(Onze
heures quarante-huit minutes)
Le Président (M.
Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de
l'aménagement du territoire ouverte.
Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 492, Loi modifiant le Code civil afin de
protéger les droits des locataires aînés.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Bergeron (Verchères) est remplacé par
Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve) et M. Laframboise (Blainville)
est remplacé par M. Jolin-Barrette (Borduas).
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous débuterons, cet
avant-midi, par des remarques préliminaires, puis nous entendrons les organismes suivants : la Corporation des
propriétaires immobiliers du Québec et l'Association des propriétaires
du Québec.
Remarques préliminaires
Donc,
nous allons commencer avec les remarques préliminaires. Je cède maintenant la
parole à Mme la députée de Gouin.
Mme Françoise David
Mme
David (Gouin) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous les collègues.
C'est un beau moment, je dois dire, pour moi, en tout cas.
J'aimerais
rappeler que le projet de loi n° 492 a une histoire — comme tout le monde la connaît, je vais
faire ça court : débat des chefs
en 2014, appui des chefs de parti au principe de la protection des locataires
aînés. L'objectif du projet de loi,
c'est donc la protection devant des évictions pour reprise de logement ou pour
agrandissement, subdivision. Ce
projet de loi touche très probablement un nombre restreint de locataires aînés,
mais les plus vulnérables, et ça, c'est quelque chose que je vais
vouloir rappeler souvent.
• (11 h 50) •
Par
une sorte de hasard, lundi dernier, on avait la Direction de la santé publique
de Montréal qui déposait un rapport qui
s'appelle Pour des logements salubres et abordables, et ce rapport, en
quelque sorte, confirme plusieurs des appréhensions
que vous avions, à Québec solidaire, bon, les locataires sont majoritaires sur
l'île de Montréal, et, entre 2001 et
2014, la hausse du prix des loyers est de 38 %. Donc, on comprend pourquoi
la situation est difficile pour un certain nombre de locataires, et je pense, entre autres, aux locataires aînés.
La proportion de la population, toujours à Montréal, vivant sous le
seuil de faibles revenus s'élevait à 50 % chez les personnes âgées de 65
ans et plus et à 60 % chez les personnes
de 75 ans et plus. Et je voudrais dire aussi que, les ménages dont le principal
soutien est âgé de 75 ans ou plus, il y en a 38 % qui dépensent
plus de 30 % de leurs revenus en loyer.
Donc,
il y a des raisons économiques, entre autres, qui viennent soutenir le projet
de loi n° 492, mais il y en a une autre,
raison, et celle-là est très chère à mon coeur depuis le début, c'est que le
déménagement d'aînés est toujours vécu par
ces personnes-là comme un drame, comme une grande difficulté, c'est un
traumatisme — je pense
qu'il n'y a pas grand monde qui va le
contester — et plus
le déménagement s'effectue loin du logement, qui est très souvent occupé par
une personne aînée depuis de
nombreuses années, plus la situation est difficile; on parle de perte de
repères, on parle de perte de réseau,
etc.
Alors,
est-ce que le projet de loi n° 492 veut chercher à limiter les évictions
de locataires aînés? Et on parle ici uniquement
de locataires aînés dont le revenu est sous le seuil de faibles revenus, ça, ça
va être important de s'en rappeler, donc
une proportion qui n'est pas le 100 % des locataires aînés, ou de
locataires ayant un handicap. Alors, oui, le projet de loi n° 492, très honnêtement, veut limiter
les évictions, mais il ne les empêche pas, il les balise, et nous aurons
l'occasion d'y revenir.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup, Mme la députée de Gouin. Je cède maintenant la parole à M. le ministre pour une durée maximale de six minutes.
M. Pierre Moreau
M. Moreau : Merci
beaucoup, M. le Président. Très heureux de vous retrouver. Je salue également
les membres de la commission,
en fait, le personnel de la commission. Je veux saluer de façon particulière la députée
de Gouin, le
député de Nicolet-Bécancour, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve,
qui sont les porte-parole des oppositions. Je veux aussi souligner la présence de mon adjoint parlementaire en matière d'habitation, le député
de Vimont; mon adjoint parlementaire en matière d'affaires municipales, le
député de Chapleau.
Je veux remercier le député de Saint-François, qui nous accompagne,
et vous-même, comme député
de Champlain, M. le Président, qui aurez à présider nos travaux. Et je suis
accompagné de Me Anne Morin, qui est la
nouvelle présidente de la Régie du logement. Je lui souhaite la bienvenue.
C'est son baptême de feu en matière de commission parlementaire, à titre
de présidente.
Lors de la campagne électorale, à l'occasion du débat des chefs, la députée
de Gouin l'a rappelé, elle a interpellé les autres participants pour qu'ils s'engagent à
protéger les droits des locataires aînés, une question qui lui tient, je le
sais, particulièrement à coeur. Le député de Roberval,
ou le candidat pour être député de Roberval, et alors chef du Parti libéral du Québec, a immédiatement relevé le gant et a promis de donner suite à
cette demande. Il est aujourd'hui premier
ministre du Québec.
Donc, à la suite de son élection au printemps 2014, notre gouvernement a exprimé son intention de favoriser l'instauration d'un climat
plus serein et respectueux à l'Assemblée nationale et d'amorcer une ère
d'ouverture et de collaboration avec tous les parlementaires, quel que soit le
parti auquel ils appartiennent.
Nous savons que le cheminement étape par étape
de tout projet de loi, M. le Président, est une prérogative du gouvernement. C'est donc en exerçant cette prérogative que le gouvernement a permis que l'Assemblée
nationale procède, le 4 juin dernier, à l'adoption
de principe du projet de loi
n° 492 et que ce projet de loi puisse cheminer jusqu'aux consultations
particulières que nous entamons aujourd'hui.
Je souligne
qu'il s'agit d'un moment exceptionnel et rarissime dans l'histoire du
parlementarisme québécois qu'un projet
de loi public de député chemine jusqu'à ce stade. En effet, dans les 10
dernières années, seuls trois projets de loi se sont rendus à l'étape de l'adoption de principe, et un seul a été
adopté. Je remercie les députés des oppositions, et plus particulièrement la députée de Gouin et mon
adjoint parlementaire responsable des dossiers d'habitation, le député de
Vimont, dont l'étroite collaboration a permis d'en arriver où nous sommes
aujourd'hui, c'est-à-dire les consultations particulières sur le projet de loi
déposé.
Nous entamons
une nouvelle étape du processus législatif par lequel seront consultés divers
intervenants concernés soit par la
condition des aînés au Québec soit par l'État du droit en matière de logement
locatif ou par les deux à la fois.
Toute société
qui se respecte cherche à assurer une protection effective des personnes les plus vulnérables, ce
qui peut notamment
inclure, à certains égards, les aînés. D'un autre côté, toute la section du Code civil
du Québec qui concerne le louage résidentiel repose
sur un principe auquel il convient de ne pas déroger, soit l'équilibre entre
les droits et les obligations des parties à un bail de logement : le propriétaire
et le locataire.
Il s'agit
donc, aujourd'hui, et dans les prochains jours, toujours dans un esprit
d'ouverture et d'écoute, de recueillir les
points de vue des divers participants à ces auditions particulières afin
d'éclairer nos réflexions et ultimement de nous permettre de déterminer le point de rencontre entre les objectifs
subjacents au projet de loi et les règles de droit justes et
proportionnées en matière de louage résidentiel.
Je crois que
tous ici s'entendent sur la noblesse des intentions derrière le projet de loi
de la députée de Gouin, mais ce qui est primordial, M. le Président,
pour nous, à cette étape du processus législatif, c'est de chercher à dégager
les implications réelles qui seraient celles
de la promulgation du projet de loi qui nous occupe s'il devait être adopté. Il
nous faut donc retourner chaque pierre
afin de nous assurer que le projet de loi fasse effectivement de notre société
un endroit où les droits des uns et
des autres, et en particulier ceux des aînés, sont protégés et éviter que, par
un effet pervers que nous aurions pu
sous-estimer, la capacité des personnes les plus vulnérables à avoir accès à un
logement de qualité soit affectée. Le
souci que nous exprimons à l'étude de ce projet de loi n'est qu'une facette
d'un dossier beaucoup plus large dont il ne faut pas négliger les autres
aspects.
J'en profite
pour vous rappeler que, le 10 octobre dernier, j'ai annoncé que la Régie
du logement a mis en place une mesure
destinée à traiter en urgence les causes visant les personnes âgées. Le temps
de traitement de ces causes est maintenant
considérablement réduit. Cette procédure accélérée a été instaurée afin de
tenir compte de la précarité des aînés. En ce domaine, la compassion est
l'affaire de tous.
J'ai
confiance que chacun des membres de cette commission saura faire preuve de
l'ouverture nécessaire envers tous
les points de vue qui seront exprimés devant nous et je remercie, d'ailleurs, à
l'avance, les personnes et les groupes qui,
par leurs commentaires, leur présence et leurs mémoires, apporteront une
précieuse contribution à l'étude du projet de loi de la députée de
Gouin, que je félicite encore une fois. M. le Président, je vous remercie.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la
porte-parole de l'opposition officielle et députée d'Hochelaga-Maisonneuve
à faire ses remarques préliminaires pour un maximum de
3 minutes 30 s.
Mme Carole Poirier
Mme Poirier : Merci, M. le
Président. Alors, à mon tour de saluer le ministre, l'ensemble de nos
collègues, Mme Morin, la nouvelle présidente
de la Régie du logement, ainsi que votre équipe et mes collègues tout
particulièrement, mais je voudrais
saluer l'initiative de la députée de Gouin, qui a su, lors du débat des chefs,
faire d'une situation inadmissible un débat de société.
La reprise du
logement est problématique. Elle l'est pour les aînés, mais elle l'est pour
tous ceux qui ont à vivre une reprise
de logement. Se faire dire juste avant Noël par son propriétaire que l'on va
reprendre son logement devient un
mauvais Noël pour la majorité des personnes qui ont à vivre cette situation.
Les aînés, plus particulièrement, tel que le souligne le projet de loi de ma collègue, viennent mettre en lumière
une situation toute particulière d'une clientèle encore plus vulnérable.
Le
rapport déposé lundi par le directeur de la santé publique démontre que
l'abordabilité des logements n'est pas au
rendez-vous. Il y a un problème, particulièrement à Montréal, sur le coût du
logement. Déménager presque en catastrophe, malgré un avis de six mois, c'est une catastrophe pour un aîné, mais
surtout par un aîné qui occupe un logement pendant 20 ans, parce que sont coût de logement n'est
probablement pas représentatif du marché et il devra se relocaliser dans
un marché pour lequel il n'a pas les moyens.
Et ça, c'est la démonstration que le directeur de santé publique a faite en
début de semaine.
Alors, le
projet de loi de ma collègue s'inscrit dans cette démarche. Deux
problématiques : l'abordabilité des loyers, mais aussi la disponibilité des loyers. L'accès à un logement dans un
même quartier au même coût est une mission impossible, et je veux saluer le fait que le directeur de la santé
publique, en début de semaine, nous a sonné l'alarme pour nous dire que finalement se trouver un logement
avec les moyens que l'on a est presque une mission impossible. Il y a un débat plus grand à avoir, qui est
l'abordabilité des logements. Il y a un débat à avoir sur le contexte de la
reprise du logement. Il y a un débat à avoir
sur le fait que la reprise de logement, quand elle est faite, elle est faite,
en principe, sur les règles qui sont
prescrites pour un membre de la famille. Il n'y a aucun suivi, il n'y a aucune
suite de donnée à part que le fardeau
de la preuve, qui est imputé au locataire. Alors, un fardeau de la preuve
imputé à un locataire qui a 80 ans, dans notre société, c'est
inadmissible. Merci, M. le Président.
• (12 heures) •
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup, Mme la députée. J'invite
maintenant le député de Nicolet-Bécancour, porte-parole du deuxième
groupe d'opposition, à faire ses remarques préliminaires pour un maximum de
2 min 30 s. M. le député.
M. Donald Martel
M.
Martel :
Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer la marraine de ce projet, la
députée de Gouin, de même que le
ministre des Affaires municipales et responsable de l'habitation, ses collègues
de la partie gouvernementale. Je
salue également la députée de l'opposition officielle et je tiens tout particulièrement
à saluer et à remercier nos invités pour leur apport à nos travaux et à
nos réflexions.
Nous avons
voté, à l'unanimité, en faveur du principe du projet de loi n° 492 en juin
dernier parce que nous avons convenu collectivement de l'importance de
protéger les locataires aînés, des gens parfois vulnérables et en besoin de
ressources et d'aide.
Cela dit,
nous croyons que cette protection ne doit pas se faire au détriment des
propriétaires et sans leur imposer de
trop lourdes obligations qui ne leur incombent pas forcément. Notre défi est de
mieux protéger les aînés pour assurer leur
dignité et leur bien-être dans les cas de reprise de logement, pour réduire les
risques d'abus, mais on doit aussi trouver un équilibre pour assurer le respect des droits des propriétaires et
ceux des locataires de logement. Plusieurs irritants qui se trouvaient
dans la première mouture de ce projet de loi l'an dernier, selon nous...
toujours présents dans la nouvelle version,
c'est pourquoi nous devons travailler en collaboration pour trouver une
solution qui nous ralliera tous dans l'intérêt des locataires aînés. La
consultation des groupes concernés par la proposition de la députée de Gouin
est donc fort importante afin de bien cibler
le problème pour bien identifier les outils qui existent déjà à l'heure
actuelle et surtout pour trouver la
meilleure solution à mettre en oeuvre pour pallier aux potentielles lacunes du
processus de reprise du logement. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Auger) : Merci, M. le député. Avant de débuter les
auditions, et parce que la séance a commencé à 11 h 45, et on s'en excuse, j'aurais besoin d'un
consentement afin de répartir le temps des échanges des différents groupes
parlementaires, ce qui donnerait, donc, pour
la députée de Gouin quatre minutes; le gouvernement, 9 min 30 s;
l'opposition officielle, 5 min 30 s; et la deuxième
opposition, quatre minutes.
Est-ce qu'il y a consentement pour cette
répartition de temps?
M. Moreau : ...je comprends
que ce consentement-là nous amènerait jusqu'à 13 h 15.
Le Président (M. Auger) :
Exactement.
M. Moreau : Oui, oui.
Consentement.
Auditions
Le Président (M. Auger) :
Consentement. Merci beaucoup. Donc, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à
vous présenter dans un premier temps et à commencer votre exposé.
Corporation des propriétaires immobiliers
du Québec inc. (CORPIQ)
Mme Forest
(Mylène) : Bonjour, mon nom est Mylène Forest, je suis la présidente
du conseil d'administration de la
CORPIQ depuis 2011 et, avant de débuter, j'aimerais, en mon nom, au nom de la
CORPIQ et les 25 000 propriétaires et
gestionnaires qu'elle représente, vous remercier, M. le Président, Mme la
députée de Gouin, M. le ministre, M. le député
de Vimont, Mme la présidente de la régie et Mmes et MM. les députés, de
nous recevoir et de nous permettre de vous présenter notre position face
au projet de loi n° 492.
Aujourd'hui,
je suis accompagnée de Hans Brouillette, qui est le directeur des affaires
publiques de la CORPIQ, à qui je
laisserai la parole et laisserai le soin de vous présenter notre position, et
notre invitée, Mme Claudette Biron, une propriétaire immobilière et
membre chez nous. Merci.
Le Président (M. Auger) : M.
Brouillette.
M.
Brouillette (Hans) : Merci. D'abord, on aimerait vous dire que nous
ressentons sincèrement, là, à la lecture du projet de loi n° 492,
une bonne intention, une intention sincère, on perçoit réellement le désir de
vouloir aider les personnes âgées et on sait
que cette démarche-là est faite de bon coeur. Pour nous, c'est une évidence. On
doit vous dire que les propriétaires
de logement québécois partagent cette conviction-là, partagent cet esprit-là de
devoir être serviables, être
sensibles à l'égard des personnes âgées. C'est important de contribuer au
mieux-être de cette clientèle-là et c'est une clientèle extrêmement
importante pour les propriétaires, une clientèle qui est appréciée, importante
en nombre, mais appréciée aussi sur le plan
humain. Donc, il y a plusieurs raisons qui font que les propriétaires
souhaitent et aiment louer à des
personnes âgées. On salue évidemment les auteurs du projet de loi, et qui l'ont
conduit quand même jusqu'ici, donc en commission parlementaire. Ce n'est
pas rien.
On a analysé avec soin le projet de loi dans
chacun de ses mots, on a étudié toutes les facettes sur... du côté propriétaires, du côté locataires du mieux qu'on a
pu. Malheureusement, on ne voit pas de possibilité concrète d'application
de ce projet de loi là, et pourtant on a
vraiment poussé notre analyse le plus loin possible, toujours dans la meilleure
intention. Non seulement les
possibilités d'application sont pour les propriétaires d'immeuble inexistantes,
mais le projet de loi, tel qu'on le
perçoit, aurait des impacts négatifs très importants sur une clientèle qui pour
le moment est très appréciée des propriétaires — et on
ne veut pas que ça change — on
parle ici des personnes âgées.
Le projet de
loi. Bon. On sait que la loi, la Charte des droits et libertés, le Code civil
prévoient qu'on peut, en tant que
propriétaires, jouir de notre bien, et le projet de loi vient s'attaquer à ce
droit de propriété là. Le droit de propriété n'est pas absolu, il y a dans la loi certaines exceptions, mais, quand
on arrive avec trop d'exceptions, on s'attaque au principe même du droit de propriété, et c'est ce qu'on
perçoit, nous, actuellement. Il faut bien comprendre, ici on parle de propriétaires qui ne sont pas des entreprises, on
parle de M. et Mme Tout-le-monde qui veulent loger leur famille, se loger
eux-mêmes, loger leurs enfants, loger leurs
parents, eux-mêmes âgés. C'est ça, la reprise de logement. C'est ça qu'on doit
défendre, donc, ce droit de propriété pour
loger nos familles, pas pour faire de l'argent, revendre le logement en condo,
relouer plus cher à d'autres
locataires — ce n'est
pas ça, l'objectif, ça, c'est interdit — mais pour concrètement relouer... en
fait, pas relouer, mais fournir un logement à sa famille.
Bien sûr, on
nous dit : Non, non, non, on ne veut pas abolir le droit de propriété, on
ne veut pas vous empêcher de
reprendre les logements, d'ailleurs on prévoit... ça, ce sont les auteurs du
projet de loi qui nous disent : On prévoit une option qui ferait en sorte que le propriétaire
puisse reprendre... à la condition de trouver au locataire un logement
équivalent. Bon. Écoutez, cette
option-là est, pour nous, irréaliste et elle s'apparente ni plus ni moins à une
interdiction de reprendre le logement
lorsque le locataire est âgé et à faibles revenus. Bien évidemment, là, il faut
comprendre qu'un propriétaire ne peut
pas se mettre à téléphoner à d'autres propriétaires et leur demander :
Est-ce que vous pourriez nous faire visiter? J'ai un locataire âgé dont
je vais reprendre le logement. J'aimerais ça lui trouver un endroit.
Concrètement, ce n'est pas quelque chose qui
est réaliste. On a également toute la notion de logement équivalent. Vous aurez
compris que, la configuration d'un
logement, le loyer d'un logement, c'est à peu près impossible de trouver
quelque chose qui est équivalent, et
surtout, si le locataire considère... en fait, le locataire n'a pas envie de
déménager, vous comprendrez que ça va être même difficile de l'amener visiter ce logement-là. Il est à peu près
certain que le logement ne sera pas considéré comme étant équivalent. Donc, la conséquence de ça,
c'est d'en arriver avec une situation où des locataires pourraient devenir
indésirables, et ça, ce n'est certainement
pas ce qu'on veut. Alors, il existe déjà des protections pour les locataires si
le propriétaire veut reprendre le logement. On pourra en reparler, si
vous le désirez.
On doit aussi
rappeler que le rôle des propriétaires de logement, hein... pour la plupart,
là, on parle de propriétaires de
duplex et de triplex, leur rôle n'est pas d'apporter une aide financière au
logement. Individuellement, personnellement, on ne peut pas demander à des citoyens de faire plus que leur part, sous
le principe qu'ils sont dans le logement, pour fournir des logements à
des gens qui sont à faibles revenus et âgés.
Donc,
évidemment, il faut rappeler aussi que le Québec est très différent du parc de
logements au Canada, il est principalement
composé de petits propriétaires, et ce sont ces petits propriétaires qui
seraient affectés. D'ailleurs, pour vous en glisser un mot, Mme Biron
pourrait vous parler aussi de sa réalité.
Le Président (M. Auger) : Mme Biron.
• (12 h 10) •
Mme Biron
(Claudette) : Bonjour. Alors, je suis propriétaire d'un triplex dans
le Vieux-Longueuil. J'ai acheté un
premier immeuble, j'avais 26 ans. À 29 ans, j'étais divorcée et monoparentale,
mère de deux enfants de sept et huit ans, alors je me suis dit : Bon, mon immeuble va peut-être devenir un
fonds de pension à plus ou moins long terme. J'étais travailleuse
autonome aussi, je l'ai été jusqu'en 2007.
Alors, par
ailleurs, j'ai une fille qui a fait l'acquisition d'un «plex» dans Rosemont—La Petite-Patrie il y a trois ans, et on avait projeté et on projette encore que
j'aille habiter là dans quelques années, au gré de mon rythme de vie. Alors,
moi, ça me rassurerait d'être capable
d'aller vivre chez ma fille, de me rapprocher d'elle — je suis très proche d'elle — de son conjoint
et de ses enfants. Maintenant, je ne sais pas, avec le projet de loi qui est
là, si je pourrai me le permettre. Mme
Poirier semble dire que c'est très difficile de se trouver un logement. Alors,
ça va peut-être être moi qui vais être obligée
de m'en chercher un, parce que je ne pense pas de gérer cet immeuble-là encore
15 ans. Et j'ai aussi un fils. Alors, peut-être
que je pourrais utiliser mon immeuble, habiter en haut, que mon fils habite en
bas, enfin, j'aimerais ça avoir un peu d'options suite à
l'investissement que j'ai fait. Voilà. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette, vous voulez continuer?
M. Brouillette
(Hans) : Merci. Alors, on pourrait poursuivre avec les questions, si
vous le désirez.
Le
Président (M. Auger) : Bien, merci beaucoup pour votre exposé. Nous
allons maintenant débuter la période d'échange avec Mme la députée de
Gouin, et vous avez... quatre minutes, excusez, à votre disposition.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Non, mais ça va, c'est parce que je
pensais que c'était l'ordre habituel. Je n'avais pas...
Une voix :
...
Mme David
(Gouin) : Bien, écoutez, je...
Une voix :
Vous êtes vraiment privilégiée.
Mme
David (Gouin) : Oui. Bien, je ne m'en priverai pas, puis, en plus,
vous me donnez une minute de plus, c'est vraiment extraordinaire.
Alors,
bonjour, messieurs mesdames, contente de vous revoir. Écoutez, on s'est dit,
quand on s'est vus — c'était
en juin, je crois — qu'on était capables de se parler mais qu'on
aurait sûrement quelques désaccords. Je pense que ça va continuer et on
peut le faire tout à fait de bonne foi.
Vous,
vous dites : C'est complètement irréaliste de penser qu'un propriétaire
peut aider une personne aînée locataire à se reloger. Je vous rappelle que, dans le projet de loi, il n'est pas
question de même quartier, il est question d'un rayon de cinq kilomètres quand même; sept kilomètres dans
l'ensemble des régions, cinq kilomètres à Montréal et dans les limites de la municipalité de Montréal. Vous soulevez
qu'il pourrait y avoir toutes sortes d'embûches — j'ai vraiment bien lu votre mémoire — semblant oublier que, si ce projet de loi
était adopté, et j'espère qu'il va l'être, il y aura des règlements, il
y aura un processus qui va être adopté et c'est évident que la Régie du
logement va devoir intervenir à un moment donné
si justement il y a mésentente entre propriétaire et le ou la locataire aînée.
C'est comme si vous oubliiez que ce n'est
pas seulement dans l'air, là, un projet de loi comme ça, ça doit atterrir avec
des mesures concrètes, bien sûr, facilitant la vie et des propriétaires
et des locataires.
Contrairement
à vous, moi, je crois réaliste de penser que, dans le cas où vraiment le
propriétaire veut absolument reprendre
son logement pour agrandissement, subdivision ou pour un membre de sa
famille... Vous pensez que ça n'est pas
réaliste, là, l'idée de s'associer à ce locataire, de vraiment, honnêtement,
non pas faire nécessairement des coups de téléphone... on peut juste aller sur Internet de nos jours et regarder
qu'est-ce qui peut être disponible dans un rayon de cinq kilomètres. Moi, je trouve ça un peu
étonnant. Je pense, au contraire, que c'est possible, c'est réaliste et, si ça
devient difficile, c'est la régie qui
tranchera comme pour tout autre litige entre propriétaire et locataire.
Qu'est-ce que vous pensez de cette idée?
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
M.
Brouillette (Hans) : Alors, qu'un propriétaire veuille absolument
reprendre le logement, c'est une chose, mais il va y avoir aussi des locataires qui veulent absolument demeurer dans
leur logement. Alors, effectivement, qu'est-ce qui va arriver? Il va arriver... parce que le
propriétaire va dire : Bien, j'ai trouvé un logement disponible.
Effectivement, on en a, des logements
disponibles, dans le marché. Supposons que le nouveau propriétaire, le futur
potentiel propriétaire accepte, le
locataire, lui, pourrait très bien dire : Bien non, moi, ça ne me convient
pas, je veux continuer de rester dans mon même logement. Donc, le
propriétaire, lui, qu'est-ce qu'il va devoir faire? Il va devoir faire une
démarche judiciaire devant la Régie du logement pour aller prouver que le
logement qu'il a trouvé est un logement qui est bel et bien équivalent. Alors
là, on demande aux tribunaux d'analyser... puis ce n'est pas des causes
simples, là, ça va être avec des preuves documentaires,
des témoignages pour valider si ce dit logement-là est réellement équivalent.
Alors, imaginons qu'au bout d'un
certain nombre de mois la régie rend sa décision; il est à peu près certain que
le logement, il ne sera plus disponible, O.K., le propriétaire l'aura reloué à quelqu'un d'autre. Donc, c'est ça
qu'on dit. Dans la pratique, ce n'est pas quelque chose qui est
réaliste. Pour nous, ça équivaut à une interdiction de reprendre le logement.
Bon,
c'est sûr qu'on comprend que la personne a besoin d'aide pour se reloger, et il
existe des programmes du gouvernement,
notamment avec la Société d'habitation du Québec, des programmes pour aider les
gens à faibles revenus, parce qu'on
parle de cette catégorie-là, à pouvoir se loger dans le marché privé. Mais ce
n'est pas au propriétaire de devoir faire
cette démarche-là. Et, n'oublions pas, encore une fois, le propriétaire reprend
le logement pour loger sa propre famille. Donc, on ne peut pas
dire : Bien, on va privilégier un citoyen...
Le Président
(M. Auger) : Juste un instant. Le temps est écoulé, à moins qu'on
permette de continuer la réponse.
Une
voix : ...
Le Président (M.
Auger) : Donc, M. Brouillette, vous pouvez continuer.
M.
Brouillette (Hans) : Dernière phrase, pour simplement dire qu'on ne
peut pas demander à un propriétaire, dire :
Bien, toi, trouve une autre option pour reloger ta famille, reloger tes enfants
ou tes parents et laisse le propriétaire dans ton propre logement.
Voilà.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous
avions, Mme la députée de Gouin. Nous allons continuer avec le ministre
pour à peu près 10 minutes.
M.
Moreau : Il va falloir que Mme la députée de Gouin fasse des
questions plus courtes. Mais alors, à mon tour...
