l'article 56 dans sa mouture actuelle.
Le premier alinéa de l'article 56 prévoit que «tout arbitrage dont
l'instruction en vertu des dispositions du Code du travail a débuté le [10 juin dernier] continue
d'être régi par les dispositions de ce code, telles qu'elles se lisent à cette
date». Bien que la notion
d'instruction soit bien connue, la ville de Montréal considère que l'intérêt
public requiert que le projet de loi
soit modifié afin d'éviter la judiciarisation des dossiers en cours. Dans cet
esprit, la ville propose que l'article 56 soit modifié afin de préciser que tout arbitrage dont un arbitre est
saisi en vertu du Code du travail se poursuit seulement si les deux parties le demandent conjointement dans
un délai donné, après la sanction de la loi. Dans le cas contraire, l'arbitre
est dessaisi du différend.
Évidemment,
si, nous autres, les policiers ont convoqué les deux parties avec la médiation,
nous, on ne l'avait pas saisi, on
était là en mode écoute, il n'y a rien qui se fait entre-temps, peut-être parce
qu'il y a des gens qui avaient eu
vent qu'un projet de loi s'en venait puis qui disent : Bon, bien, là,
cette loi-là ne s'appliquera pas à nous autres, donc, je pense que ce n'est pas correct, comme tel, là.
Et puis, pour nous, c'est important, là, en toute équité, de nous assurer,
pour l'intérêt public, que le projet de loi n° 110 puisse également
s'appliquer à la question de nos policiers.
Entre-temps, bien, je suis prêt à répondre à vos questions.
Je vous remercie de nous donner cette capacité. Je pense que
ce projet de loi, dans ce qu'on propose, c'est un peaufinement,
mais, en termes de processus, je pense que la question de la qualification des arbitres
est importante. Merci.
Le Président
(M. Auger) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons
débuter la période d'échange. M. le ministre, vous avez la parole pour
16 min 30 s.
M. Coiteux : Oui. Merci, M. le maire, pour la présentation et
d'avoir soulevé des points, là, qui sont notés pour réflexion, bien
entendu.
Il
y a un certain nombre d'enjeux que vous avez abordés sur lesquels j'aimerais peut-être
vous entendre un peu davantage.
Puis il y a un enjeu qui a également été soulevé par Québec, un petit peu différemment, mais néanmoins il y a une certaine convergence des
préoccupations par rapport au mandataire spécial.
Le
projet de loi prévoit que la demande d'une intervention d'un
mandataire spécial... Qui, je le répète, là, puis pour que ce soit clair
pour tout le monde, ce n'est pas un arbitre, là, ce n'est pas quelqu'un qui va
trancher, là. Le mandataire spécial, ce
n'est absolument pas un arbitre. Alors, il ne faut pas qu'il y ait
de confusion des genres ici, ce n'est pas
un arbitre. Le mandataire spécial, il est là dans des circonstances
exceptionnelles, qui auront été justifiées par l'une ou l'autre des parties, là, qui disent : Il y a
une impasse, les services publics sont menacés; il y a une impasse, et puis on
a tout essayé, puis on n'y arrive pas,
puis il y a un enjeu majeur, puis il faudrait que le gouvernement se penche
là-dessus. Et le gouvernement, à ce moment-là, peut nommer un mandataire
spécial.
Maintenant,
vous faites le lien entre une résolution du conseil municipal et
l'enclenchement de ce processus-là. Et si c'était la partie syndicale
qui, dans des circonstances exceptionnelles, demandait au gouvernement de
considérer la nomination d'un mandataire spécial, vous verriez ça comment, de
votre point de vue?
M. Coderre
(Denis) : ...je n'ai pas de problème. Sauf que ce qui est important,
dans ce sens-là, je pense, et en toute
démocratie, si on veut respecter le principe de l'autonomie municipale... Parce
que, tu sais, on se bat pour un statut de
métropole, qu'on va avoir, vous avez déposé un statut de capitale nationale, il
va y avoir l'application du livre blanc ou du livre bleu dans une loi-cadre au niveau des municipalités. Donc,
comment on peut trouver une façon équilibrée de se dire... Parce qu'on comprend qu'on ne peut pas décréter. Même vous,
vous ne décrétez pas. Quand c'est une loi spéciale, c'est un pouvoir législatif, vous ne décrétez pas
les conditions de travail. Donc, dans ce sens-là, comment on peut envoyer
un message qu'on prend nos responsabilités
puis ça relève de nous? Bien, cette résolution-là, ça veut dire que, de façon
large, toute l'assemblée, notre conseil va
pouvoir se pencher sur cette question-là. Que le syndicat de toute façon fasse
sa demande, nous, on va passer notre
résolution quand même, et puis, à ce moment-là, tout va être public. Donc,
c'est pour ça que c'est important qu'il y ait le principe de
transparence, que ce soit public à ce niveau-là.
Moi,
je n'ai pas de problème, là, je ne dis pas que j'enlève une capacité aux
syndicats de le faire, on privilégie la négociation, mais, dans cet
équilibre de rapport de force, puis tout en étant cohérents avec notre façon de
voir sur les principes d'autonomie
municipale dont on fait la promotion, je pense qu'à ce moment-là ce
peaufinement-là pourrait nous aider.
M. Coiteux :
Vous l'avez mentionné dans votre présentation, mais j'aimerais en entendre un
petit peu plus là-dessus. Il y a d'autres
présentations qui vont être faites aujourd'hui, je pense que l'opposition
officielle aussi se questionnait sur
le rôle du ministre des Affaires municipales, dans le cadre de ce projet de loi
là, par rapport au ministre ou à la
ministre du Travail, et vous, vous avez été très clair, tout à l'heure, il faut
que ce soit le ministre des Affaires municipales qui soit responsable de l'application de ce projet de loi. Pouvez-vous...
à la lueur de l'expérience vécue par Montréal?
M. Coderre
(Denis) : C'est parce que, dans la réalité de la vie, là, quand ça
commence à jouer au tennis entre deux
ministres, c'est peut-être le fun à regarder, mais je ne suis pas sûr qu'on va
régler quoi que ce soit. Puis ça n'enlève pas la bonne foi puis les qualités des ministres ou des ministères. Mais
je pense que, le fait que vous avez un processus qui amène jusqu'au mandataire spécial, et par la suite
vous êtes tributaire de ça, c'est vous qui êtes en charge de ce processus-là,
en toute cohérence...
Vous
savez, c'est important, là, il faut qu'il y ait justice et apparence de
justice. On peut être en désaccord avec les syndicats sur les façons de voir, on peut se dire des gros mots de
temps en temps, mais le but premier, c'est la capacité de payer des gens puis de respecter les gens qu'on
représente. Donc, si le processus vient alourdir et enlève toute cette notion
de ce qu'on défend avant, bien, je pense qu'il y a un problème.
Donc, c'est vraiment
une question pratico-pratique. En termes réels, là, de «realpolitik», là, je
pense qu'à ce moment-là ça rend la loi
encore plus forte, moins questionnable, et puis ça vient renforcer le rôle,
comme il se doit, du ministre des
Affaires municipales. On parle de dossiers municipaux, là, ce n'est pas juste
une question de relations de travail.
Parce
que, quand vous ajoutez le processus du mandataire spécial, là, c'est une
nouveauté, là. Donc, en ce sens-là, il faut qu'il y ait quand même un
lien très précis en ce sens.
• (10 h 40) •
M. Coiteux :
Un autre enjeu... Et puis le maire de Québec, tout à l'heure, dans la
présentation, aussi a mentionné cette
question-là, l'importance de l'indépendance des membres qui composent le
conseil des règlements des différends. Puis
vous avez évoqué, vous, M. le maire, la notion de permanence, la notion
d'incapacité de faire autre chose que cela pendant un certain mandat. Je
voudrais juste vous entendre sur la chose suivante. Supposons...
Puis
c'est certainement le souhait, là, que dans la majorité des cas les choses se
règlent par négociation. Et d'ailleurs le
projet de loi prévoit un nombre minimal de jours de négociation, oui, bien
entendu, parce qu'il faut quand même que les gens démontrent leur bonne foi, on ne peut pas aller à deux, trois
séances de négociation sur une semaine puis demander un arbitrage, là, même avec le nouveau régime.
Donc, il faut travailler fort en négociation, parce que ce qu'on veut, c'est
qu'il y ait des règlements négociés, mais on a la médiation obligatoire.
Bon,
notre espoir, bien entendu, c'est que, le nouveau cadre, l'équilibre entre les
grands principes, démocratie municipale, au service de l'ensemble des
citoyens — donc
ce n'est pas une entreprise privée qui négocie avec un syndicat, c'est une entité publique, démocratiquement élue, redevable
devant ses citoyens — notre
espoir, c'est qu'il n'y aura pas tant
que ça besoin d'utiliser le conseil de règlement des différends, hein? Si tout
le monde s'oriente, là, vers une négociation raisonnable, sachant qu'il y a des principes d'équilibre, peut-être
qu'il y aura moins la nécessité de recourir à des mécanismes comme
celui-là.
Supposons,
peut-être pas, mais supposons que c'était ça qui arrivait et qu'on a un conseil
des règlements des différends qui n'a que
quelques cas à régler à l'intérieur d'une période de cinq ans, est-ce qu'ils
peuvent ne vivre que de ça? Est-ce que vous voyez un enjeu ici ou...
M. Coderre
(Denis) : Si vous me demandez ce qu'ils pourraient faire en plus, on
pourrait mettre les griefs là-dedans,
ça pourrait être intéressant, ils ne manqueront pas d'ouvrage, inquiétez-vous
pas, de ce côté-là. Mais je pense que,
si on veut être conséquent, si c'est exactement comme les arbitres actuels,
bien, je m'excuse, ça ne change rien. Parce que ça nous coûte 52 % de la masse salariale, il y a eu des coûts
de 40 %, là. Ça explique ça, là. Alors, moi, je pense qu'il faut aussi... Puis même vous allez en avoir du
côté syndical qui ne seront pas en accord avec la façon dont les arbitres
fonctionnent. Donc, pour être sûr, là, au lieu d'embarquer sur le processus,
qu'on embarque sur les critères et sur le résultat,
à ce moment-là... Puis, écoutez, moi, en 30 ans de vie politique, je peux
vous dire qu'il y a des moments où on a besoin presque du quasi judiciaire pour assurer que de part et d'autre
on ne questionne pas le processus, mais on va vraiment vers les résultats. À ce moment-là, la
qualification de ces arbitres-là est essentielle, à mon avis. Et, par
expérience, et puis la façon dont je
vois les choses, si on veut que le processus fonctionne et qu'on ne s'empêtre
pas... Peut-être les avocats vont vouloir questionner la constitutionnalité
puis jouer là-dedans, mais je pense que le but — puis vous le faites depuis le début,
là — le
but d'un projet de loi puis le rôle d'une commission parlementaire, c'est
justement de travailler en matière de
prévention pour assurer, justement, qu'elle soit la plus complète possible et
la plus solide possible. Alors, moi, je pense qu'on réglerait énormément
de problèmes au niveau du processus.
Et
en plus, comme je vous ai dit, puis ça n'a rien à voir avec la loi, mais elle
peut être utile par la suite pour d'autres secteurs, exemple les griefs.
Ça, vous ne manquerez pas d'ouvrage là-dedans.
Mais
je pense qu'on ne veut pas avoir un système qui va nous dire : Bon, bien,
c'est sûr qu'on va aller là, mais tant
qu'il y a de l'homme il y a de l'hommerie, hein? La nature humaine étant ce
qu'elle est, bien, c'est sûr que les gens vont regarder ça puis ils vont
dire : C'est quoi, l'intérêt? puis : Comment je peux aller en
chercher plus?
On fait beaucoup
d'arbitrage, du côté de Montréal, comme vous le savez, M. le ministre. Alors,
on recherche évidemment des résultats négociés, mais je pense que ça, ça
pourrait répondre à beaucoup de questions.
M. Coiteux :
Mais le projet de loi, tel qu'il est proposé, quand même oblige à ce que ces
nominations-là consacrent des expertises
particulières, ce qui n'est pas le cas actuellement dans les mécanismes
d'arbitrage que nous avons, là.
M. Coderre
(Denis) : Ce que je vous dis, en fait, c'est qu'on est contents de la
façon dont vous le sortez, mais ce qu'on
dit en plus... Je pense que l'élément qui manque, là, c'est au niveau, là, de
la permanence ou de l'autonomie, là. Alors,
moi, je pense qu'on a fait des pas de géant au niveau des policiers et des
pompiers. Pour l'autre côté... C'est pour ça que je vous dis : Si on embarque, dans les autres syndicats, sur
l'arbitrage... On ne veut pas non plus que tout se fasse par arbitrage, là, de dire : On recule, à ce
moment-là, quand on parle des autres syndicats, on comprend que... au niveau
des services essentiels, et tout ça,
mais moi, je pense qu'à ce moment-là, si, dans les policiers et pompiers, vous
qualifiez les arbitres comme je vous
le propose, on parle du mandataire spécial de l'autre côté, vous avez de toute
façon le Code du travail qui prévoit
l'arbitrage, de toute façon, bien, si, au bout de la ligne, vous vous entendez tous pour dire que ça nous le
prend pareil, ce conseil des différends, pour les autres syndicats, moi, je
vous dis que ça pourrait passer la rampe puis ça devient une solution de compromis, si à ce moment-là... En
renforçant le processus sur la qualification des arbitres, ça va
vous donner une chance supplémentaire.
M. Coiteux : Je voudrais maintenant vous entendre sur
les critères qui doivent guider la décision du conseil de règlement
des différends et qui doivent être pris en compte par un mandataire spécial qui
ferait des recommandations au gouvernement. Il y a quand
même un changement par rapport aux critères qui sont appliqués à l'heure actuelle, dans les
mécanismes actuels. Vous avez évoqué à la fois comme une espèce de jugement
partagé. Il y a une partie de ça que ça va,
il y a une partie de ça que vous questionnez un peu. Est-ce que vous pouvez
élaborer un petit peu plus sur les critères?
M. Coderre
(Denis) : Bien, écoutez,
moi, je pense qu'il y
a deux éléments. Le premier, c'est la
notion obligatoire versus
facultative. Si on met tout ça là-dedans, c'est sûr que nous, la question
de l'équité externe, on pense qu'on devrait l'enlever, mais, si on s'en tient, par exemple, aux critères
obligatoires, à ce moment-là, on dit que... La situation financière et fiscale de la municipalité, tout à fait. Les conditions de travail applicables aux salariés concernés, tout à fait. Les conditions de travail
applicables aux autres salariés d'une municipalité, ça va. Au
niveau facultatif, si on dit
facultatif, c'est-à-dire qu'on
peut s'en inspirer, mais il ne faut pas que ce soit obligatoire. Les exigences
relatives à la saine gestion des finances
publiques, la question de la situation économique locale puis la situation
de la perspective salariale et économique du Québec, ça, ça devient un élément d'inspiration. Mais, étant donné que vous avez... Surtout pour Montréal, en plus, on parle ici de la métropole, et puis c'est quand même unique par rapport à son statut, bien, on pense qu'à
ce moment-là... Mais on comprend qu'on ne doit pas tout enlever. C'est sûr
que, dans le meilleur des mondes... On dit que, si on n'avait que des
critères obligatoires, ça va, mais on veut donner quand même une latitude aussi
aux experts, au conseil de différends, comme
tel, alors c'est pour ça qu'on dit : Hormis l'équité externe, les autres
critères pourront être facultatifs, à
ce moment-là.
Le Président
(M. Auger) : M. le ministre.
M. Coiteux :
M. le député de Vimont voulait...
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont.
M. Rousselle :
Combien de temps?
Le Président (M. Auger) :
Quatre minutes.
M. Rousselle : Parfait,
merci. M. Coderre, M. Desrochers, Mme Bouchard, merci d'être
ici.
Écoutez, je
vais poser la même question que j'ai posée au maire de Québec, parce qu'en
entrée de jeu vous parlez d'évolution
de la rémunération globale, et puis il y a certaines centrales syndicales...
Puis j'en profite parce que je sais que tantôt on va les entendre, puis
ils vont sûrement arriver avec ces statistiques-là...
M. Coderre (Denis) : ...
M.
Rousselle : Non, mais, ce 40 % là, il y en a qui doutent,
ce 40 % là, de la différence, parce que, là, il y en a qui vont parler : Oui, mais il n'y a pas une
différence si grande que ça... en tout cas, il n'y en a pas une entre les
policiers de Montréal ou de Laval, peu importe. Donc, c'est là-dessus
que je voudrais vous entendre.
• (10 h 50) •
M. Coderre
(Denis) : Bien, moi, je suis factuel, là, on regarde l'Institut de
statistique, je suis factuel. Alors, on peut être en accord ou en
désaccord, là, les chiffres sont là.
Deuxièmement,
moi, là, je ne veux pas me retrouver où vous avez eu une loi sur les régimes de
retraite qui a un impact important,
auquel on souscrit totalement, et de se dire que par la porte d'à côté, par la
façon de négocier, avec des enjeux, on va revenir exactement à la même
situation.
Nous, là, on
est passés d'une masse salariale de 52 % à 46 %, on a coupé dans les
dépenses. La capacité de payer des
gens, ce n'est pas n'importe quoi, là. Moi, j'ai le choix. Si vous voulez qu'on
finance les régimes, puis ce à quoi on s'entend,
parce qu'on n'a pas le choix, en quelque part, bien, on a deux choix : ou
bien on coupe, puis là ils vont dire qu'on coupe dans les services, puis
je ne veux pas ça, ou bien on augmente les taxes. C'est ça, la capacité de
payer, là.
Donc, on se
dit qu'à la lumière des chiffres, à la lumière des statistiques... On pense que
ce qu'on a de besoin, suite à la loi
des régimes de retraite, bien, c'est justement cette façon de négocier les
différends, et puis à ce moment-là, bien,
on se base sur des chiffres. Je pense que les chiffres sont clairs par
eux-mêmes, là. Vous avez juste à regarder nos budgets puis les comparables; bien, ça nous coûte cher. On est fiers de
nos policiers, de nos pompiers, de nos employés, on est très fiers, mais à un moment donné on le sait, comment ça
fonctionne. Puis M. Labeaume l'a dit, Régis l'a dit tantôt, là, quand on compare, là, le policier de
Châteauguay ou de Saguenay par rapport à Montréal, ils vont regarder comment
ils ont pu avoir. Puis, si l'arbitre
dit : Bon, bien, regarde, c'est ça, les échelles, puis ils vont appliquer
cette échelle-là, bien, c'est sûr
qu'au bout du compte c'est le payeur de taxes, c'est le contribuable qui va
payer. Donc, nécessairement, on doit trouver
une façon correcte, et c'est pour ça qu'on salue ce projet de loi là, parce que
vous avez déjà des éléments qui nous permettent
d'encadrer comme il se doit. On vous
a dit de parler d'intérêt public, de parler au niveau des comparables,
de se donner des critères. Puis je pense
qu'il faut les hiérarchiser, dans le sens que... au niveau obligatoire puis au niveau facultatif. Puis
à ce moment-là je pense qu'on va être en mesure d'équilibrer ce rapport.
Le Président (M. Auger) : Oui,
M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Toujours dans le même sujet... Vous, là,
d'ailleurs, vous devez le voir, à ce moment-là, dans vos budgets, vous devez le voir, ce déséquilibre-là, à
ce moment-là, avec les employés provinciaux, sûrement. Parce que, là, les gens
qui nous écoutent, tu sais, on parle de chiffres ou quoi que ce soit, mais là
ils vont juste voir... Ils veulent savoir, eux autres, la différence, exemple, entre un travailleur manuel de la
ville de Montréal et puis celui du gouvernement du Québec.
M. Coderre
(Denis) : Quand on le prend en général, là, on parle environ de
40 %. Vous avez eu des études, là, Robert Gagné au niveau du HEC,
vous avez l'Institut de la statistique du Québec, écoutez, les chiffres
corroborent en ce sens-là. Alors, c'est pour
ça que nous, bon, bien, c'est sûr que, si on veut comparer des comparables, on
se dit qu'un employé... Tu sais, on
ne peut pas payer à moins d'augmenter les taxes, là. Alors, on se dit... nous,
on pense que, si on veut faire les
choses adéquatement tout en offrant des services de qualité, bien, il faut, à
ce moment-là, nous assurer qu'on puisse avoir ce rééquilibre-là.
Peut-être, Mme Bouchard... Avez-vous des
choses à rajouter?
Le Président (M. Auger) :
Mme Bouchard.
Mme Bouchard
(Diane) : Oui. Bien là, on
parle de 40 %; ça, c'est par rapport... c'est une moyenne des
municipalités. Montréal, les études
du HEC, ce que ça nous démontre, c'est que Montréal, on est 30 % supérieur
que la moyenne des municipalités.
Donc, quand on dit 40 %, là, c'est conservateur, on ne risque pas trop de
se tromper, là, on est 30 %, Montréal, au-dessus de la moyenne des
municipalités. Ça fait que je pense que le 40 % est assez conservateur.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant
poursuivre avec l'opposition officielle pour 10 minutes. M. le député de
René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci beaucoup, M.
le Président. Bonjour, M. le maire.
Je voudrais d'abord vous amener à la
page 7 de votre mémoire. Vous y allez d'une recommandation, une première
recommandation, de l'article 1, et vous voulez qu'il soit modifié pour
«prévoir plus explicitement que les objectifs de
la loi [soient] de prioriser la capacité de payer des contribuables et la
recherche de l'équité entre les salariés d'un même employeur». J'ai posé
la question tantôt au maire de Québec et j'aimerais vous entendre. Vous, M. le
maire, de façon explicite, comment vous
interprétez cette capacité de payer là? Je vous ai entendu tout à l'heure, la
masse salariale fait partie d'une
colonne de dépenses à la ville de Montréal, il y a d'autres colonnes de
dépenses, les différents projets que la
ville peut mener. Quand on voit le rapport des HEC, on voit que les dépenses de
la ville de Montréal ont baissé de 3,4 %. Donc, comment vous faites ce juste équilibre, comment vous faites ce
juste équilibre pour dire : Toute augmentation de salaire des employés ou de la masse salariale
égale une augmentation de taxes, et en contrepartie toute baisse des transferts
du gouvernement vers les municipalités
n'amène pas nécessairement une augmentation de taxes? Ça fait que j'aimerais
que vous m'expliquiez, sur la capacité de payer, sur quel raisonnement vous
arrivez à...
M. Coderre
(Denis) : Bien, le raisonnement, c'est que ça nous prend tant de
revenus puis ça nous prend tant... puis ça coûte tant. Je veux dire, c'est sûr
qu'on regarde de façon globale. Si vous avez... En commençant, moi, quand
je suis arrivé, j'ai dit : On n'augmentera pas plus que le taux de
l'inflation. Donc, il y a la notion du taux d'inflation. Deuxièmement, on avait un taux de masse... le
taux, juste la masse salariale, c'était 52 %. En plus, on avait négligé,
de la façon dont on investissait dans
nos infrastructures. On a fait un ménage, on a changé notre culture de
gouvernance à l'intérieur.
Puis,
au bout de la ligne, notre rôle, on n'est pas une business, là, notre rôle,
c'est de donner un service tout en nous
assurant qu'on ait un sain climat de travail. Bon, il y a eu ce qui est arrivé,
il y a eu le saccage, il y a eu toutes sortes de choses. C'est pour ça qu'on... On est en 2016, on ne veut plus
revivre dans le passé, là. Quand on vous parlait de couteau sur la gorge, tantôt, là, puis on parlait des gros
bras, puis tout ça, là, les médias ont plein de films, ils vont vous en
montrer. Moi, je regarde vers
l'avenir, alors je me dis : Qu'est-ce qu'on est capables de faire vers
l'avenir pour trouver cet équilibre-là?
Donc,
la capacité de payer, c'est quoi? Bien c'est d'être capables de remplir nos
engagements sans avoir à augmenter le
fardeau de nos citoyens. Alors, on a enlevé les silos, on a réorganisé notre
façon de faire. Il y a eu le projet de
loi que... la loi sur les régimes de retraite. Il y a maintenant cette loi sur
les différends, la question des conditions de travail. Alors, tout ça... Le statut de métropole qui s'en vient
également. Donc, quand vous prenez tout ça ensemble, ça va nous
permettre d'avoir... respecter la capacité de payer des gens. Pourquoi? Parce
que vous savez qu'entre 2002 puis aujourd'hui,
là, juste en termes de régimes de retraite, ça a coûté 500 millions de
dollars de plus, au moins. Et moi, là, ce que je veux, c'est de m'assurer qu'il
puisse y avoir un avenir tant pour nos employés que dans la façon de livrer
les services. Bien, pour ça, bien, il faut
être en mesure de gérer nos finances puis d'avoir le contrôle de nos dépenses,
on a à poser des gestes. On les a
faits nous-mêmes, vous l'avez dit avec raison, c'était la première fois en 30
ans qu'on coupait les dépenses. Ça fait qu'on l'a fait, là, je veux dire,
M. Desrochers a fait un travail colossal avec notre équipe. Tous les
employés, M. Marcoux, notre directeur général, et les autres, on a travaillé ensemble pour arriver à ça. On peut être
en accord ou en désaccord sur certains points, mais la finalité, c'est qu'il y a
une personne qui décide, c'est le citoyen, puis moi, je les représente.
S'ils ne sont pas contents, il y a une élection l'année prochaine.
M. Ouellet : Donc, si on prend l'essence même de la loi — merci, M. le Président — et que... on prend pour acquis que le mandataire qui aura à évaluer, suite aux
recommandations, pour recommander au ministre les conditions de travail aura
à faire une évaluation aussi de cette capacité de payer là, donc le
travail que l'administration publique aura fait, dans le cas de Montréal, pour dire : Écoutez, avec le travail qui a
été fait, on évalue que la capacité de payer des citoyens se situe entre
telle et telle zone.
M. Coderre
(Denis) : En fait, M. Ouellet, le rôle du mandataire spécial,
c'est de voir à la raisonnabilité des demandes.
Ce n'est pas à l'Assemblée nationale à négocier nos conventions collectives puis à
décider ce qui est bon, ce qui n'est
pas bon, puis que, là, à ce moment-là, on transporte ce qui s'est passé, mettons, à Montréal,
puis là... Vous allez avoir plein de
visites, ça va être le fun, mais il y a d'autres façons de se
faire des amis. Alors, nous, on se dit, à ce moment-là, dans la
mesure où... Puis on souhaite que ça
ne se rende pas jusqu'au ministre,
parce que, dans le fond, c'est ça, là, on se dit : Si vous voulez, là, que ça se rende jusqu'au
ministre, bien, ce n'est pas tout le monde qui va être content non plus. Mais,
au nom de l'autonomie municipale, on se dit, on va passer la résolution,
ça va être public. Vous avez le mandataire spécial qui soit par la demande du syndicat ou de la ville... bon, bien
là vous regardez la raisonnabilité de ça, puis le ministre,
par la suite, va faire son projet de loi en conséquence.
Pour nous, je pense que ça vient avec la notion, je dirais, de la démocratie,
là, de la représentativité, de ce qu'on est, là, de l'autonomie municipale. Je
pense qu'avec ça, là, on est en business.
Le Président
(M. Auger) : Cinq minutes.
M. Ouellet : Encore sur le mandataire spécial, vous disiez tout à l'heure, M. le maire... vous parliez de la raisonnabilité, donc on va évaluer la
raisonnabilité de la demande. Et je pense que, plus loin dans le mémoire, vous
y allez jusque... qu'on puisse, le
conseil de ville puisse... je ne veux pas dire «influencer», mais donner son
avis sur... ou l'appréciation
de la teneur des négociations pour arriver à un règlement.
Est-ce que,
d'une part, vous acceptez à ce que la partie syndicale fasse
aussi ces mêmes représentations là? Parce
que, un, d'une part, ils sont...
M. Coderre
(Denis) : Tout à fait.
M. Ouellet : Oui? O.K.
M. Coderre
(Denis) : Oui, oui, moi, je n'ai pas de trouble avec ça. Mais ce que
je ne veux pas, c'est que le mandataire
spécial soit un arbitre. Puis le ministre l'a dit avec éloquence tantôt, ce n'est pas un
arbitre. Ça, c'est la première étape. Là, on se dit... Nous, on pense qu'on ne devrait pas avoir de
l'arbitrage, sauf pour les policiers puis les pompiers, pour des raisons évidentes, mais, si l'arbitrage
demeure quand même, bien là je vous ai donné une proposition qu'à ce moment-là
la qualification de ces arbitres-là est importante. Je pense qu'il y a
un équilibre dans tout ce qu'on a dit, là. Mais je suis tout à fait solidaire tant avec l'Union des municipalités du Québec, dont est mon ami Régis, dont la ville de Québec fait partie également, là. Je pense que la
notion de démocratie, la notion de transparence, que ce soit public... je
pense que ça envoie aussi un message, là, et
au mandataire, et au ministre, puis à ceux qui éventuellement... s'il y a un projet de loi rattaché à ça.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Dernière question, pour ma part : Dans ce
cas-là, est-ce que le mandataire peut effectivement modifier ce qui
aurait été présenté par la municipalité ou par le syndicat en question?
M. Coderre
(Denis) : Je pense que non, parce que ce n'est pas un arbitre. Il est
là... Ce n'est pas le rôle du mandataire
spécial de changer, c'est de voir à la raisonnabilité des demandes, et puis à
ce moment-là le ministre va trancher. Puis de toute façon le Code du
travail est clair, ils pourront toujours retourner en arbitrage.
M. Ouellet : ...à dire, oui ou
non, c'est raisonnable ou pas?
M. Coderre (Denis) : C'est
tout.
M. Ouellet : O.K. J'aimerais
passer la parole à mon collègue de Richelieu.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Richelieu.
M. Rochon : Merci, M. le
Président. M. le maire, bonjour.
Mon collègue
de René-Lévesque notait dans ses remarques préliminaires
l'absence de la ministre du Travail pour l'étude
de ce projet de loi qui pourtant modifie le Code du travail et dont elle est la gardienne. Ça doit plutôt vous réjouir, parce que vous
estimez... c'est écrit noir sur blanc dans votre mémoire : «La ville [...]
estime que, pour des raisons de simplicité
et d'efficacité, seul le ministre des
Affaires municipales devrait être
responsable de l'application des dispositions de la loi et des relations de travail
pour le monde municipal.»
Vous avez quand même
confié verbalement, tout à l'heure, que ça pouvait sembler plutôt paradoxal. Ne
l'est-ce pas pas mal plus que plutôt, paradoxal, M. le maire, genre particulièrement
paradoxal? Le gouvernement du Québec a un ministère
du Travail que vous ne voudriez plus
voir se mêler des relations de
travail dans le monde municipal, ce
qui a paru de la musique aux oreilles du ministre.
• (11 heures) •
M. Coderre
(Denis) : Juste au ministre.
Quand j'ai dit : Ça paraît paradoxal, bien, je vous expliquais que ça ne
l'était pas, justement, parce que,
si en plus il a à trancher sur le mandataire spécial, donc, il a un
rôle spécifique à jouer dans ce
dossier-là. Le Code du travail existe pareil de toute façon, là, mais, si vous voulez avoir un projet de loi qui va régler les différends... Et
pourquoi qu'on fait un projet de loi sur le municipal, d'abord?
Alors, on se
dit que, tant qu'à être cohérent... La notion de cohérence, sur le plan législatif,
c'est important. Et le rôle d'une commission parlementaire, respectueusement,
c'est de s'assurer justement qu'on regarde, vous faites l'avocat du diable avec succès, et à ce moment-là, bien, au
bout de la ligne, vous décidez article par article ce qui fonctionne, ce
qui ne fonctionne pas, puis on vient
peaufiner en conséquence. Mais il n'y a pas... Dans une loi, il y a l'esprit de
la loi, donc l'interprétation de la
loi, et il y a la réalité de la vie aussi. Alors, à ce moment-là, on se dit
que, dans la mesure où vous allez
avoir à travailler et à saisir ce qui se passe du côté des municipalités, puis
que le ministre a déjà un rôle à jouer, au lieu d'avoir deux ministres
qui se garrochent la balle... qui peut être intéressant, là, pendant les
Olympiques, là...
Le Président (M. Auger) :
30 secondes.
M. Coderre
(Denis) : ...mais je pense que ce qui est clair pour moi, c'est, à ce
moment-là, que ça dépende seulement du ministre des Affaires
municipales.
Le Président (M. Auger) :
Dernière question.
Une voix : Combien de temps...
Le Président (M. Auger) :
30 secondes.
M. Rochon : 30 secondes. Les villes parlent beaucoup
d'un rapport de force déséquilibré, applaudissent ce projet de loi, parlent d'un nouvel équilibre. J'aimerais
que vous qualifiiez... vous entendre qualifier ce nouvel équilibre. Est-ce
que vous ne vous en réjouissez pas parce qu'il est...
Une voix : ...nécessaire.
Le Président (M. Auger) : Il
n'en reste plus.
M. Coderre (Denis) : Merci.
Le
Président (M. Auger) : Donc, nous allons poursuivre avec la
deuxième opposition pour 6 min 30 s. M. le député de
Blainville et porte-parole.
M. Laframboise : Oui, merci beaucoup, M. le Président. M. le
maire, M. Desrochers, Mme Bouchard, merci d'être présents.
Ma première
question... Puis je pense que ça fait le portrait d'un peu tout le projet de
loi, quand vous dites : L'équité externe,
il faut enlever ça comme critère. Moi, je voudrais que vous me donniez, parce
que... l'équité externe, l'importance que
ça peut avoir, l'impact que ça a eu sur la ville de Montréal, que des villes
paient des fonctionnaires qui font le même travail que vous dans d'autres municipalités... et parfois un peu plus
cher. Quel impact ça a sur vos propres négociations à la prochaine
négociation, là?
M. Coderre
(Denis) : Je vais justifier la présence du président du comité
exécutif, je vais le faire parler un peu. Il va justifier son voyage.
Le Président (M. Auger) :
M. Desrochers.
M. Desrochers (Pierre) : Oui, merci
beaucoup. Merci beaucoup pour la question.
En fait, une
ville comme la ville de Montréal doit quand même demeurer attractive. C'est
certain qu'on a toujours un objectif, et le maire l'a dit, de vouloir assurer
qu'on règle nos conventions collectives par la négociation, et on doit
en même temps être en mesure de recruter des
employés de qualité, qui remplissent... et qui nous permettent de les attirer.
Ça, ce sera toujours un objectif qu'on aura,
indépendamment de n'importe quel critère qui sera fait. C'est une réalité de la
vie, là, si on veut avoir du monde.
D'un autre côté, on sait que, dans les
mécanismes qui sont mis en place, en regardant cette question d'équité externe, elle a fait qu'au cours du temps, et ce
qui est tout à fait normal, c'est d'aller chercher toujours la petite chose qui
est la meilleure des choses, et qui a
créé une spirale inflationniste. On peut parler de la ville de Montréal, mais
je suis certain que vous avez
32 autres exemples, qu'on parle du baseball, du sport et tout ça, là, où
cette recherche d'arbitrage, d'aller chercher
toujours l'équité, là, bien, les gens deviennent très spécialistes, et
aujourd'hui, bien, ça a créé des écarts, ça a créé les écarts auxquels on fait
face aujourd'hui. Et il y aura toujours, pour différentes raisons... et je ne
peux pas comprendre les raisons des autres, on va parler des nôtres, là,
qui vont faire que quelqu'un va donner quelque chose que peut-être quelqu'un d'autre ne donnerait pas et ne peut pas
donner, mais soudainement il se retrouve dans une position à être obligé de donner à cause de quelqu'un d'autre, et là ça
enlève à notre propre pouvoir décisionnel, à la ville de pouvoir décider
pour elle-même en fonction de certains
critères. Et l'expérience, très clair, démontre par les chiffres, et ce n'est
pas nous autres, là, qui le fait, par les chiffres que cet écart-là ne
fait que s'agrandir.
Donc, il faut
éliminer ça. On a proposé de prioriser six autres critères, il y en a qui sont
prioritaires, c'est clair, il y en a
trois autres qui sont facultatifs et dont on devra tenir compte, mais on croit
que l'équité externe nous a amenés où on en est, et on ne peut plus se
fier que sur ça, on ne peut pas.
Ça n'empêchera
pas la ville de demeurer une ville compétitive, attractive. Ça, on a une
obligation de faire ça. On veut que
les gens travaillent à la ville de Montréal, on veut des gens de qualité à la
ville de Montréal, mais il y a d'autres moyens d'y arriver, puis ça,
bien, on a une responsabilité vis-à-vis ça.
M. Coderre (Denis) :
Mme Bouchard va vous donner quelques exemples, d'ailleurs.
Mme Bouchard
(Diane) : Oui, j'avais un exemple concret. Quand vous
demandez comment ça se manifeste, chez
les pompiers, là, si on prend de 1997 à 2014, les policiers ont eu 16 % de plus que les autres groupes en
augmentations, en partie parce qu'on
est allés à quelques reprises en arbitrage. Ça fait que ça, c'est un effet,
c'est un exemple concret du fait
qu'on ait laissé juger un arbitre avec des critères externes, qui comparent
toujours la ville de Montréal à d'autres villes qui paient plus.
Souvent, les...
Montréal, il n'y a pas de comparatif, là, on l'a dit. Québec l'a illustré tout
à l'heure, il n'y a pas de ville comparable.
Les arbitres changent... Dépendamment, dans un arbitrage, il y a des arbitres
qui vont prendre les villes avec des
populations de 100 000 habitants, d'autres arbitres qui vont prendre
des villes avec 200 000 habitants, donc ce n'est pas des villes
qui sont nécessairement comparables. Nos policiers sont groupe 5. Dans
d'autres villes, c'est des groupes 3, au niveau, là, des responsabilités.
Donc, c'est difficile de trouver des comparables.
Il y a
toujours des villes, pour différentes raisons... Puis c'est ça qui est
dangereux avec l'équité externe, hein, on connaît les salaires, mais on
ne connaît pas l'historique des négociations, on ne connaît pas le contexte,
les enjeux particuliers. On ne sait pas,
pour avoir tel salaire, quel compromis ils ont fait, ils ont peut-être obtenu
de la sous-traitance, ils ont
peut-être obtenu autre chose. Ça, on ne le connaît pas, puis ce n'est pas pris
en considération. Donc, c'est dangereux quand on n'a que des chiffres, quand on fait de l'équité externe. On le
voit avec les policiers, qu'est-ce que ça a donné, là, c'est des faits
concrets.
M. Laframboise : M. le maire, pour arriver à la confiance, dans le
projet de loi, vous, ce que vous nous dites, il faudrait que toutes les
nominations relèvent du ministère des Affaires municipales, tu sais, par
principe, d'abord, premièrement, par...
M. Coderre
(Denis) : Bien, c'est-à-dire, le processus par le ministre. Mais, si
vous vous entendez... Dans le fond, moi, ce qui m'importe, c'est la
qualification des arbitres et la définition, là. Donc, c'est des gens qui sont
autonomes et indépendants. S'ils
peuvent faire des choses en même temps... On souhaite évidemment qu'on ne se
rende pas souvent là, mais il y a une réalité, là, quand même. Alors,
moi, je me dis que, tant qu'à l'avoir, un peu comme un tribunal quasi judiciaire ce soit vraiment une entité qui ne
portera pas à perception, d'un côté comme de l'autre, hein, vous allez avoir
des syndicats qui vont vous dire, là, qu'ils
ont été désavantagés par l'arbitrage aussi, là. Mais, nous, ce qu'on pense, à
ce moment-là, cet équilibre recherché, on va le trouver aussi dans la
pertinence de la façon que le processus va se faire.
Le Président
(M. Auger) : Une minute, M. le député.
M. Laframboise : ...le ministre des Affaires municipales responsable, compte tenu que ça
a un impact sur les taxes des contribuables du Québec, ça mérite un
processus qui peut...
M. Coderre
(Denis) : Ça va jusqu'au mandataire aussi par la suite. Donc, oui,
moi, je pense que ça devrait relever du ministre.
