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(Onze heures neuf minutes)
Le Président (M. Rancourt): À l'ordre! Nous allons
ouvrir la séance de la commission des affaires sociales qui a pour
mandat d'étudier, article par article, le projet de loi 55, Loi
modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives concernant
l'adoption.
Les membres de cette commission sont: M. Boucher
(Rivière-du-Loup), Mmes Lachapelle (Dorion), Dougherty
(Jacques-Cartier), Harel (Maisonneuve), MM. Johnson (Anjou), Juneau (Johnson),
Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Leduc (Fabre), Picotte (Maskinongé),
Rochefort (Gouin), Sirros (Laurier).
Les intervenants: MM. Beauséjour (Iberville), Bisaillon
(Sainte-Marie), Blais (Terrebonne), French (Westmount), Gravel (Limoilou),
Hains (Saint-Henri), Lafrenière (Ungava), Laplante (Bourassa), Marx
(D'Arcy McGee).
Puisque nous débutons, nous allons désigner un rapporteur,
si vous voulez me l'indiquer.
M. Johnson (Anjou): Le député de Gouin, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Je pense bien que ce sera lui ou moi.
Le Président (M. Rancourt): Donc M. le
député de Gouin est désigné comme rapporteur de
cette commission.
Mme Lavoie-Roux: Cela va être lui ou moi.
Une voix: À moins que ce soit vous.
Le Président (M. Rancourt): Nous allons poursuivre
justement en donnant la parole au ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, on pourrait
peut-être commencer l'étude du projet de loi article par article
immédiatement, à moins que la députée de L'Acadie
veuille faire quelques commentaires.
Le Président (M. Rancourt): Quelques commentaires?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Discussion générale L'adoption
internationale
Mme Lavoie-Roux: Juste quelques questions. En tout cas, si je les
pose maintenant, je ne les poserai pas au moment de l'étude des
articles. J'aimerais d'abord qu'on nous dise exactement, dans les cas que l'on
veut régulariser, de combien de cas s'agit-il. De quels pays originent
les enfants, à quoi sont dus les retards, les complications qui sont
créées dans le cas de ces enfants-là. Est-ce que c'est
parce que le gouvernement du Québec ou enfin les organismes, peu
importe, ont été accusés de se traîner les pieds,
d'être pris dans de la bureaucratie qui, finalement, empêchait les
choses d'aboutir?
Je ne sais pas jusqu'à quel point ces accusations sont
fondées, pour l'ensemble de ce groupe d'enfants qui, il faut bien le
reconnaître, a poussé le gouvernement à agir plus
rapidement à ce moment-ci parce que vous vouliez justement
régulariser des cas. Alors j'aimerais savoir de quel ordre de grandeur
il s'agit. C'est bien beau de dire qu'on va donner une amnistie à 100 ou
150 cas, mais, est-ce que des évaluations ont été faites
dans chacun de ces cas? Par qui ont-elles été faites? Cela est ma
première question.
L'autre question, qui serait peut-être préalable en fait
à celle-ci, c'est: Quelle est la politique du gouvernement en
matière d'adoption internationale? C'est que, petit à petit, on
s'est mis à faire de l'adoption internationale qui a été
très répandue, il y a peut-être une dizaine
d'années, sur une base privée, à ce moment-là. Avec
la loi 13, en 1979, on avait tenté de donner un certain cadre à
l'adoption internationale, mais on ne sait vraiment pas où le
gouvernement se situe vis-à-vis de l'ensemble de l'adoption
internationale. Est-ce qu'on agit un peu au jour le jour en assurant des
mécanismes qui fonctionnent le mieux possible, ou est-ce qu'il y a, du
point de vue démographique, du point de vue des ressources humaines, une
politique que le gouvernement entend privilégier?
Est-ce qu'on va répondre uniquement aux demandes des gens ou le
gouvernement veut-il aller au-delà de cela? Enfin, quelle
est la politique générale du gouvernement en
matière d'adoption internationale? Je pense que c'est la première
question; l'autre vient ensuite.
M. Johnson: D'accord.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Johnson: Sur la politique du gouvernement en matière
d'adoption internationale, je dois vous dire d'emblée que nous
considérons, à partir de certains principes que
j'évoquerai par la suite, que l'adoption internationale est une chose
souhaitable et souhaitable au Québec, mais à des conditions
très précises.
La première, c'est que nous présumons malgré tout
que le milieu idéal et naturel d'un enfant est son milieu d'origine
biologique, où qu'il soit situé, n'importe où dans le
monde. On sait cependant que dans beaucoup de pays, notamment dans des pays qui
ont connu différentes difficultés ou qui en connaissent, des
enfants néanmoins restent abandonnés. En d'autres termes, si ce
ne sont pas des familles québécoises qui les accueillent, c'en
sera d'autres ou ce seront des enfants qui vivront plus ou moins dans un
état de marginalité sociale et plus ou moins assumés par
des services étatiques dans certains de ces pays.
À partir du moment où l'on constate cela, ce qui n'est pas
une situation que l'on souhaite, et dans la mesure où le Québec
pourrait modestement apporter sa contribution à une politique de
développement international, cela va dans le sens de ce que tente de
faire l'UNICEF, l'Organisation mondiale de la santé ou d'autres, la
situation idéale serait un monde dans lequel il n'y aurait pas
d'adoption internationale. Donc, il y en aura. Les principes sont, encore une
fois, le respect, l'intérêt de l'enfant qui est probablement le
principe central.
Deuxièmement, des règles qu'on retrouve dans ce projet de
loi que nous avions tenté d'appliquer jusqu'à maintenant, mais
avec des trous juridiques considérables. C'est pour cela qu'on
intervient par ce projet de loi, c'est-à-dire la notion
d'adoptabilité de l'enfant et de capacité d'évaluation de
la famille à savoir que c'est un milieu adéquat pour l'enfant,
aux fins de lui fournir un milieu d'affection où il pourra se
développer le plus normalement possible et où il aura les plus
grandes chances de bonheur possible.
Cette politique, d'une part, s'inscrit dans une préoccupation
plus générale, bien que son effet sur les solutions à
l'égard de ce problème soit marginal; il est celui de la
politique de la population du Québec, et on aura le temps de
l'évoquer en termes plus généraux et plus larges d'ici le
printemps prochain. Des études considérables là-dessus ont
été faites au gouvernement et sont en ce moment au
secrétariat du développement social; on en rendra certaines
publiques bientôt.
Deuxièmement, nous constatons la volonté de centaines de
familles québécoises d'accueillir un enfant. Il faut se rappeler
qu'au Québec, très peu d'enfants sont en adoption. On se
rappellera de la politique extrêmement dynamique qui avait
été mise sur pied en 1967 au Québec, où,
littéralement, en trois ans, on a, pour utiliser l'expression de
l'époque - vidé les crèches. Il y avait des milliers
d'enfants qui étaient en milieu institutionnel et, en l'espace de deux
ou trois ans, si je ne me trompe, la plupart de ces enfants avaient
été adoptés.
Donc, les listes d'attente en matière d'adoption domestique sont
très longues et c'est probablement comme cela que des parents se sont
retournés vers l'idée de procéder à une adoption
internationale. Par ailleurs, il y a des groupes très
spécialisés dans ce domaine, qui sont essentiellement des groupes
bénévoles, qui sont amenés dans différents pays et,
à travers certains organismes internationaux qui s'intéressent
à ces questions, à partager ces principes généraux
d'intérêt de l'enfant, du milieu adéquat de la famille
d'accueil, et d'un contexte juridique le plus sécure possible pour que
ce soit fait adéquatement. Le secrétariat à l'adoption,
depuis sa création il y a à peine un an et demi maintenant, a
réussi à tisser un réseau de communications
extrêmement intéressant avec ces organismes, tant sur le plan
québécois et canadien qu'international, encore une fois, dans un
univers de préoccupations qui est celui que j'ai décrit un petit
peu avant.
Quant à la deuxième question ou celle qui avait
été formulée en premier, je laisserai peut-être Mme
Gervais le préciser, mais je dirai tout de suite qu'il y a deux
catégories de personnes qui seront soumises à une espèce
de clause éponge. Il y a ces personnes qui récemment ont
adopté des enfants dans un contexte que Mme Gervais pourra vous
décrire très précisément, à travers des
individus beaucoup plus que des organismes.
Deuxièmement, les personnes qui, depuis 20 ou 30 ans au
Québec, ont procédé à de l'adoption internationale
et qui, en l'absence d'une régularisation du statut de leur enfant sur
le plan de la filiation, pourraient théoriquement se voir opposer dans
certains milieux des problèmes juridiques importants, notamment en
matière de succession. L'effet de la clause n'est pas seulement de
passer l'éponge sur les cas récents dont on a entendu parler,
mais c'est également de s'assurer des règles de filiation de
telle sorte
qu'elles soient applicables à tous les enfants qui ont
été adoptés internationalement, même par les voies
les plus formelles, les plus encadrées, etc., dans le passé. Mme
Gervais, peut-être?
Le Président (M. Rancourt): Mme
Gervais.
Mme Gervais (Lisette): Je pourrais peut-être
répondre à des questions qui soient plus précises. On
pourrait peut-être les choisir vu que nous, on a vu des cas difficiles
où des gens, par exemple, n'avaient ni évaluation, ni
intermédiaire. Le fait de ne pas avoir d'intermédiaire nous
inquiétait beaucoup sur la provenance de l'enfant, sur
l'adoptabilité de l'enfant.
Dans le cas d'évaluation des foyers, bien sûr, la loi
prévoit que ce soit le directeur de la protection de la jeunesse qui les
fasse, donc les CSS. À ce moment, c'est ce que nous exigeons et
l'intermédiaire est, par exemple, un organisme - si on parle des cas qui
ont été les plus chauds, donc on va parler d'Haïti;
peut-être certains autres cas, mais surtout Haïti. Pour Haïti,
le seul mécanisme qu'on trouvait valable, c'était d'avoir un seul
organisme, qui est l'organisme appelé "Accueillons un enfant", qui est
reconnu par le ministère des Affaires sociales pour son expertise et sa
compétence et ses rapports quotidiens avec Haïti.
