To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Planning and the Public Domain

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Planning and the Public Domain

Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, February 8, 2005 - Vol. 38 N° 51

Consultations particulières sur le projet de loi n° 62 - Loi sur les compétences municipales


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Ouimet): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 62, Loi sur les compétences municipales.

M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Blackburn (Roberval) est remplacé par M. Paquet (Laval-des-Rapides); M. Clermont (Mille-Îles) est remplacé par M. Bernier (Montmorency); M. Morin (Montmagny-L'Islet) est remplacé par Mme L'Écuyer pour l'avant-midi et, avec le consentement des membres, par M. Cholette (Hull) pour l'après-midi.

Le Président (M. Ouimet): Est-ce qu'il y a consentement pour que M. Cholette, député de Hull, puisse se joindre à nous en après-midi?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Ouimet): Oui? Consentement.

Une voix: Qui ça?

Le Président (M. Ouimet): Le député de Hull.

Le Secrétaire: Et finalement, M. le Président, M. Deslières (Beauharnois) est remplacé par M. Pinard (Saint-Maurice).

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, nous recevons, aujourd'hui, les groupes suivants: à 10 heures, la Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec; 11 heures, la Fédération québécoise des municipalités; 14 heures, l'Association des directeurs municipaux du Québec; 15 heures, l'Union des producteurs agricoles; 16 heures, la Corporation des officiers municipaux agréés du Québec; et, à 17 heures, le Centre québécois du droit de l'environnement.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, nous allons débuter avec les remarques préliminaires. M. le ministre, à vous l'honneur d'ouvrir nos travaux.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Chers collègues de la commission, mesdames, messieurs, ceux qui sont déjà avec nous, nous entreprenons, aujourd'hui, les consultations particulières relativement au projet de loi n° 62, un projet de loi que nous avons préparé en collaboration avec nos partenaires, notamment les deux associations municipales et diverses associations de fonctionnaires municipaux.

L'exercice qui débute ce matin vise donc à poursuivre notre démarche de consultation de manière à en arriver à la formulation d'une loi qui puisse répondre à notre volonté de mieux adapter les services à la réalité de nos concitoyens et de satisfaire véritablement les demandes du monde municipal. Ce dernier, le monde municipal, considère avec raison la législation municipale trop hermétique et limitative pour permettre aux municipalités de répondre adéquatement aux responsabilités qui leur sont actuellement dévolues ainsi qu'aux exigences croissantes de leur population. À chaque année, des modifications législatives sont adoptées afin de combler ces lacunes, mais une intervention plus globale est nécessaire, et c'est pourquoi j'ai déposé, le 17 juin dernier, le projet de loi n° 62.

Avant d'aller plus loin, j'aimerais souligner l'esprit de collaboration qui a animé nos travaux depuis le début. Dès la fin de 2002, une proposition de projet de loi a été soumise au ministère et organismes gouvernementaux concernés ? il y en avait 14 au total ? afin de s'assurer d'une cohésion gouvernementale dans l'élaboration du projet. Par la suite, une consultation des associations d'élus ainsi que des associations de fonctionnaires municipaux s'est déroulée afin d'obtenir les réactions à la proposition de projet de loi. Cette consultation a permis d'aplanir certaines réticences et de parfaire le projet.

Relativement à la gestion des cours d'eau et à l'harmonisation des dispositions législatives pertinentes, des rencontres interministérielles auxquelles ont été associés des représentants des associations de municipalités se sont tenues avant et après la présentation du projet de loi n° 62. C'est ce qui explique d'ailleurs, entre juin et aujourd'hui, le délai pour essayer d'en arriver à une formulation qui soit la plus parfaite possible, bien que la perfection n'est jamais atteinte.

Vous me permettrez de profiter de l'occasion pour remercier les personnes et organismes qui ont accompagné notre démarche, nourri notre réflexion et collaboré à nos travaux jusqu'à maintenant. L'éclairage qu'elles nous apportent est très utile et précieux, je tiens à le préciser. Je remercie aussi tous les groupes qui ont accepté à nouveau ou pour la première fois notre invitation à venir présenter leurs points de vue dans le cadre de cette commission. Leurs commentaires seront considérés avec attention dans le but de parfaire le projet.

Le projet de loi sur les compétences municipales fait partie d'un vaste processus de révision des lois municipales amorcé au début des années quatre-vingt dans l'intention de moderniser le cadre légal régissant les municipalités. Il est prévu, au plan de révision de l'ensemble des lois municipales, de diviser l'éventuel code des municipalités en six livres, dont un sur les compétences municipales.

n (9 h 40) n

Bien que le Code municipal du Québec et la Loi sur les cités et villes aient été souvent révisés depuis leur mise en vigueur, qui remonte à 1871 pour le Code municipal, ces deux lois n'ont jamais été entièrement revues. Le caractère obsolète ou inadapté de plusieurs dispositions de ces lois est apparent à sa face même. Pensons, par exemple, aux dispositions sur les chemins, ponts et cours d'eau, où le contribuable est tenu de faire des travaux de voirie. Elles ne sont guère adaptées au contexte moderne. D'ailleurs, il y a des groupes qui vont venir nous proposer d'autres dispositions qui sont un peu passées de mode, pour dire le moins. Mais, au-delà de la désuétude de certaines dispositions, la motivation première de la révision est de donner aux municipalités un cadre légal révélateur du partenariat que le gouvernement est soucieux d'établir avec elles.

Le projet de loi n° 62 traite essentiellement des compétences des municipalités. Les habilitations visées portent sur la prestation de services municipaux et sur la conduite des personnes sur le territoire d'une municipalité. Le projet se limite aux compétences actuellement attribuées aux municipalités dans le Code municipal et la Loi sur les cités et villes. S'il n'ajoute pas de nouvelles compétences, il tient toutefois compte du processus de décentralisation en cours, et son libellé fait en sorte que des nouveaux pouvoirs éventuellement attribués aux municipalités pourraient s'y intégrer. Par ailleurs, cet esprit de décentralisation qui vise à améliorer les marges de manoeuvre locales constitue le fondement du présent projet de loi.

En ce qui a trait au fait que le projet de loi n'attribue pas de nouvelles compétences aux municipalités, je voudrais ici clarifier un malentendu alimenté par certains voulant que ce projet ait pour effet de permettre une plus grande privatisation des services publics. Les articles compris dans ce projet de loi constituent en fait une reformulation des dispositions existant dans le Code municipal et la Loi sur les cités et villes depuis plusieurs années. Ainsi, aucun nouveau pouvoir n'est octroyé aux municipalités en matière de production d'électricité ou en ce qui a trait à la constitution de sociétés en commandite visant cet objet. Les municipalités n'acquièrent pas non plus le pouvoir de réaliser des travaux dans les cours d'eau navigables. Quant au pouvoir de confier à un tiers la capacité d'établir ou de gérer un site de récupération et de conditionnement de matières recyclables, il était, lui aussi, existant.

D'autre part, le gouvernement n'a jamais eu l'intention de privatiser la gestion de l'eau au Québec. Le gouvernement a plutôt à maintes reprises réitéré l'importance du contrôle public dans la gestion et la protection de cette ressource, que ce soit en rétablissant l'équilibre des usages rompu par le développement anarchique de certaines activités humaines ou encore en mettant en place le processus de gestion par bassins versants. Une équipe de travail réunissant des membres du ministère des Affaires municipales et celui de l'Environnement est d'ailleurs à analyser les moyens d'assurer le meilleur arrimage possible entre le schéma d'aménagement et le plan directeur de l'eau élaboré par les organismes de bassins versants.

Comme ministre des Affaires municipales, je crois sincèrement à la gestion publique de l'eau. Nous assistons, depuis plusieurs années, à un phénomène de société où les citoyens délaissent l'eau publique pour l'eau privée. Ainsi, au Canada, la consommation d'eau embouteillée est passée de 14 litres par personne par an en 1994 à 29 litres en 2002, plus que doublée donc en moins de 10 ans. Dans les pays où l'on consomme le plus d'eau embouteillée, comme l'Italie, avec la quantité faramineuse de 155 litres, et la France, avec 146 litres, on invoque, comme motif principal, le fait que l'eau de robinet ait un goût marqué de chlore et de plomb. De fait, on évalue, en France, à 34 milliards d'euros les coûts de remplacement de réseaux désuets suite à l'adoption de nouvelles normes sur le plomb en 1998.

Au Québec, le coût de l'eau de robinet revient à environ 0,001 $ par litre comparativement à 1,50 $ le litre pour l'eau embouteillée. Formulé autrement, il nous en coûterait 2 $ le mètre cube pour une eau publique améliorée comparativement à 1 000 $ le mètre cube pour une eau privée. Comme, actuellement, notre contribution s'élève à 1 $ le mètre cube, pourquoi ne pas ajouter 1 $ et ainsi freiner la tendance et redonner confiance aux citoyens en la qualité de l'eau de robinet, sans compter l'économie de 998 $ le mètre cube que les mêmes citoyens pourraient obtenir.

Vous me pardonnerez cette digression, mais il est essentiel pour moi de bien mettre en évidence la volonté réelle du gouvernement et sa profonde conviction dans la nécessité de maintenir la gestion publique de l'eau potable.

Passons maintenant au plan du projet de loi. Le titre I du projet comporte des dispositions interprétatives dont la plus significative quant aux effets anticipés de la révision des compétences municipales est l'article 2 qui prévoit que «les dispositions de la présente loi accordent aux municipalités des pouvoirs leur permettant de répondre aux besoins municipaux, divers et évolutifs, dans l'intérêt de leur population. Elles ne doivent pas s'interpréter de façon littérale ou restrictive.»

Le titre II du projet de loi traite des domaines de compétence des municipalités locales.

Au titre III se retrouvent les dispositions relatives aux compétences des municipalités régionales de comté.

Suivent, au titre IV du projet, les dispositions modificatives qui abrogent ou modifient diverses lois qui régissent le domaine municipal.

Finalement, le titre V regroupe les dispositions diverses, transitoires et finales. Il prévoit des règles visant à assurer la transition, de l'ancien au nouveau régime, de règles qui gouvernent les compétences municipales. La continuité des règlements en vigueur est prévue à l'article 259 du projet de sorte que les municipalités ne seront pas tenues d'adopter de nouveau tous leurs règlements.

N'est pas inclus dans ce projet de loi le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme. Plusieurs élus et gestionnaires auraient souhaité que le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme se retrouve au livre V. Deux raisons motivent un traitement particulier de ce domaine.

La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme n'est pas exclusivement composée de dispositions de compétence. Cette loi contient notamment des dispositions sur les processus de planification territoriale. Il était donc impossible d'introduire tout le contenu de la Loi de l'aménagement et de l'urbanisme dans un projet de loi sur les compétences. De plus, comme cette loi doit faire l'objet d'une réforme qui va au-delà de la modernisation entreprise par le livre V, il a été plutôt décidé d'ouvrir des chantiers distincts. Nous avons toutefois l'intention de compléter une proposition législative sur l'aménagement et l'urbanisme et les mesures qui en découleront pour éventuellement être intégrées à la nouvelle Loi sur les compétences municipales.

D'autre part, il avait aussi été question de considérer les dispositions portant sur les compétences municipales contenues dans l'ensemble des lois du Québec et de les intégrer dans le futur code des municipalités. Cet objectif de départ n'a pas survécu à la réalité des faits, de nombreuses dispositions accordant des compétences aux municipalités se retrouvant dans des lois sectorielles. Par exemple, la Loi sur la qualité de l'environnement ou la Loi sur les biens culturels ne peuvent être dissociées de ces lois sans brouiller leur sens. L'avantage potentiel de regrouper toutes les compétences municipales dans une même loi est rapidement perdu si l'harmonie et l'économie générale des lois sectorielles sont rompues. Les municipalités devront donc continuer, comme les individus et maintes institutions, à référer à plusieurs lois pour connaître l'ensemble des règles qui les régissent. Cependant, des efforts seront consentis dans les prochains mois pour favoriser une meilleure harmonisation de la législation relative aux municipalités.

L'approche privilégiée dans la rédaction du projet de loi consiste à décrire les compétences en termes généraux et simples plutôt que de préciser dans de longues énumérations chacun des éléments composant l'habilitation. Historiquement, le législateur a privilégié une technique consistant à déléguer des pouvoirs aux municipalités par une série de dispositions particulières qui, à cause de leur objet restreint et leur spécificité, requièrent des modifications fréquentes afin de répondre à l'évolution des besoins des municipalités. Cette technique amène toutefois la production d'une masse législative de plus en plus volumineuse et complexe. Ce n'est pas à vous, M. le Président, que je vais avoir à vous le prouver, puisque nous nous réunissons souvent, ici, pour faire des nombreuses législations. À l'opposé, l'application de la technique de rédaction établissant en termes généraux les pouvoirs des municipalités favorise une interprétation large du texte. Elle fixe l'étendue des pouvoirs délégués tout en laissant aux municipalités les choix des moyens pour les exercer. Le résultat est une loi plus courte, plus facile à comprendre, rendant les municipalités plus aptes en répondant davantage à leurs besoins actuels et futurs, ce qui correspond à notre volonté de rapprocher les services des citoyens.

Je le répète, le projet de loi ne vient pas modifier le partage des compétences entre l'État et les municipalités ni la nature des compétences. À ce sujet, le gouvernement du Québec s'est engagé, à la suite du Forum des générations, dans un processus majeur de décentralisation et de régionalisation en partenariat avec les élus locaux. Des équipes travaillent à ces chantiers actuellement. Avec le projet de loi n° 62, il s'agit plutôt de moderniser et de simplifier la rédaction législative des compétences en accordant davantage de souplesse aux municipalités dans le choix des moyens pour y arriver.

Par ailleurs, dans la présente proposition de loi, il est un domaine de compétence, celui du développement économique, qui demeure encore formulé de manière pointue, même si le vocabulaire a été dépoussiéré. Cette situation devrait être provisoire. Nous attendons le résultat des travaux de réflexion en cours en vue d'arrimer les pouvoirs municipaux au rôle élargi que joue le milieu municipal en ce domaine.

En plus d'une rédaction habilitante et d'une simplification du texte de loi, le projet de loi n° 62 apporte des nouveautés intéressantes qui se répercuteront sur le fonctionnement quotidien des municipalités. Et, comme le temps court, je vais filer rapidement, mais ces éléments se retrouvent notamment sur la question de l'utilisation du règlement, tenir en compte finalement de l'application du Code civil et la réforme législative de la gestion des cours d'eau municipaux. Je m'y attarde un peu, puisqu'il va en être question.

À la demande répétée de plusieurs intervenants du monde municipal, les modalités d'exercice de cette compétence ont été substantiellement réformées. Le résultat est une simplification significative de la loi. La régionalisation de la compétence sur les cours d'eau municipaux est confirmée, et on applique ici le même régime qu'en matière de voirie où c'est l'instance publique, en l'occurrence la MRC, qui fait les travaux. Cette dernière disposera d'outils législatifs adéquats pour participer activement à la gestion de l'eau par bassins versants. Je tiens à préciser ici que, depuis le dépôt du projet de loi et à la suite de commentaires formulés par les associations, des modifications ont été apportées relativement à certaines dispositions relatives à la gestion des cours d'eau. Je crois, M. le Président, que les membres de la commission ainsi que tous les groupes invités ont reçu cette nouvelle version que, j'en suis certain pour certains groupes parce qu'ils ont commenté la nouvelle version... la commission sera évidemment prête à recevoir les commentaires tant sur le projet déposé que sur la nouvelle version proposée.

n(9 h 50)n

Au cours des deux journées de consultation de la commission, M. le Président, le monde municipal, des groupes environnementaux et ceux des secteurs de l'agriculture et de l'énergie pourront se prononcer sur le projet de loi avant que nous procédions à son étude détaillée en commission parlementaire. J'ai bon espoir qu'avec la contribution des membres de la commission nous parviendrons à mener ce projet à terme de manière à pouvoir offrir au monde municipal plus de souplesse dans l'exercice de ses responsabilités, et je vous en remercie.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le ministre, pour ces remarques préliminaires. Il est vrai que la législation, elle est volumineuse, mais j'aime bien nos rencontres fréquentes, j'ai l'impression que nous sommes en famille. Alors, un autre membre de la famille, le député de Blainville et porte-parole de l'opposition officielle pour les dossiers des affaires municipales. À vous la parole.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Merci, M. le Président. C'est une très, très belle introduction de votre part de faire référence à la grande famille parlementaire que nous formons tous et toutes ensemble, et effectivement c'est toujours un plaisir que de se retrouver, aujourd'hui, pour justement entendre des gens que l'on saluera plus précisément tout à l'heure, mais qui sont déjà avec nous, lors de ces consultations particulières, aujourd'hui et dans une quinzaine de jours, sur évidemment un projet de loi n° 62, un projet de loi important, M. le ministre l'a bien décrit tout à l'heure dans ses remarques préliminaires, un projet de loi important sur les compétences municipales et qui...

Évidemment, quand on parle de compétences municipales, on sait toute l'importance que ça revêt. Et, quand on regarde les notes explicatives où on parle d'accentuer la marge de manoeuvre dans l'exercice de leurs compétences, et le ministre y a fait référence à plusieurs reprises, tout en disant qu'il n'y a pas de nouvelles compétences, alors ça peut paraître à prime abord un petit peu contradictoire, cette dimension, d'une nouvelle marge de manoeuvre mais pas de nouvelles compétences. Alors, ce qui a fait aussi qu'il y a eu certaines inquiétudes... Et d'entrée de jeu je me suis aperçu que le ministre tenait à rectifier certaines choses, en particulier à l'égard d'une nouvelle intention qu'il y aurait dans le projet de loi quant à la privatisation de l'eau et de certains services publics. Mais justement je pense qu'au cours de la journée et de ces consultations particulières, bien, on sera en mesure d'entendre les gens et de voir le résultat du projet de loi en question, qu'est-ce qu'il fait. Parce qu'entre l'intention du législateur qui veut faire des choses et le résultat final, bien, c'est là-dessus, je pense, que nous aurons nos principales préoccupations.

La plus belle preuve que c'est un projet de loi important, c'est que les travaux ont commencé il y a maintenant... en 1998, si je ne m'abuse, donc ça fait déjà sept ans. Alors donc, quand ça prend sept ans, c'est qu'il y avait du travail à faire. Et je disais à la blague, lors de l'adoption de principe, en prenant connaissance du projet de loi qui a pour objectif peut-être principal de simplifier les choses pour le milieu municipal, bien, ça a pris 262 articles d'un nouveau projet de loi pour simplifier l'existant; alors, ça donne une idée de la complexité des lois municipales actuelles. Alors, je pense que tout le monde, on est d'accord et on applaudit à la démarche qui a été initiée en 1998 pour simplifier les lois municipales. Donc, ce n'est pas par ailleurs une réforme. Ce n'est pas une réforme, c'est une simplification, c'est une réécriture législative pour donner plus de souplesse et plus de marge de manoeuvre aux municipalités.

Alors, notre préoccupation, au cours des prochaines heures, ça va être d'essayer de bien cerner qu'est-ce qui change, qu'est-ce qui est changé et qu'est-ce qui va changer avec la loi n° 62. Quelles sont les conséquences? Est-ce que le législateur fait ce qu'il veut faire ou est-ce qu'il pourrait y avoir, est-ce qu'il y a une compréhension que les gens vont partager avec nous, qui pourrait peut-être nous montrer que la rédaction a fait qu'il y a des choses de changées et que ça ne fait pas tout à fait ce que le législateur voulait faire au départ? Évidemment, les mieux placés pour nous en parler, ce seront ceux qu'on va entendre au cours des prochaines heures, qui vont pouvoir venir nous dire ce qu'ils voient qui pourra être changé, mais aussi, en prenant connaissance de certains mémoires, déjà on voit qu'il y a des groupes aussi qui vont nous dire qu'il aurait fallu changer plus de choses.

Et je pense qu'il faut quand même le reconnaître ? et je le disais tout à l'heure, le ministre a pris bien soin d'essayer de rectifier certains éléments ? il y a eu des inquiétudes qui ont été évoquées suite à la présentation du projet de loi n° 62. Et je ne peux pas vous cacher que ces inquiétudes-là, bien, comme opposition, nous inquiètent, si je peux me permettre. Et peut-être que les inquiétudes... Parce que la réécriture législative, une notion de simplification dans le fond ne devrait pas inquiéter. Mais c'est peut-être à cause du contexte. Peut-être que la loi n° 62 arrive dans un contexte où on a entendu parler évidemment et où il y a eu une loi sur une agence de partenariats public-privé, où il y a eu plusieurs questions de posées au gouvernement sur la privatisation ou non de l'eau. On se faisait répondre: Non, on ne privatisera pas l'eau, mais on va peut-être privatiser les tuyaux. Alors, il y a quand même des inquiétudes qui demeurent.

De notre côté, on a bien regardé la loi n° 62 et effectivement... et on a même eu de l'information technique fort bien préparée par l'équipe du ministère, où on nous démontrait qu'essentiellement l'objectif était une simplification et que c'était une réécriture. Au lieu des fois de prendre trois paragraphes, on en prenait un, et que les textes n'avaient pas changé tant que ça dans certains cas. Alors donc, évidemment, comme on l'a mentionné lors de l'adoption de principe, on est d'accord avec l'objectif fondamental de simplifier, de rendre la vie plus facile aux municipalités. Je pense que les deux grandes associations, la Fédération québécoise des municipalités et l'Union des municipalités du Québec, vont venir nous dire que globalement elles ont apprécié évidemment l'intention initiale, mais c'est plus dans le détail qu'il faudra examiner quels sont les véritables impacts, les véritables répercussions des différents articles qui sont maintenant présentés dans le projet de loi n° 62.

En terminant, M. le Président, pour qu'on puisse respecter l'horaire, en terminant, je pense que c'est intéressant aussi de souligner... Le ministre y a fait référence, puis je tiens à le souligner également, à cet effort de collaboration, à cet esprit de collaboration, à la participation, au cours de toutes ces années... Parce qu'il y a eu un comité qui a été créé et où justement les deux grandes associations municipales étaient impliquées, où il y a eu un travail interministériel. Alors donc, évidemment, ce n'est pas un projet de loi, après sept ans, qui arrive et qui sort d'une boîte à surprise, là. Ça, c'est clair. Donc, les gens l'ont vu, ont pu émettre des commentaires, mais encore une fois je pense que ça va être important de bien regarder ce que les différents groupes viennent nous présenter pour voir dans le détail quels sont les impacts réels, là, du projet de loi n° 62. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci à vous, M. le député de Blainville. Ça termine les remarques préliminaires.

Auditions

J'inviterais maintenant les représentants de la Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec à bien vouloir s'avancer et prendre place à la table des témoins.

Alors, M. Drouin, vous êtes le président de la corporation. Je vous souhaite la bienvenue au nom de tous les parlementaires. Auriez-vous la gentillesse de nous présenter les gens qui vous accompagnent?

Corporation des officiers municipaux
en bâtiment et en environnement
du Québec (COMBEQ)

M. Drouin (René): À ma droite, M. Daniel Hubert, vice-président de la Corporation des officiers municipaux; M. Pierre-Paul Ravenelle, directeur général; et Me Daniel Bouchard, notre procureur.

n(10 heures)n

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, bienvenue à vous tous. Vous disposez d'un temps de parole de 20 minutes; par la suite, d'une période d'échange de 40 minutes.

M. Drouin (René): Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission parlementaire, bonjour. La Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec, la COMBEQ, ne peut que remercier le gouvernement de son invitation. Nous sommes honorés d'avoir l'occasion de présenter devant la présente commission de l'Assemblée nationale nos commentaires sur le projet de loi n° 62 proposant l'adoption par l'Assemblée nationale d'une nouvelle loi, soit la Loi sur les compétences municipales.

Il nous apparaît opportun d'y aller d'entrée de jeu d'un commentaire général favorable sur le projet de loi n° 62. Notre corporation appuie avec enthousiasme ce projet gouvernemental visant essentiellement à accentuer la marge de manoeuvre des municipalités locales et régionales dans l'exercice de leurs compétences, ainsi que le mentionnent les notes explicatives du projet de loi. C'est un bon pas dans la bonne direction, un virage historique ? oserions-nous parler de révolution tranquille municipale?

Ce commentaire étant fait, nous nous empressons de souligner que notre corporation désire ne pas commenter davantage l'objectif principal du projet de loi et la façon dont le gouvernement propose à l'Assemblée nationale de l'atteindre. Notre corporation ne désire pas en effet s'immiscer dans un débat qui relève bien davantage des élus municipaux notamment que de nos membres. C'est aux élus à notre avis, étant donné leur mandat dans notre société démocratique, de se prononcer sur des questions comme: Les pouvoirs conférés aux municipalités en matière de démolition d'immeuble et le cadre dans lequel ces pouvoirs seraient exercés sont-ils appropriés? Les dispositions relatives au transport de personnes sont-elles suffisantes et correctes? La marge de manoeuvre conférée aux municipalités au chapitre de l'intervention en cas de nuisance publique est-elle suffisante? Soulignons incidemment que ces interrogations ne sont ici fournies qu'à titre d'illustration. Il ne faut pas y voir un quelconque doute que la COMBEQ voudrait soulever sur le bien-fondé de ces aspects du projet de loi.

Notre corporation a choisi de concentrer ses représentations sur le sort réservé à l'inspection municipale et de ne commenter rien d'autre. Sous ce dernier chef cependant, nous considérons que le projet de loi est troublant. On constate en effet que le projet de loi fait disparaître de nombreuses obligations directes qui étaient imposées aux citoyens et aux municipalités, notamment en matière de gestion des cours d'eau ou de litige sur des questions de mitoyenneté, et enlève aux inspecteurs concernés des pouvoirs d'intervention directe et rapide qui, dans le cadre législatif actuel, permettent notamment aux municipalités d'intervenir efficacement et rapidement dans les situations urgentes. En outre, c'est toute une partie d'une fonction publique indépendante du pouvoir politique qui vole en éclats et est remplacée par des acteurs ad hoc.

L'inspection municipale est une fonction aux visages multiples en raison des diverses tâches auxquelles elle renvoie en vertu de la loi et sur le terrain. Encore mal qualifiée par la loi, aucune locution générique ne définit de façon satisfaisante cette importante partie de l'administration municipale. Il est utile de souligner que les multiples tâches d'inspection municipale ne sont pas toutes de même nature; essentiellement administratives pour la plupart d'entre elles: émission des permis et certificats d'urbanisme, application et respect du Q-2, r.8, etc., elles sont par ailleurs de nature quasi judiciaire pour certaines: ordonnance en matière de fossé ou de clôture de ligne.

Dans tous les cas, cependant, de l'avis de notre corporation, ces fonctions doivent être exercées de façon indépendante du pouvoir politique, et ce, pour s'assurer du traitement équitable de l'ensemble des citoyens régis par la loi et par les règlements municipaux. Or, c'est justement cette indépendance qui se trouve menacée par le projet de loi n° 62 tel qu'actuellement conçu. En cela, le projet de loi n° 62 fait à notre avis fausse route, du moins quant à certaines des fonctions d'inspection municipale ci-haut mentionnées.

Nous pensons ici aux fonctions de l'inspecteur agraire relatives au règlement des litiges en matière de clôture ou fossé mitoyens ou de découvert et à celles de l'inspecteur municipal relatives à la surveillance du maintien du bon écoulement des eaux. Mentionnons incidemment que notre corporation ne désire pas commenter la disparition du gardien d'enclos pas plus que celle du rôle de l'inspecteur municipal quant aux chemins. Il y a ici une désuétude manifeste ne pouvant avoir d'effets vraiment négatifs pour le public.

Nous sommes d'opinion que le régime actuel d'inspection municipale en matière de gestion des cours d'eau municipaux et de règlement des litiges relatifs aux fossés ou clôtures mitoyens et aux découverts est approprié. Nous ne comprenons pas surtout pourquoi le gouvernement propose au législateur d'inclure dans le projet de loi n° 62 une réforme sur des matières où le dossier est insuffisamment documenté. La COMBEQ ne peut applaudir ce volet du projet de loi n° 62, et ce, indépendamment de ses intérêts strictement corporatifs.

L'idée d'une abolition des fonctions d'inspecteur municipal et d'inspecteur agraire et de leur remplacement par des personnes ad hoc et n'assumant des responsabilités que pour le monde agricole et forestier n'est pas heureuse pour le Québec, du moins pour les citoyens considérés à titre d'administrés.

Il est important que les citoyens voient les questions locales et régionales gérées par des fonctionnaires impartiaux. Or, le ferment d'une telle impartialité a toujours été la constitution d'une fonction publique indépendante du politique. C'est incidemment la réforme qui a été faite au niveau provincial au début des années soixante et qui a été un volet important de ce qu'on a appelé la Révolution tranquille.

Nous ne voyons pas pourquoi les acquis municipaux à cet égard devraient être abandonnés. Le projet de loi n° 62 marque une rupture avec les garanties d'indépendance et d'impartialité qui ont toujours caractérisé, depuis plus de 40 ans, la gouvernance publique municipale.

Voilà donc, présentée de façon globale, l'approche de la COMBEQ à l'égard du projet de loi n° 62. Cette approche mérite bien sûr d'être quelque peu approfondie et expliquée, et, à cette fin, je passe la parole à Me Daniel Bouchard. Nous lui avons demandé de présenter notre mémoire. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, Me Bouchard, il vous reste à peu près une douzaine de minutes.

M. Bouchard (Daniel): J'en tiens compte, c'est pour ça qu'il n'y aura pas une lecture in extenso du mémoire. Je veux attirer votre attention sur les parties du mémoire qui nous semblent les plus importantes.

Alors, il y a présentement plusieurs catégories d'inspecteurs municipaux. Pour votre gouverne, vous pourrez en retrouver la liste avec description de tâches aux pages 3 et 4 du mémoire. Ça se retrouve également dans un document que le ministère des Affaires municipales et Sport, Loisir, c'est-à-dire, a publié en novembre 2004, tout récemment, expliquant les différentes tâches d'inspecteur municipal. Vous allez voir, ça se recoupe dans les deux documents.

Ce qu'il est utile de retenir à cet égard se résume à ceci. Dans les faits, les titres que la loi retient pour les fonctions d'inspection municipale ne sont pas nécessairement les titres qu'on retrouve sur le terrain. Les municipalités peuvent donner à leurs inspecteurs des titres qui ne correspondent pas en copier-coller conforme avec ce qu'on retrouve dans la loi. Donc, des fois, il peut être difficile de se retrouver et de faire la jonction entre la loi et le réel.

n(10 h 10)n

Mais très souvent, d'ailleurs, dans les municipalités, il va y avoir un seul inspecteur pour faire l'ensemble des fonctions d'inspection municipale ou deux inspecteurs qui vont se partager ensemble les fonctions d'inspection municipale. Puis les fonctions d'inspection municipale se divisent en quelque huit catégories différentes selon les lois diverses d'ailleurs, dont les sources proviennent de lois diverses.

La principale chose à retenir aussi, c'est que la protection du lien d'emploi pour toutes ces catégories d'inspecteurs là n'est pas la même. La COMBEQ a travaillé, au cours des dernières années, sur deux volets fondamentaux dans son travail. Elle a tenté de développer le professionnalisme de ses membres en offrant des cours de formation depuis plus de 10 ans et, sur le terrain, je pense qu'on observe le fait que les inspecteurs qui font le travail pour les municipalités sont mieux aguerris et mieux armés, plus collés sur les besoins de la loi et les besoins de la population et aussi le respect de leurs prérogatives.

D'autre part, l'autre volet sur lequel la COMBEQ a travaillé au cours des dernières années, c'est celui des représentations nécessaires pour assurer une meilleure indépendance de la fonction publique municipale, au chapitre des inspecteurs municipaux, en regard du pouvoir politique. Et à cet égard-là elle a connu certains succès. Alors, si vous regardez dans le mémoire de la COMBEQ, aux pages 11 et 12, vous allez vous rendre compte qu'on fait la liste des acquis que le législateur a consentis au cours des dernières années pour assurer une meilleure indépendance dans le travail des inspecteurs municipaux, toutes catégories confondues, par rapport au pouvoir politique.

En page 12, vous allez voir, il y a deux paragraphes, on attire votre attention sur les aspects sur lesquels il reste encore du travail à faire. Nous, on s'attendait que le projet de loi n° 62 finisse le travail déjà débuté par le législateur quant à assurer une certaine indépendance du pouvoir politique, finir ce travail-là, là, d'assurer une certaine indépendance du pouvoir politique pour les inspecteurs municipaux.

Malheureusement, au chapitre de l'inspecteur municipal responsable des cours d'eau et de l'inspecteur dit agraire, qu'on pourrait appeler «inspecteur municipal» ou donner un autre titre... Je pense qu'il ne faut pas s'enfarger, là, sur la question d'appellation qui, elle, est vieillotte, «inspecteur agraire», il faut regarder les fonctions exercées, donc qui règle des problèmes de mitoyenneté rapidement, sans obligation pour les citoyens d'aller devant la Cour supérieure, et ça fait moins de frais à assumer. Donc, à ce chapitre-là, il y a une disparition de l'indépendance du travail de ces inspecteurs-là par rapport au politique parce qu'on les remplace par des fonctions ad hoc. Vous irez voir dans le projet de loi n° 62, ce sont des commissaires ou des personnes qui vont être nommées par le conseil au besoin, par dossier, selon la demande.

Alors, que fait exactement le projet de loi n° 62 donc sur ce plan-là? Si vous me permettez, là je vais lire le mémoire parce qu'on a tenté de systématiser de façon concrète ce qu'on pensait être le danger représenté par le projet de loi n° 62 à ces égards-là. Donc, page 14, le deuxième paragraphe en haut: Contrairement à la situation actuelle, soit les articles 240 et 237 du Code municipal, la municipalité ne sera plus tenue d'intervenir dans le cas de tels litiges, articles 39 et 40 du projet de loi, on parle des litiges en matière de mitoyenneté. Présentement, le Code municipal fait obligation pour la municipalité que son inspecteur agraire, la municipalité donc, intervienne pour régler un problème de litige ou de mitoyenneté. Le projet de loi n° 62 remplace ça par une faculté qui va être accordée à la municipalité.

Nommé par le conseil au cas par cas, c'est-à-dire à chaque fois qu'une plainte est formulée, et se voyant attribuer une rémunération également fixée au cas par cas, on remplace un fonctionnaire récemment ? enfin ? doté d'une certaine indépendance à l'égard du pouvoir politique par une fonction totalement assujettie aux pouvoirs discrétionnaires du conseil, puisqu'il s'agit d'une personne ad hoc. Le choix de cette personne par le conseil risquera fort d'être influencé par la personne qui a fait la plainte, la personne visée par la plainte ou l'humeur politique du moment, comme la proximité, par exemple, d'une échéance électorale.

Troisièmement, en remplaçant une fonction exercée de façon permanente par une fonction conférée occasionnellement et au cas par cas, le monde municipal et les administrés concernés vont voir disparaître peu à peu une expertise pourtant fondamentale. Comment en effet conserver ou développer une expertise, par exemple quant à la distinction entre un cours d'eau et un fossé, un fossé de ligne, lorsqu'on intervient seulement de temps en temps et sans expérience antécédente?

Alors que l'actuel inspecteur agraire peut intervenir à la demande de tout citoyen et peu importe la vocation de la propriété de ce dernier, cette fonction devient restreinte au seul bénéfice des terres agricoles et forestières. Vous irez voir l'article 40 du projet de loi. Toute autre catégorie de citoyens se verra donc obligée de recourir à la Cour supérieure, avec les frais que cela implique.

Alors que l'inspecteur agraire intervient, en vertu de la législation actuelle, en vue de régler le litige qui lui est soumis via le pouvoir d'ordonnance que la loi lui confère, articles 237 et 240, le projet de loi remplace cela par un simple pouvoir de recommandation aux parties concernées par la personne ad hoc. Vous irez voir l'article 41 du projet de loi. Peut-on nous expliquer quelle efficacité on espère obtenir de cette façon?

Je reviendrai sur les motivations de... On a eu des commentaires sur les raisons pour lesquelles on faisait ce virage-là, là, venant notamment, semble-t-il, des légistes du ministère de la Justice, mais ces arguments-là ne nous apparaissent pas solides, puis on a essayé d'expliquer en quoi ils ne nous apparaissaient pas solides.

Notre corporation ne voit vraiment pas en quoi l'intérêt public sera ainsi mieux servi. Et c'est le même constat qu'elle tire en regard de ce que le projet de loi propose quant à l'inspecteur municipal responsable d'assurer le maintien de l'écoulement des cours d'eau municipaux. Qu'en est-il en effet à cet égard? Eh bien, voici.

Alors qu'en vertu de la loi actuelle la municipalité doit avoir un inspecteur municipal responsable notamment de la gestion des cours d'eau municipaux au chapitre du maintien de la qualité de leur écoulement, articles 219 à 221, le projet de loi et le projet de simplification ? je l'ai mis à l'annexe I, j'imagine que les membres de la commission, vous avez déjà le projet de simplification du projet de loi n° 62 relativement à la partie cours d'eau ? proposent d'abroger cette obligation de se doter d'un tel fonctionnaire et de le remplacer par rien.

Alors que la loi actuelle oblige l'actuel inspecteur municipal d'enlever les nuisances sur les cours d'eau sans délai ? voir article 828 ? le projet de loi remplace cela par une obligation imposée à la MRC d'agir lorsqu'elle est informée du problème ? voir article 4 du projet de simplification. Une MRC, qui est responsable des cours d'eau, se réunit une fois par mois. Lorsqu'il y a une nuisance dans un cours d'eau, avant qu'elle soit avertie puis qu'on puisse l'enlever, il risque de se passer un délai qui risque d'avoir des effets sur l'environnement et sur les propriétés, qui ne sont pas souhaitables. Il y a une intervention rapide actuelle dans la loi qui nous semble devoir être maintenue.

Les dispositions prévoyant le devoir de l'inspecteur municipal de surveiller l'exécution des travaux ordonnés par la municipalité ou autorisés sur un cours d'eau ? actuels articles 221, troisième alinéa, et 815 du Code municipal, voir article 225 du projet de loi n° 62 ? sont abrogées.

En passant, les dispositions du Code municipal s'appliquent aux municipalités régies par la Loi sur les cités et villes en matière de gestion des cours d'eau municipaux. Donc, quand on réfère aux dispositions du Code municipal ici, il faut comprendre que ça s'applique à toutes les municipalités du Québec par une disposition qu'on retrouve de concordance, là, de renvoi dans le Code municipal. C'est donc de toutes les municipalités du Québec dont on parle ici.

D'autre part, 4.2, responsabilités des municipalités et des citoyens. Alors que l'actuel Code municipal impose notamment l'obligation à tout citoyen habitant en bordure d'un cours d'eau d'y enlever les nuisances qui se trouvent aux abords du cours d'eau, article 783, ce qui constitue indéniablement, à notre avis, une souhaitable responsabilisation des citoyens, l'actuel projet de loi n° 62 prévoit abroger cette obligation ? vous irez voir l'article 225 du projet de loi ? sans la remplacer.

De la même façon, alors que le Code municipal actuel prévoit que les municipalités sont responsables des travaux dans les cours d'eau ? voir l'actuel article 724 du code ? le projet de loi prévoit abolir cette responsabilité ? voir article 225 du projet de loi ? toujours sans la remplacer.

Bref, en vertu de la réforme proposée par le projet de loi n° 62 à ce chapitre, les citoyens n'auront plus de responsabilité directe en matière de cours d'eau et les municipalités non plus, sauf l'obligation qui est faite à la MRC, lorsqu'elle est au courant qu'il y a une nuisance qui obstrue l'écoulement des eaux, d'intervenir. En fait, les municipalités ne se voient plus imposer quelque devoir que ce soit en regard des cours d'eau, sauf ce que je viens de dire.

Cette abrogation des devoirs d'intervention confiés à une municipalité, laquelle constitue une modification substantielle par rapport à la situation actuelle, se retrouve incidemment dans d'autres matières visées par le projet de loi n° 62. J'en fais une certaine liste ici.

Dernier paragraphe de la page. Manifestement, le projet de loi n° 62 ne choisit pas seulement d'élargir la marge de manoeuvre des municipalités en matière réglementaire. Il choisit également de diminuer les responsabilités et les rôles publics des municipalités sur des matières qui pourtant ont des impacts environnementaux non négligeables; on parle des cours d'eau, des causes d'insalubrité, etc.

En l'absence d'une analyse approfondie et d'une démonstration claire qu'il y a nécessité de changer la dynamique actuelle, il nous semble que le législateur ne devrait pas profiter du projet de loi n° 62 pour procéder à une telle réforme. Rien en effet, à notre connaissance, ne justifie la mise au rancart...

Le Président (M. Ouimet): Il vous reste une minute pour conclure.

n(10 h 20)n

M. Bouchard (Daniel): Bon. À la fin du mémoire, on liste un certain nombre de propositions de remplacement qu'on pense qui devraient être maintenues. La dynamique qu'on propose à la présente commission, qu'on aimerait voir l'Assemblée nationale retenir, c'est d'attendre. Il y a une réforme de l'administration municipale qui s'en vient, qu'on appelle, je pense, le livre III, dans lequel on va examiner le rôle des conseils municipaux, le rôle des greffiers, directeurs généraux, des différents agents et inspecteurs municipaux, dans laquelle à mon avis on va pouvoir mieux approfondir l'ensemble de la démarche et situer le rôle de l'inspecteur et ses besoins à l'intérieur de ça. On n'a vu jusqu'à maintenant aucune analyse qui explique pourquoi il faudrait changer la dynamique que le législateur avait conçue dans le Code municipal.

Et je voudrais juste terminer en attirant votre attention qu'aux pages 7, 8, 9, 10 et suivantes du mémoire on fait l'analyse de l'imbrication du rôle de l'inspecteur municipal responsable des cours d'eau municipaux, notamment dans le Code municipal, tel que vu par le législateur il y a plus de 100 ans, et ce qu'on constate, c'est que le législateur avait choisi d'avoir une armée d'inspecteurs à la grandeur du territoire qui surveillaient l'écoulement des eaux et qui intervenaient pour en assurer le maintien de l'écoulement, et on a choisi de le mettre sous le chapeau des municipalités plutôt que d'avoir une armée de fonctionnaires provinciaux qui travailleraient directement sous l'ordre, à l'auge du gouvernement.

Cette organisation-là jusqu'à maintenant a démontré une efficacité. On ne comprend pas pourquoi on veut remplacer ça par des personnes qu'on va nommer ad hoc au besoin, sans plus de personnes qui ont le rôle direct d'intervenir, d'inspecter et d'assurer une certaine surveillance sur la question de l'écoulement des eaux, par exemple, mais également sur la question des litiges puis en matière de mitoyenneté.

Le Président (M. Ouimet): Bien. On aura l'occasion d'y revenir, si vous permettez, parce que le temps est écoulé pour les remarques préliminaires. Nous allons maintenant aborder les échanges avec les parlementaires. Le règlement prévoit des blocs de 10 minutes par alternance. C'est la règle que nous avons, je pense, toujours suivie. Si ça vous convient, c'est ce que je vous propose. Sinon, ça prendrait un consentement pour avoir des blocs de 20 minutes. Alors, on s'en tient à des blocs de 10 minutes, M. le ministre, M. le porte-parole? Bien.

Alors, pour ouvrir les échanges, à vous la parole, M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Messieurs, bienvenue à la commission. C'est un plaisir d'entendre votre point de vue, et sachez qu'on est à l'écoute des propositions que vous nous faites.

D'entrée de jeu, je voudrais souligner que votre expression me semblait peut-être un peu forte, celle de la révolution tranquille municipale, surtout considérant que le critique de l'opposition a dit que ce projet de loi n'était même pas une réforme. Alors, probablement qu'entre le «pas une réforme» et une «révolution tranquille municipale», et je sais que l'UPA viendra nous dire que le projet de loi est révolutionnaire, alors on a trois angles de vision à l'égard du projet de loi, mais, tant qu'à moi, j'ai une vision un peu plus modeste de ce qu'est le projet de loi. Et d'autant que les révolutions parfois sont faites dans un cadre un peu anarchique et chaotique, comme ça fait déjà de nombreuses années qu'il est en préparation et qu'il s'assure d'une transition la plus souhaitable possible, j'ai l'impression qu'on est encore assez loin de la révolution.

