(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Vallières): La commission de l'aménagement du territoire se réunit aujourd'hui dans le cadre de l'interpellation par le député de Hull de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole sur le sujet suivant: Les effets négatifs de la réorganisation municipale pour les citoyennes et les citoyens du Québec.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements d'annoncés?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Laprise (Roberval) est remplacé par M. Lachance (Bellechasse), et M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) est remplacé par M. Després (Limoilou).
Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, je me permets de vous rappeler brièvement le déroulement de cette séance d'interpellation. Dans un premier temps, le député de Hull, qui a demandé l'interpellation, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole pour également un 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon l'ordre suivant: un député de l'opposition, suivi de la ministre, suivie d'un député du groupe ministériel. Vingt minutes avant la fin de la séance, j'accorderai une période de 10 minutes de conclusion à la ministre et un temps équivalent au député de Hull. Alors, sur ce, et sans plus de préambule, je vais passer la parole au premier intervenant, M. le député de Hull.
Exposé du sujet
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci bien, M. le Président. Chers collègues, bonjour, en ce vendredi pluvieux. J'imagine que ce temps maussade est précurseur d'une semaine prochaine plutôt maussade, parce que nous sommes maintenant à quatre jours du dépôt d'un projet de loi qui changera à jamais le paysage municipal au Québec, qui changera à jamais le choix des citoyens de résider dans une municipalité ou dans une autre. Dans quatre jours, le gouvernement amènera son rouleau compresseur sur Québec, sur Montréal et sur l'Outaouais pour forcer des fusions municipales, fusions qui ne sont pas nécessairement souhaitées par la population, puisqu'on a décidé de les ignorer dans toute cette réforme, puisqu'on leur a dit qu'ils n'avaient pas vraiment à participer à ce débat, parce qu'ils n'avaient pas à se prononcer à savoir s'ils souhaitaient changer de milieu de vie.
Cette réforme est faite évidemment sans aucune consultation sérieuse de la part du gouvernement. Elle est faite entre fonctionnaires, en catimini, avec certains groupes sélectionnés. Et, hier, on apprenait à l'Assemblée nationale que le premier ministre, d'une bonté absolument incroyable, disait de ne pas s'énerver, parce que, en commission parlementaire lors de l'étude de ce projet de loi, nous aurions droit à des consultations. Quel genre de consultations, M. le Président? Ça s'appelle des consultations particulières. Ça, c'est trié sur le volet. C'est le gouvernement qui choisit qui il va entendre. Et, habituellement, il y a plus de monde qui pense comme le gouvernement qui participe à ces débats-là que des gens qui s'opposent. Je serais bien intéressé de voir, moi, si on est intéressé à entendre les 20 000 signataires de la ville de Sainte-Foy.
Est-ce que les consultations particulières vont inclure des citoyens ordinaires de partout au Québec qui s'opposent farouchement à des membres du Parti québécois, qui déchirent leur carte présentement dans la région de Québec parce qu'ils trouvent que le processus suivi est non seulement irrespectueux, mais carrément antidémocratique? Non, le premier ministre nous a simplement dit, M. le Président, qu'il y aura des consultations, parce que c'est comme ça, puis il y aura quelques groupes d'entendus, sélectionnés sur le volet. Puis les 20 000 personnes et plus, à Québec, et les personnes qui s'opposent, partout à Montréal et en Outaouais, bien, elles, elles ne trouveront pas leur moment de gloire à l'Assemblée nationale, parce que le gouvernement ne les invitera probablement pas.
D'où ça vient, tout cela? Bien, ça vient d'un gouvernement qui a agi en catimini, sans mandat. Je vous implore, les gens du gouvernement: Sortez-moi la page du programme politique, en 1998, qui disait que vous étiez pour faire des fusions forcées. Trouvons la page qui dit que le Québec serait dénaturé à tout jamais. Trouvons la page qui dit que les citoyens n'auront plus droit de regard sur leur avenir, dans un programme politique que vous avez pourtant utilisé pour faire en sorte que vous ayez le plus grand nombre de sièges à l'Assemblée nationale, tout en ayant moins de votes à l'Assemblée nationale.
Non, le gouvernement n'a pas de mandat, et, à ce titre, ne prenez pas ma parole. Je vais citer ? parce que je suis certain que la ministre le fera tantôt ? le journal LeDroit, d'Ottawa. Il faut comprendre qu'hier le premier ministre a presque dit carrément qu'un journal de Jonquière était un torchon, en disant qu'il ne fallait pas se fier à une information contenue dans Le Quotidien, mais que, quand ça vient dans le journal LeDroit, c'est tout à coup du bonbon. Il faut comprendre qu'au Québec il y a deux genres d'information. Quand ça fait l'affaire du gouvernement, c'est correct, puis, quand ça ne fait pas l'affaire du gouvernement, c'est un torchon. Bien, dans ce qui fait l'affaire du gouvernement, il y a un journal qui s'appelle LeDroit, d'Ottawa, qui couvre l'Outaouais québécois, qui de façon évidente... Puis on va s'entendre, je ne conteste pas ça, là. Le journal LeDroit, lui, a fait son choix et il est pour une fusion. Il ne s'est jamais prononcé sur la question de la fusion forcée, par contre, il n'a jamais dit à ses lecteurs que, eux, ils sont trop caves pour se prononcer. Alors, il se prononce en faveur de la fusion, et je respecte ça. C'est ce que je demande, moi, un véritable débat pour qu'on décide ensemble de l'avenir des municipalités. Mais c'est tellement sans mandat, cette réforme-là, que le journal titre ce matin, dans un éditorial de Murray Maltais, ceci: «Beaucoup d'opposants à la fusion des villes de l'Outaouais urbain n'ont pas aperçu à temps le rouleau compresseur gouvernemental qui se pointait à l'horizon.» Le journal LeDroit, le grand allié de la ministre dans ce domaine-là, dit carrément que le rouleau compresseur s'en vient et que les opposants ne l'ont pas vu. Ça veut donc dire que ça n'a pas dû être si évident que ça, l'intention du gouvernement de fusionner de force les municipalités depuis novembre 1998, en campagne électorale. Et pour cause, il n'en a jamais parlé. D'ailleurs, la dernière fois qu'ils en ont parlé, c'est l'ancien ministre qui disait que, pour lui, des fusions forcées, ce n'était pas une bonne idée puis qu'il fallait régionaliser les services.
Vous savez que le gouvernement est en train de faire des fusions forcées, puis là on va changer de mots aujourd'hui un petit peu, puis on va parler... De quoi s'agit-il vraiment? Ça veut dire quoi? Bien, ça veut dire, là, pour les gens qui nous écoutent, qu'on va changer votre ville à tout jamais, ça veut dire que les gens, dans votre demeure aujourd'hui, vous ne verrez plus votre municipalité, votre entourage, votre environnement comme il l'est aujourd'hui, vous ne le verrez plus jamais comme il est maintenant. Après des fusions forcées, tout va changer. Non seulement la structure municipale va changer, mais le choix de vie que vous avez fait va changer, les règles en matière d'urbanisme, par exemple, seront harmonisées, vos choix quant aux services des loisirs seront changés, vous n'aurez plus jamais le même service des loisirs, il sera harmonisé. Vous allez être encore plus loin des élus municipaux, puisque, de façon évidente, chaque élu représentera plus de population. Vous allez changer le secteur dans lequel vous allez vivre, puisque les lois qui régissent l'aménagement de votre secteur vont changer, les parcs de proximité que vous avez vont changer, la qualité et la quantité de services que vous avez, ça va changer, la qualité du service des loisirs, les arts, la culture, ça va changer, et votre compte de taxes va changer. Et tout ça ne changera pas nécessairement pour le mieux.
n(10 h 10)n En fait, on ne le sait pas, comment ça va changer, parce que le gouvernement a décidé de le cacher, a décidé de cacher ces changements. Au lieu de jouer franc jeu et de dire: Voici les conséquences, et de laisser les gens choisir, le gouvernement décide à votre place. Le gouvernement a décidé que, lui, il connaissait ça, le monde municipal, et qu'il était pour s'en mêler directement.
Je vous rappelle que c'est la même ministre qui aujourd'hui pense connaître votre bien qui nous a préparé la réforme à l'aide sociale, qui nous a préparé la réforme à Emploi-Québec. Emploi-Québec, ce rapatriement important d'un pouvoir fédéral, qui a été un gâchis, un fiasco, où tous les observateurs ont dit que c'est une réforme mal planifiée. Eh bien, en début de mandat, la ministre disait qu'elle était heureuse de s'en aller au monde municipal et que le passé était garant de l'avenir, et c'est vrai: Emploi-Québec est un bon modèle pour ce qui se passe présentement dans le monde municipal. Les erreurs d'Emploi-Québec, les mauvaises planifications, le manque de respect envers le client, les citoyens, ça se répercute maintenant dans le monde municipal.
Pourtant, la ministre avait le choix, la ministre avait le choix de faire autrement. On s'entend tous pour dire qu'il fallait avoir une réforme municipale, bien entendu. D'ailleurs, le livre Pacte 2000, le rapport Bédard proposait 108 propositions, 108 propositions qui traitaient particulièrement de fiscalité municipale pour donner plus de pouvoir, de marge de manoeuvre aux élus municipaux, changeaient le Code du travail pour libérer les mains des élus municipaux pour qu'ils puissent vraiment gérer. La ministre avait le choix. Elle aurait pu affronter le taureau en le prenant par les cornes et en disant: Oui, on va véritablement changer la structure fiscale municipale ou on va faire quelque chose d'autre, on va changer les limites géographiques des villes, on va anéantir les choix des citoyens. La ministre avait le choix et elle a décidé de prendre le choix des fonctionnaires, le choix des maires des villes-centres, le choix des gens qui ont décidé d'utiliser la méthode forte pour faire passer leur message plutôt que de faire confiance aux simples citoyens qui, dans leur salon, sont obligés d'écrire le chèque. Elle a décidé de faire confiance au rouleau compresseur gouvernemental.
Trois questions demeurent sans réponse, Mme la ministre: Pourquoi? Pour qui? Et combien ça coûte, cette réforme? Trois questions qu'il y a un an on vous posait et qu'on vous pose toujours. Soyons donc transparents, dites-nous pourquoi cette réforme, pour qui et combien ça va coûter, et laissez les citoyens utiliser cette information pour décider de l'avenir de leurs collectivités. Pour nous, au Parti libéral du Québec, le citoyen doit être au coeur des décisions, doit être au coeur des actions gouvernementales, ça doit être le citoyen d'abord. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, je vous remercie, M. le député de Hull. Je vais maintenant passer la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Mme la ministre.
Réponse de la ministre
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Les arguments que l'on entend font frémir, parce que le député de Hull prétend que les parcs ne seront plus à la même place, les rues ne le seront plus, que la maison elle-même ne sera plus dans son même environnement. Il y a quelque chose, là, de démagogique dans les propos que l'on entend, et ce sont peut-être des arguments de congrès libéral, là, mais ce sont des arguments qui manquent complètement de crédibilité, et d'autant plus que l'opposition attaque sans direction en plaidant une chose et son contraire en même temps.
Je vous rappellerais, M. le Président, que nous sommes mis au défi, en matière municipale, de rendre nos villes plus efficaces et de faire en sorte que nous ne nous fassions pas devancer par la réorganisation qui a eu cours dans l'ensemble de tous les pays industrialisés. Je rappelle au député de Hull qu'il a en face de lui, chaque fois qu'il retourne chez lui, l'exemple de la ville d'Ottawa-Carleton, qui verra le jour au 1er janvier prochain, une ville de 800 000 habitants, une nouvelle ville qui est issue du regroupement de 11 municipalités. Et cette nouvelle ville d'Ottawa-Carleton prétend devancer Montréal, qui occupe le deuxième rang des grandes villes canadiennes, pour la reléguer derrière elle.
Alors, vous voyez bien que cette réorganisation municipale s'est imposée dans presque tous les pays industrialisés. Je ne pense pas qu'il y ait eu d'exception à la règle. Il y a deux modèles qui ont été choisis habituellement: celui des regroupements significatifs, dans les pays comme la Suède, la Norvège, le Danemark, la Belgique, l'Allemagne, ou des réorganisations aussi importantes, comme en France et aux États-Unis, qui ont plutôt choisi un modèle qu'on appelle supralocal. Pourquoi? C'est parce que les enjeux qui se présentent actuellement sont des enjeux qui sont extrêmement différents de ceux qui étaient il y a 50 ans. Et pourtant, nous sommes organisés, au niveau municipal, comme nous l'étions au recensement de 1951. Nous sommes en 2000 et nous avons à peu près le même niveau de municipalités qu'il y a 50 ans, quand on pouvait gérer l'eau, l'air, les déchets avec des puits artésiens, des fosses septiques puis des dépotoirs, alors que maintenant les enjeux ont depuis longtemps dépassé les frontières municipales et sont bien au-delà des intérêts ultralocaux.
Ça signifie que, en matière d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement, de gestion des matières résiduelles, avec le recyclage, la récupération, le tri, en matière de développement économique aussi, on ne peut plus comme avant continuer cette compétition stérile, improductive, cette rivalité entre les villes, alors que la compétition internationale et la compétitivité mondiale sont d'une sévérité qui fait en sorte que les sociétés qui n'inscrivent pas l'innovation au coeur des changements qu'elles ont à faire, ces sociétés-là vont être laissées pour compte. M. le Président, ce qui est en cause présentement, c'est un objectif de développement. Est-ce qu'on est organisé, en l'an 2000, dans nos villes de la façon qu'il faut s'organiser pour favoriser des conditions optimales de développement économique, de développement social, de développement culturel, d'équité fiscale, d'équité sociale? Je pense bien que poser la question, c'est y répondre.
Et, vous voyez, j'ai en tête des déclarations qui ont été faites par certains des plus farouches opposants actuels à la réorganisation municipale. Je pense en particulier au maire de Beauport, M. Langlois, et je retrouvais une déclaration qu'il faisait il n'y a pas plus d'un an dans le journal Le Soleil, le 17 mars 1999 plus précisément, et c'est un court extrait, je crois, qui parle de soi. Alors, le maire Jacques Langlois verrait bien une seule police, un seul service de pompiers, une seule desserte d'ambulanciers, un seul centre de réponse 9-1-1 et même une seule ville sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec. «Mais ça prend une volonté politique. Ailleurs, ceux qui l'ont fait en sont très satisfaits. Pourquoi les autres ne le seraient-ils pas? dit le maire de Beauport. À Toronto, ajoute-t-il, c'est le gouvernement qui a forcé le regroupement, conscient que ses propos ne lui feront pas gagner un concours de popularité, même si beaucoup de citoyens pensent comme lui, car ce langage n'est pas "politically correct" dans la région de Québec, chaque municipalité tenant à son autonomie», ajoute le maire de Beauport.
n(10 h 20)n M. le Président, s'il y a une évidence qui transcende la partisanerie politique... Le fait est d'ailleurs que le gouvernement peut compter sur l'appui de maires qui, à travers le Québec ? et j'aurai l'occasion évidemment de faire connaître des témoignages ce matin ? réclament du gouvernement d'aller de l'avant. Les études, les consultations ont été tellement nombreuses depuis 40 ans qu'elles couvriraient le bureau et m'empêcheraient de vous voir. Je veux simplement citer cette dernière consultation, une consultation qui fut convenue entre l'Union des municipalités du Québec et le gouvernement du Québec en 1997. Et je voudrais rappeler que le rapport de la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales, communément appelé rapport Bédard, qui contient 500 pages, a été publié suite à une vaste consultation, qui a encore duré un an. L'opposition est championne des consultations sans suivi. Ah! ça, les consultations, ils en ont fait quand ils étaient au gouvernement, pendant neuf ans. Ils en ont fait et c'est resté lettre morte.