Une voix :
...
M. Moreau :
Oui. À mon tour, je veux saluer Mme Forest, Me Brouillette et Mme Biron,
particulièrement Mme Biron. J'apprécie
beaucoup votre passage en commission parlementaire et je veux vous resouhaiter
la bienvenue à l'Assemblée nationale,
parce que nous sommes des législateurs, et tout part de bonnes intentions, et
souvent on a une conception théorique
des propriétaires comme des locataires, et de voir quelqu'un qui comme
propriétaire vient nous livrer un
message en disant : Bien, écoutez, moi, je suis propriétaire, mais j'ai
aussi un élément d'inquiétude et de fragilité dans mon destin, comme on en a tous, en disant :
Bien, un jour, je me retrouverai peut-être dans l'intention ou dans la
situation où ma fille devra faire une
reprise à mon bénéfice et je m'inquiète de voir si le projet de loi en question
sera un obstacle à ce que ce qui est
un souhait de bigénération puisse se réaliser ou pas... Alors, je veux vous
remercier pour votre témoignage, parce que, sincèrement, je veux vous le
dire, ça nous alimente beaucoup.
Mes
questions vont s'adresser à Me Brouillette, qui a fait la présentation, mais
sentez-vous libres d'intervenir. Je
comprends qu'il y a deux éléments dans votre présentation. D'abord, vous
craignez un impact négatif important sur les personnes âgées. J'aimerais
que vous développiez sur ça, en vous rappelant que nous avons un bloc maximum
de 10 minutes, et, deuxièmement, je vais
vous poser des questions sur la notion de logement équivalent, et
réservons-nous du temps pour ça,
parce que je vais vous amener aussi dans des solutions qui ont été mises de
l'avant en Europe dans des projets de loi semblables.
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
M.
Brouillette (Hans) : Merci. Alors, quand on parle de l'impact négatif
pour les personnes âgées... Bon, écoutez, il y a quand même près de la moitié des propriétaires actuellement qui ont
des personnes âgées dans leurs logements, donc c'est quand même très important. On a des statistiques à ce sujet-là.
Donc, c'est très important, la clientèle de personnes âgées.
C'est
sûr que la majorité des propriétaires ne reprennent pas des logements chaque
année, là, c'est quand même une
faible minorité. Mais pensez un instant à un propriétaire qui a acheté un
immeuble avec comme projet de loger sa famille,
ses enfants. Là, il se pose la question, il se dit : Bon, bien, j'ai un
logement à louer, et il y a des personnes âgées qui se présentent; pas nécessairement une personne de 65 ans, ça peut
être une personne de 60, ça peut être même une personne de 55 ans.
Alors, lui, il fait le calcul, il se dit : Si éventuellement cette
personne-là bénéficiant d'un droit au maintien,
disons-le, à vie dans les lieux et entre dans mon logement, comment je vais
faire éventuellement pour le reprendre pour
mes enfants, qui vont avoir besoin, bon... qui vont accéder au marché du
travail puis ils vont... pas nécessairement un grand revenu... ou mes
parents âgés? Donc, la crainte est de ne pas pouvoir réaliser leur projet de
vie ou familial, reprendre éventuellement le
logement. Donc, le propriétaire pourrait se dire aussi : Bien, moi, je
n'ai pas l'intention de reprendre ce
logement-là de toute façon, ça fait que je n'ai pas de problème d'avoir une
personne âgée, mais, forcément, j'aurai
un jour l'intention de revendre cet immeuble-là. Alors, le propriétaire se pose
la question : Le jour où je vais le revendre — on
ne parle pas d'un 16 logements ou d'un huit logements, là, on parle d'un
duplex, d'un triplex — le
jour où je vais le revendre, est-ce
qu'il est possible que les acheteurs potentiels qui vont se présenter vont se
poser la question : Est-ce qu'il
y a une personne âgée ici, parce que, nous, notre projet, c'est d'acheter un
duplex pour se loger, la famille? Oui,
effectivement, il y a une personne de 65 ans ou plus qui habite au deuxième.
Ah! O.K. Donc, ça va être un peu embêtant le jour où on voudra reprendre... Bien, on va dire : Écoutez, vous
avez la possibilité, mais il faudra lui trouver un autre logement.
Alors,
des propriétaires vont s'inquiéter de ce qu'il va advenir de la valeur de leur
immeuble, et ce n'est rien à voir avec
leurs relations excellentes qu'ils doivent entretenir avec le locataire âgé,
mais la perception que ça peut avoir un impact négatif sur le prix de
vente de leur immeuble...
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
• (12 h 20) •
M.
Moreau : Merci. Et j'apprécie votre réponse. On va appeler les
choses par leur nom, c'est de ça dont on parle, là. En fait, l'inquiétude, lorsque vous parlez
d'impact négatif, c'est dire : Refus de louer à des personnes qui seraient
au seuil d'obtenir le droit qui
serait garanti par le projet de loi, s'il était mis en vigueur, ou encore que
la situation ait un impact sur la valeur de la propriété.
Alors, je
vous pousse un cran plus loin et je vous amène à la situation que décrivait Mme
Biron. En droit français, Mme la
députée de Gouin nous a dit avoir fait la recherche et que des dispositions
semblables s'appliquaient. J'ai noté cependant
qu'il y avait une exception où, en droit français, on indique que le droit de
reprise sans qu'un logement correspondant à
ses besoins ou à ses possibilités lui soit offert dans les limites
géographiques prévues, selon les dispositions françaises... mais on dit : «Toutefois, les dispositions de
l'alinéa précédent ne sont pas applicables lorsque le bailleur est une
personne physique âgée de plus de soixante-cinq ans ou si ses ressources
annuelles sont inférieures au plafond [de] ressources mentionné au premier
alinéa.»
En
d'autres termes, de dire : Oui, ça s'applique dans la perspective désignée
par le projet de loi, mais, lorsque le propriétaire
devient lui-même dans une situation où, en raison de l'âge ou de sa situation
économique, cette obligation-là représenterait
un fardeau trop important, quel que soit celui que l'on fixe, à ce moment-là,
les dispositions ne s'appliquent pas. Je vous demanderais de commenter
votre confort à ce genre d'approche là.
M. Brouillette
(Hans) : ...
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
M. Brouillette
(Hans) : Pardon. Immédiatement, on comprend que, dans d'autres
situations, la reprise serait impossible,
O.K.? Donc, un propriétaire qui a, je ne sais pas, moi, 50, veut reprendre un
logement pour ses enfants; pas possible.
Un propriétaire qui veut reprendre pour ses parents, qui ne sont pas
nécessairement âgés mais qui approchent un âge avancé; ce ne sera pas possible non plus. La situation familiale
évolue. Alors, un couple qui n'a pas d'enfant s'achète un duplex ou un triplex, il y a un locataire en
haut, un locataire... ce qu'on appelle le semi-sous-sol, le «bachelor», et, un
jour, ils ont des enfants. Les enfants
grandissent, ils deviennent des ados, des jeunes adultes, et là il commence à y
avoir un manque d'espace, là. Est-ce
qu'on dit à ces gens-là : Bien, si vous voulez agrandir, malheureusement,
vous ne pouvez pas, parce que c'est
une personne âgée qui habite en bas? Donc, si vous voulez... votre famille
s'agrandit, vous avez besoin de
reloger dans plus grand, bien vendez votre immeuble, trouvez une autre
solution, mais, non, vous ne pouvez pas reprendre le semi-sous-sol pour installer vos jeunes, vous
ne pouvez pas agrandir votre logement parce qu'une personne âgée habite là.
Alors,
pour nous, je comprends très bien l'exception que vous mentionnez, mais ça
revient à ce qu'on disait tantôt : On a une loi, on a une charte qui disent qu'il y a un droit de
propriété, qu'on peut jouir de notre bien, mais, si on cherche à gruger
ce droit-là, on brise le principe même de base qui est de pouvoir jouir de
notre bien, donc reloger nos propres familles.
Alors, je comprends l'exception, mais ça reste quand même un recul du droit
fondamental qui est certainement le plus
important pour les propriétaires, le droit de jouir du bien dans lequel ils ont
investi, pour lequel ils ont pris des risques, pour lequel ils ont
travaillé et qui fait partie de leur projet de vie.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Merci. Il nous reste deux minutes, Me Brouillette. La
députée d'Hochelaga-Maisonneuve disait : Oui, il y a une procédure
qui existe, parce qu'on doit, lorsqu'on fait reprise ou éviction, manifester sa
bonne foi, c'est l'article 1968 du Code
civil. La présidente de la régie m'indique que, depuis un an à peu près, il y a
une soixantaine de causes qui sont inscrites à la régie. Donc, le
volume, comparé au volume global, n'est pas énorme.
La question que je vous pose, et le problème que
soulève la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est dire : Bien, faire le suivi après, il faut que le locataire y
aille. S'il introduit la procédure — là,
je veux juste faire une correction — ce
n'est pas exact de dire que c'est le
locataire qui a le fardeau de la preuve, c'est le propriétaire qui doit établir
qu'il était de bonne foi, mais le locataire doit quand même prendre des
mesures pour établir la procédure en question.
Est-ce
que, compte tenu du volume, qui est relativement faible, vous suggérez que la
recherche que l'on fasse soit plutôt vers une procédure à la régie ou
une procédure à la Société d'habitation plutôt que ce qui est déposé là? Et
avez-vous des commentaires là-dessus?
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette, pour une minute, maximum.
M.
Brouillette (Hans) : Ce que vous soulevez est un point très important.
Là, on ne parle plus des reprises pour loger
sa famille, là, là on parle de gens qui, pour des raisons autres, reprennent
des logements, donc, pénalisent des locataires mais pas pour les bonnes
raisons, donc pour s'enrichir ou pour faire autre chose.
Alors,
il existe déjà des sanctions très sévères, des jugements qui sont rendus, qui
pénalisent... beaucoup d'argent doit
être versé par les propriétaires pour dédommager des locataires qui auraient
été évincés pour des mauvais motifs. Et ça, pour nous, là, c'est tolérance zéro. On appuie toute mesure qui
viserait à sanctionner sévèrement des propriétaires qui contournent la
loi pour des reprises sous de faux motifs.
Alors,
si on peut explorer dans cette voie-là, vous aurez certainement tout l'appui de
la CORPIQ, et on ne défendra pas des propriétaires qui cherchent à
s'enrichir, on va défendre les propriétaires qui veulent loger leur famille.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous
avions pour cet échange. Nous allons poursuivre avec Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve pour une durée maximale de 6 min 15 s.
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Brouillette.
Mesdames, bonjour. Je veux juste faire un petit peu de pouce sur ce que le ministre vient d'aborder comme sujet. Il est
un peu faux, je vais le dire comme ça, de dire que le fardeau n'appartient pas au locataire, puisque,
pour introduire la cause et faire la démonstration qu'il y a une cause,
il faut faire la démonstration que le
logement n'est pas occupé par la bonne personne. Bien oui, parce que, quand tu
es rendu dans la procédure, il faut faire la démonstration parce qu'il
faut que tu amènes des preuves dans ton argumentation.
Alors,
moi, je vous pose la question d'une autre façon : Selon vous, comment
pourrions-nous introduire un mécanisme qui
ferait en sorte que, lorsqu'il y a reprise — et moi, je vous dis, je ne prétends pas tous les
cas de reprise, mais on est dans les
65 ans et plus, moi, je reste dans ce cadre-là, d'accord? — dans
le cas d'une reprise d'une personne de
65 ans et plus, il pourrait y avoir un suivi? Je ne sais pas comment il serait
fait, je vous laisse l'imagination. Comment on pourrait faire un suivi pour s'assurer que la personne qui prend le
logement est la bonne personne et que ça ne soit pas au locataire qui
était là de faire cette démonstration-là ou d'aller faire, introduire une cause
à la régie? Comment on pourrait faire ça?
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
M.
Brouillette (Hans) : Merci. Écoutez, c'est sûr qu'il peut y avoir
des... il y a des propriétaires qui reprennent sous de faux motifs, il pourrait y avoir un contrôle exercé ou une
déclaration peut-être au bout d'un an. Alors, oui, il y a un mécanisme qui ferait en sorte que la personne
est avisée que le logement, je veux dire, le lendemain, il n'a pas été utilisé
à d'autres fins que celles pour lesquelles
la reprise a été accordée par la Régie du logement ou négociée, parce que, il
ne faut pas l'oublier, hein,
propriétaires et locataires négocient souvent, s'entendent sur la reprise, sur
le moment, sur les modalités. La
plupart des cas se déroulent comme ça. Donc, oui, il pourrait y avoir un
mécanisme de validation. Il faut juste
faire attention à une chose : il peut arriver aussi que le motif était
honnête, sincère, de bonne foi mais qu'en cours de route un changement survient — une
perte d'emploi, une séparation — qui
fait en sorte que la personne finalement qui a bénéficié du logement n'est plus celle qui habite là. Mais,
attention, il y a quand même des règles aussi, le propriétaire doit
demander la permission à la Régie du logement pour relouer le logement.
Alors,
un mécanisme comme ça ferait... en sorte d'invalider la reprise si la personne
qui était bénéficiaire n'est plus
celle qui habite le logement, mais le propriétaire aurait à le justifier à ce
moment-là, aurait à le justifier, et le locataire serait à même de voir
s'il y a matière à poursuite ou non à explorer.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée.
Mme
Poirier : Donc, je comprends que vous êtes ouverts à une forme
de mécanisme de contrôle, appelons-le comme
ça, là, qui donnerait finalement... Moi, je parle pour les 65 ans et plus, ça
pourrait s'étendre à tout le monde, mais là on est sur les 65 ans, je me concentre là-dessus. Il pourrait y avoir
une forme de mécanisme de contrôle, un an après effectivement, pour
démontrer la bonne foi du propriétaire. On s'entend là-dessus. Excellent.
Dans
votre mémoire, page 12, vous donnez une phrase qui... et, vous le savez, vous
avez toujours l'art de m'étonner — on
n'en est pas à la première fois tous les deux. Vous dites : «En revanche,
le projet de loi n° 492 aurait pour
effet de rendre cette catégorie de locataire indésirables...» Ce n'est quand
même pas rien, là, comme mot, «indésirables». Je trouve ça fort un peu, là, je vous avoue, là. Je comprends le
dialogue que vous avez eu avec le ministre, mais est-ce que vous êtes en train de nous dire que les
propriétaires pourraient décider de ne plus louer à des locataires de 63 ans
parce que peut-être qu'ils auraient
besoin de leur logement et qu'ils ne pourraient plus, en fonction de cette loi,
reprendre le logement? Est-ce que, dans votre tête, quand vous écrivez ça,
c'est ce que vous voulez dire?
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
• (12 h 30) •
M.
Brouillette (Hans) : C'est clair pour nous qu'à partir du moment où un
locataire aîné vient figer, disons, les droits des propriétaires qui ne peuvent plus reprendre un logement, oui,
cette crainte-là est réelle, et pourtant on ne veut pas va rendre indésirable... La majorité des locataires aînés ne se font pas reprendre
leur logement, mais la crainte pour un
propriétaire de ne pas être capable de revendre facilement son immeuble ou de
ne pas être capable de lui-même réaliser son projet si la situation familiale change, cette crainte-là, oui, peut
rendre indésirable... et ça, ce n'est certainement pas ce qu'on veut, en tant que société, avoir... des
locataires avec qui il y a une bonne relation, les rendre indésirables. Alors,
oui, le mot est peut-être fort, mais cette crainte-là est bien réelle. Mme
Biron, si vous...
Le Président (M.
Auger) : Oui. Mme Biron, vous vouliez ajouter quelque chose sur...
Mme
Biron (Claudette) : Oui. Mme Poirier, moi, j'ai loué, le 1er août
dernier, à une dame de 75 ans. Quand j'ai lu ça cette semaine, je me suis dit : Oupelaïe! Est-ce que j'ai
pris une bonne décision? Alors, moi, j'ai oublié de le dire tantôt, je vais avoir 65 ans dans deux mois, au
mois de novembre, alors je passe du côté des aînés, et je me retrouve avec
un projet de loi où je me dis : Oh!
peut-être que j'ai couru après les troubles, là, et j'aurais dû peut-être
prendre un jeune couple, ou je ne
sais pas, là. Ce n'est pas rassurant, en tout cas. Moi, c'est l'impression que
j'ai eue, en tant que propriétaire. Je ne serais probablement pas la
seule à réagir comme ça.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée, 30 secondes encore.
Mme
Poirier : Je vais faire attention à ce que je vais dire, là. Je
trouve ça très inquiétant, ce que vous nous dites, très inquiétant. Ça s'appelle de la discrimination
en fonction de l'âge. C'est prévu par les chartes, c'est interdit. Et, pour
moi, c'est inquiétant, votre propos est
inquiétant. Quand vous me dites que, pour vous, madame... que le fait d'avoir
loué à quelqu'un de 75 ans, ça devient menaçant, ça m'inquiète
profondément, ça m'inquiète...
Une voix : ...
Mme
Poirier : Je le sais, mais ça m'inquiète profondément.
Le Président (M.
Auger) : Merci, Mme la députée. C'est tout le temps que nous avions.
Donc, nous allons poursuivre avec M. le député de Nicolet-Bécancour pour
4 min 15 s.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Moi,
je veux vous rassurer, vous avez exprimé tout à l'heure que vous aviez une sensibilité par rapport au sort des personnes
âgées, je vous crois à 100 % comme je crois la sensibilité de ma collègue de Gouin, puis je pense
que, sincèrement, cette sensibilité-là, cette préoccupation-là n'a pas
une couleur politique.
Moi,
je vais vous demander de commenter un peu ce que je vais vous dire, parce que
ça ne fait pas longtemps que j'ai
pris connaissance du dossier et je viens d'un milieu rural, j'ai été presque 20
ans directeur général d'une MRC en milieu
rural, et moi, je disais souvent aux maires que c'est beau de prévoir des
développements, mais il faut aussi prévoir des places où on peut mettre
du multilogement, parce que, si on veut garder les jeunes, c'est important. Ils
n'ont pas nécessairement les moyens de
s'acheter une maison en commençant, il faut qu'on ait des logements à leur
offrir, et, si on veut garder nos
personnes âgées aussi qui vendent leur maison, parce que l'attrait des grands
centres... par exemple, chez nous, il
y a Trois-Rivières, il y a Victoriaville, Sorel : c'est facile pour les
gens de quitter, ça fait que moi, je dis : Il faut qu'on ait une
offre de logement à faire.
Quand
je regarde... puis je suis vraiment préoccupé, là, tu sais, que quelqu'un
puisse perdre son logement puis se retrouver un peu démuni, mais, quand
je regarde au niveau de l'application, on dit qu'il faut trouver un
logement dans les sept kilomètres de
l'ancien logement; moi, je regarde la réalité rurale, là, ça se peut qu'il n'y
en ait pas, ça se peut que... Je regarde à Aston-Jonction, là, chez
nous, là, il y a peut-être un, deux, trois édifices à logements, et la municipalité voisine est à 12 kilomètres. Puis,
dans la municipalité voisine, ça se peut qu'il n'y en ait pas, de logement, non plus, parce que c'est
Saint-Wenceslas puis il n'y a pas beaucoup de multilogement là. Ça fait que je
ne suis pas au niveau de la
sensibilité, je peux donner l'assurance à n'importe qui de ça, mais je suis
vraiment au niveau de l'application.
Est-ce que vous y avez réfléchi? Est-ce qu'il y a des gens dans votre
association qui représentent un peu le milieu rural?
Le Président (M.
Auger) : M. Brouillette.
M.
Brouillette (Hans) : Alors, aux sens propre et figuré, on n'a pas été
aussi loin que d'aborder la question des kilomètres. Vous avez remarqué, dans le mémoire, on n'a pas parlé des
distances. C'est sûr que c'est un problème qui se pose. Mais, dès le départ, d'essayer de reloger
quelqu'un dans un autre logement qu'on va essayer de faire visiter, pour
nous, ça nous apparaît impossible, la
question de notion de logement équivalent. Bien sûr que la question se pose
encore plus dans des milieux ruraux où, effectivement, on a des membres bien
sûr et les logements disponibles, vacants ou équivalents
ne sont pas nécessairement à proximité. Ce qui est très important... et vous abordez la question de, en fait, les personnes âgées, les garder dans leur milieu, dans leur logement.
Vous savez, les propriétaires souhaitent conserver cette clientèle-là,
c'est une clientèle qui est essentielle, qui est importante, mais il y a
d'autres difficultés.
Le vieillissement de
la population amène des besoins pour des locataires d'avoir des ressources, des
soins à domicile, un accompagnement. Les
propriétaires de logement du Québec, là, qui ont surtout des duplex et des triplex,
sont des intervenants sociaux de premier
rang pour ces locataires-là, sont des gens qui accompagnent des personnes âgées
qui sont parfois isolées de leur famille,
qui n'ont pas de ressource ou qui ont des difficultés de mobilité. Il y a
une limite à ce qu'on peut faire,
mais, s'il y avait une aide supplémentaire, on permettrait à des
locataires âgés de rester plus longtemps dans leur logement du marché privé,
parce que les propriétaires, même si ce n'est pas leur rôle, jouent déjà,
exercent déjà, là, un rôle actif.
Mais, en bonifiant ce rôle-là avec une aide gouvernementale, avec une aide
à domicile, on permettrait à des gens de rester plus longtemps dans leur
logement.
Bien sûr, là, je
déborde du sujet des reprises, mais c'est important de le mentionner.
Le
Président (M. Auger) : C'est
tout le temps que nous avions à notre disposition. Je tiens, en terminant, à remercier les représentants de la Corporation des
propriétaires immobiliers du Québec. Et je vais suspendre les travaux quelques
instants pour permettre à l'Association des propriétaires du Québec de prendre
place.
(Suspension de la séance à
12 h 37)
(Reprise à 12 h 39)
Le
Président (M. Auger) : Nous
allons reprendre nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des propriétaires
du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis par la suite nous allons procéder à la période
d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à
vous présenter dans un premier temps et à ensuite débuter votre exposé.
Association des propriétaires du Québec (APQ)
M.
Messier (Martin A.) : M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, Mme la présidente de la Régie du logement, mesdames messieurs, bonjour,
mon nom est Martin Messier, je suis président de l'Association des propriétaires du Québec. L'APQ, donc, présente partout au
Québec, qui représente 16 000 membres propriétaires et gestionnaires d'immeubles, offre des services
concrets à ses membres, donc des services de formation, une publication mensuelle pour leur permettre de briser
l'isolement et, évidemment, des services juridiques. Donc, on est dans le
quotidien, dans le feu de l'action.
Les gens nous appellent, nous font part de leurs problèmes, et on les
accompagne, dans toute la mesure du possible, dans ça.
• (12 h 40) •
Évidemment, pour l'ensemble des propriétaires,
le principe qui est soulevé par le projet de loi devant nous aujourd'hui est tout à fait souhaitable. Donc, de
protéger, M. le Président, les aînés, c'est définitivement une préoccupation
qu'on doit avoir, comme société. Et là où on
fait la différence... puis vous pourrez le lire dans certains passages de notre
mémoire, cette décision-là, comme société,
d'aider les aînés, elle est tout à fait louable et elle doit, selon nous, être
assumée par la société, donc qu'on
vienne en aide, des démarches d'accompagnement, la possibilité de choisir un
logement, de connaître nos droits, donc qu'on accompagne financièrement
et qu'on sécurise les aînés, mais qu'on le fasse comme société, qu'on évite d'imposer, ce qu'on fait trop souvent,
malheureusement, au Québec, le fardeau aux seuls propriétaires d'immeubles. Alors, comme contribueurs de taxes,
tout à fait, on est prêts à investir comme société, mais, quand on vient
limiter les droits des propriétaires pour
faire en sorte que seul le propriétaire doive assumer cette responsabilité-là,
ça devient plus difficile.
Je vais vous
parler, deux petites secondes, du processus de reprise de possession du
logement juste pour vous mettre dans
le contexte. D'abord, ce n'est pas évident, la reprise de possession du
logement au Québec, et on a déjà des limites importantes au droit de
propriété. Reprendre possession, je peux le faire — et ça a été modifié
dans une des récentes réformes du Code civil
du Québec — seulement
pour les ascendants, descendants en ligne directe au premier degré. Ça veut dire quoi? Père, mère, fils, fille, hein? Je
ne peux reprendre pour n'importe qui, comme ça, dans ma famille. Il y a d'autres exceptions mais qui ne s'appliquent à peu
près jamais. Donc, essentiellement, c'est ce qu'on peut, comme propriétaires, effectuer. Et il y a un contrôle, a
priori, de la Régie du logement. Si je vous disais qu'exceptionnellement
le propriétaire envoie un avis au cher
locataire six mois, s'il s'agit d'un bail de 12 mois, avant la fin du
bail : Je désire reprendre possession
du logement pour les fins mentionnées dans l'avis, je devrai indiquer pour qui
j'entends reprendre possession du
logement. Si le locataire ne répond pas, c'est présumé comme un refus et c'est
le propriétaire qui doit introduire la demande
à la Régie du logement et qui devra faire la preuve. Donc, on renverse... vous
savez, on dit que tout le monde est
présumé être de bonne foi, normalement, dans le Code civil. Ici, on vient
renverser ce fardeau de preuve là, on dit au propriétaire : Vous
devrez démontrer, propriétaire, que vous entendez réellement reprendre
possession pour les fins mentionnées dans
l'avis, hein? Ça veut dire tout un paquet de choses, concrètement : le
logement répond à mes besoins; financièrement,
j'ai cette capacité-là de ne plus recevoir le revenu du loyer; il est localisé
dans un endroit où, oui, à moyen et long terme, je vais me plaire.
Et donc on
fait cette démonstration-là, on doit convaincre le tribunal, qui, lui, pourra
rendre une ordonnance, en fonction
des parties devant lui, donc, tant sur le moment de la reprise, sur le moment
de l'indemnité, sur les frais qui sont occasionnés,
et on va tenir compte dans ça, évidemment, du fait que la personne est âgée,
notamment dans l'indemnité accordée pour le déménagement, et donc il y a
déjà ce contrôle, a priori, de la Régie du logement. Ensuite, on suit le propriétaire en donnant un droit au locataire et,
si le propriétaire reprend possession pour des fins autres... mentionnées
à l'avis — et on se souvient qu'il y a le contrôle, a
priori, de la Régie du logement — a posteriori, on vient aussi dire au propriétaire : Vous allez pouvoir être
poursuivi, hein, si vous relouez votre logement sans avoir respecté les
modalités de la loi qui nous imposent
de retourner à la Régie du logement et de demander à la régie de fixer les
conditions de location.
M. le
Président, je vous soumets respectueusement que déjà les locataires, âgés ou
non, parce que ces dispositions-là s'appliquent
à tout le monde, sont extrêmement bien protégés. Et, sur ce, je vais passer la
parole — et j'ai
oublié de le présenter, je m'en excuse — à mon collègue juste à ma
droite, Me Jean-Olivier Reed.
Le Président (M. Auger) : Me Reed.
M. Reed
(Jean-Olivier) : Bonjour, tout le monde. Alors, pratico-pratique, la
reprise de logement : le propriétaire envoie un avis de reprise, le locataire refuse, on se rend à la Régie du
logement, le juge rend son jugement, le locataire et le propriétaire, la même journée, reçoivent
dans la poste un jugement, et, après ça, plus rien. Et c'est cette partie-là
qui est importante parce que le
locataire, les personnes aînées n'ont plus rien. Alors, nous, on pense,
l'Association des propriétaires, que
c'est à ce moment-là que le locataire a besoin d'aide et non a priori, parce
qu'a priori les règles sont déjà
suffisamment balisées pour déterminer la bonne foi du propriétaire, si
effectivement il ne veut pas ou pas reprendre le logement. Qu'est-ce qu'il considère, le juge? Bien, l'âge, leur
mobilité, l'emplacement et le déracinement. C'est déjà dans la loi. C'est déjà ça qu'ils utilisent comme
barèmes pour déterminer la compensation que le locataire va avoir, et ils
utilisent aussi les témoignages des gens
pour déterminer la bonne foi du propriétaire, si effectivement il a le droit ou
non de reprendre le logement.