Ceci étant dit, je vous remercie d'avoir concentré vos commentaires sur l'élément qui vous attire le plus, et peut-être que je voudrais, parce que vous êtes passé un peu vite ? ce n'est pas de votre faute, là, à cause du temps, vous n'aviez pas le choix ? mais revenir sur les tendances ou enfin la vision selon certains de ce que pourrait être une tendance jurisprudentielle, sur ce qu'est la capacité d'un inspecteur à rendre des ordonnances, qui est un des éléments avec lequel on doit vivre, là, et, pour vous, vous dites que certains légistes se trompent à cet effet-là. Vu que toute votre présentation tourne beaucoup autour de l'indépendance ? ça aussi, c'est une notion, celle de l'indépendance reconnue par la Cour suprême notamment, qui permet d'émettre des ordonnances ? j'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus, en vous disant d'entrée de jeu, et on aura peut-être l'occasion d'en débattre par la suite, en vous disant d'entrée de jeu qu'on réfléchit à d'autres moyens, là, qui nous permettraient d'arriver à une conclusion plus heureuse peut-être. Mais néanmoins pourquoi, vous, vous ne partagez pas ce point de vue là, que vous croyez que les inspecteurs ont l'indépendance suffisante et totale qui permet de rendre des ordonnances sans qu'aucune cour ne vienne ébranler cette certitude à l'avenir?

Le Président (M. Ouimet): Alors, question pour Me Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): Bien, d'abord, présentement, l'inspecteur n'a pas l'indépendance suffisante pour assurer son impartialité. C'est la raison pour laquelle la COMBEQ prétend, c'est une des recommandations qu'on fait à la fin, c'est qu'on devrait finir, terminer d'assurer cette indépendance-là. Il y a, pour certains inspecteurs... fonctionnaires municipaux dans la loi ? vous irez voir les articles 267.0.1 du Code municipal; dans la Loi sur les cités et villes, il y a un pendant ? un droit d'appel à la Commission des relations de travail dès qu'un fonctionnaire, directeur général, greffier est suspendu, licencié, mis à pied. Et ce droit d'appel là est à peu près la meilleure protection, le meilleur rempart contre l'arbitraire politique qu'on puisse connaître dans les lois, je dirais, en Amérique du Nord. Tu t'en vas devant la Commission des relations de travail et tu es rétabli dans tes fonctions dès et aussitôt que la Commission des relations de travail est d'opinion que, si elle avait été, elle, le conseil municipal, elle n'aurait pas pris la même décision, ce que ne fait jamais un tribunal habituellement. Donc, cette garantie d'indépendance là qui existe à la faveur de certaines fonctions municipales, on ne l'a pas encore pour l'inspecteur municipal ou l'inspecteur agraire. Nous, ce qu'on dit, c'est: Donnez-leur cette même indépendance là, puis là il va être à l'abri du politique.

Maintenant, quant aux tribunaux, c'est une autre question. Quant aux tribunaux... Par exemple, dans les lois fédérales pour la question des aliments, l'inspecteur qui s'occupe d'assurer l'inspection et respect de la loi, il y a un droit de saisie automatique pour les aliments qui sont sur une tablette, sans jugement, puis c'est sorti de la tablette, puis, après ça, tu iras voir un juge pour contester si tu n'es pas content. Je donne une liste, aux pages 18 et 19, de différents pouvoirs qui existent pour des fonctionnaires, délégués par des lois, qui sont des pouvoirs exorbitants du droit commun et qui résistent aux attaques des tribunaux. La raison, c'est que tu as un droit d'aller devant un tribunal par ailleurs si tu n'es pas content de la décision de l'inspecteur. Alors, on n'est pas face à une ordonnance qui est donnée sans droit d'appel. D'ailleurs, beaucoup d'ordonnances qui sont données par l'inspecteur agraire vont être contestées par évocation devant la Cour supérieure. La Cour supérieure va décider si elle maintient ou ne maintient pas l'ordonnance. Mais le nombre d'ordonnances rendues par l'inspecteur agraire par rapport au nombre d'ordonnances qui sont portées, contestées devant les tribunaux, bien le nombre contesté, c'est minime. On ne parle même pas de 1 %, de 0,05 %. Ça existe... Généralement, ça assure, sur le territoire, une paix entre les citoyens, une certaine sérénité et une poursuite de l'administration municipale.

Alors, ce que nous disons, c'est simple. Nous disons que, par rapport au pouvoir politique, il y a moyen d'améliorer l'indépendance, puis on a une proposition à cet égard-là. D'autre part, par rapport au pouvoir judiciaire, par rapport à la question de l'indépendance, puis de l'impartialité, puis la qualité du jugement rendu, il y a moyen d'aller en évocation devant la Cour supérieure de l'ordonnance d'un inspecteur agraire. «What's the problem?» Il n'y a pas de problème avec ça. Ça fonctionne très bien dans la société jusqu'à maintenant.

Maintenant, si on en arrive, on veut en arriver à la conclusion que ce système-là est périlleux ou dangereux, bien, qu'on nous en fasse la démonstration et surtout qu'on ne précipite pas les choses; qu'on s'assoie, qu'on l'analyse, qu'on le remette dans l'ensemble de l'organigramme municipal lorsqu'on verra l'administration municipale, puis, après ça, on prendra une décision définitive. Présentement, ça me semble prématuré et précipité. En tout cas, je ne vois pas d'analyse qui justifie ça.

M. Fournier: Deux éléments...

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Ah! Bonjour.

Le Président (M. Bernier): Bonjour.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: ...j'ai été surpris. Je pense que j'en ai perdu des éléments, là.

Lorsque vous faites le lien avec des exemples... Revenons sur un des points, là, que c'est précipité, parce qu'on peut progresser avec l'administration, il reste que l'esprit ? ça, je pense que vous l'avez capté ? l'esprit, c'est de dire: Bon, bien, vous avez une juridiction, vous avez une responsabilité, prenez les moyens pour l'accomplir. On a voulu essayer d'enlever un certain nombre de détails. Là, ce que vous nous demandez, c'est de dire: Par rapport à nous, notre groupe à nous ? je ne vous en veux pas, je ne vous en fais pas reproche ? on voudrait garder ce détail-là. Il y en a plein d'autres qui vont venir dire: Bien, ce détail-là, nous autres aussi, on le veut. À la limite, on pourrait laisser tous les détails, tu sais. Bon, ce n'est peut-être pas un détail, parce que c'est des personnes, je comprends ça, là, mais néanmoins on parle ici de façons de faire, et l'objectif, essentiellement, c'est de permettre plus de souplesse dans les façons de faire. Ça ne veut pas dire que, dans d'autres cas, on n'a pas décidé de continuer de donner certaines précisions et ça ne préjuge pas de la suite des choses. Mais je voulais vous donner l'esprit général quand même qui est au coeur.

M. Bouchard (Daniel): On le comprend bien, cet esprit-là.

M. Fournier: Oui, je le sais. Le point que je voudrais... Vous faites référence à d'autres lois, vous parlez d'ordonnances de saisie. Bon. Est-ce que, dans cette loi-là, où il y a les possibilités de saisie, il y a un recours déjà prévu en révision de la décision d'ordonnance de saisie, qui serait un peu différente du type d'ordonnance que nous avons ici, qui sont des ordonnances où il n'y a pas de droit automatique de révision, je dirais, mais simplement un droit en recours extraordinaire, là? Est-ce qu'il n'y a pas... Est-ce que ce que je viens d'expliquer est une chose qui effectivement existe, une différence entre les deux, et est-ce que ça porte conséquence?

M. Bouchard (Daniel): Bien...

Le Président (M. Bernier): Alors, Me Daniel Bouchard, je vous donne la parole.

M. Bouchard (Daniel): Excusez-moi. À ma connaissance, non, mais il y a un recours. Ce que je veux dire, c'est que la loi est ainsi faite que, lorsqu'un inspecteur agraire émet une ordonnance, en raison de la façon dont le Code de procédure civile et les règles de surveillance de la Cour supérieure sont faites, il y a un recours.

M. Fournier: Oui, mais là...

n(10 h 30)n

M. Bouchard (Daniel): Mais là vous me parlez d'un recours nommément, hein, exprimé dans la loi statutaire, par rapport à un recours, qui est statutaire aussi, qui est dans le Code de procédure civile puis qui dit que tu auras droit à révocation lorsque tu n'es pas content d'une ordonnance, d'une part. D'autre part, d'autre part, au niveau du gars qui saisit, là, il n'a pas besoin d'une autorisation du tribunal préalable, comme normalement il est prévu, il le fait proprio motu, sur-le-champ.

M. Fournier: Parfait. On va rester sur le...

Le Président (M. Bernier): Alors, M. le ministre.

M. Fournier: Excusez-moi. On va rester sur le premier point, celui de savoir est-ce que c'est le recours extraordinaire ou un recours ordinaire, pour prendre une expression différente, mais qui est prévu par la loi. Parce que je vous pose la question...

M. Bouchard (Daniel): Mais c'est prévu par la loi.

M. Fournier: ...d'autres auront d'autres réponses. Le recours extraordinaire est différent d'un recours de révision prévu dans une loi, ça va de soi, sinon on n'en ferait pas, de recours de révision dans les lois. On en prévoit dans certains cas, vous admettrez avec moi.

Mais un exemple que vous mentionnez vous-même, vous me dites, il existe des cas où il y a une ordonnance soumise à une possibilité de révision statutaire prévue, liée à l'ordonnance elle-même, je dirais, et vous me dites: Oui, ça, c'est possible de faire ça. Mais le législateur peut aussi prévoir de ne pas mettre, imbriquer avec ce pouvoir d'ordonnance un droit de révision et de dire: Bien, par ailleurs il y a un pouvoir en recours extraordinaire, et vous dites: bien, le législateur a deux choix, puis il n'y a pas de conséquence différente. Permettez-moi de vous dire que, vous comme avocat, vous allez nous plaider souvent que le législateur ne parle pas pour rien dire, et, s'il choisit deux méthodes différentes, c'est peut-être parce que ça porte deux conséquences différentes. Alors, je vous remets donc la question. À mon avis ? j'ai un préjugé là-dessus ? je pense qu'il y a une différence entre une révision statutaire...

Le Président (M. Bernier): Il reste 30 secondes au bloc, M. le ministre.

M. Fournier: ...et un recours extraordinaire, je pense même, dans l'application de la vérification qui est faite, il y a une différence. Ceci étant, est-ce que vous avez d'autres exemples où vous le prouvez ? ou établir, me donner quelques arguments ? pour dire si les conséquences sont les mêmes et qu'il y a le même niveau d'indépendance, même si c'est un recours via la cassation?

Le Président (M. Bernier): Alors, on va vous donner l'occasion dans le prochain bloc de répondre, à moins...

M. Fournier: Sur mon temps du prochain bloc, il pourrait répondre.

Le Président (M. Bernier): Sur votre temps du prochain bloc, vous êtes d'accord, M. le député de Blainville?

M. Legendre: Absolument.

Le Président (M. Bernier): Donc, je vous invite à répondre d'une façon courte, Me Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): M. le ministre, si ce qui chagrine le gouvernement, c'est qu'il n'y a pas de recours statutaire, prévoyez-en un. Ce que je vous dis, c'est qu'on a une méthode efficace sur le terrain qui permet de régler des dossiers à peu de frais pour les citoyens, et, si on enlève ce recours-là parce qu'on a peur à une contestation judiciaire, parce qu'il n'y a pas l'indépendance nécessaire, O.K., bon, bien, à l'image d'autres lois, prévoyez le recours statutaire nécessaire, qui va de toute façon conférer à l'ordonnance donnée par l'inspecteur agraire toute la plénitude à laquelle elle a droit. C'est efficace sur le terrain.

Ce que je propose, c'est qu'on essaie de regarder des solutions. Puis vous allez être d'accord avec moi, M. le ministre, que l'objectif, ce n'est pas de savoir qui a raison, qui a tort. Essayons de trouver une solution qui va permettre d'être efficace sur le terrain. Nous, on pense qu'il y a, dans cette fonction-là, des choses à maintenir. S'il faut moduler, trouver des façons pour en assurer une meilleure garantie, une meilleure viabilité, faisons-le.

Le Président (M. Bernier): Je vous remercie, Me Bouchard. Donc, la parole va maintenant au député de Blainville, porte-parole en matière municipale. M. le député.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, de saluer M. Drouin ? M. le président ? et vos collègues. Et je pense que ce que vous soulevez dans votre mémoire, ce matin, c'est au coeur des préoccupations que l'on a exprimées en guise d'introduction, c'est-à-dire: Est-ce que le législateur est en train de faire ce qu'il veut vraiment faire? Et, quand je regarde certains de vos commentaires, j'espère que ce n'est pas ça qu'il voulait faire, le législateur, parce que là vous parlez d'un projet de loi troublant, vous parlez de rupture avec les notions d'impartialité et d'indépendance et même, à quelques reprises, vous mentionnez qu'il y a des éléments importants qui ne vont pas dans le sens des intérêts des citoyennes et des citoyens du Québec. Or, je présume que ce n'est pas ça que le législateur a voulu avoir comme effet sur le domaine qui vous concerne.

Alors, la première question que je vais vous poser, et vous y avez fait référence, M. Bouchard, y avez fait référence un petit peu: sur les raisons du virage. D'ailleurs, dans votre mémoire, en page 17, vous en parlez, là, de la compréhension des motivations gouvernementales, parce qu'en même temps, dans votre conclusion, ce que vous dites clairement, c'est que le régime actuel, en ce qui vous regarde, est approprié, et là on a un projet de loi qui est supposé chercher essentiellement à simplifier sans avoir véritablement de nouvelles intentions, de nouveaux gros changements, et là il semble que c'est un nouveau gros changement pour tout le domaine de l'inspection municipale. Et vous dites, dans votre compréhension des motivations gouvernementales: «Quelle analyse justifie une telle réforme? On ne le sait pas. Y a-t-il eu ici des excès qu'on voudrait ainsi réformer? On ne le sait pas non plus.»

Je voudrais vous entendre là-dessus, à savoir est-ce que vous en savez un petit peu plus sur les raisons fondamentales de ce qui semble être un virage, là, en ce qui vous concerne, alors que les choses allaient bien.

Le Président (M. Bernier): Alors, Me Daniel Bouchard, je vous donne la parole.

M. Bouchard (Daniel): On n'en sait guère plus que ce qu'on a exprimé dans notre mémoire. On pense par contre que les préoccupations qui ont été exprimées par le gouvernement sont des préoccupations légitimes. On tente d'y répondre. On tente de dire: Compte tenu de ces préoccupations-là, qui sont par ailleurs légitimes, il nous semble que la solution que vous apportez n'est pas la meilleure dans les circonstances. Il nous semble qu'il serait possible, tout en ayant ces préoccupations-là à l'esprit, de maintenir ce qui fonctionne puis apporter des modulations, au besoin, à ce qui existe présentement dans le cadre du projet de loi n° 62 pour améliorer la qualité puis répondre aux préoccupations. Alors donc, on ne dit pas que ce qui est véhiculé est sans fondement, ce qu'on dit, c'est que la solution par ailleurs apportée, compte tenu de ces préoccupations-là, elle, elle n'est pas bonne.

En passant, juste à titre indicatif, la COMBEQ, vous l'aurez remarqué, elle ne vient pas ici demander que toutes les fonctions d'inspection municipale, donc de ses membres, soient maintenues. On fait une distinction, là: gardiens dans le clos public, on n'en parle plus; inspecteur municipal chargé de l'inspection sur les chemins, compte tenu de l'évolution des municipalités, on n'en parle plus. On ne vient pas dire ici: On est amoureux du passé et on voudrait que ces fonctions-là demeurent. Ce qu'on dit, c'est qu'il y a des fonctions du passé qui nous apparaissent devoir être maintenues. Il y a des problèmes à ce qui existe présentement, nous en convenons; nous demandons une amélioration de l'indépendance de l'inspecteur par rapport au conseil, la poursuite de cette évolution-là.

Et par ailleurs, en réponse aux inquiétudes du gouvernement, qui nous semblent légitimes, qu'est-ce qui arrive avec les villes, qu'est-ce qui arrive avec l'impartialité par rapport à la question judiciaire, bon, bien il y aurait peut-être moyen d'apporter des modulations qui permettraient de maintenir ce qui est en place, et non pas de faire table rase et de remplacer ça par des inspecteurs ad hoc. C'est ça qui nous semble être un excès ou, à tout le moins, pour l'instant, prématuré, pas suffisamment documenté. Bon, on considère que les motivations gouvernementales, qu'on explique aux pages 17, 18, 19, ne sont pas inappropriées, on pense que la solution apportée pour répondre à ces préoccupations, elle, est inappropriée.

Le Président (M. Bernier): Oui, merci. M. le député de Blainville, la parole est à vous.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Est-ce que je comprends bien que vous avez exprimé qu'au cours des dernières années il y avait une tendance à vouloir faire en sorte qu'il y ait de plus en plus d'impartialité et d'indépendance de l'inspection municipale et que, là, certaines dispositions du projet de loi n° 62 font que ça va dans le sens contraire de cette volonté-là, qui semblait rallier la majorité des intervenants dans le secteur municipal?

M. Bouchard (Daniel): Prenons deux, trois exemples...

Le Président (M. Bernier): M. Bouchard, je vous donne la parole.

M. Bouchard (Daniel): Excusez-moi.

Le Président (M. Bernier): C'est pour fins d'enregistrement, je dois mentionner qui est l'intervenant, de façon à ce qu'on puisse suivre les débats.

M. Bouchard (Daniel): Excusez mon indiscipline.

Le Président (M. Bernier): Ce n'est pas grave, Me Bouchard...

M. Fournier: On a vu pire.

Le Président (M. Bernier): ...vous n'êtes pas indiscipliné, c'est tout simplement de l'information que je vous donne par rapport à l'aspect technique de nos débats.

M. Bouchard (Daniel): D'accord. D'abord, l'inspecteur agraire, l'inspecteur municipal, il y a quatre ou cinq ans, c'était un inspecteur qui était nommé obligatoirement à tous les deux ans, donc, à tous les deux ans, il pouvait être remplacé par un autre, et il exerçait ses fonctions pendant les deux ans selon le bon vouloir du conseil. Dans un premier temps, le législateur a enlevé l'expression «selon le bon vouloir du conseil», ce qui fait que, nommé pour deux ans, il devait rester deux ans, et récemment il a enlevé «pour deux ans», ce qui fait que, quand tu es embauché, tu ne peux pas être mis à pied au bout de deux ans parce que tu ne fais pas l'affaire du conseil. Ce qui reste, c'est le droit d'appel à la Commission des relations du travail en cas de congédiement, licenciement, suspension.

n(10 h 40)n

Autre exemple, l'inspecteur en environnement, l'officier municipal en environnement, celui qui s'occupe de l'application du Règlement sur l'évacuation et le traitement des eaux usées de résidences isolées puis du Règlement sur le captage des eaux souterraines, bon, bien, récemment les dispositions ont été modifiées pour donner à ces inspecteurs-là le même droit d'appel à la Commission des relations du travail que le greffier, ou le directeur général, ou le trésorier, ce qui sont des exemples d'une volonté du législateur d'aller de l'avant dans la mise en place d'une administration publique municipale indépendante du politique, donc assurant une certaine impartialité puis une meilleure équité dans le traitement des citoyens. Ça, c'étaient des acquis, puis on pense que, ces acquis-là, il faut continuer à aller dans le même sens puis on pense que c'est rompre avec ces acquis-là que de prévoir des inspecteurs nommés ad hoc.

Le Président (M. Bernier): Alors, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Mais justement, si vous pouviez continuer, Me Bouchard, sur cette affirmation-là, quand vous dites: Bien, désormais, s'ils sont nommés sur une base ad hoc, il va y avoir perte d'indépendance et d'impartialité, bon, je pense qu'on comprend pourquoi, mais j'aimerais vous entendre là-dessus, là.

Le Président (M. Bernier): Me Bouchard, je vous donne la parole.

M. Bouchard (Daniel): Présentement, lorsqu'il y a une plainte d'un citoyen reliée à un problème de mitoyenneté ou encore un problème de cours d'eau, l'inspecteur doit intervenir, c'est une obligation qui est prévue dans la loi. C'est l'inspecteur en poste, et peu importe le citoyen qui en fait la demande, et cet inspecteur-là rend une ordonnance, le conseil n'a pas le droit d'intervenir dans la décision, et son salaire est déterminé au début de l'année ou dans une convention collective, peu importe, et il n'y a pas de lien entre son salaire et l'intervention qu'il va faire, et le dossier qu'il a à traiter. Quand tu nommes quelqu'un ad hoc, bien, d'abord il n'y a pas d'obligation, donc ça va dépendre si tu as le goût d'intervenir ou pas, et puis, après ça, la personne que tu vas nommer pour t'occuper du dossier, elle va être ad hoc, elle va dépendre des humeurs du moment, puis de...

Écoutez, on peut souhaiter, espérer la plus grande équité des administrations publiques, des politiciens, mais là où est-ce qu'il y a de l'homme, il y a de l'hommerie. Alors, quand tu es dans des conditions où tu peux nommer quelqu'un qui va faire l'affaire du gars qui a fait la plainte, parce que c'est quelqu'un qui t'appuie peut-être, bon, on peut avoir un doute quant à la qualité de la personne qui va être nommée puis à la qualité du travail qui va être fait ? sans présumer de la malveillance des élus municipaux, là n'est pas le propos. Il s'agit d'avoir une ossature d'administration publique qui donne une apparence d'impartialité. Un inspecteur nommé ad hoc, ça ne donne pas l'apparence d'impartialité.

Le Président (M. Bernier): Alors, merci, Me Bouchard. Donc, M. le député de Blainville.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): ...renchérir, s'il vous plaît, sur la question.

M. Legendre: Absolument, oui.

Le Président (M. Bernier): Oui, c'est beau. M. Ravenelle.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): Écoutez... Merci.

Le Président (M. Bernier): Donc, je vous donne la parole, M. Ravenelle.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): Écoutez, pour renchérir sur la réponse de Me Bouchard, tout le monde savent très bien ici, alentour de la table, comment ça fonctionne dans une municipalité, surtout dans les plus petites municipalités au Québec. Pour avoir eu l'honneur de siéger durant 13 ans également ? puis ce n'était pas le cas chez nous, en passant, là ? mais on va se rappeler la guerre, depuis 10 ans, que la COMBEQ a faite, avec laquelle on a eu une certaine collaboration avec les gens du gouvernement actuel et du gouvernement passé. Ça a débuté en 1995, on a obtenu un petit morceau de reconnaissance. Après ça, ça a passé en l'an 2000, un autre petit morceau de reconnaissance, contrairement à nos collègues les secrétaires-trésoriers, les directeurs généraux.

Puis, en passant, je tiens à féliciter le gouvernement, qui ont fait de ce groupe de fonctionnaires au Québec une partie importante dans la bonne administration d'une municipalité. J'ai toujours comparé, moi, avec mes collègues les élus, même les gens avec qui j'ai eu à discuter, qu'une municipalité, ça avait deux bons bras: côté administratif, secrétaire-trésorier, directeurs généraux ? vous en avez fait la preuve, le ministère des Affaires municipales, à l'époque et aujourd'hui, reconnaît l'importance de ces personnes-là dans la bonne administration ? sur l'autre bord, on a nous...

Le Président (M. Bernier): Je vous inviterais à conclure, M. Ravenelle.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): ...bon, nous, les enfants pauvres, si vous me permettez l'expression, qui, depuis 10 ans, ont travaillé fort, on est arrivés à une certaine reconnaissance, à une certaine indépendance.

Ce matin, ce qu'on vient se poser, c'est la même question que les gens du ministère se posaient au mois de septembre: Quel sera l'impact, dans le quotidien, des élus? On applaudit au fait que le gouvernement est arrivé avec un projet de loi n° 62, mais on se pose la même question que les gens du ministère se posaient et plusieurs élus se posaient ? je finis là-dessus, M. le Président ? sur l'impact des gestionnaires municipaux. Puis là je parle de l'impact des gestionnaires municipaux, ça nous concerne, nous autres, les inspecteurs municipaux à travers le Québec, puis, en passant, on est près de 1 000 qui faisons un bon travail, puis on le fait spécifiquement aussi en rapport avec le ministère de l'Environnement. Je termine là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): Alors, je vous remercie. Je vous remercie, M. Ravenelle. Donc, la parole est maintenant au ministre. Alors, il vous reste 8 min 45 s, M. le ministre. Donc, je vous donne la parole.

M. Fournier: Dites-moi comment vous réagissez si je comprends que ce que ferait le milieu municipal, c'est d'identifier, parmi ces fonctionnaires, un fonctionnaire qui a le mandat de faire ces ordonnances ? on verra plus tard, là, à réfléchir sur comment les ordonnances sont statutairement révisées ou pas, on réglera ça à une autre place, je ne suis par fermé à ce qu'on continue, de part et d'autre, d'être intelligents même quand on a fini de siéger en commission. Alors ça, on peut regarder ça. Mais, si c'était quelqu'un qui n'est pas... Parce que ce qui vous effraie, c'est d'abord une personne désignée pour un dossier puis qu'après ça quelqu'un d'autre prend un autre dossier, puis qu'on magasine les personnes, ni plus ni moins, et même qu'on magasine des personnes qui ne seraient même pas nécessairement des fonctionnaires. Ça, ça vous inquiète. Si on amenait la position à dire qu'il y a une identification d'un fonctionnaire pour faire le travail, là vous n'auriez plus de difficultés.

M. Bouchard (Daniel): En tout cas, certainement beaucoup moins de difficultés.

M. Fournier: Si la personne...

Le Président (M. Bernier): Me Bouchard, je vous donne la parole.

M. Bouchard (Daniel): Certainement beaucoup moins de difficultés.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Autrement dit, si la personne désignée n'est pas choisie à l'extérieur de ceux qui sont déjà des fonctionnaires, ça vous règle déjà un problème.

Le Président (M. Bernier): Me Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): Ça règle un partie du problème. Il reste le volet compétences acquises, parce que... Est-ce que je peux me permettre d'illustrer le problème auquel fait face l'inspecteur qui intervient?

Vous connaissez le problème qui existe sur le terrain, là, qui fait rage, sur la question des cours d'eau: Qu'est-ce qu'un cours d'eau municipal? Il est courant que je sois interpellé par une municipalité qui a un problème et qui m'appelle en me disant: J'ai un problème de fossé. Après inspection des lieux, on constate que c'est un problème de cours d'eau. Cette expertise-là, il faut qu'elle soit portée par quelqu'un qui connaît la loi, qui sait, qui a développé des habitudes, qui sait comment fonctionner, qui a une méthode d'approche avant de procéder à la qualification parce que le régime juridique qui s'applique, dans l'un comme dans l'autre, est complètement différent. Par exemple, si c'est un cours d'eau puis je veux faire des travaux dedans, ça me prend un certificat d'autorisation d'Environnement Québec avant de les faire; si je suis dans un fossé, ça ne me le prend pas.

La définition de «cours d'eau» que j'ai en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement n'est pas la même que celle que j'ai en vertu du Code municipal. Si je fais des travaux dans la berge d'un cours d'eau, j'ai les dispositions du Règlement d'urbanisme qui s'appliquent, si je fais des travaux dans la berge d'un fossé, ils ne s'appliquent pas. La distinction entre les deux est fondamentale. L'expertise de l'intervenant est capitale. Remplacez ça par quelqu'un d'ad hoc, c'est une perte d'expertise. Ce n'est pas un bénéfice pour les citoyens, ce n'est pas un bénéfice pour l'Administration publique. Et on va avoir plus de problèmes devant les tribunaux, les gens vont chialer et ils vont avoir l'impression que leur travail, leur situation, leur problème n'est pas réglé. Vous savez comme moi ce qui arrive quand deux personnes sont face à un incompétent: quand ils sont face à un incompétent, ils sortent de l'entrevue complètement fâchés. S'ils se ramassent devant une personne compétente, même si elles avaient des points de vue différents au départ, ils ont écouté, puis le bon sens va gagner, règle générale, puis le problème est réglé.

Juste ouvrir une parenthèse: historiquement, là, quand Durham est venu puis qu'il a fait son rapport, savez-vous ce qu'il a dit? Il a dit: Les Québécois, c'est des pas bons. Ça, c'est la partie de son rapport que tout le monde s'est souvenu, puis il s'est trompé là-dessus. Mais il y a l'autre partie de son rapport qui disait: Vous vous demandez comment ça se fait qu'on a des problèmes au Québec? Mais vous n'avez aucune administration publique locale, municipale pour régler les problèmes des gens, il faut qu'ils montent à Québec à toutes les fois qu'ils ont des problèmes. Je fais une analogie: l'inspecteur qui intervient sur le terrain puis qui a une expertise, bien c'est celui qui va éviter les problèmes, qui va jouer le rôle de rempart puis qui va faire qu'il va y avoir moins de crise. Ça contribue à permettre une meilleure administration publique. On dit qu'un inspecteur ad hoc, ça scrape ça, ce n'est pas bon.

Le Président (M. Bernier): Alors, merci. Alors, M. le ministre, je vous donne la parole.

M. Fournier: Juste conclure, M. le Président. J'ai terminé les interventions, mais simplement pour vous remercier du commentaire sur le rapport Durham. J'aurai probablement l'occasion de le soulever à nouveau parce que certains me diront que les décisions devaient être prises seulement à Québec et pas au niveau local. Alors, je me servirai peut-être de cette partie-là à ce moment-là ? je penserai à vous.

n(10 h 50)n

Mais je voudrais profiter du fait que vous êtes là et que le président de la FQM est derrière vous pour télégraphier tout de suite que j'aurai l'occasion de lui poser des questions sur la question du... plutôt que, la personne désignée, ce soit un fonctionnaire qui assume la... en tout cas, ou le nomme fonctionnaire plutôt que personne désignée, la personne qui a à procéder à ces exercices-là, puis ce n'est pas en tout temps, c'est à l'occasion. Mais néanmoins ce n'est pas une job: à 9 heures le matin, je commence déjà à rendre des ordonnances, là, et, dans certains milieux plus petits, il y a probablement moins de matière à rendre des ordonnances ? enfin, je ne suis pas un expert, mais j'imagine ? alors ces gens-là qui peuvent être désignés à cette fin-là peuvent aussi faire autre chose, j'imagine. Mais certainement que j'en profiterai, de la succession des témoins, pour enrichir notre pensée sur le sujet. Puis en vous remerciant de votre connaissance historique, c'est un rappel qu'il est utile de faire tous les jours. Merci.

Le Président (M. Bernier): Est-ce que vous voulez réagir aux commentaires du ministre? Il vous reste... Est-ce qu'il y a d'autres membres du gouvernement qui veulent réagir? Il reste trois minutes du temps disponible. Vous avez des questions? Non?

M. Bouchard (Daniel): Peut-être...

Le Président (M. Bernier): Oui, Me Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): Juste...

Le Président (M. Bernier): Vous pouvez y aller.

M. Bouchard (Daniel): Il y a un jugement que la Cour suprême a rendu au début de l'année 2004, sur la façon dont les lois municipales ont été rédigées en Alberta, qui est un précurseur du Québec à cet égard-là. Et le pouvoir qui était conféré aux municipalités dans la loi albertaine, la nouvelle, c'était de régir les permis de taxi, et la ville avait décidé de régir les catégories de permis de taxi puis d'établir des catégories, alors que la loi ne lui permettait pas d'établir des catégories. Dans notre Code municipal présentement, quand on donne le pouvoir à une municipalité de faire une chose, si on ne lui permet pas de faire des catégories, elle ne peut pas faire des catégories. La nouvelle loi que vous voulez faire, quand on va lui avoir donné des pouvoirs, elle va pouvoir faire des catégories. Alors, la Cour suprême, elle a dit: C'est une nouvelle approche dans le monde municipal, ce n'est pas parce que ce n'est pas marqué qu'elle peut faire des catégories qu'elle ne peut pas faire des catégories. C'est en cela que c'est une révolution tranquille municipale.

Le Président (M. Bernier): Merci, Me Bouchard. M. le député de Frontenac, vous avez une question, il vous reste deux minutes.

M. Lessard: Oui, merci. C'est seulement une question de précision quant au règlement des litiges en matière de clôture, fossé ou découvert. On a mentionné que vous étiez 1 000 dirigeants dans l'ensemble du Québec. Y a-tu une documentation sur combien d'ordonnances sont rendues annuellement et combien sont portées en évocation? Est-ce qu'il y a un volume?

Le Président (M. Bernier): M. Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): On n'a pas de statistiques là-dessus, mais je peux vous rendre compte de mon expérience personnelle. J'ai 150 municipalités clientes. J'ai des inspecteurs agraires qui m'appellent pour des problèmes d'ordonnance au rythme, à peu près, «à peu près», là, d'une fois par mois, O.K. ? ça ne veut pas dire que c'est toutes les ordonnances qui sont portées à mon attention ? et à date j'en ai connu deux qui ont été portées en évocation, dans toutes les années de pratique que je connais, là. Quand je dis que c'est minime, c'est minime.

Le Président (M. Bernier): Ça va, M. le député de Frontenac? Avez-vous d'autres questions? Vous avez terminé?

M. Lessard: Oui.

Le Président (M. Bernier): Donc, je vais donner la parole... Monsieur... Oui, M. Drouin.

M. Drouin (René): Peut-être ajouter un complément d'information. On forme nos gens dans ce sens-là aussi, au niveau des cours d'eau, la protection des cours d'eau au niveau législatif, etc., tout ça, donc nos membres sont très bien formés. On forme régulièrement nos membres à travers la province, donc on évite bien des problèmes à ce niveau-là.

Le Président (M. Bernier): Alors, merci, M. Drouin. Je vais donc donner la parole au député de Saint-Maurice. Vous avez 8 min 45 s, M. le député.

M. Pinard: Merci, M. le Président. Moi, je voudrais revenir sur un point que vous avez soulevé avec énormément d'intensité tout à l'heure. Vous nous avez parlé que, dans le monde municipal, le secrétaire-trésorier ainsi que le directeur général sont protégés concernant, par exemple, leurs mises à pied et vous nous avez demandé de modifier la loi pour faire en sorte que l'inspecteur municipal puisse bénéficier des mêmes privilèges. Que se passe-t-il si, par exemple, un citoyen fait une plainte ? et là on sait que les inspecteurs municipaux travaillent davantage au niveau des cours d'eau et fossés mitoyens dans le monde rural ? que se passe-t-il, par exemple, si un citoyen loge une plainte à l'inspecteur municipal sur le fait que le maire de la petite municipalité ou de la paroisse est en train de travailler dans un cours d'eau? Est-ce que l'inspecteur se déplace pour aller examiner qu'est-ce qui se passe? Est-ce que l'inspecteur rédige une ordonnance à l'encontre de son maire? Et est-ce que l'inspecteur est protégé par la loi advenant l'hypothèse où l'ordonnance qu'il émet ne satisfait point l'élu qui est lui-même partie à la constatation que fait l'inspecteur?

Le Président (M. Bernier): Alors, M. Bouchard.

M. Bouchard (Daniel): En vertu de la loi, l'inspecteur va être tenu d'intervenir. En vertu de la loi, il va avoir aussi une protection en raison de la Loi sur les normes du travail et, s'il est syndiqué, en vertu de sa convention collective. La Loi sur les normes du travail va interdire qu'on congédie quelqu'un sans cause juste et suffisante. Alors, si le motif pour lequel on congédie l'inspecteur, c'est parce qu'il est intervenu contre le maire, ce ne sera pas une cause juste et suffisante.

Je ne voudrais pas, O.K., lancer la présente commission sur de fausses pistes. La situation des inspecteurs municipaux n'est pas dramatique; elle comporte des insuffisances, mais à certains égards il existe déjà, dans la loi, des mécanismes de protection qui assurent une protection à ces inspecteurs-là contre l'arbitraire. Ce qui est moins facile, c'est quand on te congédie parce que tout à coup, pour d'autres motifs, on crée un contexte: on n'a pas aimé telle intervention et on s'organise pour en arriver à une conclusion qui va faire que tu vas quitter. Ça, à cet égard-là, l'inspecteur est moins bien protégé présentement que ne le sont d'autres catégories de fonctionnaires municipaux. Pourquoi? Parce que les protections qu'ont les inspecteurs, ce sont des protections qui leur sont assurées par les tribunaux judiciaires ordinaires, à partir de règles juridiques ordinaires. En matière d'appel de cadres, lors de licenciement, géré par une partie de la Commission des relations de travail, s'appliquent là des règles de droit particulières qui assurent une meilleure protection, contre l'arbitraire politique, à cette catégorie d'inspecteurs, de fonctionnaires là. Nous, on dit: Compte tenu des rôles joués par l'inspecteur municipal, on devrait leur reconnaître le même niveau de protection. Mais ils ne sont pas sans protection. Il ne faut pas s'alarmer non plus, là. Une mouche, c'est laid, mais, quand on la regarde avec une loupe, c'est pire, là. Ce n'est pas à ce point-là, là.

Le Président (M. Bernier): Merci. Alors, M. le député de Saint-Maurice, la parole est à vous.

M. Pinard: Une petite question rapidement, M. le Président: Est-ce qu'à l'intérieur de votre organisme...

Le Président (M. Bernier): Vous avez quatre minutes.

M. Pinard: À l'intérieur de votre organisme, les membres, est-ce qu'il a été fréquent... ou est-ce qu'annuellement vous assistez à des congédiements où certains inspecteurs vous demandent, demandent à votre association des conseils ou de les représenter? Est-ce que c'est quelque chose qui vous arrive régulièrement dans l'opération normale?

Le Président (M. Bernier): M. Ravenelle, la parole est à vous.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): Je peux vous dire que, depuis 1995... En 1995, c'était une question régulière. On avait même mis de l'avant un fonds de secours qui existe encore. Heureusement, depuis 1995, je vous disais tantôt, compte tenu des gains qu'on avait faits, ça a baissé. Jusqu'en l'an 2000, il y en a eu de façon encore assez régulière. En l'an 2000, avec le deuxième gain qu'on a obtenu, ça a encore diminué. Et puis, depuis les quatre, cinq dernières années, avec le programme d'assistance, on peut recevoir environ une quinzaine de plaintes par année. On en résout par téléphone.

n(11 heures)n

Des fois, je dialogue avec les élus mêmes, on appelle les maires, les conseillers. Parce que c'est toujours le même problème qu'on vit, surtout dans les petites municipalités. Des fois, la veille d'élection, bon, il ne faut pas se conter de menteries, il arrive un nouveau groupe avec un nouveau conseil, puis on essaie de pousser puis de changer la personne en conséquence. Mais, pour répondre très franchement, l'année passée, je pense qu'on a eu six cas; il y en a au moins trois, cas, qui sont encore problématiques en 2004. Et puis c'est malheureux parce qu'on ne devrait pas...

C'est la question d'indépendance, c'est ça qu'on veut. On fait notre travail comme il faut. Ces hommes, ces femmes-là font un travail extraordinaire. Ils sont les représentants des élus, les représentants de l'État, comme on a mentionné tantôt. Et puis on est encore un petit peu à l'opposé d'un exemple parfait... Moi, je le mentionne depuis 20 ans, le ministère des Affaires municipales, vous avez fait un chef-d'oeuvre avec les directeurs, trésoriers, les secrétaires municipaux, nos collègues. Puis, l'autre bras, bien nous autres, nos grands frères, le ministère de l'Environnement, on relève plus d'eux autres, mais c'est le ministère des Affaires municipales qui prend les décisions, et puis il nous en reste encore un bout à faire.

Puis ce n'est pas dans le cadre du projet de loi... On se sert peut-être de la tribune pour venir vous l'expliquer, M. le Président, mais ce qui est important, c'est que, dans une petite municipalité au Québec... Puis vous le savez, comment ça fonctionne au Québec. Aujourd'hui, heureusement qu'ils ne peuvent plus le faire, nos élus. Ce n'était pas le cas chez nous à part de ça, parce que, quand vous avez des maires puis un conseil qui sont sérieux, qui ont intérêt pour leurs citoyens... qui est important, ils prennent bien soin de leur personnel...

Le Président (M. Bernier): Je vous remercie. Le député de Blainville a une dernière question à poser, donc je dois lui...

M. Ravenelle (Pierre-Paul): Je m'excuse. Je ne suis pas habitué aux procédures à 100 %, là. C'est l'enthousiasme.

M. Legendre: Il nous reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier): Environ une minute.

M. Legendre: Environ une minute? Alors, oui, une toute petite minute pour que vous reveniez sur le sujet de vos propositions alternatives, si vous êtes capables en une minute.

M. Ravenelle (Pierre-Paul): Je vais passer la parole à un autre.

Le Président (M. Bernier): Vous avez 30 secondes.

M. Bouchard (Daniel): Écoutez, je pense, le plus simple, là, en une minute, là, c'est d'en faire le survol. À la page 20, 21, ce qu'on dit, c'est: «Prévoir l'obligation pour tout conseil municipal d'avoir à son emploi un fonctionnaire chargé du règlement des litiges en matière de fossé ou clôture mitoyen [ou] en matière de découvert ? ce qui ne veut pas dire en nommer un spécifiquement pour cette fonction-là, ça veut dire prendre parmi les fonctionnaires qui sont en place quelqu'un qui va avoir la job de le faire ? et ce, pour toute propriété située à l'extérieur du périmètre urbain ? on y comprend qu'à l'intérieur du périmètre urbain la question des mitoyennetés peut poser un problème, mais, à l'extérieur du périmètre urbain, c'est très utile ? tel que défini au plan d'urbanisme, ou pour toute propriété du périmètre urbain limitrophe à une propriété extérieure au périmètre urbain.» Puis à mon avis on vient de maintenir la stabilité et de garantir le maintien de ce que le passé nous a légué qui est, bon: prévoir...

Le Président (M. Bernier): Pardon. Je vous remercie, Me Bouchard, sur ça, je dois maintenant interrompre votre exposé. Alors, M. Hubert, M. Ravenelle, M. Drouin, M. Bouchard, représentant la Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec, merci.

J'inviterais donc la Fédération québécoise des municipalités à se préparer. J'interromps la commission pour quelques instants, de façon à faire la transition.

(Suspension de la séance à 11 h 3)

 

(Reprise à 11 h 5)

Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! J'inviterais maintenant les représentants de la Fédération québécoise des municipalités à prendre place. Je vous rappelle que vous disposez de 20 minutes pour votre exposé, qui sera suivi d'une période de 40 minutes d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et je vous donne la parole.

Fédération québécoise
des municipalités (FQM)

M. Belzil (Michel): Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames messieurs de la commission, je veux vous présenter d'abord la personne qui m'accompagne. C'est Me Isabelle Chouinard, directrice des affaires juridiques et institutionnelles à la FQM. Donc, c'est quand même un projet de loi relativement technique; donc, dépendant du sens de vos questions, on pourra demander à Me Chouinard, là, de soutenir le président dans les questions.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Ça va?

Le Président (M. Bernier): Allez-y.

M. Belzil (Michel): Alors, écoutez, nous vous remercions bien sûr de tenir cette commission, et on veut mentionner d'abord, en partant, que l'objectif de moderniser les lois en matière de compétences municipales, de façon à confier aux municipalités une marge de manoeuvre accrue dans la plupart de leurs champs d'activité, est bien accueilli par la FQM, et nous accueillons donc très favorablement le projet de loi n° 62.

La FQM réclamait, depuis plusieurs années, une révision des compétences des municipalités, à l'instar de ce qui a été réalisé dans d'autres provinces canadiennes. Le Code municipal actuel comporte de nombreuses désuétudes, mais surtout sa facture est très précise et les municipalités ne disposent que de compétences qui y sont expressément mentionnées. Il en résulte que, dès qu'une municipalité souhaite innover dans un domaine municipal, elle se heurte trop souvent à l'absence de pouvoir habilitant et elle doit reporter son projet, dans l'attente d'une modification législative. Cette révision était donc nécessaire et pressante.