En milieu municipal, ce qui manque, ce ne sont pas des consultations, ce qui manque, ce sont les décisions, et le temps d'agir est arrivé. Dans le rapport publié en 1999, donc il y a maintenant un an, ce rapport de la Commission nationale sur les finances et la fiscalité locales a été préparé suite à l'audition de 125 organismes et personnes qui ont présenté 118 mémoires, et la Commission a tenu 13 journées d'audiences qui lui auront permis d'entendre plus de 100 experts et organismes.
Alors, voyez-vous, M. le Président, nous avons décidé d'agir, et l'urgence d'agir s'impose, d'autant plus qu'à travers le Canada la réorganisation est déjà presque complétée. Elle l'est en Ontario, elle l'est au Nouveau-Brunswick, elle l'est en Nouvelle-Écosse, et le Québec fait figure encore de... je dirai, ne fait pas bonne figure dans ce tableau-là. Avec les 1 300 municipalités, nous avons le championnat toutes catégories du nombre de municipalités canadiennes, au Québec, avec le quart de la population, et il est évident qu'il y a longtemps que l'urgence d'agir s'est imposée. Ce que l'opposition propose, c'est de remettre à demain ce que nous aurions dû, comme société, faire hier.
Alors, d'autant plus, et j'insiste là-dessus, M. le Président, que ce qu'ils proposent, c'est un simulacre de démocratie. En fait, ils proposent de donner un droit de veto pour maintenir le statu quo. De quel statu quo s'agit-il? Du statu quo des mieux nantis. Du statu quo de ceux qui ne souhaitent pas l'équité fiscale, l'équité sociale, du statu quo de l'opposition, qui cherche la paralysie et l'inertie sous prétexte de consultations qu'ils appellent référendums décisionnels au niveau municipal. Il savent très bien que c'est contraire au droit constitutionnel canadien et québécois. Ils savent très bien que la compétence en ces matières relève des législatures des provinces. Ils le savent très bien, parce que la jurisprudence est constante et sans exception depuis 1891. C'est ce que la Cour d'appel de l'Ontario a rappelé d'ailleurs il y a à peine deux ans, et cette compétence a été réitérée à nouveau par la Cour supérieure du Québec dans le dossier Mont-Tremblant?Saint-Jovite, l'honorable juge Tellier, le 28 août dernier.
Alors pourquoi, M. le Président, vouloir travestir, usurper la compétence de l'Assemblée nationale, la subordonner à des consultations décisionnelles au niveau municipal qui feraient du Québec une société désaccordée, complètement désaccordée, avec des municipalités qui voudraient puis d'autres qui ne voudraient pas et, finalement, avec le droit de veto de celles qui ne veulent pas? Alors, on voit bien que ce qui est proposé, c'est la paralysie, c'est l'inertie, c'est le statu quo. C'est rétrograde.
Le Président (M. Vallières): Mme la ministre, ça termine votre bloc de 10 minutes, et nous passons maintenant la parole pour une période de cinq minutes au député de Limoilou.
Argumentation
M. Michel Després
M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je viens d'écouter la ministre, et d'entrée de jeu elle nous a dit tout à l'heure que l'opposition faisait frémir la ministre. Je vais vous dire: C'est la ministre qui fait frémir la population dans la région de Québec. C'est elle qui fait frémir la population, parce que le gouvernement a décidé de bafouer le droit le plus important: celui de la démocratie. Ce que les gens ne comprennent pas, Mme la ministre, dans la région de Québec, c'est le processus. C'est sûr qu'il y a sûrement des gens qui sont ouverts à faire des fusions; il y en a d'autres qui ne le sont pas. Ce que les gens n'acceptent pas, lorsque l'investissement le plus important qu'ils ont fait dans leur vie est celui probablement d'acheter une maison, de choisir une ville, de choisir des services qui étaient reliés, d'y choisir en même temps un compte de taxes qui était relié à ces municipalités... Et ça, c'est un droit qu'ils ont fait pour 20 ans, 25 ans, 30 ans, 40 ans, pour leur vie, dans bien des cas, Mme la ministre.
Et vous avez décidé d'un commun accord, les députés ministériels, d'aller de l'avant avec une réforme où jamais vous n'avez eu de mandat, jamais vous n'avez eu de mandat. Et, comme le disait mon collègue tout à l'heure, au fond, quand vous dites qu'on sert des arguments partisans, Mme la ministre, quand on vous demande le droit à l'information, vous les avez, les études, personne ne les a, il y a juste vous qui avez le plan d'action entre les mains. Vous le connaissez depuis le début, où vous allez, puis vous connaissez le résultat, on va l'avoir la semaine prochaine avec le dépôt de la loi. C'est ça, le droit à l'information. Le droit à la consultation, le droit à la démocratie permettent aux citoyens de choisir.
Oui, effectivement, le processus, les lois vous permettent de décider, tellement que vous avez passé la loi n° 124 qui va vous permettre, juste par correspondance, de faire approuver un décret gouvernemental dans le cas où les municipalités ne voudraient pas se soumettre à la volonté gouvernementale. Et, quand on vous demande pour qui, pourquoi, combien ça va coûter, on ne les a pas, les réponses. Et c'est pour ça que les gens se mobilisent dans la région de Québec. Ils se mobilisent, ils essaient d'avoir l'information. Et, le 4 octobre dernier, après le rapport Lapointe, il est arrivé quoi? Les députés de la région de Québec l'ont endossé... Puis je vois le député de Montmorency qui est ici ce matin, il est probablement le seul d'ailleurs qui est prêt puis qui rencontre sa population sur son territoire, le seul. Ils ont dit quoi? Quatre choses: pas de hausses de compte de taxes, quand vous avez endossé le rapport Lapointe, à chacun sa dette, le respect du sentiment d'appartenance, puis là ils ont dit: On va aller dans le chemin, on va aller rencontrer le monde. Je vais vous dire une chose: Ils ne sont pas trop, trop dans le chemin.
Il y en a, des assemblées publiques, pas organisées par le Parti libéral du Québec, pas organisées par la ville, organisées par des comités de citoyens. Je vais vous dire, je suis allé à Saint-Augustin, dans le comté de La Peltrie, il y avait probablement 600 personnes; dans la ville de Sillery, il y en avait autant. Le président du comité de citoyens est un organisateur fondateur pour le Parti québécois dans la ville de Sillery. Je vais vous dire, je suis allé à Saint-Augustin, là, puis il y avait du monde de votre grande famille, il y en avait amplement. Tous ceux qui allaient au micro, là, ils se posent des questions. Ils ne comprenaient pas pourquoi que le député qui avait endossé le dossier, il n'était pas là. De temps en temps, il faut sortir de l'Assemblée nationale, il faut sortir des suites ministérielles puis il faut aller rencontrer le monde; c'est de même qu'on se fait élire. Peut-être que la ministre aurait pu, elle, se déplacer. Mais, naturellement, c'est ses collègues qui ont été invités, puis ils ne sont pas venus à l'assemblée. Ils ne sont pas venus à Saint-Augustin.
Le ministre a été invité; la même chose, il n'est pas venu. On ne l'a pas vu. Les comités de citoyens avaient adressé une demande pour qu'il vienne, qu'il vienne expliquer pourquoi il endossait le rapport Lapointe puis les bienfaits de la réforme. Ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont écrit au ministre, puis c'était assez direct: M. le ministre, pour qui vous prenez-vous, vous qui avez vécu pendant des années des taxes de ces n'importe qui? Ce sont ces mêmes électeurs, électrices qui ont élu votre parti. Monsieur, même ministre, vous n'êtes même pas au-dessus de ces personnes, vous êtes à leur service. Vous n'avez aucun droit de les traiter de la sorte. Et, de plus, vous n'avez jamais reçu le mandat d'exécuter ces réformes que vous annoncez. Sachez, M. le ministre, que le mépris que vous affichez aujourd'hui pour ces n'importe qui, ils vous le rendront.
n(10 h 30)n Parce que j'ai demandé au ministre, en Chambre, s'il était pour assister, puis il a dit qu'il ne recevait pas, n'acceptait pas les invitations de n'importe qui, faites dans n'importe quel forum. C'est son droit, il a décidé de ne pas y aller. Mais, ça, c'est des citoyens, c'est la population qui veut poser des questions parce que le ministre et des députés ont décidé d'endosser un rapport.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Limoilou. Ce qui nous amène maintenant à un cinq minutes pour Mme la ministre.
Mme Louise Harel
Mme Harel: M. le Président, l'élément le plus incontournable de la position de l'opposition est le suivant: c'est qu'il n'y a pas besoin de changement. En fait, leur camp, c'est celui du statu quo. Sous prétexte de laisser à chacun le droit de décider, ils savent très bien que derrière ça c'est le statu quo dont il s'agit, parce que, évidemment, même si cette réorganisation va bénéficier sur le plan fiscal à une très grande majorité des contribuables ? et nous aurons l'occasion d'ailleurs de publier les études qui le démontreront, lors du dépôt des législations ? il s'avère que l'opposition sait très bien que laisser le choix à chacun, ça signifie la paralysie, parce qu'il y aura toujours une municipalité qui voudra puis une qui ne voudra pas. Alors, c'est comme un piano désaccordé, c'est comme un fromage gruyère. Vous imaginez l'île de Montréal? Et c'est, finalement, faire ce qui se fait depuis 50 ans, c'est-à-dire rien faire.
Je veux simplement citer le président de l'Union des municipalités du Québec qui disait, en mai dernier, je le cite: «Tout le monde ? il faudrait ajouter "sauf l'opposition" ? reconnaît que le mode de développement municipal tel qu'il existe n'est plus acceptable. Il ne répond plus à la réalité moderne.» Alors, M. le Président, ça a été même une des résolutions votées au congrès de l'Union des municipalités du Québec, à l'effet que le statu quo n'était plus acceptable. Alors, comment procède-t-on?
D'abord, un, il faut du changement. Ce changement-là s'impose à cause des grands enjeux, des grands défis que les villes dans le monde entier ont maintenant à relever dans le cadre de changements qui se sont produits à tous les niveaux, premièrement. Sinon, on prétendrait que tout changerait autour de nous, sauf les municipalités. Alors, comment changer? En réconciliant le besoin du citoyen d'avoir un lien avec des élus locaux, le besoin du citoyen d'appartenir à une communauté, d'obtenir des services de proximité, les services auxquels il tient, les services de loisir, les services de parcs, de déneigement, d'entretien des rues, d'entretien des parcs. Également, ce à quoi il tient, c'est cette approbation avant qu'il y ait des modifications de zonage, de plans d'urbanisme. Tout ça, M. le Président, c'est légitime et ça doit se retrouver dans les arrondissements.
Les arrondissements existent dans le monde entier, dans toutes les grandes villes du monde. J'aurai l'occasion d'ailleurs de... j'ai même eu l'occasion de présenter une étude qui a été menée par le ministère des Affaires municipales, et je l'ai déposée ici même, en cette Chambre, sur les arrondissements. C'est la façon moderne de travailler: des arrondissements avec tous les services de proximité puis le sentiment d'appartenance des citoyens, conjugués et réconciliés avec une gestion stratégique, avec un leadership régional en matière de développement économique pour qu'on cesse la concurrence. Vous vous imaginez, dans la région de Québec, 33 parcs industriels dans 14 municipalités, dont le tiers est vacant ? le tiers est vacant.
Alors, la gestion, oui, il faut une unité de décision. Les objectifs de la réforme: imputabilité démocratique directe. Vous savez, depuis des années, on multiplie le nombre d'ententes intermunicipales et de régies dans lesquelles les citoyens ne peuvent plus se retrouver; il n'y a pas de reddition de comptes, il n'y a pas de transparence, il n'y a pas d'imputabilité. Imputabilité démocratique directe avec suffrage universel; développement économique accru avec unité de décision et de commandement au niveau du développement économique; augmentation des ressources en matière de développement social et protection de l'environnement. Ce sont là des enjeux qui transcendent les territoires et les intérêts ultralocaux. Alors, arrondissements et gestion stratégique au niveau de villes regroupées, voilà l'essentiel des recommandations qui nous ont été transmises dans les rapports des mandataires.
M. le Président, je voudrais, en terminant, simplement citer le journaliste Michel David, du journal Le Soleil, qui mettait bien en garde l'opposition, et je le cite: «Il est de bonne guerre pour les libéraux de chercher à capitaliser sur le mécontentement créé par les fusions, mais cette fuite en avant a quelque chose d'irresponsable et de politiquement très risqué.» Voilà ce que disait l'analyste du Soleil.
M. le Président...
Le Président (M. Vallières): Merci, madame, déjà cinq minutes d'écoulées. M. le député de Bertrand, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
M. Claude Cousineau
M. Cousineau: Merci, M. le Président. Le libellé de l'interpellation d'aujourd'hui évoque encore malheureusement le négativisme et le manque de volonté de l'opposition officielle de voir l'important dossier de la réforme municipale aboutir pour le bien des citoyens et des citoyennes du Québec.
Voyons les points positifs plutôt que de s'acharner, comme l'a fait l'opposition officielle, à démolir, à miner le travail audacieux entrepris pour mener à bien la réorganisation municipale.
Un premier point positif. Sur le plan du dynamisme et de l'économie, il est clair, M. le Président, que le renforcement et le développement d'une collectivité naturelle par un regroupement ont pour effet de renforcer le rôle économique de la région visée et permettent par le fait même la consolidation du secteur centre et de ses activités économiques, ce qui nécessairement provoque le maintien et l'augmentation des emplois, l'augmentation du niveau de vie des contribuables du territoire visé. Qui en sont les véritables gagnants? Les citoyens et les citoyennes.
Un deuxième point positif touche les ressources générales. Une optimisation des ressources permet des économies importantes et une meilleure concertation, une meilleure gestion de l'ensemble des dossiers du territoire. Il en résulte un développement positif et rationnel de la région. Qui en sont les véritables gagnants? Les citoyens et les citoyennes.
Un troisième point positif se situe au niveau des ressources matérielles. Il est clair qu'un regroupement pensé provoque généralement une diminution importante des investissements par la mise en commun des infrastructures d'aqueduc, d'égout, ainsi que des bâtiments administratifs, diminution des investissements à moyen terme par la mise en commun de véhicules et d'équipements divers. Qui en sont les grands gagnants? Les citoyens et les citoyennes.
Un quatrième point important est celui de la distribution plus équitable de la richesse foncière pour l'ensemble de la collectivité. Un regroupement, M. le Président, provoque des impacts financiers, fiscaux, avec nécessairement une redistribution des avantages financiers. Qui en sont les véritables gagnants? Les citoyens et les citoyennes.
