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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, October 12, 2004 - Vol. 38 N° 68

Consultation générale sur le projet de loi n° 57 - Loi sur l'aide aux personnes et aux familles


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 

Mme Lucie Charlebois, présidente suppléante

M. Russell Copeman, président

M. Claude Béchard

M. Vincent Auclair

M. Camil Bouchard

Mme Sylvie Roy

M. Jean-Pierre Paquin

M. Claude Bachand

* M. Sylvain Desmeules, LASTUSE

* M. Sylvain Bergeron, idem

* M. Benoit Reboul-Salze, Mouvement ATD Quart Monde Canada

* Mme Lise Boulanger, idem

* Mme France Fournier, idem

* Mme Isabelle Laurin, idem

* Mme Madeleine Caron, idem

* M. Pierre Maheux, RSIQ

* Mme Nathalie Rech, idem

* M. Pierre Gaudreau, idem

* Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-cinq minutes)

La Présidente (Mme Charlebois): S'il vous plaît! Bonjour et bon matin à tous. Je désire, d'entrée de jeu, vous rappeler que l'usage des téléphones cellulaires est interdit dans la salle. Alors, pour la bonne marche de nos travaux, je vous rappelle, s'il vous plaît, de bien vouloir prendre les mesures nécessaires pour mettre hors tension vos téléphones ou tout autre appareil.

Je vous rappelle le mandat de la commission: la Commission des affaires sociales est réunie afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Charlebois): Alors, ce matin, nous allons recevoir trois groupes, le premier étant le Lieu d'actions et de services travaillant dans l'unité avec les sans-emploi du Saguenay; deuxième, Mouvement ATD Quart Monde Canada; et, pour terminer, le Réseau Solidarité Itinérance du Québec.

Auditions (suite)

Alors, nous allons débuter avec... Je vois que les intervenants ont déjà pris place. Je crois que M. Desmeules est le porte-parole de Lieu d'actions et de services travaillant dans l'unité avec les sans-emploi du Saguenay. Alors, je vous invite à nous présenter la personne qui vous accompagne ainsi qu'à faire la présentation de votre mémoire. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire, qui va être suivie d'échanges avec les parlementaires par la suite.

Lieu d'actions et de services travaillant
dans l'unité avec les sans-emploi
du Saguenay (LASTUSE)

M. Desmeules (Sylvain): O.K. Mon nom, Sylvain Desmeules, président de LASTUSE du Saguenay, ainsi que Sylvain Bergeron, mon coordonnateur. Et je voudrais vous remercier de bien avoir voulu nous recevoir.

LASTUSE du Saguenay, Lieu d'actions et de services travaillant dans l'unité avec les sans-emploi, est un organisme de défense des droits et des... des droits sans... la défense des droits. O.K.

M. Bergeron (Sylvain): Moi, je vais y aller rapidement un peu avec les fondements des politiques sociales. Il faut se rappeler que toute politique sociale qui vise à obtenir un filet de sécurité sociale doit s'articuler autour d'un concept de droit et non de privilège. Ce à quoi on assiste, depuis plusieurs années, malheureusement, au Québec: que l'aide sociale, sécurité du revenu ? appelons-la comme on veut ? maintenant est basée sur le privilège de recevoir, alors que c'est un droit pour chaque individu et c'est reconnu dans plusieurs chartes. Rappelons d'abord la Charte des droits et libertés de la personne qui nous dit que toute personne a droit à un montant suffisant pour vivre, un montant décent pour vivre. On le répète... la même chose, on la retrouve dans la Déclaration des droits de l'homme, à l'article 22, et également au niveau de l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, que le Canada a signé également. Bref, ces politiques-là ont pour obligation d'offrir des mesures et d'offrir des services aux personnes pour les aider à s'en sortir et non à les enfoncer dans leur misère et à faire en sorte que ces gens-là n'ont pas les outils nécessaires pour progresser dans la vie.

n (9 h 40) n

M. Desmeules (Sylvain): Un programme aux facettes multiples. Après l'aide aux mères nécessiteuses, les prestations pour aveugles, le secours direct ou même les coupons de rationnement, nous avons vu, avec la loi de 1969, la démarcation entre les plus et les moins de 30 ans. En 1989, nous assistons, sous la direction des libéraux Pierre Paradis et ensuite André Bourbeau, à l'apparition de la catégorisation à l'excès des prestataires: participant, non-participant, disponible, non-disponible et les inaptes au Soutien financier. Avec la loi n° 186 de 1996, le Parti québécois a poursuivi sa stigmatisation en utilisant les termes de «sans contraintes», «avec contraintes temporaires à l'emploi», «avec contraintes sévères à l'emploi». Dans le projet de la loi n° 57, on y retrouve sept classes de citoyens, citoyennes dans quatre programmes distincts.

Discrimination et préjugés. Votre projet de loi est fondé sur la discrimination et les préjugés. Il intensifie la notion de mérite au sein de son projet de loi. On s'attaque encore aux jeunes de moins de 25 ans et en en faisant des citoyens, citoyennes de seconde zone, puisqu'ils perdent tout droit à des recours s'ils s'ont lésés dans leurs droits. Les familles monoparentales, fortement représentées par les femmes, sont discriminées. Elles sont pénalisées du fait qu'elles reçoivent une pension alimentaire pour enfants qui est déduite de leurs prestations. Je vous rappelle que la pension alimentaire pour enfants est une responsabilité parentale et qu'elle est destinée au bien-être de l'enfant.

Autre aspect fondé sur les préjugés est la vie maritale...

M. Bergeron (Sylvain): Ici, je vais vous rappeler le petit exemple qu'on cite dans notre mémoire. Le concept de vie maritale est tellement facile avec la définition actuelle que je demande d'être reconnu comme conjoint de fait avec mon chat parce que, un, il y a cohabitation; deux, le secours mutuel vu que c'est moi qui paie pour mon chat l'épicerie, et tout ça; et, pour la commune renommée, c'est évident que, s'il y avait un enquêteur qui se présentait chez moi, il me retrouverait sur le divan en train de le flatter. Donc, vous voyez, on peut pousser à l'excès le concept qu'il y a actuellement, et, comme on le sait, ça ne prend que deux des trois critères, et qu'il ne faut qu'avoir suffisamment de soupçons pour croire qu'il y a vie maritale. Et, à en croire au nombre de dossiers qu'on gagne sur ce concept-là, c'est à revoir de fond en comble, ce point-là.

M. Desmeules (Sylvain): O.K. Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et son plan de lutte. Le projet de la loi n° 57 ne respecte pas l'esprit de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui dit que le gouvernement ne peut appauvrir davantage les personnes en situation de pauvreté. La perte de la garantie de l'allocation pour contraintes temporaires à l'emploi aux personnes de 55 ans et plus, et particulièrement l'article 53 qui permettrait la saisie des prestations pour paiement du loyer, va complètement à l'encontre de cette idée. Le barème plancher est totalement absent, c'est-à-dire une prestation minimale couvrant les besoins essentiels, en deçà duquel aucune coupure ne peut être effectuée pour tous les prestataires. Et bien plus... Comment... C'est à toi, ça.

M. Bergeron (Sylvain): O.K. Nous, on a abordé, dans notre mémoire, le point régional, les régions ressources comme le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Les politiques actuelles en matière de main-d'oeuvre ne soutiennent pas les personnes à faibles revenus, et plusieurs se contredisent. Les programmes de formation sont inadaptés face aux réalités du marché, particulièrement en région. En termes de support, que dire des places disponibles en garderie, de la possibilité de formation continue et de perfectionnement si ce n'est qu'elles sont pratiquement inexistantes.

La situation économique de notre région est... on n'utilisera pas le terme de désastreuse, mais on s'y approche. On n'entrera pas en détail dans les suites, là, de la fermeture des cuves Soderberg, de l'Abitibi-Consol, mais ces deux projets-là ne sont que des exemples qui démontrent très bien que notre région a besoin d'un support important. Ce qui peut aller plus loin, on l'étend à l'ensemble de la province parce que tout le monde est égal, mais on voit que les problèmes économiques se vivent beaucoup plus intensément dans les régions ressources. Sur ce point, par exemple, il y a un taux d'emploi de 51,2 % dans notre région, ce qui veut dire qu'il y a un taux de 49 % à peu près de non-emploi. Parmi ceux qui ont des emplois, n'oublions pas qu'il y a de l'emploi précaire, temps partiel, salaire minimum. On est toujours en deçà du seuil de faibles revenus.

Une des problématiques qu'on vit en région, c'est les femmes. Un avis du Conseil du statut de la femme a très bien démontré... Je vais résumer cette étude-là en une phrase: Le pire endroit pour une femme, particulièrement monoparentale, pour vivre, au Québec, c'est au Saguenay?Lac-Saint-Jean en raison de la situation économique et des mentalités, avec les tabous qui sont menés par des politiques tel un projet de loi n° 57.

On parle beaucoup de nos régions, oui, j'ai été souvent taxé de régionaliste, et ça me fait plaisir, j'en suis fier. Je suis fier de notre région, je suis fier des régions ressources et j'irais jusqu'à dire qu'il faut ne jamais oublier que, dans une région comme la nôtre, si on veut aller faire l'épicerie ou aller à l'hôpital, souvent il faut se taper un 75, 100 Km pour le faire. Donc, les besoins financiers des personnes et des familles sont encore plus criants dans nos régions.

M. Desmeules (Sylvain): Comment voit-on la réforme? Dans son programme électoral, le Parti libéral du Québec, dans une introduction signée par la main du chef Jean Charest, dit ceci: «Nous serons guidés par les valeurs qui ont bâti le Québec: appartenance à cette société unique en terre d'Amérique, respect des libertés individuelles, promotion des idéaux de justice sociale, répartition de la richesse, prospérité économique, partenariat avec les groupes socioéconomiques et communautaires.»

L'esprit. Le gouvernement digne de ce nom se doit de mettre fin aux politiques qui attribuent des étiquettes aux citoyens et citoyennes et d'agir dans un souci d'équité et d'exemple envers la population qui l'a mis au pouvoir. Investissons dans l'avenir.

Fiscalité et sécurité du revenu. La fiscalité doit servir les citoyens et citoyennes et non des intérêts corporatistes. Lutter contre la pauvreté est une affaire qui concerne tout le monde, étant les citoyens et citoyennes que le gouvernement et le patronat... autant. Pour y arriver, il faut toutes et tous aller dans la même direction et toujours mettre les personnes au coeur des orientations et des décisions qui les concernent. La qualité de vie d'un être humain n'a pas de prix, et aucun gouvernement ou dirigeant politique ne peut cautionner ou augmenter la misère. Cela amènera des économies à long terme, une société en meilleure santé mentale et physique, une hausse de la consommation, ce qui entraînera de la création d'emplois et l'augmentation des revenus gouvernementaux par les taxes et les impôts. Bref, c'est un investissement social et économique, de se doter d'une vision fiscale à long terme.

D'assisté-e-s à citoyen-ne-s. Le projet de la loi n° 57 ne répond pas aux aspirations de la société québécoise, dont celle mentionnée par le premier ministre, à savoir la promotion des idéaux de justice sociale et de répartition de la richesse. Pour ce faire, cette réforme se doit d'éliminer toute discrimination et toute stigmatisation que nous vous avons citées un peu plus haut.

n(9 h 50)n

M. Bergeron (Sylvain): Ici, nous vous avons dit tout à l'heure que le projet de loi n° 57 ne correspond pas à la loi n° 112, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Nous avons dit qu'une réforme de l'aide sociale doit s'axer sur une véritable application de la loi n° 112. Il y a quelques points qui sont importants et essentiels à faire partie d'un projet de loi comme tel et d'ailleurs de l'appliquer dans la loi n° 112. C'est: un, d'abord une clause d'impact obligeant l'ensemble du gouvernement à travailler pour éliminer la pauvreté; le non-appauvrissement du cinquième le plus pauvre de la population; un barème plancher, comme on disait tout à l'heure, un réel barème plancher tel que défendu par les groupes communautaires comme le nôtre, c'est-à-dire qui assure la couverture des besoins essentiels, en deçà duquel on ne peut effectuer aucune coupure; la gratuité des médicaments pour les personnes à l'aide sociale et les personnes recevant le supplément du revenu garanti.

La pension alimentaire pour enfants doit être totalement exemptée. On vous rappelle que c'est une responsabilité parentale, que le ministère du Revenu, soit au fédéral ou provincial, ne le considère pas comme un revenu, alors qu'à l'aide sociale ça le devient. C'est un peu une incohérence en termes gouvernementaux.

L'accès au soutien en emploi qui doit être adapté, oui, au marché du travail, mais également aux personnes. Combien de fois j'ai dû répondre dans ma vie que j'ai fait le choix de faire du travail social et un peu de droit parce que j'adorais ça, pas parce qu'il y avait des débouchés. Et je travaille là-dedans, et j'adore mon travail. Et, depuis que j'ai fait cette formation-là, je travaille tout le temps parce que c'est un emploi qu'on adore. Lorsqu'on n'aime pas notre emploi et qu'on n'a pas le soutien nécessaire pour se perfectionner, c'est difficile de poursuivre.

On demande une hausse du salaire minimum qui arriverait à couvrir le seuil de faibles revenus. Quand on parle de lutte à la pauvreté, ce n'est pas que les personnes vivant de l'aide sociale ou de faibles primes de l'assurance-emploi, c'est les travailleurs précaires, c'est les travailleurs au salaire minimum qui arrivent très difficilement également.

On demande également la construction de logements sociaux, d'abord de respecter les engagements qui ont été pris depuis les dernières années.

Et l'instauration d'un impôt progressif, mais un véritable système d'impôt qui va faire en sorte que les gens vont payer leur juste part d'impôts et qu'il n'y aura pas de façon de s'en sortir, qu'une personne qui gagne 15 000 $ ne paiera pas la même affaire que quelqu'un qui gagne 60 000 $. C'est qu'il faut revoir l'ensemble de la fiscalité. Bref, si on revient à une étude qui a déjà été faite par un gouvernement du Québec... Et ça avait même été commenté par Lucien Bouchard lors des forums nationaux, les grands chantiers nationaux, où Lucien Bouchard affirmait: «Il faut revoir de fond en comble la fiscalité pour que la fiscalité profite aux citoyens et non aux grandes corporations.»

Bref, pour nous, notre présence ici n'est qu'un début pour en arriver à une véritable réflexion et à l'implantation d'un revenu social garanti, tel qu'il vous a été présenté la semaine dernière par le Front commun des personnes assistées sociales du Québec.

On sait que, puisque l'économie est en croissance tout en nécessitant de moins en moins de travailleuses et de travailleurs, le travail salarié ne peut plus jouer son rôle comme auparavant. Ce n'est plus par le travail qu'on peut avoir une reconnaissance sociale. Il faut reconnaître la participation citoyenne, l'implication des personnes. Le simple fait de s'entraider entre voisins doit être reconnu dans un projet de revenu social universel garanti.

Pour ne pas conclure ? on appelle toujours nos conclusions de cette façon-là parce qu'on ne veut pas s'en arrêter là ? ce n'est qu'un début, comme je viens d'expliquer. Il faut que le projet de loi n° 57 soit retiré pour en arriver à analyser un véritable projet de réforme de l'aide sociale qui répondra vraiment aux convictions du Québec, qui n'aura aucun préjugé à l'intérieur, aucune discrimination et aucune catégorisation et stigmatisation des prestataires. Tout citoyen, on devient citoyen en naissant. On ne mérite pas d'être citoyen, donc tout le monde a le droit d'avoir un niveau de vie décent. Et c'est pour cela, M. Béchard, que tout à l'heure nous vous remettrons... Vous avez déjà entendu parler de notre campagne, sûrement, parce qu'on en a envoyé plusieurs. Suite à la discrimination que l'on retrouve à notre avis dans ce projet de loi là, nous vous remettrons un constat d'infraction de propos politiques ou actions discriminantes à l'égard des personnes en situation de pauvreté. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, afin de débuter l'échange, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Béchard: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue à vous tous ce matin, en cette deuxième semaine. Et bienvenue à MM. Desmeules et Bergeron. Merci de votre présentation.

Il y a plusieurs points dans votre présentation. Vous savez, vous amenez un certain nombre de remarques. Et je comprends votre demande de me demander de retirer le projet de loi, et tout ça, sauf qu'en même temps que je vous entends il y a plusieurs des points sur lesquels vous amenez des remarques et sur lesquels je serais tenté de vous dire: Mais c'est exactement ce qu'il y a dans le projet de loi. Reconnaissance de la participation citoyenne, là, prime à la participation, c'est ça. Le plan de lutte à la pauvreté, c'est ça qu'on vise, c'est de reconnaître la participation à l'entraide et de faire en sorte que les gens qui réintègrent le marché du travail ne le font pas uniquement et totalement toujours par des programmes d'Emploi-Québec ou des programmes de réinsertion, mais de reconnaître aussi la participation.

L'autre point sur lequel... quand vous amenez les valeurs qui ont bâti le Québec, dont on parlait, dont le premier ministre parlait, le respect de la liberté individuelle au niveau de la participation, les idéaux de justice sociale, la répartition de la richesse, ce sont des principes qui sont à la base aussi du plan de lutte à la pauvreté qu'on a déposé, de 2,5 milliards, en avril dernier, qui sont là. Quand vous amenez aussi des points sur le barème plancher, bien le barème plancher, il est là. On a aussi une indexation qui est prévue dans le plan de lutte à la pauvreté.

Alors, je vous dirais que je comprends, parce que c'est un mot d'ordre qui a été passé, là: tout le monde demandait directement ou indirectement de retirer le projet de loi. Mais le projet de loi ne sera pas retiré. On ne dépose pas un projet de loi pour le retirer deux semaines après, ce n'est pas ça. Le projet de loi est basé sur le plan de lutte à la pauvreté, est basé sur le dernier budget, est basé sur nos engagements électoraux, et il n'y a pas de surprise dans le projet de loi. Pour ceux qui nous ont suivis depuis un an et demi, il n'y a pas de surprise, ça se situe dans la continuité.

Et, quand vous dites qu'il y a de la discrimination ou des préjugés envers les jeunes, là il y a peut-être un point sur lequel on ne se comprend pas, là, parce que c'est exactement le contraire qu'on veut faire. On veut éviter, avec le programme Alternative jeunesse, cette discrimination-là que les jeunes ont souvent quand on leur colle une étiquette, on leur dit: Ah bien! Voici, vous êtes des assistés sociaux, vous êtes sur la sécurité du revenu. Avec les différents programmes qu'on a commencé à mettre en place et qu'on va continuer de mettre en place, Solidarité jeunesse, Conciliation travail-études, Ma place au soleil, ce sont tous des programmes qui répondent à des caractéristiques bien particulières des jeunes, qui nous sont demandés par les jeunes. Ce n'est pas moi, dans mon bureau, qui tout à coup a pensé à ça, dire: Aïe, wow! Ce serait une belle approche. Non, les jeunes, sur le terrain, c'est ce qu'ils nous demandent. Solidarité jeunesse, c'est un succès, puis ça a été mis en place par l'ancien gouvernement. Alors, je vous le dis, c'est un succès, c'est un beau modèle. Puis on continue avec Conciliation travail-études, que, nous, on a mis en place puis qui fonctionne très, très bien aussi. Et il va y en avoir de plus en plus, de ces programmes-là, parce qu'il faut répondre aux particularités de chacune des clientèles et de chacune des régions.

Je suis très sensible à ce que vous disiez au niveau des particularités de votre région. Moi aussi, je viens d'une région, puis ce n'est pas plus facile dans le Bas-Saint-Laurent, et ce n'est pas plus facile au Saguenay?Lac-Saint-Jean, ce n'est pas plus facile en Gaspésie. C'est pour ça qu'on essaie d'avoir le plus de programmes particuliers, notamment chez les jeunes. Alors, moi, je n'appelle pas ça de la discrimination, parce qu'il y a un programme de base, une prestation de base, et il n'y a pas de discrimination. Il n'y a même pas de caractère obligatoire sur lequel on dit: On va vous couper si vous ne l'avez pas. Alors là, j'aimerais comprendre, là, pourquoi, ce matin, vous arrivez puis vous me dites que finalement Alternative jeunesse, là, comme vous dites à la page 6 de votre mémoire, crée une catégorie de citoyens de seconde zone. Est-ce que c'est ceux qui ne participent pas qui deviennent dans la seconde zone ou ceux qui participent, selon vous?

M. Bergeron (Sylvain): Si vous me permettez de répondre...

Le Président (M. Copeman): M. Bergeron.

M. Bergeron (Sylvain): ...il y a plusieurs points que vous avez soulevés. D'abord, votre question, ce qu'on relève à la page 6 avec Alternative jeunesse, où on dit que vous créez des citoyens de seconde zone, c'est dans le sens où ils perdent le droit de contester une décision. C'est ce qu'on avait lu dans les documents qui ont été sortis et dans la conférence de presse, entre autres, à laquelle on avait assisté, à la télévision.

n(10 heures)n

Juste reprendre un peu, vous avez parlé de la prime à la participation qui est dans le projet de loi n° 57. De la façon qu'elle était inscrite actuellement, c'est une prime au mérite: si on participe, on a la prime. Et l'indexation que vous avez soulevée, l'indexation complète de la prestation sera effective seulement si vous participez à une mesure ou si vous avez des contraintes à l'emploi. Donc, c'est de la discrimination, on ne traite pas les citoyens sur un pied d'égalité. C'est à ce niveau-là qu'on l'amène.

Vous nous ramenez le barème plancher, le barème plancher que... ce que vous appelez le barème plancher, c'est la non-coupure de 150 $ pour refus d'emploi ou pour quitter un emploi. Ce n'est pas un barème plancher comme nous le revendiquons depuis une quinzaine d'années. Le barème plancher, c'est une prestation couvrant les besoins essentiels et en deçà duquel on ne peut aller plus bas.

Pour la question des préjugés, je pense que je viens d'en faire état. Par exemple, on crée sept classes de citoyens. C'est-à-dire il y a quatre nouveaux programmes plus... à l'intérieur, il y a les participants, non-participants, avec contraintes, sans contraintes. On revient finalement à la loi de 1989 avec plein de gens où la crainte qu'on a, c'est que, quand on dit qu'il y a une discrimination entre... on entretient la discrimination, c'est que le système d'aide sociale va venir en sorte que les gens vont se dénoncer entre voisins juste en espérant de pouvoir avoir plus, alors qu'ils n'auront jamais plus.