La révision proposée dans le projet de loi n° 62 est une avancée importante dans le sens de la modernisation des lois en matière de compétences municipales, et la FQM souhaite que ce premier jalon soit rapidement adopté. Néanmoins, il restera encore beaucoup à faire pour que la nouvelle Loi sur les compétences municipales soit pleinement adaptée au contexte évolutif dans lequel oeuvrent nos institutions municipales. En effet, le projet de loi n° 62 ne constitue pas une véritable réforme mais plutôt une révision administrative. Parmi les principes qui ont guidé sa rédaction figurait celui de n'accorder ni plus ni moins de responsabilités aux municipalités. Les légistes avaient pour mandat de ne réécrire que les pouvoirs actuels des municipalités et des MRC. Le projet de loi, Loi sur les compétences municipales, ne présente donc pas une véritable réforme qui serait porteuse d'une vision politique quant à ce que doit être le rôle des institutions locales aujourd'hui et pour l'avenir. Une réflexion sur ce rôle doit suivre à court terme, et la FQM l'a fait valoir tout au long des travaux ayant mené à ce projet de loi, nous y reviendrons dans la partie de ce mémoire portant sur nos commentaires généraux. Nous aborderons ensuite quelques modifications souhaitées dans nos commentaires plus spécifiques.

Comme nous le disions en introduction, la FQM accueille favorablement le projet de loi n° 62. Cependant, cette révision devra être complétée pour s'étendre à l'ensemble des lois présentant des compétences municipales. Elle devra par ailleurs être suivie prestement d'une réflexion politique et d'une réforme porteuse d'une vision moderne du rôle des municipalités et des MRC.

Redéfinir le rôle des municipalités régionales. Les MRC sont des municipalités régionales oeuvrant sur un territoire plus vaste que la municipalité locale et agissant dans l'intérêt de l'ensemble des citoyens. Le rôle du conseiller régional, donc du maire assis à la table du conseil des maires de la MRC, n'est pas de défendre les intérêts de sa municipalité locale, mais bien de développer l'ensemble du territoire de la MRC. Bien que ce fait soit reconnu dans certains textes législatifs, il ne se transpose pas dans l'évolution du rôle, du fonctionnement et des règles décisionnelles imposées aux MRC au fil des ans. La FQM est d'avis que ce rôle serait mieux compris et géré si les compétences des MRC étaient clairement définies.

n(11 h 10)n

Depuis la création des MRC, aucun gouvernement n'a eu le courage de poser une réflexion sur la réorganisation des services entre les municipalités et les MRC, en fonction du principe de subsidiarité, comme le recommandait, par exemple, la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales. Il faudra pourtant, un jour, s'y attaquer. Bon nombre de responsabilités jusqu'ici dévolues aux municipalités locales sont devenues, au fil des réformes, trop lourdes pour que les municipalités puissent continuer de s'en acquitter individuellement, et la même réflexion aussi pour toutes les nouvelles compétences, là, qui sont discutées depuis plusieurs années ? je veux porter à votre attention que ce n'est pas nécessairement le texte que je vous avais remis, c'est une simplification, là, du texte.

Plus de 20 ans après la création des MRC, il faut tirer la conclusion que le transfert des compétences aux MRC, basé sur la volonté individuelle des municipalités locales, ne permet pas de réellement favoriser une gestion supralocale des compétences qui devraient relever de ce niveau, selon le principe de subsidiarité. La FQM demande donc au gouvernement d'entreprendre cette réflexion et de se fixer un échéancier pour la compléter. Le rapport de la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales constituerait à cet égard une excellente base de réflexion.

Procéder à la révision des autres lois. D'abord, l'aménagement et l'urbanisme. Il existe un paradoxe entre l'approche de la Loi sur les compétences municipales, qui vise à accroître l'autonomie des municipalités dans leurs domaines de compétence, alors que le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme, principal champ réglementaire des municipalités, se voit imposer un contrôle croissant de l'État. La FQM réclame que l'approche adoptée dans la Loi sur les compétences municipales soit appliquée dans l'ensemble des lois municipales et en priorité à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. La FQM souhaite vivement que la révision de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme épouse les objectifs d'autonomie politique locale et de simplification de la Loi sur les compétences municipales.

Les lois sectorielles. La FQM aurait souhaité que les dispositions portant sur les compétences des municipalités et contenues dans les lois sectorielles soient regroupées dans cette loi. Nous comprenons que cette entreprise aurait trop retardé les travaux du livre V, mais nous souhaitons que l'objectif de rapatrier sous une même loi la plupart des pouvoirs des municipalités et des MRC soit maintenu et poursuivi graduellement, à plus long terme.

Maintenant, j'en arrive à des commentaires plus spécifiques. Concernant le développement économique. La Loi sur les compétences municipales témoigne d'une vision passéiste du rôle des municipalités et des MRC en matière de développement économique. Les municipalités, et surtout les MRC, devraient bénéficier, dans ce domaine, comme dans tout autre, de pouvoirs d'intervention généraux. Le projet de loi n° 62 maintient, en matière de développement économique, une énumération de pouvoirs spécifiques, qui innove au plan des pouvoirs réglementaires, mais pas dans les pouvoirs d'intervention permettant de favoriser ce développement. Il est plus que temps que l'on reconnaisse, dans nos lois municipales, le rôle des élus locaux dans ce domaine, en tout respect de la Loi sur l'interdiction des subventions municipales.

Environnement et conflits de lois. Le rôle des municipalités en matière de protection environnementale est sans cesse croissant. Le projet de loi, Loi sur les compétences municipales, confirme le pouvoir réglementaire général et le pouvoir d'intervention des municipalités en matière d'environnement. La FQM le salue. Toutefois, nous sommes d'avis qu'une modification doit en corollaire être apportée à l'article 124, alinéa 5, de la Loi sur la qualité de l'environnement afin que les municipalités puissent agir en complémentarité avec le gouvernement. En effet, cet alinéa fait en sorte que, dès qu'un domaine est réglementé en vertu de la loi québécoise en environnement, il est rendu intouchable pour la municipalité. Afin de permettre aux municipalités de jouer pleinement leur rôle évolutif dans le domaine environnemental, la FQM réclame que l'on applique en cette matière la même règle de conflit que pour tout autre règlement du gouvernement, tel que prévu à l'article 3 du projet de loi n° 62.

Un mot sur l'énergie ? un sujet de l'heure au niveau du Québec, actuellement. Dans le cadre de son mémoire sur la stratégie énergétique du Québec, la FQM recommande que le monde municipal puisse s'impliquer de façon plus importante dans la production énergétique. Le projet de loi n° 62 reprend les pouvoirs actuels en cette matière. On constate que l'implication des municipalités et des MRC est fort limitée. Concrètement, les MRC ne peuvent s'impliquer que dans la constitution de minicentrales hydroélectriques, avec une participation du privé, dans le cadre d'une société en commandite, et seulement jusqu'à concurrence de 49 % des parts. Elles ne disposent par ailleurs d'aucun pouvoir en ce qui concerne le développement de l'énergie éolienne.

Comme la FQM le fera valoir devant la Commission de l'économie et du travail, il faut maximiser les retombées de la production énergétique pour les populations locales, et les MRC devraient être les principales bénéficiaires de la mise en valeur des ressources pour leurs territoires. Il apparaît en effet souhaitable, d'un point de vue social et économique, que les bénéfices d'une ressource naturelle publique, surtout en l'absence de redevance, demeurent la propriété du public. Ces bénéfices seraient affectés au développement économique et social des régions, à l'amélioration des infrastructures, bref, à la dynamisation des régions. Les résultats d'un sondage interne auprès des MRC du Québec montrent que plus de 75 % d'entre elles souhaiteraient pouvoir être l'unique propriétaire d'une centrale hydroélectrique. La FQM demande en conséquence que la Loi sur les compétences municipales soit amendée de façon à permettre à une MRC de constituer de façon autonome une petite centrale hydroélectrique, sans par ailleurs restreindre ses possibilités de s'associer à un partenaire privé ou à Hydro-Québec, selon une participation convenue entre les parties concernées. De la même façon, les MRC devraient être habilitées à agir à titre de promoteur dans le développement de l'énergie éolienne, au grand bénéfice de leur population et de l'environnement.

Abordons maintenant la question des cours d'eau. En 2001, les MRC se sont vu transférer la juridiction exclusive des cours d'eau. Ce fut le début d'un difficile processus d'appropriation, principalement en raison des coûts majeurs associés à cette responsabilité pour bien des MRC et de la complexité du cadre juridique qui s'y applique. Les dispositions contenues dans le projet de loi offrent une amélioration indéniable de la législation actuelle et faciliteront le travail des MRC. Toutefois, la FQM souhaite émettre quelques commentaires sur la dernière version du projet en date du 22 décembre 2004.

Concernant le financement. D'abord, la FQM estime que le gouvernement devrait procéder à une évaluation globale des coûts associés à la prise en charge de cette responsabilité et soutenir financièrement les MRC afin qu'elles puissent s'en acquitter convenablement. Puisqu'il s'agit du domaine de l'eau, l'éventuel Fonds vert du ministère de l'Environnement pourrait certainement y apporter sa contribution. Au plan de la répartition des dépenses au niveau local, les MRC souhaiteraient pouvoir bénéficier d'un mécanisme souple leur permettant simplement de facturer la municipalité locale concernée, laquelle pourrait rembourser la MRC dans un délai déterminé, le temps pour elle d'imposer un tarif ou un compte de taxe spécial. Par ailleurs, la municipalité bénéficie d'un pouvoir de taxation, mais, comme on le sait, certains immeubles bénéficient d'exemption de taxes. En matière de cours d'eau particulièrement, la FQM est d'avis qu'il est inique que le propriétaire riverain qui serait responsable de nuisance soit exonéré du coût des travaux parce qu'il s'agit, par exemple, d'une institution gouvernementale.

Cours d'eau exclus. En ce qui concerne les cours d'eau qui seraient exclus de la compétence des MRC, le gouvernement aura le pouvoir d'en identifier par décret. La FQM souhaite que ce pouvoir soit en outre utilisé pour exclure bon nombre de cours d'eau situés sur les terres du domaine public dans les territoires non organisés.

Les pouvoirs de l'inspecteur agraire. Le Code municipal prévoit l'obligation pour la municipalité de nommer un inspecteur agraire responsable de régler les conflits de voisinage relativement aux nuisances publiques: découverts, fossés de ligne et clôtures de ligne. Il dispose d'un pouvoir d'ordonnance, et ses décisions sont exécutives. Les municipalités régies par la Loi sur les cités et villes n'ont pas cette obligation. Dans le cadre de la révision des lois municipales, le législateur a donc dû faire des choix. La FQM est d'avis qu'il faille préserver le pouvoir d'ordonnance de l'inspecteur, en accordant à cette personne une protection contre les congédiements abusifs. Également, la FQM souhaite que les municipalités bénéficient d'une discrétion non seulement quant au fait d'offrir ce service, mais aussi quant au territoire d'application.

n(11 h 20)n

Un mot concernant l'interdiction d'épandage. L'article 51 du projet de loi n° 62 autorise les municipalités à interdire l'épandage de déjections animales et de boues ou de résidus pendant au plus 12 jours dans l'année. Selon les modifications récemment apportées au projet de loi n° 54, cette interdiction ne peut s'appliquer pendant plus de trois jours consécutifs. De plus, le greffier ou le secrétaire-trésorier disposent de la discrétion d'autoriser une personne à effectuer un épandage interdit par règlement. La FQM maintient que cette disposition est trop contraignante pour les municipalités, principalement en regard du nombre de jours consécutifs où l'épandage peut être interdit. La FQM propose de conférer en cette matière la même autonomie réglementaire que celle insufflée dans le reste du projet de loi.

La salubrité et les nuisances. Les articles 54 à 58 du projet de loi n° 62 prévoient les pouvoirs en matière de salubrité et de nuisances. Les municipalités peuvent les réglementer. Elles peuvent par ailleurs mettre en demeure un propriétaire pour lui enjoindre de faire disparaître une cause d'insalubrité ou une nuisance. À défaut par le propriétaire de se conformer, la municipalité peut intenter une requête en Cour supérieure. En corollaire, le projet de loi n° 62 prévoit l'abrogation de l'article 82 de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui était au même effet. En regard de ces dispositions, la FQM souhaite émettre les commentaires suivants: la FQM suggère d'attribuer à la municipalité un pouvoir d'ordonnance avec préavis, de façon à lui permettre, par exemple, d'ordonner l'évacuation d'un immeuble lorsque la sécurité des personnes est en jeu; la FQM souhaite de plus que la Cour municipale soit habilitée à émettre une ordonnance pour l'enlèvement d'une nuisance ou d'une cause d'insalubrité. Actuellement, l'article 546, alinéa 2, du Code municipal l'autorise.

Donc, en conclusion rapide, avec le projet de loi n° 62, le Québec rejoindra enfin le peloton de tête des provinces canadiennes ayant modernisé leur rédaction législative en matière de compétences municipales. Il devra par contre poursuivre sa réflexion, plus politique cette fois-ci, quant au rôle évolutif des municipalités et des MRC. Le projet de loi peut d'ores et déjà faire état de cette évolution en matière de développement économique, d'environnement et de production énergétique. Toutefois, une réflexion plus approfondie devra être entamée quant au partage des responsabilités entre les municipalités et les MRC. Alors, merci beaucoup de votre attention.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Belzil, pour votre présentation. On va maintenant ouvrir la période d'échange. Je vais céder la parole au ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir. M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. Belzil, Me Chouinard, merci d'être avec nous à nouveau, j'oserais dire. Les rendez-vous que vous avons sont toujours des rendez-vous agréables.

Premier commentaire, M. le Président, je voudrais... je le dis presque au nom de tous ceux pour qui nous travaillons, c'est-à-dire les gens qui sont les fonctionnaires du ministère, qui nous passent des messages des fois ? vous savez, les ministres passent, les gouvernements passent, eux restent et sont la mémoire de ce qui se passe souvent ? et j'ai eu des commentaires sur le travail de la FQM notamment, sur la collaboration qui a été apportée à ce projet de loi là. C'est d'ailleurs vrai pour tous les groupes qui viennent; il y a plein de regroupements qui nous ont beaucoup aidés, mais je tiens à souligner, M. le Président, que la FQM a apporté une collaboration de tous les instants auprès des personnes du ministère et, je tiens à le souligner, je pense que c'est un travail important qui a été fait, qui a suscité évidemment beaucoup d'énergie, là, de la part des gens chez vous, mais je pense qu'on avait un intérêt commun à travailler ensemble, et espérons qu'on puisse reproduire ce genre de processus à l'avenir ? parfois les débats sont un peu plus compliqués dans d'autres enjeux, mais, si on est capables, tant mieux. Alors, je voulais saluer votre travail là-dedans.

Vous me permettez de commencer, comme première question, avec celle que j'ai télégraphiée tantôt, sur les inspecteurs, d'autant que le groupe qui vous a précédés est resté ? pour augmenter la cote d'écoute ? avec nous. Écoutez, vous voyez un peu le contexte, là, personne désignée, ad hoc, fonctionnaire, le recours statutairement, suite à une ordonnance, est-ce qu'on irait vers un recours statutaire qui permet de nous protéger par rapport à ce que certains disent comme étant un risque à l'indépendance, comment vous réagissez aux commentaires que vous avez entendus de la part du groupe qui vous a précédés?

M. Belzil (Michel): Écoutez, sur ce sujet-là, je vais permettre à Me Chouinard de faire un peu le topo et la vision de la fédération, qui est en plusieurs points. Alors, comme on dirait, les arguments vont rester un peu dans la famille, entre guillemets, pour ceux qui comprennent ce que je veux dire. Mais, moi aussi ? avant de laisser la parole à Me Chouinard ? je vous dirai que, dans notre mémoire principal, on a souligné aussi la façon de faire du ministère des Affaires municipales dans tout le processus, là, de révision, là, du livre V, et on est extrêmement satisfaits du mode de consultation à répétition, au niveau de la FQM et sûrement des autres intervenants. Alors, moi, les gens de chez nous m'ont dit de passer le message qu'on est très satisfaits de la façon dont ça a procédé dans ce dossier-là.

Le Président (M. Ouimet): Bien, Me Chouinard.

Mme Chouinard (Isabelle): Merci. Merci, M. le Président, M. le ministre. Concernant l'inspecteur municipal, la FQM est d'avis qu'il faille préserver son pouvoir d'ordonnance parce que peut-être que les municipalités ne verront pas l'intérêt de nommer une personne simplement pour jouer un rôle de médiateur si de toute façon, en bout de piste, on doit retourner devant le tribunal pour régler le conflit. Le pouvoir d'ordonnance de l'inspecteur agraire, c'est ce qui permet d'éviter la judiciarisation, et donc on est d'accord avec le fait qu'il préserve ce pouvoir, et on comprend qu'en corollaire ce doit être le travail d'un fonctionnaire municipal qui bénéficie d'une certaine indépendance judiciaire, donc qui doit bénéficier d'une certaine protection contre les congédiements abusifs, et on est d'accord avec ça.

Maintenant, les municipalités membres de la FQM sont en majorité régies par le Code municipal. Elles avaient déjà l'obligation d'avoir un inspecteur agraire. Donc, je comprends que le législateur a dû faire un choix parce que les municipalités qui étaient régies par la Loi sur les cités et villes n'avaient pas la même obligation. La FQM pense qu'il serait raisonnable de laisser le soin à la municipalité de décider si elle maintient ou pas ce service-là ou si elle offre ou pas ce service-là sur son territoire. On peut comprendre qu'en ville ce serait peut-être trop lourd, dans une ville par exemple comme Québec, d'avoir une personne qui règle les conflits de voisinage en matière de clôture alors que ça a toujours été géré par les tribunaux de droit commun, mais, en campagne, ça se passe très bien. Il faut comprendre par contre que, dans les municipalités qui étaient régies par le Code municipal, ça pouvait s'appliquer sur l'ensemble du territoire et pas seulement en zone agricole. Alors, de la même façon, on pense que les municipalités devraient pouvoir aussi déterminer non seulement si elles offrent ou pas le service, mais aussi l'étendue du territoire où elles vont l'appliquer.

M. Fournier: Merci, Me Chouinard. Je comprends que vous partagez certains points de vue de Me Bouchard ? peut-être pas tous. M. Belzil, peut-être vous pourriez préciser, sur cette faculté qui serait donnée à la municipalité de choisir si elle offre ou non le service, comment vous prévoyez que cela s'exercerait? Est-ce que cela n'entraînerait pas automatiquement le choix fait par plusieurs de ne pas se doter d'inspecteurs? Et donc on perdrait le service.

M. Belzil (Michel): Bien, moi, je pense... J'ai la parole? Oui.

Le Président (M. Ouimet): Oui, oui, oui, M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Moi, je ne pense pas que dans l'ensemble, là, les municipalités vont se soustraire à ce service-là. Et je ne sais pas comment ça a évolué, là, ces dernières années, mais il fut un temps, il y a 10, 15 ans, où j'étais plus près de ces dossiers-là, et il y avait des conflits d'usage, de clôture. Et, nous, on offre le service chez nous, et je ne vois pas pourquoi on refuserait ce service-là. Ça engendre des conflits qui peuvent perdurer. N'oublions pas que, dans nos milieux, à plusieurs endroits, il se fait beaucoup d'agriculture, hein? Alors, c'est souvent en lien avec ? je fais un petit aparté ? souvent en lien avec des animaux, puis ci, puis ça. Alors, non, moi, la réponse à ça, non, ça ne fera pas en sorte que les municipalités vont se soustraire à ce service-là. Pas d'après moi.

Le Président (M. Ouimet): Oui, Me Chouinard.

n(11 h 30)n

Mme Chouinard (Isabelle): Merci. Peut-être, simplement j'aimerais ajouter que la FQM a procédé à une consultation d'un large comité, d'ailleurs auquel les fonctionnaires du ministère des Affaires municipales ont participé, et les élus qui étaient autour de la table disaient: C'est utile chez nous, ce service-là, on veut pouvoir le conserver. Alors, les élus avec qui on en a parlé, je pense, vont vouloir souhaiter préserver ce service qu'ils offrent déjà. Et souvent le service de toute façon est offert par un inspecteur municipal qui exerce d'autres fonctions, donc ça ne demande pas une ressource humaine additionnelle dans la municipalité pour pouvoir l'exercer, c'est le même inspecteur.

M. Fournier: Merci. J'ai noté, à la page 14 du... Moi, je lisais le mémoire en même temps ? et je comprends, pour les fins du 20 minutes, là, qu'il faut en prendre des bouts puis en laisser des bouts, là ? mais je suivais ce que vous nous disiez; je trouve toujours significatif, puisque ça l'est évidemment, que vous choisissiez certains passages que vous considérez plus importants, puis qu'il y en a d'autres des fois qui tombent.

Il y en a un qui, moi, m'interpellait, c'est au niveau des cours d'eau exclus, où vous parlez de la Montérégie. Ça ne vous étonnera pas de savoir que j'entretiens une relation privilégiée avec les préfets de la Montérégie puisque je suis responsable de la région et je viens de la région. Tout ça pour vous dire que j'aimerais ça que vous m'en parliez un petit peu plus parce que je ne suis pas sûr qu'ils disent la même chose que vous autres.

Et il y a toute la question du 100 hectares, là, moins, plus 10 %, pantoute... Aidez-moi un petit peu, là. J'aimerais ça faire oeuvre utile, là, mais dans les gens que vous représentez, je ne suis pas sûr que tout le monde pense la même chose.

M. Belzil (Michel): Je pense qu'on va essayer de vous aider un peu, M. le ministre, aujourd'hui. D'ailleurs, c'était le sujet de notre discussion, en s'en venant ici vous rencontrer...

M. Fournier: La Montérégie.

M. Belzil (Michel): Oui, la Montérégie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Belzil (Michel): Et Me Chouinard va vous expliquer un peu la position. Écoutez, la FQM représente quand même 915 municipalités, 87 MRC au Québec; c'est certain qu'à certains égards il y en a qui ont des positions qui peuvent paraître différentes. Mais, dans ces situations-là, on tente toujours de trouver une solution qui satisfasse l'ensemble des personnes. Et c'est ce que l'on cherche, mais je vous dirai que les discussions ne sont pas terminées, alors on ne peut pas s'avancer, là, d'une façon concluante et finale, aujourd'hui, là-dessus.

Mais Me Chouinard peut vous faire état de l'avancement des discussions dans ce domaine-là et même faire état, là, de ce qu'on a vu, là, les MRC de la Montérégie, là, quelle est leur position.

Mme Chouinard (Isabelle): Alors, pour répondre à votre question, d'abord, je dois vous dire que ça a fait l'objet d'une très grande concertation, de consultations, toute la question des cours d'eau, et on a travaillé très étroitement avec un comité de l'Association des directeurs généraux de MRC, qui sont venus nous dire: Voici comment ça pourrait fonctionner, concrètement, sur le terrain. Parce que le projet de loi était complètement à réécrire, là, à cet égard-là. Et évidemment, il y avait une forte présence des MRC de la Montérégie sur ce comité-là.

Et, je vous dirais, nous croyons sincèrement que la position de la FQM ralliait... puis là ça reste à vérifier, on pourra le discuter lors de la prochaine assemblée de MRC, mais ralliait l'ensemble du monde municipal, parce qu'il y a des MRC qui nous disent: Même si on n'a pas d'obligation d'intervenir dans les cours d'eau qui, par exemple, seraient des ouvrages de drainage qui drainent des superficies de moins de 100 hectares, soit, on est d'accord avec le fait de ne pas avoir cette responsabilité-là, mais on veut quand même pouvoir les régir parce que ça peut avoir un impact sur les autres cours d'eau sur lesquels on a une responsabilité.

Ce que je comprends de la position des MRC de la Montérégie, c'est que non seulement ils ne veulent pas avoir la responsabilité, mais ils ne veulent pas non plus avoir le pouvoir de le faire. Alors, la FQM s'était dit: En limitant la responsabilité en fonction de ce que veulent les MRC de la Montérégie, mais en permettant à toutes celles qui le veulent de régir les autres cours d'eau, on pense qu'on arrive à rallier la position de tous. Il y a des MRC qui nous disaient: On veut avoir une protection environnementale peut-être plus complète, donc on veut pouvoir intervenir aussi à l'égard de ceux-là.

Ce que la Montérégie nous dit, ce que je comprends, parce que j'ai vu la résolution hier soir, c'est: Non, on ne veut même pas avoir le pouvoir d'intervenir dans ces cours d'eau là. Alors, ce qu'on va faire, c'est qu'on va aller comme préciser, lors de la prochaine assemblée des MRC, la position, voir si tout le monde comprend la même chose, d'abord, par rapport au projet de loi, et puis on pourra peut-être vous revenir avec une position plus définitive. Mais c'est arrivé hier soir, là, sur notre table, là, la position de la MRC de la Montérégie à l'effet qu'ils n'étaient pas nécessairement d'accord avec la dernière mouture du projet de loi. Vous comprenez que ça évolue tout le temps, là.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, on aura l'occasion d'y revenir, M. le ministre, on a malheureusement dépassé l'enveloppe de temps. M. le député de Blainville, à vous la parole.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, M. Belzil, Me Chouinard, c'est toujours un plaisir de vous retrouver, et de vous souhaiter la bienvenue à cette commission parlementaire, et vous féliciter également, et vous remercier pour la contribution, le travail que vous avez fait au cours des dernières années à préparer, à contribuer à ce projet de loi n° 62.

Et, moi, je voudrais aller tout de suite à la conclusion que vous tirez en page 19, où vous nous dites qu'effectivement vous êtes satisfaits de l'ensemble du projet de loi, qu'on chemine vers la modernisation. Mais vous faites référence, et je suis au paragraphe suivant: «Le projet de loi peut d'ores et déjà faire état de cette évolution en matière de développement économique, d'environnement et de production énergétique. Toutefois, une réflexion plus approfondie devra être entamée quant au partage des responsabilités entre les municipalités et les MRC.»

Alors, j'aimerais que vous élaboriez un petit peu là-dessus, en particulier à l'égard, là, du développement économique. Ce que je comprends de ce que vous affirmez là, dans votre conclusion, c'est que vous nous dites que le projet de loi n° 62 pourrait être encore bonifié dès maintenant, à l'égard d'à la fois le développement économique, l'environnement et la production énergétique, mais évidemment, en ce qui a trait des responsabilités entre les municipalités, les MRC, bien il y a un travail de réflexion à continuer.

Et, quand je regarde une de vos recommandations, c'est-à-dire la quatrième, quand vous parlez de «confier aux municipalités, et surtout aux MRC, des pouvoirs d'intervention généraux en matière de développement économique, dans le respect de la Loi sur l'interdiction des subventions municipales», je veux essayer de bien comprendre ce que vous proposez concrètement en fonction de la loi n° 62. Est-ce que vous dites: En termes de développement économique, il faut des changements assez importants à la loi n° 62 telle qu'elle est présentement?

M. Belzil (Michel): Écoutez, comment... par où aborder ça? Récemment, par exemple, dans les mandats accordés aux MRC, il y a un texte qui dit que la MRC a l'obligation de produire un plan de développement culturel, social et économique, etc. Alors, de plus en plus, et depuis fort longtemps, déjà, les maires des villes, les maires des municipalités, les préfets de MRC se vouent au développement économique de leurs milieux, bien au-delà du texte que je vais vous lire tantôt, là, qui est spécifié dans le projet de loi n° 62, et on veut continuer à le limiter à ces dispositions-là. Alors, sans mettre le doigt nécessairement sur qu'est-ce que ça peut signifier, on sait ce que le développement économique exige, alors c'est beaucoup d'interventions, un soutien ici, un soutien là, c'est énorme.

Alors, dans le texte de loi, ici, on dit, à l'article 4: «...outre [les] compétences qui lui sont conférées par d'autres lois, toute municipalité locale a compétence dans les domaines suivants:

«1° la culture, les loisirs, les activités communautaires et les parcs ? principe général;

«2° le développement économique local, dans la mesure prévue au chapitre III.»

Alors, au chapitre III, c'est ici: «Toute municipalité locale peut, dans le but de favoriser son développement économique, établir et exploiter:

«1° un centre de congrès ou un centre de foires ? alors, bien sûr que ça a été introduit, ça, à un moment donné parce qu'il y avait un centre des congrès qui était en discussion au Québec;

«2° un marché public ? alors, ça, on comprend le sens aussi, on a beaucoup de discussions là-dessus;

«3° un embranchement ferroviaire;

«4° un bureau d'information touristique ? il y en a partout.

«[Et] elle peut confier l'exploitation [du] centre visé au paragraphe 1° [...] à une personne.

«Elle peut aussi aider à l'établissement ou à l'exploitation d'un tel centre.»

Alors, je ne veux pas me... C'est ça qui est la définition du pouvoir en matière de développement économique aux municipalités.

Alors, on pense que, dans d'autres domaines, on donne des pouvoirs d'ordre général, et l'expérience, on le sait, depuis 30 ans, 20 ans, 10 ans, le monde municipal s'investit en développement économique, c'est peut-être la priorité, à bien des égards, des élus municipaux; parfois, même, certains disent que c'est trop axé vers le développement économique. Et la Loi sur les compétences, le projet de loi spécifie encore ces domaines-là, qui sont une vision très passéiste de l'action du monde municipal en matière de développement économique.

n(11 h 40)n

Alors, grosso modo, c'est un peu ça qui est le sens. Que de mettre le doigt sur toutes les actions, il pourrait y avoir une nomenclature d'actions que le monde municipal fait, mais c'est toujours en respectant ? comment appelle-t-on ça, là? ? la loi sur les subventions, l'interdiction. Alors, nous autres, notre objectif, là, ce n'est pas non plus d'ouvrir ce dossier-là puis de dire: Là on peut tout faire, dans le monde municipal, puis mettre de l'argent dans les entreprises privées, etc. Ce n'est pas ça, l'objectif. Mais on fait beaucoup, beaucoup, beaucoup d'actions en matière de développement économique, puis il faut le reconnaître, il faut lui donner un pouvoir général. C'est ça qui est le sens qu'on dit, en matière de développement économique, en matière d'environnement, en matière d'énergie.

Le Président (M. Ouimet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Alors, si je comprends bien, M. Belzil, ce que vous souhaiteriez, c'est que justement cet article-là, dans la loi n° 62, soit modifié dans le sens d'être plus général?

M. Belzil (Michel): Tout à fait.

M. Legendre: Comme l'ensemble de la loi en question, c'est la notion d'être plus précis ? et d'ailleurs passéiste, comme vous dites ? qui fait que là ça devient restreignant et que ça va dans le sens contraire de ce que la loi cherche à faire, de donner une plus grande marge de manoeuvre aux municipalités.

Vous ne dites pas qu'on devrait définir, dans le projet de loi, quelles sont les nouvelles compétences ou les nouveaux pouvoirs en matière de développement économique, parce que le travail, comme vous le dites, là, on vous a répondu qu'il y avait une réflexion qui était en cours au ministère, et là vous êtes en attente de ça. Alors donc, ce que... Vous proposez un changement concret par ailleurs à la loi n° 62, un changement de texte, là?

M. Belzil (Michel): Tout à fait. On le voit, hein, avec la nomenclature que j'ai faite tantôt, là, c'est très limité. Je sais que j'ai dit tantôt que l'objectif des gens qui se sont penchés sur le livre V, ce n'est pas d'accorder de pouvoirs supplémentaires ni en réduire, mais, au moment où nous en sommes, en commission parlementaire, je pense que c'est un peu une aberration d'être limité comme ça, alors qu'on sait qu'est-ce que c'est, sur le terrain, l'importance du développement économique et l'investissement des élus municipaux en cette matière. Alors, je pense qu'on devrait faire une percée et immédiatement en cette matière.

Le Président (M. Ouimet): Il reste du temps.

M. Legendre: Oui. Merci. Je vous amène sur le sujet, en page 6, de l'aménagement et de l'urbanisme, et j'aimerais que vous élaboriez un petit peu sur l'affirmation que vous faites quand vous nous dites: «Il existe un paradoxe entre l'approche de la Loi sur les compétences municipales, qui vise à accroître l'autonomie des municipalités dans leurs domaines de compétences, alors que par ailleurs le domaine de l'aménagement et l'urbanisme, principal champ réglementaire des municipalités, se voit imposer un contrôle croissant de l'État.» J'aimerais que vous élaboriez un petit peu là-dessus et que vous nous disiez aussi quelle est la solution à ça, là.

M. Belzil (Michel): Ce qu'on veut dire par cette affirmation ? et on l'a validé, nous, à la FQM, auprès de l'ensemble des MRC du Québec récemment ? c'est toute la question de la soumission ? là je vais le dire assez crûment ? aux orientations gouvernementales qui nous proviennent des différents ministères.

Écoutez, l'objectif de départ, dans le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme, c'était un partage, un certain partage de compétences. O.K.? Alors, l'aménagement du territoire, l'urbanisme, c'est de notoriété municipale, bien sûr. Mais, avec les orientations gouvernementales, par exemple en matière d'agriculture ? mais ça peut être aussi dans d'autres matières ? le processus qui fait en sorte, au niveau des MRC, qu'on édicte une réglementation qui doit être référée à Québec, au ministre; on analyse le travail effectué souvent de longue haleine; on n'est pas satisfait en regard des orientations gouvernementales, on retourne le travail; des fois, là, l'échange de correspondance peut durer une année; et finalement qu'est-ce qui en découle, c'est qu'à bien des égards c'est l'orientation gouvernementale qui dicte toutes les règles du jeu, donc finalement qui décide de plus en plus.

Alors, nous, ce qu'on veut dire, c'est: Trouvons un équilibre, un juste milieu, faisons en sorte que les élus municipaux en cette matière aient leur rôle à jouer, aient les coudées franches. Ça ne veut pas dire de faire tous azimuts tout ce qu'on veut faire, mais moins contrôlé, moins comprimé par des orientations gouvernementales de plus en plus, là, dirigées vers des objectifs. Et ce n'est pas nécessairement, et ce n'est même pas du tout ce que les MRC et les municipalités souhaitent dans l'avenir.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Alors, je retourne du côté ministériel. M. le ministre.

M. Fournier: Je vais rester un petit peu sur le même axe, en touchant un autre point néanmoins. Mais on comprend bien, puis notre collègue de Blainville le comprend aussi j'imagine, surtout à avoir écouté le collègue de Saint-Hyacinthe, sur le projet de loi n° 54, parler de l'importance notamment du droit de produire ? et il avait bien raison d'en parler, à ce moment-là ? il y a des positions gouvernementales effectivement, dans l'ensemble du Québec, qui doivent s'appliquer et qui doivent trouver une couleur locale, une implication locale. D'où le processus par orientations.

Et, M. Belzil, vous avez notamment souligné la question des orientations gouvernementales en matière d'agriculture notamment, et je pense que c'est important de comprendre que le milieu municipal souhaiterait avoir les coudées franches. Mais, en même temps, c'est important de comprendre les réactions de l'agriculture et les objectifs gouvernementaux à l'égard du droit de produire, et qu'il y a donc une conciliation qui doit être faite.

Je ne disconviens pas qu'on peut réfléchir sur des moyens pour arriver à cette conciliation-là, mais je tiens à réaffirmer l'importance que nous avons de concilier les positions et de s'assurer... Je l'ai d'ailleurs déjà dit, au dernier congrès de la FQM, je tiens à le dire encore une fois ? parce que, quand j'en ai l'occasion, pourquoi ne pas l'utiliser ? je ne pense pas qu'on doit opposer, surtout pas à l'effet des MRC rurales, je dirais, on ne doit pas opposer agriculture et gouvernance locale, parce que l'un va avec l'autre. Alors, ce n'est pas des fossés qu'il faut qu'on crée, c'est des ponts. Et donc on peut peut-être trouver des manières plus souples, mais à la fin il faudra toujours quand même, à mon avis, concilier ces positions-là.

Alors, j'arrive donc sur des positions à concilier, ça amène mon propos. Vous dites, dans votre mémoire, vous soulevez l'article 124 de la Loi sur la qualité de l'environnement, vous nous parlez de la théorie des champs occupés et que finalement, si le gouvernement est déjà intervenu, le règlement municipal portant sur le même objet serait inopérant. Et, à la page 10, vous nous proposez plutôt qu'on utilise une règle d'inconciliabilité plutôt que des champs occupés.

Puis-je me permettre de vous citer une partie du mémoire de l'UPA, puisque nous sommes dans la conciliation? À la page 7 ? et juste pour qu'on se comprenne; à la page 7 ? de leur mémoire, ils nous disent ceci: «À ce sujet, on nous répondra sans doute que le projet de loi comporte, à ses articles 3 et 238, des dispositions rendant inopérant tout règlement municipal inconciliable avec un règlement provincial.» Et là ils continuent en disant qu'eux ils ne veulent pas qu'on utilise l'inconciliable, mais plutôt des... Ah, bien je ne suis même pas sûr s'ils veulent des champs occupés, mais néanmoins ils ne veulent pas plus de souplesse pour le milieu municipal; ils sont craintifs par rapport à une souplesse accrue du monde municipal.

Alors, vous, d'un côté, vous nous proposez... Puisque là, ce qui est pris dans le projet de loi, là, c'est plutôt: si le champ est occupé, il n'y a plus de place. C'est ce qui est écrit. Vous nous proposez: Soyons partenaires; même si vous occupez le champ, on va l'occuper aussi, puis, si ce n'est pas inconciliable, c'est vivre ensemble. Donc, j'oserais dire: si c'est plus sévère, ça marche encore, donc c'est correct. Et, de l'autre côté, j'ai l'UPA qui va me dire cet après-midi: Déjà, comment c'est écrit, la jurisprudence, où les cours risquent d'interpréter ce qui semble être les champs occupés, risque de l'interpréter comme étant plutôt inconciliable... essentiellement savoir si c'est inconciliable. Donc, déjà on est en situation problématique en ce moment avec le libellé, tant qu'à eux, et ils souhaitent qu'on le restreigne plus. Quel est votre point de vue?

M. Belzil (Michel): Alors, c'est un point de vue que j'ai maintes fois répété. Je pense qu'en matière de pouvoir local, ou d'aménagement du territoire, ou autre, l'UPA et la FQM sont à des points de vue diamétralement opposés.

Je pense que le territoire du Québec est composé de territoires avec un paquet de particularités, composé aussi de gens, de femmes qui veulent ? comment je dirais ça? ? aménager le territoire, donner des dispositions à leurs citoyens, des lois particulières. Alors, je pense qu'il faut faire... En tout respect pour chacune des régions du Québec, à l'intérieur de ces régions, pour chacune des MRC et même des municipalités, je pense qu'il y a de la place, là, pour de la législation en regard, là, des affinités et des particularités.

n(11 h 50)n

Comme je dis, en Gaspésie, écoutez, si c'est le tourisme qui est le plan de développement stratégique de la Gaspésie et s'il n'y a jamais eu, par exemple, une porcherie dans un grand territoire, ça va donner quoi d'aller en installer une, une seule dans cette partie de territoire là? Alors, c'est aux gens de la Gaspésie, qui voient leur développement et d'une façon si importante, c'est à eux à prendre cette décision-là.

Alors, la même chose pour d'autres régions. L'Abitibi, qui, il y a deux ans, réclamait un gros projet d'industrie porcine chez elle, mais, à cause du moratoire, ne pouvait pas. Alors, ça fait beaucoup de discussions. Alors, chacun a sa façon de voir les choses, sa façon de se développer. Alors, moi, je me dis: C'est en donnant au niveau du monde municipal, municipalités, MRC, des coudées franches pour ? comment dirais-je? ? gérer le territoire, voir au développement de leurs collectivités en fonction de leurs particularités, je me répète.

L'UPA, elle, c'est certain qu'elle ne sera jamais d'accord avec cette façon de voir. O.K.? Le puissant lobby de l'UPA, lui, c'est... il faut qu'il aille le plus haut niveau au gouvernement, toujours. Alors, c'est la raison pour laquelle ils ne voudront jamais qu'il y ait, pour le monde municipal, des assouplissements, des possibilités d'évaluer des situations en fonction des particularités. Eux, ils veulent du mur-à-mur sur l'ensemble du Québec, bien souvent. Alors, nous, on s'objecte à ça, ça fait déjà des décennies, puis on va continuer à s'objecter à cette façon de voir.

Et je pense que le gouvernement ne devrait pas tomber dans le piège du mur-à-mur, alors qu'on s'entend de gouvernement en gouvernement et, de plus en plus, avec le gouvernement au pouvoir actuel, pour qu'il n'y ait pas de mur-à-mur nulle part. Alors, pas de mur-à-mur, ça veut dire d'après moi pas de solution, là, ou de lobby, là, qui fait en sorte que les décisions se prennent, comme j'ai dit tantôt, même, avec des orientations gouvernementales très serrées, où que les décisions se prennent à Québec pour l'ensemble des citoyens du Québec dans des matières où c'est le monde municipal qui devrait jouer un plus grand rôle. Me Chouinard aimerait rajouter à ce que je dis.

Mme Chouinard (Isabelle): Un petit élément que je veux ajouter.

Le Président (M. Ouimet): Il reste moins d'une minute. S'il vous plaît.

Mme Chouinard (Isabelle): Rapidement. La règle de l'inconciliabilité ou de l'incompatibilité, c'est la règle qui s'applique en droit administratif de façon générale. La règle du même objet, c'est exceptionnel. Et la règle qui s'applique à l'article 98 de la Loi sur la protection du territoire agricole, depuis 1978, c'est de dire que la Loi sur la protection du territoire agricole prévaut sur toute disposition incompatible d'un règlement municipal, ou inconciliable, ça veut dire la même chose. Donc, l'UPA demande de faire plus, dans la Loi sur les compétences municipales, que ce qu'il y a dans la Loi sur la protection du territoire agricole.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci. Ça met un terme à l'échange avec les ministériels. Il reste à peine 10 minutes pour M. le député de Blainville. À vous la parole.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, pour revenir encore une fois à votre conclusion, où vous proposez qu'il y ait une évolution au niveau du projet de loi, à la fois en matière de développement économique, d'environnement et de production énergétique. Alors, on a parlé de développement économique, tout à l'heure, on vient de parler d'environnement; j'aimerais ça que vous nous parliez d'énergie. Et je pense que vous faites une affirmation d'entrée de jeu, dans votre mémoire, qui est intéressante, où vous dites que la FQM recommande que le monde municipal puisse s'impliquer de façon plus importante dans la production énergétique. Et j'aimerais ça que vous élaboriez un peu plus là-dessus.

Et vous mentionnez d'ailleurs, un peu plus loin, que les municipalités, les MRC ne disposent pas, par exemple, de pouvoirs en ce qui concerne le développement de l'énergie éolienne. Alors, j'imagine que là aussi, un peu comme en développement économique et en environnement, vous souhaitez qu'il y ait des modifications d'apportées dans ce projet de loi ci, dans le projet de loi n° 62. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, M. Belzil.

M. Belzil (Michel): Actuellement, les municipalités, les MRC ont le pouvoir d'être partenaires, dans des sociétés en commandite, à la hauteur de 49 %, et non pas être à 50 % ou plus, là, pour des projets de minicentrales de moins de 50 MW ? c'est bien ça, je ne me trompe pas. Nous avons, comme je l'ai dit tantôt, à maintes reprises discuté de ces sujets-là en assemblée des MRC du Québec, et 75 % des MRC nous disent qu'elles aimeraient être porteuses majoritairement des ces projets de minicentrales, et ce serait important.

Écoutez, il n'y a pas de redevance de calculée. Oui, il y a certaines ententes, là, qui faisaient en sorte qu'il y avait un petit 100 000 $ par année sur 25 ans. Mais finalement, quand on regarde les vraies retombées, là, et si on devient propriétaire finalement de la business, avec des ententes avec Hydro-Québec sur 25 ans, et à coups de profits, là, facilement calculables, sans risque pratiquement, même, parce qu'il y a des promoteurs qui sont prêts à aider les municipalités et les MRC, alors pour quelle raison on ne pourrait pas ouvrir plus large cette possibilité, ouvrir plus large la possibilité même que ce soit le monde municipal qui soit le promoteur de projets?

