(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales.
Consultations particulières sur
le projet de loi n° 112
Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de compléter les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 112, Loi modifiant la Loi sur le tabac et d'autres dispositions législatives. Je comprends également, Mme la secrétaire, qu'il n'y a aucun remplacement.
La Secrétaire: C'est exact.
Le Président (M. Copeman): C'est exact, pas de remplacement.
Nous allons, dans le courant de la journée, chers collègues, effectuer trois différents mandats: nous allons compléter les consultations sur le projet de loi n° 112; en après-midi, nous allons poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 38; et, en soirée, nous allons poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 57, ce qui nous amène à la fin de la journée, littéralement à la fin de la journée aujourd'hui, minuit.
En ce qui concerne la séance de ce matin, nous allons entendre, échanger avec deux groupes dans quelques instants. C'est une présentation conjointe d'Imperial Tobacco Canada ltée, Rothmans, Benson & Hedges inc. et JTI-Macdonald corporation, et c'est suivi, 45 minutes plus tard au maximum, par les représentants de l'Institut national de santé publique du Québec.
Il y aura, si j'ai bien compris, des remarques finales à la fin de la matinée. Et nous allons faire notre possible de tenter de conclure à 13 heures, tel que prévu par le règlement. Alors, je compte sur la collaboration de tout le monde, principalement mes collègues, afin de maintenir un rythme convenable pour qu'on puisse terminer à 13 heures.
Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants d'Imperial Tobacco Canada ltée, Rothmans, Benson & Hedges inc. et JTI-Macdonald corporation. M. Dorval, bonjour. Mr Bordan, également bonjour. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et ce sera suivi par un échange d'une durée maximale de 15 minutes avec les parlementaires des deux côtés de la table.
J'ai observé, M. Dorval, vous avez enlevé votre montre pour suivre le temps, c'est très bien. Inquiétez-vous pas, je vais vous signaler quand le temps achève également. On est là pour faciliter l'échange avec tout le monde. Sans plus tarder, la parole est à vous, M. Dorval.
Auditions (suite)
Imperial Tobacco Canada ltée,
Rothmans, Benson & Hedges inc.
et JTI-Macdonald corporation
M. Dorval (Yves-Thomas): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, en fait, pour les fins de l'enregistrement, j'imagine qu'il faut identifier nos noms et nos fonctions. Alors, mon nom est Yves-Thomas Dorval. Je suis responsable des Affaires publiques chez Imperial Tobacco Canada. Je suis accompagné notamment de Me Greg Bordan, avocat externe pour Imperial Tobacco Canada, de la firme Ogilvy Renault. Les trois plus grands fabricants de produits du tabac au Canada, à savoir Imperial Tobacco Canada, qui a son siège social à Montréal, Rothmans, Benson & Hedges inc., qui a une usine à Québec, ainsi que JTI-Macdonald corp., qui a une usine à Montréal, ont déposé à la commission leurs observations conjointes quant au projet de loi n° 112. Et on m'a demandé de les représenter dans le cadre des consultations particulières de l'Assemblée nationale, aujourd'hui.
Chacune de nos entreprises est établie au Québec depuis des décennies et contribue de manière importante à l'économie du pays. L'industrie du tabac a versé, pour l'année fiscale 2004, 8,6 milliards de dollars en taxes et droits sur la vente des produits du tabac aux gouvernements fédéral et provinciaux, soit 13 fois le bénéfice net réalisé par l'industrie du tabac sur les ventes de ses produits pour la même période. On pourrait dire donc que les gouvernements sont les principaux partenaires de l'industrie du tabac. Les recettes de la taxe sur le tabac revenant au gouvernement du Québec, pour la même année, totalisaient à elles seules 923 millions de dollars, soit près de 1 milliard de dollars.
Mais, au-delà de ces aspects économiques, j'aimerais attirer votre attention sur le fait qu'ensemble les trois fabricants emploient plus de 1 150 personnes, à temps plein, au Québec, de façon directe, sans compter les employés qui travaillent dans les commerces, et ainsi de suite. Ces Québécoises et ces Québécois sont des gens comme vous et moi. Ces personnes résident peut-être dans votre comté, ce sont peut-être même vos voisins. Ils fondent des familles, ils ont des enfants, ils ont les mêmes valeurs que l'ensemble de la société québécoise. On ne parle pas ici de compagnie anonyme que certains prennent plaisir à dénormaliser ou à dénigrer. On parle de femmes et d'hommes qui travaillent, de façon intègre et légitime, afin de répondre à la demande de plus de 1 million de fumeurs adultes au Québec, quelques 5 millions au Canada.
Au cours des derniers mois, j'ai eu l'occasion de rencontrer personnellement... j'ai fait la tournée, j'ai rencontré personnellement l'ensemble des employés d'Imperial Tobacco Canada, au Canada, soit plus de un millier de travailleurs, tant syndiqués que non syndiqués. Et je peux vous affirmer sans la moindre hésitation que toutes et tous n'ont qu'un seul et même objectif: répondre aux préférences des fumeurs adultes, dans un marché très concurrentiel, en agissant de façon responsable.
J'ai la ferme conviction qu'il en est de même chez les deux autres grands fabricants au Canada. D'ailleurs, je voudrais saluer, en arrière, les membres du comité de l'Action politique des travailleuses et travailleurs du tabac de différentes compagnies, qui se feront sûrement un plaisir de parler avec vous en temps et lieu.
D'entrée de jeu, chacun d'entre nous reconnaissons que le fait de fumer est associé à de nombreux problèmes de santé, y compris des maladies comme le cancer du poumon, de la gorge et du larynx, ainsi que l'emphysème. Nous sommes aussi conscients des préoccupations du gouvernement à l'égard de la fumée du tabac ambiante et du taux de tabagisme chez les mineurs, d'où l'intérêt du gouvernement de légiférer de façon raisonnable et responsable à l'égard de l'usage et de la consommation du tabac.
À ce titre, j'aimerais préciser que nous sommes d'accord avec plusieurs dispositions du projet de loi n° 112. En fait, nous sommes en total accord avec les objectifs de santé publique qui sous-tendent ce projet de loi. On pourrait facilement trouver des aménagements qui répondraient aux problèmes qui sont soulevés sans changer le fond des intentions du projet de loi. Plus précisément, je vais énumérer quelques points sur lesquels nous sommes parfaitement d'accord:
1° nous sommes pour l'interdiction de fumer dans les établissements d'enseignement et sur leurs terrains adjacents. J'espère toutefois que les mêmes dispositions existent quant à la consommation des produits d'alcool et des drogues, un phénomène qui est de plus en plus alarmant auprès des jeunes;
2° nous sommes pour l'aménagement de fumoirs par l'exploitant d'un lieu ou d'un commerce, tel que prévu actuellement dans le projet de loi. Nous trouvons toutefois que le gouvernement, dans son rôle, devrait fixer des normes raisonnables de qualité de l'air plutôt que de définir unilatéralement les modalités de ventilation. L'accès à ces fumoirs réservés uniquement aux employés devrait cependant être étendu à tous les fumeurs adultes, puisque cela n'affecterait pas la santé des gens qui ne fument pas ou ne les incommoderait pas;
3° nous sommes pour l'interdiction à quiconque de vendre du tabac à un mineur, bien que les pénalités prévues envers l'exploitant peuvent sembler exagérées dans certains cas;
4° nous sommes pour l'obligation, aux personnes désirant acheter du tabac, de prouver sur demande qu'elles sont majeures. En fait, on devrait demander une carte d'identification avec photo s'il y a un moindre doute, et ce, pour tout produit dont la vente est interdite aux mineurs, incluant l'alcool et loteries. C'est là le meilleur moyen de réserver l'accès de ces produits aux personnes adultes seulement;
5° enfin, nous sommes pour l'interdiction d'exploiter un point de vente de tabac sur les terrains et dans les locaux d'une école ou de fournir du tabac à un mineur.
L'atteinte des objectifs fixés par le gouvernement en matière de santé doit cependant se réaliser dans le respect des droits individuels et collectifs qui caractérisent toute société démocratique. Ceci signifie l'adoption de solutions de rechange qui respectent les droits et choix non seulement des non-fumeurs, mais également des fumeurs. De même, lorsque les droits garantis, tels la liberté d'expression, sont touchés, toute modification législative apportée à la Loi sur le tabac doit respecter les balises fixées par la Cour suprême du Canada, notamment dans l'affaire RJR-Macdonald de 1995, afin de permettre la publicité ayant pour objet de favoriser la concurrence entre les marques de cigarettes.
Toujours selon la Cour suprême, toute atteinte à la liberté d'expression doit être minimale. Or, nous sommes d'avis que certaines des modifications proposées par la loi ne respectent pas ces principes. En fait, il semble que le véritable but de certaines des modifications proposées serait plutôt de punir et de dénormaliser les fumeurs, les commerçants et les fabricants de produits du tabac, un objectif qui n'est pas légitime dans une société libre.
Voici en résumé quelques dispositions proposées qui ne respectent pas à notre avis ces exigences:
1° l'effet combiné des dispositions interdisant des fumoirs pour la clientèle d'une entreprise, des dispositions interdisant de fumer dans des bars, restaurants et tavernes et celles interdisant de fumer à l'extérieur dès qu'on se trouve sous un abri quelconque condamne les fumeurs à fumer sous la pluie, dans la neige et le vent, alors qu'il n'y a pas de risque pour la santé publique de permettre de fumer à l'extérieur, sous un abri non fermé;
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(11 h 40)
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2° les exigences quant aux fumoirs réservés aux employés et dirigeants d'une entreprise sont irréalistes dans bien des contextes et ne permettent pas des méthodes de remplacement pour la ventilation qui rendent la qualité de l'air comparable à celle des aires pour non-fumeurs dans les grands centres commerciaux;
3° la délégation aux municipalités du pouvoir d'interdire complètement de fumer à l'extérieur, sur l'ensemble du territoire où se déroulent certains types d'événements, dépasse ce qui est raisonnablement nécessaire pour accommoder des non-fumeurs désireux d'éviter la fumée de tabac ambiante. La loi devrait accorder aux municipalités le pouvoir de réglementer le droit de fumer à l'extérieur et non de l'interdire;
4° les dispositions dont les effets sont d'empêcher la recherche légitime quant à l'usage et la consommation des produits du tabac ? et je donne, par exemple, les recherches qui sont faites sur les modifications apportées aux produits du tabac, selon les exigences du gouvernement fédéral, à l'égard des cigarettes à potentiel d'allumage réduit ? ça, ce n'est nullement justifié par les objectifs visés par le gouvernement et porte atteinte à la liberté d'expression. Essentiellement, cette disposition empêcherait aux compagnies, comme tout autre produit de consommation, de pouvoir vérifier les préférences de ses consommateurs lorsqu'il doit changer des produits soit imposés par la loi ou soit tout simplement pour rencontrer encore mieux la demande des fumeurs adultes;
5° il en va de même du pouvoir d'interdire par voie de règlement l'usage de certains mots dans les noms des fabricants, distributeurs ou d'exploitants des points de vente de tabac. Il s'agit non seulement d'une atteinte à la liberté d'expression ici, mais d'une atteinte aux droits conférés par la législation relative aux marques de commerce, laquelle est de compétence fédérale;
6° La modification proposée pour le paragraphe 2° de l'article 21, qui défend la réduction du prix de vente au détail d'un produit du tabac en fonction de la quantité du tabac autrement que dans le cadre d'une mise en marché régulière ? et j'attire votre attention ici ? effectuée par un fabricant, fait abstraction de la façon dont les prix sont fixés en réalité et des dispositions de la Loi sur la concurrence. Ce qu'il faut savoir, c'est que la détermination du prix au détail, ce ne sont pas les fabricants qui peuvent le faire, ce sont les détaillants. Les fabricants vendent à des distributeurs qui vendent à des détaillants. Ce sont les détaillants qui peuvent fixer les prix de vente au détail;
7° une couleur d'une marque ou d'une famille de marques ou d'autres éléments graphiques sont affichés au détail afin de mieux informer les consommateurs sur les prix des produits du tabac et pour permettre une identification efficace des produits pour le consommateur. La définition de publicité indirecte proposée ici doit être modifiée afin de tenir compte des enseignements de la Cour suprême du Canada selon lesquels la publicité véhiculant des informations factuelles sur les caractéristiques des produits du tabac et visant la concurrence entre marques doit être permise. Essentiellement, la loi fédérale dit: Vous ne pouvez pas faire telle chose, donc vous pouvez faire telle chose; et, ici, la loi dit: Mais vous ne pouvez pas faire ces choses-là. Alors, on est situés dans un vide;
8° la règle de droit exige que les avocats qui conseillent de bonne foi leurs clients quant à l'interprétation d'une loi ne soient pas exposés aux poursuites pénales si leur interprétation s'avère erronée. Je n'ai jamais vu ça. Il y a des lois professionnelles qui existent pour couvrir les actes professionnels des membres du Barreau. Et je ne suis pas membre du Barreau;
9° l'ajout proposé de l'article 34.1 est une invitation à la commission d'abus par des inspecteurs à qui cette disposition confère le pouvoir d'exiger les mêmes renseignements et documents à de multiples reprises sous menace d'amendes allant jusqu'à 15 000 $;
10° toute modification de substance proposée pour la loi par suite des observations reçues par le ministre doit faire l'objet d'une nouvelle consultation publique, de même que l'exercice de tout pouvoir réglementaire conféré par la loi. On a vu, juste ici, au cours des derniers jours, qu'au début on n'avait rien sur les présentoirs, aux points de vente, puis on a entendu parler que ce serait maintenu, mais, à la fin, on entend parler que ce serait réservé à 1 m². Il y a l'équivalent de 400 produits disponibles. Dans un dépanneur, on peut retrouver 200 produits disponibles. Dans 1 m², ça fait difficile pour un consommateur d'identifier tous les produits qui sont disponibles;
11° finalement, les dispositions de la loi doivent être appliquées de façon uniforme afin d'assurer qu'aucun fabricant, distributeur ou exploitant de points de vente de tabac n'ait un avantage concurrentiel en raison de l'application non uniforme des dispositions de la loi et que les produits de contrebande ou contrefaits ne soient pas favorisés. Essentiellement, l'atteinte des objectifs de santé publique va se trouver complètement diminuée, réduite si toute la consommation se transfère... ou, de plus en plus, la consommation se transfère du côté des produits illégaux.
En terminant, les trois grands fabricants de produits du tabac au Canada désirent remercier les membres de la commission de prendre connaissance de leurs observations conjointes.
J'attire votre attention sur le fait que, dans le mémoire qui vous a été soumis, qui s'intitule Observations conjointes, il y a beaucoup plus de détails que ce que je viens de parler, et c'est très important d'en prendre connaissance. Nous vous prions bien sûr de parcourir ce document de façon attentive.
Si nous voulons sincèrement atteindre des objectifs de santé publique dans le respect des droits individuels ou collectifs, plusieurs des dispositions que je viens de citer n'ont pas leur raison d'être telles que libellées, mais elles méritent d'être amendées, et on peut y arriver si on travaille ensemble.
Mmes, MM. les députés, j'ai eu l'occasion de travailler dans plusieurs secteurs au cours de ma carrière, y compris le secteur de la santé, et j'ai vu pas mal de choses. Mais je n'ai jamais assisté, même de près, à un traitement semblable fait à des consommateurs adultes, informés des risques qu'ils encourent, ni un traitement semblable fait aux travailleuses et travailleurs de commerces et de manufacturiers ou à leurs dirigeants.
Cependant, nous voulons faire partie des solutions, et c'est pourquoi nous vous offrons notre collaboration dans la recherche et la mise en oeuvre de mesures plus acceptables. En fait, c'est une invitation que nous vous lançons. Merci.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. Dorval. Alors, afin de débuter l'échange, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, M. Dorval, M. Bordan, pour votre visite aujourd'hui.
Effectivement, quelques réactions à vos propos. D'abord, en reconnaissant tout à fait le droit que vous avez de venir vous exprimer puis défendre le point de vue de votre industrie devant la commission ? et c'est légitime, ça, c'est légitime ? ça me permet d'aller sur le terrain de la légitimité.
Légitime et légal, ce n'est pas la même chose. Malheureusement, le tabac est un produit légal: malheureusement, parce que, s'il était présenté aujourd'hui, il serait fort probablement déclaré illégal, compte tenu de ses caractéristiques. Étant légal depuis des décennies, il est illusoire de le rendre illégal, on le sait bien, pour des raisons que vous avez vous-même mentionnées, notamment de détours vers d'autres types de produits.
Ce n'est pas un produit de consommation comme les autres. Il n'y a pas beaucoup d'autres produits de consommation qui, lorsqu'utilisés de la façon recommandée par le fabricant, entraînent la mort des gens. Et, vous savez ? évidemment vous avez l'expérience de votre industrie, vous dites que vous avez été dans la santé ? moi, une expérience, des expériences que j'ai eues, à de nombreuses reprises dans ma pratique, c'est d'annoncer le diagnostic de cancer du poumon à des jeunes femmes de 42 ou 43 ans, avec des enfants, des hommes, puis voir dans leurs yeux la détresse de ce diagnostic-là, puis se rendre compte... ils se rendent compte du lien entre leur tabagisme et ce diagnostic-là. Et, s'ils pouvaient remettre leur vie, rembobiner, comme on dit, leur vie, combien de fois ne m'ont-ils pas dit: Si j'avais su, si j'avais pu... Si j'avais pu, j'aurais aimé arrêter de fumer, mais je n'ai pas pu.
Croyez-moi, on souhaite ardemment, autant du côté du gouvernement, je crois, que du côté de l'opposition, voir les revenus de taxes liés au tabac diminuer, diminuer massivement, parce que, plus ils vont diminuer, plus notre population va être en santé et plus les coûts du système de santé également vont être atténués, et ça a été démontré à plusieurs reprises.
Vous dites que vous n'avez pas vu de législation semblable ailleurs. Vous me permettrez d'être surpris: le Québec est un des derniers États à adopter des mesures semblables, au Canada et ailleurs dans le monde.
Je vais vous poser une question, puis je pense que c'est important de commencer de cette façon-là. Croyez-vous, comme vous l'avez dit, vraiment, vraiment que le fumeur fait un choix éclairé et libre de commencer à fumer et de ne pas arrêter, compte tenu du potentiel addictif reconnu de la nicotine?
M. Dorval (Yves-Thomas): Par rapport à vos remarques, M. le ministre, vous avez dit qu'il n'y avait pas de produit de consommation... le tabac n'est pas un produit de consommation comme les autres. De fait, nous avons mentionné d'entrée de jeu que nous sommes parfaitement au courant des risques associés à ce produit. Mais, lorsqu'on arrive dans les sociétés de droit, ce qui est légal... Il n'y a pas deux types de légalité, il y a un type de légalité: ce qui est légal ou ne l'est pas. Je comprends très bien les préoccupations que le gouvernement peut avoir.
Vous avez parlé aussi: Je n'ai pas vu ailleurs; j'ai parlé: Ailleurs, dans d'autres domaines que le tabac. Oui, bien sûr qu'il y a ailleurs, dans certains endroits, des lois, mais le Canada figure pas mal comme chef de file au niveau des mesures de contrôle de tabac.
Cependant, beaucoup des mesures qui sont bien intentionnées comme objectifs n'ont pas toujours comme support de base des éléments scientifiques démontrables et efficaces. Si vous empêchez de fumer quelqu'un sous un abri à l'extérieur, je ne vois pas ce que ça change. Si vous aménagez un fumoir bien ventilé pour ceux qui fument, je ne vois pas ce que ça affecte pour les non-fumeurs.
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(11 h 50)
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Cela étant dit, si vous voulez avoir des réponses plus précises quant aux fumeurs, il faudrait vous adresser aux fumeurs et leur demander à eux, les fumeurs, pourquoi ils fument. Il y a beaucoup d'études qui le démontrent. Je peux juste vous dire que la position d'Imperial Tobacco que je représente, et c'est une position que vous retrouvez chez d'autres fabricants aussi, c'est que nous sommes d'accord avec les risques, et nous sommes même... nous convenons même que, si on prend la définition telle que prévue... telle qu'élargie aujourd'hui du mot «dépendance», oui, la nicotine peut créer la dépendance.
Ce que je dois ajouter cependant, vous avez plus d'ex-fumeurs au Canada que de fumeurs, et, dans la grande majorité des cas, ces ex-fumeurs ont arrêté de fumer sans aide thérapeutique, ce qui veut dire qu'il est donc possible d'arrêter de fumer sans nécessairement avoir des conséquences négatives comme dans le cas de l'héroïne ou d'autres drogues semblables.
M. Couillard: Oui, je vois, l'association que vous faites est très juste avec les autres types de toxicomanies, parce que c'est une forme de toxicomanie. Et on sait également que 80 % des fumeurs voudraient arrêter, souhaitent ardemment arrêter, puis même pas au moment d'avoir eu un diagnostic de santé relié à leur habitude, mais souhaitent arrêter et ne peuvent pas, ils ne peuvent pas le faire. Et on souhaite qu'il y en ait encore plus, de non-fumeurs, au Québec, et de gens qui cessent.
Mais comment pouvez-vous concilier le fait d'avoir reconnu juste maintenant que le tabac est un produit qui cause une dépendance et la notion de libre choix des utilisateurs et les techniques de marketing qui visent à augmenter son utilisation? D'après moi, c'est une position qui est socialement difficilement tenable.
M. Dorval (Yves-Thomas): Premièrement, ce n'est pas récent. Je peux vous dire que le président d'Imperial Tobacco a fait état de cette question devant le Sénat public, au fédéral, il y a déjà plusieurs années. Ça fait plus de 30 ans que de façon volontaire Imperial Tobacco a commencé à mettre des avertissements sur ses paquets de cigarettes. On n'est pas ici dans un film d'Hollywood qui s'appelle Insider, on est au Canada, avec des compagnies, comme Imperial Tobacco, qui sont socialement responsables.
Il n'y a pas si longtemps, il y a eu une campagne, au Québec, qui utilisait des porte-parole, des célébrités, pour parler du fait que c'était important. Nous-mêmes, on a émis un communiqué de presse supportant cette campagne-là en disant: Excellent! On a des programmes qui visent à aider les communautés, surtout au niveau des jeunes, à faire en sorte de diminuer le tabagisme chez les personnes d'âge mineur. Alors, on est très conscients de cela. On n'est pas ici dans une situation comme dans un film où c'est très facile d'attaquer des compagnies. Vous avez des travailleurs et des travailleuses dans ces compagnies qui ont les mêmes valeurs, les mêmes désirs.
Et, soit dit en passant, la consommation de tabac au Canada, depuis 1965, ça diminue tout le temps, et, si vous comparez avec l'index aux États-Unis, vous avez le même niveau de réduction de tabagisme. Pourtant, aux États-Unis, vous avez le droit d'avoir de la publicité dans les magazines, vous avez un niveau de taxation bien moins élevé. Alors, il y a une sensibilisation de la population, et c'est ça qui porte fruit, l'éducation, la sensibilisation, la prévention et non pas des mesures qui limitent les libertés.
M. Couillard: La question de liberté, encore une fois, pour moi, elle est très relative dans le cas du tabac. Mais il faut dire qu'aux États-Unis il y a des États qui sont encore plus rigoureux que le Québec, il y a notamment la Californie qui a agi beaucoup plus précocement que le Québec dans ce type d'intervention là.
Et, la réalité, M. Dorval, telle qu'on l'évalue de notre côté, c'est qu'une fois la première loi adoptée en 1998, il a été évident que, et c'est normal, rapidement l'industrie du tabac et ses partenaires développent des stratégies pour arriver aux mêmes fins en termes de marketing et plus ou moins passer à côté de certaines dispositions, on a de nombreux exemples de cette chose-là, alors ce qui amène la nécessité de resserrer la loi aujourd'hui.
Donc, tout ça est le résultat non pas uniquement d'une prise de conscience de la société, parce qu'il y a une prise de conscience de notre société, on le voit très bien dans les commentaires qui nous parviennent, mais également d'habitudes ou de développement de pratiques commerciales qu'on a pu observer au cours des dernières années, et ça, c'est un fait.
Le fait qu'également le taux de tabagisme au Québec ait diminué, notamment après l'adoption de la première Loi sur le tabac ? on est passés de 33 % grossièrement à 25 % d'utilisateurs du tabac dans la société, ce qui est encore plus élevé qu'ailleurs au Canada ? montre que malheureusement, comme vous le dites, ce type de mesure coercitive a un impact sur le taux de tabagisme. Parce que, disons-le franchement, un des deux objectifs du projet de loi est de diminuer le taux de tabagisme dans notre société et, oui, de dresser le plus d'obstacles possible pour l'utilisation du tabac dans les lieux publics. Et les fumeurs eux-mêmes nous disent: Bien, je vais probablement profiter de cette nouvelle loi là pour faire le pas décisif et arrêter cette habitude. Et ce n'est pas, ce n'est pas une hypothèse, c'est une réalité.
Alors, je pense que le Québec, ici, ne fait pas acte de précurseur, malheureusement. Il y a beaucoup de domaines de la santé, de la santé publique notamment, où le Québec a fait acte de précurseur. Dans ce domaine-là, nous sommes à la remorque, malheureusement. Nous voulons rattraper notre retard et rejoindre non seulement ce qui a été fait ailleurs, mais la prise de conscience de notre société puis aider même les fumeurs à se libérer de leur habitude, c'est comme ça qu'on aborde la chose.
Est-ce que, vous, vous partagez notre objectif de voir encore plus diminuer le nombre de fumeurs au Québec?
M. Dorval (Yves-Thomas): On partage les objectifs de santé publique, et ça veut dire qu'il va y avoir une décroissance, c'est inévitable. Et je reprends ce que vous avez dit, parce que vous avez mentionné, M. le ministre, qu'après la loi de 1998 on a assisté à une diminution. Non, ça fait depuis 1965 qu'il y a une diminution de la prévalence du tabac. Ça fait depuis 1981 que, de façon globale en termes absolus, les ventes diminuent de façon importante. Juste au Canada, l'année dernière, 6,1 %. De nouvelles mesures législatives... les mesures législatives actuelles fonctionnent déjà, puisqu'on a la preuve.
Maintenant, vous référez souvent à 25 %. J'entends ça de plus en plus. Je ne comprends pas, parce que les chiffres que j'ai, de Santé Canada, de l'enquête de surveillance de l'usage du tabac au Canada, précise qu'au niveau de la population totale, en 2004, c'est 22 %. Je ne sais pas si vos chiffres sont les mêmes ou pourquoi il y a...
M. Couillard: ...Canada.
M. Dorval (Yves-Thomas): Pardon?
M. Couillard: Au Canada.
M. Dorval (Yves-Thomas): Non, non, on me dit qu'au Québec, le tabagisme au Québec...
M. Couillard: Ah!
M. Dorval (Yves-Thomas): ...mais peut-être que je me trompe.
M. Couillard: C'est 25 %.
M. Dorval (Yves-Thomas): O.K. Alors, je vais faire vérifier ces informations-là. Mais ce qui est vrai, c'est que le tabac diminue, le tabagisme diminue. C'est une situation, une tendance inévitable, et on fait face à cette situation-là, et on va s'organiser en fonction de ça.
Mais vous avez parlé de stratégie marketing. La Cour suprême dit qu'on a le droit d'avoir des activités de communication, au niveau des marques, dans le contexte où on est en concurrence, et ça, c'est très important. On n'en parle jamais. Il n'y a pas une situation de monopole. Vous savez, on est dans une situation de marché économique où des concurrents, des compagnies fabricantes des produits du tabac sont en concurrence. Elles ont des marques, et ces marques... 1 % de part de marché de diminution, d'une compagnie à l'autre, c'est énormément, en chiffre d'affaires. Alors, c'est l'objectif, permis par la Cour suprême, de faire des activités qui permettent aux fabricants et aux consommateurs de pouvoir identifier les différentes marques disponibles.
Vous savez, ce n'est pas un produit de consommation comme les autres, mais effectivement: pas de publicité à la télévision, pas de publicité à la radio, pas de publicité dans les magazines, dans les médias écrits, pas de publicité sur Internet, pas de publicité en communication directe. Il n'y a même plus de commandites: 50 % du paquet exproprié. Oui, ce n'est pas un produit comme les autres, c'est déjà évident, et aller plus loin, ça peut commencer à être peut-être abusif.
M. Couillard: Bien ça, on laissera la société juger de ça puis les tribunaux, parce qu'on sait qu'une des habitudes... Oui, c'est normal, c'est légitime, parce que les gens ont des droits et des recours qu'ils peuvent faire adopter. C'est qu'en général, effectivement, il y a de nombreux recours légaux à chaque fois qu'un État ou une législature adopte une mesure législative contraignant l'usage du tabac.
Mais, puisque vous êtes dans les décisions de la Cour suprême, comment accueillez-vous la décision de la Cour suprême dans l'affaire de la Saskatchewan, récemment, pour reconnaître la possibilité pour un État d'agir dans l'étalage particulièrement et la promotion?
M. Dorval (Yves-Thomas): Bien, en fait, la décision en Cour suprême portait sur un élément. Je vais laisser M. Bordan discuter de cette question-là. Mais il faut savoir qu'il y a toujours une cause pendante à ce sujet-là. Mais je vais laisser M. Bordan.
M. Bordan (Gregory Brian): En Cour suprême, il était question de partage de compétences et précisément qu'on n'avait pas de façon directe soulevé la question de charte. Donc, cette question reste ouverte, et effectivement la Cour suprême a dit qu'à cet égard il faudrait voir à l'avenir. Alors, c'est...
Mais, si vous permettez, M. le ministre, vos questions portent sur des grands principes, et M. Dorval a bien commencé en disant que nous ne sommes pas ici pour contester ces grands principes. Les vraies questions que nous voulons vous adresser aujourd'hui: Quelle sera l'utilité d'ajouter, par exemple à l'article 21.2, les mots «effectuée par le fabricant»?
Il y a une disposition qui était compréhensible, qui interdisait un certain type de marketing ou permettait un certain type, c'était relativement compréhensible. On vient ajouter quatre mots. Nous vous disons que nous ne comprenons pas qu'est-ce qui est visé par cette loi, par cette modification. Qu'est-ce que l'ajout de ces mots viendra... en quoi ça viendra bonifier les objectifs que vous avez fixés?
Je pense que le débat nécessaire à ce stade-ci, c'est à l'égard... le libellé, les dispositions précises dont nous discutons dans les observations.
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(12 heures)
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M. Couillard: Bien, je l'ai expliqué tantôt, les dispositions qui sont proposées font état des observations des dernières années. S'il n'y avait pas eu l'adoption de pratiques de marketing telles que les «cigarette girls» ou les points de vente un peu désorganisés, il ne faudrait pas être plus resserrés que nous le sommes actuellement. C'est justement devant la constatation des dernières années qu'on a jugé qu'il était nécessaire d'aller encore plus loin dans le contrôle des pratiques de marketing.
M. Bordan (Gregory Brian): Et ce n'est pas une contestation globale que nous faisons aujourd'hui. Nous soulevons des points précis à l'égard du libellé de plusieurs des dispositions. Et je pense qu'il faut se poser la question: Est-ce que les problèmes que nous soulevons, est-ce que ce n'est pas possible de les régler tout en gardant la politique globale? On pourrait être d'accord ou pas d'accord avec ça, ce n'est même pas ça qui est en jeu dans nos observations.
Et puis effectivement, par exemple le 21.2°, c'est possible qu'en essayant de bonifier la loi on vient de créer une ambiguïté qui va faire en sorte que quelque chose qui, avant, avait un certain impact, finalement, on va le déclarer invalide parce que c'est incompréhensible.
Je pense, c'est important de porter l'attention sur le détail et se poser la question: En quoi ce détail ? et pas tous, certains ? va amener à atteindre les objectifs de santé publique?
Le Président (M. Copeman): Très bien. Merci. Mme la députée de Rimouski et porte-parole de l'opposition officielle en matière des services sociaux.
Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Bienvenue, messieurs. Dites-moi, j'aimerais vous parler des étalages. C'est un sujet qui a été discuté tout au long de nos débats. Parce que, vous savez, il y a plusieurs provinces qui ont interdit les étalages comme tels: il y a la Saskatchewan, le Manitoba, le Nunavut et maintenant l'Ontario. Ce serait quoi, les restrictions sur les étalages qui seraient acceptables pour vos entreprises?
M. Dorval (Yves-Thomas): Ça, c'est le genre... J'ai terminé ma présentation en disant que nous sommes prêts à travailler avec le ministère ou avec les membres de la commission pour trouver des aménagements qui rejoignent des objectifs qui soient raisonnables tout en permettant aux compagnies de continuer à se concurrencer au niveau des marques. Il y a moyen sûrement de trouver des façons d'avoir des présentoirs qui rencontreraient ces objectifs.
Je voudrais attirer votre attention, Mme la députée, sur le fait que le ministère a fait une consultation, au mois de février, et, si on prend par exemple en matière de réponses, il y a 542 individus qui ont fait partie de la consultation. Cette question a intéressé ? la question précisément des étalages aux points de vente ? plus de 90 % des répondants ayant donné leur avis. La majorité des répondants s'oppose à toute intervention en ce qui a trait à l'étalage aux points de vente. Ça ne semble pas être un phénomène qui est exigé, là, par tout le monde. Mais par contre, si vous avez ? et vous avez ? cet intérêt, cette question-là de trouver des solutions, aucun problème, on est prêts à s'asseoir. Le problème qu'on a, c'est qu'en 15 minutes ou en trois quarts d'heure on ne peut pas régler toutes ces questions-là ici.
Mme Charest (Rimouski): Bien qu'en 15 minutes on ne règle pas tout, mais vous avez sûrement réfléchi, et j'ai lu votre mémoire, en même temps que vous l'avez lu, et j'ai compris ce qui était écrit dedans.
Moi, ce que je vous demande, c'est: Avez-vous des pistes? Avez-vous des solutions sur quels types d'étalages seraient acceptables pour vous, les entreprises? Parce que, là, je veux bien qu'on ne fasse pas tout le débat, mais vous avez sûrement des pistes?
M. Bordan (Gregory Brian): Je pense que les balises ont été établies par la Cour suprême. Ce qui serait acceptable, c'est ce qui nous permettrait de démontrer qu'il y ait un lien entre une certaine pratique et la consommation globale.
L'article 24.1° qu'on propose d'adopter interdirait de mettre une bordure autour d'un présentoir qui comporte par exemple des petits triangles verts dont l'objectif serait simplement de porter l'attention sur une marque plutôt qu'une autre marque. C'est précisément de ce type de concurrence entre marques que la Cour suprême a dit qu'elle devrait être permise.
Si vous me permettez une intervention un peu plus personnelle, moi, j'ai certainement regardé de nombreuses études sur l'impact de diverses activités de promotion. On peut arriver à toutes sortes de conclusions, il faudra faire l'analyse détaillée de chacune de ces études. À un moment donné, je me dis: Comment savoir laquelle de ces études est la mieux ancrée dans la réalité? Et je n'ai aucun autre point de repère que de regarder des expériences personnelles. J'ai des enfants. J'ai une fille pour qui la cigarette n'aura jamais fait aucun attrait quelconque. Pour elle, il n'y aura jamais de question est-ce qu'elle devient fumeuse ou pas. J'ai un fils de maintenant 10 ans. Il est tout à fait différent. Il n'a jamais vu de la publicité de sa vie, mais, pour lui, je pense que c'est un aspect un peu macho. La réalité, c'est, il regarde dans la rue et dit: Ah! cet adolescent, il fume, c'est cool. Lui, il va avoir une décision à prendre. Je me demande... je me pose la question à savoir si, de quelque façon, avoir une bordure avec des triangles verts, par exemple, autour de marques, va avoir une influence quelconque sur cette décision et je suis persuadé que la réponse est non.
Alors, c'est là le point de notre intervention, c'est de permettre une saine concurrence entre marques et de bien identifier quels sont les objectifs qui devraient être visés, comment les atteindre, tout en permettant une certaine concurrence de marques, et que les règles soient bien claires, clairement établies. Ici, ce qu'on interdirait dans... ce qu'on permettrait dans 24.1°, c'est précisément la seule chose qui serait permise au fédéral. Il ne reste pas beaucoup de place pour une concurrence saine.
Mme Charest (Rimouski): Merci, M. Morgan. M. Dorval, vous avez affirmé tout à l'heure que, depuis 1965, la prévalence du tabac est à la baisse, est à la baisse continuellement. Cependant, on sait maintenant qu'Imperial Tobacco, hein, de 1950 jusqu'en 1997, a fait des études mensuelles, et ces études, c'était soit le Monthly Monitor ou Continuous Market Assessment, et c'étaient des études qui portaient sur la population, incluant les adolescents de 15 ans et plus.
Est-ce que vous êtes prêts à rendre ces études publiques? Parce que ça pourrait peut-être faciliter en tout cas la compréhension de vos arguments, compte tenu des études que vous avez faites, depuis de longues années, sur de longues périodes, et qui sont sûrement pertinentes au débat que nous avons?
M. Dorval (Yves-Thomas): Je peux répondre. Je vais commencer par répondre deux choses. La première, ce ne sont pas des études que la compagnie faisait nécessairement. Je ne sais pas exactement, précisément les études dont vous mentionnez, mais il existe des études, d'accord, et il y a des questions que vous pouvez rajouter dans les études, etc., premièrement.
Deuxièmement, à l'époque, quand on se reporte avant, il y a bien des années, l'âge légal était 16 ans et plus, d'accord? Le troisième élément, c'était que les catégories de recherche ne faisaient pas une différence entre 15, 16 ans, 17 ans, 18 ans, etc.
Et le dernier point le plus important, la raison pour laquelle la compagnie avait ces informations-là, que nous n'avons plus depuis beaucoup longtemps maintenant, ce sont des informations qui permettaient d'estimer quel serait le marché futur. Parce qu'en tant qu'entreprise, lorsqu'on fait des évaluations ou de la planification, c'est important de connaître le futur de la consommation. Et ce n'était pas pour viser des clientèles particulières, c'était pour identifier quel allait être le marché, parce que n'importe quelle entreprise doit définir, dans le long terme, quel va être le marché par rapport à sa viabilité dans le futur. Et c'est essentiellement ça.
Maintenant, je vais prendre en note vos questions. Je vais vérifier exactement quelles sont les études et puis je pourrai... Je ne sais pas si M. Bordan...
M. Bordan (Gregory Brian): Seulement dire que certaines de ces études font partie du record... du dossier public qui ont été déposées à titre de pièces dans les contestations constitutionnelles.
Mme Charest (Rimouski): Dites-moi...
M. Dorval (Yves-Thomas): Donc, elles sont déjà publiques.
Mme Charest (Rimouski): ...vous nous parlez d'études de marché, mais, quand on fait des études de marché, sans être une spécialiste du marketing, on vérifie les clientèles cibles, on les ? comment je dirais? ? on les partage, enfin on a... selon les catégories d'âge, selon le sexe, et tout ça. Vos études ont sûrement ces informations-là, ces données de base là, parce que vous ne pouvez pas établir de marché sans avoir minimalement ce type d'indicateur. Dites-moi, est-ce qu'en vertu de la loi n° 112 qui s'en vient, vous avez fait une étude pour essayer d'évaluer l'impact de la loi sur vos activités?
M. Dorval (Yves-Thomas): Non.
Mme Charest (Rimouski): Vous n'avez aucune...
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(12 h 10)
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M. Dorval (Yves-Thomas): Par contre, je peux vous dire qu'une disposition de la loi, que j'ai mentionnée tout à l'heure, et j'aimerais y revenir, ça, ça nous apparaît être une mesure qui n'est pas justifiée par les objectifs de santé publique, le fait de ne plus pouvoir offrir une compensation ? je ne sais pas le terme exact, là ? aux gens qui participent à une étude dans n'importe quel domaine, je n'ai jamais vu ça. Ça ne s'est jamais vu, et je ne vois pas quelle est la relation entre ça et l'objectif de santé publique.
L'objectif, c'est de connaître quelles sont les préférences des fumeurs adultes, ce qui est tout à fait légitime. Si vous changez le goût d'un produit parce que vous introduisez un nouveau principe de fabrication, par exemple, en changeant le papier, vous changez le goût de la cigarette, il faut savoir, en produisant ce nouveau produit, quelle va être l'acceptabilité, l'intérêt ou la préférence du consommateur adulte. Si vous ne pouvez pas effectuer ces recherches-là parce qu'il y a une disposition dans la loi qui vous interdit de pouvoir compenser les gens qui font partie des «focus groups» par exemple, c'est aberrant.
Mme Charest (Rimouski): Et vos «focus groups» ont strictement comme objet la clientèle adulte. Vous n'avez pas en quelque part...
M. Dorval (Yves-Thomas): Fumeurs adultes.
Mme Charest (Rimouski): Et ça, vous êtes fermes sur cet élément.
M. Dorval (Yves-Thomas): Et ça fait partie des contrats qui sont donnés aux firmes, et c'est mentionné, et c'est très précis. Et, même, dans la majorité des cas, à ma connaissance, on ne fait que des études sur des groupes de 19 ans et plus ou... parce que, dans certaines provinces, c'est 19 ans et plus, alors on essaie d'avoir un dénominateur commun.
Mme Charest (Rimouski): On sait très bien que les jeunes de 18-24 ans ne réagissent pas du tout de la même façon au tabac que les jeunes de 11-15 ans, et là-dessus c'est ça que je tente de vérifier avec vous.
M. Dorval (Yves-Thomas): Aucune étude. Nous n'avons aucune étude et ne faisons aucune étude sur les jeunes en bas de 19 ans ou 18 ans, en fait, toujours les personnes d'âge mineur. On ne va même pas chercher l'information; comme ça, on ne sera jamais accusés même de regarder l'information.
Mme Charest (Rimouski): Dans les points de vente, le marketing que vous faites, ça vous occasionne quand même des dépenses. Quels pourcentages de vos dépenses de marketing sont consacrés aux points de vente comme tels? C'est combien, exactement?
M. Dorval (Yves-Thomas): Je ne saurais vous dire précisément, mais je peux prendre la question en note et je vais vous envoyer... je vais envoyer à la commission la réponse à cette question. Mais par contre je peux vous dire que nos activités aux points de vente sont des investissements qui visent la concurrence entre marques. J'ai dit tout à l'heure qu'un point... un pourcentage de part de marché, pour n'importe quelle industrie dans le domaine des produits de consommation de masse, ça représente énormément. Alors, le marketing qui s'explique par la mise en marché aux points de vente est un marketing qui s'explique en termes de concurrence de masse pour des parts de marché. Il n'y a rien là-dedans qui vise l'augmentation du nombre de consommation, puisque, si c'était le cas, on serait de très mauvais gens de marketing, puisqu'il y a une diminution constante de la consommation du tabac. C'est la concurrence entre les marques, ça ne génère pas des nouveaux consommateurs.
Mme Charest (Rimouski): Si vous êtes conscients qu'il y a une diminution constante des fumeurs, est-ce que vous avez pu analyser... la diminution, est-ce qu'elle se retrouve dans les groupes d'âge des 35-50 ans, ou dans les 18-24, ou plus chez les hommes que chez les femmes? Est-ce que vous avez pu faire ces distinctions-là?
M. Dorval (Yves-Thomas): Bien, en fait, ce sont les informations de Santé Canada, de Statistique Canada qui sont utilisées à cet effet-là. Il n'y a pas d'informations précises que nous allons chercher davantage. On utilise des informations qui sont publiques. Juste un point...
M. Bordan (Gregory Brian): Mais c'est dans toutes les catégories d'âge qu'on voit maintenant une diminution, et ça fait des années.
Mme Charest (Rimouski): J'avoue que je suis très surprise que des entreprises comme Imperial Tobacco et toutes les autres, selon vos dires, n'ont pas d'études plus raffinées que ce que vous nous dites. Ça me surprend beaucoup. Ça peut arriver, là, mais je suis très surprise qu'en 2005, avec tout ce que l'on connaît à la fois du marketing commercial, et du marketing social, et même du marketing viral, vous n'ayez pas d'études, comme c'est connu que vous en faites, plus raffinées que ce que vous nous dites.
Mais, ceci étant dit...
M. Dorval (Yves-Thomas): M. le Président...
Le Président (M. Copeman): Oui.
M. Dorval (Yves-Thomas): C'est parce que vous vous étonnez sur une question, et je n'ai pas répondu à une question de ce sens-là. Vous m'avez posé des questions sur des recherches auprès des personnes d'âge mineur, d'abord. Je vous dis: On n'en a pas, on n'en fait pas. Alors, vous êtes étonnée. Mais, non, ce n'est pas permis de vendre à des mineurs, on ne fait pas d'études de marché chez les personnes d'âge mineur, ce n'est pas surprenant, mais on fait des études de marché...
Bien, on fait des études de marché, on prend les informations disponibles, on fait des «focus groups». J'ai mentionné qu'un de nos points principaux qui fait l'objet de cette démarche-là, c'est la question de la recherche auprès des consommateurs. Alors, oui, on en fait, je vous l'ai dit, et ces documents-là... Et d'ailleurs on doit informer Santé Canada lorsqu'on fait des études. Il faut rapporter à Santé Canada les études que nous faisons.
Mme Charest (Rimouski): Un autre objectif du projet de loi que nous avons à l'étude, c'est de diminuer le taux de tabagisme chez les adolescents, chez les jeunes du secondaire entre autres. Vous déclarez dans votre mémoire que vous êtes d'accord pour l'interdiction de fumer soit dans les établissements d'enseignement et sur leurs terrains adjacents, mais vous ne nous avez pas déclaré que vous étiez d'accord avec l'interdiction de fumer chez les jeunes de moins de 18 ans et chez les personnes, de toute façon. Moi, j'aimerais savoir, par rapport aux jeunes, cet objectif de les protéger dès le départ, est-ce qu'on peut compter sur votre appui?
M. Dorval (Yves-Thomas): De? Je n'ai pas bien compris.
Mme Charest (Rimouski): Protéger les jeunes.
M. Dorval (Yves-Thomas): Nous avons offert notre contribution. Nous avons mis sur pied des programmes. Nous subventionnons des programmes auprès des jeunes pour s'adresser non seulement dans certains cas sur la question seulement du tabagisme... parce que le tabagisme, c'est des comportements à risque. J'ai eu des adolescents et j'en ai encore une, et on sait que ce sont les comportements à risque qui sont le coeur du problème, et on investit de ce côté-là. Et on a offert notre contribution au ministère de la Santé, et le fonctionnaire à qui nous avons parlé a dit: Jamais le gouvernement du Québec ne travaillerait avec une entreprise de tabac.
Le Président (M. Copeman): Mme la députée, monsieur...
Mme Charest (Rimouski): Merci, messieurs.
Le Président (M. Copeman): ...c'est tout le temps qui est imparti. Alors, M. Dorval, M. Bordan, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom d'Imperial Tobacco Canada ltée, Rothmans, Benson & Hedges et JTI-Macdonald corporation.
Et j'invite immédiatement les représentants de l'Institut national de santé publique du Québec à prendre place à la table.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre! Alors, la commission poursuit ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentants de l'Institut national de santé publique du Québec.
L'ordre du jour nous indiquait un certain nombre de personnes. Malheureusement, je ne sais pas qui va être le...
Institut national de santé publique
du Québec (INSPQ)
M. Morin (Réal): Je vais présenter, au nom de l'institut.
Le Président (M. Copeman): Puis vous êtes docteur...
M. Morin (Réal): Réal Morin.
Le Président (M. Copeman): Dr Morin, merci. Alors, c'est avec plaisir que nous vous accueillons cet après-midi. Vous avez 20 minutes, Dr Morin, pour votre présentation... excusez-moi, 15 minutes pour votre présentation, et c'est suivi par un échange d'une durée maximum de 15 minutes avec les parlementaires des deux côtés de la table.
