(Onze heures cinquante-six minutes)
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle que, selon l'ordre de la Chambre, nous sommes réunis afin d'entendre les intéressés et procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 222, Loi concernant «Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et sa version Sherbrooke Geriatric University Institute».
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Lefebvre (Laurier-Dorion) va être remplacée par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M. Copeman): Bien. Je vous rappelle, chers collègues, ainsi que toutes les personnes présentes dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires est strictement interdite et je vous prierais de mettre hors tension ces appareils et tout appareil semblable.
L'ordre du jour est très simple, chers collègues, et, aussi étonnant que ça peut être, c'est la première fois en 10 ans que je participe à l'adoption d'un bill privé. Je n'ai jamais eu l'occasion de le faire. Alors, vous allez, j'imagine, m'accorder une certaine compréhension dans la procédure si je fais des erreurs ou si ça ne procède pas dans l'ordre habituel qu'on connaît ici, à la CAS. Mais la procédure, on me dit, est très simple.
Nous avons la possibilité évidemment de faire des remarques. Nous avons des invités qui vont faire une présentation comme requérants. Par la suite, on va mettre aux voix... mettre sous étude ? pardon ? les articles du projet de loi avec le processus habituel. Parfois, par contre, compte tenu que c'est un bill privé, il peut y avoir des questions qui éventuellement pourraient être adressées directement aux requérants aussi. Alors, il y a comme un échange qui est un peu plus inhabituel, si nécessaire, avec les invités.
Alors, nos invités sont déjà à la table. Et, si j'ai bien compris, Me Le Bel, vous êtes le porte-parole principal, et je vais peut-être vous demander de présenter les personnes qui vous accompagnent, dans un premier temps. Et je ne sais pas s'il va y avoir des remarques avant la présentation de nos représentants. Non? Alors, M. Le Bel, on vous écoute.
Auditions
Exposé du requérant
M. Le Bel (Réjean O.): Alors, mesdames messieurs de la commission, on vous remercie de nous recevoir ce matin. On vous remercie aussi pour le sucre à la crème; ça va nous inciter à revenir peut-être plus souvent.
J'ai, à ma droite...
Le Président (M. Copeman): Ce n'est pas forcément nécessaire, M. Le Bel.
M. Le Bel (Réjean O.): J'ai, à ma droite, M. Denis Lalumière, qui est directeur général de l'Institut de gériatrie, l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke de même que du CLSC de Sherbrooke, et, à ma gauche, M. Alex Potter, qui est membre du conseil d'administration de l'institut de même que directeur... président du Bureau des gouverneurs, puisqu'il s'agit de ce qu'on appelle une corporation propriétaire.
En fait, le projet de loi que vous avez devant vous, le projet de loi n° 222, vise trois objectifs: amender la loi afin d'obtenir les pouvoirs pour pouvoir intégrer le CLSC de Sherbrooke à l'Institut de gériatrie; également, apporter des modifications pour que, dorénavant, l'Institut, s'il désire modifier sa charte, il puisse le faire par simple lettre patente émise par le ministre; et, finalement, faire une refonte de la loi.
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(12 heures)
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Pour faire un court résumé, la loi constitutive de l'Institut de gériatrie provient d'une loi privée qui a été adoptée en 1888 afin de créer le Sherbrooke Protestant Hospital qui a été modifié par la suite pour être le Sherbrooke Hospital, et cette loi-là qui est maintenant... ne reflète plus la réalité d'aujourd'hui, doit être amendée.
En 1996, le Sherbrooke Hospital a intégré l'Hôpital d'Youville de Sherbrooke et a changé son nom pour devenir l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke. Par la suite, en 2003, nous avons intégré le centre Estriade, qui comprenait trois pavillons. Et, en 2004, suite au choix du ministre et de l'agence, il fut décidé dans un consensus d'intégrer le CLSC de Sherbrooke à l'institut. Or, pour pouvoir procéder à cette étape-là, l'institut n'avait pas, de par sa loi constitutive de 1888, les pouvoirs d'exploiter un centre local de santé et services sociaux, et c'est la raison pour laquelle on demande, ce matin, l'adoption de cette loi-là, pour être capables entre autres d'avoir comme objet et pouvoir... de pouvoir exploiter un établissement... le centre local de services sociaux.
