(Neuf heures trente-neuf minutes)
La Présidente (Mme James): Bonjour. Bon matin, tout le monde. Ayant constaté le quorum, bienvenue à cette séance de la Commission des affaires sociales. Dans un premier temps, je vous rappelle que, pour la bonne marche de nos travaux, que l'usage... les téléphones cellulaires sont interdits dans cette salle, et je demanderais aux personnes qui en font usage de bien vouloir les fermer pour la durée de cette séance.
Je vous rappelle le mandat de la commission, ce matin, aujourd'hui: la Commission des affaires sociales est réunie afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 124, Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. Alors, M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) va être remplacé par M. Blackburn (Roberval); Mme Legault (Chambly), par M. Auclair (Vimont). Voilà.
n
(9 h 40)
n
La Présidente (Mme James): Merci. Nous allons commencer, ce matin, par des remarques préliminaires. Par la suite, nous allons entendre le Conseil de la famille et de l'enfance; à 11 heures, on attend l'Association des éducateurs et éducatrices en milieu familial; cet après-midi, l'Alliance des intervenantes en milieu familial; et, en fin de journée, nous allons entendre l'Association québécoise des centres de la petite enfance. Alors, nous avons une grande journée devant nous.
Remarques préliminaires
Alors, sans plus tarder, on va commencer par les remarques préliminaires. Mme la ministre, vous aurez 15 minutes qui vous seront réparties pour faire vos remarques; par la suite, l'opposition officielle, vous aurez 15 minutes également... à l'opposition. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous pour 15 minutes.
Mme Carole Théberge
Mme Théberge: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, chers collègues, mesdames et messieurs, la commission parlementaire que nous amorçons aujourd'hui, comme toutes les autres, est une expression éloquente de notre processus démocratique. Le projet discuté dans les prochains jours revêt une grande importance pour toute la population du Québec, et particulièrement évidemment pour les enfants et leurs parents.
Je tiens d'emblée, Mme la Présidente, à réitérer le fait que les enfants sont au coeur de ce projet de loi, et à ce titre il faut être clair: ce sont les enfants qui seront en toile de fond des discussions qui auront cours au cours des prochains jours. Le bien-être des enfants ne doit toutefois pas nous faire oublier le rôle crucial des parents, des éducateurs et des éducatrices tant en installation qu'en milieu familial. Il ne faut pas perdre de vue ceux qui s'occupent du bien-être des enfants.
Depuis le dépôt du projet de loi, il y a trois semaines, j'ai lu et entendu des commentaires et des interprétations sur les intentions du gouvernement en matière de services de garde. Je profiterai donc de cette tribune pour préciser et clarifier les mesures énoncées dans ce projet de loi.
Au cours des prochains jours, nous aurons l'occasion d'entendre et de discuter avec celles et ceux qui sont concernés, de près ou de loin, par les services de garde, et cet exercice, Mme la Présidente, ne sera pas vain. Je suis persuadée qu'avec les échanges qui animeront les sept jours de consultation nous parviendrons à faire ressortir et clarifier les réels objectifs de ce projet de loi.
Le fruit de ces... échanges, pardon, est très important pour nous et pour l'avenir du système des services de garde. Pour bien comprendre ce que nous discuterons dans les prochains jours, permettez-moi de vous présenter le projet de loi dans les services de garde éducatifs à l'enfance.
Le réseau compte trois types de services: les centres de la petite enfance, les garderies, les services en milieu familial. Il est donc, selon nous, tout à fait légitime que le titre de la loi reflète cette diversité. Le titre du projet de loi, projet de loi sur les services éducatifs à l'enfance, a donc été modifié afin de mieux refléter la réalité; la réalité, quant aux différents types de services de garde, mais aussi la réalité quant à la mission éducative de ces services de garde que nous voulons préserver.
Par ailleurs, vous le savez, nous l'avons répété, à maintes et maintes reprises, la qualité des services est primordiale pour nous. Et ce projet de loi reflète cette volonté d'améliorer de façon constante la qualité des services qui sont offerts aux enfants et aux parents.
Un élément clé du projet de loi est la démarche éducative. Nous voulons tout mettre en place afin de favoriser le développement de l'enfance sur tous les aspects: social, affectif, moral, cognitif, langagier et moteur. Le fait d'inclure la démarche éducative au sein même de la loi lui donne une force d'obligation légale, ce qui n'est pas le cas dans la loi actuellement en vigueur. La démarche éducative est essentielle pour favoriser le bon développement des enfants. Je le rappelle, les objectifs visés par cette démarche sont de favoriser le développement et l'acquisition d'habilités sociales et de saines habitudes de vie. Je sais que ceux et celles qui offrent des services de garde partagent ce même désir, soit celui de contribuer au mieux-être des enfants.
Toujours afin de nous donner des outils pour améliorer la qualité des services, le projet de loi prévoit que les parents seront dorénavant davantage consultés, par l'entremise des comités de parents mis en place dans les garderies, notamment au sujet du traitement des plaintes. Il s'agit là de moyens de concrétiser leur engagement envers la qualité des services offerts à leurs enfants. Avec le projet de loi, nous visons une amélioration constante de la qualité des services de garde, mais aussi une accessibilité accrue des services.
Nous le savons tous, avoir accès à un service de garde qui répond à nos besoins est un facteur qui facilite la gestion d'un horaire souvent très chargé. J'ai voulu, avec le projet de loi, faire de l'accessibilité un atout important pour les services de garde québécois.
Le projet de loi propose et donne des outils aux prestataires de services pour soutenir l'amélioration de l'offre de service et en permettre l'assouplissement. Par exemple, des places excédentaires pourront être désormais utilisées pour recevoir des enfants d'âge scolaire au tarif fixé par les prestataires. Dorénavant, les garderies auront, elles aussi, la possibilité d'offrir des services à des enfants d'âge scolaire qui n'ont pas de service de garde à l'école et d'offrir des services aux enfants dont les besoins de garde sont occasionnels.
Également, le projet prévoit que les places qui ne sont pas développées ou qui demeurent inoccupées, et ce, pour tous les types de services, puissent être récupérées et réaffectées afin d'assurer la disponibilité maximale des places.
Nous avons également comme préoccupation d'offrir une plus grande flexibilité des services aux parents qui ont des besoins de garde particuliers, leur offrir par exemple de la garde à la demi-journée, de la garde intensive, saisonnière et de la garde à horaire non usuel.
Avec le projet de loi, nous proposons aussi un grand virage dans la coordination des services de garde en milieu familial. Je tiens à préciser que ces changements n'affecteront pas l'autonomie des responsables de services de garde. Leur statut de travailleuses autonomes n'est pas remis en cause; elles conserveront, par exemple, la possibilité de faire le choix des enfants qu'elles recevront. Leur prestation de services, leurs conditions de rétribution et d'exercice et l'entente de services avec les parents seront également maintenues telles qu'elles le sont maintenant.
Ce qui va changer, c'est la gestion de la garde en milieu familial. Le milieu familial, c'est plus de 88 000 places, 14 200 responsables de garde et le premier choix de nombreux parents. Tout cela est coordonné par plus de 880 structures différentes. C'est principalement à ce niveau que le projet de loi propose des modifications.
En effet, à compter du 1er avril 2006, des bureaux coordonnateurs seront mis en place. La diminution du nombre de structures de coordination permettra le regroupement de l'expertise diversifiée sous un même toit et un meilleur soutien aux responsables de services de garde en milieu familial. La coordination de la garde en milieu familial sera sous la responsabilité de ces bureaux. Ces derniers veilleront à accorder des reconnaissances dans le territoire qui leur sera attribué; à favoriser la formation et le perfectionnement des responsables, à leur offrir un soutien pédagogique et technique sur demande, à répartir entre ces responsables les places donnant droit à des services de garde subventionnés, en fonction des besoins et des priorités répertoriés sur le territoire desservi; à surveiller l'application des normes réglementaires concernant ces services de garde; à déterminer l'accessibilité des parents à la contribution réduite; et à transmettre aux responsables des services de garde les subventions auxquelles elles ont droit.
De plus, afin de favoriser l'accès à une information sur les services de garde en milieu familial, il est prévu que les bureaux coordonnateurs maintiennent un service centralisé d'information. Ces services visent à aider les parents et à simplifier leurs démarches dans la recherche d'un service de garde.
Avec la mise en place de ces bureaux, nous voulons offrir aux parents et aux enfants ainsi qu'aux responsables de services en milieu familial un service qui leur permettra de mieux répondre à leurs besoins. Le regroupement des expertises au sein d'un nombre le plus restreint d'organisations permettra de mettre en commun les compétences de chacune de ces conseillères, qui, étant dispersées au sein de plus petites entités, devaient répondre, chacune d'entre elles, à l'ensemble des besoins des RSG, RSG étant: responsables en services de garde. La qualité des services offerts aux RSG en sera augmentée, car il y aura une équipe de compétence pour la soutenir et non plus seulement une seule personne. De plus, cela permettra de distinguer les fonctions de surveillance et de soutien, qui, étant souvent assumées par la même personne, suscitaient de nombreuses insatisfactions et une confusion des rôles.
Le projet de loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance propose également une amélioration de la gouvernance des services de garde. Concrètement, c'est la composition du conseil d'administration des centres de la petite enfance qui est particulièrement visée. À ce conseil, les parents demeureront majoritaires au conseil d'administration. Je le répète: Les parents demeurent majoritaires. Ils seront appuyés par deux membres de la communauté qui les soutiendront, particulièrement dans leur rôle d'administrateurs, et un maximum de deux personnes membres du personnel pourront siéger au conseil d'administration.
L'objectif de ces changements, c'est de préserver l'équilibre entre la préoccupation pour l'enfant et celle pour la gestion. La gouvernance sera aussi améliorée par l'instauration de mesures de contrôle progressives. Ces mesures iront d'un avis de non-conformité à un pouvoir d'enquête élargi. Également, pour s'assurer de la bonne gestion des subventions versées, le projet de loi prévoit également des mesures qui nous permettront de mieux soutenir les prestataires de services s'ils éprouvent des difficultés financières. Le projet de loi permettra au ministère d'établir un plan de redressement lorsque c'est nécessaire; de donner des directives quant à la gestion des ressources humaines, budgétaires ou matérielles; de désigner une personne au conseil d'administration pour aider à appliquer les plans de redressement ou les directives.
n
(9 h 50)
n
Il est prévu aussi que les actifs d'un centre de la petite enfance ou d'un bureau coordonnateur, acquis avec des subventions, devront être cédés à un autre organisme similaire en cas de cessation des activités.
Un autre volet important du système de services de garde qui doit être revu est celui de la contribution excédentaire qui est parfois demandée aux parents. Nous avons observé que certains services de garde exigent des parents une contribution autre que celle fixée par règlement pour les services de garde. Le projet de loi vient interdire ce genre de contribution ainsi que tous autres frais supplémentaires pour couvrir des frais par exemple d'administration, de gestion, d'inscription d'un enfant sur la liste d'attente. De plus, l'admission d'un enfant ne pourra être liée à l'obligation de payer un surplus, et l'enfant ne pourra être refusé parce que le parent ne paie pas un surplus.
En somme, le Québec arrive à une étape très importante de la consolidation des services de garde éducatifs à l'enfance, et je tiens à préciser que les modifications que nous proposons sont le fruit de deux années et demie de travail de réflexion sur le terrain. Nous avons consulté les groupes à plusieurs reprises, au cours de ces dernières années, que ce soit lors de consultations formelles, comme lors de la consultation sur les scénarios de développement par exemple et de financement ou encore lors de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 8. Nous avons également tenu plusieurs rencontres de travail avec les partenaires et les fournisseurs de services. Nous avons pris par ailleurs bonne note des études sur la qualité des services, comme l'enquête Grandir en qualité par exemple, et, enfin, Mme la Présidente, le projet de loi répond aussi aux besoins et aux préoccupations des parents que, nous, les députés, nous avons rencontrés au cours des dernières années.
Depuis quelques semaines, j'entends des gens qui critiquent très durement ce projet de loi en utilisant des arguments non fondés. Je dis aux réfractaires de nous laisser la chance de mettre sur pied de nouvelles façons de faire qui amélioreront les services offerts aux enfants et aux parents.
Comment, Mme la Présidente, peuvent-ils nous reprocher d'offrir aux parents du Québec des services adaptés aux réalités d'aujourd'hui? Comment peuvent-ils nous reprocher de vouloir faire mieux? Comment peuvent-ils nous reprocher d'agir pour la qualité des services offerts aux enfants, alors que c'est avant tout pour eux que ce réseau existe? Car ce que nous voulons, avec ce projet de loi, c'est consolider les acquis et offrir des services toujours plus orientés sur le bien-être des enfants et des parents du Québec.
Les principes de qualité, d'accessibilité, de pérennité sont l'âme de ce projet de loi. Notre priorité est orientée vers le bien-être des enfants et la reconnaissance de leurs besoins particuliers. C'est pourquoi, j'en suis fermement convaincue, ce projet de loi ne peut que leur être profitable.
Mme la Présidente, chers collègues, je vous remercie de votre attention, et je réitère que nous entendrons chacun des groupes et des personnes qui voudront bien venir partager avec nous leurs commentaires sur le projet de loi, leurs préoccupations et leurs suggestions, de façon très ouverte, et j'espère que tous les gens qui se présenteront le feront dans le même sens, parce qu'encore une fois ce projet de loi est fait en fonction des besoins des parents et des enfants, et nous devons faire en sorte d'y répondre collectivement. Merci.
La Présidente (Mme James): Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, je cède maintenant la parole au porte-parole en matière d'emploi, de solidarité sociale et de la famille. M. le député de Vachon, la parole est à vous pour une dizaine de minutes.
M. Camil Bouchard
M. Bouchard (Vachon): Merci, Mme la Présidente. Alors, je conçois que je partage ce 15 minutes avec la députée de Lotbinière...
La Présidente (Mme James): Effectivement.
M. Bouchard (Vachon): ...pour compléter le 15 minutes. Merci. Mme la Présidente, les derniers mots de la ministre ne me rassurent qu'à peine, parce que, lorsqu'elle a fait état de ce pour quoi nous étions ici, ce matin, elle nous a dit qu'essentiellement ces consultations allaient lui offrir l'occasion de faire ressortir et de clarifier les objectifs du projet de loi n° 124. J'espère que cette commission ne sera pas qu'une occasion pour la ministre de faire valoir son projet de loi. Je pense qu'elle y croit fermement, et c'est tant mieux. Je pense qu'elle est de bonne foi, tout le monde le conçoit, mais je pense qu'elle se trompe lourdement quant à la façon qu'elle conçoit d'atteindre les objectifs d'amélioration de la qualité de l'environnement des enfants et de leurs parents. Ceci étant dit, nous aurons l'occasion d'entendre des avis divergents durant cette commission. Je m'engage très clairement à les écouter et à les mettre à profit dans notre réflexion.
J'aimerais cependant être assuré du fait que la ministre se montre prête explicitement à modifier, lorsqu'il le faut, et de façon majeure, lorsqu'il le faut, son projet de loi à l'écoute des critiques qui se feront entendre. Je ne voudrais pas encore une fois que cette série de consultations, de journées à écouter les gens qui vont venir nous rencontrer ne soient qu'une occasion pour convaincre au lieu d'améliorer le projet de loi, Mme la Présidente.
Deuxièmement, je veux souligner que nous avons ici une commission qui siège dans un format de consultations particulières: deux poids, deux mesures. Le projet de loi n° 125, déposé par la ministre déléguée à la jeunesse, concernant la protection de la jeunesse, s'est vu octroyer une fenêtre de temps beaucoup plus longue entre le dépôt du projet de loi et son étude en mode détaillé. Les parlementaires savent toutes et tous que le projet de loi n° 125 ouvre la porte à des consultations générales beaucoup plus substantielles, et d'autre part permet à l'ensemble des groupes qui se feront entendre de bien préparer leur mémoire, de bien consulter leurs commettants et de venir témoigner à partir du 24 janvier, si ma mémoire ne m'abuse.
C'est un projet de loi très important, nous disait le leader parlementaire en Chambre. C'est ce pour quoi nous disposerons du temps voulu pour l'étudier et pour l'améliorer. Faut-il comprendre, Mme la Présidente, que le projet de loi n° 124, qui touche 200 000 enfants, qui touche leurs parents, qui touche des milliers d'éducateurs et d'éducatrices, de gestionnaires et de directeurs de réseaux importants, qui touche des centaines de partenaires locaux et régionaux intéressés et impliqués, engagés dans le développement du bien-être des enfants, faut-il comprendre que ce projet de loi n'est pas assez important pour que nous prenions le temps et que nous laissions le temps aux gens qui viennent nous rencontrer de bien se préparer, de consulter les gens qui les entourent et de nous amener des solutions qui, autrement, peuvent ne pas être à l'ordre du jour, tout simplement parce que le temps a trop pressé?
Mme la Présidente, en tant que représentant de l'opposition officielle, je suis bien obligé de m'incliner devant les motions qui nous sont présentées à l'Assemblée nationale et éventuellement de tirer le mieux qu'on peut de ces motions, mais je vous dis, ici, que nous aurions été vraiment beaucoup plus ouverts et enthousiastes à du travail de longue haleine si le gouvernement nous avait permis de le faire. Alors, la ministre aura beau invoquer le fait qu'elle aura consulté, durant deux ans et demi, avant l'écriture de son projet de loi, nous savons pertinemment que les consultations ont pu avoir lieu avec certains groupes, beaucoup moins avec certains autres, et cela nous inquiète aussi.
Et, en passant, Mme la Présidente, je remercie la ministre d'avoir ouvert la porte à un changement que je lui ai demandé du côté du chantier, du Chantier de l'économie sociale, qui avait des problèmes à s'ajuster à notre agenda. Je lui ai aussi demandé d'ouvrir la porte, et elle y consent, à la Fondation Chagnon. Je lui ai aussi demandé de déplacer, à la demande de ceux-ci qui l'ont fait à plusieurs reprises, la présentation de l'Association québécoise des centres de la petite enfance, qui sont prévus pour ce soir, 17 heures, du fait que cette association compte des centaines de membres, qu'ils avaient besoin de plus de temps pour préparer leur mémoire, et ils ont demandé que ce soit déplacé et la ministre n'a pas consenti à cette demande. Cependant, elle consent et elle place le Conseil québécois des centres de la petite enfance, qui s'est montré très favorable à son projet de loi, en dernier, ce qui, me semble-t-il, à mon avis est l'application d'une règle deux poids, deux mesures.
C'est vrai que l'Association québécoise des centres de la petite enfance n'est pas d'accord avec l'ensemble du projet de loi, et c'est vrai que le torchon brûle, entre l'association et la ministre, mais ce n'est pas une raison pour être inflexible quant à l'horaire qu'on leur impose dans leur venue devant cette commission. Nous pensons que la démocratie passe au-dessus des mauvaises humeurs, et, à ce titre-là, Mme la Présidente, je veux souligner que je suis déçu de cette décision de la ministre. Je la comprends, en tant qu'être humain, mais je suis déçu de son comportement, en tant que parlementaire, dans cette situation.
n
(10 heures)
n
Ceci dit, Mme la Présidente, nous, nous sommes très inquiets, très inquiets du projet de loi que nous avons devant nous, très inquiets. Nous sommes inquiets parce que, lorsque la ministre nous dit que le projet de loi se préoccupe du développement et du bien-être des enfants, nous le voyons bien dans le titre que le mot «éducatifs» apparaît; nous voyons aussi que des normes de démarche éducative apparaissent dans le projet de loi, mais nous voyons également le démantèlement d'un réseau qui fonctionnait très bien, qui avait besoin d'ajustements sans doute et qui aurait eu besoin d'ajustements à partir de la loi actuelle et non pas en la jetant au panier pour la remplacer par une autre.
Mais nous voyons aussi, dans ce projet de loi, énormément de menaces, énormément de menaces à des environnements de qualité à l'égard des enfants. Ce pourquoi nous sommes inquiets, c'est que ce qui nous est proposé, ce qui nous est proposé isole maintenant les CPE d'un côté avec moins de ressources, donc les centres de la petite enfance d'un côté avec moins de ressources, les bureaux coordonnateurs qui nous apparaissent étrangement loin du concept de proximité avec aussi des ressources diminuées. La ministre fait signe que non, mais là il y a des équations qui ne mentent pas. Il va falloir qu'on en discute en détail, et nous sommes là pour le faire, aussi bien durant la commission que durant l'étude des articles de loi.
Nous sommes en présence d'un projet de loi qui n'évince pas les parents mais qui affaiblit leur pouvoir considérablement. On passe des deux tiers à la majorité simple en tant que représentants sur les conseils d'administration. Et ça affaiblit le pouvoir des parents, certainement ça menace quelque part leur capacité d'influencer les décisions. Et on sait très bien que les décisions très importantes qui sont prises au conseil d'administration sont prises aux deux tiers, on sait aussi très bien qu'une absence involontaire peut infléchir désormais un vote, d'un côté comme de l'autre, en l'absence des parents ou d'un parent.
Alors, Mme la Présidente, on s'en inquiète aussi, à ce niveau-là, on s'inquiète du fait que la ministre ne répond pas à nos questions, au salon bleu, concernant l'attrition que pourrait subir le groupe, par exemple, des conseillères pédagogiques dans ce remue-ménage qu'elle orchestre en vue de sa réforme. Nous sommes inquiets du fait que ces éducatrices, qui servent à la fois comme soutien dans les réseaux auprès des responsables de services de garde en milieu familial et dans les installations, perdent beaucoup de leur impact auprès à la fois des intervenants, des éducateurs, éducatrices, mais aussi auprès des parents.
Ce sont des inquiétudes réelles, fondées, qui apparaissent à un moment où ce gouvernement aura posé, et j'aurai l'occasion de le rappeler, une série de gestes qui ont à la fois inquiété puis affaibli puis choqué les représentants et les centres de la petite enfance du Québec. Je suis de mieux en mieux placé pour le savoir parce que je les rencontre sur le terrain et j'entends leurs voix.
Mme la Présidente, nous ferons, nous ferons ces travaux en tout respect de notre code parlementaire et en tout respect de la bonne foi que nous attribuons à la ministre dans ses propositions. Mais nous le ferons aussi avec très grand soin, avec très grande rigueur et avec très grande fermeté parce que nous croyons que nous sommes en train de réparer ce qui n'est pas brisé. Nous sommes en train au contraire de démanteler un réseau exemplaire qui faisait très bien son travail, qui avait encore certainement des améliorations à enregistrer dans son bloc-notes, mais qui pouvait éventuellement les amorcer, ces améliorations-là, et les poursuivre, puisqu'ils avaient commencé depuis longtemps, sans que l'on mette à feu et à sang ce réseau. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme James): Merci, M. le député. Mme la députée de Lotbinière, vous avez cinq minutes pour vos remarques préliminaires.
Mme Sylvie Roy
Mme Roy: Merci, Mme la Présidente. Alors, nous, à l'ADQ, on considère qu'on a échangé un service de proximité contre un service bureaucratique. Avec les bureaux coordonnateurs, on va niveler toutes les interventions d'une façon égale, partout, dans toutes les régions du Québec. On tue ainsi l'initiative, la connaissance fine du milieu qu'ont les intervenants, la versatilité ? j'aurais dû choisir un mot plus facile; la versatilité ? des interventions de chacun des intervenants qui connaissent leur milieu, qui savent comment interagir, autant au niveau géographique qu'au niveau de la population qu'elles desservent, au niveau des besoins.
Les garderies, c'est une initiative du milieu, qui a été faite avec le milieu, soutenue avec les parents. Je pense que la machine n'a pas été capable de résister à la bureaucratisation de toutes ces interventions-là qui se faisaient. Parce qu'avant que les CPE existent il y avait les garderies, qui sont devenues des centres de la petite enfance; on a ajouté le volet éducatif. Maintenant, on recule, puisqu'on va faire encore des structures, on va essayer d'égaliser.
Dans un deuxième point, je dois aussi dénoncer le fait qu'on a eu une convocation de façon aussi rapide. Juste, par exemple, ce qu'a fait le Conseil de la famille et de l'enfance. Ce n'est pas la première fois que je viens siéger en commission, c'est, la plupart du temps, beaucoup plus épais que ça. Je soupçonne peut-être qu'ils n'ont pas eu le temps de préparer des mémoires. Les CPE, qui ont des membres, qui ont beaucoup de membres à rencontrer, avant de venir faire des propositions ici, ne peuvent même pas agir de façon démocratique en considérant leurs membres et en leur présentant les propositions, ils doivent le faire rapidement.
Je me demande pourquoi on est si pressés, dans le cas des CPE, dans le cas d'un projet de loi où il s'agit d'aller chercher de l'argent dans le milieu, et si lents quand on s'occupe des enfants de la DPJ, quand c'est leur milieu de vie, quand c'est leur sécurité qui est en question. On remet le dossier à la DPJ, au mois de janvier, puis ici on a fait ça rapidement sans aucun délai, sans... Ça considère la façon dont la ministre traite ces principaux intervenants, les principaux partenaires qu'elle a dans le réseau. C'est très peu de considération pour ces intervenants. Donc, moi, je trouve que ce n'est pas démocratique, que c'est une façon à peine voilée de désavouer le travail de toutes ces personnes-là.
Le fait de dire aussi qu'il y a de la désinformation, j'imagine que Mme la députée... Mme la Présidente, j'imagine que Mme la ministre a reçu, autant que moi, des lettres de parents qui s'indignent. On ne peut pas dire que tous ces parents-là ont des craintes non fondées et rejeter ça du revers de la main puis de se sécuriser en faisant une petite commission et terminer par l'adoption d'un projet de loi, qui, d'après moi, va se faire sous le bâillon.
Donc, j'aurais voulu qu'on démontre beaucoup plus de respect, à l'égard de tous ces intervenants-là, en leur permettant de bien se préparer, en leur permettant de venir présenter des mémoires pas seulement sur invitation, avant de tout chambouler, là, ce qui se passe dans le réseau des CPE. Merci, Mme la Présidente.
Auditions
La Présidente (Mme James): Alors, merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant les représentants du Conseil de la famille et de l'enfance. Bonjour et bienvenue à cette séance de la Commission des affaires sociales. Je reconnais Mme Blais et Mme Bitaudeau. Je vous rappelle que vous aurez 20 minutes, dans un premier temps, à présenter votre mémoire à nous. Ensuite, nous allons passer à la période d'échange avec les parlementaires du côté ministériel et de l'opposition. Alors, la parole est à vous pour 20 minutes.
Conseil de la famille et de l'enfance (CFE)
Mme Blais (Marguerite): Mme la Présidente, merci beaucoup. Mme la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, eh oui, le Conseil de la famille et de l'enfance ouvre cette commission particulière substantielle. On s'excuse si on vous dépose le mémoire ce matin, séance tenante, mais on l'a fini tardivement en après-midi.
Vous savez que le conseil est constitué de bénévoles, issus de la société civile et nommés par le gouvernement du Québec, alors ces gens proviennent de différents milieux, que ce soient des services de garde, milieux syndical, patronal, organismes communautaires, universitaires, même de simples citoyens. Alors, il faut réunir ces gens-là pour avoir une pensée et prendre un recul.
Mais, étant donné qu'on ouvre, on a pensé que c'était intéressant, avant toute considération, de rappeler que le réseau québécois de services de garde, tel qu'il existe actuellement, est le fruit de l'action militante des parents, qui, depuis plus de 30 ans, ont fait preuve, les uns après les autres, de ténacité et de détermination pour mettre en place des services de garde de qualité pour leurs enfants. Depuis les projets du programme d'initiatives locales, du plan Bacon, de la création de l'Office des services de garde à l'enfance, des décennies soixante-dix et quatre-vingt, un long chemin a été parcouru.
Le conseil aimerait faire part du point de vue des familles consultées en mai dernier, lors de son colloque Regards sur la diversité des familles: Mieux comprendre pour mieux soutenir, dont un avis sera déposé en début d'année 2006. À cette occasion, parents et intervenants intéressés à la politique familiale ont reconnu le grand progrès qu'a constitué la mise en place du réseau des services de garde. Ils ont souligné la qualité éducative des services dispensés, la tarification réduite, la continuité des services pour les enfants de zéro à 12 ans, l'intégration des diverses composantes du réseau. Par contre, ils demeurent inquiets sur un point: ils ont l'impression que le réseau est constamment menacé, que rien n'est totalement acquis.
n
(10 h 10)
n
Les personnes consultées ont aussi déploré le manque de place et la rigidité des services. Elles considèrent que les normes du réseau devraient être plus souples afin de s'adapter aux différentes réalités et aux besoins diversifiés des parents: horaires atypiques, garde à temps partiel, réalité des parents étudiants, et le reste. Les disparités régionales sont encore très présentes, et les besoins des régions rurales, en particulier du milieu agricole, moins bien couverts. Les augmentations de tarifs, si minimes soient-elles, représentent une dépense importante pour les familles moins bien nanties et causent surtout... d'incertitude. Il y a donc place à amélioration.
Si l'heure des bilans a sonné, un temps d'arrêt est nécessaire. Le conseil souhaite, dans ce mémoire, recentrer la discussion sur les débats de fond. C'est pourquoi nous allons faire, dans un premier temps, un retour sur les questions fondamentales à la base même de l'existence des services de garde éducatifs, puis nous commenterons les changements proposés dans le projet de loi qui ont retenu l'attention du conseil.
Les questions fondamentales. Quelle est la raison d'être du réseau des services de garde éducatifs à la petite enfance? Quel projet se trouvait à la base du développement de ce réseau? Quels seront les impacts de ces changements sur la politique familiale du gouvernement du Québec dans son ensemble? C'est ce qu'on veut discuter.
Dans la période précédant 1997, l'État s'est principalement employé à cerner et à encadrer les bonnes pratiques, en matière de services de garde, au moyen de l'émission et du contrôle des permis rendant obligatoire le respect de normes minimales de santé et de sécurité des enfants. La loi et les règlements antérieurs s'appliquaient donc à définir et à baliser l'activité de quatre catégories de services de garde.
Quelques années plus tard, dans la mouvance de l'économie sociale, la notion de «centres de petite enfance» a vu le jour, concrétisée par l'adoption, en 1997, de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. La nouvelle loi serait accompagnée d'un investissement sans précédent dans le développement du nombre de services et de l'introduction des places à coûts minimes pour tous les enfants.
Outre l'objectif de conciliation famille-travail visant à permettre aux parents d'exercer une activité en s'appuyant sur des services fiables et accessibles, on visait le développement de l'enfant en lui offrant un encadrement favorable à la socialisation, à l'apprentissage et à l'acquisition d'habiletés. Désormais, l'application du programme éducatif faisait partie des conditions à respecter pour détenir un permis: on ne parlait plus simplement de services de garde, mais de services de garde éducatifs.
Cet élan inscrivait le Québec comme un exemple en matière de politique familiale en Amérique du Nord. Le développement du réseau de services de garde éducatifs, dans toutes les régions, a coïncidé avec la mobilisation d'un ensemble d'acteurs qui ont manifesté leur adhésion au projet. Les instances régionales ont favorisé la concertation d'organismes et de personnes engagées dans la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, le soutien aux familles et les services à la petite enfance.
Les objectifs poursuivis visaient la conciliation famille-travail, mais ils comprenaient aussi la lutte contre la pauvreté et la prévention, par le dépistage précoce des enfants à risque dès la petite enfance, la concertation des différents services sociaux et la continuité entre la première enfance et l'école. Cette initiative avait également pour but de faire échec au travail au noir relativement répandu dans ce secteur d'activité. Elle a aussi entraîné la création de plus de 12 000 emplois, majoritairement féminins, répartis sur l'ensemble du territoire. Dans cette perspective, on a vu évoluer le rôle des centres de la petite enfance, qui, au plan local, sont devenus des pivots du rôle éducatif qu'on leur conférait; ils se sont mis progressivement à exercer un rôle social dans leur communauté.
En ce sens, le conseil souhaite exprimer son inquiétude sur le risque de perdre de vue cette évolution. D'une part, pensons aux enfants issus de milieux défavorisés ou ayant des besoins spéciaux: les modifications proposées risquent d'entraîner une rupture au niveau des efforts d'harmonisation et des actions complémentaires entre différents services que plusieurs milieux avaient commencé à instaurer. Par exemple, les centres de la petite enfance assuraient le lien entre le CLSC et l'école, une fonction par ailleurs souvent assumée par la conseillère pédagogique. D'autre part, nous croyons que ce changement risque fort de réinstaller le climat de concurrence entre les différents types de services ? incluant les services de garde ? qui existaient avant l'adoption de la loi de 1997 au lieu de favoriser la complémentarité autour de l'enfant.
Préserver la qualité des services: les risques d'une réforme qui prend place dans un contexte de compression budgétaire. Les dernières études sur la qualité des services de garde, qu'il s'agisse de la vaste enquête menée par l'Institut de la statistique du Québec, Grandir en qualité, ou celle récemment publiée par l'Institut de recherche en politiques publiques, nous apprennent qu'il reste bien des progrès à faire pour atteindre un niveau de qualité éducative satisfaisant dans tous nos services. C'est une étape cruciale de la consolidation du réseau. Mme Christa Japel et autres chercheurs rapportent, dans l'étude La qualité, ça compte, «que les centres de la petite enfance étaient généralement de meilleure qualité que les autres types de services. Ainsi, 35 % des centres de la petite enfance en installation et 29 % des centres de la petite enfance en milieu familial contre 14 % des garderies à but lucratif et 10 % des services en milieu familial non régis étaient de qualité jugée bonne». Et ce n'est pas surprenant: la garde collective pose des défis nouveaux, comme la formation du personnel, les ratios encore trop élevés du nombre d'enfants par éducatrice.