Je vous prierais de présenter votre confrère et vos consoeurs qui vous accompagnent, et, par la suite, immédiatement enchaîner avec votre présentation.
M. Morin (Réal): Alors, M. le Président, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, membres de la commission, c'est avec plaisir que l'Institut national de santé publique du Québec a accepté de venir exprimer son point de vue sur le projet de loi n° 112.
Je m'appelle Réal Morin et je suis médecin spécialiste en santé communautaire et directeur scientifique à l'institut. Alors, je vous présente, à mon extrême gauche, Dre Johanne Laguë, médecin spécialiste en santé communautaire et coordonnatrice scientifique de l'Unité des habitudes de vie, incluant l'équipe de recherche sur le tabagisme; à ma gauche immédiate, Dre Michèle Tremblay, médecin-conseil, spécialiste du dossier du tabagisme à l'institut et responsable du projet visant à mobiliser les professionnels de la santé à intervenir auprès des fumeurs; et, à ma droite, Dr André Gervais, pneumologue clinicien, spécialiste-conseil à l'institut et directeur du Centre d'abandon du tabac du Centre hospitalier de l'Université de Montréal.
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(12 h 20)
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Je voudrais excuser l'absence du Dr Richard Massé, président-directeur général de l'institut. Il est, aujourd'hui même, à Montréal pour recevoir le Dr Lee Jong-Wook, qui est directeur général de l'Organisation mondiale de la santé.
Chaque année, plus de 13 000 Québécois et Québécoises, c'est-à-dire 36 personnes par jour, décèdent de maladies causées par le tabagisme. Encore aujourd'hui, 1,7 million de Québécois sont toujours aux prises avec la dépendance au tabac qui tue un fumeur sur deux. La fumée du tabac affecte également la santé des non-fumeurs qui la respirent. Elle serait responsable du décès, chaque année, par cancer du poumon ou par maladie du coeur, de plus de 350 non-fumeurs exposés à la fumée de tabac secondaire à la maison. Un estimé qui tient compte d'une exposition plus large, comme celle dans les lieux de travail, les automobiles et les lieux publics, chiffre plutôt le nombre de décès de non-fumeurs à environ 1 500 à chaque année.
L'adoption à l'unanimité de la Loi sur le tabac, en 1998, a permis au Québec de franchir des étapes importantes. En 1998, le Québec était à l'avant-garde de la lutte contre le tabac. En 2005, alors que plusieurs pays et provinces canadiennes se sont dotés de nouveaux instruments législatifs de lutte contre le tabagisme, le gouvernement du Québec peut encore aspirer avec le projet de loi n° 112 reprendre la première place.
Le projet de loi n° 112 vise sans contredit à renforcer la protection de la santé des citoyens qui ne font pas l'usage du tabac, à réduire les possibilités d'achat de produits du tabac par les mineurs et à restreindre davantage la publicité et la promotion de ces produits hautement néfastes pour la santé. C'est pourquoi l'institut appuie très fortement ce projet de loi qui constitue une avancée significative afin d'améliorer la santé des Québécois et des Québécoises. Néanmoins, des améliorations au projet de loi apparaissent à l'institut nécessaires et faisables, et les données scientifiques pour les appuyer, disponibles et probantes.
Parlons d'abord de la protection de la santé des non-fumeurs face à l'exposition à la fumée du tabac. Il ne fait aucun doute maintenant que la fumée de tabac secondaire cause de nombreuses maladies, tant chez les adultes que chez les enfants. On parle de maladies du coeur, de cancers, d'asthme, de syndrome de mort subite du nouveau-né, et il y en a d'autres aussi.
Certains tentent encore d'ébranler ce consensus scientifique, comme vous avez pu l'entendre au cours des travaux de la commission. Sachez que les articles scientifiques tendant à démontrer l'absence d'impact de la fumée secondaire sur la santé ont 88 fois plus de chances d'avoir été financés par l'industrie du tabac que ceux démontrant un impact. Quand on vous parle, par exemple, d'une étude comme celle du British Medical Journal, en voilà justement une, subventionnée par l'industrie du tabac, qui n'a pas démontré d'augmentation significative du risque de cancer. Même les journaux scientifiques réputés ne sont pas à l'abri de l'intrusion d'articles de qualité douteuse. D'ailleurs, la communauté scientifique s'est montrée très sévère auprès de l'éditeur de la revue.
Selon certaines études, une exposition à de la fumée de tabac pendant aussi peu que 30 minutes pourrait déclencher un infarctus du myocarde chez des personnes non-fumeuses qui auraient les facteurs de risque associés à la maladie cardiaque. La fumée de tabac secondaire est considérée comme étant l'un des agents les plus cancérigènes pour l'humain par plusieurs organismes prestigieux. Elle contient entre autres six substances auxquelles les travailleurs du Québec ne devraient jamais être exposés, selon la loi même de la santé et de la sécurité du travail du Québec.
L'exposition à la fumée de tabac est particulièrement préoccupante pour les travailleurs des bars, des salles de billard, des bingos, des salles de quilles et des établissements de jeu parce qu'ils sont exposés à des concentrations élevées de fumée de tabac, fumée provenant de clients des établissements où ils travaillent.
Le risque accru de cancer du poumon auquel ils sont exposés à cause de leur travail a été scientifiquement démontré. Une étude, menée en 1998 auprès de 50 Québécois travaillant dans des restaurants de la région de Montréal, a révélé que ceux-ci avaient, sur une période de 40 ans, un risque supplémentaire de mortalité par cancer du poumon ou maladie coronarienne d'environ 8 %. Ce taux, appliqué à l'ensemble des travailleurs québécois des restaurants et des bars, se traduirait par plus de 300 décès à chaque année. Le projet de loi n° 112 vient corriger cette lacune qui touche un très grand nombre de travailleurs québécois qui ne sont pas couverts par la loi actuelle, et l'institut convient que c'est une excellente mesure.
En ce qui regarde les fumoirs, le projet de loi n° 112 prévoit la possibilité d'aménager des fumoirs dans les lieux visés par la loi qui ne seraient utilisés que par les dirigeants ou employés de ces lieux ainsi que par les personnes qui y sont hébergées. Ainsi, en théorie, les employés non-fumeurs ne seraient à peu près pas exposés à de la fumée de tabac s'ils n'entrent pas dans le fumoir.
Toutefois, il est permis de s'interroger sur le niveau de protection que de tels fumoirs pourraient offrir. Plusieurs expériences par rapport à la mise en place de fumoirs du type de ceux prévus dans le projet de loi n° 112 ont révélé que la fumée de tabac s'échappe du fumoir lors de l'ouverture et de la fermeture de la porte, causant ainsi une contamination de la zone non-fumeurs, de telle sorte qu'il serait nécessaire d'installer, à la porte du fumoir, une sorte de tunnel de 8 pi de long pour minimiser la propagation de fumée de tabac dans l'établissement pourtant non fumeur.
Les systèmes de ventilation nécessitent de nombreux ajustements. Les bris fréquents des systèmes de ventilation sont plutôt difficiles à détecter, et ainsi plusieurs de ces systèmes défectueux ne sont pas réparés. Les systèmes de ventilation ne sont généralement pas en opération après les heures d'ouverture, et plusieurs heures sont nécessaires après l'arrêt de la combustion du tabac pour diminuer la concentration de la fumée de tabac. Ainsi, les employés non fumeurs à qui on demanderait d'assurer l'entretien de ces fumoirs seraient exposés à des contaminants de la fumée de tabac non encore éliminés. Les coûts d'installation selon les normes prévues dans le projet de loi et les coûts d'entretien sont très élevés. Les coûts pour la société sont aussi élevés à cause de l'obligation de former les inspecteurs spécialisés en ventilation qui s'assureront de la conformité des fumoirs.
Enfin, l'instauration de fumoirs n'encouragera pas les employés fumeurs à cesser de fumer, malgré le fait que la grande majorité ? M. le ministre, l'a dit, il y a quelques instants ? d'entre eux désire cesser de fumer. Il est en effet bien démontré que des interdictions totales de fumer en milieu de travail ont plus d'impact sur le renoncement au tabac et sur la diminution du nombre de cigarettes fumées que des interdictions partielles.
Pour toutes ces raisons et parce qu'il est impossible de garantir que les non-fumeurs ne seront pas exposés à la fumée secondaire, l'institut maintient sa recommandation à l'effet de ne pas permettre la mise en place de fumoirs dans les lieux visés par la loi et suggère au gouvernement d'amender son projet de loi en ce sens.
Concernant les chambres allouées à des fumeurs, le projet de loi n° 112 prévoit allouer jusqu'à 40 % des chambres à des fumeurs quand il s'agit de personnes vivant dans des établissements qui représentent pour eux un milieu de vie. Nous comprenons qu'il soit particulièrement difficile d'interdire de fumer aux usagers qui demeurent en permanence en établissement comme dans un centre hospitalier de soins de longue durée. Toutefois, il est essentiel de se préoccuper également de la santé des résidents non fumeurs qui sont déjà souvent malades eux-mêmes et dont la condition peut être aggravée par la fumée de tabac ainsi que des employés non fumeurs qui offriraient des services dans ces chambres où il serait permis de fumer.
Or, il n'existe pas de système efficace de ventilation et de filtration qui permette de réduire significativement la présence de tabac dans l'environnement. C'est pourquoi l'institut estime que la mise en place de fumoirs avec ventilation indépendante respectant les critères les plus stricts permettrait de mieux circonscrire les lieux contaminés dans ces établissements et de diminuer l'exposition de tous ses occupants. Les fumoirs ventilés ne sont pas la panacée, on l'a dit, mais, pour l'institut, il s'agit là du meilleur équilibre actuellement possible entre les droits des fumeurs hébergés et les besoins et les droits des non-fumeurs, travailleurs comme résidents.
On pourrait proposer les mêmes mesures pour les établissements d'hébergement touristique. On convient cependant que l'application à court terme de règlements interdisant de fumer dans toute chambre d'hôtel serait d'application difficile. Peut-être que, lors d'une future révision de la loi, le gouvernement pourra faire ce pas supplémentaire.
Cependant, pourquoi allouer 40 % des chambres à des fumeurs, alors que la prévalence du tabagisme est maintenant à 26 % et que le Québec a comme objectif d'atteindre une prévalence sous la barre des 20 % d'ici 2012? L'institut propose de réduire le pourcentage à 20 % et de prévoir la possibilité de réajuster cette norme en fonction de la baisse de prévalence qui sera observée au cours des prochaines années.
Concernant l'interdiction de fumer sur les terrains des écoles primaires et secondaires, évidemment l'institut approuve tout à fait cette interdiction, de même que le temps laissé au milieu scolaire pour mettre en place les activités permettant de faciliter l'application de l'interdiction sur les terrains des écoles.
Quelques mots sur la vente de tabac. D'abord, la réduction du nombre de points de vente. Il existe 20 000 points de vente de tabac au Québec. En France, il y a 34 000 points de vente pour une population huit fois plus nombreuse qu'au Québec. Si on faisait un ratio points de vente sur population, en fait on remarquerait qu'il y a cinq fois plus de points de vente au regard de la population au Québec par rapport à la France.
Étant donné que la présence envahissante des produits du tabac chez un très grand nombre de détaillants est incompatible avec son caractère nocif pour la santé; que l'accès facile et fréquent incite à surestimer la prévalence de l'usage du tabac, un des déterminants majeurs du tabagisme chez les jeunes; que le fait de réduire le nombre de points de vente des produits du tabac facilite évidemment la surveillance de l'application de la loi; alors, pour ces raisons, nous sommes entièrement d'accord avec le projet de loi qui définit un point de vente de tabac comme un lieu fixe et fermé et qui interdirait toute vente par appareil distributeur.
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(12 h 30)
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De plus, dans un esprit de cohérence avec les autres articles de la loi, nous appuyons l'interdiction d'exploiter des points de vente dans les lieux comme les cégeps, universités, dans les lieux où se déroulent des activités sportives, culturelles et artistiques et dans des lieux où il est interdit de fumer, comme les bars et les brasseries. Enfin, nous appuyons l'accroissement de la sévérité des sanctions pénales.
Quant à l'étalage des produits du tabac dans les points de vente, l'institut recommandait, en février 2005, qu'aucun produit du tabac ne soit visible dans quelque point de vente que ce soit, et nous encourageons très fortement le gouvernement à considérer un amendement en ce sens. Plusieurs arguments militent en faveur d'une interdiction de l'étalage des produits du tabac dans les points de vente.
L'industrie du tabac investit des sommes colossales et de plus en plus importantes dans la promotion dans les points de vente. Nous avons entendu des témoignages, hier, le témoignage d'un expert en marketing qui a expliqué pourquoi la promotion aux points de vente est si importante pour influencer les décisions d'achat du consommateur. L'industrie affirme que la promotion, dont les étalages, n'a pour but que d'informer le fumeur de leurs produits pour ainsi recruter des fumeurs adultes. Or, les études indiquent que moins de 10 % des fumeurs changent de marque de cigarettes.
Plusieurs facteurs influencent les jeunes à expérimenter le tabac, dont leur réceptivité à la promotion du tabac et leur estimation de la prévalence du tabac. Quand on entre dans un dépanneur, par exemple, et que l'on voit un mur complet de cigarettes, il est difficile d'imaginer que seulement le quart des Québécois fument. Cela transmet en effet l'impression, pour les jeunes en particulier, que le tabagisme est beaucoup plus répandu qu'il ne l'est en réalité. Le fait de voir des murs de cigarettes peut certainement ébranler la motivation des fumeurs qui viennent de cesser de fumer. Vous le savez, la dépendance au tabac est très puissante et nécessite de cinq à six tentatives en moyenne avant d'atteindre le succès final.
Enfin, la présence de produits du tabac à côté des friandises ? d'autres l'ont dit aussi ? reflète une image faussement bénigne, très loin de son caractère nocif. C'est pourquoi plusieurs pays ont adopté les mesures pour interdire les étalages des produits du tabac dans les commerces. Plus près de nous, la Saskatchewan ? il en a été souvent question ? interdit, depuis 2002, l'exposition des produits du tabac aux points de vente accessibles aux mineurs. Quelques mois après la mise en application de cette interdiction, intéressant de noter qu'on a relevé un taux de conformité très élevé, et aucune fermeture de magasin n'a été notée ni de congédiement d'employés. Nous encourageons donc très fortement le gouvernement à inclure une telle mesure dans un projet de loi qui vise à débanaliser, dénormaliser et réduire l'usage du tabac.
En conclusion, le projet de loi n° 112 représente une avancée significative pour le contrôle du tabac au Québec. Nous encourageons toutefois le gouvernement à revoir certains points de son projet de loi, à savoir: éliminer les fumoirs dans les milieux visés par la loi; reconsidérer l'article qui fait mention de 40 % de chambres allouées à des fumeurs dans des centres d'hébergement qui constituent un milieu de vie pour permettre uniquement la mise en place de fumoirs avec ventilation indépendante et pression négative; reconsidérer l'article qui fait mention de 40 % de chambres allouées à des fumeurs dans des centres d'hébergement touristiques pour réduire ce nombre à 20 %; interdire l'étalage des produits du tabac dans les points de vente.
Enfin, nous croyons important que soit retiré l'article 12 qui permet au gouvernement de déterminer par règlement les cas, conditions et circonstances où il est permis de fumer dans des lieux où il est interdit de le faire en vertu de l'article 2 parce qu'un tel article est incohérent avec l'esprit même de la loi qui entend limiter les lieux d'exposition au tabac.
Et, pour terminer, si le gouvernement conservait la possibilité d'installer des fumoirs, nous suggérons à tout le moins de retirer la possibilité de déterminer par règlement toute autre catégorie de personnes pouvant utiliser un fumoir. De plus, il serait important de permettre aux municipalités d'adopter des mesures plus sévères. Je vous remercie, M. le Président et MM. les membres de la commission, de votre attention.
La Présidente (Mme James): Merci beaucoup. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Couillard: Merci, Mme la Présidente. Merci, Dr Morin, mesdames messieurs, pour votre visite. Afin de clarifier quelque chose sur la validité des données scientifiques disponibles, est-ce qu'à l'avis de l'institut il existe une quelconque ambiguïté sur les effets sur la santé de la fumée de tabac dans l'environnement ainsi que sur le caractère addictif des produits du tabac? Est-ce qu'il y a des zones grises d'incertitude comme on a entendu pendant la commission?
M. Gervais (André): Oui. Pour la première question, qui traite de la fumée secondaire, je pense que maintenant il n'y a aucun doute sur le fait que la fumée secondaire est responsable de cancer du poumon et aussi de maladies cardiaques, et de beaucoup des autres maladies qu'on a mentionnées tout à l'heure, mais c'est les deux principales qui, du point de vue nombre de mortalités, sont à citer. C'est les maladies cardiaques et le cancer du poumon. Et je pense que ce qui est devenu intéressant au cours des dernières années, c'est qu'on appréciait peu l'importance ou le danger de la fumée secondaire au sujet des maladies cardiaques. Et on a mentionné d'ailleurs, tout à l'heure, qu'en à peine 30 minutes on peut faire des changements dans l'organisme, au niveau du sang, au niveau des vaisseaux, qui peuvent même provoquer des infarctus. Alors donc, je pense qu'il n'y a aucun doute.
On nous a parlé hier de quelques études où il y a des résultats négatifs. On a parlé d'une étude qui a été publiée dans le British Medical Journal, qui a été citée hier après-midi, qui ne montrerait aucun risque de cancer. C'est une étude qui était subventionnée par l'industrie du tabac. Et, dans cette étude-là, il y avait une faille importante du point de vue du groupe de contrôle qui était un groupe de contrôle qui avait été aussi exposé à la fumée secondaire, ce qui a été la grande critique de cette étude-là. Alors, comme on le mentionnait tout à l'heure, quand une étude est publiée par l'industrie du tabac, il y a beaucoup plus de conclusions qui sont négatives au sujet des risques. Et on a même fait une revue d'une centaine d'études sur la fumée secondaire et des risques ? 106 études ? et on a trouvé là-dedans que, quand l'étude avait un auteur qui venait de l'industrie du tabac, il y avait 88 fois plus de chances que les conclusions soient négatives au sujet de cette étude-là.
En ce qui a trait à la deuxième question... Et je crois que vous vouliez... C'était la dépendance. Je pense qu'on sait maintenant que la nicotine... Il y a peut-être d'autres substances aussi dans le tabac, mais la nicotine est l'agent principal qui fait que le fumeur s'accroche au tabac et devient fumeur pour le reste de sa vie. Alors, le plus tôt les jeunes vont avoir contact avec le tabac et qu'ils vont être en contact avec la nicotine, plus tôt ils vont s'accrocher et demeurer dépendants.
On a des études, même une étude maintenant qui a été réalisée à Montréal, une cohorte où on étudie justement le développement de la dépendance à la nicotine, et on a trouvé, dans cette étude-là, que c'était même plus important comme facteur de devenir un fumeur qui utilisait régulièrement le tabac, la dépendance à la nicotine, que des facteurs comme la famille et l'environnement social. Alors donc, oui, la dépendance est créée par la nicotine, et c'est la principale cause qui accroche les fumeurs et qui en fait des fumeurs en permanence jusqu'à leur mort, malheureusement.
M. Couillard: J'aurai l'occasion, dans mes remarques finales, dans quelques minutes, d'aborder les suggestions que vous nous faites quant aux améliorations à apporter au projet de loi. Il est clair que, pour la question des fumoirs, on accueille vos commentaires. Il y a une question de cohérence qui pour nous est essentielle à régler. J'ai l'impression que vos arguments et ceux des autres groupes visant le contrôle du tabac sont logiques et solides, autant pour les effets sur la santé, qui sont illusoires, de ces fumoirs-là, que la lourdeur d'examen, la lourdeur d'inspection et d'entretien de ces installations-là pour même les entreprises elles-mêmes.
L'autre point cependant où on est dans une zone où l'équilibre est plus difficile à atteindre, c'est celui de l'étalage. Vous avez entendu hier, j'ai fait allusion aux mesures qui sont proposées en termes réglementaires. Advenant le cas où le gouvernement décidait de permettre une certaine forme d'étalage ? mais vous avez pu entendre, hier, que cette forme est extrêmement restreinte; on parle d'une superficie minime ? quelles sont les ? évidemment, je vous place dans une hypothèse, là ? quelles sont les façons dont vous nous suggéreriez d'aborder le problème pour rendre encore plus efficace cette restriction? Sur la localisation, par exemple, dans le commerce, sur le type d'étalage envisagé, par exemple, est-ce qu'on devrait le laisser comme pouvoir réglementaire ou l'introduire dans le corps du projet de loi? Ce genre de suggestions là, on serait intéressé à les entendre de votre part.
Mme Tremblay (Michèle): Bien, je pense que notre position là-dessus a été assez claire, c'est-à-dire qu'on souhaite une interdiction totale. Je pense qu'on l'a très clairement exprimé dans le premier mémoire et on le réaffirme cette fois-ci.
Je pense que ça me permet peut-être de vous parler aussi de tous les facteurs d'influence de l'usage du tabac chez les jeunes. Ce qu'il est important de savoir, c'est que les jeunes ont habituellement... sont accrochés très tôt. Dr Gervais en a fait mention tout à l'heure. L'étude qui est en cours nous fait voir que très, très, très tôt, ils deviennent dépendants et, de cette façon-là, ils sont accrochés à une marque. Il y a une foule de facteurs qui peuvent les influencer à fumer, dont le fait, entre autres ? c'est un des facteurs ? d'aller dans les dépanneurs. On sait que les jeunes vont fréquemment dans les dépanneurs. On sait que les jeunes qui y vont plus qu'une fois par semaine ont 50 % plus de risques d'expérimenter le tabac ou de devenir des fumeurs établis. On sait également que, dans les dépanneurs qui ont plus de façons de faire de marketing ? c'est plus des études américaines ? les jeunes également vont avoir plus de chances de devenir fumeurs.
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(12 h 40)
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Donc, je pense que, même si les études ne sont peut-être pas aussi robustes que, par exemple, des études des effets de la fumée de tabac sur la santé, je pense qu'on est en droit de limiter totalement ce positionnement-là des produits et je pense que l'industrie a toutes sortes de façons de pouvoir bien positionner les produits et les mettre en valeur. Je suis assez ahurie, parce que je ne me promène pas dans les dépanneurs très souvent, mais de voir toutes les façons qu'ils peuvent utiliser. Je pense qu'il faut être attentif à ça. Et, dans ce contexte-là, je pense que les expériences, même dans d'autres pays, de tenter de limiter, par exemple, à 4 m² l'étalage ou de limiter à une marque de cigarettes ont fait en sorte qu'il y a des nouveaux produits qui ont été développés et que la visibilité de l'étalage était encore très grande. Alors, je pense que notre position a été assez claire là-dessus.
M. Couillard: On a bien compris votre position, mais restons dans l'hypothèse où on garderait cet étalage restreint, là, 1 m², on ne parle vraiment pas d'un gros étalage, là; vous avez entendu tantôt les commentaires de vos prédécesseurs. Actuellement, c'est là comme pouvoir réglementaire. Est-ce que vous pensez que ça devrait rester là ou être introduit dans le corps du projet de loi? Toujours dans l'hypothèse où le gouvernement décidait de maintenir la possibilité d'une forme d'étalage.
Mme Tremblay (Michèle): Nous pensons que ça devrait être introduit dans un projet de loi, effectivement.
M. Couillard: Merci.
La Présidente (Mme James): Merci. Alors, Mme la députée de Rimouski, la parole est à vous.
Mme Charest (Rimouski): Merci, Mme la Présidente. Bienvenue, mesdames et messieurs de l'Institut national de santé publique. Moi, je voudrais vérifier avec vous... Vous faites des recommandations dans votre mémoire, et la première que vous faites, c'est l'élimination des fumoirs dans les milieux visés par la loi. Par contre, vous ne parlez pas des salons de cigares. Pourquoi vous n'en parlez pas? Est-ce que c'est parce que le tabac des cigares est moins nocif pour la santé que le tabac pour la cigarette?
Une voix: M. Gervais.
M. Gervais (André): Le tabac des cigares n'est certainement pas moins nocif, peut même contenir plus de monoxyde de carbone, entre autres, que la fumée de cigarette. Alors, pourquoi on n'en a pas parlé? On a décidé, je crois, de cibler ce qui nous semblait essentiel, et c'est pour ça qu'on n'en a pas parlé. Mais il est définitif que la fumée de cigare est dangereuse aussi et que les gens qui vont être dans ces salons de cigares là vont aussi être exposés à une fumée qui est nocive, avec des effets qui peuvent se produire également.
Mme Charest (Rimouski): Est-ce qu'il y a une revue de littérature qui existe sur les effets nocifs de la fumée du cigare ou de l'usage...
M. Gervais (André): On a beaucoup, beaucoup moins, beaucoup moins de littérature. Il y a quelques données sur les contenus de la fumée, mais beaucoup moins que ce qu'on a pour la fumée de cigarette. Cependant, on sait que c'est de la combustion, combustion du tabac puis, encore une fois, on sait que ? les quelques études qu'on a ? le monoxyde, surtout si les cigares sont très gros... il peut y avoir plus de monoxyde produit même que plusieurs cigarettes. Et évidemment plus le cigare est gros, bien plus il y a de fumée de produite par ce cigare-là. Ils sont très inégaux entre eux, les cigares.
Alors, du point de vue effet sur la santé, on sait que les fumeurs de cigare absorbent leur nicotine par la bouche plutôt que par le poumon, un peu comme les fumeurs de pipe, et, s'ils ne fument strictement que le cigare, ils vont donc être en contact plus avec les muqueuses des voies aériennes supérieures et de la bouche. Par contre, s'ils ont été des fumeurs de cigarette, à ce moment-là, ils vont les inhaler comme la cigarette. Alors, ils vont être exposés à probablement des quantités beaucoup plus grandes des produits toxiques. Et il y a des études qui suggèrent, qui démontrent même, que pour les cardiomyopathies, ça pourrait être un facteur de risque très, très important, même plus marqué que pour la fumée de cigarette.
Mme Charest (Rimouski): À la lumière de ce que vous venez de me dire, est-ce que je peux me permettre de conclure que vous êtes contre le maintien de salons de cigares?
M. Gervais (André): En principe général, je crois que l'élimination complète de la fumée secondaire dans nos milieux, c'est l'objectif qu'on veut atteindre de façon ultime. Cependant, il faut franchir des étapes et c'est pour ça que nos priorités ont été ce qu'elles sont là. Mais pour moi toute exposition à la fumée veut dire un risque, que ce soit le cigare ou que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur, et je pense que c'est important de... J'ai entendu à quelques reprises mentionner que la fumée à l'extérieur, ce n'était pas dangereux. Dr Turcotte vous a déposé un rapport du California EPA, qui est un volume très imposant, et là-dedans il y a des mesures des concentrations de particules de tabac chez des fumeurs qui sont à l'extérieur des édifices, et ça peut être très élevé, autant qu'à l'intérieur, s'il n'y a pas de ventilation. Alors, s'il y a plusieurs fumeurs et qu'on est à l'extérieur et qu'on est, nous, un non-fumeur à travers de ces fumeurs-là, on est exposé. Et ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de risque à ce moment-là, il y en a également à l'extérieur. Alors donc, si on ne veut pas avoir de risque à propos de la fumée secondaire, il faut l'éviter, intérieur, extérieur, quelque provenance que ce soit.
Mme Charest (Rimouski): Bon. Alors, je reviens sur l'élimination des fumoirs, qui est une de vos recommandations, parce que le ministre les maintient, lui, dans son projet de loi. En quoi et dans quelle mesure le maintien de ces fumoirs annulerait les effets positifs sur les bénéfices que la santé devrait en retirer en les éliminant? Parce que le maintien va faire que, bon, ça va être moins bénéfique. Et en quoi aussi ça diminue l'efficacité? Avez-vous essayé de... pas comptabiliser, mais mesurer ce serait quoi, la différence en termes de bénéfices pour la santé que de maintenir des fumoirs?
M. Gervais (André): Les bénéfices pour la santé de les maintenir, en fait, nous, on dit que les bénéfices pour la santé sont maximum si on les élimine.
Mme Charest (Rimouski): Ça, j'ai compris, mais le fait de les maintenir, dans quelle proportion ça annulerait ces bénéfices-là sur la santé?
M. Gervais (André): Ça dépend des circonstances, parce que, comme on l'a expliqué plus tôt, les fumoirs sont souvent non fonctionnels. Quand on ouvre les portes de ces fumoirs-là, il y a de la fumée qui sort. Et M. Repace, qui est le biophysicien qui nous a visités récemment, mentionnait un couloir de 8 m, là, pour éviter justement qu'il y ait contamination de l'air ambiant en ouvrant le fumoir. Alors, si le fumoir, il ne fonctionne pas et que la porte est ouverte, bien on peut être exposé à des quantités de fumée qui seraient similaires au fait qu'il n'y ait pas de fumoir. Alors, si le fumoir est fonctionnel, il y a quand même une contamination, et là les risques vont dépendre en fait de l'écart entre les deux. Alors, je ne peux pas vous donner une proportion parce que ça dépend vraiment des circonstances.
Mme Charest (Rimouski): Le ministre s'est donné comme objectif de diminuer le taux de tabagisme en adoptant cette loi-là dans la continuité de celle de 1998, parce que celle de 1998 a fait ses preuves, elle a diminué de beaucoup le taux de tabagisme. Le maintien des fumoirs pourrait, comment je dirais... Ce pourcentage pourrait être moindre, compte tenu du maintien des fumoirs?
M. Gervais (André): Bien, il y a deux composantes. Ce que je vous mentionnais, c'étaient les risques à la santé. Le fait de ne pas avoir de fumoir... On sait que les interdictions totales en milieu de travail font que les fumeurs diminuent davantage leur consommation et qu'il y a plus de fumeurs qui vont cesser de fumer, et il y a quelques études, ça, qui l'ont démontré déjà. Alors, le fait d'enlever les fumoirs devrait donc faire que plus de personnes vont cesser de fumer et qu'il va y avoir moins de cigarettes de consommées. Plus rapidement.
Mme Charest (Rimouski): Alors, je suis d'accord avec vous qu'il faut réduire et même bannir l'étalage des points de vente. J'en profite pour donner mon point de vue là-dessus. Et ça, ça semble plus difficile de convaincre le ministre parce que, si on se rappelle tous les intervenants qui sont venus et qui lui ont parlé des étalages, il ne semble pas convaincu. Est-ce que vous auriez un argument massue qui ferait que le ministre accepterait de comprendre que les étalages jouent un rôle dans le maintien et dans la... pour susciter l'habitude du tabac, du tabagisme?
M. Morin (Réal): On a fait référence beaucoup aux jeunes et à l'influence de ces environnements-là dans le paysage... évidemment dans l'entourage des jeunes. On discutait de ça hier. Quand on examine les facteurs explicatifs des comportements moins favorables à la santé chez les jeunes et qu'on examine le rôle de l'éducation, de la famille, de l'environnement, les pairs, bon, de plus en plus, on constate l'importance de l'environnement et de la norme sociale ou ce qu'on interprète comme étant une norme de comportement.
Mme Charest (Rimouski): Un style de vie.
M. Morin (Réal): Style de vie. Et c'est la raison pour laquelle on est évidemment d'ailleurs d'accord à ce qu'il n'y ait aucune référence visuelle, verbale, de mots entre l'industrie ou les produits de l'industrie et ce qui peut susciter un attrait chez les jeunes.
Mais, plus que ça, il n'en demeure pas moins que la présence, dans des lieux fréquentés beaucoup par les jeunes, des bonbons et malheureusement jusqu'au paquets de cigarettes, donc la présence aussi majeure est un facteur. Et, quand on compare à d'autres connaissances qu'on a sur les jeunes, on ne peut pas faire autrement que considérer que c'est un facteur déterminant, important.
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(12 h 50)
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Alors, le ramener à 1 m², est-ce que ce sera, un, possible, deux, suffisant pour modifier cette norme sociale là, cette impression-là d'omniprésence du tabac dans l'environnement des jeunes? Dre Tremblay y a fait référence, comment allons-nous... pouvons-nous contenir ? et l'industrie avant nous ? 200 marques, 400 marques de cigarettes sur 1 m²? La tendance et la pression vont être très fortes à ajouter de la grandeur, des mètres, à mettre des lumières à travers de ça pour que ça flashe le plus. Mais c'est ce qu'on voit d'ailleurs actuellement dans les dépanneurs, c'est de plus en plus d'imagerie, de façons de rendre...
Mme Charest (Rimouski): Le côté glamour.
M. Morin (Réal): ...de frapper les sens et surtout les sens des jeunes, quoi qu'ils en disent.
Mme Charest (Rimouski): Merci, messieurs, merci, mesdames.
La Présidente (Mme James): Alors, à mon tour, je vous remercie, Dr Gervais, Dr Morin, Dre Tremblay et Dre Laguë, pour votre présentation avec nous et votre présence avec nous, ce matin, de la part de l'Institut national de santé publique du Québec. Merci.
Alors, je suspends les travaux de la commission pendant quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 51)
(Reprise à 12 h 52)
La Présidente (Mme James): À l'ordre, s'il vous plaît!
Mémoires déposés
Pour les rendre publics et pour valoir comme s'ils avaient été présentés devant la commission, je dépose les mémoires des organismes suivants: l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux, Cadrin machines inc., Institut économique de Montréal, la Société canadienne du cancer et le programme d'Opération Carte d'identité Zone scolaire Saguenay.
Document déposé
Je dépose également la liste des personnes et des organismes qui ont transmis des commentaires à la commission dans le cadre de ce mandat.
Et je suis prête maintenant pour reconnaître la députée de Rimouski pour ses remarques... pas préliminaires mais finales.
Remarques finales
Mme Solange Charest
Mme Charest (Rimouski): Merci, Mme la Présidente. Je veux, dans un premier temps, remercier tous les groupes, toutes les personnes qui ont participé aux travaux de la commission parlementaire. J'ai remarqué la qualité des échanges, la qualité des mémoires et le professionnalisme des intervenantes et des intervenants qui sont venus ici partager avec nous leurs préoccupations par rapport à la lutte au tabagisme et également certaines conséquences qui pourraient être attribuables à l'adoption du projet de loi n° 112. Je veux également remercier les parlementaires des deux côtés de cette table de leur apport. Il faut souligner que le climat de collaboration qui a existé au cours de nos deux journées de délibérations, ça aide beaucoup à pouvoir travailler dans un sens positif et de bonne foi.
Il faut aussi se rappeler que probablement nul des personnes ou des groupes ne gagnera en totalité et que ces recommandations soient adoptées en bloc par le ministre de la Santé et des Services sociaux, mais je pense que tous ceux et celles qui ont participé à la réflexion lors de la consultation, qui ont partagé à la fois leurs expertises, leurs connaissances et leurs expériences savent qu'ils ou qu'elles ont travaillé de bonne foi à la bonification de ce projet de loi. Il ne reste plus qu'au ministre à en tenir compte le plus possible. Cela lui assurera un meilleur degré d'acceptabilité de la lutte au tabagisme que constitue l'adoption du projet de loi n° 112. L'adoption de la loi antitabac, qui se fera, je l'espère, dans la sérénité, fera foi de sa grande magnanimité. Donc, la balle est dans le camp du ministre de la Santé et des Services sociaux.
L'opposition officielle, même si elle est d'accord avec les principes du projet de loi, n'abdiquera pas à ses responsabilités de chien de garde. Nous réaffirmons notre volonté de travailler ce projet de loi de façon à s'assurer qu'il y aura le moins d'effets négatifs à son application, et ce, tout en s'assurant que les principes de base soient respectés.
Nous avons entendu quelque chose comme 13 organismes. 19 groupes ont présenté des mémoires, mais six ont été seulement déposés, et nous avons reçu ? je pense que c'est la même chose au ministère, au cabinet, que dans mon bureau ? de nombreux commentaires, recommandations, documents. J'en prends bonne note et je peux affirmer à tous que je les lis sérieusement. Alors, je pense que tous ces avis sont issus soit de petites et moyennes entreprises, comme les restaurants, les bars, les brasseries, des professionnels issus du milieu de la santé, des propriétaires de machines distributrices et même de chercheurs du milieu universitaire.
Ce que l'opposition officielle retient de leurs avis, commentaires, recommandations, c'est que, malgré le fait que la société québécoise a fait de grands pas en faveur de la lutte au tabagisme depuis 1998, depuis l'adoption à l'unanimité, par l'Assemblée nationale, de la première loi antitabac parrainée par mon collègue et ami le ministre Rochon du Parti québécois ? et ça, je pense que, oui, le Québec est en marche vers la diminution significative du taux de tabagisme ? mais ça reste que le tabagisme demeure un débat qui suscite encore beaucoup de discussions et même d'incrédulité chez certaines personnes ? on a pu le constater au cours de nos discussions ? ainsi que beaucoup de passion.
La loi n° 112 suit en quelque sorte ce que la loi antitabac de 1998 avait amorcé comme démarche de changement social vers une société sans fumée. Alors, nous n'y sommes pas encore arrivés, mais l'esprit et les principes qui sont contenus dans le projet de loi n° 112 constituent un pas de plus vers l'atteinte de cet objectif. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme James): Merci beaucoup, Mme la députée. Je cède maintenant la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux, pour vos remarques finales.
M. Philippe Couillard
M. Couillard: Merci. Mme la Présidente et chère collègue Mme la députée de Rimouski, mesdames messieurs. Je voudrais également à mon tour souligner la qualité de la participation des différents individus, groupes et organismes qui ont participé, d'une part, à la consultation préalable et, d'autre part, à cet exercice de commission parlementaire sur invitation.
Je ne reprendrai pas, je crois que ma consoeur l'a bien fait et nous l'avons fait à plusieurs reprises dans nos travaux, la défense de la nécessité d'agir de façon plus décisive sur le contrôle du tabagisme dans notre société compte tenu de ses impacts de santé qui sont majeurs et de la caractéristique très spécifique de ce produit qui quoique légal doit être dénormalisé et débanalisé.
Je veux également, et je désire, et je souhaite que les travaux, comme on l'a dit il y a quelques minutes, se poursuivent dans la sérénité et que nous répétions l'exercice de 1998 qui a vu alors l'Assemblée nationale du Québec adopter à l'unanimité le projet de loi sur le contrôle du tabac.
Nous avons écouté les arguments et les notes qui nous ont été présentés. Il est certain que l'adoption d'une loi telle que celle que nous proposons est un exercice dans lequel on introduit un changement social ou un changement de normes sociales, donc qu'il faut approcher avec une certaine prudence, fermeté mais une certaine prudence, et s'assurer de la recherche d'un équilibre le plus adéquat possible. Cependant, il est clair que pour nous l'équilibre est biaisé et fortement biaisé du côté de la protection de la santé publique et de la santé de la population.
On a entendu à plusieurs reprises des gens et des groupes nous dire: Nous sommes d'accord avec vos objectifs, mais nous n'aimons pas tel, tel moyen. Ça me rappelle la chanson de Petula Clark: «Tout le monde veut aller au ciel, mais personne ne veut mourir.» Ici, il s'agit d'empêcher le plus de monde possible de mourir des effets du tabac, Mme la Présidente. Alors, nous évaluerons la possibilité de certains amendements et ajustements au projet de loi qui bien sûr seront déposés lorsque nous entreprendrons l'étude article par article:
D'abord, la modification de la date d'entrée en vigueur dans les restaurants et les bars du 1er janvier au 31 mai 2006, pour deux raisons: d'abord, il s'agit d'harmoniser nos pratiques avec l'Ontario et, d'autre part, de permettre une adhésion sociale plus grande, étant donné que l'hiver sera terminé, qu'on sera à distance de la période de réjouissances du temps des fêtes et qu'il ne s'agit somme toute que d'un délai de quelques semaines qui ne remet nullement en cause le principe et l'application du projet de loi;
La possibilité que l'interdiction de vente du tabac soit appliquée à l'ensemble des restaurants et non seulement aux restaurants détenant un permis d'alcool ? ceci a été demandé par l'Association des restaurants du Québec ? et la possibilité de clarifier la situation des terrasses, tel que recommandé également par cette même association;
La possibilité d'inclure des dispositions sur l'étalage dans le projet de loi plutôt qu'en termes de pouvoir réglementaire;
Également, la possibilité d'engager une démarche inscrite au projet de loi, étapiste, menant ultimement à l'interdiction complète de l'étalage ? nous allons discuter de cette option au sein du gouvernement et de la députation et verrons s'il est possible d'harmoniser la pratique du Québec avec celle des autres provinces qui ont déjà agi dans ce domaine;
Que soit mis sur pied un registre des points de vente du tabac, tel que recommandé par l'Association pour les droits des non-fumeurs;
Et certainement envisager la possibilité d'éliminer les fumoirs dans les milieux de travail, tel que recommandé par l'Association pour les droits des non-fumeurs, la Coalition pour le contrôle du tabac et l'Association médicale du Québec.
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(13 heures)
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Ce sont là des mesures qui visent à rendre encore plus solide ce projet de loi et le rendre plus conforme et cohérent avec les objectifs de santé publique que nous poursuivons, tout en maintenant notre préoccupation pour la cohésion sociale et le consensus qu'il est nécessaire de maintenir et de mobiliser autour de ce projet de loi si on veut qu'il soit appliqué, efficace et qu'il nous permette d'atteindre nos objectifs.
Je vous remercie, Mme la Présidente, et j'ai déjà hâte que nous nous retrouvions pour l'étude détaillée du projet de loi. Merci.
La Présidente (Mme James): Merci. Oui, Mme la députée.
Mme Charest (Rimouski): Je m'excuse, Mme la Présidente. Puis-je demander au ministre s'il avait l'amabilité de me faire parvenir ses amendements au moins 48 heures à l'avance pour que je puisse les travailler de façon professionnelle?
M. Couillard: On va faire notre possible pour répondre à cette demande. Je voudrais terminer, si vous me permettez, par trois citations sur le thème du tabac.
La Présidente (Mme James): Allez-y, M. le ministre.
M. Couillard: La première est d'Alexandre Dumas père: «En fumant, me dit-on, vous abrégez votre vie. Je fume depuis l'âge de 18 ans, j'en ai 65, si je n'avais pas fumé, j'en aurais 70. Je serais bien avancé!» Mark Twain: «Le fait de fumer m'a sauvé la vie. En effet, figurez-vous qu'à chaque fois que je [suis malade mon] médecin me supprime le cigare. Et je guéris! Mon Dieu, où en serais-je si je n'avais pas fumé le cigare!» Et une dernière d'un M. Kirwan ou Mme Kirwan: «Quand il lut quelque part que fumer pouvait provoquer le cancer, il arrêta de lire.»La Présidente (Mme James): Et, sur ce, la commission ayant accompli son mandat, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures afin d'effectuer un autre mandat.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 10)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues! Alors, la Commission des affaires sociales poursuit ses travaux en changeant le mandat.
Et, compte tenu qu'il y a un changement de mandat, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Girard (Gouin) va être remplacé par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M. Copeman): Très bien.
Une voix: M. Girard...
Mme Harel: Ah, d'accord.
Étude détaillée du projet de loi n° 38
Nomination, responsabilités
et organisation (suite)
Le Président (M. Copeman): Tout va bien? Tout va bien, très bien. La dernière fois qu'on s'est vu au sujet du projet... Je vous rappelle le mandat, excusez-moi, j'étais bien négligent. Nous sommes réunis afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 38, Loi sur le Commissaire à la santé et au bien-être. Et, la dernière fois qu'on s'est quittés, nous étions rendus... nous avons adopté l'article... je vous rappelle, juste pour fin de mémoire, l'article 1 a été suspendu. Il demeure toujours en suspens. Ça doit être fatiguant pour lui, mais il est... Non, ce n'est peut-être pas drôle pour un article d'être suspendu aussi longtemps, mais il l'est.
M. Couillard: Ça peut faire mal.
Le Président (M. Copeman): Ça peut faire mal. Mais il est suspendu depuis un certain temps. L'article 2 a été adopté à son grand plaisir. L'article 3 a été également adopté.
Alors, en principe, nous sommes rendus à l'article 4, mais, mais, j'ai ouï-dire qu'il y a quelque chose qui va nous empêcher d'aller immédiatement à l'article 4, c'est-à-dire des papillons. Alors, sur ça, je présume que le ministre de la Santé et des Services sociaux est prêt à introduire quelque chose qui s'apparente à un article 3.1.
M. Couillard: Oui, M. le Président. Mais rafraîchissez ma mémoire, est-ce qu'on avait déjà circulé les amendements? Oui. Donc, ils sont en position des collègues de l'opposition.
Le Président (M. Copeman): Exact.
M. Couillard: Alors, il s'agit comme amendement d'ajouter les articles 3.1 à 3.4, M. le Président. Et avec votre permission on pourrait débuter par 3.1. L'avez-vous?
Mme Harel: Alors, nous avons un amendement qui s'intitule articles 3.1 à 3.4.
Le Président (M. Copeman): On va procéder un à la fois, dans l'ordre. On commence avec... Coudon, on va commencer avec 3.1, hein, au lieu de commencer avec 3.4, je pense que ce serait intéressant qu'on commence dans l'ordre.
M. Couillard: Une bonne idée, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Alors, nous commençons avec 3.1.
M. Couillard: Alors, il s'agit de préciser à travers ces articles, et notamment 3.1, le mode de nomination et de mise en candidature des candidats au poste de Commissaire à la santé et au bien-être.
Alors, je vais rapidement décrire l'article 3.1. Il s'agit de permettre, afin de nommer le Commissaire, de former un comité de candidature composé de quatorze personnes choisies ou nommées de la façon suivante:
D'abord, sept députés choisis par et parmi les membres de la commission parlementaire, qui est cette commission; quatre du parti formant le gouvernement, trois de l'opposition officielle... de l'opposition, pardon, dont un ne provient pas du parti formant l'opposition officielle;
«Sept personnes nommées par le gouvernement à savoir:
«a) un médecin nommé après consultation du Collège des médecins[...];
«b) une infirmière ou un infirmier, nommé après consultation de l'Ordre des infirmières et infirmiers[...];
«c) une travailleuse ou un travailleur social, nommé après consultation de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux[...];
«d) une personne nommée parmi [les membres élus] des conseils d'administration [d'établissements];
«e) une personne nommée [par les] membres des conseils d'administration [des centres hospitaliers comme représentant des comités d'usagers], après consultation [du regroupement des comités des usagers].» Deux personnes finalement possédant deux types d'expertise différente. D'abord, l'alinéa ou paragraphe f? S'agit-il d'un alinéa ou un paragraphe?
Le Président (M. Copeman): D'un paragraphe.
M. Couillard: Un paragraphe.
«f) une personne possédant une expertise en évaluation des technologies de la santé et...»La Secrétaire: Je regrette infiniment.
M. Couillard: Oui, mais ce sera beau dans le transcript, je suppose, avec des petites notes de musique, qu'on pourrait la...
Une voix: Dans le temps des fêtes, c'est parfait.
M. Couillard: Donc: «f) une personne possédant une expertise en évaluation des technologies de la santé et des médicaments, nommée après consultation de l'Agence d'évaluation[...]; et enfin
«g) une personne possédant une expertise en éthique, nommée après consultation des universités qui dispensent des programmes de formation en philosophie ou en éthique», etc.