Peut-être plus pour expliquer la différence entre ce qu'on appelle une fusion et une intégration, grosso modo, c'est que, lorsqu'on fait une fusion, on... les deux corporations sont fondues finalement, puis la résultante de ça, c'est une nouvelle corporation, alors que l'intégration, c'est une corporation qui intègre l'autre, qui est la corporation intégrée, et la loi constitutive de l'établissement qui est intégré disparaît et la loi constitutive de l'établissement intégrant demeure. Puis c'est pour ça que la loi que vous avez, la loi constituante puis la loi qui gouverne l'institut, c'est l'ancienne loi de 1888, qui provenait de la charte du Sherbrooke Hospital, parce que c'est elle qui avait intégré l'Hôpital d'Youville à l'époque.
Donc, pour pouvoir réaliser l'intégration du CLSC, on doit amender la loi pour obtenir ces pouvoirs-là. Et puis finalement on fait une refonte de la loi afin d'éliminer tous les articles de la loi de 1888 qui, dans les faits, n'ont plus aucune raison d'être aujourd'hui.
Je ne sais pas si M. Lalumière veut apporter quelque chose à ça ou...
M. Lalumière (Denis): Oui. Mes commentaires. Très brièvement. Évidemment, l'objectif de la réforme actuelle, qui est en cours dans le réseau, c'est de pouvoir créer les instances locales, donc de placer sous l'autorité d'un même conseil d'administration et d'une même équipe de direction l'ensemble des activités de soins et services de première ligne dans la communauté.
À Sherbrooke, ça prend la forme concrètement d'une mise en commun, d'un regroupement de l'ensemble des services, des soins et services actuellement dispensés par l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et du CLSC, sauf qu'à cause de cette difficulté légale nous sommes encore deux établissements, donc nous devons maintenir deux conseils d'administration, gérer deux budgets différents, etc. Et ce que nous vous demandons au fond aujourd'hui, c'est la permission de regrouper ces deux institutions en une seule nouvelle institution tout en assurant une continuité juridique qui permet le maintien des droits acquis hérités dans le temps par l'Institut universitaire de gériatrie.
M. Potter (Alex G.): Oui, peut-être tu peux ajouter que cette façon de poursuivre permet de continuer l'implication de la population anglophone, une implication qui est exemplaire d'après moi dans le développement de l'instance locale et aussi de l'institut, etc. Il y avait certains engagements qui avaient été faits auprès de la population anglophone, et cette façon de faire permet de les respecter comme il faut.
Aussi, ça permet l'intégration harmonieuse des trois ou quatre établissements maintenant qui font partie de l'instance locale. Merci.
Discussion générale
Le Président (M. Copeman): Alors, ça va? Merci, messieurs. Commentaire général, M. le ministre.
M. Couillard: Très brièvement, M. le Président. Je pense qu'il faut saluer le leadership des gens du milieu de Sherbrooke qui, autant du CLSC que de l'Institut universitaire, ont décidé d'aller dans cette direction-là qui n'était pas évidente parce qu'on avait, d'une part, une organisation à statut universitaire, un institut universitaire, mais, de l'autre part, un CLSC également qui a une mission universitaire. Et je crois qu'il faut saluer la créativité de ce milieu-là qui permet à la région de Sherbrooke de se doter d'une organisation avec désignation universitaire qui va combiner l'hébergement, la première ligne, les soins à domicile et également l'expertise académique en gériatrie, ce qui va donner à cette organisation un statut, sur le plan académique, qui va être considérable et l'aider encore plus à rayonner sur le plan national et international, ce qu'ils font déjà d'ailleurs. Et je crois que c'est une excellente initiative à laquelle nous souscrivons entièrement, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, M. le Président. Alors, je voudrais saluer M. Potter et de même que M. Lalumière et Me Le Bel.
Alors, il y a quelques questions qui en fait vont mériter certainement les réponses que vous leur apporterez, des questions qui ont trait au statut de ce nouvel établissement. À 1, je comprends que le nom de l'établissement serait Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke. C'est bien cela? Quel sera le nom, l'appellation?
M. Le Bel (Réjean O.): L'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke pour l'instant. Après l'intégration, le nom va changer pour CLSC... Centre local de services communautaires de Sherbrooke. Je vais laisser répondre M. Lalumière, là, parce que...