Ce qu'un certain nombre de parents contestaient, c'était le fait
qu'ils aient adopté un enfant à Haïti et qu'à toutes
fins utiles je ne demande pas à Immigration Québec et à
Immigration Canada d'émettre les visas d'entrée ici. Dans ces
cas, parfois les parents n'avaient aucune évaluation, parfois, ils en
avaient une d'un travailleur social privé, parfois, ils en avaient aussi
une d'un centre de services sociaux. Parfois -dans deux cas, à ma
connaissance - ils avaient une évaluation négative d'un centre de
services sociaux. La plupart du temps, ils n'avaient pas d'intermédiaire
reconnu, et c'est là-dessus que se situait notre inquiétude face
à la provenance de l'enfant. Dans bien des cas, ce que nous racontaient
les parents sur les circonstances de l'adoption de leur enfant, c'est qu'ils
étaient allés eux-mêmes dans les familles, dans la
montagne, par exemple, à Cap-Haïtien, négocier
eux-mêmes l'enfant, si l'on peut dire, et le ramener, après avoir
eu ces contacts par un intermédiaire privé
québécois qui avait un correspondant à Haïti.
Si je peux me permettre cette expression, on les appelle les "adoptions
à hauts risques", un peu comme les grossesses à hauts risques.
Pour nous rassurer là-dessus, on a prévu de faire part de chaque
dossier au DPJ de la région où il y a cette famille. Je pense que
le DPJ peut apporter à la fois un soutien et un contrôle. Je pense
qu'il est plus important d'apporter un soutien à cet enfant. Ces
enfants-là à Haïti sont dans des crèches; ils sont ou
bien sortis d'une autre crèche ou d'une famille, mais ils sont un peu
comme nulle part. C'est pour cela qu'on veut s'assurer que l'enfant, quand il
sera ici, sera suivi. C'est ce qu'on est convenu de faire avec quelques
directeurs de la protection de la jeunesse parce que cela s'est
concentré dans une même région où était, bien
sûr, l'intermédiaire qui était le plus actif.
C'est important pour nous que cela soit adopté très
tôt, surtout pour l'avenir, moins pour le passé que pour l'avenir.
Cela nous permettra dans l'avenir d'amener au tribunal ces causes-là.
L'intermédiaire ne sera pas l'intermédiaire reconnu; les gens
seraient obligés de dire que l'intermédiaire est une personne. Je
ne sais pas si cela répond à votre question. En termes de nombre,
quand il est question d'Haïti, évidemment que c'est...
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
Lavoie-Roux.
Mme Lavoie-Roux: Ceux qui attendent que la situation soit
régularisée...
Mme Gervais: Je vous dirai qu'à ma connaissance il y en
aurait neuf, dix ou peut-être douze parce que tous ne se sont pas
nécessairement manifestés au gouvernement. Il peut y en avoir qui
attendent de voir. Ce ne serait pas plus que cela, parce que c'est un
réseau qu'on connaît bien, le réseau en provenance
d'Haïti et quelques-uns en provenance du Guatemala.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
Lavoie-Roux.
Mme Lavoie-Roux: Je suis encore la députée de
L'Acadie.
Le Président (M. Rancourt): Je sais.
Mme Lavoie-Roux: C'est la deuxième fois que vous me le
dites.
Le Président (M. Rancourt): Vous avez toujours votre nom.
Je m'excuse.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas grave. En fait, cela se limite
à une dizaine de cas.
Mme Gervais: À une dizaine de cas, puisque ces
enfants-là on les connaît bien. Ils sont là-bas.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'ils sont tous de la Mauricie?
M. Johnson (Anjou): De la Mauricie?
Mme Lavoie-Roux: Enfin, de Trois-Rivières.
Trois-Rivières, c'est la Mauricie?
M. Johnson (Anjou): Je vous dirais Trois-Rivières,
Shawinigan, Contrecoeur, Tracy et Nord-Ouest québécois.
Une voix: Compton.
M. Johnson (Anjou): Lac-Mégantic, pas Compton.
Mme Lavoie-Roux: Alors, il y en a une dizaine.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Gervais: II y en aurait une dizaine, oui.
Mme Lavoie-Roux: Dans les cas où vous avez eu deux
évaluations négatives, que faites-vous?
Mme Gervais: Dans le cas où on a eu une évaluation
négative...
Mme Lavoie-Roux: Vous avez dit que dans deux cas vous aviez eu
des évaluations négatives.
Mme Gervais: C'est dans ce sens-là que je dis que c'est
encore à plus haut risque et qu'on demande au DPJ de... On lui
présente le dossier au complet. On lui demande de surveiller cette
famille-là et de voir ensuite s'il y aurait lieu de faire un
signalement.
Mme Lavoie-Roux: C'est parce qu'ils seront adoptés ces
enfants-là.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Sauf que dans le fond ils seraient
traités comme des enfants d'un milieu naturel, normal. Pour ces deux
cas-là, il aurait fallu faire une exception tellement odieuse et
tellement complexe qu'on n'aurait pas pu la faire dans la loi.
Mme Lavoie-Roux: Mais il n'y avait pas d'objection majeure...
M. Johnson (Anjou): A priori... Mme Lavoie-Roux:
...à l'adoption.
M. Johnson (Anjou): Par exemple...
Mme Lavoie-Roux: On peut trouver que des personnes sont plus
aptes à être parents que d'autres, mais il ne s'agit pas d'une
chose fondamentale. Je ne sais pas à quoi je penserais; à des
gens irresponsables ou à un milieu criminel, je ne sais pas.
M. Johnson (Anjou): II ne s'agit pas, donc - on nous rassure
quant à cela - de milieux criminels, comme exemple, mais...
Mme Lavoie-Roux: Je vous donnais cela comme exemple, parce que je
n'avais pas d'autre idée.
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Néanmoins, ce que je
comprends du processus, c'est de faire en sorte que le DPJ étant
alerté, comme pour n'importe quelle famille où un enfant dont le
développement ou la sécurité physique ou mentale sont
susceptibles d'être menacés, il pourrait y avoir un signalement.
Il est bien évident que certains cas seront, je ne dirais pas
surveillés, mais si le DPJ obtient un signalement à
l'égard de ces familles, il comprendra très bien ce dont il
s'agit. Je pense qu'il fallait malgré tout régulariser la
situation d'adoption, compte tenu de l'état d'avancement de tout ce
dossier.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Dans les autres contrats dont il est question,
est-ce plus, pour l'ensemble des enfants qui ont été
adoptés au plan international, d'assurer la filiation ou s'il s'agit
d'autres cas qui ont été adoptés par l'entremise d'agents
privés? Et là, il s'agit de combien de cas?
Mme Gervais: Je pense que ce que M. le ministre disait, c'est
pour les années passées, ce qui peut remonter à dix,
quinze, seize ou dix-sept ans, même, à ma connaissance.
Mme Lavoie-Roux: Mais ce sont tous des cas privés?
Mme Gervais: Non, non.
Mme Lavoie-Roux: Tous des cas qui ont été faits au
plan international?
Mme Gervais: Oui, parce que... Mme Lavoie-Roux: Ah!
D'accord.
Mme Gervais: Voici peut-être un petit exemple. Beaucoup
d'adoptions ont été homologuées, mais en reconnaissant,
donc, la valeur du jugement du pays d'origine de l'enfant, ce qui n'avait pas
exactement les mêmes effets que l'adoption ici. C'était
très courant.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Comment pensez-vous, à l'avenir,
prévenir les adoptions privées, et d'une façon plus
précise, y a-t-il des dispositions qui sont prises par les
ministères de l'Immigration du Québec et du Canada? Quelle sorte
d'arrangements avez-vous? C'est la seule façon pour vous, je pense, de
contrôler les adoptions, appelons-les... Elles sont peut-être
légitimes, mais...
Mme Gervais: Transfrontières.
Mme Lavoie-Roux: ...qui ne se font pas selon les normes
reconnues.
Mme Gervais: On travaille déjà, on travaille depuis
presque le début de mon mandat avec le ministère de l'Immigration
du Québec et donc, avec le ministère de l'Immigration du Canada
et je pense que ce qui s'est passé à Haïti est vraiment la
preuve que ce mécanisme fonctionne. Le ministère de l'Immigration
du Québec n'a pas émis un certificat de sélection.
Immigration Canada n'a pas laissé partir les enfants d'Haïti. C'est
ce qui était difficile au début. Il valait mieux, je pense, ne
pas laisser les enfants quitter leur pays plutôt que de les retrouver ici
à Mirabel ou à Dorval. On a une collaboration de ces deux
ministères absolument sans problèmes et des contacts
hebdomadaires, à tout le moins.
Le Président (M. Ranoourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Mais comment, alors, a pu se développer
le problème des enfants de la république Dominicaine? Ce que j'ai
cru comprendre, c'est qu'il y en avait une dizaine qui étaient
entrés au pays. Comment se fait-il que... On peut bien adopter une loi
ici, mais...
Mme Gervais: Oui. J'allais vous dire que c'est en 1982 que ces
problèmes se sont posés avant qu'on puisse mettre ces
mécanismes en place et aussi avant la mise en vigueur des articles de
loi du 1er décembre 1982.
Mme Lavoie-Roux: Bon. D'accord. Ah oui!
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: La dernière question que je voulais poser
avant de toucher à l'étude article par article, c'est: Dans
quelle mesure veut-on aussi favoriser l'adoption d'enfants
québécois qui sont un peu plus vieux, qui peuvent même
avoir trois ou quatre ans? Je ne parle pas nécessairement de ceux qui
ont quatorze ans. Est-ce qu'il y a encore suffisamment de demandes pour eux? On
est un peu pris dans un conflit -conflit est un grand mot, en l'occurrence
-entre la nécessité aussi de donner un milieu stable à des
enfants du Québec et peut-être le désir des parents, parce
qu'on peut avoir un enfant plus jeune si on va sur le marché... Je
m'excuse, pas sur le marché.
Mme Gervais: Cela a été comme cela longtemps. (11 h
30)
Mme Lavoie-Roux: Au plan international, si on va dans l'adoption
internationale, comment conciliez-vous les deux, parce que cela peut être
plus tentant de dire... En général, les gens veulent
adopter...
Une voix: Un bébé.
Mme Lavoie-Roux: ...un bébé. Ils ont plus
l'impression que ce bébé est le leur, que s'il avait trois
ans.
Le Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Je laisserai Mme Gervais et j'aurai quelque
chose à ajouter après. Il est bien évident que les
difficultés... Il reste des enfants, au Québec qui sont
techniquement adoptables; ce sont souvent des enfants handicapés. Nous
avons, malgré tout, comme vous le savez, depuis maintenant quatre ans,
je pense, une politique d'aide à l'adoption d'enfants qui ont
vécu longtemps en familles d'accueil. Souvent, ces enfants ont un
handicap mental ou physique ou ont, parfois, des problèmes de
comportement, et se retrouvent dans des familles d'accueil. Mais je dirais que,
tous les ans, je signe une cinquantaine de reconnaissances de demandes d'aide
financière à des familles d'accueil qui ont décidé
de procéder à l'adoption de l'enfant qui a vécu, dans ce
foyer thérapeutique. Il reste que c'est un problème, c'est
évident. Je pense qu'on ne peut pas empêcher, non plus, les
parents québécois qui souhaitent avoir de jeunes enfants
d'entreprendre des démarches dans le sens de l'adoption internationale
si, au départ, c'est ce qu'ils veulent.
