(Quinze heures huit minutes)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de l'aménagement du
territoire ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électriques.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi n° 492,
Loi modifiant le Code civil
afin de protéger les droits des locataires aînés.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).
Remarques préliminaires
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons débuter avec les remarques
préliminaires. Mme la députée de Gouin, vous disposez de
20 minutes.
Mme Françoise David
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, je dois dire un peu candidement que c'est quand même un grand moment pour moi aujourd'hui.
On est passés
par bien des étapes depuis deux ans, et il y a plusieurs
personnes ici qui ont franchi ces étapes avec moi, donc je les en remercie beaucoup. Il y a aussi des personnes qui, en ce moment même, nous écoutent, je peux vous le dire, dans ma circonscription, entre autres, et dans des regroupements qui
s'occupent des aînés, qui regroupent les aînés. Ces personnes-là sont aussi en train de nous écouter. Je ne doute pas
non plus que des associations de
propriétaires sont en train de nous
écouter, puis c'est très correct. C'est ça, la démocratie, mais je suggère à
tout le monde, justement, de bien écouter
et de voir comment on s'y est pris collectivement — on a travaillé quand même fort depuis deux
ans — pour
trouver un équilibre entre les droits
des locataires et les droits des propriétaires dans un contexte où il fallait
quand même apporter une solution,
même imparfaite, à un problème réel. Et c'est surtout, dans le fond, de ça que
je veux parler, parce que, sur le contenu, les amendements, on aura
amplement l'occasion d'y revenir.
• (15 h 10) •
Comment ça se
fait qu'on se retrouve ici aujourd'hui, M. le
Président? C'est parce qu'après avoir été députée de 2012 à 2014 j'ai vraiment pu constater comme
députée d'une circonscription dans un quartier central d'une grande ville
qu'est Montréal que nous vivions un problème
important, je le rappelle rapidement, le problème de la spéculation immobilière, le problème d'achat de logements de
plus en plus répété de façon à ce qu'à plusieurs reprises des locataires sont évincés de l'endroit où ils habitent, et,
parmi ces locataires, ce qui m'a énormément frappée comme députée, et ça,
c'était du concret, il y avait beaucoup de personnes âgées.
Pourquoi
beaucoup de personnes âgées? Bien, parce que, et tout le monde le sait, la
situation est la suivante : dans nos
vieux quartiers, souvent, on a un propriétaire familial au rez-de-chaussée, il
y a deux étages ou un autre étage et là il y a un petit logement, il y a une personne âgée qui l'habite et qui
l'habite souvent depuis longtemps, très, très longtemps. Quand je dis «longtemps», dans certains ça, ça a
été jusqu'à 40 ans, hein, dans le même logement. Ces personnes âgées, il
y en a aussi dans des immeubles, bien entendu, plus considérables. Ces
personnes âgées, un jour ou l'autre, se voient menacées d'éviction, parce qu'un propriétaire va évoquer soit une
reprise de possession pour lui-même, un ascendant ou un descendant ou soit, et
c'est ce qui arrive vraiment le plus souvent, il va évincer des locataires pour
agrandissement ou subdivision.
Lorsqu'il les évince, ce qui arrive souvent, il procède à quelques rénovations
et reloue le même logement beaucoup
plus cher. En fait, ça, là, c'est souvent la réalité qu'on vit dans nos
quartiers. Et, moi, ce qui m'a énormément touchée comme députée, c'est de recevoir, à mon
bureau, des femmes, surtout, âgées de 80, 85 ans qui habitaient leur logement depuis très longtemps et qui pleuraient à
chaudes larmes parce qu'elles étaient évincées et que, là, pour elles, elles avaient le sentiment que leur vie
s'écroulait. On parle de personnes âgées pas riches, dans mon comté, à revenus
modestes, autonomes mais qui ont besoin de
services et qui donc se sont créé des réseaux avec le CLSC, avec une entreprise
d'économie sociale, par exemple, qui vient
aider pour des tâches ménagères, avec le club de l'âge d'or au coin de la rue,
les petits commerçants qu'elles connaissent bien, ces personnes âgées. Donc,
tout un réseau qui est très important quand on a cet âge et surtout
quand l'on vit seul, ce qui est le cas de beaucoup de personnes âgées.
Alors, voyant
tout cela, je me suis cassé la tête un petit peu, j'avoue, en me demandant
qu'est-ce qu'on pourrait faire et
j'ai fait faire des recherches. On est tombé sur une loi française, j'en ai
beaucoup parlé ici, à l'Assemblée nationale, une loi, donc, qui existe depuis 1989 et qui permet aux locataires de
rester dans les lieux. Un propriétaire ne peut pas évincer un locataire de plus de 70 ans à faibles
revenus, à moins de lui trouver un logement comparable dans le même arrondissement ou la même municipalité. Alors, je
suis partie de là et j'ai déposé un premier projet de loi, donc, il me semble que c'était juste
avant l'été 2014, le n° 192. Discussion avec, à l'époque, le... je
pense que je peux nommer son nom, le ministre des Affaires municipales,
M. Moreau. Non? Oui?
Une voix : Non.
Mme David (Gouin) : Bon, désolée.
Mais enfin, bon, ce sera fait.
Une voix : Le député de
Châteauguay.
Mme David
(Gouin) : Et député de Châteauguay. Merci. Donc, on a beaucoup
discuté, discuté avec la députée d'Hochelaga-Maisonneuve aussi, avec le
député de Vimont. C'est ça. Plein de réunions, de discussions pour arriver finalement, il y a un an, au dépôt d'un deuxième
projet de loi, le n° 492, celui dont nous allons parler aujourd'hui, et là
on avait essayé d'améliorer, de clarifier,
de spécifier, mais on a continué à avoir des discussions. Finalement, le député
de Châteauguay et ex-ministre de
l'Habitation a dû quitter pour des raisons de santé, et nous avons maintenant
un nouveau ministre, en fait depuis
quelques mois, Affaires municipales, Habitation, Sécurité publique, métropole,
etc., avec qui les discussions ont commencé.
Finalement,
au terme de très nombreuses discussions, nous en sommes arrivés aux amendements
qui sont, en ce moment, sur la table. Ils ont été remis ce matin au
salon bleu, et je veux indiquer clairement que, bien sûr, ce sont les amendements du ministre mais que j'y souscris. Je
voudrais que ça soit très clair. Ça ne veut pas dire que ça ne peut pas
être encore amélioré au besoin, mais il y a réellement entente, et c'est un peu
ça, la merveille de la chose.
On a réussi,
de part et d'autre, à éliminer certains irritants, donc, par exemple, vous
remarquerez dans l'amendement qui va être déposé mais que tout le monde
connaît qu'il n'y a plus cette obligation pour le propriétaire de chercher un
nouveau logement pour le locataire, ce qui pour plusieurs personnes
représentait un irritant. Et l'âge — j'ai accepté d'augmenter l'âge aussi — c'est 70 ans au lieu de 65. Le logement doit
être occupé depuis 10 ans. Bon, vous voyez que j'ai fait quand même un certain nombre de concessions mais qui me sont
apparues raisonnables dans la mesure où, par ailleurs, l'amendement est très clair sur le fait que, si on a
70 ans, qu'on occupe un logement depuis au moins 10 ans, qu'on a un revenu modeste, on va rester dans son logement.
C'est quand même une amélioration assez extraordinaire par rapport à la
situation actuelle, et moi, je pense que les regroupements d'aînés aujourd'hui
doivent être vraiment très contents.
Il y a une
exception, on en parlera, une exception qui nous a demandé, de mon côté, avec
les groupes avec lesquels je
travaille, beaucoup de discussions. Donc, toute cette idée qu'il peut tout de
même y avoir reprise de possession, on l'a acceptée, d'une part, parce qu'au terme de longues discussions je pense
qu'à un moment donné, de part et d'autre, il faut accepter de mettre de l'eau dans son vin, sinon à
quoi sert de discuter, mais aussi parce qu'au fond ça nous est apparu raisonnable. Mais je veux quand même le souligner,
parce que je sais que, du côté des comités-logement, c'était un petit bout un peu plus difficile. Il faut parfois savoir
accepter les compromis nécessaires pour que l'essentiel soit préservé, et
l'essentiel, à mon avis, c'est vraiment
cette protection des locataires aînés et, peut-être, peut-être surtout au-delà
de ce qui est écrit, le message.
La classe
politique envoie un message à la société québécoise, puis ça, c'est un message
d'espoir, et ce message-là, il est le
suivant : Les aînés locataires à revenus modestes, qui sont souvent des
gens seuls, souvent, surtout des femmes seules, d'ailleurs, bien, on s'en occupe. On veut les garder à la
maison, hein? Comme société, ça fait longtemps qu'on a décidé ça. Les
personnes âgées veulent rester chez elles, on a dit oui, puis on va développer
des services de maintien à domicile, on va
essayer d'entourer les personnes. Je pense qu'il y a encore du chemin à faire,
mais c'est quand même la vision qu'on
en a. Bien, si c'est vrai, il faut, à ce moment-là, leur permettre vraiment de
rester chez elles et ne pas les obliger
à déménager à 10, ou 15, ou 20 kilomètres de chez elles. Donc, moi, il me
semble que le message qu'on envoie, il est positif, il est constructif.
Et, pour
avoir plusieurs amis, plusieurs... pas un ou deux, là, plusieurs qui sont des
propriétaires de duplex ou de triplex
dans lesquels habitent des personnes âgées, moi, je peux vous dire qu'ils sont
tous, tous d'accord avec le projet de
loi, parce que ça existe, M. le Président, et ça existe même beaucoup, des
propriétaires qui ont vraiment du coeur et qui me disent, à moi, que jamais, jamais ils ne sortiraient de chez elle
une personne de 80 ans — tu sais, c'est comme si ça n'avait pas de bon sens, quelque part — à moins peut-être de circonstances tout à
fait exceptionnelles, et justement ici il y a ces circonstances.
Alors, pour
le moment, M. le Président... je ne sais pas combien de temps j'ai parlé,
l'important, c'est de ne pas parler
pour ne rien dire non plus, donc je pense que je peux m'arrêter là. Je veux,
encore une fois... je l'ai fait en point de presse, mais je veux souligner qu'il n'est pas fréquent, c'est le moins qu'on puisse dire, qu'un projet de loi de l'opposition se
rende jusqu'à un dénouement que j'espère heureux. En fait, je pense que ça sera
un dénouement heureux, j'en suis convaincue.
Donc, c'est une belle tradition peut-être à inventer. Je pense que la population
en serait absolument ravie. Je veux remercier... Excusez-moi. Pouvez-vous
passer à quelqu'un d'autre?
• (15 h 20) •
Le
Président (M. Auger) : Oui, bien sûr.
Donc, nous pourrons revenir un peu
plus tard. M. le ministre, je vous céderais la
parole pour vos remarques préliminaires.
M. Martin Coiteux
M. Coiteux : Oui. M.
le Président, merci. Chers collègues,
c'est une étape importante évidemment, là, on est dans les derniers milles d'une longue odyssée, mais on commence maintenant
justement l'étude
détaillée du projet de loi n° 492, loi modifiant le Code civil du Québec afin de protéger
les droits des locataires aînés. Et ma collègue la députée de Gouin nous a donné un petit peu quels ont été les jalons
de cette odyssée, mais je vais les rappeler, de mon côté, à certaines dates
clés.
Le 27 mai 2014, donc, la députée de Gouin a présenté le
projet de loi n° 190, Loi modifiant le Code civil afin de protéger les droits des locataires aînés, et,
essentiellement, ce projet de loi devait imposer au locateur souhaitant exercer
son droit à la reprise de logement ou à l'éviction de trouver au locataire âgé
de 65 ans ou plus un autre logement correspondant
à certains critères déterminés. Le 21 mai 2015, la députée de Gouin
présentait le projet de loi n° 492, lequel constituait une nouvelle
version, une nouvelle mouture du précédent projet tout en portant le même nom.
D'ailleurs, l'Assemblée nationale en avait adopté le principe le
4 juin 2015. À la suite de l'adoption de principe par l'Assemblée nationale, la Commission de l'aménagement du
territoire a tenu des audiences particulières les 17 et
22 septembre 2015. Différents
organismes, des regroupements ont alors eu l'occasion de présenter leurs
observations et leurs commentaires sur
le projet de loi. Dans son allocution de fermeture, l'ex-ministre des Affaires
municipales et de l'Occupation du territoire et actuel ministre délégué aux Finances et toujours député, bien
entendu, de Châteauguay... que le projet de loi ne se rendrait pas, tel que rédigé, à l'étude article par
article, compte tenu des constatations qui s'étaient dégagées lors de la tenue
de la commission, notamment, concernant le risque de discrimination auquel
pourraient faire face les personnes âgées en quête d'un logement, et les
travaux se sont donc poursuivis à partir de ce moment.
M. le Président, aujourd'hui, je vais déposer les
amendements dont j'ai eu l'occasion de discuter avec la députée de Gouin. Elle a dit que c'étaient des amendements
consensuels. C'est vrai, on a eu des discussions autour. Je vais déposer
ces amendements aujourd'hui.
Effectivement, après plusieurs mois de collaboration,
d'échange avec ma collègue la députée de Gouin, nous avons pu en arriver à une entente. Pour le gouvernement,
c'est important de s'assurer d'un équilibre entre, d'un côté, la protection
des aînés contre l'abus en matière
d'éviction et de reprise de logement — c'est le but poursuivi par le projet de loi,
et on le partage totalement — et de le faire en maintenant un équilibre
entre, d'une part, ce but de protection des aînés et le droit de propriété des locateurs, trouver cet équilibre,
et les amendements qui vont être déposés nous apparaissent être un compromis
acceptable pour toutes les parties et qui va
justement répondre à cette préoccupation d'équilibre que le gouvernement a
souhaité maintenir dans toutes les discussions que nous avons eues.
Alors, avec les amendements proposés, le locateur ne
pourrait plus reprendre un logement ou en évincer un locataire lorsque ce dernier, au moment de la reprise ou de
l'éviction, est âgé de 70 ans ou plus, occupe le logement depuis au moins
10 ans et dont le revenu est égal ou
inférieur au revenu maximal lui permettant l'admissibilité à un logement à
loyer modique selon le Règlement sur l'attribution des logements à loyer
modique. Alors, ça délimite bien, là... on veut protéger les personnes aînées
vulnérables, et c'est ce que vient accomplir le projet de loi avec les
amendements.
Ceci dit, pour maintenir l'équilibre, puis c'est une
question qui est raisonnable, finalement, il serait toutefois possible pour le locateur de reprendre le logement dans
l'une ou l'autre des situations suivantes : un, première possibilité donc,
il est lui-même... ou elle, bien entendu, est âgé de 70 ans ou plus et
souhaite reprendre le logement pour s'y loger; deuxième cas de figure, le bénéficiaire de la reprise est
une personne âgée de 70 ans ou plus; et, troisième cas de figure, le
propriétaire occupant est âgé de 70 ans ou plus et souhaite loger, dans le même immeuble
que lui ou elle, un bénéficiaire, essentiellement un membre de sa famille, là. J'utilise les termes
juridiques ici, là, mais la loi vise un membre de sa famille âgé de moins
de 70 ans.