M. le Président, le regroupement municipal appelle une remise en question fondamentale des façons de faire afin d'assurer une prestation des services publics qui soit efficace et efficiente. Plutôt que de tenir un discours négativiste comme le fait l'opposition officielle par la voie de son député de Hull, parlons et mettons plutôt l'emphase sur l'ensemble des bienfaits de la réorganisation municipale.
Un cinquième point qui est très positif est l'abolition de la concurrence, pas toujours fructueuse, entres les municipalités. Malheureusement, les efforts des villes centrales dans ce domaine profitent à des villes périphériques. Ces dernières ne consentent pas le même niveau d'effort. Les services se trouvent dans les villes-centres, les citoyens des villes de périphérie profitent largement de ces avantages sans pour autant en payer le juste prix. Il est normal de vouloir rétablir l'équité. Qui en sont les gagnants? La majorité des citoyens et des citoyennes.
Vous voyez, M. le Président, plutôt que de voir les côtés négatifs comme le fait l'opposition officielle et d'alimenter certains maires et mairesses de ce négativisme non productif, lesquels le transmettent à une certaine partie de leurs populations, ils devraient plutôt honnêtement présenter les bons côtés de la réorganisation municipale; ils auraient dû le faire du temps où ils étaient au gouvernement. Malheureusement, ils n'ont pas eu le courage de le faire, et ils tentent aujourd'hui de miner le travail du gouvernement dans cet important dossier.
Vous voyez, M. le Président, le libellé même de l'interpellation d'aujourd'hui: «Les effets négatifs de la réorganisation municipale pour les citoyens et citoyennes», ce libellé est porteur d'un manque de courage et d'un manque d'information.
M. le Président, il est clair que l'opposition tente par tous les moyens de nuire à cette réforme. Nous l'avons vu depuis quelques semaines avec différentes motions présentées par le chef de l'opposition: motion de censure qui blâmait le gouvernement, motions du mercredi qui blâmaient le gouvernement. Pour les mêmes raisons, il est évident, M. le Président, que l'opposition officielle n'a pas de cause. Le gouvernement arrive à destination avec sa réforme; les citoyens et les citoyennes du Québec en seront les grands gagnants.
Rappelons, M. le Président, d'autres points importants, comme la mise en place d'Infrastructures-Québec, la mise en place d'un pacte fiscal, la signature d'infrastructures Québec-Canada. Voilà toute une série d'éléments positifs qui tranchent avec le négativisme de l'opposition officielle.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bertrand. La parole est maintenant à M. le député de Hull pour les cinq prochaines minutes... Non, M. le député de Limoilou pour les cinq prochaines minutes.
M. Michel Després
M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Un peu pour revenir, tout à l'heure, sur l'aspect de la consultation, ce que je veux dire aux députés ministériels, aux députés de la région de Québec: Les assemblées où les citoyens demandent de l'information, demandent de vous poser des questions, sortez de l'Assemblée nationale, sortez de vos bureaux, sortez de vos suites ministérielles. Que ça soit à Sillery, à Saint-Augustin, à L'Ancienne-Lorette, à Cap-Rouge, à Vanier, pas un député du gouvernement est venu défendre votre rapport Lapointe, à part que vous l'avez fait en conférence de presse ou que vous le faites ici, à l'Assemblée nationale; vous ne l'avez, un, pas fait.
n(10 h 40)n Puis, quand le ministre de la capitale parle de la politique de la chaise vide, il n'a pas arrêté de répéter que les maires n'avaient pas été à la table que la ministre avait créée. Vous êtes où, vous autres? C'est exactement ce que vous faites; vous utilisez la politique de la chaise vide.
Quand la ministre vient nous mentionner Michel David, dans Le Soleil ? on va prendre le même journal, Mme la ministre ? avec l'éditeur, M. Samson qui vient dire: «Tous les députés du Parti québécois et ministres de la région de Québec font bloc derrière Louise Harel, conductrice du rouleau compresseur. On ne pouvait trouver plus triste manifestation de la dérive de la démocratie au Québec.» C'est le même journal, ça, hein?
«Sont-ils des machines à voter des lois silencieuses, des coursroies de transmission des volontés gouvernementales vers leurs concitoyens, sans discernement?» Et là il les mentionne: «Les Jean Rochon dans Charlesbourg, les Paul Bégin dans Louis-Hébert, Agnès Maltais dans Taschereau, Diane Barbeau dans Vanier, Raymond Brouillet dans Chauveau, Mme Carrier-Perreault dans Chutes-de-la-Chaudière, M. Côté dans La Peltrie, M. Simard, suivent aveuglément la ligne de parti. Ils sont alors déconnectés de leurs commettants et sombrent dans l'arrogance qui vient avec l'usure du pouvoir où ils font preuve de lamentable à-plat-ventrisme.» Ça fait que, voyez-vous, Mme la ministre, l'éditeur du journal Le Soleil, le titre: «Les machines à voter», le 6 septembre dernier. Depuis ce temps-là, les députés se sont réfugiés je ne sais pas où, ici, à l'Assemblée nationale; je ne les ai pas vus dans la population. J'ai vu le député de Montmorency, je le sais qu'il l'a fait ? je l'ai dit d'ailleurs ? probablement le seul. D'ailleurs, il a accepté, s'il y a une assemblée publique à Beauport, d'y être présent. C'est le seul; les autres, ils n'ont pas l'air trop, trop à l'aise pour vous défendre, puis je comprends que c'est le seul qui est ici ce matin pour vous défendre, parce que les autres, là, ils ne sont pas là.
Puis, je répète, le 4 octobre, les députés de la région de Québec ont endossé ce rapport-là, hein? Ils ont dit: On va avoir le respect du sentiment d'appartenance. Il y a 13 villes, au lieu de faire 13 arrondissements, il va y en avoir huit. Un drôle de respect de l'appartenance!
Après ça, ils ont dit, hein ? très important ? puis là on va faire parler le ministre de la capitale en ce qui concerne les taxes. Parce que vous avez émis une condition très, très claire. Vous avez dit que, si les fusions municipales entraînent une hausse du compte de taxes ne serait-ce que d'une seule ville de l'agglomération de Québec, il mettrait en cause son appui à la ministre. Ça, là, vous en avez fait une condition. C'est les paroles du ministre, je le cite au texte: «Il n'y aura pas de perdants. Une des conditions sine qua non, c'est qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxes provenant des fusions». Donc, il a voulu rassurer tout le monde. On s'est dit: Comment ils vont faire? Probablement qu'ils vont verser une subvention à la nouvelle ville. Pendant combien de temps? On ne le sait pas, probablement jusqu'aux élections.
Mais, ça, c'est un engagement qu'ils ont pris, là, sur le compte de taxes. Ils ont dit: L'appartenance, on va respecter ça. Déjà là, c'est réglé, là, la loi va être déposée la semaine prochaine, il va y avoir huit arrondissements. Il n'y en aura pas 13, il va y en avoir huit. Donc, un, on n'a pas respecté ça.
Deuxièmement, au niveau de la consultation, on va voir, le gouvernement se lance dans une campagne publicitaire à tour de bras...
M. Cholette: De propagande.
M. Després: La propagande. Puis, moi, quant à ça, vous voulez donner de l'information, on va vous dire: Écoutez, faites-en, de la publicité. Mais, quand c'est le temps de la défendre puis d'aller expliquer aux citoyens puis de les rencontrer, les députés ne sont pas là. Ils ne doivent pas être très, très à l'aise avec ça, ils n'y vont pas.
Moi, quand il y a quelque chose qui se passe dans mon comté, j'y vais. Le député de La Peltrie me disait, voilà pas longtemps: Aimeriez-vous ça que j'aille dans votre comté? Vous êtes le bienvenu. Je suis dans la ville de Québec, en plus. Vous êtes bienvenu, quand vous voudrez. J'ai réglé ça, je n'ai pas de problème à me promener dans les autres comtés; puis, s'ils veulent venir dans le mien, qu'ils viennent, aucun problème.
Mais je veux revenir à l'histoire des taxes, M. le Président, très rapidement, parce que ce n'est pas long, des cinq minutes. À la sortie du Conseil des ministres cette semaine, le ministre de la capitale a dit que, là, il pourrait y avoir des ajustements; qu'il fallait tenir compte d'une forme d'équité. Il y en a qui payaient moins, il y en a d'autres qui payaient plus, donc il a mis la table, là. Ça fait que l'engagement, là, je ne suis plus sûr qu'il va tenir. Il a commencé tranquillement à se tasser, là.
Ça fait que, voyez-vous, là, je commence à comprendre pourquoi ils ne veulent pas se déplacer, là, parce que, entre ce qu'ils ont dit puis ce qui va être la réalité, c'est autre chose. Puis, ils ne pourront pas le faire, M. le Président, geler le compte de taxes, puis, s'ils le font, ils vont le faire avec une subvention déguisée ? notre argent? mais ils ne pourront pas respecter cet engagement-là, et c'est pour ça que le ministre a déjà commencé.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Limoilou. Ça nous amène à Mme la ministre, pour les cinq prochaines minutes.
Mme Louise Harel
Documents déposés
Mme Harel: Alors, M. le Président, je voudrais déposer ce matin copie d'études menées par le professeur universitaire Gilbert Brisson, Ph.D., qui est à l'Université de Chicoutimi et qui a publié deux études, une s'intitulant Les regroupements réduiraient les dépenses des municipalités et la seconde s'intitulant Les regroupements amélioreraient la performance des municipalités.
Alors, M. le Président, il faut se rappeler que le temps d'agir est plus qu'arrivé. L'Assemblée nationale du Québec, est-ce qu'elle a le droit, à l'instar de toutes les autres législations provinciales, de procéder à ces changements dans les institutions locales? La réponse, c'est oui. La réponse nette, la réponse évidente, c'est oui. Le fait est que, ici même, dans ce salon bleu, il y a eu 16 législations adoptées depuis 40 ans pour effectuer des regroupements de 90 municipalités, et, sur ces 16 législations adoptées ici, il y en a eu 13 qui l'ont été par un gouvernement libéral.
Une voix: Ah tiens! Tiens donc!
Mme Harel: Et je pense en particulier à ce regroupement constitué de sept municipalités pour créer la ville de Beauport actuelle...
Une voix: Volontaire.
Mme Harel: ...et une de ces municipalités, Saint-Michel-Archange, refusait de se joindre à ce regroupement. Comme je vous ai dit, il y en a toujours une qui veut puis une qui ne veut pas. Alors, la législation en matière de regroupement, au Québec comme ailleurs, a toujours été la règle plutôt que l'exception, la règle avec les gouvernements libéraux qui étaient fidèles à eux-mêmes ? pas avec l'opposition actuelle ? M. le Président...
Alors, dans le cas de la municipalité de Saint-Michel-Archange, à qui un gouvernement libéral a imposé le regroupement et qui constitue maintenant la municipalité de Beauport, le sous-ministre de l'époque était l'actuel député de Vaudreuil.
Une voix: Ah bon?
Mme Harel: Oui.
Une voix: Ah!
Mme Harel: M. Marcoux, l'actuel député de Vaudreuil, était le sous-ministre de M. Goldbloom, qui avait procédé à ces regroupements. M. Goldbloom, sa législation prévoyait 40 regroupements dont Jonquière, Kénogami, Arvida et d'autres municipalités. Alors, la règle, c'est des regroupements par législation, ce que l'opposition appelle «regroupements forcés» et ce qu'ils ont abondamment fait lorsqu'ils étaient au gouvernement.
Pourquoi, M. le Président? Parce que les délimitations internes, c'est des délimitations de municipalités. Les municipalités n'ont pas un droit à disposer d'elles-mêmes. Le droit à l'autodétermination, reconnu en droit international, est le droit à l'autodétermination des peuples, pas des villes, partout dans le monde. Pourquoi? Parce que, finalement, les délimitations internes doivent évoluer selon les défis que chaque époque a à relever.
Il est bien évident, à l'époque, comme je le disais, où il y avait des puits artésiens, des fosses septiques, des dépotoirs et où finalement les gens travaillaient là où ils résidaient, on pouvait penser qu'un nombre de municipalités pouvaient s'additionner. Alors que maintenant, quand les gens ont à quitter leur domicile et à y revenir le soir, donc se transporter soir et matin pour aller à l'extérieur chercher leur emploi, comme c'est le cas, M. le Président, dans l'ensemble des grandes agglomérations urbaines, il est évident qu'on ne peut pas laisser porter sur les épaules des seuls contribuables qui fournissent les services le poids de ces services à fournir, puisqu'ils bénéficient à l'ensemble du territoire, qui est plus grand que celui des limites de la ville seulement. Ça, ça s'appelle des agglomérations urbaines.
Des agglomérations urbaines, dans les pays industrialisés, il y a un club de 378 agglomérations métropolitaines. Au Québec, on en compte six. Ce n'est pas une invention du gouvernement ni de Statistique Canada; ça, ça signifie que Montréal, Québec, Hull, Chicoutimi, Sherbrooke et Trois-Rivières sont, au sens des définitions de l'Organisation de coopération et de développement économique, qui est le club des 29 pays industrialisés... ces six grands territoires constituent des agglomérations métropolitaines. Ça signifie un même bassin d'emploi, ça signifie un même espace économique, ça signifie un même destin; ça signifie qu'une partie du sort des citoyens dépend de l'ensemble. Et ça, ça signifie, M. le Président, la nécessité de cesser de favoriser la concurrence entre les municipalités.
n(10 h 50)nLe Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. M. le député de Bellechasse, pour une période de cinq minutes.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir ce matin concernant ce sujet extrêmement important dont on parle depuis des années, des décennies, au Québec.
Moi, je suis étonné de constater qu'après en avoir parlé pendant aussi longtemps si peu de choses aient été réalisées jusqu'à maintenant. Je prends comme référence le monde scolaire où, au début des années soixante, on avait 1 700 commissions scolaires locales et où, aujourd'hui, on se retrouve avec quelque chose comme 72 commissions scolaires sur l'ensemble du territoire du Québec. Il y a eu une évolution, et je pense que personne ne s'en plaint, tout le monde trouve que c'est tout à fait normal.
Dans le monde municipal, pour des raisons souvent de petit royaume que certains élus ses sont constitués ? et non pas généralement pour l'intérêt public ? la résistance a été beaucoup plus forte, tellement forte que le nombre de municipalités aujourd'hui, au Québec, tourne autour de 1 600.
J'ai pu observer de très près ces difficultés, ayant été moi-même dans le monde municipal pendant 14 ans. J'ai eu l'occasion de vivre de près de grandes réformes, comme celle, par exemple, où on a vu l'apparition des municipalités régionales de comté, au début des années quatre-vingt.
Tous les ministres des Affaires municipales qui se sont succédé depuis 40 ans... il y en a eu 17 à partir de M. Dozois, de l'Union nationale, jusqu'à Mme Harel, députée de Maisonneuve, l'actuelle ministre. Tous les ministres qui se sont succédé ont rêvé d'être capables de faire une réforme majeure dans le monde municipal, comme il y en avait eu dans le monde scolaire. Tout le monde y a rêvé, certains se sont essayés et personne n'a réussi. Et là, maintenant, on voit poindre à l'horizon, dans un laps de temps relativement court, que ça va changer, que ça va se faire.