Le Président (M. Rancourt): Mme
Gervais.
Mme Gervais: J'allais ajouter que, de toute façon, il y a
quand même très peu d'enfants, et même des enfants plus
âgés, qui sont disponibles pour l'adoption. Maintenant, compte
tenu des articles du Code civil en vigueur depuis décembre 1982, il y
aura quand même possibilité de déclaration
d'adoptabilité. Donc, il y a un certain nombre d'enfants, qui sont
déjà en
familles d'accueil qui, à ce moment - c'est le cas, avec l'aide
financière à l'adoption -deviennent adoptables par ces
dispositions du Code civil. C'est même le cas pour les enfants
mongoliens. On en est à cette gravité de handicap, si l'on veut,
et des enfants plus âgés. D'autre part, ce sont parfois des gens
différents, parfois "une autre clientèle" entre guillemets qui
désire adopter à l'étranger, mais c'est aussi, parfois,
les mêmes familles. Quand on parle de familles qui adoptent leur premier
enfant, c'est différent, mais, pour des familles qui en ont
déjà adopté, trois ou quatre ou cinq ou six - ou, dans un
cas exceptionnel, 21 -ces gens ont à la fois intégré des
enfants de différentes nationalités, mais aussi des enfants
québécois qui étaient ou plus âgés ou
handicapés. Cela se retrouve souvent parce que la notion même
d'adoption se trouve être une notion qui est beaucoup plus large.
Le Président (M. Rancourt): Mme la députée
de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Dans le cas où il y a 21 enfants. Est-ce
que la loi va régulariser leur...
Mme Gervais: Oui, plusieurs d'entre eux.
Mme Lavoie-Roux: Je trouve bien heureux les gens qui, en 1983,
peuvent s'occuper de 21 enfants. C'est un peu un orphelinat.
Mme Gervais: C'est à cause de leur âge. Il y a des
plus vieux qui sont sortis. Il faut aussi dire que personne d'autre ne voulait
de ces enfants.
Le Président (M. Marcoux): Ce qui termine les remarques
préliminaires. Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question.
Le Président (M. Marcoux): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez fait un suivi, par exemple,
de la persévérance des parents qui ont adopté au plan
international. Je ne sais pas combien il y en a eu sur le plan international
jusqu'à maintenant. Si on prend depuis 17 ou 18 ans. Est-ce que le plan
de la persévérance ou le succès est équivalent aux
adoptions qui se sont faites avec les enfants québécois?
Mme Gervais: D'abord, la première adoption qu'on appelle
internationale, a eu lieu au Vietnam il y a maintenant seize ans. On a depuis
l'automne, entrepris une enquête sur le vécu de ces enfants, sur
l'intégration des enfants dans les milieux. C'est une
préoccupation presque mondiale à la fois des pays qui nous
confient leurs enfants et aussi ceux qui reçoivent les enfants, mais
davantage des pays qui nous confient leurs enfants. On a quand même
très bien structuré, avec de très bons dossiers, des
dossiers qui sont à jour depuis à peu près dix ans. On
prend 1200 de ces dossiers d'adoption. Une enquête est en cours dont les
résultats seront disponibles au début de février. À
ce jour, 500 questionnaires assez volumineux, d'une cinquantaine de pages, ont
été remplis avec la collaboration des parents dans 98% des cas.
Je pense que ce sera extrêmement intéressant de savoir cela, ce
qu'on n'avait pas vraiment.
Mme Lavoie-Roux: Vous n'avez pas d'information précise
pour le moment.
Mme Gervais: Sauf, bien sûr, par les centres de services
sociaux, par les organismes avec lesquels on travaille.
Mme Lavoie-Roux: En général, j'imagine que ce doit
être comparable...
Mme Gervais: Comparable à l'adoption
régulière.
Mme Lavoie-Roux: L'adoption au Québec. Oui.
Mme Gervais: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que vous seriez
prêt à passer à l'article 1?
Mme Lavoie-Roux: Oui, on peut passer à l'article 1.
Étude article par article
Le Président (M. Brouillet): J'appelle l'article 1.
Modification au Code civil du Bas-Canada
M. Johnson (Anjou): M. le Président, par l'article 1, il
s'agit dans le fond d'établir une règle pour faire preuve de la
loi étrangère plutôt que procéder par preuve par
expert qui est très complexe, coûteuse et longue. On introduit la
notion qu'une fois que le juge a une copie certifiée de la loi, cela
fait preuve prima facie du droit du pays d'où vient l'enfant.
Mme Lavoie-Roux: Cela va.
Le Président (M. Brouillet): L'article 1
est-il adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Modifications au Code civil du Québec
Le Président (M. Brouillet): J'appelle l'article 2.
M. Johnson (Anjou): II s'agit ici d'établir la
règle de droit international privé qui s'applique,
c'est-à-dire établir le principe qui permet aux États
réciproquement de savoir comment s'harmonisent leurs lois. Ce que nous
affirmons, c'est que dans le cas de l'adoption d'un enfant domicilié
hors du Québec, ce sont les règles relatives au consentement et
à l'adoption de son pays d'origine qui s'appliquent aux fins de juger de
son adoptabilité.
Mme Lavoie-Roux: Pour la première partie, "dans le cas de
l'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec, les
règles relatives au consentement à l'adoption et à
l'adoptabilité de l'enfant sont celles que prévoit la loi de son
domicile." Quels sont les rapports que vous entretenez avec ces pays pour
assurer que l'adoptabilité de l'enfant se fait selon des règles
qui sont un peu similaires au plan des principes humains? Il y a sûrement
des différences culturelles. Même si n'importe quel gouvernement
nous donne une attestation d'adoptabilité de l'enfant et qu'on dit:
Parfait, peu importe ce qui se passe de l'autre côté de notre
frontière... Même involontairement, je pense qu'on ne voudrait pas
être complice de certains régimes. L'exemple qui me vient en
tête, quoique je ne pense pas que la situation se soit
présentée, je prends les enfants de l'Argentine qu'on a
envoyés pour adoption, probablement pas ici mais un peu partout en
Amérique du Sud. Ce n'est pas facile pour un gouvernement de dire:
Écoutez, il est adoptable. Il y a quand même des espèces de
garde-fous qu'il faudrait mettre pour s'assurer qu'on n'est pas
involontairement complice d'actions qui, au plan humain, sont
inacceptables.
M. Johnson (Anjou): Vous parlez des mères et des
grand-mères.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Mme Gervais: On a des contacts avec elles. J'espère bien
que cela ne se représentera pas en Argentine, je pense que la situation
est différente. On a eu ce problème avec le Salvador. J'ai
demandé à M. Johnson si on pouvait se permettre de ne pas
permettre l'entrée d'enfants salvadoriens, parce qu'il y avait
peut-être des possibilités d'avoir des enfants qui venaient du
Salvador, sauf qu'au Salvador, on savait pertinemment - j'ai pu vérifier
pour ma part - que tous les mouvements rattachés à
l'Église et l'archevêque même de San Salvador étaient
opposés à l'adoption d'enfants parce que ces enfants pouvaient
peut-être être des orphelins mais les parents pouvaient être
des parents disparus. J'ai rencontré aussi deux mères et
épouses salvadoriennes qui étaient de passage, qui sont
réfugiées à Mexico, qui nous ont dit que ce qu'elles
souhaitaient, c'était de l'aide là-bas pour avoir des types de
garderies pour les enfants et permettre aux enfants de demeurer dans leur
famille même si ce n'était pas la famille immédiate.
À ce moment-là, on s'est opposé à l'entrée
de ces enfants. Je pense qu'on est très vigilant par nos contacts avec
les pays, avec les organismes internationaux, avec les organismes
bénévoles ici.
D'autre part, si on pense à un pays comme la Corée, par
exemple, c'est un pays qui nous confie des enfants par le biais d'une agence,
le Social Welfare Services, et cette agence est reconnue par l'État. Les
enfants sont de passage dans ce qu'on pourrait appeler un orphelinat, mais ils
sont tout de suite replacés dans des familles d'accueil en attendant
d'être adoptés par des Québécois. On a entre 50 et
60 enfants qui, cette année, vont arriver de la Corée avec un
dossier extrêmement bien fait sur leur histoire médicale, leur
histoire sociale, par exemple, l'histoire des parents, dans la mesure où
elle est connue.
C'est ce genre d'entente que l'on fait par des contacts. Par exemple,
j'ai rencontré le responsable de Social Welfare Services quand il
était de passage aux États-Unis, à New York; il y a des
gens de chez nous qui y vont comme escortes et qui peuvent, en ramenant les
enfants, vérifier sur place. J'ai dit "chez nous", ils ne sont pas du
ministère, mais de l'organisme bénévole avec lequel on
travaille. Ils vont sur place voir dans quelles conditions les choses sont
faites et c'est vraiment le type de relations que l'on veut entretenir avec les
pays, que l'on veut maintenir. Tout ce temps, nous demandons à nos
organismes bénévoles qu'ils s'occupent d'aider les enfants chez
eux, soit par des formes de parrainage d'enfants qui ne pourront jamais
être adoptés, soit par un support aux familles pour qu'elles
puissent les garder, etc.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais...
Mme Gervais: Est-ce que cela répond à votre
question?
Mme Lavoie-Roux: Oui, cela répond à ma question,
mais il reste un élément de...
Mme Gervais: Je pourrais peut-être ajouter qu'on est
absolument contre - et on
en a fait une politique qu'on a transmise à tous les directeurs
de la protection de la jeunesse, à tous les praticiens aussi, aux
organismes bénévoles - l'adoption, à défaut d'un
meilleur mot, qu'on appelle privée directe, c'est-à-dire de
famille adoptive à famille biologique. Je trouvais, personnellement, que
cela posait des problèmes d'éthique. Ce sont des problèmes
qui préoccupent tous les organismes sur le plan international qui
s'occupent d'adoption qu'on dit transfrontières.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne pouvez pas procéder par entente -
enfin, je ne sais pas quel caractère juridique elle pourrait avoir
-entre le Québec et un autre pays en ce qui touche l'adoption? Quand on
fait une entente, on connaît les conditions du contrat d'un
côté comme de l'autre et je me demande s'il n'y aurait pas
là un élément un peu plus sécuritaire. Je comprends
ce que vous dites, le ministre expliquait hier que ce sont des enfants qui sont
en institution. On doit s'assurer qu'ils sont adoptables, etc., mais dans
quelle mesure peut-on s'en assurer? Dans le fond, ils arrivent avec leur
certificat d'adoptabilité qui est donné par leur pays
d'origine.