Le juge
administratif a aussi une panoplie de moyens pour gérer les problèmes ou les
paramètres spécifiques du dossier
qu'il a en face de lui, dont les montants à donner et aussi le délai ou le jour de la reprise de logement. Il y a
déjà la possibilité, dans certaines circonstances, de reporter cette
journée-là. Donc, finalement, l'APQ est d'avis que l'expertise des juges administratifs et le Service de
conciliation de la régie a permis, dans le passé, et permettra encore dans le
futur de pallier aux problèmes... aux
solutions originales des problèmes ponctuels avec les paramètres actuels du
Code civil du Québec.
Bon, c'est
sûr et certain que les règles de la régie de reprise de logement et l'éviction,
c'est la contradiction de deux
droits, le droit du locataire du maintien dans les lieux et le droit du
propriétaire de faire l'usage... de son propre usage, et on considère que c'est un
compromis actuel acceptable et équitable. La modification, on considère
qu'elle débalancera de façon
importante ces deux droits en faveur, généralement, du locataire et sans égard à la bonne foi du
propriétaire. Donc, je vais terminer
par deux... Premièrement, il s'agit aujourd'hui de mettre à la disposition des aînés des outils nécessaires pour traverser cette reprise-là de façon sereine. Alors, moi, je vais
finir par une question : Est-ce qu'on doit aujourd'hui entamer le processus
de recherche de logement avant de déterminer la bonne foi du propriétaire?
C'est une question qui est un peu... parce que,
là, on demande dans le projet de loi d'offrir un logement au locataire avant même de
déterminer si la bonne foi du propriétaire est là. C'est tout.
Le Président (M. Auger) : Oui, M.
Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Écoutez,
peut-être, sans répondre à la question de mon confrère,
j'aurais des idées de réponse, M. le Président, mais simplement nous
dire que, dans le marché actuellement, il y a plusieurs logements de disponibles mais que c'est extrêmement compliqué, c'est tellement personnel, le choix du logement. Quand on
demande, dans le projet de loi sous étude, de demander au propriétaire d'être en quelque
sorte l'agent d'immeubles du locataire et, dans les notions de logement équivalent, on va avoir un paquet de
facteurs : on va avoir l'emplacement, le prix du loyer, l'ensoleillement, mais, pour un locataire, il
préfère un immeuble plus neuf; pour d'autres, certains immeubles plus âgés,
plus historiques... Et donc c'est vraiment
une question très, très personnelle. Donc, de demander au propriétaire de
faire office d'agent d'immeubles, en fait, ça nous semble, à toutes fins
pratiques, impossible.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Donc, ce qui met fin à votre exposé. Nous allons commencer la période
d'échange avec Mme la députée de Gouin pour quatre minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Et je vais quand
même encore avoir une introduction un petit peu plus longue à ma question. Je
voudrais ramener des chiffres que j'ai trouvés qui viennent d'une étude de la
SHQ, Les logements privés au Québec,
2002. C'est très intéressant de regarder cette étude. On y découvre qu'en fait,
là, je vous passe les détails, les gros
propriétaires, c'est-à-dire de 10 logements ou plus, forment 5 % du nombre général des propriétaires mais contrôlent 44 % du parc
locatif. Autrement dit, on parle beaucoup, ce matin, du petit propriétaire qui
habite un duplex, un triplex et qui veut peut-être
reprendre un étage pour ceci ou cela, mais, dans les faits, la majorité des
locataires québécois habitent des immeubles
de six logements ou plus, et nous avons des gros propriétaires. Au Québec,
nous n'en avons pas un nombre
extraordinaire, mais ceux que nous avons possèdent une grande partie du parc
locatif. On peut donc imaginer que
ces personnes peuvent relativement facilement trouver un autre logement à un
locataire qu'ils veulent évincer.
Ma question,
cela dit, va porter sur la notion de logement équivalent. Dans votre mémoire,
vous avez une conception du logement
équivalent qui n'est pourtant pas du tout celle de... en fait, qui n'est pas du
tout la mienne, celle de la personne qui
a présenté un projet de loi. Là, vous êtes rendus à me dire qu'un logement
équivalent, là, même niveau d'ensoleillement, puis les mêmes comptoirs dans le logement... Écoutez, sincèrement, là,
vous avez dû lire comme moi la jurisprudence sur la notion de logement équivalent ou comparable et répondant aux
besoins des gens. On ne parle pas des mêmes comptoirs et de la même quantité de fenêtres, on parle d'un certain
nombre de critères assez objectifs, du nombre de pièces, de l'étage où,
par exemple, le logement est situé, du niveau de tranquillité par rapport au voisinage.
Il y a de la
jurisprudence là-dessus, là. Je ne
comprends pas comment vous pouvez arriver à dire franchement : La notion d'équivalence, elle est tellement
restrictive que ça va être impossible de trouver un logement. Je ne
sais pas sur quoi vous vous basez.
• (12 h 50) •
Le Président (M. Auger) : M.
Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Merci. D'abord,
un premier point, et, en fait, dans les chiffres que vous nous mentionnez — je vous remercie de le mentionner — c'est effectivement une donnée significative, le fait que 44 % des logements soient détenus par de grandes sociétés, il faut tout de suite
voir que déjà, pour ces immeubles-là, les grandes sociétés, évidemment, des compagnies n'ont pas
accès à la reprise de possession, donc il n'y a pas de reprise de possession
déjà pour près de la moitié du parc locatif. Et évidemment, quand il y a des
personnes âgées dans ces immeubles-là, il
n'y a pas de compagnie qui va reprendre possession. Donc, juste qu'on mette ça
en tête dans le marché. Ensuite, qu'on revienne
au nombre, parce que c'est intéressant, parce que la même étude, quand on parle
du nombre de propriétaires, nous
disait qu'il y a près de 280 000 propriétaires au Québec, dont moins de
40 000 détiennent plus de six logements.
Donc, on a
effectivement, en termes de nombre de logements, beaucoup d'unités qui sont, en
fait, déjà protégées dans le sens où
on l'étudie aujourd'hui, parce qu'il n'y a pas de reprise, mais on a énormément
de propriétaires de petits immeubles
qui, eux, peuvent reprendre possession du logement. Donc, gardons ces
chiffres-là en tête parce que c'est tout à fait intéressant et venons-en à votre réponse. En fait, la notion de
loyer équivalent, de logement équivalent a été établie par la jurisprudence dans le contexte où on
reprend possession du logement, non pas le contexte inverse, où on le présente
actuellement, où c'est dans la tête du
locataire, le logement équivalent, pour le propriétaire, la distinction qui est
soumise. Parce que, dans la loi, en fait, quand j'ai un logement
équivalent qui se libère, je dois...
Le Président (M. Auger) : Encore 30
secondes à cet échange.
M. Messier (Martin A.) :
Pardonnez-moi?
Le
Président (M. Auger) : 30 secondes à l'échange. Si vous aviez encore
une intervention, là ce serait peut-être... Non?
M. Messier
(Martin A.) : Parfait. Et
donc la notion de logement équivalent est utilisée par le propriétaire pour
dire : Il ne s'agit pas d'un logement
équivalent, donc il faut que je reprenne ce logement-là, même si
l'autre se libère. Et on est allé,
oui, jusqu'à l'ensoleillement, jusqu'à l'accès à la cour arrière. Et effectivement ces exemples-là, vous avez tout
à fait raison, sont tirés de jurisprudence où les propriétaires ont eu gain de
cause en disant : Je peux reprendre possession de ce logement-là parce qu'il ne s'agit pas d'un logement équivalent, donc je ne suis pas
contraint de reprendre celui qui se libère.
Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup.
C'est tout le temps que nous avions pour ce premier échange. M. le ministre,
pour 10 min 30 s.
M. Moreau :
Oui. Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, bonjour, M. Messier,
Me Reed. Dans votre mémoire, d'abord,
je veux revenir sur un élément statistique qui, en tout cas, moi, me frappe.
Là, vous dites qu'il y a 50 % du parc immobilier qui, étant détenu
par des entreprises, n'a pas recours aux dispositions du Code civil sur la
reprise, c'est important, et ce que l'on
doit retenir, ce que voulez que les parlementaires retiennent de votre passage,
c'est de dire que, dans l'autre
50 % de ce parc-là, c'est majoritairement des petits propriétaires. Donc,
de combien de logements environ, en moyenne?
M. Messier (Martin A.) : On parle de
moins de huit logements, souvent des duplex, triplex, quintuplex.
M. Moreau : De sorte que l'argument de dire «on se retourne
sur sa propre propriété pour trouver un logement équivalent» est un
petit peu faible. O.K.
Le Président (M. Auger) : M. Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Si vous
permettez, je veux juste préciser ça : Si j'ai un logement équivalent qui
se libère dans ma propre propriété, la loi prévoit déjà que je devrai
prendre possession de ce logement-là.
M. Moreau :
Oui. Ça, c'est 1964, puis vous devez avoir un logement équivalent, et c'est
d'ailleurs de là que vous prenez votre jurisprudence.
Une voix : ...M. le ministre.
M. Moreau : Bon. Alors, je
veux faire ressortir ça, là, pour les bénéfices des gens avec qui on travaille.
Donc, si vous
en avez, vous devez aller dans votre parc si jamais vous regardez ça, mais,
quand vous allez dans votre parc, vous devez avoir une notion de
logement équivalent, et la notion de logement équivalent a fait l'objet de jurisprudence, et, moi, c'est là-dessus un peu que
je veux vous amener parce que ce que je vois en distinction entre le droit
français et celui qui sera introduit par ce
projet de loi là, c'est une notion très importante de distinction entre un
logement pour les besoins de la
personne relocalisée ou un logement équivalent. Là, on est sur deux planètes
complètement différentes. Et ce que
je comprends, c'est que, dans votre mémoire, vous avez indiqué des extraits de
jurisprudence de la Régie du logement sur quelle est la notion de
logement équivalent, donc, on dit : Même niveau d'ensoleillement et
d'éclairage; balcon aux mêmes dimensions; au
même étage; et souvent avec un mobilier permanent équivalent. C'est vrai que la
barre est haute un peu, là, je pense, c'est ça que vous voulez
souligner.
Est-ce que
vous seriez plus confortables, donc, avec — et là je vous amène à la question, et
peut-être que Me Reed va vouloir
intervenir — la
notion de logement nécessaire pour les besoins? Parce qu'on peut avoir un sept
et demie, tous les enfants sont
partis, on est tout seul; des fois, dans un trois et demie, ça ferait pareil,
ça répond à nos besoins, mais ce n'est pas un logement équivalent.
Alors, c'est sur ça que je veux que vous développiez.
Et l'autre
élément : vous nous avez posé une question,
M. Reed. Le problème, c'est que c'est nous qui les posons
ici, puis vous êtes avocat, alors vous allez être obligé de répondre, sinon il
y a des cellules ici, en bas.
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Moreau : Vous dites que
l'aide devrait arriver après que le jugement de la régie est rendu sur la
reprise, autorisant la reprise. Quelle est cette forme d'aide là qui devrait
exister, selon vous?
Le Président (M. Auger) : Me Reed.
M. Reed (Jean-Olivier) : Écoutez,
c'est très pertinent comme... Je pense que la société d'hypothèques et de logement
peut sûrement faire une certaine aide pour aider les personnes
qui sont visées par le projet de loi au
niveau de la priorisation des listes d'attente pour avoir des
logements abordables, sûrement au
niveau de l'aide psychologique,
soutien des travailleurs sociaux. C'est à ce moment-là que la personne a
besoin d'aide, je crois.
M. Messier
(Martin A.) : Et donc, M. le ministre, si vous le permettez... Ah oui! Je dois avoir la parole de vous avant.
Le
Président (M. Auger) : M. Messier.
M.
Messier (Martin A.) : Merci.
M. le ministre, d'abord, si on parle de la France... c'est triste de
vouloir avoir au Québec ce qu'ils ont en France actuellement. Il y a un
parc immobilier où les propriétaires aujourd'hui cherchent à se départir... puis ils ne trouvent pas de façon
de se départir de leurs actifs. Il y
a même des gens, nos collègues
de l'UNPI, l'Union nationale de la
propriété immobilière, avec lesquels on a établi un partenariat. On a été voir
en France, ils sont venus voir ici, et laissez-moi vous dire que, si on s'en va
sur cette piste-là, c'est grave pour les locataires et c'est grave pour les propriétaires au Québec;
un parc immobilier en décroissance, trop de règles, trop d'impacts, compliqué
pour eux. Donc, c'est un modèle où,
oui, techniquement, au niveau des droits, on va retrouver plusieurs
choses qui sont de nature à protéger beaucoup
plus les locataires. L'impact est catastrophique sur le parc immobilier, son
entretien et sur l'intérêt. Parce
qu'il faut se souvenir qu'acheter un
logement, c'est une décision, essentiellement. C'est une décision d'investissement. Si j'ai peur d'acheter un logement puis je décide
de placer plutôt un certificat d'actions, ce n'est pas une bonne idée, ce
n'est pas comme ça qu'on va avoir des logements au Québec.
Sur
la notion de besoin, c'est extrêmement délicat, M.
le ministre, extrêmement délicat parce que ces besoins-là sont vraiment consentis... ou en fonction de la personne.
Donc, de demander au tribunal ou aux propriétaires de déterminer quels sont les besoins réels... Donc, je vous
donne des exemples. On en a vu dans des cas de reprise de possession où les
gens voulaient reprendre possession de quelque chose d'un peu plus grand pour accueillir de la famille; quelqu'un
qui aime faire de la couture qui veut
un espace isolé pour en faire. Il y a tellement de besoins comme ceux-là que je crois que
ce n'est pas la place du législateur ni non plus de la régie de s'investiguer
répartiteurs de besoins des gens.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : O.K. Je
comprends ça. Maintenant, vous comprenez comme moi qu'on a un projet de loi qui est à l'étape de la consultation, c'est parce qu'il y a une réflexion et que quelqu'un,
à un moment donné, a soulevé un problème, il y a un problème
ou il y a un os en quelque part. L'os en quelque part, sans résumer
l'argumentaire de mes collègues d'Hochelaga-Maisonneuve
et de Gouin, c'est de dire : Il y a un problème parce que des fois il y a
des reprises qui ne sont pas faites sous les bons motifs et que, malgré le fait
que le Code civil prévoit des sanctions à ceux qu'on attrape, bien c'est
difficile ou de les attraper ou de s'assurer
que ce soit suffisamment dissuasif pour ne pas que quelqu'un ait à essayer de
mettre son doigt dans la trappe. Alors, qu'est-ce qu'on fait? Qu'est-ce que
vous suggérez?
Le Président (M.
Auger) : M. Messier.
M.
Messier (Martin A.) : ...d'avoir l'occasion de vous parler sur ça.
Pour nous, le respect de la loi et le respect strict de la reprise de possession est un gage de son maintien. Et,
quand on a, dans l'occasion de nos conseils juridiques avec les membres, l'occasion de leur expliquer,
vous pouvez être certain qu'on le fait de façon très déterminante. On leur
explique les conséquences et vraiment la
priorité d'appliquer la mesure de la loi vraiment où on doit habiter le
logement. Et il n'y a pas beaucoup de
recours qui sont effectués, pour moi, en 2015. Et la situation a évolué depuis
plusieurs années, mais, en 2015, de
savoir si quelqu'un habite réellement le logement... Moi, j'ai vu, M. le
ministre, des... qui entreprenaient ce
recours-là, aisément, demander la confirmation à l'audience : Sortez votre
permis de conduire. C'est quoi, l'adresse sur ça? Ah! c'est drôle, ce n'est pas l'adresse du logement. Oups!
Subpoena à Hydro-Québec. Quelle est la consommation dans le logement? Assez facile en 2015. Souvent,
on a juste à regarder Facebook, en fait, puis les gens vont dire quand
ils déménagent dedans, mais ça, c'est autre chose. Et c'est très facile d'aller
chercher l'emplacement des gens.
Par
contre, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir de la Régie du logement, qui est
fort efficace, souvent, on dit, avec le
sourire... n'empêche qu'elle applique très bien des dispositions qui ne font
pas du tout notre bonheur, d'inclure un rappel, lors d'une décision qui vise la reprise de possession, sur les droits
des locataires : Rappelez-vous que, si votre propriétaire agit en... rappelez-vous que vous avez la
possibilité de faire 1 800 régie puis on va vous parler, peut-être même
d'écrire à des organismes
communautaires ou gouvernementaux qui pourraient aider cette personne-là,
simplement de l'information pour permettre à la personne âgée de bien
connaître ces droits-là, qui sont déjà en place?
• (13 heures) •
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Mais je comprends que, là, si on dit à la
personne : O.K., votre logement, il est repris, puis vous faites 1 800, ça ne va pas bien, c'est
peut-être court un peu. Alors, quelle serait la mécanique la plus, je dirais,
efficace? Parce que, mettons-nous
dans les... personne âgée ou pas personne âgée, là, quelqu'un qui se fait
évincer parce qu'il y a une reprise,
je comprends que c'est l'exercice d'un droit qui est reconnu par le Code civil,
il n'y a pas de problème, puis ça ne
fait pas du propriétaire un méchant parce qu'il fait ça, c'est le droit qu'il
a, puis il l'exerce. Mais le propriétaire véreux... Moi, j'ai toujours dit d'ailleurs, quand je vous
dis ça, là, on n'aime pas plus les propriétaires véreux que les locataires
véreux, puis il y en a dans les deux
catégories, alors c'est pour ça qu'il y a des équilibres. Mais, le propriétaire
véreux, là, qui utilise cette
procédure-là de façon incorrecte, est-ce qu'on ne devrait pas pousser ça un
cran plus loin et à lui faire des
obligations, par exemple d'évincer celui qui, illégalement, a repris le loyer
pour le remettre à la disposition de la personne qui a été illégalement
évincée?
Le Président (M.
Auger) : M. Messier.
M.
Messier (Martin A.) : Écoutez, d'abord, d'entrée de jeu, tout à
fait... puis, quand je discute avec des collègues — je vais les appeler comme ça, eux
n'ont peut-être pas le même vocabulaire — d'associations de locataires,
je leur dis : On vit souvent sur deux planètes, hein, parce que, nous, les
mauvais propriétaires, ils n'ont pas une tendance à nous appeler pour se faire rappeler les lois, et
probablement que les mauvais locataires ne vous appellent pas non plus. Donc,
oui, d'avoir une vision chez choses où on
réalise qu'il y a des propriétaires qui pourraient être tentés de reprendre
possession autre que pour des fins mentionnées à l'avis, ça existe, ça
existe.
Par contre,
je dois vous dire qu'on s'est donné une mesure exceptionnelle au Québec, hein,
il faut envoyer l'avis. Le locataire
qui ne répond pas, c'est le propriétaire qui fait la démarche à la régie et
c'est lui qui devra se déculotter — on me
pardonnera l'expression — mais décrire tout le processus, pourquoi il veut ce logement-là,
comment il va l'utiliser, est-ce que
ça répond également à un besoin. Ce n'est pas simple, là. Les régisseurs à la
Régie du logement, là, ils vont très
loin dans l'examen de cette décision-là. Et, si on l'évince... d'évincer celui
qui est en place, ça m'apparaît difficile, parce que, si le propriétaire effectivement reloue sans respecter la
loi, donc sans demander à la Régie du logement de statuer sur les conditions de location, cette personne-là,
elle n'est probablement pas au courant. Donc, vous allez l'évincer, mais,
bon, c'est peut-être lui-même quelqu'un qui
aurait besoin de protection. Et donc ça m'apparaît être une solution qui risque
de poser problème, avec respect. Mais qu'on
informe les gens de leurs recours, qu'on les assiste dans ce recours-là, tout à
fait, là. Le respect de la loi, c'est définitivement une priorité pour
nous.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre avec Mme
la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour un échange de
6 min 15 s.
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, il me
fait plaisir de vous revoir. On s'entend que la reprise de logement devrait être une mesure d'exception — je veux bien utiliser ce terme-là — ça devrait être mesure d'exception, parce que finalement reloger sa mère,
son père puis ses enfants, ça devient une mesure d'exception en tant que telle, tu sais, dans notre vocabulaire, là, ça
devrait être, dans notre société, un moyen qu'on utilise parce qu'on est dans
une situation x. Madame le disait tout à l'heure, Mme Bisson, si je me rappelle
bien...
Une voix : ...
Mme
Poirier : Biron. Excusez-moi. Mme Biron disait : Moi, je
veux garder ce privilège-là. Si ma fille a besoin de me loger, ça
devrait... À mon avis, on devrait être dans une mesure d'exception.
Alors,
reprendre un logement pour loger quelqu'un de sa famille proche devrait être
une mesure d'exception et ne pas en
faire une règle. Et, quand vous me dites que la moitié du parc de logements
appartient à 50 % du monde... bien, il y a aussi la règle, dans la
reprise, de l'agrandissement, subdivision, etc., et, si je me rappelle bien, la
cause pour un édifice de la rue
Deux-Montagnes, c'étaient des grands propriétaires avec un 56 logements, et ils
ont vidé l'édifice en voulant
justement subdiviser en en faisant des condos indivis. On s'en rappellera, ça a
passé devant le juge, mais ils ont perdu, fort heureusement. Mais ça
existe. Mais ça existe.
Moi, je veux
juste comprendre, là. On cherche une façon de faire. J'ai posé la même question
à vos prédécesseurs. On a parlé d'un
mécanisme avec vos prédécesseurs. Vous dites : On ne peut pas évincer la
personne qui a été mise dans le logement,
même si ce n'est pas la bonne personne qui aurait dû y être. Je veux bien. Mais
qu'est-ce qu'on prévoit comme dédommagement
au locataire évincé? Parce qu'il y a quelque chose là d'odieux : utiliser
un pouvoir, parce que c'est un pouvoir
du locataire, d'évincer son locataire. Et, comme propriétaire, j'ai le droit de
le faire. La loi est claire, j'ai droit de le faire, mais, si je le fais à mauvais escient, il faut que je me
fasse taper sur les doigts. Et il est là, là, le principe. Moi, le fardeau d'aller invoquer à la régie, de
dire : J'ai pris des photos, j'ai validé sur Facebook, ce n'est pas
le bon qui est dans le logement, quand tu as 80 ans, je m'excuse, là,
c'est compliqué, hein, c'est compliqué.
Alors, quel mécanisme vous proposez pour vous
assurer que le propriétaire fasse les choses dans les règles?
Le Président (M. Auger) : M.
Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Bien, d'abord, vous avez tout à fait raison, c'est bel
et bien une exception, c'est une exception
tellement restreinte qu'ascendants, descendants, ligne directe, premier degré
il faut démontrer sa bonne foi, et je
vous dirais qu'il faut prévoir un budget. Il y a des propriétaires qui sont
consternés quand on les rencontre. Ils viennent de passer chez le notaire, puis là on leur dit le processus qu'ils
doivent suivre, la possibilité de contestation judiciaire et également le fait qu'ils devront remettre une
compensation à leur locataire qui est importante, et déjà ça, je vous dirais
que ça fait en sorte que la reprise, pour
plusieurs, est vraiment une procédure d'exception et une procédure lourde à
suivre.
On parlait
d'éviction. Évidemment, l'éviction, ce n'est pas le même processus, mais c'est
également un processus très lourd
pour le propriétaire, donc on parle d'obtention des permis, étude
architecturale, prouver qu'on a le financement pour la faire. Encore une fois, la régie va très loin dans son examen de
situation comme celle-là. Il faut garder en tête que c'est une mesure qui est essentielle pour
permettre l'adaptation du parc locatif. Les sociétés évoluent. On a des
propriétaires qui disent :
Maintenant, on se rend compte qu'on a besoin de cinq et demie, de six et demie
même puis qu'on loue des deux et
demie. Il faut permettre au parc locatif de respirer et de s'adapter à la
demande du marché. C'est une disposition qui est essentielle et qui, elle aussi, est facile à contrôler. Les
permis, la réalisation de travaux, on conviendra que c'est assez facile
de voir si quelqu'un réalise vraiment ce que c'est.
Je suis tout à fait sensible à votre exemple
d'une personne âgée de 85 ans qui a besoin, en fait, de recevoir l'accompagnement voulu et je pense que c'est à
cette étape-là du processus qu'on doit s'assurer qu'elle a les informations
et qu'elle a la
possibilité de recourir à des gens qui pourront l'appuyer. Quand on parle de
processus de contrôle a priori et
puis... Bien, c'est tout à fait heureux que Mme la présidente de la Régie du
logement soit là, ça me permettra de répéter ce qu'on répète souvent à la sortie du rapport du Protecteur du citoyen,
ce qui est le cas aujourd'hui, que la régie manque de ressources, hein? Déjà, on a un manque de
régisseurs, des délais très, très longs avant d'être entendus, et là, si on
vient ajouter un mécanisme de contrôle a posteriori, il faut prévoir
qu'il y a un impact financier pour ça et que la capacité d'adaptation doit être
au coeur de notre réflexion.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée, une minute.
Mme
Poirier : D'accord. On va recevoir les gens de l'APAGM, là, vos
collègues, cet après-midi, et eux — parce qu'ils ont sorti un communiqué de presse, donc, on peut en parler — proposent que le gouvernement prévoie des
mesures pénales plus coercitives envers les propriétaires de mauvaise
foi. Qu'en pensez-vous?
Le Président (M.
Auger) : M. Messier.
M. Messier (Martin
A.) : Merci. C'est déjà coercitif à souhait. Je vous dirais qu'un
propriétaire qui reprend possession, de
mauvaise foi, là... il reçoit une demande où on le poursuit pour
30 000 $, 40 000 $, 50 000 $ et il a cette
demande-là devant lui; je peux vous dire
qu'entre le moment de l'introduction de la demande puis les très nombreux mois,
malheureusement, pour une question de
ressources, il aura des difficultés à dormir. Il y a des condamnations très
importantes qui sont données par la Régie du logement.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée, 20 secondes.
Mme
Poirier : Écoutez, je suis très surprise d'entendre des
montants de 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $ quand,
dans l'ensemble des mémoires, on nous parle des sommes d'à peu près
4 000 $.
M. Messier (Martin
A.) : Non, mais je vous parle de...
Le Président (M.
Auger) : Juste un instant, une personne...
Mme
Poirier : Alors, je suis un peu surprise de vos propos, mais je
ferais juste une remarque dernière. Dans votre mémoire, vous parlez, et je vous cite, que les «modifications nuisent à
la valeur des immeubles où habitent des locataires aînés et ultimement à la qualité des immeubles».
Je ne comprends pas que le fait d'avoir des aînés dans son immeuble
menace la qualité d'un immeuble. Je suis assez surprise.
Le Président (M.
Auger) : Merci beaucoup.
M. Messier (Martin
A.) : Deux blocs de 15 secondes pour répondre à ça?
Le Président (M.
Auger) : C'est terminé pour cet échange.
M. Messier (Martin
A.) : Vous me rendez très triste. Est-ce que quelqu'un peut me donner
un deux blocs de 15 secondes pour répondre à ça?
Le
Président (M. Auger) : Bien, peut-être que ça pourrait être permis
éventuellement dans les différents échanges. Donc, je vais céder la
parole maintenant au député de Nicolet-Bécancour pour une durée maximale de
4 min 15 s.
M.
Martel : Merci. Bien, allez-y si c'est... parce que vous
êtes assez verbomoteur, là. 15 secondes, ça, ça va être correct.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Le Président (M.
Auger) : Donc, M. Messier.
M.