Le Président (M. Copeman): M. le ministre.

M. Béchard: Oui. Bien, écoutez, je vous dirais qu'au niveau, premièrement ? puis je l'ai mentionné la semaine passée, je vais le redire ? de l'Alternative jeunesse, là, il n'y a pas de perte de droits, au contraire. Il faut faire attention. Les droits dont vous me parlez, c'est d'avoir un droit de recours quand, par exemple, au niveau d'Emploi-Québec, on dit que quelqu'un a, oui ou non, accès à une mesure. Et, dans ces cas-là, effectivement il n'y a pas de droit de recours, et ça, c'est là. Mais, au niveau des recours sur les programmes, Solidarité jeunesse avant n'y était pas. Là, il va y avoir des recours au niveau de Solidarité jeunesse. Même chose au niveau de Conciliation travail-études et au niveau de tous les programmes d'alternative jeunesse, il va y avoir des recours. Alors, on élargit le droit de recours pour les gens qui participent à ces mesures-là. On ne les enlève pas, on les élargit.

Deuxièmement, ça me préoccupe toujours parce que, au niveau du barème plancher, quand les gens reviennent avec l'indexation, ça revient toujours avec un peu la même chose. Avant, il n'y en avait pas, d'indexation d'annoncée, c'était, à chaque fin d'année, dépendamment des possibilités, des capacités financières du gouvernement. Là, on arrivait puis on décidait: Oui, il va y avoir une indexation ou il n'y en aura pas. Le gouvernement précédent a choisi, pendant quatre ans, de ne pas indexer. Puis en plus le gouvernement précédent a aussi coupé. Il y avait des coupures quand les gens refusaient de participer. Alors, je trouve qu'on a fait quand même des pas de géant. Je comprends très bien qu'on ne se rend pas aussi loin que vous le voudriez. Ça, j'en suis parfaitement conscient, je l'entends depuis le début de la commission parlementaire. Mais, d'un autre côté, je vous dirais qu'on a quand même fait des pas de géant comparativement à la situation où l'indexation devenait au bon droit de regard et à la bonne humeur du ministre, du ministre des Finances, du premier ministre en chaque fin d'année. Là, on l'a indiqué dans le plan de lutte, il va y avoir une indexation année après année, et elle sera même, cette indexation-là, prévue pour les gens qui sont aptes au travail. Il va y en avoir une et, avant ça, pendant quatre ans, il n'y en avait pas eu.

Au niveau du barème plancher, je comprends qu'il n'est peut-être pas assez haut et j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est à quel niveau qu'il faudrait que ce barème-là soit et combien ça pourrait représenter comme effort financier de la part du gouvernement. Puis pas juste du gouvernement, parce que c'est de la part de tous les citoyens, des contribuables du Québec aussi. Alors, sur ce barème plancher là, moi, je vous dirais que présentement, là, on a enlevé ? et parfois on s'est fait critiquer assez fortement là-dessus ? le caractère obligatoire de participer, que, si les gens ne participaient pas, ils avaient des coupures. Et là, même en cas de non-participation, qu'on dise qu'elle est moins élevée que prévu, je veux bien, mais il y aura quand même une indexation.

Et l'esprit qui anime ce projet de loi là, comme l'esprit qui anime le plan de lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale, c'est le principe de dire: Chaque fois que quelqu'un est en mesure, ou souhaite, ou a la capacité, ou désire, ou peu importe comment on le dit, participer, que le gouvernement soit là pour les aider, pour s'assurer que ce soit toujours plus valorisant, plus payant, plus... qu'on ait plus d'appui quand on veut participer. Et c'est ce qu'on fait.

Alors, moi, je veux revenir sur un des points, d'abord, au niveau d'Alternative jeunesse, de dire que je ne vois pas comment on peut dire qu'il y a des pertes de droits. On les augmente, on permet des droits de recours là où il n'y en avait pas. Et, deuxièmement, au niveau du barème plancher, moi, j'aimerais bien savoir à quel niveau vous fixez le barème plancher, parce que je pourrais... Mais je ne peux pas dire à quel point, à quel niveau le barème plancher partait sous l'ancien gouvernement dans leurs hypothèses, et on le rend, nous, à 100 %. Vous, j'imagine que vous le rendez plus haut que ça. Donc, à quel point vous fixeriez le barème plancher, vous, si vous étiez à ma place, demain matin?

Le Président (M. Copeman): M. Bergeron.

M. Bergeron (Sylvain): Bon. Vous avez relevé Solidarité jeunesse, Conciliation études. Pour nous, ce ne sont pas des programmes de type comme le Programme de l'aide sociale, ce sont des mesures complémentaires qui permettent aux personnes... En politique sociale, on fait beaucoup de démarcations dans ce sens-là. Le recours, il existe déjà. Même si on dit qu'il n'existe pas, il existe déjà. On appelle ça la révision administrative. Par contre, lorsqu'on lit la description d'Alternative jeunesse, on ne le voit pas.

Vous nous rappelez qu'avant il n'y avait pas l'indexation. J'aurais tendance à vous dire: Vous ne pensez pas qu'on restait assis à attendre que tout à coup il y ait une indexation, on critiquait. À chaque année, on disait ce qu'on avait à dire, parce que, si on refuse d'indexer une portion de la population, c'est de dire que ce n'est pas des citoyens à part entière comme tous les autres. Peu importe le gouvernement, on a toujours revendiqué les mêmes choses. Nous, on travaille pour les personnes. Que ce soient les libéraux, les adéquistes, les péquistes, «whatever», on a toujours défendu le droit des personnes à un revenu décent.

Vous parlez que les personnes qui sont aptes ne recevront pas l'indexation complète, ce sera la moitié de l'indexation. Encore là, c'est comme dire: Bien, comme vous ne participez pas à une mesure puis vous êtes apte, bien vous n'êtes pas un citoyen à part entière, vous êtes rien qu'un demi-citoyen, on vous donne rien qu'une demi-indexation. À ce compte-là, dans notre région, j'irais à exiger que l'on coupe les subventions de moitié à Alcan et à la Consolidated-Bathurst qui utilisent ces subventions-là pour améliorer leurs usines et sacrer le monde dehors. On a perdu plus de 2 000 emplois dernièrement. Dans cinq ans, ces 2 000 emplois là vont devenir 11 000 à cause des effets de répercussion dans la région. Si on veut vider une région, c'est une très belle façon de faire. Donc, à ce niveau-là, quand on parle d'équité, de justice sociale, ce qui est bon pour une grande entreprise multinationale peut l'être, bon, pour une personne qui a de la difficulté à manger à tous les jours.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vimont et adjoint parlementaire au ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Auclair: Merci, M. le Président. M. Desmeules, M. Bergeron, vous avez parlé et vous avez mentionné qu'on faisait de la discrimination dans le cadre du projet de loi n° 57 parce qu'on crée sept catégories de citoyens ayant recours à l'aide sociale. Moi, je vous dirais plutôt que c'est dans le fond... Lorsqu'on parle des jeunes, il ne faut pas les traiter de la même façon que... ou ils n'ont pas les mêmes réalités, devrais-je dire, qu'une personne qui a 55 ans. Je sais que les besoins de base... Je suis tout à fait d'accord avec vous qu'il y ait des besoins de base, ça, il faut y voir. Mais, d'un autre côté, il faut s'assurer que ces jeunes-là, entre autres ? je vais prendre l'exemple des jeunes ? on puisse les aider justement, les amener dans un cheminement qui va faire en sorte qu'ils vont s'en sortir, hein? L'objectif de l'aide, de cette loi-là ou même de tout le programme, c'est d'aider les gens pour qu'ils s'en sortent le plus gros possible. On sait très bien qu'on ne pourra jamais avoir 100 %. On sait qu'il y a des gens malheureusement qui sont dans une situation qu'ils vont prendre plusieurs années à s'en sortir, d'autres qui ne vont jamais s'en sortir pour certaines réalités. C'est pour ça que, quand vous dites de discrimination, moi, je vous dirais plus d'éviter justement de faire un programme de mur-à-mur et d'adapter justement à certaines réalités, des réalités qui sont vécues par ces gens-là.

Donc, est-ce que vous voyez, vous... Est-ce que vous voyez juste une catégorie, puis on met ça mur à mur pour tout le monde, le même système?

M. Bergeron (Sylvain): O.K. Quand on parle de discrimination, la stigmatisation, l'étiquetage est de la discrimination. Je rappellerai bien humblement, M. le Président, on se rappelle il y a quelques années où je travaillais dans un autre type d'organisation au niveau des personnes handicapées, on parlait de citoyens à part égale pour les personnes handicapées, on ne voulait plus être considéré comme un fauteuil avec quelqu'un dedans, un fauteuil roulant, et l'autre est une personne qui marche. Et c'est la même chose, un programme de sécurité du revenu ou un filet de sécurité sociale doit considérer que toute personne est un citoyen ou une citoyenne à part entière au même titre que n'importe qui d'autre dans la société. Que tu aies un travail, que tu t'appelles Pierre Karl Péladeau ou que tu sois un itinérant, tu es un citoyen. La seule différence, c'est qu'il y en a un qui paie plus d'impôts que l'autre, puis encore je ne suis pas sûr.

n(10 h 10)n

Quand on parle au niveau de la discrimination, oui, ça prend un programme qui reconnaît que tout le monde est égal. Ça ne veut pas dire que, comme par le passé, soit avec les péquistes ou... Comme vous avez relevé tout à l'heure, il y a d'autres programmes qui ont été créés pour aider... des mesures ? excusez, on va revenir avec les bons termes ? des mesures adaptées à certaines personnes. Je reviens avec l'exemple des personnes handicapées, pour le travail, il y a eu les contrats d'intégration au travail à un moment donné, des choses comme ça. Donc, vous voyez un peu, un programme qui considère tout le monde sur un même pied. Par contre, des mesures pour aider, pas pour obliger. Je me rappelle, M. Béchard, au printemps ou à la fin de l'été, vous parliez: C'est fini, le bâton avec les personnes à l'aide sociale. Mais, de là à dire: Si tu ne participes pas, tu n'as pas ton indexation, c'est un coup de bâton. Je suis désolé, nous, c'est de même qu'on le perçoit. Je dis «nous» parce que nous avons consulté nos membres qui sont des prestataires de la sécurité du revenu.

Et je reviendrais à la question, si vous permettez, de M. Béchard que j'ai oublié de répondre tout à l'heure. Le barème plancher, vous vouliez qu'on chiffre. Je ne vous donnerai pas le chiffre précis de ce que doit être, je vais vous donner deux chiffres. À l'annexe 3 de notre mémoire, vous avez pu constater qu'en 1996 le gouvernement du Parti québécois avait établi que les besoins reconnus pour couvrir les besoins essentiels ? et on ne parle même pas de loisirs, là, on ne parle même pas d'un 2 $ par semaine pour aller au cinéma, là ? et ce n'est même plus ça, en 1996 c'était ça, on parlait de 667 $ par mois. Si on fait juste une extrapolation à 2 % du coût de la vie ? on sait qu'il y a des années elle était beaucoup plus que 2 % ? aujourd'hui, en 2004, ça devrait être, la couverture de besoins essentiels, à 777 $. Si on pousse encore plus loin, à partir du seuil de faibles revenus de Statistique Canada, l'ordre des syndics de faillite... je ne me souviens pas le nom exact, là, mais du Canada estime qu'une personne ayant 1 643 $ et moins par mois n'a pas les moyens de vivre. Ils commencent à 1 643 $ pour dire qu'une personne peut vivre, et c'est des syndics de faillite.

Le Président (M. Copeman): M. le député.

M. Auclair: Merci. Un autre éclaircissement que j'aimerais avoir, c'est que vous parlez beaucoup, dans votre document, de reconnaissance maritale. Vous semblez ne pas en avoir contre le principe, du principe qu'il faut qu'on fasse une distinction dans les lois antérieures et dans la loi actuelle puis qu'on fasse une distinction au niveau de la reconnaissance maritale, mais ce que vous en avez, c'est pour justement le fait que les critères, bon, semblent être établis d'avance, puis, bon, c'est très difficile à jouer avec. Comment vous l'établiriez, vous, la reconnaissance maritale? De bonne foi des gens? Est-ce que vous iriez juste avec la bonne foi, dire: Bon, O.K. Vous vous déclarez, ou on va plus loin avec le rapport d'impôts et autres?

M. Bergeron (Sylvain): O.K. Dans notre mémoire, je l'ai mentionné, je dis: La vie maritale, la façon qu'elle est définie actuellement, vous me nommez deux personnes, je suis capable de vous les marier comme ça, parce que ça ne prend que deux des trois et que ça ne prend que des soupçons.

Soyons clairs, j'ai des enquêtes... O.K. Je fais de la représentation en révision et, bon, je reçois des rapports d'enquête. C'est sûr que je n'ai pas les noms des tierces personnes. Par contre, je démolis la moitié... 75 % des rapports d'enquête que j'ai, je les démolis sans avoir besoin d'argumenter très fort, parce que ce ne sont que des soupçons. Ce que l'on dit, le concept de la vie maritale, oui, ça doit être présent lorsqu'il y a véritablement une vie de couple. Il faut la prouver, il ne faut pas juste la soupçonner. C'est trop facile à couper les gens juste parce qu'on a besoin, une année, d'équilibrer le budget du ministère, de dire: Bien là, cette année, on va aller sur le concept de la vie maritale et on va en prendre un peu plus, là. C'est trop facile.

Et, je vais être sincère avec vous, on le soupçonne déjà parce que, depuis le printemps dernier, la hausse de demandes de révision pour vie maritale que l'on a dans notre région, elle est incroyable. C'est du 400 % de hausse dans les dossiers de vie maritale. Et là-dessus, je dirais, sur les 136 derniers dossiers qu'on a reçus, au bureau, sur la vie maritale, on a réussi à démontrer dans à peu près 115 des cas qu'il n'y avait pas de vie maritale. Donc, c'est extrêmement facile avec la définition qu'il y a actuellement. Il faut vraiment améliorer la façon d'évaluer le concept de vie maritale.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de solidarité sociale.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Si vous permettez, je vais revenir sur... Et j'aurais besoin de l'attention du ministre là-dessus parce que je vais l'interpeller, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Semble-t-il, j'ai manqué un bout.

M. Bouchard (Vachon): Non, non, j'aurais besoin de l'attention du ministre parce que je vais l'interpeller à travers vous sur une question précise. Non, ça va.

Le Président (M. Copeman): Oui, mais l'attention du ministre est considérée acquise, M. le député. Allez-y.

M. Bouchard (Vachon): O.K. Merci. D'abord, bonjour aux représentants de LASTUSE. Vous avez soulevé la question encore une fois du droit de recours et vous maintenez dans votre position que les droits de recours sont éliminés en ce qui concerne les programmes spécifiques et Alternative jeunesse. C'est votre position. C'est la lecture que plusieurs groupes auront faite de ces dispositions du projet de loi d'ici la fin de la commission.

Le ministre a réagi à cette affirmation-là en disant que, non, le droit de recours était bel et bien inscrit dans la loi. Dans le fond, on va être pris avec cette question-là jusqu'à la fin de ces séances de la commission, et ce que j'offrirais maintenant, M. le Président, au ministre, c'est de consulter ses avocats qui sont ici présents et de voir s'il ne peut pas nous amener une réponse claire à cette question des droits de recours, parce que c'est comme si c'était la parole de l'un contre la parole de l'autre, et peut-être le ministre a-t-il des indications précises sur où, dans la loi, le droit de recours est-il protégé en ce qui concerne Alternative jeunesse et les programmes spécifiques. Moi, je n'aurais aucun problème, M. le Président, à ce que le ministre reprenne la parole avec l'aide de son personnel pour pouvoir éventuellement clarifier cette position-là. Mais seulement là-dessus, le droit de parole seulement là-dessus.

Le Président (M. Copeman): M. le député, je ne peux pas limiter le droit de parole de qui que ce soit. Si on accorde le droit de parole au ministre, il va exercer son droit de parole. Je ne peux pas commencer à mettre des limites sur qu'est-ce que le ministre va dire. Il faut qu'on s'entende là-dessus, j'espère. Alors, c'est sur votre temps, M. le député. Si vous cédez un peu de votre temps pour le ministre, allez-y. Sinon, continuez votre présentation.

M. Bouchard (Vachon): Alors, le ministre n'a pas fait la démonstration d'une très grande collaboration jusqu'à maintenant, et j'ai un petit peu de craintes qu'il utilise le temps sans répondre à la question. Et, s'il répond à la question, je n'ai pas de problème avec ça, mais il peut prendre la question en délibéré et nous donner sa réponse plus tard, dans ses prochaines interventions. Parce que ses interventions, lorsque les groupes soulèvent les questions, sont extrêmement longues et donc hypothèquent la capacité des groupes d'intervenir. Donc, j'espère que le ministre pourra répondre à cette question-là d'ici la fin de la matinée, avec l'aide de son personnel: Où, dans la loi, ces droits de recours sont-ils protégés, notamment dans Alternative jeunesse ? et j'espère qu'on aura la réponse à votre question avant que vous ne quittiez, cet avant-midi ? et aux programmes spécifiques?

Deuxièmement, sur la question du barème plancher, je voudrais tout simplement souligner en passant, puisque vous êtes des intervenants, des citoyennes et des citoyens qui sont engagés dans la protection des droits notamment à une vie décente et la couverture des besoins essentiels, que le ministre a pris l'habitude, depuis le début ? ce n'est pas une longue habitude, j'espère qu'il va la perdre ? de demander aux groupes de définir le barème plancher. Or, le ministre, vous le savez bien, dispose d'outils qu'il n'utilise pas, qu'il n'a même pas créés, comme, par exemple, le comité consultatif prévu par la loi n° 112 à partir duquel il pourrait avoir des indications, des indications qui viendraient d'un groupe indépendant à savoir quels sont les besoins essentiels reconnaissables et reconnus, jusqu'à quel point on est éloigné de ces besoins essentiels ou de la couverture des besoins essentiels et quels sont les moyens qu'il compte entreprendre ou adopter pour arriver à couvrir les besoins essentiels. Alors, le ministre fait du boomerang avec les questions qui lui sont posées sur cette question-là parce qu'il n'a pas de réponse encore, mais on espère que, d'ici la fin de la commission, il nous annoncera la création du comité consultatif selon la loi n° 112 et sa composition et qu'il nous dira dans quel délai il entend répondre à cette question-là.

Vous soulevez, dans votre mémoire aussi ? et c'est de façon très intéressante ? la question de la spécificité des programmes offerts à Emploi-Québec. J'aimerais vous entendre là-dessus et vous entendre aussi sur comment Emploi-Québec est en mesure de répondre aux demandes des personnes qui veulent une formation et qui veulent une intégration réussie à l'emploi. Alors, je vous écoute. J'aurai quelques questions sans doute plus précises.

Le Président (M. Copeman): M. Bergeron, allez-y.

n(10 h 20)n

M. Bergeron (Sylvain): Je vais répondre par les expériences personnelles que l'on a au bureau. Le gros problème qu'on voit avec Emploi-Québec actuellement, à part les coupures, là, qui fait que les gens... il y a moins de services, c'est que ça va dépendre de la bonne volonté de l'agent, de la bonne humeur de l'agent. Les critères sont tellement vastes et difficilement bien décrits que, si une personne présente sa demande et que c'est monsieur X qui le reçoit comme agent, il sera accepté, alors que, monsieur Y, c'est un non automatique.

Puis, quand on parle de spécificité au niveau des formations, il faut que les formations soient adaptées, pas juste au niveau... il ne faut pas que ce soient juste des programmes et des mesures de formation ou d'employabilité qui sont uniquement pensées dans un bureau, dans une tour à bureaux à Montréal ou à Québec parce que les problématiques en région sont différentes. Quelqu'un qui va à Emploi-Québec à Chicoutimi, ou à Jonquière, ou à La Baie, leur dire: Bien, regarde, les voies d'avenir, c'est l'infographie ou tout ce qui est électronique, l'informatique, c'est malheureux, mais ce n'est pas dans notre région, ces emplois-là. Les emplois, dans notre région, ça a rapport avec la forêt, les mines. Il faut offrir ces opportunités-là aux personnes pour permettre à nos entreprises de chez nous de croître également, de pouvoir bénéficier des mesures d'employabilité d'Emploi-Québec, du support d'Emploi-Québec, ces entreprises-là, qui va faire en sorte qu'on va créer de l'emploi dans la région ? et dans toute autre région, là, je parle de notre région parce que je la connais bien.

Et, pour ça, il faut en arriver à avoir des visions à long terme en termes de gouvernement. Il faut arrêter de penser en termes de quatre ans pour pouvoir être réélu aux prochaines élections. Si on investit dans l'emploi, la création d'emplois, en fonction de chacune des régions du Québec, qui va permettre de développer les entreprises, de développer les personnes, que les personnes se sentent partie prenante de l'entreprise où ils vont travailler, ils vont pouvoir se perfectionner, à long terme ça va être profitable au Québec parce que ça va être tout des retours au niveau des taxes, des impôts, la consommation qui va accroître dans la région, donc création de nouveaux emplois. On n'arrêtera pas, c'est là-dessus qu'il faut... Quand on dit qu'il faut revoir la fiscalité en profondeur, il faut se donner des visions à long terme, particulièrement au niveau de qu'est-ce que l'employabilité en région versus les grands centres.

Le Président (M. Copeman): M. le député.

M. Bouchard (Vachon): Toujours sur cette question d'offre de formation à Emploi-Québec, tout le monde sait maintenant, là, qu'il y a eu des coupures dans le budget d'Emploi-Québec. Votre région a été évidemment touchée par ces coupures. Je pense que le chiffre tourne autour du million, là, de coupures dans la région du Saguenay et du Lac-Saint-Jean. Est-ce que vous voyez des effets de ces coupures-là maintenant dans les bureaux d'Emploi-Québec? Et comment ça se manifeste, le cas échéant?