M. Lalumière (Denis): M. le Président, si vous permettez, nous serons l'un des 95 centres de santé et de services sociaux du Québec. Alors, nous comprenons que nous porterons le nom de centre de santé et des services sociaux. Néanmoins, nous demanderons au ministre la permission d'inscrire également dans notre nom le mot «Institut universitaire de gériatrie», puisque c'est une marque de commerce, c'est une carte de visite extrêmement importante pour nos cliniciens et également pour nos professeurs et chercheurs. Alors, nous deviendrions, avec la permission du ministre, le Centre de santé et des services sociaux Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke.
Mme Harel: En fait, ce projet de loi est en quelque sorte un préambule ou un passage obligé pour des changements qui seront apportés ultérieurement, notamment l'appellation, là, vous venez d'y répondre, d'une part. D'autre part, sur le statut de corporation propriétaire, l'institut était donc une corporation propriétaire, alors que les autres établissements qui sont intégrés sont des établissements de propriété publique. Comment... Quel devient le statut de ce nouvel établissement?
M. Le Bel (Réjean O.): Une corporation... Elle demeure une corporation propriétaire.
Mme Harel: Une corporation propriétaire des établissements publics qui sont intégrés?
M. Le Bel (Réjean O.): Bien, c'est-à-dire qu'elle demeure propriétaire des immeubles et de tout ce qu'elle possédait avant, mais, sa loi constitutive ne changeant pas, son statut demeure le même.
Mme Harel: Attendez, est-ce que vous voulez dire, là, qu'on fait un transfert de propriété avec l'actuel projet de loi?
M. Le Bel (Réjean O.): On ne fait pas de transfert de propriété. Absolument pas.
Mme Harel: Bien, expliquez-nous, là. Il y a un établissement... Il va y en avoir quatre, hein, au total? C'est bien ça? Il y a le CLSC... Expliquez-nous.
M. Lalumière (Denis): Dans l'histoire, il y a... M. le Président.
Le Président (M. Copeman): M. Lalumière.
M. Lalumière (Denis): Dans l'histoire, Me Le Bel vous a expliqué tantôt qu'il y a eu, dans les années précédentes, déjà d'autres fusions par voie d'intégration. Au moment où on se parle, il n'y a que deux établissements. Le nouvel Institut de gériatrie de Sherbrooke est lui-même la résultante de différentes intégrations au fil des ans. Au moment où on se parle, il y a deux établissements publics: l'Institut universitaire de gériatrie et le CLSC.
Il y a une personne morale, une corporation propriétaire au sein de l'Institut universitaire de gériatrie. L'effet du projet de loi est de maintenir l'existence, d'assurer la continuité juridique de cette personne morale, donc de cette corporation propriétaire, qui va se retrouver dans le fond à l'intérieur dorénavant d'un établissement plus vaste avec l'ajout de la mission CLSC.
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(12 h 10)
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Mme Harel: Est-ce qu'on comprend que cette personne morale devient, par le fait du projet de loi adopté, propriétaire du bâtiment dans lequel est le CLSC?
M. Lalumière (Denis): Pour ce qui est des immeubles, peut-être rapidement vous situer du côté de ce qui est actuellement l'Institut universitaire de gériatrie. Nous avons cinq immeubles. La corporation propriétaire est, dans les faits, propriétaire de l'un de ces immeubles-là, à savoir l'édifice où est né le Sherbrooke Hospital.
La corporation propriétaire, elle est née avec la loi de 1888 et est donc propriétaire des édifices et des terrains de ce qui était auparavant le Sherbrooke Hospital. Les autres pavillons que nous opérons sont juridiquement placés sous la propriété de la Corporation d'hébergement du Québec. Et, par ailleurs, du côté du CLSC, l'ensemble des installations sont en location. Donc, il n'y a pas de propriété physique dans la composante CLSC.
Mme Harel: L'institut devient à ce moment-là... est reconduit dans les obligations de locataire de la Corporation d'hébergement du Québec?
M. Lalumière (Denis): Tout à fait. Il assumera l'ensemble des obligations juridiques contractées par le CLSC. Donc, l'ensemble des baux de location, etc., sont immédiatement transférés sous la responsabilité de l'Institut de gériatrie.