Alors, voici donc l'article 3.1, M. le Président, tel que rédigé. Je rappelle que, dans les moments... dans les mois qui ont suivi le dépôt du projet de loi n° 38 d'une part la fonction reliée aux plaintes, à son plus haut niveau, à travers le projet de loi n° 83, a été rattachée à l'Assemblée nationale, donc au Protecteur du citoyen, et il s'agit de donner une plus grande caractéristique d'indépendance au mode de nomination. On verra par la suite ce qui est recommandé une fois que ce comité propose une liste de candidats ou de candidates aptes à exercer la fonction, mais il s'agit ici de former le comité de mise en candidature ou de candidature, qui étudie les diverses personnes qui pourraient se manifester ou être présentées comme étant habilitées à occuper cette fonction.
Le Président (M. Copeman): Très bien. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Première remarque. Compte tenu des travaux que nous avons faits jusqu'à maintenant, il était convenu que nous vous informions si nous souhaitions que l'examen se fasse paragraphe par paragraphe, hein, c'est bien cela? Alors, sans présumer, là, du temps qu'il nous faudra pour faire l'étude de l'amendement 3.1, ce serait préférable immédiatement que vous preniez en considération qu'il est possible, non pas nécessairement indispensable ou nécessaire mais possible, que nous examinions les articles paragraphe par paragraphe.
Le Président (M. Copeman): Si vous me permettez, Mme la députée, j'en conviens avec vous, que c'est les demandes qui ont été faites à l'article 2 et 3. Par contre, on m'avise que, compte tenu que c'est un amendement, le temps imparti selon le règlement porte sur l'ensemble de l'amendement de 3.1: 20 minutes par député sur 3.1 dans son ensemble. On ne peut pas... Autrement dit, dans un projet de loi, dans un article de projet de loi évidemment on peut procéder paragraphe par paragraphe du projet de loi, mais, quand il s'agit d'un amendement, il faut limiter, en principe; le règlement nous indique qu'on limite la discussion à 20 minutes pour l'ensemble de l'amendement, c'est-à-dire 3.1. C'est ça. Dans un esprit de collaboration, là, au fur et à mesure qu'on avance, Mme la députée, il y a toujours possibilité de demander consentement s'il faut dépasser. On pense qu'on verra rendu là. C'est bien ça.
Mme Harel: Très bien. De toute façon, il y a toujours possibilité de déposer des sous-amendements.
Le Président (M. Copeman): Exact.
Mme Harel: C'est ça. Bon. Alors, reprenons l'amendement 3.1. Je constate, au premier alinéa, que les mêmes difficultés se présentent que pour l'article 1 du projet de loi, à savoir que l'amendement introduit des modalités de nomination du Commissaire par le gouvernement. Alors, nous avons déjà suspendu l'article 1.
Le Président (M. Copeman): Exact.
Mme Harel: Et ce que je suggère, c'est que nous fassions de même en ce qui concerne le premier alinéa, puisque ça supposerait, M. le Président, que nous abordions la question plus longuement à savoir est-ce que ce Commissaire doit être nommé par l'Assemblée nationale comme l'avait promis le Parti libéral en campagne électorale.
Alors, je ne sache pas qu'à ce moment-ci ce soit nécessaire tout de suite, là, que nous abordions cette question, puisque nous ne l'avons pas fait à l'article 1. Alors, c'est une... comment dit-on, habituellement, là, c'est... c'est-à-dire que c'est par...
Le Président (M. Copeman): Concordance?
Mme Harel: Concordance.
Le Président (M. Copeman): Sauf que, Mme la députée, j'en conviens avec vous, nous avons suspendu l'étude de l'article 1, ma mémoire est plutôt au fait... Nous l'avons suspendu parce que nous n'avons pas adopté les modalités par la suite, nous n'avons pas pris en considération les modalités à 3, parce que le ministre avait signalé qu'il était pour y avoir des amendements là-dessus. Écoute, je ne sais pas si c'est pertinent de suspendre un alinéa d'un amendement. Il faut suspendre tout l'amendement. On ne peut pas uniquement isoler un alinéa d'un amendement.
Mme Harel: Nous les avions déjà, M. le Président, là, les amendements, au moment où nous avons suspendu l'article 1. Ça, je vous rappelle que nous les avions déjà. Mais je vous rappelle également qu'on peut difficilement faire un débat sur 3.1, alors que l'article 1 est suspendu, étant donné que 3.1 introduit des modalités à l'article 1, hein?
n(15 h 20)n 3.1 commence par: «Afin de permettre au gouvernement de nommer le Commissaire, un comité de candidature doit être formé.» Alors, la question de fond, c'est: Est-ce que le Commissaire doit être nommé par le gouvernement ou doit l'être par l'Assemblée nationale, comme ça a été promis?
Alors, ce que je vous propose, parce que notre intention, d'ici 6 heures, c'est d'avancer, honnêtement, là, c'est de progresser, alors, moi, ce que je vous propose, c'est qu'on suspende celui-là puis qu'on poursuive. De toute façon, il est toujours loisible de revenir, hein? La suspension, elle n'est pas pour l'éternité, là. Si vous trouvez que le rythme n'est pas satisfaisant, vous avez toujours la possibilité de demander d'examiner l'article.
Le Président (M. Copeman): Écoute, moi, je suis à votre disposition, hein? Il s'agit de savoir quand est-ce qu'on va faire le débat sur la modalité de sélection du Commissaire. On peut le faire là ou on peut suspendre les amendements proposés, poursuivre l'étude puis revenir à une date ultérieure pour faire le débat. Comme vous voulez, chers collègues, ce n'est pas moi qui va dicter à vous comment on veut procéder. Avez-vous une opinion, M. le ministre, là-dessus?
M. Couillard: Bien, moi, je n'ai pas d'objection. Et bien sûr nous sommes conscients du fait que les membres de l'opposition s'opposent au mode de nomination suggéré dans le projet de loi; ce n'est pas nouveau, et on ne s'attend pas que cette attitude se modifie au cours des travaux.
Il faudrait s'assurer qu'on ne débat pas deux fois de la même chose, c'est-à-dire que, si on en débat, de ce principe, du mode de nomination dans l'article 1, on ne refasse pas le même débat à nouveau à la faveur du premier alinéa d'un amendement. Dans cette condition, moi, je n'ai pas de difficulté à ce qu'on progresse dans le reste du projet de loi puis qu'on revienne en arrière.
Mme Harel: Je dois dire, M. le Président, que mon expérience parlementaire m'amène à penser que, quand vous voulez regarder un projet de loi, vous êtes mieux de regarder tout ce sur quoi vous vous entendez. Ce fut le cas, lors de la réforme du Code civil, et ça a donné des bons résultats. Alors, vous gardez pour la fin ce sur quoi vous ne vous entendez pas, mais au moins vous avez déjà convenu de ce sur quoi vous vous entendez.
M. Couillard: Et on est d'accord, M. le Président, de passer au reste du projet de loi, en juste retenant la remarque que j'ai faite sur le débat de fond sur le mode de nomination, dont on connaît essentiellement l'issue.
Le Président (M. Copeman): Alors, nous allons suspendre l'étude de l'amendement. Je propose qu'on fasse pareil pour 3.2 et 3.4... 3.3 et 3.4 parce qu'il s'agit, je crois, d'essentiellement le même sujet, n'est-ce pas? Alors, l'étude de ces amendements-là est suspendue, ce qui nous amène à l'article 4. Alors, M. le ministre, l'article 4.
M. Couillard: Alors, il s'agit d'un article qui également fait l'objet d'un amendement. La disposition initiale était la suivante: «Le Commissaire peut nommer, parmi les membres de son personnel, un ou plusieurs commissaires adjoints.» La version, telle qu'amendée, est la suivante; il s'agit de dire maintenant que «le Commissaire nomme ? donc, le mot "peut" n'est plus là ? parmi les membres de son personnel, un ou plusieurs commissaires adjoints ? et c'est un autre ajout ? dont un doit être spécifiquement responsable des aspects éthiques liés à la santé et au bien-être».
Alors, cet article a pour but, avec l'amendement qui est introduit, d'introduire l'obligation pour le Commissaire de nommer des commissaires adjoints, un ou plusieurs commissaires adjoints, dont un doit nécessairement s'occuper exclusivement de la question de l'éthique en santé et en bien-être.
Le Président (M. Copeman): Alors, sur l'amendement uniquement, chers collègues, qui vise deux choses ? on l'a sous les yeux... On prend en considération l'amendement. Mme la députée, allez-y.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, en fait, la seule obligation qu'introduit l'amendement, c'est celle qui est faite au Commissaire de nommer au moins un commissaire adjoint responsable des aspects éthiques liés à la santé et au bien-être. Il n'a pas d'obligation pour en nommer plus qu'un. Quelle est la perspective du ministre à l'égard du nombre d'adjoints envisagé... dont la nomination est envisagée?
M. Couillard: Effectivement, bien, je voudrais éviter d'être trop directif dans la façon dont nous allons dire au Commissaire... de la façon dont il ou elle devra s'acquitter de ses fonctions. On peut envisager ? mais ceci n'est qu'une opinion, et je ne voudrais pas la formaliser trop, justement de crainte de trop lier les mains de la personne qui sera nommée ? qu'outre cette personne ayant des compétences pour les aspects éthiques, une autre soit, par exemple, affectée aux questions d'évaluation des technologies, une aux services de santé et peut-être une autre au domaine social. On peut envisager en général ce genre... Mais je ne voudrais pas en faire un détail trop marqué dans le projet de loi, parce que je pense que la logique va faire en sorte que le Commissaire va lui-même ou elle-même déterminer comment son mandat doit être accompli et de quel type d'adjoints on doit se doter.
Mme Harel: La question étant, M. le Président: Pourquoi des adjoints au Commissaire? Pourquoi cette notion de commissaires adjoints plutôt, par exemple, que de directeur, de direction au sein du Commissaire à la santé, là, au sein de l'institution?
M. Couillard: C'est une question qui est valable. À mon avis on aurait pu dire également un adjoint tout court ou... Mais je ne voudrais pas non plus lui imposer un organigramme. Est-ce qu'il va vouloir ou elle voudra adopter une structure par direction? Le terme «commissaire adjoint» me semblait approprié parce qu'essentiellement c'est la fonction dont on parle, adjoint du Commissaire. On n'y voit pas de correspondance avec le titre du Commissaire en titre lui-même. Il s'agit d'avoir, je dirais, un équilibre entre des prescriptions très formelles et très détaillées pour l'organisation et également une capacité peut-être pour la personne d'agir le plus librement dans la mise en place de ses fonctions.
Parce que d'un autre côté on pourrait nous reprocher d'être trop directifs, d'insister pour qu'il y ait tel ou tel aspect qui soit couvert. À ce moment-là, on en ferait une liste exhaustive et on risque nécessairement d'en oublier. Je pense que, compte tenu du mandat et particulièrement de la façon dont on a modifié le mandat à la lumière des amendements qui ont été introduits ici ? je me souviens notamment de l'ajout des déterminants de la santé et du bien-être ? il est clair que le Commissaire voudra s'entourer de personnes qui ont ce type de compétences là. Quant à l'organigramme qui est nécessaire pour avoir cette structure, à lui ou à elle d'en disposer. Mais on trouvait important que les aspects éthiques, qui sont rarement touchés dans les discussions publiques, non pas des experts externes, mais dans les discussions gouvernementales du système de santé... On parle beaucoup d'investissements, on parle de programmes, on parle de services, mais on parle rarement directement des aspects éthiques liés aux choix qui sont faits.
Mme Harel: M. le Président, je souscris au fait qu'on parle très peu... qu'on aborde très peu les questions éthiques ? sans vouloir dicter au futur Commissaire son ordre... dans l'ordre, l'examen de certaines questions, je crois que la néonatalogie devrait en être une en priorité ? mais en fait la question étant plutôt: Pourquoi, dans la rédaction de l'article 4, on mentionne que c'est un commissaire adjoint? Parce que ça aurait pu être tout simplement: Le Commissaire nomme, parmi les membres de son personnel, un ou plusieurs adjoints. On souhaite que ce soit un commissaire adjoint, c'est-à-dire qu'il ait une stature de plus, ou si ça n'a pas de conséquence autre que celle du qualificatif, là, il n'y a pas de... Dans la structure hiérarchique, là, combien y aura-t-il de personnel? Est-ce que ça donne un avantage pécuniaire?
M. Couillard: Bien, je pense qu'effectivement le terme «adjoint» recoupe un grand nombre de personnes. Théoriquement, l'assistante administrative ou l'assistant administratif peut également être qualifié d'adjoint. On imprime à cette nomination également d'adjoint une notion hiérarchique qui est juste en dessous du Commissaire, et certainement que ça va avoir une traduction en termes de conditions de travail. Et je pense que c'est visé également.
Mme Harel: Combien évaluez-vous le personnel qui sera sous l'autorité, là, du Commissaire?
M. Couillard: Alors, on sait que dans le projet de loi figure le transfert des effectifs de deux organismes, qui sont actuellement le Conseil de la santé et du bien-être, de même que le Conseil médical du Québec, ce qui représente un total de 17 équivalents à temps complet.
Mme Harel: Très bien.
Le Président (M. Copeman): Ça va?
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Copeman): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 4, tel qu'amendé...
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Également adopté. Alors, l'article 5, M. le ministre.
M. Couillard: M. le Président, l'article 5 permet de préciser de quelle façon l'absence ou l'empêchement du Commissaire pourrait être comblé:
«En cas d'absence ou d'empêchement[...], le gouvernement peut désigner l'un des commissaires adjoints ? voilà donc une raison de préciser rétrospectivement le titre de commissaire adjoint; donc, je reprends ? ou, à défaut, toute autre personne pour exercer les responsabilités, fonctions et pouvoirs du Commissaire tant que dure son absence ou son empêchement. Le gouvernement fixe alors, selon le cas, le traitement ou les honoraires ainsi que les autres conditions de travail de cette personne.» Je pense qu'il s'agit essentiellement d'une disposition standard pour des postes d'emplois supérieurs de ce type-là.
n(15 h 30)nMme Harel: M. le Président, vous nous dites que c'est une disposition qui est standard. Est-ce qu'on peut nous indiquer dans quelle autre législation on la retrouve?
M. Couillard: Bon, on va faire les recherches. On va le trouver. Ce ne sera pas très long, je pense.
Mme Harel: Peut-être, M. le Président, demander au ministre, quand on lit: «tant que dure son absence ou son empêchement», est-ce que cela peut... Étant donné que c'est indéterminé, là, cela pourrait-il durer un an ou deux?
M. Couillard: La durée n'est pas précisée, et je pense qu'on veut être relativement ouverts. Dans ce domaine-là, il peut y avoir plusieurs circonstances qui font en sorte que l'absence ou l'empêchement se produit, allant des plus brèves aux plus prolongées. Et on veut disposer de la souplesse nécessaire pour s'ajuster à l'une de ces conditions, que ce soit une maladie chronique qui vient d'être diagnostiquée, ou un accident, ou juste une absence pour raison personnelle.
Alors, il y a un parallèle, M. le Président, mais le parallèle n'est pas tout à fait exact. Il y a des différences qu'on pourra discuter. C'est la Loi sur le vérificateur général, à l'article 15. Je vais lire l'article:
«En cas d'absence ou d'empêchement du Vérificateur général ou de vacance de son poste, le président de l'Assemblée [...] peut, avec l'accord du premier ministre et du chef de l'opposition[...], désigner l'un des vérificateurs généraux adjoints comme Vérificateur général, pour assurer l'intérim.» Ça, c'est essentiellement similaire. Ce qui est différent cependant, c'est qu'au niveau du traitement on indique dans la Loi du vérificateur que «celui-ci reçoit, pour la durée de l'intérim, un traitement équivalent à celui du Vérificateur général», alors que, dans la disposition, telle que...
Par contre, un autre parallèle m'est présenté pour le Protecteur du citoyen et... dans le paragraphe 7, au sujet du remplacement:
«Lorsque le Protecteur du citoyen cesse de remplir ses fonctions ou est empêché d'agir et lorsqu'il en est de même de son adjoint ou si aucun adjoint n'est en fonctions, le Protecteur du citoyen est remplacé par une personne nommée temporairement à cette fin par le gouvernement, qui fixe, s'il y a lieu, le traitement, le traitement additionnel, les honoraires et les allocations de cette personne.» Donc, dans un cas, celui du Vérificateur général, la concordance est complète, sauf pour la question de la déterminaison du... détermination du... Voyons, qu'est-ce qu'on dit, déterminaison ou détermination?
Une voix: Détermination.
M. Couillard: Détermination du traitement. Et, dans le cas du Protecteur du citoyen cependant, la disposition est identique.
Mme Harel: Alors, M. le Président, est-ce qu'on comprend de l'économie générale, là, de l'article 5 qu'en cas d'absence ou d'empêchement d'agir, là, de la part du Commissaire, le gouvernement désigne un des commissaires adjoints d'abord, et sinon, si c'est... À défaut, s'il ne peut pas le faire, il nomme toute autre personne. Mais il ne peut nommer toute autre personne que s'il ne peut pas nommer un adjoint, ce qui fait que le gouvernement devra justifier qu'il ne peut pas nommer un commissaire adjoint avant de nommer toute autre personne. Est-ce qu'on lit bien le sens, là?
M. Couillard: Oui. Et je pense que c'est... Le terme «à défaut», M. le Président, permet de confirmer ce qui vient d'être mentionné. Évidemment, il s'agit de circonstances rarissimes, où l'ensemble du personnel du Commissaire, des commissaires adjoints seraient sur le même avion par exemple, et il y aurait un accident, mais c'est peu probable.
J'ai une information supplémentaire, M. le Président, sur cet article. Alors, on me dit que la Loi sur le Vérificateur et la loi sur la protection du citoyen sont des lois qui ont été donc promulguées il y a quelques années. Le libellé de l'article actuel a été discuté et approuvé par le secrétariat à la législation et le secrétariat aux emplois supérieurs.
Le Président (M. Copeman): Ça va?
Mme Harel: Ça va.
Le Président (M. Copeman): Alors, est-ce que l'article 5 est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 6, M. le ministre.
M. Couillard: Alors, M. le Président, il s'agit de prévoir l'obligation pour le Commissaire d'être assermenté avant de commencer à exercer cette fonction, le contenu du serment, de même que le fait que la prestation du serment doit se faire devant le titulaire du poste de ministre de la Santé et des Services sociaux.
Je lis l'article 6: «Le Commissaire doit, avant de commencer à exercer ses fonctions, prêter le serment suivant:
«"Je déclare sous serment que je remplirai mes fonctions avec honnêteté, impartialité et justice. De plus, je déclare sous serment que je ne révélerai et ne ferai connaître, sans y être autorisé par la loi, aucun renseignement confidentiel dont j'aurai eu connaissance dans l'exercice de mes fonctions."
«Le Commissaire exécute cette obligation devant le ministre de la Santé et des Services sociaux.» Bien sûr, le mandat du Commissaire est essentiellement un mandat de type systémique, mais on ne peut exclure le fait qu'il soit ou qu'elle soit mise en présence d'informations de type nominal ou confidentiel servant d'exemple, par exemple, à la description d'une situation systémique, et bien sûr cela va de soi que ces informations doivent rester totalement confidentielles.
Mme Harel: C'est la première fois, là... ça ne signifie pas que j'ai une connaissance de toutes les lois, là, du Québec, mais c'est la première fois que je vois une disposition de cette nature dans un projet de loi. Est-ce qu'il est possible de me citer quelque autre loi où on retrouve semblable disposition?
M. Couillard: On va faire la recherche immédiatement, mais il me semble, et là sous réserve des objections que l'opposition a pour le mode de nomination qui est proposé, qu'il y a là de quoi rassurer la population sur la confidentialité totale de certains types d'informations qui, dans le domaine santé et social, sont souvent particulièrement sensibles pour l'opinion. Mais on va trouver, dans très peu de temps, les parallèles s'il y en a.
(Consultation)
M. Couillard: M. le Président, je m'excuse, je reviens rapidement... plus rapidement. Dans la Loi sur le Protecteur du citoyen, on retrouve une disposition semblable avec un texte de serment un peu différent parce qu'on parle également de somme d'argent, avantage qui lui sera alloué, etc., mais c'est en annexe, et on nous a recommandé... par les deux secrétariats dont j'ai parlé tantôt ? il nous a été recommandé de l'inclure dans le corps du projet de loi plutôt qu'en annexe étant donné l'importance sur le plan, je crois, de la perception publique de cette modalité sur le plan de la confidentialité. Si Mme la députée veut, je pourrais lire le serment que le Protecteur des citoyens a à prononcer. Il est quelque peu différent. Oui?
Mme Harel: D'après vous, c'est devant quelle instance, ça?
M. Couillard: Je vais lire le serment, puis, pendant ce temps-là, on va me trouver le renseignement sur la façon dont c'est fait:
«Je déclare sous serment que je remplirai mes fonctions avec honnêteté, impartialité et justice et que je n'accepterai aucune autre somme d'argent ou avantage, pour ce que j'accomplirai dans l'exercice de mes fonctions, que ce qui me sera alloué[...]. «De plus, je déclare sous serment que je ne révélerai, sans y être dûment autorisé, aucun renseignement que j'aurai obtenu dans l'exercice de mes fonctions.» Ça date de 1968, avec des amendements en 1987 et en 1999. Et je ne trouve pas immédiatement de détails quant à l'endroit où ce serment doit être prêté.
Mme Harel: Alors, M. le Président, le Commissaire, en vertu de l'article 6, serait appelé à prêter ce serment. Mais ses adjoints, c'est-à-dire ceux et celles qui éventuellement partageraient les mêmes connaissances dans les dossiers de même nature, seraient-ils appelés également à prêter serment?
M. Couillard: Pas selon le libellé proposé. On pourra voir si les protecteurs adjoints ou les vérificateurs adjoints ont à faire le même exercice. C'est un renseignement que je n'ai pas immédiatement, qu'on pourrait obtenir.
Mme Harel: Et donc l'obligation de prêter serment devrait sûrement... Si telle est, disons, l'obligation faite au Commissaire, nécessairement cette même obligation devrait être faite aux commissaires adjoints.
n(15 h 40)nM. Couillard: D'autant plus, M. le Président, qu'on me remet le parallèle pour le Protecteur du citoyen et on m'indique que le Protecteur du citoyen et son adjoint doivent, avant de commencer à exercer leurs fonctions, prêter le serment prévu en annexe. Maintenant, ils exécutent cette obligation respectivement, respectivement devant ? ça, c'est intéressant ? devant le président de l'Assemblée nationale, pour le Protecteur du citoyen, et devant le Protecteur du citoyen, pour les adjoints. Donc, moi, je n'ai pas d'objection formelle, si on veut introduire un amendement pour qu'on ajoute les adjoints, quant à l'obligation d'être assermenté, compte tenu du fait qu'également ces commissaires adjoints peuvent être en contact avec des informations de type confidentiel.
Alors, je ne sais pas si vous voulez formuler un amendement ou si...
Mme Harel: Oui. Je pense, M. le Président, que cela se justifie, là, dans la perspective où le Commissaire exerce ses fonctions en prêtant serment, que ses adjoints exercent les leurs en prêtant serment devant le Commissaire. Parce que les autres nominations sont faites conformément à la Loi de la fonction publique qui a déjà des dispositions, je pense, hein? Est-ce que les adjoints sont inclus à l'article 7, font partie des membres du personnel du Commissaire?
M. Couillard: Oui.
Mme Harel: Oui. Et, dans le cas du Protecteur des citoyens, est-ce que l'adjoint du Protecteur des citoyens faisait aussi partie du personnel de la fonction publique?
M. Couillard: On m'indique que oui également.
Mme Harel: Ah oui? Puis on réclamait malgré tout qu'ils prêtent serment. Les dispositions de la Loi de la fonction publique, je pense... Il y a des dispositions qui concernent la protection des renseignements et...
M. Couillard: ...sont indiquées, mais je le remets avec beaucoup de rapidité. La Gazette officielle du Québec les contient. Il s'agit de Règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique. Alors, on trouve toutes ces... Par exemple, je vois Devoirs du fonctionnaire à 4: «Le fonctionnaire ne peut prendre connaissance d'une information confidentielle qui n'est pas requise dans l'exercice de ses fonctions ni tenter de prendre connaissance d'une telle information.» Ensuite, il y a les sections sur le conflit d'intérêts, précédemment communication d'information confidentielle, etc.
Donc, tout est bien codifié dans le Règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique, de sorte que, là, à ce moment-là, si on considère qu'on nous indique que les adjoints font partie du personnel de la fonction publique, il ne devient plus nécessaire absolument qu'ils soient assermentés également. Je ne sais pas si on pense, de l'autre côté, si c'est nécessaire ou...
Mme Harel: En l'occurrence, dans la mesure où ils sont nommés conformément à la Loi sur la fonction publique, mais le seront-ils? Je crois que le Commissaire, à l'article 4, va nommer, parmi les membres de son personnel, des adjoints. Est-ce qu'on prend pour acquis que ces adjoints le seront en fonction de la Loi sur la fonction publique?
M. Couillard: Dans l'article 7 qui suit, on vient de dire que le personnel... les adjoints sont sélectionnés à même le personnel. Dans l'article 7, on verra que «les membres du personnel [...] sont nommés conformément à la Loi sur la fonction publique». Donc, là, il y a une concordance qui est correcte.
Mme Harel: Alors, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'introduire un amendement, puisque, par l'effet combiné des articles du projet de loi, ils seront membres... donc les commissaires adjoints seront membres du personnel, et les membres de personnel seront nommés conformément à la Loi sur la fonction publique, et la Loi sur la fonction publique contient les dispositions d'éthique et de protection des renseignements.
Le Président (M. Copeman): Je crois que nous avons bouclé la boucle. Est-ce que l'article...
Mme Harel: Une dernière...
Le Président (M. Copeman): Oui, allez-y, Mme la députée. Excusez.
Mme Harel: À l'alinéa... le dernier alinéa: «Le Commissaire exécute cette obligation devant le ministre de la Santé et des Services sociaux.» Alors, est-ce que le ministre a déjà prévu une cérémonie où il sera prêté serment? Allez-vous faire ça au salon rouge? Avez-vous déjà en tête l'événement?
M. Couillard: On sera sûr d'y inviter la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui ne pourra manquer de saluer cet heureux événement, M. le Président.
Mme Harel: Je comprends, M. le Président, que «le Commissaire exécute cette obligation devant le ministre de la Santé et des Services sociaux», cela se ferait devant la présidence de l'Assemblée si tant est que le Commissaire était nommé par l'Assemblée nationale. Alors, remarquez qu'il serait possible aussi, même si le Commissaire est nommé par l'Assemblée nationale, qu'il prête serment devant le ministre de la Santé. Ça n'indique pas... Le Vérificateur général, lui, prête serment devant le président de l'Assemblée nationale.
M. Couillard: Ça dépend du type... Effectivement c'est lié au type de nomination, parce que le Protecteur du citoyen prête serment devant le président de l'Assemblée, mais les adjoints cependant prêtent serment devant le Protecteur du citoyen.
Mme Harel: Alors, M. le Président, nous allons voter contre l'article 6 à cause du dernier alinéa.
Le Président (M. Copeman): J'ai bien compris.
Mme Harel: Très bien. Alors, sur division.
Le Président (M. Copeman): Alors, est-ce que l'article 6 est adopté sur division?
Mme Harel: Sur division.
Le Président (M. Copeman): Très bien. Adopté sur division. L'article 7.
M. Couillard: L'article 7. Bien, il s'agit de préciser que «les membres du personnel [...] sont nommés conformément à la Loi sur la fonction publique ? donc, sont assujettis aux règlements et autres lois en vigueur.
«Le Commissaire définit les pouvoirs et devoirs de son personnel et dirige son travail. Il peut déléguer par écrit l'exercice de chacun de ses pouvoirs.»Mme Harel: Est-ce que le deuxième alinéa, qui attribue au Commissaire, là, la responsabilité de définir les pouvoirs et devoirs du personnel, est usuel? Est-ce que ça ne va pas de soi? Pourquoi faut-il rédiger un tel alinéa? On dit: «Le Commissaire définit les pouvoirs et devoirs de son personnel et dirige son travail.» Est-ce qu'il pourrait en être autrement? «Il peut déléguer par écrit l'exercice de chacun de ses pouvoirs.» Pourquoi y a-t-il obligation de formaliser les attributs en fait du Commissaire?
M. Couillard: Eh bien, évidemment, on pourra y réfléchir, du côté de mes assistants, mais je suppose que certains de ses pouvoirs consistant par exemple à obtenir des informations, des documents, à former des comités de travail, théoriquement, si ? et on ne veut pas prêter de mauvaises intentions à quiconque ? mais si quelqu'un voulait ralentir, par exemple, les travaux du Commissaire sur une question particulière, on pourrait invoquer le fait que ses pouvoirs, de son adjoint par exemple ou d'une autre personne de son personnel, ne lui permettent pas d'assister à une réunion ou de demander tel document. Tandis que si, au début de l'exécution d'un mandat spécifique, le Commissaire indique qu'il délègue ce pouvoir, bien ça enlève cet obstacle-là.
Je présume que c'est la raison pour laquelle on a établi cette disposition, mais nos experts légistes sont en train de conférer pour nous éclairer sur la question. Ils sont en réflexion, M. le Président, en recherche en fait.
Mme Harel: L'expression est large, hein: «peut déléguer [...] l'exercice de chacun de ses pouvoirs» par écrit, hein? C'est le pouvoir d'enquête, ça, également?
M. Couillard: Notamment, mais il y a également, si on va plus loin dans le projet de loi, on y arrivera plus tard, là, la formation de groupes de travail; possibilité de faire des enquêtes, sondages et autres. Par exemple, effectuer des études, enquêtes ou sondages, avoir recours aux experts externes, et tout ça, sont des pouvoirs qui sont...
Tout ça est au chapitre III du projet de loi, à partir de l'article 13, donc: avoir recours aux experts externes; effectuer des études, enquêtes ou sondages; requérir la collaboration du ministre et des organismes ou conseils sous l'autorité de ce dernier ? et c'est là justement qu'on a besoin d'un peu d'insistance parfois pour obtenir les renseignements, former des comités de travail, procéder à des consultations, des opinions, recevoir et entendre des requêtes. Le pouvoir de tenir des audiences publiques. Mais je suppose que, pour ce qui est des audiences publiques, le Commissaire voudra lui-même ou elle-même s'en charger. Il y a le pouvoir d'enquête bien sûr qui est indiqué à l'article 16.
Mme Harel: Est-ce qu'il y a un processus de délégation aussi formel dans la Loi du Vérificateur général ou du Protecteur du citoyen?
M. Couillard: On semble nous apporter une réponse. Oui, M. le Président, il exerce... il existe, pardon, une disposition semblable sur la Loi sur le Protecteur des usagers, au chapitre II, article 4: «Le Protecteur des usagers définit les devoirs des membres du personnel mis à sa disposition et dirige leur travail. Il peut déléguer par écrit l'exercice de chacun de ses pouvoirs.» Donc, la même disposition existe pour le Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux, probablement pour les mêmes raisons, notamment le pouvoir d'enquête, je suppose.
Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, est-ce que l'article 7 est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 8, M. le ministre.
n(15 h 50)nM. Couillard: L'article 8 prévoit que le secrétariat du Commissaire est nécessairement situé sur le territoire de la ville du Québec... de Québec, pardon, mais que c'est le gouvernement qui en détermine l'adresse.
Donc: «Le secrétariat du Commissaire est situé sur le territoire de la ville de Québec, à l'endroit déterminé par le gouvernement.
«Un avis de la situation et de tout déplacement du secrétariat est publié à la Gazette officielle du Québec.» Il s'agit de s'assurer que les fonctions sont exercées dans notre capitale nationale.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Alors, l'article 8 est adopté. L'article 9.
M. Couillard: L'article 9, M. le Président, rend obligatoire l'adoption par le Commissaire d'un code d'éthique applicable aux experts externes auxquels il peut avoir recours, de même que d'autres personnes. Mais il faut noter que le Commissaire lui-même, ses adjoints et les membres de son personnel ? on a déjà discuté cette question à l'article 6 et 7 ? sont régis par le Règlement sur l'éthique et la déontologie des administrateurs publics et la Loi sur la fonction publique, le Règlement sur l'éthique et la discipline dans la fonction publique. Mais il faut s'assurer que, lorsque le Commissaire va utiliser le service d'experts externes, ces gens-là soient également soumis à un code d'éthique et de déontologie qui leur soit applicable.
Mme Harel: Ce code d'éthique et de déontologie sera-t-il rédigé sur mesure ou y a-t-il référence à un code d'éthique et un code de déontologie déjà applicables aux experts externes?
M. Couillard: Si je lis l'article 9, on dit: «un code d'éthique et de déontologie applicable aux experts externes». Donc, je suppose, et on pourra me le confirmer, qu'il s'agit d'un code d'éthique qui s'applique à l'ensemble de ces experts externes et non pas un sur mesure pour chacun. Mais je suppose qu'à l'intérieur de ce code d'éthique on pourra trouver des dispositions spécifiques qui pourront être ajustées selon le type de mandat qui est donné. Mais le cadre général du code d'éthique est probablement commun à tous les types d'experts que le Commissaire voudra s'adjoindre.
Une voix: ...
M. Couillard: ...dit oui. On opine du bonnet, M. le Président.
Mme Harel: Existe-t-il, dans d'autres juridictions, là, existe-t-il un code d'éthique et de déontologie applicable aux experts externes?
M. Couillard: Il s'agirait de voir si d'autres dispositions permettant l'engagement d'experts externes existent. Pas à la connaissance de nos collègues, mais je pense que c'est une précaution qui est de bon aloi ici, qu'elles existent ou non ailleurs dans le cadre législatif.
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Pardon?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Nous avons adopté quelque chose? Bon. O.K., mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
Fonctions du Commissaire à la
santé et au bien-être
Le Président (M. Copeman): Tant mieux! C'était l'article 9 d'ailleurs, hein? Excellent. Alors, l'article 10, M. le ministre.
Mme Harel: ...au coeur, au coeur du projet de loi, sur les fonctions du Commissaire.
Le Président (M. Copeman): Oui. Alors, M. le ministre.
M. Couillard: Oui.
Le Président (M. Copeman): Le coeur.
M. Couillard: Donc, le chapitre II traite... et le titre du chapitre II est Fonctions du Commissaire à la santé ? fonctions, au pluriel, du Commissaire à la santé ? et au bien-être. Il comprend les articles 10 à 12 inclusivement.
L'article 10 fait l'objet d'un amendement. Et, compte tenu de l'ajustement que nous avons apporté dans l'article 2, je crois, sur les déterminants, il y aura peut-être lieu d'ajuster des articles en conséquence. On verra, en cours de lecture, où est-ce que cette notion pourrait s'insérer. Mais je vais me permettre de lire l'article 10, puisque c'est là que nous sommes maintenant, M. le Président, l'article 10 tel qu'amendé:
«Afin de remplir adéquatement les responsabilités qui lui sont confiées, le Commissaire est notamment ? "notamment" est toujours important ? investi des fonctions suivantes:
«0.1° il évalue l'ensemble des éléments du système de santé et de services sociaux afin d'en déterminer la pertinence;
«1° il apprécie périodiquement les résultats obtenus par le système de santé et de services sociaux en fonction des ressources qui y sont affectées et des attentes raisonnables qui peuvent en découler;
«2° il informe le ministre et la population de la performance globale du système de santé et de services sociaux, des changements qu'il propose afin d'en améliorer l'efficacité ou l'efficience de même que [les] enjeux et [les] implications de ses propositions;
«3° il rend publiques les informations permettant un débat au sein de la population sur les enjeux et les choix nécessaires à la viabilité du système de santé et de services sociaux et une compréhension globale par cette dernière de ceux-ci; et
«4° il donne des avis au ministre sur l'évolution de l'état de santé et de bien-être de la population, notamment par l'analyse rétrospective des impacts des politiques gouvernementales sur cet état.» Et est-ce qu'on continue le reste? Non. Ça se termine quatrième sous-paragraphe ou paragraphe. Je suis toujours un peu perplexe devant ces... Je vais finir par la retenir, la différence entre les alinéas, les paragraphes et les sous-paragraphes. Donnez-moi encore trois ou quatre ans, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Moi, je peux vous donner plusieurs années, si vous voulez, ça ne me dérange pas.
Mme Harel: Après 24 ans, je me mélange encore.
Le Président (M. Copeman): Oui, mais la règle est relativement simple. Quand il est numéroté ou quand il y a une lettre, parce que je ne sais pas comment dire en français quelque chose qui est numéroté mais quelque chose qui a une lettre également, c'est un paragraphe. Le reste, c'est des alinéas. Alors, quand on voit un chiffre ou une lettre devant, c'est un paragraphe.
M. Couillard: Donc, M. le Président, ce qui est, par exemple, 0.1°, 1° et 2° seraient ici des sous-paragraphes.
Le Président (M. Copeman): C'est exact.
M. Couillard: Merci.
Le Président (M. Copeman): Alors, si j'ai bien compris, le ministre avait tendance, quand il faisait lecture de l'article, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, d'inclure déjà ses amendements. Alors, le ministre avait comme fait lecture de l'article tel qu'amendé. Alors, on comprend, avec l'amendement, qu'il y a un ajout, après le premier paragraphe, de ? vous l'avez, l'amendement, je crois ? 0.1°. Dans les troisième, quatrième et cinquième lignes du paragraphe n° 4, on supprime tout ce qui est après «état»; et l'amendement également supprime le paragraphe n° 5.
En principe, première discussion sur l'amendement comme tel.
Mme Harel: Alors, M. le Président, vous comprendrez que l'étude sur l'article 10 va demander que l'on étudie paragraphe par paragraphe, chacun en fait des paragraphes.
Le Président (M. Copeman): Très bien.
Mme Harel: Alors, sur l'amendement?
Le Président (M. Copeman): Sur l'amendement, exact.
Mme Harel: Bon. Alors, l'amendement consiste à ajouter aux fonctions du Commissaire l'évaluation de «l'ensemble des éléments du système de santé et de services sociaux afin d'en déterminer la pertinence». Bon. Qu'est-ce que recouvre le mot «éléments»?
M. Couillard: Ici, tout de suite, je note que nous parlons du système de santé et de services sociaux lui-même. On se souvient que, dans nos amendements précédents, on a ajouté la question des déterminants. Je répète qu'on pourra, au cours de l'étude de cet article, voir comment cette question peut être réintroduite, mais les éléments, ce sont les différentes organisations, organismes, fonctions du système de santé et de services sociaux. Et le mot «pertinents» signifie dans quelle mesure ils répondent aux besoins de la population.
Mme Harel: Alors, M. le Président, comme le législateur est présumé ne pas parler pour ne rien dire, n'est-ce pas, des fois une économie de mots signifie plus qu'une surabondance. Si c'est là l'intention, ça pourrait être: Il évalue le système de santé et des services sociaux afin d'en déterminer la pertinence. Pour qui? Pour la population? L'ensemble des éléments du système, c'est le système lui-même.
M. Couillard: Oui, effectivement.
Mme Harel: Et afin d'en déterminer la pertinence. Pour qui?
M. Couillard: Bien, pour la population, effectivement, oui.
Mme Harel: Pour la population. En tout cas, si la référence n'est pas là, on peut évaluer... en déterminer la pertinence pour le gouvernement, par exemple.
M. Couillard: Je suppose qu'on veut également ? c'est ce qu'on m'indique ? permettre de singulariser un ou plusieurs des éléments du système de santé. Bien sûr, le mot «ensemble» est important. Est-ce un signal? À mon avis, ça l'est, un signal qui dit que ces éléments doivent être considérés de façon globale mais également peuvent être singularisés ou être abordés... Bien sûr, ça va de soi. On pourra dire que ça va de soi, effectivement. C'est de cette façon de toute façon qu'une telle analyse serait faite.
Est-ce que, si on dit: «Il évalue le système de santé et de services sociaux», ça veut dire la même chose? Probablement que oui ...effectivement. Je ne sais pas si... On n'est pas sûr, derrière moi, là. Alors, on va faire attention de ne pas limiter des fonctions du Commissaire sous des dehors de vouloir simplifier le texte.
Une voix: ...
M. Couillard: O.K. Voilà. Voilà un argument... voilà un argument intéressant. On me dit: Si on enlevait le mot «éléments», à ce moment-là, c'est la pertinence de tout le système qu'il faudrait discuter. Ce n'est pas nécessairement ce qu'on veut faire.
n(16 heures)nMme Harel: Mais en mettant «l'ensemble des éléments», ce n'est pas tout le système?
M. Couillard: Mais il peut aller dans toutes les directions... ou elle peut aller dans toutes les directions possibles: l'ensemble des éléments, ou un de ces éléments, ou deux, ou quatre de ces éléments particulièrement. Il ne s'agit pas de donner une ouverture ici pour remettre en cause l'ensemble du système de santé. «L'ensemble des éléments»... ou on pourrait dire «les éléments». On pourrait dire «les éléments» ou «les différents éléments».
Mme Harel: C'est peut-être l'usage du mot «ensemble des éléments» qui donne à comprendre que c'est le système qui est évalué. Vous, vous dites: Le tout peut être différent de la somme des parties, là.
M. Couillard: Oui. Ou on pourrait dire «les différents éléments» ou «les...» Oui, «les différents éléments», c'est... Mais je ne crois pas que c'est... En tout cas, ce n'est pas l'intention qui est visée, mais, si ce n'est pas clair, on peut ajuster.
Le Président (M. Copeman): Également, l'utilisation de la préposition «la pertinence»... «La pertinence», vous avez indiqué que ce n'est pas la pertinence du système. Ce serait drôle comme fonction si le Commissaire était obligé d'examiner la pertinence du système. Si on dit: Il évalue les éléments, est-ce que c'est mieux?
Mme Harel: En fait, c'est le mot «pertinence» également. Pertinence en regard de quoi, là? Du rapport qualité-prix? En regard de...
M. Couillard: La façon dont nous l'envisageons, c'est en regard des services requis par la population compte tenu de l'état des lieux à ce moment-là. Alors, ce qui peut, par exemple, permettre de faire remarquer que tel élément du système n'est plus adapté à la réalité, je ne sais pas, 2010 ou 2012 et doit être modifié. C'est ce genre, je dirais, de signification qu'on attache au mot «pertinence».
Mme Harel: Pourquoi avoir introduit un tel amendement? Quelle est l'intention?
M. Couillard: L'intention, M. le Président, c'est de donner une indication claire au Commissaire qu'on veut qu'il ou elle, si je peux m'exprimer ainsi, fouille vraiment dans toutes les directions, et dans toutes les parties, et les recoins du système de santé et de services sociaux et que... Bien sûr, son jugement est global et systémique, mais ça n'empêche pas de singulariser un ou deux éléments. Par exemple, on a parlé tantôt de l'éthique en néonatalogie. Bien, si ça devient, comme c'est possible, une question d'une brûlante actualité, compte tenu des progrès technologiques, bien là il est certain que le Commissaire va vouloir, une année, donner une attention particulière à cette question-là, notamment sur les questions éthiques.
Alors, c'est un signal qu'on lui donne de dire: Écoutez, votre mandat est systémique et global, mais il y a des éléments, dans le système de santé, et vous pouvez en singulariser un ou plusieurs.
Mme Harel: En quoi, par exemple, l'amendement qui introduit l'évaluation des éléments du système de santé pour en déterminer la pertinence est différent du paragraphe 2°? Évidemment, il y a une distinction qui est d'informer le ministre et la population, mais, au paragraphe 2°, on dit: Informer «de la performance globale du système de santé et de services sociaux, des changements qu'il propose afin d'en améliorer l'efficacité...»M. Couillard: Bien, c'est justement. C'est que, là, c'est global et là c'est le mandat systémique du système, tandis qu'à 0.1° on permet vraiment de singulariser ou de déterminer certains de ces éléments. Je pense que c'est complémentaire. Je pense ça n'exclut pas l'un par rapport à l'autre. Le 0.1° également permet justement d'introduire cette notion de pertinence, alors que, dans le deuxième sous-paragraphe, on parle de changements proposés «afin [d'améliorer] l'efficacité ou l'efficience de même que les enjeux et les implications de ses propositions». C'est plus spécifique. Je crois que c'est complémentaire. Je crois que l'un n'empêche pas l'autre ou l'un ne contredit pas l'autre.
Mme Harel: M. le Président, la question qui se pose en regard de l'évaluation, par exemple, d'un élément, entre autres, du système de santé: Est-ce que ça pourrait conduire, par exemple, le Commissaire à proposer que ce n'est pas pertinent de maintenir des services d'organisation communautaire, par exemple, dans les centres locaux de santé et de services sociaux?
M. Couillard: Mais bien sûr il n'a aucun pouvoir décisionnel. C'est le gouvernement qui aurait à prendre des décisions de politiques. Mais, écoutez, tous les débats sont permis. C'est ça qui est... Je ne voudrais pas prendre celui que souligne la députée parce que de toute évidence il est très peu probable. S'il y a quelque chose qui est appelé à rester puis à demeurer, au cours des prochaines années, c'est l'implication du mouvement communautaire. Mais, j'irais plutôt dans d'autres directions en termes d'adaptation des éléments du système de santé à la réalité du moment.
C'est très difficile de prévoir maintenant, par rapport à ce que sera notre population dans cinq, 10, 15 ans, dans quelle mesure les différents éléments s'y adapteront, y seront bien adaptés. Je ne pense pas que... Ça n'a pas pour but, là, de remettre en question les éléments dont on parle, mais d'en déterminer et d'en discuter la pertinence. Et il ne faut surtout pas s'interdire les débats. Je pense que c'est quelque chose sur lequel on va revenir souvent. Ce n'est pas parce que théoriquement le Commissaire pourrait arriver à telle ou telle conclusion qu'on doit lui indiquer les endroits où son regard n'a pas le droit de se poser, où le débat ne peut même pas être soulevé. Je pense que ça doit être le plus large possible. C'est dans l'intérêt de la société que ces débats soient faits.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que ça pourrait, par exemple, signifier que le Commissaire pourrait évaluer le paiement... la rémunération à l'acte?
M. Couillard: Certainement, certainement. Je vois très bien... C'est là d'ailleurs que le mot «pertinence» prend tout son sens. Dans les crédits, on a eu une discussion à ce sujet-là. On pourrait fort bien envisager que le Commissaire... Et là surtout je ne voudrais pas que mes paroles un jour servent de guide trop précis au Commissaire; je ne fais que donner un exemple. On pourrait se trouver dans une situation où le Commissaire jugerait, par exemple, que, dans le cadre d'une médecine très spécialisée en milieu universitaire, la rémunération à l'acte n'est pas adaptée, n'est pas pertinente pour les services qui sont rendus, alors que ce n'est pas le cas dans d'autres secteurs. Voilà un excellent exemple de l'utilisation du mot «pertinence».
Mme Harel: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de mieux qualifier justement le mot «pertinence», c'est-à-dire «afin d'en déterminer la pertinence pour». Pour qui le législateur veut-il en déterminer la pertinence? Vous avez dit tout de suite: «Pour la population.» C'est donc la pertinence pour la population plutôt que la pertinence pour le milieu médical, ou la pertinence pour le ministère, ou le ministre.
M. Couillard: Ça peut être pour toutes ces composantes-là. Il est possible que... Bien sûr, d'abord et avant tout, en termes des services à la population, mais je ne suis pas sûr qu'il faudrait... Moi, je n'ai pas d'objection fondamentale à préciser le type, dire que c'est pertinence en regard des services à offrir à la population, par exemple, ou ce genre de formulation là, mais il ne faut pas non plus créer des ajouts qui nous semblent être une valeur ajoutée puis qui en fait vont limiter la capacité d'induire des débats ou de faire des discussions. C'est un peu la crainte que j'aurais. Je comprends très bien la préoccupation d'indiquer que c'est avant tout pour les gens, pour les citoyens qu'on fait tout ça; d'un autre côté, il ne faut pas donner l'impression au Commissaire que le gouvernement ou les législateurs ont voulu que surtout on ne parle pas de ceci ou de cela. Moi, je suggérerais de laisser l'amendement dans l'état actuel.
