(Neuf heures trente-neuf minutes)
Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les municipalités régionales de comté.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des changements d'apportés?
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(9 h 40)
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Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Cholette (Hull) est remplacé par M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) et M. Ouimet (Marquette) est remplacé par Mme Delisle (Jean-Talon).
Auditions (suite)
Le Président (M. Vallières): Bien, je vous remercie. Alors, je demanderais aux représentants de l'Union des municipalités du Québec de bien vouloir s'avancer. Vous indiquer qu'il est prévu que nous puissions terminer nos travaux à midi trente. Donc, je verrai à organiser l'horaire, là, en conséquence, compte tenu que nous démarrons avec 10 minutes de retard.
Alors, je pense que M. Gagnon, qui est président ex officio et maire de Saint-Basile-le-Grand, va nous présenter les gens qui l'accompagnent. Vous disposerez de 20 minutes pour présenter votre mémoire, et, ensuite, on pourra échanger avec des membres de la commission. Alors, M. Gagnon, la parole est à vous.
Union des municipalités du Québec (UMQ)
M. Gagnon (Bernard): Merci, M. le Président. Simplement vous mentionner que c'est ex officio comme président de l'UMQ mais pas au niveau de la mairie de Saint-Basile-le-Grand.
Alors, M. le ministre. Mmes les députées, MM. les députés, M. le Président, je suis accompagné, ce matin, par le vice-président de l'Union des municipalités du Québec, maire de la magnifique ville de Rimouski, Michel Tremblay, et également de M. Jean Langevin, permanent à l'Union, responsable de ces dossiers, alors qui vont surveiller celui qui vous parle et puis qui vont le corriger lorsqu'il y aura des impairs qui pourraient être commis.
Alors, sans plus tarder, je vais tenter d'être bref pour laisser peut-être plus de place au niveau de la discussion, mais, quand même, il y a un minimum qui se doit d'être fait, M. le Président. Alors, je vous remercie. Je vous remercie d'offrir aujourd'hui à l'Union des municipalités du Québec l'opportunité de vous transmettre son point de vue sur le projet de loi n° 77. L'Union des municipalités du Québec, comme vous le savez, est le seul regroupement à représenter le monde municipal dans toute sa diversité et l'une des rares organisations dont le poids et la légitimité lui permettent d'intervenir dans le débat public au nom de près de 6 millions de citoyens et citoyennes du Québec. Alors, l'Union est le plus important regroupement municipal au Québec. L'ensemble de ses membres représente 80 % de la population et 90 % des budgets municipaux. Alors, puisque nous sommes présents dans les 17 régions du Québec, il n'est pas surprenant de constater qu'une grande concentration de nos membres se retrouve dans les MRC qui forment la classe à caractère urbain et rural.
Alors, d'entrée de jeu, j'aimerais vous rappeler que notre Union s'active, depuis ses premières années d'existence, à contribuer concrètement à l'épanouissement et à la vitalité des collectivités. Pour nous, le développement dynamique des régions qui composent pour une très grande partie le territoire habité du Québec est le souci et le défi de tous et chacun impliqués dans l'essor du monde municipal québécois. Voilà pourquoi, une fois de plus, l'Union a inscrit à son agenda la priorité de poursuivre la réflexion déjà bien amorcée sur le renforcement des structures municipales.
Notre mémoire, que vous avez tous reçu, témoigne d'ailleurs de la grande importance que représente pour nous le développement régional dans le respect de la cohabitation urbaine et rurale. C'est probablement là que réside le plus grand défi auquel nous sommes confrontés. Globalement, j'oserais dire que, souvent, des fois, des décisions d'autorité à certaines occasions, pour faire différemment, de vivre dans une cohabitation n'amènent pas nécessairement au règlement des problèmes. Donc, l'objectif bien sûr que l'on voudrait voir établi est le respect de la cohabitation urbaine-rurale.
En effet, la réalité du monde municipal des régions n'est plus la même qu'il y a 25 ans, alors que la loi 125 sur l'aménagement du territoire créait les MRC. La problématique qui occupait principalement les esprits réformateurs à cette époque, esprits réformateurs des réformes municipales, était de trouver une formule qui favoriserait la coordination de l'aménagement du territoire. Un quart de siècle plus tard, on s'interroge plutôt sur le fonctionnement de la structure régionale qu'est la MRC. La question à l'ordre du jour est maintenant de savoir comment articuler les règles de fonctionnement définissant les compétences et la prise de décision afin d'assurer un meilleur essor de la cohabitation urbaine-rurale dans une région donnée.
Après toutes ces années, bien que les raisons varient d'une MRC à une autre, nous constatons que ce sont des facteurs historiques qui expliquent la nature du développement socioéconomique d'une région. La concentration de la richesse, la prépondérance des services administratifs dans une localité plus qu'une autre ne s'expliquent souvent que par une logique fondée sur des éléments intrinsèques au territoire.
L'UMQ croit que ces particularités régionales et structurantes du paysage socioéconomique d'une MRC méritent de ne pas être sous-évaluées. Ne pas accorder d'importance à ces phénomènes équivaut sans contredit à nier la dynamique fondamentale du développement d'un territoire. En ce sens, aucune politique de renforcement des MRC ne peut aller à l'encontre du constat que les villes-centres représentent l'élément moteur d'une région. De plus, elles assument pleinement ce rôle en supportant les coûts financiers, administratifs et politiques de telles charges, et j'oserais même ajouter de telles responsabilités.
Renforcer la MRC par un accroissement de compétences et de responsabilités et donner plus de poids aux municipalités de la ruralité est impensable si le législateur ne s'impose pas la règle de ne pas transgresser celle de la cohabitation de l'urbain et du rural dans leurs composantes propres. Outrepasser cela sera irrémédiablement néfaste pour la vitalité de toute une région. Le gouvernement ne doit pas puiser dans les ressources des villes-centres pour contribuer au renforcement ou au rééquilibrage des potentiels de la communauté urbaine et rurale d'une MRC.
Je voudrais également porter à votre attention que cette problématique touche aussi un autre type de municipalités, soit les villes à caractère de centralité. Alors, le rayonnement de celles-ci fait qu'elles exercent une influence sur une partie importante de la MRC, de la population de la MRC. Cette influence s'explique par leur capacité de promouvoir et de développer l'essor économique régional, d'être le lieu de desserte des services gouvernementaux et paragouvernementaux, d'offrir aux habitants de la région des offices municipaux d'habitation, des installations sportives et culturelles.
Quotidiennement, la population des environs de ces villes exerçant des fonctions à caractère de centralité se rend dans ces municipalités pour y travailler, commercer, se récréer, étudier ou quérir des services de toute nature. Les particularités des villes de centralité sont donc à considérer dans l'élaboration de la structure décisionnelle que devrait se donner la MRC.
Alors, le 27 avril 2001, le ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole, Mme Louise Harel à l'époque, annonçait la création d'un groupe de travail pour examiner et approfondir la situation des MRC dont le caractère est à la fois urbain et rural. À cette occasion, l'Union des municipalités a présenté un mémoire portant sur les quatre éléments de réflexion proposés par la ministre. Cette présentation faisait suite à quelques rencontres de travail réunissant MRC et municipalités membres de l'Union directement concernées par le sujet. Six mois plus tard, soit le 24 octobre, l'UMQ accueillait favorablement l'ensemble des recommandations proposées dans le rapport dudit groupe de travail.
Il est utile de vous rappeler, M. le Président, que notre Union se réjouissait de constater que les deux présidents, les deux coprésidents du groupe recommandaient au gouvernement de ne pas donner suite à son projet d'élection du préfet au suffrage universel. Nous soulignions à ce moment-là que cette initiative aurait eu pour conséquence inévitablement d'ajouter un nouveau palier de gouvernement. Aussi, l'Union des municipalités du Québec soutenait la proposition d'alternance à la préfecture entre les milieux urbain et rural et se disait en accord avec la recommandation de maintenir le transfert des responsabilités du gouvernement aux municipalités via la municipalité locale, point de chute de la démocratie locale.
Quant aux recommandations touchant le droit de retrait à l'égard des compétences et la mise en commun de services entre municipalités, le groupe de travail observait la même ligne de pensée que la nôtre: l'autonomie des municipalités quant à la prise en charge de nouvelles municipalités par les MRC et le balisage du droit de retrait après cette prise en charge nous apparaissaient comme autant de mesures susceptibles d'améliorer le fonctionnement de cette structure de concertation et de services.
Finalement, pour ce qui est du processus de réorganisation municipale en cours, l'UMQ se ralliait au groupe de travail qui demandait au gouvernement de ne pas axer ses politiques de soutien aux municipalités rurales en faisant appel aux ressources locales et régionales. Par ailleurs, l'adoption d'une règle de plafonnement du nombre de voix dans le cadre du processus de prise de décision selon le principe de la double majorité nous paraissait justifiée.
Alors, le projet de loi n° 77 sous étude habilite les MRC désignées à caractère urbain et rural et leur accorde des nouveaux pouvoirs d'élire un préfet au suffrage universel et la compétence exclusive sur l'ensemble des cours d'eau municipaux situés sur leur territoire. De plus, il prévoit une représentation de la ville-centre au sein des comités de la MRC et des règles spéciales concernant la prise de décision et la désignation du préfet si ce dernier n'est pas élu au suffrage universel en cas d'impasse dans l'application des règles ordinaires.
Enfin, en ce qui concerne l'ensemble des MRC sans distinction de leur caractère, le législateur propose, et je le rappelle brièvement: le remplacement de l'appellation du préfet suppléant par celle de préfet adjoint; l'extension des règles budgétaires au-delà de la fin de l'exercice si le nouveau budget n'est pas adopté avant le 1er janvier; il accorde aux municipalités locales un nouveau pouvoir en matière de délégation de compétences; et enfin, il prévoit que les conditions et modalités relatives à l'exercice du droit de retrait pour les municipalités locales devront être prévues par résolution lorsque la MRC déclare sa compétence dans un domaine originellement attribué à la municipalité locale. Les propos et commentaires sur ce projet de loi que nous vous présentons aujourd'hui portent sur sept points donc.
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(9 h 50)
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Alors, les nouvelles compétences d'abord. L'Union est satisfaite de la position adoptée par le gouvernement dans l'attribution de nouvelles compétences à la MRC. Depuis longtemps, l'Union soutient qu'une des causes clairement identifiées de relations tendues entre les municipalités locales et les MRC réside dans l'attribution de pouvoirs propres aux MRC sans droit de retrait aux municipalités qui ont déjà accès à un tel service. Par contre, l'Union s'est prononcée généralement en faveur de l'attribution de pouvoirs, tant aux municipalités locales qu'aux MRC. Une telle réciprocité permet de mieux outiller le monde municipal afin de mieux gérer les ressources. Précisons cependant que, bien que l'Union soit en désaccord avec l'attribution de pouvoirs exclusifs aux MRC, elle reconnaît que la compétence en matière de planification appartient en propre à celles-ci. Enfin, l'Union s'est montrée globalement en faveur des modifications législatives qui permettent d'améliorer la prestation des MRC en tant que structure apte à prendre en charge la mise en commun volontaire de services.
Par ailleurs et paradoxalement, l'étude statistique sur les similitudes entre les MRC, présentée partiellement dans notre mémoire dont vous avez obtenu copie, démontre également des disparités de fonctionnement entre elles. L'évolution des interrelations politiques et administratives, de développement économique et de l'emploi ont varié à un point tel qu'ils ont provoqué des disparités significatives. En effet, les agglomérations urbaines, pôles régionaux de développement, ont prospéré inégalement d'une MRC à une autre. Plusieurs facteurs justifient ces différences. Il est important de constater de plus l'hétérogénéité ? alors, un mot pas facile à prononcer...
Une voix: Il ne faut pas le répéter.
M. Gagnon (Bernard): ...il ne faut pas le répéter ? des relations qu'entretiennent les communautés rurales et urbaines entre elles avec la MRC.
Cet état de fait démontre toute l'importance de ne pas légiférer uniformément sur l'attribution d'exclusivité de compétences à la MRC. Une large discrétion à cet égard doit être laissée au milieu local. À cet égard, nous tenons à faire connaître au ministre des Affaires municipales et de la Métropole l'insatisfaction des membres de l'Union dont le territoire se trouve à l'intérieur des limites d'une agglomération de recensement et qui, malgré une prépondérance urbaine, contiennent des zones rurales qui devraient pouvoir profiter des avantages de la Politique nationale de la ruralité. Or, il semble qu'il en soit autrement. Le gouvernement a préféré reproduire et alimenter cette dualité en définissant le territoire d'application comme étant tout le territoire rural qui se situe à l'extérieur de ces 31 agglomérations urbaines du Québec. Cette attitude ne mérite-t-elle pas d'être réfutée, alors que l'on cherche à trouver des moyens de concerter tous les intervenants du milieu pour un meilleur épanouissement régional?
Par ailleurs, l'Union rejette la possibilité de l'élection du préfet au suffrage universel. Cette initiative n'aurait que pour effet de conduire probablement à la création d'un palier additionnel dont on estime non nécessaire de gouvernance au Québec. De plus, cette possibilité contredit le principe fondamental du respect de l'autonomie et du pouvoir des municipalités locales. Dans cette logique, l'Union rejette également toute autre disposition permettant un palier additionnel de gouvernance supralocale.
L'importance de maintenir la table du conseil des maires, comme la loi le prévoit présentement, remporte la majorité des voix au sein de notre Union. La réunion périodique de l'ensemble des représentants politiques locaux de la région demeure à notre point de vue un forum idéal de concertation et de rassemblement des forces politiques du milieu dans un contexte de développement régional. Elle permet de discuter des sujets et des préoccupations d'ordre régional qui relèvent de la compétence et de la responsabilité de la MRC.
En ce qui touche la représentation de la ville-centre au sein du conseil de la MRC et de ses comités, l'UMQ ne peut que saluer cette initiative d'assurer la présence d'un élu de la ville-centre sur les comités de la MRC. Ainsi, cette disposition confirme la volonté du gouvernement de voir se concrétiser cette cohabitation dans toutes les étapes de réflexion et de recommandation dans les différents sujets de sa compétence.
L'activité politique de la MRC à caractère urbain et rural doit refléter le sentiment que tous participent et sont appelés à participer à l'avenir de leur région. La garantie de voir siéger urbains et ruraux ensemble en tout temps favorisera un effet de synergie hautement souhaitable. Pour ces mêmes raisons, nous reconnaissons le bien-fondé de la règle de l'alternance à la direction de la préfecture.
En ce qui touche les règles affectant la prise de décision, le projet de loi n° 77 modifie l'article 202 de la Loi de l'aménagement et l'urbanisme en introduisant des règles de plafonnement du nombre de voix pour la municipalité la plus populeuse ou celle dotée d'un nombre de voix supérieur à celui dont disposent tous les représentants du conseil de la MRC.
Le mémoire, déposé par l'Union pendant les consultations du groupe de travail présidé par Mme Ruest-Jutras et Nicolet, soulignait son acquiescement à une mesure semblable. Jusqu'au 18 décembre 1997, les décisions du conseil de la MRC étaient soumises à la règle générale de la majorité simple. Depuis, les décisions du conseil sont prises selon une double majorité, soit la majorité des voix exprimées représentant la majorité de la population totale des municipalités locales de la MRC. Il faut se rappeler aussi que, depuis 1977, une municipalité membre de la MRC peut également posséder plus d'une voix ou encore une municipalité peut avoir plus d'un représentant. Ces particularités varient d'une MRC à l'autre. Elles sont établies par entente entre les municipalités membres préalablement à l'adoption du décret gouvernemental à cet effet.
Les modifications législatives de 1997, introductives de la règle de la double majorité, apportaient une solution permanente au problème répandu du mode de votation d'alors. Antérieurement à 1997, bon nombre de MRC attribuaient un vote à chacun des maires, peu importe l'importance de la population qu'il représentait. À cette époque, on décriait le déséquilibre créé par le système à voix unique. Par exemple, en 1995, dans 15 MRC sur 93, en excluant bien sûr les cas spéciaux de Laval et de Mirabel, il se trouvait une municipalité qui comptait à elle seule plus de la moitié de la population totale de la MRC. De plus, des 27 autres MRC, les deux municipalités les plus populeuses comptaient ensemble plus de la moitié de la population totale de la MRC. Il y avait donc discordance entre le poids politique de la voix de l'élu au conseil de la MRC et sa représentativité.
La volonté d'établir une concordance entre le poids politique et la représentativité a conduit à l'introduction du critère de proportionnalité des voix. Ceci a soulevé un autre problème: la primauté du pouvoir décisionnel ou du droit de veto de facto des municipalités les plus populeuses. La résolution de cette deuxième problématique mena à la règle actuelle de la double majorité en ajoutant l'exigence de cumuler la majorité des voix au conseil et la majorité de la représentativité.
L'UMQ, dans son mémoire sur l'avenir des MRC d'octobre 1995, recommandait l'introduction de la règle de cette double majorité, car, disait-on, cette position permettra d'établir une plus grande équité pour les municipalités de grande taille au sein de la MRC. Le mémoire de l'UMQ poursuivait en souhaitant néanmoins qu'aucune municipalité ou un groupe de municipalités ne devienne l'otage d'autres groupes de municipalités au sein du conseil d'une MRC.
Quatre ans après la mise en vigueur donc de la règle obligatoire de la double majorité et compte tenu des projets de renforcement des agglomérations urbaines au sein des MRC, l'UMQ réitère le même souhait: une règle de prise de décision fondée sur l'attribution d'un nombre de voix en fonction de la représentativité du détenteur et qui n'entrave pas la liberté de chacune des municipalités d'exprimer sa volonté sans qu'elle ne soit l'otage d'une municipalité ou d'un petit groupe de municipalités.
Enfin, mentionnons le souhait de certains membres de l'Union d'admettre la possibilité d'ajouter la population de villégiateurs à la population domiciliée d'une MRC, selon des critères à déterminer, qui pourraient être basés sur le nombre de résidences secondaires dans la définition de la population servant à déterminer le nombre de voix au sein du conseil d'une MRC.
Alors, en ce qui touche le remplacement de l'appellation du «préfet suppléant» par celle de «préfet adjoint», on manque de savoir les objectifs qui sont visés par cette proposition. En voulant remplacer l'appellation de «préfet suppléant» par celle de «préfet adjoint», on s'interroge sur l'intention poursuivie par le législateur. La fonction de «préfet suppléant», au même titre que celle de maire suppléant, signifie, à notre point de vue, fonction complémentaire et alternative d'un élu siégeant au conseil et qui agira en lieu et place du préfet ou du maire, dans l'éventualité de son impossibilité ou de son incapacité d'agir. En adoptant le vocable «préfet adjoint», à l'article 198 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, l'objectif visé est-il de donner plus de pouvoirs à ce personnage, lui donner une fonction distincte, des pouvoirs particuliers? Un adjoint sera-t-il appelé à remplir des fonctions déléguées par le préfet en permanence pour lui alléger la tâche? Quels sont ces pouvoirs-là? Nous croyons que «suppléant» suggère un rôle de remplaçant, alors qu'«adjoint» renvoie à une espèce de permanence avec un pouvoir juridictionnel quelconque. Qu'en est-il exactement? C'est une question que l'on pose.
Vraisemblablement, comme le législateur ne parle jamais pour ne rien dire, cette modification nous intrigue au plus haut point. Selon toute éventualité, l'UMQ demande à ce que la règle de l'alternance dont nous parlions plus tôt trouve application ici entre le préfet et son suppléant. Au surplus, l'Union repousse cette suggestion de modifier cette appellation-là de «suppléant» par celle d'«adjoint».
Alors, au niveau des pouvoirs en matière de délégation de compétences, advenant l'adoption de l'article par l'Assemblée nationale, toute municipalité locale pourra conclure avec toute autre municipalité locale une entente par laquelle elles délégueront à la MRC l'exercice de tout ou partie d'un domaine de leurs compétences.
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(10 heures)
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L'UMQ se dit en faveur d'une disposition semblable. Elle respecte la possibilité de déléguer une compétence par certaines municipalités sans affecter la volonté des autres. A fortiori, seules les municipalités parties à cette entente supporteront toute dépense découlant de son application, et ce serait une décision du milieu et du pouvoir local au niveau d'une délégation à un niveau différent. Cet article offre aux municipalités une option très valable de conclure des délégations à la carte. Comme nous le mentionnions tout à l'heure, cela nous conforte dans notre souci de laisser cours au caractère variable de la dynamique de fonctionnement des conseils d'une MRC à l'autre.
Quant au droit de retrait, dans les cas de déclaration de compétence par la MRC, le projet de loi n° 77 garantira aux municipalités les modalités relatives à l'exercice du droit de retrait. Alors, ces modalités devront être exprimées dans la résolution par laquelle la MRC déclare sa compétence relativement à tout ou partie d'un domaine de compétence. Ces dispositions satisfont aussi les attentes du conseil de l'UMQ, car elles supposent qu'après délibération du conseil de la MRC chacune des municipalités aura valablement l'option de se soumettre ou non à la nouvelle déclaration de compétence.
Et, finalement, les modalités de financement. En matière financière, la MRC possède tous les pouvoirs nécessaires afin d'assurer son financement par les municipalités locales ainsi que de gérer les fonds dont elles disposent. En vertu des dispositions prévues à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, toute municipalité dont le territoire est compris dans celui de la MRC contribue au paiement des dépenses de celle-ci. Les dépenses de la MRC sont réparties entre les municipalités qui doivent contribuer à leur paiement selon tout critère qu'elles déterminent par règlement et qui peut varier selon la nature des dépenses. À défaut d'un tel règlement, les dépenses sont réparties entre ces municipalités en fonction de leurs richesses foncières uniformisées respectives. Une municipalité qui a exercé son droit de retrait quant à une obligation ne contribue pas, quant à elle, au paiement des dépenses relatives à celle-ci.
La MRC adopte par règlement les modalités de l'établissement des quotes-parts de ses dépenses et de leur paiement par les municipalités. Selon ces règles, il n'y a aucun problème de financement dans les MRC. À l'intérieur du cadre législatif de ses compétences et de ses responsabilités, la MRC peut engager les dépenses qu'elle veut.
Le problème du financement de la MRC réside plutôt dans le partage de la dépense entre les municipalités locales membres. Pour la plupart des MRC, les dépenses sont financées et réparties en fonction de l'importance relative de l'assiette foncière des municipalités locales, l'évaluation foncière. Les municipalités avec une évaluation foncière plus importante paient donc plus que les autres. Notons également que ces mêmes municipalités ont en général une quote-part per capita plus grande que celle des autres, par la force des choses. Le contribuable urbain paie donc davantage que son concitoyen rural pour les mêmes services régionaux.
De plus, cet écart est souvent accentué du fait que le coût de production unitaire en milieu urbain plus dense est généralement plus bas. Par exemple, si le coût unitaire de la mise à jour du rôle d'évaluation est de l'ordre de 50 $ par unité d'évaluation en milieu urbain, il peut facilement accéder 75 $ en milieu rural. Alors, on voit là un autre facteur aggravant une situation.
Le Président (M. Vallières): M. Gagnon, c'est parce qu'on a déjà passé de trois minutes le temps qui vous était alloué. Je pensais toujours que ça allait terminer. Peut-être vous demander de conclure dans la minute qui vient.
M. Gagnon (Bernard): Quelques pages, M. le Président, deux pages et demie, si vous me permettez.
Le Président (M. Vallières): Ça va réduire d'autant. C'est parce qu'on réduit d'autant le temps de parole, des échanges. Mais vous pourriez conclure le plus vite possible, s'il vous plaît.
M. Gagnon (Bernard): En conclusion, pour terminer, j'aimerais, au nom de l'Union, remercier le ministre des Affaires municipales, M. Boisclair, pour sa disponibilité et l'ouverture dont il fait preuve dans ce dossier complexe des structures municipales régionales. L'UMQ se déclare globalement satisfaite du contenu du projet de loi n° 77. Elle exhorte le ministre à porter une attention toute particulière sur la nécessité de la recherche de l'équilibre dans la cohabitation urbaine et rurale dans l'ensemble des MRC du Québec. Je pense que c'est un, sinon l'objectif majeur de l'ensemble de ces travaux et de cette recherche.
Le contenu de notre mémoire reflète les éléments qui ont fait consensus parmi les membres de notre organisation. Nous tenons cependant à mentionner l'effort de réflexion de certains de nos membres qui se sont présentés devant cette commission et ont exprimé des visions distinctes sur la structure décisionnelle dont devrait se doter la MRC. Nous profitons de notre présence en commission parlementaire, devant ses membres et le ministre M. Boisclair, pour rappeler l'important exercice dans lequel s'investit l'Union dans le cadre de sa planification... de la démarche de planification stratégique qui est déjà entamée. Les nombreuses transformations qui touchent le monde municipal québécois nous amènent à redéfinir les enjeux et les orientations pour les municipalités.
C'est pourquoi l'Union s'est donné pour mission, et je le rappelle tout simplement, d'adapter les municipalités à la nouvelle sociodémographie, de faire de la municipalité le lieu de la personne et de la citoyenneté, de remodeler la gestion municipale et de reconstruire les solidarités municipales, enfin, de relancer les relations gouvernement-municipalités sur de nouvelles bases avec, pour principe dominant, l'autonomie municipale et le respect mutuel des parties. Voilà l'essentiel des propos que nous avions à vous transmettre aujourd'hui. Alors, mes collègues et moi-même sommes prêts à répondre aux questions qui pourraient vous venir. Merci.
Le Président (M. Vallières): Merci bien, M. Gagnon. Alors, le premier intervenant sera M. le ministre.
M. Boisclair: Je vous remercie de votre présentation. Je pense qu'il n'y a pas nécessairement de surprise dans votre message. Ce sont des sujets dont nous avons déjà discuté et débattu. Je voudrais vous poser en rafale quelques courtes questions. Est-ce que, à votre avis, le statu quo serait préférable à tout mouvement qui serait proposé par le législateur?
Le Président (M. Vallières): M. Gagnon.
M. Gagnon (Bernard): Alors, ça dépend toujours, parce que c'est une question très vaste, le statu quo. Je pense qu'il y a des principes à l'intérieur de l'ensemble des discussions. L'autonomie des municipalités en est un.
M. Boisclair: Le statu quo de 77, là, la proposition qui est sur 77. Est-ce que l'Union préfère le statu quo à la situation actuelle?
M. Gagnon (Bernard): Non. C'est... La proposition de 77, globalement, en général, est appuyée par l'Union des municipalités du Québec.
M. Boisclair: Est-ce que vous voyez des aménagements possibles dans le projet de loi n° 77 qui vous permettraient un plus grand niveau de confort, avec le projet de loi n° 77?
M. Gagnon (Bernard): Oui. L'élection du préfet auquel on n'est pas d'accord nécessairement et la question de la définition de «préfet adjoint», «préfet suppléant».
M. Boisclair: Est-ce que, plutôt que d'énoncer le principe de votre désaccord avec la possibilité pour les MRC à caractère urbain-rural de procéder à l'élection de... au suffrage universel, est-ce que nous ne pourrions pas reconnaître ce principe, l'inscrire dans la loi, mais faire en sorte que, dans les quatre MRC qui sont... où les regroupements dans les agglomérations ne sont pas terminés, où on viendrait mettre une clause suspensive pour ces MRC ? en tout cas, trouver une mécanique législative pour laquelle on exclurait ces quatre MRC ? est-ce que vous seriez favorable à ce qu'on introduise le principe? En somme, est-ce que votre opposition à l'élection du préfet au suffrage universel est une opposition forte de principe ou, si nous trouvions des accommodements nécessaires pour faire en sorte que, dans la MRC d'Argenteuil, celle dans le bout de... MRC d'Argenteuil, il y en a d'autres, là, les cas de Lachute, Brome-Missisquoi, et Joliette, et Memphrémagog, qui sont les quatre MRC ou les... Certains pourraient prétendre, comme l'a dit M. Carette hier, au nom des villes d'agglomération, que ces quatre MRC des regroupements d'agglomération ne sont pas terminées. Si on excluait ces MRC de la disposition d'élection, est-ce que c'est une proposition d'accommodement qui vous satisferait?
M. Gagnon (Bernard): Peut-être... Oui. Alors, peut-être M. Langevin, puis je reviendrai.
M. Langevin (Jean): Non, bien, permettez-moi juste de le mettre au courant de la discussion d'hier, parce qu'il ne devait pas...
(Consultation)
M. Gagnon (Bernard): Écoutez, je pense que, bon, je n'aurais pas été là hier, puis ça n'aurait pas changé grand-chose à ce que j'étais pour dire, mais... Je n'y étais pas d'ailleurs. Globalement, c'est une opposition de principe, c'est clair, parce que c'est toute la question de la définition du pouvoir local qui est en jeu actuellement.
M. Boisclair: Au nom de ce principe donc, vous vous opposez donc même à l'élection du préfet au suffrage universel pour des MRC à caractère rural?
M. Gagnon (Bernard): C'est toute la question... C'est toute la question de la définition des municipalités et de leur autonomie. Qu'on ait un principe d'autonomie... L'autonomie des municipalités s'accommode mal d'une définition rurale-urbaine comme telle. Qu'il y ait des habilitations, qu'il y ait des décisions qui émanent de ces corps, constituées pour habiliter, par exemple, un tout plus grand, la MRC à certains égards, soit, mais, globalement, d'introduire un niveau de palier élu au suffrage universel, et on sait ce que ça comporte par la suite des choses...
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(10 h 10)
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M. Boisclair: Là, je vous pose une question claire. Moi, je suis convaincu que nous avons fait un bon choix en permettant l'élection du préfet au suffrage universel pour les MRC à caractère rural. Le monde rural a besoin de cette institution parce que, dans certaines situations, les municipalités de plus petite taille n'ont pas toujours... pas qu'elles manquent de volonté, mais elles n'ont pas toujours l'expertise et les ressources pour accomplir des tâches et s'acquitter de responsabilités qui doivent être... dont le monde municipal doit s'acquitter. Pensons à l'aménagement, pensons aux préventions incendies, pensons à la gestion des matières résiduelles, des champs qui sont importants. Est-ce que vous remettez même en cause cette décision qui a été prise par le gouvernement et vous souhaiteriez qu'on retourne en arrière et qu'on revienne au statu quo de l'époque?
M. Gagnon (Bernard): Bien, je ne vois pas en quoi l'élection d'un préfet au suffrage universel activerait ou réglerait davantage une série de problèmes à cet égard-là. Il y a des voies différentes, dans un contexte de respect des structures déjà existantes, qui ont fait largement leurs preuves, qui présentent aujourd'hui des défis importants, on en convient tous, mais l'élection au suffrage universel du préfet ne nous apparaît pas comme étant une solution à l'ensemble de cette problématique.
M. Boisclair: En tout cas, moi, je vais vous dire de façon... très clairement, puis je le dis au nom des gens de ma formation politique, sans aucune ambiguïté: Le choix de faire en sorte que, dans les MRC à caractère rural... La décision que nous avons prise est une décision que nous avons prise avec enthousiasme parce que nous pensons qu'il faut, à terme, faire en sorte qu'il y ait une consolidation de la MRC en milieu rural. Et nous allons, avec force et vigueur, défendre ce principe auquel adhère le monde rural.
La question qui est davantage soulevée aujourd'hui cependant, j'en conviens, ce sont pour les MRC à caractère urbain et rural. Je comprends que vous manifestez cette même opposition, mais il me semblerait que vous auriez intérêt à discuter aussi avec d'autres de vos collègues du monde municipal qui ont une opinion totalement divergente de la vôtre. Et il me semble que nous pourrions, compte tenu de ce qu'est le Québec moderne d'aujourd'hui, compte tenu à la fois du rôle inestimable que jouent les grandes villes tout comme les villes d'agglomération, mais, compte tenu aussi de la réalité bien québécoise qui est celle du monde rural que nous voulons soutenir et voir se développer, que nous voulons voir maintenir sa capacité d'attraction, que nous souhaitons aider par une Politique nationale sur la ruralité... qu'on ait suffisamment de perspectives pour trouver un aménagement.
Et je vous pose donc cette question bien pointue: Est-ce que nous ne serions pas justifiés de permettre l'élection du préfet au suffrage universel aussi pour les MRC à caractère urbain et rural et s'inspirer de la proposition du maire de Saint-Georges, M. Carette, qui, hier, nous disait: Moi, j'embarque là-dedans au nom des villes d'agglomération, là, le Regroupement. Ils étaient... M. Gascon, le maire de Saint-Jérôme, et il y avait aussi le maire de Magog qui était avec nous. Les trois sont venus nous dire: Nous, on souscrit à l'élection.