Messier (Martin A.) : Deux blocs de 15 secondes. D'abord, 30 000 $,
je ne vous parle pas de la condamnation, je vous parle de la réclamation. Et, oui, je pourrai vous présenter ces
gens-là qui ont besoin de pilules pour les aider à dormir quand ils reçoivent ces demandes-là et qui, s'ils
ont repris de mauvaise foi, ont probablement tout à fait raison de se sentir
très mal.
• (13 h 10) •
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Nicolet-Bécancour.
M.
Martel : Je pends les chiffres un petit peu que ma collègue
de Gouin a mentionnés tantôt. Tu sais, on est devant une situation où il y a les chefs de parti, il y a
les députés, on a dit : Ça serait une bonne idée d'essayer de trouver une
solution par rapport à cette
situation-là. Vous, vous représentez des membres puis vous regardez le projet
de loi tel qu'il est écrit, puis vous
dites : Pour nos membres, c'est difficilement... Je peux comprendre ça.
Moi, j'essaie de trouver une piste. Tantôt, j'ai fait allusion au milieu rural. Mais, si on disait : Par
exemple, à partir d'un certain... un propriétaire... ça ne peut pas s'appliquer à tout le
monde, mais à partir d'un propriétaire qui a un certain nombre d'immeubles
puis... pas d'immeubles mais de
loyers — là, je ne
dis pas «25», je ne dis pas «six» — mais il y a un certain nombre de... et,
quand tu as un certain nombre, la loi
va te viser parce que... là, moi, je me dis : La journée que tu veux
occuper le logement, bien attends que tu en aies un comparable qui soit
disponible pour... est-ce que ça pourrait être une piste, selon vous, mais en
étant conscient que ça ne peut pas s'appliquer à tout le monde, là?
Le Président (M. Auger) : M.
Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Bien, ça peut être une piste, tout à fait, qui mérite
d'être étudiée, mais il faut garder en
tête que, quand on parle de valeur de ces immeubles-là, en région rurale
particulièrement, les gens qui vont vouloir acheter... si je veux vendre
mon duplex, là, c'est souvent pour quelqu'un qui va vouloir l'habiter. Si les
prix du loyer commandent un revenu tellement
faible qu'il n'y a pas personne pour l'acheter, quand je vais essayer de
financer pour faire des travaux sur
cet immeuble-là, il n'y en aura pas. Et on a des situations comme ça, on appelle
ça des immeubles culs-de-sac. Je vais
voir la banque, ils me disent : Non. Et ça fait quoi? Ça fait qu'ils se
dégradent jusqu'à tant qu'ils finissent par mettre le boulet de
démolition à l'intérieur, et c'est une situation qui est préoccupante.
Vous savez, à trop protéger le marché locatif et
le locataire, on finit par lui nuire.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Nicolet-Bécancour.
M.
Martel :
Je veux revenir à ce que je vous demande. Est-ce que ça serait applicable, un
propriétaire qui a plus que, je vais
dire, six logements, là... ça peut être 12, je ne le sais pas, mais dire :
Toi, la loi, là, elle s'applique à toi, puis, la journée que tu veux occuper un logement, bien, tu en as d'autres,
assure-toi qu'il y en a un autre disponible pour déménager la personne
que tu veux déplacer?
Le Président (M. Auger) : M.
Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Bien, écoutez, c'est difficile... on parle de bonne foi,
c'est difficile d'attribuer la bonne foi
parce que la personne a sept logements, qu'on va lui demander d'avoir des
obligations plus importantes qu'une autre, et, il faut se souvenir, Mmes et MM. les membres de la législature,
vous protégez déjà les locataires d'une façon exceptionnelle au Québec. Je sais que vous voulez aider, mais il faut
faire attention. Ces mesures-là, qui découragent les investisseurs immobiliers, sont parfois de nature
à nuire autant aux locataires qu'aux propriétaires. Si on se décourage
puis on se dit : C'est trop de travail avoir un immeuble à logements, ce
n'est pas une bonne idée pour personne.
Le Président (M. Auger) : Un dernier
30 secondes, M. le député.
M.
Martel :
Bien, je reviens un petit peu, là, au... Vous avez entendu ma question par
rapport au milieu rural, là. À votre
avis, est-ce qu'il y a des gens qui représentent le milieu rural dans votre
association qui se sont prononcés par rapport à ça?
Le Président (M. Auger) :
Rapidement, M. Messier.
M. Messier
(Martin A.) : Il y en a définitivement, puis on voit déjà que ça ne
fonctionne pas, puis d'ailleurs, dans
plusieurs milieux ruraux, qu'on parle de Trois-Rivières, qu'on parle de la
région de Sherbrooke, il y a énormément de logements de disponibles, mais ils sont souvent très loin, et donc de
trouver des notions de loyer équivalent... Et, quand on met le prix dans
l'équation, on sait qu'il y a un contrôle des loyers, pour nous, trop serré...
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup.
M. Messier
(Martin A.) : ...et là d'imposer la notion de loyer équivalent, ça
rend impossible l'application de la mesure...
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup, M. Messier.
M. Messier (Martin A.) : ...que ce
soit pour les kilomètres ou pour le prix.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup.
M. Messier (Martin A.) : Merci.
Le
Président (M. Auger) : C'est tout le temps que nous avions. Donc, je
tiens à remercier les représentants de l'Association des propriétaires
du Québec, M. Messier et Me Reed.
Je vais suspendre les travaux jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 14)
(Reprise à 15 h 2)
Le
Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de
l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le
projet de loi n° 492, Loi modifiant le Code civil du Québec afin de protéger les droits des locataires
aînés. Nous entendrons, cet après-midi, les organismes suivants : premièrement, le Regroupement des propriétaires d'habitations
locatives, ensuite l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal et finalement
l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées
et préretraitées.
Je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants du Regroupement des propriétaires d'habitations
locatives. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé puis nous procéderons à une
période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc dans un premier temps à vous présenter. Par la suite, vous pourrez
procéder à votre exposé. À vous la parole.
Regroupement des
propriétaires
d'habitations locatives (RPHL)
Mme Lapointe (Annie) : Merci.
Bonjour, M. le Président. M. le ministre, Mme la présidente de la Régie du logement, Mmes et MM. les députés, donc, je me
présente : Annie Lapointe, directrice adjointe au Regroupement des propriétaires d'habitations locatives, donc, des
propriétaires d'habitations à logements résidentiels principalement en Estrie
et en Montérégie. Je suis accompagnée de Me Robert Soucy, avocat, qui est
spécialiste dans le domaine.
Donc, pour
vous faire un petit portrait, le RPHL a été fondé en 1981 par des propriétaires
de la région estrienne qui ont uni
leurs forces et leurs ressources afin de travailler à la défense et à la
promotion des droits et des intérêts des propriétaires d'immeubles et des gestionnaires d'immeubles également.
Donc, le RPHL soutient la cause des propriétaires depuis près de 35 ans en offrant une panoplie
de services et d'avantages, dont les conseils juridiques par le biais de
juristes spécialisés dans le domaine
locatif, donc c'est dans ce cadre-là qu'on est appelés de façon quotidienne à
parler aux propriétaires, à les conseiller concernant les différentes
situations difficiles qu'ils vivent.
Donc, on
tient à vous remercier de prendre le temps de nous accueillir et de nous
entendre sur nos représentations concernant
un projet de loi qui nous interpelle tout particulièrement. Donc, c'est
important pour nous de vous faire part de notre réalité, malgré le fait qu'on soit très sensibles aux personnes
plus vulnérables. Donc, je vais céder la parole à Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes les
députées, MM. les députés. Mesdames messieurs,
bonjour. Mon nom, c'est Robert Soucy, je suis un avocat spécialisé en matière
de logement. Ça fait 35 ans que j'occupe
à représenter des propriétaires d'immeubles devant la Régie du logement, c'est
ma spécialité, et je suis présent
au tribunal au moins deux à trois fois par
semaine depuis les 30 dernières années et je suis conseiller juridique
aussi pour le regroupement, le RPHL.
Je représente les membres devant les tribunaux, la Régie du logement, la Cour du Québec, la Cour supérieure et la Cour
d'appel. En plus de ça, on donne de
l'information, on offre un système de gratuité à nos membres, ils peuvent nous demander des conseils
juridiques, donc je donne aussi des conseils juridiques, donc je suis assez près des propriétaires d'immeubles, ça fait longtemps
que je les représente, j'ai à peu
près le pouls, à peu près,
des propriétaires d'immeubles.
Ce que je
voudrais aussi souligner pour le projet, juste une remarque tout de suite en passant, c'est : lorsqu'on
lit le projet tel que rédigé, on dit, à l'article 1967.1 : «Le locateur qui
désire reprendre le logement occupé...» À mon avis, il faudrait rajouter
que le locateur, «s'il en est le propriétaire»... parce que l'article 1957
prévoit qu'il faut que tu sois locateur et
propriétaire pour reprendre un logement. Là, ce qu'on mentionne, on dit :
Le locateur qui désire reprendre un logement.
Un locateur ne peut pas reprendre un logement, donc il y a un problème au
niveau de la rédaction du projet de loi.
Donc, le projet de loi vise à protéger les personnes âgées de plus de
65 ans à faibles revenus et/ou handicapées, et on parle aussi d'obliger le propriétaire qui fait une
demande de reprise ou une éviction d'offrir un logement équivalent et
aussi on parle d'un certain moratoire, qu'entre le 1er décembre et le
31 mars ça soit reporté au 1er avril.
Moi, ce que
je voulais faire partager avec vous, c'est ma connaissance que j'ai des
décisions de la Régie du logement en
matière de reprise de logement et d'éviction. Je vais passer outre, là, la
question, là, de la preuve devant le tribunal, là, puis c'est quoi, le
fardeau de preuve en matière d'éviction, en matière de reprise de possession,
mais on va en venir simplement aux indemnités qui sont données, premièrement,
en matière de reprise de possession.
Quand une
personne est âgée, une personne est handicapée, la régie, elle a un régime
particulier — parce
que, on l'a vu tantôt, il y a des
gens qui ont fait des représentations, là — qu'ils regardent l'âge, la durée
d'occupation, l'état physique de la
personne avant de donner des indemnités. Quand une personne est handicapée,
qu'elle a des difficultés de motricité...
ou des personnes qui sont très âgées, les indemnités sont beaucoup supérieures,
disons, que les indemnités accordées
aux autres locataires. On peut penser, là... ça varie, là, d'un régisseur à
l'autre, chaque régisseur a sa discrétion, mais on peut penser qu'habituellement, ce que la régie va faire, elle va
accorder des frais d'emballage, des frais de déballage et va accorder aussi trois mois de loyer aussi
puis une indemnité. Ça peut varier. Les indemnités qui sont accordées en
matière de reprise de possession, ça varie,
disons, de 3 000 $ pour les personnes âgées et handicapées et ça va
aller jusqu'à 15 000 $.
Donc, la Régie du logement est très sensibilisée
aux personnes âgées et handicapées. Et ce que j'ai comme expérience, c'est que, même en matière d'éviction,
il y a encore des indemnités, on a trois mois de loyer plus les frais de
déménagement. En plus, si le locataire juge que le trois mois d'indemnité puis
les frais de déménagement ne sont pas suffisants, il peut
demander également des dommages et intérêts en plus des recours trois mois de
loyer, qui sont automatiques, et, les frais de déménagement, il peut demander
un recours.
Maintenant,
on a parlé aussi de... parce que j'ai assisté aux exposés, là, de ce matin, on
parlait qu'en matière de reprise de
mauvaise foi la Régie du logement, là aussi, elle fait son devoir. Les
jugements contre les propriétaires qui font des reprises de possession de mauvaise foi, ça peut varier entre
8 000 $ et 30 000 $, les indemnités que des locateurs ont
été obligés de payer lorsqu'ils ont fait des
reprises de possession de mauvaise foi. Ça varie, là, il y a une fourchette, ça
dépend, chaque cas est un cas d'espèce, mais
disons, là, qu'habituellement, en moyenne, c'est environ une dizaine de
milliers de dollars pour des reprises de possession de mauvaise foi.
Ceci étant dit, la jurisprudence aussi, c'est
que le régisseur, il a le pouvoir de fixer les conditions qu'il estime justes et raisonnables. La plupart du temps,
lorsque la reprise de possession ou l'éviction arrive durant les mois d'hiver,
c'est très facile de demander de reporter la
date de reprise ou la date d'éviction. La plupart du temps, il y a une entente
qui est faite entre la partie demanderesse, la partie défenderesse, et on
s'entend sur une date. À mon avis, ce n'est pas nécessaire de faire un
amendement au Code civil, la jurisprudence pourvoit à cette difficulté-là.
• (15 h 10) •
Ceci étant
dit, maintenant, je voudrais aborder la question du loyer équivalent et de mon
expérience devant les tribunaux. Tout d'abord, la très grande majorité
des cas, lorsqu'une personne est à faibles revenus ou handicapée, la plupart des cas, ils sont représentés par des
avocats de l'aide juridique, la plupart des cas. La plupart des cas, les
avocats de l'aide juridique sont très
férus en la matière, connaissent leur domaine, ils plaident, et les personnes
âgées sont beaucoup protégées.
Moi-même, j'ai eu beaucoup de cas, et l'avocat va insister sur l'indemnité, la
date de reprise, puis ainsi de suite, et
la Régie du logement a une sensibilité et elle va rendre un jugement selon le
cas d'espèce, mais en général on tient bien compte du caractère
particulier de la cause, du cas d'espèce.
Maintenant,
lorsqu'on parle de notion de loyer équivalent, je devrais faire quelques remarques,
c'est que, selon la jurisprudence, «équivalent», c'est d'une racine
latine qui dit «égale valeur», donc c'est, quand on parle de «loyer équivalent», d'«égale valeur». Donc, il y a une
notion économique attachée à ça. Et, à la Régie du logement, aussi il y a
une jurisprudence qui parle de jugement
équivalent : on dit que deux logements que tu peux interposer l'un sur
l'autre, avec les conditions
principales, c'est un logement équivalent avec un même prix. Donc, ça veut dire
qu'un quatre et demie, ça rentre dans
un quatre et demie, puis les conditions principales, c'est un logement
équivalent. Mais la jurisprudence aussi a fait quelques distinctions à
un palier différent, d'accord? Donc, est-ce qu'un sous-sol est un équivalent à
un rez-de-chaussée? Est-ce qu'un troisième
étage est équivalent à un premier palier? C'est tout ça, la jurisprudence
distingue déjà ça. Mais, lorsqu'on
marque dans la loi «loyer équivalent», il faudrait définir c'est quoi, le
terme, la notion, «loyer équivalent», parce que nous autres, en
pratique, on va être pris à vivre avec ça à tous les jours, quotidiennement.
Maintenant,
on pense souvent que les propriétaires d'immeubles sont tous jeunes, en santé,
ils ont des profits plein les poches,
mais, les propriétaires d'immeubles que moi, je connais, ce n'est pas
nécessairement ce portrait-là. On a, nous autres, des propriétaires d'immeubles qui sont eux-mêmes handicapés,
sont eux-mêmes âgés, des fois aussi il y a des gens qui ont des difficultés de langage, on a des gens
qui sont des non-voyants, on a des gens qui sont des problèmes de motricité
qu'on est obligés d'aller les rencontrer pour signer des documents. On a toutes
sortes de propriétaires d'immeubles.
La question
que je me posais, c'est que, lorsqu'on dit qu'on demande à un propriétaire
d'offrir un logement, donc, on impose
un devoir. Prenons un exemple, puis je crois que le ministre Moreau en a parlé,
là, avec la législation française : si quelqu'un lui-même est une
personne âgée, et elle-même est handicapée, elle va être obligée de faire...
Le Président (M. Auger) : En
terminant, Me Soucy. Il reste 15 secondes.
M. Soucy
(Robert) : O.K. Tout ça pour vous dire, là, qu'il faut penser, là, que
les propriétaires peuvent être des personnes handicapées puis avoir des
problèmes.
Il y a la
question aussi de loyer de faveur, un loyer de faveur. Si vous avez un grand
six et demie, ça fait 30 ans que vous l'habitez puis le loyer est à
400 $, vous demandez à un propriétaire de trouver un loyer équivalent dans
les sept kilomètres ou dans les cinq
kilomètres, dans beaucoup de cas, ça va être une impossibilité physique, ça ne
se fera pas, il n'y en aura pas, de loyer équivalent. Donc, il faut le
prévoir.
Le
Président (M. Auger) : Merci, Me Soucy. Vous allez peut-être
avoir la chance de continuer tout à l'heure, suite à nos échanges. Nous allons commencer avec la période d'échange,
bien sûr, avec Mme la députée de Gouin pour quatre minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Monsieur, madame, bonjour. C'est sûr,
moi, je n'ai pas été président de la
Régie du logement... présidente, je n'ai donc pas votre expérience, mais j'en
ai une quand même, c'est celle d'être députée
d'une circonscription dans un quartier central de Montréal où il y a de
nombreuses évictions de locataire, la plupart du temps, pas pour reprise de possession pour un membre de la famille,
mais évictions pour agrandissement, subdivision et qui assez souvent finissent par être ventes en indivision qui se
transforment en copropriétés qui, après ça, vendent ces logements-là à des prix absolument inabordables
et, ce faisant, font augmenter la fièvre spéculative, dans les quartiers
centraux de Montréal, non seulement pour les
locataires, qui paient de plus en plus cher pour avoir des loyers, mais même
pour des petits propriétaires qui aimeraient ça acheter et qui
commencent à trouver que c'est cher, les immeubles dans mon quartier, et
qui auront pas mal de taxes à payer.
Donc, je
pense qu'on est dans une situation, puis c'est ce que j'aimerais vous dire puis
redire en même temps aux gens qui
nous écoutent, là, où il y a une préoccupation qui devrait être centrale ici
pour tout le monde, et cette préoccupation-là, c'est celle des personnes aînées, et pas n'importe
lesquelles, 65 ans et plus, à faibles revenus ou handicapées. Ça, c'est la
préoccupation. Vous dites : Bon, s'il y
a éviction pour diverses raisons, etc., les locataires ont toutes sortes de
procédures qui peuvent leur être
accordées. Moi, je vous soumets — et là c'est mon expérience de députée — qu'il est, en fait, très difficile
pour les locataires, un, d'être remis dans leur logement et, deux, de recevoir
des indemnités convenables.
Alors,
la question que je veux vous poser. Je reviens à votre mémoire. Vous dites que
ce projet de loi là, là, mettrait en
péril l'investissement immobilier au Québec en plus de nuire à la valeur
économique des immeubles dans lesquels habitent des gens aînés. Si je comprends bien, les gens aînés vont devenir
synonymes de mauvais investissements. J'aimerais vous entendre
là-dessus.
Le Président (M.
Auger) : Me Soucy.
M.
Soucy (Robert) : Oui. Mme David, nous, ce qu'on prétend, là,
c'est que... Regardez, là, le taux de vacance, là, à Sherbrooke, est 5,4 % en moyenne. Dans le district nord,
c'est 6,3 %, puis dans Lennoxville c'est 7,8 %, le taux de vacance. Le taux de vacance équilibré, là, est
environ à 2,5 %. Donc, quand on regarde à 7,8 % puis à 6,3 %, là
il y a bien des logements vacants qui
sont difficiles à louer. Ce n'est pas le même marché immobilier que Montréal,
ou Le Plateau, ou des districts... Je connais bien la ville de Montréal,
je suis né dans le quartier d'Hochelaga-Maisonneuve, j'y ai habité très longtemps, je connais les quartiers centraux,
je connais la difficulté, mais moi, je regarde le projet, là, tel quel puis
je vous dis nos préoccupations. Ce que je dis : On a une sensibilité parce
qu'on reçoit des appels de nos membres.
Vous
savez, récemment, le Code civil, il a été amendé, là, puis on a passé de deux
mois à trois mois pour donner un avis
d'une personne dans un HLM, une personne âgée. Il y a des personnes, là, qui
sont prises dans des quartiers, là, à
7,8 % puis 6,3 %. La personne âgée qui donne un avis de départ, le
propriétaire peut se retrouver avec un logement vacant pendant plus d'un an. Je sais que ce n'est pas la
même dynamique que dans vos quartiers, mais, lorsqu'on légifère, on légifère pour la province au complet. Donc, moi,
ce que je dis, c'est : Faites attention. Si vous faites une législation,
faites attention, il y a des cas marginaux aussi dans d'autres
quartiers.
Le
Président (M. Auger) : Vous voulez intervenir, Mme la députée? Mme la
députée de Gouin, 30 secondes.
Mme
David (Gouin) : Merci. Écoutez, je m'excuse de vous interrompre, mais
c'est parce que je pense que je comprends
très bien cette réalité-là. Et c'est vrai que c'est un projet de loi qui va
s'appliquer à la grandeur du Québec. Je
soumets quand même que les principaux cas d'éviction pour toutes les raisons
qu'on connaît se font dans les quartiers centraux des grandes villes en ce moment, et particulièrement à
Montréal, donc c'est là que ça va toucher le plus. Pourquoi? Parce qu'il
y a une fièvre spéculative, parce qu'il y a de la spéculation immobilière.
Alors,
si, à Sherbrooke, le problème ne se pose pas tellement, s'il n'y a pas
d'éviction de personnes aînées parce qu'il y aurait une fièvre
immobilière, bien, tant mieux. À ce moment-là, tout simplement, vous ne serez
pas tellement touchés par le projet de loi.
M. Soucy
(Robert) : Est-ce que je peux répliquer?
Le Président (M.
Auger) : Merci, Mme la députée.
M.
Soucy (Robert) : O.K.
Le
Président (M. Auger) : Nous sommes rendus maintenant avec la partie
ministérielle. Je cède la parole au ministre.
M.
Moreau : Merci, M. le Président. Alors, Mme Lapointe,
Me Soucy, bienvenue encore une fois à l'Assemblée nationale, merci de venir nous faire part de vos expériences
dans ce domaine-là. J'ai noté que, Me Soucy, vous aviez 35 ans de spécialité dans ce domaine-là. Vous avez
commencé très jeune, ce n'est pas la couleur de vos cheveux qui indique...
M. Soucy
(Robert) : Et j'ai plus de 65 ans.
M. Moreau :
Ah! alors, vous seriez visé par le projet de loi...
M. Soucy
(Robert) : Bien, exactement.
M. Moreau :
...donc vous êtes en conflit d'intérêts.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M.
Soucy (Robert) : Mais j'aurais des problèmes avec les revenus faibles,
peut-être, je ne passerais pas le test, je crois.
M. Moreau : Bon. Alors, je vous pose quelques questions qui touchent
les inquiétudes que vous avez soulevées dans votre exposé, notamment sur
la question de logement équivalent. Mes deux adjoints parlementaires souhaitent
intervenir, alors je vais vous demander de... Vous êtes habitué de plaider
devant la régie, donc vous êtes habitué de comprimer un peu votre intervention
et d'être concis.
La notion de logement
équivalent — vous
avez entendu les représentants, ce matin, des groupes qui ont été entendus — c'est véritablement problématique, ça me
semble assez clair, là, à l'heure actuelle, avec les interventions que l'on a. Est-ce que la notion de logement répondant
aux besoins, indépendamment, là, du fondement, dire : Bien, on devrait
faire ça ou on ne devrait ne pas faire ça,
sur la question d'équivalence... est-ce qu'on ne serait pas plus dans un, je
dirais, un univers acceptable si on changeait cette notion-là par
«répondant aux besoins», parce que les besoins évoluent?
Le Président (M. Auger) :
Me Soucy.
• (15 h 20) •
M. Soucy
(Robert) : C'est sûr qu'aller dans cette direction-là, c'est dans la
bonne voie, là, pour voir équivalent
aux besoins de la personne.
Mais, moi, la
question que je me pose... parce que, nous autres, ce
qu'on concluait, c'est : Pourquoi le régime des offices municipaux ne
pourrait pas faire une résolution ou un amendement à son règlement qu'une
personne qui est évincée... une personne
handicapée âgée qui est évincée d'un logement, pourquoi qu'elle n'aurait pas
la priorité sur une liste? Comme
n'importe quoi... des fois, il y a des gens qui se font mettre à la rue, puis tout
ça, puis il y a des listes de priorités. Moi, je pense que le réseau des HLM, des offices municipaux...
il y en a à peu près dans toute la province, ça couvre à peu
près toutes les grandes régions, je crois que ça serait une partie de la
solution. Je ne dis pas que ça serait l'idéal,
mais... de plus de ça, M. le ministre, les propriétaires,
ils n'ont pas tous la même sensibilité aux personnes âgées, aux personnes handicapées. C'est des cas
généralement particuliers, une certaine lourdeur. Je pense qu'un travailleur
social, quelqu'un de l'office
municipal d'habitation, il a plus la sensibilité et la compétence pour prendre
soin de ces cas-là, et moi, je pense
aussi que c'est des cas marginaux. Ce n'est pas des cas... en tout cas, le cas
spécifique des personnes âgées et personnes handicapées, là, à faibles
revenus, ce n'est pas des cas, disons, qu'on voit souvent dans la pratique.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Moreau : Bien, si je
regarde les statistiques de la Régie du logement, vous avez parfaitement
raison, en 2014‑2015, des reprises touchant
les personnes âgées — puis,
dans les statistiques de la régie, c'est 60 ans et plus, c'est donc plus que 65 ans et plus — pour les reprises pour changement
d'affectation, c'est cinq cas en 2014‑2015; 11 cas dans les cas
d'agrandissement, et, dans les cas de subdivision, si je suis sur la bonne
ligne, c'est deux cas. Donc, on est à 60 quelques
cas dans une année lorsqu'on parle de personnes de 60 ans et plus, et donc
moins si on parlait de 65 ans et plus.
Mais, ce que
vous venez de dire, en réalité, vous dites : Faites une modification à
l'article 23 du Règlement sur l'attribution
des logements à loyer modique pour indiquer dans les demandes prioritaires
celles des personnes âgées de 65 ans
et plus qui seraient évincées. Or, ce n'est peut-être pas la solution unique,
mais ça pourrait être une mesure qui irait dans la bonne direction,
selon vous. C'est exact?
M. Soucy (Robert) : Oui, à mon avis.
M. Moreau :
O.K. Je vais laisser mon collègue le député de Vimont, qui est mon adjoint
parlementaire en matière d'habitation, vous poser la prochaine question.
Le Président (M. Auger) : Donc, avec
plaisir. M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Mme Lapointe, M. Soucy, merci d'être ici. De base,
on sait que ce projet de loi là justement est fait vraiment pour aider les personnes âgées à faibles
revenus, et je pense que toutes les associations qui vous ont précédés
ont parlé comme quoi qu'ils comprennent l'objectif.
Je voulais
juste vous entendre... Vous, vous représentez... je réalise, il y a beaucoup de
petits propriétaires aussi, donc.
Vous, pensez-vous qu'un projet de loi de même pourrait être néfaste, néfaste
dans le sens : Les propriétaires, est-ce qu'ils auraient hésitation à louer à des personnes âgées? Parce que j'ai
entendu d'autres organismes revenir avec ça, là.
Le Président (M. Auger) : Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Écoutez, là, je vais être franc avec vous, là, où est-ce
qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie. C'est ma réponse.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont. C'est court.
M. Rousselle : C'est assez
court comme réponse et c'est assez clair aussi, là.
Le Président (M. Auger) : En
avez-vous une deuxième, M. le député de Vimont?
M. Rousselle : Bien,
écoutez...
M. Moreau : Des fois, les
réponses courtes sont aussi claires.
Le Président (M. Auger) :
Absolument. Il n'y a aucun problème. Donc, M. le député.
M.
Rousselle : Dans le nombre de personnes que vous représentez
dans votre association... vous avez parlé que vous avez beaucoup de
propriétaires qui ont 65 ans et plus. En proportion, est-ce que c'est une
grande partie ou...