Ça aurait l'avantage évidemment... Deux avantages majeurs à première vue. C'est d'éliminer souvent toute contestation. Parce que, souvent, c'est le promoteur privé, là ? vous les connaissez, les noms de ces promoteurs privés là ? c'est ça qui fait en sorte que la population se soulève, qui dit: Écoutez, gardez nos ressources; l'argent s'en va dans les poches de promoteurs privés puis nous finalement, qu'est-ce qu'il nous reste, petites collectivités, difficultés d'arriver à donner des services à nos citoyens? Là, je ne veux pas être alarmiste non plus, là, mais il y en a des cas comme ça dans le Nord-du-Québec. Alors, ce qu'on dit: Ça, ça pourrait régler cette question-là, là, de mouvement de la population, s'ils savaient que finalement les retombées, suite à l'entente, ça s'en va dans leurs communautés, ça s'en va pour le développement de leurs collectivités. Ce n'est pas rien qu'un petit 100 000 $; je dis des chiffres, mais c'est peut-être un 800 000 $, 1 million de dollars au total, par année. Alors, on pourrait régler en partie, en tout cas, le développement de certaines collectivités qui ne demandent qu'à investir.

Et, au début, dans ces dossiers-là, je vais vous dire, c'est sûr que les MRC, les municipalités n'étaient pas, là, très... n'avaient pas beaucoup d'expertise, mais de plus en plus il y a de l'expertise qui se développe. Moi, j'ai assisté, il y a deux, trois, quatre ans, à des rencontres puis... hein, des préfets de MRC puis des consultants dans le domaine, et ça m'apparaissait très, très intéressant. Alors, c'est la même chose pour l'éolienne. J'ai rencontré personnellement aussi des promoteurs, il n'y a pas longtemps, et j'avais cette discussion-là avec eux: une entente avec le monde municipal, etc., ça pourrait atteindre des objectifs de développement économique général dans certaines collectivités, l'utilisation des ressources naturelles, etc. Je ne sais pas où s'en va le dossier de l'éolienne à 100 %, mais il y a des élus, là, qui se posent la question sur qu'est-ce que ça va leur rester à eux, dans leurs collectivités, tantôt. Alors, ce serait intéressant de leur permettre de participer, là, à ces projets-là. Alors, c'est un peu ce qui nous anime en faisant cette proposition.

M. Legendre: Et, sur ce sujet en particulier, je vois, dans vos recommandations, que vous souhaitez que ça fasse partie du projet de loi n° 62.

M. Belzil (Michel): On ne peut pas attendre, là, que tout le phénomène de l'éolienne soit passé puis qu'on modifie les lois, là, par la suite, là.

M. Legendre: Par ailleurs, évidemment, on tomberait dans de nouvelles compétences.

M. Belzil (Michel): Bien, dans de nouvelles compétences, écoutez, on a la compétence, mettons, si on parle d'énergie, des minicentrales, alors il s'agit juste d'étirer le bras un peu, puis on va parler d'éoliennes. C'est de l'énergie également. Alors, je pense que c'est totalement compatible, là, les deux sources, là.

M. Legendre: Parlant de sources, là, M. le président, vous faites plusieurs recommandations que je comprends encore une fois qui seraient pour être intégrées dans la loi n° 62, à l'égard des cours d'eau, et j'aimerais ça peut-être que vous élaboriez un petit peu sur les différentes recommandations, que vous peut-être nous saisissiez de celles qui vous apparaissent les plus prioritaires.

M. Belzil (Michel): En matière de cours d'eau, vous avez vu que je me tourne rapidement vers Me Chouinard. Alors, je vais lui demander de faire état de l'essence, là, de nos recommandations.

Mme Chouinard (Isabelle): Bien, écoutez, je pense que la première chose qu'il va falloir voir, c'est satisfaire les attentes des MRC. Puis ça, vraiment, j'attends la conclusion de notre prochaine assemblée des MRC, qui aura lieu la semaine prochaine, pour voir finalement jusqu'où s'étendra la compétence des MRC en matière de cours d'eau. Est-ce qu'on veut qu'elles puissent agir sur l'ensemble des cours d'eau ou seulement sur les cours d'eau qui drainent des... en fait qu'on exclue de toutes leurs compétences les ouvrages de drainage qui drainent des superficies de moins de 100 ha? Ça, c'est la première question, et malheureusement je n'ai pas de réponse à vous fournir de façon définitive, là-dessus, ce matin.

n(12 heures)n

Ceci dit, le projet de loi fait un bon ménage. Il reste des petites choses à régler, notamment peut-être réintroduire le pouvoir d'ordonnance de l'inspecteur en matière de cours d'eau, on l'a dit tout à l'heure, de peut-être modifier aussi certains articles en ce qui concerne l'obligation pour la MRC de remettre les lieux en état et réparer le préjudice causé par son intervention, pour que quand même la MRC puisse circuler pour faire les travaux sans avoir nécessairement toujours à indemniser les citoyens parce qu'il y a eu un ou deux arbres qui ont été affectés par le fait que justement elle a dû passer.

On veut aussi que, le calcul du 100 ha, on ait une petite marge d'erreur pour ne pas avoir à faire un arpentage des lieux à chaque fois qu'on aura à calculer la superficie.

On demande au gouvernement d'avoir l'ouverture de considérer, dans le décret d'exclusion, certains cours d'eau qui ne seraient pas nécessairement des cours d'eau navigables et flottables mais qui seraient des cours d'eau qui ne sont pas nécessairement accessibles parce qu'ils sont sur des terres publiques gérées par le ministère des Ressources naturelles.

Aussi, on veut qu'on puisse exclure des exemptions de taxe, là, en matière de cours d'eau, pour que l'ensemble des citoyens du Québec, incluant le gouvernement, paient les coûts des travaux pour l'enlèvement des nuisances dont ils auraient la responsabilité.

Je pense qu'on a un peu l'essentiel, là, de nos recommandations en matière de cours d'eau.

Le Président (M. Ouimet): Il reste moins de deux minutes, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Non. Ça va.

Le Président (M. Ouimet): Ça va? Il ne me reste qu'à vous remercier, au nom des parlementaires, de votre participation aux travaux de cette commission.

Et je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures, alors que la commission poursuivra ses auditions publiques dans le cadre des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 62, Loi sur les compétences municipales.

(Suspension de la séance à 12 h 2)

(Reprise à 14 h 3)

Le Président (M. Ouimet): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Et je demanderais encore une fois à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Je vous rappelle que le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 62, Loi sur les compétences municipales.

J'inviterais maintenant les représentants de l'Association des directeurs municipaux du Québec à bien vouloir s'approcher et à prendre place à la table des témoins.

Une voix: ...

Le Président (M. Ouimet): Alors, on me fait remarquer que ce n'est pas les représentants, mais bien les représentantes, parce qu'il s'agit de trois dames. Alors, Mme Céline Ouimet, vous en êtes la présidente, alors je vous souhaite ? bonjour ? je vous souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale et je vous demanderais de bien vouloir nous présenter les personnes qui vous accompagnent.

Association des directeurs municipaux
du Québec (ADMQ)

Mme Ouimet (Céline): Donc, merci, M. le Président. M. le ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, mesdames messieurs, membres de la commission parlementaire, il me fait plaisir de vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui: à ma droite, Mme Patricia Fillet, vice-présidente de l'Association des directeurs municipaux du Québec et directrice générale de la municipalité Val-des-Monts, dans la région de l'Outaouais, comté de Papineau; à ma gauche, Mme France Vézina, directrice générale de l'association. Et pour ma part je suis présidente de l'association et directrice générale de la municipalité de Saint-Chrysostome, dans la région sud-ouest du Québec, circonscriptions Beauharnois, Huntingdon.

Le Président (M. Ouimet): Alors, bien. Vous disposez de 20 minutes pour votre exposé, qui sera suivi d'une période d'échange de 40 minutes. À vous la parole.

Mme Ouimet (Céline): Donc, l'Association des directeurs municipaux du Québec s'est donné pour mission de voir à la promotion et à la défense de ses membres, en plus de leur offrir un soutien professionnel. Sur le plan politique, elle s'est imposée avec le temps comme un acteur important dans le monde municipal. Plus de 1 000 directeurs généraux et adjoints en sont membres, et la plupart administrent des municipalités de petite à moyenne taille en milieu rural.

L'ADMQ est une association très dynamique au chapitre des activités de formation. Ainsi, en 2003, plus de 2 000 gestionnaires ont participé à une centaine de sessions de formation, portant sur divers sujets directement liés à nos fonctions dans le monde municipal. L'association offre de surcroît un programme reconnu d'agrément des gestionnaires, appelé Gestionnaire municipal agréé, qui permet à la fois d'améliorer les compétences de ses membres, tout en valorisant leur fonction. Plus de 425 membres portent maintenant le titre de GMA et, à ce rythme, plus de la moitié de nos membres auront obtenu le titre en 2005.

Le poste de directeur général. Au cours des dernières années, l'ADMQ a multiplié les pressions auprès du gouvernement provincial pour que soit enfin reconnu le poste de directeur général. Elle réclamait qu'on amende le Code municipal pour qu'il reconnaisse, comme le fait la Loi sur les cités et villes, le poste de directeur général, par opposition à l'appellation désuète de secrétaire-trésorier.

Ce changement de nom, officialisé par l'adoption en juin dernier du projet de loi n° 54, mesure enfin le travail des directeurs municipaux à sa juste valeur. Non seulement ces derniers portent-ils de lourdes responsabilités administratives, mais leur rôle se trouve souvent accru, au sein des petites communautés en milieu rural et en milieu semi-urbain. Cette nouvelle appellation traduit désormais le rôle central et l'influence de la profession dans le monde municipal. Les membres de la Fédération québécoise des municipalités ont appuyé la demande de l'ADMQ, tout comme les maires et les conseillers des conseils municipaux, qui ont accepté d'emblée le titre de directeur général en remplacement de celui de secrétaire-trésorier, donnant ainsi leur accord à ce changement.

L'intérêt de l'ADMQ dans le cadre du projet de loi n° 62. Les premières discussions, au sujet de la révision du livre V sur les compétences municipales, remontent déjà au début des années 2003. À ce moment, l'ADMQ s'est jointe à une équipe de travail formée de représentants du ministère des Affaires municipales, de la Fédération québécoise des municipalités et d'autres intervenants du milieu. Grâce à ces rencontres, l'ADMQ a pu être saisie des intentions ministérielles et a participé à l'élaboration du document servant à la rédaction du projet de loi que nous analysons aujourd'hui.

Tous les échanges qui ont précédé le dépôt de ce projet de loi ont été très importants, et nous croyons que le résultat reflète en très grande partie les travaux réalisés. Les commentaires et parfois même les objections que nous avons soumis au cours du processus de consultation ont fait l'objet de discussions approfondies. Plusieurs requêtes de l'ADMQ ont été prises en compte et elles ont été intégrées au projet de loi. Dans l'ensemble, nous sommes assez satisfaits du résultat.

Cette démarche de consultation avant la publication du projet de loi a donc été très importante. Il s'agit d'une méthode de fonctionnement que nous souhaiterions qu'elle se répète sur une base plus régulière avec les représentants du ministère des Affaires municipales et des autres ministères qui légifèrent dans le monde municipal.

Nous souhaitons tout de même apporter notre contribution à cette consultation afin de transmettre quelques commentaires supplémentaires et porter à votre attention certains points du projet de loi qui nous apparaissent encore ambigus. Puisque les directeurs généraux des municipalités ont la responsabilité de mettre en application cette loi, nous croyons plus qu'opportun d'en comprendre toute la portée. Nous profitons de notre présence à cette commission pour vous faire part également de notre vision du monde municipal, de notre travail et de notre rôle, parfois mal connu, dans nos municipalités.

Depuis la création des municipalités régionales de comté, le rôle de la municipalité locale a bien changé. Les municipalités locales... la municipalité locale, pardon, doit de plus en plus travailler de concert avec un ensemble d'intervenants local et régional ainsi qu'avec des organismes voués au développement social et économique du milieu. Le directeur général est très souvent au coeur des échanges et il se doit d'être en relation avec l'ensemble des décideurs de sa région.

n(14 h 10)n

De plus, les nombreuses réglementations, en matière notamment de sécurité publique, d'environnement, de transport, combinées aux nouvelles responsabilités dédiées aux municipalités par le gouvernement du Québec, ont considérablement modifié le rôle et les responsabilités des municipalités locales. Ces responsabilités sont partagées entre les élus et les fonctionnaires municipaux. À cet effet, les directeurs généraux ont un rôle crucial puisqu'ils doivent assumer de nombreuses tâches. Il faut souligner ici que les plus petites municipalités n'ont pas toujours les moyens de se doter de personnel spécialisé, et leur directeur général assume ainsi beaucoup de fonctions. Ce faisant, il doit être très polyvalent en plus d'être un bon gestionnaire. Il doit aussi avoir la capacité de s'adapter et de bien comprendre les lois qui encadrent le monde municipal.

Pour parvenir à bien gérer les municipalités locales avec des ressources plus limitées, les directeurs généraux ont l'obligation de s'outiller pour bien accomplir leur travail. Pour y arriver, l'ADMQ leur offre un programme de formation continue. De plus, nos membres, en collaboration avec d'autres partenaires municipaux, dont le ministère des Affaires municipales, ont mis au point des indicateurs de gestion pour les aider à atteindre les plus grands standards de qualité en matière de gestion municipale.

Une modernisation des lois municipales. Les travaux de révision des lois municipales remontent déjà à plus d'une quinzaine d'années. Les ministres des Affaires municipales qui se sont succédé au cours de cette période n'ont pas toujours jugé prioritaire la révision des lois municipales. Nous tenons à remercier le ministre actuel, M. Fournier, d'avoir donné des orientations claires à ce sujet.

La désuétude de certains articles et même de certaines sections du Code municipal du Québec aurait commandé qu'on procède un peu plus rapidement à la modernisation de cette loi. Parfois, il faut user d'imagination pour tenter d'appliquer certains articles de cette loi et de l'expliquer à la population. Par exemple, à l'article 822, «l'inspecteur municipal [qui] peut requérir chacune [des] personnes d'amener ou de faire conduire un certain nombre de chevaux ou de boeufs[...], avec [des] harnais, [des] chariots», etc., je doute fort qu'on s'en est servi dans les dernières années.

La réforme des lois municipales compte six livres. Jusqu'à présent, deux seulement ont été adoptés: la Loi sur les élections et référendums dans les municipalités, en 1987, et la Loi sur l'organisation territoriale, en 1988. Par ailleurs, au début des années quatre-vingt-dix, des discussions ont eu lieu concernant le livre III sur l'organisation administrative des municipalités et des MRC. Nous sommes toujours en attente de la poursuite des travaux pour le livre III. Outre le livre III, les travaux entourant le livre IV sur la fiscalité municipale et ceux sur le livre VI sur les recours restent en suspens. L'ADMQ souhaite que le ministre poursuive activement le travail de révision pour pouvoir passer à travers le processus de mise à jour de notre système municipal.

Même si la présentation du livre V sur les compétences des lois municipales ne suit pas le processus de révision des lois établi au départ par le ministère des Affaires municipales, l'ADMQ considère que cette modernisation d'une partie du Code municipal et de la Loi sur les cités et villes est un pas dans la bonne direction. Le livre V sur les compétences municipales facilitera la gestion municipale. Avec un nouveau mode de fonctionnement plus souple et moins restrictif, les municipalités pourront mieux s'adapter aux réalités d'aujourd'hui.

Des orientations différentes en matière de gestion municipale. L'ADMQ approuve les orientations et l'approche retenue par le gouvernement en décrivant les compétences des municipalités en termes généraux et simplifiés, plutôt que de procéder par de longues énumérations qui rendent parfois la compréhension plus difficile. De plus, le projet de loi n° 62 a la qualité de ne pas réduire les pouvoirs existants des municipalités.

L'ADMQ se réjouit également que l'adoption éventuelle de ce projet de loi nous permettra enfin d'intervenir sur les mêmes bases légales en matière de compétences municipales, évitant de faire la distinction entre les municipalités régies par le Code municipal et celles relevant de la Loi sur les cités et villes. En matière d'échange d'information et de formation des membres, le fait de n'avoir qu'une seule loi est un gain appréciable pour les membres de l'ADMQ.

L'esprit du projet de loi est de reconduire intégralement les pouvoirs que nous retrouvons dans les lois municipales. Ces pouvoirs sont toutefois décrits différemment. Nous tenons ici à faire une mise en garde, car une réécriture de la loi pourra changer la portée de certains articles, et ce n'est qu'à l'usage que nous y découvrirons toutes les subtilités.

Toutefois, nous estimons que les compétences des municipalités, en termes généraux et simplifiés, devraient être bien assimilées par l'ensemble des élus et des fonctionnaires des municipalités. La municipalité a donc une belle occasion de montrer son savoir-faire et sa capacité à adopter des règles plus souples.

Je cède la parole à ma collègue, qui va continuer.

Mme Fillet (Patricia): Agir par résolution. Le ministère des Affaires municipales a voulu, par ce projet de loi, que l'utilisation de la procédure réglementaire soit réservée à l'adoption des normes visant à régir le comportement des personnes ou à l'imposition d'une taxe. Toutes autres décisions pourront se prendre au moyen d'une résolution. À prime abord, il semble que la municipalité pourra agir davantage par résolution, mais nous constatons que, dans de nombreux cas, cette résolution devra être suivie par un règlement, notamment lors de l'adoption des normes pour l'utilisation de biens et services municipaux.

Des pouvoirs généraux plus précis. Le projet de loi n° 62 n'élargit pas la fourchette des compétences et des pouvoirs des municipalités, il en précise la portée, et l'ADMQ tient à en souligner quelques-uns.

Au niveau de la voirie locale, l'ADMQ endosse la proposition à l'effet que la municipalité puisse exécuter les travaux de voirie et par la suite taxer les contribuables en conséquence. Le pouvoir de taxer par la municipalité, dans ce cas précis, devrait être précisé, et la loi devrait prévoir que les frais encourus pour les travaux soient assimilables à une taxe foncière et récupérables de même manière. Les citoyens qui se voient imposer des frais pour ce genre de travaux refusent parfois de payer. De cette manière, la municipalité a une garantie d'être remboursée.

Un autre point que nous tenons à souligner et qui constitue un changement majeur par rapport à la situation présente est la question du retrait du titre d'inspecteur municipal et d'inspecteur agraire. Lors des rencontres que nous avons eues avec les représentants du ministère des Affaires municipales, la désignation du titre et des pouvoirs de l'inspecteur ont fait l'objet d'attentions particulières. Le projet de loi n° 62 propose de confier à la municipalité le pouvoir de désigner cette personne. Cependant, il faudra s'assurer que la personne désignée possède toutes les compétences requises pour ce genre de travail.

Commentaires particuliers. Dans ce chapitre, nous portons à votre attention quelques articles qui incitent à un questionnement ou qui nous apparaissent difficilement applicables dans la municipalité. À ce stade-ci, nous avons plus de questions que de réponses et nous espérons que des précisions seront apportées lors de la présente consultation ou lors de l'étude article par article du projet de loi.

Dans les généralités, l'article 5 stipule que «dans le cadre de la présente loi et dans la mesure qui y est prévue, une municipalité locale adopte un règlement lorsqu'elle veut rendre obligatoire une règle de caractère général et impersonnel». On comprend le principe de devoir adopter un règlement lorsque la municipalité veut rendre obligatoire une règle à caractère général et impersonnel. Toutefois, comment la municipalité pourra intervenir s'il s'agit d'une règle à caractère particulier et personnel? Comment pourra-t-on répondre à des demandes à des fins de développement au bénéfice d'un seul contribuable? Concilier ces deux principes nous apparaît difficile.

Également, l'article 6.1 mentionne que, «dans l'exercice d'un pouvoir réglementaire prévu [à] la présente loi, toute municipalité locale peut notamment prévoir: toute prohibition». Nous sommes conscients que le pouvoir de prohiber est directement lié aux compétences municipales incluses dans ce projet de loi. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme interdit, elle, de prohiber. Peut-être que la coexistence de ces deux lois sera compliquée lorsque viendra le temps de réglementer. Peut-être devrait-on revoir ce principe dans la LAU.

Développement économique local. À la fin de l'article 10, il est mentionné que la municipalité locale «peut confier l'exploitation d'un centre visé au paragraphe 1° du premier alinéa à une personne». Nous nous questionnons sur la définition du mot «personne». Dans ce contexte, pourrait-il s'agir aussi d'une personne morale?

Environnement. Dans l'article 51, il y a deux volets qui nous préoccupent: le titre de secrétaire-trésorier et le pouvoir qui est donné au greffier. On fait référence au secrétaire-trésorier, mais, depuis l'adoption de la loi n° 54, ce titre a été remplacé par celui de directeur général. Nous proposons de remplacer «secrétaire-trésorier» par «directeur général».

Par ailleurs, nulle part ailleurs il n'y a un pouvoir qui est donné au greffier. Pourquoi ne pas accorder ce pouvoir au directeur général ou à une personne désignée par le conseil municipal? En effet, dans plusieurs municipalités, il y a des personnes en poste qui sont habilitées à étudier ce genre de dossier et autoriser les épandages.

n(14 h 20)n

Salubrité. Dans cette section, le projet de loi évoque la possibilité de réclamer au propriétaire des coûts engagés par la municipalité pour procéder à des travaux particuliers, advenant le fait que le propriétaire ne les fait pas. Nous croyons qu'il faudrait accorder le même pouvoir décrit auparavant pour que les coûts des travaux soient assimilables à une taxe foncière et récupérables de même manière par la municipalité.

Transport. À l'article 69, «toute municipalité locale peut entretenir une voie privée ouverte au public par tolérance du propriétaire ou de l'occupant, sur requête d'une majorité des propriétaires ou occupants riverains». Ce principe implique qu'une seule requête de la majorité des propriétaires ou occupants riverains fera que la municipalité pourra entretenir la voie privée. Cela implique-t-il que les chemins privés non conformes pourraient être entretenus sans frais supplémentaires autres que la taxe générale? Si la municipalité possède un règlement visant la construction des chemins, le chemin privé ne devrait-il pas rencontrer les normes de ce règlement? Qui sera responsable en cas d'accident? La municipalité ne devrait-elle pas avoir une exonération de blâme? Que signifient les mots «par tolérance»? Pour nous, cet article renferme des éléments problématiques.

Ceci résume nos commentaires particuliers sur les articles qui ont retenu notre attention. Quant aux autres questions, nous n'avons pas d'autre commentaire spécifique.

Mise en application de la loi. La tâche de mettre en application cette loi reviendra, dans la plupart des cas, au directeur général. C'est le directeur général qui aura à vivre avec les difficultés qui surviendront avec la loi. Compte tenu qu'il s'agit d'une nouvelle façon, pour les municipalités, de procéder, il risque de surgir des situations qui malheureusement n'auront pas été prévues. De plus, les directeurs généraux auront la tâche d'expliquer à la population et parfois aux élus municipaux les nouvelles règles de fonctionnement.

L'ADMQ soumet respectueusement trois recommandations au gouvernement: que le gouvernement du Québec, et plus particulièrement le ministère des Affaires municipales, prévoie des ressources pour répondre aux municipalités lors de l'application de la nouvelle loi sur les compétences municipales; deuxièmement, que le gouvernement du Québec accorde un délai entre l'entrée en vigueur du projet de loi afin de permettre la réécriture du Code municipal du Québec et la Loi sur les cités et villes, avec tous les amendements que nous retrouvons dans le projet de loi n° 62; finalement, que le gouvernement du Québec s'assure également que le nouveau Code municipal du Québec et la Loi sur les cités et villes soient disponibles lors de l'entrée en vigueur de la loi sur les compétences municipales.

Formation des directeurs généraux. Nous vous avons fait part que l'ADMQ offre à tous ses membres un programme de formation continue. L'adoption de la nouvelle loi sur les compétences fera l'objet d'une attention particulière, et l'ADMQ devrait, dans les meilleurs délais, mettre à la disposition de ses membres une nouvelle formation afin qu'ils maîtrisent bien le contenu de cette nouvelle loi. Nous tenons à signaler que généralement les coûts pour cette formation sont défrayés par les municipalités. Nous profitons de l'occasion pour rappeler au ministre que la collaboration de son ministère est toujours appréciée dans une telle situation.

Pour les municipalités du Québec, procéder par résolution exige un changement important dans la façon d'aborder les dossiers. Nous croyons donc que non seulement les directeurs généraux devront recevoir une formation, mais aussi l'ensemble des élus ainsi que les procureurs des municipalités.

En conclusion, nous réitérons que l'ADMQ endosse ce projet de loi et souhaite maintenant que le gouvernement poursuive la modernisation des lois municipales dans les meilleurs délais.

En terminant, l'ADMQ a apprécié être consultée tout au cours de ce processus, et les échanges qui ont eu lieu avec le dépôt du projet de loi ont été des plus enrichissants pour tous. Nous adressons nos remerciements à tous les membres de cette commission, au ministre des Affaires municipales, du Sport et du Loisir, et à toutes les personnes qui ont participé à l'élaboration de ce projet de loi. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Alors, merci à vous, mesdames Ouimet, et Mme Fillet, et Mme Vézina, pour cette présentation. Nous allons maintenant ouvrir la période d'échange, et je vais céder la parole au ministre des Affaires municipales. M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. À mon tour de vous saluer et vous remercier de votre participation à cette commission mais aussi aux travaux qui ont amené ce projet de loi là. Je l'ai signalé ce matin, vous étiez là dans les banquettes arrière, tous ceux qui ont contribué font en sorte qu'on peut effectivement avoir un outil plus utile, donner des marges de manoeuvre accrues, même si ce sont les mêmes compétences, mais plus d'espace au monde municipal, et vous êtes évidemment les premiers artisans de ce qui se passe à ce niveau-là. Donc, merci de votre collaboration et merci à l'avance de l'aide que vous allez contribuer à donner en participant à la formation, là, de l'ensemble des directeurs municipaux.

Écoutez, je peux peut-être commencer par quelques éléments. Je ne les prendrai pas tous, mais peut-être discuter un peu de vos commentaires particuliers, à moins que je commence peut-être... J'avais une question préalable sur les pouvoirs généraux plus précis, à la page 10, sur la question des inspecteurs, puisqu'on en a déjà discuté ce matin. Sans vouloir nécessairement, là, refaire tout le débat... Vous étiez là, puis c'est encore du monde qui ont fait des présentations ce matin qui sont là, donc sentez-vous bien à l'aise de vous protéger dans vos réponses. Bien, vous connaissez le débat, alors je vais vous laisser m'en parler un petit peu.

Mais par ailleurs vous faites cette phrase: «Cependant, il faudra s'assurer que la personne désignée possède toutes les compétences requises pour ce genre de travail.» Peu importe que ce soit une personne désignée ou que ce soit une personne choisie parmi les fonctionnaires, ça prend quelqu'un qui est capable de le faire, mais c'est bien sûr la localité qui est capable de l'identifier, cette personne-là, pas grand monde d'autre, là. Parlez-moi aussi de cela. Bon, je veux bien que ce soit une personne qui soit compétente, mais pourquoi ne le serait-elle pas? C'est peut-être un peu ça, par la négative, comment je pourrais le dire. Et expliquez-vous, dans ce débat sur la personne désignée, et l'inspecteur, et ce qu'on devrait faire.

Mme Ouimet (Céline): Bon. D'abord, l'ADMQ a soutenu qu'il fallait une personne compétente parce qu'on pense que les gens qui sont en poste dans nos municipalités sont probablement les gens les plus compétents pour répondre aux demandes qui nous sont faites. Donc, la personne désignée, ce pourrait être un fonctionnaire désigné, ce pourrait être quelqu'un qui est nommé ou par le directeur général ou par le conseil municipal, mais cette personne-là, d'après nous, ne devrait pas être nommée de façon temporaire ni selon le dossier ou selon la demande. Ce devrait être une personne qui est en poste qui assume cette fonction, et pour cela peut-être que le nom de «fonctionnaire désigné» serait plus opportun que «personne désignée», comme il a été mentionné ce matin.

Pour ce qui est de cette compétence, c'est sûr qu'on n'a pas vu à maintes reprises des ordonnances qui se sont ramassées devant la cour. Personnellement, je suis là depuis 15 ans et j'ai vu un seul cas qui s'est ramassé devant la cour. Tous les autres ont été réglés à l'amiable. Donc, ça veut dire que c'est un besoin, ça répond à des attentes des citoyens, et les personnes qui sont déjà nommées, en poste, ont probablement plus de facilité à répondre à ces demandes-là qu'une personne qui serait nommée sur le pouce par le conseil municipal pour répondre à des demandes différentes. Donc, au niveau de l'ADMQ, on ne fait pas d'autre recommandation. Évidemment, c'est à vous à régler le différend, là, mais ça nous prend quelqu'un de compétent.

M. Fournier: Plus le temps passe, de moins en moins il y a de différends. Juste pour les fins de la transcription et pour votre bonheur personnel, sachez que, lorsque vous parliez, il y avait des signes affirmatifs derrière vous.

Une voix: ...

M. Fournier: Oui. Alors, ça va bien de ce côté-là, du côté des différends.

Alors, on va passer, dans les commentaires particuliers, à l'article 5. Vous revenez sur une question, là, que vous avez déjà soulevée préalablement dans le mémoire, entre le règlement et la résolution, et vous dites: «Comment la municipalité pourra intervenir s'il s'agit d'une règle à caractère particulier et personnel?», auquel cas j'ai l'impression donc que c'est une décision qui découle peut-être d'un règlement mais qui peut donc être plus de l'ordre de la résolution que du règlement. Est-ce que la réponse n'est-elle pas «par résolution», la même chose lorsqu'il y a une décision au bénéfice d'un seul contribuable, donc d'un ordre différent qu'une règle normative à l'ensemble? Est-ce que la réponse n'est-elle pas tout simplement «par résolution»? Est-ce que c'est trop simple?

Mme Ouimet (Céline): On imagine que c'est ça. On espère que c'est comme ça et que c'est comme ça que les élus vont le prendre aussi. Quand on parle d'une norme particulière... Évidemment, quand on veut appliquer une règle, une généralité pour tous, on fait un règlement et on a cette habitude. Quand on veut traiter des cas particuliers, en général on le faisait par résolution. Et là ce qu'on veut bien se faire rassurer, c'est qu'on va pouvoir continuer de le faire par résolution et qu'on ne sera pas obligés de faire des règlements pour légiférer sur toutes sortes de choses très particulières, dans les rues, les développements, les...

n(14 h 30)n

M. Fournier: Je sais. Et vous voyez vous-mêmes tous les gens du ministère hocher de la tête, là, avec énergie, pour dire combien ce qui est visé ici, c'est que le règlement soit utile pour la norme générale et que la résolution soit utilisée pour les décisions personnelles ou les cas particuliers. Qu'est-ce qu'il manque, dans le projet de loi, pour qu'alors que tout le monde est d'accord ce soit juste plus facile à comprendre? Est-ce qu'il y a quelque chose qui manque dans le projet de loi pour que... Cette volonté qui me semble assez claire ne s'est pas transportée jusqu'à vous, en tout cas.

Mme Ouimet (Céline): Notre crainte, c'était que, quand les élus vont prendre des décisions, ce ne soit pas si clair que ça. Donc, si on dit: Je veux une règle particulière pour un secteur donné, si on s'en va en urbanisme, on va être obligés de faire un règlement, de toute façon. Et là on dit: Bon, bien, si c'est une règle particulière, faites-le donc par résolution. C'est là ma contradiction.

M. Fournier: La réponse que je vous donne, vous qui êtes des spécialistes de la chose, avec les spécialistes de la chose ici, me permet d'embarquer en même temps sur 6.1 pour vous dire que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui prévoit certains types de règlements, va continuer, elle, de s'appliquer avec certains types de règlements précis auxquels vous faisiez référence. Je ne sais pas si... ça ne règle probablement pas tous les cas de figure. Là, vous avez pris un cas de figure qui était celui-là. Dans ce cas-là, le règlement continuera d'être utilisé parce qu'il s'agit d'un règlement en vertu de la LAU. Dans les autres cas de figure, je comprends qu'il peut y avoir des zones grises, peut-être, à des moments donnés. Mais la volonté qui est manifeste, c'est de pouvoir procéder par résolution assez régulièrement pour éviter justement, là, tout le processus réglementaire, sauf évidemment dans les cas où c'est une norme générale qui s'applique à l'ensemble.

Alors, ça... Disons que la volonté du législateur est celle que vous souhaitez, mais on verra s'il y a lieu qu'il y ait des précisions à apporter. Quoique je ne serais pas de ceux qui souhaitent que nous précisions l'ensemble des cas particuliers, parce qu'à ce moment-là on ne va pas simplifier la loi, on va la compliquer, là. Mais en tout cas entendons-nous pour dire que c'est la même volonté.

À l'article 6.1, vous soulevez justement la question de la LAU et de, je dirais, la contradiction qu'on pourrait y voir. Comme vous le savez, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme va, elle, faire l'objet d'une autre étude, et on verra plus tard à voir s'il doit y avoir une symétrie entre les deux ou non. Mais pour l'instant, c'est facile à comprendre, il n'y aura pas de symétrie, pour l'instant.

À l'article 10, bien là je vous posais la question parce que, quand j'ai lu votre mémoire... Et je dois avouer que mes cours de droit sont passablement loin, j'ai ergoté plus ici depuis 10 ans sur le libellé des articles que sur les raisonnements juridiques qui ensuite tentent de les interpréter, mais, à l'article 10, je dois avouer que, moi, je ne me posais pas la question que vous vous posiez. Pour moi, «personne», ça voulait dire aussi «personne morale». Pourquoi est-ce que vous soulevez cette question-là? J'ai toujours compris, moi, que, quand on faisait à référence à «personne» dans un texte de loi, c'était aussi les personnes morales, mais...

Mme Fillet (Patricia): Si vous me permettez, M. le ministre, c'est parce que, dans la Loi sur les élections et référendums, on dit «personne physique», «personne morale», donc on faisait une spécificité entre les deux. On disait, là: Est-ce que «personne» pouvait s'étendre à ça?

M. Fournier: Oui. Là, je vais tenter quelque chose, puis les juristes me diront si je n'aurais pas dû me taire à la place, mais, dans le cas de la Loi sur les élections et les référendums, forcément il doit y avoir une division entre personne physique et personne morale, donc il a fallu les qualifier parce qu'elles ont des traitements particuliers. Lorsqu'elles ont des traitements identiques, il n'y aurait pas lieu, à mon avis... Puis là vous allez me permettre de jeter un coup d'oeil pour voir si ce que je dis aurait de l'allure. Ah, j'ai beaucoup de signes affirmatifs. Alors, est-ce que ça vous cause des... Donc, ça répond peut-être à votre question, je ne le sais pas, mais en tout cas, tant qu'à moi, je pense que les personnes sont à cet effet-là.

Je passe sur la question, là, du secrétaire-trésorier, dont on a déjà amplement discuté, pour aller à la salubrité. Vous posez une question, tout simplement, à la salubrité: «Le projet de loi évoque la possibilité de réclamer au propriétaire des coûts engagés par la municipalité pour procéder à des travaux particuliers», et «que les coûts soient assimilables à une taxe foncière et récupérables de même manière». À l'article 95 ? je l'avais tantôt ? je vais vous tenter un libellé qui semblait, quand on me l'a présenté ? c'est une compétition; merci beaucoup... On dit ceci: «Toute somme due à la municipalité à la suite de son intervention en vertu de la présente loi est assimilée à une taxe foncière si la créance est reliée à un immeuble et si le débiteur est le propriétaire de cet immeuble. Autrement, la créance est assimilée à une taxe non foncière.» Est-ce que ça ne répond pas à votre question ou...

Mme Ouimet (Céline): Donc, la disposition générale s'appliquerait à tous les items, finalement?

M. Fournier: Oui.

Mme Ouimet (Céline): C'est ça?

M. Fournier: Oui.

Mme Ouimet (Céline): Donc, je disais, la disposition générale s'appliquerait pour tous les items, que ce soit en salubrité, ou en nuisance, ou...

M. Fournier: Dans le texte, on parle de sommes dues en vertu de la présente loi, donc la Loi sur les compétences. S'il s'agit d'une compétence, la somme qui est due est donc assimilable.

Mme Ouimet (Céline): Merveilleux.

M. Fournier: Je n'en espérais pas tant de votre part. Il y a une règle qui dit...

Le Président (M. Ouimet): ...M. le ministre.

M. Fournier: Si vous me permettez, M. le Président, il y a une règle qui dit: «Quit when you're ahead.»

Une voix: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Ouimet): L'enveloppe est terminée. Je vais du côté de l'opposition maintenant. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Je n'enchaînerai pas sur cette affirmation-là. Alors, Mme la présidente, mesdames, un plaisir de vous accueillir.

Dans votre mémoire, en fait dans le sommaire de votre mémoire, vous faites une affirmation intéressante quand vous dites: «Enfin, le projet de loi n° 62 a la qualité de ne pas réduire les pouvoirs existants des municipalités.» Une première question que je vous poserais: Est-ce que vous avez le sentiment que par ailleurs le projet de loi n° 62 augmente les pouvoirs des municipalités?

Mme Ouimet (Céline): Nous, on est concernés plus par le Code municipal, donc, à certains égards, oui, quand je pense au remorquage, entre autres, des véhicules, ce qu'on n'avait pas antérieurement. C'était sous les cités et villes, je crois. Donc, nous, on augmente un peu, si tu veux, la possibilité de faire des choses dans notre municipalité, mais, dans la majorité des cas, c'est similaire.

M. Legendre: O.K. Et par ailleurs, dans votre mémoire, en page 9, toujours justement sur les pouvoirs, vous dites: «Ces pouvoirs sont toutefois décrits différemment.» Et là vous tenez à faire une mise en garde en disant: «Une réécriture de la loi pourra ? ou pourrait ? changer la portée de certains articles, et ce n'est qu'à l'usage que nous y découvrions toutes les subtilités.» Si vous écrivez ça, est-ce que c'est parce que vous voyez déjà poindre des subtilités qui, à l'usage, seront confirmées?

Mme Ouimet (Céline): Entre autres, on pense au titre de directeur général. Le titre de directeur général n'est pas le même dans l'application au niveau de la Loi sur les cités et villes que dans le Code municipal. Donc, il y a cette distinction. Et, quand on réécrit les lois, est-ce qu'on va les rendre pareilles ou on va continuer à garder une distinction? Donc, c'est peut-être dans la façon d'écrire. Entre autres, quand on regardait pour le titre de directeur général, il y avait toutes sortes de subtilités entre comment c'était écrit dans la Loi sur les cités et villes et comment c'était écrit dans le Code municipal. En fait, on faisait les mêmes fonctions, mais c'était écrit différemment: un préparait, l'autre déposait. C'était des petits termes mais qui font des distinctions. Et il y a encore une distinction entre le titre de D.G. dans les cités et villes versus ceux du Code municipal.

M. Legendre: Un petit peu dans le même ordre d'idées, Mme Ouimet, quand vous nous dites, dans votre sommaire, que «le projet de loi n° 62 accorde aux municipalités le pouvoir d'agir davantage par résolution, mais l'ADMQ constate que, dans de nombreux cas, cette résolution devra être suivie par un règlement, notamment lors de l'adoption des normes pour l'utilisation de biens et services municipaux. Il s'agit d'une nouvelle façon de procéder et il faudra agir avec prudence.» J'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu là-dessus par rapport aux inquiétudes, là, que vous exprimez.

n(14 h 40)n

Mme Ouimet (Céline): Dans le projet de loi, il y a au moins à 35 reprises des endroits où on dit... Par exemple, en culture: «Toute municipalité locale peut réglementer les services culturels, récréatifs ou communautaires qu'elle offre et l'utilisation de ses parcs.» Donc, à chaque fois, on dit: On peut, par résolution, décréter un service mais on doit le réglementer pour établir une norme à caractère impersonnel, là, par un règlement. Donc, au moins 35 fois, dans ce texte-là, on a retrouvé qu'on devait faire un règlement. Donc, l'intention, c'était qu'on puisse faire plus par résolution, donc on peut comme décréter des choses par résolution, décider qu'est-ce qu'on veut faire si on a cette compétence-là, mais, dès qu'on veut normer quelque chose, on doit le faire par règlement.

Mme Vézina (France): Peut-être ajouter aussi ce que Mme Ouimet voulait dire aussi de la prudence. C'est le fait que dorénavant les élus vont procéder beaucoup plus par résolution, donc la décision va être souvent prise de façon plus rapide. Alors, il faudra quand même faire attention à cela, c'est une façon de faire qui va être différente, une mentalité pour les élus, qui devront agir différemment et avec prudence là-dessus pour ne pas agir trop rapidement non plus. Autant ça peut être efficace, mais autant il faut être prudent, là.

M. Legendre: Mais, à cet égard-là, sur ce sujet-là, votre recommandation n'est pas de modifier quelque chose dans la loi telle qu'elle est présentée actuellement. C'est plus dans l'application de la loi par la suite, un petit peu dans les cours de formation, dont vous parliez, qu'il faudra en faire bon usage, si je comprends bien.

Mme Ouimet (Céline): Et apprendre à se servir chacun soit de la résolution ou du règlement au bon moment, donc il va falloir toujours s'assurer qu'on a fait le bon choix. Donc, ce n'est pas évident qu'au conseil municipal, dans le feu de l'action, on décide de faire une résolution, quand dans les faits on aurait dû faire un avis de motion et, à la prochaine séance, adopter un règlement. Donc, il va y avoir des distinctions à faire, là.

M. Legendre: Mais est-ce que l'objectif premier, en tout cas que, moi, j'ai compris du projet de loi qui est d'essayer de simplifier les choses, est-ce que, d'un point de vue... par exemple directeur général, directrice générale, est-ce que ce que vous voyez fait en sorte que vous pensez que ça va simplifier les choses véritablement ou est-ce qu'il y a des... Parce que, là, quand on voit quelques-unes des mises en garde, on pourrait comprendre que ça va être plus complexe, peut-être tout simplement parce qu'il y a une nouvelle façon de faire, mais est-ce que l'objectif de simplification, dans la vie de tous les jours, pour les municipalités, pour vous, dans votre domaine, est-ce que vous pensez que ça devient un outil pour atteindre cet objectif-là?

Mme Ouimet (Céline): Moi, je pense sérieusement que oui parce que c'est plus facilitant d'adopter seulement une résolution que d'attendre toute la procédure d'un règlement. Donc, on peut procéder plus rapidement, c'est évident.

M. Legendre: O.K. Sur le sujet du développement économique, vous avez fait référence ? on en a parlé tout à l'heure avec le ministre ? vous avez fait référence à la précision quant à la signification de «personne», mais, je pense, vous étiez ici un petit peu plus tôt aujourd'hui également, alors vous avez entendu aussi ce que la Fédération québécoise des municipalités avait à nous dire, concernant le secteur du développement économique, où dans le fond la fédération souhaitait que le texte devienne plus général pour, en fin de compte, augmenter la marge de manoeuvre des municipalités, que le... Elle faisait référence au fait que le texte actuel est un peu dépassé. J'aimerais ça voir... Puis évidemment, bien, vous êtes au coeur de l'action avec les fonctions que vous occupez. Comment vous voyez ça? Quelle est votre vision? J'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu sur le secteur du développement économique mais évidemment en lien avec le projet de loi n° 62.

Mme Ouimet (Céline): Je pense que, dans toutes les régions du Québec, la volonté, c'est d'innover, de faire des choses différemment, et ce n'est pas en précisant, dans un article de loi, toutes les choses qu'on pourra faire qui vont donner de la latitude aux régions. Et je suis convaincue que, si on laisse l'article tel qu'il est là, il va y avoir encore des modifications à la loi à faire très bientôt parce qu'il y a encore une municipalité ou deux qui vont arriver puis ils vont vouloir faire un projet qui ne sera pas précisé là-dedans et qui va venir les limiter. Donc, probablement que ce serait plus simple de le mettre d'une façon plus générale que de le préciser comme c'est fait présentement.

Le Président (M. Ouimet): Bien. On va revenir, M. le député de Blainville. Je retourne du côté ministériel. Il vous reste un peu moins de six minutes, M. le ministre.

M. Fournier: J'oserais dire: Plus simple en effet, mais compliqué quand même. Parce que, oui, c'est plus simple, puis là on étudie plein d'éléments là-dessus. Il y a plusieurs lois, notamment au niveau de l'interdiction de subvention et autres, là, qui sont visées par ça. On regarde comment on peut l'adapter puis, arrivés à terme, au moment où on est, on n'a pu le faire encore. Par ailleurs, il y a des discussions qui se font au niveau de la décentralisation, autant avec les associations municipales qu'avec les CRE, et, autour de ce débat-là, il y aura des précisions.