M. Bergeron (Sylvain): Au niveau de comment est-ce qu'on les voit, oui, il y a de moins en moins de gens qui peuvent répondre... de moins en moins d'agents plutôt, et il y a de moins en moins d'acceptations au niveau des programmes, des mesures de création d'emplois ou de formation. On doit se battre, on doit passer par les pouvoirs discrétionnaires, on doit passer par la direction régionale pour faire admettre des gens dans des formations. Ça devient aberrant. Et je ramène encore à la question du régionalisme, je regarde ça dans notre région, on a peur. On se pose la question, et je l'ai dit dans mon mémoire, excusez le québécisme, là, mais ça fait peut-être baveux de l'avoir posée de cette façon-là, mais est-ce que l'intention des gouvernements actuels est de vider les régions en ne permettant pas aux personnes d'y rester et d'y vivre sainement et décemment?

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, dans le projet de loi, le ministre biffe la référence au Bureau des renseignements et plaintes. Nous l'avons déploré, et plusieurs groupes l'auront déploré également d'ici la fin de la commission. Le ministre réagit en disant: Écoutez, contrairement à ce que vous pensez, nous nommons désormais l'obligation du ministre à s'occuper des plaintes, et on remplacera le bureau par quelque chose de mieux que ça. Bon.

Est-ce que, dans votre pratique d'accompagnement à la fois social et légal auprès des personnes qui s'adressent à vous, vous voyez des motifs à éliminer le Bureau des renseignements et plaintes? Et, si oui, par quoi vous aimeriez le voir remplacé? Et, dans la loi, comment cela pourrait-il s'exprimer?

M. Bergeron (Sylvain): O.K. Bien, de biffer ce bureau-là, pour nous, c'est une aberration. On l'a mentionné rapidement dans notre mémoire, parce qu'on aurait pu s'étendre sur un mémoire de 200, 300 pages, il a son utilité parce que les personnes, lorsqu'elles ne sont pas à l'aise avec leur agent ? ça arrive souvent, des conflits avec un agent, des problèmes de personnalité entre deux personnes, ça se vit à tous les jours ? peuvent utiliser ce Bureau des renseignements là pour avoir des informations sur leur dossier et faire même avancer le dossier. Parce qu'après, là, l'information, rappelle son agent: Regarde, j'ai pris mes informations et... Bon. S'il y a un véritable conflit entre une personne et son agent, ce bureau-là est le seul endroit où la personne se sent capable d'appeler quand ce n'est pas nous qui... quand les gens ne nous connaissent pas. Quand ils nous connaissent, bien ils viennent chez nous, puis c'est moi qui passe par les supérieurs immédiats, puis ça, ça va mieux.

Par contre, d'enlever ce recours-là, ça ramène à ce que... Je me souviens de ce que le ministre a répondu la semaine dernière: Ah! Mais il va y avoir le pouvoir discrétionnaire du ministre. Sans vouloir être prétentieux ou... ? ce n'est pas à l'encontre de M. Béchard en disant ça ? ça fait beaucoup trop de pouvoirs dans les mains d'une seule personne. À la blague, je dis un peu dans le mémoire... Quand je dis: C'est un retour en arrière, on revient presque à l'époque des édits du roi où c'est un roi qui décide: Ah! Bien là ça me tente, aujourd'hui, d'accepter ça, ça devient correct pour aujourd'hui. Demain, on reverra à ça. Donc, on ne doit pas laisser place à ce changement de mentalité. Si, demain matin, on change de ministre, ça va être complètement différent, et tout ce qui avait été reconnu auparavant sera refusé par la suite. Donc, le pouvoir discrétionnaire, oui, il a sa place mais pas autant qu'on peut le percevoir dans le projet de loi n° 57.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, j'aimerais qu'on puisse quand même être un petit peu plus explicite sur qu'est-ce que vous souhaitez voir apparaître dans le projet de loi concernant cette fonction des renseignements et des plaintes auprès des citoyens.

M. Bergeron (Sylvain): O.K. Mais le nommer y répond. Il faut qu'il y ait un lieu où les prestataires soient à l'aise d'appeler pour avoir de l'information qu'ils ne sont pas capables souvent d'avoir par leur agent. Je ne dis pas que les agents ne font pas leur travail. Bien au contraire, on a de très bonnes relations avec les agents dans notre région. Nous, on couvre trois centres locaux d'emploi. À part un ou deux avec qui c'est des conflits de personnalité que j'ai, l'ensemble des agents, on a de très belles relations. Même, lorsqu'on fait la semaine de la dignité des personnes... la Semaine des personnes assistées sociales, on organise des activités, les agents participent à nos activités pour démontrer la solidarité envers les personnes.

Eux, ils appliquent une loi, on n'a rien contre eux. Par contre, parfois les personnes ne se sentent pas à l'aise de poser telle ou telle question à leur agent. Donc, il faut un endroit où ces personnes-là peuvent aller chercher de l'information sans être jugées, sans que l'agent sente: Oup! Elles critiquent mon travail, là, puis j'ai un boss en arrière de moi. Donc, ça permet ça. Le Bureau des plaintes, en même temps, ou si c'est un lieu pour porter une plainte... Parce qu'actuellement les gens ne savent pas qu'on peut appeler un chef d'équipe, et souvent, au niveau des chefs d'équipe, bien il y a toute la structure, le directeur régional, les directives régionales, les directives locales qui sont difficiles à faire... à passer au travers. Donc, un bureau totalement indépendant où les personnes peuvent appeler pour se plaindre du traitement qu'ils ont eu. Le non-respect de la déclaration des services aux citoyens, la plupart des appels qu'on a, c'est concernant ça. Les gens ne se sentent pas respectés, disent qu'ils n'ont pas été traités avec dignité, comme il a été reconnu dans la déclaration de services aux citoyens qui a été adoptée d'ailleurs par l'Assemblée nationale.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président... M. Bergeron, vous nous avez parlé tout à l'heure, là, d'une augmentation des cas de révision en ce qui concerne la situation maritale. Est-ce que vous avez, durant les derniers mois, observé une difficulté particulière à la reconnaissance du statut de contraintes sévères?

M. Bergeron (Sylvain): Oui. Je suis obligé de vous dire oui, parce que je suis en train de repenser aux dernières... Le dernier mois particulièrement, j'ai eu beaucoup d'appels à ce niveau-là, même au niveau des contraintes temporaires. Alors que le guide de diagnostics médicaux dit: C'est un trois mois, l'agent dit: Non, on ne donne rien. Ça, on commence à le voir. Je ne pourrais pas vous dire que c'est une tendance qui va se poursuivre, c'est le temps qui va nous le dire. Mais, depuis un mois, oui, j'ai de plus en plus d'appels à ce niveau-là.

Le Président (M. Copeman): J'ai une demande d'intervention de la part de la députée de Lotbinière. Est-ce que vous voulez poursuivre? Est-ce que ça va, M. le député? Oui?

M. Bouchard (Vachon): Allez-y.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Lotbinière.

n(10 h 30)n

Mme Roy: Premièrement, je vous remercie de vous être présentés ici et je vous félicite pour la qualité de votre intervention. Je note, au paragraphe trois, que vous avez beaucoup de familles monoparentales chez vous, de pauvreté et que, la plupart du temps, les chefs des familles monoparentales, dans 80 % des cas, sont des femmes. Il semble que ce soit une situation assez alarmante. Puis, dans vos solutions d'arrimage à la loi n° 112, vous écrivez seulement les pensions alimentaires pour enfants. Pouvez-vous me décrire un petit peu plus qu'est-ce que vous voulez dire à ce niveau-là, concernant le projet de loi, là, qui est devant nous?

M. Bergeron (Sylvain): O.K. À ce niveau-là, nous, on a donné en piste de solution... La coupure de pension alimentaire, c'est déjà beaucoup. Une personne qui se fait couper une pension alimentaire qui va pour l'enfant, c'est enlevé directement de son 555 $ d'aide sociale, ça fait encore moins d'argent pour nourrir l'enfant. C'est sûr qu'on aurait pu aller plus loin. Comme je le disais tout à l'heure, il aurait fallu pondre un mémoire de 200, 300 pages.

Par contre, le simple fait de donner une prestation qui reconnaîtra les besoins essentiels des personnes, qui va couvrir les besoins essentiels, déjà là, va aider grandement les familles. Si une mère est capable de payer son loyer avec sa prestation, de payer l'électricité, l'épicerie, et tout ça, le reste permet de... l'allocation familiale, la pension alimentaire deviennent vraiment à l'utilisation pour les enfants, c'est-à-dire les vêtir, les envoyer à l'école. Parce que, on ne s'en cachera pas, la gratuité scolaire, c'est une utopie. Je peux vous en parler, des mères monoparentales qu'on a ici, avec nous, ce matin... rentrer sa fille en première année de secondaire, elle est rendue pas loin... à 800 piastres, là, déjà, là, depuis le mois de septembre, là. Donc, toutes les mères monoparentales le vivent.

Et, dans notre région, pourquoi est-ce qu'on le soulève? Avec l'avis du Conseil du statut de la femme, on parle beaucoup de l'exode des jeunes de notre région, qu'il y a un autobus et demi par semaine qui s'en va. Mais pourquoi le chiffre de femmes monoparentales n'est pas plus élevé? Ce n'est pas compliqué ? et ça, il y a d'autres études qui l'ont démontré ? c'est que les femmes monoparentales s'en vont de notre région aussi parce qu'elles ne sont pas capables de travailler dans notre région. Elles doivent s'en aller à Québec, Montréal pour se trouver de l'emploi.

Mme Roy: J'imagine que, dans votre région, aussi en raison des distances dont vous avez parlé, les femmes monoparentales doivent se retrouver aussi plus isolées pour avoir les services et soins pour leurs enfants. C'est aussi une des caractéristiques qui doivent les désavantager de façon peut-être plus pointue que d'autres groupes d'assistés sociaux.

M. Bergeron (Sylvain): Tout à fait. La question des distances se fait au niveau de l'aide sociale, mais une femme monoparentale qui doit aller à l'hôpital d'urgence avec son enfant, c'est de valeur, une fois que la pension alimentaire est coupée du montant d'aide sociale, ce n'est pas avec les allocations, le chèque d'aide sociale qu'elle va être capable de se payer une voiture, donc va être dépendante des voisins. Si on prend quelqu'un qui reste, un exemple, à Rivière-Éternité, oui, mais c'est un trois quarts d'heure pour se rendre à l'hôpital de Chicoutimi en voiture. Donc, c'est de quémander encore à des voisins. Ce sera utiliser peut-être le transport ambulancier, qui n'est plus couvert dans les situations que ce n'est pas une urgence essentielle à la vie. Parce qu'on a beaucoup de refus au niveau des transports ambulanciers, donc il faut que ce soit vraiment essentiel à la vie.

Donc, tous les facteurs... Tantôt, c'est bref, ce que j'ai énuméré dans le mémoire concernant les femmes monoparentales, mais l'avis du Conseil du statut de la femme, c'est une quatre-vingtaine de pages et c'est de l'argumentation de ce type-là tout le long, concernant notre région.

Mme Roy: Je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon, brièvement, s'il vous plaît.

M. Bouchard (Vachon): Oui, je comprends qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps, messieurs, mais finalement, là, vous avez entendu le ministre, vous avez eu l'occasion de répondre à plusieurs questions, vous avez demandé le retrait du projet de loi. Est-ce que vous avez changé d'idée depuis que cette séance est commencée?

M. Bergeron (Sylvain): Non, absolument pas. Nous, on dit: Ce projet de loi là ne doit pas être déposé, voté, on doit le tasser et retourner à la table de travail.

M. Desmeules (Sylvain): Refaire nos classes.

M. Bergeron (Sylvain): C'est ça, refaire nos classes. Il faut refaire une réforme. Oui, la loi actuelle a besoin d'être réformée, on ne s'en cache pas, mais il faut retourner pour que ce soit vraiment applicable.

Nous, à LASTUSE, je vous rappellerai, lors du dépôt du projet de loi n° 112, nous étions un des rares groupes à dire non au projet de loi n° 112 parce que, nous, on se fie aux expériences du passé. Nonobstant le parti qui était au pouvoir, les «oui, mais», on s'est toujours fait avoir, au Québec. Dans un mémoire, on disait: Oui, mais; oui, mais changer ça après. Non. On s'est toujours fait avoir, et il manque toujours des affaires à l'intérieur, et des faits essentiels. Pour nous, on dit: Non, retournons à la table de travail. Et pourquoi pas, tant qu'à réformer une politique comme telle, aller à la base, aller les rencontrer, les personnes assistées sociales, aller rencontrer les groupes qui travaillent avec eux, voir est-ce que c'est vrai qu'ils ont faim à partir du 16 du mois parce qu'ils sont obligés de couper sur la nourriture parce qu'il y a eu trois hausses successives d'électricité, que l'essence a des hausses, qu'aucun des deux paliers de gouvernement ne veut mettre un stop à ça. Donc, il faut avoir une vision globale. Ce n'est pas juste une loi d'aide sociale qu'il faut réformer, il faut réformer également notre vision.

Le Président (M. Copeman): M. le président Desmeules, M. Bergeron, merci beaucoup d'avoir participé, au nom de Lieu d'actions et de services travaillant dans l'unité avec les sans-emploi du Saguenay, à cette commission parlementaire. J'invite les représentants du Mouvement ATD Quart Monde Canada de s'installer à la table et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 36)

 

(Reprise à 10 h 39)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission reprend les travaux, et nous souhaitons la bienvenue aux représentants du Mouvement ATD Quart Monde Canada. C'est M. Reboul-Salze, j'imagine, qui est le porte-parole. Vous savez un peu comment ça marche: vous avec une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie par un échange de 20 minutes chaque côté de la table, plus ou moins. Alors, je vous invite à présenter les personnes qui vous accompagnent et de débuter immédiatement votre présentation.

Mouvement ATD Quart Monde Canada

M. Reboul-Salze (Benoit): Merci, M. le Président. Donc, mon nom est Benoit Reboul-Salze. Je suis accompagné de Mme Lise Boulanger, à droite, de Mme France Fournier, Mme Madeleine Caron et Mme Isabelle Laurin. Tous et toutes, nous sommes des membres du Mouvement ATD Quart Monde venant de différentes régions du Québec. Alors, M. le Président, permettez-moi de présenter rapidement le Mouvement ATD Quart Monde. Ensuite, nous prendrons la parole successivement pour vous présenter notre point de vue sur le projet de loi n° 57.

n(10 h 40)n

Le Mouvement ATD Quart Monde est un mouvement international de lutte contre la pauvreté et la misère. C'est de son histoire d'engagement avec les personnes en situation de pauvreté sur tous les continents en essayant toujours de rejoindre les plus pauvres d'entre elles que s'appuie son action pour que notre société s'enrichisse du savoir de chacune et de chacun de ses membres. C'est ainsi qu'il a reçu le statut consultatif le plus élevé auprès du Conseil économique et social des Nations Unies. Il est présent au Québec depuis 22 ans maintenant et cherche à développer un réel partenariat entre les personnes en situation de pauvreté et les groupes engagés avec elles. Aujourd'hui, nous sommes en colère face à tout ce qui se passe, en colère parce que la situation des personnes en situation de pauvreté s'aggrave. Nous allons vous dire les choses fermement dans le but d'entamer un dialogue qui devra être constructif.

La lutte contre la pauvreté est au-delà des partis, c'est pourquoi nous avons toujours cherché à être non partisans. Tout le monde est appelé à y participer, c'est un devoir de société. Mais on ne peut pas parler de réforme de l'aide sociale sans se remettre face à la vie des personnes en situation de pauvreté. Elles ne l'ont pas choisi, mais elles font leur part. Nous vous l'avons dit lors des audiences pour le projet de loi n° 112: Un changement de regard doit se faire en même temps qu'on assure la sécurité matérielle des personnes, et c'est de ça dont nous voulons commencer à vous parler.

Alors, je passe la parole à Mme Lise Boulanger.

Le Président (M. Copeman): Mme Boulanger.

Mme Boulanger (Lise): Bonjour, mesdames et messieurs. Depuis quelque temps, je me pose la question suivante: Comment est-ce possible qu'on nous présente des projets de loi qui sont contradictoires à la réalité qu'on vous présente lors des rencontres que nous avons eues avec vous? Après toutes les présentations de la réalité des situations que vivent les gens de l'assistance-emploi et des rencontres auprès des députés et ministres, nous en sommes encore au même point. Lorsqu'on vous adresse la parole, vous dites tous oui de la tête, mais le reste de votre corps dit bien autre chose. En fait, il reflète votre pensée. Nous en avons les résultats par la présentation de projets de loi qui alimentent les préjugés envers les personnes qui ne travaillent pas.

Lors de notre dernière audition devant la Commission des affaires sociales pour le projet de loi  n° 112, vous admettiez que déjà l'assistance-emploi était plus contrôlante qu'aidante. Je m'aperçois que les préjugés sont très ancrés dans la tête de bien des gens et que parfois on commet des actions qui briment davantage les droits des personnes. La Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale dit qu'il faut combattre les préjugés, mais le projet de loi qui nous est présenté ne fait que renforcer les préjugés envers les personnes en situation de pauvreté et alimente ce mythe envers les assistés sociaux: ils cherchent à frauder le système, il faut les pousser à retourner au travail. Comme si nous ne le voulions pas. Dans les préjugés qui sont subis par les personnes de l'aide sociale, il y a aussi le fait qu'on leur rappelle toujours leurs responsabilités: Tu dois faire ci, tu dois faire ça, sans leur donner des moyens de les assumer.

Je connais une personne qui a perdu son emploi, payée au salaire minimum. Elle a vécu pendant cinq semaines sans aucune entrée d'argent, elle a reçu du chômage mais a de la difficulté à récupérer le retard du loyer, de l'électricité, du téléphone. Puis elle reçoit de l'assistance-emploi, mais malheureusement ce n'est pas suffisant. Le propriétaire demande un avis d'expulsion. Les dettes continuent d'augmenter, car il faut continuer à payer les dépenses en cours. Finalement, c'est l'expulsion. Six mois dans une chambre avant de retrouver un autre logement, alors que, si cette personne avait un chèque plus élevé, il n'y aurait pas de problème de non-paiement de loyer.

Parce qu'une personne fraude, on croit que tout le monde est fraudeur. C'est comme cela que l'on juge une personne prestataire de l'assistance-emploi. Une personne qui commet un vol, cela veut-il dire que tout le monde est voleur? Il y a des exceptions, mais c'est cette généralisation qui nourrit les nombreux préjugés envers ceux qui vivent la pauvreté, et cela joue dans la prise de décision. Je passerai donc la parole à Mme France Fournier.

Le Président (M. Copeman): Mme Fournier.

Mme Fournier (France): Bonjour, messieurs. Bonjour, Mmes les députées. Je viens, dans la maison du peuple, témoigner de ma vie mensuelle et journalière dans mon patelin. J'habite Thetford Mines avec pas de sparce que... Vous comprenez pourquoi? Je vis de l'aide sociale avec un complément pour mon fils qui est aux études. J'habite la seule coopérative d'habitation de la ville. Mon revenu est de 782,98 $. Je m'acquitte de mes obligations financières. Je paie mon loyer 155 $, 80 $ pour l'Hydro, 30 $ de téléphone et cette belle petite boîte qui, médicaments obligent... 27 $ pour le câble, ce qui est mon accès à l'information et mon loisir. Et, même comme ça, à la fin du mois, je n'y arrive pas.

Et tout le monde ne peut pas habiter une coopérative ou un HLM, il en manque tellement. À ce moment-là, le montant de loyer est beaucoup plus difficile à payer. Quand on ne vit pas en coopérative ou en HLM, je ne sais pas comment l'on peut faire pour s'en sortir. Ce n'est pas rare d'avoir un loyer à 550 $.

J'ai déjà connu de meilleurs jours. J'ai connu des programmes d'insertion au travail, de cheminement d'aide personnelle. J'ai réussi à avoir de meilleurs revenus, une meilleure image de moi-même. Avec l'aide du comptoir alimentaire, je peux réussir à me procurer des fruits et des légumes dont la qualité pourrait être meilleure et très, très rarement on peut se procurer de la viande.

Comme tant d'autres à l'aide sociale, je survis. Ce qui me permet de garder le moral, c'est de m'impliquer comme citoyenne militante dans deux groupes communautaires, au comité avec... du collectif, sans oublier ATD Quart Monde. Je sais combien cela demande de l'énergie pour croire que demain sera meilleur que mon présent. Ce qui m'anime, c'est de savoir combien d'énergie et de courage il faut pour faire face aux regards et aux préjugés que l'on porte sur mes semblables à cause de leurs revenus. Nous sommes citoyens et citoyennes malgré nos difficultés. Je passe la parole à Mme Isabelle Laurin.

Le Président (M. Copeman): Mme Laurin.

Mme Laurin (Isabelle): Bonjour. Je suis chercheure à la Santé publique de Montréal et je travaille auprès des familles en milieu de pauvreté.

Au printemps dernier, dans le cadre d'un projet de recherche-action, j'ai rencontré un groupe de huit mères de jeunes enfants dans le quartier Saint-Michel, à Montréal. Nous avons consulté ces mères en tant qu'expertes et nous étions intéressés à mieux comprendre le contexte dans lequel s'exerce le rôle de parent en milieu de pauvreté. Lors d'une de nos rencontres, nous avons invité les femmes à discuter de la phrase suivante: «Dans une société démocratique, les individus sont encouragés à rechercher et à raisonner ensemble, à contribuer au travail de la société et à influencer le gouvernement. Une société démocratique cultive la capacité de jugement de tous les citoyens sur les institutions.»

L'une d'elles, appuyée par les autres, dira que c'est à moitié vrai, surtout en ce qui concerne le point «influencer le gouvernement». Elle dira: «Ils ont leurs idées déjà en tête et ils font semblant de nous écouter. Ils écoutent peut-être la classe des riches, mais, bon, ils ne vont pas voir la classe un peu plus basse comme nous.»

Ces femmes nous ont donné plusieurs exemples pour illustrer ce sentiment de n'être jamais écoutées et consultées pour des choses qui pourtant les concernent directement, elles et leurs familles.