Le
Président (M. Auger) : M. le député de Blainville. Ça va? Bien, M. Coderre, Mme Bouchard et
M. Desrochers, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux
de la commission.
Je vais suspendre
quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 8)
(Reprise à 11 h 13)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en souhaitant la
bienvenue aux représentants de la Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc, dans
un premier temps, à vous présenter, et par la suite vous pourrez commencer
votre présentation.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Boyer (Daniel) : Alors, Daniel Boyer. Je suis le président de la Fédération des travailleurs et travailleuses
du Québec. Je suis accompagné de Daniel Pépin, président du Syndicat des pompiers
et pompières du Québec, affilié à la FTQ; Denis Bolduc, président du SCFP-Québec,
du Syndicat canadien de la fonction publique, affilié aussi à la FTQ; Kateri Lefebvre, directrice du SEPB-Québec,
également affilié à la FTQ; et Alexandre Leduc, du Service de la recherche
de la FTQ. Merci, M. le Président. Merci, M.
le ministre. Merci aux membres de la commission de permettre à la FTQ de
vous faire quelques observations, quelques critiques concernant le projet de
loi n° 110.
Tout
d'abord, la FTQ représente bon nombre... plusieurs milliers de membres dans
toutes les régions du Québec, que ce
soient des pompiers, des cols bleus, des cols blancs, des chauffeurs, du
personnel administratif, des architectes, des préposés en entretien de société de transport, etc. Donc, je vous ai
nommé les syndicats affiliés qui représentent des membres.
Écoutez,
d'entrée de jeu, je vous dirais qu'on juge le projet de loi n° 110
inutile. Je vous dirais une remarque bien particulière : Laissez-nous négocier. J'entendais le maire de
Montréal tantôt. Mécanisme de règlement des différends, il faudrait à tout le moins qu'il y ait des
différends, et ce n'est pas ce qu'on constate dans le secteur municipal. En
tout cas, nous, au Syndicat des pompiers et pompières du Québec,
118 conventions collectives dans les six dernières années, cinq ont dû passer par le processus d'arbitrage,
un maigre 4 %. Au SCFP, 118 conventions collectives depuis
2014 : 29 en conciliation, quatre
arrêts de travail, donc un maigre 3 %. Donc, c'est mieux que les objectifs que s'est fixés le ministère du Travail, parce que le ministère du Travail a
des mécanismes de conciliation, de médiation, d'arbitrage où il vise 95 %
de règlement sans conflit. On est au-delà de
ça avec nos syndicats affiliés de la FTQ dans le secteur municipal. Donc, quand
on dit que le projet de loi est
inutile, on pense que les mécanismes qui sont prévus actuellement au Code du
travail font la job.
Le
droit de négocier, c'est un droit fondamental, c'est un droit qui est prévu aux
chartes, autant celle du Québec
que celle du Canada, droit d'association,
droit de négociation, droit de grève. Le droit de grève, la Cour suprême est venue statuer. La Cour supérieure de l'Ontario aussi, appuyée sur la décision de la Cour suprême, est venue dire que c'est un droit fondamental. Donc, pour passer outre ces droits fondamentaux, ça prend
des motifs exceptionnels, ce qu'on n'a pas ici parce que, on vient de
vous le mentionner, on trouve des règlements, dans le secteur municipal, pour
l'ensemble des catégories d'emploi.
Je
vous le dis d'entrée de jeu, je n'entrerai pas dans le détail, on va rester sur
le régime de négociation de façon générale.
Vous aurez l'occasion d'entendre un peu plus tard cette semaine le SCFP et le SPQ avec leurs présentations
respectives, spécifiques à leurs secteurs d'activité, donc je vais rester de
façon un peu plus générale.
Le
droit de négocier, je l'ai dit, c'est un droit fondamental, mais on a plusieurs
irritants dans ce projet de loi là. Entre autres, et ça a été soulevé, on
questionne le rôle inapproprié du ministère des Affaires municipales. Le Code
du travail, les relations de travail, au Québec,
c'est quelque chose d'important, c'est quelque chose de sensible. On en discute
régulièrement au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre. Quand on veut bouger
quelque chose dans le Code du travail, il
faut être éminemment précis. Les
parties patronale et syndicale travaillent sur des bases de consensus;
ici, il n'y a eu aucune consultation. On a un
tripotage, on a un dépeçage du Code du
travail par le ministère des Affaires municipales. Et là je
n'en veux pas... ce n'est pas une question, là... Je ne vise pas M. le ministre
actuel, là, je vise... j'ai un problème avec la fonction du ministre des Affaires municipales dans ce
contexte-ci. Le ministère du Travail a un rôle de neutralité entre les parties patronale et
syndicale. On ne retrouve pas ça ici. Le ministère des Affaires municipales,
c'est le ministre des maires, c'est le
ministre des municipalités, on voit mal un rôle neutre de la part du ministère.
Et ça ouvre la porte à toutes sortes
de scénarios loufoques. Demain matin, est-ce que ce sera le ministre des Mines
qui viendra également modifier le Code du travail dans le but de
l'adapter au secteur des mines? Est-ce que ce sera le ministre responsable de la Forêt qui viendra également
modifier le Code du travail? Écoutez, ça doit être le ministère du Travail
qui détermine les règles des relations de
travail au Québec. Donc, la revendication première, c'est que le ministre du
Travail demeure le seul interlocuteur des parties syndicale et patronale
dans le monde municipal.
Quand
je dis : Laissez-nous négocier, il y a un délai de 120 jours, ça ne donne
pas le temps aux parties de négocier. Le
temps de négociation doit aussi appartenir aux parties. On a des obligations de
négocier, on a des obligations de régler, et le temps doit appartenir aux
parties, partie patronale et partie syndicale, pour toutes sortes de bonnes
raisons. Des fois, il y a un timing qui n'est pas bon pour régler, et on
va laisser passer un peu de temps. Des fois, ça peut se passer très rapidement. Donc, il faut laisser aux parties le
temps de négocier, et là on nous amène rapidement avec l'intervention d'un tiers, on nous précipite vers une procédure
d'arbitrage, on nous précipite vers un mandataire spécial. Et on se doit de
donner toute la place aux parties de négocier.
• (11 h 20) •
La
médiation obligatoire, ça ne fonctionne pas, plein d'experts viennent nous le
dire, nos expériences nous portent à
croire que ça ne fonctionne pas. D'ailleurs, il y a eu un comité, le rapport
Morency-Thérien... Il n'y a pas eu un rapport comme tel, mais, au niveau des policiers et des pompiers, il y a eu un
exercice entre les parties patronale et syndicale, et également le ministère de la Sécurité publique et
le ministère du Travail se sont impliqués, et la médiation obligatoire,
ça devait demeurer volontaire. Donc, on pense qu'il ne devrait pas y avoir de
caractère obligatoire.
Dans
les principes directeurs et des facteurs de décision contraignants, là je vous
avoue qu'on a une multitude de facteurs, et déjà les arbitres,
actuellement, tiennent compte de plusieurs facteurs qui sont autres que ceux
qui sont mentionnés actuellement au Code du
travail. Mais, quand on parle de la capacité de payer des citoyens, de la
disparité entre les villes, moi, j'ai
juste une petite interrogation, là : S'il y a une disparité bien grande,
je veux bien croire qu'on va attirer
et retenir du personnel, mais il faut faire attention; si on veut attirer et
retenir du personnel, on doit avoir des conditions de travail assez similaires d'une ville à l'autre. Puis, la capacité de payer des citoyens,
j'achète ça, mais il n'en demeure pas
moins que c'est les maires qui font les choix politiques pour leurs villes.
Et ça, on ne conteste absolument
pas ça, mais, quand ça met en péril les conditions de travail des employés, là on peut peut-être
contester ce fait-là. Donc, les choix politiques qui sont faits ne
doivent pas mettre en péril les conditions de travail des employés.
Le
partage des frais d'arbitrage, écoutez, actuellement, on voit mal comment les petits syndicats, de
plus petits syndicats, de plus
petites municipalités, je ne parle pas juste des organisations syndicales, peuvent faire face à ces coûts-là, qui actuellement
sont assumés par le gouvernement.
La
disparition injustifiée du droit de regard sur les arbitres, ça aussi, on veut
que le gouvernement maintienne la possibilité octroyée aux
parties de s'entendre. On revient toujours à la même base : Laissez les parties
négocier. On est capables de le faire. La preuve, c'est qu'on règle dans
la majorité des cas.
Que
soit maintenue la possibilité d'avoir recours à des assesseurs, vous savez, des
fois, à l'occasion, les arbitres ne maîtrisent pas l'ensemble
des facettes, et les assesseurs sont d'une grande utilité dans le but de faire
comprendre à l'arbitre certaines
facettes qui sont méconnues de sa part. Donc, il y a une utilité pour les
assesseurs, il y a une utilité aussi de crédibilité auprès
des parties qu'il représente. Donc, on souhaite que ce soit maintenu.
La médiation arbitrale, c'est une solution
appropriée pour les pompiers et les policiers. Je vous en ai parlé tantôt, il y
a eu un comité de travail, et on fait fi de ce comité, des recommandations de ce comité de travail là, on n'en tient pas compte nulle part, on fait abstraction totalement
des travaux. Il y a eu des consensus
qui ont été faits entre les deux ministères, entre les employeurs, entre les syndicats, et on n'en tient pas compte.
Donc, on voudrait que la médiation arbitrale soit utilisée comme
possibilité de processus de règlement.
Le
mandataire spécial, écoutez, on juge que c'est une procédure inacceptable, qui
va nous amener directement vers le
décret de conditions de travail de la part du gouvernement du Québec. Ce n'est
pas ce qu'on souhaite. On n'a pas besoin de ça, on vous l'a dit. Autant
dans le cas des pompiers que des autres salariés du secteur municipal, on
réussit à s'entendre, on réussit à régler,
donc on est capables de le faire. Donc, on veut que toute la section concernant
le mandataire spécial soit retirée du projet de loi.
Dans
le cas de l'arbitrage, durée trop longue des conventions, on impose un minimum
de cinq ans. On juge que c'est trop
long, trop long pour vivre avec une décision d'un tiers. On pense que de un à
trois ans, tel que prévu au Code du travail
actuellement, c'est drôlement suffisant. Et, si les parties, comme c'est le cas...
si les parties le veulent, elles conviendront d'appliquer cette
décision-là pour une période plus longue.
Je
vous dirais, en concluant, si le gouvernement décidait de retourner à la table
à dessin, il serait à propos qu'une réflexion
plus en profondeur soit initiée sur les inéquités alléguées des conditions de
travail des employés municipaux et les déséquilibres du rapport de
force.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous pour 16 min 30 s.
M. Coiteux :
D'abord, merci pour la présentation. Bienvenue à vous, bien entendu,
M. Boyer, mais à toutes les personnes qui vous accompagnent ce
matin.
J'ai écouté
attentivement votre présentation. Moi, j'aurais une question d'ordre assez
général pour commencer, si vous me
permettez, qui serait la suivante : Est-ce que les syndicats que vous
représentez, qui sont présents pas seulement dans le secteur municipal, qui sont présents beaucoup dans le secteur
privé, dont le secteur manufacturier, notamment... Traditionnellement, la FTQ est très représentée
dans le secteur privé, manufacturier notamment; pas exclusivement mais
notamment. Est-ce que vous négociez de la même façon avec une ville qu'avec une
entreprise?
M. Boyer (Daniel) :
Sensiblement. Mais vous voulez dire quoi? Toutes les...
Une voix : ...
M. Boyer
(Daniel) : Non, mais c'est
parce que toutes les négociations sont différentes en soi, là, que ce soit...
Qu'on prenne deux entreprises privées distinctes, les négociations sont
différentes d'une entreprise privée à l'autre.
Les
négociations dans le secteur public ont un caractère un peu particulier,
j'inclus les municipalités dans ça, là, les négociations dans le secteur public ont un caractère un peu plus
particulier puisqu'elles sont de nature publique, donc il y a des relations publiques qui se font aussi
autour de ces négociations-là, mais les principes de négociation sont les mêmes,
là. Et, si on tient compte de la capacité de
payer des citoyens, on tient compte de la capacité de payer de l'employeur
aussi, dans le cadre d'une négociation, on n'est pas des êtres carrément
irresponsables, là.
M. Coiteux :
Donc, selon vous, ça devrait être exactement les mêmes principes. Je ne parle
pas des tactiques, là, je ne parle
pas des finalités de la négociation, mais, les principes mêmes, pour vous, il
n'y a aucune différence entre une municipalité puis une entreprise.
M. Boyer
(Daniel) : ...dans des
municipalités... Je ne vous ferai pas... Écoutez, c'est évident, vous savez que
les policiers et les pompiers n'ont
pas le droit à la grève. Les cols bleus, cols blancs, ils ont un droit de grève
limité avec un maintien de services essentiels. C'est sûr que ça joue,
là, ça rentre en ligne de compte, tout ça.
M. Coiteux : Parce
que moi, je pense
qu'il y a une différence. Puis peut-être
qu'on ne s'entendra pas là-dessus,
mais échangeons là-dessus, échangeons un petit peu là-dessus.
Supposons,
là, que, dans une négociation avec une entreprise privée, vous auriez des grands pans, disons,
surtout sur le côté salarial, ça peut
arriver effectivement, puis cette entreprise-là, elle serait
obligée d'augmenter ses prix pour être capable
de couvrir sa nouvelle convention
collective. Elle a des concurrents,
hein, elle a des concurrents, cette entreprise-là,
il n'y a rien qui oblige les consommateurs de cette entreprise-là à acheter
d'une entreprise qui a augmenté ses prix si l'autre
a négocié d'une façon un petit peu plus serrée puis elle n'est pas obligée
d'augmenter ses prix, donc il y a la liberté, là... Mais les taxes, ça, c'est obligatoire.
C'est-à-dire, si la municipalité a mal négocié puis est obligée d'augmenter les
taxes trois fois plus que l'inflation, le
citoyen, là, il n'a pas le choix, là, il ne peut pas dire : Aïe! non, moi,
je ne peux pas... je ne paierai pas
mes taxes. Le consommateur, lui, il a le choix. Vous ne pensez pas que ça, en
soi, ça crée une différence importante dont on doit tenir compte?
M. Boyer
(Daniel) : Bien là, il y a
une prémisse, d'abord, que je dois... Là, vous partez avec la prémisse qu'on a
mal négocié. Ça, c'est bien triste, qu'un maire
ou qu'une municipalité ait mal négocié, ça nous arrive à nous aussi, là, mais,
écoutez, a mal négocié... Ça, c'est la même affaire que de négocier avec le
couteau sur la gorge, là.
Moi, ce que
je vois dans le secteur municipal, là, ce que je vois dans le secteur
municipal, c'est des conventions collectives
signées. J'en ai depuis le mois de février puis des très récentes, qui ont été
signées après le dépôt du projet de
loi n° 110. J'en ai... je ne vous les énumérerai pas, là, mais je dois en
avoir plus que 25, là, au SCFP, de signées depuis le mois de février. Des maires, j'ai des photos
des maires, là, des conseillers, des représentants syndicaux avec un beau
sourire qui signent la convention
collective. Moi, je ne vois pas de couteau nulle part, là, je ne vois pas de
couteau nulle part.
Donc, oui,
quand on me parle qu'il y a une capacité de payer des citoyens, bien,
effectivement, mais moi, je pense que
les maires en tiennent compte. Et pensez-vous qu'on est des êtres totalement
irresponsables, et que les maires sont des êtres totalement irresponsables, et qu'on ne tient pas compte de la
capacité de payer des citoyens? On tient compte de ça, on tient compte
de tout ça, bien évidemment.
Mais on négocie des conventions collectives de
gré à gré, on se donne la main, on signe de gré à gré. Est-ce qu'il y a des choses, dans une convention
collective, qui nous plaît moins? Bien oui. Il y en a pour les maires, mais il
y en a aussi pour nous.
M. Coiteux : Permettez-moi quand même de revenir à ma question.
Puis je reviens à l'idée, est-ce que c'est pareil pour... Est-ce que
vous tenez compte de la capacité de payer d'une ville, de ses citoyens,
ultimement, qui sont soumis à l'impôt
obligatoire, les taxes sont obligatoires... est-ce que vous en tenez compte
dans vos négociations de la même façon que vous tiendriez compte de la
capacité de payer d'une entreprise privée?
M. Boyer (Daniel) : Pourquoi
pas?
M. Coiteux :
Bien, je vous pose la question. Est-ce que vous le faites dans... Est-ce que c'est
comme ça que vous...
M. Boyer (Daniel) : Mais bien sûr, bien sûr. Écoutez, si on avait des
demandes extravagantes qui feraient en sorte que ça doublerait les taxes municipales... On est responsables, là, je
veux dire, on tient compte de ça. Je veux dire, vous en savez quelque chose, M. Coiteux... M. le
ministre, M. le ministre, la procédure parlementaire, des fois, elle m'échappe,
là, mais, M. le ministre, vous en
savez quelque chose. Dans le secteur public, là, il n'y a à peu près personne
qui pensait qu'on trouverait un
règlement, on en a trouvé un. Est-ce qu'on a tenu compte de la capacité de
payer des citoyens? Je pense que, oui,
on a été responsables. Est-ce qu'on a tenu compte que les travailleurs devaient
être bien payés, avoir des augmentations de salaire? Je pense que, oui, on a été responsables. Vous l'avez été,
vous aussi. C'est la même chose dans les municipalités, là, c'est exactement
la même chose.
M. Coiteux :
Néanmoins, dans les municipalités, il y a plusieurs années d'augmentations de
taxes qui sont supérieures à l'inflation, au
point où l'ISQ — puis
l'ISQ, je pense, c'est impartial, là, ils font des études statistiques qui
sont difficilement contestables — documente non seulement qu'il y a un écart
très grand entre la rémunération dans le secteur municipal et le reste du secteur public, mais que cet écart-là,
il a augmenté dans le temps. Donc, en quelque part, ça ne s'est pas passé de la même façon dans le
secteur municipal que dans le secteur public québécois. Comment est-ce que
vous expliquez ça?
M. Boyer
(Daniel) : C'est parce que ça n'a pas augmenté suffisamment dans le
secteur public québécois.
M. Coiteux :
Le régime est parfait dans le secteur municipal?
• (11 h 30) •
M. Boyer (Daniel) : Non, bien, écoutez, oui, le régime est... bien
oui, le régime est parfait dans le secteur municipal, on vous dit qu'il
n'y a pas lieu d'avoir un projet de loi amendant les dispositions du Code du
travail pour le secteur municipal. Moi, ce
que je vous dis, c'est qu'il y a des conditions de travail... qu'elles soient
bonnes ou qu'elles soient moins bonnes,
il y a des conditions de travail qui ont été négociées de gré à gré entre les
parties. Si les maires ont été totalement irresponsables, parce qu'ils prétendent que la masse salariale est dans
le plafond, écoutez, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Moi, je
vous dis que la masse salariale, elle n'est pas dans le plafond.
Puis
M. Labeaume, le maire de Québec, peut bien dire que l'ISQ, ça ne se trompe pas,
vous-même, vous contestiez les chiffres de l'ISQ lors de la dernière
négociation dans le secteur public. Donc, oui, ça peut se contester.
Puis,
écoutez, la dernière étude de l'ISQ, là, elle ne tient pas compte de la loi
n° 15 sur les régimes de retraite, et ça, c'est une diminution de
la masse salariale dans les municipalités. Elle ne tient pas compte de ça.
Et
là vous allez avoir l'occasion, lorsque le SCFP fera sa présentation en
commission parlementaire, de questionner de façon beaucoup plus précise. C'est eux qui ont fait l'étude, ils
pourront vous répondre de façon pointue, pour chacun des types d'emploi importants dans le secteur
municipal, où se situent les salaires du secteur municipal, des fois un peu en
haut de la médiane, des fois un peu en bas,
des fois dans la médiane. Mais je vous avoue que ce qui baisse la médiane, là,
c'est les employés du secteur public, de la fonction publique québécoise, là.
M.
Coiteux : Donc, dans le fond, vous, vous auriez souhaité un projet de
loi qui modifie le régime de négociation dans le secteur public québécois pour qu'il y ait une explosion des coûts
dans le secteur public québécois, pour qu'on rattrape le secteur
municipal puis qu'on augmente les impôts des Québécois. C'est ça, dans le fond.
M. Boyer (Daniel) : M. le ministre, on a négocié une convention collective de cinq ans dont
je suis fier. C'est correct, dans le secteur public, c'est réglé, là. On
s'en reparlera dans la prochaine négociation.
M.
Coiteux : Ah! justement, c'est parce qu'il y a un autre ordre de
gouvernement, qui est l'ordre de gouvernement municipal, qui, lui, n'est pas d'accord avec votre interprétation des
faits qu'ils vivent dans le meilleur des mondes possibles puis qu'il n'y a rien à changer dans le régime de
négociation actuel. Dans le fond, quand je vous écoute... puis vous avez
le droit de penser comme ça, là, tout à
fait, mais, quand je vous écoute, le statu quo est non seulement souhaitable,
mais c'est l'idéal. C'est comme... on
est dans le meilleur des mondes. Alors, j'essaie de comprendre pourquoi vous
êtes les seuls à penser comme ça, dans le secteur municipal, parce que
nous, on cherche un équilibre, là, entre tout le monde.
M. Boyer
(Daniel) : Bien, on n'est pas les seuls... Mais on n'est pas les
seuls. L'ensemble des organisations syndicales
qui vont défiler devant vous cette semaine vont venir vous dire que les
dispositions du Code du travail actuelles font la job. Écoutez, quand le ministère du Travail se fixe comme
objectif 95 % des conventions signées sans conflit, puis que dans le secteur municipal on est à 96 virgule
quelque chose pour cent, on atteint les objectifs, on est supérieurs aux
objectifs du ministère du Travail. Donc,
pourquoi modifier les règles? Parce qu'il y a deux maires à chaque bout de la
20 qui veulent qu'on modifie les règles?
Écoutez,
M. Labeaume a souligné... le maire de Québec a souligné votre courage d'entrée
de jeu. Ça prend du courage pour négocier, M. Coiteux... M. le ministre,
ça prend du courage.
M. Coiteux :
Moi, je pense que ça s'applique à tout gouvernement qui veut moderniser les
choses. Des fois, moderniser, ça prend du
courage, effectivement, parce que ça veut dire changer les manières de faire,
remettre en question des choses qui n'ont pas été remises en question
auparavant. Je pense que c'est de ça qu'on parle.
Mais je reviens sur une chose. Vous avez
dit : Ça fait la job. Ma question est simple : Ça fait la job pour
qui?
M.
Boyer (Daniel) : Pour les
deux parties. Je vous l'ai mentionné, écoutez, je pourrais vous les nommer,
toutes les villes qui ont signé,
toutes les municipalités qui ont signé des conventions collectives, puis ça se
fait avec le sourire. Écoutez, ça
fait la job. Si vous m'aviez dit, là, qu'il y a 50 % des conventions
collectives qui sont signées, puis, toutes les autres, il y a des conflits interminables où on met la santé et la
sécurité du public en danger, je vous dirais : Il y a un véritable
problème.
Puis, s'il y
a un véritable problème, là, appelez-nous, là, on va s'asseoir à une table puis
on va trouver les solutions. Puis
c'est ça aussi qu'on déplore dans le projet de loi n° 110, c'est qu'en
aucun temps on n'a été impliqués. Il y avait un comité qui a été formé pour les pompiers puis les policiers, un comité
où le ministère de la Sécurité publique était là, un comité où le ministère du Travail était là, les
associations patronales et les associations syndicales, un comité qui ne date
pas de Mathusalem, là, 2012‑2013. On a fait
fi de l'ensemble des consensus que ce monde-là avait convenus puis on se
tricote autre chose.
Écoutez, le dialogue social, là, si on veut
modifier les règles... Et ça, on le sait, on le fait avec nos partenaires patronaux. Quand on veut modifier les règles, on
s'assoit, on trouve des solutions, quand il y a un problème. Quand il n'y en a pas, on n'a pas à se gratter la tête, là.
Il n'y a pas de problème? On va continuer à fonctionner avec les règles
actuelles.
M.
Coiteux : C'est parce qu'il y a beaucoup de gens qui pensent qu'il y a
un problème. Et honnêtement, à sa face même,
ce n'est pas parce qu'il y a des signatures qui se font, même avec le sourire,
qu'il n'y a pas nécessairement un problème.
Moi, si
j'avais vu évoluer les conditions de travail puis les salaires de façon à peu
près parallèle dans le secteur public
québécois puis dans le secteur municipal, je me dirais : Bon, bien, il y a
peut-être deux régimes différents, mais en quelque part il y a une espèce de cohérence globale, là, parce
qu'ultimement le citoyen, il paie de l'impôt sur le revenu, il paie des taxes municipales, c'est le même qui
paie, bon, mais il y a une cohérence. Mais là cet écart de 39,5 %... Qui
est une moyenne. Ça cache, là, des fois des
choses qui peuvent aller jusqu'à 60 et quelques pour cent d'écart entre le
secteur municipal puis le secteur
public québécois. Quand moi, je vois ça, même si c'est signé avec le sourire
dans certains cas, juste ça, c'est un symptôme de quelque chose qui ne
fonctionne pas. Vous ne pensez pas?
M. Boyer
(Daniel) : Non, je ne pense pas. Écoutez, M. le ministre, je pense que, depuis le pacte fiscal, il y a eu toutes sortes de rumeurs sur toutes sortes de
possibilités. Il y a eu le dépôt de votre projet de loi au mois de juin, et, pendant tout
ce temps-là, il a continué à se négocier et à se signer des conventions collectives, il n'y
a aucun maire qui s'est assis sur son steak puis qui a décidé d'attendre un projet de loi ou d'attendre un nouveau pouvoir qu'on lui donnerait. Pourquoi? Parce
que ça marche.
Il n'y a
personne qui avait le couteau sur la gorge, là. Écoutez, moi, qu'on me dise que
le maire de Québec puis le
maire de Montréal ont le couteau sur la gorge, là, je ne le sais
pas, là, mais je pense qu'ils n'ont pas tant le couteau sur la gorge que ça. Je pense qu'ils sont très bien
capables de se défendre, je pense qu'ils sont très bien capables de se
défendre puis ils sont très bien
capables de négocier à une table de négociation. Puis c'est pour ça, d'ailleurs, que les cols bleus puis les cols blancs de Montréal et de Québec
ont des conventions collectives de signées.
M.
Coiteux : Mais pourquoi alors
auraient-ils consenti, à travers le temps, des conditions 40 % supérieures à celles du secteur
public québécois?
M. Boyer
(Daniel) : Écoutez, moi, je
pense que ce n'est pas 40 %, premièrement, il faudrait remettre les bons
chiffres aux bonnes places. Puis,
deuxièmement, écoutez, les parties ont convenu parce qu'ils ont convenu. Je
veux dire, pourquoi Bombardier
accorde des augmentations moindres qu'une autre entreprise? Écoutez, ça, ça
regarde les parties. Puis c'est ça,
notre régime, notre Code du travail est fait entre les parties. C'est les
parties qui ont l'obligation de négocier de bonne foi et c'est les parties qui ont l'obligation de convenir d'une
convention collective. Ça appartient aux parties, tout ça.
Le Président (M. Auger) : Trois minutes.
M.
Coiteux : Oui. Puis ça, le projet de loi ne remet absolument pas ça en
question. Par contre, le projet de loi, lui, puis c'est pour ça que j'avais commencé mon échange avec vous
là-dessus, il fait quand même une distinction entre un gouvernement de proximité... Dans ce cas-ci, on
s'entend, là, c'est un gouvernement municipal, mais qui est redevable devant l'ensemble de ses citoyens puis qui soumet
ses citoyens à l'impôt obligatoire. Les taxes municipales, ce n'est pas optionnel, là, nous, on pense que c'est très
différent d'une entreprise privée. C'est pour ça que j'ai commencé avec ça,
mais vous avez dit : Non, ce n'est pas différent.
M. Boyer
(Daniel) : Oui, mais, pour
ça, il faut se donner des mécanismes différents qui bafouent les droits des
travailleurs puis des travailleuses? Bien
non. On est capables d'en tenir compte, nous aussi, à une table de négociation,
de ces critères-là. On en tient compte.
C'est sûr que...
Écoutez, vous me dites : Est-ce qu'on se comporte différemment? Non, on ne
se comporte pas différemment, on est
toujours sur la capacité de payer de l'employeur en face. On tient compte de
ça, bien évidemment, autant dans le privé, autant dans le public.
M.
Coiteux : Mais vous comprenez un peu comment ça marche, là. Une
entreprise privée, si vous pensez qu'elle va faire faillite si vous avez trop demandé, vous allez faire un peu
attention, vous allez être au chômage. Mais, si vous pensez que la ville va augmenter les taxes puis
que ça va passer, peut-être que vous allez le traiter différemment. C'est
pour ça que je vous ai posé cette
question-là. Ne pensez-vous pas qu'il y a vraiment une différence telle que ça
nécessite un ajustement des mécanismes?
M. Boyer (Daniel) : Mais, M. Coiteux, est-ce que vous pensez que, quand on s'assoit à une
table de négociation... M. le
ministre, est-ce que vous pensez que, quand on s'assoit à une table de
négociation, on se dit : Il n'y a pas de problème, on va demander la lune; de toute façon, la ville,
elle peut augmenter les taxes de 50 %? Ce n'est pas de même qu'on
se comporte. On ne se comporte pas comme ça, on ne se comporte vraiment pas
comme ça.
Puis,
écoutez, la capacité de payer de la ville, ça dépend de quoi, ça? Puis je ne remets
pas en question le pouvoir des maires
de choisir où ils dépensent les taxes des citoyens et où ils rendent des
services, mais, moi, un maire qui décide de construire — je caricature, là — 20 bibliothèques, 50 piscines puis
un amphithéâtre, puis qui met bien de l'argent, bien des millions là-dedans, puis qui n'en a pas à
donner à ses employés, on peut questionner ça aussi. Mais ça, on n'a jamais
été là-dedans.
Le Président (M.
Auger) : Une minute.
M. Coiteux :
Peut-être le député de Vimont voudrait conclure avec sa propre question.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Oui, merci. M. Boyer, je regardais dans votre
mémoire, à la page 10, vous parlez justement du délai de négociation, un délai de 120 jours,
vous aimeriez qu'il soit retiré. Vous savez qu'il y a un 30 jours
supplémentaire qui peut être ajouté? Vous, 150 jours, ce n'est pas assez
pour négocier ou... Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Boyer (Daniel) : Ah! même que pour les autres salariés c'est même 90 jours de plus
avant le... Le délai officiel de
négociation, là, il peut être de 90 jours de plus, on peut donner un avis
avant la fin de la convention, sinon... Je ne veux pas entrer dans le
détail du code, là, mais ça peut être 90 plus 120. Mais, écoutez, ça...
Puis, dans le cas des
pompiers et des policiers, c'est complètement différent, parce que ce n'est pas
le même 120 jours. Là, on se parle de 120 jours du début de la phase
de négo.
Bien,
écoutez, est-ce que c'est suffisant ou pas? Peut-être que dans certains cas
c'est suffisant, mais ça appartient aux parties. Ça se peut que ça
prenne 18 mois pour négocier. Ça a pris, dans le secteur public, deux ans,
je pense.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Nous allons poursuivre avec l'opposition
officielle pour 10 minutes. M. le député de Richelieu.
• (11 h 40) •
M. Rochon :
Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.
Vous avez entendu, vous venez d'en parler, le
maire de Québec, dans son langage très imagé, utiliser l'expression
«couteau sur la gorge». Le maire de Montréal, qui a aussi un langage assez
imagé, l'a faite sienne, cette expression-là. Ils estiment tous les deux le rapport de force déséquilibré et ils
applaudissent ce projet de loi qui rééquilibre, à leur point de vue, là,
le rapport de force.
Votre
opinion, elle est tout à fait contraire, puis vous êtes particulièrement
préoccupés par le fait que le ministère du Travail soit tassé des relations de travail dans le monde municipal.
Vous nous avez entendus, nous, de l'opposition officielle, regretter l'absence de la ministre du Travail, gardienne du
code. Vous vous préoccupez que ce soit le ministre des Affaires
municipales qui devienne en quelque sorte responsable des relations de travail
dans le monde municipal.
Ce serait quoi, le
rapport de force, si ce projet de loi devait être adopté tel quel? Et les
payeurs de taxes en tireraient-ils des bénéfices?
M. Boyer (Daniel) : Bien, à notre avis, non, ils n'en tireraient pas de bénéfice, pour la
bonne et simple raison, puis je vous
l'ai mentionné... les parties, actuellement, trouvent des règlements sans
conflit. Là, on vient ratatiner la période où les parties pourront trouver un règlement, 120 jours plus 30,
peut-être plus 90, là, et on met ça... Puis il y a différents facteurs qui pourraient amener une municipalité ou
un syndicat à prendre du temps pour régler, s'il y a des élections, s'il y a
une activité quelconque, un
375e anniversaire ou peu importe. Les parties sont libres de décider du
temps qu'elles prennent pour négocier. Là, on catapulte les parties avec
l'intervention d'un tiers, et ça va nous pousser vers un arbitrage obligatoire éventuellement, parce qu'on sait que,
sinon, il y a un mandataire spécial, puis le mandataire spécial, il sert à ce
qu'il y ait une loi spéciale à un moment donné, donc ça va nous catapulter vers
un arbitrage obligatoire.
Qu'est-ce
que ça donne, un arbitrage obligatoire? On ne le sait pas. L'intervention d'un
tiers aussi rapidement, ça peut
provoquer des décisions qui sont favorables à une partie ou favorables à
l'autre partie. Qu'est-ce que ça va donner aux payeurs de taxes? Je n'en ai aucune espèce d'idée, mais ça risque
d'avoir des conséquences encore plus graves, parce que ce n'est pas les
parties qui auront convenu ensemble des salaires, des conditions de travail.
M.
Rochon : Il risque d'y
avoir — puis
c'est commencé, là, dans le cadre de ces consultations — une abondante référence à l'étude de l'Institut de la statistique du Québec qui
démontre qu'il y a un écart important entre les salaires versés dans le monde municipal et ceux versés dans la
fonction publique, là, un écart à la faveur des syndiqués que vous représentez
dans le monde municipal, on parle de près de
40 % d'écart. Vous contestez ça. J'aimerais que vous vous expliquiez un
peu, là, sur les travers de cette étude de l'Institut de statistique du
Québec. Qu'est-ce que vous reprochez à cette étude?
M. Boyer
(Daniel) : Bien, je vous dirais, je l'ai mentionné tantôt, d'abord,
cette étude-là, elle est antérieure à l'application
de la loi n° 15 concernant les régimes de retraite, qui vont faire en
sorte de toute façon que la masse salariale des municipalités risque de
diminuer. Donc, il faudrait avoir une étude un peu plus à date.
Deuxièmement,
ça dépend quel morceau on prend, quelle catégorie de salariés on prend, mais,
si on regarde les entreprises
privées, syndiquées, de plus de 200 travailleurs, si on regarde le monde
municipal, si on regarde la fonction publique
fédérale, si on regarde l'administration québécoise et si on regarde les
entreprises publiques, moi, je vous le dis, et le SCFP pourra vous en faire la démonstration cette semaine en
commission parlementaire, les salaires des employés municipaux se
retrouvent la plupart du temps dans la médiane, sinon très près de la médiane.
Écoutez, je
l'ai mentionné, là. Ce qui fait... Pourquoi ils se ramassent à la médiane,
c'est que vous avez aussi des salariés
qui sont des bas salariés, des salariés de l'administration publique, qui font
baisser la médiane. C'est sûr que, si les salariés de l'administration publique étaient mieux payés, peut-être que
nos employés municipaux seraient peut-être un peu au-dessus de la médiane, mais là on est dans la médiane pour la
plupart des types d'emploi, les plus populeux dans le secteur municipal.
On est dans la médiane.
M. Rochon : Vous conviendrez avec
moi qu'il s'agit, pour les citoyennes et les citoyens québécois, pour les payeurs de taxes, d'une question très sensible, n'est-ce
pas? Les salaires payés dans le monde municipal doivent, à leur point de vue, et je crois que c'est légitime
qu'ils le pensent, être raisonnables. C'est
le cas, à votre point de vue, ils le sont, ils se situent dans la, dites-vous, médiane, et vous ne semblez pas
impressionnés du fait qu'ils puissent être 40 % plus élevés que les salaires versés dans la fonction
publique québécoise, ce que vous contestez, venons-nous d'entendre.
M.
Boyer (Daniel) : Bien, moi,
ce que je vous dis, là, c'est que, si on calcule la rémunération globale avec
l'ensemble des avantages sociaux, les
secteurs dont je vous ai parlé tantôt... C'est sûr que, si on se parle des
entreprises non syndiquées, là, on se parle d'une autre affaire. Mais,
si on se compare, on prend des comparables, les grandes entreprises privées syndiquées et la fonction publique fédérale, les
entreprises d'État, si on met tout ça ensemble, nous sommes... les employés
municipaux sont dans la médiane.
Et, écoutez,
moi, je vous dis, le critère le plus important, c'est que ces salaires-là ont
été convenus par les parties. Puis
moi, je pense qu'il n'y a personne qui est innocent, là, je veux dire, on a
tous convenu de gré à gré de ces salaires-là.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de René-Lévesque. 3 min 30 s.
M.
Ouellet : D'accord.
J'aimerais vous entendre. Dans le chapitre I du projet de loi, dans les
principes directeurs, au quatrième
alinéa, «il est de la responsabilité de l'employeur de pourvoir à l'embauche de
[personnes qualifiées], de gérer ses
effectifs et d'en contrôler le niveau de manière à combler ses besoins
opérationnels». Vous savez, tout ce qui n'est pas convenu en convention collective est reconnu être un droit de
gérance. Selon vous, avec ce principe directeur là... Avez-vous peur que
dans certains cas on vienne chercher des droits de gérance qui étaient déjà
convenus dans la convention collective? On
peut peut-être parler, dans le cas d'une organisation du travail, dans certains
cas, un nombre minimal d'emplois garantis, dans certaines municipalités.
Avez-vous peur que ce quatrième alinéa là vienne de façon à vous enlever certaines dispositions qui étaient
déjà prévues dans la convention collective et donc qui n'étaient plus un
droit de gérance de l'employeur?
M. Boyer
(Daniel) : Tant et aussi
longtemps qu'on donne du temps aux parties pour convenir d'une convention
collective, on n'a aucune crainte face à ça.
Sauf que le processus, tel qu'il est formulé au moment où on se parle, je l'ai
mentionné tantôt, nous catapulte vers l'arbitrage, nous catapulte vers un
mandataire spécial et, en bout de piste, peut-être une intervention de l'État. Bien, oui, ça nous
inquiète effectivement, parce qu'un arbitre pourrait, en fonction de ces
principes directeurs là, balayer du revers de la main un plancher
d'emploi qui existe dans une convention collective qui a été convenue de gré à gré au fil du temps entre un
employeur puis un syndicat. À notre avis... Puis c'est pour ça qu'on dit :
Il faut se donner absolument le temps de
négocier, laisser les parties négocier pour qu'on puisse convenir de
dispositions. Et, écoutez, s'il faut
abolir un plancher d'emploi, là, qui de mieux que les parties pour le négocier?
Et il ne faut surtout pas donner le pouvoir à un tiers de décider de ça.
M.
Ouellet : Dans votre
mémoire, revendication n° 4, vous demandez que le secteur des transports
soit exclu du projet de loi
n° 110. Vous semblez surpris de voir apparaître cette constatation-là dans
le projet de loi. J'aimerais vous entendre.
Pourquoi vous demandez de sortir le transport? Et quels sont les enjeux qui
n'étaient pas discutés et que vous voyez maintenant apparaître dans ce
projet de loi concernant le secteur du transport?