M. Soucy
(Robert) : Disons que, les propriétaires d'immeubles au Québec, il y a
beaucoup de personnes âgées qui sont
propriétaires d'immeubles au Québec. Souvent, aussi les gens, ils ont payé
leurs hypothèques puis ils réussissent à
survivre, là, avec les taxes, tout ça, mais un nouvel acheteur qui, lui,
achète, il est obligé d'avoir une hypothèque, là, il y a des problèmes de rentabilité de... C'est ça
que je peux vous dire, là, comme expérience que j'ai, là, des propriétaires
d'immeubles. Les personnes âgées qui sont
propriétaires elles-mêmes de logement, souvent elles ont clairé, comme on
dit en bon français, là, leurs hypothèques,
elles ont un petit peu plus de jeu, mais les nouveaux acquéreurs, eux, n'ont
pas cette facilité-là de financement, puis là l'enjeu économique est
plus important. Ce qu'on veut dire, c'est qu'avant de s'intéresser à un immeuble il y a peut-être des gens qui vont freiner un
petit peu, qui vont se poser des interrogations, là.
On ne prétend pas, là, que demain matin, là, il
n'y aura plus un immeuble qui va se vendre parce qu'il y a des personnes âgées dedans, là. Ce n'est pas notre
prétention, là, comprenez-vous bien, là? C'est juste qu'il va peut-être y avoir
des interrogations des acheteurs potentiels,
parce que ça peut rendre plus difficile l'accès au logement. Si tu achètes pour
prendre possession toi-même puis il y a une
personne âgée, bien ça fait une difficulté de plus. Disons que ça va être un
irritant supplémentaire.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont.
M. Rousselle : Donc,
pensez-vous qu'il peut y avoir, selon vous, un impact sur la valeur de la propriété?
Le Président (M. Auger) : Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Bien, disons,
indirectement, parce que, si les acheteurs ne sont pas intéressés à acheter un immeuble, à un
moment donné, l'immeuble va rester sur le marché un bout de temps, puis sa
valeur va dévaluer, là, nécessairement, là. C'est les règles de l'économie générales.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Vimont. Non. Avec plaisir. M. le député de Chapleau.
M. Carrière : Merci beaucoup.
Bienvenue, Mme Lapointe et M. Soucy.
Moi, je
regarde le projet de loi, il n'est pas très volumineux, il a un article...
bien, deux avec l'entrée en vigueur, mais
moi, c'est dans l'applicabilité, là, ou... Moi, je viens de l'Outaouais.
Tantôt, on parlait de... bien, ce matin, on parlait de Montréal, où les logements ont monté de façon
vertigineuse, le coût des logements. En Outaouais, c'est encore pire, avec notre réalité frontalière avec l'Ontario,
etc., donc, les coûts des logements, c'est probablement, à qualités égales,
les plus élevés au Québec. Et tantôt
j'entendais la députée de Gouin, ce matin, parler, là, que les déménagements
pour les... et je suis d'accord.
Souvent, les déménagements, pour les aînés c'est un traumatisme, c'est un drame
pour eux, c'est un déracinement, là,
souvent. Et, quand je regarde dans l'application de cet article-là, s'il était
appliqué de façon stricte, là, quand
on dit : Pour les municipalités de 100 000 habitants et moins,
donc, c'est la plupart des municipalités du Québec, il faudrait que le
propriétaire relocalise dans la même MRC.
Moi, dans une
autre vie, j'ai été maire, j'ai été préfét d'une MRC, la MRC des
Collines-de-l'Outaouais, qui, si je prends
la municipalité la plus à l'est... puis là je fais un cas qui n'arrivera
probablement jamais, mais, la municipalité la plus à l'est, pour un logement identique, s'il relocalisait la personne
dans la municipalité la plus à l'ouest, c'est environ
100 kilomètres. Donc, quand on parle de drame et de déracinement, là c'est
clair que c'est poussé à l'extrême, mais comment
vous voyez l'application? Tu sais, je peux voir cinq kilomètres ou sept
kilomètres dans des villes comme Montréal, comme Gatineau, comme Québec, etc., mais, dans des cas de figure que je
vous parle, comment vous voyez qu'un propriétaire, et même le
locataire... comment on pourrait réaliser ce genre d'opération là?
Le Président (M. Auger) : Me Soucy.
M. Soucy (Robert) : Est-ce que vous
avez dit, là, que la localité la plus prochaine est à 100 kilomètres?
M.
Carrière : Non, non, je disais : Dans le fond, la MRC, il
y a sept municipalités, mais, si je prends la plus à l'est et la plus à l'ouest, il y a 100 kilomètres
de distance, 100 kilomètres. Et il y a des MRC que c'est encore pire que ça.
Vous avez dit : Quand il y a de
l'homme, il y a de l'hommerie. Donc, si on voit un propriétaire : Oui, je
vais t'en trouver un, logement
équivalent, mais ça va être dans la septième municipalité la plus à l'ouest,
comment vous voyez l'application dans des MRC ou des municipalités où il
n'y a déjà pas beaucoup de logements?
M. Soucy
(Robert) : Bien là, strictement parlant, il faudrait respecter la
règle dans la même municipalité, ça veut dire qu'il ne pourrait pas le
reloger, là, dans la municipalité voisine, il faudrait qu'il trouve, là...
M. Carrière : Non. Les
100 000 et moins, c'est dans la même MRC.
M. Soucy
(Robert) : O.K. Vous vous parlez des 100 000 et moins, oui, oui,
la même MRC pour les municipalités de 100 000 et plus. O.K.
Le
Président (M. Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Il y a 10 municipalités au Québec qui ont 100 000
de population et plus. La façon dont le projet de loi est rédigé — c'est ce que nous souligne le député de Chapleau — donc, dans 1 123 municipalités au
Québec, on devrait s'en remettre à la
règle de la municipalité régionale de comté, et ce qu'il vous dit, c'est que...
je ne sais pas si c'est Collines-de-l'Outaouais ou...
M. Carrière :
...
M. Moreau :
...Collines-de-l'Outaouais, on pourrait prendre une personne puis lui
dire : L'obligation est rencontrée, mais à 100 kilomètres de distance. Je
ne pense pas que c'est l'intention...
M. Soucy
(Robert) : Mais ce n'est pas l'intention du projet tel que je l'ai...
M. Moreau :
Je ne pense pas que c'est l'intention de Mme la députée de Gouin, mais ça
pourrait arriver.
M. Soucy (Robert) :
Non, non, mais...
Le Président (M.
Auger) : Juste une personne à la fois, s'il vous plaît. Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Bien là, je vois que, tel que c'est rédigé, là, ce n'est
pas prévu, ce cas-là, là.
Mme Lapointe
(Annie) : Si je peux me permettre?
Le Président (M.
Auger) : Oui, Mme Lapointe.
Mme Lapointe (Annie) : Bien, c'est une des raisons pour lesquelles on
trouve que l'applicabilité est un petit peu difficile, donc il y aurait des choses à vérifier, mais c'est également
une raison pour laquelle ce serait préférable que ce soit le locataire qui ait la possibilité de se
choisir un logement, plutôt que le propriétaire, avec les critères qui sont
inscrits dans la loi, là.
Le Président (M.
Auger) : O.K. Donc...
Une voix : ...
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre, oui, 2 min 30 s.
• (15 h 30) •
M.
Moreau : 2 min 30 s. Alors, je l'ai fait avec
vos prédécesseurs, vous avez entendu ça. Mme la députée de Gouin soulève à juste titre une problématique liée aux
personnes âgées dans les cas de reprise. Et, même lorsque la reprise est
justifiée, et ce n'est pas l'objectif prévu
par la loi, ça crée un traumatisme, c'est clair. Moi, je pense que ça doit
créer un traumatisme pour des gens
qui n'ont pas 65 ans et plus, alors j'imagine qu'à 65 ans et plus, quand ça
m'arrivera dans de nombreuses années, ça pourrait aussi me traumatiser.
Mais
ce que je veux savoir, c'est dire...
Vous dites : Le projet de loi ne répond pas... pour les motifs que vous
avez exprimés et pour lesquels on a
beaucoup d'égards. Mais ce serait quoi, la solution, pour faire en sorte qu'on
ne se retrouve pas avec... Puis, je
le dis pour vous comme je l'ai dit pour les précédents, on n'aime pas plus les
locataires véreux. Moi, j'ai vu... je
pense que c'était une publicité de la CORPIQ sur l'état d'un loyer qui avait
été laissé par un locataire. Je vais vous
dire, sincèrement, là, quand je vois ça, je trouve ça révoltant. Un locataire
véreux, c'est aussi terrible qu'un propriétaire véreux, pour moi. Et mon rôle, moi, c'est de travailler pour ceux qui ne
sont pas des véreux mais empêcher qu'il y en ait.
Alors,
l'objectif poursuivi par la députée de Gouin est tout à fait louable, de
dire : Qu'est-ce qu'on fait pour faire en sorte... C'est lourd pour une personne de dire : Oui, j'ai des
recours. Vous êtes avocat depuis 35 ans, j'ai pratiqué le droit
pendant 22 ans. Je sais très bien que prendre des recours, même quand on
en a, c'est un problème.
Est-ce
qu'il y aurait une solution, peut-être, déjudiciarisée qui nous permettrait de
contrer ce genre d'attitude, où, de façon mesquine, quelqu'un utilise la
reprise ou l'éviction à des fins autres que celles qui sont autorisées par la
loi?
Le Président (M.
Auger) : Me Soucy, en 45 secondes.
M.
Soucy (Robert) : En 45 secondes. Mon expérience, là, les gens qui
agissent comme ça, là, c'est des gens ou qui ignorent la loi ou qui s'en foutent carrément, de la loi, ou la
personne est tellement argentée que ça lui importe peu, tu lui mets une amende de 20 000 $, de
10 000 $, il s'en fout, ou il ne connaît pas la loi puis il se fait
attraper après, puis là il le regrette. Est-ce que vous comprenez?
Moi,
ce que je pense, là, c'est des campagnes d'information. Les gens, ils ne savent
pas leurs recours. Même nous autres,
les propriétaires, des fois, quand ils font des demandes de reprise de
logement, ils oublient le recours, ils ne respectent pas les délais puis ils perdent leurs droits.
C'est une méconnaissance des droits. Donc, c'est de la publicité, à mon avis,
qui pourrait rendre les lois plus connues
puis les recours plus attrayants, donc engager des régisseurs, réduire les
délais d'audience puis rendre l'accès à la justice plus facile.
Le Président (M.
Auger) : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre maintenant avec Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour une période de 8 min 30 s.
Mme Poirier : Merci, M. le
Président. M. Soucy, ex-résident d'Hochelaga-Maisonneuve, ça fait plaisir.
M. Soucy (Robert) : J'ai encore
beaucoup de famille, de racines là-dedans, dans le quartier, oui.
Mme
Poirier : Bon, excellent, on va se retrouver en famille. Mme
Lapointe, ça fait plaisir. Ma collègue de Gouin a commencé une discussion sur l'indivise, en tant que tel. On va changer
de section de votre cahier. Et c'est un des problèmes qui sous-tend ce
projet de loi là.
Vous êtes probablement de l'Estrie, mais je
profite de votre connaissance du parc immobilier d'Hochelaga-Maisonneuve. Ce qui se passe dans la vraie vie, c'est
que moi, je suis propriétaire unique, je vends mon édifice à une entité
à plusieurs têtes qui décide de faire de la
reprise de logements pour agrandissement, machin, etc., en me donnant, bien des
fois, une allocation généreuse pour que
justement je n'aille pas à la régie, parce que je ne veux surtout pas que ça se
sache, et c'est ce que je vais faire
aussi avec des personnes âgées, je vais leur donner une allocation
substantielle et je transforme cet édifice, mettons, un trois-logements,
en trois condos indivis.
Ça, c'est la
réalité de nos quartiers, c'est ce qui se passe présentement. Le ministre nous
dit que ça n'existe pas, mais moi, je vais vous dire que ça existe.
Une voix : ...
Mme Poirier : Oui, c'est ce
que vous m'avez répondu, M. le ministre, dans une lettre.
Alors, la
dynamique que l'on a, c'est celle-là, et ça fait que des personnes âgées,
actuellement, sont évincées de leur
logement par ce stratagème, parce que c'est un stratagème, qui fait en sorte
qu'on reprend des logements et qu'on les remplace par des condos. Ça,
c'est la réalité montréalaise actuelle et c'est exactement ce dont parle ma
collègue. Peut-être qu'en Estrie ce n'est
pas rendu là, ça s'en vient. Je suis persuadée qu'ils vont comprendre la
formule puis ils vont l'appliquer
ailleurs. C'est commencé à La Petite-Patrie, ça a fait Rosemont, Hochelaga et
là ça s'en va dans le Sud-Ouest. On
le voit, c'est un phénomène montréalais. Semble-t-il que ça a commencé à
Québec. Et ce que ça fait, c'est que ça nous fait perdre des logements au détriment de propriétaires occupants. Pour
certains, ça peut être une bonne solution pour avoir plus de propriétaires occupants, c'est
effectivement une solution, mais ce que ça fait, de façon insidieuse, c'est
faire perdre leur logement à des personnes, entre autres, âgées. Ça,
c'est la dynamique actuelle.
Est-ce que le projet de loi ici vient régler
cela? Non. Mais le problème, il est aussi celui-là, parce que, par ce stratagème, on fait perdre des logements à des
personnes âgées, et ces personnes âgées là, quand elles viennent pour se
reloger, ne sont pas capables de se reloger
au même coût. Il est bien sûr qu'une personne qui est dans un logement depuis
20 ans, et vous l'avez vous-même dit, ne
paie pas le prix du marché. Quelqu'un qui a un cinq et demie à Montréal qui est
là depuis 20 ans, il paie peut-être
500 $. Mais, l'étude qu'on nous a déposée lundi, on nous a dit que des
logements en bas de 700 $ à
trois chambres, ça n'existe plus à Montréal. Alors, ça veut dire que, lorsque
je déplace cette personne-là, ce qu'on appelle le loyer équivalent ou
comparable va être absolument une mission impossible.
Alors, moi, j'aimerais vous entendre, là, sur
qu'est-ce qu'il serait possible de faire pour régler le problème, parce qu'il y
a un problème.
Le Président (M. Auger) : Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Bon. Avec le respect que j'ai pour vous, madame, le projet
de loi que vous avez présenté, c'est
certain que ça n'apportera pas une solution à ce problème-là. Puis moi, j'ai
tendance à vous dire : Quand vous aurez un projet de loi, là, pour endiguer le problème, ça me fera un plaisir
de venir en commission parlementaire puis commenter le projet. Mais,
dans le moment, ce n'est pas le projet que vous avez présenté.
La question
des conversions en condos, je sais que c'est une problématique, là. Ce n'est
pas que je n'en suis pas conscient,
que je ne suis pas sensible, mais ce n'est pas avec un projet comme celui
présenté que vous allez faire obstacle à
cette dite problématique là, qui est une dynamique de gentrification des
quartiers centraux de Montréal. Je sais que, le quartier Hochelaga-Maisonneuve, il y a une gentrification, il y a des
condos puis il y a les gens de la place qui ne sont pas contents par les
nouveaux arrivants, les nouveaux arrivants qui font des plaintes, puis ainsi de
suite. Des fois, la cohabitation est
difficile, j'en conviens, je suis sensible à ça, mais, strictement parlant, le
projet de loi ne mettra pas fin au problème que vous soulevez.
C'est un
problème, j'en conviens, mais la solution, ce n'est pas un projet comme ça.
C'est ma réponse polie à cette question.
M. Moreau : ...
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Moreau :
Rappel au règlement, l'article 212. La députée d'Hochelaga-Maisonneuve a
déformé les propos que j'ai tenus en
disant que je lui disais que ce qu'elle décrivait n'existait pas. Ce n'est
absolument pas ça. Alors, je voudrais déposer
ici la lettre que je lui ai adressée le 23 avril 2015, dans laquelle on doit
démêler un peu la réalité de la fiction, là, où on
dit simplement ceci : «Il n'existe donc pas, du point de vue juridique, la
"conversion indivise" d'immeubles à logements.
Autrement dit, un immeuble n'est jamais "converti" en copropriété
indivise, au sens où on l'entend [par] la copropriété divise.»
Je
vais déposer la lettre, parce que je n'accepterai pas que la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve fasse une grosse déclaration ronflante pour
laisser penser que le ministre vit sur une autre planète, ce qui n'est pas le
cas.
Le Président (M.
Auger) : Merci, M. le ministre.
M.
Moreau : Alors, je dépose la lettre et je lui demanderais
gentiment de reprendre les paroles qu'elle a prononcées.
Le
Président (M. Auger) : Oui. On va en faire des photocopies, s'il vous
plaît, pour qu'on puisse les donner à chacun des membres de la
commission.
M. Moreau :
...des copies aux membres de la commission, on verra qui est-ce qui...
Le Président (M.
Auger) : Nous allons maintenant reprendre l'échange entre Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve,
représentante de l'opposition officielle, ainsi que nos invités. Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme
Poirier : Merci. Même si le ministre dépose la lettre, sa
réponse faisait en sorte de ne pas rien changer à la situation qu'on lui
demandait de changer.
M. Moreau :
...
Le Président (M.
Auger) : Juste un instant!
Mme Poirier :
Je m'excuse, c'est moi qui ai la parole, là.
M. Moreau :
Rappel au règlement, M. le Président.
Le Président (M.
Auger) : Oui. Mais juste un instant!
M. Moreau :
Oui.
Le Président (M.
Auger) : Juste un instant! M. le ministre, question de règlement.
M.
Moreau : Oui. Encore une fois, l'article 212. Si la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve, plutôt que de faire honneur aux gens qui se
présentent ici pour commenter le projet de loi qui est sur la table, veut faire
de la politique et essayer de m'imputer des
paroles qui sont contraires à ce qui est écrit dans la lettre, je ne
l'accepterai pas, et, je regrette, mais son droit de parole va en être
largement affecté.
Le Président (M. Auger) : O.K. Donc, nous allons reprendre avec Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve, et bien sûr...
M. Moreau :
...
Le
Président (M. Auger) : Juste un instant, M. le ministre. M. le
ministre, juste un instant. Nous allons reprendre notre échange, Mme la
députée d'Hochelaga-Maisonneuve, avec nos invités.
• (15 h 40) •
Mme
Poirier : Dans le projet de loi, on mentionne que c'est le
niveau de revenus au niveau de l'office municipal qui est visé. Selon vous, avec ce revenu, parce
que, dans une des propositions, la proposition nous dit qu'il faut trouver
un loyer équivalent, et une des propositions
que le ministre vient de faire et qui s'appuie aussi sur une proposition dont
vous avez parlé, c'est de donner une
préférence à ces gens-là dans l'office municipal... est-ce que vous croyez que
cette solution-là fait justement lieu de dire que le marché locatif
n'est pas disponible pour ces personnes aînées là?
Le Président (M.
Auger) : Me Soucy.
M.
Soucy (Robert) : Ce n'est pas ce que j'ai dit, madame. Ce que j'ai
dit, c'est que, dans certains quartiers, comme nous autres, là, à Sherbrooke, il y a un taux de vacance super élevé,
là. Je ne pense pas qu'un locataire qui est évincé de son logement ait de la difficulté à trouver un
logement. Ce que j'ai dit, par contre... la dynamique est différente dans des
quartiers populeux de Montréal, ça peut être
difficile de se trouver un logement équivalent. Moi, j'ai dit : À ce
moment-là, si c'est une personne de
bas revenus et, en plus, handicapée, ça devient comme des cas exceptionnels
d'urgence, et, à ce moment-là, le
réseau des offices municipaux pourrait prendre en charge ces cas-là, parce que
ce n'est pas des cas nombreux. Et, moi, ce que j'ai dit... je crois que
le réseau des offices municipaux, avec leur personnel, ils ont beaucoup plus de
sensibilité, ils sont habitués à faire
affaire avec une clientèle particulière... que de demander ça à un propriétaire
privé qui n'a pas la compétence et
qui ne va peut-être pas faire son travail comme il faut. C'est ça que j'ai
voulu dire, de distinguer, là.
Moi, je pense que le
réseau des offices municipaux, il est assez compétent, il y a des personnes
compétentes. J'ai déjà eu l'office municipal
de Montréal comme client, je connais pas mal le système. Je crois qu'il
pourrait y avoir des modifications,
là, au Règlement d'attribution des logements, là, des choses comme ça, des
modalités, et, à mon humble avis, ça
pourrait régler en partie... peut-être pas totalement, mais en partie la
problématique qu'on a devant nous autres. Parce que c'est vrai qu'une personne âgée, surtout si elle est
handicapée... Il faut penser, Mme Poirier, que le propriétaire, il va aller faire des visites dans un logement, il
va demander à une personne handicapée d'aller faire la visite du logement,
il va y avoir les questions du transport
adapté, les horaires. Vous savez comment c'est, un transport adapté, ce n'est
pas...
Écoutez,
demander ça à un privé, là, tu sais, qui n'a aucune connaissance, aucune
sensibilité de gérer ce cas lourd là, je
crois que c'est un peu être irréaliste, à mon humble avis. Je crois que les
offices municipaux sont mieux articulés pour ça.
Le Président (M. Auger) : Mme la
députée, 30 secondes.
Mme Poirier : Vous
mentionnez, vous aussi, que ça vient affecter la valeur de l'immeuble.
M. Soucy (Robert) : J'ai dit
tantôt...
Le Président (M. Auger) : Me Soucy,
rapidement.
M. Soucy
(Robert) : ... — oui — à court
terme, non, mais il va y avoir des interrogations pour l'acheteur. C'est ça que
j'ai dit. C'est qu'on craint qu'il y ait des appréhensions. Mais on ne dit pas,
là, que, demain matin, les immeubles, les valeurs vont s'effondrer. Non,
ce n'est pas vrai.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre
maintenant avec la deuxième opposition avec le député... en lui
souhaitant la bienvenue, je crois, M. le député de Borduas, pour
5 min 30 s.
M.
Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Mme Lapointe, Me Soucy, bonjour. Merci pour votre
contribution aux travaux. Dans un premier temps, j'aimerais qu'on
revienne à votre mémoire. À la page 7 de votre mémoire, vous invoquez la bonne foi des propriétaires. Et puis
on sait tous, là, que, dans notre système, bien, la bonne foi est présumée,
mais, je voudrais savoir, selon votre expérience de plaideur à la régie, tout
ça, au niveau de la jurisprudence, est-ce qu'il y a beaucoup de condamnations
annuellement pour malversation, fraude ou... de la part des propriétaires.
M. Soucy (Robert) : ...je n'ai pas
les statistiques, les dernières statistiques...
Le Président (M. Auger) : Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : ...mais peut-être que la Régie du logement a ces
statistiques-là, là. Ce n'est pas des cas... il n'y a pas de nombreux cas, là. Vous voulez dire des dommages-intérêts
suite à une reprise de possession de mauvaise foi?
M. Jolin-Barrette : Des dommages-intérêts,
oui.
M. Soucy
(Robert) : Je n'ai aucune idée, là, des statistiques de la province
là-dessus, là, mais ça existe dans le rapport
annuel de la Régie du logement. Vous pouvez trouver votre information dans
ledit rapport annuel de la Régie du logement,
qu'ils vont vous dire le nombre... mais je ne les ai pas en tête,
malheureusement, là, les statistiques précises. Je m'excuse, là.
M. Moreau : ...
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre.
M. Moreau :
...si ça vous intéresse, on a les statistiques — on peut les déposer — sur le nombre de demandes introduites
à la Régie du logement, ce qui ne donne pas... Le nombre de demandes
introduites depuis 2007, c'est 547. En 2014‑2015,
c'est 44, mais cette statistique-là ne vous dit pas, à la fin de l'exercice,
les 547, il y en avait combien qui étaient effectivement des cas de
mauvaise foi. Alors, je ne prends pas plus de temps, je vais déposer...
Le Président (M. Auger) : ...du
document.
M. Moreau : ...
M. Jolin-Barrette : S'il vous plaît,
si vous voulez le déposer.
Le Président (M. Auger) : Oui.
Merci. Faire des copies, s'il vous plaît. M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Le projet
de loi déposé par la collègue députée de Gouin est légitime dans le sens où il
vise la protection des personnes aînées qui souffrent d'un handicap qui
sont à faibles revenus. Dans votre mémoire, vous opposez la réalité de la responsabilité sociale
des individus versus celle de l'État. J'aimerais vous entendre davantage.
Vous avez parlé des offices municipaux d'habitation, vous faites référence
également aux CLSC.
C'est quoi, l'impact pour les membres de votre
organisation, versus ce que la société devrait avoir à faire?
Le Président (M.
Auger) : Me Soucy.
M.
Soucy (Robert) : Regardez bien, là, lorsqu'on parle de droits, on
parle des droits des deux parties, d'accord, les droits des locataires,
les droits des propriétaires.
La
question que vous allez imposer un devoir à un propriétaire de trouver un
logement à une personne handicapée; la
première question qu'il va se poser, ce propriétaire-là, c'est de dire :
Pourquoi moi, je suis obligé de faire cette job-là, alors que ses propres enfants ne font pas le
travail qui devrait être fait? Ça, c'est un exemple que je vous dis d'une
réaction qu'on peut entendre des fois
au téléphone. Est-ce que vous comprenez? Je vous dis ça, là, mais disons qu'on
entend pas mal de choses. Moi, je vis
dans les tranchées, j'entends les balles qui sifflent. Est-ce que tu comprends?
Aujourd'hui, j'ai l'air de tirer sur
les ambulances, là, mais, écoutez, on a des membres qui ont des préoccupations.
Les droits sont universels; les
propriétaires ont des droits, les locataires ont des droits. Mais, en enlevant
des droits aux propriétaires, on en donne aux locataires, j'en conviens, mais, à un moment donné, il faut voir
qu'est-ce qu'on impose comme devoir à un citoyen : de gérer un cas lourd. Quand je dis «un cas
lourd», c'est une personne à faibles revenus assez âgée qui peut être en perte
d'autonomie ou une personne, en plus, qui
est handicapée... un handicap physique ou un handicap mental. Là, vous allez
chercher un logement pour cette personne-là. La personne, là, la personne qui
est propriétaire, là, est-ce qu'elle a la compétence pour gérer un cas comme
ça?
Moi,
je pense que cette charge sociale là revient plus à l'État qu'à un individu
privé — c'est ça
un peu, moi, mon approche que je dis — parce qu'ils ne vont pas être
bien servis si le projet de loi s'appliquait, à mon humble avis. Est-ce que vous comprenez? Donnez ça aux
propriétaires, vous allez vivre avec les conséquences, je vous le dis, là,
mais...
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui. Merci. À la page 11 de votre mémoire, vous faites référence à la
marchandisation du bail.
M. Soucy
(Robert) : Notre mémoire, il a huit pages, là. La page 11, là, ce
n'est pas dans mon mémoire.
Le Président (M.
Auger) : ...de Borduas.
M. Soucy
(Robert) : Vous êtes dans le mémoire de la CORPIQ ou...
M.
Jolin-Barrette : J'en suis désolé.
M. Soucy
(Robert) : Oui, il n'y a pas de quoi. C'est parce que vous
m'inquiétez.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Jolin-Barrette : Mes excuses. J'ai consulté le mémoire qui était devant moi. Mes
excuses. Concrètement, pour...
Une voix :
...
M.
Jolin-Barrette : J'avais préparé ma série de questions.
M. Soucy
(Robert) : ...une pause, si vous voulez.
Documents
déposés
Le
Président (M. Auger) : Vous allez me permettre de déposer la lettre du
ministre décernée à Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve ainsi que le
tableau du ministre tel que spéculé.
M.
Martel :
J'en aurais peut-être une, question.
Le Président (M.
Auger) : Oui, M. le député de Nicolet-Bécancour, allez-y.
M.