Pour assurer le maximum de sécurité dans ce type de
relations qu'on a avec d'autres pays eu égard à l'adoption,
est-ce qu'on pourrait envisager une possibilité d'entente? Je ne sais
pas quel caractère on pourrait lui donner, peut-être pas
nécessairement un caractère juridique, mais, si on prend la
Corée...
Mme Gervais: On a ce type d'entente.
Mme Lavoie-Roux: Vous l'avez. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de
l'étendre à tous les pays où on adopte?
Mme Gervais: C'est très difficile. Sur le plan
international, c'est très difficile. Cela existe, mais...
Mme Lavoie-Roux: On pourrait peut-être essayer de la
développer.
M. Johnson (Anjou): Oui, on a déjà un comité
- c'est ce que j'allais dire - qui travaille à une entente. Ce qui est
important, c'est d'arriver à signer une première entente. Comme
le Québec a une juridiction exclusive dans le domaine de
l'adoption...
Mme Lavoie-Roux: Pour une fois que vous pouvez exercer une
juridiction, servez-vous en.
Mme Gervais: Une entente est amorcée avec les Philippines.
Si vous me demandez pourquoi avec ce pays plus qu'un autre, c'est parce qu'il y
avait déjà des traditions, il y avait déjà des
amorces et ils ont offert de signer une entente. En ce moment, c'est en
négociation et cela devrait se signer assez tôt.
M. Johnson (Anjou): II faut comprendre qu'en
général, à part cela, c'est un peu compliqué pour
les gouvernements, dans quelque pays que ce soit, d'admettre, dans le cadre
d'une entente internationale, qu'il prend de ses enfants pour les envoyer
à l'étranger. (11 h 45)
Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'il ne faudrait
peut-être pas lui donner un caractère juridique sur le plan
international, mais au moins qu'on n'entre pas en relation avec eux à
moins qu'on sache un peu quelles sont les conditions de l'autre
côté de la clôture. Cela peut être une entente qui,
à un moment donné... justement si elle est moins juridique on
peut l'abandonner ou y faire les modifications au fur et à mesure
peut-être qu'un pays devient plus sensibilisé. Je suis sûre
qu'ils n'ont pas nécessairement la même philosophie que nous quant
à ce que cela représente pour les parents qui laissent aller leur
enfant pour adoption.
Mme Gervais: C'est aussi une préoccupation des juristes,
par exemple, sur le plan international, des organismes de développement
social. De nouveau il en est question à des comités auxquels on
participe sans y être mais en y étant par les organismes
bénévoles ou par correspondance beaucoup. C'est d'avoir un code
d'éthique international sur l'adoption. Il y a aussi l'importance pour
nous que l'on puisse...
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, il n'y en pas de code
international?
Mme Gervais: Non, il n'y en a pas en ce moment. C'est une demande
qui a été faite aux conférences en développement
social par exemple, qui ont lieu tous les deux ans. C'est la quatrième
fois que cela sera ramené pour présenter aux Nations Unies. Les
principes sont là, mais qu'on en arrive à avoir ce code
d'éthique sur le plan international, un code avec lequel les pays qui
confient des enfants et les pays qui les reçoivent sont d'accord, cela a
été discuté à La Haye l'été dernier,
cela a été discuté à Quito en Équateur.
C'est une grande préoccupation surtout des pays d'Amérique latine
qui, très souvent, à cause de leur pauvreté assistent peu
à ces conférences. Ils ne peuvent pas se déplacer, ils ne
peuvent pas y aller, ils ne peuvent pas envoyer de
délégués. Dès qu'il y a de plus petits
comités, par exemple, ou par nos contacts qui sont assez
fréquents avec...
Mme Lavoie-Roux: Dans le moment le seul pays avec lequel vous
auriez une entente c'est la Corée.
Mme Gervais: La Corée, un accord.
Mme Lavoie-Roux: ...un accord ou entente, je ne veux pas...
Mme Gervais: Oui. Sauf qu'on en a aussi avec d'autres
répondants dans des pays mais qui ne sont pas une entente aussi formelle
que la Corée, cela c'est sûr. Le modèle Corée est
celui qu'on veut arriver à établir avec plusieurs pays dans la
mesure -j'allais ajouter aussi - où une adoption qui est faite par
exemple dans un pays. C'est le cas de l'Amérique latine où il
peut y avoir deux types d'adoption. Mais on veut faire des ententes avec des
pays où l'adoption est vraiment une rupture de liens de filiation
biologique pour devenir une filiation de l'enfant avec ses parents adoptifs, ce
qui n'est pas toujours le cas avec l'Amérique latine. Mais dans la
mesure où par exemple, la notion même d'adoption ne rompt pas le
lien de filiation on ne pourra pas accepter l'enfant. C'est prévu dans
un des articles.
Mme Lavoie-Roux: Comme Haïti par exemple, que ce soit un peu
plus formalisé cela ne serait pas mauvais.
Mme Gervais: On y travaille, j'allais dire, jour et nuit
d'arrache-pied.
Mme Lavoie-Roux: Je suis mieux de ne pas faire de commentaire,
parce que c'est au journal des Débats. Même si j'ai
l'immunité...
Le Président (M. Brouillet): L'article 2 est-il
adopté?
Mme Lavoie-Roux: À la condition qu'il y ait un engagement
de la part du ministère d'essayer, peut-être avec certaines
variantes, d'établir avec chacun des pays où on va chercher des
enfants, un type d'entente qui soit un peu plus formelle que juste la bonne
volonté - que je ne mets pas en doute - de gens dans le pays d'origine
ou autres ou d'organismes ou de points de repère qu'on a ici et
là qui, à un moment donné, de toute façon peuvent
disparaître pour...
M. Johnson (Anjou): Je pense qu'on peut sûrement donner cet
engagement à deux chapitres rapidement. Premièrement, c'est qu'on
essaie d'encadrer cela le plus formellement possible, mais quand on sait les
difficultés que cela pose... Deuxièmement, il ne faut pas oublier
que nos règles d'ordre public interne s'appliqueraient si jamais le
secrétariat s'adonnait à des transactions avec un quelconque
endroit que je ne nommerai pas, mais où littéralement
l'État se livre au commerce des enfants; je pense que ce serait contre
l'ordre public du droit québécois que le secrétariat le
fasse.
Donc, il y a une espèce de garantie dans les personnes qui vont
chercher ces enfants, qui ont la responsabilité d'accréditer des
intermédiaires, etc. Ils sont soumis à des principes
généraux au niveau de l'ordre public qui font qu'à toutes
fins utiles on ne pourrait pas transiger avec une quelconque fraction du
continent latino-américain ou africain ou ailleurs qui déciderait
de se faire un îlot de 100 milles carrés où il y a du
trafic d'enfants. Je pense que ce serait contre l'ordre public. Le tribunal ici
chez nous ne sanctionnerait pas cela. Je pense qu'il y a toutes sortes de
mécanismes qui font que même s'il n'y a pas une contrainte
juridique absolue qui est, à toutes fins utiles, impossible à
établir parce qu'on parle du droit et du fonctionnement du droit dans
d'autres États, il y a ici, je pense, des mécanismes qui
garantissent que l'action des organismes que nous accréditons comme
secrétariat est balisée par ces principes au coeur desquels on
retrouve la notion d'intérêt de l'enfant.
Le Président (M. Desbiens): L'article 2 est adopté.
L'article 3?
M. Johnson (Anjou): Le premier paragraphe de l'article 3 vise
à confirmer dans la loi qu'il faut absolument agir par
intermédiaire accrédité. Deuxièmement, à
mettre le juge dans une position où également il s'assure que la
DPJ a fait l'évaluation de la famille. Ce sont les deux principes de
base. On dit dans le fond ià-dedans que le tribunal avant de rendre sa
décision doit s'assurer que les dispositions de la Loi sur la
santé et les services sociaux qui touche l'accréditation de
l'intermédiaire, comme l'évaluation par le DPJ, sont
respectés.
Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire quels sont vos
critères d'accréditation d'un organisme?
Mme Gervais: Avec les organismes, on signe un protocole d'entente
qui est quand même assez volumineux, mais qui demande aux organismes
d'abord de s'engager à aider les enfants sur place, ce que je vous ai
dit tantôt, dans leur famille d'origine et dans leur milieu. Ensuite, ils
ont un rôle extrêmement important, un rôle majeur dans ce
qu'on appelle le jumelage - à défaut d'un autre mot - de
l'enfant, c'est-à-dire l'enfant dans son pays d'origine avec la famille
ici; mais c'est quand même le Directeur de la protection de la jeunesse
qui a le rôle déterminant dans ce jumelage. Les positions vont
être faites là. Mais ce sont les organismes qui doivent nous faire
la preuve,
qui sont supports aux parents, qui font ce parrainage et qui apportent
des mesures d'aide dans le pays. Ce sont des organismes qui ont
déjà un passé certain, ont dix ans d'existence et d'autres
peut-être deux ans, mais c'est ce type d'organisme qui a
déjà un fonctionnement et qui parfois commence d'abord en
travaillant comme support aux parents avant l'adoption et qui apporte un suivi
aux parents après et qui, aussi, sont ressources pour les escortes. Par
exemple, pour la Corée, on a ce type d'organisme.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez un prototype de...
Mme Gervais: Protocole? Mme Lavoie-Roux: Oui. Mme
Gervais: On peut l'obtenir. Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): L'article 3 est adopté.
Article 4?
M. Johnson (Anjou): II s'agit ici de s'assurer que le lien de
filiation, c'est-à-dire tous les droits qui découlent du fait
qu'on devient un enfant adopté, donc, on dit un enfant à part
entière, à toutes fins que de droit, de s'assurer que le juge en
prend acte et la loi du pays où l'adoption a été faite qui
est le lieu du domicile de l'enfant le prévoit ou bien le juge ici doit
y pourvoir. On réaffirme encore cette question que dans le processus, le
juge doit tenir compte que si les dispositions de la Loi sur la protection de
la jeunesse ont été respectées, c'est-à-dire
l'intermédiaire, c'est passé par un intermédiaire en
deuxième lieu, une évaluation de la DPJ, il ne reprend pas la
décision au fond, il constate que le processus a été
respecté.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): L'article 4 est-il
adopté? Adopté. Article 5?
M. Johnson (Anjou): C'est le décès
prématuré d'un adoptant.