M. Boyer
(Daniel) : De nos membres,
là, aucun conflit dans le secteur du transport terrestre depuis 2011, aucun,
aucun, des conventions collectives
renégociées convention après convention. Écoutez, ça sort d'où, ça? On n'a
jamais entendu parler de ça avant, on dépose le projet de loi
n° 110, et coucou! Le transport terrestre est là-dedans.
Est-ce qu'il
y a des problématiques là aussi, dans le transport... Bien non, il n'y a pas de
problématique. Donc, oui, on est surpris. Ça n'a jamais fait partie
d'aucune discussion, et là, tout d'un coup, on arrive avec ça.
Le Président (M. Auger) : Dernière
question, M. le député? 30 secondes.
M. Ouellet : Non, ça va. 30
secondes, c'est...
Le Président (M.
Auger) : Ça va. Merci beaucoup. Nous allons poursuivre avec la
deuxième opposition et M. le député de Blainville pour
6 min 30 s.
M. Laframboise : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Merci, M. Boyer, M. Leduc, M. Pépin,
M. Bolduc, Mme Lefebvre. Merci d'être présents, présente.
D'abord, je
vous trouve quand même assez brillants, là, dans... Vous êtes bien organisés,
vous êtes bien organisés. Puis vous
terminez tout en disant que, le projet de loi, vous ne trouvez rien de bon
là-dedans, mais vous terminez en disant, votre dernier paragraphe :
«Si d'aventure le gouvernement décidait de retourner à la table à dessin, il
serait à propos qu'une réflexion plus en profondeur soit initiée sur les
iniquités alléguées des conditions de travail des employés et employées — masculins et féminins — municipaux et les déséquilibres [du] rapport
de force.» Donc, évidemment, ça, ça veut dire que vous êtes conscients
qu'il y a un certain déséquilibre du rapport de force. Et ça...
Une voix : ...
• (11 h 50) •
M.
Laframboise : Non, mais ça, je comprends, parce que
je vous écoutais tantôt, là, par
rapport aux négociations dans le secteur public, vous
dites : Bon, on a négocié, il y
avait une convention, mais le ministre
puis président du Conseil du trésor,
il avait toujours la possibilité d'imposer une loi spéciale. Donc, ça, ça fait
partie des négociations. Je veux dire, vous avez signé, il était content, M. le président du Conseil du trésor, de signer, mais il reste quand
même que, si jamais vous ne vous
étiez pas entendus sur quelque chose de raisonnable, il aurait pu imposer la
loi spéciale. Et d'ailleurs la rumeur voulait
qu'on soit rappelés pour une loi spéciale. Donc, vous étiez au courant de ça. Si nous, on était au courant,
vous étiez au courant.
Donc, à quelque part, le rapport de force qu'a
le gouvernement, ce n'est pas le rapport de force qu'ont les municipalités. Quand le maire de Montréal vient nous dire : Ma crainte à moi, c'est
que, les gains que j'aurais pu faire avec
la loi sur les pensions, là,
évidemment, là, le projet de loi n° 15, là, bon, je puisse les... je vais
les perdre si le projet de loi actuel
n'est pas adopté, puis honnêtement, là, quand je regarde les relations de
travail puis la... Vous, vous dites : Il n'y a pas... les gens signent,
là. M. le maire de Québec vous l'a dit, là : Je ne signe pas... j'ai un
couteau sur la gorge parce que de
toute façon je n'ai pas de moyen, je ne suis pas capable, c'est ça ou il y a
une désobéissance civile, puis, à la fin, bien, j'aime autant faire ça,
parce que je ne vois pas la façon dont je suis capable de régler à l'avantage
de mes contribuables, sinon d'étirer une
négociation, qui va se ramasser dans les rues, avec tout le tralala qui va avec, là. Donc, lui, il n'a pas
cette capacité-là, puis le maire de Montréal n'a pas dit non, n'a pas dit le
contraire, là, tu sais. Donc, à quelque
part, si les maires des deux grandes villes viennent nous dire... imaginez-vous
les maires des 1 100 municipalités au Québec qu'il reste, là. Si le maire de
Montréal puis le maire de Québec n'ont pas de rapport de force, pensez-vous
vraiment que les maires des autres municipalités ont des rapports de force? Ils
n'en ont pas du tout, là.
Donc, à quelque part, c'est vrai qu'ils signent,
puis c'est correct, parce que la façon dont les négociations, actuellement, se passent, ça force les signatures,
tout simplement. Moi, je vois ça comme ça. Puis ça a été quoi, le résultat?
C'est que les maires, au cours des années,
ont délaissé des infrastructures parce qu'ils avaient à payer, justement, des
salaires des employés. Puis ça, là,
je ne reviens pas sur le passé, là, je fais juste vous dire que c'est ça, la
réalité, là. Il y a un déficit. Il y a des salaires des employés qui
augmentent de 40 %, puis vous avez un déficit de plus de 10 milliards
dans les infrastructures des municipalités
au Québec. Donc, ça, à quelque part, vous pouvez me dire : Il y a des
bâtisses neuves là-dessus, mais il y
aurait quand même... il y a des bâtisses existantes, puis il y a des réseaux
d'aqueduc, puis il y a des réseaux
d'égout, puis il y a des routes, puis des rues, puis des citoyens qui vont vous envoyer plein de courriels pour vous
dire c'est quoi qu'aurait dû faire la ville plutôt que de donner une augmentation
de salaire aux employés.
Donc, tout ce
que fait ce projet de loi là, c'est d'essayer de faire un équilibre par rapport à ça. Donc, moi, à quelque part,
en tout cas, j'espère que vous êtes conscients de ça. Moi, le
message que je veux vous livrer, c'est : C'est terminé, là. À quelque
part... Je vous l'ai dit d'entrée de jeu dans ma prémisse, quand j'ai fait mon
introduction, en 1982 il y a eu René
Lévesque qui a eu le courage de déposer le projet de loi qu'il a déposé parce qu'à quelque part, à un moment donné,
c'était assez. Bon, ça a commencé là, l'écart. Il l'a fait pour la fonction
publique, puis l'écart a commencé là, en 1982‑1983,
puis, le monde municipal, il y a eu un écart qui s'est étiré depuis ce
temps-là. C'est ça, la réalité. Puis ça, c'est correct, c'est fait. Le problème, puis, moi, pour lequel j'ai un
problème, c'est quand le maire de Montréal vient me dire : Bien là, on vient de faire des gains avec les
fonds de pension, puis je risque de les perdre si vous ne m'adoptez pas ce
projet de loi là. Moi, là, ma
question, c'est : Pouvez-vous sécuriser le maire de Montréal puis
dire : Si vous n'adoptez pas ce projet
de loi là, M. le maire, on ne récupérera pas tout ce qu'on a perdu dans les
fonds de pension? Êtes-vous capables de me dire ça, vous, là?
M. Boyer
(Daniel) : Je ne vous dirai
pas ça, parce qu'on n'est pas d'accord avec la loi n° 15
non plus. Bon, bien, écoutez...
M.
Laframboise : Mais
imaginez-vous. C'est qu'au pire ça veut dire que, si, admettons, la loi n° 15...
Ça veut dire que,
si vous augmentez... si en plus vous récupérez dans des négociations, puis que, le projet de loi n° 15, admettons, vous gagnez devant les tribunaux, puis qu'ils sont obligés de
rembourser, ils vont avoir donné les augmentations de salaire plus la récupération qu'ils vont avoir... Tu sais, c'est pour ça que,
je vous dis, à quelque part, il n'y
a jamais de milieu là-dedans,
là. Il y a une loi, puis, à un moment donné, moi, je pense
que les élus municipaux ont besoin, pour les contribuables... Puis, quand je parle des élus, là, je suis content que
les maires disent : Ça prend une résolution de conseil pour que tout
le monde soit bien conscient, à la
ville, qu'est-ce qui se passe par
rapport aux salaires, aux rémunérations des employés. Je pense que c'est ça, la réalité,
on est rendus là, là, présentement. Les citoyens ne sont plus capables de
payer, puis ça, il va falloir qu'on arrive à
quelque chose — puis
j'espère — avec
l'entente avec les syndicats, pour dire : Oui, on va avoir un cadre
qui va peut-être favoriser une plus juste négociation. Vous n'êtes pas d'accord
avec ça?
M. Boyer
(Daniel) : Oui, je suis
d'accord, puis c'est ce qu'on fait négociation après négociation. Quand on vous
dit qu'on règle des conventions collectives, c'est ça qu'on fait.
Quand vous me
dites que les maires ont délaissé les infrastructures pour payer leurs
employés, on pourrait en jaser longtemps,
là. Premièrement, c'est des choix politiques qui appartiennent aux
municipalités. Puis, écoutez, j'écoutais les deux maires tantôt qui nous mentionnaient le pourcentage de leur masse
salariale. C'est sûr que le pourcentage de la masse salariale, ça va être une partie importante des
dépenses de la ville. C'est une entreprise de services, on donne des services,
puis à date il n'y a pas de robot qui fait
la plupart de nos jobs. Donc, bien évidemment, le pourcentage de la masse
salariale va être important.
Puis là vous me parliez de loi spéciale, là.
Nulle part dans la loi sur le régime de négociation dans le secteur public vous ne voyez que le gouvernement a le droit de décréter les conditions de travail. Quand il le fait,
c'est un pouvoir d'urgence qu'il exerce, et ça, c'est très, très, très
balisé par les tribunaux supérieurs maintenant.
Le Président (M. Auger) : ...15 secondes.
M. le député de Blainville.
M.
Laframboise : ...pouvoir, le
gouvernement du Québec, alors que les villes n'ont aucun pouvoir. Quand le
maire de Montréal
vous dit : Les comparables avec les autres villes, je n'en veux plus,
êtes-vous d'accord avec ça, d'enlever le critère des comparables?
M. Boyer
(Daniel) : Écoutez,
moi, ce que je vous dis, là, c'est que, premièrement, l'arbitrage
n'est pas tellement utilisé, les parties conviennent entre eux. Donc,
qu'on se parle de comparables ou pas, là, dans la majorité
des cas, les parties s'entendent...
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Merci, messieurs. Désolé de couper vos élans respectifs, mais un petit
message d'intérêt parce que
dans les quatre prochaines minutes vous allez avoir une petite séance de
dynamitage, donc, pour ne pas rester surpris de la secousse que ça peut
occasionner.
Donc,
M. Boyer, Mme Lefebvre, M. Bolduc et M. Pépin, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends quelques instants pour permettre au
prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 11 h 56)
(Reprise à 12 heures)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en souhaitant la
bienvenue aux représentants de la Confédération
des syndicats nationaux. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et par la suite nous allons
débuter avec une période d'échange. Donc, dans un premier temps, bien
vouloir vous présenter. Par la suite, vous pourrez commencer votre
exposé.
Confédération des syndicats nationaux (CSN)
M.
Létourneau (Jacques) : Bien.
Alors, merci, M. le Président. M. le
ministre. Ça nous fait extrêmement plaisir d'être aujourd'hui devant vous pour vous exposer nos appréhensions sur le projet de loi n° 110. Je suis accompagné de Minh Nguyen, du
Service de recherche et des relations de travail de la CSN, Michel Forget, qui
est adjoint au comité exécutif de la CSN,
Denis Marcoux, qui est le président de la fédération des employés de
services publics de la CSN, et Richard
Fortin, qui est le coordonnateur de la fédération et qui a aussi été appelé, là, souvent à
intervenir dans des dossiers de négociation dans le secteur municipal.
Alors, comme il n'y aura
qu'une seule présentation par la CSN et sa fédération dans le cadre de la présente commission
parlementaire, c'est clair que mes amis de la fédération seront appelés à
intervenir lors de la période de questions, là, pour préciser un certain nombre d'éléments.
Mais c'est quand même important de mentionner que, dans le secteur municipal, la CSN représente 11 200 travailleuses et
travailleurs qui sont répartis dans 188 syndicats qui les
représentent au niveau des municipalités.
D'entrée de
jeu, là, je pense que, si vous avez lu notre mémoire, évidemment, vous
comprenez que, sur le fond, nous
serions évidemment favorables au retrait du projet de loi, dans la mesure où on
considère que le régime des relations de
travail au Québec et même que l'expérience historique des négociations dans le
secteur municipal ne justifient en rien un état ou une politique d'exception comme celle qui est mise sur la
table ce matin, d'autant plus que nous, on considère que le projet de
loi n° 110 repose sur de fausses prémisses.
J'écoutais
attentivement, ce matin, le maire de Québec et le maire de Montréal — et j'écoutais aussi la période d'échange, là — qui prétextent qu'il y a un écart de
rémunération important entre les employés municipaux et les gens de la
fonction publique au Québec, alors que nous, on pense que la fameuse étude de
l'ISQ pose problème au niveau méthodologique, dans la façon dont on utilise les données. D'abord,
c'est important de rappeler que l'ISQ exclut toutes les municipalités de 25 000 personnes et
moins, et ça considère... donc il y a à peu près 96 % des municipalités
qui sont carrément exclues de l'étude
de l'ISQ. Et, par le passé, il y a des études de l'ISQ qui ont démontré, dans
des municipalités où il y avait moins
de 25 000 habitants, que les employés municipaux bénéficiaient d'une
rémunération globale, je dis bien «globale»,
qui était moins élevée que celle des grandes municipalités. Donc, plusieurs
emplois ont été même exclus par l'ISQ
de la méthodologie pour être capable de faire les comparaisons avec
l'administration publique. Et, en bout de ligne, nous, on dit qu'il y a à peu près 17 % des employés de
l'administration publique au Québec qui ont un retard salarial de 18 %
et un écart de 39,5 % avec un pourcentage inconnu d'employés municipaux,
complètement inconnu, parce que cette référence-là,
dans l'étude de l'ISQ, considérant ce que je vous ai dit précédemment, donc,
nous amène loin de l'affirmation qui
est colportée quasiment comme une légende urbaine que tous les employés
municipaux, toutes catégories confondues, auraient presque 40 % de rémunération globale plus élevée que les
travailleuses et les travailleurs qui sont dans le secteur public et la fonction publique. On pourrait même
dire, si on tient compte des périodes de gel salarial qu'on a connues dans le secteur public et des faibles augmentations de
salaire qu'on a connues lors des dernières négociations dans le secteur public, que ce sont les travailleurs puis les
travailleuses du secteur public et des employés municipaux qui accusent un
retard qui est important.
L'autre
prémisse qui est inquiétante, c'est celle sur laquelle on prétend qu'il y a des
conflits de travail. Tu sais, quand
on écoute les maires de Québec et de Montréal, c'est comme si c'était la
pagaille partout dans le monde municipal, au Québec, au niveau des relations de travail, alors qu'au cours des dernières
années, je dirais même depuis à peu près l'an 2000, là, il y a 539 négociations de convention collective qui
ont fait en sorte qu'on a réussi à régler sans problème. Donc, la très grande majorité des conventions
collectives sont négociées sans conflit de travail, on parle de
3,5 conflits de travail sur
16 années, là, de 2000 à 2016. Donc,
contrairement à ce qu'on nous laisse croire, il n'y a pas une situation alarmante ou dramatique en matière de relations de
travail et surtout en matière de conflits dans le monde municipal au Québec. Ça aussi, ça fait partie d'une légende
urbaine qu'il faut absolument déconstruire et ramener, je dirais, dans sa juste
perspective.
Donc, nous,
on pense que la façon dont le projet de loi n° 110 est conçu, là, comme une
action politique d'urgence qui...
fait quasiment qu'on est dans un état d'exception pour pallier un déséquilibre
qui est carrément inexistant et pour agir
sur des tensions qui n'existent pas. Donc, c'est pour ça que la CSN réclame
carrément le retrait de ce projet de
loi.
Bon, évidemment,
vous allez le voir à la lecture de notre mémoire, si jamais
le projet de loi était maintenu, on va souhaiter de revoir, justement,
cette idée-là d'un mandataire spécial, là, qui serait sous la responsabilité du ministère des Municipalités. Vous savez, dans notre histoire, au Québec, puis dans l'histoire
des relations de travail de façon générale,
il y a toujours un équilibre fragile, hein,
entre le capital et le travail, et on a construit les lois du travail, on a
construit un code du travail, au
Québec, au cours des années, pour maintenir justement un équilibre dans les
relations de travail entre les
syndicats, les représentants des travailleuses et des travailleurs et les
patrons. J'ajouterais même, ça a été dit un peu plus tôt, quand on fait affaire avec le ministère de la Santé ou encore
on négocie, actuellement, dans le secteur de l'hôtellerie, à la CSN, bien, ce n'est pas le ministère de
l'Industrie et du Commerce qui va se mêler des relations de travail, au
contraire. Le ministère de l'Industrie puis du Commerce, il va réfléchir
au développement de l'industrie puis du commerce au Québec de façon plus générale, mais ce n'est pas lui qui va s'immiscer
dans les relations de travail. Même chose dans le ministère de la Santé, on ne demandera pas au
ministre de la Santé de s'immiscer... on ne souhaitera pas qu'il s'immisce
dans les relations de travail. Donc,
pourquoi donner au ministère des Municipalités ce pouvoir extraordinaire qui
vient remettre carrément en question
le régime puis le mode de relations de travail qu'on a constitué au Québec au
cours des dernières années et, comme
d'autres l'ont dit précédemment, qui fonctionne très bien, qui permet
justement, notamment sous la
responsabilité du ministère du Travail, de faire des interventions ponctuelles
tant dans le secteur public que dans le secteur privé, quand les parties le demandent, pour être capable,
justement, de trouver un équilibre, puis de trouver des solutions, puis
de trouver un règlement aux différentes négociations de convention collective?
Donc, nous,
on a un problème sérieux avec cette idée-là que le MAMOT va faire autre chose
que de la gouvernance puis de
l'administration générale par rapport à la façon dont les municipalités doivent
évoluer et fonctionner au Québec. Et
on pense que pas plus que le MAMOT que d'autres ministères ne devraient avoir
des pouvoirs qui viennent lui permettre, justement, d'intervenir
directement sur le terrain des relations de travail.
L'autre
élément sur lequel on va souhaiter que la commission parlementaire se penche,
c'est que le projet de loi ne tient
pas compte non plus que l'exercice de négociation, c'est quelque chose qui peut
prendre de temps. Donc, l'imposition d'un
médiateur après une période déterminée de négociation, c'est quelque chose qui
peut bâcler le processus de négociation, alors que, dans le fond, nous, on a toujours considéré qu'il faut donner
le temps aux parties justement de faire correctement la négociation, pour permettre d'atterrir puis
d'arriver à une négociation de convention collective. Mes collègues pourront
vous démontrer tantôt que dans bon nombre de cas on a réussi, quand on a pris
le temps puis on a mis les énergies nécessaires pour être capable d'investir le
terrain de la négociation, d'en arriver à un règlement.
Alors, en
considérant, donc, que le Code du travail prévoit déjà des balises, là, pour
arbitrer la question des différends,
on pense que les principes directeurs qui sont prévus dans le projet de loi
sont superflus et que ce qui existe déjà
dans le Code du travail, ça fait amplement la job. Et c'est pour ça,
d'ailleurs, qu'on demande de retirer l'article 1 et l'article 17,
qui sont, à notre avis, totalement inutiles.
Peut-être
rapidement conclure en disant que, sur la durée des conventions collectives,
bon, nous, à tout le moins, on pense
que la première convention collective devrait durer trois ans, pour permettre
justement de faire les ajustements nécessaires,
puis après ça c'est aux parties de voir si on négocie des conventions de plus
longue durée, mais minimalement, quand
il y a une première convention, on devrait s'en tenir à une convention
collective de trois ans. Et on
considère aussi que... Compte tenu que
le paradigme, je dirais, de la négociation collective dans le secteur municipal a été pas mal chamboulé avec la loi n° 15 sur notamment la
question des régimes de retraite, bien, on pense qu'on devrait laisser tomber la notion d'application rétroactive de la loi puis
de l'appliquer plutôt en fonction de la date de signature des conventions
collectives, plutôt que de fonctionner de façon rétroactive.
Alors, voilà pour les commentaires de la CSN et
de la fédération.
• (12 h 10) •
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup pour votre exposé. M. le ministre, pour
16 min 30 s.
M.
Coiteux : Oui. Merci beaucoup, M. Létourneau. Merci à ceux aussi qui
vous accompagnent, qui vont peut-être répondre
à certaines questions. Mais je vais certainement commencer avec vous, si vous
voulez bien. Et vous m'en donnez l'occasion
encore plus que dans le dialogue qu'on a eu tout à l'heure sur cette question,
est-ce qu'il y a une différence entre
négocier dans le secteur privé puis négocier dans le secteur public, parce que
vous avez utilisé cette image du capital contre le travail. Vous l'avez utilisée, cette image-là, puis je saisis
ça au bond parce que c'est justement ça que j'essaie d'expliquer depuis
le début avec ce projet de loi là. On ne peut pas transposer ça dans le secteur
municipal, selon moi — peut-être que vous avez une autre vision,
puis je voudrais vous entendre là-dessus — parce qu'un gouvernement, ça ne représente pas le capital; un gouvernement,
c'est là pour l'intérêt collectif. Et la vision qu'on a, la vision que j'ai,
certainement, mais la vision qu'on a comme gouvernement, c'est que les
municipalités, ce sont des gouvernements, appelons-les gouvernements de
proximité, là, si on veut, là, c'est sûr qu'ils n'ont pas les mêmes fonctions,
les mêmes devoirs, les mêmes responsabilités et les mêmes capacités
législatives que le gouvernement provincial, bien sûr, mais néanmoins ce sont des gouvernements. Il y a une
démocratie qui s'exprime dans les villes, il y a des gens qui vont voter.
Ils votent un conseil municipal, des
conseillers, ils votent un maire. Ces gens-là sont redevables devant leurs
citoyens et ils ont à prendre des
décisions pas dans l'intérêt d'actionnaires, là, ils ne représentent pas le
capital, ils représentent leurs citoyens. Puis leurs citoyens, bien,
comme c'est le cas pour l'ensemble des gouvernements, ils doivent payer les services publics, puis ce n'est pas facultatif,
payer les services publics, c'est obligatoire. Il faut payer des taxes, les
taxes sont obligatoires.
Alors, la
vision capital-travail dans le secteur gouvernemental, même celui de proximité
que sont les villes, pour moi, ça
m'apparaît être un anachronisme. Si on a déjà pensé ça dans le passé, je pense
sincèrement que ça a été une erreur.
Alors, vous
dites : Le Code du travail est parfait, il est excellent, il ne faut pas
le toucher; il s'applique là-dessus comme
il s'applique avec Bombardier puis les syndicats ou avec d'autres entreprises
privées, y compris des entreprises étrangères installées au Québec, on
devrait transposer cette vision-là dans le secteur municipal, qui est un
secteur gouvernemental de proximité. Moi, je
ne suis pas d'accord avec ça, mais j'aimerais comprendre pourquoi vous, vous
êtes d'accord avec cette vision-là.
M.
Létourneau (Jacques) : Bien, quand on utilise l'exemple des relations
de travail de façon historique entre le
capital ou les grandes entreprises et les travailleuses, les travailleurs, on
réfère directement au régime de relations de travail qui s'est constitué pour permettre... J'insisterais plus sur les
équilibres fragiles entre les deux parties constituantes dans le cadre d'une négociation. Et là, au risque
de vous décevoir, c'est vrai que le gouvernement, qu'il soit national ou
municipal, n'est pas représentant du
capital, dans la mesure où on définit le capital en fonction des entreprises,
mais il a une responsabilité comme
employeur, par contre. Non seulement il a une responsabilité comme employeur,
mais, quand le gouvernement municipal
ou national donne des services à la population, bien, il embauche de la
main-d'oeuvre puis il s'assure de donner une prestation de services de
qualité avec des conditions de travail de qualité.
Alors, nous,
ce qu'on dit, c'est qu'à partir du moment où on vient briser cet équilibre
fragile... Parce que ça ne prend pas
grand-chose. Et ma crainte, avec le projet de loi, c'est qu'on introduise... Il
y a quelqu'un tantôt qui a fait référence au couteau. Bien là, je peux vous dire que le couteau risque de se transférer
de l'autre côté, avec des municipalités, par exemple, qui diraient : Bien, de toute façon, le mandataire
spécial, on fera appel à lui, surtout que la période est tellement
cadrée puis limitée dans le temps, puis ultimement l'Assemblée nationale tranchera.
On veut-u ça comme régime de relations de
travail au Québec? La réponse, c'est non, et encore moins dans le secteur
municipal ou, par exemple, dans le cadre des négociations du secteur
public.
Donc, la
référence, c'est vraiment les équilibres fragiles dans les relations de
travail. Nous, on pense... Il n'y a pas de régime parfait, là, c'est sûr que tu peux avoir des débordements d'un
côté comme de l'autre, à un moment donné, en négociation, mais, de façon générale, on pense que c'est un système de relations
de travail qui fonctionne bien. Et c'est la raison pour laquelle c'est un système de relations de travail qui relève
historiquement d'un ministre du Travail, qui, lui, a une responsabilité indépendante des autres
fonctions que l'État peut avoir, que ce soit en éducation, en santé ou
ailleurs. Et c'est un ministère qui
peut être appelé globalement à intervenir quand il y a un conflit de travail
itou dans le secteur privé.
Donc, c'est pour ça que nous, on dit : Ces
équilibres-là, ils sont fragiles, et, quand tu déséquilibres, tu risques de
provoquer des problématiques que tu n'avais pas dans le passé puis les
multiplier.
M.
Coiteux : Je suis d'accord
avec vous qu'il faut viser l'équilibre, totalement d'accord avec vous,
puis je suis d'accord avec vous que
c'est un équilibre dont on doit se préoccuper parce qu'il est potentiellement fragile, il faut faire attention
à ça. Je suis totalement... Je conviens de ça parfaitement.
Par contre,
j'ai du mal à penser qu'on puisse résoudre cette question de l'équilibre
fragile de la même façon que dans le
secteur public, où il y a un gouvernement redevable vis-à-vis l'ensemble de ses
citoyens, soumettant ses citoyens à l'impôt
obligatoire, puis transposer ça dans le secteur privé ou vice versa puis penser
que c'est la même façon de régler les choses. Moi, j'ai un enjeu avec
ça, puis c'est pour ça que je veux creuser la discussion avec vous, là.
Pourquoi
ça devrait être pareil, les négociations dans le secteur privé, que dans le
secteur public? Pourquoi ça devrait être la même espèce d'affaire, régi
par les mêmes mécanismes, qui ne tiennent pas compte du caractère institution
démocratique et municipalité?
Le Président (M. Auger) :
M. Marcoux.
M. Marcoux
(Denis) : Merci. M. le ministre, moi, j'aurais le goût de dire, parce
que ça a été mentionné tantôt, là, qu'on
a l'impression, comme syndicat, qu'on arrive dans une ville X ou Y, qu'on
est complètement désincarné de la réalité. La vraie vie, là, quand on négocie des conventions collectives, là,
c'est qu'on s'assoit avec une équipe de négociation, qui par ailleurs... Tu sais, on a parlé de la
compétence, là; c'est des bureaux d'avocats, à peu près partout, qui négocient,
là. Donc, il faut éliminer ce
critère-là. Mais, comme vous l'avez mentionné tantôt, dans votre ex-vie, vous
étiez économiste, vous savez très bien que, quand on arrive dans une
municipalité, il y a des marchés de travail locaux puis il y a des dynamiques aussi régionales qui relèvent de la
rémunération qui est payée. Un exemple : à Baie-Comeau, à Saguenay,
il y a des dynamiques régionales, des
déterminants salariaux qui jouent, hein? Et ça, ça fait partie de la vie aussi,
là, O.K.? Donc, toute cette notion-là
de réalités régionales, d'efficacité... Parce que, si on n'est plus capable,
mettons, d'embaucher des gens
spécialisés, là, ça, c'est plus problématique pour les citoyens, parce que
qu'est-ce qu'on est obligé de faire, on est obligé d'aller à sous-contrat, avec tous les problèmes que ça...
C'est là qu'on a des problèmes d'explosion de coûts beaucoup plus
importants. On en parlait tantôt, la construction, là, il y a plein de
responsabilités qui vont revenir au municipal.
Pourquoi? Parce que ça coûte moins cher, ce n'est pas compliqué. Donc, quand on
dit, là, qu'on arrive dans une ville,
dans une région, qu'on fait... il faut viser l'efficience de l'organisation.
Et, si on n'est pas capable d'avoir des conditions de travail attractives pour le monde, bien là, il y a une
panoplie d'autres problèmes qui viennent en compte, et à la fin de la
journée, pour le contribuable, là, je ne suis pas sûr que c'est lui qui est
gagnant.
C'est ça
qu'il faut faire attention. Ce n'est pas désincarné, comme on peut se faire
dire, de toutes les réalités. Puis il
y a d'autres facteurs, tu sais, on sait que la taille des organisations aussi,
ça compte, les réalités régionales. Tout ça, là, ça fait partie, là, des
analyses qui sont faites quand on arrive à une table de négociation dans les
diverses régions, il faut prendre en compte
les réalités régionales. Puis, quand on commence à jouer à l'apprenti sorcier,
hein, on n'a pas des experts en
relations de travail, puis qu'on a du monde qui ne connaissent pas l'ensemble
de la dynamique, moi, je pense qu'on se réserve des lendemains pas mal
plus douloureux pour la population, M. le ministre.
M.
Coiteux : Je vais prendre deux éléments de ce que vous venez de dire
juste pour questionner davantage. Je vais commencer par le suivant, en
tout cas, les statistiques.
J'ai compris, là, M. Létourneau a dit tout à
l'heure : Bien, nous, on n'est pas tout à fait d'accord avec ces statistiques-là. En tout cas, c'est les
statistiques neutres que nous avons, puis elles sont... ils font un travail
très professionnel, de comparables
avec des comparables. Mais, enfin, les statistiques montrent que les conditions
de travail dans le secteur municipal
sont particulièrement bonnes, là, quand on regarde par rapport à
l'administration publique. Même M. Boyer, tout à l'heure, c'est la FTQ, ce n'est pas la CSN, il peut y avoir
une vision différente, mais il a dit : Bien, dans le fond, le problème, c'est que le secteur public devrait
s'ajuster au secteur municipal, dans le fond, c'est un peu ça, alors il ne
contestait pas que les conditions étaient
bonnes dans le secteur municipal. Puis, comme vous trouvez qu'actuellement on a
un bon régime, j'imagine que vous
trouvez que les conditions dans le secteur municipal sont bonnes également.
Alors, il semblerait que ce n'est pas ça, le problème.
Mais je voudrais vous amener sur l'autre
terrain, qui est le suivant, vous avez dit, la question des disparités régionales : Il faut tenir compte des
réalités régionales. Je voudrais vous entendre sur un sujet puis je vais faire
un lien, parce qu'on a eu avant le
maire de Québec et le maire de Montréal, les deux nous ont demandé de retirer
un des critères qui est dans la loi,
qui est celui de regarder aussi les conditions de villes comparables. Est-ce
que vous seriez d'accord avec retirer le critère d'équité externe,
puisque c'est si important de différencier les réalités régionales?
Le Président (M. Auger) :
M. Marcoux.
• (12 h 20) •
M. Marcoux
(Denis) : Bien, moi, j'ai
trouvé ça un peu particulier parce
que l'UMQ elle-même,
hein, elle a un bureau d'évaluation des relations de travail, de toutes les conditions, qui est extrêmement efficace et efficient, et les gens, de façon régulière, ils bénéficient de ça. Je ne comprends pas ça, parce que
même l'UMQ a développé des outils extrêmement performants pour justement faire le contraire
de ce que vous nous dites. Tu sais, des fois, dans la vie, là, il faut
faire attention, là, de, tu sais... quand on est sur la place publique, là,
puis quand on arrive dans la vraie vie, là.
Puis je peux
vous dire que, pour négocier des conventions
collectives dans le secteur municipal,
là, on a près de 200 syndicats, 188,
là, je veux dire, les règlements, dans les régions, là, c'est à la moyenne
provinciale. On parle à peu près de
2,5 %, là, pour l'ensemble des employés, là? On est dans cette moyenne-là
partout, là. Il n'y a personne qui joue avec les poignées de sa tombe, là,
en demandant des 20 % puis des
30 % d'augmentation, c'est ancré dans les réalités régionales.
M. Coiteux : Et sur le critère de
l'équité externe?
M. Fortin
(Richard) : Bien, écoutez,
dans la vie, quand on est à une table de négociation, c'est un des critères
qu'on considère. Alors, évidemment, quand on
négocie, dans une municipalité, et qu'on a l'impression que... soit que l'employeur considère que leur rémunération est
trop élevée, nous, on considère qu'elle n'est pas suffisamment élevée, à
ce moment-là c'est un des critères qui va être utilisé, et là on va y aller
avec des villes de taille comparable, avec une richesse foncière uniformisée semblable, etc. On
avait fait ça, entre autres, dans une négociation à ville de Baie-Saint-Paul,
où on avait fait une étude de 10 villes
comparables au Québec mais de même taille, c'était entre 5 000 et
10 000, avec la même richesse,
etc. Donc, c'est déjà un élément qui est utilisé dans l'argumentaire qui se
développe dans le cadre d'une négociation pour trouver une augmentation
salariale qui est correcte.
Puis, vous
savez, on parle beaucoup du salaire ici, depuis ce matin, puis souvent ce n'est
pas vraiment ça qui pose problème, ce
n'est pas l'endroit le plus difficile où on doit régler, c'est beaucoup sur
l'organisation du travail, les conditions d'exercice du travail, et ce
projet de loi là semble s'adresser uniquement à la question salariale.
Et je m'en
voudrais de ne pas intervenir suite à la question que vous avez posée au
président de la CSN. Vous savez, le
droit de négocier, c'est un droit fondamental garanti en vertu de la charte, et
c'est un plein droit à la négociation, et
je trouvais ça regrettable que des gens qui travaillent pour la collectivité
n'aient pas les mêmes droits que les autres travailleurs à une vraie
négociation de convention collective avec une possibilité de rapport de force.
La charte et la Cour suprême, avec les trois
décisions qu'on connaît, qu'on appelle la trilogie, avec police montée,
Meredith et Saskatchewan, elle ne
fait pas cette distinction-là. Elle parle du droit fondamental à la négociation
pour l'ensemble des travailleurs,
elle ne dit pas, pour les gens du secteur public ou pour les gens qui
travaillent pour une collectivité : Vous, votre droit, il est
altéré parce que vous travaillez pour une collectivité.
M.
Coiteux : Oui, puis c'est un projet de loi qui reconnaît ces
droits-là, bien entendu, mais c'est un projet de loi qui fait quand même la différence entre un
gouvernement qui négocie au nom de l'intérêt collectif puis une entreprise
privée qui négocie au nom des actionnaires, puis face à la capacité de taxer
les citoyens de manière obligatoire, face à
proposer un produit à vendre à des citoyens qui peuvent décider de l'acheter
d'une entreprise concurrente. Nous, on pense
que c'est une différence qui est fondamentale. Et je pense qu'implicitement on
la sent dans toutes les négociations entre
le secteur public québécois et les syndicats qui représentent ces employés,
mais le secteur municipal a été historiquement considéré comme si c'était une entreprise puis que c'était régi par les
mêmes types de mécanisme, fondamentalement, alors ça a créé un déséquilibre entre... pas nécessairement... ce n'est
pas juste une question de rapport de force, c'est entre deux principes,
là, le principe au droit de négocier, les droits fondamentaux d'association,
oui, mais en même temps l'assurance qu'on
sert l'intérêt public, surtout dans le cadre d'une société démocratique, puis
c'est ça qui est dans le secteur municipal.
Donc, moi, je
veux beaucoup vous entendre sur ces questions-là, parce que normalement vous
représentez des gens qui veulent
faire du changement, faire avancer la société, reconnaître l'intérêt public.
Alors, pourquoi, là, ici, vous seriez braqués contre un projet de loi
qui vient faire ça?
M.
Létourneau (Jacques) : Bien, si vous permettez, d'abord, ce n'est pas
vrai que, dans le positionnement, les organisations syndicales, de façon
générale, sont contre le changement. Dans le secteur public puis dans le
secteur municipal, depuis des années on est
de réforme en réforme, de transformation en transformation. Quand l'État, par
exemple, compresse les dépenses dans
les municipalités, ça a un impact, ça, sur les enveloppes budgétaires, puis sur
le régime de relations de travail, puis sur l'organisation du travail.
Alors, ce n'est pas vrai que les syndicats n'ont jamais négocié d'aménagements, que les syndicats n'ont jamais
négocié de particularités aux conventions collectives pour être capables
de permettre justement aux municipalités
puis aux travailleuses puis aux travailleurs de pérenniser les régimes de
relations de travail.
Donc, pour
nous, quand on pose la question du droit, le droit de négocier, ça fait aussi
partie, comme Richard l'a dit, des
chartes, puis il y a le droit de grève aussi. Et notre crainte, avec ce pouvoir
du mandataire, c'est que le mandataire intervienne justement pour
discipliner la relation de travail, en disant : À partir du moment où il y
a risque de conflit, il y a risque, effectivement, d'imposition de convention
collective ou de conditions de travail.
Et, encore
une fois, même s'il n'y a pas beaucoup de conflits de travail qui vont jusqu'à
la grève — on l'a
dit tantôt, entre 2000 puis 2016 il
n'y en a à peu près pas eu — c'est quand même un droit qui est
fondamental. Si tu mets au-dessus de la tête du monde une épée de
Damoclès puis que tu leur dis : Aussitôt que vous allez commencer à parler
de grève à l'assemblée générale, on va faire
la demande d'un mandataire pour venir discipliner le rapport au travail, c'est
un peu comme si, dans le secteur
public, vous nous aviez menacés de décréter en commençant la négo, alors qu'il
y avait des grèves qui se faisaient
de façon tout à fait respectueuse à la fois du Code du travail et des services
publics qui étaient donnés à la population.
Donc, moi, je
pense qu'il faut faire attention à cette idée-là reçue, souvent, et colportée
que les syndicats, ce n'est pas des
acteurs de changement. Les syndicats, là, de façon générale... On se racontait
tantôt... À La Pocatière, quand on a négocié, au niveau de la municipalité, quand Bombardier s'est mis à
avoir des difficultés, ça a eu des répercussions sur la négociation avec la ville de La Pocatière, là. On n'est pas fous à plein temps, là, on est
capables de comprendre la réalité dans
laquelle se déroule le cadre de négociation. Mais en
même temps, quand vous introduisez
des dispositions comme celles-là,
je le vous dis, ça risque de justement briser cet équilibre fragile là, et là vous
pouvez vous retrouver avec des dynamiques
de relations de travail qui vont être beaucoup plus difficiles que
celles qu'on a connues au cours des dernières années.
Le Président (M. Auger) : ...15 secondes.
M. Coiteux : Simplement pour
rappeler que, le mandataire, les syndicats peuvent aussi faire la demande au gouvernement de considérer la nomination d'un mandataire. Donc, c'est symétrique,
hein, il ne faut pas penser que ça ne l'est pas.
M.
Létourneau (Jacques) :
Disons que c'est les villes qui se plaignent plus que nous autres du
déséquilibre en matière de
régime de relations de travail. Donc, je serais quasiment prêt à parier avec
vous aujourd'hui que les mandataires risquent de venir...
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Nous allons poursuivre les échanges avec l'opposition officielle. M. le député de Richelieu, en vous
mentionnant que vous avez 10 minutes à votre disposition.
M.
Rochon : Merci, M. le Président. En tout respect pour la ministre du Travail, c'est quand même hallucinant qu'elle ne soit pas là pour assister à ces consultations sur un projet de loi qui modifiera le Code du travail, dont elle est
la gardienne.