La Société
d'habitation du Québec va également publier sur son site Internet les seuils de
revenu maximal permettant à un locataire
d'être admissible à un logement à
loyer modique, pour que tout le monde ait l'information sur les seuils de revenus. Et enfin il est prévu
d'amender un article au Code civil du
Québec afin de rendre obligatoire la divulgation des principes que je
viens de mentionner précédemment dans les avis de reprise ou d'éviction.
Alors, en
conclusion, M. le Président, je considère que plusieurs des problématiques qui
avaient été soulevées tout au long du
cheminement qui nous a menés à ce jour ont trouvé des solutions raisonnables à
travers les amendements qui sont proposés. Évidemment, on aura
l'occasion, là, d'entrer un petit peu plus dans le détail dans quelques
instants, et évidemment, bien, je fournirai
moi-même, de mon côté, les explications nécessaires. Merci, donc, M. le Président.
Merci, chers collègues, d'être là aujourd'hui.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. Je crois que Mme la
députée de Gouin aimerait reprendre la parole,
mais par contre je dois demander un consentement. Est-ce qu'il y a
consentement? Consentement. Donc, Mme la députée de Gouin, en vous
rappelant que vous avez encore un 9 min 45 s à votre
disposition.
Mme Françoise David
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Écoutez, je vais en prendre deux. D'abord, bien,
c'est des remerciements, en fait, que
je voudrais faire : mon comité... mon comité-logement — comme
s'il m'appartenait — le comité-logement Rosemont—La Petite-Patrie, dont les intervenants, depuis le
début, ont travaillé inlassablement à faire des recherches et à m'aider du mieux qu'ils pouvaient,
particulièrement Martin Blanchard, pour qu'on arrive à des textes et, je
dirais, à convaincre, quelque part,
de la validité de ce qu'on proposait; les élus de mon arrondissement, Rosemont—La Petite-Patrie, ont appuyé aussi le
projet de loi, je l'ai dit; l'ensemble des regroupements aînés; le personnel de
mon comté, Julie, en particulier; tout le
personnel de l'Assemblée nationale; la ministre d'Hochelaga-Maisonneuve,
présente à plusieurs réunions; et, bien sûr, les deux ministres qui se
sont succédé et leurs personnels, que je ne remercierai jamais assez.
Et je
remercie aussi le premier ministre du Québec d'avoir respecté sa parole, une
parole qu'il avait donnée lors du débat des chefs en 2014. Merci, M. le
Président.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup, Mme la députée de Gouin. Et je crois qu'on a eu, avant de lui passer
la parole... Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, et non Mme la ministre d'Hochelaga-Maisonneuve,
pour vos remarques préliminaires d'une durée, également, maximale de
20 minutes.
Mme Carole Poirier
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Alors, effectivement, c'est une belle journée, aujourd'hui, où un gouvernement accepte d'appeler un projet de loi de l'opposition, mais, le
ministre qu'on a devant nous, ce n'est pas sa première, parce que moi, j'ai eu le bonheur, la semaine passée,
dans le cadre du projet de loi n° 83, de voir le projet de loi n° 594
être amené comme amendement et être
adopté. On adoptera probablement le projet de loi n° 83 dans les
prochaines heures ou les prochains
jours, mais ce que ça fait, ça veut dire de l'ouverture, M. le Président.
Alors, je pense que, quand on est là pour les bonnes raisons en
politique, c'est ce que ça veut dire, je pense.
Donc, je veux
féliciter le ministre de son ouverture et j'aurai des questions, mais, sur le
fond, je pense que c'est vraiment un
beau jour, aujourd'hui. Et, dans le fond, ça fait deux fois que je participe,
avec le même ministre, à l'adoption d'un
projet de loi de l'opposition. Ça fait que, franchement, ça va bien, cette
session-ci, pour certaines choses. Cependant, j'ai des questions, j'ai un questionnement, parce que je dois jouer mon
rôle d'opposition officielle. Les amendements qui ont été présentés ce matin viennent réécrire
complètement le projet de loi. C'est plus sur la forme que sur le contenu. Le
fait de venir réécrire le projet de loi fait en sorte que je n'ai pas
d'avis des groupes qui avaient commenté la première version du projet de loi. Donc, j'imagine que, probablement, le ministre
a dû faire des consultations et il va nous témoigner de ces
consultations.
• (15 h 30) •
Je sais que
la députée de Gouin, elle avait consulté... mais je pense qu'elle a surtout
consulté les groupes-logement. Je ne
suis pas sûre... et je vois M. Brouillette qui est dans la salle
présentement, je ne suis pas sûre que la CORPIQ a été consultée. En tout cas, il serait intéressant de
le savoir et de voir quelles sont leurs positions là-dessus et au moins pour
faire entendre... parce que, dans notre
Parlement, nous avons cette qualité d'avoir la chance de pouvoir entendre toutes les parties. Je ne suis pas toujours
d'accord avec ce que les associations de propriétaires préconisent ou avancent, mais je
pense que chacun a droit à sa voix dans notre Parlement, et c'est ce qui fait
le bel équilibre que nous avons.
Alors, je
vais avoir cette question-là, mais, comme la députée de Gouin, je vais amener
le sujet sur ce qui est, à mon avis,
le débat de fond de ce dossier. Le débat de fond, bien, c'est l'indivis, M. le
ministre. Le débat de fond du pourquoi que
ces situations-là arrivent, c'est qu'il y a
une pratique qui continue, malheureusement, et qui fait rage dans nos quartiers centraux à Montréal, qui est la
transformation des logements en condos indivis, et c'est un cancer qu'on vit,
qui est très difficile. Pourquoi
les personnes âgées perdent leur logement? Bien, c'est parce qu'elles ne paient pas cher. Alors, moi, je l'avais fait lors des précédentes auditions, je vais répéter le cas de mes
propres parents, qui étaient dans le même logement depuis 23 ans, un beau grand six et demie au
deuxième étage, sur la rue Valois et qui payaient 475 $, par mois, de loyer. Non, ce n'était pas cher. C'était ordinaire, mais
ce n'était pas cher. Et, à 76 ans, bien, ils ont appris qu'il fallait qu'ils
quittent leur logement, parce que le propriétaire a mentionné qu'il
voulait le reprendre pour sa fille. Est-ce que c'est sa fille qui y a habité après? On n'a pas été cogner à la
porte. Mais ça a fait en sorte qu'un couple de 76 ans a dû se retrouver un
logement pas à 475 $ par mois. Alors, ils ont doublé... le marché était le
double pour l'équivalent. Alors,
quand la députée de Gouin a
déposé son projet de loi, moi, je me reconnaissais totalement,
pour avoir accompagné mes propres parents.
Mais pourquoi
les propriétaires font ça? Parce
qu'il y a un marché immobilier en
croissance. Ce marché immobilier fait
en sorte que, si nous, nous avons des immeubles, comme propriétaires, bien, on
peut les transformer en indivis. Donc, à trois, on achète un immeuble,
un compte de taxes indivis, on le laisse comme ça, on prend chacun un logement.
On devient en indivis : aucune procédure, aucun encadrement. La Régie du
logement n'a rien, n'a pas de droit là-dessus, l'article 51 de la Régie
du logement est sur le droit pour le divis et non l'indivis. Et ce que ça fait,
bien, c'est que la ville dans
laquelle l'immeuble est situé ne le sait pas non plus, parce qu'il y a toujours juste un compte de taxes en indivis, et là on vient de transformer trois logements en trois
condos indivis et on vient de faire monter la bulle spéculative autour, parce que, lorsque les trois, au bout de deux ans, vont vouloir vendre,
bien, ils peuvent vendre sans aller à la régie, sans procédure, et, au bout de deux ans, bien, ces trois
logements-là sont devenus trois condos divis qui retournent sur le marché, et
ils viennent de faire augmenter la
spéculation immobilière tout autour, mais surtout les loyers des voisins, parce que,
le voisin de chaque côté, son
prochain compte de taxes municipales va être augmenté de la valeur actuarielle
qu'il va y avoir sur son immeuble. C'est de ça dont on parle. Et ça fait
monter les loyers partout en ville.
Dans un
quartier comme Hochelaga-Maisonneuve, où on parle de gentrification, oui, c'est de ça
qu'on parle, c'est ce régime
incontrôlé. J'ai déposé précédemment, il
y a quelques années, un projet pour
l'inclusion, pour limiter, pour s'assurer que l'on puisse avoir, justement, des règles et obliger les municipalités à avoir des règles d'inclusion dans le développement. Vous voulez
construire des condos? Bien, en échange, vous allez investir dans le logement
social, vous allez avoir des obligations à partir d'un certain nombre d'unités. Le
propriétaire, le constructeur, le promoteur doit avoir des obligations
pour faire en sorte qu'on crée de la mixité.
Si je me ramasse avec un parc à logements juste de condos, bien, les gens qui sont plus démunis, qui n'ont pas accès à la
propriété, n'auront pas accès aux logements. Et le fondement du projet de loi de la députée
de Gouin, il part de cette prémisse-là, parce qu'il y a une clientèle spécifique, une
clientèle très spécifique qui sont nos aînés et qui, eux, se retrouvent
de façon très vulnérable, parce que, eux, leur revenu ne changera pas.
À
70 ans, quand tu as ta pension de vieillesse avec un supplément de revenu
garanti, tu vas être là-dessus jusqu'à ta
mort, ton revenu ne changera plus jamais, ce qui fait que, lorsque tu te
retrouves dans une situation comme mes parents ont vécu, comme les cas que la députée de Gouin a mentionnés, bien, ces
gens-là, qui payaient 475 $ avec un revenu stable, doublent leur coût de logement lorsqu'ils changent
de logement parce qu'ils sont chassés de leur logement, chassés de leur milieu et là ils ont
à déménager, bien souvent, de quartier, parce que, dans leur propre quartier,
ils ne retrouveront pas l'équivalent,
en tout cas, pas dans les quartiers centraux, et ils vont avoir à s'éloigner.
S'éloigner du centre, ça veut dire s'éloigner
de son milieu de vie, s'éloigner de ses amis, s'éloigner de ses loisirs. C'est
de ça dont on parle puis c'est des tragédies.
Moi, je vais
vous dire, quand ma mère a pensé à se trouver un nouveau logement, abandonner
la proximité de la rue Ontario,
c'était terrible. Ça fait 75 ans qu'elle demeure au bord de la même rue,
dans le même quartier, mais, dans son
quartier, où elle a toujours demeuré, il n'y en avait plus, de logement
accessible, pour elle, il n'y avait pas de disponibilité de logements
dont elle avait les moyens de se payer.
Alors,
introduire le projet de loi de la députée de Gouin vient, oui, régler en partie
la situation, mais ça ne vient pas
régler le problème, parce que le problème, c'est la transformation des
logements. Et ça, je l'avais signifié au prédécesseur du ministre, qui n'avait pas compris, je vais le
dire comme ça, l'ampleur du phénomène. Lors des séances de discussion que nous avons eues ici, dans les consultations,
on est revenus avec, justement, ce phénomène, et je pense qu'à force... on était à la fin du processus, on a commencé à
voir de la sensibilité du ministre à la compréhension du problème, parce
que ce n'est pas évident, il faut le vivre
pour le comprendre. Et il faut surtout savoir que les moyens législatifs qui
sont à notre disposition actuellement ne permettent pas à personne de
régler le problème ou d'arrêter le fléau.
J'ai
rencontré la Chambre des notaires, qui m'a dit : Si on n'enregistre pas
les ventes, jamais on ne va les voir. Et
M. Blanchard, dont Mme la députée de Gouin mentionne, a fait une étude
là-dessus. Ils ont fait une étude parce que le phénomène est parti dans La
Petite-Patrie il y a plusieurs années. Au début des années 2000, c'est chez
elle que ça a parti. Ça s'est en
venu, après ça, dans Rosemont, puis c'est descendu dans Hochelaga. C'est sûr,
c'est des stations de métro. C'est
toujours à côté d'une station de métro que ça se passe. J'en ai cinq dans mon
comté, stations de métro. J'ai le seul comté
au Québec... Alors, chez nous, là, c'est le raz-de-marée, j'ai des milliers de
logements transformés. Ça, c'est des gens
qui ont perdu leur logement. Ce n'est pas tous des aînés, et on n'est pas
capables de le documenter, parce qu'il n'y a pas de trace, parce que, bien souvent, les propriétaires vont
s'organiser avec le locataire. Ils vont lui faire la proposition d'un montant d'argent pour dédommager pour le
déménagement, pour les problèmes vécus, par la suite, par l'éloignement,
alors ça va être une négociation d'argent qui va se passer. Ce n'est pas tous
les locataires, à 75 ans, qui amènent leur propriétaire à la Régie du logement.
Alors, les
modalités qui sont déposées aujourd'hui vont justement donner des droits à ces
locataires, mais des droits qu'ils
devront, eux aussi, aller exercer devant la Régie du logement. Et ça, ça fait
partie de mes inquiétudes encore. Quelle assistance on va donner à ces gens-là? Parce que, le locataire qui va se
dire victime des modalités qui sont dans le projet de loi, comment on va l'accompagner, quels moyens
on va lui donner? Et, avec l'efficacité de la Régie du logement, on
pourra s'en reparler.
Est-ce que
ces gens-là vont attendre deux ans avant d'avoir un règlement? Est-ce qu'on va
créer un «fast track»? Ça a été un
des objets qu'on a discutés, ça. Est-ce qu'il y aura une façon de faire que ces
gens-là vont passer en avant pour s'assurer
qu'ils ne soient pas pénalisés et qu'ils ne soient pas obligés de déménager
pour récupérer leur logement deux ans plus tard? Ça, c'est des
inquiétudes.
Alors, M. le
Président, je pense que l'ouverture qu'on voit aujourd'hui est une ouverture
heureuse. Je pense que, si on faisait
de la législation comme ça tous les jours, nos vies seraient plus faciles, et
vos soirées, peut-être plus allégées, et
on pourrait peut-être avoir des sessions intensives un peu moins intensives.
Mais je tiens encore à féliciter tant la députée de Gouin pour sa
persévérance et féliciter le ministre de son ouverture. Merci.
• (15 h 40) •
Le
Président (M. Auger) : Merci, Mme la députée. Nous allons poursuivre
avec le porte-parole de la deuxième opposition et député de
Nicolet-Bécancour pour également une durée maximale de 20 minutes.
M. Donald Martel
M.
Martel :
Merci, M. le Président. Bien, je veux saluer ma collègue de Gouin, la féliciter
pour son travail, sa ténacité. Je
veux saluer aussi ma collègue d'Hochelaga et, bien sûr, les députés de la
partie gouvernementale et bien sûr, M.
le ministre, vous saluer personnellement. Ce n'est pas la première fois qu'on
se retrouve en commission puis c'est toujours
un plaisir, parce que je sais qu'on travaille sur le fond des choses, puis
c'est une des choses que j'apprécie de vous.