Ah oui, quand l'adoptant décède
prématurément, s'assurer que l'enfant peut malgré tout
réaliser ses... Je présume que la situation pratique, c'est qu'on
est en cours d'adoption. Le jugement d'adoption a été
prononcé à l'étranger. L'enfant, au moment où il
arrive dans sa famille ici, n'a pas de filiation au sens du jugement
étranger. C'est de s'assurer qu'on donne ce lien de filiation pour
être sûr que l'enfant a droit à tout ce à quoi il
aurait droit s'il était un enfant du Québec.
Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est-il
adopté?
Mme Lavoie-Roux: C'est conforme aux lois qui existent pour les
mouvements d'adoption?
M. Johnson (Anjou): Voilà! En matière domestique.
C'est cela.
Le Président (M. Brouillet): Adopté.
Mme Lavoie-Roux: Seulement une question...
Le Président (M. Brouillet): Oui, excusez-moi.
Mme Lavoie-Roux: ...plus ou moins reliée à ceci. Y
a-t-il eu des cas relevés où des enfants étaient
décédés et pour lesquels des familles avaient
assumé des frais à l'étranger?
Mme Gervais: Qui pouvaient avoir été adoptés
à l'étranger?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Des enfants décédés
avant d'arriver au pays?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Mme Gervais: À ma connaissance, il y a un cas à
Haïti où les requérants étaient allés chercher
un enfant dans la montagne. Cet enfant avait 22 ou 26 jours. Ils ont
ramené l'enfant à Port-au-Prince. L'enfant a été
placé dans une pension ou une crèche. J'ai parlé à
plusieurs reprises à ces gens-là. Ils étaient
extrêmement malheureux. Je leur ai dit aussi que l'enfant était
bien jeune pour quitter sa mère biologique. Ces gens-là ont fait
une autre demande et leur demande...
Mme Lavoie-Roux: Étaient-ils passés par une des
agences reconnues?
Mme Gervais: Non, non.
Mme Lavoie-Roux: Ils l'avaient fait privément.
Mme Gervais: Oui. Ils étaient passés par le groupe
dont on a beaucoup parlé dans les médias.
Mme Lavoie-Roux: Et qu'en est-il dans le cas des enfants atteints
d'un handicap? On a parlé aussi de certains cas d'enfants qui avaient
finalement été adoptés et étaient des enfants
handicapés. Ce n'est pas que j'en aie contre cela, mais...
Mme Gervais: Non.
Mme Lavoie-Roux: ...l'enfant était arrivé et ils ne
savaient pas qu'il était handicapé. Vous n'avez pas eu de...
Mme Gervais: Je ne l'ai pas à la mémoire, mais, en
fait, je peux vous dire que ce qui est prévu avec les organismes, c'est
que les parents ou les requérants sont conscients du dossier
médical. Le dossier médical n'est pas selon nos critères
d'ici, mais, dans la mesure où on peut obtenir des données sur un
dossier médical de l'enfant, c'est ce qui est proposé aux parents
en même temps que la proposition d'un enfant leur est faite, comme on le
fait ici. C'est important que les gens en soient très conscients. Il y a
plusieurs enfants qui ont été adoptés et qui avaient un
handicap, mais les parents le savaient. Ils savaient aussi quel type de
handicap, à moins que vous parliez d'un enfant aveugle. C'est
peut-être cela.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, c'est un enfant qui avait un
handicap. Ce que je me demandais, dans quelle mesure.... D'abord, vers quel
âge, en général, sont-ils adoptés?
Mme Gervais: La plupart des enfants...
Mme Lavoie-Roux: En bas d'un an?
Mme Gervais Non, non. Ils peuvent avoir plus d'un an. C'est pour
la demande, moins d'un an...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Mme Gervais: ...mais il y a des enfants qui ont entre un an et
trois ans, pour la plupart. Il y a des enfants qui sont plus âgés,
qui ont cinq ans et...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais, pour la majorité, ils ont
moins de trois ans.
Mme Gervais: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Et de moins d'un an?
Mme Gervais: À leur adoption, ils peuvent avoir moins d'un
an, mais il reste qu'il peut quand même y avoir, avant que les
procédures ne soient complétées, cinq ou six mois de
délai. Ils arrivent ici et ils peuvent avoir...
Mme Lavoie-Roux: C'est rare qu'un enfant arrive avant six
mois.
Mme Gervais: Oui, avant six mois. Il y a quelques cas qui ont
été faits sur le plan privé, mais il y a eu des
problèmes sérieux. Il y a un enfant qui est
décédé ici récemment, un enfant qui avait une
maladie très rare, qui pouvait se diagnostiquer après trois mois,
mais, habituellement, les enfants qui vont arriver de Corée, par
exemple, auront entre cinq mois et cinq ans.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Dans le cas de l'adoption internationale -
ici, c'est plus facile - les parents sont-ils mis au fait que, par exemple, un
enfant - surtout s'il vient d'un pays où il n'y a pas beaucoup
d'expertise médicale, par exemple, sur la déficience mentale ou,
même si ce n'est peut-être pas considéré selon les
mêmes critères que nous...
Mme Gervais: Ou les effets de la sous-alimentation.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela, les parents sont-ils mis au
courant? Y a-t-il des retours d'enfant après que des parents se soient
aperçus que leur enfant était handicapé? (12 heures)
Mme Gervais: Dans la mesure où les parents ont
procédé par les voies normales et à notre connaissance, il
n'y a pas eu ce type de rejet, il faut bien le dire, ou de second abandon.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article 6?
M. Johnson (Anjou): II s'agit d'affirmer le principe que la
reconnaissance du jugement d'adoption produit les mêmes effets que si le
jugement d'adoption avait été rendu au Québec, à
compter du prononcé du jugement d'adoption rendu hors du Québec.
En d'autres termes, le lien de filiation est créé de fait par le
jugement québécois, mais ce jugement est rétroactif au
jugement d'adoption du pays de l'enfant adopté. Il faut s'assurer qu'il
n'y a pas de vide juridique entre le moment où l'enfant perd ses liens,
puisqu'il devient adopté en vertu de la loi étrangère, et
le moment où il arrive ici.
Le Président (M. Brouillet): L'article 6 est
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Modifications au Code de procédure
civile
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article 7?
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Brouillet): L'article 7 est
adopté? Adopté. L'article 8.
M. Johnson (Anjou): II s'agissait de l'obligation par
l'intermédiaire de l'article 72.3, en vertu de la Loi sur la protection
de la jeunesse, c'est-à-dire les organismes bénévoles,
d'être des corequérants des adoptions internationales qui se
réalisaient devant les tribunaux québécois. L'obligation
aurait de nouveau imposer à ces organismes de débourser des frais
inutilement. Dans la mesure où on les accrédite, dans la mesure
où nos règles de droit sont maintenant précises, il n'est
pas nécessaire qu'ils soient des corequérants ayant recours
à ces frais inutilement. C'est le Directeur de la protection de la
jeunesse qui va faire cela.
Le Président (M. Brouillet): L'article 8 est-il
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article
9?
M. Johnson (Anjou): II s'agit d'éviter d'avoir à
signifier aux parents biologiques étrangers la copie de la demande de
placement. On comprendra qu'il est difficile ou, à toutes fins utiles,
impossible de signifier une telle copie dans les plaines de la Corée du
Sud ou dans les montagnes du Pérou.
Mme Lavoie-Roux: À cet article-là, il y a quelqu'un
qui me faisait un commentaire. Est-ce que M. Bergeron est ici? On vous a fait
également ce commentaire sur l'article 9. On désirait que soit
ajouté - c'est très technique et je sais que vous êtes au
courant - à 825.1: Dans le cas où le consentement à
l'adoption est spécial, l'avis de la demande de placement est
signifié par le demandeur.
Il semble qu'à certains endroits on fait une différence
entre le consentement spécial et le consentement ordinaire, par
opposition. Par rapport au Code civil, ce n'est pas très clair. Il est
à un endroit et il ne se retrouve pas à l'autre. C'est
très technique. Je ne sais pas si c'est justifié ou pas, c'est
à vous de décider cela.
M. Johnson (Anjou): C'est une proposition qui effectivement m'a
été faite un peu à la dernière minute.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas de mon cru, alors je vous la
donne.
M. Johnson (Anjou): La demande, c'est quelque chose d'abord qui
ne concerne pas l'adoption internationale proprement dite. C'est quelque chose
qui concerne l'ensemble des problèmes de l'adoption. Il s'agit des
adoptions dites spéciales, c'est-à-dire celles qui se font entre
parents jusqu'au troisième degré et qui ne nécessitent pas
l'intervention du Directeur de la protection de la jeunesse parce que justement
il y a un lien de parenté. Dans ces adoptions, comme le Directeur de la
protection de la jeunesse n'intervient pas en vertu de la loi, il est absent du
dossier. Or, il y a un article, qui est le 825.1, qui prévoit que toute
demande doit être signifiée au Directeur de la protection de la
jeunesse et que l'avis de la demande est signifié par le Directeur de la
protection de la jeunesse aux parents. Donc, l'article 825.1 prévoit
que, lorsqu'il y a une adoption, un avis de cette adoption doit être
signifié aux parents biologiques par le Directeur de la protection de la
jeunesse.
Cela concerne les adoptions en général. Or, dans les
adoptions spéciales, le Directeur de la protection de la jeunesse
n'intervient pas. Donc, la suggestion qui m'a été faite -mais,
comme je vous dis, c'était un peu à la dernière minute,
c'est pour cela que cela ne se retrouve pas dans le projet de loi - est
celle-ci: Est-ce qu'on ne pourrait pas clarifier ce qui est actuellement une
opinion juridique en disant que, comme ce sont des adoptions spéciales
et que le Directeur de la protection de la jeunesse n'intervient pas, donc, ce
ne devrait pas être à lui de faire la signification? Comme cette
suggestion m'a été faite - je ne vous le cache pas - hier soir en
fin de journée, cela a été...
Mme Lavoie-Roux: Je pensais que c'était hier matin.
M. Johnson (Anjou): Ou hier matin, peut-être. Mon souvenir
était que c'était hier soir, mais c'est possible. Je n'ai donc
pas eu le temps - c'est une suggestion par téléphone d'un avocat
qui travaille, qui est compétent, évidemment - de vérifier
la pertinence de cela.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela ne vaudrait pas la peine, de
toute façon, que vous en examiniez la pertinence? Et, si cela peut
éclairer et simplifier les choses, qu'on l'inclue, c'est tout.
M. Johnson (Anjou): On peut même aller plus loin que cela.
Comme le comité de législation siège cet
après-midi, je vais demander à mon collègue de la Justice
et également au secrétariat du comité de
législation, de voir cette proposition. Si
j'obtiens l'aval du comité de législation cet
après-midi, on pourrait le faire au moment du rapport.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'on adopte quand
même l'article 9, quitte à le modifier plus tard?
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mme Lavoie-Roux: C'est
cela.