Alors, vous abordez justement dans votre
mémoire, messieurs, cette question d'un projet de loi qui «crée un régime d'exception au Code du travail et aux relations de travail au Québec en déplaçant l'encadrement et la
supervision des processus de négociation — je cite votre mémoire au texte, là — et d'arbitrage du secteur municipal vers une
des parties intéressées au résultat des négociations, soit le ministère
des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire». Pourquoi, vous demandez-vous dans votre mémoire, être parmi les seuls travailleurs de juridiction québécoise pour lesquels les relations de travail ne seront plus supervisées par le ministère
spécialisé en la matière? Et vous répondez à votre propre question en parlant des apparences qui vous
«permettent de conclure raisonnablement que ce transfert de compétences vers le MAMOT a pour but de changer le paradigme
actuel sur lequel repose l'équilibre du rapport de force dans le secteur
municipal». Vous ne vous étonnez donc pas que les municipalités applaudissent
ce projet de loi.
• (12 h 30) •
M.
Létourneau (Jacques) : Ça,
c'est sûr qu'on n'est pas du tout étonnés d'entendre les municipalités comme elles l'ont fait ce matin.
Sur le Code du travail, je veux quand même porter à votre attention que les organisations syndicales, depuis un certain
nombre d'années, sont intervenues auprès du ministère du Travail pour
parfois bonifier, améliorer, je dirais même moderniser le Code du travail. La réponse même d'un des derniers ministres
du Travail qu'on a côtoyé, Sam Hamad, c'était : On ne peut pas toucher au Code du travail parce que, le jour où on touche au code, c'est clair que,
si on en donne aux syndicats, les
patrons vont s'inviter, le bordel va prendre, puis on va casser justement
l'équilibre prévu au code pour être capable de maintenir une dynamique de relations
de travail et de paix industrielle.
Donc, ce que vous soulevez là, c'est fondamental. Effectivement, c'est inquiétant de voir que, par le truchement du projet de loi n° 110, on est en train, justement,
de remettre en question des pans importants du Code du travail.
L'autre chose que je veux signaler, c'est que,
malgré les difficultés qu'on a avec le gouvernement libéral depuis qu'il est au pouvoir, on a quand même, comme mon
collègue de la FTQ l'a dit tantôt, réussi à négocier, dans le secteur public, une entente de bonne foi. Même si le
gouvernement du Québec a découvert 1,8 milliard de surplus, là, récemment,
là, alors qu'à l'époque on était à la
gorge, on a négocié de façon responsable en fonction de la situation des
finances publiques en décembre 2015.
Et on a, dans
notre régime de relations de travail, au Comité consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, qui relève du
ministère du Travail, trouvé des voies de passage pour les régimes à
prestations déterminées, incroyable quand même, on s'est assis avec les employeurs. Contrairement à ce qui s'est passé
par rapport aux régimes de retraite dans les municipalités, où on a été obligés de le faire, sur le terrain, un peu
plus dur, les relations de travail dans les municipalités, au CCTM on s'est assis, patrons, employeurs,
syndicats, pour trouver des voies de passage aux régimes à prestations. Dans
les universités, la même affaire.
Donc, il y a
une logique de relations de travail qui existe dans notre histoire et qui
fonctionne. Et le ministère du Travail,
même dans les municipalités, est régulièrement appelé à intervenir,
conciliation, médiateur, et de façon générale on comprend que ça
fonctionne.
Donc, c'est inquiétant de voir effectivement que
le ministère du Travail ne soit pas associé de près à cette question-là, parce que c'est un peu comme si demain
matin on venait donner au ministre de la Santé des pouvoirs d'intervenir directement dans le domaine de la
santé au niveau des relations de travail, en éducation ou ailleurs. Ce ne
serait pas tenable, là, parce qu'en termes
de responsabilité puis de gouvernance — vous comprenez très bien ce que je vous explique — ça viendrait créer des conflits d'intérêts
majeurs entre les politiques publiques puis la dimension des lois du
travail.
Donc, pour
nous, comme on trouve que le régime actuel... Il n'est pas parfait, là, il n'y
a personne qui dit que c'est la
perfection puis qu'il n'y a pas de débordements des fois, mais honnêtement on
est loin de la situation dramatique qu'on prétend pour, justement,
justifier un coup de force comme celui-là, avec une loi d'exception qui va
venir changer profondément le régime de
relations de travail qui existe puis qui a été débattu de façon sociétale puis
discuté entre les patrons, les syndicats puis les différents
gouvernements.
Le Président (M. Auger) : M. le
député.
M. Rochon : Le ministre aime bien vous amener sur ce qui
devrait distinguer les négos dans les secteurs public et privé, vous demandant notamment si vous abordez
ces négos-là dans le même esprit, hein, au public et au privé. Il y a une distinction, que ne soulève jamais, cependant,
le ministre, entre des négos que vous menez au public et au privé, c'est
celle des regards tournés, quand ces
syndicats négocient au public, et notamment dans le monde municipal, des
regards tournés vers eux de tous les
contribuables des municipalités dans lesquelles se déroulent ces négociations
et qui souhaitent bien que ces
syndicats tiennent compte de leur capacité de payer. N'est-ce pas, en effet,
une distinction fondamentale entre les négos menées au privé et au public que ce
regard des contribuables tourné vers vous dans les pourparlers que vous
avez avec vos vis-à-vis du secteur public, que ce soit municipalité ou
gouvernement québécois?
M. Létourneau
(Jacques) : Bien, je peux en faire un bout, puis, si les collègues
veulent prolonger... Il y a des nuances, évidemment. On ne peut pas
faire du copier-coller d'une entreprise privée versus les différents ordres de gouvernance, qu'ils soient provinciaux, ou
municipaux, ou régionaux, et notamment sur la question des services essentiels,
hein, on n'a pas le rapport aux services
essentiels chez Bridgestone-Firestone qu'on peut les avoir dans le réseau de la
santé et des services sociaux ou dans les
municipalités. Mais il y a une chose, par contre, qui est certaine, c'est que,
quand on négocie, on tient compte de la réalité de l'entreprise et on tient
compte de la réalité gouvernementale et municipale, avec les enveloppes qui sont dégagées par les
municipalités, pour être capables, justement, de négocier. Moi, j'habite à
Montréal depuis 25 ans, là, puis, quand
on agite le fameux compte de taxes, là, qui a doublé en l'espace de
15 ans, puis que j'entendais que
dans une autre époque, à la ville de Montréal, il y avait des contrats
d'asphalte qui s'étaient donnés 40 %
plus cher que ce qu'on aurait dû payer, bien, moi, je le trouvais dur, dur,
dur, le phénomène de l'augmentation du compte
de taxes municipales, pas mal plus que la réalité des conditions de travail des
cols bleus de la ville de Montréal, là, pas mal plus. Mais évidemment,
ça, on n'en parle pas, puis on ne parle pas des compressions budgétaires, même
des dernières coupures qui ont été faites
avec le pacte fiscal pour permettre justement aux municipalités de donner les services, et on
s'en prend toujours aux conditions de travail du monde comme si
c'étaient des conditions inacceptables, alors que, je suis d'accord, effectivement, il faudrait
viser à aller vers le haut, pas vers le bas; il ne faut pas ramener le monde du
secteur public vers le bas, il faut les
ramener vers le haut, en fonction toujours de la capacité, bien sûr, d'un gouvernement puis d'un État, en matière de fiscalité, de payer puis de se donner des
priorités comme société. Et, bien, ça fait partie, ça... Quand tu priorises l'éducation, la santé puis les
municipalités, au Québec, bien, ça fait aussi partie des responsabilités, de donner des bonnes conditions de travail au monde, incluant même des
conditions de régime de retraite, pour éviter que le monde arrive à la
retraite puis qu'ils soient pauvres comme Job.
Je
n'en revenais pas, moi, les préjugés développés dans les médias en général à
l'endroit des régimes de retraite des
employés municipaux, comme si le monde partait à la retraite avec 200 000 $ dans leurs poches, passaient
leurs hivers dans le Sud, puis alors
qu'ils partent avec en moyenne 20 000 $, 21 000 $ par
année. Alors, ce n'est pas vrai, là, que tu t'enrichis. Puis c'est des conditions qu'on peut considérer comme
acceptables parce qu'il y a eu des négociations, il y a des travailleuses et des travailleurs qui se sont
battus à une autre époque, qui se battent peut-être différemment aujourd'hui,
mais qui ont fait en sorte qu'on a donné
minimalement des conditions au monde pour qu'ils aient le goût de donner des
services de qualité à la population.
Donc,
inquiétez-vous pas, en général on tient compte des capacités. On l'a fait dans
le secteur public, on le fait dans le
secteur municipal puis on le fait de façon responsable dans le secteur privé,
dans les entreprises, quand une entreprise est en difficulté.
Le Président
(M. Auger) : 45 secondes. M. le député de Richelieu... M. le
député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci. Écoutez, on a fait beaucoup un débat de chiffres, avec les
différentes positions, par rapport à
ce que l'ISQ est venu déposer, alors j'inviterais le ministre à réfléchir à la
possibilité d'accueillir l'ISQ ici, en commission parlementaire, pour effectivement avoir des
précisions sur sa méthodologie et avoir peut-être, effectivement, cette
possibilité de questionner ces chiffres-là, qui nous amène à se
positionner en fonction de ce qui est véhiculé.
Ma
question, très courte : J'aimerais vous entendre sur, dans le projet de
loi, pourquoi on devrait... ou on ne devrait pas, plutôt, limiter ou
obliger un minimum pour la signature d'une convention collective.
Le Président
(M. Auger) : 15 secondes. Très rapidement.
M. Marcoux
(Denis) : Bien, c'est parce que ce n'est pas de même que ça marche,
parce que des fois on a des problèmes, hein, qui sont très différents.
Je vais vous donner quelques exemples...
Le
Président (M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous
avions. Je dois céder maintenant la parole au député de Blainville, porte-parole de la deuxième
opposition. Et il peut effectivement vous permettre de répondre, il a six
minutes à sa disposition.
M.
Laframboise : ...le temps de...
M. Marcoux
(Denis) : L'entretien et transport de Montréal, c'est chez nous, hein?
On se rappelle, il y a eu des périodes
de mouvements extrêmement importants, des périodes très dures en relations de
travail. Il y a du monde qui a été emprisonné, il y a eu toutes sortes
d'affaires qui se sont passées. Deux ans pour négocier, hein? Là, on a négocié,
voilà quatre ans, un pacte avec la société de transport pour augmenter
l'efficience de l'organisation, avec des aspects monétaires à cette entente-là; ça a pris plus de deux ans. Ville de
Gatineau, on a suspendu les négociations pour une grande période pour
revoir l'organisation du travail voilà quelques années, hein?
Il
y a des caractéristiques qui sont propres à chacune des villes. Je le disais
tantôt, quand on joue à l'apprenti sorcier, on va faire plus de dommages. Puis à la fin de la journée, là, c'est le
contribuable qui est important, moi, je suis d'accord avec vous, M. le ministre, là-dessus, mais, si on
arrive, là, puis on sabote toute la dynamique qu'il y a à l'heure actuelle...
Juste sur les
services essentiels, la notion de prestation de services, là, ça fait
35 ans qu'on vit avec les services essentiels. Pourquoi? Parce qu'on nous disait à l'époque : Il ne
faut pas prendre la population en otage, hein? On est d'accord avec ça. Droit de
lock-out, là, tu ne prends pas moins la population en otage si la ville est en
lock-out. Il y a un équilibre sur le rapport de force. Ça, c'est une
grosse différence avec le privé.
Le Président (M. Auger) : Je
vais céder la parole au député de Blainville parce que son temps s'écoule. Cinq
minutes.
• (12 h 40) •
M. Laframboise : Oui, c'est ça, sinon il va tout le prendre, là.
Bon. Non, mais... Donc, M. Létourneau, M. Forget,
M. Marcoux, M. Fortin, M. Nguyen, merci d'être présents.
Je vous écoutais, M. Létourneau. C'est sûr
que, comme le ministre, par rapport à capital-travail, là, je vous ai entendu, l'entreprise privée, le milieu municipal
doivent se comporter comme un bon employeur, mais autant tantôt, pour le
milieu municipal, ce que je disais par rapport aux propos de la FTQ, les
négociations se sont passées avec le gouvernement
du Québec, mais le gouvernement a toujours le pouvoir d'imposer une loi
spéciale, ce que n'a pas le monde municipal.
Dans l'entreprise privée, l'entreprise a toujours le pouvoir de faire faillite
si jamais les conditions de travail de ses
employés ne sont plus supportables, mais le monde municipal... En tout cas, si
vous ne le savez pas, là... sûrement que
vous le savez, là, une municipalité, au Québec, ça ne peut pas faire faillite,
c'est une créature du gouvernement du Québec.
J'ai connu, dans un temps passé, où un premier ministre a nommé le directeur
général de la ville de Montréal parce qu'à quelque part, à la fin de
l'année, il fallait que le gouvernement du Québec comble le déficit de la
ville.
Donc, on est
rendus à un moment où les négociations que vous faites, avec les lois telles
qu'elles sont, c'est passé date. Il
faut être capable de donner aux villes ce sentiment, au nom des citoyens puis
de leur capacité de payer, qu'elles sont
capables de s'asseoir à une table de négo puis réussir, dans le cadre des
budgets qu'elles ont puis, comme le demandent les villes, voté au
conseil municipal... qu'elles sont capables de prendre les négociations avec
leurs employés. On est rendus là. Et c'est la main que je vous tends parce que,
dans le fond, je le sais, puis c'est parfait, vous avez fait votre travail avec les lois qui étaient là, mais, au
moment où on se parle, on a besoin d'une modernisation de la loi pour que
les villes se sentent en confiance, pour
être capables d'entreprendre des négociations serrées puis correctes, dans la
capacité de payer des contribuables.
Vous ne pensez pas qu'on est rendus là puis qu'on devrait tous ensemble faire
évoluer ce projet de loi là?
M. Létourneau
(Jacques) : Moi, écoutez, j'ai bien de la misère avec le concept de
modernisation, là. Je pense qu'on est
plutôt en train de faire l'inverse puis on va reculer à une époque où
effectivement peut-être que les lois du travail n'étaient pas celles que nous connaissons, puis que c'était beaucoup
plus difficile de négocier les conventions collectives, puis il y avait des conflits de travail. Quand
Denis parlait de l'emprisonnement de dirigeants à la Société de transport de
Montréal, vous avez deviné que ce n'était pas la semaine passée, là, c'était il
y a peut-être une quarantaine d'années.
Donc, nous,
on ne partage pas cette idée-là générale qu'il y a un déséquilibre dans le
rapport de force. À preuve, on n'entend
pas beaucoup de municipalités nous annoncer qu'elles sont sur le point de
fermer les livres. De toute façon, elles
ne pourraient pas fermer les livres, puis c'est une maudite bonne
nouvelle — pardon — parce que ça serait justement de venir remettre en question le droit des
citoyens puis des citoyennes d'avoir des services de qualité puis de se donner
les moyens d'avoir des services de qualité.
Moi, je pense que le régime actuel, c'est un régime qui permet justement de
maintenir ces équilibres-là. Et, si vous déséquilibrez les rapports de force,
vous risquez malheureusement de vous retrouver dans une dynamique où il va y
avoir peut-être plus de conflits de travail qu'on a eus dans le passé.
Donc,
moderniser les lois du travail, je vous l'ai dit tantôt. Quand on posait la
question au ministre du Travail, de
moderniser le code, la réponse qu'on a depuis... moi, ça fait 20 ans que
je fais du syndicalisme, ça fait 20 ans qu'on se fait dire : On ne peut pas toucher au Code
du travail parce que, si on le modernise en fonction des intérêts des
syndicats, les patrons vont
s'inviter, on va être obligés de tout rebrasser ça; laissons le Code du
travail. Et ça, même le gouvernement libéral
qui est actuellement au pouvoir nous a servi cet argumentaire-là :
Laissons le Code du travail comme il est là parce qu'il fait, de façon générale, le travail. Alors,
je ne sais pas pourquoi aujourd'hui on a besoin de revenir sur des aspects
du code pour donner des pouvoirs
extraordinaires à un ministère qui normalement devrait gérer la bonne
gouvernance.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Blainville. Une minute.
M. Laframboise : C'est parce
qu'on a présentement des maires comme le maire de Québec puis le maire de Montréal... Ça ne s'est jamais vu, là, moi, je
suis le monde municipal depuis des dizaines d'années, là, des maires qui sont
prêts à aller au front puis qui veulent un
projet de loi, malgré tout ce que vous dites, là. Puis ils en veulent un, avec
une union des municipalités qui est
solidaire par rapport à ça puis des maires qui ont signé des conventions
collectives puis qui sentent qu'ils
l'ont, le couteau sur la gorge, je veux dire, à quelque part, parce que la loi
fait présentement qu'ils ne peuvent
pas faire autrement, parce que leurs services juridiques leur disent :
C'est la meilleure façon. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'il est temps qu'on change les lois, vous ne pensez pas?
On pourrait le faire ensemble, là, ce serait un bon moment pour qu'on
fasse... au nom des citoyens puis de leur capacité de payer.
Le Président (M. Auger) :
30 secondes. M. Fortin.
M. Fortin
(Richard) : Oui, bien,
premièrement, sur la question des relations de travail, elles se sont
modernisées par elles-mêmes. Il y a
15 ans, 20 ans, il y avait plein de conflits dans le monde municipal
puis dans le monde du transport, et les
gens ont appris à trouver des solutions aux problématiques qui étaient posées,
y compris celle de la rémunération. Alors, dans le monde du transport, il n'y a pas eu de conflit depuis sept ans,
approximativement, alors qu'avant on parlait d'un conflit par année. Donc, elles se sont modernisées
avec l'aide du ministère du Travail et également avec une plus grande
maturité de la part des parties.
Deuxièmement,
la rémunération des employés du secteur municipal, ce n'est pas des gens qui
font 125 000 $, 150 000 $
par année, ce sont des travailleurs de la classe moyenne. Quand on va les
rencontrer, dans le stationnement, ce
n'est pas des Porsche puis des Mercedes. C'est des gens qui gagnent
50 000 $, 55 000 $, des fois un peu moins, donc c'est des
gens... et qui travaillent fort, qui ont une rémunération qui est parfaitement
équilibrée par rapport au travail qu'ils rendent.
Et, sur la question
du couteau sur la gorge...
Le Président
(M. Auger) : Rapidement.
M. Fortin (Richard) : ...les augmentations salariales qui sont
consenties, à l'heure actuelle, c'est des augmentations salariales qui sont équivalentes à ce que le
Conseil du patronat du Québec prévoyait de ce qui devait se donner comme
augmentations salariales en 2016 puis en
2015. Donc, ce n'est pas des gens qui font des hold-up puis qui négocient avec
un couteau sur la gorge...
Le
Président (M. Auger) : Merci. Merci beaucoup. Donc, merci à vous
tous, messieurs, pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux de la commission jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à
12 h 45)
(Reprise à 14 heures)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le
projet de loi n° 110, Loi concernant le régime de négociation des
conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur
municipal.
Nous
entendrons cet après-midi les organismes suivants : le Regroupement des
associations de pompiers du Québec, la
Fédération des policiers et policières municipaux du Québec, la Fraternité des
policiers et policières de Montréal et l'Union des municipalités du
Québec.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Regroupement des
associations de pompiers du Québec. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et par
la suite nous allons débuter la période d'échange. Dans un premier temps, bien vouloir vous présenter, et par la
suite vous pourrez commencer votre exposé.
Regroupement des associations
de pompiers du Québec (RAPQ)
M.
Martin (Ronald) : M. le Président, M. le ministre, membres de la
commission. D'entrée de jeu, nous remercions la commission et ses membres de l'occasion qui nous est donnée
d'exprimer notre point de vue, point de vue franc et, croyons-nous,
constructif.
Je
m'appelle Ronald Martin et je suis président du Regroupement des associations
de pompiers du Québec, le RAPQ, formé des associations de pompiers
accréditées en vertu du Code du travail, qui représente les pompiers de la majorité des grandes agglomérations du Québec,
dont Montréal, Québec, Laval, Gatineau, Longueuil et Terrebonne. Je suis incidemment aussi président de l'Association
des pompiers de Montréal. Nos membres, représentant plus de 3 600 pompiers professionnels, protègent
24 heures sur 24 à longueur d'année un peu plus de 3,5 millions de
citoyens, soit environ 45 % de
la population du Québec. Je suis aussi accompagné à cette table du premier
vice-président du RAPQ, M. Éric
Gosselin, aussi président de l'Association des pompiers professionnels de
Québec, et de Me Claude Leblanc, notre procureur, du cabinet
d'avocats Philion Leblanc Beaudry.
Je
vais laisser maintenant le soin à Me Leblanc de faire la présentation de notre
argumentaire. Nous nous ferons un plaisir et un devoir de répondre
clairement à toutes vos questions. Merci.
M. Leblanc
(Claude) : Merci. Alors, bonjour, M. le Président, M. le ministre,
membres de la commission.
Compte
tenu du temps qui m'est imparti, je vais aller rapidement à l'essentiel du
message que l'on veut vous livrer cet
après-midi. Le projet de loi n° 110, s'il était adopté dans sa mouture
actuelle, va nécessairement entraîner, et sur ce point-là je veux être clair, nécessairement entraîner des contestations
juridiques, contestations juridiques qui, on l'expose dans notre mémoire, mais je vais développer
principalement un seul argument devant vous, je le répète, compte tenu du temps
qui m'est imparti, contestations juridiques basées sur le fait... Et on
s'adresse ici, évidemment, au niveau du processus d'arbitrage chez les pompiers, hein? Dans le projet de loi
n° 110, il y a des dispositions qui touchent d'autres corps d'emploi au niveau des municipalités; mon
propos s'adresse aux dispositions touchant le processus d'arbitrage chez
les pompiers.
Une loi, en principe,
lorsque le législateur décide d'intervenir dans un secteur, quel qu'il soit, en
principe, le législateur se devrait
d'intervenir généralement pour deux raisons principales, soit pour guérir un
mal ou soit pour prévenir un mal.
C'est là une fonction importante du législateur, prévenir ou guérir, pas
réjouir des maires. Le projet de loi n° 110, dans sa mouture actuelle, quant à nous, n'est là
que pour faire en sorte que certains maires qui décrient un système d'arbitrage
depuis plusieurs années aient effectivement satisfaction.
Ce qui est percutant dans le projet de
loi n° 110 — et je
m'adresse particulièrement à vous, M. le ministre — ce qui
est percutant dans le projet de loi n° 110 : toutes les dispositions
qui traitent de l'arbitrage chez les pompiers et chez les policiers, au total on parle d'environ
35 dispositions dans le projet de loi, on fait état dans notre mémoire
que, sur la trentaine de dispositions
relatives à l'arbitrage chez les pompiers et chez les policiers, la majorité de
ces dispositions-là se retrouvent
déjà contenues au Code du travail. On n'a pas innové. On a pris des
dispositions se trouvant dans le Code du travail du Québec et on les a enlevées du Code du travail, c'est
l'objectif de la loi, pour les ramener dans ce fameux projet de loi
n° 110 là.
On
peut se poser la question. Pourquoi? Pourquoi le législateur veut-il retirer du
Code du travail des dispositions pour
les amener dans la loi n° 110? Il y a une explication qui saute aux yeux.
Le Code du travail, actuellement — et c'est l'article 152.1 — est très clair : «Le ministre du
Travail est responsable de l'application du présent code.» Donc, tout ce
qui relève du Code du travail, c'est le
ministre du Travail qui s'en occupe. Le projet de loi n° 110, dans son
article 58 actuel : «Le ministre
qui est responsable des affaires municipales est responsable de l'application
de la présente loi.» Ça semble
banal de dire : Oui, mais on fait juste
changer de ministre. Non. Non. Un processus d'arbitrage, pour
qu'il soit reconnu comme étant
valable par les tribunaux, et là je parle de décisions de la Cour suprême, il y a des décisions de la Cour suprême qui se sont déjà prononcées sur qu'est-ce que devrait être un processus
d'arbitrage mis en place par le législateur pour un
groupe d'employés à qui on a retiré le droit de grève, comme c'est le cas chez
les pompiers et chez les policiers, et le critère retenu, c'est qu'on dit que ce processus-là doit être
raisonnablement perçu, raisonnablement perçu comme étant neutre et
crédible. C'est ça, le critère. Le fait que dorénavant, hein, ce ne soit plus
le ou la ministre du Travail qui va s'occuper
de tout ce qui touche les différends chez les pompiers et les policiers, mais
que ça va être dorénavant le ministre
des Affaires municipales, ça change tout. C'est qui, le ministre des Affaires municipales? Évidemment, M. le
ministre, répondez-moi pas : C'est moi, là, je le sais. Mais en
droit c'est qui?
La
Loi sur le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation
du territoire — et
là je cite la loi — l'article 7
nous dit ceci : «Le ministre veille à la bonne
administration du système municipal dans l'intérêt des municipalités — c'est la loi, là, qui le dit — et [également des] citoyens.» Et, pour s'assurer que le
ministre gère effectivement dans
l'intérêt des municipalités, on va même prévoir qu'il doit, et je suis au cinquième
alinéa de l'article 7, «aider et soutenir les municipalités dans l'exercice de leurs fonctions». C'est ça, le ministre des Affaires municipales. Le ministre du Travail, ce n'est pas ça. Ce n'est pas banal, parce que, dans le projet de loi tel qu'il
est, le ministre des Affaires
municipales, c'est quoi, les pouvoirs qu'il a en lien
avec le processus d'arbitrage? L'article 10, pour ne
citer que celui-là : «Le conseil
de règlement des différends...» Parce qu'il faut comprendre qu'avec le projet de loi
n° 110 le système d'arbitrage traditionnel avec les arbitres nommés en vertu du Code du travail, sous la
responsabilité du ministre du Travail, après consultation des parties, c'est évacué, ça n'existe plus. Ce
qu'on a va avoir dorénavant, c'est que le ministre qui est en charge d'aider et soutenir les municipalités dans l'exercice de
leurs fonctions va être le ministre qui va
recommander la nomination des arbitres qui devront composer le fameux nouveau conseil de règlement de
différends. C'est ça, la réalité. C'est ce qu'amène le projet de loi n° 110.
C'est
trop simple de dire : Oui, mais, écoutez, on a préservé l'arbitrage de différends chez les policiers et les pompiers, là, dans le projet de loi n° 110. Non. Ce qui est le coeur de l'arbitrage des
différends chez les policiers, chez
les pompiers, au Québec, depuis plusieurs dizaines d'années, ce n'est
pas nouveau, là, ce n'est pas nouveau, c'est que le processus de nomination des
arbitres — c'est les arbitres qui entendent les parties
après, hein? — se fait
avec le ministre du Travail, après
discussion entre les parties, mais c'est surtout que, si le ministre du Travail
décide de la nomination de certains arbitres,
on sait que ce n'est pas le ministre qui est là pour soutenir les municipalités
dans l'exercice de leurs fonctions.
Autrement
dit, le ministre qui va nommer les arbitres, ultimement, est le même ministre
qui prend parti pour l'une des deux
qui vont être en arbitrage. C'est aussi simple que ça. Et, les critères de la
Cour suprême en ce qui concerne le fait qu'on doit raisonnablement croire que le système est neutre et
impartial, ça ne rencontrera pas ce critère-là. Et on ne veut pas vous dire : On va contester la loi pour
la contester. On est ici devant vous aujourd'hui pour être très clairs sur le
fait que, oui, on va la contester, et
on vous dit même comment on va la contester. Il n'y aura pas de cachette. On
vous le dit, comment on va la contester.
• (14 h 10) •
Et
pourquoi le législateur s'est-il senti obligé de déposer un projet de loi comme
celui-là? On va vous dire — et j'ai entendu ce matin
M. le ministre dans une mêlée de presse que vous avez eue — qu'entre autres le système d'arbitrage
de différends chez les pompiers et les policiers devait être modernisé et
ramené au XXIe siècle. Oui.
On a déposé... Dans
notre mémoire, on va parler d'une ville où le maire est l'un des principaux,
hein, partisans — une minute — de la modification proposée par le projet de
loi n° 110, le maire Labeaume, le maire Labeaume qui est appuyé dans ses démarches par son
lieutenant, le maire Coderre, hein, puis qui demande ces modifications-là. Le
maire Labeaume est maire de la ville de
Québec depuis 2007, on est au XXIe siècle. Le maire Labeaume a vécu,
depuis qu'il est en poste, un seul
arbitrage de différends, celui des pompiers de la ville de Québec, décision
rendue en 2014. Quand la décision est
sortie, concernant les pompiers de la ville de Québec, en 2014, le maire
Labeaume — et on vous a mis l'extrait dans nos différents onglets, c'est l'onglet 5 — le maire Labeaume, et je cite, disait : «La décision de l'arbitre reconnaît
la légitimité et la pertinence des enjeux propres à la ville [de Québec]
pourtant déjà acceptés par les autres employés...» Régis Labeaume dans un communiqué de presse : «Le fait que les
enjeux des régimes de retraite et de la rémunération aient été
rééquilibrés pour cette période est une excellente nouvelle pour les
contribuables.»
Le Président (M.
Auger) : Merci, maître, c'est tout le temps que nous avions. À moins
qu'on ait un temps supplémentaire pour continuer la représentation, M. le
ministre. Sinon, la parole est à vous.
M.
Coiteux : Bien, s'il restait...
Pour terminer la phrase et le paragraphe, peut-être. Je n'ai pas de problème avec ça, là.
M.
Leblanc (Claude) : Oui, finir la phrase et le paragraphe.
Le Président (M.
Auger) : M. Leblanc.
M. Leblanc
(Claude) : Ça va?
Le Président (M.
Auger) : Allez-y.
M. Leblanc (Claude) : Alors, pour le seul cas d'arbitrage que le maire Labeaume a vécu depuis qu'il est en poste,
en 2007, il s'est déclaré satisfait de la sentence que l'arbitre a rendue.
Je
finis le paragraphe. Il y a un mythe sur le fait que, présumément, et on l'a encore entendu ce matin, les arbitres
n'exerceraient pas leurs pouvoirs
correctement. Mais en vertu de quoi? Sur quelle étude le gouvernement se base,
outre des propos du maire Labeaume,
répétés par le maire Coderre? Ça vient d'où, ces mythes-là? La dernière... Je
vous le répète : La seule décision qu'a vécue le maire Labeaume, il
était satisfait.
Il
n'y a pas lieu d'intervenir dans le processus d'arbitrage chez les pompiers et
les policiers. Il y a peut-être lieu à ce
qu'il y ait des modifications, par exemple, en ce qui concerne le délai à
l'intérieur duquel doit se tenir un arbitrage, les associations de pompiers, les associations de policiers sont
d'accord avec ça. Il y a peut-être lieu de rafraîchir la liste des arbitres. Encore ce printemps, la ministre du
Travail a nommé cinq nouveaux arbitres, on est toujours ouverts à ces choses-là. Mais de sortir du Code du travail les
dispositions sur l'arbitrage des policiers et des pompiers et de confier ça au
ministre qui est, en vertu de la loi,
responsable d'aider les villes, d'aider les municipalités, ça ne se fait pas
sur le plan de la garantie que l'on a au niveau des chartes. Merci.
Le Président (M.
Auger) : Merci. M. le ministre, pour à peu près
14 min 30 s.
M.
Coiteux : Me Leblanc,
d'abord, merci pour la plaidoirie, hein, parce que c'est un mémoire,
mais en même temps c'est une plaidoirie aussi, je pense,
sur la forme. Et on ne peut pas... Autant moi, j'ai été économiste dans une vie
antérieure, vous êtes toujours avocat. Donc, notre façon de présenter les
choses en est teintée, et c'est normal.
Je
voudrais juste commencer par une question : Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait
qu'une municipalité est un gouvernement?
M. Leblanc (Claude) : Je suis d'accord avec le fait qu'une municipalité est un organisme
pour lequel les gens qui représentent
sont démocratiquement élus par la population, effectivement, et à qui le gouvernement provincial a
donné un certain nombre de responsabilités, une délégation de pouvoirs.
M. Coiteux :
Mais est-ce que, selon vous, c'est une forme de gouvernement?
M. Leblanc (Claude) : C'est une forme... Ce que je vous dis, c'est que, le gouvernement, il n'y en a pas 10; il y a le
gouvernement fédéral, il
y a le gouvernement provincial. On ne
parle pas des municipalités comme étant un gouvernement. On parle des municipalités comme étant un organisme
municipal, donc des gens, un
organisme, à qui on a confié un
certain nombre de responsabilités que vous, comme gouvernement, que l'Assemblée nationale décide de bien vouloir
déférer à ces municipalités-là, de la même façon qu'on va élire, par exemple, je ne sais pas combien de temps que ça va durer, mais, pour le temps...
au niveau des commissions scolaires, on va élire des commissaires. Est-ce qu'on peut dire qu'une commission scolaire est un gouvernement? Je pense qu'au niveau constitutionnel on ne peut pas parler de gouvernement. On peut parler effectivement d'organisme légalement constitué à qui le gouvernement décide de déléguer un certain nombre de responsabilités. C'est
ce que je peux vous répondre, M. le ministre.
M. Coiteux :
Mais qui a certainement certains des attributs d'un gouvernement, dont le
pouvoir de taxer.
M. Leblanc
(Claude) : Qui a un certain nombre de pouvoirs...
M. Coiteux :
Encadré par les lois, bien sûr, mais dont le pouvoir de taxer.
M. Leblanc (Claude) : Tout à fait. Mais ça n'en fait pas un gouvernement. Le gouvernement, je vous le répète, au sens de la constitution, il y a le gouvernement fédéral, il y a le gouvernement provincial... comme les commissions scolaires ont un pouvoir de
taxation, mais on ne peut pas dire que la commission scolaire est un gouvernement. On peut dire qu'effectivement une commission scolaire comme une municipalité sont des organismes
créés par le gouvernement du Québec pour le bon fonctionnement d'un certain
nombre de services qui doivent être offerts à la population, entre autres
choses.
M.
Coiteux : Oui. Donc, une
entité démocratiquement élue, redevable devant sa population,
répondant, donc, à des intérêts
d'ordre public dans un certain nombre de domaines qui sont de la compétence des
villes et avec un pouvoir de taxation. Bon, on peut jouer sur les mots,
mais c'est une forme de gouvernement, c'est une forme de gouvernement.
M. Leblanc (Claude) : Bien, déjà,
votre question n'est pas la même. Là, vous êtes rendu avec une forme de gouvernement.
Moi, je vous dis... Il n'y a pas 10 formes de gouvernement, M. le ministre. Il
y a des gouvernements, il y a un
gouvernement fédéral, il y a un gouvernement
provincial. Le reste, c'est des
organismes. Une municipalité, c'est un organisme que le gouvernement a
créé, à qui on a donné des pouvoirs.
Vous pourriez
décider de donner des pouvoirs de taxation à d'autres organismes. Est-ce que
vous en feriez un gouvernement? La réponse, c'est non.
Alors, je ne
joue pas sur les mots, je réponds le
mieux possible à la question telle
que formulée. Vous aimeriez que je
vous dise qu'une municipalité, c'est un gouvernement; je vous
dis : Une municipalité n'est pas un gouvernement. Ça, c'est
clair.
M. Coiteux : Alors, moi, je
l'appellerais un gouvernement local, un gouvernement de proximité, mais c'est certainement une entité démocratique, redevable
devant ses citoyens, qui doit rendre des services puis qui a un pouvoir
particulier qu'une entreprise n'a pas, qui est celui de taxer les citoyens.
Et c'est un
peu normal, dans un contexte comme celui-là, qu'on se pose la question :
Est-ce qu'on a le régime approprié pour ce type de gouvernement local qui a ce pouvoir de taxation? Puis j'ai posé la question à
d'autres groupes qui sont venus ce matin, particulièrement du côté des
syndicats : Est-ce que vous négociez avec une entreprise privée comme vous négociez avec un gouvernement? Et la raison pour laquelle le régime de négociation actuel nous
apparaît peu approprié à la réalité
d'un gouvernement local, c'est
précisément celle-là : C'est un régime qui est conçu, et ça a été dit ce matin par d'autres qui sont venus présenter
leur position... c'est un régime qui est conçu en vertu d'équilibrer un rapport entre capital et travail. Or, la ville
représente le capital et les actionnaires ou elle représente l'intérêt public,
avec un pouvoir de taxation obligatoire sur ses citoyens? Vous
comprenez?
Alors, c'est ça,
la prémisse de base, là, derrière un projet
de loi comme celui-là, c'est ça qui
est la prémisse de base. Et ça, je ne vous ai pas entendus là-dessus,
j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Leblanc
(Claude) : Absolument.
Au niveau des policiers et des pompiers, hein, on s'entend qu'il s'agit là de deux services publics,
hein, qui sont essentiels à la population. La question n'est pas de dire : A-t-on
les moyens d'éteindre les feux,
ou : A-t-on les moyens de faire en sorte que la criminalité
diminue, hein? On est dans un domaine de services publics, hein, où... Même, au niveau de l'entreprise privée, l'entreprise privée, ce n'est pas ça. Les services d'incendie,
les services de police, c'est des domaines
qui sont très particuliers, à ce point particuliers, M. le ministre, que le législateur, depuis
les années 40, leur a dit : Vous autres, là, le droit de
grève, vous n'en aurez pas, vous ne pouvez pas cesser, hein, de donner les prestations que vous avez à donner à
la population, c'est au coeur des services auxquels les
citoyens ont le droit d'avoir. Alors, toute la notion d'entreprise
privée, là, c'est clair qu'on n'est pas là.
À partir du moment où, cependant, et c'est là où
j'en suis... À partir du moment où on leur a retiré ce droit de grève là, on a mis un mécanisme en place qui était
différent, qui n'a jamais été contesté devant les tribunaux... On n'a jamais eu de décision qui disait que le système
n'était pas bon, et là on arrive, en
2016, avec une prémisse qui dit : Oui, mais le système a besoin d'être modernisé. Pourquoi?
Qu'est-ce qui, dans le système
d'arbitrage de différends chez les policiers et les pompiers, nécessite,
en 2016, une opération de sabotage du régime comme celle qui est proposée dans le projet
de loi n° 110? Ça vient
d'où? Ça vient de la pression d'un certain nombre de
maires influents et d'un pacte fiscal où...
Puis les liens ont été faits. Puis, M.
le ministre, je ne vous ferai pas de
cachette, on les fait aujourd'hui devant vous, on va les faire devant d'autres instances si le projet de loi est adopté, hein? On a fait ce projet de loi là parce qu'on sait qu'au
niveau du pacte fiscal, bien, il y a de l'argent qui a été coupé aux municipalités, puis on dit aux municipalités : Bien, on va vous donner des outils pour essayer de récupérer cet argent-là,
puis entre autres en espérant que nos outils soient assez efficaces pour
faire en sorte qu'au niveau du coût de main-d'oeuvre, bien, vous le récupériez.
Mais ce n'est pas vrai que le système
d'arbitrage chez les pompiers et les policiers a besoin d'être ramené au XXIe siècle. Il y a peut-être
des maires qui ont besoin d'être ramenés au XXIe siècle, mais pas le système.
Le système fonctionne depuis les années... fonctionne bien
depuis plusieurs années, depuis plusieurs dizaines d'années.
On n'a pas une seule étude, M. le ministre... C'est ça qui est inquiétant. Il y a
des propos politiques qui ont été dits, mais il n'y a
pas une seule étude, au niveau des
policiers, des pompiers, qui démontre que le système d'arbitrage de
différends est inadéquat, il n'y en a pas. Et on cite dans le mémoire
quatre commissions d'enquête qui se sont penchées sur le système, qui ont proposé, au fil des ans, des modifications. Pour certaines, ça a été appliqué. On l'a modernisé, le système,
au fil des ans. Ce n'est plus de la
modernisation, qu'on fait, c'est de la démolition, on dit : On n'en veut
plus. Le maire Labeaume vous l'a dit
ce matin : Les arbitres, ce n'est plus bon, ça rend des décisions — je
ne me rappelle pas de l'expression — couci-couça...
ou, enfin, ça ressemblait à ça, ça finissait par «a» puis ça commençait par
«i», mais, je veux dire...
• (14 h 20) •
M. Coiteux : Je vais vous prendre au
mot. Vous avez...
M. Leblanc (Claude) : «Wishy-wisha».
Bon. Mais ça, ce n'est pas très juridique, du «wishy-wisha».