M. le Président, je disais qu'on en parle depuis longtemps. Je voudrais citer, par exemple, quelqu'un qui a été maire de la ville de Québec pendant 12 ans, un personnage non pas près du Parti québécois mais plutôt de nos amis d'en face, un certain Gilles Lamontagne, qui en 1974 ? donc il y a 26 ans ? suggérait de liquider la CUQ, la Communauté urbaine de Québec, et de faire en sorte qu'on regroupe les municipalités qui en faisaient partie, pour être plus efficace au niveau économique. C'est donc quelqu'un qui ne peut pas être taxé d'être partisan du côté du gouvernement du Parti québécois. Ça, c'était en 1974.
En 1991, j'aimerais vous citer les propos d'un éditorialiste du journal Le Soleil qui était, je pense, presque un prophète à l'époque, vous allez voir, par les propos qu'il tenait. C'est M. Raymond Giroux, dans Le Soleil du 14 janvier 1991. Il dit ceci, et je cite: «Les maires de la Communauté urbaine de Québec ont réussi une nouvelle fois, la semaine dernière, à démontrer publiquement pourquoi la région de la capitale s'acharne à végéter dans d'interminables querelles byzantines. Sur 13 municipalités, il y en a 12 de trop.» Alors, si ce n'est pas du regroupessment, ça... C'est tout à fait clair. Et il poursuit:
«Parler de rassemblement des forces et des énergies à Québec ressemble fort à crier dans le désert. Les politiciens provinciaux...» Qui était au pouvoir en 1991? Ce n'est pas nous, c'étaient nos amis d'en face, dont l'actuel député de Limoilou. Alors, je poursuis. «Les politiciens provinciaux, ultimes décideurs en l'occurrence, défendent avant tout leur pâturage local, donc les municipalités.
«Mais, à partir du constat qu'il ne faut pas attendre aucun geste responsable des différentes municipalités dans ce domaine, il revient au gouvernement d'agir». Et je poursuis ? et c'est là la prophétie de M. Giroux ? il disait: «La bataille serait rude.» Serait rude, effectivement, elle l'est. «Elle se déroulerait sur un tableau de démagogie sans doute jamais vue dans la région.» C'est pas mal ce qu'on vit, n'est-ce pas? «Il faut compter sur l'intelligence des citoyens pour réagir contre toute vision passéiste et rétrograde à la vue du déclin des coûts urbain qu'engendrent le statu quo.» Et, en terminant, il disait: «Il n'existe aucune raison valable pour justifier l'existence de pouvoirs politiques concurrents sur un espace aussi restreint. Tous connaissent les méfaits de l'étalement et de la concurrence fiscale; il faut réagir.» C'est ce que disait l'éditorialiste du Soleil à l'époque, et je cite Raymond Giroux, le 14 janvier 1991. Qu'il était réaliste, ce monsieur! Parce que c'est ce qu'on vit à l'heure actuelle.
Alors, M. le Président, il est important de dire aussi, pour le bénéfice des citoyens, qu'est-ce qu'ils veulent: meilleurs services au meilleur coût, et de les rassurer que les surplus ou encore les dettes générées par les différentes municipalités, accumulées par ces municipalités, eh bien, devraient continuer d'êtres assumées par ces municipalités. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le député de Limoilou.
M. Cholette: Non.
Le Président (M. Vallières): Cette fois-ci, M. le député de Hull, pour un cinq minutes.
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci. Ce qu'il ne faut pas entendre! On se fait accuser par le gouvernement d'être d'arrière-garde, d'être une cause d'arrière-garde, d'une bataille d'arrière-garde, et on accuse les citoyens d'être d'arrière-garde. On nous dépose des études qui datent de cinq ans, on nous cite des éditoriaux qui datent de 10 ans, et la ministre fait état des regroupements qui datent de 25 ans et de 35 ans. Alors, voilà pour la nouveauté gouvernementale.
Mais, aujourd'hui, dans les quelques minutes qui me restent, je voudrais vous parler des machines à voter, ceux qui tombent à plein ventre devant le gouvernement du premier ministre et de sa ministre des Affaires municipales, et on va commencer en parlant du député de Bertrand, qui a un poste très important au sein de l'appareil gouvernemental puisqu'il est adjoint, donc mérite une prime sur son salaire pour être adjoint parlementaire ? pas à n'importe qui ? à la ministre des Affaires municipales.
Mais il est avant tout député, le député de Bertrand, et le député de Bertrand, dans son comté, il se fait brasser un petit peu, parce que les gens de son comté semblent lui dire que ça ne va pas très bien. Le député de Bertrand a oublié que son premier devoir, c'était de représenter les citoyens chez eux. Le député de Bertrand, d'ailleurs, recevait des remontrances de la part du maire de Sainte-Agathe-Nord, le 16 octobre 2000, en disant clairement, dans une lettre à la ministre «que les citoyens et citoyennes de la municipalité de Sainte-Agathe-Nord s'opposent à la fusion forcée, avec des raisons importantes, notamment...» parce que le député de Bertrand avait donné Sainte-Agathe-Nord à la ville de Sainte-Agathe-des-Monts. Alors, il lui avait livré sur un plateau d'argent cette municipalité.
Et la lettre du maire de Sainte-Agathe-Nord, M. Robert Champagne, se poursuit en disant: «Nous protestons fermement contre la façon cavalière de votre ministère qui a informé les soussignés et les membres du conseil en dernier lieu sur le projet de décret de fusion. Nous sommes les élus de la population et entendons nous faire respecter tant que nous le serons.»
Et le député de Bertrand a fait quoi là-dedans? Bien, il n'a rien fait. En fait, il s'est couché à plein ventre devant l'appareil gouvernemental, tellement qu'il est en train de défendre des études qu'il ne comprend sûrement pas, puisqu'il a reçu une nouvelle lettre, une lettre ouverte du maire de Sainte-Agathe-Nord qui lui fait des remontrances quant à la compréhension qu'il a d'une étude de regroupement avec la municipalité de Sainte-Agathe.
Le député de Bertrand ferait des erreurs de 2,5 millions de dollars sur un total de 11 millions quant à la fusion, et je vous lis simplement une ligne de cette lettre assez sévère, merci: «Est-ce donc par négligence ou par calcul politique obscur que vous avez omis ? on parle du député de Bertrand ? de faire honneur aux responsabilités qui vous ont été confiées avant de prendre une décision de la plus haute importance impliquant l'avenir de la principale ville de votre comté?» La réponse du député de Bertrand, c'est: Je me suis couché, j'ai fait le mouton et j'ai décidé de voter avec le gouvernement. Des informations dans L'Information du Nord, du 21 octobre, nous disent ceci: «La population de Sainte-Agathe-Nord est en colère. Près de 150 personnes ont manifesté majoritairement leur désaccord face à la décision de Québec d'imposer la fusion. "Cousineau nous a trahis", dénonçait un citoyen avec sa pancarte à l'entrée de l'hôtel de ville.» Et on poursuit: «Le Conseil de Sainte-Agathe-Nord a vivement réagi à l'annonce de la fusion imposée par Québec avec Sainte-Agathe-des-Monts. Le maire pointe du doigt le député du comté de Bertrand qui ne les a pas défendus: « Il ne nous a jamais donné de raisons valables pour justifier cette fusion. Pourquoi Sainte-Agathe-Nord et pourquoi pas Ivry-sur-le Lac, par exemple", questionne le maire?" On a bafoué la démocratie, c'est aux citoyens de décider de leur sort." »
Et quand vient le temps de parler à l'Assemblée nationale, eh bien, le député de Bertrand se lève et vote avec le gouvernement sur des motions aussi simples et aussi logiques que celles-ci:
«Que l'Assemblée nationale garantisse le droit des citoyens de chaque municipalité de choisir, par référendum, s'ils acceptent ou non de fusionner leur municipalité.» Qu'est-ce que le député de Bertrand a fait? Il s'est levé et a voté contre ça, contre le fait que les citoyens se prononcent.
À la question: «Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois qui procède sans mandat dans le dossier des fusions municipales», qu'est-ce que le député a fait? Il a voté contre cette motion-là en prétendant qu'il avait un mandat au Parti québécois, alors qu'on sait que c'est faux. Et, finalement, le député de Bertrand a fait quoi?
À la question suivante: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il divulgue aux citoyens concernés toutes les informations détenues sur les impacts des fusions municipales forcées» ? ce n'était pas compliqué, ça, qu'on donne l'information aux citoyens ? qu'a-t-il fait, le député de Bertrand? Bien, il s'est levé pour cacher l'information. Il a voté contre la résolution qui fait en sorte qu'on mettrait devant tous les citoyens toute l'information pertinente.
Est-ce qu'on appelle ça un député qui protège les siens? Non, moi, j'appelle ça un député qui se couche devant l'appareil gouvernemental, qui brime le droit démocratique aux citoyens de s'exprimer et surtout qui tente de cacher la réalité aux citoyens. Merci, M. le Président.
n(11 heures)nLe Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Hull. Mme la ministre, pour les cinq prochaines minutes.
Mme Louise Harel
Mme Harel: M. le Président, s'il y a un exemple à ne pas choisir dans ceux que présente le député de Hull, c'est bien le cas de figure de Sainte-Agathe-Nord. M. le Président, j'ai ici l'étude de faisabilité d'un regroupement municipal réalisée par le Groupe Roche, bien connu dans le monde municipal, bien connu certainement du député de Hull, et cette étude qui démontre une baisse du compte de taxes de tous les contribuables des municipalités concernées par un regroupement entre Sainte-Agathe et Sainte-Agathe-Nord, y compris les contribuables de Sainte-Agathe-Nord... Baisse du compte de taxes, et cette étude, M. le Président, le maire de Sainte-Agathe-Nord, que cite le député de Hull, a refusé de rencontrer le Groupe Roche pour se la faire présenter. Alors, cette étude, qu'est-ce qu'elle démontre? Que, pour les gens de Sainte-Agathe-Nord, la diminution du compte de taxes est, en l'an 2000, de 20 %, en 2001, de 21 %, en 2002, de 22 %, en 2003, de 20 %.
M. le Président, le député de Hull peut se rassurer, il aura aussi les projections lorsque les décisions seront prises dans le cas de Sainte-Agathe-Nord. Le gouvernement a pris la décision et a adopté un décret à l'effet de regrouper les municipalités de Sainte-Agathe, Sainte-Agathe-Nord, puisque c'étaient là des municipalités ciblées dans le cadre du volet I de la Politique de consolidation des communautés locales rendue publique en 1996 suite à une tournée d'un groupe de travail mis en place par mon prédécesseur, présidé par nul autre que le très connu ancien maire de Sherbrooke. M. le Président, est-ce que vous pourriez faire cesser...
M. Simard (Montmorency): M. le Président, question de règlement. On n'est pas au cirque, on est dans une interpellation. Pourriez-vous rappeler à l'ordre le député de Hull qui n'arrête pas d'interrompre la ministre, s'il vous plaît?
Le Président (M. Vallières): S'il vous plaît, M. le député de Hull, je vous inviterais à vous servir de vos droits de réplique pour intervenir. Mme la ministre.
Mme Harel: Alors, je termine, M. le Président, en vous disant qu'en 1996 le groupe de travail chargé d'identifier les municipalités ciblées dans le cadre du volet Paroisses, villages, cantons a ciblé les municipalités de Sainte-Agathe-Sud, Sainte-Agathe-des-Monts et Sainte-Agathe-Nord, suite à quoi une étude de regroupement a été faite, le maire de Sainte-Agathe-Nord ayant toujours refusé que cette étude lui soit présentée, pour qu'il n'ait pas à la fournir à ses citoyens qui auraient été avisés qu'une importante diminution de taxes, de 20 % en moyenne, M. le Président, est donc souhaitable et possible.
Alors, j'ai ici une lettre de Sainte-Agathe-des-Monts, signée par le maire, Pierre Circé, de Sainte-Agathe-des-Monts, et cette lettre dit ceci, notamment que ce regroupement aurait pour effet de permettre à la nouvelle municipalité de poursuivre le travail de relance et de revitalisation socioéconomique déjà amorcé depuis janvier 1999, étant entendu que déjà Sainte-Agathe-Sud et Sainte-Agathe-des-Monts ont été regroupées et que ce regroupement se fera dorénavant avec également Sainte-Agathe-Nord.
Je voudrais, M. le Président, féliciter, féliciter le député qui a pris ses responsabilités avec courage, avec détermination, avec ténacité, avec le sens des responsabilités qu'on lui connaît. Et, vous voyez, j'ai reçu une lettre cette semaine qui est signée par la mairesse de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, qui se trouve également dans le comté du député de Bertrand, et Mme Violette Gauthier, mairesse de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, me dit ceci: «Sans intervention, il était assuré que jamais nous n'aurions réussi à nous entendre. Comme je vous l'ai déjà mentionné, l'ordonnance émise a pour effet de corriger une erreur historique en mettant fin à une situation pénalisante et injuste pour la population que je représente. Le sens de l'équité vous honore. Nous vous appuyons totalement dans votre réforme et vous encourageons à poursuivre dans la même voie.» M. le Président, des lettres comme celle-là, le député de Bertrand en a reçu.
Imaginez une municipalité, Sainte-Marguerite, qui compte 2 500 habitants, et la municipalité de ville de L'Estérel, qui en comptait 108, aussi ciblées, comme Sainte-Agathe-Nord que vous avez citée, dans le volet I de la Politique de consolidation des communautés locales. Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson avait à payer l'entièreté des coûts d'entretien de la voirie locale, alors que L'Estérel, bien nantie sur le plan foncier, ne partageait aucune de ces dépenses. Alors, M. le Président, il y aura de l'équité fiscale...
Le Président (M. Vallières): Merci.
Mme Harel: ...il y aura de l'équité sociale grâce au député de Bertrand.
Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre, c'est ce qui complète votre cinq minutes. M. le député de Montmorency.
M. Jean-François Simard
M. Simard (Montmorency): M. le Président, alors, je tiens à vous dire à quel point je suis heureux d'être parmi vous ce matin dans le cadre de cette interpellation portant sur les regroupements municipaux, et tout particulièrement heureux d'être avec la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui, à mon sens, est une des grandes dames de la politique québécoise et qui pilote présentement une des plus importantes réformes qu'on ait connues depuis la Révolution tranquille.
Alors, le député de Hull, tout à l'heure, se demandait: Mais pourquoi? Pourquoi devrait-on procéder à des regroupements municipaux? Alors, abordons de plein fouet ce sujet et essayons de le cibler pour la région de Québec que j'ai l'honneur, notamment, de représenter à l'Assemblée nationale comme député du comté de Montmorency. D'abord, pourquoi? Parce que, à mon sens, il s'avère essentiel d'en arriver le plus rapidement possible à une meilleure administration publique municipale. Dans une région comme la nôtre, qui regroupe les 13 villes de la CUQ, à peu près 500 000 habitants, il y a 13 municipalités. Il y a donc 13 maires avec 13 conseils rémunérés. Il y a, dans toutes les villes, un directeur général. Il y a, dans toutes les villes, un greffier. Il y a, dans la plupart des villes, un directeur général adjoint; dans plusieurs villes, un directeur des travaux publics; dans plusieurs villes, un directeur des loisirs; dans plusieurs villes, un directeur des ressources humaines. Et je pourrais continuer la liste comme ça, j'ai seulement cinq minutes, je m'arrête. Mais tout ça pour vous dire qu'on a 13 fois trop de structures municipales à Québec et qu'il y a matière de rationaliser. On peut faire mieux avec les impôts municipaux que nous payons, et voilà un des objectifs qui nous animent, et je suis fier donc de défendre ce point de vue là.