Mais vous avez tout à fait raison de le noter. Si certaines dispositions restent plutôt sous l'ancienne mouture, bien elles vont connaître aussi les effets de l'ancienne mouture, c'est-à-dire des panoplies de lois privées qui vont venir faire, à gauche, à droite, une correction parce que ce n'est pas tout à fait ça puis... et là on l'a fait pour un puis on l'a fait pour 12 autres, puis, à un moment donné, après quatre sessions de bills privés, tout à coup on fait une loi générale. Alors, ça va probablement revenir à cet état-là, mais disons qu'on est dans une phase transitoire qui, pour certains, est plus de l'ordre de la réforme et, pour d'autres, plutôt de la révolution. Alors, pour l'instant, je ne sais pas encore tout à fait ce que c'est.

Je vous entendais encore parler de règlement et de résolution, et effectivement je pense que c'est plus rapide, et il y a une vertu dans la rapidité en termes d'efficacité. Par ailleurs, il faut être prudent: n'y a-t-il pas une... Et ça se décide plutôt au cas par cas, hein? C'est vous autres, sur le terrain, là... On est... Règlement, résolution, j'ai un doute. Dans le cas du doute, n'allez-vous pas choisir le règlement? Puisqu'il comprend la résolution, ça règle le problème.

Mme Ouimet (Céline): Souvent, ça dépend aussi du conseil municipal. Des fois, il veut aller vite.

M. Fournier: Ah, ça, je le comprends, mais là, s'il y a un doute, vous savez, nous tous, comme élus, ici, on est imputables, et, dans le monde municipal, je pense que l'imputabilité est encore plus vraie parce que, comme je le dis souvent, c'est sept jours semaine, puis ils sont toujours en contact avec leurs électeurs. Alors, moi, j'ai confiance dans la façon dont ils vont résoudre leur doute, sachant très bien que vous allez pouvoir les conseiller, que, puisqu'il y a un doute, le règlement permettrait de régler le problème.

Sur l'aspect du secrétaire-trésorier, ne serait-ce que pour le souligner, vu qu'il y a encore eu une discussion sur le sujet, on se comprend bien à l'effet que dorénavant il y ait des directeurs généraux partout. Dans certains cas, le secrétaire-trésorier est devenu le directeur général; dans d'autres cas, il peut y avoir un directeur général et un secrétaire-trésorier. Et donc, puisque c'est l'état du droit actuel, il y a maintien de l'existence du secrétaire-trésorier, puisque cela peut avoir été ce qui a été choisi comme mode de fonctionnement par le niveau municipal, et, comme le projet de loi s'inspire d'une philosophie où on tente de donner des marges de manoeuvre pour que les gens choisissent un peu comment eux veulent faire les choses, c'est un peu délicat de dire: Bien, on va vous forcer à faire ceci ou cela. Alors, je voulais quand même qu'on se comprenne, puisque, oui, maintenant il y a des directeurs généraux partout.

Je vais conclure mon intervention en vous posant la question sur la recommandation 2, en termes du délai pour l'entrée en vigueur afin de permettre la réécriture, et surtout je pense bien que c'est afin de permettre aussi une formation et une compréhension plus complètes. Admettons que le processus fonctionne bien et qu'au mois de juin nous puissions adopter le projet de loi, ça prend combien de temps avant qu'il entre en vigueur pour que votre recommandation soit satisfaite?

Mme Ouimet (Céline): Évidemment, le temps que chacune des municipalités au Québec puisse recevoir une copie complète de toutes ces modifications et une copie à jour, là. Donc, on ne pourra pas fonctionner avec l'ancien code en disant: Bon, 240 articles retranchés, etc. Il faut vraiment qu'on ait une copie en main, et les gens qui n'ont pas participé aux travaux, depuis 2002, 2003, sur les compétences municipales devront avoir en main un document vraiment à jour pour être capables de fonctionner, sinon ce sera impensable de travailler avec le vieux code.

M. Fournier: On est dans les technicalités.

Mme Ouimet (Céline): Oui, c'est ça.

M. Fournier: L'entrée en vigueur permet d'avoir un texte codifié. S'il n'entre pas en vigueur, on n'a pas encore de texte, à moins d'avoir une copie administrative. Alors, admettons qu'on est au mois de juin, admettons qu'il y a adoption, admettons qu'on a une copie administrative dès ce moment-là, là ? ou dans la semaine qui suit, tiens, pour se donner une période tampon ? qu'on a une copie administrative, combien de temps faut-il pour qu'en possession d'une copie administrative vous soyez à l'aise pour procéder avec une copie officielle, donc qu'il y ait une mise en vigueur?

n(14 h 50)n

Mme Ouimet (Céline): Nous, le délai n'est pas très long. C'est sûr que, dès qu'on aura une copie conforme de tout ça, on va se mettre à préparer le programme de formation pour tous nos membres et on sera en mesure de donner toute l'information sur la nouvelle loi.

Le Président (M. Ouimet): Alors, il reste à peine une vingtaine de secondes, M. le ministre.

M. Fournier: Un ordre de grandeur de temps que vous pouvez avoir, on l'adopte en juin, est-ce que c'est en octobre que ça rentre en vigueur? Prévoyez le délai de codification, et tout ça, là, puis... Parce qu'avant on peut fonctionner avec des copies administratives, là, mais pour que, quand ça rentre en vigueur pour vrai, là...

Mme Ouimet (Céline): Nous, dès qu'on a une copie officielle, on peut commencer à travailler avec ça. Donc, on peut former notre personnel, il n'y a aucun problème, là, mais il nous faut cette copie.

M. Fournier: Combien de temps de formation, dernière question?

Mme Vézina (France): Nous, la formation s'échelonne sur une session; donc, on parle d'une période, par exemple, de septembre à décembre. Lorsqu'on part en tournée de formation, on fait 17 régions, on donne des sessions dans 17 régions du Québec, donc ça se fait assez rapidement. On est très habitués, là, à donner de la formation à travers la province, donc ce n'est pas une question de mois. Que ce soit le mois d'octobre...

Le Président (M. Ouimet): Je dois vous interrompre parce que l'enveloppe de temps est terminée pour le côté ministériel.

M. Fournier: Seriez-vous assez gentil de lui permettre de finir sa réponse?

M. Legendre: Demandé comme ça...

M. Fournier: Merci. Alors?

Mme Vézina (France): Donc, ça peut être le mois d'août, de septembre. Dès qu'ils ont l'outil pour travailler, nous, on part en tournée, et ça peut être applicable, là.

Le Président (M. Ouimet): Tu n'avais pas le choix, sinon tu n'es pas gentil.

M. Fournier: Merci beaucoup, je remercie l'opposition.

Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, du côté de l'opposition, maintenant, M. le député... le gentil M. député de Blainville.

M. Legendre: Oui, volontairement gentil. Merci, M. le Président. Mme Ouimet, dans les pouvoirs généraux plus précis, là, en page 10, quand vous parlez de la voirie locale, vous dites que vous endossez «la proposition à l'effet que la municipalité puisse exécuter les travaux de voirie et par la suite taxer les contribuables en conséquence». Et là vous dites par ailleurs: «Le pouvoir de taxer par la municipalité dans ces cas précis devrait être précisé.»

Alors, j'aimerais justement que vous nous précisiez de quelle manière, quand vous dites ça, de quelle manière ça devrait être précisé. Est-ce que vous faites référence qu'il y aurait des choses qui devraient être rajoutées dans la loi n° 62, des précisions qui devraient être rajoutées à cet égard-là?

Mme Ouimet (Céline): Bien, ils ont répondu un peu tantôt par l'article 95, je crois, où ils disent que ça devient assimilable à une taxe foncière. Nous, ce qu'on voulait s'assurer, c'est que tous ces frais-là soient assimilables à une taxe foncière et récupérables de la même manière pour que ça devienne une priorité au niveau des créances municipales. Et on nous confirme que, dans la généralité, c'est déjà inclus pour toutes les compétences qu'on a dans ce projet de loi là.

M. Legendre: O.K. Dans votre première recommandation, où vous nous dites que le gouvernement du Québec, plus particulièrement le ministère, prévoit des ressources pour répondre aux municipalités, lors de l'application de la nouvelle Loi sur les compétences municipales, j'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu plus là-dessus. Qu'est-ce que vous avez en tête de ce côté-là?

Mme Ouimet (Céline): Bon. Les personnes qui ont travaillé sur ce projet de loi ont connu tous les tenants et aboutissants des modifications qu'on apporte aujourd'hui. On pense que, dans chacune des municipalités du Québec, il y aura des questionnements. Même après les journées de formation, il y aura des interrogations, et cela prendra des gens pour répondre à ces questions-là. On pense que ce n'est pas nécessairement dans le bureau régional, où ces gens-là n'ont pas participé au processus de modification de la loi, qu'ils seront en mesure de nous répondre facilement. Donc, il faudra des ressources, on croit, venant du ministère, pour être capables de répondre adéquatement, là, aux questions des D.G. des municipalités.

Mme Vézina (France): Peut-être, pour compléter votre réponse, on va avoir besoin d'accompagnement des hauts fonctionnaires du ministère pour faire bien assimiler cette loi-là. Il y a, du siège social ? si je peux m'exprimer ainsi, entre guillemets ? de Québec... mais il va y avoir des questions dans les bureaux régionaux, et les directeurs régionaux devront être très, très bien informés et formés à cet effet-là. D'ailleurs, nous avons déjà invité à notre congrès les personnes responsables du projet de loi n° 62 pour, au mois de mai, déjà venir en parler, et on veut avoir une collaboration très, très étroite avec les gens du ministère pour bien informer. La formation, on va la donner, mais il y a toute la question de l'information au jour le jour. Ça prend absolument l'appui du ministère des Affaires municipales dans ce cas-là.

M. Legendre: Essentiellement, c'est des ressources humaines, de l'accès aux ressources humaines auquel vous pensez.

Une voix: Oui. Tout à fait, oui.

M. Legendre: O.K. Dans votre conclusion ? et parce que vous étiez un petit peu contraintes par le temps ? dans votre conclusion, vous affirmez effectivement que la nouvelle loi selon vous a réussi, là, à atteindre l'objectif qu'elle avait initialement de simplifier. Par ailleurs, vous faites référence au fait qu'il reste encore, et je vous cite, là, «qu'il reste encore quelques articles qu'on souhaiterait bien voir améliorés». Et là vous dites: «Après plusieurs lectures, nous avons encore de la difficulté à comprendre exactement le sens et la portée de l'article 100 et suivants», au pluriel, et là effectivement, bien, vous citez l'article 100, et je pense que je vais nous épargner l'article 100, mais je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt et je dois me ranger dans votre groupe qui ne comprend pas après quelques lectures.

Alors, je ne sais pas, quand vous dites: «La portée de l'article 100 et suivants», puis bon, je blague un peu, là, mais je comprends ? probablement qu'on le comprend tous, là ? qu'il y a encore des améliorations à apporter, mais j'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu sur ce sujet-là. «100 et suivants», est-ce que vous en voyez plusieurs qui vous apparaissaient avoir besoin d'un peu plus de simplification?

Mme Ouimet (Céline): Entre autres, il y avait 100 et 101, particulièrement. Et ça semble être comme le chapitre qui a été oublié ou qu'on n'était pas capable de le décrire, je ne le sais pas, mais c'était vraiment... c'est presque encore incompréhensible, là, quand on relit ça. Il faut vraiment retourner dans chacun des articles, chacun des paragraphes, chacun des alinéas pour être capable de comprendre la portée de 100 et 101. Et il y en a sûrement d'autres. On pourrait vous les identifier, là, mais particulièrement ces deux-là.

M. Legendre: Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Blainville. M. le député de Saint-Maurice, il reste trois minutes.

M. Pinard: Merci, M. le Président. Je vais essayer d'aller rapidement. D'abord, c'est concernant votre mémoire, à la page 10, concernant le retrait de l'inspecteur municipal et l'inspecteur agraire. Ce qui apparaît clairement, dans le texte, c'est que selon vous «il faudra s'assurer que la personne désignée possède toutes les compétences requises pour ce genre de travail», alors que le projet de loi n° 62 propose de confier à la municipalité le pouvoir de désigner cette personne. Ce matin, il a été clairement établi, par les deux groupes que nous avons rencontrés, que ces deux groupes tenaient mordicus à maintenir l'inspecteur agraire et l'inspecteur municipal. Tout à l'heure, je vous ai entendues abonder dans le même sens.

Alors, ma question est très simple, et, comme j'ai trois minutes puis j'ai une autre question à vous poser: Est-ce que vous êtes d'accord qu'on maintienne l'inspecteur agraire et l'inspecteur municipal?

Une voix: ...

M. Pinard: Merci beaucoup. Alors, la réponse est?

Mme Vézina (France): Écoutez, c'est sûr que, on l'a dit ce matin, inspecteur agraire, là, il y a des désuétudes à l'intérieur de...

M. Pinard: Dans certains... Oui, oui, on va oublier les chevaux, là.

Mme Vézina (France): Mais, dans l'ensemble, là, oui, on est d'accord avec ce qui a été amené.

M. Pinard: D'accord. Merci. Alors, ça va à l'encontre un peu de ce que vous avez mentionné dans votre mémoire à la page 10.

Concernant la question ? et là je reviens sur un point majeur pour moi parce que, dans mon ancienne vie, on accordait énormément d'importance à la confection des règlements municipaux et aux résolutions. On parle par résolution, on légifère par règlement. Si j'ai un promoteur, dans une municipalité de 1 000 habitants, un village quelconque, O.K., qui décide, lui, de demander au conseil municipal un développement domiciliaire sur sa terre et qu'il a obtenu un dézonage, tout est correct, là. Il va rencontrer le conseil municipal, dépose son plan de développement, et cette personne-là obtient l'accord du conseil pour développer, par exemple, 75 terrains domiciliaires. Ça veut dire: on passe l'eau, on passe les égouts, on met des lampadaires, on fait les trottoirs, puis on pose l'asphalte, puis on fait un parc. Est-ce que le conseil va y aller par règlement, avec avis de motion, consultation de ceux qui sont impliqués sur le lot, ou si le conseil va y aller par résolution?

Le Président (M. Ouimet): Il va falloir qu'il y aille rapidement, parce qu'il reste moins de 15 secondes.

M. Pinard: Oui, mais là on parle du gros de la loi, je pense, on parle des sous.

Le Président (M. Ouimet): Mme Ouimet.

Mme Ouimet (Céline): Tantôt, on nous a dit que, si c'était un cas particulier, on y allait par résolution. Donc, c'est un cas particulier, on y va par résolution. Par contre, s'il doit respecter les règles en vertu de l'aménagement et de l'urbanisme, on devra respecter le règlement sur l'aménagement et l'urbanisme.

n(15 heures)n

M. Pinard: Alors, ça veut dire que, si le développement est dans une zone, dans le périmètre d'urbanisation de la municipalité, à ce moment-là, le conseil municipal de telle municipalité pourrait adopter, par résolution, un emprunt de l'ordre de plusieurs millions de dollars sans s'adresser aux autorités du ministère des Affaires municipales pour étudier le règlement et pour voir à ce que la capacité de payer soit là.

Le Président (M. Ouimet): De consentement... On déborde de l'enveloppe de temps, là, mais, de consentement... M. le ministre.

M. Pinard: Est-ce qu'on peut, par consentement, approfondir davantage? Parce que, là, on touche...

M. Fournier: On peut même dire qu'on élargit le projet de loi, puisqu'on est rendu dans d'autres éléments, celui du règlement d'emprunt n'est pas visé dans ce cas-ci. Mais je peux laisser répondre aussi, là, je ne veux pas empêcher les gens de répondre, là.

M. Pinard: Alors, comme directrice générale d'une municipalité de 1 000 habitants, hein, vous avez un conseil municipal, vous avez un personnage influent de la municipalité qui connaît tous les conseillers, qui connaît personnellement le maire, pour ne pas dire que c'est son frère, et puis qui arrive avec une proposition semblable: Moi, je développe ma terre. Il se passe quoi? Comment vous allez fonctionner avec la loi n° 62?

Mme Ouimet (Céline): Je crois qu'en premier le conseil municipal va donner son aval à ce développement-là, par résolution.

M. Pinard: Par résolution.

Mme Ouimet (Céline): Par la suite, le promoteur en question devra présenter des plans de lotissement, d'aménagement, à l'inspecteur qui, lui, devra approuver les lots.

M. Pinard: Il les approuve.

Mme Ouimet (Céline): Il les approuve. Et par la suite, s'il faut faire un règlement d'emprunt, bien on va suivre la procédure de règlement d'emprunt.

M. Pinard: Est-ce que c'est un règlement d'emprunt ou par résolution?

Mme Ouimet (Céline): ...

M. Pinard: Ça, ça ne change pas?

Mme Ouimet (Céline): Non.

M. Pinard: Merci.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le député de Saint-Maurice. Alors, Mme Ouimet, Mme Fillet, Mme Vézina, je vous remercie de votre participation aux travaux de cette commission, et bon retour.

Mme Ouimet (Céline): Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouimet): J'invite maintenant les représentants de l'Union des producteurs agricoles du Québec à s'approcher.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): M. Pellerin, je vous souhaite la bienvenue à cette Assemblée nationale que vous connaissez fort bien. Auriez-vous la gentillesse de nous présenter la personne qui vous accompagne?

Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Pellerin (Laurent): Bien sûr. Alors, je suis Laurent Pellerin, président général de l'Union des producteurs agricoles, et je suis accompagné de Me Michel Lord, qui est du contentieux de l'UPA, qui a suivi l'évolution du projet de loi n° 62.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, vous disposez de 20 minutes pour votre présentation.

M. Pellerin (Laurent): D'abord, on vous remercie du temps que vous nous accordez, cet après-midi, pour vous transmettre nos préoccupations par rapport à cet important remaniement de dizaines, centaines et peut-être milliers d'articles pour revoir une bonne partie des lois qui touchaient les cités et villes au Québec et même le milieu rural dans son entièreté, vous rappeler que, s'il y avait des lois différentes, certaines lois différentes ou certains paragraphes, des articles différents pour les grandes villes que pour les petites municipalités, probablement qu'il y avait quelques raisons. Alors, il faut faire attention, dans le regroupement, pour ne pas tout uniformiser dans une moyenne un peu plate et, à notre esprit, basse pour certains des éléments qu'on veut vous soulever.

Sur l'essentiel du projet de loi, qui consiste à remplacer des milliers de dispositions habilitantes particulières par quelques articles généraux, on est de cet exercice-là, aucune réserve là-dessus. Ça a plein de sens dans les domaines qui ont toujours relevé du monde municipal: les parcs, les bibliothèques, la voirie, le service des pompiers, d'égout. Je pense qu'on n'interviendra pas beaucoup sur ces sujets-là. Par ailleurs, nous croyons que le projet de loi va trop loin en accordant aux municipalités pleins pouvoirs en matière d'environnement, domaine déjà occupé par le gouvernement du Québec et qui doit le demeurer.

C'est à l'État de déterminer ce qui doit être autorisé dans notre société. Même si des clauses de conflit sont prévues, clauses stipulant qu'un règlement municipal est inopérant s'il est incompatible ou inconciliable avec un règlement provincial, d'innombrables et interminables conflits juridiques seraient à prévoir advenant pareil partage des responsabilités. Et puis nous craignons que cela puisse avoir pour effet d'annuler toutes les années consacrées à la discussion avec le monde municipal pour définir les règles de ce qu'on appelle la cohabitation. Simplement, on dirait que le monde municipal a suffisamment de pouvoirs de contingentement, d'aménagement, actuellement, pour gérer les questions qui sont de son ressort. D'élargir et donner pleins pouvoirs en matière environnementale nous apparaît être abusif.

Dans un deuxième point, le projet de loi va trop loin également lorsqu'il suggère, par des amendements qui nous ont été déjà proposés, que les municipalités aient dorénavant compétence sur tous les cours d'eau, fossés mitoyens, fossés de chemins, mais également des fossés ou des rigoles strictement privés. Il y a des limites à la réglementation. Ce n'est pas aux MRC de décider si un fossé de ferme doit être creusé ou entretenu ou de décider quel type de ponceau doit y être installé.

Le projet de loi va trop loin également en dégageant les municipalités rurales de leur obligation, obligation qui existe depuis toujours, d'entretenir convenablement leurs cours d'eau, y compris les fossés de chemins, lesquels doivent servir au drainage non seulement du chemin, mais des terres avoisinantes. Vous comprenez que le changement de perspective dans la loi que vous proposez, c'est que la municipalité peut le faire, mais elle n'est pas tenue de le faire, alors qu'avec tout l'argent public qui a été investi dans le drainage souterrain des terres, au Québec, si un réseau de drainage souterrain est inopérant parce que le fossé de la municipalité n'est pas fait, bien il doit y avoir une obligation qu'elle procède à ces travaux-là, ce qui est le système actuel. C'est tout le système de drainage des terres dans le fond qui est en jeu, et ces dispositions doivent absolument demeurer. On peut faire bien des choses avec une loi, mais on ne peut pas refaire la topographie.

Depuis toujours également, on retrouvait dans les lois des dispositions permettant aux propriétaires de terrains bas de pouvoir se drainer en passant, au besoin, sur des terres de leurs voisins, en payant les frais bien sûr, mais en passant sur les terres de leurs voisins. On pense aussi que cela devrait demeurer.

Quant à l'idée de règles spéciales pour les fossés drainants de moins de 100 ha, on ne sait pas trop quoi en penser, ce n'est pas trop défini. Si c'est pour remplacer des dispositions dont je viens de parler, cela mérite d'être regardé. Il faudrait s'assurer que 100 ha, c'est suffisant, et permettre le recours au drainage souterrain aussi parce que, même si c'est 100 ha, si on n'a pas l'obligation de connecter l'égout du drainage souterrain, on a la même problématique que je soulignais deux paragraphes précédents. Nous vous signalons cependant qu'il ne sera pas facile de déterminer c'est quoi, un bassin versant de 100 ha. Il y a quelques litiges entre voisins là-dessus, là: Je draine chez vous, je ne draine pas chez vous, puis je pourrais passer autrement. Ce n'est pas évident à définir sur le terrain. Dans un bureau, ça va bien, ça, sur des cartes, mais, quand on arrive sur le terrain, ce n'est pas évident.

L'UPA se réjouit par ailleurs du maintien de l'inspecteur agraire, qui devient une personne désignée, une institution qui a depuis longtemps fait ses preuves pour solutionner les litiges relatifs aux clôtures, aux fossés et aux découverts. Mais nous pensons que cela serait faire une erreur que de rendre sa nomination facultative, comme c'est le cas actuellement dans les villes. On négligerait souvent de procéder à pareille nomination et on refuserait sans doute d'y procéder lorsque des problèmes se poseraient, sous prétexte de ne pas vouloir intervenir dans un litige privé. Il ne faut pas attendre le moment où on est en crise pour le nommer, sinon il ne sera jamais nommé, alors que ce monde-là, actuellement, partout sur le territoire rural, font une bonne job, ils sont appréciés de façon très large des deux parties, même si les deux parties sont en litige.

n(15 h 10)n

Je ne vous ferai pas une présentation mot à mot du mémoire, mais vous avez reçu une copie du mémoire total qu'on vous a présenté. Comme je le disais, dans son ensemble, on pense que la réforme est un bon pas dans la bonne direction, de simplification, mais il faudrait faire attention, dans cette simplification-là, de ne pas perdre des éléments qui sont extrêmement importants pour l'agriculture et le milieu rural. C'étaient nos commentaires.

Le Président (M. Bernier): Alors, merci, M. Pellerin. Alors, M. Lord. Il n'y a pas de commentaires? Merci de vos commentaires. Donc, on va passer immédiatement à la période d'échange. Donc, la parole est au ministre. M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous avoir avec nous. Essentiellement, deux sujets que je vais traiter avec vous, là. C'est pas mal le coeur d'ailleurs de ce que vous avez soulevez, même si vous avez touché à d'autres éléments.

On va commencer par les cours d'eau. Je le dis sans gêne, là: c'est compliqué, les cours d'eau. Je pense que je ne suis pas le seul qui essaie de comprendre tout ce qu'on vise par les cours d'eau. Vous connaissez ça sans doute beaucoup plus que moi. Parlez-moi des cours d'eau, là, notamment des cours d'eau privés, c'est-à-dire, on est sur la terre de quelqu'un, ça n'a pas rapport avec personne d'autre. Je vais vous donner ma conception à moi, je vais vous raconter une petite histoire. Puis prenez pas ça mal, c'est ce que je vis tous les jours. Puis j'ai fait un lien avec ça, puis peut-être que je me trompe complètement parce que j'ai fait le lien avec les bassins versants.

Je viens de Châteauguay, je reste là encore. Beaucoup d'inondations. On fait des études en ce moment pour voir comment on pourrait éviter que les berges s'effritent comme elles s'effritent. On est à la veille de faire deux rivières en une parce qu'on ramène tout ça en plein milieu en ce moment. Et essentiellement il y a des analyses qui démontrent que, à partir des États-Unis, quand ça descend, ça draine partout. Ça part des montagnes, ça dégèle au sud, puis là on est gelé en haut, puis ça vient se ramasser. Et là il y a plusieurs études qui se font en même temps sur, entre autres, l'impact de l'irrigation des terres qui arrive en même temps, tout ça. Donc, il y a une notion, je dirais, de lien entre tous les intervenants du côté sud, parce que ça va vers le nord, et tout à coup l'eau arrive d'un seul coup. En fait, c'est bizarre, parce qu'au printemps l'eau est à une hauteur où ça déborde, évidemment, puis c'est rendu qu'à l'été on voit le fond. Alors, il y a vraiment des débits incontrôlables. Et donc, moi, quand on me parle de bassin versant, je le vois comme ça, je le vois comme capable d'harmoniser le cours d'eau. C'est une mauvaise expression, mais...

Quel est l'impact sur le propriétaire privé, là, de dire... Comment on le considère dans son cours d'eau? Il paraît que ça dépend des cours d'eau, que, même quand c'est un petit fossé, là... Comment on fait un impact sur lui? Quelle est la conséquence pour lui? N'est-il pas raisonnable qu'on réfléchisse à cette irrigation-là dans l'ensemble de la problématique, notamment de cette rivière-là? En fait, commençons par ce problème-là, cette image-là, puis, après ça, parlez-moi de l'ensemble des affaires sur les cours d'eau.

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Sur l'ensemble du réseau hydrique du Québec, c'est un peu la même problématique dans toutes les régions, ce n'est pas particulier à Châteauguay, mais les eaux de printemps commencent à nous arriver par le sud, les montagnes, descendent. Les terres agricoles viennent après, à quelques semaines d'intervalle. Habituellement, les inondations viennent d'en haut, ne viennent pas d'en bas. Que les municipalités ou les MRC aient pleins pouvoirs sur tout ce qui est ce réseau hydrique là pour son entretien, pour sa réglementation, les normes de creusage, le partage de la facture, etc., il n'y a aucun problème avec ça. Mais, quand on est rendu dans des raies de curage, qu'on est dans le labours sur des terres ou des rigoles d'égouttement agricole, je veux dire, que les municipalités ou les MRC aient un pouvoir de venir réglementer ça... Des fois, les municipalités, ils ont des appétits auxquels il faut les convaincre que, pour leur régime, c'est mieux qu'ils ne mangent pas ces affaires-là. Je les connais pas mal, surtout les associations qui sont un peu différentes des municipalités elles-mêmes, parce qu'il y a beaucoup de municipalités rurales qui n'ont pas cet appétit-là de tout manger. Il y a certaines associations de municipalités qui ont un appétit beaucoup plus... on dit dans le jargon les yeux plus grands que la panse. Alors, s'il faut qu'on se mette à avoir des gens qui réglementent les fossés sur des milliers d'acres de terre, ils ne s'en sortiront jamais, ils ne seront jamais capables d'administrer ça, et le prix de cette vérification-là ou de cette réglementation-là est absolument ingérable. Puis ça n'aura pas d'impact non plus sur le cours d'eau. Je veux dire, l'eau, elle est là puis elle coule.

M. Fournier: Aidez-moi sur...

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin, M. le ministre, si vous permettez, je vais vous identifier à tour de rôle au niveau de la parole parce que ça facilite l'enregistrement et l'identification des galées.

M. Pellerin (Laurent): Excellent.

Le Président (M. Bernier): C'est bien? Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Dites-moi, donnez-moi quel genre d'exemple de normes réglementaires qui seraient contenues dans un règlement sur le fossé ou la rigole, le fossé privé qui... Qu'est-ce qu'on pourrait mettre dedans, là?

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Sur les grands réseaux hydriques, ce qu'on voit comme normes actuelles, c'est l'angle de talus, largeur du fond, empierrement dans des milieux ou dans des bouts de rivières qui sont plus fragiles, non-empierrement. C'est ce genre de réglementations là qui sont appliquées actuellement. Je ne sais pas, Michel, si tu penses à d'autres choses, là. C'est pas mal ces normes-là qu'on connaît actuellement. Ce qui vaut pour des cours d'eau à débit important, mais, quand on arrive sur des rigoles, on n'est plus dans la même affaire, là.

M. Fournier: Est-ce que...

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Excusez-moi, M. le Président. Est-ce que vos craintes sont à l'effet que les municipalités utilisent ce pouvoir réglementaire sans adapter la réalité de la rigole par rapport à un cours d'eau d'envergure plus considérable, et donc que vous y voyez une menace, par exemple, à l'agriculture?

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): C'est ce qu'ils ont tendance à faire déjà. Ce n'est pas une nouvelle tendance qu'ils pourraient développer, ils ont déjà cette tendance-là.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Mais c'est ce que vous pensez qui arriverait.

M. Pellerin (Laurent): Oui.

M. Fournier: Oui. O.K. Parlez-moi des fossés qui ne sont pas nécessairement, là, privés, là, qui drainent, là, le 100 ha, là.

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Nous, on a pour tradition en agriculture que, lorsqu'un fossé draine plus que deux propriétaires, il devient un fossé public; donc, il n'est plus ce qu'on revendique comme étant un fossé privé, il est un fossé public puisqu'il y a plus qu'une personne qui met de l'eau dedans. Donc, la municipalité commence à avoir une responsabilité d'intervenir dans ce genre de travaux là. Mais, moins que ça, quand ce sont des fossés sur nos terres, là, il y a une limite, là, à l'ingérence. On est encore en régime de propriété privée au Québec, là.

M. Fournier: Alors, votre...

Le Président (M. Bernier): M. le ministre, à vous la parole.

M. Fournier: Alors, votre façon, c'est... agréable... Ça coupe l'idée à chaque fois. Votre façon de le dire serait de ne pas parler de fossé qui draine 100 ha, mais d'un fossé qui draine deux terrains, là, deux propriétés différentes.

M. Pellerin (Laurent): Bien, cette notion-là de 100 ha, là, c'est nouveau. On ne voit pas à quoi ça réfère exactement. Il n'y a rien de précis comme ça, là, au Québec, là. Il n'y a pas un réseau d'égouttement, là, qui est divisé par 100 ha, là. L'eau, ça ne marche pas de même au Québec, là. Ça peut être 250 de ce bord-là, puis 32 de ce bord-là, puis ça s'en vient dans un petit canal, ça s'en va dans une rivière. Alors, 100 ha...

Premièrement, il faudrait tout classifier les réseaux à partir d'une division à 100 ha, je veux dire, c'est qui qui se cherche une job là-dedans, là? Ça n'a pas d'allure, ça, là. À première vue, ça nous apparaît que ça n'a pas de sens, là, mais peut-être qu'on manque l'objectif que vous recherchiez. Mais, nous, on n'y voit rien d'intéressant pour le moment là-dedans.

M. Fournier: O.K. Je vais passer au deuxième sujet sur lequel je voudrais que vous élaboriez un petit peu. On avait la FQM ce matin. Je soulignais à la FQM que parfois il y avait des positions à concilier entre l'UPA et la FQM, ce n'est pas à vous que j'ai besoin de le dire. Mais la FQM avait une position complètement différente par rapport à la Loi sur la qualité de l'environnement, sur l'article 124 et sur les liens qu'il y avait à faire, à savoir si c'était conciliable, inconciliable ou inapplicable au complet. Parlez-moi de la difficulté que vous avez, que vous envisagez, puis je suis sûr que vous savez ce que la FQM, elle, de son côté demande: une souplesse accrue. C'est la bonne occasion pour que vous me disiez, par rapport à l'état du droit actuel...

Enfin, je pense bien que ce qui est dans la loi actuellement représente ce qui est l'état du droit. C'est du copier-coller en mots différents, là, c'est le même état du droit qui est là. Ce qui amène la FQM à dire: Je voudrais avoir un peu plus de souplesse que ce qui est là. Et je crois comprendre de votre texte que vous nous dites: Bien, nous, on voudrait tenir compte de l'évolution jurisprudentielle et il faudrait donc se prémunir tout de suite et rendre la chose un peu plus compliquée déjà. Alors, premier angle de ma demande: Est-ce que vous considérez que le texte, tel qu'il est là, correspond à ce qui est la loi actuelle, finalement? Est-ce que vous souhaitez garder comme il est dans le projet de loi ou vous souhaitez, parce qu'il y a une évolution jurisprudentielle, rendre ça plus restrictif, je dirais, les possibilités, les facultés qui sont données au monde municipal? Ça, c'est le premier volet un peu plus légal, là.

Le deuxième volet... donc, peut-être pour vous... le deuxième volet, c'est la réalité terrain de ce que vous vivez avec des dispositions qui pourraient éventuellement être prises par le monde municipal et donc auraient des effets sur l'agriculture.

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

n(15 h 20)n

M. Pellerin (Laurent): De façon générale, on ne veut pas se retrouver avec un régime qui serait appliqué de façon complètement discordante d'une région à l'autre ou d'une municipalité à l'autre. Ce qu'on lit, nous, et ce que nos avocats comprennent dans le texte qui est actuellement sur la table, ça pourrait donner comme résultat qu'au-delà, par exemple, de pouvoir contingenter la quantité de telle production dans une municipalité, pouvoir que nous reconnaissons qu'ils ont depuis l'automne passé, ce qui est écrit là pourrait leur donner même le pouvoir de dire: On va plus loin que contingenter, on a maintenant pleins pouvoirs dans le domaine environnemental, alors on décide... pas qu'on contingente, on décide qu'il n'y en a plus du tout, de cette production-là sur notre territoire. On pense que la loi, telle qu'elle est écrite actuellement, leur donne ce pouvoir-là.

Peut-être Me Lord peut faire un commentaire là-dessus.

Le Président (M. Bernier): Alors, Me Lord. On va déborder un petit peu sur votre temps, monsieur. Est-ce que vous êtes d'accord?

M. Fournier: J'ai fini mon bloc, je n'aurai plus d'autres questions après, alors...

Le Président (M. Bernier): Donc, je vous en prie, Me Lord, la parole est à vous.

M. Lord (Michel C.): Alors, selon moi, évidemment, à l'heure actuelle, les municipalités disposaient de très peu de pouvoirs en matière d'environnement. Évidemment, ils se servaient d'artifices, là, ils travaillaient avec la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, et tout, pour arriver à des réglementations de site environnemental, alors que le projet de loi n° 62 leur accorde vraiment, là, des pouvoirs réels en matière d'environnement.

Tantôt, vous avez invoqué 124.5 de la Loi sur la qualité de l'environnement, c'est vrai que ça demeure, mais, selon nous, on va multiplier, en fin de compte, les occasions de conflit. Et il est beau de dire qu'un règlement municipal inconciliable avec un règlement provincial est inopérant, mais le démontrer, c'est une autre chose. Et, même si c'était relativement simple, il faut toujours se retrouver devant le tribunal, en fin de compte, pour en faire la démonstration.

Pour ce qui est de la jurisprudence, jusqu'à tout récemment, il y avait une décision de la Cour d'appel, que vous connaissez, Saint-Michel-Archange, on était relativement à l'aise avec ça. Depuis la décision de la Cour suprême dans Spraytech, là on est un peu plus inquiet, il faudra attendre d'autres décisions de la Cour suprême. Mais on a vu que la Cour suprême était tentée de permettre aux municipalités d'ajouter une réglementation provinciale, d'aller plus loin sans qu'on juge que le règlement est inconciliable. Alors ça, ça nous inquiète, et on n'est pas capables pour l'heure de savoir ce qui va advenir.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Lord. Donc, nous allons maintenant donner la parole au représentant de l'opposition. Alors, M. le député de Blainville, responsable en affaires municipales.

M. Legendre: Merci, M. le Président. D'abord, bonjour, M. Pellerin, Me Lord. Mais un peu pour continuer sur le même sujet, parce que je pense que c'est ça, l'essentiel de votre propos, où vous nous dites d'entrée de jeu, en introduction, que le projet de loi va trop loin, notamment en accordant pleins pouvoirs en matière d'environnement. Alors qu'on l'a soulevé au début de la journée, le projet de loi n° 62 en compétences municipales avait l'objectif de réécrire, de reconfirmer des pouvoirs, de simplifier, de donner une marge de manoeuvre plus grande aux municipalités, mais, de votre point de vue ? là, vous l'avez exprimé ? de votre point de vue, ce n'est pas une simple réécriture, c'est carrément qu'il y a de nouveaux pouvoirs qui seraient accordés, selon vous, aux municipalités en matière environnementale.

M. Pellerin (Laurent): C'est notre compréhension.

M. Legendre: Et ça, c'est à partir de quoi? À partir de quel article, en le comparant à l'existant, qui vous fait venir à cette conclusion-là? Vous avez fait référence à la jurisprudence. Est-ce que c'est un petit peu aussi le projet de loi, tel qu'il est présentement, mais en lien avec des cas précis de jurisprudence qui viennent ajouter à l'inquiétude ou... Parce que, bon, le législateur, semble-t-il, nous dit-on, avait comme intention une réécriture, de ne pas augmenter les pouvoirs. Alors, j'essaie de bien saisir la différence entre avant et après, là.

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Bien, comme M. Lord l'a dit tantôt, nous, notre lecture, c'est que le texte actuel n'est pas une simple réécriture, mais qu'il ouvre la porte à une application plus large et plus systématique de pouvoirs que, oui, les associations municipales ont l'appétit de, ça, c'est clair, mais dont on pense qu'ils n'ont pas la compétence pour appliquer sur les questions environnementales le même jugement que les instances provinciales ont.

Vous savez, un maire, c'est fort, mais en même temps c'est très fragile. Vous avez des bureaux de comté. On a une organisation démocratique chez nous: quatre, cinq téléphones la même journée sur le même sujet; deux, trois, cinq citoyens qui se présentent ensemble à un conseil municipal sur le même sujet, et puis c'est le branle-bas de combat. Alors, comment les élus municipaux vont pouvoir résister? Vous l'avez dit tantôt, ils sont très près de la population votante. Comment ils vont pouvoir résister à un groupe de citoyens, deux, trois, quatre, 10 citoyens qui s'organisent ensemble, 15, 20 qui viennent de la municipalité voisine ou même du centre-ville de Montréal ? les gens du Plateau aiment ça voyager ? qui s'en viennent en région faire un branle-bas de combat sur une question qui est tout à fait théorique, et le maire, le conseil municipal est complètement paralysé? Ce projet de loi là ouvre la porte toute grande à ça. Et je pense qu'on a déjà assez des pouvoirs qu'ils ont actuellement dans le domaine environnemental.

Le Président (M. Bernier): Alors, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Dans votre introduction, M. Pellerin, vous avez dit: Il faut faire attention pour ne pas trop uniformiser, en particulier ne pas trop uniformiser les dispositions à l'égard: petites villes ou plus petites villes et plus grandes villes. Est-ce que vous disiez ça en introduction de façon générale ou vous disiez ça en réaction au projet de loi n° 62? Est-ce que votre mise en garde était plutôt un constat?

Le Président (M. Bernier): M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): Je pensais particulièrement à toute la question de ce que j'ai énuméré, là, sur les cours d'eau, sur l'inspecteur agraire, sur le voisinage dans le monde rural, qui sont des questions qui sont probablement débattues en ville, mais pas au même niveau. Vous savez, en ville, quand deux voisins se chicanent pour une clôture de 100 pi, il y en a un qui finit par la faire, puis c'est réglé. Quand on se chicane pour clôturer un terrain de 200 acres, ce n'est pas le même prix. Puis, habituellement, on aime mieux en faire la moitié chacun. Quand on se chicane pour l'entretien des fossés mitoyens entre individus, on aime mieux que l'inspecteur agraire soit là pour être sûr qu'on le fait à la bonne place puis juste une fois, puis que chacun en paye sa moitié. Ce n'est pas les mêmes débats qui se passent en ville, là. Alors, cette partie-là, pour le monde rural, est... l'égouttement des terres, la séparation des terres. On est à refaire le cadastre géopositionné dans plusieurs régions du Québec. Ça s'est fait chez nous l'an passé, ça va amener beaucoup de débats sur: on retasse des affaires à des places, ici, puis comment qu'on gère ça. Ce n'est pas la même affaire qu'un terrain de 100 X 100 en ville, ça, là. Je pense que vous comprenez ça assez facilement.

Alors, d'uniformiser, c'est ça que je vous disais tantôt, de tenter d'uniformiser toutes ces questions-là à la grandeur du Québec dans l'objectif d'avoir une loi simplifiée, en principe on souscrit à ça, mais faites attention, parce qu'en pratique ça pourrait, nous autres, tasser des procédures ou des façons de travailler qu'on a qui sont assez vieilles et qui ont fait leurs preuves sur l'efficacité, là. Et c'est des dizaines de milliers de dollars, l'entretien des fossés mitoyens, de clôtures, et tout ça, là, ce n'est pas juste un petit bout de clôture de 100 pi, là. Alors, c'est à ça que je référais surtout, de faire attention à ça.

M. Legendre: Mais, quand vous dites...

Le Président (M. Bernier): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Je m'excuse. Quand vous dites «faites attention», ça veut dire quoi, faire attention? Est-ce que vous dites: Faites attention, il y a des choses qu'il faudrait qui soient modifiées dans le projet de loi tel qu'il est présentement ou si ça va être dans l'application qu'il faut faire attention?

M. Pellerin (Laurent): Le premier...

Le Président (M. Bernier): Oui, M. Pellerin.

M. Pellerin (Laurent): C'est lui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pellerin (Laurent): Le premier article qu'on vous soulevait, c'est d'introduire les fossés privés dans la même sorte de réglementation que l'ensemble du réseau hydrique géré par les municipalités. Ça, on pense que c'est une contrainte trop détaillée, ce qui devrait être revu. Le mot est déjà dans la liste que vous donnez aux municipalités.

Quand on parle de... Peut-être par omission, là, mais la lecture que ça nous donne actuellement, la municipalité n'est plus tenue d'entretenir un cours d'eau qui égoutte... une rue dans laquelle, moi, je draine mes terres. La situation actuelle, là: je draine mes terres dans le fossé du chemin, puis, si mes drains ne sont pas capables de s'égoutter là, mes fossés ne sont pas capables de s'égoutter là, j'écris à la municipalité, la municipalité, elle est tenue de venir entretenir son fossé. Ce n'est pas: si elle a le temps, si elle a le budget, si elle veut. Elle est tenue de venir l'entretenir; moi, je ne suis pas capable de produire. Ça, c'est disparu dans l'écriture. Ça fait que ce n'est pas juste une simple réécriture que... Vous avez supprimé ou suspendu la responsabilité de la municipalité à cet égard-là. Dans la grande ville de Montréal, je ne sais pas ce que ça change, ça, là, mais chez nous, dans le milieu rural, je peux vous dire que ça change quelque chose. Des rangs, il y en a des grands, grands, longs rangs. Il y a tout le réseau des voies ferrées sur lequel il y a des fossés. Et ces gens-là sont tenus d'entretenir leurs fossés pour ne pas bloquer nos drainages de terres. Alors, cette obligation-là est disparue dans la loi, là. Ce n'est pas juste une simple réécriture, ce bout-là.