En premier
lieu, moi, je veux dire que... puis c'est très important, parce que la façon
que je vais aborder ça... je suis d'accord
avec le contenu, mais ça va être une position un peu plus critique sur la
façon, pas sur le fond, sur la façon. En premier lieu, je veux dire que pour moi qui est membre de la Coalition
avenir Québec, qui est député de Nicolet-Bécancour, pour moi, la compassion humaine, ça n'a pas une
couleur politique. Je pense que tous les députés, quelle que soit notre formation politique, on a à coeur le bien-être de
nos citoyens. On ne peut pas faire de la politique et être juste égoïstes
puis penser à nous, il faut avoir une
pensée, une compassion par rapport à nos citoyens, parce que, sincèrement, ce
serait emmerdant faire de la
politique. Si on faisait juste ça pour nous, ce ne serait pas le fun. Puis on
est là pour le bien-être de nos
citoyens, quelle que soit leur classe, puis évidemment on est tous, puis,
encore là, j'insiste, très sensibles par rapport aux personnes dans notre société qui sont les plus vulnérables, puis je
ne mettrai jamais de couleur politique par rapport à ça, c'est une
question d'individus.
On a assisté
au dernier débat des chefs. Quand la chef de Québec solidaire, la députée de
Gouin, est arrivée avec cette
suggestion-là, moi, j'étais très content, puis je n'étais pas surpris de
l'engagement de chacun des chefs de dire : Regarde, oui, c'est vrai, on devrait avoir une compassion
par rapport aux personnes aînées qui doivent changer de logement quand
souvent ça fait des années qu'ils sont là. Donc, moi, j'étais très content de
ça mais pas surpris, comme je vous disais.
Où est-ce que j'ai un problème
actuellement, c'est... Puis, vous savez, je suis whip, hein, de ma formation
politique, je suis whip, puis c'est
important d'avoir une certaine discipline dans nos partis politiques, puis, si
les députés ne sont pas consultés dans nos caucus par rapport à des
questions, ça peut soulever, hein, dans... quelle que soit la formation politique. Des fois, ça peut être un ministre ou
ça peut être un député, un critique qui va prendre position, puis il va se
faire dire par ses collègues : Comment
ça se fait que tu es allé là? Nous, on n'a jamais entendu parler de ça. Puis je
suis certain que, quel que soit le
parti politique, c'est des choses qui peuvent arriver. Ça fait que, quand on se
présente et on va voter pour
l'adoption d'un projet de loi, le principe d'un projet de loi, on en a discuté, on prend une orientation, on est d'accord, on a
répondu aux questions, on s'en va voter, on vote sur le principe, puis, ensuite
de ça, il y a la procédure qui s'enclenche.
Mais on convient que, si on a voté pour le principe, c'est sur l'objet du
règlement qu'on a regardé, on s'est entendus puis on s'attend à ça.
Là,
on se retrouve avec un projet de loi qui a un article, essentiellement, un
article, puis cet article-là est amendé de façon importante, je ne dis pas «de pas la bonne façon», mais, quand
je regarde... Puis faites l'exercice sincèrement, là, regardez la note explicative que le
ministre... ou peut-être que, là, dans ce cas-là, c'est la députée qui lit la
note explicative, faites l'exercice de lire la note explicative, puis
regardons le projet de loi qu'on a devant nous. Ça ne concorde pas.
Dans le livre des
règlements, on dit, à l'article 244... Puis, je veux vous assurer, je ne vous
amène pas dans la procédure, mais je veux
expliquer le malaise que j'ai par rapport à ça. On dit à l'article 244 que «les
amendements doivent se rapporter à
son objet et être conformes à son esprit et à la fin qu'il vise». Quand je
regarde... on a un projet de loi qui a un
article, on le change de façon très importante. On ne peut pas dire que nos
collègues qui ont voté sur le projet de loi, sur le principe du projet de loi... On étudie ce projet de loi là, c'est un
nouveau projet de loi. On ne peut pas dire que les gens... puis j'entendais ma collègue faire un peu la même
remarque, on ne peut pas dire que les gens qu'on a entendus, en commission parlementaire, sur le projet de loi
d'origine, ils ont émis leurs commentaires ou qu'ils ont fait leurs mémoires
en fonction de l'amendement qu'on a là. C'est un nouveau projet de loi.
Donc,
moi, M. le Président, je vais vous demander d'évaluer... je ne sais pas à quel
moment, dans la procédure. Puis, je
vous le dis, je veux vous rassurer, je ne rentre pas dans une guéguerre de
procédure. Je vous le dis d'avance, je vais demander au président de regarder la recevabilité de cet amendement-là.
Et je vous le dis d'avance, que, si le président disait que ce n'est pas recevable, moi, je vais vous donner mon consentement
pour qu'on le regarde quand même. Mais je pense que, comme législateurs, on a quand même une rigueur. Au-delà du
fond, au-delà de l'émotion, il y a une rigueur qu'on doit appliquer à l'égard de nos modes de fonctionnement, à l'égard
de nos structures de consultation et par respect pour nos collègues
aussi de chacun des partis politiques, parce que c'est sûr.
Tu
sais, tantôt, j'entendais la députée de Gouin dire que ça fait des mois qu'elle
échange avec le ministre ou les ministres
par rapport à ça, mais nous, on a su ça ça fait quelques heures. Tu sais, le
fruit de vos échanges, on a su ça depuis quelques heures. On a le droit de
discuter puis on a le droit... mais je dois vous dire que ça me déçoit quand
même un peu. Puis ce n'est pas un
reproche que je vous fais, là, mais je trouve que, l'engagement qu'il y avait
eu à l'égard des chefs, on modifie de
façon considérable le contenu du projet de loi. Moi, je pense que j'aurais aimé
ça que ma formation politique soit
dans le coup, qu'on n'apprenne pas ce matin l'entente qu'il y a entre la
députée de Gouin et le gouvernement. Moi, je me sentais à l'écart par rapport à l'entente qu'il y a là. Puis, je vous
le dis, je vous répète, je ne dis pas que l'amendement qui est là n'est pas bon. Au contraire, je pense
qu'il y a de l'intelligence qui a été appliquée dans les discussions que vous
avez eues et je vais le regarder avec
beaucoup, beaucoup d'attention. Mais c'est le message que je voulais vous
passer, je pense, à l'égard de la procédure.
• (15 h 50) •
Peut-être
comme dernière remarque... puis ça, c'est toujours ma marotte un peu rurale,
parce que j'écoutais la députée de
Gouin, j'écoutais la députée d'Hochelaga, puis c'est inimaginable, hein, pour
moi qui habite dans Nicolet-Bécancour, qui est totalement
rural, tu sais... Nicolet, c'est ma grosse ville, puis le centre, il a
8 000 de population, ça fait qu'on vit deux réalités vraiment différentes, puis une des réalités qu'on a en
milieu rural, c'est que, des propriétaires, nous, on en cherche. Moi, j'ai beaucoup de municipalités que j'aimerais ça avoir des promoteurs qui
viennent construire des deux logements, des trois logements. On manque de logements. Nos personnes, quand elles
arrivent à un âge un peu plus... le danger, moi, ce n'est pas qu'ils se fassent expulser de leur logement, c'est qu'il
n'y a pas de logement. Ils ne veulent plus s'occuper de leur maison puis
ils déménagent.
Ça
fait que c'est pour ça que c'est important qu'on ait cette considération-là. Tu sais, vous
vous rappelez... puis je ne veux pas ressasser des vieilles affaires, mais,
quand on avait mis au monde Solidarité rurale, il y avait deux fonctions,
hein : il y avait la fonction de donner
de l'argent pour aider à du développement, mais il y avait aussi un
organisme-conseil qui servait à
étudier, évaluer l'impact des nouvelles mesures gouvernementales dans leur
application sur le monde rural. Puis
là moi, c'est un cas, je n'ai pas fait d'étude, je n'ai pas... mais, je vous
dis, c'est important, le signal, il ne faut pas qu'on impose des règles qui vont faire en sorte de sortir des
promoteurs, parce qu'en milieu rural ça peut avoir des conséquences
quand même très importantes.
Donc,
je ne suis pas un spécialiste de la procédure, M. le Président, je vous
l'annonce d'avance, que je vais vous demander
de vous positionner sur la recevabilité de cet amendement-là. Et je rassure mes
collègues que, quelle que soit votre
décision, moi, je vais donner mon... Bien, pas quelle que soit... Si vous dites
qu'il n'est pas recevable, moi, je vais donner mon consentement pour qu'on puisse étudier le projet de loi. Et
je ne veux pas jouer les trouble-fêtes, je veux être partie prenante de l'engagement qu'il y a eu entre
les chefs politiques sur la demande que la députée de Gouin avait faite.
Et je vais être un législateur participatif
avec vous autres, je ne suis pas là pour barrer les choses. Ça fait que je vous
remercie beaucoup, et je vais attendre quel moment qu'il va falloir que
je le répète ou... Merci.
Le
Président (M. Auger) : Je vais vous expliquer tout ça. Merci, M. le
député de Nicolet-Bécancour. Pour l'instant, est-ce qu'il y a d'autres
députés qui voudraient faire des remarques préliminaires?
Donc,
pour répondre à votre question, donc, en vertu de l'article 198, au niveau
de la recevabilité, en fait, c'est : «Tout amendement doit, au moment où il est proposé, sur motion sans
préavis, être transmis au président. Celui-ci décide de sa recevabilité.» Donc, au moment
opportun — donc, ce
n'est pas encore le moment, on n'est pas rendus à un dépôt ou à une
présentation d'amendement — donc
en temps et lieu, vous pourrez demander la recevabilité.
Étude détaillée
Donc, pour
l'instant, je vais procéder à l'étude détaillée article par article en cédant
la parole à Mme la députée de Gouin pour la présentation de
l'article 1. Mme la députée de Gouin. L'article 1.
Mme David (Gouin) : Donc, M. le
Président, je lis tout l'article 1?
Le Président (M. Auger) : Tout à
fait.
Mme David
(Gouin) : O.K. Alors, le Code civil du Québec est modifié par
l'insertion, après l'article 1967, du suivant :
«1967.1. Le
locateur qui désire reprendre le logement occupé par un locataire âgé de
65 ans et plus ou qui désire évincer
celui-ci doit lui offrir un logement équivalent qui correspond à ses besoins
lorsque ce locataire est dans l'une des situations suivantes :
«1° son
revenu est égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d'être admissible
à un logement à loyer modique selon le Règlement sur l'attribution des
logements à loyer modique (chapitre S-8, r. 1);
«2° il est une personne handicapée au sens de
l'article 1 de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale
(chapitre E-20.1).
«Le logement équivalent
doit être situé dans la même municipalité régionale de comté pour les
municipalités de moins de
100 000 habitants ou à une distance d'au plus sept kilomètres du
logement d'origine pour les municipalités de 100 000 habitants et plus. Lorsque le locataire habite la
ville de Montréal, il doit être situé sur le territoire de la ville, à une
distance d'au plus cinq kilomètres du logement d'origine.
«Pour la période du 1er décembre au
31 mars, la reprise ou l'éviction est reportée de plein droit au 1er avril
lorsque le locataire est dans l'une des situations visées au premier alinéa.»
Le
Président (M. Auger) :
Est-ce qu'il y a des explications ou un résumé par rapport à l'article 1? Mme la
députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Oui. Je vais
intervenir rapidement, M. le
Président, sachant qu'un amendement
substantiel va arriver, mais je tiens
à quand même dire quelques mots pour expliquer peut-être
justement comment non
seulement le ministre mais moi-même avons voulu répondre à des
interrogations apportées, entre autres, par des associations de propriétaires ou par des députés appartenant au
monde rural. Et c'est la raison pour laquelle finalement nous avons modifié,
je vais le dire comme ça, là, modifié
substantiellement certains aspects. Et je vais en nommer simplement
deux mais pour vraiment montrer qu'on a été à l'écoute des gens qui sont
venus en commission parlementaire.
Le député de
Nicolet-Bécancour — c'est
bien ça? — nous
parlait du monde rural. Ça avait été soulevé durant la commission parlementaire non seulement par sa
formation politique, mais par des députés d'autres formations politiques,
et tout cela, parce que nous discutions de
la recherche d'un logement équivalent à tant de kilomètres du territoire
d'origine, et là il y avait des
députés, vraiment, qui nous disaient : Mais c'est tellement compliqué,
votre affaire, comment voulez-vous que
ça soit applicable dans le monde rural? Et donc je fais remarquer que, nous le
verrons avec l'amendement qui s'en vient,
il n'y a plus pour le propriétaire cette obligation de trouver un nouveau
logement au locataire, que ce soit en ville ou que ça soit dans des municipalités ou des villages ruraux, il n'y en a
plus. Alors, je pense que ça, c'est une manifestation du fait qu'on a
été capables d'être à l'écoute.
Et, une
simple deuxième question, je me rappelle très bien d'une association de
propriétaires qui nous avait amené le cas d'une dame, et on en avait parlé tout
le long de commission, une dame que sa fille, propriétaire à Montréal, espérait
voir venir vivre près de chez elle. Je peux
le dire, parce que ça a été public, là, c'était Mme Biron. Puis je me souviens
qu'on a beaucoup parlé de la situation de Mme Biron. Et alors je veux donc
indiquer que, dans l'amendement qui est proposé, bien, justement, on en
discutera, là, mais ça permet une forme de réunification familiale.
Donc, je veux juste dire qu'honnêtement on a été
à l'écoute, de ce côté-ci en tout cas, avec les associations qu'on a consultées, des associations regroupant
des aînés, des grosses associations comme la FADOQ, des associations, bien sûr, de locataires aussi, mais on a entendu
aussi les associations de propriétaires qui venaient à la commission de
même que les députés du monde rural.
Alors, je
voulais simplement l'indiquer. Ça n'est pas du tout à moi à me prononcer sur la
recevabilité ou non d'un amendement,
et je ne me risquerai certainement pas à le faire, mais je veux simplement
indiquer qu'il y a eu de l'écoute et que,
dans les mois qui ont suivi, les discussions entre l'équipe ministérielle et
nous ont tenu compte des représentations qui avaient été faites en
commission parlementaire. Ça, je veux vraiment l'indiquer. Merci, M. le
Président.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Je sais qu'il y a un amendement, mais, avant de poursuivre, j'aimerais souligner la présence... c'est assez particulier, on parle
d'un projet de loi touchant les aînés, mais nous avons la visite
d'un député d'un jour, Mathis,
à qui je souhaite la bienvenue, puis il vient de Louiseville, je crois, du
comté de Maskinongé. On me dit également
qu'il est très assidu aux périodes de questions. Je suis très heureux qu'il assiste à une commission parlementaire pour voir autre
chose que la période de questions. Bienvenue, Mathis.
Donc, je crois que, M. le ministre, vous avez un
amendement.
M. Coiteux : J'ai l'amendement. Vous
allez me donner l'occasion de...
Le Président (M. Auger) : ...le
présenter...
M. Coiteux : ...de le motiver également?
Le Président (M. Auger) : ...et
l'expliquer.
M. Coiteux : De l'expliquer et de le
motiver.
Le Président (M. Auger) : Oui, tout
à fait. Allez-y.
M. Coiteux : Oui. Alors, l'amendement
consiste à remplacer l'article 1 du projet de loi par le suivant :
1. Le Code civil du Québec est modifié par
l'insertion, après l'article 1959, du suivant :
«1959.1. Le
locateur ne peut reprendre un logement ou en évincer un locataire lorsque
ce dernier ou son conjoint, au moment
de la reprise ou de l'éviction, est âgé de 70 ans ou plus, occupe le
logement depuis au moins 10 ans et dont le revenu est égal ou inférieur au revenu maximal lui permettant d'être
admissible à un logement à loyer modique selon le Règlement sur
l'attribution des logements à loyer modique (chapitre S-8, r. 1).