Le Président (M. Copeman): Si vous me permettez, M. le ministre...
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Oui, bien, simplement parce que, dans une vie bien lointaine, j'ai effectué un stage, au Conseil du trésor, sur l'évaluation de programmes. Et ce qui me frappe, c'est que, dans plusieurs éléments contenus dans plusieurs paragraphes, il y a différents éléments de ce qu'on appelle traditionnellement l'évaluation de programmes. Il y a la pertinence d'un programme; il y a son efficience; il y a son efficacité. Ce sont des termes, parfois utilisés par l'Administration publique, qui ont un sens, une connotation. Et je vois, dans le deuxième paragraphe, on fait référence à l'efficacité, à l'efficience. Là, j'ai compris, on ajoute la notion de pertinence qui m'apparaît pertinente.
Dans le premier paragraphe, on indique: «Il apprécie périodiquement les résultats obtenus...»«Apprécie», est-ce que ça veut dire évaluer? J'ai regardé dans le dictionnaire, on me dit c'est pas mal la même chose. Quand on apprécie quelque chose, on fait l'évaluation de quelque chose.
M. Couillard: C'est-à-dire, M. le Président, que le mot «apprécier», dans sa signification la plus littérale possible, n'est pas nécessairement positif. Dans le langage quotidien, on a tendance à dire qu'on apprécie telle personne, mais le mot «apprécier» est plus vaste, est plus neutre en fait que ce qu'on entend en général.
n(16 h 10)nLe Président (M. Copeman): Non, exact, et le mot «apprécier», un synonyme dans le dictionnaire, c'est «évaluer», ce n'est pas nécessairement de donner une... Mais tout ça m'amène à croire... Évidemment, je n'ai aucune objection à 0.1°, mais il me semble... Si on ajoutait la notion de pertinence à un des paragraphes déjà existants, est-ce qu'on pourrait résoudre le problème ou... Écoute, si vous souhaitez que ça reste tout seul...
M. Couillard: C'est parce que, M. le Président, 0.1°... Et justement on a eu cette discussion sur la question d'«ensemble d'éléments», c'est de l'autre partie. Uniquement enlever «pertinence» puis le mettre ailleurs, de toute façon on a un 0.1°, on n'a pas nécessairement simplifié le texte législatif. Moi, je suggérerais que ça reste comme ça.
Mme Harel: M. le Président, la question qui se pose aussi, c'est en regard du mandat qui est déjà donné à la Santé publique. On nous indique ici que... C'est en fait extrait de mémoires qui ont été présentés en commission parlementaire, lors de l'étude du projet de loi. On nous indique qu'il y aurait lieu de clarifier «la fonction du Commissaire portant sur le suivi de l'état de santé et de bien-être de la population ? article 10 ? puisque cette fonction correspond à celle dévolue aux autorités de la Santé publique en vertu de la Loi sur la santé publique [...] et spécifiée dans le Programme national de santé public 2003-2012» ? enfin qui a été renouvelé, 2005-2012. «Nous souhaitons, disait l'organisme, que la Santé publique continue d'être le maître d'oeuvre de cette évaluation et que soient clarifiées les fonctions et la collaboration avec le Commissaire.» Là, je comprends que, dans la Loi sur la santé publique, il y a déjà une disposition qui attribue la responsabilité d'évaluation à la Santé publique. Est-ce qu'il n'y a pas double emploi, là?
M. Couillard: M. le Président, c'est une question très pertinente, mais, si on regarde un peu plus loin, la question de l'état de santé de la population est au sous-paragraphe 4°. Alors, on pourra discuter. Si les collègues sont d'accord, de la pertinence du paragraphe 4° parce que c'est là qu'on y retrouve cette question de l'état de santé de la population, et je crois que c'est essentiellement à cet endroit que les gens ont émis des craintes quant au chevauchement des mandats.
Vous remarquerez par ailleurs qu'il y a d'autres parties qui ont été supprimées par rapport à la formulation initiale, alors dans l'esprit de clarifier les choses. Mais on pourra soit les clarifier davantage, soit même, si on considère qu'il y a double emploi, à la lumière de la discussion, discuter du maintien de ce sous-paragraphe 4°.
Le Président (M. Copeman): Étant donné que l'amendement touche également le paragraphe 4° et la suppression du paragraphe 5°, on peut bien faire la discussion immédiatement.
M. Couillard: Il y a autre chose, M. le Président, c'est qu'il faut avoir, je dirais, du suivi, de la cohérence dans ce qu'on a fait. On a introduit, dans le début du projet de loi, suite à une bonne discussion, la question des déterminants. Alors, à partir du moment où on parle des déterminants, on élargit le champ d'action du Commissaire à autre chose qu'uniquement le système de santé. On l'élargit à l'ensemble des actions gouvernementales. Et c'est volontairement, je crois, qu'on a fait ça, et on était d'accord pour le faire. Il est clair que la façon dont on étudie les méthodes que le gouvernement utilise pour agir sur les déterminants de la santé, ça en vient à mesurer forcément l'état de santé de la population, là, et c'est clair qu'il y a un petit chevauchement.
Je serais d'accord avec la députée qu'il y a un petit chevauchement avec les autorités de santé publique et la Loi de la santé publique. Il ne s'agit pas de les diminuer l'une par rapport à l'autre, mais je vois que, par exemple... je crois que c'est le bulletin de l'état de santé de la population, bien voilà un outil qui va être mis à la disposition du Commissaire justement. Ce n'est pas le Commissaire qui va rédiger le bulletin de l'état de santé de la population, il va s'informer auprès de la Santé publique qui a mis au point cet outil-là, qui va le lui rendre disponible. D'ailleurs, je me faisais la réflexion en lisant ce fort intéressant document que, si on avait maintenant un commissaire, il aurait probablement trouvé beaucoup de matières à commenter, compte tenu des déterminants et de la façon dont l'état de santé de la population est rédigée. Alors, il y a là, je pense, un rôle complémentaire, et je crois que les gens de santé publique, autant la Direction... les directions de la Santé publique que l'institut ne verront pas leurs rôles amputés.
Mais peut-être qu'on peut avoir une opinion différente puis en discuter, mais je ne vois pas, moi, surtout de la façon dont on a modifié l'article... Étant donné le fait qu'on a ajouté la notion de déterminants de la santé et du bien-être, il me semblerait important que cette préoccupation pour l'état global de santé de la population soit maintenue. Maintenant, est-ce qu'on peut préciser? On verra. On peut en discuter maintenant. Est-ce qu'on peut ajouter une phrase par exemple qui garantirait le maintien des fonctions des gens de santé publique? Elles sont déjà garanties par la loi. Est-ce qu'il faut nécessairement rappeler que la loi doit être suivie? J'en doute. Mais certainement c'est une discussion intéressante à avoir, et je n'en nie pas du tout la pertinence, là. Mais je vois, moi, une complémentarité dans les deux rôles justement à la lumière du bulletin de l'état de santé qu'on a ici avec nous actuellement.
Mme Harel: En matière de reddition de comptes, qui finalement va ultimement avoir la responsabilité de la reddition de comptes? C'est le ministre.
M. Couillard: C'est le gouvernement. Le gouvernement agit, prend des décisions, adopte des politiques, fait des choix financiers non seulement dans le ministère de la Santé et des Services sociaux, mais dans les autres secteurs du gouvernement. Le Commissaire fait son rapport, dit: Voici, pour tel, tel objectif, cette action est bonne; pour tel, tel objectif, cette action n'est pas utile et même peut-être négative, et c'est au gouvernement d'en assumer la responsabilité, d'en répondre devant la population. Je ne pense pas que ce soit le Commissaire ? et on ne voudrait certainement pas ça ? qui, dans son rapport, explique pourquoi le gouvernement a choisi telle politique plutôt qu'une autre. Il doit se borner à constater les effets positifs ou négatifs d'un choix de politique, et après c'est aux élus d'en assumer l'imputabilité puis la responsabilité devant la population. Je pense que c'est clair que les deux éléments doivent être dissociés.
D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle plusieurs amendements répondant à des remarques qui ont été faites en commission parlementaire ont assez fortement dissocié le rôle d'évaluation par rapport au rôle conseil. Parce qu'on nous reprochait, la députée s'en souvient, là, de donner encore plus de dédoublements, c'est-à-dire que celui qui, comme ministre, me conseille, c'est le sous-ministre en titre et son équipe du réseau, les gens de santé publique. Il y en a plein, de conseillers. Alors, est-ce qu'on veut qu'il y en ait un autre qui fasse ce travail-là? Est-ce qu'il ne serait pas non plus en conflit d'avoir conseillé quelque chose, par la suite, cette chose n'étant pas réalisée, d'avoir à la justifier? Il y a là tout un enchaînement, là, qui peut être difficile.
Il est clair, M. le Président, que ce n'est pas le Commissaire à la santé et au bien-être qui est imputable de la façon dont le gouvernement gère le système de santé ou l'État, là.
Mme Harel: Prenons l'exemple des électrochocs, par exemple, hein? On a vu dernièrement qu'il y a une mobilisation, là, sur le fait qu'il y a, semble-t-il, une recrudescence de l'usage des électrochocs: 4 000 électrochocs, fin des années quatre-vingt, puis 8 000, début des années 2000. Et particulièrement c'est fait sur des femmes et des femmes de plus de 60 ans. Ça, c'en est un, élément de système. Parce que le ministre a dit en commission parlementaire qu'il écrirait, je pense, à l'AETMIS et au Collège.
M. Couillard: Bien, j'ai dit en commission, sur cette importante question, là... je comprends la préoccupation, mais qu'il faut aborder avec une certaine prudence: Souvenons-nous qu'il s'agit de décisions cliniques et de prescriptions médicales pour lesquelles l'État a relativement peu de... Ce n'est pas une politique gouvernementale, d'adopter ou de prescrire l'électrochoc, mais c'est une décision clinique. Et il y a des psychiatres et des médecins qui l'ont... puis qui se présenteraient devant nous, aujourd'hui même, en nous reprochant de mettre en doute l'efficacité de cette technique-là, sur la base d'articles scientifiques, d'efficacité, etc.
Mais je pense que, sur cette question, le parallèle que je ferais, c'est l'action en santé mentale. L'élément du système de santé qui s'applique ici, globalement c'est l'organisation des services en santé mentale, et c'est là-dessus, je pense, que le Commissaire aurait des commentaires à faire certainement. Est-ce qu'il déciderait ou elle déciderait de singulariser la question de la prescription médicale? Pourquoi pas? Ce n'est pas quelque chose qu'il est interdit de faire. On veut que le débat soit le plus large possible, mais ce n'est pas nécessairement là, à ce niveau-là, d'emblée, qu'il va ou qu'elle va vouloir commenter.
Mais je n'exclus pas que ce soit le cas non plus. Il n'y a rien dans le projet de loi qui empêche... Pour répondre de façon définitive à la question de la députée, il n'y a rien dans le projet de loi à mon avis qui empêcherait le Commissaire, dans son rapport annuel, de souligner une préoccupation, et, étant donné les pouvoirs qu'il a ou qu'elle aura d'obtenir des informations, de la même façon que, moi, j'écrirais, on l'a dit, au Collège des médecins, ou à la fédération médicale, ou à l'Agence d'évaluation, il n'y a rien qui l'empêchera de faire lui-même ou elle-même cet exercice et d'en donner peut-être une coloration différente de ce que pourrait faire le gouvernement. Ça, il n'y a aucun problème avec ça, on souhaite même que ce débat ait lieu.
n(16 h 20)n Mais restons dans ce sujet, parce qu'il est important. Advenant le cas où on aurait une préoccupation commune sur la perception d'un abus de ce type d'intervention, il n'y a pas d'autre façon d'agir là-dessus que de soumettre cette préoccupation aux organisations médicales, notamment au Collège des médecins, parce qu'éventuellement et ultimement ce sont ces organismes qui ont la responsabilité de veiller à défendre les intérêts de la population dans l'acte médical, dans l'accomplissement de l'acte médical.
Mme Harel: Oui, parce que toute décision clinique n'a pas nécessairement une valeur probante. Je pense aux lobotomies qui étaient faites sur une grande échelle. Je ne sais pas si le ministre a vu le film...
M. Couillard:Over the Cuckoo's Nest.
Mme Harel: Oui, entre autres, mais celui plus récent, québécois, d'Alys Robi, où on voit qu'entre 1935 et 1955 il y a eu des dizaines de milliers... De mémoire, je pense que c'est au-delà de 150 000 lobotomies. Alors, c'était une décision clinique, mais il n'est pas sûr que... Bien, ça dépend de l'état de la science, là, mais il faut aussi qu'il y ait évolution et examen.
Cette évaluation, il y a l'Agence d'évaluation qui en fait, il y a... Alors, est-ce que ça signifie que le Commissaire pourrait donner des mandats? Est-ce qu'il pourrait donner des mandats de sa propre autorité, par exemple à l'AETMIS?
M. Couillard: On m'indique que le Commissaire pourrait certainement suggérer que l'AETMIS se penche ? prenons cette question ? pourrait suggérer que l'AETMIS se penche sur cette question, mais l'Agence d'évaluation étant elle-même souveraine, elle décide des mandats qu'elle désire ou non exécuter. C'est vrai... Mais la remarque de la députée est vraie. La médecine est non seulement une science, mais également un art, et puis la pondération scientifique objective de différents éléments n'est pas toujours aussi ferme qu'on croit en général.
Mme Harel: La médecine, c'est comme la politique, ce n'est pas la mathématique, on ne peut pas dire: Deux et deux font quatre. Il arrive même que deux et deux font trois ou cinq.
M. Couillard: Mais, moi, je dirais que temporairement deux et deux peuvent faire cinq, mais, à la fin de la journée, il faut qu'ils fassent quatre pareil.
Mme Harel: Cependant, je pense que ce serait formidable si c'était une science exacte, hein? Ni la politique l'est, ni la médecine l'est.
On lit dans le projet de loi, à l'article 13, paragraphe 1°, donc que «le Commissaire peut [...] avoir recours à des experts externes». S'il arrivait, bon, qu'il demande le concours de l'AETMIS qui, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, choisirait donc d'autres priorités, ça signifie que, sur ces sujets-là, le Commissaire pourrait faire appel à des experts externes, hein?
M. Couillard: Oui, puis non seulement auprès de l'AETMIS, mais il pourrait même solliciter des experts étrangers, par exemple, sur la question, faire lui-même des études, enquêtes ou sondages.
Pour la question du chevauchement de fonctions, on pourra voir plus loin, à 12.1, un amendement qui a été introduit, qu'on a bien voulu protéger, là, les fonctions des autres organismes. On pourra le voir tantôt, lorsqu'on sera à 12.1, à l'amendement.
Le Président (M. Copeman): Chers collègues, il y a une demande de vote par appel nominal en Chambre. Alors, je suspends les travaux de la commission.
(Suspension de la séance à 16 h 24)
(Reprise à 16 h 50)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission poursuit ses travaux, et nous sommes toujours à l'amendement proposé par le ministre sur l'article 10. Je pense qu'il est pertinent qu'on continue.
M. Couillard: Je pourrais, M. le Président, me permettre de réintroduire la discussion en faisant remarquer que la partie de l'amendement qui porte sur le sous-paragraphe 4° ? il s'agit d'un retrait de texte de la fin du sous-paragraphe 4° et du retrait du sous-paragraphe 5° au complet ? vise en fait à retirer la confusion entre le rôle d'évaluateur et le rôle conseil que certains nous ont reproché, à juste titre je crois maintenant, d'avoir confondus dans le projet de loi initial.
Si on lit ce qui était prévu, par exemple, au cinquième paragraphe: «...sur les orientations à considérer pour assurer une évolution constante et cohérente de ce système de même que sur les options qui sont à la disposition du gouvernement en regard des ressources financières disponibles», bien il est clair que ce travail-là doit être fait par le gouvernement avec ses conseillers et non pas par un non-élu. Alors, c'est la raison pour laquelle on a introduit cet amendement.
Et plus loin on verra qu'on protège également les fonctions des autres personnes telles que le Vérificateur général et... C'est un amendement qu'on introduit plus loin, à 12.1, qu'on s'assure de bien préserver les fonctions des autres personnes telles que le Directeur de la santé publique ou le Vérificateur général.
Le Président (M. Copeman): Alors, toujours sur l'amendement qui a trois effets: le premier, on connaît, l'ajout du sous-paragraphe 0.1°; le deuxième, la suppression, dans le quatrième paragraphe, des mots après «état»; et, le troisième effet, la suppression du cinquième paragraphe.
Mme Harel: Ah oui! d'accord. Le ministre vient de nous indiquer qu'il y a suppression du paragraphe 5°, hein? C'est bien ça?
M. Couillard: Sous-paragraphe.
Le Président (M. Copeman): Non, paragraphe.
M. Couillard: Paragraphe.
Le Président (M. Copeman): C'est vrai que ça va vous prendre un certain temps, M. le ministre, parce que...
M. Couillard: Je suis découragé, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Oui, c'est un paragraphe.
Une voix: Découragé.
M. Couillard: Vous avez raison parce qu'il y a un chiffre devant, vous l'avez dit tantôt.
Le Président (M. Copeman): Oui. Bien, vous savez, le 0.1° est un sous-paragraphe parce qu'il est...
M. Couillard: C'est un nouveau paragraphe.
Le Président (M. Copeman): Bon.
M. Couillard: Bon. Vous êtes encore plus mêlé que moi, M. le Président, puis ça fait plus longtemps que moi que vous êtes là.
Le Président (M. Copeman): Ça fait juste 11 ans.
M. Couillard: Ce n'est pas rassurant.
Le Président (M. Copeman): De toute façon, on va revenir à la discussion. Je peux vous le dire, le cinquième, c'est vraiment un paragraphe.
Mme Harel: Donc, vous allez privilégier un rôle d'évaluation et non pas un rôle conseil.
M. Couillard: Voilà! Et on donne quand même la possibilité au Commissaire de faire des commentaires, on l'a vu, plus loin, de façon à ce que ne soit pas un pur rôle technique, mais il peut également faire des commentaires d'orientation. Mais effectivement, comme on nous l'a dit en commission parlementaire, ceux à qui il revient de conseiller le gouvernement sur les options disponibles, leur adéquation avec les ressources financières, ce sont les équipes administratives du ministère, les consultants externes auxquels on peut avoir recours à l'occasion, et c'est là que l'imputabilité se situait. Je pense que là il y avait une confusion qu'il était nécessaire de retirer du projet de loi.
Mme Harel: M. le Président, ce faisant, le ministre abolit, par l'adoption du projet de loi, le Conseil médical et le Conseil santé et bien-être qui tous deux avaient un rôle conseil, un rôle donc d'aviseur au ministre mais aussi à la population, puisque les avis étaient rendus publics. Les avis du Conseil santé bien-être étaient rendus publics; je ne sais pas pour les avis du Conseil médical.
M. Couillard: Pas nécessairement.
Mme Harel: Pas nécessairement. Mais santé et bien-être, ils l'étaient, je pense, hein?
M. Couillard: Bien, la Politique santé et bien-être était rendue publique. Quant aux avis qui étaient entre les politiques, je n'en suis pas certain, là. Mais il est certain de toute façon que le rapport du Commissaire est rendu public et va comprendre beaucoup de ces éléments-là. Pour ce qui est des conseils sur les politiques à obtenir, souvenons-nous que l'état de santé de la population maintenant est là, le plan stratégique du ministère également est disponible et comporte des objectifs très précis. Et effectivement le Commissaire par ses remarques peut orienter la question.
Quant au Conseil médical, on y reviendra, je suppose, à la lueur d'un autre article. On considère maintenant que la profession médicale est très bien représentée non seulement dans le ministère, mais à l'extérieur, et on pourra obtenir ses avis de la même façon. Et, par exemple, si on prend les effectifs médicaux, prenons l'exemple des effectifs médicaux, qui est un sujet sur lequel le Conseil médical se prononce régulièrement, on le sait, il n'y a absolument rien qui empêche le Commissaire de se prononcer sur ces mêmes questions et même de consulter les mêmes personnes qui, à travers le Conseil médical, donnaient des avis et de les incorporer à son rapport. Alors, il est clair que ceci ne retire pas de pertinence au rôle du Commissaire et, d'après moi, n'est pas une valeur retirée à ce qu'on avait actuellement.
Mme Harel: M. le Président, je ne pense pas que cela soit un avis partagé par la profession médicale. Je crois qu'il y a toujours un espoir que ça se traduise... Je pense qu'ils ont perdu espoir que ça se traduise par le maintien du Conseil médical, mais il y a toujours un espoir que ça se traduise par un nouveau dispositif qui relèverait du Commissaire, mais lequel dispositif permettrait la continuité au moins du rôle que jouait le Conseil médical. À cet effet, là, j'aurai des projets d'amendement... j'aurai un projet d'amendement à déposer, qu'on pourrait déposer pour examen par les membres de la commission et le ministre dès que nous aurons retrouvé copie incessamment du projet.
Je veux signaler qu'autant la Loi sur le Conseil médical du Québec que la Loi sur le Conseil de la santé et du bien-être contient une disposition qui prévoit la publicité des avis, conseils et recommandations, et qui se lit, pour le Conseil médical du Québec, comme suit: «Le conseil peut rendre publics les conseils, avis et recommandations qu'il formule en application des articles 16 à 20, 60 jours après les avoir transmis au ministre.» Donc, tous ces avis transmis au ministre peuvent être rendus publics dans les 60 jours. Et, en ce qui concerne la Loi sur le Conseil de la santé et du bien-être, c'était donc l'article 24: «Le conseil transmet au...» Excusez-moi, 21: «Le conseil peut rendre publics les conseils, avis et recommandations qu'il formule en application des articles 16 à 20, 60 jours après les avoir transmis au ministre.» C'est donc dire qu'il y avait spécifiquement un dispositif qui permettait à la population de se saisir des avis du Conseil de santé et bien-être et du Conseil médical.
Alors, si on revient à l'amendement, on était au paragraphe 0.1°, c'est bien ça?
Le Président (M. Copeman): Tout à fait, l'amendement dans son ensemble, qui traite des trois... qui a trois effets.
Mme Harel: Ah! parce qu'on ne peut pas... Il faut le faire... Oh! d'accord. Alors, il faut...
Le Président (M. Copeman): Parce qu'il s'agit d'un amendement, il faut... On peut en discuter dans ses composantes, mais en principe il s'agit d'un seul amendement qui a trois effets à l'article 10.
Mme Harel: Alors donc, M. le Président, l'amendement prévoit donc, en plus d'introduire un nouveau paragraphe, prévoit, au paragraphe 4°, la suppression dans les troisième, quatrième et cinquième lignes, des mots suivants... Donc, le Commissaire... Non.
M. Couillard: Les quatrième, cinquième et la... La fin de la quatrième, la cinquième, sixième et le début de la septième.
Mme Harel: Donc, le Commissaire propose au ministre «des grandes orientations aptes à guider l'élaboration de la Politique de la santé et du bien-être». Pourquoi cette suppression?
M. Couillard: Bien, c'est le même élément que ce qu'on a expliqué tantôt, c'est de retirer le rôle conseil et faire une nette distinction entre le rôle conseil et le rôle d'évaluation. C'est cohérent avec le retrait du paragraphe 5°.
Mme Harel: C'est donc dire que le rôle conseil... Il y aura quand même un forum de la population que vous proposez. Alors, ce forum de la population aurait un rôle conseil, ce n'est pas un rôle d'évaluation.
M. Couillard: C'est-à-dire qu'on va voir plus loin que, dans tout rapport que le Commissaire publie... Et, en passant, il y a nécessité, dans l'article 18, pour le Commissaire également, de déposer tout rapport particulier devant l'Assemblée nationale, dans un délai de 30 jours. Donc, il y a publicité également des avis du Commissaire directement à l'Assemblée nationale. Mais il y a également obligation, on le verra lorsqu'on parle des dispositions du forum de la population, que le forum soit consulté pour l'élaboration de ces rapports. Donc, il y aura certainement un input de la population qui va être très apprécié et très important, là, à ce niveau-là, et qui doit faire... On doit en faire état dans le rapport.
n(17 heures)nMme Harel: Et, à ce moment-là, cette consultation d'un forum de personnes, là ? je vois qu'il est composé de 27 personnes dont 18 citoyens, là, provenant de chacune des régions du Québec... Elles ne seraient dorénavant consultées que sur le rôle d'évaluation?
M. Couillard: C'est une aide au rôle d'évaluation du Commissaire, mais auquel s'ajoute également... Si vous regardez le paragraphe 2°, là: «il informe», il y a quand même, ce que je dirais, une dose de conseil qui persiste, puisqu'«il informe le ministre et la population de la performance [...] des changements qu'il propose afin d'en améliorer l'efficacité ou l'efficience de même que [les] enjeux et [les] implications de ses propositions».
Donc, la population va se prononcer sur cet aspect-là. Donc, on n'a pas retiré tout le rôle conseil; on a voulu cependant démarquer les responsabilités et l'imputabilité de chacun.
Mme Harel: Je voudrais juste vérifier une chose. Au paragraphe 4°, je relis... Dans le tableau des amendements proposés au projet de loi par le Conseil de la santé et du bien-être, l'amendement qui était proposé au paragraphe 4° se lisait comme suit: Le Commissaire en fait «donne des avis au ministre de la Santé et des Services sociaux sur les grands enjeux du système de santé et bien-être, sur les orientations à considérer pour assurer une évolution constante et cohérente de ce système de même que sur les options qui sont à la disposition du gouvernement en regard des ressources financières disponibles». Ça ressemble à 5°, hein?
M. Couillard: C'était le texte initial.
Mme Harel: C'est ça. Oui, vous avez raison. En fait, c'est qu'ils ont décalé, là, l'ordre des paragraphes.
En ce qui concerne le paragraphe 4°, ça se lit comme suit: «Il donne des avis au ministre sur l'évolution de [la] santé et de bien-être de la population, notamment par l'analyse rétrospective des impacts des politiques gouvernementales sur cet état, et il lui propose en conséquence des grandes orientations aptes à guider...» En fait, la recommandation, c'était le maintien du paragraphe 4°, par le Conseil de santé et bien-être.
M. Couillard: Et c'est là qu'on a dû faire l'arbitrage entre le retrait d'une plus grande partie du rôle conseil, tel qu'on nous l'a suggéré de plusieurs côtés à la commission parlementaire.
Mme Harel: Là, M. le Président, si on dispose de cet amendement, on ne reviendra plus sur la discussion du paragraphe 5°.
Le Président (M. Copeman): Il n'existera plus, effectivement. L'effet de l'amendement étant de supprimer...
Mme Harel: De supprimer.
Le Président (M. Copeman): Exact.
Mme Harel: M. le Président, au paragraphe 4°... on va revenir quand même sur le paragraphe 4°, quel que soit le résultat, là, de l'étude de l'amendement, parce qu'à plusieurs reprises il a été question, en commission parlementaire, de demander une modification pour que les avis que le Commissaire donne le soient au ministre et à la population.
Le Président (M. Copeman): Vous savez qu'il y a toujours possibilité d'amendement, Mme la députée. Le seul effet de l'amendement, actuellement, la discussion, c'est évidemment qu'on ne peut pas retourner sur la portion qui est retranchée, c'est-à-dire «et il lui propose». Mais, sur le reste, effectivement, nous allons retourner sur le paragraphe 4° par la suite.
Mme Harel: Permettez-moi une question. Quand le ministre disait, tantôt, que tous les avis... c'était quel article?
M. Couillard: 18, M. le Président. 18. Alors, il y a deux alinéas, d'abord pour le rapport... Bien, je peux le lire maintenant:
«Dès qu'il est disposé à présenter des conclusions ou à déposer un avis sur une question[...], le Commissaire peut transmettre au ministre un rapport particulier en faisant état ou il peut choisir d'inclure ses conclusions ou son avis dans le rapport visé à l'article 17», qui est le rapport annuel.
Mais on ajoute: «Le ministre dépose tout rapport particulier devant l'Assemblée nationale dans les 30 jours de sa réception ou, si elle ne siège pas, dans les 30 jours de la reprise de ses travaux.» Donc, si le Commissaire décide, étant donné l'importance d'une question ou l'actualité d'une question, de ne pas attendre la publication de son rapport annuel pour le soumettre à l'Assemblée nationale, il doit le déposer. Ça veut dire que, s'il prend la décision de faire un rapport particulier sur une question ou si on lui demande de faire un rapport particulier sur la question, il doit obligatoirement le déposer à l'Assemblée nationale.
Mme Harel: Est-ce qu'il y a un amendement qui est apporté à l'article 18?
M. Couillard: Oui. Dans l'amendement, on ajoute après le mot «dépose»... On indique, au lieu de «dépose ce rapport», «dépose tout rapport particulier».
Le Président (M. Copeman): Alors, sur l'amendement?
Mme Harel: Alors, sur l'amendement, M. le Président... Permettez-moi juste une légère... La question qu'on se pose, M. le Président, c'est la suivante: Est-ce qu'à l'article 2 on ne retrouve pas mutatis mutandis... Au paragraphe ? excusez-moi ? paragraphe 2° ? excusez-moi ? de l'article 10, est-ce qu'on ne retrouve pas les fonctions similaires à celles qu'on retrouve au paragraphe 5°?
M. Couillard: C'est-à-dire que c'est beaucoup plus... moins détaillé, parce que, si vous regardez le paragraphe 5°, c'était très précis. On disait: «...évolution constante et cohérente [du] système de même que les options [...] à la disposition du gouvernement en regard des ressources financières disponibles.» Et là il y avait une sorte de conseil administratif, là, qui était présent, là.
Alors, tandis que, si on prend les grands enjeux, par exemple la question qui nous a intéressés ce matin, à la période de questions, le virage démographique, la question des personnes âgées, voilà un grand enjeu, un enjeu majeur du système de santé, alors il est clair que le Commissaire va vouloir informer le ministre et la population de ce type d'enjeu là.
Mme Harel: Également, M. le Président, j'ai en tête le scénario d'une caisse santé. Disons, si on applique le paragraphe 5°, il pourrait y avoir des avis du Commissaire sur les options à la disposition du gouvernement en raison des ressources financières disponibles.
Si on applique le paragraphe 2°, on pourrait y introduire également des propositions dans la formule d'information. Est-ce que c'est différent?
M. Couillard: Si la question est la suivante: Est-ce qu'il y a quelque chose...
Mme Harel: Dans les enjeux et les implications, oui?
M. Couillard: O.K.
Mme Harel: Excusez-moi, je n'avais pas terminé. C'est... Il pourrait informer le ministre et la population des enjeux et des implications de ces propositions en regard des changements qu'il propose afin d'améliorer l'efficacité ou l'efficience.
(Consultation)
Mme Harel: Alors, M. le Président, je pense qu'on serait prêts à disposer.
Le Président (M. Copeman): De l'amendement?
Mme Harel: Oui, et à l'apprécier, comme vous dites.
Le Président (M. Copeman): Alors, après avoir évalué l'amendement, est-ce que l'amendement est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Des voix: Adopté.
n(17 h 10)nLe Président (M. Copeman): L'amendement est adopté. Et nous retournons à la discussion, par alinéas et paragraphes, de l'article 10 tel qu'amendé. Alors, on peut avoir une discussion générale, on peut procéder, si vous souhaitez, procéder par alinéas et paragraphes, comme vous voulez. Oui? Donc, on commence dès le début.
M. Couillard: Alors, M. le Président, le premier alinéa se lit de la façon suivante: «Afin de remplir adéquatement les responsabilités qui lui sont confiées, le Commissaire est notamment investi des fonctions suivantes.» Je crois qu'ici le mot important est le mot «notamment» parce que ça donne également de l'ouverture pour encore une fois donner la latitude au Commissaire d'explorer des points de vue ou des sujets ou de susciter des débats qui ne sont pas exclusivement restreints à ceux qui sont mentionnés dans les paragraphes qui suivent.
Mme Harel: Au paragraphe 1°, M. le Président, le Conseil santé et bien-être suggérait en commission, lors de l'audition des mémoires, la modification suivante: Il apprécie la performance du système de santé et de bien-être. Je vois qu'on retrouve le mot «performance» au paragraphe 2°, cette fois pour informer le ministre et la population de la performance globale du système, alors que là ce serait une évaluation en fait.
M. Couillard: Bien, M. le Président, c'est plus que ça, parce que, si on lit le texte du deuxième paragraphe: «Il informe le ministre et la population de la performance globale du système de santé et de services sociaux...» d'abord, donc, s'il doit informer, il faut qu'il l'ait analysée.
Deuxièmement: «...des changements qu'il propose afin d'en améliorer l'efficacité ou l'efficience de même que des enjeux et des implications de ses propositions.» C'est là où on a permis un rôle qui dépasse la simple évaluation, où on permet certainement au Commissaire de s'aventurer sur le terrain des conseils ou des propositions. Et je pense que c'est la façon de le faire, puisqu'on parle de la... on en reste à un rôle de conseil macroscopique sur la performance globale du système de santé et de services sociaux.
Mme Harel: Le Conseil de santé et bien-être suggérait qu'on introduise, au paragraphe 2°, les mots suivants: «Il exerce cette fonction, notamment en regard de l'accessibilité, la continuité, l'efficacité, l'efficience, la pertinence, la qualité technique, la réactivité et la sécurité, la capacité d'adaptation et la capacité d'innovation.»M. Couillard: Oui, mais, écoutez, l'efficacité et l'efficience sont là; performance, c'est là. On s'engagerait dans une liste extrêmement exhaustive, là, et je ne suis pas certain que de toute façon, le Commissaire, compte tenu de ses compétences et des fonctions qui lui sont attribuées, n'aura pas naturellement tendance à regarder ces questions-là. Ça me semble un peu peut-être superflu en termes d'alourdissement du texte. Je ne pense pas qu'à l'inverse il n'y ait rien dans ce texte qui prescrive au Commissaire d'étudier les différents éléments auxquels le Conseil de santé et bien-être fait allusion.
Mme Harel: On reviendra peut-être, au paragraphe 2°, sur la question de l'accessibilité. Mais, au paragraphe 1°, est-ce que le ministre peut nous définir ce qu'il considère comme... ce que signifie en fait le mot «raisonnables»? C'est étrange, dans un projet de loi, de trouver les mots «attentes raisonnables». Est-ce qu'on peut considérer que, par exemple, les «ressources qui y sont affectées et des attentes [...] qui peuvent en découler», est-ce qu'il peut y avoir... Pourquoi est-ce qu'on utilise le mot «raisonnables»?
M. Couillard: Bien, voilà! Est-ce que le fait de dire qu'on analyse le résultat en fonction des ressources qui y sont affectées n'est pas en soi une façon de faire appel à cette notion-là? On pourra en discuter.
«Attentes raisonnables», on pourrait dire, par exemple, que... certains pourraient juger que la santé doit recevoir non pas 43 % mais 60 % des dépenses de l'État parce que tous les besoins doivent être comblés. On sait que par définition le domaine de la santé et des programmes sociaux est un domaine où les besoins sont quasi infinis. Donc, il y aura toujours malheureusement des besoins qui ne seront pas comblés. Il s'agit de refléter cette notion, qui n'est pas une orientation mais une réalité. C'est d'ailleurs...
Mme Harel: Ce sont les attentes raisonnables de qui?
M. Couillard: Bien, de la population, je suppose. Mais le mot «raisonnables», pour compléter la réponse, je pense qu'essentiellement, c'est: Le Commissaire va en faire l'appréciation, de ce qui est justement raisonnable. Parce qu'un gouvernement pourrait dire à la population: Bien, votre attente dans tel domaine n'est pas raisonnable parce que telle, telle, telle raison, alors que le Commissaire pourrait dire: Non, justement, il s'agit d'une attente raisonnable. Il y a une ouverture d'utiliser le terme, là, dans toutes les directions possibles.
Mme Harel: Reprenons, M. le Président. Le paragraphe se lit comme suit. Il s'agit des fonctions du Commissaire: «Il apprécie périodiquement les résultats obtenus par le système de santé et de services sociaux en fonction ? de deux paramètres soit ? des ressources qui y sont affectées...» C'est un paramètre quantitatif. On sait ce que ça signifie, 43 % du budget de l'État. Mais l'autre paramètre, c'est «des attentes raisonnables qui peuvent en découler».
Et là ça reste imprécis, parce que les attentes raisonnables qui peuvent en découler, ça peut être différent quand on apprécie les attentes raisonnables du gouvernement ou les attentes raisonnables de la population.
M. Couillard: Bien, moi, je serais prêt qu'on ajoute «les attentes raisonnables de la...» C'est un peu lourd, comme phrase, là, mais clairement, c'est les attentes raisonnables de la part de la population et non pas... Je comprends la... Mais il s'agit peut-être de le préciser, si nécessaire, mais de façon qui ne soit pas trop lourde pour le texte. «Des attentes raisonnables...»Mme Harel: Je pense que ce serait utile de le préciser.
M. Couillard: On pourrait peut-être dire ? je le lance comme ça, sans en faire un amendement formel, parce qu'on peut échanger avant de le faire, là: «...des ressources qui y sont affectées et des attentes raisonnables qui peuvent en découler du point de vue de la population», peut-être? Je ne sais pas si vous trouvez que c'est correct.
Mme Harel: Oui. Je pense que ce serait utile de le faire, à défaut de quoi ça peut très bien être interprété comme étant un des paramètres duquel le Commissaire doit tenir compte. Mais ce paramètre pourrait être celui des attentes raisonnables du ministre, des attentes raisonnables du Conseil du trésor. Même, je vous dirai que, si on ne le précise pas, les mots «attentes raisonnables» peuvent même... il y a différents... Quel que soit le gouvernement, entre le ministre des Finances, la présidente du Conseil du trésor et le ministre de la Santé et des Services sociaux, il peut y avoir trois visions légitimes mais différentes de ce qu'est l'attente raisonnable qui en découle.
Et il me semble que, si on indique que le Commissaire apprécie les résultats en fonction des ressources et des attentes raisonnables, du point de vue de la population...
(Consultation)
Mme Harel: Laissons cela ouvert, parce que de toute façon on a l'ensemble de l'article, hein? Alors, avec le temps qui est imparti, là, on pourrait poursuivre et continuer à y réfléchir.
M. Couillard: Ce que je peux juste donner, comme son de cloche de la part des collaborateurs, c'est ce qu'on m'indique, c'est que c'est ce qu'on voulait dire. Alors, est-ce qu'il est nécessaire de le... On peut toujours aborder la question dans un sens inverse: Est-ce qu'il y a quelque chose qui nous dit que ce n'est pas ça qu'on veut dire? C'est peut-être la question qu'on pourra se poser. Mais on y reviendra donc. On a le temps d'y réfléchir, tous, chacun de notre côté, là.
Mme Harel: Oui, parce qu'habituellement, en technique de rédaction de lois, ce qui n'est pas dit ne peut pas être interprété comme étant inclus.
Le Président (M. Copeman): Évidemment, il y a toute la question de l'intention du législateur. L'intention a été annoncée par le ministre, mais je suis d'accord avec vous que ça vaut la peine qu'on réfléchisse sur la possibilité de préciser le terme.
Mais, si on poursuivait la discussion sur le deuxième paragraphe, on va... Parce qu'on va voter sur l'ensemble; on ne voterait pas paragraphe par paragraphe, alors...
M. Couillard: D'autant plus ? c'est parce que, quand une idée nous vient, c'est dommage de la laisser s'éloigner puis de ne pas y revenir par la suite ? d'autant plus que le forum de la population est consulté dans cet exercice-là. Donc, clairement, l'attente raisonnable va être colorée par l'input du forum de la population. Bon, c'est un élément que j'ajoute à la discussion.
n(17 h 20)nMme Harel: C'est certain que le fait que ce ne soit pas précisé peut laisser place à de l'interprétation. Bon. Je n'ai pas eu l'occasion... Il nous faudra plus de temps, l'an prochain, lors de l'étude des crédits, mais je n'ai pas eu l'occasion d'interroger le ministre sur ce sondage, là, de la firme Léger Marketing concernant les attentes des Canadiens et des Québécois à l'égard de l'accès aux soins de santé, et on y retrouvait des pourcentages assez élevés de l'opinion publique québécoise en faveur d'un recours au système privé.
Évidemment, quand on lit comme il faut le sondage, on se rend compte que la question qui est posée suppose que toutes choses étant égales et que ça ne modifie en rien la livraison de services publics... Ce qui est une vue de l'esprit, parce qu'on ne peut pas introduire un système sans que ça ait de l'impact et que ça modifie... On ne peut pas introduire plus de système privé sans que ça ait de l'impact sur le système public et alors que la question posée laissait entendre qu'il n'y aurait aucun impact. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de prendre connaissance du sondage, là, et de la question, telle que libellée, mais elle introduisait un aspect qui sans doute a eu beaucoup d'influence sur la réponse.
Mais les «attentes raisonnables qui peuvent en découler», si on introduit «de la population», et dire que ça pourrait être pris en considération...
M. Couillard: Ça pourrait être perçu négativement également par la population en leur disant: Écoutez, juste pour vous, vos attentes à vous, il faut qu'elles soient raisonnables, celles du gouvernement n'ont pas nécessairement à l'être. Comprenez-vous? Il y a peut-être une... Encore une fois, je comprends le but qui est visé, mais est-ce qu'on va arriver à l'objectif? Est-ce qu'on ne créera pas en fait un objectif contraire?
Mme Harel: Mais ça peut être aussi des attentes raisonnables pour le Commissaire. Parce que, tel que libellé, «il apprécie [...] les résultats obtenus [...] en fonction des ressources qui y sont affectées ? ça, c'est indubitable, hein, c'est quantifiable ? et des attentes raisonnables qui peuvent en découler», il est évident que le Commissaire va évaluer... a à évaluer ce qu'il considère comme des attentes raisonnables.
M. Couillard: Par exemple, il pourrait dire que, compte tenu du choix budgétaire du gouvernement d'avoir privilégié ce secteur, on aurait pu raisonnablement s'attendre à avoir tel type de résultats. Pourquoi ces résultats ne se sont pas produits? Je vois là également une ouverture qui permet au Commissaire d'être encore plus créatif dans... Dans toutes ces prédictions, je pense qu'il faut toujours faire l'effort, et on le fait très bien actuellement, de vérifier qu'on ne va pas limiter la capacité de réfléchir ou d'imaginer du Commissaire, là.
Mme Harel: En fait, c'est qu'il n'y a pas deux paramètres distincts. Les «attentes raisonnables qui peuvent en découler», c'est-à-dire qui peuvent découler des ressources qui y sont affectées, à savoir que l'un est subordonné à l'autre. En fait, il apprécie les résultats en fonction des ressources et des attentes qui peuvent découler de... ce n'est pas les attentes de la population, mais les attentes qui peuvent découler des ressources qui y sont affectées. Et où, dans ses fonctions, peut-il évaluer le fait que les ressources sont insuffisantes?
M. Couillard: Bien, il peut le faire, là, dans les grands enjeux. Ça, c'est... Je pense que voilà un grand enjeu du système de santé, là, sur l'ensemble des éléments également. Un des éléments du système de santé, c'est le financement, c'est les choix budgétaires, la pertinence également. Le mot «pertinence» s'applique très bien aux décisions budgétaires du gouvernement.
Moi, je vois très bien la traduction de cette fonction-là dans l'évaluation des choix de financement du gouvernement non seulement de la santé à l'intérieur de l'enveloppe globale du gouvernement, mais des priorités qui sont déterminées à l'intérieur de l'enveloppe de la santé et des services sociaux. Je pense que c'est là que le mot «pertinence» également prend toute sa signification et qu'on fait le lien avec, d'une part, les déterminants pour l'enveloppe globale du gouvernement, puis, d'autre part, l'état de santé de la population, les indices de santé publique, etc. Tout ça est à mettre en lien.
Mme Harel: Alors, on poursuit au paragraphe 2°? Alors, le paragraphe 2°, il n'y a pas d'amendement, je crois, hein? Il n'y a pas d'amendement.
M. Couillard: Il n'y a pas d'amendement.
Mme Harel: On y lit donc:
«2° il informe le ministre et la population de la performance globale du système de santé et de services sociaux, des changements qu'il propose afin d'en améliorer l'efficacité ou l'efficience...» Quelle est la différence entre les deux?
M. Couillard: Alors, l'efficacité, c'est le résultat brut qu'on obtient, puis l'efficience, c'est la façon dont on a le plus judicieusement possible utilisé les ressources, tant humaines que financières, pour arriver à ce résultat-là. Par exemple, on a réussi à faire, je ne sais pas, moi, 150 opérations de plus, mais on constate qu'on aurait pu avoir exactement le même résultat ? qui est l'efficacité ? en organisant le travail différemment ou en finançant différemment les composantes du système de santé ? ça, c'est l'efficience.
Mme Harel: Donc, l'efficacité, ce serait: il y a 150 chirurgies par exemple.
M. Couillard: C'est beaucoup...
Mme Harel: L'efficience, ce serait dans un plus court délai.
M. Couillard: Ou comment a-t-on fait? Je dirais: Comment a-t-on fait? Peut-être, oui, dans un plus court délai. Ou comment a-t-on fait pour obtenir ce résultat de 150? Aurait-il été possible d'obtenir le même résultat avec des choix différents qui auraient pu libérer des ressources pour d'autres secteurs du système de santé?
Le Président (M. Copeman): Je crois que l'efficacité... l'efficience, pardon, l'efficience revient à la notion des moyens utilisés: Est-ce que c'est...
M. Couillard: ...
Le Président (M. Copeman): ...en relation avec les résultats? Est-ce que les moyens utilisés étaient les plus appropriés, ainsi de suite, pour atteindre un résultat qui est l'efficacité?
Mme Harel: On comprend que le paragraphe 2° est sujet à l'application de l'article 18 qui prévoit que, s'il y a avis du Commissaire, il est déposé dans les 30 jours à l'Assemblée nationale. Est-ce que c'est la bonne interprétation?
M. Couillard: C'est-à-dire que le rapport annuel va clairement devoir incorporer ces éléments-là, mais il est possible que le Commissaire décide de faire un rapport particulier sur l'efficience de telle partie du système de santé, et, à ce moment-là, ayant décidé de faire le rapport particulier, sur sa propre initiative ou sur demande, il doit être déposé à l'Assemblée nationale.
Mme Harel: Prenons un exemple: des infirmières praticiennes. Par exemple, on sait qu'on a un fort ratio de médecins par habitants. On peut poursuivre... Mais le fait est qu'il y a un ratio qui est le plus élevé des provinces canadiennes, hein, 21 médecins pour 10 000 habitants, au Québec, en comparaison avec l'Ontario, 18 médecins. Et on peut donc poursuivre l'augmentation des inscriptions dans les facultés. Je constate que, pour la présente année, il y a un certain ralentissement par rapport aux années précédentes, 55; cette année, 32. Il y aura un examen, qui se fera sans doute, du nombre de médecins dont on a besoin; ça pourrait aussi être exponentiel, comme les besoins. Alors, il pourrait y avoir un examen par exemple des services qui pourraient être rendus par des infirmières praticiennes, y compris en matière de médecine familiale.