L'inspecteur agraire, le fait de ne pas le nommer, c'est disparu, ça aussi. Les municipalités étaient tenues de le nommer, l'inspecteur agraire, là. Ce n'était pas: peut-être bien que si, puis peut-être bien un jour il arrive un trouble, là. D'en nommer un. Il y en a en stand-by dans toutes les municipalités du Québec. Il y a deux, trois inspecteurs agraires, ça ne coûte rien de les nommer, ils sont là. S'ils ne sont pas utilisés, ça coûte le même prix. C'est: s'il y a un problème, bien, celui-là va sur tel territoire puis l'autre va sur tel territoire, puis ils se partagent la tâche, puis la job se fait. Puis on ne se retrouve pas devant les tribunaux. Nous autres, on ne veut pas créer des jobs pour les avocats, on pense qu'ils en ont assez, là.

n(15 h 30)n

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bernier): Alors, M. le député...

M. Pellerin (Laurent): On parlait, là, de régime judiciaire léger, là. Il est déjà là, ce régime-là, ça fait qu'arrangez-vous pas pour qu'il devienne plus lourd, là. Il est efficace en milieu rural. Je vous le dis, j'ai de la misère à me prononcer pour Trois-Rivières, ou Montréal, ou Sherbrooke, là, mais chez nous, en milieu rural, ce système-là, il donne les résultats escomptés.

Le Président (M. Bernier): Alors, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Vous parlez, dans votre mémoire, évidemment de la cohabitation puis du travail qui a été fait au cours des dernières années. Vous faites référence à la loi n° 54, vous suggérez que le législateur puisse corriger le tir évidemment avec le projet de loi n° 62. Mais, un petit peu auparavant, il y a un paragraphe inquiétant quand vous dites: «Nous craignons également [...] qu'il y ait dérapages et abus pouvant se traduire par d'irréparables dommages pour un bon nombre de productrices et producteurs que nous représentons.»

Alors, j'imagine que votre lecture du projet de loi n° 62 est aussi influencée évidemment par la loi n° 54, là, et toute la dimension de la cohabitation, puis j'aimerais ça que vous nous fassiez part un petit peu, là, de vos craintes à cet égard-là, à l'égard des producteurs.

M. Pellerin (Laurent): Bien, loi n° 54, oeuvre imparfaite et inachevée. Il ne faudrait pas que 62 vienne encore compliquer ce qui est déjà imparfait et inachevé. Si ça avait été pour le parfaire, on ne serait pas venu ici, aujourd'hui, mais on pense qu'il y a des occasions de dérapage dans ce qui est soulevé là. Je vous le dis, il y a déjà, depuis plusieurs années, des producteurs agricoles qui ont été pénalisés, des gens qui ont fait des choix d'investissement ou qui ont fait des choix de non-investissement à cause des contraintes actuelles de cohabitation, là. Alors, il ne faudrait pas que 62 vienne encore mettre de l'huile sur le feu là-dessus et ouvrir des portes pour... Puis, comme disait Me Lord tantôt, on s'est essayé, on a contesté quelques règlements municipaux abusifs en cour, puis, à chaque fois, c'est des dizaines, sinon des centaines de milliers de dollars en frais légaux et avec des réponses qui ne sont pas souvent concluantes.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, M. le député de Blainville. Je retourne maintenant du côté ministériel. M. le ministre.

M. Fournier: Une seule question qui concerne l'article 65 du projet de loi, qui dit que «la municipalité locale a compétence en matière de voirie sur les voies publiques dont la gestion ne relève pas du gouvernement du Québec ou de celui du Canada ni de l'un de leurs ministères ou organismes.

«Dans la présente loi, une voie publique inclut toute route, chemin, rue, ruelle, place, pont, voie piétonnière ou cyclable, trottoir ou autre voie qui n'est pas du domaine privé ainsi que tout ouvrage ou installation, y compris un fossé, utile à leur aménagement, fonctionnement ou gestion.»

L'interprétation qui sous-tend cette disposition-là est à l'effet que la compétence à l'égard d'un travail, d'un fossé par exemple, entraîne aussi la responsabilité à l'égard des dommages causés par ce fossé. Est-ce que cette disposition-là ne répond pas à la question que vous avez sur l'obligation d'entretenir les fossés?

M. Lord (Michel C.): Il faudrait que j'y réfléchisse.

Le Président (M. Ouimet): Me Lord.

M. Lord (Michel C.): Il faudrait que j'y réfléchisse. Franchement, là, je ne suis pas en mesure de vous répondre maintenant, là. Vous me dites que, bon, la municipalité serait propriétaire du fossé, donc devrait assumer la responsabilité des dommages...

M. Fournier: Je vais faire quelque chose avec vous. On va se faire...

M. Lord (Michel C.): C'est un point qu'on vérifiera.

M. Fournier: On va faire un deal, vous puis moi: on va y réfléchir chacun de notre bord.

M. Lord (Michel C.): Mais, voyez-vous, si on me permet, M. le Président, là, relativement à cette question-là, il y a l'article 742 surtout qui est une disposition absolument centrale, puisqu'il crée ce qu'on appelle des servitudes légales, légales de drainage, en permettant à une municipalité de prendre des eaux d'un chemin, y compris les eaux des terrains avoisinants, et de les acheminer sur les terrains inférieurs. Si 741 et 742 disparaissaient, nous sommes inquiets, là, des conséquences, eu égard à ces servitudes-là, servitudes légales qu'on ne retrouverait plus. On tenait à vous le signaler.

M. Fournier: Alors, nous ayant mutuellement signalé des numéros d'articles, nous allons mutuellement réfléchir à ces numéros et à leur contenu, et on aura l'occasion de s'en reparler, je suis persuadé. Merci.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le ministre. Alors, je retourne du côté de l'opposition. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui, M. le Président. M. Pellerin et Me Lord, du côté de tout ce qui traite de l'inspection municipale dans le projet de loi n° 62, quelles sont vos réactions à cet égard-là?

M. Pellerin (Laurent): L'inspection municipale, vous référez à quoi?

M. Legendre: Bien, par exemple, quand vous faites... en page 9, là, quand vous parlez de... «Le projet de loi propose de rendre facultative, plutôt qu'obligatoire comme c'est le cas actuellement pour les municipalité rurales, la nomination de la personne désignée pour arbitrer les conflits pouvant se poser.» Et là vous dites: «Il nous apparaît que cela serait faire fausse route.» J'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu là-dessus.

M. Pellerin (Laurent): C'est l'inspecteur agraire plus que l'inspecteur municipal.

M. Legendre: Oui, je m'excuse.

M. Pellerin (Laurent): Oui. Sur l'inspecteur agraire, dans le fond, ce qu'on dit, c'est: Laissez-les en fonction, ces gens-là nommés d'avance; n'attendez pas les conflits, parce qu'une situation conflictuelle, ça va être extrêmement difficile pour la municipalité de ad hoc nommer quelqu'un pour régler ces questions-là. Il y a un inspecteur agraire. Les gens savent en quelque part que, s'il y a un comportement qui n'est pas correct par rapport à... anciennement, on disait au Code municipal, je ne sais pas comment on l'appellera éventuellement... L'inspecteur va venir trancher ça.

Tout le monde dans le milieu rural connaît cette procédure-là. La journée que tu reçois une lettre ou un téléphone de l'inspecteur agraire, il n'y a personne qui est content, là. Ils savent qu'il y a un problème à régler, puis il y a quelqu'un qui va venir se mêler de tes affaires, là, parce que tu ne t'es pas entendu avant avec ton voisin. Ça, c'est connu, cette affaire-là, c'est efficace, ça marche; les contestations subséquentes de ce mécanisme-là en tribunal, à peu près inexistantes; donc c'est efficace, mais à condition que le processus soit là, là. Puis laissez-le pas s'amenuiser, ce processus-là. Il est là, il est bon, il fonctionne. Il est peu dispendieux.

M. Legendre: Et vous avez peur qu'autrement toute la dimension d'indépendance...

M. Pellerin (Laurent): Si on ne les nomme pas, on pense que l'habitude va se créer qu'ils ne soient pas nommés. Puis, s'ils sont nommés juste en cas de conflits, ça va créer une autre mentalité, une autre approche, puis on ne solutionnera pas les conflits de la même façon qu'on les solutionne actuellement. Le processus actuel, d'abord, il est peu dispendieux, il fonctionne bien, alors pourquoi fixer quelque chose qui n'est pas cassé?

M. Legendre: Une dernière question, M. le Président. Dans votre conclusion, quand vous dites: «Le gouvernement doit également faire marche arrière relativement aux cours d'eau et au drainage des terres», ça veut dire des changements importants au projet de loi n° 62?

M. Pellerin (Laurent): Bien, ou l'exclusion de trois, quatre mots ici et là. D'abord, si on a... Dans le premier paragraphe, je veux dire, si on exclut les mots «fossé privé», on vient à la situation avant. Si, plus loin, on garde «l'obligation pour les municipalités», si on s'entend sur... je pense que le ministre tantôt reconnaissait qu'il fallait s'entendre pour que cette obligation-là demeure, un entretien dans les cas où il y a besoin d'entretien, que ce ne soit pas au bon choix ou au bon vouloir de, mais que ce soit... Ça ne marche pas, ça ne marche pas, vous êtes tenues responsables des dommages, puis ça n'a pas toujours été... bien, je dirais, ce n'est pas souvent cette approche-là qu'on prend avec les municipalité, là, qui sont tenues responsables des dommages ? on aimerait bien ça ? mais c'est plutôt à un tiers responsable d'entretenir le cours d'eau. C'est rare, je pense, qu'on leur a imputé les dommages.

Et l'autre paragraphe, c'était de maintenir la possibilité pour les producteurs qui utilisent les terres de voisins de continuer à utiliser ça puis de... Il y a quasiment une servitude qui était créée, là. Pour quelqu'un qui est en terre basse, de passer chez un voisin pour aller s'égoutter dans un bas-fond encore plus loin, plus bas, et même en passant chez un voisin, en payant les frais bien sûr, ça s'est toujours fait en milieu rural. Ça, les gens comprennent bien ça, là.

M. Legendre: Alors, là-dessus, de votre point de vue, ce sont des choses qui existent présentement et qui fonctionnent correctement.

M. Pellerin (Laurent): Tout à fait.

M. Legendre: Et qui ne nécessitaient pas de changements législatifs, là.

M. Pellerin (Laurent): Bien, si ce qu'on nous a dit au début, que cet exercice-là de la loi n° 62, c'était une réécriture ? puis je comprends qu'à l'occasion d'une réécriture il peut arriver qu'on adapte à certains moments ? si l'essentiel de l'opération, c'était une réécriture, bien, profitez-en pas pour choper des responsabilités qui sont déjà aux municipalités que je pense qu'ils doivent continuer à avoir, puis profitez-en pas non plus pour leur donner des pouvoirs supplémentaires qu'ils ont peut-être l'appétit d'avoir, mais qu'on pense qu'ils ont suffisamment la panse pleine pour les ressources qu'ils ont. Parce que c'est nous autres qui finissons par payer au bout, là.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, M. le député de Blainville. M. le député de Saint-Maurice, à vous la parole.

n(15 h 40)n

M. Pinard: Oui, ce sera court, M. le Président. J'ai déjà été, dans mon ancienne vie, maire d'une municipalité où il y avait une section urbaine massive, mais quand même un territoire agricole, et j'ai appris, à un moment donné, que ma municipalité se devait de contribuer à payer les frais de clôture d'une terre agricole. Alors, mon directeur général, qui était inspecteur agraire, m'a dit: M. le maire, il faut qu'on fasse ça en vertu de la loi, on est tenu, etc. Bon. Bien, j'ai dit: O.K., allons-y. Mais je veux revenir là-dessus parce que je prends connaissance, à la page 9 du mémoire que vous avez déposé, que vous nous soulignez, vous nous soulignez, par écrit, qu'il y a des articles qui vont tout simplement disparaître du Code municipal, les articles 744 et 745 qui obligeaient les municipalités à respecter l'engagement tout à fait... du Code civil, là, et d'entretenir, pour la moitié, les clôtures avec l'agriculteur. Et plus loin, plus loin, vous nous mentionnez que ces clôtures-là vont devenir, en vertu de l'article 1002, elles vont appartenir à la municipalité d'office. Et vous nous mentionnez que, «malgré cette disposition, les municipalités ne pourraient se soustraire de l'obligation de contribuer pour moitié aux frais de clôture, l'article 3 du projet de loi y faisant obstacle».

Alors, d'une part, vous dites: Bien, là, les municipalités ont réussi à obtenir le retrait de l'obligation de payer à moitié des clôtures, et, vous, vous mentionnez qu'en vertu de l'article 3, malgré le retrait de ça, ils vont être tenus, là. J'aurais besoin d'explications parce que je voudrais m'assurer que, vous, votre position que vous défendez, c'est bel et bien qu'on maintienne la responsabilité légale des municipalités de payer s'ils sont propriétaires... Si c'est une clôture mitoyenne, habituellement c'est les deux qui paient, à la fois la... Si c'est une clôture mitoyenne qui sépare deux terres agricoles, les deux cultivateurs doivent partager le coût de la réparation ou le coût d'entretien de la clôture. Dans le cas où il y a une partie qui appartient à la municipalité, bien c'est normal que ce soit la municipalité.

M. Pellerin (Laurent): Ça m'apparaît très, très clair. Dans votre exemple particulier que vous donniez, c'est un peu surprenant que votre directeur général de municipalité ait été inspecteur agraire aussi. En tout cas, il ne devait pas être bon pour juger les cas de la clôture mitoyenne de la municipalité, il est pour le moins en conflit d'intérêts.

M. Pinard: Excusez-moi, vous avez raison, il était inspecteur municipal. O.K.

M. Pellerin (Laurent): Il n'aurait sûrement pas été capable d'aller sur un cas comme ça.

M. Pinard: Ah! sûrement pas.

M. Pellerin (Laurent): Pour moi, il n'aurait pas été bien reçu.

M. Pinard: D'autant plus qu'il était ingénieur civil, alors.

M. Pellerin (Laurent): Il avait deux défauts majeurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pellerin (Laurent): Pour le cas, pour le cas.

M. Pinard: J'en conviens.

M. Pellerin (Laurent): Pour le cas. Plus sérieusement, sur le fond de votre question, actuellement, oui, les municipalités...

M. Pinard: Sont tenues.

M. Pellerin (Laurent): ...elles sont tenues d'entretenir fossés et clôtures chaque côté des chemins publics, comme la voirie provinciale sur le bord des autoroutes. Ça, ce n'est pas nouveau, c'est la règle générale. Notre compréhension encore, c'est que, si l'article 741, 742 n'est pas...

Une voix: 744...

M. Pellerin (Laurent): 744 n'est pas...

M. Pinard: 743 et 744.

M. Pellerin (Laurent): ...ne sont pas reconduites, ça pourrait ? notre compréhension ? ça pourrait soustraire les municipalités de cette obligation-là, et on trouve que ce n'est pas une réécriture, ça, c'est un changement, et ce n'est pas... Vous comprenez que, si la municipalité a décidé de passer le chemin là, ce n'est pas le producteur de chaque bord qui a décidé ça, là...

M. Pinard: Non, non.

M. Pellerin (Laurent): ...donc, ce n'est pas à lui seul à faire les frais de ça, là. Si la municipalité décide d'élargir ou de changer les clôtures, ce n'est pas ce producteur-là qui décide ça tout seul, c'est la municipalité qui décide. Alors, ce n'est pas au producteur tout seul ou le voisin de ce réseau routier là qui doit supporter toujours la totalité des charges.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, l'enveloppe de temps de l'opposition est épuisée. Alors, M. Pellerin, Me Lord, je vous remercie de votre participation à nos travaux. Bon retour.

Et, sur ce, je vais suspendre les travaux pour une période d'une dizaine de minutes, pour permettre une pause aux parlementaires.

(Suspension de la séance à 15 h 44)

 

(Reprise à 16 h 1)

Le Président (M. Ouimet): Alors, la commission reprend ses travaux. Je vois que les représentants de la Corporation des officiers municipaux agréés du Québec ont déjà pris place. Mme Suzanne McKercher ? elle est là ? Me Paul Rathé, Me Érick Parent et Me Yvon Denault, je vous souhaite la bienvenue. Alors, je cède la parole à Mme McKercher pour une présentation de 20 minutes. Bienvenue.

Corporation des officiers municipaux
agréés du Québec (COMAQ)

Mme McKercher (Suzanne): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés membres de la commission. Au nom de la COMAQ, nous tenons à vous remercier pour cette opportunité de présenter nos commentaires sur le projet de loi n° 62.

Comme vous le savez, la Corporation des officiers municipaux agréés du Québec, mieux connue sous l'acronyme de COMAQ, existe depuis 1968. Elle regroupe près de 550 membres qui occupent tous des fonctions reliées à l'administration générale des municipalités, soit au niveau de la direction générale, des finances, du greffe et des ressources humaines.

Parmi les objectifs que nous poursuivons se retrouve notamment celui de contribuer à l'évolution de la législation municipale. Vous comprendrez que c'est donc avec un vif intérêt que nous avons examiné le projet de loi n° 62 sur les compétences municipales. Comme vous le constaterez, nos motifs de satisfaction sont nombreux. Cependant, comme tout projet de loi est perfectible, nous avons quelques suggestions et recommandations à vous soumettre.

Puisque nous représentons les personnes qui seront chargées d'appliquer ce projet de loi dans le quotidien, nos recommandations sont empreintes de cette vision terrain qui caractérise le travail de nos membres. Aussi, elles portent tantôt sur le fond du projet, tantôt sur sa forme. Elles visent à assurer une meilleure cohérence entre l'esprit de la loi et les diverses dispositions qu'elle contient. C'est pourquoi l'essence de nos suggestions consiste à proposer le regroupement d'un ensemble de dispositions qui nous apparaissent comme pouvant menacer la flexibilité et la simplicité recherchées dans le texte de loi.

En premier lieu et de façon générale, il importe de préciser que nous saluons les objectifs poursuivis par le législateur avec ce projet de loi. Nous sommes d'avis que le fait d'accroître la marge de manoeuvre des municipalités dans l'exercice de leurs compétences sera bénéfique non seulement au monde municipal, mais en bout de ligne à l'ensemble de la société québécoise. En effet, une telle initiative laissera davantage de place à l'innovation et permettra ainsi aux municipalités de se doter d'une couleur qui leur est propre en plus de confirmer leurs façons de faire à plusieurs égards.

Soulignons également le style simplifié de rédaction législative adopté dans le projet de loi n° 62. Il s'agit là d'une première qui, souhaitons-le, marquera le début d'une ère nouvelle pour les prochaines étapes de la révision des lois municipales. Vous savez, jadis, un philosophe grec disait que parler beaucoup et parler à propos ne sont pas la même chose. M. le Président, nous sommes heureux de constater la volonté du législateur d'appliquer ce précepte ici. C'est pourquoi la description des compétences des municipalités en termes généraux et simples, plutôt que dans d'interminables énumérations, nous apparaît une excellente chose. Il en va de même pour la modernisation du vocabulaire qui est utilisé dans le texte de loi.

Tout cela fait en sorte que nous nous retrouvons devant un texte de loi qui est appelé à être beaucoup plus performant. D'emblée, dans son article 2, ce projet de loi vient changer les façons de faire. Le fait d'y édicter que la loi ne devra être interprétée de façon littérale contribuera certes à davantage d'efficacité. Cela est d'autant plus important que, dans le quotidien, dans l'application sur le terrain, ceux et celles qui ont à travailler avec les textes de loi ne sont pas tous juristes. Il importe donc de garder cela à l'esprit pour faire en sorte que ces personnes puissent travailler avec un outil performant.

M. le Président, permettez-moi maintenant d'aborder quelques dimensions plus spécifiques du projet de loi qui mériteraient d'être bonifiées.

D'abord, l'esprit de ce projet de loi repose en grande partie sur l'article 4; cet article contient en quelque sorte un énoncé de la mission des municipalités. La description des compétences qu'il contient est faite en termes généraux plutôt qu'en termes spécifiques. Cela contribuera sans contredit à doter les municipalités de la flexibilité qu'elles recherchent pour accroître l'efficacité de leur gestion. Concrètement, nous sommes d'avis que la philosophie se dégageant de l'article 4 devrait contribuer à réduire de façon significative le nombre de cas où les municipalités s'abstenaient d'intervenir ou ne le faisaient qu'avec réticence parce que le pouvoir qu'elles recherchaient n'était pas clairement défini par une loi habilitante.

En outre, rappelons que cette redéfinition des compétences du palier municipal vient placer les municipalités québécoises au même niveau que leurs consoeurs d'autres provinces canadiennes. En effet, au cours des dernières années, certains gouvernements provinciaux ont adopté une législation similaire, marquant par le fait même leur reconnaissance de la capacité des municipalités à gouverner.

Ceci étant dit, M. le Président, notre enthousiasme vacille lorsque l'on constate la présence d'un certain nombre de dispositions à caractère spécifique qui de notre avis pourraient être interprétées par les tribunaux comme autant de restrictions à la portée générale recherchée dans les articles 4 et 5.

J'illustre mes propos à l'aide de quelques exemples. L'article 4 reconnaît la compétence des municipalités. L'article 5 leur accorde un pouvoir réglementaire général. Cependant, on constate que le chapitre 2 du projet de loi vient restreindre ce pouvoir et dénaturer la portée générale recherchée dans le premier chapitre, notamment aux articles 4 et 5.

Permettez-moi de citer un exemple de ce que j'avance: l'article 7. On y édicte que, et je cite: «Toute municipalité locale peut réglementer les services culturels, récréatifs ou communautaires qu'elle offre et l'utilisation de ses parcs.» Fin de la citation. En termes concrets, il appert qu'on semble, à l'article 7, venir mettre en doute la portée générale des articles 4 et 5. Puisque ces derniers confèrent aux municipalités la compétence en matière de culture ainsi qu'un pouvoir réglementaire, pourquoi revenir sur le sujet à l'article 7? Cela ne risque-t-il pas de faire naître des problèmes d'interprétation que nous pourrions dès maintenant prévenir? Autrement dit, de façon plus globale, nous craignons que de tels excès de précision ne viennent semer la confusion lorsque viendra le temps d'interpréter la loi.

Nous sommes donc d'avis qu'il aurait peut-être été préférable que le législateur édicte les situations dans lesquelles il désire restreindre le pouvoir général qui est accordé aux municipalités. Ceci est important parce qu'en fait, M. le Président, on semble vouloir nous dire: On reconnaît vos compétences et vos pouvoirs, mais, chassez le naturel et sans doute il revient au galop, on vient baliser le tout ailleurs dans le texte de loi. À notre avis, une telle approche risque fortement d'être interprétée comme autant de restrictions au pouvoir et à la marge de manoeuvre que l'on tente d'octroyer. C'est pourquoi nous pensons qu'il serait nécessaire de préserver la portée générale des articles 4 et 5 du projet de loi. Pour ce faire, il serait souhaitable d'éviter de la restreindre par une série de précisions contenues dans d'autres articles de la loi.

Toujours suivant le même raisonnement, M. le Président, encore quelques remarques concernant l'approche contradictoire qui semble émaner de certaines dispositions du projet de loi. Par exemple, s'il y a lieu de préciser le pouvoir de réglementer en matière de culture et de loisirs, pourquoi n'en irait-il pas de même lorsqu'il s'agit de réglementer l'utilisation de l'eau ou du système d'égout de la ville? En d'autres termes, pourquoi, dans certains articles ou pour certaines compétences, on laisse libre cours aux municipalités quant aux façons de les exercer, alors que, dans d'autres cas, on sent le besoin de les préciser davantage?

Puisqu'il est reconnu que le législateur ne parle pas pour ne rien dire, ne serait-il pas préférable d'éviter le risque que l'assurance acquise dans la volonté de préciser certaines compétences ne vienne susciter des doutes dans toutes les autres? Il nous apparaît souhaitable d'éluder ce genre de problème en évitant la tentation de restreindre la portée générale des articles 4 et 5 par une série de précisions non essentielles dispersées çà et là dans le projet de loi.

n(16 h 10)n

Dans le même ordre d'idées, en ce qui a trait aux pouvoirs réglementaires, permettez-moi de rappeler ce que le ministre affirmait lors de l'adoption du principe du projet de loi, et je cite: «La voie réglementaire est réservée à l'adoption de normes visant à régir [les comportements] des personnes ou à l'imposition d'une taxe. Il ne sera donc plus nécessaire d'adopter un règlement pour décider [d'ouvrir] une bibliothèque ou d'ouvrir une rue; une résolution suffira.» Fin de la citation. Si telle est la ferme volonté du législateur, pourquoi risquer de semer la confusion en parsemant, à plusieurs endroits dans la loi, diverses dispositions traitant des pouvoirs réglementaires? Afin de préserver le fondement de l'objectif visé par le législateur, n'aurait-il pas été préférable que seul le chapitre I établisse le pouvoir réglementaire des municipalités?

Également, concernant l'article 5, une suggestion relative à son libellé. On y précise que la municipalité peut adopter un règlement «lorsqu'elle veut rendre obligatoire une règle de caractère général et impersonnel». Or, le libellé de cette disposition, et précisément les termes «règle de caractère général et impersonnel», nous apparaissent difficiles à cerner. Nous nous demandons s'il n'aurait pas été plus convivial de formuler le tout autrement en édictant tout simplement comme: «La municipalité peut adopter un règlement à l'égard des situations où elle veut régir la conduite des individus», ou encore, pour paraphraser M. le ministre: «lorsqu'elle veut régir le comportement des personnes ou imposer une taxe».

Ceci étant dit, M. le Président, je pense que nous pouvons nous questionner sur la pertinence de maintenir encore aujourd'hui les règlements. Les mesures non réglementaires, si elles sont publicisées adéquatement, lorsque nécessaire, peuvent avoir le même effet et sont beaucoup plus faciles à administrer. Mais c'est juste une petite parenthèse.

Maintenant, quelques mots sur les dispositions concernant le domaine public des municipalités. Puisque nous traitons de biens du domaine public, il nous semble justifié qu'une loi habilitante permette à une municipalité de régir l'usage qui peut en être fait par des tiers. Cependant, encore une fois, plutôt que d'aborder cette question de façon globale, dans l'article 4, le législateur entrait dans une panoplie de dispositions. Par exemple, à l'article 7, on traite de l'utilisation des parcs; à l'article 66, de l'usage d'une voie publique; à l'article 78, du droit de régir les stationnements, et j'en passe.

Il nous semble qu'il aurait été plus compatible avec le principe de base du projet de loi d'édicter un seul article général permettant aux municipalités de régir l'utilisation des biens qui font partie de leur domaine public. Si l'article 4 contenait un paragraphe conférant à une municipalité le pouvoir général de réglementer l'usage du domaine public qui est sous son contrôle, aurait-on vraiment besoin de conserver une telle série d'articles qui ciblent en détail chacun des biens publics pris individuellement?

En outre, on peut se demander si le fait que certains biens publics fassent l'objet de dispositions expresses dans le projet de loi ne vient pas exclure les autres qui n'y apparaissent pas, tel que l'affichage, par exemple. Dit autrement, ne risque-t-on pas de réduire la portée de l'article 4 aux seuls objets traités spécifiquement dans le projet de loi?

De surcroît, nous craignons, M. le Président, que cette approche adoptée par le législateur ne favorise le maintien de vieilles habitudes et ne vienne par conséquent miner les retombées attendues du projet de loi. Je pense qu'il faut en effet reconnaître que le réflexe de toujours chercher un pouvoir habilitant spécifique ne pourra pas disparaître facilement. Il demeurera toujours tentant, dès que le moindre doute est soulevé, de rechercher l'assurance que confère l'octroi d'un pouvoir épousant les contours d'un problème à régler. C'est pourquoi nous suggérons d'éloigner de telles tentations et de simplifier tout ce qui traite des biens publics des municipalités en incluant, à l'article 4, le paragraphe suivant:

«La municipalité peut réglementer l'usage du domaine public qui est sous son contrôle.»

Dans le même esprit, lorsque l'on regarde d'autres articles du projet de loi, on peut se demander pourquoi l'octroi de certaines compétences au pouvoir est réparti dans plusieurs dispositions plutôt que dans une seule et unique dont la portée serait plus générale, comme le veut l'esprit de la loi.

On note en effet que différentes dispositions accordent à la municipalité le droit de confier à un tiers la gestion et l'exploitation de certains services. Par exemple, on retrouve à l'article 61 le droit de confier le service d'incendie à une personne désignée par la municipalité; aux articles 92 et 93, on retrouve des dispositions similaires en matière de promotion industrielle, commerciale ou touristique, d'activités culturelles et de protection de l'environnement; il en va de même aux articles 10 et 37, où l'on traite du droit d'exploitation; et que dire du droit de subvention, qui se retrouve dans 11 articles différents du projet de loi?

M. le Président, nous sommes devant un projet de loi qui va au coeur des compétences municipales et qui vise à asseoir le pouvoir des institutions municipales sur des bases rationnelles et cohérentes. Ne serait-il donc pas préférable que le législateur confère une seule compétence générale en y apportant les habilitations particulières et les restrictions qu'il jugera nécessaires?

En l'occurrence, il nous apparaîtrait plus simple et logique de regrouper sous quelques grandes thèmes les articles qui traitent d'un même sujet et qui, à l'heure actuelle, se retrouvent dispersés dans le projet de loi. Ces grands thèmes pourraient traiter... ? il s'agit là d'une suggestion que nous soumettons à la discrétion du législateur ? donc ces grands thèmes, outre les compétences, pourraient traiter les pouvoirs d'intervention sur un domaine public, de délégation, d'intervention sur la propriété privée, d'extraterritorialité et de subvention.

Enfin, et avant de conclure, permettez-moi une remarque sur l'article 39. On y prévoit la nomination d'une personne chargée de régler les problèmes reliés aux mésententes relatives aux clôtures mitoyennes, aux fossés mitoyens et aux découverts. M. le Président, même si, comme le veut l'adage, l'habit ne fait pas le moine, on peut se questionner sur l'opportunité pour une municipalité de confier à une personne qu'elle désigne la responsabilité d'exercer les pouvoirs de médiation et d'arbitrage prévus aux articles 40 et suivants. Ne serait-il pas préférable de réserver cette fonction à une personne occupant un poste de fonctionnaire désigné en vertu de la Loi sur les cités et villes? Nous croyons que cela serait souhaitable dans la mesure où ces derniers ont non seulement les compétences, mais également l'autorité et l'impartialité requises pour mener à bien ces tâches.

En conclusion, M. le Président, je pense qu'il importe de réitérer que nous apprécions l'effort du législateur pour livrer un texte de loi simplifié, donnant plus de flexibilité aux municipalités. À la lumière de notre analyse, nous estimons cependant qu'un peu de polissage serait nécessaire afin d'assurer que, dans l'application du projet de loi, sa forme soit en harmonie avec sa finalité.

Comme nous l'avons souligné, afin de faciliter la compréhension et l'interprétation du projet de loi, plusieurs dispositions contenues dans les articles 7 à 97 pourraient soit être regroupées ou encore être retirées. Une certaine épuration dans le nombre de dispositions permettrait de réduire considérablement le volume du projet de loi, tout en le rendant plus compréhensible et facile à appliquer. En outre, rappelons que les compétences ainsi que les pouvoirs réglementaires devraient être concentrés dans le chapitre I. Cela permettrait d'assurer plus de cohérence avec l'esprit du projet de loi et d'éviter les éparpillements inutiles, qui à notre avis risquent de miner l'efficacité recherchée lors de son application.

M. le Président, malgré ces remarques et, vous l'aurez noté, même si notre idéal aurait été d'avoir un projet de loi dont l'essence tienne en quelques pages, nos motifs de satisfaction quant au fond demeurent tout de même importants. Nous souhaitons donc vivement que la philosophie qui imprègne le projet de loi n° 62 ? le livret V de la révision des lois municipales ? guide aussi la refonte imminente des autres lois sectorielles, qui, rappelons-le, est toujours fort attendue.

Je tiens à remercier le ministère pour la démarche de consultation qui a été effectuée tout au long de ce processus. Enfin, soyez assurés que la COMAQ entend poursuivre sa collaboration dans ce dossier afin de garantir que l'évolution de la législation municipale se poursuive dans le meilleur intérêt de tous les citoyens et citoyennes du Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): À moi de vous remercier, Mme McKercher, pour cette présentation. Je vais maintenant ouvrir la période d'échange en cédant la parole au ministre des Affaires municipales, du Sport et du loisir. M. le ministre.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, merci beaucoup de votre venue à cette commission, de votre collaboration du passé, présente et à venir; on peut toujours compter sur vous. Je vais commencer peut-être à partir des derniers propos que vous avez tenus, soit l'intérêt des citoyens et des citoyennes, que nous avons à coeur, tous et toutes, et peut-être que ça nous permettrait de commenter le choix éditorial un peu qui est fait.

À mon avis, on peut écrire de différentes façons bien des choses et on peut «polisser», comme vous le disiez, jusqu'au point de ne pas reconnaître ce qu'on polissait au début. La simplification ne doit pas faire perdre de vue quel est l'objet néanmoins qu'on vise. Et, si une loi peut être à ce point simplifiée qu'elle nous permet, à ceux qui sont les experts, de savoir ce qu'on à faire, elle doit quand même être compréhensible pour les citoyens. Et je dirais que c'est peut-être ce qui fait une petite différence à l'égard de la présentation que vous faites et du projet qui est sur la table. Il faut que le monde comprenne de quoi on parle.

n(16 h 20)n

Il va falloir... On peut bien regrouper par thème ou regrouper par mode d'intervention. Vous, vous favorisez plus un regroupement par mode d'intervention. Je crois que, pour les experts qui oeuvrent avec une loi tous les jours, ça peut être une des voies envisageables. Je pense que ce n'est pas quelque chose qui est à côté de la track complètement.

Mais, imaginez-vous que vous êtes un citoyen, que vous ne faites pas affaire dans le monde municipal, vous ne connaissez pas ça, vous voulez juste savoir c'est quoi, le pouvoir dans les parcs. Hein, un parent, ses enfants, je ne sais pas trop: C'est quoi, le pouvoir de la ville dans les parcs? Là, ils vont-u y aller par mode d'intervention, parce qu'ils cherchent le parc? C'est quoi, le... Alors, c'est un choix très différent, et la question qu'on peut se poser, c'est: Est-ce qu'il est mauvais, ce choix éditorial là?

Moi, honnêtement, je vous le dis bien franchement, lorsqu'on regarde la facture, j'aime autant qu'il y ait... et je ne pense pas qu'il y en ait, je reviendrai sur les article 4, 5 et 7, qui a formé le coeur de votre interprétation tantôt, mais sur l'ensemble je ne pense pas qu'il y ait de redondance. Bien que simplifié par rapport à ce qui était avant, néanmoins, il comporte un certain nombre d'éléments de clarification pour qu'on comprenne de quoi on parle.

Si je reprenais votre image de polissage, tu sais, je peux bien décaper une tablette puis la polir, puis la polir, puis la décaper pour qu'elle soit belle, belle, belle, mais, à un moment donné, à force de la polir, si elle est tellement mince que, le premier livre que je mets dessus, la tablette tombe, je ne suis pas sûr que j'ai fait ce qu'il fallait que je fasse. Il faut que ça reste utile jusqu'à un certain point. J'exagère un peu, je cherchais une image pour reprendre, m'accrocher à votre polissage de tantôt. Mais, vous voyez, l'idée finalement, c'est de simplifier pour faire oeuvre utile aussi pour ceux qui ne sont pas des experts.

Et je pense que, ça, c'est aussi le coeur de toute cette démarche-là. Parce qu'il y a des lois puis des rédactions d'articles à la tonne et à la tonne, et même les experts dans le fond étaient capables de se débrouiller; c'est les autres, qui ne le sont pas, qui, eux autres, on aurait besoin de peut-être leur expliquer un peu. Et donc je pense que ça correspond à ce qu'on cherchait à faire plutôt qu'être le contraire de ce qu'on cherchait à faire. Enfin, voilà ma justification; vous n'êtes pas obligés de la partager.

Je voudrais attirer votre attention sur les articles 4, 5 et 7. On va prendre 7 comme étant le cas exemplaire de tous les autres pouvoirs qui viennent ailleurs, par matière, parce qu'il y en a effectivement ailleurs, parce qu'on a... on y va par des définitions par matière, donc par sujet, je dirais. Donc, on prendrait 7 à cet égard-là.

Alors, prenons l'article 4. Alors, l'article 4, bien on parle des compétences, et ça se termine par: «Elle peut adopter toute mesure non réglementaire dans les domaines prévus au premier alinéa ainsi qu'en matière de services de garde à l'enfance.» Donc, ma compréhension à moi, que je vous propose pour l'article 4, c'est la possibilité d'agir par résolution, entre autres, non par règlement, dans ces matières-là, donc du non réglementaire.

J'arrive à l'article 5. Quand est-ce que j'adopte un règlement? Ce n'est pas un pouvoir nouveau, là, c'est une explication: «Dans le cadre de la présente loi et dans la mesure qui y est prévue, une municipalité locale adopte un règlement lorsqu'elle veut rendre obligatoire une règle de caractère général et impersonnel.» Bon. Dans quel cas? Bien, dans la mesure qui est prévue dans la loi. Elle prévoit où? À l'article 7. À l'article 7, elle nous dit qu'on «peut réglementer les services culturels, récréatifs ou communautaires qu'elle offre et l'utilisation de ses parcs».

Si je lis 4, 5 et 7, à mon avis, ils ne sont pas en conflit, ils se complètent. Dites-moi pourquoi j'ai tort.

Mme McKercher (Suzanne): C'est... M. le Président.

Le Président (M. Ouimet): Oui, Mme McKercher.

Mme McKercher (Suzanne): Excusez. Ce qu'on disait, c'est qu'on donne une compétence générale. On dit que, bon, en outre les compétences... on a compétence dans culture, loisirs, activités communautaires et les parcs, et par la suite, dans un processus d'énumération, on revient, à toutes fins pratiques, redire que, oui, on peut avoir compétence dans les services culturels, récréatifs ou communautaires.

Bon, pour cet exemple-là, ça colle quand même relativement bien avec le n° 1. Mais dans d'autres cas, si vous permettez, si on va comme au développement économique local, où là on va plutôt avoir une énumération qui porte sur des points spécifiques, alors, dans ce sens-là, c'est qu'on donne une compétence, on dit à la municipalité: Bon, dans ce champ de compétence là, vous pouvez agir, on reconnaît que vous avez compétence là-dedans, sauf qu'un tout petit peu plus loin dans le projet de loi, on vient, à toutes fins pratiques, restreindre l'application, là, de cette compétence générale là.

M. Denault (Yvon): Si vous permettez, M. le ministre. Ce n'est pas tellement qu'ils sont en contradiction, ils ne se contredisent pas, ils se répètent, à notre point de vue. Parce que, quand on dit, à 4, que je peux réglementer en matière de loisirs, et si je combine 4 et 6... 4 et 5, et là, quand j'arrive à l'article 7, je dis en fait la même chose.

Et ce qu'il y a de problématique là-dedans, c'est que vous savez que, malgré l'impulsion que la Cour suprême a donnée ces dernières années d'interpréter plus généreusement les pouvoirs municipaux, il se trouve encore beaucoup de juges qui ont la vieille habitude de regarder nos règlements avec une loupe et de chercher la petite bête ou de chercher l'absence de pouvoir. Et ce qui nous inquiète, c'est qu'on soit porté à se dire: Mais, finalement, 4 et 5, ça sert-u vraiment à quelque chose? tu sais, ça aurait pu être dans le préambule.

Parce que, si on sent le besoin à chaque chapitre de répéter que je peux réglementer dans les domaines où j'ai compétence, on se répète. Je ne dis pas qu'on se contredit, mais on se répète. Et c'est toujours inquiétant d'avoir des articles qui se répètent, parce que là on cherche la petite différence, on cherche la raison ou on cherche la justification.

Et, dans d'autres cas, bien là on y va carrément de façon... Je pense que c'est l'article 62, là évidemment on va plus loin, on dit un certain nombre de choses qu'on aurait pu penser être incluses dans la compétence générale. Ça ne nuit pas, mais la question est: Est-ce que vraiment c'est compatible ? si je prends l'exemple de l'article 66; est-ce que c'est compatible ? avec l'esprit que l'on retrouve dans 4 et 5?

Et là, est-ce qu'il n'y a pas une crainte que quelqu'un qui veut contester va faire une analyse exégétique de ces textes-là et va inviter, à tout le moins, le juge à dire: Bien, voyez, le législateur, qui est censé ne pas parler pour rien dire, s'il a senti le besoin d'apporter des précisions, c'est donc que 4 et 5 n'auraient peut-être pas la portée aussi large qu'on serait porté à le croire quand on les lit. C'est plutôt ça, notre inquiétude, avec ces articles-là.

M. Fournier: On va commencer par 5. Est-ce que j'ai compris tantôt que ? j'ai probablement mal compris ? vous souhaitiez qu'il n'y ait pas de règlement mais que des résolutions?

M. Denault (Yvon): Oui. Mais, ça, c'est un aparté.

M. Fournier: Non, mais on va commencer par celui-là.

Mme McKercher (Suzanne): Non, non, M. le Président. Non, je n'ai pas dit... mais il y a sûrement des endroits où on pourrait... Ce que j'ai dit, c'est qu'on pourrait changer la voie réglementaire, oui, par résolution, en autant qu'on y apporte la même publicité qu'on fait avec les règlements. Sauf que c'est beaucoup plus simple qu'une résolution, mais en la publicisant, de la même façon qu'on fait avec un règlement, effectivement.

M. Fournier: Juste pour que je me comprenne comme il faut, alors là vous me dites que... bien, la proposition que vous feriez, c'est qu'il n'y ait pas... ou on pourrait dire des résolutions sans publication et des règlements qui sont des résolutions publiées?

Mme McKercher (Suzanne): Voilà.

M. Fournier: C'est ce que vous proposeriez?

Mme McKercher (Suzanne): Ça pourrait...

M. Fournier: Quelque chose comme ça. Quels sont les éléments que vous voulez donc faire disparaître, dans votre nouvelle façon de voir, entre la résolution et le règlement? Quelles sont les complications que vous voulez voir disparaître?

M. Denault (Yvon): ...M. le ministre. On sait qu'il y a des municipalités qui font régulièrement des petites assemblées de cinq minutes, le matin ou en fin d'après-midi, parce qu'on a oublié le satané avis de motion. Et en pratique, l'avis de motion ne sert plus à rien, je pense, aujourd'hui. D'ailleurs, je pense que c'est dans les cartons du ministère depuis un certain temps de le faire disparaître. Parce que, souvent, ça fait tellement longtemps qu'il est donné, cet avis de motion là, qu'on ne s'en souvient même plus.

Tellement qu'occasionnellement, d'ailleurs, les gens se posent la question: Un avis de motion donné il y a deux ans est-il encore bon, puisqu'il n'y a pas de limite dans la loi? Et, dans l'hypothèse où il le serait, ça veut dire qu'il ne sert plus du tout. Parce que, quand on informe les gens à partir d'un avis qu'on a donné il y a six mois, il y a un an, il y a deux ans, ce n'est plus utile. Alors, ça force les gens à faire des démarches inutiles.

M. Fournier: Je vous suis, mais là, quand ça fait... L'exemple de deux ans, ça va assez bien. Mais ça se peut qu'il y ait des cartons qui se font ? moi, ils ne me les montrent pas toujours à moi ? puis quelqu'un d'autre les verra un jour, j'imagine.

Mais, honnêtement, les avis de motion, moi, je considérais ça utile. Je pensais ? là vous m'apprenez quelque chose ? j'en jasais avec nos gens, je croyais que l'avis de motion permettait d'alerter les citoyens. Ah, ça, c'est d'autre chose. S'il y a cinq personnes, ça, c'est d'autre chose, là. La participation citoyenne à une activité, ça, c'est d'autre chose. Ce n'est pas parce qu'il y en a peu, à un moment donné, qu'on va oublier les démarches qu'on fait pour aviser la population d'une décision à venir qui serait importante pour qu'il y ait un débat qui se place.

Donc, ce que vous me dites, c'est qu'aujourd'hui les avis de motion sont inutiles pour aviser la population d'un débat qui se soulève, et que finalement on devrait juste faire résolution et rendre la chose d'une publicité plus grande?