«Il peut toutefois reprendre le logement dans
l'une ou l'autre des situations suivantes :
«1° il est lui-même âgé de 70 ans ou plus
et souhaite reprendre le logement pour s'y loger;
«2° le bénéficiaire de la reprise est âgé de
70 ans ou plus;
«3° il est un
propriétaire occupant âgé de 70 ans ou plus et souhaite loger, dans le
même immeuble que lui, un bénéficiaire âgé de moins de 70 ans.
«La Société d'habitation du Québec publie sur
son site Internet les seuils de revenu maximal permettant à un locataire d'être
admissible à un logement à loyer modique.»
• (16 heures) •
Le Président (M. Auger) : Des
explications par rapport à l'amendement?
M.
Coiteux : Alors, les explications.
Pouvez-vous, M. le Président, puisque vous aurez notamment
à vous prononcer sur la...
Le Président (M. Auger) : ...encore,
là, il ne faut pas anticiper.
M. Coiteux : Peut-être, peut-être.
On en discutera.
Bon. Alors,
indépendamment de cela, on voit bien que l'amendement poursuit exactement
le même but que l'article d'origine, soit d'empêcher des cas de reprise de
logement ou d'éviction qui touchent des personnes aînées vulnérables.
Donc, on reprend cette notion de protéger les personnes aînées, on reprend le
critère de revenus.
Bien sûr
que, compte tenu des consultations qui ont eu lieu, compte tenu des points de vue qui ont été exprimés lors des
consultations qui ont été tenues, et la députée de
Gouin y a fait allusion — même
elle en a donné certaines de façon
très précise — il
y a eu un travail autour d'un amendement qui visait à faire la même chose mais en étant un petit peu plus précis sur ce qu'on entendait par «personnes
aînées vulnérables» et en prévoyant des exceptions raisonnables. Ça ne
dénature absolument pas le premier article, mais ça permet d'avoir un premier article
qui tient compte des préoccupations qui ont été exprimées, qui resserre les critères
pour qu'on cerne mieux le phénomène que l'on souhaite éviter dans le but de protéger les personnes âgées vulnérables, et ça
prévoit les exceptions, qui sont, somme toute, de l'avis de beaucoup...
qui sont raisonnables.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Donc, nous en sommes rendus à des interventions concernant l'amendement. M. le député de Nicolet-Bécancour.
Question de règlement
sur la recevabilité d'un amendement
M.
Martel : Bien, je ne referai pas tout le laïus que j'ai
fait tout à l'heure, mais je vais répéter quand même
que... Faites l'exercice, lisons...
je ne le lirai pas, là, mais lisons les notes explicatives, regardons la modification, l'importance de la modification au règlement. La note explicative n'a pratiquement plus rapport
avec le contenu. On ne parle pas d'un règlement de cinq articles, 10 articles, 20 articles, on parle d'un règlement où il y a
un article, un... deux, pour l'entrée en vigueur, là. Il y a un article, et on le change de façon... Je suis d'accord
avec le ministre que le but visé, on est dans les mêmes eaux, mais le fond, moi, la
discussion... puis je suis certain que, dans chacun de vos caucus, la
discussion que vous avez eue à l'égard du contenu du projet de loi... l'amendement qui est proposé vient changer complètement le contenu.
On a entendu des intervenants, des invités qui
sont venus présenter des mémoires, qu'on a questionnés, et les questions...
J'entendais tantôt ma collègue parler de ruralité. C'est vrai que le 70... le
nombre de populations, des habitants, c'est vrai que ça, ça a été touché. Moi, ce
n'était pas à cet égard-là au
niveau de la ruralité, ce que je
parlais, c'est : On a besoin de
promoteurs. Mais ce n'est pas ça, le sens de mon propos. Ce que je veux dire,
c'est qu'au niveau du contenu
on ne parle plus des mêmes obligations, des mêmes conséquences. Je vous répète
que, si le président disait que cet amendement-là
est irrecevable, on va discuter quand même. Moi, je donne mon consentement pour
qu'on en parle. Je veux qu'on procède à son adoption, au même titre que
tout le monde ici, mais je vous demande, M. le Président, une question de
rigueur parce que c'est important.
La décision
que vous allez rendre, elle va avoir des conséquences sur les prochains projets
de loi, là, qui peuvent être modifiés
de fond en comble puis qui ne respectent pas, à mon avis, l'article 244. Donc,
je vous le demande formellement, de nous dire si cet amendement-là est
recevable.
Le
Président (M. Auger) : Donc, compte tenu que j'ai une demande de
recevabilité, je vais permettre aux personnes intéressées de pouvoir intervenir s'il y a des gens qui veulent
intervenir par rapport à ce que j'ai entendu, là, de M. le député de
Nicolet-Bécancour concernant sa demande.
Est-ce que,
Mme la députée de Gouin, vous voulez argumenter en faveur de la recevabilité ou
de la non... Dans votre cas, ça va être la recevabilité, là, que
l'amendement est recevable.
Mme David
(Gouin) : Probablement que oui, M. le Président. Merci. Écoutez, je comprends
la préoccupation de mon collègue le
député de la CAQ, mais j'aimerais rappeler quand même que, sur le fond des
choses, bien que, oui, on ait... le
ministre, par son amendement, élimine toute la notion de l'offre d'un logement
équivalent et tout ce qui s'ensuit.
Je lis le
premier paragraphe des notes explicatives : «Ce projet de loi modifie les
conditions de la reprise de logement et de l'éviction prévues dans le
Code civil afin de protéger les droits des aînés.»
C'est ça qui
est important. C'est ça qui était au coeur de la première mouture avec, oui,
c'est vrai, des modalités qu'on ne retrouve plus, j'en conviens tout à fait,
ces modalités ayant été assez souvent, en fait, remises en question, je dirais,
par l'équipe ministérielle, par la deuxième opposition, par plusieurs
associations de propriétaires. Et donc l'idée, c'était de se dire : O.K., on va garder le but, le but étant... ça,
je pense que je le dis... en tout cas, j'ai dû le dire 50 fois, là,
d'essayer, tu sais, de protéger les locataires
aînés contre l'abus d'éviction, mais j'ai été ouverte, oui, à regarder un amendement qui allait dans une autre direction
mais avec le même but. C'est ça qui était important pour moi. Sinon, vous
comprenez bien que jamais je n'aurais accepté cet amendement. Mais, si on me
dit : Mme la députée, c'est un peu compliqué,
votre procédure — appelons
ça comme ça — dans le
monde rural... difficilement applicable; dans le monde urbain, il y a, tu sais, des inconvénients, et on
avait parlé, entre autres, des familles, de la réunification familiale... Et
donc on me dit : Mais, à ce
moment-là, gardons l'idée qui est celle de protéger autant que faire se peut le
maintien des locataires aînés dans
leur logement, mais prenons un chemin plus simple — en fait, moi, c'est un peu comme ça que je
l'ai compris — et en même temps acceptons que, dans
certains cas — donc,
vous voyez les alinéas 1°, 2° et 3°, là — là, bien, oui, un propriétaire
pourrait procéder à l'éviction.
Donc, ma
compréhension, même si je ne suis pas une spécialiste... je l'avoue humblement,
mais ma compréhension sur le fond des
choses, c'est que l'amendement continue de protéger les droits des locataires
aînés. C'est dans le titre des deux...
pas des deux projets de loi, mais du projet de loi et de l'amendement — Loi modifiant le Code civil afin de protéger
les droits des locataires aînés, là, on a
exactement les mêmes titres... projet de loi, amendement — et c'est ça qui est essentiel. Et je dois dire que quand même, depuis quatre ans,
j'ai participé à beaucoup de commissions, j'en ai vu, des amendements substantiels à un certain nombre d'articles de
projet de loi, l'important étant toujours : Est-ce que, sur le fond, on
est sur le même sujet, on garde les mêmes objectifs?
Alors, dans
cette mesure, et, bien sûr, sous réserve de l'expertise de notre président, je
crois, moi, que l'amendement devrait être recevable.
Le Président (M. Auger) : Merci. M.
le ministre.
• (16 h 10) •
M.
Coiteux : Oui. Je vais ajouter assez brièvement là-dessus, parce
qu'essentiellement ce que fait l'amendement, c'est : il vise le même but, il introduit, effectivement, une
restriction au droit de reprise. C'est de ça qu'il s'agit dans le cas de
l'article d'origine comme dans celui-ci. C'est juste qu'il n'impose pas une
contrepartie très compliquée.
Il ne
l'impose pas, cette contrepartie, mais il vise exactement la même chose, de
faire en sorte qu'il n'y ait pas d'éviction
ou de reprise de logement lorsqu'il s'agit d'une personne aînée. Il a simplifié
les choses en évitant cette contrepartie,
qui était difficile d'application, mais en permettant des exceptions raisonnables. On fait la même
chose, mais avec des exceptions
raisonnables et en évitant une contrepartie qui, de l'avis de plusieurs, était
impraticable, mais on atteint le même
but, et bien sûr que les notes explicatives... Vous savez, dans un
projet de loi à quelques articles, la note explicative est souvent
la reprise de l'article. Alors, si l'article est rédigé différemment, c'est
normal que la note explicative soit différente, mais on vise exactement la même
chose ici en plus simple et avec des exceptions raisonnables.
Le Président (M. Auger) : Merci. Mme
la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier :
Oui, M. le Président. Bien, moi-même, quand j'ai vu, ce matin, au dépôt... j'ai
lu le texte, mais je n'ai même pas
regardé le numéro de l'article de loi que ça modifiait, parce que, dans ma
tête, on venait modifier le même article que dans le projet de loi.
C'est en
m'assoyant tout à l'heure et en prenant ma copie du projet de loi que j'ai
remarqué qu'on n'était plus dans le
même article, et je pense qu'est là le questionnement du collègue. Un projet de
loi qui n'a qu'un seul article et qu'on vient amender l'article pour lequel faisait
l'objet du projet de loi peut effectivement apparaître une drôle de procédure
ou... en tout cas, je n'ai pas vu ça souvent
puis j'en ai vu. Par contre, sur le fond, ce que je ne serai pas d'accord avec
mon collègue, je pense que
j'appellerais ça la façon de faire de la législation positive du ministre, je
vais le dire comme ça. Qu'est-ce
qu'on veut, au fond? C'est régler le problème, mais je pense que le ministre
s'est donné les moyens, par cet amendement-là, de régler le problème.
Le projet de
loi déposé par la collègue de Gouin avec l'équipe des légistes qui l'a
accompagnée a pensé que c'était l'article
1967 du code qu'il fallait modifier. Ce n'était peut-être pas celui-là.
L'équipe du ministère du ministre a trouvé une solution pour, justement, répondre aux interrogations que nous avons
eues ici et ils ont dit : Non, ça va être le 1959. Est-ce que ça en fait un amendement recevable ou
irrecevable? Ça, à vous de juger, mais moi, je pense que ça introduit une façon de faire différente, il y a quelque
chose là, là. Il y a quelque chose à la base sur laquelle... Venir changer le
seul article... venir amender
l'article 1961.1, qui était l'objet du projet de loi, c'est une chose, mais là
venir le faire disparaître, c'est
comme faire disparaître un projet de loi, ce que d'habitude le gouvernement
fait, on va se le dire. Il n'appellera pas le projet de loi puis il va en redéposer un nouveau avec le nom du ministre
dessus. Il aurait pu faire ça. Mais je pense que — je vais
appeler ça la législation positive — au lieu de faire cette procédure,
d'introduire un nouveau projet de loi, ce que le ministre aurait pu faire ce matin... il aurait pu déposer un nouveau
projet de loi, parce qu'au fondement c'est un nouveau projet de loi, mais, au lieu de faire ça, il a
décidé d'être positif et de laisser l'initiative à la députée de Gouin, et,
pour ça, M. le Président, je pense qu'on devrait respecter ça.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour vos interventions. Je
suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 14)
(Reprise à 16 h 44)
Le Président (M. Auger) : Nous
allons reprendre nos travaux.
Décision de la
présidence
Et je vais
rendre ma décision sur la question de règlement soulevée par le député de Nicolet-Bécancour. M. le ministre
a présenté un amendement à l'article 1 du projet de loi, et M. le député de Nicolet-Bécancour a soulevé une question de règlement pour
souligner la recevabilité de cet amendement, qui, selon lui, change
complètement l'article proposé au départ.
Lorsqu'une
question de règlement est soulevée quant à la recevabilité d'un amendement, la
présidence doit vérifier si
l'amendement respecte les règles générales de recevabilité qui se retrouvent
aux articles 244 et 197 du règlement. Ainsi, un amendement doit se rapporter à l'objet du
projet de loi et être conforme à son esprit et à la fin qu'il vise. De plus, il
doit concerner le même sujet que la motion et ne peut aller à l'encontre
de son principe ou en introduire un nouveau.
Le principe
du projet de loi vise à protéger les droits des locataires aînés. L'amendement
déposé vise à préciser les modalités d'application et n'a pas pour effet
d'élargir la portée du projet de loi, il vient seulement préciser les conditions de la reprise de
logement et de l'éviction. Donc, l'amendement est donc recevable.
Nous allons maintenant poursuivre avec des
interventions concernant l'amendement qui remplace l'article 1. Est-ce qu'il
y a des interventions? Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Alors,
merci, M. le Président. Ça va être des questions pour comprendre les
intentions du législateur. Je
vais y aller un peu à l'envers, là, pour comprendre la séquence. C'est le
troisième picot : «3° il est un propriétaire occupant âgé de
70 ans...»
On va se
faire des cas de figure, là, pour se comprendre, là. Alors, le propriétaire a
75 ans et il souhaite loger dans son
immeuble — on
va prendre un triplex — dans son immeuble... alors, lui, il habite le
premier étage, il veut mettre au deuxième
étage... et là on dit «un bénéficiaire âgé de moins de 70 ans». Pourquoi
introduire ceci, puisqu'il en a déjà le droit? Il n'y a rien qui lui empêche de faire ça, parce que le droit
présentement prévoit, qu'importe l'âge du propriétaire, qu'on peut reprendre un logement, parce que, la
loi sur l'éviction, c'est ce qu'elle dit : Tu peux reprendre un logement
pour le confier à quelqu'un de ta famille.
Je comprends que, le mot «bénéficiaire», le ministre l'a dit tout à l'heure,
puis j'aimerais ça qu'on me précise
d'où vient... J'imagine que ça doit être dans le lexique en quelque part, là,
qu'on nous dit la définition de «bénéficiaire». J'aimerais que le
ministre nous en fasse la lecture.
Alors, si le
mot «bénéficiaire» veut dire «un membre de la famille»... C'est déjà prévu dans
les articles de loi qu'un propriétaire
peut pour un membre de sa famille évincer un locataire. Alors, qu'est-ce qui
fait qu'on doit venir le mettre là, puisqu'il a déjà ce droit-là?
(Consultation)
Mme
Poirier : Je ferais
une virgule, parce qu'on vient faire en sorte d'ouvrir la porte à un membre de
la famille qui a moins de 70 ans. Bien, je ne comprends pas, là.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Coiteux : Écoutez, les trois cas de figure qui sont ici, le
troisième est une exception à l'exception, et effectivement l'article 1957
dit bien de quel bénéficiaire il s'agit, là. Ça s'applique toujours.