Un deuxième élément qui est très important à retenir, c'est celui de l'équité fiscale. Moi, je suis comme le député de Limoilou, je représente les citoyens de la ville de Beauport, et la ville de Beauport, depuis plus de 20 ans, paie plus de taxes municipales per capita que la ville de Sainte-Foy. Deux villes qu'on appelle des villes jumelles: à peu près la même population, à peu près la même dimension de ville, à peu près le même nombre de rues, bref à peu près, M. le Président, les mêmes dépenses, que ce soit à Beauport ou à Sainte-Foy. Mais comment se fait-il que depuis 20 ans les gens que je représente à l'Assemblée nationale paient plus de taxes qu'à Sainte-Foy? Est-ce que c'est parce que nos édiles et nos élus municipaux sont moins bons que ceux de Sainte-Foy? Pas du tout. Pas du tout, c'est parce que nous avons les mêmes dépenses, mais nous n'avons pas les mêmes revenus.
Pensez seulement à l'Université Laval: 8 millions d'«en lieu» de taxes payés chaque année par l'Université. Où ça va? Ça ne va pas sur la planète Mars, ça va dans les goussets de la seule ville de Sainte-Foy et un petit peu pour la ville de Sillery. Ça ne va pas aux gens de l'ensemble de la région de Québec, alors que vous savez très bien comme moi qu'il y a des jeunes de Beauport, comme de Charlesbourg, comme de Vanier, qui vont à l'Université Laval. La même chose ? on pourrait multiplier les exemples ? l'aéroport de Québec, à Québec, il est où? Il est à Sainte-Foy. Et où vont les «en lieu» de taxes générés par l'aéroport de Québec? Ils ne vont pas à la ville de Québec ni à l'ensemble de la région, pour l'instant, ils vont seulement à la ville de Sainte-Foy. Donc, il y a un problème en termes d'équité fiscale.
Moi, ma maison, que j'ai achetée récemment, elle vaut ? avec ma conjointe ? elle est évaluée à 74 000 $. Un de mes amis vient de s'acheter récemment une maison à Sillery qui est évaluée à 200 000 $. La mienne est évaluée 74 000 $, à Beauport, la sienne, à Sillery, 200 000 $, et à 100 $ près on paie le même compte de taxes. Vous allez me dire que, ça, c'est de l'équité fiscale, M. le Président? À mon sens, ça n'en est pas. Et il y a un ménage important à faire là-dessus, et c'est ce que le gouvernement projette de faire.
L'autre truc, M. le Président ? parce que le temps file, et je veux amener un certain nombre d'éléments ? ce qui nous distingue des libéraux, chez nous, au Parti québécois, c'est qu'on a une autre philosophie de développement pour la région de Québec. Pour nous, Québec, c'est plus que la simple addition de 13 municipalités une en arrière des autres. Québec forme un tout en soi qui est cohérent, et on se doit de s'occuper de cette région comme un tout. Et, si les députés de la capitale nationale ne s'occupent pas de la région, qui va le faire? Qui va le faire? C'est notre responsabilité, et nous l'assumons.
Il y a deux grandes ? dans le fond ? logiques qui s'opposent dans le débat actuel. Il y a une logique que j'appellerais de perspective et une logique de compromis. La logique de compromis, c'est: on demande aux maires actuels quelle est la différence entre Québec d'aujourd'hui puis Québec il y a 25 ans; ils vont vous dire, à quelques compromis près: La région de Québec, c'est la même affaire qu'il y a 25 ans, puis ça sera la même chose dans 25 ans que maintenant. Pas de changement, toujours pareil. Nous, la philosophie qui nous anime, c'est une philosophie de perspective: le monde change, le monde évolue. La compétition, de nos jours, elle n'est plus entre les villes d'une même agglomération, elle est entre les agglomérations elles-mêmes. C'est Milan, en Italie, qui est notre compétiteur, c'est Tours, en France, qui est notre compétiteur, c'est Boston, aux États-Unis. Mes voisins de Charlesbourg, ce ne sont pas mes compétiteurs, ce sont mes alliés. C'est pour...
n(11 h 10)nLe Président (M. Vallières): Très bien. Ceci termine votre cinq minutes, M. le député de Montmorency. Je vais maintenant passer la parole à M. le député de Limoilou. M. le député de Limoilou.
Des voix: ...
M. Michel Després
M. Després: ...oui, parce que mon temps coule, j'espère que vous allez me rajouter mes secondes, étant donné que le député de Montmorency...
Une voix: ...
M. Després: Le député de Montmorency a demandé tantôt le respect, là, au niveau de l'interpellation. Son temps est fini, M. le Président. Merci beaucoup.
M. le Président, je reprendrai un petit peu au départ l'exemple que la ministre aime bien citer, que même le premier ministre a cité en Chambre la semaine dernière, qui est celui de la ville de Beauport, hein, sur la fameuse loi spéciale en 1976. Mme la ministre, je pense que votre exemple, vous devriez l'expliquer au complet. Effectivement, vous avez raison, oui, il y a eu une loi spéciale en 1976. Ce que vous ne dites pas, c'est que, dans les sept villes qui étaient concernées, il y en a six qui étaient consentantes, dont les conseils municipaux étaient, par résolution, un, d'accord. Et il y a deux municipalités, la ville de Sainte-Thérèse et la ville de Villeneuve, qui ont voulu aller plus loin dans le processus, elles ont dit: On va consulter nos citoyens par référendum. Les résultats ont été positifs, et la ville de Saint-Michel-Archange... avec tout le respect, parce que, à cette époque, on la reconnaissait comme une municipalité, mais c'était en même temps une institution psychiatrique, Mme la ministre. Donc, vous comprendrez qu'effectivement ça a pris une loi spéciale, parce que la ville de Saint-Michel-Archange avait le choix d'aller entre Québec et Beauport. Ils auraient été mieux, effectivement, aller à Québec.
Mais je pense que, de façon très majoritaire, quand tous les conseils de ville autres, les six autres, étaient d'accord et que deux municipalités sont allées par référendum... je pense qu'il y avait majorité, Mme la ministre, je pense... ce qui n'est pas le cas dans la région de Québec, parce que, dans les 13 que vous voulez fusionner, je n'ai pas vu une résolution d'aucun conseil de ville puis je n'ai pas vu aucun comité de citoyens pour le oui, sur les fusions, encore, Mme la ministre. Je pense qu'il y a une grande différence. Ça fait que quand vous donnez l'exemple, surtout celui-là dont vous vous servez abondamment dans la région de Québec, j'ai l'impression que l'exemple est un petit peu tordu, quant à moi, M. le Président.
Maintenant, je viens d'écouter le député de Montmorency qui vient de dire: Écoutez, nous, on a des objectifs, hein. On veut une meilleure administration publique, puis il y a 13 villes, puis effectivement il y a du monde, puis ça coûte cher, puis il y a des directeurs généraux, puis il y a des directeurs des ressources humaines... Pensez-vous, demain matin... et j'aimerais poser la question au député, si, lui, il a vu les études, parce que la ministre cache ses études, puis, à part lui, tous les députés de la région se cachent quand c'est le temps de rencontrer les citoyens: C'est quoi, le coût de l'économie? C'est ça, quand les gens disent «le droit à l'information», on va sauver quoi, M. le député, au bout de la ligne? La loi n° 124 vient protéger tout le monde. Ils vont faire probablement un programme de départs, hein? Il va falloir racheter des années de service à ces gens-là, il va y avoir un coût aussi associé, comme vous l'avez fait dans la fonction publique, pendant qu'on court après les médecins puis qu'on court après les infirmières à l'heure actuelle. Mais c'est un exemple différent. Ceci étant dit, c'est que vous n'avez jamais démontré qu'il y aurait une économie.
Le rapport Bédard, il a dit quoi? M. Bédard est venu en commission parlementaire sur le projet de loi de la création de la Communauté métropolitaine, il a réussi à se contredire trois fois. Il a réussi à se contredire trois fois. Parce qu'il avait dit dans son rapport qu'avant toute réorganisation de structures il fallait modifier le Code du travail aux articles 45 et 46. Il avait dit dans son rapport qu'il n'y avait pas d'économies à faire. Il l'a dit publiquement. Quand est arrivé le temps d'arriver en commission ? parce que là le processus est avancé, puis M. Bédard a des mandats du gouvernement, hein, au ministère de la Santé et des Services sociaux ? il est venu dire tout d'un coup... Je lui ai demandé la question: Est-ce qu'il y a des économies? Là il est venu nous dire que oui, alors qu'il s'était penché pendant des mois de temps... puis il a déclaré après qu'il n'y avait pas d'économies.
Puis, après ça, il est allé dire: Voyez-vous, la région de Québec, on voit ça en quatre, cinq villes. Puis là, quand est venu le temps, la ministre l'a fait parader, là il est venu dire... Non, je lui ai posé la question, M. le Président: Êtes-vous d'accord avec le projet de la ville de Québec? Il m'a dit oui. Tout d'un coup, là, sa position, pendant qu'il s'était penché là-dedans pendant un an de temps puis qu'il a fait un rapport volumineux avec une centaine de recommandations... sa position, elle avait changé tout d'un coup. Je peux vous dire que M. Bédard n'était pas très, très à l'aise quand il est venu comparaître en commission.
Mais, pour revenir au député de Montmorency, moi, j'aimerais bien qu'on me démontre, M. le député, elles sont où, les économies. La création de la nouvelle ville va créer combien d'économies? Et, si ça crée des économies, ça va même améliorer le compte de taxes du citoyen, hein...
Une voix: Qui vote, qui décide.
M. Després: ...qui décide, qui vote. Puis j'ai hâte de le voir où ça va avoir lieu.
Par contre, vous avez réussi... parce que, dans un poste de radio, à CBV radio, vous avez déclaré, M. le député, et je vous cite: «J'ai conseillé à Louise de ne pas procéder au regroupement de l'île d'Orléans, où il y a six municipalités.» Ça fait que je vous écoute, là, tout d'un coup, puis votre raisonnement... puis je sais que vous allez me parler que c'est agricole, que ça a un patrimoine culturel particulier. Il y a bien du monde qui a un patrimoine culturel très important, en commençant par la ville de Beauport qui est une des plus anciennes villes. Ceci étant dit, M. le Président, je vois le fil découler, il va falloir que je revienne, mais on ne nous a jamais démontré quel était le coût des économies et pourquoi l'île d'Orléans a été exemptée. Je reviendrai tout à l'heure.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Limoilou. Mme la ministre.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Il n'y a pas un coût, il y a des économies. Et les objectifs du gouvernement sont à la fois de développer l'économie et de réussir aussi à faire des économies. Alors, vous voyez, je cite l'étude réalisée par l'universitaire Gilbert Brisson et qui dit ceci: «Considérant les résultats globaux de notre recherche, il est difficile de ne pas croire au succès des municipalités qui se sont regroupées. En effet, pour la majorité des municipalités concernées, l'expérience de regroupement a été l'occasion d'atteindre la performance. Secundo, les municipalités regroupées se sont distinguées par des taux de croissance de population très nettement distincts des comparables. Ensuite, pour ce qui est des dépenses d'opération, on a pu vérifier que leur taux de croissance dans les municipalités regroupées a été inférieur aux autres. Enfin, notre recherche a permis d'établir que les municipalités regroupées ont consenti à leurs employés des augmentations salariales moins généreuses que leurs comparables», et ainsi de suite, M. le Président. Et ça, ce n'est pas comme d'autres papiers d'universitaires qui prétendent à des choses, c'est une étude menée sur 290 regroupements qui se sont déroulés au Québec au fil des dernières décennies.
M. le Président, je rappelle que l'objectif du gouvernement, ce n'est pas de faire des regroupements, c'est de faire du développement. Alors, le gouvernement dit: Le statu quo n'est plus acceptable, mais le mur-à-mur ne l'est pas non plus. Il n'est pas l'intention du gouvernement de faire du mur-à-mur. Ce que l'opposition prétend, c'est qu'il ne faut pas de regroupements nulle part. Nous, on ne dit pas qu'il en faut partout.
Le cas de l'île d'Orléans est un bon exemple. M. le Président, l'île d'Orléans est zonée agricole à 91 %, et donc c'est la Loi de la protection du territoire agricole qui s'applique. Et, en plus, depuis 25 ans, elle est également au patronage de la Loi sur les biens culturels. Et donc, ce n'est pas juste que c'est un patrimoine, c'est une Loi sur les biens culturels qui s'applique sur un territoire qui est celui de l'île d'Orléans. Alors, est-ce qu'il nous faut faire des regroupements à tout prix partout? Non, il nous faut faire des regroupements là où les conditions de développement l'exigent.
Et je voudrais citer un éditorial publié dans le journasl La Presse suite à la publication du rapport de M. Bernard, à Montréal, éditorial signé par Alain Dubuc et qui dit ceci: «Dans une société mondialisée où les activités humaines transcendent les frontières ? imaginez-vous, là, il n'y a déjà pas de frontières entre les États-Unis, le Canada, le Québec et le Mexique, et éventuellement il n'y en aura plus du tout entre les deux Amériques, de la Terre de Feu à la terre de Baffin ? les villes joueront un rôle de plus en plus essentiel comme lieux d'innovation, comme pôles économiques, comme outils d'identification sociale et culturelle.» Pensez-vous, M. le Président, que ce rôle essentiel peut être joué quand les villes sont organisées pour se concurrencer entre elles au sein d'un même territoire? Je vous donne l'exemple, Rive-Sud de Montréal: 12 corps policiers, 22 brigades d'incendie, huit usines d'approvisionnement en eau potable, neuf usines d'épuration d'eaux usées, 23 parcs industriels, dont une bonne majorité des terrains de ces parcs industriels sont encore vacants, et 75 ententes intermunicipales.
Il est évident que la réalité est toujours plus importante que la fiction. Alors, la réalité, c'est que les enjeux de notre époque transcendent les territoires trop étroits des municipalités. Donc, on a vu multiplier les ententes intermunicipales, les régies intermunicipales au cours des années, des centaines et des centaines et des centaines. La ville de Sherbrooke, le maire me disait signer 52 ententes intermunicipales qui exigent de lui le plus gros de son énergie. Pensez-vous que l'énergie d'élus doit être investie à signer ou à négocier des ententes plutôt qu'à développer? D'autant plus que les citoyens ne s'y retrouvent pas, M. le Président, dans ces milliers de régies, d'ententes intermunicipales où il n'y a pas de reddition de comptes, il n'y a pas d'imputabilité démocratique directe, il n'y a pas de transparence. Le citoyen ne peut pas demander des comptes, il n'élit pas au suffrage universel les élus de... Le cas de la STCUQ en est un bon exemple, il n'élit pas des gens qui ont directement des comptes à lui rendre.
n(11 h 20)n Alors, M. le Président, il est bien évident qu'il y a absence de dialogue entre l'opposition et le gouvernement parce que l'opposition a choisi de se camper dans une position...
Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. M. le député de Bertrand.