À ce propos, les spécialistes de la petite enfance martèlent qu'en matière de services de garde l'élément clé de la qualité des services demeure la formation du personnel, elle-même tributaire d'un niveau de financement adéquat. En présentant leur étude, Mme Japel, qui a évalué la qualité des services offerts dans plus de 1 500 milieux de garde pendant plus de trois ans, explique: «Ces résultats soulignent l'importance d'un investissement continu dans un réseau de garde de qualité accessible à tous les enfants, quel que soit le statut socioéconomique de leurs parents.» Le conseil souhaite rappeler que faire des réformes dans un contexte de compressions budgétaires est toujours hasardeux. Il reconnaît que le gouvernement du Québec a agi comme un chef de file dans le développement de la petite enfance en y consacrant, depuis plusieurs années, un investissement considérable. Cependant, nous considérons que le réseau des services de garde éducatifs a besoin de consolidation. Dans cette perspective, une partie des fonds qui seront versés, en vertu de l'entente fédérale-provinciale sur les services de garde, pourrait y être consacrée, après avoir considéré les besoins dans les autres secteurs dédiés à la famille.
En particulier, il demeure important de poursuivre l'amélioration de la qualité dans tous les milieux d'accueil de la petite enfance. Une attention spécifique doit être portée du côté des milieux défavorisés. L'étude récente déjà citée de Mme Japel et de son groupe révèle que les enfants défavorisés fréquentent en plus grand nombre les services de garde en milieu familial. Autre constat, et je cite l'étude: «...les centres de la petite enfance en milieu familial, les garderies à but lucratif et les milieux familiaux non régis fréquentés par les enfants des familles plus défavorisées étaient de moindre qualité que les milieux de garde du même type utilisés par les familles plus aisées.» Ainsi, pour favoriser l'égalité des chances des enfants provenant des milieux socioéconomiques plus défavorisés, il serait crucial qu'ils puissent fréquenter des services de garde de qualité, et que ces derniers profitent d'un financement stable.
La création des bureaux coordonnateurs de la garde en milieu familial et le soutien aux responsables en services de garde. À la lecture du projet de loi, le conseil a plusieurs interrogations concernant la restructuration proposée par la garde en milieu familial.
Le législateur introduit, au plan de la formation et du perfectionnement destiné aux responsables en services de garde, un changement notable: les bureaux coordonnateurs assureront le soutien pédagogique et technique des responsables de services de garde sur demande seulement. Il ne s'agit plus d'un accompagnement et d'un soutien continu, mais d'une intervention ponctuelle lorsqu'une difficulté se présente. Cela représente selon le conseil un recul important dans la façon de concevoir le soutien à donner aux responsables de services de garde en milieu familial. Cette disposition pourrait avoir un impact négatif sur la qualité des services. Nous redoutons de plus un possible effet pervers sur l'intégration des enfants avec des besoins spéciaux.
De même, les bureaux coordonnateurs auront la responsabilité de favoriser la formation et le perfectionnement, ce qui nous semble amoindrir la portée des dispositions antérieures, alors que les centres de la petite enfance avaient une responsabilité de promouvoir la mise sur pied de cours de formation et de perfectionnement. Ces différences nous font redouter une diminution des efforts de formation et de soutien pour les responsables de services de garde, alors que ce sont des éléments essentiels à l'amélioration de la qualité des services.
Le conseil aimerait avoir l'assurance que seront créées de véritables équipes de soutien spécialisées pour le milieu familial. Le conseil craint que l'organisation proposée n'accentue les disparités entre le soutien que les responsables de services de garde pourront recevoir selon qu'elles se trouvent en milieu urbain, en région périphérique ou en région éloignée. Dans les régions moins densément peuplées, les professionnels se font rares, il est difficile de poser des diagnostics, le personnel éducateur fait face à un surcroît de travail important pour soutenir les enfants et leurs parents.
Concernant les critères considérés pour agréer les bureaux coordonnateurs, le conseil souhaite que toute personne appelée à y oeuvrer détienne l'expérience, les connaissances et les compétences reconnues.
n(10 h 20)n Par ailleurs, la réorganisation pourrait aussi présenter des impacts du côté des centres de la petite enfance. Certains centres de la petite enfance opérant des installations de plus petite taille pourraient souffrir de la diminution de revenus causée par la perte de la supervision du milieu familial et voir leur situation financière déjà précaire s'aggraver.
Entre la situation actuelle et les hypothèses de création de 130 bureaux coordonnateurs, il y aurait peut-être, dans l'intérêt du milieu familial, un juste milieu à trouver. Des scénarios de regroupement, basés sur un examen de l'organisation territoriale actuelle, avec le concours des instances de concertation régionale, pourraient permettre d'y arriver.
Revoir la gestion des places: la nécessité d'une liste centralisée. Les bureaux coordonnateurs de la garde en milieu familial sont des entités désignées pour attribuer aux parents les places en milieu familial, les centres de la petite enfance et les garderies à but lucratif continuant d'enregistrer les inscriptions pour leurs places en installation. On se trouve ainsi à abandonner l'idée d'instaurer des listes d'attente centralisées pour toutes les places en services de garde d'un quartier ou d'une région. Pourtant, dans ses consultations auprès des familles, le conseil est régulièrement saisi des attentes des parents en ce sens. Par ailleurs, une telle pratique compléterait les données issues des enquêtes sur les besoins et préférences des parents, en matière de garde, et permettrait de mieux les cerner à l'échelle locale.
Enfin, s'il y a eu des progrès pour localiser plus facilement les services, une réflexion est nécessaire pour uniformiser les critères selon lesquels les parents peuvent obtenir une place dans un milieu donné. N'y aurait-il pas lieu d'émettre certains principes directeurs, à titre d'exemple l'accueil au même endroit des fratries pour l'attribution des places par les prestataires de services?
La question de la flexibilité des horaires des services et de l'élargissement des horaires de garde. Sans que ceci ne soit mentionné dans le projet de loi, nous comprenons que le ministère examine en ce moment la possibilité d'introduire des incitatifs financiers afin de permettre aux différents services d'offrir de la garde à horaire non usuel. À ce sujet, le conseil veut éviter, dans la mesure du possible, un éventuel usage abusif de l'étendue des heures d'ouverture des services. Il faut baliser par des règles le nombre d'heures maximales qu'un enfant peut passer en services de garde, et faire attention de ne pas déresponsabiliser les parents. Une autre question se pose: Avons-nous besoin de services de garde éducatifs la nuit? Les extensions des heures d'ouverture des services devraient s'appuyer sur une estimation sérieuse des besoins en tenant compte des particularités locales. Il faudra également se questionner sur la complication de la conciliation famille-travail pour les femmes qui assurent ces services et qui bien souvent sont également des mères.
Amélioration des mécanismes de contrôle de l'utilisation des fonds publics. Les objectifs proposés visent de manière générale à améliorer la gestion des fonds publics consacrés à la petite enfance. Le conseil ne peut qu'adhérer à ces principes. Ainsi, il souscrit à la possibilité, pour les services éducatifs en difficulté financière, de s'inscrire dans une démarche graduelle de plan de redressement des services. De même, il apprécie les améliorations apportées au pouvoir d'enquête. Le conseil s'est montré particulièrement heureux de l'abolition des frais supplémentaires de toute nature chargés aux parents.
Composition des conseils d'administration. Les dispositions proposées quant à la composition des conseils d'administration des centres de la petite enfance amènent le conseil à rappeler que la participation des parents dans les milieux de garde joue un rôle important d'éducation populaire et d'engagement citoyen. C'est extrêmement formateur pour les parents administrateurs de centres à la petite enfance: ils apprennent à engager du personnel, à prendre des décisions pour le bien-être des enfants, à élaborer des projets, à faire des levées de fonds. Cette action est particulièrement marquante dans les milieux défavorisés.
Nous comprenons que les changements proposés ont pour visée de remédier aux situations où les parents utilisateurs de services et membres des conseils d'administration des centres de la petite enfance se retrouvaient au centre de controverses ou de conflits d'intérêts. Le conseil suggère cependant que le conseil d'administration puisse exercer le choix des deux membres issus de la communauté. Toutefois, il pourrait être difficile d'obtenir la participation effective des milieux institutionnels. À titre d'exemple, les conseils d'établissement des écoles sont régulièrement confrontés à la difficulté de recrutement et de disponibilité des acteurs du milieu.
Autres éléments de réflexion. En complément de l'évaluation de la qualité des services, il paraît souhaitable au conseil que soit instauré un mécanisme d'évaluation en lien avec la finalité du réseau de services éducatifs à la petite enfance évoquée au début du présent mémoire. Cette évaluation périodique devrait porter sur l'atteinte des objectifs de prévention et d'égalité des chances pour les enfants; de plus, les résultats devraient en être rendus publics.
Dans un autre ordre d'idées, le conseil souhaite souligner l'intention annoncée de reconnaissance des acquis pour les personnes en provenance de l'étranger qui devraient donc plus facilement intégrer ce secteur d'activité.
En conclusion, le Conseil de la famille et de l'enfance est convaincu de l'importance de la prévention et de la nécessité de favoriser l'égalité des chances dès le plus jeune âge. Par conséquent, il souhaite que l'on ne perde pas de vue que les tout-petits, quel que soit leur environnement, doivent pouvoir bénéficier de services de garde éducatifs de qualité. Dans cette perspective, il souhaite que soient prises en considération ses observations touchant le rôle que seraient appelés à jouer les bureaux de coordination dans le soutien spécialisé pour le milieu familial.
Par ailleurs, en accord avec les attentes exprimées à de nombreuses reprises par les parents, il recommande de centraliser par territoire le lieu d'inscription et d'information sur les places disponibles. Mme la Présidente, merci beaucoup.
La Présidente (Mme James): Merci à vous, Mme Blais. Nous sommes maintenant à la période d'échange entre parlementaires. La parole est à vous, Mme la ministre de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine.
Mme Théberge: Merci, Mme la Présidente. Peut-être quelques secondes, avant de retourner à Mme la présidente, à Mme Bitaudeau, juste pour spécifier quelques points qui ont été mentionnés tant par le député de Vachon que la députée de Lotbinière.
J'aimerais juste rappeler au député de Vachon que, lorsque la loi a été adoptée, en 1997, il y a eu deux jours de consultation. Deux jours, ça, ça voudrait dire 10, 12 groupes maximum, compte tenu des remarques préliminaires et tout, pour adopter une loi. Nous en faisons sur sept jours; nous allons rencontrer près de 40 groupes, et c'est suite à des consultations qu'on a faites à différentes étapes du projet de loi et à différentes étapes de la consolidation également des services de garde. Alors, il faudrait peut-être un petit peu rectifier la façon dont il a de parler de cette consultation-ci.
Et, également, lorsqu'il dit que les services sont exemplaires en tous points et qu'on ne doit rien faire, je suis un petit peu surprise quand... C'est ça. Alors, il faudrait juste vérifier.
M. Bouchard (Vachon): Mme la Présidente, j'invoque le règlement.
La Présidente (Mme James): Allez-y, M. le député.
M. Bouchard (Vachon): Lorsqu'un député conçoit qu'il a été mal cité, il demande à la personne qui l'a mal cité de retirer ses paroles. Alors, je le fais.
Mme Théberge: ...est-ce qu'on peut continuer?
La Présidente (Mme James): Allez-y, Mme la ministre.
Mme Théberge: C'est ça. Alors...
M. Bouchard (Vachon): Mme la Présidente, je vous en prie.
La Présidente (Mme James): Un instant, M. le député, je vous prie.
M. Bouchard (Vachon): Oui.
(Consultation)
La Présidente (Mme James): M. le député, vous pourrez donner vos explications lorsque vous aurez... en vertu de l'article 212 du règlement, vous pourrez rectifier les informations lorsque Mme la ministre aura terminé sa période d'échange avec les parlementaires... avec les représentants.
Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Théberge: Tout ça pour dire que dans le fond, les services de garde, on les a à coeur et on travaille au quotidien, toute l'équipe du ministère, tous les gens qui sont concernés et qui donnent les services, pour s'assurer justement qu'ils demeurent au service des parents et des enfants et qu'ils se fassent dans le meilleur environnement possible pour ceux et celles qui y travaillent, et c'est dans ce sens-là que le projet de loi est fait. Je l'ai dit dans le fond dans mon point, en introduction.
Ceci dit, Mme la présidente du Conseil de la famille et de l'enfance, merci beaucoup de nous avoir fait part de vos commentaires. Je pense qu'on se rejoint sur plusieurs points, et évidemment vous parlez entre autres de l'étape de consolidation des services de garde pour assurer la pérennité, et ça, c'est important. Je vous remercie d'en avoir fait la mention parce qu'il y a des familles, aujourd'hui, qui y ont accès, il y a des familles qui veulent y avoir accès depuis longtemps, il faut surtout s'assurer que les familles de demain aussi y auront accès. Dans un service de garde, c'est du 0-4 ans. Il y a un roulement, il y a de nombreuses jeunes familles qui s'attendent à avoir un service, et, nous, il faut faire en sorte qu'il soit disponible, qu'il soit flexible, pour répondre à leurs besoins. Et c'est ça, la consolidation des services de garde.
Vous parlez, oui, de flexibilité, évidemment plus souple, pour répondre à certains besoins des parents, et ce qu'il faut mentionner puis c'est important de le faire, c'est que, lorsqu'on parle de flexibilité et... de flexibilité particulièrement, c'est que la possibilité va être donnée aux services de garde de la donner, cette flexibilité-là, de l'offrir. Il n'y a pas d'obligation de le faire, il n'y a même pas de besoin partout non plus de le faire. Vous l'avez, ça aussi, mentionné. Il y a des endroits où ça ne change absolument rien, au niveau des services de garde, dans l'offre de services qu'ils ont actuellement parce qu'elle répond très bien aux besoins de leur région, de leur secteur. Il y a certains endroits où il y a une demande qui est différente de l'offre, et une demande à laquelle les services souhaiteraient pouvoir répondre, mais que la loi ne permet pas de le faire présentement. Alors, c'est ces éléments-là qu'on a voulu dans le fond faciliter par le projet de loi. Alors, lorsque vous parlez de la nécessité d'avoir des services plus flexibles et plus souples, bien je pense que c'est là, dans ce sens-là, que la loi y répond.
n(10 h 30)n Vous parlez également du fait que les services offerts aux enfants... de l'importance qu'ils soient éducatifs, et vous avez tout à fait raison. C'est dans le titre de la loi, c'est dans la... je vous dirais, c'est intrinsèque à la loi au complet et c'est surtout très bien intégré maintenant dans la loi. Parce que les paramètres des services éducatifs et l'encadrement n'étaient pas là. Nous nous sommes donné, par les articles qui sont dédiés à ce sujet-là, vraiment toutes les possibilités pour l'exiger, cette qualité-là, l'exiger, exiger, je dirais, les balises d'une démarche éducative pour s'assurer justement que les enfants aient un service auquel les parents sont en droit de s'attendre, parce que ces services-là évidemment... On dit toujours que le parent est le premier responsable de son enfant, mais on veut que, dans les services, il y ait tout... que tout soit mis en place dans le fond pour que le volet prévention ? vous parliez de dépistage ? et le volet éducatif, en support aux actions des parents, soient là, et ça, c'est important, et on l'a même intégré dans le fond à la loi pour avoir justement une portée, tout ça dans le fond pour s'assurer que la qualité va être au rendez-vous, et, pour ceux et celles des personnes ou des services qui ne donneraient pas cette qualité-là, bien qu'on puisse retirer les places et retirer la subvention. Parce que, ça, c'est important, ça fait partie d'un processus de qualité. Et ça, ce n'était pas là non plus, et là on l'a intégré.
Vous parlez de mesures pour mieux diriger les sommes vers les services aux enfants. C'est exactement ça aussi qu'on fait, particulièrement avec les bureaux coordonnateurs: moins de structures et plus de services directs aux enfants. Alors, je veux vous rassurer là-dessus. Au niveau des bureaux coordonnateurs, je vais vouloir vous entendre, parce que vous semblez avoir une préoccupation par rapport aux équipes de soutien qui seraient en place ou au manque... Vous dites que vous avez un peu une préoccupation par rapport peut-être à la composition de ces équipes-là. Je veux, moi, vous rassurer. Comme je dis, je vais vouloir vous entendre là-dessus. C'est qu'il y aura vraiment des équipes qui vont être dédiées par région, par secteur, au milieu familial. Nous voulons conserver un service de proximité, un service encore plus soutenu, parce que...
On l'a vu dans plusieurs régions en fait, c'est que, oui, les CPE avaient une personne ou une personne et demie, parfois deux, ça dépendait de l'ampleur du milieu familial, dédiées au milieu familial, mais on a aussi vu, dans des conclusions d'enquête, entre autres sur la qualité, que l'uniformité de la qualité n'était pas égale partout au Québec. Remarquez que c'est un objectif, on espère l'atteindre, et tout, mais il faut s'assurer, nous, par contre, de notre côté, de mettre en place les moyens, par exemple. Et nous pensons que de concentrer des équipes par région, adaptées au nombre de milieux familiaux et au nombre d'enfants et de responsables, et évidemment axées sur les besoins particuliers de chaque région...
Vous parliez de distances, par exemple, de géographie, tout ça va être pris en compte. C'est bien évident que, si, par exemple, un bureau est situé au centre-ville soit de Québec, Montréal ou Trois-Rivières, ce n'est pas la même chose tout à fait au quotidien que si on est situé dans une région, comme par exemple Rouyn-Noranda, où il y a du millage à faire, des distances à parcourir, ça est pris en ligne de compte. On fait des travaux présentement, évidemment c'est toujours sujet à l'approbation de la loi, mais on fait des travaux pour voir de quelle façon ça va pouvoir s'orchestrer, et tout ça est déjà pris en compte, et je voulais aussi vous assurer là-dessus.
Ce que nous avons aussi en commun dans le fond comme préoccupation, c'est l'abolition des frais supplémentaires et la gestion des fonds publics. On ne peut pas ne pas se préoccuper de la gestion de fonds publics lorsqu'un service comme celui-ci exige de la part des contribuables... et qui le font, je pense, avec plaisir, parce que les contribuables sont des parents, ce sont des grands-parents et ce sont des gens qui ont eu des enfants, qui sont conscients des besoins qu'on a et des réalités différentes en 2005. On ne peut pas ne pas se préoccuper de la gestion des fonds publics. Et, au niveau du projet de loi, nous nous sommes donné les mécanismes justement pour s'assurer de la bonne gestion des fonds publics, du support en cours de route aux gens qui ont à les gérer, pour les supporter dans leurs décisions, leur faciliter également le travail et faire en sorte qu'il y ait une reddition de comptes accrue, au ministère et au gouvernement conséquemment, sur cette utilisation des fonds publics.
Lorsque vous parlez des bureaux coordonnateurs, vous semblez dire ou en tout cas vous semblez avoir une préoccupation qu'ils ne pourront pas soutenir comme il se doit le milieu familial. J'aimerais peut-être vous entendre un peu plus là-dessus en fonction évidemment de ce que vous connaissez du projet de loi et des détails. Je pourrai peut-être aussi échanger pour vous préciser des choses, mais j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Blais (Marguerite): Alors, merci beaucoup, Mme la ministre. Mme la Présidente, si vous permettez. Tout changement, je crois ? ce n'est pas à vous, Mmes et MM. les parlementaires, que je vais apprendre ça ? tout changement, dans la vie, est extrêmement insécurisant. Or, l'insécurité est palpable un peu partout parce qu'on se demande comment ces bureaux coordonnateurs vont fonctionner, on ne le sait pas vraiment, c'est difficile d'imaginer comment ça va fonctionner.
Alors, au conseil, quand on regarde, par exemple, dans le projet de loi, au numéro 40, au point 7°, c'est: «de favoriser la formation et le perfectionnement des personnes responsables d'un service de garde en milieu familial ? ça va ? et d'offrir un soutien pédagogique et technique sur demande». Alors, le mot «sur demande» nous a énormément questionnés. Il nous semble que ça ne devrait pas être sur demande, il nous semble que ça devrait être tacite. On devrait pouvoir l'offrir. C'est comme si, en mettant le mot «sur demande», on ouvre une porte pour dire: Bien, si le milieu familial ne fait pas la demande de soutien et de formation, bien là il n'obtient pas la formation. En tout cas, c'est ce que je comprends, et je crois que c'est ce que les membres du conseil ont compris par rapport à ça.
Autre chose concernant les bureaux coordonnateurs de garde en milieu familial, c'est que ça coordonne évidemment le milieu familial, ça ne tient pas compte des listes nécessairement d'attente dans les centres de la petite enfance. Je crois qu'on s'intéresse au... Et vous me corrigerez, là. On a besoin, nous aussi, du conseil, d'être éclairés. Ça gère les listes d'attente pour le milieu familial mais pas nécessairement pour les centres à la petite enfance.
Et nous avons cette inquiétude de fragilité, d'effritement du milieu local qui commençait à se tisser. Nous savons pertinemment comment c'est difficile de changer les mentalités et les cultures. Et, pour qu'il y ait des mécanismes pour faire travailler les gens ensemble, c'est-à-dire un milieu de parents, un milieu communautaire, un milieu local, ça prend beaucoup de temps, ça ne se fait pas en un an, en deux ans. Alors, quand on dit aussi: Assurer la pérennité, nous sommes d'accord avec vous, il faut l'assurer à long terme, mais il faut aussi assurer la pérennité de la mise en place d'une autre culture qui est celle aussi de l'«empowerment».
Si on veut régler les problèmes... Puis là je suis sortie des bureaux de coordonnateurs, hein, pour revenir à mon dada. Mais, si on veut régler ? excusez-moi cette digression; mais, si on veut régler ? les problèmes de pauvreté et d'exclusion sociale, si on ne veut pas un jour avoir de très grandes difficultés dans notre Québec, avec des jeunes qui se rebellent, je crois qu'il est impératif, à la base, que les petits enfants aient des chances égales. Et c'est aussi très important que les parents, qui sont peut-être... qui ont eu moins de chances dans leur propre vie, puissent aussi découvrir qu'ils ont, à l'intérieur d'eux-mêmes, un pouvoir parfois insoupçonné. Et les gens peuvent transformer leur milieu quand ils croient à leur pouvoir intérieur.
Et là je reviens au bureau coordonnateur pour vous poser une question. On a un peu de difficultés à comprendre les mécanismes de fonctionnement de ces bureaux-là. On ne dit pas que ce n'est pas bon, on dit seulement qu'on a de la difficulté à les voir clairement. Comment ça va fonctionner? Comment ce bureau-là va faire en sorte qu'il y ait assez de conseillères pédagogiques pour offrir la formation et le soutien nécessaires au milieu familial? Alors, je vous repose la question.
Mme Théberge: Moi, je vais reprendre un peu ce que vous avez dit par rapport, entre autres, aux liens avec la communauté. Il y a des services de garde, que ce soit le CPE-installation, que ce soit les garderies privées, que ce soit le milieu familial, qui ont tissé, seuls ou en groupe, des liens avec la communauté, et tout ça va demeurer. Lorsqu'on parle du bureau coordonnateur, ce n'est que, mais en même temps c'est quand même un gros morceau, une mesure administrative dans le fond pour remettre, dans une équipe complète, tout le soutien.
n(10 h 40)n Je vais vous donner un exemple. Il y a des endroits où, par exemple sur le terrain, j'en parlais un petit peu tout à l'heure, s'il y a des conseillères pédagogiques ou des groupes qui étaient en soutien, ils n'avaient pas nécessairement des temps complets, par exemple, à faire ou avaient à aller sur le territoire et croisaient souvent des gens d'un autre CPE, qui se retrouvaient dans un milieu familial voisin, par exemple, parce qu'il y avait des chevauchements de territoires. Et des éléments aussi, par ailleurs, par rapport à, je dirais, la qualité égale en tout, du moins la plus uniforme possible partout, étaient difficiles parce qu'il y avait beaucoup de gens qui s'occupaient, de façon différente, parce que c'est humain... étaient en petites équipes très éparpillées un petit peu sur le territoire. En ramenant à une équipe de soutien qui sera là au service uniquement du milieu familial... Et, quand on dit «sur demande», c'est bien évident que toutes les mesures, que ce soit d'accréditation, de supervision et de surveillance même, vont être là quand même, là, l'un n'enlève pas nécessairement l'autre, mais le soutien va être sur demande en plus. Parce qu'on a reçu aussi beaucoup de commentaires du milieu familial, et même de certains CPE, qui disaient: On ne peut pas donner le soutien aussi souvent, aussi bien, aussi longtemps qu'on voudrait. Et le milieu familial disait: On n'a pas accès à un service régulier.
Alors, d'avoir des équipes complètes, qui vont être plus nombreuses, comme je disais, au prorata évidemment des nombres de milieux familiaux et des nombres d'enfants, et tout ça, et aussi en fonction du territoire à couvrir et en fonction des besoins particuliers, les équipes vont être formées dans ce sens-là. Alors, nous, ça nous rassure beaucoup sur la qualité, la disponibilité du service de soutien, entre autres, de... Quand on dit «soutien», c'est du soutien, c'est de la formation, c'est de l'information, c'est du service-conseil. Quand on dit «sur demande»... C'est parce que c'est important que la personne qui est seule dans sa maison, par exemple, en milieu familial, puisse avoir accès à quelqu'un rapidement ou régulièrement, selon un besoin particulier ou selon une situation particulière, et c'est dans ce sens-là que les mises en place devraient se faire. Alors ça, c'était pour vous rassurer aussi au niveau du bureau coordonnateur.
Un élément aussi de centralisation, je vous dirais, par rapport aux listes d'attente, qui est important, vous l'avez abordé un petit peu. On entend en fait presque toujours parler d'un porte-à-porte pour trouver des places, que ce soit en CPE, en installation, en garderie ou en milieu familial. Nous voulons nous assurer justement d'un meilleur jumelage entre l'offre et la demande. Au niveau du bureau coordonnateur et du milieu familial, la personne responsable, on respecte l'autonomie de son service, évidemment elle pourra choisir les enfants, mais c'est important de faire en sorte que le lien se fasse. De quoi on a besoin sur un territoire? De quelle sorte de services? Est-ce qu'il y aura de la garde de nuit? Probablement pas beaucoup, parce que ce n'est pas nécessairement un service qui est très demandé, mais ça se peut qu'à un endroit, pour un service, on puisse le faire. C'est à nous de s'assurer que la loi permet de le faire, si besoin, particulièrement pour ce service-là. Est-ce qu'il y aura des obligations d'offrir toute la flexibilité en tout temps? Non, il n'y a pas d'obligation à ça, c'est selon un besoin. Et c'est ça, la flexibilité aussi, la possibilité de le faire, et de bien le faire surtout, et d'être bien encadré pour le faire également.
Et, lorsque vous parlez de listes d'attente par rapport aux CPE, aux garderies, il y a présentement un projet pilote justement d'un logiciel pour les listes d'attente. Dans le centre-ville de Montréal, il y a entre 15 ou 20 CPE qui sont attachés à ça, hein? Une cinquantaine? On me dit 50, voyez-vous? Si c'est concluant, on va pouvoir exporter la bonne nouvelle, dans le fond, parce que, ça aussi, pour les parents, c'est une façon d'enlever du stress et de concilier, à un moment donné, le travail-famille, parce que ce n'est pas évident, on en convient. Et tout ce cheminement-là fait justement partie du processus, c'est-à-dire consolider et améliorer le service de garde, parce qu'il y a le service directement aux enfants et il y a l'environnement aussi dans lequel ce service-là est donné.
Mme Blais (Marguerite): Mme la ministre, n'y aurait-il pas lieu que le législateur... pour revenir au point 7°, concernant «sur demande», pour clarifier ça, étant donné que vous avez dit que non seulement il y aura du service, mais qu'on va faire un renforcement du service, qu'on trouve un terme qui ferait en sorte que, oui, le milieu familial peut demander les services, mais que les services seront constants, que les services seront présents pour ne pas insécuriser? Ce mot-là, «sur demande», insécurise un peu, il y aurait peut-être lieu de trouver un terme qui vient faire un renforcement: disponible mais constant. En tout cas, un autre mot, là. Je ne l'ai pas, et il ne me vient pas à l'esprit. En continu, tenez, en continu. De cette manière-là, bien, ah, on sait que les services seront disponibles.
Et je suis très heureuse d'entendre qu'il y a actuellement... Oui, je sais qu'il y a des projets pilotes. Et je lisais... Hier soir, dans la nuit, j'ai revu le projet de loi et j'ai vu qu'effectivement il y avait des projets pilotes et qu'on s'octroyait la possibilité de mettre sur pied des projets pilotes. Et je trouve que les projets pilotes permettent aussi de voir qu'est-ce qui se fait de bien et qu'est-ce qui se fait peut-être de moins bien. Et les listes centralisées nous apparaissent comme étant quelque chose de fondamental parce que, sinon, seulement une liste pour le milieu familial, ça ne règle pas le problème des listes d'attente des centres de la petite enfance.
La Présidente (Mme James): Il reste à peu près une minute et demie.
Mme Théberge: Une minute et demie. Parfait. À ce moment-là, peut-être un point sur lequel aussi vous avez... Bien, en tout cas, on parlait de liste centralisée. Est-ce que vous avez des suggestions, par exemple, par rapport à de quelle façon ça pourrait se faire pour respecter un peu le besoin du parent, de votre point de vue à vous, et l'offre évidemment, pas nécessairement en installation, là, mais en milieu familial?
Mme Blais (Marguerite): Je ne sais pas si j'ai une idée, mais je vais vous raconter quelque chose. Quelqu'un près de moi a un enfant qui était dans un milieu familial, et, à un moment donné, on a refusé l'enfant parce qu'à deux ans il n'était pas en mesure de marcher comme un autre enfant de deux ans, il avait une difficulté physiologique. Donc, on a dit: On ne garde pas votre enfant, madame. Alors, elle s'est retrouvée avec son enfant et, elle, étant sur le marché du travail, à être obligée de trouver une place. Finalement, elle a trouvé une place dans un centre à la petite enfance. Et c'est la raison pour laquelle il faut faire extrêmement attention pour les enfants qui ont des besoins spéciaux. Étant donné que le milieu familial peut choisir les enfants, il faut protéger les autres enfants. Et ces parents-là se retrouvent dans des difficultés. Non seulement ils apprennent que leur enfant a une anomalie, ils doivent vivre avec la difficulté de l'enfant ayant une anomalie, mais, en plus de ça, il faut se trouver une place et, quand il y a des listes d'attente...
J'apprenais récemment... Je suis d'un quartier populaire, je suis issue de Pointe-Saint-Charles, je le dis souvent, j'en suis très fière. Et le CPE de Pointe-Saint-Charles, il a une liste d'attente à peu près d'une centaine d'enfants. Alors, c'est un milieu défavorisé, c'est un milieu multiculturel, c'est un milieu où effectivement les enfants doivent recevoir beaucoup de services éducatifs. Alors, on se dit: Comment se fait-il qu'il y a une liste d'attente d'une centaine d'enfants? Et ça, ce sont les intervenants, dans le CPE de Pointe-Sainte-Charles, qui m'ont dit ces choses-là récemment.
Alors, c'est pour ça que... Je n'ai pas de solution, mais je vous dis seulement qu'il y a des interrogations par rapport à la gestion des listes d'attente, puis il ne faut pas mettre de côté les enfants qui ont des besoins spéciaux.
Mme Théberge: Je veux vous rassurer tout de suite, parce que non seulement on ne veut pas, mais je ne pense pas que ce soit le souhait non plus des intervenantes en milieu familial. Mais on a aussi intégré non seulement au règlement, mais aux règles budgétaires surtout ce qu'on appelle les mesures exceptionnelles, c'est-à-dire des mesures de soutien qui sont là pour soutenir financièrement, et souvent ça se traduit par des équipements autant dans les installations que le milieu familial, les enfants justement qui ont des problématiques, que ce soient physiques ou de d'autres ordres. Et ça, c'est bien important. Merci.
La Présidente (Mme James): Merci. M. le député de Vachon, vous avez soulevé une question de règlement en vertu de l'article 212. Avant de débuter votre période d'échange avec Mme Blais, si vous souhaitez faire des explications suite à l'intervention de Mme la ministre, vous pouvez le faire immédiatement.
M. Bouchard (Vachon): Mme la Présidente, c'est plutôt la ministre qui me doit des explications parce qu'elle a affirmé que j'aurais prétendu que le réseau était parfait et n'avait pas besoin d'améliorations. J'ai dit à deux reprises, dans mon intervention, que le réseau était exemplaire, oui. Ça veut dire qu'il peut donner l'exemple à d'autres entités, dans d'autres juridictions, de la performance et de son efficacité à relever des défis extraordinaires. Mais j'ai aussi mentionné qu'on pouvait arriver à faire des améliorations à partir de la loi actuelle plutôt que de la jeter au panier et de la remplacer. Alors donc, je corrige les propos qui à mon avis ont été, selon l'expression de 212, mal compris ou déformés. Et, en français, «ou», ça veut dire «et/ou».
La Présidente (Mme James): ...votre période d'échange, M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Très bien. Alors, bonjour et merci de votre contribution et merci d'installer ce ton de conciliation et de discussion sereine autour de cette table. Vous avez un mémoire qui soulève plusieurs questions, et j'aimerais en aborder quelques-unes. Je vais prendre le moins de temps possible à poser mes questions pour vous écouter le plus longuement possible.