Ceci étant dit, il y a quelques MRC ? ils en identifiaient quatre ? où, de leur avis, les regroupements dans les agglomérations urbaines n'étaient pas tout à fait terminés, et qu'ils souhaitaient que le législateur, avant d'étendre le grand principe de l'élection au suffrage universel pour les MRC à caractère rural et urbain, que le législateur donne, accorde un traitement particulier.
Vous savez que, dans le cas de Magog, il y a un rapport de la Commission municipale qui a déjà fait des réflexions et des propositions sur cette question. Donc, est-ce que ce n'est pas là une piste d'atterrissage qui pourrait nous permettre de nous réconcilier et qui pourrait nous permettre de correctement faire en sorte que tout le monde se reconnaisse, tous les Québécois, toutes les Québécoises, tous les élus municipaux se reconnaissent avec un certain enthousiasme dans les institutions que nous nous donnons pour mieux dialoguer et mieux vivre notre partenariat? Parce que le partenariat que vous réclamez, vous le réclamez en fonction de vos intérêts, mais le partenariat, c'est aussi vrai aussi pour les autres municipalités, dont les municipalités plus rurales qui sont davantage regroupées dans l'autre union. Et là, si je me mets partenaire de l'un, je me mets l'adversaire de l'autre; si je me mets partenaire de l'autre, je me fais l'adversaire de l'Union des municipalités.
Alors, est-ce que nous ne pourrions pas trouver une piste d'atterrissage, M. Gagnon? Est-ce qu'il n'y a pas une possibilité d'en arriver à un compromis qui ferait en sorte que le partenariat se vivrait, non pas avec une union ou l'autre, mais se vivrait avec l'ensemble du monde municipal? Est-ce que nous n'avons pas la maturité pour en arriver là ou si les gens vont rester bien campés sur leurs propositions? Parce que le ministre, là, il va être partenaire non pas d'une union, il va être partenaire du monde municipal.
M. Gagnon (Bernard): Écoutez, je n'étais pas là, mais M. Carette s'est opposé à l'élection du préfet, là. Et je pense que c'est sa position. Il y a peut-être un problème de compréhension à cet égard-là, mais c'est ce que j'en comprends et c'est ce que j'en retiens. Aussi, il faut faire attention pour ne pas trop catégoriser. On donne et vous donnez l'impression dans l'échange que, finalement, l'Union des municipalités est insensible au monde rural et, plus que ça, ne le représente pas, dans une certaine mesure. Et vous donnez a contrario ce pouvoir-là globalement à l'autre union. C'est probablement inexact de penser ça. C'est notre point de vue.
Il ne faut pas oublier que nous représentons également les villes à caractère de centralité qui sont impliquées à l'intérieur de l'ensemble de la vie rurale comme telle. C'est important, vous le savez, vous les connaissez. Et ces villes-là sont certainement prêtes à accepter un ensemble de situations et de jouer véritablement leur rôle de moteur dans un contexte qui est bien établi, celui des municipalités locales. Pourquoi vouloir arriver à ne pas reconnaître... ou bafouer un principe de base comme celui-là, celui de l'autonomie des municipalités, pour voir comment et de quelle façon on peut trouver une solution qui aurait pour conséquence de créer un palier additionnel de représentation, avec tout ce que ça comporte, peut-être pas maintenant mais éventuellement? L'élection au suffrage universel risque d'amener des compétences additionnelles, risque de d'amener également, probablement, les moyens de réaliser les objectifs que l'on voudra bien se donner, donc une taxation éventuellement, et c'est sur cet aspect-là où on vous dit tout simplement qu'il est préférable d'examiner les avenues qui empruntent les voies que l'on connaît maintenant au niveau de la dispensation des services comme tels, tout en reconnaissant le rôle de planification au niveau des MRC.
M. Boisclair: Bien. Je constate qu'il y a un désaccord. Je ne veux pas polariser les points de vue, mais vous réclamez que nous agissions en partenariat avec le monde municipal. Moi, j'acquiesce à ça, mais être partenaire du monde municipal, c'est bien plus qu'être partenaire d'une union quelle qu'elle soit. Et je vous invite tout à l'heure à assister à la présentation de vos collègues de la FQM, qui sont juste derrière vous, qui viennent se joindre à nous, pour comprendre jusqu'à quel point il y a là un fossé qui, à l'évidence, vous sépare. Et j'agrée à votre idée de partenariat, mais, pour la vivre, il faudrait qu'il y ait chez l'un comme chez l'autre une certaine souplesse, une certaine ouverture, puisqu'il m'apparaît impérieux qu'au Québec nous consolidions nos communautés rurales. Et j'aimerais, moi, parfois vous entendre parler de cet impératif.
Le Québec, en déclin démographique, forme aujourd'hui 24 % de la population canadienne. Dans 50 ans, nous serons 16 %. La population québécoise vieillit à un rythme accéléré. En 30 ans, le nombre de personnes âgées va passer de 12 à 24 %. Est-ce que nous allons être à la remorque et ajuster nos institutions après le coup ou si plutôt, aujourd'hui, de façon claire, nous ne devrions pas nous donner des institutions rassembleuses, au-delà parfois d'une certaine réalité municipale, particulièrement dans le monde rural, pour faire en sorte que nous ayons des niveaux de services, des niveaux d'organisation et de planification non seulement de l'aménagement, mais aussi des services et de la livraison de ces services de proximité à la population, qu'on ait cette réflexion qui se fasse sur la base de la MRC? Il m'apparaît que la situation démographique au Québec, il m'apparaît aussi que notre volonté de correctement soutenir et de représenter le monde rural, cette volonté doit se traduire par les choix qui sont contenus dans le projet de loi et aussi dans la Politique nationale sur la ruralité.
Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Gagnon, ce sera la dernière intervention du côté ministériel. Vous pouvez répondre au commentaire du ministre.
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(10 h 20)
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M. Gagnon (Bernard): Bon. C'était tout simplement pour mentionner... il y a quand même un fait brut qui demeure et qu'il ne faut pas oublier: dans les villes de centralité y habitent à peu près 50 % de la population rurale comme telle. On parle de 600 000 sur un total de 1,2 million approximativement, ça a été mentionné hier. Donc, il ne faut pas penser qu'il y a des rôles qui sont préconçus globalement, et c'est très artificiel, ça, relativement à certaines structures plutôt que d'autres. Au contraire, tout ça est très mêlé. Et il ne faut pas oublier que les villes de centralité, qui représentent probablement une partie très importante du monde rural, ont un rôle moteur majeur à jouer. Elles sont prêtes à le jouer, mais dans un contexte de respect des structures telles qu'elles sont existantes maintenant. Qu'il y ait des aménagements, soit, mais je voudrais mettre en garde contre ces catégorisations-là qui nous amènent à des conclusions qui ne sont, à mon point de vue, pas basées sur les faits, et donc je tenais quand même à mentionner ça. Ce n'est pas si tranché au couteau que ça, la représentation du monde rural. D'ailleurs, les éléments des villes de centralité ? il y en a plus de 60 ? représentent plus de 50 % de la population rurale du Québec.
Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, M. Gagnon, M. Tremblay, M. Langevin, merci pour votre présentation.
Je souhaiterais revenir sur l'élément qui vient d'être soulevé concernant la dichotomie ou le clivage qui existe au quotidien entre le monde rural et le monde de la réalité urbaine, là, dans le monde municipal.
Mais avant, peut-être de façon plus pointue, m'attarder avec vous sur la question concernant les règles de prise de décision. Alors, vous cautionnez le principe de la double majorité avec plafonnement. Si je m'appuie sur une réalité bien concrète qui est celle, par exemple, de la MRC Rimouski-Neigette, dont le maire de Rimouski est ici aujourd'hui, je me rends compte évidemment que la ville de Rimouski représente quand même 79 % de la population. Et, lors de la tournée de la commission Nicolet/Jutras, il y a plusieurs craintes qui ont été exprimées ? à la page 65 du rapport ? par les municipalités rurales de la MRC. Et une des réalités en fait qui a été exprimée ? vous me permettrez de citer ? on disait: «Crainte exprimée quant à la suggestion de séparer les deux mondes, rural et urbain, plutôt qu'initier une dynamique de plus grande collaboration.» Et même... On disait même qu'il y a certains maires... Il y a un maire d'une petite municipalité qui a lancé: «Un maire, un vote», la formule d'un maire, un vote, en fait parce que, justement, la ville de Rimouski représente quand même 79 % de la population.
Alors, prenons spécifiquement le cas de la ville de Rimouski, qui représente 79 % de la population dans la MRC Rimouski-Neigette. Comment concrètement vous allez appliquer le principe de la double majorité avec plafonnement? Et ce plafonnement-là, on l'établit à quel endroit? 51 %? 50 %? Concrètement, comment on va pouvoir relever ce défi-là à partir de votre exemple pour éviter effectivement que les maires des plus petites municipalités autour de Rimouski, là, aient littéralement l'impression de se faire avaler par la ville de Rimouski?
Le Président (M. Vallières): Alors, c'est M. Tremblay qui va répondre à la question.
M. Tremblay (Michel): Mme la députée, M. le ministre, évidemment, j'écoutais les débats au préalable, là, au niveau de la fameuse ruralité et les villes d'urbanité, ça se vit, ça, dans la région. Et, pour le vivre, nécessairement, il faut qu'il y ait des dialogues, il ne faut pas qu'il y ait des batailles tranchées entre séparer la partie rurale et la partie urbaine. Donc, il faut ensemble cohabiter puis essayer de trouver des modus vivendi acceptables de part et d'autre. Et je pense que le fait de la double majorité, dans le cas de la ville de Rimouski tout particulièrement, où nous représentons 79 % de la population... ce serait impensable qu'un maire... un maire, un vote. Je pense qu'à ce moment-là ce serait instaurer la dissidence au préalable. Ce qu'il faut, c'est trouver un modus vivendi acceptable, et je pense que l'acceptabilité, c'est la double majorité pour la population.
Quant au représentatif, le nombre de votes pour le nombre de citoyens que je représente au fonctionnement de la MRC, évidemment, on est d'accord avec la proposition que nous avons faite, l'Union des municipalités, à savoir qu'on ait un vote proportionnel finalement. Ça veut dire que, dans le cas de Rimouski, j'ai neuf votes sur 18; il me faut avoir le consentement d'un autre maire pour pouvoir faire accepter la proposition. Donc, j'ai toujours besoin, moi, d'un maire de l'environnement pour pouvoir donner l'aval à une proposition. Si on n'est pas capables de s'entendre, à ce moment-là, c'est la double majorité, mais ça force le dialogue également. Si on ne s'entend pas, bien, on remet ça en question, et, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas le consensus, on n'ira pas de l'avant avec le projet. Mais ça force le dialogue et, en même temps, ça nous oblige à s'entendre. Et je pense qu'à l'heure actuelle on s'est entendus sur bien des projets, malgré les tiraillements, mais, au moins, il y avait une espèce de respect, d'une part, de la population et, d'une part, des représentations des municipalités environnantes.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: M. le Président, vous me permettrez à nouveau une question toujours sur ce sujet qui est extrêmement important parce que, là, on est vraiment dans la pratique, là. Je disais hier à vos collègues qui sont venus ici: Soyons pragmatiques pour tenter de trouver des solutions concrètes finalement pour relever le défi de la cohabitation harmonieuse. C'est un bien beau principe, la cohabitation harmonieuse entre le monde rural et le monde urbain, là, mais dans les faits, comment tout ça se... comment on peut faire atterrir tout ça sur le terrain?
Vous avez parlé, M. le maire, d'un modus vivendi acceptable et vous vous appuyez sur une expérience vécue effectivement pour affirmer que, bon, la situation conduit souvent à des tiraillements, mais vous finissez toujours par vous entendre. Quel est, selon vous, le modus vivendi acceptable pour effectivement arriver à rencontrer l'objectif qui est annoncé par le législateur dans le projet de loi n° 77?
Le Président (M. Vallières): M. Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Bien, je pense que, déjà, le maintien de la double majorité nous permet à ce moment-là d'avoir l'équilibre. La question de la représentation au niveau du nombre de votes au conseil d'administration, nécessairement, on ne veut pas avoir la majorité là, ce serait, à mon sens, la double majorité inacceptable et indéfendable. Alors, ce qu'il nous faut, c'est d'avoir un vote proportionnel à notre population qu'on représente pour chacune des municipalités et, à ce moment-là, ça fait l'équilibre.
Alors, d'une part, ils peuvent décider et, moi, je peux en même temps faire l'équilibre avec ma double majorité. Alors, ils sont... Supposons qu'ils sont neuf sur un côté et que je suis d'accord avec leur proposition, ça va de l'avant, il n'y a pas trop de problèmes. Si on est en désaccord, ça nous force à nous entendre. Donc, je pense qu'il y a une espèce d'équilibre. La double majorité force l'équilibre.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Juste un élément de précision, si vous permettez, M. le Président, M. le maire, quand vous dites: Moi, comme maire de Rimouski, je vais représenter... dans le fond, je vais incarner un pourcentage de votes de ma population. Vous représentez 79 % de la population. Alors, vous comprendrez bien, dans le fond, que 79 % de la population dans la dynamique, là, ça fait quand même... vous pesez lourd dans la balance, comme on dit.
Alors, dans ce sens-là, comment rassurer les maires des plus petites municipalités, les municipalités rurales qui sont autour de Rimouski, dans ce contexte-là? Comment peut-on les rassurer pour éviter effectivement que... qu'on atteigne justement le modus vivendi acceptable puis l'équilibre auquel vous faites référence?
M. Tremblay (Michel): Bien, il y a un plafonnement, c'est-à-dire qu'il y a deux possibilités. Lorsqu'on s'entend au point de vue majorité et au point de vue en maintenant le nombre de voix, ça va de l'avant. Si on ne s'entend pas, bien, c'est remis en question, et je pense qu'à ce moment-là ça force le dialogue ou encore... C'est un peu comme un conseil municipal. Au conseil municipal, nous autres, à l'heure actuelle, on marche autant que possible... Je préside un nouveau conseil municipal à la ville de Rimouski. On a 300 résolutions de passées depuis le début puis on a fait ça quasiment à l'unanimité toujours. Donc, c'est la... et c'est bien ainsi. Si c'est divisé, je ne sais pas, on est 12, c'est-à-dire six, six, ça ne donne pas l'aval à la résolution. Vous savez très bien qu'en gestion municipale, c'est-à-dire en décision municipale, lorsqu'il y a équilibre des votes, le maire peut toujours trancher, mais ça, c'est difficile et c'est dur à supporter.
Mais, au niveau de la MRC, c'est le même principe. Si on arrive à l'équilibre des votes, c'est-à-dire qu'il y a neuf d'un bord, neuf de l'autre, à ce moment-là, la résolution ne passe pas et, par conséquent, ça ne donne pas l'aval à ça et ça nous force nécessairement peut-être à revoir notre position.
La même chose au niveau d'un maire. Un maire qui tranche toujours, à mon sens, la décision du conseil, il va être malheureux, puis malheureux pour un bout de temps. On ne peut pas marcher toujours... le maire décider, c'est impossible, même s'il peut exercer son droit de vote. Alors, le même phénomène se produit au niveau de la MRC. La MRC, le préfet...
(Consultation)
M. Tremblay (Michel): Le préfet pourrait trancher à la rigueur, mais c'est dur à supporter.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.Mme Normandeau: Est-ce que c'est terminé, M. le Président? Est-ce qu'on a encore juste un petit peu de temps?
Le Président (M. Vallières): Non, on a encore environ quatre à cinq minutes.
Mme Normandeau: Bien, puisqu'on a la chance de s'appuyer sur une expérience vécue avec le maire de Rimouski, ce matin...
M. Tremblay (Michel): Mme la députée, si vous me permettez, je voudrais répliquer un peu. Tout à l'heure... au niveau de l'élection au suffrage universel. On est en délégation de pouvoir. Moi, je suis délégué par la ville de Rimouski comme représentant de la ville de Rimouski. Donc, je ne suis pas élu par le peuple, moi. J'ai un pouvoir délégué de la ville, et mes collègues, mes neuf collègues autour représentant les parties rurales, sont également en pouvoir délégué. Par conséquent, ils ne sont pas au suffrage universel. Je ne vois pas comment est-ce que le suffrage universel du préfet viendrait combler une... alors qu'on est par délégation de pouvoir, les autres qui sommes là. Je pense qu'il y a vraiment un manque de cohérence, là. On ne peut pas faire une élection d'un préfet à l'élection universelle, alors que nous, on est en délégation de pouvoir, à moins que tout le monde, on soit élus par le peuple, tous les représentants à la MRC, là, on serait vraiment délégués par la population. Mais pourquoi nommer le préfet au suffrage universel, alors que nous, on est en délégation de pouvoir?
n(10 h 30)nM. Boisclair: ...
M. Tremblay (Michel): Bien oui, je suis d'accord avec vous, pas de problème, une ville... Dans le cas présent de la ville de Rimouski, c'est véritablement ça, c'est une ville, une MRC. M. le ministre, je suis bien content de vous l'entendre dire.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: J'avais une question à... M. Gagnon même pourrait peut-être y répondre. En fait, la question que j'ai posée à vos collègues qui sont venus hier, qui incarnaient, d'un côté, les villes d'agglomération, de l'autre, les villes de centralité: Qu'est-ce que l'Union des municipalités du Québec est prête à faire comme compromis pour que le projet de loi n° 77 soit acceptable pour l'ensemble du monde municipal? Dans un contexte... Puisqu'on travaille dans un contexte de compromis, quel est le pas que vous êtes en mesure de faire pour qu'on puisse arriver à une entente pour l'ensemble du monde municipal au Québec?
M. Gagnon (Bernard): Bien, M. le ministre parlait d'une ville, une MRC ou une MRC, une ville. C'est le respect complet de l'ensemble des principes qui sont sur la table, c'est l'affirmation de l'autonomie du pouvoir local, c'est la nécessité de créer une masse particulière pour rendre certains services. Il y a là une idée qui consacre des principes. Mais d'avoir des solutions qui, comme M. Tremblay le mentionnait, empruntent des principes à gauche et à droite, on se retrouve des fois avec un canard boiteux. D'avoir un préfet, comme il dit, élu au suffrage universel et un ensemble de maires qui sont là par délégation comme telle, ça crée un problème, c'est clair. À cet égard-là, il y a d'autres avenues qui peuvent être employées pour arriver aux mêmes objectifs, et ces avenues-là pourraient respecter l'ensemble du monde municipal tel qu'il existe maintenant. Et ce n'est pas un principe accessoire, le principe de l'autonomie des municipalités, c'est un principe de base.
Et d'ailleurs on se pose aujourd'hui des questions: Administration locale, gouvernement local? Où devrions-nous aller? On fera une réflexion, au niveau de l'Union des municipalités, sur cette question-là aussi. Si nous sommes pour assumer des responsabilités de première ligne, est-ce qu'on doit se contenter de jouer un rôle d'administration? Alors, c'est... et avec tout ce que ça comporte comme échanges obligatoirement. Mais, au travers de tout ça, il y a le respect du pouvoir local, de la démocratie locale, de l'autonomie municipale.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée.
Mme Normandeau: Un commentaire toujours sur la question évidemment du monde rural, la réalité rurale et la réalité urbaine. Vous, dans votre discours, vous affirmez effectivement que vous travaillez à chaque jour avec les municipalités rurales et vous plaidez en faveur d'une plus grande cohabitation, mais, en même temps, dans votre mémoire ? c'est votre position, ça a été également la position de vos collègues qui sont venus hier ? vous admettez bien sûr que les villes de centralité, les villes d'agglomération représentent les pôles de développement de chacune de vos MRC.
Alors, évidemment, il y a là, vous comprendrez bien, au même moment ? puis c'est l'interprétation que j'en fais, et vous aurez certainement l'occasion de me corriger si je fais erreur ? au même moment que vous plaidez pour une plus grande harmonisation des deux réalités, vous admettez quand même que vous tenez mordicus, vous tenez à ce que vos villes, les villes de centralité et d'agglomération, soient reconnues comme des pôles de développement. Donc, vous entretenez un peu vous-même cette dichotomie ou ce clivage entre le monde rural et le monde urbain.
Alors, évidemment, dans un contexte comme celui-ci... Même les maires de villes de centralité demandaient une reconnaissance officielle et formelle dans le cadre du projet de loi n° 77. Ils allaient même plus loin finalement que certaines municipalités qui sont membres chez vous. Alors, dans ce sens-là, comment on peut arriver, de notre côté, là, concrètement, de façon très pragmatique justement, à passer par-dessus ça puis à arriver véritablement à atteindre l'objectif qu'on s'est fixé, là, comme législateurs?
Le Président (M. Vallières): Oui, alors, M. Gagnon, ce sera la dernière intervention.
M. Gagnon (Bernard): Oui. Merci. Bien, toute cette question-là des villes à caractère de centralité, c'est un état de fait. L'ensemble de l'action et de la présence dans le milieu, ce n'est pas un souhait, c'est une réalité comme telle. Ce sur quoi on en est, ce n'est pas tellement sur les objectifs comme sur les moyens qui sont employés. Si on dit: Une MRC, une ville ? vous pourrez poser la question un petit peu plus tard, ça serait intéressant de voir quel est le type de réponse ? dans le contexte où on doit, à mon point de vue, favoriser la confirmation d'un gouvernement fort local, non pas d'une structure supramunicipale ou régionale... C'est là où on diffère de points de vue. Mais, quant au reste, c'est clair qu'il y a des nécessités et des obligations de discussion et d'entente. Mais on ne peut pas choisir la voie de la complexité, on doit choisir la voie de l'affirmation du pouvoir local, de la démocratie locale, pas celle de son dédoublement.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci de votre contribution à nos travaux.
Je demanderais maintenant à la Solidarité rurale du Québec de bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous continuons nos travaux avec Solidarité rurale du Québec. Alors, MM. Proulx et Desjardins, des habitués à nos travaux en commission, vous disposez de 20 minutes pour la présentation. Mais, évidemment, plus vous êtes courts en présentation, plus on peut profiter d'échanges avec les députés de chaque côté de la table. M. Proulx, la parole est à vous.
Solidarité rurale du Québec
M. Proulx (Jacques): Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, j'essaierai d'être assez rapide. Vous pouvez le constater, notre présentation est relativement courte. En fait, j'éviterai de présenter Solidarité rurale; la majorité d'entre vous savez que c'est une coalition en fait qui regroupe tous les grands organismes du Québec et qui est en place depuis 1991.
Alors, le contexte général. Dès 1999, Solidarité rurale du Québec, dans son Avis pour une politique gouvernementale de développement rural, se faisait l'écho d'une demande maintes fois exprimée par les ruraux lors de la Corvée d'idées, soit de privilégier le territoire de la municipalité régionale de comté dans la planification et la gestion du développement rural. Et il faut dire que ces structures de concertation ne sont pas les seules à intervenir sur le territoire, mais elles ont l'avantage d'être démocratiques et d'avoir des règles de fonctionnement claires. À l'heure actuelle, les MRC sont responsables devant les populations qui ont élu chacun de leurs membres. Or, le caractère démocratique de ces institutions prend encore plus de sens avec l'élection du préfet au suffrage universel.
Solidarité rurale du Québec s'est prononcée à plusieurs reprises, autant sur la réorganisation municipale dans son ensemble que sur les nombreux projets de loi qui y étaient associés. Il n'est pas nécessaire ici de reprendre la totalité de ces arguments, sinon de redire que, dans l'ensemble, la réforme initiée par le ministère des Affaires municipales porte en elle une vision d'un Québec centré sur les villes que même les dispositions introduites dans les projets de loi n° 60, 29 et 77 ainsi que la Politique nationale de la ruralité ne peuvent à eux seuls renverser.
Dès son dépôt en avril 2000, les fondements idéologiques de la réorganisation municipale ont fait sursauter Solidarité rurale du Québec. La réforme faisait état de la concurrence improductive entre les municipalités et de leur insertion nécessaire dans la nouvelle économie mondiale, au moment même où plusieurs d'entre elles en subissent les contrecoups, notamment dans le secteur forestier. Au dire de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, le Québec entre dans un siècle des agglomérations. La richesse se crée donc précisément par le renforcement des 31 agglomérations urbaines du Québec contenant 78 % de la population, 85 % de l'emploi, 82 % du produit intérieur brut. L'esprit de la réforme n'est pas sans rappeler la renaissance des concepts phares des «pôles de croissance» et des «pôles de développement» qui ont marqué plusieurs interventions en développement régional dans les années soixante-dix.
n(10 h 40)n La réorganisation municipale qui s'achève n'est donc pas qu'une simple réforme touchant les structures municipales, l'identification des équipements supralocaux et la révision de la fiscalité locale. Ainsi, les ruraux craignent d'être marginalisés dans une opération qui vise à fusionner les petites municipalités rurales au pourtour des villes-centres, de perdre un poids politique important face aux nouveaux conseils municipaux et de voir le citoyen se désengager de la vie publique dans les nouvelles entités créées.
Dans une étude fort bien détaillée, Clermont Dugas, professeur à l'Université du Québec à Rimouski, a démontré que les fameuses économies d'échelle et administratives souhaitées par le gouvernement ne sont pas fondées ni sur des études valables ni sur des observations réelles et que les villages, aussi petits soient-ils, ont de solides bases historiques, une identité particulière et un sentiment d'appartenance porteur d'avenir.
Ce qui est présenté comme un renforcement du pouvoir local est bien souvent une diminution pour les petites municipalités rurales regroupées à d'autres dont l'importance démographique est nettement supérieure. Les résidents de ces petites municipalités deviennent alors assujettis aux règlements des municipalités plus populeuses et sont par le fait même dépossédés du plein contrôle de leur territoire. En somme, mentionne Dugas, en dehors du champ de fiscalité, «tout repose essentiellement sur des considérations théoriques et idéologiques dont les fondements relèvent plus de la spéculation que de faits clairement établis, même s'il est largement fait référence aux notions de rationalité, de cohérence, d'efficacité et d'efficience[...]. La mise en place d'une administration unique qui aura pleine autorité sur l'ensemble du territoire regroupé est un autre de ces soi-disant avantages non démontrés. La question fondamentale qui se pose ici est de savoir en quoi une administration unique est avantageuse aux citoyens. Cette question peut être envisagée sous au moins deux angles différents: soit par rapport aux taxes et services, soit en regard de la modification du pouvoir politique ou de la façon de vivre la démocratie locale.» D'un autre angle, la réforme ne semble pas entièrement injustifiée, puisqu'elle encourage les regroupements de services à l'échelle des MRC, la polyvalence dans l'utilisation des équipements collectifs. Elle absorbe les questions essentielles du partage des responsabilités et du financement entre les municipalités, tout en permettant une identification de problèmes variés touchant des populations d'un territoire élargi.
Cependant, la réorganisation municipale a créé des ensembles démographiques d'envergure faisant fi de bien des considérations géographiques, économiques, politiques, sociales et culturelles. La réforme n'a guère permis de nuances; elle applique à tous le même modèle. Le principal problème de la réforme réside dans une vision unique urbaine des enjeux actuels, autant pour la fiscalité, le partage des compétences, le développement des services et des équipements que le développement économique.
En toile de fond, Solidarité rurale déplore la création des catégories de MRC ayant des compétences et des pouvoirs très variables. Le Québec se retrouve donc avec 48 MRC à caractère rural et deux communautés rurales, 28 MRC à caractère urbain et rural, des villes faisant office de MRC et des MRC comprises à l'intérieur des nouvelles communautés métropolitaines de Québec et de Montréal.
Solidarité rurale croit encore qu'une véritable décentralisation pourrait apporter des solutions concrètes aux problèmes de disparité et permettre la mise en oeuvre d'un véritable développement endogène à l'échelle des MRC. Il faut néanmoins reconnaître que des améliorations tangibles ont été apportées depuis l'automne dernier en matière de développement rural et de renforcement du pouvoir des paliers municipaux. L'élection du préfet au suffrage universel en est un exemple manifeste. Nous saluons la volonté du gouvernement d'avoir permis aux MRC à caractère rural de disposer de ce nouveau moyen, même si le Rapport du groupe de travail sur le fonctionnement des municipalités régionales de comté à caractère urbain et rural l'avait disqualifié de facto.
L'élection du préfet. L'instauration par la loi n° 29 de l'élection des préfets au suffrage universel pour les MRC à caractère rural constitue une avancée démocratique importante dans la gestion des affaires municipales. Ce pouvoir encourage la collégialité au conseil de la MRC plutôt que la polarisation qu'entraîne le système actuel, tout en assurant un leadership clair du préfet sur l'appareil administratif. L'élection de préfet à l'échelle des MRC permet enfin de réduire l'écart entre le monde rural et les grandes villes qui ont déjà des maires élus de la sorte. Non seulement Solidarité rurale du Québec propose que l'élection des préfets au suffrage universel soit permise aux MRC à caractère urbain et rural, mais que le gouvernement québécois prévoie une date butoir pour rendre obligatoire cette disposition pour toutes les MRC du Québec. Une telle responsabilité politique permettrait de rehausser la responsabilité et la légitimité du préfet à l'égard des citoyens encore davantage si toutes les municipalités locales sont représentées au sein du conseil d'une MRC.
L'élection du préfet au suffrage universel devrait également servir à renouer les liens significatifs avec la population. Il importe ici que le schéma d'aménagement d'une MRC redevienne un projet de vie plus global qu'il ne l'est actuellement et puisse rejoindre les gens dans leur quotidien.
Dans la routine de l'administration des permis et des règlements, cette dimension de la participation des citoyens et de la communication semble avoir perdu de son lustre. Plus que jamais, avec notamment la mise en place de la Politique nationale de la ruralité, l'occasion est belle de renforcer les liens entre le développement local et la planification en aménagement du territoire à l'échelle de la MRC.
Les règles concernant la prise de décision. Lors de la création des MRC, le législateur introduisait, dans les règles de prise de décision et de gouvernance, la notion de poids démographique, donnant alors aux villes-centres un vote prépondérant par le mécanisme de la double majorité. Solidarité rurale du Québec désapprouve ce fondement qui donne plus d'importance, au chapitre des décisions, à une municipalité contenant plus de la moitié de la population totale d'une MRC. Rappelons que cette question du poids démographique est d'ailleurs absente dans notre système parlementaire. Une fois élus, les députés, peu importe le nombre de leurs électeurs, ne jouissent pas de privilèges particuliers. Pourquoi en serait-il ainsi pour les villes-centres d'une MRC?
Sans se prononcer sur un quelconque mécanisme afférent à la prise de décision, Solidarité rurale du Québec souhaite fermement que le projet de loi n° 77 puisse protéger les municipalités rurales à l'égard de la municipalité la plus populeuse. Le rôle de l'État ne s'inscrit-il pas dans cette voie d'atteindre un équilibre entre tous les citoyens d'une MRC, qu'ils demeurent en milieu rural ou dans la ville-centre? Rien ne justifie donc que le poids démographique d'une ville-centre soit plus important au chapitre des voix que les autres municipalités.
Au chapitre des autres mesures concernant la prise de décision, le préfet, seulement s'il est élu au suffrage universel, devrait bénéficier d'un vote prépondérant en cas d'égalité des votes. Et enfin, la MRC paraît bien placée pour gérer elle-même les conditions du droit de retrait d'une municipalité locale.
Les compétences dévolues aux MRC. Si le remplacement des 72 anciens comtés municipaux par 96 MRC en 1979 visait notamment à réunir les localités urbaines et rurales de façon à couvrir l'ensemble du territoire, le clivage perdure encore aujourd'hui dans plusieurs de celles-ci. L'arrimage entre les municipalités locales et la MRC demeure, dans plusieurs cas, une tâche difficile, encore davantage lorsqu'une municipalité fait office de ville-centre dans une MRC essentiellement rurale. La référence à une même base territoriale a tout de même permis une intégration horizontale des approches, des planifications et des actions des intervenants dans le développement d'un territoire commun.
En plus des tâches de nature supralocale qu'elles assurent, que ce soit la sécurité, la forêt, les lots intramunicipaux, les cours d'eau, ainsi de suite, les MRC sont à l'origine d'une importante collecte de données qualitatives et quantitatives sur leur territoire, notamment celles nécessaires à la préparation des schémas d'aménagement. Depuis plus de 20 ans, l'élaboration de ces schémas d'aménagement est une occasion pour l'ensemble des intervenants de s'approprier les instruments de planification et de réglementation en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire. Il importe donc à ce moment-ci de vivifier ce niveau de gouvernance municipale et d'en bonifier les compétences. Cet exercice doit viser autant les MRC à caractère rural que les MRC à caractère urbain et rural. On peut d'ailleurs s'étonner que ces dernières ne reçoivent pas les mêmes attributions de compétences que les MRC rurales.