M. Denault (Yvon): Il y a des sujets beaucoup plus importants qui sont... auxquels s'attachent les... qui sont discutés au conseil municipal, qui ne sont pas traités par règlement puis qui n'ont donc pas fait l'objet d'avis de motion. On peut...

M. Fournier: Oui, mais là, vous répondez par le contraire, là, vous.

M. Denault (Yvon): Non, mais tout ça pour vous dire que, si c'était ça, le but, il faudrait donner des avis de motion pour bien d'autre chose: avis de motion qu'on va discuter de la prochaine convention collective, qui va coûter x millions; ou avis de motion qu'on va construire un nouvel hôtel de ville payable à même le fonds général, ou... Il y a des tas de sujets importants qui viennent au conseil et qui n'ont pas fait l'objet d'un avis de motion de la même façon qu'on le fait pour un règlement.n(16 h 30)n

Mais, comme je vous dis, je cherche pourquoi, dans le temps... Il y a peut-être eu une époque où, quand un avis de motion était donné, bien, sur le pas de l'église, tout le monde en parlait, puis là, à la prochaine séance du conseil, ils vont parler, ils vont adopter un règlement pour telle, telle chose. Mais, aujourd'hui, les gens ne voient pas les avis de motion. Si vous n'êtes pas un citoyen qui va régulièrement chercher les procès-verbaux du conseil, vous ne saurez jamais qu'un avis de motion a été donné, parce que ça ne paraît pas dans les journaux et personne n'en est informé.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, je vais maintenant aller du côté de l'opposition. Et c'était Me Yvon Denault qui avait la parole, n'est-ce pas? Alors, M. le député de Blainville, à vous la parole.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter, Mme la présidente et vos collègues, la bienvenue.

Je vais essayer de bien comprendre dans le fond ce que vous suggérez, parce que, d'une part, vous dites, et vous le dites clairement, là, que... ? comment vous dites ça? ? que les motifs de satisfaction sont nombreux. Mais par ailleurs, dans ce que vous proposez, il m'apparaît, mais vous me contredirez si ce n'est pas le cas, il m'apparaît que, si on écoutait ce que vous proposez, ce serait un changement assez important à la loi n° 62, ce serait une reconfection assez importante. Parce que, là, vous proposez deux pistes de changement, dans le fond: d'une part, d'être...

Et vous avez dit quelque chose que j'ai trouvé savoureux, je l'ai noté ici, vous avez dit que des excès de précision viennent semer la confusion. C'est assez intéressant, ça, que des excès de précision peuvent semer la confusion, et c'est ça évidemment que vous argumentez beaucoup, que dans le fond on essaie de simplifier mais que... on n'atteint pas tout à fait cet objectif-là et qu'on vient compliquer, qu'on pourrait réduire. On pourrait justement être moins précis et que ça permettrait d'atteindre mieux l'objectif.

Mais, si je me mets dans la peau du législateur, ça veut dire qu'on fait quoi exactement avec le projet de loi tel qu'il est présentement? Ça veut dire qu'il y aurait donc une assez nombreuse élimination de dispositions et d'articles de la loi. Alors, il y a ça, là-dessus, que j'aimerais vous entendre, d'une part. Et d'autre part, bien, l'autre piste que vous suggérez, c'est de regrouper des dispositions. Mais, là aussi, quand on regarde ça, c'est un assez bon bricolage, là, dans la loi telle qu'elle est présentée actuellement.

Alors, je me dis, oui, vous émettez des commentaires de satisfaction, mais en même temps ce que vous proposez, ce sont des changements assez importants. Alors, moi, j'aimerais ça peut-être vous réentendre plus en détail là-dessus.

Le Président (M. Ouimet): Mme McKercher.

Mme McKercher (Suzanne): M. le Président, ce qu'on vient dire, c'est qu'en début de loi, dans les articles 4 et 5, on définit les différents champs de compétence des municipalités. On vous dit... Un des champs de compétence: «la culture, les loisirs, les activités communautaires et les parcs». Alors ça, c'est le champ de compétence dans lequel la municipalité peut intervenir.

Un tout petit peu plus loin, on reprend la façon de faire qu'on a actuellement, là, dans la Loi sur les cités et villes, c'est qu'on va par énumération. C'est le réflexe actuellement de nos gens qui sont sur le terrain, qui travaillent avec la Loi sur les cités et villes: si, nommément, la compétence n'est pas inscrite noir sur blanc, on ne peut pas le faire. Si ce n'est pas là... Alors, c'est une loi restrictive, dans le sens que, si ce n'est pas nommément inscrit comme tel, on ne peut pas agir, là, dans ce champ, dans cet élément-là.

Alors, ce qu'on vient nous dire, et là on part avec un grand principe, une philosophie qui est totalement, là, différente de ce qu'on a connu jusqu'à maintenant, où on vient nous dire: Maintenant, vous avez compétence; dans ce champ d'activité là, vous avez compétence. Alors, on se dit: Bon, alors, on a compétence. Mais par après on reprend le même libellé que dans la loi qu'on a actuellement en faisant une certaine énumération. Donc, on reprend un petit peu ce qu'on avait avant.

Alors, on a comme deux vitesses: on a notre champ général, globalement, puis on nous dit: Bon, oui, vous pouvez aller sur culture, loisirs et les activités communautaires, mais un tout petit peu plus loin, bien, on vient nous restreindre encore avec une énumération comme on retrouvait actuellement, là, dans la Loi sur les cités et villes. Alors, il y a comme un petit quelque chose, là, qu'on ne va peut-être pas jusqu'au bout de la philosophie de départ, de donner pleine compétence, où, là, la municipalité pourrait, à toutes fins pratiques, occuper pleinement son champ sans se demander si, oui ou non, elle peut. Ou encore, au niveau du développement social, un autre exemple, où on dit: Bien, là, en termes de développement... pas social, mais, en termes de développement économique local, ça peut être un centre des congrès, de foires, ça peut être... à ce moment-là, on dit: Bien, là, si c'est autre chose, mais c'est quand même... on comprend que c'est du développement économique local, c'est que ça va questionner.

Nous, notre intervention, aujourd'hui, au niveau de la COMAQ, c'est tout simplement pour que nos membres aient un outil qui soit facile, qui soit performant. Contrairement à ce qu'on a actuellement où, bon, on fait des recherches, on regarde si ce n'est pas spécifiquement inscrit dans la Loi sur les cités et villes ou dans le Code municipal, c'est qu'on ne peut pas aller de l'avant. Alors, il y a beaucoup de questionnements qui se posent. Là, on se dit: Bon, bien, si on a une compétence générale, mais par la suite on revient avec... Alors, le réflexe tout de suite de ne pas aller vers la compétence générale mais plutôt d'aller encore vers l'énumération, là, des différents champs où on peut intervenir. Alors, c'est là où on dit, nous... Bon, on se demande s'il n'y aurait pas lieu... On a une bonne philosophie de départ, et pourquoi ne pas maintenir cette vitesse de croisière là et tout simplement l'encadrer et donner pleine compétence, là, aux municipalités. J'aimerais passer...

Le Président (M. Ouimet): Oui, Me Rathé, je pense, hein?

Mme McKercher (Suzanne): Me Rathé, oui.

Le Président (M. Ouimet): Vous voulez ajouter.

M. Rathé (Paul): Peut-être juste pour illustrer le propos. Si on réfère à l'article 11, là, exemple, il y a une énumération qui apparaît là en termes de pouvoirs économiques. Alors, on dit, là, en introductif, là: «Toute municipalité locale peut, par règlement, régir l'exposition, le port ou la distribution d'imprimés ou d'autres objets sur une voie publique ou sur un immeuble privé.» Ce qu'on dit dans le fond, c'est que, si on a une compétence générale en matière de voirie, qu'on peut y faire des règlements, pourquoi reprendre dans le texte une énumération comme celle-là, ce qui va amener autant le rédacteur que les tribunaux à dire: On n'a utilisé que cet aspect-là? On a une mentalité aussi en termes de réglementation municipale qui est de dire: On y va de façon restrictive. Donc, ça va tout de suite nous rattraper, et on ne se confortera pas dans une compétence qu'on pourrait exercer de façon large. C'est dans ce sens-là, non pas au contraire... Je pense que le projet fait un grand pas en avant et le projet ne devrait pas être dénudé de tous ses mots. Il y a des mots qui peuvent rester là, mais je pense qu'on a peut-être une image, là, de ce qu'on tente de vous exposer en faisant en sorte peut-être qu'une relecture justement de ces articles-là viendrait dire: On peut les rattacher... l'affichage dans ce cas-ci, on pourrait le rattacher à la voie publique, parce que c'est souvent là que c'est utilisé, et de dire: C'est des mots qui sont inutiles, quant à nous, si on veut garder le principe de rédaction de la loi qui nous dit, à l'article 2 justement, que le texte ne doit pas être interprété de façon littérale. Alors, c'est ça, là, c'est le jeu qui se pose entre chacun des chapitres.

Le Président (M. Ouimet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Dans le fond, c'est comme si la philosophie, l'objectif au début, au point de départ, vous trouvez qu'il ne s'est pas rendu assez loin dans l'esprit de simplification, et ce n'est pas juste... Parce qu'au début, moi, j'avais... À vous entendre, je trouvais que c'était plus une question de forme, mais je me rends compte, au fur et à mesure que vous l'expliquez, que c'est plus qu'une question de forme, c'est-à-dire qu'à partir du moment justement où c'est plus détaillé, bien, là, il peut y avoir des conséquences sur ce qu'on essayait de faire au point de départ avec ce projet de loi, qui était non seulement de simplifier, oui, l'objectif de simplifier, mais l'objectif aussi d'une plus grande marge de manoeuvre pour les municipalités à l'intérieur des mêmes compétences. Alors, là, ce que vous nous dites, c'est que la construction, la façon qu'il est écrit, qu'il est présenté risquerait possiblement... n'étant pas allé assez loin, risquerait de faire en sorte qu'on n'atteigne pas cet objectif-là d'une plus grande marge de manoeuvre pour les municipalités. Ou est-ce que je vous mets des paroles dans la bouche, là?

Le Président (M. Ouimet): Mme McKercher.

Mme McKercher (Suzanne): M. le Président, par souci de... peut-être par crainte, on n'ira peut-être pas jusqu'au bout, parce qu'on va maintenir les mêmes réflexes, là, qu'on a développés au cours des dernières années, là, depuis bon nombre d'années. C'est toujours le réflexe d'aller voir, là, si c'est nommé. Donc, c'est ce qu'on dit. C'est tout simplement, là, pour être en mesure de mieux remplir, là, le champ de compétence sans qu'il y ait de questionnement, là, comme on connaît actuellement. Je ne sais pas, Me Rathé, si vous avez...

n(16 h 40)n

M. Rathé (Paul): Je pense que ça va être le même exercice, ça va être le même pouvoir, sauf que, dans la façon de faire, si on décide d'opter pour qu'une municipalité puisse se doter d'une couleur... Juste pour imager mon propos, qu'elle se dote d'une couleur et qu'elle fasse des choix, ça va lui permettre de le faire. Elle a actuellement des choix qu'elle peut faire au niveau de ses compétences. Ils sont écrits, ses pouvoirs, mais ils sont très, très, très restrictifs. Alors, la nouvelle approche qui est voulue est une approche beaucoup plus libérale, beaucoup plus ouverte, et c'est celle-là.

Alors, une crainte. Les articles introductifs qui viennent fixer la mission de la municipalité sont là, dans le chapitre I, puis, ensuite de ça, on reprend, dans chacune des compétences, en disant: Vous avez, pour telle compétence, un, le pouvoir, faites-le par règlement ? c'est ce qui est indiqué. Ensuite de ça, on vous dit: Si vous voulez subventionner dans ce champ de compétence là, vous le faites. Ensuite de ça, le troisième outil sera: Si vous voulez intervenir chez le voisin ou chez la municipalité voisine, on vous prévoira un critère d'extraterritorialité pour vous permettre de le faire.

Ce qu'on dit dans le fond, c'est: Les outils sont là, est-ce qu'on ne pourrait pas les regrouper pour faire une énumération aussi de tout ce qui est confié en gestion ou en exploitation? Elle est là actuellement, elle se retrouve dans le projet de loi. C'est peut-être juste de le ramener puis de le remettre pour que, si, exemple, je cherche en quoi je peux exploiter ou je peux confier la gestion par rapport à un tiers, j'aurais un outil qui me dirait: Oui, la gestion se retrouverait sous tel chapitre.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Alors, je vais du côté ministériel, cette fois-ci. M. le ministre.

M. Fournier: Oui, parce que ça me... ça va sûrement continuer de nous intéresser, même après la fin de cette commission, mais, puisque vous êtes là, pourquoi ne pas s'intéresser avec vous à ce sujet des articles 4, 5 et 7.

Alors, l'article 4, premier alinéa. La compétence qu'on considère ici, c'est la culture, les loisirs, les activités communautaires et les parcs. Ça, jusque-là, ça va, c'est le jardin, c'est la compétence qui est donnée.

Je vais aller à 7. Le pouvoir réglementaire à l'égard de cette compétence-là ne s'étend pas à l'ensemble de la compétence. On voit bien que 7 couvre des matières plus restrictives que 4.1°, puisqu'on est là, ici, dans la réglementation de services culturels, récréatifs ou communautaires qu'elle offre et l'utilisation des parcs. Donc, il n'y a pas une redondance, il y a une spécification qu'à l'égard d'une compétence générale en culture, loisirs, activités communautaires et parcs la capacité de s'exprimer par règlement est à l'égard de ce qui est prévu par 7, donc un des volets de l'ensemble de la compétence, donc pas des matières identiques mais une partie. Donc, une partie qui est par règlement, et quelle partie par règlement? Celle que définit l'article 5, c'est-à-dire donc la règle de caractère général et impersonnel qui s'applique pour cela.

Pour le reste du champ culturel, loisirs, activités communautaires et parcs, qui n'est pas prévu à 7, j'aurais tendance à croire que, dans ce cas-là, c'est la résolution qui va être utilisée. C'est ce que dit, peut-être au mauvais endroit ? c'est ce qu'on discutait ici ? la finale de 4, qui pourrait peut-être être un 5.1 plutôt qu'à la fin de 4. Comme ça, 4 serait la compétence générale, c'est le gros jardin. 5, on vient dire comment on peut s'exprimer à l'égard de ce jardin-là, par règlement ou par résolution, donc réglementaire ou non réglementaire. Et 7 vient préciser: ce qui est réglementaire, c'est une partie de cette grande compétence là à l'égard, ici, de ce qu'on dit, les services et l'utilisation des parcs.

Présenté ainsi, est-ce que nous nous comprenons?

Mme McKercher (Suzanne): Je passerai la parole à Me Rathé.

M. Rathé (Paul): Je serais tenté de vous dire oui.

Mme McKercher (Suzanne): Oui.

M. Rathé (Paul): C'est qu'à ce moment-là on éviterait la redondance entre l'article 5 qui vient d'émettre un principe en disant qu'on y va pour faire une règle impersonnelle et à caractère général, qui est le règlement, et on vient enlever cet effet-là à 7. Et je comprends bien que, quand on nous dit, à 7, qu'on peut réglementer les services, on vient limiter en fait à l'intérieur du champ de compétence. Mais on dit dans le fond: Si on veut le faire, dans le cas des services, qu'on le fasse par règlement. Mais je pense que ce que vous proposez, d'aller déjà marquer l'outil, dans le fond qui est le processus d'adoption soit réglementaire ou le moyen non réglementaire, d'aller le mettre en 5, viendrait peut-être éviter dans tout le texte, partout, de venir répéter l'utilisation du règlement ou pas. Puis ça viendrait camper, dans l'article... Dans le chapitre introductif, on aurait l'ensemble de la norme qui serait là.

M. Fournier: J'ai l'impression qu'on ne s'est pas compris, puis, là, je ne vous comprends pas. C'est parce que ce que j'essayais de dire, c'est... J'essayais de justifier ce qui était là et donc pas de le changer, sauf la finale de 4 qui... La finale de 4 qui vient parler du non-réglementaire, bien, à mon avis, on devrait, dans l'ordre hiérarchique, on devrait peut-être commencer par dire ce qui est l'ordre réglementaire et ensuite ce qui est non réglementaire; autrement dit, le règlement en premier, la résolution en deuxième. Bon, en ordre hiérarchique. Donc, à 4, je camperais la compétence générale, donc exactement le même article, sauf que j'enlève la finale sur les mesures non réglementaires. Cette disposition-là, je l'amènerais à 5 pour expliquer quand est-ce que tu fais du règlement, quand est-ce que tu fais du non-réglementaire, donc on le garde, qui est une espèce d'article qui divise: c'est quoi, faire un règlement; dans le fond, pourquoi on fait ça, c'est pour ces notions-là. Et donc, lorsqu'on arrive à 7, on vient identifier, dans les compétences concernant la culture, celles qui concernent les services culturels. Si elles sont de l'ordre du caractère général et impersonnel, elles seront réglementaires. Si c'est des services culturels qui ne sont pas du genre caractère général et impersonnel, ce seront des résolutions. Et, si on n'est pas dans l'ordre des services, par exemple, si ce n'est pas l'utilisation des parcs, mais la désignation du parc, bien, alors là, on est dans le non-réglementaire, dans la résolution.

Autrement dit, ce que je suis en train de vous dire, si vous êtes encore d'accord avec ce que j'ai dit, si je l'ai dit correctement et de façon compréhensible, on s'entendrait juste en changeant la finale de 4, puis on l'amènerait à 5, puis on se serait compris.

Le Président (M. Ouimet): Qui veut se risquer? Me Denault?

M. Denault (Yvon): Je comprends ce que vous dites, M. le ministre, je pense que je comprends ce que vous dites. C'est que vous dites que, dans 7, c'est une partie de ce qu'il y a dans 4. On ne vise que les services. D'abord, tout ça, ça me pose deux problèmes. C'est que, dans l'article, par exemple, 21, je n'ai pas cette limitation-là, et, pour en prendre un autre, je n'ai pas cette limitation-là dans l'article 59. Là, le raisonnement ne vaudrait plus.

M. Fournier: Si vous me permettez, on va commencer par 7.

M. Denault (Yvon): Oui.

M. Fournier: On peut bien... Je vais juste vous dire que ça se peut qu'on ne fasse pas les mêmes choses partout. On va prendre les cas, cas par cas, là. On va juste regarder 7, si vous le voulez. Je ne cherche pas à gagner mon point, là.

M. Denault (Yvon): Non, non, je comprends.

M. Fournier: O.K. Si vous avez raison, tant mieux, puis on va corriger. On cherche à faire de la bonne job. Commençons par 7. Dans le fond, ce que j'essaie de dire, c'est un des points qui a été dit, je vois bien que le champ de 7, en termes de services, est différent du champ de la compétence totale. Donc, je maintiens le point qu'à cet égard-là il n'y aurait pas de répétition, il y aurait une explication. Donc, la compétence est large, mais la réglementation, étant entendu que c'est pour le caractère impersonnel, elle s'applique à un champ plus petit. Donc, dans ce cadre-là, ça se tiendrait, pour ça.

M. Denault (Yvon): Si on essaie de prendre un exemple... D'abord, on s'est posé la question: Qu'est-ce qu'ils veulent dire par ça? Qu'est-ce que c'est qu'on peut réglementer dans les services culturels? Un règlement de bibliothèque, par exemple? Vous ne rapportez pas vos livres, vous payez une amende, parce que... Qu'est-ce qu'on va réglementer dans les services culturels? À part le règlement de bibliothèque, en tout cas, nous autres, on avait de la difficulté à avoir un exemple. Mais, si c'était le cas...

M. Fournier: Admettons que c'est ça, là.

M. Denault (Yvon): Si c'était le cas, pourquoi ne serait-il pas déjà compris dans 4 et 6... dans 4 et 5? J'ai compétence en matière de loisirs, donc bibliothèque et autres choses, et, si je veux imposer une règle obligatoire de caractère général et impersonnel à l'égard de ça, je me sers de l'article 5, donc je n'ai pas besoin de l'article 7...

M. Fournier: Mais, l'article 5, je pense que là c'est le coeur de l'affaire, l'article 5 n'est pas attributif de compétences, c'est une règle d'interprétation qui vient dire quand est-ce que c'est un règlement. Alors, c'est sûr que, si vous dites: 5 donne les compétences...

M. Denault (Yvon): Là, je comprends ce que vous voulez dire. O.K. Alors, nous, on croyait qu'il était attributif de compétences...

M. Fournier: Non, bien non.

M. Denault (Yvon): ...mais en fait il ne l'est pas, de la façon dont vous le...

M. Fournier: Non, non. Recommençons. 4 vient dire le champ. 5 vient dire comment on fait ça: règlement, résolution, on explique un peu les différences, le caractère impersonnel, et tout ça, point. Après ça, on rentre dans chacune des matières. Encore une fois, je peux convenir qu'on pourrait l'écrire par mode d'intervention, mais l'objectif qui est visé, c'est que, pour les personnes moins familières, ce soit compréhensible si elles veulent tourner les pages, trouver ce qu'elles cherchent. Alors, on y va par secteur d'activité et là on leur dit: Bien, là, le règlement s'applique à cette espèce de volet là, ce sous-groupe-là, ça, c'est le règlement qui... Évidemment, quand ça répond à la règle d'interprétation de ce qu'est un règlement, on l'a prévu à 5. Si ce n'est pas dans le cadre... Si c'est dans le cadre d'une décision personnelle à l'égard du service culturel, bien, là, c'est une résolution.

Alors, voyez-vous, l'idée, c'est: C'est quoi, la compétence? De manière générale, comment on les exerce, les moyens d'action? Puis, après ça, on commence... on prend chacun des secteurs ? soit on a parlé des généralités, jusque-là, là, on donne un plan de match, une table des matières ni plus ni moins ? hein, voici les compétences, voici comment l'action se déroule normalement à l'égard de tout ça, maintenant regardons-les étape par étape pour voir comment ça se fait pour vrai.

M. Denault (Yvon): Mais ça, c'était à cause des mots «et dans la mesure qui y est prévue». Parce que, si j'enlevais ces mots-là, je sens qu'il y aurait des grosses chances de devenir attributif.

M. Fournier: Mais là, vous qui plaidez très bien en faisant le saut d'un article à l'autre, vous n'allez pas commencer à argumenter en enlevant des mots tout de suite, là. On n'aura pas de fun, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Les mots sont là, ils veulent dire quelque chose.

M. Denault (Yvon): Non, mais le but étant qu'on n'aurait plus besoin de le répéter.

Le Président (M. Ouimet): Moi, je vais plaider que l'enveloppe de temps du côté ministériel... Je dois vous interrompre.

M. Fournier: Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouimet): L'enveloppe de temps est terminée, mais vous aurez peut-être l'occasion d'échanger à nouveau dans un autre cadre.

n(16 h 50)n

Je vais maintenant du côté de l'opposition officielle à qui il reste à peu près... exactement 8 min 55 s. À vous la parole, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Une question simple: Tel qu'il est rédigé présentement, le projet de loi n° 62, est-ce que vous jugez qu'il augmente la marge de manoeuvre des municipalités?

Mme McKercher (Suzanne): M. le Président, si vous me permettez de répondre.

Le Président (M. Ouimet): Oui, Mme McKercher.

Mme McKercher (Suzanne): Oui, oui. Je vous dirais que oui. Le projet de loi, comme on l'a dit en tout début, on le reçoit de façon très positive. C'est un instrument qui est beaucoup plus performant que ce qu'on a connu avec la Loi sur les cités et villes. Ça nous ouvre, là, une marge de manoeuvre beaucoup plus grande. Je dirais que oui. Me Rathé, est-ce que vous avez...

M. Rathé (Paul): ...de concevoir qu'avec l'interprétation et les mots, oui, effectivement, ça va dans le sens d'avoir, d'occuper complètement le champ de compétence. Oui.

M. Legendre: Et ce que vous suggérez, les différentes suggestions que vous faites ont plus un objectif de simplification ou également un objectif de continuer d'accroître cette marge de manoeuvre là? Ou les deux?

M. Rathé (Paul): Je pense que c'est plus un objectif de simplification et de compréhension de la loi, là, parce que, tant qu'à la compétence ou à l'expression de la compétence... Je pense, l'objectif premier, c'est, pour le lecteur et l'utilisateur, que ça puisse être un outil qui est convivial et qui évite les questions. On a l'avantage de pouvoir se le dire à ce stade-ci. Ce sera définitivement plus facile si c'est clair au départ, là, d'avoir un outil plus simple.

M. Legendre: Parce qu'on voyait, là, dans l'échange précédent, que...

Une voix: Intéressant.

M. Legendre: Tout à fait intéressant, oui, par ailleurs, qu'il y a encore un objectif ou un besoin de clarté, là.

M. Rathé (Paul): L'objectif est d'avoir le meilleur produit parce qu'on va vivre avec pendant des années et des années. Et, si on prend cet outil-là comme étant un modèle à appliquer aux autres livres, je pense qu'on va avoir une philosophie de rédaction au niveau du législateur qui va faire en sorte d'aller dans ce sens-là. Donc, partant de ce principe-là, c'est le premier outil. Je pense qu'à ce stade-ci c'est... L'avantage pour tous, c'est d'avoir un outil qui est plus performant et plus facilement compréhensible.

M. Legendre: Est-ce que je comprends, dans les deux voies que vous avez proposées, celle que je qualifierais de la simplification par la réduction des énumérations et l'autre qui est le regroupement, que vous favorisez peut-être plus celle de réduire, de réduire le texte, somme toute?

M. Rathé (Paul): Oui, je pense que oui. On peut encore faire un exercice de réduction tout en gardant à l'idée la clarté de la loi pour le lecteur.

M. Legendre: Et, sur le sujet du développement économique, vous y avez fait référence un petit peu, mais j'aimerais vous entendre à nouveau, et j'imagine que vous avez...

M. Rathé (Paul): L'image était très attachée au texte en termes de développement économique. C'est que j'y référais parce qu'en termes de développement économique, si on se retrouve à l'article 10 ou 11, on a une énumération de ce que la municipalité ou la corporation municipale peut faire au Québec. Donc, on est dans l'ancienne façon de penser, si je peux m'exprimer ainsi. On se retrouve avec une énumération: on peut faire un bureau de tourisme, on peut faire un centre de foires, etc. Mon propos visait beaucoup plus d'aller chercher sur le mode rédactionnel, de dire: On n'est en énumération que sur le contenu au niveau de la compétence en termes économiques.

M. Legendre: Alors, vous rejoignez un petit peu ce qu'on a entendu au cours de la journée, que, dans le fond, si on pouvait se défaire du vocabulaire passéiste et rester en termes plus généraux ? de toute façon, c'est ce que vous recommandez pour l'ensemble des secteurs ? ça donnerait, à ce moment-là, une marge de manoeuvre plus grande aux municipalités à l'égard du développement économique.

M. Rathé (Paul): À l'image des pouvoirs qui sont déjà consentis. Comme on l'a dit, c'est une relecture, c'est une reformulation. Le pouvoir est déjà là. En tout cas, si on regarde la philosophie, c'était plus... pas plus, pas moins. Alors, normalement, je pense que ça va être plus dans le mode d'expression ou dans la façon d'innover pour aller revoir au niveau du projet... de la compétence, pardon.

M. Legendre: Deux petites questions rapides, M. le Président ? visiblement, vous acceptez. Deux petites questions rapides sur des commentaires spécifiques que vous faites. À l'article 4, quand vous faites référence, là: «Afin de respecter la logique interne de la loi, il est suggéré que le pouvoir d'adopter toute mesure non réglementaire en matière de services de garde à l'enfance soit transféré dans le chapitre X», pourquoi vous faites... Est-ce que c'est simplement, encore une fois, à des fins de regroupement plus logique que vous proposez ça?

M. Rathé (Paul): Tout à fait, tout à fait, parce que cet article-là réapparaît en bout de piste avec services de garde à l'enfance, qui est un champ qui existe actuellement dans la loi; c'est une compétence qui existe, mais avec sa... Le fait d'avoir bougé les textes, j'ai l'impression, ça fait en sorte que cette compétence-là apparaît. Mais on se dit: Pourquoi, à ce moment-là, ne pas les envoyer avec les autres pouvoirs qui sont paix, bon ordre, etc., les cimetières, et compagnie, qui enlèveraient, si vous voulez, cette nouvelle visibilité là, là, au niveau de la compétence.

M. Legendre: Et dernière question, M. le Président, qui je ne pense pas va prendre trois minutes. Ah! il y a peut-être mon collègue, ici, qui va prendre les deux minutes restantes. L'article 39, vous y allez d'une question. Mais dans le fond c'est quoi, votre suggestion à l'article 39?

Mme McKercher (Suzanne): 39, bon, on en a fait mention au niveau de notre mémoire. Tout ce qu'on dit, c'est que... Bon, de parler d'une personne, nous, on préconise que ce serait plus... selon l'esprit de ce qui est déjà fait, là, d'utiliser le même vocabulaire, d'un fonctionnaire. C'est tout simplement... c'est le seul commentaire qu'on avait à formuler. On a entendu les commentaires de la COMBEQ, on... Mais ça a été tout simplement, là, ce commentaire-là qui a été fait dans notre mémoire. Ce n'était pas l'angle donné au mémoire qui vous est présenté; c'est tout simplement, comme on disait, dans un but de clarté, de simplification.

Le Président (M. Ouimet): M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: J'écoutais avec beaucoup d'attention, tout à l'heure, M. le Président, l'échange entre le ministre des Affaires municipales et avocat et des avocats également qui sont nos témoins, aujourd'hui, conseil de législation et firme d'avocats réputée. Et ma question est fort simple: Y a-t-il, à ce moment-ci, risque majeur de se retrouver devant les tribunaux concernant les articles 4, 5 et 7, sur la compréhension de ces articles-là, sur les limites?

M. Denault (Yvon): Risque majeur, je ne dirais pas. Le propos ici n'est pas de refaire le projet de fond en comble et de le reprendre avec une approche totalement différente, je pense que ce n'est pas l'impression qu'on veut laisser. On aurait souhaité que quelques articles qui pourraient, dans des mains habiles, être utilisés à mauvais escient... c'est plus ça qu'autre chose, c'est d'enlever des possibilités de mauvaise interprétation alors que possiblement on peut y remédier relativement facilement. Mais encore une fois il ne s'agit pas de réécrire le projet de loi de fond en comble.

Peut-être que, dans le cas du domaine public, celui-là, je le trouve plus fatigant parce que l'énumération donne à penser qu'on veut donner beaucoup de marge de manoeuvre dans le domaine public, mais on s'y prend par des énumérations qui font penser un peu à la législation actuelle alors qu'on n'en a pas, je pense, vraiment besoin. On pourrait se contenter de permettre à la municipalité de légiférer sur le domaine public qui lui appartient ou sur lequel elle a un contrôle, évidemment pas sur le domaine public de l'État provincial ou fédéral. Mais on n'en mourra pas, là, ce n'est pas une catastrophe. Mais on nous demande de faire des suggestions pour améliorer, alors c'est dans cet esprit-là qu'on s'est, au comité de législation, qu'on s'est attaché à étudier le projet.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci. L'enveloppe de temps est épuisée. Alors, Mme McKercher, Me Rathé, Me Parent, Me Denault, merci de votre participation à nos travaux.

n(17 heures)n

J'inviterais maintenant les représentants du Centre québécois du droit de l'environnement à bien vouloir s'approcher.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Ouimet): ...vous êtes le président du Centre québécois du droit de l'environnement. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Et pourriez-vous nous présenter la personne qui vous accompagne?

Centre québécois du droit
de l'environnement (CQDE)

M. Girard (Jean-François): Bien sûr, je suis accompagné de Me Marc Turgeon, qui est avocat et chargé de projet au Centre québécois du droit de l'environnement.

Le Président (M. Ouimet): Alors, vous disposez de 20 minutes pour nous présenter votre point de vue.

M. Girard (Jean-François): Vous me permettez de me verser un peu d'eau.

Le Président (M. Ouimet): Bien sûr.

M. Girard (Jean-François): Et nous parlerons peu mais parlerons bien. J'espère. J'espère.

M. Fournier: On va essayer de faire la même chose.

M. Girard (Jean-François): Donc, vous me permettrez en commençant de faire une brève présentation du Centre québécois du droit de l'environnement. Le centre ? oui, vous me le permettez, vous êtes bien gentils, bien aimables ? le centre est né sous l'impulsion d'un groupe de juristes intéressés par les aspects juridiques des enjeux environnementaux. Le Centre québécois du droit de l'environnement a été fondé en 1989. Depuis maintenant 15 ans, le CQDE joue un rôle actif au sein de la société québécoise en intervenant dans les débats environnementaux importants qui animent l'actualité. Notamment, le CQDE participe aux consultations gouvernementales portant sur diverses réformes législatives et réglementaires. Cette implication a donné lieu à plus de 40 mémoires et analyses juridiques à l'attention de commissions parlementaires comme celle-ci, du Sénat et des ministres concernés. Le CQDE offre également des conférences en droit de l'environnement à l'intention des professionnels en environnement et du grand public. Depuis sa fondation, le CQDE dispense l'information juridique à des citoyens et à des groupes de protection de l'environnement, leur permettant de faire la lumière sur les dimensions juridiques des problèmes environnementaux auxquels ils font face.

Le Centre québécois du droit de l'environnement, qui est un organisme à but non lucratif, s'est donné pour mission de promouvoir les outils juridiques et les pratiques environnementales responsables. Dans l'intérêt collectif, il privilégie le développement de modes de gestion de l'environnement qui placent l'action citoyenne au coeur des mécanismes de protection, de la qualité de nos milieux de vie. L'engagement du CQDE repose sur une vision pragmatique et progressiste du droit de l'environnement où sont privilégiés quatre axes qui guident les représentants de l'organisme dans l'atteinte de sa mission. Ces axes sont la prévention, la précaution, la subsidiarité ? dont nous aurons l'occasion de discuter plus amplement dans le cadre du mémoire ? et l'innovation.

Alors, on remercie les membres de la commission de nous donner l'occasion de se faire entendre sur le projet de loi n° 62, portant sur les nouvelles compétences municipales. Ce projet de loi a reçu récemment beaucoup d'attention de la part des commentateurs ou éditorialistes et des tribunes libres, beaucoup s'inquiétant de voir les municipalités recevoir des compétences dont elles pourraient faire un usage abusif ? je réfère, entre autres, à un article de M. Jean-Robert Sansfaçon, journaliste au Devoir.

Comme son titre l'indique, ce projet de loi porte sur les compétences des municipalités dans plusieurs domaines dont ce qui nous intéresse ici et ce dont nous allons vous entretenir, ceux de l'environnement et de la gestion de l'eau. À en croire la réaction générale, on s'insurge de ce que ce projet de loi constituerait une forme d'abandon grave de responsabilités de la part du gouvernement du Québec. Pourtant, comme nous l'expliquons ci-après, la plupart de ces dispositions ne sont pas de nouvelles dispositions et existent depuis plusieurs années dans les lois municipales.

Ainsi, dans le cadre du présent mémoire, nous voulons, premièrement, souligner l'intérêt de voir les municipalités québécoises se voir octroyer une plus grande compétence en matière d'environnement; deuxièmement, apporter certaines précisions aux critiques déjà entendues afin d'éclairer, dans la mesure de notre possible, le débat public; trois, rappeler que l'État provincial devra par ailleurs offrir aux municipalités de nouveaux moyens de faire face à ces responsabilités qui leur sont dévolues par ce projet de loi; et enfin, quatrièmement, questionner la cohérence du gouvernement quant à l'attribution de compétences exclusives aux municipalités régionales de comté sur les cours d'eau et les lacs, alors que la Politique nationale de l'eau prévoit une approche de gestion par bassin versant en ce domaine.

C'est donc avec un intérêt marqué que le CQDE constate que l'article 4 du projet de loi n° 62 indique que toute municipalité locale a compétence dans le domaine de l'environnement et que par conséquent elle peut adopter toute mesure non réglementaire en ce domaine. Nous croyons, au CQDE, qu'il est intéressant de voir cette compétence-là octroyée de façon claire aux pouvoirs municipaux. L'article 6 du projet de loi ajoute pour sa part que, dans l'exercice d'un pouvoir réglementaire prévu par cette loi, une municipalité peut notamment prévoir toute prohibition, et nous croyons que ça permet de cette façon-là de prévenir tout litige à l'encontre d'un règlement qui serait totalement prohibitif.

D'aucuns s'inquiètent cependant que les municipalités seraient dorénavant autorisées à adopter des règlements en matière d'environnement, comme c'est prévu à l'article 21, et voient dans cette disposition une grande imprécision susceptible d'ajouter à la confusion régnant en matière de réglementation environnementale. Or, la philosophie du projet de loi n° 62 est justement de rédiger les pouvoirs habilitants des municipalités dans un style large et libéral, laissant plus de latitude aux conseils municipaux pour adopter les mesures réglementaires adaptées aux impératifs et aux situations locales. Cette philosophie s'inscrit d'ailleurs dans la direction tracée par la Cour suprême dans plusieurs décisions récentes où le plus haut tribunal a favorisé l'autonomie des conseils municipaux ? et je vous réfère notamment aux affaires Greenbaum, Hydro-Québec, Spraytech et la récente affaire Frelighsburg, l'affaire du mont Pinacle.

La juge McLachlin, dans l'affaire des produits Shell du Canada contre Vancouver, a souligné la véritable nature des municipalités modernes. Ainsi, à son avis, il est important que les conseils municipaux soient libres de définir eux-mêmes, dans la mesure du possible, l'étendue de leurs pouvoirs légaux. Elle explique ? et je me permets de citer un passage de son jugement: «...il importe de reconnaître la nature et le rôle changeants du gouvernement municipal au Canada. Comme je l'ai déjà fait remarquer, les municipalités ont, au cours des 100 dernières années, évolué de façon remarquable tant sur le plan de leur taille que sur celui de leur objet. Comme l'affirme Rogers: "Des fonctions généralement acceptées aujourd'hui comme relevant de la compétence légitime des municipalités n'ont pas toujours été perçues ainsi..." Donc, même si l'expression de valeurs collectives n'était pas traditionnellement considérée comme une fonction des autorités municipales, la complexité et l'importance croissantes d'une ville contemporaine comme Vancouver ? dans ce cas-là, mais comme les municipalités québécoises ? exigent que la portée des "objets municipaux" soit déterminée en fonction de cette réalité actuelle.» Alors, le centre accueille favorablement cette nouvelle façon d'octroyer des pouvoirs aux municipalités, façon large et libérale qui, croyons-nous, respecte par ailleurs le principe de subsidiarité, comme je me permets de l'expliquer immédiatement.

Encore, la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Hydro-Québec, écrivait récemment que «la protection de l'environnement est un défi majeur de notre époque. C'est un problème international qui exige une action des gouvernements de tous les niveaux», où les instances internationales, nationales, provinciales et même municipales sont appelées à intervenir. Le plus haut tribunal du pays, dans l'affaire Spraytech, a d'ailleurs reconnu la légitimité de l'action de tous les paliers gouvernementaux lorsqu'il s'agit de protéger l'environnement. À ce titre, le CQDE mise sur le principe de subsidiarité selon lequel le niveau de gouvernement le plus apte à agir sur le plan de l'efficacité doit être habilité à le faire selon les paramètres de la problématique à résoudre et dans le respect de la hiérarchie constitutionnelle des lois et règlements.

Chose certaine, il faut appuyer et il faut encourager les initiatives municipales lorsqu'elles tentent d'intervenir en matière d'environnement; c'est ce qu'on veut vous dire ici. D'ailleurs, nombreux sont ceux qui pensent que, plutôt que de s'en remettre systématiquement au gouvernement pour solutionner des problèmes qui se présentent, chacun devrait tenter d'intervenir à son niveau, sur son milieu. Et force est de constater en effet que de plus en plus de citoyens réclament le droit de participer au processus décisionnel et exigent de se faire entendre quant à la gestion des ressources de leur milieu. Or, les municipalités représentent le palier de gouvernement le plus proche des citoyens et, de l'avis de plusieurs, le plus apte à créer cette synergie entre la volonté des citoyens et les orientations de l'État, dans la recherche d'un développement vraiment durable. Rappelons à cet effet que les municipalités ont été identifiées comme un pôle important de réalisation du développement durable lors du Sommet de la Terre de Johannesburg, en 2002.

n(17 h 10)n

Dans le respect de sa mission, le CQDE croit essentiel d'habiliter, entre autres, les pouvoirs municipaux, les élus et les fonctionnaires afin qu'ils puissent assumer pleinement leur rôle et qu'ils soutiennent les initiatives de ceux qui forment leur collectivité, leurs citoyens. Nous estimons en effet qu'une partie importante des réponses aux enjeux environnementaux auxquels le Québec est actuellement confronté réside dans la stimulation et l'encadrement de l'initiative locale. C'est par la sensibilisation et la formation des décideurs locaux et des citoyens que le centre intervient régulièrement sur la scène environnementale québécoise. Aussi, nous prônons une approche intégrant les aspects environnementaux, économiques et sociaux appliqués à de nouvelles institutions de gestion misant sur des approches concertées où les initiatives locales sont encouragées et soutenues par les autorités étatiques.

Ce qui m'amène à dire qu'à ce titre le centre pense que l'État québécois a également un grand rôle à jouer, et nous sommes d'avis que le gouvernement du Québec, dans la foulée du projet de loi n° 62, doit offrir aux municipalités locales et régionales des moyens accrus de faire face à ces nouvelles responsabilités qui leur sont dévolues, particulièrement en matière d'environnement, et nous ne voulons pas exprimer là simplement le principe de la main tendue. Il n'est pas simplement question de donner aux municipalités des pouvoirs financiers accrus, mais de les accompagner dans la mise en application et l'application in concreto sur le terrain de ces nouvelles compétences là. Ceci est d'autant plus vrai depuis le jugement de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Colombie-Britannique contre Canadian Forest Products Ltd., qui a confirmé que les différents paliers de gouvernement, mais particulièrement les municipalités, assument un rôle de fiduciaire de l'environnement. J'ajouterais à cela que la cour a également dit que ce rôle de fiduciaire de l'environnement était aussi porteur d'une grande responsabilité pour les municipalités.

Et je me permets un petit commentaire sur l'article 23 ? c'est un peu plus technique ? qui permet aux municipalités de constituer une fiducie d'utilité sociale à des fins environnementales, notamment pour la réalisation de travaux de décontamination des sols. Cela nous apparaît une mesure intéressante permettant de faire des gains environnementaux. Il aurait été cependant souhaitable que le projet de loi n° 62 en étende l'application de façon à permettre à une municipalité de participer à une fiducie déjà existante et ainsi en accroître le patrimoine fiduciaire, puisqu'il semble que, dans l'état actuel du droit, il ne soit pas possible de se faire. Notamment, c'est dans l'article 542.5.2 ? on ne dit pas que la numérotation est facile ? de la Loi sur les cités et villes qu'il est prévu ce pouvoir où les municipalités doivent... peuvent se porter constituantes d'une fiducie d'utilité sociale. Mais nulle mention n'est faite de la possibilité d'accroître un patrimoine fiduciaire déjà existant, tel que cela est prévu à l'article 293 du Code civil du Québec, et c'est pourquoi nous déduisons du libellé de l'article 542.5.2 de la Loi sur les cités et villes qu'une municipalité doit absolument être constituante d'une fiducie d'utilité sociale, et nous croyons que ce pouvoir devrait donc être étendu afin de permettre aux municipalités de participer à une fiducie déjà existante par le biais d'un acte d'accroissement.

Nous voulons maintenant aborder la question de la gestion de l'eau sous deux volets principaux, soit la gestion des infrastructures ? c'est bon pour le temps ? la gestion des infrastructures et la gestion par bassin versant.

Le Président (M. Ouimet): C'est bon pour le temps, mais, en ce qui concerne le «peu», on est rendus au-delà du «peu».

M. Girard (Jean-François): Du «peu»?

Le Président (M. Ouimet): Quand vous avez dit «peu et bien», «nous parlons peu et bien».

M. Girard (Jean-François): Ah! Mais, oui, mais...

Le Président (M. Ouimet): Mais vous avez 20 minutes, hein!