Première question. Vous évoquez le fait qu'on aurait peut-être pu envisager un scénario de compromis entre le nombre que nous avons, actuel, de CPE qui sont responsables de services de garde en milieu familial, tant dans la surveillance, le contrôle, que dans le soutien, et le 130 que nous retrouvons non pas dans la loi, mais dans les explications non législatives que nous donne la ministre. Avez-vous en tête un scénario quelconque? Avez-vous eu le temps d'examiner des scénarios qui nous permettraient à la fois de rencontrer des objectifs poursuivis par la loi et à la fois de préserver l'intégralité des communications entre les CPE et les ressources de garde en milieu familial?
n(10 h 50)nMme Bitaudeau (Isabelle): Là-dessus, je peux peut-être donner quelques explications. Les membres du conseil ne se sont pas rendus, je dirais, dans leur réflexion, jusqu'à des scénarios élaborés. Ce qu'ils voulaient mettre en évidence par cette remarque sur l'examen de la zone géographique, c'était que le scénario proposé devait absolument, la ministre l'a souligné tantôt, tenir compte de la géographie particulière du Québec, tout particulièrement des régions peu densément peuplées. La proposition de bureau coordonnateur laissait entendre une concentration, en fin de compte, de ressources en un lieu donné. Plusieurs membres viennent des régions et nous disaient: Bien oui, mais une concentration, quand on se retrouve effectivement en Abitibi, sur la Côte-Nord ou en Gaspésie, ça veut dire que la proximité va disparaître. Et ça, c'était, je dirais, l'inquiétude principale, là, autour de cette question-là, c'était de pouvoir conserver, en fin de compte, une proximité de services pour le milieu familial, qu'il sente que la personne chargée du soutien, en particulier du soutien éducatif, soit familière avec l'environnement social, avec l'environnement local, je dirais, et c'était davantage cette inquiétude-là qui a provoqué, en fin de compte, cette remarque du conseil, cette observation. Sans qu'il se rende jusqu'à un scénario très, très élaboré, il lui semblait que 130, c'était vraiment une concentration peut-être importante, surtout en tenant compte de la géographie de la province de Québec.
Mme Blais (Marguerite): Qui plus est, j'ajouterais peut-être, si vous le permettez, que le sentiment identitaire local... Il y a une montée, une importance de se sentir bien dans notre environnement. On est en train de travailler sur un avis, ça n'a rien à voir avec ça, mais sur les municipalités, et, dans nos recherches, à une époque, on quittait les villes pour s'en aller dans les banlieues, et là les gens sont rendus dans les quatrièmes couronnes, quand on habite dans une grande ville, et on se rend compte de toutes les difficultés de conciliation famille-travail, on veut revenir à la ville. Donc, on ne veut plus aller dans une banlieue-dortoir, on veut vivre dans un endroit où on a le sentiment qu'on est accueillis en tant que personnes, qu'on a des services de proximité, etc. Donc, les gens ont besoin de ce sentiment de sécurité là et identitaire. On a perdu beaucoup, dans nos campagnes, dans nos villes et dans nos villages, l'épicerie du coin, on a perdu des caisses populaires, bon, des services financiers, devrais-je plutôt dire, sans nommer qui que ce soit. Mais ça, ce sont des endroits qui sont très rassembleurs. Et je pense que ça crée cette inquiétude-là, et c'est la raison pour laquelle nous avons dit qu'entre 130 bureaux coordonnateurs et 880 places, par exemple, il y aurait peut-être un autre équilibre à trouver.
M. Bouchard (Vachon): Votre question en soulève une autre, à savoir: Est-ce que vous souhaiteriez que, dans ces scénarios, on conserve l'intégralité du système, c'est-à-dire qu'on s'abstienne de créer un troisième réseau, ou est-ce que vous voyez plus de bureaux de coordonnateurs plus petits? Parce que la loi propose la création d'un troisième réseau, vous l'avez souligné, même que vous avez évoqué des inquiétudes à cet effet-là, à savoir qu'on installerait peut-être la compétition désormais entre les réseaux, là.
Mme Blais (Marguerite): C'est une très bonne question. Ce n'est pas une question qu'on a approfondie encore. Vous savez qu'au Conseil de la famille et de l'enfance nous avons des personnes qui viennent de tous les milieux, alors certains membres du conseil seront présents à cette commission, et il y a des visions parfois qui sont totalement opposées. Alors, au conseil, nous avons dû concilier avec des visions qui étaient à gauche et à droite ou en haut ou en bas puis essayer de trouver un consensus. Donc, certains membres ne souhaitent pas la disparition du système actuel, d'autres membres du conseil ont dit que c'était important aussi qu'il y ait une diversité de services, qui étaient pour les bureaux coordonnateurs. Alors, voilà la diversité au sein même de la démocratie qu'est un conseil comme le Conseil de la famille et de l'enfance.
M. Bouchard (Vachon): Alors, bienvenue dans le club. Dites, il y a une préoccupation chez vous de cette notion de compétition entre les réseaux, et j'aimerais vous entendre plus longuement là-dessus.
Mme Bitaudeau (Isabelle): Là-dessus, je dirais que les membres se sont réunis d'abord en comité avant de proposer des positions à l'ensemble du conseil. Et ce qui ressortait des discussions du comité, c'était, bon, le souvenir aussi. Vous avez noté que le conseil revient beaucoup à l'origine du réseau, à la façon dont il s'est constitué et au rôle majeur que les familles elles-mêmes et les parents ont joué dans l'élaboration de ce réseau-là. Et plusieurs ont évoqué l'époque où effectivement, autour de la petite enfance, plusieurs institutions, plusieurs réseaux institutionnels et organisations locales avaient une forme de compétition.
Bon, sans vouloir les nommer, on parlait... Bon, il y avait des initiatives qui parlaient d'école maternelle, il y avait le CLSC qui prétendait avoir des compétences aussi, particulièrement en matière de prévention, il y avait donc le réseau scolaire, le réseau sociosanitaire et les garderies de toutes sortes, garderies privées, etc., et alors il nous semblait que les années de développement du réseau avaient permis de mettre non pas en concurrence, mais en cohérence l'ensemble de ces institutions et de ces organismes autour de la petite enfance et de la nécessité de la prévention. Et les membres souhaitaient exprimer que cette cohérence-là, que le fait que toutes ces institutions et les personnes de ces institutions avaient appris à travailler en complémentarité, c'était important de le préserver.
M. Bouchard (Vachon): À ce sujet-là, Mme la Présidente... Bon, vous m'amenez sur une autre question, là, c'est sur l'effritement possible des partenariats et des collaborations locales. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que voilà un projet de loi qui soulève des questions à ce sujet-là, vous n'êtes pas les premières à l'évoquer. Nous recevons quotidiennement des mémoires de plusieurs organisations, institutions, par voie de courriels, et des lettres de parents également.
J'aimerais vous entendre là-dessus parce que ça arrive au moment où, en même temps, le ministère de la Santé, dans son opération de reconfiguration des services de santé, mise sur les réseaux de santé locaux, reconfigure les CLSC et autres organismes en CSSS et souhaite qu'il y ait des projets cliniques. Et plusieurs avaient conçu les centres à la petite enfance comme des plateformes importantes des projets cliniques locaux dans ce contexte-là, à savoir que, puisqu'il y a 200 000 enfants inscrits dans les centres de la petite enfance, installations et services de garde en famille, ces joueurs devenaient très importants dans l'élaboration d'un projet clinique 0-4 ou 0-5 ans au niveau local, et là vous vous inquiétez de l'effritement des partenariats locaux. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus parce que c'est majeur, me semble-t-il, dans nos prétentions à favoriser plus de prévention, plus de promotion du développement de l'enfant et en même temps plus de dépistage des enfants en difficulté.
Mme Blais (Marguerite): Je vais commencer, puis Isabelle pourrait compléter. Si on prend un milieu comme Montréal, si on prend Centraide, entre autres, du Grand Montréal en pleine campagne, pas seulement Centraide du Grand Montréal, mais Centraide dans son ensemble, en pleine campagne de financement, les Centraide financent beaucoup les tables de concertation des milieux, entre autres Centraide a un projet pilote avec ville Saint-Michel, qui est un quartier extrêmement... un quartier sensible, un quartier difficile, un quartier où on peut changer les choses si on le désire. On ne voudrait pas que... Et la beauté de Saint-Michel, c'est que ce n'est pas à l'extérieur de Montréal, c'est en plein coeur de Montréal, comparativement en France où les quartiers sensibles sont à l'extérieur, ils ont été faits à l'extérieur de la ville, c'est en plein coeur de la ville de Montréal. Donc, on peut agir, il faut agir maintenant, parce que se retrouve, à ville Saint-Michel, un grand bassin d'enfants et de parents pauvres, et je vous rappellerai, Mmes et MM. les parlementaires, qu'il n'y a pas d'enfants pauvres sans parents pauvres.
n(11 heures)n Et cette table de concertation fait en sorte que le milieu communautaire... Et, quand je parle de milieu communautaire, on parle également de parents qui siègent à cette table pour prendre des mesures communes. Et les mesures communes, c'est aussi simple que, à un moment donné, si Centraide finance un transporteur, une petite camionnette pour un organisme et que l'organisme n'a pas besoin d'une camionnette sept jours par semaine, c'est comment on peut partager les services entre différents organismes. Alors, ça a pris quand même plusieurs mois de discussions pour en arriver à une espèce de consensus pour faire en sorte que Centraide finance un transporteur, que ce transporteur-là puisse servir à l'ensemble de la collectivité, pour les besoins de la collectivité. Ça veut dire que ça permet à des acteurs locaux d'essayer de vivre ensemble. On a de la difficulté à accepter souvent des différences et des idées qui sont différentes, mais on peut parfois faire des compromis. Dans la vie, il faut apprendre à faire des compromis, il faut apprendre à tisser les mailles ensemble et à vouloir agir ensemble.
Et ville Saint-Michel ? bien, ce n'est plus ville Saint-Michel maintenant, là ? l'arrondissement de Saint-Michel est un bel exemple de prise de décision des gens par eux-mêmes pour vouloir changer la situation, et nous espérons ? parce que vous savez qu'il y a une très grande concentration de population noire; et nous espérons ? qu'on va réussir à pouvoir changer la face ? c'est le cas de le dire ? de ce quartier, que ce quartier va devenir riche, riche dans le sens où on va vraiment découvrir que les enfants peuvent partir, d'un point de vue égalitaire, avec toutes les chances et que même le milieu scolaire par la suite sera ouvert.
J'entendais récemment: Il va y avoir un film qui va sortir, dans le cadre du Mois de l'histoire des Noirs, un documentaire, et il y a une école, l'école Joseph-Papineau, bien, il n'y a pas de fenêtres dans cette école-là, c'est gris. Alors, les jeunes disent: Écoutez, on va dans une école qui est grise, une école qui n'a pas de fenêtres, une école où le soleil ne traverse pas. Alors, on a besoin, nous aussi, pour s'épanouir d'avoir les mêmes qualités que les autres. Et c'est la raison pour laquelle c'est important de ne pas perdre de vue le milieu local et la proximité pour justement essayer de changer les difficultés qu'on y rencontre. Isabelle?
Mme Bitaudeau (Isabelle): Madame, que voulez-vous que j'ajoute à ça? Il me semble que votre description de l'importance de la cohérence dans un milieu donné a été suffisamment éloquente.
M. Bouchard (Vachon): Oui, mais en même temps j'aimerais vous entendre plus précisément sur ce qui vous inquiète dans le projet de loi à ce sujet-là.
Mme Bitaudeau (Isabelle): Je dirais que l'attention s'est centrée spécifiquement sur le rôle, par exemple, que pouvaient jouer les conseillères pédagogiques en ce sens-là. Les conseillères pédagogiques rattachées à un CPE avaient développé une connaissance très fine du milieu local, connaissaient effectivement... bon, elles vivaient en partenariat avec un bon nombre d'institutions. Évidemment, il y avait une diversité, là. Tout le monde n'était pas rendu au même point dans le développement de ce genre d'expertise là, mais il nous semble que de nombreux milieux avaient réussi à développer ce genre de partenariat puis d'actions concertées ou en tout cas d'actions en cohérence autour de l'enfant. Et le fait de concentrer les services dans une zone géographique pour le milieu familial nous paraît représenter effectivement un risque, là, de perdre cette expertise et cette volonté de travailler en partenariat, qui s'étaient développées.
M. Bouchard (Vachon): Merci. Mme la Présidente, je sais que la députée de Lotbinière voudrait poser une question, mais j'aimerais peut-être... Non? Non. Vous n'avez pas posé une question? O.K.
Alors, écoutez, vous avez, tout à l'heure, évoqué la question des listes d'attente. Ça va devenir un peu plus technique. La ministre faisait état d'un projet pilote, dans le centre de Montréal, avec 50 CPE, puis ça a l'air à être assez concluant, ce qui nous fait dire qu'on n'avait pas besoin d'un bureau coordonnateur pour faire le travail. Mais ce qui vous inquiète dans le fond, c'est le fait qu'on instaure des listes d'attente qui ne tiennent pas compte de l'ensemble des besoins de la communauté. Parce que les CPE ne feront pas partie de la même liste d'attente. On va avoir deux, trois guichets uniques, là. Voulez-vous nous informer davantage de l'analyse que vous faites à ce sujet-là?
Mme Bitaudeau (Isabelle): Bien, ce n'est pas... Je n'appellerais pas ça une analyse parce que je dirais qu'on n'a pas poussé très, très loin les scénarios possibles. C'est davantage le reflet de ce qu'on entend quand le conseil fait des consultations, y compris quand on a organisé un colloque au mois de mai. Les parents nous disent: Écoutez, nous, on a besoin de savoir... Ça débute dès le moment où on apprend qu'on attend un enfant. Tout le monde autour de nous parle de la difficulté de trouver une place, etc. Donc, on a besoin de savoir où s'adresser et on a besoin d'avoir un seul endroit, en fin de compte, où s'adresser. Parce que les parents, surtout quand c'est le premier enfant, n'ont pas tous fait un choix éclairé, en fin de compte, de milieu familial ou de CPE. Il y en a beaucoup qui ont besoin d'abord d'avoir une information, de visiter des milieux, de comprendre comment ça se passe. Je ne vous l'apprends pas, là, le premier enfant, c'est l'inconnu, puis c'est la découverte petit à petit de tous les services qui s'offrent, etc. On nous a beaucoup souligné la difficulté de trouver les services, d'avoir une information claire, facilement accessible. Les parents soulignent qu'ils sont un peu laissés à eux-mêmes, là, dans la quête du bon service, etc. Donc, le conseil, en fin de compte, s'est saisi un peu de ces attentes-là et les a traduites dans l'idée d'une liste centralisée, quelle que soit la place. Il ne s'est pas prononcé autrement sur quel organisme devrait centraliser cette liste-là, mais il lui semblait que les attentes des parents étaient davantage d'avoir un seul endroit où s'adresser, où ils puissent obtenir toute l'information nécessaire.
M. Bouchard (Vachon): Je pense avoir entendu ? puis là je ne voulais pas me faire servir 212 à mon tour, là, mais; je pense avoir entendu ? tout à l'heure, la ministre dire que les responsables des services de garde auraient la latitude de choisir les parents ou les enfants qu'ils souhaitaient, là, sur leur liste. Est-ce que vous avez une idée comment cela peut fonctionner, en même temps une liste centrale où on aurait l'ensemble des places disponibles ou des parents en demande, mais d'autre part une liberté laissée à chacun des prestataires de services de choisir qui bon lui semble? Est-ce que vous avez entendu la même chose que moi? Peut-être pouvez-vous m'éclairer là-dessus.
Mme Blais (Marguerite): Écoutez, on n'a pas pu réfléchir à tous ces détails-là. La commission parlementaire est rapide. Ce qu'on vous a présenté aujourd'hui, c'est vraiment une préoccupation de fond du conseil pour les services éducatifs. On ne peut pas arriver avec des mécanismes de fonctionnement. On n'est pas assez dans le concret, là, du fonctionnement quotidien des centres à la petite enfance, ou du milieu familial, ou des garderies privées. On n'a pas la connaissance fine de tous ces détails-là, mais ce que nous savons, ce qu'on apprend, c'est que le service familial peut, c'est-à-dire qu'une personne responsable du milieu familial peut choisir les enfants qu'elle accueille, tandis que, dans les centres à la petite enfance, on accueille tous les enfants. Et si, dans un milieu familial, par exemple, un enfant est en difficulté parce qu'il est handicapé et que le milieu familial le refuse, bien il faut absolument que ce parent-là se retourne et trouve un milieu autre pour accueillir son enfant en situation de handicap. C'est ce que nous comprenons.
M. Bouchard (Vachon): Très bien. Vous avez soulevé toute la question ? puis, en rencontrant les responsables de services de garde en milieu familial, c'est souvent évoqué ? de la qualité de vie des femmes qui sont responsables de ces services de garde en milieu familial et de l'approche de flexibilité offerte aux parents dans les horaires atypiques ou le prolongement des horaires. Peut-être une petite observation en passant. La flexibilité, là, à part les 48 heures, là, que la loi entrevoit, la flexibilité n'est pas inscrite dans la loi, là. Elle va apparaître dans les règlements, mais elle n'est pas inscrite dans la loi.
Ceci dit, qu'est-ce que vous suggérez, quelles sont vos préoccupations, et ce que vous suggérez à l'égard de la qualité de vie des familles qui reçoivent, au sein de leur maisonnée, des enfants dont ils ont la garde durant la journée, en regard de la flexibilité et en regard de votre préoccupation pour la qualité de vie de ces femmes-là?
La Présidente (Mme James): Je vous demanderais de répondre assez rapidement, étant donné que le temps passe.
Mme Blais (Marguerite): Oui, bien, merci, Mme la Présidente. Tout ce qu'on peut dire, c'est que, si on parle beaucoup de conciliation famille-travail et de permettre aux parents travailleurs d'obtenir des services pour les horaires atypiques, leur horaire de travail, il me semble que c'est important, il nous semble que c'est important aussi de préserver la qualité de vie des personnes qui sont responsables du milieu familial. Donc, ça veut dire que ça prend... 48 heures, déjà, c'est beaucoup de laisser un enfant, hein? Il ne faudrait pas que les parents se déresponsabilisent et laissent les enfants continuellement dans le service de garde et oublient de s'occuper de l'enfant. Je pense que ça, ce serait une grave erreur.
Donc, il faut tenir compte absolument des besoins de la personne qui est responsable d'un milieu familial au niveau de sa propre conciliation famille-travail, lui donner le soutien adéquat pour qu'elle soit en mesure d'accueillir des enfants dont les parents ont des horaires non usuels et... Bien, ça, ça va prendre un équilibre très fin également.
La Présidente (Mme James): Alors, merci beaucoup, Mme Bitaudeau, Mme Blais, pour votre présentation de la part du Conseil de la famille et de l'enfance.
n(11 h 10)n Et je demanderais aux représentants de l'Association des éducateurs et éducatrices en milieu familial de prendre place immédiatement, s'il vous plaît. Merci.
(Changement d'organisme)
La Présidente (Mme James): Alors, bienvenue à l'Association des éducateurs et éducatrices en milieu familial à cette commission parlementaire. Mme D'Amours et Mme Couture, je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire. Par la suite, nous allons procéder à une période d'échange, dans un premier temps, avec le côté ministériel et ensuite à l'opposition. Alors, sans plus tarder, je vous cède la parole pour 20 minutes.
Association des éducatrices et éducateurs
en milieu familial du Québec inc. (AEMFQ)
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour et merci de nous accueillir. Vous avez, aujourd'hui, une immense responsabilité, vous avez l'avenir des services éducatifs, l'avenir de l'intérêt des éducatrices en milieu familial à participer au système éducatif du Québec. J'ai l'immense responsabilité de savoir vous toucher par nos réalités et j'avoue en être très nerveuse; n'ayant pas l'habitude de la rigueur des commissions parlementaires, je vais à l'avance m'excuser pour cette nervosité.
Alors, d'abord, nous avons rendu disponible notre mémoire seulement hier soir, mes excuses, il a été prêt vraiment à la dernière minute. Vous venez d'en recevoir une copie.
20 minutes, c'est vraiment très court pour l'ampleur de ce mémoire. Alors, nous avons fait énormément d'exercices pour réduire à sa plus simple expression ? et c'est très difficile pour moi ? le message de l'Association des éducatrices en milieu familial.
Alors, d'abord, nous sommes une association qui sommes voués à la représentation des éducatrices en milieu familial, qui travaillons à la reconnaissance de cette profession-là. Nous avons des mandats de soutien, d'information aux niveaux légal et administratif en vue de faire reconnaître le statut de travailleur autonome. Alors, voilà les fondements de notre association, le pourquoi de notre présence ici.
Notre mémoire est en plusieurs volets, un volet sur les services en milieu familial eux-mêmes que nous traverserons très rapidement ? on vous laissera consulter notre mémoire ? le réseau, le nouveau réseau, la nouvelle structure des services éducatifs et toute la réalité du travailleur autonome lui-même, qui pour nous est essentielle, où on va s'attarder un petit peu plus longtemps; une question sur la vie associative et quelques recommandations de différents ordres. Alors, voilà.
Ce mémoire se veut un lien entre décembre 2003... du projet n° 8 avec le projet de loi n° 124. Nous y voyons un projet, pour reprendre des mots, de compromis par excellence. Notre association avait proposé 17 bureaux de coordination pour l'ensemble du Québec; avec notre vision, c'était suffisant. Aujourd'hui, on en présente 130. Alors, nous avouons ici voir un compromis de taille.
Évidemment, nous vous partagerons nos appréciations à ce projet de loi, nous vous partagerons nos inquiétudes de ce projet de loi et nous vous partagerons les recommandations que nous ferons. Alors, concernant le service de garde en milieu familial, ce qui est le plus important pour nous ici, c'est la dénomination du projet de loi en lui-même. Qu'il soit intitulé Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance, pour nous, est un beau signe de reconnaissance envers tous les types de garde qui ont contribué au système éducatif du Québec jusqu'à ce jour. Alors, bravo à cette nomination inclusive qui ne fait la distinction entre aucun des services. Et nous apprécions fortement. Et nous faisons la proposition, à ce bravo, d'ajouter une nouvelle dénomination à la responsable de garde en milieu familial, qui n'est pas le reflet de sa tâche éducative ni de par la loi et le règlement qui lui attribuent... pour changer la dénomination pour éducatrice en milieu familial. Alors, pour nous, le projet de loi serait complet en incluant cette dénomination-là.
Nous voulons aussi souligner l'inclusion de la démarche éducative qui est présentée par le projet de loi. Alors, cette démarche éducative englobe les orientations du précédent programme éducatif mais amène aussi une meilleure orientation beaucoup plus globale et beaucoup plus proche de la réalité du rôle de l'éducatrice. Toute la notion d'un esprit communautaire est essentielle. Alors, nous affirmons que ce projet de loi permettra à l'éducatrice en milieu familial d'être un réel partenaire de la mission éducative par l'élaboration de sa propre démarche éducative, tenant compte de son environnement et de ses propres valeurs. Alors, bravo, par cette démarche éducative, on vient de faire un trait définitif sur le concept de gardiennage.
L'autre aspect. Alors, le réseau des services éducatifs, la création des bureaux de coordination. Alors, nous saluons l'arrivée du projet de loi n° 124 parce que le projet de loi n° 124 offrira un cadre distinct à la garde en milieu familial indépendante d'un autre titulaire de permis, lui accorde un cadre qui saura tenir compte de ses caractéristiques, et de ses différences, et de sa qualité, et de ses richesses. Parce que, si nous avons un service éducatif en milieu... si nous avons un système de garde éducative au Québec, il faut reconnaître l'apport important que le milieu familial a su y investir.
Alors, le bureau de coordination aura un mandat. À ce mandat, nous saluons la précision que le mandat de surveillance du bureau de coordination sera fait par règlement. Alors, finies ici les mille et une interprétations des 884 CPE qui avaient le mandat de contrôler et surveiller le milieu familial. Par contre, nous souhaitons avoir la garantie que les 130 ne répéteront pas le même scénario et que nous aurons une seule application de loi et règlement. Pour une reconnaissance professionnelle, dans le milieu où on s'investit, il faut avoir un seul cadre, il ne faut pas qu'il change à tout moment.
Nous saluons aussi particulièrement la précision d'un soutien pédagogique et technique sur demande. De la part de notre association, c'est un plus, c'est une reconnaissance de ces professionnelles de la petite enfance qui ont toutes les aptitudes à déterminer si elles ont besoin de soutien et surtout quel soutien elles auront. Peut-être qu'elles n'auront pas besoin de soutien pédagogique, peut-être qu'elles auront besoin de soutien psychologique pour des difficultés différentes, orthophonistes, etc. Alors, lorsqu'on parle de soutien, on souhaite voir un soutien élargi et non seulement centré sur un besoin unique et d'une seule référence.
Par contre, à l'alinéa 2, nous faisons la proposition de changer le terme «se soumettre à la surveillance» pour le terme «accepter la surveillance». Le temps de la soumission à son conjoint, à l'Église et à Dieu est terminé, alors de demander à des éducatrices de se soumettre à des bureaux de coordination est vraiment passé mode. Alors, si nous comprenons la loi, ce projet de loi, ce que l'on souhaite comme législateur, c'est que les éducatrices en milieu familial acceptent de suivre ce cadre réglementaire, ce cadre légal, et nous sommes tout à fait en accord avec les besoins de réglementation pour la santé et sécurité de nos tout-petits. Mais il faut aussi que ça se fasse avec éthique et morale.
n(11 h 20)n Le sixième alinéa cause certaines inquiétudes: «maintenir un service centralisé d'information». Alors, il est très important pour nous que, par règlement, le fonctionnement de ce service centralisé soit fixé pour qu'on connaisse les balises parce que, si l'éducatrice est confortée et complice de cette volonté d'uniformisation de l'information, nous pourrons nous assurer que le centre d'information puisse fonctionner. Sans la collaboration des éducatrices elles-mêmes, il ne pourra pas y avoir de service d'information efficace. Alors, il faut s'assurer que tout se fasse en accord avec ces droits et ces choix de travailleuses autonomes.
Concernant l'article 41 qui vient dire quelles seront les conditions pour être nommé comme bureau de coordination, nous avons énormément apprécié la notion de probité qui est présentée dans les critères. Après huit ans de contrôle et de surveillance, où l'aspect discrétionnaire était beaucoup plus présent qu'autre chose, nous apprécions de voir que les bureaux de coordination devront observer des règles rigoureuses sur les principes de justice et de morale. Alors, bravo à cette précision.
Par contre, nous souhaiterions qu'une mesure d'évaluation précise et organisée soit en place pour le renouvellement de l'agrément de ces bureaux de coordination. Il faut s'assurer en tout temps de la probité de l'ensemble des exigences. Pour ce faire, nous proposons un comité de sélection de ces bureaux de coordination, nous proposons qu'une représentante de notre association ait un siège sur ce comité de sélection parce que nous possédons de l'information terrain bien précise que nous croyons que le gouvernement serait enrichi de connaître pour faire des bons choix et s'assurer que les futurs bureaux de coordination prennent la direction souhaitée.
L'autre point important de cet article 41 est le cinquième alinéa, où on précise l'importance de la participation des parents pour se garantir de toujours... l'intérêt de participation du parent. Il faudrait aussi y voir la participation des éducatrices en milieu familial à l'intérieur du concept. Il ne faut pas oublier qu'en tout temps, à l'intérieur de ces bureaux de coordination, le prestataire de services sera l'éducatrice en milieu familial. Alors, il faut s'assurer de sa collaboration. Pour une bonne implantation de ces bureaux, il faut qu'elle soit au coeur du fonctionnement. Alors, voilà pour le réseau lui-même.
Alors, l'autre partie est le statut du travailleur autonome. Évidemment, cette partie-là nous tient à coeur. Le fil est mince entre les choix de réglementer sur la santé et sécurité, de rencontrer les besoins des parents du Québec et de respecter ces travailleurs qui ont un statut de travailleurs autonomes. Alors, la morale impose une éthique absolue dans ce fait. Le projet de loi n° 124 intègre les notions qui étaient présentes au projet de loi n° 8, c'est-à-dire laisse la déclaration du statut de travailleur autonome à une éducatrice en milieu familial. Mais à l'époque, lors du projet de loi n° 8, nous avions dit que nous étions tout à fait en accord avec ce projet de loi dans la mesure où la pratique suivait cette déclaration. Alors, le projet de loi est un début, nous n'y sommes pas encore arrivés complètement.
Mais le projet de loi amène une notion très particulière, différente, un ajout, un impact majeur, il amène toute la notion de contrat par la reconnaissance, aux trois ans, de l'éducatrice en milieu familial. Alors, c'est excessivement important. Cette reconnaissance pourra être suspendue, révoquée en cours de contrat si les conditions ne sont plus rencontrées, personne ne s'objecte à ça. Par contre, il peut ne pas être renouvelé. Comment ne sera-t-il... Pourquoi ne sera-t-il pas renouvelé? Nous demandons à ce que ce soit intégré dans les règlements, que ce soit intégré, la définition de qu'est-ce qui amène à un non-renouvellement.
On met en lumière également l'article 102 du projet de loi qui, lui, vient créer une iniquité, une injustice totale envers l'éducatrice en milieu familial. Tous les titulaires de permis, les centres de la petite enfance-installation, les garderies privées auront le privilège de contester, au TAQ, une suspension ou une révocation de leur permis. Et, à l'éducatrice en milieu familial, on ne donne pas les mêmes droits. On va lui donner le pouvoir de contester une suspension, une révocation, mais, au non-renouvellement, on lui oblige le silence et l'absolution totale, ce qui nous ramène au terme qu'on a dénoncé, «se soumettre».
Alors, est-ce qu'on est venu dire que le service éducatif, malgré le projet de loi, est un service éducatif de moindre qualité? Est-ce qu'on est venu dire aux parents du Québec que, lorsqu'ils choisissent le milieu familial, ils choisissent un service de moindre importance? Si ce n'est pas le cas, nous demandons l'inclusion du droit à l'éducatrice en milieu familial, dans l'article 102, de pouvoir demander au TAQ de réviser une décision de non-renouvellement.
Concernant la clientèle du travailleur autonome, par l'article 48, on a voulu ouvrir. Par contre, l'article 88 n'est tellement pas clair qu'on ne sait pas à quoi le droit à l'ouverture est présent. Et ce qu'on vient de vivre, l'année dernière, concernant l'article 39, qui avait été pourtant corrigé par le projet de loi n° 26 en juin 1999, nous fait dire que l'article 88 doit être clairement défini. Je vous réfère aux pages 15 et 16 de notre mémoire à ce sujet-là.
Concernant le ratio de l'éducatrice en milieu familial, bien, ici, nous considérons que la ministre a manqué une très belle opportunité de nous faire connaître les résultats du projet de loi... du projet pilote, pardon, 6 à 9, un projet pilote qui avait été mis en place pour expérimenter une conciliation travail-famille de l'éducatrice en milieu familial. Et, pour les personnes qui ne connaissent pas ce projet-là, l'objet du projet pilote était d'analyser l'impact des enfants scolaires de 6 à 9 ans de l'éducatrice, à l'extérieur du ratio de l'éducatrice en milieu familial, pendant les heures d'ouverture du service. Alors, nous attendions avec impatience ce projet de loi... ce projet pilote, et nous l'attendrons encore. Et le fait que nous n'avons pas d'ouverture au ratio, que nous n'avons pas ces résultats-là du projet pilote nous laisse craindre ceci pour la politique de conciliation travail-famille: Serons-nous intégrés comme tous les autres Québécois pour avoir droit à une conciliation travail-famille?
Concernant le revenu du travailleur autonome, le travailleur autonome éducatrice en milieu familial offre un service aux parents du Québec, à une clientèle précise. Contre ce service, elle reçoit une rémunération de sa clientèle. Le gouvernement du Québec a décidé, par une politique familiale, de prendre à sa charge les deux tiers de cette rétribution de l'éducatrice pour un service rendu. Le gouvernement du Québec, par son soutien aux services éducatifs, accorde une petite subvention de 9,35 $ par jour à l'éducatrice en milieu familial qui reçoit un poupon, accordera peut-être une petite subvention de 25 $ par jour pour l'intégration des enfants ayant des problèmes d'adaptation ou des handicaps quelconques. La rétribution d'une éducatrice en milieu familial est une chose, et les subventions sont une autre. Alors, nous demandons que, dans le texte de loi, cette nuance soit présente et qu'on parle de rétribution et non de subvention, et qu'on parle de subvention là où il y a réelle subvention.
À titre de rémunération, nous demandons aussi de profiter de l'implantation de ces nouveaux bureaux de coordination, au 1er avril 2006, d'appliquer une tarification unique d'une région à l'autre du Québec. À tâches similaires, revenu similaire. Il y a assez de discours sur l'équité salariale sur toutes les plateformes pour qu'on ne passe pas à côté, ici, d'avoir un principe d'équité sur le revenu, sur la rétribution de l'éducatrice en milieu familial.
Et toujours sur la question du revenu de l'éducatrice, sur la fragilité de sa rétribution, l'article 92 du projet de loi apporte la nuance que, dans l'éventualité où une place à contribution réduite ne serait pas correctement utilisée, elle pourrait être enlevée à la travailleuse autonome, à l'éducatrice en milieu familial. Alors, cette menace de place reprise... L'éducatrice consent à la réglementation, à des exigences pour que sa clientèle ait les mêmes privilèges que tous les autres parents du Québec, c'est-à-dire recevoir des places à contribution réduite. L'éducatrice a une place à contribution réduite dans son service dans la mesure où le parent est admissible à cette contribution. Si je ne trouve pas des parents admissibles, la place demeure vacante. Et la menace que les places soient reprises est très dangereuse pour la qualité même du service éducatif en milieu familial. Nous comprenons que le gouvernement, l'État ait l'obligation de s'assurer que l'ensemble des places à contribution réduite soient bien utilisées pour tous les besoins des parents, on comprend aussi que tous les parents ont besoin de services, mais on comprend aussi que ces travailleuses ont droit à un revenu décent et que leur travail ne doit pas fluctuer.
n(11 h 30)nLa Présidente (Mme James): Mme D'Amours, c'est pour vous dire qu'il vous reste à peu près deux minutes.