M.
Coiteux : Non, mais vous
avez parlé, tout à l'heure, de l'importance que le mécanisme d'arbitrage soit neutre,
soit basé sur des critères objectifs, vous avez parlé de tout ça. Il se trouve qu'il
n'y a qu'un côté, là, qui dit que ça fonctionne
bien, il n'y a qu'un côté qui dit qu'il ne faut pas que ce soit changé. Donc,
en quelque part, il y a un malaise profond.
Il y a plus que 1 100 municipalités, au Québec, puis il n'y en a pas
une qui ne dit pas que le mécanisme doit être revu, il n'y a pas une qui
ne dit pas qu'il y a un malaise à l'heure actuelle.
Donc, de
votre côté, il n'y a rien à changer, le statu quo est excellent, mais les
1 100 municipalités... Puis ce n'est pas juste un employeur banal, là, une municipalité, ils représentent des
citoyens. Puis, quand ils négocient avec les pompiers, avec les policiers, avec les cols bleus et les
cols blancs, ils négocient dans l'intérêt de l'ensemble de ses citoyens. Ce
n'est pas un
acteur banal. Quand il y en a 1 100 qui nous disent qu'il y a un problème
puis quand on constate... Puis là on ne va pas commencer à chaque catégorie, parce qu'on a plus de mal à comparer
les pompiers provinciaux avec les pompiers municipaux. Mais néanmoins,
quand on prend l'ensemble de la rémunération dans le secteur municipal, c'est
un fait objectif, ça fait des décennies que
ça augmente plus vite que dans le secteur public québécois. Alors, il y a un
problème.
Alors,
nier le problème, c'est donc de dire... Les gens tombent des nues parce que
tout d'un coup on apporterait des
modifications et une modernisation, mais il y a un problème, il est perçu par
plus de 1 100 municipalités puis il est perçu dans les statistiques. Et c'est assez
sérieux comme problème. Ce n'est pas né du pacte fiscal, ça, ça fait des
décennies que ça existe. Mais à un moment donné il faut avoir le courage
de regarder les choses.
Alors,
je vous écoute, et vous me dites : Il n'y a pas nécessité de changer les
choses. Vous n'êtes pas seuls, il y a quelques groupes qui défendez ça,
mais la vaste majorité des citoyens du Québec, représentés notamment par les municipalités qui ont été... les maires, les
conseillers qui ont été élus, nous disent depuis longtemps, pas depuis le pacte
fiscal, nous disent depuis longtemps qu'il y a un problème.
Alors,
de temps en temps, le gouvernement doit regarder les choses puis se poser la
question : Est-ce qu'on a le bon
régime de négociation dans ce cas-ci? Nous, on pense que non. C'est pour ça
qu'on propose cette loi-là. Ça n'a rien à voir avec des intentions comme vous nous les prêtez. C'est l'intention
de moderniser dans le sens de l'intérêt des citoyens, pas l'intérêt des maires, l'intérêt des citoyens
qui habitent dans les villes, y compris les pompiers et les policiers qui
vivent dans les villes. Et le projet de loi, de ce point de vue là, vise
un équilibre.
Le Président (M.
Auger) : M. Martin.
M. Martin
(Ronald) : Écoutez, avec tout le respect, je ne partage pas le même
point de vue. Historiquement, probablement
avant les refontes qui ont eu lieu au Code du travail pour — je vais utiliser le terme — moderniser l'arbitrage de différends,
qu'il y a eu dans le milieu des années 90... On ne peut plus parler comme
ça.
Vous
avez dit «pompiers provinciaux». Des pompiers provinciaux, ça n'existe pas. Des
comparables au niveau des pompiers,
il n'y en a pas, au Québec, il n'y en a pas. Alors, quand les maires font
référence à l'Institut de la statistique pour le 40 %, on ne se sent pas,
vraiment pas visés par ça. Et, quand le maire Coderre, ce matin, dit : Il
faut enlever l'équité externe, avec
quoi qu'on va se comparer? Des pompiers, c'est des pompiers. On peut les
mesurer en fonction de soit la population, les appels qu'ils ont, le
genre de services qu'ils ont.
Mais
nous, à notre sens, ce qu'on partage — et je ne vous demande pas d'être d'accord
avec nous — le
système d'arbitrage, depuis qu'il a
été modernisé, dans le milieu des années 90, fonctionne. Et, quand il y a eu un
problème, on a toujours été
interpelés par la ministre du Travail ou le ministre du Travail et on a
discuté. On est arrivés à un consensus, qui a été formé à la demande de M. Morency, sous-ministre des Affaires
policières à la Sécurité publique, et Mme Suzanne
Thérien, qui était sous-ministre au Travail, on est arrivés à un consensus. Pas
un consensus avec le milieu syndical; avec les associations patronales
municipales et les municipalités. On ne voit rien de ça.
On est prêts à regarder les choses, de moderniser
dans le sens... le temps. Parce qu'ils nous disaient, dans le temps, les associations patronales et les villes :
Le système d'arbitrage, dans des grosses agglomérations, prend trop de temps.
Je crois bien. Quand tu arrives avec une convention collective complète sur la
table, bien, c'est sûr que ça prend plus que 120 jours. Et on voulait raccourcir ça et commencer à négocier
avant l'expiration de la convention collective, et il y a eu consensus
là-dessus, M. le ministre.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Coiteux : Vous me permettrez une question un petit peu plus
spécifique. Parce que, là, jusqu'à maintenant, on a une discussion au niveau des grands principes de base. On a un
désaccord sur le fait que, semble-t-il, peut-être... En tout cas, j'interprète
qu'on a un désaccord sur le caractère de gouvernement de proximité d'une ville.
Donc, vous voudriez qu'on le traite
comme un employeur comme un autre; nous, on ne pense pas que c'est un employeur
comme un autre.
Mais
je veux aller plus spécifique, maintenant, parce que vous avez parlé de
l'équité externe. Donc, pour vous, c'est un critère important.
Est-ce
que le critère de la capacité de payer des contribuables de la ville devrait
être aussi un critère important dans l'arbitrage?
M.
Martin (Ronald) : Il est
déjà dans le Code du travail, présentement, et plusieurs arbitres en ont tenu
compte et surtout dans les arbitrages
récents. Et on l'a vécu à Montréal, les pompiers de Montréal, avec l'arbitrage des
années 2007 à 2009. L'arbitre, François
Hamelin, a beaucoup misé là-dessus, sur ce critère-là. Alors, il est
déjà dans le code, et on ne l'a pas contesté.
Le Président (M.
Auger) : Deux minutes, M. le ministre.
M.
Coiteux : Mais, la capacité
de payer n'étant pas la même d'une ville à l'autre, la situation
fiscale n'étant pas la même d'une
ville à l'autre, d'une communauté à l'autre, d'une région à l'autre... Vous
avez dit tout à l'heure : Un pompier, c'est un pompier, c'est un pompier, c'est un pompier, mais la capacité
de payer, elle peut différer d'un endroit à l'autre. Est-ce que
vous trouvez que cette caractéristique-là, capacité de payer, est pleinement
prise en compte dans les mécanismes d'arbitrage actuels? Parce que ce
n'est pas ça qu'on entend.
M. Martin (Ronald) : Je vais laisser
Me Leblanc répondre à la question, il brûle des lèvres de répondre.
Le
Président (M. Auger) : 1 min 30 s, maître.
M. Leblanc (Claude) : O.K. Le problème de la notion de la capacité de payer
est le suivant. Ça a déjà été abordé, d'ailleurs, dans certains des
mémoires, les quatre mémoires dont on vous a parlé, ça a déjà été suggéré
d'inclure, cette notion-là, mais on en est toujours... les comités qui
se sont penchés sur cette question-là en sont toujours arrivés à la conclusion, particulièrement chez les pompiers et
les policiers... Comment la capacité de payer des citoyens va-t-elle être
prise en compte par un tribunal quand va
venir le temps de décider que l'on doit éteindre des feux et contrôler la
criminalité? Comment est-ce qu'on va réussir? On va demander à des tiers, des arbitres de définir des
notions aussi vagues? Ça se dit peut-être bien dans un discours politique, «il faut respecter la capacité de payer», mais, quand vient le temps de
transcrire ce discours politique
là par des décisions, on fait quoi avec cette notion-là? Un arbitre va venir
dire : Bien, on va couper 50 pompiers
à la ville de Montréal, les citoyens n'ont plus la capacité de les
payer. Imaginez-vous ce que ça va donner.
Vous
comprenez? On est dans des services publics de première ligne. Ce qui est prévu
au niveau de l'arbitrage de différends, ce n'est pas
pour tout le monde, c'est les policiers et les pompiers, à cause de la nature
du service.
Alors,
cette fameuse notion là de capacité de payer, les arbitres vont effectivement regarder quelle est la situation
financière d'une ville. Ils le font depuis 40 ans.
Le Président (M.
Auger) : Merci, Me Leblanc. Nous allons poursuivre avec l'opposition
officielle pour une période de 10 minutes avec le député de Richelieu.
M. Rochon :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.
Alors,
j'ai écouté avec grand intérêt votre plaidoyer et j'en ai, comme le ministre,
apprécié la qualité de livraison. Je
ne trouve pas non plus banal, comme vous, que la responsabilité des relations
de travail en matière municipale passe de la
ministre du Travail — qui
est absente, et pourtant on est en
train de modifier un code dont elle
est responsable — au ministre des Affaires municipales,
je ne trouve pas ça banal.
Les
maires estiment par ailleurs que les intérêts des payeurs de taxes seront ainsi
mieux servis. Vous avez un peu élaboré
là-dessus, mais j'aimerais vous réentendre. Est-ce que c'est une évaluation...
Vous savez que c'est une évaluation, là, celle selon laquelle les intérêts des payeurs de taxes seront ainsi
mieux servis... vous savez que c'est une évaluation à laquelle lesdits payeurs de taxes ne pourront qu'être
sensibles. Est-ce qu'on leur fait miroiter quelque chose de réel? Est-ce de la
poudre aux yeux? J'aimerais vous entendre là-dessus.
• (14 h 30) •
M. Leblanc (Claude) : Merci, M. le député. Le problème du projet de loi n° 110, c'est
qu'il risque d'atteindre exactement ce que vous venez de décrire. Et
c'est là que le bât blesse.
Quand
un gouvernement met en place un système d'arbitrage... Les décisions de la Cour
suprême, là, ce n'est pas moi qui les ai écrites, là, loin de là, hein?
Quand la Cour suprême dit que le système doit être perçu comme neutre et impartial, elle fait référence au fait qu'on ne
doit jamais penser qu'un tribunal, qu'un système d'arbitrage est là pour servir
les intérêts de l'une des parties ou du
gouvernement, on en parle dans les décisions de la Cour suprême, l'une des
parties ou le gouvernement. Or, là, pour permettre aux municipalités
d'obtenir éventuellement des réductions de coûts de main-d'oeuvre, on met sur pied un tribunal en nommant comme ministre
responsable de l'application de ces règles-là le ministre qui est là pour aider les municipalités. C'est là que le bât
blesse, vous comprenez? C'est justement le danger, c'est que les municipalités obtiennent ce qu'elles
veulent par le biais de ces tribunaux-là, et c'est ce que la Cour suprême
défend.
Ne
nous embarquons pas encore une fois dans des débats juridiques, vous allez
dire, ça fait peut-être votre affaire, vous
êtes avocat, mais je ne suis pas ici pour ça. Je suis ici pour prévenir le législateur, de dire : Si vous faites
ça, vous ne respectez pas les enseignements pourtant bien connus de la Cour
suprême du Canada, déjà rendus en 2003, répétés en 2015. C'est ce que
j'ai à vous répondre, M. le député.
M. Rochon :
C'est très clair. Je vais laisser mon collègue...
Le Président (M.
Auger) : M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci. Ce matin, on a entendu un maire, entre autres, nous exposer
qu'on avait vécu un véritable bordel
dans les négociations ou du moins dans les relations de travail. En quoi, selon
vous, ce projet de loi là pourrait éviter ce soi-disant bordel?
M. Leblanc
(Claude) : En rien. Écoutez, le projet de loi n'est pas là, c'est
clair, quant à nous, pour régler un problème
de relations de travail. Et là, je le répète, je parle spécifiquement de
l'arbitrage chez les policiers et les pompiers qui existe. Comment voulez-vous résoudre un problème qui n'existe pas?
Il n'est pas là, c'est des discours politiques. M. le ministre a terminé tout à l'heure en disant : Vous n'êtes
presque pas corrects de nier le problème. Mais quel problème? Oubliez le discours. Qui... Les
1 100 maires, c'est quoi, les exemples qu'ils sont venus vous donner
de décisions arbitrales chez les
policiers ou les pompiers, depuis 1990 — on va partir de là, ça va faire
25 ans — qui
n'ont pas fait leur affaire? Vous comprenez?
Alors, non, il n'y a
pas de... Ça, ça ne réglera rien. Ça va en créer d'autres, oui.
M. Ouellet : Ce qu'on a entendu, ce
matin, c'était la présomption qu'un arbitre rendait des décisions plus favorables du côté syndical versus du côté de
l'employeur. En refondant le Code du travail et en créant ce fameux conseil
des différends, on
enlève l'arbitre unique et ses deux assesseurs et on le remplace par un conseil
nommé de trois personnes. Avec votre
éloquence et surtout votre pedigree dans le domaine du droit, j'aimerais vous
entendre en quoi la nomination de
trois personnes mais surtout ayant une expérience reconnue en relations de
travail ou dans le domaine municipal ou économique serait mal servir le
droit du travail.
M. Leblanc (Claude) : Le système actuel est composé d'un arbitre assisté de deux assesseurs,
donc on a déjà un tribunal de trois,
O.K.? C'est une chose que de venir affirmer... Parce que, je vous le répète,
quand on se pose la question : Pourquoi remplacer ça par le fameux
nouveau conseil, là?, le système actuel, il n'y a pas un exemple... C'est
facile d'avancer des... de dire des choses du
genre : Écoutez, ce n'est peut-être pas partial; les arbitres, on ne les
aime pas. Mais sur quoi on se base?
Le
nouveau système qu'on crée, on n'est même pas sûr... On sait que c'est le
ministre des Affaires municipales qui ultimement va faire la recommandation, on
ignore de quelle façon, évidemment, ces sélections-là vont se faire. On dit : Il faut que... ça prend des gens qui
sont compétents. Mais, la compétence, en quoi on ne l'a pas... pourquoi est-ce
qu'on ne l'a pas déjà dans le Code du travail?
Encore au mois de mai
2016, M. le député, ça ne fait pas longtemps, il y a cinq nouveaux arbitres qui
ont été nommés par le ministre du Travail,
et le ministre du Travail, pour nommer ces cinq nouveaux arbitres là, a obtenu
l'accord des syndicats de pompiers,
des syndicats de policiers et des représentants de l'Union des municipalités du
Québec, ce n'est pas rien. On va nous
dire qu'on a nommé cinq personnes incompétentes? On va nous dire qu'on a nommé
cinq personnes qui ont un parti pris? Ça sort d'où? Puis ça, je vous le
répète, là, ce n'est pas des nominations qui remontent à 1991. Mai 2016. On
vient de les faire, ces nominations-là.
Alors,
je ne vois pas en quoi ce nouveau système là, que l'on ne connaît pas mais dont
on connaît, cependant, que la composition va être décidée par le ministre des
Affaires municipales, ça va régler un problème, je vous le répète, qu'on
n'a de toute façon pas identifié encore
aujourd'hui. Ce n'est pas que je nie le problème, j'aimerais qu'on me
l'explique. J'aimerais qu'on me
dise : Regardez, Me Leblanc, prenez la décision rendue par
l'arbitre Y concernant la municipalité X. Puis qu'est-ce que vous pensez de cette
décision-là? Vous ne trouvez pas que c'est un non-sens? On n'a rien. Je vous ai
donné... Le seul cas que Régis Labeaume,
comme maire, a vécu en arbitrage, il s'est déclaré satisfait de la décision,
puis c'est au XXIe siècle, c'est en 2014 que la décision est
sortie, ça ne fait même pas deux ans.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Vous avez dit tout à l'heure — ou peut-être l'ai-je lu simplement dans
votre mémoire — avoir
cherché en vain une étude rigoureuse
récente qui aurait pu démontrer le caractère inadéquat du système mis en place
dans le Code du travail. Alors, recherche vaine?
M. Leblanc
(Claude) : Tout à fait.
M. Rochon :
Vous ne détesteriez sans doute pas que, pendant l'étude du projet de loi, nous
demandions au ministre de produire
une étude, qu'il a peut-être entre les mains et qui n'a pas été rendue
publique, pour enrichir notre réflexion.
M. Leblanc
(Claude) : Effectivement, ce serait une excellente idée. Et on
aimerait en avoir une copie.
M. Rochon :
Il y a bien eu, par ailleurs, des groupes de travail qui se sont penchés sur
les mécanismes, là, de négociation, d'arbitrage, et ainsi de suite, n'est-ce
pas, au cours des...
M. Leblanc (Claude) : Tout à fait. Depuis, je vous dirais, les années 80, il y a eu au
moins quatre études. Et, pour avoir lu les mémoires de d'autres groupes
qui vont nous suivre, je sais, entre autres, qu'au niveau des policiers on a détaillé... la fraternité des policiers de
Montréal a pris soin de détailler le contenu de ces quatre études-là, alors il
serait peut-être approprié,
concernant peut-être le détail de ces études-là, de poser ces questions-là aux
groupes qui vont suivre. Mais je peux
vous dire une chose, c'est que ces quatre études-là n'ont jamais proposé
d'abolir le système d'arbitrage de différends
chez les policiers et les pompiers et de donner au ministre des Affaires
municipales un pouvoir de nomination des
arbitres. Ça n'a jamais même été demandé avant l'arrivée de certains maires au
Québec, là, ce n'était pas du tout dans les cartons d'aucun gouvernement
avant le dernier pacte fiscal.
Le Président (M.
Auger) : 45 secondes d'échange.
M. Rochon :
Ce pourquoi vous concluez en un deal récent, là, entre le ministre et les
maires?
M. Leblanc
(Claude) : ...pacte fiscal, bien oui.
M. Rochon :
C'est tout.
Le Président (M.
Auger) : D'autres interventions? M. le député de René-Lévesque.
30 secondes.
M. Ouellet : Vous parlez, à
l'article 17, de la capacité de payer. Il y en a huit, critères qui ont
été instaurés, et on a entendu ce matin dans certaines interventions
l'importance d'en prioriser, d'en mettre certains obligatoires et d'autres facultatifs. Selon vous, en quoi ces critères-là
supplémentaires seraient une mauvaise chose dans le cas de l'arbitrage... du
conseil des différends, pardon?
Le Président (M. Auger) : Très
rapidement.
M. Leblanc
(Claude) : Oui. Écoutez, M.
le député, ce serait une chose si on avait un projet de loi qui ne contenait
que des modifications au Code du travail, en
laissant le ministre du Travail responsable de l'application, de dire : On
va peut-être regarder des nouveaux
critères, on va peut-être en enlever, en rajouter. Évidemment, je n'ai pas fait
l'analyse sous cet angle-là parce que ce n'est pas le projet de loi que
l'on a.
Le Président (M. Auger) : Merci, Me
Leblanc. Nous allons poursuivre avec la deuxième opposition pour
6 min 30 s. M. le député de Blainville.
• (14 h 40) •
M.
Laframboise : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Merci, M. Martin, M. Gosselin,
Me Leblanc, d'être présents.
D'entrée de
jeu, je vous dirai qu'en partant j'ai un faible pour le travail qu'effectuent
vos membres, parce qu'autant les
policiers que les pompiers font de l'excellent travail au Québec. Par contre,
les relations de travail puis le salaire, ça, c'est un autre domaine.
Je vous
entendais, Me Leblanc, parce que vous avez fait votre plaidoirie, vous avez
parlé de l'article 7 de la Loi sur le ministère des Affaires
municipales. Quand je le lis... Puis, si je le lis, vous l'avez lu à votre
façon, là, mais l'introduction : «Le
ministre veille à la bonne administration du système municipal dans l'intérêt
des municipalités et de leurs
citoyens», hein, il faut comprendre que le ministre gère pour l'intérêt des
citoyens. Puis, quand on arrive au troisième alinéa, oui, au troisième alinéa : «3° s'assurer que
l'administration municipale gère sainement les deniers publics et voit
au bien-être des personnes dans les limites de sa compétence.» Donc, moi, déjà
là, là, quand je vois ça, je ne suis pas avocat,
je suis notaire, moi, là, mais de confier au ministre des Affaires municipales
le pouvoir de peut-être encadrer... ou
la gestion de la plus grosse dépense de chacune des villes — je pense, là-dessus, on ne reviendra pas, la
dépense en salaires, c'est la plus
grosse dépense de chacune des villes — c'est quelque chose que... ça se défend.
Moi, vous pouvez faire votre
argumentaire, là, puis vous pouvez aller devant les tribunaux, moi, je suis
certain que le gouvernement va avoir ses
avocats pour être capable de défendre ça, de dire que, les relations de travail
dans le milieu municipal, bien, on a besoin que ça relève du milieu municipal, tout en respectant... Puis là je
comprends, la Cour suprême, ce qu'elle nous dit, c'est qu'il faut respecter la libre négociation, mais il
ne faut jamais oublier que dans la négociation actuelle, Me Leblanc, vous
le savez, il y a des critères, il y a déjà
des critères qui ont été imposés par le gouvernement. Le gouvernement peut donc
changer les critères. Vous, vous l'aimiez, là, l'équité externe; le maire de
Montréal, il ne l'aime pas, l'équité externe. Si
nous, on lui enlève l'équité externe, bien, on a le droit de le faire. Vous
pouvez contester, mais vous ne pourrez pas dire que c'est anticonstitutionnel d'enlever ça, là. C'est des critères
que les gouvernements, avec les années, ont imposés.
Ce qu'on dit,
depuis le tout début, c'est : On est rendus à un moment de la vie
municipale où il faut être capable de
respecter la capacité de payer des citoyens. Je pense qu'on est rendus là.
Donc, qu'il y ait des arbitres qui le fassent, vous l'aviez dit, il y en a qui en tiennent compte. Le maire de
Montréal, ce qu'il est venu nous dire, ce matin, c'est : Moi, ce que j'ai peur, c'est que je viens d'avoir des
gains par rapport au projet de loi n° 15, ce que vous contestez, là, bon,
par rapport aux fonds de pension, puis tout ça, là, mais je ne veux pas
les perdre avec les prochaines négociations, puis honnêtement je suis inquiet pour lui, tu sais, dans l'état actuel des
relations de travail puis des lois. Donc, à quelque part, comment on fait, nous, pour essayer de dire aux
maires : Bon, bien là, à quelque part, là, on essaie, là, que vous ne
perdiez pas le petit avantage que vous venez d'avoir puis d'essayer...
Donc, ça,
c'est les relations de travail. Que ça relève du ministère des Affaires
municipales, en autant qu'il y ait une libre négociation, moi, je pense
qu'il n'y a aucun problème avec ça. Vous pouvez ne pas être d'accord, mais on peut-u s'entendre qu'il faut moderniser les lois
du travail par rapport au secteur municipal? Puis comme on l'a dit ce matin,
d'abord, il n'y a pas la possibilité du
gouvernement d'imposer, le milieu municipal, comme le gouvernement peut faire,
là, le président du Conseil du trésor
peut dire : Je ne suis pas content, j'impose, je vais faire un décret ou
une loi spéciale. Puis ce n'est pas
une entreprise privée, donc elle ne peut pas faire faillite, je vous l'ai dit
ce matin, c'est impossible, au Québec.
Aux États-Unis, les villes peuvent faire faillite; pas au Québec. Les villes
relèvent... c'est des créatures du monde municipal, puis, si jamais elles ne paient pas, bien, c'est bien de
valeur, c'est le gouvernement qui va payer à sa place.
Donc, vous ne
trouvez pas qu'on est rendus à ce moment-là où on devrait s'asseoir ensemble
puis concocter quelque chose qui serait intéressant pour tout le monde?
Le Président (M. Auger) :
Me Leblanc.
M. Leblanc (Claude) : Non. Et voici
pourquoi.
Vous avez
très bien exprimé la prémisse, et, je vous dirais de façon un peu humoristique,
le jour où on se retrouvera devant
les tribunaux, on risque de se servir de ces extraits-là. Vous nous
dites : Le maire de Montréal est venu nous dire ce matin qu'il ne voulait pas perdre les acquis de
la loi n° 15 dans les prochaines négociations. On fait quoi? On va
demander au ministre des Affaires
municipales de nous faire un tribunal sur mesure pour s'assurer qu'on ne perde
pas nos acquis qu'on a eus avec la loi n° 15. C'est ça qu'on
dénonce.
M. le député, l'article 7 de la loi sur le
ministère, s'il nous disait ceci, hein, que «le ministre veille à la bonne administration du système dans l'intérêt des
municipalités, de ses employés et des citoyens», pas de problème.
L'article 7, il n'a jamais été
contesté avant aujourd'hui. Puis pourquoi vous en parle-t-on aujourd'hui, c'est
que c'est le ministre qui dorénavant va avoir à
nommer des arbitres pour venir régler des litiges avec les municipalités, une
des parties que le ministre se doit... On n'est pas là, nous autres, là,
l'article 7 ne dit pas : Bonne administration dans l'intérêt des municipalités, de ses employés et de leurs
citoyens. Puis vous avez raison de dire qu'avant aujourd'hui, l'article 7,
on ne s'en souciait pas, parce que le ministre n'avait pas le pouvoir
que le projet de loi n° 110 lui accorde. C'est ça qui est nouveau, c'est
ça qui est nouveau.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Blainville. Une minute.
M. Laframboise : ...par le fait même, par le fait que la dépense en salaires est la plus
importante, moi, je pense que c'est
justifié qu'on le retrouve là, comprenez-vous, là? Mais ça, ça va faire des
débats, ça va faire des débats juridiques.
Mais
à quelque part on est dans une position où il faut être capable d'avoir une
nouvelle façon de voir les relations de
travail dans le milieu municipal. Et il y a eu des moments dans la vie
politique, je l'ai dit ce matin... En 1982, il y a eu un gouvernement de M. René Lévesque qui a imposé
des lois à ses fonctionnaires, et tout ça. Mais le monde municipal ne peut pas faire ça, tu ne peux pas dire, demain
matin, dans le monde municipal : On va baisser le salaire des employés
puis on va reculer parce que je n'arrive pas, c'est impossible, c'est
impossible, là. Il faut que ça passe par une négociation. Puis, quand il y a une négociation, bien,
inévitablement, si tu veux... Ce matin, on nous disait : Le plancher
d'emploi, il faut que ça se négocie.
Essaie de négocier pour enlever un plancher d'emploi. Comment ça va te coûter
pour essayer d'enlever le plancher d'emploi?
Donc,
à quelque part, tout est là, par rapport aux critères. Donc, inévitablement,
nous, ce qu'on fait, c'est qu'on modifie les critères.
Le Président (M.
Auger) : Merci, M. le député de Blainville. C'est tout pour ce premier
bloc d'échange... ce dernier bloc d'échange, pardon. Donc, Me Leblanc,
M. Martin et M. Gosselin, merci pour votre contribution.
Je
suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de
prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 14
h 44)
(Reprise à 14 h 48)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en souhaitant la
bienvenue aux représentants de la
Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. Je vous rappelle
que vous avez 10 minutes pour votre exposé, puis par la suite nous allons
procéder à une période d'échange. Mais, avant de continuer, vers 15 heures
nous aurons également une autre séance de
dynamitage, donc je vous avertis d'avance pour ne pas que vous ayez trop
de surprise. Donc, dans un premier temps,
bien vouloir vous présenter, et par la suite vous allez pouvoir commencer votre
exposé.
Fédération des policiers et
policières
municipaux du Québec (FPMQ)
M.
Côté (Robin) : Parfait, merci. Bien, bonjour. Je suis Robin Côté, le
président de la fédération des policiers municipaux du Québec. Je suis accompagné du directeur exécutif de la
fédération des policiers municipaux, Luc Lalonde, et de Me Frédéric
Nadeau, du bureau Roy Bélanger Dupras.
La fédération
remercie d'abord la Commission de l'aménagement du territoire de lui donner la
possibilité d'exprimer son opinion sur le
projet de loi n° 110. La FPMQ regroupe l'ensemble des associations de
policiers municipaux du Québec, incluant la Fraternité des policiers et
policières de Montréal, qui en fait partie à titre de membre associé.
D'entrée
de jeu, la FPMQ dénonce le projet de loi n° 110, qui porte atteinte à la
liberté d'association en ce que le processus
proposé pour le règlement des conflits de travail en milieu policier et pompier
n'est pas un substitut valable au
droit de grève. Lorsque le droit de grève n'est pas accessible aux salariés
pour des motifs d'intérêt public, il doit être remplacé par un mécanisme
véritable de règlement de différends, tel que décidé par la Cour suprême du
Canada.
• (14 h 50) •
L'arbitrage
de différends en milieu policier et pompier a fait couler beaucoup
d'encre au cours des 35 dernières années,
et, pendant ces 35 dernières années là, il y a eu au moins sept
comités qui se sont penchés là-dessus, et ce, depuis 1980. Ces comités ont tous
rejeté le genre de proposition qu'on retrouve dans le projet de loi n° 110.
De plus,
le recours à l'arbitrage de différends est beaucoup moins fréquent en
milieu policier depuis l'an 2000, pour plusieurs raisons, mais principalement
à cause du nombre réduit de corps de police municipaux, qui est passé de 150 en 2000, en fait, à 31 aujourd'hui. La très grande majorité des différends en milieu policier se règlent
en négociation. L'arbitrage demeure une exception de
dernier recours, comme il se doit, au même titre que la grève.
L'arbitrage
de différends fonctionne bien et ne nécessite au pire que des ajustements
mineurs. Sinon, comment expliquer que les villes ont adhéré, en 2012‑2013,
au comité Thérien-Morency?
Pour
notre part, le projet de loi n° 110 est inacceptable et enlève toute crédibilité à
l'arbitrage de différends. Nous ne pouvons que le dénoncer. Nous allons
d'ailleurs, au cours des prochaines minutes, couvrir les éléments de notre mémoire
qui nous apparaissent les plus importants.
Premièrement, la création d'un tribunal de différends permanent. Le projet de loi prévoit de remplacer le mécanisme actuel d'arbitrage par l'établissement d'un conseil de règlement des différends. D'une
part, le processus proposé prendrait une
tangente davantage judiciarisée. D'autre part, l'arbitrage des différends
assumé par une ou deux formations à caractère
permanent et oeuvrant dans un même contexte et un même environnement sera très rapidement étiqueté après une ou deux décisions rendues dans un sens donné. La jurisprudence du conseil ferait en sorte que les
salariés seraient justifiés de croire que les dés sont pipés d'avance et
que l'arbitrage n'est pas la solution au règlement de leur conflit.
Le
comité Boivin disait ceci, en rejetant l'idée d'un tel tribunal : «...on
peut [...] craindre qu'avec l'intervention d'un tribunal permanent il s'établirait, à moyen terme, quelques
courants jurisprudentiels bien tracés et desquels il serait difficile de sortir, étant donné la permanence et
le nombre réduit de juges.» Même le processus de négociation en serait affecté. Sachant par ailleurs qu'ils n'auraient
aucune marge de manoeuvre devant un tribunal campé dans sa jurisprudence,
les salariés chercheraient à régler leurs conflits autrement, au détriment du
climat de travail.
Deuxièmement, la
désignation des membres du conseil. Le choix des membres du conseil de
règlement des différends soulève aussi un
questionnement, ils seraient choisis par le gouvernement parmi les personnes
recommandées par un comité de
sélection dont la composition reste à définir. Il n'est pas clair que les
représentants des parties auraient encore
leur mot à dire dans la sélection des membres du conseil de règlement des
différends. Or, le choix des arbitres par les parties est important pour la crédibilité et l'acceptabilité du
processus d'arbitrage, comme le souligne la Cour suprême dans une affaire impliquant le SCFP et le ministre
du Travail de l'Ontario : «L'arbitrage en matière de relations de travail
en tant que mécanisme de règlement des
différends repose traditionnellement et fonctionnellement sur le consentement,
l'arbitre étant choisi par les parties ou étant acceptable par chacune
d'elles.»
Troisièmement,
les critères de décision du tribunal. L'article 17 du projet de loi
propose huit critères dont le conseil de
règlement des différends devrait tenir compte. À ces huit critères s'ajoutent
ceux découlant de l'article 1, qui énonce des soi-disant principes
qui doivent guider en tout temps la détermination des conditions de travail
dans le secteur municipal, notamment
l'alinéa 3°, qui pourrait être interprété comme ayant pour effet de
prioriser l'équité interne comme critère
de décision en matière de différends au détriment de l'équité externe;
l'alinéa 4°, qui pourrait être interprété comme ayant pour effet
d'empêcher la négociation d'un plancher d'emploi, de fixer les règles de
dotation, de promotion, de transfert, de
mutation ou de rétrogradation. Une telle interprétation pourrait également
empêcher un tribunal de fixer les règles
relatives à la gestion des effectifs en matière de santé et de sécurité au
travail. Toutes ces matières ont constitué en tout temps des matières négociables et, de fait, ont été négociées. Les
enjeux entourant la protection de l'emploi, l'intégrité de l'unité de négociation, la dotation de
personnel, la gestion des effectifs, la charge de travail sont des enjeux
importants qui influencent
considérablement les conditions de travail des policiers. Et que dire de
l'amalgame de ces deux propositions, tribunal permanent et critères
décisionnels obligatoires?
Malgré
la clause privative prévue à l'article 37 du projet de loi, il est évident
que la multiplication des critères décisionnels donnera lieu à des recours en
révision judiciaire, comme le soulignait le comité Lemieux dans son
rapport. Le comité Boivin refuse d'adhérer à
la demande des municipalités d'ajouter un critère relatif à la capacité de
payer. Il fait d'abord remarquer que
le critère de l'équité interne est un bon indicateur de la capacité de payer,
la ville l'ayant elle-même exprimé dans ses autres conventions
collectives.
Les
policiers municipaux font le même travail partout en province, il n'y a pas de
raison qu'un policier soit moins bien
rémunéré qu'un autre à cause de la soi-disant capacité de payer de son
employeur. Et d'ailleurs, dans le comité Boivin, il y avait une référence qui en était tirée, et on disait que «nous ne
pouvons accepter qu'en matière de sécurité publique le niveau de salaire
ou les conditions de travail des fournisseurs de service soit dicté, du moins
principalement, par la richesse de la
municipalité. S'agissant des services policiers de base, en quoi devrait-on
accepter qu'un policier travaillant à Montréal soit, pour cette raison,
moins bien rémunéré que son collègue exerçant le même métier à Sillery?»
La
capacité de payer d'un organisme n'est pas un critère applicable à l'arbitrage
de différends dans le secteur public, comme
le fait remarquer un arbitre dans une sentence 2013 concernant les policiers de
Springhill, en Nouvelle-Écosse : «In the public sector, ability to pay
means simply that the employer, for reasons which are often political, does not
want to pay.»
Les
critères que les articles 1 et 17 du projet de loi proposent d'ajouter à
ceux déjà prévus à l'article 99.5 du Code du travail sont tous du même
acabit, ayant pour but évident de faire pencher la balance d'un seul bord,
celui des employeurs. On impose aussi
au tribunal une obligation de tenir compte des augmentations consenties aux
employés de l'État. Autant dire que
c'est le gouvernement qui va fixer les salaires des policiers et pompiers
municipaux. Avec tous ces critères à
saveur économique et politique, l'arbitre perd sa marge de manoeuvre et devient
le pantin d'un système biaisé qui n'a aucune valeur comme moyen de
règlement des différends en milieu policier et pompier.
Les
comités d'experts qui se sont penchés sur ces questions depuis plus de
35 ans nous ont donné les meilleures raisons du monde pour rejeter les éternelles revendications des
municipalités, il faudrait en tenir compte. Avec un tel régime, tant la négociation proprement dite que le
substitut à la grève seraient entravés de façon substantielle, portant ainsi
atteinte à la liberté d'association de nos membres.
Quatrièmement :
Présentement, les coûts de l'arbitre de différends sont assumés par le
ministère du Travail, et chaque partie
assume les frais et honoraires de son assesseur. En ce qui concerne la très
grande majorité des associations policières,
l'assesseur syndical fait partie du contentieux dont la FPMQ s'est dotée pour
la défense de ses membres dans tous
les domaines reliés au droit du travail. Les policiers n'ont rien d'autre à
débourser que leurs cotisations syndicales et, s'ils doivent se soumettre à un arbitrage de différends, ils n'ont pas
de déboursé additionnel à faire, sauf pour des témoins experts.
Les associations
policières devraient désormais assumer le coût d'une ressource et demie. Si les
villes ont les moyens de payer ces sommes,
ce n'est pas le cas des associations policières. Avec en plus la preuve
d'expert que requièrent les critères imposés par le projet de loi
n° 110, on parle de dépenses exorbitantes. Certaines villes en profiteront
pour pousser les négociateurs syndicaux dans
les câbles, sachant qu'ils n'ont pas les moyens d'aller en arbitrage, alors que
le coût, pour une ville, constitue une infirme partie de son budget et
de ses ressources.
Au niveau de l'arbitrage, au-delà des coûts, il
nous apparaît essentiel qu'il y ait un représentant de chaque partie sur un
tribunal d'arbitrage de différends, en l'occurrence un assesseur, comme c'est
le cas dans le cadre de la législation actuelle. Le rôle
des assesseurs est essentiel lors d'un délibéré. Les assesseurs permettent la
recherche du consensus et, par leurs
connaissances des milieux des parties, ils aident les arbitres à rendre des
décisions qui ressemblent davantage à ce que les parties auraient
négocié.
Au niveau de
la durée, il nous apparaît clairement qu'une durée minimale de cinq ans imposée
à tous les salariés du secteur municipal ne se justifie aucunement et
porte atteinte de façon substantielle à leur liberté de négociation. De fait, on
prive ces salariés de leur droit de négocier pendant cinq ans, on suspend leur
liberté d'association pendant cinq ans. Le
droit de négocier, c'est une norme constitutionnelle, et son exercice doit,
pour être raisonnable, demeurer dans la sphère de l'exception.
Par ailleurs,
une sentence de différend doit être limitée dans le temps, parce qu'elle est
imposée aux parties. Une convention
imposée par un tiers est en soi une limite à la liberté de négocier. Cette
limite doit être raisonnable. Le projet de loi n° 110 ne prévoit, non plus, aucune limite maximale à la
durée d'une sentence de différend. Ainsi donc, le conseil de règlement des différends pourrait imposer aux
policiers et aux pompiers une convention collective d'une durée de 10 ans,
les privant ainsi de leur droit de négocier
pendant 10 ans. Et plus la sentence sera insatisfaisante, plus le climat de
travail en souffrira. La loi doit
prévoir un maximum acceptable, le même que celui applicable à tous les secteurs
d'emploi, soit trois ans.
En terminant,
pour revenir au comité Thérien-Morency, sous l'égide du ministère de la
Sécurité publique et du ministère du
Travail, un comité composé de représentants syndicaux et patronaux du milieu
policier et pompier a entamé en 2012
une réflexion sur les améliorations pouvant être apportées au régime
d'arbitrage de différends. Le comité, il a réussi à...
Le Président (M. Auger) : Est-ce que
vous en avez encore pour...
M. Côté (Robin) : Peut-être une
minute.
Le
Président (M. Auger) : Pardon, c'est parce que tout le temps que nous
avions. M. le ministre... À moins qu'on puisse continuer sur le temps de
la partie gouvernementale.
M. Coiteux : Comme tout à l'heure,
je peux laisser le temps de terminer la phrase et le paragraphe.