Donc, c'est un membre de sa famille. Alors, ça précise une exception à
l'exception ici.
Mme
Poirier : Mais est-ce
que vous pouvez me donner un cas de figure de qu'est-ce que ça explique versus
ce que prévoit déjà la loi?
M. Coiteux :
Oui, mais c'est parce que, puisque la loi dit que c'est interdit maintenant,
donc, dans quelles circonstances cette interdiction-là, elle est levée... mais
on précise ici qu'elle est levée dans ces trois cas-là. C'est beaucoup plus
précis ainsi que si on ne maintenait pas le troisième puis là il y aurait un
conflit d'interprétation potentiel par rapport
à l'article 1957, alors que, là, ils sont tout à fait insérés l'un avec
l'autre, ils sont arrimés solidement.
Mme
Poirier : Donc, un
propriétaire qui actuellement souhaite récupérer un logement pour sa fille — je vais le prendre comme ça — il a
le droit présentement.
Dans
le fond, ce que vient de dire le ministre, c'est que, lorsque le locataire a
plus de 70 ans, il pourra loger une parenté, on va le dire comme ça, de moins de 70 ans. Il vient
ouvrir la porte au fait que le propriétaire, à cause de son âge... Et là je ne comprends pas pourquoi c'est à cause
de son âge, parce que le but, ce n'est pas l'âge du propriétaire, c'est l'âge
du locataire. Alors, pourquoi venir limiter
ça à un propriétaire de 70 ans? Pourquoi un locataire de 35 ans qui... et
pourquoi faire un droit pour un
propriétaire de 70 ans? C'est ça que je veux comprendre. Parce qu'on vient
donner un droit à un propriétaire de
70 ans. L'objet de la loi, l'objet, l'intention du législateur depuis le
début, c'est de venir faire en sorte qu'on donne des droits à des
locataires.
• (16 h 50) •
M. Coiteux :
Oui, mais tout en recherchant un équilibre entre ce qu'on veut accomplir ici
puis les droits des propriétaires, et on
fait une... disons les choses ainsi, on veut être particulièrement attentif aux droits des propriétaires qui eux-mêmes sont des personnes aînées. Donc, on veut protéger les personnes aînées, puis, dans l'équilibre entre le
droit des propriétaires et des
locataires, on porte une attention particulière à l'âge des propriétaires
aussi, puisque l'objet ici est de protéger davantage les personnes
aînées. Donc, ça fait partie de la recherche de l'équilibre ici.
Mme
Poirier : Je comprends l'alinéa 2° pour cela. Quand, par
exemple... je ne me rappelle pas le nom de la dame qui était propriétaire... et qu'elle voulait
reprendre le logement pour elle-même parce qu'elle était rendue au-dessus d'un
certain âge, je le comprends. Mais pourquoi
donner un droit aux propriétaires en fonction de leur âge? On n'a jamais
entendu parler de ça, jamais.
Alors,
pourquoi venir donner un droit au propriétaire, en fonction de son âge, pour
ses enfants quand il a déjà ce pouvoir-là en tant que tel, là? Je ne
comprends pas l'intention.
Le Président (M.
Auger) : Juste un instant. J'ai Mme la députée de Gouin sur cet
élément-là.
Mme
David (Gouin) : Oui, M. le Président. Comme j'ai accepté cet
amendement, j'aimerais expliquer... certainement que le ministre voudra le faire aussi, il a commencé à le faire, mais je
vais expliquer ma compréhension, en tout cas, de pourquoi j'ai accepté cet amendement, partant du principe que la règle
générale, si le projet de loi est adopté avec l'amendement qui est proposé, c'est qu'un locataire de
70 ans ou plus occupant un logement depuis au moins 10 ans et dont le
revenu est faible ne pourra être
évincé. Ça, c'est l'espèce d'idée générale, mais il est vrai que j'ai consenti
à ce que dans certaines situations cette règle générale souffre des
exceptions.
Alors,
ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve ne remet pas en question — c'est ma compréhension, en tout cas — les alinéas 1° et 2°, si je comprends
bien, mais a un malaise ou un questionnement — je ne veux pas lui mettre les mots dans la bouche, là — avec l'alinéa 3°. Si moi, j'ai accepté,
comme députée de Gouin, l'alinéa 3°, c'est justement parce qu'il y
avait deux restrictions. Je ne l'aurais pas accepté s'il n'y en avait pas eu.
Les
deux restrictions sont les suivantes. On parle d'un propriétaire occupant — ça, c'est quand même important — un propriétaire occupant. C'est-à-dire,
cette personne a 70 ans ou plus et occupe un logement et cette personne
dit : Dans le même immeuble que moi...
parce que n'oubliez pas qu'un propriétaire peut avoir plusieurs immeubles, mais
là on dit : Dans le même immeuble, oui, un bénéficiaire, donc son enfant,
en fait... puis, si la personne a 70 ans ou 80 ans, on peut supposer que son enfant risque de ne pas
avoir 15 ans. On parle d'adultes, en fait. Donc, j'ai accepté qu'on dise :
Oui, dans ce cas-là, on pourrait accepter
qu'un propriétaire occupant à 70 ans ou plus loge, dans le même immeuble que
lui, son bénéficiaire. Pourquoi? Pourquoi
est-ce que j'ai accepté ça, dans le fond? Parce que, un propriétaire...
occupant, pardon, de plus de 70 ans,
c'est très concevable qu'il puisse avoir besoin d'aide, de soutien physique,
moral, psychologique, tu sais, pour
toutes sortes de choses et que je me suis, honnêtement, laissée convaincre, je
dois dire, de la validité de cette idée
que, bien, au fond, à 70 ans passés, propriétaire occupant, j'aimerais ça
que mon fils ou ma fille de 50 ans, disons, vienne vivre dans le même immeuble que moi, parce que ça va me donner un
bon coup de main pour le déneigement, pour les commissions, pour m'accompagner
dans certaines activités de santé ou autres.
Alors, juste expliquer que c'est la raison pour
laquelle, en tout cas, moi, après consultation aussi de mon comité-logement, on en a vraiment... «Mon comité-logement». Je m'excuse de cette appellation, parce que
ce n'est vraiment pas le mien, c'est celui de ma circonscription. Donc, on en a vraiment débattu, ça n'a pas été au bout de trois minutes,
là, et on s'est dit : O.K., c'est une concession,
mais c'est une concession qu'on va faire pour des raisons que j'appellerais
humanitaires. Voilà.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre. Ensuite, M. le député de Nicolet-Bécancour.
M.
Coiteux : C'est très bien
qu'elle ait donné cet exemple, ma collègue la
députée de Gouin, parce que
j'allais exactement présenter ce type d'exemple là, qui a fait l'objet
de nos discussions autour de cette restriction... de cette exception à
l'exception, mieux dit.
Le Président (M.
Auger) : Merci. M. le député de Nicolet-Bécancour.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bien, deux choses : un commentaire puis une question. Le commentaire, c'est : À l'égard de... comment je pourrais dire ça, de la façon que vous
avez ciblé les personnes visées, moi, je
trouve qu'on atteint plus le but. Je pense
que de dire que les personnes de 70 ans et plus... «Les personnes que ça
fait 10 ans qu'elles sont dans
le même logement», moi, j'ai l'impression que c'est mieux dit, c'est mieux
ciblé que ça l'était. Moi, je suis plus à l'aise avec ça, dans le sens que c'est vraiment ce type de clientèle
là qu'on visait, dans le sens que : Qu'est-ce qu'elle fait, du jour
au lendemain, la personne qui est là depuis 10 ans puis que, pour aucune
raison... Moi, je suis très à l'aise avec ça, je veux le dire.
Où
j'ai un peu un malaise par rapport à l'amendement versus le projet initial,
c'est que, là, on retire un droit quand même assez important que les propriétaires avaient, dans le sens que le
propriétaire avait le droit de reprendre son logement, mais il y avait des conditions, il fallait qu'il
relocalise, puis il y avait des... mais il restait propriétaire puis il avait
tous les droits par rapport à ça. De
la façon qu'on le dit, là, il n'y a pas de porte de sortie, à moins des
restrictions très, très précises. Mais,
par exemple, s'il voulait transformer ça en condominium, il ne peut pas, il
perd un droit de... pas de gérance, mais de propriété par rapport à ça.
Le
ministre, est-ce qu'il partage la même vision que moi par rapport à ça, que le
fait d'avoir enlevé des conditions à
remplir pour, entre autres, trouver un logement... le fait d'avoir enlevé ça,
là, on vient de priver à jamais... puis je ne dis pas que c'est bon, je ne dis pas que ce n'est pas
bon... on vient vraiment de retirer un pouvoir aux propriétaires, un pouvoir
de propriété aux propriétaires?
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Coiteux : On a enlevé une obligation de résultat. L'article, tel qu'il
était rédigé, donnait une obligation de résultat, d'offrir un autre logement. Ça nous est apparu
difficilement praticable. Un propriétaire peut avoir un seul immeuble, il
n'est pas propriétaire d'autres immeubles.
De l'engager, lui, de lui donner l'obligation légale de trouver un autre
logement, c'était une obligation
qu'on trouvait difficile à rencontrer dans la pratique, même avec les balises
qui avaient été mises de l'avant.
Alors, bien sûr, en enlevant ça, on n'oblige pas les propriétaires à cette
obligation de résultat très difficile à atteindre. Donc, de ce point de
vue là, on a rétabli un équilibre qui n'était pas là, selon nous.
D'autre part, oui, c'est certain qu'à partir du
moment où on veut protéger les locataires aînés vulnérables c'est sûr, c'est certain qu'en quelque part il n'y a
plus la même liberté qu'auparavant de reprendre un logement ou de procéder à
l'éviction. C'est certain, c'est dans la nature même d'un projet de loi comme
celui-là, mais la contrepartie, c'est de protéger les aînés vulnérables. Mais justement, pour ne pas trop
restreindre les droits de propriété, il y a des exceptions qui sont prévues.
Donc, il y a eu, de notre point de vue, l'élimination d'une obligation de
résultat, de notre point de vue, impraticable et, d'ailleurs, qui aurait
donné lieu à des contestations incessantes, je crois, honnêtement.
On
l'a enlevée. On retrouve un autre équilibre, meilleur, de notre point de vue,
mais, en même temps, on se dit : Oui,
il y a une restriction ici, alors prévoyons des exceptions à cette restriction, parce qu'il faut retrouver cet
équilibre.
• (17 heures) •
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : M. le Président, vous allez me permettre de souligner la présence, parmi nous, d'une
délégation chinoise, dont M. le député, M. Li, et une équipe qui est avec lui. Alors, je veux
souligner leur présence. Ils sont venus étudier et voir comment
fonctionnent nos institutions.
Le Président (M.
Auger) : Bienvenue à vous tous.
Mme Poirier :
Alors, je veux leur souhaiter la bienvenue, en tant que tel.
On
dit que, dans l'explication tant de la députée
de Gouin que du ministre,
on donne une contrepartie. Moi, je vous
explique la contrepartie, M. le
Président, pour l'alinéa 3°. Si
le propriétaire a 70 ans, que le locataire actuel a 70 ans et que l'enfant du propriétaire a 45 ans... On fait
toute cette loi-là pour protéger les locataires de 70 ans et là on vient
enlever au locataire de 70 ans
son droit de maintien dans les lieux parce
que son propriétaire a plus de
70 ans. On oppose les droits de
deux personnes. C'est, à mon avis, non recevable. On ne peut pas opposer le droit
du locataire de 70 ans pour lequel... et vous avez dit que la recevabilité de cet article-là...
parce que c'est sur le fond, et le fond, c'est la
protection des aînés dans leur
logement. Si, parce que le propriétaire a plus de 70 ans, on vient
enlever les droits des locataires de 70 ans, je me demande ce qu'on
fait ici, là, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.
On vient
confirmer des droits de maintien dans les lieux aux locataires par les alinéas
1° et 2°. On vient leur enlever par
l'alinéa 3° à cause de l'âge du propriétaire. C'est, à mon avis,
irrecevable. C'est absolument contre le pourquoi on est assis ici. Pourquoi les
droits du propriétaire de 70 ans deviennent tout à coup plus importants
que ceux du locataire de 70 ans
pour lequel on fait ce projet de loi là? L'engagement des chefs de parti à la télévision, c'était de protéger les droits des aînés qui sont locataires. Et je comprends
l'argument de la députée de Gouin qui... puis, je la comprends, elle veut
que ça passe, son projet de loi, puis elle a
dû faire des concessions, là, mais moi, je ne suis pas là pour en faire, là.
Moi, je suis là pour l'objet pour lequel on est assis ici, là, cet
après-midi, là.
C'est les
droits des locataires qu'on veut protéger. On n'a jamais parlé de protéger les
droits des propriétaires, là, jamais,
que je respecte énormément. Mais ce n'est pas en fonction de ton âge qu'on
protège ton droit de propriétaire sur un locataire âgé, parce que
l'objet de la loi, c'est le locataire âgé qu'on veut protéger.
Alors là, il
y a comme un non-sens à cette insertion-là. Moi, je pense que ce bout
d'amendement là... et je vais en
faire la proposition, s'il faut, je vais faire un amendement pour retirer cet
alinéa-là, mais je préfère qu'on en discute dans un premier temps, mais, je vous le dis, pour moi, il est à
contresens des deux premiers et il est à contresens du pourquoi nous
sommes ici, qui est les droits des locataires.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M.
Coiteux : C'est que, si on faisait ça, on se mettrait en contradiction
avec un article important de la Charte des droits et libertés de la
personne qui est à l'effet que toute personne âgée ou toute personne handicapée
a droit d'être protégée contre toute forme
d'exploitation et telle personne a aussi droit à la protection et à la sécurité
que doivent lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent
lieu.
Donc, on
pourrait juger de l'article 1 de ce projet de loi comme contrevenant à la
Charte des droits et libertés s'il n'y
avait pas l'alinéa 3° ici. Pourquoi? Parce qu'on dirait qu'une personne
aînée ne pourrait pas reprendre un logement pour un membre de sa famille qui viendrait lui apporter soutien. Alors,
il y a quand même une réflexion juridique aussi qui nous a amenés à cette formulation des exceptions à l'exception. Alors, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve peut, si
elle le veut, déposer un amendement à l'amendement, c'est son droit, mais j'annonce tout de suite, de notre côté, que nous n'allons pas aller dans ce sens,
parce qu'on a fait cette réflexion que je viens d'indiquer ici.
Donc, ce
n'est pas par hasard que cet alinéa-là est présent. Il est très important. Il a
fait l'objet de discussion aussi dans des cas de figure très réalistes,
mais en plus il y a la Charte des droits et libertés de la personne.
Le Président (M. Auger) : D'autres
interventions? Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Mais en quoi on vient enlever un droit en fonction de
la charte, puisqu'on l'enlève à tous les autres propriétaires, le droit? On ne vient pas l'enlever... Là, on vient lui
donner un droit en fonction de son âge, à ce propriétaire-là, puis on vient l'enlever au locataire en fonction
de son âge. On fait le contraire, là. Et, la première partie du projet de loi,
on enlève le droit à tous les autres.
Alors, cet équilibre-là, qui est un équilibre que le ministre a choisi, puis je
respecte son choix, mais c'est un
équilibre qui est brisé par le fait que j'enlève le droit au locataire de
70 ans par rapport au propriétaire de 70 ans pour lequel le
motif est l'âge, pour les deux.