J'ai choisi de présenter cet extrait aujourd'hui parce que la loi n° 112 veut favoriser la participation des personnes et des familles en situation de pauvreté à la vie collective et au développement de la société. Pour ça, il faut les consulter et les écouter, et, de toute évidence, vous ne l'avez pas fait en ce qui concerne le projet de loi n° 57. Celui-ci ne reconnaît pas que les personnes en situation de pauvreté et d'exclusion sociale sont les premières à agir pour transformer leur situation et celle des leurs. Au contraire, on en fait une obligation nouvelle. Les personnes doivent être les premières à agir. Pour nous, cela traduit un manque de connaissance de ce que vivent vraiment les personnes en situation de pauvreté.

n(10 h 50)n

Je termine en citant les paroles d'une des participantes du groupe qui nous a dit: «Dans votre rapport de recherche, vous direz que ce n'est pas nécessaire d'être riche pour avoir de la rhétorique.» Je passe la parole à M. Reboul-Salze.

Le Président (M. Copeman): M. Reboul-Salze.

M. Reboul-Salze (Benoit): M. Pierre Chaput devait être présent, ce matin, avec nous. Malheureusement, cela n'a pas été possible, mais il a préparé... Pierre habite le quartier Saint-Michel et est très impliqué dans la vie de son quartier. Voilà ce qu'il voulait vous dire. L'aide sociale, en milieu urbain, ne répond pas aux besoins de base. On ne peut pas demander aux banques alimentaires de répondre à ces besoins. Si quelqu'un veut réintégrer la société et trouver un emploi, je pense que le téléphone et la carte d'autobus ne sont pas un luxe. Une loi d'aide sociale nouvelle ne doit inclure aucun recul, c'est déjà le minimum inacceptable. Avec un loyer à 455 $ par mois et si tu as 555 $ d'assistance-emploi, si tu as les taxes, il te reste 100 $ pour faire le mois. On parle de 59 $ de carte de transport, de 28 $ de téléphone, etc., et en plus envoyer des C.V., ça coûte des timbres. Ça ne le fait plus. Et on ne parle même pas d'activités culturelles. Tu es obligé d'aller dans les banques alimentaires, tu es obligé d'aller à Old Brewery. Aujourd'hui, ce sont donc les banques alimentaires qui soutiennent les personnes.

Ce n'est pas les droits de la personne, ça. Oui, il n'y a pas de respect des droits de la personne dans le projet de loi n° 57. Il n'y a pas non plus de respect de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui a été unanimement votée. Je passe la parole à Mme Madeleine Caron, juriste de formation et retraitée de la Commission des droits de la personne.

Le Président (M. Copeman): Mme Caron.

Mme Caron (Madeleine): Messieurs et mesdames, nous pensons que le projet de loi ne respecte pas la loi n° 112 et contient un certain nombre de reculs qui vous ont été présentés dans notre mémoire. Isabelle vient de parler du préambule de la Loi visant à lutter contre la pauvreté par rapport et en opposition avec l'article 2 du projet de loi n° 57. Nous voulons faire reconnaître que les personnes agissent vraiment pour lutter contre leur situation et celle des leurs.

Et il y a aussi un non-respect des exigences de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale qui vise à améliorer la situation économique et sociale des personnes et des familles, et de tous. Il faut voir les choses d'une façon globale. Le plan d'action va entraîner une détérioration du revenu des personnes sans contraintes sévères à l'emploi en raison de l'application d'un taux d'indexation réduit de moitié, comme vous l'avez entendu souvent. Comme il n'est pas le même pour tout le monde, on aura, dès janvier 2005, une aide sociale incohérente. Ainsi, quelqu'un qui est à l'aide sociale et qui ne peut pas bénéficier de mesures pour la prime à la participation parce qu'il n'y en a pas, vu l'insuffisance des budgets, se verra de plus en plus pauvre d'année en année.

Autre incohérence, avec quel montant commenceront les gens entrant à l'aide sociale, celui d'une demi-indexation ou celui d'une indexation complète? Après tout, ils étaient au travail avant, et les chiffres montrent qu'il y a beaucoup de passages entre un emploi, l'assurance-emploi et l'assistance-emploi. Cela devient un casse-tête insurmontable ouvrant la porte à des incohérences et des discriminations.

De plus, dans le projet de loi n° 57, l'allocation pour contraintes temporaires à l'emploi des personnes de 55 ans et plus n'est pas garantie. Comment parler d'une loi transparente quand le projet de règlement n'est pas... Et, en modifiant le règlement en vertu de la présente loi, vous allez priver de 100 $ par mois les prestataires qui vivent avec leurs parents dont les revenus de travail sont inférieurs à 28 000 $ par année.

Nous voudrions faire remarquer à la commission que le Bureau des renseignements et plaintes disparaît bel et bien. En tout cas, si on lit la loi, c'est ça qui apparaît et ça reste à la discrétion du ministre. Cela veut dire qu'on perd de la transparence encore. Cette mise en place n'est pas connue aujourd'hui. Est-ce que ce sera un lieu de recours indépendant? Quel en sera le fonctionnement? Nous sommes dans l'inconnu, et certainement pas dans un fonctionnement de droit. Cela veut dire aussi que le mot «renseignements» disparaît sans être remplacé. N'oublions jamais que seule une personne informée peut exercer sa citoyenneté.

Nous croyons aussi que, si on lit l'article 96 du projet de loi, il y a des cas, dans les programmes d'alternative jeunesse, les programmes spécifiques, où il n'y aura pas de droit de recours. Je laisse la parole à M. Reboul-Salze.

Le Président (M. Copeman): M. Reboul-Salze.

M. Reboul-Salze (Benoit): Les gens ont besoin qu'on leur tende la main, pas qu'on les assomme. Quand le projet de loi n° 57 nous est présenté, il est fait mention d'une nécessaire flexibilité qui le justifierait. Mais cette flexibilité ne doit pas se faire sur les revenus, l'aide sociale doit être un droit et le même droit pour tout le monde. C'est la variété des mesures d'insertion qui doit permettre la flexibilité pour prendre en compte le plus possible les compétences et l'histoire des personnes en situation de pauvreté, pas le revenu. Sans compter que les mesures d'insertion ne sont pas assez budgétisées. Aujourd'hui, il y a environ 166 000 personnes sur l'aide sociale, et des mesures de participation pour seulement 17 000 d'entre elles. Alors, s'il vous plaît, respectez vos engagements. Le Parlement et le gouvernement n'ont pas le droit d'oublier ce qu'ils ont voté. Vous n'avez pas le droit d'oublier que vous vous êtes engagés à appliquer cette loi contre la pauvreté. C'est inacceptable.

Le gouvernement nous demande de lui faire confiance. Mais comment le faire alors que les engagements électoraux signés de M. Charest ne sont pas respectés, même s'il les a qualifiés d'urgents? Je vais vous citer des extraits de cette lettre que M. Charest nous a adressée le 8 avril 2003 et dont nous avons fait circuler une copie ce matin. Je cite: «Je peux vous assurer que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale sera respectée par le prochain gouvernement libéral.» Un peu plus loin: «Nos engagements prévoient déjà l'adoption de certaines mesures urgentes, dont la gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément de revenu et les personnes assistées sociales, l'indexation des prestations de dernier recours, l'établissement d'un seuil minimal de prestations en deçà duquel aucune pénalité ne sera imposée.» Respect de la loi, médicaments, indexation, seuil minimal de prestations, tout cela est plus qu'urgent mais n'est pas respecté.

Si on parle de la transparence de ce projet de loi, où est-elle? Où se trouve l'examen de l'impact de ce projet sur le revenu des personnes, tel que mentionné à l'article 20 de la loi n° 112? Où se trouve le projet de règlement? C'est lui qui montre ce qui va se passer réellement dans la vie des personnes. Et, lorsqu'on voit le dernier projet de règlement de modification à la loi actuelle que vous venez de rendre public le 22 septembre, nous avons de bonnes raisons de nous inquiéter. La Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale vous demande de tout faire pour améliorer le revenu et les avoirs des personnes en situation de pauvreté bénéficiant du Programme d'assistance-emploi, mais votre projet de règlement fait le contraire. Je propose à Mme Caron de conclure notre présentation.

Le Président (M. Copeman): Mme Caron.

Mme Caron (Madeleine): Vous avez nos propositions dans notre mémoire: un retrait complet du projet de loi n° 57, des modifications essentielles à la loi actuelle et un débat public avec des consultations.

Il ne s'agit pas de l'appétit des groupes sociaux, tel qu'il en a été fait mention récemment dans les médias. Il faut bien que vous compreniez que ce n'est pas de groupes dont nous parlons, mais de personnes dont la dignité n'est pas respectée et qui n'ont plus rien au plus tard le 15 du mois. Il s'agit de personnes qui nous disent: Le chèque reste pareil et le coût de la vie monte, comment régler cette situation? On nous déshabille. C'est de tout cela, c'est de la violence de la société envers les personnes en situation de pauvreté dont il faut parler. Oui, une réforme s'impose mais pas celle-ci. Le droit à un niveau de vie décent, reconnu par la charte québécoise et par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, doit être assuré à tous sans discrimination. Ce travail doit se faire avec les personnes en situation de pauvreté.

Nous sommes nombreux à le dire. En 1995, les chefs d'État du monde entier se sont mis d'accord sur ce point au sommet mondial de Copenhague ? je cite: «Donner aux pauvres les moyens de s'organiser et de participer à tous les aspects de la vie politique, économique et sociale, leur permettant de devenir de véritables partenaires du développement.»

En 1996, la Commission des droits de l'homme de l'ONU le reconnaissait en adoptant le rapport Grande pauvreté et droits de l'homme, de M. Despouy. En 2002, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale le reconnaissait et le prévoyait. En 2003, le bilan des 25 ans de la Charte des droits et libertés de la personne rappelait que la pauvreté est une violation des droits de la personne. La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse demandait que soient renforcés les droits économiques, sociaux et culturels dans la charte. Après tout, le Canada est signataire du pacte international avec l'accord du Québec. En 2004, la Belgique publiait un bilan de son action contre la pauvreté et l'a fait avec les personnes qui la vivent en recueillant leur vécu et leur analyse.

n(11 heures)n

Après avoir montré la voie et fait la fierté du monde en votant la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, est-ce que le Québec va en devenir la risée en ne poursuivant pas dans la même direction, tendre vers un Québec sans pauvreté? Dans cinq jours, nous serons au 17 octobre. C'est la Journée mondiale du refus de la misère reconnue par l'ONU comme la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté. Ce jour-là, dans 45 pays, dont le Canada et en particulier au Québec, les personnes qui vivent la misère et celles qui leur sont solidaires prendront la parole, elles parleront de courage et de dignité, mais surtout elles diront: C'est ensemble qu'on va plus loin. Voilà.

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, afin de débuter l'échange, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Béchard: Merci beaucoup, M. le Président. Merci à M. Reboul-Salze et Mme Caron, Mme Fournier, Mme Boulanger, Mme Laurin. Merci de votre présentation. Bienvenue. J'ai bien écouté vos présentations, et un des points sur lequel je veux immédiatement revenir, c'est quand vous dites: Il n'y a pas de débat, ou on n'écoute pas, ou on n'a pas été consulté. Et on est ici, à l'Assemblée nationale, en plein salon rouge en tenant une consultation publique sur le projet de loi n° 57, alors je pense que c'est une consultation. Peut-être que vous souhaiteriez qu'on fasse le tour du Québec, qu'on aille rencontrer tous les groupes partout dans chacune des régions, c'est peut-être l'option que vous privilégiez, mais je pense qu'il y a un débat qui est là, et on vous écoute.

Et, je l'ai mentionné, cette commission parlementaire là, sur certaines améliorations au projet de loi n° 57, on est ouvert à ces améliorations-là, à ces changements-là. Il y a un point sur lequel, par contre, il n'y aura pas de changement, c'est sur la philosophie qui est à la base du projet de loi n° 57, sur le plan de lutte à la pauvreté qui a été déposé, de 2,5 milliards, en avril dernier.

Et ce que j'en comprends un peu, de votre présentation, ce matin, c'est ? et j'ai eu, quand j'entendais certains de vos propos, cette idée de comparaison là ? que vous nous présentez, ce matin, ce que vous voudriez et ce que vous souhaitez comme, je dirais, le projet de loi idéal ou le plan de lutte idéal pour lutter à la pauvreté, qui est à un niveau, et vous dites: Vous n'êtes pas là. Et vous dites: C'est inacceptable que vous ne soyez pas là. Et, moi, je dis: Oui, peut-être qu'on n'est pas là, mais on est en route vers cet idéal-là.

Et ce que j'en comprends aussi, c'est que, sur plusieurs des points que vous nous amenez, par exemple ? on aura peut-être l'occasion d'en reparler ? au niveau, entre autres, de tout ce qui est des caractères d'obligation ou sur l'indexation comme telle et tout ça, on fait des efforts majeurs, et je veux juste vous le rappeler. Peut-être que, pour certains, là, c'est plus facile dans l'opposition. J'entendais le député de Vachon tantôt, n'ayant pas le courage d'avoir ma réponse, a simplement tenté de poser une question sans vouloir avoir la réponse. Je pense que ça ne fera pas de lui un Legaultiste, parce que M. Legault, hier, a clairement eu le courage de déterminer certaines choses, a dit que certaines de vos décisions étaient des erreurs.

Alors, ce n'est pas avec une démarche où vous tentez d'avoir des choses et vous parlez un peu de démagogie, vous dites... Vous faites de la démagogie quand vous dites qu'on va faire disparaître le Bureau des plaintes. Voyons donc, on ne fera pas disparaître le Bureau des plaintes à l'aide sociale. Arrêtez un peu, là. Parce qu'on ne le met pas dans la loi, là, on va faire disparaître le Bureau des plaintes. Il n'y a pas d'autres directions du ministère qui sont dans la loi. Alors, je pense que, si vous voulez rattraper le camp de M. Legault, vous devriez au moins avouer certaines de vos erreurs et vous dire qu'effectivement, au niveau du barème plancher, vous n'étiez pas au même niveau que nous, et à d'autres niveaux aussi.

Et un autre point sur lequel je veux amener votre présentation ce matin, c'est quand vous parliez des engagements électoraux. Moi, je regarde la lettre, là, qui est à la base de nos engagements et je vous dirais que, sur un point, sur la gratuité des médicaments, effectivement on n'en est pas rendu là encore. Je vous dirais qu'on est en route vers cet engagement-là, on n'y est pas rendu. Il est clair aussi que ce serait beaucoup moins urgent si le programme n'avait pas été mis en place par le gouvernement précédent. On ne serait pas obligé de corriger cette erreur-là, donc effectivement ce serait moins urgent. Mais c'est encore dans les plans.

Mais, sur les autres points, je vous dirais, là, l'indexation des prestations de dernier recours, il est là, il est dans le plan de lutte. Peut-être qu'il n'est pas à un niveau idéal, mais l'indexation est dans le plan de lutte. Peut-être que vous voudriez une indexation de 5 % ou de 10 %. On peut vouloir ça, mais l'indexation comme telle est dans le plan de lutte, c'est une première. Je veux bien qu'on ne s'entende pas sur le taux, mais reconnaissons au moins que, pour la première fois, au Québec, l'indexation n'est pas sous la gouverne du bon vouloir d'un ministre ou d'une situation budgétaire à un moment donné, il est indexé en fonction d'un critère d'indexation qui sert d'indexation à toutes les autres mesures gouvernementales. Donc, il est là. Alors, je veux bien qu'on ne soit pas d'accord sur le niveau, mais c'est là.

L'établissement d'un seuil minimal de prestations, le barème plancher, en deçà duquel aucune pénalité ne sera imposée, sauf en cas de fraude, c'est 100 % de la prestation actuelle. Il y avait d'autres personnes qui disaient qu'il y avait des scénarios de 80 % et des scénarios de 90 %, il y avait des pénalités. Il est là. Je veux bien qu'il ne soit pas au niveau de besoins, là, on est en train de redéfinir un nouveau barème plancher. C'est pour ça que je vous dis qu'il faut faire la différence entre ce qu'on a fait et la situation idéale. Mais c'est là.

Le cadre financier qu'on prévoyait, 850 millions sur cinq ans au chapitre de la valorisation du travail, soutien au revenu, on met 2,5 milliards sur cinq ans, c'est plus que l'engagement qu'on avait pris. Alors, c'est pour ça, je veux juste rappeler ces faits-là parce que des fois... Je veux bien qu'on ne soit pas d'accord avec le projet de loi n° 57, qu'on dise... Bon. Mais, d'un autre côté, je veux dire que, pour plusieurs des points, nous sommes en route vers ce que vous appelleriez la loi idéale.

Mais j'aimerais vous entendre là-dessus, là. Pour vous, là, ce matin, je veux bien qu'on critique le projet de loi n° 57, mais quelle serait votre loi idéale? À combien serait votre barème plancher? Je comprends qu'il n'y aurait à peu près plus de distinction entre les gens qui sont aptes, qui sont inaptes, les jeunes, on amènerait une seule prestation... J'aimerais ça vous entendre sur quelle serait votre loi idéale, là. Si vous étiez à ma place, ce matin, là, puis vous auriez toute la marge de manoeuvre financière possible, là, quelle serait votre loi idéale sur... Puis il faut faire attention parce que c'est une loi. Ce n'est pas le plan de lutte à la pauvreté, c'est une loi qui est une partie du plan de lutte. Alors, moi, j'aimerais vous entendre là-dessus ce matin, là, pour voir, dans les comparaisons, là, combien de chemin il nous reste à faire pour atteindre le niveau de loi idéale que vous souhaiteriez.

M. Reboul-Salze (Benoit): M. le Président, je pourrais revenir sur un certain nombre de choses que vient de dire M. le ministre. D'abord, concernant la consultation, c'est avant l'élaboration du projet de loi qu'il faut la faire, pas une fois qu'il est établi. On aurait gagné du temps, on aurait gagné beaucoup de temps si vous aviez pris le temps de consulter les groupes et les personnes en situation de pauvreté avant d'écrire, dans votre ministère, ce projet de loi. Ça nous aurait évité bien des erreurs et bien des pertes de temps et d'énergie. Ça, c'est une première chose.

La deuxième chose, vous nous dites qu'on n'est pas prêt à un changement de philosophie. Bien, c'est bien dommage parce que c'est quand même ça qu'il faut faire, on est... Et, quand on voit vos propres engagements, je suis désolé, vos engagements, ils ne sont pas tenus. Vous avez reconnu vous-même qu'il y a la gratuité des médicaments. Mais prenons l'indexation. Vous nous dites: L'indexation est là. Eh bien, non, elle n'est pas là pour tout le monde. Là où il y a une profonde injustice, c'est que les gens aptes à l'emploi, sans contraintes sévères à l'emploi, auront une demi-indexation. Donc, ça veut dire qu'ils vont gagner 3 $ par mois supplémentaires à partir du 1er janvier 2005; ils vont passer de 533 $ à 536 $. Pour ceux qui auront la chance de pouvoir bénéficier de la prime à la participation, parce que ce n'est pas tout le monde encore une fois qui pourra y avoir droit, à ce moment-là ils auront une indexation pleine et entière.

Qu'est-ce que ça va devenir ? on vous l'a dit dans notre introduction ? dans deux ans, dans trois ans? Les gens qui entreront à l'aide sociale après avoir été sur le marché du travail, est-ce qu'ils vont avoir une aide sociale avec des demi-indexations? Mais vous les punissez. En fait, vous punissez les gens qui... être à l'aide sociale et vous punissez les gens qui n'ont pas la chance, pour des tas de raisons, soit parce qu'ils ne sont pas assez forts pour se défendre... vous punissez les gens qui ne bénéficient pas de prime à la participation. Donc, là, c'est un effort majeur qu'il reste à faire.

L'autre chose, vous nous dites: On a investi 2,5 milliards pour la lutte à la pauvreté. C'est vrai si on regarde le budget total. Si on regarde l'aide sociale, ce n'est pas vrai. Je vous invite à regarder la page 29 de votre plan d'action. L'argent investi sur l'aide sociale, c'est 500 millions sur cinq ans. Sur ces 500 millions, la moitié sont réservés à l'indexation. Donc, il reste 250 millions sur cinq ans. Sur ces 250 millions, soit 50 millions par an, vous venez de décider de coupures d'un montant de 44 millions par an. Donc, 50 millions moins 44 millions, il reste 6 millions. Alors, on est loin du 2,5 milliards sur cinq ans. Et, du coup, quand on parle de barème plancher, bien, excusez-moi, j'ai du mal à vous croire. Vous venez d'annoncer, le 22 septembre, pour 44 millions de coupures, et vous parlez de barème plancher. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là.

n(11 h 10)n

Autre point, vous nous demandez ce serait quoi, pour nous, la loi idéale. Bien, pour ça, on vous l'a dit dans notre mémoire. Je vous invite à le regarder, c'est en page 3 de notre mémoire. On vous dit un certain nombre de choses, et d'abord on vous propose une méthode de travail qui est de retirer ce projet de loi, il n'est pas amendable. Il est tellement incohérent, confus, ouvrant la porte à des discriminations qu'il n'est pas amendable. Donc, retirez-le, faites les améliorations minimums à la loi actuelle qui doivent être faites: la question de l'indexation annuelle et à un taux uniforme pour tout le monde; la notion d'introduire les besoins essentiels; la possibilité pour les prestataires d'augmenter les avoirs. La Loi visant à lutter contre la pauvreté vous le demande; ce n'est pas le cas. On pourra aussi débattre là-dessus, sur le dernier projet de règlement.

Et, une fois que vous avez fait ces... Et gardez quand même... La seule chose qui est bonne dans le projet de loi n° 57, c'est l'article 49 qui dit: On ne fera plus de coupure pour refus de mesure. C'est la seule chose qui est bonne, donc gardez ça. Et puis lancez un débat, lancez un débat au niveau de la société, allez consulter les personnes en situation de pauvreté pour savoir qu'est-ce qu'il faudrait faire pour permettre un vrai retour à l'emploi, pour permettre de garantir les besoins essentiels des personnes.

Le Président (M. Copeman): M. le ministre.

