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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, August 20, 2014 - Vol. 44 N° 9

Special consultations and public hearings on Bill 3, An Act to foster the financial health and sustainability of municipal defined benefit pension plans


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Remarques préliminaires

M. Pierre Moreau

M. Alain Therrien

M. Mario Laframboise

Auditions

M. Alban D'Amours

Ville de Québec

Ville de Montréal

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)

Association du personnel retraité de la ville de Québec (APRVQ)

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Autres intervenants

M. Pierre Michel Auger, président

M. Guy Leclair

M. André Spénard

Mme Martine Ouellet

*          M. Bernard Morency, accompagne M. Alban D'Amours

*          M. Régis Labeaume, ville de Québec

*          M. André Legault, idem

*          M. Jonatan Julien, idem

*          M. Denis Coderre, ville de Montréal

*          M. Alain Marcoux, idem

*          M. Pierre Desrochers, idem

*          Mme Suzanne Roy, UMQ

*          M. Bernard Sévigny, idem

*          M. Alain Rayes, idem

*          M. Serge Cadieux, FTQ

*          M. Gaston Verreault, APRVQ

*          M. Michel Raymond, idem

*          Mme Francine Lévesque, CSN

*          Mme Nathalie Joncas, idem

*          M. Denis Marcoux, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures quarante-trois minutes)

Le Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 3, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Pagé (Labelle) est remplacé par M. Therrien (Sanguinet).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Auger) : Merci. Voici l'ordre du jour de ce matin. Nous allons débuter par les remarques préliminaires. Par la suite, nous entendrons M. Alban D'Amours, la ville de Québec et la ville de Montréal.

Je cède maintenant la parole au ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire pour ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Alors, compte tenu de ce temps très court, je vous saluerai, M. le Président, et, globalement, l'ensemble de mes collègues de la commission parlementaire.

M. le Président, nous commençons aujourd'hui un processus de consultations normal et légitime dans une démocratie comme la nôtre. Nous devons innover pour assurer la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur municipal. Les dispositions des régimes de retraite municipaux ont été négociées dans des environnements différents de ceux que nous connaissons aujourd'hui et ne sont plus soutenables dans le contexte économique et démographique actuel. Elles appartiennent à une époque marquée par une croissance soutenue, des rendements importants et une espérance de vie moins longue qu'aujourd'hui. Selon la Régie des rentes du Québec, il y a 20 ans, il y avait 17 travailleurs actifs pour chaque retraité dans un régime type. Aujourd'hui, ce nombre a fondu. Il n'y a plus que trois travailleurs pour chaque retraité, et ce faible nombre tend à diminuer encore.

La conséquence de cette situation fait en sorte que les régimes, qui étaient à l'origine financés majoritairement par les cotisations, dépendent maintenant, pour 65 % de leur financement, du rendement des marchés boursiers. Ils sont devenus très vulnérables aux fluctuations du marché. À cette vulnérabilité s'ajoutent le nombre sans cesse croissant de retraités et l'augmentation significative de l'espérance de vie. En matière de retraite, il faut toujours penser à long terme et regarder loin devant. Il faut aussi penser aux autres, ceux qui nous ont précédés et ceux qui nous suivront. C'est ça, l'équité intergénérationnelle. C'est pourquoi, même si les marchés financiers ont récemment été favorables et que la situation financière des régimes de retraite s'est améliorée, il n'en demeure pas moins que le projet de loi n° 3 demeure nécessaire.

Dans le passé, certaines municipalités ont pris des congés de cotisations. L'expérience nous démontre que cette pratique était imprudente. Dans le passé, des améliorations importantes et permanentes ont été apportées aux régimes de retraite et elles ont souvent été financées à même des surplus de nature temporaire. L'expérience nous démontre que cette pratique aussi était imprudente.

Qui plus est, le déficit de l'ensemble des régimes était, au 31 décembre dernier, de 3,9 milliards de dollars. Il est le résultat de plusieurs années de laisser-faire. Pourtant, au cours de cette période, de nombreuses négociations se sont tenues librement sans jamais régler la question des déficits passés. Sur ce point, il est incontestable que la libre négociation n'a donné aucun résultat, si ce n'est de pelleter en avant un problème dont on ne voulait pas parler. Ce temps est maintenant révolu. Les contextes économique et démographique actuels font en sorte que, si nous devions connaître des perturbations semblables à celles connues dans le passé, de nombreux régimes à prestations déterminées s'effondreraient tout simplement, entraînant dans leur sillon les rentes de base actuellement payées aux retraités et la perspective de retraite des cotisants d'aujourd'hui. C'est surtout pour cela qu'il faut aller de l'avant : pour la sécurité de nos retraités, pour la retraite de nos travailleurs et pour ne pas laisser à nos enfants un problème que nous refusons de voir et de régler. Il y a ici une responsabilité sociale d'agir pour assurer la santé financière des régimes et sauvegarder les retraites. Voici le pourquoi il faut agir.

Maintenant, comment allons-nous faire? La proposition déposée le 12 juin dernier par le gouvernement prévoit que les régimes doivent être restructurés et établit des objectifs précis concernant les coûts et les déficits. Cette proposition aborde aussi l'indexation automatique des régimes, les règles de modification et le financement des engagements supplémentaires. Le projet de loi prévoit doter tous les régimes d'un fonds de stabilisation. Tous s'entendent pour dire que nous vivrons d'autres crises boursières et financières dont le moment et l'ampleur sont impossibles à prédire. Le fonds de stabilisation a précisément pour but de créer un coussin de protection des régimes dans ces cas.

Cela dit, le projet de loi accorde une grande place et beaucoup de latitude aux parties pour négocier et s'entendre sur les changements à apporter. L'embellie actuelle des marchés est un moment propice pour entreprendre cette démarche puisque l'effort requis n'en sera que moins grand.

Le gouvernement fixe une destination et laisse les parties libres de choisir le chemin pour y arriver. Les négociations sont balisées dans le temps, et personne ne pourra laisser traîner les choses. Qui dit négociation dit solution sur mesure. Pour les 172 régimes visés par la loi, il pourra y avoir 172 solutions différentes. On est loin du mur-à-mur. L'objectif que nous poursuivons est de permettre aux parties de restructurer le régime et d'en assurer la viabilité à long terme dans le respect de toutes les parties impliquées : les retraités, les travailleurs, mais aussi les contribuables. Voilà, M. le Président, pourquoi nous avons déposé le projet de loi n° 3.

Nous commençons aujourd'hui les consultations sur ce projet de loi. Le gouvernement prend l'engagement, et je suis convaincu qu'il en va de même pour mes collègues des autres formations politiques, d'écouter les propositions sérieuses qui nous seront faites en vue de l'améliorer et ainsi rencontrer les objectifs incontournables que nous impose la situation actuelle. Merci, M. le Président.

• (9 h 50) •

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. J'invite le porte-parole de l'opposition officielle à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 3 min 30 s.

M. Alain Therrien

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, j'en profite pour saluer les collègues, saluer les gens du parti au pouvoir, le ministre et son équipe ainsi que mes collègues et les collègues de la deuxième opposition.

Écoutez, notre parti est conscient qu'il y a un problème au niveau de la pérennité des régimes de retraite, que les régimes à prestations déterminées doivent être favorisés et doivent être maintenus. On a travaillé beaucoup en ce sens-là lorsqu'on était au gouvernement à l'époque. Notre réflexion a abouti à un projet de loi en février dernier, le projet de loi n° 79. On avait travaillé très fort, on a eu, à travers ce projet de loi là, un équilibre. On avait aussi obtenu un consensus qui faisait en sorte qu'on mettait la table sereinement pour la négociation. On avait confiance que la négociation viendrait à bout des régimes de retraite qui avaient des problèmes de solvabilité.

Le projet de loi qui est proposé par le ministre actuellement, c'est un projet de loi qui est quand même assez loin du projet qu'on avait déposé au départ. On se demande un peu pourquoi d'ailleurs. Ça a amené beaucoup de tension, ça a amené, comme on l'a vu avant-hier, à des débordements qui sont très malheureux et qu'on dénonce. Donc, on espère qu'il y aura un changement d'attitude du côté, justement, des gens qui veulent défendre leur position, mais aussi changement d'attitude du côté du gouvernement. Ce qu'on a remarqué, c'est beaucoup d'intransigeance, beaucoup de rigidité, d'abord avec le ministre qui a déposé ce projet de loi, mais aussi avec le premier ministre qui a un peu mis en doute l'importance de la commission pour amener une bonification.

Alors, évidemment, nous, on espère la collaboration. On est ici pour collaborer. Évidemment, une commission parlementaire, ça va nous permettre de mieux comprendre les portées de ce projet de loi qui est quand même très complexe. Et donc on va être à l'écoute des gens qui viendront nous voir dans le respect, mais aussi on va, nous, proposer, de notre côté, là, des propositions pour justement amener une bonification pour que la négociation soit davantage possible. Et, quand on parle de bonifier le projet de loi, là, bien, il y a, à quelques endroits, des changements qu'on désirerait apporter et qu'on viendra expliquer, là, au fur et à mesure qu'on entendra les gens à la commission et, par la suite, lors de l'étude détaillée. Soyez assuré de notre pleine collaboration, M. le ministre.

Et donc, en gros, le mur-à-mur est questionné de notre part, la rétroaction, de faire en sorte de rouvrir des conventions collectives, nous, ça nous pose problème dans une société comme la nôtre, où les contrats doivent être respectés et que tout le monde qui signe un contrat, tout le monde qui s'entend sainement, sans entrave, dans un contrat, ces gens-là doivent faire en sorte de pouvoir penser que ces contrats-là sont valides durant l'échéance, que... pouvoir porter ce contrat-là. Aussi, l'indexation des retraités pose problème, et finalement, aussi, le problème du plafonnement, du 8 %. On en reviendra plus tard.

Et donc je vous salue tous et je vais être dans un élan positif pour, justement, qu'on fasse en sorte de régler ce problème qui est extrêmement délicat et de faire en sorte que les prestations déterminées, ce régime qui est tant convoité, fasse en sorte non seulement de rester présent dans les moeurs des municipalités, mais également de l'étendre, si on est capables, à l'ensemble de la communauté, car c'est la meilleure protection appropriée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 2 min 30 s.

M. Mario Laframboise

M. Laframboise : Merci. Bonne commission, M. le Président. D'abord, j'aimerais saluer le ministre et tous les députés, ses députés, qui l'accompagnent, de même que les députés de Sanguinet et de Vachon, mon collègue de Beauce-Nord, qui a la chance de m'accompagner également, sans oublier M. D'Amours qui a su... M. Alban D'Amours, vous avez su soulever l'ampleur du problème de la solvabilité des régimes de retraite municipaux puis l'urgence d'agir. J'aimerais également remercier les 27 autres intervenants, notamment les maires de Québec et de Montréal, ainsi que les groupes syndicaux qui viendront nous faire part de leur point de vue d'ici mardi prochain. Par ailleurs, je tiens à remercier tous les groupes qui nous ont soumis des mémoires mais qui ne viendront pas nous les présenter. Sachez que vos arguments seront pris en compte au même titre que ceux des intervenants qui sont présents aujourd'hui. Finalement, j'aimerais saluer et remercier les fonctionnaires municipaux, les citoyens qui ont pris la peine de nous écrire.

Cela m'amène à réitérer notre message d'hier. Les récents dérapages, et plus particulièrement les actes de vandalisme et l'intimidation qui ont eu lieu lundi soir à l'hôtel de ville de Montréal, sont inacceptables et inexcusables. Respirons par le nez. Nous ne sommes qu'à l'étape des consultations, rien n'est encore scellé. Nous saurons apporter les modifications nécessaires au texte de loi proposé par le gouvernement, soyez-en assurés.

Le problème est réel. Selon les prévisions de la Régie des rentes du Québec, le déficit cumulé net de 554 des 170 régimes s'établissait à 4,1 milliards au 31 décembre dernier. C'est impératif, on doit légiférer, d'une part, pour assurer la pérennité et la santé financière des régimes de retraite municipaux et, d'autre part, pour que le fardeau fiscal des contribuables ne s'alourdisse pas en raison de ces déficits structurels. Mais le cadre législatif qui sera adopté devra favoriser la négociation et permettre aux parties de parvenir à une solution adaptée à la réalité de leur régime de retraite tout en accordant l'autonomie nécessaire aux municipalités, notamment pour trancher lorsque les négociations sont infructueuses.

Enfin, je l'ai annoncé plus tôt aujourd'hui, mais je tiens à le redire devant vous tous, les 125 députés de l'Assemblée nationale doivent prêcher par l'exemple. La Coalition avenir Québec est en faveur d'une hausse de la cotisation des députés à leur régime de retraite sans discussion sur le salaire. On ne peut pas demander aux fonctionnaires municipaux de faire une chose et ne pas être prêts à le faire nous-mêmes. Notre parti déposera donc un projet de loi visant à revoir les avantages financiers consentis aux députés dès la rentrée parlementaire. J'enjoins le gouvernement, au nom du principe d'équité, de le considérer quand le temps viendra.

Finalement, j'aimerais demander au ministre qu'il dépose au secrétariat de cette commission les avis juridiques qui ont été produits à sa demande concernant le projet de loi. Merci, M. le Président. Et, à tous mes collègues, encore une fois, bonne commission.

Auditions

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le député. Permettez-moi maintenant de souhaiter la bienvenue à nos invités. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

M. Alban D'Amours

M. D'Amours (Alban) : M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les députés, je me présente, Alban D'Amours, président du comité d'experts sur le système de retraite québécois. M. Bernard Morency, actuaire, m'accompagne à titre de membre du comité et non comme membre de la haute direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec. D'ailleurs, une lettre à cet effet est annexée à notre rapport. M. Morency a siégé à titre personnel et bénévolement, comme tous les membres du comité, d'ailleurs.

Nous sommes honorés d'avoir été invités à venir témoigner devant vous. Outre Bernard et moi, notre comité était composé de messieurs René Beaudry, Luc Gobdout, Claude Lamoureux, Maurice Marchon et Martin Rochette. Tous les membres de notre comité supportent le contenu de ce mémoire, à l'exception de René Beaudry qui doit s'abstenir de commenter ce mémoire étant donné son implication dans des dossiers directement liés au projet.

M. le Président, je sais que vous serez indulgent si je dépasse de quelques petites minutes. Je vous en remercie à l'avance.

En introduction, nous tenons à vous rappeler que notre mandat visait à incarner, dans le système de retraite québécois, une vision globale de la sécurité financière à la retraite. Nous avons rapidement réalisé qu'il fallait innover pour pérenniser le système de retraite et adapter nos régimes aux nouvelles réalités économiques et démographiques.

Notre rapport, publié le 17 avril 2013, a entraîné un haut niveau d'acceptabilité sociale entourant les constats et les recommandations qu'il contenait. Le statu quo n'est pas une option, il y a urgence d'agir, et un nouveau contrat social s'impose pour renforcer la sécurité financière à la retraite de tous les travailleurs québécois. La démarche que nous avons retenue s'est appuyée sur trois valeurs, lesquelles ont piloté tous nos arbitrages : la transparence, l'équité intergénérationnelle et la responsabilisation. Ces mêmes valeurs sont au coeur du projet de loi n° 3.

Les recommandations que nous avons soumises témoignent de notre conviction profonde que les régimes à prestations déterminées sont les meilleurs pour assurer la sécurité financière à la retraite. Elles témoignent également que des changements sont nécessaires pour assurer la survie et la pérennité des régimes à prestations déterminées. Ces ajustements sont nécessaires afin de préserver le plus important des droits acquis, celui de bénéficier d'un régime de retraite à prestations déterminées.

Je tiens à souligner que notre mandat se limitait aux régimes à prestations déterminées sous la surveillance de la Régie des rentes du Québec, dont les régimes du secteur municipal. En toile de fond, nous pouvons dire à l'égard de ceux-ci qu'ils présentent un enjeu majeur de coût et d'équité. Nous aurions tous préféré que les marchés financiers règlent ces enjeux pour nous. Malheureusement, ce n'est pas arrivé, et les chances que cela arrive sont minimes. De plus, comme le ratio des retraités versus les participants actifs augmente, il est plus dispendieux en pourcentage du salaire de régler le problème aujourd'hui qu'il y a 10 ou 20 ans et, par ailleurs, moins coûteux que dans 10 ou 20 ans. Il y a donc urgence d'agir.

Une remontée des taux d'intérêt et une poursuite de la bonne performance des marchés boursiers aideront, mais les causes sont trop profondes pour que le problème se règle de lui-même. Si rien n'est fait, les cotisations requises par les employeurs et les taxes augmenteront. Nous l'avons démontré dans notre rapport, le statu quo n'est pas une option.

Il y a plus de 150 régimes à prestations déterminées dans le secteur municipal. Bien sûr, l'ampleur du problème et ses conséquences sur le contribuable varient d'une ville à l'autre et parfois même d'un régime à l'autre dans une même municipalité. Toutefois, il y a plusieurs traits communs qui rendent ces régimes plus généreux et coûteux que la moyenne des régimes à prestations déterminées qui continuent d'exister dans le secteur privé, notamment les conditions en cas de départ à la retraite avant 65 ans, que ce soit à 60 ans, 55 ans, et parfois même plus tôt que cela, et, dans plusieurs cas, une certaine forme d'indexation garantie.

La très grande majorité de ces régimes ont fait l'objet de négociations collectives. Un des principaux enjeux de les modifier est donc cette perception qu'ont les gens qu'on leur enlève quelque chose qu'ils ont obtenu à la table de négociation et pour laquelle ils ont fait des concessions. C'est vrai, mais en partie seulement. En effet, dans la majorité des cas, le coût des améliorations négociées s'est avéré bien supérieur à celui prévu. Ce n'est pas la faute de personne. C'est tout simplement un état de fait principalement dû aux changements démographiques et économiques et aussi au fait que, souvent, les hypothèses employées se sont avérées optimistes.

Premièrement, les gens vivent de plus en plus vieux et, souvent, partent plus tôt à la retraite. L'augmentation de la longévité est une bonne chose, mais cela fait en sorte que les rentes doivent être payées pendant de plus longues périodes. Ce fait est amplifié par les généreuses conditions de retraite anticipée.

• (10 heures) •

Deuxièmement, les taux d'intérêt sont à un bas historique. Ça aussi, c'est une bonne chose. Les Québécois qui s'achètent une maison paient moins cher pour leur hypothèque. Les entreprises qui veulent investir paient moins cher leur financement. Le service de la dette dans le budget provincial est moins coûteux. Le revers de la médaille est que les rendements des régimes de retraite sont moindres et qu'en conséquence ils s'avèrent plus coûteux que prévu. Il y a longtemps que les Québécois ont compris ces nouvelles réalités économiques et démographiques et ont ajusté leur comportement en conséquence. Le Québécois moyen ne parle plus de liberté 55; il est en train de redéfinir sa retraite.

 Par contre, les régimes à prestations déterminées du secteur public, incluant ceux des municipalités, eux n'ont que peu évolués. Ils doivent le faire. Ils doivent être revus afin de les adapter aux réalités économiques et démographiques actuelles et des 15, 20, 30 prochaines années. C'est sous cet angle qu'il faut réfléchir et discuter. On ne peut pas demander aux Québécois de changer leur vision de la retraite, d'épargner plus ou de retarder la retraite et, en même temps, leur demander de financer des régimes de retraite à prestations déterminées qui, eux, ne changent pas.

Ces discussions doivent toutefois tenir compte d'une autre réalité, celle de la diversité des régimes tant au niveau des prestations que de leur situation financière et du processus de négociation. Le sujet est complexe, et le temps presse. La discussion se doit donc d'être encadrée et elle doit se tenir avec une obligation de résultat. C'est ce que notre rapport proposait et c'est aussi ce que le projet de loi propose.

Afin d'appuyer cet énoncé, je rappelle que les recommandations de notre rapport touchant la pérennité des régimes à prestations déterminées sont regroupées sous trois grands volets : la réalité financière — ce volet traite des hypothèses et méthodes utilisées pour établir le coût du régime ainsi que la gestion des risques, incluant les marges pour écart défavorable; la gouvernance et la gestion — ce volet traite d'une plus grande flexibilité de la loi et notamment du partage des coûts, incluant celui associé aux déficits et de l'utilisation des surplus; enfin, la restructuration des régimes — ce volet traite de la révision des prestations prévues par le régime lorsque nécessaire pour en assurer la pérennité à un coût raisonnable. Je commenterai donc le projet de loi en utilisant ce cadre de référence.

Nous souscrivons à plusieurs prescriptions prévues dans le projet de loi, notamment l'encadrement des hypothèses actuarielles, le partage des coûts et la suspension possible de l'indexation, parce qu'elles vont dans la bonne direction pour assainir la santé financière, se rapprocher de la vérité des coûts et assurer la pérennité des régimes à prestations déterminées du secteur municipal. Nous souscrivons également à l'idée d'encadrer les négociations afin d'éviter toute impasse, d'imposer une obligation de résultat et de protéger l'équité intergénérationnelle.

Il est correct que l'employeur ait un droit unilatéral de réduire certaines prestations si rien ne bouge. Nous l'avons recommandé dans notre rapport. Cependant, ce droit doit être balisé afin de maintenir un équilibre dans les négociations. À vous de voir ce qui sera proposé à ce sujet lors de la commission parlementaire et de décider si des assouplissements au projet de loi sont à propos.

Le projet de loi propose d'utiliser une nouvelle table de mortalité et un taux d'actualisation maximale de 6 %, avec une marge de 10 % dans le calcul de la cotisation à l'exercice. Selon les données publiées par la Régie des rentes du Québec, le taux d'actualisation moyen utilisé par les 522 régimes qui ont soumis une évaluation actuarielle en date du 31 décembre 2012 était d'approximativement 5,25 %, et plus de 85 % de ces régimes ont utilisé un taux égal ou inférieur à 5,75 %. Un taux d'actualisation de 6 % est donc clairement un taux maximum dans le contexte actuel.

Par exemple, une caisse de retraite qui investit 40 % en revenus fixes et 60 % en actifs plus risqués peut s'attendre à obtenir un rendement, net de frais, entre 5 % et 6 % sur les prochaines 10 années... 10 et 15 ans. Un taux d'actualisation maximale de 6 % représente donc le haut de la fourchette. Dans le cas d'un régime qui déciderait d'utiliser le taux maximum, on pourrait facilement exiger une marge de 15 % plutôt que de 10 %.

De plus, le projet de loi limite cet encadrement à la première évaluation actuarielle. Il serait souhaitable d'étendre cet encadrement bien au-delà et de l'accompagner de recommandations quant à la gestion des risques afin de sécuriser au maximum les prestations prévues par le régime et d'éviter que la situation actuelle ne se reproduise à nouveau à l'avenir.

En effet, le plus grand risque d'un régime, c'est d'être incapable de respecter sa promesse de rente. Il faut maximiser la probabilité que la promesse soit respectée. Il faut gérer l'actif en fonction du passif. Un passif, c'est la promesse; un actif, c'est le capital nécessaire pour respecter la promesse. Il faut revoir cette pratique qui vise à financer des régimes en escomptant des rendements qui risquent de ne pas se réaliser, et cela, sans tenir compte du passif et de sa composition. Pensons aux retraités. On ne peut donc concevoir une gestion saine et prudente des risques sans la présence de réserves suffisantes, la fameuse provision pour écarts défavorables. Elles sont les seules, d'ailleurs, ces provisions, à permettre l'usage d'un taux d'actualisation comportant plus de risques.

Le projet de loi propose un partage 50-50 des coûts pour services futurs avec...

Le Président (M. Auger) : S'il vous plaît! M. D'Amours, juste un instant, s'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement pour avoir un délai supplémentaire? Consentement? Consentement. Et on prend le temps à quel endroit?

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Merci. M. D'Amours, si vous voulez continuer. Merci.

M. D'Amours (Alban) : Le projet de loi propose un partage 50-50 pour les services futurs avec un maximum de 18 %, 20 % pour les policiers et pompiers pour la cotisation d'exercice. Le partage des coûts est aussi un élément essentiel que nous avions également recommandé.

La combinaison du partage des coûts et du maximum de 10 % forcera les parties à s'entendre sur les meilleures façons d'adapter leur régime aux conditions économiques et démographiques actuelles et futures. Il est bon de noter que, malgré l'ajout de telles restrictions, les employés municipaux continueront à bénéficier de conditions plus avantageuses que celles dont bénéficient la majorité des Québécois, qu'ils aient ou non un régime collectif d'épargne-retraite.

Le projet de loi n° 3 impose également un partage 50-50 des déficits eu égard aux services futurs. Le partage de ces déficits devrait inciter les parties à mieux gérer les risques. Il demande toutefois des précisions dans ses modalités d'application.

Le projet de loi stipule également les prestations qui peuvent ou doivent être modifiées tant pour les services futurs que les services passés. Nous traiterons séparément les services futurs et services passés. Pour le futur, une indexation conditionnelle à la capacité de payer du régime est une bonne chose; elle doit être non seulement permise, mais même encouragée. Pour le passé, le projet de loi traite séparément les participants actifs et les retraités, ce qui est parfaitement justifié. Il est toutefois important que, lors de négociations, les deux soient traités de façon équitable.

Pour les retraités, le projet de loi donne le droit à l'employeur de suspendre l'indexation des rentes sans égard à la situation financière du régime. Étant donné la grande diversité des régimes qui existent et les circonstances particulières de chacun, nous croyons que ce droit devrait être fonction de la situation financière du régime. De plus, ce droit devrait être restauré si la situation financière s'améliore au-delà de la pleine capitalisation, incluant la PED.

Pour les participants actifs, le même principe de balisage selon la situation financière pourrait s'appliquer. Il est toutefois important de bien identifier quels avantages peuvent ou non être revus. Nous pensons ici à l'indexation avant et après la retraite, la subvention pour retraite anticipée, et le supplément d'appoint, et la subvention pour la rente de conjoint survivant. En somme, il faut protéger la rente de base et limiter la restructuration aux prestations accessoires. Enfin, la restructuration des régimes ne devrait être obligatoire que si la situation financière du régime l'exige.

En conclusion, le projet de loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal souscrit à la logique de notre rapport. Il est muet cependant à l'égard de certaines autres recommandations de notre rapport qui mériteraient d'être prises en considération, notamment celles traitant de la gestion des risques comme l'obligation pour tous les régimes d'adopter des politiques de financement, de placement et de prestations. C'est correct dans la mesure où ces autres aspects sont couverts lors de l'amendement à la Loi sur les régimes complémentaires de retraite dans un court laps de temps. Plusieurs des changements auxquels nous référons ici ne sont pas controversés et seront utiles lors des négociations. Je pense, entre autres, à la possibilité de séparer les caisses de retraite entre les retraités actuels, d'une part, et les participants actuels et les retraités futurs, d'autre part, et de permettre les achats de rentes en cours d'existence du régime. À vous de voir si vous voulez les inclure ou non dans la version finale du projet.

En outre, nous pensons que la Loi sur les régimes complémentaires de retraite devrait permettre de réduire les subventions à la rente de conjoint survivant pour les services passés et futurs et interdire, pour les services futurs, d'offrir des bénéfices de retraite anticipée subventionnés à des participants âgés de moins de 55 ans.

Je ne connais pas les intentions du gouvernement pour les autres régimes du secteur public, tels ceux des universités. Il sera toutefois important d'être cohérent.

Enfin, nous désirons rappeler que les embellies financières sont cycliques et que les rendements qu'elles procurent ne sont pas le reflet de la performance que connaissent les marchés financiers sur une longue période.

La pérennité des régimes à prestations déterminées signifie qu'ils survivront aux prochaines crises financières, que leurs promesses seront respectées, qu'ils seront abordables et qu'ils ne seront pas remplacés par des régimes à cotisations déterminées.

Finalement, certains vous diront que ceci ne règle en rien le manque d'épargne en vue de la retraite chez plusieurs Québécois. C'est vrai, mais cela est un tout autre enjeu. Nous l'avons abordé dans notre rapport en proposant deux mesures : l'adoption des RVER et la rente longévité. Nous vous remercions de votre attention et de votre indulgence et nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. J'aurais besoin d'un autre consentement, parce que, ce matin, on était censés terminer nos travaux à 12 h 42. On a eu un léger retard, donc je demande le consentement pour aller au-delà de l'heure prévue. Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Auger) : Consentement. Merci beaucoup.

Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour une durée d'environ 22 minutes.

• (10 h 10) •

M. Moreau : Merci, M. le Président. Bienvenue, M. D'Amours; bienvenue, M. Morency. Merci de vous déplacer pour les travaux de la commission. Je pense que, de toute façon, votre passage est incontournable. Vous avez travaillé très fort pour préparer un rapport qui, vous l'avez dit dans vos remarques, a fait l'objet d'une large approbation d'ailleurs au niveau des partis politiques ici, à l'Assemblée nationale, mais beaucoup plus largement à l'extérieur des murs. Il y a certains éléments — on a une vingtaine de minutes — deux ou trois éléments sur lesquels je vous demanderais d'interagir et peut-être de préciser.

Premièrement, le député de Blainville le mentionnait, je pense que ça émane aussi de la proposition gouvernementale, nous sommes convaincus de la nécessité de l'urgence d'agir. Cette urgence d'agir est remise en question dans le débat public de façon correcte, là. Il y en a qui disent : Non, vous allez trop vite. Vous êtes favorable à une action immédiate. Pour quelle raison y a-t-il urgence d'agir?

M. D'Amours (Alban) : Bien, si nous n'agissons pas maintenant, le problème va devenir encore plus difficile à solutionner dans l'avenir. Alors, nous avons l'expérience du passé, hein? Dans les années 2000-2005, on anticipait ces problèmes, on a négocié et, au lieu, à l'époque, de trouver des solutions durables, par exemple, on a exclu les municipalités de la règle de la solvabilité. On n'a pas aidé à la solution du problème, on a amplifié les risques de ces régimes et, avec la crise de 2008 et finalement l'effondrement des marchés, nous avons hérité de la situation actuelle. Et il ne faut pas attendre la prochaine crise financière pour assurer la pérennité de nos régimes; il sera trop tard parce qu'ils se transformeront tous en régimes à cotisation déterminée et entraîneront la réduction de la sécurité financière des travailleurs québécois qui en profitent.

M. Moreau : Vous avez largement, dans votre rapport et encore ce matin, indiqué, je dirais, votre côté favorable pour les régimes à prestations déterminées, puisqu'ils représentent une sécurité et une prévisibilité en vertu de la retraite. Donc, le risque de ne pas agir serait de perdre ces régimes-là, de les voir se transformer en régimes à cotisation déterminée et, dans certains cas, j'imagine, aussi de les voir totalement s'effondrer, ce qui mettrait en péril la capacité du régime à payer la rente. Exact?

M. D'Amours (Alban) : Absolument.

M. Moreau : Maintenant, à l'égard des gains obtenus, vous l'avez mentionné dans votre rapport, vous l'avez mentionné aussi dans les remarques que vous nous avez lues, vous dites... et on va parler des choses telles qu'elles sont sur la place publique, certains disent : Il y a eu des ententes qui ont été négociées de bonne foi, ça équivaut à renier les signatures qui ont été obtenues. Vous faites une grande nuance à ça. Vous dites que c'est vrai, mais que ce n'est vrai qu'en partie, dans la mesure où les gains obtenus ont été, dans bien des cas et dans la majorité des cas, plus importants que ce qui avait été négocié ou anticipé au départ. En réalité, donc, ce que vous dites, c'est que le consentement des parties à consentir un gain était fait sur des éléments qui étaient moindres et qui avaient moins de coûts pour les régimes. J'aimerais que vous développiez là-dessus.

M. D'Amours (Alban) : Bien, bien sûr, compte tenu de la démographie qui a évolué puis de la situation économique, on a constaté que les coûts de ces améliorations ont été nettement supérieurs à ceux que nous avions prévus. Ça, ça a été fait de bonne foi. Il n'y a pas de coupable là-dedans. Mais maintenant on le constate et on dit qu'on va mettre en péril nos régimes. Alors, qu'est-ce qu'il faut protéger, c'est l'intérêt général du régime ou bien non protéger certains droits acquis que l'on sait, bon, creuser les déficits davantage éventuellement avec des retours financiers comme on a déjà connu? Alors donc, il faut absolument que nous progressions dans ce sens-là, et il est temps de le revoir, et s'asseoir, et, en toute sérénité, discuter de l'avenir. Et, bien sûr, le principe... la valeur d'équité intergénérationnelle doit nous piloter dans tous ces exercices.

M. Moreau : Sur la question de l'équité intergénérationnelle, vous avez fait une large part de votre rapport et de l'intervention que vous avez faite ce matin au traitement des retraités. Moi, je veux bien saisir votre opinion là-dessus. Vous dites : Il est correct, et l'alignement du projet de loi n° 3 sur le traitement des retraités est enligné correctement dans la mesure où on sépare les retraités des cotisants actifs. Maintenant, vous dites : La suspension de l'indexation. Les chiffres que j'ai sont les suivants : compte tenu de la totalité des régimes visés par le projet de loi, on me dit que la suspension de l'indexation des rentes, de l'indexation des rentes des retraités, n'aurait aucun effet chez 85 % d'entre eux parce qu'il n'y a que 15 % des régimes qui prévoient une indexation automatique. La plupart des régimes ne prévoient pas d'indexation. Donc, pour 85 % des retraités, là, la question de la suspension, ça n'a aucune incidence. Mais, sur la suspension, sur le 15 %, là, qui pourrait subir une suspension temporaire de l'indexation, vous dites : Il faut faire attention et ne pas le traiter également... il faudrait avoir une différenciation selon la santé financière du régime. Ma question porte donc sur la santé financière du régime.

On entend toutes sortes de chiffres, il y en a qui disent : 85 % de capitalisation, c'est un régime qui est en santé. Pourtant, dans votre rapport, vous dites : On doit avoir un fonds de stabilisation qui équivaut à peu près à 20 % de plus qu'une capitalisation totale. Donc, c'est 120 % en chiffres réels. Si mon régime est à 85 %, il y a encore un déficit de 35 % par rapport à la marge de sécurité que je souhaite obtenir.

Qu'est-ce que c'est, un régime en santé? Est-ce qu'à 85 %, avec un déficit qui, compte tenu d'un fonds de stabilisation à 20 %, serait de 35 %, on peut dire que c'est un régime en santé ou si, là, on doit le considérer également?

M. D'Amours (Alban) : Un régime en santé, c'est un régime qui a une capitalisation de 100 %. Mais il faut bien se rendre compte ici que les régimes municipaux, là, ils ne sont pas soumis à la règle de la solvabilité. Si on disait : Un régime en solvabilité est à 85 % et qu'on devrait être tolérants à 85 %, 90 %, bien là on pourrait se rendre à cet argument. Mais, lorsqu'il s'agit de la capitalisation qui est en mode continu, si on décide finalement d'accepter qu'à 85 % le régime est en santé, ça veut dire qu'il y a encore 15 % de déficit. Et qui va payer les déficits? C'est un transfert intergénérationnel. Et donc, encore une fois, si on veut arbitrer tout ça avec une recherche de l'équité intergénérationnelle, on doit définir un régime en santé lorsqu'il est pleinement capitalisé.

M. Moreau : Donc, à 100 %. Et la raison pour laquelle, là... Pour que les gens qui nous écoutent suivent bien nos discussions, vous dites : Bon, les régimes municipaux ne sont pas soumis au test de solvabilité parce que la municipalité, elle est pérenne, elle va durer tout le temps, elle n'est pas... la stabilité de l'institution est là, sauf que, lorsque je parle de la stabilité de l'institution, je parle aussi de l'imposition qui est faite sur les contribuables et, bien que les régimes municipaux ne soient pas soumis au test de solvabilité, j'ai un équilibre à respecter entre les contribuables qui, ultimement, sont ceux qui fournissent les sommes pour que les municipalités puissent payer. C'est exact?

M. D'Amours (Alban) : ...

M. Moreau : O.K. Maintenant, donc, vous dites : Un régime en santé, pour vous, c'est un régime qui est pleinement capitalisé, à 100 %. Un régime qui n'est pas pleinement capitalisé à 100 %, là, vous dites : On pourrait, dans ce cas-là, si je suis votre raisonnement... Je ne veux pas vous mettre les mots dans la bouche, je vous pose la question; si vous êtes en désaccord avec la proposition, vous me le dites. Donc, un régime qui ne serait pas capitalisé à 100 % pourrait, dans le cas des retraités où le régime prévoit une indexation automatique, voir à la suspension temporaire de cette indexation jusqu'à ce que la capitalisation arrive à 100 % et, à ce moment-là, de façon prioritaire, rétablir l'indexation des pensions des retraités. Est-ce exact?

M. D'Amours (Alban) : ...ainsi à, bien sûr, introduire un peu plus de souplesse. Bernard, est-ce que tu as un commentaire à ça?

M. Morency (Bernard) : Bien, je pense, M. le ministre, sur la théorie de suspendre l'indexation temporairement, dans notre rapport, ce qu'on avait dit, c'est que ça devrait être une solution de dernier recours. Ce qui devrait se faire, c'est... D'abord, on le regarde, c'est quoi, le constat. Est-ce qu'on est à 85 %, à 88 %, à 100 %, à 102 %? Et ce qu'on suggérait fortement ici, c'est que : un, on prend état de ce constat-là; deux, on regarde la situation des retraités séparément de celle des employés actifs, qui est un principe d'ailleurs qui se retrouve dans le projet de loi n° 3; et, après ça, les parties conviennent d'une façon d'adresser la question des retraités. Dans le cas des retraités, il nous semblait impératif de protéger la rente qui existe au moment où on a la discussion. Donc, il n'est pas question de revoir le montant de rente qui est versé aux retraités.

La seule option que les parties devraient se donner, c'est de dire : Est-ce qu'il y a lieu, dépendant de la situation, de suspendre l'augmentation de cette rente-là pendant un certain nombre d'années, le temps qu'on recouvre la santé financière? Donc, on pense que cet esprit-là est celui qui devrait animer ces discussions-là, et, si nécessaire, à ce moment-là, ça peut amener les parties à faire ça.

• (10 h 20) •

M. Moreau : Si vous savez que le projet de loi, tel qu'il est rédigé à l'heure actuelle — puis je répète qu'on est ouverts à la discussion — le projet de loi garantit la rente de base et dit : Vous n'avez pas le droit de toucher à ça dans la restructuration du régime, donc c'est une bonne nouvelle pour les retraités, en disant : Ma rente de base, elle, elle n'est pas touchée, celle sur laquelle je calcule mon niveau de vie à la retraite, parce qu'avec les formules d'indexation qui existent, là, bien malin serait celui qui pourrait dire à 25 ans : Voici quelle sera l'indexation que je toucherai pour les cinq premières années de ma retraite. C'est impensable et c'est impossible à prévoir. Donc, on parle toujours de l'indexation pour 15 %. Vous me dites : Il faut tenir compte de la situation. Les chiffres pour Montréal : 1,6 milliard de déficit globalement sur les sept régimes, 1 milliard attribuable aux coûts de l'indexation, dont 470 millions attribuables aux retraités. Comment est-ce que je traite ce problème-là avec les chiffres que la Régie des rentes a à l'égard des régimes de Montréal? Est-ce que je comprends que votre raisonnement, c'est de dire : Isolez le 470 millions, parce que celui-là, c'est l'indexation attribuable à l'indexation des retraites, et traitez le solde avec les participants actifs? Est-ce que c'est comme ça que vous m'alignez le problème?

M. Morency (Bernard) : C'est le principe qui avait été proposé dans notre rapport et qui a été retenu dans le projet de loi, de séparer les deux enjeux. L'autre élément, c'est : Quelle est la situation financière du régime dans son entier? Dans le projet de loi, on dit : On commence par établir cette situation financière là puis ensuite on alloue ce déficit ou ce surplus-là s'il y en avait un. Donc, oui, c'est la logique qui prévaudrait. Je n'ai pas les chiffres aussi précis que vous pour la ville de Montréal, bien sûr.

M. Moreau : Ça va. Maintenant, cette façon de voir les choses, on l'applique régime par régime. Donc, on tient compte de la situation de chacune des situations existantes : Le régime prévoit-il une indexation ou il n'en prévoit pas? Là, on n'est pas dans du mur-à-mur, on est dans du sur-mesure. C'est ce qu'on prévoit dans le projet de loi.

Je pousse plus loin le raisonnement. Dans ce contexte-là, à partir du moment où je suspends l'indexation, là aussi, il n'y a pas de mur-à-mur, parce que, si j'ai un régime qui est plus capitalisé qu'un autre, le retour à la santé financière devrait normalement être plus rapide, et le rétablissement de l'indexation, plus rapide. Alors, je tiens compte de la situation de chaque régime. C'est exact?

M. D'Amours (Alban) : C'est une façon de le concevoir.

M. Moreau : Et encore une fois, là, on ne peut pas dire qu'on adopte une situation qui est mur à mur, mais on adapte une situation à la réalité des 15 % des régimes qui prévoient une indexation automatique. C'est exact? Alors, la réalité, dans le fond, puis je pense que c'est ça et je suis très heureux que... Puis il va y avoir d'autres points de vue qui vont être entendus durant la commission, mais je pense qu'on a un exercice pédagogique à faire ce matin. Il y a un réflexe, là, qui dit : Ah! ça, c'est du mur-à-mur puis c'est trop large. Quand on l'examine, la réalité des choses n'est pas celle-là, c'est-à-dire qu'on adapte des principes à la réalité particulière de chaque régime. Et déjà je pense que, parmi les retraités qui nous écoutent, il y en a qui, pour la première fois, entendent que, pour 85 % d'entre eux, le projet de loi n'aura aucun impact. Est-ce que vous confirmez ce fait?

M. D'Amours (Alban) : En effet, et nous adhérons à cette façon de voir.

M. Moreau : Parfait. Maintenant, sur les hypothèses actuarielles, vous avez dit : C'est important de partir d'hypothèses actuarielles qui sont les mêmes pour juger de l'ensemble de la situation. Pour quelle raison est-ce qu'on doit... Quelle est l'importance des hypothèses actuarielles dans le contexte du problème auquel on a à faire face?

M. D'Amours (Alban) : ...les bons conseils de mon actuaire.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Morency (Bernard) : Écoutez, ce qui est important, c'est d'encadrer le processus. Je ne pense pas qu'ici on puisse dire que les hypothèses actuarielles doivent être identiques pour chacun des régimes, parce qu'elles doivent être adaptées selon la démographie du régime, selon la capacité des gens à assumer des risques, selon les prestations qui sont prévues, mais ce qui est important, c'est d'encadrer le processus.

Malheureusement, la science actuarielle, ce n'est pas une science précise. On doit poser un paquet d'hypothèses sur de très longues périodes, et donc ce qui est retenu ici, c'est l'importance d'encadrer ce processus-là de façon à permettre aux parties, à l'intérieur d'une fourchette qui est acceptable, de prendre la décision qui leur convient à eux pour l'établissement de leurs hypothèses. Donc, c'est un élément essentiel de l'encadrement qu'on veut se donner. Le projet de loi, il va, d'une certaine façon, en suggérant une table de mortalité, en suggérant un taux d'escompte qui peut varier mais qui devrait être un maximum de 6 %... Ça ne veut pas dire qu'il faut utiliser 6 %. L'actuaire pourrait décider que, dans ses circonstances à lui, il veut utiliser 5,8 %, mais le projet encadre ça, et je pense que c'est un élément important de l'encadrement qui doit être donné aux parties.

M. Moreau : Bien.

M. D'Amours (Alban) : Dans notre rapport, nous avions proposé la capitalisation améliorée en prescrivant un taux maximum pour actualiser le capital nécessaire pour les retraités et les futurs retraités, et c'est une approche qui a des similitudes. Vous avez choisi d'aller vers celle que nous vous proposons... que vous proposez, et il y a une certaine forme d'équivalence.

M. Moreau : Et donc vous n'avez pas de commentaire négatif, mais vous dites...

M. D'Amours (Alban) : Bien, le commentaire principal, celui que j'ai fait, M. le ministre, est : Il ne faudrait pas encadrer ça simplement pour l'évaluation actuarielle au 31 décembre 2013. Il faudrait que cet encadrement-là soit aussi pour le futur, sinon on risque de connaître ce qu'on a connu dans le passé. Il faut se donner les moyens de mieux gérer les risques de nos régimes pour maximiser la probabilité que les rentes seront payées.

M. Moreau : Alors, vous dites : L'encadrement qui est prévu par la loi, il est correct, mais il doit être étendu aux autres cycles...

M. D'Amours (Alban) : Absolument.

M. Moreau : ...d'évaluation actuarielle des régimes, sachant que ces cycles d'évaluation sont une fois tous les trois ans. C'est exact? Et vous dites : Donc, à tous les trois ans, l'encadrement devrait valoir de façon continue pour l'avenir. C'est ce que vous dites?

M. D'Amours (Alban) : Oui, et j'estime que la Régie des rentes a un rôle à jouer dans ce contexte. Elle doit avoir... elle devrait avoir le pouvoir dans la loi d'établir cet encadrement et de fixer des taux maximums.

M. Moreau : O.K. Dans le rapport que vous avez produit aussi — je vous amène sur un autre élément — on a dit : Le projet de loi protège la rente de base des retraités, donc ça devrait être de nature à apaiser les inquiétudes qu'il pourrait y avoir. Elle ne touche pas même à la question d'indexation. Pour 85 % d'entre eux, ils sont totalement exclus de toute application de la loi. On parle aussi de la rente du conjoint survivant. Là, j'ai entendu, autant, je pense, dans les discours syndicaux que chez les municipalités, un questionnement autour de la protection de la rente du conjoint survivant en disant : Bien, dans le passé, pour les retraités, dans le Québec traditionnel d'il y a plusieurs années, le conjoint n'avait pas de source de revenus autonomes, et donc la rente du conjoint survivant était un filet de protection sociale très important. Cette réalité-là, dans le Québec moderne, est moins présente. Quels sont les commentaires ou les recommandations que vous aurez à faire à la commission parlementaire sur la protection de la rente du conjoint survivant?

M. D'Amours (Alban) : Bien, nous avons recommandé de la considérer comme un bénéfice accessoire. Et, dans l'exercice qui veut... qui poursuit à l'assainissement de la santé financière d'un régime, bien on suggère de s'accrocher à l'essentiel. Quel est l'essentiel d'un régime de retraite? C'est que la personne puisse, en toute assurance, toucher son chèque de rente au moment où elle prend sa retraite, et préférablement le plus tardivement possible. Ça, ça confirme la probabilité que la rente sera payée. Ça, c'est l'essentiel. L'indexation est un bénéfice, entre guillemets, accessoire mais auquel on aspire tous, mais dans une condition financière qui le rend possible, sinon on doit revenir à l'essentiel, qui est le chèque. Donc, tout accessoire peut être négocié et... que ces bénéfices puissent être restaurés — c'est l'esprit de notre rapport — progressivement lorsque le régime sera à bon niveau, et on aura pleinement capitalisé le régime, et les réserves seront suffisantes pour restaurer ces bénéfices.

M. Moreau : Je reformule ce que vous venez de dire. Vous dites : La rente de base, c'est intouchable, le reste, c'est accessoire, et certains des éléments accessoires sont plus importants que d'autres. L'indexation doit être établie prioritairement, mais tous les accessoires peuvent faire l'objet d'une discussion, y compris la rente du conjoint survivant. C'est l'opinion que vous exprimez?

M. D'Amours (Alban) : Oui.

• (10 h 30) •

M. Morency (Bernard) : J'aimerais apporter une petite précision ici, là, pour être bien certain de ce qu'on veut dire quand on mentionne ça, M. le ministre. Les gens qui sont déjà à la retraite, le conjoint qui déjà reçoit une rente, le conjoint d'un retraité qui est déjà à la retraite, ça, ce qu'on dit, c'est que ça ne devrait pas être touché.

M. D'Amours (Alban) : C'est sûr.

M. Moreau : Les rentes versées, les rentes de conjoint survivant versées, on ne touche pas à ça.

M. Morency (Bernard) : C'est ça, et y incluant le conjoint d'un retraité. Le retraité, son conjoint, lorsque le conjoint... lorsque le retraité décédera, le conjoint aura droit à quelque chose. Il n'est pas question de toucher à ça.

M. Moreau : Alors, une clause grand-père pour ces deux éléments accessoires.

M. Morency (Bernard) : C'est ça. Ça fait que ça, c'est important.

M. Moreau : O.K.

M. Morency (Bernard) : Le deuxième élément... Il faut faire attention ici. Ce qu'on a mentionné, c'est la subvention pour la rente au conjoint, pas la rente elle-même. La rente elle-même, c'est une clause très importante des régimes de retraite. C'est une protection très importante d'avoir une rente au conjoint. L'élément ici, c'est : Est-ce que cette protection-là est subventionnée? Et un des éléments qu'on veut faire voir, c'est que, dans le regard des choses, dans l'examen qu'on peut vouloir faire pour adresser le déficit de 4 milliards dont vous avez tous parlé dans vos notes préalables, un des éléments, c'est cette subvention-là qui pourrait être reconsidérée, donc pas la rente elle-même, mais la subvention qui est accordée pour financer la rente. Ça fait que c'est une...

M. Moreau : M. Morency, M. D'Amours, merci beaucoup.

Le Président (M. Auger) : ...temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle. La parole est à vous.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je vous salue. Merci d'être présents à cette commission. Écoutez, bon, j'ai quelques questions par rapport à la présentation que vous avez faite.

D'abord, juste au départ, parce que vous avez un peu parlé du ratio retraités-employés quand vient le temps d'évaluer la santé, là, d'un régime de retraite... Puis vous en parlez à la page 2, là, vous dites : «...comme le ratio des retraités vs les participants actifs augmente, il est plus dispendieux...»

J'aimerais vous entendre parce que, c'est sûr que, quand tu as un régime avec financement par répartition... Je vois l'importance, c'est très important, mais parlez-moi un peu de l'influence de ce ratio-là quand on parle de la capitalisation d'un régime comme le régime à prestations déterminées.

M. D'Amours (Alban) : Bien, lorsque la... C'est la maturité d'un régime. Lorsqu'il y a plus de retraités qu'il y a de participants actifs, bien sûr que le coût qu'entraîne le financement du régime augmente pour les participants, pour la cotisation d'exercice. Il est évident qu'il faut avoir en tête cette situation démographique qui est de plus en plus lourde à soutenir, et donc il faut revoir notre financement, et il y a différentes façons : élever la cotisation ou revoir les bénéfices. Il n'y a pas d'autre solution possible.

M. Therrien : Et donc ça, ça touche le taux de capitalisation d'un régime de retraite.

M. D'Amours (Alban) : Bien oui! C'est le financement...

M. Morency (Bernard) : Oui, bien sûr. En fait, ce ratio-là, M. le député, il a deux impacts très importants. Le premier, c'est celui dont vous parlez et sur lequel Alban élabore, c'est que, lorsqu'on exprime le coût d'un régime de retraite, on l'exprime toujours en pourcentage de la masse salariale. Donc, bien sûr, plus on a de retraités qui ne sont pas dans la masse salariale, plus le coût va être élevé en pourcentage de la masse salariale. Donc, cette progression-là qu'il y a eu dans le ratio... Donc, d'entrée de jeu, on disait... la régie disait que c'était 17 pour un, puis là c'est rendu trois pour un, puis ça s'en va à peut-être deux pour un ou un et demi pour un. Ça a un impact direct sur le coût lorsqu'il est exprimé en pourcentage. Mais le deuxième, qui est aussi excessivement important, c'est la capacité du régime et des parties à prendre du risque. La situation de 2008, pour la personne qui a 40 ans, bien, il a 20 ou 25 ans pour se refaire. Pour la personne qui en a 64, qui était pour prendre sa retraite le 1er janvier 2009, là, c'est pas mal plus tragique, là. Donc, quand on a un régime qui a beaucoup plus de retraités, ça a un impact sur la capacité du régime à vivre avec cette volatilité-là. C'est un élément très important. C'est un élément très important de l'urgence d'agir parce que ça, là, la démographie, c'est assez prévisible. Nous tous, là, dans 10 ans, on va être 10 ans plus vieux ou on va être morts. Je veux dire, il n'y a pas d'autre option. Donc, c'est quelque chose qui est assez facile à prévoir et qui doit être pris en compte dans la gestion des risques des régimes.

M. Therrien : À ce moment-là, je vous amène à la page 5, quand on parle de la restructuration des régimes : «Enfin, la restructuration des régimes ne devrait être obligatoire que si la situation financière du régime l'exige.» Donc, vous parlez de la solvabilité qui s'applique dans le privé, là, parce qu'il y a possibilité que l'entreprise, là, ferme ses portes.

On avait discuté, là, de la règle de solvabilité quand on parlait des municipalités, que ça devenait plus difficile d'être sévère à ce niveau-là. Et donc la question qui était posée par M. le ministre, c'était : Bon, à 85 %, c'est-u bon? À 90 %? Là, ce que vous me dites... Puis c'était ça, le but de ma question, là, c'est de savoir comment on pouvait évaluer si un régime doit être inclus dans ce projet de loi là. J'imagine, s'il doit être inclus, c'est parce que sa santé, sa pérennité est en danger. Alors donc, à ce moment-là, comment vous évaluez, à partir de paramètres comme celui-là, là, entre autres, là, du ratio employés-retraités, mais aussi par rapport à la capitalisation du... du pourcentage de capitalisation? Comment vous pourriez dire : Ce régime-là, il n'est pas en danger, on peut le laisser tranquille? Est-ce que vous avez pensé à établir des paramètres comme ça quand vous avez écrit ça? Là, vous dites : «...la restructuration des régimes ne [peut pas] être obligatoire que si la situation financière du régime l'exige.» C'est quoi, vos paramètres d'analyse, à ce moment-là, pour évaluer ça?

M. D'Amours (Alban) : Cette précision que nous apportons, bien sûr, c'est dans le cadre de la recherche de balises et puis pour rassurer tout le monde, dans le sens où l'employeur n'irait pas abolir, suspendre l'indexation de tout le monde, alors que son régime est en santé, en disant : Bon, bien, ça peut me coûter moins cher et... Donc, c'est une balise que l'on souhaite que le projet de loi confirme clairement. Et, dans ce contexte-là, il m'apparaît que c'est tout à fait sain. Dans un contexte d'équité intergénérationnelle, c'est tout à fait sain de penser de cette manière-là. Et la démographie, hein, la longévité fait en sorte que le problème, aujourd'hui, il est moins grave que celui de demain. Alors, si nous n'agissons pas maintenant, bien, le coût de ne rien faire va être considérable. Et qui va payer? Ce n'est pas celui qui sera responsable, c'est le citoyen, hein?

M. Morency (Bernard) : Juste un point. Vous mentionnez «solvabilité». On ne parle pas de solvabilité ici, on parle de la capitalisation sur une base en continu. C'est vraiment important d'apporter cette précision-là. Et comment elle est déterminée? Elle est déterminée justement avec l'encadrement dont on parlait il y a quelques minutes. Le projet de loi dit : Voici la façon d'encadrer la détermination de ce chiffre-là, et c'est un chiffre basé sur la capitalisation, pas la solvabilité. C'est vraiment important de faire la distinction entre les deux.

M. Therrien : Non, je comprends bien, mais c'est parce que tantôt... Je faisais référence à tantôt, quand on parlait de solvabilité, tout simplement. Mais je comprends très bien, là, ce que vous dites, là.

Écoutez, donc, on voit que le projet de loi n° 3, ça va toucher tous les régimes de retraite. Celui qui était proposé en février laissait tomber les régimes de retraite qu'on considérait en santé à partir de certaines balises. Est-ce que vous considérez que tous les régimes de retraite devraient être inclus dans cette restructuration-là ou qu'on pourrait justement dire : Bien, si on veut assurer la pérennité, donc on veut s'arranger pour que les régimes soient en santé; si les régimes sont en santé, peut-être qu'on n'a pas besoin de restructurer. Je ne sais pas ce que vous en pensez, de ça.

M. D'Amours (Alban) : Bien, il y a de la restructuration que propose le projet pour tous les régimes. Par exemple, passer de 35-65 à 50-50, ça exige... le passage, c'est restructurer le régime, d'une certaine manière. Mais, au-delà de ces prescriptions dont je viens de parler, si le régime est bien capitalisé, s'il est à 50-50 et puis il ne dépasse pas le 18 % et qu'il est bien capitalisé, bien, on pense qu'on ne doit pas créer cette obligation d'aller plus loin que ça. C'est ça qu'est notre point de vue.