M. Johnson (Anjou): On tient pour acquis qu'en troisième
lecture ou au moment du rapport, si on fait un amendement...
Le Président (M. Brouillet): L'article 9 est
adopté. J'appelle l'article 10.
M. Johnson (Anjou): II s'agit de la section V, sur la
reconnaissance des jugements qui sont rendus hors du Québec. Il s'agit
de préciser à l'article 825.6 ceux qui peuvent faire la
requête et les documents à produire au soutien de la requête
et, à l'article 825.7, les demandes dites accessoires.
Mme Lavoie-Roux: On va finir cela et je reviendrai sur autre
chose. On est aux articles 825.6 et 825.7, n'est-ce pas?
Une autre suggestion m'a été faite très rapidement
par le même avocat. Je l'apporte strictement dans l'esprit que, si on
peut enlever des petits problèmes techniques, c'est aussi bien de le
faire.
M. Johnson (Anjou): La modification des registres de
l'état civil?
Mme Lavoie-Roux: Oui, des registres de l'état civil. Cela
est en lien avec l'acte de naissance dans les pays étrangers.
M. Johnson (Anjou): On a discuté cette proposition avant,
ce n'est pas une proposition de dernière minute, même si je ne
blâme personne. Dans l'article 825.7, on dit que le requérant peut
joindre à sa demande des demandes accessoires, comme le changement de
nom ou de prénom de l'adopté et la modification des registres de
l'état civil. C'est pour qu'il y ait un suivi, pour que cela soit
inscrit dans les registres, etc.
Ce qui inquiète la personne avec qui vous avez discuté,
c'est que le mot "modification" n'inclut pas la création de toutes
pièces d'un nouveau dossier pour un enfant qui est né à
l'étranger et qui n'a pas ici d'acte d'état civil.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Johnson (Anjou): Ce n'est donc pas, au sens propre du terme,
la modification, selon cette façon de voir les choses, sauf que,
l'expression "la modification des registres de l'état civil" ici, c'est
une expression qui est utilisée ailleurs dans le Code civil. Quand on
dit qu'on modifie le registre de l'état civil, cela inclut ou bien la
création d'un nouvel acte ou la modification proprement dite, mais, de
toute façon, dès que l'on touche à un acte d'état
civil...
Mme Lavoie-Roux: Cela peut être l'un ou l'autre.
M. Johnson (Anjou): ...on modifie l'ensemble des registres.
Alors, cela inclut cette chose et c'est d'ailleurs exactement le même
esprit qui se traduit dans les autres articles du Code civil sur les actes
d'état civil concernant le mariage, etc., les actes de sépulture
et c'est le même état d'esprit qu'on va retrouver dans d'autres
amendements...
Mme Lavoie-Roux: Alors, c'est inutile d'ajouter...
M. Johnson (Anjou): ...qui peuvent venir sur le Code civil. Pour
ma part, après en avoir discuté avec les gens du ministère
de la Justice, on a conclu que cette crainte n'était pas
justifiée.
Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord. Il n'y aura pas de plaidoyer.
J'aimerais...
Le Président (M. Brouillet): Oui.
Mme Lavoie-Roux: ...excusez-moi, M. le Président, je me
rends compte qu'on est rendu à l'article 825.5 du Code civil. On a
passé, parce qu'on s'en est tenu strictement à ce projet de loi
qui est devant nous... Aux articles 631 et 632, il y a toute la question du
caractère confidentiel des dossiers d'adoption, ce à quoi j'ai
touché un peu, hier. Je me rends compte, d'abord, que cela n'est pas
dans le projet de loi, M. le Président, et que, par rapport à ce
qu'on discute, on retourne en arrière...
Le Président (M. Brouillet): Excusez-moi, est-ce que c'est
nécessaire avant d'adopter le...
Mme Lavoie-Roux: Ah oui! Je pensais qu'on l'avait adopté,
c'est pour cette raison.
Le Président (M. Brouillet): Non.
Mme Lavoie-Roux: Alors, on va l'adopter.
Le Président (M. Brouillet): Alors, adoptons l'article 10
et...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Brouillet): L'article 10 est
adopté.
M. Johnson (Anjou): Adopté.
Le Président (M. Brouillet): Très bien.
Allez-y.
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord. Aux articles 631 et 632, le
recours au tribunal pour permettre la consultation du dossier d'adoption
uniquement à des fins de renseignement, de recherche ou d'enquête
publique, et surtout la restriction contenue dans l'article 632, "ces
consentements ne doivent faire l'objet d'aucune sollicitation". Est-ce qu'on
n'attend pas de jugement, en ce moment, pour voir quelle interprétation
on va lui donner? Dans un premier jugement, cela a été
interprété d'une façon restrictive...
M. Johnson (Anjou): C'est en appel.
Mme Lavoie-Roux: ...je pense qu'on est en appel, c'est cela.
M. Johnson (Anjou): II n'y a pas encore de jugement rendu...
Mme Lavoie-Roux: Il n'y a pas de jugement encore...
M. Johnson (Anjou): ...pas à ma connaissance
récemment.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Vous êtes à établir des
règles - vous m'avez répondu, hier, à l'Assemblée
nationale - sur certaines choses que vous êtes prêt à faire
pour les enfants qui seront adoptés à l'avenir ou qui sont
adoptés à partir d'aujourd'hui. Par contre, sur la
rétroactivité, si je puis m'exprimer ainsi, on a des
réticences dans une certaine mesure. Je pense que les réticences
doivent certainement comprendre la nécessité d'avoir le
consentement des deux parties. C'est mon point de vue et je pense que c'est
celui de la majorité des gens.
Il reste que vous avez, d'un côté, Mme X, qui est
consentante, et M. Y, qui est consentant, mais il n'y a aucun moyen pratique de
pouvoir les solliciter dans le sens d'une rencontre avec l'autre.
L'interprétation qu'on fait est due à la restriction du dernier
paragraphe de l'article 632. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, à ce
moment-ci, étant donné qu'on est dans l'adoption... D'abord, je
ne sais pas pourquoi on l'a mis et je dois dire que je pense que j'y
étais quand cela s'est passé... Je n'en suis pas sûre, mais
en tout cas, peu importe; je vais dire que je n'y étais pas, mais je
n'en suis pas certaine non plus. Est-ce que ce ne serait pas le moment de le
modifier, aujourd'hui?
M. Johnson (Anjou): Non.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Mais pourquoi y tenez-vous tant que
cela?
M. Johnson (Anjou): C'est-à-dire que, la cause
étant en appel, je pense que la valeur de notre système
d'interprétation des lois et surtout avec le niveau... d'après,
cela permet une évolution très graduelle, finalement, de
l'interprétation des lois en fonction de ce que les juges
considèrent être comme l'évolution de la
société. Le législateur peut faire la même chose en
changeant les lois. Je pense que je n'oserais pas parler de l'esprit du
législateur sur la notion de sollicitation. On voulait laisser le
débat ouvert. On est conscient que l'interprétation restrictive
est venue d'une inquiétude de la part du tribunal. En cela, je pense que
cela véhiculait probablement l'opinion de la moitié des gens du
côté des parents naturels, que des organismes comme les CSS ou
d'autres qui sollicitent non seulement les gens dans un contexte où ils
troublent leur quiétude... Quelqu'un, par exemple, qui a donné un
enfant en adoption il y a quinze ou vingt ans, ou enfin dix-huit ou vingt ans,
peut considérer qu'elle a droit - et il s'agit de femmes,
essentiellement - à ce qu'on ne lui en parle pas. Et je pense qu'on a
invoqué, pour l'interprétation restrictive, le fait que des
personnes avaient été contactées à plusieurs
reprises par un travailleur social, et que, à leurs yeux, cela
consistait une sorte de harcèlement. (12 h 15)
Encore une fois, je ne veux pas me prononcer sur le bien-fondé de
ce qu'a décidé le savant juge ou ce que décidera la Cour
d'appel. Je pense que ce n'est pas le temps; je pense qu'il n'y a pas de
consensus autour de cette question. On a affaire à deux conceptions des
droits des personnes. Aux États-Unis d'ailleurs, ce
phénomène prend une ampleur assez extraordinaire. On l'a vu par
la notion qui commence à être interprétée dans la
jurisprudence américaine: The right to one's own biological origins.
J'ai vu, récemment, une émission américaine d'affaires
publiques très populaire aux États-Unis, qui en traitait pendant
une heure et demie, et où vous aviez, à une
extrémité, la mère qui avait donné son enfant en
adoption il y a 20 ans qui expliquait que ce serait un drame absolument
épouvantable qu'on lui rappelle ces événements, dans un
contexte où la loi lui permettait de le faire il y a 20 ans, de donner
son enfant en adoption, alors qu'elle s'était rebâti une vie; et
à l'autre extrémité, une jeune fille - je me souviens -qui
considérait que, comme être humain, ne pas connaître ses
origines biologiques, cela en faisait quelqu'un qui ne pouvait pas se
développer d'une façon humaine normale.
Alors, je pense qu'on a affaire à une opposition fondamentale sur
le plan des conceptions. C'est pour cela qu'on pourrait dire que, pour
l'avenir, il faut que cela évolue, je pense. On peut dire que, pour
l'avenir, il s'agit de mettre en branle ce qu'il faut pour que,
dorénavant, quand une mère confie son enfant en adoption, elle
accepte 18 ans avant le fait que son enfant pourra exiger de communiquer avec
elle. Et, deuxièmement, de faire en sorte que toutes celles et ceux qui
sont dans ce contexte-là aujourd'hui puissent, s'ils expriment leur
consentement, avoir une chance qu'il y ait un croisement des consentements
donnés et qu'on puisse faire en sorte qu'ils se rejoignent.
Encore une fois, pour le passé, dans le cas du Québec, il
y a une dimension qui m'inquiète énormément: c'est la
valeur des registres d'état civil de l'époque. Pour l'avenir,
c'est très simple; l'encadrement qu'on a pour cela, pour l'avenir, est
très clair. Et nos lois, depuis une dizaine d'années, ont
entouré le registre d'état civil d'une série de
précautions qui, il faut bien dire, n'existaient pas il y a 20 ans. J'ai
eu des échos très précis venant de deux personnes qui
m'ont expliqué comment un abbé - je ne nommerai pas le nom - se
promenait avec son carnet noir.
Mme Lavoie-Roux: Ah oui, je le connais.
M. Johnson (Anjou): Bon.
Mme Lavoie-Roux: C'est-à-dire que j'en ai entendu
parler.
M. Johnson (Anjou): Bon. Et je pense que ce certain abbé
avait décidé qu'au moment de sa mort, son carnet noir devait
être détruit.