Mme Harel: Donc, il n'y a pas de transfert de... mobilier ou immobilier.
M. Lalumière (Denis): Non. Dans les faits, non. Sauf les équipements qui suivent, là, qui étaient déjà utilisés par le CLSC. Mais les immeubles, il n'y en a pas, puisqu'ils étaient tous... on fonctionnait par voie de bail.
Mme Harel: D'accord. Très bien. Et puis une autre question sur le statut linguistique. Quel était le statut du CLSC?
M. Lalumière (Denis): Le CLSC n'a pas de désignation formelle sur le plan linguistique.
Mme Harel: Alors que l'institut l'était en vertu de l'article 29.1 de la Charte de la langue française, j'imagine. Alors que devient, là, le nouveau statut linguistique du nouvel établissement?
M. Couillard: La loi n° 25 a spécifiquement prévu ces situations où la désignation est transmise pour l'installation et pas nécessairement pour l'ensemble du nouvel établissement, de sorte que la désignation est maintenue bien sûr pour l'Institut universitaire de gériatrie. Mais le CLSC, si c'est une crainte que Mme la députée exprime, n'a pas à avoir la désignation en vertu de la Charte de la langue française, à moins que la communauté en fasse la demande et qu'elle satisfasse aux critères qui figurent dans la Loi sur la Charte.
Mme Harel: ...que le ministre a raison, mais je pense qu'il a tort parce que ce dont il nous parle, c'est ce qui se retrouve comme dispositif dans la loi n° 25, sauf que, là, on a une nouvelle loi, et justement c'est du fait que la loi n° 25 ne pouvait pas s'appliquer. On a une nouvelle loi, et il n'y a pas de disposition de prévue dans cette nouvelle loi. Dans cette nouvelle loi, ce n'est pas une fusion, c'est une intégration. Donc, l'intégration fait en sorte que le CLSC se trouve, avec l'adoption de la loi, à se voir appliquer le statut de l'institut.
M. Couillard: Bien, pour vérifier la question, on pourrait demander à nos invités de nous dire ce qui est arrivé lorsqu'ils ont intégré l'Estriade? Est-ce que la désignation a été appliquée également à l'Estriade?
M. Potter (Alex G.): Moi, j'ai toujours compris que le statut linguistique bilingue s'appliquait seulement à l'ancien Sherbrooke Hospital, à l'emplacement de l'ancien Sherbrooke Hospital.
Mme Harel: Encore faut-il, là, que ce soit confirmé juridiquement. Je ne sais pas si Me Le Bel.... Parce que je dois vous dire que c'est impossible. Quand vous faites une fusion, c'est possible, mais une intégration, non. Comme vous le mentionniez tantôt, Me Le Bel, l'intégration, c'est donc l'établissement intégré qui prend toutes les caractéristiques de l'établissement intégrant. Ce n'est pas une fusion comme la loi n° 25, là.
M. Le Bel (Réjean O.): Effectivement. Sauf qu'il faut comprendre qu'en pratique ? et puis je vais laisser M. Lalumière vous répondre sur ça ? dans les faits, ce que M. Potter vous dit, c'est la réalité.
C'est que le statut linguistique est mis en vigueur ou est utilisé, à toutes fins pratiques, dans le Pavillon Argyll, qui est l'ancien établissement du Sherbrooke Hospital, où la majorité des patients anglophones se retrouve. Puis la majorité du personnel aussi qui était avec le Sherbrooke Hospital, la majorité est demeurée à cet établissement, puis, dans les faits, ça se traduit comme ça. Je vais laisser compléter la réponse par M. Lalumière, qui va vous...
Le Président (M. Copeman): M. Lalumière en premier lieu, M. Potter après.
M. Lalumière (Denis): Je confirme qu'en tout cas c'est notre compréhension, de sorte que, lorsqu'il y a eu, en date du 1er avril 2004, intégration du CHSLD Estriade à l'intérieur de l'Institut universitaire de gériatrie, ça n'a pas changé la gestion et l'organisation des soins dans les pavillons de l'Estriade. Et, quant à nous, le statut bilingue, il est appliqué à l'installation de ce qu'on appelle maintenant le Pavillon Argyll. Donc, dans notre démarche auprès de vous, il n'était pas question d'étendre le bilinguisme à l'ensemble de la mission CLSC.