M. Morency (Bernard) : C'est ça. Et je pense que... Évidemment, c'est un sujet architechnique, ici. Puis ce que je vous dirais, c'est qu'en tant que commission, quand vous allez écouter, il y a trois pôles de choses : il y a le futur, il y a le passé et là il y a la gestion des risques. Le futur et la gestion des risques, tous les régimes ont besoin de réfléchir à ça. Tous les régimes ont besoin de réfléchir au nouvel environnement démographique, au nouvel environnement économique pour le futur. Tous les régimes ont besoin de réfléchir à la gestion des risques. La partie où on suggère de baliser, moduler différemment, c'est la partie du passé où, là, ceux qui n'ont pas de déficit n'ont peut-être pas besoin d'avoir des mesures comme celles qui sont envisagées. Par contre, ceux qui en ont doivent envisager des mesures pour combler le 4 milliards de déficit. Donc, c'est cette partie-là qui doit être balisée. Mais la première et la troisième, elles s'appliquent à l'ensemble des régimes.

• (10 h 40) •

M. Therrien : Je vais poser une question... Je vais essayer de simplifier un peu, là. Moi, je suis un travailleur. Mon employeur me dit que le régime est sain, 100 % de capitalisation, peu importe, 105 %, et la cotisation totale, c'est, genre, 22 %, 23 %, bon, peu importe, là, suite à des négociations. Là, moi, ça va bien dans mes affaires, puis là je me fais dire qu'il faudra qu'on passe à la restructuration et que je baisse ma cotisation et la cotisation de l'employeur à 18 %, en incluant un fonds de stabilisation. Comment vous faites pour vendre cette idée-là à cette personne-là? Je veux qu'on la convainque.

M. D'Amours (Alban) : Bon, il y a l'aspect de l'équité qui est en jeu, là. Alors qu'on est à 22 %, 23 %, 24 %, 25 % dans certains régimes, et la grande majorité, la cotisation est payée par l'employeur, et qui promet des bénéfices qui sont au-delà de 2 %, le fameux 2 % — on était rendus à 2,5 % et plus — là, on permet à cette personne qui, dans le fond, bénéficie d'un privilège, de pouvoir préparer sa retraite de meilleure façon que le citoyen qui n'a pas ces régimes et qui, lui, n'a que la Régie des rentes, les REER, si l'on veut... la Régie des rentes pour assurer sa retraite. Alors, nos lois fiscales sont claires là-dessus, hein? Il y a le fameux 18 %. Donc, quelles que soient les particularités, la technicalité entourant l'application de nos lois fiscales, le citoyen va comprendre qu'il y a une iniquité quelque part. Donc, essayons de composer avec ça. Puis j'estime que tout le monde peut réfléchir sereinement à ça dans un contexte de recherche d'équité.

M. Therrien : Donc, vous lui dites que son régime est trop généreux comparativement à ce qu'on retrouve ailleurs; il devrait faire partie de l'effort collectif pour justement qu'on espère établir au plus grand nombre ces avantages-là. C'est ce que vous me dites.

M. D'Amours (Alban) : Oui. Bien... Oui. Rappelez-vous que, dans notre mémoire, nous croyons que tous les travailleurs québécois devraient avoir accès à un régime à prestations déterminées. C'est la raison pour laquelle on a proposé la rente longévité. C'est la mère de tous les régimes, mais qui vise... L'essentiel, c'est la rente promise et presque assurée à partir de 75 ans. Et ça, ça, à mon sens, on accroît la sécurité financière. Il ne faut pas aller dans le sens où on met à risque les régimes actuels. Il n'y a que 35 % des travailleurs qui ont un régime à prestations déterminées. C'est une proportion qui est relativement faible. Alors, protégeons cet acquis-là, mais, en même temps, ouvrons les perspectives pour les 65 % de travailleurs qui n'ont pas accès à ce type de régime là.

M. Therrien : Merci.

Le Président (M. Auger) : Quatre minutes.

M. Therrien : Quatre minutes? Je pourrais laisser la parole à mes collègues.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, tout d'abord, d'entrée de jeu, j'aimerais saluer les collègues, M. le ministre, les gens qui vous accompagnent. Merci beaucoup, M. D'Amours, ainsi que les gens qui vous accompagnent, pour votre mémoire et votre temps que vous prenez à faire avancer cette cause-là.

Bien entendu, tantôt, lorsque vous avez résumé votre mémoire verbalement, dans vos 10 premières minutes, vous avez parlé de la perception des travailleurs qu'ils font leur part. J'aimerais peut-être avoir votre vision. Lorsqu'on dit à un travailleur ou à un groupe de travailleurs qui décident, dans une convention collective autant passée que future, de ne pas demander une augmentation de salaire en disant : On va mettre tout le... l'aspect financier, au lieu de le mettre sur le salaire à l'heure, on va bonifier notre fonds de pension... Ces gens-là qui ont pris cette décision-là à tort ou à raison, qui voient leurs employeurs qui, eux, prennent un certain congé de cotisation, puis qu'on leur dit aujourd'hui... Bien, ces travailleurs-là ont la perception qu'ils bonifient le... ou qu'ils aident toute la société à tenter de rétablir tout ce qui n'est pas uniforme dans nos régimes de retraite. On sort des chiffres, là, on dit 4 milliards, mais malheureusement ces chiffres-là, ça reste en suspens, mais on n'a jamais eu de chiffre, là, autant de la part du ministre, autant des régimes des rentes, on n'a pas de chiffre à se baser. Lorsqu'on dit : Si tu demandes 2 $ de l'heure de plus ou bien tu demandes de bonifier de 5 $ ton fonds de retraite, personne n'a ces chiffres-là. On ne les a pas. C'est les actuaires qui nous parlent de ça. Puis tantôt, d'entrée de jeu, vous dites : La perception que les travailleurs, ils font leur part... Moi, j'aimerais que vous nous disiez comment vous voyez ça. Lorsqu'un groupe de travailleurs décident de ne pas demander une augmentation de salaire de l'heure puis qu'ils bonifient leur fonds de pension, c'est leur choix. S'ils décident, en groupe... Lorsqu'on leur dit aujourd'hui : Bien, là, les régimes sont non fonctionnels, on va devoir couper, vous allez devoir encore repayer... Comment vous voyez ça si l'employeur, lui, avait pris — dans certains cas, ce n'est pas tous des employeurs — un congé de cotisation? Comment qu'on explique ça au travailleur qui, lui, avait décidé, dans les trois dernières conventions collectives, de dire : On n'augmentera pas notre salaire de l'heure, mais on va mettre ça sur nos fonds de pension, puis aujourd'hui on vient leur dire avec un projet de loi : Bien, là, «too bad» là, ça ne marche pas? J'aimerais vous entendre là-dessus. Comment qu'on expliquerait ça à ces travailleurs-là qui ont pris cette décision-là?

Le Président (M. Auger) : Une réponse, si c'est possible, à l'intérieur d'une minute.

M. D'Amours (Alban) : Je vous rappelle que, dans les années 90, c'était l'effervescence, les marchés financiers allaient très bien. On s'est donné, de fait, des congés de cotisation par la suite, on a bonifié nos régimes de retraite. Depuis, ces bonifications dans les régimes de retraite sont devenues des droits acquis, et les congés, pour la plupart, ont tous été remboursés.

Deuxièmement, à cette époque, on considérait que le régime de retraite, c'était une façon de s'enrichir. On avait développé une culture du rendement. Aujourd'hui, il faut changer notre paradigme, il faut aller vers une culture de la sécurité financière et se mettre dans un contexte de sécurité ou d'accroître... d'améliorer la gestion de nos risques, faire en sorte que la contribution des uns et des autres soit équitable sur le plan intergénérationnel aussi. Et, dans ce contexte-là, la contribution des travailleurs, elle est jugée compte tenu que les acquis font en sorte que...

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup.

M. D'Amours (Alban) : ...les coûts sont plus élevés actuellement. Donc, forcément, il faut restaurer un équilibre à cette situation.

Le Président (M. Auger) : Merci. C'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au député de Blainville, du deuxième groupe d'opposition.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, merci, messieurs, pour... devant nous, M. D'Amours, M. Morency. J'ai beaucoup de respect pour vos compétences. Je vais essayer de m'en servir un peu.

Évidemment, nous, comme parti politique, on considère que les fonds de pension font partie de la rémunération globale. Donc, c'est possible qu'il y ait des différences par rapport aux fonds de pension, là. Nous, on part de ce principe-là. Puis, quand on regarde les chiffres qui nous ont été fournis — parce qu'on n'a pas pu avoir les chiffres sur les 172 régimes, M. le ministre, là, nous, on en a 154 de répertoriés — on en a 10 qui ont plus de 95 % de capitalisation, il y en a 10 qui ont plus de 100 % de capitalisation.

Ma question va être simple : Ces régimes-là, on les associe à la même loi puis aux mêmes restrictions, selon vous? Ceux qui sont en capitalisation de plus de 95 % puis ceux qui sont à plus de 100 %, est-ce qu'on les assujettit à la même loi, là?

M. D'Amours (Alban) : On a dit qu'on considère qu'un régime en santé, c'est celui qui est capitalisé à 100 %. On n'est pas en solvabilité, on est en capitalisation en mode continu. Donc, oui, si on n'est pas capitalisé à 100 %, bien, si on décide qu'il est en santé, ça signifie qu'on va demander aux payeurs de taxes, aux générations futures, de payer ce déficit. Alors, si on veut que les choses soient équitables, il faut qu'il soit capitalisé, à ce moment-là, à 100 %.

M. Morency (Bernard) : C'est important juste de comprendre, si on a un régime qui est à 95 % puis un autre qui est à 80 %, l'ampleur de ce qui est demandé est complètement différente. Ils sont sujets à la même obligation d'adresser le problème, mais bien sûr, dans un cas, le problème, c'est 5 %, puis, dans l'autre cas, c'est 20 %. Donc, ce qu'ils ont à faire n'est pas du tout de la même ampleur. Ça fait qu'il faut faire attention à ça.

M. Laframboise : Sauf qu'ils ont quand même quelque chose à faire, selon vous. C'est pour ça que...

M. Morency (Bernard) : Pour la partie passée, oui.

M. Laframboise : Pour la partie passée... Bien, si on est à 100 %, la partie passée, tu sais, là...

M. Morency (Bernard) : À ce moment-là, on n'a pas besoin de rien faire.

M. Laframboise : C'est pour ça que je veux... C'est parce que nous, on essaie de faire de la politique autrement, là, c'est-à-dire que, quand on part avec comme prémisse qu'on aura de l'arbitrage, bien, c'est ça que ça fait : le Parti québécois qui donne des marges de manoeuvre plus importantes à l'arbitre, puis le gouvernement qui donne moins de marge de manoeuvre, on a encore de l'arbitre, là, puis finalement l'arbitre n'a pas de latitude, alors que nous, ce qu'on dit : À la fin, ça devrait être la ville qui tranche, parce que... Et j'aimerais vous entendre sur ma deuxième question : Qu'est-ce que vous allez dire au maire de Montréal, qui va vous demander : Mes bleus, j'ai signé jusqu'en 2017, je voudrais les retirer parce que je veux respecter la parole de la ville? Est-ce qu'on les assujettit, les bleus de Montréal, à cette même loi-là ou on lui donne certaines marges de manoeuvre pour qu'il puisse être capable de respecter la parole qu'il a donnée?

• (10 h 50) •

M. D'Amours (Alban) : La logique de nos recommandations devrait s'appliquer à tous les régimes. Mais pourquoi est-ce qu'on traiterait un régime de façon toute particulière parce que son problème est plus gros? La démarche qui est proposée devrait convenir à tous les régimes, et les pistes qui sont proposées devraient leur permettre, compte tenu de leurs situations particulières, de leur donner les marges de manoeuvre suffisantes, en termes de négociation en particulier, pour ramener les régimes à l'équilibre.

M. Laframboise : Donc, vous voyez, là, mon dilemme à moi, là, avec le régime encadré avec l'arbitrage, ça fait ça, ça fait qu'on n'a pas de marge de manoeuvre.

Sur le partage 50-50 des déficits, j'aimerais juste vous donner la chance, là, de vous exprimer, futur, passé, là, M. Morency, là, vous, là, juste nous encadrer bien la position, là, votre position par rapport à ça.

M. Morency (Bernard) : Bien, d'abord, un des principes : il faut respecter les ententes qui existent, là. Votre exemple de : Si on a eu une entente, est-ce qu'il faut la respecter? Bien sûr qu'il faut la respecter, bien sûr. La question, ici, c'est de dire : Ces régimes-là ont un défi important de pérennité, donc pour le futur. La réalité est que les gens vivent beaucoup plus vieux qu'ils ne vivaient. La réalité est que les taux d'intérêt sont beaucoup plus bas, donc les régimes plus coûteux qu'ils ne l'étaient. Donc, ce qu'on dit, c'est que, pour qu'ils survivent, ces régimes-là, ils doivent, pour la partie future, réfléchir à comment ils peuvent revoir leurs dispositions pour s'adapter à ces circonstances-là. C'est vrai de tous nos défis. On doit s'adapter à cet environnement-là. Donc, c'est ça qu'on dit. Et cet exercice-là doit se faire absolument dans le respect du processus de négociation. Nous, on n'est pas des experts du droit du travail. Donc, c'est pour ça que, dans les notes d'introduction, on a dit : Pour ce qui est de cet aspect-là des choses, les parties qui sont des experts dans le droit du travail vont vous faire des suggestions. C'est à vous de moduler comment vous allez les interpréter. Nous, on est des experts de la retraite. Alors, ce qu'on vous dit, c'est qu'à long terme, dans un processus de discussion, ces questions-là doivent être adressées.

M. Laframboise : Et, par rapport au passé, d'après vous, est-ce que ça doit concerner ceux accumulés avant l'entrée en vigueur de la loi, les nouvelles conventions collectives? Il faut s'attaquer à tout le problème, là, même ceux qui...

M. Morency (Bernard) : Écoutez, c'est très difficile, et c'est pour ça que la solution doit se passer à la table des discussions des divers régimes et des diverses municipalités. Il n'y a pas une solution miracle qui va régler l'enjeu de tous, là, mais la réalité est la suivante, vous l'avez tous dit : il y a 4 milliards de dollars qui manquent pour l'ensemble de la situation. Ces 4 milliards de dollars là, ils doivent venir de quelque part, et il n'y a que quatre options. La première, c'est que les rendements soient supérieurs à ceux qui sont prévus. Nous, ce qu'on vous a dit, c'est : Les chances sont que ça ne réglera pas le problème, ça, quand on regarde les attentes de rendement. Donc, il n'en reste que trois : les participants actifs, les participants retraités et le payeur de taxes. Ce n'est pas compliqué. Alors, la question est : Comment on se répartit ce montant-là tout en respectant un principe d'équité intergénérationnelle, de ne pas en repousser trop sur les plus jeunes, de respecter ce principe-là qui veut qu'on ne peut pas juste repousser ce 4 milliards de dollars là sur les plus jeunes? Ce qu'on vous dit au niveau du 100 %, ou du 85 %, ou du 90 %, c'est : Plus on repousse, plus on va à l'encontre de ce principe d'équité intergénérationnelle là. Donc, ce qui nous motive de vous suggérer de considérer la barre au 100 % de capitalisation, c'est ce principe-là. C'est ça qui nous motive dans notre réponse.

M. Laframboise : Le député de Beauce-Nord, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Merci, M. le Président. À mon tour de saluer le ministre ainsi que mes confrères présents aujourd'hui, confrères et consoeurs.

Alors, M. D'Amours, j'ai lu ça, j'ai lu votre rapport. J'ai trouvé ça fort intéressant. Par contre, on parle peu des travailleurs. On parle des régimes; on parle peu des travailleurs. Un travailleur qui a un régime de retraite... Je pense qu'à Montréal, les cols bleus, la moyenne des rentes, c'est 25 000 $ par année, 25 000 $ ou 26 000 $ par année. Alors, ce n'est pas le Pérou, là. N'allons pas penser que tous les retraités sont riches. Puis, selon les données fournies par Aon Hewitt, il y a 50 % des régimes de retraite qui ont un coût en proportion de la masse salariale qui sont au-dessus de 18 % — oublions les policiers et les pompiers — puis il y en a même qui dépassent 30 %.

Moi, je me demande : Pensez-vous qu'une aussi grande réduction, c'est nécessaire? Évidemment, c'est des cas par cas, là, mais ce n'est pas trop préjudiciable pour certains travailleurs qui sont déjà retraités ou les travailleurs à faibles revenus?

M. D'Amours (Alban) : Ce que l'on propose, nous — puis on est d'accord avec ces balises — ce sont des balises qui vont amener les gens autour de la table des négociations. Et, bien sûr, la suspension de l'indexation, elle sera temporaire. Il faut ramener en santé financière le régime. Donc, ce n'est pas préjudiciable parce qu'on travaille pour sauver son régime. Alors, ce serait préjudiciable si on ne faisait rien. Là, ça coûterait cher parce qu'on met ces régimes à risque, et un jour il y aurait... on serait très tentés... Si jamais on ne trouve pas les formules actuelles ensemble, un jour, le problème sera si aigu qu'il y a des solutions qui seraient transversales. On sera obligés de couper de 10 % la rente de tout le monde. Il y a des pays actuellement qui pensent... qui ont pensé dans ces termes. On coupe à travers, et ça, avec un pourcentage. On réglerait le problème pour tout le monde, mais ça serait préjudiciable pour ceux qui ont déjà ce bénéfice et ce droit acquis. Il faut le protéger, ce droit acquis d'avoir accès à un régime à prestations avec promesse.

Le Président (M. Auger) : En 30 secondes. Il reste 30 secondes, M. le député.

M. Spénard : Il reste 30 secondes?

Le Président (M. Auger) : Oui.

M. Spénard : En ce qui concerne l'indexation comme telle, la suspension de la clause d'indexation, est-ce que vous en parlez par régime? Est-ce que vous en parlez par catégorie de travailleurs aussi? Est-ce que c'est... Il faudrait en parler par catégorie de travailleurs, c'est-à-dire qu'un travailleur qui a une rente de 75 000 $ par année puis un autre qui en a une de 26 000 $ par année, ce n'est pas la même affaire, même s'ils font partie du même régime. Alors, est-ce qu'on suspend unilatéralement pour tout le monde?

M. D'Amours (Alban) : Bien là, si on introduit un mécanisme de subvention pour l'un ou pour l'autre et puis... il y en a un qui va payer pour, et c'est celui qui a un régime peut-être plus généreux. Il va payer pour les autres. Alors, je trouve que, là, il y a un problème d'équité, là, dans une approche semblable.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions. Je tiens à vous remercier, M. D'Amours, M. Morency, pour votre présentation.

Je vais suspendre les travaux le temps que le prochain groupe puisse prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 57)

(Reprise à 11 h 1)

Le Président (M. Auger) : S'il vous plaît, les gens dans la salle! On reprend place. Merci beaucoup de votre collaboration. Donc, nous allons reprendre nos travaux.

Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à nos nouveaux invités. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter, bien sûr, et je vous rappelle que vous disposez d'un temps de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Ville de Québec

M. Labeaume (Régis) : Merci, M. le Président. Je suis Régis Labeaume. Je suis le maire de Québec. Normalement, je vous ferais ça en 10 minutes, mais il m'arrive d'être lent, alors... Je ne devrais pas dépasser 12 minutes et je présume que les civilités sont exclues, là.

Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs les députés, d'abord, permettez-moi de présenter les personnes qui m'accompagnent. M. Jonatan Julien, vice-président du comité exécutif de la ville de Québec, M. André Legault, directeur général de la ville de Québec, M. Benoit Richer, directeur des services des ressources humaines, Benoit, et Mme Chantal Pineault, trésorière et directrice des services des finances.

Je remercie la commission de nous permettre de nous exprimer sur ce projet de loi crucial pour l'avenir des régimes de retraite des municipalités.

M. le Président, le projet de loi n° 3 répond à la nécessité de mettre fin à une profonde injustice sociale, fiscale et intergénérationnelle dont les contribuables québécois, et surtout notre jeunesse, font les frais. Ce projet de loi est absolument pertinent, juste et incontournable.

Le gouvernement du Québec fait ici preuve d'un courage politique que nous saluons, et il ne doit pas douter un seul instant de l'appui massif des Québécoises et des Québécois dans ce débat, surtout des 65 % de la population ne possédant pas de régime de retraite et se demandant avec appréhension, voire avec une certaine angoisse, s'ils auront les ressources nécessaires pour vivre décemment leur retraite. Je tiens d'ailleurs à rappeler que je peux en parler avec légitimité, car je me suis fait élire, en novembre dernier, avec un mandat clair de la population de Québec pour régler la situation des déficits des régimes de retraite. Depuis que le débat est engagé sur ce dossier, il s'est dit n'importe quoi et son contraire, et je voudrais aujourd'hui profiter de ma présentation pour rétablir certains faits.

D'abord, il y a le mythe des déficits qui se résorberont grâce aux rendements boursiers. M. le Président, c'est totalement faux, et, comme l'a affirmé le comité D'Amours, et je le cite : «Certains croient qu'une embellie des marchés, soutenue et significative, réglera les problèmes à long terme, et qu'il suffit [...] d'être patient. [...]une telle embellie appartient plutôt [aux] mirages.» Ceux qui prétendent le contraire ont un discours purement jovialiste. Nos actuaires-conseils estiment que le niveau de déficit des régimes de la ville de Québec, qui s'établissait, en 2010, à 516 millions de dollars, se situerait, à la fin de 2013, à plus de 600 millions de dollars. Et pourquoi ce déficit a progressé de 20 % dans les trois dernières années, alors que les rendements ont pourtant été tout à fait conformes aux attentes? La réponse est simple : L'évolution des tables de mortalité. Grand bien nous fasse, M. le Président, les Québécois vivent plus vieux. Ceci dit, cette situation est toutefois désastreuse sur la capitalisation des régimes de retraite.

Pour beaucoup d'employés municipaux, les années de retraite dépasseront le nombre d'années au travail, et, pendant ce temps, les comptes de taxe des contribuables ne cesseront de s'alourdir. Si, en 2003, avec une dépense annuelle de 21 millions de dollars, l'impact des régimes de retraite sur le compte de taxe d'une maison moyenne à Québec était de 78 $, il sera de 339 $ après impôt, en 2015, avec une dépense qui sera passée à 132 millions de dollars par année. M. le Président, c'est tout à fait intenable.

Deuxième mythe qui a la vie dure : les employés crient au vol en affirmant que les villes ont profité de congés de cotisation. C'est encore faux, M. le Président, faux de prétendre que les déficits sont dus à des congés de cotisation pris par les municipalités. À Québec, le seul arrêt, temporaire, de cotisation qui a eu lieu s'est déroulé jadis à la ville de Sainte-Foy. Il s'appliquait tant aux employés qu'à l'employeur et n'a duré qu'une courte période, en 1998 et 2001, pour environ 11 millions de dollars. De plus, il faut bien comprendre ça, cet arrêt de cotisation était obligatoire en vertu des lois fiscales fédérales.

Ensuite, il y a le mythe qui cherche à faire croire que les employés municipaux ont accepté de moins bons salaires en contrepartie de régime de retraite plus avantageux. On parle ici, M. le Président, de salaires reportés. À moins qu'on nous explique pourquoi la rémunération totale des employés municipaux dépasse de 38 % celle des employés du gouvernement du Québec, je crierai à l'indécence concernant cet argument. Jusqu'à tout récemment, une personne à l'emploi de la ville, à partir de 25 ans jusqu'au moment de sa retraite à 60 ans, gagnait, clair dans ses poches, plus à la retraite que pendant qu'elle travaillait. Dans certains cas, ça allait jusqu'à 114 %. Les conditions sont telles à la ville que notre taux de roulement annuel est de 1 %. Vous comprendrez qu'on n'a aucun problème de rétention.

Comment peut-on avoir une rémunération plus importante à la retraite que lorsqu'on travaille? Sans compter que la proportion des cotisations au régime payées par l'employeur a longtemps été plus importante que celle des employés. Par exemple, en 2005, juste avant que je devienne maire de Québec, la cotisation moyenne des employés à leur régime de retraite variait de 33,5 % à 45,5 % alors que celle de l'employeur était de 54,5 % à 66,5 %. Et qu'est-ce que ça veut dire en clair, ça, M. le Président? Ça veut dire que ce sont les payeurs de taxes qui ont constitué la majorité des fonds des régimes de retraite des employés municipaux.

Autre mythe : les villes cherchent à appauvrir les retraités en exigeant un retour vers le passé en suspendant l'indexation de leur pension pendant 15, voire 20 ans. Rien de plus faux, M. le Président, encore. Selon nos experts, le remplacement de l'indexation automatique par une indexation conditionnelle en fonction de la santé financière des régimes permet de réduire de près de 300 millions de dollars, soit 50 % du déficit total accumulé jusqu'à maintenant à Québec. Cependant, et c'est très important de le souligner, dès 2017, soit dans moins de trois ans, les retraités de trois des six régimes de retraite à la ville pourraient voir leurs rentes pleinement indexées des pourcentages d'indexation de 2014, 2015 et 2016, les retraités du quatrième régime bénéficieraient quant à eux déjà d'une indexation partielle, et, pour les deux autres régimes, cette indexation pourrait être rétablie concrètement dans moins de six ans. M. le Président, on est très loin des 15 à 20 ans du discours de leurs représentants. De plus, nous venons justement de nous entendre avec nos employés cols bleus et cols blancs qui ont eux-mêmes accepté cette mesure, soit la suspension temporaire de l'indexation.

Dernier mythe auquel je voudrais m'attaquer, c'est celui en vertu duquel les élus seraient des enfants gâtés qui exigent des autres des sacrifices qu'ils ne souhaitent pas faire eux-mêmes. C'est encore là faux. J'ai dernièrement demandé pour la troisième fois, avec le maire de Montréal, que le régime de retraite des élus municipaux soit modifié. Je crois que le projet de loi n° 3 doit aussi s'appliquer à tous les élus municipaux, parce qu'ils doivent être responsables et assumer à parts égales le coût de leur propre régime de retraite.

M. le Président, au-delà des mythes, il y a la réalité, celle des coûts qui devront être assumés par les contribuables. M. le Président, il est hors de question pour moi de leur refiler à eux seuls la facture des déficits des régimes de retraite. M. le Président, ils ne seront plus les dindons de la farce. C'est pour cette raison que, depuis au moins quatre ans, je n'hésite pas à remettre en question le système actuel. Le système m'apparaît totalement, totalement immoral et insoutenable. Il n'est pas normal qu'une majorité de contribuables ait à payer les avantages financiers d'une minorité. Loin de moi d'ostraciser les syndicats, mais force est d'admettre, M. le Président, que le balancier penche beaucoup trop du même côté. Je l'ai dit et je le répète, je suis un social-démocrate en colère qui cherche à rétablir ou à remettre de l'équité dans le système.

Je le rappelle, à Québec, nous avons dernièrement réglé avec les cols bleus et les cols blancs. Ceci dit, nous avons signé ces conventions dans la mesure où nous avons complètement laissé de côté toute référence aux déficits passés, autrement aucune négociation ni aucune entente n'auraient été possibles. Nous avons fait la démonstration, M. le Président, que toutes négociations sur le partage des déficits passés sont absolument impossibles sans son imposition par le projet de loi n° 3. Ces conventions comprennent une entente — et j'achève — sur les régimes de retraite de façon succincte...

• (11 h 10) •

Le Président (M. Auger) : Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on puisse terminer? Et on prend le temps à quel endroit?

M. Moreau : ...qu'on prend ça sur la partie ministérielle.

M. Labeaume (Régis) : Merci, très aimable.

Le Président (M. Auger) : Merci. Vous pouvez continuer, M. le maire.

M. Labeaume (Régis) : Ces conventions comprennent une entente sur les régimes de retraite, et, de façon succincte, nous avons convenu des éléments suivants : une réduction, à compter de 2014 — et donc on ne retourne pas dans le passé — de la formule de rente afin de limiter le coût du régime à 18 % de la masse salariale, incluant un fonds de stabilisation, soit un niveau de contribution assurant l'accumulation d'une rente comparable à celle accordée par les meilleurs régimes de retraite existants. M. le Président, pourquoi les contribuables devraient-ils assumer des coûts de régime plus élevés pour les employés des villes, alors qu'ils ne peuvent pas contribuer eux-mêmes à plus qu'un maximum de 18 % annuellement en vertu des règles applicables pour les REER, et d'ailleurs ce que bien peu de contribuables ont d'ailleurs les moyens de se faire? Nous nous sommes aussi entendus sur le partage à 50-50 entre la ville et les employés des coûts des services futurs du régime, aussi sur les calculs pour déterminer le niveau de rente fondé maintenant sur le salaire moyen des cinq meilleures années au lieu des trois dernières, et finalement sur une augmentation de l'âge de la retraite.

Si, pour les représentants syndicaux, M. le Président, le projet de loi est si mauvais, pourquoi les nouvelles conventions collectives convenues avec nos fonctionnaires et nos employés manuels s'alignent presque exactement sur celui-ci en ce qui a trait aux contributions des services courants et futurs des régimes de retraite?

Depuis le dépôt du projet de loi, je suis extrêmement déçu qu'on n'ait pas entendu d'arguments rationnels pour trouver des solutions de la part des syndicats. Par ailleurs, la ville souhaiterait voir bonifiés certains aspects du projet de loi, plus particulièrement les dispositions touchant le processus d'arbitrage. La loi devrait favoriser le plus possible la négociation et empêcher le recours à l'arbitrage comme une possibilité d'escamoter l'obligation de résultat. La ville de Québec constitue un exemple probant que la négociation peut conduire aux résultats recherchés. Nous sommes d'avis qu'un processus d'arbitrage qui comprend, comme vous le proposez, la possibilité de tenir compte des concessions antérieures dans le cadre des négociations syndicales-patronales nous conduit inexorablement sur le chemin de l'arbitrage, et il faut absolument éviter ça. Rappelons-nous que les enjeux d'aujourd'hui, ce sont la pérennité des régimes de retraite municipaux, l'équité entre les générations et la capacité des citoyens à défrayer le coût des régimes de retraite qu'eux-mêmes n'ont pas les moyens de se payer.

M. le Président, je termine en demandant au gouvernement de ne pas dévier de sa route et de garder le cap. Des changements mineurs sont peut-être nécessaires au projet de loi n° 3, mais la volonté politique qui le sous-tend ne doit en aucun temps, en aucun temps, être modifiée. Les Québécoises et les Québécois nous surveillent et se demandent si, pour une fois, l'intérêt général de la population passera avant les intérêts corporatistes. Il est clair pour moi que toute modification importante au projet de loi n° 3 se fera au détriment des contribuables du Québec qui en paieront la facture. Que le gouvernement sache que, dans les conditions actuelles, nous le soutenons et ne l'abandonnerons pas, j'en fais la promesse formelle.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Moreau : Merci de votre participation. Bienvenue, M. Labeaume. Je souhaite également la bienvenue à ceux qui vous accompagnent : M. Julien, qui est vice-président du comité exécutif, M. Legault, votre directeur général, Mme Pineault et M. Richer. Bienvenue à la commission parlementaire. Merci pour votre contribution.

Je pense qu'on peut résumer votre position en disant que vous êtes assez favorable au projet de loi. Mais il y a des éléments très précis de votre intervention sur lesquels je veux revenir, et certains de ces éléments-là sont des éléments qui ne sont pas contenus dans le projet de loi, notamment, on va parler de l'arbitrage — on y viendra dans un instant — vous souhaitez des modifications; Régime de retraite des élus municipaux — vous êtes le premier à introduire le sujet — j'aimerais en parler.

Mais parlons de ce qui est prévu déjà dans la loi, et un des éléments, c'est la question de la suspension de l'indexation chez les retraités. Là, vous êtes le premier à nous apporter un exemple chiffré, un exemple concret basé sur la réalité. J'ai dit — je pense que vous étiez présent à la présentation de M. D'Amours — que, pour 85 % des retraités, là, le projet de loi, la suspension de l'indexation, ça n'a aucun effet puisque, de toute façon, ils n'ont pas d'indexation et que l'indexation automatique touche 15 % des gens. Là, vous, vous êtes dans ce 15 % là lorsque vous nous parlez, parce qu'à la ville de Québec il y a des clauses d'indexation. Et vous nous dites, là, pour contrer... Puis on a un exercice pédagogique, on va faire le même exercice pédagogique avec tous ceux qui vont passer à la commission, avec la même ouverture, parce que je pense que c'est important que les gens comprennent l'enjeu et la portée des débats. Alors, vous avez six régimes de retraite à la ville. Qu'est-ce qui vous permet de dire que, pour la moitié de ceux-ci, le rétablissement de l'indexation pourrait avoir lieu aussi rapidement que dans trois ans?

M. Labeaume (Régis) : Il faut expliquer une chose : le déficit des régimes de retraite des retraités est de 190 millions. Si nous suspendons temporairement l'indexation, 85 % du déficit s'élimine, techniquement. Le déficit des employés actuels est de 150 millions. Nous devons en assumer 50 %, donc 75, et les employés actuels en assument 75. Si nous suspendons temporairement l'indexation, le déficit total des employés actuels est éliminé. Il reste un surplus de 45 millions qu'on peut appliquer aux retraités. Et donc, techniquement — et c'est pour ça, des fois, que je me demande pourquoi on se bat — à Québec, si nous suspendons temporairement l'indexation, les déficits sont complètement éliminés, à part celui de l'ancienne ville. Et là à ce moment-là qu'est-ce qui se passe? Comme dans les conventions qu'on a signées avec les bleus et les blancs, nous créons le fonds de stabilisation, et l'indexation, pour que les retraités recouvrent l'indexation, ça prendra des rendements. Ce qui nous fait dire, selon nos analyses au moment où on se parle, que, dans la moitié des régimes une fois qu'on fait l'évaluation, dans trois ans, ils vont recouvrer leur indexation, accumulée pendant les trois dernières années, en pourcentage. Ça, c'est la moitié des régimes, trois sur six. Un autre recouvrera déjà une partie de l'indexation, et les deux autres, qui sont plus mal en point, ça va se faire à l'intérieur de six ans.

Alors, quand on parle de 15, 20 ans, c'est fou, là. À Québec, ça ne donnera pas ça. Puis ceux qui parlent le plus, c'est les représentants de nos retraités de Québec. Et ça, ce sont des calculs précis. Et je veux répéter, M. le ministre, je ne sais pas si les gens ont bien compris, là. Nous suspendons temporairement l'indexation chez les employés actifs, et, chez les retraités, il n'y a plus de déficit, techniquement.

• (11 h 20) •

M. Moreau : Alors, c'est dire le poids de l'indexation sur les régimes. Et je pense que vous faites cette démonstration-là, mais vous faites une démonstration additionnelle avec des éléments chiffrés et précis, c'est-à-dire qu'avec les dispositions actuelles du projet de loi, ce que le projet de loi nous permet de faire, là, on n'est pas dans du mur-à-mur. On est non seulement dans du sur-mesure pour la ville de Québec, mais on tombe dans du sur-mesure régime par régime, puisque, pour trois des six régimes, on aurait un retour plus rapide. Alors donc, on fait une démonstration, là, que cet élément de mur-à-mur, il faut arrêter de mettre ça dans notre vocabulaire. Je suis prêt à en discuter avec tous ceux qui vont passer, parce que le projet de loi prévoit une situation qui s'applique à tous mais dont les effets pratiques seront différents dans chacun des cas. Et là je pense que c'est un élément.

Deuxième élément, et là on sort du projet de loi n° 3, mais on est dans le débat des régimes de retraite, vous avez parlé du régime de retraite des élus. Le député de Blainville, dans ses remarques introductives, indiquait que les députés de l'Assemblée nationale doivent avoir la même ouverture d'esprit. Le leader du gouvernement a déjà déposé une lettre disant au président de l'Assemblée nationale que le Bureau de l'Assemblée nationale se penche... puis aller de l'avant avec le rapport. Vous, vous allez plus loin. Vous dites : Les élus municipaux, alors, dont le régime de retraite est prévu par une autre loi, la Loi sur le régime de retraite des élus municipaux, on doit modifier ça pour que ce soit 50-50. Je ne suis pas fermé d'aucune façon à ce qu'il y ait même une modification législative dans le projet de loi n° 3 pour le permettre, pour amender cette loi-là.

Je veux aussi, dans un but didactique, là, discuter avec vous puis avoir vos réactions sur ça. La moyenne de la rémunération des élus municipaux est bien inférieure à la rémunération des employés municipaux. C'est vrai aussi pour les ministres par rapport à leurs sous-ministres, c'est vrai pour vous par rapport à votre directeur général, c'est vrai, je pense, dans l'ensemble du Québec, d'une part, mais je ne vise pas votre directeur général. L'autre élément, c'est que la durée moyenne d'un mandat d'un élu, qu'il soit au Québec, à l'Assemblée nationale ou dans un hôtel de ville, est de beaucoup inférieure à la durée de prestations de travail d'un employé municipal. En amenant 50-50, est-ce que vous ne voyez pas là un déséquilibre? Je ne dis pas que moi, j'y vois un déséquilibre. Je veux savoir quelle est votre opinion là-dessus. Est-ce qu'il n'y a pas une inéquité dans le traitement ou si vous dites : Laissez faire l'inéquité, la perception est tellement importante que vous devez aller de l'avant avec une mesure semblable? Je veux vous entendre là-dessus.

M. Labeaume (Régis) : Nous, à la ville de Québec, on voulait revoir toute cette question-là. Moi, c'est la troisième fois que je le demande. Je l'ai demandé la troisième fois avec le maire de Montréal, qui venait d'être élu. Pour compenser le fait qu'il n'y ait pas de sécurité d'emploi — on sait qu'en politique il n'y a pas de sécurité d'emploi — il existe ce qu'on appelle des primes de départ. Alors, ce que je dis, ça serait la partie qui justifierait encore plus le fait que c'est un métier incertain et qui pourrait aider des gens à vouloir faire un peu de politique. Pour le reste, pour une question de principe, je pense qu'on doit arriver à 50-50, et la partie prime de départ pourrait, je pense, être encore plus justifiée pour couvrir le fait que c'est un métier, entre guillemets, incertain.

M. Moreau : Alors, ce que vous dites, ce n'est pas : Bonifiez la prime de départ. Vous dites : La prime de départ est une compensation à ce qui pourrait être une inéquité si on n'agissait que sur — sans prime de départ — le partage à 50-50.

M. Labeaume (Régis) : M. le ministre, au total, l'élu est perdant, mais ce n'est pas grave.

M. Moreau : Parce qu'il y a une question de perception qui est très importante.

M. Labeaume (Régis) : Parce qu'il y a une question de perception. Alors, ce métier-là, il est incertain puis il est incertain jusque-là.

M. Moreau : Alors, ça confirmera l'idée qu'on ne va pas en politique pour faire de l'argent.

M. Labeaume (Régis) : Bien, moi, si vous voulez que j'en parle avec vous, ça va me faire plaisir, là, mais je précise qu'on l'avait demandé, et le maire de Montréal, lui, a annoncé hier qu'ils votaient lundi, alors je lui ai dit qu'on suivrait pour lundi prochain aussi. On va voter, au conseil de ville de Québec, une résolution pour demander officiellement que la loi n° 3 s'applique...

M. Moreau : Au Régime de retraite des élus.

M. Labeaume (Régis) : ...au Régime de retraite des élus municipaux, et incluant le passé, en passant. Je regrette pour les anciens, là, mais c'est ça.

M. Moreau : Bien. Sur la question des déficits passés, vous avez amplement fait part, dans vos remarques, dans votre mémoire déposé à la commission, du fait que vous avez été, à la ville de Québec — et là ça s'applique autant à l'administration de la ville qu'aux associations syndicales — extrêmement actifs dans la négociation et dans la modification des conventions collectives pour s'aligner vers les principes du projet de loi n° 3, vers les balises que prévoit le projet de loi n° 3. Malgré le fait que vous ayez peut-être été... je ne sais pas, je ne veux pas faire un jugement négatif sur les autres municipalités, mais probablement dans la tête de peloton des municipalités les plus actives en négociation, vous n'avez jamais réglé la question des déficits passés. Pourquoi?

M. Labeaume (Régis) : Bien, premièrement, je pense que tout le monde va convenir que, depuis cinq, six ans, ce n'est pas à Québec où les relations patronales-syndicales étaient les plus harmonieuses, hein? Je pense que je ne surprends pas personne en disant cela. Et le ticket d'entrée, le billet pour commencer sérieusement à négocier, c'était d'accepter qu'on élude complètement la question des déficits passés. Si on n'avait pas fait ça, on ne négocierait pas, on n'aurait pas eu d'entente. Il faut vivre en temps réel, sinon c'est de l'angélisme. Il n'y a aucun syndicat, avant cette loi-là, qui accepterait que les employés remboursent le déficit passé. Oubliez ça, là. On peut bien se conter des histoires, c'est non. Moi, je l'ai vécu en temps réel pendant six ans : impossible. Mais, comme je savais que la loi s'en venait, je me suis permis d'accepter qu'on l'élude. Et, en passant, non seulement on a éludé la question des déficits passés, ce qu'on a négocié et conclu, c'est à peu près copier-coller la loi : coût du régime à 18 %, 50-50 pour le futur, etc., c'est à peu près copier-coller la loi. Comment ça se fait qu'elle est si mauvaise que ça, cette loi-là, si on l'a signée, nous autres, avec des gens à Québec, des leaders syndicaux qui ne sont pas toujours faciles non plus? C'est comme le maire, hein, tu sais?

M. Moreau : Le maire non plus n'est pas facile?

M. Labeaume (Régis) : C'est ce que je dis.

M. Moreau : Voilà, voilà. Mais, dites-moi, sur la question des déficits passés, donc, j'entends une ouverture où on dit : Bon, oui, peut-être que les déficits passés devraient être réglés, comme le prévoit la loi, sur une base de 50-50. J'entends ça dans le discours. On me corrigera si mes oreilles me font défaut. Mais ce que j'entends aussi, c'est de dire : Si j'exige un partage à parts égales du déficit passé, il ne doit pas y avoir d'écart entre l'obligation faite à la ville, donc aux contribuables à travers elle, et aux cotisants. Alors, si tout le monde doit payer, tout le monde doit payer la première année et non pas étaler ça. Une ville aurait une possibilité d'emprunter puis d'amortir son emprunt sur plusieurs années. Mais n'entrons pas dans les détails du droit ou de la procédure municipale.

D'abord, comment voyez-vous ça? Est-ce que la ville doit payer immédiatement et les associations syndicales immédiatement ou est-ce qu'on doit aussi être ouvert au discours de dire : Le coût, pour les associations, peut, dans certains cas, être important, et ne pas modifier la répartition à 50-50, mais étaler dans le temps la possibilité d'acquitter cette somme-là, étant entendu que la loi doit établir une date butoir pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté et qu'on dise : On doit régler les déficits passés?

• (11 h 30) •

M. Labeaume (Régis) : Première chose, tout retard se fera au détriment des payeurs de taxes. Plus on retarde... Plus les employés retardent à éliminer le déficit, c'est le payeur de taxes qui paie. C'est tout. Si vous me parlez d'urgence, moi, c'est maintenant, parce qu'on veut que ça se termine maintenant. Dans le cas des employés réguliers de la ville, techniquement, il n'y a plus de déficit si on lève l'indexation. On l'a fait dans les deux cas. Voyez-vous, auprès de ces gens-là, ça n'existe plus, on a même 45 millions... On est 45 millions au-dessus de nos affaires. Bon, alors, tout retard, là, moi, je pense qu'à chaque fois qu'on va le faire il y a quelqu'un qui va payer, ça va être le payeur de taxes.

Maintenant, je veux juste revenir, pour suivre votre raisonnement, sur les retraités. Le citoyen payeur de taxes, il a perdu de l'argent dans les dernières années, la crise financière, etc., il est obligé de réorganiser sa retraite. Il sait que, comme le disait M. D'Amours, ce n'est plus liberté 55, c'est terminé, il doit revoir son futur. Mais le retraité municipal dit à ce payeur de taxes là : Moi, je ne perds pas une cenne sur ma rente, — parce qu'il ne perd pas un sou — peu importe ta condition, je veux mon augmentation de salaire de toute façon. Parce qu'une indexation, excusez-moi, c'est un revenu de plus. Donne-moi plus d'argent, à part du fait que je suis sûr d'avoir ma rente de base, donne-moi-z-en plus, à peu près 1,5 million par année, peu importe ta situation. Que tu aies perdu de l'argent, ce n'est pas mon problème, je veux mon indexation. Ce qui est insensé, c'est ça.

Et je veux revenir, là. Moi, je vais vous dire, M. le ministre, je suis ouvert parce que, bon, un projet de loi, c'est un projet, puis il faut que ça finisse par une loi officiellement, mais je vous demande d'éviter toute modification dans la loi qui ferait en sorte, au moins pour Québec, que les payeurs de taxes continuent à payer. Pour moi, le projet de loi doit terminer le moment où le payeur de taxes en paie trop. Plus on retarde, plus il va payer, puis c'est toujours lui qui est au bâton.

M. Moreau : J'ai deux autres questions à vous poser, là : la première en relation avec le sujet dont on parle; puis, la deuxième, j'irai sur la question de l'arbitrage. Il nous reste à peu près cinq minutes.

Première question. À Québec, vous dites : Si je suspends l'indexation, je règle le problème, donc, chez nous...

M. Labeaume (Régis) : Techniquement.

M. Moreau : ...techniquement, chez nous, là, le problème ne se pose pas vraiment. Je vais vous demander de mettre votre talent au service des autres municipalités du Québec. Mettons que vous n'êtes pas à Québec et que la suspension de l'indexation ne règle pas le problème. Est-ce que vous êtes fermé à l'idée d'étaler dans le temps, dans une peut-être très courte période, l'obligation qu'auraient et la ville et les associations syndicales à payer le déficit passé? Est-ce que ça peut être étalé sur un an, deux ans, trois ans?

M. Labeaume (Régis) : M. le ministre, regardez ce qu'on a fait à Québec. Oui, l'indexation temporaire qui est levée règle le problème, mais on a fait plus que ça. 18 %, vous l'avez dans la loi, coût du régime. Vous savez, juste calculer la rente sur cinq années au lieu de trois années, c'est beaucoup d'argent. Reculer l'âge de la retraite comme on a fait, c'est beaucoup d'argent. Alors, au lieu d'étaler, là, que les gens prennent les moyens pour arriver à leurs fins. On l'a fait, nous. Imaginez-vous qu'on l'a fait à Québec. Si on a été capables de le faire à Québec, tout le Québec est capable de le faire.

M. Moreau : Dernière question parce que je pense que c'est tout le temps que nous aurons, en tout cas pour la partie ministérielle. Vous avez parlé de l'arbitrage. Et c'est le troisième alinéa de l'article 38 du projet de loi qui prévoit qu'«en outre, l'arbitre doit prendre en considération les concessions antérieures qu'ont consenties les participants à l'égard d'autres éléments de la rémunération globale». Cet alinéa-là complète le précédent, qui dit : «[L'arbitre] doit prendre en considération, notamment, la capacité de payer des contribuables, l'équité intergénérationnelle, la pérennité du régime de retraite, le respect du partage des coûts et des objectifs visés par la présente loi, les congés de cotisation ainsi que les améliorations apportées au régime.»

L'idée derrière cette proposition-là, c'est de créer un équilibre. On dit : Congé de cotisation, ce n'était pas une bonne pratique — ça, c'est du côté des villes; amélioration des régimes, ce n'était pas une bonne pratique — c'est du côté des associations syndicales. Mais, lorsque les associations syndicales ont consenti des concessions importantes, pour quelle raison est-ce que l'arbitre ne devrait pas en tenir compte? Parce que ce que vous me dites, c'est : Là, on ne veut pas créer un incitatif aux associations, dire : Vous ne négocierez pas, on s'en va à l'arbitrage, on reste les deux mains... on est assis sur nos mains. Les associations syndicales nous disent : Le contexte de l'article 38 fait en sorte qu'il y a un risque que les municipalités restent assises sur leurs mains.

M. Labeaume (Régis) : Je vous dirai que tout d'abord, techniquement, ça va être incroyable de pouvoir... de devoir reculer dans le passé, se documenter. Six mois, ça ne sera jamais assez. Tu recules de 10, 20, 30, 40 ans, tu arrêtes où?

M. Moreau : Sur l'arbitrage.

M. Labeaume (Régis) : Pour l'arbitrage, hein? D'ailleurs, j'étais favorable, au début — je m'en veux un peu, puis je vous l'ai dit — mais on y a pensé comme il faut.

D'autre part, ce n'est pas vrai que les salariés ont laissé quelque chose sur la table pour avoir des meilleures pensions. C'est faux, ça, M. le ministre. Ça n'existe pas, parce qu'ils gagnent 38 % pour les mêmes jobs au gouvernement du Québec. Ça n'existe pas. C'est un leurre et c'est un mythe. Et ça m'enrage, ça. C'est faux. Ils n'ont rien laissé sur la table, parce qu'ils gagnent 38 % de plus qu'au gouvernement du Québec et ils gagnent plus que les grandes entreprises syndiquées. C'est totalement faux, et c'est pour ça que, parce que ça n'existe pas, ça ne vaut pas la peine d'arbitrer dans ce sens-là.

Et, en plus de ça, en attendant, si on prolonge... Et, vous savez, les organisations syndicales vont prendre une chance d'aller vers l'arbitre s'ils ne s'entendent pas. Ça, ça veut dire qu'on prolonge de quelques mois à maximum un an à 18 mois, puis, pendant ce temps-là, ce sont nous, les villes, qui vont payer les cotisations d'exercice et les cotisations d'équilibre. Excusez-moi, les villes, c'est le payeur de taxes. Alors, là-dedans, il y a une perte pour le payeur de taxes, garantie.

Et c'est faux, faux, archifaux que les employés municipaux ont laissé des choses sur la table. Ils gagnent plus que tout le monde. C'est un mythe, c'est un leurre.

M. Moreau : M. le maire, là-dessus — puis je complète, j'en fais plus une remarque — j'entends très bien ce que vous me dites, mais il y a quand même... dans la perspective de ne pas avoir de mur-à-mur, il y a des cas documentés, notamment à Montréal, où il y a eu des congés de cotisation qui équivalent à peu près à 850 millions de dollars. Alors, il faut aussi, dans la balance des inconvénients et dans l'équilibre des choses, faire en sorte que l'arbitrage, ce soit vu comme un élément inquiétant pour les deux parties, de sorte que l'effet net sera de favoriser la négociation.

M. Labeaume (Régis) : Écoutez, je ne veux pas me mêler de Montréal, parce qu'il y a quelqu'un...

M. Moreau : Non, non. Bien, je ne vous demande pas...

M. Labeaume (Régis) : ...il y a quelqu'un, derrière moi, qui me surveille, mais je doute...

M. Moreau : Oui, oui, oui. Je comprends. Mais je vous dis, pour éviter le mur-à-mur... Oublions Montréal, là, il y a peut-être d'autres cas...

M. Labeaume (Régis) : Je doute qu'il y ait... Comment dire? Je vais le dire autrement. Dans les grandes villes, je doute qu'il y ait des policiers sous-payés. Je vais le dire comme ça. Il y a peut-être des cas particuliers de congés de cotisation, mais encore là n'exagérons rien. Je pense que, s'il y a eu des congés de cotisation, après, au long des années, les employés ont dû aller chercher un peu plus de bonifications. Je le pense sincèrement.

M. Moreau : Mais vous convenez avec moi que la loi... je ne parle pas de la situation de Québec, mais que la loi doit tenir compte ou doit ouvrir la possibilité à tenir compte des situations particulières pour éviter justement d'être un mur-à-mur et de s'appliquer aux situations particulières de chaque municipalité.

Le Président (M. Auger) : Désolé, c'est tout le temps que nous avions. Je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle, le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue à M. le ministre et ses collègues qui l'accompagnent...

Une voix : M. le maire.

M. Therrien : M. le maire. M. le maire, excusez-moi. Peut-être ministre un jour, on ne sait pas.

Alors donc, écoutez, très intéressant, comme intervention. J'aurais quelques questions. Il y a des questions qui sont d'information, parce qu'il y a des choses que j'entends, puis je veux juste préciser, là, certains aspects.

Vous parlez d'un déficit de 500... 600 millions. Vous, il n'y a pas de congé de cotisation qui s'est pris. En tout cas, ce que vous avez dit, là : Précédemment, mais, bon, ça fait longtemps, puis c'était très peu, là, à ce qu'on a vu.

M. Labeaume (Régis) : M. le député, c'était pour les employés et les employeurs, les deux.

M. Therrien : C'est ça. Non, non, ça va, puis j'avais bien compris. En 2006, il y a une taxe supplémentaire aux citoyens qui a été imposée dans l'ancienne ville de Québec. Est-ce que cette taxe-là, c'était en partie pour financer... Je vous pose la question, là, c'est une information que j'ai. Est-ce que cette taxe-là, c'était pour justement aider le financement du déficit des fonds de retraite? Puis je pourrais vous poser cette question-là...

M. Labeaume (Régis) : Ça concerne... Il y a trois déficits à Québec, hein? Vous avez le déficit de l'ancienne ville de Québec. On ne peut pas demander à la personne de... pas de Val-Bélair... de payer l'ancienne ville. Alors, ce déficit-là, il est de 260 millions. On doit l'assumer complètement et on le taxe actuellement, hein, on le taxe depuis 2006, si l'information que vous avez elle est exacte. Il y a le déficit des retraités, de 190 millions; il y a celui des employés actifs, de 150 millions. Ça fait 600. Et, même à la fin de l'exercice de la loi, la ville continuera à payer, au total, 60 % avec les taxes.

M. Therrien : Et ça, ce montant d'argent là, est exclu, vous l'avez retiré du montant de 600 millions que vous m'avez mentionné tantôt.

Une voix : Non, il est inclus.

M. Therrien : Ça veut dire que c'est 600 millions, en considérant ces revenus de taxation.

M. Labeaume (Régis) : Là, on est en train de le taxer, c'est ça que je vous dis. Depuis 2006, on taxe pour rembourser le 260 millions de déficit de l'ancienne ville de Québec, et on en a pour encore très longtemps.

M. Therrien : O.K. Donc, ça sert à rembourser. Ce n'est pas mis de côté, là.

M. Labeaume (Régis) : C'est uniquement, uniquement pour rembourser la taxe de l'ancienne... la dette de l'ancienne ville de Québec, et c'est taxé seulement aux habitants du territoire de l'ancienne ville de Québec.

M. Therrien : Et, dans votre évaluation, vous en tenez compte, évidemment.

M. Labeaume (Régis) : Bien oui!

M. Therrien : O.K. Moi, j'aurais des questions par rapport à l'entente que vous avez signée récemment, là. Vous avez dit que vous avez, là... en tout cas, vous vous êtes profilé sur le projet de loi n° 3 puis... En tout cas, c'est assez clair, là. Est-ce que vous attendez, évidemment, le projet de loi n° 3 pour ensuite tomber dans le déficit passé? Est-ce que vous allez utiliser ce cadre-là, ce nouveau cadre, pour justement régler les déficits passés que vous n'étiez pas capables de régler auparavant?

M. Labeaume (Régis) : Oui, absolument. Tout d'abord, bon, il n'y aucun syndicat qui voudra le négocier. Puis, deuxième affaire, la loi nous empêche de le faire parce que la loi dit que ce sont les villes qui paient les déficits. Légalement, on ne peut pas le faire, en plus.

• (11 h 40) •

M. Therrien : O.K. Autre chose : dans cette entente-là, ce qu'on voit... corrigez-moi, mais en tout cas c'est écrit, là, c'est assez clair que l'âge de la retraite va augmenter, que les syndicats ont accepté de prolonger, là, le temps de travail; l'âge de la retraite augmente. C'est bien ce que j'ai constaté. Je pense que je ne me suis pas trompé, c'était très clair dans votre mémoire. Vous dites aussi dans votre mémoire que la prolongation de l'espérance de vie cause des problèmes de financement des régimes de retraite. Je pense que tout le monde en convient.

Moi, je voudrais vous demander, comme ça : Est-ce qu'il y a eu de l'évolution entre la date d'entrée des employés et la date de sortie des employés, récemment, depuis 10, 15, 20 ans? Est-ce que vous avez noté que les employés arrivent plus tard et terminent plus tard ou il n'y a pas vraiment de changement à ce niveau-là qui fait en sorte que vraiment les retraités sont appelés à être beaucoup plus longtemps à la retraite?

M. Labeaume (Régis) : Ah! bien, c'est mathématique, en ce sens que l'espérance de vie d'un homme, je pense, c'est rendu à 85, d'une femme, 87. Ça a augmenté de 10 ans dans les dernières 50 années et de deux ans dans les trois, quatre dernières années. Alors, c'est mathématique, hein?