Mme Lavoie-Roux: Ah, c'est cela! Je me suis dit: II doit
être mort.
M. Johnson (Anjou): Bon. Je ne sais pas si c'est le testament qui
a annoncé qu'il l'avait fait ou s'il est décédé et
qu'on l'a trouvé dans son testament. Alors on voit bien le genre de
drame que cela peut poser. Si les registres de l'état civil ne sont pas
clairs, cela peut placer des gens dans une situation, sur le plan humain, qui
est absolument absurde, pour ne pas dire carrément odieuse, pour les uns
comme pour les autres, et, en ce sens, je pense que cela va prendre des
années littéralement - je vous dis comme je le pense - avant que
les modifications dans notre société nous amènent à
considérer qu'il y a dorénavant une règle
générale pour le passé. Je pense que, pour l'avenir, c'est
une chose qui peut aller plus vite. Pour le passé, cela va prendre
encore beaucoup de temps.
Mme Lavoie-Roux: Je partage en grande partie l'opinion du
ministre là-dessus et on peut attendre le jugement de la Cour d'appel.
Si on donne au mot "sollicitation" un sens moins restrictif que celui qui a
été donné la première fois, cela réglerait
le problème. J'admets qu'on puisse attendre le jugement de la Cour
d'appel. Dans l'hypothèse où il maintiendrait le jugement de
première instance, outre les dispositions qu'on ne peut faire
rétroactivement et qui pourraient causer une foule de problèmes
parmi ceux dont vous parlez, ne pourrait-il y avoir ce qu'on appellerait de la
sollicitation? Je suis d'accord avec vous que le harcèlement se termine
une fois que la personne a dit non. On a simplement à lui dire:
Écoutez, si jamais vous changez d'avis c'est à vous d'entrer en
contact avec nous.
Ne pourrait-il y avoir entre les deux une possibilité de demander
une fois à la personne? Elle refuse, c'est fini, il n'y a plus d'autres
initiatives qui sont prises. Il y aurait quand même moyen de mettre cela
à l'intérieur de balises très précises pour
éviter le harcèlement. J'imagine que celui qui veut retrouver
l'origine de l'autre peut revenir à la charge plusieurs fois contre le
gré de l'autre partie. Qu'au moins une fois on puisse dire à
l'autre: Écoutez, on a des dossiers. Là où il n'y a pas de
dossiers, je ne vois pas comment on peut le faire parce que c'est quand
même à partir de dossiers qui, en général, dans les
CSS, ont dû être conservés depuis dix ans, quinze ans,
peut-être vingt ans. Mais au moins qu'on permette qu'on pose la question
à d'autres personnes.
J'ai eu deux cas à mon bureau, cet automne, de personnes qui
fonctionnent très bien dans la vie. Il y en a une qui était... Je
ne donnerai pas leur occupation, cela n'a aucune espèce d'importance.
Ces personnes sont mariées, ont leurs enfants, sont rendues à un
certain âge. Je ne me suis pas interrogée sur la motivation
profonde pour laquelle elles veulent retrouver leur mère ou savoir qui
elle est. Elles ont fini par identifier qu'elle était quelque part en
Abitibi. L'autre peut dire: Oui, on est d'accord, ou non, et cela finit
là. Mais elle a dit que jamais personne ne lui a demandé si elle
était d'accord ou non.
Entre cela et le harcèlement dont vous parlez, il me semble qu'il
y a une marge. Il y a aussi le consentement de la troisième personne,
mais cela ce sont les parents adoptifs. Il ne faut pas oublier qu'on a quand
même affaire, à ce moment-là, à trois adultes. En
bas de 18 ans, le problème ne se pose pas.
Je pense qu'on peut attendre le jugement de la Cour d'appel mais est-ce
que le ministre pourrait, au niveau des modalités,
permettre un mécanisme qui soit bien balisé pour
éviter ce dont vous parlez ou même que ce soit confié dans
chacun des CSS à une personne en particulier qui développera
l'expertise dans ce genre de choses et non pas que chaque travailleur social
devienne intermédiaire mais que cela devienne vraiment le boulot de
quelqu'un en particulier qui en prendra la responsabilité?
Il me semble qu'entre les deux il y aurait une petite ouverture possible
parce que ce n'est pas toujours rapide de faire évoluer les
mentalités. Je comprends qu'il faut attendre de les faire
évoluer. Je suis d'accord avec cela aussi mais il y a quand même
eu une évolution depuis dix ans.
Il y a des pays qui le font. Par exemple, en Écosse, je ne sais
pas quelle sorte de problèmes cela leur a créés. Je pense
que l'Angleterre le permet aussi. Il y a certains États aux
États-Unis. Enfin, je ne connais pas les modalités de
fonctionnement de chacun mais cela vaudrait peut-être la peine de...
M. Johnson (Anjou): Disons deux choses. D'abord, on attend le
jugement de la Cour d'appel, qui pourrait changer toute la situation.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord.
M. Johnson (Anjou): Deuxièmement, le secrétariat
doit... Même avant de créer le secrétariat, j'ai
confié à Mme Gervais deux mandats spécifiques: un qui
était d'essayer de revoir toute cette question de l'adoption
internationale et qui, j'en suis très heureux, a abouti, en l'espace de
même pas 18 mois, à d'excellentes relations avec les pays, les
organismes, l'assurance du respect des principes, ce projet de loi, etc., et,
deuxièmement, au mois de juin, le secrétariat doit me faire des
recommandations sur la question que vous évoquez. Mais, selon les
recommandations qui me seront faites, je pense que le principe que nous devrons
conserver, si jamais on bougeait dans ce sens, c'est de s'assurer que la
modalité administrative retenue ne puisse pas donner cours à
quelque forme d'abus, de harcèlement ou d'approche
répétitive.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Maintenant, les dispositions que vous
mettrez pour l'avenir - parce que vous êtes bien disposé pour
l'avenir, cela semble être un peu plus concret - feraient-elles l'objet
uniquement de règles administratives ou si cela ferait l'objet de
dispositions dans la loi?
M. Johnson (Anjou): C'est dans le cas où une mère
donne son enfant...
Mme Lavoie-Roux: On parle pour l'avenir.
M. Johnson (Anjou): Pour l'avenir. Je ne pense pas qu'il faille
modifier la loi. C'est une procédure administrative. Au moment où
la mère remet son enfant à un établissement du
réseau pour des fins d'adoption, on lui fait remplir une série de
papiers. Depuis combien de temps cela se fait-il comme cela? Depuis un an,
depuis la mise en vigueur... Depuis décembre 1982.
Mme Lavoie-Roux: Si elle change d'avis, parce qu'elle ne
connaît pas les circonstances de sa vie, quand elle donne l'enfant pour
adoption et 20 ans après... D'abord elle a vieilli, elle se sent plus en
sécurité. Quelles dispositions sont prévues pour qu'elle
puisse modifier ce consentement?
M. Johnson (Anjou): Est-ce que vous voulez savoir ce qui se passe
aujourd'hui?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Ce qui se passe aujourd'hui c'est qu'une
mère donne un consentement à l'adoption, durant les rencontres
avec les travailleuses sociales. Si elle ne sait pas que cela est possible, on
l'informe de la possibilité pour elle d'être disponible à
son enfant...
Une voix: À sa majorité.
M. Johnson (Anjou): ...à sa majorité. En ce moment,
si on parle du centre de services sociaux du Montréal
métropolitain où il s'en fait le plus, il est difficile pour une
mère, dans les mois qui entourent la naissance de son enfant, le
consentement à l'adoption, de prendre aussi cette
décision-là. Certaines la prennent; je pense que récemment
il y a eu un relevé. Sur quinze personnes, trois avaient donné ce
consentement. Les services sociaux demeurent disponibles pour prendre ce
consentement plus tard. La mère peut aussi revenir sur sa
décision. Elle le sait; l'information est faite de mieux en mieux. Je ne
pense pas qu'on puisse faire davantage. Je pense que c'est dans l'ensemble du
support qui est donné à la mère à ce
moment-là, que cela fait partie de toute la notion de culpabilisation ou
de déculpabilisation du geste qu'elle pose.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Rancourt): Nous sommes prêts
à aborder l'article 11?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Modifications à la Loi sur la protection de la
jeunesse
M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article
11 est adopté, M. le Président?
Le Président (M. Rancourt): Non.
M. Johnson (Anjou): L'article 10 est adopté. À
l'article 11, il s'agit d'une technicité pour les fins de la notion de
signature d'un protocole... Asseoir l'entente qui existe entre le ministre
et...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Rancourt): Est-ce que l'article 11 est
adopté? Adopté. Article 12?
M. Johnson (Anjou): C'est la modification à la Loi sur la
protection de la jeunesse, qui prévoit la nécessité de
passer par un intermédiaire. Pour faire une longue histoire courte,
d'une part la concordance avec les principes qu'on a édictés.
À toutes fins utiles, on a interdit l'adoption dite privée.
Le Président (M. Rancourt): L'article 12 est
adopté. Article 13?
M. Johnson (Anjou): II s'agit, M. le Président,
d'augmenter les amendes. Les infractions à une loi comme celle-là
nous apparaissent mériter des amendes importantes.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais mieux... Je n'en ferai pas un
"filibuster", mais je trouve que 1000 $ c'est très bas.
M. Johnson (Anjou): Ce n'est pas beaucoup.
Mme Lavoie-Roux: Non. Quand vous voyez que des gens sont
prêts à payer 10 000 $ pour obtenir un enfant, on en ajoute 1000 $
et... Généralement, je pense qu'on donne toujours les amendes les
plus basses, entre 1000 $ et 3000 $. Surtout que vous avez enlevé
l'emprisonnement. Je me demande s'il n'y aurait pas moyen ou mettre le chiffre
lui-même... Évidemment, il faut peut-être une marge pour
tenir compte des capacités des gens, c'est peut-être pour cela
qu'on laisse une marge, mais 1000 $ je trouve cela très bas.
M. Johnson (Anjou): Écoutez, je suis prêt à
demander à mes collègues du comité de législation,
pour assurer une certaine cohérence avec les autres, je suis prêt
à envisager cette possibilité sous réserve que... (12 h
30)
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas de...
M. Johnson (Anjou): Avez-vous un chiffre?
Mme Lavoie-Roux: J'aurais mis au moins 2000 $.
M. Johnson (Anjou): Oui, cela fait mal.
Mme Lavoie-Roux: D'un autre côté c'est tout un
processus quand on entre dans celui de l'adoption et tous les
intermédiaires.
M. Johnson (Anjou): On peut mettre cinq à dix pour les
intermédiaires.
Mme Lavoie-Roux: Je ne m'opposerais pas.