Le Président (M. Copeman): M. Potter.
M. Potter (Alex G.): Peut-être un exemple que je pourrais vous donner que je ne trouve pas particulièrement brillant, mais, en tout cas. Qu'est-ce qui est arrivé à un moment donné, le Pavillon Argyll a loué une salle pour le prélèvement de sang au CLSC. J'ai rentré là-dedans, puis il n'y avait pas d'affichage anglais, puis j'ai dit: Comment ça? On m'a dit: Vu que ce n'est pas le Pavillon Argyll, c'est le CLSC, il faut que ce soit tout en français. Donc, c'est comme ça que ça... Notre statut de bilingue est très, très limité.
Mme Harel: M. le Président, c'est comme ça jusqu'à l'adoption de la loi qui est devant nous, là, la loi n° 222. Mais, après l'adoption de la loi... Moi, je ne doute pas de l'ouverture d'esprit et du directeur général, mais également de M. Potter. J'ai eu l'occasion dans d'autres forums, là, de voir son engagement puis son implication. Mais, quand on adopte des lois, c'est dans la perspective d'une pérennité qui fait qu'elle sera appliquée par d'autres éventuellement que ceux qui l'adoptent et elle sera administrée par d'autres aussi que ceux qui la proposent.
Alors, disons, dans cette dynamique, il faut voir que le statut qu'on appelle bilingue, en fait, c'est le statut qu'on retrouve à l'article 29 de la Charte de la langue française, c'est un statut qui est possible après un certain test seulement, c'est-à-dire 50 %, je pense, des usagers. Attendez, c'est un... Ah oui, un établissement... On retrouve donc le texte de 29.1: «L'office doit reconnaître, à sa demande [...] un établissement de services de santé et de services sociaux visé à l'annexe, lorsqu'il fournit ses services à des personnes en majorité d'une langue autre que le français.» Donc, c'est la règle du test de la majorité.
Et c'est donc dire qu'en faisant un seul établissement il y a danger des deux côtés, c'est-à-dire qu'il y aurait danger que l'établissement intégré perde son statut, puisque l'office peut voir une demande être déposée pour faire attribuer, accorder un statut ou pour faire retirer un statut, n'est-ce pas? Et le test, c'est donc une majorité d'une langue autre que le français, que l'office vérifie pour ensuite l'apprécier puis ensuite conclure et le décider.
Je le dis parce que je ne doute pas, là, que ça se fasse à la bonne franquette, comme on dit, là, ou à l'amiable. Il y avait une tradition du côté du CLSC, M. Potter vient de l'évoquer; il y en avait une du côté de l'institut. Mais là ça va être un seul établissement intégré, et l'intégration va faire en sorte que cet unique établissement aura nécessairement un statut.
À l'article 5, il est prévu que le gouvernement pourra modifier par lettres patentes supplémentaires toute autre disposition applicable à l'établissement. Alors, dans les lettres patentes, il va y avoir nécessairement un statut linguistique. Il y a un statut linguistique dans les lettres patentes. Quelle est l'intention du ministre à cet égard?
Le Président (M. Copeman): M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
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(12 h 20)
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M. Couillard: Bien, M. le Président, la question est fort judicieuse, et ce qu'il faut réaliser, c'est que le projet de loi actuellement ne fait pas l'intégration, je pense que Mme la députée vient de le dire. Il donne le pouvoir à l'institut d'intégrer ultérieurement le CLSC, et ceci, ça se fera d'abord par une convention d'intégration puis par l'émission de lettres patentes.
Alors, d'une part, lors de la convention d'intégration et, d'autre part, également si c'est applicable juridiquement, lors d'émission des lettres patentes, et on prendra le soin de le vérifier. Notre intention ? et il faut que ce soit très clair ? c'est de garder le statut tel qu'il est actuellement, autant pour l'Institut universitaire de gériatrie, ancien Sherbrooke Hospital, que pour la mission CLSC qui y est intégrée, et je pense que la chose sera très claire dans la convention d'intégration et, si nécessaire, également dans les lettres patentes.
Mme Harel: M. le Président, je ne crois pas que le projet de loi sursoie à l'intégration. Je ne sais pas si Me Le Bel peut nous répondre, mais, à l'article 1, le projet de loi prévoit que l'Institut universitaire de gériatrie de Sherbrooke et sa version Sherbrooke Geriatric University Institute, a pour mission d'exploiter un centre local...