Je vous dirais qu'avec la nouvelle entente on ne verra plus de sortie à 55 ans puis on... Normalement, on ne verra plus de retraités qui gagnent plus à la retraite que quand ils travaillent. Ça, je pense qu'on a éliminé ça. Quant à savoir... C'est sûr que maintenant ils sortent plus tard. Je vais vous donner un exemple : les employés manuels. Ce que font les gens, c'est qu'ils s'en vont dans une entreprise privée puis ils s'en viennent à la ville se constituer un fonds de pension. Ça, ça fait que, quand on calcule leur âge d'entrée à la ville et l'âge de titularisation de ceux qui sont des travailleurs temporaires, ça donne, dans ce cas-là des employés manuels, 40 ans à peu près. Mais c'est un cas exceptionnel. Alors, c'est bien sûr qu'ils ne partiront pas à 55 ans, parce qu'ils ont été dans une entreprise privée où il n'y avait pas bien, bien de fonds de pension ou c'était plus à risque, à cotisations déterminées, ils s'en viennent à la ville avec un superfonds de pension puis ils vont travailler jusqu'à 60, 65 ans parce qu'ils vont sortir de là avec...

Vous savez, un policier, là... un pompier, à Québec, qui rentre à 20 ans puis qui sort à 50 ans, son fonds de pension vaut 1 million de dollars. Un policier, pour la même bracket, là, le même temps, ça vaut 840 000 $. En connaissez-vous, vous, des travailleurs dans ce style-là qui ont un fonds de pension de 1 million de dollars? Moi, je n'en connais pas. Et, en passant, je veux juste répéter, hein, la majorité des fonds de pension ont été payés pas par les travailleurs, par les payeurs de taxes. Parce que les travailleurs disent : Aïe! on a constitué ça, nous autres, on a mis de l'argent là-dedans. C'est parce que la vérité, c'est que la majorité de l'argent vient des payeurs de taxes. Les travailleurs ont toujours payé moins que les villes, dont les payeurs de taxes. Ça, c'est une autre fausseté qu'il faut raplomber, là.

M. Therrien : Je vais vous poser la question... Moi, je me questionne beaucoup, je m'interroge là-dessus beaucoup parce que je n'ai pas été dans le monde municipal. Et je vais vous poser une question, puis je ne sais pas si ça va sortir tout croche. En tout cas, je ne veux pas que vous m'en teniez rigueur, là, mais c'est une question que je me pose, là. Comment se fait-il qu'on se retrouve dans une situation de déficit comme ça? Et moi, j'imagine que, quand vous avez signé des ententes, par le passé, à quelque part, vous avez dit aux employés : C'est correct, on trouve que ça a du bon sens. Vous avez signé, ils n'avaient pas le couteau sur la gorge, rien. Ça fait que, moi, c'est ça que je trouve un peu surprenant, c'est que vous dites : Ah! bien là, on se retrouve... on a payé beaucoup trop, puis le contribuable, il supporte tout ça. Mais moi, je me dis : La municipalité est censée protéger les contribuables. C'est ce que vous faites aujourd'hui, mais je me dis : Quand vous avez signé, là, à quelque part, là, vous aviez... Tu sais, vous avez eu cette conscience-là de protéger les contribuables. Mais pourquoi vous signez? Première question. Et pourquoi on ne retrouve pas des situations similaires dans l'ensemble des régimes des municipalités? Je ne sais pas si ma question est plate, mais c'est une question que je me pose, là.

M. Labeaume (Régis) : Bien, regardez, je ne peux pas parler pour moi, parce que ça fait six ans; tout ce que j'ai signé, moi, on était gagnants. Dans le passé... Je ne veux pas accabler mes prédécesseurs, mais, premièrement, la première réponse, c'est qu'il n'y a pas... il est impossible d'avoir un sain rapport de force dans le domaine municipal. La ville n'a pas de pouvoir. Tout le monde le sait. Et c'est ça qui a fait que, d'année en année, les maires ont laissé aller bien des choses, et c'est rendu intenable. Première affaire. La grosse réponse, c'est celle-là : Il n'y a pas possibilité d'avoir un sain rapport de force dans le domaine municipal des négociations.

Deuxième affaire — M. D'Amours l'a dit — écoutez, les rendements ne sont pas là. Ce n'est pas bien compliqué, là. Ça coûte moins cher, une hypothèque aujourd'hui. Un financier... un industriel se finance à moins cher. Ça, ça veut juste dire qu'on n'a pas de rendement, nous autres, dans les villes, puis comme tous les investisseurs.

Puis finalement c'est la fatalité. Moi, je ne pense pas que le maire Lamontagne avait prévu qu'aujourd'hui les gens vivraient 10 ans de plus. Moi, j'ai parlé au maire, puis il ne savait pas cette affaire-là.

Alors, tu sais, il y a des choses qui étaient incontrôlables, il y en a d'autres... Il y a peut-être des maires qui ont été plus conciliants avec des syndicats, oui, sûrement. Pas moi. Et, au total, je pense que le vice de base, c'est l'absence pour les villes de la capacité de créer un sain rapport de force. On n'a pas de pouvoir. Et c'est d'ailleurs ce qu'on négocie avec le ministre Moreau, c'est d'avoir plus de pouvoir. En tout cas, à Montréal, Québec et les municipalités de l'UMQ.

M. Therrien : Mais il y a quand même des municipalités qui ont réussi... en tout cas, je ne sais pas si c'est à cause qu'ils ont établi un rapport... bien, je ne le sais pas, mais des municipalités qui se sont prononcées puis ont dit : Bien, nous, on n'a pas nécessairement de problème avec la gestion des régimes de retraite. Bien là, moi, je vous pose la question : Qu'est-ce qui fait que... C'est-u la taille de la ville? Qu'est-ce qui fait que le rapport de force du maire se trouve peut-être à se dissiper?

M. Labeaume (Régis) : Je vous dirais que c'est assez simple, la réponse : La moyenne des villes, c'est 38 % de plus de salaire chez les employés des villes que le gouvernement du Québec. Ça, c'est la moyenne de toutes les villes. La réponse est là, là. Ceux qui disent que tout va bien, ils sont bien chanceux ou bien donc ils... comment dire, ils sont jovialistes. Moi, je... Puis je regarde les chiffres, c'est ça que ça donne. Et, si on dit que la moyenne des villes, c'est 38 % de plus, je ne sais pas quelle ville va bien au Québec. Nommez-moi-la. J'en connais pas mal. Ça me ferait plaisir de les connaître. Il y a peut-être Rimouski. Rimouski a négocié 50-50 avec le passé. Autrement, je n'en connais pas. Il y a des maires qui ne voudront pas de changement. Tu sais, on ne résiste pas tous pareillement à la pression et à l'intimidation, O.K.? Puis moi, je respecte ça. Et, si la loi veut créer des exceptions pour les villes, moi, je n'ai aucun problème, dans la mesure où ça ne me touche pas. Si ça ne me touche pas, puis il veut créer des exceptions pour des villes, pour répondre aussi à votre question de tantôt, pas de problème, mais je ne veux pas que ça nous touche puis je ne veux pas que ça touche le payeur de taxes de Québec.

Alors, des villes qui vont bien, si vous en connaissez, là, des villes de la... tu sais, dans les 10 plus grandes villes de Québec, qui sont pétantes de santé, là, puis qui donnent des services, par exemple... Ça peut très bien aller, mais tu ne donnes pas de services; j'en connais, des villes comme ça. Il y a un nom qui me vient, mais je ne vous le dirai pas. Il va venir ici, il va vous dire que ça coûte moins cher chez eux qu'à la ville de Québec, mais ils ne donnent pas de services. Ça, c'est un choix, tu sais.

M. Therrien : Bien, merci. Je vais laisser la place à mes collègues pour poser des questions.

Le Président (M. Auger) : Oui, Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Bonjour à M. Labeaume, vos collègues. Merci d'être ici, aujourd'hui, pour le projet de loi n° 3, un projet de loi important.

Vous le disiez un peu plus tôt, ce qu'il y a dans le projet de loi n° 3, ça vous convient. C'est ce que vous aviez négocié avec vos employés en grande partie, sauf pour le passé, où il y avait un blocage. Et vous nous avez donné des exemples, là, sur les pompiers, les policiers. Mais j'imagine que, dans vos six régimes de retraite, ce n'est pas tout pareil. Est-ce que vous pouvez vous expliquer? Ça, ça doit être deux des six régimes de retraite, j'imagine, pompiers et policiers? Est-ce que vous pouvez nous parler des quatre autres? Ça ressemble à quoi?

M. Labeaume (Régis) : Bien, je vous dirai que... Puis je veux expliquer une chose, parce que le président des policiers du Québec a dit : Si ça va mal, il avait juste à bien les gérer, ses... Il est bon en marketing, mais il avait oublié que c'est un comité paritaire puis que c'est les policiers puis c'est la ville qui gèrent ça ensemble. Alors, je ne sais pas à qui était le blâme, là, mais il a dit qu'on gérait mal. Probablement que c'est aux représentants policiers aussi.

Alors, chaque régime a son comité d'investissements, hein — puis je vais demander à André d'en dire un peu plus — et il décide des investissements. Les décisions seront différentes, ça donne des rendements différents. Il y en a des moins chanceux que les autres.

Mme Ouellet : Mais ça ressemble à quoi pour, par exemple, les cols bleus, les cols blancs? Qu'est-ce qu'on a comme genre de...

M. Labeaume (Régis) : André.

M. Legault (André) : Écoutez, c'est certain que chaque régime a ses particularités, exemple au point de vue clause d'indexation. Possiblement qu'il y en a qui sont un peu plus généreux, d'autres qui sont un peu moins généreux, dépendant de...

M. Labeaume (Régis) : Il y a les anciennes villes aussi là-dedans, là.

M. Legault (André) : Oui, il y avait les vieilles clauses, là, d'indexation qui datent des anciennes villes. Donc, il faut aller voir chacun des régimes pour ce qui s'était négocié de différent.

Mme Ouellet : Je comprends que c'est différent d'un régime à l'autre, là, mais, comme vous aviez donné des chiffres, vous aviez parlé que les... Les policiers, je crois que c'était 1 million, que ça avait...

M. Labeaume (Régis) : La valeur de 1 million.

Mme Ouellet : ...d'équivalent, puis les pompiers, quelque chose de... 800 quelques mille dollars.

M. Legault (André) : 840.

M. Labeaume (Régis) : Bien, regardez, je vais vous le sortir de... Moi, l'information que vous voulez... Parce que, là, vous avez six régimes. Ensuite, vous avez 12 villes qui ont fusionné. Six multiplié par 12, ça fait pas mal de monde. Alors, si vous voulez que je vous donne aujourd'hui l'état des régimes, on le fera, parce que, là, c'est... En 10 minutes, je vais vous dire qu'on ne tombe pas trop dans le détail, hein?

Mme Ouellet : Parfait. Mais vous êtes d'accord avec moi que ce n'est pas tous les régimes qui ont la même générosité. Et...

M. Labeaume (Régis) : Non, heureusement; on serait en faillite.

M. Legault (André) : Puis ils n'ont pas tous le même salaire.

M. Labeaume (Régis) : Et après ça ils n'ont pas tous le même salaire, c'est ça, là.

Mme Ouellet : C'est ça.

M. Labeaume (Régis) : Hein, tu sais, un égoutier, ça gagne moins qu'un policier. Tu sais, peut-être que ce n'est peut-être pas une bonne idée non plus, là.

Mme Ouellet : Puis qu'ils n'ont pas tous... Mais, même dans les conditions de régime, ils n'ont pas tous eu les mêmes conditions, donc ils ne partent pas tous du même niveau. Donc, on ne peut pas tous les mettre dans le même panier.

M. Labeaume (Régis) : Tu sais, dans 12 villes, là, il n'y en avait probablement pas une à l'époque, avant les fusions, qui avait le même régime, là. Alors, imaginez-vous le fouillis. Parce que, quand on parle des retraités, on parle de six régimes multipliés par 12 villes. C'est compliqué, cette affaire-là, là.

• (11 h 50) •

Mme Ouellet : Et est-ce que vous seriez d'accord... Et vous en aviez un petit peu parlé. Vous dites : Oui, la solution pour Québec, c'est celle-là; ce projet de loi là, tel quel, me convient, peut-être même avec un ou deux tours de roue de plus, de ce que j'ai entendu de votre part. Mais est-ce que vous êtes d'accord... Parce que moi, j'ai entendu d'autres maires d'autres municipalités en disant : Non, nous, on ne veut pas avoir ce carcan-là de négociation. Est-ce que vous seriez d'accord que ce n'est pas nécessairement du mur-à-mur? Même vous, à l'intérieur de vos différents régimes, ce n'est pas tout à fait les mêmes conditions. Donc, d'une municipalité à l'autre, ils n'ont pas vécu le même passé. Vous n'avez pas eu de congé de cotisation spécifique du côté municipal, d'autres régimes en ont eu. Est-ce que vous êtes d'accord à ce que ce projet de loi là permette une adaptation à chacun des régimes particuliers concernés?

M. Labeaume (Régis) : Je vous dirai, Mme la députée, que le maire qui va venir vous dire ça, il a fallu qu'il passe des années dans des syndicats. Je pense qu'on sait de qui on parle. Moi, ça ne m'est jamais arrivé. Et c'est assez simple, le résultat de ça, là, c'est que c'est encore le payeur de taxes qui va payer. Le maire qui va venir vous dire qu'on n'a pas besoin de ça, il va vous mentir parce que ce n'est pas vrai que les syndicats vont, avec un grand sourire, aller négocier le déficit passé — c'est faux — à 50-50. Ça n'arrivera pas. Bon. Alors, encore là, on n'a pas tous le même passé. Voilà. On vit avec son passé, son historique, avec ses anciens amis puis les pressions qui viennent de ça. Moi, je n'en ai pas.

Mme Ouellet : Il reste combien de temps?

Le Président (M. Auger) : 10 secondes, donc ce serait pas mal terminé.

Mme Ouellet : Peut-être, en 10 secondes, est-ce que vous pouvez nous donner une fourchette au niveau des taux de capitalisation pour les régimes de retraite que vous avez à Québec?

M. Labeaume (Régis) : Jonatan.

M. Julien (Jonatan) : Approximativement 70 %, là. Ce serait la bonne...

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le maire, d'être présent. Moi, écoutez, c'est parce que je vais revenir sur un commentaire du ministre, tantôt, qui disait : Ah! mon projet de loi permet de la marge de manoeuvre puis de la latitude pour régler tous les problèmes. Par contre, vous lui demandez de resserrer, par rapport à l'arbitrage, encore un peu, là. Puis c'est correct, tu sais, c'est parce que... j'ai eu la chance de le dire tantôt, c'est que, quand on choisit l'arbitrage, c'est ça que ça fait. Bon, c'est-à-dire que, quand on fait de moins en moins confiance à l'arbitre, on encadre l'arbitre. Si jamais vous aviez le pouvoir, vous, là, tu sais, que la loi... ce serait la loi et l'obligation de régler puis que ce serait la ville qui trancherait à la fin... Moi, tout ce que je voudrais... Est-ce que les négociations seraient plus dures, moins dures? Parce que, là, vous n'avez pas été capables de vous asseoir pour vos déficits passés, là. Si la loi vous donnait le pouvoir, pensez-vous qu'à quelque part... Parce que, là, vous savez, les syndicats, bon, on nous critique : la loi, elle encadre trop; l'arbitre, bon, pas de marge de manoeuvre. Moi, je suis tenant que les villes devraient avoir plus d'autonomie, donc que la ville devrait trancher à la fin. Vous êtes redevables envers vos contribuables. Puis il faut régler, dans toutes les villes du Québec, tout le problème, là, une fois pour toutes, des fonds de pension. Si vous aviez ce pouvoir-là, pensez-vous que la négociation serait... je ne vous dis pas qu'elle serait facile, mais elle serait faisable, là?

M. Labeaume (Régis) : Écoutez, je voudrai toujours plus de pouvoir pour les villes, mais ce n'est pas le cas. Alors, je vis en temps réel, hein? Je vis en temps réel. Et c'est pour ça, d'ailleurs, qu'on négocie avec le ministre une loi spéciale pour la ville de Québec. Mais actuellement, là... Moi, j'ai eu un mandat, aux élections, et ce que je peux vous dire au-delà de ce débat-là, c'est que la loi répond parfaitement au mandat que les citoyens m'ont donné à 74 % aux dernières élections. Alors, si vous me dites : Que feriez-vous? Bien des choses, M. le député, mais ce n'est pas le cas, et moi, je veux que les citoyens arrêtent de payer, et la loi, elle fait mon affaire.

M. Laframboise : Non, mais ce que je veux vous dire, M. le ministre, on a une loi, là. À la fin, si l'arbitre...

M. Labeaume (Régis) : ...je suis maire.

M. Laframboise : M. le maire, excusez-moi. Ce que je veux vous dire, c'est qu'on a une loi mais qu'à la fin de la loi, c'est l'arbitre qui tranche. Là, vous dites : Il faut encore resserrer l'arbitre pour ne pas qu'il dérape. Si, à la fin, c'était la ville qui tranchait, le projet de loi pourrait vous satisfaire aussi, là.

M. Labeaume (Régis) : J'aimerai toujours que la ville tranche. Mais c'est un très grand débat, hein? Ce sont des discussions qu'on a eues. Je sais que vous autres, la CAQ, vous étiez d'accord, et je vous en remercie, mais ce n'est pas ça qui arrive, là. Puis je ne veux pas embarquer dans ce débat-là, parce que je pense que c'est mal aligné. Puis je vous comprends très bien, c'est parce que vous l'avez prôné, et j'étais d'accord. C'est juste que, le temps faisant, je dois vous dire, pour être très honnête avec vous, je l'ai laissé tomber pour m'assurer qu'on ait quelque chose de solide, puis on l'a.

M. Laframboise : Parce qu'à la fin, moi, ce que je... c'est juste parce qu'à la fin, quand on voit l'encadrement, il pourrait arriver qu'à notre commission la solution, ce soient les villes qui tranchent. Je vous le dis, ça pourrait arriver que ce soient les villes qui tranchent. Moi, si c'était ça, moi, ce que... je veux juste vous dire... Est-ce que ça serait plus difficile, les négos, si ça arrivait ou ça serait... De toute façon, il y aurait des négos, puis la loi l'obligerait, puis on le ferait, puis il y aurait...

M. Labeaume (Régis) : M. le député, je suis heureux avec la loi. Je n'ai pas envie de la mettre en doute.

M. Laframboise : Par contre, nous, on peut, en tant que parti d'opposition — vous comprenez, là — faire notre travail, là. C'est ça.

M. Labeaume (Régis) : Non, non, vous faites votre travail, puis je le sais, là. Je respecte ça totalement.

M. Laframboise : Parfait, parfait. Bon. Ça va. Parce qu'évidemment vous avez compris que la marge de manoeuvre... Tu sais, tantôt, je le disais : Le maire de Montréal va demander que, pour ses bleus, ça soit reporté. Donc, il faut avoir une certaine marge de manoeuvre. Vous avez vu M. D'Amours qui disait : Bien là, pourquoi, quand on a un projet de loi, il faut que tout le monde passe pareil, tu sais, il ne faut pas faire de différence?, alors que moi, je pense qu'il faut laisser l'autonomie aux villes.

M. Labeaume (Régis) : Si vous me permettez, il faudrait que, dans le fond, personne n'ait le goût d'aller voir l'arbitre — c'est ça, l'affaire — que tu trouves que c'est très hasardeux d'aller voir l'arbitre et que ça force la négociation. Moi, je pense que l'avantage, c'est ça : forcer la négociation, avoir un meilleur résultat que le hasard. Puis les arbitres ne sont pas tous pareils, puis avant qu'il se... Puis le problème, c'est qu'il va se créer de la jurisprudence, les arbitres vont se créer de la jurisprudence. Avant qu'il s'en crée, ça va être... Ceci dit, il y a peut-être des cas particuliers. L'important, c'est que ça ne nous touche pas.

M. Laframboise : Par la suite, évidemment, la bonification que vous demandez de l'arbitrage, parce que... Étant donné que vous considérez qu'on la garde comme ça, la bonification de l'arbitrage, je voudrais juste que vous éclairiez, là. Vous ne voulez pas... Vous venez de me le dire, vous souhaiteriez qu'il n'y ait pas d'arbitrage, donc, inévitablement... qu'on ne soit pas obligés d'aller à l'arbitrage, hein? C'est ça?

M. Labeaume (Régis) : Non, non, ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. Laframboise : Vous souhaiteriez qu'on ne soit pas obligés d'aller en arbitrage.

M. Labeaume (Régis) : Non, je dis oui à l'arbitrage. La seule chose qu'on dit, c'est : L'idée que l'arbitre puisse revenir analyser les conditions passées pour prendre son jugement, c'est délicat, parce que moi, je dis que les syndicats n'ont rien laissé sur la table. Parce que si... parce que le syndicat va dire : Allons prendre une chance avec l'arbitre puis plaidons qu'on en a perdu dans le passé, alors que moi, c'est clair pour moi qu'ils n'en ont pas perdu. Si, dans l'encadrement de l'arbitre, on dit : L'arbitre ne tiendra pas compte du passé mais de l'avenir, les gens vont avoir moins le goût d'aller voir l'arbitre, je vous le garantis.

M. Laframboise : Et l'indexation. Vous êtes revenu en disant que l'indexation pourrait régler en bonne partie vos problèmes, mais vous êtes... Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'il y ait d'autres facteurs qui soient analysés que l'indexation? Dans votre cas, ça semble être ça.

M. Labeaume (Régis) : Tu sais, nous... Écoutez, tu sais, je dis toujours... Comment dire? Trois à cinq ans... Ça a l'air bénin, deux ans, dans la décision sur la création d'une rente pour un individu. Pour chaque individu, ce n'est peut-être pas majeur, mais au total, pour une ville, c'est extraordinaire. C'est comme la fameuse indexation de 1,5 %. Ça a l'air de pas grand-chose après impôt, là, mais pour la ville c'est énormément d'argent. Et juste recomposer le mélange entre l'âge et le nombre d'années de travail pour déterminer la capacité d'aller à la retraite sans pénalité, bien, juste là, ce n'est pas grand-chose, mais pour une ville, au total, c'était énormément d'argent. Alors, on l'a fait. Il n'y a pas juste l'indexation. C'est juste que, si vous analysez en Occident, hein, les organisations, les gouvernements qui ont rebâti leurs régimes de retraite, l'indexation, c'était un automatisme. Et, pour les retraités, c'était un automatisme, généralement. Alors, ici, là, on ne réinvente pas la roue, là. Quand on dit... Tu sais, il n'y a pas de miséreux, là. Lever l'indexation temporairement pour les retraités, c'est quasiment automatique en Occident, si vous analysez la documentation, ce qui a été fait ailleurs. Ça se fait. Alors, on ne peut pas diaboliser le gouvernement ici, puis pas le maire de Québec non plus. C'est juste normal; ça se fait ailleurs. Mais il faut accepter qu'on refasse les régimes de retraite.

M. Laframboise : O.K. Puis, dans cette condition-là, par rapport... parce que vous, la... Quand on pense au passé pour atteindre le 100 %, 120 %, est-ce que ça va être nécessaire d'imposer le partage automatique 50-50?

M. Labeaume (Régis) : Ah! il faut imposer le partage.

M. Laframboise : Automatique.

M. Labeaume (Régis) : De toute façon, c'est une question d'équité. Comment peux-tu exiger du citoyen... Il faut arrêter de les faire payer plus que l'employé lui-même sur le fonds de pension de l'employé. Ça n'a aucun sens, c'est une injustice. En passant, c'est la quintessence, l'exemple parfait de l'injustice intergénérationnelle. Moi, les jeunes que je rencontre, ils sont tous contre ça, ils n'en reviennent pas. Il y a des jeunes qui m'étonnent, de ce temps-ci. Enfin, ce que je veux dire, c'est que c'est 50-50, ça ne peut pas être en bas de ça, là; c'est juste normal. Ce qui est anormal, c'est ce qui existe maintenant puis c'est ce qui existait avant. C'était anormal. Et, aujourd'hui, le problème, c'est qu'il y a moins de richesse, le gouvernement est cassé, puis les citoyens, eux autres, ont perdu de l'argent puis ils n'en peuvent plus, ils sont tannés.

M. Laframboise : M. le député de Beauce-Nord, est-ce que...

Le Président (M. Auger) : ...

M. Laframboise : Deux minutes, oui.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauce-Nord.

• (12 heures) •

M. Spénard : Deux minutes? Bonjour, M. le maire. Il me fait plaisir de vous voir et revoir. Vous avez affirmé... vous avez parlé du régime de retraite pour les élus mêmes et vous allez envoyer une résolution, je pense, de votre conseil pour assumer à parts égales pour les élus municipaux de votre ville. Et vous avez parlé que la moyenne des élus... on sait à peu près qu'ici au gouvernement du Québec, c'est à peu près six ans. On sait aussi que les salaires des élus sont moindres que ceux qui travaillent dans les villes, que les permanents des villes. C'est aussi ça, aussi. Alors, moi, j'aimerais savoir comment vous voyez ça. Est-ce que ça fait partie du 18 %? Est-ce que vous touchez à la loi comme telle? Ça va-tu être 18 % de la masse salariale des élus? Ça va-tu... Comment vous le voyez? Puis vous avez parlé de prime de départ. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Labeaume (Régis) : En passant, moi, je ne suis pas... probablement pas dans les 20 plus payés à la ville de Québec; je n'ai pas les compétences pour. Alors, c'est bien connu. Mais ce que je veux vous dire, M. le député, c'est que ce qui est important, c'est le 50-50. Actuellement, le 70-30, quant à la cotisation, c'est indécent un peu, là, hein? Alors, il faut ramener le 50-50. Quant au coût total du régime, bien là on embarque dans une affaire qui est plus compliquée, là. Mais je pense que l'idée du 50-50, passé, présent et futur, avec une levée d'indexation, je pense que le principe de base, c'est ça, c'est ça qui est important. Alors, le coût du régime, là, ça peut être extrêmement compliqué, mais je pense que c'est... Ce qu'ils attendent de nous autres, les citoyens, c'est qu'on paie la moitié des cotisations, puis ça n'a jamais été le cas à Québec, en tout cas depuis les fusions au minimum; avant, je ne le sais pas.

Le Président (M. Auger) : Dix secondes.

M. Spénard : Bien, merci beaucoup.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le député. Donc, je tiens à remercier les représentants de la ville de Québec.

Je suspends les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 2)

(Reprise à 12  h 9)

Le Président (M. Auger) : Nous allons reprendre nos travaux. Je souhaite la bienvenue à nos nouveaux invités. Bonjour. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes, et ensuite nous allons procéder à une période d'échange. La parole est à vous.

Ville de Montréal

M. Coderre (Denis) : Je comprends, M. le Président, qu'il y a une certaine flexibilité, comme le projet de loi, pour le temps, quand on parle un peu plus que 10 minutes.

Le Président (M. Auger) : Un 10 minutes.

• (12 h 10) •

M. Coderre (Denis) : Ce qui est bon pour minou est bon pour pitou? O.K. Alors, merci beaucoup, M. le Président, M. le ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, M. Moreau, mesdames et messieurs, distingués membres de cette commission, je tiens d'abord à remercier la commission de nous recevoir aujourd'hui afin d'échanger sur ce projet de loi particulièrement important pour le monde municipal.

Je suis accompagné de plusieurs membres. Avec moi, j'ai M. Pierre Desrochers, qui est mon président de comité exécutif; Mme Anie Samson, qui est ma vice-présidente... une de mes vice-présidentes... elle est ma vice-présidente et responsable de la sécurité publique et des services aux citoyens; M. Lionel Perez, qui est responsable des infrastructures et des relations intergouvernementales; ainsi que M. Alain Marcoux, qui est directeur général de la ville de Montréal.

Depuis plus de 10 ans maintenant, la ville de Montréal a souligné à maintes reprises la problématique associée au financement des régimes de retraite et aux engagements qui en découlent. En 2013, le comité D'Amours a présenté une analyse détaillée de la situation des régimes de retraite et proposé plusieurs solutions. Le partage des coûts et de la gestion du risque devait être revu; le statu quo n'est pas une option.

J'aimerais saluer aujourd'hui la volonté du gouvernement qui, par son ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, M. Pierre Moreau, propose une approche législative qui incitera les municipalités du Québec et leurs syndicats à négocier pour restructurer nos régimes de retraite afin d'en garantir la pérennité et la santé financière, et ce, pour les générations à venir.

Je tiens également à souligner le bon travail du précédent gouvernement et de la ministre Agnès Maltais avec le dépôt du projet de loi n° 79, projet de loi qui faisait suite aux travaux effectués dans le cadre des forums paritaires tenus en janvier. Ces forums ont donné une voix autant aux parties patronales que syndicales. On constate bien que l'enjeu des régimes de retraite en est un qui dépasse les lignes de parti et que tous s'entendent sur la nécessité de les moderniser.

Les régimes de retraite à prestations déterminées des employés municipaux sont parmi les régimes de retraite les plus avantageux. Il s'agit d'un incitatif qui permet aux villes de recruter du personnel compétent et efficace. Les employés de la fonction publique municipale peuvent aussi avoir l'assurance qu'à la retraite ils recevront une rente et que le montant de cette rente sera prévisible et garanti. N'oublions jamais, par ailleurs, que c'est un avantage que, malheureusement, beaucoup de nos concitoyens n'ont pas. La ville de Montréal a toujours maintenu sa volonté de conserver ce type de régime pour ses employés, mais une restructuration est maintenant inévitable. Cette situation s'explique principalement par deux facteurs : la démographie et l'économie. Pas besoin de vous dire qu'on en parle ad nauseam, de la situation de l'espérance de vie, la fluctuation des marchés, et le reste.

Actuellement, ce sont les villes, et donc les contribuables via les taxes municipales, qui assument seules cette hausse du coût. Soyons clairs : à Montréal, il n'a jamais été question de remettre en cause les régimes à prestations déterminées. Au contraire, l'ensemble des démarches de la ville, depuis les dernières années, vise à protéger et assurer la pérennité de ces régimes. Cependant, nous sommes maintenant confrontés à une réalité financière que nous ne pouvons plus ignorer. Le coût des régimes de retraite a plus que quadruplé entre 2002 et 2014, passant de 126 millions à 550 millions de dollars, et les régimes sont toujours déficitaires. Le poids sur les finances de la ville s'en fait durement ressentir. Pour 2014, le coût des régimes de retraite représente 12 % du budget municipal. Alors que la population a de moins en moins de chances de bénéficier d'avantages similaires, il n'est plus possible de justifier le coût sans cesse grandissant des régimes de retraite des employés municipaux face aux contribuables qui n'en ont pas.

Certains laissent entendre que, par le projet de loi n° 3, les villes veulent refiler aux employés municipaux la facture des congés de cotisation dont elles ont bénéficié dans les années 90 et 2000. Or, il est important de rectifier certains faits. Bien que la ville, oui, ait effectivement pris des congés de cotisation pour chaque dollar de congé, l'équivalent a été octroyé aux employés en amélioration de prestation, et la valeur de ces améliorations a augmenté avec le temps. Alors que les congés ont été temporaires, les améliorations sont, pour leur part, devenues permanentes.

Aujourd'hui, le seuil de tolérance des villes et des contribuables est atteint; le coût des régimes de retraite pèse maintenant trop lourd dans la balance et mine le développement de l'offre des services aux citoyens. La capacité de payer des contribuables a atteint ses limites. Il est temps de rétablir l'équilibre. Le projet de loi à l'étude a le mérite de proposer une démarche, des objectifs et un échéancier.

Et j'aimerais répéter ici, M. le Président, que, pour les quatre prochaines années dans mon mandat, j'ai dit aux citoyens de Montréal que je n'augmenterais pas les taxes plus haut que le taux d'inflation. Donc, c'est incontournable, on doit trouver une façon de faire.

La ville de Montréal se joint donc aux voix des regroupements de municipalités, l'UMQ et la FQM, et soutient la proposition gouvernementale, une proposition qui, d'abord, fixe une période de négociation basée sur la réalité des coûts qu'une évaluation actuarielle établira au 31 décembre 2013 avec assistance, au besoin, d'un conciliateur. Ensuite, pour ceux qui n'auront pas réussi à s'entendre, un arbitre tranchera les éventuels différends. C'est une démarche équilibrée qui tient compte de l'urgence de la situation et qui laisse une grande place à la négociation avec toutefois une obligation de résultat.

Plusieurs conditions proposées par ce projet de loi pour encadrer les négociations reprennent les demandes de la ville de Montréal et de l'UMQ, notamment : le partage 50-50 du coût des régimes de retraite entre les villes et leurs syndiqués, qui garantit que le coût des régimes et des éventuelles augmentations seront assumés également par les deux parties; la limitation du coût du service courant d'un régime public à 18 % du salaire, 20 % pour les policiers et les pompiers, afin de respecter la capacité de payer des contribuables; trois, la constitution d'un fonds de stabilisation qui protégera à l'avenir les régimes de retraite des fluctuations des marchés financiers; quatre, l'abolition de l'indexation automatique de la rente, qui permettra de répartir les efforts financiers demandés entre les participants actifs et les retraités; et finalement la garantie que la rente de base des retraités et la rente des conjoints survivants ne seront pas affectées.

Le partage à 50-50 est déjà en vigueur pour la grande majorité des employés du secteur public. C'est d'ailleurs une recommandation du rapport D'Amours qui fait consensus. Pour moi, c'est une question d'équité à tel point que cette formule devrait être aussi appliquée aux élus. À ce sujet, hier, le Conseil municipal de Montréal a adopté à l'unanimité une résolution demandant au gouvernement du Québec que le Régime de retraite des élus municipaux de Montréal soit aussi assujetti à ce même partage 50-50. Et, comme mon collègue et ami Régis a dit tantôt, Québec a déjà fait la demande, mais il va y avoir une résolution en forme au niveau de leur propre conseil.

Certains aspects, cependant, du projet de loi, doivent être assouplis. Pour moi, c'est une boîte à outils, c'est une façon... on s'entend sur les objectifs, sur les paramètres, mais il doit y avoir certains assouplissements, et je vous propose... je soulignerai trois points, enfin, c'est ce que la ville veut. Un, d'abord, nous sommes persuadés du bien-fondé de la présente démarche, autant pour nos contribuables que pour nos employés, parce qu'elle implique des efforts importants de part et d'autre et que cette restructuration des régimes de retraite devrait avoir un caractère permanent. C'est pourquoi nous demandons au gouvernement du Québec de clarifier notamment l'alinéa 3° de l'article 5 quant à la permanence de la limitation du coût du service courant d'un régime public à 18 % du salaire et à 20 % pour les policiers et les pompiers. À quoi servirait-il de dépenser toute cette énergie pour se retrouver dans trois ou quatre ans avec exactement les mêmes problèmes? La définition qu'on a eue, c'est que c'est comme une seule fois et qu'il pourrait y avoir par la suite un changement en ce sens. Donc, la notion de permanence, tant qu'à le faire, il faut qu'elle soit permanente.

Deuxièmement, la ville de Montréal demande que le projet de loi permette que, si une entente sur le partage des coûts des déficits est intervenue avec un groupe d'employés, d'ici le 1er janvier 2010, à la satisfaction des deux parties, la municipalité puisse retarder l'application de tous les éléments de la loi sur cet aspect jusqu'à l'échéance de cette entente. Je veux ici souligner l'ouverture dont le Syndicat des cols bleus a fait preuve dans la dernière entente collective alors que le financement de leur régime de retraite a été revu dans le sens d'un plus grand partage du coût et du risque avec l'employeur. Je pourrai répondre à vos questions par la suite sur ce dossier particulier.

Enfin, certains cas exceptionnels, comme celui d'un régime fermé, demandent des mesures qui sont tout autant exceptionnelles. La ville de Montréal vit cette situation avec un de ses régimes, celui des contremaîtres. Ainsi, la loi doit permettre certains ajustements par décret afin de pallier aux situations particulières qui mettraient en péril les fondements mêmes de la loi lors de sa mise en oeuvre. Donc, le ministre peut avoir cette capacité, lorsqu'il y a de façon exceptionnelle une situation comme un régime fermé, de pouvoir répondre ponctuellement à ce dossier.

Je vais m'attarder maintenant sur le principe de l'équité intergénérationnelle parce que c'est important. Oui, le projet de loi demande, sous certaines conditions, une contribution des retraités. Il permet cependant de maintenir intégralement la rente de base. Il faut être sensible et intraitable à ce sujet. Suspendre le caractère automatique de l'indexation des prestations de nos retraités, nos anciens employés, ne serait-ce que de façon temporaire, est évidemment une décision difficile à prendre. Cependant, la gravité de la situation nous impose le constat que c'est tous ensemble...

Le Président (M. Auger) : Juste un instant, M. le maire. Je devrai demander le consentement pour aller au-delà du temps prévu. Consentement?

Une voix : ...

M. Coderre (Denis) : Bon, merci.

Le Président (M. Auger) : Et vous prenez le temps également?

M. Moreau : Comme d'habitude, M. le Président, vous prendrez le temps sur la partie ministérielle.

Le Président (M. Auger) : Merci. À vous, M. le maire.

• (12 h 20) •

M. Coderre (Denis) : J'apprécie. Merci. La métropole est heureuse. Cependant, la gravité de la situation nous impose le constat que c'est tous ensemble que nous trouverons des solutions durables à cet enjeu. Nous vivons présentement une situation économique hors du commun. Je vais vous dire que, si on suspend l'indexation automatique — on a un déficit actuariel de 1,9 milliard de dollars à Montréal — on va avoir un impact où ça va baisser de 50 %. Donc, ça va avoir un impact important, et je pense que ça nous permettrait de nous donner plus de marge de manoeuvre.

Plusieurs retraités du secteur privé ont dû retourner sur le marché du travail après les crises de 2001 et de 2008. D'autres ont vu leurs prestations diminuer de façon significative ou vivent dans l'insécurité financière. Les régimes de retraite des employés municipaux sont aussi en crise, et on ne peut demander aux contribuables de payer davantage. Par souci d'équité, donc, nous ne pouvons pas faire non plus porter le poids d'une restructuration des régimes de retraite aux seuls employés actuels. Ce pelletage par en avant, qui aurait pour conséquence d'augmenter le fardeau sur les épaules des nouvelles générations, serait un geste irresponsable pour une administration municipale.

En terminant, M. le Président, les dernières semaines ont été mouvementées, émotives même. Pas besoin de vous rappeler ce qui s'est passé à notre hôtel de ville. Et, pour plusieurs, ça a brassé. Mais maintenant l'heure est venue de travailler ensemble. J'ai toujours affirmé que ma porte était toujours ouverte pour la négociation avant ou après le projet de loi. Je fais appel à la bonne foi de nos partenaires. Je vais écouter leurs propositions afin d'identifier avec eux les meilleurs moyens d'atteindre les objectifs de cette restructuration. J'ai la conviction que nous pouvons trouver des solutions négociées qui auront le support le plus large possible afin que les employés municipaux actuels, futurs et retraités puissent toujours compter sur un régime de retraite attrayant, fiable et stable. Ce que ça veut dire, par exemple, c'est qu'il est urgent d'agir.

Nous avons aujourd'hui un projet de loi qui respecte les quatre principes essentiels que nous nous sommes fixés, à savoir : tenir compte de la capacité de payer des contribuables; assurer la pérennité des régimes de retraite; établir un partage équitable des coûts et des risques; quatre, garantir l'équité intergénérationnelle. Sur la base de ces quatre principes, nous donnons notre appui au projet de loi du ministre Moreau, mais cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas être amélioré ou bonifié sur certains points, comme j'ai proposé. C'est le travail qui nous attend au cours des prochains jours. Il faut tous ensemble mener à bien ce projet de société au nom des générations des travailleurs présente et à venir et pour le bien-être de nos citoyens. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons commencer la période d'échange. M. le ministre, vous avez la parole pour une période de 22 minutes.

M. Moreau : Merci, M. le Président. Alors, d'entrée de jeu, M. le maire, je veux vous souhaiter la plus cordiale bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec. Je veux saluer également Mme Samson — merci d'être là — M. Perez, M. Desrochers, et, M. le maire, vous me permettrez d'avoir une salutation particulière pour votre directeur général, étant donné qu'il a déjà occupé le fauteuil que j'occupe aujourd'hui. Je veux saluer M. Marcoux et lui dire que nous sommes toujours heureux de le revoir à l'Assemblée nationale.

Vous avez terminé sur une note, et je veux faire un peu de pouce là-dessus, vous avez dit qu'on est là pour bonifier le projet de loi. Vous ne pouvez pas avoir plus raison que ça, M. le maire. Le processus démocratique fait en sorte qu'il y aura deux étapes pour bonifier ce projet de loi là, qui seront faites ici, à la commission, qui, comme nous l'avons fait pour le projet de loi n° 1 concernant l'inspecteur général de Montréal, a toujours travaillé dans un esprit de collaboration et d'ouverture. Je remercie d'ailleurs mes collègues, tant de l'opposition officielle que de la deuxième opposition, pour avoir, dans leurs remarques introductives qui ont été faites à un moment où nous n'étiez pas encore dans cette salle... ont indiqué leur collaboration, leur intention de collaborer. J'ai indiqué l'ouverture d'esprit du gouvernement sur ces mesures-là.

Je vais aller sur deux points dans les 20 quelques minutes qui nous sont imparties. D'abord, la question du régime des élus municipaux. Je comprends que vous avez adopté une résolution, elle est sans aucun doute acheminée à l'Assemblée nationale, on va en prendre connaissance, et, d'ici la fin de la commission, elle sera déposée de façon officielle.

Deuxième point, sur ce que vous avez appelé les assouplissements, il y a trois éléments que vous avez couverts. Je veux revoir avec vous chacun de ces éléments-là, pour certains qui me semblent avoir un risque d'effet, et je voudrais vous entendre là-dessus.

D'abord, sur le régime des élus, vous avez entendu votre collègue le maire de Québec; je vous pose à vous aussi la même question. Alors, la durée... et l'idée n'est pas de défendre la situation actuelle, comprenons-nous bien, mais l'exercice dans lequel nous sommes engagés est un exercice qui est aussi pédagogique, qui nous permet de sortir les pour et les contre dans chaque proposition. Vous dites : Bon, alors le partage de participation des élus à leurs régimes de pension, que ce soient les élus municipaux, que ce soient... et l'idée est évoquée aussi pour les élus de l'Assemblée nationale, doit être de 50-50. Je vous pose la question : La durée moyenne d'un mandat d'un élu est bien inférieure à la période de travail d'un salarié dans le domaine public, que ce soit au niveau municipal ou au niveau du gouvernement du Québec, d'une part. D'autre part, la base de rémunération est bien inférieure dans le cas des élus par rapport à celle des salariés. Est-ce que le fait d'amener un partage 50-50 n'amène pas une distorsion? Encore une fois, je répète que je ne veux pas défendre le statu quo, je pense que les interventions précédentes sont claires dans ce sens-là, mais est-ce qu'il n'y a pas — posons-nous la question — une forme d'iniquité là et est-ce qu'il y a une compensation à faire ou, encore une fois, et je vous pose la question, est-ce que la perception est tellement importante qu'elle doit prévaloir sur l'équité entre les individus?

M. Coderre (Denis) : Je pense, M. le ministre, qu'il y a une question de principe puis une question de crédibilité. Montréal, la métropole, vous savez, 1,8 million d'habitants, budget de 5 milliards de dollars, on est près de 103 conseillers, dont 65 conseillers de ville. On a pris une décision ensemble où on pense que, nécessairement, s'il y a un sacrifice à faire entre avoir une rente... — puis on sait qu'il y en a qui n'en ont pas, près de 65 % n'ont pas un régime de rente déterminé — je pense que c'est le geste à poser. J'entendais parler primes de départ, là. Moi, je n'ai jamais eu de prime de départ. Vous savez, j'étais député avant, puis, quand on est parti, on n'a pas eu de prime de départ, et tout ça. S'il y a des primes de départ qui existent au niveau municipal, c'est de la façon dont on part : si c'est à la fin ou si c'est pour des raisons de santé, tout ça. Ça pourrait être l'objet d'un autre projet de loi. Je comprends que M. Laframboise a un projet de loi éventuel. On pourra en discuter. Mais je pense qu'il est important d'envoyer le message que cette notion de sacrifice et que, si on voulait envoyer clairement, notamment aux syndicats, que, O.K., on est dans le même bain puis on comprend, puis c'est que tout le monde doit faire son effort... C'est pour ça que c'est avec beaucoup de fierté que je me retrouve ici au nom... Et non seulement pour la question des élus, mais pour la question du projet de loi n°3, je parle au nom de l'ensemble des élus également de Montréal et des Montréalais qui trouvent qu'on doit poser des gestes. Donc, je pense que c'est le geste à poser au niveau des élus. On contribuera à la commission parlementaire à ce moment.

On doit aussi envoyer comme message que Montréal a pris sa position, Québec a pris sa position. Je ne parle pas au nom de l'ensemble des élus municipaux, parce que, déjà à l'Union des municipalités du Québec, il y a un comité d'étude qui travaille sur ce dossier. Donc, je parle strictement au nom de la métropole, mais je sais que plusieurs municipalités sont non seulement sensibles, mais sont d'accord avec ce point de vue là. Mais, dans la balance, il est important, à mon avis, dans le cadre de ce débat-là, qu'on puisse aussi envoyer comme message à tout le monde qu'en autant que Montréal est concernée les élus municipaux, en tout cas, doivent faire leur part.

M. Moreau : Alors, votre point de vue est entendu. Sur ce que vous avez appelé les assouplissements, vous en avez donné trois. Le premier, c'est de rendre permanent le portionnement de 18 %, la masse salariale, de 20 % dans le cas des policiers, pompiers, du coût du régime par rapport à la masse salariale. Moi, j'y vois là pas un assouplissement, mais un élément qui est plus dur. Je vous suggère la situation suivante : la raison pour laquelle, dans le projet de loi, nous l'avons établi comme base de départ, c'est qu'il faut tenir compte que, dans le temps, les régimes vont évoluer, et, selon la maturité du régime, le coût du régime va aller en augmentant au fur et à mesure que le nombre de retraités va augmenter parce que le coût est tributaire du fait que le régime doit décaisser pour un plus grand nombre de retraités. Si on rend permanent le 18 % et le 20 % dans le temps, au fur et à mesure que le nombre de retraités augmente et que le coût du régime augmente, la conséquence de le rendre permanent, c'est que je vais devoir réduire constamment les prestations du régime. Est-ce que, dans le contexte d'une plus grande souplesse, il n'est pas préférable de maintenir ce critère-là comme un critère de base et de laisser pour l'avenir le champ libre à la négociation entre les villes et leurs associations syndicales?

• (12 h 30) •

M. Coderre (Denis) : La raison, M. le ministre, que j'ai posé la question en termes d'éclaircissement, c'est que je vous propose un autre scénario. Parce que, si on met toutes ses énergies — et c'est clair que, du milieu syndical, on va conspuer ce 18 % puis ce 20 % là — qu'on travaille tous très, très fort puis on obtient ce «one-shot deal» et qu'au bout de deux ans, là, il y a une renégociation, par exemple, des policiers ou des pompiers puis on s'entend sur une autre formule de partage, l'arbitre, quand ils vont négocier le régime, va se fier à ce que qui se passe ailleurs. Quand tu vas devant un arbitre, ce n'est pas blanc ou noir, la situation. Donc, nécessairement, il va y avoir des changements. S'il y a des changements, il va y avoir un impact financier également en ce sens. Alors, dans le fond, la question que je me pose : O.K., vous voulez le faire une première fois, mais, si c'est juste pour mettre la poussière en dessous du tapis puis d'être pogné avec le problème plus tard — puis là c'est ce que je propose comme réflexion aux membres — est-ce qu'à ce moment-là on ne devrait pas assurer, peut-être, une meilleure redéfinition de ce qu'on entend par ça. Et pas de problème de négocier. Moi, je... d'ailleurs, c'est ce qu'on dit depuis le début, sauf que, si, par un autre exemple, on met toute cette énergie-là pour rien, vous savez aussi qu'il y a eu une question de travailler avec l'ensemble de ces travailleurs-là par la suite. Donc, est-ce que c'est de se donner bien du mal pour rien, pour arriver à ça, quand ça pourrait changer éventuellement?

Je suis d'accord avec la formule du 18-20, mais je veux juste savoir, quant à son application, qu'est-ce qu'on devait faire en conséquence. Donc, c'est pour ça que je vous dis : Vous m'avez donné cet éclaircissement-là, mais je vous lance... en fait, c'est plus qu'une... ce n'est pas juste... ce n'est pas une demande. Ce que je vous demande, c'est qu'il y ait un débat spécifiquement là-dessus parce que c'est trop important, dans ce projet de loi n° 3 là, pour qu'on puisse dire : Bon, bien, il peut y avoir des conséquences à ce point-là.

M. Moreau : Je comprends, de votre remarque, là, de la réponse que vous me donnez que vous, vous référez à l'arbitrage, particulièrement dans le cas de la négociation telle qu'on la connaît avec les policiers, où on dit : Bien, s'il n'y a pas d'entente, là il y a un arbitrage. Puis là il y en a beaucoup qui disent : Bien, l'arbitrage a toujours eu un effet ascenseur où on va aller chercher ce qu'il y a de plus fort dans les autres régimes, bon. Mais, si on exclut ça, ou si on encadre ça, ou si on modifie cette situation-là pour établir, mettre l'emphase sur la négociation, est-ce qu'il n'est pas préférable de maintenir le critère du 18 % et du 20 % comme élément de base, quitte à soumettre à la négociation entre les villes et leurs associations syndicales ce qui va se passer dans l'avenir?

M. Coderre (Denis) : M. le ministre, j'ai déjà été à votre chaise, ça fait que je sais que, dans le cadre d'une commission parlementaire, lorsqu'on a à monter une loi, on veut s'assurer de couvrir l'ensemble des angles puis de trouver une marge de manoeuvre puis un niveau de flexibilité qui va permettre d'être encore plus consensuel. Je suis d'accord avec ça, là. Ce que je vous dis, c'est que je n'ai pas de problème à ce que ça soit une seule fois, puis je suis pour la négociation, mais je vous dis qu'on se donne du trouble un peu pour rien aujourd'hui.

M. Moreau : Que vous, vous ne souhaitez pas que, par un effet pervers, quel qu'il soit, l'effort qu'on demande de consentir à l'heure actuelle soit totalement anéanti la prochaine fois. C'est ce que...

M. Coderre (Denis) : C'est exactement le point que je vous ai dit aujourd'hui.

M. Moreau : Parfait, O.K., j'ai bien compris.

La question de... Deuxième point, l'échéance des ententes, de respecter l'échéance des ententes. Je pense que, là, vous faites référence à l'article 52 du projet de loi, l'article 52 qui dit : «Lorsqu'une entente concernant un régime conclue entre un organisme municipal et une partie ou la totalité de ses employés au cours des trois dernières années [précédant] la sanction de la présente loi comporte la constitution d'un fonds de stabilisation», etc.

«Les règles prévues à la présente loi s'appliquent à l'égard de ce fonds à compter du 1er janvier 2014 si les négociations entre les parties débutent le 1er février 2015 et à compter du 1er janvier 2015 si les parties conviennent que les négociations débuteront le 1er janvier 2016.»

Je veux bien comprendre. Vous avez une entente qui est valide jusqu'en 2017. Si vous entreprenez, conformément à l'article 52 de la loi, vos négociations le 1er janvier 2016, l'intégralité de l'entente que vous avez à l'heure actuelle n'est pas touchée. Alors, je ne veux pas vous prendre par surprise, là, je veux juste que... Vous me dites : J'ai une entente avec les cols bleus. C'est exact, c'est les cols bleus dont on parle...

M. Coderre (Denis) : Tout à fait.

M. Moreau : ...qui se termine en 2017. Bien, cette entente-là, la loi, ce qu'elle vous fait comme obligation, c'est d'entreprendre la négociation dès 2016. Alors, ça ne remet pas en question l'entente que vous avez avec les cols bleus, qui expire en 2017. Et donc, si ce que je viens de vous dire là est exact — là, je ne veux pas vous prendre par surprise, je pense que ce que je viens de vous dire est exact — si ça, c'est exact, vous êtes donc à l'intérieur des paramètres que vous souhaitez.

M. Coderre (Denis) : M. le Président, ma compréhension, ce n'était pas ça du tout, c'était qu'on pouvait... on était obligés de renégocier à nouveau notre 50-50. Là, on a une position...

Rappelons les faits. Quand les cols bleus ont eu l'intelligence et la vitesse d'esprit de signer une entente avec l'administration précédente... Parce qu'on se rappellera qu'il y a eu la fluctuation à cause du krach boursier, et on avait dit... Bon le rapport D'Amours s'en venait : Grouillez-vous, c'est le temps, si vous voulez avoir une entente, on va le faire. Il y a eu une entente qui a été signée de 55-45. On est passés de 70 % à 55 %.

La question que je me pose, c'est : Quand je regarde le projet de loi, on doit aller à 50-50, on doit donc refaire tous nos devoirs. Et moi, je pense qu'il faut être pratico-pratique, dans la vie, je pense qu'on est... on veut s'assurer que, s'il y a des gens qui ont travaillé très fort puis qui ont saisi la balle au bond à l'époque — puis là on parle... c'est pour ça que je vous parle du 1er janvier 2010 — je pense que ça serait important qu'on puisse le faire. Au même titre que, quand on parle d'appliquer la loi, moi, je n'ai pas de problème. Étant donné que vous avez la suspension de l'indexation, et tout ça, je ne vois pas pourquoi qu'on ne pourrait pas l'appliquer, en une fois ou deux fois, pour nous assurer que... De toute façon, ce qu'on veut, c'est d'avoir les objectifs de la loi, qui est le 50-50, la protection des régimes de retraite et l'équité intergénérationnelle. C'était dans ce sens-là.

Si vous me dites que... C'est pour ça que, si on doit tomber à 50-50, ça veut dire que l'entente qu'on a actuellement est caduque puis il faut que je la renégocie.

M. Moreau : Alors, bon, très bien, c'est bon qu'on ait cette discussion, vous voyez, c'est serviable, les commissions parlementaires, hein? C'est salutaire, les commissions parlementaires.

Ce que je comprends, moi, de l'article 52, et, avec les gens qui ont rédigé la loi, c'est de dire : Vous n'êtes pas... Vous n'avez pas atteint, avec les cols bleus, 50-50; vous êtes à 45-55 — je pense que c'est ça, là, quelque chose du genre — et vous avez un fonds de stabilisation. D'ailleurs, le fonds de stabilisation, on doit vous féliciter, ça vient des initiatives de la ville de Montréal. Alors, vous êtes à l'intérieur de ce contexte-là. Et ce que la loi vous dit... Elle ne vous dit pas : L'entente prend fin prématurément un an avant. Elle vous dit : Vous devez convenir que les négociations débutent le 1er janvier 2016. Alors, vous allez commencer les négociations en cours d'entente avec les cols bleus. C'est ce que prévoit le deuxième alinéa de l'article 52.

Et je comprends que, si ce que je vous dis là correspond à l'interprétation sur laquelle on s'entend tous, vous êtes heureux de ça. Puis, si ce n'est pas ça, vous me dites : Bien, M. le ministre, modifiez ça pour que la loi corresponde à ce que vous venez de me dire. C'est exact?

M. Coderre (Denis) : M. le ministre, ce n'était pas mon interprétation, mais, si c'est la réalité, ça veut dire que l'entente des cols bleus, on la garde comme telle, et que, par la suite, on entreprend des négociations en vue d'atteindre, à compter...

M. Moreau : ...de 2016.

M. Coderre (Denis) : ...de 2016... Voilà.

M. Moreau : Vous êtes capable de vivre avec ça, si c'est... O.K., parfait.

M. Coderre (Denis) : Vous m'enverrez le libellé, je suis un visuel.

M. Moreau : Je vais vous donner ma copie.

M. Coderre (Denis) : Vous me donnerez votre avis juridique.

M. Moreau : O.K. Troisième point, l'ajustement par décret pour les régimes fermés. Je veux bien comprendre ce point-là, parce que, là, je pense qu'on s'adresse à une... Vous êtes sur un sujet qui est très pointu, c'est-à-dire le régime des contremaîtres de la ville de Montréal, c'est exact? Et je pense que c'est un régime assez particulier. Pouvez-vous nous donner plus de détails? Parce que le projet de loi, je pense, ne pose pas, ou ne vise pas, ou ne vise pas de façon spécifique ce régime-là. Alors, quelle serait la demande de la ville?