Mme D'Amours (Nathalie): Merci, Mme la Présidente. Alors, comme le droit au travail autonome est si essentiel pour notre association, c'est ça qu'il est important de dire.
Le dernier point est sur la vie associative. Alors, notre association avec ses 3 000 éducatrices dont... ? ils ont une adhésion volontaire malgré toutes les contraintes qu'on peut rencontrer ? rend légitime cette représentation-là, et nous demandons l'abolition de l'obligation que la ministre a de consulter les bureaux de coordination lorsque vient le temps de faire des ententes sur les améliorations aux conditions d'exercice de ces travailleuses autonomes éducatrices en milieu familial et le gouvernement.
Le dernier point, la dernière demande, c'est de reconnaître notre mandat ? tel que l'article 122 le permet déjà d'ailleurs; de reconnaître notre mandat ? de soutien et d'information et que toutes les éducatrices du Québec aient accès aux produits, aux services, au soutien et à l'information que nous sommes en mesure de leur offrir en acceptant de subventionner adéquatement les activités de notre association.
Alors, en dernier lieu, il y avait nos recommandations, que je résume très rapidement, Mme la Présidente. Alors, nous saluons positivement l'intégration de l'article 57 parce que nous sommes d'avis que, pour que les services éducatifs en milieu familial soient reconnus, il faut qu'ils soient connus et que c'est tout à fait normal que les 14 200 points de services des éducatrices en milieu familial soient connus du ministère tout comme la liste des garderies privées, tout comme les installations CPE. Nous faisons une demande pour l'article 71 de modification, très légère mais importante pour le respect des éducatrices en milieu familial et le caractère privé familial, qu'un inspecteur doive faire ses inspections pendant les heures d'ouverture et non à heure raisonnable. Quoiqu'on ne doute pas qu'un inspecteur travaille pendant les heures raisonnables, le caractère du respect familial et privé doit être inscrit correctement.
La Présidente (Mme James): Alors, merci. Afin de débuter la période d'échange, je cède la parole à la ministre de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine.
Mme Théberge: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme D'Amours. Bonjour, Mme Couture. Merci de vous être jointes à nous ce matin avec vos coéquipières. Merci d'avoir produit vos commentaires, et recommandations, et préoccupations aussi à certains égards. Et je pense que, de la façon que vous abordez la question, c'est très constructif. C'est probablement dans ce sens-là aussi que vous, avec votre équipe et l'équipe du ministère, avez travaillé dans le fond dans les derniers mois. On s'est rencontrés à quelques reprises sur différents sujets, il y a eu des tables de travail, et je salue dans le fond la constante préoccupation que vous avez de bien répondre aux besoins de vos membres et surtout de bien répondre aux parents qui utilisent les services de vos membres aussi. Il faut rappeler à ceux qui nous écoutent que c'est plus de 88 000 places partout au Québec. Alors, c'est probablement le service qui accueille le plus d'enfants qui est réparti sur le territoire, et il faut faire en sorte justement, nous comme ministère, comme gouvernement, de soutenir ces services-là. Et, vous l'avez mentionné au début, le titre de la loi maintenant reflète la part égale de tous les prestataires de services. Et c'était une priorité pour moi de le faire de cette façon-là parce que c'est la réalité sur le terrain, et ça démontre aussi à vous et aux autres associations notre volonté justement de soutenir de la meilleure façon possible tous les prestataires de services.
Vous adhérez aussi à la démarche éducative, vous dites aussi que le fait que la loi favorise l'accessibilité et la flexibilité est important pour vous. Et je vais vouloir vous entendre là-dessus, parce qu'on se comprend bien ? puis je l'ai dit d'ailleurs à votre colloque il y a environ deux semaines, trois semaines maintenant ? qu'il n'est pas question pour un projet de loi, ou pour nous, ou pour moi personnellement, évidemment de faire en sorte que les enfants demeurent dans des services de garde 24 heures par jour, sept jours par semaine. Ça, c'est vraiment, là, évidemment bien, bien, bien loin de notre pensée et de l'esprit de la loi. Au contraire, c'est de faire en sorte, d'une part, de supporter évidemment les parents, mais, en même temps, de respecter le développement de l'enfant et de faire en sorte que, si un service doit répondre à des besoins, bien, que l'enfant soit pris en considération, premièrement.
Et tout ça aussi doit se faire, dans votre cas à vous, en respect du fait que vous êtes des travailleuses autonomes, et j'aimerais vous entendre sur la flexibilité parce que ça touche beaucoup vos services. Vous disiez, en 2003, lorsqu'on a fait une consultation, entre autres sur la loi n° 8, que la flexibilité ou la possibilité de le faire avait diminué ou était rendue plus difficile, d'une part; d'autre part, lorsqu'on parle aujourd'hui d'une flexibilité si besoin, encore une fois vous êtes probablement des services aussi qui peuvent l'accorder le plus facilement possible. Mais comment vous le voyez chez vous? Comment vous entrevoyez dans le fond le potentiel pour répondre aux besoins de vos clients? Et aussi peut-être comment vous voyez un petit peu les écueils qu'on devrait, nous, évidemment faire attention pour respecter évidemment votre statut souvent de parents évidemment ou de travailleuses autonomes aussi? Parce que, nous, dans le fond, notre préoccupation, c'est de faire le juste équilibre, hein, évidemment entre tout ça, et j'aimerais vous entendre, parce que je sais que souvent vos membres vous en ont parlé, de quelle façon ils la voient au quotidien, cette flexibilité-là.
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, au quotidien, la flexibilité en milieu familial, il faut savoir d'où elle vient. Avant 1997, toute la garde atypique était assumée par le milieu familial. Alors, chaque éducatrice a la possibilité, compte tenu de sa clientèle, de répondre à des besoins. Pourquoi? Parce que les caractéristiques mêmes d'un milieu familial, ça se fait dans une résidence privée, donc c'est beaucoup plus souple, tous les membres de la famille sont mis à contribution au service. Il y a un groupe multiâge et il y a une relation continue dans le temps non seulement avec l'enfant pour une journée, mais avec les années et il y a une relation intimiste qui s'installe avec les parents. Lorsqu'un parent fréquente ton service et te fréquente, toi, éducatrice en milieu familial, pendant de nombreuses années, la relation est teintée très différemment. De là venait l'offre de services atypique, de là venait de dire: Oui, moi, je vais le garder ce soir, oui, ce week-end, oui, pour une vacance, et qu'il y avait de la souplesse dans l'offre de services.
En 1997, avec l'évolution des centres à la petite enfance et de leur mandat de contrôle et de surveillance, l'avènement qu'on a vécu, c'est qu'on n'avait plus le droit en aucun temps de s'absenter de son service; alors, fini le temps d'aller acheter la pinte de lait qui manquait, qu'on était menacés de visites de contrôle pendant la nuit si on gardait un enfant à coucher la nuit. Il y a même des gens qui sont allés dire qu'en milieu familial, pendant la nuit, on n'aurait pas le droit de dormir si on avait des gens dans notre service. Alors, c'était une application d'un mandat qu'on donnait au nom de la qualité tout à fait à l'opposé de la nécessité du milieu, ce qui a fait que le milieu familial s'est complètement retiré de cette offre-là. On ne se bataillera pas pour un enfant une nuit, une fois par semaine ou de façon plus régulière. Alors, c'était plus facile de se retirer.
Maintenant, sur le projet de loi et là où sont les pièges, les pièges à éviter, c'est de retomber dans une rigueur aussi farfelue et non respectueuse des caractéristiques mêmes du milieu familial par les bureaux de coordination. Parce que rappelons-nous que le mandat donné aux bureaux de coordination se ressemble étrangement, alors on est loin d'avoir tout réglé avec le projet de loi aussi. Il y a beaucoup de pièges à éviter, et celui-là en est un. Par exemple, si j'offre un service de jour et de nuit, il se peut que des enfants se croisent dans ma porte? Est-ce qu'on va faire une scène épouvantable parce qu'il y a un croisé dans ma porte, ou je fais attendre quelqu'un dehors au froid, ou si je le fais entrer, quitte à avoir un enfant de trop en présence de ses parents pendant la transition? C'est toutes des applications qui, pour nous, étaient difficiles. Alors, s'il y a une souplesse... Et, lorsqu'on entend que le projet de loi est flexible, on entend que ça va être corrigé et qu'on pourra permettre aux éducatrices de continuer à nouveau d'offrir des services flexibles et diversifiés.
Mme Théberge: Parlant de ça justement, de services, on parle beaucoup de soutien offert, il a été... Vous avez entendu probablement le groupe qui vous a précédées au niveau de la demande d'un soutien sur demande. Ce libellé-là en fait venait d'une demande que vous avez faite, à travers les années, d'avoir du soutien sur demande. D'où c'est venu? Et pourquoi cette formulation-là, vous, répond dans le fond à vos attentes?
Mme D'Amours (Nathalie): Ça répond énormément à nos attentes par rapport à la reconnaissance professionnelle des éducatrices en milieu familial. Dans les dernières recommandations, que je n'ai pas eu le temps de vous présenter, pour une opération de consolidation future, nous parlons d'une campagne de promotion de la garde en milieu familial pour expliquer aux citoyens du Québec qu'est-ce que c'est, une éducatrice en milieu familial, et quel est son rôle capital dans le service, dans l'enveloppe de services éducatifs complète du Québec. Il faut que les gens puissent avoir une vision au-delà d'une expérience peut-être malheureuse ou unique, au-delà des ouï-dire des uns et des autres et puissent se faire une opinion propre de ce que c'est, la garde en milieu familial, pour bien comprendre l'utilité... Là, j'ai perdu mon idée, je m'excuse infiniment. Alors...
Mme Théberge: ...sur demande.
n(11 h 40)nMme D'Amours (Nathalie): Pour le soutien. Alors, c'est parce que beaucoup trop de personnes prennent pour acquis que ces éducatrices en milieu familial sont absolument sans formation, qu'il faut commencer à zéro, qu'on prend pour acquis qu'il n'y a pas d'expertise, qu'il n'y a pas de formation. Au contraire, chez les éducatrices en milieu familial, il y a de plus en plus de diplômées universitaires, des diplômées de cégep en petite enfance aussi qui font ce choix-là. Alors, pour toutes ces personnes qui devaient subir un soutien, à qui on imposait d'une conseillère pédagogique, qui peut-être quelquefois commençait sa propre carrière... à des femmes de carrière, d'expérience et formées, il y avait énormément de tensions. Alors, aujourd'hui, qu'on vienne dire que le soutien sera sur demande, bien bravo! Bravo, parce qu'on laisserait l'éducatrice professionnelle initier sa demande, comme j'ai dit dans mon mémoire. Et non seulement elle initiera sa demande, si demande il y a, mais elle choisira sa ressource. C'est excessivement important que l'éducatrice ait ce choix.
Mme Théberge: Là, je comprends dans le fond votre volonté de dire sur demande pour un besoin, vous disiez tout à l'heure, soit psychologique ou de ressources externes, ressources spécifiques par rapport à un besoin des enfants. Mais vous comprenez aussi que, nous, la formation vient aussi en prévention ou en formation. Dans le fond, le mot le dit, pour former, et informer, et faire la mise à jour de la formation des personnes. J'imagine que vous n'êtes pas contre ça, évidemment.
Mme D'Amours (Nathalie): On n'est pas contre ça du tout, Mme la ministre. C'est même dans une autre recommandation, que je n'ai pas mentionnée, d'avoir des programmes de formation adaptés à la vraie réalité du milieu familial, tenant des comptes des groupes multiâges. Des formations pour des formations, c'est stupide et stérile. Il faut des bonnes formations et aussi il faut avoir des mesures qui incitent à des formations. Les éducatrices en milieu familial travaillent déjà de 50 à 60 heures-semaine. Alors, si on désire qu'elles se forment, il faut inciter, avoir des mesures. Comment avons-nous fait pour que toutes les éducatrices du réseau puissent atteindre un seuil de formation de deux sur trois? On leur a mis des programmes en place, on les a libérées, on a fait en sorte que leur formation était facilitée. Alors, si on souhaite avoir le même seuil de qualification, il faut être prêt à faire les mêmes mesures d'intégration.
Mme Théberge: Alors, avant de passer la parole à mes collègues qui souhaitent intervenir, je vous dis: J'ai bien entendu vos préoccupations sur les autres sujets, et, comme je l'ai dit en début de cette commission, on va prendre en délibéré par la suite... de voir de quelle façon on peut y répondre et dans quel calendrier. Merci.
La Présidente (Mme James): M. le député de Vimont.
M. Auclair: Merci, Mme la Présidente. Mme D'Amours, bonjour. D'entrée de jeu, on parle, là, justement de formation. Le groupe avant vous, là, avec Mme Blais, entre autres, a mentionné qu'une des inquiétudes, c'est justement, c'est qu'il n'y aurait... avec les centres de coordination, il y aurait moins de formation. Est-ce que, de votre côté, c'est une réalité que vous voyez en ce... Dans le fond, ce que j'aimerais, est-ce que... En ce moment, au niveau de la formation, comment ça se vit avant le projet de loi n° 124, l'inquiétude qui est soulevée par le groupe qui vous a précédées et ce que vous venez de nous dire au niveau du suivi pour la formation?
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, l'article 40, dans le mandat du bureau de coordination, au septième alinéa, mentionne de favoriser la formation et le perfectionnement. C'est ce qui était, c'est ce qui est encore. Alors, non seulement ça risque d'être pareil, mais, nous, ce qu'on souhaite, c'est que ça s'améliore, ça s'améliore par des incitatifs et des formations adaptées à leurs vrais besoins. Je crois que la préoccupation était surtout d'offrir un soutien pédagogique et technique qui, lui, est sur demande, question que je viens de répondre et qui est absolument nécessaire et pourquoi notre recommandation d'une campagne à la sensibilité pour que tous les Québécois soient sensibles à ce que c'est vraiment, un milieu familial.
Nous, ce qu'on constate, c'est que finalement il y a peut-être beaucoup plus de préjugés et de mauvais paradigmes dans tout ça que... Qui sont les personnes qui sont en mesure de réellement avoir... sauf les parents qui fréquentent le milieu familial, qui continuent à préférer le milieu familial, qui, enquête sur enquête, continuent de dire: Nous préférons le milieu familial? Alors, sûrement que tous ces parents-là, les 88 000 places, ce n'est pas toutes des personnes sans analyse.
M. Auclair: Juste pour continuer dans... C'est juste parce que... Je veux poser cette question-là parce que, du préalable, mon collègue de Vachon avait déjà mentionné que le changement de modèle réduirait la qualité des services et la ramènerait même à l'ère du gardiennage. Face à ça, qu'est-ce que vous avez à dire?
Mme D'Amours (Nathalie): C'est sûr que c'est une déclaration qui ne vient pas chercher chez nous beaucoup d'accord, beaucoup de consentement. La démarche éducative, pour nous, vient contrer, au contraire vient enterrer toute la notion de gardiennage parce que l'éducatrice en milieu familial doit s'investir, doit s'inscrire dans une mission qui va être enfin réalisable. Quand on lui confiait un programme éducatif dans lequel elle ne se retrouvait pas, c'était beaucoup plus farfelu de croire qu'il y avait vraiment un programme éducatif en place.
Alors, la démarche éducative est le gage de ça, et c'est l'engagement de l'éducatrice en milieu familial envers sa profession, son professionnalisme, son code d'éthique, qui créent la qualité au quotidien. De la qualité, ça ne s'injecte pas à quelqu'un. Le cadre va peut-être mettre en valeur le contenu, la toile, mais ça ne change pas la toile. Si elle n'est pas belle, elle restera pas belle. Alors, la qualité se construit, la qualité s'initie d'abord par l'éducatrice en milieu familial, et ce n'est pas le cadre, ce n'est pas 884 cadres, 130 cadres ou 17, comme on aurait souhaité, qui en font la différence.
La Présidente (Mme James): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.
M. Bernard: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme D'Amours. Je suis content de vous revoir puis je vais vous faire une intervention sur le dernier point que vous venez de faire à propos des bureaux coordonnateurs. Moi, je suis content de la solution qu'on a trouvée, que Mme la ministre a apportée, parce que je prends l'exemple de ma région, l'Abitibi-Témiscamingue: d'une extrémité à l'autre, il y a cinq heures de route. Simplement dans ma MRC, il y a 80 km d'une extrémité à l'autre, beaucoup de territoire à couvrir. Et, si je prends simplement mon comté, j'ai deux heures et demie de route entre la municipalité la plus au sud, Témiscaming, et Rouyn-Noranda. Alors, c'est comme avoir un bureau de coordination à Montréal et aller donner des services à Québec. Alors, c'est très grand sur le territoire, en plus que j'ai des populations anglophones et des communautés autochtones. Alors, j'ai beaucoup travaillé avec les gens de la région et je crois qu'une approche MRC, étant donné la disparité, la couverture et l'étendue du territoire, était plus favorable à cet égard-là, et je sais que Mme la ministre a de l'ouverture à cet égard-là. Ça, c'est le point...
L'autre chose, si je vous disais par ailleurs que les bureaux de coordination sont pratiquement un gage de... pas de survie mais d'assurer vraiment un support au milieu familial et pour maintenir un service de proximité versus qu'est-ce qu'on observe actuellement, seriez-vous d'accord si je fais cette affirmation-là? Puis je vais vous dire pourquoi.
Actuellement, Rouyn-Noranda, si je prends la région, quand le réseau de garde en milieu familial s'est mis en place, il s'est mis en place rapidement, cinq CPE qui se sont déployés sur mon territoire, et une grande compétitivité. Actuellement, on assiste à une décroissance démographique dans les petites municipalités. J'ai beaucoup de personnes qui sont en place actuellement, sur le territoire, et il commence à y avoir un manque d'enfants. Et j'ai assisté, au cours de la dernière année, à une compétition entre les CPE et les RSG pour les milieux d'enfants, et actuellement ma crainte, c'est que, si on ne sépare pas les entités, le milieu familial du milieu de la CPE, cette diminution-là démographique va se faire au détriment des personnes qui ont investi, les travailleurs autonomes, pour développer le milieu RSG, et effectivement c'est le milieu rural qui va se dégarnir du milieu familial.
Alors, si je dis que le bureau de coordination, la mise en place, c'est peut-être le gage de succès pour assurer le maintien des RSG et un service de proximité, ai-je tort en disant ça?
Mme D'Amours (Nathalie): Non, vous n'avez pas tort du tout. Effectivement, un bureau de coordination, par son cadre exclusif à la garde en milieu familial, va pouvoir respecter beaucoup plus sa structure, et ses besoins, et ses particularités surtout. Par contre, il ne faut pas oublier que les bureaux de coordination travailleront avec des éducatrices en milieu familial et que c'est leur implication personnelle et passionnée de leur travail qui fera de ces bureaux de coordination là un succès. Alors, c'est une combinaison de plusieurs éléments qui nous assurent.
Vous parlez de l'isolement de votre secteur, j'ai rencontré les communautés autochtones la semaine dernière, au Sommet sur la qualité, à Toronto. Toutes les communautés sont engagées à la qualité des services de garde et en font des démonstrations claires. Les cinq éducatrices en milieu familial membres de notre association sur l'île d'Anticosti, elles se sentent aussi très seules. Alors, il faut qu'elles aient des accès à des structures de soutien et d'information.
La Présidente (Mme James): O.K. Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. J'aimerais vous entendre sur l'évolution de vos conditions de travail depuis 2003. Est-ce que vous considérez que vos conditions de travail se sont améliorées ou si c'est le contraire? Merci.
n(11 h 50)nMme D'Amours (Nathalie): Ça, c'est une dure question. C'est pour ça que la question du travailleur autonome, dans notre mémoire, prenait une place si importante. Ce qui est sûr, c'est que ça ne s'est pas détérioré. Ce qui est sûr, c'est qu'on travaille à améliorer les choses, qu'on travaille à ce que le statut de travailleur autonome prenne racine. Et ce qui manque, c'est peut-être une reconnaissance de tous de leur contribution individuelle et autonome au réseau de garde du Québec. Lorsqu'on associe la garde en milieu familial, donc des éducatrices en milieu familial, donc des travailleurs autonomes, dépendantes d'une autre structure, on vient renier le fait qu'elles sont un élément positif et important dans la création de tout ça.
Alors, il y a plusieurs aspects pour les conditions de travail. Il y a la rémunération. Une des recommandations, que j'ai encore tue ? alors, j'espère que vous irez toutes lire nos dernières recommandations de la fin de mon mémoire ? est une amélioration des revenus de l'éducatrice, de voir à la possibilité de subventions de démarrage, de fonctionnement annuel, d'amélioration des avantages sociaux. Toutes ces recommandations-là font l'objet, dans une recherche, Oui, ça me touche!, par Gillian Doherty, de l'Université de Guelph, des éléments d'une qualité en services éducatifs en milieu familial. Il existe des recherches spécifiques sur la garde en milieu familial. Cette recherche-là avait 250 000 familles de garde dans tout le Canada, dont le Québec était fortement représenté évidemment par la force de notre réseau. Alors, il y a des éléments clés qui ont été prouvés par recherche, sur lesquels on peut travailler, continuer de travailler pour améliorer les conditions des travailleurs autonomes de notre réseau.
La Présidente (Mme James): Merci beaucoup. M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Merci, Mme la Présidente. Mme D'Amours, bonjour. Je m'excuse de ne pas avoir noté le nom de la personne qui vous accompagne.
Mme Couture (José): José Couture.
M. Bouchard (Vachon): Pardon?
Mme Couture (José): José Couture.
M. Bouchard (Vachon): Bienvenue, Mme Couture.
Mme Couture (José): Merci.
M. Bouchard (Vachon): Je vous en prie. J'aimerais clarifier avec vous toute la question de la contrainte dont vous parlez concernant le programme éducatif et du manque d'appariement entre le programme éducatif, tel que vous le vivez, là, en milieu familial, par rapport à ce que vous souhaitez. Moi, j'avais comme compris quelque part que... Bon, par exemple, nous allons recevoir un groupe, là, qui nous fait part du fait que le programme éducatif est très bien adapté à la culture crie, par exemple, dans l'adoption du programme, donc il y avait une flexibilité présente dans la façon d'appliquer le programme, et je me demandais quelles sont les contraintes que vous dénoncez par rapport à ce que vous souhaitez. Vous pouvez peut-être nous donner des exemples probants de ça.
Mme D'Amours (Nathalie): Oui, certainement. Alors, dans le programme éducatif tel qu'il nous était présenté, le ministère avait validé une seule application qui s'appelle, oui, Jouer, c'est magique. Dans le programme éducatif Jouer, c'est magique, il faut faire une différence, que, dans le programme éducatif lui-même, dans les grandes lignes, nous ne contestons absolument rien dans les besoins du programme. La grande problématique que nous vivions dans notre réseau, c'était l'application Jouer, c'est magique imposée et pressée par les centres à la petite enfance. Jouer, c'est magique est le réel problème. C'est pour ça que la démarche éducative qui est présentée dans le projet de loi n° 124 nous fait plaisir, parce qu'elle intègre les notions du programme éducatif mais vient en plus ajouter l'obligation de la notion communautaire.
Alors, le Jouer, c'est magique, pour revenir à ça, avait des exigences sur la structure des lieux. Alors, lorsque la caractéristique du milieu familial situe le service dans une résidence privée, on rencontre une problématique sur la structure des lieux. Lorsqu'on demande d'identifier des coins, des coins de jeux avec des pictogrammes, lorsqu'un centre à la petite enfance nous obligeait à déguiser, dénaturer tout notre milieu de garde en mettant des pictogrammes partout dans la maison parce que ce n'était pas assez clair que c'était la cuisine, ça, alors, évidemment, il y avait des impacts majeurs dans l'application de ce programme-là. C'est là pourquoi on dit qu'il n'était pas adapté au milieu familial, même le rythme des activités proposés. Il ne faut pas oublier que l'éducatrice en milieu familial est une travailleuse oeuvrant seule, qui doit cumuler toutes les tâches les unes par-dessus les autres. Alors, il est fort difficile de faire tout à la fois, il est fort difficile de désinfecter pendant qu'on est en train de préparer le repas.
M. Bouchard (Vachon): Alors, le démon se cache dans les détails.
Mme D'Amours (Nathalie): C'est souvent le cas.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Et est-ce que le projet de loi actuel vous rassure à ce sujet-là? Parce que, dans le fond, si je compare les deux propositions législatives, là, je ne voyais rien, dans la loi qu'on s'apprête à abandonner, qui régissait le type d'application et de contraintes que vous mentionnez maintenant. En quoi le projet de loi actuel vous protège-t-il contre cela?
D'Amours (Nathalie): Dans le projet actuel, c'est la notion supplémentaire du programme éducatif, toute la notion communautaire et d'habiliter l'enfant à développer des attitudes, des capacités à son intégration. C'est ce qui vient nous garantir que la démarche éducative ne peut pas être simplement théorique et pratique, mais elle devra tenir compte de tout un environnement social propre et à des valeurs propres.
M. Bouchard (Vachon): C'est parce que je ne comprends pas encore tout à fait, là, puis j'aimerais vraiment bien saisir ça parce que c'est évident que, dans un environnement qui est destiné au développement des enfants, les dimensions de qualité reposent beaucoup sur le type d'interaction qu'il y a entre l'éducatrice et l'enfant, le type d'activités dans lequel l'enfant est amené à s'impliquer, le type d'accompagnement, etc. Est-ce que vous connaissez, par exemple, le Programme ALI, activités de lecture interactive?
D'Amours (Nathalie): Je ne connais pas tous les programmes. Celui-là, je ne le connais pas particulièrement, alors je ne voudrais pas me faire poser une question précise.
M. Bouchard (Vachon): Non, non, mais je ne vous poserai pas une question sur le programme comme tel. Mais je sais que les centres à la petite enfance composés d'installations et de milieux familiaux, notamment en Montérégie, ont adopté ce programme-là, l'offrent dans leur formation, et ça vient s'ajouter comme un outil, là, dans le programme éducatif qu'on peut offrir aux enfants dans les différents milieux. Ce dont je veux m'assurer, c'est que... Est-ce que vous vous sentiez contraintes au seul programme Jouer, c'est magique? Est-ce que vous pouvez ajouter ou modifier, dans le programme, d'autres éléments qui vous apparaissent pertinents dans le contexte actuel?
D'Amours (Nathalie): Nous avions toutes les latitudes de choisir l'application que nous souhaitions. L'élaboration d'un programme éducatif, application au milieu familial, dont vous avez, dans la pochette qu'on vous a remise avec notre mémoire, la publicité de cette formation-là, en fait foi. Alors, la problématique n'était pas dans la possibilité mais était dans le contrôle autour. Ce qu'on voit dans le projet de loi n° 124, c'est que l'éducatrice en milieu familial, comme le centre à la petite enfance, peut déterminer, doit déterminer sa démarche éducative, sa propre démarche. Et c'est ce qui est magnifique dans le projet de loi, c'est qu'à l'inverse l'ancienne loi stipulait qu'on devait appliquer le programme éducatif avec ses contraintes d'application. Alors, dans celle-ci, l'éducatrice devra appliquer sa démarche.
M. Bouchard (Vachon): Écoutez, je vais relire le projet de loi actuel, mais je ne vois pas à quel article vous faites référence quand vous parlez de cette obligation d'adopter le programme en question.
Mais ceci étant dit, j'aimerais passer à un autre sujet qui vous préoccupe beaucoup, c'est la question du non-renouvellement. Vous mentionniez tantôt que ça vous inquiétait, le fait que les critères ou conditions d'un non-renouvellement étaient laissés sans définition claire. Quelles sont d'après vous les balises qui devraient apparaître dans le projet de loi pour vous rassurer?
n(12 heures)nD'Amours (Nathalie): Bien, je n'ai pas proposé que, dans le projet de loi, il faut qu'il y ait des balises, j'ai proposé qu'un cadre clair soit inséré dans la prochaine réglementation qui devra en découler, tout comme les critères de suspension et de révocation y sont déjà présents. Nous sommes conscients que le milieu familial se doit de rencontrer ces objectifs, se doit de rencontrer des critères de qualité, critères qui malheureusement sont souvent évalués, comparés à une installation et qu'on ne fait pas des grilles de qualité, compte tenu des distinctions du milieu familial. La dernière enquête sur la qualité en fait la démonstration nette, si on tenait compte de tout ce que l'éducatrice n'a pas pour offrir ses services, lorsqu'on regarde les résultats, elle croise tout le monde au fil d'arrivée. Alors, j'ai... Je m'excuse, je me suis encore égarée dans...
M. Bouchard (Vachon): Non, non, non, ça va, c'est correct.
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, le non-renouvellement, ce n'est pas dans la loi qu'on le veut, c'est dans le règlement. Et ce qu'on veut surtout, c'est que l'éducatrice ait, au même titre que tous les autres prestataires des services, le droit de contester un non-renouvellement. On ne veut pas tomber dans le piège du non-renouvellement discrétionnaire, qui est malheureusement le topo de la situation actuelle.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Regardez, je ne veux pas contester surtout vos espoirs et vos attentes, mais le non-renouvellement, il est inscrit dans la loi, dans le projet de loi, il est inscrit. Même si vous souhaitez que les balises et les conditions ne soient pas inscrites dans le projet de loi, la capacité de non renouveler est inscrite. Alors...
Mme D'Amours (Nathalie): Capacité de suspendre et de révoquer est également inscrite.
M. Bouchard (Vachon): C'est ça. Mais ce que vous me dites, c'est que ça, ça ne nous inquiète pas tellement, mais ce qui nous inquiète, c'est l'absence de définition de critère à partir duquel le non-renouvellement pourrait être appliqué. Et vous nous dites: Ça devrait apparaître dans la réglementation. Le non-renouvellement apparaît dans la loi, mais les balises et les critères devraient apparaître dans la réglementation. J'ai deux questions. Pourquoi...
Mme D'Amours (Nathalie): Pourquoi?
M. Bouchard (Vachon): Excusez-moi. J'ai deux questions: Pourquoi vous préférez que ça apparaisse seulement dans la réglementation? Et, deuxièmement, je vous répète ma question, là, juste au cas où vous avez un message fort à passer, quels seraient ? j'essaie, là; quels seraient ? les critères qui, selon vous, devraient être pris en compte?
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, pourquoi nous n'avons pas de préférence à ce que ce soit dans le règlement ou dans la loi, nous l'avons proposé dans le règlement à la lumière de ce que nous comprenons du processus, parce que déjà les conditions de la suspension et de la révocation sont au règlement. Que les critères soient dans la loi, oui, tant mieux, pas de problème. Et quels seraient les critères? Les seuls critères à notre avis acceptables pour un non-renouvellement, c'est une preuve indéfectible que l'éducatrice ne rencontre pas son mandat de qualité et non des besoins administratifs ou des besoins des uns ou par rapport aux autres. Alors, c'est vraiment des critères de qualité, d'engagement.
M. Bouchard (Vachon): O.K. Et vous êtes bien certaine que vous ne voulez pas voir apparaître ça dans la loi?
Mme D'Amours (Nathalie): Bien, c'est parce que je viens de répondre que je le préférerais, monsieur...
M. Bouchard (Vachon): Oui, mais je n'ai pas compris votre préférence. Parce que vous savez que l'article 160, là, prévoit qu'un règlement qui est pris avant le 1er avril 2007 n'est pas soumis à l'obligation de publication prévue à l'article 8. Vous ne serez pas consultés, là. Alors, ça suspend les règles de consultation, la période de 45 jours en prépublication de règlement. Est-ce que...
Mme D'Amours (Nathalie): Notre mémoire précise que nous souhaitons un comité spécifique à l'élaboration de ces règles. Nous souhaitons qu'il y ait une consultation particulière, que sur cette notion d'ailleurs. Sur tout le règlement même, c'est beaucoup mieux, parce que, lorsque les partenaires sont impliqués, surtout quand les gens seront imputés, imposés de ce règlement, une consultation... non seulement une consultation, mais une intégration de leur présence dans l'élaboration des règlements est tout à fait normale. Qu'on concocte des choses après, qu'on consulte avant et qu'on revient après, ça ne nous garantit pas que la rigueur du processus sera là effectivement. À la question, nous avons proposé que ce soit dans le règlement pas comme seule option, c'est que nous avions compris que c'était la seule possibilité où ça devait être. Si on comprend que ça peut être dans la loi, oui, merci, Seigneur. Ce n'est pas ça. C'est ce qu'on avait compris, c'est là que ça devait être.
Bon, des critères de non-renouvellement, c'est essentiel que ce soit clarifié, c'est essentiel que ce soit fait en collaboration avec les personnes qui les subiront aussi pour qu'on s'assure que leur respect de statut de travailleur autonome, de leur apport au système soit là.
M. Bouchard (Vachon): Mme D'Amours, j'aimerais qu'on aborde maintenant la question de la qualification. Vous avez, tout à l'heure, souhaité, je pense, comme tout le monde, qu'on puisse arriver, à la fois dans les installations et dans les services de garde en milieu familial, arriver à un niveau de qualification semblable, donc que, le ratio deux sur trois, là, de personnes qui puissent arriver à cette qualification-là, qu'on puisse le retrouver partout. Quelle est la proportion actuelle des personnes qui, dans le milieu familial, répondent aux critères de qualification dont on parle?