Martel : Ce matin, je faisais une suggestion de... Je n'ai
pas le nombre, O.K., mais les partis politiques, les chefs de parti, on a convenu que c'était une
problématique. Peut-être que ça, c'est difficile d'appliquer, mais est-ce qu'on
pourrait viser un type de propriétaire qui
a, par exemple, six unités de logement, neuf unités, 12, je ne sais pas
combien, pour que la personne qui est
propriétaire, quand elle veut faire ce type de changement là, bien elle peut
attendre qu'il y en ait un qui va être libre?
M. Soucy (Robert) : Pour répondre,
si vous permettez...
Le
Président (M. Auger) : Me Soucy, très rapidement.
M. Soucy
(Robert) : ...très brièvement, là. Admettons, moi, j'ai un
huit-logements, là, mes locataires, ils ne déménagent pas, là, mes locataires,
j'ai des... je suis un bon propriétaire, ils sont heureux dans leur logement,
ils ne déménagent pas. Imaginons, là, que, dans les 10, 15 prochaines années,
il n'y a aucun mouvement de locataire.
Une voix :
...
M. Soucy
(Robert) : Hein?
Une voix :
...
M.
Soucy (Robert) : Mais imaginons. Écoutez, il y a des gens, des fois,
qui n'ont pas de «vacation», là, ils n'ont pas de logement libre, là. Ce que je peux vous dire : ça peut
arriver à une impossibilité aussi. En tout cas, c'est ma réponse.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup; ce qui met fin à cette période
d'échange. Donc, je vous remercie pour votre présentation.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
15 h 49)
(Reprise à 15 h 52)
Le
Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis par la suite nous allons
procéder à la période d'échange avec les membres. Donc, premièrement,
vous présenter. Par la suite, bien, procédez à votre exposé. À vous la parole.
Association des propriétaires d'appartements
du Grand Montréal (APAGM)
M. Perron (Christian) : Alors, bonjour à tous. Je me présente :
Christian Perron, président de l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal, l'APAGM. Je suis
propriétaire, à Montréal, de plus ou moins 100 logements. À ma gauche : Martin Gauthier est également
membre du conseil d'administration de l'APAGM et le directeur général du
Southwest One, environ 700 logements dans l'Ouest de Montréal, directement lié...
Vous entendez bien, oui?
Une voix :
Vous pouvez continuer.
M. Perron
(Christian) : O.K. Alors, directement situé en face de l'hôpital du
Lakeshore.
Alors,
ça fait 10 minutes qu'on parle de notre mémoire, là. Juste pour être sûr que
tout le monde l'a bien, là, ça, c'est...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Perron
(Christian) : Les deux dernières questions, là, c'était sur notre
mémoire, ça fait que ça...
Alors,
ceci étant dit, un aspect important de nous aujourd'hui, c'est que nous sommes
deux bénévoles praticiens à Montréal.
Nous vous remercions, M. le ministre, et tous les membres de l'opposition, de
nous recevoir aujourd'hui dans le cadre du projet de loi n° 492.
Nous
voulions vous parler de principes de reprise et cession, mais, compte tenu que
les autres associations avant nous
l'ont fait, permettez-nous de passer rapidement aux solutions que vous
trouverez en pages 12 et 13 de notre mémoire. On comprend que l'objectif du projet de loi est double : protéger
les personnes âgées contre les abus et empêcher la spéculation et autres mesures affectant le parc locatif
disponible. Là-dessus, nous avons une réflexion... (panne de son) ...quelques
spéculateurs malintentionnés et pour quelle
raison on adopte une mesure sociale aux dépens d'une catégorie de citoyens
que sont les petits propriétaires d'immeubles locatifs.
Concrètement, nous
croyons que le projet de loi est complètement inapplicable sur le terrain.
Comment un propriétaire peut-il prendre
l'engagement de trouver un logement semblable dans le même quartier et au même
coût, et ce, surtout si le locataire
demeure dans le logement depuis plusieurs années? Il faut comprendre ici que
les augmentations de loyer édictées
par la Régie du logement sont constamment en deçà de l'inflation. Ce projet de
loi va complexifier l'achat ou la
vente d'un «plex» par la classe moyenne. C'est un projet de loi dont l'objectif
est de nuire aux spéculateurs et qui portera
préjudice à tous ceux qui sont honnêtes, car, dans l'exemple où je veux prendre
un logement pour mon enfant et que mon
locataire demeure chez moi depuis longtemps, juste la différence de mensualité
du loyer va faire de mon projet une mission impossible.
Par contre,
nous sommes d'accord avec la volonté de s'occuper de nos personnes âgées. On s'associe
à la députée de Gouin sur ce point.
Nos propositions sont fort simples, et je pense que nos solutions feront
consensus. Considérant toute la procédure imputable aux reprises de
possession et aux évictions, surtout le délai préalable de six mois, nous proposons que tous les
aînés qui répondent aux normes inscrites au projet de loi reçoivent en priorité
un logement social. C'est simple, il
suffit de modifier l'article 23 du Règlement sur l'attribution des logements à
loyer modique, cet article qui prévoit justement des exceptions pour
l'accès à ce genre de logement, notamment pour les victimes de violence conjugale, dont l'association avait donné son
accord pour les violences... la violence conjugale. Alors, vous avez
l'annexe 1 de notre mémoire, page
14, qui parle de l'article n° 23. De par cette mesure, c'est l'ensemble de
la société qui s'occupera de nos
aînés et non pas une catégorie de citoyens qui sont nos propriétaires. Avec un
délai préalable de six mois, nous sommes
convaincus que les offices municipaux seront en mesure de répondre à cette
demande compte tenu qu'il n'y a pas beaucoup de cas. On en a fait la
preuve avant.
Nous avons
également une autre recommandation : donner un pouvoir coercitif à la
Régie du logement concernant les
fausses reprises de possession en établissant des amendes salées, en plus des
dommages et intérêts. Si un propriétaire est sujet à une amende en plus des dommages et intérêts, le rapport
coût-bénéfice le fera réfléchir. Alors, dans un exemple, si je pense prendre un logement et en faire un
bénéfice de 30 000 $, si j'ai des dommages et intérêts plus une
amende de 10 000 $,
15 000 $, peut-être que le bénéfice n'en vaut pas le coût. Également,
pour encourager les locataires à se plaindre, le gouvernement devrait modifier l'article 1961 du Code civil du Québec
pour que l'avis de reprise ou d'éviction indique en intégralité l'article 1968 du Code civil du
Québec, qui rappelle le droit du locataire de recouvrer des dommages-intérêts
résultant d'une reprise du logement, d'éviction de mauvaise foi.
Alors, je vais vous lire l'article 1968 :
«Le locataire peut recouvrer les dommages [et] intérêts résultant d'une reprise ou d'une éviction obtenue de mauvaise foi,
qu'il ait consenti ou non à cette reprise ou éviction. Il peut aussi demander
que celui qui a ainsi obtenu la reprise ou
l'éviction soit condamné à des dommages [et] intérêts punitifs.» Cet article de
loi devrait faire partie de l'avis lorsqu'on demande une reprise ou une
éviction.
Une autre
proposition que nous désirons vous présenter et qui répondra au questionnement
de Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve : l'ouverture obligatoire, à la
Régie du logement, d'un dossier de reprise et y déposer les preuves de résidence pour les deux années
subséquentes. Autrement dit, peu importe, que ce soient des personnes âgées,
peu importe l'âge, on ouvre automatiquement
une demande à la régie et, dans les deux années suivantes, on dépose les
preuves dans le dossier comme quoi la
personne à qui on a mis le logement... une fille, un parent, on prouve que
c'est bien habité par cette personne-là. Ce sera un outil facilement
consultable pour la personne dont a repris le logement.
Ce que l'on
reproche au système actuel, c'est que la preuve pour une reprise illégale est
difficile à faire. La personne âgée
n'a pas la ressource ni même les énergies pour en faire la preuve. Il sera
facile de consulter à la Régie du logement les documents qui y seront
mis. Alors, en un coup de téléphone à la régie, on saura si les documents ont
été déposés. Et la même chose peut
s'appliquer pour l'éviction, avec au final un certificat d'occupation. On fait
des changements, les villes demandent
à ce qu'un inspecteur visite les lieux avant. Or, on a un certificat
d'occupation. On pourra le mettre au dossier dans les cas d'éviction.
Un dernier
point que nous voulons vous entretenir : la problématique des loyers qui
ne sont pas au prix du marché. La
position de notre association est très claire, on s'associe ouvertement à toute
mesure encourageant et protégeant le droit au maintien dans les lieux.
Nos règles touchant le concept du maintien dans les lieux ont fait leurs
preuves, mais pouvons-nous concevoir
aujourd'hui, en 2015, que, lorsque le logement se libère, la notion de liberté
contractuelle puisse s'appliquer au prix du marché? Moi, en tant que propriétaire,
je ne force personne à signer un bail, c'est du gré à gré, et ce sont des adultes consentants. Également, le
concept de cession de bail devrait contenir un droit de résiliation de bail
pour le propriétaire, et ce, sans pénalité
pour le locataire. Ceci empêchera le commerce immoral des baux. On a soulevé
la question au préalable, à savoir :
Est-ce que ça va avoir une incidence sur le prix des immeubles? En changeant
juste le concept de cession de bail,
on vient de sécuriser les locataires qu'un bail qui est en deçà du marché ne
pourra pas être cédé, donc vous aurez toujours le choix de le reprendre.
Sur ce, merci de m'avoir entendu.
• (16 heures) •
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange. Mme la
députée de Gouin, pour quatre minutes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. Je remarque dans votre
mémoire — j'ai
le bon mémoire — que
vous regroupez quelque 400 membres pour un parc locatif — et on
parle de la région du Grand Montréal — de
100 000 logements. C'est quand
même considérable. Donc, vous avez certainement, parmi vos membres, des
propriétaires qui ont plusieurs immeubles.
M. Perron (Christian) :
Effectivement.
Mme David (Gouin) : Effectivement.
M. Perron (Christian) : On parle de
grosses compagnies et de petits propriétaires.
Mme David
(Gouin) : D'accord. Je veux vous dire d'entrée de jeu qu'à la page 5
de votre mémoire vous dites que le projet de loi n° 492 propose que la
personne aînée doit être relogée dans le même quartier. Non; à Montréal
en particulier, c'est à cinq kilomètres du
lieu de résidence; ailleurs, sept kilomètres; et puis ensuite, pour les régions
plus rurales, dans la même MRC. Donc, ça n'est pas tout à fait exact, ce
que vous avez mentionné.
Il y a
quelque chose qui m'interpelle aussi, c'est que dans votre mémoire, déjà,
d'emblée, là, vous dites : Écoutez, vraiment, «la reprise de possession et l'éviction — je cite, là — sont des mesures d'exception extrêmement
restreintes comportant des règles
précises et contraignantes». Et vous réitérez ça en page 7. Pourtant, ce
que nous, nous voyons sur le terrain, c'est que de très nombreux locataires, et
particulièrement chez les personnes aînées, ne vont même pas à la Régie du
logement, et voilà pourquoi, d'ailleurs, il
y a si peu de cas recensés. En fait, ces personnes-là acceptent le
dédommagement qui est donné par le
propriétaire, se font évincer et finalement se retrouvent dans des loyers plus
chers qu'auparavant. Puis moi, je vous parle de personnes aînées, très
souvent des femmes seules et pauvres.
Donc, ce
que j'ai à vous demander, c'est la chose suivante : Votre recommandation
n° 3, bien entendu, on est d'accord, mais de penser que ce qui va résoudre le problème du déménagement d'un
ou une aînée, là, c'est de dire : Bien, la personne va être prioritaire sur les allocations de loyer
modique... est-ce que vous savez qu'à Montréal il y a 28 000 personnes en
attente d'un HLM, 28 000 personnes, et
toutes des personnes avec de grandes difficultés? Alors, j'ai de la difficulté
à voir comment votre proposition peut
être applicable et je me demande sérieusement pourquoi, compte tenu d'un
relatif petit nombre de personnes aînées
que l'on décrit dans le projet de loi, aînés, pauvres et/ou ayant un
handicap... vraiment, là, on
circonscrit la question, mais pourquoi les propriétaires n'accepteraient-ils
pas de prendre, oui, une responsabilité sociale, c'est-à-dire ou bien de les garder dans leur immeuble ou bien, s'ils
tiennent à tout prix à ce qu'ils déménagent, les aider à trouver un logement? Et, s'il n'y a pas entente
entre locataire et propriétaire, ce sera à la régie de trancher. Il y a moyen
de rendre ce processus-là simple, clair et applicable.
M. Perron (Christian) : Bien,
premièrement...
Le Président (M. Auger) : M. Perron,
il reste une minute.
M. Perron
(Christian) : Alors,
premièrement, je pense que les offices municipaux sont plus outillés que nous
pour trouver un logement qu'un propriétaire.
S'il y a une liste d'attente aussi longue pour recevoir un HLM, l'office
municipal pourra toujours aller sur le marché privé et donner une aide à la
personne s'il y a une différence de loyer. Ça réglerait le problème. Si l'office municipal ne trouve pas sur le marché
privé, pourquoi est-ce qu'un propriétaire privé trouverait, lui?
Mme David
(Gouin) : D'accord. Et, si, effectivement, le... voyons, l'office
municipal d'habitation ne trouve pas de
logement dans un rayon de cinq kilomètres, alors, on fait quoi, là? La personne
aînée se retrouve devant quoi? Vous le dites dans votre mémoire, son
loyer est souvent un peu en bas du prix du marché, c'est vrai. N'est-ce pas une
bonne chose pour les personnes aînées pauvres
que de pouvoir payer un prix décent pour leur logement? On ne parle pas ici
d'être... comment je dirais ça, on ne parle pas de biens de
consommation, on parle de se loger.
Le
Président (M. Auger) : Donc, c'est tout le temps que nous avions pour cet échange. M. le ministre, vous voulez
que M. Perron...
M. Moreau : Bien, peut-être que, M. Perron, qui avait l'air de se lancer dans
une respiration — ça
devait être pour répondre — on pourrait lui laisser prendre son air.
Le Président (M. Auger) : Avec
plaisir. M. Perron.
M. Perron
(Christian) : J'ai répondu à
la question, je me répète. C'est que, si l'office municipal ne trouve pas sur le marché privé
un logement convenable, pourquoi est-ce qu'un propriétaire en trouverait un;
d'une chose? Si le logement est plus cher,
ce que je vous dis, c'est une aide à la personne pour combler la différence.
Alors, ça ne changera rien pour la
personne âgée. Alors, c'est un petit peu ça, la réponse en question. Et, si
j'ai besoin du logement en haut, c'est peut-être
parce que j'ai moi-même une nécessité, j'ai peut-être un parent handicapé qui
aurait besoin de rester au-dessus de
moi, un enfant handicapé au-dessus de moi. Personnellement, à 19 ans, je suis
tombé handicapé, mon père m'a trouvé le
logement au-dessus de chez nous, d'accord? Alors, je pense que, oui, il y a le
problème de la personne âgée, mais, si je reprends un logement pour
moi-même, il y a une raison probablement sérieuse.
Le Président (M. Auger) : M. le
ministre. 11 min 30 s, à peu près.
M. Moreau :
Bien, merci, M. le Président, vous êtes généreux. Alors, M. Perron, M.
Gauthier, à mon tour de vous souhaiter
la bienvenue. J'allais dire en blague : Je vais poser toutes mes questions
à M. Gauthier, il n'a pas fait un son encore,
puis c'est tout M. Perron qui travaille pour l'Association des propriétaires
d'appartements du Grand Montréal. Mais c'est une blague. Sentez-vous bien
à l'aise de répondre, l'un ou l'autre.
Alors,
d'abord, un, M. Perron, vous avez suggéré de modifier l'article 23. Moi, je
suis à la page 13 de votre mémoire. Vous
suggérez de modifier l'article 23, ça rejoint un peu ce que Me Soucy nous
disait juste avant vous. Donc, un, ça, ça crée une priorité sur la liste des logements disponibles à l'office
municipal d'habitation ou dans les habitations à loyer modique, ça ne
règle pas tous les problèmes. Moi, la façon dont je vois le débat se
dessiner — aujourd'hui,
là, vous êtes le quatrième groupe entendu — il y a deux courants :
alors, il y a celui qui dit : Il faut avoir des mesures pour le maintien dans les lieux — c'est un peu ce que vise le projet de loi
qui est sur la table; puis vous, vous dites, puis je ne veux pas être réducteur dans les propos — quand on résume la pensée de quelqu'un
d'autre, on peut souvent avoir l'air réducteur,
ce n'est pas mon intention — vous dites : Regardez, ces cas-là ne
sont pas légion — ce que
conteste la députée de Gouin. Elle
dit : Moi, je vois que la statistique que vous avez à la régie ne reflète
pas la réalité sur le terrain. J'ai beaucoup de respect pour l'opinion qu'elle émet, mais là vous, vous dites :
Néanmoins, ce qu'il faut faire, c'est taper sur la tête des mécréants qui, de façon
détournée, essaieraient d'utiliser la loi pour une reprise, en ayant des
amendes ou des conséquences plus salées que ce qui existe à l'heure
actuelle plutôt que privilégier le maintien dans les lieux.
Je
vais vous poser une question — je sais qu'elle est difficile, parce que
c'est celle à laquelle on va avoir à répondre, nous : Est-ce qu'il n'y pas un équilibre entre les deux,
c'est-à-dire, oui, taper sur la tête des méchants propriétaires, parce qu'il y en a, et manifestement vous n'en faites
pas partie — en fait,
vous n'avez pas l'air de ça — et en même temps essayer d'avoir une mesure qui sécuriserait le maintien
dans les lieux, lorsqu'on est dans une situation de fragilité, là, sans la
définir plus précisément? On fera le
travail, les légistes pourront nous suggérer des définitions, et tout ça. Mais
ce que Mme la députée de Gouin dit,
elle dit : Moi, je constate qu'un jour — puis je pense que notre collègue de la CAQ
dit la même chose — les chefs de parti politique au Québec en viennent
à la conclusion qu'il y a une situation de fragilité, à un moment donné dans la vie, qui fait que la protection pour
le maintien dans les lieux devrait être améliorée par rapport à ce qu'elle
est. Moi, je vous suis quand vous
dites : Quand vous en accrochez un, là, faites un exemple, ça fait que,
comme ça, les autres vont le regarder
deux, trois fois sécher au soleil, ils vont peut-être avoir moins le goût
d'essayer ça. Mais il n'y a pas
quelque chose auquel vous avez pu réfléchir — vous êtes propriétaires d'un grand nombre de
logements à Montréal — il n'y a pas quelque
chose, là, vous, là, pour le maintien dans les lieux qui vous a accroché en
disant : Oui, dans certains cas, il faudrait peut-être en faire un
peu plus qu'on en fait là?
Le Président (M.
Auger) : M. Perron.
• (16 h 10) •
M. Perron (Christian) : Bien, écoutez, je pense que le règlement, il est
déjà bien balisé. Quand je fais une reprise de logement pour loger mes proches, le maintien dans les lieux, je ne
peux pas faire grand-chose. C'est parce que moi, je n'aurai jamais à utiliser ça. J'ai plusieurs
immeubles. Je n'aurai jamais besoin d'évincer quelqu'un ou de reprendre un logement.
On
parle ici surtout de petits propriétaires qui n'ont pas 50 unités, qui n'en ont
pas 25, qui n'en ont habituellement
que deux : le leur et celui d'en haut.
Or, s'ils en ont besoin, le maintien dans les lieux est impossible pour cette
personne-là. Je pense que les propositions qu'on a mises de l'avant répondent très bien à l'objectif,
c'est qu'on reloge la personne, que ce
soit dans un HLM ou dans un logement privé, avec de l'aide à la personne, de ce
côté-là. Côté du mécréant, quelqu'un
qui veut arriver à faire quelque chose de tout croche, il va toujours y arriver, mais il faut que ça lui coûte plus
cher, tout simplement. Ce
n'est pas parce qu'on a mis des limites de vitesse sur les autoroutes que le
monde les respecte, nécessairement. Ça fait
que c'est un petit pareil dans le logement. C'est sûr que, si on met
15 000 $, 20 000 $ d'amende plus les dommages-intérêts, ça se peut que ça n'empêchera pas la
personne, mais il va lui en rester moins dans les poches, par exemple.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : O.K. Je
vais vous poser une question — vous
êtes propriétaires de plusieurs logements : À combien pourrait se chiffrer le bénéfice qu'une personne
qui outrepasse les obligations que lui fait la loi pourrait empocher et qui
l'inciterait à aller outre au droit de la personne au maintien dans les lieux?
Ça varie entre quoi et quoi, d'après vous?
Le Président (M.
Auger) : M. Gauthier.
M.
Gauthier (Martin) : Il y a
deux situations possibles. Dans le cas d'une reprise qui est une
fausse reprise, c'est un ajustement
de loyer au loyer de marché. Donc, dans un cas comme ça, on peut possiblement
penser à un bénéfice de l'ordre de... possiblement jusqu'à 20 % de
loyer de différence...
M. Moreau :
De plus.
M. Gauthier
(Martin) : ...de normal, O.K.? Bon. Si vous êtes dans l'immobilier
puis vous investissez dans l'immobilier,
vous savez qu'un immeuble, ça vaut 20 fois les bénéfices. Donc, si vous avez
ajouté 20 % à votre loyer, qui
était de 400 $, puis c'est rendu 500 $, bien vous venez de faire
100 $ du mois fois 12, puis multipliez ça par 20, puis voici la
valeur de votre immeuble qui vient d'augmenter pas mal. Ça, c'est dans le cas
d'une reprise.
M.
Moreau : Donc, vous suggéreriez qu'une pénalité, si je suis
votre collègue, soit égale ou supérieure à cet ordre de grandeur là.
M. Gauthier
(Martin) : Largement supérieure dans ce cas-ci pour empêcher...
M. Moreau :
À 20 %. Mettons, on dit : 35 %, là, on commence à pincer.
M.
Gauthier (Martin) : Oui,
oui, ça pince. Dans le cas d'un changement de vocation d'un immeuble — mais
là on parle de gros argent, là — les
pénalités doivent l'être encore plus, parce
que, lorsqu'on change de vocation d'un immeuble,
bien c'est possiblement parce qu'on peut faire 20 $ du pied carré avec un
immeuble multirésidentiel puis 35 $ du pied carré avec un immeuble commercial s'il est bien localisé. Dans
ce cas-là, on est allé chercher beaucoup de valeur. Ça fait que, là,
bien, ça dépend du pied carré que vous avez.
M.
Moreau : À quoi devrait servir l'amende, à votre avis? Si on
suit votre suggestion puis on dit : Très bien, il y aura une amende à 35 %, plus les dommages punitifs, à qui devrait servir l'amende, à
quoi devrait servir l'amende? Est-ce qu'on la verse à la victime, ainsi
que les dommages punitifs, ou on crée un fonds d'indemnisation? On fait quoi
avec ça?
Le Président (M.
Auger) : M. Gauthier.
M.
Gauthier (Martin) : J'avais
une idée — peut-être que Christian en avait une autre. On avait discuté, en équipe,
de démarrer un fonds éventuellement qui pourrait permettre d'éduquer et aussi
d'assister les personnes âgées dans la démarche
et de les éduquer de leurs droits et de quelles démarches ils doivent prendre
et faire un suivi sur ces dossiers-là à leur place.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Maintenant,
vous dites, bon, très clairement : On ne peut pas aller vers des mesures de
maintien dans les lieux, parce que — particulièrement, ce que vous évoquez, là — c'est-à-dire, le propriétaire d'un duplex, lui, il veut le reprendre pour sa famille. Alors, c'est un peu
le jeu de la chaise musicale : il
y a une chaise, mais il y a
deux personnes à asseoir dessus. Vous dites : L'État devrait
favoriser l'exercice du droit de propriété, et donc que la destination soit prioritairement choisie par le propriétaire dans
le cadre de l'exercice de son droit de propriété, mais faites en sorte que,
deux choses, un, on mette prioritairement à
l'usage des personnes âgées ou en situation de vulnérabilité la liste des logements disponibles dans les HLM, ou dans le réseau
public, ou dans les réseaux d'accueil, et, deux, prenez des mesures coercitives
extrêmement sévères à l'égard de ceux qui
viendraient enfreindre l'exercice correct du droit de reprise ou d'éviction.
C'est ça?
Le Président (M.
Auger) : M. Perron.
M. Perron
(Christian) : Effectivement. En mettant des moyens coercitifs, on va
réduire le nombre de cas, premièrement. Et, déjà
qu'on sait qu'il y a, quoi, une soixantaine de cas par année, bien, si
vous réduisez tous ceux qui sont
frauduleux, on va couper la liste énormément. De ce côté-là, je pense que les offices
municipaux vont être capables de répondre
à la demande. Et, je l'ai dit tantôt, s'il n'y a pas de place dans leurs
immeubles, qu'ils viennent dans le privé et qu'ils donnent une aide à la
personne. C'est sûr qu'ils vont trouver, tôt ou tard, un logement pour cette
personne-là.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Merci, M. le Président. Dans les cas de changement de vocation, là, ça peut être beaucoup
plus payant que 35 % d'écart
entre le revenu. Est-ce que, dans un cas comme celui-là... Vous avez une mesure
très intéressante pour le suivi,
là, qui est le paragraphe 3 de la page 13, là, en disant : L'obligation
pour les nouveaux locataires ayant obtenu... de faire parvenir à la
régie, pour une période de deux ans, une preuve de résidence.
Dans
les cas de changement de vocation, on pourrait adopter ça et adapter cette recommandation-là. Et est-ce que vous seriez favorables à une mesure où l'évaluation
du bénéfice frauduleux soit évaluée par la Régie du logement et qu'il y ait une
compensation à 100 % du bénéfice? Est-ce que vous seriez favorables à une
mesure semblable?
Le Président (M.
Auger) : M. Perron.
M. Perron (Christian) : Écoutez, à partir du moment où est-ce qu'on parle de
fraude, c'est tolérance zéro. Ça nous
fait mal à nous, c'est à la personne de payer. Comme j'ai dit tantôt, que ce
soit une éviction ou une reprise, on ouvre automatiquement... et c'est obligatoire pour tout le monde d'ouvrir un dossier à la Régie du logement dans lequel on va mettre les papiers, preuves de résidence. Dans le
cas d'une éviction, ça va être le permis de la ville, ça va être les plans
d'architecte et, nécessairement, à la fin des travaux, ça devra être le
certificat d'occupation.
Le Président (M.
Auger) : Un dernier 30 secondes, M. le ministre.
M.
Moreau : Non, ça va.
Je vais laisser mon temps aux représentants de l'association s'ils souhaitent
ajouter quoi que ce soit.
Le
Président (M. Auger) : M.
Perron, M. Gauthier, ça vous va? Donc, nous allons poursuivre maintenant
avec Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour une période de
7 min 30 s.
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Je pense que ce qui est intéressant, c'est que vous arrivez avec
des solutions, des solutions pratico-pratiques. On voit que le ministre
a même cheminé avec vous sur des propositions que vous faites, et je
pense qu'il y a quelque chose là qui donne des solutions.
Moi,
je voudrais venir à votre article 6 — on
n'en a pas parlé — qui
est «de modifier l'article 1870 du Code civil du Québec pour permettre un droit de résiliation du bail
par le propriétaire sans pénalité pour le locataire cédant». Donc, ce
que je comprends, c'est que, lorsque je veux... dans le fond, c'est qu'un
locataire peut actuellement sous-louer son logement
et, à ce moment-là, il a juste à... il est alors tenu d'aviser le locateur de
son intention. Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez qu'est-ce que vous
voulez exactement par cet article 6 là.
Le Président (M.
Auger) : M. Perron.