Le Président (M. Auger) : Allez-y,
M. Côté.
M. Côté (Robin) : Bien là, on a un
paragraphe très court. J'étais à... O.K. Les parties, donc, représentées au comité Thérien-Morency avaient convenu de, un,
rendre obligatoire la médiation-arbitrage, qui est présentement facultative;
deux, de maintenir le statu quo sur la durée
de la période couverte par la sentence de différend, soit 36 mois à
compter de la date d'échéance, et raccourcir les délais en faisant
débuter le processus six mois avant la date d'expiration de la convention et le faisant se terminer dans les neuf
mois de cette date. Cette proposition-là... La proposition unanime des intervenants vise à déjudiciariser le processus,
écourter les délais et le nombre de rencontres que requiert habituellement
une preuve fastidieuse, favoriser la
négociation et amener les parties à s'entendre sur l'ensemble ou sur une grande
partie des enjeux, plutôt que d'en
disposer après audition d'une preuve formelle et risquer de rendre une décision
qui pourrait ne satisfaire personne. Le projet de loi n° 110 prend une direction
complètement opposée à ce qui avait été convenu entre les acteurs du
milieu, et c'est à ne rien y comprendre.
Le Président (M. Auger) : Merci, M.
Côté. Je vais céder maintenant la parole au ministre pour 14 minutes.
• (15 heures) •
M.
Coiteux : Oui. Bien, merci pour cette présentation, M. Côté.
Mais, avant de commencer avec mes questions, pour fins d'échange, j'aimerais d'abord et avant tout vous féliciter
pour votre... On n'appellera pas les pompiers, je pense que ce n'est pas nécessaire, c'est des travaux qui
sont en train de se faire. Je voudrais d'abord vous féliciter, vous avez
été élu, le 16 juin dernier, président,
donc, de la Fédération des policiers et policières, là, municipaux du Québec.
Donc, je voulais vous féliciter pour
ça pour commencer. Donc, alors, bienvenue dans ce nouveau rôle. Et puis on aura
certainement l'occasion d'échanger
pas seulement sur le projet de loi n° 110, mais sur tous les enjeux qui
touchent la sécurité publique au Québec. Alors, heureux qu'on puisse se
rencontrer aujourd'hui dans ce contexte-là.
Écoutez, il y a beaucoup, beaucoup de questions
à poser, évidemment. D'abord, confirmez ou infirmez, mais je crois comprendre que, pour vous, le système
actuel est impeccable, là, il n'y a rien à questionner dans le système actuel.
Est-ce que c'est ça, votre interprétation, ou vous pensez qu'il y a des lacunes
dans le système actuel?
M. Côté
(Robin) : Bien, nous, ce qu'on sait, là, le système actuel, il
fonctionne très bien. Et les propositions... en fait, les modifications qui ont
été proposées en 2012 ou 2013, lors du comité Thérien-Morency, bien, on a beaucoup de difficultés à comprendre pourquoi que ce n'est
pas ça qui se retrouve sur la table aujourd'hui puis pourquoi que ce n'est
pas ça qui a continué, qui n'a pas fait
l'objet de travaux pour en faire une finalité. Parce que, quand on regarde le
mandat que ce comité-là avait, les participants qui étaient autour de
cette table-là, je ne vois pas pourquoi... il y a vraiment le ministère du Travail, le ministère de la Sécurité
publique, l'ensemble des intervenants au niveau syndical, autant au niveau
police, pompiers, tout le monde était là. Ça a duré des mois, il y a eu sept
rencontres ou six rencontres plus une conférence
téléphonique au mois de mai 2013 qui a finalisé le tout. Il restait juste à
discuter des coûts, au niveau de qui assumerait
les coûts de l'arbitrage, en mai 2013, et c'était le seul point qui restait à
régler. Le ministère du Travail est arrivé, ils ont dit : Correct, on va assumer les frais. Tout le monde était
content, les maires étaient contents, l'UMQ avait obtenu ce qu'ils voulaient.
Puis, on se retrouve, là, en 2016, avec un tout nouveau projet de loi qui met
complètement de côté les conclusions du rapport Thérien. J'ai de la
difficulté à comprendre ce bout-là.
M. Coiteux :
Écoutez, on a un autre son de cloche des 1 100 et quelques municipalités
du Québec à l'effet que, pour eux, le système actuel, il a
des lacunes importantes. Donc, vous, vous me dites : Le système actuel a
besoin d'améliorations à la marge. Eux, ils
n'ont pas confiance dans le système actuel. En particulier, ils ont
l'impression que le système actuel est
biaisé, pour toutes sortes de raisons. Et ce n'est pas d'hier, là, ça fait déjà
un certain nombre d'années qu'on
entend cette critique-là, puis tôt ou tard, à un moment donné, il faut se poser
la question : Est-ce qu'on ne doit pas revoir tout ça?
Mais
il y a un aspect de votre présentation, tout à l'heure, qui — ce n'est peut-être pas le bon mot, mais je vais le prendre
quand même — m'inquiétait un petit peu, qui est le suivant : vous avez laissé
entendre que la capacité de payer des
contribuables ne devrait absolument pas être un critère en matière d'arbitrage
dans le cas des policiers et pompiers. Autrement dit, peu importe le
coût, peu importent les résultats des négociations, même si c'est irréaliste
quant à la capacité de payer des citoyens,
bien, il faut payer la note, indépendamment de ce que ça va avoir comme impact
sur les taxes municipales, donc sur
la qualité de vie ultime des citoyens, là, parce que, s'il ne leur en reste pas
dans les poches, il y a un paquet de
choses qu'ils ne pourront plus avoir. Peut-être même que les villes vont être
obligées de couper les services parce
qu'elles auront à payer des frais qui sont au-delà de leur capacité de taxer
raisonnablement leurs citoyens et en même temps livrer des services de
qualité. Et ce que j'entendais tout à l'heure de votre part qui m'inquiète,
c'est comme si, écoutez, là, il ne faudrait
pas que ce soit un critère, il ne faut absolument pas que ce soit un critère,
il faut laisser le maximum de marge
de manoeuvre aux arbitres actuels sans utiliser un tel critère. Moi, ça me fait
peur un peu, parce que notre but, comme
gouvernement, là, ce n'est pas de protéger les maires, ce n'est pas de protéger
un groupe plutôt qu'un autre, c'est de s'assurer
de l'intérêt des citoyens dans le secteur municipal comme dans les autres
secteurs dans lesquels on intervient.
Alors,
j'aimerais ça peut-être vous entendre sur les justificatifs, là, profonds,
profonds à l'égard desquels vous pourriez dire : Bien, non, écoutez, la capacité de payer des
citoyens, il ne faut absolument pas que ce soit pris en compte. Parce qu'à sa face même, oui, c'est un gros
conflit avec le projet de loi qui est proposé, mais c'est un conflit avec les
citoyens, finalement.
M. Côté
(Robin) : Bien, nous pensons que la capacité de payer des citoyens, on
ne devrait pas en tenir compte dans le cas des policiers, c'est exactement
notre position. Pourquoi? Parce qu'un policier qui travaille à... puis je l'ai dit tantôt, un policier qui
travaille à Gatineau, ou qui travaille à Longueuil, ou qui travaille à
Sherbrooke, ou à Trois-Rivières, ou à Saguenay, bien, il a la même job à
faire, il a les mêmes tâches à faire.
Et ce matin j'entendais le maire de Québec
dire : Bien là, nous autres, on n'a pas eu de meurtre depuis 13 mois,
ça fait qu'on pourrait baisser les salaires,
c'est un peu ça qu'il venait dire. J'espère qu'on ne commencera pas à payer nos
policiers en fonction des statistiques,
parce qu'il y a une année qu'ils vont gagner cher, puis l'autre année ils vont
gagner moins, puis ça n'a aucun bon
sens, là, ça n'a ni queue ni tête. Je pense qu'il y a des moyennes globales qui
ont été établies avec les années.
Puis c'est
une tâche spécialisée, être policier, là, je veux dire, il y a des formations qui
sont prévues, vous le savez, l'École nationale de police forme des
policiers à chaque mois, à chaque année, et c'est de plus en plus une fonction spécialisée. Et la fonction est aussi spécialisée,
je pense — puis pas
«je pense», je crois et je sais — à Sherbrooke qu'elle l'est à
Trois-Rivières, qu'elle l'est à Montréal ou qu'elle l'est à Gatineau. C'est ce
que je pense.
M. Coiteux :
Écoutez, je suis d'accord avec vous que le rôle des policiers est un rôle
extrêmement important, très
spécialisé, qu'il faut avoir les meilleurs policiers qu'on peut trouver, il
faut former les meilleurs policiers possible. Il faut qu'on s'assure, dans nos lois, d'avoir une couverture policière
qui correspond aux enjeux de sécurité qu'on vit sur le territoire, il
faut s'assurer d'une équité dans les dessertes policières à travers tout le
Québec, nos lois visent à faire ça, puis il faut que les municipalités qui ont
des corps policiers assument les responsabilités qui sont les leurs. Ça, je
suis totalement d'accord avec vous. Et ça
implique évidemment d'offrir aux policiers des conditions de travail adéquates,
des conditions de rémunération qui
correspondent à ce qu'on leur demande comme fonctions, puis aux exigences de la
fonction, puis aux risques qui sont
inhérents à cette fonction-là. Ça, totalement d'accord avec ça, vous ne pouvez
pas avoir plus d'accord. Je pense
qu'on est tous d'accord, mais moi, comme ministre de la Sécurité publique,
laissez-moi vous dire que je suis totalement d'accord avec ça. C'est un
de mes rôles fondamentaux comme ministre de la Sécurité publique.
Mais, en même
temps, de dire que dans les mécanismes d'arbitrage, lorsqu'on n'a pas réussi à
s'entendre par voie de négociation,
il faudrait qu'on ne tienne absolument pas compte de la capacité fiscale de la
municipalité et de ses citoyens, de la situation économique, de ce qui
se verse ailleurs dans le secteur public, autrement dit de déconnecter totalement, une fois qu'on a dit tout cela, les
policiers du reste des travailleurs du secteur public, à sa face même, à sa
face même, si c'est vers ça qu'on
irait, on rempirerait même le système actuel. Puis, dans le système actuel,
bien, ce que nous disent les élus
municipaux, redevables devant l'ensemble de leurs citoyens, ils nous disent que
les mécanismes actuels, justement,
c'est un des principaux problèmes, ils ne tiennent pas suffisamment compte de
la situation fiscale puis de la capacité de payer.
Alors là, on
a un enjeu. Vous dites : Le mécanisme actuel est parfait, changeons-le
pas, mais les citoyens, représentés par leurs élus municipaux notamment, mais
nous, comme gouvernement, quand on regarde la situation de façon objective,
dans l'intérêt collectif, on se dit : Ça ne va pas, il y a un
déséquilibre, il y a un déséquilibre.
Alors, est-ce
qu'il y a moyen de reconnaître les droits de tout le monde, y compris le droit
des contribuables, dans une affaire
comme ça? C'est ça, la proposition qu'on met sur la table. Ne pensez-vous pas
que c'est important, ce critère-là?
M. Côté
(Robin) : Je vais laisser Me Nadeau poursuivre la réponse à la
question.
Le Président (M. Auger) :
Me Nadeau.
• (15 h 10) •
M. Nadeau
(Frédéric) : Oui. Bonjour, tout le monde. En fait, ce qui est dit
spécifiquement dans le mémoire, c'est qu'il
y a des décisions arbitrales qui ont été rendues où les arbitres des tribunaux
ont dit : Le critère de la capacité de payer est très difficilement
applicable dans le domaine public. Et c'est embêtant pour un tribunal parce que
ça commande nécessairement la réouverture de
toutes les décisions qui ont été prises par la ville pour regarder, en fait,
comment ça a été géré, où est-ce
qu'on a mis l'argent, qu'est-ce qu'on a dépensé, et fouiller, dans le fond,
dans le détail la situation financière et
politique de la ville, parce qu'il y a des choix politiques qui sont faits par
les villes, et c'est ça qui rend la chose embêtante.
Maintenant,
pour répondre à vos préoccupations, la capacité de payer, elle est prise en
compte déjà par le système, comme vous l'avez mentionné. Les villes font
des demandes qu'elles vont justifier, qu'elles vont défendre, et ces demandes-là sont faites, évidemment, en tenant
compte de la capacité de payer. Quand on parle de l'équité interne, on
parle aussi de la capacité de payer. L'effort qui est demandé aux citoyens est
déjà pris en compte.
Là, ici, on
ne parle pas, en fait, de principes généraux, on parle de l'établissement ou la
création d'un tribunal auquel on va
donner une fonction, en fait, un tribunal qui, selon nous, ne rencontre pas les
exigences qui ont été posées par la Cour
suprême en matière de protection de la liberté d'association, puis du droit de
négocier, puis du droit de grève, mais ce tribunal-là va devoir
appliquer ça. Et c'est pour ça qu'on vous dit dans le mémoire : Attention!
L'imposition d'un certain nombre de critères va nécessairement amener bon
nombre de contestations et de critiques, et ce critère-là en particulier risque malheureusement d'alourdir
grandement le processus de ce tribunal-là ou d'un tribunal d'arbitrage qui
pourrait demeurer comme il l'est à l'heure actuelle.
Alors, il faut faire attention avec les
critères. Plus on ajoute des critères, plus on alourdit le processus, plus on prête le flanc à des contestations et plus on
réduit la marge de manoeuvre du tribunal, qui, il faut le répéter... Un
tribunal d'arbitrage de différends,
ce n'est pas un tribunal ordinaire. Ce n'est pas un tribunal qui est là pour
régler un conflit de droit, c'est un
tribunal qui est là pour, dans le
fond, régler un différend qui est un
conflit en intérêts et qui ultimement... L'objectif principal d'un tribunal d'arbitrage de
différends, c'est de reproduire le résultat qu'aurait eu la négociation entre les parties si elle s'était poursuivie, alors,
forcément, ce tribunal-là va prendre en compte tous les facteurs qui auraient
été pris en compte lors d'une négociation.
M. Coiteux : Mais j'ai eu cette discussion-là avec d'autres
groupes aujourd'hui, il y a quand
même une différence fondamentale entre une ville, là, puis une entreprise,
hein? Si une entreprise, pour x raison, a négocié dans une position
de faiblesse, admettons, et signé une convention collective qu'elle n'aurait pas eu
vraiment les moyens de se payer dans son univers concurrentiel, puis qu'elle doit augmenter ses prix pour la
couvrir, bien, vous savez peut-être qu'elle risque de faire faillite, alors il
est peut-être possible que juste ça, ça fasse en sorte que vous allez négocier
un peu différemment. Mais ce n'est
pas votre cas à vous, vous êtes dans le secteur public. Alors, dans le secteur
public, vous, quand vous négociez avec
le secteur public, vous dites : Bien, de toute façon, ils ont juste à
augmenter les taxes. Puis les taxes, c'est obligatoire.
Alors, c'est
ce phénomène-là qui fait en sorte qu'on ne peut pas ignorer la capacité de
payer des citoyens, parce qu'ils
n'ont pas le choix, ils n'ont aucune façon de s'ajuster à une situation où ils
seraient taxés davantage, au-delà de ce qu'ils peuvent, parce qu'il y aurait
une négociation ou une sentence d'arbitrage qui aurait imposé des conditions
qui n'étaient pas du domaine de leur
capacité de payer. Alors, nous, comme législateurs publics, comme législateurs,
il faut qu'on en tienne
compte.
Alors, vous
vous déclarez satisfaits du régime actuel, mais les élus municipaux, puis il y en a
plusieurs, là, qui représentent leurs citoyens dans
différentes régions du Québec, eux, ils nous disent exactement le contraire de
vous, exactement le contraire de vous.
Alors, en quelque part, il y a un malaise, il y a un malaise. Et je vous
écoute, puis c'est comme si on vivait
dans le meilleur des mondes, là, c'est comme si on avait le système parfait.
Or, ce n'est pas ça qu'on entend sur le terrain. Donc, on se pose la
question.
Il arrive un
jour où il faut changer les choses. Je comprends que ça change la donne un peu,
ça change la donne, mais est-ce qu'il
n'est pas venu le temps, justement, de changer les choses dans le secteur
municipal pour tenir compte de ce que je viens de dire?
Dans le fond,
c'est un gouvernement qui a une capacité de taxer. Ce n'est pas un gouvernement
comme le gouvernement du Québec, mais
il joue un rôle de gouvernement de proximité. C'est ça qui est sur la table. Ce
n'est pas une négation des droits, au contraire, les principes qui sont établis dans le projet de loi n° 110
parlent très bien des droits d'association, de négocier, la
négociation de
bonne foi est encadrée, mais cet
argument sur la capacité de payer est important pour le législateur dans
le projet de loi qui est proposé ici.
Donc, c'est
pour ça que je ne comprends pas qu'on ne puisse pas s'entendre minimalement là-dessus.
On peut ne pas s'entendre sur les
formes que ça va prendre par
la suite puis on peut avoir une
discussion, mais là sur le principe même je sens un désaccord. C'est ça
qui m'étonne.
Le Président (M. Auger) :
Dernier 30 secondes. Une intervention, M. Côté, Me Nadeau?
M. Côté.
M. Côté
(Robin) : Bien, écoutez, je
peux juste vous dire que... Puis vous êtes au courant, vous êtes très au
courant du dossier du financement des
services de police municipaux au Québec. Et, si les municipalités cherchent de l'argent
puis elles cherchent une façon
équitable d'aller chercher de l'argent, je pense qu'elles seraient bien mieux de s'unir
avec la fédération des policiers municipaux puis de nous aider, avec
l'UMQ, à convaincre le gouvernement de financer les services de police municipaux au Québec à
la même hauteur que le gouvernement finance les services dans les municipalités où la Sûreté du Québec couvre.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. Côté. Nous allons
poursuivre avec l'opposition officielle. M. le député de Richelieu, pour
environ neuf minutes.
M. Rochon :
Oui, merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.
Des
salaires dictés dans la fonction publique municipale par la capacité de payer
des citoyens de ces municipalités, ça peut paraître bien séduisant,
hein, voire d'un réalisme absolu, mais ça ne rend pas moins pertinentes les
questions, M. le ministre, les questions que
ce monsieur nous pose aujourd'hui. «Les policiers municipaux font le même
travail, partout en province. Il n'y
a pas de raison — dit le
mémoire de ce groupe — qu'un policier soit moins bien rémunéré qu'un autre, à cause de la
soi-disant capacité de payer de son employeur[...]. Une infirmière — ajoute le mémoire — est-elle moins bien rémunérée en Gaspésie que sa collègue du CHUM, [en raison] de la situation
économique locale? Les policiers de Mont-Tremblant
et ceux de Bromont devraient-ils être mieux rémunérés que ceux de Montréal,
de Trois-Rivières ou de Sherbrooke, eu égard à la richesse foncière de la ville où
ils travaillent?» On ne peut pas évacuer, je crois, ces questions-là.
Elles méritent d'être posées, elles sont pertinentes au débat.
Et,
dans votre mémoire, vous dites aussi : Encore faudra-t-il voir ce qui a pu
influencer la capacité de payer des municipalités concernées. Est-ce qu'on s'y attardera
dans l'analyse? Est-ce qu'on poussera le raisonnement jusque-là? Est-ce qu'on s'interrogera sur les choix politiques des municipalités, qui influencent indirectement et même directement leur capacité de payer?
En fait, j'aimerais
vous entendre encore là-dessus plus abondamment, sur la notion de capacité de
payer sur laquelle... qui dicterait les salaires dévolus aux employés d'une
municipalité.
Le Président
(M. Auger) : M. Côté.
M. Côté
(Robin) : Bien, aux employés d'une municipalité... Écoutez, je peux
vous parler des policiers. Mais je vais vous amener un autre exemple. Prenez l'agglomération de Longueuil, hein?
Là, on va analyser chacune des municipalités que la police de Longueuil couvre puis on va dire : Bon, bien, toi...
on pense que Brossard a peut-être une richesse plus élevée que, je ne sais pas, Greenfield Park, puis
là on va dire : Bon, bien, les résidents de Brossard, vous allez payer un peu plus pour le même service de police, puis à
Greenfield Park vous allez payer un peu moins, puis là, le policier qui patrouille le secteur de Brossard, tu vas être
mieux payé que le patrouilleur qui patrouille le secteur de Greenfield Park.
Je veux dire, c'est un non-sens. Ça ne fonctionne pas, on ne peut pas. C'est
pour ça qu'on vous dit...
Puis
je reviens, je tape sur le même clou, mais le policier qui... En plus, dans ce
cas-là, le policier, qui travaille pour le même service de police, dans
le même service de police, parce qu'il travaille dans une municipalité qui
aurait moins de capacité de payer, serait
payé moins cher, alors que l'autre qui travaille à l'autre bout du territoire,
bien... Ça ne fonctionne pas, là, ça ne fonctionne pas. C'est le même métier
partout, peu importe où le policier travaille. Puis on pense que... Puis notre position demeure la même, c'est
qu'il doit être payé de façon à ce que ça respecte les exigences de son métier
puis ses compétences.
M. Rochon : Vous avez fait état d'un rapport, dont malheureusement, là, j'oublie le
nom, je l'avais noté, Thérien et...
Une voix :
Morency.
M. Rochon : ...Morency, qui avait été accueilli favorablement par les
municipalités, vous l'avez fait remarquer au ministre. On était alors en
2013. Est-ce que c'est ça?
M. Côté
(Robin) : C'est 2012‑2013.
M. Rochon : 2012‑2013. Alors, vous le faites remarquer au ministre, qui évacue
assez rapidement votre remarque pour vous répondre laconiquement :
Bien, ils ne sont plus contents aujourd'hui, les maires, en 2016.
Qu'est-ce
qui a changé entre 2016 et 2012‑2013 pour que les maires ne soient plus
contents et réclament autre chose que ce qui se retrouvait dans ce
rapport qu'ils avaient bien apprécié?
M. Côté
(Robin) : Il faudrait poser la question aux maires, qu'est-ce qui fait
que... Écoutez, nous, on était satisfaits du consensus qui avait eu lieu là. Qu'est-ce qui a fait, entre les deux,
que les maires ont changé d'idée? C'est la question que je posais un peu dans le mémoire, là.
Pourquoi? Pourquoi est-ce que ce comité-là et les conclusions du comité ont
été écartés? Aucune idée.
Le Président
(M. Auger) : M. le député de René-Lévesque, en vous rappelant que
vous avez 4 min 30 s.
M. Ouellet : Merci, M. le Président. Je vous entendais tout à
l'heure, et vous nous avez fait mention que le conseil de différends... ou en tout cas, du moins,
l'arbitrage déjà existant, plutôt, n'était pas... on ne traitait pas de conflit
de droits mais plutôt de conflit d'intérêts entre deux parties.
Ma question
va être la suivante. Avec les nouvelles dispositions du projet de loi
n° 110, on laisse tomber l'arbitrage et on tombe avec le conseil des différends, pour lequel le ministre va
nommer trois membres pour rendre une décision. J'aimerais
connaître votre... si vous êtes à l'aise avec le fait que le ministre des
Affaires municipales, qui est aussi le ministre
de la Sécurité publique, va nommer trois personnes, dont un issu du milieu du
travail, disons-le, et deux autres qui
pourraient être issus des milieux économique et municipal. Êtes-vous à l'aise
avec ça, qu'il va être celui qui va décréter... bien, décréter...
déterminer les conditions dans les différends? Êtes-vous à l'aise avec ça?
• (15 h 20) •
M. Nadeau
(Frédéric) : Avec respect,
pas du tout, pas du tout, parce qu'en
fait on parle de moderniser l'arbitrage de différends, et, à notre sens, puis je pense que c'est clairement
expliqué dans notre mémoire, on va à contre-courant de ce qui est
aujourd'hui, en 2016, des relations de travail modernes.
À l'heure
actuelle, on met beaucoup l'emphase sur la médiation-arbitrage, sur les modes
alternatifs de règlement des
conflits, des différends. Le travail des assesseurs, c'est le seul point... le
point le plus positif, le plus important, je pense, qui, à l'heure actuelle, fait partie de
l'arbitrage de différends, puis on l'évacue, on les enlève. Et, quand on dit
qu'il faut que les parties se
parlent, il faut que les parties négocient, bien, ils le font aussi à travers
leurs assesseurs, et ça, on enlève ça.
Donc, ce
qu'on fait, dans le fond, avec le projet de loi n° 110, c'est qu'au lieu
d'aller dans la modernisation d'un processus où on commence déjà... les
parties ont déjà commencé par elles-mêmes à trouver des modes alternatifs de règlement des conflits on va créer un tribunal qui
va judiciariser davantage la situation ou les conflits, et ça, ce n'est pas du
modernisme, en fait, c'est de la
rétrogradation, en fait. Et c'est là où nous, évidemment, on n'est pas à
l'aise; non seulement avec le mode de
nomination des gens qui vont siéger sur ce tribunal-là, mais également avec la
façon dont ce tribunal-là va opérer.
M. Ouellet : On en a parlé longuement, on en a parlé beaucoup,
de la capacité de payer du contribuable. On essaie, dans le projet de
loi, de nous dire que le citoyen est au centre de ce projet de loi là.
Donc, on
présume que, dans les différends des policiers... On a parlé beaucoup de rémunération,
mais je crois comprendre que, dans
ces différends-là, on règle aussi de l'organisation du travail. Alors, la
question que j'aurais pour vous ou la
crainte que j'aimerais qu'on partage ou, du moins, que vous précisiez, c'est
que maintenant le conseil pourrait rendre
une décision sur l'organisation du travail qui n'a aucunement rapport sur le
coût mais plutôt sur la façon dont on pourrait
organiser les factions, dans ce cas-là, les policiers. Donc, pour ma part, je
pense qu'il y aurait un impact sur la sécurité,
les services à offrir, et que, là, dans le comité, on pourrait avoir
effectivement quelqu'un issu du milieu municipal et quelqu'un issu du milieu économique qui auraient à trancher une
décision d'organisation du travail sans connaître toutes les nuances et
les technicalités qui, si on se trompe, auraient un impact sur la sécurité des
individus. Est-ce que cette prétention-là... cette crainte-là pourrait être
légitime?
M. Nadeau
(Frédéric) : Tout à fait. L'inquiétude est immense, en fait, à ce
niveau-là, parce qu'à l'heure actuelle, avec la nomination des
assesseurs, tant patronaux que syndicaux, on s'assure quand même... les parties
s'assurent par elles-mêmes d'une
connaissance du milieu policier puis de l'organisation policière, ce qui ne serait
pas nécessairement le cas avec le
projet de loi dans la façon dont il est rédigé à l'heure actuelle. Et ça, c'est
très, très inquiétant pour nous parce qu'effectivement ça pourrait avoir
des conséquences même sur les opérations policières, en fait, parce que les horaires de travail, la façon d'opérer, les
rappels au travail, tout ça fait partie du quotidien des activités, en fait,
d'un corps de police, et, évidemment,
si ce sont des gens qui ne sont pas rompus à ces réalités-là qui tranchent, ça
va effectivement causer des problèmes.
Et, pendant
que vous êtes là-dessus, je ne peux pas passer sous silence non plus l'article
du projet de loi qui fixe les conventions collectives à un minimum de
cinq ans. Et j'ai beaucoup de difficultés à voir, là, en quoi la capacité de
payer d'un citoyen, par hypothèse, ou la situation économique justifie une
telle entrave à la liberté de négociation des syndicats...
et des employeurs, par la bande. J'écoutais le maire de Québec, ce matin,
dire : Moi, après trois ans, si ça ne fait pas, j'aime ça être
capable de changer. Nous aussi, alors...
Le Président
(M. Auger) : Merci.
C'est malheureusement tout le temps que nous avions. Nous allons poursuivre
avec le porte-parole de la deuxième opposition, le député de Blainville, pour
environ six minutes.
M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci,
M. Côté. Encore félicitations! On avait eu la chance de se voir.
M. Lalonde, Me Nadeau, merci de votre présence.
Évidemment,
on sent, là, depuis ce matin, là, puis je suis un peu d'accord avec M. le
ministre, là... C'est que la capacité
de payer, d'abord, vous, vous le dites carrément, là, la capacité de payer des
citoyens, ce n'est pas votre problème, mais nous, en tant que
législateurs, on a un problème.
Moi, j'ai un
problème, puis on a eu la chance de se rencontrer, parce que moi, j'ai des
villes qui veulent quitter les
bleus — j'appelle
les syndicats municipaux «les bleus» — pour s'en aller aux verts parce que ça coûte
moins cher. Tantôt, vous avez
dit : Bien là, il faudrait subventionner les bleus, donc ça, ça veut dire
augmenter les impôts des contribuables pour
essayer... ou, à l'inverse, augmenter le coût des verts pour... puis là c'est
les... Tu sais, c'est qu'on est rendus là, là. On est rendus, aujourd'hui, à
discuter de la capacité de payer.
Puis tantôt, là, j'aurais voulu le dire aux pompiers, tu
sais, moi, je suis député à
Blainville, je vis à Rosemère, qui met
fin à son service de pompiers puis qui se fusionne carrément dans l'espace de
deux jours, sans avertissement. C'est-u correct? Non. Mais la capacité de payer, par exemple, c'est qu'on est
rendus là, on est rendus où une ville... Rosemère qui dit demain matin : Bien, moi, j'abolis
mon corps de pompiers puis je m'en vais avec Blainville, de l'autre côté. On
est là.
Donc, si on
veut des exemples de la capacité... On est rendus là, il faut discuter de la
capacité de payer. Que ça ne fasse
pas votre affaire, je peux comprendre ça, mais nous, en tant que législateurs,
on est rendus avec la capacité de payer des citoyens, sinon il va arriver des
Rosemère puis il va arriver des situations où des villes vont vouloir quitter
les bleus pour s'en aller aux verts parce que ça coûte moins cher puis...
Donc, il faut être capable de discuter de ça.
Et
c'est pour ça que, dans votre mémoire, je comprends, mais je ne sens pas
d'ouverture par rapport au projet de loi. Ça, je pense qu'il n'y a pas nécessairement d'ouverture. Vous vous
posiez la question tantôt, M. Côté : Je ne comprends pas pourquoi que les villes... Les villes étaient
à une table de négociation où l'obligation était un résultat avec tous les
intervenants, et là ils ont la chance
d'avoir un gouvernement, là, je vous le dis, là... parce qu'il faut être
courageux, puis là, là-dessus, je le souligne,
là, de déposer un projet de loi, puis les villes, elles ont plus que qu'est-ce
qu'elles auraient eu avec le comité
Thérien-Morency, là, c'est tout simplement ça. Pourquoi qu'ils ne se sont pas
contentés de ça? Parce qu'à quelque part il est temps qu'on discute de
la législation.
Donc,
pour vous, là, est-ce qu'il n'y a rien à négocier, il faut rester comme ça, ou
on peut discuter? Pour vous, c'est clos, le débat est fait, puis, ce
projet de loi là, il ne faut pas qu'on...
Le Président
(M. Auger) : M. Côté.
M. Côté
(Robin) : Nous, la position est assez claire là-dessus : On ne
pense pas que le projet de loi, il est bénéfique pour les membres de la
fédération. On a été clairs dans notre mémoire là-dessus. Il y a un paquet...
Juste au niveau des critères, on a
parlé amplement de la capacité de payer, je ne reviendrai pas là-dessus, mais
il y a des critères qui vont être imposés
à un tribunal, un comité... ou appelez ça comme vous voulez, un tribunal
décisionnel dans lequel on ne croit pas.
On vous dit que le
système actuel est fonctionnel, qu'il y a des allègements qui avaient été
prévus au comité Thérien pour faciliter la
vie de tout le monde. J'ai un peu de misère à entendre quand vous me dites que,
bien, ça, c'est un compromis
acceptable, mais là ils ont eu un deal du gouvernement, ça fait qu'ils aiment
mieux avoir le deal. C'est un peu ça
que vous venez de nous dire. Je trouve ça spécial parce que ça, c'était la paix
industrielle, là, c'était vraiment un
compromis entre les syndicats, les maires de toutes les municipalités au
Québec, là, tout le monde était content de ça, là, puis là, aujourd'hui, à la place, comment je
pourrais dire, on remet le trouble dans quelque chose qu'il n'y en avait pas.
Ça
fait que, non, on n'est pas d'accord avec le projet de loi. Puis, non, on ne
voit pas où on pourrait apporter une amélioration alors que le système
qu'on a présentement est fonctionnel.
M. Laframboise : Parce que... Puis je reviens à ce que je disais tantôt, c'est que c'est
évident que, pour les élus municipaux, puis je ne me gêne pas, là, parce
que le maire de Montréal l'a dit ce matin, là, il ne veut pas... tout ce qu'il ne souhaiterait pas, c'est que les prochaines
négociations fassent que la récupération qu'il a faite dans le cadre des fonds
de pension, bien, soit éliminée tout simplement parce que les lois du travail
actuelles font qu'à quelque part, à cause du...
Ce n'est pas pour rien, là, que l'équité externe, il n'en veut pas, là; parce
qu'à quelque part il y a une ville qui a donné quelque chose, bien, qu'il soit obligé de donner aux policiers ou
aux pompiers la même chose qu'une ville qui aurait octroyé... parce qu'à quelque part l'arbitre lui
donnerait, là. Tu sais, c'est ça, la réalité, là. Puis ça, c'est une réalité
qui pourrait arriver, là, dans
l'espace d'une décision dans une ville au Québec toutes les relations de
travail viennent d'être changées, puis la récupération qui peut avoir
lieu, pour lesquelles, moi, je suis...
On
a travaillé fort, puis à quelque part la population était d'accord avec la
réforme des fonds de pension. Même si
pour nous, personnellement, il y avait certains endroits où on a été trop durs,
là, mais il reste quand même qu'il y avait quand même un appui de la population. Donc, on ne peut pas non plus, à
cause du système de relations de travail actuel, faire que dans une convention collective on va tout éliminer tout le
travail qu'on a fait pendant les deux, trois dernières années. Tu sais, c'est pour ça qu'il faut
moderniser les relations de travail, pour être capable d'évoluer dans la
capacité de payer des citoyens. Mais ça, la capacité de payer des
citoyens, vous, là, c'est...
Le Président
(M. Auger) : 40 secondes pour une dernière intervention.
M. Lalonde.
• (15 h 30) •
M. Lalonde
(Luc) : Bien, écoutez, là, je vous entends, mais je ne comprends pas
très bien. Et je vais vous expliquer pourquoi.
Le passé est garant
du futur. La situation passée, là, n'a jamais été un problème. On n'en a pas,
de problème. Me Leblanc vous expliquait
tantôt, là, que même M. Labeaume était content de la seule décision qu'il
y a eu durant son mandat. Ça fait
30 ans que je négocie à travers le Québec, j'ai même négocié avec
M. Carrière. Demandez-lui, il
n'y en a pas eu, de couteau sur la gorge. Pantoute. On s'est toujours
entendus, on a toujours trouvé des solutions.
Quand
il n'y en avait pas, on allait en arbitrage de différends. Puis, quand on
allait en arbitrage de différends, bien, comme assesseurs ou comme
procureurs, on venait à bout de présenter notre preuve. Les villes faisaient
zéro.
Le
Président (M. Auger) :
Merci, M. Lalonde. Merci. Désolé, c'est tout le temps que nous avions.
Donc, M. Côté, M. Lalonde et Me Nadeau, merci beaucoup
pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
15 h 31)
(Reprise à 15 h 34)
Le Président (M. Auger) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux en souhaitant la bienvenue
à la Fraternité des policiers et policières de Montréal. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et par la suite nous procéderons à une
période d'échange. Dans un premier temps, bien vouloir vous identifier,
et par la suite vous pouvez commencer votre présentation.
Fraternité
des policiers et policières de Montréal inc. (FPPM)
M. Francoeur
(Yves) : Oui, bonjour, M. le
Président, membres de la commission, M. le ministre. On vous remercie de
nous recevoir, même si on commence à trouver qu'on vient ici un peu trop
souvent. Mais c'est une autre histoire.
Je suis accompagné, à ma droite, de
Me Laurent Roy, qui pratique en droit du travail depuis 42 ans, dont
une quarantaine d'années en milieu policier
et pompier. À ma gauche, André
Gendron, vice-président exécutif à la
fraternité des policiers de Montréal,
et, à sa gauche, M. Jean-François Potvin, vice-président aux relations de
travail à la fraternité des policiers de Montréal. Et moi-même, Yves
Francoeur, président de la fraternité des policiers de Montréal.
Donc, la
fraternité représente les 4 500 policiers et policières de Montréal
et assure la sécurité de 2 millions de citoyens et citoyennes de la métropole du Québec et de l'île de
Montréal, une tâche dont la complexité au quotidien est majeure, avec annuellement près de 2 millions
d'interventions, dont 30 000 qui se rapportent à une personne en crise ou
des problèmes de santé mentale. À cela
s'ajoutent près de 1 500 services d'ordre des grands rassemblements
publics, la lutte au terrorisme, la
lutte au crime organisé, les gangs de rue, des problématiques sociales
diverses, bien d'autres choses encore
qui mènent souvent nos membres à gérer les côtés les plus sombres de l'être
humain. D'ailleurs, je remercie le maire
de Québec, qui a répété à plusieurs reprises ce matin qu'être policier à
Montréal était particulier. Pour une fois que quelqu'un du monde
syndical est d'accord avec le maire de Québec...
D'entrée de
jeu, je dois dire que la dernière fois que nous sommes venus ici, c'était pour
le projet de loi n° 3, qui allait
devenir la loi n° 15, une loi qui brime clairement nos droits
constitutionnels et pour laquelle nous sommes devant les tribunaux. Nous avions pourtant fait toutes
les mises en garde possibles mais, au final, sans être écoutés. C'est donc
avec bien peu d'illusions que nous nous retrouvons ici devant un nouveau projet
de loi.
On doit
rappeler que les 4 500 policiers de Montréal ont été frappés par la
loi n° 15 plus durement que n'importe qui d'autre, loi qui est censée assurer la pérennité d'un régime de
retraite, un régime de retraite pourtant excédentaire, capitalisé entre 90 % et 134 % sur une
période de 25 ans, et où la ville de Montréal a bénéficié de
500 millions de congé de
cotisation, c'est-à-dire qu'ils ont payé 0 $ pour le régime de retraite
des policiers de Montréal entre 1996 et 2007. Et maintenant cette loi-là impose à nos policiers une coupure de
9 000 $ par année, 3 000 $ par année en hausses de
cotisation et 6 000 $ par
année en coupures de bénéfices, tout ça, comme je le disais, pour un régime de
retraite performant. On se peut se
poser la question : Est-ce que les contribuables de Montréal ont pour
autant bénéficié d'une baisse de taxes pour cette économie d'un
demi-milliard sur un peu plus de 10 ans pour notre bonne gestion? Pas à
notre connaissance.
Arrive
ensuite le projet de loi n° 10, issu des promesses faites aux maires en
matière de fiscalité municipale. Ces promesses
ont motivé la ville de Montréal à refuser de négocier sérieusement et de bonne
foi avant de voir la couleur du projet
de loi que vous avez devant vous, et ce, malgré le fait que notre convention collective
est échue depuis deux ans et le régime de retraite, depuis décembre
2011.
Le projet de
loi n° 110 torpille le droit à la négociation. Et je citerai en entrée de
jeu l'honorable juge Dickson, alors
juge en chef de la Cour suprême dans le renvoi relatif à l'Alberta en 1987, qui
disait : «Je suis d'accord avec ce que dit l'Alberta International
Fire Fighters Association [dans] son mémoire, à savoir qu'"il est
généralement reconnu qu'employeurs et
employés doivent être sur un pied d'égalité en situation de grève ou
d'arbitrage obligatoire lorsque le droit de grève est retiré". Le
but d'un tel mécanisme est d'assurer que la perte du pouvoir de négociation par
suite de l'interdiction législative des
grèves est compensée par l'accès à un système qui permet de résoudre
équitablement, efficacement et promptement les différends mettant aux
prises employés et employeurs.»