M. Béchard: Oui, merci. Écoutez, je pense que ça reflète ce que je mentionnais, c'est qu'au niveau des éléments, dont l'indexation, vous demandez plus, ça en prendrait plus. Puis ça, je n'ai pas de problème avec ça, notre philosophie, ça a été d'indexer. Je comprends que vous trouvez que ce n'est pas assez. L'ancien gouvernement n'indexait pas, alors on part de quand même très loin, tu sais, on a vécu zéro indexation pour les personnes aptes pendant quatre ans. Alors, je veux bien, aujourd'hui, que les gens d'en face viennent nous faire les gorges chaudes en nous disant: Vous devriez indexer davantage, et tout le monde, mais eux n'indexaient pas. Mais je comprends que vous nous dites que ce n'est pas assez. Je veux vous dire que je le comprends parfaitement. Mais c'est là. Est-ce qu'on peut reconnaître au moins que c'est un acquis que ce soit dans le plan de lutte?

Deuxièmement, au niveau de l'article 49 sur... Vous voyez, toutes les opinions sont valables. Vous me dites que c'est la seule bonne chose, l'article 49, le barème plancher, avec le fait de ne pas avoir de pénalité pour la non-participation. Je vous dirais que, sur cet article-là, vous, vous dites: C'est une bonne chose, l'opposition, le Parti québécois doivent être tentés de me dire que ce n'est pas une bonne chose, parce que, eux, ils voulaient des pénalités, ils les gardaient puis ils pénalisaient la participation. Alors, vous voyez, toutes les opinions sont... C'est dur de faire l'unanimité.

Mais un point sur lequel j'aimerais aussi vous entendre, c'est sur la prime à la participation. Parce que vous avez soulevé certains points sur la prime à la participation, alors j'aimerais... Comment on peut définir ou mettre en place ce programme-là? Vous allez me dire que ce ne sera pas assez puis qu'il n'y a pas assez d'argent, puis que ce n'est pas tout le monde qui va être admissible, mais c'est un premier pas, là. C'est un nouveau programme qu'on veut mettre en place, une nouvelle façon de faire qu'on veut amener, et ça, là-dessus, je vous consulte, là, je vous le demande, là. Vous êtes ici, là, j'ai besoin de votre éclairage pour voir comment on peut définir ensemble les paramètres de ce programme-là de prime à la participation.

Alors, je comprends que vous allez me dire que ce n'est peut-être pas assez, que ça en prendrait plus. Mais, une fois qu'on a dit ça, comment vous voyez la mise en place de ce programme-là de prime à la participation pour que justement... L'effort dans les communautés, la participation dans les groupes communautaires, la participation dans les activités au niveau des municipalités, de différents quartiers, on veut le reconnaître. Alors, est-ce que vous pouvez nous aider en nous disant comment on pourrait mettre en place ce programme-là, qu'il soit applicable, qu'il soit juste, qu'il soit correct et qu'il finalement aide à reconnaître la participation des gens qui, dans leur communauté, dans leur quartier, dans leur village, viennent en aide à leurs concitoyens et concitoyennes?

Le Président (M. Copeman): M. Reboul-Salze.

M. Reboul-Salze (Benoit): Mme Caron.

Le Président (M. Copeman): Mme Caron.

Mme Caron (Madeleine): Moi, je veux répondre sur les deux premières questions, M. le Président, du ministre. Sur l'indexation, je ne suis pas certaine que vous ayez compris notre critique. Vous dites: Vous pensez que ce n'est pas assez, que ça pourrait être plus. Ce n'est pas ça qu'on a dit. On a dit que le fait d'indexer différemment les personnes sans contraintes à l'emploi et les personnes avec contraintes, c'est là-dessus qu'on en a et ça démontre un préjugé à l'égard des personnes qui sont aptes à l'emploi, et c'est les juger comme des personnes qui ne font pas ce qu'il faut pour se sortir de leur situation. Alors, ce qu'on demande, c'est un changement de regard par rapport aux personnes aptes à l'emploi et d'avoir une indexation la même pour les deux groupes.

Deuxièmement, sur le barème plancher, je vais vous lire l'article 15, deuxième paragraphe, de la loi  n° 112, qui est quand même en vigueur, cet article-là, et qui dit: «Le plan d'action doit également proposer des modifications au Programme d'assistance-emploi [...] afin [...] d'introduire le principe d'une prestation minimale, soit ? et on définit ? un seuil en deçà duquel une prestation ne peut être réduite en raison de l'application des sanctions administratives, de la compensation ou du cumul de celles-ci.» C'est assez clair, et ce que nous voyons, c'est que cet article de la loi n° 112 n'est pas respecté.

Le Président (M. Copeman): Ça va?

M. Béchard: Bien, j'ai demandé aussi des suggestions sur prime à la participation, alors j'aimerais entendre un petit peu, là-dessus, si vous avez des suggestions à faire parce que je... Et, entre autres, sur le barème plancher, là, juste comme remarque, là, il y a toutes sortes d'interprétations qu'on peut faire. On peut aussi référer aux articles suivants de la loi n° 112, mais je vous dirais qu'il y a un barème plancher qui est là et qu'on a enlevé le régime dans lequel il y avait des pénalités. Et, moi, là, je m'excuse, mais, quand on parle de la décision qu'on a prise il y a quelques semaines, pour moi, ce n'est pas une pénalité d'avoir la chance de demeurer chez ses parents. Ce n'est pas une pénalité quand on compare avec la même personne qui n'a pas cette chance-là. Mais ça, on peut aller là-dessus pendant des heures aussi. Et, au niveau de l'indexation dans le régime aptes versus inaptes, dans ce cas-là, il faudrait faire attention à ce que les gens d'en face pourraient nous suggérer parce que, eux, vu qu'ils n'indexaient pas les aptes, ils pourraient aussi nous suggérer de ne pas indexer les aptes. Mais il y aura une indexation pour tout le monde. Elle est à deux niveaux, mais il y aura une indexation pour tout le monde.

Et, juste un autre point qui m'est venu en tête aussi, au niveau des règlements, vous me dites: Vous ne déposez pas le règlement en même temps. Mais, si je déposais, aujourd'hui, le règlement, les gens nous diraient: Bien là ça ne donne absolument rien, d'avoir une consultation, non seulement la loi est là, le projet de loi est là, mais en plus le règlement est là. Alors, le règlement, on va le déposer et on va le faire après la commission, ici, et après l'étude détaillée du projet de loi article par article parce que le règlement sert aux ajustements qui viennent après. Alors, ça aussi, il faut y aller par souci de cohérence, mais j'aimerais beaucoup vous entendre sur prime à la participation.

M. Reboul-Salze (Benoit): Sur la prime à la participation, rapidement, ce qu'il faudrait, c'est qu'elle soit accessible à tout le monde parce que les gens qui sont en situation de pauvreté, qui sont à l'aide sociale font déjà beaucoup pour s'en sortir, pour améliorer leur situation, leur propre situation et celle des personnes qui les entourent. On parlait tout à l'heure des gens qui, au 15 du mois, sont obligés d'aller faire les files dans les banques alimentaires, certains sont obligés de quêter et plein d'autres choses. C'est sûr que leur participation, quand on a l'aide sociale, elle est déjà effective. Après, est-ce qu'il va y avoir des mesures d'insertion qui vont permettre aux gens de retourner vers l'emploi quand des gens ne savent pas lire et pas écrire, quand des gens n'ont pas de formation?

Je pourrais vous lire le témoignage d'un jeune qui, lui, a fait des formations en vente de mécanique, en imprimerie puis qui ne trouve pas de travail. Donc, c'est parce que ces mesures-là ne sont accessibles qu'à un petit nombre de personnes, et donc il faut qu'elles soient généralisées, accessibles à tous. Et c'est sûr que... Voilà, je vais arrêter là pour...

Le Président (M. Copeman): Ça va? J'ai une demande de la part du député de Saint-Jean.

M. Paquin: Merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, bienvenue. Merci pour votre mémoire. J'aimerais, moi, aborder une question qui me tient à coeur et, j'en suis convaincu, tient à coeur à la majorité, à la totalité des gens qui sont ici, ce matin, et au-delà de ça. Vous avez abordé tantôt le fait que ? je crois que c'est madame qui a abordé ça ? les gens ou plusieurs personnes avaient émis des idées discriminatoires vis-à-vis les personnes qui recevaient de la sécurité du revenu, et c'est inacceptable quant à moi, et je pense que personne ne peut contester ça.

Ma question est celle-ci: Qu'est-ce qu'on peut faire tous ensemble pour enrayer ce problème qui est irrecevable et inacceptable? Qu'est-ce qu'on peut faire pour enrayer ça? S'il y a des gens qui ont des idées discriminatoires vis-à-vis d'autres personnes qui retirent de la sécurité du revenu, c'est à cause de quoi? Est-ce qu'il y a des raisons? S'il y a des raisons, quoi faire pour les contrer? Est-ce que c'est des idées comme ça, sans réfléchir, qu'ils agissent comme ça ou par manque de respect? Mais qu'est-ce qu'on peut faire tous ensemble pour essayer d'améliorer cette situation-là? Parce que c'est un point, je pense, très, très, très important, et, la journée qu'on réussirait à améliorer cette partie-là, on aurait un grand pas de fait, je pense, vers l'avenir et le respect des gens qui malheureusement sont obligés d'avoir la sécurité du revenu.

M. Reboul-Salze (Benoit): La question de contrer les préjugés, je proposerais à Mme France Fournier de répondre.

Le Président (M. Copeman): Mme Fournier.

n(11 h 20)n

Mme Fournier (France): Le budget que nous avons, les personnes en situation de pauvreté, c'est une nécessité, c'est une base. Ce n'est pas: Ça me tente, ça ne me tente pas, je veux aller travailler, je ne veux pas aller travailler. Et le budget, là, quand on vous dit qu'à la moitié du mois, là... À 533 $, là, c'est inacceptable, c'est inacceptable. Au nombre de personnes qu'on est à vivre cette situation-là, je crois qu'on a de la crédibilité.

Puis de dire que, apte ou pas apte, l'aptitude qu'on a puis l'attitude qu'on a, c'est de survivre au quotidien avec l'énergie que ça demande de savoir si ton enfant, si toi-même tu vas avoir à manger le lendemain, ton hydro que tu... C'est la vache à lait, votre vache à lait, notre vache à lait, puis, lui, il a droit à l'indexation ? indexe, mon ti-nomme, augmente, augmente ? mais, nous, nos revenus, ils restent les mêmes, nos dépenses, elles restent les mêmes: il faut se loger, se nourrir, s'habiller parce qu'il fait frette en hiver. Bien, quand vous dites: Apte, pas apte...

Puis, sauf le respect que j'ai envers vous, M. Béchard, là, j'ai noté le nombre de fois que vous vous êtes gargarisé avec l'opposition ce matin, c'est 12 fois. Moi, je ne veux pas savoir si ça plaît à l'opposition, si ça ne vous plaît pas, si ça fait belle image, si ça ne fait pas belle image, mais, moi, ce qui me préoccupe, c'est de savoir le résultat que ça va avoir sur le vécu quotidien des personnes, parce que c'est des personnes qui vivent ce budget-là. Ce n'est pas des chiffres, c'est des personnes. Puis le droit, là, à avoir quelque chose de décent, le minimum, là, bien, moi, j'aimerais bien ça qu'on arrête de dire: Apte puis inapte, parce que tout le monde est apte. Puis, quand on regarde le marché du travail puis le nombre de personnes qui se battent pour trouver un emploi, puis C.V. après C.V., puis tout, puis qu'on nous arrive avec apte puis inapte, vous nourrissez les gens qui disent: Ah! Les bons pauvres ou les mauvais pauvres.

Le Président (M. Copeman): M. le député.

M. Paquin: Oui. Bien, je vais laisser la parole à monsieur. Mais je comprends très bien que madame défend très bien son affaire, mais ma question, ce n'était pas vraiment ça...

Mme Fournier (France): ...monsieur, l'avis des autres.

M. Paquin: Oui, mais c'est parce que ma question, madame, n'était pas tout à fait, tout à fait ça, ou je l'ai probablement mal posée, là. Moi, je vous demandais qu'est-ce qu'on peut faire tous ensemble, au-delà de tout ça, au-delà d'aujourd'hui, la population, moi, comme citoyen, et les autres personnes qui nous écoutent, pour essayer d'améliorer la situation au niveau... essayer d'avoir une image moins discriminatoire vis-à-vis des gens qui sont assistés sociaux, parce qu'on ne doit pas en avoir une. Ça fait que, comme citoyens, qu'est-ce qu'on pourrait faire, qu'est-ce qu'on pourrait amener? C'était plus ça, ma question, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): M. Reboul-Salze, rapidement, s'il vous plaît.

M. Reboul-Salze (Benoit): Oui, rapidement. Moi, ce que me dit le cri du coeur de France, c'est... enfin, le cri de colère aussi, c'est: La première chose à faire, c'est de comprendre ce que vivent les gens, et c'est ça qu'il faut que l'ensemble des citoyens et citoyennes aient les moyens de faire, comprendre qu'est-ce que ça veut dire, vivre avec si peu d'argent, vivre en situation de pauvreté. Et ça, ça passe par de la formation dans les écoles et ça passe par de la formation dans les universités, à tous les niveaux. Et, si on ne prend pas ce temps-là pour comprendre, on ne va pas changer de regard, on ne va pas voir les efforts que font les gens et on n'avancera pas, on restera avec nos préjugés que les gens à l'aide sociale profitent du système, ce qui n'est pas juste.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de solidarité sociale.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Bienvenue, mesdames. Bienvenue, monsieur, à cette commission. Je dois vous avouer que je suis un petit peu secoué par ce que vous nous avez fait entendre ce matin. Je trouve que votre présentation et vos témoignages sont extrêmement percutants, troublants.

Je veux, en passant, de fait, puisque je connais votre mouvement, et à travers vous, saluer la responsabilité citoyenne des personnes qui, comme vous, jour après jour, côtoyez ce problème, tentez d'aménager des solutions, accompagnez des personnes vers des solutions et être vraiment partie prenante... Vous êtes vraiment partie prenante de l'amélioration de la qualité de vie de ces personnes-là, et vos efforts, je pense, pour améliorer leur situation et guider les gouvernements successifs dans l'amélioration des conditions de vie des personnes les plus démunies sont extrêmement louables, extrêmement inspirants, et nous vous devons un coup de chapeau citoyen pour ce que vous accomplissez.

Et, à ce chapitre-là, je ne relèverai pas ? par respect pour ce que notamment Mme Fournier vient de dire ? les inexactitudes ou les divergences d'opinions qu'on pourrait avoir, le ministre et moi, sur la question et m'adresserai directement à vous.

J'aimerais avoir une opinion éclairée d'une juriste ? donc, je m'adresse à Mme Caron ? sur l'article 96 du projet de loi concernant le droit de recours des personnes qui seraient impliquées dans Alternative jeunesse ou dans des programmes spécifiques. J'ai demandé tout à l'heure au ministre de consulter son monde pour voir quelle pourrait être l'interprétation qu'on pourrait faire de sa loi et des dispositions de couverture des droits de recours, nous n'avons pas eu de réponse encore. Mais, puisque vous êtes là, madame, on peut profiter de vos lumières, là, en termes d'interprétation de la loi. Qu'est-ce que vous y lisez et comment vous interprétez cet article?

Mme Caron (Madeleine): Écoutez, je...

M. Bouchard (Vachon): Parce que, je pense, c'est vous qui avez mentionné l'article 96 dans votre témoignage.

Mme Caron (Madeleine): Écoutez, quand on lit l'article 96, au deuxième alinéa, on voit bien qu'il y a une exception à la règle générale qui veut qu'on puisse demander des révisions, hein, c'est... Et puis les situations qui sont visées, le titre I, l'article 40, chapitres III et IV du titre II et l'article 93, bien ça vise les programmes spécifiques et puis les programmes jeunesse. Je lis, comme tout le monde, là, comment on peut voir que... «N'est pas révisable», donc il y a des choses qui ne sont pas révisables, puis ça a rapport avec ces programmes-là. Moi, je lis ça comme ça, là, c'est le gros bon sens, là. Alors, je ne peux pas en dire plus que ça. Je lis, comme tout le monde, là, qu'il y a des décisions qui ne sont pas révisables, donc il y a un droit de recours qui n'existe pas pour certaines catégories de bénéficiaires de programmes. C'est comme ça que je le lis. Je n'ai pas fait des études approfondies, là, mais ça semble être ça.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je lis le même article que vous, et ce que je vois, c'est que le type de décision qui serait rendu en vertu, par exemple, des chapitres III et IV du titre II, les chapitres III et IV, c'est les programmes Alternative jeunesse, les programmes spécifiques, une décision rendue en vertu de ces programmes-là n'est pas révisable. Et on pourrait être tenté de donner la chance au coureur, c'est-à-dire au législateur, et de dire: Bien, peut-être que, dans le règlement, on verra que c'est une catégorie ou un type de décision ou un autre, mais, tel que libellé, l'article tend à, me semble-t-il, à moins d'un avis contraire de votre part, là, à définir toutes sortes de décisions, l'ensemble...

Mme Caron (Madeleine): Encore une fois, là, je ne veux pas... je n'ai pas rédigé une opinion approfondie, mais, tel que libellé, «une décision rendue en vertu des chapitres III et IV du titre II», bien ça semble être décision rendue en vertu des chapitres en général. C'est comme ça qu'on peut le lire, c'est comme ça que je lis moi-même.

M. Bouchard (Vachon): Et, M. le Président, à la lecture des chapitres III et IV, est-ce que vous avez trouvé quelque matière à vous rassurer par rapport à ça? C'est-à-dire, est-ce qu'il y aurait, dans les chapitres III et IV, des dispositions de droit de recours explicites ou implicites?

M. Reboul-Salze (Benoit): Je n'en ai pas souvenir dans les chapitres concernant le programme Alternative jeunesse et les programmes spécifiques.

M. Bouchard (Vachon): Bon. Bien, en tous les cas, je pense qu'on pourrait toujours avoir un... Si vous en avez l'occasion, là, M. le Président, j'imagine, c'est possible que des réponses nous parviennent par écrit si jamais vous avez d'autres opinions sur la question. Mais je pense que ce serait éclairant pour tous les membres de cette commission que nous ayons quelque part une lecture qui soit la plus précise et la plus exacte possible de ce type d'article qui pourrait évidemment, éventuellement, représenter un danger réel en termes de la protection des droits des personnes dans ces programmes. Et je pense que l'alerte est désormais sonnée, et j'espère que, dans l'éventualité où le ministre ne retire pas son projet de loi, on pourra intervenir là-dessus pour tenter d'améliorer la nature de cet article-là.

n(11 h 30)n

D'autre part, j'aimerais peut-être demeurer dans le même champ de préoccupation, si vous permettez, un petit moment: la question du Bureau des renseignements et plaintes. Est-ce que, dans l'analyse que vous avez faite au fil des ans, vous rencontrez plusieurs personnes donc qui ont affaire à l'aide sociale? Est-ce que vous avez rencontré, au fil des ans, matière à amélioration du Bureau de renseignements et plaintes? Est-ce que vous avez l'impression qu'il fallait retirer de l'encadrement légal une référence explicite au Bureau des renseignements et plaintes? Est-ce que vous êtes rassurés par les réponses du ministre qui dit: Oui, mais désormais c'est le ministre qui est responsable de recevoir les plaintes ? bon, c'est dans la loi, c'est spécifique ? et, ne vous inquiétez pas, on remplacera le Bureau des renseignements et plaintes par quelque chose d'aussi bon sinon meilleur? Est-ce que vous voulez commenter là-dessus?

Mme Caron (Madeleine): Ce que j'ai entendu, c'est que le Bureau des renseignements et plaintes pourrait être amélioré mais non pas aboli pour être remplacé par d'autres choses. Il y a un groupe qui est venu avant nous, qui vous a dit que parfois c'est vers les organismes communautaires que les gens se tournent pour avoir des renseignements sur les programmes disponibles ou l'application de la loi, et, à ce point de vue là, ils font un grand travail. Le bureau en fait est important dans le sens du droit à l'information qui fait partie, là, de l'application de cette loi. C'est normal que les gens qui sont en situation de vulnérabilité puissent avoir de l'aide pour faire leurs demandes et connaître leurs droits.

M. Bouchard (Vachon): Oui?

M. Reboul-Salze (Benoit): Ce que je pourrais rajouter, c'est que, dans la loi actuelle, il y a un bureau des renseignements et des plaintes. Dans l'article 33 qui est proposé dans le projet de loi n° 57, le mot «renseignements» disparaît. Or, à quoi ça sert? Ça sert aujourd'hui à savoir quelles ont été les décisions qui ont été rendues par le passé sur tel et tel point, et donc c'est un outil de défense des droits qui est très précieux et très utile et qui permet d'exercer pleinement sa citoyenneté, d'exercer ses droits. Si cet outil-là disparaît... Et on n'a pas l'assurance qu'il va réapparaître, puisque le mot «renseignements» n'apparaît pas. Le mot «plaintes» ou quelque chose va apparaître, mais on ne sait pas quoi, mais le mot «renseignements» n'y est plus. Alors là, on est inquiet aussi.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, on a l'occasion de... Enfin, ça arrive plusieurs fois qu'on entend, dans cette enceinte, l'idée que le législateur ne parle pas pour rien dire, et, quand il ne parle pas tout court, on peut voir là-dedans quelque chose de très significatif. Quelle interprétation faites-vous du fait que ce Bureau des renseignements et plaintes n'apparaisse plus comme protégé dans un encadrement législatif?