M. Johnson (Anjou): Cinq à dix pour les
intermédiaires, les corporations.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Je retiens la suggestion. J'en ferai part. En
attendant, M. le Président, est-ce qu'on peut considérer que
l'article 13 est adopté?
Dispositions finales
Le Président (M. Brouillet): L'article 13 est
adopté. L'article 14?
M. Johnson (Anjou): C'est la clause amnistie.
Mme Lavoie-Roux: Évidemment, la clause amnistie cela va de
soi que cela rencontre les normes relatives aux conditions d'adoption qu'on a
traitées au début.
M. Johnson (Anjou): Oui, c'est cela.
Mme Lavoie-Roux: II y a seulement un point d'interrogation. Je
pense que Mme Gervais l'a mentionné tout à l'heure en disant: -
ce n'est peut-être pas au texte mais je pense que c'était l'esprit
de votre affirmation - de ceux qui ont été portés à
notre attention et qu'on connaît, laissant sous-entendre qu'il y en avait
peut-être que vous ne connaissiez pas. Qu'est-ce qui arrive à ce
moment-là?
Mme Gervais: S'il y en a qu'on ne connaît pas et dont on
prend connaissance ce serait la même chose on demanderait des dossiers.
On demande au DPJ d'apporter le même support, d'exercer la même
surveillance pour que ces enfants s'intègrent le mieux possible ou
soient replacés ailleurs finalement.
M. Johnson (Anjou): Donc, les enfants, par l'effet de l'article
14, si on en découvrait par la suite, ceux pour qui cela a
été fait avant l'adoption du projet de loi verront les droits qui
leurs sont conférés en vertu de l'article 14 s'appliquer à
eux. Cependant la procédure est de nature
administrative et elle vise à appliquer la Loi sur la protection
de la jeunesse à l'égard du milieu qui touche ces enfants et non
pas à remettre en cause le processus d'adoption.
Mme Lavoie-Roux: Non, mais...
M. Johnson (Anjou): Les enfants par exemple pourraient,
théoriquement, ensuite être retirés à une famille
pour les mêmes raisons qu'on va retirer à une famille la garde et
la responsabilité d'un enfant qu'elle maltraite parce que c'est un
milieu malsain. Ce sont les mêmes critères qui vont
s'appliquer.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces cas-là seraient maintenant
devant le tribunal pour se faire reconnaître, ces cas que vous ne
connaissez pas? Ou si automatiquement... Au plan juridique qu'est-ce qui se
produit? Ceux dont on n'entend pas parler.
M. Johnson (Anjou): S'ils ont un jugement d'adoption
étranger, l'effet de l'article 14 est de faire en sorte que ce soit
exactement comme si le jugement avait été prononcé au
Québec.
Mme Lavoie-Roux: Ils restent dans l'anonymat et ils sont reconnus
au même titre que ceux dont on veut régulariser la situation.
M. Johnson (Anjou): Ce que me disent M. Bergeron et Mme Gervais
là-dessus, c'est qu'il ne doit pas y en avoir tant que cela. Si on parle
d'Haïti, les enfants ne peuvent pas sortir d'Haïti. Les parents ont
tout entrepris cela. Ils sont allés à Haïti. Ils sont
allés dans les montagnes rencontrer les parents. Ils ont pris le
bébé dans leurs bras. Ils reviennent au Québec et ils
disent je veux avoir mon enfant et le problème est qu'ils ne sortent pas
d'Haïti. On les connaît. Cela se pourrait qu'il y en ait
quelques-uns qui nous aient échappé. Est-ce qu'un enfant est
entré dans un sac à dos à Mirabel, un jour, sans que le
douanier l'ait vu. Théoriquement, cela se pourrait mais j'ai
l'impression qu'il ne doit pas y avoir beaucoup de cas de cette nature. S'il y
en avait, éventuellement ils pourraient nous être signalés
d'une façon ou d'une autre. Par exemple, le jour où les parents
demanderaient d'obtenir un service de l'État qui exige la production
d'un certificat de baptême, d'un certificat de citoyenneté,
à ce moment, pour avoir le certificat il va y avoir une démarche,
donc, cela va être connu. Toutefois, selon l'évaluation du
secrétariat, il n'y en a sûrement pas.
Mme Lavoie-Roux: Ce serait très infime comme nombre?
M. Johnson (Anjou): C'est cela. Mme Lavoie-Roux:
D'accord.
Le Président (M. Brouillet): L'article 14 est-il
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Article
15?
Mme Lavoie-Roux: Ah oui, on ne refera pas de discours.
Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 15 est
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Sur division. Avant d'arriver à l'article
16...
Le Président (M. Brouillet): L'article 15 est
adopté sur division. Avant l'article 16, oui?
Mme Lavoie-Roux: Avant l'article 16, il y a une question que
j'avais posée à Mme Gervais, enfin, que j'avais posée au
ministre au début. Quel est le bien-fondé des accusations de
lenteur, des accusations que les procédures sont trop longues? On dit
que l'enfant qu'on voulait adopter à six mois arrive presque à
cinq ans. C'est en caricaturant un peu, si on veut, mais on a parlé de
quatre ans, alors, ce n'est pas...
M. Johnson (Anjou): II y a des listes d'attente...
Mme Lavoie-Roux: C'est toute la question des listes d'attente. Je
trouve qu'il y a beaucoup de frustration qui s'est exprimée à
l'endroit des gens qui ont la responsabilité de la protection de la
jeunesse, qui font les adoptions et à qui, en fait, tout contrôle
échappe, parce qu'il n'y a pas d'enfants ou... Peut-être est-ce
dû à une bureaucratie trop compliquée? Je ne le sais pas.
Comme tout le monde se plaint de celui-ci ou de celui-là, il faudrait
quand même que, publiquement, on...
Mme Gervais: Au départ, il faut dire qu'il n'y a pas
d'enfants, de bébés québécois et les parents, ou
les requérants, doivent attendre six, sept ou huit ans. Même s'il
y a une très grande misère dans le monde, il n'y a pas tant
d'enfants dont on est absolument assuré de l'adoptabilité.
D'autre part, les critiques sont venues du fait que, dans certains centres de
services sociaux, les gens ont dû attendre longtemps. Cela est dû
au fait que, tout à coup, il s'est fait beaucoup plus d'adoptions sur le
plan international, et donc, beaucoup plus de demandes dans certaines
régions.
Comme nous considérons que les citoyens ont droit aux mêmes
services, qu'ils habitent la Gaspésie, Montréal ou Québec,
en collaboration avec les DPJ, il y a eu un rattrapage dans ce qu'on peut
appeler la liste d'attente, dans les évaluations qui ont
été faites, et dans les centres où cela prenait
jusqu'à cinq ans... Là, on ne parle pas d'un enfant qui a
été adopté; quand il est question de ...
Mme Lavoie-Roux: Des gens qui désirent adopter un
enfant.
Mme Gervais: ...trois, quatre ou cinq ans, on parle de gens qui
désirent adopter un enfant et qui veulent avoir une proposition
d'enfant. À toutes fins utiles, c'est la durée d'attente.
Maintenant, à travers le Québec, c'est la même durée
d'attente, on s'est rattrapé.
Mme Lavoie-Roux: Quelle est-elle?
Mme Gervais: Selon la disponibilité des enfants, en termes
de durée, c'était environ trois ans et on a diminué cette
attente à deux ans, en ce moment, selon les pays, bien sûr.
Mme Lavoie-Roux: Et ce, à la condition qu'on veuille un
enfant étranger?
Mme Gervais: Oui, on ne parle pas du tout d'adoption locale; ici,
l'attente est de six, sept ou huit ans pour un bébé.
Mme Lavoie-Roux: II serait peut-être important que les gens
le sachent. Il y a des choses qu'on peut critiquer, mais il y en a d'autres qui
sont indépendantes même de la meilleure volonté du monde.
Je pense que les gens ne sont vraiment pas au courant de cela.
Une autre question là-dessus, puisque vous êtes ici. Je me
souviens que, dans le temps, il ne fallait pas avoir plus que tel âge,
etc. Quant à l'âge des parents adoptifs, quelles sont les
règles?
Mme Gervais: II n'y a pas de loi là-dessus, c'est
régi par un article du Code civil, je pense que c'est toute personne qui
peut, seule ou conjointement...
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais, quant aux critères en vigueur
dans les CSS?
Mme Gervais: II y a eu des critères, des espèces de
balises ont été proposées par les CSS, mais nous leur
avons demandé de les abandonner et c'est maintenant respecté, les
CSS n'utilisent plus ces critères.
Mme Lavoie-Roux: Bon, c'est parce qu'un cas a été
porté à mon attention, celui de personnes à qui on aurait
refusé...
Mme Gervais: Pour une question d'âge?
Mme Lavoie-Roux: ...pour une question d'âge. Parfois, on
nous dit qu'il peut y avoir autre chose aussi, mais je me posais la question.
Je trouve que c'est discriminatoire. Si on demandait des parents de moins de 30
ans, ce ne seraient pas nécessairement de bons parents, pas plus que si
on exigeait des parents de plus de 40 ans. Vous pouvez être de bons ou de
mauvais parents à 30 ans ou à 40 ans. Je trouve que c'est un
peu... Surtout aujourd'hui, compte tenu de l'instabilité des familles,
ce qui autrefois était la garantie d'une longue relation avec les
parents qui nous adoptaient, aujourd'hui, c'est loin de...
Mme Gervais: Au secrétariat, on s'est opposé
vraiment, rigoureusement à cela et, de fait, il y a un mois, on a
autorisé quelqu'un qui, selon les anciennes balises, aurait
dépassé l'âge, à adopter.
Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, je vous remercie.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 16 est
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Brouillet): Adopté. Le titre du
projet de loi est-il adopté?
Une voix: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Brouillet): Adopté, et le projet
de loi dans son ensemble est-il adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Brouillet): Adopté.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je voudrais remettre
à la députée de L'Acadie un exemplaire d'un projet de
convention signé avec le ministre...
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Merci bien. Bon, on n'en a jamais fait
un aussi rapidement que cela, M. le Président.
Le Président (M. Brouillet): Tout le monde est content et
heureux? Est-ce que vous avez des remarques pour terminer, M. le ministre?
M. Johnson (Anjou): Bon appétit! Des voix: Ah! Ah!
Ah!
Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie et j'en
souhaite autant à tout le monde. Le rapporteur devra...
Mme Lavoie-Roux: Devra rapporter.
Le Président (M. Brouillet): ...faire son travail le plus
tôt possible.
Une voix: J'ai déjà commencé, M. le
Président.
Le Président (M. Brouillet): La commission ayant accompli
le mandat qui lui avait été confié, j'ajourne les travaux
sine die.
(Fin de la séance à 12 h 41)