Mme D'Amours (Nathalie): Bien, en milieu familial, l'éducatrice étant seule, c'est bien sûr que, là, on ne peut pas avoir un ratio de deux sur trois. Ce que j'ai voulu signifier par la question de la formation, c'est qu'en milieu familial il y a déjà de la compétence, et on serait très étonnés si on avait vraiment des outils pour le mesurer. Nos dernières statistiques à nous sont très vieilles. Alors, si on avait des statistiques à jour, je serais ravie de voir qu'on y constate un degré de formation universitaire important en milieu familial, on y constate également un degré de formation collégiale important, on y constate aussi un degré de formation de secondaire V dont les éducatrices, au fil des ans, se sont approprié de l'expérience.
Très peu de programmes ? il y en a quelques-uns ? font la reconnaissance des acquis avec le nouveau... les nouveaux acquis en éducation. Mais ma proposition était de mettre en place des incitatifs pour que ces éducatrices puissent aller chercher leur équivalence, puissent aller faire la démonstration de leur propre formation et expertise au fil des ans. Il y en a qui ont une surformation au point de départ, et de là venait toute la question de soutien sur demande. Lorsqu'on a déjà plus de formation que les gens qui veulent nous en offrir, bien, là, il y a une dichotomie dans le processus. Alors, dans l'idée d'avoir de la formation, c'est non seulement avoir un degré de formation, c'est de se questionner aussi quelle formation qu'on exige, quelle formation est pertinente pour l'éducatrice en milieu familial.
M. Bouchard (Vachon): Vous, vous soulignez, et je pense que vous attirez notre attention sur toute la question de la qualité de vie des personnes qui travaillent quotidiennement dans les environnements de garde en milieu familial. Quels sont les éléments qui, dans le projet de loi actuel, vous rassurent quant à l'amélioration des conditions de travail des responsables en milieu familial? Quelles sont vos attentes? Quelles seraient les modifications que vous souhaitez à cet égard-là? Vous parlez en même temps ? puis je vais tenter de ramasser mes questions dans un même tout, là, parce que c'est de la même mouture ? vous souhaitez en même temps que, par exemple, on améliore les avantages sociaux, mais par ailleurs vous revendiquez un statut de travailleuse autonome. C'est difficile de concilier ces deux affirmations-là, à moins que vous soyez en train de demander au gouvernement d'adopter plusieurs des recommandations du rapport Bernier à l'effet d'améliorer les conditions de vie des travailleurs autonomes. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, vous avez une plateforme, là.
Mme D'Amours (Nathalie): Alors, le projet de loi n° 124, à la description de ses objectifs, n'a pas pour intention d'améliorer les conditions de travail des éducatrices en milieu familial. Alors, je n'y vois pas d'énormes éléments à cet objectif-là, n'ayant pas été inclus dans le projet. C'est pour ça qu'en introduction je disais que le projet de loi n° 124 est un bon début aux choses. Ceci dit, il y aura une amélioration considérable, il y aura une amélioration considérable, compte tenu du changement de mandat de ces bureaux de coordination là qui se voudra plus respectueux de leur statut. Alors, si on arrête d'être en bataille pour défendre notre statut, on pourra enfin travailler à améliorer les conditions du statut. Alors, c'est un bon début.
Maintenant, lorsque je parlais de recommandations pour la consolidation future du réseau, lorsque j'ai parlé de subventions de démarrage, de fonctionnement, une amélioration du revenu, c'est que l'enquête Oui, ça me touche! détermine que la rétribution de l'éducatrice en milieu familial a un facteur direct sur la qualité du service éducatif. Et c'est normal parce que l'éducatrice en milieu familial est la seule à investir dans son service de garde, doit prendre à même son revenu tout ce qu'elle a besoin pour son service éducatif. Alors, plus on lui donne de moyens, plus elle est capable de faire. Alors, déjà qu'elle fait beaucoup avec peu, compte tenu des éléments d'analyse et des enquêtes qu'on a eus sur la qualité, bien un comité d'étude pour voir à l'amélioration de ces situations-là, c'est aussi voir à l'amélioration, à la consolidation de la qualité des services éducatifs en milieu familial.
n(12 h 10)nM. Bouchard (Vachon): Mme D'Amours, vous êtes très critique par rapport aux instruments qui ont été utilisés pour mesurer la qualité des environnements de garde en milieu familial. Je suis particulièrement sensible à ça parce qu'ayant été chercheur longtemps, là, j'ai fréquenté beaucoup les personnes avec lesquelles je devais collaborer pour évaluer les environnements et je me demandais quelles sont les démarches qui ont été entreprises ou par vous ou pour les chercheurs pour tenter de répondre à vos objections, à vos craintes, à vos inquiétudes. Est-ce que vous avez rencontré les équipes en question? Comment ça s'est passé? Où est-ce que vous en êtes dans vos interactions?
Mme D'Amours (Nathalie): Lorsque le mandat de l'enquête sur la qualité a été confié à l'Institut de la statistique du Québec, notre organisation avait été invitée à agir à titre d'expert-conseil pour les grilles. Malheureusement, après un fort lobbying des réseaux d'associations de centres de la petite enfance, notre expertise a été rejetée de leur comité de conseil d'experts. Alors, on s'est privé de notre expertise, on s'est privé de l'opportunité que nous avions d'expliquer les différentes caractéristiques et les distinctions de notre milieu.
Nous avons en toute simplicité informé nos membres, les éducatrices en milieu familial, que nous n'avions plus le mandat de s'assurer que cette enquête serait rigoureusement respectueuse de leurs caractéristiques. À cela, malheureusement, l'enquête a été mise en péril, et le gouvernement a dû revenir chercher notre expertise mais trop tard pour faire une différence importante dans le concept. Nous avons émis nos... ? que vous allez retrouver à la page 7 de notre mémoire ? certains éléments, certaines... pas mesures, nos craintes, en tout cas nos ? le terme exact m'échappe; nos ? réticences et nous avons fait part de nos commentaires généraux. D'ailleurs, lorsqu'on lit l'enquête au complet, l'introduction le dit très bien, d'être excessivement prudent dans la lecture de ces résultats-là. Alors, si tout le monde avait fait une lecture prudente de ce qu'on peut en tirer, ce serait bien. Mais, comme on s'est permis des jugements de valeur, des jugements par catégories, malheureusement on a complètement sorti le contexte du contenu, et ça fait que le milieu familial a été excessivement désavantagé et par la procédure et par l'enquête et, pire, par la promotion des résultats.
La Présidente (Mme James): Alors, Mme D'Amours et Mme Couture, merci beaucoup pour votre présentation de la part de l'Association des éducateurs et éducatrices en milieu familial.
Et je suspends les travaux de la commission jusqu'après les affaires courantes, soit vers 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 13)
(Reprise à 15 h 42)
La Présidente (Mme James): Alors, bon après-midi. Ayant constaté le quorum, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. Avant de commencer, je vous rappelle que l'usage des téléphones cellulaires et des téléavertisseurs sont interdits dans cette salle. Alors, je vous demanderais, aux personnes qui en font l'usage, de bien vouloir les fermer pour la durée de cette séance.
Je reconnais les représentants de l'Alliance des intervenantes en milieu familial. Mme Lafond, je vous demanderais d'une part de vous présenter ainsi que les gens qui vous accompagnent. Et je vous rappelle que vous aurez 20 minutes pour présenter votre mémoire, ensuite nous allons passer à la période d'échange avec le côté ministériel et par la suite avec l'opposition. Alors, la parole est à vous.
Alliance des intervenantes
en milieu familial (ADIM)
Mme Lafond (Linda): Bien, merci, dans un premier temps, de nous avoir invités à la commission. C'est une première pour l'Alliance des intervenantes en milieu familial CSQ d'être assis avec vous aujourd'hui. Avant de commencer les présentations, j'aimerais vous mentionner que nous sommes toutes des responsables de services de garde en milieu familial qui opérons toujours nos services de garde, même si on a des rôles politiques à jouer.
Alors, à ma droite, on retrouve Marlène Carbonneau, qui est présidente de l'ADIM-Estrie, ADIM étant Alliance des intervenantes en milieu familial. Alors, pour la suite, je parlerai toujours plus ADIM. Alors, voilà. Il y a Johanne Bédard, représentante de l'ADIM ?Québec?Rive-Sud?Rive-Nord; il y a Claudia Fortier, présidente de l'ADIM?Laval?Laurentides-Lanaudière; à ma gauche, Louise Condrain, représentante de l'ADIM-Montérégie; et Me Frédéric Tremblay, conseiller aux ADIM, et avocat à la Centrale des syndicats du Québec, et parent utilisateur du milieu familial aussi. Alors, voilà.
Donc, j'ai une voix qui n'est pas très, très bonne. Alors, j'espère que je vais être capable de continuer la présentation sans vous irriter les oreilles. Nous représentons les alliances des intervenantes en milieu familial. Les cinq ADIM sont présentes dans 11 régions du Québec. Elles regroupent plus de 1 000 responsables de services de garde reconnues par les centres de la petite enfance, les CPE. Les ADIM ont pour mission de défendre les intérêts de leurs membres et de promouvoir la profession.
Les ADIM sont nées du besoin de briser notre isolement, de nous donner les moyens d'être bien informées et de faire entendre notre voix. Nous sommes affiliées à la Centrale des syndicats du Québec, CSQ, où nous nous retrouvons à la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec, la FIPEQ.
Afin que vous saisissiez bien les conséquences du projet de loi n° 124 sur nos vies, il nous semble important de vous décrire, dans un premier temps, nos conditions de travail et notre quotidien.
Comme responsables de services de garde, nous travaillons un minimum de 10 heures par jour, cinq jours par semaine, pour un total de 50 heures par semaine de présence avec les enfants. En plus de ces 50 heures, nous consacrons plusieurs heures à des tâches connexes: acheter la nourriture en s'assurant que l'on respecte le Guide alimentaire canadien, remplir les documents d'administration, entretenir les locaux, laver les jouets, préparer les activités pédagogiques, participer aux activités de formation, etc. Bref, les semaines de 60 heures et plus ne sont pas rares. Tout cela pour un revenu annuel très bas. Une fois que nous avons payé tous les frais nécessaires pour faire fonctionner nos services de garde, cela représente un salaire inférieur au salaire minimum.
En plus, nous n'avons pas droit à des congés fériés, des congés de maladie ou des congés sociaux rémunérés. Nous ne bénéficions pas de congé de retrait préventif rémunéré ni de vacances payées. Si nous faisons des heures supplémentaires, nous ne sommes pas payées à taux et demi. Dans le cas où nous avons le droit de nous absenter, nous devons le faire à nos frais en payant notre remplaçante. Vous comprendrez qu'avec un revenu aussi faible, nous ne pouvons pas nous payer un régime de retraite.
Nous aurions souhaité que la réforme proposée par le gouvernement apporte des améliorations à nos conditions de travail et aux conditions d'exercice de notre profession. Nous espérions qu'à l'occasion de ce profond changement législatif, un coup de barre serait donné afin d'améliorer nos conditions de travail. Cet espoir était fondé sur la promesse faite par Mme la ministre Carole Théberge devant la Commission des affaires sociales, lors de l'étude du projet de loi n° 8. Elle avait alors affirmé que l'amélioration des conditions de travail des RSG était une priorité pour elle et pour son ministère.
Cela explique en partie pourquoi nous sommes si déçues du projet de loi n° 124. Nous l'avons lu attentivement et nous n'avons rien découvert qui puisse améliorer nos conditions de travail et apporter des solutions aux problèmes que nous vivons. Au contraire, il ajoute des dispositions législatives qui vont empirer les conditions dans lesquelles nous exerçons notre travail.
En effet, si le projet de loi n° 124 est adopté, nous serons encore plus isolées qu'avant. Les bureaux coordonnateurs, BC, nous offriront moins de soutien. Nous n'aurons plus le droit de contester le non-renouvellement de notre reconnaissance au Tribunal administratif du Québec, le TAQ. Nous n'aurons plus autant d'autonomie dans la gestion de nos places. Les bureaux coordonnateurs pourront exercer plus de contrôle sur nous que ne le faisaient les CPE. Et nous n'aurons toujours pas le droit de nous associer librement.
Nous serons plus isolées. En tant que RSG, nous accueillons les enfants dans notre maison. Nous travaillons seules ou au plus à deux, avec une assistante. Depuis l'adoption de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance en 1997, nous nous sentons moins isolées. Le CPE est situé à proximité de notre domicile. Chaque CPE est responsable d'un nombre limité de RSG, 16 en moyenne. Par conséquent, les RSG qui font partie d'un même CPE vivent près les unes des autres. Cette proximité favorise les rencontres informelles, les réunions régulières, une relation étroite et personnelle avec le CPE. Il est également plus facile d'obtenir du soutien pédagogique, de participer aux formations et aux activités de perfectionnement. De plus, le fait que les deux modes de garde soient réunis dans les CPE atténue notre isolement, et cela a beaucoup amélioré la reconnaissance de notre travail. Nous sommes maintenant reconnues comme des professionnelles, au même titre que les éducatrices en installation. Les parents nous le disent.
Mais, si la ministre va de l'avant avec son projet de loi, il y aura environ 130 bureaux coordonnateurs de la gestion de la garde en milieu familial sur l'ensemble du territoire québécois. En moyenne, le territoire d'un BC sera de six à sept fois plus grand que celui d'un CPE. De plus, le nombre de RSG reconnues par bureau sera multiplié. Aujourd'hui, il y a en moyenne 16 RSG par CPE. La ministre désire qu'à l'avenir chaque bureau coordonnateur ait la responsabilité d'environ 130 RSG. Et cela ne représente qu'une moyenne. Dans la pratique, certains bureaux coordonnateurs seront responsables de plus de 170, voire 200 RSG.
Ces changements auront des conséquences négatives sur notre travail. Premièrement, nous serons éparpillées sur un immense territoire. Notre bureau coordonnateur ne sera plus dans notre quartier si nous vivons en milieu urbain ou dans notre localité si nous vivons en milieu rural. Il sera plus difficile d'établir des contacts entre nous, puisque nous serons beaucoup plus nombreuses à être reconnues par le même bureau coordonnateur.
Nos relations avec le bureau coordonnateur seront plus difficiles, compte tenu de la grosseur de la structure et le nombre élevé de RSG par bureau coordonnateur. Ces bureaux seront des bureaucraties où les rapports risquent d'être déshumanisés.
Maintenant, je vais céder la parole à Mme Condrain, qui va parler, elle, du soutien pédagogique.
n(15 h 50)nMme Condrain (Louise): Il nous apparaît que nous aurons moins de services en raison des économies de 42 millions de dollars qu'entend réaliser la ministre avec cette réforme. Des économies dont nous ne voyons pas la raison. Le gouvernement du Québec vient tout juste de signer une entente avec le gouvernement fédéral qui lui rapportera 1 125 000 000 $. Où ira tout cet argent? Certainement pas dans les services de garde, où des compressions de 41 millions de dollars ont affecté le réseau en 2005-2006, auxquelles s'ajoutent ces économies de 42 millions. Et que dire de l'économie de 8 millions faite à nos dépens l'an dernier?
Ces économies se traduiront par des centaines de mises à pied qui toucheront principalement les conseillères pédagogiques dans les CPE. Or, ces conseillères pédagogiques jouent un rôle essentiel. Nous pouvons les appeler plusieurs fois par semaine. Lorsqu'il y a un problème, elles nous conseillent. S'il y a une urgence, elles peuvent se déplacer rapidement pour venir nous rencontrer. Nous allons vous donner quelques exemples: un enfant qui mord ses amis; un enfant qui a des problèmes de langage, qui parle sans arrêt, mais dont on ne comprend rien; un enfant handicapé. Actuellement, lorsqu'on fait face à une telle situation, on en parle avec notre conseillère pédagogique. Parfois, un seul téléphone suffit. Parfois, elle vient nous voir, et on prépare ensemble un plan d'intervention auprès de l'enfant et, si nécessaire, auprès de ses parents.
Ce soutien pédagogique constant, allié à la formation obligatoire et au perfectionnement qui fait partie des exigences actuelles est très important. Il nous permet d'offrir un service éducatif de qualité aux enfants dont nous sommes responsables. C'est d'ailleurs avec une très grande fierté que nous avons pris connaissance des résultats des études menées par l'Institut de recherche sur les politiques publiques et l'Institut de la statistique du Québec, qui ont démontré que le soutien que nous recevons des CPE a permis aux milieux familiaux d'atteindre un niveau de qualité supérieur à celui observé dans les garderies à but lucratif. Cependant, ces études soulignent que ce soutien doit être offert, de façon fréquente et continue, de la part du CPE afin de favoriser la qualité des interventions des RSG.
En ce sens, la restructuration proposée par le projet de loi n° 124 nous inquiète énormément, car elle aura pour effet de réduire significativement le soutien professionnel des CPE au milieu familial. Moins de visites de soutien pourront être effectuées. Cela risque d'amoindrir la qualité des services éducatifs que nous offrons. Ce soutien des CPE est important à nos yeux, car il nous permet de maintenir la qualité de nos services, il nous motive et nous encourage à nous investir dans notre milieu. Si la ministre va de l'avant dans sa volonté de réduire le soutien que nous recevons, nous nous retrouvons plus isolées. Il est vrai que le projet de loi indique que ce soutien sera offert sur demande, mais on peut s'interroger s'il sera accessible, rapide et efficace.
Bref, non seulement nos conditions de travail seraient détériorées avec l'adoption de ce projet de loi, mais les conditions d'exercice de notre profession le seraient également.
Je cède maintenant la parole à ma collègue Johanne Bédard, qui va nous parler des risques de privatisation du réseau ainsi que du renouvellement de notre reconnaissance.
Mme Bédard (Johanne): Si nous sommes inquiètes par le faible nombre de bureaux coordonnateurs, nous le sommes également par leur gestion. Dans le projet de loi, il est écrit que ces bureaux de coordonnateurs seraient sous la responsabilité d'un «centre de la petite enfance ou [d'une] autre personne morale, [d'une] société ou [d'une] association, à l'exception d'une municipalité et d'une commission scolaire...» Cette modification risque d'entraîner une privatisation des services de garde en milieu familial. Une garderie à but lucratif ou tout autre genre de corporation motivée par le profit pourrait obtenir l'agrément de la ministre et la responsabilité de notre reconnaissance, de nous surveiller et de nous fournir un soutien pédagogique. Rien n'empêchera une multinationale américaine de devenir propriétaire de bureaux de coordonnateurs. Quelle importance accorderait-elle à la mission éducative des services de garde en milieu familial? Aucune ou très peu... Pourquoi le gouvernement ne limiterait-il pas la gestion du milieu familial aux CPE?
Actuellement, la loi nous permet, dans le cas où notre reconnaissance comme RSG est suspendue ou révoquée, de contester cette suspension ou cette révocation devant le Tribunal administratif du Québec. Ce recours n'est pas parfait, car il ne permet pas au tribunal d'ordonner au CPE de rembourser à la RSG lésée les dommages causés par une décision illégale du CPE. Cependant, il a l'avantage d'être rapide, peu coûteux et efficace dans la plupart des cas.
Le projet de loi n° 124 maintient ce recours, sauf dans un cas. Dorénavant, les RSG devront renouveler leur reconnaissance tous les trois ans. Une RSG dont la reconnaissance ne sera pas renouvelée par son bureau de coordonnateur ne pourrait pas s'adresser au Tribunal administratif du Québec pour contester cette décision. Dans une telle situation, la RSG devra exercer son recours devant la Cour supérieure. Or, en Cour supérieure, les délais sont très longs, les coûts extrêmement élevés et les procédures nombreuses. Ce changement législatif entrave donc l'accès des RSG à la justice. Ce retour à la situation qui prévalait en 1999, c'est-à-dire avant que la loi actuelle ne soit modifiée, est un recul majeur pour les RSG.
Finalement, notons que la jurisprudence du TAQ, portant sur les révocations ou les suspensions de reconnaissance de RSG, démontre sans équivoque l'importance et l'utilité de ce recours pour les RSG. Et qu'en penseront les parents lorsque, pour des raisons administratives, leur service de garde en milieu familial fermera sa porte et que le petit dernier âgé de deux ans devra vivre une séparation et une instabilité dues à des économies?
Pour nous, cette modification signifie que nos emplois seront en péril tous les trois ans. Est-il nécessaire de vous rappeler que nous n'avons pas droit à l'assurance-emploi? Qu'arrivera-t-il des investissements que nous avons faits pour accueillir les enfants? Sans recours juridique, notre situation devient plus précaire que jamais. À ce sujet, nous trouvons ironique que la ministre nous décrive dorénavant comme des prestataires de services de garde. Est-ce pour nous préparer mentalement à ce que nous devenions des prestataires de l'aide sociale?
Je laisse donc la parole à mon amie Marlène, qui va vous entretenir du nombre de places au permis et les horaires atypiques.
Mme Carbonneau (Marlène): À l'article 92 du projet de loi, il est écrit: «Le bureau coordonnateur peut réaffecter une place répartie à une personne responsable d'un service de garde en milieu familial si elle devient inoccupée ou si l'offre de service de la responsable ne respecte plus l'entente de subvention intervenue.» Cet article nous inquiète beaucoup, car actuellement un CPE ne pourrait pas nous enlever une place si elle devient inoccupée.
Si une famille déménage par exemple, et qu'une place devient inoccupée dans notre milieu familial, est-ce que cette place pourrait être donnée à une autre RSG, à une autre région ou à une garderie privée? Si tel est le cas, cela signifierait une perte de revenu importante alors que notre revenu est déjà très faible. De plus, il n'est fait mention d'aucun délai pour l'octroi de cette place inoccupée. Cela ouvre la porte à tous les abus.
Enfin, la possibilité de réaffecter des places, si elle est non conforme à l'entente, permettrait d'exiger le respect des horaires atypiques ou annoncés par une RSG lors de sa reconnaissance. À ce propos, l'insistance de la ministre sur les questions des horaires atypiques nous inquiète également. Les études et les projets pilotes qui ont été réalisés au cours des dernières années ont démontré que cela coûte cher d'offrir des horaires atypiques. Or, ce qui coûte le moins cher, c'est la garde en milieu familial. Nous craignons donc d'en faire les frais en étant obligées d'effectuer des heures encore plus longues.
Bien sûr, les services de garde sont un élément essentiel pour la conciliation travail et famille. Mais il n'y a pas que les exigences du travail et ses horaires qu'il faut concilier, il y a aussi la famille. Comme RSG, nous aussi, nous avons des familles. Il y a donc une limite à ce qu'on peut exiger de nous pour ce qui est de la disponibilité. À propos de nos familles, nous aurions aimé que ce projet de loi amène des soutiens, des solutions pour régler un problème que nous avons depuis plusieurs années, soit le fait que nos enfants ayant neuf ans et moins comptent dans notre ratio. Si l'on décide de garder nos propres enfants à la maison, il nous est impossible de recevoir une subvention, à moins de les faire garder chez une autre RSG ou dans un CPE. Difficile d'expliquer cela à nos enfants.
Cette réforme soulève aussi une question de valeurs dans notre société. Comme responsables de services de garde, les valeurs familiales sont très importantes. Alors, quand on entend la ministre parler d'horaires atypiques, de flexibilité, de possibilité de faire garder ses enfants pendant 48 heures de suite, nous demandons quel genre de message elle transmet aux parents. En tant que société, nous devrions plutôt tendre vers un rapprochement de la famille et permettre aux parents de faire moins d'heures de travail pour qu'ils puissent passer plus de temps en famille.
Qu'arriverait-il de nos dossiers? L'article 154 du projet de loi indique que «le titulaire [du] permis [du] centre de la petite enfance, autre que celui agréé par la ministre à titre de bureau [coordinateur] de la garde en milieu familial, qui exploite son établissement dans un territoire attribué à un bureau [coordinateur] doit, sur demande du ministre et sans délai, transmettre à ce bureau les nom et adresses des personnes qu'il a reconnues à titre de personne responsable d'un service de garde en milieu familial ainsi que les dossiers qu'il a constitués sur ces personnes en vertu de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance et ses règlements».
Cet article est très inquiétant pour nous, comme responsables de services de garde, car une bonne partie de notre vie privée sera transférée dans un bureau avec du nouveau personnel. Notre vie comme RSG et celle de notre famille se retrouvent dans ces dossiers. Nous ne voulons pas que ces renseignements puissent être lus par n'importe qui. De plus, nous croyons sincèrement que cet article ne respecte ni la confidentialité des renseignements personnels ni notre vie privée.
Je vous invite à aller à la section sur notre capacité d'association. On continue de s'objecter à l'ensemble des dispositions qui étaient contenues dans le projet de loi n° 8 et qui sont maintenant incluses dans la loi n° 24.
n(16 heures)n En conclusion. Le réseau des centres de la petite enfance est un réseau jeune. Créé en 1997, il a réussi en huit ans à faire ses preuves. Bien sûr, il reste de nombreuses choses à améliorer. Mais selon nous il est possible et préférable que ces améliorations soient apportées dans le cadre actuel de la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, et non en sabotant la loi et en la remplaçant complètement. Pour reprendre une image qui colle à notre quotidien, on ne jette pas le bébé avec l'eau du bain. Nous nous demandons également où est l'urgence. Nous devrions prendre le temps de bien analyser la situation afin de trouver les solutions les mieux adaptées.
Enfin, nous aimerions rappeler à la ministre Carole Théberge qu'elle porte aussi le chapeau de ministre de la Condition féminine. À ce titre, nous l'implorons de tenir compte du fait que ce réseau a été construit essentiellement par des femmes. Tous les jours, des femmes accomplissent des petits miracles parce qu'elles ont à coeur l'avenir de nos enfants qui sont l'avenir de la société québécoise. Nous vous demandons de nous donner les moyens d'accomplir cette mission. Et les recommandations vont être données par Claudia.
Mme Fortier (Claudia): Globalement, nous recommandons au gouvernement de rejeter le projet de loi n° 124 et d'apporter des améliorations à la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde. Plus spécifiquement, nous recommandons: que la responsabilité des services de garde en milieu familial relève exclusivement des centres de la petite enfance; que les centres de la petite enfance conservent la responsabilité des deux volets: installation et milieu familial; que le gouvernement renonce aux compressions budgétaires qu'il entend imposer au réseau des centres de la petite enfance; que le gouvernement reconnaisse le droit d'association des responsables de services de garde en milieu familial. Et je vous remercie de nous avoir entendus.
La Présidente (Mme James): Merci beaucoup. Alors, Mme la ministre de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine.
Mme Théberge: Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mmes Lafond, Carbonneau, Bédard, Grondin, Mes Tremblay et Fortier. Alors, merci beaucoup d'être venu nous rencontrer, cet après-midi, et de nous faire part de vos préoccupations par rapport au projet de loi.
Dans le document que vous avez présenté avec votre discours, évidemment je pense qu'on se rejoint sur plusieurs points, malgré tout. Entre autres, je vous entends parler beaucoup d'encadrement de qualité, encadrement plutôt soutien, je dirais, de qualité, soutien de proximité, de formation en continu.
Il y a des éléments aussi par rapport aux places et à votre autonomie, mais ça, je l'ai dit à plusieurs reprises. Et le projet de loi est fait aussi en fonction de ça, et je l'ai répété cet avant-midi avec l'association des responsables en milieu familial également. L'autonomie des responsables en milieu familial est respectée dans tout ça. Et évidemment que l'on parle d'horaire flexible ou qu'on parle de bureau coordonnateur, et on a un lien avec vous et vos collègues, cette autonomie-là est respectée. Lorsqu'on parle... lorsqu'il y avait une préoccupation au niveau des places, entre autres, et le jumelage, il faut vraiment penser, et c'est comme ça que c'est décrit, c'est un jumelage entre l'offre que vous faites et les besoins dans votre région, dans votre secteur.
Et le bureau coordonnateur aura le mandat, entre autres, de s'assurer de jumeler cette offre-là pour éviter, entre autres choses, le porte-à-porte pour les parents effectivement, et aussi pour s'assurer que les besoins sont répondus. Il pourra arriver que, dans un secteur donné, il y a un besoin particulier, par exemple, prenons... de garde de soir, alors il faudra trouver quelqu'un qui veuille offrir ce service-là. Il n'y a pas d'obligation à le faire, il n'y a pas d'obligation à offrir un service que vous ne voulez pas faire. Et en plus c'est que ce besoin-là de flexibilité, par exemple, si on prend cet exemple-là, n'est pas le même partout, et pour plusieurs services de garde ça ne changera absolument rien dans le fond dans leur quotidien. Il s'agissait pour nous de faire en sorte que la loi puisse permettre cette flexibilité-là et cette meilleure accessibilité là si besoin. Si besoin, et c'est bien important. Dans un projet de loi, vous le savez, chaque mot est pensé et pesé, et on essaie qu'il traduise le mieux possible non seulement l'esprit de la loi, l'objectif que l'on souhaite atteindre évidemment, mais qu'il soit aussi dans le fond tout le contexte de tout ça.
Aussi, ce qui est maintenu, et je vous le redis, c'est la reconnaissance, les ententes de garde, la rétribution, le soutien, le droit de choisir et le droit aussi de combler son ratio avec des enfants non admissibles à une place à contribution réduite. Dans plusieurs secteurs où la garde scolaire, par exemple, n'est pas disponible ou peu disponible et où, vous, vous prenez la relève bien souvent, c'est un élément qui est important.
J'aurai des questions à vous poser dans quelques secondes, là. Mais je veux aussi vous rassurer sur des points, entre autres au niveau du soutien. Vous parlez de soutien... de l'éparpillement ou... Il faut savoir que le soutien des bureaux... parce que les bureaux coordonnateurs vont vous assurer ce soutien d'une équipe qui va être plus ou moins nombreuse selon le nombre de responsables dont ils ont la responsabilité en fait, de responsables en milieu familial, selon le nombre d'enfants, selon aussi le lieu géographique, l'étendue, le territoire géographique, parce que, ça aussi, il faut prendre ça en considération. Vous le savez, vous représentez, je pense, des groupes d'un peu partout, alors ça, il faut prendre ça en considération également. Et ce soutien-là sera en fait en grande partie comme il est maintenant, c'est-à-dire d'un soutien de formation, d'information, tout ça, et en plus sur demande également avec un service de proximité. Vous avez une inquiétude à ce propos-là, les services de proximité. Parce que les équipes vont être en fait mises en place en fonction des critères que je viens d'élaborer et de d'autres qui sont aussi contenus dans la loi.
Aussi, par rapport au niveau de l'information, l'information ne s'en va pas partout. Vous parliez d'informations qui pourraient être disponibles à tout le monde, on s'entend qu'il n'y a que les bureaux coordonnateurs qui ont accès à certaines informations, là. Ce n'est pas de l'information qui devient publique, là, je veux vous rassurer là-dessus. Encore une fois, c'est en respect de l'autonomie.
Un dernier point, avant d'aller à une question, par rapport au TAQ. Vous savez que, dans la loi actuelle, il n'y avait aucune précision par rapport au non-renouvellement d'une accréditation par rapport au milieu familial, ça n'existait pas. Alors, conséquemment, le lien avec le TAQ n'était pas là. Alors, je le prends en bonne considération, ce que vous me dites. Un groupe qui vous a précédés l'a aussi mentionné. Je le prends en bonne considération, justement pour voir de quelle façon on pourrait donner une suite à votre préoccupation.
Par ailleurs, si on regarde par rapport à la flexibilité et à l'offre de services, vous avez des préoccupations d'ingérence, nous avons une préoccupation de donner un bon service aux parents. Quelle serait selon vous la meilleure façon ou les ou le critère qu'on devrait s'assurer d'ajouter dans nos notes d'agrément, en fait c'est qu'il y ait un bureau coordonnateur... Pour nous assurer d'une part de respecter votre autonomie et votre choix, libre choix de choisir les enfants, et tout ça, et en même temps de pouvoir répondre à des besoins de parents, qu'ils soient particuliers, ou des besoins réguliers qu'on appellerait. De quelle façon vous verriez le traitement de ces critères-là? Je ne sais pas laquelle de vous peut répondre, remarquez, là.
Mme Condrain (Louise): Moi, je pense que la problématique qu'on a soulevée avec la garde atypique, premièrement, j'aimerais souligner que, dans la loi actuelle des CPE, il n'y a absolument rien de changé. La flexibilité, elle est là. Les horaires 48 heures, on peut. Les horaires flexibles, il n'y a rien qui empêche aucune RSG d'ouvrir de 6 heures le matin jusqu'à 4 heures puis une autre dans d'autres heures. Il y a même des RSG, dans certains secteurs, qui ouvrent de soir, il y en a qui ouvrent de fin de semaine. Donc, dans la loi actuelle, on a déjà tout ça. Donc, je ne vois pas ce que la nouvelle loi va amener de changements à ce niveau-là. Et, moi, je pense que ce qu'on veut s'assurer, c'est qu'on continue à avoir cette liberté-là. On l'a actuellement, il n'y personne qui nous oblige à ouvrir le soir ou les fins de semaine.