M. Reboul-Salze (Benoit): Par définition, un recours doit être indépendant. Le Bureau des renseignements était indépendant des services du ministère. Est-ce qu'on va de nouveau avoir cette indépendance d'un service qui va dépendre directement du ministre? Ça, on n'en est pas garanti. Et, d'autre part, il ne faut quand même pas oublier... On n'en a pas parlé jusqu'à maintenant, mais, dans le cadre de la réingénierie de l'État, on prévoit une diminution du nombre de fonctionnaires, on prévoit une diminution... une fusion entre Emploi-Québec et les agents d'aide sociale. Ça veut dire qu'on va se retrouver avec des personnes qui vont avoir de plus en plus de travail, une charge de travail plus importante. Donc, ça veut dire une complication, ça veut dire moins de patience en fin de journée quand vous avez reçu 30, 40 personnes. C'est tout ça que ça veut dire. Donc, ça veut dire certainement un moins bon service à la population.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, dans l'esprit de la loi n° 112 et dans les remarques que vous faites dans votre mémoire, vous insistez énormément sur la possibilité, pour la population et notamment pour les personnes qui sont aux prises avec des problèmes de pauvreté, de faire partie de la réflexion, de l'analyse, de la planification, éventuellement des propositions concernant une éventuelle vraie réforme de l'aide sociale. Et vous citez le Centre belge sur l'égalité des chances, qui a pris l'habitude, je pense, au fil des ans, de produire ses propres opinions à l'intérieur d'un cadre de bienvenue, si on peut parler comme ça, là, de l'Assemblée nationale belge. C'est-à-dire qu'il y a des dispositions pour que ça... Est-ce que vous pouvez informer les membres de la commission des approches que vous connaissez en la matière, desquelles on pourrait s'inspirer pour une meilleure participation de la population?

M. Reboul-Salze (Benoit): Donc, en Belgique, il y a eu, il y a quelques années, un rapport général qui s'est fait sur la pauvreté, qui a débouché sur un ensemble de mesures. Et en fait le Centre d'égalité des chances a fait un groupe de travail qui comprenait à la fois des universitaires, à la fois des agents d'aide sociale, à la fois des personnes en situation de pauvreté pour croiser les savoirs, pour mélanger les différents aspects, les différentes visions des choses qu'on peut avoir concernant les mesures de lutte à la pauvreté en Belgique.

Et ça, c'est une approche qui est innovante, qui est de mettre ensemble les différents partenaires et puis on discute ensemble pas simplement pour apporter une expérience de vie, mais aussi pour apporter son analyse parce que, quand on vit quelque chose, on est capables de l'analyser. Et souvent les consultations de par le monde ont été: Dites-nous ce que vous vivez puis on va faire quelque chose avec. Mais là ils ont été plus loin, c'est non seulement: Dites-nous ce que vous vivez, mais: Dites-nous ce que vous pensez, et avec ça on va évaluer les mesures de lutte contre la pauvreté, et ça, c'était vraiment très particulier et très, très intéressant et très novateur.

M. Bouchard (Vachon): Peut-être revenir sur un... J'ai bien entendu votre réponse, là, mais éventuellement j'espère qu'on pourra définir un peu mieux ce genre de mécanisme là à l'intérieur de nos propres institutions, il me semble que c'est extrêmement important.

Sur la question de l'indexation, la disposition légale par rapport à l'indexation est absente, c'est-à-dire que, dans le projet de loi n° 57, on ne fait pas mention d'une indexation quelle qu'elle soit, mais tous les groupes nous reviennent avec ça parce que quelque part il y a eu un règlement au niveau de la loi budgétaire concernant une demi-indexation aux personnes aptes à l'emploi, y compris de fait, hein, les personnes avec contraintes temporaires, là ? les familles monoparentales sont à demi-indexées lorsqu'elles ont des enfants de moins de cinq ans et les personnes de 55 ans et plus ? si bien que quelqu'un qui arriverait à l'aide sociale dans quatre, cinq ou six ans pourrait se voir offrir une prestation qui est diminuée par rapport à ce qu'elle est maintenant.

Quelle est votre proposition par rapport à l'indexation? Bon. Il y a eu de la part de différents gouvernements des dispositions très différentes, là, par rapport à ça. Le ministre se plaît à évoquer le fait que, lorsque le Parti québécois était au pouvoir, il y a eu quatre ans sans indexation. L'indexation a été éventuellement remise à l'ordre du jour mais pleinement, et cette fois on arrive avec des différentiels d'indexation, apte ou avec contraintes sévères à l'emploi. Quelle est votre proposition, quelle est la meilleure manière d'approcher ce problème-là? Et je vous ferai remarquer en passant, là, qu'à la Régie des rentes du Québec le taux d'indexation est supérieur au reste de l'ensemble des citoyens, contrairement à ce que le ministre a dit tout à l'heure.

M. Reboul-Salze (Benoit): Ce qu'il faut, c'est une indexation pleine et entière pour tous les gens parce que le coût de la vie augmente. L'année dernière, il y a eu une indexation mais hors alcool et tabac. Donc, les gens n'ont pas le droit de fumer ou au moins leur budget diminuait aussi. Puis en plus il y a eu l'augmentation d'Hydro le lendemain de l'indexation: indexation au 31 décembre au soir et hausse d'Hydro le 1er janvier, ça a mangé l'indexation en un éclair.

Il y a une chose qu'il ne faut pas confondre, parce qu'il y a la question du montant de l'indexation qui doit être mécanique, c'est le montant du coût de la vie, et on ne devrait pas avoir à se poser de questions par rapport à ça. Il y a l'autre question qui est le montant d'aide sociale, et c'est deux choses différentes. Et c'est sûr qu'il faut une indexation mécanique automatique, mais en même temps il faut aussi augmenter le montant d'aide sociale, et c'est deux choses différentes, deux mécanismes différents.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que votre recommandation serait à l'effet qu'il y ait une indexation automatique inscrite dans le plan... dans le projet de loi n° 57, dans le projet de loi, par conséquent? Et est-ce que par ailleurs, dans votre réponse, là, vous nous dites en même temps: Il faudrait un mécanisme de révision continue quant au niveau de la prestation elle-même et que ce soit inscrit dans la loi?

M. Reboul-Salze (Benoit): Paradoxalement, je vais vous dire: On n'a pas envie que ce soit inscrit dans cette loi-là parce qu'on veut qu'elle soit retirée. Donc, on ne va pas vous faire une recommandation pour améliorer cette loi ? pour nous, on demande son retrait ? mais qu'il y ait un amendement à la loi actuelle pour une indexation automatique et mécanique, oui, et que ça reste dans la prochaine réforme de l'aide sociale à faire, à débattre, oui, qu'il y ait ce mécanisme d'évaluer quel doit être le montant d'aide sociale pour couvrir les besoins essentiels à un barème, un vrai barème plancher, à ce moment-là, oui, on va être d'accord.

Le Président (M. Copeman): Ça va?

M. Bouchard (Vachon): Oui, j'aurais...

Le Président (M. Copeman): Allez-y, M. le député.

M. Bouchard (Vachon): O.K., une dernière question. Vous reprochez au ministre d'amener un projet de loi qui a été rédigé en vase clos, dites-vous, dans votre mémoire, là. Je pense que je vous cite correctement.

n(11 h 40)n

En même temps, vous dites: Ce projet de loi ne se préoccupe pas de l'impact des mesures antérieures quant à la nature même de la réforme qu'il nous propose et ne se préoccupe pas de l'impact des mesures que le projet de loi lui-même amène. Quelles seraient les questions d'impact les plus importantes auxquelles le gouvernement devrait répondre avant de faire une telle réforme?

M. Reboul-Salze (Benoit): La Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale demande au ministre ? on pourrait retrouver l'article ? s'il le juge nécessaire en conscience que ça va influencer les revenus... Il me semble que, quand on fait une loi sur l'aide sociale, on peut estimer en conscience que ça va influencer les revenus des personnes en situation de pauvreté.

Et la loi demande, à un autre article ? je crois que c'est 15.2 ? qu'il y ait une amélioration du revenu des personnes. Là, on n'est pas vraiment dans une amélioration par rapport au coût de la vie, par exemple, ou on n'est pas dans une amélioration pour tout le monde. C'est vrai que, pour certaines catégories de personnes en situation de pauvreté, il va y avoir amélioration, mais elle n'est pas pour tout le monde, et ça, ce n'est absolument pas normal. Est-ce qu'il y a des bons pauvres qui ont droit à une amélioration et des mauvais pauvres qui n'ont pas droit? Non, quand on est en situation de pauvreté, on n'a pas le choix, il faut qu'on ait de quoi vivre.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, une petite dernière question. Puisque nous allons conclure notre conversation et que tout le monde est très attentif à votre témoignage, quelle serait, quelle serait la demande la plus importante, la plus urgente, la plus significative que vous voudriez adresser aux membres de cette commission, et notamment au ministre, avant de clore nos débats?

M. Reboul-Salze (Benoit): Il y a trois demandes, en fait: c'est que cette commission recommande le retrait du projet de loi n° 57, recommande des améliorations à la loi actuelle, et vous en avez en page 3 de notre mémoire et puis d'autres mémoires qui vous ont été envoyés, notamment celui du Collectif pour un Québec sans pauvreté, donc qu'il y ait un ensemble d'amendements qui soient faits à la loi actuelle, et que, dans le même temps, on lance un débat public, clair, cherchant la participation des personnes en situation de pauvreté sur ce serait quoi, une vraie réforme de l'aide sociale qui respecte la loi n° 112 qui vise à tendre vers un Québec sans pauvreté.

Le Président (M. Copeman): Monsieur dames du Mouvement ATD Quart Monde Canada, je vous remercie.

Je veux juste indiquer à tout le monde, incluant les membres de la commission, les membres ? à vous mêmes ? et les membres du public, que la Commission des affaires sociales n'a pas le mandat de recommander le retrait du projet de loi ni n'a pas le mandat, tel que donné par l'ordre de la Chambre, de suggérer des amendements.

À ce stade-ci, nous sommes en consultation générale, qui sera suivie par l'adoption oui ou non du projet de loi, qui sera suivie par l'étude détaillée du projet de loi, si l'adoption de principe est faite par l'Assemblée nationale, et c'est à ce moment-là que la Commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi. Je veux vous assurer, messieurs dames, que les parlementaires ne font jamais des consultations inutiles.

Je vous remercie, M. Reboul-Salze, Mme Caron, Mme Fournier, Mme Boulanger et Mme Laurin, d'avoir participé à cette commission. J'invite les représentants du Réseau Solidarité Itinérance du Québec à prendre place à la table et je suspends les travaux de la commission quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 43)

 

(Reprise à 11 h 45)

Le Président (M. Copeman): Alors, la commission reprend ses travaux, et nous souhaitons la bienvenue aux représentants du Réseau Solidarité Itinérance du Québec.

M. Maheux, vous êtes le président, je vous rappelle comment ça fonctionne: vous avez une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie par un échange de plus ou moins 20 minutes de chaque côté de la table.

Je vous invite à présenter les personnes qui vous accompagnent et de débuter immédiatement votre présentation.

Réseau Solidarité Itinérance
du Québec (RSIQ)

M. Maheux (Pierre): Je suis accompagné de M. Pierre Gaudreau, qui est trésorier du Réseau Solidarité Itinérance, et de Mme Nathalie Rech, qui est agente de liaison du réseau.

Le Président (M. Copeman): Excusez, madame. Pour les fins de nos enregistrements, madame?

Mme Rech (Nathalie): Nathalie Rech.

M. Maheux (Pierre): Nathalie Rech.

Le Président (M. Copeman): Rech?

M. Maheux (Pierre): Oui.

Le Président (M. Copeman): Merci.

M. Maheux (Pierre): Sans i.

M. Gaudreau (Pierre): Alors, je vais débuter la présentation du mémoire du Réseau Solidarité Itinérance du Québec. Bonjour, messieurs dames les députés. Peut-être, comme c'est de coutume et encore plus parce qu'on est relativement un nouveau regroupement, présenter ce qu'est le Réseau Solidarité Itinérance du Québec.

On est un regroupement québécois qui représente des organismes, des concertations qui interviennent en itinérance dans une dizaine de régions ou sous-régions du Québec regroupant 135 organismes. Ces 135 organismes, ça va de maisons comme l'Auberivière à Québec, La Maison du père, l'Accueil Bonneau, Le Chaînon, des organismes connus par vous tous mais aussi beaucoup de nouveaux organismes qui interviennent auprès des jeunes de la rue, qui interviennent sur les problématiques comme les personnes séropositives, qui interviennent auprès de travailleuses du sexe. Donc, toutes sortes d'organismes qui interviennent avec la réalité très diversifiée qu'est le milieu de la rue.

Le Réseau Solidarité Itinérance du Québec existe depuis 1998. On est très actif sur plusieurs dossiers. Entre autres, on a été très impliqués avec le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral dans la mise en place du programme IPAC ? une initiative de partenariat en action communautaire ? qui est un programme fédéral destiné justement à la lutte à l'itinérance, à agir pour soulager ou prévenir l'itinérance. Grâce à la collaboration du RSI et du gouvernement du Québec via les régies régionales ? maintenant les agences ? on a réussi, au Québec, à livrer de façon efficace puis en suivant un modèle québécois le programme IPAC, puis on en est bien content, et on espère, comme le ministre le disait aujourd'hui lui-même dans le journal, qu'il peut y avoir un programme IPAC III rapidement parce que malheureusement les besoins sont très importants.

Le Réseau Solidarité Itinérance, on intervient à la fois pour aider les organismes qui interviennent en itinérance et les populations qui vivent des situations d'itinérance. Ça nous amène à agir sur des politiques, sur des programmes, et c'est à ce niveau-là justement qu'on est très interpellés par la réalité d'un programme... des programmes de sécurité du revenu puis par l'actuel projet de loi n° 57 qui veut amener une nouvelle réforme de la sécurité du revenu.

Avant d'embarquer dans les critiques et les commentaires et les suggestions qu'on fait sur la loi n° 57, il est important pour nous de regarder ce qu'est l'actuelle Loi de la sécurité du revenu. Le premier énoncé qu'on veut faire, et on vient d'en parler dans la présentation précédente, c'est: le niveau actuel des prestations en est un qui maintient une trop grande pauvreté et qui, pire, amène un appauvrissement des gens qui sont déjà en situation de pauvreté.

On a des données dans notre mémoire que vous avez souvent entendues mais qu'il est pour nous important de répéter parce que c'est de la vie des gens dont on parle. Il y a quatre ans, une personne à l'aide sociale apte au travail avait un niveau de prestations qui correspondait à 41 % de la valeur annuelle du seuil de faibles revenus. En raison justement de la non-indexation dont on a déjà amplement parlé ce matin et dont vous avez déjà entendu parler mais qui est quelque chose de très important, quand on calcule le niveau de prestations actuel d'une personne en 2003 en comparaison justement du seuil de faibles revenus, on est rendu à un niveau de 34 %. Donc, il y a une perte, même si le revenu de la personne a légèrement augmenté, parce qu'il n'a pas augmenté de façon suffisante. Ce qu'elle a versus ce qu'est le seuil officiel de seuil de faibles revenus a diminué. Donc, la valeur réelle de son revenu, pour faire face aux besoins que sont le logement, la nourriture, le transport, les médicaments, n'a pas suivi. Donc, quand on parle d'indexation, de pleine indexation, c'est un principe important.

n(11 h 50)n

Il y a deux choses donc qui sont importantes: il y a d'avoir un niveau de prestations qui est suffisant pour faire face à des besoins, mais il y a aussi que ce niveau de prestations là puisse suivre le coût de la vie et soit pleinement indexé. Puis, à ce niveau-là, autant on a été critiques de ce qui s'est fait dans les dernières années, on salue les avancées qu'il peut y avoir au niveau de l'indexation, et on veut, comme d'autres, que ce soit pour tout le monde. Le niveau actuel des prestations, il est un facteur de pauvreté, il est un facteur d'appauvrissement. Il est aussi... Puis on regarde évidemment la réalité de l'aide sociale actuellement et le projet de loi à la lumière de notre travail en itinérance. Le niveau actuel de prestations, il est un facteur d'itinérance.

En 2001, le recensement de Statistique Canada ? et là on parle de données qui datent donc de l'année précédente, de l'an 2000 ? dévoilait, démontrait qu'il y avait déjà plus de 111 000 ménages locataires, au Québec, qui consacraient plus de 80 % de leurs revenus pour se loger. Depuis ce temps-là, et vous le savez tous et toutes, on a assisté, au Québec ? on a rattrapé la réalité canadienne et celle d'autres pays ? à une montée fulgurante des loyers, alors que les revenus des personnes les plus démunies n'ont pas suivi évidemment cette hausse du coût du logement. Dans toutes les régions du Québec, on fait face à une hausse, depuis l'an 2000, très importante: 30 %, 40 % du coût des loyers. Donc, le prochain recensement va dévoiler une réalité encore plus épeurante parce que les niveaux de revenus ? espérons qu'on va sortir du débat actuel avec une hausse quand même plus importante ? le niveau de revenus dans le premier cycle de... le premier cinq ans des années 2000 a très peu augmenté pour les gens les plus pauvres, alors que les loyers ont beaucoup augmenté. Donc, il reste très peu pour vivre après ça. Juste vous donner quelques chiffres qu'on a souvent dits. On a assisté à une montée en flèche des loyers: 13 % à Montréal, 17 % à Gatineau, plus de 9 % à Québec. Ça, c'est sur deux ans, alors qu'on parle d'une période de plus de quatre ans maintenant, ce qui laisse évidemment démontrer qu'il va y avoir une très grave détérioration de la situation.

Quand on parle de gens qui paient plus de 80 % de leurs revenus pour se loger, on parle donc de gens à qui il reste très peu d'argent, on parle de gens parfois qui ont 20 $ par mois. Par exemple, à Montréal, si quelqu'un a un trois et demie, avec une prestation d'apte au travail, il lui reste 20 $, un coup son loyer payé, si elle a le loyer moyen. Dans certains cas, les loyers étant très élevés, il y a des gens qui consacrent plus que leurs prestations pour se loger. Cette réalité-là, vous le savez aussi et on en a parlé tantôt, elle amène beaucoup de gens à fréquenter les ressources des banques alimentaires. Le sondage de l'Association des banques alimentaires a démontré une augmentation de plus de 22 % de l'utilisation des banques alimentaires entre 1997 puis 2003. À ce niveau-là, on est très interpellés par cette réalité-là, puis on tient à réaffirmer ? et pour nous c'est très important ? que, s'il y a des banques alimentaires, s'il y a des soupes populaires, c'est parce qu'il y a des besoins. Ce ne sont pas les organismes communautaires qui créent les besoins. On les révèle, on les dévoile mais on ne les crée pas, assurément, M. le ministre.

Les personnes bénéficiaires d'aide sociale sont extrêmement vulnérables, puis, au moindre problème de santé, quand ils consacrent un taux d'effort de 80 % de leurs revenus pour se loger, quand il y a des imprévus, que ce soit pour les enfants, pour les médicaments, quand ils ont à se déplacer, à prendre le transport en commun qui, dans tous les grands centres urbains, est rendu de plusieurs dollars ? 4 $, 5 $ pour faire un aller-retour ? ces gens-là ne l'ont pas, cet argent-là. Donc, c'est des gens qui sont extrêmement fragiles. On ne dit pas qu'il y a 110 000 personnes qui paient plus de 80 % de leurs revenus pour se loger qui sont sur le bord de l'itinérance, mais on sait, et on le voit dans les organismes, qu'une partie importante de ces gens-là effectivement perdent leur logement, incapables de le payer, parce qu'ils font d'autres choix: ils font un choix de manger, ils font le choix de vêtir leurs enfants, ils font le choix de payer leurs médicaments. Donc, oui, il y en a une partie qui perdent leur loyer ? les chiffres sont épeurants, on parle d'un taux de 30 000 à 40 000 évictions par année à la Régie du logement pour loyer impayé ou loyer souvent en retard ? et cette réalité-là il faut travailler là-dessus. Et ce n'est pas parce qu'on veut se faire prophète de malheur, parce qu'on sait qu'avec la réalité actuelle, avant même le projet de loi, les niveaux de prestations sont tellement insuffisants qu'ils sont un facteur ? ce n'est pas le seul ? de création d'itinérance.

Un autre élément sur lequel on est souvent intervenus, les différents organismes, qui pour nous aussi est inacceptable, c'est qu'il y a une discrimination à l'égard des plus démunis en créant des catégories, et on le voit aussi dans les personnes itinérantes. Il y a des jeunes qui fréquentent des ressources, qui se ramassent avec différents statuts. Pour nous, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des besoins, il y a un besoin de se loger, un besoin de se vêtir, de se nourrir, de se transporter. Et leur niveau de prestations devrait donner à tout le monde, aptes ou inaptes, jeunes ou moins jeunes, un revenu minimum décent pour faire face au minimum de ces besoins-là.

Avant d'embarquer dans la critique et les commentaires sur la loi n° 57, on tient à dire que pour nous c'est une question importante. On est content d'être ici, ce matin, et de contribuer au débat et à la réflexion sur la nécessaire réforme de la sécurité du revenu, une réforme qui doit attribuer à toutes les personnes un seuil de revenus décent, une réforme qui doit traiter tout le monde de façon équitable. Et là-dessus je vais laisser la parole au président du Réseau Solidarité Itinérance, Pierre Maheux, pour faire justement les commentaires sur la loi n° 57.

M. Maheux (Pierre): Dans un premier temps, le projet de loi n'affirme pas notre responsabilité collective à l'égard des plus démunis. La lutte à la pauvreté, c'est un effort collectif, on n'a pas à se déresponsabiliser collectivement puis à culpabiliser individuellement les personnes qui sont démunies, qui sont pauvres ou qui ont le bénéfice de toucher l'aide sociale.

Dans un deuxième temps, il est bon de souligner aussi que, même s'il s'est créé beaucoup d'emplois au Québec... En 2001-2002, il s'est créé 118 000 emplois et il y a eu 6 000 pertes au niveau des diminutions de prestataires des revenus. Donc, la création d'emplois n'affecte pas tant que ça le niveau d'aide sociale en tant que tel.

Lutter contre la pauvreté puis l'exclusion sociale en ne véhiculant pas de préjugés, c'est justement renforcir la solidarité sociale comme société puis comme collectivité en tant que tel. Ce qu'on apprécierait beaucoup... C'est que le projet de loi, il ne garantit pas un revenu minimum décent. Un revenu minimum décent, pour nous autres, c'est un revenu qui va permettre aux gens de pouvoir répondre à l'ensemble de leurs besoins de base. Actuellement, quelqu'un qui est sur le bonheur social, il n'a pas les moyens de prendre un transport en commun dans une grande ville, c'est trop cher. Donc, il perd une de ses capacités, un de ses outils de se chercher et de se trouver un emploi. Puis, s'il n'a pas les moyens de se payer le transport en commun, on ne parlera pas d'Internet, d'accord, parce que ça prend un ordi.