M. Perron
(Christian) : Alors, présentement... vous avez parlé de sous-location, mais on parle de cession ici,
hein, c'est deux choses différentes. La
cession, présentement, ce qui arrive, c'est qu'une personne qui veut
déménager... alors c'était l'idée du
législateur de pouvoir... qu'un locataire puisse se départir de son bail. Il
déménage, il change d'emploi, on veut
se départir de son bail facilement. Alors, le législateur a prévu que la personne
pouvait céder son bail à quelqu'un
qui va le remplacer. Nous, ce que l'on
demande, c'est que, quelqu'un qui me demande une cession, je puisse immédiatement lui dire : Ne cherche pas de cessionnaire, je reprends le bail, et
sans pénalité. Alors, c'est un petit
peu ça, l'idée en arrière de ça.
Mme Poirier : O.K. Dans le
fond — pour
être pratico-pratique, là — on
est en plein milieu du bail, donc, on est peut-être en janvier, par exemple, la
personne doit quitter son logement le mois prochain, parce qu'elle change d'emploi — dans
votre exemple — et,
en principe, pour assurer le paiement de son obligation, qui est son bail,
devrait sous-louer son logement pour être capable d'assumer son bail jusqu'à la
fin ou demander un trois mois pour quitter, dans toutes sortes de
moyens, faire un arrangement avec son propriétaire.
Ce que vous,
vous dites, c'est qu'au lieu de lui donner l'obligation de sous-louer ou du
moins la possibilité de sous-louer,
si la personne est volontaire, vous êtes prêts à mettre fin au bail au moment
demandé, sans pénalité, parce qu'en principe il devrait vous payer au
moins jusqu'à la fin du bail ou au moins trois mois, là, dans les modalités prévues.
Est-ce que c'est de ça dont on parle? Parce que je veux juste qu'on soit clair
pour savoir de quoi on parle.
• (16 h 20) •
Le Président (M. Auger) : M. Perron.
M. Perron
(Christian) : Alors là, il
faut différencier sous-location et cession de bail, qui sont deux choses
différentes. La sous-location, c'est
parce que la personne pense revenir dans son logement, donc, elle sous-loue le
logement et tente de revenir plus
tard. La cession de bail, c'est autre chose, c'est : justement, la
personne doit quitter pour une raison x et elle trouve quelqu'un pour la remplacer. Nous, ce qu'on demande, c'est que la
personne qui veut céder son bail nous avise en disant : Je désire céder mon bail, voulez-vous le casser
immédiatement ou je dois trouver un cessionnaire? Alors, à ce moment-là, le locataire aura deux choix, et le
propriétaire également. Il pourra dire : Je reprends ton bail, même si on
est au mois de janvier, je reprends ton
bail, tu n'as pas de pénalité. Merci, bonjour. Ou bien : Non, trouve un
cessionnaire comme la loi le stipule présentement.
Le Président (M. Auger) : Mme la
députée.
Mme Poirier : Pourquoi des
gens devraient être contre ça?
Le Président (M. Auger) : M. Perron.
M. Perron (Christian) : Bien, je ne
vois pas pourquoi le législateur serait contre — je pense que c'est
assez facile — et d'autant plus qu'on a parlé tantôt,
l'association avant moi, qu'il y a du monde qui aurait peur de louer à des
personnes âgées parce qu'ils seraient pris
avec à un moment donné. Eh bien, en instaurant cette règle-là, on dissiperait
tout problème. Alors, si j'ai une personne
âgée que ça fait 20 ans qu'elle est chez nous... Parce que ça arrive
aujourd'hui, la vente des baux. On
marchandise les baux présentement. Alors, si j'ai 300 $ en bas du loyer
marchand, si vous allez sur Internet,
vous allez trouver quelqu'un qui va dire : Écoute, moi, pour
2 000 $, je te cède mon bail. Alors, on aimerait ça éviter ça
également.
Mme
Poirier : Si on fait référence, parce qu'on y a fait référence
tout à l'heure, au projet de loi qu'on avait adopté avec l'ex-ministre des Aînés, Mme Blais, ça avait
été toute une bataille de la part des propriétaires de céder le bail finalement
au propriétaire avec deux mois de pénalité.
Vous, vous dites : Moi, sans pénalité, je suis prêt à le prendre.
J'aimerais ça vous suivre, là, comme association de propriétaires,
peut-être pas vous autres, mais l'ensemble de l'oeuvre.
Le Président (M. Auger) : M. Perron.
M. Perron
(Christian) : Alors,
effectivement, l'APAGM n'a pas lancé des cris d'alarme à ce niveau-là.
Peut-être d'autres, mais pas nous.
Par contre, dans un cas pratique, ce qui pourrait arriver au mois de janvier...
Parce que vous savez que, quand une
personne âgée reçoit un logement d'un office municipal, ou peu importe, ils
décident : C'est le 1er janvier que
tu déménages, il n'y a pas de période de grâce, là, on ne dit pas : Du
1er décembre au 30 mars, tu ne peux pas déménager. Non, non, c'est le 1er janvier que tu déménages.
Que tu aies 70, 75 ans, ce n'est pas grave, c'est là que tu déménages.
Donc, ce que
vous me parlez là, la personne aurait quand même un choix de plus, elle
pourrait dire : Écoute, je te
paie deux mois, je casse mon bail, salut, bonjour, si le propriétaire ne
reprend pas le bail. Elle ne sera pas obligée... ou elle pourrait
trouver un cessionnaire. Alors, elle aurait ces trois choix-là, ce qui est
avantageux.
Le Président (M. Auger) : Mme la
députée.
Mme
Poirier : Je veux juste faire un petit peu de pouce sur ce que
vous avez dit. Je trouve intéressant ce que vous proposez à l'article 23, mais vous ajoutez aussi, dans le fond, ce qu'on
appelle les suppléments au loyer. Dans le fond, ce que
vous dites, c'est qu'on pourrait aussi donner à l'intérieur de ça une
possibilité que l'office municipal puisse aller sur le marché locatif privé avec un supplément du loyer si on manque de
logements sociaux. C'est ce que vous nous dites.
Le Président (M. Auger) :
M. Perron.
M. Perron (Christian) : Voilà. À moins que je me trompe, c'est
l'intention du ministre d'aider à la personne, plutôt qu'une aide à la pierre. Et ce seraient des cas idéaux pour faire
ça, effectivement. On trouverait nécessairement un logement facile à nos
personnes âgées.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée, il y a encore 45 secondes à votre
disposition. Ça va?
Mme Poirier :
Merci. C'est beau.
Le
Président (M. Auger) : Donc, nous allons poursuivre avec la deuxième
opposition, M. le député de Borduas, bien
sûr, en vous rappelant que nous sommes avec l'Association des propriétaires
d'appartements du Grand Montréal.
Une voix :
...
Le Président (M.
Auger) : C'est une blague.
M. Perron
(Christian) : J'en ai une copie si...
M.
Jolin-Barrette : Merci, M. le Président, c'est ce que je voulais
valider. J'ai le bon mémoire cette fois-ci.
Le Président (M.
Auger) : M. le député, c'est à vous la parole.
M. Jolin-Barrette : Merci. Bonjour, messieurs. À la page 13 de votre mémoire, au
point 5, vous indiquez que vous souhaitez davantage de liberté
contractuelle entre les parties, donc, vous voulez qu'on supprime certaines
règles qu'il y a dans le Code civil du
Québec. C'est quand même un mécanisme de protection qu'il y a pour les
locataires de savoir, le prix du
bail, à l'époque, quel montant était-il. Je comprends que pour les
propriétaires ça devient un avantage, selon
le marché, de hausser le loyer. Vous ne voyez pas une certaine problématique à ça? Supposons qu'on se retrouve
dans un marché où il n'y a pas beaucoup de logements disponibles.
Le Président (M.
Auger) : M. Perron.
M. Perron
(Christian) : Écoutez, présentement, si on regarde le marché, l'offre
et la demande est toujours à l'avantage du
locataire. Un propriétaire peut baisser le prix de son loyer. Si on se
rappelle, début des années 90 — je ne suis pas vieux, mais j'étais déjà dans le marché — en 1990, on baissait les loyers, on donnait
des poêles, des frigidaires, Brault & Martineau
nous aimait beaucoup, on baissait les prix. Mais, quand vient le temps où
est-ce qu'il y a un manque de
logements, on n'est pas capables de reprendre ce retard-là, O.K.? Alors, la
liberté contractuelle, ce que ça fait... On est d'accord avec le maintien dans les lieux, on est clairs là-dessus, mais,
quand un logement se libère, que je veux le mettre aux normes, ce sont des grosses sommes que
j'investis dans mes logements. Et, si je me fie à ce que la Régie du logement
me donne en fixation de loyer, c'est non
rentable. Aussi bien laisser mon logement dépérir que de le rénover si je suis
pour garder l'ancien loyer.
Si
vous êtes au courant, aujourd'hui, la Régie du logement, si je fais des travaux
majeurs, je... ça prend 35 ans avant de me faire rembourser, et ce, sans intérêt, d'accord? Et on ne parle même pas d'inflation là-dessus.
Donc, ça, il faut changer ça.
J'aimerais ça rencontrer le ministre à ce niveau-là, mais c'est ça. Ça fait que la
liberté contractuelle... je pense que, quand un logement se libère, ce sont des
adultes consentants. Probablement que nous, quand on a un logement que ça fait 20 ans que la personne est là, on va
le rénover, on va le mettre beau, on va le mettre aux normes. Ça va être
bon pour le monde d'avoir un bel environnement de vie. Sûrement qu'il y a un
coût à ça.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Donc, vous ne voudriez plus que la personne, le futur locataire, puisse
contester le nouveau prix devant les tribunaux, devant la Régie du
logement?
M. Perron
(Christian) : Ah! effectivement. C'est ça, la liberté contractuelle.
M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau de vos demandes, vous souhaitez... et
puis là on va parler davantage de la Régie
du logement, vous souhaitez que ça soit maintenant les greffiers qui puissent
gérer les dossiers, certains dossiers. Pouvez-vous nous parler de cette
demande-là — à
l'annexe 2, la page 15 — dans le cadre de non-paiement de loyer?
Le Président (M.
Auger) : M. Gauthier? M. Perron.
M. Perron (Christian) : Pouvez-vous
préciser votre question?
M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, concrètement, à la page 15,
vous souhaitez l'élargissement des pouvoirs des greffiers spéciaux.
M. Perron (Christian) : O.K. Oui. C'est surtout en ce qui a trait au
non-paiement de loyer. Alors, aujourd'hui,
on a un régisseur qui est payé aux alentours de 120 000 $ pour faire
une cause de non-paiement de loyer qui prend habituellement cinq minutes parce que la partie adverse ne se
présente pas. Alors, ce qu'on voudrait, ce sont des greffiers spéciaux avec un salaire moindre qui vont pouvoir
passer plus de causes. La Régie du
logement va économiser sur les
salaires et ils vont peut-être pouvoir engager plus de monde pour passer les
causes plus rapidement.
Le Président (M.
Auger) : M. le député de Borduas, 1 min 30 s.
M. Jolin-Barrette : Donc, ce que vous souhaitez,
c'est davantage de ressources à la Régie
du logement, mais pas
nécessairement... en ayant un coût moindre.
M. Perron (Christian) : Bien, je
pense que... bien oui, ça va être un
coût moindre. Si on prend les régisseurs et qu'on les met dans des causes civiles, ça va raccourcir la durée avant
d'être entendus. J'ai présentement une cause de toilette que ça fait 24 mois que j'attends après, parce que
la madame avait bouché sa toilette. C'est inconcevable. Donc, je pense que,
si on prenait les ressources qu'on a présentement et qu'on les mettait à la bonne place, on augmenterait
l'efficience de la Régie du logement.
Le Président (M.
Auger) : M. le député, une minute.
M. Jolin-Barrette : Sur la question de la preuve d'assurance habitation. Vous souhaitez
qu'on oblige les locataires à fournir une preuve d'assurance habitation?
M. Perron (Christian) : Ce serait une bonne chose, parce qu'en hiver on
voit souvent des cas dramatiques de personnes
où est-ce qu'il y a un feu qui perdent tout. Moi, mon assurance... ce qu'il
faut comprendre, si c'est un autre locataire
qui met le feu à la bâtisse, mon assurance va juste dédommager la bâtisse, et
la personne qui n'est pas assurée va
faire face à des accusations pour tous les dégâts qui ont été causés aux autres
locataires. Donc, ils n'ont pas nécessairement les
moyens de payer, donc ça tombe à l'eau, mais ça préviendrait plusieurs
catastrophes pour les personnes d'avoir une assurance.
Si
tout le monde adhérait à ça, nous, comme propriétaires, nos
assurances, probablement, au lieu d'augmenter de façon
exponentielle à chaque année, elles seraient plus stables.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions. Donc, je tiens à vous remercier,
MM. Perron et Gauthier, pour votre participation aux travaux de l'Assemblée. Je
vais suspendre les travaux quelques instants pour faire place au prochain
groupe.
(Suspension de la séance à
16 h 30)
(Reprise à 16 h 35)
Le
Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux, et je souhaite
maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise de
défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé puis par la suite nous allons procéder à une période d'échange. Dans un
premier temps, bien sûr, vous présenter, par la suite débuter votre
présentation.
Association
québécoise de défense des droits des
personnes retraitées et préretraitées (AQDR)
Mme Gagnon (Judith) : Alors, merci de nous avoir accueillis ici pour parler de ce projet de
loi là. Je me nomme, je suis Judith
Gagnon, je suis présidente de l'AQDR nationale et aussi coordonnatrice d'un
projet qui s'appelle Coup de pouce
aux aînés, dans la capitale nationale, d'une de nos AQDR, l'AQDR-Québec, qui
accompagne les aînés vulnérables. Je
suis accompagnée par M. René Bélanger, qui est aussi membre de l'AQDR nationale
et qui est président de l'AQDR du Bas-Saint-Laurent.
Alors,
à prime abord, on accueille favorablement le projet de loi n° 492 et on
salue l'initiative de Québec solidaire qui
vise à protéger les droits des locataires aînés. Pourquoi on fait ça? D'abord,
vous connaissez l'AQDR, je vais dire quelques mots. Nous sommes des
bénévoles qui faisons partie d'une association de défense collective des droits
des personnes aînées. On a 45 sections
à travers le Québec, 27 000 membres, et notre but ultime, c'est la défense
des droits des aînés, et on a une
vision dynamique aussi de cette défense des droits là parce qu'on la fait
nous-mêmes. On est aînés, mais on
participe collectivement à cette défense des droits là, et ce qu'on veut
s'assurer, c'est la protection des personnes aînées et qu'il y ait des
milieux de vie sécuritaires aussi.
Alors,
je n'aborderai pas les questions qui ont été abordées par la première personne
de l'après-midi, là, qui a parlé beaucoup
de droits, moi, je vais y aller plus sur l'aspect social. L'habitat, pour nous,
c'est important, c'est important pour tout le monde, pas juste pour les aînés, et
particulièrement la notion d'habitat, le logement pour les personnes aînées,
c'est extrêmement important parce que
plus tu vieillis, plus tu passes ton temps dans ton logement et plus... si tu
déménages ou si... tu te crées aussi
des liens tout autour, des liens pour te faire aider, parce que souvent tu as
des petites incapacités, et c'est
très important, le domicile, les lieux. Alors, on a vu dans les données que le
déménagement des personnes aînées, c'est très peu par rapport... de 75
ans et plus et même de 55 à 64 ans, c'est très peu comparativement aux autres,
et ça s'explique pour cette raison-là.
Alors, les personnes aînées, la plupart du temps, qui sont en logement et qui
rencontrent les critères visés par le
projet de loi sont des personnes aînées qui sont pauvres, évidemment, et qui ne
sont pas très en forme, qui
présentent un handicap. Ces gens-là, quand on les déloge, ça a un impact majeur
sur leur vie, et, je vous dirais, comme
impact, ça peut même... à un moment donné, c'est un fil mince entre l'autonomie
et la non-autonomie, ça peut même les
faire basculer dans la non-autonomie. Et souvent ces gens-là sont seuls, ils
sont isolés et ils n'ont pas de famille pour leur trouver de logement.
Alors, c'est très important de le souligner.
C'est
important aussi de soulever qu'en 2015 il y a 17 % de la population qui a
65 ans et plus puis on va avoir un
boom, hein, en 2061, on va en avoir 28 %. Alors, c'est une problématique.
C'est une problématique, le vieillissement de la population, puis il faut
tenir compte des aînés plus vulnérables.
Alors, nous, quand on
a vu le projet de loi... Je ne parlerai pas, ce qui est dans notre mémoire, de
la reprise du logement, de l'éviction. Mes
prédécesseurs en ont parlé amplement. On a vu que l'article 1967.1, avec la
modification qui nous est proposée,
vient compléter l'article 1967. C'est la première fois qu'on voit apparaître
cette notion de locataire aîné
vulnérable, et on considère que c'est drôlement important parce que ça existe,
ces aînés vulnérables là, et c'est aussi ces aînés vulnérables là qui ne vont pas à la Régie du logement, parce
qu'ils ne peuvent pas, ils ont de la misère, ils ne savent pas comment
se défendre puis ça les stresse aussi, et qui ont besoin de règles pour les
protéger.
• (16 h 40) •
Alors,
c'est important. Nous, ce qu'on a vu... quand on a vu la modification qui est
proposée, on s'est dit : Bon, O.K.,
on rentre dans la loi la question d'aînés vulnérables, on codifie ça, on pense
à eux, on fait une section spéciale pour eux pour essayer de leur aider et aussi d'éviter, des fois, que le fil
mince entre l'autonomie et la non-autonomie soit brisé. Alors, on est
conscients de ça. C'est une problématique sociale qui va aller de plus en plus
loin.
Par
ailleurs, aussi, on a un certain questionnement, parce qu'on regarde les
choses. Il ne faudrait surtout pas que ça
discrimine, le projet de loi, les personnes âgées de 65 ans et plus, que, quand
un propriétaire les voit venir, il dise : Ah mon Dieu! pas dans ma cour, on n'en veut pas qui nous
causent des problèmes. Et, tu sais, on est conscients de ça, là, on est conscients, on sait que ça peut être une voie
de discrimination. Puis on veut aussi avoir des précisions sur l'application,
parce que, si moi, je loue un logement à 64
ans et puis je le loue pour deux ans, dans le cours de mon bail, j'arrive à 65
ans, il m'arrive toutes sortes de
mauvais désagréments puis je m'en viens... je rentre dans les critères, est-ce
que ça va s'appliquer à moi? Alors, ça, c'est quand même quelque chose
d'important.
L'autre
aspect qu'on a évoqué... qui ont été précédemment évoqués, les propriétaires de
logement qui sont des aînés de 65 ans et plus. On est allés voir dans la
loi française, et ceux-là ne sont pas... En France, la présente mesure s'applique, ils ne sont pas visés par la mesure.
Alors, nous, on se questionnait là-dessus. On se questionnait aussi sur le
parc locatif de logements locatifs, parce
que, si on doit trouver un logement équivalent, il faut qu'il soit là, le
logement équivalent, puis il faut
regarder le parc de logements locatifs. Puis l'autre question, c'est qu'on se
dit : Il y a beaucoup de lois, il y a beaucoup de choses, mais, la
question des personnes âgées, la plupart ne veulent pas judiciariser leur problématique. C'est difficile pour eux. Ils ne
sont pas capables, ils sont souvent seuls puis ils acceptent souvent un peu
n'importe quoi de leur propriétaire.
Alors, je passe la
parole à M. Bélanger pour nos constats et recommandations.
Le
Président (M. Auger) : ...M. Bélanger, et je vous rappelle que vous
avez encore 2 min 30 s à votre disposition.
M.
Bélanger (René) : Parfait. Alors, le premier constat que l'on regarde,
c'est que les locateurs ne sont pas toujours sensibilisés à la réalité
des aînés vulnérables. Alors, notre recommandation dans ce sens, ce serait que
l'absence de connaissance ou de compassion
pourrait, à tout le moins, être particulièrement corrigée par l'inclusion d'une
norme qui tient compte des caractéristiques des aînés vulnérables.
Le
deuxième constat, c'est qu'on dit que les nouvelles dispositions de l'article
pourraient avoir comme conséquence que
moins de locateurs souhaiteraient louer un logement aux personnes de 65 ans et
plus, accentuant ainsi la discrimination à leur égard. On recommande donc qu'il faudrait s'assurer que l'article ne
vienne pas accentuer la discrimination à l'égard des personnes aînées. On constate aussi qu'il n'y a aucune information
sur les baux concernés par les nouvelles dispositions de la loi. Est-ce que l'article serait uniquement
pour les nouveaux baux locaux ou ceux ayant signé avant l'entrée en vigueur
de l'article? Alors, on recommande que
l'article devrait mentionner les baux concernés ainsi que ceux qui ne le sont
pas.
On
en a parlé tout à l'heure, de l'utilisation de l'expression «logement
équivalent». Alors, on aimerait que l'expression soit définie selon des critères précis, parce que c'est large. Un autre
constat, c'est que l'article ne révèle aucune disposition concernant les propriétaires âgés de 65 ans et
plus. On recommande donc de faire un portrait de la situation des locateurs propriétaires
âgés de 65 ans et plus et il devrait être réalisé avant l'adoption de
l'article.
Enfin, on constate le manque de logements sociaux.
C'est aussi un obstacle pour les personnes âgées en recherche de logement ainsi que pour les locateurs qui
désireront relocaliser ces personnes. On recommande donc : L'obligation
d'offrir un logement équivalent doit pouvoir
s'appuyer sur des données probantes, notamment celles sur le temps d'attente
relatif à l'octroi d'un logement à loyer
modique, ou encore la capacité des parcs immobiliers à répondre réalistement
aux exigences du nouvel article. Enfin, un changement de disposition
législative ne peut être efficace que si les personnes concernées
en sont informées, donc on recommande que la Commission de l'aménagement du
territoire assure cette responsabilité d'informer le public de ces changements.
En conclusion...
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup. Il reste 15 secondes, Mme Gagnon.
Mme Gagnon (Judith) : Alors,
écoutez, ce n'est pas une mesure qu'on doit voir d'une façon unique, en silo,
c'est une mesure qui est importante parce qu'on parle des aînés vulnérables
dans le Code civil, mais on doit l'avoir dans l'ensemble des mesures qui
doivent être prises pour aider et protéger les aînés vulnérables.
Le Président (M. Auger) : Merci
beaucoup, Mme Gagnon et M. Bélanger, pour votre exposé. Nous allons
commencer les échanges avec Mme la députée de Gouin pour quatre minutes.
Mme
David (Gouin) : Oui. Merci, M. le Président. Bien, d'abord, j'aimerais
répondre à une couple d'interrogations. Dans mon esprit, en tout cas — et, si ça n'est pas clair, bien il faudra le
clarifier, ça sert à ça aussi, les auditions — il est évident que, si une personne signe un bail et qu'elle atteint l'âge de
65 ans en cours de route et que, je répète toujours, c'est une personne à faibles revenus et/ou
handicapée, dans mon esprit, c'est évident que la loi s'applique. Mais, si ça
n'est pas suffisamment clair, bien il faudra le mettre vraiment par écrit.
Vous soulevez la question des propriétaires âgés
de 65 ans et plus, le ministre l'a déjà soulevée ce matin en faisant référence à la loi française. Pour être
tout à fait précis, là, il faut dire : Propriétaires de 65 ans — dans le cas de la France, c'est 70 ans, d'ailleurs — et à faibles revenus. C'est ça que dit la
loi française. Et est-ce que là-dessus il y aurait possibilité d'avoir un regard sur le projet de loi
que j'ai déposé? La réponse, c'est : Oui, il y a possibilité d'en
discuter. Troisièmement, «logement
équivalent» — je
pourrai peut-être vous faire part d'une recherche qu'on a fait faire et dans
laquelle il y a au moins une vingtaine de
cas recensés dans toute une jurisprudence de la Régie du logement où on définit
assez bien ce qu'est un logement équivalent — alors, ce n'est pas un
logement pareil, semblable en tous points, mais équivalent à partir d'un
certain nombre de critères. Donc, ça pourra évidemment être clarifié aussi.
Je suis
heureuse de voir que, dans l'ensemble, vous avez des questions très légitimes,
mais vous accueillez, comme vous l'avez dit, favorablement le projet de
loi. J'aimerais, pour le temps qu'il nous reste, vous entendre un peu sur la question de la discrimination. Je trouve ça assez
terrible, en fait, qu'on soit obligés — je sais qu'on l'est, là — de parler de discrimination possible à l'égard des aînés à cause d'une loi qui
viendrait baliser les évictions. Personnellement, je pends un peu pour acquis que la majorité des
propriétaires sont des gens qui ont du coeur et donc qui vont, oui, louer à une
personne aînée et qui, non, ne voudront pas l'évincer. Pourtant, vous craignez
la discrimination.
Une voix : Mme Gagnon.
Mme Gagnon
(Judith) : ...on la craint,
la discrimination, parce qu'on l'a vue, dans le sens... Je vous ai dit qu'on a
traité plusieurs cas à Québec. Ce n'est pas Montréal, mais quand même on
accompagne les aînés vulnérables. Et, à quelques
reprises, on accompagnait des aînés âgés qui avaient un peu des critères
similaires au projet de loi qui voulaient se chercher un logement, et ils avaient de la difficulté. Sans rien. Il
y avait quand même une certaine discrimination. Je vous le dis, on en a accompagné beaucoup, on le
fait, on travaille avec des psychoéducateurs, avec des gens en droit, on le
fait. On craint ça, mais on est quand même
pour la mesure. Il peut être possible que cette discrimination-là joue, mais
elle joue encore, elle joue à l'heure actuelle aussi.
Le Président (M. Auger) : Mme la
députée de Gouin, 45 secondes.
Mme David
(Gouin) : Merci, M. le Président. Est-ce que, dans ce cas-là, vous
parlez d'information, hein, aux aînés
pour leur dire que, mettons, il y aurait un projet de loi... il y aurait une
loi, en fait, qui, bon, leur serait favorable, et tout? Peut-être qu'on
devrait imaginer que cette campagne d'information rappelle aussi aux
propriétaires qu'ils ont l'obligation légale de répondre à la Charte des droits
et libertés, qui interdit la discrimination selon l'âge. Ça pourrait peut-être
faire partie de la campagne d'information.
Le Président (M. Auger) : Mme
Gagnon, très rapidement, 15 secondes.
Mme Gagnon
(Judith) : Tout à fait. On
considère qu'une campagne d'information puis de sensibilisation grand
public serait très importante.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre avec M.
le ministre. Vous avez 13 minutes à votre disposition.
• (16 h 50) •
M. Moreau :
Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je veux saluer Mme Gagnon, M.
Bélanger et leur dire qu'on est
heureux de les retrouver, ce sont des habitués des commissions parlementaires.
Je me souviens notamment du passage de Mme Gagnon lors de l'étude article
par article ou... en fait, pas de l'étude article par article, mais de la
consultation sur le projet de loi n° 3 qui est devenu la loi
n° 15 et je sais que l'association vise toujours à être le plus
constructive possible dans ses représentations.
D'ailleurs, je vous remercie parce que
votre passage nous permet d'aller vers un autre aspect ou un autre angle
d'éclairage sur le projet de loi qui est
proposé. Vous dites dans un premier temps... puis je ne veux pas faire affront
à la présentation que vous faites,
mais vous dites dans un premier temps : On a une vision assez favorable à
l'idée que sous-tend le projet de
loi. Moi, je pense que je vous dirais que ça doit être partagé par tous les
parlementaires qui sont ici. Mais vous avez
aussi des craintes comme celles qui ont été exprimées par plusieurs membres de
la commission, sur les effets pervers d'une disposition semblable, puis,
quand je dis «les effets pervers», ce n'est pas des effets calculés au moment
de la présentation d'un projet de loi, mais
c'est souvent des effets qui, dans le contexte des consultations, ressortent,
et vous en avez mentionné deux.