Notre préoccupation est aussi là parce qu'on pense qu'il y a des enfants qui passent trop de temps dans les services de garde actuellement et que plus on va ouvrir, plus, là, les enfants, ils seront là longtemps. On sait que déjà, au Québec, il y a des enfants qui n'ont pas de vacances annuellement, parce que le temps que les parents sont en vacances, bien le parent trouve un autre service de garde qui est ouvert ailleurs puis il fait garder son enfant là. Puis là-dessus peut-être on pourrait prendre exemple sur les services de garde en Suisse où les parents n'ont pas la permission d'apporter leurs enfants quand ils sont en vacances. Ça fait que donc il se fait des choses ailleurs puis, moi, je pense qu'il faut aller voir ce qui se fait ailleurs là-dessus. C'est s'assurer en tout cas que les enfants ne passent pas des heures de fou, puis que nous autres non plus... on ait du temps avec nos familles, puis qu'on n'est pas là des 10, 12 heures. Parce qu'il faut savoir... c'est que, quand on rouvre à 7 heures le matin, on s'est levées à 6 heures pour être capables d'être fraîches et disposes puis ouvrir la porte à 7 heures, être capables de fonctionner. Puis quand le dernier, il est parti, là, bien ce n'est pas fini, il y a le ramassage, le nettoyage et tout ce qui va avec. Donc, plus on augmente notre temps en présence des enfants, plus c'est difficile d'arriver à concilier notre propre travail avec notre propre famille.
n(16 h 10)nMme Théberge: Là, je veux aussi vous rassurer, il n'est aucunement question, puis je me fie aussi là-dessus au jugement de tout... Dans le fond, les gens qui interviennent en service de garde, jamais, jamais, jamais on n'acceptera qu'un enfant passe 24 heures par jour, sept jours par semaine, même pas au-delà des heures prescrites dans le fond. Quand on parle de flexibilité, souvent c'est de changer l'horaire, on s'entend là, pour la majorité des cas. C'est que ce n'est pas nécessairement de 7 heures à 5 heures, ça peut être des fois de midi à 8 heures parce que la dame ou les parents travaillent, par exemple dans un centre d'achats, bien suivant l'heure d'horaire des centres d'achats, vous le vivez possiblement, tout ça, c'est dans ce sens-là, une flexibilité. Si on a eu des cas, je dirais, d'abus des horaires que j'appellerais à travers le temps puis évidemment qu'il faut dénoncer ça, parce qu'on a une grande préoccupation et tous les... Moi, je le sais que... vous aussi, vous l'avez puis les autres partenaires aussi, de faire en sorte que l'enfant vive avec ses parents évidemment qui sont les premiers responsables, mais aussi qu'on puisse suivre son développement, et tout, mais pas dans un service de garde à la journée longue. Le 48 heures, vous l'avez mentionné, était déjà dans la loi parce que ça, ça répond aussi à des besoins, dans certaines régions, par exemple touristiques ou saisonniers. C'est ponctuel, ça. Ce n'est pas toujours. C'est très ponctuel. C'est dans ce sens-là qu'il faut juste être prêts à pouvoir rendre le service encore une fois si besoin.
Lorsque vous parlez des... là, vous dites l'affectivité, vous l'avez. Mais encore une fois le lien avec un bureau coordonnateur par exemple, comment vous le verriez? Parce que vous n'avez pas répondu tout à fait à la façon... comment on pourrait le jumeler? Si on dit demain matin, dans une région par exemple, est-ce que vous aimeriez qu'on lance un genre... je ne sais pas, moi, un appel d'offres dire: on a besoin de tel genre de services. Ou vous dites: Nous, on va parler avec nos membres et on va nous dire: Voici qu'est-ce qu'on est prêt à offrir ou... Parce que dans les faits l'offre atypique d'horaires variables a diminué beaucoup, beaucoup. Vous me dites: C'est dans la loi, on pouvait déjà le faire. Mais, à ce moment-là, pourquoi? Il y a une demande, mais l'offre n'est pas au rendez-vous.
Mme Condrain (Louise): Bien, en tout cas, pour moi, ce qui est mon cas en Montérégie, on a même eu des projets pilotes qui n'ont même pas été acceptés. Un coup que les projets pilotes ont été acceptés, on a eu de la misère à trouver des gens, de la clientèle. Parce que ce n'est pas dans la culture au Québec de laisser nos enfants pour la nuit... ou ailleurs. Donc, souvent, ces gens-là s'arrangent plus avec la famille. Donc, déjà là, il y a eu un problème. En tout cas, dans mon propre CPE, ça n'a pas fonctionné, le projet pilote, avec les horaires atypiques.
Mme Théberge: Je suis d'accord avec vous que, pour la nuit, il y aura probablement très, très peu, sinon pas du tout de demande effectivement, là. C'est pour ça que je parlais plutôt d'heures parfois allongées ou d'heures consécutives dans certaines régions, dans certains secteurs, pour certaines périodes de l'année très, très ponctuelles.
J'aimerais vous entendre maintenant sur... au niveau de la... parce que j'englobe ça dans une grande question dans le fond, la formation, le soutien, et le soutien, ce qu'on appelle sur demande dans le fond, le projet de loi. Comment vous le voyez, le soutien à la formation, pour les personnes responsables en milieu familial?
Mme Carbonneau (Marlène): Bien, moi, je vais juste faire un commentaire, puis peut-être que Louise, elle rajoutera. Ce que je voulais dire, c'est que je ne comprends pas comment le gouvernement va pouvoir donner le même soutien avec moitié moins d'argent? Ça, je ne peux pas comprendre. Quand on dit que le milieu, le réseau va être coupé, je ne vois pas comment on va pouvoir avoir le même soutien des conseillères pédagogiques avec moins de budget, finalement. Ça, je ne le sais pas comment ça peut être fait? Peut-être que Louise, je ne sais pas si tu veux compléter...
Mme Théberge: Il faut savoir peut-être... peut-être une précision là-dessus. C'est qu'il y a un pourcentage de l'argent qui était dédié à la formation qui n'y allait pas, qui était utilisé pour autre chose ou d'autres services à l'intérieur des CPE. Il y a eu ce volet-là, à certains égards il y a des montants importants. Ça, c'est public. Alors, il y a plus du tiers de ces montants-là qui n'allaient pas à la gestion. Et en revoyant les façons de faire et en concentrant les argents sur les services et non sur les structures, c'est ce qui nous permet d'avoir une enveloppe dédiée directement aux services... aux responsables en milieu familial avec des équipes regroupées, des expertises regroupées, des expertises qui... des personnes, des ressources dans le fond spécialisées qui peuvent non seulement soutenir une formation et répondre aux besoins, si besoin, selon la qualification, et tout ça. Dans ce sens-là.
Mme Condrain (Louise): Nous autres, on avait une grosse inquiétude aussi quant au territoire à couvrir, parce que juste, déjà, en Montérégie puis à plusieurs autres endroits, ne serait-ce qu'en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine, il y a des territoires immenses. Moi, par expérience personnelle, j'ai un petit nouveau qui ne va vraiment pas bien; ma soutien pédagogique, depuis un mois, elle est venue deux fois par semaine régulièrement. Je vois difficilement comment je peux faire si mon soutien pédagogique est à 50 km, qu'elle doit parcourir cette distance-là, puis qu'elle doit arriver chez nous dans les délais assez courts parce que, quand la situation de crise est là, ce n'est pas dans deux heures qu'on a besoin d'aide, c'est là. Donc, cette préoccupation-là, c'est sûr qu'elle est là au niveau de la distance à parcourir. Puis il y avait aussi une question de gratuité de la formation, qu'on trouvait ça important, là, que ça continue. Puis aussi le soutien pédagogique, on établit un contact qui est avec cette personne-là, qui est un contact de confiance. Parce que, ce n'est pas du jour au lendemain que ça s'établit, ces contacts-là, puis qu'on peut travailler main dans la main pour le mieux-être de ces enfants-là. Il ne faut pas se le cacher, ce qu'on veut dans le fond, c'est faire grandir ces petits-là le mieux possible pour leur donner des chances égales. D'ailleurs, c'était ça, le but de la Loi sur les centres de la petite enfance: donner des chances égales au petit gars qui est né à Shawinigan comme celui qui est né à Pointe-Saint-Charles. Donc ça, c'était dans nos préoccupations.
Mme Théberge: Je vais vous rassurer tout de suite, c'est encore ça, le but. C'est justement de donner un meilleur... un soutien encore amélioré. Puis il y a des constats qui ont été faits à travers les années, puis c'est important justement, quand on fait des constats, de mettre en place des mesures qui pourront faire plus et mieux. Je pense que le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue voulait intervenir.
La Présidente (Mme James): Oui, effectivement. Allez-y, M. le député.
M. Bernard: Merci, Mme la ministre. Merci, Mme la Présidente. Écoutez, il faut que je prenne les propos au bond parce que, qu'est-ce que vous venez de soulever là, c'est un point important sur votre mémoire, bas de la page 4. Puis, moi, je crois au besoin de réformer le projet de loi pour justement les raisons que vous venez de dire. Rouyn-Noranda, c'est un territoire de 6 000 km². J'ai une ville-centre, Rouyn-Noranda, et qui a été fusionnée avec 14 municipalités. Actuellement, j'ai cinq CPE qui sont dans le centre et qui desservent un réseau de RSG, qui sont effectivement répartis sur un territoire, chaque municipalité, et j'en ai qui sont à plus de 60 km de Rouyn-Noranda, O.K. Et actuellement le pire scénario que j'ai: j'ai cinq RSG dans une petite municipalité qui est à 60 km, chaque petite RSG est supportée par un CPE différent. Donc, dans la même journée, je peux avoir cinq intervenants qui partent de chacun des CPE pour aller donner un coup de main dans une RSG. Alors, ils perdent du temps sur la route, etc. Donc, votre argumentaire de dire qu'on couvrirait un grand territoire, moi, je le vis déjà, à Rouyn-Noranda, O.K., et ça fonctionne. Puis actuellement je me dis qu'effectivement, si on veut faire du bon service, on pourrait regrouper un bureau de coordination qui va superviser un territoire, et les personnes, quand elles vont se déplacer pour l'aide technique, ils vont aller faire... une personne va se déplacer puis peut faire le support à plusieurs RSG, au lieu de cinq personnes qui font le même travail.
Alors, moi, je crois qu'actuellement un bureau de coordination peut donner un meilleur support avec le même budget puis avec un nombre moindre de personnes, pour bien couvrir un territoire. Alors, l'argumentaire dans votre... quand vous dites, entre autres: «Notre bureau coordonnateur ne [serait] plus dans notre quartier, si nous vivons en milieu urbain, ou dans notre localité si nous vivons en milieu rural.» Rouyn-Noranda, c'est exactement ça qu'on vit actuellement, et ça se fait, et c'est réalisable. Alors, moi, je pense que le projet de loi peut faire beaucoup mieux pour donner un support aux RSG, particulièrement en milieu rural.
Mme Théberge: Cela dit, quand on parle de demander au service dans le fond d'offrir une flexibilité, c'est qu'on veut aussi se donner, nous, la possibilité d'être plus flexibles aussi pour répondre aux demandes, aux besoins particuliers de certains secteurs, certaines régions. Ça va dans tous les sens aussi. C'est dans ce sens-là qu'on peut répondre à des besoins, par exemple, pour Rouyn-Noranda. Les Îles-de-la-Madeleine, j'y étais au printemps. J'ai rencontré les gens, là-bas. Ils m'ont fait effectivement part, au niveau de la formation, des difficultés de formation, à cause des distances, et tout ça. Ça aussi, c'est des éléments qu'on va prévoir, justement pour s'assurer qu'elles aient accès à la formation et sans décalage avec nécessairement les autres, et tout, là, et quand on parle des Îles. Mais le Québec, c'est grand, hein? Alors, c'est pour ça qu'il faut être capables, nous-mêmes, de se donner de la flexibilité pour moduler et s'assurer du soutien maximal.
La Présidente (Mme James): Alors, M. le député de Saint-Jean.
M. Paquin: Mme la Présidente, merci beaucoup. Mesdames, messieurs, bienvenue. J'aurais quelques questions pour vous. Mais avant, permettez-moi de vous lire un communiqué en date du 21 septembre 2002 qui va comme ceci. À l'occasion de la rencontre régionale qui a précédé le forum national sur les CPE, l'ADIM-Estrie a émis un communiqué dans lequel on peut lire ceci: «Cette première rencontre régionale a permis aux responsables [des services] de garde de rappeler que, malgré les bienfaits apportés par la politique familiale, les services de garde en milieu familial restent encore et toujours [des] parents pauvres du réseau de la petite enfance.» Plus loin, le communiqué dit encore: «Là où le bât blesse, c'est quand il est question de relations entre [...] CPE et leurs responsables d'un service de garde. Pour les [interventions] en milieu familial, l'intégration au CPE est loin de se traduire par une participation à la vie démocratique du CPE. Elles ne sont toujours pas considérées comme des membres à part entière de la corporation.» J'aurais deux petites questions pour vous là-dessus. La première: Est-ce que l'ADIM-Estrie, qu'est-ce qu'elle veut dire au juste par cette déclaration?
Deuxième question: Est-ce que les représentants du RSG au C.A. seront selon vous souhaitables?
n(16 h 20)nM. Tremblay (Frédéric): Bonjour. Je suis conseiller syndical à la Centrale des syndicats du Québec, puis je travaille aussi comme avocat pour défendre les responsables des services de garde en milieu familial qui ont des problèmes avec leur centre de la petite enfance. Et des problèmes, il y en a depuis 1997. Et évidemment qu'on maintienne la loi actuelle ou qu'on change la loi, il va continuer d'avoir des problèmes de relations de travail, puisque les relations de travail en soi génèrent toujours un lot de problèmes.
En 2002, lorsque l'ADIM-Estrie a écrit le communiqué dont vous avez lu, il y avait effectivement des difficultés d'intégration. Et, lorsqu'on dit que les RSG sont les parents pauvres du réseau, je pense qu'on peut le dire encore aujourd'hui, en 2005, et, si vous voulez que les personnes, à ma droite, vous expliquent pourquoi elles sont les parents pauvres du réseau, je pense qu'elles pourraient le faire en long et en large. Mais ne serait-ce que de rappeler qu'elles doivent travailler 50 heures par semaine, et ça, c'est une obligation légale, c'est le législateur qui a décidé que ces femmes-là, ces 14 000 RSG là, devraient travailler, à chaque semaine, au moins 50 heures. Il n'y a pas dans le réseau ni les éducatrices en installation, ni les gestionnaires, ni les conseillères pédagogiques, qui doivent travailler ce nombre d'heures là, et surtout pas au taux horaire que les responsables des services de garde gagnent.
Maintenant, et ça a été très intéressant lorsqu'on a préparé le témoignage ? le mémoire qu'ils ont présenté ressemble beaucoup à un témoignage ? et lorsqu'on a fait les tournées de consultation, parce que, dans les deux dernières semaines, j'ai rencontré plusieurs syndicats de responsables des services de garde en milieu familial, ça a été très intéressant. Pour la première fois, depuis un bon bout de temps, on ne visait plus les CPE, on visait le gouvernement. C'était comme si l'ensemble des complaintes, l'ensemble des problèmes qu'on avait eus avec les centres de la petite enfance, même s'ils étaient considérables et ils continuaient d'être difficiles à tous les jours, ils devenaient moins importants que ce projet de loi là qu'on a devant nous, le projet de loi n° 124. Parce que pour elles on était capables de mettre ça sur la glace puis de dire: Oui, on a des problèmes, on va continuer d'en avoir. Ça s'améliorait, il y a des solutions. Mais là on a quelque chose qui est plus grave que les problèmes quotidiens qu'on vit avec les centres de la petite enfance. Et je pense que l'ensemble des propos qu'elles ont développés l'exprime très bien. Et il y a plusieurs autres groupes qui vont venir et qui vont exprimer sensiblement les mêmes craintes.
Et c'est évident que le réseau actuel pourrait être amélioré, il y a plusieurs choses qui pourraient être faites. J'aborde l'élément dont vous parlez, l'intégration des responsables des services de garde. Est-ce qu'elles devraient avoir une place sur le conseil d'administration? Ça aurait été pour nous souhaitable que la loi actuelle oblige qu'il y ait à tout le moins une certaine proportion de responsables de services de garde en milieu familial ou de parents qui utilisent le milieu familial. Parce qu'à l'heure actuelle, et c'est comme ça depuis 1997, les gens qui ont investi les conseils d'administration, ce sont, dans une très grande majorité, des parents qui fréquentent le volet installation du CPE. Parce qu'ils ont un contact quotidien avec les gestionnaires, parce qu'ils voient physiquement le centre de la petite enfance, alors que les parents du milieu familial, et on peut leur reprocher ça, là, moi y inclus, parce que mes enfants sont en milieu familial, on s'est peu investis dans la gestion des centres de la petite enfance. Et il semble que l'occasion était belle pour justement changer ça et obliger qu'il y ait un certain nombre soit de parents qui doivent siéger sur le conseil d'administration, qui ont des enfants en milieu familial, où une est responsable des services de garde, surtout dans les centres de la petite enfance où il y a beaucoup plus de places en milieu familial qu'en installation.
La Présidente (Mme James): Merci. O.K. Alors M. le député de Vachon, la parole est à vous.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Merci, Mme la Présidente. J'aimerais revenir sur la composition... J'aimerais ça être seul à parler aux invités, si vous permettez, M. le député de Vimont. Alors, bonjour. J'aimerais revenir sur la question que vous avez posée, tout à l'heure, concernant la capacité des bureaux coordonnateurs d'offrir le soutien adéquat aux responsables de services de garde en milieu familial. Selon un compte rendu d'une réunion qu'a tenue le Conseil québécois des centres de la petite enfance, là, que nous recevrons à la toute fin, datée du 8 novembre, cette réunion avec les représentants du ministère, on nous dit, dans ce compte rendu ? ça vaut la peine de lire les comptes rendus de ce conseil-là parce qu'il y a des informations dont on ne peut pas avoir la même qualité d'information lorsqu'on pose des questions au salon bleu ? qu'il y aurait plus ou moins 15 % des bureaux coordonnateurs qui auraient la capacité de moins de 250 places; 20 % des capacités de plus de 1 000 places; et la majorité se situerait entre 250 à 850 places. Puis on nous dit en même temps que le cadre financier du bureau coordonnateur permettra un regroupement de compétences, composant une structure administrative et de soutien se situant en moyenne entre 6,5 à 10 équivalents à temps plein.
Moi, lorsque j'ai lu ça, je me suis posé la question et je me demandais si vous aviez fait une analyse à ce sujet-là. Quel pourrait être le ratio, à supposer que le gouvernement maintient sa proposition de créer des bureaux coordonnateurs à hauteur de 130, là, quel pourrait être, dans un bureau coordonnateur, le ratio avec lequel vous pourriez vivre éventuellement, là, par rapport au nombre de responsables de services de garde reliés à une conseillère pédagogique? Parce que ce qu'on nous dit, là, dans ce compte rendu là, là, c'est qu'il y aurait des compétences pour composer la structure administrative et de soutien entre 6,5 à 10 équivalents à temps complet. On ne connaît pas la nature de ces composantes-là, là. On ne sait pas combien de ces personnes-là vont être en soutien et combien vont être affectées à des tâches administratives et de bureau. Alors, on a un ratio de 1/16 maintenant. Est-ce que 1/16 pose des problèmes?
Mme Condrain (Louise): Pour ma part, en tout cas, je trouve 1/16, c'est comme limite, là. C'est correct. Quand on n'a pas de temps de crise, puis qu'il n'y a pas trop de petits qui mordent, puis que ça va bien, ce n'est pas si mal. Mais, je veux dire, c'est vraiment pour nous en tout cas un minimum. Donc, si on va au-delà de ça avec des 1 000 places pour six à 10 personnes, là, ça commence à être un ratio pas mal plus grand que qu'est-ce qu'on a actuellement. Puis déjà là, avec la reconnaissance, avec tout ce qui va avec ça, le renouvellement, ça amène beaucoup de charges. Puis ce qui est difficile avec ce nouveau projet de loi là, c'est que toutes les reconnaissances vont être renouvelables à la même date, à chaque trois ans.
En tout cas, je m'imagine bien difficilement comment les personnes qui vont être responsables du renouvellement vont être capables de faire le tour de toutes leurs RSG dans un si court laps de temps, quand on sait que dans un CPE comme le mien, où on est 38 RSG ? c'est un des plus gros CPE qui existent en Montérégie; 38 RSG ? 350 places au permis, ça prend une année complète à Chantal, notre soutien pédagogique, pour être capable de faire et les visites contrôles et la reconnaissance. Donc, s'ils sont moins que ça, puis en plus ils ont des booms de travail, puis que c'est tout en même temps, il n'y aura aucune place pour le soutien. Ça va être que de la reconnaissance, que du renouvellement, des suspensions, ces trucs-là, mais le soutien, il ne sera pas là. Je ne vois pas comment il pourrait l'être en tout cas, pas à ce ratio-là.
M. Bouchard (Vachon): Dans le témoignage que nous avons entendu ce matin, de la part de l'Association des éducateurs et éducatrices en milieu familial, Mme D'Amours, qui était là ? et, je pense, qui est toujours présente dans la salle ? disait: Bravo, bravo, bravo pour le projet de loi! Cette association représente, je pense, 4 000 ? ou à peu près, là, peut-être un petit peu plus, un petit peu moins, je ne sais pas ? responsables de services de garde en milieu familial. Vous, vous dites: Retirez le projet de loi. Et vous représentez aussi des responsables de services de garde en milieu familial. Alors, pour des parlementaires, c'est un petit peu embêtant parce qu'on se dit quelque part: Il semble y avoir des gens qui sont très enthousiastes et d'autres extrêmement déçus et très inquiets.
Quel est votre sentiment à ce propos? Pourquoi y a-t-il une si grande différence entre une association comme celle de Mme D'Amours et votre association?
Mme Condrain (Louise): Ce n'est pas quelle différence il y a entre notre association puis l'association de Mme D'Amours... Ce que je sais puis ce que j'entends actuellement au Québec, c'est un net désaccord avec ce projet de loi là. Que ce soient les autres organismes... Mais en général ce qu'on entend, que ce soit de la part des parents, ou de l'AQCPE, ou de d'autres organismes, on entend vraiment un désaccord avec ce projet de loi là et beaucoup d'insatisfaction. J'ai fait le tour de plusieurs réunions publiques qui s'est donné en Montérégie au cours des semaines qui viennent de passer. Comme on peut dire chez nous, la panique est prise, parce qu'il y a beaucoup de choses qui circulent, mais je pense qu'il y a une inquiétude profonde qui vient d'une grande majorité de RSG, puis ce n'est pas pour rien.
n(16 h 30)n Et je pense que, s'il y a cette inquiétude-là, ce n'est pas pour rien. C'est parce qu'il y a longtemps déjà on commençait à s'inquiéter sur ce que cette réforme-là devait amener. Puis d'ailleurs, au départ, c'était une réforme, et on se ramasse, quelques mois plus tard, avec un nouveau projet de loi qui vient faire table rase d'un projet de loi, comme disait Frédéric, qui a quand même des imperfections, qui a des choses à améliorer. Mais huit ans, ce n'est pas bien long pour apprendre à vivre ensemble puis essayer de construire sur ce qui là. Puis là on fait table rase de ce qui est déjà là; je pense que ça, c'est une grande inquiétude.
Puis il ne faut pas se le cacher, les RSG, on est très isolés. Donc, ce n'est pas comme un syndicat ou comme des réunions ou quand on est toutes ensemble; on est chacune dans nos maisons. Donc, pour réussir à rejoindre plusieurs RSG, ça veut dire que c'est du téléphone, du téléphone, du téléphone, de se voir dans les parcs puis d'essayer de se dire: Bien, regarde, il y a une réunion, tu te présenterais-tu? Puis, quand tu as fait ton 10 heures de travail dans la journée, puis tu as fait ta petite demi-heure de ménage, puis, s'il y en a qui ont eu le goût d'aller voir, dans la réglementation, ce qu'on doit faire à chaque semaine comme entretien dans nos maisons, bien, après, le soir, quand arrive, à 7 h 30, une réunion d'information sur le nouveau projet de loi de Mme Théberge, bien il y a bien du monde qui se disent: Bien, regarde, je n'irai pas parce que je suis brûlée, puis, demain matin, je veux être dédiée à mes petits mousses. Ça fait que c'est ça qui se passe.
M. Tremblay (Frédéric): J'aimerais ça rajouter quelque chose, et puis je ne veux pas comparer le travail que l'autre association fait et la nôtre, mais on a quand même des constats qui sont similaires par rapport surtout aux conditions d'exercice puis aux conditions de travail. Tout à l'heure, j'entendais Mme D'Amours parler de la rétribution qui est très faible et je suis tout... l'ensemble de nos membres sont d'accord avec ça. L'idée aussi que Mme D'Amours défend, depuis un certain nombre d'années, de faire diminuer de neuf à six l'âge des enfants de la RSG qui comptent dans le ratio, c'est des choses avec lesquelles on est tout à fait d'accord.
Maintenant, nous, quand on fait l'évaluation du projet de loi, on ne voit rien qui règle ces problèmes-là ou d'autres problèmes qui sont aigus, évidents et multiples. Eux évidemment font une autre lecture, mais notre position repose sur le fait qu'on ne voit pas, dans le projet de loi, de solutions aux nombreux problèmes que les responsables de services de garde en milieu familial vivent dans leur quotidien.
M. Bouchard (Vachon): Le député de Saint-Jean a dû remonter jusqu'à 2002 pour laisser traîner une pelure de banane en espérant que vous glissiez dessus, tout à l'heure, et a cité un communiqué de 2002 où l'ADIM de Sherbrooke faisait état d'un certain nombre de frustrations, le côté abrasif, là, des relations avec les CPE.
Quelle est l'évaluation que vous faites ? parce que c'est important qu'on se fasse une tête à ce propos-là, ici, là ? de l'évolution des relations entre les services de garde en milieu familial et les installations depuis la création du réseau? À mon souvenir, on partait d'agences, d'agences de services de garde familiale, qu'on a transformées en CPE, et ensuite on a demandé... la loi a prévu pour les CPE... était composées d'installations et de services de garde en milieu familial. On a tenté de rapprocher ces deux univers-là, ces deux univers très différents, et je pense que, ce matin, nous avons eu une description très nette de la différence de ces univers. Quelle est l'évaluation que vous faites de l'évolution durant les huit dernières années? Et la deuxième question, c'est: En quoi le projet de loi va améliorer le rapprochement de ces deux entités?
Mme Condrain (Louise): Bien, moi, je pense qu'au cours des années l'amélioration est allée en croissance. Ça n'a pas été toujours facile, ça ne l'est pas toujours. Mais une chose est certaine, c'est qu'avec les années c'est sûr que, 2002, on est trois ans en arrière, de plus en plus, il y a des liens qui se sont tissés entre les CPE, installation et le volet familial, et aussi ça a contribué à notre reconnaissance sociale, parce que tout à coup les parents se sont aperçus qu'on appartenait au même réseau. C'est-à-dire, le fait de faire des réseaux séparés, comme ce que le projet de loi n° 124 veut faire actuellement, c'est comme si on retourne à la préhistoire, au temps des agences où, à ce moment-là, c'était la madame qui garde chez eux; puis ça, on en a ras le bol, de ça. On n'est pas des madames qui gardons chez nous, on est des responsables de services de garde en milieu familial, on se donne des formations. Oui, la loi prévoit seulement 45 heures de formation, mais la très grande majorité d'entre nous sont allées chercher des attestations au niveau collégial; moi-même, je suis actuellement en train de faire une formation universitaire au certificat. Et on est légion, comme ça, qui, après nos 10 heures de travail, on se tape trois heures de cours pour se donner de la formation. Ça fait que, donc, ce jumelage-là a permis une reconnaissance sociale, et aussi les parents, bien, se sont sentis beaucoup plus en sécurité aussi de voir: Bien, regarde donc ça, il y a des liens qui se tissent, puis ça nous permet en tout cas de voir que ça évolue.
Puis je vais continuer à taper sur le clou, en disant que, oui, ce n'est pas parfait, il y a encore des choses à améliorer. C'est des relations humaines, et, comme disait Frédéric, c'est aussi des relations de travail, veux veux pas. On a beau dire d'avoir le statut de travailleur autonome, mais finalement on a beaucoup de liens de subordination avec le CPE actuellement. Donc, ça amène des conflits, mais on peut passer par-dessus ces conflits-là, puis, je pense, avec les années... En tout cas, moi, personnellement, dans mon propre CPE, j'ai eu des difficultés, j'ai même eu des mises en demeure de ma directrice générale, puis avec le temps ça s'est beaucoup aplani puis maintenant on est capables de se parler d'égale à égale, puis au moins on est reconnu comme des personnes intervenantes auprès des enfants qui ont une bonne expérience.
M. Bouchard (Vachon): Mme la Présidente, si vous permettez. À moins que vous ayez quelque chose à ajouter, Me Tremblay.
Mme Condrain (Louise): On sonne la cloche. Ça veut dire que c'est fini, c'est ça?
Une voix: Non, c'est correct.
M. Bouchard (Vachon): Ah! On la sonne...
Mme Condrain (Louise): O.K.
La Présidente (Mme James): C'est pour le quorum au salon bleu. Continuez.
M. Bouchard (Vachon): C'est parce...
Des voix: ...
M. Bouchard (Vachon): C'est parce que tous les... il y a plusieurs députés qui sont dans leurs bureaux à nous écouter tellement c'est intéressant.
La Présidente (Mme James): Allez-y, M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Oui. J'aimerais qu'on puisse aborder la question de l'offre de services, étant donné le souhait d'une plus grande flexibilité, énoncé par la ministre, mais qui n'apparaît pas si clairement que ça dans le projet de loi, là.
J'ai deux questions. La première, c'est: Est-ce que vos membres sont rassurés du fait qu'il y aura une évaluation, en vue du renouvellement de leurs permis, durant la première année suivant l'adoption de la loi? Quelles questions se posent-ils par rapport à ce renouvellement-là? Est-ce qu'ils font un lien entre le renouvellement et leurs capacités d'offrir des heures supplémentaires? Comment les gens vivent-ils cette idée que les RSG ne seront pas obligés d'offrir des heures supplémentaires, mais qu'ils ne savent pas en même temps sur quels critères se feront les renouvellements?
Mme Carbonneau (Marlène): C'est sûr qu'il y a des responsables qui sont inquiètes parce qu'elles disent: Si elles ne répondent pas à cette demande-là ou, si, dans leurs quartiers, il y a une demande de garde atypique et qu'elles ne répondent pas à cette demande-là, bien qu'il n'y aura pas de renouvellement de reconnaissance. Ça, c'est sûr que, comme ce n'est pas déterminé par rien, c'est quelque chose qui inquiète les responsables de garde. D'être évalué, dans la première année, comme il n'y a rien encore qui détermine le renouvellement ou le non-renouvellement, ça aussi, c'est quelque chose qui les inquiète, mais c'est beaucoup plus le non-renouvellement qui les inquiète, en tout cas, dans celles qu'on a rencontrées. Il y avait beaucoup, beaucoup de questions à ce sujet-là, puis c'est toutes des questions sans réponse, donc c'est des inquiétudes que les responsables ont.
Mme Condrain (Louise): Bien, moi, je rajouterais juste que pour beaucoup aussi ce n'est pas si évident que ça la différence entre renouvellement puis réévaluation. Actuellement, dans la loi, on est reconnus, à un bon moment donné, puis, à chaque année, on est réévalués. Et ce n'est pas à ce moment-là qu'on peut être révoqué, c'est une réévaluation. Donc, il n'y a pas de ? comment je dirais? ? il n'y a pas d'incertitude puis il n'y a pas d'inquiétude quand c'est le temps de la réévaluation. Bien, c'est comme de regarder ce qu'on a fait durant l'année. C'est quoi, nos objectifs pour l'an prochain, qu'est-ce qu'on veut améliorer, quels sont nos points forts. Tandis que là c'est un renouvellement. Ça veut dire qu'au bout de l'année on est comme plus RSG puis on doit renouveler. Donc, ce n'est pas la même chose. C'est là que ça amène de l'incertitude puis de l'inquiétude. C'est de dire: Sur quoi on va se baser? Puis, étant donné qu'on n'a pas encore en main la réglementation puis on ne sait pas trop quand on va l'avoir parce qu'il y a eu un... je pense que, dans le projet de loi, il y a un article là-dessus qui dit qu'on n'aurait pas les règlements aussi rapidement que normalement on devrait les avoir, on ne peut pas rassurer nos membres là-dessus parce qu'on ne l'a pas, la réglementation. Ça veut dire quoi, le renouvellement? On ne le sait pas. Donc, oui, il y a de l'inquiétude, c'est sûr.
M. Tremblay (Frédéric): Si je peux me permettre, il y a une autre inquiétude qui est liée simplement, pour la première année, à la quantité de travail que va engendrer le renouvellement de toutes les 1 200 RSG au Québec. Puisqu'il y aura en moyenne plus de 100 RSG par bureau coordonnateur, ça va représenter une quantité de travail très, très importante, dans le contexte surtout que les bureaux coordonnateurs vont déjà être à se mettre sur pied, ce qui va déjà générer beaucoup de travail. En plus de ça, ils vont devoir, lorsque la loi, obligatoirement... renouveler toutes les filles. Alors, c'est sûr que, dans le cadre des assemblées, il y avait beaucoup de monde qui nous disait: Oui, mais ils n'auront pas de temps pour le soutien. S'ils ont 100 RSG à renouveler, ils ne connaissent pas ces filles-là, ils se trempent dans leurs dossiers, ça prend au moins une journée par RSG et la moitié de l'année qui est passée juste à faire du renouvellement de reconnaissance.
La Présidente (Mme James): Ah! Mme la députée de Lotbinière, allez-y.
Mme Roy: Merci, Mme la Présidente. Les RSG qui... Bon, je vous remercie de votre présence. J'ai lu avec attention votre mémoire et je considère qu'il est une bonne illustration de ce qui se passe sur le terrain. Il est très réaliste, et je suis bien satisfaite que vous veniez faire part de vos inquiétudes ici; c'est le forum idéal.
n(16 h 40)n Une inquiétude qui me venait, moi aussi, à la lecture de ça, en ayant moins de personnes comme les CPE, il y avait, comme vous l'avez décrit, des liens qui se sont établis, et j'ai toujours entendu dire, les professionnels, des pédopsychiatres, entre autres M. Lajoie, qui nous disait que, lui, s'il voulait arrêter d'avoir des interventions, parce qu'il faisait de l'intervention fine dans le milieu, s'il voulait arrêter d'avoir de l'intervention, il disait: Quand ça ira mal, tu m'appelleras. Donc, là, l'intervention est à la demande et non un support constant; ça, c'est une première des choses.