On se souviendra donc qu'en plus de permettre au gouvernement québécois de désigner des MRC à caractère rural et d'habiliter une telle MRC à choisir de faire élire son préfet au suffrage universel la loi n° 29, adoptée en juin 2001, donnait également à une MRC ainsi désignée la compétence exclusive en matière d'évaluation foncière et de l'entretien des cours d'eau municipaux, des compétences facultatives en matière de sécurité civile, de parcs régionaux, de gestion des matières résiduelles, de voirie locale, de logement social et de transport des personnes handicapées, sans que les municipalités locales puissent exercer un droit de retrait.
n(10 h 50)n Finalement, la loi n° 29 permet au gouvernement de donner aux MRC des compétences en matière d'élaboration de politiques de développement culturel, patrimonial et touristique local et de l'établissement de modalités de gestion et de financement d'équipements, d'activités et d'infrastructures à vocation supralocale.
Alors, Solidarité rurale du Québec suggère que le gouvernement puisse donner aux MRC visées dans le présent projet de loi les mêmes compétences que celles dévolues aux MRC à caractère rural. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Proulx. M. le ministre des Affaires municipales et de la Métropole.
M. Boisclair: M. Proulx, je voudrais vous remercier, ainsi que votre collègue, pour votre présentation. Je n'ai pas pu prendre connaissance de votre mémoire dans le détail. Il a été porté à ma connaissance ce matin, mais j'ai écouté attentivement votre présentation.
D'abord, sur le fond, nous partageons une même volonté, celle d'assurer cette meilleure cohabitation, non pas nécessairement entre le monde rural et le monde urbain, mais de faire en sorte que tout le monde au Québec puisse bien vivre ensemble, que nous soyons capables de le faire aussi dans un contexte particulier, qui est celui d'un Québec qui est en déclin démographique, qui est celui aussi d'un Québec qui a ce vaste défi de correctement occuper son territoire. Et, autant la contrainte démographique est de plus en plus lourde, cette contrainte ne doit pas nous amener à vouloir tout sacrifier de nos institutions et aussi du style de vie qu'ont choisi des milliers de Québécois et Québécoises. C'est dans cette perspective, comme vous le savez, M. Proulx, que la politique sur la ruralité est apparue, avec des objectifs bien clairs.
Je peux vous dire qu'aujourd'hui c'est assez étrange de voir combien la ruralité est populaire. Lorsque j'entends, par exemple, des maires réclamer d'être désignés du monde rural parce qu'il y a, attachées à cette reconnaissance, des sommes d'argent que nous transférons aux MRC, je vois bien que l'appétit des élus n'est pas celui de la reconnaissance, mais bien davantage celui de l'argent. Et donc, il est facile parfois de se draper dans la vertu des uns pour se procurer à soi-même des avantages. Le choix de la politique sur la ruralité est un bon choix.
J'aurais quelques commentaires à faire sur la réorganisation municipale, M. Proulx. D'abord, vous dire qu'il est vrai que la réorganisation municipale va nous permettre des économies d'échelle. Il faudrait aussi se dire que le principal objectif, c'est de faire du développement. Ce n'est pas juste de faire une ponction sur les coûts, c'est une vision de développement. Ce n'est pas juste... La réorganisation municipale, ce n'est pas uniquement une diminution des coûts puis des économies d'échelle, c'est une vision de développement. Il n'y a pas juste la colonne des dépenses qui nous intéresse, il y a beaucoup la colonne des revenus aussi qui nous intéresse.
Deuxièmement, je dois vous dire que je suis convaincu que le choix que nous avons fait de confier des responsabilités particulières aux MRC à caractère rural est un bon choix et que l'élection que nous permettons est un bon choix. Je pense qu'il nous faut aller plus loin, M. Proulx. Dans mes notes, dans mon discours d'ouverture, j'ai affirmé de façon claire que j'espère que les membres de cette commission seront capables de s'entendre sur des nouvelles responsabilités que nous pourrions désigner aux MRC. Je prends votre présentation comme un appui à cette volonté. Je veux toutefois nuancer cet appui en vous disant que je ne pense pas cependant qu'il faille avoir le même traitement pour l'ensemble des MRC du Québec. Et là je veux vous dire, en toute amitié, que je diverge d'opinions avec vous. Je ne pense pas qu'alors, par exemple, que les présidents de communautés métropolitaines ne sont pas élus on permette sur les MRC de ces territoires l'élection du préfet. Il y aurait là une incohérence qui serait rapidement dénoncée.
Donc, je pense qu'il est encore opportun, de la même façon que vous réclamez un monde municipal qui s'adapte sur mesure aux réalités locales et régionales et que vous réclamez de la souplesse dans nos approches, que cette même souplesse doit prévaloir quant au statut que nous donnons aux MRC.
J'entends bien votre idée de date butoir, où vous souhaiteriez que, partout, l'élection soit faite sur les MRC qui seraient désignées pour élection. J'exclus d'office, là, toutes les MRC incluses en partie ou en tout sur les territoires des communautés métropolitaines. Ce serait une erreur de le faire. J'entends cette idée.
Et je voudrais vous poser, ces commentaires étant faits, une question: Quelle rationnelle devoir trouver derrière l'argument, que des gens de l'UMQ et que plusieurs gens de bonne foi nous font, qui est celui de la représentation de la population? Tout à l'heure, vous nous avez dit: L'État est justifié, en pareille circonstance, d'intervenir. Vous avez donné l'exemple des députés de l'Assemblée nationale, qui ont tous un vote, indistinctement du fait que leur circonscription soit de 42 000 habitants ou de 35 000 habitants.
Ceci étant dit, la Loi électorale québécoise prévoit des normes pour la constitution des circonscriptions, et ces circonscriptions doivent se contenir dans un ordre d'environ... entre 35 et 40 000, mais il y a des règles pour assurer de l'idée du poids du vote équivalent, indistinctement du territoire. Nous avons permis un certain nombre d'accrocs à ce principe. Par exemple, il y a une circonscription pour les Îles-de-la-Madeleine. Plusieurs personnes aussi, compte tenu de la situation en Gaspésie, ont réclamé aussi des accommodements comme ceux-là. Donc, l'État est intervenu pour rééquilibrer, au-delà des principes démocratiques que certains pourraient qualifier de fondamentaux, en faisant donc des accommodements.
Comment, dans le monde municipal, pourrions-nous prévoir ce type d'accommodement? Est-ce que... Donc, de façon très pointue, comment concilier le principe général de l'égalité des votes, de l'égalité de représentation, avec cet autre principe qui est celui de l'accommodement au nom du bien vivre ensemble, de la convivialité québécoise, du respect aussi de l'identité québécoise, de son histoire et de ses traditions? Comment concilier ces deux principes pour que nous puissions correctement, nous, les membres de cette commission, être éclairés sur le chemin à suivre?
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. le ministre. M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Oui. Bon. Il y a une question en particulier, je vous dirai: La démocratie. La démocratie, ce n'est pas une simple question de comptabilité, M. le ministre. La démocratie, c'est un ensemble de choses, et, tant et aussi longtemps que l'aspect principal pour désigner des choses, ça va être le nombre de personnes, donc une comptabilité, c'est sûr qu'on va créer des disparités incroyables. Il faut qu'il y ait beaucoup d'autres facteurs qui rentrent en ligne de compte pour définir ça. On ne peut pas s'arrêter uniquement... Pour nous, c'est une aberration de toujours s'en tenir... même avec une possibilité de variables.
Les députés... Être député ? je vais prendre député de votre comté, M. le ministre, qui est Gouin, je pense... Le travail est très différent, j'en suis persuadé, que le député de Duplessis, hein? Alors, il faut tenir compte... Je donne... On peut en donner, des dizaines d'exemples de même. Et, nous, on a toujours trouvé aberrant... Et c'est pour ça que, de plus en plus, il y a des discussions, il y a des demandes qu'on modifie ces façons de faire là. Parce que ce n'est pas vrai que tout le monde est bien représenté dans ça, c'est une comptabilité qui est bien représentée. Et, pour moi, c'est une attaque très forte contre une véritable démocratie ouverte, transparente, ou ainsi de suite. Il n'y a pas de formule magique, M. le ministre. Je dirai comme je dis souvent: Il y a une formule de gros bon sens. Moi, je pense que, quand du monde peuvent essayer de bien visualiser tous les aspects de ça, ils sont capables d'accorder et de définir des possibilités autour de ça.
n(11 heures)n Ceci étant dit, l'autre aspect, la fusion, on ne sera jamais d'accord sur les fusions, sauf à quelques-unes que je pense que ce n'est pas là qui étaient les discussions. Il n'y a pas personne de nous autres qui discutait sur la fusion de l'île de Montréal, personne de nous. En tout cas, nous autres, on n'a jamais... On trouvait que c'était tout à fait normal puis on peut être en accord ou en désaccord, ça m'importe peu. Où on n'est pas d'accord, pour nous autres: on crée encore davantage de disparités qu'on l'a fait. C'est là qu'on n'est pas d'accord. Parce que vous ne changerez pas la géographie du Québec en fusionnant; les distances restent toujours les mêmes. Je veux dire, que vous fusionnez un village pour faire comme Rouyn-Noranda, par exemple, 17 municipalités... les municipalités ne se sont pas toutes ratatinées autour de Rouyn-Noranda; ils ont resté où qu'ils étaient.
Alors, en quoi ça va venir améliorer le développement économique? En quoi ça va venir... Puis, là aussi, c'est un autre aspect, le développement économique. Parlez-vous uniquement du développement économique ou on peut parler d'un développement économique, social et culturel? Est-ce qu'on les place sur un pied d'égalité, ça aussi? Pour nous, c'est important. Pour nous, c'est très important. Ça fait qu'on l'aborde. Alors, la géographie ne changeant pas, le développement économique, je ne peux pas voir, parce qu'on est fusionné, parce qu'on a une seule entité, que ça va améliorer énormément. Et, d'ailleurs, tout ce tralala autour de dire les pôles de croissance, puis ainsi de suite, c'est vrai et pas vrai en même temps. On pourrait vous donner un tas d'exemples où que, même avec une ville-centre ? je ne vous parle pas des principales au Québec, mais qu'est-ce qui est considéré comme une ville-centre ? n'est pas à l'intérieur de la MRC le plus gros pôle de croissance et de développement.
M. Boisclair: ...projet de loi un peu, là, M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Mais non, mais vous avez soulevé la question des choses, je vous réponds.
M. Boisclair: Mais comment, comment réconcilier, tu sais, avec le fait... Est-ce qu'on devrait donner, par exemple, l'élection au suffrage universel pour tout le monde, indistinctement de la logique du poids de la représentation? Le maire de Rimouski, il me dit: Moi, je représente 79 % du monde alentour de la table. Pourquoi j'irais me faire barrer par des maires qui représentent 1, 2, 3 % de la représentation, alors que c'est moi qui paie, alors que les taxes sont plus élevées dans ma municipalité qu'elles le sont dans les municipalités voisines et que les services qu'on s'est développés, on a payé pour, on a financé nos arénas, nos affaires, puis on paie des taux de taxes, puis on a des niveaux d'endettement plus élevés?
Je veux juste vous dire que c'est l'argument auquel je suis confronté, en vous disant cependant que je cherche la façon de faire en sorte que ce soit plus convivial, de réconcilier les points de vue de l'UMQ puis de la FQM. Mais ce sont des arguments de poids, là, qui sont mis sur la table aussi, là.
M. Proulx (Jacques): M. le ministre, je vous dirai que, quand j'entends ce raisonnement-là, comme j'ai entendu tout à l'heure, je suis renversé. Je suis renversé, parce que ce n'est pas vrai, qu'est-ce qu'ils disent. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai qu'ils ont payé tout seuls leurs arénas. Ce n'est pas vrai qu'ils ont payé tout seuls leurs infrastructures. Ce n'est pas vrai, rien de ça, parce qu'ils l'ont payé, oui, il y a 78 % de la population, mais il y a le 22 % autour qui a payé aussi pour l'utilisation, puis il a payé comme citoyen, puis il a payé comme utilisateur. Alors, c'est faux, ces avancées-là. C'est des demi-vérités, je dirai. Ce n'est pas complètement faux, des demi-vérités.
Alors, pour nous, c'est inacceptable, ça. Et c'est ça que je vous disais tout à l'heure: que, s'ils représentent tant de monde, je ne vois pas leurs craintes, ils vont être élus facilement. Ils ont déjà 78 % du monde qui vont normalement être pour eux autres, parce que les gens ne sont pas des citoyens qui sont assez tarlas pour dire: On n'élira pas... on représente, on va élire ça. Je ne comprends pas la crainte énorme qu'ils ont de ne pas vouloir se faire élire au suffrage universel et j'exclus.... je suis d'accord avec vous qu'on exclue les villes, MRC, là. Ça ne donne rien, ça serait... Mais je ne peux pas voir la crainte, la crainte. Et je pense que vous êtes bien placé, parce que vous avez une responsabilité qu'une démocratie pleine et entière s'exerce. Moi, si j'étais maire d'une ville qui représente 78 %, là, je serais fier, parce que je viendrais légitimer encore davantage mon rôle et ma force à l'intérieur d'un ensemble.
M. Boisclair: En tout cas, je voudrais vous remercier. Je m'arrête là pour vous dire que je pense que votre présentation est déterminante, en tout cas, dans mon cas, pour la suite des travaux de la commission et je pense que la force de votre argumentation, sans que je puisse dire... sans que je me montre 100 % d'accord avec l'ensemble de vos propositions, mais la force de votre démonstration m'apporte, à moi, plusieurs réponses aux questions que j'ai ouvertes en début de commission. Et je voudrais vous remercier pour cette présentation qui est, pour moi, déterminante pour la suite des choses.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. le ministre. Merci, M. Proulx. Alors, je vais me donner la parole comme députée de Matapédia. Il reste quelques minutes du côté ministériel et, ensuite, je vais donner la parole à Mme la députée de Jean-Talon.
Sur deux éléments, M. Proulx, l'UMQ, tantôt et dans son mémoire, faisait connaître son opinion quant à l'insatisfaction de municipalités dont le territoire se trouve à l'intérieur des limites d'une agglomération de recensement, mais qui comprend d'importantes zones rurales. Ces municipalités ne peuvent pas profiter autant qu'elles le devraient des avantages de la Politique nationale de la ruralité, selon ces municipalités. Et vous savez qu'on a alloué... le gouvernement du Québec a alloué 90 millions sur cinq ans. On a à peu près... Ça joue entre 200 à 300 ou 350 000 $ par MRC, et j'aimerais connaître votre opinion quant à cette demande que font certaines municipalités qui font partie des agglomérations de recensement.
Moi, mon opinion, c'est qu'à un moment donné ils ont accès aux enveloppes du CLD. Plusieurs de ces municipalités-là ont aussi des organismes, des corporations de développement économique, mais, moi, j'aimerais ça, parce que vous connaissez plusieurs de ces municipalités, des gens... Si je pense à Rimouski-Neigette, c'est Mont-Lebel, Sainte-Blandine qui ont été regroupées qui font aussi partie du monde rural. Mais les choses étant ce qu'elles sont, l'argent n'étant pas incommensurable, pas à l'infini, c'est quoi, votre opinion par rapport à ça, d'une part?
Et vous avez quand même bien parlé de l'élection au suffrage universel, du clivage. On constate vraiment, depuis qu'on est ici, puis je pense que ça va continuer sur deux jours encore, une opinion très, très, dichotomique entre l'élection. Puis, moi, je pensais que par... Et, même dans le monde rural, ce n'est pas si évident que ça, l'élection au suffrage universel. Alors, moi, je me demande: De quoi les gens ont peur? Parce que, depuis nombre d'années, depuis 10, 20 ou 30 ans, on veut avoir des pouvoirs, on veut exercer des pouvoirs puis, quand on les a, on a comme peur de les exercer. Moi, je trouve que, pour une municipalité en milieu rural, d'avoir un préfet élu qui n'a pas non plus de conflit d'intérêts avec une ville qu'il représente au conseil des maires, pour moi, ça m'apparaît intéressant. Alors, j'aimerais avoir, sur ces deux sujets-là, votre opinion.
M. Proulx (Jacques): Je répondrai à votre deuxième question puis je demanderai à Pierre de compléter la première, puis on pourra rajouter. Bien, écoutez, nous autres, c'est très clair, et, depuis très longtemps, on le souligne dans ça, l'élection au suffrage... C'est parce qu'on croit beaucoup à la décentralisation. Alors, pour nous, il est important, dans l'avenir, que, graduellement, on décentralise de plus en plus de pouvoirs au gouvernement local. Et, pour donner de la force à cette revendication-là, pour nous, c'est fondamental de donner davantage de légitimité. Puis je ne suis pas en train de dire qu'ils n'ont pas de la légitimité à l'heure actuelle, le préfet, bien sûr, mais il est élu par un groupe de personnes, il n'est pas élu par l'ensemble. Première chose: de redonner une légitimité beaucoup plus grande au préfet.
De libérer aussi le préfet ? appelez ça conflit d'intérêts, ou tendance, ou ainsi de suite ? mais le rendre davantage responsable de l'ensemble du territoire, d'en faire une personne qui va être un leader grandi à l'intérieur avec les autres intervenants, avec les autres maires parce qu'il va avoir une liberté d'action qu'il ne peut pas avoir aujourd'hui. Et, pour moi, qui parle de gouvernement doit parler d'un gouvernement qui a beaucoup de liberté d'action, et ainsi de suite. Alors, pour moi, c'est fondamental. C'est bien sûr que ce n'est pas facile, changer les mentalités. Vous savez, c'est de changer de quoi qui existe depuis assez longtemps, mais c'est pour ça qu'on doit mettre beaucoup de pression, qu'on doit mettre une date butoir, par exemple, comme on dit, et assez rapidement.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Proulx. Comme il reste deux minutes, vous avez deux minutes, M. Desjardins, pour répondre à l'autre question.
M. Desjardins (Pierre): Je vais faire rapidement. Les objectifs de la Politique nationale de la ruralité est de venir aider, supporter, encourager le développement des petites communautés rurales. Je vais prendre l'exemple de Rouyn-Noranda, qui est une MRC-ville aujourd'hui et qui s'est grossie de 17 quartiers qui sont 17 anciens villages. Si je ne m'abuse, ils ont accès à l'enveloppe des pactes ruraux, mais c'est clair que la condition d'utilisation des fonds fait en sorte que l'utilisation va être réservée uniquement aux municipalités ou aux quartiers, aux nouveaux quartiers de Rouyn-Noranda qui sont désignés comme étant des quartiers ruraux, si on veut, et qui étaient anciennement des villages. Donc, je ne vois pas... L'idée est de venir compenser, rééquilibrer, aider des milieux à faible densité de population et qui ont peu de moyens financiers, des assiettes fiscales faibles. L'idée, ce n'est pas de venir renforcer les agglomérations de recensement qui jouissent déjà d'un certain nombre... d'une assiette fiscale en tout cas plus importante.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Desjardins. Trente secondes. Bon, alors, on va considérer qu'on est dans le temps. Mme la députée de Jean-Talon.
n(11 h 10)nMme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Avant de poser ma question à M. Proulx, j'aimerais juste... Je ne peux pas laisser passer le commentaire qu'a fait le ministre à l'égard des municipalités qui souhaitaient tout à coup se prévaloir de la reconnaissance rurale. Je lui rappellerai, à ce ministre ? c'est sans doute, peut-être, parce qu'il est ministre... il représente un comté qui est beaucoup plus urbain ? mais que, s'il y a confusion dans les genres, c'est peut-être justement parce qu'il y a effectivement confusion, et c'est le gouvernement lui-même qui a voulu étiqueter les catégories de MRC avec différentes compétences. Et vous avez vous-même soulevé tout à l'heure... mais vous n'êtes pas le premier à soulever le fait qu'on se retrouve avec 48 MRC à caractère rural, deux communautés rurales, 28 MRC à caractère rural-urbain alors, et j'en passe. Je voudrais également rappeler au ministre que, si on met sur la table une opportunité de pouvoir avoir accès à des programmes de subventions puis qu'on le fait de façon électoraliste, sans vraiment s'apercevoir finalement ou sans même bien connaître ces différents genres, bien, on se ramasse aujourd'hui avec des confusions de ce genre.
Moi, je voudrais, M. Proulx, revenir sur la question des craintes que peuvent avoir à la fois les parlementaires mais également les gens du milieu à l'égard de l'élection au suffrage universel, parce que ça semble prendre une grande place dans nos débats depuis quelques jours, et c'est celle à l'effet que, si le préfet d'une MRC à caractère rural-urbain est élu au suffrage universel ? on parle d'une représentation évidemment démocratique d'une population quand même importante, là, dans ces milieux-là ? est-ce qu'il n'y aura pas à un moment donné confusion entre le rôle du député et le rôle du préfet? Ces deux personnes s'occupent évidemment de défendre les intérêts des citoyens. Le développement économique évidemment fait partie des préoccupations de ces deux catégories d'élus, si vous me passez l'expression. Et il y a... Moi, j'ai entendu personnellement des commentaires à l'effet ? puis je ne parle pas juste de députés, je parle même d'élus de gouvernements locaux... dire: Est-ce qu'il n'y aura pas chevauchement au niveau des responsabilités, finalement? Puis j'aimerais savoir de votre part s'il y a eu une réflexion qui a été faite pour essayer de bien distinguer quel était le rôle du député ou quel serait le rôle du député à partir du moment où on aurait les préfets élus au suffrage universel pour évidemment les préfets représentant le milieu à caractère rural-urbain.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme la députée. M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Je vous dirai, madame, que, depuis un bon bout de temps, on travaille très fort sur toutes ces questions-là et on arrive à la conclusion qu'il faut voir le monde autrement. Il faut sortir des préjugés dans lesquels on est et arrêter d'avoir toujours une même vision qui ne change pas, alors que, tout autour de nous autres, tout change. Alors, je vous dirai que non, il n'y a pas confusion pour nous. On a la conviction que chacun a un rôle majeur. Et je dirais plus que ça, je suis convaincu que ça va permettre de clarifier des choses et surtout de valoriser encore davantage et probablement valoriser à nouveau le rôle de député. Et on n'y voit aucune confusion parce que chacun a des responsabilités bien particulières, et ça va créer une synergie entre le député qui est un législateur... Ce n'est pas parce qu'on a, avec les années, fait du député un peu un intervenant dans tout... C'est d'abord et avant tout un législateur, le député, à ma connaissance, là ? je sais bien qu'il a d'autres responsabilités, mais il doit légiférer ? alors que le préfet élu, c'est une personne qui est très territoriale, qui va travailler fortement sur le territoire en grande collaboration et, je dirai, probablement en plus grande collaboration qu'il peut le faire aujourd'hui pour des raisons bien particulières que, lui, il va avoir un rôle très bien défini à l'heure actuelle et beaucoup plus représentatif qu'il peut l'être avant et peut-être avec moins de partisanerie, entre guillemets, ou ainsi de suite, à notre avis. En tout cas, je pense qu'il va y avoir une connivence assez extraordinaire autour de ça.
Mais, avant de décider tout seul si on doit aller vers là puis dire... tenir compte de tout ça, il faudrait peut-être demander l'avis aux citoyens. Je serais bien curieux, moi, je suis persuadé que les citoyens sont beaucoup plus avancés que les élus autour de l'importance de l'élection au suffrage universel.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Proulx, M. Desjardins, merci d'apporter évidemment un éclairage au débat de ce matin. Évidemment, on n'est pas tellement surpris de votre position. On a eu l'occasion de vous lire, de vous entendre à de nombreuses reprises. Vous êtes, à Solidarité rurale, depuis 10 ans, une instance-conseil du gouvernement, et vous défendez avec force et argumentation l'importance évidemment de mettre en valeur et de préserver la réalité rurale. Et je pourrais même... jusqu'à dire que vous avez contribué certainement à redonner les lettres de noblesse à un monde qui a été malheureusement trop souvent oublié.
Mais, ce matin, je vais me faire un peu l'avocat du diable et, sur la base des interventions que j'ai entendues hier, je vais vous poser quelques petites questions, notamment sur l'élection du préfet au suffrage universel, et vous demander comment on peut arriver à concilier l'autonomie locale ? et ça, c'est le discours qu'ont tenu les membres de l'Union des municipalités qui vous ont précédés, les représentants des villes-centres et des villes d'agglomération ? comment concilier donc cette nécessité de préserver l'autonomie locale avec finalement la suggestion qui est faite dans le projet de loi d'avoir un préfet élu au suffrage universel qui va bien sûr contribuer à renforcer le pôle que représente... l'instance que représente la MRC. Alors, dans le fond, comment arriver à concilier tout ça?
Et, d'autre part, puisque je vais me faire encore l'avocat du diable, Mme la Présidente, lorsque vous soulignez, M. Proulx, que l'élection du préfet au suffrage universel va permettre de renouer des liens significatifs avec la population, certaines personnes qui sont venues ici nous ont dit que ? puis d'ailleurs on aura l'occasion de les entendre aujourd'hui ? les deux préfets qui ont choisi... les MRC qui ont choisi d'élire leur préfet au suffrage universel, les deux préfets ont été élus à l'unanimité. Et certains prétendent que, en fait, les citoyens ont très peu d'intérêt à l'endroit des paliers que sont la MRC. Évidemment, les citoyens vont sortir pour voter pour leur maire, mais certains anticipent le fait que très peu de citoyens pourraient sortir pour voter pour leur préfet, comme on le voit dans les commissions scolaires.
Alors, puisque je me fais l'avocat du diable, l'avocate du diable, là, parce que je veux... C'est important, je pense, de confronter les idées puis qu'on puisse évidemment... De ça rejaillira peut-être la vérité, c'est ce qu'on souhaite. Alors, peut-être, j'aimerais vous entendre là-dessus, M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): ...Mme la députée...
M. Boisclair: Si vous permettez, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Doyer): Deux secondes.
M. Boisclair: ...il y en a un sur deux qui a été élu par acclamation.
Mme Normandeau: ...
M. Boisclair: C'est ça. Un sur deux par acclamation, et celui qui a été élu a été élu avec un taux de participation de la population plus élevé qu'aux élections municipales.
Mme Normandeau: O.K. Bon, bien, alors...
M. Boisclair: Juste des faits pour...
Mme Normandeau: Merci de la précision.
La Présidente (Mme Doyer): M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Ah! Bien là on vous a répondu, je veux dire, il faut corriger, parce qu'il y a eu un très haut taux de participation, c'est ça qui est intéressant. Il y avait, je pense, trois candidats à part de ça qui étaient intéressés. Alors, ça vous démontre... Et c'est très nouveau, là. Il faut faire attention. C'est sûr que tout n'est pas parfait au départ.
Comment concilier le rôle et l'autonomie? Moi, je suis peut-être bien naïf, mais je ne vois aucun problème. Il n'y a pas... Il n'y a rien qui arrive là qui... Le préfet élu au suffrage universel va être le représentant de toute la MRC, vous savez. Il n'est pas un dictateur. Il n'est pas l'unique représentant. Il y a un conseil qui est représenté par les maires ou les délégués de chacune des communautés. Alors, il va travailler en connivence avec ces gens-là qui vont défendre les intérêts particuliers de leur communauté. Et c'est là, quand on parle de légitimité puis de... et davantage, je dirais, de force de conviction qu'il va y avoir, c'est qu'il n'aura pas un intérêt particulier pour sa localité d'abord et avant tout devant un sujet très controversé. Là, il va être libéré de ça. Alors, il va être capable de trouver des consensus, des compromis. Ça va être un animateur extraordinaire.
Alors qu'aujourd'hui, quand tu n'es pas élu au suffrage universel, bien, c'est bien sûr que, pour être préfet, il faut que tu sois d'abord et avant tout élu dans ta communauté. Et, si, à un moment donné, devant un sujet x, y ou z qui va toucher ta communauté... On est des humains, hein, on est des humains. Alors, bien honnêtement, il va avoir toujours cet arrière-goût-là de dire: Oui, ça va faire quoi? Je vais-tu être préfet encore l'année prochaine? Et c'est là qu'on trouve... C'est là, quand on parle de légitimité, de capacité d'animer le milieu, et ainsi de suite, d'être un leader beaucoup renforcé à l'intérieur et de trancher des questions très litigieuses qui peuvent survenir comme on en voit souvent au niveau de toutes sortes de sujets donnés et d'être capable aussi... beaucoup mieux placé pour donner une vision d'ensemble et un développement d'ensemble de la communauté, de la MRC.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Proulx. Mme la députée de Bonaventure.
n(11 h 20)nMme Normandeau: Oui, merci, M. Proulx. Je pense que vous avez évidemment, à travers le mémoire, traduit très, très bien le sentiment qui anime les ruraux et cette crainte qui est exprimée, et qui est légitime évidemment, puis on l'a vue dans le rapport Nicolet/Jutras, en fait, la crainte des ruraux de perdre leur poids politique en fait à travers évidemment la redéfinition de nouvelles règles au sein même des MRC à caractère rural et à caractère urbain.
Mais, au niveau des règles concernant justement la prise de décision, vous m'avez entendue ce matin, là, je demandais concrètement comment justement arriver à atteindre ce fameux équilibre. Et vous soulignez dans votre mémoire, à la page 6, en fait, que le projet de loi n° 77 devra protéger les municipalités rurales à l'égard des municipalités plus populeuses.
Alors, comment on le fait concrètement? Est-ce que vous souscrivez à cette règle de la double majorité avec plafonnement? Alors, comment vous voyez, de votre côté... Peut-être avez-vous une autre suggestion à nous faire finalement pour arriver justement à atteindre la cohabitation tant souhaitée autant de part et d'autre finalement?
La Présidente (Mme Doyer): M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): C'est évident qu'on est contre la double majorité, et ça, ce n'est pas depuis quelques mois, depuis toujours. Pour nous, c'est une aberration. C'est antidémocratique. Ça ne se défend pas. On n'en a pas, de solution, Mme la députée. Et, si on en avait une, si on vous la disait, je vous concéderais de ne pas la prendre parce qu'il n'y a pas une solution simple et facile autour de ça. La seule façon de trouver la meilleure solution, c'est d'aller directement dans ce sens-là, de les corriger, ces choses-là, et de ne pas permettre... C'est là qu'on va trouver les meilleures solutions.
Probablement qu'il y a plusieurs solutions. Il n'y a pas une unique solution pour protéger, pour maintenir un bon équilibre. Et la meilleure solution, encore une fois, je pense que c'est une démocratie transparente, une démocratie qui s'exerce bien. Je pense que c'est la seule façon.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la députée.
Mme Normandeau: Certainement. Un dernier élément concernant les compétence qui sont dévolues aux MRC. Bon, encore une fois, là, on a vu, je vous dirais, le fossé qui sépare les deux unions municipales sur cette question-là. D'un côté, la Fédération québécoise des municipalités souhaite, sur la base de responsabilités qui ont été consenties aux municipalités rurales dans le projet de loi n° 29, qu'on puisse étendre ces champs de compétence à l'ensemble des MRC au Québec. L'Union des municipalités du Québec dit: Non, non, non. Nous, quand même, nos villes font déjà beaucoup de travail de ce côté-là. On est prêts à travailler avec des compétences qui sont soit la question liée à l'aménagement, à la gestion des cours d'eau municipaux et le développement économique.
Vous, M. Proulx, vous suggérez évidemment que le gouvernement puisse donner aux MRC qui sont visées, évidemment dans le présent projet de loi, les mêmes compétences que celles bien sûr dévolues aux MRC à caractère rural. Donc, dans ce sens-là, vous plaidez bien sûr en faveur... pour la Fédération québécoise des municipalités. Et vous insistez aussi sur la nécessité de pouvoir... Vous parlez du fameux droit de retrait également au niveau des MRC. Comment, encore une fois, on peut arriver justement... Parce que la crainte, sur la base des discours qu'on a entendus, c'est d'avoir un monde municipal au Québec qui se développe à deux vitesses, alors une démocratie à deux vitesses. Et le projet de loi n° 77, puis je pense que c'est à peu près le mot qui est revenu le plus souvent en deux jours, c'est: «compromis», «consensus», comment on peut arriver finalement à tirer la ligne. Je demandais hier aux villes de la centralité: Où est-ce qu'on la tire, la ligne, finalement, pour qu'il y ait une zone de confort suffisante pour tout le monde, pour éviter effectivement qu'on ait un dérapage puis qu'on se ramasse effectivement à un développement à deux vitesses au Québec et, je vous dirais, à l'échelle municipale?
Alors, comment vous voyez ça, de votre côté? Est-ce que... Vous allez me dire qu'il n'y a pas de problème. Vous êtes un optimiste de nature. Puis je dois vous dire que le fait que vous plaidiez en faveur d'un changement et de voir autrement, ça, moi, personnellement, ça me plaît beaucoup parce que, effectivement je pense qu'à travers ça transparaît la nécessité d'être un peu plus audacieux. Si on veut avancer, si on veut évoluer, si on veut s'adapter, il faut faire autrement, il faut faire différemment. Mais, dans le contexte évidemment, comment on peut arriver à éviter le piège peut-être qui nous attend justement de la démocratie à deux vitesses au niveau municipal au Québec? Une grande question.