• (15 h 40) •
Donc, le
projet de loi n° 110 stipule qu'après quatre mois de négociation et deux
mois de médiation obligatoire on
envoie les policiers devant un conseil de règlement des différends qui
remplacerait les tribunaux d'arbitrage habituels. Ce conseil de règlement n'inspire absolument
aucune confiance. Il est expressément créé pour faire plaisir aux maires.
C'est un cadeau, un tribunal dont le mandat
principal est de baisser les coûts, un tribunal dont le mandat est de mettre en
oeuvre le pacte fiscal promis aux maires par
le gouvernement, un tribunal qui ne rencontre pas les paramètres légaux de
l'arbitrage obligatoire, lequel doit, selon
la Cour suprême du Canada, pallier au fait que nous n'ayons pas le droit de
grève.
Six personnes
choisies par le gouvernement auront la main haute sur nos conditions de
travail. Les membres du
conseil de règlement pourront n'avoir aucune expérience dans le domaine
extrêmement complexe de l'arbitrage des différends,
des gens sans garantie d'indépendance, choisis pour livrer le pacte fiscal.
Pourtant, dans un arbitrage digne de
ce nom, ce sont les parties qui choisissent l'arbitre, l'équilibre des forces
et la crédibilité du processus en dépendent. Ce tribunal ne tient pas la
route.
De plus, la
fraternité est totalement opposée à ce que le ministre des Affaires municipales
devienne le chien de garde des
relations de travail dans le secteur municipal. Il y a non seulement apparence
de conflit d'intérêts, mais carrément conflit d'intérêts.
Par
conséquent, il est très difficile d'avoir confiance en un processus comme
celui-là. Un ministère en aussi étroite relation avec les villes, qui sont l'une des parties, ne peut agir comme
gardien d'un processus équitable, c'est évident. Le ministre du Travail est un agent neutre, ce qui n'est pas le cas du
ministre des Municipalités, en ce qui a trait aux relations de travail
dans le monde municipal. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir la chose.
MM. les
parlementaires, on pourrait s'étendre longtemps sur les nombreux problèmes que
créerait l'adoption du projet de loi
n° 110. Depuis quelques années, les policiers et policières de Montréal
sont injustement attaqués de toutes parts.
La ville et le gouvernement font preuve de populisme, et les relations de
travail sont en train d'être durablement détruites. Il est temps de mettre en place les
conditions favorables à de véritables négociations de bonne foi, justes,
équitables et qui respectent les chartes et le droit.
Malheureusement, le projet de loi n° 110
est un nouveau pas dans la mauvaise direction, qui mine encore davantage le principe fondamental de la libre
négociation, notamment en imposant des délais mais surtout un cadre qui brime les droits constitutionnels des
travailleurs. Nous l'estimons nuisible et nous déplorons qu'il s'apprête à
sérieusement et durablement dégrader quelque chose qui fonctionne
pourtant bien.
Avant de
conclure, je me permettrai de citer le paragraphe 72 de la décision de la
Cour suprême dans l'affaire récente de l'Association de la police montée
de l'Ontario contre le Procureur général du Canada en 2015 et qui dit : «L'équilibre nécessaire à la poursuite véritable
d'objectifs relatifs au travail peut être rompu de maintes façons. Des lois
et des règlements peuvent restreindre les sujets susceptibles de faire l'objet
de négociation ou imposer des résultats arbitraires. Ils peuvent interdire
l'action collective des employés sans offrir de mesures de protection adéquate
en compensation et réduire ainsi leur
pouvoir de négociation. Ils peuvent rendre impossible la réalisation des
objectifs des employés relatifs aux
conditions de travail. Ou encore, des lois et des règlements pourraient établir
un processus que les employés
seraient incapables de contrôler ou d'influencer. Quelle que soit la nature de
la restriction, il faut [absolument] déterminer
si les mesures en question perturbent l'équilibre des rapports de force entre
les employés et l'employeur que l'article 2d
[de la Charte canadienne] vise à établir, de telle sorte qu'elles interfèrent
de façon substantielle avec un processus véritable de négociation
collective.»
Donc, en
conséquent, et pour toutes ces raisons et certaines autres que vous retrouverez
dans le mémoire, qui est beaucoup
plus complet, nous considérons que le plus sage serait de retirer le projet de
loi n° 110, de cesser d'envenimer les
relations de travail, qui sont déjà sur la corde raide, et réitérer que nous
sommes prêts à négocier et à travailler avec le gouvernement pour
améliorer le système actuel. Merci.
Le Président (M. Auger) :
Merci, M. Francoeur. M. le ministre, pour 15 minutes.
M. Coiteux :
Merci beaucoup, M. Francoeur. Merci également à ceux qui vous accompagnent
aujourd'hui. Et on a quelques
minutes, là, pour échanger. Honnêtement, je ne m'attendais pas nécessairement à
ce que vous arriviez pour nous dire
que le projet de loi n° 110 était un projet de loi formidable, que vous
appuyez à 100 %, mais, dans les échanges que j'ai avec des groupes aujourd'hui, je m'étonne tout de même qu'il
n'y ait aucune ouverture à un certain nombre de choses qui sont dans ce
projet de loi là. Puis avec tout le monde j'essaie d'explorer un peu les mêmes
avenues.
Nous, puis je pense que ça commence à faire consensus,
nous, on est absolument convaincus que c'est une mauvaise idée que d'assimiler une ville, qui a un pouvoir de taxation obligatoire sur ses citoyens... c'est une mauvaise
idée de l'assimiler à une entité que serait,
par exemple, une entreprise privée, qui, elle, elle refile le coût, peut-être,
à ses consommateurs, mais ses
consommateurs, ils ont toujours la liberté d'acheter de quelqu'un d'autre.
Alors, c'est pour ça qu'en même temps
qu'on reconnaît, là, pleinement, là, le droit d'association, qu'on veut
s'assurer qu'on maintienne toutes, toutes,
toutes les dispositions à l'égard de ces droits fondamentaux, puis c'est ce que
fait le projet de loi, on veut s'assurer que soit mieux prise en compte cette caractéristique-là. Il y a un
impact direct sur les taxes des citoyens, du régime de négociation.
Alors, est-ce
que vous êtes prêts à reconnaître en quelque part qu'effectivement, négocier
avec une municipalité... Je comprends
que, vous, c'est avec une municipalité que vous négociez tout le temps, mais il
y a d'autres groupes qui sont venus
ce matin, puis des fois ils sont avec le secteur privé, puis des fois ils sont
avec le secteur public. Êtes-vous quand même prêts à admettre que c'est une entité différente puis qui doit être
traitée de façon différente d'autres acteurs dans le monde du travail?
M. Francoeur
(Yves) : Bien, tout à fait,
parce que nous n'avons jamais fait d'amalgame entre la négociation avec les
policiers, pompiers et le secteur privé. C'est complètement deux choses
différentes. Les critères du Code du travail sont différents, le travail est différent. La sécurité publique, ce
n'est pas la même chose que de vendre des automobiles, des thermopompes
ou des hot-dogs. On a toujours été d'accord avec ça puis on a toujours coopéré.
Mais je
reviendrai à ce que plusieurs intervenants ont dit : Il est où, le
problème? Montréal, les derniers 35 ans : 10 conventions
collectives négociées, deux sentences arbitrales. La dernière sentence
arbitrale date de 2007 à 2010, l'arbitre
nous a accordé 8,25 %. Nos membres étaient fâchés après nous autres,
étaient en furie après nous autres, puis la ville était en furie après l'arbitre. Tout le monde était mécontent.
Je présume que c'était peut-être une décision arbitrale qui a fait la
job. Mais, oui, il y a des critères différents, puis, oui, ce sont des choses
complètement différentes, je suis entièrement d'accord avec vous, on ne fera
pas de débat là-dessus.
M. Coiteux :
Donc, ce que vous dites, c'est qu'à l'heure actuelle les arbitres tiendraient
compte des dimensions... la situation fiscale de la municipalité, sa
situation économique?
M. Francoeur
(Yves) : Bien, si ce n'est
pas le cas, moi, je peux vous dire que, dans une audition de 40 journées
d'arbitrage, il y a eu six ou huit journées,
l'économiste syndical, l'économiste patronal, des rapports économiques d'une
soixantaine de pages de chacun des deux côtés, et qui a donné la décision qu'il
a donnée.
Mais on ne
peut pas non plus isoler seulement la capacité de payer. Si c'est ce que le
gouvernement veut faire, il faudrait travailler puis la définir, cette
capacité de payer là. Vous envoyez 300 millions de facture aux... excusez,
vous coupez 300 millions de transferts fiscaux aux municipalités. C'est
les travailleurs municipaux qui doivent payer pour
ça? Si vous décidez de couper 150 millions l'année prochaine, c'est les
travailleurs municipaux qui vont travailler pour ça? Il y a un maire qui se fait un
amphithéâtre de 400 ou 500 millions, puis jusqu'à maintenant il n'est pas
rentable. C'est les employés
municipaux qui font ça? Le maire de Montréal se paie une équipe de baseball à
1 milliard qui va s'avérer déficitaire
dans 10 ans. C'est les employés municipaux qui vont payer pour ça? Il
faudrait la définir, la capacité de payer.
M. Coiteux :
Mais à l'inverse, de façon symétrique, s'il y a des conventions collectives,
imposées ou négociées, qui imposent un coût tel qu'on est obligé de
couper dans les services publics, qu'est-ce que vous diriez?
M. Francoeur
(Yves) : Oui, vas-y, Laurent.
• (15 h 50) •
M. Roy (Laurent) : Bien, M. le ministre, avec respect, ce n'est
jamais arrivé. Vous évoquez une possibilité, une hypothèse qui ne s'est
jamais avérée vraie.
Vous
nous arrivez avec un projet de loi en nous disant dans vos remarques
préliminaires qu'il va servir, il va être très utile parce qu'il va
moderniser les relations de travail. Est-ce que vous nous permettez de vous
dire qu'au lieu de moderniser on va faire plutôt un retour en arrière
prodigieux, dangereux et sûrement pas souhaitable?
En
1947, le régime Duplessis, que tout le monde connaît bien, a adopté une loi qui
est frappante tant il y a des analogies à faire entre le projet de loi
n° 110 actuel et la loi, le chapitre 54, qui alors a été adoptée,
pour trois raisons. La première, c'est qu'on
a sorti le secteur municipal de la Loi des relations ouvrières, comme on le
fait aujourd'hui avec le Code du
travail. Ensuite, on a introduit les soi-disant critères relatifs à la capacité
de payer des citoyens, on a imposé dans les critères la taxation, les conséquences qu'une sentence arbitrale
pourrait avoir sur ce que les citoyens
paient comme taxes. Et on a créé un
tribunal permanent, c'est-à-dire que l'arbitre, lorsqu'il décidait du différend,
pouvait voir sa décision portée en
appel par la municipalité devant un tribunal permanent qui pouvait
intervenir s'il en venait à la conclusion que, finalement, le critère de
la capacité de payer n'avait pas été respecté. J'ai curieusement l'impression
qu'on retourne en 1947 au lieu d'avancer,
parce que c'était ça, à l'époque, on a fait exactement ce que vous proposez
comme solution. Et un gouvernement
libéral, en 1964, s'est empressé de l'enlever, parce que ce n'était pas une
façon à la fois moderne, correcte, juste et souhaitable.
Ce
n'est pas d'hier qu'on parle de la capacité de payer des citoyens, puis,
croyez-nous, là, on ne dit pas que ce n'est
pas en soi un élément qui est légitime dans la considération des salaires. La
preuve, c'est qu'il y a eu deux arbitrages en 34 ans à Montréal pour les policiers, un en 1985‑1986 puis un
autre en 2007‑2010. En 1985‑1986, l'arbitre a accordé l'inflation. Ça a
été ça, sa sentence arbitrale. Je suis certain qu'il n'y a personne qui a
déchiré sa chemise sur la place publique, et
ce n'est certainement pas cette sentence arbitrale qui par la suite a amené la
ville à dire : On va négocier plutôt que... on va essayer de s'entendre, puis on a le couteau sur la gorge,
plutôt que d'aller devant un arbitre, parce que c'est ce qu'on a eu,
l'inflation. Et il a fallu attendre 20 ans avant d'aller de nouveau devant un
arbitre, qui nous a donné 0 % en 2007,
c'est-à-dire exactement l'offre de la ville, qui nous a donné 2 % en 2008,
exactement l'offre de la ville, qui nous a donné 2 % en 2009,
exactement l'offre de la ville, puis qui, le 31 décembre de l'année en
question, 2009, nous a accordé une légère
augmentation pour tenir compte d'un rattrapage qui manifestement s'imposait.
Deux arbitrages au cours desquels la ville a fait valoir tous ces points
de vue là. La preuve économique a été faite, le taux de taxation, la capacité
foncière de la municipalité, son niveau d'endettement. Le directeur général de
la ville est venu témoigner, le trésorier est venu témoigner. Tous ces éléments-là
ont été mis en preuve devant l'arbitre, qui en a tenu compte.
Alors,
je ne vois pas en quoi on évolue, puisque ça a toujours été la situation devant
laquelle nous avons été placés, faire
attention, ne pas trop demander parce qu'effectivement il y a un élément qui va
nous être reproché si on n'est pas raisonnables,
puis l'arbitre ne nous donnera pas raison. Alors, ces éléments-là sont déjà, en
soi, dans la jurisprudence, mais le
législateur, en 1964, a choisi de ne pas l'introduire comme critère formel
parce que partout au Canada, partout au Canada...
On
serait la seule province du Canada, là, où on va se faire dire qu'un tribunal
d'arbitrage, ce n'est pas le forum approprié pour imposer les conditions
de travail des policiers et des pompiers, la seule province du Canada où on va
avoir un tribunal permanent, nommé, évidemment, par le gouvernement, en
fonction de critères qui sont très vagues. Un
expert en économie, là, pour moi, ça ne veut pas dire grand-chose, comme, du
reste, être un avocat, ça ne veut pas dire
grand-chose. Pourquoi? Parce qu'il y a à peu près 22 spécialités dans le
domaine juridique. Quelqu'un qui n'a jamais fait de différends de sa vie
vaut zéro quand il se présente devant un tribunal d'arbitrage.
Alors,
un expert en économie, ça veut dire quelque chose, oui, il a des connaissances
économiques. Puis l'expert du monde
municipal, lui, il connaît quoi dans le domaine des relations de travail, dans
le domaine propre au milieu policier, quand
on va parler d'horaires de travail, quand on va parler de promotions, de
critères d'ancienneté? Qu'est-ce qu'il connaît là-dedans? On n'a pas
d'assesseur dans le projet de loi que vous...
M. Coiteux :
...mais, quand on va parler d'impact sur les taxes municipales, je pense qu'il
est utile qu'il y ait une certaine expertise dans ce domaine-là.
M. Roy
(Laurent) : On en parle. J'en ai parlé dans ma réponse, M. le
ministre.
M. Coiteux :
Mais, si vous me permettez... Parce que vous nous avez ramenés en... Vous
m'avez dit en 1947?
M. Roy
(Laurent) : 1947.
M. Coiteux :
Moi, j'aimerais, si vous me permettez, juste nous ramener en 2016. Il y a quand
même un article 1 ici sur lequel
j'aimerais vous entendre, et en particulier il y a deux alinéas qui disent ceci...
Parce que c'est un tout, là, on ne faut pas prendre juste un petit morceau, c'est
un tout, ce projet de loi là. Dans cet article 1, notamment, on parle de...
«L'attraction et le maintien à l'emploi d'un
personnel qualifié commandent des conditions de travail justes et raisonnables
eu égard aux qualifications requises, aux
tâches à exécuter et à la nature des services rendus.» J'imagine que vous
n'êtes pas contre ça. «L'équité entre les membres du personnel exige de
maintenir un rapport approprié entre les conditions afférentes aux différentes catégories ou classes d'emploi, notamment en
ce qui concerne les salaires, les augmentations salariales et les
avantages pouvant être consentis.» Il y a un équilibre là-dedans.
Donc, vous dites : Actuellement, on a un équilibre parfait, ou, en
tout cas, idéal dans les
circonstances, ou immuable, vous dites : On a trouvé la solution en
1964. L'évolution de la situation, depuis 1964, ne commande aucune révision?
M. Roy (Laurent) : Ce n'est pas ça qu'on dit, M. le ministre. Mais, pour commander une solution, encore faut-il que la solution qu'on amène soit viable. Et qu'est-ce que vous allez véritablement changer en introduisant autant de critères?
M. Coiteux :
Pourquoi est-ce qu'elle n'est pas viable?
M. Roy (Laurent) : Pour une simple et bonne raison. D'abord,
un, tous les experts... Bien, première des choses, M. le ministre, lorsque, comme disait Me Leblanc, on veut introduire un aspect
législatif, c'est soit pour prévenir ou pour guérir quelque chose, c'est parce
qu'on veut solutionner un problème.
Or, il est où, le problème? Vous voulez solutionner quoi?
La
capacité de payer des citoyens, tous les experts au Canada
disent que c'est le critère le plus difficile à appliquer. Pourquoi? Parce
qu'il y a des choix qui sont derrière
les décisions qui sont prises par les élus municipaux. Alors, vous allez
demander à l'arbitre d'intervenir dans ces choix-là, d'en tenir compte? Est-ce
qu'on va payer un policier de Montréal moins cher sous prétexte qu'une décision
municipale malheureuse aurait privé la municipalité de son pouvoir, de sa capacité de payer les policiers pour avoir une police compétente,
des policiers compétents, qui ne sont pas corrompus, qui donnent un bon service aux citoyens? Le
policier de la SQ, est-ce qu'il est moins bien payé sous prétexte qu'il
est dans une ville plutôt que dans une autre?
M. Coiteux : Mais il
n'y a personne qui remet ça en question
ici, là, puis il n'y a rien dans le projet de loi ici qui
remet ça en question, là.
M. Roy (Laurent) :
Mais alors pourquoi le changer, le système?
M. Coiteux : Pourquoi le changer? Parce que
l'évolution des finances publiques municipales au cours des
dernières décennies nous montre qu'il
y a un réel problème, l'évolution des taxes municipales nous montre qu'il y a
un réel problème. L'évolution
des transferts du gouvernement vers les municipalités pour s'assurer qu'elles soient capables de faire
arriver les deux parties de l'équation, les revenus et les dépenses
montrent qu'il y a un sacré problème.
Quand
on regarde l'évolution des rémunérations dans le secteur public québécois
puis à quoi on a dû s'assujettir, nous,
comme gouvernement, puis, dans
le fond, demander des efforts à la population,
ils n'ont pas trouvé leur contrepartie, dans le secteur municipal, alors que ce sont des gouvernements qui ont le pouvoir de taxation. Alors, ou bien ils réclamaient
plus de transferts du gouvernement ou alors ils taxaient davantage les
citoyens.
Cet
aspect-là, puis on n'est pas les seuls à le dire, il est mal pris en compte par
les mécanismes actuels. C'est ça, le problème. C'est ça, le problème
qu'on doit guérir vite.
Il n'y a
rien à guérir? Je ne suis pas d'accord avec vous et je ne suis pas le seul à ne
pas être d'accord avec vous. Il y a des gens qui sont élus par leur population, ils sont élus, là, ce n'est pas des fonctionnaires, là, ils sont élus,
redevables devant leurs citoyens, il y en a plus de 1 100 au Québec. Je vous le dis franchement, là, unanimement ils
voient les choses de cette façon-là,
qu'il y a un réel problème. Puis nous, on les regarde aller, là, dans les
transferts qu'on fait aux municipalités, dans l'évolution des taxes et des impôts.
On le voit, le problème.
Alors,
on ne veut pas remettre en question aucun droit. Donc, il s'agit ici de trouver un
équilibre entre ce principe de la saine gestion des finances publiques
dans le secteur municipal — puis
le secteur municipal, je répète, c'est un gouvernement, c'est un gouvernement local avec
pouvoir de taxation — puis
les exigences de donner des conditions de travail qui correspondent aussi aux droits fondamentaux des
travailleurs, et notamment, bien
sûr, des policiers. C'est ça,
l'équilibre qu'on recherche ici.
M. Roy (Laurent) : Est-ce
que ça veut dire que le Québec
est la seule province du Canada où à cause du système d'arbitrage il y a
un déséquilibre, mais pas ailleurs? Partout ailleurs au Canada, le système
d'arbitrage répondrait adéquatement à la situation des municipalités, mais pas
au Québec?
Puis
vous remplacez l'arbitrage par un tribunal qui de toute façon, lui aussi, va
avoir à appliquer des critères. Il va avoir
à tenir compte du critère de l'équité externe, même si le maire de Montréal
ne le veut pas. Je ne sais pas comment est-ce
qu'il va faire pour engager un technicien en informatique s'il ne sait pas quel
est le marché de référence pour un technicien en informatique. Les
salaires des médecins, à ce que je sache, ont tenu compte du critère externe,
lorsque le gouvernement a négocié avec
les médecins du Québec, il a tenu compte du rattrapage qu'il devait y
avoir sur l'Ontario. C'est le premier critère dans la détermination des
salaires, le critère externe, et les municipalités ne le veulent pas. Pourquoi? C'est ça, le déséquilibre, parce que
les arbitres appliquent un principe universellement appliqué que... C'est quoi,
cette certitude tranquille que les élus ont vis-à-vis de ce prochain
conseil de règlement...
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Coiteux : S'il y avait un seul critère, s'il y avait un
seul critère, on pourrait avoir cette discussion-là, mais, dans le projet
de loi, il n'y a pas un seul critère qui est proposé.
Mais
c'est normal qu'il y ait des critères s'il y a un arbitrage. Vous n'êtes pas
d'accord avec le fait qu'il y ait des critères?
M. Roy
(Laurent) : Oui. Les arbitres en tiennent compte.
Le
Président (M. Auger) :
Merci, messieurs. Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle pour
un bloc d'échange de neuf minutes. M. le député de Richelieu.
• (16 heures) •
M. Rochon : Oui, merci, M. le Président. Laissez-moi d'abord saluer cette leçon d'histoire qui nous a été servie,
servie comme commentaire, là, sur la volonté de moderniser. Il emploie beaucoup
cette expression, le ministre, de moderniser
les relations de travail dans le monde municipal. Alors, la leçon d'histoire
nous permet d'apprendre que ce que préconise le gouvernement
d'aujourd'hui est ce que préconisait celui de Maurice Duplessis en 1947. Et ce
qu'il a implanté comme relations de travail
dans le monde municipal, ça a été retiré par le progressiste gouvernement
libéral de Jean Lesage en 1964.
Alors, voilà pour la modernité. Mais
je vais mettre le nez dans mes cahiers d'histoire, là, pour en apprendre
un peu plus sur ce sujet-là.
Je
veux aussi dire que j'ai bien entendu l'opinion du groupe qui vient d'exposer son mémoire et ses
remarques sur l'aberration que constitue,
selon ce groupe, le fait de confier au ministre
des Affaires municipales les relations de travail dans ce domaine plutôt qu'à la ministre du Travail, qui brille par son absence et qui pourtant est la gardienne du Code du travail, n'est-ce pas?
Le
Président (M. Auger) : ...M. le député, de faire attention de ne pas
souligner la présence ou la non-présence, là, d'une ministre ou d'un
député. Donc, si vous voulez continuer, s'il vous plaît.
M. Rochon :
Bon, c'était de notoriété, par ailleurs, M. le Président, mais je prends note,
là.
Mon collègue de la deuxième opposition, suite au
mémoire déposé ici par des opposants au projet de loi — et Dieu sait que nous en avons entendu plusieurs
aujourd'hui — leur
demandait : Bon, c'est bien, vous êtes contre, mais qu'est-ce que
vous avez à proposer pour moderniser — il reprenait avant la leçon
d'histoire, lui aussi, le verbe du ministre, là — pour moderniser les relations
de travail?
Alors,
vous, dans votre document, vous proposez quelque chose, et je veux vous
entendre sur cette proposition. Vous proposez
au gouvernement «de prendre une pause et de considérer les recommandations du comité Thérien-Morency — dont
on a entendu parler déjà — comme
étant la plateforme qui [va permettre], à la satisfaction de tous,
d'améliorer le processus de négociation dans le secteur municipal, au bénéfice des citoyens», écrivez-vous, là.
«Ces recommandations, précisez-vous, sont le fruit des travaux effectués par les associations représentatives du monde municipal sous la supervision professionnelle
et experte du ministère du Travail — ça sert à quelque chose, ce ministère,
j'espère que ça continuera à servir à quelque chose. Elles sont le résultat
d'un examen approfondi de la situation et d'une analyse de solutions pratiques,
réalistes, prometteuses et qui sont mutuellement acceptables.»
Donc, voilà la voie
que vous préconisez. Je souhaite vous entendre plus abondamment là-dessus.
M. Francoeur
(Yves) : Pour avoir été présent... Oui, excusez.
Le Président (M.
Auger) : ...la parole.
M. Francoeur (Yves) : Pour avoir été présent, effectivement, le constat qui a été fait, c'est qu'il n'y avait pas de décision déraisonnable — et je suis toujours ouvert à ce qu'on
m'en présente une — il n'y avait pas de décision déraisonnable qui était rendue. Les
problématiques étaient au niveau des délais, des situations qui traînaient et
qui se salissaient, malheureusement.
Et
donc il y a eu — que succinctement j'ai ici, là — des conclusions du rapport Thérien-Morency,
qui regroupait des représentants des
villes de Montréal, des villes de Québec... Il y en avait une ou deux autres,
je ne veux pas induire personne en
erreur, mais je me demande si Gatineau et Laval n'étaient pas là. Mais en tout
cas il y avait Montréal, Québec, l'UMQ,
il y avait des représentants du monde syndical, policier et pompier, et il y a
eu un consensus. Le premier consensus, c'était de rendre obligatoire la
médiation-arbitrage, ce qui fait en sorte que l'arbitre, s'il n'y a pas entente
lors de la médiation-arbitrage, rend une
décision arbitrale sur les matières qui n'ont pas fait l'objet d'entente; une
sentence de 36 mois, puis, je le
répète, qui faisait consensus chez les parties, parce qu'une mauvaise
décision, pour une ville ou pour un syndicat, cinq ans, c'est long, c'est beaucoup trop long; un début de négociation six mois avant l'échéance de la convention collective et une
médiation-arbitrage délimitée dans le temps de trois mois, incluant le délibéré
de l'arbitre, ça fait que, si on tient compte
de la période des fêtes, là, dépendamment s'il y a une... en tout cas, c'est quelque chose qui se réglait en neuf, 10, 11 mois, là, maximalement. Et, je le répète, il y avait
un consensus des villes, Québec, Montréal, l'Union
des municipalités du Québec, les grands syndicats policiers puis les
grands syndicats pompiers.
Et,
je le répète encore, moi, je suis à la recherche d'une décision arbitrale qui
pourrait être jugée déraisonnable. Je n'en connais pas et je suis
présent dans le monde du travail depuis près de 20 ans.
Donc,
on revient à la prémisse de départ : Il est où, le problème?
La capacité de payer, on l'a dit, ça a été abordé dans notre arbitrage, c'est déjà un
critère du code. Il y a eu huit jours de preuve sur la capacité de payer
de la municipalité en question.
M. Rochon : Vous vous demandez, toujours
dans le mémoire, là, que nous avons sous les yeux et sur lequel
nous vous interrogeons, comment
expliquer, au-delà de considérations — et
là je vous cite, là — de
petite politique, que le présent
gouvernement se soit engagé dans la voie qu'il préconise aujourd'hui avec le dépôt du projet de
loi n° 110, et vous
constatez qu'il l'a fait sans étude. Ça, vous n'êtes pas les premiers à nous
dire ça. Il n'y a pas d'étude sur laquelle le gouvernement se base pour nous arriver avec ce projet de loi, qui modifie sérieusement,
sérieusement le Code du travail, qui joue dans le droit à la négociation, un droit fort important, là. Il lui faut agir avec sérieux, et il n'est
pas clair qu'il agisse actuellement, le gouvernement, avec sérieux.
Vous
serez donc du même avis que moi, je présume, qu'il serait fort
pertinent que le gouvernement retourne faire mieux ses devoirs et étaie un argumentaire qui nous fasse mieux
comprendre la voie dans laquelle il souhaite engager tout le Québec.
Le Président (M.
Auger) : Il reste une minute à l'échange. M. Francoeur.
M. Francoeur (Yves) : Oui, effectivement. C'est un long débat, on pourrait en parler longtemps,
mais je remonte aussi loin que des
maires de Montréal qui ont gelé les taxes pendant six ans, ils n'ont
pas investi dans les infrastructures, et qui se retrouvent que, 10, 15 puis
20 ans après, ça ne fonctionne plus. C'est un grand débat.
On
est conscients de la capacité de payer, on vous l'a expliqué, on est prêts à
des méthodes ou des façons de faire novatives
pour améliorer la situation, mais le projet
de loi n'arrangera en rien la situation.
Au contraire, ça va faire des employés, des policiers
démotivés, désengagés, une productivité à la baisse, il ne faut pas se le
cacher.
Le Président (M.
Auger) : 30 secondes. M. le député de Richelieu.
M. Rochon :
Je vais les laisser à mon collègue.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, nous allons poursuivre avec M. le député de Blainville
pour six minutes.
• (16 h 10) •
M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le
Président. Merci, M. Francoeur, M.
Potvin, Me Nadeau. Merci d'être présents.
D'abord, d'entrée de jeu, je vous dirai que j'ai beaucoup de respect pour vos membres, surtout que dans le cadre du projet de loi n° 3 et de la loi n° 15, vous avez raison,
vous avez été injustement traités. Ça, c'est des choses qui arrivent. Votre régime était capitalisé, donc n'avait pas
besoin d'un projet de loi pour le remettre à flot, il l'était déjà, à flot. Ça,
là-dessus...
Mais
par contre, là, on est dans les relations de travail, et là, dans les relations
de travail, c'est dur depuis... Parce qu'effectivement vous avez un bon
discours parce que c'est vrai qu'il n'y a pas eu d'arbitrage, souvent, puis il
y a eu beaucoup de signatures de convention
collective, mais je vous dirais que c'est toujours par rapport aux lois qui
existaient et le système d'arbitrage
qui existait. Donc, il y a plusieurs élus qui ont signé puis qui, même s'ils
étaient souriants quand ils ont signé l'entente, et tout ça, avaient comme
leurs conseillers qui leur disaient : D'une manière ou d'une autre, c'est
mieux ça que d'aller en arbitrage ou quoi que ce soit. Alors, c'est ça, la
réalité, c'est qu'on vit avec un système qui vous a été favorable. Puis ça, là-dessus, je pense que
c'est ça, la réalité. Vous pourrez... Mais la réalité, là, je vous dirais,
macropolitique, vue de l'extérieur par les citoyens du Québec, puis les
statistiques le donnent, les employés municipaux n'ont pas été perdants au
cours des 25, 30 dernières années. Disons que vous avez été avantagés par
le système qu'il y a là.
C'est
normal que les élus municipaux demandent à ce que... un certain rééquilibre, et
tout en conservant la liberté de
négociation, et tout ça, parce que les critères... Tu sais, ce n'est pas banal
quand le maire de Montréal nous dit : L'équité externe, je n'en veux plus. Ça veut dire qu'elle
lui a coûté cher à lui, comme maire, puis aux autres maires qu'il y avait
avant. Je veux dire, on peut dire que c'est un critère qui est rendu
international ou quoi que ce soit, mais, en tant que gouvernement, on peut
décider qu'il y a des critères qui sont obligatoires puis qu'il y aura d'autres
critères qui seront facultatifs pour la...
tu sais. Donc, à quelque part, c'est à nous, en tant qu'élus, à essayer de voir
comment on peut essayer d'ajuster.
Puis
je pense qu'on est rendus là. On est rendus... Puis je le répète, là, je l'ai
dit ce matin, là, quand le maire de Montréal
nous dit : Ma crainte, c'est que, mes prochaines négociations, je perde
tous les avantages que j'ai eus avec le projet de loi n° 3, que vous ne méritiez pas, en passant, là, tu sais,
c'est pour ça que j'ai un problème majeur, mais il reste quand même que ce serait difficile de... Tu sais, il y a
quand même du travail qui a été fait pendant deux ans. Il y a des parties
du projet de loi n° 3 pour lesquelles je n'étais pas d'accord, mais il y
en a pour lesquelles j'étais d'accord. Donc, il fallait qu'il y ait un renflouement des fonds de pension. Puis
inévitablement, quelque part, il ne faut pas que les villes, avec une prochaine négociation, avec les
conditions de travail qu'on a présentement, bien, qu'elles soient obligées de
payer tout ce qu'elles ont eu comme récupération au cours des deux
dernières années.
Vous
ne trouvez pas qu'on est rendus au moment où... Puis c'est vrai que, dans
l'histoire, il y a eu des gouvernements...
vous avez raison, là, il y a des gouvernements qui ont pris des décisions, il y
a d'autres gouvernements qui les ont
renversées, il y a eu le gouvernement Lévesque, en 1982‑1983, qui a imposé même
la loi matraque pour être capable de faire rentrer ses propres employés.
C'est que, dans l'histoire d'une société, il y a des temps où on est dus pour faire une modification, puis je pense que...
Je l'ai donné tantôt, là. Quand on voit la ville de Rosemère qui, parce qu'elle n'est pas capable de trouver des façons de
négocier avec ses employés, elle abolit son service de pompiers pour s'en aller avec Blainville, bien, on est rendus au
temps où il faut prendre en considération la capacité de payer. Vous ne trouvez
pas qu'on est rendus là?
M. Francoeur
(Yves) : J'ai combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Auger) : Deux
minutes, M. Francoeur.
M. Laframboise : Je vous les donne,
en plus, je vous les donne.
M. Francoeur (Yves) : Deux minutes?
Je vais essayer de faire ça vite.
Première des choses, si je me rapporte aux
20 dernières années, là, pour les policiers de Montréal, je peux me tromper, à peu de chose près, là, mais les
augmentations salariales ont varié entre 1,5 % et 2,5 % par année,
avec au moins une année de gel.
Est-ce que c'est déraisonnable? Je ne le crois pas. Si on demande aux élus
municipaux : Est-ce que ça coûte
trop cher?, peu importe ce qu'on rajoute après, la cueillette des ordures, la
voirie, les polices, les pompiers, la réponse va toujours être oui, ça,
ce n'est pas compliqué, là, en partant.
L'équité
externe, on peut s'en parler, mais, moi, jamais je ne vais accepter, nonobstant
le respect que j'ai pour le travail
effectué par les cols bleus puis le travail effectué par les cols blancs, que
des policiers qui comme chez nous sont tireurs
d'élite, démineurs d'explosifs, peuvent intervenir en matière d'antiterrorisme,
enquêtes crime organisé, enquêtes motards,
enquêtes gangs de rue, enquêtes terrorisme... Puis nous, on va se comparer, à
l'interne, avec des blancs et des bleus?
Si c'est ça que vous voulez, vous êtes complètement à l'inverse de la tendance
nord-américaine, où partout c'est reconnu que les policiers, les
pompiers, les intervenants d'urgence font un travail particulier.
Ça fait que
c'est pour ça que l'équité externe, là... Le maire a beau ne pas aimer ça, là,
mais le maire, quand il compare son
salaire, il ne compare pas son salaire avec le maire de Rosemère, mais je suis
certain qu'il le compare avec celui de Toronto puis celui de Vancouver.
Le Président (M. Auger) :
30 secondes, M. le député.
M.
Laframboise : ...quand on
écoute M. Desrochers, qui nous dit : Moi, dans l'équité externe, mon
problème... Probablement, même, pour
lui, ce n'est pas le salaire, parce qu'il faut qu'il soit capable, s'il veut
garder son personnel, puis la
rétention... C'est tout ce qui peut se donner que je n'avais pas vu venir puis
qui s'est donné dans une ville parce qu'à
quelque part on a donné quelque chose, qu'on est obligé de rajouter, parce que
ça arrive dans une négociation, tout simplement, là. C'est ça que
M. Desrochers nous disait ce matin.
Le Président (M. Auger) :
15 secondes.
M. Roy
(Laurent) : ...en
rémunération globale. Rappelez-vous, lors de la loi n° 15, les travaux de
la commission parlementaire, on vous
l'a expliqué : le régime de retraite, il est négocié en rémunération
globale. Le salaire des policiers de Montréal est moins élevé que
partout ailleurs au Québec parce que notre régime coûte plus cher. Alors, on
peut...
Le Président (M. Auger) : Merci,
maître. Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions. Donc,
MM. Francoeur, Gendron, Potvin et Me Roy, merci beaucoup pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 14)
(Reprise à 16 h 18)
Le Président (M. Auger) : À l'ordre,
s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux en souhaitant la bienvenue aux représentants de l'Union des municipalités du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre présentation, et par la suite nous allons procéder
à une période d'échange avec les trois groupes parlementaires. Dans un
premier temps, bien vouloir vous présenter, et par la suite vous pouvez
commencer.
Union des municipalités
du Québec (UMQ)
M. Sévigny
(Bernard) : Merci, M. le Président.
M. le ministre, chers membres de l'Assemblée nationale. Alors, d'abord,
au nom de l'UMQ, je vous remercie, je veux remercier les membres de la
commission de bien vouloir nous entendre
aujourd'hui. Permettez-moi d'abord de vous présenter les gens qui
m'accompagnent : Mme Caroline St-Hilaire, qui est mairesse de Longueuil et présidente du
Caucus des grandes villes de l'UMQ; Alexandre Cusson, maire de Drummondville et premier vice-président du
l'union. Je suis également accompagné de Jasmin Savard, qui est directeur
général de l'UMQ, et de M. Yves Létourneau, conseiller aux politiques à
l'UMQ.
Alors,
brièvement, avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais simplement vous
rappeler que l'UMQ représente, depuis
près d'un siècle, des municipalités de toutes tailles dans toutes les régions
du Québec. En fait, ses membres représentent 80 % de la population
et 80 % du territoire du Québec.
• (16 h 20) •
L'UMQ dénonce
depuis des années le déséquilibre du rapport de force dans les relations de
travail municipales et réclame des outils pour rééquilibrer ce rapport
et permettre aux municipalités de gérer les services publics selon la capacité de payer des
citoyens. D'ailleurs, dans son livre blanc municipal, l'UMQ recommandait au
gouvernement du Québec une révision
de l'encadrement législatif des relations de travail dans un souci justement
d'un meilleur contrôle des dépenses municipales et de limiter la
croissance des coûts.
D'ailleurs, il y a
une étude qui a été réalisée par Raymond Chabot Grant Thornton pour l'UMQ, en
2015, qui démontre que la part des budgets
municipaux consacrée à la rémunération des employés est en croissance continue.
Et je vais vous faire grâce du
40 % de l'Institut de la statistique du Québec, statistique que vous
connaissez parfaitement bien, et qui
représente un écart moyen de 20 000 $ par année chez les employés
municipaux par rapport aux employés de la fonction publique québécoise.
À ce faible rapport de force des municipalités dans la négociation des
conventions collectives s'ajoute un mode
d'arbitrage pour les policiers et pompiers qui entraîne une spirale vers le
haut des conditions de travail.
Bref, il faut se
rendre à l'évidence, le cadre des relations de travail actuel, dans les
municipalités, a généré les résultats que
nous connaissons, donc les statistiques que nous connaissons, et n'est pas
adapté aux réalités municipales du
XXIe siècle. Il faut rétablir, donc, un équilibre, sans rien enlever à
personne et dans le plus grand respect des employés municipaux. Il faut rétablir un équilibre dans
lequel les citoyens, payeurs de taxes, feront partie de l'adéquation. Il faut
rétablir un équilibre dans lequel les
municipalités sont reconnues pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire des
gouvernements de proximité qui gèrent des services publics.
Or, le projet de loi que nous étudions
aujourd'hui va dans ce sens, et je tiens ici à saluer le travail du ministre
des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire à cet égard. Le projet de loi n° 110 marque un
changement majeur dans le processus de négociation collective des
municipalités, que nous saluons d'ailleurs.