M. Claude Cousineau
M. Cousineau: Merci, M. le Président. M. le Président, il faut à ce moment-ci se poser certaines questions sur la vision de l'opposition officielle et de son député de Hull concernant l'important dossier de la réorganisation municipale. Quelle est réellement leur position? À qui veulent-ils plaire? Pourquoi n'ont-ils rien fait durant le temps, disons, qu'ils ont passé au pouvoir? Pourquoi ne prennent-ils pas en considération les positions de Claude Ryan ou du maire de Sherbrooke, M. Perrault, qui, eux, appuient la ministre dans ce dossier? Pourquoi ne prennent-ils pas en considération la position des maires des 92 villes de centralité, lesquels appuient le livre blanc déposé par la ministre au printemps dernier? Pourquoi ne prennent-ils pas en considération la position des maires des six villes-centres, lesquels appuient aussi la ministre? Pourquoi ne prennent-ils pas en considération la position des maires des 25 villes d'agglomération, lesquels aussi appuient la ministre? Pourquoi ne prennent-ils pas connaissance de l'étude de M. Gilbert Brisson, docteur à l'Université du Québec à Chicoutimi, laquelle démontre que les regroupements amélioreraient la performance des municipalités? Pourquoi font-ils fi des succès qu'ont engendrés des regroupements par le passé, comme, par exemple, la ville de Laval? Pourquoi ont-ils peur de doter le Québec de structures municipales fortes, capables de concurrencer les autres villes d'Amérique du Nord et des pays industrialisés? Pourquoi ont-ils peur que le Québec sorte fort de cette réorganisation?
M. le Président, toutes ces questions ne trouvent pas réponse chez les libéraux de Jean Charest, parce qu'ils savent que le gouvernement actuel, avec sa ministre des Affaires municipales, est en train de réussir là où ils ont lamentablement échoué par le passé. Leur négativisme à outrance et leur immobilisme du passé, axés sur le statu quo, ont malheureusement cristallisé leur esprit, voire même leur jugement. Il suffit de lire les extraits des débats, les interventions en Chambre, les libellés des motions et des interpellations de l'opposition officielle pour constater que tout tourne autour des mêmes points et de la même question. Cette question: Comment peut-on se faire du capital politique?
M. le Président, ils sont malheureusement tombés dans la démagogie et dans les discours faciles en fredonnant aux citoyens et aux citoyennes les mêmes refrains: Vos taxes vont augmenter; vous allez payer les dettes des autres; le gouvernement ne vous respecte pas. Par contre, nous, du côté du gouvernement, nous utilisons le discours axé sur le positivisme, nous parlons de renforcement des communautés locales, de renforcement des villes-centres et d'agglomération, de renforcement des pôles de développement économique pour être plus concurrentiels à l'échelle internationale. Nous parlons de disparition de la concurrence stérile entre municipalités; nous parlons d'équité pour tous les citoyens et les citoyennes, de partage de richesse collective, de renforcement des MRC, surtout en milieu rural, pour faire face aux nouvelles responsabilités, comme la gestion des matières résiduelles et la sécurité incendie. Nous parlons de la réussite du pacte fiscal avec les municipalités pour le bien des contribuables et nous parlons d'investissements au niveau d'Infrastructures-Québec. Nous parlons de performance et de rationalisation, de croissance inférieure des dépenses dans le cas des villes regroupées comparativement à celles non regroupées. Nous parlons d'une plus grande supervision de la gamme des services offerts, que ce soit en administration, en voirie, en loisirs, en culture et dans le développement économique.
En résumé, M. le Président, l'ensemble des éléments que je viens d'énumérer contribuent à faire la démonstration que les regroupements sont rentables pour les citoyens et les citoyennes, pour leur qualité de vie, pour le développement de leur communauté, pour le maintien et la création d'emplois solides.
À la lecture de l'interpellation déposée par le député de Hull, je ne peux que déplorer le négativisme et l'inviter à prendre connaissance des positions du maire de Sherbrooke, M. Perrault, de M. Ryan, ancien ministre des Affaires municipales, de l'étude de M. Brisson, de l'Université du Québec à Chicoutimi, de Jacques Brisebois, le maire de Mont-Laurier, de M. Leblanc, le maire de Trois-Rivières, du maire de Sainte-Agathe, comme disait tantôt la ministre, de la mairesse de Sainte-Marguerite.
J'invite aussi le député de Hull à lire attentivement l'article de M. Marion Roy dans La Presse du 5 mai 2000, intitulé La démocratie à toutes les sauces. En voici un petit extrait, assez court: «La démocratie permet bien des choses, entre autres de défendre avec une légitimité apparente et très efficace, si on sait s'y prendre, des intérêts purement égoïstes.» Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Bien. Merci, M. le député de Bertrand. M. le député de Hull.
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci, M. le Président. C'est assez exceptionnel, mais je suis d'accord avec la ministre. Je suis d'accord que les citoyens ne s'y retrouvent plus, surtout dans son discours, parce que, voyez-vous, elle blâme les maires pour faire quelque chose et son inverse. Alors, elle blâme les maires de s'entendre, avec des ententes intermunicipales, elle dit: Ça n'a pas de bon sens qu'on ait des maires qui s'entendent, avec 52 ententes administratives, puis ça va bien. Ça, ça n'a pas de bon sens, je vais vous fusionner de force. Puis, d'un autre côté, elle blâme les maires de ne pas s'entendre puis d'avoir de la chicane. Puis, quand ils ne s'entendent pas, elle leur dit: Bien, je vais vous fusionner de force.
Pour aider les citoyens à bien s'y retrouver, comme elle le souhaite, est-ce qu'elle peut nous dire aujourd'hui ? puis je lui demande, là, on est à l'Assemblée nationale, c'est le rôle des députés, plutôt que simplement des machines à voter ? qu'est-ce qu'il y a dans les projets de loi? Elle les connaît. On est à quelques jours du dépôt, il y a quelques ficelles à attacher. Qu'est-ce qui arrivera à Québec? Qu'est-ce qui va arriver à Montréal? Qu'est-ce qui va arriver en Outaouais? Qu'est-ce qui arrive avec la Rive-Sud de Montréal? Y aura-t-il des arrondissements? Qu'arrive-t-il avec les comptes de taxes? Où sont les études?
Qu'arrive-t-il avec les services à la population? Est-ce qu'il y aura des arrondissements? Est-ce que les maires seront élus au suffrage universel, dans les arrondissements? Est-ce qu'il y aura deux comptes de taxes? Est-ce qu'elles augmenteront? Est-ce qu'il y aura des subventions gouvernementales envers les municipalités? Pour combien de temps? Combien ça va valoir? Est-ce que ce n'est pas notre argent qu'on va prendre pour subventionner les folies des structures? Est-ce qu'il y a des organisations gouvernementales qui vont tomber, les CLD, les CLE, les CDE, et tout ça? Est-ce qu'il y a d'autres structures qui vont être créées? Est-ce que la ministre a toutes les réponses à ces questions? Puisqu'elle les a, est-ce qu'elle peut nous en parler aujourd'hui? Est-ce qu'elle peut au moins donner un avant-goût aux citoyens de ce qui les attend? Qu'arrivera-t-il avec les services aux populations? Qu'arrivera-t-il d'ici ce temps-là? Est-ce que les villes seront en tutelle? Est-ce qu'elles pourront continuer à gérer leurs biens? Est-ce qu'elles pourront continuer à donner des services à la population?
Qu'arrivera-t-il avec les conventions collectives, notamment des pompiers, des policiers? Est-ce qu'il y a des gens qui vont perdre leur emploi? Est-ce que le coût d'opération des municipalités va baisser? Est-ce que le Code du travail sera modifié? Est-ce qu'on pourra faire de la sous-traitance, dans les villes? Est-ce qu'il y aura des ententes intermunicipales suite à ça? Est-ce que les conseils métropolitains, que ce soit en Outaouais, à Québec ou à Montréal, auront un suffrage universel, puisque la reddition de comptes est tellement importante pour la ministre?
Est-ce qu'elle va revenir sur sa décision d'encore faire de ce palier un palier où est-ce que ça serait des nominations? Est-ce qu'il y aura un pouvoir de taxation dans les CMM, ou CMO, ou CMQ? Est-ce qu'elle peut nous dire si elle a des réponses à ces questions? Parce que j'imagine qu'un projet de loi ou des projets de loi aussi importants, à quatre jours de l'échéance, elle doit le savoir. Est-ce qu'elle peut informer les populations de ce qui les attend? Puisqu'ils n'ont pas droit de regard, puisqu'ils ne peuvent pas s'exprimer par référendum, puisque, même s'ils vont à 20 000 à l'hôtel de ville pour dire qu'ils ne sont pas contents de ce qui se passe... puisqu'on oublie de les écouter, qu'on a décidé de les ignorer, est-ce que, au moins, on peut les informer des grandes décisions, dans les cabinets ministériels, que la ministre et le premier ministre ont prises en catimini ensemble?
Est-ce qu'elle peut nous dire vraiment ce qui va se passer sur le territoire du Québec? Est-ce qu'elle peut nous dire si on va avoir des discussions libres en commission parlementaire où tous les groupes qui désirent venir seront invités à venir participer? Est-ce qu'elle peut nous garantir que le bâillon ne sera pas utilisé pour bâillonner non seulement les populations, mais les députés de l'Assemblée nationale? Est-ce qu'elle s'engage à voir un véritable débat à l'Assemblée nationale sur toutes ces questions? Est-ce qu'elle aura le courage, aujourd'hui, de ses convictions? Est-ce qu'elle aura le courage de nous dire ce qu'elle a décidé?
C'est ça, les questions fondamentales. Est-ce que la ministre va dire vraiment ce qu'elle veut faire du Québec? Et, d'un trait de crayon, est-ce qu'elle décidera d'annuler 200 ans d'histoire dans certaines villes, 300 dans d'autres, elle décidera de décider pour et au nom des citoyens du Québec? C'est ça, les véritables enjeux présentement, au-delà de la rhétorique et des belles paroles sur l'ensemble du continent, où est-ce qu'on oublie de parler notamment des régions des États-Unis, notamment de Boston, de la France, où est-ce que ça ne fonctionnait pas du tout pareil, où est-ce qu'on oublie de se comparer à l'Ontario. Mais, quand on dit que l'Ontario le fait, on oublie de dire qu'ils ont 30 % d'impôts de moins puis qu'on ne parle pas de séparation là-bas.
n(11 h 30)n Est-ce que la ministre ne peut pas nous dire aujourd'hui quelles sont les véritables intentions, nous dire pourquoi la majorité des recommandations dans le rapport Bédard ne sont pas retenues et nous dire pourquoi on traite les élus municipaux avec un tel mépris, comme le député tantôt le faisait, en disant que 13 administrations, c'était mal gérer, de façon évidente, puis que ça en prenait juste une? Et si plus gros, c'est meilleur, comment se fait-il que Montréal se retrouve avec le pétrin tel qu'on le connaît?
Alors, aujourd'hui, j'invite la ministre, dans les moments qui lui restent, à nous dire où on s'en va dans le monde municipal. Le sable mouvant municipal, c'est assez, Mme la ministre! Je vous invite à utiliser le salon bleu de l'Assemblée nationale pour nous dire quels seront vos choix pour les citoyens du Québec.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Hull. Mme la ministre, pour les cinq prochaines minutes.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Oui. Merci, M. le Président. Ce qui est certain, c'est que le député de Hull et l'opposition ont pensé qu'à l'occasion de cette interpellation ils me feraient trébucher, sans doute en dévoilant ? avant même que les législations soient présentées, la semaine prochaine, ici, à cette Assemblée ? les orientations du gouvernement. Toutes les questions du député de Hull trouveront réponse dans les législations qui seront déposées, comme il le sait, la semaine prochaine.
Alors, non, M. le Président. Moi, ce à quoi je peux m'engager cependant, c'est à ne pas laisser l'opposition faire dérailler la réorganisation municipale. Et je dois vous dire que cette réorganisation municipale se fait dans la plus totale solidarité ministérielle et solidarité du caucus.
M. le Président, je voudrais simplement rappeler au député de Hull, qui semble l'oublier, que le maire de Sherbrooke a justement fait valoir ce que 52 ententes intermunicipales ? contrairement à ce que vous disiez tantôt, là ? ce que ça signifie. C'est qu'après avoir mis en commun tous les services, est-ce qu'il n'est pas le temps de mettre aussi en commun les structures? C'est d'ailleurs la question que le maire de Hull a posée à ses concitoyens. Et, dans une lettre qu'il écrivait au chef de l'opposition et député de Sherbrooke, lettre dont il m'a envoyé copie, il disait ceci... Le 27 avril dernier, le maire de Sherbrooke écrivait à son député et m'envoyait copie de cette lettre. Il disait ceci:
«Il faut absolument que le gouvernement du Québec donne des outils nécessaires aux villes-centres pour qu'elles deviennent des agglomérations fortes, capables de faire face à la concurrence interrégionale et mondiale. D'ailleurs, les six grandes villes-centres et les 25 autres villes dites de centralité ont signé une déclaration conjointe demandant au gouvernement d'agir sans tarder et en adoptant les lois devant concrétiser la réorganisation municipale, et ce, dès 2001. Ces 31 villes de centralité sont localisées au coeur d'agglomérations regroupant 78 % de la population et 85 % de l'emploi.»
Moi, j'invite le député de Hull à rencontrer le maire de Sherbrooke pour qu'il lui fasse part justement des orientations de renforcement de l'agglomération de Sherbrooke, qu'il a rendues publiques. M. le Président, savez-vous ce à quoi il faut mettre fin?
Une voix: À la zizanie.
Mme Harel: Il faut mettre fin à 10 années de chicane sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec. Ce document a été préparé par mes collègues du caucus de la Rive-Nord de Québec. Alors, il s'agit, n'est-ce pas, uniquement d'une revue de presse de toutes ces invectives...
Une voix: Guerres de clocher.
Mme Harel: ...qui ont été lancées entre les maires des banlieues de Québec et de la Rive-Nord. Alors, ces invectives, les maires de la banlieue, de la Communauté urbaine de Québec maintenant, les envoient contre la ministre, contre le gouvernement. C'était entre eux avant, en fait.
Alors, vous voyez, M. le Président: Guerres de clocher, 16 mars 1994; Zizanie chronique, 30 décembre 1992; 13 à table, c'est 12 de trop, 14 janvier 1991; Encore le bordel à la CUQ, 17 mai 1995; Un échec ? Réforme de la CUQ, 13 mars 1995. Je lis, là, je m'excuse, mais... On a l'air de maudits «twits», le maire Émile Loranger, 30 janvier 1999; À mort la CUQ ? Le maire Loranger en a assez de passer pour un bouffon, 11 janvier 1996. Il y en a comme ça... C'est simplement la revue de presse, M. le Président.
Une voix: À pleurer.
Mme Harel: À pleurer. À pleurer! Au moment où il y a tant de défis à relever dans l'agglomération de Québec. Alors, M. le Président, il est temps d'agir. Et quand je vois que des municipalités comme Val-Bélair embauchent des personnes pour recueillir des signatures contre le regroupement ? vous vous rendez compte, là, elles leur offrent un salaire de base, avec 0,25 $ par signature, pour recueillir des signatures contre le regroupement ? alors il est bien évident que les bornes sont dépassées. Si vous pensez que c'est ça, de la démocratie, engager des gens pour défendre des intérêts hyperpersonnalisés, là, M. le Président, il y a quelque chose qui n'a pas de bon sens.
Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. M. le député de Bellechasse.
M. Claude Lachance
M. Lachance: Merci, M. le Président. Juste très rapidement. J'ai été surpris par les propos du député de Hull à l'égard du député de Bertrand tantôt. J'ai toujours perçu le député de Hull comme un gentleman. Ça m'étonne. Je l'inciterais amicalement à regarder l'exemple du député de Richmond, qui est ici depuis 22 ans. S'il veut faire une longue carrière en politique, ce n'est pas la façon de procéder.
Ceci étant, M. le Président, la réforme municipale, il faut la faire et on va la faire. À partir de ce moment-là, avec la volonté, la détermination et la solidarité des membres du caucus ministériel, ça ne sert à rien aux municipalités de gaspiller de l'argent au moment où nous en sommes rendus. Il y a une multiplicité des intervenants actuellement qui conduit à une absence de vision d'ensemble. Ça provoque une concurrence stérile entre les municipalités d'une même agglomération. Il y a un coût à ça pour les citoyens. On l'a évoqué amplement, des chicanes de clocher et le reste, et le reste, il y en a depuis des décennies. Ça amène aussi, cette multiplicité des disparités fiscales, une iniquité flagrante entre les contribuables qui habitent des villes voisines, comme l'a évoqué tantôt mon collègue de Montmorency. En clair, en résumé, les regroupements, c'est une question d'efficience, d'efficacité.
Et, d'ailleurs, j'inciterais le député de Hull à regarder chez les voisins de l'autre côté de la rivière. J'ai ici une coupure de presse du Devoir, il y a quelques semaines, Le secret, c'est de parler d'une seule voix, et je cite: «Lorsque le gouvernement Harris a ressuscité, il y a trois ans, le projet de fusionner les 12 municipalités locales et régionales de la région d'Ottawa, les milieux d'affaires ont applaudi. Les économies budgétaires et les éventuelles baisses de taxes qui s'ensuivraient n'étaient que l'une de leurs préoccupations. Ce qu'ils voulaient avant tout était un interlocuteur unique pour promouvoir la région et pour régler les problèmes associés à son développement trop rapide. Une administration unique, ça signifie un seul plan d'aménagement du territoire et de développement des infrastructures. Pour les entreprises, plus besoin, entre autres, de faire affaire avec plusieurs services d'urbanisme et de se plier à des règlements de zonage disparates.» Fin de la citation.
Dans cet important dossier des municipalités, M. le Président, je déplore vivement que les députés de l'opposition libérale aient décidé d'agir en oiseaux de malheur en faisant de sombres prophéties dans l'espoir évident de gagner des votes. Tout le monde a compris qu'ils agissent en bonhomme sept heures pour des raisons strictement partisanes. Est-ce qu'un tel comportement est vraiment responsable? Non, bien sûr, parce que les enjeux sont trop importants. Deux exemples que je cite, ça va vous rappeler des souvenirs. Souvenez-vous de la piastre à Lévesque, en 1980, lors du référendum. La piastre à Lévesque, 0,70 $, qu'on disait que ça vaut. Combien vaut la piastre à Chrétien aujourd'hui?
Une voix: 0,64 $.
M. Lachance: 0,64 $. Le bogue de l'an 2000, la députée de La Pinière a parlé de ça ici, en cette Chambre, comme si ça allait être épouvantable. Finalement, on a vu le résultat. Il faut être positif dans la vie. Moi, je voudrais rappeler quelque chose que j'ai observé de près, les grandes réformes du gouvernement du Parti québécois, première version: la Loi sur le zonage agricole, la Loi sur la création de la Régie de l'assurance automobile, qui s'appelle la SAAQ aujourd'hui, et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi n° 125. Quelle a été l'attitude du Parti libéral? Il ne reste plus aucuns députés libéraux de cette époque, ici, dans cette Chambre. Ça a été de dire: On ne veut rien savoir de ça. Blocage systématique en Chambre, filibuster, on ne veut rien savoir. Qu'est-ce qui est arrivé aux élections qui ont suivi quelque temps après, en 1981, là où j'ai été élu et le député de Richmond a été réélu? Bien, le gouvernement du Parti québécois a été réélu. Pourquoi? Parce que les gens, les citoyens craignaient que les réformes qui avaient été mises en place, les grandes réformes importantes, soient mises en péril par l'arrivée d'un éventuel gouvernement libéral. Moi, je dis aux amis d'en face: Je ne mets pas en doute votre bonne foi, mais attention à l'effet boomerang. Ça devrait un peu vous faire réfléchir.
n(11 h 40)n Nous, nous avons confiance en l'avenir, on a confiance au bon jugement de la population. Et si j'avais un bon conseil à vous donner, mes amis d'en face, ce serait de dire: On va profiter de la commission parlementaire qui va découler du dépôt du projet de loi pour bonifier le projet de loi que la ministre des Affaires municipales va déposer la semaine prochaine, pour le bonifier, l'améliorer. Et, pour le faire, c'est un travail important en démocratie, c'est un travail que vous devez faire, et non pas faire un blocage où vous ne voulez rien savoir. Vous devez plutôt contribuer à améliorer, à l'étude du projet de loi article par article, en espérant que ça se rende là. Je souhaite vivement que ça se rende là, parce que c'est un rôle essentiel de l'opposition de faire un travail constructif. Même si on ne peut pas vous demander de voter pour, au moins montrez votre bonne volonté. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Bellechasse. M. le député de Limoilou, pour les cinq prochaines minutes.
M. Michel Després
M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Comme c'est les cinq dernières minutes, c'est un peu l'occasion de faire une certaine conclusion. Voyez-vous, le gouvernement du Québec, par l'entremise de sa ministre qui est porte-parole, la ministre des Affaires municipales, et les députés de la région de Québec, a créé carrément, depuis le début dans ce dossier-là, la confrontation avec le monde municipal à Québec. Et confrontation au départ entre les élus et la ministre, mais, maintenant, cette confrontation-là, M. le Président, elle s'est transportée, elle s'est transportée par l'entremise des citoyens, des comités de citoyens.
Je vais vous dire, moi, j'ai rencontré personnellement, ayant été invité des fois à y aller à titre d'observateur, à des assemblées publiques, des milliers de personnes que les députés d'en face n'ont pas voulu rencontrer, Mme la ministre, pour défendre le projet du rapport Lapointe, à part d'avoir fait une conférence de presse.
Puis je peux vous dire que les gens qui étaient dans la salle, ils n'avaient sûrement pas été payés pour être dans ces salles-là, puis il y avait du monde. Mais personne n'était là, c'était la politique de la chaise vide. Je ne sais pas si c'est parce que les députés n'étaient pas à l'aise avec ça, je ne sais pas si c'est parce qu'eux-mêmes n'ont pas l'information puis qu'il y a juste vous qui les avez, mais ils ne se sont pas présentés.
Ils sont ici, à l'Assemblée nationale, ils sont prêts à rencontrer les comités de citoyens, oui, à coup de deux, trois ou quatre personnes qui siègent sur le comité des citoyens, mais, quand c'est le temps de rencontrer celui qui paie, qui est le payeur de taxes, on n'est pas là, Mme la ministre. On n'est pas là.
Puis je comprends, parce que les députés de la région de Québec avaient pris des engagements bien clairs quand ils ont appuyé le rapport, ils en avaient pris quatre: pas de hausse du compte de taxes... Je reviens là-dessus. Le ministre a dit cette semaine, après le Conseil des ministres, qu'il y aurait des ajustements entre le compte de taxes des différentes municipalités. Il avait dit: C'est une condition sine qua non. Mme la ministre, il va-tu y avoir augmentation de taxes pour les municipalités? Parce que les députés ont dit que, s'il y en avait seulement une... Il n'y aurait pas de perdant, c'est les paroles du ministre: Il n'y aura pas de perdant. Pas de perdant. Et je le cite: Une des conditions sine qua non, c'est qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxes provenant des fusions. Ils ont décidé d'appuyer le rapport en fonction qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxes, et là le ministre commence à reculer. On verra bien, on verra bien.
L'autre engagement: à chacun sa dette. Il y avait 13 villes, il y a huit arrondissements; à chacun sa dette. Je ne sais pas dans quelle dette vous allez tomber quand vous allez changer d'arrondissement, hein.
On va respecter l'appartenance. Allez voir les gens de Saint-Augustin, les gens d'Ancienne Lorette, les gens de Cap-Rouge, les gens de Sillery, les gens de Sainte-Foy. Allez les rencontrer. Il y en a une, assemblée, Mme la ministre, dans la ville de Vanier, de la députée de Vanier, lundi soir. Votre collègue ministre de la capitale a été invité puis la députée a été invitée. Je ne sais pas s'ils seront présents, je le verrai bien lundi soir. Mais je la connais, la réponse, ils ne seront pas présents. Ils ne seront pas présents.
Le ministre de la capitale, à part de faire un point de presse ici dans les corridors, de se promener entre le parlement et sa suite ministérielle et son bureau de comté, il ne rencontre pas de monde. Je le comprends, pourquoi il ne rencontre pas de monde. J'ai bien hâte, à la prochaine campagne électorale, de faire le débat; ça, ça va être s'il se représente, on verra bien. Mais, je vais vous dire, vos députés ne sont pas à l'aise. Le député de Montmorency était à l'aise ce matin, il est venu ici en parler au Parlement. Je sais qu'il est allé dans une assemblée à Boischatel. C'est le seul que j'ai vu se déplacer, le seul. Les autres, je n'en ai pas vu un. Puis ils auraient avantage à se montrer.
Je vais vous dire, M. le Président, déçu. Déçu parce qu'on ne respecte, on ne donne pas l'information, on ne les a pas, les études. Probablement que les députés de la région ne doivent pas les avoir non plus. Il y a le ministre de la capitale, probablement, qui les a vues au Conseil des ministres, parce que là il a changé de position: Le compte de taxes, on va y toucher, c'est ça qu'il a voulu nous dire.
Ils ont pris l'engagement, au-delà ces trois choses-là, qu'ils informeraient la population, qu'ils feraient des sorties publiques. Je reviens là-dessus. Le ministre m'a dit, quand il répondait à une question en Chambre ou qu'il faisait un point de presse ? il avait fait une sortie publique ? qu'ils étaient pour rencontrer les gens dans le milieu, c'est l'engagement qu'ils ont pris.
Il a organisé... Le ministre de la capitale, en terminant, il voulait organiser une rencontre, Mme la ministre, avec les aînés de la capitale pour leur parler de la réforme. Il y a eu un Conseil des ministres spécial. Bon. Il s'est retiré. Il voulait être capable de se lever en cette Chambre pour dire qu'il avait organisé une activité, une rencontre avec les aînés de la capitale. Elle n'a pas eu lieu. C'est la seule dont il aurait pu dire qu'il avait assisté pour informer la population, Mme la ministre. C'est désolant de voir comment vous n'êtes pas plus, les gens du gouvernement, respectueux de permettre au citoyen de choisir de son avenir et de choisir la municipalité et ses services et son compte de taxes.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Limoilou. À ce moment-ci, j'aimerais requérir le consentement des membres pour que nous puissions déborder de cinq minutes, ce qui permettrait de respecter les 10 minutes imparties chaque côté de la Chambre. J'ai le consentement?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, Mme la ministre, pour les 10 prochaines minutes.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, nous entamons le dernier droit de cette interpellation, et je mets au défi les gens qui nous écoutent aujourd'hui ou les membres de cette Assemblée d'entendre l'opposition cette semaine nous dire qu'on ne les a pas, les études ? c'est une incantation ? quand ils savent très bien qu'il fallait les reprendre parce que le pacte fiscal signé entre le monde municipal et le gouvernement le 10 octobre dernier introduit 1,5 milliard de plus pour les cinq prochaines années et qu'il fallait bien évidemment réintroduire tout cela, étant entendu que, par exemple, dans la région de Québec, c'est 22 millions de plus par année que le gouvernement va injecter dans le monde municipal, étant donné l'augmentation des «en lieu» de taxes sur les immeubles du gouvernement que le gouvernement va dorénavant payer.
M. le Président, si on les entend dire aujourd'hui: On ne les a pas, les études, je vous gage, à n'importe qui, que, dès la semaine prochaine, lorsque, avec les législations, on les rendra publiques, on va entendre maintenant un nouveau discours: On ne les croit pas, les études. Parce que l'opposition a choisi son camp. L'opposition a choisi le camp du refus global, a choisi le camp du refus catégorique, a fait de l'antifusion une religion. Alors, c'est sans doute la raison pour laquelle il y a des appuis nombreux pour des regroupements par législation, comme je vous l'ai dit, qui sont la règle plutôt que l'exception. Ce que l'opposition appelle les regroupements forcés ou les regroupements imposés, c'est des regroupements par législation, c'est donc des regroupements démocratiques. Ils sont adoptés par l'Assemblée nationale, qui est, dans notre société, le lieu où s'arbitre le bien commun. Alors, je disais donc que des appuis nombreux sont transmis au gouvernement par de nombreux maires et mairesses qui, publiquement et légitimement, sont connus comme étant soit des militants libéraux, soit même des ex-candidats libéraux. Alors, M. le Président, mon collègue a raison quand il invite l'opposition à de la prudence, à plus de sagesse. Je ne peux pas anticiper qu'ils pourraient adopter une attitude constructive. Mais je leur dis que, dans leurs rangs, ils seraient surpris ? ils le seront quand tout cela sera rendu public ? de voir à quel point les appuis nombreux sont transmis au gouvernement, d'élus municipaux qui sont notoirement connus comme appartenant au Parti libéral.
M. le Président, je voudrais citer un prédécesseur à ce poste des Affaires municipales et de la Métropole, un ministre libéral, M. Goldbloom, qui avait procédé à l'adoption par législation de 40 regroupements. Ce n'est pas parce que ça se parle depuis 35 ans... C'est ce dont me fait grief le député de Hull, parce que ça s'est parlé il y a 35 ans. M. Levesque, d'ailleurs, je retrouvais une déclaration de lui, en 1964, à l'ouverture du nouvel hôtel de ville de Chomedey où il était allé appuyer son collègue Jean-Noël Lavoie, M. Levesque disait ceci: «Il faut unir nos forces, cela s'impose, car le regroupement des villes permet de se développer plus normalement et plus sainement. J'ai l'impression, lançait-il, que les édifices que vous inaugurez aujourd'hui sont bâtis pour plus que le Québec d'aujourd'hui. De toute façon, 1 600 municipalités, c'est trop pour le Québec.» Alors, vous voyez bien, M. le Président, que ce n'est pas parce qu'on en parle depuis longtemps que c'est dépassé. Au contraire, c'est parce qu'on en parle depuis trop longtemps qu'il faut agir et que c'est urgent d'agir maintenant.
n(11 h 50)n Je vous disais donc que mon prédécesseur, M. Goldbloom, disait ceci à l'occasion de l'adoption de cette législation de regroupements, et je le cite: «Cette chose fondamentale est que le changement est toujours menaçant. Si l'on demande à une population de se prononcer de façon simple: Choisissez-vous le changement ou le statu quo?, elle a tendance à dire: On aime mieux garder le statu quo. C'est une réaction bien humaine.» Et il poursuivait: «Je voudrais vous dire qu'à certains moments de l'histoire un gouvernement doit avoir une vision et doit prendre ses responsabilités pour la transformer en réalité.» Alors, M. le Président, vous le savez, le gouvernement a choisi d'agir. Il s'est donné une obligation de résultat et il s'est donné cette obligation également de ne pas faire de mur-à-mur, mais de faire du sur-mesure, avec les difficultés que ça peut représenter que tout ne soit pas uniformisé. Mais, en même temps, le gouvernement est conscient, et la société québécoise l'est aussi, que cette réorganisation municipale aurait dû être faite il y a longtemps.