La Présidente (Mme Doyer): M. Proulx.
M. Proulx (Jacques): Écoutez, on ne peut pas avoir juste les bons côtés puis ne pas avoir les mauvais côtés. Quand on reçoit des droits ou des pouvoirs, il faut accepter de partager. Alors, tu ne peux pas prendre juste qu'est-ce qui te convient au nom que tu es majoritaire, au nom que tu es le centre, au nom de n'importe quoi puis ensuite dire: Je vais continuer pareil comme avant. Ça ne se peut pas, ça. Alors, moi, je pense qu'il faut trouver le moyen de... Et il y a des compromis à trouver à l'intérieur de ça. Et ces compromis-là, à notre avis, sont assez faciles à trouver. Il s'agit qu'il y ait de la bonne volonté, de l'imagination puis arrêter de toujours rester dans le passé en fait. Il y a des bouleversements, il y a des changements. Alors, ça doit nous emmener à pratiquer ces changements-là. Et je pense qu'il y a beaucoup d'ouverture, à l'heure actuelle, à... Il y a d'autres façons de faire les choses; il y a pas une seule façon de faire les choses. Alors, de partager des responsabilités, de se donner en commun des services, et ainsi de suite, c'est vers ça qu'on doit aller. On doit sauver à tout prix l'identité, la culture particulière de chacune des communautés. Et que ce soit dans les grandes villes, les quartiers, je dirai, c'est ça qui va être la solidité de l'avenir, c'est ça qui va être la pérennité. Peut-être, Pierre, tu veux compléter, mais...
La Présidente (Mme Doyer): M. Desjardins.
M. Desjardins (Pierre): Les diverses réformes municipales qu'on a assisté depuis une dizaine d'années ont induit une très grande complexité non seulement au niveau de la géographie municipale, mais au niveau des responsabilités de chacune des municipalités. Ce qu'on vous dirait, c'est de dire, dans un premier temps: Ayez le souci du citoyen. C'est-à-dire que, pour que tous les citoyens du Québec soient à peu près sur un pied égal, encore faut-il que l'administration, de par sa localisation sur le territoire, ils soient à peu près dans le même univers juridique, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Donc, dépendamment si vous habitez dans une petite municipalité, si vous êtes dans une ville-centre, si vous êtes dans une municipalité, dans une agglomération de recensement, si vous êtes dans une MRC mixte, une MRC rurale, si vous êtes dans une MRC qui... une MRC-ville, si vous êtes dans une MRC qui est dans une communauté métropolitaine, si vous appartenez à une grande ville, si... vous n'êtes jamais pareils. Donc, dépendamment... Si vous vous promenez sur le territoire du Québec, vous ne vivrez pas la même vie municipale, dépendamment de votre lieu de résidence. Donc, l'invitation qu'on vous fait, c'est de dire: Il faudrait peut-être essayer de regarder non pas seulement que du point de vue des associations municipales, des élus et des administrations, mais des citoyens qui sont toujours les mêmes payeurs de taxes. Premier élément.
Le deuxième élément. On vous renvoie la balle sur la façon de gérer la polarité ou la polarisation entre la ville-centre et les milieux moins populeux. C'est de dire: On pourrait concevoir facilement que le rôle du gouvernement, le rôle de l'État, c'est d'assurer l'équilibre et que ça vient... cette façon de faire là, c'est de ne sûrement pas conforter le plus fort, mais de supporter les plus faibles. Alors, quand on vous dit: Trouvez la formule qui fera en sorte que les municipalités rurales pourront demain être en mesure de répondre, être en mesure de faire valoir leur opinion, de s'assurer un développement, d'avoir un droit de parole équivalent ? non pas proportionnel, mais équivalent ? à celui de la ville-centre, je pense que le génie de la formule, il est là. Et je dirais que la responsabilité du gouvernement, c'est de cet ordre des choses là.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, Mme la députée de Bonaventure, il vous reste 1 min 20 s.
Mme Normandeau: Bien, écoutez, on a quand même répondu à l'ensemble de mes questions. Le discours évidemment qu'est venu plaider ce matin Solidarité rurale, c'est un discours qui est... évidemment qu'on entend, mais qui est tout à fait logique avec la position que l'organisme a défendue, notamment via M. Proulx depuis maintenant 10 ans. Il y a 10 ans, M. Proulx avait certainement l'impression de prêcher dans le désert. Aujourd'hui, il est sûrement un peu plus conforté par rapport au développement qu'on a connu au cours des dernières semaines.
Mais, Mme la Présidente, peut-être que l'ensemble des parlementaires qui sont ici, aujourd'hui, à cette commission, pourraient certainement retenir deux suggestions: certainement celle du souci qu'on doit avoir à l'endroit du citoyen et citoyenne, payeur de taxes, mais également... Puis c'est d'ailleurs le sentiment souvent qu'on retrouve dans nos régions, les gens souvent ont l'impression d'être traités comme des citoyens de seconde zone. Et, là-dessus, je dois vous dire qu'il y a vraiment une frustration qui s'exprime au quotidien dans toutes sortes de réalités. Puis, là-dessus, je pense qu'effectivement le législateur et les parlementaires que nous sommes ont intérêt à être attentifs à ces frustrations qui s'expriment.
Et l'autre, évidemment, élément que je retiens, c'est l'invitation que nous lance M. Proulx au renouveau, à l'audace, faire autrement, voir autrement et certainement gouverner autrement. Et ça fait certainement partie, Mme la Présidente... M. Proulx, il plaide beaucoup pour une nouvelle gouvernance. Et j'imagine que l'argumentaire qui est contenu dans votre mémoire évidemment met en lumière justement cette nécessité de nouvelle gouvernance au Québec. Alors, évidemment, on vous remercie pour vos...
n(11 h 30)nLa Présidente (Mme Doyer): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Alors, le ministre me réclame les 30 secondes qu'il resterait à la partie ministérielle.
M. Boisclair: Tout simplement pour remercier M. Proulx et dire à ma collègue de l'opposition que je prends note de ce qu'elle dit. Mais la commission tire à sa fin, et il serait intéressant qu'avant la fin, de façon plus claire, qu'on sache ce que l'opposition pense de l'élection du préfet au suffrage universel. Parce que, là, elle retient des choses: il faudrait... plans d'innovation, tous des beaux mots qui vont rapidement faire consensus, mais il y a des questions fortes qui sont posées par le projet de loi. Et j'espère que ma collègue saura, d'ici la fin des travaux, nous dire de façon très claire là où elle loge. Je n'ai pas eu peur de dire que la présentation de M. Proulx était aujourd'hui pour moi... apportait des réponses définitives à des questions. Je n'ai pas eu peur de me prononcer en faveur de l'élection du préfet au suffrage universel, avec cependant la remarque que j'ai faite pour les quatre MRC. Là, la question dure va arriver. Il y a des débats qui devront se faire à l'Assemblée nationale. Est-ce que l'opposition va apporter son concours à l'adoption de ce projet de loi si nous commençons, par exemple, demain, l'étude à l'Assemblée nationale? Ce sont toutes des questions... J'espère que nous aurons des réponses d'ici la fin aussi.
La Présidente (Mme Doyer): D'accord. Merci, M. le ministre. Alors, M. Proulx, M. Desjardins, je vous remercie de votre participation à la commission. Je suspends pour deux minutes, le temps de faire le changement.
(Suspension de la séance à 11 h 32)
(Reprise à 11 h 35)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, je demanderais aux membres de la commission de prendre place et aux gens qui sont de la Fédération québécoise des municipalités aussi de prendre place.
Mémoire déposé
Et, avant de vous donner la parole, M. le président de la FQM, je voudrais recevoir officiellement le mémoire, présenté à la commission sur le projet de loi n° 77, de la ville de Rimouski. Alors, je le reçois.
Et ça me fait plaisir d'accueillir M. le président de la Fédération québécoise des municipalités. Si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent.
Fédération québécoise des municipalités (FQM)
M. Belzil (Michel): Alors, Mme la Présidente, je suis accompagné des deux vice-présidents de la Fédération québécoise des municipalités: M. Jean-Guy Poirier, qui est maire de Saint-Siméon et préfet de la MRC Bonaventure; et de M. Michel Giroux, maire de Lac-Beauport et préfet de la MRC de La Jacques-Cartier. Et moi-même, maire de la municipalité de Barnston-Ouest et préfet de la MRC de Coaticook.
Alors, il nous fait plaisir de vous présenter nos commentaires sur le projet de loi n° 77. La FQM se sent interpellée au premier chef par ce projet de loi, puisqu'il s'inscrit en continuité avec les travaux amorcés dans le cadre du chantier sur le renforcement des MRC lancé par l'ex-ministre des Affaires municipales et de la Métropole, Mme Louise Harel, dans le cadre du congrès de la FQM, en septembre 2000.
Nous consacrons le temps qui nous est imparti pour faire la démonstration aux membres de cette commission que, pour la FQM, le second volet de la réorganisation municipale portant sur le renforcement des MRC doit permettre un rééquilibrage des forces politiques en cause, affectées en profondeur par les fusions municipales dans les différentes agglomérations urbaines. Loin d'être désincarnée du premier volet, cette étape complémentaire doit se réaliser avec une volonté ferme de redonner une voix aux centaines de municipalités non visées par les regroupements, dans le respect et la reconnaissance des forces que peuvent constituer les principales agglomérations urbaines.
Pour la FQM, cette voix s'acquiert, dans un premier temps, en permettant à toutes les MRC du Québec de se doter, selon leur propre volonté, des pouvoirs et responsabilités mis à leur disposition pour assurer une livraison efficace et transparente des services publics et ainsi développer pleinement les potentiels de leur région. Pour ce faire, la FQM propose l'abolition des dénominations distinctives des MRC, c'est-à-dire rurales, urbaines-rurales, communautés métropolitaines, et l'octroi des mêmes compétences et responsabilités accordées à seulement une cinquantaine de MRC par le projet de loi n° 29. Cette proposition, doublée d'un réajustement du pouvoir décisionnel au sein des MRC, les outillerait et surtout miserait sur leur dynamisme intrinsèque, car, bien que très récente, cette catégorisation des MRC n'a dans les faits que semé la confusion, alors que, sur le terrain, les distinctions entre les MRC ne trouvent pas leur réponse dans le profil même des municipalités qui les composent, mais davantage dans la volonté des élus municipaux et des employés de ces MRC de développer leur territoire.
Cette réalité se confirme lorsque l'on observe l'évolution des MRC depuis leur création en 1979. Alors qu'elles étaient initialement imparties des mêmes responsabilités, les MRC n'ont certes pas évolué à la même vitesse ni avec le même dynamisme. C'est pourquoi il convient, selon la FQM, de donner les mêmes outils à toutes les MRC et de miser davantage sur leur volonté propre à se prendre en main. Par exemple, l'élection du préfet au suffrage universel peut intéresser autant des MRC ayant une agglomération urbaine que celles avec une ville de centralité ou sous le chapeau d'une communauté métropolitaine. Ce que la FQM dit en substance, c'est qu'il ne faut pas priver les MRC qui veulent utiliser davantage d'outils, sous prétexte que certaines n'en veulent pas.
Le palier supralocal, une nécessité. Pour la FQM et bien d'autres partenaires dont les appuis sont joints à l'annexe 2 de notre mémoire, il est temps que le Québec reconnaisse le rôle incontournable que doit jouer le palier supralocal dans la prise en charge des responsabilités qui lui incombent en vertu du principe de subsidiarité. En effet, au plan de la desserte de services publics, ce principe commande que la responsabilité de toute activité soit confiée au palier de gouvernement le plus près du citoyen et apte à l'assumer.
n(11 h 40)n Malgré leur mandat premier en matière d'aménagement du territoire, les MRC ont évolué considérablement au fil des ans, assumant plusieurs fonctions importantes. Ainsi, les MRC se sont vu confier une multitude de fonctions, tantôt héritées d'anciennes corporations de comté, tantôt décentralisées ou encore déléguées par le niveau local.
À cet égard, on n'a qu'à citer les multiples tâches de nature supralocale qu'elles gèrent désormais. La liste, je vous en fais une lecture rapide: l'environnement, la sécurité incendie, la forêt, les lots intramunicipaux, la gestion des cours d'eau municipaux, la géomatique, l'habitation, l'agriculture, le développement économique, etc. Il faut noter que bon nombre de ces responsabilités ont été confiées aux MRC afin de faciliter la mise en oeuvre de réformes majeures de divers ministères et qu'à ce titre les MRC sont de véritables partenaires du gouvernement. Nous ne saurions trop insister sur cet aspect. D'ailleurs, l'annexe 3 du mémoire dresse la liste des responsabilités assumées par les MRC, selon le ministère concerné.
Les MRC constituent une structure politique et administrative au potentiel et aux ambitions extraordinaires, dotée d'une capacité d'adaptation remarquable aux réalités de leur milieu. À titre d'exemple, on peut citer les MRC des régions-ressources qui oeuvrent quotidiennement pour l'avancement des dossiers forestiers, en partenariat avec le ministère des Ressources naturelles, les industriels forestiers, les propriétaires de boisés et bien d'autres ou encore celles de la région métropolitaine de Montréal qui s'affairent à des dossiers agricoles, de gestion par bassins versants, de politique culturelle, de programmes gouvernementaux d'aide en habitation tel RénoVillage.
La ville-centre, qu'elle soit située en région ou dans une agglomération urbaine, ne peut agir seule. Même les villes de Montréal ou de Québec ont la nécessité de coordonner leur action avec les municipalités environnantes. Les deux communautés métropolitaines se sont vu confier des compétences dont le territoire couvre bon nombre de municipalités, dont une comptant près de 2 millions d'habitants. Le gouvernement leur a notamment octroyé des compétences exclusives ou facultatives en aménagement du territoire, développement économique, développement artistique ou culturel, équipements, infrastructures, services et activités à caractère métropolitain, transport en commun, gestion des matières résiduelles. Mais ce geste du gouvernement s'est fait en parallèle avec d'importantes fusions des municipalités et la création d'arrondissements. Les municipalités de moins de 100 000 habitants doivent continuer d'offrir des services de proximité à leur population, mais ont besoin d'un palier intermédiaire entre elles et la communauté métropolitaine, cette dernière ne pouvant gérer de façon réaliste les compétences en matière de politiques culturelle et patrimoniale, de gestion de cours d'eau municipaux, de gestion des ententes avec la Sûreté du Québec et bien d'autres.
Comme solution à toute cette problématique, d'aucuns préconisent des approches qui, dans les faits, ne font qu'accentuer le clivage entre le milieu urbanisé et le milieu rural en proposant toutes sortes de formules qui se résument à faire du chacun-pour-soi, alors que toute la région a fortement besoin d'une mise en commun des efforts pour assurer leur relance.
Les quelques villes-centres les plus importantes en matière de population sont maintenant des institutions structurées pour la livraison de services de nature locale et régionale bénéficiant aux deux niveaux de la représentativité par le suffrage universel. Ailleurs au Québec, hors de ces quelques dizaines de kilomètres carrés, qui règle les problématiques de nature régionale? Les gens qui ont un mandat local? Pourquoi les régions sont-elles désavantagées par rapport aux grandes villes? Malgré leur forte influence, aucune légitimité ne leur permet d'exercer quelque responsabilité que ce soit hors du territoire de leur ville.
Les compétences. En respect du principe de subsidiarité, les municipalités locales doivent demeurer l'assise des responsabilités de nature locale, avec l'opportunité de confier, lorsqu'elles le jugent approprié, certaines de leurs responsabilités locales à la MRC.
Néanmoins, force est de reconnaître que, de plus en plus, de responsabilités sont d'intérêt supralocal. Que ce soit, à titre d'exemple, l'environnement ou le développement économique, certains domaines d'activité dépassent les limites territoriales des municipalités et demandent une gestion intercommunautaire. Ainsi, une gestion rationnelle et efficiente commande de confier d'importantes responsabilités à des administrations couvrant le territoire de plusieurs municipalités. L'État avait d'ailleurs confirmé cette nécessité en créant, dès 1855, des conseils de comté dont l'évolution a permis par la suite la création des MRC. Cette même rationalité commande également de ne pas multiplier les instances de gestion et de regrouper les forces vives au sein même des MRC.
En adoptant le projet de loi n° 29, en juin dernier, le gouvernement octroyait aux MRC à caractère rural certaines compétences additionnelles et exclusives, tout en facilitant la prise en charge d'autres responsabilités. Pour la FQM, il n'y a aucune raison justifiant de limiter aux MRC rurales la possibilité de prendre en charge ces compétences de nature supralocale. Ainsi, nous demandons que les compétences octroyées aux MRC rurales soient dévolues à l'ensemble des MRC du Québec. À ces quelques responsabilités doit s'ajouter celle en matière de développement économique. En effet, les élus municipaux, leaders de leur collectivité, sont les mieux placés pour prendre en charge cette responsabilité, notamment parce qu'ils possèdent une vision d'ensemble du développement socioéconomique de leur territoire, y inclus l'action concertée ou non de différents organismes ou agents économiques.
Finalement, il faut prendre en compte les impacts de la récente réforme de la carte policière qui a pour conséquence l'abolition de plus de 35 corps de police municipaux en contrepartie des services de la Sûreté du Québec sur leur territoire. Cette réforme n'est pas sans conséquence sur les cours de justice municipales et régionales. C'est pourquoi la FQM propose d'envisager la régionalisation des cours municipales et le partage des frais comme solution à la baisse importante des revenus de ces dernières. Bien entendu, l'octroi de ces compétences aux MRC sous une communauté métropolitaine devra se faire en complémentarité avec les lois régissant ces dernières. Il n'est nullement question pour la FQM de demander de revoir les compétences des communautés métropolitaines mais bien d'assurer un lien entre ce qui se fait au niveau local et ce qui se fait à l'échelle métropolitaine.
Parlons du droit de retrait. À l'instar des modalités d'exercice du droit de retrait des municipalités locales prévu pour les MRC rurales, ce dernier doit également être revu pour les autres MRC. À la différence du mécanisme actuel où la déclaration de retrait devient effective avec le vote de la municipalité locale, nous suggérons que le conseil de la MRC accorde ou refuse le droit de retrait à la municipalité demanderesse dans le cadre d'un vote. Comme dans certains cas particuliers, une municipalité peut être désavantagée par une gestion regroupée à la MRC. Il importe de permettre à la communauté régionale de reconnaître cette réalité particulière par la voie du retrait. Ainsi, le droit de retrait deviendrait un outil de gestion additionnel géré par les élus et non plus une source de blocage et un facteur retardant indûment le développement et les mises en commun.
L'élection du préfet au suffrage universel. Quoique renforci par les nouvelles compétences, le leadership propice au développement d'un territoire ne peut véritablement éclore sans une structure démocratiquement porteuse. Ce leadership est pourtant nécessaire pour mobiliser les forces vives du milieu et assurer le développement endogène non seulement en milieu urbanisé, mais pour l'ensemble du territoire des MRC. Toutes les vertus du suffrage universel étant nécessaires au palier local, pourquoi ne seraient-elles pas justifiées au niveau supralocal?
Bien que les dirigeants des MRC soient des représentants municipaux élus au suffrage universel dans leur localité, aucun suffrage direct ne permet aux citoyens d'exprimer leurs besoins de nature supralocale. Selon des observateurs sérieux, la double allégeance, locale et supralocale, des dirigeants comporte le risque que les intérêts locaux, fréquemment conflictuels d'une municipalité à l'autre, prennent le pas sur l'expression majoritaire des intérêts supralocaux. Parce qu'ils sont avant tout élus par les citoyens de leurs municipalités, les préfets ne peuvent, en toute logique, faire abstraction complète qu'ils sont avant tout maires de leur municipalité locale.
Pour permettre aux MRC d'assumer le leadership nécessaire au développement régional et assurer la prise en charge efficace des nouvelles responsabilités, il est proposé de redessiner l'architecture politique des conseils des MRC en leur permettant d'adopter, s'ils le désirent, une structure décisionnelle qui soit à la fois redevable à la population tout en demeurant en lien avec ces municipalités constituantes. Cette redéfinition du leadership politique passe par l'octroi de la possibilité d'élire le préfet au suffrage universel afin de modifier sensiblement les équilibres politiques sur les territoires de MRC. Cette modification assurerait la présence d'un leader régional voué aux intérêts et au développement de toute la MRC.
n(11 h 50)n La loi n° 29 a ouvert une brèche pour favoriser cette situation en offrant la possibilité aux MRC dites rurales d'élire, si elles le désirent, leur préfet au suffrage universel. On reconnaît ainsi, pour ces MRC à tout le moins, le caractère régional des intérêts affectés par l'action de la MRC et on permet à la population, et c'est important, de participer directement, par l'élection du préfet, au gouvernement qui gère ses intérêts.
On comprend mal cependant pourquoi cette mesure facultative n'est accordée qu'aux MRC dites rurales sans qu'elle soit étendue aux autres MRC. Les arguments qu'on peut faire valoir pour justifier l'élection du préfet au suffrage universel s'appliquent aux MRC non rurales comme aux MRC rurales. Les membres du conseil des MRC non rurales, pas plus que ceux des MRC rurales, n'ont été élus pour gérer les intérêts affectés par l'action de la MRC. Les électeurs de ces MRC sont aussi compétents que ceux des 51 autres pour élire leur préfet qui dirige un gouvernement de nature régionale. Enfin, même s'il y a, dans la MRC non rurale, une ou quelques villes qui se veulent centrales, les intérêts régionaux affectés par les décisions municipales ne se réduisent pas à l'action de ces villes et nécessitent autant, sinon plus qu'ailleurs, des arbitrages venant d'un préfet élu par l'ensemble de la population.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belzil, je m'excuse de vous interrompre, mais il vous reste à peu près, pour que vous ayez le temps de présenter le coeur de votre... quatre minutes.
M. Belzil (Michel): Donc, je vais aller immédiatement à la conclusion.
La Présidente (Mme Doyer): Si vous voulez aller à l'essentiel.
M. Belzil (Michel): La MRC, telle que nous la connaissons actuellement, répond déjà en partie aux besoins supralocaux. Toutefois, des ajustements sont nécessaires, tant au niveau de sa structure que des compétences qui lui sont dévolues. En effet, à l'instar des MRC rurales, les citoyens de toutes les MRC doivent avoir leur mot à dire sur les enjeux de leur territoire et sur la façon dont leur seront dispensés les services supralocaux. Il importe donc que l'on offre à l'ensemble des MRC la possibilité d'élire de façon facultative leur préfet au suffrage universel. De même, leurs compétences doivent être revues de façon à leur confier, en plus des compétences qu'elles exercent déjà, celles dévolues aux MRC rurales. De plus, le gouvernement devrait reconnaître le leadership des élus municipaux en matière de développement économique en leur permettant d'assumer davantage de responsabilités.
Comme le suggérait la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales, ce scénario consisterait à faire des MRC non seulement des coopératives de services, mais le centre de gravité de la planification et du développement et de l'offre de services sur leur territoire, tout en maintenant un palier de municipalités locales responsables de la gestion de services de proximité ayant un impact direct sur la qualité de vie locale. Pourquoi le gouvernement a-t-il renforcé par une démocratisation de l'appareil supralocal dans les villes regroupées et qu'il ne le permettrait pas ailleurs?
Le gouvernement a démontré jusqu'ici une détermination ferme pour obliger le partage des services et de la richesse au sein des agglomérations urbaines en imposant les fusions de nombreuses municipalités locales. Il devra faire preuve de la même détermination en mettant de côté les susceptibilités individuelles et en permettant l'élection du préfet au suffrage universel dans toutes les MRC, en plus de leur attribuer de nouvelles compétences qui, en vertu du principe de subsidiarité, devraient échoir à cette instance. Alors...
La Présidente (Mme Doyer): Il vous reste deux minutes, M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Non, ça va.
La Présidente (Mme Doyer): Ça va? On va y aller avec...
M. Belzil (Michel): ...avec les questions.
La Présidente (Mme Doyer): M. le ministre des Affaires municipales et de la Métropole.
M. Boisclair: Bien. M. Belzil, j'espère que vos arguments de poids, pour lesquels je voudrais vous remercier, vont aider nos collègues de l'opposition peut-être à prendre des positions claires sur la question de l'élection au suffrage universel, de même aussi que sur les compétences à donner aux MRC. Puis j'espère, M. Belzil, que vous serez avec nous jusqu'à la fin de la journée pour entendre les remarques de clôture des membres de la commission.
Je veux vous dire que je partage avec vous une vision qui est celle du renforcement des MRC. Je l'ai dit d'entrée de jeu, je le répète ici aujourd'hui, et j'espère à nouveau que nous serons capables, dans cette commission, de tisser des consensus sur des pouvoirs nouveaux que nous pourrions donner de façon spécifique aux MRC à caractère urbain et rural. Parce qu'il est vrai que nous avons octroyé des compétences nouvelles, exclusives aux MRC à caractère rural, l'évaluation municipale. Nous en avons donné des facultatives aux rurales. Il m'apparaîtrait peut-être de bon ton que nous étendions ces compétences facultatives aux MRC à caractère urbain et rural, même si le projet de loi n° 77 n'en fait pas la proposition.
Je veux aussi vous dire... J'espère que nous aurons le consensus sur cette question. Et, le consensus, il se manifestera non seulement par des propos tenus ici, en cette commission, mais il pourrait se traduire aussi par le rythme auquel l'Assemblée nationale adoptera le projet de loi. Parce que vous comprenez que, quand il y a consensus à l'Assemblée, les choses peuvent toujours se faire plus rapidement que s'il n'y a pas consensus entre les parlementaires. Je pense que ceux qui sont habitués à suivre nos débats comprennent mon message.
Je voudrais, M. Belzil, vous dire cependant que je ne suis pas nécessairement prêt à conclure de la même façon que vous sur les MRC qui se retrouvent intégralement ou partiellement regroupées sur des territoires de communauté métropolitaine. Nous avons déjà eu cette discussion ensemble. Peut-être êtes-vous à nouveau devant moi sur le plan de la pensée? Êtes-vous peut-être plus progressiste que je ne peux l'être? Je m'en confesse, je ne suis pas rendu au même endroit que vous et je ne pense pas que les membres du gouvernement ne le soient non plus. Mais j'entends votre point de vue.
Moi, je veux vous poser une question bien précise, et je m'arrêterai là par le suite. M. Carette, hier, avec le maire de Saint-Georges ? c'est ça, hein, le maire de Saint-Georges, le maire de Saint-Georges, c'est bien Saint-Georges ? accompagné de ses collègues le maire de Magog, le maire aussi de Saint-Jérôme, M. Gascon, sont venus nous faire une présentation au nom des villes d'agglomération. Essentiellement, ce qu'ils nous ont dit au sujet de l'élection du préfet au suffrage universel, c'est que, de façon générale, ils s'y opposaient ? c'est une opposition de principe ? voyant là apparaître un nouveau gouvernement régional au-delà des municipalités. Et M. Carette, là, avec sa façon bien à lui, est venu dénoncer le syndrome des fonctionnaires. Il dit: On va créer une nouvelle bureaucratie, des nouveaux bureaux... Je reprends essentiellement son propos là, mais le moindrement qu'on crée une institution, elle va vouloir se développer, puis c'est une nouvelle bureaucratie qui va se développer entre...
Ceci étant dit, ce n'est pas là l'essentiel de son propos. Je voudrais citer son propos, parce qu'on cherche aussi des compromis, là. Moi, je veux être partenaire du monde municipal. C'est plus que d'être partenaire d'une union ou d'une fédération municipale. C'est assez difficile, être partenaire du monde municipal ces temps-ci, là. Vous me rendez ça difficile. Ce n'est pas que je ne le souhaite pas, là, mais danser à trois, ce n'est pas simple. Donc, il dit, et je cite M. Carette ? le tango à trois, moi, je n'ai jamais vu ça ? «On vous dit ? et je cite M. Carette: Si, toutefois, pour des raisons qu'il vous incombe de juger, le législateur québécois décidait d'offrir cette opportunité-là ? l'élection au suffrage universel ? on voudrait mettre quand même deux balises à ça: c'est que le règlement ? puis je pense que l'esprit de la loi, c'est ça, du projet de loi, c'est ça ? le règlement qui habilite un conseil des maires à décider s'il y aura suffrage universel doit nécessairement être soumis ? bien, je ne vous lirai pas l'article ? mais à l'article 201 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est-à-dire à la double majorité.» Première balise. C'est toujours la citation de M. Carette que je continue, là.
«Deuxièmement, on vous suggère également que, dans le cas de nos villes ? parce que c'est les villes où il y a des MRC urbaines et rurales ? les conseils des maires ne soient habilités à prendre une telle décision qu'après seulement que les agglomérations soient regroupées. Autrement que ça, il n'y a pas de logique là-dedans. L'ensemble législatif... Même si on est contre les préfets élus, on ne croit pas que c'est bon pour le Québec, on ne croit pas que c'est bon pour la démocratie, on ne croit pas que c'est bon pour le portefeuille des Québécois et des Québécoises, mais, si jamais, pour des raisons d'État qui nous échappent, vous décidiez d'aller là, on vous exhorte de ne pas habiliter les MRC d'aller dans ce sens-là tant et aussi longtemps que, dans l'agglomération, ce ne sera pas regroupé. On pourrait vous expliquer ça tantôt. Ce que je n'ai pas le temps de dire, on le dira en réponse à des questions.»n(12 heures)n Essentiellement, c'est le propos que je cite au texte de M. Carette. Est-ce que vous seriez prêts à faire en sorte que l'amendement Carette se retrouve dans le projet de loi ? ...
Des voix: ...
M. Boisclair: ...hein, parce qu'on va le baptiser aujourd'hui, là ? se retrouve dans le projet de loi pour essayer de tisser... de trouver un compromis, mais, en contrepartie de quoi, je serais prêt à étendre des pouvoirs nouveaux aux MRC rurales et urbaines? Est-ce qu'il n'y a pas là un consensus, là, puis une zone suffisamment confortable pour que tout le monde puisse se dire: Écoutez, le Québec a bougé dans une bonne direction? Et est-ce que cette proposition vous apparaîtrait un pas dans la direction... dans une bonne direction? Et j'ajoute l'information suivante que, dans le cas, là, des villes pas regroupées en agglomération, il y a quatre MRC, là, qui sont visées; c'est quatre. Sachant aussi que le monde municipal évolue, là ? ce n'est pas tout le monde qui est prêt, même dans les rurales, à procéder à l'élection du préfet ? alors, faites-moi donc plaisir là, M. Belzil, là, dites-moi donc, là, que l'amendement Carette, c'est une bonne affaire puis qu'on marche. Puis, en contrepartie, les facultatives qu'on a données au rural, on les donne aux urbaines et rurales. Décevez-moi pas, là. Décevez-moi pas.
M. Belzil (Michel): Écoutez bien, je peux...
La Présidente (Mme Doyer): M. le président, M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Alors, écoutez, ça me ferait grand plaisir de dire oui à cet amendement-là. Je suis totalement heureux de voir l'ouverture de M. Carette, l'ouverture des villes d'agglomération, quoique, d'entrée de jeu, ils nous disent qu'ils sont opposés au préfet élu. Mais, nous, c'est totalement secondaire, on va tout de suite à l'aspect négociation finale. Donc, c'est certain qu'ils sont favorables, mais ils mettent certaines balises. Par contre, ce que l'on a toujours dit et ce que l'on répète, et je ne peux pas aller sur le terrain de la proposition pour une raison particulière, c'est qu'on ne veut pas... Dans le fond, on recherche que tous les citoyens du Québec dans ces MRC puissent être en mesure d'aller élire et de discuter de toutes les questions de niveau régional. Et, vous le voyez, il y a beaucoup de secteurs qui vont devenir de plus en plus régionaux.
Alors, toute la question du milieu, de l'imputabilité, de la transparence, c'est important pour nous. Alors, il ne faut pas non plus utiliser une manière détournée, qui est la double majorité, le maintien de la double majorité, pour faire en sorte que, dans les faits, il n'y en aura pas, de décision, de réglementation pour favoriser l'élection du préfet dans ces agglomérations ou il n'y en aurait seulement que quelques-unes qui ont une volonté d'aller dans ce sens-là. Mais, vous voyez, leur souhait initial, c'est qu'il n'y en ait pas. On dit oui, dans la mesure où la ville-centre va contrôler le vote sur cette possibilité-là.
Alors, nous, il nous apparaît que c'est comme équivaloir, pour nous, à ce qu'il n'y ait pas d'élection, qu'il n'y ait pas l'offre d'élection au préfet au suffrage universel dans ces MRC urbaines-rurales. Alors, je vous réponds comme ça, d'entrée de jeu. Alors, nous, notre proposition, que je n'ai pas eu le temps de lire, c'est tout simplement de dire: La double majorité, c'est un frein à l'expansion de la MRC, au renforcement.