Puis une deuxième des choses: Comment se sentent les RSG qui avaient entretenu un lien avec un CPE et qui voient un organisme coordonnateur, qui semble être plutôt quelqu'un qui va les surveiller et les mettre au pas, si on peut dire, pour employer une expression québécoise, comment vous allez vous sentir d'aller demander du support ou du soutien dans des situations qui sont problématiques? Parce que c'est ça qui se vit, là, entre une RSG et un enfant ou entre les conflits qui peuvent survenir avec les parents. Allez-vous sentir le support nécessaire que vous aviez avec les CPE?
Mme Carbonneau (Marlène): Bien, moi, ce qui m'inquiéterait, c'est que les responsables fassent moins de demandes de support, parce qu'étant donné que ça va devenir comme plus réglementé ? ou plus de la surveillance, plus de la police peut-être ? ça fait que j'ai l'impression que peut-être que c'est le côté support qui va être laissé... laissé de côté, en tout cas, je pense... que c'est quelque chose que peut-être qu'on va éviter d'appeler, éviter qu'il rentre plus souvent dans nos maisons. Parce que ça va être écrit, ça va être plus inquiétant, là, ça va être plus une police que d'autre chose.
Mme Condrain (Louise): Peut-être aussi ce qui inquiète beaucoup, c'est justement, quand on parle du soutien pédagogique, pourquoi, le législateur, il a rajouté «sur demande»? Ça non plus, on ne comprend pas très bien pourquoi, ça, ça a été ajouté, puisqu'actuellement la plupart du temps c'est sur demande. C'est sûr qu'il y a beaucoup de filles qui font du soutien pédagogique, qui régulièrement vont appeler toutes les RSG du CPE juste pour voir, bon: Comment ça va, Louise, avec tes petits? C'est-u correct, le petit Damien? Bon, un peu ce genre de relation là qui s'établit. Puis, les autres fois, c'est nous autres qu'on va les appeler pour faire une demande. Donc, on ne comprend pas tellement bien qu'est-ce que ça veut dire, ça, «sur demande», puis ça amène des inquiétudes, en disant: Est-ce qu'on va avoir droit à trois appels dans un mois puis la quatrième va être facturée ou comment ça va marcher? Ça fait que ça aussi...
Puis l'autre question qui suit ce que Frédéric apportait tantôt, la grosse inquiétude aussi, c'est quand est-ce qu'on va être payées quand les CPE vont être comme abolis puis ça va devenir un bureau coordonnateur, puis, dans l'espace d'une nuit, tout va miraculeusement... les dossiers vont suivre puis go? Puis des places où il y avait 30 RSG, ils vont se ramasser avec 100 ou 150. Comment tout ça va jouer? Il y a énormément d'inquiétudes là-dessus. En tout cas, dans les parcs, les filles, ce qu'elles se demandent... parce qu'il ne faut pas se le cacher, ce n'est pas une petite jobine pour la plupart du monde, c'est un revenu substantiel; il y a beaucoup de femmes monoparentales qui exercent cette profession, puis elles ont besoin de ce revenu-là. Ça fait que, de se faire dire comme ça: Bien, je vais-tu avoir ma paie, je ne l'aurai-tu pas? Là, c'est très insécurisant pour les RSG.
La Présidente (Mme James): Alors, merci. Mme Fortier, Mme Bédard, Mme Carbonneau, Mme Lafond, Mme Condrain et Me Tremblay, je vous remercie pour votre présence et votre présentation de la part de l'Alliance des intervenantes en milieu familial. Et je demanderais maintenant aux représentants de l'Association québécoise des centres de la petite enfance de prendre place. Merci.
(Changement d'organisme)
La Présidente (Mme James): Bien, ils s'en viennent. C'est correct. C'est correct.
O.K. Alors, bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des centres de la petite enfance à cette commission. Je comprends que, Mme Potvin, vous êtes la porte-parole principale. Je vous demanderai, avant de commencer, de bien présenter les gens qui vous accompagnent. Je vous rappelle que vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Ensuite, nous allons procéder à un échange entre les parlementaires: un premier 20 minutes avec le côté ministériel et par la suite avec l'opposition officielle. La parole est à vous.
Association québécoise des centres
de la petite enfance (AQCPE)
Mme Potvin (Hélène): Alors, bien le bonjour et merci beaucoup d'avoir accepté de nous inviter. Alors, je suis accompagnée... Hélène Potvin, présidente de l'Association québécoise des centres de la petite enfance. Je suis accompagnée de Mme Johanne Roy, qui est vice-présidente de l'Association québécoise des centres de la petite enfance et aussi directrice générale du CPE La Chenille; Michel Lessard, qui est directeur aux relations de travail de l'AQCPE; également Mme Nancy Neamtan, qui est une pionnière et une experte dans le dossier, je dirais, des centres de la petite enfance mais de l'économie sociale, qui est le partenaire principal de l'AQCPE depuis de nombreuses années. Alors, voilà. Je suis accompagnée de ces trois personnes.
Peut-être, d'entrée de jeu, vous identifier... On ne fera pas le tour. Ceci n'est qu'un résumé de notre mémoire, qui va être déposé, d'ici la fin de la commission, avec une analyse article par article. Vous avez donc tout simplement une question, je dirais, de nos notes préliminaires et analyse préliminaire en regard avec le projet de loi n° 124.
L'AQCPE représente 700 centres de la petite enfance. C'est la plus grosse organisation de centres de la petite enfance du Québec, et évidemment nous constituons des acteurs centraux et de premier plan dans l'offre de services qui existe au Québec. Évidemment, nous sommes interpellés et directement touchés par le projet de loi n° 124 et les consultations qui l'entourent. Actuellement, nos membres, dans chacune des régions, font des consultations. Certains ont terminé, d'autres pas, d'autres vont terminer en début de semaine prochaine. Alors, c'est ce qui justifie notamment notre dépôt de notes et analyse préliminaires et également le fait de la vitesse de la commission parlementaire. On comprend bien que le projet de loi, qui a été déposé le 25 octobre... par la suite nous avons été informés de la commission, le 8 novembre, pour apprendre que nous avions une semaine pour présenter un mémoire d'un projet de loi qui n'est pas une modification simple de ce que nous avions mais une transformation majeure. C'est un échéancier très rapide, qui à notre avis n'a pas sa raison d'être, et c'est un échéancier qu'on retrouve également dans le processus concernant les règlements, et ça nous inquiète grandement.
Alors que le projet de loi n° 124 a été élaboré, à notre avis, oui, par écouter des gens qui ont des choses à dire, mais il n'y a pas eu de consultation, de travail réel, à notre avis, avec le principal réseau des centres de la petite enfance. Alors, pour nous, ça crée une difficulté que nous voulions énoncer.
n(16 h 50)n Évidemment, lors de l'annonce du projet de loi, beaucoup des éléments qui ont porté écho dans les médias portaient sur l'offre de services améliorée pour les parents: la garde atypique, la gestion des listes d'attente, l'étalement des horaires, etc. Nous sommes tous conscients qu'il aurait été possible de faire de simples modifications réglementaires, des ajustements nouveaux à des normes administratives, et accorder des budgets pour arriver à la même fin.
Un élément qu'on voudrait soulever, c'est le risque de créer des attentes très importantes, qui, en bout de ligne, ne pourront pas donner nécessairement, effectivement, dans les faits, les places qui peuvent être appréciées ou désirées par les parents. Évidemment, cet élément-là porte souvent écho un peu partout. On aimerait soulever par contre qu'il y a des éléments et des enjeux beaucoup plus importants dans ce projet de loi là. Non pas que je diminue l'importance de ce qui précède, mais par contre ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'il y a des enjeux importants, dans le projet de loi, dont on n'entend pas parler.
Premièrement, la question de la bureaucratisation de la garde. On s'en va vers une imposition d'une structure centralisée, qu'on appelle les bureaux coordonnateurs, qui amène l'enjeu de la taille des organisations partout au Québec, qui amène des pertes de liens de proximité, qui amène une rupture de lien de confiance qui est établi entre 14 000 responsables de garde familiale et 884 centres de la petite enfance, une diminution d'une présence significative sur le territoire, d'une présence concertée, un accent sur une valeur administrative de la gestion de la garde en milieu familial.
Deuxième point ? c'est un autre enjeu ? c'est celui de la diminution de la perte de pouvoir des parents. La première, bien, la nouvelle composition des conseils d'administration... en fait les nouvelles règles de sa composition diluent, pour nous, le pouvoir décisionnel des parents. On reconnaît avec difficulté, dans le projet de loi, l'expertise des parents administrateurs qui pourtant sont très capables et ont bien démontré leur grande capacité à faire l'administration des centres de la petite enfance. Ce sont eux, avec les gestionnaires, qui ont fait le développement d'un si grand nombre de places en si peu de temps. Je vous rappelle qu'avant la politique familiale, les très belles années, c'étaient 2 000 places développées. Nous avons roulé à 14 000 places par année. On voit très bien la capacité des parents de s'ajuster.
Un autre enjeu, c'est celui de la commercialisation des services de garde qui nous inquiète grandement. Pour nous, c'est une ouverture inquiétante aux entreprises. Plusieurs installations, plusieurs... un propriétaire va pouvoir maintenant également avoir plusieurs installations. Pour nous, ça nous inquiète, et on sait qu'au Canada, lors de l'implantation du programme national des garderies, c'était une inquiétude qui avait été manifestée: la venue des chaînes de garde comme nous avons vu en Australie.
Les bureaux coordonnateurs actuellement sont très centrés sur l'administration et moins sur le support et la qualité éducative. Ce qui nous inquiète également, c'est de voir arriver des frais de services au niveau des responsables de garde en milieu familial.
M. Bouchard (Vachon): ...
Mme Potvin (Hélène): Avant, on devait faire une offre de services pédagogiques, de soutien technique et professionnel, et maintenant c'est sur demande. Il y a donc là une inquiétude. Évidemment, si une entreprise devient bureau coordonnateur, également ça nous ouvre une grande inquiétude sur la commercialisation de la garde également en milieu familial.
Un dernier enjeu qu'on voulait soulever c'est celui de la diminution de la qualité au niveau de l'encadrement. Pour nous, il y a, dans le projet de loi, un clivage entre les deux modes de garde, la garde en installation et la garde en milieu familial. Il faut bien comprendre qu'au-delà des personnes, quand on parle, par exemple, combien de conseillères pédagogiques ça prendrait, ça va beaucoup plus loin que ça, le projet de loi. Le clivage des deux modes de garde amène la perte de transfert des expertises entre les deux modes de garde. On parle souvent de la conseillère pédagogique, mais on oublie aussi le personnel de l'installation qui peut parfois aider et supporter. On a vu de très beaux exemples, peut-être qu'ils ne sont pas partout dans la province, mais je pense qu'il faut s'appuyer sur les beaux exemples plutôt que de transformer.
Également, on en parle... on en a un petit peu abordé, tout à l'heure, c'est la question que le budget, pour la garde en milieu familial, est amputé de 50 %. Comment peut-on prétendre qu'il n'y aura aucun impact, à ce niveau-là, lorsque le budget est amputé à ce niveau-là? Je t'inviterais, Johanne, peut-être à poursuivre.
Mme Roy (Johanne): Oui. Alors, moi, je vous inviterais à prendre l'analyse préliminaire, en page 18, pour les besoins de la synthèse. Ensuite, avec la lecture que nous faisons, avec le projet de loi n° 124, nous passons d'une Loi sur les centres de la petite enfance à une Loi sur les services de garde. Donc, ce qu'on entend ou ce qu'on voit apparaître, c'est une loi davantage axée sur les structures, davantage axée sur les modes de garde. Et il y a un glissement aussi, au niveau de cette loi, où la notion de services de garde est davantage définie en fonction des besoins des réalités du travail, réalités qui sont justifiables mais peut-être pas au détriment des besoins des familles, des parents et des enfants. Alors, on entend ici par le mode de «garde atypique», qui peut convenir dans un contexte où les besoins sont plus importants par rapport à des parents qui travaillent, mais il ne faudrait pas oublier tous les besoins qui sont plus de nature éducation et mission éducative et sociale des centres de la petite enfance.
Ensuite, il y a aussi un glissement important dans la loi lorsque nous la lisons. On passe d'une notion de «parents utilisateurs et administrateurs de centres de la petite enfance», dans l'ancienne loi, pour voir apparaître la notion de «parents bénéficiaires de services» de garde. Alors, le parent... Ce qu'on voit, à l'intérieur de ça, c'est que l'esprit de la loi relègue le rôle ou le statut du parent à un statut de bénéficiaire. On dilue son pouvoir décisionnel, au sein des conseils d'administration, par la composition et par le pouvoir aussi que la ministre se donne d'édicter des règles de régie interne. Alors, nous sommes inquiets de cette définition.
Et ensuite il y a aussi apparition où l'État va définir les besoins, va définir les besoins mais au-delà en fait des besoins qui sont plus identifiés par rapport aux parents, capacité des parents de définir ces besoins. Donc, l'État risque, par la forme de la loi, de définir les besoins, en termes d'études et en termes d'analyses, au-delà des besoins qui peuvent être identifiés par les parents et la capacité qu'ont les parents à définir leurs propres besoins dans leurs collectivités et leurs communautés.
Nous passons aussi d'un «programme éducatif» à une «démarche éducative» qui sera imposée, par règlement ou par la loi, et nous passons aussi, nous voyons apparaître la notion de «subvention universelle». Nous sommes inquiets sur l'universalité des places. On introduit une notion, à l'intérieur de la loi, où les subventions vont être attribuées en fonction de places spéciales et de places non spéciales. Alors, ça nous inquiète sur comment va se développer ce mode de garde, et nous sommes aussi inquiets, à savoir est-ce que les parents en garde atypique auront droit au même traitement puis également aux places subventionnées au même titre que tous les autres parents, là, qui bénéficient de places spéciales?
Il y a aussi le concept... Nous passons d'un «concept intégré de services de garde éducatifs» à un «concept distinct de dispense de services en milieu familial et volet installation». Comme disait Hélène, la séparation des deux modes nous inquiète. Et aussi, également, d'un «réseau uni et regroupé sur la base de l'expertise en éducation petite enfance» à un «regroupement sur la base de structures et modes administratifs de services» de garde, c'est-à-dire qu'on a une vision plus administrative et plus en fonction de la structure et du mode de garde qui va être offert aux parents. Donc, c'est un clivage entre les deux modes.
Ce qui nous inquiète, c'est peut-être en fait l'apparition... On avait... on avait une concertation à l'intérieur... Oui? Alors, c'est ça.
Mme Potvin (Hélène): J'aimerais ça laisser la parole un petit peu à Mme Nancy Neamtan, puis, bien, Johanne, Johanne, tu pourras poursuivre tout à l'heure avec les questions.
Mme Neamtan (Nancy): Je m'excuse. Tant de choses à dire. Je voulais simplement dire, premièrement, que je ne suis pas ici pour représenter le Chantier de l'économie sociale, que je dirige. Les représentants viendront le 25 novembre, tel que prévu. Mais c'était... quand je suis à l'extérieur du pays, c'était la seule façon que j'avais de pouvoir me faire entendre devant cette commission.
Pourquoi tant insister pour témoigner devant cette commission parlementaire? Je vais être franche avec vous. Pour moi, ce projet de loi ? et tout le processus ayant mené à son dépôt ? constitue un des gestes politiques les plus inacceptables de ce que j'ai pu observer depuis fort longtemps. Et, devant un tel constat, je ne peux pas rester silencieuse, car ce projet de loi constitue non seulement un recul pour la société québécoise, mais aussi un affront direct au millier d'hommes et de femmes qui se sont battus, qui ont donné des heures, des journées et des années de leur vie pour construire un réseau de centres de la petite enfance qui fait envie de tous à travers le Canada et ailleurs dans le monde.
n(17 heures)n La réforme que propose la ministre suggère un virage de 180 degrés par la simple prestation de services de garde, voire de services de gardiennage, et ouvre la voie à la commercialisation de ces services. D'un seul coup, toutes les composantes du projet social et éducatif portées par les CPE depuis 1997, qui ont assuré leur succès, sont évacuées et avec comme seul prétexte une économie d'échelle guidée à mon avis par une vision dogmatique.
À travers ce projet de loi, je crois que la ministre s'attaque à ce que nous avons de plus précieux au Québec: un projet mobilisateur qui permet à la société québécoise d'offrir ce qu'elle a de mieux aux générations actuelles et futures. Comme des dizaines de milliers d'autres personnes, je ressens une profonde tristesse et une très grande colère devant ce projet que la ministre semble vouloir imposer à tout prix pour les raisons que je n'arrive pas à deviner. Mais, si je ne peux pas comprendre pourquoi la ministre s'attaque avec autant d'ardeur à un acquis collectif qui s'est construit pendant 30 ans, je vais profiter de ces quelques minutes pour vous donner les 10 raisons pourquoi ce projet de loi à mon avis est irrecevable et pourquoi il faut le rejeter.
Première raison. Je fais partie de ceux et celles qui se sont mobilisés, dans les années soixante-dix, et qui ont contribué à la mise en place des garderies populaires. Ce modèle de prise en charge par les parents et la collectivité est à l'origine des CPE. Et, si nous considérons que ce modèle est encore la meilleure forme d'organisation, ce n'est pas par nostalgie: toutes les études internationales démontrent la supériorité de ce type de services de garde. Et ce constat ne date pas d'hier; je me permets de vous rappeler d'ailleurs que le plan Bacon, mis en place par un gouvernement libéral, dans les années soixante-dix, donnait priorité aux garderies sans but lucratif.
Deuxième raison. Je fais partie des parents québécois qui ont vécu l'expérience de chercher désespérément des services de garde de qualité pour leurs enfants. Mon mari et moi avons élevé quatre enfants et avons vu la différence entre les garderies sans but lucratif où nous avions notre mot à dire, au travail au noir qui était très présent, ou à la garde en milieu familial sans supervision où nous pouvions simplement espérer que notre enfant se retrouve entre bonnes mains. Penser que la ministre veut faire revivre cela aux parents en créant des mégastructures qui encadreront en moyenne 700 enfants tout en sabrant dans les ressources de soutien pédagogique dépasse ma capacité de compréhension en tant que mère.
Troisièmement. Je n'arrive pas à concevoir que la ministre puisse mettre en péril ce projet merveilleux qui a fait consensus lors du Sommet sur l'économie et l'emploi en 1996. En tant que présidente du groupe de travail sur l'économie sociale, j'ai eu le privilège de présenter la proposition de concertation interrégionale des garderies du Québec en vue de créer les CPE. Nous avons été témoins des nombreuses étapes ayant mené à la construction du réseau, à travers la mobilisation massive des parents, travailleuses et communautés de partout au Québec. Presque 10 ans plus tard, c'est avec fierté que je constate le progrès réalisé. Bien sûr, tout n'est pas parfait, mais est-ce une raison suffisante pour dénaturer totalement ce projet?
Quatrième raison. Je ne peux pas partager le bilan négatif qu'utilise la ministre pour défendre son projet basé sur des anecdotes à défaut d'études scientifiques... À l'automne 2002, le Chantier de l'économie sociale a mené un processus de bilan cinq ans après l'adoption de la politique familiale. Pour ce faire, nous avons organisé une tournée dans 16 régions, durant laquelle nous avons tenu des assemblées publiques et échangé avec plus de 1 300 personnes, parents, travailleuses, élus locaux et autres. J'ai constaté jusqu'à quel point ce réseau de CPE était indispensable non seulement pour les parents et enfants, mais pour une foule d'acteurs locaux et régionaux, d'intervenants dans les domaines de la santé et services sociaux, éducation et bien d'autres. Encore une fois, tout n'était pas parfait, c'est bien sûr, mais personne ne questionnait la mission éducative et le projet social à la base du réseau.
Cinquième raison. Je considère que le projet de loi n° 124 trahit les promesses du Parti libéral. En 2003, j'étais ravie de voir qu'un des sujets de la campagne électorale concernait les centres de la petite enfance. Les critiques du Parti libéral se résumaient à dire que le développement ne se faisait pas assez vite. Comme citoyenne, j'ai pensé que les CPE étaient entre bonnes mains, que, peu importent les résultats, je n'avais pas de raison de m'inquiéter. Comment donc justifier ce projet de loi qui vide le réseau de sa mission fondamentale?
Sixième raison. Je n'accepte pas que la ministre démolisse un acquis qui a donné tant d'espoir aux intervenants préoccupés par la petite enfance non seulement au Québec, mais à travers le Canada. Je sais que mes collègues, dans les autres provinces, seront abasourdis par ce projet de loi. J'ai eu le privilège de prendre la parole devant 800 personnes réunies à Winnipeg, l'année dernière, et de pouvoir constater à quel point le modèle québécois faisait l'envie du reste du Canada. Comment expliquer, surtout après la récente entente fédérale-provinciale que nous saluons, que la ministre se prépare maintenant à vider le réseau de sa portée éducative et sociale?
Septième raison. Je sais que les conséquences de ce projet de loi seront de réduire l'accessibilité pour des enfants ayant des besoins particuliers. Sans soutien pédagogique, il est évident que les responsables de services de garde ne pourront assumer les défis liés à l'intégration et à la prise en charge de ces enfants. Nous nous privons ainsi comme société d'un outil puissant d'intégration. Le coût individuel et collectif, à moyen et à long terme, n'a certainement pas été calculé.
Huitième raison. Je considère que ce projet de loi nous prive d'une possibilité inestimable de faire de la vraie prévention en santé et services sociaux. Des partenariats de plus en plus développés entre le réseau de santé et services sociaux et les CPE au niveau local, l'entente-cadre, signée par le ministère de la Famille, de la Santé, l'Association des CLSC ainsi que l'Association québécoise des centres de la petite enfance seraient mis en péril. Pourtant, toutes les études internationales démontrent que le dépistage précoce constitue un moyen formidable pour prévenir des problèmes sociaux et logiquement pour réduire des coûts. Est-ce que la ministre se rend compte des impacts de son projet de loi sur une question aussi stratégique?
Neuvième. Je considère que l'ensemble de ce processus menant au dépôt de ce projet de loi a été caractérisé par un refus de dialogue, de la part de la ministre, et que les résultats en témoignent. Personne ne peut ou ne veut prétendre que tout est parfait dans le réseau des CPE, mais pourquoi avoir refusé systématiquement toute proposition venant de l'AQCPE pour trouver des solutions réalistes? Il me semble que, si la ministre avait comme but d'améliorer les services de garde au Québec, elle avait un devoir de travailler d'une manière constructive et concertée avec les principaux intéressés afin de trouver des solutions.
Mon métier, depuis 20 ans, a été de construire des passerelles entre les entreprises, des syndicats, des organismes communautaires, les élus, les milieux sociaux et bien d'autres, dans les situations fort complexes, afin de revitaliser les quartiers, créer de l'emploi, développer l'entrepreneurship collectif et social, réduire la pauvreté et contribuer au développement des collectivités à travers le Québec. Mon expérience a démontré qu'il est toujours possible, quand la bonne volonté y est, de trouver des solutions à travers la concertation et le dialogue. Au nom des enfants et parents du Québec, pourquoi n'avons-nous senti aucun véritable effort en ce sens? Pourquoi la confrontation et le refus de discussion?
La dernière raison pour rejeter ce projet de loi est de nature très personnelle. Depuis un peu plus d'un an, j'ai eu le privilège de devenir grand-mère, et, comme toute grand-mère, je réfléchis à l'héritage que nous laissons à nos petits-enfants.
Le réseau des CPE, issu d'une réflexion en profondeur sur le besoin des familles, résultat probant d'un réel partenariat entre le milieu, les élus ainsi que la volonté populaire...
La Présidente (Mme James): Mme Neamtan, pardon, c'est pour vous aviser qu'il vous reste à peu près 30 secondes.
Mme Neamtan (Nancy): Oui, j'ai fini ? représente l'une des choses dont je suis la plus fière comme Québécoise. Pouvoir léguer ce réseau à mes enfants et petits-enfants, en ayant contribué, comme des milliers d'autres, à son éducation est une source de grande fierté. Il est inconcevable, pour moi, qu'on puisse détruire cet héritage bâti.
Voilà donc les 10 raisons qui m'amènent devant cette commission pour vous demander de faire le seul choix logique dans les circonstances: refuser le projet de loi, se remettre de nouveau autour de la table, dans un esprit concerté de recherche de solutions réalistes qui nous permettront de répondre collectivement, le mieux possible, aux besoins des enfants et de leurs parents. Merci.
La Présidente (Mme James): Alors... S'il vous plaît!
Des voix: ...
La Présidente (Mme James): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous rappellerai qu'il est interdit de faire des manifestations d'approbation ou de désapprobation face aux présentations, en vertu du règlement de l'Assemblée nationale.
Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Théberge: Merci, Mme la Présidente. Mme Neamtan, je veux tout de suite rétablir quelque chose. Ce n'était pas le seul moment où vous pouviez venir. Vous nous aviez fait savoir que vous ne pouviez être présente le 25, de mémoire. On vous a contactée pour vous offrir la place d'un autre groupe, cet après-midi, qui s'était désisté, où on devait faire un remplacement, et vous avez refusé. C'est votre choix, c'est... Je ne demande pas de réponse, c'est votre choix, c'est votre droit, mais je n'aime pas que vous laissiez entendre qu'on ne peut pas vous entendre autrement.
Mme Potvin, je suis un petit peu surprise. Je lisais le préambule, dans votre document, en préliminaire, notes préliminaires, du fait que vous disiez que vous n'avez pas eu le temps ni de consulter ni de contacter vos membres et pas prêts pour déposer un rapport.
Je vais juste vous rappeler que, nous, «nous» incluant les gens de mon ministère, vous avons rencontrés et contactés et consultés à plusieurs reprises, depuis deux ans, sur tous les sujets qui touchent les services de garde, parce que nous avons beaucoup questionné, réévalué, encouragé et fait en sorte de maintenir et d'améliorer ces services de garde là. Vous avez été consultés à plusieurs reprises, vous avez été même auprès de vos membres à plusieurs reprises pour revenir avec des commentaires ou des suggestions que vous avez transposés à notre ministère, je vous rappelle.
Vous saviez, depuis le printemps dernier ? c'est moi qui vous l'avais dit ? que la commission déposerait un projet de loi cet automne. Ce n'était pas une surprise, on avait d'ailleurs demandé à toutes nos associations de faire des contributions à nos travaux depuis l'automne 2004. Je suis un peu surprise que vous disiez que vous n'avez pas eu le temps dans le fond de préparer un document, quoi que vous en avez quand même préparé un, alors...
n(17 h 10)n Et j'ai dit que cette commission parlementaire là, je la ferais dans un esprit d'ouverture et un esprit constructif également. Je vais prendre soin des mots que je vais dire, mais je vais vous dire que la stratégie de communication que vous avez mise en place pour saborder ce projet de loi là ne me démontre pas vraiment, honnêtement, je pense, une ouverture. Je suis déçue, je suis déçue parce que j'attendais autrement de vous, et je veux avoir des précisions.
Vous avez fait des commentaires dans votre Notes et analyse préliminaires, et, moi, je me demande à certains moments où est-ce que vous prenez l'information. Vous parlez entre autres d'un fardeau pour les parents par rapport à la garde atypique. Voulez-vous m'expliquer comment et où, dans le projet de loi, vous avez lu qu'il y aurait une tarification variable en fonction du mode de garde, qu'il y aurait des frais de service pour les responsables en milieu familial?
Mme Potvin (Hélène): Premièrement, au niveau de la consultation, Mme Théberge, la consultation qui a amené le lien avec le projet de loi, je ne sais pas si on se rappelle, c'était il y a plus d'un an et demi où les regroupements ont été interpellés, différents... les CRE, etc., ont été interpellés pour identifier des modifications que les gens souhaitaient au niveau des normes, au niveau de la loi, parce que vous étiez en train d'y travailler, ce à quoi nous n'étions pas en désaccord.
Concernant les bureaux coordonnateurs, effectivement, cet été, nous avons été interpellés, et, à partir du moment où on a montré une certaine résistance... ou une résistance certaine, plutôt, au niveau des bureaux coordonnateurs, les travaux, pour nous, ont cessé. Et beaucoup des éléments que nous voyons dans le projet de loi, nous les avons appris malheureusement par le cadre des médias lors des interventions où on a vu poindre la question...
Notamment, juste la question des conseils d'administration, on n'a jamais été consultés formellement à cet égard sur la composition. Dans notre mémoire, nous avions fait des recommandations de suggérer le fait d'avoir des membres de la communauté au sein des conseils d'administration. Mais ce que je veux juste dire à cet égard, c'est qu'on n'a pas eu le temps de consulter, au niveau d'article par article, où on a voulu que nos membres puissent prendre le temps de les regarder un par un, parce qu'on n'est pas sur une petite modification de la Loi des centres de la petite enfance, on est sur, je dirais, une refonte complète d'une nouvelle loi.
Également, au niveau de la présentation du projet de loi, vous n'êtes pas sans savoir que, dans un grand nombre de régions, c'est le ministère de la Famille et de l'Enfance qui est venu présenter le projet de joie... le projet de joie... voyons! le projet de loi aux gens pour leur permettre de se faire une tête, de se faire une idée; alors ça, je pense que c'est important que les gens le sachent. Même si ça ne s'est pas fait partout, ça s'est fait dans un grand nombre de régions, où c'est le ministère qui est venu présenter, informer les gens sur les cadres de la loi, et ce sont les gens qui se sont faits une tête à cet égard.
Mme Théberge: Merci...
Mme Potvin (Hélène): Au niveau de la garde atypique, au niveau de la tarification variable, dans les articles de loi, on voit notamment apparaître non plus une question d'âge, juste de classe d'âge, mais une classe... un élément au niveau du mode, du mode de garde. Et là, à ce moment-là, on est en droit de se questionner sur: le PCR sera-t-il pareil par rapport à ça? Également, lors d'entrevues dans les médias, une question déjà a été posée à l'effet de la garde atypique, et la réponse a été qu'il pourrait y avoir des frais différents pour la garde atypique.
Nous sommes inquiets. Ce qu'on manifeste, c'est notre inquiétude à cet égard, parce que les gens qui font de la garde atypique sont souvent sur des horaires non usuels, c'est souvent de «petits» travailleurs ? je sais que le terme n'est pas bon, là, j'ai un trou de mémoire ? et ça nous inquiète grandement parce qu'on ne voudrait pas voir apparaître, dans le réseau des services de garde, au Québec, une différenciation entre le chanceux parent qui travaille de jour avec une place à 7 $ et le parent de soir, où certaines normes pourraient se régler et se financer de façon différente.
Également, au niveau des services... des frais de service, au niveau des RSG, je suis tout à fait d'accord avec vous, ça ne fait pas partie du projet de loi. Ce que nous avons dit dans notre présentation, c'est notre grande inquiétude à cet égard, quand on sait qu'au niveau de ce qui précédait, en 1997, c'étaient les agences de garde en milieu familial, et, bien que le réseau des agences n'était pas parfait, bien que le réseau des centres de la petite enfance n'était pas parfait, hein, on évolue, hein, vers le haut la question de la tarification, au niveau des responsables, était très présente, à cette époque-là, où il y avait une tarification, on entendait beaucoup parler de services plus obligatoires, chose qui a tombé, au fil des années, notamment avec l'implantation, au Québec, des centres de la petite enfance.
Mme Théberge: Ce que je peux vous dire pour rassurer les gens de votre groupe, c'est qu'au niveau du soutien aux responsables en service familial, le «sur demande» répondait à une demande des groupes qu'on réévalue de façon à ce que ce soit bien compris. Le soutien va être là ? de proximité ? aux responsables en milieu familial, il va demeurer un soutien, et continu et sur demande, selon évidemment les besoins spécifiés.
Au niveau de la mission éducative, vous dites que, dans le projet de loi, vous pouvez déduire que, maintenant, tout ce qui est retenu, c'est la sécurité des enfants et non leur développement. Je vais vous lire l'article 5: «Afin d'assurer la prestation de services éducatifs, le prestataire de services de garde prévoit, dans l'élaboration et l'application de sa démarche éducative, des activités qui ont pour buts de favoriser le développement global de l'enfant en lui permettant de développer toutes les dimensions de sa personne notamment sur le plan affectif, social, moral, cognitif, langagier et moteur, et d'amener progressivement l'enfant à s'adapter à la vie en collectivité et de s'y intégrer harmonieusement.
«La démarche éducative comprend également des services de promotion et de prévention visant à donner à l'enfant un environnement favorable au développement de saines habitudes de vie et de comportements qui influencent de manière positive sa santé et son bien-être.» Alors, moi, j'aimerais comprendre pourquoi vous dites que c'est la sécurité qui est retenue et non leur développement, quand au contraire on met tout en place justement, dans ce projet de loi là, pour faire encadrer les paramètres du volet éducatif qui n'y étaient même pas dans l'ancienne loi.
Mme Potvin (Hélène): De voir apparaître, dans le projet de loi, le terme «éducatifs», pour nous, évidemment, on trouve ça intéressant, parce qu'effectivement on a un programme éducatif, mais on ne le voyait pas apparaître au niveau de la loi.
Toutefois, par contre, nonobstant cet aspect-là, ce qu'il faut bien comprendre, c'est notre grande inquiétude au niveau de la baisse à cet égard. C'est quand même qu'il faut comprendre que, si je regarde au niveau du réseau dans son entier, le fait d'avoir les deux modes de garde, ça a permis d'avoir, je dirais, un transfert d'expertise, d'un mode à l'autre, qui fait partie du volet éducatif des services de garde, qui est très important et qui doit continuer. Nous avons vu des défis, lancés par des éducatrices en milieu familial à des éducatrices en installation, qui ont porté fruit, et vice versa.