D'abord, soulignons l'importance du
paragraphe 1°, article 1 du projet de loi, qui reconnaît que les municipalités
constituent des institutions démocratiques
redevables auprès de leurs contribuables et qu'à ce titre elles ont la
responsabilité de dispenser des
services de qualité aux résidents de leur territoire. Et cette disposition est
majeure, car elle met en évidence l'intérêt
public et la légitimité démocratique qui fondent l'action des municipalités. Et
pour la première fois une loi en matière
de relations de travail reconnaît le caractère spécifique des municipalités, ce
principe directeur est la base même de
la nouvelle approche proposée par ce projet de loi. Et nous souhaitons un
régime de négociation distinct qui reconnaisse que les municipalités sont des institutions démocratiques redevables
auprès de leurs contribuables, et ça, c'est fondamental, c'est capital.
Alors, avant de céder la parole à mes
collègues pour vous présenter nos principales recommandations, je veux
réaffirmer haut et fort que l'UMQ a toujours préconisé et privilégié la
négociation avec la partie syndicale, et cela ne changera pas après l'adoption
de ce projet de loi. L'objectif demeure de favoriser une négociation de bonne
foi.
Le mémoire de l'UMQ regroupe
14 recommandations, et j'invite mon collègue vice-président de l'UMQ de
vous présenter quelques-unes d'entre elles. M. Cusson.
M. Cusson (Alexandre) :
Merci, M. Sévigny. Alors, M. le ministre, M. le président de la
commission, membres de la commission.
Alors, pour compléter la mise en
contexte qui a été faite par notre président, j'ajouterais que la rémunération
globale plus élevée dans le secteur
municipal a un impact qui est significatif sur le coût des services. Par
ailleurs, les pressions financières
exercées sur les municipalités se sont accrues considérablement par des
demandes de plus en plus nombreuses des
citoyens, qui réclament davantage de services pour répondre à leurs besoins
évolutifs. De plus, il ne faut pas les oublier aussi, il y a les nouvelles obligations auxquelles doivent répondre les
municipalités, notamment en matière d'environnement, en matière de transport, de développement économique.
Tout ça ajoute aux pressions financières. Ces pressions, conjuguées avec la capacité de payer des citoyens, commandent
des changements du cadre des relations de travail dans les municipalités.
Permettez-moi donc d'attirer votre
attention sur quelques-unes de nos recommandations concernant les employés
municipaux autres que les policiers et pompiers.
Alors,
d'abord, je vous réfère à l'article 41 du projet de loi, qui prévoit que, et je
cite, «si des circonstances exceptionnelles
le justifient», l'une ou l'autre des parties peut, après le dépôt du rapport du
médiateur, demander par écrit, avec
justification à l'appui, la nomination d'un mandataire spécial qui aura comme
mission de favoriser le règlement du différend.
L'Union des municipalités du Québec considère que le conseil municipal doit
également pouvoir intervenir auprès
du ministre lorsqu'il y a refus de négocier de bonne foi ou dans le cadre d'une
négociation qui perdure. Dans ce contexte,
on propose donc de clarifier l'article 41 pour préciser concrètement les
cas où il peut y avoir intervention auprès du ministre.
De plus, le conseil municipal doit
avoir la possibilité de préciser au ministre ses orientations. Alors, on suggère
donc qu'après la médiation le conseil
municipal puisse, et par résolution, soumettre ses positions au ministre, de
même que ses recommandations.
Par ailleurs, après une médiation
infructueuse tenue conformément aux dispositions de la section II, le
projet de loi prévoit que les parties
peuvent demander conjointement que leur différend soit soumis à un arbitre
unique. Ici, j'aimerais souligner que
cette option, qui est déjà prévue au Code du travail, n'est jamais utilisée par
les municipalités. Sauf dans le cas
des policiers, pompiers, et pour des raisons évidentes, les municipalités ne
souhaitent pas confier à un tiers non élu la responsabilité de décider des conditions de travail et, par conséquent,
des dépenses municipales. Dans ce contexte, l'UMQ ne voit pas la
pertinence d'inclure cette option dans le présent projet de loi.
Alors,
voici l'essentiel de nos recommandations concernant les salariés autres que les
policiers et pompiers. Je cède maintenant la parole à ma collègue
présidente du Caucus des grandes villes pour compléter.
Mme St-Hilaire (Caroline) : Merci,
Alexandre. Alors, à mon tour de saluer le ministre, le président de la
commission, messieurs, puisque ça semble être essentiellement masculin ici.
Alors,
oui, à titre de présidente du Caucus des grandes villes, je veux aussi saluer
le travail du ministre des Affaires municipales pour livrer les
engagements de l'accord de partenariat avec le monde municipal.
Depuis sept ans maintenant que je suis mairesse
de Longueuil, et comme mes collègues je constate que les municipalités ont bien peu de marge de manoeuvre
en ce qui a trait à la gestion de leurs ressources humaines. Pourtant, le conseil municipal est la meilleure instance
pour apprécier la capacité de payer des citoyens lorsque vient le temps de
décider des conditions de travail de ses employés.
Nous avons
salué le courage du gouvernement de revoir le dossier des régimes de retraite.
Maintenant, avec la permettrait aux villes de mieux gérer la prestation
des services publics aux citoyens et à meilleur coût.
Il faut se
rappeler que les conventions collectives actuelles sont le fruit de dizaines
d'années de compromis par les villes,
durant lesquelles elles ont privilégié la paix sociale et évité de longs et
surtout de coûteux conflits de travail. En gros, on a plié pour la bonne entente. C'est sans doute pourquoi on
dit, du côté syndical, que 94 %, 96 % des négociations se règlent sans arrêt de travail. Ces compromis,
qui sont devenus des privilèges ou même parfois des aberrations, doivent
être remis en question aujourd'hui dans le respect de la capacité de nos
citoyens, à qui nous sommes redevables.
Une autre
aberration est le régime d'arbitrage des différends des policiers et des
pompiers, qui nous a fait perdre tout contrôle. Il en a résulté une
spirale — je
vois qu'il me reste une minute, alors j'accélère.
Les municipalités sont ainsi tributaires des
décisions et des choix des autres municipalités, qui souvent ont un contexte économique et un cadre financier fort
différents. C'est pourquoi l'UMQ a toujours revendiqué la mise sur pied d'un tribunal permanent et spécialisé qui
déciderait d'une sentence arbitrale tenant lieu de convention collective selon
des critères tenant compte de la réalité de chaque municipalité.
Alors, l'UMQ
appuie l'ajout de critères tels que la situation financière et fiscale de la
municipalité. Néanmoins, nous proposons de retirer du projet de loi la
référence au critère lié à l'équité externe.
De plus, il
sera difficile pour les membres du conseil et pour les parties en cause de
considérer huit critères différents ayant
tous le même poids. L'UMQ recommande donc de modifier le projet de loi afin de
prévoir des critères obligatoires et des critères optionnels.
Je vous remercie de votre attention et je cède
la parole au président de l'UMQ.
M. Sévigny (Bernard) : Alors, M. le Président...
Le Président (M. Auger) : C'est tout
le temps, pardon, que nous avions. M. le ministre, on peut permettre...
Allez-y, M. Sévigny.
M. Sévigny (Bernard) : En deux mots,
M. le ministre, simplement rappeler les trois enjeux prioritaires : l'autonomie — nous y tenons — la reconnaissance des municipalités comme
gouvernements de proximité et l'indépendance des arbitres et des
critères d'arbitrage. Merci beaucoup.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup pour votre présentation. M. le ministre, vous avez 15 minutes.
• (16 h 30) •
M.
Coiteux : Oui. Alors, d'abord et avant tout, bien, merci beaucoup,
M. Sévigny, M. Cusson, Mme St-Hilaire, ceux qui ne se sont pas exprimés mais qui auront
peut-être l'occasion de s'exprimer, mais vous avez certainement participé
aux travaux, là, donc merci beaucoup d'être ici présents pour présenter ce
mémoire.
Alors, on a
un peu moins d'une quinzaine de minutes, maintenant, pour échanger. Regardez,
il y a eu... vous êtes les huitièmes aujourd'hui à venir présenter un
mémoire, à faire une présentation, et on a souvent entendu, du côté des syndicats qui représentent les intérêts des cols
bleus, des cols blancs ou bien des associations qui représentent les policiers
et les pompiers, le fait que, pour eux, en
fait, vous avez toujours manifesté, dans le passé, votre grande satisfaction
par rapport au régime actuel. La
preuve en est qu'il y aurait eu peu de conflits de travail, beaucoup d'ententes
négociées, peu de renvois en arbitrage. Et donc pourquoi réparer quelque
chose qui fonctionne bien et à la satisfaction de tous?
Votre présentation laisse entendre que ce n'est
pas le cas, que ce n'est pas à la satisfaction de tous, que vous n'avez pas toujours signé avec grande conviction, disons. Et vous
dites que les mécanismes actuels vous ont amenés des fois, au nom de la paix sociale, à signer des choses que
vous auriez préféré ne pas signer, parce
que vous pensiez que ce n'était
pas une bonne solution.
Je pense que c'est important de prendre
l'opportunité, maintenant, pour expliquer comment ça a été vécu très concrètement, au cours des dernières années, je
dirais, au cours des dernières décennies mais y compris dans l'époque la
plus récente, comment tout ça a été vécu et pourquoi vous pensez que les
mécanismes actuels sont inadéquats.
M. Sévigny
(Bernard) : Bien, en fait, M. le ministre, il y a deux mécanismes distincts, le premier, parce qu'on parle, dans un premier temps, des policiers et des pompiers, où l'équité
externe fait partie des critères prioritaires des arbitres, donc qui fixent à partir d'un échantillon, enfin,
d'une appréciation externe, pour fixer les critères, et ces critères-là, en tout
cas, les conditions qui sont
accordées par un tiers, deviennent des critères d'équité interne pour les
autres employés, d'où l'effet, l'effet spirale, que les employés, que ce
soient les cols blancs, les cols bleus, à des tables de négociation, réclament les mêmes conditions qui sont accordées
par ceux et celles qui ont bénéficié de l'arbitrage. Ça, c'est un élément.
Le
deuxième élément, on parle de paix sociale. Et ça, évidemment,
c'est réel. Encore une fois, les municipalités ne
gèrent pas des meubles ou des vélos, on gère des services publics, et, quand il y a
arrêt de ces services publics là, un conflit
de travail, par exemple, que j'ai personnellement vécu il y a
cinq ans à Sherbrooke, bien, évidemment, ça pose des questions,
ça pose toutes sortes de difficultés, notamment... Et d'ailleurs on a un petit couplet à la fin de notre mémoire
sur les services essentiels, où la liste des
services essentiels est proposée par la partie syndicale, et ça fait en sorte...
Dans notre cas très précis, parce que vous voulez des exemples, ça fait en sorte qu'il
y a 15 % des employés cols bleus
qui étaient véritablement en grève, donc ne
travaillaient pas, alors que 85 % travaillaient pour les services
essentiels, et ce 15 % là, ce
sont les services, évidemment, dits non essentiels : loisirs, arénas,
parcs, etc. Et, après quelques semaines, vous comprendrez que la
population se manifeste, et on a eu à gérer, par exemple, des conflits où des
parents sortaient les tondeuses pour aller tondre les terrains de soccer parce
que les enfants étaient privés de sport. Et évidemment cette pression-là fait
en sorte qu'on a finalement consenti ce que le syndicat demandait pour
retrouver cette paix sociale là.
Donc, ce sont des exemples réels, qui fait en
sorte que, quand on parle de spirale... Puis évidemment les villes négocient de façon individuelle avec leurs
syndicats, et le syndicat, évidemment, aussi font de l'étalonnage sur les
meilleures conditions à gauche et à
droite, donc un bouquet de demandes qui sont fondées sur les meilleures
pratiques, et qui fait en sorte, là... ce qui nous place dans une situation
difficile, parce qu'encore une fois nous gérons des services publics.
M.
Coiteux : Une autre question sur laquelle j'aimerais vous entendre,
puis j'ai eu, encore une fois, cet échange-là avec plusieurs aujourd'hui, j'amenais les gens... je leur posais la
question : Est-ce que vous reconnaissez que, les municipalités, on ne peut pas traiter ça comme une entreprise, que
c'est un gouvernement, vous, vous définissez ça comme un gouvernement de proximité, mais une entité où il y
a un processus démocratique, qui élit des représentants qui sont redevables
devant leurs citoyens, qui doivent gérer des
services publics dans l'intérêt de tous, qui ont un pouvoir de taxation? Vous
allez me dire qu'ils sont limités par les lois, ça, c'est bien entendu, ça,
c'est une autre histoire, mais vous avez un pouvoir
de taxation. Si vous décidez d'augmenter l'impôt foncier, vos citoyens n'ont
pas le choix, n'est-ce pas? Ils n'ont pas
l'option de dire : Bien non, moi, je ne paie pas plus que 1 % de
plus. Vous le savez, tout ça. Donc, j'essayais d'amener les gens à se
prononcer là-dessus : Est-ce que c'est un gouvernement? Et donc, s'il
s'agit d'un gouvernement, même de proximité,
est-ce que ça ne justifie pas un régime de négociation qui soit distinct, qui
tienne compte de ça? J'ai entendu des
gens qui, sans remettre ça en question, disaient : Oui, mais peut-être que
ça ne veut pas dire nécessairement qu'il faut un régime de négociation distinct, mais j'en ai entendu d'autres qui ont
nié ce caractère de gouvernement de proximité. Alors, qu'est-ce que vous avez à dire là-dessus à ceux qui en
douteraient ou qui auraient un point de vue différent du vôtre?
M. Sévigny (Bernard) : D'abord, on apprécie que, dans le projet de loi,
on reconnaisse, je dirais, quasiment enfin les municipalités, dans le cadre de
relations de travail, comme étant des gouvernements de proximité, un véritable
palier de gouvernement local. Et à ce titre,
compte tenu de la nature des activités municipales, qu'on soit considérés...
qu'on ait un cadre, un cadre spécifique qui
relève du ministre des Affaires municipales, pour nous, ça va de soi, c'est
dans l'ordre des choses, parce
qu'encore une fois nous gérons... Vous l'avez dit : Lorsqu'on taxe des citoyens,
c'est direct, et, je vous dirais, là, le feed-back est assez rapide.
Donc,
on a... je ne dirais pas tous les pouvoirs, mais les pouvoirs de taxation,
etc., et le seul que nous n'avons pas, c'est celui de pouvoir contrôler
notre principal poste de dépenses, qui est celui de la masse salariale. Donc,
dans ce contexte-là, la reconnaissance du
gouvernement local comme étant une instance spécifique en matière de droit du
travail, donc, qui relèverait du
ministère, en ce qui nous concerne, là, c'est ce qu'il faut faire, et c'est ce
que nous souhaitons également.
M.
Coiteux : Vous êtes en contact avec d'autres associations municipales
à travers le Canada, et tout à l'heure on
a eu des échanges à savoir si on était tellement différents, pourquoi nous, on
ferait les choses différemment du reste du pays. Est-ce que vous sentez le même genre de pression puis le même
genre de préoccupations du côté des municipalités dans le reste du pays?
M. Sévigny (Bernard) : Bien, on l'a senti. Vous savez, on a tenu un
sommet il y a quelques mois ici, à Québec, qui regroupait les associations municipales des autres provinces
canadiennes, et, je vous dirais, peut-être pas de façon spécifique sur le cadre des relations de travail,
mais je vous dirais que, lorsqu'on a parlé du projet de loi n° 110 qui
avait été déposé en juin puis... évidemment, ça fait l'envie,
honnêtement, d'un certain nombre d'associations municipales provinciales.
Par
ailleurs, sur le plan de la taxation, évidemment, il y a des différences, et c'était
l'occasion d'échanger sur les pratiques dans les différentes provinces
canadiennes, les pratiques, évidemment, des ministères desquels relèvent... le ministère des Affaires municipales dans les autres
provinces, et effectivement, en matière de relations de travail, on n'est pas
les seuls. Je ne pourrais pas
spécifiquement, là, vous parler d'un cas en particulier, mais on a constaté
qu'on n'était pas les seuls qui avions un problème de rapport de force
avec les parties syndicales, dans les municipalités canadiennes.
M.
Coiteux : D'autre chose, encore une fois, parce que je veux entendre
tout le monde sur ces sujets-là, donc, pour
vraiment qu'on puisse, comme parlementaires, avoir accès aux deux versions...
ou aux trois ou quatre versions, selon le
cas, là, on nous a dit aussi qu'à défaut de modifier comme propose de le faire
le projet de loi n° 110 il y a d'autres avenues pour améliorer le système actuel. Alors, on nous a
dit que des travaux avaient été faits entre les associations de policiers
et de pompiers et les villes du Québec pour
améliorer le processus actuel d'arbitrage dans le sens d'en accélérer la
cadence, de faire en sorte que les
délais sont moins longs. Est-ce que vous avez participé à ces travaux?
Qu'est-ce que vous concluez de votre
participation à ces travaux? Et est-ce que vous pensez que ce serait une voie...
que ça suffirait, dans le fond, pour améliorer et moderniser notre cadre
actuel?
M. Sévigny
(Bernard) : Bien, l'union a
participé, effectivement, aux travaux de ce comité, et l'objet, l'objet du
comité était les délais, spécifiquement et exclusivement. Donc, les
travaux n'ont pas porté sur les mécanismes, sur le fond, sur l'appréciation que
peuvent faire les arbitres à partir d'un certain nombre de critères, notamment d'équité
externe, ça s'est vraiment limité...
Et, oui, ça a donné des résultats dans la mesure où on s'est entendus sur la
durée, donc, sur les délais, qui nous semblaient disproportionnés. Donc,
ça a permis effectivement...
Et
ça ne veut pas dire... Encore une fois, puis j'aimerais faire le parallèle, si
vous me permettez, M. le ministre, on
veut continuer à parler à nos employés, on veut continuer à parler aux
représentants syndicaux. Ce qu'on veut, c'est de s'entendre de bonne foi. Ça, c'est la prémisse de base. Et c'est vrai
pour les délais en arbitrage dans le cadre d'un comité et c'est vrai pour chacune des villes, chacun des
conseils municipaux à l'égard de leurs employés municipaux, et ça, je pense, il ne faut pas le perdre de vue. Oui, quand
il y a des difficultés, ça nous prend des outils spécifiques, mais à la base
nous voulons régler, nous voulons des conventions de bonne foi, là.
M. Coiteux :
Rappelez-moi juste la date où a été publié le livre blanc.
M. Sévigny
(Bernard) : 2011.
M.
Coiteux : C'est en 2011 que le livre blanc a été produit. Puis, dans
le livre blanc, la demande de moderniser le cadre de négociation des
relations de travail avait été faite. Donc, c'était déjà, en 2011, un constat
que vous faisiez, qu'il y avait un enjeu sérieux, là.
M. Sévigny (Bernard) : Tout à fait. Et, si on l'a écrit en 2011, dans le
cadre du livre blanc, bien, c'est parce qu'on en a discuté bon nombre d'années précédemment. Donc, ça fait plusieurs
années qu'on s'interroge et qu'on réclame du gouvernement du Québec un
régime spécifique pour le monde municipal en matière de relations de travail.
• (16 h 40) •
M.
Coiteux : C'est une demande qui est venue bien avant à la fois le
projet de loi qui a revu les régimes de retraite, le partage du coût des régimes de retraite au
Québec, et c'est une demande qui est venue, bien entendu, bien avant le pacte
fiscal.
M. Sévigny
(Bernard) : Tout à fait.
M.
Coiteux : Tout à fait exact, hein? Tout comme la demande de reconnaître les gouvernements de proximité est venue avant
qu'on reconnaisse, nous, comme gouvernement
du Québec, qu'on devait aller dans ce sens-là, dans une modernisation de l'ensemble des relations entre le gouvernement
du Québec et les municipalités.
Je
dis ça, puis c'est simplement pour que tout
le monde enregistre bien, parce que
certains, des fois, font un lien entre
les difficultés budgétaires récentes du gouvernement et puis le projet de loi qu'on est en train de regarder ensemble,
alors que ce débat-là, il a commencé bien avant. Est-ce qu'on est d'accord là-dessus?
Bien.
Je pense que le député
de Vimont aurait peut-être quelques questions.
M. Rousselle :
Oui. Bien, écoutez...
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Vimont.
M. Rousselle :
Merci, M. le Président. MM. les maires, Mme la mairesse.
Écoutez,
je regardais juste, dans vos recommandations... Tantôt, on a parlé de durée qui lie les
parties, j'ai écouté tantôt les représentants syndicaux qui parlaient justement
que trois ans, ce serait comme le maximum, que ça devrait rester comme au niveau du Travail. Vous, vous amenez toujours... vous suggérez d'au moins cinq ans. Voulez-vous
élaborer là-dessus, là, pourquoi le cinq ans au lieu d'un trois ans?
M. Sévigny (Bernard) : Bien, trois ans, bien, c'est un peu court dans la
mesure où souvent on commence à négocier avant, mais parfois on signe
des conventions collectives qui sont déjà à échéance depuis deux ans et on
s'entend pour trois ans, on recommence à
négocier l'année prochaine. Aujourd'hui, il y a des conventions de sept ans qui
se signent. Donc, cinq ans nous
semble un moment... À partir du moment où il y a une décision, évidemment, du
ministre, cinq ans, ça nous donne le
temps de faire autre chose que de négocier, pendant quelques années, avant de
se rasseoir et de négocier les conditions de travail et salariales.
Le Président (M.
Auger) : Deux minutes. M. le député.
M.
Rousselle : Actuellement, dans les municipalités que... puisque
vous couvrez bon nombre de municipalités au Québec, les négociations, en
moyenne, au niveau de la durée de la convention, c'est...
M. Sévigny
(Bernard) : C'est environ trois ans, qu'on me dit, oui.
M. Létourneau (Yves) : Oui. Mais, lorsqu'il y a des sentences
arbitrales, parfois, bien, le délai court... On cite souvent l'exemple
de Gatineau, par exemple, en 2011, où la décision arbitrale a été rendue, et ça
couvrait la période 2007 à 2009, donc, quand
la décision a été rendue, il y avait déjà deux ans de couvert. Même, sur une
période de trois ans, elle était déjà
terminée. Ça fait que trois ans est la durée de la convention collective, mais
avec des délais, qui est une des raisons
pour lesquelles on s'est rencontrés en comité, ce qui faisait que la décision
de trois ans était déjà passée en partie.
Le Président (M.
Auger) : Dernière minute, M. le député.
M.
Rousselle : Juste... Vous voulez avoir quelque chose de
spécifié au paragraphe 4° de l'article 1 concernant l'organisation du travail, vous dites que vous
voulez avoir en plus, là... que ce soit bien spécifié que l'organisation du
travail est la responsabilité de
l'employeur. Ce n'est pas le cas actuellement ou vous voulez l'avoir vraiment
spécifié, là? Je voulais juste comprendre.
M. Sévigny
(Bernard) : Oui, on le
réitère, en fait. Effectivement, l'organisation du travail relève de
l'employeur, mais évidemment, dans
les processus de convention collective, on le fait souvent... on discute avec
nos employés, là, il ne faut juste pas
penser qu'on veut exercer de façon unilatérale, voici les conditions de
travail, ça se discute avec les instances syndicales. Mais ultimement, effectivement, l'organisation du travail
appartient à l'employeur. La responsabilité, en tout cas.
Le Président
(M. Auger) : Ça va? Merci. Nous allons poursuivre avec l'opposition
officielle pour neuf minutes. M. le député de René-Lévesque.
M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le
Président. Encore une fois, bienvenue à vous tous.
On va aller
dans le vif du sujet tout de suite en commençant. On a entendu les
représentants de la ville de Québec, ce
matin, de Montréal, on vous écoute aujourd'hui, l'UMQ, et j'ai l'impression que
c'est un peu un copier-coller, que vous
êtes tous à peu près alignés sur les mêmes recommandations ou du moins la même
satisfaction. M. le ministre, au courant de la journée, nous a dit à
plusieurs reprises avoir discuté avec des municipalités, et tout le monde
semblait heureux de la réponse du gouvernement, donc le p.l. n° 110. J'aimerais
savoir : Est-ce que, du côté de l'UMQ, c'est effectivement le cas, tous vos membres sont heureux du dépôt du projet
de loi n° 110, après, effectivement, avoir subi une ponction de 300 millions par année?
Est-ce que c'est unanime, là, tout le monde dit : M. Sévigny, on est
d'accord, on est heureux, et c'est la meilleure chose qui est jamais
arrivée?
M. Sévigny
(Bernard) : Bien, je vous
dirais qu'il y a un très, très large consensus. Puis évidemment l'UMQ, là,
ce n'est pas une secte, vous allez entendre
des municipalités qui pensent un peu différemment, mais, je vous dirais, il y a
un très large consensus. Oui, on est
satisfaits parce que le projet de loi est un peu la contrepartie, justement, du
pacte fiscal et de l'entente de partenariat. C'est-à-dire, oui, il y a
un effort à faire, puis je pense qu'on a consenti à le faire. Maintenant, ça nous prend des outils pour
contrôler nos dépenses. Ça faisait partie des engagements du gouvernement,
et on nous livre ces engagements-là, la raison pour laquelle nous sommes
satisfaits de façon extrêmement générale, à quelques exceptions près, là, mais,
de façon générale, nous sommes tous satisfaits du dépôt du projet de loi.
M.
Ouellet : Donc, si
je comprends bien, puis vous venez
bien de le dire, M. Sévigny, c'est la contrepartie du pacte fiscal, puisque tantôt M. le ministre nous disait : Écoute, les discussions ou les réflexions ont
commencé en 2011 pour revoir un peu
les façons de faire en matière de relations
de travail municipales.
Je crois comprendre qu'avec le pacte fiscal on a augmenté l'intensité ou
l'urgence d'agir, c'est ce que je comprends.
Le Président (M. Auger) : Mme
St-Hilaire.
Mme
St-Hilaire (Caroline) : En
fait, rappelez-vous les débats qu'on a eus, ils étaient assez houleux, sur le
pacte fiscal, tout le monde faisait le rapport et faisait la conclusion que, oui, ça nous coûtait
trop cher partout dans les municipalités. Alors,
ce n'est pas nécessairement une contrepartie, c'est la suite logique. On a
dit : Si vous voulez qu'on assume nos responsabilités comme un gouvernement de proximité que nous pensons être, donnez-nous les moyens pour justement
s'occuper de nos ressources humaines, c'est tout. Ce n'est pas une
contrepartie, c'est une suite logique.
M.
Ouellet : Donc, vous êtes entièrement satisfaits ou plus que satisfaits dans le projet de loi, mais vous y allez quand même, l'UMQ, d'une proposition quand même
assez audacieuse, qui métamorphose le projet
de loi, à savoir votre recommandation n° 10, que «le conseil municipal peut soumettre, par
résolution au ministre, les conditions
de travail qui devraient être
appliquées. Dans ce cas, le mandat du mandataire spécial est d'analyser le
caractère raisonnable de la proposition municipale.» Donc, vous êtes d'accord avec nous que cette proposition-là va un petit peu plus loin que ce qu'il y a dans le projet de loi et qu'au final ça va arriver par un décret des conditions de travail par l'Assemblée
nationale. C'est ça que vous cherchez dans la proposition... recommandation,
pardon, n° 10? C'est bien ça?
M. Sévigny (Bernard) : Tout à fait,
par résolution, pour la simple et bonne raison que, vous savez, on agit publiquement et que les contribuables, les citoyens
de la ville concernée puissent prendre acte de la proposition qui est sur la table.
Maintenant,
nous, on propose également... Le volet arbitrage, dans ce mécanisme-là, on
propose de l'enlever et que le mandat
du mandataire spécial porte sur l'appréciation, sur la raisonnabilité de la proposition municipale, et non de jouer un rôle d'arbitrage, en fait.
Donc, à partir du moment où il y a une proposition de déposée, le mandataire spécial aura à
faire ses recommandations au ministre mais sur le caractère raisonnable de la proposition
municipale.
M. Ouellet : On a eu la précision aujourd'hui
de M. le ministre qu'effectivement le mandataire n'était pas un arbitre. Alors, ma question va être la suivante,
et j'aimerais vous entendre là-dessus : Si, d'un côté, vous permettez ou vous demandez que les municipalités puissent, par résolution, déposer au mandataire ses recommandations, en contrepartie les organisations syndicales pourraient, eux
autres aussi, faire des représentations et déposer leurs recommandations?
M. Sévigny
(Bernard) : Tout à fait. C'est ce que prévoit, d'ailleurs, le projet
de loi, c'est-à-dire les deux parties peuvent le
faire. Mais, dans la mesure où il y a une appréciation à partir de critères, les mêmes
critères qu'on va retrouver au
conseil du règlement de différends... Il y aura une appréciation de
portée. Mais l'idée, c'est le mandat. Je
pense que la clé, dans le questionnement,
c'est le mandat. Est-ce que le mandat consiste à prendre une... les deux
demandes, et de porter un jugement là-dessus,
et non de s'engager dans un mécanisme d'arbitrage? Je pense,
c'est une question de nuances. Et ces nuances-là sont importantes parce
que nous, on veut qu'ultimement
ce soit le ministre qui soit saisi de la proposition. Et, si nous, on peut s'en remettre au mandataire spécial, je ne vois
pas pourquoi on empêcherait la partie syndicale de le faire. Je pense
que c'est tout à fait raisonnable de le penser, là.
M.
Ouellet : On va faire un cas
de figure, exemple, parce
que... pour bien comprendre la nature
de votre proposition, là. Donc, la partie patronale, une municipalité
décide de demander l'intervention du mandataire spécial, ce que la partie syndicale ne veut pas, mais un des deux le
demande, donc il y a accès. Donc, la partie patronale remet ses recommandations. À ce moment-là, le côté syndical, sachant qu'il y a
une demande, vont, eux autres aussi, remettre leur proposition. Au final, le mandataire va
évaluer la raisonnabilité des deux propositions et va déposer au ministre pour décision. Donc,
au final, selon les différentes propositions, ce sera le ministre qui va décréter si c'est la décision de la municipalité qu'il va tenir compte ou celle du syndicat. C'est bien ça?
• (16 h 50) •
M. Sévigny (Bernard) : Bien, honnêtement,
je ne peux pas déterminer la façon dont le mandataire spécial va apprécier une proposition
syndicale. Nous, ce qu'on dit, c'est que la proposition municipale doit être
appréciée pour qu'est-ce qu'elle est en
termes de raisonnabilité, et il appartiendra au ministre par la suite de porter
cette proposition-là en projet de loi
ou pas. Mais c'est l'exercice que
nous, on considère être le plus approprié pour la position municipale. Encore une fois, on n'a pas de proposition à vous faire pour analyser une proposition, le cas échéant, qui vient de la partie syndicale.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Richelieu.
M.
Rochon : Oui. Sur le rapport
de force, là, les négociations, qui a fait dire à votre collègue de Québec
ce matin qu'il négociait le couteau
sur la gorge, est-ce que ce projet
de loi, qui vous satisfait,
dites-vous, ne vient pas tout
simplement de transférer l'ustensile auquel il référait de main?
Moi,
j'entends, là, la profession de foi émouvante du ministre à l'égard
des gouvernements de proximité, mais j'ai beaucoup de difficultés à y croire, ayant encore trop fraîchement à la
mémoire votre quête difficile de financement, également le... je ne sais pas comment le dire de façon
politiquement correcte, mais l'agression perpétrée contre
nos outils de développement locaux par ce gouvernement.
Est-ce que
vous saisissez le vilain sentiment qu'ont vos travailleurs de payer pour
cette défection du gouvernement? Est-ce
que vous saisissez ça, leur sentiment
qu'ils paient pour les pots cassés, pour la défection du gouvernement à l'égard de ces gouvernements
de proximité et de nos régions?
M. Sévigny
(Bernard) : Bien, écoutez,
les municipalités ont à gérer plusieurs phénomènes, c'est-à-dire, qui ont des impacts, et
depuis toujours, sur le budget municipal. Et ça peut être des nouvelles
responsabilités, donc, c'est varié. Et, bon, est-ce
que c'est une raison, nous, pour
dire : Est-ce qu'on peut avoir le contrôle de notre principal poste
de dépenses, qui est celui de la
masse salariale? Et on ne le reçoit pas, je dirais, dans cette
contradiction-là, c'est-à-dire : Bien, voici ce qu'on nous a fait. Non.
Nous, on a des responsabilités.
Vous savez,
quand on accorde à des employés municipaux, puis évidemment avec la progression
des échelons, des augmentations salariales qui vont bien au-delà de l'indice des prix à la
consommation, on se pose des questions sur notre capacité. C'est ça, la
capacité de payer des contribuables.
Le
Président (M. Auger) :
Merci, M. Sévigny. Merci. Nous allons poursuivre avec la deuxième opposition et
le porte-parole, M. le député de Blainville, pour six minutes.
M.
Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. M. Sévigny, M. Cusson,
Mme St-Hilaire, M. Létourneau, M. Savard, merci beaucoup
d'être présents.
D'abord, ça me fait plaisir, parce qu'évidemment
j'ai eu la chance d'occuper le même siège que vous, là, de 1997 à 2000. Puis il y avait effectivement, à ce moment-là, un pacte fiscal de 360 millions. C'était un autre gouvernement,
celui du Parti québécois. Il y avait
des demandes par rapport aux relations
de travail, qui sont mortes dans tout
le dossier des fusions municipales.
Donc, c'est ce qui s'est passé à l'époque, mais il y avait des demandes par rapport aux lois du travail, je me
souviens d'avoir discuté, à l'époque, avec Mme Diane Lemieux. Donc, c'étaient
les demandes traditionnelles. Donc, l'UMQ a toujours eu ces demandes-là.
Je pense que
c'est bien, et il faut comprendre aussi... Parce que ce que le milieu
syndical est venu nous dire, puis c'est
correct, c'est qu'il n'y a pas eu beaucoup d'arbitrages au cours des dernières années, des
dernières décennies. Puis vous avez
utilisé un terme, Mme St-Hilaire, qui est «plier», de votre bouche — c'est
rare que vous pliez, donc, mais vous avez
utilisé le mot «plier» — donc,
pour la bonne entente. Ça, ça veut dire que, dans les relations de travail, par rapport à la façon... aux lois actuelles puis à
l'arbitrage tel qu'il est géré, vous devez signer des ententes que
théoriquement, bon, on vous
recommande, probablement vos services juridiques ou quoi que ce soit vous
disent : De toute façon, si on va en arbitrage, on va perdre, parce
que ça s'est donné dans tel autre...
Donc, c'est ça que j'aimerais que les citoyens comprennent, là,
que les gens qui nous écoutent comprennent.
Mme St-Hilaire
(Caroline) : Alors, merci, M. Laframboise, de rappeler que je ne plie
pas souvent.
En
fait, il y a des raisons pour lesquelles on peut plier, dans
la vie. On peut plier pour la paix sociale, mais on peut aussi plier — je me
sens un petit peu obligée de répondre au député de Richelieu — parce que, comme maires, nous sommes gestionnaires de fonds publics, nous sommes
imputables à la population, ultimement c'est à eux que nous sommes redevables. Et je pense que nos employés sont
aussi des citoyens, alors ce n'est
pas contre nos employés, au contraire. Et je pense que le président l'a
bien rappelé, on travaille avec eux.
Moi,
je vais vous expliquer un exemple concret, là. Tout à l'heure... J'en ai
plein, d'exemples, mais je vais vous en
montrer un, parce que justement ça fait le rappel des fusions et des défusions.
Et je ne vise pas personne, puis je salue le président des cols bleus qui est
ici, de Longueuil, mais, par exemple, si j'ai un bris d'aqueduc à Longueuil... Parce qu'à Longueuil il y a trois arrondissements, O.K.? Si j'ai un bris d'aqueduc
à la frontière de deux arrondissements, il faut que je fasse recours à
deux équipes, parce que les employés cols bleus ne traversent pas d'un
arrondissement à l'autre.
Alors,
vous me parlez d'aberrations, vous me parlez d'équité, vous me parlez de mes
citoyens? C'est à ça que je fais face au quotidien. Je peux vous en donner
plein, d'exemples comme ça où les employés ne traversent pas d'un
arrondissement à l'autre parce que c'est conventionné, ça a été signé.
Je
comprends très bien, mais dites-moi pas que ça a été signé... En tout cas, si
ça a été signé de bonne foi de la part
du maire de l'époque, je pense qu'il a plié pour rien, parce que ça n'a pas de
bon sens. Puis je peux vous en donner plein, d'exemples comme ça. Voilà.
Le Président (M.
Auger) : M. Sévigny, vous voulez... En complémentaire?
Une voix :
M. Cusson...
Le Président (M.
Auger) : M. Cusson.
M.
Cusson (Alexandre) : ...mentionné, Drummondville est ce qu'on appelle,
à l'UMQ, une cité régionale, donc 27 municipalités
de 25 000 à 100 000 de population, à peu près. Et souvent, pour
rester dans le même terme, souvent, dans
les cités régionales, on va plier parce qu'on sait que, si on ne paie pas plus,
et plus, et plus, on va perdre nos employés. Ils vont s'en aller ailleurs, ils vont s'en aller dans les grandes
villes. Ils vont s'en aller à Sherbrooke, ils vont s'en aller à
Longueuil. Et l'instabilité, ça a un coût aussi dans une ville. Ça prolonge les
délais. Ça fait en sorte que nos services à
la population ne sont pas à la hauteur de ce qu'on voudrait parce que, là,
woups! la personne qui faisait ça s'en va, ça prend trois à quatre mois à remplacer la personne parce qu'on fait un
processus qui est efficace, et etc., mais c'est long. Et donc l'instabilité, ça a un coût aussi. Alors, on
regarde ça, on dit : Bon, ils vont aller le chercher ailleurs; aussi bien
leur donner ici puis les garder.
Alors, d'avoir un
régime particulier qui va permettre à l'ensemble des municipalités de mieux
contrôler la croissance des coûts de main-d'oeuvre, c'est bon pour tout le
monde.
M. Laframboise : Parce que, là, ce que vous nous dites, c'est que l'équité externe,
c'est ça que ça a comme impact macropolitique,
c'est-à-dire qu'inévitablement ça augmente les coûts pour tout le monde, puis
je suis obligé, à la fin, de payer
parce que d'une manière ou d'une autre il y a quelque chose qui s'est donné
ailleurs ou ça... Tu sais, c'est ça, le problème, là, c'est que... C'est pour ça que, finalement, on arrive à un
écart si important par rapport à la fonction publique. C'est-à-dire
qu'on a des critères qui font que macropolitiquement on ne peut pas gagner sur
une longueur de vie, là, finalement. C'est ça qui se passe, là, présentement,
là, c'est ce que je comprends, M. le Président.
M. Sévigny (Bernard) : Et, quand on a le choix, une municipalité, un
maire ne souhaite pas un conflit de travail, encore une fois, qui affecte des services à la population, et
effectivement l'achat de la paix sociale, ça existe dans ce cas-là. On est souvent à la marge. Est-ce que ça vaut la
peine pour 1 %, par exemple? Et c'est un peu le jeu de la négociation,
mais il y a cet ultime effet là que bien souvent on veut éviter pour nos
citoyens, là.
Le Président (M.
Auger) : 45 secondes. M. le député.
M. Laframboise : Juste peut-être pour la résolution du conseil municipal, M. le maire de
Québec nous a dit que c'est important
que la ville se positionne, qu'il y ait une résolution. Vous êtes dans ce
sens-là, pour que ce soit publicisé, quoi, finalement? C'est ce qu'on
veut?
M. Sévigny (Bernard) : Bien, une ville, ça parle par règlements et par
résolutions, de façon publique, et on tient à ce que les propositions soient
publiques, donc soient adoptées par le conseil municipal, qui est redevable
envers les contribuables.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le député. Donc, Mme St-Hilaire,
M. Sévigny... On vient de me couper les noms! Donc, à vous tous, merci
beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.
La
commission ajourne ses travaux à demain, le mercredi 17 août, à
14 heures, où elle poursuivra son mandat à la salle des
Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May.
(Fin de la séance à 16 h 59)