Et, sur ce sujet-là, pourquoi n'irions-nous pas selon le mode des voix, comme c'est prévu à l'élection du préfet dans les MRC existantes aujourd'hui, sans qu'il y ait d'élection au suffrage universel? Alors, je pense que la décision d'élire un préfet, ce n'est pas la décision d'investir 200 000 $ dans un site d'enfouissement ou d'injecter des fonds alors que la ville-centre a déjà des équipements ou a déjà toute la structure en place. Je pense que l'élection du préfet, c'est une démocratie régionale, et ça devrait se prendre avec un potentiel ou une possibilité que ça puisse se faire. Et la proposition ici, j'aurais aimé aller dans ce sens-là, mais il n'y a pas de possibilité pratiquement que ça puisse se faire.
La Présidente (Mme Doyer): M. le ministre.
M. Boisclair: Alors, pourquoi, si cette proposition de compromis, vous la rejetez d'emblée, pourquoi le législateur à ce moment-ci serait justifié d'intervenir puis pourquoi on ne ferme pas les livres puis on n'attend pas tout simplement qu'il y ait un plus grand consensus dans le monde municipal? Vous qui réclamez que nous soyons des partenaires, que nous respections l'autonomie municipale, certains qui nous accusent d'infantiliser les municipalités parce qu'on prend des décisions à leur place. Alors, s'il n'y a pas de compromis possible, moi, pourquoi je ne fermerais pas tout simplement les livres, puis on va attendre qu'il y ait plus de... un plus grand consensus dans le monde municipal?
La Présidente (Mme Doyer): Oui. M. Belzil ou la personne que... J'aimerais ça que vous... M. Giroux.
M. Giroux (Michel): M. le ministre, il ne s'agit pas, je pense, là... Il y a des responsabilités que nous sommes en train d'étudier, tous ensemble, auxquelles on réfléchit pour améliorer le monde municipal, faire en sorte que la démocratie soit plus étendue.
L'amendement Carette qui est sur la table est un amendement qui n'en est pas un. C'est ça qui est dommage. Si ça apparaît comme quelque chose d'intéressant, on peut aller vers ça. De toute façon, ça ne sera pas reculer, mais ce n'est pas avancer. C'est que de laisser le choix ou la décision à la ville-centre à savoir si la démocratie doit s'exercer au niveau du choix de leur préfet à l'échelle régionale, si c'est la ville-centre qui continue à le décider, c'est comme si on n'avançait pas. On ne recule pas, vous allez me dire, c'est vrai, mais on n'avance pas, puisque ce sera dommage que les gens de cette région puis les citoyens de ces régions voient le leader régional ou, en tout cas, d'une partie de la région, soit le maire de la ville-centre... et qu'il n'a pas été élu pour les représenter totalement. Il y aura, à côté, un préfet non élu qui, lui, ne pourra pas faire plus que ce qu'il fait présentement, puisque c'est la ville-centre même, là, qui dirige sur tous les autres aspects avec la double majorité. Alors, on n'avance pas, là.
M. Boisclair: Mais, ceci étant dit, on avance, puisque, pour argumenter le fait que nous n'avancions pas, vous prétendez que la population et que le débat ne... vont faire en sorte que jamais les maires des villes-centres ne vont vouloir le faire. Ça, c'est présumer d'une décision d'un maire de ville-centre, ce qui n'a rien à voir avec l'intention du législateur, qui est de le permettre. La job du législateur, c'est de le permettre, ce n'est pas de le garantir.
Et ça, c'est le débat local. Les maires des villes-centres, lorsqu'ils se feront élire, se feront élire sur des plates-formes électorales. Certains pourront dire qu'ils sont pour ou ils sont contre, mais, en bout de course, ils seront... c'est eux qui décideront... et donc que le rôle du législateur, ce n'est pas de prendre la décision à leur place, c'est de permettre que la décision se prenne.
Et, moi, je vous repose ma question froide, froide, très froide: Pourquoi avancer à ce moment-ci s'il n'y a pas de consensus dans le monde municipal? Vous qui réclamez à chaque jour que nous respections votre autonomie, que... vous réclamez d'être traités en partenaires puis vous ne voulez pas vous faire imposer des décisions, force m'est de constater que, d'un côté, il y a des gens qui disent blanc puis, de l'autre côté, il y a des gens qui disent noir. Alors, pourquoi ne pas tout simplement fermer les livres puis dire: On repassera?
La Présidente (Mme Doyer): M. Giroux.
M. Giroux (Michel): Il y a encore trop à faire pour fermer les livres, M. le ministre. Je pense que la même détermination que votre gouvernement... Nous avons admiré la détermination de votre gouvernement dans le processus depuis deux ans. Je ne vois pas pourquoi votre gouvernement n'aurait pas la même détermination pour continuer à renforcer les MRC. Et c'est faisable, et il y a sûrement moyen de trouver des solutions.
Maintenant, je vous répète que ce que vous proposez ? ou l'amendement Carette ? n'est pas un recul, mais ce n'est tout de même pas pouvoir avancer beaucoup et même c'est très peu avancer parce que la plupart des compétences qui seraient la compensation, ce sont des compétences facultatives où, encore une fois, la ville-centre pourrait décider si on les prend ou on ne les prend pas.
Alors donc, ce qu'on met sur la table, ce n'est qu'une possibilité que peut-être un maire de ville-centre pourrait un jour en arriver avec son conseil municipal à décider que, bon, on va avoir une vision un peu plus régionale puis on va essayer d'aller avec la MRC puis s'entendre. Mais on juge un arbre à ses fruits et puis, depuis quelques années, on n'a pas récolté beaucoup de fruits de ce côté-là, M. le ministre. Et c'est au gouvernement, je pense, à prendre les dispositions pour faire en sorte que la démocratie soit la même partout au Québec.
M. Boisclair: Mais il faudrait quand même faire valoir que les regroupements municipaux, il y a plus de 75 ans qu'on en parlait. Et puis, sans doute, on pourrait retrouver des textes anciens sur une plus longue période. Et il a fallu effectivement un gouvernement très courageux qui, malgré la bravade de l'opposition, a fait le choix de procéder.
Ceci étant dit, des bonnes causes puis l'intérêt public, le gouvernement en a identifié quelques-unes et les a menées à bien. Mais, devant le blocage actuel, compte tenu aussi de la situation politique qui prévaut à l'effet qu'il y a une grande division dans le monde municipal, pourquoi, moi, soudainement, je serais celui qui m'élèverait à ce moment-ci, alors qu'on débat de la question de l'élection du préfet depuis un an ou deux, pour dire: Voilà, j'impose le bien de mon bureau de ministre des Affaires municipales?
n(12 h 10)n Moi, il me semble que la proposition de M. Carette ? je comprends qu'elle n'est pas idéale, mais quand même ? ouvre la voie pour qu'ensuite la démocratie locale joue, pour que la démocratie locale joue et pour éviter que ce soit nous, à Québec, qui prenions la décision. Notre job, qu'on a à faire aujourd'hui dans le projet de loi, c'est de dire quels sont les véhicules que nous donnons au monde municipal et quelles sont les balises pour que cette démocratie-là joue. Et, moi, je suis prêt à mettre plus de choses dans le panier de la responsabilité municipale ou du désir municipal, mais dans la mesure où les gens le veulent aussi, sinon, là... Peut-être qu'on pourrait discuter de l'«exclusive» dans l'évaluation. Il y a bien des firmes privées qui font ça. Je pourrais rajouter ça dans mon panier, là.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, il y a deux mains qui se sont levées, celle de M. Belzil et celle de M. Poirier.
M. Belzil (Michel): Je vais prendre la parole en second lieu. J'aimerais...
La Présidente (Mme Doyer): D'accord. Et je vous ferai remarquer que, du côté ministériel, il reste trois minutes et que j'ai eu une demande de parole de M. le député de Roberval.
M. Poirier (Jean-Guy): Moi, M. le ministre, je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'on devrait garder notre autonomie; ça fait longtemps qu'on se bat pour l'avoir. Mais, par contre, dans le cas présent, quand on parle de laisser le choix au niveau de l'élection des préfets au suffrage universel, avec le pouvoir que les villes ont à l'heure actuelle, c'est une démocratie biaisée en partant, parce qu'on sait d'ores et déjà que, quand ça va arriver sur le terrain, à toutes fins pratiques, ça ne passera pas. Alors, ce serait simplement pour leur faire plaisir, c'est-à-dire qu'on accepterait ici, et, plus loin, on serait bloqué quand même. Vous allez peut-être trouver qu'on n'est pas tellement collaborateurs ce matin, mais excepté qu'on a tellement vécu ça. Moi, écoutez, ça fait 25 ans de vie municipale, ça fait à peu près 20 ans que je suis autour de la table de l'Union comme telle, et, à chaque fois, on a cette problématique-là. C'est qu'on est certain que ça ne passera pas, et je pense que tout le monde va perdre son temps là-dedans.
M. Boisclair: ...démocratie. Ce que vous me demandez, c'est de statuer à votre place.
M. Poirier (Jean-Guy): Non, ce n'est pas exactement ça, excepté qu'on dit qu'on a toujours répondu de changer la façon de voter ou de se prononcer. C'est ça qu'est le problème, parce que, écoutez, je vais vous donner un exemple: quand les députés sont élus lors des élections, les gens qui vont voter... même si c'est un président de compagnie qui a 2 000 employés, il a un vote, O.K.? Alors, moi, je pense que, au niveau d'une table comme celle-là, c'est certain, quand il y a des décisions à prendre, il y a de l'argent à dépenser... Si on dit, au niveau de l'évaluation foncière, dans l'exercice qu'on se prépare à faire, ça va vous coûter 100 000, votre municipalité, votre ville, et les autres, ça va leur coûter 10 000, là, il y a un problème. Mais, dans ce cas-ci, ce n'est pas une question monétaire, c'est une question de démocratie.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Poirier. Alors, je vais permettre une question au député de Roberval, question très courte et réponse courte, s'il vous plaît. Puis on terminerait, et je passerais la parole à ce côté-ci, à ma gauche.
M. Laprise: Merci beaucoup, Mme la Présidente. À la page 5 de votre mémoire, vous parlez que ce sont les municipalités qui devraient déléguer à la MRC les responsabilités qu'elles veulent bien déléguer. Et, à la fin de votre mémoire, vous dites: Le gouvernement devra nous déléguer des responsabilités. Je voudrais... À quelle place que vous vous situez vraiment là-dedans?
La Présidente (Mme Doyer): M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Il faut que je comprenne bien le sens, là. Écoutez, on parle bien sûr de responsabilités facultatives...
M. Laprise: Facultatives.
M. Belzil (Michel): ...que les municipalités vont bien vouloir déléguer à la MRC, mais, dans la fin de notre mémoire, on parle peut-être de responsabilités du genre cours municipales régionales...
M. Laprise: Plus régionales.
M. Belzil (Michel): ...alors qui sont d'un autre ordre et que le gouvernement, à bien des égards, trouve avantageux d'insérer dans les MRC comme compétences ou par d'autres lois.
M. Laprise: Quand vous parlez que vous devriez avoir le développement, est-ce qu'à ce moment-là vous parlez de prendre en main les CLD à la place du...
M. Belzil (Michel): Écoutez, je pense que les élus municipaux ont toujours favorisé de prendre en charge le développement. C'était le cas avant les CLD. Alors, ça peut aller jusqu'à prendre en commission de MRC les CLD. Par contre, on en a déjà discuté abondamment: quant à nous, les CLD, c'est une structure qui demeure, qui doit demeurer avec une autonomie de décision. Par contre, il faut comprendre que nous sommes des partenaires financiers avec le gouvernement dans les CLD, et, si on veut investir de plus en plus d'argent comme municipalités, il faut, je pense, être impliquées plus que c'est le cas aujourd'hui dans la dynamique élus et société civile.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Belzil. Alors, je vais donner la parole à la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, Mme la Présidente. M. Belzil, M. Poirier, M. Giroux. Salutations également à l'ensemble de vos collaborateurs et collaboratrices qui sont ici, ce matin. Vous me permettrez peut-être ? et je pense que M. le président et M. Giroux vont me pardonner ? de saluer de façon particulière, évidemment, M. Poirier, qui est le préfet de la MRC de Bonaventure, qui est la MRC qui est dans mon comté, le comté de Bonaventure.
Puis, d'entrée de jeu, Mme la Présidente, vous me permettrez de réagir aux propos qu'a tenus le ministre et à la confession qu'il nous a faite ici, en cette commission, sur sa difficulté comme ministre d'être partenaire du monde municipal. Bien, j'ai envie de lui dire la chose suivante, Mme la Présidente: si le gouvernement avait pris ses responsabilités en matière d'affaires municipales, si le gouvernement n'avait pas lui-même contribué à diviser le monde municipal, on n'en serait certainement pas ici, aujourd'hui. Et, à preuve, la fameuse réorganisation municipale, le livre blanc qui a été déposé, est un exercice qui, malheureusement, a été fait de façon partielle.
Et, dans mes notes, dans mes remarques préliminaires, Mme la Présidente, j'ai eu l'occasion de livrer, à partir de faits concrets qui illustrent l'improvisation du gouvernement dans le secteur de la réorganisation municipale... en livrant le fait que, sur une période de moins d'un an, du 15 juin 2000 au 20 décembre 2001, il y a cinq législations qui ont été déposées, justement avec 1 000 amendements, pour réagir à la pièce à chaque fois avec un projet, dans le fond, qui n'a été imaginé qu'à moitié. Et, aujourd'hui, avec le projet de loi n° 77, on a le ressac, en fait, de l'improvisation, et c'est la sixième législation qui a été déposée depuis le 15 juin 2000. Puis là la question qu'on doit se poser: Est-ce qu'on aura une autre législation pour corriger l'improvisation du gouvernement dans six mois? Hein! Alors, évidemment, on est, du côté du gouvernement, adepte de l'étapisme, Mme la Présidente, mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que c'est le monde municipal qui paie pour ça, qui paie pour des mauvais choix et qui paie certainement pour un manque de vision de la part du gouvernement et du ministre des Affaires municipales.
Pour ce qui est de la question des fusions, j'aimerais peut-être aussi rappeler au ministre des Affaires municipales que nous nous sommes opposés à toute fusion forcée. C'est très important de le dire. Et, du côté du gouvernement, on a vraiment l'impression, en fait, que les fusions forcées allaient être la panacée du développement des régions du Québec, comme si, finalement, les choix de développement allaient passer par les fusions forcées au Québec, ce qui illustre, à notre sens, Mme la Présidente, un manque total de vision et de confiance à l'endroit des régions du monde municipal.
Mais, ceci étant dit, j'aimerais certainement prendre quelques instants, Mme la Présidente, pour féliciter les gens qui sont ici ce matin d'avoir pris, bien sûr... d'avoir fait leur travail avec sérieux, parce que, de toute évidence, tous les éléments contenus dans le projet de loi n° 77 ont été analysés, soupesés, et il y a des propositions qui nous sont formulées.
Mon premier commentaire... et, là-dessus, j'abonde parfaitement avec la Fédération québécoise des municipalités, concernant le point... concernant les distinctions nominatives. Et vous souhaiteriez, si je comprends bien, puis c'est clair dans votre mémoire, que ces distinctions soient abolies, encore une fois, des distinctions qui mettent en lumière le fait que le gouvernement a, je vous dirais, brouillé les cartes. Hier, je faisais référence à une situation qui est devenue plus complexe dans le secteur des affaires municipales. Mais la politique du gouvernement est claire, hein: diviser pour mieux régner. Je pense que... Je pense que, là-dessus, il n'y a aucune subtilité, là, de la part de la stratégie qui est utilisée par le gouvernement.
Mais j'aimerais peut-être me consacrer, Mme la Présidente, à la question liée au droit de vote. Je me réfère bien sûr au résumé qui est contenu dans votre mémoire pour qu'on puisse ensemble peut-être tester votre... en fait, le mode de calcul que vous avancez. Et je m'appuierai là-dessus, sur... parce que j'ai regardé évidemment... à partir de la suggestion que vous faites, qui est une contre-proposition au principe de la double majorité qui est annoncé dans le projet de loi. Je me réfère au rapport de la commission Nicolet/Jutras. Et là je cherchais une MRC qui correspond, dans le fond, aux critères que vous avancez et je suis tombée sur la MRC du Haut-Saint-Maurice qui possède, en fait, qui représente... En fait, on parle de 94 %. La ville de La Tuque représente 94 % de la population... qui est la ville-centre et qui représente 66 % du vote. Alors, j'aimerais qu'on puisse peut-être faire un exercice ensemble et voir concrètement, là, si c'est possible, comment effectivement la proposition que vous apportez permettrait, d'une part, de satisfaire la ville-centre ou la ville de centralité ou la ville d'agglomération ? appelez-la comme on voudra, là; ça va nous prendre un lexique bientôt pour s'y retrouver ? puis, en même temps, satisfaire bien sûr les municipalités du monde rural qui, elles, sont plus... évidemment ont des craintes qui sont légitimes, soit dit en passant.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belzil.
n(12 h 20)nM. Belzil (Michel): Le calcul proposé, dans son essence, fait en sorte que toute ville qui possède, qui a plus de 50 % de la population, avec la formule qui est proposée, va faire en sorte que, du côté du mode de votation par les voix, elle va être réduite en bas de 50 % des voix. Ça peut être à 45, à 40, dépendant, là, des voix totales selon les lettres patentes des MRC. Alors, c'est assez difficile de faire des calculs, mais, au moins, ça a l'effet de diminuer le vote de la ville-centre en bas du 50 % au niveau des voix. Elle conserve toujours, si on parle de double majorité, le mode selon la population, son droit de veto sur toute question. Par contre, ce qu'on dit, c'est qu'en matière de désignation ou de vote sur la possibilité d'élire le préfet... On dit: si on conserve la double majorité, on sait que toutes les agglomérations ? et celles où ce n'est pas fait encore, ça va se faire ? vont dépasser 50 % par le renforcement des agglomérations qu'on a vu depuis trois ans.
J'ai jasé, moi, avec M. Carette souvent, et, à l'époque, il représentait moins de 50 % de la population. Quand on a décidé... votre prédécesseure a décidé d'aller de l'avant et de renforcer ces pôles urbains en fusionnant le pourtour, les banlieues et, parmi celles-là, des municipalités rurales, bien sûr que les gens, les représentants de ces villes-centres-là étaient très contents, elles devenaient maintenant avec un poids supérieur à 50 %, donc elles contrôlaient d'une certaine façon la MRC, même si ce n'était pas ça, l'objectif, là, des regroupements ? là, je ne veux pas m'étendre là-dessus. Mais le gouvernement a démontré une volonté d'aller de l'avant dans le renforcement des agglomérations, et ce qu'on demande aujourd'hui au gouvernement et même à ces maires de villes-centres là, qui sont contentes d'avoir été renforcées, d'avoir passé le palier du 50 %, ce qu'on demande, c'est que, maintenant, le gouvernement ait la volonté tout aussi ferme de dire: On veut une démocratie régionale. On vous a permis de dépasser le cap du 50 %, mais maintenant soyez beaux joueurs, vous ne pouvez pas tout avoir dans la vie, O.K.? Vous allez vous développer, on vous a donné des outils supplémentaires, mais, pour ce qui est de la démocratie régionale, on voudrait qu'il y ait une possibilité d'élire le préfet. Et, si vous vous enferrez dans tout ce qu'on entend depuis des années et des années, il n'y en aura pas, de possibilité sur le terrain. Alors, c'est ce qu'on dit. Avec la formule de vote selon les voix, la ville-centre, souvent, va avoir 40 ou 45 % quand même des voix, mais ce ne sera pas un automatisme, par la double majorité, que de dire: si je n'en veux pas, il n'y en aura pas.
Alors, c'est ce qu'on demande: une volonté ferme là-dessus pour que ce soit possible sur tous les territoires de MRC, en tout respect de tous les citoyens du Québec qui veulent aussi participer aux discussions d'ordre régional et en toute transparence et en désir de rendre imputables leurs gens, leurs représentants. Alors, c'est ça qui est le résumé de notre pensée, rapidement.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Belzil. Mme la députée de Jean-Talon.
Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Alors, messieurs, bonjour. Je pense être connue comme une grande partisane de la démocratie et puis de la place que le citoyen doit occuper lorsqu'il est question de prendre des décisions qui les concernent. Un constat que je fais depuis que je siège à l'étude de ce projet de loi là, c'est qu'on a, par la voie de la loi n° 29, accordé à certaines MRC la possibilité d'élire son préfet au suffrage universel et aussi la possibilité d'accorder à certaines MRC certains pouvoirs si ces MRC choisissent d'utiliser ces dispositions de la loi.
On arrive avec le projet de loi n° 77 qui est devant nous aujourd'hui et on dit aujourd'hui: Maintenant, on va inclure les municipalités régionales de comté qu'on a comme oubliées ou: On est allé peut-être un peu trop vite puis on ne les a pas incluses dans le projet de loi n° 29, donc on s'en vient réparer une erreur ? j'interprète, mais je pense que je ne me trompe pas du tout ? et on se retrouve avec un débat aujourd'hui qui est le coeur finalement, là, du projet de loi n° 77, à quelque chose près.
Moi, il y a quelque chose qui me fatigue et qui m'interpelle depuis hier, et c'est toute la question du corollaire qui va avec l'élection du préfet au suffrage universel, et c'est celui qui dit que... En fait, en anglais, on dit: No taxation without representation. Alors, la question que je pose ? et je voudrais une réponse ... pas que je pense qu'elle sera malhonnête, je ne veux pas une réponse de politicien. Mais, lorsque vous nous dites que c'est important puis c'est majeur, je le reçois, mais je voudrais aussi qu'on me dise que la prochaine étape sera peut-être un jour de dire: Bien, puisque ces services-là, lorsqu'on aura choisi de les prendre à notre charge, la responsabilité de la MRC... est-ce que le corollaire donc sera de dire: On va venir voir le gouvernement puis on va lui demander de nous donner le pouvoir de taxation? Est-ce que je me trompe, quand je fais cette réflexion à voix haute, de dire franchement oui au suffrage universel, à l'élection au suffrage universel du préfet, mais, à quelque part, à un moment donné, il va arriver d'autre chose, il va y avoir une autre demande? Est-ce que cette réflexion a été faite chez vous, M. le président?
La Présidente (Mme Doyer): M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Oui, tout à fait. Écoutez, nous réfléchissons à ces dossiers-là et nous l'avons reconnu même devant la commission Nicolet/Jutras qui a voulu nous faire parler un peu sur la question de niveau de taxation au niveau de la MRC.
Alors, ce qui est privilégié dans nos discussions avec le gouvernement, avec le ministère, ce n'est pas d'aller dans la voie d'un nouveau système de taxation. On sait très bien que les citoyens ne l'accepteraient pas, et l'ensemble de nos membres ne l'acceptent pas non plus. Alors, tant qu'à nous, il n'est pas question, d'une façon subtile, d'aller chercher un pouvoir de taxation.
Par contre, on sait que les MRC, leur financement relève, dépendant des MRC, en partie des quotes-parts des municipalités. Ce que l'on recherche ? et il y a déjà des exemples fortement avancés ? au juste, ce que l'on recherche, c'est de donner autant... Les demandes des municipalités, historiquement, c'est de donner des revenus autonomes aussi à la MRC. Alors, on a commencé avec l'adjudication des revenus dans le pacte fiscal. Alors, il y a le montant sur les ressources naturelles, un 10 millions, qui s'en va directement à la MRC. Alors, on essaie par tous les moyens de doter les MRC de revenus autonomes suffisants ou intéressants. Il y a des MRC dans la Gaspésie qui ne font pas appel à une somme énorme en matière de quotes-parts des municipalités pour différentes raisons; il y en a d'autres aussi pour d'autres raisons; bien, ça dépend des sources de revenus.
Mais, pour ce qui est d'établir un palier de taxation, ce n'est pas dans nos prévisions et dans nos discussions. Alors, on peut penser que ça pourrait arriver là dans 10, 20 ans, mais je vous dirai, moi, que la voie et la solution qui seraient privilégiées par tout le monde, en respect de nos citoyens, c'est d'y aller par des revenus autonomes suffisants.
Et, Mme la Présidente, Mme la Présidente, M. Giroux aimerait...
La Présidente (Mme Doyer): Ah, excusez-moi! J'étais distraite.
M. Belzil (Michel): M. Giroux aimerait rajouter quelques mots.
La Présidente (Mme Doyer): Allez-y. M. Giroux.
M. Giroux (Michel): Rapidement, Mme la députée, évidemment on a réfléchi à toute cette question et on dit: No taxation without representation, mais, dans le cas que nous avons, c'est: No representation. Est-ce qu'il doit y avoir «taxation»? On commence par le «representation». Alors, c'est une réflexion...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Giroux (Michel): Alors, le principe n'est pas violé, mais, d'un autre côté, il est évidemment... de façon théorique, il serait fort intéressant pour les théoriciens en matière politique d'avoir un niveau de gouvernement qui est en même temps responsable de sa taxation. Mais commençons par la «representation», et, ensuite, je pense qu'au fil des ans nous verrons si le Québec doit se doter d'un niveau de taxation, et ça, ce sera une décision communautaire, je pense, d'une société.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Giroux. Merci, Mme la députée. Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Oui, merci. Peut-être un élément de précision, toujours évidemment à l'aspect... à l'annexe de synthèse de votre mémoire sur vos prises de position, notamment de l'élection du préfet au suffrage universel, simplement pour bien m'assurer... parce qu'on lit ? vous me permettrez de citer: «La FQM est d'avis que l'on permette à l'ensemble des MRC d'élire, si elles le veulent, le préfet donc au suffrage universel.» Je dois comprendre, là, pour vous, qu'il n'y a pas d'obligation. Les MRC qui souhaitent s'en prévaloir, dans le fond, pourront le faire, c'est ça? Et là-dessus, évidemment, je serais tentée de vous demander: Est-ce qu'il n'y a pas une conséquence liée justement au fait qu'on arrive avec une double... une démocratie à deux vitesses, en fait, comme je l'ai demandé aux représentants qui sont venus, dans le monde municipal au Québec? Et j'ai envie de vous dire: dans le fond, puisqu'il n'y a pas d'obligation, qu'est-ce qui inciterait une MRC ? on en a deux au Québec, là ? mais qu'est-ce qui inciterait une MRC à se prévaloir d'une disposition comme celle-là?
La Présidente (Mme Doyer): M. Belzil.
M. Belzil (Michel): Alors, je conviens avec vous que c'est sûrement un phénomène très rare que de la démocratisation à la carte d'une façon facultative, mais c'était notre niveau de réflexion l'an passé et c'est ce que les gens, à ce moment-ci, souhaitent.
n(12 h 30)n Alors, c'est dans ce sens-là que, pour ne pas pénaliser les MRC qui veulent aller de l'avant en se donnant un leader élu régionalement et en ayant, là, quand même une poussée pour représenter toute la région, alors on ne voulait pas restreindre dans cinq, 10 ou 20 ans, alors c'est la raison pour laquelle on a favorisé l'aspect facultatif, tout à fait.
Et, pour répondre à une question que j'ai comme sous-entendue, ici depuis tantôt, je vous dirai que, l'an passé, il y a eu deux préfets élus; cette année, il va s'en rajouter environ... on va s'en rajouter quatre. Et on a effectué des... Ce n'est pas beaucoup, certains le diront, et je vous dirai que ce n'est pas évident non plus. C'est quand même jeune au niveau de la discussion, on se reporte à l'an passé. Et nos sondages très personnalisés ? et je pense que c'est aussi la vision gouvernementale ? font état qu'il y a 50 % des MRC rurales actuellement qui sont intéressées, dans un avenir rapproché, à élire le préfet au suffrage universel. Et les autres 50 % dont on parle, on nous dit qu'une bonne partie, c'est parce que la réflexion ne passe pas d'une façon, là, comment dirais-je, majoritaire. Par contre, il y a des éléments dans chacun des conseils de MRC qui favorisent l'élection du préfet.
Alors, c'est un processus en évolution et, ce que l'on dit ici, ce matin, c'est la même chose. Ne nous interrogeons pas sur qui va aller de l'avant l'an prochain ou dans deux ans, disons-nous tout simplement: On offre cette possibilité-là, et les gens feront leur réflexion, et ceux qui veulent aller de l'avant, écoutez, ce sera pour leur avenir, pour leur vision et ils se donneront une vision; et ceux qui ne veulent pas aller de l'avant, pour différentes raisons, il ne faut pas être péjoratifs non plus envers les MRC ou les préfets qui ne sont pas élus. Alors, je pense que c'est un processus continu. Et, dans la mesure où il y a une volonté et où les gens s'exprimeront de part et d'autre sur les bienfaits, je pense que ça évoluera plus rapidement.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Belzil.
M. Boisclair: Mme la Présidente, je voudrais remercier M. Belzil et l'inviter à luncher avec M. Gagnon, ce midi.
Une voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. le ministre. Alors, je considère que les travaux sont terminés. Je suspends les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures, ou après les affaires courantes si c'est plus tard, alors que la commission poursuivra ses auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 77. Merci, mesdames, messieurs.
(Suspension de la séance à 12 h 33)
(Reprise à 16 h 7)
Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Alors, nous recevrons dans l'immédiat M. Gilles Goddard, qui est préfet de la MRC du Haut?Saint-François, et M. Charles Grenier, préfet de la MRC des Pays-d'en-Haut, qui sont les premiers... à bien vouloir prendre place, s'il vous plaît.
Alors, pour le fonctionnement de nos travaux, nous pourrions convenir ? j'en ai discuté avec les gens qui vont nous faire leur présentation ? que normalement, en dedans de 15 minutes, la présentation va être faite. Nous pourrions, par la suite, échanger, une période d'échange avec les membres de la commission de 15 minutes de part et d'autre de la Chambre, et on convient également que les remarques finales vont être condensées dans une dizaine de minutes plutôt que 15 minutes pour chacun des intervenants.
Alors, si ça vous sied, on y va tout de suite ? le temps nous est compté ? en nous excusant auprès de nos invités qui ont dû attendre. Ainsi en vont les travaux de la Chambre; des fois, c'est plus long que prévu. Alors, la parole est à vous, M. Goddard.
MRC du Haut-Saint-François et
MRC des Pays-d'en-Haut
M. Goddard (Gilles): Si vous permettez, je vais laisser commencer M. Garnier, et puis j'enchaîne tout de suite après.
Le Président (M. Vallières): Volontiers. M. Garnier.
M. Garnier (Charles): Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier la commission de me donner la possibilité de vous faire part de mes commentaires en regard du projet de loi n° 77. Mon nom est Charles Garnier. J'ai été élu préfet au suffrage universel de ma MRC, des Pays-d'en-Haut, le 4 novembre dernier. Avant cette date, j'étais maire de Saint-Sauveur depuis 16 ans et préfet désigné par mes collègues maires depuis six ans. Je cumulais donc la double fonction de maire et de préfet.
L'occasion de traiter, d'analyser et de discuter en première ligne de dossiers régionaux m'a amené avec le temps à devenir un partisan du renforcement des MRC. J'ai donc entrepris de persuader le conseil des maires de ma MRC d'adopter un règlement pour que le préfet soit désormais élu par la population, convaincu des avantages inconditionnels pour notre milieu d'avoir un tel leader.
Avec l'adoption du projet de loi n° 29 qui permettait l'élection du préfet par la population, je me suis donc retrouvé dans une situation que j'avais en quelque sorte provoquée. Très attaché au développement de ma municipalité, il me fallait donc faire un choix entre la mairie et la préfecture et être conséquent avec moi-même. Je crois en la force des régions et, si je ne suis pas un fusionniste inconditionnel, et surtout pas en faveur des fusions forcées, il n'en demeure pas moins que je suis un régionaliste convaincu. Pour moi, le renforcement des MRC passe par l'élection du préfet au suffrage universel; c'est une question d'imputabilité. Il faut légitimer le poste de préfet face aux nombreuses responsabilités de nature régionale maintenant dévolues aux MRC du Québec.
n(16 h 10)n Je vous disais plus tôt avoir cumulé pendant six années les fonctions de maire et de préfet; j'ai donc vécu l'expérience de porter deux chapeaux. Pour être franc et logique, je vous dirais qu'on ne peut, dans certaines situations, faire abstraction que l'on est d'abord et avant tout un maire élu par sa population de sa municipalité locale. Il est donc facile d'imaginer le risque que les intérêts locaux prennent le pas sur l'expression majoritaire des intérêts régionaux.