M. Girard (Jean-François): ...pour des avocats. Il faut mettre les choses en perspective.

Le Président (M. Ouimet): Oui, oui, j'ai bien compris.

M. Girard (Jean-François): Alors, sur la gestion des infrastructures, plusieurs commentateurs du projet de loi n° 62 se sont empressés de dénoncer les dispositions qui permettraient aux municipalité de conclure des ententes d'exclusivité de construction et d'exploitation d'aqueduc d'une durée maximale de 25 ans avec les compagnies privées; c'est prévu à l'article 25 du projet de loi. D'aucuns y voient là une nouvelle tentative de privatisation de la distribution de l'eau par le présent gouvernement. D'autant plus, ajoutent-ils, si on lit le projet de loi n° 62 conjointement avec le projet de loi n° 61 portant sur l'Agence des partenariats public-privé du Québec.

Pour notre part, nous croyons qu'un terme maximal d'une quinzaine d'années, avec révision quinquennale, serait plus approprié pour éviter les abus et assurer une gestion plus serrée de ce service essentiel. Ceci étant dit, cette mesure permettant aux municipalités de conclure de tels contrats existe depuis plusieurs années dans les lois gouvernant le monde municipal. Je réfère ici aux articles 557 du Code municipal, 444 de la Loi sur les cités et villes, 43 de la Loi sur la qualité de l'environnement et également sur la Loi sur la vente des services publics municipaux. Outre quelques modifications mineures, nous voyons mal ce que le projet de loi n° 62 ajoute de nouveau à ce sujet, dans la mesure où à notre connaissance les municipalités n'y ont pas ou peu eu recours jusqu'à ce jour. Le débat sur la place du privé dans la distribution de l'eau ayant cependant été mené à plusieurs reprises et tranché à chaque fois en faveur du maintien de la compétence publique sur cet aspect de la gestion de l'eau potable au Québec, nous nous interrogeons sur la véritable pertinence de ce pouvoir repris par le projet de loi n° 62.

À ceux qui s'inquiètent de l'absence de débats publics sur cette question, nous voulons cependant souligner que la disposition prévoit que tout octroi d'un contrat d'exclusivité doit faire l'objet de l'approbation ? et nous croyons que c'est très fort, ça, ce n'est pas simplement une consultation, mais l'approbation ? des citoyens de la municipalité concernée. Il est également prévu que le gouvernement doit aussi donner son aval à une telle entente. C'est l'alinéa 2 de l'article 25 qui le dit. Pour notre part, que les citoyens s'intéressent aux affaires de leurs municipalités constitue selon nous un rempart contre la privatisation débridée de nos services publics de distribution de l'eau.

Reste la question de la compétence exclusive des municipalités régionales de comté, MRC, sur les cours d'eau et les lacs, tel que prévu aux articles 102 et suivants du projet de loi n° 62, à l'heure où, sur plusieurs rivières importantes du Québec, des comités de bassin tentent de relever le défi de la gestion par bassin versant. Devant un projet de loi qui veut établir, pour l'avenir, pour le futur, le rôle et les compétences des municipalités, il est pour le moins surprenant de constater qu'aucune mention n'est faite de la gestion par bassin versant. Or, c'est là une des orientations fondamentales de la Politique nationale de l'eau, qui insiste également sur la nécessité d'entreprendre la révision du cadre juridique concernant l'eau et de développer les outils légaux nécessaires à la mise en oeuvre de la politique. Nous nous permettons de vous rappeler que c'est là l'orientation 1 et l'axe 1 de la Politique nationale de l'eau: réviser le cadre juridique.

Entendons-nous bien, nous ne questionnons pas ici la pertinence des pouvoirs octroyés aux municipalités en matière de gestion des cours d'eau par le projet de loi n° 62. Mais, compte tenu des orientations de la Politique nationale de l'eau, auxquelles le CQDE adhère, nous nous interrogeons sur la cohérence du gouvernement en ce domaine. En effet, quelle sera la véritable légitimité des comités de bassin si le législateur distribue ici et là les compétences touchant à la gestion de l'eau avant même que ces comités de bassin soient réellement en mesure d'agir?

De l'avis du CQDE, là sont les véritables dangers du projet de loi n° 62, qui ne semble pas du tout tenir compte des principes de gestion par bassin versant et du statut de chose commune ? res communis ? de l'eau qui en principe exige que sa gestion soit assurée par les usagers de la ressource. De plus, comment interpréter l'octroi de tels pouvoirs face au rapport de la commission Beauchamp sur la gestion de l'eau, qui recommandait ? et nous croyons qu'il ne peut en être autrement ? une gestion participative en matière de gestion de l'eau au Québec. Dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 62, en octroyant une compétence exclusive aux MRC sur les cours d'eau et les lacs, nie tout simplement le principe même de la gestion par bassin versant, ce qui nous apparaît être un recul important sur les acquis de la Politique nationale de l'eau.

C'est pourquoi nous sommes d'avis que ces dispositions traitant de la compétence des MRC sur les cours d'eau et les lacs devraient tout simplement être retranchées du projet de loi n° 62 jusqu'à ce que le gouvernement entreprenne véritablement la révision du cadre juridique concernant l'eau au Québec, et nous croyons d'ailleurs qu'en ce domaine le temps commence à presser.

Je vais transmettre la parole à mon collègue Me Turgeon pour les recommandations et je vais me permettre de terminer avec une brève conclusion.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Moi, je vais juste vous rappeler avant: il vous reste trois minutes. Alors, Me Turgeon.

n(17 h 20)n

M. Turgeon (Marc): Alors, rapidement, les recommandations sont au nombre de trois. Vous les trouverez à la page 10 du mémoire. Alors, c'est pourquoi que, bien que le CQDE accueille favorablement ces responsabilités maintenant clairement dévolues aux municipalités, il estime que l'État québécois doit offrir à ces dernières les moyens, notamment techniques et financiers, de faire face à ces nouveaux défis et soutenir les initiatives locales. La deuxième recommandation, le CQDE recommande qu'il soit permis aux municipalités de participer à une fiducie déjà existante et d'en augmenter le patrimoine fiduciaire. La troisième porte sur la question des bassins versants, le centre estime que les dispositions du projet de loi n° 62 sur ce sujet ne sont pas appropriées tant et aussi longtemps que le gouvernement du Québec n'aura pas véritablement entrepris la révision du cadre juridique concernant la gouvernance de l'eau afin d'y inclure les références nécessaires à la gestion par bassin versant. Il en va à notre avis de la légitimité même de ce mode de gestion de nos ressources hydriques. C'est pourquoi entre-temps le centre recommande l'abrogation des articles 102 à 123 du projet de loi n° 62.

M. Girard (Jean-François): Alors, dans la minute qu'il me reste, en guise de conclusion, si nous sommes d'avis qu'il est heureux que le projet de loi n° 62 offre aux municipalités une plus grande autonomie en matière d'environnement, nous en appelons au gouvernement du Québec afin qu'il fasse preuve de plus de cohérence quant aux aspects de ce projet qui touchent la gestion des cours d'eau et des lacs. Encore une fois, nous répétons, il en va là de la légitimité même de la gestion par bassin versant au Québec. Et nous croyons enfin que l'État provincial devra par ailleurs offrir aux municipalités de nouveaux moyens de faire face à ces responsabilités qui leur sont dévolues par ce projet de loi. Alors, nous vous remercions de l'attention que vous nous avez accordée.

Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, Me Girard et Me Turgeon, pour cette présentation. Je vais maintenant ouvrir la phase des échanges avec les parlementaires. Mais juste avant: M. le député de Montmorency, la sonnerie est bel et bien éteinte, de votre téléphone cellulaire?

M. Bernier: Oui, monsieur.

Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, merci beaucoup d'être avec nous. J'ai noté l'ensemble des remarques. J'aurai une question tantôt sur l'accompagnement du rôle environnemental des villes, là, vous avez précisé certaines... ou j'aimerais que vous précisiez certaines choses; un mot sur la fiducie d'utilité sociale, et on va essayer de faire un correctif pour inclure la notion que vous vouliez dire, là, on l'a reçue positivement.

M. Girard (Jean-François): Je peux vous dire que ça nous permettrait de réaliser de beaux projets environnementaux, et j'attends ça.

M. Fournier: Juste vous ou d'autres aussi?

M. Girard (Jean-François): Bien, moi, je l'attends pour d'autres!

M. Fournier: Excellent! On va aller avec les bassins versants parce que ? j'en ai parlé d'ailleurs un peu plus tôt, cet après-midi ? moi, dans ma région, ça s'appelle la SCABRIC, l'organisme responsable du bassin versant ? je ne sais pas si vous connaissez, c'est la rivière Châteauguay ? et toute l'organisation qui découle. D'ailleurs, je pense que la SCABRIC est probablement un des premiers organismes de gestion de bassin versant qui a été formé, la Chaudière était peut-être en même temps, là, mais à peu près. Et je suis très convaincu de l'utilité de la chose. En ce moment, ils sont à faire un certain nombre de travaux, et, nous, on a à prendre en compte... d'ailleurs c'est ce qu'on fait avec les MRC qui sont responsables maintenant des cours d'eau, mais on a une vision un peu plus large.

Toute une discussion qu'il y a eu d'ailleurs, et qui n'est pas tout à fait finie, j'ai l'impression, sur l'aspect des cours d'eau, qu'est-ce qui est un fossé qui est couvert, pas couvert, et tout ça, mais le projet de loi couvre quand même assez large sur la capacité réglementaire. À ce stade-ci, il n'y a pas de conclusion finale sur l'aménagement juridique que cela va prendre, et je ne crois pas qu'il est utile pour l'environnement de laisser perdurer une situation compliquée au niveau des cours d'eau, là, en ce moment. Le projet de loi n° 62 n'est peut-être pas la solution parfaite selon quelques-uns, là, mais même ces quelques-uns-là trouvent que c'est mieux par rapport à ce qui existe présentement. Alors, forcément c'est déjà un pas en avant.

Mais ce que vous nous proposez, c'est de dire: On va l'oublier, on va attendre, on va laisser la situation compliquée, qui n'est peut-être pas la plus performante, jusqu'à temps qu'on ait un arrimage juridique qui permet de donner effet au plan des bassins versants. Pourquoi faudrait-il procéder ici avec une espèce de halte sur une situation qui améliore les choses? Pourquoi se compliquer... Pourquoi le choix de dire: Restons dans une situation compliquée jusqu'à temps qu'on procède à un arrimage juridique?

M. Girard (Jean-François): J'ai eu l'occasion de participer au récent Colloque sur la gestion par bassin versant de Réseau Environnement, où j'étais membre d'un panel de discussion, et il était question du financement des organismes de bassin. On nous avait demandé ? on était six personnes sur le panel ? de discuter et d'élaborer sur la question du financement des organismes de bassin, et d'entrée de jeu j'ai dit: Je ne vous en parlerai pas parce qu'avant même de parler de financement des comités de bassin je crois qu'il faut s'attarder sur la légitimité de ces organismes-là qui, à l'heure actuelle... Outre la Politique nationale de l'eau donc qui traite de l'existence, premièrement, de la gestion par bassin versant, de cette volonté-là et de l'existence des comités de bassin, il n'y a aucune mention dans le cadre législatif québécois de l'existence du rôle et du rôle, je crois, important et fondamental de ces organismes-là dans la gestion de l'eau au Québec. Et je trouve pour le moins surprenant et étonnant qu'un projet de loi qui veut fixer des choses pour le futur n'en traite pas encore, alors que c'est une orientation, c'est l'orientation numéro un, l'axe numéro un de la Politique nationale de l'eau. Lorsqu'on fait suggestion d'enlever, d'abroger ces articles-là, c'est peut-être pour les remplacer par des articles où, à tout le moins, on commencerait à faire, à définir le cadre législatif dans lequel on va faire intervenir la gestion par bassin versant.

Et j'irais plus loin: je trouve qu'un projet de loi comme ça, qui encore une fois fixe les choses pour le futur... Puis on a été très clairs: c'est un bon projet de loi, c'est excellent, c'est intéressant de voir qu'enfin on écarte un peu la théorie de l'ultra vires puis on s'en va vers un mode de rédaction large et libéral des pouvoirs municipaux. Moi, comme procureur de municipalité, je crois que c'est une bonne chose. Cependant, je trouve qu'on lance un message qui, à certains points, nous fait craindre que les municipalités vont comprendre que c'est eux qui sont responsables de la gestion par bassin versant, ou en fait que c'est eux qui ont la responsabilité de la gestion des cours d'eau, parce qu'on n'y fait pas mention, on n'y voit pas apparaître le concept même de gestion par bassin versant.

M. Fournier: Deux choses. Premièrement, sur votre référence à une loi pour l'avenir, il y a des dispositions dans la loi, notamment sur le domaine économique, où il y a des réflexions qu'on doit continuer de faire, et on a déjà annoncé qu'il y aurait des précisions, ou des éclaircissements, ou une autre façon de rédaction qui pourraient intervenir. Donc, on essaie de faire quelque chose. Il faut accoucher à un moment donné. Mais «on accouche», ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des dispositions qui pourront être améliorées à l'avenir. Alors, ceci étant, pour dire que, bien qu'on le souhaite ? avec un libellé comme celui-là, une rédaction comme celle-là, on souhaite ne pas revenir à chaque session avec des omnibus ? néanmoins, ça ne veut pas dire qu'on ne fait plus de législation. Le ministre des Affaires municipales doit faire de la législation, ça fait partie de la tradition, semble-t-il, ça vient avec la fonction ? bien que parfois il s'en passerait probablement.

Je veux revenir sur... vous me dites «devrait contenir», alors parlez-moi de ce que vous auriez vu là-dedans, ce que, vous, vous auriez mis dans le projet de loi. Je veux dire, on les retranche puis on mettrait d'autre chose, qu'est-ce qu'on mettrait comme aménagement juridique? Comment vous verriez les dispositions?

M. Girard (Jean-François): Je vais être bien honnête: je n'ai pas le texte de ces articles-là à vous livrer immédiatement...

M. Fournier: Je ne parle pas du texte, je parle du cadre général, là.

M. Girard (Jean-François): ...mais on sait que le principe de gestion par bassin versant, bon, premièrement, implique l'existence de comités de bassin, lesquels, comités de bassin, actuellement ont la responsabilité de mettre en place, d'élaborer un schéma directeur de l'eau. Peut-être que... et je sais qu'il y a un important effort de réflexion à faire, comment on va arrimer les pouvoirs municipaux avec ces schémas directeurs de l'eau. Au Colloque sur la gestion par bassin versant, on nous a présenté, bon, le schéma directeur de l'eau, qui se traduirait par des contrats de rivière, etc. Au-delà des qualifications juridiques, de toutes ces bibittes juridiques là, je pense que le schéma directeur de l'eau est un élément constructif sur lequel on doit bâtir, et il pourrait peut-être apparaître là. Peut-être qu'on pourrait dire: Les municipalités régionales de comté vont participer à cet effort de réflexion sur les schémas directeurs de l'eau. Déjà là, j'aurais une légitimité.

Et je vais vous dire pourquoi on intervient comme ça, en commission parlementaire, parce que, lorsque j'étais sur le panel, il y a quelqu'un qui se présente qui est responsable des cours d'eau pour la MRC de la Haute-Yamaska et il me dit: Le comité de bassin de la rivière Yamaska, qui est le COGEBY ? il dit ? j'ai reçu des demandes de financement de la part du COGEBY, puis, à chaque fois, au fil des années, là, au fil des mois où j'ai vu COGEBY apparaître sur ma table, comme je ne savais pas trop c'était quoi ? puis il dit: Aujourd'hui, je participe au Colloque sur la gestion par bassin versant pour m'initier et là je commence à comprendre ? mais comme je ne savais pas c'était quoi, comme je constatais qu'il n'y avait pas beaucoup de financement de la part d'autres bailleurs de fonds, ma recommandation était toujours de leur accorder un petit financement. Et je trouvais que c'était tellement illustratif du propos qu'on vous tient aujourd'hui, comme quoi ces comités-là n'ont pas de reconnaissance légale, législative dans le cadre législatif du Québec, et, en partant de là, ils n'ont pas de légitimité. J'arrête.

M. Fournier: O.K. C'est parce que je ne veux pas embarquer dans la légitimité, j'aime mieux discuter d'un cadre légal dans le fond. Parce que la question de reconnaissance, ça peut se faire de diverses façons qu'on mettrait dans le projet de loi. Là, il y en a une, façon, je comprends, c'est de lui dire: Les MRC, par exemple, pourraient être associées au comité pour le plan directeur. C'est une chose. Le plan directeur arrive, qu'est-ce que... Bon, peut-être que c'est prématuré dans le projet de loi, s'il arrive, le plan directeur. On peut attendre quand il arrivera pour voir comment on va le faire. Mais vous avez sûrement déjà une idée là-dessus.

n(17 h 30)n

M. Girard (Jean-François): J'aurais presque le goût de vous répondre: Ça nous fera plaisir, au CQDE, de vous faire un contrat, pour vous répondre à cette question-là. Mais bref...

M. Fournier: ...des sous. Je veux gagner des sous.

M. Girard (Jean-François): Mais bref, mais bref...

M. Fournier: En tout cas, vous êtes honnête.

M. Girard (Jean-François): Oui, oui. Je vais vous dire, je pense que, dans la réflexion qu'on entretient, il y a une donnée qui semble incontournable, c'est l'arrimage entre les schémas directeurs de l'eau et les schémas d'aménagement et les règlements d'urbanisme. Le projet de loi le reprend, les municipalités ne s'expriment que par résolutions et règlements; dans le cas qui nous occupe, les règlements. Donc, pour traduire les objectifs du schéma directeur de l'eau, il va falloir que ce soit traduit à travers les règlements d'urbanisme. Encore là, on ne voit pas apparaître ça dans le projet de loi. Et je crois que ce n'est pas si difficile de... Et n'oubliez pas, je sais que vous ne voulez pas que je parle de la légitimité, mais il faudrait juste lancer un peu de souffle aux organismes de bassin, et je ne représente pas les organismes de bassin, mais je peux vous dire qu'ils sont étranglés puis ils sont à bout de souffle.

Donc, je crois qu'il va falloir réfléchir à comment on va arrimer les schémas directeurs de l'eau avec les schémas d'aménagement, quelles seront les interrelations, comment... Et je peux vous dire qu'au CQDE effectivement on a une réflexion qui est avancée là-dessus, on privilégierait l'approche contractuelle, c'est-à-dire que, les municipalités, et en fait tous les usagers, si l'eau est un bien commun et qu'il appelle la gestion par les usagers, il faut que tous les usagers participent à l'effort et la création, l'élaboration de l'institution de gestion. Le schéma directeur de l'eau avec les comités de bassin, c'est un peu dans ces eaux-là qu'on patauge, puis c'est le cas de le dire. Mais je crois qu'on pourrait... que les engagements qui apparaissent au schéma directeur de l'eau pourraient être concrétisés par le biais d'une approche contractuelle, dans quel cas c'est-à-dire les municipalités diraient: Moi, ça, la partie du schéma directeur de l'eau qui me concerne, voici comment, et je vais ensuite partir avec mon petit bonheur sous mon bras puis aller le réaliser à travers mon schéma d'aménagement et les règlements d'urbanisme.

Mais il va falloir aussi, je peux vous... débordons en matière de conservation des milieux naturels, hein? On a... Oups! on me fait signe d'arrêter.

Le Président (M. Ouimet): Vous allez avoir l'occasion de revenir. Moi, je dois aller du côté de l'opposition parce que, l'enveloppe de temps, on l'a excédée. Alors, M. le député de Blainville, à vous la parole.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, M. le président, Me Turgeon. La première question, ce serait pour vous entendre un peu plus, là, vous y avez fait référence, mais sur le principe de subsidiarité et sur votre affirmation comme quoi évidemment ? comment vous nous dites ça? ? le niveau de gouvernement le plus apte à agir sur le plan de l'efficacité doit être habilité à le faire, et le niveau de gouvernement le plus apte à agir en environnement évidemment, dans ce cas-ci. J'aimerais ça vous entendre un petit peu sur le lien que vous voyez et... je pense, c'est ce que vous dites, c'est que le projet de loi n° 62 permet de conférer plus de pouvoirs, plus de compétences aux municipalités en termes environnementaux, mais quels liens vous voyez aussi avec l'État québécois, avec le ministère de l'Environnement? J'aimerais ça que vous nous parliez un petit peu plus de votre vision de ce côté-là.

M. Girard (Jean-François): Votre question a plusieurs volets. Je vous dirais, sur le principe de la subsidiarité, je me permettrais de préciser, selon les paramètres de la problématique en réseau, ce n'est pas en environnement de façon large, mais je crois que le principe de la subsidiarité a notamment été évoqué dans l'affaire Spraytech, et à mon sens il est intéressant de voir comment on l'a utilisé dans Spraytech, où la problématique à résoudre était: Est-ce qu'une municipalité a compétence pour mettre de l'avant, pour éviter un règlement sur l'utilisation des pesticides?

Il est clair que la cour, compte tenu des enjeux de santé publique, compte tenu, bon, du contexte dans lequel ça s'inscrit, veut donner, veut avaliser ce règlement-là. Et elle cherche des moyens de le faire et invoque le principe de subsidiarité ? qui d'ailleurs a été pris, a été mis de l'avant par la commission Beauchamp dans le rapport sur la gestion de l'eau ? et elle dit: Si une municipalité intervient par le biais d'un règlement et qu'il y a un intérêt, il y a un bénéfice environnemental, écologique de santé publique, on doit chercher un moyen de l'habiliter à le faire. Et le projet de loi n° 62 ajoute à cette clarté-là parce que maintenant il écrit clairement qu'une municipalité peut adopter des règlements en matière d'environnement, et ces règlements-là peuvent être totalement prohibitifs. C'est très intéressant. On ne sera pas obligés de faire les entourloupettes juridiques qu'on a faites dans le cadre du jugement de l'affaire Spraytech.

Bon. Maintenant, vous demandez comment rattacher ça à la compétence ou au rôle de l'État. Je vous avoue que ce n'est pas facile de répondre à cette question-là. J'ai notamment en tête un exemple: Politique de protection des rives, du littoral et de la plaine inondable, qui est une compétence clairement municipale. On a dit aux municipalités... Puis là on a un bel exemple où c'est supposé être inclus dans les règlements d'urbanisme, cette protection-là. Mes beaux-parents ont un chalet sur le bord du lac Taureau, je le fréquente régulièrement, c'est un massacre écologique qui est en train de se passer là, on est en train de déboiser complètement les berges, on construit des beaux chalets, des belles pelouses jusqu'au bord, il y en a même qui ont poussé l'audace jusqu'à empierrer la rive. La municipalité ne fait rien, et le gouvernement ne fait rien. Et, moi, je suis très confronté par une situation comme ça parce que je me dis, moi, qui est procureur de la municipalité, qui privilégie de donner aux municipalités des pouvoirs d'intervenir: Qu'est-ce qu'on fait quand on n'intervient pas? Ah! peut-être que la solution, elle réside, premièrement, dans une volonté plus affichée de la part de l'ensemble des intervenants et dans une synergie...

J'entendais un représentant du ministère de l'Environnement me dire: Je ne me soucie pas de la chasse gardée, de la compétence d'une municipalité lorsque je constate qu'il y a une infraction au règlement sur les fosses septiques, et j'envoie une lettre aux contrevenants, et j'envoie mes gens du ministère de l'Environnement. Je pense qu'il faut faire preuve de synergie dans ces domaines-là et qu'on utilise les ressources de chaque palier de gouvernement. Et c'est ça, le principe de la subsidiarité selon la problématique à résoudre, peut-être que certaines problématiques demandent l'intervention de plusieurs paliers de gouvernement, et n'est-ce pas là une expression du développement durable? On décloisonne les silos, et c'est un type de gestion horizontale par lequel tous les intervenants concernés vont être appelés à participer à la recherche de la solution et l'application de la solution. Oui?

M. Turgeon (Marc): Peut-être ajouter, si vous regardez à la fin de la page 5, ça se fait quand même dans le respect de l'ordre constitutionnel, la hiérarchie constitutionnelle des lois, alors c'est bien dit: «...selon les paramètres de la problématique à résoudre et dans le respect de la hiérarchie constitutionnelle des lois et règlements.» Alors, dans le fond ça ne vient pas nécessairement enlever des pouvoirs à l'État provincial, ça vient juste dire: Je peux le faire si j'ai une problématique sur mon territoire puis je suis le meilleur pour le faire, le plus aisé à le faire, le plus facile à faire, je peux le faire. Puis dans le fond, comme disait Jean-François, c'est d'arriver en fait... c'est que les différents pouvoirs réglementaires puissent non pas s'interposer les uns les autres, mais aller dans le même but en fait, arriver à la meilleure protection de l'environnement, dans le cas qui nous occupe, puis arriver à construire le développement durable.

M. Girard (Jean-François): En fait, on sait qu'il existe maintenant le Code de gestion des pesticides, qui est de compétence provinciale. Mais, toujours dans l'affaire Spraytech, je crois qu'il eût été malheureux que la décision du tribunal arrive à la conclusion que la municipalité n'avait pas compétence pour adopter un règlement comme ça.

Alors, replaçons-nous, là: ce pour quoi on est ici aujourd'hui, c'est dans le contexte du projet de loi n° 62. Nous, au CQDE, on trouve que ce projet de loi là est intéressant dans la mesure où il énonce clairement que les municipalités ont une compétence en environnement. Je peux vous dire, je rencontre des gens qui ont plein d'idées pour faire faire plein de choses aux municipalités en environnement, allant jusqu'à créer des puits de capture de carbone, Kyoto, ces affaires-là, bon, O.K., et on m'a demandé: Est-ce qu'une municipalité pourrait s'engager dans un projet pilote de cette nature-là? Bien, avec un projet de loi n° 62, ma réponse, elle est clairement oui, elle peut contracter parce que ça devient un objet municipal, elle pourrait même aller jusqu'à réglementer. Ça, je trouve ça intéressant, et ça respecte encore une fois le principe de subsidiarité où une municipalité, parce qu'elle est interpellée par des citoyens, il y a une question de proximité, elle se permet d'agir. Et on ne viendra pas miner le travail qu'elle fait en environnement sous prétexte qu'elle n'a pas compétence. Alors, c'est ça qu'on veut exprimer.

Le Président (M. Ouimet): M. le député de Blainville.

n(17 h 40)n

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Dans la gestion des infrastructures, vous reconnaissez le fait que le projet de loi n° 62 semble présenter le même genre de dispositions, le même genre de texte que dans les années antérieures, à l'égard du fameux 25 ans avec les compagnies privées. Mais, malgré cela, vous faites quand même une recommandation où vous suggérez qu'un terme maximal d'une quinzaine d'années, avec révision quinquennale, serait plus approprié. Alors, j'aimerais... Et un petit peu plus loin, aussi, vous vous interrogez sur la véritable pertinence de ce pouvoir repris par le projet de loi n° 62.

Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus: d'un côté, vous dites, bien vous semblez dire: Il n'y a pas d'inquiétude à y avoir parce que c'est la continuité; mais en même temps vous suggérez possiblement de réduire la durée en question.

M. Girard (Jean-François): Quant à la question de la durée, il est vrai qu'on écrit que les municipalités, jusqu'à ce jour, n'y ont pas ou peu eu recours. Cependant, dans un contexte de raréfication des ressources financières, puis des enjeux qui sont toujours de plus en plus grands, et coûteux, et demandants, il pourrait arriver que les municipalités y aient plus recours, et, dans ce contexte-là, peut-être qu'il y a lieu... Puis c'est là l'idée de notre propos, on dit: Ce pouvoir-là, là, existe depuis de nombreuses années, puis ça a toujours été 25 ans. Peut-être qu'aujourd'hui, constatant notamment qu'en France c'est de 12 ans, est-ce qu'on ne pourrait pas aller à 15 ans puis prévoir une révision quinquennale de ces contrats-là pour assurer? Parce que c'est ça, la crainte des gens.

J'ai cité l'article de M. Sansfaçon, du Devoir, puis je suis intervenu à l'émission de M. Maisonneuve, à Radio-Canada, où j'entendais un maire, entre autres, dire: Avec ce projet de loi là, ils vont nous forcer à donner en contrat à des entreprises privées la gestion des réseaux d'aqueduc. Notre commentaire, ici, veut dire: Je ne vois pas ça dans le règlement... je ne vois pas ça dans le projet de loi, ce n'est pas écrit. Premièrement, il faudrait arrêter de jeter de hauts cris, puisque ce pouvoir-là n'est pas un nouveau pouvoir. Il existe depuis fort longtemps dans les lois. Je pense qu'il est là depuis la création de la Loi sur la qualité de l'environnement, là, l'article 43, là, si je ne m'abuse, d'une part. D'autre part, donc ce commentaire-là sur la quinzaine d'années, bien, si... il veut donner une balise supplémentaire si les municipalités voulaient en faire usage.

Cependant, et sans se prononcer, nous, on est un peu perplexes parce que, le débat sur la place du privé dans la distribution de l'eau, on l'a fait, on le refait, et on le refait, et on le re-refait. Moi, je vous dirais ? peut-être par l'impétuosité de ma jeunesse ? j'ai hâte qu'on arrête de faire les vieux débats puis qu'on en fasse des nouveaux. Donc, pourquoi, dans un projet de loi, qui encore une fois fixe des choses pour le futur, on reprend ce pouvoir-là? Peut-être qu'on aurait pu ne pas en parler du tout puis le laisser dormir dans la loi où il se trouve actuellement ou, tant qu'à le reprendre, bien allons-y, diminuons pour 15 ans et révision quinquennale. C'est un peu ça, le but de notre propos, mais pour ajouter aussi au débat public, parce qu'on trouvait qu'il se disait plein de choses qui étaient non fondées à ce propos-là.

Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Blainville. Du côté ministériel, M. le ministre.

M. Fournier: Bon, bien, un seul sujet qu'on n'avait pas encore traité... mais, juste avant, pour vous dire que, depuis ce matin, on se demande si c'est un projet qui n'est pas porteur de réforme, ou bien c'est une réforme, ou une révolution tranquille, ou un projet révolutionnaire. À la fin de la journée, ayant maintenant entendu parlé des captages de puits de carbone, je penche pour le révolutionnaire et je pense qu'on est en train de faire quelque chose de bien important.

Tantôt, vous avez parlé de la responsabilité environnementale du monde municipal. Vous avez dit qu'il faudrait qu'il y ait un accompagnement concret sur le terrain. Donnez-moi des... Et là vous avez dit: Puis il n'y a pas juste les bras financiers. Parlez-moi de... Le bras financier, ça, je le connais, là, ça, je n'ai pas de problème, je connais ce mode d'accompagnement là. Quelles sont les autres méthodes d'accompagnement auxquelles vous faisiez référence?

M. Girard (Jean-François): Je vais me servir d'un exemple. Notamment en matière de gestion de l'eau, d'eau souterraine, la gestion par nappe ? c'est une position qu'on avait mise de l'avant dans notre mémoire sur la gestion de l'eau ? il y a un très important effort à faire si on veut bien gérer nos ressources. Parce que c'est de ça qu'il est question ici, c'est la gestion de certains volets de l'environnement. Si on veut bien gérer nos ressources, il faut les connaître, et trop souvent, à l'heure actuelle, la connaissance fait défaut. On manque de connaissances sur l'état de nos ressources. Et je trouve un peu inquiétant qu'on puisse se permettre d'octroyer des permis d'exploitation, d'une façon ou d'une autre, lorsqu'on connaît ? puis je parle dans l'absolu ? lorsqu'on connaît mal la ressource. Donc, notamment en matière de gestion de l'eau, je crois qu'avant... Dans l'élaboration d'une institution de gestion, parce que, si on parle de gestion par bassin versant, au CQDE, on prône la gestion par nappe d'eau souterraine également ? et tout ça étant imbriqué, alors je ne vous dis pas le fouillis avec les lois municipales ? mais, bref, il faut connaître l'état de la nappe d'eau souterraine, et, pour arriver à ça, est-ce que le gouvernement, est-ce que l'État provincial ne pourrait pas fournir les ressources techniques scientifiques pour permettre des hydrogéologues, des arpenteurs, etc., pour permettre d'avoir ces connaissances-là? C'est une façon de le faire.

Il y a au niveau fiscal aussi. Ça nous amène à déborder sur l'aspect financier, bon, notamment en matière de conservation des milieux naturels. On sait que, sur l'île de Montréal ? prenons l'exemple de l'île de Montréal ? si l'île de Montréal voulait atteindre cet objectif de 8 % des aires protégées, il est trop tard, il n'y en a plus assez à protéger; et, s'il voulait protéger tout ce qu'il lui reste à protéger, la ville de Montréal frappe un gros noeud parce que la plupart de ces terrains-là sont détenus par des promoteurs. Cependant, on est actuellement dans un cadre, dans un paradigme qui favorise le développement, et celui qui veut protéger un milieu naturel doit faire la preuve qu'il est plus valable et qu'il est souhaitable de protéger le milieu, alors que celui qui veut le développer a tous les pouvoirs de le faire. Est-ce que soutenir l'action de l'État, ce ne serait pas d'offrir des moyens fiscaux différents, pour les municipalités, pour permettre de changer le paradigme dans lequel... Celui qu'on proposerait, c'est un paradigme où c'est la conservation des milieux naturels qui est mise de l'avant en priorité, et notamment ce serait d'offrir aux municipalités des pouvoirs leur permettant d'avoir une fiscalité verte, une fiscalité cohérente en matière d'espaces protégés.

Il y a quelqu'un qui a lancé, j'ai entendu ça l'autre fois, une taxe à l'imperméabilisation du territoire. À chaque fois qu'on bétonne, qu'on construit, on imperméabilise le territoire, et ça, ça apporte un coût environnemental important, dans la mesure ? je vous vois réagir, ça m'inquiète...

M. Fournier: Je pensais au Coke puis aux chips, mais allez-y. C'est sur un autre sujet. Mais je vous écoutais néanmoins.

M. Girard (Jean-François): Donc, une taxe à l'imperméabilisation du territoire par laquelle le promoteur qui développe un territoire et qui l'imperméabilise est tenu de payer une taxe qui va nous permettre de compenser pour la perte des milieux humides. Alors, tout ça, ces outils-là de fiscalité sont à développer, et ça demande l'intervention de l'État. Et ça, ce n'est pas un coût... ça ne vous demande pas de faire un chèque aux municipalités demain matin, mais ça demande au gouvernement d'offrir de nouveaux moyens, de nouveaux pouvoirs pour qu'on ait les moyens de nos ambitions. Parce que ces ambitions-là sont grandes.

Et il ne faut pas se leurrer, il n'existe qu'un seul payeur au bout du compte: c'est ou bien le propriétaire foncier, par le biais de ses taxes, ou bien les consommateurs que nous sommes tous. Ce n'est pas compliqué, l'argent, elle ne pousse pas dans les arbres, comme on dit, elle vient tout le temps d'une seule source unique, c'est de nos poches, par le biais de nos impôts, par le biais des taxes. Alors, tout ça... Moi, quand j'entends dire: Ça va coûter plus cher, oui. Tenir compte de l'environnement, oui, répondre aux ambitions des municipalités qui voudraient aller de l'avant dans une prise en charge de l'environnement, ça va nous coûter plus cher, mais ça, c'est la réalité que je crois qui est de plus en plus incontournable, c'est... Lorsque je suis intervenu, en commission parlementaire, sur le projet de loi n° 44, qui était la notion de pollueur-payeur, c'est ce qu'on est venus dire: on est venus dire que l'internalisation des coûts environnementaux, c'est souhaitable, et effectivement ça va nous coûter plus cher.

Alors, j'espère que ça répond un peu à: Quelles sont les possibilités de soutenir? Moyens techniques, moyens scientifiques, des nouveaux moyens de fiscalité ? j'en ai d'autres, je ne vous les dévoile pas tous, vous me donnerez un contrat.

M. Fournier: Oui, jusqu'ici d'ailleurs le contrat me coûterait de l'argent, puis il me semble que tout est un bras financier, pour être très franc. Les techniques, c'est aussi... il faut les payer. Ils existent, il faut les payer. Ce serait donc Québec qui fournirait ça. La fiscalité incitative, dans le fond c'est aussi un paiement. Et l'autre ? et je termine là-dessus puis je vais terminer, ça va être la conclusion de mes propos ? la taxe sur l'imperméabilisation, l'imperméabilité peut-être du sol que vous nous proposez m'amène à dire que j'ai peut-être été un peu prématuré dans ma qualification de révolution, parce que je pense qu'il reste encore beaucoup de révolutions à faire pour se rendre au bout de vos idées. Mais...

n(17 h 50)n

M. Girard (Jean-François): Si vous me permettez, un autre moyen... Tantôt, je voulais aborder la question de la conservation des milieux naturels. Il y a longtemps que je me pose la question: Comment, à partir du schéma d'aménagement... Bon, on sait que la CMM a son schéma d'aménagement... bien, son schéma d'aménagement et de développement où ils veulent protéger certains milieux naturels. Comment on pourrait faire en sorte que la réalisation concrète du schéma d'aménagement soit le fait de groupes de conservation sur le terrain et que ça ne passe pas par nécessairement l'intervention d'une municipalité, par le biais de ses règlements d'urbanisme? Il y a des ficelles à attacher là. Je n'ai pas la réponse encore, mais il me semble que, si on grattait un peu, on pourrait trouver des nouvelles façons de faire, mais ça, c'est à moindre coût. Mais vous avez tout à fait raison, il y a toujours un coût, il y a toujours un coût.

Le Président (M. Ouimet): Je dois mettre un terme à l'échange parce qu'on a débordé et dépassé l'enveloppe de temps. Alors, merci, M. le ministre. Du côté de l'opposition maintenant, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Me Girard, bon, vous avez clairement indiqué que vous jugez que, le niveau de gouvernement apte à intervenir en termes d'environnement, les municipalités le sont. En même temps vous dites par ailleurs: Bien, ce serait important qu'il y ait des moyens accrus parce que c'est quand même, peut-être, des nouvelles compétences, ou des nouveaux pouvoirs, ou des nouvelles responsabilités à exercer de plus en plus. J'aimerais ça avoir un petit peu votre évaluation ou quel est votre point de vue sur l'expertise nécessaire, en termes d'environnement, que l'on retrouve présentement au niveau des municipalités. On sait, quand on dit «municipalités»... C'est facile de dire «municipalités», mais il y en a de toutes les tailles, évidemment. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Je ne questionne pas du tout le fait que ce soit un niveau de gouvernement apte à le faire, mais, au niveau de l'expertise, vous voyez ça comment?

M. Girard (Jean-François): Bien, je pense que vous touchez une des nuances importantes à faire, c'est en fonction de la taille. Évidemment, la ville de Montréal a plus de moyens que certaines municipalités rurales.

Et peut-être que cette expertise-là, elle est à développer, mais, avec respect et égard pour les gouvernements qui se succèdent, je ne pense pas qu'au niveau de l'État québécois on ait toujours les moyens appropriés de la mise en application de nos lois. Et il y a, je crois... Vous savez, on pourrait en discuter longtemps, là, mais il est une réalité qu'on met en place des règles, on met en place des lois, mais à certains égards, et peut-être trop souvent, les moyens d'application in concreto font défaut. Et j'entendais, aujourd'hui, là... On est dans l'épisode de smog, là, et j'entendais... On va se donner cet exemple-là, la ville de Montréal dit: On va faire un règlement contre la marche au ralenti des voitures. Parfait. Maintenant, on l'applique comment? Une fois qu'on l'a dit, on l'applique comment? Est-ce qu'on met 800 inspecteurs sur l'ensemble du territoire pour voir ? puis, bon, c'est de la compétence de la CMM, hein ? donc 800 inspecteurs sur le territoire pour attraper tous ceux qui, le matin, font partir leur voiture? Alors, je vais être obligé de vous renvoyer la question.

Les moyens de mise en application sont encore, je crois, à définir, sont encore à élaborer, et malheureusement je crois qu'il est une utopie de croire que, parce qu'on a mis en place une réglementation, la situation est réglée. Non, au contraire, il faut mettre plusieurs efforts. Et, sans vouloir louanger qui que ce soit, je me souviens d'entendre le ministre Mulcair dire: Il faut appliquer la loi parce qu'actuellement on ne l'applique pas. Bien, je peux vous dire que je ne pouvais qu'applaudir à cette déclaration-là parce que c'est le cas, c'est le cas. J'ai souvent dit: En matière d'environnement, on a d'excellentes lois au Québec; le problème, c'est qu'on ne les applique pas. Alors...

Cependant, revenons à notre propos. Je crois qu'il est intéressant, au niveau municipal, puisqu'il y a un phénomène de proximité avec les citoyens, il est intéressant qu'on leur donne les pouvoirs parce que, si on se donne... puis il y a un important effort d'éducation, de sensibilisation à faire, mais, si on se donne les moyens, il est possible de croire qu'on va avoir une action terrain plus rapide, plus efficace. Encore là, c'est le principe de subsidiarité.

Le Président (M. Ouimet): M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: M. le Président, une seule question. J'ai écouté avec beaucoup d'attention la question de l'eau potable ? siégeant sur une autre commission qui est transports et environnement, on a passé à travers plusieurs projets de loi. On a les comités de gestion des bassins versants qui sont en place, sont financés par le ministère de l'Environnement. Vous nous parlez de l'opportunité ou encore vous nous parlez d'une action qui doit être prise par les différents pouvoirs municipaux. Ma question est fort simple. Vous savez pertinemment, puisque vous êtes avocat et que vous faites partie d'un contentieux, vous savez pertinemment que certaines petites municipalités n'ont absolument pas les ressources financières leur permettant d'avoir un service adéquat pour desservir l'ensemble de leur population. Ma question est la suivante: Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt envisager la participation des MRC plutôt que des municipalités? Voilà.

M. Girard (Jean-François): Quant à moi, le terme «municipalité» se décline à plusieurs niveaux, soit la municipalité locale, la municipalité régionale de comté. Vous savez, la municipalité, c'est une fiction administrative par laquelle on détermine que voici le territoire de la municipalité. Et c'est tellement une fiction administrative qu'on a dit un jour: Il y a des municipalités locales, il y a des municipalités régionales. Quant à moi, ce qui est important, c'est de se donner les outils et, peut-être par la mise en commun au niveau des MRC, de réaliser ? et je reviens à mon propos de tout à l'heure ? de réaliser la mise en application des règles qu'on se donne et des moyens qu'on se donne de tenir compte des aspects environnementaux, et vous comprenez que mon propos concerne les aspects environnementaux.

Maintenant, j'irais même plus loin et je vous dirais: Il est intéressant, dans le concept de gestion par bassin versant, que cette unité-là de gestion de bassin versant, qui n'est pas une fiction administrative, mais qui était bel et bien une unité géomorphologique, et qui nous permet d'avoir une prise en compte d'une réalité terrain qui dépasse le cadre de ces limites administratives là, donc la gestion par bassin versant... Et, si je peux me permettre, puisque vous m'y avez amené, là, c'est une opportunité, au Centre québécois du droit de l'environnement, on croit beaucoup dans ce phénomène de gestion, dans cette orientation de gestion par bassin versant qui demande la prise en charge du milieu par le milieu, pour le milieu, et une gestion participative. On croit que la notion par bassin versant pourrait être le fer de lance d'une nouvelle façon de faire, d'une nouvelle façon de gérer notre territoire.

Mais votre question soulève aussi l'aspect des moyens de mise en application, mais ça, je n'ai pas plus la réponse, je vais être bien franc avec vous, je n'ai pas plus la réponse que cette honorable commission, parce que la réponse, M. Fournier l'a soulevé, c'est une question de sous. Alors, je vous renvoie la question: Est-ce que, nous, quand... Est-ce que, nous, au Québec, on est capables de se donner les moyens de la mise en application des règles qu'on se donne?

Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, ce sera le mot de la fin parce que le temps est épuisé. Me Girard et Me Turgeon, je vous remercie infiniment pour votre participation aux travaux de cette commission.

Et j'ajourne donc les travaux au mardi 22 février 2005, à 9 h 30, alors que la commission poursuivra ses auditions publiques dans le cadre des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 62, Loi sur les compétences municipales.

(Fin de la séance à 17 h 58)


Document(s) related to the sitting