M. Couillard: Ou de médecine de première ligne. Vous savez que c'est un dossier qui, je pense, tous les deux nous tient à coeur, et il n'y a pas de raison qu'au Québec on ne se dote pas de cet outil-là. Et, certainement, dans les commentaires sur les effectifs médicaux, ce qu'a dit la députée est exact. On pourrait, sur la même logique de besoins, par définition, insatiables, continuer de façon exponentielle les admissions en médecine. On sait qu'on est heurtés à un phénomène incontournable qui est la limitation de la capacité d'accueil des facultés de médecine et du maintien de la qualité de la formation. Donc, là, il y a un plafond qu'on ne peut pas dépasser.
La question des ratios de population, il faut être prudent avec ça parce que d'autres éléments font en sorte que ceci doit être analysé avec prudence. Par exemple la démographie de la profession médicale au Québec, les habitudes de pratique, les valeurs de société, etc., tout ça fait en sorte que les ratios qui... C'est ce que j'appelle le paradoxe québécois, hein? Évidemment, n'étant pas citoyens des autres provinces, on ne sait pas quel est le niveau d'insatisfaction des citoyens dans les autres provinces sur la question des effectifs médicaux, mais... alors que c'est effectivement le cas qu'alors qu'on a sur papier des ratios qui sont plus élevés qu'ailleurs il semble que, dans notre population, à moins que ce soit le cas ailleurs également et qu'on ne le perçoive pas, le degré d'insatisfaction, quant à la disponibilité des services médicaux, soit cependant le plus élevé, alors là il y a un des éléments de ce qu'on peut appeler le paradoxe du Québec. Pourquoi c'est comme ça? Est-ce que ce sont des facteurs liés aux habitudes de pratique, à la démographie qui est différente? Et ce n'est pas une mauvaise chose qu'on ait plus de femmes médecins, au contraire, mais ça a des impacts en termes d'organisation du travail.
n(17 h 30)n Et c'est ce genre de questions là qu'il faut discuter, et c'est là que la question des infirmières également devient essentielle. Et là on a bien sûr des travaux à faire avec les ordres professionnels. Et il est certain à mon avis qu'un rapport du Commissaire qui ferait état de la nécessité d'accélérer par exemple la progression dans l'installation des infirmières praticiennes de première ligne aurait un élément majeur de stimulation, si je peux m'exprimer ainsi, chez les ordres professionnels. Parce que là on aurait un... Voilà un argument de plus qui vient d'une analyse qui dit qu'effectivement il n'y a pas de raison qu'au Québec on ne dispose pas de cet outil-là. D'autant plus qu'on ne peut pas, à la fois, comme je le disais à des représentants de notre profession médicale lors d'une autre commission, on ne peut pas à la fois développer le discours de la pénurie d'effectifs et ? et ce n'est plus le cas maintenant parce qu'il y a une attitude d'ouverture qui n'était pas présente auparavant mais qui est maintenant présente ? et, de l'autre côté, dire qu'on n'a pas besoin, au Québec, des infirmières praticiennes de première ligne.
Puis je complète toujours en disant la même chose: que ça s'applique également pour les infirmières elles-mêmes, que les infirmières elles-mêmes doivent également montrer de l'ouverture pour d'autres professions telles que les infirmières auxiliaires ou les préposés aux bénéficiaires, pour se concentrer sur leurs tâches spécifiques. Voilà un...
Je pense que, parmi les grands enjeux du système de santé sur lequel le Commissaire va vouloir se prononcer, outre le virage démographique de la population elle-même, il y a toute la répartition des tâches et l'organisation du travail non pas en termes syndical mais en termes de responsabilité relative d'un corps professionnel par rapport à l'autre. Je pense que c'est là un des éléments, un enjeu important pour l'avenir du système de santé du Québec.
Mme Harel: Voilà quelque chose que l'on partage, M. le Président, le ministre et l'opposition.
Je lis la définition que le dictionnaire donne d'«efficacité» ? le Petit Robert ? et dans cette définition: «Caractère de ce qui est efficace.» Bon, c'est redondant, là. «Capacité de ? bon ? produire le maximum de résultats avec le minimum d'effort.» Synonymes: efficience, rendement, productivité. Alors, ça me semble être des termes assez synonymes, alors qu'à «efficience», on y lit ceci: «Efficacité.»M. Couillard: Alors, il s'agit évidemment de... On veut s'assurer que les gens aient la compréhension de ce qu'on entend par les notions, les notions qui doivent être couvertes. Si on...
Je comprends que, d'après le dictionnaire, «efficacité» et «efficience» se recoupent, mais, si on ne marquait qu'«efficacité» on risquerait de n'avoir que des rapports faisant état des données brutes de résultats, alors qu'en termes de gestion, «efficience», c'est ce qu'on indiquait tantôt, est l'efficacité aux moindres coûts, en termes de ressources. Et on veut s'assurer...
Évidemment, ça peut sembler superflu. Même chose, on pourrait marquer juste «efficience». À l'opposé, on pourrait marquer uniquement «efficience», puisque c'est synonyme à «efficacité», mais le but qui est recherché et l'intention qui est poursuivie ici, c'est de s'assurer que non seulement on désire l'évaluation des résultats bruts, mais également de la façon dont ils ont été obtenus.
Mme Harel: Il m'apparaît, M. le Président, qu'il y a une dimension qui devrait être introduite en plus, qui est celle de l'accessibilité, à défaut de quoi l'efficacité et l'efficience pourraient fort bien être la mise en place d'un seul centre au Québec, par exemple de chirurgie des cataractes, ou deux centres à travers le Québec. Ça pourrait être très efficace, très efficient. N'importe, là, c'est un exemple, on pourrait prendre n'importe quel autre exemple, du genou, etc., alors qu'on demanderait aux personnes qui doivent subir ces interventions de se déplacer et non l'inverse. Alors, il me semble que, dans la performance globale du système, il y a l'efficacité et l'efficience, mais il y a l'accessibilité également.
Moi, j'ai souvenir d'une correspondance d'un médecin, spécialiste de la hanche, de l'Abitibi, je crois que c'était d'Alma ou... d'Amos, d'Amos, et qui se plaignait amèrement que l'Hôpital juif de Montréal avait obtenu des fonds de l'Agence régionale de Montréal pour pouvoir exercer, prodiguer, là, enfin diminuer la liste d'attente des personnes qui étaient surtout âgées, qui attendaient une chirurgie de la hanche et qui, ayant complété, si vous voulez, toutes les interventions qui devaient se faire sur le territoire de Montréal, avait écrit à l'équipe médicale d'Amos en leur disant qu'ils avaient toutes les facilités pour procéder aux interventions chirurgicales de la hanche pour des patients de l'Abitibi.
Ça, je dois vous dire, M. le Président, là, que ça avait déclenché une tempête. C'est récent, là, ça doit faire peut-être un an, un an et demi. Et là leur préoccupation était: Oui, mais, nous, on est en région. Et je voyais bien qu'il y avait une sorte de concurrence, mais il y avait un bon sens qui était de dire: S'il y a des complications, est-ce que les patients d'Abitibi vont devoir retourner? Non, c'est nous qui allons avoir à les suivre en cas de complications. Alors, pourquoi ce n'est pas nous qui ferions les opérations? Alors, on voit bien que... Peut-être que ce serait plus efficace et efficient qu'il y ait un seul centre à Montréal, mais ce ne serait pas accessible.
M. Couillard: C'est plusieurs points très intéressants. Je rappelle qu'à l'article 2 l'accessibilité est indiquée, donc tout est soumis à ces critères-là, dont l'accessibilité. Quand on parle... Le cas de l'Abitibi est intéressant, d'ailleurs c'est une nouvelle que j'apprends: qu'à Montréal ils considèrent qu'ils ont fait toutes les chirurgies qu'ils avaient à faire, parce que...
Mme Harel: De la hanche.
M. Couillard: Mais, même à la hanche, il s'en fait plus... En fait, le volume est plus élevé en genou qu'en hanche parce qu'en hanche les procédures sont plus longues. Alors, je suis quand même surpris, là. D'autant plus qu'en Abitibi ils ont déjà fait l'exercice de concentrer la chirurgie orthopédique dans un hôpital. Alors, ils ont déjà fait cet exercice de concentration; il n'y a rien qui les empêche d'aller plus loin, là. Auparavant, il y avait les services de chirurgie orthopédique dans tous les services de chirurgie dans les hôpitaux d'Abitibi alors qu'ils ont été consacrés dans une seule institution, ce qui est une très bonne idée, là.
Alors, on est d'accord là-dessus. Mais, de là à dire que les gens de Montréal ont fait tous les patients en attente de chirurgie de la hanche, s'ils cherchent des patients, on se charge de leur en trouver, là, de Montréal, je pense qu'il n'y a pas de problème.
Mme Harel: M. le Président, nous allons transmettre la lettre de l'équipe médicale d'Amos où finalement ces interventions avaient été regroupées, et on m'indique que l'établissement montréalais qui avait communiqué avec l'Hôpital d'Amos avait encore une liste d'attente mais prévoyait des sommes assez importantes qui étaient attribuées par l'agence régionale et planifiait pouvoir passer à travers sa propre liste. Mais c'était un établissement... Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas de liste d'attente pour des interventions de la hanche à Montréal, là. Mais, comme cet établissement ne voulait pas entrer en concurrence avec d'autres établissements de Montréal, il cherchait à obtenir finalement un nouveau volume, là, de personnes à opérer de régions autres. Alors, on va vous transmettre la lettre de...
M. Couillard: Avec le plus grand intérêt, on va la regarder. D'autant plus que l'Hôpital général juif, si je me souviens bien, sauf erreur, là, a déjà... dispose du plateau chirurgical de l'Hôpital LaSalle, je crois, pour faire de la chirurgie orthopédique. On pourra vérifier cet élément-là. Alors, il y a déjà des éléments qui sont présents. Et puis il y a amplement de patients en attente dans les autres hôpitaux de Montréal; s'ils veulent en emprunter, si vous me passez l'expression, je n'ai pas d'objection.
Mme Harel: Sans doute ne voulaient-ils pas le faire entre établissements montréalais...
M. Couillard: Voilà!
Mme Harel: ...parce qu'auquel cas les sommes d'argent qui leur étaient dévolues auraient tout simplement été redistribuées aux autres établissements qui avaient des listes d'attente plus longues. Alors, ils se sont adressés en fait à Amos, et ça a déclenché aussi une réaction assez vive.
Le Président (M. Copeman): Je ne veux pas m'aventurer, mais il me semble que ce n'est pas très efficace comme approche.
M. Couillard: Surtout s'il faut faire de la rééducation postopératoire, là, les gens sont mieux d'être servis près de chez eux. Ce n'est pas la vision qu'on a, là. Je veux rassurer tout de suite la députée, là. Il y a des choses qui doivent être concentrées dans des grands centres, comme la transplantation ou la chirurgie cardiaque, mais pas ce type de chirurgie là. Par contre, les concentrer à l'intérieur d'une même région, ça, c'est une très bonne idée; ça, c'est de l'efficacité et de l'efficience.
Mme Harel: Le ministre fait référence à l'article 2, alinéa deux, là. Mais pourquoi est-ce qu'au paragraphe 2° de l'article 10 on n'indique comme facteurs d'appréciation que l'efficacité et l'efficience et pas l'accessibilité?
M. Couillard: Parce que l'efficacité et l'efficience ne sont pas indiquées dans le paragraphe 2° qui sont les grands... le grand parapluie avec lequel on demande au Commissaire d'exercer ses fonctions. Puis je me souviens que c'est à cet endroit-là qu'on a ajouté la question des déterminants, sauf erreur.
Le Président (M. Copeman): Il y a confusion. Je pense que la députée fait référence au paragraphe 2° de l'article 10.
n(17 h 40)nM. Couillard: Oui? C'est ça. Ce que je dis, c'est que l'efficacité et l'efficience ne sont pas dans le deuxième alinéa de l'article 2, tandis que l'accessibilité y est. Alors, l'accessibilité est déjà là comme, je dirais, enjeu global, là. Et à mon avis, là, à mon humble avis, si on rajoutait l'accessibilité, on ferait une répétition. Il doit de toute façon ? ou elle doit ? exercer ses responsabilités en regard de la qualité, l'accessibilité, l'intégration, etc. Et la performance globale également signifie accessibilité et qualité, par définition, là.
Je pense qu'on n'enlève rien. Encore une fois, il n'y a rien qui dit au Commissaire de ne pas utiliser le critère de l'accessibilité. Et je rappelle que, lorsqu'on va consulter le forum de la population sur ce type d'évaluation là, je doute que, par exemple sur l'exemple qui nous est soumis, les gens qui représentent la population seraient enthousiastes à l'idée qu'on envoie les patients, en Abitibi, à Montréal pour se faire opérer de leur hanche là. Je pense que c'est bien de rappeler que l'accessibilité fait partie du tableau, c'est essentiel de le dire, mais je pense qu'elle l'est. Cet élément-là est présent dans le projet de loi.
Mme Harel: M. le Président, je pense qu'il pourrait être utile d'introduire le mot «notamment» avant les mots «l'efficacité ou l'efficience», parce que je crois que c'est le seul paragraphe où il est dit que le Commissaire informe le ministre et la population. Il informe le ministre, mais, la population, je ne sache pas qu'il y ait un autre paragraphe où il est clairement rédigé que le Commissaire informe la population, et, dans ce cas-ci, il l'informe «de la performance globale du système[...] ? et la performance globale sont plutôt les résultats ? des changements qu'il propose afin d'en améliorer», et on pourrait mettre, «notamment l'efficacité ou l'efficience». Ça peut être autre chose aussi, les changements qu'il propose pour améliorer, ça peut être, si c'est nécessaire, le financement. En fait, ça peut être divers autres facteurs.
M. Couillard: Bien, regardez, il n'y a pas de problème à ajouter «notamment», là. Ce n'est pas limitatif. Faisons l'amendement puis disposons-en.
Mme Harel: On va le préparer, puis on pourrait, à ce moment-là, vous le distribuer pour les fins de l'étude ultérieure. Comme ça, on pourrait examiner les amendements en même temps, parce que nous en aurons un déjà annoncé.
Le Président (M. Copeman): Oui, bien sûr, on peut poursuivre le débat sur l'ensemble de l'article 10. Évidemment, avant de voter, on va considérer tout amendement qui est soumis.
Mme Harel: Alors, nous avons déjà remis au Secrétariat de la commission un projet d'amendement.
Le Président (M. Copeman): Il y en a un, effectivement. Il faut que ce soit proposé. C'est le paragraphe 3°, je crois. Alors, à un moment opportun, vous allez proposer l'amendement, nous allons le prendre en considération.
Mme Harel: Alors, nous en sommes au paragraphe 3°.
Le Président (M. Copeman): Allez-y.
Mme Harel: Donc, nous annonçons l'amendement au paragraphe 2° et celui qui a été distribué au paragraphe 3°. Alors...
Le Président (M. Copeman): Voulez-vous proposer votre amendement au paragraphe 3° immédiatement, Mme la députée?
Mme Harel: Je pense qu'il serait préférable d'entamer une discussion sur le paragraphe 3° et de voir les intentions du législateur.
Le Président (M. Copeman): Donc, allez-y. M. le ministre.
M. Couillard: Alors, le troisième paragraphe: «Il rend publiques les informations permettant un débat au sein de la population sur les enjeux et les choix nécessaires à la viabilité du système de santé et de services sociaux et une compréhension globale par cette dernière de ceux-ci.» Alors, c'est un peu une reprise de ce qui existe déjà à l'article 2, si on y fait référence: «...fournir [...] à la population les éléments nécessaires à une compréhension globale des grands enjeux dans le domaine de la santé et des services sociaux.» Et ici on spécifie les enjeux qui sont en rapport avec la viabilité du système de santé et de services sociaux. Alors, par exemple, un exemple classique de ce type d'enjeu là, c'est la question du vieillissement de la population et les transformations à apporter au réseau.
Mme Harel: Alors, je pense qu'on arrive, là, M. le Président, à un aspect qui a été abordé beaucoup, en commission parlementaire, par les différents organismes qui se sont présentés, celui de restreindre le débat sur la viabilité.
Le paragraphe 3° attribue au Commissaire la fonction de susciter en fait un débat. Il le permet en rendant publiques des informations sur les enjeux et les choix nécessaires à la viabilité. Donc, à la fois les enjeux portent sur la viabilité et les choix nécessaires, c'est donc dire que le seul débat, au sein de la population, se restreint sur la viabilité du système de santé et de services sociaux.
M. Couillard: Bien, ce n'est pas ce que nous comprenons. Tout le reste du débat est possible, il y a plein d'autres éléments, dans les fonctions de Commissaire et les objectifs qui sont inclus à plusieurs articles. Mais on veut s'assurer que cet élément soit notamment prescrit parce qu'on sait que c'est une préoccupation de la population. Les différentes enquêtes le montrent: les gens sont inquiets quant à la capacité de notre société de maintenir son système de santé et de services sociaux. Et il faut que ces enjeux soient abordés de façon régulière par le Commissaire et soumis à la discussion. Et ça n'enlève rien des autres fonctions; il y a plein d'autres fonctions qu'on a discuté tantôt. Je reviens encore à la question des déterminants de santé, la fonction des... les différentes composantes du système de santé, on en a parlé tantôt.
Donc, il y a énormément d'autres... plusieurs autres éléments qui sont... Ce n'est pas exclusif, là. On ne vient pas dire là-dedans qu'il ne faut susciter de débat que sur cette question. Mais on veut s'assurer que cette question fasse l'objet d'un examen et d'un débat répétés et réguliers non seulement par le Commissaire, par le forum de la population et la population également elle-même lorsque les rapports seront déposés à l'Assemblée nationale.
Mme Harel: M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre que c'est plus le système de santé... C'est le système public. Est-ce que c'est de ça dont il est question ici, au paragraphe 3°: «...permettant un débat au sein de la population sur les enjeux et les choix nécessaires à la viabilité du système ? public ? de santé et de services sociaux...»?
M. Couillard: Bien, il y a... M. le Président, il y a un système de santé et services sociaux au Québec. C'est le système public, il n'y a pas d'autre système de santé et de services sociaux.
Mme Harel: Bien, c'est-à-dire que, M. le Président, je pense qu'en réalité toutes les statistiques le démontrent: il y a 35 % au moins des soins en santé qui sont dispensés ? je ne parle pas des services sociaux, là, le pourcentage est encore plus élevé ? sont dispensés par le privé.
M. Couillard: Alors, il faut être prudent, parce que c'est un chiffre qui est repris fréquemment, et ce n'est en rien l'indication d'un virage vers la privatisation du système de santé, puisque, si on prend par exemple les actes médicaux, les soins de santé, c'est une infime minorité qui sont du ressort privé.
Ce qu'on retrouve du domaine privé, c'est, bon, la pharmacie, les cliniques de physiothérapie, l'ergothérapie, ce genre de ressources là. Le pourcentage... C'est un peu illusoire lorsqu'on compare par exemple le fait ? c'est un sujet intéressant ? que le pourcentage de services donnés par le privé au Québec n'est pas différent de ce qui existe ailleurs, parce que ce n'est pas les mêmes services. Par exemple, vous ne pouvez pas comparer ce qui existe en France, qui a un système de santé vraiment privé parallèle avec des cliniques privées, qui font des opérations, des actes médicaux où les patients paient. Ce pourcentage-là n'est pas le même que chez nous.
Donc, le système de santé qu'on parle ici, le système de santé et de services sociaux, c'est notre système de santé et de services sociaux tel qu'il existe actuellement, tel qu'il a été mis sur pied et qu'on veut conserver. Parce qu'on dit «les choix nécessaires à la viabilité», on ne remet pas en cause la viabilité elle-même, c'est justement pour faire en sorte que cette viabilité soit assurée et soit discutée. Si on ne discute pas de ces enjeux-là...
On est souvent frileux, au Québec. Il y a des enjeux dont on se tient loin parce qu'ils sont difficiles, mais, ces enjeux-là, il faut les discuter avec la population régulièrement. Et je pense que, lorsqu'on indique ? et j'y reviens encore une fois ? un débat sur les enjeux et les choix nécessaires à la viabilité, on ne vient pas dire au Commissaire: Bien, mettez en doute la viabilité elle-même et dites que ce n'est plus viable, donc il faut changer le système. On dit: Non, on veut garder notre système de santé, on veut assurer sa viabilité. Quelles actions doit-on poser maintenant? Quels sont les enjeux à dégager, à exposer à la population, qui nous permettent, maintenant, pour les cinq, six, 10 prochaines années, d'assurer sa viabilité?
n(17 h 50)n Et, si on regarde les grands enjeux, hein, ils sont bien connus: le financement en général mais plus spécifiquement les coûts des médicaments, puis, moi, je pense, le virage démographique beaucoup plus que les technologies. Si on fait des analyses fines, on va constater que les investissements de type hospitalier aigu n'ont pas beaucoup changé au cours des dernières années. Ce qui augmente de façon massive, c'est la dépense en médicaments. Et la dépense à venir ? elle est déjà commencée, mais à venir ? a trait à la transformation du réseau pour s'adapter à la perte d'autonomie liée au vieillissement de la population.
Mme Harel: Au paragraphe 3°, on ne parle pas des enjeux et des choix nécessaires à l'amélioration de la santé de la population.
M. Couillard: C'est-à-dire qu'on le donne au quatrième. Là, on parle de l'état de santé et de bien-être de la population et on en parle également par les amendements qu'on a introduits au début, vous vous en souviendrez, lorsqu'on a ajouté la question très importante des déterminants de la santé. Et je pense que, là, il y a clairement un lien avec l'état de santé de la population.
Mais, vous savez, c'est une bonne façon de réintroduire la question des déterminants, parce que, dans le paragraphe 3°, on parle du système de santé et de services sociaux. Or, la plupart des économistes de la santé considèrent que les systèmes de santé et de services sociaux expliquent environ le quart au tiers, maximum, de l'état de santé d'une population. Ce qui détermine l'état de santé d'une population, ce n'est pas en majorité le système de santé et de services sociaux, c'est pour 50 % des déterminants socioéconomiques: l'environnement, l'éducation, ce genre de situations là. On a souvent tendance à faire une adéquation entre «notre santé de population est bonne, donc on a un bon système de santé» ou, à l'inverse, elle est moins bonne, donc on a un moins bon système de santé. La relation est loin d'être linéaire, là, dans plusieurs éléments.
En fait, on a, au Québec... La meilleure preuve, c'est qu'au Québec on peut certainement tous se dire qu'il faut améliorer notre système de santé, qui n'est pas à la hauteur des espérances encore de la population. Cependant, on a des indices de santé de population qui sont parmi les plus élevés au monde et les meilleurs au monde. Alors, c'est deux choses différentes.
Ce qui a conduit à la mise en place de ces indices de santé de population là, on pourrait probablement soutenir que ce n'est pas en majorité les changements apportés au système de santé, c'est les changements apportés à l'hygiène publique, à l'éducation, à la lutte contre la pauvreté, qui, dans notre société, ont amené ces résultats-là. Qu'on ait plus de résonnances magnétiques ou des listes d'attente moins élevées pour certaines chirurgies, oui, ça a un impact majeur pour les individus qu'on doit servir, mais, en termes d'impact global sur la santé de la population, c'est probablement assez marginal par rapport à ces autres éléments là.
Et donc il y a deux éléments, hein? Le troisième et le quatrième donnent ces deux éléments-là. Parce qu'à mon avis, si on ne demandait que de regarder le système de santé et de services sociaux, bien là on serait très mal outillés pour évaluer l'état de santé de la population et les actions du gouvernement.
Mme Harel: Paragraphe 3°, on rend publiques des... le Commissaire rend publiques des informations et, paragraphe 4°, il donne des avis au ministre. Dans un cas, c'est-à-dire dans le paragraphe 3°, il rend publiques les informations pour permettre un débat, au sein de la population, sur les enjeux du système.
Dans le paragraphe 4°, il donne des avis au ministre. Évidemment, il y a toujours l'application de l'article 18, avec l'amendement qui prévoit que, dans les 30 jours, les avis doivent être rendus publics, mais il n'y a pas comme telle de fonction particulière qui est dévolue au Commissaire de susciter et de permettre un débat sur l'évolution de l'état de santé et de bien-être de la population.
M. Couillard: C'est deux choses encore une fois qui sont complémentaires. Prenez le paragraphe 3° où le Commissaire pourrait dire: Bien, voici un élément sur lequel il serait bon que la population engage un débat. Alors, je vais publier ? je me mets à sa place, là, théoriquement ? je vais publier des informations pertinentes à la mise en place de ce débat-là. Ça, ce n'est pas un avis comme tel, c'est les bases d'un débat public que le Commissaire peut décider de publier.
Par contre, lorsqu'il donne des avis, on sait qu'il s'agit de rapports particuliers, là, qui sont sujets à l'obligation de publiciser ou de les rendre publics à l'Assemblée nationale. Et bien sûr ils vont susciter des débats également, mais c'est différent, c'est complémentaire. Et là c'est certain que l'état de santé de la population ayant été publiée, bien là voici ce qu'il va faire probablement, c'est qu'il va publier un avis qui va être soit intégré dans son rapport annuel, soit en faire un avis particulier. Il va dire: Voici la comparaison des trois derniers bulletins d'état de santé de la population; voici les politiques gouvernementales qui ont été mises en place non seulement en santé, mais ailleurs; puis voici la corrélation qu'on peut faire.
Mme Harel: Prenons la problématique de l'obésité, disons obésité chez les enfants en particulier, qui va devenir une préoccupation majeure, hein, qui l'est déjà, mais qui va, semble-t-il, en tout cas, devenir une préoccupation majeure, et encore plus avec l'arrivée de tout le système informatique. Les enfants, et surtout les jeunes enfants, sont tentés, à la préadolescence et à l'adolescence, de passer des heures devant l'ordinateur plutôt que d'aller jouer au hockey, mettons, pour résumer la chose en simplifiant un peu, mais ça ressemble à ça. Où se ferait le débat sur l'obésité?
M. Couillard: Bien, je pense qu'il pourrait, dans le paragraphe 4°, très bien s'appliquer, parce que, si vous regardez les bulletins de l'état de santé de la population, parmi les nouvelles menaces ou les nouvelles maladies chroniques que le Dr Poirier et son équipe identifient, il y a la question de l'obésité. Alors, voici un exemple où clairement les façons de pallier au phénomène débordent le système de santé et de services sociaux, incluent également l'éducation, toute la question de l'éducation populaire également, la sécurité alimentaire, les activités physiques disponibles pour les jeunes.
Et, juste pour l'anecdote, quand je dis ça à mes enfants ? parce que j'ai des enfants adolescents qui passent beaucoup de temps devant les ordinateurs ? je leur dis: Dans mon temps, je n'étais pas de même. J'étais toujours dehors à jouer au hockey. Comment ça se fait... Puis la réponse est toujours: Dans ton temps, papa, ce n'était pas pareil. Tu n'avais pas tout ce qu'on a maintenant et tu ne peux pas comparer. Alors, je ne sais plus quoi répondre, après ça. Ça varie d'un enfant à l'autre. Après, le débat s'enclenche de façon différente. Mais voilà donc une façon de le placer.
Puis d'ailleurs la question est très bien placée également parce que de l'obésité des enfants va jaillir la prochaine épidémie de diabète acquis dans les prochaines années. Alors, il faut vraiment, là... C'est clairement un élément majeur de l'état de santé de la population.
Mme Harel: M. le Président, reprenons cette question, par exemple l'obésité des enfants. Et ça pourrait conduire, par exemple, à susciter, au sein de l'éducation, là, une réflexion sur le temps dévolu dans les écoles à l'exercice physique. Ça pourrait se traduire de cette manière-là, autant par des cours que par des jeux libres en récréation, etc., les jeux du parascolaire organisés ou des choses comme ça.
Il y a la Santé publique qui publie son rapport. La Santé publique donne des avis au ministre sur l'évolution de la santé et du bien-être.
M. Couillard: ...qu'elle donne un état de situation. Si vous regardez le bulletin, il s'agit d'un bulletin assez descriptif, et on indique les voies de solution. On indique très bien, dans le rapport qui est là, que ce n'est pas uniquement le système de santé qui doit être mobilisé pour améliorer l'état de santé de la population. Et voilà donc l'analyse que le Commissaire fera. Par exemple, il fera une analyse rétrospective, là.
Je prends la problématique d'obésité chez les jeunes. C'est très bien de souligner que l'éducation physique à l'école est une façon d'y répondre, mais je dirais qu'également la présence d'infrastructures sportives de proximité est un élément important. Est-ce qu'on donne aux jeunes les moyens, s'ils en ont le goût et on espère qu'ils en ont le goût, de faire de l'activité physique? Alors, voilà des éléments qui, dans l'analyse rétrospective, vont être particulièrement importants. Ça, ce n'est pas vraiment... je ne pense pas que ce soit présent, dans les rapports de santé publique, de façon marquée.
Mme Harel: Mais le débat, la responsabilité de susciter ou de permettre un débat, au sein de la population, sur l'obésité, elle est dévolue à qui, la responsabilité de susciter un débat?
M. Couillard: Bien, à tous, le gouvernement également.
Le Président (M. Copeman): ...
M. Couillard: Ça n'empêche pas au gouvernement lui-même puis aux partenaires non gouvernementaux de susciter ce débat-là. Mais le fait, pour le Commissaire, d'avoir inclus de façon évidente cet élément dans son rapport annuel ou d'en avoir fait un rapport particulier, clairement, automatiquement, va susciter un débat. J'imagine que, quel que soit le gouvernement, le jour du dépôt à l'Assemblée d'un tel rapport, bien il y aura de nombreuses questions et commentaires qui vont être faits sur ce sujet-là et également à l'extérieur du gouvernement et du monde politique par les intervenants du milieu.
Je pense que le fait même de déposer et de publier ces rapports-là en soi est un élément déclencheur de débat, mais on ajoute également, dans le paragraphe 3°, que, pour la question de la viabilité du système de santé, on rappelle au Commissaire qu'il lui est tout à fait loisible de déposer des informations sur par exemple l'évolution du financement du système de santé, ce genre de considérations, là, les choix qui ont été faits pour orienter les investissements dans les bonnes directions de façon à ce qu'ils soient structurels et qu'il y ait un effet à long terme. Je pense qu'il y a là tout ce qu'il faut pour susciter des débats, amplement de débats en fait. Je prévois que les occasions de dépôt du rapport du Commissaire vont être des journées intéressantes sur le plan médiatique.
Le Président (M. Copeman): Et...
Mme Harel: ...le rapport du Vérificateur général.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Copeman): ...malheureusement, sur ça, compte tenu de l'heure, je dois suspendre les travaux de la commission jusqu'à 20 heures afin d'effectuer un autre mandat. Merci.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 9)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux avec un changement de mandat.
Étude détaillée du projet de loi n° 57
Notre mandat pour ce soir est de poursuivre, eh bien, oui, poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.
J'ai cru comprendre, Mme la secrétaire, qu'il n'y a pas de remplacement. C'est exact?
La Secrétaire: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Alors, la secrétaire nous informe qu'il n'y a pas de remplacement.
Nous nous sommes réunis hier sur le même mandat. On a permis quelques remarques à Mme la ministre de l'Emploi et la Solidarité sociale, M. le député de Vachon. On se souvient que nous avons suspendu pour permettre une séance de travail. Alors, nous voilà.
Objet, mesures, programmes et services
Principes et pouvoirs généraux (suite)
Nous sommes à l'article 1. Alors, quand on s'est quitté, la dernière fois qu'on a vraiment effectué l'étude détaillée, au mois de décembre, le 9 décembre, il y avait une autre atmosphère, c'était le temps des fêtes, tout le monde était heureux et content, il y avait des changements de visages autour de la table, mais nous étions à un amendement proposé par M. le député de Vachon.
n(20 h 10)n Alors, juste pour... si ça intéresse, parce qu'à ce moment-là, à ce moment-là, il y avait un intérêt particulier pour l'utilisation du temps, c'était... Quel était... Le temps utilisé, le temps restant étaient une préoccupation majeure pour les parlementaires à ce moment-là. Alors, sur l'amendement, l'auteur, le proposeur, M. le député de Vachon, avait utilisé presque 13 minutes, alors il reste sept minutes. Le député de Joliette, qui agissait en remplacement de probablement...
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Oh! il était peut-être membre de la commission à ce moment-là également, c'est possible. La députée de Laurier...
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Ah! tiens, O.K. Alors, M. le député de Joliette remplaçait Mme la députée de Rimouski. Alors, il restait du temps pour... Il reste 14 minutes, soit pour la députée de Rimouski. La députée de Laurier-Dorion avait commencé à intervenir sur le sujet, il restait... Alors, il vous reste, Mme la députée, si vous voulez poursuivre, à peu près 16 minutes. Et le gagnant du concours a été le député de Gouin, parce que, lui, il avait juste commencé son intervention sur l'amendement, il avait fait à peine 45 secondes. Alors, le député de Gouin gagne avec 19 min 15 s qu'il reste au sujet de l'amendement. C'est là où nous en sommes.
Alors, toujours sur l'amendement proposé par M. le député de Vachon. Je pense que les membres de la commission, on va vous remettre des copies au cas où que vous ne l'avez pas avec vous ce soir. Mais la parole est au député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): J'avais peur que vous la gardiez, M. le Président. De fait, étant donné les circonstances, je ne sais pas si on peut pratiquer... si on peut mettre en pratique la proposition que je vais faire, mais je vous dirais, M. le Président, que mon souhait serait plutôt qu'on remette les pendules à zéro, et je retirerais du même geste l'amendement et je proposerais à l'ensemble de mes collègues que nous puissions revoir le projet de loi n° 57 à partir du début et que nous l'examinions alinéa par alinéa, si bien que tout le monde commencerait au même endroit.
Le Président (M. Copeman): Mais évidemment vous êtes le proposeur, vous pouvez retirer votre amendement, il n'y a aucun problème, de consentement évidemment avec les membres de la commission, parce qu'une fois proposé l'amendement appartient à la commission. Alors, il y a consentement pour le retrait de l'amendement?
Des voix: Consentement.
Le Président (M. Copeman): Consentement. En ce qui concerne le souhait de remettre les chronomètres à zéro, dans la pratique, M. le député, ça a très peu d'importance parce que la seule indication que j'ai, c'est que, sur l'article 1, vous-même, vous avez utilisé cinq minutes sur une possibilité de 40. Parce que vous avez exprimé le désir de l'étudier alinéa par alinéa, alors ça donne une possibilité de 40 minutes pour l'article 1 dans son ensemble, dont vous avez utilisé... Vous êtes le seul qui avez utilisé un temps de parole, puis c'est 5 minutes. Alors, ça vous laisse 35 minutes à peu près. Puis de plus j'ai cru comprendre que la ministre a un amendement à l'article 1.
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Oui? Alors, il va y avoir du temps également pour discuter de l'amendement. Est-ce que ça vous convient, M. le député?
M. Bouchard (Vachon): Bien... Non.
Le Président (M. Copeman): Bien, écoutez, de consentement, si vous voulez vraiment récupérer votre cinq minutes...
M. Bouchard (Vachon): Bien, moi, je pense que oui. Je pense que ce serait un beau geste.
Le Président (M. Copeman): Bien, de consentement, de consentement, c'est ça, on... Très bien. Alors, on considère qu'on repart de zéro. Alors, nous sommes toujours à l'article 1, et je comprends, Mme la ministre, que vous avez un amendement.
Mme Courchesne: Alors, l'amendement proposé serait de modifier l'article 1 du projet de loi:
1° par le remplacement du premier alinéa par le suivant:
«Dans le cadre des principes et orientations énoncés à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, la présente loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles.»;
2° par le remplacement, dans la première ligne du deuxième alinéa du mot «inciter» par le mot «encourager».
Alors, l'amendement vise à préciser l'objet de la Loi, bien sûr, sur l'aide aux personnes et aux familles en lien avec les principes et orientations énoncés à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il remplace également le terme «inciter» par celui d'«encourager» afin de mieux démontrer le changement de philosophie d'intervention auprès des personnes, basée sur une approche moins coercitive.
Le Président (M. Copeman): Alors, sur l'amendement. M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Oui. L'amendement qui est proposé par la ministre nous convient. Nous avions demandé de fait à l'époque et nous avions fait, je me souviens très bien, plusieurs interventions, vous vous en souviendrez sans doute, M. le Président, à l'effet que nous préférions de beaucoup que le projet de loi n° 57 puisse faire référence à la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale pour trois raisons.
La première, c'est qu'en faisant référence à un plan d'action on fait référence à l'éphémère, dans le fond. Un plan d'action prévoit une application pour un certain nombre d'années, peut être modifié en cours de route, et cela nous semblait une assise assez fragile.
La deuxième raison, c'est qu'en reconnaissant la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale on avalise, d'une certaine façon, son importance. On souligne son importance. On en fait désormais une référence. Et nous sommes heureux d'avoir inspiré la ministre dans cette direction-là parce que ce sera la première référence législative au texte de loi dans une loi qui suit directement la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
La troisième m'apparaît encore plus importante, c'est que la présente loi s'inscrit désormais, comme l'a mentionné la ministre, en lien avec les principes et les orientations de la loi, donc avec les exigences de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et ça, ce n'est pas une raison banale. J'ai toujours qualifié cette loi-là de sursaut de la collectivité québécoise à l'égard de notre capacité de reconnaître les droits des personnes les plus démunies, ensuite de reconnaître quelque part l'importance que l'on arrive éventuellement à satisfaire aux besoins essentiels auxquels on fait référence à l'article 9, si je ne m'abuse, de la loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale et au fait aussi qu'on fait référence à cette notion-là du barème plancher.
Comme la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion fait aussi référence à l'intention de la société québécoise d'éliminer les préjugés envers les personnes les plus démunies et aussi fait référence à une participation des citoyennes et des citoyens dans l'aménagement des environnements favorables à la lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale, ça nous amène aussi dans des horizons extrêmement intéressants dans lesquels on va pouvoir discuter désormais le projet de loi n° 57.
n(20 h 20)n Alors, pour ces raisons, M. le Président, nous accueillons avec... nous appuyons très certainement cet amendement.
Le Président (M. Copeman): Il a d'autres interventions sur l'amendement? Mme la députée de Laurier-Dorion.
Mme Lefebvre: Bien, très brièvement, je vais dans le même sens que mon collègue de Vachon puis je voulais souligner aussi l'accueil très favorable que l'on fait de cet amendement. C'est extrêmement important. Ça a été une politique qui a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale du Québec. Je crois que les Québécois et les Québécoises en sont extrêmement fiers. Puis l'idée, dans l'article 1, d'y faire référence de façon explicite et précise est de bon augure pour l'ensemble de cette politique. Puis le référent de base sera celui de cette loi qui va finalement nous permettre, je l'espère, d'ici quelques mois, sinon années d'arriver enfin aux objectifs prescrits dans la loi. Donc, voilà, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci. Ça va? Alors, est-ce que l'amendement proposé par la ministre est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. Discussion sur l'article 1.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Oui.
M. Bouchard (Vachon): Je vous demande de bien vouloir accepter une proposition d'amendement à l'article 1 du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, par l'ajout, après le deuxième alinéa, du segment de phrase suivant: «Elle ? la loi ? vise également, à terme, à couvrir les besoins essentiels des personnes notamment la nourriture, le logement, les médicaments, l'habillement et le transport.»(Consultation)
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il a de l'argumentation sur la recevabilité de l'amendement?
M. Bouchard (Vachon): Qui doit argumenter quoi? Habituellement, M. le Président, s'il y a une discussion là-dessus, c'est qu'on veut mettre en doute la recevabilité.
Le Président (M. Copeman): Bien, écoutez, je vous le dis de façon très transparente, la question que j'ai posée à la secrétaire permanente de la commission, à laquelle nous sommes en train d'avoir une discussion... Évidemment, tout amendement qui engage une dépense ne peut être présenté que par le ministre. Alors, la question est: Est-ce que la formulation de cet amendement engage une dépense? «Elle vise également, à terme, à couvrir les besoins essentiels des personnes notamment la nourriture, le logement, les médicaments, l'habillement et le transport.» C'est la réflexion que je suis en train d'avoir comme président. Alors, je ne sais pas s'il y a une intervention sur la recevabilité, M. le...
M. Bouchard (Vachon): Est-ce que vous voulez poursuivre votre réflexion ou vous voulez entendre les arguments avant?
Le Président (M. Copeman): Bien sûr, il me semble, pour réfléchir, ce serait mieux si j'étais outillé par les membres de la commission sur la question de la recevabilité.
M. Bouchard (Vachon): Bien, écoutez, M. le Président, nous avons pris soin d'inscrire, dans cet amendement, l'expression «à terme», ce qui permet évidemment au législateur et au gouvernement en place de choisir le moment où ils voudraient augmenter les dépenses qui pourraient éventuellement être conséquentes à cet amendement, si bien qu'il n'y a pas là, me semble-t-il, d'indication qui nous permet de croire que l'amendement en question impliquerait qu'il y ait des investissements supplémentaires qui soient directement et automatiquement associés à l'amendement.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la recevabilité?
Mme Courchesne: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: J'aimerais d'abord questionner sur le mot «à terme», parce que, moi, je trouve que, de la façon dont l'amendement est rédigé... Et je pense qu'un législateur ne parle jamais pour ne rien dire. Un législateur doit toujours s'exprimer pour que ça puisse se comprendre et se transmettre en gestes concrets. Or, «elle vise [...] à terme», qu'est-ce que veut dire «à terme» dans le cadre de cet article? Dans le temps, ça se situe quand, «à terme»? Une loi a un début de vie, mais une loi a une continuité dans le temps jusqu'à temps qu'elle ne soit pas modifiée. Donc, lorsqu'on dit: «Elle vise également, à terme», M. le Président, je trouve que ça ne nous définit pas la période de ce temps.
Donc, effectivement, dans les interprétations, ça pourrait engager effectivement la responsabilité financière de l'État. Or, M. le Président, vous l'avez dit vous-même, un amendement qui engage des dépenses ou des investissements ou modifie de façon... et, dans ce cas-ci, vous le savez, M. le Président, ça modifierait de façon très substantielle les finances publiques, bien on ne peut pas recevoir cet amendement-là, M. le Président, pour les deux raisons que je viens de mentionner: son imprécision et son engagement financier.
Le Président (M. Copeman): M. le député, allez-y.
M. Bouchard (Vachon): Sur l'argument de l'imprécision, je vois mal, là, comment cet argument-là, même s'il était vrai, viendrait jouer dans la décision qu'a à prendre le président parce que c'est un argument qui, en soi, peut être invoqué dans n'importe quel autre article de loi, tu sais. Lorsqu'on dit, par exemple, «le ministre peut», bien ce n'est pas très précis. Il peut, on ne sait pas quand, on ne sait pas comment, mais il peut. Alors, dans ce cas-ci, «à terme» veut justement ne pas cadenasser un calendrier de dépenses ou un échéancier de dépenses qui obligerait des investissements de la part du gouvernement, mais ça permet au gouvernement de choisir le temps opportun pour arriver à se conformer à cette obligation de couvrir les besoins essentiels.
L'idée, M. le Président, c'est d'introduire le principe parce que, tant qu'on n'aura pas introduit le principe dans la loi, on va manquer à notre devoir de parlementaire, et tout simplement parce que la loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale, dont on vient d'adopter la référence dans l'article 1, demande au législateur d'orienter ses interventions en fonction de la couverture des besoins essentiels, et encore plus dans une loi comme celle qui nous concerne ce soir. Alors, si vous permettez, M. le Président, je vous réfère explicitement à l'article 9 de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. On peut lire ceci: «Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment...» Alors, on est là-dedans, là, «les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique». On est en plein dedans, avec 57, là. À moins qu'on n'y soit pas, puis, si on n'y est pas, on va avoir un fichu de problème.
Le Président (M. Copeman): Non, non, mais, écoute, je ne conteste pas ça, M. le député. Ce que...
M. Bouchard (Vachon): Laissez-moi simplement finir la lecture puis ensuite...
Le Président (M. Copeman): Oui.
M. Bouchard (Vachon):«Rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.» Alors, voilà, M. le Président, c'est comme si... À moins que la ministre la prenne à son compte, cette proposition d'amendement. Parce que, si la ministre veut être cohérente avec ce qu'elle vient d'apporter comme amendement, elle devrait prendre cette proposition à son compte.
n(20 h 30)nLe Président (M. Copeman): Oui, mais, M. le député, je comprends puis je ne veux pas qu'on rentre dans le fond de la discussion à ce moment-ci, on discute de la recevabilité de l'amendement. Est-ce que l'amendement est cohérent avec les autres articles du projet de loi ou est-ce qu'il est cohérent avec des projets de loi adoptés précédemment par le Parlement du Québec? Ce n'est pas à ce moment-ci qu'on doit trancher cette question. On doit trancher... je dois trancher la question qui relève de l'article 192, qui est simplement les motions réservées à un ministre:
«Seul le ministre peut présenter une motion visant:
«1° l'engagement de fonds publics;
«2° l'imposition d'une charge aux contribuables;
«3° la remise d'une dette envers l'État;
«4° l'aliénation des biens appartenant à l'État.» Le règlement continue... l'article continue: «Cette règle ne s'applique pas à une motion n'exprimant qu'une idée générale ou une opinion sur les matières énumérées ci-dessus.» C'est de ça dont il faut que je dispose avant de rentrer dans le vif du sujet. Est-ce qu'il y a... M. le député, oui?
M. Bouchard (Vachon): Oui. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, relire les derniers segments de phrase, là, le dernier alinéa ou les deux derniers?
Le Président (M. Copeman): Oui, bien sûr. Toujours utile de traîner le règlement avec nous, hein, comme parlementaire.
M. Bouchard (Vachon): Surtout comme président.
Le Président (M. Copeman): Oui. Non, mais je trouve que c'est intéressant. Alors, je répète. Motions réservées à un ministre. Le ministre peut présenter une motion visant... Il y a quatre critères, et le bout de phrase, je crois, qui vous intéresse: «Cette règle ne s'applique pas à une motion n'exprimant qu'une idée générale ou une opinion sur les matières énumérées ci-dessus.» Ça, c'est le règlement.
Et évidemment je peux être guidé par des décisions antérieures, on verra, mais est-ce qu'il y a d'autres arguments sur la recevabilité de la motion? Mme la ministre.
Mme Courchesne: Bien, M. le Président, quand je reprends les derniers termes que vous avez mentionnés, il me semble que le libellé va beaucoup plus loin qu'une opinion ? et j'ai oublié les termes, là ? qu'une opinion générale parce que c'est très précis: «Elle vise ? elle vise ? également, à terme, à couvrir...» Il y a là une volonté d'agir.
M. Bouchard (Vachon): Bien oui, justement, c'est ça.
Mme Courchesne: Non, je m'excuse. C'est évident, mais justement il y a là des conséquences financières importantes pour l'État, et, dans ce sens-là, M. le Président, je pense qu'effectivement ça ne peut pas être recevable suivant la logique de ce que vous nous avez lu. Là, on n'est pas sur le fond ou la pertinence, on est sur la recevabilité. Et je vais très sincèrement vous dire qu'on ne peut pas, dans un amendement... Quand on dépose une loi à l'Assemblée nationale, vous savez comme moi qu'on a franchi toutes les étapes de comité ministériel, on a franchi l'étape du Conseil des ministres et que notre projet de loi a été soumis au Conseil du trésor, au ministre des Finances, et le gouvernement a eu à se prononcer sur l'engagement financier de la loi. Si vous déposez un amendement qui implique justement des dépenses importantes pour l'État, la ministre qui est devant vous, elle n'a pas ce pouvoir de dire oui ou non, il faut s'en référer au gouvernement. Alors, dans ce sens-là, je ne vois pas, M. le Président, comment on pourrait recevoir cet amendement-là.