Au contraire, le préfet élu au suffrage universel possède la légitimité et la latitude de défendre le dossier d'une municipalité par rapport à une autre sans être pour autant en situation conflictuelle. Le préfet élu au suffrage universel bénéficie de l'appui démocratique de tous les citoyens et citoyennes de la MRC et non pas uniquement de ceux de sa municipalité locale comme l'est le préfet désigné par ses confrères maires. Le préfet élu au suffrage universel sera ainsi justifié de parler au nom de toute la population du territoire de la MRC. Il aura un poids politique de nature supralocale qui devra être inévitablement pris en compte par les divers intervenants du milieu économique, social et politique.
J'ai été longtemps un adepte de l'autonomie des municipalités et je comprends que certains élus le soient encore. Mais, dans le contexte actuel, il nous faut admettre que les nombreux défis régionaux à relever requièrent des modifications dans nos structures politiques. Aujourd'hui, il nous faut se doter d'une confiance régionale et d'être prêts collectivement à faire face aux délégations de responsabilités gouvernementales, ce qui suppose que le chacun-pour-soi doit faire place à «essayons de faire des choses ensemble pour l'ensemble de la collectivité». La réorganisation de la structure de la MRC est donc inévitable. Il nous faut la rendre davantage efficace, la démocratiser et surtout la faire connaître.
Lors de l'élection de novembre dernier, chez nous, dans Les Pays-d'en-Haut, les trois candidats maires qui se sont présentés ont été, durant plus de deux mois, des éducateurs, des informateurs, des pédagogues. En effet, tout en sollicitant l'appui des électeurs, nous avons pu constater que la plupart des gens n'avaient jamais entendu parler de la MRC ou encore du préfet, pourtant cela existe depuis plus de 20 ans. On avait prédit un taux de participation similaire aux élections scolaires. Bilan final: 40 % des électeurs se sont prévalus de leur droit de vote. Chez nous, c'est un taux supérieur à la moyenne de participation aux élections municipales locales, puisqu'il ne faut pas oublier que, dans notre région, le début novembre, c'est la saison morte et que de nombreux villégiateurs restent à ce moment-là en ville. Le post mortem de cette campagne électorale, avec tout le battage publicitaire l'entourant, nous a révélé que cette élection à la préfecture a grandement contribué à faire connaître notre MRC et le rôle du préfet.
Plusieurs élus et citoyens m'ont demandé quelle était la différence entre le travail du député et celui du préfet élu au suffrage universel. Je dirais que le travail de l'un et de l'autre est avant tout un privilège qui nous est accordé par la population. Certains pensent que les députés voient d'un mauvais oeil la venue de préfets élus au suffrage universel dans leur comté. Je suis d'avis, et je souhaite que c'est l'opinion de vous tous ici présents, que les députés voient les préfets élus par la population comme des interlocuteurs représentatifs de la région. Nous bénéficions d'un appui démocratique majeur pour défendre les intérêts de l'ensemble des citoyens de la MRC dans les champs de compétence municipale. Je crois fermement que notre travail est complémentaire à celui des députés et que nous sommes avant tout des alliés au service des citoyens dans des dossiers d'intérêt commun.
Dans ma région, depuis que j'ai été élu préfet au suffrage universel, j'ai pu constater que mes relations avec mon député Claude Cousineau sont tout aussi harmonieuses, et ce, même si nous sommes de groupes sanguins différents.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garnier (Charles): Nous joignons nos efforts à servir la population. Je me consacre à la gestion du territoire de ma MRC et, lui, il légifère et voit aux besoins de son comté à la suite des demandes des citoyens et citoyennes et des municipalités, entre autres. Les mandats du préfet et du député sont ainsi complémentaires, considérant que leurs intérêts respectifs sont de faire évoluer la situation socioéconomique des citoyens de leur territoire. C'est donc dans cet esprit, avec des buts communs, que nous pouvons agir pour le bénéfice de la population.
En conclusion, je vous dirai qu'un préfet élu au suffrage universel pourra s'imposer comme leader régional, conjuguer les forces vives de sa région et exprimer les besoins régionaux de sa MRC auprès des paliers supérieurs. Je suis fier, à titre de préfet élu au suffrage universel, de poursuivre cette mission politique pour le bien-être de la population que je représente. Et je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci, M. Garnier. Alors, M. Goddard va compléter la présentation.
M. Goddard (Gilles): M. le Président, M. le ministre, messieurs dames les commissaires, c'est un plaisir. Je tiens à vous remercier de nous recevoir pour nous permettre d'émettre notre opinion sur plus un aspect vécu que d'autre chose.
Puis, en commençant, j'aimerais vous mentionner le pourquoi que j'avais opté au départ puis, ensuite, passer à l'expérience. C'est que le facteur, pour moi, qui était optionnel ou facultatif en était un de base, parce que, pour une fois qu'il y avait un choix, que ce n'était pas du mur-à-mur... Trop longtemps, tout le monde se sont plaints que certains voulaient tout et que d'autres ne voulaient rien. Pour une fois qu'on a le choix puis à partir du moment où on a un choix, on peut opter pour ou contre, mais au moins donner la chance aux gens d'avoir le choix.
Alors, l'expérience de la MRC du Haut-Saint-François. Tout comme mon confrère de la MRC des Pays-d'en-Haut, j'étais aussi maire d'une municipalité et préfet désigné par mes confrères avant d'être élu préfet au suffrage universel dans ma MRC. En effet, j'ai eu le privilège d'être maire de la municipalité d'Ascot Corner ? qui était à l'est de Fleurimont, qui maintenant est à l'est de Sherbrooke ? pendant 12 ans et préfet de la MRC du Haut-Saint-François pendant trois ans.
Lorsque la loi n° 29 a octroyé aux élus des MRC rurales le choix de pouvoir élire leur préfet au suffrage universel dès 2001, les maires de ma région, conscients des nombreuses retombées positives d'un tel choix, ont fait pression pour que nous puissions bénéficier de ce privilège le plus tôt possible, et j'explique rapidement: c'est que je crois qu'il y a des moments de préparation, et la MRC du Haut-Saint-François était prête à ça.
Et, hier matin, on me remettait une étude qui a été faite, à laquelle je n'ai pas participé et où je n'étais pas plus au courant que d'autre chose, mais c'est un rapport, une consultation des acteurs-clés de la MRC du Haut-Saint-François mais faite par un CAMO, le CAMO éducation et formation. Et on cite là-dedans certains résultats de consultation, entre autres ? puis ça a été noté tout à l'heure: la population connaît mal sa région, il y a un manque généralisé de vision à moyen et à long terme, particulièrement du côté des élus municipaux. Ce qui nuit le plus au développement de la MRC, ce sont les chicanes de clocher constantes entre les municipalités. Chacune tire la couverte de son bord, on dirait des villages gaulois, bon, etc.
Mais, par contre, en solution, le rapport mentionnait le besoin de leadership dans une MRC. Il y a unanimité quant à la nécessité d'avoir un leader qui soit aussi un rassembleur. Le leader doit être une personne neutre au regard des sous-régions de la MRC. En ce sens, ce rôle devrait échoir au préfet de la MRC. O.K. Alors, c'est une étude en parallèle qui avait été faite.
En effet, jouissant déjà de bons éléments de concertation, la MRC du Haut-Saint-François voulait profiter de l'occasion pour se doter d'un leader régional vraiment élu par le peuple et pour le peuple. L'élection du préfet au suffrage universel venait confirmer le bon choix des maires mais devenait en plus le choix de tous les intervenants du territoire et de la population tout entière. Chez nous, le préfet ne représente plus seulement les municipalités, mais toutes les sphères de la société. Une MRC représente une région ? villes, villages et secteurs ruraux. Une région est forte lorsqu'elle travaille pour le bien de tous les citoyens et qu'elle a des projets communs adaptés.
Pourquoi un préfet élu au suffrage universel? Quelle est la différence pour une MRC que son préfet soit élu au suffrage universel plutôt que désigné par ses confrères maires? Sachez que ce sont deux réalités distinctes, et je crois qu'une région doit être prête pour se doter de ce nouvel outil. Un outil n'est efficace que si on en découvre l'utilité et l'efficacité. O.K. Alors, c'était clair que, cet outil-là, il y a des gens pour qui c'est un avantage et d'autres pour qui ce ne serait pas un avantage.
n(16 h 20)n Tout d'abord, il s'agit d'être porteur d'une vision régionale, sans attache à une municipalité ? je vais rapidement; un élément déclencheur ou amplificateur, dépendamment du vécu de la MRC, d'une concertation régionale non seulement pour le municipal, mais aussi pour le scolaire, le communautaire, la santé, la culture; donner une meilleure perception et connaissance de la MRC et de ses rôles; avoir une reconnaissance d'un leadership régional par tous les milieux ? et ça, c'est des faits vécus que je vous raconte de ce qui se vit présentement; obtenir un poids politique plus grand au niveau de tous les paliers de gouvernement; être un multiplicateur dans la Politique nationale de la ruralité; avoir une disponibilité lors des réunions des conseils municipaux, c'est-à-dire les visites, soutien et aide, assistance dans les municipalités ? ce que je ne pouvais pas faire avant, étant déjà maire moi-même. On avait les mêmes soirs de réunion, donc on ne pouvait pas apporter cet avantage-là. Hier soir encore, j'étais demandé, je fais une tournée de toutes les municipalités du territoire
Le préfet élu au suffrage universel bénéficiera d'un appui démocratique que le préfet désigné ne possède pas et il sera légitimé de parler au nom de la région et jouira d'un poids politique de nature supralocale qu'on devra inévitablement considérer. Personnellement, je crois que la décision gouvernementale de renforcer les MRC est l'ultime solution au développement des régions et de l'ensemble du territoire du Québec.
Les régions du Québec ont des problèmes différents et elles doivent nécessairement apporter des solutions qui leur sont adaptées. Nous avons maintenant la possibilité de nous impliquer davantage régionalement, en fonction de besoins spécifiques. L'intérêt suscité par ce nouveau rôle a fait en sorte que, depuis mon élection, j'ai eu à rencontrer de nombreuses municipalités sur des besoins spécifiques ou autres. J'ai travaillé, entre autres, avec un organisme communautaire s'occupant de handicapés physiques et mentaux pour aider à régulariser les rôles régionaux ainsi qu'au financement récurrent, et ce, avec différents représentants de la régie de la santé, de l'office des handicapés, de différents groupes sociaux.
J'écris maintenant une chronique dans le journal régional du Haut-Saint-François pour que la population puisse mieux connaître la MRC, le conseil des maires, son fonctionnement, les projets régionaux et leur suivi. Il est donc souhaitable, à mon avis, que chacune des MRC gère son évolution et ses défis avec les moyens et les outils que le gouvernement a commencé à nous donner. Je fais ici allusion au récent pacte fiscal et surtout à la Politique nationale de la ruralité. Celle-ci va nous permettre, tous ensemble, de se doter d'infrastructures régionales et locales pour non seulement contrer la dévitalisation des régions grâce à la proximité des services priorisés, mais aussi pour mettre en valeur nos régions dans la vision d'un développement durable.
Les pouvoirs de planification, de gestion, de développement de services à caractère municipal par la MRC sont nettement suffisants pour justifier un préfet élu au suffrage universel. Nous n'avons qu'à songer aux domaines suivants: l'aménagement du territoire, la participation aux CLD et aux SOLIDE, les schémas de couverture de risques au niveau incendie, l'environnement, les plans de gestion de matières résiduelles, leur application, la forêt, l'agriculture, un plan de communication, sécurité policière, cour municipale, pactes ruraux, nombreux dossiers suprarégionaux, bon. Alors, vous les connaissez.
En conclusion, le renforcement des MRC est une nécessité et le préfet élu au suffrage universel devient un incontournable qui ne peut assumer d'autres fonctions électives, qui se consacre entièrement aux affaires de sa MRC, donc qui est détaché d'une attache municipale, qui jouit d'un vote prépondérant en cas de blocage à cause de la double majorité et qui est redevable devant toute la population. Il devra assumer ce leadership essentiel à l'essor socioéconomique qui contribuera au renforcement des MRC. Le privilège de pouvoir élire le préfet au suffrage universel doit être attribué aux citoyens de toutes les MRC du Québec. Nous vous remercions et souhaitons que vous partagerez notre position dans l'intérêt de la collectivité québécoise.
Le Président (M. Vallières): Merci, monsieur. M. le ministre.
M. Boisclair: Je voudrais vous remercier. On a vraiment l'occasion, par votre témoignage, au-delà des conceptions théoriques et des modèles qu'on peut construire en écrivant des lois, en définissant des organigrammes, de bien comprendre votre enthousiasme mais les conséquences aussi de la légitimité accrue qui vous est donnée.
Je dois vous dire que je partage cet enthousiasme. J'ai eu l'occasion d'échanger avec vous en privé, l'occasion de m'instruire sur votre expérience. Donc, sur cette question, moi, je veux dire ? je le réitère au nom des membres de ma formation politique: nous pensons que le choix qui a été fait de permettre l'élection au suffrage universel des préfets des MRC rurales est un bon choix, et il n'y a personne qui veut remettre ça en cause, en tout cas, pas de ce côté-ci de l'Assemblée. Au contraire, nous voulons étendre ce droit et ? cette possibilité, devrais-je dire, plutôt que ce droit ? cette possibilité et faire en sorte de confier, dans le projet de loi n° 77, la possibilité confirmée que le préfet puisse être élu au suffrage universel.
La clé demeure cependant la décision pour autoriser ce type de procédure de nomination du préfet, et j'ai indiqué très clairement qu'il m'apparaît que la formule contenue au projet de loi m'apparaît être la bonne formule et que nous pensons que nous ne pouvons pas forcer la démocratie là, la démocratie locale, et que nous faisons bien de nous inspirer du principe aussi de l'autonomie municipale pour dire que les gens qui le veulent, le législateur va leur donner le moyen, par la loi, mais les gens décideront entre eux avec les formules qui sont celles qui, en ce moment, s'appliquent, dans le respect des grands principes démocratiques.
Moi, j'ai deux questions pour vous. La première: S'il y avait des compétences nouvelles à donner aux MRC ? nous avons donné des pouvoirs exclusifs, avec l'évaluation municipale; il y a des pouvoirs aussi qui sont facultatifs ? est-ce que vous êtes d'avis qu'il faudrait faire en sorte que davantage de pouvoirs facultatifs soient transformés en pouvoirs exclusifs? Si oui, lesquels? Et est-ce que vous pensez opportun que le législateur confère aux MRC à titre rural et urbain les mêmes avantages ou, en tout cas, les mêmes possibilités que nous avons données aux MRC rurales?
Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Goddard va débuter. M. Goddard.
M. Goddard (Gilles): D'accord, merci, M. le Président. Alors, dans un premier temps, lorsqu'on parle des responsabilités dites régionales, moi, ce que j'aime de ce fonctionnement-là, c'est que, la responsabilité étant régionale ou relevant de la MRC mais pas nécessairement effectuée par la MRC, parce que... Au même titre que présentement on fonctionne à l'inverse: il y a un pouvoir local qu'on peut reporter à la MRC. Je vous donne un exemple ? parce qu'on vient de le faire: en gestion de matières résiduelles. Il faudrait, par contre, alléger un petit peu le fonctionnement lorsqu'on demande une acquisition de compétence. Mais, dans le fonctionnement comme tel, on peut avoir un pouvoir et transmettre une partie de ce pouvoir-là, ou le faire faire localement, ou y aller aussi sous contrat, ou le prendre généralement.
Alors, ce qui est important, c'est que, lorsqu'on a un pouvoir, c'est une gestion mais une gestion avec une vision sur tout le territoire. Alors, c'est pour ça que, pour moi, je préfère cet aspect-là, mais en tenant compte, bien sûr... puis c'est toujours la même chose à chaque place. En étant élu au suffrage universel, ce que ça fait, ça dégage, d'un point de vue purement municipal...
Et, si vous permettez, je vais juste faire un petit aparté sur la vision, comment qu'elle peut être différente lorsqu'on est inclus comme maire et comme régional, puis je vais vous le faire dans un autre domaine. J'étais, moi, par formation, un prof d'éducation physique, on dit aujourd'hui «non pratiquant», mais c'était ma formation. Puis, à l'école où j'étais, on avait le privilège d'avoir un directeur adjoint qui était super, qui nous défendait, en éducation physique, parce que, vous savez, on a le directeur, le directeur adjoint puis... Puis, à un moment donné, le même directeur adjoint a été transféré puis il a eu à superviser d'autres matières qu'il a défendues avec autant d'acharnement. Puis, c'est curieux, on a été un peu délaissés parce qu'on n'avait pas le type qui était le gros vendeur. Alors, dans le fond, ça explique qu'il y a plusieurs visions, mais, dépendamment si on la voit juste d'un côté ou de l'autre, ça peut faire la différence. Alors, dans ce cas-là, le fait d'être élu au suffrage universel et d'avoir la vision régionale, ça peut créer des impacts meilleurs à ce niveau-là.
Dans ce qui est transféré présentement... Et, en même temps que je suis un régionaliste, je dois avouer que je suis quelqu'un qui est très local aussi, et je crois qu'il y a certains pouvoirs qui doivent demeurer locaux et de gestion locale. Certains doivent être régionaux, et je vais même plus loin et on travaille déjà à ce niveau-là, il y a des gestions qui doivent se faire au niveau suprarégional, c'est-à-dire en concertation avec d'autres MRC. Aujourd'hui, là, on ne peut pas juste penser un secteur. Dépendamment du niveau d'activité, il faut s'ajuster avec le niveau de territoire puis de volume qu'on a à couvrir.
M. Boisclair: Vous plaidez donc pour que les MRC à l'intérieur des communautés métropolitaines, à la limite, disparaissent.
M. Goddard (Gilles): À la limite, jusqu'où ça peut aller, ça va être différent ? je me permets de répondre, Charles, là-dessus. Moi, ce que j'essaie de regarder, c'est que, dans le cas de notre MRC ? parce que je la connais plus, bien sûr, même si j'en connais d'autres, et le fait de siéger avec d'autres préfets d'autres MRC qui vivent d'autres situations, on en voit aussi ? à la limite, il y a des pouvoirs qui doivent être régionaux. Je prends le cas de Sherbrooke, Sherbrooke qui est devenue une ville, une MRC. C'est curieux comme, avant, la vision de Sherbrooke était là, puis ce qui était à l'extérieur, ce n'était pas nécessairement facile à gérer, puis maintenant ça se gère facilement. Il y a même du rural qui se gère facilement.
Alors, je pense qu'il y a des craintes de la part de certaines personnes de perte de pouvoirs. En réalité, une MRC, ça devrait être, comme dans n'importe quel milieu politique, une question de leadership, non pas de dictateur. Alors, on a... Je vais vous donner un exemple. Je reviens encore dans les cours d'école, mais, dans une cour d'école, s'il y a un petit gars de 5 pi 8, puis il y en a quatre de 5 pi, celui de 5 pi 8 va jouer à ce qu'il veut puis les autres vont jouer à ce qu'il veut aussi. Mais est-ce que c'est ça qui est correct? Alors, les pouvoirs, à quelque part, c'est bon lorsque c'est la population qui peut se prononcer dessus.
M. Boisclair: Est-ce que vous plaidez, à terme, dans un monde idéal, pour une ville, une MRC partout sur le territoire?
n(16 h 30)nM. Goddard (Gilles): Ha, ha, ha! Je dois vous avouer qu'il y a 10 ans passés j'avais un maire d'une municipalité très rurale qui disait: Une MRC, une ville. À l'époque, une municipalité... mais c'était évidemment une...
Une voix: ...
M. Goddard (Gilles): Oui, oui. Mais, à la limite, je ne crois pas qu'on soit prêt à ça. C'est pour ça que, d'avoir certains éléments qui ramènent à un niveau supérieur, ça devient beaucoup plus avantageux, parce que, vous savez, il y a toujours la question du «opting out» qui a éliminé souvent... parce qu'il y a des gens ne sont pas toujours conscients de ce qu'ils vont chercher. Moi, par exemple, j'ai favorisé, chez nous... Puis je ne suis pas pour être géré ou dirigé par les plus petits et j'ai défendu ce point-là, moi, que les plus gros aient plus de pouvoirs dans la MRC à l'époque, parce que tu es plus gros payeur, il est normal que tu aies un poids plus lourd. Mais ça ne devient plus normal lorsque tu contrôles tout puis que les autres sont obligés de suivre avec l'idée. Alors, il y a à quelque part des nuances à apporter, là, dans le fonctionnement. Mais de respecter le niveau local, pour moi, c'est très important, et je ne l'enlèverai pas, parce qu'on va enlever le bénévolat, la participation, les gens du milieu qui sont impliqués. Il y a toute une vie, là, qui est dans les localités qu'il faut absolument respecter puis conserver.
M. Boisclair: En tout cas, moi, je vous remercie pour ce témoignage et je retiens particulièrement l'ouverture. Vous êtes le premier à le faire depuis les travaux de cette commission et nous sensibiliser au fait que, autant on peut agir au niveau de la MRC et c'est important de mieux coordonner nos efforts au niveau de la MRC, mais vous plaidez même que, sur certains enjeux, il faut travailler à un niveau régional. C'est un appui de plus que je récolte à l'idée du renforcement des pouvoirs des communautés métropolitaines, et je vous remercie pour ce courage.
Le Président (M. Vallières): Oui. M. Garnier, vous voulez ajouter.
M. Garnier (Charles): Si vous permettez, M. le Président, j'aimerais peut-être répondre à M. le ministre concernant une MRC, une ville.
M. Boisclair: ...une esquisse.
M. Garnier (Charles): Non, non, mais...
M. Boisclair: Je n'annonce pas d'amendement législatif qui va proposer ça, là, rassurez-vous bien, mais, dans un monde idéal...
M. Garnier (Charles): Non, mais vous disiez ce matin que votre gouvernement... Et c'est vrai, depuis 30 ans, on en parlait, des fusions municipales, et votre gouvernement, j'admets, a eu le courage finalement de procéder dans ce dossier-là. Et votre politique s'appelait la politique de la consolidation municipale. Vous avez fait deux choses dans cette politique-là: vous avez fait des fusions et vous avez fait du renforcement des MRC. C'est en parallèle. Les deux se sont faits en parallèle. Puis, la raison, je pense qu'elle est logique, nos petites municipalités ne pouvant subvenir et ne pouvant répondre aux délégations de responsabilités que vous vouliez leur confier, il fallait donc les renforcer ou les fusionner. C'est un ou l'autre.
Ça fait que, là, si on en vient maintenant à la fusion des MRC, bien, là, je vous dirais, alors on fusionne toutes les municipalités au niveau des MRC ou bien on leur donne, à ces municipalités, des moyens au supralocal, et c'est là qu'on revient à la MRC avec son préfet au suffrage universel. Parce que le gouvernement a beau vouloir confier des responsabilités importantes aux MRC, si ces MRC là ? je sais qu'elles sont toutes différentes au Québec; les MRC ont toutes des lettres patentes différentes et ont toutes des responsabilités, des besoins et des problèmes qui sont différents... mais, à ce moment-là, c'est au niveau des petites municipalités, à travers un renforcement des MRC, qu'on va être capable de répondre aux délégations de responsabilités de votre gouvernement.
Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous deux, chers préfets. M. Goddard et M. Garnier, ça nous fait très plaisir de vous entendre et certainement de pouvoir s'appuyer sur ? comme le disait le ministre ? une expérience vécue. Et, puisque vous êtes avec nous, bien, évidemment vous me permettrez de poser quelques questions pointues sur, au quotidien, comment se traduit la vie d'un préfet élu au suffrage universel? En d'autres termes, une semaine, là, comment ça s'organise? J'imagine que vous n'avez peut-être pas suffisamment de 35, 40 heures pour tout faire, mais il y a des représentants qui sont venus nous dire, ce matin, hier également ? plus hier, je vous dirais, un peu ce matin ? qu'en renforçant les pôles que sont les MRC, en fait, on va, à terme, contribuer à créer une nouvelle bureaucratie, à fonctionnariser la profession de préfet.
Là-dessus, j'aimerais peut-être vous entendre: Comment, sur le plan physique et logistique, là, comme vous êtes élus au suffrage universel, est-ce que ça a un impact sur l'organisation de l'équipe à l'interne à la MRC? Est-ce que vous avez dû embaucher du personnel de plus? De un. Et, de deux, au niveau de la prise de décision à l'interne ? parce que vous êtes des préfets qui ne sont pas rattachés à aucune municipalité du territoire de la MRC que vous représentez ? alors est-ce qu'il y a des conflits, des tensions? Si oui, comment vous arrivez, là, à régler les litiges qui peuvent se présenter?
Le Président (M. Vallières): M. Garnier.
M. Garnier (Charles): Bon. Pour ce qui est de ma part, moi, remarquez que j'étais déjà à temps plein comme maire et comme préfet auparavant. J'avais pris ma pension de mon employeur; ça faisait six ans que j'occupais ces deux postes là à temps plein. Donc, la transition s'est faite assez bien dans le sens que, maintenant, bien, je suis à temps plein seulement dans ma MRC, et ça fait avancer les dossiers. Évidemment, j'ai une bonne relation avec mon personnel. On n'en a pas engagé d'autres supplémentaires du tout, mais ça me permet d'avoir une vue et une interrelation avec les maires, avec les municipalités qui est beaucoup plus grande. Je consulte régulièrement, par téléphone évidemment, parce que la plupart de mon conseil des maires, c'est des gens qui travaillent ou qui ont des emplois ou qui sont occupés ailleurs, mais je les consulte régulièrement. On a des dossiers qu'on monte en parallèle, on a des comités, on est occupé sans bon sens. Mais, surtout, surtout, le fait que je suis là à plein temps, ça fait connaître la MRC. Les gens maintenant arrêtent me voir. Ils veulent voir le préfet.
Autrefois, là, le préfet, ils ne savaient même pas c'était quoi, le préfet, ils ne connaissaient pas ça. Ça fait quoi, un préfet? Ça marie le monde. Il y en a qui pensaient que ça mariait le monde, le préfet. Il y en a d'autres qui ont même dit que ça faisait des fusions. Maintenant, les gens savent c'est quoi. Autrefois, j'étais préfet; jamais les journalistes ne me posaient des questions ou ne m'appelaient pour savoir mes commentaires au niveau des décisions de la MRC. Aujourd'hui, j'ai deux chroniques dans les journaux, j'ai des émissions de télévision, télévision locale. Les journaux parlent de nos réalisations, parlent de ce qu'on fait. Et il y a des projets qui avancent, et on est connu maintenant. C'est l'élection qui nous a fait connaître, qui a fait connaître la MRC et le rôle du préfet.
Le Président (M. Vallières): Bien. Est-ce que M. Goddard veut faire part aussi de son expérience?
M. Goddard (Gilles): S'il vous plaît, M. le Président, madame. Je dois avouer, oui, il y a un emploi du temps plus que chargé, mais je l'étais avant aussi, là, parce que je pense que, pour faire ce qu'on fait là, il faut être passionné. Donc, ce n'est pas une question d'heures, c'est vraiment une question d'implication.
Dans les facteurs ou les secteurs principaux où ça a un impact, aussi curieusement que ça puisse paraître... Et, personnellement, je suis un gars qui différencie les chapeaux qu'il porte. Lorsque je parlais comme préfet, c'était clair que je ne parlais pas pour Ascot Corner lorsque je parlais, mais les gens ne le perçoivent pas nécessairement comme ça, même si, toi, tu fais la différence, alors que, maintenant, ça a amené comme une facilité dans la communication. Pour les gens, je suis devenu vraiment le préfet.
D'ailleurs, les gens disent, plusieurs m'ont dit après l'élection: Ah, mais c'est le fun, félicitations, tu es rendu préfet. Ça faisait des années que je l'étais, mais là je l'étais maintenant, O.K.? Mais le plus: c'est comme si c'est vraiment détaché. Il y a plusieurs municipalités qui m'ont fait venir pour différents dossiers locaux, des visions, des opinions, rencontrer leur conseil, ce qui ne se serait pas fait avant parce que j'étais le maire d'Ascot Corner aussi, et il y avait une question de disponibilité aussi les soirs de rencontre, entre autres. Mais la perception n'est plus la même sur l'aide qu'on peut apporter dans les municipalités. Vous savez... Puis ce n'est sans doute pas vrai partout, puis c'est pour ça que j'essaie de faire des distinctions, puis c'est pour ça que ça va être bon à des places puis peut-être moins bon ailleurs. Puis c'est pour ça que, pour moi, l'aspect optionnel, facultatif est très important.
Pour moi, quand je regarde ça, c'est que, pour plusieurs municipalités, on sait que les dossiers aujourd'hui sont rendus de plus en plus complexes. Alors, comme les dossiers sont complexes, on y travaille beaucoup plus. Comme élu, j'ai maintenant bien plus d'influence. Si vous parliez de la relation au niveau du personnel, il n'y a pas plus de personnel, mais on a plus d'influence parce qu'on peut connaître mieux le dossier, le faire évoluer, l'influencer, alors que c'étaient plus des gestionnaires... Alors, pour moi, ce côté-là vient même politiser davantage... où la vision de développement est différente de juste un gestionnaire. Donc, ça fait un effet contraire, là, par rapport à ça.
Mme Normandeau: Pour ce qui est peut-être, si vous permettez, au niveau de la dynamique ou des décisions à l'interne, là, alors, comment, s'il y a un litige, comment vous arrivez à... Est-ce que tout naturellement votre autorité s'impose sur la base de la légitimité que vous avez obtenue de la population ou il y a encore des réticences du côté de vos pairs autour de la table?
M. Goddard (Gilles): Ah bien, il y a deux places. Au niveau du personnel, ça ne change rien parce qu'il y a...
Mme Normandeau: Je parle de vos collègues maires, là.
M. Goddard (Gilles): O.K. Au niveau des collègues, c'est plus de l'aide qui est demandée. Puis, moi, je suis de ceux qui prônent tout le temps... Parce que la MRC, c'est une entité qui ne représente rien, alors que la table des maires, pour moi, elle a un pouvoir. Le conseil des maires, c'est ça qui est vrai et, à chaque rencontre, plusieurs fois, et quand je rencontre les gens partout, je leur dis toujours: C'est le conseil des maires qui est souverain. Le préfet élu au suffrage universel, son vote, c'est seulement en cas de double majorité. À part de ça, là, à la table du conseil, on continue à faire les mêmes choses. Par contre, la relation, je dirais qu'elle s'est améliorée au niveau des échanges, tout ça.
Puis ce que j'allais dire tout à l'heure, c'est que les maires, lorsqu'ils reçoivent beaucoup d'information en même temps, ils peuvent... Vous savez, on peut recevoir de l'information, la comprendre assez pour l'acheter mais jamais pour la vendre. Alors, de là le problème. Lorsque le dossier arrive dans les municipalités, souvent, il y a un manque de compréhension, manque d'information, alors que, maintenant, on peut avoir la disponibilité pour aller les aider à le faire, ça, ce qui fait qu'une MRC qui veut avancer peut avancer beaucoup plus rapidement parce qu'il y a toute cette synergie-là qui peut se mêler puis de l'entraide, dans le fond, puis de l'éclaircissement qui peut se faire dans la compréhension des dossiers aussi à ce niveau-là.
n(16 h 40)n Alors, pour moi, ça a amené aussi cet impact-là, mais ils vont écouter beaucoup plus qu'avant, si on veut parler de la relation, là, préfet-maires.
Mme Normandeau: Donc, dans le fond, ce que vous êtes en train de nous dire, M. Goddard, c'est que la légitimité qu'on vous a conférée porte à un écho autour de la table. Quand vous dites: Dans le fond, les maires m'écoutent un peu plus, c'est que, ça, ça a un effet concret. C'est ce que je comprends.
M. Goddard (Gilles): Mais, le terme «écoutent», moi, je le vois plus... ils sont plus ouverts ou plus confiants dans les communications qui se passent.
Mme Normandeau: O.K. D'accord.
M. Goddard (Gilles): Et je dirais maintenant pour... de laisser autour de la table, parce que l'impact a été beaucoup plus large que ça. Par exemple, Le Club Étincelles, qui est un groupe dont je parlais tantôt qui s'occupait de handicapés, n'aurait pas demandé l'aide du préfet pour dire qu'il y avait des injustices par rapport au territoire, par rapport aux subventions, par rapport à des financements, par rapport au rôle qu'il joue dans le milieu, alors que, là, j'ai eu à travailler avec la régie, avec différents secteurs, les réunir, voir pourquoi, qu'est-ce qu'il y a. Alors, il y a toute... Jamais ça n'aurait été fait avant. On n'aurait pas demandé au préfet pour ça.