Je vous rappelle que la Révolution tranquille est passée à côté de la réorganisation municipale, sans doute parce qu'on avait beaucoup de choses à faire et beaucoup de priorités à mettre en place, notamment dans le milieu scolaire compte tenu de notre sous-scolarisation, et donc nous avions à corriger des situations dans le milieu scolaire. Nous sommes passés de 1 500 commissions scolaires à 72 commissions scolaires, au Québec, en 50 ans, alors que nous sommes à peu près toujours à l'équivalent, plus ou moins, du même nombre de municipalités, autour de 1 400, 1 300. Alors, nous avions aussi beaucoup à faire en rattrapage dans le milieu des affaires, et l'organisation municipale a été laissée de côté dans le cadre des réformes amorcées au Québec depuis 50 ans.
Pourquoi est-ce qu'il est temps d'agir? Pour toutes les raisons que j'ai déjà données ? et je n'y reviendrai pas ? entre autres les raisons liées au développement économique, au développement social, au développement culturel, à l'équité sociale, à l'équité fiscale. Est-ce que c'est être équitable que d'accepter que, sur l'île de Montréal, la ville de Westmount, qui est complètement enclavée, qui se retrouve entièrement entourée de la ville de Montréal, qu'à Westmount le taux de taxe soit de 0,95 $ au 100 $ d'évaluation, alors que les citoyens de Westmount ont nécessairement à sortir de leur municipalité, de tous les côtés, pour aller chercher des services qui sont payés par les seuls contribuables de la ville de Montréal? 0,95 $ du 100 $ d'évaluation, est-ce que vous savez, M. le Président, que, pour retrouver ce niveau-là de taxation, il faut aller bien loin des villes qui offrent des services et ne pas être au coeur de cette ville?
Alors, vous voyez qu'il y a des priorités, surtout dans un contexte où il y a faible croissance démographique au Québec. La faible croissance démographique fait en sorte que des régions entières verront d'ici cinq ans commencer une diminution de leur population. Je prends l'exemple de Trois-Rivières. Trois-Rivières, toute la grande agglomération de Trois-Rivières, dans la MRC de Francheville et du côté de Bécancour également, connaît une augmentation nette de population de 1 100 personnes par année, alors que, dans cinq ans, le déclin devrait arriver... et finalement, dans 10 ans, l'Institut de la statistique du Québec, qui a publié ces prévisions, considère qu'il y aura diminution d'environ, en moyenne, 300 personnes par année.
Dans la grande région métropolitaine de Montréal, qui fait 3,5 millions de population, savez-vous quelle a été l'augmentation nette de population l'an passé? 23 000 personnes, malgré l'immigration, parce que le taux de mortalité commence à être plus élevé que le taux de natalité; 23 000 personnes l'an passé, prévision dans cinq ans, 11 000 personnes, dans la région métropolitaine de Montréal qui compte 3,5 millions d'habitants.
Alors, M. le Président, avec cette faible croissance démographique, c'est un devoir, c'est une responsabilité que de se consolider comme société. On ne peut plus continuer à être dispersé, fragmenté sur un territoire où les municipalités sont concurrentes les unes les autres, et surtout dans un contexte de vieillissement de population. Savez-vous que, dans 20 ans, les 65 ans et plus que nous serons compteront pour 30 % de la population, alors que les 65 ans et plus ne faisaient que 4,5 % au début du siècle dernier? Imaginez ce passage qui voit apparaître maintenant le quatrième âge, un quatrième âge qui est déjà une réalité dans toutes nos municipalités, et déjà on voit poindre le cinquième âge. Ce qui, par exemple, nous amène à constater que, dans 20 ans, les 70-64 ans que nous serons également, M. le Président, seront plus nombreux que les 0-4 ans.
Vous vous rendez compte de ce que cela nous oblige à faire pour préparer l'avenir? Ce que nous faisons présentement, nous le faisons pour tout de suite, évidemment, mais nous le faisons de manière à ne pas avoir à recommencer tout le temps, en sachant très bien que de réorganiser des structures n'est pas fréquent. Les communautés urbaines ont été adaptées il y a 30 ans, les MRC il y a 20 ans, alors que les municipalités n'ont pas vraiment changé depuis 50 ans. Alors, ce qu'il faut dans chacun de nos milieux, c'est se demander: Comment veut-on être organisé dans 20 ans? Qu'est-ce qu'on veut laisser comme organisation de société à nos enfants et nos petits-enfants, de manière à s'y préparer maintenant? Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le député de Hull, pour les 10 prochaines minutes.
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci bien, M. le Président. Dans quatre jours, le gouvernement va nous annoncer l'arrivée à bon port du rouleau compresseur, il va entrer dans la demeure, les citoyens du Québec vont passer par là. Vous allez perdre votre municipalité dans quatre jours, vous allez perdre les services auxquels vous êtes habitués, et vous allez payer la note, sans pour autant dire quoi que ce soit à savoir si vous le souhaitez ou non. Vous n'aurez pas un mot à dire à savoir si vous souhaitez garder votre municipalité, votre environnement de vie, l'environnement dans lequel vos enfants évoluent. Et, tout cela, le gouvernement le fait sans mandat, pas un mot en campagne électorale, et même va jusqu'à renier certains héritages du Parti québécois.
Vous allez me permettre de lire certains passages du programme politique du Parti québécois. On citait René Lévesque tantôt, on lui faisait dire qu'il était pour les fusions forcées. La ministre aurait dû lire le programme du Parti québécois, en 1976: «Il importe de maintenir ou de créer des instances locales et régionales nécessaires à cette décentralisation qui favorise à la fois la participation maximale des citoyens aux décisions qui les concernent et l'attribution des responsabilités en matière de services et d'équipements au palier administratif le plus approprié. En conséquence, un gouvernement du Parti québécois s'engage à revaloriser le pouvoir local en remettant aux municipalités certains pouvoirs actuellement exercés par le gouvernement du Québec et en augmentant les ressources financières à leur disposition, et s'engage à réorganiser les structures municipales en consultant obligatoirement la population concernée sur tout projet de restructuration, regroupement ou fusion». René Lévesque voulait consulter, lui, et d'utiliser sa mémoire à d'autres fins, je ne suis pas sûr que le gouvernement est dans la bonne voie.
M. le Président, on voit qu'au sein du gouvernement et de l'aile parlementaire il est clair qu'il y a des députés qui ne sont pas d'accord avec la ministre. Le premier député qui n'est pas d'accord, c'est le premier ministre, qui a fait exclure les fusions forcées de son comté; c'est le vice-premier ministre, qui a fait exclure son comté des fusions forcées. Mais il y a aussi le député de Marguerite-D'Youville, qui, lui, a dit qu'il avait un gros problème avec le rapport Bernard, et il disait ceci dans La Presse du 6 octobre dernier: «Le député de Marguerite-D'Youville, François Beaulne, qui représente une autre ville récalcitrante, Boucherville, s'oppose, lui aussi, à cette fusion et appuie l'idée d'une communauté métropolitaine. Il l'a répété hier au caucus du Parti québécois. M. Beaulne n'est cependant pas surpris de l'appui de Mme Marois à la fusion.» M. Beaulne dit cela dans son comté et, quand vient le temps de voter, M. Beaulne vote avec ses collègues. À la question: Est-ce que les citoyens devraient être capables de se prononcer à savoir s'ils décident, oui ou non, de se fusionner, le député de Marguerite-D'Youville a voté contre cette résolution. Et à la résolution que nous proposions, à savoir que les informations devraient être disponibles aux citoyens avant les décisions, le député Beaulne de Marguerite-D'Youville a voté contre cette résolution. À Québec, on tient un langage et, dans le comté, on en tient un autre.
n(12 heures)n On cite souvent des journaux, du côté du gouvernement, on peut en citer d'autres. Dans La Presse d'aujourd'hui, Yves Boisvert, Pourquoi des fusions?, dit ceci: «Mais les fusions à Montréal, sur la Rive-Sud ou ailleurs, en soi, n'apportent aucun avantage économique. Ce n'est pas parce que tout le déneigement est centralisé qu'il coûtera moins cher. En fait, en ce moment, si les municipalités sont relativement inefficaces, si elles coûtent trop cher, ce n'est pas parce qu'elles sont trop petites, c'est parce qu'il n'y a pas de concurrence dans l'offre de services et parce qu'on est incapable d'évaluer leur performance.»
M. Boisvert considère qu'il n'y a pas assez de compétition entre les villes; la ministre tente d'annuler tout genre de compétition. Le plan gouvernemental, c'est qu'on va annuler toute compétition possible entre le monde municipal. Ça, ça va juste créer une augmentation des coûts pour les citoyens. Prenons l'exemple de Toronto. Qu'est-ce que le gouvernement nous dit? Le gouvernement nous a dit aujourd'hui: Attendez, vous verrez, mercredi, la décision ultime, à savoir si vos municipalités sautent ou non. Elle dit: Il n'est pas question que j'écoute la population, le bien commun exige de vous bâillonner, le bien commun exige que les citoyens n'aient pas un mot à dire; le gouvernement le saura, lui, le bien commun et agira en conséquence. Le gouvernement veut votre bien et il l'aura.
Ce que le gouvernement dit aussi aujourd'hui, c'est qu'il existe des études, mais qu'il n'a pas le courage de les déposer avant que les décisions soient prises. Bien, non, on décide de tout décider avant, et ensuite on donnera certaines informations, bien choisies, calculées pour assurer le moins de transparence possible.
Le gouvernement s'apprête aussi à vous faire un cadeau à la veille de Noël, probablement avec votre argent. C'est un petit peu comme mon enfant qui, le 15 décembre, me dit: Papa, j'aimerais ça, aller t'acheter un cadeau de Noël, donne-moi donc 20 $. Mais, mon 20 $, je vais le garder. Et, Mme la ministre, les citoyens désirent garder leur argent, vous n'avez pas besoin d'utiliser 225 millions de dollars pour justifier votre réforme, 225 millions de dollars de l'impôt des citoyens les plus taxés en Amérique du Nord pour ne rien créer de plus, là, pas plus de services, là, mais simplement pour éponger l'augmentation de taxes occasionnée par vos décisions.
On a des corridors pleins de civières dans les hôpitaux, on a des réformes à accomplir au niveau des soins à domicile, on a des personnes âgées qu'on lave une fois par semaine, on a des étudiants entassés dans des roulottes dans les écoles. Vous ne pensez pas que le 225 millions, plutôt que de le gaspiller pour réorganiser les lignes municipales contre la volonté des citoyens, ne serait pas mieux utilisé pour l'amélioration des services à la population? Des cadeaux avec notre argent, on n'en veut pas.
Et qu'est-ce que la ministre nous dit aussi? C'est qu'elle justifie toute cette réforme sur le droit constitutionnel canadien. Elle dit ? ça n'a pas de bon sens: Le droit constitutionnel me donne tout pouvoir sur les municipalités. Puisque ce sont mes créatures, je vais utiliser ce pouvoir canadien pour décider de l'avenir de vos municipalités. Sauf que les citoyens, eux, ne sont pas une créature du gouvernement, et ce sont eux qui font le chèque, ils méritent de décider.
On cite Victor Goldbloom comme ancien ministre des Affaires municipales. Je tiens juste à vous dire que, le 14 février 1974, il écrivait à Francis Dufour, maire d'Arvida, en lui disant: «Je sais que cette décision ? c'est-à-dire de tenir un référendum sur une fusion le 3 mars ? émane de la bonne foi du conseil municipal et représente une expression de la démocratie. Je ne voulais donc nullement lui opposer des obstacles. Il me semble désirable que les citoyens de Jonquière, Kénogami et Saint-Dominique soient consultés en même temps que ceux d'Arvida au sujet des questions identiques sur lesquelles les quatre municipalités se seraient mises d'accord, puisque les quatre ont été appelées à suivre ensemble un processus déterminé et à finir par s'entendre ou ne pas s'entendre.» Alors, Victor Goldbloom était d'accord avec la consultation publique.
Et, pour nous, au Parti libéral du Québec, le choix est clair. Le gouvernement a décidé de prendre le rouleau compresseur et de faire avaler sa réforme à l'aide de propagande qui commencera dans les prochains jours. Cette ministre-là qui nous disait même que les campagnes de publicité, on devrait toujours avoir les deux côtés, le parapluie du oui et le parapluie du non; elle faisait la remontrance à Mont-Tremblant. Eh bien, regardez bien la publicité qui commencera, la propagande, dans quelques jours. Il n'y aura qu'un seul côté ? qu'un seul côté ? le côté du rouleau compresseur.
Et, pour terminer, ne prenez pas ma parole, prenez simplement la parole d'un citoyen qui m'écrivait hier, M. Pierre Sénécal, un citoyen de Brossard qui dit ceci: «Permettez-moi, M. le député, de vous adresser toutes mes félicitations pour la motion déposée à l'Assemblée nationale afin d'obliger le gouvernement péquiste à divulguer aux citoyens toutes les informations détenues sur les impacts des fusions municipales forcées. Le vote contre cette motion par les députés péquistes démontre à nouveau la crainte de faire éclater la vérité au grand jour dans ce dossier brûlant d'actualité.
«En tant que citoyen de la ville de Brossard, c'est avec appréhension que j'affronte la menace du gouvernement péquiste de fusionner de force, sans la moindre consultation démocratique des citoyens concernés, huit municipalités de la Montérégie en une seule municipalité, tel que le recommande le mandataire de la ministre Harel, M. Louis Bernard.» Ce citoyen et combien d'autres ont à coeur l'avenir de leur municipalité, ont à coeur l'avenir de leurs enfants et ont le droit légitime de choisir dans quelle ville ils vont vivre. Et, dans quatre jours ? quatre jours ? la ministre et le gouvernement du Parti québécois vont annuler ces choix, vont décider à votre place, alors que la tendance mondiale est à l'inverse, où on ne fait que des mises en commun d'équipements régionaux plutôt que d'abolir les choix individuels des municipalités.
Pour nous, au Parti libéral, la bataille ne fait que commencer, et nous allons utiliser tous les moyens en notre pouvoir pour nous opposer à ce rouleau compresseur qui est rétrograde, les deux yeux braqués dans le rétroviseur, qui applique une solution des années soixante-cinq aux années 2000. Pour nous, le citoyen doit être au coeur de cette réforme, le citoyen doit pouvoir avoir toutes les analyses, le citoyen doit pouvoir décider. Parce que, pour nous, c'est le citoyen d'abord, parce que c'est lui qui en paie la note. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Hull. Cette dernière intervention me permet d'indiquer que la commission a maintenant complété son mandat. Conséquemment, j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 7)