M. Couillard: ...pouvoir intégrer. Si on n'avait pas cet article-là, M. le Président, ils ne pourraient pas intégrer une mission CLSC. Ça pourrait être théoriquement le CLSC de Thetford Mines, je caricature, là. Mais le fait qu'on leur change leur statut au point de vue de leur statut d'établissement au sens de la loi de santé et des services sociaux leur donne l'habilité d'intégrer la mission CLSC que, sinon, ils ne pourraient pas faire. Alors, je pense que c'est comme ça qu'il faut comprendre le premier article, M. le Président.
Une voix: Exactement.
Mme Harel: Alors donc, c'est, comme je le disais, un préalable... un préambule. Puis, ensuite de ça, qu'est-ce qui va suivre? Qu'est-ce qui va suivre, Me Le Bel?
M. Le Bel (Réjean O.): Premièrement, l'article 1 permet d'ajouter les pouvoirs qu'on n'avait pas pour pouvoir permettre, par la suite, l'exploitation d'un CLSC. Par la suite, il y a l'adoption de... la signature de la convention d'intégration et la signature par le ministre de la convention d'intégration, suivie des lettres patentes qui vont venir établir la mission de l'institut qui couvrira dorénavant le CLSC et non pas...
On ne retrouve pas de statut linguistique dans les lettres patentes. Les lettres patentes ne changent pas le statut linguistique. Les lettres patentes... Le statut linguistique ne nous est pas accordé en vertu de notre loi, il nous est accordé, en vertu de la Charte de la langue française, par le ministre.
Le Président (M. Copeman): M. le ministre.
M. Le Bel (Réjean O.): C'est deux choses complètement différentes.
M. Couillard: Cette question-là d'après moi va devoir ? et c'est une bonne chose qu'on en fasse la remarque... sera clarifiée dans la convention d'intégration, cependant. Et là il est certainement possible de le faire à ce niveau-là. Mais effectivement c'est pour ça que je me gardais une petite prudence pour les lettres patentes parce que, sur le plan strictement légal, je n'étais pas certain que ça s'appliquait là. Cependant, dans la convention d'intégration, il est clair que ceci pourra être clarifié et sera clarifié. Je mentionnerais cependant en ajoutant, M. le Président, que les relations... s'il y a un endroit au Québec où les relations sont harmonieuses entre les deux communautés, c'est bien la région de Sherbrooke, et je pense que, des deux côtés, il y a une volonté ferme de conserver les désignations linguistiques telles qu'elles sont actuellement, d'une part, pour le Sherbrooke Hospital, d'autre part, pour le CLSC.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Mme la députée.
Mme Harel: Vous savez à quel point il faut prévoir, au moment où ça va bien, dans les contrats de mariage, les dispositions pour lorsque ça va mal, n'est-ce pas? Et souvent les avocats vont nous dire que les notaires sont chanceux parce qu'eux ne voient les couples que lorsque ça va bien, dans le contrat de mariage, alors qu'eux les rencontrent lorsque ça va mal. Mais il n'y a rien de mieux que de bien planifier ce qu'il faut pour que, beau temps, mauvais temps, la résolution pacifique des conflits puisse se réaliser.
Alors, je comprends que cette question-là, même si ça va bien, si le climat est très bon, il reste que tout ça est quand même sujet, si vous voulez, à l'air du temps et aux personnes aussi qui sont en présence. Alors, je ne pense pas que la conjoncture actuelle mènerait à quelques conflits, mais je pense qu'il faut le prévoir pour les années qui viennent. Et notamment vous savez que le statut bilingue permet l'embauche de personnes unilingues. Alors, ça va jusqu'à l'embauche, ça prévoit jusque... jusque, par exemple, à la langue du conseil d'administration, par exemple. Alors, il ne peut pas y avoir, disons, mise de côté de cette question-là dans un nouvel établissement.