Dans la planification stratégique qui se fait dans les différentes municipalités, c'était, avant, un organisme différent. C'était le SADC qui avait eu la responsabilité de la planification stratégique de tous les organismes sur le territoire. Et là, d'un commun accord, à une réunion où je n'étais même pas, tous ces organismes-là ont dit: Non, c'est le préfet... Ça, c'est le rôle du préfet, cette concertation-là. Alors, il y a, là, cet impact-là de neutralité perçue dans la population, dans les organismes du milieu.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Là, vous m'ouvrez une porte, évidemment. Puis vous avez, dans votre présentation, chacun de votre côté, soulevé les inquiétudes ou les appréhensions qui ont été manifestées, par exemple, l'arrimage entre député et préfet. Et la loi n° 29 évidemment conférait un certain nombre de responsabilités aux municipalités à caractère rural. Et j'imagine que, chaque jour, au quotidien, dans l'exercice de vos fonctions, vous devez évidemment vous conformer, ou enfin vous respectez les balises que la loi vous confère en termes de possibilités, en termes de compétences. Mais vous comprendrez en même temps que la ligne est un peu floue, et le dossier auquel vous faites référence, pour les personnes handicapées, tout de suite, mon réflexe, quand je vous ai entendu tantôt, je me suis dit: Bien, ça, c'était peut-être la job du député de faire ça, mais là c'est le préfet qui a fait cette job-là.
Alors, dans le fond, en même temps, là, je comprends que vous êtes... vous devez vous rattacher évidemment à un cadre réglementaire ou législatif qui est là, qui est clair, mais, en même temps, il y a tout ce qu'il y a à côté, finalement, et qui n'a pas été édicté, dans aucune loi, dans un aucun texte législatif. Mais, en même temps, bon, la vie étant ce qu'elle est, on peut peut-être faire appel à vous pour d'autre chose que... Alors, comment on peut... Dans le fond, comment éviter que les préfets élus au suffrage universel transgressent peut-être trop facilement cette ligne-là qui n'est quand même pas évidente?
Le Président (M. Vallières): M. Garnier.
M. Garnier (Charles): Juste faire un petit point. Après ça, je vais remettre la parole à Gilles. Dans mon cas, avec le député, j'agis souvent un peu comme intermédiaire dans les dossiers comme celui-là.
Mme Normandeau: Vous, vous n'êtes pas du même groupe sanguin que votre député, hein!
M. Garnier (Charles): C'est ça.
Mme Normandeau: Ha, ha, ha!
M. Garnier (Charles): Vous savez, autrefois, quand il y avait un problème qui était apporté dans une municipalité, les maires disaient: Ça, ça relève de la MRC. Aujourd'hui, les maires instinctivement disent: Va voir le préfet. Et c'est sûr qu'il y a des problèmes des fois qui relèvent de la MRC et que finalement ça revient à la table de la MRC pour en discuter au conseil des maires, le conseil étant souverain, comme je le disais. Mais, à l'occasion, il va y avoir des dossiers où, moi, je peux servir d'intermédiaire auprès du député. Puis je suis en liaison régulièrement avec le député. Il n'y a pas de problème, je parle à son secrétaire. Si je ne le rejoins pas, il me revient puis on se parle. Et, souvent, je sers simplement d'intermédiaire dans certains dossiers. Je vais laisser Gilles poursuivre là-dessus.
Le Président (M. Vallières): M. Goddard.
M. Goddard (Gilles): M. le Président. Alors, pour compléter, parce que, moi, j'ai le privilège, je travaille avec Mme Bélanger puis, au niveau de la concertation, du fonctionnement, ça va très bien, et le même dossier va être traité de façon différente. Je ne crois pas personnellement que ça aurait été le rôle de Madeleine d'appeler à la régie, voir ce que c'est, faire le travail, j'appelle ça de terrain ou de labour. Par contre, les influences politiques sont beaucoup plus grandes. Puis de travailler en concertation... Après qu'on a telle chose puis que le dossier a été clarifié, si on veut, bien là on dit: Écoute, il faut qu'on fasse quelque chose pour notre région, puis là on va travailler ensemble à ce niveau-là.
Mais, moi, je n'irai pas faire quelque chose où c'est le rôle de la députée ou du député qui est là, qui est très différent du mien ? disons que je l'appelle peut-être «plus pratique» sur le déblayage sur le terrain, la perception, pour voir ce que c'est, là. Puis, évidemment, suite à ça, pour que le dossier avance plus rapidement, on a à travailler de concert avec le député puis on le fait. Même, d'ailleurs, je peux vous dire qu'à ce niveau-là le travail ensemble se fait beaucoup plus même qu'au préalable parce qu'avant je traitais des dossiers régionaux, tandis que maintenant, c'est clair, là, dans la perception de ce que c'est.
Le Président (M. Vallières): Bien. On a une question de Mme la députée de Jean-Talon.
Mme Delisle: Ah bon! Oui. Alors, bonjour, messieurs.
M. Goddard (Gilles): Bonjour.
Mme Delisle: Combien reste-t-il de temps, monsieur?
Le Président (M. Vallières): Très peu.
Mme Delisle: Très peu?
Le Président (M. Vallières): Mais quelque trois... trois minutes.
Mme Delisle: Alors, je vais très honnêtement céder la parole, si vous permettez, à ma collègue de Mégantic-Compton, parce que son préfet élu au suffrage universel est ici.
Le Président (M. Vallières): De Mégantic-Compton, oui. Avec le consentement des membres de la commission.
Mme Bélanger: C'est vrai, parce que je ne suis pas membre.
Le Président (M. Vallières): Mais, compte tenu que madame a été présidente de la présente commission pendant de nombreuses années et que tout le monde l'aime... Mme la députée de Mégantic-Compton, la parole est à vous.
Mme Bélanger: Alors, bon, moi, ça fait longtemps que je travaille avec M. Goddard comme préfet de la MRC et comme maire de la municipalité d'Ascot Corner. Je pense qu'on a une très bonne relation. Mais je reviens sur... M. Goddard va peut-être...
M. Boisclair: Êtes-vous du même groupe sanguin?
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bélanger: Disons que oui. Je pense, je pense. Bien, au fédéral, il a déjà été candidat conservateur, tu sais.
Le Président (M. Vallières): Nous n'avons que trois minutes, alors...
Mme Bélanger: Ah! O.K. Alors, M. Garnier...
Mme Delisle: Goddard, Goddard.
Mme Bélanger: ...M. Garnier...
Mme Delisle: Ah!
Mme Bélanger: ...dit qu'être préfet élu au suffrage universel, ça a fait connaître sa municipalité, puis il dit que «le post mortem de cette campagne électorale avec tout le battage publicitaire l'entourant, nous a révélé que cette élection à la préfecture a grandement contribué à faire connaître notre MRC et le rôle du préfet». Mais vous avez été, pendant 27 jours, je pense, en campagne électorale, alors que moi, mon préfet, il a été élu par acclamation.
M. Garnier (Charles): Il est chanceux. J'aurais voulu ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Bélanger: Il a été chanceux puis non. Pour la MRC, ça n'a pas été un avantage, puisque vous dites que d'être élu à la préfecture, d'avoir une élection, ça a contribué à faire connaître la MRC. Alors, étant donné que mon préfet a été élu au suffrage universel par acclamation, ça m'a un peu... pas dérangée, parce que je connais bien M. Goddard puis je sais qu'il fait un travail extraordinaire, mais je pense que, si on élit un préfet au suffrage universel, il faut absolument que la population participe.
Alors, je ne le sais pas, M. Goddard, moi, j'aimerais avoir des explications sur le fait... Tout à coup, moi, j'ai vu dans le journal que: Gilles Goddard, élu préfet au vote universel. Là, j'ai appelé, j'ai dit: Qu'est-c'est qui se passe, là? Qu'est-ce que c'est que ça, cette histoire-là? Il n'y a pas eu des élections? Alors, c'est pour ça que je veux savoir, M. le préfet élu au suffrage universel par acclamation... Moi, j'aimerais ça être députée élue par acclamation dans mon comté. Parce qu'il a un rôle très important à jouer, comme préfet élu au suffrage universel. Alors, j'aimerais avoir des explications. Comment ça s'est passé puis comment se fait-il que... Est-ce que c'est parce qu'il n'y avait pas personne qui pouvait vous battre?
M. Goddard (Gilles): ...madame.
Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Goddard, d'abord.
M. Goddard (Gilles): Oui, s'il vous plaît. Alors, je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure, mais, dans le rapport qui était là, il y avait quelques noms ? quand on parlait d'un leader, là ? par cette étude-là, et le nom de Gilles Goddard était là. Alors, ce n'est pas d'hier que du monde acceptait le rôle que je jouais déjà comme préfet. Deuxièmement, ça vient clarifier aussi la différence entre un rôle de député et un rôle de préfet, parce que Mme Bélanger est dans la MRC du Granit, alors...
Mme Bélanger: ...
M. Goddard (Gilles): Oui, mais parlons plus, là... Bien, voisins-voisins, mais... Alors, le territoire est vraiment différent et la campagne se fait dans un milieu MRC. Alors, ça, c'est peut-être une première réponse.
Deuxièmement, il y a eu beaucoup aussi de publicité, dans le journal Le Haut-Saint-François, qui a été faite, beaucoup d'articles. De fait, ce qui est arrivé dans mon cas, c'est très simple: il y a eu, comme dans n'importe quel domaine, des précampagnes, j'imagine, et puis j'avais eu l'appui de tous les maires de ma MRC, les anciens préfets de la MRC, tout le monde des affaires. À mon lancement de campagne, lorsqu'on était là, les principales personnes d'affaires étaient présentes, les gens de l'agriculture, les gens du secteur social. Alors, j'avais un appui de tous les secteurs. J'aurais pu avoir quand même quelqu'un qui se serait opposé; ça aurait été une perte d'argent.
Le Président (M. Vallières): Merci. Alors...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Goddard (Gilles): Non, non. Mais la raison étant qu'il y avait quand même des très bons candidats, mais ils n'ont pas voulu venir contre moi, O.K.?
Une voix: ...
M. Goddard (Gilles): Non, ils n'ont pas eu peur...
Le Président (M. Vallières): Non, bien, ça va aller. C'est parce que le temps est écoulé, et il faudrait terminer.
M. Goddard (Gilles): ...s'il vous plaît, parce que j'ai parlé, en début, de concertation, et je peux vous dire, madame, que la MRC du Haut-Saint-François, il y a des bons personnages qui jouent les bons rôles à la bonne place. Le président du SADC aurait pu très bien être préfet, le président du CLD aussi, mais on a une concertation, on a une entente de fonctionnement, ce qui fait qu'on va beaucoup de l'avant. Et, moi, je joue le rôle de préfet. Alors, ça va très bien dans notre MRC. Merci.
Le Président (M. Vallières): Merci. Ce qui nous amène au député de Duplessis, en quelques minutes.
n(16 h 50)nM. Duguay: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Goddard et M. Garnier, moi également, je suis très heureux de vous entendre. Et, s'il y a un dossier qui m'intéresse, c'est bien celui-là, compte tenu du comté que je représente également, parce que, moi, j'ai trois MRC présentement sur un immense territoire, 225 000 km². Et il y a aussi eu un coin de mon beau pays où on n'a pas de MRC; c'est un administrateur qui gère tout ce secteur-là. Et aussi j'ai une communauté dans le Nord-du-Québec où j'ai un administrateur, et une autre ville qui est composée d'une MRC. Or, c'est donc dire que je suis très heureux de vous entendre par rapport bien sûr à ce que vous avez mentionné pour le rôle qui peut être joué par un préfet qui soit est élu d'une façon universelle ou dépendamment de ce que la municipalité peut mettre comme projet.
Cependant, en ce qui concerne le travail de député également, avec le préfet, je suis heureux également de constater que, dans la vraie vie, vous réalisez qu'il n'y en a pas un qui se pile sur les pieds. Et, moi, j'ai déjà mis sur pied un certain projet: une fois par année, on se rencontre dans un milieu donné ? malgré que ça coûte des sous ? l'ensemble des MRC avec le député, et on chemine avec tous les dossiers. Alors, ça, ça fait prendre conscience à l'ensemble des MRC de tous les dossiers.
Il y a deux petites questions, moi, qui m'intriguent, par exemple. Vous avez fait référence, M. Garnier, tantôt que, depuis quand même un certain temps, vous fonctionnez à titre de préfet. Et, hier et aujourd'hui, on a entendu beaucoup de groupes. Et la députée de Bonaventure a soulevé une question, mais je pense que, moi, je vais aller un peu plus loin. C'est qu'on a fait référence à un moment donné que ça deviendrait une superstructure avec un superbureau, et là on a associé ça à un moment donné avec ce qui se passe dans le fonctionnarisme, que là ça deviendrait très fonctionnarisé. Et, finalement, bien, ça pourrait être beaucoup d'ameublement nouveau, du monde nouveau. Alors, il y avait cette question par rapport... Est-ce que ça va devenir une superstructure en fonction de ce que vous vivez? Et également une petite question: Le préfet suppléant ou adjoint, comment vous vivez ça, vous?
Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Garnier.
M. Garnier (Charles): Bon, pour répondre à votre première question, avec la ministre Harel, ça a été discuté amplement, de faire une structure beaucoup plus importante que le préfet élu au suffrage universel. Il était même question d'une espèce de conseil exécutif qui entourait le préfet élu au suffrage universel. Et même ces conseillers-là devaient être élus. On s'est rendu compte que la structure était beaucoup trop lourde. Et, d'une façon ou d'une autre, au niveau de nos membres, ça a été refusé, et il n'y a pas eu de suite à ça.
Je pense que mon président, ce matin, M. Belzil, a parlé aussi de la question du danger que ça devienne une structure très lourde, comme vous dites, et que, même, on en vienne à vouloir demander au gouvernement d'avoir le privilège de taxer. Pour ceux qui étaient ici ce matin, ça a été discuté. Tout d'abord, c'est le gouvernement qui va le décider si c'est le cas ou pas, mais je peux vous dire que, ça aussi, on va avoir une côte à monter face à la population et face à nos élus aussi. Et, d'une façon ou d'une autre, présentement, notre financement se fait par nos quotes-parts de municipalités. Je pense qu'il n'y a pas de problème de ce côté-là. Votre autre question, c'était...
M. Duguay: Suppléant et adjoint.
Le Président (M. Vallières): Suppléant ou adjoint.
M. Garnier (Charles): En fait, on appelle ça adjoint maintenant, avec la modification de la loi. Il est nommé par le préfet, élu. Il est certain que, moi, en tout cas, personnellement, j'ai nommé un maire avec qui j'avais des ondes... des affinités, un groupe sanguin qui... tu sais, quelqu'un avec qui j'étais capable de composer, quelqu'un avec... pas quelqu'un qui est appelé à me remplacer si je ne suis pas là, pas seulement ça: quelqu'un avec qui je suis capable de consulter puis de travailler avec dans des dossiers, puis avoir l'heure juste.
M. Duguay: Mais...
Le Président (M. Vallières): Très bien. C'est parce que, là, le temps est écoulé, puis on a d'autres gens à rencontrer. Je m'excuse auprès du député de Duplessis et de nos invités. M. Goddard, on vous laisse un petit, petit mot de la fin.
M. Goddard (Gilles): En complément, s'il vous plaît.
M. Garnier (Charles): Il a toujours le dernier mot.
M. Goddard (Gilles): Je m'excuse, mais c'est parce qu'il y a... Moi, je n'ai pas touché l'aspect des finances et je ne voulais pas le toucher parce qu'on a discuté, même chez nous, des heures et des heures. Les gens disaient: On peut mettre tel salaire, mais d'un coup ça ne serait pas toi, ça serait trop, puis... Alors, ça n'a pas de sens de voir un poste comme ça du point de vue salaire, ça n'en a pas, de sens. Aïe! Dans la même semaine, on a engagé un ingénieur puis on en a engagé un autre, on ne s'est pas demandé voir si ça prendrait un encrier puis ces choses-là; ça n'a pas de rapport avec ça. C'est: est-ce que ça va valoir la peine? C'est un investissement qu'on fait dans un milieu. C'est ça qui est différent, ce n'est pas une question d'argent puis de sous, là. Même si tu le payais la moitié du prix, ce serait trop s'il ne faisait pas sa job.
Le Président (M. Vallières): Voilà! Merci, M. Goddard, de même que M. Garnier.
Alors, nous suspendons quelques minutes, et je demanderais à M. Nicolet et Mme Ruest-Jutras de bien vouloir s'approcher.
(Suspension de la séance à 16 h 55)
(Reprise à 16 h 57)
Le Président (M. Vallières): S'il vous plaît! Alors, j'invite maintenant M. Goddard de même que... M. Nicolet de même que Mme Ruest-Jutras. M. Nicolet. Mme Jutras.
À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, M. Nicolet, Mme Ruest-Jutras, bienvenue. Alors, nous vous demanderions de bien vouloir procéder, comme je vous l'indiquais tantôt, dans les meilleurs délais afin de, au maximum, pouvoir échanger avec vous. La parole est à vous.
M. Roger Nicolet et Mme Francine Ruest-Jutras
M. Nicolet (Roger): Si vous me permettez, je pense que vous avez tous eu l'occasion de prendre connaissance de notre rapport. Mme Ruest-Jutras va vous présenter quelques éléments qu'il nous paraissait particulièrement important de souligner. Et, par la suite, nous sommes bien sûr à votre disposition pour répondre aux questions.
Mme Ruest-Jutras (Francine): Oui, effectivement. Alors, ce sera très bref comme présentation. Donc, M. Nicolet et moi-même sommes très heureux d'être parmi vous pour prendre part à cette commission parlementaire en regard du projet n° 77 qui, lui-même, découle du mandat qui nous avait été confié par Mme Harel. C'est un mandat qu'on a eu beaucoup de plaisir à remplir. Ayant présidé un des comités de consultation qui avaient créé les municipalités régionales de comté au début des années quatre-vingt, j'avais l'impression de boucler une certaine boucle. Et M. Nicolet avait, pour sa part, une connaissance très fine lui aussi de ce dossier-là. Alors, ça a été pour nous très agréable.
Pour fins de rappel, sachez que notre Groupe de travail s'est assuré de la participation la plus large possible des municipalités qui étaient touchées par le mandat. Nous avons reçu 56 mémoires et documents de réflexion; 17 résolutions qui appuyaient une position commune. Neuf de ces mémoires ou documents de réflexion nous sont parvenus tels qu'approuvés par la partie urbaine et par la partie rurale des MRC. Trente et un autres mémoires ou documents de réflexion ont été acheminés au Groupe de travail après avoir été approuvés ou par la ville-centre ? ça a été le cas pour 15 d'entre elles ? ou encore par un regroupement partiel ou total ? pour 16 des municipalités autres que la ville-centre. Douze autres mémoires et documents de réflexion et 17 résolutions détaillées ont été acheminés au Groupe de travail par des municipalités individuelles autres que les villes-centres. Enfin, quatre associations, dont trois provinciales et une régionale, ont communiqué les fruits de leur réflexion au Groupe de travail.
n(17 heures)n Donc, la troisième section de notre rapport, celle qui consignait des recommandations, découle essentiellement des mémoires et des commentaires que nous avons reçus. S'y greffaient aussi, vous l'avez remarqué, des recommandations plus générales sur l'organisation municipale.
Le Groupe de travail tenait cependant, d'entrée de jeu ? et je cite certains paragraphes qu'on retrouve à l'intérieur du rapport ? à «souligner un constat qui transcende toutes les conclusions [...] de son mandat et des recommandations qui en découlent.
«L'avenir des régions du Québec se forgera par l'intégration sociale et économique des villes et des communautés rurales qui les entourent. Le développement de la collectivité régionale ne peut, en effet, être envisagé que dans une symbiose des éléments qui la constituent. L'organisation municipale polarisée entre l'urbain et le rural dessert le milieu lorsqu'elle nourrit les clivages et entretient les confrontations[...].
«La ville-centre regroupe une majorité de la population et, par sa nature même, devient le foyer de l'activité économique et sociale, il faut le reconnaître. Le monde rural ? de son côté ? occupe le territoire et alimente le noyau urbain, dans toute l'acceptation du terme.» Après avoir longuement traité de la consolidation du coeur des agglomérations urbaines et de la préoccupation essentielle à l'égard des communautés rurales, le comité a dégagé des lignes directrices principales qui, à son avis, devrait sous-tendre toute organisation ou réorganisation des MRC. Alors, là encore, je vais faire certaines citations que vous retrouvez particulièrement à la page 21, notamment, de notre mémoire.
«La MRC demeure la structure appropriée pour gérer les fonctions et les responsabilités à caractère régional que spécifie la loi ou que la MRC aura identifiée, en accord avec les municipalités la constituant. Par contre, [...] toute velléité de faire des MRC un embryon de palier gouvernemental intermédiaire se heurterait à l'opinion d'une bonne majorité d'élus municipaux» et de la population en général. Je reviendrai sur l'élection du préfet au suffrage universel plus tard.
«Malgré les lourdeurs du conseil des maires d'une MRC, ce lieu de rencontre et de dialogue est un mécanisme qui favorise le développement d'un sentiment d'appartenance régionale et ouvre les perspectives de collaboration inter-municipale. En fait, les résultats les plus convaincants à ce chapitre semblent avoir été atteints par les MRC qui ont fait l'effort et réussi à impliquer les conseils locaux dans l'analyse de dossiers à caractère supra-municipal.
«La MRC doit pouvoir devenir le lieu d'accueil administratif des mises en commun de services, librement souhaités par certaines ou toutes les municipalités qui la constituent et aux frais de celles-ci[...].
«Les recommandations présentées par le Groupe de travail visaient donc à favoriser le dialogue et à préserver les équilibres.» Elles sont présentées sous huit rubriques différentes. Le projet de loi n° 77, quant à lui, s'attarde principalement aux trois premières têtes de chapitre et touche particulièrement les règles concernant la prise de décision, l'élection du préfet, la place de la ville-centre au sein des comités de la MRC et la délégation de compétences.
Alors, on peut constater que le projet de loi n° 77 donne suite assez largement aux recommandations de notre rapport en ce qui a trait au maintien de la double majorité mais en la plafonnant, tel que recommandé. On y traite aussi du rôle accru des villes-centres dans les instances, du traitement du budget, des compétences déléguées à la MRC. On y traite également du préfet élu au suffrage universel. Je ne sais pas si on abordera ce dossier-là maintenant ou si on y reviendra à la période de questions. On y traite... mais on se pose des questions sur le fait que l'alternance, la façon dont est gérée l'alternance qui était recommandée par le Groupe de travail, ça ne nous semble pas très clair. Alors, ce serait intéressant peut-être de clarifier ça. L'introduction de la notion de préfet adjoint, là encore, il y aurait peut-être certaines précisions à apporter. On ne traite pas des villégiateurs. Ça nous avait été soumis par un nombre quand même assez important de villes. Alors, j'imagine qu'on aura l'occasion de revenir là-dessus à la période de questions.
Et je conclurai par un commentaire qui était aussi une des recommandations, qui était une recommandation générale et qui touchait la codification des lois relatives aux MRC. Donc, on est bien loin, là, du projet de loi n° 77, mais il y a quand même un lien à faire.
On y notait, dans cette recommandation, que c'est très difficile pour les élus et les fonctionnaires, a fortiori la population, de se retrouver dans l'ensemble des textes juridiques qui sont relatifs à l'un ou l'autre des aspects de fonctionnement des MRC. Et, quand on regarde que la loi... quand on s'aperçoit que la loi n° 77 se trouve à modifier la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, le Code municipal du Québec, la Loi sur l'organisation territoriale, la loi sur les sociétés d'économie mixte municipales et la Loi sur le traitement des élus municipaux, on se dit que peut-être cette recommandation-là, toute incidente qu'elle soit, a sa pertinence.
Le Président (M. Vallières): Bien. M. Nicolet, est-ce que vous ajoutez à la présentation?
M. Nicolet (Roger): Non. Je pense que Mme Ruest-Jutras a bien résumé les points saillants de notre rapport et quelques pistes de réflexion.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, ça nous amène à la période d'échange. M. le ministre.
M. Boisclair: Je vais d'abord vous remercier pour non seulement votre contribution, mais aussi votre présence parmi nous aujourd'hui. Je pense qu'il faut voir, à travers vos propos aussi, la qualité de la recherche et de la consultation que vous avez menée auprès du monde municipal. Vous ne nous arrivez donc pas avec une présentation qui est issue d'une réflexion improvisée, bien au contraire. Et, à la qualité de la consultation, s'ajoute bien sûr votre expérience personnelle du monde municipal.
Je pense ne pas me tromper en affirmant que les grands équilibres que vous avez ici, dans votre rapport, sont repris dans le projet de loi, puisque c'est là l'objet aujourd'hui de notre réflexion. Nous avons fait le choix de retenir, entre autres, la formule de limitation que vous aviez proposée. Elle se retrouve intégralement dans le projet de loi. Nous confirmons la possibilité toutefois de l'élection du préfet au suffrage universel, mais avec la règle de la double majorité. Donc, nous autorisons le monde municipal à le faire mais dans le respect toutefois de l'autonomie municipale. D'autres modifications vont bien sûr inspirer le gouvernement dans la rédaction du projet de loi.
Moi, j'ai une question bien précise pour vous, qui est la question du transfert de compétences aux MRC. Moi, je pense que le gouvernement a été bien avisé d'ouvrir cette possibilité. J'ai la conviction que les MRC sont un lieu d'organisation de certains services qui peut être utile, particulièrement pour l'évaluation municipale. Je suis toujours étonné de voir que le Québec est sans doute un des rares États, si ce n'est le seul en Amérique du Nord, où cette fonction est si décentralisée. Et nous avons acquiescé à cette proposition pour les MRC à caractère rural non seulement dans une perspective de renforcement de la MRC, mais aussi, je pense, inspirés d'une volonté de mieux gérer ce service.
Pourquoi donc ne pas avoir, sachant cependant les recommandations que vous nous faites... et vous réclamez, au nom de l'autonomie municipale, que, si seulement des municipalités en font la demande, avec les règles qui seront connues, qu'il puisse y avoir délégation. Moi, je pense qu'il faudrait confier aussi aux MRC à caractère urbain et rural la responsabilité de l'évaluation municipale. J'aimerais avoir vos commentaires sur cette question.
Deuxièmement, si la MRC est aussi un lieu qu'il nous faut consolider, pourquoi ne pas permettre, sur une base facultative, la délégation d'autres responsabilités? Moi, je ne pense pas qu'il serait inconvenant, bien au contraire, que les compétences facultatives que nous avons offertes aux MRC rurales soient aussi étendues aux MRC à caractère urbain et rural.
n(17 h 10)n Donc, sur ces deux questions, moi, j'aimerais connaître votre appréciation, sachant qu'il y a aussi des gens du monde municipal qui réclament un partenariat avec le gouvernement, mais des institutions tellement divisées que le ministre va chercher d'abord et avant tout à être partenaire du monde municipal avant d'être partenaire d'unions ou de fédérations municipales et qu'il me semblerait opportun que nous profitions du débat actuel pour aller plus loin, même plus loin que le projet de loi n° 77, dans le renforcement des MRC, même si je cours le risque de ne satisfaire ni l'un ni l'autre. Ha, ha, ha!
Le Président (M. Vallières): Alors, M. Nicolet répond à la question.
M. Nicolet (Roger): Si vous me permettez, dans un premier temps, je vais m'adresser à la question de l'évaluation. J'aimerais rappeler que je ne suis pas ici à titre de préfet mais simplement à titre de participant à un travail que Mme Ruest-Jutras a, du reste, fort bien présenté.
Le dossier évaluation est essentiellement le produit d'une évolution historique, et la difficulté à répondre de façon positive à la suggestion de M. le ministre vient essentiellement de la complexité qu'a prise la prise en charge de cette responsabilité dans le milieu municipal. On a, d'une part, les cités et villes qui font face à des responsabilités d'évaluation fort complexes, compte tenu du parc immobilier qui est multiforme et qui exige des compétences parfois très pointues dans l'exercice de la compétence, tandis que le milieu rural, qui fait face à un domaine bâti beaucoup plus uniforme et beaucoup plus simple dans sa mesure de ses caractéristiques pour fins d'évaluation, peut se contenter d'un service qui est beaucoup plus léger au niveau des compétences techniques.
Tout ça a amené, lorsque les conseils de comté puis les MRC ont assumé la responsabilité de l'évaluation, dans plusieurs cas, à se doter de leurs services propres, d'une fonction publique à l'emploi de la MRC. Dans certains cas, elles font affaire à des firmes externes. Mais il y a une multitude de situations sur le territoire qui sont difficilement réconciliables. Il y a donc des services publics, il y a des consultants, il y a des services publics de MRC qui sont essentiellement axés sur un parc immobilier rural, il y a des services municipaux qui, eux, ont bâti des compétences dans un domaine beaucoup plus étendu. Comment réconcilier tout ça dans une seule et sous une même autorité? Comment intégrer ce qui, sur le terrain, soulève des problèmes de relations de travail, des problèmes de locaux, d'équipements, de compétences, d'investissements, d'informatisation? C'est véritablement... La réponse à votre question en est une de difficulté... de practicalité de mise en oeuvre de cette recommandation.
Pour ce qui est de l'autre volet, de l'autre aspect de votre question, vous touchez le sujet fort délicat de l'acquisition de compétences au niveau des MRC. D'abord, il faut bien constater qu'une des difficultés fondamentales et des clivages potentiels les plus virulents entre le monde rural et le monde urbain est la divergence des intérêts quant à l'acquisition de toute compétence nouvelle à un niveau suprarégional. En d'autres termes, là où le monde rural aurait un intérêt à faire effectuer certaines tâches sur une base supralocale collectivement, la ville, pour toutes sortes de raisons qui lui sont propres, ne partage pas cet intérêt, d'où notre recommandation qui, je crois, est cruciale et que vous avez du reste repris dans la loi n° 77, en disant: On délègue à la MRC ce que l'on veut bien déléguer, et délèguent ceux qui le veulent, à condition qu'ils en assument entièrement les frais. Parce que, là où il y a chicane, et Dieu sait qu'il y a bien des endroits au Québec où il y a chicane, c'est qu'un des partenaires, un des deux groupes a l'impression que l'autre essaie de le faire passer par un entonnoir pour assumer des charges qu'il a déjà couvertes, qu'il a déjà défrayées et qu'il est parfaitement organisé pour en prendre charge par sa propre population. Et on tombe immédiatement dans des conflits d'intérêts. Donc, ce que nous avons fait, je crois, par le biais de notre recommandation, c'est de permettre des mises en commun mais de ne contraindre personne à l'assumer contre sa volonté.
Mme Ruest-Jutras (Francine): Et j'ajouterais que la recommandation que nous avons faite, c'était vraiment l'écho de ce qu'on avait entendu. Alors, on se le disait en s'en venant, le rapport, ça n'a pas été, ce n'est pas un objet de créativité, là; c'est un objet de synthèse. C'est la synthèse de ce qu'on a entendu. Et, là-dessus, il y avait un large consensus: Ne nous imposez rien, nous déciderons nous-mêmes de ce que nous voulons mettre en commun. Et, sur l'évaluation, je pense qu'effectivement il y a des disparités. Si je regarde la façon dont ça fonctionne chez nous, je ne vois vraiment pas comment on pourrait mettre ça en commun parce qu'on aurait deux mondes, deux mondes complètement, complètement différents.
Qu'on l'ait fait, que ce soit là pour les MRC à caractère rural, je pense que M. Nicolet disait: Il y a toujours une certaine homogénéité, hein, mais, lorsqu'on arrive dans le groupe de villes et de MRC qui se veulent l'objet de notre rapport, je pense qu'on est dans quelque chose de beaucoup plus bigarré, où il n'y a pas vraiment de moule dans lequel on peut faire rentrer tout le monde. Et gardons cette souplesse. Là encore, si les gens trouvent qu'ils ont à gagner en faisant l'évaluation en commun, ils le feront.
Le Président (M. Vallières): Oui, M. Nicolet.
M. Nicolet (Roger): Les réformes de l'évaluation se sont toujours faites lorsqu'il y a eu des exemples criants d'abus. Je ne suis pas dans votre position et je ne sais pas si, actuellement c'est le cas. Mais, de façon... Enfin, le peu que j'en connais, c'est un... le milieu dans lequel j'oeuvre, l'évaluation rurale est faite correctement par des professionnels ? dans notre cas, indépendants. Mais il y a des gens à côté de chez nous qui ont des services d'évaluation qui fonctionnent, selon tout ce qu'on entend, de façon satisfaisante. L'autre élément qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est que les tribunaux sont à longueur d'année mobilisés par des causes qui impliquent des évaluations industrielles. On est dans des domaines de technicité extrêmement pointus. Le droit est en constante évolution. Et de demander à un service municipal ou à une MRC de développer des compétences dans des domaines aussi complexes que ça, c'est illusoire et ce n'est même peut-être pas possible dans les limites des disponibilités financières de certains milieux en tout cas, de certains milieux.