Le Président (M. Copeman): Peut-être une dernière intervention de part et d'autre, de chaque côté. Après ça, je vais rendre ma décision. M. le député de Vachon, sur la recevabilité toujours.
M. Bouchard (Vachon): Bien, écoutez, moi, je vais retourner l'argument... deux arguments à la ministre. Le premier, c'est qu'elle disait, tout à l'heure, que le projet de loi était trop vague ou imprécis parce qu'on y trouvait le mot «à terme», et maintenant qu'elle sait que, quelque part, une opinion générale pourrait être acceptée, elle nous dit qu'il est trop précis parce que ça vise à l'action et qu'elle serait obligée de prendre action dans le dessein de couvrir les besoins essentiels. Alors, je suis un petit peu... En tout cas, j'y vois une contradiction. Mais, comme vous disiez l'autre jour, M. le Président: Là où il y a plusieurs contradictions, on risque de trouver une vérité.
Et le deuxième argument, c'est qu'il me semble que, dans les termes qui sont employés, «elle vise également, à terme, à couvrir les besoins essentiels», on exprime un principe général qu'on reprend de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. De fait, on ne définit pas là-dedans d'échéancier, il n'y a pas non plus de montant, les besoins essentiels ne sont pas exprimés ou définis en termes monétaires.
Alors, moi, je plaide pour une ouverture plus grande de la part de la ministre et je lui dis tout simplement que, si elle pense que ce n'est pas recevable, étant donné notre code de règlement, elle pourrait le reprendre à son compte et agir conséquemment à l'adoption du premier amendement.
Le Président (M. Copeman): Ça, je comprends ça, mais on n'en est pas là pour l'instant, ce serait potentiellement une étape subséquente. M. le député de Saint-Jean, sur la recevabilité de la motion de proposition d'amendement.
M. Paquin: Absolument. Oui, absolument, M. le Président. Très rapidement. Vous avez lu l'article, le règlement est clair. Je pense que vous n'avez pas le choix, l'amendement n'est pas recevable. Si vous vous basez sur l'article, et c'est votre devoir de le faire, l'amendement n'est pas recevable, d'aucune façon. Ça fait que je vous demande de rendre votre décision, M. le Président.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Non, je pense que je suis...
M. Bouchard (Vachon): Non, mais c'est parce qu'en toute justice, là, puis je ne vais pas insister davantage, M. le Président...
Le Président (M. Copeman): Oui, M. le député, allez-y.
M. Bouchard (Vachon): ...mais c'est parce que ma collègue me fait observer que, dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, il y a une disposition qui dit: «Les actions qui sont liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent [...] viser à rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté.» Il y avait là une application financière très nette, mais, comme ce n'est pas défini dans le temps, le ministre... ou la ministre ne s'est pas sentie piégée ni obligée de devoir appliquer cet article de loi dans des délais qui lui auraient imposé une obligation déraisonnable, étant donné toute la mécanique dont nous a parlé tout à l'heure la ministre, à savoir le fait que le gouvernement doit, aux comité des priorités, comité exécutif, etc., en venir à accepter les propositions d'investissement proposées par la ministre. Vous comprenez, j'ai comme l'impression qu'on n'est pas dans un précédent très fort, là.
Le Président (M. Copeman): Oui. Toujours sur la recevabilité et surtout si vous avez des éléments nouveaux à ajouter. Si vous allez me prier simplement de rendre ma décision, ça, je vais le faire, mais... Allez-y, allez-y.
Mme Courchesne: Une toute dernière remarque. Je répète que le législateur ne parle pas pour rien dire. Donc, il y a quand même là un principe important, et nous croyons que tous les programmes et mesures qui sont inclus dans le projet de loi n° 57 devraient être cohérents avec le principe, et on a une sérieuse crainte que ça puisse engager financièrement le gouvernement.
Le Président (M. Copeman): Très bien. Je vais suspendre les travaux de la commission quelques instants pour réfléchir sur cette question.
(Suspension de la séance à 20 h 38)
(Reprise à 20 h 52)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, chers collègues. Alors, la commission reprend ses travaux. Je dois rendre une décision quant à la recevabilité d'un amendement proposé par le député de Vachon, qui se lit comme suit:
L'article 1 du projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles est amendé par l'ajout, après le deuxième alinéa, de ce qui suit: «Elle vise également, à terme, à couvrir les besoins essentiels des personnes notamment la nourriture, le logement, les médicaments, l'habillement et le transport.» Le règlement est le suivant, à l'article 192 ? je prends la peine de le lire au complet:
«Motions réservées à un ministre. Seul un ministre peut présenter une motion visant:
«1° l'engagement de fonds publics;
«2° l'imposition d'une charge aux contribuables;
«3° la remise d'une dette envers l'État;
«4° l'aliénation de biens appartenant à l'État.
«Cette règle ne s'applique pas à une motion n'exprimant qu'une idée générale ou une opinion sur les matières énumérées ci-dessus.» Alors, la question pour la présidence est la suivante: Est-ce que l'amendement proposé par le député de Vachon engage des fonds publics? C'est la question qui nous préoccupe.
Évidemment, une chance que la présidence est guidée par des décisions similaires. Et c'est très rare qu'un président ou une présidente est appelé à créer un précédent, à créer une nouvelle jurisprudence. Normalement, on retrouve, à l'intérieur de notre Recueil de décisions concernant la procédure parlementaire, des critères supplémentaires, parce qu'il s'agit des critères supplémentaires, pour nous guider dans de telles situations. Parce qu'il faut que le règlement soit toujours interprété selon les décisions antérieures.
À sa face même, on peut évidemment prétendre que la motion engage des fonds publics. Par contre, plusieurs décisions antérieures indiquent à la présidence qu'il faut interpréter la notion d'engagement de fonds publics par quatre critères. Et je vous réfère à une décision 192/1, 192/2, qui est également appuyée par des décisions similaires dans les deux cas.
Alors, je lis le contexte: «Lors de l'étude détaillée d'un projet de loi, un député de l'opposition officielle présente une motion d'amendement à un article afin d'abaisser l'âge d'entrée à l'école. La problématique est de savoir si cette motion d'amendement vise l'engagement de fonds publics.» La question posée: «Est-ce que la motion d'amendement présentée par le député de l'opposition officielle vise l'engagement de fonds publics au sens de l'article 192 du règlement?» Je lis toujours la décision: «Pour savoir si une motion implique des engagements de fonds publics, quatre critères doivent être pris en considération: Est-ce exécutoire?», premier critère. «Y a-t-il implication directe sur des dépenses d'argent?», deuxième critère. «Est-ce exprimé en termes généraux?», troisième critère et, quatrième critère: «Est-ce que la motion comporte des chiffres?» Ce sont les quatre critères qui doivent guider la présidence. Si nous regardons attentivement l'amendement proposé par le député de Vachon... Et j'applique les quatre critères. Est-ce que l'amendement est exécutoire? On retrouve dans l'amendement la notion «à terme ? à terme ? à couvrir [des] besoins essentiels des personnes». Y a-t-il une implication directe sur des dépenses d'argent? Considérant qu'on utilise les mots «à terme», je ne crois pas qu'il y a une implication directe sur des dépenses d'argent. Est-ce exprimé en termes généraux? «Elle vise également, à terme, à couvrir [des] besoins essentiels des personnes notamment...» Nous sommes toujours dans les objectifs du projet de loi, des objectifs généraux. Est-ce que la motion comporte des chiffres?
Je vous suggère que, malgré le fait que le projet de loi est exécutoire, la formulation avec la notion «à terme» rend l'amendement... fait en sorte que l'amendement n'est pas exécutoire immédiatement. Deuxièmement, compte tenu qu'on parle d'«à terme», dans une période non définie dans le temps, il n'y a pas d'implication directe sur des dépenses d'argent. Est-ce qu'il est exprimé en termes généraux? Je crois que, oui, c'est assez général. Et est-ce que la motion comporte des chiffres? Évidemment, non.
Pour toutes ces raisons, compte tenu de la jurisprudence, les décisions antérieures, je déclare la motion du député de Vachon recevable et je crois que nous avons diffusé des copies de l'amendement. Alors, sur le fond de la question, M. le député de Vachon, la parole est à vous.
M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Le principe auquel la loi réfère avec cet amendement rejoint directement, M. le Président, les orientations qui sont poursuivies dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Alors, je pense que ce n'est pas négligeable de les rappeler, là. J'en fais lecture très rapidement, parce que je ne veux pas m'étendre là-dessus trop longtemps, parce que c'est trop évident, le lien qu'on peut faire entre l'amendement que je viens de proposer et le principe en question. Alors, je fais une lecture rapide:
«Afin d'atteindre les buts poursuivis par la stratégie nationale ? on parle de la stratégie nationale de lutte à la pauvreté ? les actions menées par l'ensemble de la société québécoise et par le gouvernement, dans la mesure prévue par la loi [et] aux conditions qu'il détermine, doivent s'articuler autour [de] cinq orientations suivantes:
«1° prévenir la pauvreté et l'exclusion sociale en favorisant le développement du potentiel des personnes;
«2° renforcer le filet de sécurité sociale et économique;
«3° favoriser l'accès à l'emploi et valoriser le travail;
«4° favoriser l'engagement de l'ensemble de la société;
n(21 heures)n«5° assurer, à tous les niveaux, la constance et la cohérence des actions.» En relisant ces orientations, on voit bien aussi que, d'une loi à l'autre, on doit établir des liens très nets entre les principes qui sont énoncés dans une loi-cadre, ce que je disais tout à l'heure, M. le Président, une loi référence, et les dispositions d'une autre loi comme celle du projet de loi n° 57. Alors, ces actions doivent également, dans leur conception et leur mise en oeuvre, viser à prendre en compte des réalités propres aux femmes et aux hommes en appliquant notamment une analyse différenciée selon les sexes, etc.
Mais en plus, M. le Président, le projet de loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale reprend chacune de ces orientations et les explicite davantage en termes d'actions. Et la première action que l'on rencontre, sous cette orientation, est de favoriser le renforcement du filet de sécurité sociale et économique. On la rencontre, comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, à l'article 9, qui se lit comme suit:
«Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à rehausser le revenu accordé aux personnes et aux familles en situation de pauvreté, en tenant compte notamment de leur situation particulière et des ressources dont elles disposent pour couvrir leurs besoins essentiels.» Nous avons suffisamment, M. le Président, évoqué, lors de la session d'automne, la nécessité d'introduire, dans le projet de loi n° 57, une préoccupation que je dirais liée très fortement à la sécurisation ? vous m'excuserez l'expression ? du revenu. J'ai fait observer à plusieurs reprises, devant vous et devant mes collègues, qu'au fil des ans, et je ne ferai pas le détail historique, mais depuis le début des années soixante-dix, on a vu tranquillement, de réforme en réforme ? et là je fais référence à tous les gouvernements antérieurs ? on a vu tranquillement disparaître, au profit de l'incitation à l'emploi, de l'incitation à la formation, on a vu disparaître la notion de sécurité du revenu dans notre Loi de la sécurité du revenu.
Et, ma foi, la façon dont se présente le projet de loi n° 57 est de la même mouture. Si on reprend, tel que modifié, le projet de loi n° 57, on s'aperçoit que, dans l'alinéa 1, le législateur fait référence au fait que la loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique. Et la plupart des observateurs qui ont commenté ce segment-là du premier alinéa ont bien signifié ce que ça voulait dire, c'est-à-dire la capacité de la personne à tirer du travail son revenu de façon autonome et de favoriser l'autonomie sociale des personnes et des familles.
«La présente loi, lit-on plus loin, vise également à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation active dans la société.» Alors, le texte de loi est très lourdement teinté d'une orientation qui se préoccupe ? et à juste titre il ne faudrait pas l'éliminer ? de toute cette idée d'une participation à la vie économique, à la capacité de tirer un revenu du travail, etc., mais on ne fait pas référence, M. le Président, à cet autre objectif que doit nécessairement comporter une loi que l'on intitule Loi d'aide aux personnes et aux familles, mais qui est dans la grande tradition des lois de sécurité du revenu et d'un filet de protection. On doit explicitement faire référence à cette notion que cette loi doit tendre à couvrir les besoins essentiels.
Je vous ferai remarquer que, devant cette commission... Et je sais bien que Mme la ministre n'y était pas à l'époque, mais elle a lu les mémoires, elle a lu à tout le moins la synthèse des mémoires. Elle s'est fait sans doute aussi raconter quelle était l'importance des interventions notamment de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse qui, parmi d'autres, a insisté très lourdement sur cette idée d'un droit à une vie décente, et du fait que la pauvreté ? et la ministre en convient, j'en suis sûr ? est une négation de ce droit. Et une loi de l'aide sociale qui ne se préoccuperait pas de relever le défi de couverture des besoins essentiels, à mon avis, raterait un objectif fondamental vis-à-vis des droits les plus... du droit fondamental à une vie décente pour tous les citoyens, les citoyennes et les citoyens du Québec.
Alors, voilà en capsule, M. le Président, parce qu'on pourrait en parler très, très, très longuement, là, mais voilà en capsule l'essentiel de l'argumentation que je pose devant vous en défense de la pertinence et de la nécessité d'inclure cet alinéa où on dirait que la loi vise à terme à couvrir les besoins essentiels des personnes, notamment la nourriture, le logement, le médicament, l'habillement et le transport.
Je vous dirai une chose, M. le Président. Après avoir entendu les remarques de la ministre, les remarques préliminaires de la ministre, hier, après avoir lu les amendements, j'ai comme l'impression qu'au-delà de la recevabilité la ministre va être particulièrement sympathique à cet amendement. L'idée, et là je ne peux pas reprendre ses paroles in extenso, je n'ai pas le texte devant moi, mais il me semble qu'elle a dit qu'elle trouvait intolérable que, dans une société comme la nôtre, il y ait des gens qui, jour après jour, doivent s'inquiéter de ce qu'ils auront à manger. Et je prends cette réflexion comme étant le signe d'une ouverture très grande, de la part de la ministre, à accepter. Maintenant que nous avons convenu que cela n'engageait pas de budget, qu'elle n'aurait pas à défendre et à se défendre contre un éventuel changement de cap vis-à-vis des obligations ou des engagements qu'elle a pris envers ses collègues du Conseil des ministres, maintenant que nous savons que cela ne nécessite pas des engagements financiers obligatoires par la ministre, il me semble qu'elle est en bonne position, étant donné le jugement que vous venez de porter, pour défendre le bien-fondé de cet amendement devant ses collègues. Et, si elle a besoin d'aide, j'y serai.
Mais, vous voyez un petit peu, M. le Président, le débat que l'on vient d'avoir est fondamental. Nous venons de dire, nous venons de convenir avec vous que cet amendement était recevable du fait qu'il n'obligeait pas immédiatement, et dans des termes précis, le gouvernement à investir des budgets supplémentaires qu'il n'aurait pas prévus dans son exercice financier.
Mais nous venons de dire également, et la nature même de l'amendement le dit... nous venons de donner une empreinte avec cet amendement. Si nous le recevons et si nous l'adoptons, nous venons donner une empreinte extrêmement lourde, forte, et une indication extrêmement nette du Parlement à agir dans la direction et en cohérence avec les orientations de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Et ça a aussi une valeur de symbole très importante, parce que venant ou apparaissant, cette préoccupation, dans le texte d'une loi de solidarité sociale, elle devrait à mon avis inspirer beaucoup d'autres dispositions dans d'autres missions de l'État où, lorsque la décision sera venue de prendre des décisions qui risqueraient d'améliorer ou qui auraient comme probabilité d'améliorer la situation économique des personnes, bien les gens se référeraient désormais à ce modèle où une loi réfère explicitement à un principe d'une loi auquel elle se réfère dans le texte même.
Alors, M. le Président, j'arrêterai là mes remarques et je vous remercie de m'avoir écouté.
Mme Courchesne: M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: M. le Président, est-ce que je peux demander à la commission quelques minutes, suspendre quelques minutes pour que je puisse consulter et l'équipe et mes collègues?
Le Président (M. Copeman): Bien sûr.
Mme Courchesne: Merci.
Le Président (M. Copeman): Je suspends les travaux de la commission.
(Suspension de la séance à 21 h 10)
(Reprise à 21 h 15)
Le Président (M. Copeman): Alors, la commission reprend ses travaux. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'ai écouté attentivement le député de Vachon et je sais qu'il a fait référence à mes remarques préliminaires d'hier soir. Et je veux, devant cette commission, réitérer tout à fait mes propos tenus à l'ouverture de la commission sur le fait que notre gouvernement a tout à fait à coeur ? et la volonté, parce que je pense que ça prend une volonté ? a tout à fait la volonté non seulement de poursuivre la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale ? et le député de Vachon, M. le Président, sait très bien que cet enjeu, ce n'est même pas un enjeu de société parce qu'on ne devrait pas avoir à combattre contre la pauvreté dans une société, on ne devrait pas avoir à combattre la pauvreté, mais elle existe malheureusement... et que donc notre gouvernement a démontré clairement, fortement, fermement, depuis notre élection, que nous étions disposés à prendre tous les moyens, dans le respect de certains encadrements forcément, parce que tout n'est pas illimité dans la vie, mais de prendre tous les moyens à notre disposition pour développer ces programmes, ces mesures qui vont faire en sorte qu'il y aura de moins en moins de démunis dans notre société.
Et le député de Vachon, M. le Président, l'a bien dit, la loi n° 112 a été adoptée, a été adoptée à l'unanimité. Or, M. le Président, ce que je constate ce soir, c'est que, dans la Loi sur la sécurité du revenu, jamais il n'a été fait mention de cette notion de besoins essentiels, de viser à tendre à... Peu importe le vocabulaire qu'on utilisera, dans la Loi sur la sécurité du revenu, la loi actuelle sur la sécurité du revenu, tout ce qui est le volet aide sociale, prestations, tout ce qui soutient le revenu ou la sécurité du revenu, jamais on n'a fait mention à la couverture de ces besoins essentiels.
Or, M. le Président ? j'attire l'attention du député de Vachon ? lorsque son gouvernement a adopté la loi n° 112, pourquoi son gouvernement ou le législateur de l'époque, mettons ça comme ça, pourquoi le législateur de l'époque n'a-t-il pas senti le besoin, à ce moment-là, de modifier la Loi sur la sécurité du revenu? Et le législateur, il ne l'a pas fait. Moi, M. le Président, je n'y étais pas à ce moment-là, mais, à mon humble avis, il ne l'a pas fait parce qu'il a voulu que... Et, à ce moment-là, je dirai «le gouvernement», mais rappelons que c'est le législateur, la loi a été votée à l'unanimité, donc le législateur a voulu faire de la loi de lutte contre la pauvreté... a voulu en faire une loi de référence, l'équivalent d'une loi-cadre, la loi qui structure toutes les orientations, toute la démarche du gouvernement, toutes les actions, tous les programmes et toutes les mesures.
n(21 h 20)n Or, dans cette loi n° 112, cette loi sur la pauvreté, on définit bien effectivement la façon dont on souhaite interpréter, dans la législation, la couverture des besoins jugés essentiels. Et, pour cette raison-là, et comme la loi que nous avons devant nous ce soir, le projet de loi n° 57, qui, lui, est une loi d'encadrement de programmes et de mesures... Et très sincèrement il m'apparaissait important d'amender l'article 1 pour non plus faire référence au plan de lutte... Je dois dire, M. le Président, que je partage l'avis du député de Vachon. Un plan d'action, c'est effectivement plus éphémère, mais une loi, c'est totalement autre chose. Alors, c'est pour ça que j'ai accepté, M. le Président, d'amender cet article 1 et de plutôt faire référence à cette loi n° 112 qui, elle, est très... qui est une loi de fond, une loi de référence et qui nous explique très, très bien dans quelles conditions on doit... ou pas tellement les conditions comme la philosophie, les orientations qui doivent guider l'action du gouvernement lorsqu'il s'agit d'établir ces programmes, ces mesures et ces actions en respectant justement cet esprit de tendre vers la couverture des besoins essentiels.
Alors, M. le Président, pour cette raison-là, je ne vois pas comment nous puissions accepter l'amendement du député de Vachon. Mais je veux par ailleurs insister sur le fait que ce n'est pas parce qu'on rejette cet amendement-là... ce n'est pas parce qu'on rejette cet amendement-là que nous n'allons pas déployer encore tous les efforts, que nous n'allons pas conserver la cohérence des orientations de la loi n° 112. Alors, nous sommes tout à fait, là, dans la ligne de la loi n° 112, dans la philosophie, dans le respect de la cohérence de la loi n° 112. Alors, je ne voudrais pas, M. le Président, que quiconque puisse interpréter que, parce que nous rejetons cet amendement-là, nous rejetons l'article 7, l'article 9 de la loi n° 112, bien au contraire, parce que l'amendement que nous avons proposé ce soir est un amendement qui fait référence à cette loi plutôt qu'au plan d'action gouvernemental sur la lutte contre la pauvreté.
Alors, voilà, M. le Président, on doit se dire que c'est de cette façon que nous souhaitons poursuivre à cet égard-là. Parce que je crois sincèrement qu'une loi-cadre ou une loi référence doit conserver toute sa force. Et, moi, je préfère avoir cette référence de cette façon-là, avec tout ce qu'on reconnaît à un principe de loi-cadre ou de loi structurante, plutôt que de commencer à travers une loi qui définit plus des normes ou qui définit plus un encadrement de programmes. Je préfère conserver intacte la valeur de la loi n° 112.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Là, je ne veux surtout pas caricaturer la position de la ministre, mais j'ai comme l'impression qu'il y a une façon d'interpréter l'amendement qui m'apparaît un petit peu restrictive, c'est-à-dire que, dans la proposition d'amendement qui est posée devant vous, M. le Président, c'est bien clair que nous référons explicitement à un article. Dans le fond, nous faisons référence à un article de la loi sur la pauvreté et... de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Il n'y a pas de négation, au contraire, dans notre amendement, ni de restriction, dans notre amendement, lorsque nous faisons référence aux besoins essentiels. Au contraire, nous mettons en évidence cette notion fondamentale. Et je crois me rappeler que, dans la loi actuelle, s'il n'y a pas de référence explicite à la notion de sécurité de revenu, il y a une référence explicite à la notion de besoins essentiels, dans la loi actuelle. Pourquoi? Parce que, quelque part, il me semble... Enfin, là on essaie de voir si, quelque part, il n'y aurait pas cette... Mais, à mon souvenir, ça existerait.
Mais je ne comprends pas tout à fait la logique qui inspire la ministre là-dedans. Dans le fond, ce que la ministre nous dit, c'est qu'elle refuse, elle refuse, en refusant l'amendement, l'occasion qui lui est donnée de redresser carrément le balancier.
Et lorsque... la ministre parlait du législateur, tout à l'heure, puis je salue sa délicatesse, là, parce qu'en effet les législateurs successifs, durant les 30 à 40 dernières années, se sont laissé aller tranquillement à cette dérive de considérer davantage le mérite et l'effort que les personnes pourraient déployer pour arriver à couvrir leurs besoins essentiels plutôt que leurs droits, et ça s'est installé à la faveur de toutes sortes de circonstances. Et la ministre, qui connaît très bien l'environnement social et économique du Québec, sans doute acquiescera avec moi que beaucoup de ces décisions se sont prises alors que l'économie était en très mauvaise posture et que beaucoup de décisions se sont prises, notamment quant à la question de diviser les catégories en contraintes sévères, ou sans contraintes sévères, ou aptes, ou inaptes, etc., dans un environnement où l'État cherchait à minimiser ses engagements financiers, étant donné les disponibilités budgétaires, et cherchait à protéger le mieux possible les personnes qui présentaient les caractéristiques de santé les plus délétères.
Alors, il y a eu, au fil des ans et au fil des périodes, mais surtout à la faveur des récessions économiques, une espèce de dérive qui est principalement due, à mon avis ? mais là je fais une interprétation de l'histoire ? à mon avis, qui était principalement due à des pressions budgétaires, où on tentait de composer avec les besoins des personnes qui apparaissaient les plus criants. Et on a commencé à dire: Bien, il y a des gens qui ont des besoins encore plus grands que d'autres. Puis là on a fait les personnes qui étaient inaptes, puis les autres qui étaient aptes, puis ensuite les personnes avec contraintes, puis d'autres sans contraintes, etc., pour installer, dans le système, une espèce de polarité: ceux qui pouvaient arriver à plus d'autonomie financière et qui devaient y arriver, ce qui, d'une certaine façon, arrivait à économiser un certain effort budgétaire de la part de l'État, budget qu'il n'avait pas, prétendait-il, et ceux qui n'y pouvaient apparemment rien. Et, ce faisant, on a comme diminué la couverture des besoins en la cantonnant le plus possible vers un groupe de plus en plus restreint de personnes, et là je parle des personnes qui présentent des contraintes sévères à l'emploi, dont les prestations sont un peu plus élevées. Et là il y aurait tout un débat à savoir si ça couvre les besoins essentiels ou non; il y a des gens qui disent que non, des gens qui disent que oui. J'ai comme l'impression qu'on est plus près de les couvrir en tous les cas, et ce n'est pas seulement une impression, c'est un constat, que pour les personnes qui ne présentent pas de contraintes.
Alors, mon argument est à l'effet que la ministre refuserait, là... Et je lui demande d'y penser encore un peu, parce que je l'ai rencontrée dans d'autres circonstances, notamment sur la loi n° 53 sur l'immigration, où les débats que nous avons eus ont abouti, hein, à une formulation de la loi qui était à mon avis très intéressante vis-à-vis de ce que ça annonçait au point de départ.
n(21 h 30)n Et la ministre part d'un texte de loi, le 57, la ministre part d'un texte de loi, le 57, qu'elle n'a pas rédigé elle-même, au point de départ. Elle part de loin, là. Et les améliorations... Non, non, c'est vrai. Mais les améliorations à apporter sont énormes. Et j'ai vu, hier, la série d'amendements qui avaient été apportés par son équipe, et à mon avis il y a quelques trucs là-dedans qui sont fort intéressants, mais il y a aussi des gros morceaux qui manquent encore. Et il y a une chance historique, là, après l'adoption de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, pour une... La première fois qu'on ouvre la loi dite de l'aide sociale, il y a une chance historique d'y réintroduire cette notion très forte de la sécurité du revenu.
Alors, je comprends mal l'argumentaire de la ministre, à moins qu'elle me dise que quelque part elle a peur que ça implique des engagements financiers à ce point importants qu'elle n'ose même pas y penser. Alors, moi, franchement, là, j'essaie de comprendre l'argumentaire, puis je ne le vois pas clairement, M. le Président. Et peut-être que la ministre veut le dire autrement?
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, je remarque en effet que le député de Vachon est arrivé dans cette Assemblée en même temps que moi, c'est-à-dire le 14 avril 2003. Moi, je dirais, M. le Président, au député de Vachon qu'il devrait transmettre son message à son propre parti, parce qu'il me parle, M. le Président, d'une chance historique ce soir. Mais, votre gouvernement... M. le Président, son gouvernement, ça veut donc dire qu'il l'a ratée, la chance historique dont il parle. C'est ça qu'il est en train de faire comme aveu, ce soir, M. le Président, aux membres de cette commission. Parce que la chance historique, M. le Président, c'était au moment de l'adoption de la loi n° 112. C'était à ce moment-là que le gouvernement aurait dû faire ou en tout cas saisir cette chance historique. Alors, M. le Président, je suis obligée de dire... Malgré toute mon amitié pour le député de Vachon, je suis obligée de lui dire que c'est un aveu, ce soir, qu'il nous fait que son gouvernement a passé complètement à côté de cette question-là, de la façon dont lui est en train de me demander de corriger ce que son gouvernement n'a pas fait.
Mais, M. le Président, pourquoi son gouvernement ne l'a-t-il pas fait? Il y avait des raisons. Et je l'invite à aller revoir mes prédécesseurs de ce temps et qu'il demande à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pourquoi elle a toujours refusé de reconnaître les besoins essentiels. Et, s'il m'avait posé une question en Chambre, aujourd'hui, je lui dis aussi amicalement que j'ai toutes les coupures de presse de cette époque-là où tous les groupes réclamaient exactement ce qu'il demande ce soir. Puis je sais que les groupes, le collectif, et tout ça... Puis je suis très sensible au discours de Mme Labrie. Je suis très sensible à tous ceux et celles qui font la démonstration qu'aujourd'hui c'est difficile de vivre avec la prestation plancher, ça me touche, puis ça ne devrait pas exister dans notre société.
Par contre, M. le Président, bien, c'est évident qu'un gouvernement doit essayer de procurer à la population un ensemble de services, un ensemble de programmes, un ensemble de mesures où on espère qu'on va diminuer de façon substantielle cette pauvreté et où on espère qu'on va augmenter la capacité d'atteindre l'autonomie financière, d'atteindre surtout la dignité. Mais il est évident qu'il y a des conséquences budgétaires. Il est évident, M. le Président, qu'il faut être responsable lorsqu'on a à faire ces partages. Puis je n'aime pas ça, être forcée de parler de ça en rapport avec des sommes d'argent, mais, à la fin de la journée, il y a une réalité, il y a une réalité où il faut avoir aussi la capacité de le faire.
Et, M. le Président, je dis au député de Vachon... Bien, cette chance historique dont il parle, je l'invite vraiment à retourner auprès de ses collègues et de leur demander pourquoi, eux, ils ne l'ont pas et elles ne l'ont pas saisie, cette chance historique.
Et, moi, je regarde le chemin parcouru avec la loi n° 112, votée à l'unanimité, loi qui était absolument fondamentale, essentielle. Elle est votée. Suite à ça, un plan d'action gouvernemental, un investissement de 2,5 milliards de dollars sur cinq ans. C'est déjà une étape, c'est une autre étape importante dans la bonne direction. Projet de loi n° 57, ce n'est pas tout à fait comparable, mais il y a un élément important dans ce projet de loi là: la prestation plancher. Est-ce que c'est suffisant? Mme Labrie va nous dire non, mais c'est un pas dans la bonne direction. Et c'est comme ça qu'une société se bâtit, c'est comme ça qu'une société évolue et c'est comme ça qu'on améliore les situations. Tout faire en même temps, malheureusement c'est difficile.
Et je veux, M. le Président, en terminant, dire aussi au député de Vachon que je ne m'inscris pas dans le discours de penser qu'on ne tient pas compte, qu'on tient de moins en moins compte, dans nos lois, des droits des personnes. Encore une fois, notre société s'est donné une charte dans laquelle on décrit clairement les droits fondamentaux, puis les droits sociaux, puis les droits économiques... et les droits fondamentaux, c'est ça, socioéconomiques. Alors, nos lois doivent respecter cette charte. Nos lois ne peuvent pas aller à l'encontre des chartes. Nos programmes ne peuvent pas aller à l'encontre des chartes. Nos actions ne peuvent pas aller à l'encontre des chartes. Alors, je ne peux pas m'inscrire... Et, dans la loi n° 57 non plus, je ne m'inscris pas dans le discours qui dit que nous sommes en train de glisser, puis qu'on est en train de tout mettre dans des mesures pour mettre les gens en emploi aux dépens de la sécurité du revenu. En tout cas, 57, ce n'est pas ça qu'il nous démontre, on a l'instauration de la prestation plancher.
Donc, M. le Président, si on pense que, ce soir ou dans les jours qui viennent, on va pouvoir répondre à 100 % à tout ce qu'on devrait faire pour que vraiment il n'existe plus de pauvreté ou que vraiment on puisse accéder à toutes ces demandes louables mais pour lesquelles je pense qu'il faut continuer à travailler tout le monde ensemble à mettre tous nos efforts ensemble dans la même direction, c'est-à-dire de poursuivre cette lutte à la pauvreté et plutôt regarder à quel point... et mesurer à la fois la volonté et mesurer le chemin parcouru tout en sachant qu'il en reste encore un à parcourir...
Et, M. le Président, je termine là-dessus, le député de Vachon, qui est un homme raisonnable, sait très bien maintenant, depuis deux ans, ce que gouverner veut dire. Même s'il n'a pas été encore membre d'un gouvernement en fonction, je pense que déjà il est capable de mesurer la portée des propos que je viens de tenir.
Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Laurier-Dorion.
Mme Lefebvre: Merci, M. le Président. Bien, assez brièvement, j'aimerais prendre au bond certains propos de la ministre, puisqu'elle mentionnait à mon collègue de Vachon d'aller revoir les ex-collègues pour leur demander pourquoi, à un moment y dans l'espace et dans le temps, des actions x ou y auraient été posées ou pas posées, et ce qui justifierait qu'aujourd'hui, en 2005, on ne puisse pas regarder vers l'avenir puis se dire qu'on part au moment qui est aujourd'hui. On est en train d'étudier le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, on est en train de faire... de restructurer, disons, cette loi. Selon moi... Je ne le sais pas, moi, j'ai 26 ans, je regarde vers l'avenir. C'est sûr qu'il y a des choses qui ont été faites dans le passé, il faut en tenir compte, mais en même temps est-ce que c'est parce que ça n'a pas été fait qu'on doit se dire aujourd'hui: On ne peut pas aller plus loin?
n(21 h 40)n Moi, ce que je pense, c'est que, comme la ministre l'a mentionné, il y a des actions qui ont été faites, puis on met des pierres à l'édifice, puis il s'agit d'en mettre toujours une après l'autre. La Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale a été adoptée, le plan d'action a été adopté. Maintenant, aujourd'hui, on est en train de réviser le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, et puis on parle d'un aspect fondamental, dans cet amendement-ci, qui est la couverture des besoins essentiels. Et, de l'exprimer explicitement dans le projet de loi, je pense que ce serait justement d'ajouter cette pierre importante à l'édifice, donc cette étape de plus qu'on pourrait franchir tous ensemble puis regarder justement vers le futur. Il faut penser que la pauvreté, c'est un des fléaux de toutes les sociétés, qu'elles soient modernes ou moins avancées, peu importe. Mais ici, au Québec, il me semble que ça devrait être un objectif louable puis, en ce sens-là, c'est sûr que... Bon, le passé existe, et puis j'aimerais rappeler à la ministre que justement nous ne sommes plus au gouvernement. Donc, nous avons reçu ce message de la population. Maintenant, il est temps de regarder en avant puis d'ajouter cette pierre.
Et puis j'espère qu'en poursuivant nos débats on réussira à convaincre le gouvernement de l'importance d'ajouter explicitement cette référence à la couverture des besoins essentiels parce que... bien parce que c'est nécessaire, il me semble, dans toute société moderne comme celle du Québec. Puis j'aimerais rajouter qu'il y a 41 groupes qui sont venus nous présenter des mémoires qui ont mentionné l'importance de l'ajouter également au projet de loi.
Donc, tout ce que j'espère, c'est qu'on puisse regarder vers l'avant, puis dans le fond pas toujours se référer aux choses qui peut-être se sont faites de moins bonne façon dans le passé, et se dire que l'avenir dans le fond est pour nous, et puis qu'on ne doit pas se limiter à rien, puis aller de l'avant. Voilà.
Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon, en vous signalant qu'il vous reste 1 min 30 s.
M. Bouchard (Vachon): Tout simplement pour souligner, s'il me reste si peu de temps, M. le Président, que je suis à ce point raisonnable que j'ai écrit un article où le mot «à terme» apparaît. Et c'est justement pour ne pas coincer la ministre dans un environnement législatif qui l'obligerait à mettre sur la table, dans un avenir trop prévisible, des sommes très importantes que son gouvernement n'aurait pas prévues que ce «à terme» a été introduit. Il est introduit, M. le Président, parce que c'est le principe qui est exprimé par l'amendement qu'il m'apparaît important de rendre en effet visible dans le projet de loi. Première remarque.
La deuxième, c'est qu'il y a eu des chances historiques qui ont été ratées; il y en a d'autres qui ont été plutôt bien saisies. Et, ma foi, les parlementaires de l'époque ? et là je réfère à décembre 2002 ? tous qu'ils en étaient, ont bien saisi l'opportunité qui leur était offerte de voter à l'unanimité une loi luttant contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Alors, il me semble que, quelque trois ans et quelques semaines plus tard, cette autre chance se présente. L'ancien gouvernement n'avait pas eu l'occasion de réouvrir la loi n° 169 concernant l'aide aux personnes. Ce gouvernement en a l'occasion, la loi est réouverte, l'occasion se présente, l'opportunité est très belle. Et, à ce point de vue là, M. le Président, je ne crois pas que ça vaille la peine à mon avis de profiter de l'occasion pour faire des reproches aux législateurs qui nous ont précédés. Je faisais tout simplement référence, lors de mon intervention antérieure, d'un mouvement ou d'une dérive que les législateurs successifs avaient empruntée et qu'il était temps de corriger cette dérive.
Le Président (M. Copeman): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mme Courchesne: Une dernière.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre, allez-y.
Mme Courchesne: Une toute dernière. M. le Président, je le disais tout à l'heure, le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Le législateur a toujours aussi été très sage. Et la Loi sur la sécurité du revenu, M. le Président, est une loi, j'ai le goût de dire, délicate. C'est une loi complexe, mais c'est une loi délicate. Et la raison pour laquelle le législateur a à mon avis toujours refusé, peu importe le parti au pouvoir, d'ouvrir là-dessus, c'est parce qu'il y a une crainte, puis je n'ai pas, moi, ce soir, à juger si elle est fondée ou pas, mais il y a une crainte, probablement basée sur la sagesse de l'expérience, qu'il y ait une immense ouverture devant les tribunaux de la détermination de ce que serait le montant à établir dans tout ce qu'on fait dans l'aide sociale, dans la détermination des montants de prestations. Je le dis en toute transparence. Je ne suis pas obligée de dire ça ce soir, mais je le dis parce que je ne veux pas qu'on mésinterprète mes propos. Et c'est très difficile pour un tribunal et c'est très difficile pour nous tous, dans la société, d'établir un consensus sur ce montant. Mais, comme on gère une loi, on gère des programmes de prestations, tu sais, à un moment donné, il y a comme cette réalité-là où il faut que ce soit très précis, il faut qu'il y ait beaucoup de critères, il faut que ce soit, tu sais, très clair, sinon, bien, on se retrouve effectivement avec beaucoup, beaucoup de causes devant les tribunaux, et ça, je ne pense pas que ce soit souhaitable puis je ne pense pas que ce soit... En tout cas, moi, j'essaie toujours, dans les décisions que nous avons à prendre, de déjudiciariser le plus possible ou s'assurer qu'on ne va pas vers cette possibilité-là.
C'est pour ça que je disais tout à l'heure: Il y a beaucoup de chemin parcouru, il en reste encore beaucoup à parcourir. Et, à mon avis, dans toute la façon d'aborder la question de l'aide sociale... Puis la députée de Laurier-Dorion disait aussi... Elle est jeune, il y a encore beaucoup d'années devant elle. Mais, moi, je pense sincèrement qu'il y a encore beaucoup de réflexion à faire aussi sur la façon d'aborder, de gérer... je n'aime pas le mot «gérer» quand on parle de l'aide sociale, mais d'aborder, de régler toutes ces questions liées à l'aide sociale, mais que, dans la sagesse du législateur, liée à son expérience, il y a ces notions-là de prudence aussi qu'il faut avoir. Et c'est pour ça que, plus je nous écoute ce soir... Vous avez raison, je n'étais pas là avant, ça ne fait pas longtemps que je suis là, mais plus je nous écoute, ce soir, et plus je comprends l'importance de la loi n° 112 et surtout de la façon dont elle est faite, de la façon dont elle est structurée. Et, quand je la lis, là, depuis tout à l'heure que je la relis, elle a ses fondements, elle a sa raison d'être et elle est faite, elle aussi, je crois, avec toute la sagesse requise, et ce serait pour moi un peu réducteur, à cette étape-ci, après tout ce qui a été fait depuis cette loi-là, ce serait réducteur, ce soir, de bêtement faire une cause à effet entre le projet de loi n° 57 et l'amendement proposé par le député de Vachon, que nous rejetons, et le fait qu'on ne veut pas tendre vers notre capacité de couvrir les besoins essentiels. Mais je pense que, sincèrement, il faut remettre les choses là où elles appartiennent, et la loi n° 112, pour moi, c'est elle qui clarifie toute cette situation-là.
Le Président (M. Copeman): Il y a d'autres interventions? Il n'y en a pas? Alors, est-ce que l'amendement est adopté?
M. Bouchard (Vachon): Vote nominal.
Président (M. Copeman): Une demande de vote par appel nominal. Alors, Mme la secrétaire.
n(21 h 50)nLa Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?
M. Bouchard (Vachon): Pour.
La Secrétaire: Mme Lefebvre (Laurier-Dorion)?
Mme Lefebvre: Pour.
La Secrétaire: M. Girard (Gouin)?
M. Girard: Pour.
La Secrétaire: Mme la ministre?
Mme Courchesne: Contre.
La Secrétaire: Mme Gaudet (Maskinongé)?
Mme Gaudet: Contre.
La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?
M. Paquin: Contre.
La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue)?
M. Bernard: Contre.
La Secrétaire: Mme Legault (Chambly)?
Mme Legault: Contre.
La Secrétaire: Mme James (Nelligan)?
Mme James: Contre.
La Secrétaire: M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Contre.
La Secrétaire: ...
Le Président (M. Copeman): Alors, l'amendement est rejeté.
Alors, nous revenons sur toujours l'article 1 tel qu'amendé par l'amendement de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Est-ce qu'il y a d'autres... M. le député de Vachon, oui. Bien sûr.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, j'aimerais proposer un autre, et là je ne veux pas décourager mes collègues d'en face, alors je vais dire: Et dernier amendement, en ce qui nous concerne, à l'article 1. Et, à l'article 1 alors du projet de loi n° 57, j'ajouterais ceci après le deuxième alinéa: «Dans le but de protéger le pouvoir d'achat des personnes, le ministre accorde une indexation automatique selon l'indice des prix à la consommation de Statistique Canada aux prestations offertes dans le cadre des programmes.»Le Président (M. Copeman): Sur la recevabilité. Alors, sur la recevabilité, Mme la députée de Maskinongé.
Mme Gaudet: Il me semble, M. le Président, que, tout à l'heure, vous avez énoncé qu'un des principes qui fait qu'un amendement n'est pas recevable, c'est s'il engage des sommes supplémentaires au niveau du gouvernement. Alors, je crois que très clairement, dans cet amendement, en demandant une indexation automatique... je n'ai pas le libellé devant moi, là, mais il m'apparaît que des coûts supplémentaires sont engendrés automatiquement, et il m'apparaît, M. le Président, que cet amendement n'est pas recevable.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la recevabilité?
M. Bouchard (Vachon): Sur la recevabilité, M. le Président, je pense que vous avez tout en main pour en juger.
Le Président (M. Copeman): Oui. Moi aussi. Écoutez, compte tenu des quatre critères dont on a discuté précédemment, auxquels je vais encore une fois faire référence... Je vais les connaître par coeur, hein, à la fin de l'étude du projet de loi, je pense. Est-ce que... Là, on est toujours dans le domaine de l'engagement des fonds publics, hein, je vous rappelle. Une motion qui engage des fonds publics est réservée à un ministre. Si on... Pour arriver à... C'est ça, on arrive à la conclusion en appliquant les quatre critères.
Alors, les quatre critères: Est-ce exécutoire? «Le ministre accorde», ça m'apparaît... Le mot «accorde» jumelé avec «une indexation automatique», ça m'apparaît exécutoire.
Y a-t-il des implications directes sur les dépenses d'argent? Je crois que oui: «...selon l'indice des prix à la consommation de Statistique Canada...», à moins qu'il y ait absolument zéro... Écoute, je ne suis pas économiste, là, mais la dernière fois qu'il n'y avait aucune augmentation dans l'indice des prix à la consommation de Statistique Canada, là, ça m'apparaît... récemment... En tout cas, ça m'apparaît lointain.
Est-ce exprimé en termes généraux? Il me semble que c'est exprimé en des termes très spécifiques. Il s'agit d'une indexation automatique selon l'indice des prix à la consommation de Statistique Canada aux prestations offertes.
Est-ce que la notion comporte des chiffres? Pas nécessairement, mais on peut facilement calculer le chiffre en utilisant l'index...
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): ...l'indice des prix, l'indice des prix. Alors, malheureusement, pour cette motion, je dois la déclarer irrecevable.
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): C'est ça. Alors, avec... Ça m'apparaît très clair, selon les décisions antérieures, la jurisprudence, les quatre critères, ainsi de suite.
Alors, nous sommes toujours à la discussion de l'article 1. Je ne sais pas s'il y a d'autres... Est-ce qu'on est prêt à voter sur l'article 1? On est prêt à voter? Est-ce que l'article 1 est adopté?
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, est-ce qu'on a le droit de... un commentaire général sur l'article?
Le Président (M. Copeman): Sur l'article?
M. Bouchard (Vachon): Oui.
Le Président (M. Copeman): Bien sûr.
M. Bouchard (Vachon): Ah! Bon. Alors, est-ce que vous avez offert la possibilité de le faire ou...
Le Président (M. Copeman): Bien sûr. Il me semble... Je peux suspendre et vérifier, mais il me semble que j'ai dit: Est-ce qu'il y a d'autres discussions sur l'article 1?
M. Bouchard (Vachon): Ah!
Le Président (M. Copeman): Est-ce que j'ai dit ça? Il me semble que j'ai dit ça.
M. Bouchard (Vachon): Ah! Bon. Bien, alors j'ai raté le coche, excusez-moi.
Le Président (M. Copeman): Alors, écoutez, il n'y avait pas de député, à ce moment-là, qui avait manifesté qu'il y ait d'autres discussions. J'ai demandé le vote. Je pense qu'il faut procéder avec le vote. Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Bouchard (Vachon): Sur division.
Le Président (M. Copeman): Sur division. Très bien. Tel qu'amendé, évidemment. Alors, l'article 1, tel qu'amendé, est adopté sur division. L'article 2.
Mme Courchesne: Alors...
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre, je crois que vous avez un amendement.
Mme Courchesne: J'aurais un amendement à proposer, M. le Président: Modifier l'article 2 du projet de loi par le remplacement, dans la quatrième ligne, des mots «devant être» par le mot «étant».
Cet amendement vise à corriger l'interprétation donnée par plusieurs groupes entendus lors des consultations publiques à l'effet que l'expression «devant être» laissait entendre que le projet de loi réintroduisait une obligation pour les personnes d'entreprendre des démarches vers l'emploi. En remplaçant le mot «devant» par «étant», l'amendement reprend à cet égard le libellé du préambule de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
Cet amendement vise notamment à donner suite aux commentaires de certains intervenants entendus lors des consultations, dont le Collectif pour un Québec sans pauvreté, Le Regroupement des sans-emploi MRC de L'Érable, la Centrale des syndicats démocratiques, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, la Coalition des organismes communautaires pour le développement de la main-d'oeuvre et la FIIQ. Voilà.
Le Président (M. Copeman): Alors, sur l'amendement, M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Je ne serai pas très long parce que nous sommes évidemment en accord avec cette proposition. L'explication de la ministre cependant m'apparaît un petit peu étrange, là. Je vais voir si je comprends, si j'interprète bien ce qu'elle vient de nous lire. Elle nous a lu ceci: «L'amendement vise à corriger l'interprétation donnée par plusieurs groupes...» M. le Président, l'amendement vise à corriger le texte, il ne vise pas à corriger l'interprétation donnée par plusieurs groupes. Non, mais franchement!