La
première, c'est... et j'ai même pris en note les mots que vous avez prononcés,
là, vous dites : Ça peut être une source
de discrimination. Puis Mme la députée de Gouin dit, avec raison — je suis pas mal sûr que sa statistique doit
être bonne : La très grande majorité des propriétaires ne sont pas
des gens mesquins, comme la très grande proportion des locataires ne doivent pas être des locataires mesquins. Mais la loi est
là pour réprimer les abus, et, dans ce contexte-là, c'est à ceux qui véritablement pourraient faire de
la mesquinerie avec une loi semblable que l'on doit s'attarder, parce qu'à partir du moment où une loi est adoptée elle
est un peu comme un navire qui est construit : lorsqu'il quitte le port,
il n'appartient à personne d'autre qu'à la mer, et donc il est soumis aux
intempéries selon le bon vouloir de la nature. Donc, ici, on pourrait bien légiférer puis dire : Voici quel est le
projet de loi, mais arriver et voir que dans son application ça pourrait
avoir un effet extrêmement négatif.
Les
membres de la commission ont été étonnés d'entendre des associations de
propriétaires venir dire : Écoutez, moi, je ne vous garantis pas que chez certains propriétaires ça n'aura
pas l'effet d'un frein. Et vous avez même eu une dame qui est elle-même âgée de 65 ans qui est propriétaire, qui bientôt
pense à s'établir avec sa fille puis qui dit : Moi, là... Puis ce n'est pas une personne méchante
qu'on a vue là, là, c'est une personne comme vous et moi, là, qui dit :
Moi, je regarde ça, là, puis je me
demande si j'ai fait une bonne chose compte tenu de la possibilité que le
législateur aurait d'intervenir dans ce sens-là.
Moi,
j'aimerais, Mme Gagnon, que vous m'indiquiez... Vous dites : On s'est
questionnés sur la possibilité d'un effet
parallèle discriminatoire. Est-ce que votre interrogation vous a amenés à vous
convaincre qu'une mesure semblable pouvait effectivement avoir aussi un
effet discriminatoire?
Le Président (M.
Auger) : Mme Gagnon.
Mme Gagnon (Judith) : Vous me posez une bonne question, M. le ministre, comme d'habitude.
Écoutez, je veux dire, on est pour quand même la mesure parce qu'on est
heureux de retrouver dans le Code civil la question des aînés vulnérables, parce que c'est important, c'est une
clientèle fragilisée puis c'est une clientèle importante. C'est sûr qu'on
craint un peu la discrimination, mais cette discrimination-là, là, elle se
passe même à l'heure actuelle. S'il y a des campagnes
d'information, s'il y a de la sensibilisation, s'il y en a beaucoup, beaucoup,
beaucoup, et si tout ça se passe, elle
va être amoindrie, parce que c'est certain qu'il peut y en avoir. On ne pouvait
pas ne pas le soulever. Mais ça peut être
amoindri par des campagnes de sensibilisation puis en faisant bien comprendre
que socialement les personnes aînées vulnérables font partie de la
société québécoise au même titre que les autres et qu'on ne doit pas les mettre
dans une réserve — on n'en a pas assez, de logements
sociaux — et qu'on
doit en faire attention. C'est sûr qu'on l'a invoqué, mais, écoutez, ça ne nous a pas arrêtés pour dire :
On n'est pas pour le projet de loi. Bien au contraire, on soulève la
possibilité, on la soulève.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre.
M.
Moreau : Merci, M. le Président. Je sais qu'il nous reste peu
de temps et que le député de Côte-du-Sud veut intervenir, je vais donc faire une courte intervention additionnelle.
Alors, vous nous dites : Soyez attentifs, Mmes, MM. les législateurs, au caractère discriminatoire
possible de la mesure, bien que nous la soutenions. C'est ce que je retiens de
votre...
Mme Gagnon
(Judith) : À l'impact.
M.
Moreau : À l'impact. Je voulais très aimablement corriger
une remarque de la députée de Gouin, qui dit qu'en France c'est pour les
gens de 70 ans et plus. J'ai l'air très intelligent en vous faisant cette
remarque-là, mais c'est la présidente de la
régie qui me la fait, que, depuis le 27 mars 2014, c'est 65 ans et
plus, même en France. Alors, je vous le dis en toute amitié, je ne le
savais pas, moi non plus. Alors, maintenant, on le sait tous.
Dites-moi,
la notion de logement équivalent, Mme Gagnon, pour vous, est-ce que c'est
une notion qui est suffisamment précise
ou si vous avez fait une réflexion sur cet élément-là? Parce que, vous avez
entendu les intervenants avant vous, ils
vous disent : Écoutez, «logement équivalent», dans les critères
jurisprudentiels de la régie, c'est très exigeant, on parle de l'ensoleillement, on parle du balcon, on parle
finalement d'un clone de l'appartement que l'on quitte, alors qu'on a pu être
dans les lieux pendant de nombreuses années,
être dans un six et demie ou, même ici, à Québec, des grands sept et
demie — ça
existe moins dans les quartiers centraux
maintenant — alors
qu'un trois et demie pourrait très bien répondre à nos besoins.
Est-ce
qu'on doit s'attarder plus à la notion d'équivalence dans la reproduction du
logement offert ou si on doit plus s'attarder aux besoins, selon vous?
Le Président (M.
Auger) : Mme Gagnon.
Mme
Gagnon (Judith) : Une autre
bonne question. La question d'équivalence, de logement équivalent, pour nous, elle est difficile, parce que qu'est-ce que
c'est, un logement équivalent? Est-ce qu'on peut le retrouver? Est-ce que
c'est possible, potentiellement? Est-ce
qu'un autre logement qui serait convenable pourrait faire l'affaire aussi? Mais
il ne faudrait surtout pas... j'ai
une réserve, il ne faudrait surtout pas, mettons, à titre d'exemple, que, un
aîné de 70 ans qui a de la
misère à marcher, qui a sa marchette, tout ça, qui est rez-de-chaussée, on lui
dise : Tu as un logement qui te convient au troisième étage d'un
autre appartement.
M. Moreau : Dans ce
contexte-là, il ne répondrait pas à ses besoins?
Mme Gagnon (Judith) : Exactement.
M. Moreau :
C'est pour ça que je vous dis : La notion de répondre aux besoins, c'est
dire : Bien, c'est sûr, si j'ai une
marchette, je ne me mettrai pas au cinquième étage, pas d'ascenseur, ça va être
compliqué. Mais ça peut être quelque chose qui n'est pas en tous points
conforme à l'appartement qu'il quitte. C'est ça, la question.
Mme Gagnon
(Judith) : C'est ça, on se
questionnait là-dessus, on s'est vraiment questionnés là-dessus, puis nous,
on en arrive à penser : Quelque chose qui conviendrait à ses besoins.
M. Moreau :
Je vais laisser, M. le Président, avec votre permission, à mon collègue de
Côte-du-Sud notre droit de parole.
Le
Président (M. Auger) : Ça me fera plaisir. Donc, M. le député de
Côte-du-Sud, vous avez à votre disposition presque cinq minutes juste
pour vous.
M. Morin :
Oui. Merci. Bon, comme député de région, je suis très sensible à la
problématique que la députée de Gouin
nous amène pour discussion en cette commission, mais ce n'est pas tout à fait
la même problématique chez nous en région.
Puis j'ai cru comprendre que, M. Bélanger, vous êtes responsable du
Bas-Saint-Laurent. J'aimerais vous entendre sur : «le logement équivalent doit être situé dans la même
municipalité régionale de comté». Croyez-vous que ça avantage, avec cette phrase-là, le projet de loi, chez nous en
région quand on sait que Saint-Marcel est dans la municipalité régionale
de comté de L'Islet et Sainte-Apolline et il y a une distance de quatre, cinq,
six, sept kilomètres? Et chez vous aussi, Bas-Saint-Laurent, c'est la même
chose. Et je... Kamouraska, du Bas-Saint-Laurent, et c'est la même
problématique. Comment vous vivez avec cette phrase-là, là?
Le Président (M. Auger) :
M. Bélanger.
M.
Bélanger (René) : Je voulais justement, tout à l'heure, compléter
Mme Gagnon lorsqu'elle parlait de logement équivalent puis je
voulais justement aborder cette question-là.
En région,
trouver un logement équivalent dans un rayon x, mettons, sept kilomètres...
souvent, à sept kilomètres et plus,
la personne est déjà déracinée. Quand on parle, là, de garder les gens dans
leur environnement puis qu'ils aient toujours
leur contexte, parce que c'est les personnes aînées qui vivent dans des choses
comme ça, qui ont 65 ans et plus, qui
sont vulnérables... souvent, ils ont un réseau autour d'eux autres, hein, ils connaissent
peut-être un voisin qui va aller faire
ses commissions, son épicerie, puis tout le kit. Si on veut chercher un
logement... Si la personne est évincée puis on veut lui donner un logement équivalent à 10, 12, 15 kilomètres,
bien, c'est bien de valeur, mais cette personne-là, elle est déracinée.
C'est ma vision.
Et, si, par
exemple, on donne un exemple... on
est voisins, finalement, moi, je suis dans le comté de Rivière-du-Loup puis vous, vous êtes à Kamouraska, mais, si on
regarde les petites municipalités... Prenons juste Rivière-du-Loup. Si je
suis une personne aînée et vulnérable dans
le centre-ville de Rivière-du-Loup, que j'ai longtemps vécu là puis, pour
raison x, je me fais évincer puis
qu'on dit : Bien là, on va essayer de t'en trouver un dans un rayon de
sept kilomètres et plus, c'est bien
de valeur, mais je suis rendu en dehors de Rivière-du-Loup, je vais vers
Saint-Antonin, je m'en vais vers Cacouna ou je m'en vais vers le Portage, bien là je ne suis plus dans mon
milieu que je suis habitué de vivre. Alors, c'est un peu cette
question-là que nous, à l'AQDR, on veut soulever.
• (17 heures) •
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Côte-du-Sud.
M. Morin : Oui. Je veux juste vous préciser que ma question
est qu'il faut que la recherche de logements soit dans la même municipalité
régionale de comté. Pour moi, c'est
une difficulté, parce
que les gens de Saint-Marcel, c'est
des gens qui se connaissent avec
Sainte-Apolline, et, s'ils trouvent un logement à Sainte-Apolline, là il va
être hors-la-loi. Donc, c'est ce
petit bout là qui m'intrigue, que vous acceptez que ce soit dans la même municipalité régionale de comté, la problématique que moi, je ressens, parce que
les gens chez nous se connaissent d'une municipalité régionale de comté.
Saint-Roch-des-Aulnaies, La Pocatière, c'est deux MRC, puis ils sont collés,
puis c'est du même monde.
Mme Gagnon (Judith) : ...
Le Président (M. Auger) : Mme
Gagnon.
Mme Gagnon (Judith) : Je
pense que nous, là, on est d'accord
avec le principe qui a été énoncé avec le projet de loi, on est d'accord avec le principe puis on le salue,
parce que, pour la première fois, il y a quelque chose, dans le Code civil, qui parle des aînés vulnérables, on les prend en soin, puis il y a
une responsabilité sociale, puis on le définit. On est d'accord
avec le principe. Les modalités, ça, il peut y avoir des modifications dans les
modalités, parce que nous-mêmes,
on a des questionnements. C'est le principe fondamentalement, et on est très heureux du projet de loi et on l'accueille favorablement parce qu'il y en a, des... Les aînés vulnérables visés sont vraiment
très vulnérables, il faut faire attention
à eux autres, il faut les protéger, il faut en prendre soin, parce que
c'est nous, dans quelque temps, peut-être plus moi que vous, plus vite...
M. Morin :
Attention à vous.
Des voix :
Ha, ha, ha!
Mme Gagnon (Judith) : ...mais c'est dans quelque temps, alors c'est pour ça. Mais, quant aux
modalités, nous, on n'est pas des légistes, on n'a pas tout regardé ça. On est
venus pour mentionner nos préoccupations mais donner aussi notre aval à l'idée
d'une meilleure protection des aînés vulnérables, et c'est essentiel.
Le Président (M.
Auger) : M. le ministre, 30 secondes.
M.
Moreau : Oui.
Simplement, donc, je ne veux pas enlever rien à ce que vous avez dit, mais, ce
que je comprends bien, vous dites : Oui, mais, les modalités,
vous verrez ça parce qu'on a des questionnements. Tout est dans les modalités. Alors, vous êtes, en principe, d'accord
avec le fait que législateur
reconnaisse le caractère de vulnérabilité de certaines personnes notamment en raison de leur âge ou de
leur handicap et vous dites : Ça, c'est ce avec quoi on est d'accord. Pour
le reste, dans les modalités, on voit bien
qu'il y a une route un peu plus chaotique dans le projet de loi tel qu'il est
déposé, comme votre collègue
l'exprimait, notamment en milieu rural, mais on peut voir aussi la même chose
en milieu urbain. Donc, vous dites : Oui, on appuie le principe...
Le Président (M.
Auger) : En terminant.
M.
Moreau : ...mais on a des inquiétudes sur les effets
collatéraux de l'application dans ses détails. C'est exact?
Le Président (M.
Auger) : Merci. Rapidement.
Mme Gagnon
(Judith) : Je pense que, rapidement, ensemble... ou l'ensemble des
parties pourraient voir à la construction de modalités peut-être un peu plus
ancrées à la réalité.
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, nous allons poursuivre
avec Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour
7 min 45 s.
Mme
Poirier : Merci, M. le Président. Bonjour, madame, monsieur. Je
voudrais revenir à votre recommandation 5, qui dit qu'«un portrait de la situation des locateurs propriétaires âgés
de 65 ans et plus devrait être réalisé avant l'adoption». Je veux juste
comprendre qu'est-ce que vous voulez dire par ça.
Mme Gagnon (Judith) : Bien, alors, écoutez — je suis assez transparente, là, pour les
gens qui me connaissent — on n'a pas fait de
grandes recherches, on est allés voir la loi française, parce qu'on a vu que
c'était ça, et on a vu qu'il y avait une
exception pour ces locateurs propriétaires âgés de 65 ans. Mais nous, on
n'a pas recherché il y en a combien ici, c'est quoi, les problématiques, tout ça. Alors, on se questionnait :
C'est qui? Est-ce qu'il y en a beaucoup ici? Qu'est-ce que c'est, cette
situation-là? Alors, c'est pour ça qu'on l'a soulevée.
Mme
Poirier : Mais, dans le projet français, effectivement, on
prévoit des modalités. On ne les a pas dans le nôtre. Est-ce que vous
pensez que ce qu'il y a dans le projet français devrait être dans celui de la
députée de Gouin?
Mme Gagnon
(Judith) : Bien, écoutez, on ne sait même pas il y en a combien, de
locateurs propriétaires de 65 ans et plus,
puis c'est quoi, leurs caractéristiques, mais ce qu'on sait, c'est que ces
gens-là de 65 ans et plus, des fois, ils peuvent être pas si riches que
ça, ils peuvent avoir des difficultés, eux autres aussi, puis il ne faudrait
pas non plus leur mettre trop de fil à la
patte parce qu'ils sont déjà dans la clientèle ciblée de vulnérabilité, même
s'ils n'ont pas toutes les caractéristiques.
Mme Poirier :
Mais je veux juste comprendre. Qu'est-ce que vous souhaiteriez avoir pour ces
personnes-là?
Mme Gagnon
(Judith) : Écoutez, il faudrait voir le portrait, il faudrait voir un
peu qu'est-ce que c'est, les problématiques
qu'ils vivent, puis tout ça. Mais, dans la loi française, je crois qu'on les
exclut. Je ne sais pas si je suis exacte, mais je crois qu'on les
exclut.
M. Moreau : Les propriétaires.
Mme
Gagnon (Judith) : Les propriétaires.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée.
Mme
Poirier : Donc, votre recommandation, c'est de faire, en tout
cas, référence à l'exclusion qui existe dans la loi française.
Mme Gagnon (Judith) : En regardant vraiment c'est quoi, le portrait, ici. Parce que moi, je
ne suis pas pour faire des copier-coller de toutes les choses. Il
faudrait regarder ici qu'est-ce qui se passe dans notre réalité.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée de...
Mme
Poirier : Merci. Dans la recommandation 7, vous nous
parlez, entre autres, d'une campagne d'information en lien avec les modifications, vous dites :
La commission. La commission ne peut pas faire ça, là, on s'entend. Nous,
ça serait le gouvernement, là, qui ferait
ça. Mais quel type de campagne vous verriez, vous, pour vraiment bien rejoindre
la clientèle visée, quel type de campagne?
Le Président (M.
Auger) : Mme Gagnon.
Mme Gagnon
(Judith) : Écoutez, je pense que le gouvernement du Québec a été assez
loin au niveau de la certification des
résidences privées puis il a vraiment pris le taureau par les cornes, puis il a
vraiment fait des belles choses, parce qu'il y a eu des campagnes de
publicité, il y a eu toutes sortes de choses qui éveillaient puis qui parlaient
de la nécessité de faire une certification.
Vous l'avez fait, on l'a fait collectivement, on s'est occupés de faire que nos
aînés soient plus sécurisés, puis tout ça, puis ça a été bien fait.
Alors,
dans ce cas-ci, la question est aussi qu'on pourrait faire une campagne
d'information pour dire : Les aînés de 65 ans et plus, si c'était notre mère ou notre père, c'est de notre
société, c'est des nôtres, il faut faire attention à eux, ça fait partie de notre collectivité, parce qu'on
se soucie peu de la collectivité, et on considère que ça serait important que
tout le monde... pas juste avoir la question
pécuniaire. Mais la question sociale aussi, c'est très important, parce qu'on
finit tous par faire le tour : on naît
et on vieillit, alors... Mais on l'a réussi, le gouvernement du Québec, pour
bien des choses, dans l'abus, la
maltraitance aux aînés, il y a eu de la publicité. On est quand même bons
là-dedans, là. Alors, pour cette question-là,
il y aurait quelque chose à faire de sensibilisation parce qu'il y a aussi de
l'abus des propriétaires. Nous, on en a vu à Québec. Savez-vous
qu'est-ce qu'ils font? Ils arrivent à dire : Il n'est pas bien, il a
baissé de facultés, on va l'expulser. Puis
ils disent à un aîné : Tu n'es plus capable, tu déranges les autres, tu
n'es pas bien, tu n'es plus capable de descendre les escaliers. Il y a
des propriétaires qui font ça. Là, les travailleurs sociaux s'en mêlent, ils
font passer toutes sortes de tests pour voir
le degré d'autonomie des personnes. Puis là ils sont là puis ils n'acceptent
pas ça. Mais, autrement, ces gens-là
seraient dans la rue, parce que, quand tu es vulnérable, tu te fais dire ça par
ton propriétaire, tu as peur, tu t'écrases puis là tu quittes. Mais, je
veux dire, c'est... tu sais, ça n'a pas d'allure, d'une certaine façon.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée.
Mme
Poirier : Vous parlez, justement, des caractéristiques des
aînés vulnérables. Est-ce que vous avez en quelque part c'est quoi, ces caractéristiques-là? Est-ce
que vous avez un document pour lequel on pourrait avoir c'est quoi? Parce que
vous dites : On vient introduire, dans le Code civil, le libellé, là,
«aîné vulnérable». Qu'est-ce que c'est, pour vous, un aîné vulnérable?
Le Président (M.
Auger) : Mme Gagnon.
Mme Gagnon (Judith) : Bien, bonne question aussi. À l'AQDR-Québec, une de nos sections de
l'AQDR, on a défini... j'aurais dû
apporter ma feuille avec moi, on a défini par l'accompagnement qu'on faisait
aux aînés c'est quoi, les
caractéristiques d'un aîné vulnérable. Il y a une question de revenus aussi
dans la vulnérabilité. Si tu es raide pauvre, tu es très vulnérable. Il y a une question de santé physique et mentale.
Il y a une question aussi de réseau social, parce que l'appauvrissement, c'est aussi dans le réseau
social. Les gens qui sont très isolés, ils sont démunis, ils sont vulnérables.
C'est un ensemble de facteurs.
Le Président (M.
Auger) : Mme la députée, une minute.
Mme Poirier :
Bien, peut-être que, si c'était possible de transmettre ce document-là à la
commission pour le bénéfice de tous ici, ça
pourrait nourrir notre réflexion justement sur ce que vous, vous croyez comme
caractéristiques d'un aîné vulnérable. Moi, je l'apprécierais, en tout
cas.
• (17 h 10) •
Le Président (M.
Auger) : Est-ce que c'est possible, Mme Gagnon, de le faire
parvenir à la commission...
Mme Gagnon
(Judith) : Certainement que c'est possible.
Le Président (M. Auger) : ...faire
parvenir au secrétaire de la commission ledit document, s'il vous plaît?
Mme Gagnon
(Judith) : Au secrétaire de la commission, oui. Très bien.
Le Président (M. Auger) : Merci.
Mme
Poirier : Merci. M. le Président, le ministre a déposé la réponse tout à l'heure. Là, j'aimerais ça vous déposer la lettre que je lui ai envoyée,
pour le bénéfice de mes collègues.
Le Président (M. Auger) : Donc, nous
allons faire des copies ou simplement un dépôt? Faire des copies?
Mme Poirier : La copie à tout
le monde.
Le Président (M. Auger) : O.K., des
copies à tout le monde.
Mme Poirier : Ils ont eu la
réponse. Ce serait bien qu'ils aient la question.
Le
Président (M. Auger) : Merci. Donc, nous allons faire des copies. Il
vous reste encore 30 secondes, Mme la députée.
Mme Poirier : Il me reste 30
secondes. D'accord. Vous nous parlez des critères nécessaires à définir pour le
logement social. Moi, je vous dirais, au-delà de la jurisprudence — parce
que depuis tout à l'heure on nous dit «la jurisprudence,
la jurisprudence» — il y a une jurisprudence qui définit le logement
équivalent. Est-ce que vous, vous avez réfléchi à quels devraient
être ces critères-là?
Mme Gagnon (Judith) : Réellement,
madame — je
pourrais vous inviter n'importe quoi, mais je ne suis pas comme ça — non,
on n'a pas réfléchi réellement là-dessus.
Le
Président (M. Auger) :
Merci. Merci beaucoup. C'est tout
le temps que nous avions pour ce bloc
d'échange. Là, nous allons poursuivre avec M. le député de Borduas pour
un bloc d'échange de 5 min 15 s. M. le député.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Bonjour, Mme Gagnon. Bonjour, M. Bélanger. Merci pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Dans
votre conclusion, à la page 14, vous indiquez trois points au bas complètement de la page. Donc, vous souhaitez certaines mesures, soit
l'élargissement de l'offre de logement social pour répondre aux besoins des
locataires aînés, la concertation des milieux — communautaire, municipal,
psychosocial — autour
de l'enjeu collectif du logement et l'augmentation du financement à la mission des groupes de
défense collective des droits. Donc, c'est trois mesures qui nécessitent le financement de l'État,
un rôle social de l'État. Puis, dans le cadre du projet de loi déposé par la députée de
Gouin, on met la responsabilité un peu sur les propriétaires de logement. Il va
falloir réconcilier tout ça dans le cadre de ce projet de loi là. Les
propriétaires, tout à l'heure, nous ont dit : Écoutez, ce n'est pas nécessairement de la responsabilité
de nos membres d'avoir cette responsabilité, là, de relocaliser les locataires aînés ou vulnérables qui souffrent
d'un handicap.
Est-ce que
la solution ne passe pas peut-être par un plus grand investissement de l'État à
travers les logements sociaux, par un plus grand accompagnement plutôt
que de mettre le fardeau sur les propriétaires?
Le Président (M. Auger) : Mme
Gagnon.
Mme Gagnon
(Judith) : Oui. Je vais vous
répondre : C'est aussi la responsabilité des propriétaires, c'est une responsabilité.
C'est aussi la responsabilité des propriétaires, mais pas seulement la responsabilité
des propriétaires.
Il faut
regarder la notion de protection et de sécurité des aînés vulnérables d'une
façon globale. L'amendement,
la proposition, avec le projet de loi, ça touche un angle, mais nous, on a essayé de
visionner plus large, parce que collectivement, comme société, on doit faire quelque chose pour ce groupe
de population là. C'est sûr qu'il manque des logements sociaux,
c'est clair. J'espère que vous êtes d'accord. Il en manque. La concertation des milieux, c'est important, parce que
les gens qui sont mal pris, les aînés
vulnérables, ils ne vont pas cogner aux portes du gouvernement du Québec, ils restent dans leurs milieux puis ils font affaire avec des groupes
communautaires qui les accompagnent,
qui leur aident. Donc, il faut absolument essayer qu'il
y ait plus de concertation du milieu
pour leur aider, parce que souvent ces gens-là sont isolés puis ils ont des problématiques. Puis, quand j'ai
parlé — ça a l'air un peu drôle, là, mais c'est
réel — de
l'augmentation du financement à la
mission des groupes de défense collective... Parce que, je vous dis, on en a
fait 1 600, cas d'accompagnement, à
l'AQDR-Québec, depuis juillet 2010, on a fait de la médiation avec les gens, on
a accompagné les gens partout, et c'est important. On a même
déjudiciarisé des situations, parce qu'on les aidait, puis ils se sentaient
supportés.
Alors, il
faut voir la mesure présentée dans un ensemble. Puis on ne veut pas dire que ce
n'est pas une bonne mesure, parce que les propriétaires, comme tous les
gens de notre société, sont aussi responsables.
Le Président (M. Auger) : M. le
député de Borduas, 1 min 45 s.
M.
Jolin-Barrette : Oui. Merci.
Le groupe qui vous a précédés faisait état de la nécessité, peut-être, de
sanctions plus importantes pour les propriétaires qui contreviendraient
aux règles. Comment vous envisagez ça?
Le Président (M.
Auger) : Mme Gagnon.
Mme Gagnon (Judith) : Ça pourrait
être une solution intéressante. Mais, écoutez, on ne se le cache pas, là, M. Moreau au début a donné les statistiques de la
Régie du logement et puis il donnait les statistiques qu'ils étaient très
peu, hein, les aînés de 65 ans et plus.
La plupart des situations ne sont pas judiciarisées parce que les aînés ont
peur. J'en connais, j'en côtoie
depuis 2010, ils ne veulent pas y aller, ils endurent, et, tu sais, ça ne
marche pas. Ça fait que comment est-ce
qu'on mettrait des amendes plus... Il y a beaucoup de cas qui se passent puis
qu'on ne voit pas, hein? Alors, ça, ça se
règle par un accompagnement, des mesures sociales pour aider ces personnes-là.
Mais les amendes, ça pourrait être une option dans le cas où les gens se
présentent à la Régie du logement, ça pourrait être une option.
Le Président (M. Auger) : 30
secondes, M. le député.
M.
Jolin-Barrette : Parce que,
concrètement, dans ce qui est proposé actuellement dans le projet de loi, on
vient ajouter des droits et des
obligations, mais, si jamais ce n'est pas respecté, les locataires aînés vont
devoir aussi s'adresser aux tribunaux. Donc, c'est le chien qui court un
peu après sa queue aussi.
Le Président (M. Auger) : Très
rapidement.
Mme Gagnon
(Judith) : Ah! ce n'est pas
une problématique facile, là, c'est une problématique juridique et sociale.
C'est une problématique difficile à laquelle on va faire face encore plus dans
les prochaines années.
Document déposé
Le
Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'était tout le temps que nous
avions. Je vais déposer la lettre de Mme la députée
d'Hochelaga-Maisonneuve en réponse à la lettre du ministre déposée un peu plus
tôt.
Donc, je tiens à vous remercier, Mme Gagnon et
M. Bélanger, et la commission ajourne ses travaux au mardi 22 septembre 2015, à
10 h 30, où elle poursuivra son mandat.
(Fin de la séance à 17 h 17)