M. Marcoux (Alain) : M. le ministre, c'est un régime où il n'y a plus d'adhérent depuis un certain nombre d'années, parce que, maintenant, les contremaîtres appartiennent au groupe des cadres et... Alors, c'est un groupe... Il n'y a plus d'adhérent, donc, évidemment, le coût, compte tenu de l'âge, augmente énormément ou tout ça. Alors, on voudrait que vous... le ministre ait le pouvoir, dans des situations comme celles-là, d'adopter un décret ou un arrêté ministériel qui nous permette, en somme, de ne pas appliquer tous les éléments du projet de loi.

M. Moreau : Et est-ce que ce pouvoir de décret du ministre devrait... Là, je comprends que le régime auquel vous faites référence, je pense qu'il y a huit adhérents encore...

M. Marcoux (Alain) : Je crois qu'il y en a 150 vivants encore, parce qu'il y a des retraités, etc., là.

M. Moreau : Des retraités, mais huit actifs.

M. Marcoux (Alain) : Oui. Je pourrais corriger le chiffre, mais ce n'est pas... un petit groupe de sept, huit, là.

M. Moreau : O.K. Bon, alors, c'est un élément pointu...

M. Marcoux (Alain) : Oui. Oui, oui.

M. Moreau : ...qui ne justifie pas les manifestations dans les rues. Mais est-ce que le pouvoir de décret du ministre devrait être encadré à des situations qui sont exceptionnelles? Je pense que c'est ce que vous demandez.

Une voix : ...

• (12 h 40) •

M. Moreau : O.K., parfait. Il nous reste du temps, il nous reste quatre minutes, M. le maire. Sur la question des déficits passés, on a entendu votre collègue le maire de Québec. Je vais vous poser la question puis je ne le fais pas dans le but d'antagoniser les rapports, je le fais dans le but d'avoir les faits sur la table. Est-ce que, dans les négociations... Vous avez été notamment, aussi, très proactif avec, par exemple, les cols bleus pour arriver à l'entente qui expirera en 2017, peut-être avec d'autres groupes aussi de travailleurs à la ville de Montréal. Est-ce que vous avez abordé, lors de ces négociations-là, la question de pouvoir vous entendre sur le règlement des déficits passés ou si c'est un sujet qui a été totalement évacué?

M. Coderre (Denis) : M. le ministre, ça fait neuf mois que je suis maire. Ça ne fait pas partie de mon administration. C'est donc qu'il y a eu une entente par la suite. On n'a pas parlé des déficits passés. C'était basé sur l'avenir. Mais, certainement, c'est pour ça que, pendant le projet de loi n° 79, ce qu'on avait demandé, c'était qu'on puisse avoir un projet de loi. Et je me rappelle, au forum, à l'époque, on parlait du déficit passé comme tel. Vous avez choisi — et je trouve que c'est justifié — que l'on puisse suspendre, et suspendre, je veux dire, c'est temporaire, l'indexation qui pourrait répondre à la question des déficits passés. Donc, nécessairement, lorsqu'on va négocier dans le cadre de la loi, on va envisager en conséquence. Mais je n'ai pas eu d'expérience où on négociait pour les déficits passés.

M. Moreau : Bien. Écoutez, M. le maire, je vous remercie de votre passage à la commission, et je m'en voudrais de terminer votre témoignage, enfin, pour la partie ministérielle, sans vous dire que le gouvernement compatit avec tous les élus de la ville de Montréal pour les événements malheureux qui ont eu lieu à l'hôtel de ville. Et je réitère que je suis convaincu que ce n'est pas le fait, et ce n'est pas supporté... Parce que ça a été dénoncé par les associations syndicales, ça a été dénoncé de façon unanime ici par tous les partis à l'Assemblée nationale, et je suis convaincu que les gens, même ceux qui ont été mêlés à ces incidents-là, comprennent très bien maintenant que ce genre d'attitude là est décrié par l'ensemble de la population. Et c'est une bonne chose, parce que nous avons la chance de vivre dans une démocratie et que ça, c'est probablement, au-delà de tous les débats politiques, une des grandes richesses de notre société. Je vous remercie d'être passé à l'Assemblée nationale.

M. Coderre (Denis) : M. le ministre, je vous dirai tout simplement que, dans mon vocabulaire, rapport de force n'inclut pas intimidation. Jamais, au grand jamais la ville de Montréal ne va céder aux gros bras. On est là pour protéger l'enceinte démocratique. Je remercie l'ensemble des partis politiques qui, unanimement... et les chefs syndicaux qui ont été très clairs dès le début, qui étaient contre cette méthode. Mais je serai là pour protéger l'intérêt des Montréalais. Je serai là également pour protéger l'institution démocratique. Et puis on n'est plus dans les années 60, on est en 2014. Si on n'est pas capables de contrôler son monde, peut-être qu'on n'est peut-être pas à la bonne place. Merci.

Le Président (M. Auger) : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Bonjour, M. le maire. Je ne dirai pas M. le ministre dans ce cas-ci. Un ancien ministre, d'ailleurs. Je vous salue tous. Merci d'être ici.

Écoutez, j'aurais quelques questions par rapport à ce qu'on a... par rapport à votre mémoire, qui est très volumineux et de qualité, là. En tout cas, on a beaucoup d'information. Vous nous avez fait travailler beaucoup, c'est bien. Écoutez, je regarde... première question qui me vient à l'idée, je regarde la capitalisation de vos six régimes, et puis ce que je m'aperçois, puis c'est une question comme ça que je vous pose, là, c'est que la capitalisation est quand même intéressante en 2007. Vous oscillez, là, la plupart, entre 85 % et 98 %. Donc, en tout cas, on est dans une situation qui n'est pas mauvaise. Mais vous avez été frappés comme tout le monde, là, par la crise de 2008, puis on arrive dans la situation où ce qu'à partir de 2010 ça devient plus problématique. Vous avez eu des négociations avec les cols bleus qui se sont — bien, en tout cas, je pense, d'après vos propos puis d'après ce qu'on a entendu aussi des deux côtés de la table — quand même bien déroulées.

Moi, je vous poserais d'emblée la question : À partir du fait qu'on met des paramètres sur ce qui va s'en venir, du 50-50, entre autres, pour les déficits puis, bon, sur les cotisations, moi, je vous dirais, et sans toucher aux déficits passés, est-ce que vous auriez été tenté de dire qu'il y aurait eu possibilité d'entente, suite à votre expérience? Vous avez... vous sentez qu'il y aurait peut-être de l'ouverture de la part des employés pour justement assurer la pérennité des régimes, pour dire : Bien, je pense que, si on avait parlé des déficits présents et futurs... bien, déficits futurs, d'ailleurs... bien, on aurait peut-être pu arriver, ou en bout de course, avec quelque chose qui aurait pu assainir les régimes de retraite sans aller dans les déficits passés.

M. Coderre (Denis) : Vous savez, M. le député, quand on parle d'équité intergénérationnelle, et qu'on sait que... je vous ai parlé tantôt d'un déficit de 1,9 milliard de dollars, et que, si on suspendait temporairement l'indexation, on réduirait de moitié, si vous avez un régime qui va être bien capitalisé, il n'y aura pas de suspension d'indexation. Ça fait qu'on va regarder vers l'avenir puis le présent. Donc, nécessairement, on se donne des outils pour qu'on puisse respecter la capacité de payer des gens. Donc, si vous êtes capitalisé à 106 % puis qu'il y a une suspension... il n'y aura pas de suspension d'indexation. C'est le geste qu'on demande, parce qu'on veut aussi... Équité intergénérationnelle veut dire qu'on veut protéger aussi les rentes de base.

Si, ma mémoire est fidèle, il n'y a pas vraiment d'indexation, par exemple, des pompiers depuis les 10 dernières années. Il y a quelqu'un qui est venu me voir, un pompier, puis qui me dit : Aïe! Coderre, tu vas m'enlever ma rente. Pardon? Non, on ne t'enlèvera pas ta rente. Il dit : Qu'est-ce que vous allez faire, d'abord? Bien, on a dit : Quand ce n'est pas capitalisé, on va suspendre l'indexation. Ah! il dit : C'est correct, ça fait 10 ans que je ne l'ai pas reçue. Bon. Tu sais, je veux dire, il y a des efforts à faire de part et d'autre.

On peut trouver des modus operandi. C'est sûr qu'on peut parler en termes d'âge de retraite, je sais qu'il y a certains syndicats... Nous, on a dit qu'on veut la protéger, mais qu'à cause de la réalité de la vie la question de la rente de conjoint, c'était une chose qu'on peut peut-être envisager.

La meilleure preuve, c'est que, si on regarde pour l'avenir et le futur, avec la suspension temporaire de l'indexation, pour moi, ça démontre que ce projet de loi là, il n'est pas mur à mur. Vous avez, quoi, 154, 172, ça dépend des régimes qui existent. Donc, on veut nécessairement négocier régime par régime. La capitalisation n'est pas la même, mais, quand on regarde dans sa globalité, au niveau des déficits, vous avez vu qu'on est à 1,912 milliard de dollars de déficit, il faut trouver des solutions.

Alors, cet équilibre-là... Puis je pense qu'en faisant ça ça nous donne une chance, et puis c'est vendable, et que la population est derrière nous puis va être d'accord avec ça. Maintenant, oui, il y a un sacrifice, oui, ça va coûter plus cher aux employés. Maintenant, c'est là qu'on a parlé d'application tantôt. On peut l'appliquer sur une fois, deux fois, tout dépendant du régime. On est capables de se parler puis d'arriver à dire : Bien, finalement, si ça te coûte 1 200 $ de plus par année puis tu le mets sur deux ans, ça ne coûtera pas 1 200 $ par année de plus. Donc, on va aussi gérer la pression financière de l'employé tout en étant conscient, puis ce n'est pas de mettre un contre l'autre, mais qu'ils forment 35 % de la population qui a un régime de retraite de cette façon. Puis moi, je veux, comme les municipalités, comme vous... c'est de protéger aussi ce régime de retraite, parce que c'est un choix de société qu'on a fait.

M. Therrien : O.K., merci. J'aurais une question par rapport à l'indexation, là, puis la clause banquier. Dans votre mémoire, vous dites que vous aimeriez que la clause banquier puisse rester avant qu'on arrive à rembourser les indexations. Juste m'expliquer en gros, là, d'où ça vient, la clause banquier, pourquoi c'est important pour vous puis votre position, là.

M. Desrochers (Pierre) : En fait, actuellement, comme vous savez, à un moment donné, on a dû prendre un emprunt de l'ordre de 1,6 million, dont un a été fait par emprunt et l'autre...

Une voix : ...milliard.

M. Desrochers (Pierre) : ...1,6 milliard, désolé, dont une portion a été faite par obligations, qu'on a mis... 1,2 million d'emprunt... 1,2 milliard d'emprunt et un 400 millions d'obligations qu'on a mis dans les différents régimes. Aujourd'hui, on estime que la dette qui reste est environ de 550 millions, à peu près, là, dans son ensemble, qui reste à faire. À l'époque, il avait été négocié, avec les différentes ententes, dépendamment des surplus, qu'on était pour se récupérer ces montants-là. Et on croit qu'actuellement, avec le projet de loi, on ne sera peut-être pas en mesure d'être les premiers à récupérer ces montants-là qu'on avait souscrits. Donc, on a une préoccupation vis-à-vis ça, et c'est dans ce sens-là qu'on indique... qu'on fait la remarque.

M. Therrien : D'accord. C'est un peu... c'est l'argent du régime en surplus qui va dans la clause banquier pour rembourser le prêt que vous avez fait au préalable.

M. Desrochers (Pierre) : Que, s'il y avait des surplus... Oui, effectivement.

• (12 h 50) •

M. Therrien : O.K. Par rapport à l'arbitrage, à la page 35, là, aidez-moi, là, vous dites que vous voulez supprimer l'article qui dit : «En outre, l'arbitre doit prendre en considération les concessions antérieures qu'ont consenties les participants à l'égard d'autres éléments de la rémunération globale.»

Pourquoi vous voulez l'enlever? Puis est-ce qu'on est capable d'évaluer ces... Est-ce que vous êtes capable d'évaluer ce genre de concessions là? Parce qu'on imagine que l'arbitre va faire ça, va évaluer les concessions.

M. Coderre (Denis) : Je vais laisser le président répondre, mais ce que je voudrais aussi rajouter en termes d'arbitrage, puis c'est dans le mémoire, c'est qu'aussi, si on va en arbitrage, c'est basé strictement sur les régimes des employés municipaux. Vu que ce projet de loi là est au niveau des employés municipaux, par exemple, si on est au niveau des policiers de Montréal, on comprend qu'il y a aussi les policiers municipaux, bien ça ne voudrait pas dire, par exemple, qu'on inclut le régime de la Sûreté du Québec, par exemple. Ça, c'est important, ça, c'est important à mentionner. Pierre?

M. Desrochers (Pierre) : Bien, je pense que je vais répéter un petit peu ce qui a déjà été dit. Je ne crois pas qu'actuellement il n'y ait personne qui ne va laisser rien sur la table, là. Déjà, ils sont très bien rémunérés. Je pense que ce qu'on tente de faire, c'est de limiter la croissance et de ramener ça à un niveau plus acceptable. Mais personne ne va laisser de l'argent sur la table, déjà, et les statistiques ont été données d'au-delà de 38 % au-dessus de la moyenne des secteurs privé et public, là. Donc, déjà, je ne crois pas que ça ne va rien leur coûter.

Il y a des rajustements qui seront à faire. Mais c'est une préoccupation. Je peux comprendre leur désir de vouloir faire ça, mais, dans tout ça, il faut aussi penser au contribuable, parce qu'à la fin ça sera toujours le contribuable qui devra payer. Et on a pris aussi des engagements, comme le maire l'a souligné tantôt, qu'on veut limiter la croissance de la charge fiscale sur nos contribuables. On doit le faire et on doit limiter la croissance des coûts qui sont reliés aux régimes de retraite et les risques également.

M. Therrien : O.K. Les congés de cotisation, dans les années 60, 70, il s'en est pris, peu importe la raison, ce n'est pas ça, le but, là. Est-ce que l'arbitre pourrait revenir là-dessus, justement, pour donner un avantage quelconque aux employés? Et est-ce qu'on est capables d'évaluer l'ensemble des congés de cotisation qui ont été pris, là, historiquement?

M. Coderre (Denis) : La question des congés de cotisation, c'est réglé, parce qu'il y a eu des compensations par la suite, là. Donc, je ne pense pas que ça fasse partie du dossier, de toute façon. Alors, on essayait de dire : Bon, c'est nous autres qui payaient tout. Non, non, regarde, il y a eu des congés... Quand il y a eu des congés de cotisation, on a compensé par des bonifications. Ces bonifications-là, par exemple, sont devenues permanentes. Les congés ont été temporaires, mais, au bout de la ligne, quand tu calcules tout, ça veut dire qu'on a donné plus que ce qu'on a mis de côté, qu'on a pris en considération comme congé. Alors, pour moi, ça ne fait pas partie de ça.

M. Therrien : Je vais laisser la parole à mes collègues.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée de Vachon. Non, M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, M. le maire, ainsi que les gens qui vous accompagnent. En entrée de jeu, ce matin, M. D'Amours nous expliquait, puis le ministre semblait être d'accord aussi, que, lorsqu'on parlait d'indexation, ça toucherait environ 15 % des gens. C'était minime, puis tout le monde semblait être d'accord avec ça, alors qu'on voit M. Labeaume qui vient ici, vous aussi... Dans votre cas, ça réglerait une méchante belle partie de... Alors, qu'est-ce que vous dites du rapport D'Amours qui, comme... Il dit que c'est bien, bien... ça ne touche pas grand-chose, ce n'est pas...

M. Coderre (Denis) : C'est son point de vue. Moi, je vous parle de chiffres puis par rapport à ma propre réalité montréalaise. Je veux dire, c'est pour ça que vous avez plusieurs personnes qui viennent ici. Ils viennent témoigner à la lumière de leur propre expérience puis de leur propre expertise. Nos chiffres, nous, sont clairs : on a un déficit de 1,9 milliard de dollars, et que l'impact de cette suspension temporaire de l'indexation réduirait près de 1 milliard, ce qui veut dire 50 %. Ce n'est pas rien. Alors, je ne veux pas faire une guerre de chiffres avec M. D'Amours, mais c'est notre réalité, puis je vous la donne.

M. Leclair : C'est bien. C'est juste pour m'assurer qu'on était sur la même longueur d'onde. D'un autre côté, lorsqu'on parle... vous avez parlé beaucoup d'équité, autant intergénérationnelle, puis les déficits passés, et tout ça, on sait que ça va être le nerf de la guerre, en bout de ligne, de ce projet de loi là, de tenter de trouver un passage où est-ce que tout le monde va être satisfait pour clarifier, là, tous les déficits passés.

Lorsqu'on parle d'équité intergénérationnelle, vous dites puis vous n'êtes pas le seul, dans plusieurs mémoires, on dit que, de prendre un congé de cotisation ou d'indexation, ça réglerait un certain montant ou un certain problème, dans des cas, quasiment tous les problèmes. Mais, corrigez-moi si j'ai tort, mais est-ce qu'on parle ici... lorsqu'on empêche l'indexation des gens qui sont déjà à la retraite, c'est encore juste ces gens-là qui vont payer? Puis là on peut faire parler les chiffres, dire : Bien non, on avait indexé, on avait fait ci et ça, mais, dans le cas réel, si on dit : On n'indexe pas pendant deux, trois ans, jusqu'à temps que le régime soit rétabli, bien il n'y a pas d'équité entre le patronal et le travailleur, ou le retraité qui est déjà à la retraite. Je veux avoir votre point de vue là-dessus.

M. Coderre (Denis) : Bien, je reprends les propos de votre collègue. On a vu qu'au niveau de la capitalisation on voit que ça va quand même assez bien, puis il y a quand même certains gestes à poser, puis c'est temporaire. Il va y avoir un impact presque à court terme sur l'ensemble de notre santé financière. Si je vous dis que les pompiers, pendant 10 ans, à cause... bon, c'est le taux d'inflation et tout ça, ils n'ont pas eu d'indexation pendant 10 ans, on n'enlève pas de l'argent aux rentiers, là. On dit : Vous avez votre rente de base, mais que, l'indexation, on va la suspendre. C'est un sacrifice à faire, bien oui, ça dépend d'où est-ce qu'on est. Bien, moi... est-ce que vous voulez aussi que les jeunes policiers, les jeunes pompiers et les jeunes cols bleus prennent tout sur leurs épaules, quand on sait que la réalité, c'est que comment, à l'époque, il y avait plus de travailleurs qui payaient pour les rentiers, mais qu'aujourd'hui, là, on est obligés d'être des experts boursiers, puis que la question des fonds de pension, ça dépend de Wall Street, de Montréal ou de la Bourse de Toronto?

Alors, je vous dis : L'équité, là, ça veut dire qu'on répartit le sacrifice. Puis on a dit : On ne veut pas toucher à la rente de base; suspendons temporairement. Si je prends les propos de votre collègue, il le voit bien, écoutez, ce n'est pas si pire que ça, dans le fond. Alors, si ce n'est pas si pire que ça, puis ça nous donne une marge de manoeuvre puis de l'oxygène pour fonctionner, puis qu'on respecte l'ensemble des citoyens qui ont un compte de taxes à payer, bien, je pense qu'à ce moment-là c'est équilibré.

Vous allez toujours avoir des gens qui ne seront pas contents, mais je pense qu'on n'a pas le choix, et ce projet de loi là nous force adéquatement à avoir... à restructurer nos régimes de retraite. Puis je pense qu'avec les objectifs qu'on s'est fixés puis avec les éclaircissements qu'on va chercher, bien, on peut arriver à protéger les régimes de retraite tout en t'assurant qu'au jeune, on dit : Toi, là, dans 20 ans... C'est sûr que les jeunes travailleurs, eux autres, dans 20 ans, ils veulent peut-être avoir leur salaire tout de suite, puis ce n'est pas évident. Mais, si, dans 20 ans ou dans 30 ans, ils prennent leur retraite puis qu'ils disent : J'ai un régime de retraite aujourd'hui, c'est à cause des décisions qu'on va prendre aujourd'hui.

Le Président (M. Auger) : Une minute. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Bonjour M. le maire. Bonjour à votre équipe. Sur... parce que, du côté de Montréal, c'est sûr qu'il y a eu des congés de cotisation, mais c'est aussi lié au rendement des différents régimes, le fait de la dette qui existe aujourd'hui.

Je me demandais, à Montréal, comment est décidé... qui décide des placements, qui décide des congés de cotisation? Le comité, est-ce que c'est la ville de Montréal, est-ce que c'est les employés, est-ce que c'est 50-50? Est-ce que vous pourriez nous éclairer à ce sujet-là?

M. Coderre (Denis) : Il y a un comité, il y a des comités paritaires de toute façon, vous avez... c'est quoi? APR, là, pour les policiers. Il y a un groupe à part où on a des représentants comme conseillers de ville, mais là on ne joue pas avec le bas de laine du monde de même, là. C'est du monde qui sont sérieux, avec des experts, mais avec des représentants, d'où la notion de comités paritaires, là. Ça fait que, si je me lève de mauvaise humeur un matin, ce n'est pas moi qui est en charge des placements.

Mme Ouellet : Quand vous dites...

Le Président (M. Auger) : ...c'est tout le temps que nous avions. Je vais maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Blainville.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le maire, d'être présent. D'abord, je voudrais souligner d'entrée de jeu toute mon... Vous avez toute mon admiration pour la façon dont vous avez traité le dossier. Ce qui s'est passé à l'hôtel de ville lundi, vous l'avez fait... vous vous êtes tenu debout, mais vous l'avez fait avec humilité, sans arrogance. Je pense que vous l'avez bien fait, puis j'espère que ça va continuer, puis qu'on va comprendre que finalement, puis vous l'avez dit, là, on est en discussion ici, là. Moi, je disais ce matin aux employés de respirer par le nez, là, on commence le processus, là. Puis je pense que c'est le temps d'ouvrir le débat puis d'être capable d'atteindre l'objectif, qui est, comme vous le dites : Il faut régler le problème, c'est le temps. Puis c'est le temps ou jamais, puis je pense que, M. le ministre, ce projet de loi se doit d'être discuté.

Mon problème est un petit peu... Bon, vous avez parlé d'assouplissement; M. D'Amours a parlé d'assouplissement. Bon, le ministre vous a réglé le cas des bleus assez rapidement, là, mais je veux juste... Je ne voudrais pas justement qu'on règle...

Une voix : ...

• (13 heures) •

M. Laframboise : C'est ça. Qu'on ne règle pas ça trop rapidement. Parce que ça se pourrait que vous ayez des négociations puis qu'il y ait une entente qui soit aussi bonne, qui atteigne l'objectif, mais de façon différente, là, puis qui serait justifiée. Puis, M. le maire, c'est sûr que...

M. Coderre (Denis) : Excusez-moi, M. Laframboise.

M. Laframboise : Oui.

M. Coderre (Denis) : Je vous arrête là parce que c'est important. Quand on a fait les fameux forums... là, ça chiale sur les déficits passés, mais moi, là, je me rappelle... parce que, grâce à notre intervention à une même table, on s'est assurés notamment que le syndicat des policiers et des pompiers puisse faire partie prenante de la discussion, parce que ce n'était pas le cas à l'époque. Et je répète ce que je répétais dans le temps des forums : Il n'y a pas personne, dans le fond, qui est contre le fait que ça doit être du 50-50. On est rendus là, là. Alors, le projet de loi, c'est ça, là : c'est du 50-50, c'est de protéger les régimes de retraite, c'est de s'assurer qu'on puisse avoir une équité intergénérationnelle. Maintenant, on détermine quand. Il y a eu un choix qui a été fait, que j'appuie. On ne s'entend peut-être pas sur la question «permanent», mais c'est un débat que vous devriez avoir. Mais on est rendus là, là. Ça veut dire que, moi, demain matin, là, n'importe qui, dans les présidents de syndicats, vient me parler puis on commence à négocier, là, dans ma tête, là, si on est passés de 70 % à 55 % pour les cols bleus, on comprend qu'éventuellement le 50-50, c'est important, là.

Donc, quand on est sortis bras dessus, bras dessous, là, avec Mme Maltais, M. Gaudreault, qui étaient ministres à l'époque, il y avait les maires, dont Régis et moi, puis l'UMQ, puis il y avait les représentants syndicaux, puis on parlait tous d'une même voix. Là où il y avait un problème, c'était sur la négociation des déficits passés. Mais pour le reste, là, vous n'êtes pas loin, là. Vous ne ferez pas un article par article trop long, là. Alors, c'est pour ça que je vous dis qu'il ne faut pas dire : Je ne vois pas la forêt parce que j'ai un arbre devant moi, là. On a la capacité de régler, puis entre-temps il n'y a rien qui nous empêche de s'asseoir puis de négocier. Peut-être qu'au lieu de faire du saccage, qu'on prenait le temps de négocier, mettre cette énergie pour la négociation, on y arriverait. Mais j'ai bon espoir, parce que je veux saluer les gars comme Marc Ranger, qui font partie de la solution plutôt que du problème. On est capables de se parler puis de travailler ensemble pour trouver une solution, parce qu'on a tous à intérêt la protection de ce système de pension.

M. Laframboise : Et on est dans cette lignée. Moi, la seule chose — puis je le répète depuis les tout débuts — c'est qu'évidemment le fait qu'il y ait un arbitrage, il y a un carcan, il y a des demandes, il y a ci, il y a ça... Moi, je pense que les villes sont capables de régler ces différends-là. Tantôt, vous avez fait une demande pour un décret. Moi, je me dis : Bon, on demande au gouvernement de faire un décret; la ville aurait très bien pu négocier, puis trancher, puis dire : On s'entend là-dessus. Je veux dire, ça, c'est... je comprends que vous jouez la situation, il y a toute une façon de faire.

M. Coderre (Denis) : Oui, sauf, M. Laframboise, qu'il y a quelque chose d'important. Puis je veux saluer le gouvernement, parce qu'on est en train de négocier présentement quelque chose qui va être important, qui s'appelle le statut de métropole. Alors, oui, il y a un projet de loi par rapport aux relations de travail puis les régimes de retraite, mais on est en train de négocier, là, le genre de partenariat pour que la métropole soit un véritable catalyseur pour les Québécois. Et ça, ça veut dire, au bout de la ligne, qu'on va parler d'incitatif fiscal, on va parler de développement économique, on va parler de développement social. Donc, ce n'est pas juste le projet de loi aujourd'hui, là. On est en train de redéfinir un partenariat, notamment, entre les municipalités et le gouvernement du Québec, parce qu'on n'est plus une créature des provinces; on est un ordre de gouvernement de proximité. Donc, pour moi, dans cette foulée-là, c'est sûr que c'est très complexe, mais, quand il y a des systèmes pointus, ayant été ministre moi-même, tu ne veux pas être à la merci du système et tu ne veux pas que le système soit à la merci du ministre, il est important, quand on assume de façon politique la capacité d'avoir un décret pour régler une situation... Pas besoin d'être dans la salle d'attente pour attendre un papillon, là, on sait que ça va être dans la loi, on fait un téléphone puis on règle ça.

M. Laframboise : C'est parce que vous, vous prenez le... C'est un tout, là.

M. Coderre (Denis) : ...moi, je prends mes responsabilités, inquiétez-vous pas.

M. Laframboise : Là, vous prenez un tout, là. Mon problème à moi, c'est que je veux régler un problème qui est bien ponctuel, c'est les déficits. Moi, je suis ici pour régler ça, puis on parle de ce projet de loi là. Je ne veux pas embarquer dans un tout avec : Je te permets ça au gouvernement, puis tu me donnes ça, puis j'échange...

M. Coderre (Denis) : Non, mais ce que ça veut dire, M. Laframboise...

M. Laframboise : Ça, vous êtes capable de faire ça, M. le maire, là.

M. Coderre (Denis) : ...respectueusement, c'est que là, aujourd'hui, on parle d'un dossier qui est extrêmement complexe, qui est le régime de retraite. Quand on parlera en termes de relations de travail ou les conventions collectives, puis tout ça, là, ça sera l'objet d'une autre affaire. Si vous voulez faire éventuellement une refonte du Code du travail, parce que c'est un outil vivant, là, on pourra discuter de la question de lock-out — je sais que vous en avez parlé pendant la campagne électorale, et tout ça — mais, pour l'instant, je pense que ce qui est important, c'est de se donner les outils pour qu'on ait des paramètres, qu'on chante la même toune puis qu'on protège la capacité de payer des gens tout en protégeant les régimes de retraite.

M. Laframboise : Mais je ne parle pas de lock-out, là. Je fais juste donner un pouvoir aux villes de trancher, tout simplement. Je vais laisser la prochaine question à monsieur...

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Coderre. Je vous souhaite la bienvenue, de même que votre équipe. Je vois que M. Marcoux faisait partie du 1 % de non-rétention à la ville de Québec lorsqu'il s'est en allé à Montréal, d'après M. Labeaume.

M. Coderre (Denis) : ...une chose au clair, c'est un Montréalais qui a travaillé à Québec. Là, il est revenu chez lui.

M. Spénard : Ah! O.K., O.K., O.K. Bien, moi, je...

M. Coderre (Denis) : On accepte les jarrets noirs aussi, si vous voulez.

M. Spénard : Oui, j'imagine. M. le maire, vous parliez que vous allez donner l'exemple pour une question de perception en ce qui concerne le régime de retraite des élus municipaux. J'aimerais en connaître un peu plus en ce qui concerne ce régime de retraite là. Est-il déficitaire? À comment qu'il est présentement? Est-ce qu'il est à 70-30? Est-ce qu'il est à... Est-il déficitaire? Est-il «over»? Et qui va assumer les déficits s'il y a des déficits passés? Comment ça marche, ça, ces...

M. Coderre (Denis) : ...vous répondre.

M. Marcoux (Alain) : M. le député, à ma connaissance, la dernière fois que j'ai vérifié — c'est il y a quelques mois — le coût du régime était à environ 30 %. Les membres des conseils municipaux en paient entre 6 % et 7 %, et environ 23 %, l'employeur. Bon. La dernière fois que j'ai vérifié, c'est le... s'il y avait un déficit, il était léger et marginal, il n'était pas substantiel. Mais la proposition, telle qu'elle a été adoptée par le conseil de Montréal, le conseil de ville de Montréal, c'est que le coût du régime, le coût de l'ensemble du régime serait assumé 50-50. Moi, j'ai compris par cette résolution-là que c'est le service courant et le service passé qui seraient partagés 50-50.

M. Spénard : O.K. Et, comme votre prédécesseur, le maire de la ville de Québec, qui parlait de... parce que vous savez que la carrière politique... Si M. Labeaume était le 20e employé, en termes salarial, à Québec, vous devez être le 200e à Montréal. Je ne le sais pas, là, où vous vous situez. Les employés municipaux gagnent toujours plus cher que les élus. C'est pareil au gouvernement. Ça, c'est clair. C'est ça. M. Labeaume parlait d'une prime de départ, d'ajuster la prime de départ. Est-ce qu'il y a des primes de départ de prévues dans vos... avec les élus municipaux de Montréal?

M. Coderre (Denis) : ...une refonte. D'ailleurs, je veux juste vous apprendre que moi, j'ai même eu une diminution de salaire parce que j'étais un député. Alors, tu ne fais pas ça pour l'argent. Tu fais ça par passion, tu fais ça par vocation, tu fais ça pour aider les gens, tu veux servir la population. Donc, c'est sûr que tu ne te mets pas riche avec ça, là. Mais il y a une question de principes, dans la vie, puis il y a une question de valeurs, et c'est pour ça que je pense que, si on demande aux gens de faire un... d'avoir le sens du sacrifice, on doit tous l'avoir.

Maintenant, dans votre prochaine législation, en termes de primes de départ... Je peux comprendre des fois que, pour des raisons de maladie, il y a des gens qui doivent quitter puis que... Il ne faut pas être dogmatique en ce sens. Mais, s'il y a des gens qui quittent parce qu'ils sont accusés au criminel, ils ne devraient pas avoir le beurre et l'argent du beurre. Ils devraient se garder une petite gêne puis se mettre ça dans un fonds en fidéicommis, puis, s'ils sont innocentés, ils pourront peut-être l'avoir. Mais ça, c'est un débat qu'on pourra faire par la suite. Moi, je n'ai pas eu de prime de départ quand j'ai quitté après 16 ans comme député fédéral, puis c'est correct. J'ai fait un choix. Quand tu fais un choix, entre-temps, tu l'assumes puis tu vis avec, tout simplement.

Le Président (M. Auger) : 30 secondes, M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Alors, juste pour vous dire que, bien, nous, on est favorables, évidemment, à la même perception que vous avez, à donner aux citoyens, que les élus provinciaux devraient faire de même que qu'est-ce qu'on demande au municipal. Alors, je vous félicite et je vous remercie beaucoup d'avoir pris part à la commission.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, je tiens à vous remercier, chers représentants de la ville de Montréal.

Sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 9)

(Reprise à 14 h 12)

Le Président (M. Auger) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder à des consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 3, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal.

Cet après-midi, nous recevons des représentants de l'Union des municipalités du Québec, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, de l'Association du personnel retraité de la ville de Québec de même que la Confédération des syndicats nationaux.

Compte tenu de l'heure, je demande consentement pour qu'on puisse prolonger la période qui était prévue jusqu'à 18 heures. Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

M. Moreau : Qui ne dit mot semble consentir.

Le Président (M. Auger) : On m'a quand même fait un signe.

M. Moreau : Ah! O.K. Le député de Beauharnois est consentant. O.K.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Donc, je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter, bien sûr. Je vous rappelle que vous disposez d'une période de 10 minutes, et, par la suite, nous procéderons à une période d'échange. La parole est à vous.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Mme Roy (Suzanne) : Alors, merci M. le Président de la commission. M. le ministre, mesdames messieurs les députés, à titre de présidente de l'Union des municipalités du Québec, je remercie la commission de nous entendre aujourd'hui sur cet important projet de loi.

Permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Donc, M. Bernard Sévigny, premier vice-président de l'Union des municipalités du Québec et maire de Sherbrooke; M. Alain Rayes, deuxième vice-président de l'UMQ et maire de Victoriaville; M. Jasmin Savard — là, je vous fais promener d'un côté et de l'autre — alors, M. Jasmin Savard, notre directeur général à l'Union des municipalités du Québec; et M. Yves Létourneau, conseiller à la direction des politiques de l'union.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais vous rappeler que l'Union des municipalités du Québec représente, depuis plus de 90 ans, les municipalités de toutes tailles dans toutes les régions du Québec. Ses membres représentent 80 % de la population du territoire québécois. Depuis plus de 10 ans, le dossier des régimes de retraite à prestations déterminées des employés municipaux est au coeur des préoccupations de l'UMQ. Déjà, au début des années 2000, l'UMQ s'inquiétait des effets de l'effondrement des marchés boursiers sur les caisses de retraite des travailleurs municipaux. C'est un enjeu qui concerne toutes les municipalités qui ont des régimes de retraite à prestations déterminées. Au Québec, 108 municipalités, toutes membres de l'UMQ, gèrent les près de 200 régimes de retraite à prestations déterminées, qui sont différents, évidemment. Chacun de ces régimes de retraite à prestations déterminées possède ses propres particularités : la rente de base versée, le taux de capitalisation, la part des coûts payés par chaque partie, la politique de placement, la maturité, le coût du régime, etc. Tous ces éléments peuvent varier d'un régime à l'autre. Pour ces raisons, certaines municipalités présenteront leur vision, adaptant leurs caractéristiques sur les éléments spécifiques au projet de loi n° 3. Cependant, il y a beaucoup plus d'éléments convergents. Notamment, ils ont tous un point commun : tous ces régimes ont vu leurs coûts augmenter de façon continue depuis le début des années 2000, et ces coûts ont littéralement explosé depuis 2008. Aujourd'hui, la très grande majorité de ces régimes sont déficitaires. Ils représentent un fardeau financier important et un risque incontrôlable pour les municipalités dans les conditions actuelles.

Encore plus important, les contribuables ne peuvent plus assumer la totalité des coûts et des risques associés à ces régimes de retraite. C'est pour ces raisons que l'UMQ a tiré la sonnette d'alarme, il y a déjà plusieurs années, et demandé des modifications législatives permettant de s'assurer de protéger les contribuables municipaux, de s'assurer la pérennité des régimes de retraite des municipalités, d'assurer l'équité intergénérationnelle et de convenir à un effort équitable de tous. Le projet de loi que nous avons devant nous répond à ces demandes en proposant des solutions concrètes pour les atteindre. C'est pourquoi l'UMQ appuie sans équivoque les principes et les objectifs du projet de loi n° 3.

Par ailleurs, j'aimerais rappeler que l'UMQ a toujours préconisé la négociation et que la négociation est encore et toujours la voie privilégiée par ses membres. Le projet de loi n° 3 impose aux parties une obligation de résultat et un délai pour les atteindre. Il y a tout intérêt pour les parties de négocier des mesures permettant de mieux partager le risque et d'assurer la pérennité des régimes de retraite. L'UMQ salue le courage du gouvernement qui a respecté son engagement électoral et a répondu aux demandes des municipalités en présentant le projet de loi.

Je m'arrêterai ici pour l'instant pour céder la parole à mon collègue, M. Bernard Sévigny, maire de Sherbrooke, pour poursuivre cette présentation.

• (14 h 20) •

M. Sévigny (Bernard) : Merci, Mme la présidente. Alors, mon principal message aux membres de la commission parlementaire aujourd'hui est la pertinence d'agir maintenant. Vous savez, depuis le début des années 2000, de façon récurrente et à chaque nouvelle crise financière, l'enjeu des régimes de retraite est venu hanter tous les promoteurs de régimes de retraite à prestations déterminées, donc ça dure depuis une quinzaine d'années, et chaque nouvelle crise vient alourdir davantage le coût de ces régimes. Au-delà des fluctuations cycliques des marchés financiers, ce qui met en péril la survie même des régimes est la croissance inévitable des charges de retraite dues tout simplement à l'évolution des paramètres socioéconomiques. Et, c'est clair et net, ces régimes ne sont plus adaptés aux réalités démographiques, économiques et financières actuelles, et c'est la raison pour laquelle la très grande majorité des promoteurs de régimes privés ont, depuis longtemps, adapté le régime de retraite aux nouvelles réalités. Et, dans le secteur municipal, le rapport de force déficient entre l'employeur et les employés ne nous a pas permis d'apporter ces ajustements.

Par exemple, en 2006, dans le cadre de la négociation du pacte fiscal, le gouvernement a accepté de soustraire des municipalités à l'obligation qu'elles avaient de faire des versements pour résorber les déficits de solvabilité de leurs régimes de retraite. Mais cette mesure, oui, a permis de soulager financièrement les municipalités, mais elle ne permettait pas de s'attaquer aux problèmes structurels des régimes et remettait les décisions à plus tard. On croyait à tort que la croissance économique allait résoudre le problème. La crise financière de 2008 a fait ressurgir de façon encore plus évidente les lacunes des régimes de retraite municipaux et a provoqué des pressions énormes sur les finances municipales. Depuis 2008, les fortes contributions financières des municipalités associées à la récente embellie des marchés financiers, oui, ont permis de réduire les déficits actuariels des régimes municipaux, les faisant passer de 4,8 milliards de dollars, en 2011, à 3,9 milliards de dollars en 2013. Ce serait une erreur de conclure, comme en 2006, que le déficit des régimes de retraite n'est plus un enjeu et qu'il serait préférable d'attendre encore une fois que la situation se redresse d'elle-même. Agir en fonction de cette hypothèse serait irresponsable et ferait porter uniquement par les contribuables tous les risques associés à des régimes de retraite mal adaptés aux présentes réalités. Rappelons que chaque crise financière n'a fait qu'empirer le problème d'une fois à l'autre. Si rien n'est fait, la prochaine crise financière, qui arrivera tôt ou tard, sera insoutenable pour les municipalités et, ultimement, pour les contribuables. En somme, ce que l'UMQ souhaite, ce sont des régimes de retraite qui soient viables à long terme et qui ne feront pas porter des risques démesurés sur les épaules des contribuables. Et je termine en vous répétant que c'est maintenant le temps d'agir, vous en aviez d'ailleurs tous convenu lors de la dernière campagne électorale.

J'invite maintenant mon collègue Alain Rayes, maire de Victoriaville, à poursuivre la présentation.

M. Rayes (Alain) : Merci, M. Sévigny. La route a été longue avant d'arriver au dépôt de ce projet de loi. Cela fait plusieurs années que l'on analyse la question sur tous les bords et sur toutes les coutures. Aujourd'hui, on comprend tous que le statu quo n'est plus une option. Mes collègues vous ont présenté les objectifs qui sont poursuivis et pourquoi il faut agir maintenant. De mon côté, j'aimerais vous parler principalement du contribuable municipal.

Selon les données du ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire, entre 2007 et 2013, les charges associées aux régimes de retraite ont plus que doublé dans les municipalités du Québec. Les régimes de retraite des municipalités sont généralement financés à près de 70 % par les municipalités, et les déficits de ces régimes sont assumés à 100 % par les contribuables québécois qui, comme vous le savez, pour la grande majorité, n'ont même pas de régime à prestations garanties. Rappelons de plus que, pour l'ensemble des contribuables québécois, la part pouvant être consentie dans un régime enregistré d'épargne-retraite est limitée par la loi à un maximum de 18 % du salaire, et ce n'est qu'une très faible minorité qui a la possibilité d'y contribuer. Il faut être conscient qu'au niveau municipal, lorsque le coût des services augmente, il faut obligatoirement refiler la note directement sur le compte de taxes des contribuables. Il arrive un moment où la pression fiscale devient insupportable, et nous croyons que ce moment est arrivé.

D'ailleurs, le rapport du comité D'Amours concluait sans équivoque que des changements fondamentaux aux régimes de retraite doivent être apportés et qu'il serait illusoire de prétendre que la situation se corrigerait d'elle-même. Si des changements structurels majeurs ne sont pas apportés maintenant, la prochaine crise financière mettrait en péril encore une fois non seulement la santé financière des municipalités, mais aussi leur capacité à conserver les régimes à prestations déterminées.

Le Président (M. Auger) : Juste un instant, M. Rayes. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on ait un délai supplémentaire?

M. Moreau : Oui, M. le Président, et que le délai soit pris sur la partie ministérielle.

Le Président (M. Auger) : Consentement. Merci, M. le ministre. M. Rayes.

M. Rayes (Alain) : Merci. Nous avons, comme élus, la responsabilité de planifier à long terme et de prendre des décisions durables et équitables. J'aimerais ici ouvrir une parenthèse pour clarifier des propos voulant que les élus municipaux aient pris de mauvaises décisions par le passé, notamment sur le congé de cotisation. Pour notre compréhension commune de l'évolution de la situation des régimes de retraite, il est important de savoir qu'il n'y a pas une seule décision concernant les régimes de retraite des employés municipaux prise sans les syndiqués et les retraités, qui sont partie prenante des décisions; c'est la loi. En effet, la gestion des régimes de retraite se fait à l'aide d'un comité de retraite. De plus, précisons que chaque congé de cotisation a été assorti d'une bonification de régime, comme vous le savez.

Ceci étant dit, aujourd'hui, ce qui est le plus important à retenir, c'est que le problème des régimes de retraite à prestations déterminées est structurel. Nous sommes devant une situation critique et nous devons légiférer pour effectuer les changements fondamentaux nécessaires à leur survie. Nous avons le devoir d'assurer une équité avec les citoyens contribuables qui ne possèdent pas de tels régimes, mais doivent en absorber indirectement les coûts. Cette situation présente un problème politique et social. Bref, des aménagements législatifs sont nécessaires, et ceux présentés dans le projet de loi sont les bons. Sur ce, j'invite la présidente, Mme Suzanne Roy, de l'UMQ, à conclure cette présentation.

Mme Roy (Suzanne) : Merci, M. Rayes. En conclusion, nous demandons aux parlementaires de donner aux municipalités les outils nécessaires pour assurer la pérennité des régimes de retraite, protéger la capacité de payer des contribuables municipaux et permettre une équité intergénérationnelle. En l'absence d'un rapport de force de l'employeur municipal, il est presque impossible que les travailleurs syndiqués renoncent à certains droits acquis. Il est aussi impossible de modifier unilatéralement les conditions de travail négociées. Le projet de loi est une incitation claire à s'asseoir à la table de négociation avec les salariés pour négocier des mesures permettant de mieux partager les risques et d'assurer la pérennité des régimes de retraite.

L'UMQ réclame depuis plusieurs années des outils permettant aux municipalités de corriger la situation des régimes de retraite, et le projet de loi n° 3 répond à cette demande. Pour nous, les mesures suivantes sont consensuelles et incontournables : le partage obligatoire des coûts moitié-moitié du service courant et futur; la constitution d'un fonds de stabilisation afin de protéger les régimes d'éventuelles crises financières; la limite du coût de service courant, au 1er janvier 2014, à 18 % de la masse salariale, 20 % pour les policiers et pompiers; la possibilité que les participants actifs et les retraités puissent contribuer à l'effort de remboursement du déficit passé; et la protection des rentes de base des retraités.

En terminant, nous souhaitons que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. Le monde municipal souhaite aller de l'avant avec ces changements en négociant dans le calme et le respect afin de trouver les meilleures solutions possible pour nos employés, pour les citoyens de nos municipalités et pour les retraités de nos municipalités.

M. le Président, Mmes, MM. les députés, voilà l'essentiel de la réflexion de l'UMQ à l'égard du projet de loi. Nous vous remercions de votre attention, et c'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

Le Président (M. Auger) : Je vous remercie pour votre présentation. Nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour une période de 21 minutes.

M. Moreau : Merci beaucoup. Bienvenue à l'Assemblée nationale, Mme Roy, M. le maire Sévigny, M. le maire Rayes, MM. Savard et Létourneau. Merci de participer à nos travaux, que nous souhaitons voir se continuer dans le calme et l'harmonie comme nous avons vu ce matin. Et je suis convaincu que tout le monde est là pour participer, ceux qui seront entendus plus tard également, comme une contribution positive à l'amélioration du projet de loi.

L'UMQ représente combien de municipalités? Je sais qu'avec la Fédération québécoise des municipalités, qui est l'autre organisme que je connais très bien, là, vous vous disputez le territoire et la population. Alors, pouvez-vous simplement nous donner...

Mme Roy (Suzanne) : 300 municipalités. C'est 80 % du territoire québécois. Et la totalité des municipalités qui ont un régime de prestations déterminées sont membres de l'Union des municipalités.

M. Moreau : Là, je comprends que les municipalités visées par la fédération québécoise sont moins visées parce qu'il y a moins de situations où on a des régimes à prestations déterminées.

Mme Roy (Suzanne) : Voilà.

M. Moreau : Bon, l'UMQ appuie les principes du projet de loi. Moi, j'ai entendu des critiques, et, cette question-là, je vais la poser aussi à ceux qui ont formulé ces critiques, de dire que le projet de loi, dans sa forme actuelle, est fait principalement pour Montréal et Québec. Il y a une multitude de municipalités représentées par l'Union des municipalités du Québec, dont de très petites municipalités. Ce n'est pas une question de nombre ou de population, alors je pense que vous avez un éventail. Si je comprends que vous appuyez les principes du projet de loi, je comprends aussi que vous avez fait une réflexion à savoir s'il n'était fait que pour deux grandes villes. J'aimerais vous entendre là-dessus.

• (14 h 30) •

Mme Roy (Suzanne) : Je peux vous affirmer que, et le projet de loi et à l'intérieur de l'Union des municipalités, quand on a travaillé au niveau des régimes de retraite, on l'a fait vraiment sur des bases consensuelles. Donc, pour des régimes de retraite qui sont effectivement quelquefois plus petits ou dans des... On a quand même les 11 grandes villes, au Québec, qui sont membres, mais on a aussi des villes moyennes. Bon, Victoriaville, Sainte-Julie et plusieurs autres municipalités font face au même défi. C'est sûr que c'est moins impressionnant quand on dit qu'on a un déficit de 2 millions. Mais 2 millions de déficit, quand on a un budget de 20 millions, ça commence à être énorme comme déficit, à avoir un impact sur la taxation des citoyens, qui est aussi grand que dans le cas de Québec ou de Montréal. Donc, les éléments sur lesquels on a travaillé, ce sont vraiment des éléments de consensus qui réunissent l'ensemble des municipalités qui ont justement ce type de régime.

M. Moreau : Sur la question des éléments que vous avez déterminés comme étant incontournables, vous dites : Le partage 50-50 passé et à venir — je reviendrai sur le passé, là, on l'établira d'une façon particulière; la création d'un fonds de stabilisation; la limite du coût du régime à un pourcentage de la masse salariale; la participation des retraités; la conservation et la préservation de la rente. Ça, ce sont des éléments où vous dites : Bon, là-dessus, là, ça va. Les critiques à l'égard de cette approche-là pourraient être de dire : Bien là, vous faites du mur-à-mur. Ce matin, on a exploré cet aspect-là avec M. D'Amours, avec les maires de Montréal et de Québec puis on a vu que, dans les faits, il pouvait y avoir, même à l'intérieur d'une même ville — le maire de Québec en faisait l'illustration — une application qui soit totalement différente d'un régime à l'autre ou par groupes de régimes.

Sur la question de l'approche mur à mur, quelle est la position de l'Union des municipalités du Québec? Est-ce que vous voyez ça comme une approche mur à mur ou si effectivement ce qu'on s'est efforcés de faire en incitant les parties à négocier amène plutôt une situation sur mesure régime par régime, à la limite?

Mme Roy (Suzanne) : Je pense qu'effectivement le projet de loi nous permet, dans cette période de négociation là, de faire des choix régime par régime et avec les syndiqués concernés. Les choix, par exemple, pour nos employés cols bleus à l'intérieur d'un régime peuvent être très différents, par exemple, de l'association des cadres. Alors, ils peuvent choisir, à l'intérieur de ça, des balises qui sont propres à la réalité même, je dirais, de leurs fonctions, quand je pense aux policiers et aux pompiers, donc, et où c'est important, par contre, et on ne doit pas traduire ça comme étant du mur-à-mur, c'est de vraiment faire l'exercice où on a vraiment des objectifs à atteindre. Il faut atteindre les objectifs, parce que, sinon, on va véritablement frapper un mur. Alors, en ce sens là, à l'intérieur, comment on l'aménage? Ça, ça appartient à chaque régime de retraite puis, je dirais, avec la réalité aussi d'un régime de retraite par rapport à un autre, mais il faut quand même conserver, et ça fait partie du consensus que nous avons à l'Union des municipalités, des objectifs à atteindre pour s'assurer que... Ce n'est pas nécessairement toujours très agréable à vivre, des situations comme celle-là, mais qu'on prend nos responsabilités et qu'on règle la situation.

M. Moreau : Parlons maintenant des déficits passés. On a vu que Montréal pour ses cols bleus, Québec pour cols bleus, cols blancs ont été des villes qui ont été très actives en termes de négociation. On nous a dit que, dans ces deux grandes structures municipales, il y avait été pratiquement impossible, au plan pratique, d'amener, dans les négociations, le règlement du déficit passé. Qu'en est-il des municipalités représentées par l'UMQ, et qui sont de plus petites municipalités? Est-ce qu'il a été possible dans certains cas de traiter des déficits passés? Et, si oui, dans quel contexte?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, on le sait, que, dans un cas où il y a eu une entente dans une municipalité qui est plus petite, qui est la ville de Rimouski, qui n'est vraiment pas une petite municipalité — mon confrère va me lâcher un coup de fil après — ...

M. Moreau : Oui, c'est ça.

Mme Roy (Suzanne) : ...alors qui n'est pas une petite municipalité où effectivement il y a eu une entente... mais c'est souvent un élément qui est plus difficile. Mais évidemment, quand on parle du passé et qu'on touche l'indexation, par exemple, au niveau des retraités, on sait que ça touche 15 % de l'ensemble, là, de nos régimes, donc ce n'est pas nécessairement la majorité qui est directement touchée par la portion, je dirais, là, du déficit passé lié à l'indexation.

M. Moreau : Sur la question du déficit passé, un des arguments qui nous est avancé par les associations représentant les syndiqués, c'est de dire : Écoutez, de demander aux associations syndicales de régler, dans un seul coup, le déficit passé, ça peut amener des éléments de contrainte importants. Quelle est l'opinion de l'Union des municipalités du Québec sur une éventuelle possibilité d'étaler sur quelques années le paiement des déficits passés et sur le traitement qui devrait être réservé et aux villes et aux associations de syndiqués à cet égard-là?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, déjà à l'intérieur de notre mémoire, on a parlé, en ce qui concerne du présent et du futur, donc de la possibilité de respecter les ententes qui sont déjà signées. On parle à partir du 1er janvier 2009, donc après, je dirais, la crise de 2008, parce que c'est vraiment à ce moment-là où il a commencé à y avoir des mouvements et des ententes qui se sont faites. Donc, effectivement, il y a déjà des ententes qui ont déjà fait, je dirais, une première marche de ce dont vous parlez. Donc, il y a une première possibilité à ce niveau-là. Donc, c'est des ententes qui vont, dans certains cas... Je vous dirais que les dernières, c'est probablement 2018, là, qui ont dû être signées dans les dernières années. Donc, à ce moment-là, bien sûr, de respecter ces ententes-là sur ce partage-là, mais déjà commencer, dès aujourd'hui ou 18 mois avant la fin de l'entente, à discuter pour qu'à terme, au moment où l'entente sera terminée, on atteigne véritablement les objectifs du projet de loi.

M. Moreau : Ce que prévoit déjà l'article 52. On l'a vu avec le maire de Montréal un peu plus tôt, c'est-à-dire lui, il a négocié, pour les cols bleus, une entente qui est valide jusqu'en 2017. L'obligation faite par l'article 52 est d'entreprendre, à l'égard de cette association-là, les négociations à compter de 2016. Donc, ce que vous veniez de dire est exact, se reflète dans le projet de loi. Et là vous dites : Il faudrait aussi le faire pour les ententes qui se terminent en 2018 et donc obliger que les négociations commencent à compter de 2017. C'est ce que vous dites?

Mme Roy (Suzanne) : Je ne vais pas prendre l'exemple de Montréal, là, il est tout près, il me surveille, là. Mais, par exemple, dans le projet de loi, on nous dit qu'à compter du 1er janvier 2015, si les parties conviennent, les négociations débuteront au 1er janvier 2016. Donc, c'est rétroactif en 2015. Donc, pour une entente, par exemple, qui se terminerait en 2017 ou en 2018, il y aurait quand même une année — ou deux années même, dans le cas de 2018 — où on perdrait cette entente-là.

M. Moreau : Bien, c'est ça. Ça veut dire que la fin du deuxième alinéa de 52 dit : Si les parties conviennent que les négociations débuteront le 1er janvier 2016. Donc, dans le cas de Montréal, c'était l'exemple qui se terminait en 2017, la situation est visée par le projet de loi. Vous, ce que vous dites, c'est : Si les ententes se rendent jusqu'en 2018, d'ajouter un élément où on dirait que les négociations doivent débuter au 1er janvier 2017, parce que ça vous donnerait...

Mme Roy (Suzanne) : On disait 18 mois, là, mais une année ou 18 mois, en autant qu'au moment de la fin de l'entente on puisse vraiment réaliser et atteindre les objectifs du projet de loi.

M. Moreau : Bon. Mais je vais vous répéter ma question, parce que vous avez, dans la réponse... Et ça nous arrive à tous, là, de faire une petite digression, puis finalement la réponse, c'est la digression puis pas la question. La question que je vous posais était la suivante. Je sais que vous ne l'avez pas faite volontairement pour éluder la question. La question que je vous posais est la suivante. Les associations disent : Le déficit passé, si on m'exige de payer ma part, 50-50, de payer mon 50 % d'un seul coup, ça crée une obligation qui est onéreuse. Est-ce que ça ne pourrait pas être étalé dans le temps sans changer la répartition? Autrement dit, on garde la responsabilité à 50-50, les associations et les villes, et, à travers elles, les contribuables, mais que ce paiement-là puisse être étalé dans le temps. Quelle est la réaction de l'UMQ à une proposition semblable?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, je vous dirais spontanément : On est ouverts à la discussion. Ça peut faire partie d'éléments justement à discuter dans le cadre des négociations, mais une chose est certaine, c'est qu'il faut vraiment se donner une échéance pour atteindre l'objectif et que ça ne crée pas pour le citoyen un apport supplémentaire. Mais effectivement on peut être très ouverts à le regarder.