M. le Président, vous avez été témoin, à cette commission, de comment les groupes avaient été outrés par la façon dont le législateur avait interprété le segment de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, alors que cette loi reconnaît ce que les personnes font effectivement d'efforts pour en sortir, d'efforts pour s'assurer un environnement économique le plus adéquat possible et d'efforts pour s'assurer une vie décente. La façon dont était rédigée la loi les plaçait devant une obligation de le faire, comme s'ils n'étaient pas motivés à le faire, comme s'ils n'avaient pas d'intérêt à le faire et comme s'ils ne le faisaient pas. Vous vous souvenez de ça, M. le Président. Nous avons eu plusieurs représentations de groupes à cet effet-là.
n(22 heures)n Et l'amendement vise heureusement à corriger le texte et non pas l'interprétation des groupes, parce que l'interprétation des groupes, M. le Président, elle est valide en soi, puisque ces groupes mesuraient la distance entre l'expression qui était utilisée, «devant être», et même allaient jusqu'à dire que c'était carrément que de tronquer l'intention même et la reconnaissance même, nier la reconnaissance même que faisait le texte de la loi luttant contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Et plusieurs des groupes entendus faisaient valoir qu'en utilisant ce terme-là on contribuait à renforcer les préjugés.
Alors, c'est une très bonne disposition que dépose la ministre, un très bon amendement. Je remarque aussi, dans ses remarques préliminaires, que nous ne figurons pas parmi les intervenants qui ont réclamé ce changement, mais je me rappelle très bien que nous l'ayons fait. Mais cependant la MRC de L'Érable y est, et ça me réjouit.
Alors, M. le Président, je pense qu'on vient de remettre cet article 2 dans le bon sens, qu'on vient à mon avis de se brancher directement sur le concept de dignité et de respect, de respect des personnes qui, dans des situations extrêmement pénibles, extrêmement difficiles, font tout ce qu'elles peuvent pour s'en sortir et qu'elles sont les acteurs ou les actrices de leur développement. Et, à ce point de vue là, je pense que c'est tout à l'honneur de la ministre que de nous amener cet amendement.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Mme Courchesne: Courte, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): C'est vous qui le dites, Mme la ministre. Allez-y.
Mme Courchesne: M. le Président, vous savez, il s'est dit beaucoup de choses sur le projet de loi n° 57. Parfois, je pense qu'il y avait des... Et c'est pour ça qu'on fait des consultations, c'est tout à fait l'objet des consultations publiques que nous faisons. Mais effectivement il faut faire attention dans les propos que j'utilise. Quand je dis corriger l'interprétation, il se peut... puis je le dis de façon très objective, parce que je n'étais pas à l'origine du projet de loi n° 57, mais je sais par contre qu'il peut y avoir eu aussi des interprétations, M. le Président, qui ne traduisaient pas nécessairement la volonté du législateur. Je pense que ça arrive. Je ne suis pas en train de vouloir minimiser les commentaires qui ont eu cours sur le projet de loi n° 57, mais je dis aussi qu'il faut faire attention. Ce n'est pas parce que je dis ce que je viens de dire que ça ne puisse pas être le cas.
Et puis, bien, moi, je les aime bien, les gens de la MRC de L'Érable. Je les trouve tout aussi importants que n'importe quels autres qui sont venus en commission faire des représentations. Voilà.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Moi, j'aimerais bien que la ministre m'aime autant que la MRC de L'Érable et qu'elle mentionne les efforts qu'on a faits pour améliorer le texte de loi.
Ceci étant dit, je répète que nous venons de... avec cet amendement-là, je pense que nous avons l'occasion de redresser le projet de loi dans le sens requis et que nous allons appuyer cet amendement.
Le Président (M. Copeman): Je dois ajouter, M. le député, que je crois sincèrement qu'il y a plusieurs parlementaires qui ont travaillé...
M. Bouchard (Vachon): Bien oui!
Le Président (M. Copeman): ...à améliorer le projet de loi, tout autour de la table, des parlementaires qui ne sont pas ici, à la table. Alors, je suis sûr que la ministre nous aime bien, tous et chacun.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Mais vous savez, M. le Président, que c'est le rôle de l'opposition que d'exprimer très clairement... et d'identifier les faiblesses d'un projet de loi et que d'exprimer très clairement son intention de modifier, si l'opposition le peut, certaines dispositions qui lui apparaissent inacceptables. Et, dans ce cas-là, nous l'avions très, très clairement exprimé.
Le Président (M. Copeman): C'est un rôle avec lequel je suis très familier, M. le député, je peux vous l'assurer.
Est-ce qu'il y a d'autres discussions sur l'amendement? Est-ce que l'amendement est adopté? Adopté.
Discussion sur l'article 2 tel que modifié, M. le député de Vachon? Bien, écoutez, on va peut-être... Écoute, la ministre n'a pas eu même l'occasion de présenter l'article parce que nous avons commencé immédiatement avec l'amendement. On va permettre à Mme la ministre de présenter l'article puis, après ça, on va faire la discussion là-dessus.
Mme Courchesne: Alors, l'article 2? C'est ça?
Le Président (M. Copeman): Oui. Exact, tel qu'amendé. C'est parce que nous avons enchaîné... nous avons commencé la discussion sur l'article 2 immédiatement avec l'amendement.
Mme Courchesne: Ah! d'accord. Vous voulez que je...
Le Président (M. Copeman): Bien, écoute, si les membres de la commission ne jugent pas nécessaires d'autres explications sur l'article 2, je n'en impose pas à qui que ce soit.
Une voix: C'est beau. C'est beau.
Mme Courchesne: Ça va?
Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, M. le député de Vachon, allez-y.
M. Bouchard (Vachon): J'aimerais introduire un amendement à l'article 2.
Alors: L'article 2 du projet de loi n° 57 est amendé par l'ajout, à la deuxième ligne, après le mot «afin» des mots ? et j'ouvre les guillemets ? «de promouvoir le respect et la protection de la dignité des personnes en situation de pauvreté, de lutter contre les préjugés à leur égard et d'améliorer leur situation économique et sociale. Ces mesures, programmes et services sont aussi établis dans le but ? et l'article se poursuivrait de la façon suivante ? d'accompagner les personnes dans leurs démarches vers l'atteinte et le maintien de leur autonomie économique et sociale...»Le Président (M. Copeman): Moi, j'ai besoin de le lire, avant que je le déclare recevable.
(Consultation)
Le Président (M. Copeman): Alors... Est-ce qu'on a d'autres copies? On va en faire. Même, ce serait génial, si on en faisait tout de suite.
(Consultation)
Le Président (M. Copeman): Oui, bien, à sa face même, l'amendement est recevable. Alors, je pense que nous avons assez de copies. Les interventions sur l'amendement, M. le député de Vachon?
M. Bouchard (Vachon): Oui. M. le Président, je pense que les notions qui sont présentées dans l'amendement sont fondamentales. Nous avons affaire, avec ce projet de loi, à des dispositions législatives qui concernent des personnes très vulnérables et souvent très marginalisées et, par certains leaders d'opinion, très ostracisées. Et un projet de loi comme celui que nous avons devant nous, je pense, devrait rappeler, à toutes et à tous, à l'ensemble des citoyens du Québec, que les dispositions mêmes de la loi sont faites en vertu non simplement d'un objectif d'améliorer l'autonomie économique et d'améliorer l'autonomie sociale des personnes, mais aussi avec l'objectif de renforcer, de protéger leur dignité, de lutter contre les préjugés, qui ne sont pas rares dans notre société à leur égard, et en plus d'améliorer la situation économique et sociale.
Alors, il y a, pour reprendre les mots de la ministre, là, une prudence du législateur à exercer de tous les instants lorsqu'on intervient dans des textes de loi qui s'adressent directement ou qui prétendent s'adresser au bien-être des personnes en situation de pauvreté ou en situation de vulnérabilité.
n(22 h 10)n Alors, je pense que, même si cela pouvait éventuellement apparaître comme redondant, la pédagogie de la redondance en la matière ne m'apparaît pas superflue. C'est important que le législateur fasse oeuvre de pédagogie et qu'il indique aux personnes que sa préoccupation, en réformant la Loi de l'aide sociale, va d'abord au respect, entretient d'abord une préoccupation prioritaire en regard du respect que l'on doit à ces personnes ? et on sait très bien que la très grande majorité de ces personnes auront connu des moments de très grande détresse, ont traversé des périodes extrêmement difficiles ? donc le respect, la dignité, à savoir que les mesures que l'on développe ne devraient jamais remettre en cause la dignité de ces personnes ou les atteindre dans leur dignité et diminuer leur sentiment de dignité et de valeur personnelle, et que les dispositions aussi devraient, comme on vient de le faire en amendant le premier alinéa, devraient éviter de renforcer ou de créer plus de préjugés qu'il n'y en a.
Et je pense que ce qu'on vient de faire, là, en tant que parlementaires, là, c'est un bel exemple de ça. C'est-à-dire qu'on vient de changer tout simplement dans cette phrase, «devant être» par «étant», et on vient, je pense, d'éviter d'en remettre sur le dos des personnes les plus démunies. Alors, voilà l'intention de l'amendement, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, je veux vous dire que ce que je constate, c'est que le député de Vachon, avec la meilleure intention, là ? puis, encore une fois, là, nous avons tous de bonnes intentions ? mais, avec la meilleure intention, il reprend presque mot à mot ce qu'on retrouve dans la loi n° 112, à une nuance près par contre très, très, très importante.
Dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, à l'article 6, voici ce que l'on dit. On dit: «Les buts poursuivis par la stratégie nationale sont les suivants ? la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, mais c'est une stratégie, donc les buts poursuivis par la stratégie nationale sont les suivants: promouvoir le respect et la protection de la dignité des personnes en situation de pauvreté et lutter contre les préjugés à leur égard.» On dit aussi: «Améliorer la situation économique et sociale des personnes et des familles qui vivent dans la pauvreté et qui sont exclues socialement.» Mais ça, là, M. le Président, on dit ça à l'égard d'une stratégie. Ce que le député de Vachon demande, c'est d'ajouter ces mêmes mots mais à la suite d'un article qui dit: «Les mesures, programmes et services mis en oeuvre en vertu de la présente loi sont établis ? bon ? afin d'accompagner...», bon, etc., mais dans le but de promouvoir le respect et la protection de la dignité des personnes en situation de pauvreté.
M. le Président, je dois dire au député de Vachon que j'ai un petit peu la même réaction que pour l'amendement qu'il a proposé à l'article 1, et je vous dirai que je vais vouloir que le législateur ait la même prudence et sagesse dont je parlais tout à l'heure.
Il y a une différence entre une stratégie, une stratégie qui effectivement promouvoit le respect et la protection de la dignité et lutte contre les préjugés, et il y a une différence entre coller ça à des mesures, des programmes et des services. Parce que, si on fait ça, on va encore ouvrir à l'interprétation, on va encore porter flanc, on risque encore de se retrouver devant les... Oui, M. le Président, parce qu'expliquez-moi... honnêtement, je ne connais pas de gouvernement qui, dans ses programmes, va vouloir atteindre la dignité des personnes.
Mais comment faisons-nous, dans un programme, une mesure? Il y a des mesures où vous pourriez nous dire: Ah! parce que vous ne donnez pas telle augmentation ou parce que vous ne donnez pas tel montant, vous atteignez à la dignité des personnes. Une mesure puis un programme, c'est lié effectivement à des décisions fort concrètes qui, oui, engagent des fonds publics. Et c'est là qu'on va tomber dans l'interprétation, parce que, si on ne donne pas le bon montant, on va nous dire qu'on atteint à la dignité de la personne puis on va nous dire qu'on ne fait pas la promotion... qu'on entretient les préjugés.
Alors, M. le Président, j'ai un malaise avec ça, pas parce que je ne veux pas mais parce qu'encore une fois notre article 1 de tout à l'heure, qui fait clairement référence au fait que nous devons... dans le cadre de nos actions, nous devons nous en remettre à la loi qui vise à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, l'article 1 reprend l'article 6, reprend l'article 7, reprend l'article 9 de la loi n° 112. Donc, le projet de loi n° 57, il est comme soumis dans son entièreté à respecter tous les principes que nous retrouvons dans la loi n° 112. Et je l'ai dit, la loi n° 112 a l'effet d'une loi-cadre, c'est une loi de référence pour guider justement la loi n° 57 qui, elle, a pour objectif d'encadrer des programmes, des mesures, des actions, du soutien, des services.
Alors, M. le Président, je suis obligée de vous dire que nous devons nous inspirer de cette même sagesse et de nous en remettre totalement à la définition même de ce qu'est une loi-cadre ou une loi de référence. C'est pour ça qu'on fait des lois n° 112, c'est pour justement qu'elle guide l'ensemble de nos décisions, qu'elle nous permette de vraiment sous-tendre tous les principes, tous les objectifs qui font que des lois décrivent des programmes et des mesures. Et, dans ce sens-là, M. le Président, je ne peux pas recommander à mes collègues d'accepter l'amendement du député de Vachon.
Le Président (M. Paquin): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Bon, écoutez, M. le Président, je comprends bien l'argumentaire de la ministre, mais on va manquer de cohérence bientôt, là. Moi, j'invite la ministre à revenir à l'article 1, deuxième alinéa: «La présente loi vise également ? et je lis, là, M. le Président ? à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation active dans la société.» Alors, on peut lire...
Mme Courchesne: Lisez l'article au complet.
M. Bouchard (Vachon): ...dans la loi...
Mme Courchesne: Excusez-moi, M. le Président, il faudrait que le député de Vachon lise l'article au complet. Lisez... M. le Président, je demanderais au député de Vachon de nous lire l'article 1 au complet.
M. Bouchard (Vachon): Bien, allez-y, Mme la ministre.
Mme Courchesne:«Dans le cadre des principes et orientations énoncés [à la Loi visant à] lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale...» C'est très important...
M. Bouchard (Vachon): Oui!
Mme Courchesne: ...très, très important, parce que la présente loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services mais dans le cadre des principes et orientations énoncés à la loi.
Donc, dans le cadre de l'article 6, de l'article 7, de l'article 9 de la loi n° 112, l'article 6 de la loi n° 112 dit: «Les buts poursuivis [...] sont les suivants: promouvoir le respect et la protection de la dignité des personnes en situation de pauvreté et lutter contre les préjugés à leur égard[...] ? et ainsi de suite; améliorer la situation économique et sociale des personnes et des familles qui vivent dans la pauvreté et qui sont exclus socialement.» Donc? Donc, la cohérence, elle est complète. C'est tout le projet de loi n° 57 qui doit se situer exactement dans la promotion de la dignité, dans la lutte contre les préjugés et dans l'amélioration de la situation économique et sociale des familles.
n(22 h 20)nM. Bouchard (Vachon): Non. Je comprends fort bien, M. le Président, puis je trouve que...
Mme Courchesne: Mais ne me dites pas que c'est incohérent, c'est... Au contraire, moi, je pense qu'on a là vraiment de la cohérence entre une loi-cadre, une loi de référence, et c'est pour ça que ça existe, des lois-cadres, c'est exactement pour ça, c'est pour inspirer la cohérence dans les autres lois.
M. Bouchard (Vachon): Bien, M. le Président, j'ai permis à la ministre d'interjecter l'expression de ses idées alors que je n'avais pas complété la mienne, mais je pense que je n'aurais pas dû. Parce que ce que je voulais dire, c'est la chose suivante.
Dans l'article 1, dans l'article 1, on peut lire: «La présente loi vise [...] à inciter les personnes à exercer des activités permettant leur insertion sociale, leur intégration en emploi et leur participation active dans la société.» Si je suivais le raisonnement de la ministre, je dirais: C'est inutile de dire ça parce que ça apparaît déjà dans la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Parce qu'on peut lire, à l'article 9: «Les actions liées au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser [...] à favoriser le maintien ou l'intégration en emploi...» Alors, voyez-vous, mon problème avec la cohérence, c'est que, si on se permet de le faire à propos de l'intégration en emploi, pourquoi ne se le permettons pas de le faire à propos de la promotion de la dignité et du respect des personnes? Vous voyez un peu mon raisonnement, Mme la ministre? C'est un petit peu plus convaincant que ce ne l'était, hein? Parce qu'autrement...
Regardez, là, ce que vous me dites. C'est que, comme la loi-cadre dit déjà les choses qu'on pourrait retrouver dans la loi n° 57, la loi n° 57 devrait s'abstenir de s'exprimer sur des choses précises. Alors, quand 57 s'exprime sur des choses précises... Puis on sait très bien que... Vous et moi, là, on la connaît... on connaît déjà la première mouture de 57, il y a plein de choses là-dedans qui apparaissent et qu'on ne retrouvera pas in extenso dans la loi luttant contre la pauvreté et l'exclusion sociale, en même temps qu'il y a plein de choses qu'il n'y a pas dans 57 et qui apparaissent dans l'autre loi, c'est sûr. Mais il y a des... il y a des instances où, parce qu'étant donné la mission même de la loi, le législateur se permet de reprendre des objectifs, des missions ou des orientations que la loi-cadre lui inspire.
Or, elle dit: Moi, dans 57, là, je reconnais explicitement qu'il y a des mesures qui vont atteindre ce que me commande 9.2° dans la loi sur la lutte à la pauvreté et l'exclusion sociale. Alors, comme le point 9 dit: «Les actions liées ? et les actions, là, ça se traduit dans des projets de loi comme 57, les actions liées ? au renforcement du filet de sécurité sociale et économique doivent notamment viser à favoriser le maintien et l'intégration en emploi des travailleurs à faibles revenus», bien la ministre prend soin de revenir à ce concept d'intégration en emploi et dire que sa loi n° 57 va viser à inciter des personnes à exercer des activités qui leur permettent leur intégration en emploi. Alors, ça... Vous avez une question, Mme la ministre?
Mme Courchesne: Non, c'est correct.
M. Bouchard (Vachon): O.K. C'est dans le deuxième alinéa de l'article 1. Alors, si on peut se le permettre par rapport à l'intégration à l'emploi, pourquoi ne pourrait-on pas se le permettre par rapport à l'amendement que je propose, à savoir promouvoir le respect, protection et dignité des personnes, lutter contre les préjugés à leur égard, améliorer leur situation économique et sociale? D'ailleurs, s'il y avait quelque chose à changer, ce serait sans doute ce dernier segment là, puisqu'il est repris dans la deuxième section ensuite de l'alinéa deux, là.
Le Président (M. Paquin): Mme la ministre.
Mme Courchesne: M. le Président, le député de Vachon veut m'amener sur un terrain, là, sur lequel je n'irai parce que je ne... Je le répète: Pour moi, ce projet de loi n° 57 n'a pas pour principal objectif d'amener forcément les gens en emploi. Je ne veux pas aller sur ce terrain-là. Par contre, le projet de loi n° 57, c'est une loi, je le répète, qui encadre des mesures, des programmes et des services.
Alors, c'est évident que, nous, dans la vie, à Emploi-Québec, ministère de l'Emploi, on met sur pied des mesures pour favoriser l'emploi. Si on favorise l'intégration en emploi, on va probablement favoriser une insertion sociale puis on va probablement favoriser une participation active dans la société, parce que, nous, notre mission, comme ministère, c'est ça.
Là où j'ai une difficulté... puis les principes de promouvoir la dignité puis de lutter contre les préjugés, là, ce sont des principes tout à fait importants avec lesquels je suis d'accord. Nous allons augmenter nos efforts à cet égard-là. On va aussi faire des campagnes de sensibilisation, on va essayer de mettre des mesures pour s'assurer que nous luttons contre les préjugés.
Mais, si nous acceptons, M. le Président, l'amendement du député de Vachon, à ce moment-là, nous ouvrons la porte à de l'interprétation. Ça ne se compare pas de dire que nous allons inciter des personnes à exercer des activités et pour lesquelles notre mission fondamentale c'est de concrètement avoir des mesures d'aide à l'emploi alors que... quand on dit, à la demande du député de Vachon ? et je veux reprendre son amendement ? que les mesures, les programmes et les services devront promouvoir ou en tout cas auront pour but de promouvoir le respect et la protection de la dignité. Mon problème, c'est le lien qu'on fait entre la protection de la dignité, la protection de la dignité et la lutte contre les préjugés, et qu'on fait un lien direct avec les mesures et les programmes, parce que ça ne se mesure pas.
Comment faisons-nous pour déterminer qu'un programme protège ou non la dignité des personnes? Quel est l'instrument de mesure qui va faire qu'on va pouvoir établir, hors de tout doute, avec tout le consensus, qu'on n'atteint pas la dignité des personnes? Et c'est pour ça, M. le Président, que, dans sa sagesse, le législateur, dans la loi n° 112, a dit... dans la façon de faire du gouvernement, a dit: Bien, c'est la stratégie nationale qui doit s'assurer de promouvoir le respect et la dignité des personnes. Il n'a pas dit, le législateur, dans la loi n° 112, il faut que les mesures et les programmes respectent la dignité. Il l'aurait fait dans la loi n° 112, mais pourquoi il ne l'a pas fait, M. le Président? Parce qu'il ne voulait pas que ce soit sujet à interprétation, parce qu'un législateur veut qu'une loi soit claire et précise.
Ce que le législateur n'aime pas, c'est quand c'est imprécis puis qu'il se retrouve inutilement... bien pas inutilement mais trop souvent ? trop souvent ? trop souvent devant les tribunaux. Si, à cause d'une loi, les citoyens sont trop souvent devant les tribunaux, c'est parce que, la loi, elle n'est pas claire, parce que la loi a un problème d'interprétation, et c'est ça qu'on veut éviter. Alors, à mon humble avis... et je ne suis pas une juriste, mais, à mon humble avis, si on établit ce lien, comme le demande le député de Vachon à l'article 2, on ouvre la porte très grande à cette interprétation-là.
Et en plus, M. le Président, effectivement, notre loi, elle est protégée par la charte. Et c'est évident que ces droits-là auxquels fait allusion le député de Vachon sont importants, sont fondamentaux, et il faut s'assurer qu'on se donne des moyens pour le faire, et ça, ça me fera plaisir de discuter avec le député de Vachon des moyens que nous voulons développer, dans le plan de lutte, dans le plan d'action de lutte, pour justement combattre les préjugés. Et, oui, on n'a probablement pas fait suffisamment; il faut probablement accroître les moyens et changer notre façon de lutter contre les préjugés. On a une responsabilité, à cet égard-là, et, croyez-moi, je ne veux certainement pas m'en défiler.
n(22 h 30)n Mais je pense sincèrement que, si on acceptait cet amendement-là, on ne rendrait pas service au législateur, mais on ne rendrait pas nécessairement service aux citoyens non plus. C'est-à-dire que je suis d'accord avec ces principes, je voudrais simplement qu'on les inscrive au bon endroit et qu'ensuite, dans les mesures et dans les programmes, on développe des moyens précis mais qui ne portent pas à interprétation, et, de la façon dont vous nous le suggérez, on n'atteindra pas cet objectif-là.
Comment faire pour déterminer que, quand un gouvernement, quel qu'il soit, quel qu'il soit, décrète des montants de prestation ou des montants à l'intérieur d'une mesure quelconque, comment ne pas dire qu'elle ne brime pas la dignité de la personne? À mon avis, M. le Président, c'est impossible de déterminer ça, c'est complètement subjectif. Subjectif, on s'entend, là, comprenez-moi bien, là, je ne veux pas heurter personne, quand je dis ça. Mais ce que je dis: Ça ouvre la porte à interprétation et à des contestations constamment devant les tribunaux. Et comment allons-nous faire pour trouver le consensus qui va dire: C'est tel montant plutôt que tel autre montant? Parce que, dans ce ministère, c'est beaucoup ce que nous faisons, nous décrétons des montants d'aide à donner aux personnes, c'est essentiellement ça, les mesures d'aide. Moi, je vois que ça irait aussi loin que... ça va très loin. Alors, voilà, M. le Président.
Le Président (M. Paquin): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, simplement pour savoir si... parce que là on est dans le mode réflexion puis conversationnel, là, puis j'entends bien un certain nombre de préoccupations de la ministre, puis j'entends bien aussi qu'elle trouve tout aussi important que je puisse le faire, cette idée de respecter et de promouvoir la dignité des personnes. Mais je vais simplement faire un test avec la ministre pour voir si j'ai bien compris son argumentaire.
Mme Courchesne: Bon!
M. Bouchard (Vachon): Puis là je ne fais pas une proposition, là, mais je dis: Si, au lieu de trouver, dans l'amendement que nous proposons, le mot «afin de promouvoir le respect et la protection de la dignité», on retrouvait plutôt l'expression «en se souciant de la dignité des personnes, des préjugés que l'on pourrait créer», est-ce que ça conviendrait mieux? Je n'en fais pas une proposition, j'essaie de voir si je comprends bien le sens de l'intervention de la ministre.
Si je comprends bien le sens de l'intervention de la ministre, elle dit: Oui, mais, si on adopte votre proposition, on risque d'aller devant les tribunaux, parce que tout le monde pourrait contester le fait qu'on a fait ce qu'il fallait pour respecter, pour arriver, autrement dit, à un objectif de résultat. Et cet objectif de résultat serait difficilement mesurable et porterait flanc à toutes sortes d'interprétations. Je pense que c'est ça que la ministre dit.
Alors, si on introduisait dans 2 l'expression «en se souciant de la dignité des personnes en situation de pauvreté et en luttant contre les préjugés» ou quelque chose du genre, je comprends qu'on serait dans un univers qu'on partagerait, là, puis que ce serait plus acceptable. Est-ce que...
Le Président (M. Paquin): Mme la ministre.
Mme Courchesne: M. le Président, j'apprécie tellement les efforts du député de Vachon. En fait, ce sont devenus des efforts intellectuels pour absolument avoir un amendement. M. le Président, je veux bien, là, mais, encore là, tu sais: en essayant, en suscitant, en se souciant, en se souciant, mais comment se soucier de la lutte contre les préjugés? Se soucier de la dignité, c'est déjà un peu plus facile, mais se soucier de la lutte des préjugés, M. le Président, je répète: Tout ça est parfaitement couvert, au bon endroit, de la bonne façon, dans la loi n° 112.
D'autant plus, M. le Président, que la sauvegarde de la dignité de la personne, c'est dans la Charte des droits, c'est déjà dans la Charte des droits. Il ne peut pas y avoir une loi plus puissante que la Charte des droits, à cet égard-là, qui dit clairement et qui impose clairement l'obligation de la sauvegarde de la dignité, et nous n'avons pas le droit d'être contre la charte.
Alors, M. le Président, nous, on a fait le choix aussi. En fait... puis je crois sincèrement que la meilleure façon de promouvoir la dignité des personnes, là, c'est le projet de loi n° 57, dans le sens suivant: parce qu'il y a l'établissement de la prestation plancher.
Mais il y a plus que ça dans la loi n° 57. Dans la loi n° 57, c'est qu'on mise sur la liberté des individus et non plus sur la coercition. Et ça, pour moi, M. le Président, là, miser sur la liberté des individus à travers la façon dont on offre des moyens et des services sans les imposer, sans les imposer, ça, je pense que c'est un réel respect de la dignité des personnes. Et c'est pour ça que...
Et je suis très fière... et j'espère qu'on va adopter rapidement le projet de loi n° 57. Parce que, moi, je suis très fière qu'on change cette attitude de punition, de sanction, de coercition, et puis qu'on change le vocabulaire, puis, si on change le vocabulaire, on va changer nos façons de faire, puis on va changer notre approche, puis on va humaniser nos services. Mais encore une fois il me semble beaucoup plus simple... Parce que le législateur aime ça aussi la simplicité dans les lois.
Mais encore une fois cette loi est une loi d'encadrement. À la limite, c'est une loi technique, tandis qu'on a une loi n° 112, une loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui, elle, est une loi de référence. Pour moi, c'est une valeur, je ne dirai pas équivalente, parce que je pense que les juristes me corrigeraient, mais, en quelque part, une loi de référence, ça a un poids moral presque aussi fort que la charte. Sinon, pourquoi on fait des lois-cadres? Sinon, pourquoi on fait des lois références?
Puis ça le dit: Une loi de référence, ça veut donc dire que le gouvernement est lié, le législateur est lié par cette loi de référence dans l'établissement de ses programmes, de ses mesures, de ses services. Et laissons-lui toute sa force morale, à cette loi de référence, laissons-lui toute cette obligation morale, à cette loi de référence, et n'allons pas fragiliser ces bons principes si fondamentaux à notre société, n'allons pas les fragiliser dans une autre loi où là on va ouvrir à l'interprétation puis là on va se retrouver vraiment dans des situations où c'est les tribunaux qui vont devoir décider. Moi, M. le Président, je ne pense pas que ce soit la bonne façon de légiférer.
Le Président (M. Paquin): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Il y a plein de concepts, M. le Président, qui apparaissent dans des lois et qui sont difficilement mesurables. La question de la... Moi, j'aurais autant de misère à mesurer la liberté que la dignité, quant à moi, et invoquer le concept de liberté, ça m'apparaît tout aussi difficile, hein? Et, dans le projet de loi qui nous concerne ? tout à fait en passant, là ? le concept d'insertion sociale, il peut amener la ministre ou n'importe quel autre ministre devant les tribunaux, n'importe quand. On pourrait prétendre que le législateur a failli dans son devoir d'accompagner les personnes à leur insertion sociale du fait qu'une personne pourrait prétendre ne pas être insérée socialement et pourrait gagner, dépendant de la définition qu'on en donne.
n(22 h 40)n Il y a quelques années, M. le Président, j'ai eu l'occasion de faire une recherche et un suivi auprès de 800 personnes qui présentaient un problème de déficience intellectuelle, et nous avions comme objectif de mesurer leur insertion sociale, et nous avons découvert qu'il y avait pas mal de définitions de qu'est-ce que c'était que l'insertion sociale et des mesures conséquentes à chacune des définitions. Et je parierais fort que, devant les tribunaux, quelqu'un pourrait trouver des arguments à l'effet que le législateur a failli à sa tâche d'insertion sociale tout simplement en évoquant une définition qui est aussi valable que celle que le législateur a en tête.
Moi, là, cet argument-là ne me touche pas vraiment. Ce qui me touche cependant comme argument et qui nous a amenés à présenter cette proposition, c'est que, si le législateur donne une poignée juridique ou judiciaire aux citoyens pour aller devant les tribunaux, c'est quasiment en quelque part un pouvoir ajouté aux citoyennes et aux citoyens, c'est-à-dire que l'obligation que le législateur se fait est très importante dans l'aménagement des environnements qu'il crée en vertu d'un objectif qu'il se fait de l'amélioration des conditions des citoyennes et des citoyens.
Je ne dis pas que tout doit passer par là. Ce que je dis, c'est qu'on ne peut pas invoquer une idée comme celle de: Oui, mais ça pourrait forcer le gouvernement à, alors que précisément les lois sont souvent faites pour faire en sorte qu'une partie ou une autre, dans un contrat social, se voit placée devant des obligations. Et, dans ce cas-là, l'obligation qui serait faite à n'importe quel gouvernement, c'est d'opérer dans un souci de protéger la dignité des personnes et de ne pas créer davantage de préjugés.
Alors, je trouve cet argument-là, de l'obligation que le gouvernement ou que le législateur se ferait, comme étant un argument qui nous porterait à refuser l'amendement, je trouve que ce raisonnement-là est fautif vis-à-vis même de la mission du législateur. Dans le contexte d'une loi comme celui d'un filet de protection envers les personnes, je pense que c'est la mission même et le devoir même du législateur de s'obliger à. Alors, cet argument-là, je ne le reçois pas vraiment bien, mais vous voyez que quelque part il m'atteint plus que les autres.
Mais, ceci dit, l'argument de la mesure pour moi: non, parce que, voyez-vous, moi, j'ai toujours défendu que ce qui était mesurable, opérationnalisable, c'est toujours mieux que ce qui ne l'est pas, et la créativité de l'être humain est assez forte pour arriver...
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Ah! mais, écoutez, encore une fois la notion d'insertion sociale, la notion d'insertion sociale en a confondu plus d'un. Et je vais finir, je vais finir mon illustration pour mes collègues parlementaires, là, de ce simple petit concept. On s'est aperçu, dans le cadre de cette recherche-là, après avoir suivi des personnes qui sont déficientes intellectuelles sévères, moyennes et légères, que, si on tentait de regrouper les nuages de points des personnes quant à leur score d'insertion sociale, on arrivait à un drôle de phénomène, c'est que les gens qui présentent des déficiences légères et qui sont prétendument insérés socialement parce qu'ils gèrent leur propre appartement, ont ou déploient quotidiennement exactement les mêmes activités que les personnes qui sont très sévèrement atteintes de déficience intellectuelle et qui se retrouvent dans des grandes installations ou des grands centres d'accueil, tout simplement du fait qu'on a confondu autonomie et insertion. Alors, quand on dit à quelqu'un, puisqu'elle est capable de faire la vaisselle, elle est capable de laver son linge, elle est capable d'avoir son propre appartement, on convient qu'elle est insérée socialement, on se trompe, selon les constats qu'on fait. Elle est autonome, mais elle n'est pas insérée socialement. Alors, voyez-vous, simplement ce concept-là d'insertion sociale peut porter à toutes sortes d'interprétations et donc peut porter flanc à toutes sortes de poursuites devant les tribunaux.
Pour moi, ce n'est pas très convaincant comme argument. Je pense que ce qui me convaincrait quelque part, c'est de dire que le législateur reconnaît, reconnaît son devoir de présenter, à travers un modèle de loi qui précisément a comme fonction de protéger les plus démunis et les plus défavorisés, ce qui me convaincrait, c'est que le législateur dise: Je me soucie à ce point de cette mission que j'ai que j'exprime explicitement mon devoir de décider des mesures, des activités, des programmes et des services en fonction de ce souci de protéger la dignité et de ne pas créer davantage de préjugés.
Et Mme la ministre faisait référence, tout à l'heure ? puis elle connaît mes opinions là-dessus qui ont été exprimées depuis très longtemps ? sur la question de la coercition, nous voterons, vous le savez très bien, nous voterons avec vous l'amendement 49 et nous serons d'accord avec 49; vous le savez bien, qu'on va être d'accord avec 49. Nous avons fait la démonstration que la coercition était très inefficace dans la poursuite de l'amélioration, hein?
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Pardon? Bon.
Le Président (M. Copeman): Vous avez la parole, M. le député.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Mais alors, oui, oui, cette disposition serait cohérente avec un énoncé comme il apparaîtrait dans 2; pas de problème avec ça, aucun problème avec ça. C'est en effet une belle illustration que nous amène la ministre. Alors, voilà.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.
M. Bernard: Merci, M. le Président. Je vais être très bref, mais je vais aller dans le sens des propos de Mme la ministre. Si on regarde l'amendement proposé, en fait l'article 2 tel que proposé avec l'amendement proposé par Mme la ministre, et, si on retourne à l'article 1, l'article 1 modifié dit: «...la présente loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles», O.K., dans le cadre des principes et orientations tel qu'indiqué.
L'article 2, tel qu'il est proposé et modifié, reprend essentiellement les mêmes termes, dans le même ordre, en ajoutant: «...celles-ci étant les premières à agir pour transformer leur situation...» Si je reprends: «Les mesures, programmes et services mis en oeuvre en vertu de la présente loi sont établis afin d'accompagner les personnes», c'est exactement à peu près le même libellé avec la notion que les personnes sont les premières à agir.
Si on prend l'amendement qui est apporté par l'opposition, eux amènent la notion première de l'article 2 qui... Il dit d'insérer «de promouvoir le respect». Donc, la première notion viendrait que l'article 2: Les mesures, programmes et services auraient en premier lieu de promouvoir le respect et la protection de la dignité des personnes en situation... d'améliorer et de lutter contre les préjugés. Ces mesures, programmes et services sont aussi établis dans le but, à ce moment-là, d'accompagner les personnes dans leurs démarches vers l'atteinte.
Donc, l'article 2 vient mettre la notion, pour les programmes, de promouvoir le respect avant la mesure initiale qui est celle de favoriser l'autonomie. O.K.? Donc, l'article 2 vient un peu en contradiction à la proposition que vous amenez par rapport à la 1. La 1, l'objectif premier des programmes: de favoriser l'autonomie économique et non de favoriser, de promouvoir le respect. Et donc, moi, je pense qu'il y a une contradiction entre les deux tels que formulés.
Mais l'autre chose première, c'est quand même que, par rapport aux propos de la ministre, c'est que, le principe de promouvoir le respect, il fait partie de la stratégie nationale. Et, de descendre des principes de stratégie nationale à l'intérieur après ça de programmes et de mise en oeuvre, je crois que c'est très dangereux, autant pour... en termes, comme Mme la ministre a dit, d'expliquer des... on peut avoir des contradictions d'interprétation entre la stratégie éventuellement et les programmes mis en oeuvre, mais également peut être limitatif pour des programmes.
Puis j'ai assisté, récemment, à des négociations dans d'autres contextes entre une stratégie-cadre et des stratégies sectorielles, et cet enjeu-là était constamment ressorti entre faire attention à amener, à l'intérieur de politiques de mise en oeuvre, des stratégies... des termes de stratégie-cadre.
Alors, moi, je considère que l'article, tel que demandé... les amendements demandés par l'opposition peuvent être dangereux, et, à cet égard-là, je crois qu'il vaut mieux vraiment rejeter cet amendement-là tel que proposé.
Des voix: ...
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a d'autres discussions sur l'article 2?
M. Bouchard (Vachon): Sur l'amendement?
Le Président (M. Copeman): Sur l'amendement, pardon!
Des voix: Ha, ha, ha!
n(22 h 50)nLe Président (M. Copeman): Sur l'amendement, proposé par le député de Vachon, qui modifie l'article 2. Il n'y a pas d'autres discussions? Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Bouchard (Vachon): Vote nominal.
Le Président (M. Copeman): Alors, une demande de vote nominal. Mme la secrétaire de la commission.
La Secrétaire: M. Bouchard (Vachon)?
M. Bouchard (Vachon): Oui, pour.
La Secrétaire: Mme Lefebvre (Laurier-Dorion)?
Mme Lefebvre: Pour.
La Secrétaire: M. Girard (Gouin)?
M. Girard: Pour.
La Secrétaire: Mme la ministre?
Mme Courchesne: Contre.
La Secrétaire: Mme Gaudet (Maskinongé)?
Mme Gaudet: Contre.
La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?
M. Paquin: Contre.
La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue)?
M. Bernard: Contre.
La Secrétaire: Mme James (Nelligan)?
Mme James: Contre.
La Secrétaire: M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Contre.
Alors, sur l'application... bien, l'amendement est rejeté.
Alors, nous revenons à la discussion sur l'article 2 tel qu'amendé par l'amendement de la ministre. Est-ce qu'il y avait d'autres interventions sur l'article 2? Est-ce que l'article 2 est adopté tel que modifié?
M. Bouchard (Vachon): Sur division.
Le Président (M. Copeman): Sur division. L'article 3. Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'aimerais proposer l'amendement suivant: Modifier l'article 3 du projet de loi par le remplacement, dans les première et deuxième lignes, des mots «de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille» par les mots «de l'Emploi et de la Solidarité sociale». Me voilà, me semble-t-il, un amendement fort simple et facile à adopter.
M. Bouchard (Vachon): Un amendement?
Mme Courchesne: L'amendement pour faire concordance avec le dernier remaniement où on discutait de la distinction entre Emploi, Solidarité sociale et Famille.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il y a discussion sur l'amendement proposé par Mme la ministre? Est-ce que l'amendement est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Sur l'article, dans son ensemble, tel que modifié.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): C'est l'article 3, hein?
Le Président (M. Copeman): Exact.
M. Bouchard (Vachon): Oui, bon. Alors, l'article 3 du projet de loi n° 57 serait amendé par le remplacement ? alors, vous aurez compris que c'est un amendement, M. le Président ? à la deuxième ligne, des mots «il peut [...] offrir» par les mots «il offre également»...
Des voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Alors, si vous permettez, M. le Président, tout simplement... pas pour l'expliquer mais pour le lire au bon endroit, là, alors: «À ces fins, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale offre des services d'accueil, d'évaluation et de référence.» On lit: «Il peut également offrir...» Nous proposons l'amendement suivant: «Il offre également des mesures, programmes et services d'aide à l'emploi...» C'est un amendement fort simple, de concordance quasiment.
Le Président (M. Copeman): Bien, c'était plutôt d'accord avec la première partie de votre affirmation.
M. Bouchard (Vachon): Je dis: Quasiment. Quasiment.
Le Président (M. Copeman): La deuxième est... est en tout cas sujet à discussion au moins. J'en conviens avec vous, que c'est simple. J'en conviens, que c'est recevable. Alors, avons-nous des copies bientôt? Ça s'en vient. Ça va? Alors, avez-vous une intervention à faire sur l'amendement, M. le député de Vachon?
M. Bouchard (Vachon): Je pense que oui, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Allez-y.
M. Bouchard (Vachon): Bien, c'est parce que... Mon amendement, c'est surtout pour comprendre pourquoi on l'a écrit comme on l'a écrit. Parce que, tout au long de cet article-là, M. le Président, vous remarquerez que le législateur emploie le verbe directement: Il «offre des services», et plus loin: «Il administre en outre les programmes», toujours dans le troisième article. Mais, en ce qui concerne les mesures, les programmes et les services d'aide à l'emploi, on hésite, là, quelque part: «Il peut également offrir». C'est comme si le législateur voulait se donner une petite chance de ne pas les offrir, alors que par ailleurs il offre des services d'accueil, d'évaluation et de référence, mais c'est sans doute pour pouvoir éventuellement offrir des mesures, programmes et services d'aide. Et, si le législateur ne veut pas les offrir ou veut se garder une possibilité de ne pas les offrir, il insère dans le même article, me semble-t-il, une faiblesse. Il affaiblit la portée de la loi, de l'article.
Alors, moi, je... On aurait pu, M. le Président, dire ou proposer: «Il doit également offrir», nous ne l'avons pas fait parce que nous avons pensé qu'«il offre également» vient de la même tenue que l'intention qui est exprimée par «offre» et «administre en outre les programmes d'aide financière».
Alors, je ne comprends pas pourquoi il y a une restriction qui est introduite, en début de la deuxième phrase de l'article 3, au sujet des mesures, des programmes et des services d'aide à l'emploi que le législateur offre... que le gouvernement offre aux personnes. Je ne comprends pas cette restriction.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, moi, je pense qu'au contraire, le député de Vachon, il a bien compris. Moi, je... encore une...
M. Bouchard (Vachon): ...voyant que je ne le savais.
Mme Courchesne: Bien, peut-être. Peut-être. Mais, M. le Président, moi, je ne suis pas, encore une fois, juriste. Mais, si on enlève le mot «peut», ma compréhension, ça pourrait vouloir dire «doit». «Il offre», il y a comme une obligation d'offrir. Et, moi, je pense que c'est pour ça que le mot «peut» est là, au sens où le mot «peut» donne effectivement au gouvernement une marge de manoeuvre dans sa façon de décider s'il le fait, à quel moment, comment, etc. Et je crois que, si on enlève le mot «peut», on y introduit l'effet du mot «doit».
Maintenant, je ne suis pas l'avocate comme tel, mais je crois très sincèrement que c'est un peu ça, et vous le retrouvez à d'autres endroits, là, vous ne le retrouverez pas uniquement dans cet article-là. Donc, c'est encore là parce qu'on veut... et ce n'est pas que dans cette loi-là, hein, c'est dans l'ensemble des lois. À partir du moment où le gouvernement a des choix à faire, bien il peut, c'est son choix, c'est sa marge de manoeuvre, c'est son pouvoir décisionnel, c'est sa prérogative, c'est le gouvernement qui a la capacité de déterminer s'il le fait ou pas. Sinon, le législateur pourrait dire «doit», mais «doit» c'est une obligation et ce n'est pas le choix que nous avons devant nous. Le choix que nous avons devant nous, c'est «peut offrir ces programmes».
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je pense que, tous et toutes, ici, là, on est en développement, tu sais, on apprend. Alors, moi, ce que je vois, c'est que le législateur n'a pas dit «il doit offrir», il a dit «il peut». Il avait l'occasion de dire «il offre», comme il avait l'occasion de dire «il peut offrir des services d'accueil, d'évaluation et de référence»...
Mme Courchesne: Non.
M. Bouchard (Vachon): Il ne l'a pas dit. Il ne l'a pas dit. Donc, quelque part, ce que le législateur dit, c'est que le ministre... le ministre se laisse une marge de manoeuvre, dans un texte de loi où la mission est de mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services.
Là, je lis ça, là, dans le premier paragraphe, là, dans le premier article: «...la présente loi vise à mettre en oeuvre des mesures...» Mais, soudainement, le ministre hésiterait à mettre en oeuvre des mesures. Bien, ça ne marche pas. Il faut que le ministre, M. le Président, s'oblige à faire quelque chose, un brin au moins. Un brin au moins.
Le Président (M. Copeman): Mais, si vous me permettez, Mme la ministre, ça me tente d'intervenir.
M. Bouchard (Vachon): Bien, allez-y, M. le Président, vous êtes membre de cette commission.
Le Président (M. Copeman): Parce que, soudainement, soudainement, pendant les discussions, et c'est avec un peu de chagrin, j'ai réalisé que je suis le seul député, autour de la table, qui a vécu la dernière réforme de l'aide sociale importante, en 1998.
n(23 heures)n D'ailleurs, tous les collègues ici, autour de la table, ont été élus après... ou en ou après 2003. En ou après 2003.
Mme Lefebvre: ...ensemble.
Le Président (M. Copeman): Oui, on peut. On peut. Et d'ailleurs j'étais très frappé... Je ne dirai pas qui, une députée qui a dit qu'il faut aller plus loin. Et en principe je suis bien d'accord avec cette information. Je le dis très candidement et très sincèrement sans vouloir offusquer personne, ayant vécu neuf ans à ma gauche, que c'est plus facile d'aller plus loin par l'opposition qu'il l'est au gouvernement. Je le dis très candidement. C'est l'expérience que je vis, que je vis comme parlementaire.
M. Bouchard (Vachon): Voulez-vous mon siège, M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Pas forcément. Et non, non, je le dis très candidement, les défis d'être responsable pour la gouvernance d'un État comme celui du Québec sont... pèsent lourd, pèsent sur les ministres, pèsent sur les députés, pèsent sur nous tous. En tout cas, c'est une réflexion.
Et je remarque, M. le député de Vachon... Je suis très bien votre argumentation, mais, compte tenu que j'étais même porte-parole de l'opposition officielle en 1998, quand Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a procédé avec une réforme assez importante de la Loi sur la sécurité du revenu... Ça a été précédé par un livre vert, une importante consultation sur le livre vert. Il me semblait qu'autour de 100 groupes, madame, et plus... 103, je me souviens très bien.
Je me souviens également, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, pour qui j'ai un immense respect comme parlementaire, m'a toujours dit: Il y a une différence entre un livre vert puis un livre brun. Un livre vert, c'est plus ouvert. C'est comme ça que je le retiens. Un livre blanc indique des orientations gouvernementales plus précises. Mais un livre vert, c'est plus ouvert. Moi, je trouvais une formulation très facile à retenir.
Alors, livre vert, modifications de la loi qui, elle, a également été modifiée en 2002 sous l'initiative de Mme Linda Goupil ? je peux prononcer son nom maintenant ? ex-députée de Lévis, de deux façons. J'arrive à la réforme de 1998, la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, la loi adoptée en 1998. Et étrangement je lis, à l'article 2 ? la loi qui est toujours en vigueur, hein: «À cette fin, le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale offre des services d'accueil, d'évaluation et de référence.» Une obligation d'après... On s'entend.
Par contre, la loi continue: «Il peut également: offrir des services d'accompagnement; recueillir [des informations]; offrir des services de placement[...]; financer des cours[...]; émettre des bons d'emploi...» Oui, oui. Oui, oui. Il peut, il peut. Il peut «offrir des services de placement[...], colliger des renseignements[...]; financer des cours, [...] programmes de formation», ainsi de suite. Et cette formation de «peut» continue. C'est l'économie générale de la loi. C'est l'économie générale de la loi actuelle.