Alors,
j'enlève au locataire son droit de maintien dans les lieux, qui, lui, est
protégé par les alinéas 1° et 2°, je lui retire à cause de l'âge de son propriétaire. Il me semble qu'il est là,
le non-sens, là. Et, en fonction de la charte et des droits en fonction de l'âge, c'est une opposition de deux
droits pour deux personnes en fonction de leur âge, et la loi, elle est faite pour protéger les droits des locataires
aînés. Alors, il me semble que, là, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M.
Coiteux : C'est qu'il y a
de la jurisprudence, là, qui parle de cet article 48 de la Charte des droits et
libertés de la personne pour protéger
les personnes aînées, il y a une jurisprudence qui dit qu'il doit être, dans le fond, concomitant — je
ne suis pas un juriste, moi, donc je ne
prends peut-être pas nécessairement les termes juridiques — mais
que l'article dont il est
question ici, l'article... par
exemple, l'article
1957 sur les bénéficiaires, dont on a parlé, et cet article ici relie directement à cela.
Ça doit être interprété en conformité avec l'article
48 de la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, il y a une
jurisprudence, il y a un raisonnement juridique très fort à l'appui de cette
exception à l'exception n° 3.
Mme
Poirier : ...l'ensemble
de l'amendement et l'ensemble de ce projet
de loi là peut être soumis, justement, à cette jurisprudence et à la
charte, parce qu'on vient de donner des droits à une clientèle en fonction de
leur âge, et ça, c'est directement. On fait
exactement ça pour tout le projet de loi. Alors, l'application que le ministre
veut donner à cette jurisprudence et
à la charte, bien, il la fait pour tout le projet de loi, parce qu'il vient
discriminer une clientèle en fonction de
son âge en lui donnant des privilèges et en enlevant des droits à une autre
clientèle, qui s'appelle le propriétaire, à cause de l'âge de sa
clientèle.
Alors, on
introduit une discrimination, là, et c'était la volonté de la députée de Gouin,
puisque son critère, c'est l'âge de
la personne. Alors, elle introduit directement un privilège, et c'est là qu'on
en a discuté lorsqu'on a eu les auditions, mais vous ne pouvez pas donner un droit privilégié au propriétaire de 70
ans en enlevant le droit que vous venez de donner au locataire de 70 ans par un privilège que vous
donnez au propriétaire pour une volonté qui est de faire ce que la loi lui
permet de faire quand ce n'est pas un
locataire âgé parce que la loi permet au propriétaire de le faire quand ce
n'est pas un locataire âgé, en fonction de vos deux premiers alinéas.
Tous les propriétaires au Québec, qu'importe
leur âge actuellement et qu'importe l'âge du locataire, ont droit d'évincer un locataire, tout le monde. Là, on
vient fermer la porte en disant : Si le locataire a 70 ans, répond à
certains critères,
on ferme la porte. Mais là vous venez de donner un droit à un propriétaire en
fonction de son âge, alors, lui, vous venez
de le discriminer, vous venez de lui donner un avantage. C'est le contraire.
Alors, moi, je vous dis, je trouve cet article-là totalement... il est
discriminatoire par rapport aux locataires âgés de 70 ans.
• (17 h 10) •
Le
Président (M. Auger) : Je vais maintenant céder la parole à l'auteure
du projet de loi, Mme la députée de Gouin.
Mme David (Gouin) :
Merci, M. le Président. Je pense que je comprends très, très, très bien la
situation, et, comment je dirais, la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve a raison de poser des questions là-dessus, mais je vais
indiquer ma compréhension. Moi non
plus, je ne suis pas juriste, mais je vais indiquer quelle est ma compréhension
de la situation.
La
députée a raison de dire que la reprise de possession est déjà quelque chose de
prévu dans le Code civil en ce qui a
trait au logement. Oui, les propriétaires peuvent effectuer des reprises de
possession pour leurs ascendants et descendants,
hein, bon, tout le monde sait ça, là, j'imagine. Bon, je veux rappeler une
chose, dans la grande majorité des cas,
les locataires âgés évincés de leur logement ne le sont pas pour reprise de
possession pour des ascendants ou descendants, ils le sont bien plus souvent pour des questions d'agrandissement et de
subdivision et dont on sait qu'à plusieurs reprises ça finit par avoir des fins spéculatives. Bon,
alors, premièrement, ça, c'est comme juste important de le dire, parce que ce que nos comités-logement dans tous nos quartiers
nous disent, c'est vraiment : Agrandissement, subdivision, c'est là qu'on
est au coeur du problème, beaucoup moins la reprise de possession.
Mais restons quand
même sur la reprise de possession, puisque c'est de ça qu'on parle aux trois
alinéas, là, 1°, 2° et 3°. Je pense que ce
qu'on essaie de faire, c'est placer une règle générale qui est, bon, le premier
paragraphe, là, puis après
dire : Il peut y avoir des exceptions. Ce que je comprends, c'est que ma
collègue ne remet pas... enfin, je pense, là, en question les deux premières exceptions, mais la troisième, parce
qu'elle dit : Mais là, au moment de la troisième exception, il y a une espèce de collision de
droits, ce en quoi elle a entièrement raison, c'est-à-dire le droit d'un
propriétaire occupant qui a 70 ans et
plus et qui, ce faisant, là, parce qu'il reprend un logement pour un bénéficiaire
qui va être son descendant,
nécessairement... bien, oui, ça se peut qu'il évince un locataire âgé de 70 ans
ou plus. C'est vrai. Il y a, comme ça
arrive souvent, hein... rien n'est parfait, je dirais, il y a une espèce de
collision des droits. Mais, au fond, je vous dirais que, même dans les deux premiers alinéas, à ce
compte-là, il y a aussi une exception, et ça peut aussi provoquer une éviction,
hein, soit que le propriétaire est lui-même
âgé de 70 ans et il veut reprendre le logement pour s'y loger. Bien là, il va y
avoir éviction. Donc, il y a déjà là,
et j'en suis parfaitement consciente, une petite collision de droits. Oui, le
locataire âgé va donc être évincé, et
ce n'est pas de gaieté de coeur que j'ai accepté cette concession. Comme disait
ma collègue, c'est une concession,
c'est vrai. Ou bien le bénéficiaire de la reprise est lui-même âgé de
70 ans ou plus, mais je rappelle que, dans ce cas-là aussi, il y aura éviction. Le troisième cas, c'est que ce
n'est pas n'importe quel propriétaire. Et là on vient restreindre le
droit actuel. C'est, du moins, ma compréhension. Les juristes pourront me
corriger.
Ma compréhension,
c'est qu'à l'heure actuelle un propriétaire non occupant, et quel que soit son
âge, peut reprendre un logement pour un ascendant
ou un descendant. Ça, là, c'est la situation actuelle. Là, il y a une
restriction quand même ici. Je dirais
même, il y en a plus qu'une, il y en a trois : ce propriétaire doit être
occupant, il doit être âgé de 70 ans
ou plus et va loger dans le même immeuble que lui. Je vous rappelle qu'il y a
des propriétaires, hein, qui possèdent plusieurs
immeubles. Donc, il y a trois restrictions à un droit qui existe déjà, et c'est
compte tenu de ces trois restrictions que
j'ai accepté une concession. Et, je vais m'assumer et l'assumer, c'est une
concession. Je n'enlève à personne, bien sûr,
le droit de dire : Bah! la concession
est peut-être trop grande, et je respecte ce point de vue infiniment, mais je l'ai fait et je ne reviendrai pas en
arrière, parce que je vais m'assumer jusqu'au bout.
J'ai
simplement essayé d'expliquer un peu le contexte puis
d'expliquer ma compréhension de ce troisième alinéa, mais, bien sûr, on
peut avoir des désaccords sur cette question entre collègues, et ça ne me pose
aucun problème.
Le
Président (M. Auger) :
D'autres interventions sur l'amendement? Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Bien, écoutez,
je m'essaie une dernière fois, sinon je vais déposer le sous-amendement, puis on va faire du temps, parce que
la concession que la consoeur de Gouin... elle a beau dire qu'elle a fait des
concessions, mais elle n'est pas d'accord.
Alors,
elle a fait une concession pour pouvoir avoir le projet de loi. Moi, je ne suis
pas obligée de faire ça. Moi, je n'opposerai
pas les droits d'un propriétaire aîné à un locataire aîné. Je ne ferai pas
cette concession-là. Il y a quelque
chose là d'immoral. Pour moi, le locataire aîné à qui on vient donner un
droit, on vient le lui enlever par le troisième alinéa, et, pour moi, ce n'est pas une concession
admissible. Ou on admet ici qu'on donne des droits et qu'on respecte la parole
donnée à l'effet que le but de ce projet
de loi là, c'est de donner des droits
aux locataires parce qu'ils ont 70 ans et plus. On a même remonté la cote à 70 ans et plus,
on est tous d'accord, mais, parce
que son propriétaire a 70 ans,
on vient lui enlever ses droits. Bien, voyons donc!
Alors,
écoutez, M. le Président, si le ministre veut répondre, il répond, mais, je vous le dis,
mon intention, c'est de déposer le sous-amendement, puis je vais faire la bataille là-dessus, parce que,
pour moi, on vient opposer des droits de
deux personnes et, justement, qu'on protège généralement par des chartes,
mais là, en fonction de leur âge, on vient de donner un droit plus important, en
fonction de son âge, à un
propriétaire dans une loi qui vient modifier les droits pour les
locataires du même âge. Il y a quelque chose qui...
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : M. le Président, je ne sais pas si, dans la procédure, c'est correct, mais est-ce que
je peux poser une question à ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve pour
comprendre quelque chose?
Le Président (M.
Auger) : Vous pouvez apporter un commentaire. Sans aucun problème.
Mme David
(Gouin) : Je peux le faire
sous forme de commentaire, puis elle y répondra si elle veut y répondre.
Le
Président (M. Auger) : Vous
avez le droit de vous exprimer, la parole est à vous, Mme la députée de Gouin.
Mme
David (Gouin) : O.K.
Mais c'est parce que je comprenais jusqu'ici que ma collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve remettait en question le troisième alinéa — j'ai
bien compris? — mais
est-ce qu'elle remet aussi en question les... Je ne
sais pas comment faire pour ne pas poser de question, là, mais...
Le Président (M. Auger) : Allez-y,
allez-y, exprimez-vous.
Mme David
(Gouin) : Il y a
les deux premiers alinéas aussi qui, dans une certaine mesure, restreignent la
portée du premier paragraphe,
et je voudrais simplement comprendre, là. Est-ce que ma collègue
remet en question les trois alinéas, ou seulement le
troisième, ou... Enfin, juste qu'on sache où est-ce qu'on est, là.
Le Président (M. Auger) : Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Poirier : ...M. le
Président, je vais déposer le sous-amendement, là, qui se lit comme suit :
L'amendement à l'article 1 du projet de loi est modifié par
la suppression du paragraphe 3° de l'article 1959.1.
Le
Président (M. Auger) : Je
vais suspendre quelques instants pour en permettre la reproduction et la
distribution.
(Suspension de la séance à 17 h 19)
(Reprise à 17 h 21)
Le Président (M. Auger) : Nous
reprenons nos travaux avec le sous-amendement présenté par la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.
Mme
Poirier : Oui. Alors, ça va, en plus, répondre à ma collègue,
en tant que tel. C'est pour ça que j'ai procédé comme cela.
Je reprends,
là, le libellé de l'article 1 mais les alinéas 1° et 2°. Lorsque
je suis un propriétaire et que j'ai un locataire qui a 70 ans et plus qui occupe mon logement depuis 10 ans et
dont le revenu est égal ou inférieur au revenu maximal pour avoir un
logement à loyer modique, d'accord, si, comme propriétaire, je suis âgé de 70
ans et plus et je souhaite reprendre le
logement pour y loger, pour me loger, me loger moi-même, on l'accorde. Si la
personne à qui je veux faire... à donner
le bénéfice, dans le fond, dans le cadre de cette reprise-là, il faut que cette
personne-là ait 70 ans ou plus. Alors là, on vient de donner deux façons de le faire : moi-même, comme
propriétaire, je dois avoir 70 ans pour aller occuper le logement ou la personne à qui je veux donner le
bénéfice doit avoir 70 ans et plus. Il me semble que c'est clair. Ça, là,
c'est clair, clair, clair, et ça répond à des propositions et des arguments
qu'on a entendus ici.
Le troisième,
on ne sait pas d'où il arrive, parce que le troisième, il vient faire le
contraire des deux premiers. Il dit : Premièrement, je suis le propriétaire occupant. Donc, ça veut dire que
ce n'est pas l'alinéa 1°, parce que l'alinéa 1°, c'est : Comme propriétaire occupant de 70 ans, je vais aller
prendre le logement. Ce n'est pas le cas du début de la phrase du troisième, parce que je suis déjà dans l'immeuble.
Donc, effectivement, c'est une autre catégorie. Et ce que je souhaite faire, c'est loger dans l'immeuble un bénéficiaire
âgé de moins de 70 ans, qui est le contraire de 2°, parce qu'à 2° je
dis : Mon bénéficiaire doit
avoir plus que 70 ans. Alors, par 3°, je viens faire le contraire de 2°. Pour
qui? Et tout l'ensemble de l'article est pour des locataires de
70 ans et plus à qui on veut protéger des droits. Pourquoi on viendrait
donner un privilège à un propriétaire de
70 ans pour y loger sa fille de 45 ans et évincer une personne âgée
de 70 ans, donc mettre
cette personne-là dans la situation difficile de se retrouver un loyer? Parce
que c'est l'âge du propriétaire qui vient déterminer
la raison. C'est tout, c'est la seule, parce
qu'on est venu limiter ce droit-là de
3° dans 1° et 2°. On a dit : 1°, c'est pour se loger lui-même, et 2°, c'est que son bénéficiaire doit avoir
plus de 70 ans, puis dans 3° on vient dire le contraire, totalement
le contraire, on dit que le bénéficiaire peut avoir moins de 70 ans, ce
qui est le contraire de 2°, puis, en plus, on dit qu'il doit être
occupant versus 1°, où c'était pour lui-même.
Qu'est-ce qu'on veut atteindre par ça? On n'en a
aucune idée. Pour moi, cet alinéa-là est totalement contraire à 1° et 2°. 1° et 2° répondent directement. On n'a pas besoin de 3°, on n'en a pas besoin. Et on va venir
introduire là une catégorie où on
vient finalement permettre de mettre des personnes âgées dehors en fonction de l'âge du propriétaire et en fonction de l'âge du locataire, ce qu'on
vient justement de baliser dans les deux autres et dans le premier paragraphe.
Alors, M. le Président, je peux comprendre ma collègue, là, qui a fait des concessions, là.
Elle l'a dit : J'ai fait des concessions.
Ça lui appartient. Mais moi, je vais plaider, parce que, cette concession-là,
je trouve qu'elle est coûteuse pour le but du pourquoi on est ici, qui
est de donner des droits aux locataires âgés.