Bon, vous allez me dire, Me Le Bel: Ce n'est pas dans les lettres patentes. Objectivement, vous avez raison, vous venez de le dire, puis on... oui, on le reconnaît. Sauf que si ça ne l'est pas, eh bien, il pourrait y avoir par exemple une demande de retirer le statut bilingue de l'Institut de gériatrie, et l'office aurait à procéder au test de la charte et vraisemblablement pourrait conclure qu'il n'y a pas une majorité... qu'il n'y a pas de services à des personnes en majorité d'une langue autre que le français. Alors, vous voyez que, quel que soit le côté, là, que l'on regarde, que ce soit la communauté anglophone minoritaire ou la communauté francophone majoritaire, il y a besoin de convenir d'un protocole ou d'une entente sur ces questions-là. Elle ne peut pas être laissée comme ça à plus tard.
Le Président (M. Copeman): Me Le Bel.
M. Le Bel (Réjean O.): Avec tout le respect, Mme Harel, le statut linguistique, en vertu de l'article 29, tout ce que ça permet, c'est d'avoir une dénomination sociale bilingue, d'avoir un affichage bilingue, d'avoir certaines communications bilingues à l'intérieur de l'établissement, de pouvoir verser certaines pièces parfois dans les dossiers en anglais puis, chose très importante, c'est que l'établissement doit s'assurer que les services en français soient disponibles. Ça ne veut pas dire qu'on doit engager du personnel. Ça ne fait pas une obligation d'engager du personnel unilingue. Les seuls... C'est limité à ce que je viens de vous dire. Les article 26, 24, 27 et 23 de la Charte de la langue française.
Le Président (M. Copeman): M. Lalumière, vous voulez ajouter.
Mme Harel: Mais la question de l'embauche se retrouve également, là. Il y a un article qui vous manque.
Le Président (M. Copeman): M. Lalumière.
M. Lalumière (Denis): Nous comprenons... Je ne suis pas un spécialiste, je vais laisser Me Le Bel répondre à vos questions sur le plan des affaires juridiques, mais nous comprenons qu'un établissement public de santé et de services sociaux peut en tout temps demander une révision de son statut bilingue. C'est le cas actuellement. L'Institut de gériatrie, même s'il n'intégrait pas le CLSC, pourrait juridiquement... le conseil d'administration de cet établissement pourrait demander une révision de son statut.
Nous comprenons que nous n'engageons pas à cet égard le futur conseil d'administration de l'institut pour les 50 prochaines années, mais, encore une fois, il nous apparaît que la pièce légale, la loi qu'on vous demande d'adopter ne vient pas changer cette réalité qu'en tout temps un établissement peut adresser une requête pour voir son statut, en vertu de la Charte de la langue française, être modifié.
Une voix: Je crois que c'est l'article 30.
Mme Harel: Mais ça ne vient pas que du conseil. Là, je comprends, M. Lalumière, que le conseil d'administration pourrait le faire. Mais cela peut être fait par d'autres aussi, y compris par les usagers.
Le Président (M. Copeman): M. le ministre, allez-y.
M. Couillard: ...les usagers de l'Institut gériatrique de Sherbrooke pourraient demander ça. Ça ne change rien à cette réalité-là.
Mme Harel: Mais les usagers du CLSC pourraient le faire également.
M. Couillard: C'est pour ça que, lors de la convention d'intégration, c'est le moment de clarifier cette question-là. La convention d'intégration signée par les partenaires également, contresignée au niveau ministériel. Je peux affirmer encore une fois que cette question sera clarifiée et de façon très explicite, de façon ? et on demandera à nos partenaires de le faire lorsqu'ils rédigeront leur convention ? que les obligations actuelles au sens des services linguistiques sont maintenus, autant pour l'Institut gériatrique de Sherbrooke que pour le statut de la mission CLSC ou d'une installation CLSC, si on veut. Mais je pense que c'était tout à fait légitime comme remarque. Certainement qu'on prendra les démarches nécessaires pour clarifier cette question. Mais la loi actuelle n'a pas à discuter de cette question-là, puisqu'elle donne seulement le pouvoir habilitant de réaliser l'intégration.
Mme Harel: Alors, M. le Président, je voudrais, avant de terminer sur cette question, que le ministre nous précise, là, quelles sont ses intentions à l'égard de la langue d'usage dans ces institutions.