M. Moreau : C'est pour ça que je vous pose la question. C'est que, si on l'étale dans le temps, il y aura un impact sur le citoyen. Mais est-ce qu'il est préférable d'avoir cet impact-là pour tenir compte de la capacité de payer puis d'avoir un impact réduit sur l'exécution et l'obligation par les associations de salariés et par la ville ou si vous dites : Bien, dès lors qu'il y a un impact chez le contribuable, on préfère qu'il n'y ait pas d'étalement dans le temps?

Mme Roy (Suzanne) : Je pense que c'est quelque chose qui peut être regardé vraiment en fonction de chacun des régimes où, dans certains régimes, ça peut avoir des impacts qui sont moindres, alors, au moment de la négociation, ça peut faire partie des discussions.

M. Moreau : Il nous reste neuf minutes. On va aller sur un autre sujet qui n'est pas nécessairement visé par la loi, puis j'aurai un autre thème où je veux revenir sur votre mémoire. Donc, on va répartir ça. Je vais essayer de faire la question courte et je vais vous demander d'avoir la réponse courte.

Pourquoi est-ce que les élus municipaux seraient traités différemment des associations de salariés en ce qui a trait au partage de leur contribution aux régimes de retraite? Ça ne devrait pas être 50-50 pour tout le monde, incluant les députés à l'Assemblée nationale?

Mme Roy (Suzanne) : En fait, l'Union des municipalités est très ouverte à la discussion. On vous en a fait part, d'ailleurs, M. le ministre, de notre ouverture à discuter, bien sûr, tant au niveau des régimes de retraite que l'ensemble de la rémunération des élus. Donc, il y a déjà eu un rapport de la juge à cet effet-là, et on est prêts à se mettre au travail dès demain matin.

M. Moreau : Le maire de Montréal ne voulait pas vous scooper, je pense, mais il me semble me souvenir qu'il a dit que vous aviez, à l'UMQ, un groupe de travail qui, à l'heure actuelle, travaille là-dessus.

• (14 h 40) •

Mme Roy (Suzanne) : C'est plus large, c'est sur l'ensemble de la rémunération des élus.

M. Moreau : O.K. Et est-ce qu'il y a une date butoir ou une date à laquelle le groupe de travail doit rendre un rapport public?

Mme Roy (Suzanne) : Pas à ce moment-ci.

M. Moreau : O.K. Deuxième élément, dernier élément, en ce qui concerne notre bloc à nous, dans votre mémoire, vous demandez certains assouplissements. J'utilise l'expression toujours entre guillemets. Quels sont, Mme la présidente, selon vous, les trois éléments les plus importants dans les mesures d'assouplissement que vous souhaitez voir mis en oeuvre?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, dans les mesures d'assouplissement, on ne demandait pas vraiment beaucoup d'assouplissements, hein, on demandait, je vous dirais, plutôt de s'assurer d'atteindre les objectifs et qu'on voit comment, localement, on peut moduler tout ça. C'est vraiment de tenir compte peut-être de particularités, parce qu'évidemment on parle de près de 200 régimes de retraite, on ne peut pas retrouver, à l'intérieur d'une loi, les particularités de l'ensemble des régimes de retraite. Je pense juste à un exemple où on dit : Chez nous, on a une association de cadres à l'intérieur de la régie de police où on retrouve et policiers et blancs. Donc, est-ce que c'est le 20 % ou le 18 %, là? Il y en a un paquet de particularités. Il faut juste trouver le moyen que chacun des régimes puisse se retrouver dans ces particularités.

M. Moreau : Alors, quand la loi incite à la négociation, dans le cadre d'une négociation, ce sont les éléments de souplesse que vous pourriez retrouver.

Mme Roy (Suzanne) : On a toujours compris, au niveau de l'union, que justement cette partie du projet de loi qui détermine une période de négociation est justement pour ces ajustements-là qui reflètent des régimes qui sont différents les uns des autres.

M. Moreau : Et les critères de l'arbitrage, votre prédécesseur le maire Labeaume, je pense, a dit : Bien, vous devez modifier les critères de l'arbitre pour ne pas tenir compte des concessions préalables faites par une association de travailleurs. Nous, on dit : On l'a mis là pour créer un équilibre entre, par exemple, les congés de cotisation, les bonifications au régime, les bons gestes posés ou mauvais gestes posés par une ville et les bons gestes ou mauvais gestes posés... pas dans la perspective de rechercher un coupable, mais je pense que son propos généralement était à l'effet de dire : Il ne faut pas rendre l'arbitrage attrayant pour une partie ou pour l'autre, forçant ainsi les parties à s'entendre en négociation ou étant un incitatif puissant pour atteindre une entente négociée. Est-ce que, selon vous, les critères actuels qui sont prévus dans la loi sont suffisamment rébarbatifs pour les deux parties?

Mme Roy (Suzanne) : En fait, on les questionne parce qu'on ne sait pas jusqu'où ça peut aller, jusqu'où ça va arrêter. Et on parlait de mur-à-mur, je me permets un petit aparté, M. le ministre, mais, vous savez, quand on va en arbitrage, ce qu'on a souvent à vivre, c'est l'équité externe, hein? Alors, personne ne veut du mur-à-mur, mais on va toujours voir ce qu'il y a de meilleur chez le voisin pour le ramener chez soi. Alors, il nous semblait qu'au niveau des critères on ne savait pas où ça s'arrête. Alors, quand on prend congé de cotisation puis on en tient compte... mais, le coût des bonifications qui ont été amenées au régime aussi, il faut en tenir compte. Alors, on n'est pas certains jusqu'où ça peut aller puis si c'est réaliste même.

M. Moreau : Alors, lorsque vous parlez... quand vous parlez d'équité externe, vous parlez de l'arbitrage dans le cas des conventions collectives, notamment avec les policiers. Ici, l'arbitrage, il est conçu pour s'appliquer régime par régime, il n'est pas question d'équité externe dans ce contexte-là. Alors, si on élimine la question de l'équité externe, l'objectif qui est poursuivi dans le projet de loi, c'est dire : Personne n'aura avantage à aller à l'arbitrage parce que et les bons et les mauvais côtés et les bons et les mauvais agissements dans la gestion... dans la façon dont la situation qui conduit à l'arbitrage a été vécue historiquement sont pris en compte. Est-ce que, dans ce contexte-là où il n'y a pas une question d'équité externe, vous estimez que les critères prévus à la loi sont suffisamment décourageants et pour les villes et pour les associations de salariés et que ce sera un incitatif pour la négociation?

M. Sévigny (Bernard) : Bien, si je peux me permettre...

M. Moreau : Oui.

M. Sévigny (Bernard) : ...M. le ministre, vous faites référence à l'article 38, notamment, et l'article 38 porte sur les concessions antérieures qu'ont consenties les participants à l'égard d'autres éléments de la rémunération globale, et ça se limite aux participants actifs. Moi, je ne vois pas la contrepartie. Est-ce que les promoteurs et les villes pourraient revenir... Donc, c'est assez exclusif comme libellé, et il y a des collègues qui l'ont évoqué ce matin, c'est-à-dire : Est-ce qu'on va devoir, si vous me prêtez l'expression, «rewinder» de 30 ans, de 40 ans, dépoussiérer des concessions qui ont été faites de part et d'autre? Parce qu'on comprend qu'il y a des contreparties qui ont été consenties à des bonifications de régime, là, des congés de cotisation, donc, de la façon dont est libellé l'article 38, là, ça me semble être une invitation à l'arbitrage.

M. Moreau : Si, à ce moment-là, vous dites : Bon, bien, il y a des éléments qu'on ne sera pas capable de déterrer parce qu'on ne veut pas remonter au déluge ou... et à l'arche de Noé, là, est-ce qu'on devrait prévoir de limiter dans le temps l'examen historique des régimes? Et, si oui, quelle serait la limite dans le temps qui serait équitable pour les deux parties, pour les deux parties, autant pour les associations de salariés que pour les municipalités, selon vous?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, je pense qu'effectivement on aurait avantage à préciser en tout cas au niveau de cet article-là, pour être sûr, un, que ça soit le même temps, qu'il y ait une équité aussi qui soit d'un régime par rapport à l'autre. Alors, effectivement, il y a des petites spécifications à ajouter. Il nous semblait un peu vague, puis on avait effectivement l'impression qu'il apportait exactement le contraire, donc, qu'il amenait justement à diriger vers l'arbitrage en disant : Ah! bien là, on a trouvé une ville qui a eu un congé de cotisation pendant x années, alors, hop! on s'assoit dessus puis on va aller chercher quelque chose alors qu'en même temps bien il y avait bonification aussi du régime, alors, oui, il y aurait des précisions peut-être à apporter.

Une voix : Que les règles soient claires, en fait.

M. Moreau : Ce que vous me dites, c'est que, dans sa forme actuelle, du point de vue d'une ville, la rédaction du projet de loi vous fait craindre l'arbitrage. C'est ça que vous me dites?

Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait.

M. Moreau : O.K. C'est curieux, j'ai le même discours de la part des associations. Ça veut dire qu'il y a peut-être un équilibre, là.

Une voix : Non.

Mme Roy (Suzanne) : Il faut préciser, baliser un peu.

M. Moreau : Baliser un peu. L'objectif est véritablement d'inciter à la négociation justement pour aller vers le critère du sur-mesure que nous voulons retrouver et souligner dans la loi.

Écoutez, je pense que ça termine notre bloc. Il nous reste une minute. Je vous remercie beaucoup de votre participation. Je souhaite que nous puissions profiter de vos remarques, et, s'il y en avait d'autres qui ont été suscitées par les questions qui vous ont été posées, n'hésitez pas à les faire parvenir au secrétariat de la commission afin que nous puissions nous en inspirer pour la suite de nos travaux. Merci beaucoup.

Le Président (M. Auger) : Merci. J'invite maintenant le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Bienvenue. Merci d'être là, Mme Roy, vos collègues.

Écoutez, je vous ai écoutés avec attention, et c'est très intéressant. Vous parliez tantôt des outils nécessaires pour assurer la pérennité du régime, en tout cas c'est ce qu'offre, selon vous, le projet de loi n° 3. Moi, j'aimerais vous entendre sur la relation entre l'existence d'un plafond de 18 % et justement la pérennité des régimes. Comment cet outil-là, vous, va vous permettre d'acquérir et d'atteindre la pérennité des régimes? Je voudrais vous entendre là-dessus.

Mme Roy (Suzanne) : Bien, je pense que c'est lié directement avec la capacité de payer des citoyens. Donc, dans certains régimes, on est rendus à près de 30 %, donc, même dans certains cas, ça dépasse le 30 %, donc, de la masse salariale qui est attribué aux régimes de retraite. Donc, quand on parle justement de pérenniser les régimes, c'est lié avec la capacité de payer des citoyens. Alors, en ce sens-là, bien sûr, on peut capitaliser. Un régime à 105 %, s'il est payé à 90 % par les taxes des citoyens, ce n'est pas dur de le capitaliser, on va monter les contributions, la ville va payer encore plus, puis le système va être capitalisé. Alors, je pense que, pour nous, cet élément-là est important. Et d'ailleurs c'est ce qu'on retrouve, hein? On le disait, la grande majorité des citoyens et des citoyennes n'ont pas accès, malheureusement, je dirais, à un régime à prestations déterminées. Donc, d'être obligé de hausser la taxation pour pouvoir compenser et augmenter cette part de la masse salariale, pour nous, c'est un enjeu qui est extrêmement important, d'autant que ça a doublé, au niveau des dépenses municipales, en dedans de quelques années, la contribution à même les taxes des citoyens.

• (14 h 50) •

M. Therrien : D'accord, merci. Si on a 50 %, 50-50, là, pour ce qui va venir, bien ça ne va pas un peu jouer ce rôle-là, en sachant bien que, si, par exemple, les employés décident de bonifier leur régime de retraite pour x raisons, bien ils sont obligés de rajouter et de supporter à 50 % leur niveau de cotisation? Est-ce que ce n'était pas justement un frein à l'éclatement, si on veut, de la responsabilisation des villes à cet égard-là? Pourquoi, d'après vous, on a besoin d'un plafond, malgré le fait que ce soit 50-50, là, pour les cotisants?

Mme Roy (Suzanne) : D'abord, pour nous, le 50-50, c'est d'abord une question d'équité, d'équité, parce que ce sont les taxes des citoyens, donc il nous semble normal que la contribution des employés soit de cet ordre-là. Et le fait de plafonner le pourcentage de la masse salariale qui est attribuée aux régimes de retraite, c'est vraiment, là aussi, une façon de bien contrôler les dépenses. Puis c'est important parce que ce sont des dépenses... Il ne faut pas se leurrer, là, ce sont des dépenses extrêmement importantes, et, à chaque crise, s'il n'y a pas un plafonnement, bien on va revivre ça, on va demander d'injecter de l'argent dans le système pour capitaliser le système puis on va réussir à augmenter toujours la contribution citoyenne, alors, je pense que c'est important, et l'élément du 50-50 et l'élément aussi de limiter le pourcentage qui est attribué aux régimes de retraite à l'intérieur de la rémunération des employés.

M. Therrien : D'accord. Tantôt, vous m'avez intéressé, mais j'aimerais ça vous entendre davantage là-dessus : Quand on parlait du mur-à-mur, le ministre vous a posé la question là-dessus, et vous aviez... vous mentionniez, là, qu'il y avait des choix, qu'on pouvait avoir des choix, là, dans la façon de négocier selon le régime. Moi, quand je regarde le projet de loi, il y a beaucoup de paramètres qui sont préétablis. Moi, je veux savoir, là : Quand vous parlez de choix qu'on peut faire selon le régime, là, à quoi vous vous référez, là, comme possibilités? J'aimerais ça avoir peut-être un exemple ou deux, là, des choix que vous pouvez avoir en tête, là, quand vient le temps de signer des ententes.

M. Rayes (Alain) : L'important pour nous, c'est que les objectifs soient clairs. Donc, l'idée du 50-50 est à la base, vous l'avez souligné, le 18 % maximum de la masse salariale, mais, une fois que cela est entendu, tout est possible dans la discussion en fonction des différents régimes que chaque municipalité a. Est-ce que l'âge à la retraite peut être négocié? Est-ce que la rente peut être négociée? La prestation pour conjoint? Donc, je pense que tout est sur la table et peut se décider conjointement avec la partie syndicale. Donc, je pense qu'il y a de la marge de manoeuvre. L'important, c'est que l'objectif soit clair. Moralement, on pense que 50-50, 18 % de la masse salariale, qui est l'équivalent équitablement avec l'ensemble des citoyens et citoyennes, ce qu'ils ont le droit, on trouve ça extrêmement juste.

Mais maintenant, cela étant dit, chacune des municipalités, en fonction de leurs régimes et de leur situation, pourraient, avec les syndicats, voir à l'intérieur de ça de quelle façon encadrer l'augmentation des coûts qui sont associés. Donc, tout est là sur la table, peut être négocié. Certaines villes l'ont déjà fait à leur façon en contrôlant le partage des coûts de leur côté, donc c'est faisable, et on pense sincèrement qu'on est capables de le négocier avec la partie syndicale.

M. Therrien : D'accord. Négocier sur les déficits passés, est-ce que ça — la question a été posée, j'aimerais vous réentendre là-dessus — ça pose problème chez certains de vos membres, le fait qu'on revienne sur des ententes qui étaient déjà convenues au préalable par les parties impliquées par cette entente-là? Est-ce qu'il n'y a pas un certain malaise?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, vous allez me permettre de revenir sur cette notion de signature d'entente sur laquelle on revient. Bien sûr, il y a eu des ententes au cours des années et il y a eu aussi une évolution, une évolution démographique qui a eu différentes crises au niveau des rendements qui ont fait qu'on a hérité de déficits. On a cru longtemps qu'effectivement il s'agissait d'attendre et que, sur 15 ans, ça se replacerait. Donc, force est de constater que ça n'a pas été le cas. Heureusement, on pense que, pour ce qui est de notre espérance de vie, ça va continuer à augmenter. Donc, oui, bien sûr, il y a eu des ententes signées, mais la situation a évolué.

Alors, quand une situation évolue comme ça et que, bon, on est gestionnaire de fonds publics, on a deux choix, hHein, on peut se fermer les yeux puis dire : Ah! je vais laisser ça au prochain maire, il s'en occupera, lui, du déficit des régimes de retraite ou bien on assume notre responsabilité comme gestionnaires de fonds publics et on fait face à la situation. Alors, bien sûr, il y a eu des ententes signées, mais il y a des éléments qui sont structurels aux régimes de retraite, qui font qu'effectivement ça va amener un poids de plus en plus important pour les citoyens. Donc, comme mairesse, j'ai l'obligation de prendre des décisions, de regarder comment on peut régler ces situations-là et je pense aussi que, du côté syndical... Parce que les jeunes qui vont rentrer aujourd'hui, là, dans nos hôtels de ville, là, bien ils ont envie aussi d'avoir un régime de retraite avec prestations déterminées quand ils vont quitter, et ça aussi, ça fait partie de la responsabilité qu'on a en tant qu'élus, mais, pour ça, bien, il faut travailler et trouver des moyens de faire les choses, même s'il y a eu des ententes signées.

M. Rayes (Alain) : Je voudrais... Je pourrais me permettre de rajouter un autre élément. Lorsque ces négociations-là ont été faites, elles ont été basées sur une législation qui était là, et, dans cette législation-là, il y avait un élément qui était extrêmement important, c'était que tout déficit engendré était assumé à 100 % par la municipalité. Donc, à la base, c'était très difficile d'aller s'asseoir avec les syndiqués pour aller revoir le régime, si, de toute façon, s'il y avait un déficit qui était engendré, c'était la municipalité, donc les contribuables qui allaient l'assumer. Donc, ces négociations-là ont été faites basées sur des éléments que l'on considère inadéquats particulièrement pour tout ce qui touche les déficits — puis on l'a vu en 2008, dans la dernière crise financière — et, si on ne fait rien, nécessairement, à la prochaine crise, on va vivre le même problème. Donc, on ne pourra pas... Même si la bourse va bien présentement, les rendements sont au rendez-vous, le déficit semble vouloir... la situation semble vouloir s'embellir, ce n'est que temporaire. De toute manière, l'histoire nous l'a démontré, puis ça va se reproduire une autre fois.

Donc, c'est clair que le changement de législation va permettre de revoir...et c'est clair, une fois qu'ils vont... les syndiqués vont avoir à payer, ils vont se requestionner eux autres mêmes sur ce qu'ils veulent avoir au niveau de la retraite, donc je pense que les discussions vont être beaucoup plus saines autour de la table par la suite.

M. Therrien : D'accord. J'aurais une dernière question avant de passer le micro à mon collègue. Par rapport à l'indexation, on a vu qu'on pouvait cesser l'indexation selon la volonté de la municipalité. Moi, je vous pose la question à vous puisque vous représentez plein de municipalités, donc vous êtes quand même une banque de données intéressante, là : Est-ce qu'il y en a beaucoup qui veulent se prévaloir de ce droit-là d'éliminer temporairement l'indexation? Et est-ce que ça les dérange d'y aller de façon unilatérale? Dans certains cas, est-ce qu'ils vont consulter avant d'aller enlever cet acquis-là à des retraités? Est-ce qu'il n'y a pas une certaine... Comment je pourrais dire, ils veulent y aller de façon à être respectueux des retraités qui ont ces droits acquis là. Comment... C'est quoi, le son de cloche de vos membres à ce niveau-là?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, en fait, pour ce qui touche les régimes de retraite où il y a indexation... La grande majorité des régimes de retraite municipaux n'ont pas d'indexation, donc ils ne sont pas touchés par ça. Si on parle de 15 %, là, des gens qui ont des régimes de retraite à prestations déterminées qui sont à la retraite actuellement où il y a une indexation... Donc, effectivement, c'est un questionnement important parce que, bien sûr... Et c'est une question, à ce moment-là, qui se pose, d'équité, d'équité intergénérationnelle parce que... Est-ce que ce déficit-là, on va le prendre, on va l'envoyer, on va le donner à 100 % à l'ensemble des citoyens, ce qui était le cas actuellement? Puis là, on le sait, les citoyens n'ont plus cette capacité de payer. On veut protéger la rente. C'est ce qui est fondamental, c'est de protéger la rente. Alors, comment il est possible pour, par exemple, ces gens-là qui bénéficient de la rente avec indexation... Alors, la partie indexation était une solution qui est envisageable pour... Et je veux bien dire que c'est en plus une suspension qui est temporaire, qui peut être liée à la santé financière du régime. Alors, si le régime est en meilleure santé financière, il peut y avoir, à ce moment-là, retour de l'indexation.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauharnois.

M. Leclair : M. le Président, à mon tour de vous saluer, Mme Roy ainsi que vos collègues qui vous accompagnent. Je reviendrai un peu sur cette même question-là, parce que vous dites, dans votre mémoire, qu'il y a l'existence d'un large consensus pour tout ce qu'on parle des fonds... des déficits passés. Mais là on s'entend bien, là, c'est plus les maires que tous les travailleurs municipaux, là, lorsque vous dites... dans ce consensus.

Mme Roy (Suzanne) : Bon, nous, on représente les élus dans les municipalités, alors c'est sûr...

M. Leclair : Les gestionnaires du régime.

Mme Roy (Suzanne) : Bien, nous, nos membres, ce sont les municipalités représentées par leurs élus, donc les maires, les conseillers. C'est sûr que je ne parle pas au nom des centrales syndicales quand j'affirme ça.

M. Leclair : O.K. Puis vous dites aussi, dans votre mémoire, un peu plus loin, que vous êtes aussi en accord avec le processus d'arbitrage. J'aimerais vous poser une question, si ça a été questionné à vos membres. Le ministre se garde le droit de nommer à la fin, là, les arbitres qui vont pouvoir arbitrer s'il n'y a pas d'entente. Qu'est-ce que vous pensez de ça, de donner ... je ne parle pas du ministre en place aujourd'hui, là, mais à n'importe quel ministre futur qui aura le choix de déterminer les prochains arbitrages... décider de l'arbitre alors qu'on semble parler d'équité puis que toutes les deux parties soient bien représentées. Alors, est-ce que vous trouvez que ce processus-là est équitable ou...

• (15 heures) •

M. Rayes (Alain) : À partir du moment que les balises sont claires pour que le ministre nomme qui il veut, il va se baser sur quelque chose. Donc, pour nous, à la base, l'objectif... c'est que les objectifs soient clairs. Donc, si vous avez décidé que c'est 50-50, la négociation devra arriver à ça. Si ultimement les parties patronale et syndicale n'arrivent pas à s'entendre et on veut laisser ça dans les mains d'un juge pour décider quels sont les éléments à l'intérieur du régime qui vont permettre d'atteindre 50-50, je pense qu'il n'y a personne qui va vouloir laisser une tierce personne décider pour nous, ce qui va nous obliger à nous asseoir ensemble. Mais ultimement l'objectif du 50-50, du partage, du 18 %, c'est des chiffres qui sont très clairs. Mathématiquement, on ne pourra pas passer à côté, puis la personne qui aura arbitrairement à décider devra se baser sur quelque chose. Et c'est pour ça que, pour nous, le projet de loi doit être clair et précis, pour éviter cette ambiguïté-là par la tierce personne qui va trancher à la toute fin.

Une voix : C'est bien.

Mme Roy (Suzanne) : En quelque part, d'ailleurs, on disait que plus les objectifs seraient clairs, moins le travail serait difficile au niveau de l'arbitrage.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Écoutez, on parle d'indexation. Les deux collègues qui vous ont précédés insistaient sur le fait que ça serait, à la limite, payant, là, d'enlever temporairement l'indexation, puis ils l'ont bien expliqué. Vu que ça touche seulement 15 % des régimes, ça veut dire qu'à quelque part cette solution-là n'est pas envisageable pour 85 % des régimes.

Alors, moi, la question que je vous pose, c'est : Est-ce qu'il n'y a pas un risque de se trouver avec un déficit, là, chez les retraités, qui va être sur vos épaules davantage et qu'à quelque part... ça dépend de la grosseur du déficit pour les retraités, là, mais que vous allez vous retrouver avec une situation extrêmement pénible à supporter si on n'est pas capables d'avoir l'indexation?

Mme Roy (Suzanne) : C'est clair que là où il n'y a pas indexation, ça se retrouve sur les épaules des citoyens par l'intermédiaire de leurs municipalités, puisque le choix qui a été fait, c'est de dire que cette possibilité-là, la seule possibilité qui existait au niveau des gens qui sont retraités, c'était de dire d'aller sur l'indexation. Et on est complètement d'accord, nous, avec le principe de protéger la rente de base que protège le projet de loi. Je pense que c'est fondamental, sinon, c'est de même mettre en péril les régimes de retraite à prestations déterminées.

Une voix : ...

M. Sévigny (Bernard) : Et, si je peux me permettre aussi, effectivement, il y a 85 % qui ne sont pas indexés. C'est vrai à Sherbrooke, c'est vrai à Sainte-Julie, c'est vrai à Victoriaville, mais il y a un coup de barre à donner. Il y a un coup de barre à donner, un coup de barre que donnent les contribuables à 100 % aujourd'hui. Puis c'est ça, je pense, qui est le fond de l'histoire. On demande... Puis, effectivement, dans ce sens-là, on adhère aux orientations, c'est-à-dire : le coup de barre est à donner par les participants actifs également et, dans la mesure du possible, par les retraités.

À Sherbrooke, elles n'ont jamais été indexées, les rentes. Et je comprends, c'est malheureux quand on est indexés et on perd cette indexation de façon temporaire, ce n'est pas une partie de plaisir, on s'entend là-dessus. Mais, chez nous, personne n'est mort parce que les rentes ne sont pas indexées. Donc, ça se fait... C'est usuel dans plusieurs villes, et ça fait partie des éléments qui ne concernent pas Sherbrooke, ni Sainte-Julie, ni Victoriaville, mais qui permettent... quand on aborde l'ensemble des régimes de retraite dans le monde municipal, bien ça vient donner de l'air à certaines villes.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions. Nous allons continuer avec le député de Blainville, porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

M. Laframboise : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme la présidente, MM. les maires. C'est un plaisir de vous recevoir. J'avais eu la chance, dans un autre Parlement, de recevoir les membres de l'UMQ, et là j'ai encore la chance aussi d'être aujourd'hui ici.

D'abord, notre... mon intervention... Je vais vous questionner, mais je vais avoir un commentaire. Parce que, vous avez raison, M. le maire, quand vous dites : Bon, quand les conditions seront claires, bien là, l'arbitre... Ça, ça veut dire qu'on encadre l'arbitre, là, tu sais? C'est-à-dire que plus on va encadrer l'arbitre, bien, moins on va vouloir aller à l'arbitrage puis plus que la décision... Et c'est sûr que ça irrite l'autre partie, c'est... Vous n'êtes pas surpris que, nous, depuis les tout débuts, ce qu'on dit, c'est que la ville devrait trancher. Ça l'aurait un grand avantage, ça réglerait tous les dossiers si la ville tranchait à la fin. Je comprends, vous avez choisi de respecter... Parce que le cadre clair que vous demandez, quand vous regardez le projet de loi du Parti québécois, je ne suis pas sûr que ce qui était clair pour eux, ça aurait été assez clair pour vous autres. C'est peut-être plus clair avec le nouveau gouvernement, puis je... Ce matin, le maire de Québec nous demandait, encore une fois, d'aller plus loin puis d'encadrer l'arbitre, mais ça a ce problème-là, c'est-à-dire que ça ne règle pas tout, puis parfois, là, à un moment donné, le cadre fait qu'on échappe des choses.

Puis là je vais vous questionner, parce que vous avez demandé à ce que les participants actifs puissent participer à l'effort en contribuant au remboursement du déficit passé. Ça, vous l'avez demandé. Pour les participants actifs, bien, nous, on demande la même chose. Puis vous dites : Qu'ils puissent le faire — ça, c'est dans votre mémoire — si l'état de leur régime le demande.

 Mais, le projet de loi, ce n'est pas ça qu'il dit, lui. Le projet de loi stipule qu'ils doivent le faire qu'importe leur situation. Donc, tu sais? C'est pour ça que je vous dis, là : À clarifier, là, à un moment donné... parce que, évidemment, chez vos membres, vous en avez qui ont des degrés de capitalisation de 90 %, 95 %. Il y en a même qui sont à 100 %, là. Donc, on leur demande, à eux aussi, de faire ça. Vous êtes à l'aise avec ça?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, vous avez bien lu notre mémoire. Notre mémoire dit bien : «...la possibilité que les participants actifs et les retraités puissent contribuer à l'effort de remboursement du déficit passé.» Vous avez bien lu notre mémoire. Effectivement, c'est un assouplissement, je dirais, par rapport au projet de loi tel que présenté. Tout à fait.

M. Rayes (Alain) : Je voudrais juste compléter. Puis ça va avoir un impact direct sur les négociations. Parce que, dans le passé, dans l'ancienne législation, les employés actifs ne pouvaient pas contribuer. Donc, on faisait une ligne avec le régime — bon, vous connaissez la structure — et on repartait.

 Aujourd'hui, si on peut négocier avec les employés actifs, on pose les mêmes changements qu'on a négociés librement avec l'ancienne législation, puis on applique ça, mathématiquement, sur l'ensemble des employés actifs, parce que, dans 85 % des cas, on ne peut pas jouer sur l'indexation pour nos retraités, puis on le concède, cette partie-là. De façon automatique, mathématique, les régimes de retraite vont baisser. À partir du moment que les régimes de retraite vont baisser, la négociation pour payer les déficits passés va être beaucoup plus intéressante à négocier ensemble. Donc, naturellement, on va avoir tous intérêt à trouver des éléments qui vont avoir des impacts comptables pour faire baisser ce déficit-là que nous avons. Et c'est là qu'on croit qu'on aura tous intérêt, autour de la table, de discuter. On est confiants de pouvoir s'asseoir. On ne dit pas que la chaleur va baisser, une fois que le projet de loi sera là, pour aller négocier.

M. Laframboise : ...conscient que, pour cette partie-là, ce n'est pas négociable, là. Vous, ce que vous dites, c'est que ça va vous donner de la souplesse plus tard, dans les prochaines négos, là.

M. Rayes (Alain) : Non, je pense que...

Mme Roy (Suzanne) : À l'intérieur du projet de loi...

M. Rayes (Alain) : ... du projet de loi, on va l'avoir, cette possibilité-là, de discuter avec eux autres, c'est comme ça qu'on le comprend, à moins que je me trompe, là, mais...

M. Laframboise : Par rapport...

Mme Roy (Suzanne) : Disons que notre consensus est moins ferme que le projet de loi.

M. Laframboise : Oui, c'est ce que je comprends, là, O.K.?

Mme Roy (Suzanne) : Voilà.

M. Laframboise : Vous êtes plus souples, mais vous n'osez pas le dire. Vous ne demandez pas de souplesse, là.

Mme Roy (Suzanne) : Non, je dirais «moins ferme».

M. Laframboise : C'est ça. Vous n'avez pas osé. Non, non, je comprends.

M. Rayes (Alain) : Le mot «moins ferme» est peut-être plus adapté.

M. Laframboise : Vous avez beaucoup de témoins dans la salle qui vous surveillent, là.

Mme Roy (Suzanne) : ...populaire, hein?

M. Laframboise : Ça va.

Mme Roy (Suzanne) : Sauf qu'en ayant cette possibilité-là, puis ça, je tiens à le spécifier, parce qu'en ayant cette possibilité-là c'est aussi un poids dans les négociations, parce que tu as la possibilité d'intervenir. Alors, ça, ça te donne aussi un poids dans la négociation.

M. Rayes (Alain) : On pense que, de façon naturelle, ça va se produire, parce que, quand on va s'asseoir après, qui va payer ce déficit-là si on a à le partager 50-50? Est-ce que ça va être les plus anciens? Les plus jeunes? Ceux qui sont au milieu dans leur carrière? De façon naturelle, il y a un équilibre qui va se créer, d'après nous, et on pense qu'avec ça les maires, mairesses, avec leurs comités de retraite vont pouvoir travailler adéquatement.

M. Laframboise : En autant qu'on ajuste le projet de loi, hein? C'est parce qu'évidemment, nous, on en avait déposé un, puis c'était ça, là. Je veux dire, on ciblait ce que vous voulez aujourd'hui, puis c'était... Bon. Chacun a sa façon de le faire, là, nous, on va essayer de travailler dans votre sens.

Vous souhaitez aussi que les municipalités qui ont déjà conclu des ententes avec leurs travailleurs qui permettraient d'atteindre les objectifs de pérennité de santé ne soient pas automatiquement assujetties aux mêmes règles, là.

Mme Roy (Suzanne) : Ce n'est pas tout à fait ça.

M. Laframboise : Non?

Mme Roy (Suzanne) : En fait, ce qu'on dit, c'est qu'il y a déjà des gens, depuis, bon, la dernière crise, en 2008, déjà des groupes qui ont fait des ententes. Donc, il y a déjà eu des ententes pour, par exemple, le présent, le futur, donc une modification de la contribution. Et on dit que, bon, ces ententes-là sont signées, il y a déjà un bout de chemin de fait, qu'on puisse se rendre à la fin de ces ententes-là, mais qu'on commence — nous, on parlait de 18 mois avant, mais un an ou 18 mois, ça va très bien — à discuter pour qu'au terme de cette entente-là, bien, là, on arrive à l'objectif du projet de loi. On s'en tient encore à l'objectif du projet de loi, mais en respectant les ententes ou les cheminements qui ont déjà été enclenchés depuis le 1er janvier 2009.

M. Laframboise : Est-ce que vous avez, avec les délais qui sont dans la loi, là... Ça réussirait à recouper tous vos membres, là, et tous...

Mme Roy (Suzanne) : Pas tout à fait, là. Il y avait... Bon, on en discutait, tout à l'heure, avec le ministre, là, au niveau des dates. On a des ententes qui se terminent jusqu'en 2018, d'après ce qu'on a vu. Donc, on parle de un an ou 18 mois, là, de négociations préalables avant la fin de l'entente.

M. Laframboise : Et ça, si jamais il y avait de quoi, vous pouvez nous les faire parvenir, s'il y avait une date plus... tu sais, une fois que vous aurez fait le tour de vos membres, là. Parce qu'il faut quand même aussi s'assurer d'une équité envers toutes les villes du Québec, là, hein?

M. Rayes (Alain) : Ce qui simplifierait, c'est dire : Jusqu'à la fin des ententes présentes, 18 mois avant, obligation de... Je pense que même la date serait... 18 mois, 12 mois, bon, en fonction de ce qui sera décidé, mais, à partir de ce moment-là, tout le monde est dans le processus.

Mme Roy (Suzanne) : ...

M. Rayes (Alain) : Puis, si on regarde la date qu'on est aujourd'hui, lorsque le projet de loi aura fini son cheminement, on va commencer à discuter, on devrait se rapprocher, mais, ultimement, au bout des ententes, on devra tous respecter la loi.

M. Laframboise : Parfait. Merci. Mon collègue de Beauce-Nord.

Le Président (M. Auger) : Oui, M. le député de Beauce-Nord.

• (15 h 10) •

M. Spénard : Merci. À mon tour de vous souhaiter la bienvenue, l'Union des municipalités. Madame, il y a une petite affaire, moi, qui me chicote un peu. L'indexation comme telle, en ce qui concerne... pour combler le déficit des régimes passé, il y a juste 15 % du monde qui ont des pensions indexées, qui ont des rentes indexées si j'ai bien compris. Sherbrooke, Sainte-Julie et Victoriaville, ce n'est pas indexé.

Qu'allez-vous faire pour régler le déficit des régimes passé? Ça va être des nouveaux... des actifs qui vont le combler?

Mme Roy (Suzanne) : En fait, ce que projette le projet de loi : deux parties. Il y a la partie qui appartient à ceux qui sont déjà retraités; ça, c'est déjà prévu que ça va aux municipalités, donc qu'il y aura un amortissement sur quelques années et c'est les municipalités qui doivent l'absorber à 100 %; et il y a l'autre partie du déficit, hein, parce que le déficit n'est pas tout aux retraités, il y a la partie du déficit qui, lui, appartient aux actifs, où ils devront contribuer au déficit auquel ils participent.

M. Sévigny (Bernard) : Et, si je peux me permettre de compléter, dans notre mémoire, on fait allusion à de nombreuses clauses banquier qui sont déjà dans les régimes et qui nous permettraient... évidemment, le jour où les régimes non seulement sont à flot, mais qu'ils ont répondu aux conditions de la réserve, donc... et pourraient exercer des clauses banquier de façon à résorber également des déficits qui datent... et qui ont été payés par les citoyens en 2004, 2005, 2006.

M. Spénard : O.K. L'autre partie de ma question, parce qu'il y a eu deux de vos membres qui vous ont précédés ce matin, qui ont passé ou qui vont passer des résolutions pour que les élus municipaux soient assujettis aux mêmes règles du 50-50.

En ce qui concerne leur régime de retraite, leur fonds de pension si on veut, est-ce que l'UMQ pense en faire une proposition globale pour l'ensemble de ses maires? Comment voyez-vous ça, vous, que vos membres, avec les...

Mme Roy (Suzanne) : On a un comité de travail qui a été mis en place au niveau de l'Union des municipalités où on travaille, et le régime de retraite fait aussi partie de nos réflexions, évidemment, donc tout comme la rémunération des élus.

M. Spénard : Mais votre...

Le Président (M. Auger) : Il vous reste une trentaine de secondes.

M. Spénard : O.K. Votre comité n'a pas encore déposé son rapport, j'imagine.

Mme Roy (Suzanne) : Non, pas encore. On travaille, actuellement, à ce niveau-là, et on est prêts à travailler avec tous les élus, les élus du Québec aussi, donc sur tout ce qui touche la rémunération et les régimes de retraite.

M. Spénard : O.K. Merci beaucoup.

Le Président (M. Auger) : Bien, merci beaucoup. Donc, merci à l'Union des municipalités du Québec.

Je vais suspendre quelques instants, le temps de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 13)

(Reprise à 15 h 16)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux. Permettez-moi, maintenant, de souhaiter la bienvenue à nos nouveaux invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Vous disposez de 10 minutes. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange. Donc, la parole est à vous.

Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)

M. Cadieux (Serge) : Merci, M. le Président. Je comprends que j'ai droit aux mêmes 10 minutes que tous ceux qui m'ont précédé.

Le Président (M. Auger) : On verra, on verra.

M. Cadieux (Serge) : Et mon nom est Serge Cadieux. Je suis le secrétaire général de la FTQ. Je suis accompagné, à ma droite, de Mme Marie-Josée Naud, qui est responsable du dossier de la retraite et des avantages sociaux à la FTQ; et de M. Colin L'Ériger, du service de recherche de la FTQ.

Bon, évidemment, ce matin, M. le ministre, j'ai vu que vous avez reçu beaucoup des demandes de votre fan-club. À partir de maintenant, bien, on a une divergence de points de vue sur le projet de loi. J'aimerais quand même vous remercier de recevoir la FTQ à cette consultation et vous dire que la FTQ représente environ 35 000 membres qui sont visés par le projet de loi n° 3 de différents syndicats affiliés, soient le SCFP, le Syndicat des métallos, le syndicat des pompiers et le SEPB.

Avant d'entrer dans le vif du sujet et de présenter notre position eu égard du projet de loi n° 3, nous aimerions regarder avec vous le rôle que jouent les régimes complémentaires de retraite dans le système de retraite québécois. Lors de la création des différents régimes publics de retraite, les gouvernements tenaient pour acquis que les employeurs allaient créer et maintenir des régimes de retraite en milieu du travail, et que l'on pouvait donc offrir des régimes publics qui offraient peu de protection. Malgré leur appellation, les régimes complémentaires comme ceux des municipalités constituent donc une partie essentielle du revenu de retraite des travailleurs et des travailleuses.

Ainsi, le projet de loi n° 3 fragilise l'un des piliers les plus importants de notre système de retraite, sans toutefois chercher à renforcer les autres composantes. La démarche du gouvernement ne s'inscrit visiblement pas dans une perspective de pérennisation de notre système de retraite. Ce n'est pas en nivelant par le bas et en introduisant une telle réforme que l'on va améliorer la retraite des citoyens et des citoyennes. Pour la FTQ, les régimes publics doivent jouer un plus grand rôle afin que l'ensemble de la population puisse bénéficier d'une retraite décente. C'est pourquoi, de concert avec une multitude de groupes de la société civile, nous réclamons, depuis déjà quatre ans, la bonification du Régime de rentes du Québec. Il s'agit d'une mesure simple et efficace qui tient compte des nouvelles réalités du marché du travail. De plus, la bonification du Régime de rentes du Québec profiterait principalement aux jeunes, puisqu'elle serait entièrement capitalisée. Une interdiction des disparités de traitement en matière de retraite contribuerait également à une équité intergénérationnelle.

• (15 h 20) •

Pour la FTQ, ce projet de loi constitue une attaque injustifiée envers l'ensemble des travailleurs, des travailleuses et des personnes retraitées du secteur municipal. Le gouvernement a porté toute son attention aux demandes formulées par certains maires, sans tenir compte d'aucune suggestion formulée par les syndicats représentant les salariés du secteur municipal. Après une analyse du projet de loi, nous pouvons affirmer sans l'ombre d'un doute que l'objectif réel du gouvernement n'est pas tant d'assainir la santé financière et d'assurer la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées, mais bien de limiter les coûts pour l'employeur en reniant les promesses faites aux personnes salariées et retraitées. Il s'agit d'un précédent dangereux et inquiétant dans une société de droit. Lorsque le législateur décide, par une loi, de briser rétroactivement des contrats dûment négociés de bonne foi et signés par deux parties, conformément à la règle de droit applicable et ayant la pleine capacité juridique de le faire, soit en l'espèce une municipalité et un syndicat, le gouvernement se place en rupture avec l'État de droit.

J'ai eu l'occasion, cet été, pendant mes vacances, de lire un essai très intéressant écrit par un chargé de cours de la Faculté de droit de l'Université de Montréal, Me Frédéric Bédard, et qui a pour titre La Fin de l'État de droit?, et il parlait du Québec. Dans l'essai, l'auteur définit l'État de droit comme suit, et je cite : «État dans lequel les normes juridiques sont hiérarchisées de telle sorte que sa puissance s'en trouve limitée.» Et il poursuit en écrivant plus précisément : «L'État de droit vise à encadrer et limiter à l'aide d'un ensemble de normes juridiques le pouvoir de l'État. La puissance publique, soit celle d'un État et de ses divers organes est ainsi assujettie au droit. Par conséquent, l'État de droit s'oppose à ce que règne le bon plaisir du prince, soit l'arbitraire pur. L'exercice de la puissance publique en d'autres termes prend sa source à même le droit tout en étant limité et encadré par celui-ci. La violation des règles en question constituerait ni plus ni moins une tricherie, un bris du lien de confiance liant l'État et ses citoyens.»

M. le Président, si le projet de loi avait existé au moment d'écrire son essai, l'auteur aurait sûrement accordé un chapitre à cette loi comme autre exemple de l'effritement de l'État de droit. M. le Président, n'allez pas croire que le concept d'État de droit n'est qu'une préoccupation intellectuelle de juristes. Lors d'un discours devant la Chambre de commerce de Québec, un élu municipal, en 2012, avait déclaré au sujet des régimes de retraite, et je cite : «Les régimes sont des contrats négociés entre un employeur et ses employés. Dans une société de droit, on respecte les contrats. Les employés ont acquis des droits inscrits formellement dans les régimes de retraite, et ces droits doivent être honorés.» Cet élu, M. le Président, est le maire de Québec, M. Régis Labeaume. M. le Président. À la FTQ, nous avons la même opinion que Régis Labeaume sur cette question bien précise.

Nous croyons, à la FTQ, qu'il existe au moins quatre raisons pour amender le projet de loi de façon substantielle : un, parce qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi qui est équilibré; deux, parce qu'il est inéquitable; trois, parce qu'il constitue un précédent dangereux; et, quatre, parce qu'il est fort probablement inconstitutionnel. Le projet de loi impose une solution unique qui bénéficie à une seule partie. Il applique la même médecine de brousse à tous les régimes de retraite municipaux, même ceux qui vont bien. Il s'agit d'un entêtement purement dogmatique qui n'a rien à voir avec l'objectif prévu à l'article 1 du projet de loi, qui est d'assainir la santé financière et d'assurer la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées dans les municipalités, pas d'assainir les finances des municipalités. C'est différent. Ce n'est pas ça qui est prévu dans le projet de loi.

Comment le gouvernement peut-il justifier une telle intrusion mur à mur, aussi brutale dans des régimes de retraite qui ne sont pas en danger? Près de 50 % des régimes de retraite dans les municipalités sont capitalisés à 85 % et plus et ne sont donc pas en danger. Le projet de loi pénalise inutilement ceux qui ont bien géré, qui ont été prévoyants ou qui ont apporté des correctifs depuis 10, 15 ans et qui ont un régime de retraite bien capitalisé. S'il doit y avoir une loi pour forcer la restructuration d'un régime de retraite dans les municipalités, elle doit être limitée aux régimes de retraite en difficulté, soit les régimes de retraite qui ont un taux de capitalisation inférieur à 85 %. C'est d'ailleurs ce que prévoyait le projet de loi n° 79 du gouvernement précédent, et je n'ai pas entendu aucun élu de l'Assemblée nationale, au dépôt du projet de loi n° 79, s'opposer à ce critère-là.

La loi doit aussi interdire, comme c'est le cas actuellement dans la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, de toucher au service passé. Il s'agit de droits acquis. La Cour suprême, dans l'affaire Dayco en 1993, rappelle que normalement un participant s'attend à ce que les droits prévus au régime deviennent acquis et qu'ils le deviennent au moment du départ à la retraite. Quiconque ne peut les modifier à la baisse par la suite. Il en va de la conception même d'un régime de retraite qui oblige un salarié à contribuer à la caisse de retraite et qui, en retour, garantit une rente aux salariés. En somme, la réduction des droits acquis, les rentes des retraités actuelles et les prestations reliées au service passé des participants actifs ne peuvent être qu'une solution négociée. Elle ne peut jamais être imposée. Malgré... Même le comité d'experts, nommé par le gouvernement libéral et présidé par M. D'Amours, limitait la possibilité de toucher au service passé que sur des conditions accessoires et uniquement et strictement suite au consentement des parties, ce qui est en droite ligne avec les décisions rendues par les tribunaux supérieurs, et c'était sa recommandation n° 14.

Pour ce qui est des déficits, le comité d'experts proposait que seuls les déficits pour les services futurs soient partagés entre l'employeur et les participants actifs, le déficit passé demeurant une obligation de l'employeur. C'était la recommandation n° 9.

La FTQ croit que la restructuration des régimes de retraite en difficulté, soit ceux dont le taux de capitalisation est inférieur à 85 %, doit faire l'objet d'une négociation entre les parties afin de restructurer le régime de retraite pour le ramener à un taux de capitalisation acceptable, soit 85 %. Enfin...

Le Président (M. Auger) : M. Cadieux, juste un instant, s'il vous plaît. Est-ce qu'il y a un consentement pour qu'on prolonge le temps?

M. Moreau : Monsieur... Il me fait sourire. Oui, il y a consentement, et je veux que le temps soit pris sur la partie ministérielle, même s'il me dit qu'il n'est pas dans mon fan-club. J'accepte ça.

Le Président (M. Auger) : Vous êtes d'une souplesse, M. le ministre!

M. Moreau : J'ai une souplesse à tous crins.

Le Président (M. Auger) : M. Cadieux.

M. Cadieux (Serge) : Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre. Donc, afin d'en assurer la pérennité. C'est d'ailleurs le rôle des parties de négocier et de trouver les solutions appropriées qui peuvent être différentes d'un régime à l'autre, puisqu'il s'agit, de toute façon, de régimes différents. Et, ce matin, M. Morency a dit : Nous, on vient vous livrer des chiffres, mais vous allez entendre des suggestions, par la suite, des experts en relations de travail. C'est ça, notre business. On est des experts en relations de travail.

Le projet de loi, dans sa forme actuelle, impose aux parties un cadre beaucoup trop rigide qui empêche une véritable négociation. Le législateur choisit, à la place des parties négociantes, les moyens qui doivent être utilisés pour assainir la santé financière et assurer la pérennité des régimes de retraite, et ce, sans aucune nuance d'un régime de retraite à l'autre. En ce sens, ce projet de loi porte atteinte de manière substantielle à la liberté d'association garantie par les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés, de même qu'aux conventions internationales signées par le Canada. Le projet de loi n° 3 empêche la tenue d'une véritable discussion entre l'employeur et les représentants des travailleurs et des travailleuses.

En conclusion, M. le Président, pour la FTQ, s'il doit y avoir une loi d'exception pour les régimes de retraite dans le secteur municipal, les principes suivants doivent s'y retrouver : un, la loi ne doit couvrir que les régimes dont la capitalisation est inférieure à 85 %; deux, la loi doit continuer de protéger les droits acquis des participants actifs et des retraités pour le service passé, comme c'est actuellement le cas, à moins que les parties, par la négociation, acceptent de revoir certaines mesures accessoires du service passé; trois, si le déficit d'un régime doit être partagé par les parties, tout comme le proposait le rapport d'experts, il ne doit s'agir que du déficit pour le service futur; et, quatre, ne pas fixer aucune autre condition aux parties en négociation que celle de rétablir le taux de capitalisation du régime à 85 %, ce qui assure la pérennité du régime de retraite. Si le gouvernement veut trouver une solution équilibrée pour atteindre l'objectif d'assainir la santé financière et d'assurer la pérennité des régimes de retraite PD dans le secteur municipal, et ce, dans un climat serein et respectueux des règles applicables dans un État de droit, les propositions que nous mettons de l'avant dans notre mémoire vont en ce sens. Merci.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons débuter les périodes d'échange. M. le ministre, pour une période d'une durée de 22 minutes.

• (15 h 30) •

M. Moreau : Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Cadieux, Mme Naud, M. L'Ériger. Je répondrai à votre première remarque en disant qu'on n'a pas invité mon fan-club, et d'ailleurs je trouve que la feuille du jour... l'ordre du jour est bien équilibré, puisque ce matin nous avons entendu M. D'Amours, qui avait été mandaté et dont le rapport avait été reçu de façon très favorable par l'ensemble des partis à l'Assemblée nationale, qui a conduit d'ailleurs à de nombreuses réflexions en commission parlementaire. Par la suite, il y a eu les représentants de la ville de Québec, de Montréal, alors deux villes, l'Union des municipalités du Québec. Vous êtes là cet après-midi, la FTQ. Vos collègues de la CSN vont suivre — je ne sais pas s'ils vont me dire qu'ils sont dans mon fan-club — et on a une association de retraités. Alors, il me semble que là, comme au projet de loi n° 3, on retrouve un certain équilibre, et je vous le dis en toute amitié. Et puis je n'ai rien à voir là-dedans, parce que ce n'est pas le ministre qui établit l'ordre du jour, c'est négocié entre les leaders des partis à l'Assemblée nationale.

Alors, ceci étant dit, merci d'être là, d'apporter votre contribution à la discussion et de le faire dans un contexte que j'apprécie beaucoup, c'est-à-dire de le faire d'une façon rationnelle et de nous dire en quoi est-ce qu'on peut avoir des divergences d'opinions. Il y a certains éléments sur lesquels vous avez discuté cet après-midi, notamment sur le caractère légal du projet de loi, sur lesquels on est en désaccord, mais j'entends bien ce que vous me dites, je comprends pourquoi vous le dites. Je ne partage pas cette opinion, mais je suis très ouvert à la recevoir.

Sur la question... Bon, vous dites : Tout le monde devrait avoir... les régimes publics devraient être améliorés. Ça, c'est une chose. C'est un débat qui est beaucoup plus large. Revenons sur ce qui est le prisme du projet de loi n° 3 sur les régimes à prestations déterminées dans le domaine municipal. D'abord, sur la question des déficits passés, quelle est... Moi, la position que je comprends, là, et j'entends... Puis vous êtes probablement... Vous nous dites, et je le conçois, que vous êtes un expert des relations de travail. Il y a eu de nombreuses négociations libres qui ont été tenues au fil des ans, dans les 10, 15 dernières années, alors qu'il existait des déficits passés, et j'ai posé la question à tous les maires qui sont passés — petites, moyennes, grandes municipalités : jamais ces négociations libres là n'ont porté sur l'éléphant dans le milieu de la place, c'est-à-dire le règlement des déficits passés. Ce matin, les maires ont dit : Écoutez, même quand on s'assoit aux tables de négociation, si on veut arriver à une entente, là, on ne peut même pas parler de ça. Je ne dis pas qu'ils ont tort, je ne dis pas qu'ils ont raison. Vous êtes là, c'est votre opinion que je veux avoir. Pour quelle raison est-ce que la libre négociation, jusqu'à maintenant, n'a jamais amené le règlement des déficits passés?

M. Cadieux (Serge) : Vous savez, M. le ministre, la crise de 2008 a affecté tous les régimes de retraite, pas uniquement les régimes du secteur municipal. Nous, à la FTQ, on représente 600 000 travailleurs et on est la principale centrale dans le secteur privé. Vous ne pensez pas qu'à chaque table de négociation la problématique n'était pas adressée. Oui, elle était adressée, et on a réussi à restructurer les régimes de retraite en tenant compte de la législation qui existait, soit celle qu'on n'avait pas le droit de remettre en cause les promesses faites pour le passé, mais on a travaillé pour le futur, ce qui a permis de rétablir des taux de capitalisation à un taux acceptable et de diminuer le coût du service courant.

Moi, ce que je vous dis, là... Je ne vous dis pas, là... On est en train de vous dire que, peut-être, ça va fonctionner. Depuis 2008, on l'a fait dans le secteur privé puis dans des organismes parapublics. Je donne l'exemple de la Commission de la construction du Québec, il y a deux ans, où j'étais là et où on a modifié le régime de retraite, mais pour le service futur, pas pour le service passé. Et il y a une conception erronée de c'est quoi, un droit acquis. Je lis des articles dans des médias, où ils pensent qu'un droit acquis, là... Moi, je rentre dans une municipalité pour travailler; ça fait 15 ans, puis, quand je suis rentré, il est prévu que j'ai le droit à une retraite à l'âge de 55 ans. Ce qu'on propose, nous, c'est qu'on peut le changer, cet âge de retraite là, à partir d'une date x, mais pas une date rétroactive. On peut dire qu'à compter du 1er janvier 2015 la date de retraite va changer de 55 à 60 ans, exemple. Ça, ça veut dire que ça va affecter la capitalisation, ça va même affecter le coût courant du régime. Et moi qui travaille dans une municipalité depuis 15 ans, que je pensais que j'avais le droit de prendre ma rente... ma retraite sans pénalité actuarielle à 55 ans, compte tenu que l'âge est changé pour le futur, je ne pourrai pas la prendre à 55 ans, mais je peux ne pas la prendre à 60. L'actuaire va faire une espèce de calcul des droits que j'ai acquis pour les 15 premières années versus les 15 autres années que je vais travailler, et je vais peut-être pouvoir la prendre à 57 ans et demi sans réduction actuarielle. Ça, ça fait le travail. On peut changer aussi d'autres éléments accessoires dans le régime de retraite, mais sur le service futur.

M. Moreau : M. Cadieux, je vous ramène sur la question des déficits passés. Comment on... D'abord, est-ce qu'on doit régler, à votre opinion, la question des déficits passés? Est-ce que vous pensez qu'on peut constamment continuer à pelleter par en avant l'existence d'un déficit qui, dans le cas des régimes à prestations déterminées du secteur municipal, est à hauteur de 4 milliards de dollars... 3,9 milliards de dollars, quand on sait que les nouvelles tables actuarielles et l'espérance de vie vont avoir un effet qui va venir pas annuler, mais réduire beaucoup le rendement positif des marchés? Est-ce que vous êtes d'opinion que le libre marché va régler ça, alors que ça ne l'a jamais fait dans le passé, alors qu'on a une augmentation du nombre de retraités, avec le poids qu'amènent les clauses d'indexation? La question que je vous pose sur les déficits passés : Ne convenez-vous pas avec moi qu'il faut régler les déficits passés? Oui ou non?