On a entendu
la FADOQ, on a entendu des dizaines de groupes. Le RCLALQ sont venus nous
dire... tout le monde est
venu nous dire : On doit protéger les droits des aînés, des locataires
aînés. Il n'y a personne qui est venu nous plaider le droit des propriétaires aînés, sauf dans un cas,
et c'est le cas qui est prévu par 1°. C'est le seul cas qu'on a eu qui est venu
plaider ici... une madame qui est venue ici et qui a
dit : Moi, j'ai un immeuble, j'aimerais ça pouvoir récupérer le logement
qui m'appartient, mais je ne peux pas le
faire actuellement, à moins de mettre la personne à la porte. Puis,
dans son cas, ce n'étaient pas nécessairement
des personnes âgées, mais elle disait : Si c'est des personnes âgées, vous
allez m'enlever mon droit, vous allez
m'enlever le droit, moi, comme aînée, de le faire. Alors, 1° est là pour ça.
Elle est âgée de 70 ans, elle
souhaite reprendre son logement, c'est clair, c'est là. Pourquoi venir donner
un droit à un propriétaire qui habite déjà
dans les lieux? Donc, ce n'est pas pour lui.
Puis
je peux comprendre l'argument de dire qu'un aîné veut peut-être
avoir un de ses enfants plus proche, je suis d'accord, mais au détriment du pourquoi on est assis ici, qui est le
locataire aîné. Mais là, je m'excuse, mais on est en totale contradiction avec le pourquoi de la loi qui est
devant nous, on fait le contraire, et ça, pour moi, ce n'est pas admissible.
Ce n'est pas admissible, M. le Président, là. Je ne sais pas d'où vient, à part... Je comprends que les juristes
du ministère ont consulté l'ensemble des chartes, etc., je
comprends ça, mais celui qui va venir contester ça en fonction de l'âge, il va
se ramasser avec la contestation en
fonction de l'âge du locataire et que la loi est destinée à protéger les droits
des locataires aînés. Et là je viens
de donner préséance, en fonction de son âge, au propriétaire. Je viens de lui
donner un droit qui est contraire aux droits qui sont précédents, je
viens faire le contraire complètement, je fais une culbute par en arrière.
Est-ce
que c'est la concession qu'on a donnée aux associations de propriétaires pour
ne pas les entendre? Je ne le sais pas, mais moi, je vais vous dire, je
me pose réellement la question là-dessus, M. le Président, réellement.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Nicolet-Bécancour.
• (17 h 30) •
M.
Martel : Bien,
deux, trois remarques. Évidemment, je suis... bien, pas évidemment,
mais je ne suis pas d'accord avec le sous-amendement proposé, pour quelques raisons, mais, si c'est important
d'adopter un projet de loi qui va faire en sorte que des personnes âgées de 70 ans et plus puissent garder leur
logement, qu'on puisse les sécuriser, pourquoi qu'on n'adopterait pas la même logique aux propriétaires si le fait
d'apporter un bénéficiaire près de lui fait en sorte qu'il peut rester
dans son logement plus longtemps?
Moi,
je trouve qu'il y a un défi dans ce
projet de loi là, il y a un défi de dire : On sécurise nos personnes
âgées, les personnes de 70 ans et
plus... à laquelle tout le monde souscrit, tout le monde, sans exception, mais
il y a un équilibre aussi à atteindre
entre la... je vais dire, la protection des propriétaires, dans le sens que le
but, ce n'est pas d'enlever tous les
pouvoirs ou tous les droits aux propriétaires, le but, c'est de donner des conditions qui vont faire en sorte
que la personne de 70 ans et plus qui
habite son logement depuis une bonne période de temps puisse être sécurisée.
Moi, je dis : Je pense qu'on
l'atteint en bonne partie. Mais, si le but, c'est d'enlever des droits aux
propriétaires pour faire en sorte que, parce que, pour avoir des
locataires, ça prend des propriétaires, ça prend du monde qui est... Il n'y a
personne qui est obligé d'acheter un immeuble.
Ce n'est pas une obligation. On ne vient pas au monde en disant : Toi, il
faut que tu achètes ça. À un moment
donné, il y a un choix, puis heureusement qu'il y a des
propriétaires, heureusement qu'il y a des gens qui disent : Moi, j'accepte d'investir, de mettre mes économies, de
me ramasser un petit fonds de pension dans l'immobilier. Heureusement qu'il y a ça, sinon, à moins que ce soit le choix
qu'on fasse, on n'aurait que du logement municipal ou gouvernemental, puis là je ne pense pas que ce soit ça, le débat.
Le
débat, les chefs, sur quoi qu'ils se sont entendus, c'est de dire :
Pouvons-nous mettre ensemble des conditions qui vont faire en sorte que des personnes avec un certain âge ne
puissent pas être évincées de leur propriété sous simple caprice ou on peut-u leur donner une sécurité?
Puis, je vous le dis depuis le début, il
y a un équilibre qui est fragile par rapport à ça, puis je pense que et la partie gouvernementale, et le ministre, et la députée de Gouin, ils ont mis chacun de
l'eau dans leur vin pour faire en sorte que quelque chose qui est là... qu'il est potentiellement acceptable, en tout cas, que moi, je vais voter pour.
Mais il faut garder un équilibre, puis moi, je vous le dis, là, l'équilibre, il
est fragile. Puis, quand j'entends les remarques de ma collègue d'Hochelaga,
là je ne veux pas qu'on dévie du débat.
Je veux qu'on reste
très ciblés par rapport à où est-ce qu'on en est. Ça fait que c'est pour ça.
Moi, je pense qu'il y a là une mesure qui
est raisonnable, qui peut être favorable pour le propriétaire qui veut
continuer d'habiter son immeuble. Donc, voilà. Mais je n'ai pas de
question.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée de Gouin.
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je comprends, je comprends et
je me retrouve dans une situation où idéalement, idéalement, dans un
monde idéal... et c'était le cas du projet de loi version initiale sans
amendement, il n'y avait pas d'exception,
mais — et je
pense que l'ensemble de mes collègues vont le comprendre, de même, j'en suis
convaincue, que les comités-logement qui, en ce moment même, suivent très
attentivement la commission — la question de la recherche de l'équilibre est au coeur de nos discussions depuis
deux ans, et là l'eau dans son vin, c'est une image qui s'applique très
bien des deux côtés.
Le
gouvernement actuel n'est pas un gouvernement de Québec solidaire, c'est une
réalité. Nous sommes des députés solidaires, je suis une députée très
solidaire des droits des locataires, mais je suis capable, je pense... et ma
formation politique est capable de saisir
aussi qu'il y a des moments où on doit rechercher cet équilibre des droits. On
peut trouver à un moment donné qu'il
y a déséquilibre. Moi, je trouve souvent qu'il y a déséquilibre des droits
entre les propriétaires et les
locataires personnellement, mais, dans ce cas-ci, la tentative honnête, là,
c'est d'essayer d'aller le plus loin possible pour la protection des droits des locataires aînés, le plus loin
possible dans le contexte dans lequel nous vivons. Alors, oui, je reconnais ce qui s'appelle le droit de
propriété, et, dans ma formation politique, c'est reconnu. Il y en a qui
pensent que non, mais c'est reconnu.
J'ai
cherché l'équilibre, nous avons cherché l'équilibre, une protection accrue pour
l'ensemble, pour l'immense majorité des locataires aînés et pauvres. Je vous
rappelle qu'il y a aussi une notion de faibles revenus. On a convenu
aussi qu'il pouvait y avoir certains cas d'exception.
Les trois
alinéas, 1°, 2° et 3°, sont des cas d'exception, parce que je rappelle que, par
exemple, même dans le premier alinéa, le locateur, c'est-à-dire le
propriétaire, du moment qu'il a 70 ans ou plus, peut reprendre un logement
qui lui appartient pour s'y loger. Donc, là
aussi, là, je suis en train de reconnaître que ce propriétaire, qui est
probablement plus fortuné que son
locataire qui a peut-être 70 ans, là, bien, oui, il va reprendre son logement
et évincer un locataire de 70 ans peut-être
moins fortuné. Je ne souhaite pas que ça arrive, c'est bien entendu. Et, en
fait, c'est assez rare que ça arrive. Ce n'est pas tellement ça, le
problème, mais je reconnais que ça arrive.
Et c'est vrai
qu'à l'alinéa 3°, là, on va un peu plus loin, hein? On dit : Ça n'est pas
pour lui-même, mais c'est pour un
bénéficiaire, donc en fait son grand enfant adulte, là, âgé de moins de
70 ans. Et, si nous avons consenti à cet alinéa, c'est parce qu'il y a effectivement des situations
où des petits propriétaires âgés de 70 ans ou plus habitant leur logement,
donc occupants... Là, on vient restreindre,
en fait, les droits, pas en ajouter, on restreint, mais on dit : Oui, son
fils, sa fille pourrait venir habiter
dans le même immeuble dans un but d'occuper souvent la fonction qu'on appelle
d'aidant naturel. En fait, c'est de
ça qu'il est question. Et, dans cette mesure-là, on dit : Oui, l'alinéa
3°, il est concevable, il est recevable. Là, je ne sais pas quel mot utiliser. Donc, c'est à la fois, oui, une
concession mais, je dirais, aussi la reconnaissance qu'il peut exister des cas qui, à mon avis, vont être
très peu nombreux. On pourra toujours en faire l'analyse dans quelques années
peut-être et regarder ce que ça a donné.
Mais, en tout cas, en ayant discuté de tout ça avec non seulement le
comité-logement de Rosemont—La Petite-Patrie, mais il y a d'autres comités
aussi... il y aura très peu de cas. Mais, dans les cas où ça arrivera, c'est vrai que ça pourra permettre à une
personne qui est souvent un petit propriétaire occupant de 70 ans ou plus
d'avoir quelqu'un de sa famille avec lui. Et je rappelle encore une fois que
ça, c'est déjà une restriction.
En ce
moment, un propriétaire occupant ou non, quel que soit son âge, peut reprendre
un logement pour un ascendant ou un
descendant. Ça, c'est ça, la loi, en ce moment, là. Là, ce qu'on dit, c'est
que, dans le cas des aînés, il faut que ce propriétaire soit occupant, âgé de 70 ans ou plus, logé dans le même
immeuble. Donc, on restreint, en fait, là, on n'est pas en train
d'ajouter des droits.
Tout ceci
étant dit, je reconnais tout à fait l'imperfection. Ce n'est pas un projet de
loi parfait, ce n'est peut-être pas
le projet de loi idéal, mais les échos que j'en ai, aujourd'hui même, de
représentantes et représentants de groupes aînés de même que du regroupement des associations de locataires, c'est :
Voilà un pas dans la bonne direction. Alors, pas le pas parfait, pas le monde idéal, je suis tout à
fait d'accord. Et je comprends, je le répète, je comprends très, très bien les
arguments de ma collègue, je ne veux pas du
tout les délégitimer, mais simplement il y a là un pas dans la bonne direction,
et, quant à moi, en tout cas, je suis prête à l'assumer et à
l'accueillir.
Le Président
(M. Auger) : D'autres interventions sur le sous-amendement? Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
• (17 h 40) •
Mme
Poirier : Bien, je vais reprendre le dernier argument de ma
collègue. Le pas dans la bonne direction, c'est les alinéas 1° et 2°. Ça, c'est le pas dans la bonne direction. C'est
pour ça qu'on est ici. C'est le motif de son projet de loi, les alinéas
1°, 2°.
Jamais la
députée de Gouin, jamais la députée de Gouin n'a demandé de protéger les droits
des propriétaires de 70 ans et plus,
jamais. Et je suis très surprise de
l'entendre tenir ces propos-là dans le but de protéger l'ensemble de l'oeuvre. Je
suis très surprise.
Jamais
la députée de Gouin n'a argumenté sur le fait que son intention était
de protéger les droits des propriétaires de 70 ans et plus. Ça me renverse. Tout simplement, on enlève à
une personne âgée des droits qu'on va donner à un plus jeune. C'est ça qu'on vient faire, qui est le
contraire de ce qu'on veut faire. C'est incroyable. Et, quand on parle du propriétaire, le propriétaire, là, il est propriétaire d'un immeuble, hein, il est
propriétaire d'un immeuble. Il a au moins deux logements. Ça n'en fait pas quelqu'un qui est pauvre, là, ça en
fait quelqu'un qui est probablement plus riche que le locataire qui répond aux critères qui sont au
premier paragraphe, qui est quelqu'un qui a un revenu maximal permettant
d'être admissible au logement à loyer
modique. Donc, on vient dire à cette personne-là, qui répond à tous les
critères du paragraphe 1° : Toi,
là, qui est plus pauvre que ton propriétaire, c'est sûr, tu es plus pauvre que
ton propriétaire, bien, toi, on va
t'enlever les droits pour protéger les droits du propriétaire plus riche que
toi dans une loi qui était censée venir te protéger en fonction de ton revenu puis en fonction de ton
âge. C'est assez incroyable. Ça, c'est assez incroyable. Puis, en plus, est-ce qu'on pourra documenter ça? Non, M. le
Président, ça ne se documentera pas, parce que la loi va venir reconnaître
un droit pour lequel on ne pourra pas s'y
opposer. Il n'y en aura pas, de registre de ça. On ne pourra pas documenter les
gens qui vont aller à la régie, parce que,
dans le fond, ce qu'on dit, c'est : Vu que vous, vous avez 70 ans et
plus, allez donc à la régie contre
votre propriétaire, à qui on a donné des droits. C'est de ça dont on parle, là.
Alors, l'argument de la collègue, qui dit des cas qu'ils seront
enregistrés... Non, ils ne seront pas enregistrés.
Elle vient
enlever les droits aux personnes pour lesquelles elle a créé le premier
paragraphe, qui sont des gens pauvres,
démunis, pour des propriétaires qui ne le sont pas, parce qu'ils ont un
immeuble. Ils n'ont peut-être pas de revenu, mais ils ont de la propriété, ils ont des actifs. Et on vient donner les
privilèges pour lesquels on est ici à un locataire aîné, on vient les donner à une personne de moins de 70
ans, donc, d'un âge inférieur à eux. On vient de donner ces privilèges-là, là.
C'est assez paradoxal, assez.
Et, M. le
Président, je n'ai pas de problème avec les arguments de mes collègues. Qu'ils
ne soient pas d'accord, ça leur
appartient, je n'ai pas de problème avec ça, mais, quand on a des convictions
et que le but pour lequel on fait une démarche,
qui est les locataires âgés... bien, ces convictions-là, on les maintient. Et,
quand Québec solidaire nous a amené ce projet de loi là et a fait faire
une entente avec les chefs des autres partis, c'était pour protéger les
locataires aînés.
Là, aujourd'hui, elle vient donner un
droit sur les locataires aînés aux propriétaires aînés. C'est son privilège,
elle a le droit, mais je ne suis pas
obligée d'être d'accord, M. le Président. Et, pour moi, j'ai l'impression que
je me fais leurrer dans ce volet-là. Je me fais leurrer, parce que, la
collègue, ce qu'elle a voulu, c'est protéger les locataires aînés, et là, actuellement, elle vient donner ce privilège-là
aux propriétaires aînés. C'est complètement l'inverse. Et elle vient donner
des privilèges à des bénéficiaires de moins
de 70 ans à l'encontre des locataires âgés qui ont des revenus à loyer
modique. C'est ce qu'elle fait en acceptant ça.
M.
le Président, ils voteront contre mon amendement, ce n'est pas grave, mais au
moins on aura fait la démonstration ici
que, dans ce projet de loi là, il y a des droits qui ont été donnés aux
propriétaires aînés en échange de quelque chose à l'encontre du principe
du projet de loi. Ça, c'est un fait, M. le Président.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée de Gouin.