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(12 h 30)
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M. Couillard: Bien, c'est que l'état actuel soit préservé, que l'installation qu'on peut appeler Argyll ou Institut universitaire de Sherbrooke conserve les obligations qui lui sont données en raison de son statut bilingue et qu'également l'installation en CLSC conserve son statut actuel, qui est de donner des services dans la langue française, sans ajout d'obligations venant du statut bilingue de l'autre installation. Je pense que c'est la façon... Il y a des façons plus élégantes, sur le plan légal, de le dire dans la convention d'intégration, mais c'est l'intention qu'on va poursuivre certainement.
Le Président (M. Copeman): Ça m'apparaît clair, ça.
Mme Harel: Évidemment, les institutions... Vous êtes bien chanceux, vous, M. le Président. Évidemment, les établissements quels qu'ils soient doivent toujours donner les services en anglais aussi lorsque la personne le requiert. La différence, c'est que ce n'est pas institutionnel, c'est personnel; ce n'est pas l'institution qui est bilingue, c'est le service qui doit l'être, hein? Ça, je pense qu'on s'entend sur ça. Vous mentionniez, je pense, Me Le Bel l'expression le maintien... ou peut-être M. Lalumière, l'expression: Maintenant qu'il y a une seule nouvelle institution dans laquelle il y a maintien des droits acquis. Quels sont ces droits acquis auxquels vous vous référiez?
M. Le Bel (Réjean O.): En fait, il y a la question linguistique, mais il y a... Le statut universitaire et d'institution universitaire affiliée, c'est surtout ça qu'on visait. Parce que c'est très important pour l'Institut de conserver ça puis aussi la corporation propriétaire.
Mme Harel: Est-ce que vous avez une garantie du ministre sur le statut universitaire affilié?
M. Le Bel (Réjean O.): En fait, oui...
Mme Harel: Peut-être pourrions-nous lui demander également...
M. Couillard: ...un des établissements universitaires les plus rayonnants du Québec, et je le connais très bien, ayant côtoyé plusieurs des personnes qui y travaillent pendant quelques années. Et, sur le point des droits acquis, je pense qu'il est important ? et ça a été mentionné brièvement par M. Potter lors de l'introduction... La communauté anglophone de Sherbrooke et de l'Estrie en général est une communauté qui est fortement intégrée dans la communauté générale, qui s'est beaucoup impliquée dans l'organisation des soins de santé, notamment par le biais de sa fondation. La Fondation du Sherbrooke Hospital, qui bien sûr est demeurée en place lors de la dissolution en partie du Sherbrooke Hospital pour qu'il devienne l'Institut universitaire, a joué un rôle très important dans le développement des soins de santé et elle joue encore un rôle actuellement important, d'une part. Et, d'autre part, la communauté anglophone de Sherbrooke et de l'Estrie considère important sur le plan réel et symbolique à la fois de conserver cet attachement sous forme d'une corporation propriétaire. Et je pense que c'est exactement ce qu'on veut mentionner, là, par les droits acquis sur les deux plans.
Mais, pour ce qui est du statut universitaire, il est loin d'être menacé, M. le Président.
Mme Harel: Cela veut-il dire qu'il est confirmé?
M. Couillard: Bien, il est... je ne sache pas qu'il venait à échéance, là, je vous dirais, mais je pense qu'il est actuellement en cours et sans aucune menace à l'horizon.
Étude détaillée
Le Président (M. Copeman): Ça va? Comprenez qu'on a eu une discussion un peu générale. Je propose qu'on procède, mettre sous étude les articles. Alors, je mets sous étude l'article 1. Est-ce qu'il y a des questions, encore des questions, des interventions? Non. Est-ce que l'article 1 est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 2? Je ne pense pas que ça devrait poser question, hein?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 3?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 4 est-il adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 5?
Mme Harel: Sur division.
Le Président (M. Copeman): L'article 5, adopté sur division. Article 6?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. L'article 7?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. Est-ce que le préambule du projet de loi est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Je mets aux voix le titre du projet de loi. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Est-ce que le texte du projet de loi est adopté?
Mme Harel: Adopté.
Le Président (M. Copeman): Adopté. Alors, est-ce qu'il y a des remarques finales? Ça va?
Mme Harel: Est-ce qu'il reste encore du sucre à la crème?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Copeman): Ça, c'est une question à laquelle je n'ai pas de réponse. La commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux de la commission sine die.
(Fin de la séance à 12 h 34)