M. Cadieux (Serge) : Par la négociation, oui. Par la négociation, oui, on peut le faire. On l'a fait dans le secteur privé, on peut le faire dans le secteur municipal, mais on ne peut pas l'imposer. À partir du moment où on vous dit, à la FTQ : Si un régime de retraite est capitalisé à 60 % puis que l'obligation, c'est de le ramener à 85 %... Je veux dire, l'obligation de résultat est là. Donc, notre régime, on s'entend-u qu'il va être dans une meilleure santé financière? Si on n'est pas capables de rétablir le 85 % juste sur le service futur, bien, les parties en négociation vont quand même avoir l'obligation de le ramener à 85 %. Donc, ils vont faire des choix.

M. Moreau : Je vais vous concéder une chose : si vous partez de 65 %, vous montez à 85 %, il va être dans une meilleure santé. Ce que M. D'Amours nous dit ce matin, c'est qu'il ne sera pas dans une bonne santé parce que, pour lui, un régime qui est en bonne santé, c'est un régime qui est capitalisé à 100 %. Sinon, l'écart entre le niveau de capitalisation du régime et 100 % constitue un déficit qui est supporté par les contribuables. Alors, ce que je vous dis, c'est : Évidemment, quand on arrive à une capitalisation de 100 %, on a un bon régime. Même, on nous dit : Mais vous devez aussi avoir un fonds de stabilisation. Puis je vous reprends bien amicalement, là, puis je ne vous en veux pas, vous avez dit : Vous n'avez retenu aucune suggestion provenant des représentations syndicales. Le fonds de stabilisation, c'est une idée qui vient des syndicats. Alors, ça, au moins, on l'a repris.

Mais je vous repose la question : Qu'est-ce qu'on fait? Je comprends qu'on peut améliorer la situation; mais améliorer la situation, l'idée, c'est de dire : On veut mettre les régimes à prestations déterminées à l'abri. Ce que les experts nous disent, c'est que, pour qu'ils soient à l'abri, il faut qu'ils soient capitalisés à 100 %. Qu'est-ce qu'on fait avec les déficits passés?

M. Cadieux (Serge) : Je l'ai entendue, l'opinion d'Alban D'Amours. Il n'avait pas dit ça lors de la commission... Il n'avait pas dit ça dans son rapport. Je n'ai pas vu ça dans son rapport, là, qu'il fallait les capitaliser à 100 %. C'est sûr qu'on tend pour s'en aller vers 100 %. La vraie question : Est-ce qu'on doit faire ça «overnight»? Est-ce que ça doit se faire à partir du jour un? Je veux dire, il y a une espèce d'équilibre. Il faut savoir d'où on part, là. Il faut savoir d'où on part puis où est-ce qu'on va atterrir. Donc, il y a une espèce d'équilibre, là, qu'on doit tenir compte. À partir du moment où nous... Puis je vous le dis, quand le gouvernement précédent a déposé son projet de loi, puis l'objectif à l'intérieur de la période de négociation était de l'amener à 85 %, ce n'était pas de l'amener à 85 % ad vitam aeternam. C'est sûr que l'objectif... Je ne viendrai pas vous dire que l'objectif, ce n'est pas d'amener le régime à 100 %. Puis c'est même plus que 100 %, parce qu'on parlait d'un fonds de stabilisation pas de 10 %, de 20 %.

M. Moreau : ...d'accord avec un fonds de stabilisation?

• (15 h 40) •

M. Cadieux (Serge) : Absolument. Je n'irai pas dire que je ne suis pas d'accord avec le fonds de stabilisation, mais je ne suis pas d'accord qu'on vienne limiter le coût du service courant, parce qu'un régime de retraite, dépendamment de sa maturité, ce que ça veut dire... Parce qu'à partir du moment où vous plafonnez le coût du service courant à 18 % ça, ça veut dire, dans la vraie vie, là, 16,36 %, parce que le reste, là, le 10 % que vous proposez, va sur le fonds de stabilisation. Ça veut dire qu'il faut qu'on ait un régime de retraite dont... son coût ne doit pas excéder 16,3 %. On sait qu'il y en a beaucoup qui excèdent ça. Et il peut y avoir deux régimes de retraite identiques qui n'ont pas le même coût du service courant, parce que ça dépend de l'âge, de la maturité du régime. Alors donc, ça, c'est profondément injuste. On ne peut pas annuler d'un coup de trait, là, les régimes de retraite et imposer des cibles sur l'ensemble des dispositions que comprend un régime de retraite. Ça, ça se fait par la négociation.

M. Moreau : M. Cadieux, je vous ramène sur cet élément-là. Ce que j'entends dans votre discours, c'est que vous dites : On ne veut pas le régler d'un trait, on ne veut pas le régler d'un coup sec. J'ai posé la question à tous les maires qui se sont présentés. Donc, est-ce que ce que vous dites, c'est qu'il pourrait y avoir l'introduction d'un délai pour le règlement du déficit passé?

Vous dites deux choses : Un, on est d'accord avec le fonds de stabilisation; deux, on est d'accord avec l'objectif d'atteindre 100 %. Je ne veux pas faire un travail de dentiste, là, puis je ne veux pas vous prendre par surprise. Puis, s'il y a des choses que je vous dis avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord, je sais que vous n'êtes pas très gêné, ce n'est pas dans votre nature, vous allez me corriger. Mais vous êtes d'accord à porter le régime à 100 %, vous êtes d'accord avec le fonds de stabilisation. Est-ce qu'à ce moment-là l'introduction d'un délai pour payer le déficit passé est un élément qui est envisageable pour vous ou si vous dites : Oubliez ça, là, parlez-en même pas, du déficit passé, là, seule la négociation va amener ça? Mais à date, là, ça n'a pas été... l'expérience enseigne que ça n'a pas été... ça ne s'est pas réglé par négociation.

M. Cadieux (Serge) : Un, je répète, ce n'était pas permis par la loi puis...

M. Moreau : Oui, oui, je comprends.

M. Cadieux (Serge) : Non, non, mais, regardez, il faut comprendre quel cadre qu'on avait, là. Il y a des endroits, à des tables de négociation, où on a voulu revoir le service passé, puis on s'est fait taper sur les doigts par la Régie des rentes, disant que ça prenait un consentement individuel de tous les participants. Là, ce qu'on dit, c'est qu'on est d'accord, par la voie de la négociation. À partir du moment où on rétablit le seuil à 85 %, M. le ministre, puis qu'on a un fonds de stabilisation... Mais là, évidemment, il faut laisser de l'espace, là, il ne faut pas plafonner le coût du service courant à 18 %, parce qu'on empêche de faire ces deux éléments-là parallèlement. Mais, à partir du moment où on a ça, on vient d'assurer une plus grande pérennité pour les coûts, les fluctuations de marché qui vont venir dans l'avenir. C'est pour ça, le fonds de stabilisation, O.K.?

Alors donc, ce que je dis : Regardons la situation des régimes de retraite au 31 décembre 2012 versus le 31 décembre 2013. On s'entend-u que le déficit est de plus de 1 milliard de moins qu'il l'était au 31 décembre 2012? Donc, les marchés ont quand même joué. Moi, ce que je vous dis... C'est parce que vous, vous fixez absolument une échéance. Et tantôt il y a quelqu'un qui est venu dire : Évidemment, la solvabilité, dans une municipalité, c'est moins important, parce qu'on sait que les municipalités sont pérennes, elles ne feront pas faillite. Donc, il y a cette dimension-là aussi, là, qu'on doit tenir compte. Donc, ce n'est pas, pour la FTQ, un objectif qu'on doit... un objectif temporel d'arriver au 100 % de capitalisation. On est dans une municipalité, là, on se comprend bien, là. On se comprend bien. Il n'y a pas une cotisation d'exercice qui est versée par la municipalité. Ce n'est pas la même chose que dans le secteur privé, où, là, on est soumis par le test de solvabilité. On doit regarder... Puis d'ailleurs vous avez fait ça, vous l'avez regardé de façon différente. C'est pour ça que vous avez enlevé le test de solvabilité dans les municipalités, dans les universités puis dans certains autres secteurs. Alors donc, il faut travailler avec ce qu'on a. Il y a une situation à améliorer. À la FTQ, on dit : Oui, on est prêts à le faire. On est d'accord avec le processus de négociation. On dit : On est prêts à aller négocier, mais le seul objectif que le législateur doit fixer, c'est d'atteindre le 85 % et de négocier un fonds de stabilisation.

M. Moreau : Là-dessus, là, on a une petite divergence d'opinions. Vous avez un expert qui vient vous dire : Un régime en santé, c'est 100 %. Vous me dites 85 %. Bon. Dans l'intervalle, il y a 3,9 milliards de déficit pour le passé. Si rien n'est fait, qui le paie? C'est les contribuables qui assument ça. Ce que j'essaie de faire avec vous, là, c'est une progression. Vous me dites : On doit tendre vers 100 %; on ne doit pas le faire d'un grand coup sec. Vous dites : Moi, c'est en santé à partir de 85 %. Bon. Pour tendre vers 100 %, ça veut dire que les déficits passés doivent être réglés. Vous me dites : Par négociation, mais on ne fixe aucun terme à cette négociation-là. Alors, dans l'intervalle, c'est les contribuables qui l'assument. Moi, je vous dis : Faites le pas additionnel; dites-moi à l'intérieur de quel délai il est possible d'arriver, par négociation ou autrement, au règlement des déficits passés, parce qu'on ne peut plus continuer à les pelleter par en avant. Puis vous me dites : Bien, on va convenir d'une chose, là, il y a eu une réduction des déficits en raison des performances du marché. Je vous l'ai concédé dans les notes d'ouverture ce matin. Vous allez me concéder une chose, c'est qu'il reste encore 3,9 milliards de chemin à faire et que, si on ne les fait pas, à l'heure actuelle, c'est 100 % des contribuables qui l'assument. Alors, comment on règle cette situation-là? Je sais que ce n'est pas facile, mais je vous pose la question simplement : Est-ce que le fait d'introduire un délai dans les règlements des déficits passés partagés à 50-50 est un élément à considérer?

M. Cadieux (Serge) : Moi, ce que je vous dis : Il y a un élément conjoncturel là-dedans. Il y a un élément conjoncturel que vous ne tenez pas compte. C'est sûr, il y a eu une crise en 2008, les taux d'intérêt... parce que là, évidemment, on joue avec les taux d'intérêt, les taux d'intérêt sont passablement bas. Moi, je n'ai pas de boule de cristal, pas plus que vous, pas plus que vous. Moi, je vous dis : Vous essayez de prendre une très, très grande bouchée qui est déséquilibrée. Il faut savoir d'où on part.

Moi, je dis : Nous partons de la situation présente dans les municipalités. On dit... Vous savez, les règles du jeu, là, de façon générale, là, ça fait partie des conditions de travail, et on négocie dans une convention collective les régimes de retraite, pas d'une façon isolée, on négocie ça dans un ensemble et dans une rémunération globale, globale. Moi, je peux vous dire qu'il y a des municipalités, les régimes de retraite sont assumés 60-40 mais que la masse salariale au prorata du nombre d'employés est moins élevée que celui qui l'assume 50-50, parce qu'ailleurs ils ont consenti de moins bonnes conditions de travail. Donc, je veux dire, là, vous êtes en train de dire : On doit considérer les régimes de retraite comme s'ils étaient désincarnés du reste des conditions de travail. On ne peut pas faire ça. On ne peut pas faire ça.

Donc, moi, je vous dis : On est prêts à faire une exception pour dire... Même s'il y a des conventions collectives qui sont actuellement en vigueur, qui viennent à échéance juste dans deux ans, dans trois ans, on est d'accord pour dire : Si le régime n'est pas capitalisé à 85 % à la dernière évaluation actuarielle, la plus près, on force les parties à négocier. On force les parties à négocier et on les force à atteindre la cible de 85 %, mais on n'a pas à décider pour eux autres que, pour l'atteindre, il faut que ça soit une cotisation de 50-50, il faut que le coût du service courant ne soit pas plus que 16,36 %, qu'il faut obligatoirement qu'il y ait un fonds de stabilisation de 10 %. Écoutez, c'est le rôle... c'est le propre des parties de négocier en fonction de chacun leur réalité. À partir du moment où les municipalités, au Québec, les 170 régimes de retraite qu'on vise vont avoir un taux de capitalisation de 85 %, je peux vous dire, oui, on va regarder la situation conjoncturelle aller. Ça, ça veut dire que l'année prochaine, s'il y a encore un problème énorme à la bourse, bien, les gens vont être obligés de le ramener à 85 %, leur régime de retraite. Donc, il y a des efforts qui vont...

Puis vous savez comment on fait ça? De deux façons. Il y a deux façons, il n'y a pas d'autres moyens, là : en réduisant les droits dans le régime de retraite ou en le finançant plus. Ça prend un équilibre, M. le ministre. J'ai bien entendu les maires ce matin. Vous leur confiez la banque de sang comme si c'étaient des vampires. Vous leur dites : On va... regardez, là, on vient, pour vous autres. Vous n'avez pas été capables, vous autres, de négocier la rémunération globale, là, on va isoler les régimes de retraite de vos conventions collectives puis on va vous les plafonner pour vous autres; toi, ton régime de retraite te coûte 23 %, on vient de te régler un problème de ta masse salariale. Pourtant, son régime de retraite, il est peut-être capitalisé à 115 %. Voyons donc! L'objectif... Si je lis bien, l'objectif de la loi, là, ce n'est pas d'assurer la santé financière des municipalités, là. Moi, je lis : «...en vue d'en assainir la santé financière...

Le Président (M. Auger) : Oui, M. le ministre.

M. Cadieux (Serge) : ...et d'en assurer la pérennité [du régime].»

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

• (15 h 50) •

M. Moreau : M. Cadieux, regardez, je ne veux pas vous interrompre inutilement, là, mais... Vous pouvez me faire le discours; je le comprends. Ce n'est pas ça. Je ne partage pas cette opinion-là. Vous dites : Montez ça à 85 %. Pourquoi est-ce que je ne le montrais pas à une capitalisation de 100 %? Pourquoi est-ce que je ne ferais pas ça? Quand vous dites : Vous capez nos régimes à un coût de 18 %, ce n'est pas exact. On dit : Le point de départ de la négociation, c'est 18 %. D'ailleurs, le maire de Montréal nous dit : Ça devrait être permanent. Je lui ai expliqué qu'il y aurait un effet pervers sur le régime et que donc, à partir de la première négociation, on est à 18 %, mais que par la suite tout ça est soumis à la négociation. Alors, ne dites pas, parce que ce n'est pas exact, qu'on cape à 18 %, puis à 20 % pour les policiers. On part de là, puis après ça on dit : Regardez les concessions dans le contexte d'une négociation. Là, là-dessus, là, on s'entend. Vous voulez négocier. Moi, je vous dis : Négociez. La question que je vous pose, c'est : Pourquoi vous, vous mettez la barre à 85 %, en laissant donc un déficit de 15 %, alors que les experts vous disent : Vous devez monter à 120 %? Si c'est vrai qu'on doit monter à 120 %, alors que le projet de loi vous limite à 110 %, à 85 %, vous avez encore un déficit de 35 %. C'est ça que je vous dis. Pourquoi vous ne voulez pas reconnaître qu'un régime doit être capitalisé à 100 %? S'il arrive un effondrement boursier puis que vous avez des régimes à 65 % puis à 85 %, vous pensez que vous assurez comme ça la pérennité d'un régime de retraite à prestations déterminées?

Le Président (M. Auger) : M. Cadieux, une minute.

M. Cadieux (Serge) : Bon, M. le ministre, je vais vous dire — puis je vais reprendre une expression de Régis Labeaume — moi, je vis dans la vie d'aujourd'hui, là. Et dans la vie d'aujourd'hui, en vertu de la législation actuelle, là, c'est une dette de l'employeur. C'est une dette de l'employeur; c'est ça qui est prévu dans la loi. Et, si je fais un parallèle : moi, je m'achète une maison puis je vais négocier un prêt hypothécaire, puis que l'institution financière me consent une hypothèque à 5 %, puis 10 ans après il va voir le législateur puis il dit : J'ai consenti des hypothèques à 5 %, mais je suis financièrement dans la merde, je peux-tu rétroactivement aller leur charger 10 %? Vous allez dire : Ça n'a pas de sens. C'est un peu ça que je vous dis. Moi, je vous dis : J'essaie d'amener une espèce d'équilibre. J'essaie d'amener une espèce d'équilibre. Je vous dis : Regardez d'où on part, là; actuellement, c'est une dette à 100 % de l'employeur.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. Cadieux. Nous allons poursuivre avec le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je vais souhaiter la bienvenue à M. Cadieux, à Mme Naud et à M. L'Ériger. Bien content que vous soyez parmi nous. Très intéressant.

Écoutez, au départ, les gens qui ont passé avant vous, entre autres, considéraient qu'il y avait de l'espace de négociation. Ils trouvaient que le terrain de jeu, là, était assez large pour qu'ils puissent trouver des ententes. Qu'est-ce que vous avez à leur dire ou à nous dire suite à ces commentaires-là, suite à la... évidemment au projet de loi n° 3, là?

M. Cadieux (Serge) : Bien, ce que j'ai à vous dire... C'est sûr, c'est ça qu'on privilégie, la négociation, mais une négociation... il ne faut pas que le législateur ait choisi toutes les solutions pour les parties. Ça, ce n'est plus de la négociation. Ça, ça ne rencontre pas le test de la libre négociation. Ça, à mon point de vue, juridiquement, c'est clair, hein? Et puis, si je pars du principe, là... Le Code du travail dit : C'est déjà prévu dans le Code du travail. Il y a des maires qui disaient : On ne devrait pas aller à l'arbitrage; ça va inciter une partie à ne pas négocier. Le Code du travail dit que les parties doivent négocier de bonne foi — puis le projet de loi n° 79 le prévoyait aussi, là, soit dit en passant — et il y a une autre disposition, dans le Code du travail, qui dit : On peut négocier tout ce qui n'est pas à l'encontre de l'ordre public.

Alors donc, moi, je dis : À partir du moment où le gouvernement a fixé... Nous, on dit 85 %. On dit ça, nous. On pense que c'est une belle base. Il me semble que le gouvernement devrait être rassuré, à partir du moment où il a fixé une cible puis qu'il dit aux parties : Allez dans vos municipalités, tenez compte des spécificités de votre régime de retraite et amenez-nous, avec la validation de la Régie des rentes du Québec, que vous avez réussi à ramener votre régime à 85 %. Et là je ne suis pas dogmatique, je vous dis : Dans certains cas... et je le sais, dans certains cas, il y a des parties qui vont choisir de revoir du service passé sur des rentes accessoires, pas... c'est sûr, pas sur le crédit de rente, là, mais, sur certains aspects, ils vont choisir de le faire. Il y a d'autres qui vont choisir d'y aller autrement. Puis moi, je pense qu'on est capables de régler la plupart des régimes de retraite sur le service futur. C'est vrai qu'on ne l'aura pas ramenée, toute la... on n'aura pas ramené la capitalisation à 100 %, mais je n'ai jamais vu au Québec, depuis que je m'intéresse aux régimes de retraite, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, tous les régimes de retraite capitalisés à 100 %. Je n'ai jamais vu ça. Alors donc, là, ce qu'on vise, c'est de quoi qui n'a jamais existé dans aucun secteur.

Je dis : Il faut faire attention. Il faut faire attention avec l'appétit qu'on a, là. C'est ça que je dis. Il faut être prudent, il faut savoir d'où on part, où est-ce... Idéalement, où est-ce qu'on veut atterrir, c'est une chose. Où est-ce qu'on peut atterrir dans un équilibre qui assure la stabilité, la paix industrielle, je pense que vous devez tenir ça en compte aussi, il me semble, là. C'est le gros bon sens, ça. C'est ça que je dis.

M. Therrien : Je me posais la question... Je regarde la façon qu'on négocie généralement, puis je ne suis pas un négociateur comme vous, là, mais on a une rémunération globale, puis à partir de ce moment-là, bien, on peut jouer, là, soit au niveau des retraites, des salaires, on peut décider d'avoir un salaire moins élevé puis un salaire en différé à travers la retraite, ainsi de suite. Donc, vous avez un panier de conditions possibles que vous pouvez négocier à travers cette rémunération globale là. Avez-vous l'impression qu'avec un projet de loi aussi rigide, au niveau des paramètres, c'est comme si on sortait le régime de retraite de la rémunération globale puis on faisait en sorte de baisser les chances qu'on puisse s'entendre sur une table de négociation avec le patron ou avec les employeurs?

M. Cadieux (Serge) : Bien, ce n'est pas une impression que j'ai, c'est sûr que c'est ça que le projet de loi fait, là. Il sort littéralement les régimes de retraite du cadre normal de la négociation. C'est une loi d'exception, là, c'est sûr que c'est ça. Je ne sais pas, moi, dans six ans, les municipalités vont venir dire : Ce n'est pas correct, les régimes de retraite... les régimes d'assurance, notre contribution est plus élevée, ça fait que vous devez intervenir. Je veux dire, il faut le voir... ça fait partie de la rémunération globale. Et je vous le dis, là, c'est dogmatique d'avoir... de penser que c'est plus équitable que, tous les régimes de retraite, le coût de la cotisation soit 50-50. Il y a des parties qui ont fait des choix différents, mais en bout de ligne, pour chaque employé, per capita, là, il y a des municipalités qui paient une contribution plus élevée dans le régime de retraite, mais, sur la masse salariale, le coût total leur coûte moins cher. Vous le savez mieux que moi, là. Tu sais, je veux dire, c'est clair, ça.

M. Therrien : J'aurais une dernière petite question avant de passer la parole à ma collègue de Vachon. Vous parlez, là, de la disparité des traitements en matière de retraite pour assurer l'équité intergénérationnelle. Vous parlez de ça dans votre document, mais je trouve que vous en parlez peu. J'aimerais ça vous entendre là-dessus pour justement voir, là, à quel point ça pourrait bonifier le projet de loi n° 3.

M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez... Bien, c'est dans son ensemble, hein? Ça fait longtemps, nous, qu'on parle du problème intergénérationnel, ça fait quatre ans. Puis on est venus ici, dans ce même salon là, parler qu'il fallait bonifier absolument les régimes publics. Puis ça, évidemment, il y a un aspect intergénérationnel. Mais ça ne s'applique pas juste au secteur municipal. Entre autres, on voit... on assiste de plus en plus à des régimes à deux vitesses : un régime à prestations déterminées pour les anciens, puis un régime à cotisation déterminée pour les nouveaux. Ça fait longtemps qu'on sonne l'alarme, là-dessus, des élus. Puis il n'y a pas un empressement à venir interdire, dans la Loi sur les normes, des régimes à deux vitesses. C'est des régimes à deux vitesses, c'est un peu ça. C'est ça qu'on vous dit. Et pourtant, quand je regarde les statistiques des 15 dernières années, la courbe, là, bien, les régimes à prestations déterminées qui étaient là puis les régimes à cotisation déterminée qui étaient là, ça s'en va comme ça, hein? Moi, je pense qu'il y avait urgence d'agir. Les élus n'ont pas agi là-dessus. Puis ça, c'est une mesure pour contrer les problèmes intergénérationnels. Tu sais, ce qui est bon pour pitou est bon pour minou, là.

M. Therrien : Merci.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Bonjour, M. Cadieux et votre équipe. Donc, dans le fond, ce que j'entends de votre part, c'est que vous demandez qu'il y ait des modifications au projet de loi, particulièrement sur les aspects qui ne sont pas directement en lien avec la pérennité des régimes de retraite, parce qu'il y a un volet qui est sur la pérennité des régimes de retraite, mais d'autres volets, par exemple comme ceux que vous avez nommés, sur le 85 %, étant donné qu'effectivement il y a la cotisation qui embarque dans le régime de retraite, mais il y a aussi des rendements, donc, à 85 %, on peut travailler sur des rendements, même si on souhaite toujours atteindre le 100 %, on est moins en état de difficulté que quand on était en 70 % ou 65 %, parce que, on l'a vu, le marché boursier a quand même pas mal fluctué. Il y a eu des années qui ont été tellement bonnes que les gens se sont donné des congés de cotisation, et on a frappé un creux en 2008, qui est quand même assez récent. Donc, ce volet-là, à 85 %... Donc, les régimes au-dessus de 85 % qui sont affectés, ce ne serait pas pour une raison de pérennité.

Et l'autre volet également, qui est le 18 % imposé... Donc, ce 18 % là, encore là, n'agit pas sur la pérennité, mais agit beaucoup plus, dans le fond, pour faire en sorte de baisser les coûts de régime de retraite pour l'employeur, donc, a contrario, baisser les conditions de travail globales de l'employé. Et ce que j'entends de ce que vous me dites, c'est qu'au niveau de l'équité vous dites : L'équité ne doit pas être juste en regardant un régime de retraite à un autre, mais également l'ensemble de la rémunération des employés, parce que c'est un des éléments, et ça n'a pas tous été négociés de la même façon, avec chacun son poids.

Et moi, j'aimerais vous entendre, parce que vous avez ouvert une autre porte pour l'équité, et je crois que c'est important, même si ce n'est pas dans le cadre exact de cette commission-là. Mais, quand vous parlez aussi de l'équité avec les autres régimes de retraite, où on a des régimes de retraite à prestations déterminées, mais aussi des régimes de retraite à cotisation déterminée, et que vous aviez mis sur la table des propositions pour non pas... comme le volet qu'on voit, qui n'est pas lié à la pérennité et qui s'enligne vers un nivellement par le bas, mais plutôt d'essayer de rehausser l'ensemble des conditions, j'aimerais ça, vous entendre sur vos propositions.

• (16 heures) •

M. Cadieux (Serge) : Sur la bonification des régimes publics?

Mme Ouellet : Oui.

M. Cadieux (Serge) : Bon, écoutez, la bonification des régimes publics... On mène une campagne depuis quatre ans puis on a réussi à convaincre sept provinces, hein, ailleurs au Canada, parce qu'il faut bonifier aussi le RPC, puis, au Québec, c'est le RRQ. On les a tellement convaincues que, compte tenu que le gouvernement de M. Harper ne veut pas aller de l'avant, la première ministre libérale de l'Ontario est tellement consciente de l'urgence d'agir qu'elle a décidé de créer une RRO en Ontario pour bonifier la rente à 15 %.

Alors donc, nous, ce qu'on proposait, c'est, graduellement, sur sept ans, d'augmenter la cotisation à la Régie des rentes du Québec de 0,5 %, échelonné sur sept ans. En faisant ça, on augmente la contribution, puis ça, c'est une cotisation 50-50, hein, c'est 50 % l'employeur, 50 % les travailleurs. C'est une cotisation qui est obligatoire, et ça nous permet d'avoir un niveau de rente de 50 % au lieu de 25 %. Et, même avec le 3 % d'augmentation de chaque partie, on était capables d'augmenter le MGA à 68 000 $. Ça, c'est une mesure universelle.

Ce n'est pas corporatiste, ça, là. On ne parle pas pour les syndiqués. Les syndiqués, ils ont des régimes à prestations déterminées. Là, là, on fait la bataille pour les six Québécois sur 10 qui n'en ont pas, de régime de retraite, et on déplore le fait, là, que le gouvernement n'arrive pas avec des mesures pour corriger cette situation-là. Puis ça ne coûte rien, ça, au gouvernement. Puis, en plus de ça, quand on augmente les régimes publics, ça diminue la pression sur les régimes des municipalités, parce que nos régimes sont intégrés. Alors donc, ce qu'on reçoit dans les régimes publics, on ne les reçoit pas dans les régimes municipaux, donc ça améliore la capitalisation, ça baisse le coût du service courant. C'est profitable pour tout le monde.

Mme Ouellet : Merci. Deuxième volet de votre mémoire que j'aimerais aborder, c'est la question de la constitutionnalité des mesures. Vous avez des préoccupations qui semblent importantes. J'aimerais que vous détailliez un petit peu votre préoccupation, tant sur l'aspect de constitutionnalité, mais aussi sur l'aspect de séquence, parce que, s'il y a des décisions qui sont prises, et le temps que la constitutionnalité soit décidée ou non, qu'est-ce qui se passe dans l'entre-deux?

M. Cadieux (Serge) : Bon. Bon, sur l'aspect de la constitutionnalité, vous l'avez vu dans notre mémoire, là, nous, en s'appuyant... Évidemment, les décisions des tribunaux, ça peut toujours évoluer, on s'entend là-dessus. Il y a une décision très récente qui a été rendue concernant Radio-Canada par la Cour d'appel. Je vous invite à l'examiner, hein, c'est une décision importante. Donc, nous, ce qu'on pense... Puis, évidemment, j'ai entendu le ministre dire qu'il avait des avis sur la constitutionnalité du projet de loi. Je ferais juste dire que les gouvernements ont toujours des avis sur la constitutionnalité des projets de loi, mais la Cour suprême vient en invalider aussi, des projets de loi. Ça veut dire que, quand tu t'en vas devant les tribunaux, je veux dire, il y a toujours un risque, O.K.?

Alors donc, en attendant que la Cour suprême rende un jugement, c'est sûr que ça va créer, ça peut créer de l'instabilité. Comment les gestionnaires de caisses de retraite vont se comporter? Parce qu'un coup qu'on a sorti, là... Là, on parle d'un régime de retraite, donc des gens qui vont partir à la retraite en cours de route. Est-ce qu'on avait le droit de modifier leurs droits ou pas? Est-ce que c'est constitutionnel ou pas? On peut sortir le dentifrice du tube, hein, mais le rentrer après ça, ça vient compliquer les affaires.

Moi, je dis juste, là, que, si on est capables, il y a un risque, puis, honnêtement, nous, on pense, de bonne foi, que le projet de loi laisse... vient dicter des règles qui doivent être négociées par les parties. On vient s'ingérer dans le processus de négociation et on vient imposer trop de cibles de façon permanente, pas temporaire, de façon permanente. Et ça, selon nous, ça brime le droit à la libre négociation. Et, le temps que ces contestations-là, judiciaires, vont se faire, bien, c'est sûr qu'il va y avoir de l'instabilité. Je veux dire, ça ne peut pas faire autrement.

Mme Ouellet : As-tu d'autres questions...

Le Président (M. Auger) : Vous avez encore deux minutes à votre disposition.

Mme Ouellet : Oui? Non, bien, je...

Une voix : ...

Mme Ouellet : J'ai peut-être une petite dernière. Vous avez mentionné un petit peu plus tôt que... Vous avez dit que vous étiez ouvert à regarder l'âge de retraite, ce qui avait été fait dans le projet de loi n° 79 qui avait été déposé par la députée de Taschereau, et que vous préfériez grandement voir ce volet-là abordé directement qu'indirectement à travers le 18 %, qui se retrouve à toucher indirectement l'âge de retraite, mais qui touche beaucoup plus large, qui touche aussi, comme on le disait, un petit peu plus tôt, là, une baisse de coûts pour l'employeur, une baisse de conditions de travail. Donc, je voulais juste être certaine d'avoir bien compris ce volet-là.

M. Cadieux (Serge) : Ah! regardez, vous avez parfaitement bien compris. Je vais vous donner un exemple. Un régime de retraite, exemple, d'une société de transport, qui est capitalisé à 115 %, mais que le coût courant du régime de retraite est 20,7 %, en quoi ça va contribuer, ça, à assurer la pérennité du régime que de baisser son coût courant à 18 %? Là, là, cette mesure-là n'est pas du tout en lien avec l'objectif du projet de loi. C'est un objectif qui est détourné. Le seul objectif, là, qu'on atteint, c'est de baisser la masse salariale de la municipalité, et ce n'est pas ça, l'objet du projet de loi.

Nous, on est prêts à danser — ça prend deux pour danser le tango, là — pour régler, pour nous assurer de la pérennité des régimes de retraite; pas pour régler les finances municipales au grand complet, là. Ce n'est pas ça, là, qu'on est conviés de faire, là.

Le Président (M. Auger) : Merci. Nous allons poursuivre avec le deuxième groupe d'opposition, le porte-parole, le député de Blainville.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président, M. Cadieux, madame, monsieur. D'abord, il me fait plaisir que vous soyez parmi nous aujourd'hui. M. Cadieux, moi, j'achète, là... C'est vrai que le fonds de pension fait partie de la rémunération globale; j'achète. Le problème, c'est que les contribuables du Québec ont une épée de Damoclès, qui est le déficit, qu'on a, pour toutes sortes de raisons. On ne s'est pas attaqués à ça, on a pensé que le marché était pour régler ça. Même vous, vous avez tendance à dire que le marché... bon. Je pense qu'on est rendus à l'heure où il faut prendre le taureau par les cornes, il faut le régler.

Vous nous parlez de 85 %, moi, j'ai juste fait un calcul, là, parce que, vous savez, les chiffres de 2013, ce n'est pas officiel, là. Ceux de Statistique Canada, au 31 décembre 2012, la moyenne était environ... entre 81 % et 82 % pour un déficit de 3 940 000 000. Si jamais on allait à 85 %, on fera... tu sais, je veux dire, on n'atteindra... on ne récupérera pas 3 milliards, là, on va récupérer à peu près 750 millions, 800 millions, là, tu sais, si on atteint 85 %, là. Donc, je pense qu'il faut rediscuter de ça.

Moi, là, je... Là, il faudrait que vous ayez une ouverture pour dire : Écoutez, là, 85 %... Tu sais, il faut être capable... Est-ce que 100 %, c'est ça? Vous avez des arguments, mais, à un moment donné, il va falloir s'assurer qu'on règle une fois pour toutes ce déficit-là. Moi, je pense que c'est un des... Le premier consensus, c'est de s'entendre sur le pourcentage.

La deuxième chose, je vous suis sur la négo. Je n'ai aucun problème avec la négo. Le problème d'une négo, c'est qu'il faut que ça se finisse à quelque part. Donc, on met des arbitres. Bon, le PQ avait sa façon d'arbitrer, qui était peut-être plus acceptable pour vous autres. Là, le Parti libéral a son cadre pour les arbitres qui va faire que... puis c'est pour ça que nous, notre position, à la fin, c'est de dire : La ville devrait trancher, ce qui réglerait les cas dans toutes les villes, et peut-être différemment dans chacune des villes. Mais là, ça, vous êtes... en tout cas, je veux vous entendre là-dessus.

M. Cadieux (Serge) : Bien, je vais commencer par votre dernier... ce que vous venez de dire, là. Qu'est-ce que vous penseriez si moi, j'arrivais, comme secrétaire général de la FTQ, là, puis vous suggérer qu'en cas de désaccord au bout du processus de négociation, là, la FTQ va trancher? Vous diriez : Il est tombé sur la tête, lui, complètement. Là, je ne veux pas dire que vous êtes tombé sur la tête, là, n'allez pas prendre ça, là, mais...

Des voix : ...

• (16 h 10) •

M. Cadieux (Serge) : ...mais vous me dites : M. Cadieux, êtes-vous d'accord qu'au bout du processus, si ça ne fonctionne pas, c'est l'employeur qui va décider? Écoutez, je veux dire, ça, c'est une règle de droit. Moi, là, en première année de droit, là, tu sais, j'ai appris ça, là, que ça ne marche pas de même, là. On s'entend, c'est un contrat qu'on négocie, là. C'est un contrat. Ça prend l'accord des deux parties. Et je vous dis : En bout de ligne, si on ne s'entend pas...

Écoutez, là, on fait une grande ouverture, on dit : En bout de... on est d'accord pour jouer dans le carré de sable, là, ou sur la patinoire pendant la durée que le ministre a mentionnée dans son projet de loi. Évidemment, si on va en conciliation, on trouve ça un peu bizarre qu'on soit obligés de payer 50 %, c'est du jamais -u, je n'ai jamais vu ça, là. On veut que les parties négocient, mais on va charger aux syndicats 50 % pour se faire enlever des droits. Tu sais, c'est un peu ordinaire, parce que ce n'est pas un processus ordinaire, là, on ne sera pas capable de le convaincre, lui, qu'il améliore notre régime de retraite, là. On s'en va travailler avec lui pour trouver des solutions pour le diminuer. Je trouve ça ordinaire, un peu, que les syndicats soient obligés de payer pour que leurs membres subissent des diminutions obligatoires, O.K.? Mais, en bout de ligne, pour atterrir en bout de ligne, c'est sûr que ça ne peut pas être la municipalité qui vienne décider. Là, si on s'en va dans une dictature, là, ça ne marche pas, là.

M. Laframboise : Sauf que je ne suis pas tombé sur la tête, là, dans le sens où, bien, quand vous gérez vos employés à la FTQ, monsieur, vous prenez la décision pour vos employés à la FTQ. Les élus municipaux sont élus par la population, à un moment donné, ça... Comme ici, à l'Assemblée nationale, quand il y a un problème, bien, les employés de l'État vont subir la loi qui a été adoptée par l'Assemblée nationale. C'est pour ça que je vous dis que le jour où on a un cadre de loi qui nous dit : On règle un problème bien précis, on le règle, à la fin, ça prend une solution. Donc, quand la négociation ne donne pas de résultat, bon, on y va avec l'arbitre. Est-ce que vous êtes d'accord avec l'arbitrage et la demande du maire Labeaume de ce matin, qui dit qu'il faudrait peut-être resserrer encore le travail de l'arbitre? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

M. Cadieux (Serge) : Non. C'est parce que je comprends le maire Labeaume. Le maire Labeaume, ce qu'il dit : L'arbitre, il faut qu'il tranche sur simple déclaration des parties. Ça vient... un peu, en gros, ça, là. L'arbitre n'a pas à entendre de preuve. Ça, je veux dire, ça ne marche pas, là, parce qu'il veut limiter... il ne veut pas qu'il y ait une preuve des congés de contribution antérieurs puis des sacrifices que les salariés ont faits en disant : Bien, nous, on choisit de ne pas avoir une augmentation de salaire comme la municipalité à côté, mais on souhaite que vous contribuiez dans le régime de retraite à un plus grand niveau.

Puis j'ai de la difficulté à comprendre le maire Labeaume là-dessus, parce que je l'ai entendu dire ce matin : De toute façon, tout ça, c'est de la «bullshit», ce n'est pas vrai, ils n'ont jamais fait de sacrifice sur rien. Ça fait que, s'ils n'ont jamais fait de sacrifice pour rien, bien, les syndicats ne seront pas capables de convaincre l'arbitre de ça, ils ne seront pas capables de faire la preuve de ça. Ça fait qu'il s'inquiète pour rien, le maire Labeaume, là-dessus.

M. Laframboise : Sauf que, le maire, ce qu'il veut, c'est finalement le respect de la capacité de payer de ses citoyens, puis moi, je ne peux pas être en désaccord avec ça, là. Tu sais, vous, vous pouvez décider qu'à quelque part une augmentation de taxes à Québec serait peut-être raisonnable pour payer, bon, bien là, on... peut-être qu'on est...

M. Cadieux (Serge) : Non, mais, M. le député, si j'ai bien lu dans le projet de loi, l'arbitre va devoir tenir compte de ça aussi, ce que vous dites, la capacité de payer. Je veux dire, tu sais, à un moment donné, là, je comprends que la tour de Pise, ils aiment ça que ça penche, mais là elle est après tomber.

M. Laframboise : Vous êtes à l'aise avec tout le contenu de ce qui est soumis à l'arbitre dans le projet de loi tel qu'il est là, là. C'est ce que j'entends, là?

M. Cadieux (Serge) : Moi, là, vous avez vu, dans notre projet de loi, nous, on aimait mieux... Ce qu'on dit sur l'arbitrage, on aimait mieux que ça soit la Commission des relations de travail, sauf pour les pompiers, policiers, parce qu'ils ont déjà ce système-là. Et ce qu'on critique, c'est qu'il faut payer. Voyons donc! On va payer pour aller faire diminuer des droits.

Parce que, n'oubliez pas, c'est une loi d'exception. Là, on n'est pas dans le cadre d'un grief traditionnel où les parties ont choisi d'aller à l'arbitrage, où généralement c'est payé 50-50. En conciliation, je n'ai jamais vu ça de ma vie, là. C'est vrai que je suis jeune, ça fait juste 35 ans que je suis dans le milieu, mais je n'ai jamais vu ça.

C'est généralement un service proposé par l'État parce que ça permet de ne pas judiciariser, mais d'atteindre une certaine paix industrielle. Donc, il me semble que ça, ça devrait être modifié dans le projet de loi. Ça, à mon point de vue, c'est le minimum, là, qu'on ne devrait pas avoir à payer pour aller devant le tribunal.

M. Laframboise : Et par rapport au mur-à-mur, parce que, là, vous avez écouté le ministre, là, qui nous a dit que le projet de loi pouvait permettre la latitude requise, là, puis que ce n'était pas du mur-à-mur. Qu'est-ce que vous en pensez, vous, là?

M. Cadieux (Serge) : Non, je l'ai entendu, mais je ne partage pas son point de vue. C'est sûr que je l'ai entendu, mais, écoutez, je pense que, c'est ça, à partir du moment où il y a trop de cibles qu'on doit obligatoirement atteindre et modifier, on laisse peu de latitude aux parties. Moi, je dis : Si on veut assurer la pérennité d'un régime de retraite, fixons un objectif. Nous, on propose 85 %. Est-ce que c'est 80 %, est-ce que c'est 90 %? Fixons-le, laissons les parties aller négocier en leur donnant l'obligation de revenir avec un régime «designé», où la Régie des rentes va pouvoir confirmer par des études actuarielles : ces modifications-là font le travail, le régime est rendu capitalisé à 85 %, ce qui était l'ancien projet de loi du gouvernement précédent. C'était ça, là, puis je n'ai pas vu personne déchirer sa chemise là-dessus.

M. Laframboise : O.K. Il faut comprendre qu'il a été déposé juste avant... Il n'y a pas eu d'étude en commission parlementaire, je pense, hein? Non, il n'avait pas... Vas-y, André. Le député de Beauce-Nord.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Beauce-Nord, vous avez à peu près 1 min 30 s.

M. Spénard : 1 min 30 s. Ah, seigneur! Il n'y aura pas grand question là, mais bienvenue, M. Cadieux. Vous êtes un excellent négociateur, M. Cadieux, je dois vous dire que la FTQ a toujours passé pour une excellente unité de négociation, et vous refusez le projet de loi pour quatre principes. J'en ai retenu trois : inéquitable, inconstitutionnel et constitue un précédent.

Là, je me suis mis à penser à ça, le précédent pour un syndicat, c'est pratiquement inacceptable. Par contre, ce que je peux vous dire, c'est que je ne vous ai jamais entendu parler du contribuable qui payait en bout de ligne. Vous parlez de l'employeur. L'employeur, c'est la municipalité. Vous dites : L'employeur, l'employeur... Mais, l'employeur, là, c'est mes taxes sur ma maison, là, tu sais. Je regrette infiniment, mais l'employeur, ce sont les contribuables. Et nous, nous sommes ici pour protéger les contribuables et non vos membres. Ça, il faut que vous le sachiez.

Puis, à un moment donné, si on a été élus, et si M. Labeaume, que vous ne semblez pas aimer, a été élu par 70 % de la population, et si M. Coderre a été élu par 70 % de la population, puis qu'ils nous demandent — par peut-être 40 % de la population — le projet de loi, à un moment donné, il va falloir répondre.

Vous dites aussi que : Écoutez, là, on sabre dans les conditions. Mais n'oubliez pas que les employés municipaux, et ça, c'est prouvé : 37 % de plus, au point de vue de masse salariale, qu'un employé équivalent au gouvernement du Québec, dans le régime public. Là, vous êtes des excellents négociateurs. Par contre, nous, on doit penser aux contribuables, et ça, je pense que la conscience sociale de la FTQ en ce qui concerne ses non-membres, mais l'ensemble de la population, je pense que vous passez carrément à côté de l'objectif.

Je me demande... Je vous écoutais parler puis je me dis : Mais, voyons, il me semble que la FTQ avec le fonds SOLIDE... le Fonds de solidarité, ils ont une conscience sociale qui est un peu plus grande que ça. Vous ne semblez pas l'avoir du tout. Pour vous, le contribuable, c'est un employeur, c'est l'employeur...

Le Président (M. Auger) : Merci. Merci beaucoup, M. le député.

M. Spénard : C'est qui qui paie, par rapport à l'employeur? On s'en balance. En tout cas, moi, c'est ce que...

Le Président (M. Auger) : M. le député, merci beaucoup.

M. Spénard : Je n'ai pas de question. Je termine.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup.

M. Spénard : Ma minute et demie est finie, là...

Le Président (M. Auger) : C'était très, très intéressant.

M. Spénard : ...mais j'en aurais, j'en aurais pour 10 minutes, là, tu sais...

Le Président (M. Auger) : C'était très intéressant. Donc, je vous remercie pour votre présentation. Nous allons prendre une pause.

Nous allons suspendre les travaux une courte période pour laisser à l'autre groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 18)

(Reprise à 16 h 24)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à notre nouveau groupe d'invités. Pour les fins d'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre présentation. Par la suite, nous allons procéder à une période d'échange. La parole est à vous.

Association du personnel retraité
de la ville de Québec (APRVQ)

M. Verreault (Gaston) : Merci, M. le Président. Alors, je suis accompagné, à ma gauche, de M. Michel Raymond, vice-président de l'Association du personnel retraité de la ville de Québec, et, à ma droite, Sylvie Vaillancourt, secrétaire de l'association.

Mmes et MM. les députés, M. le ministre, d'entrée de jeu, je voudrais vous dire que vous allez sans doute entendre des choses que vous avez déjà entendues ou que vous avez déjà lues. Ce n'est pas parce qu'on radote, c'est parce qu'on a de la mémoire.

Notre mission, à l'association, qui a été créée en juin 2014, qui est relativement jeune comme association, association qui a été fondée par l'inquiétude qu'a suscitée le projet de loi n° 79 et par la grande inquiétude suscitée par le projet de loi n° 3, donc notre mission est de représenter les droits et les intérêts des 4 000 retraités et bénéficiaires des régimes de retraite de la ville de Québec. Notre association est représentative de toutes les catégories d'emplois à la ville de Québec : les employés manuels, les fonctionnaires, les professionnels, les cadres, les policiers et les pompiers. Nous aurions aimé que la commission invite beaucoup plus d'associations de retraités du secteur municipal. Nous sommes privilégiés, je présume : nous sommes les seuls à participer à la commission, la seule association de retraités du secteur municipal.

Sans parler pour les autres, nous espérons pouvoir vous livrer des arguments convaincants mais constructifs pour améliorer votre projet de loi. C'est notre manière à nous de faire valoir notre point de vue. Nous pouvons résumer notre pensée en trois citations, que je souhaite rapporter d'entrée de jeu. Me Jean-Étienne-Marie Portalis, avocat juriste et l'un des rédacteurs du Code civil français, disait ceci : «L'office de la loi est de régler l'avenir; le passé n'est plus en son pouvoir. Partout où la rétroactivité serait admise, non seulement la sûreté n'existerait plus, mais son ombre même. Que deviendrait donc la liberté civile, si le citoyen pouvait craindre qu'après coup il serait exposé au danger d'être recherché dans ses actions — et je mets de l'emphase — ou troublé dans ses droits acquis, par une loi postérieure?»

Je souhaite également vous rappeler les propos du maire de Québec, M. Régis Labeaume, qui déclarait en 2012, dans ses discours devant les chambres de commerce à propos des régimes de retraite... D'autres qui nous ont précédés l'ont mentionné. Il mentionnait, entre autres : «Que [faire] maintenant? Je vais commencer par dire ce qu'on ne fera pas. D'abord, on ne changera pas rétroactivement les régimes de retraite. Ces régimes sont des contrats négociés entre un employeur et ses employés. Dans une société de droit, on respecte les contrats. Les employés ont acquis des droits inscrits formellement dans les régimes de retraite, et ces droits doivent être honorés.»

Il semble, de l'avoir entendu ce matin, qu'il semble renier ses engagements. Pourtant, il a bel et bien mentionné qu'il avait été élu avec une majorité très forte, et, dans sa campagne électorale, il a parlé des régimes de retraite et des conditions de travail, et, à l'intérieur de ça, il y avait l'engagement de ne pas toucher au passé. Donc, je présume qu'il devrait vous rappeler pour dire qu'il maintient sa déclaration.

Je souhaite enfin citer, M. le ministre, vous-même, qui disiez, au mois de juin dernier, et je vous cite : «La protection des retraités a toujours prévalu et serait maintenue, car nous avons à coeur de maintenir leur niveau de vie à la retraite.» Vous avez constaté, à la lecture de notre mémoire que vous avez déjà reçu, que nous avons une connaissance approfondie de l'historique des régimes de retraite de la ville de Québec et de leur situation financière réelle. Nos sources sont fiables, nos sources proviennent des documents officiels de la ville, et nos calculs sont basés sur ces documents.

• (16 h 30) •

Maintenant, allons immédiatement au coeur du problème. Le projet de loi n° 3 comprend, dans ses articles 8, 9 et 13, des dispositions qui pourraient permettre à la ville de Québec de suspendre arbitrairement l'indexation des rentes des retraités. Notre principale recommandation est de retirer la suspension de l'indexation du projet de loi. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons. Les personnes retraitées de la ville de Québec ont toujours eu à coeur de faire leur travail dans l'intérêt du public, avec toute la fierté que comporte le fait de travailler pour une grande institution telle la ville de Québec. Or, il est indéniable que l'intervention du législateur aura pour conséquence directe d'accentuer l'incertitude et la méfiance des employés et des retraités à l'égard des ententes actuelles et futures, même si elles ont été signées de bonne foi. Plus précisément, le projet de loi mine profondément la confiance de la partie qui subit, participants actifs, retraités et bénéficiaires dans le cas qui nous préoccupe, tant à l'égard des ententes en vigueur qu'à celles à venir. Il en va de la crédibilité de tout le système des négociations dans les différents milieux de travail de même que de la probité de l'institution municipale et de ses dirigeants. Rappelons, dans l'affaire Dayco, ce que disait la Cour suprême dans sa décision : «Tant qu'un employé continue d'appartenir à une unité de négociation, il est nécessairement soumis aux vicissitudes du processus de la négociation[...]. Toutefois, à la retraite, le travailleur sort de cette relation et, à ce moment-là, les droits qu'il a accumulés à titre d'employé se cristallisent sous une forme quelconque de droits "acquis" dont il bénéficie en qualité de retraité.»

Comme le disait le maire de Québec lui-même, dans une société de droit, on respecte les contrats. C'est la base de tout notre système juridique et social. Il faut rappeler que nous ne demandons pas la charité. Nous avons payé pour l'indexation. Nous nous sommes privés de notre salaire et d'autres avantages pour avoir cette indexation. M. le maire Labeaume, ce matin, prétend le contraire, mais on a l'avantage d'être plus vieux que lui, on a l'avantage d'être à la retraite et on a l'avantage d'avoir une grande mémoire. Je peux vous dire, pour avoir été président du syndicat des fonctionnaires pendant 12 ans et vice-président pendant 10 ans, qu'effectivement, lors des négociations, nous avons fait des concessions à différents niveaux pour ne pas toucher au régime de retraite que nous avons.

Ceci nous amène à la notion essentielle de la rémunération globale. Les différentes ententes convenues avec les organisations de travailleurs incluent en effet tous les aspects de la rémunération globale, incluant l'indexation des rentes. Prenons, entre autres exemples récents, dans le cas de l'entente visant les professionnels de la ville de Québec où les travailleurs se sont privés d'avantages en salaire et ont concrètement cotisé davantage pour obtenir une rente indexée. Il en a été de même pour les fonctionnaires au cours des années 1980. Ils ont accepté d'augmenter leurs cotisations salariales pour se payer une indexation. Il faut aussi rappeler que personne ne va s'enrichir avec l'indexation; cela ne fait que maintenir notre pouvoir d'achat. Suspendre l'indexation pourrait faire baisser la rente des retraités de 30 % sur 15 ans, ce qui peut équivaloir à une perte de pouvoir d'achat de 65 000 $ à 80 000 $ par individu. Permettez-moi ici de réagir aux propos de M. le maire ce matin. M. le maire semble dire que ne pas être indexé 1,25 %, 2 % pendant deux, trois ans, ce n'est pas si pire que ça, mais, collectivement, c'est une somme énorme. En 2014, l'ensemble des retraités bénéficiaires de la ville de Québec qui ont une indexation, les régimes ont versé 722 000 $ en indexation. C'est toute une somme, d'après M. le maire. Pourtant, c'est un actif des régimes de retraite de 1,8 milliard, peut-être, au moment où on se parle, on est rendu à 1,9 milliard.

Nous avons aussi, dans notre mémoire, des données inédites concernant le poids relatif des régimes de retraite sur les finances de la ville de Québec. M. Raymond, qui m'accompagne, qui est également évaluateur agréé et à la retraite, a particulièrement travaillé sur ces données, et nous les avons analysées attentivement. Selon nous, tout le débat est né de la croisade du maire de Québec lui-même. Le mandat que le gouvernement libéral de l'époque avait confié au comité d'experts présidé par M. D'Amours avait comme objectif d'examiner l'ensemble du système de retraite québécois. Expliquez-moi pourquoi aujourd'hui nous sommes ici à ne parler que des régimes de retraite du secteur municipal. À ma connaissance, il y a d'autres régimes à prestations déterminées qui ne font pas l'objet de discussions alarmistes — je le dis, alarmistes — dans les médias. En juin dernier, le maire de Québec a annoncé que, selon lui, le déficit des régimes de retraite de la ville de Québec serait de 620 millions. Ce matin, il a parlé de 600 millions.

Le Président (M. Auger) : Juste un instant, s'il vous plaît. J'ai besoin d'un consentement pour que vous puissiez avoir du temps supplémentaire. Est-ce qu'il y a un consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Auger) : Consentement. Et le temps?

M. Moreau : Sur la partie ministérielle.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le ministre. M. Verreault.

M. Verreault (Gaston) : Merci beaucoup. Je vais essayer d'accélérer, M. le Président.

Alors, nous croyons que le chiffre du maire est exagéré et nous allons expliquer pourquoi. Dans nos recherches pour préparer notre mémoire dont vous avez copie, qui est beaucoup plus étoffé que qu'est-ce que je vous dis aujourd'hui, avec beaucoup plus de données, nous avons relevé l'existence d'écarts positifs de trésorerie et d'une réserve financière qui totalisent, au 31 décembre 2013, 177 millions. Donc, les citoyens de la ville de Québec ont été taxés au cours des dernières années, ont versé à la ville pour les régimes de retraite 177 millions, au 31 décembre 2013, que la ville n'a pas versés dans les régimes de retraite. Au moment où on se parle, c'est rendu à 200 millions, dont 100 millions est dans l'encaisse de la ville de Québec, et il ne rapporte aucun intérêt. Je vous donne comme exemple, si ce 100 millions avait été placé dans les régimes de retraite au début de l'année 2013, le rendement des régimes a été de 13,8 %, on aurait 13,8 millions de plus dans les régimes de retraite. Mais M. le maire ne l'a pas mentionné ce matin. Il a tout fait pour ne pas répondre à une question du député de Sanguinet. Selon les prévisions de la ville, dans environ 15 ans, la valeur totale de la réserve pour le déficit de l'ex-ville de Québec, l'argent taxé que la ville met dans cette réserve plutôt que de le verser dans les régimes, va atteindre 640 millions. Ça, le maire ne nous l'a jamais dit, mais nous, nous vous le disons.

Le déficit ajusté des régimes de retraite de la ville de Québec, qui s'évalue donc à 424 millions si on prend le 601 millions — le chiffre que le maire a avancé de 600, le chiffre, c'est 601 — moins la réserve pour le déficit de l'ex-ville de Québec, c'est-à-dire qui n'est pas versé dans les régimes de retraite, moins les excédents de trésorerie à des fins des régimes de retraite qui ne sont pas versés dans les régimes de retraite, le déficit est de 424 millions. Le poids relatif des régimes de retraite est influencé à la baisse par cet ajustement. En effet, l'ajustement en question fait diminuer le ratio du déficit de capitalisation des régimes sur la capacité fiscale de la ville de Québec de 0,96 % à 0,68 %. C'est à la page 21 de notre mémoire.

Nous avons aussi beaucoup entendu le maire parler de la situation financière de la ville. Or, cette situation est très intéressante pour les contribuables. Toujours en page 21 de notre mémoire, entre 2001 et 2011, le ratio d'endettement de la ville, sa dette par rapport à la richesse foncière a diminué de 4,4 % à 3,6 %. À la page 19 de notre mémoire toujours, nous avions vu qu'entre 2001 et 2014 le fardeau fiscal municipal moyen assumé par les citoyens détenant un immeuble unifamilial a diminué de 4,6 % à 3,3 %. Par ailleurs, le coût de l'indexation des rentes des personnes à la retraite, même s'il a un impact grave pour les personnes retraitées, est très faible sur le plan collectif. L'indexation des rentes représente, pour les régimes, moins de 1 million par année, alors que les prestations annuelles sont de 110 millions par année. On voit ici que les retraités bénéficiaires sont un apport économique important pour la région de Québec, principalement la ville de Québec, puisque les six régimes de retraite versent 110 millions de rentes et de prestations. En résumé, pendant que le maire de Québec tient un discours alarmiste sur le déficit de nos régimes de retraite, les finances de la ville s'améliorent, et les citoyens paient de moins en moins de taxes sur la base de la capacité fiscale.