Aussi, ce qui revient en tant que tel, c'est: le projet de loi rouvre de nouveau la porte à la saisie des chèques pour non-paiement de loyer. Le non-paiement de loyer, les cas de fraude, au niveau de l'aide sociale, c'est minime. Il n'y a pas plus de fraudeurs à l'aide sociale que dans les millionnaires, ou dans les revenus élevés, ou dans les entreprises en tant que tels; donc ça reste un phénomène mineur en tant que tel. Sauf que la saisie des chèques... On regarde qu'actuellement, à cause de la pression inflationniste au niveau des loyers ou la rareté des loyers, la crise, la pénurie de logement, utilisons toutes les expressions qu'on veut, elles sont très bien présentes. De plus, un propriétaire actuellement, entre une personne à faibles revenus puis une personne à revenus moyens qu'il va être sûr qu'elle va être capable de payer son loyer, il y a une discrimination qui se fait de manière systématique. Donc, à ce niveau-là, ça ne réglera pas le problème. Le problème qu'on a actuellement, c'est que le monde qui sont à l'aide sociale ou qui ont des revenus très bas ont de plus en plus de misère à se loger en tant que tel, et pas rien qu'au mois de juillet, c'est à l'année. D'ailleurs, en HLM, le taux moyen de non-paiement de loyer est de 0,5 %. Preuve est que, quand un loyer correspond à un pourcentage équitable des revenus des personnes, qui est de 25 % au Québec, c'est un peu plus facile d'arriver avec 25 % de tes revenus en loyer qu'avec 80 %, en tant que tel.

Deuxièmement, concernant la discrimination, c'est-à-dire l'ajout de nouvelles clauses, de nouvelles catégories de personnes, les moins de 25 ans, déjà, dans l'ancien projet de loi, dans l'ancienne loi, ce qu'on avait dénoncé... c'est-à-dire, dans l'actuelle loi ? excusez-moi ? c'est la clause minimum de deux ans avant qu'un jeune puisse toucher un premier chèque d'aide sociale. Nous autres, on avait surnommé ça la «machine à fabriquer la relève en itinérance», et on ne s'est pas tellement trompés là-dessus. Parce qu'on remarquera que, autant il y a 10 à 15 ans la majorité, autour de 75 % des personnes qui fréquentaient le réseau d'itinérance étaient âgées de plus de 30 ans, maintenant on frise le 50 % en bas de 30 ans, c'est un rajeunissement de la population assez marquée. Donc, cette clause-là est maintenue en tant que telle, donc le minimum de deux ans est maintenu, et en plus on crée un nouveau programme qui est Alternative jeunesse, un programme spécifique qui s'adresse aux moins de 25 ans. On peut comprendre et on peut être d'accord que les jeunes aient besoin de mesures d'accompagnement spécifiques, mais ils devraient avoir droit aux mêmes droits et aux mêmes privilèges que l'ensemble des prestataires de l'aide sociale en tant que tels et non pas une clause à part qui exclut le droit au recours. Effectivement, on peut se demander c'est quoi, l'objectif poursuivi, surtout avec l'annonce de compressions de 100 $ pour les jeunes qui demeurent encore chez leurs parents, dont les revenus sont inférieurs à 28 000 $. Des revenus inférieurs à 28 000 $, convenons-en, on ne parlera pas de personnes extraordinairement riches. Ça fait qu'on ne comprend pas ce traitement distinct là, et on le condamne, et on exprime notre profond désaccord.

n(12 heures)n

Autre chose aussi, c'est les personnes de plus de 55 ans. On peut comprendre qu'actuellement, dans le marché du travail, il y ait des personnes de plus de 55 ans qui durent plus longtemps que prévu sur le marché du travail. Généralement, c'est des emplois spécialisés. N'importe qui qui connaît un peu le marché de l'emploi le sait: les emplois non spécialisés occupés par des personnes âgées, de plus en plus ces personnes-là perdent leur emploi, en tant que tel. Vouloir en faire une catégorie où il y a accès, comme s'ils y avaient accès, étant donné leur âge, à toute l'ouverture au niveau de l'emploi comme n'importe quelle autre catégorie d'âge, c'est faire abstraction de la réalité du marché de l'emploi. Et, à ce niveau-là, pour nous autres, c'est une mesure inquiétante puis on demande qu'elle soit retirée aussi.

En fait, ce qu'on propose, c'est: que la loi affirme le droit à la couverture des besoins essentiels puis à la dignité; que la loi énonce explicitement la responsabilité du gouvernement à l'égard de l'ensemble des citoyens du Québec, à commencer par les plus démunis ? parce qu'il ne faut pas oublier qu'on peut devenir plus démuni très facilement et très rapidement, on l'a vu lors des relocalisations, des fermetures d'usines, des crises dans les pêcheries, etc., ce n'est pas une maladie, c'est un phénomène de société; que soient abandonnés les différents régimes catégoriels qui renforcent les préjugés à l'égard des personnes, pour n'avoir qu'un programme universel d'aide sociale accessible à l'ensemble des personnes en difficulté; que les acquis des 55 ans et plus soient maintenus; que l'indexation des prestations soit automatique et complète pour l'ensemble des prestataires; que l'article 53, qui prévoit le versement d'une partie de la prestation au locateur d'une personne assistée sociale pour non-paiement de loyer, soit retiré purement et simplement du projet de loi; que la loi ne comporte pas d'éléments coercitifs mais plutôt des mesures incitatives favorisant l'insertion et la réinsertion sociales des personnes; que les personnes sans adresse fixe puissent continuer de recevoir leurs prestations, par exemple à l'adresse d'un organisme communautaire qu'elles fréquentent sur une base régulière, ressources d'hébergement ou autres; que les personnes inaptes qui participent à des programmes d'insertion sociale ne soient pas pénalisées en voyant leur allocation réduite.

Nous proposons également que les montants accordés aux personnes assistées sociales permettent de couvrir les besoins essentiels et quels que soient leur âge, leur situation familiale, leur santé mentale ou leur santé physique; que la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles soit accompagnée de mesures favorisant le logement social et communautaire pour pourvoir aux personnes assistées sociales du logement vraiment accessible en tant que tel. Fondamentalement, ce qu'on souhaiterait, parce qu'on pourrait reprendre mot pour mot ce que les personnes qui nous ont précédés... Excepté l'article 49, on pense que ce qu'il y a de mieux... Même si ce n'est pas le pouvoir de la commission, on pense que le mieux, c'est que la loi actuelle soit retirée et qu'on entreprenne un véritable processus de consultation pour en arriver à quelque chose de consensuel. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup. Alors, M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

M. Béchard: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue à vous trois, et je vous dirais qu'il y a un certain nombre de points que, dans votre présentation, je trouvais bien intéressants et sur lesquels je veux vous entendre aussi approfondir, entre autres au niveau...

Inutile de vous dire que j'ai bien apprécié quand vous avez mentionné qu'il s'agissait d'une avancée au niveau de l'indexation, mais que ce n'est pas assez puis que c'est un facteur d'itinérance. Regardez, je suis bien d'accord, puis ça reflète ce que je dis depuis ce matin, le début de la commission. C'est qu'il y a un niveau qui est là, et il faut, il faut faire attention. Le projet de loi comme tel et le montant des prestations, c'est deux choses. Les gens viennent, ils nous disent: Bien, dans le projet de loi, il n'y a pas de montant minimum ou de revenu minimal acceptable, ou peu importe, dans le projet de loi. Je veux dire, je ne suis pas sûr que c'est le rôle du projet de loi non plus de le fixer, ce revenu-là, et je ne suis pas sûr que ce serait accepté de toute façon.

Mais je vous dirais... Et je veux vous entendre là-dessus comme première question, parce que, quand vous me parlez des 16-18 ans, c'est quelque chose qui me préoccupe beaucoup, moi aussi, au niveau des... puis du deux ans, là, 16-18 ans. Entre autres, au niveau de l'Alternative jeunesse, on veut tendre de plus en plus, dans certains cas simples mais dans de nouveaux programmes ? c'est quelque chose qu'on est en train d'étudier ? de commencer plus tôt, à 16 ans, des programmes non pas, je vous dirais, de juste 18-25, mais commencer les programmes plus tôt. Et c'est pour ça que, entre autres, dans le projet de loi, à l'article 69, il est question que le programme Alternative jeunesse... Le libellé, c'est: «Le ministre peut proposer le programme Alternative jeunesse à un adulte de moins de 25 ans...» Donc, qu'il ait 16, qu'il ait 17 ans, ça, je vous dirais, c'est une tendance qu'on veut prendre de plus en plus, dans la mesure où on, on... Moi, je suis d'accord avec ce que vous mentionnez, là: 16-18, c'est la fin de la fréquentation scolaire obligatoire qui pour certains est déjà finie bien avant, on va s'entendre là-dessus. Et là on a une période pendant laquelle finalement on laisse les gens à eux-mêmes puis on les ramène après.

Alors, moi, ce que je veux vous entendre, sur ce 16-18 ans, vous trouverez sûrement que c'est une bonne tendance à prendre. Et je suis conscient que vous nous dites qu'Alternative jeunesse risque de créer une discrimination ou quoi que ce soit. Moi, je ne le vois pas sous cet angle-là. Alternative jeunesse, c'est le programme de base au niveau de la sécurité du revenu. Il n'y a pas de participation obligatoire. Le jeune qui ne veut pas participer à un des programmes n'est pas puni, n'est pas pénalisé. On ne coupe pas son chèque, mais on lui offre des alternatives. Et j'espère qu'on va en offrir de plus en plus à des moins de 25 ans tout court, pas juste 18-25. Au niveau d'Alternative jeunesse, est-ce que vous aimeriez mieux qu'il y ait un seul même grand programme? Vous trouvez au moins que la démarche, là, d'y aller de plus en plus sur le 16-18, d'avoir des programmes qui correspondent davantage à chacun des milieux... Est-ce que vous trouvez que c'est une approche qui est quand même valable?

Le Président (M. Copeman): M. Maheux.

M. Maheux (Pierre): Les programmes, oui, mais les catégories, non. Ce qu'on a dit tout simplement, c'est que... Ce qu'on vous demande, c'est que l'ensemble des prestataires, quel que soit leur âge, soient traités de la même manière, sauf les 55 ans et plus où on veut éviter qu'on les reconsidère de nouveau aptes et actifs en tant que tels, qu'ils soient soumis à un risque de pénalisation. Dans un deuxième temps, avoir des revenus minimums décents pour l'ensemble des personnes bénéficiant du programme, c'est correct. Mais, en tant que tel, que vous vouliez créer un programme pour les 16-25 ans, les 18-25 ans, il n'y a pas de problème avec ça. Il en a déjà existé, il en a existé une flopée depuis que ça existe. Nous autres, on est contre le fait qu'il y ait une catégorisation par segments d'âge. Il est là-dessus, notre bogue. Il n'est pas sur le fait qu'il y ait un programme, il est sur le fait qu'il y a une catégorisation par âge, comme si on allait leur demander des obligations supplémentaires à d'autres. C'est là, notre crainte. Et le message que vous avez envoyé avant la commission, ça l'a un peu confirmé, veux veux pas: les coupures de 100 $ pour les personnes qui demeurent encore chez leurs parents puis qui ont des revenus inférieurs à 28 000 $.

M. Béchard: Ce n'est pas, ce n'est pas... Il faut faire attention pour ne pas mélanger les choses. Alternative jeunesse, là, c'est justement des choses de plus qu'on offre, là...

M. Maheux (Pierre): ...

M. Béchard: ...et je ne veux pas... C'est parce qu'on est, on est souvent, là, contraints, je dirais, dans des perceptions plus que dans la réalité, là. Mais la réalité qui est écrite là, qui est Alternative jeunesse, même au niveau des recours, il y a plus de recours qu'il y en avait avant avec certains programmes. Alternative jeunesse vise à offrir plus de choix, pas plus d'obligations. Je vous dis: Le jeune qui refuse de participer, bien il ne participe pas puis il n'est pas coupé. Comparativement à l'ancien régime avant cette loi-là, il n'est pas coupé. Alors, c'est pour ça que... Je veux bien, là, qu'on, qu'on... mais je veux quand même qu'on soit prudents sur un certain nombre de choses, là, parce qu'Alternative jeunesse, c'est offrir plus de choix, plus de programmes, plus de possibilités aux jeunes selon les critères des régions, selon ce qui va être proposé par les communautés. Je ne vois pas, je ne vois pas ce qu'il y a d'obligation, parce que, en plus, si quelqu'un, un jeune décide de ne pas participer à ces programmes-là, il n'est pas puni.

Mais l'autre point sur lequel... Parce que c'est la même chose: Quand vous parlez d'un revenu minimal acceptable, c'est combien? Parce qu'encore là ça fait partie de la réalité qu'on a, aujourd'hui, et de la prestation ou de la loi idéale ou du monde idéal, il est dans ça, l'écart, là. Et, dans bien des cas, les gens sont contre le projet de loi n° 57, ils nous disent qu'on n'a pas assez mis dans le plan de lutte à la pauvreté pour ça, pour cette raison-là. Mais c'est parce qu'à un moment donné on fait ce qu'on peut avec les sommes qu'on a aussi. Moi aussi, je souhaiterais qu'il y ait un revenu minimal formidable pour tout le monde, mais, dans la réalité, on fait ce qu'on peut, au niveau de l'indexation entre autres. Mais il serait à combien, ce revenu minimal acceptable là, selon vous?

M. Gaudreau (Pierre): Juste revenir... finir, c'est-à-dire, sur nos positions par rapport à Alternative jeunesse, aux programmes pour les jeunes. Il faut des programmes, oui. Là où on est inquiets, c'est quand on parle de créer une catégorie. Puis on est d'autant plus inquiets qu'on ne semble pas vouloir garantir, pour cette catégorie-là, les mêmes possibilités de recours et de contestation. On n'a pas eu de réponse qui nous convainc à date de votre part là-dessus.

Sur le revenu minimum acceptable, il y a des seuils. Les seuils de faibles revenus de Statistique Canada peuvent sembler élevés ? quand on parle de 16 000 $ ou de 18 000 $ pour une personne seule ? sauf que c'est la réalité dans laquelle on se trouve. On voit, à l'heure actuelle, avec le coût des logements, que le coût des loyers est dans bien des cas supérieur à la prestation d'aide sociale qu'a une personne dans plusieurs centres urbains. Il y a donc un besoin de relever substantiellement le revenu. À quel niveau? Il y a des indicateurs. La loi n° 112 prévoyait de créer un observatoire. Il y a des mécaniques qui peuvent être créées, il y a des choses qui existent au niveau du gouvernement du Québec.

Ce qu'on dit par rapport à la loi n° 57, c'est: Mettons-la sur les tablettes, adoptons des amendements majeurs à la loi actuelle pour bonifier les conditions de vie des personnes à la sécurité du revenu et travaillons sur vers quoi on veut tendre. Pour relever le niveau des prestations et garantir leur indexation, ça, c'est dès maintenant, en modifiant effectivement la loi ou en agissant sur une base réglementaire comme vous avez pu le faire. Il y a donc du travail qui peut se faire là-dessus, et, nous, on est prêts à travailler. Mais on regarde les situations des gens: oui, il y a un besoin de relever de façon substantielle le revenu des personnes seules et des familles. C'est largement insuffisant. La situation dans laquelle les gens vivent, on condamne des gens à la rue. Donc, il y a du travail à faire là-dessus, sur le revenu.

n(12 h 10)n

Il y a du travail à faire aussi sur le logement. Et ça, on en est tout à fait solidaires et on le voit très bien, puis je pense que vous êtes sensible là-dessus. Parce qu'on a beau relever le niveau des prestations des gens à l'aide sociale, si le niveau des loyers augmente encore plus rapidement ? et ça a été le cas depuis l'an 2000 ? il n'y a pas de gain pour les gens. Donc, il faut travailler sur le coût des loyers. Il faut travailler aussi pour garantir un toit permanent, et ça, c'est par un investissement important dans le logement social sous ses différentes formules, puis particulièrement celle du support communautaire en logement social pour des clientèles fragilisées comme les personnes itinérantes. Votre plan d'action d'ailleurs en matière de pauvreté le reconnaît, que c'est une formule importante à soutenir. Donc, il y a du travail à faire sur le revenu, sur le logement, sur d'autres questions; les médicaments, vous en avez déjà parlé.

M. Béchard: Il y a beaucoup de travail à faire sur beaucoup de choses. Et ça, entre autres au niveau du logement, on en a fait une partie. On est en train de travailler, mon collègue des Affaires municipales, responsable de l'habitation, sur toutes les questions du logement aussi, on a devancé un certain nombre de constructions au niveau du logement social. Mais c'est comme je vous dis, on est conscients qu'il y a des besoins énormes, puis ça, j'en suis parfaitement conscient. Il y a des choses sur les bureaux des plaintes, et tout ça, mais toute la question des structures, là, je laisse ça à mon collègue de l'opposition, là, au niveau des plaintes. Ça le préoccupe beaucoup.

Mais je veux revenir, moi, sur un point. Vous êtes les premiers à en parler: la question de la saisie du chèque. Moi, je l'ai dit, l'article est là. Je veux qu'on le fasse, le débat; ma tête n'est pas faite là-dessus. Je suis parfaitement conscient des avantages, des inconvénients des deux côtés. Un côté, des gens qui effectivement dépensent 80 % de leurs revenus pour se loger. De l'autre côté aussi, il ne faut pas se faire de cachette de propriétaires ou de gens qui ne louent pas parce qu'ils ont des craintes au niveau de la perception comme telle du loyer. Ce serait quoi, votre solution là-dedans, vous autres? Qu'est-ce que vous nous proposeriez comme... Parce que vous allez peut-être me dire: Bien, retirez tout ça puis qu'il n'y ait pas d'obligation. Mais, d'un autre côté, si on se retrouve avec un grand nombre de personnes qui carrément ne veulent plus louer à des gens, bien là on augmente la discrimination, on augmente encore les préjugés.

M. Maheux (Pierre): Je vous dirais que la quantité de locateurs qui ne veulent pas louer à des personnes à faibles revenus est déjà assez forte. Et c'était même annoncé dans les journaux l'été passé, cet été et l'autre été d'avant, tu sais, avec des conditions particulières: pas d'enfants, pas de chats, pas de chiens, pas de personnes âgées, etc., puis des revenus de tant. Ce n'est pas une nouveauté. Dans un deuxième temps, ce qui renforce la discrimination effectivement, c'est le taux d'inoccupation puis l'accessibilité au niveau du logement. Un propriétaire actuellement a le choix, comme ils le disent si bien, effectivement.

Dans un deuxième temps, est-ce que c'est le recours à la saisie du chèque qui va encourager les propriétaires à louer à plus de personnes à faibles revenus? Soyons très sceptiques là-dessus. Même la saisie du chèque en tant que telle ne réglera pas un problème qui somme toute reste assez marginal en tant que tel. Du monde qui déménage à tous les trois mois en ayant été trois mois sans payer leur loyer, il n'y en a pas des dizaines dans chacune de l'ensemble des villes. On pourrait toujours prendre des cas particuliers puis en faire une genèse, un peu comme les Bougon. En même temps, on pourrait prendre deux, trois propriétaires particulièrement véreux puis en faire une généralité sur l'ensemble des propriétaires. Mais actuellement c'est un article qui n'apporte rien, qui cible une catégorie de personnes comme quoi effectivement ils ont peut-être plus tendance à frauder.

Donc, on va permettre la saisie du chèque, alors que la saisie du chèque, c'est un revenu de dernier recours. Il n'y a personne qui embarque sur l'aide sociale par plaisir. Ce n'est pas vrai, en tant que tel, ça. Ça fait qu'à ce niveau-là permettre la saisie, c'est encore fragiliser des personnes qui très souvent ne sont pas responsables de la situation dans laquelle ils sont, tant au niveau du revenu qu'au niveau du logement en tant que tel, tout simplement.

Le Président (M. Copeman): M. le député d'Arthabaska.

M. Bachand: Merci, M. le Président. Je suis assez surpris de cette réponse-là. Mais en tout cas il faut vivre avec, là. S'il s'est développé, au cours du temps, une espèce de perception à l'effet qu'effectivement il y a des propriétaires... Puis vous le citiez vous-mêmes, là, le fait qu'il y a beaucoup de propriétaires, là, qui mettent de plus en plus de critères. C'est peut-être parce qu'ils vivaient des situations contraignantes, eux autres, de leur côté. Mais en tout cas on peut toujours, on peut toujours dire que ça n'existait pas, là, cette situation-là.

L'opinion générale sur... L'organisme reprend la majorité des revendications du Collectif sur un Québec sans pauvreté. Depuis le début, on entend souvent parler de ça. Donc, bienvenue à la commission, je m'en voudrais de ne pas vous souhaiter la bienvenue ici, mesdames... madame.

J'aimerais ça que vous m'éclairiez un petit peu sur... Et ça, c'est revenu souvent, cette hypothèse-là, le fait que les gens devraient être, à toutes fins pratiques, assurés d'un revenu minimum garanti, puis tout ça. J'aimerais que vous me parliez un petit peu... Et vous avez cité ça un petit peu dans votre présentation, que c'est important que les gens puissent vivre leur individualité, dans le sens où ne pas avoir, avec ce revenu minimum garanti là, la possibilité ou l'obligation d'aller frapper à la porte d'organismes communautaires pour leur assurer une survivance en termes de logement, survivance en termes aussi, carrément, de bouffe, là, puis être obligés d'aller à la cuisine collective puis au... bon, etc.

Moi, j'aimerais que vous m'expliquiez dans cette perspective-là où... Je ne sais pas si c'est une image de l'esprit qui me revient continuellement, mais l'individualité, là, d'une personne, là, ça relève du fait qu'elle devrait être autonome dans les actions qu'elle pose, et le revenu minimum garanti lui permettrait de faire ça. Hein? Est-ce que je me trompe, monsieur, madame?