Également, quand on regarde au niveau des subventions, du financement ? vous l'avez abordé tout à l'heure ? lorsqu'on regarde l'enveloppe de 110 millions pour la gestion de la garde en milieu familial, j'aimerais vous rappeler que ? et vous le savez, là ? la gestion d'un centre de la petite enfance, depuis 1997, tous les paramètres que le gouvernement a mis en place, ce n'est pas le centre de la petite enfance, ce sont les paramètres que le gouvernement a mis en place, également ces structures de soutien et de gestion, que le gouvernement a lui-même proposées aux centres de la petite enfance qui l'ont mis en place, c'est une gestion globale. Que j'aie une installation, deux installations du milieu familial, c'est une gestion globale qui permet, par exemple, d'avoir des superviseurs pédagogiques, oui, qui s'occupent de la garde en milieu familial, qui offrent les services, mais également qui peut peut-être supporter l'intégration d'un enfant qui présente des besoins particuliers en installation. On a vu cet élément-là, et même, c'était recommandé très chaudement par le même ministère.
Quand on regarde pourquoi nous partageons une grande inquiétude à l'égard de la diminution au niveau pédagogique, c'est que, dans la compression au niveau de la garde en milieu familial, on part de 110 millions. Si effectivement on fait le constat qu'il y a un montant de 30 millions, que vous avez vous-même présenté, 30 millions qui finalement était utilisé pour la gestion de l'installation... Et on ne dit pas... Quand on aborde cette question-là ? je l'aborde très franchement ? ce n'est pas qu'on volait de l'argent pour la garde en milieu familial, on offrait les services demandés et nécessaires. Par contre, ça permettait à l'installation d'avoir des services pédagogiques. Il y avait un transfert d'expertise, donc une mutualisation d'expertise, ce qui est très intéressant. C'est une meilleure utilisation des fonds publics quand on peut faire bénéficier deux modes de garde sur des sommes allouées dans une gestion globale. Quand on regarde le financement, si j'enlève, du 110 millions, 30 millions, il me reste 80 millions. De ce 80 millions là, l'année prochaine, ce qu'on nous parle, c'est qu'il y aura 60 millions de disponibles pour la gestion de la garde en milieu familial. Il y a donc encore là une compression de 20 millions. Alors, comment peut-on penser, croire, prétendre ? pour nous, c'est très difficile de l'imaginer ? que, pour ce qui va demeurer du support et de l'encadrement, pour le milieu familial... la même chose que ce qui est actuellement en place tout simplement? Alors, c'est des éléments sur lesquels on a une grande, je dirais, inquiétude.
Mme Théberge: Avant de passer la parole aux collègues qui ont des questions à vous poser, quel serait le taux d'encadrement que vous jugeriez, vous, acceptable, en quelques secondes?
Mme Potvin (Hélène): Le taux d'encadrement qu'on juge acceptable, selon les paramètres que nous voyons dans le projet de loi, je vais vous faire un petit élément avant de donner le chiffre exact.
n(17 h 20)n Actuellement, dans le projet de loi, on voit apparaître quelque chose de très nouveau: on va avoir des reconnaissances de responsables de garde en milieu familial qui vont avoir du financement de places à contribution réduite pour, par exemple, si elle a choisi tous les enfants ou si le bureau coordonnateur a l'espace, là, tous ses enfants. On va avoir également la reconnaissance de responsables de garde en milieu familial qui vont avoir un certain nombre d'enfants en PCR ? places à contribution réduite ? mais également d'enfants qui vont être financés, dont le parent va défrayer un coût. Également, on voit apparaître la possibilité de faire une reconnaissance de responsables de garde en milieu familial, sans place à contribution réduite, qui vont finalement pouvoir charger des frais aux parents.
Quand je regarde ce projet-là, quand je regarde le fait qu'on pourrait avoir jusqu'à 1 000 places de gérées, qu'on peut avoir 200 RSG en milieu familial, on peut avoir donc tout autant... quand je prends 1 000, hein, c'est 1 000 familles... Il faut bien comprendre que ça, il y a des enfants à temps partiel, donc on augmente, il y a là une croissance assez importante de gens, au niveau de la garde en milieu familial, d'enfants, de parents, de familles, de besoins.
Donc, évidemment, quand je regarde le projet de loi, je suis obligée de vous dire: Ça va dépendre d'un grand nombre de paramètres. Actuellement, ce qu'on vivait dans notre milieu, le ratio de 1-15 était très intéressant, avec la jonction des deux modes, O.K.? Mais, quand je regarde le projet de loi, Mme Théberge, je ne suis pas capable de prendre les mêmes paramètres d'analyse parce qu'on voit apparaître des éléments qui font en sorte que les bureaux coordonnateurs deviennent des entités qui gèrent beaucoup de garde en milieu familial.
Et je pourrais ajouter à cela ? et je ne sais même pas si ça fait encore partie des travaux ? il y a des travaux qui ont été faits aussi en suggérant l'annualisation des places. Je m'explique. L'annualisation des places: il y a, dans les services de garde qui sont fermés dans certaines périodes, exemple des éducatrices en milieu familial qui prennent des congés, des vacances. Pour avoir un taux de fréquentation très élevé dans mon année, je peux en reconnaître un peu plus. Il y a des journées où j'ai plus de responsables, mais il y en a d'autres, j'en ai moins. J'annualise, woup! je ne dépasse pas mon permis. On ne sait pas où on est rendus à cet égard-là.
Mme Théberge: Excusez-moi. La question portait juste sur le ratio, peut-être réfléchir...
Mme Potvin (Hélène): O.K. Bien, c'est ensemble. Excusez-moi. Excusez-moi.
Mme Théberge: O.K. Parce que je sais qu'il y en a qui ont d'autres questions, alors je voudrais laisser la parole.
Mme Potvin (Hélène): O.K.
Mme Théberge: Et, peut-être pour votre réflexion, tout à l'heure, les représentantes de Montérégie parlaient de un responsable par 38, si j'ai bien compris ce qu'ils ont dit. Je vais juste m'assurer, je vais revérifier sur le verbatim, parce que j'avais ça puis je voulais juste vérifier parce que...
Mme Potvin (Hélène): ...compartimenté, généralement, ce qu'on va avoir.
Mme Théberge: O.K. Parfait. Merci. Je vais passer la parole à...
La Présidente (Mme James): M. le député de Roberval, allez-y.
M. Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Alors, mesdames, monsieur, bonjour. Mes premiers mots d'abord vont être pour Mme Neamtan, et, lorsque je regarde la réaction des gens dans la salle, je ne suis pas certain que je vais avoir des applaudissements aussi.
Mais on a beaucoup de points en commun, dont un, on aime les enfants. Mme Neamtan, je vous entendais, tout à l'heure... Puis on a fait des batailles ensemble, il n'y a pas tellement longtemps, et je pense qu'on avait, on avait comme objectif de faire avancer, de faire avancer le Québec, de faire avancer les organisations pour lesquelles ont décidait de se battre.
Vous avez quatre enfants, j'ai quatre enfants. Vous avez connu des différents services de garde, j'ai connu des différents services de garde, du privé à aller aux CPE, aux services de garde qui ont passé à la transition depuis 1992. Et la seule différence que je pense qu'on a, cet après-midi, puis avec le projet de loi n° 124 ? ce matin, on a entendu différents intervenants qui sont venus nous faire part de leurs positions ? c'est le changement.
Je me souviens, moi, il n'y a pas tellement longtemps, lorsqu'on a étudié le projet de loi n° 31, qui est devenu... on parlait de la sous-traitance, à ce moment-là, il y avait mon ami Painchaud, de la fédération des policiers de Montréal, qui était venu se déchirer la chemise ici, en commission parlementaire, qui avait annoncé l'apocalypse parce qu'on était en train de faire des changements. Rappelez-vous, rappelez-vous les modifications qu'on a faites avec le regroupement. Je comprends que ça n'a peut-être pas de rapport, mais la réaction est la même.
Rappelez-vous, lorsqu'on a fait les modifications dans le domaine de la santé, lorsqu'on a voulu faire des regroupements pour aller chercher une meilleure efficacité pour être en mesure d'offrir des meilleurs services à notre population, comment la réaction était contre, parce qu'on allait mettre à feu et à sang le Québec.
Qu'est-ce qu'on constate aujourd'hui? C'est que le système de santé est en meilleure position qu'il ne l'a jamais été auparavant. Le système de garde dans lequel on est en train de travailler, mesdames, bien sûr que, lorsqu'on regarde ce qui a été accompli jusqu'à maintenant, il y a eu des bons pas qui ont été faits. Mais maintenant, comment on peut arriver, à l'intérieur des paramètres que l'on connaît, à l'intérieur des limites que nous avons, en termes financiers, bien sûr, mais en termes de services qu'on veut offrir à notre population, comment on peut arriver à faire des changements qui vont nous permettre de continuer d'avancer? Puis l'objectif que vous poursuivez, c'est le même qu'on poursuit: c'est de s'assurer qu'en quelque part on puisse offrir encore des bons services à notre population qui va pouvoir continuer d'avancer.
Dans ce contexte-là, j'ai beaucoup de difficultés, lorsque vous parlez, entre autres, par rapport aux services qui peuvent être offerts aux enfants en difficulté. Vous sautez tout de suite à la conclusion que le fait d'être regroupés, le fait de mettre en place des organisations qui vont pouvoir faire, je dirais, une meilleure synergie des besoins... Parce que, lorsqu'on regarde les gens qui ont une formation pour venir en aide aux enfants qui sont en difficulté, il en manque sur le territoire; on ne se contera pas de peurs, on ne se barre pas les pieds là-dedans, il en manque. Alors, comment on peut arriver à mettre ces services-là en commun pour qu'on puisse offrir des meilleurs supports à ces jeunes-là qui en ont besoin? Puis Dieu sait que je sais de quoi que je parle, parce qu'il y en a qui en ont besoin, des services, puis effectivement c'est donc difficile de trouver des capacités puis des outils puis des personnes pour les aider.
Comment pouvez-vous arriver puis être réfractaires, tout de suite, à ce changement-là, aux modifications qu'on veut apporter pour s'assurer qu'en quelque part nos enfants puissent retirer des bénéfices, nos enfants puissent continuer d'avoir des services de garde de bonne qualité, mais avec tous les outils qui vont leur permettre de pouvoir continuer de grandir, mais en même temps en fermant toute possibilité au changement?
Il y a des choses que j'ai beaucoup de difficultés à comprendre, et, lorsque je vous entends faire votre présentation, oui, je comprends, vous êtes contre les changements que nous voulons apporter, mais... Écoutez, je regardais, cette semaine, la lettre qui avait été envoyée par l'association régionale... moi, je viens de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, la lettre qui avait été envoyée, par votre association régionale, à la conférence régionale des élus, pour les informer sur le projet de loi n° 124. Ce n'était pas pour les informer sur le projet de loi n° 124, c'était pour leur dire de quelle façon il fallait qu'on soit contre le projet de loi n° 124, pour toutes sortes de raisons, et souvent ce n'étaient pas des raisons qui étaient justifiées, là, il ne faut pas se conter de peurs, là. Dans ce contexte-là, comment peut-on arriver... Vous mentionnez qu'il faut qu'on se rassoie puis qu'on parle. Vous êtes là puis on est là, comment on peut arriver à faire en sorte qu'on puisse s'entendre?
Mme Neamtan (Nancy): Bien, moi, je pense que la première chose à dire, c'est qu'il y a... en tout cas je pense que l'Association des CPE l'a dit, tout le monde l'a dit, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'amélioration à faire, mais c'est dans le processus et les démarches.
Moi, je suis témoin, depuis au moins un an, de toutes les inquiétudes, tous les bouleversements, et Dieu sait que je ne suis pas quelqu'un qui est contre les changements, et j'ai pris beaucoup de risques dans ma vie, mais j'ai rarement vu un processus où est-ce que cette absence de dialogue, d'essayer de faire des compromis sur des questions fondamentales, parce qu'on touche des questions fondamentales...
On touche, par exemple, moi, comme présidente chargée d'économie sociale, l'enjeu des parents. Tu sais, on entend dire: Bien, les parents, tu sais... il y a des questions qui permettent une mise en tutelle, de même, sans condition dans cette loi-là. Comment les parents ressentent ça, de se faire dire qu'ils ne sont pas capables puis que la ministre ou le ministère peut se donner n'importe quelle façon de venir intervenir? Comment les gens peuvent ressentir quand... bien, je pense qu'on les a entendus, d'entendre parler des bureaux de coordonnateurs avec tous les bouleversements. Qu'il y ait des changements, bien sûr il y a des changements, bien sûr il faut faire des choses autrement et... en tout cas je crois que vous me connaissez assez pour savoir, mais le processus dans lequel ça s'est fait fait juste semer l'inquiétude, l'incompréhension. Il n'y a pas de processus. C'est pour ça que je ne disais pas qu'il n'y a pas de changement et d'amélioration; tout le monde le reconnaît. Mais est-ce qu'on peut s'asseoir... Si ça prend un médiateur ? ça en prendrait bien un ? mais que les gens s'assoient, parce que sinon ça va... C'est qui ça va affecter? Ça va affecter les enfants. Ça va affecter les parents. Ça va affecter la qualité... Ça ne peut pas faire autrement qu'il y ait tant d'inquiétudes.
La deuxième chose, c'est qu'il y a des conséquences, je pense, qui n'ont pas été évaluées. Moi, j'ai eu des contacts avec les gens du ministère de la Santé, des gens dans le monde du milieu... qui travaillent auprès des personnes handicapées, les gens sont extrêmement inquiets; inquiets, par rapport au projet original de prévention de dépistage précoce, de toutes ces questions-là. Est-ce que ces conséquences ont été mesurées? D'après ce que j'entends, je crois que non. Et certainement il faudra prendre le temps.
Alors, de dire qu'il n'y a rien à changer, non, ça, je suis d'accord avec vous. Il ne faut jamais être contre le changement, je pense qu'il n'y a personne qui est contre le changement. Mais il y a des questions de principe, et des questions de respect, et questions de démarche, et c'est là-dessus où...
La Présidente (Mme James): Alors, merci, Mme Neamtan. Malheureusement, le temps est écoulé de ce côté-ci de la table. Je vais maintenant céder la parole au porte-parole officiel. M. le député de Vachon, la parole est à vous.
M. Bouchard (Vachon): Mme Neamtan, est-ce que vous voulez continuer votre phrase?
Mme Neamtan (Nancy): Non, non, ça va.
M. Bouchard (Vachon): Bon. Le député de Roberval invoquait, tout à l'heure, l'expérience de la transformation du réseau, dans le domaine de la santé, comme un exemple extraordinaire de qu'est-ce qu'on pouvait entreprendre, quand il n'y avait pas de résistance au changement, puis qu'il n'y avait pas lieu de résister au changement. Moi, je vous suggère de regarder les données des sondages, là: 70 % des Québécoises et des Québécois...
La Présidente (Mme James): S'il vous plaît!
Des voix: ...
M. Bouchard (Vachon): ...70 % des Québécoises et des Québécois...
Des voix: ...
La Présidente (Mme James): S'il vous plaît!
M. Bouchard (Vachon): ...non simplement se montrent insatisfaits du gouvernement, mais ils se montrent aussi au même niveau insatisfaits de ce qui se passe dans le domaine de la santé.
Des voix: ...
n(17 h 30)nM. Bouchard (Vachon): Alors, voyez-vous, Mme la Présidente, je pense que... la démonstration que vient de faire le député de Roberval d'attribuer à nos invités une incapacité de s'adapter aux changements comme seule réaction à leur présentation indignée... Mme Neamtan était fâchée, indignée et triste dans sa prise de position. La seule réaction qu'il a eue, c'est de dire que c'étaient des gens qui étaient rébarbatifs au changement. Je pense que c'est une grande partie du problème que nous aurons vécu, dans l'élaboration, l'étude et éventuellement, je n'espère pas, la mise en place de 124. Et j'espère qu'on n'entendra plus ce type d'intervention qui m'apparaît, à tout le moins, non respectueuse des sentiments et des idées qui animent nos invités.
Ceci dit, Mme la Présidente, j'aimerais entendre Mme Neamtan, un peu plus longuement, sur cette question de la participation des parents et de la participation des communautés. Nous partons d'un environnement où nous avons 1 002 CPE dont 800 ou quelques ou 700, dans l'organisation de l'AQCPE, implantés localement et régionalement, responsables des services de garde à proximité, chargés, avec les CRE et antérieurement d'autres organisations, de l'analyse des besoins, à la fois en termes de milieu familial et en termes d'installations, aussi bien en termes de quantité que de localisation dans l'offre de services.
Mme Neamtan faisait référence à toute cette question de la participation des communautés et des parents, dans l'analyse des besoins et l'élaboration et l'offre de services, en même temps que de leur rôle dans l'aménagement des services de garde eux-mêmes et leur qualité. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus parce que ça a l'air être une inquiétude authentique, très bien ressentie, en tous les cas, et très bien communiquée. On sent qu'il y a quelque chose là de très important.
Et, Mme Neamtan, vous avez beaucoup d'expérience dans la mise sur pied de projets qui accueillent les forces des communautés, leur capacité de s'impliquer et de développer des projets. Le seul fait qu'on a réussi à développer, à une vitesse grand V, tant de places dans les milieux familiaux et dans les installations fait la preuve que ces communautés-là sont capables ? et ces parents ? de grandes choses. Qu'est-ce qui, dans le projet de loi, Mme Neamtan, vous inquiète tant?
Mme Neamtan (Nancy): Bien, à cet égard-là, je pense qu'effectivement, là, moi, c'est le message qui est envoyé aux parents, de dire que, tu sais, qui donne... dans le fond qui ne clarifie pas l'autonomie des centres de la petite enfance et les conseils d'administration. Bon, la présence... et je pense que Mme Potvin l'a mentionné et d'autres... de dire qu'il y a des gens de la communauté sur les conseils d'administration, c'est une très bonne chose, puis je pense qu'il n'y a pas de problème là.
Mais il y a une quasi mise en tutelle, il y a des articles de la loi qui font en sorte qu'on ne sait pas. Le ministère peut arriver... ce n'est pas clair, c'est quoi, les motivations qui l'amènent à... etc. Alors, au bout de la ligne, comme parent qui veut s'impliquer... par exemple, on peut imposer des mesures de redressement, mais est-ce que la personne qui est administratrice va avoir les responsabilités?
Dans un organisme sans but lucratif, on a des responsabilités. Et tout le développement par exemple de l'économie sociale, toute cette vision-là de prise en charge collective de dire: On va se donner les moyens, on n'attendra pas que l'État règle tout, on n'attendra pas que le marché règle tout, mais on va se mobiliser, un des exemples de ça, c'étaient les centres de la petite enfance.
D'ailleurs, la rapidité avec laquelle ça s'est développé ? puis Mme Potvin y a fait référence ? il faut voir que les parents qui ont mis du temps, ce n'est pas parce qu'ils avaient besoin de plus de places; leur enfant était déjà là. Donc, c'était vraiment pour le bénéfice de la collectivité qu'ils ont mis du temps et de l'énergie pour ouvrir des places à d'autres.
C'est cette énergie-là... Moi, quand on a fait la tournée, par exemple la présence des élus locaux à beaucoup d'assemblées publiques pour dire comment c'était important, dans le milieu rural, d'avoir ce réseau de centres de la petite enfance, leur inquiétude: D'un coup que les régies, dans leur petit village, allaient fermer. Qu'est-ce qui est arrivé? Alors, les gens voulaient être partie prenante de ces décisions-là.
Ce qu'on retrouve dans la loi, c'est suffisamment de pouvoirs donnés au ministère qu'à n'importe quel moment on peut arriver, imposer des conditions de travail, imposer les conditions des directrices, et dans le fond priver des parents et ces conseils d'administration, qui devraient être des entités autonomes, de leur capacité d'agir.
Et c'est là où est-ce que je pense que le message qui est passé est extrêmement inquiétant pour les parents. Ce n'est pas moi qui... Je ne suis plus parent, je dois dire, d'enfants en CPE, mais je pense que, dans nos contacts et ce que nous recevons comme message ? et vous allez sans doute le recevoir ici ? c'est ce genre d'inquiétude qui est exprimé. Puis peut-être que les autres pourraient rajouter.
Mme Roy (Johanne): Oui, effectivement, la formation et la composition des conseils d'administration, la façon dont la loi prévoit deux membres de la communauté, on parle d'un certain nombre de parents, mais, dans l'ancienne loi, c'était aux deux tiers de parents majoritaires, et maintenant c'est majorité plus un, alors on a déjà une dilution du rôle des parents au sein des conseils d'administration.
Ensuite, on a aussi l'apparition, avec les bureaux coordonnateurs, on a aussi l'apparition ou la possibilité que le bureau coordonnateur ne soit pas dirigé par un conseil d'administration. Parce qu'on le voit, le bureau coordonnateur peut être une personne morale, peut être une entreprise à but lucratif. Alors, les bureaux coordonnateurs de la garde en milieu familial pourraient se retrouver sous l'égide d'entreprises à but lucratif et privés d'un conseil d'administration formé de parents. Et là on voit apparaître, par rapport aux 88 000 places en milieu familial, un risque que 88 000 enfants soient desservis ? disons, dans la progression ou dans l'histoire; soient desservis ? par un service ou une entreprise qui n'a pas de conseil d'administration. Les parents sont évacués de cette structure-là, et c'est plus de la moitié des places, au Québec, qui risquent de se retrouver ainsi. Alors ça, on a une énorme inquiétude par rapport à l'évacuation des parents sur les structures démocratiques des corporations et des centres de la petite enfance.
Mme Potvin (Hélène): À cela, je voudrais juste rajouter: Effectivement, dans les critères, on voit apparaître la question de comité de parents. Je vous invite à être très vigilants à cet égard. On n'est pas... Il y a une grande différence entre membre d'un conseil d'administration et avoir un rôle décisionnel et être sur un comité de parents pour donner son avis, et, à cet égard-là, pour nous, c'est quelque chose qui est quand même fondamental.
M. Bouchard (Vachon): Merci. J'aurais une autre question à Mme Neamtan et ensuite à vous, Mme Potvin, mais pas sur le même sujet. Je l'annonce d'avance parce que je veux vous donner un peu de temps, plus que ce que vous en aurez eu pour l'écriture de votre mémoire.
Mais j'aimerais que vous puissiez, Mme Potvin, une fois que vous aurez entendu la question, y penser, là, puis on y reviendra. Je vais vous la poser tout de suite: Est-il exact que vous aviez... ou que vous avez proposé au ministère des scénarios de compromis qui feraient en sorte qu'on aurait peut-être un petit peu moins de CPE responsables des services de garde en milieu familial ? par exemple autour de 600 ? mais qu'on gardait l'intégralité du système et qu'on arrivait donc à la fois à solutionner un certain nombre de problèmes liés à l'existence de petits CPE, de micro CPE, pourrait-on dire, qui pourraient poser un problème administratif mais qui par ailleurs avaient le mérite de conserver ou de préserver l'intégralité du réseau?
Je vous laisse un petit bout de temps pour y penser, et je demande à Mme Neamtan... Son point 8, là, j'aimerais revenir là-dessus, parce que, moi, je trouve ça extrêmement important. Et je vais employer une expression que quelqu'un, autour de cette table, reconnaîtra facilement, là: Il me semble que, lorsqu'on fait un projet de loi comme celui-là, on doit être en mesure, à partir d'un bon «benchmarking», de bien évaluer, de bien jauger ce que ça prend comme ressources pour participer à ce qu'on appelle désormais, là, dans les CSSS, là... aux projets cliniques, c'est-à-dire à l'ensemble des services que l'on voudra donner aux 0-5 ans, particulièrement aux enfants les plus vulnérables, soit en termes de prévention soit en termes de promotion.
Ce que je comprends, là, c'est que, dans les services, tels qu'ils sont faits actuellement, la conseillère pédagogique ou la responsable désignée, dans la gestion du CPE, qui est désignée pour prendre plus particulièrement soin des liens avec les services de garde en milieu familial, s'occupait de ces liens ou s'occupe de ces liens de partenariat. On m'a informé que, même dans certains CPE maintenant, ils avaient été obligés de rompre des ententes de partenariat parce que les dernières coupures avaient mis en cause ces postes-là et leur capacité de répondre.
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que nous étudions en même temps la loi n° 125, là, qui porte sur la protection des enfants au Québec. Et la plateforme que nous occupons, dans les CPE, avec les installations et services de garde, une formidable plateforme d'observation, d'intervention douce et préventive et promotionnelle du développement de l'enfant, pourrait arriver à prévenir un certain nombre de situations qu'on retrouve là, mais aussi des situations de détresse éventuelles, au niveau des échecs préscolaires et scolaires, etc.
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus parce qu'il ne semble pas que ça ait été un point, ça, qui a marqué tant l'imaginaire des gens, au Québec, à savoir que les services de garde étaient aussi des outils de promotion du développement des enfants et de prévention. Si vous voulez commenter là-dessus, je suis tout oreilles.
n(17 h 40)nMme Neamtan (Nancy): Mais je pense que c'est ça, la notion de «centre» à la petite enfance. C'est que l'idée d'un centre de la petite enfance, c'est de dire: On part de là, on part de l'enfant, des besoins des enfants, et toute la communauté se met autour. Ça prend un village pour élever un enfant, toute la communauté se met autour, premièrement, évidemment, pour les services de garde de qualité mais avec un projet éducatif, avec un enjeu de prévention, de dépistage précoce, etc. C'est tout ça qui est en train de se mettre en place, et c'est pour ça... Excusez ma colère, mais je ne peux pas faire autrement parce que c'est un projet absolument fabuleux qui allait avoir des impacts à long terme, si on regarde toutes les études ? et vous connaissez ça mieux que moi ? de dépistage précoce. Et, là... en tout cas, moi, comme je dis, je ne sais pas si les études... ou si des discussions ont eu lieu avec les gens de la Santé publique, avec la prévention, sur l'impact, tout ça, mais, d'après ce que je comprends, il faudrait le vérifier et avant d'aller plus loin, parce qu'effectivement c'est toute cette notion de dire: Un centre avec tous les besoins de la communauté autour de la petite enfance, c'est ça qui est perdu dans ce projet de loi.
Mme Roy (Johanne): Le fait que, moi, j'aimerais ajouter... pour l'expérience que je vis, dans mon centre de la petite enfance, j'aimerais ajouter que, le partenariat, il est déjà existant à l'intérieur des centres de la petite enfance. Et par le fait que nous avons un mode... nous sommes en mode intégré de services, tout autant la garde en milieu familial que la garde en installation, tout le travail de partenariat qui est investi et qui est établi, à l'intérieur de nos structures, de nos services, sert tout autant pour la garde en milieu familial que la garde en installation. Et, quand on a une vision d'offre de services de qualité, on n'a pas besoin de se définir sur la base de structure mais plus davantage sur la base d'une offre de services. Et intégrer un enfant particulier, ça prend une gamme de services autour, hein, on sait, le soutien à la famille, le soutien à l'enfant, le lien avec le professionnel, les conseillers cliniques, tout ça. C'est déjà en marche, on a plusieurs CPE qui sont... une grande majorité des CPE sont déjà en mode concertation dans le cadre des protocoles CPE-CLSC. Et, plus encore, avec les centres jeunesse, avec les centres de réadaptation, il y a des expériences cliniques extraordinaires et qui servent aux deux modes.
Ce qui fait le plus mal, dans le projet de loi, c'est la séparation des deux modes, et c'est la disparition du mode intégré de services, dans une vision globale et dans une mission éducative large d'aide de soutien à l'enfant, à la famille, à la communauté, et où les décisions proviennent: elles proviennent de la base, elles proviennent de... Alors, c'est ça qui est menacé, et la séparation... Il y a des améliorations à apporter, mais la séparation ou la distinction des deux modes ne justifie pas... en fait, le projet de loi n'est pas justifié dans son esprit.
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Oui. Est-ce que vous vous souvenez toujours de ma...
Mme Roy (Johanne): Oui, tout à fait.
M. Bouchard (Vachon): J'espère que les gens autour de la table, de tous les côtés de la table, auront entendu cela, parce qu'il me semble que cette fonction d'accompagnement des parents, des enfants, notamment des enfants qui présentent les plus grands risques ou sont les plus vulnérables, dans les milieux qui sont particulièrement vulnérables aussi, dans des démarches de partenariat, de mise en commun des ressources, tel que le souhaite le ministère de la Santé, j'espère que cette réponse que vous venez de donner sera entendue et que ce sera considéré, lorsque nous étudierons le projet de loi article par article, parce que ça définit les ressources dont on a besoin. Mme Potvin, s'il vous plaît.
Mme Potvin (Hélène): Bien, en fait concernant effectivement... Est-ce que je peux me permettre de répondre à des petites questions que, tout à l'heure, je n'avais pas eu le temps, en fait, la question du changement? Effectivement, le réseau des centres de la petite enfance, c'est une preuve qu'on est capables de faire du changement, mais il faut que ça ait du sens pour nous, et c'est là le gage de réussite.
L'AQCPE a fait une proposition effectivement: Plutôt que d'y aller dans le sens des bureaux coordonnateurs, d'y aller sur une base où on regarde par exemple un permis minimal, un permis minimal pour la garde en milieu familial, qui permettrait les économies que vous recherchez. Et également le fait d'avoir du regroupement de services, comme le gouvernement recherche, nous ne sommes pas en défaveur.
C'est, je dirais, le projet, la solution qui est trouvée à laquelle nous sommes en défaveur. Nous avons donc fait une proposition sur la base... on pourrait identifier un minimum de base de permis en milieu familial. Un CPE par exemple qui n'a pas ce minimum-là aurait une obligation. Donc, ce n'est pas le gouvernement qui enlève les places, c'est le conseil d'administration qui garde son pouvoir. Et ce qu'il fait, il dit: Moi, je n'ai pas le nombre de places minimum au permis en milieu familial. Qu'est-ce que je fais? Je redonne les places en milieu familial, dans la région, qui vont être redistribuées, je cesse; ou bien ce que je fais, c'est que je me regroupe avec des CPE de mon secteur. Et d'ailleurs, dans la région de Québec?Chaudière-Appalaches, vous avez trois exemples de regroupements sous ce modèle-là où, parce que ce n'est pas un permis démesuré mais un permis qui offre une grandeur humaine, qui offre finalement un lien de convergence entre des responsables de garde familiale et finalement leur centre de la petite enfance. C'est prouvé, ça a été démontré que c'est très intéressant.
Donc, oui, nous avions, oui, nous avons et, oui, nous sommes toujours intéressés à regarder, sous cet angle-là, parce que votre objectif, nous ne sommes pas contre. C'est la solution qui est apportée à laquelle nous avons un élément de défaveur.
Concernant l'intégration des enfants handicapés, vous dites qu'on saute vite aux conclusions. Écoutez, les responsables de garde en milieu familial, nos éducatrices de garde en milieu familial sont responsables de la qualité de leurs services, et elles le font très bien au Québec.
Par contre, d'elles-mêmes, celles que nous rencontrons nous disent que, pour l'intégration d'enfants qui présentent des besoins particuliers, elles ont besoin d'un peu plus de support et d'aide. Et, quand on regarde la grande compression au niveau du financement pour la supervision et la gestion de l'aide, d'encadrement au niveau de la garde en milieu familial, on est obligés de faire un lien, et nous avons de grandes inquiétudes.
M. Bouchard (Vachon): Je ne voudrais pas clore cette rencontre sans souligner le fait que vous avez été mises au ban et accusées de désinformation. J'ai souvenir que, lorsque vous avez, par exemple, évoqué la possibilité que les centres de la petite enfance puissent être dépouillés de leur capacité de gestion auprès des services de garde en milieu familial et qu'on arriverait avec une structure de 150 ? je pense que c'est 150 que vous aviez dit à l'époque? ? la ministre dit que c'était sans fondement et que c'était de la désinformation. Nous sommes à 130.
Lorsque vous avez dit qu'il y aurait des coupures de 41 millions, on vous a aussi accusés de bonhomme Sept-Heures et de faire peur à tout le monde; vous avez été coupées de 41 millions. De quoi avez-vous peur maintenant et dont on vous accusera de désinformation?
Mme Potvin (Hélène): En fait, que le projet de loi passe avec l'esprit dans lequel il est attaché. On ne peut pas accepter le projet de loi comme il est là. On s'en va vers une ère où on va être plus vers du gardiennage; on s'en va vers une diminution de la qualité des services, autant en installation qu'en milieu familial; on s'en va vers une commercialisation des services de garde, et, pour nous, c'est inacceptable; également le pouvoir des parents.
Donc, ce sont tous ces éléments-là qui nous inquiètent. Et c'est pour ça qu'on demande et on continue à demander à poursuivre le travail pour peaufiner. Peut-être qu'il y aurait des éléments qu'on va garder du projet de loi, mais il y a des éléments fondamentaux qu'il faut revoir et retravailler et redéfinir ensemble d'une autre façon, tout simplement.
M. Bouchard (Vachon): Merci.
La Présidente (Mme James): C'est terminé? Alors, merci beaucoup, M. Lessard, Mme Potvin, Mme Roy et Mme Neamtan, pour votre présentation de la part de l'Association québécoise des centres de la petite enfance.
La Commission des affaires sociales ayant terminé la séance pour aujourd'hui, j'ajourne les travaux jusqu'à demain, soit mercredi le 16 novembre, à 9 h 30, ici, à la salle du Conseil législatif.
(Fin de la séance à 17 h 48)