M. Boisclair: Si les villes le font, les MRC pourront le faire. Puis, à la limite, peut-être qu'on devrait, pour les grands secteurs industriels, peut-être confier ça à une agence nationale.
M. Nicolet (Roger): C'est un autre débat.
M. Boisclair: Non, mais c'est un autre débat, mais ce sont des vraies questions qu'on ne peut pas comme ça retourner du revers de la main comme le fait la députée de l'opposition avec ses hauts cris d'exclamation. Ce sont des vraies questions qui se posent. Et, moi, je pense que, si les municipalités sont capables de faire de l'évaluation municipale ? d'autant plus que souvent elles le confient dans le privé ? de secteurs industriels, la MRC sera capable de faire la même chose. Tu sais, si on fait affaire, indistinctement de l'employeur, on a affaire à des professionnels de l'évaluation ? je pense même qu'il y a un ordre des évaluateurs agréés ? qui répondent à un ordre professionnel, alors que l'employeur soit la MRC ou la municipalité, ça ne change rien à la qualité du travail qui est fait.
n(17 h 20)nLe Président (M. Vallières): M. Nicolet.
M. Nicolet (Roger): Attention, ça coûte très cher, le faire correctement, et ce ne sont pas tous les milieux qui ont les ressources et accès aux ressources et le bassin tant de ressources financières que de ressources humaines. Donc, c'est quelque chose à aborder avec circonspection.
Mme Ruest-Jutras (Francine): Oui. On se retrouverait avec quelque chose qui pourrait être assez bizarre aussi dans la mesure où vous avez une ville qui a un contrat à long terme avec une firme privée et la MRC qui, elle, a une brigade plus ou moins légère à l'intérieur de son service et qui, elle aussi, a un évaluateur qui vient à un moment donné voir de quelle façon il fait le travail du personnel de la MRC. Je vous dis: vous avez là deux mondes, et je ne vois pas vraiment ce que ça peut faire d'heureux comme mélange. Je ne vois vraiment pas ce qu'on y gagne.
Le Président (M. Vallières): Merci. Ça nous amène à Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Simplement indiquer au ministre qu'on n'a pas la même notion de hauts cris évidemment de ce côté-ci que de son côté.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Normandeau: Mais simplement lui indiquer certainement ? vous me permettrez une petite parenthèse, M. le Président, au niveau de l'évaluation. On comprend très bien que le ministre tente de tester certaines suggestions ou propositions. J'aimerais peut-être lui faire une mise en garde ? et d'où évidemment ma réaction en fait physique de mon côté ? c'est lorsqu'on parle... Puis d'ailleurs, je partage tout à fait le point de vue de M. Nicolet et de Mme Ruest-Jutras là-dessus. Pourquoi donc venir imposer dans le fond une nouvelle responsabilité, alors qu'on plaide dans le monde municipal pour une plus grande souplesse?
L'autre élément qu'on doit considérer, c'est certainement le secteur privé, hein! Il y a des entreprises privées qui se sont développées au niveau de l'évaluation, on en a dans chacun de nos comtés, dans nos régions, alors je pense qu'il faut aussi anticiper ces impacts-là, hein! Créer une agence nationale d'évaluation, là, je peux à peu près déjà voir à quelle enseigne se loge le ministre, c'est encore une autre structure qui ferait, à toutes fins pratiques, qui contribuerait à toutes fins pratiques à faire mourir le secteur privé au niveau de l'évaluation.
Là-dessus, je vous fais des mises en garde, M. le ministre, ce sera certainement un autre débat, là, si vous avez l'intention d'aller fermement de ce côté-là. Mais, de ce côté-ci, vous aurez certainement beaucoup de travail à faire pour nous convaincre évidemment du bien-fondé de votre proposition. Mais on prendra pour acquis, M. le Président, qu'à ce stade-ci le ministre n'en fait qu'une proposition.
M. Boisclair: Est-ce que je comprends que vous êtes contre la dévolution des pouvoirs d'évaluation MRC urbaines et rurales?
Mme Normandeau: Non. M. le Président, le ministre évidemment ne doit surtout pas nous prêter une quelconque intention ou de quelconques intentions. Mais, simplement, je tenais à lui faire une petite mise en garde sur la proposition ou la question qu'il a posée à nos deux invités qui lui ont très clairement exprimé leur position.
Mais, M. le Président, revenons à nos moutons. Vous me permettrez, d'entrée de jeu bien sûr, de saluer nos deux invités et certainement de prendre quelques instants pour féliciter Mme Ruest-Jutras pour sa nomination, pour son élection à la tête de l'Union des municipalités du Québec. Je vous souhaite un excellent mandat et je dois vous dire que c'est très rassurant de voir des femmes dans le secteur municipal évidemment gravir les échelons comme vous l'avez fait, évidemment de défendre la voix des municipalités, du monde municipal évidemment à l'intérieur ou à la tête d'une union comme celle de l'UMQ. Alors, je vous en félicite très sincèrement. Remarquez qu'on n'a rien contre les hommes qui sont dans le secteur municipal, mais le secteur municipal étant un secteur, je vous dirais, traditionnellement dévolu aux hommes, ça nous fait toujours très, très plaisir de voir des femmes qui réussissent à se démarquer.
Mme Delisle: ...un peu moins. Avec les fusions forcées, il y en a moins.
Mme Normandeau: Alors, ceci étant dit, M. le Président, bon, bien, je suis très contente qu'on ait l'occasion d'échanger avec nos deux invités qui ont effectivement abattu un travail important de synthèse, comme l'a si bien dit Mme Ruest-Jutras. Et c'est la première fois en fait à l'Assemblée nationale, dans le cadre d'une commission parlementaire, qu'on a l'occasion d'aborder ce fameux rapport que vous avez livré il y a déjà quelques mois. Et j'ai eu évidemment l'occasion de le lire et, je dirais, de le relire et de parcourir les commentaires qui vous ont été formulés par les municipalités que vous avez rencontrées. Et tous les commentaires recueillis en fait mettent très bien en lumière le clivage, ou la dichotomie, qui s'est exprimée, qui s'exprime toujours sur le terrain, entre la réalité rurale et la réalité urbaine.
Et, là-dessus, je dois vous dire qu'il n'y a pas vraiment eu ? puis c'est un petit peu les recommandations, là... Ce que je comprends, c'est que vous avez tenté de faire des recommandations à partir de consensus, mais que ces consensus ont été extrêmement difficiles. Et je pense qu'on ne peut pas aujourd'hui parler de consensus véritablement, et je prends pour exemple, là, la recommandation I sur les règles de prise de décision. Vous avez choisi, dans le fond, de recommander la double majorité, alors que, ce matin, la Fédération québécoise des municipalités a plaidé pour un autre type de règle de prise de décision. Mais c'est certainement, dans le fond, M. le Président, des recommandations qui illustrent le fossé ou, dans le fond, les divergences d'opinions, qu'on soit du côté rural ou du côté urbain, et qui dans le fond habitent le monde municipal. Puis, remarquez, M. le Président, c'est très normal, parce que, comme l'a dit évidemment Mme Ruest-Jutras, il y a des réalités qui s'expriment à échelles variables.
Alors, moi, j'aimerais me concentrer, si vous permettez, sur, notamment, la règle de prise de décision, parce que c'est un des éléments, un des trois éléments, à mon sens, qui est compris dans le projet de loi, qui est extrêmement important, qui est majeur, qui est une des pièces maîtresses du projet de loi, et vous demander dans le fond: Comment peut-on concilier effectivement la recommandation que vous avez formulée pour la reconduction de la formule de la double majorité avec les objections qui ont été formulées ou la proposition nouvelle qui a été amenée par la Fédération québécoise des municipalités qui, elle, dans le fond, souhaitait avoir une formule, je vous dirais, mathématiquement, là, plus... qui, selon elle, tiendrait compte, finalement... ou permettrait de protéger davantage les appréhensions des municipalités rurales? Et vous me permettrez, M. le Président, donc de faire lecture de cette proposition qui a été formulée ce matin.
On dit donc que «la FQM est d'avis que toutes les décisions, à l'exception de celles concernant le choix du préfet[...] ? au sein de la MRC ? soient prises selon la formule suivante: lorsqu'une municipalité remplit les deux suivantes ? on dit: le pourcentage de sa population par rapport à celui de la MRC est supérieur ou égal à 50 %; le nombre de voix dont elle dispose est supérieur ou égal à 50 %».
L'exemple que je donnais ce matin, c'est le Haut-Saint-Maurice donc qui est un exemple concret. Alors, son droit de vote serait donc limité ainsi, parce que ce qu'on cherche, dans le fond, c'est à encadrer davantage, je vous dirais, le pouvoir des villes soit d'agglomération ou de centralité dans le contexte actuel.
Alors, ils nous proposent la chose suivante: «Le nombre de voix de cette municipalité est limité en multipliant le pourcentage de la population que celle-ci détient dans la MRC par le nombre de voix dont disposent les autres municipalités.» Alors, pour eux, évidemment, c'est... Le principe de la double majorité, ce matin, ils nous l'ont dit, ils l'ont rejeté totalement. Alors, comment, dans le fond, arriver à tirer un consensus? J'avoue que c'est une question pas évidente à répondre peut-être, là, mais, puisqu'on est à la recherche évidemment de la meilleure solution ou du meilleur scénario pour permettre à tout ce beau monde-là, au quotidien, de bien cohabiter, vous comprendrez qu'on essaie de voir de notre côté comment, dans le fond, on peut avoir le meilleur processus.
Le Président (M. Vallières): Bien. Qui répondra?
Mme Ruest-Jutras (Francine): Écoutez, ce que vous nous...
Le Président (M. Vallières): Oui, Mme Ruest-Jutras.
Mme Ruest-Jutras (Francine): La formule à laquelle vous faites référence, nous, on l'entend pour la première fois.
Mme Normandeau: O.K.
M. Ruest-Jutras (Francine): Mais je vous dirai que, quand on regarde notre rapport, on s'aperçoit que, sur la représentativité, le Groupe de travail a passé beaucoup de temps. Il y a trois pages de notre rapport qui y font référence, et on a passé l'un après l'autre les arguments qui nous étaient présentés pour finalement, oui, en arriver à recommander la reconduction de la double majorité, parce que je vous avouerai qu'on ne nous a absolument pas fait la preuve que c'est une formule qui ne marchait pas.
C'est une formule qui a le mérite d'obliger les gens à discuter. S'il n'y a pas de terrain d'entente, oui, il n'y a rien qui se passe, mais on n'a pas été en mesure de nous identifier des dossiers majeurs qui seraient restés en rade parce qu'il n'y avait pas eu d'entente. Par ailleurs, comme il y a souvent des questions financières derrière les dossiers dont on traite, cette formule-là a le mérite de ne pas faire payer des gens pour un service ou une chose dont ils ne veulent pas. Alors, ça force la discussion, ça oblige à trouver des compromis, et, comme je vous disais, même si on nous...
n(17 h 30)n Ça nous a semblé une formule qui était beaucoup plus victime de préjugés. On se disait au départ: Ah, c'est terrible! Les petits sont laissés-pour-compte. Mais, quand on disait: Bon, une fois que vous avez dit ça, là, une fois que c'est l'impression que vous en avez, on vous demanderait de nous donner un cas concret, hein, où la formule n'a pas fonctionné, et un des cas qui nous a été soumis, c'était quelqu'un qui finalement s'était fait refuser un voyage en Provence pour aller vanter les mérites de son coin de pays, sur la forêt, parce qu'il voyait là une possibilité d'attirer une clientèle touristique. Ça, ça a été un des gros dossiers qui nous ont été soumis comme faisant en sorte que la double majorité avait empêché un dossier de se réaliser. Mais, quant au reste, c'est beaucoup plus une question de perception qu'on a par rapport à la formule qu'une question de réalité, hein! Alors, cette formule-là, elle marche bien.
Le Président (M. Vallières): Bien. Je vous demanderais...
M. Nicolet (Roger): Peut-être juste en complément. Je suis incapable de me prononcer sur la formule parce que c'est la première fois que je l'entendais puis il faudrait la regarder de près pour savoir si, dans les faits, elle a les mêmes conséquences que la formule que nous avons avancée. Il y en a probablement de multiples qui atteindraient le même objectif. Bien, ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est qu'on est parti d'une vision du monde urbain qui était relativement claire, à savoir: les villes étaient prêtes à faire une concession pour ne pas avoir le contrôle absolu de la MRC et des deux...
Le monde rural, ce que nous avons entendu, était éparpillé. À un extrême, un maire, un vote, à l'autre extrémité, c'était... Enfin, on a eu toutes sortes de suggestions, mais il n'y avait pas de véritable position intégrée, cohérente de l'ensemble du monde rural, et c'est fort compréhensible. Ce que nous avons essayé de faire, c'est de, en toute justice, reconnaître et faire et créer un équilibre entre la municipalité en tant qu'entité individuelle et une réalité démographique qui est parfois écrasante dans certains secteurs ou dans certaines régions.
Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Bonaventure.
Mme Normandeau: Oui. Bien, en fait, je me réfère, M. le Président, toujours sur cette question-là, au mémoire de la Fédération québécoise des municipalités, là, qui est venue ce matin. Évidemment, une de leurs craintes, que vous avez clairement exprimée, qui vous a été exprimée aussi par le monde rural, le défi, ce qui est posé, c'est, dans le fond, comment on va baliser le processus décisionnel pour effectivement éviter un déséquilibre tel que plusieurs municipalités dans les MRC, en fait, se trouveraient désavantagées. Et, là-dessus donc, vous continuez de prétendre que la formule que vous avez proposée est la meilleure formule dans le contexte actuel et la formule de compromis, si je comprends bien.
M. Nicolet (Roger): C'est une formule de compromis, il y en aura probablement plusieurs autres, mais ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est l'objectif, hein! Du moment que la formule satisfait l'objectif... Celle qui nous a été présentée et que nous avons finalement recommandée nous paraissait souple et d'application facile, mais, s'il y en a d'autres... C'est bien possible qu'il y en ait d'autres.
Le Président (M. Vallières): Mme Ruest-Jutras, vous vouliez ajouter.
Mme Ruest-Jutras (Francine): ...que ce que la FQM remettait en cause ce matin, ce n'est pas le principe de la double majorité, mais plutôt la façon dont on «capait» ? si vous me passez le terme ? cette double majorité là pour s'assurer qu'on ne retrouvait pas dans les mains d'une seule ville les deux volets de la double majorité, volet population, volet voix en fonction des lettres patentes. Est-ce que c'est de ça dont on parle?
Mme Normandeau: En fait, je me réfère évidemment à une des recommandations contenues dans le rapport de la Fédération québécoise des municipalités. Vous avez la chance d'avoir une représentante derrière, de la Fédération, qui s'occupe des communications. Effectivement, je vous ai fait la lecture tout à l'heure intégralement, là, donc de la position de la Fédération québécoise des municipalités sur le droit de vote, dans le fond, et vous... En fait, eux prétendent que leur formule favorisait effectivement la discussion. C'est le même argument évidemment que vous avez entendu, que vous avez évoqué pour justifier la double majorité.
Finalement, bon, c'est une formule qui est proposée, bon, qui est certainement discutable, mais là on comprend que, dans le contexte, ça a peut-être été... Vous n'avez peut-être pas eu le temps évidemment de regarder tout ça. Mais ce qu'on cherche à savoir, évidemment, c'est de quelle façon toute cette formule-là de règles de prises de décision va permettre finalement d'avoir, de déterminer une zone de confort où tout le monde va être très confortable. Et ce que vous nous dites finalement, c'est: Oui, c'est la zone de confort, la règle de double majorité, qui sera la plus satisfaisante. C'est ce qu'on doit comprendre.
Mme Ruest-Jutras (Francine): Écoutez, je vous répète que ça a fait l'objet de beaucoup de discussions, de beaucoup de représentations qui nous ont été faites. Et, cette formule-là, qui se vit quand même depuis quelques années dans la MRC, à notre avis, en fonction de ce que nous avons entendu, de ce qu'on nous a représenté, elle tient la route. Elle tient la route. Alors...
Et, à ce moment-là, le rôle du comité a été de trouver une façon de faire en sorte... Et ça, les villes où le problème se posait ? il y en avait deux, à ma connaissance, si je me rappelle bien ? les villes où on risquait... où il y avait effectivement le contrôle des deux parties de la double majorité, voix et population, étaient tout à fait d'accord pour dire que, ça, ça n'avait pas d'allure et qu'il fallait donc trouver une façon de faire en sorte qu'on ne puisse pas vivre une situation comme celle-là. On a soumis une façon donc de traiter le volet voix ? le volet population, lui, là, il n'est pas question de jouer avec ça ? donc de jouer avec le volet voix, qui... Et on avait fait plusieurs scénarios, plusieurs cas de figure, et ça tenait. Mais de dire qu'on va enlever la double majorité, je pense que ce serait un déni de démocratie, là, écoutez.
Mme Normandeau: Merci. C'est beau.
Le Président (M. Vallières): Ça termine. Alors, est-ce que j'ai d'autres demandes d'intervention? Il resterait quelques minutes. M. le ministre.
M. Boisclair: Pour nous, c'est clair que nous ne la retirons pas. Nous acceptons la formule de limitation que vous nous proposez, et on s'en tient aux dispositions qui sont contenues dans le projet de loi puis on ne bougera pas là-dessus.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, avant que nous passions aux remarques finales, je vous remercie de votre contribution à nos travaux, de même que pour le rapport que vous avez produit. Alors, merci beaucoup. Bon retour.
Mme Ruest-Jutras (Francine): Alors, merci. Ça nous a fait plaisir de venir vous voir. Il y a bien des visages qui nous sont familiers. Alors, j'étais contente d'être là.
Le Président (M. Vallières): Oui. Nous allons suspendre quelques minutes, le temps de vous saluer, et puis nous reprenons nos travaux pour la finition.
(Suspension de la séance à 17 h 38)
(Reprise à 17 h 40)
Remarques finales
Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, si vous permettez, nous allons continuer et terminer nos travaux en débutant par Mme la députée de Bonaventure pour ses remarques finales. Nous disposons, de part et d'autre, de 10 minutes maximum pour ce faire. Mme la députée de Bonaventure.
Mme Nathalie Normandeau
Mme Normandeau: M. le Président, merci beaucoup. Je ferai quelques remarques préliminaires. Ça ira assez rondement pour les quelque 10 minutes qui sont à ma disposition, certainement, dans un premier temps, pour profiter de l'occasion pour remercier tous les intervenants, les maires bien sûr et mairesses qui ont pris soin de venir nous visiter, et certainement les remercier et les féliciter pour le sérieux de l'exercice qu'ils ont effectué parce que, évidemment, tous les mémoires qui ont été déposés ? malheureusement, certains groupes n'ont pu être entendus ? tous les mémoires qui ont été déposés évidemment étaient d'une très grande qualité, répondaient de façon très pertinente au projet de loi et certainement aux interrogations soulevées par plusieurs.
Et, M. le Président, je dois vous dire que, de notre côté, là, on a été très réceptifs. Et, moi, personnellement, j'en ai appris évidemment certainement beaucoup plus sur le fonctionnement et les difficultés et les bons coups, les moins bons coups en fait du fonctionnement de MRC qui sont mixtes, en fait, qui sont à caractère rural et à caractère urbain. Et j'espère, j'ose croire, M. le Président, que le ministre fera preuve de la même écoute dont il a fait preuve au cours de ces deux jours d'audiences et certainement cherchera tout comme nous à avoir un projet de loi qui réponde le plus parfaitement possible aux demandes et aux craintes des groupes qui sont venus nous rencontrer. Et, là-dessus, évidemment, lorsque j'ai fait mes remarques préliminaires, je soulignais que c'est un projet de loi qui était perfectible, et je pense sincèrement qu'il l'est encore, sur la base de ce que nous avons entendu ce matin.
Deux éléments qui retiennent mon attention, c'est toute la question liée à l'élection du préfet au suffrage universel et celle liée, notamment, à la dévolution de certaines compétences. Et là encore, M. le Président, il n'y a pas d'unanimité sur ces questions-là, notamment l'élection du préfet au suffrage universel. Je dois vous dire que certains évidemment ont des craintes qu'on pourra... Puis les préfets qui ont été élus au suffrage universel, M. Goddard et M. Garnier, sont venus nous rassurer là-dessus, et je dois vous dire que, là-dessus, ça a été effectivement un témoignage qui a apporté certainement un éclairage nouveau: au quotidien, dans la pratique, là, comment un préfet qui a été élu au suffrage universel pouvait améliorer, contribuer à améliorer le développement de sa communauté qui est, en l'occurrence, là, la MRC.
Alors, M. le Président, nous, évidemment, on souhaite bien sûr collaborer à l'étude de ce projet de loi, comme on l'a fait en fait au cours des deux dernières journées d'audiences. Et ce qu'on souhaite évidemment, c'est que le ministre ? puis j'insiste beaucoup là-dessus ? c'est qu'il fasse preuve d'ouverture parce qu'il y a peut-être évidemment certains groupes qui vont continuer de se manifester. On aura l'occasion de passer à travers tout le processus d'étude du projet de loi, et demain on en est déjà, je pense, à l'adoption du principe du projet de loi. Et, moi, je pense que ce que nous devons rechercher, comme législateurs, c'est évidemment d'avoir le meilleur projet de loi.
Parce qu'il ne faut pas oublier, et je tiens aussi à le dire et à le redire, M. le Président, on a ici... Le ministre a déposé un sixième projet de loi qui concerne bien sûr toute la question de la réorganisation municipale. Six projets de loi en moins de, bon... On a commencé en décembre 2000; là, on est en 2002. En moins de deux ans, six projets de loi. Et on a choisi encore... Parce que le gouvernement a manqué de vision dans le secteur municipal, on a choisi une stratégie, là, à la pièce. On a des adeptes de l'étapisme de l'autre côté, mais ça se traduit évidemment au niveau municipal, et ça, ça a donné lieu à des réalités qui se sont exprimées, des tensions qui se sont exprimées, qui... aujourd'hui, par voie législative, qu'on doit corriger.
Et le ministre évidemment me permettra de lui dire, même, là, s'il n'est pas d'accord avec moi là-dessus, que ces tensions qui ont été créées en fait l'ont été parce que le gouvernement n'a fait preuve... a manqué de vision dans le secteur municipal. Et le cri du coeur qui a été envoyé, la semaine dernière, par l'ancien président de l'Union des municipalités du Québec ? d'ailleurs, c'est ce qu'a plaidé la Fédération québécoise des municipalités: Faites-nous confiance. On sait que les municipalités sont des créatures du gouvernement provincial, mais je pense qu'elles ont fait la démonstration, depuis leur création, de leur autonomie, de leur compétence, de leur savoir-faire.
Alors, évidemment, ce qu'on souhaite, M. le Président, c'est que le ministre s'inspire de cet historique qui parle, qui témoigne de lui-même, qui est assez éloquent quant à la performance de nos municipalités et de ce qu'elles peuvent faire au niveau local et qu'il puisse s'en inspirer effectivement pour avoir, dans le fond, un monde municipal qui évite de se développer... je vous dirais, qui soit en compétition à l'intérieur même donc de cette grande famille que représente le monde municipal au Québec.
Mais, en même temps, M. le Président, je pense que ? c'est ce que je retiens des deux jours... c'est qu'on doit aussi avoir suffisamment de souplesse sur le plan législatif pour avoir la capacité de s'adapter à des échelles variables. Et, là-dessus, c'est le message que je retiens notamment de la mairesse de Drummondville, Mme Francine Ruest-Jutras, qui, elle aussi, s'appuie sur une longue expérience vécue: Laissez-nous plus de souplesse.
Et, tout ça, M. le Président, je ferais le lien avec cette nécessité, cette obligation, à partir du fameux principe que certains nous ont servi, notamment la Fédération québécoise des municipalités, le fameux principe de subsidiarité. Parce que l'État ne peut pas tout gérer, parce que l'État ne peut pas tout contrôler sur le terrain. Il faut laisser évidemment au monde municipal la possibilité donc de régler certaines questions qui touchent les citoyens et les citoyennes au quotidien. Alors là on comprend qu'il y a un premier pas qui a été fait avec la dévolution de certaines compétences dans le cadre du projet de loi n° 29. La Fédération québécoise des municipalités est venue dire ce matin: On souhaiterait que ces responsabilités et compétences soient étendues à l'échelle des MRC. Alors, là-dessus, on a entendu un autre son de cloche de la part des villes de centralité, des villes d'agglomération. Il faudra voir, M. le Président, avec ce que le ministre évidemment nous a proposé dans son projet de loi, si effectivement on a la meilleure formule évidemment dans le contexte actuel.
Alors, je ne sais pas s'il me reste tellement de temps, M. le Président. Peut-être quatre minutes, c'est ça?
Le Président (M. Vallières): Deux, trois minutes.
Mme Normandeau: Deux, trois minutes. Mais c'est parce que, dans le fond, je ne prendrai peut-être pas nécessairement les 10 minutes qui me sont accordées parce qu'on aura abondamment loisir de rediscuter, dans le cadre du processus qui suivra et certainement demain, dès demain, au niveau de l'adoption du principe.
Mais je tiens peut-être, en terminant, à rassurer le ministre, M. le Président, parce que je sais que le ministre est inquiet. Il a envoyé quelques messages, au cours de ces deux jours d'audiences, sur la position de notre équipe au niveau de l'élection du préfet au suffrage universel. Là-dessus, j'aimerais le rassurer: le Parti libéral du Québec et mes collègues, nous ne nous sommes jamais en fait opposés au principe et à l'élection du préfet au suffrage universel, nous ne nous sommes jamais publiquement... puis je dois vous dire qu'on ne s'est jamais opposé à ce principe-là. Et on sera certainement conséquent avec le choix qu'on a faits, comme formation politique, qui est de faire confiance aux régions du Québec, qui est de faire confiance au monde municipal.
Et ça, je pense qu'il faut éviter d'avoir un double discours puis, malheureusement, c'est souvent le double discours que tient le gouvernement. D'un côté, le ministre tente de s'ériger en grand décentralisateur et, évidemment, le gouvernement qu'il représente tente aussi de s'incarner en grand décentralisateur, alors que, sur le terrain, en fait, le gouvernement, je vous dirais, est très centralisateur. Et, là-dessus, ce qui a été dénoncé par M. Gagnon, Bernard Gagnon, la semaine passée, met très clairement en lumière cette espèce de ras-le-bol, dans le fond, du monde municipal à l'endroit du gouvernement qui est de dire: Arrêtez de nous dire quoi faire dans notre cour! On est élus, on a toute la légitimité dans le fond pour faire le travail pour lequel on a été mandatés par nos citoyennes et nos citoyens.
Alors, M. le Président, je tiens à réitérer au ministre, à le rassurer: l'opposition sera extrêmement constructive, collaboratrice pour effectivement avoir un projet de loi qui réponde véritablement aux besoins de l'ensemble du monde municipal pour qu'on puisse, une fois pour toutes, prétendre, au Québec, qu'on a des outils sur le plan législatif qui nous permettent, dans le fond, de construire un Québec certainement pas à deux vitesses, mais qui nous permettent donc de travailler véritablement à la construction d'une nouvelle cohabitation et d'une meilleure harmonisation de la part de tous les acteurs au niveau municipal. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la députée de Bonaventure. M. le ministre, vos remarques finales.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, je propose que les propos de la députée soient repris et qu'on les dépose et qu'on en fasse le procès-verbal des deux dernières journées parce que, en somme, la députée a très bien résumé ce que nous avons entendu. Toutefois, elle a confondu son rôle avec celui du secrétaire de la commission qui doit dresser un procès-verbal. Le rôle du législateur, c'est plutôt de donner des orientations et de prendre quelques décisions importantes. Comment a-t-elle pu, pendant les quelque 10 minutes où elle s'est exprimée, ne pas poser ou donner plutôt des réponses aux questions de fond qui ont été soulevées?
n(17 h 50)n Et je comprends que j'ai eu quelques indications. Tout comme nous, il y a un consensus sur le fait que l'élection du préfet au suffrage universel est une bonne chose. Donc, il n'y a personne qui remet en cause ce qu'on a fait pour le monde rural et l'intention du législateur de l'étendre pour les MRC à caractère urbain et rural. Toutefois, la véritable question, là où il y a un noeud, c'est: Est-ce qu'on ouvre la formule de la double majorité qui est contenue au projet de loi? Le gouvernement a statué dans sa proposition. Est-ce qu'il doit retourner et proposer à l'Assemblée nationale de nouveaux amendements? À ce moment-ci, je pense que non, mais j'aurais bien aimé entendre l'opinion de l'opposition sur cette question.
De la même façon, le projet de loi n'ouvre pas tellement la porte à des délégations supplémentaires de pouvoirs pour les MRC à caractère urbain et rural. Je n'ai pas entendu de la députée quelque intention que ce soit, ou quelque proposition que ce soit, ou quelque idée que ce soit sur ce que devrait compter un projet de loi. Comment arbitre-t-elle, nous qui devons ici trancher l'intérêt public? Comment répond-elle aux problèmes qui ont été soulevés devant nous? Moi, je me dis que je suis... de la même façon que je ne pense pas qu'il faille rouvrir la question de la double majorité, mais je pense cependant que nous pourrions très certainement ouvrir la voie à des délégations supplémentaires vers les MRC, particulièrement des délégations facultatives, dans le respect de l'autonomie municipale, mais peut-être même, pourquoi pas, quelques délégations exclusives. J'ouvre la porte, et, sur cette question, je n'apporte pas une réponse définitive, mais c'est une question, moi, que je voudrai rediscuter dans les prochains jours. Mais je veux donner déjà une indication, comme j'ai fait d'entrée de jeu: je pense que tout geste qui pourrait contribuer à renforcer les MRC sont des gestes qui vont dans le bon sens.
Donc, voilà un peu ce que... là où j'en suis après ces deux jours de consultation. Je vais vous dire que je tente de maintenir un dialogue entre les gens de l'UMQ et de la FQM. Je pense que la division dans le monde municipal en ce moment dessert le monde municipal. Il ne m'appartient pas de dicter, de même, il ne m'appartient pas d'identifier quelles seraient les meilleures structures de représentation du monde municipal, mais je constate, comme bien des citoyens puis comme bien des députés, que les divisions actuelles dans le monde municipal nuisent, à mon avis, aux intérêts municipaux. Certains même, devant l'incapacité des gens à s'entendre entre eux, accusaient le gouvernement de vouloir les diviser. Quel raisonnement un peu étrange!
Bon, ceci étant dit, je maintiens cette discussion. J'ai fait des propositions aux deux unions où je souhaiterais qu'entre elles elles discutent parce que, encore là, il y a une limite à ce que nous tranchions toujours à leur place. Parce que, rapidement, on est confrontés au problème suivant: d'un côté, des gens qui nous disent: Respectez notre autonomie, donc, en d'autres mots: Ne faites rien sans qu'on soit d'accord; puis, d'un autre côté, des gens qui nous disent: Regardez, il faut bouger parce que l'intérêt public le commande. Et, si on appuie ce point de vue, immédiatement, on se fait dire par des gens qui réclament l'autonomie municipale, qui utilisent des expressions un peu étranges comme «infantilisation du monde municipal»... Bien, c'est un peu...
Vous comprenez que ça nous met dans une situation qui est délicate et que le législateur doit trancher parce que, à terme, au-delà des débats auxquels nous assistons, notre job, c'est de définir l'intérêt public et de définir, au meilleur de notre connaissance et au meilleur de nos compétences, ce qu'est le bien commun. Et donc, c'est cette élévation que je souhaite des membres de la commission. Je suis convaincu qu'on sera capable d'y arriver parce qu'il y a là un rendez-vous, puis en comprenant aussi que, indistinctement du projet de loi ? écoutez, les regroupements municipaux, on en avait parlé pendant des dizaines d'années; l'élection du préfet au suffrage universel, c'est récent dans le débat... et que Rome ne s'est pas bâti en un jour, et que le dialogue que le gouvernement du Québec entretient avec le monde municipal est un dialogue souple, constructif puis en constante évolution aussi, et que nous n'apportons pas, par le projet de loi, une réponse définitive à toutes les questions qui nous sont posées. Nous tentons simplement de faire un pas.
Voilà donc mon état d'esprit, M. le Président. Et je remercie la députée et les membres de cette commission pour leur contribution. Je voudrais aussi remercier mes proches collaborateurs du cabinet ainsi que mes collaborateurs du ministère des Affaires municipales pour leur grand talent et leur compétence, et remercier aussi toutes celles et ceux qui sont venus devant nous pour ajouter à nos débats. Je voudrais aussi saluer le personnel de la commission qui nous a bien encadrés pendant ces discussions. Je vous remercie.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci à tous pour votre collaboration. La commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 17 h 56)