En tout cas, mon interprétation, c'est que c'est l'économie générale qu'effectivement la ministre doit offrir des services d'accueil, évaluation et de référence. Et j'étais porte-parole à ce moment-là, et nous n'avons pas, même à ce moment-là, de l'opposition, vraiment contesté cette économie générale de la loi.
M. Bouchard (Vachon): Mais, M. le Président, je comprends, je comprends pourquoi vous n'avez pas contestée. Vous avez bien fait d'ailleurs parce qu'il y a une énorme différence entre ce que vous venez de lire comme énumération et ce que j'ai devant moi dans l'article 3.
Dans l'article 3, deuxième phrase: «Il peut également offrir des mesures, programmes et services d'aide à l'emploi de même que d'aide et d'accompagnement social», c'est très générique. C'est très, très, très générique et très peu spécifique, alors que ce que vous venez de me dire, là, on va le revoir plus loin dans 5, où, là, on fait une déclinaison beaucoup plus précise d'un certain nombre de services qui témoigne de principes... de descriptions plus génériques de ce qui apparaît en 3.
Alors, moi, là, je ne veux pas créer du chichi pour rien, là. J'essaie de comprendre quand on emploie le «doit», le verbe à l'indicatif ou le «peut». Et ce que je constate, c'est que le législateur qui a rédigé l'article présent, là, a repris exactement le «il peut également offrir», qui apparaissait dans l'ancienne loi, même si l'énumération qui suit n'a plus rien à voir, même si on est dans le générique plutôt que dans le spécifique. Alors ça, c'est ça, moi, je pense, qu'on a... On a affaire à cela. On a affaire à cela.
Le Président (M. Copeman): Peut-être. Je vais juste terminer, mais je ne veux pas évidemment... Par contre, cette utilisation de «peut», à l'article 2, dans la loi actuelle, continue ailleurs: «Les mesures, programmes et services à l'emploi peuvent notamment...» Dans le cas de l'article 4: «Le ministre peut offrir ? peut offrir ? une aide financière...» À l'article 5: «Le ministre peut évaluer la situation...» C'est presque l'économie générale de la loi. Ça a toujours été.
Et d'ailleurs vous avez eu un débat absolument passionnant et assez long sur la différence entre «peut» et «doit». Le gouvernement a toujours défendu, toujours défendu son droit d'utiliser «peut».
M. Bouchard (Vachon): Son droit...
Le Président (M. Copeman): Absolument.
M. Bouchard (Vachon): O.K.
Le Président (M. Copeman): Absolument. Et, écoutez, comme la ministre l'a dit, on se parle... En tout cas, moi, j'essaie de toujours être le plus transparent possible. Il est quant à moi acceptable et même normal que certaines des mesures énumérées: les mesures, des programmes... des mesures, programmes et services, soient contingentées. Et, il me semble, c'est là une partie du débat parce que...
M. Bouchard (Vachon): ...
Le Président (M. Copeman): Bien, en tout cas, ça ne se peut pas... Ça se peut, mais en tout cas...
M. Bouchard (Vachon): Non, non, non, mais je disais ça pour moi.
Le Président (M. Copeman): Très bien. Oui, oui. Je comprends. Mme la ministre, vous avez quelque chose à dire, c'est sûr.
Mme Courchesne: Bon. Écoutez, oui, on va faire du temps.
Des voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Là, un instant, s'il vous plaît.
Le Président (M. Copeman): Non. Je pense que...
Mme Courchesne: Laissez-moi terminer, M. le Président...
Le Président (M. Copeman): Oui, oui. Bien sûr.
Mme Courchesne: ...soyez gentil.
Le Président (M. Copeman): Oui, oui.
M. Bouchard (Vachon): Moi, je ne veux pas faire du temps.
Le Président (M. Copeman): Oui.
Mme Courchesne: D'abord... Bien, si le député de Vachon, M. le Président...
M. Bouchard (Vachon): Non, non, je ne veux pas faire du temps.
Mme Courchesne: ...ne veut pas faire du temps, très amicalement il devrait vous écouter attentivement. Je vais vous dire pourquoi: Parce que, si le député de Vachon, en ce moment, est très sincère et dans son amendement et dans le fait qu'il ne veut pas faire du temps, amicalement je vais lui dire de suivre une courte formation sur la façon dont les lois sont fabriquées au gouvernement depuis des décennies.
M. Bouchard (Vachon): ...
Mme Courchesne: Non. Je m'excuse, M. le Président. Ça suffit? Bien, moi aussi, je pourrais lui dire «ça suffit», parce que c'est élémentaire, ça, ce «peut» et ce «doit». Pourquoi la première partie de l'article est... Pourquoi, dans la première partie de l'article, on dit qu'on évalue, qu'on fait des références et qu'ensuite on «peut» faire des programmes? Je vais vous le dire, pourquoi: C'est parce que, quand on fait des programmes, on engage des budgets, puis pour engager des budgets, il faut s'assurer que le gouvernement a l'argent pour les payer. Et c'est pour ça qu'on utilise le mot «peut». C'est aussi clair que ça. Bien, voyons! C'est aussi clair que ça.
Allez dans les comités de législation, ça va être... C'est fondamental. C'est fondamental, dans la façon de faire les lois ici, au Québec. Dès qu'il y a un article de loi qui va engager le gouvernement dans une voie budgétaire, bien on ne peut pas obliger le ministre à le faire parce que le ministre, à lui seul, ce n'est pas le gouvernement. Alors, le «peut» apporte cette protection-là pour s'assurer qu'avant de faire le programme, avant de faire les mesures, on va s'assurer que nous avons l'argent pour les payer. C'est aussi simple que ça.
Et, M. le Président, le député de Vachon semble vouloir ridiculiser ce que je suis en train de dire par son langage corporel, mais, M. le Président, c'est élémentaire dans la façon dont les lois sont faites. Et ça, ce n'est pas vrai seulement depuis 2003; c'était vrai en 1988, lorsque j'y étais comme sous-ministre, puis c'est vrai après 1994, quand votre parti était au gouvernement. Ce n'est pas par hasard que c'est comme ça.
n(23 h 10)n Encore une fois, M. le Président, le législateur, il ne parle pas pour rien dire, puis le législateur, il protège l'ensemble du gouvernement, puis il protège... il est prudent et il s'assure de la sécurité aussi, de la façon dont... de la sécurité de ce que les parlementaires ont à livrer et ce que le gouvernement a à livrer. On peut en débattre encore très longuement, puis vous aurez toute ma collaboration pour en débattre, mais je veux simplement dire que je trouverais dommage qu'on mélange la facture générale d'une loi, comme dit le président, à des questions de fond. Et je ne souhaiterais pas qu'on veuille...
Une voix: ...
Mme Courchesne: Bien, oui, c'est une question... Oui, c'est une question de fond, M. le Président, parce que c'est évident que, quand on a une obligation... Oui, c'est une question de fond, c'est ce qu'on dit. Mais, quand c'est une obligation, c'est différent de pouvoir faire quelque chose.
Mais je veux juste qu'on comprenne pourquoi le législateur choisit le mot «peut», et il y a une seule raison, c'est parce que, quand on élabore des programmes, quels qu'ils soient, en quantité, peu importe le nombre de programmes, peu importe le contenu du programme, ça a des incidences budgétaires, et il y a des responsabilités à cet égard-là.
M. Bouchard (Vachon): Très bien. Alors, Mme la ministre, vous allez m'expliquer comment ça se fait qu'il n'y a pas d'incidence budgétaire à: «...le ministre de l'Emploi [et] de la Solidarité sociale [...] offre des services d'accueil, d'évaluation et de référence...» Il n'y a pas d'influence budgétaire, là. Bien, voyons donc! Non, franchement.
Mme Courchesne: Non, il n'y en a pas. M. le Président...
M. Bouchard (Vachon): Ah bon! Ça ne coûte rien, ça. Ça ne coûte rien.
Mme Courchesne: M. le Président, si M. le député de Vachon veut se fâcher, libre à lui. Libre à lui.
Le Président (M. Copeman): Non, on va respirer par le...
M. Bouchard (Vachon): C'est parce que je n'ai pas pris mon cours, tu sais.
Le Président (M. Copeman): On va respirer par le nez.
M. Bouchard (Vachon): Je vais le prendre dans deux ans, avant de devenir ministre.
Le Président (M. Copeman): Il est tard.
Mme Courchesne: Oh, on est susceptible. On est susceptible.
Le Président (M. Copeman): Non, non, non. Écoutez, chers collègues, chers collègues, les travaux de la commission se déroulaient bien, avançaient à un certain rythme, sinon à un rythme certain. On va respirer par le nez. Il nous reste 48 minutes. Nous allons maintenir un ton respectueux et civilisé parmi nous, et les 48 minutes vont passer beaucoup plus rapidement que si on succombe à notre fatigue, un peu d'impatience de tous les côtés. Alors, on respire.
Une voix: C'est correct, là.
Le Président (M. Copeman): Et c'est ça. Allez-y, Mme la députée... Mme la ministre.
Mme Courchesne: Alors, je vais, M. le Président, expliquer pourquoi effectivement, dans le premier... dans la première partie de l'article, on dit... Si je peux le trouver.
M. Bouchard (Vachon): L'article 3.
Mme Courchesne: Alors, je vais expliquer pourquoi on dit que «le ministre de l'Emploi [et] de la Solidarité [...] offre des services d'accueil, d'évaluation et de référence», parce que ces services font partie, si vous voulez, de la mission fondamentale. Pourquoi il y a un ministère de la Solidarité sociale? C'est effectivement pour soutenir des prestataires d'aide sociale ? je simplifie ? mais que, pour être capable d'établir qui est prestataire et qui ne l'est pas, il faut qu'il y ait des services d'accueil, d'évaluation et de référence. Donc, ça, ça fait partie de la mission essentielle du ministère.
La différence entre ça et un programme ou une mesure, et quand on écrit «peut», c'est parce que le législateur veut que nous retournions devant toutes les instances ministérielles, les comités ministériels, le Conseil du trésor et il veut qu'on retourne devant le gouvernement pour faire approuver le programme et s'assurer que nous disposons des disponibilités budgétaires. C'est ça, la différence et c'est dans ce sens-là que ça... Et, vous le savez, ces programmes-là, il faut déterminer les critères puis il faut suivre ces étapes-là. Et ça, ça ne peut pas être prévu dans une loi. Une loi ne peut pas nous protéger de ça, alors que les services d'accueil, d'évaluation et de référence, c'est la raison même de l'existence du ministère.
Alors, dans toute la programmation budgétaire, je vous dirais qu'il y a là une différence énorme à cet égard-là. Et aussi parce que les programmes et mesures, M. le Président, ont souvent une longueur de vie qui est variable. Et cette longueur de vie des programmes et des mesures, pour toutes sortes de raison, elle n'est pas aussi longue que la durée de vie d'un ministère. Le ministère de l'Emploi et de Solidarité sociale existe beaucoup plus longtemps que bien des programmes à l'intérieur du ministère. Puis c'est voulu comme ça pour qu'on puisse retourner devant les instances appropriées pour faire approuver ces disponibilités-là et donner la marge de manoeuvre au ministre en fonction de ses disponibilités budgétaires, puisque nous sommes avant tout imputables et responsables de nos budgets. Donc, effectivement, ça laisse cette marge de manoeuvre au ministre de faire ses choix, de décider.
Donc, au tout départ, M. le Président, le député de Vachon, quand il s'interrogeait, quand il a proposé l'amendement, il avait raison. Il avait bien compris puis il avait raison. Reprenez votre introduction de départ, quand vous nous avez mis sur cette piste-là, bien c'était la bonne piste, et c'est pour ça qu'on écrit «peut».
M. Bouchard (Vachon): M. le Président.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): J'essaie de suivre la logique derrière l'argumentaire. Et ce que je viens d'entendre là, c'est que la mise en oeuvre des mesures, des programmes et des services qui favoriseraient l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles ne serait pas la mission du ministère?
Parce que c'est ce que la ministre vient de dire, là. La mission du ministère, c'est d'accueillir, d'évaluer et de référer, mais pour le reste... C'est ça, la mission du ministère.
Or, je retrouve dans l'article 1 que la «loi vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie...» Alors, ça ne marche pas, là.
Et à mon avis 3 est générique... J'essaie de faire comprendre à la ministre que 3 est générique et que 5 ne l'est pas. Et 3 est générique et 5 ne l'est pas. Et, à ce titre-là, 3 est une définition de la mission, et je pense qu'il y a une validité à la fois conceptuelle, il y a une validité conceptuelle, là, dont on parle, là, entre 3 et 1. Et, si on dit que les mesures, programmes et services ne sont pas de la mission, mais que services d'accueil, d'évaluation et de référence sont de la mission, bien là on vient nier l'article 1.
Alors là, je ne comprends plus. Mais cependant ce que j'ai saisi dans mon cours accéléré en législation que vous venez de me donner, c'est que 3 est générique et 5 est spécifique. Et je vois très bien que de vous amener des amendements dans 5 qui diraient: Dans le cadre des mesures, programmes et services, le ministre recueille et diffuse de l'information, offre des services de placement, là, je comprends qu'on ne peut pas faire ça parce qu'on est dans la déclinaison du générique. Vous comprenez mon point de vue, hein? C'est... Je ne le sais pas si on apprend ça dans les cours, là, mais, moi, en tous les cas, je pense qu'il y a une différence énorme entre un énoncé beaucoup plus général dans 3, qui reprend la mission de 1 en spécifiant un tout petit peu ce que c'est, et 5 qui, lui, est vraiment, là, dans les manières de faire, la façon de faire. Puis on pourrait, autrement dit, arriver à ces résultats-là en utilisant toutes sortes d'autres procédures que le 5. Là, je comprends très bien l'utilisation du verbe «peut» à ce point tel que j'avais des amendements que j'ai jetés sous la table parce que je pense qu'ils deviennent inutiles pour 5.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Quand je parle de l'article 3 et que je fais un lien avec la mission, c'est pour dire la chose suivante, il faut bien se comprendre: C'est évident que la mission, elle n'est pas que simplement faire des services d'accueil, d'évaluation et de référence, ce n'est pas ça, notre mission, ce n'est pas ça que je dis. Ce que je dis, parce que les services d'accueil, d'évaluation et de référence, ce sont des employés du ministère qui font ça, ce sont vraiment donc... qui font partie effectivement des dépenses nécessaires pour exercer notre mission.
Le Président (M. Copeman): Services de base.
n(23 h 20)nMme Courchesne: C'est ça, services de base. C'est beaucoup, beaucoup universel, de base, c'est beaucoup moins aléatoire. Pour faire ça, cette mission de soutenir les prestataires d'aide sociale, ils doivent être accueillis, ils doivent être évalués, ils doivent être référés, sinon, si on n'a pas ça, on ne peut pas établir des mesures puis on ne peut pas établir des programmes. Donc ça, c'est de base. C'est le fondement même de l'existence en partie, parce qu'on ne fait pas que ça, dans le ministère, là, il ne faut pas prendre mes mots à la lettre. Mais il n'en demeure pas moins que ça, c'est vraiment ce qu'on fait de base. Et avec ces services d'accueil, d'évaluation et de référence, c'est ensuite qu'on élabore les programmes. Et c'est ensuite que ces programmes, qui ont une durée de vie, dans le temps, pour toutes sortes de raisons, là..., parfois ça peut être... ils peuvent durer très longtemps, mais parfois ils peuvent être de courte durée.
Mais ce que je disais, tout à l'heure, c'est que le «peut» ? et je ne reviendrai pas là-dessus ? le «peut» a effectivement un lien avec cette marge de manoeuvre dont on a besoin pour s'assurer qu'on a toutes les sommes disponibles pour le faire et qu'on n'engage pas le gouvernement dans des impossibilités d'agir. Mais je n'ai pas dit que notre mission, M. le Président, je n'ai jamais dit que... ou on relira les galées. Ce que je dis, c'est que ces services-là sont essentiels à notre mission, et, ces services-là, on peut les affirmer, parce qu'ils font référence à nos employés, et ça, c'est fixe. S'il n'y a pas d'employés dans un ministère, il n'y a pas de ministère. Pourquoi il y a des employés dans un ministère? Pour répondre à une mission, et ça, c'est vraiment... Les premières étapes sont l'accueil, l'évaluation et la référence.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, pour faire quoi? Alors, si on accueille puis on fait... Pour faire quoi? Et je trouve ça... Écoutez, là, on n'est pas dans l'obstination pour savoir qui va gagner sur cette affaire-là, on est là pour comprendre c'est quoi, l'épine dorsale de ce projet de loi.
Le Président (M. Copeman): Allez-y, M. le député.
M. Bouchard (Vachon): C'est parce que je parlais de l'épine dorsale puis je voyais le dos de la ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Courchesne: ...le dos de la chaise, pas le dos de la ministre, le dos de la chaise.
M. Bouchard (Vachon): La ministre est sûre d'une bonne protection. Mais quelle est l'échine, quelle est l'échine de ce projet-là? Hier, je l'ai entendue dire, et, aujourd'hui, je l'ai entendue répéter que ce projet de loi, le maître mot, le maître mot de ce projet de loi, le maître concept de ce projet de loi, c'est l'accompagnement social. Alors, si c'est ça, on ne peut pas dire que c'est aléatoire, comme vient de faire la ministre. La ministre vient de dire: «Il y a les services de base puis il y a les services plus aléatoires.» Ce n'est pas aléatoire, là, ce n'est drôlement pas aléatoire, parce que la ministre nous a affirmé, hier, dans ses remarques préliminaires, aujourd'hui, devant les journalistes, que l'accompagnement social, c'était le maître mot. Bien, si c'est ça, le maître mot, que d'être aléatoire en termes de concept de services et de programmes, ce n'est pas fort, et je suis sûr que c'est plus fort que ça.
Alors, voilà, je pense qu'on arrive dans le noeud du problème. Le noeud du problème, c'est que la mission de ce projet de loi, cette mission, elle est complètement, elle est complètement à mon avis trahie si on utilise le verbe «peut» plutôt qu'«offre», parce que la ministre elle-même nous dit qu'il y a deux choses qui comptent, c'est les programmes d'aide à l'emploi et l'accompagnement vers l'emploi. Alors là, moi... Et voilà.
Le Président (M. Copeman): M. le député, si on enlève «peut» et si on adopte votre amendement, on va lire «il offre».
M. Bouchard (Vachon): Oui.
Le Président (M. Copeman): Moi, je comprends, en lisant «il offre», il y a une obligation d'offrir. Moi, je comprends ça.
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Bien, en tout cas, je comprends que, si on enlève le mot «peut» et on indique «il offre», il y a une obligation d'offrir.
Mme Courchesne: Voilà.
Le Président (M. Copeman): Et honnêtement, je vous le dis très candidement, M. le député, vous connaissez assez bien notre système pour savoir qu'il n'y a pas un gouvernement qui est capable, capable d'offrir obligatoirement des mesures, programmes et services d'aide à l'emploi à tous les prestataires. C'est physiquement impossible. Il y a plus de 150 000 adultes sans contraintes sévères à l'emploi. Il y a plus de 125 000 adultes avec contraintes sévères à l'emploi. Quel gouvernement est dans la possibilité d'offrir des mesures à toutes ces personnes-là? Il n'en y a pas un. Parce qu'il me semble, et très candidement, ces choses-là sont contingentées, elles ont toujours été contingentées, elles vont continuer à être contingentées, et on peut bien plaider qu'il faut aller plus loin, mais ce n'est pas crédible de suggérer que le gouvernement du Québec est en mesure d'obligatoirement offrir des mesures, programmes et services à tous les prestataires adultes, et c'est comme ça malheureusement que je comprends votre amendement.
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): ...oui, oui. Si on ne comprend pas la même chose, bien on ne comprend pas la même chose, mais je pense que le point de vue est le suivant: Si on enlève le mot «peut» et on dit «il offre», écoute, on peut demander à des légistes, là, mais il semble que, quand on dit «il offre», c'est très facile de plaider qu'il y a une obligation d'offrir. Et je comprends pourquoi les députés, certains députés, je ne veux pas présumer, peuvent rejeter la notion qu'il doit obligatoirement offrir. Le gouvernement ne peut pas. N'importe quel gouvernement ne pouvait pas. Vous le savez pertinemment bien. Je suis convaincu.
M. Bouchard (Vachon): Oui. M. le Président, je ne vous ferai pas l'affront de vous dire que vous pervertissez mon amendement. Je ne vous ferai pas ça.
Le Président (M. Copeman): Non, non, je comprends.
M. Bouchard (Vachon): Mais vous avez dit quelque chose qui est cependant inexact. Si mon amendement avait été ainsi écrit: «Il offre des mesures, programmes et services d'aide à l'emploi de même que d'aide et d'accompagnement social à toutes les personnes le requérant», j'aurais dit: Oui, M. le Président, je pense que là, ça n'a comme pas de bon sens de s'obliger à cela.
Le Président (M. Copeman): ...
M. Bouchard (Vachon): Bon, et c'est ce que vous venez de dire en parlant de mon amendement. Alors, vous convenez que vous avez peut-être dépassé un peu l'intention de l'amendement.
Le Président (M. Copeman): C'est possible.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Bon. Alors...
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Mais cependant ce que je viens de dire, et là j'ai saisi ce qui se passait, là, peut-être un petit peu mieux, c'est que la ministre fait une différence entre des services de base et des services plus aléatoires. Et, moi, ce que je lui dis, c'est que, si elle est sérieuse dans son intention d'offrir une législation qui va refléter la mission qu'elle lui impute, à savoir l'accompagnement social, à savoir la facilitation vers l'emploi, bien ce n'est plus aléatoire, là.
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Non, non, mais ce qui est aléatoire, M. le Président, et si la ministre était là, si je pouvais m'adresser à la ministre directement, je le ferais de cette façon-ci: Mme la ministre ce qui est aléatoire, c'est le type de programme, c'est la nature de tel ou tel programme. Ça, on peut les remplacer, mais l'offre de programmes en accompagnement social, cette offre est nécessaire parce que l'article 1 dit en toutes lettres que ce projet de loi «vise à mettre en oeuvre des mesures, des programmes et des services afin de favoriser l'autonomie économique et sociale des personnes et des familles». Alors, franchement, je ne rajouterai rien à cette conversation. Je pense avoir dit ce qu'il fallait, j'ai entendu ce qu'il fallait entendre de la part de la ministre et je pense que, lorsqu'elle va voter contre, elle n'aura pas raison.
Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.
Mme Courchesne: M. le Président, le programme d'accompagnement social, tel que défini dans la loi, là, dans la loi, comme ça, c'est nouveau. Mais ce qui n'est pas nouveau par contre, au ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, là, c'est que des mesures d'accompagnement social, là, existent déjà dans des programmes existants, existent déjà dans des programmes existants, existent dans des programmes existants. Donc...
Une voix: ...
Mme Courchesne: C'est ça. Oui, vous avez raison. Il est tard, hein, il est 11 h 30. Il est tard.
M. Bouchard (Vachon): J'ai gagné l'amendement.
n(23 h 30)nMme Courchesne: Non, pas du tout. Absolument pas. Je ne suis pas encore assez fatiguée pour aller jusqu'à voter votre amendement. Mais ce que je veux juste vous dire, c'est: donc, tout ça effectivement fait en sorte que ça renchérit le fait qu'on va garder le mot «peut», parce qu'il y a des notions, il y a des façons de faire, il y a des concepts, il y a des méthodes qui ne sont pas toujours obligés d'être dans une loi pour que le ministère les fasse de toute façon.
Alors, M. le Président, quand le député de Vachon veut jouer sur mon sérieux ? sur mon sérieux ? donc voulant dire ma volonté ou ma détermination d'agir au sens où je l'ai exprimé, il ne réussira pas, M. le Président, à m'ébranler à cet égard-là. Quand je prends des engagements, bien je prends tous les moyens pour réaliser mes engagements, et je le fais au nom du gouvernement, et je le fais aussi en mon nom personnel, parce que, quand on est ministre, qu'on le veuille ou pas, si on prend un engagement, comme personne et comme individu membre d'un gouvernement de surcroît, on veut être capable de remplir cet engagement-là.
Donc, ça existe déjà. Par contre, ce que la loi fait ici, c'est que, pour donner effectivement une volonté à cette orientation-là, elle rend visible le fait que nous voulons effectivement élaborer ces programmes d'accompagnement social, mais nous devons le faire en conservant ce «peut», parce que ce «peut» donne la marge de manoeuvre requise pour savoir effectivement à quel moment, quelle ampleur, mieux préciser les modalités, mieux préciser le comment on va élaborer ces programmes et se donner donc... Mais ça ne veut pas dire, M. le Président, que, parce qu'on ne met pas le mot «peut», on ne le fera pas et on ne tiendra pas notre engagement, parce que de toute façon tout ça sont des déclarations publiques et que, dans ce sens-là, si on dit qu'on va le faire, c'est parce que justement on s'est assurés préalablement que nous avons les moyens de le faire, et pour moi c'est ça, le sens du mot «peut» dans cet article de loi. Et, M. le Président, non, on ne me fera pas dire que, parce que le mot «peut» n'est pas là, le gouvernement ou la ministre ne sont pas sérieux à l'égard de l'importance de faire un programme d'accompagnement social. C'est très, très important de pouvoir élaborer, élargir, élargir ce concept... mais ce concept, cette façon de faire... C'est plus qu'un concept, c'est une façon de faire. Je crois sincèrement que l'accompagnement social va faire en sorte qu'un plus grand nombre de personnes vont trouver le bon chemin, vont trouver la bonne voie correspondant à leurs besoins, à leurs moyens, à leurs capacités et à leur rythme. C'est ça, la souplesse et la flexibilité du projet de loi n° 57.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'on est prêt à voter l'amendement? Sur l'adoption? Non? Est-ce que l'amendement...
M. Bouchard (Vachon): Nominal.
Le Président (M. Copeman): Oui. Oui.
M. Bouchard (Vachon): Par vote nominal, s'il vous plaît.
Le Président (M. Copeman): Oui, je vais le mettre aux voix.
M. Bouchard (Vachon): O.K.
Le Président (M. Copeman): Est-ce que l'amendement proposé par le député de Vachon à l'article 3 est adopté?
M. Bouchard (Vachon): Par vote nominal, s'il vous plaît, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Vachon. Mme la secrétaire, pouvez-vous procéder à un vote par appel nominal, s'il vous plaît?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Bouchard (Vachon)?
M. Bouchard (Vachon): Pour.
La Secrétaire: Mme Lefebvre (Laurier-Dorion)?
Mme Lefebvre: Pour.
La Secrétaire: M. Girard (Gouin)?
M. Girard: Pour.
La Secrétaire: Mme la ministre?
Mme Courchesne: Contre.
La Secrétaire: Mme Gaudet (Maskinongé)?
Mme Gaudet: Contre.
La Secrétaire: M. Paquin (Saint-Jean)?
M. Paquin: Contre.
La Secrétaire: M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue)?
M. Bernard: Contre.
La Secrétaire: Mme Legault (Chambly)?
Mme Legault: Contre.
La Secrétaire: M. le Président?
Le Président (M. Copeman): Contre.
La Secrétaire: 6 à 3, rejeté.
Le Président (M. Copeman): Alors, l'amendement est rejeté. Sur l'article 3 dans son ensemble tel qu'amendé ? tel qu'amendé? oui, bien sûr tel qu'amendé ? M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président, l'article 3 est beaucoup plus faible qu'il ne l'aurait été autrement. Je suis particulièrement déçu du fait que le législateur n'oblige la ministre en rien en ce qui concerne les mesures, programmes et services d'aide à l'emploi, de même que d'aide et d'accompagnement social, alors que la ministre, et je suis persuadé qu'elle est tout à fait sincère vis-à-vis de cela, affirme haut et fort que l'accompagnement social devient le porte-étendard philosophique de sa nouvelle approche.
J'aurais aimé qu'on puisse traduire ce fanion dans une obligation qui aurait donné le signe que non simplement la ministre est sérieuse dans ses intentions, mais qu'elle est ferme quant à sa volonté d'offrir ces programmes, services et mesures et qu'elle obligerait quiconque... elle aurait obligé quiconque qui l'aurait suivie dans cette responsabilité très importante qu'elle a d'offrir des programmes. Puis on ne dit pas combien, on ne dit pas de quelle nature, on dit tout simplement que la ministre se fait un devoir de respecter la mission que la loi l'oblige à remplir.
Alors, je pense personnellement que l'article 3 est beaucoup plus faible de portée qu'il ne l'aurait été autrement. Je déplore cela. Ceci étant dit, M. le Président, je suis prêt à passer à d'autres choses.
Le Président (M. Copeman): Excellent!
Une voix: ...
M. Bouchard (Vachon): Non. Moi, oui.
Le Président (M. Copeman): Oh pardon! Excusez-moi, Mme la députée de Laurier-Dorion. Allez-y!
Mme Lefebvre: Bien, merci, M. le Président. En fait, je voulais juste ajouter... bien, ajouter ma voix à celle de mon collègue pour dire également qu'en quelque part, peu importe, je suis un peu déçue que ça n'ait pas passé maintenant. Le «peut», le verbe pouvoir et le verbe devoir n'ont pas la même signification. Puis tout ce que je veux dire, c'est que, si on veut réussir notre objectif, donc d'amener en 10 ans le Québec dans la liste des pays où il y a le moins de pauvreté possible, il va falloir en quelque sorte et à un moment précis ? je suis désolée que ce moment n'ait pas été choisi ? mais trouver des solutions concrètes et obliger le législateur à agir concrètement afin que des solutions tangibles puissent voir le jour et puis qu'on puisse s'attendre à ce que, bon, on puisse poursuivre dans la bonne voie vers cet objectif de lutte à la pauvreté et d'exclusion sociale.
Le Président (M. Copeman): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 3? Est-ce que l'article 3 est adopté tel qu'amendé?
M. Bouchard (Vachon): Sur division.
Le Président (M. Copeman): Sur division, très bien. L'article 4.
Mme Courchesne: Pas d'amendement.
Le Président (M. Copeman): Alors, Mme la ministre, nous vous écoutons.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, à l'article 4, il n'y a pas d'amendement. Je peux le lire, et il se lit comme suit:
«Les mesures, programmes et services d'aide à l'emploi sont liés aux différents volets d'une politique active du marché du travail, à savoir la préparation à l'emploi, l'insertion et le maintien en emploi, la stabilisation de l'emploi et la création d'emplois.» Et il n'y a pas d'amendement.
M. Bouchard (Vachon): M. le Président.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Est-ce qu'on peut avoir de la part de la ministre un énoncé d'intention derrière cet article? Pourquoi cet article?
Mme Courchesne: M. le Président, cet article en fait est un article de précision tout simplement sur les différents critères ou les différentes possibilités de services que nous pouvons offrir. Quand on dit que c'est lié à une politique active du marché du travail, vous n'êtes pas sans savoir que le gouvernement a déposé un plan gouvernemental de l'emploi, donc qui oriente, si vous voulez... qui donne les grandes orientations du marché du travail comme telles.
n(23 h 40)n Donc, on a une politique au gouvernement qui effectivement valorise le travail, valorise l'emploi, mais qui développe un certain nombre de moyens pour faire en sorte qu'on veuille s'assurer qu'un plus grand nombre de personnes participent au travail, mais que, pour y arriver, à partir du moment où le gouvernement a cette politique d'emploi, bien il y a des étapes à franchir auprès de certaines populations, de certaines personnes, qui nécessitent de la préparation à l'emploi, qui nécessitent des moyens d'insertion ? on en parlait tout à l'heure ? qui sont assez variés, qui nécessitent à mon avis aussi qu'on s'assure qu'il y a des possibilités pour une personne de pouvoir rester en emploi, de pouvoir avoir un emploi stable, je pense que ça, c'est aussi très important. Et, dans cette politique active liée au marché du travail, bien, oui, on souhaite pouvoir créer des emplois, c'est-à-dire développer des moyens... soutenir des entreprises qui permettront effectivement d'offrir de l'emploi à un plus grand nombre.
Donc, c'est effectivement, tout simplement, des fins de précision sur ce qui oriente les mesures, les programmes et les services d'aide à l'emploi. Donc, le fait de le faire nous incite ? et là, M. le Président, on ne retombera pas dans le «peut» et le «doit» ? mais nous incite effectivement à mettre de l'avant des mesures, des programmes, des services qui préparent à l'emploi, qui permettent cette insertion, qui assurent un maintien en emploi ? parce que, parfois, il y a des personnes qui ont de la difficulté, pour toutes sortes de bonnes raisons, à rester en emploi. Donc, est-ce qu'il y a des ajustements qu'on peut apporter dans nos façons de faire pour mieux préparer la personne en emploi? La stabilisation et la création, parce qu'il y a des organismes qu'on peut aider justement pour permettre de créer de l'emploi et à offrir de l'emploi à nos prestataires d'aide sociale.
Le Président (M. Copeman): M. le député, allez-y.
Mme Courchesne: M. le Président, si vous me permettez.
M. Bouchard (Vachon): Est-ce que...
Le Président (M. Copeman): Excusez. Oui?
Mme Courchesne: Juste dire que cet article complète un peu l'article 1. Si vous relisez l'article 1, on retrouve un énoncé de la loi actuelle, là. Je ne parle pas de la loi du projet amendé, je parle de la loi actuelle.
M. Bouchard (Vachon): Oui, oui, je comprends bien. Cependant, si on fait référence aux différents volets d'une politique active du marché du travail, j'ai compris, dans la réponse de la ministre, que pour elle cette référence-là, c'est la politique gouvernementale de l'emploi.
Mme Courchesne: Pardon?
M. Bouchard (Vachon): J'ai compris, dans la réponse de la ministre, que pour elle la politique active du marché du travail, c'est la politique gouvernementale de l'emploi.
Mme Courchesne: Non. M. le Président, si vous me permettez, non, ce n'est pas ce que je dis, parce que, sinon, on aurait écrit «plan gouvernemental de l'emploi»; ce n'est pas la même chose. Mais ce que je dis, c'est qu'il y a des orientations gouvernementales qui valorisent l'emploi ? comme toute bonne société, je pense que c'est important de pouvoir valoriser l'emploi ? que, pour ce faire, le gouvernement s'est doté d'un plan gouvernemental de l'emploi, mais que, si on se dote d'un plan gouvernemental de l'emploi, c'est parce qu'effectivement notre volonté, c'est d'avoir une politique active, c'est-à-dire des mesures actives, des moyens actifs de mettre les gens en emploi, de favoriser l'emploi et de développer des mesures actives, si vous voulez, qui vont faire en sorte qu'on va pouvoir inciter, encourager notamment, notamment, les prestataires d'aide sociale à faire des démarches vers l'emploi.
Maintenant, c'est une loi, là. Une loi, ce sont des énoncés; dans la vraie vie, ce n'est pas tranché au couteau de cette façon-là. Mais cet article démontre la volonté et la capacité de devoir oeuvrer à travers ces volets qui sont écrits ici. Donc, ça délimite, si vous voulez, notre champ d'action, mais pas nécessairement de façon exhaustive, mais ça donne les grands paramètres du champ d'action à l'intérieur duquel nous voulons offrir des services aux personnes qui seraient en mouvement vers l'emploi.
Le Président (M. Copeman): Ça va?
M. Bouchard (Vachon): Oui, oui. Ça va.
Le Président (M. Copeman): Est-ce que l'article 4 est adopté?
Des voix: ...
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 5.
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, j'aimerais apporter un amendement à l'article 5, le modifier de la façon suivante, par l'insertion, après le paragraphe 4°, du suivant... deviendrait:
«4.1° offrir des moyens pour faciliter la participation des personnes handicapées aux mesures, programmes et services d'aide à l'emploi afin de favoriser leur intégration et leur maintien en emploi, en milieu de travail régulier ou en entreprise adaptée.» Alors, je pense que cet amendement-là vise à répondre à des préoccupations, notamment d'organismes représentant les personnes handicapées, quant à la mise en oeuvre de certaines mesures d'adaptation pour faciliter à ces personnes la participation à diverses mesures d'aide à l'emploi et favoriser leur intégration.
Je crois qu'il y avait eu confusion à l'égard de l'article original, notamment à l'égard du fait que l'accessibilité à des entreprises adaptées n'est pas limitée aux seuls prestataires du Programme de solidarité sociale, contrairement à l'interprétation qu'on pouvait donner à l'article 59 du projet de loi. Et précisons que, suite à l'adoption du projet de loi n° 56, l'expression «entreprise adaptée» a remplacé celle de «centre de travail adapté». Alors, il y a une concordance aussi que nous apportons à l'article 5.
Le Président (M. Copeman): Sur l'amendement.
M. Bouchard (Vachon): Oui. Bien, alors, je ne pense pas que ça pose de problème. Nous avions, à l'époque, soulevé ce problème-là à l'effet que, tel qu'il avait été rédigé, l'article pouvait être interprété à l'effet que seules les personnes qui étaient inscrites dans le Programme de solidarité sociale pouvaient éventuellement être visées par cette disposition.
Donc, ce qu'on fait essentiellement, si je comprends bien, M. le Président, c'est de déplacer l'article de là où il était, hein, à ce nouvel endroit.
Mme Courchesne: ...bonifié.
M. Bouchard (Vachon): Est-ce qu'il est modifié autrement?
Mme Courchesne: Bonifié. Mais il est au même endroit...
M. Bouchard (Vachon): Non, non, non, il ne doit pas être au même endroit, parce que...
Mme Courchesne: ...il était à l'article 59.
M. Bouchard (Vachon): C'est ça, donc...
Mme Courchesne: Oui, c'est ça.
M. Bouchard (Vachon): On l'a déplacé, mais est-ce qu'on en a changé d'autres éléments? Je ne pense pas, hein?
Mme Courchesne: En fait, le texte n'est pas tout à fait le même, dans le sens, M. le Président, qu'on offre maintenant des moyens... En fait, on l'a bonifié. On offre des moyens pour faciliter la participation des personnes, ce qu'on n'avait pas au préalable. Avant, on disait: «Offrir des emplois adaptés pour les adultes qui présentent des limitations fonctionnelles, notamment dans des centres de travail adapté ou dans le cadre de contrats d'intégration au travail.» Je pense que la formulation qui est devant nous, M. le Président, encore une fois elle est plus incitative, c'est offrir des moyens pour faciliter. Donc, toujours dans cette approche incitative plutôt que directive, on offre des moyens pour faciliter la participation. Et je pense que la nuance est aussi pour enlever l'ambiguïté sur le fait que cet article-là... ou ces mesures-là plutôt ne s'adressent pas uniquement à des prestataires du Programme solidarité sociale.
Le Président (M. Copeman): Alors, toujours sur l'amendement. Ça va?
M. Bouchard (Vachon): Sur l'amendement?
Le Président (M. Copeman): Sur l'amendement. Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Bouchard (Vachon): Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. Alors, sur l'article tel que modifié. Mme la députée de Laurier-Dorion.
n(23 h 50)nMme Lefebvre: J'avais une petite question. Donc, il y a le paragraphe 5°, c'est ce qu'on dit?
M. Bouchard (Vachon): ...
Mme Lefebvre: Donc, aider les employeurs, les associations, les salariés, bon, les organismes communautaires. De quelle façon, du point de vue du législateur, de quelle façon c'est perçu? Quel type d'aide va être offert aux organismes communautaires?
Mme Courchesne: Alors, M. le Président, c'est évident que cet article-là... quel type d'aide, vous savez combien on en a beaucoup, d'aide. Par exemple, si on prend les employeurs, on peut penser à des subventions salariales. Si on parle aux organismes communautaires en milieux régionaux et locaux, on a beaucoup... on a beaucoup... on a de plus en plus d'ententes de partenariats avec les milieux locaux et régionaux pour... et ? et ? une combinaison avec les organismes communautaires. On dit souvent que là où on a un meilleur succès dans une région donnée, c'est quand on a effectivement ces intervenants qui ensemble complètent des moyens différents pour essayer de favoriser encore là l'intégration en emploi. Donc, dans ce sens-là, il y a soit les programmes d'aide, comme je mentionnais, soit les subventions salariales, soit des ententes qu'on peut bâtir un peu plus sur mesure sur des situations très spécifiques comme telles par rapport à des stratégies.
Vous savez, je vais vous donner l'exemple des travailleurs âgés, par exemple. C'est une réalité qui est nouvelle, mais on se doit, avec encore là les employeurs et les intervenants locaux, adapter des façons de faire. Alors, on peut faire une combinaison de formation, d'apprentissage en milieu de travail, on peut, on peut... Ça s'est fait dans le Saguenay?Lac-Saint-Jean, avec Port-Alfred, où effectivement, avec les commissions scolaires, de façon très, très rapide, on a réussi à mettre sur pied un programme de formation qui répondait à ces personnes-là, selon leur profil, parce que c'étaient des gens qui travaillaient dans la même usine depuis très, très, très longtemps, donc avaient une sorte d'expertise, avaient développé des habilités, puis on a essayé de mettre donc des programmes de formation pour essayer de les réorienter. Mais tout ça se fait de plus en plus par le biais de ce type de partenariat là.
Donc, c'est un peu de se dire: Travaillons localement de façon spécifique. Adaptons nos stratégies, nos interventions, quand je dis «nos», incluant ces partenaires-là, mais à vraiment des façons de faire, des moyens qui correspondent à ce qu'eux sont dans cette région-là. Alors, ça nous permet de le faire. Cet article-là va nous permettre de le faire et de continuer de le faire, mais d'insister à ce que des partenaires participent avec nous, et on pense qu'on va avoir des résultats plus concluants.
Si ça vous intéresse, M. le Président, il y a quelques exemples, là, au Québec, qu'on pourrait citer. Je viens de vous citer Saguenay?Lac-Saint-Jean, on pourrait en citer d'autres.
Une voix: ...
Mme Courchesne: Port-Alfred. Laval, non, pas tant que ça. Plus dans les régions ressources en fait. Les priorités vont beaucoup, beaucoup dans les régions ressources ou là où, par exemple, on pourrait faire, on pourrait utiliser un article comme celui-là dans les cas de textile, dans les cas de... liés, mais il faut qu'il y ait une volonté du milieu, il faut que le milieu veuille aussi participer avec nous.
Mme Lefebvre: Mais, quand c'est inscrit: Aider, bon, les organismes, mais aider les organismes communautaires et ta, ta, ta afin de développer et de mettre en application des stratégies, donc, de quelle façon le législateur entend-il aider les organismes communautaires dans cette application?
Mme Courchesne: Bien, s'il y a des... D'abord, les organismes communautaires, nous les soutenons financièrement beaucoup. On parle ici des organismes communautaires qui ont déjà des liens avec nous pour la plupart, là. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas un nouveau qui ne pourrait pas s'inscrire, mais pour la plupart on a déjà des liens importants avec les organismes communautaires. Alors, si, dans une région donnée, on fait face à une situation particulière, bien ce qu'on dit, c'est qu'Emploi-Québec va être souvent l'espèce de coordonnateur de cette stratégie-là à déployer ou à développer. Et souvent Emploi-Québec va s'assurer que les autres partenaires répondent aux appels et coordonnent le suivi de ces interventions, de ces stratégies qui sont développées.
Mais il m'apparaît important de faire ressortir et de satisfaire aux exigences en matière de main-d'oeuvre mais en matière de cette main-d'oeuvre locale qui a ses réalités propres, qui a ses spécificités propres, qui a son expérience qui lui est propre. Ça, ça s'adresse beaucoup, beaucoup aussi aux villes mono-industrielles, c'est-à-dire que ça peut être très utile pour aller vers une diversification de la main- d'oeuvre dans le cas de certaines villes mono-industrielles ou de certaines régions mono-industrielles qui éprouvent parfois des difficultés conjoncturelles.
Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.
M. Bouchard (Vachon): Toujours dans la même intention de mieux connaître la mission qui est traduite, là, qui est déclinée dans ces différentes mesures, on lit en 6°, donc au paragraphe 6°: «Contribuer à [l'amélioration du] fonctionnement du marché du travail et à minimiser l'impact de ses restructurations.» On peut très bien voir, là, qu'il y a un certain nombre de programmes qui sont administrés et gérés par Emploi-Québec notamment, mais en ce qui concerne les restructurations.... Mais l'amélioration du fonctionnement du marché du travail, pouvez-vous donner une illustration, un exemple de... J'aurais cru retrouver ça davantage dans un ministère comme le Développement économique, mais quels sont les...
Mme Courchesne: Bien, moi, je vous dirais que tout le volet de la formation est un volet fort important, qui contribue à améliorer le fonctionnement du marché du travail. Je fais référence aussi à la Commission des partenaires du marché du travail, qui... Je pense à la formation parce que la Commission des partenaires du marché du travail sont préoccupés par ces aspects-là, mais je pense que toute l'intervention de la commission, sur différents dossiers, contribue très certainement à améliorer le fonctionnement du marché du travail.
Donc, je vous donne l'exemple de la formation, mais par exemple aussi tous les comités d'adaptation du marché du travail sont des... tous les comités sectoriels sont des moyens, en fait des ressources, qui nous recommandent de mettre en oeuvre des moyens qui sont fort importants et qui améliorent très certainement le marché du travail, et ça répond davantage aussi aux besoins de main-d'oeuvre. C'est parce que ça nous permet de faire une meilleure adéquation entre le besoin de main-d'oeuvre, les moyens utilisés et les résultats qu'on a besoin pour s'assurer qu'on comble ces besoins de main-d'oeuvre.
M. Bouchard (Vachon): C'est quand même étrange, hein, que, dans le contexte de ce dont... mais qu'on ne spécifie pas notamment en fonction des besoins des personnes requérant les services. Tu sais, c'est comme... J'imagine bien que... Je n'en fais pas une proposition d'amendement, là, mais j'imagine bien que, dans l'esprit du législateur, si on l'a installé là, c'est parce que quelque part il y avait une préoccupation à ce qu'on puisse dessiner les différentes mesures d'amélioration du fonctionnement du marché du travail en fonction des besoins d'une population bien précise, très souvent très éloignée du marché du travail, hein? C'est...
Mme Courchesne: M. le Président, c'est une bonne remarque. On ne l'a pas fait parce qu'on a repris la loi actuelle. C'est vraiment le report intégral, sauf pour le petit amendement qu'on vient de proposer. Mais c'est une bonne remarque. Je vous dirais que ça touche aussi les comités de reclassement. En fait, c'est parce que vous avez bien mentionné, hein, ces services d'aide à l'emploi sont vraiment gérés par Emploi-Québec, donc c'est dans la réalité d'Emploi-Québec comme telle. Mais c'est une... Mais un n'exclut pas l'autre, parce qu'on dit aussi, dans les articles précédents, qu'on veut offrir... L'article 4 en fait... En fait, c'est comme la suite de l'article 4. L'article 4 s'adresse davantage aux caractéristiques de ces personnes qui ont besoin de services pour aller vers l'emploi et l'article 5 définit les types de mesures réelles qui peuvent favoriser l'emploi pour ces personnes-là. Donc, en 4, on se soucie des personnes et, en 5, on décrit les moyens.
Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'on peut disposer de 4 ce soir ou...
M. Bouchard (Vachon): De 4?
Le Président (M. Copeman): 5, excusez-moi.
M. Bouchard (Vachon): Oui, oui. Pas de problème.
Le Président (M. Copeman): On peut disposer?
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Non, non. Alors, est-ce que l'article 5 est adopté...
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Copeman): ...tel qu'amendé. Et, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de la commission sine die.
(Fin de la séance à minuit)