Vous verrez aussi, dans les documents qui vous ont été remis, que la suspension de l'indexation des retraités ne faisait pas partie des demandes de la ville de Québec en 2012 dans le cadre de ses négociations avec les employés syndiqués. La raison est bien simple : suspendre l'indexation n'est pas nécessaire pour assurer la pérennité des régimes de retraite. Les documents budgétaires de la ville le confirment, et le maire l'a également confirmé dans ses discours en 2012. Le projet de loi comporte aussi un bon nombre d'effets pervers que nous croyons que le gouvernement n'a pas prévus. Les six nouveaux régimes de retraite de la ville de Québec, en tenant compte des formules d'indexation prévues dans les quinze anciens régimes de retraite à prestations déterminées, comportent plus de 20 formules d'indexation différentes...

Le Président (M. Auger) : M. Verreault, en terminant. Je veux être équitable avec les autres groupes qui vous ont précédé, donc j'aimerais qu'on puisse...

• (16 h 40) •

M. Verreault (Gaston) : Oui. Alors, je dirais que l'indexation, M. le Président, est un principe reconnu depuis de nombreuses années. Les rentes et prestations payées par la Régie des rentes sont indexées. La rente payée par la pension de sécurité de vieillesse est indexée. Les indemnités payées par la CSST sont indexées. Les indemnités payées par le régime d'assurance automobile sont indexées. Non seulement le gouvernement croit à l'indexation pour assurer le niveau de vie des citoyens, mais le conseil municipal de la ville de Québec, en 2009, a adopté un règlement municipal dans lequel il est clairement écrit que les rémunérations des élus municipaux de la ville de Québec sont indexées automatiquement, à chaque année, de la pleine indexation calculée sur l'IPC Canada.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. Verreault. Merci. Nous allons procéder à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Moreau : Merci beaucoup, M. le Président. M. Verreault, M. Raymond, Mme Vaillancourt, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci de contribuer à nos travaux.

D'entrée de jeu, M. Verreault, je vous dirais, je faisais... je jetais un regard à l'opposition officielle quand vous disiez que vous étiez le seul groupe de retraités. Il y en aura d'autres, là, on n'a pas essayé d'exclure des groupes de retraités. Puis, je vous dis sincèrement, les membres de la commission, là-dessus, s'en remettent aux discussions qui existent entre les leaders de chacun des partis représentés à l'Assemblée nationale pour déterminer les groupes et l'ordre dans lequel ces groupes sont entendus. Mais je vous dis tout de suite qu'en regardant les horaires d'audition pour cette semaine, jeudi, nous entendrons l'Association québécoise des retraité-e-s des secteurs public et parapublic et, mardi le 26, nous entendrons l'association québécoise de défense des personnes retraitées et préretraitées, qui ont, je pense... qui amènent avec leur mémoire les préoccupations, là, que vous reprenez dans le vôtre.

Alors, je veux vous rassurer et je pense que, ce matin, le député de Blainville disait : Il y a des parties qui ne seront pas entendues, mais qui ont envoyé des mémoires. Moi, je vous assure que l'ensemble des mémoires reçus va être pris en considération, même si les partis ne sont pas entendus. Alors, ça, il faut être clair là-dessus, là, il n'y a pas d'exclus, on essaie d'entendre tout le monde.

M. Verreault (Gaston) : ...important, M. le Président...

M. Moreau : Oui, oui, oui, allez-y.

M. Verreault (Gaston) : M. le ministre, vous avez peut-être mal compris, je n'ai peut-être pas parlé assez fort, j'ai parlé d'associations du personnel de retraités du secteur municipal. Je comprends et j'ai vu l'horaire de la commission, effectivement, il y a d'autres associations de retraités, mais ils ne représentent pas nécessairement des retraités du secteur municipal.

M. Moreau : Je leur passe le message et je vous demande de leur passer le message, s'ils ont des commentaires à formuler ou des mémoires à fournir à la commission, on sera heureux de les recevoir. Il ne s'agit pas ici de museler qui que ce soit, puis je pense que je parle au nom de tous les membres de la commission, si on a des informations qui nous sont données par d'autres associations de retraités du secteur municipal, on sera très heureux de les prendre en considération et de les examiner.

Vous avez cité le maire Labeaume, il sera responsable de ses déclarations. Vous m'avez cité, je suis responsable de mes déclarations, et, lorsque je dis que nous avions l'intention d'amener une protection des retraités, je vous signale que le projet de loi n° 3 amène une protection des rentes des retraités, et c'est, je pense, la première fois, dans une loi, où on assure que, même dans un contexte de restructuration, les rentes de base des retraités ne seront pas touchées.

Vous avez entendu également les représentations à l'effet qu'il n'y a que 15 % des régimes qui comportent des clauses d'indexation ou plans d'indexation qui seraient soumis à la suspension temporaire. Et donc, dans 85 % des régimes, le projet de loi n° 3 à l'égard des retraités n'a aucune incidence, quelle qu'elle soit.

Sur la suspension, pour ceux qui risquent d'être touchés, il s'agit d'une suspension temporaire, et ce matin, à l'occasion du témoignage du maire de Québec, on voyait que, dans les éléments les plus concrets, cette suspension-là risque, pour certains cas, d'être d'une durée de trois ans, dans d'autres, d'une durée de six ans, selon la santé financière du régime.

Quand on regarde les chiffres sur l'importance de l'indexation dans le coût... c'est-à-dire dans les déficits des régimes de retraite, on voit qu'il y a une incidence qui est extrêmement importante. Par exemple, dans le cas de la ville de Québec, l'indexation des six régimes de la ville vaut 289 millions, dont 59 % est attribuable aux retraités. Moi, l'idée de l'entretien que je veux avoir avec vous, ce n'est pas de vous ostraciser, d'aucune façon, mais c'est de vous dire : Comment réconciliez-vous le fait que, lorsque le gouvernement demande aux participants actifs de faire un effort, lorsque le gouvernement demande aux municipalités et, à travers elles, aux contribuables, de faire un effort, comment réconciliez-vous le fait que nous puissions entrevoir de ne demander aucun effort de la part des retraités qui voient leur régime automatiquement indexé, alors qu'une part de cette indexation est génératrice d'un coût pour le régime? Et comment vous réconciliez ça avec l'équité intergénérationnelle? Simplement dit : Si ce ne sont pas les retraités des régimes pleinement indexés qui, par une suspension temporaire de leur indexation, assument ces coûts-là, il reste deux autres parties qui peuvent l'assumer, soit les cotisants actifs, donc les jeunes travailleurs, pour des passifs qui ne leur appartiennent pas, soit les contribuables.

Alors, comment réconciliez-vous la position de dire : Jamais les retraités ne doivent, même dans le cas d'une indexation automatique, participer à assumer une partie des coûts, comment réconciliez-vous cette proposition-là, qui est la vôtre, avec l'équité intergénérationnelle?

M. Verreault (Gaston) : Dans un premier temps, M. le ministre, je voudrais apporter une précision. Je n'ai pas compris... M. le maire n'en a pas fait la démonstration non plus quand il dit que suspendre l'indexation pour les retraités, ça élimine tout le déficit. Et je ne comprends pas, parce qu'à la base même, quelques minutes avant, il a parlé que l'augmentation du déficit... Il vous a dit ça, ce matin : Entre 2010 et 2013, il y a 200 millions qui est dû aux changements de la table de mortalité. Alors, la table de mortalité puis l'indexation, c'est deux choses différentes. Alors là, il a mêlé encore les chiffres, là, ou il a mêlé encore les concepts. Quand il vous a dit, ce matin, que l'indexation pourrait être rétablie après deux ans, quatre ans et possiblement six ans, M. le maire n'a pas dû comprendre que, dans le projet de loi, il est écrit que l'indexation va être rétablie quand la situation du régime de retraite va être rétablie. Mais la part que la ville doit assumer, elle, parce qu'il va lui rester une part, elle a 15 ans pour la payer, sa part. Donc, la situation financière du régime de retraite, à ma compréhension, ne sera pas rétablie. Donc il faudra, théoriquement, techniquement parlant, attendre 15 ans, parce que c'est la période d'amortissement pour la part de l'employeur.

• (16 h 50) •

M. Moreau : Je vous arrête tout de suite parce que... Je comprends votre propos, là, ce n'est pas l'objectif d'aucune façon, là, il faut être bien clair. Ce n'est pas vrai que la ville peut attendre 15 ans avant de payer dans la rédaction actuelle du projet de loi. Elle va payer immédiatement, à partir de chacune des annuités, pour rétablir la santé du régime. Mais moi, je ne veux pas entrer dans un débat entre vous et M. Labeaume, ce n'est pas ça, là. Vous avez le droit d'avoir vos différents, c'est correct, puis vous faites ça correctement, il n'y a pas de problème. Moi, ça, c'est une chose dans laquelle je n'ai pas à intervenir.

La question que je vous pose, c'est la suivante : Vous convenez avec moi — puis je ne veux pas vous mener dans un piège, là, si vous n'êtes pas à l'aise avec la proposition, dites-le — qu'il y a une partie du déficit qui est attribuable à l'indexation des retraités. À partir du moment où cette partie du déficit, attribuable à l'indexation des retraités, n'est pas supportée par les retraités... Puis je vous le dis tout de suite, ça n'a pas pris 30 secondes, lorsqu'on s'était rencontrés, même avant la rédaction du projet de loi, on avait dit : On veut garantir les rentes de base. Et ça, le projet de loi les garantit. Il garantit les rentes de base, il garantit la rente au conjoint survivant. Éliminons ça. On parle strictement de la partie indexation automatique. Si je n'utilise pas, à l'égard des retraités, cette partie-là, j'élimine totalement l'effort des retraités à l'égard du redressement des régimes. Si je fais ça, il me reste deux sources possibles : la première, les jeunes cotisants qui entrent sur le marché du travail, les travailleurs actifs, ou, la deuxième, les contribuables. Comment est-ce que vous réconciliez le fait d'exclure totalement la participation des retraités dans la portion indexation pour une partie temporaire — puis on a vu, dans certains cas, que c'était trois ans, vous n'avez pas besoin d'être d'accord avec le fait que c'est trois ans, mettons que c'est quatre ans, cinq ans, là — et l'équité intergénérationnelle? Pourquoi est-ce que je demanderais aux jeunes cotisants qui arrivent sur le marché du travail de supporter une part de dette qui est attribuable à l'indexation des régimes des retraités? Pourquoi est-ce que je demanderais aux contribuables d'assumer ça? Comment est-ce que je peux réconcilier ça avec l'équité entre les générations?

M. Verreault (Gaston) : D'abord, sur le principe de droit dans lequel nous vivons, premièrement. Deuxième des choses, c'est le même principe aussi, le même raisonnement que la Régie des rentes. Le législateur, par la Régie des rentes, a fait une étude, une analyse, une consultation, en 2009, de mémoire, pour trouver des solutions pour assurer la pérennité du Régime des rentes du Québec, entre autres, pour essayer d'améliorer l'équité intergénérationnelle. Ils ont eu, dans leurs consultations, une série de solutions et ils n'ont pas choisi de couper l'indexation des retraités, de la rente des retraités de la Régie des rentes. Pour quelles raisons... et je reviens au début de ma présentation, pourquoi le secteur municipal est différent d'ailleurs? C'est le même payeur de taxes, c'est le même contribuable.

M. Moreau : On commence par le secteur municipal, là, parce que moi, je suis ministre des Affaires municipales et qu'on parle des fonds de pension dans le secteur municipal. Il faut commencer quelque part. Ça, c'est le début de la réponse à votre question.

Mais vous ne répondez pas à ma question. Qu'est-ce que je fais avec la partie du déficit qui est attribuable à l'indexation automatique des rentes des retraités? Je fais quoi avec? Pour être équitable envers les contribuables, pour être équitable envers les générations, je fais quoi? Je l'oublie? Je l'assume? Je dis que c'est les contribuables qui le paient à 100 %? C'est là où on essaie d'établir un équilibre.

Vous plaidez les droits acquis. Je vais reprendre l'exemple que nous donnait le secrétaire général de la FTQ lorsqu'il nous parle d'une maison. J'ai une maison. J'ai une hypothèque, elle est donnée en hypothèque en garantie du remboursement d'un prêt. Mes droits de propriété, ils s'établissent de deux façons : j'ai des droits sur la partie de mon capital qui a été net, mais j'ai aussi une obligation de rembourser la créance. Or, mon droit acquis à l'entièreté de la propriété de ma maison, il arrivera le jour où j'aurai totalement payé mes obligations financières. Faisons le parallèle avec le régime. Vous dites que vous avez des droits acquis. Vous avez des droits acquis à l'actif du régime, mais est-ce que vous n'avez pas aussi une obligation à l'égard du passif étant donné que le régime, dans le contexte où il est pleinement indexé, va vous verser des sommes qui génèrent, pour l'instant, un déficit? Vous dites : Je n'ai des droits que dans les actifs, je n'ai aucune obligation à l'égard du passif?

M. Verreault (Gaston) : Mais je passerais la parole à Michel à ma gauche, mais il y a une décision qui a été rendue aussi pour les retraités d'Hydro-Québec. Les retraités n'ont pas le droit au surplus. Ils n'auront pas le droit d'améliorer leurs rentes éventuellement, mais par contre ils auraient l'obligation de payer pour le déficit. Et pourtant, l'indexation, ils ont payé pour.

Les retraités, contrairement à un actif, pour rejoindre votre question, ils n'ont pas la possibilité de se reprendre, contrairement à un employé actif qui pourra peut-être avoir une augmentation salariale plus élevée, une journée de vacance de plus. On a dit, tout le monde reconnaît, les spécialistes, qu'un régime de retraite fait partie de la rémunération globale. Je vais demander à Michel de compléter.

M. Raymond (Michel) : M. le ministre, deux petits calculs fort simples. Ce matin, nous apprenions de M. Labeaume que le déficit imputable aux retraités de la ville de Québec serait de 190 millions. Il faut savoir que la rente moyenne d'un retraité à la ville de Québec, c'est 27 700 $. Faisons un calcul fort simple en arrondissant ce chiffre à 30 000 $. M. Labeaume disait, ce matin, que ça prendra entre trois et sept ans de suspension de l'indexation pour pouvoir annihiler, si vous voulez, le déficit. Alors, trois, cinq... on va y aller ensemble, cinq ans. Alors, sur cinq ans... Alors, 30 000 $ à un taux d'indexation de 2 % par année, ça fait 600 $ par année. Alors l'indexation que devrait recevoir un retraité d'une rente de 30 000 $ à un taux d'indexation de 2 %, c'est 600 $ de plus par année. Pendant cinq ans, si on lui suspend son indexation, cinq ans à 600 $, ça fait 3 000 $. 3 000 $, sur l'espérance de vie d'un retraité à la ville de Québec... disons une espérance de vie à 82 ans, la moyenne d'âge des retraités, c'est 66 ans, alors disons 15 ans. Alors donc, s'il perd 3 000 $ pendant 15 ans, ça fait 45 000 $. La même chose que dans les chiffres énoncés dans le discours de M. Labeaume ce matin. On dit : La suspension de l'indexation des rentes des retraités, ça représente 169 millions, ce qui fait, grosso modo, par les 4 000 retraités, 42 500 $.

J'ajoute ceci, M. le ministre. C'est qu'on arrive dans une situation où, dans notre mémoire, on vous a fait état de la charge financière du régime de retraite sur la richesse foncière de la municipalité. Cette charge du déficit — et soyons bien clairs, ce n'est pas une dette, c'est un déficit — ça représente 0,6 %, 0,7 % de la richesse foncière de la municipalité, alors que, dans un même temps, disons, la dette de la ville, qui est de 1,8 milliard de dollars, représente à elle seule environ 3 % de la richesse foncière de la municipalité. Alors, la dette de la ville représente 3 % de sa richesse, et les déficits des régimes de retraite représentent 0,6 %, ce qui est cinq fois moins, alors que, dans la politique de gestion de la dette de la ville, dans sa politique la plus récente, on dit que les objectifs poursuivis sont les suivants : respecter la capacité de payer de la population, garantir l'équité intergénérationnelle et maintenir, voire améliorer la cote de crédit.

Alors, si, pour une dette de 1,8 milliard, qui représente 3,5 % de la richesse, on respecte ces objectifs-là, comment nous, comme association de retraités, alors qu'on représente cinq fois moins dans le poids relatif, on peut remettre en question, justement, cette équité intergénérationnelle là, remettre en doute la capacité de payer des citoyens, voire le fardeau fiscal des citoyens? C'est une preuve qu'on vous a faite.

M. Moreau : Vous revenez avec la question du 15 ans, là. Je vous le dis tout de suite, là, je pense qu'on ne se comprend pas dans l'application ou dans l'interprétation du projet de loi, là. Ce dont on parle, c'est le délai qui, ultimement, pourrait être utilisé pour une ville pour le remboursement. Ce matin, j'ai dit : Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir une équité puis dire : Si on demande aux associations syndicales de payer d'un coup sec, les villes ne devraient pas le faire également? Donc, c'est un élément de réflexion.

Mais, quand le maire Labeaume vous dit... Supposons, là, 30 secondes qu'il a raison dans le délai requis pour remettre en état la santé financière du régime, il vous dit : C'est une suspension de trois ans de l'indexation d'un retraité, je reviens à ma question : Est-ce que vous pouvez trouver une façon d'être équitable entre les générations en faisant supporter par d'autres que par les retraités la partie de la dette ou du déficit qui est attribuable à l'indexation de leur pension, en prenant pour acquis que le projet de loi garantit la sauvegarde de la rente de base, qui est celle sur laquelle vous calculez votre niveau de vie à la retraite? Vous ne l'avez pas calculé, là, sur la base d'une indexation avec une formule qui est impossible à prévoir 25 ans en avance, quel sera ce montant d'indexation. Entendons-nous bien, là, je ne vous dis pas que vous avez tort lorsque vous dites que ça représente un effort. Mais est-ce que cet effort-là n'est pas compatible avec l'équité entre les générations? Est-ce que cet effort-là n'est pas compatible avec une équité qui touche l'ensemble des contribuables? Et, comme cet effort-là est essentiellement temporaire, est-ce que ce n'est pas l'atteinte la plus minimale que nous ayons pu trouver à l'égard d'une responsabilité partagée entre trois parties, les retraités, les participants actifs et les contribuables? Est-ce que vous avez d'autres solutions à proposer?

Le Président (M. Auger) : Nous n'aurons pas la réponse pour l'instant, le temps étant écoulé.

M. Moreau : Êtes-vous d'accord pour qu'il réponde?

Le Président (M. Auger) : Oui, consentement pour une réponse?

• (17 heures) •

M. Verreault (Gaston) : Pour répondre à votre question, M. le ministre, c'est une question d'équité. Les employés actuels, les employés futurs, s'ils ont un effort à faire, ils vont faire le même effort. C'est une cotisation basée sur le salaire. Alors, c'est une proportion.

Pour ce qui est des retraités, je vous l'ai dit tantôt dans notre présentation, il y a au moins 20 formules d'indexation différentes. Donc, les 4 000 retraités et bénéficiaires vont tous avoir à faire des concessions totalement différentes, injustes et inéquitables entre eux autres, en partant, en partant. Ceci dit, M. le ministre, les trois dernières évaluations actuarielles, la 2007, la 2010, la 2013, il y a eu des gains actuariels reliés à l'indexation des rentes de 32 millions. Il y a eu des gains puis il va falloir couper l'indexation des retraités. Là, je ne comprends plus rien. C'est vrai que je ne suis pas actuaire, je ne suis pas avocat, je ne suis pas comptable, je suis juste retraité, mais je vous dis qu'il ne faudrait pas qu'en voulant chercher une équité on crée des injustices, des inéquités en enlevant un acquis aux retraités.

Et, quand je dis retraités, je fais souvent exprès pour parler de bénéficiaires. Il y a une dame qui m'a appelé, elle a une rente de 500 $ par mois du régime de retraite dans lequel... 500 $, là. Bien, la petite indexation, pour elle, compte beaucoup. Et une indexation de 2 % ou de 2,25 %... Dans notre mémoire, on a utilisé 2,25 %; c'est l'indexation, l'inflation prévue par l'actuaire du régime pour les 30 prochaines années. La Régie des rentes, elle, dans son analyse actuarielle, a prévu une inflation de 2 %. Je comprends, comme vous, là, on peut bien prendre 2 %, 2,25 %, mais ce n'est pas pour une courte période, c'est pour une longue période. Donc, là aussi, pour évaluer le montant, le déficit imputable aux retraités, ça va dépendre des hypothèses. Si, à la ville de Québec, l'actuaire des six régimes a pris une hypothèse d'inflation de 2,25 % et la ville, à côté, l'actuaire, a pris une hypothèse de 1,9 %, bien, je veux dire... Et, si, dans une même ville, il y a cinq régimes de retraite, cinq firmes d'actuaires différents, il n'y en a pas un qui a pris la même hypothèse d'inflation pour indexer les rentes, il va y avoir une inéquité entre les régimes dans une même municipalité.

Vous voyez que ce n'est pas parce qu'on ne veut pas essayer, puis on ne veut pas... on ne comprend pas; on est d'accord pour dire qu'il fallait qu'il se fasse quelque chose pour assurer la pérennité des régimes de retraite. On n'est pas contre. C'est dans les moyens. Et nous, on est d'avis que ce n'est pas en touchant aux plus vulnérables qu'on va assurer la pérennité des régimes de retraite. Et, par contre, ça va avoir comme effet de créer des inéquités énormes et d'affaiblir, d'appauvrir les retraités.

Le Président (M. Auger) : Merci. Nous allons poursuivre avec le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue à MM. Verreault, Raymond et Mme Vaillancourt. Je voudrais d'abord vous féliciter pour le mémoire. Vous êtes nés en juin, semble-t-il, votre association. C'est un travail qui est remarquable. Je vous félicite parce qu'il y a beaucoup de rigueur, beaucoup de chiffres, beaucoup de réponses à beaucoup de questions. Et je trouve ça bien, bien important que vous nous arriviez avec des chiffres comme ça, ça nous pose la réflexion puis ça détruit aussi quelques mythes.

Moi, si je résume, là, vous me dites que le retraité, c'est 27 700 $. On ne peut pas dire que c'est le Pérou, là, 27 500 $. 27 700 $. Là, vous dites que l'indexation a été payée en surplus de leur cotisation. De bon aloi, ils ont dit : Nous, on veut avoir une indexation, ça fait qu'ils ont payé des cotisations supplémentaires pour les avoir. Ces gens-là sont dans une situation, économiquement, d'une vulnérabilité, c'est-à-dire que, si on commence à jouer avec la rémunération, ils n'ont souvent, malheureusement, pas la chance d'aller trouver des sous ailleurs, pour plusieurs raisons. C'est ce que j'ai compris puis c'est ce que je pense savoir aussi, là, des gens à la retraite.

Et aussi le fait de cesser, de façon ponctuelle, à des indexations a des effets sur le reste de la vie. C'est ce que vous avez expliqué. Si je coupe 600 $ cette année, c'est l'année prochaine, c'est dans deux ans; jusqu'à la fin, vous avez 600 $ de moins. Et, pour quelqu'un qui gagne 27 700 $, c'est quelque chose, hein, de difficile avec laquelle il doit gérer ce portefeuille-là, qui diminue en termes réels, parce que, là, il ne faut pas regarder en termes nominaux, il faut regarder en termes réels, en termes de pouvoir d'achat.

Puis moi, je vous dirais que l'indice des prix à la consommation, l'indexation à 2,25 %, vous n'êtes pas loin de la vérité, parce que le panier de consommation du retraité n'est pas à l'image de ce qu'on retrouve dans l'IPC généralement soutenu par les calculs de la Banque du Canada, là. Leur panier, là, est beaucoup plus fluctuant en termes de prix, et ça diminue leur pouvoir d'achat. Par-dessus ça, il faut aussi considérer que c'est un droit acquis, ça a été signé. Vous l'avez mentionné au départ, là, avec plusieurs citations, là, qui remontent au XIXe siècle, mais qui sont encore d'actualité, si on peut dire. Alors, pour ces raisons-là, vous considérez que la défense des retraités est menacée et vous vous soulevez contre le projet de loi n° 3. Est-ce que je résume bien votre pensée?

M. Verreault (Gaston) : Oui, puis je vais vous répondre par une autre citation d'une commission formée par le gouvernement ici, la commission... le Comité consultatif indépendant sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale, qui dit ceci dans son rapport du mois de novembre 2013 — c'est relativement récent : «Un élément est cependant essentiel pour le comité. Les modifications aux dispositions du régime de retraite ne doivent pas s'appliquer rétroactivement. Les changements devront prendre effet à une date déterminée et viser uniquement les années à venir. Les bénéfices déjà accumulés [par les membres de l'Assemblée nationale], en ce qui a trait aux rentes et aux crédits de rentes, ne sont en aucune façon remis en question. Il serait tout à fait injuste de chercher à modifier les conditions de travail passées du député en y appliquant [les] règles nouvelles.»

Donc, on n'est pas tout seuls à tenir le discours, toutes les firmes, les compagnies, les spécialistes le disent : Le passé, je regrette. Peut-être que moi, voilà 30 ans, j'aurais dû dire à l'actuaire de l'époque : Soit donc un petit peu plus conservateur dans tes hypothèses, mais je n'étais pas capable de le dire à l'époque, puis j'aimerais ça le dire aujourd'hui, qu'ils sont trop conservateurs, mais je ne suis pas capable de le dire non plus. Mais, effectivement, vous avez raison.

M. Therrien : C'est sûr qu'à la fin, là, je ne reviendrai pas là-dessus, mais vous faites un portrait du poids que doit supporter le contribuable par rapport au régime de retraite, là, bon, avec leur actif, leur richesse, tout ça. Je ne reviendrai pas là-dessus. Moi, je voudrais revenir sur quelque chose d'important, c'est que nous, on essaie de faire un portrait le plus clair possible de la situation des villes par rapport au déficit, à la dette qu'ils contractent par rapport au taux d'actualisation... et c'est parfois difficile. Puis, quand j'ai posé la question au maire Labeaume ce matin, quand je parlais de la taxe supplémentaire, il m'a dit... Et j'ai posé la question parce qu'honnêtement je me suis fié à votre rapport. Et moi, je pensais qu'il y avait un déficit initial de 601 millions, mais qu'il prenait une taxe qui a été créée en 2006 et qu'il mettait cet argent-là de côté sans le mettre sur le traitement de cette dette-là. Et il m'a affirmé tantôt que ce montant-là était effectivement mis sur la dette de la ville. C'est ce qu'il m'a dit tantôt. Ce n'est pas ce que vous dites.

M. Verreault (Gaston) : Non.

M. Therrien : Pouvez-vous m'expliquer un peu, là? Parce que je suis un peu perdu.

M. Verreault (Gaston) : Et allez dans notre mémoire à la page 13, et — vite, vite, brièvement — c'est le déficit initial de l'ex-ville de Québec qui a été créé au début de la décennie 60. Ça a été vrai pour le gouvernement provincial, fédéral, la ville de Montréal, la ville de Québec. Le régime de retraite de la ville de Québec, il date de 1913, je m'en rappelle, j'étais là pour le signer.

Une voix : Ha, ha, ha!

            M. Verreault (Gaston) : Et, en vertu de la loi de la Charte de la Ville de Québec, la ville de Québec doit taxer les citoyens qui demeurent sur le territoire de l'ancienne ville de Québec pour payer ce déficit. En 2014, les citoyens ont versé 8,9 millions pour ce déficit-là que la ville a mis dans le déficit. Mais la ville charge une autre taxe additionnelle à ces mêmes citoyens là pour le même déficit. En 2014, 14,3 millions juste... Mais, ce 14,3 millions là, la ville, elle ne le verse pas dans les régimes de retraite, elle l'a mis dans une poche à côté. Elle ne veut pas le payer, le déficit. La ville de Montréal, c'est le choix qu'ils ont fait en 2004. Lisez les budgets annuels de la ville de Montréal, à chacune des années, ils se pètent les bretelles d'avoir fait ça. Nous, à Québec, c'est une décision à laquelle ils ont droit de prendre. Le conseil de ville, en 2007‑2008, a décidé de ne pas payer le déficit, de créer une réserve. Ils en mettent une partie, mais l'excédent, le 14,3 pour 2014, ils l'ont mis dans une réserve.

Ensuite, il y a l'excédent de trésorerie, qui est autre chose. En 2007, les normes comptables ont changé. Il faut que...

Une voix : ...

• (17 h 10) •

M. Verreault (Gaston) : Pour les municipalités. Maintenant, quand la ville fait son budget, elle doit taxer le citoyen pour les avantages sociaux, incluant les régimes de retraite, sur la projection du coût. Faisons l'hypothèse, pour les fins de discussion avec vous, que l'actuaire, il dit : Il faut que vous taxiez les citoyens pour 90 millions. La ville ne verse pas le 90 millions dans le régime de retraite, elle ne verse que la cotisation minimale prévue dans la loi. Faisons l'hypothèse que la cotisation minimale, c'est 60 millions. La ville, elle a encore 30 millions qu'elle a taxé le citoyen pour les régimes de retraite. Elle ne l'a pas versé dans les régimes de retraite, elle le garde dans son encaisse, et, au moment où on vous parle, il y en a 200... il y en a 100 millions, de ça.

Donc, le citoyen a payé, puis là le maire laisse voir qu'il y a 601 millions de déficit. Mais, M. le maire, commencez par prendre l'argent que vous avez mis dans la petite poche d'en arrière puis payez une partie du déficit; le déficit va être moins gros. Vous n'aurez pas besoin de monter le compte de taxes pour les citoyens au 1er janvier 2015. Mais ça, il ne vous le dit pas, il ne le dit pas. C'est parce que c'est vrai que ce n'est pas simple à expliquer, puis ce n'est pas simple à comprendre. Mais on l'a assez regardé, puis on l'a assez fouillé, puis on prend ça dans le budget de la ville de Québec, là, je vous l'ai dit tantôt, l'extrait du budget de la ville de Québec. Il y a des phrases, dans notre mémoire, c'est, mot à mot, ce que le maire... pas le maire, mais que la ville a écrit dans son budget.

Le Président (M. Auger) : Mme la députée de Vachon.

M. Therrien : Merci.

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. Bien, bienvenue. Puis je vais réitérer les félicitations de mon collègue : Beaucoup de chiffres, c'est intéressant de voir l'ensemble de la documentation, parce que, je vous dirais, c'est probablement ce qui nous manque le plus dans ce dossier-là, c'est d'avoir des chiffres, d'avoir la connaissance sur les différents régimes de retraite.

J'ai posé une question ce matin au maire de Québec concernant les comités de régimes de retraite. Et il m'a dit que c'étaient des comités paritaires. Et je vois que, dans une vos recommandations, vous dites : «Améliorer la représentation des retraités — là, à la page 36 de votre mémoire — aux comités de retraite [...] du secteur municipal.» Donc là, je me suis comme posé la question : Est-ce que, lorsqu'il disait paritaire, c'était-u en termes consultatifs ou décisionnels? Comment fonctionnent vos comités de retraite à la ville de Québec?

M. Verreault (Gaston) : On a... excusez. Les comités de retraite, à la ville de Québec, ont été constitués conformément à la loi RCR. La ville désigne un certain nombre de membres sur le comité de retraite. En vertu de chacun des règlements, il est mentionné que le syndicat ou l'association des employés doit en désigner deux, l'assemblée annuelle doit en désigner un avec droit de vote, l'assemblée annuelle — les retraités — doivent en désigner un avec droit de vote. C'est de même que ça fonctionne. C'est totalement conforme à la loi RCR.

Ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est que, si le projet de loi venait à forcer la participation des retraités, bien, en contrepartie, il devrait y avoir plus de retraités avec droit de vote sur les comités de retraite, tout simplement.

Et l'employeur, évidemment, lui, il a des représentants qui sont souvent des gens à l'externe et des gens à l'interne. Dépendamment des régimes, l'employeur a quatre représentants. Je pense qu'il y a un régime où l'employeur a cinq membres.

Mme Ouellet : Donc, à ce moment-là...

M. Verreault (Gaston) : Et quand... Excusez. Vous voulez avoir la question sur le paritarisme. Ce n'est pas une forme de paritarisme. Chacun a un droit de vote, mais c'est la... Quand on additionne les votes, il faut que, du côté patronal, il y ait la majorité, puis, du côté des participants, qu'il y ait la majorité. S'il n'y a pas une majorité d'un bord ou de l'autre, il n'y a pas de décision. Donc, il faut que les membres du côté patronal votent en faveur; du côté des participants, votent en faveur. Là, la résolution est adoptée en bonne et due forme.

Le Président (M. Auger) : 1 min 30 s, Mme la députée.

Mme Ouellet : Oui. Puis, peut-être en 1 min 30 s, si vous réussissez à faire ça, de m'expliquer l'origine des déficits des régimes de retraite. Vous avez, à votre page 17, qu'il y a eu des modifications d'hypothèses depuis 2007, qui représentent 50 % du déficit total identifié au 31 décembre 2013. Pour moi, c'est nouveau, ça. J'aimerais vous entendre sur ça.

M. Verreault (Gaston) : Bien, à chaque analyse actuarielle, l'actuaire, il a la liberté. C'est lui qui décide quelle hypothèse il va utiliser pour ses évaluations actuarielles : les hypothèses économiques, c'est-à-dire les augmentations salariales, si elles sont connues; l'inflation, etc. Puis il y a les hypothèses qu'on appelle démographiques. Il regarde l'image du groupe, la mortalité, l'expérience des années antérieures, puis là il fait son évaluation actuarielle.

Compte tenu des marchés, l'évolution des marchés, les taux de rendement au cours des dernières années, évidemment, les taux de rendement utilisés par l'actuaire, escomptés, excusez l'expression, sont moins élevés que l'analyse actuarielle précédente. Donc, si je dis qu'on va avoir un rendement de 6 % au lieu de 6,25 %, bien, il manque 0,25 % par rapport à l'analyse... Donc, ça, il y a un manque à gagner, là. Il y a un coût, parce que ce que les placements ne rapportent pas, il faut le payer par une cotisation patronale ou syndicale.

Le Président (M. Auger) : Désolé...

M. Verreault (Gaston) : L'autre hypothèse, c'est la table de mortalité.

Le Président (M. Auger) : M. Verreault.

M. Verreault (Gaston) : La table de mortalité...

Le Président (M. Auger) : M. Verreault, c'est tout le temps que nous avions de disponible. C'est très intéressant, mais... Je m'excuse, mais je dois gérer le temps. Donc, on cède maintenant la parole au député de Blainville, porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

M. Laframboise : Merci, M. le Président. Puis, si vous voulez terminer, je vais vous laisser faire. Vous étiez bien parti.

M. Verreault (Gaston) : La table de mortalité, l'Institut canadien des actuaires, ils ont dit : Bon, bien, les prochaines évaluations actuarielles, celles qu'on vit présentement... Parce que, dans le secteur municipal, compte tenu des regroupements des municipalités le 1er janvier 2002, il y a eu une analyse actuarielle en décembre 2001; il y en a eu une en 2004, il y en a eu une en 2007, en 2010. Donc, presque toutes les villes regroupées ont des évaluations actuarielles après. Pour ce qui est de la 2013, l'Institut canadien des actuaires, ils ont dit : Vous allez prendre la table de mortalité que nous, on a structurée, qu'on a élaborée, la table de mortalité canadienne, là, qu'ils appellent. Ça, ça a fait augmenter le coût des régimes de retraite. Évidemment, en augmentant le coût, ça augmente les déficits. Et j'ai sorti le tableau, ça a fait monter... ça a créé énormément... ça a fait des déficits de plusieurs, plusieurs dizaines de millions.

Et encore là, quand on regarde l'expérience des six régimes de retraite de la ville de Québec, la table de mortalité a généré des gains actuariels de 12 millions. Donc, notre table de mortalité qu'on utilisait pour nos groupes à nous, elle n'était pas si mauvaise que ça. Mais on n'a pas le choix, la table de mortalité, l'actuaire prend celle-là. Où le comité de retraite a un pouvoir, c'est sur la marge pour écarts défavorables. Ça, c'est une responsabilité des comités de retraite. L'actuaire va dire : Moi, je prévois que les rendements vont être de 6,25 %. Le comité de retraite, vous autres, êtes-vous à l'aise avec ça ou vous voulez prendre un écart défavorable, une marge pour un écart défavorable? On pourrait dire : Oui, on va prendre 0,50 %. Ça, c'est une responsabilité du comité de retraite.

Mais le fait d'avoir changé les hypothèses au cours des dernières évaluations actuarielles, ça a fait monter énormément les déficits, et ce n'est pas nécessairement dû à l'expérience des régimes, je viens de vous faire la preuve tantôt. Il y a eu des gains actuariels sur l'indexation, des gains actuariels sur la table de mortalité. Donc, quand, tantôt, le projet de loi va évoluer et qu'il y aura à établir les déficits des régimes de retraite, bien, si c'est les mêmes règles pour tous les régimes de retraite — excusez l'expression, mur à mur — bien, il y a des régimes où les employés et les retraités vont assumer une part qu'ils ne devraient pas assumer, selon moi.

M. Laframboise : Par contre, ce que vous nous confirmez, c'est que la table utilisée, la table des actuaires canadiens, est quand même raisonnable. En tout cas, pour vous, elle est raisonnable, là, la table de retraite, là.

M. Verreault (Gaston) : Elle est... ce n'est pas l'expression, là. Il y a des firmes d'actuaires, que je ne nommerai pas ici, là, qui ont écrit dans leurs bulletins — ils émettent des bulletins — qu'ils mettent en doute le réalisme de cette table de mortalité là pour le Québec.

M. Laframboise : Sauf que, pour vous, ce n'est pas le cas, là.

M. Verreault (Gaston) : Oui, en prenant la table de mortalité suggérée par l'institut canadien de l'actuaire, ça nous fait mal.

M. Laframboise : O.K.

M. Verreault (Gaston) : Ça nous fait mal.

M. Laframboise : O.K. Par rapport à... Moi, je veux revenir sur l'équité intergénérationnelle, là, parce que vous avez votre façon à vous, puis j'ai peut-être ma façon à moi, là, on va essayer de s'entendre, là... Parce que, si on ne fait rien, vous allez convenir... parce qu'évidemment, vous êtes le pouvoir gris, là, hein? J'espère que vous me comprenez; vous avez un pouvoir d'achat, vous l'avez mentionné. Les régimes à prestations déterminées, c'est parmi les meilleurs en Amérique du Nord. Donc, évidemment, si on ne fait rien, ça veut dire qu'un jour, si on ne règle pas le déficit, il va manquer d'argent. Peut-être que vous, vous allez être capable de vivre assez longtemps pour bénéficier de vos augmentations puis de vos indexations, mais il y aura quelqu'un, quelque part, qui n'en aura pas à la fin, là. C'est des plus jeunes qui, aujourd'hui, probablement, ne pensent pas à leur retraite encore, là.

Donc, nous, notre... D'où l'importance de s'attaquer au problème aujourd'hui et que tous les bénéficiaires du régime y participent à la hauteur de leur participation. Vous, ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est : Nous, on ne veut pas du tout participer à ça. Mais il y a quand même un déficit, tu sais, par rapport aux revenus, les dépenses, les profits qui n'étaient pas là, ça n'a pas performé. Donc, à quelque part, il faut s'asseoir un jour, là, pour régler ça. Puis, si on s'assoit, il faut que tous les bénéficiaires du régime s'assoient, y compris vous.

Ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est : Nous, on ne veut pas être là. Nous on ne veut pas participer à ça. On est indexés, on a négocié, que les autres s'arrangent. Mais, si on faisait tous ça, tout le monde ensemble, il y aurait un déficit qui grossirait, puis un jour il y aurait du monde qui n'en aurait pas.

• (17 h 20) •

M. Verreault (Gaston) : Je vais vous répondre ce que j'ai dit à M. le ministre tout à l'heure, là, je lui ai dit : Ce n'est pas le choix que le législateur a fait pour la Régie des rentes. Pour quelle raison que l'argument que vous me donnez, les explications que vous me donnez, le législateur ne les a pas appliquées pour la Régie des rentes il y a quelque temps? C'est un problème intergénérationnel. C'est un régime par répartition, le Régime de rentes du Québec, premièrement.

Deuxième des choses, pour ce qui est des déficits, il y a des ententes qui ont été conclues, puis je pense que la coalition syndicale le répète ad nauseam, que c'est possible de faire des ententes. Les cols bleus de la ville de Montréal, les cols bleus de la ville de Laval, les cols bleus de la ville de Québec, les cols blancs de la ville de Québec, les employés du Saguenay—Lac-Saint-Jean, à Rimouski, à Rivière-du-Loup, et j'en passe, ils en ont fait, des ententes, avec ce qu'on appelle un mur de Chine ou un régime à deux volets : le passé et le futur.

Les conditions qu'ils ont modifiées dans leur régime de retraite, normalement, pour le futur, ne devraient plus créer de déficit. Ils ont créé une réserve de stabilisation. Ils ont évalué le régime avec beaucoup plus de mesures conservatrices. Donc, il reste le passé. Mais, le passé, il va s'éliminer, ce déficit-là. Je regarde dans les régimes de retraite de l'ex-ville de Québec... dans les anciennes villes de Québec — il y en avait 13 — il y a encore des déficits de ces anciens régimes là : il reste 13 000 $, 18 000 $, 500 000 $. Ça achève, ils avaient 15 ans pour le payer. Ça va tout s'éliminer, ça. Il va en rester encore, là, je suis d'accord avec vous, mais possiblement que ça va s'éliminer assez rapidement.

Le futur, il est protégé, maintenant, avec les ententes qu'on voit, qu'on a vues récemment, que ça soit à Montréal, à Saguenay, je ne le répéterai pas, là. Mais les syndicats, les employés ont été responsables, et ils veulent assurer la pérennité des régimes de retraite, ils veulent être équitables pour les jeunes, ils veulent que, ces régimes-là, les jeunes puissent y accéder. Mais on a...

M. Laframboise : Je vous arrête, M. Verreault, parce que...

M. Verreault (Gaston) : Je finis. En terminant — excusez — nous, on n'a pas voix au chapitre, là, on ne va pas à la table de négociation, là.

M. Laframboise : Non. Par contre, vous êtes ici aujourd'hui, puis je suis content de ça, là. Mais c'est...

M. Verreault (Gaston) : ...entendre, mais on n'a pas le droit au chapitre.

M. Laframboise : Non, je comprends. Sauf que, quand on parle à, exemple, M. D'Amours, qui nous dit : Tous ceux qui pensent que le déficit va se résorber comme ça, bien, c'est de la pensée magique, là... C'est ça qu'il nous disait ce matin, là, je ne sais pas si vous l'avez vu, là, puis c'est ça. Donc, comprenez-nous, là, nous, on veut que le problème se règle une fois pour toutes. Il faut commencer en quelque part. Je comprends que vous nous dites, là : Il y a la Régie des rentes, il y a... Il faut commencer par le commencement, puis là on a quelque chose d'important qui a été soulevé par les maires, à juste titre, là. Puis vous avez des interrogations par rapport à la ville de Québec, puis je peux comprendre. Mais, quand je regarde les chiffres, s'il prenait son argent, il est à 70,4 % de capitalisation, probablement qu'il tomberait à 76 %, il serait en bas de la ville de Montréal, le maire de Québec, même s'il prenait l'argent qu'il a dans les... que vous dites qu'il a dans ses coffres, là. Donc, il manquerait de l'argent encore, là.

Donc, inévitablement, il faut arrêter de pelleter par en avant, puis c'est là que j'interroge, j'interpelle votre pouvoir gris pour dire : Je comprends que vous ne voulez pas rien perdre. Mais y a-tu moyen, là... Parce que, là, je comprends que vous êtes énervé par le 15 ans. Le maire nous disait, par rapport à l'indexation : Moi, j'aurais besoin entre trois et sept ans, je n'ai pas besoin du 15 ans. Le projet de loi parle du 15 ans. Donc, y a-tu moyen qu'on discute de délais, de temps? S'il y a une annulation de votre indexation, y a-tu quelque chose, ou bien donc vous êtes fermés carrément puis vous ne voulez pas qu'on en parle?

M. Verreault (Gaston) : Je vais... par vous répondre : D'abord, ce que le maire dit, je ne le crois pas toujours nécessairement. Je connais l'homme politique, j'ai lu toutes ses déclarations depuis que je suis au monde. Et, des fois, on est capables de le contredire, mais on n'a pas toujours la possibilité de le faire, parce qu'on n'est pas des politiciens. Mais ce que le maire ne vous a pas dit non plus ce matin, là — puis je veux... m'adresse à M. le ministre aussi — le projet de loi, tel qu'il est rédigé...

Je vais vous faire un exemple. L'actuaire, il fait l'analyse actuarielle du groupe des cols bleus de la ville de Québec. Il sépare le déficit imputable aux retraités puis il sépare le déficit imputable aux actifs. Pour les retraités, l'actuaire, il dit : Le déficit imputable aux retraités cols bleus, c'est 30 millions. L'actuaire, il dit : Si je suspends l'indexation de ce régime-là, j'élimine le déficit. Il n'y en a plus, de 30 millions. Les retraités ont payé 100 % du déficit, alors que le projet de loi dit que, pour les actifs, c'est 50-50 : 50 % pour la ville puis 50 % pour les employés actifs. Déjà là, là, il y a une inéquité encore là, là.

M. Laframboise : Et je suis d'accord. C'est pour ça que je vous dis, tu sais : Si ce n'est pas une annulation, c'est une diminution, y a-tu moyen que vous soyez capables de participer à ça, là? Puis, si vous nous demandez une place aux tables, moi, je n'ai aucun problème avec ça, là, je vous le dis, là. C'est juste qu'à quelque part il faut régler ce problème-là une fois pour toutes. Puis le maire de Québec, il faut lui donner une chose. Vous, vous avez... bon. Mais il a quand même sensibilisé les autres élus du Québec, qui avaient des problèmes, puis qui se fermaient la boîte, puis qui ne disaient pas un mot.

Là, il est appuyé par le maire de Montréal, il est appuyé par l'Union des municipalités du Québec. Là, le gouvernement, on est rendus là, là. Là, il faut le faire, parce que les maires nous le demandent. Il faut le faire pour, évidemment, respecter la capacité de payer des citoyens puis pour ne pas qu'un jour les citoyens se ramassent avec une facture de taxes spéciale pour ça.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions. Je vous remercie pour votre présentation.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 25)

(Reprise à 17 h 31)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue au dernier groupe de la journée. Donc, pour les fins de l'enregistrement, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous avez une période de 10 minutes. Par la suite, nous procéderons à une période d'échange. La parole est à vous.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Lévesque (Francine) : Merci beaucoup. Je suis Francine Lévesque, vice-présidente de la CSN. Je suis accompagnée de Denis Marcoux, qui est le président de la Fédération des employés des services publics de la CSN, donc qui regroupe les employés municipaux et qui regroupe également les gens qui travaillent dans le secteur du transport municipal. Et, à ma droite, je suis accompagnée de Mme Nathalie Joncas, qui est notre conseillère syndicale actuaire, notre spécialiste en matière de régimes de retraite. Alors, on est le dernier groupe. On va essayer aujourd'hui d'être le premier groupe à tenir sa présentation dans 10 minutes.

M. Moreau : Alors, si vous ne réussissez pas, je prends l'engagement à l'avance de vous donner du temps sur la partie ministérielle.

Mme Lévesque (Francine) : Bien, merci beaucoup. On va essayer de pouvoir mettre le maximum de temps disponible sur nos échanges plutôt que sur notre présentation.

Donc, je vous remercie infiniment de nous permettre de pouvoir présenter aujourd'hui les propositions de la CSN à l'égard du projet de loi sur la santé financière et la pérennité des régimes de retraite. Et je veux vous dire d'entrée de jeu que la CSN partage avec le gouvernement la grande préoccupation de l'avenir des régimes à prestations déterminées, qui sont de loin, là, les meilleurs régimes de retraite pour assurer la sécurité financière des travailleuses et des travailleurs, et on partage aussi les inquiétudes. On avait déjà eu l'occasion de les exprimer l'an dernier, dans le cadre des consultations sur le rapport D'Amours, et, je vous rassure, on n'a pas changé d'idée. Elles seront toujours présentes, ces inquiétudes-là, même si la lecture que nous, on fait de la situation actuelle, au plan financier, des régimes de retraite, elle est moins dramatique que celle présentée par le gouvernement, parce qu'on constate quand même que, dans la dernière année, il y a eu un meilleur rendement financier qui a permis quand même une petite embellie qui nous permet d'envisager les choses, je dirais, sur une... peut-être une période beaucoup plus à moyenne et à longue portée. Alors, vous devinerez que, même si on partage les inquiétudes, on ne partage pas vraiment, par ailleurs, les solutions qui sont mises de l'avant par le gouvernement. On est même très inquiets de l'impact de plusieurs des dispositions du projet de loi. Néanmoins, on persiste à dire qu'une réforme du régime de retraite, ça s'impose, parce qu'il faut effectivement sauver les régimes actuels puis aussi parce qu'il faut qu'on permette la mise en place de nouveaux régimes à prestations déterminées, qu'ils puissent voir le jour pour qu'il y ait de plus en plus de personnes qui puissent être couvertes par ce régime de retraite qui est vraiment la meilleure des formules de régime complémentaire.

Alors, ce qu'on va faire aujourd'hui... Nous, on s'est dit : On est en commission parlementaire, c'est pour travailler sur des solutions, adresser des perspectives. On a donc décidé de concentrer notre propos sur, je dirais, cinq mesures du projet de loi qui nous apparaissent les principales. Et, sur ces questions-là, on a des positions à vous présenter qu'on pense qui vont permettre de faire avancer le dialogue et de trouver des solutions qui vont nous rassembler, et qui vont permettre de régler de façon durable les problèmes des régimes en difficulté, et qui vont nous permettre de sortir du climat de tension dont le premier ministre faisait état hier.

Donc, sans plus tarder, sur les cinq questions, je dirais, la première qu'on veut aborder avec vous, c'est la question du plafond sur le service courant, donc, de 18 % à la cotisation, le plafond qui inclut en plus la contribution qu'il faudrait qu'on fasse à un fonds de stabilisation. Donc, dans les faits, c'est l'équivalent de 16,36 % qui serait la contribution maximale apportée à nos régimes de retraite. Et pourquoi on s'oppose à ça? Bien, parce que, pour nous, cette position-là n'a rien à voir... elle ne vient pas régler la question des déficits actuels. Ce qu'elle fait, cette mesure-là, c'est qu'elle vient strictement condenser, réduire les éléments de rémunération globale, parce que ce n'est pas parce qu'un régime de retraite est à 20 % de la masse salariale qu'il est en difficulté. Il pourrait être en très bonne santé financière, alors qu'à côté un autre régime qui est, lui, moins important, moins... en termes de pourcentage, lui pourrait être, s'il a été mal géré, en fort mauvaise posture. Donc, pour nous, le niveau, le plafond de la contribution, ce n'est pas quelque chose qui a à voir avec assurer la pérennité des régimes de retraite. Et on trouve qu'elle a des effets pervers, cette mesure-là, parce qu'elle a notamment... C'est un élément, je pense, qui est spécifique, c'est un argument que je n'ai pas entendu aujourd'hui, en tout cas, d'aucun intervenant. Elle peut entraîner des mesures qui vont être discriminatoires, particulièrement à l'égard des femmes, pour des groupes dans des régimes de retraite qui seraient constitués majoritairement de femmes, compte tenu de la situation qu'on connaît en lien avec, bon, par ailleurs, la durée de vie, la longévité plus grande des femmes, la question aussi qu'on a souvent des salaires qui sont inférieurs. Alors, il y a beaucoup, là, d'éléments liés à la discrimination.

L'autre chose qu'on trouve qui est très... qui est liée à cette mesure-là, c'est que, puisqu'on considère — vous ne serez pas surpris de nous entendre là-dessus — que les régimes de retraite, c'est un élément qui fait partie de la rémunération globale, bien, nous, on pense qu'en forçant actuellement les régimes de retraite qui contribuent à plus de 18 % à s'appliquer une réduction, bien, on pénalise de façon indue des groupes qui ont choisi d'épargner pour leurs retraites. Donc, ils ont choisi de prendre une partie de leur rémunération et de la mettre dans l'épargne pour le futur, alors que d'autres groupes qui n'auraient pas fait ces choix-là de façon aussi importante, eux, peuvent passer tout droit, ils ne sont pas obligés de contribuer à la caisse, ils n'ont pas de mesure particulière à faire à cet égard-là. Donc, on trouve que c'est un peu paradoxal, alors que, notamment cet été, le gouvernement lançait son opération avec les régimes volontaires d'épargne-retraite, de faire un appel à la retraite... pour contribuer à sa retraite, de dire en même temps aux gens dans le secteur municipal : Bien, vous, vous devez réduire votre contribution, et ça, indépendamment que le régime aille bien ou qu'il aille mal. Alors, je vais vous dire, sur cette position-là, notre point de vue, il est sans équivoque : on pense que cette disposition-là devrait être retirée du projet de loi.

Deuxième point qu'on voulait aborder, c'est la question du partage des déficits futurs. Alors, nous, on trouve que votre projet, sur cette question-là, est assez difficile à appliquer... sera inapplicable et va être très inéquitable parce qu'il va imposer, notamment, aux jeunes l'obligation de payer les déficits relatifs aux droits acquis de travailleurs qui les ont précédés. Alors, ce qu'il faut... En plus, je dirais — un autre élément qui a été bien exprimé par les intervenants précédents — ça augmente beaucoup l'insécurité des retraités, qui se demandent : Est-ce que mon indexation va être menacée, va être remise en cause, tout ça? Et ces gens-là sont parmi les plus vulnérables, effectivement, probablement pas d'autre moyen de pouvoir aller se chercher des revenus supplémentaires pour compenser. Alors, on pense que c'est un problème majeur pour ces gens-là, même si le ministre nous exposait ce matin qu'il n'y a pas grand monde, dans le fond, qui peut être visé par ça, parce qu'il dit qu'il y a 15 % des régimes qui prévoient l'indexation automatique. Mais les gens qui sont visés par ça, eux, ils le prennent personnel pas mal. Alors, on trouve qu'il n'y a pas nécessité de faire ça. Ce n'est pas une mesure qui va, je dirais, être structurante pour assurer l'avenir des régimes de retraite. Ça remet, quant à nous, en cause la nature même de ce que c'est, un régime de prestations déterminées, où tu devrais être assuré de ce que ça va être, ton revenu de retraite quand tu pars à la retraite, tu le sais, ça va être quoi, ton montant. Puis de jouer là-dedans, attaquer des droits acquis des retraités, on pense que c'est une mesure qui est très, très lourde de conséquences et on est tout à fait en désaccord avec ça. On pense qu'il y a moyen d'alléger le fardeau des rentes des retraités en permettant notamment aux promoteurs des régimes, là, d'acheter les rentes des retraités auprès de compagnies d'assurance afin de les garantir. Ça, c'est des moyens qui sont... qui assurent une certaine pérennité. Et l'autre élément majeur, évidemment, c'est celui de s'engager dans des changements structurels dans la méthode de financement des régimes. On pense que c'est comme ça qu'on va être capables de s'assurer qu'on va éviter dans l'avenir de se retrouver avec des déficits de l'ordre de ce à quoi, aujourd'hui, on veut s'attaquer.

Troisième mesure — j'y vais de façon synthétique, le plus vite possible, pour espérer rencontrer mon engagement — le partage 50-50 du service courant. Ça a l'air bien équitable, ça, de façon publique, de façon, je dirais, populiste, mais nous, on ne pense pas que ça ait non plus une mesure qui est équitable. On pense, encore une fois, ça aussi...

Il me reste une minute? Ah! Bien là, je n'aurai pas réussi avec mon engagement.