Mme
David (Gouin) : M. le Président, je ne pensais pas réintervenir, parce
que, comme le dit la collègue, on peut avoir des désaccords, et c'est
tout, et moi aussi, je vis très, très bien avec les désaccords.
Ce
avec quoi je vis beaucoup moins bien, c'est avec le doute semé par la collègue
sur ce que j'appellerais mes convictions.
Le mot «convictions» a été prononcé ici. Je pense que ça n'est pas de
convictions que nous sommes en train de
parler, parce qu'ici, dans cette
salle, ce que j'ai compris, c'est que toutes les personnes présentes, tout à
fait sincères et de bonne foi, là, avaient la conviction qu'il fallait
protéger les locataires aînés. Je pense qu'on est d'accord là-dessus.
J'aimerais
rappeler que, même avec le projet de loi non amendé, là, dès le début de toute
l'opération, de toutes les
discussions qu'il y a eu, là, depuis deux ans et très ouvertement, on a tous
toujours parlé d'«équilibre» des droits entre locataires et propriétaires. C'est un mot qui est revenu je ne sais
combien de fois à la fois dans le discours public, mais aussi, bien entendu, dans les discussions, les
négociations qu'il y a eu, etc. On a parlé d'équilibre des droits. Alors, évidemment, d'un point de vue solidaire,
l'équilibre que je recherche peut être un peu différent de celui d'un autre parti.
Moi, je considère, par exemple, je l'ai dit
tout à l'heure, qu'en ce moment il y a déséquilibre des droits et, en d'autres
moments, en d'autres lieux, lorsqu'il
sera question, par exemple, d'une refonte plus générale de tout ce qui entoure
les lois entourant le logement, je
ferai certainement valoir beaucoup d'idées avec lesquelles je sais que la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve sera d'accord parce qu'elle les défendra
elle-même aussi.
Je
rappelle que, dans ce cas-ci, on est dans un projet de loi qui, dans son
ensemble, protège essentiellement les locataires
aînés mais accepte qu'il puisse y avoir des exceptions à cette protection, ce
qui est le cas de tout l'ensemble du
deuxième paragraphe, y compris les alinéas 1° et 2°, je le répète, là, pas
seulement l'alinéa 3°. À ce compte-là, il faudrait tous les enlever, ma grande foi, parce que, dans
les trois cas, on convient qu'un propriétaire aîné ou le bénéficiaire d'une
reprise lui-même aîné... mais on est
toujours du côté des propriétaires, là, puis, oui, on convient donc que, dans
certains cas, ces personnes-là, qui
sont aînées elles aussi mais, je suis d'accord, avec certainement plus de
moyens que certains locataires, là... ça, ça ne fait aucun doute. Donc,
on convient qu'il puisse y avoir des exceptions.
Je
comprends très bien qu'au troisième alinéa l'exception va plus loin, parce
qu'elle permet à un bénéficiaire de moins
de 70 ans, donc, de venir prendre un logement qui est effectivement occupé par
une personne âgée de plus de 70 ans. Non,
ça n'est pas une situation facile, mais, oui, ça peut se poser dans certains
cas, et ce propriétaire aîné peut être une personne vulnérable en besoin d'avoir près de lui son fils ou sa fille,
qui va l'aider. Dans tout un contexte, là, de... comment je dirais, de
maintien à domicile, je pense que c'est quelque chose qui est concevable.
Est-ce
qu'il faudrait trouver tellement d'autres moyens pour protéger les droits des
uns et des autres? J'en suis : développer bien davantage les
services de maintien à domicile, développer bien davantage les logements
sociaux, les logements intergénérationnels.
Il y aurait tellement de choses à faire, j'en suis très consciente, pour que
les personnes, jeunes et moins
jeunes, hein, d'ailleurs, puissent toutes, au Québec, avoir accès à un logement
décent, là. Ça, on pourrait en parler
longtemps. Et tout à l'heure, au début de notre commission, la collègue faisait
référence à tout le problème de l'indivision, de la spéculation. Je suis
tellement d'accord, et c'est clair qu'il va falloir s'attaquer à ces
questions-là.
Mais là je rappelle que ce dont il est question,
c'est globalement d'assurer une protection supérieure à celle que les
locataires aînés et pauvres ont actuellement. Ça, c'est l'ensemble, mais, oui,
il y a des exceptions avec lesquelles on peut être ou ne pas être d'accord, ça, j'en conviens tout à fait, mais
qui, sincèrement, là, sincèrement n'ont rien à voir avec les convictions profondes des personnes, qu'il s'agisse de
moi, qu'il s'agisse de quelqu'un d'autre, mais je pense qu'on n'est vraiment pas là-dedans, là.
• (17 h 50) •
Le Président (M.
Auger) : Merci. D'autres interventions sur le sous-amendement? S'il
n'y a pas d'autre intervention, je vais le mettre aux voix. Est-ce que le sous-amendement
à l'amendement est adopté?
Des voix :
Rejeté.
Une voix :
Sur division.
Le
Président (M. Auger) :
Rejeté. Nous revenons à l'amendement remplaçant l'article 1. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement? Pas d'autre intervention. Je vais le mettre aux voix. Est-ce que
l'amendement remplaçant l'article 1 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Une voix : Sur division.
Le
Président (M. Auger) : Adopté sur division. Est-ce que
l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?
Des voix :
Adopté.
Une voix :
Sur division.
Le
Président (M. Auger) : Adopté sur division. À l'article... Non. Vous
avez un autre amendement qui introduit un nouvel article. M. le
ministre.
M. Coiteux :
Oui, qui introduit l'article 1.1. L'article 1961 de ce code est modifié :
1° par l'insertion,
après le deuxième alinéa, du suivant :
«Ces avis doivent
reproduire le contenu de l'article 1959.1.»;
2° par le
remplacement du troisième alinéa par le suivant :
«La
reprise ou l'éviction peut prendre effet à une date postérieure à celle qui est
indiquée sur l'avis, à la demande du locataire et sur autorisation du
tribunal.»
Le Président (M.
Auger) : Explications?
M. Coiteux : Alors, l'amendement propose d'amender un article
du Code civil, lequel rendrait maintenant obligatoire, dans l'avis de reprise ou d'éviction, la
divulgation des principes consignés à l'article principal du projet de loi tel
qu'énoncé ci-avant.
Le
Président (M. Auger) : Des interventions sur cet amendement, qui
introduit l'article 1.1? Pas d'interventions? S'il n'y a pas d'intervention, je vais le mettre
aux voix. Est-ce que l'amendement introduisant l'article 1.1 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M.
Auger) : Adopté. Donc, l'article 1.1 est adopté. Article 2.
Mme la députée de Gouin.
Mme David
(Gouin) : Où est-ce qu'on est rendus?
Le Président (M.
Auger) : Article 2. Mme la députée.
Mme
David (Gouin) : Oui. Excusez-moi. Excusez-moi. L'article 2 du
projet de loi. Bien, l'article 2 : La présente loi entre en vigueur
le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).
Le
Président (M. Auger) : Est-ce qu'il y a des interventions concernant l'article 2?
S'il n'y a pas d'intervention, je vais le mettre aux voix. Est-ce que
l'article 2 est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le Président (M.
Auger) : Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Auger) : Adopté. Je propose que la commission recommande
la numérotation du projet de loi amendé. Cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Le
Président (M. Auger) : Adopté. Je propose que la commission adopte une
motion d'ajustement des références. Cette motion est-elle adoptée?
Des voix :
Adopté.
Remarques finales
Le
Président (M. Auger) : Adopté. Nous sommes maintenant rendus à l'étape
des remarques finales. Je cède maintenant
la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de
Nicolet-Bécancour pour une durée maximale de 20 minutes.
M. Donald Martel
M.
Martel :
Non, mais, je pense, ça va être moins long que ça. Bien, écoutez, je pense
qu'on peut être contents du travail
accompli, dans le sens qu'on a tous assisté au débat des chefs, où on a vu
chacun nos chefs prendre cet engagement-là, je pense qu'aujourd'hui on
livre la marchandise.
Ce que j'avais à dire par rapport à la
procédure, je l'ai dit, je ne reviens pas là-dessus. Pour moi, c'était clair
que cet engagement-là devait être
tenu et c'est ce qui se réalise aujourd'hui. Et je pense que ce n'était pas
facile de trouver l'équilibre,
d'autres auraient peut-être arrivé à d'autres résultats, mais je pense qu'à un
moment donné il faut avancer, la vie
ne s'arrête pas demain. S'il y a des imperfections, d'autres pourront toujours
les modifier. Donc, moi, je suis très content
qu'on ait abouti à ce travail-là puis je vous souhaite une bonne soirée, tout
le monde, puis, bientôt, des bonnes vacances, mais on va se garder ça
encore un petit peu.
Le
Président (M. Auger) : Pas tout de suite, pas tout de suite. Merci,
M. le député de Nicolet-Bécancour. Je cède maintenant la parole à Mme la porte-parole de l'opposition officielle et
députée d'Hochelaga-Maisonneuve également pour une durée maximale de 20
minutes.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier :
On ne fera pas 20 minutes, M. le Président, sinon on va dépasser l'heure.
Je
vais répéter ce que j'ai dit en entrée de jeu, je pense qu'on vient de faire de
la législation créative et positive qui est un bel exemple à retenir. Je
pense qu'on devrait faire ça plus souvent.
Cependant,
j'ai déposé l'amendement pour soustraire le troisième alinéa, non pas pour
faire du temps comme on a l'habitude de voir, mais j'ai la conviction profonde, M. le Président, que l'équilibre des droits n'est pas protégé. Je vais quand même
voter pour ce projet de loi là parce
que le but des paragraphes 1° et 2° protège le droit des locataires aînés, et c'est pour ça qu'on est ici. L'introduction de
droits aux propriétaires occupants ne m'a pas été justifiée, et, pour moi, il
s'agit là, ce qu'on appelle, d'un deal, et moi, les deals, je hais bien ça et
je veux le dire. Et je ne pense pas que d'enlever les droits à un aîné de 70 ans qui n'a pas de
revenu suffisant pour se payer un
loyer pour le donner à une personne de moins de 70 ans parce qu'il est
le fils d'un aîné... je ne pense pas que c'est un bel équilibre. Je nous le
dis, je vais le répéter.
Cependant,
vous me permettrez de féliciter tant le ministre que la députée de Gouin, mais
surtout les convictions de la députée de Gouin sur le fait d'aller
jusqu'au bout de cette volonté de protéger les droits des aînés.
Je nous espère que
notre Assemblée nationale va retenir cet événement aujourd'hui pour qu'on soit
dans une démarche de législation créative et
positive un peu plus souvent. Et je rappellerai le projet de loi n° 595 au
ministre. Merci.
Le
Président (M. Auger) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la
parole au ministre pour les remarques finales.
M. Martin Coiteux
M.
Coiteux : Je ne veux pas prendre beaucoup de temps, je veux laisser de
l'espace à la députée de Gouin. Je pense
qu'on a trouvé un équilibre qui est acceptable, je pense qu'on a rempli des
engagements importants de nos formations politiques exprimés par nos leaders respectifs, puis vous me permettrez
de remercier et de saluer la députée de Gouin, avec qui j'ai trouvé franchement fort agréable de travailler et de
chercher cet équilibre, et on a donné là l'exemple de ce qu'on est capables de
faire lorsqu'on travaille ensemble.
On a des formations
politiques différentes, mais on est capables de travailler ensemble, puis je
pense que les Québécois qui voient ce type de résultat ont des raisons de se
réjouir ce soir. Merci.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. Et, avant de poursuivre,
et j'anticipe que nous allons probablement dépasser un peu le temps...
Donc, si c'est le cas, je vais demander le consentement pour aller au-delà du
temps. Consentement? Consentement. Donc, Mme
la députée de Gouin et auteure du projet de loi, je vous cède maintenant la
parole pour les remarques finales.
Mme Françoise David
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je ne serai pas très longue
non plus. Je voudrais vraiment remercier l'ensemble des collègues pour leur contribution à la discussion. Non,
personne n'a fait de temps ici. Je pense que tout le monde y est allé de remarques pertinentes et de
questions légitimes et pertinentes. Moi, je l'accepte tout à fait. En fait, je
pense qu'on a tout de même adopté ce projet
de loi ici, là, je veux dire, en un temps record. Alors, c'est ça, la
démocratie, et moi, je pense que, dans l'ensemble, ça s'est bien passé.
Oui,
nous avons bien travaillé, le ministre et mon équipe, c'est vrai. Nous avons
vraiment cherché très fort, très fort,
des deux côtés, cette espèce d'endroit où il nous serait possible d'atterrir.
J'étais parfaitement consciente que le projet de loi version initiale posait des problèmes au gouvernement. Je l'ai
déposé quand même parce que je croyais qu'il y avait là une avenue. Le gouvernement m'est revenu avec
autre chose, mais on en a discuté quand même, toujours appuyés par des groupes
à la base. Ça, c'était très important pour moi à chaque fois, de consulter, de
m'assurer de la validité de ce que j'acceptais
ou de ce que je pressentais. Donc, ce qui est au jeu ici cet après-midi, ça
n'est pas seulement mon oeuvre, je l'ai dit bien des fois, là, c'est l'oeuvre de plein de gens, la FADOQ, qui
vient de nous dire : Oui, on est contents. On n'a pas tout réglé, c'est tellement clair qu'on n'a pas tout
réglé, mais on a fait un pas. Je pense que c'est ça que je retiens de toute
cette expérience, c'est qu'il est possible de faire des pas même dans des
situations difficiles.
• (18 heures) •
Je
rappellerai qu'il y a bien des journées où la formation politique que je
représente joue aussi son rôle d'opposition face au gouvernement actuel, mais je me réjouis lorsque nous pouvons
arriver à atterrir à des pistes d'atterrissage,
en fait, qui tout de même font avancer la société. Et, dans ce cas-ci,
honnêtement, là, le plus honnêtement possible, et malgré certainement des imperfections, je crois que nous venons d'avancer, sous
réserve de l'adoption, bien
sûr, par l'Assemblée nationale, nous venons
d'avancer dans ce que j'appellerais la protection des locataires aînés. Et je
pense que le projet de loi
continue d'avoir raison de s'appeler comme ça, parce que pour l'essentiel,
pour l'immense majeure partie de tout ce qu'il est — en
fait, il est court — il
est question ici de la protection des locataires aînés. Et je
continue de penser que c'est ce que je voulais faire, et c'est ce qu'on
a réussi à faire par toutes sortes de discussions depuis deux ans.
Donc, merci à
l'ensemble des collègues. Je ne vous
retiendrai pas plus longtemps, je sais qu'il y a une sorte de fatigue qui s'accumule au terme de toutes ces
longues journées et, évidemment, je vais attendre avec impatience le moment
de l'adoption ici même, au salon bleu, et
j'espère que ce moment viendra la semaine prochaine. Merci beaucoup.
Le Président (M. Auger) : Merci, Mme
la députée de Gouin. Merci à vous tous pour votre collaboration.
Et la commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux au mercredi 8 juin 2016, après les affaires
courantes, où elle entreprendra un autre mandat. Merci beaucoup, et bonne fin
de journée.
(Fin de la séance à 18 h 1)