On pense que ça pénalise les jeunes. Ça ne modifie pas la hauteur de la facture, ça, ça fait juste changer la facture autrement. Alors, nous aussi, cet argument-là, on pense que le 50-50, ça ne vise pas la pérennité des régimes de retraite. On pense que ce que ça fait, c'est un objectif de réduction des dépenses des finances publiques des municipalités. Donc, c'est un détournement de sens par rapport à l'objectif du projet de loi. Ça force en plus la réouverture d'ententes... de conventions collectives qui n'en ont pas besoin, parce que, s'il y a des gens qui ne sont pas en situation de déficit, s'il n'y a pas de problème avec leurs régimes de retraite, pourquoi on va les forcer aujourd'hui à rouvrir leurs conventions collectives pour rétablir une forme de contribution différente équivalente à 50-50, s'ils n'ont pas déjà fait ce choix-là? S'ils veulent le faire, c'est une chose, mais, s'ils ne veulent pas le faire à ce moment-ci, il n'y a pas de raison de rouvrir des conventions collectives puis il n'y a pas de raison...

• (17 h 40) •

Le Président (M. Auger) : Juste un instant. Malheureusement...

Mme Lévesque (Francine) : Bien oui, je n'ai pas réussi.

Le Président (M. Auger) : ...le 10 minutes est écoulé, mais j'anticipe déjà un consentement pour que vous puissiez continuer.

Une voix : Pas ce coup-là.

M. Moreau : M. le Président...

Le Président (M. Auger) : Pas ce coup-là? Oui? Consentement?

M. Moreau : Mme Lévesque, vous n'avez pas respecté votre engagement; moi, je vais respecter le mien, je vais vous donner mon temps.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Lévesque (Francine) : ...je vous remercie.

Le Président (M. Auger) : Donc, nous prenons le temps sur la partie gouvernementale. Mme Lévesque, vous pouvez continuer.

Mme Lévesque (Francine) : Donc, si le gouvernement persiste avec cette décision de pouvoir... d'imposer le 50-50, nous, on pense que, puisque ça ne doit pas être une façon de travailler à assurer... à abaisser le niveau de financement des régimes, bien, il faudrait qu'il y ait des compensations, parce que, si les gens ont décidé dans le passé d'une certaine forme de partage des coûts du régime de retraite puis qu'ils modifient cette chose-là, bien, on ne veut pas non plus que ce soient des groupes qui soient pénalisés par rapport à leur rémunération globale dans le futur. Donc, on pense que ça impose nécessairement une compensation financière qui devrait être faite par la municipalité.

Il y a la question du problème de déficit actuel dont il est amplement question aujourd'hui. Là aussi... Je comprends qu'un régime de retraite en parfaite santé, il est capitalisé à 100 %, mais il peut être en excellente santé à 95 %, il peut être en bonne santé à 90 %, puis on peut avoir une santé d'un athlète olympique si on est capitalisés à 120 %, genre. Alors, moi, je pense qu'on ne peut pas appliquer la même médecine de cheval, si vous me permettez l'expression, à tous les régimes s'ils sont plus ou moins en bonne santé financière. Alors, nous, on pense qu'en deçà de 85 % de capitalisation il faut éviter d'imposer des restructurations. On pense qu'il devrait y avoir une forme d'«opting out», si vous me permettez l'expression. Et, par ailleurs, pour les régimes qui sont capitalisés en deçà de 85 %, bien, nous, on est tout à fait d'accord qu'ils puissent, eux, être soumis à une restructuration obligatoire dans la mesure où, évidemment, c'est lié à la survie du régime et que la réduction des droits acquis soit compensée par des versements, là, équivalents à la valeur des droits supprimés à ces salariés. C'est un élément, je pense, qui est majeur, là, dans toute la discussion autour de ce projet de loi.

Dernier point que je veux traiter, c'est la question du financement, donc le fonds de stabilisation. Je dirais, de toutes les mesures qui sont mises de l'avant dans le projet de loi, on pense que c'est celle qui est la plus importante et c'est celle qui s'attaque au fond du problème. S'il y a quelque chose à faire, bien, c'est sur ce point-là. Et nous, on est tout à fait d'accord avec les financer adéquatement, financer en fonction du niveau de risque de la politique d'investissement de ce régime de retraite là. Si on trouve une façon de simplifier la gestion des régimes pour être capables, là, de s'assurer que ce soit cohérent, le mode de fonctionnement du service courant par rapport aux éléments du service passé pour le futur, bien, nous, on est tout à fait d'accord que cette mesure-là, elle est tout à fait nécessaire et elle devrait faire l'objet de travaux qui vont nous amener à convenir d'un consensus sur la méthode de financement.

Donc, on est très conscients qu'il y a des ajustements à faire. On pense que la restructuration, elle devrait être appliquée obligatoirement et strictement aux régimes qui sont en difficultés financières. On pense que c'est important de favoriser la concertation des parties, qu'il faut assurer le maintien des régimes à prestations déterminées sur une base solide et durable pour le futur. Et, bien, nous, on en appelle évidemment à la sagesse du gouvernement pour travailler au nom du bien commun et de la paix industrielle. Je pense qu'il faut faire des efforts dans ce sens-là. Et, si c'est la voie que le gouvernement privilégie, bien, il va effectivement pouvoir compter sur toute la collaboration de la CSN. Voilà.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons procéder à la période d'échange. M. le ministre, vous avez une période de 21 minutes.

M. Moreau : Merci, M. le Président. Mme Lévesque, bonjour. M. Marcoux, rebonjour. En fait, je devrais vous dire rebonjour à tous parce qu'on a eu l'occasion déjà de se voir, Mme Joncas également. Merci de votre participation aux travaux de la commission.

Alors, vous ne nous donnez pas la note de passage. On a un sur cinq, là, si j'ai suivi votre dynamique. On va commencer par notre bon coup, le fonds de stabilisation. Vous êtes d'accord avec ça. Est-ce que vous êtes d'accord avec le niveau du fonds de stabilisation qui est prévu dans le projet de loi? Parce que le rapport D'Amours suggérait en fait qu'on ait un niveau de 20 %. Le projet de loi l'a limité à 10 % au-delà d'une capitalisation totale. Est-ce que vous êtes d'accord avec la façon dont le fonds de stabilisation est présenté dans le projet de loi?

Mme Lévesque (Francine) : En fait, je vous disais rapidement que nous, on pense que le niveau de contribution... le niveau de ce fonds-là doit être établi en fonction du niveau de risque que le régime prend dans la gestion de ses avoirs. Puis peut-être que je vais demander à Mme Joncas, là, de développer un peu plus sur ce volet-là, là.

M. Moreau : Oui, parce que je ne saisis pas ce que vous signifiez exactement, là, par ça, là, puis je ne le vois pas non plus dans votre...

Mme Joncas (Nathalie) : Sur le fonds de stabilisation, on a dit qu'on était d'accord parce que ça implique une modification complète, à peu près, de la méthode d'évaluation, de financement. Ce qu'on est en train de regarder...

M. Moreau : Je m'excuse, je ne veux pas vous interrompre, mais vous êtes d'accord que ça touche tous les régimes à prestations déterminées.

Mme Joncas (Nathalie) : Oui, ça devrait toucher tous les régimes.

M. Moreau : Ça veut dire, s'il y en a 172, là — parce que je sais que les chiffres varient, mais on calcule qu'il y en a 172 — les 172 régimes devraient être touchés par cette mesure-là.

Mme Joncas (Nathalie) : Ce qu'on vous dit... On va même plus loin. Ce qu'on pense, c'est que la... Présentement, la méthode de capitalisation, telle qu'elle est utilisée, elle nous a conduits à la situation qu'on a présentement. Vous êtes en train de faire une grosse réforme puis vous nous dites : Bien, la méthode, elle va très bien. Nous, on vous dit : La méthode, elle ne va pas bien, elle nous a conduits dans la situation qu'on est là. Ce n'est pas nécessairement seulement la crise financière, c'est une série de choses qui s'appliquent, une série de façons d'évaluer qui font en sorte qu'on prenait les surplus trop rapidement, peut-être, qu'on payait pendant trop longtemps les déficits, qu'on permettait des choses. Donc, ce qu'on vous dit : On est d'accord avec un fonds de stabilisation, mais on doit aller plus loin aussi, on doit revoir l'ensemble de la méthode de financement. Et la majorité des travaux, à chaque endroit qu'il y a des fonds de stabilisation, si tu as 90 % de ton argent investi dans des actions, bien, tu as besoin de pas mal plus que 10 %; si tu es 50-50, tu as besoin d'un petit peu moins; si tu as 50 % en obligations, 50 % en actions... Il y a beaucoup de documents de travail qui sont là-dessus. Beaucoup d'experts... L'institut canadien a sorti ces éléments pour... c'est quoi, le niveau, puis le niveau doit être en fonction de comment tu investis ton argent. Mais ça ne peut pas être — et ça, c'est un des problèmes du projet de loi — une mesure isolée, le fonds de stabilisation. Ça doit être cohérent avec l'ensemble de la méthode d'évaluation. Et, si vous faites ça seulement comme ça, on va encore se retrouver dans la même situation dans 10 ans.

M. Moreau : Si on demande aux parties de capitaliser à 100 % les régimes et qu'on ajoute un fonds de stabilisation, qu'est-ce qui pourrait faire qu'on se retrouve dans cinq ans ou, vous avez dit, dans 10 ans dans la situation actuelle? La situation actuelle, elle est provoquée... Il y a des déficits qu'on n'a jamais voulu regarder puis qu'on n'a jamais voulu régler. Il y a l'effet du marché et il y a le poids de l'indexation automatique sur les régimes. Il y a le fait qu'on a de plus en plus de retraités, il y a un critère démographique aussi à ça. Si, pour pallier à cette situation-là, on dit : Les régimes doivent être capitalisés à 100 %, qu'il y a un fonds de stabilisation, au-dessus de cette capitalisation-là, de 10 %, qu'est-ce qui ferait que, dans une situation semblable, si on réussit à amener tous les régimes là, on se retrouverait dans la même situation que celle que l'on vit là dans cinq ans ou dans 10 ans?

• (17 h 50) •

Mme Joncas (Nathalie) : Bien, on a eu de tout temps, là, dans les années 80, des fonds qui étaient à 150 %, à 120 % puis à 130 %. Il n'y a rien qui garantit ça, parce que la loi, elle permet d'aller chercher des surplus après 110 % puis après 115 % ou elle permet de... La méthode de financement, c'est une série d'éléments, ce n'est pas juste d'avoir une réserve. Puis une réserve de 10 %, là, il y a beaucoup de régimes qui en avaient, là, dans les années... quand ça allait bien, puis ils avaient même plus que ça, puis on s'est quand même retrouvés en déficit. Donc, ce qu'on vous dit... Puis les éléments que vous avez nommés... je ne vous les renommerai pas, mais tous ces éléments-là se gèrent de façon correcte si on modifie la méthode, parce que la méthode, on a fait beaucoup de tests, elle n'est plus adéquate. La solvabilité n'est plus adéquate pour les régimes du privé, puis la méthode de capitalisation, telle qu'elle est là, elle nous a amenés où on est là.

M. Moreau : Oui, mais parlons... Je comprends, là, qu'il y a les régimes du privé, là; parlons des régimes dans le domaine municipal. Vous me dites : Bon, il ne faut pas juste regarder le fonds de stabilisation, parce que la méthode risque de nous ramener là. C'est la raison pour laquelle on vous dit : Vous devez avoir une capitalisation qui amène une santé financière du régime. Tantôt, vous disiez : On peut avoir une santé olympique à 120 % ou on peut avoir une bonne santé à 100 %. On peut avoir une moins bonne santé à 85 %. Pourquoi est-ce que vous fixez... Si vous avez une crainte de vous retrouver dans la situation actuelle dans cinq ans ou dans 10 ans, pourquoi est-ce qu'on prendrait le risque de sous-capitaliser le régime à 85 % en disant : Bien, je le regarde maintenant comme un régime en santé? Pour quelle raison est-ce que vous résistez à l'idée de dire qu'un régime en santé est capitalisé à 100 %? Pourquoi est-ce que vous ne voulez pas lancer ce chiffre-là? Est-ce qu'il y a un...

Mme Lévesque (Francine) : Bien, ce à quoi on résiste, M. le ministre, c'est l'idée qu'il faut immédiatement, de façon urgente, de façon uniforme, partout, obliger tout le monde, quelle que soit sa situation, à refaire des... à rouvrir sa convention collective, d'une certaine façon, parce que le régime de retraite, c'est un élément de la convention collective, et il faut combler de telle manière le déficit. Nous, on dit : Il y a du monde, quand ils sont financés en deçà de 85 %, on est d'accord avec vous, il y a une urgence à prendre des décisions; quand ils sont financés peut-être à 90 % ou à 95 %, on peut très bien attendre le renouvellement de la convention collective, on peut très bien attendre de voir des fluctuations à moyen et à long terme, il y a une urgence qui est moins grande de s'appliquer ce remède de cheval qui impose un non-respect du droit à la négociation. Parce qu'on a eu des ententes. Ces ententes-là, elles ne datent pas du temps de Mathusalem, là. Elles ont été convenues, en général, depuis la dernière crise financière, tout ça, par des administrations municipales et par des organisations syndicales qui connaissaient le portrait, qui avaient une évaluation de leurs situations, tout ça.

Alors, si aujourd'hui la situation est criante pour certains, regardons la situation criante pour certains maintenant, mais laissons le temps à ceux et à celles qui ne vivent pas cette situation-là de trouver, d'imaginer des moyens de résoudre leurs difficultés moins grandes puis qui pourraient aussi déborder du cadre du régime de retraite, qui pourraient aussi impliquer d'autres éléments de rémunération. Et ça, nous, on pense que ça se ferait en tout respect des ententes. Vous savez, c'est compliqué, nous, d'aller voir nos membres, là, puis de leur dire : On va travailler autrement, tout ça, puis là ça va marcher pour le futur, mais on ne peut pas respecter les engagements qu'on a pris ensemble et les contrats qu'on a signés ensemble avec nos administrations municipales, s'il n'y a rien d'important qui le justifie. Et, en plus, je vous dirais que, d'expérience, si vous regardez les lieux où on est intervenus dans plusieurs situations très difficiles — c'est peut-être plus dans le secteur privé qu'on pourrait en témoigner — bien, on les fait, ces débats-là. Les gens, là, les travailleurs, les travailleuses, ils sont préoccupés de l'avenir de leurs régimes de retraite, ils ne veulent pas les mettre en danger, se retrouver en situation qu'ils soient obligés de cesser leurs régimes ou confrontés à toutes sortes de choix très compliqués.

Là-dessus, M. Marcoux, lui, c'est son quotidien, comme responsable de négociation, comme responsable de fédération, et Mme Joncas, bien, elle, c'est son quotidien aussi parce qu'elle est appelée en appui à régler les cas... les causes désespérées, des fois, les situations difficiles. Alors, peut-être que chacun aura de quoi à ajouter, là, sur ce que je viens de dire.

M. Moreau : Oui. Mais je ne veux pas les empêcher de s'exprimer, là, je veux juste ne pas perdre l'idée, là. Mme Lévesque, je vais essayer quelque chose que j'ai essayé avec votre collègue de la FTQ, M. Cadieux. Vous parlez d'un remède de cheval, mais vous dites en préambule : On partage l'objectif du gouvernement d'assurer la pérennité; on pense que c'est des bons régimes, les régimes à prestations déterminées. On n'a pas le même... on partage les inquiétudes, quoiqu'on dit : On n'a pas le même niveau d'urgence pour tout le monde.

Quand vous faites référence à un remède de cheval, ce que vous introduisez dans la discussion, c'est la notion d'intervenir de façon différente selon le caractère mal en point du régime. Et donc ce que vous voulez introduire, c'est une notion de délai. J'ai essayé tant que j'ai pu tantôt, avec M. Cadieux, il n'a pas répondu à cette question-là. Je vais essayer avec vous : Est-ce que, dans ce contexte-là, vous estimez que le fait de régler les déficits passés et d'y accoler un délai, parce que le remède est de cheval si on demande de l'acquitter immédiatement, peut être une solution possible? Vous me parlez du respect des ententes signées. Le projet de loi prévoit, là, une clause de négociation en 2016, qui oblige en 2016 et qui reconnaît les ententes qui se terminent en 2017. Vous dites : Dans certains cas, j'en ai en 2018. Toujours, cette notion-là, c'est une notion de délais additionnels : plutôt que de payer tout de suite le déficit, on va l'étaler dans le temps selon la santé du régime. J'essaie. J'essaie.

Mme Lévesque (Francine) : Bien, c'est plus large que ça. Je vais demander à Mme Joncas...

M. Moreau : O.K.

Mme Joncas (Nathalie) : Bien, le remède de cheval, là... Puis je ne veux pas que vous vous trompiez; on partage vraiment l'urgence puis le fait qu'on veut que les régimes soient en bonne santé financière. Quand, là, la crise est arrivée puis que les régimes étaient vraiment en difficulté, le gouvernement, là, le gouvernement libéral, nous a conviés pour des mesures d'allégement, parce qu'il nous a dit : Il faut respecter les contribuables qui paient trop de montants d'amortissement. Et il y avait des problèmes. Donc, on a trouvé une méthode pour balancer les frais des contribuables, la sécurité des prestations puis les ententes qui étaient promises. Donc, on a agi à ce moment-là.

Quand on vous dit 85 %, c'est qu'il n'y a personne... il n'y a aucun régime de retraite où les bénéfices ont été coupés, où les rentes ont été suspendues. Et ça, c'est des mesures exceptionnelles que de couper des bénéfices et de suspendre des rentes pour ramener un pourcentage de capitalisation plus élevé. Ça fait que, ce remède-là de cheval, on doit l'appliquer à 85 %. C'est sûr qu'à 90 % on n'est pas en supersanté financière. Tout le monde vise à s'en aller à 100 %, mais ça ne devrait pas se faire par des coupures de bénéfices. C'est juste ça qu'on vous dit. Puis on vous dit que — je veux juste terminer, 30 secondes — ...

M. Moreau : Oui.

Mme Joncas (Nathalie) : ...il y a d'autres moyens pour se ramener à 100 %, se ramener à 110 %, se ramener à 120 % et avoir un meilleur régime qui ne dit pas qu'on doit couper des prestations. Nous, on vous dit : On est d'accord pour avoir cette affaire-là, exceptionnelle, mais seulement en bas de 85 % parce que c'est une mesure exceptionnelle.

Et, juste pour terminer, des régimes à 90 %, ça existe depuis à peu près 30 ans, puis il n'y a jamais eu besoin de couper des bénéfices pour qu'on soit capables de les ramener à 100 %.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

M. Moreau : Je ne veux pas vous interrompre, mais c'est difficile de ne pas le faire. Bon.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Moreau : Je vous le dis en toute amitié, là. Alors, le remède de cheval, on va faire un petit bout. À 85 %, vas-y, mon homme, on fait le remède de cheval. À 95 %, on n'est pas en «supersanté». Je reprends vos mots. Je ne veux pas vous prendre au mot, je reprends votre expression. Est-ce que vous n'êtes pas en train de me dire tranquillement que, dans le cas des régimes, par exemple, à 85 %, il devrait y avoir un règlement immédiat ou plus immédiat et qu'on pourrait introduire une notion de délai ou d'importance de correction dans ceux qui sont en bas de 100 %, parce que vous reconnaissez implicitement — puis je vous remercie de le faire — qu'un régime en santé, c'est un régime qui est capitalisé à 100 %?

Mme Joncas (Nathalie) : Ce remède-là, entre 85 % et 100 %, ne doit pas inclure de coupure de bénéfices. Ça peut être...

M. Moreau : ...quoi? C'est quoi? C'est quoi, la solution, en...

Mme Joncas (Nathalie) : De tout...

M. Moreau : Simplement, là, la question : C'est quoi, la solution, pour vous, entre 85 % et 100 %? Parce qu'à 100 % on est en santé, en bas de 100 %, on ne l'est pas. Vous reprenez, dans le fond, la position que nous donne M. D'Amours, ce matin, sur sa vision d'un régime en santé. Bravo! C'est quoi pour vous... Comme disent les Anglais, «give me your best shot». C'est quoi, la solution, pour vous, entre 85 % et 100 %, si ce n'est pas des coupures de prestations?

Mme Joncas (Nathalie) : C'est qu'où on ne partage pas votre alarme, c'est que, de tout temps, des régimes entre 85 % et 115 %, les évaluations actuarielles font toujours en sorte qu'on est dans cette fourchette-là. Que tu sois un peu en bas, que tu sois à 90 % ou que tu sois à 110 %, ce n'est pas un problème. On a parlé souvent, là, des contribuables. Si on obligeait les contribuables à financer toujours les régimes à 120 % puis à 130 %, ce serait leur demander de financer trop, ça nous amènerait des surplus beaucoup trop importants non plus. Donc, il n'y a pas une urgence. C'est normal qu'un régime à prestations déterminées, à certains moments, soit à 90 %. On commence tranquillement à payer des montants d'amortissement. Et les syndicats, là, souvent, augmentent leurs cotisations, l'employeur augmente ses cotisations, on a une période de 15 ans pour s'y rendre. Tranquillement, on avance vers là. Il arrive des surplus. Tranquillement, on les diminue. Il n'y a jamais une évaluation actuarielle qui dit : Aujourd'hui, on est à 100 %. C'est nécessairement en haut ou en bas, et ce n'est pas alarmant.

• (18 heures) •

M. Moreau : Bien, c'est-à-dire, un instant, là. Tu sais, sur la question d'être alarmé, c'est une question d'appréciation. Vous partagez un point de vue de dire qu'un régime capitalisé à moins de 100 % n'est pas en santé. Il est en meilleure santé plus il se rapproche de 100 % et il est totalement en santé à 100 %. Vous me dites oui au remède de cheval à 85 % et moins. Entre 85 % et 100 %, vous dites : Là, on peut aller vers une augmentation des cotisations, mais dans un élément progressif pour tenir compte du fait qu'on doit... plus on se rapproche de 100 %, moins l'impact doit être important. C'est ce que je comprends de votre propos.

Maintenant, qu'est-ce qu'on fait avec la question des déficits passés? Est-ce que vous êtes d'avis, vous, que les déficits passés, là, le 3,9 milliards qui est là aujourd'hui... Puis, dans la situation d'aujourd'hui, j'ai des régimes qui sont capitalisés à 100 %, très peu, mais j'en ai, c'est 172. J'en ai qui sont capitalisés un peu en haut de 100 % puis j'en ai beaucoup qui sont en bas de 85 %, j'en ai beaucoup qui sont en bas de 100 %. Qu'est-ce que je fais avec ces déficits-là? Pour vous, c'est quoi, la solution? C'est d'escompter que le marché va régler la situation tout seul ou si c'est de les payer? Et, si je les paie, qui les paie, puis comment on les paie?

Mme Lévesque (Francine) : ...va vous donner son opinion là-dessus.

M. Moreau : Good!

M. Marcoux (Denis) : Moi, ça a été mentionné, on est aux opérations dans à peu près plus ou moins 150 municipalités, des syndicats, et je vous dirais que... Pourquoi on dit 85 %, là? Parce que, ça a été mentionné, il y a des mécanismes qui font en sorte qu'il y a une fluctuation qui est normale dans la vie d'un régime de retraite, et, quand ça va en bas de 85 %, donc, soit qu'il y a eu des problèmes structurels qu'on a connus en 2008... donc, on approche le problème de façon ponctuelle, et c'est ce qui a été fait. Et là on arrive avec une loi d'exception qui va venir faire en sorte qu'on va à peu près éliminer les bases normales ou qu'on connaît, qui fonctionnent en termes de relations de travail dans ce secteur-là.

Pour l'opinion contraire pour les déficits passés, là, on a plusieurs endroits où on a négocié avec la CSN des... même des endroits où on a augmenté les cotisations des gens sans bénéfices rattachés pour donner la chance, tu sais, de regarder ça de façon globale. Parce que, quand on est en négociations, il n'y a pas juste le régime de retraite, ça a été mentionné, c'est global, et on regarde l'organisation du travail, on regarde... On a même des ententes, à Montréal, la société de transport, qui font en sorte qu'on a été capables de mettre en place un processus d'amélioration continue de l'organisation lié avec le régime de retraite, financer le régime de retraite à partir de ces économies-là. Donc, il y a une panoplie d'outils qu'on a à notre disposition. Et je suis très inquiété quand on regarde la structure du projet de loi à l'heure actuelle, parce que, quand on regarde les grandes dimensions, on passe, là, du projet de loi, là... le mécanisme de restructuration. On regarde l'article 5, donc : le 50-50, c'est imposé, ce n'est pas négocié, donc, ça, c'est obligatoire; les déficits futurs, c'est réglé, c'est obligatoire; le plafond du 18 %, c'est obligatoire, puis ça, ça n'a rien à avoir avec la santé financière d'un régime, là, c'est obligatoire; et il y a le fonds de stabilisation qui est obligatoire, mais nous, on dit qu'il faut moduler les affaires en fonction du niveau de risque.

Vous parliez tantôt, un régime, là, qui possède — puis ça n'existe probablement pas, là — 90 % en actions puis 10 % en obligations, quand on a une situation comme 2008, on peut-u s'entendre qu'ils vont être frappés beaucoup plus durement que quand on est en 50-50, tu sais? Donc, c'est pour ça qu'on dit que ces mécanismes-là font en sorte qu'on est capables de stabiliser, mais il faut laisser le temps au temps de faire leur travail.

Qu'est-ce qu'il nous reste à l'arbitrage? La seule chose qu'il reste à l'arbitrage, c'est les déficits pour le service passé. C'est la seule dimension qui va être arbitrée, là. Les autres sont imposées. Moi, il y a du monde, aujourd'hui, qui ont passé ici, là, puis ils nous ont dit que c'était le Klondike, puis tout ça. Mais ce n'est pas de la négociation, ça. Ce n'est pas de la négociation. Quand on dit, là, qu'on n'a rien à négocier, le seul choix qu'on a quand on se présente aux tables de négociation, là, on dit qu'on va nous couper le bras, on va avoir le choix de l'outil : un couteau de cuisine, un scalpel ou une chain-saw. Ça va être ça, les choix qu'on va avoir à la négociation. Ça fait que ce n'est pas de la négociation, et ceux qui ont répété ça, là, hein, avec tout le respect pour l'opinion contraire, c'est des gens qui ne connaissent pas la négociation. Parce qu'on ne peut pas arriver à une table de négociation quand on connaît la piste d'atterrissage puis que la piste d'atterrissage va nous être imposée. De un, tu élimines tous les outils aux alentours, et la négo est pipée d'avance, les dés sont pipés d'avance.

Le Président (M. Auger) : M. le ministre, une minute.

M. Moreau : Ouf! Une minute. Bon, je vais l'essayer en une minute. Peut-être que j'aurai le consentement de la partie... du parti de l'opposition pour vous laisser répondre.

Une voix : ...

M. Moreau : Hein? C'est ça, oui. Ça va être bon. Écoutez, vous dites : Bon, dans certains endroits, là, on le fait, là, là, puis nous, on a négocié le règlement des déficits passés. Comment je fais pour introduire une obligation de résultat? Parce que l'idée, là, c'est que, dans bien des cas... Je comprends, il y a les éléments de la loi dans la situation actuelle, mais comment je fais pour imposer une obligation de résultat au règlement des déficits passés dans le contexte d'une négociation? Ce que vous demandez, essentiellement, c'est de dire : Donnez-moi un délai pour le faire. Et c'est ce que j'ai essayé d'avoir avec vos collègues de la FTQ, que je réessaie avec la présidente de votre table aujourd'hui, puis là je vais l'essayer avec vous. Dans le fond, ce que vous me dites : M. le ministre, donnez-moi un délai, parce que ça me prend un petit peu de temps pour le négocier. Est-ce que vous êtes prêt à convenir qu'en contrepartie d'un délai vous êtes prêt à vous assujettir à une obligation de résultat sur le règlement des déficits passés?

M. Marcoux (Denis) : M. le ministre, j'aurais le goût de vous dire : Meilleure chance la prochaine fois.

M. Moreau : ...

M. Marcoux (Denis) : Non, non, mais ce qu'on dit, là, c'est qu'en bas de 85, là, hein, il y a un problème qui arrive à quelque part, dans la façon qu'on fonctionne, qui est ponctuel. On va s'asseoir, hein, et on va regarder les solutions globalement, parce que c'est une question de rémunération globale qui va faire en sorte... qui va nous ramener à 85 %, O.K.? Il y a des régimes, là... Puis je suis membre d'un régime, là, qui a fluctué beaucoup dans le temps, là, hein, et on est à peu près capitalisés, puis le régime, là, il n'est pas arrivé aucune catastrophe parce qu'on était à 90 %, hein? On travaille avec des hypothèses actuarielles, hein, on introduit plus de conservatisme, on se développe une politique de placement qui prend en cause tous les risques, hein, il y a un comité qui gère les placements de façon... avec une politique de placements qui est adéquate. Il faut laisser le temps aux outils de faire leur travail. C'est ça qu'on vous dit, hein?

M. Moreau : Je vous demande combien de temps, vous refusez même de répondre à cette question. Moi, je vous dis très sincèrement : Quand on parle de souplesse...

Le Président (M. Auger) : M. le ministre.

M. Moreau : Bien, oui, je sais que j'ai passé mon temps...

Le Président (M. Auger) : Oui, exactement.

M. Moreau : ...il va me laisser finir ma phrase. Quand on parle de souplesse et d'ouverture, c'est aussi de ça dont on parle. Ce n'est pas une voie à sens unique, la souplesse et l'ouverture. Et je conçois mal... puis je vous le dis honnêtement, en toute amitié, l'idée, c'est de garder les passerelles de communication, mais je ne comprends pas que ce soit impossible de répondre à ce genre de question là. Je conçois très bien que, comme représentant des organisations syndicales, vous dites : Moi, je ne suis pas là pour me tirer une balle dans la tête, me harakirir ou avoir des gens en arrière de moi qui entendent que faire un effort, c'est facile. Tout le monde comprend ça, mais vous ne vous rendez pas jusque-là parce que... Je ne sais pas, honnêtement, pourquoi.

Moi, j'essaie de vous dire : On peut regarder des solutions, mais, s'il n'y a pas de garantie de résultat, il n'y a pas d'obligation de résultat, il n'y a pas de condition de résultat, on a une difficulté.

Le Président (M. Auger) : Je vais maintenant céder la parole au député de Sanguinet.

M. Moreau : Oui, je m'excuse, M. le Président. Je me rends. O.K.

Des voix : ...

• (18 h 10) •

M. Therrien : Alors, merci, M. le Président. Je vous souhaite la bienvenue. Je suis très content de vous voir. Écoutez, je vais un peu résumer, là, ce qui s'est dit depuis une vingtaine de minutes, là. Puis j'aimerais ça que vous me corrigiez, là, si ma compréhension n'est pas adéquate, là. Vous dites, en gros, parce qu'il y avait des actuaires avant qui... en tout cas, soit dans la commission sur le rapport D'Amours ou... Aujourd'hui, il y en a même qui ont dit ça, que les actuaires, ce n'est pas une science exacte. Tu sais, des fois, ils ont des hypothèses, à cause que c'est économique, souvent, les hypothèses, puis c'est difficile de prévoir l'économie, là, et, à cause de ça, vous dites : Bien, ça oscille, hein? Tu sais, c'est difficile de tomber sur la pine à 100 %, ça fait que ça oscille, 90 %, 95 %, 100 %, 105 %, des fois. Et, bien, ce qui arrive, c'est qu'à partir du moment où est-ce que ça oscille, bien, quand vous avez... quand ça a tendance à coller un peu en bas, bien là vous y allez avec une demande — je parle plus à vous parce que vous êtes négociateur — dire : Bien, regarde, à quelque part, ça prend de l'oxygène, parce qu'on colle à 85 %, 90 %, 92 % puis on a de la misère à relever un peu, donc il faudrait aller chercher des... hein, un petit peu d'argent chez nos employés. Parce qu'à quelque part vous devez vous assurer que le régime est en santé. Je veux dire, si je régime est en santé, c'est vous qui êtes victorieux là-dedans, c'est votre monde, bon. Alors donc, moi, c'est ce que j'ai compris, puis c'est pour ça qu'on parle, là, de dire, là, bien, que tout le monde doit aller, là — vous dites «se faire couper le bras» — tout le monde doit aller dans cette négociation un peu... très, très, très balisée et se dit : On n'a pas besoin de faire ça, parce qu'on est conscients qu'on doit avoir un régime en santé.

Ceci étant dit, vous parlez du... — puis là je veux juste poursuivre là-dessus — vous avez parlé de méthodes d'évaluation puis de gestion de portefeuille. Si j'ai compris, vous dites que le fonds de stabilisation de 10 % ne devrait pas être fixé à 10 %, ça dépend de la nature du portefeuille que vous allez construire. C'est-u ça que j'ai compris, là? C'est ça, j'ai compris?

Mme Joncas (Nathalie) : Oui, vous avez bien compris. Merci.

M. Therrien : Bon, O.K. Et vous avez dit que le problème était sur la méthode d'évaluation. Pouvez-vous peut-être en dire un peu plus par rapport au problème qu'on avait vécu antérieurement, là? Puis ça, vous avez parlé de ça rapidement, puis j'ai comme... Ça, je n'ai pas compris. Alors, j'aimerais ça que vous reveniez là-dessus.

Mme Joncas (Nathalie) : Bien, je trouve que vous avez vraiment bien résumé c'est quoi, un régime de retraite. Et pourquoi les prestations déterminées fonctionnent comme ça? Parce que, dans les fluctuations quand ça va moins bien, on paie, on commence à payer; quand ça va mieux, on commence à récupérer. Pourquoi les participants, dans le fondement même d'un régime à prestations déterminées, ils n'assument pas les déficits? C'est parce que, si on avait à payer pendant trois, quatre ans, il y aurait des gens qui paieraient trois, quatre ans, il y en a qui partiraient à la retraite, puis là, tout à coup, tu as des jeunes qui arrivent, puis là, woups!, ils profitent des surplus. Puis c'est très, très, très difficile d'avoir une équité, c'est même impossible quand, pendant cinq ans, il y en a qui vont payer puis, pendant les cinq prochaines années, dans la fluctuation, il y en a qui vont prendre les montants. Donc, dans ce que vous avez expliqué, c'est pour ça que le fondement même d'un prestations déterminées, c'est l'employeur qui sert de... je dirais de «buffer», là, mais ce n'est pas... Donc, il avance et il se récupère.

Ce que les syndicats ont négocié puis ce qu'on a à plusieurs endroits, c'est des clauses banquier. C'est qu'on dit : Tu vas payer, et là tu te récupéreras dans les montants qui vont être les surplus. On va te les donner, parce que ça, c'est la façon équitable, et là tu peux balancer tes choses. Ça, c'est vraiment... c'est pour ça que c'est équitable quand c'est l'employeur, pas parce qu'on veut qu'il paie, mais parce que lui, il est capable d'avoir les plus, et d'avoir les moins, et, au long terme, d'avoir un coût... Souvent, on dit : Nous, ce qu'on veut payer, c'est 50-50 ou 40-60, on va le faire sur le long terme. Quand ça va mal, paie-z-en un peu plus, récupère-toi, puis, à la fin, on va toujours être 40. Mais, si on le fait payer par les participants, ça devient totalement inéquitable. Donc, ça, c'est une des façons de... C'est la méthode, et, dans la méthode, ce n'est pas en disant : Là, les participants, vous allez tout de suite payer, puis, regarde, on va vous... ceux qui seront à la retraite, qui auront quitté, on va prendre vos adresses puis on va vous retourner de l'argent plus tard. Ça, c'est tout dans la méthode et c'est comme ça. Quand tu le revois, tu fais une marge, et là plus ton régime est... plus tu as de chances de tomber en bas, plus tu dois faire une marge importante. Ça, c'est la méthode.

Et je dirais juste... Quand on dit : De 85 % à 100 %, c'est de cette façon-là ou par des ententes de négociation qu'on est capables de ramener ça. Et ce que le ministre, il essayait de nous faire dire, c'est que, oui, on va se couper ou on va payer pour se ramener de 85 % à 100 %. Mais nous, on dit : De 85 % à 100 %, on ne veut pas avoir à subir cette coupure-là comme participants, parce qu'après ça est-ce que vous allez être capables de nous redonner? Il y a d'autres façons de gérer ces fluctuations-là que de couper. Quand c'est exceptionnel, on peut le faire, mais il y a d'autres façons de gérer ces façons-là qui soient équitables tant pour les contribuables que pour les participants.

M. Therrien : Et puis c'est pour ça que... En tout cas, puis là je prolonge mon analyse, là, c'est pour ça que, si la négociation des retraites ou des fonds de retraite est à l'intérieur d'une rémunération globale, vous qui êtes négociateurs, si j'ai bien compris, ça vous donne plus de latitude, si on n'a pas trop de balises non plus, ça vous donne plus de latitude pour pouvoir mettre de l'oxygène dans le fonds de retraite, pour dire, par exemple, aux employés : Bien, regardez, mettez-en... peut-être, demandez moins d'augmentations de salaire puis envoyez ça dans le fonds de retraite, parce qu'on en a besoin pour x raisons. Donc, le fait qu'on ne soit pas trop paramétrés dans notre façon de gérer le fonds de retraite vous permet d'obtenir des négociations qui sont plus fructueuses puis qui garantissent la pérennité du système. Est-ce que c'est correct, ce que je dis, ou...

Mme Lévesque (Francine) : Moi, je pense que oui, ça va assez, ce que vous dites, et j'ajouterais que, sur une base régulière, à chaque renouvellement de convention collective ou à chaque évaluation actuarielle, on a l'occasion de se faire les réajustements nécessaires. Donc, ce n'est pas un contrat en blanc puis ce n'est pas juste pelleter par en avant, là. Ce qu'on dit, c'est : On est prêts à le regarder, on le regarde dans le cadre des négociations des conventions collectives. Et que le projet de loi nous dise : Vous devez tendre de plus en plus là-dessus, on ne veut plus permettre des situations où des régimes de retraite se retrouvent vraiment sous-capitalisés, on ne veut plus obliger non plus, à chaque fois qu'il y a des surplus, à dire qu'il faut qu'on dilapide ces surplus-là, bien, ça, c'est des éléments relatifs au mode de financement qui devraient nous permettre d'avoir l'action dans la majorité des régimes de retraite, qui permettent de rétablir les choses sans qu'on soit obligés de s'imposer un non-respect des ententes négociées, sans qu'on soit obligés de s'imposer le remède de cheval à tout le monde. Et Denis Marcoux voulait ajouter un petit bout là-dessus aussi.

M. Marcoux (Denis) : Oui. Moi, je veux revenir sur la négociation — et je pense que vous avez bien résumé notre propos — sur l'histoire de la rémunération globale. Moi, demain matin, là, si on impose les paramètres que vous avez mentionnés, là, avec les quatre impositions unilatérales, puis mon histoire d'aller me faire couper le bras en arbitrage, puis... C'est une petite anecdote. En 1997, 1998, M. Guay, qui était le père de ça, avec la loi n° 414, il y avait ces dimensions-là. Et il y avait également la clause «opting out», hein? Et les gens, je pense que c'est 80 % que les gens ont utilisé cette clause «opting out» là pour justement préserver les relations de travail, et la paix industrielle, et adapter ces réalités-là...

Les places où on a eu à aller en arbitrage, hein, je vous dis, là, les gens ont décidé de ne même pas déposer de proposition pour se couper eux-mêmes. Donc, c'est des places où on s'entend que ça n'allait pas très bien, hein? Bon. Et ça va être la même affaire, là, ça va être la même affaire. Moi, je me présente à l'assemblée générale, là, pour décider, là : On coupe ça, on coupe ça, ou coupe ça. Les gens vont dire : Bien là, laissez-leur faire la job, on ne décidera pas d'aller se couper.

Puis, une autre affaire, comment on va faire pour... Tu sais, quand on regarde, on structure une démarche de négociation, hein, le processus est assez simple, même si, des fois, il est un peu plus difficile. On va voir notre monde, on regarde les priorités, on développe ensemble un projet de convention avec des choix qui regroupent l'ensemble de la rémunération. Si, a posteriori, on vient leur dire que le choix qu'ils ont fait sur la retraite... désolé, on est obligés de repasser à la caisse à cause d'un projet de loi qui nous impose des affaires, comment, en termes de crédibilité, hein, dans un débat où on veut promouvoir l'épargne, je vais être capable de me présenter devant le monde en disant : On va faire tel, tel taux sur la retraite, qu'est-ce qu'on va se faire dire, comme syndicat, hein? On ne pourra plus avoir la crédibilité, comme syndicat, hein, compte tenu de ce qui va s'avoir passé dans le projet de loi, de favoriser l'épargne par les choix qu'on va faire sur la rémunération globale liée à la retraite. C'est terminé, ça. Parce que les gens vont dire : Amène l'argent, je vais m'organiser avec mes affaires.

Puis, je vous dis, là, moi, j'ai passé à travers de plusieurs... lors de la fusion des municipalités, hein? Il y en avait des petites, il y en avait des grandes. Je vous le dis, M. le ministre, là, je n'ai pas jamais eu une part aussi... je n'ai jamais eu une période aussi dure de ma militance quand on a fait ça. Quand on arrive dans une ville, là, où il y avait des REER, il n'y avait pas des obligations, puis les gens n'avaient pas fait ces choix-là, tu arrives avec quelqu'un, une personne, 53, 54, à deux, trois ans de sa retraite, hein, avec un REER qu'il lui reste à peu près 15 000 $ parce qu'il s'est payé le voyage, le 10 pieds de roulotte, le 10 forces de moteur de plus, tout au long de sa vie, il a décaissé puis il arrive à deux, trois ans de sa retraite, c'est des catastrophes humaines, ça, M. le ministre. Des catastrophes humaines. Et ça, là, c'est ça qu'on veut éviter, là, avec ce type d'outil là puis ce type de régime là.

Le Président (M. Auger) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Vachon.

• (18 h 20) •

Mme Ouellet : Oui. Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Lévesque et toute votre équipe. Vous nous donnez un son de cloche assez différent de ce qu'on a entendu depuis un certain temps dans les médias et même aujourd'hui. Vous nous dites que la CSN ne considère pas que les régimes de retraite du secteur municipal soient tous en difficulté, loin de là. Et vous ajoutez qu'au 31 décembre 2013 le taux de capitalisation médian des régimes de retraite se situait autour de 90 %. Donc, une santé des régimes de retraite, en tout cas, pas mal meilleure que ce qu'on a entendu dans les médias.

Et je veux justement revenir à la question de la santé, le baromètre de la santé financière des régimes de retraite. De ce que j'ai compris de Mme Joncas, puis vous me corrigerez si ce n'est pas exact, j'ai comme compris que, dans votre notion de santé du régime de retraite, ce n'est pas seulement que la capitalisation, mais qu'il y a aussi des éléments de méthode de financement qui doit sûrement inclure la politique de placement, parce que j'imagine que, si du placement est dans du papier commercial, par exemple, ce n'est pas la même santé que si le placement est dans des obligations. Donc, j'aimerais vous entendre, parce que vous avez dit, plus tôt : Des choses importantes à réviser dans les régimes de retraite, qu'ils soient municipaux ou peut-être autres, mais parlons de ceux municipaux, c'est la méthode de financement et les méthodes d'évaluation, parce qu'encore là la capitalisation puis le niveau en fonction des hypothèses d'évaluation — et des hypothèses en actuariat, c'est toujours une boule de cristal — si elles sont au-dessus ou en dessous, ça a un impact favorable ou défavorable sur les régimes de retraite directement. Et ça, c'est, entre guillemets, fictif, parce que, si l'hypothèse ne reflète pas la réalité, ça ne se concrétise jamais. Donc, j'aimerais ça vous entendre sur ça.

Le Président (M. Auger) : Mme Joncas, une réponse en 30 secondes, s'il vous plaît.

Mme Joncas (Nathalie) : Oui. Bien, un des éléments, je pourrais vous dire, puis vous regarderez nos mémoires dans les 10 dernières années, ça fait longtemps qu'on dit que les régimes devraient avoir une politique de gestion de maturité. Ça fait longtemps qu'on demande que les caisses ne conservent pas les retraités, parce que ça devient trop de retraités pour la masse salariale. Donc, ou vous faites de l'appariement d'actif avec les retraités ou vous les achetez auprès d'une compagnie d'assurance, mais ça fait longtemps qu'on demandait cette mesure-là. Là, M. D'Amours est arrivé avec dans son rapport, mais ça fait... Regardez les mémoires de la CSN dans les 10 dernières années, ça fait longtemps qu'on dit qu'on ne peut pas avoir autant de retraités avec, souvent, des masses salariales qui restent. Donc, la gestion de la maturité d'un régime, c'est aussi important que la politique de gestion de l'actif, mais ça, on n'en fait pas ici. On laisse les caisses devenir très, très grosses, puis après ça on dit : On ne peut pas prendre les déficits que ça prend. Mais il faut que les comités de retraite s'en occupent. Ça en est un, des éléments.

Le Président (M. Auger) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Blainville pour une période de 10 minutes.

M. Laframboise : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Lévesque, M. Marcoux, Mme Joncas.

C'est sûr qu'on est dans des positions, là, qui, j'espère... Moi, j'aimerais qu'elles soient conciliables, là, parce que, dès le départ, on semble ne pas s'entendre par rapport au déficit. Vous savez, le rapport D'Amours, ce qu'il nous dit, c'est que plusieurs régimes ne survivraient pas à une prochaine décote boursière. C'était ça, là. Tu sais que, quand on parle du rapport D'Amours finalement, là, c'est de dire, là : Il faut tout de suite être capable de restructurer, parce que, sinon, si ça arrive une prochaine fois, il y en a qui ne survivront pas.

Là, vous autres, vous êtes complètement ailleurs, là, tu sais? Je peux vous comprendre parce que vous ne voulez pas... Mais la minute où on veut se pencher sur la question puis qu'on veut régler le problème, il faut le régler. Tu sais, là, quand on est conscientisés, nous, en tant qu'élus, à une urgence d'agir puis à un risque, à la fin, si on ne le fait pas, c'est le contribuable qui paie, il faut avoir l'objectif d'avoir une loi, et, dans la loi, moi, je reviens toujours à... Je l'ai dit à la FTQ, je l'ai dit à tout le monde aujourd'hui, je suis bien ouvert à la négociation, je vous le dis, mais, le problème, il faut que ça se finisse. Quand on choisit l'arbitrage, à la fin, si on veut être sûr — puis les villes, c'est ce qu'elles font pour être sûres — on encadre l'arbitre, puis on encadre l'arbitre, puis on encadre l'arbitre, ce qui vous fait dire, M. Marcoux, que, finalement, peut-être que ça ne vaudra même pas la peine, là, tu sais, de négocier, là, tu sais? Bon, c'est ça, là.

L'autre façon, si on veut s'assurer du résultat, c'est de dire : On négocie, mais, à la fin, ça prend quelqu'un qui tranche. Moi, je pense que la ville pourrait trancher. Ça permettrait, dans plusieurs cas, de régler, je vous le dis. Il y en a des gros que ça serait plus difficile, mais je ne suis pas sûr que le résultat ne serait pas différent qu'avec le projet de loi, parce que, finalement, si le projet de loi est adopté, il va y avoir un résultat, tu sais, je veux dire... puis on va pouvoir le décrire d'avance. Une négociation où la ville, à la fin, trancherait, je ne suis pas sûr, moi, qu'on arriverait au même résultat puis que ça ne serait pas avantageux. Je vous le dis, dans le contexte où tout le monde est prêt à s'asseoir au Québec, puis les citoyens, vous l'avez vu, là, c'est divisé, là, par rapport à — hein, on a vu le sondage ce matin — à ceux qui appuient ou... en tout cas. Tu sais, c'est divisé au Québec.

Donc, à quelque part, moi, je pense qu'il y aurait avantage. Je le sais, que ce n'est pas porteur chez vous, là, le fait de dire à la ville de trancher, mais il reste quand même que l'ampleur du problème, pour moi, fait que cette loi-là, elle est nécessaire, il faut la passer. Puis on ne peut pas dire à la fin : Ça va être juste la négociation, même si je voudrais vous supporter. Oui, je serais bien prêt, mais, à la fin, il faut arriver à un résultat, dans chacun des régimes, qui serait différent. Puis là je vous suis, parce que vous avez finalement des commentaires en disant : Oui, il y a des possibilités, mais, dans certains endroits, le plafond pourrait être plus élevé, puis... Oui. Moi, le pire, c'est que je serais d'accord avec ça. Il y a des villes que ça va mieux, puis ils peuvent se permettre ça. Mais, à quelque part, il faut qu'à la fin il y ait quelqu'un qui tranche, là. Sinon, ça fait quoi? Cadre rigide adapté à toutes les villes, puis, à la fin, l'arbitre qui tranche, puis on a déjà choisi pratiquement la décision que l'arbitre était pour rendre, là.

Mme Lévesque (Francine) : Mais c'est parce que ce n'est pas ça qu'on dit. On dit qu'il faut agir, mais en amont pour être capable de se donner des moyens qui vont nous permettre...

M. Laframboise : C'est trop tard.

Mme Lévesque (Francine) : Non, ce n'est pas trop tard.

M. Laframboise : C'est trop tard.

Mme Lévesque (Francine) : Ça ne peut pas être trop tard, parce que c'est ça qu'est la source du problème. On va continuer à mettre des plasteurs ville par ville, autrement, et on va toujours se retrouver avec le même problème qui va conduire strictement à de la réduction des bénéfices pour les travailleurs et les travailleuses, puis ça, ça ne peut pas fonctionner. Puis on ne peut pas dire qu'en leur imposant un cadre et un délai, puis tout ça, ça va permettre de régler la question. Nous, on dit : On va travailler de cette façon-là rapidement dans les places que c'est très nécessaire, mais on va se donner... On n'a pas besoin d'une éternité, là. L'année dernière en commission parlementaire, on disait qu'on avait besoin de travailler six mois à une façon importante avec le gouvernement, avec la Régie des rentes, tout ça, pour être capables de trouver, de finaliser des choses. On ne s'est pas tourné les pouces depuis ce temps-là, on a fait des travaux, on a participé aux forums, celui des municipaux, celui du privé, celui des universitaires, et on est prêts à continuer de faire ça. Ça peut aboutir rapidement et nous donner des moyens de régler de façon structurelle pour tout le monde dans le respect des gens. Parce que c'est ça qui est important, là, de ne pas balayer sous le tapis, là.

M. Laframboise : ...dis trop tard, c'est que les maires sont venus nous le dire, là, il n'y a pas personne qui a voulu discuter des déficits passés. Vous avez tout discuté, mais personne ne voulait s'occuper des déficits passés. Et c'est pour ça que je vous dis que c'est trop tard. Le mal a été fait en 2008, puis il risque d'y avoir d'autre chose qui peut arriver, puis, à quelque part, si on continue encore à essayer de prendre le temps qu'il faut, ça va être trop tard. C'est pour ça que je vous dis que c'est trop tard. Parce que de la façon dont... Il faut avoir une nouvelle gestion. Moi, je suis prêt à vous suivre, mais il va falloir arriver différemment à un résultat qui est beaucoup plus rapide pour sécuriser le citoyen qui, là, à cause de tout ça, a l'impression que, s'il y a un problème, c'est lui qui va payer pour. Puis là il en a là, comprenez-vous?

Mme Lévesque (Francine) : Rapidement, il y a Mme Joncas, il y a M. Marcoux, ils vont avoir le mot de la fin.

M. Marcoux (Denis) : Moi, je vais vous relancer la question, hein? Je vais vous relancer la question. Comme je dis, là, on est dans les dossiers. De un, là, ce que M. Labeaume a dit ce matin, là, en tout cas, pour le respect de l'opinion contraire, là, je suis en total désaccord avec ça, parce que ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas du monde qui ont... qu'il n'y a pas des gens qui n'ont pas... ils ont pris leurs responsabilités puis ils ont travaillé sur le déficit passé. Ce n'est pas vrai. Dans les dossiers que nous, nous pilotons, là, j'ai des dizaines d'exemples. Donc, il faut faire attention avec ce type d'affirmations là qui, à mon avis, sont très gratuites.

Si on met — ...

Une voix : ...

M. Marcoux (Denis) : ...non, juste une seconde — en application votre proposition, que le maire décide, à la fin, les maires décident, hein, est-ce que vous pensez que ça va promouvoir la négociation que vous nous dites que vous êtes d'accord? Quand je le sais, là, que moi, je vais avoir le bâton, je vais avoir l'épée de Damoclès, je vais tout avoir dans les mains puis je vais m'asseoir de bonne foi à négocier? Je négocie dans 150 dossiers, cher monsieur, puis je n'en connais pas un qui va faire ça, pas un. Ça fait que ce n'est pas la promotion de la négociation, faire ça, c'est du décret. Puis ce n'est pas ça, de la négociation.

Mme Joncas (Nathalie) : Juste rapidement, là, je ne suis pas devin, là, je suis actuaire, là, mais ce que je vous dis : Vous pouvez bien dire : Passer une loi, couper les gens, les faire cotiser, ramener ça à 100 %, changer rien d'autre, puis, dans 10 ans... puis là vous allez tous taper des mains : On a réglé le problème, ça va bien, mais, dans 10 ans, on va se retrouver dans la même affaire s'il n'y a rien d'autre qui est changé.

Moi, ce que je vous dis, c'est qu'on n'a pas besoin, en bas de 85 %, de couper les gens ou de faire ça. Mais par contre ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a une urgence d'agir sur beaucoup d'autres choses, beaucoup d'éléments qui n'impliquent pas des coupures, pour qu'on soit sûrs de pérenniser les régimes de retraite. Donc, si vous voulez couper la rémunération puis être sûr que, demain, vous sortez d'ici, puis on dit : Oui, on est à 100 % demain, coupez, faites votre programme, mais ce n'est pas ça qui va assurer la santé financière des régimes puis la pérennité des régimes. Ça, c'est clair. Il y a d'autres choses à faire. Vous allez avoir réussi, vous allez avoir 100 % demain, mais vous ne l'aurez pas puis vous n'aurez pas refait une vraie réforme des régimes de retraite comme il s'est fait dans les autres pays où ils ont mis des mesures prospectives à moyen terme, ils ont pris des bons engagements, mais ils n'ont pas coupé les rentes de leurs participants, loin de là, puis ils ont été capables de mettre en place les choses qu'ils ont... les méthodes qu'ils ont pérennisées.

Le Président (M. Auger) : Merci. M. le député de Beauce-Nord, pour un deux minutes.

• (18 h 30) •

M. Spénard : Oui. Bienvenue, M. Marcoux, Mme Lévesque et Mme Joncas. Je regardais vos recommandations : bon, à 85 %, c'est-à-dire que les «organismes municipaux assument la totalité du déficit relatif aux engagements des retraités[...]; [...]de ne pas procéder à un partage égal des coûts du service courant[...]; la CSN recommande de ne pas imposer un partage obligatoire des déficits futurs entre les participants et l'employeur». Je comprends votre position, mais moi, je me place dans la position de la municipalité et je me dis : Vous voulez donc qu'on refile la facture aux contribuables. Vous voulez qu'on refile la facture aux simples contribuables, puis nous, le monde qu'on a à protéger, bien, écoutez, là, le contribuable, dont 65 %, en passant, n'a pas de régime de retraite, n'a pas de régime de pension sauf le régime des rentes, et tout, bien, ils paieront pour les mieux nantis des municipalités, là. C'est ça que vous recommandez à l'intérieur de...

Une voix : ...

M. Spénard : Bien, moi, c'est ça que je lis, là. La recommandation 1, l'«opting out» pour le 85 %; la recommandation 4, la municipalité; la recommandation 6, pas de partage égal des coûts courants. Quand vous parlez de «pas de partage égal», j'imagine que ce n'est pas 60 % employés, puis 40 % employeur, là. Ça doit plutôt être le contraire, là, ou je me trompe?

Le Président (M. Auger) : 30 secondes.

Mme Lévesque (Francine) : Écoutez, en 30 secondes, c'est... Comment le dire sans... Je ne veux pas être blessante, mais je trouve que c'est un peu réducteur de la façon dont vous le présentez, parce que nous aussi, on est des contribuables. Nous aussi, on veut la meilleure gestion possible de nos choses. Et ce qu'on vous dit, c'est que la meilleure gestion des régimes de retraite dans le secteur municipal actuellement, ça ne passe pas par ce type de moyens là.

Là où c'est très nécessaire, c'est quand il y a des gros déficits. Mais, quand il n'y a pas de gros déficit, en deçà de 85 % de capitalisation, on veut travailler et on est prêts à le faire maintenant et rapidement, à trouver des solutions qui vont faire que le fardeau fiscal des contribuables ne va pas s'appesantir et les conventions vont pouvoir être respectées, et tout ça.

Le Président (M. Auger) : Merci. Merci à vous tous. C'est tout le temps que nous avions.

Je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux au jeudi 21 août, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 32)

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