M. Gaudreau (Pierre): Le revenu minimum garanti, nous, on reprend l'expression d'un «revenu décent», il y a différentes formules. Puis, comme on a répondu au ministre, on pense qu'il faut travailler là-dessus, à quel niveau il devrait être. Il y a des seuils de faibles revenus de Statistique Canada. Est-ce que ça doit aller là? Est-ce que ça doit être inférieur, si ça doit être à 75 %? Nous, ce qu'on sait, c'est qu'il y a 7 millions de personnes au Québec et que, pour des centaines de milliers, la situation personnelle, la situation familiale les mettent dans une situation où ils ne peuvent pas être capables de se loger et de se nourrir.

Les gouvernements se sont donné, via la fiscalité, un moyen de répartir un peu la richesse, et c'est une bonne chose, c'est-à-dire de ramasser de l'argent pour donner un minimum décent aux gens. Au fil des années, parce que le niveau des prestations n'a pas suivi ? puis ce n'est pas juste un problème d'indexation, il y a eu des nouvelles catégories qui ont été créées ? on en arrive à une situation où les gens qui sont à l'aide sociale n'ont pas un revenu minimum décent, un revenu minimum garanti, peu importe la formule. Puis, nous, on ne s'attache pas à une formule, on regarde les besoins, et, nous, on pense que l'État doit soutenir les gens pour qu'ils soient capables de vivre.

M. Bachand: Oui. Est-ce que l'État doit les soutenir dans leur individualité ou dans leur appartenance à la communauté, à votre avis?

M. Maheux (Pierre): En tout cas, ce qu'on peut dire actuellement, c'est qu'il y a beaucoup trop de gens que l'essentiel de leur temps passe justement à la survie, c'est-à-dire: recherche de nourriture, recherche de vêtements, recherche de biens en tous genres pour être capables d'arriver d'ici à la fin du mois, en tant que tel. Ce n'est pas une manière de les supporter dans leur action à la communauté en tant que telle, un.

Deuxièmement, les gens s'impliquent déjà dans beaucoup d'organismes, dans beaucoup de milieux en tant que tels justement pour aller chercher de l'entraide et du support, et ça, ils le font. On pense que c'est des activités qui valent la peine d'être soutenues parce que ça fait partie d'un réseau non formel mais qui existe, et qui est important, et qui permet de régler un paquet de petits problèmes sans qu'on s'en aperçoive.

Je pourrais donner, par exemple, un exemple concret. Quand on parle des impacts que ça peut avoir, une baisse, ou une chute, ou une augmentation de revenus ou une diminution des dépenses, j'ai un de mes oncles qui est passé d'une belle maison de chambres à un HLM. Ça fait qu'il est passé effectivement de 75 % de ses revenus en logement à 25 % de ses revenus en logement. Ça a changé beaucoup de choses. Et pourtant ce n'est pas un gain financier énorme, en tant que tel.

M. Bachand: Ça, je comprends ça. Moi, ce que je veux comprendre: Est-ce que, d'après vous, c'est contradictoire de pouvoir vivre son individualité, donc être autonome, et d'être aussi présent dans la communauté et d'avoir le support de cette communauté-là? Parce qu'en fait, là, fondamentalement, ce que M. le ministre vous demande: C'est quoi, le montant d'argent dont vous auriez besoin? Moi, ce qui m'intéresse de savoir: Est-ce que c'est contradictoire de vivre son individualité, donc d'être discriminé, et puis de faire partie aussi de la communauté et puis de profiter des services que la communauté a mis en place? Et ça, ça assure la pérennité de chaque individualité.

Autrement dit, ce n'est pas le montant qu'il nous intéresse de savoir peut-être, mais, moi, ce qu'il m'intéresserait de savoir: Est-ce que c'est contradictoire, ça, le fait de dire: Oui, je suis un individu, je veux être capable d'être autonome dans ma société, mais, d'un autre côté, si jamais ça arrive, pour n'importe quelle raison, que, moi, je ne puisse plus vivre cette individualité-là, donc être en permanence autonome dans mon action dans la société, est-ce que c'est mauvais de dire que, oui, de temps en temps, je peux aller chercher des services dans ma communauté? Puis c'est justement cette communauté-là... C'est ça que le communautaire fait finalement, donner des services, des services d'urgence.

M. Maheux (Pierre): Bien, à ma connaissance, toute personne peut aller se chercher des services dans la communauté et c'est...

M. Bachand: Absolument! Donc, ce n'est pas contradictoire.

M. Maheux (Pierre): Et, dans un deuxième temps, dans la société actuelle, je dirais: Quelqu'un qui vise à être autonome à 100 %, 365 jours par an, 24 heures sur 24, sept jours par semaine, je ne suis pas sûr qu'il y en ait tant que ça, monsieur.

n(12 h 20)n

M. Bachand: Absolument. Et c'est là qu'on se rejoint. Donc, le revenu minimum garanti, là, qui assure cette autonomie-là... Puis c'est normal de vouloir tendre vers ça, mais ça peut être normal aussi que tendre vers et puis l'atteinte de, il y a toute la distinction entre quand est-ce que le milieu communautaire vient finalement pallier à cette zone grise là. Puis, moi, je me dis: Dans une société, c'est une question de choix.

Et, juste pour terminer, M. le Président, avec ça, moi, ce que je trouve fondamental dans les discussions qu'on a depuis le début, c'est tout le temps ça, c'est cette zone grise là, quand est-ce qu'on dit ou on reconnaît à l'individu... Et ça, pour le collectif, ça revient à plusieurs reprises puis je les comprends aussi. Je comprends ça, où ça arrive et où ça arrête. Mais, moi, ce qui m'intéresse, c'est où ça s'arrime, l'individualité de chaque personne, par rapport à ce que la communauté va pouvoir lui fournir comme aide au moment où il va y avoir urgence. C'est un petit peu là que je me dis... Et, moi, ce que je cherche chez vous comme réponse: Est-ce que, hein, ça vous intéresse vous aussi? À quel endroit c'est complémentaire, ça, l'individualité puis la communauté?

M. Gaudreau (Pierre): Peut-être juste clore là-dessus.

Le Président (M. Copeman): Allez-y, oui.

M. Gaudreau (Pierre): Je pense que, nous, ce qu'on attend des gouvernements, c'est qu'il y ait une contribution pour que les personnes puissent assumer, faire face aux responsabilités de base. L'individualité, la possibilité de se réaliser, elle va être là justement quand les gens vont être logés décemment, pouvoir se nourrir décemment. Ça fait qu'il y a un arrimage là. Et juste dire un mot sur le travail que font les organismes communautaires: On ne se voit pas là pour ? même si c'est souvent le cas ? pallier à l'intervention des gouvernements. Trop souvent, c'est le cas. Nous, ce qu'on souhaiterait, c'est que les gouvernements assument leurs responsabilités en santé, en services sociaux, au niveau de la sécurité du revenu, au niveau du logement.

M. Bachand: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de solidarité sociale.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Mme Rech, M. Maheux, M. Gaudreau...

Le Président (M. Copeman): Excusez-moi, M. le député. J'imagine qu'il y a consentement pour dépasser légèrement l'ordre de la... de terminer à 12 h 30?

M. Béchard: ...au fur et à mesure.

Le Président (M. Copeman): Il y a consentement. Allez-y, M. le député.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Je remercie mes collègues pour leur générosité.

J'aimerais commencer notre conversation sur le mode suivant. Vous affirmez dans votre mémoire, en page 5, point 3, dans votre premier paragraphe: «On a encore trop souvent tendance à penser que les personnes portent l'entière responsabilité de leur situation socioéconomique.» Ce paragraphe, là... Vous êtes replacés dans votre mémoire, oui? Très bien. Alors: «Malgré le faible taux de comportements frauduleux, l'ensemble des personnes assistées sociales portent le fardeau d'une présomption de culpabilité, présomption qui imprègne la loi actuelle et le projet de loi.»

En quoi le projet de loi n° 57 pourrait-il être éventuellement modifié ou la loi actuelle pour que cette impression d'une imprégnation, si on veut, de culpabilité des personnes inscrites à l'aide sociale disparaisse?

M. Gaudreau (Pierre): Deux éléments. Entre autres, tout ce qui touche la saisie des chèques, je pense que c'en est un, élément, où on fait porter le fardeau des gens... des personnes, pardon, leur situation, leur contexte économique, le coût des loyers, l'insuffisance des revenus, et l'autre, c'est les catégories de prestations.

M. Bouchard (Vachon): Les?

M. Gaudreau (Pierre): Les catégories de prestations qui justement ostracisent les gens.

M. Maheux (Pierre): Et, deuxièmement, à l'article 2 du projet de loi n° 57, il est écrit que les personnes en situation de pauvreté doivent être les premières à agir pour s'en sortir. On pense, nous autres, que c'est une responsabilité partagée.

M. Bouchard (Vachon): Dans la loi n° 112, on énonce en effet que les personnes «sont» les premières à s'en sortir, et, dans ce projet de loi n° 57, on dit «doivent être» les premières à s'en sortir. Est-ce que vous y voyez un glissement sémantique mineur ou est-ce que pour vous ça indique quelque chose de plus important?

M. Maheux (Pierre): Est-ce que c'est un glissement sémantique mineur ou majeur? Le fait que le glissement soit là, donc, en partant, c'est une mauvaise nouvelle, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, je vous dirais, M. le député, tout simplement, c'est que ce n'est pas rien que le projet de loi, à ce moment-là, qui est jugé, c'est aussi les mesures qui sont annoncées. Ça aussi, ça fait partie de la dialectique, puis du contenu, puis de tout ce qui va avec ça. Puis, comme je le disais tantôt, les annonces qui ont été faites avant la commission parlementaire ne nous ont pas rassurés, loin de là.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, vous faites référence au programme IPAC...

M. Maheux (Pierre): Oui.

M. Bouchard (Vachon): ...la contribution du gouvernement fédéral en la matière. Est-ce que vous pourriez nous décrire très brièvement les impacts sur votre population, les impacts que vous avez observés du programme et les inquiétudes ou les préoccupations que vous avez vis-à-vis de ce programme?

M. Gaudreau (Pierre): Oui. Le programme Initiative de partenariat en action communautaire est en sa deuxième livrée. Il y a eu un IPAC I qui est complètement terminé depuis plus d'un an. Ce que ça a permis dans les différentes régions, c'est, aux communautés, d'identifier les besoins auxquels il fallait répondre pour soulager ou prévenir l'itinérance, puis ça, c'est une formule intéressante. Dans les différentes régions, c'est les groupes communautaires, les concertations qui existent, comme le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes à Montréal, le Réseau d'aide aux itinérants et itinérantes de Québec, à Québec, ou d'autres groupes qui se parlaient ensemble, de s'asseoir avec le CLSC, la régie régionale, le gouvernement fédéral, et d'identifier quels besoins il y avait, quelle solution était la meilleure puis quelle priorité on devait avoir à même l'enveloppe. 56 millions pour trois ans, pour le Québec, on s'entend que ce n'est pas beaucoup.

IPAC II, c'est le même montant. Ce que ça a permis de faire, ça a permis de faire du logement, de l'hébergement, d'améliorer des installations, des soupes populaires, de financer des gens pour faire du travail de rue, de financer des intervenants pour soutenir les gens, pour défendre leurs droits. Je dirais, dans les centres urbains où l'itinérance est un problème majeur, Montréal, Québec, ça a beaucoup plus été pour soulager l'itinérance. Dans les autres régions, on a travaillé plus pour essayer de la prévenir, en travaillant beaucoup au niveau des jeunes. Je pense à la Montérégie, à la rive sud de Québec, où l'argent utilisé dans IPAC I et II permet ça.

Le problème, c'est que c'est un programme qui est non récurrent. Pour financer du logement, ça va, mais, pour financer de l'intervention humaine, c'est insuffisant. Le gouvernement fédéral a annoncé... Le Parti libéral du Canada a annoncé son intention de renouveler ce programme-là. On en est bien content, on espère que ça va faire partie du prochain budget fédéral, mais encore là le ministre Fontana a démontré une certaine ouverture là-dessus. C'est un programme qui doit être récurrent, donc les programmes doivent s'enclencher les uns après les autres, un peu comme ça s'est fait dans la lutte au sida, parce qu'autrement on se tire dans le pied si on intervient dans la rue puis on arrête au 31 mars 2006.

Une chose importante qui va vous concerner tous, nous, on pense que ça peut et ça doit se faire dans le respect des compétences du gouvernement du Québec. Ça a été le cas d'ailleurs dans IPAC I et II, avec une intervention qui avait été négociée par Mme Harel, Mme Marois et M. Baril et qui a été poursuivie par l'actuel gouvernement. Donc, il ne devrait pas y avoir de problème là-dessus, c'est juste que ça prend plus d'argent. Et, dans le cas d'IPAC aussi, par exemple à Montréal, plus que la moitié de l'enveloppe va pour faire du logement social. Ça fait que ça démontre les besoins d'agir sur d'autres questions aussi, que le fédéral réinvestisse en logement social, que Québec maintienne et accroisse son intervention pour de la brique et du béton humain, social.

M. Bouchard (Vachon): Alors, devant l'évaluation positive que vous faites du programme, on ne peut que souhaiter que ce programme puisse être poursuivi et que le ministre ait du succès dans ses négociations.

Maintenant, j'aimerais peut-être vous parler du Fonds québécois d'initiatives sociales. Est-ce que vous y voyez là également un atout dans votre action? Est-ce que ce fonds-là fonctionne selon les prévisions? Est-ce que vous avez fait déjà une analyse de son efficacité et de son utilité dans les faits?

M. Maheux (Pierre): Bon. Il est un peu tôt pour se prononcer sur l'utilité d'un programme dont la date de dépôt, on a appris il y a environ trois semaines, était le 15 octobre 2004, grosso modo.

Dans un deuxième temps, on pourrait faire un commentaire plus global sur la multiplication des programmes puis des enveloppes desservant le milieu communautaire ou les communautés pauvres, démunies, etc., ou les communautés en voie de dépérissement, pour utiliser une expression déjà utilisée il y a quelques années. Nous autres, ce qu'on a toujours dénoncé, c'est la multiplication des programmes, justement parce que ça accroît la paperasse, ça accroît la bureaucratie, etc., en tant que telles.

En même temps, on n'a jamais été tellement favorables aux programmes taggés «communauté» ciblés, en tant que tels. On a eu le Fonds de lutte à la pauvreté, maintenant on a le fonds d'investissement social. C'est qu'un investissement non récurrent ne règle pas un problème qui est récurrent, parce que l'enveloppe du Fonds d'initiatives sociales, on ne sait pas combien de temps ça va durer. Est-ce que ça va prendre de l'expansion dans les prochaines années? On ne le sait pas. L'annonce a été une surprise pour bien du monde parce que, au départ, le programme, ce qu'on avait eu comme information, c'est que l'argent était déjà réparti au début de l'année en tant que tel mais qu'il y a des projets qui n'ont pas levé, donc on a lancé un appel d'offres en septembre 2004.

Ça fait que, à partir de ce moment-là, pour le moment, c'est les remarques préliminaires. Nous n'avons malheureusement pas lu au complet le formulaire, les guides et les critères, parce qu'on a eu beaucoup de choses à digérer en peu de temps ces derniers mois.

n(12 h 30)n

M. Bouchard (Vachon): Merci. Écoutez, l'intention du législateur lorsqu'il réforme un... lorsqu'il ouvre un projet de loi, ou pour l'améliorer, ou pour l'amender, ou pour le réformer complètement ? et ce législateur et ce gouvernement sans doute ne fait pas exception à la règle, là ? c'est qu'on souhaite évidemment améliorer le sort des personnes et on part avec cette prémisse-là au point de départ. Et, comme communauté ou comme collectivité, on est amené, dans une commission comme celle-ci, à se poser des questions sur: Est-ce que le projet de loi remplit bien cette mission d'améliorer le sort des personnes?

Alors, je ne poserai pas une question facile, mais en même temps j'aimerais vous entendre là-dessus, c'est: Puisque vous êtes très près des personnes itinérantes, et vous nous avez fait des remarques extrêmement importantes tantôt quant au rajeunissement de la population des personnes itinérantes notamment, est-ce que ce projet de loi risque d'améliorer ou non... Est-ce qu'il y a des probabilités que ce projet de loi, tel qu'il nous est présenté là, améliore le sort des personnes, leur bien-être?

M. Maheux (Pierre): Écoutez, soyons clairs, nous autres, notre réflexion est beaucoup axée sur: l'échec des mesures de sécurité sociale poussent des personnes à la rue. Et la réponse qu'on vous a donnée est non lors de notre présentation de mémoire, et elle reste non, en lien justement avec la clause minimum de deux ans avant que des jeunes puissent toucher leur premier chèque de BS. Ce qui fait qu'on a des catégories qu'on appelle les sans-chèque, qui sont même reconnus comme étant les catégories pouvant bénéficier des programmes de la solidarité sociale. C'est particulier.

Deuxièmement, la clause concernant les 55 ans et plus nous inquiète aussi parce que c'est une communauté qui peut être fragile. C'est très souvent des travailleurs non spécialisés qui vont perdre leur statut de travail, à ce moment-là, et non pas des travailleurs spécialisés. Le fait aussi qu'on tienne compte de l'avoir liquide, qu'on veut réformer ça aussi, nous inquiète aussi.

Ça fait que tout ça en même temps, je me dis: Est-ce qu'on n'est pas... Puis je ne dis pas que le monde se sont levés, ils ont fait le projet de loi en disant: Yé, on en met tant dans la rue, en tant que tel, on va se lever le matin puis on va faire ça. Il n'y a personne qui pense ça, il n'y a personne qui veut faire ça. Je suis d'accord avec cette affirmation, mais les conséquences que ça risque d'avoir concrètement, c'est ça.

En 1992-1993, le gouvernement de l'époque avait été prévenu des conséquences désastreuses que ça aura pour les plus démunis, certaines clauses. Lors de la réforme Harel, les mêmes choses ont été dites, et on va dire à peu près les mêmes choses en 2004, grosso modo. Tu sais, c'est: Il y a une clause ou il y a des clauses qui sont restées, des clauses qui sont rajoutées, qui nous inquiètent justement, qui font qu'on considère que la machine à rupture sociale, puis à fabriquer des personnes... puis à mettre des personnes dans la rue n'est pas stoppée. Il y a des bouts qui ont été défaits. Il y a même un article qui est intéressant, l'article 49, dans l'actuel projet de loi, mais on dit que fondamentalement il y a des engrenages trop gros qui restent encore dans cette machine-là. On les a nommés.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, à la lecture de votre mémoire, j'ai compris également, là, que vous mettiez sur la table un problème fondamental, c'est-à-dire que ce projet de loi a comme objectif d'assurer, enfin de favoriser l'autonomie financière des personnes et de favoriser l'intégration à l'emploi, mais en même temps vous déplorez le fait qu'il n'y a pas beaucoup de préoccupations à l'égard de la couverture de besoins essentiels, donc à propos d'une notion extrêmement importante dans une loi d'aide sociale, c'est-à-dire: Est-ce que la notion de sécurité du revenu est là ou non? Et vous répondez non dans votre mémoire. Je pense que c'est important de le souligner parce que, lorsqu'on arrive dans des considérations un peu plus spécifiques, on oublie souvent l'horizon, l'horizon un petit peu plus large sur lequel on doit se pencher et juger d'un projet de loi. Et il m'apparaît, dans votre mémoire... en passant, que j'ai trouvé fort intéressant sur le recul historique que vous faites et en même temps la description des populations que vous servez, c'est important, je pense, qu'on puisse souligner votre contribution à cet égard.

Dernière question, vous êtes très crédibles au niveau de votre action et de votre analyse des problèmes que peuvent vivre les personnes itinérantes, crédibles par rapport à ce que vous avez fait déjà et aussi par rapport à votre réseautage, si on peut dire, d'interventions auprès de ces personnes mais aussi d'analyses. Vous êtes crédibles aux oreilles du ministre, sans doute beaucoup plus que les membres de l'opposition, alors profitez-en. Si vous avez un message important et urgent à livrer au ministre, quel serait-il?

M. Gaudreau (Pierre): Je pense que... Puis on est content de voir qu'il y a une certaine ouverture de la part du ministre à dire que ça peut être amélioré et que c'est un «work in progress». Les réformes de la sécurité du revenu, on en a parlé, on a connu la réforme Paradis, la réforme Harel, ils ont même eu le temps de changer de ministre avant que les projets soient adoptés. Ça a été Paradis, Bourbeau, Harel, Boisclair. Je ne lui souhaite pas de changer, là, mais, oui, on doit améliorer le sort des gens, je pense que vous en convenez, les gens sont dans des situations inacceptables, trop de gens sont proches de la rue.

Mais, nous, le message qu'on veut répéter, c'est que ce projet de loi là ne répond pas à un objectif... Il n'y a pas assez d'éléments... Ce n'est pas suffisant, les éléments positifs qu'il y a là-dedans ? on en a parlé un peu ? pour qu'on puisse l'adopter et que ce soit une nouvelle réforme de sécurité du revenu pour plusieurs années. Prenons le temps, mettons-la sur la table, apportons les améliorations urgentes aux revenus des gens et travaillons. On ne vous demande pas de rencontrer l'ensemble de la population du Québec, mais retravaillons sur ce qu'il est possible de faire, ce qui doit être fait, incluant le niveau de prestations qu'on a parlé tantôt, incluant aussi l'arrimage avec d'autres politiques en habitation et sur d'autres questions, pour voir comment on peut arriver à améliorer le sort des gens les plus démunis puis éviter qu'il y ait un accroissement à l'itinérance.

Vous allez sûrement, parfois, à Toronto, ou à New York, ou même à Ottawa, vous voyez la différence. Au Québec, parce qu'on a eu des politiques un peu moins pires, un peu meilleures, il y a moins de gens qui sont dans la rue. Cependant, autant à Québec, à Montréal qu'ailleurs, il y en a beaucoup trop, il ne faut pas tendre vers ça.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Lotbinière.

Mme Roy: Alors, je vous remercie de votre présence, de la qualité de votre présentation, au nom de l'aile adéquiste. Il y a des questions qui nous préoccupent vraiment. Ce qui a aussi fait... qui était un de nos chevaux de bataille, c'est le déficit démographique. Et puis ce qui m'étonne ici, votre seule présence va m'avoir amené à cette réalité-là, c'est que, dans l'ensemble du Québec, on sait que la classe des jeunes, c'est de moins en moins, en termes de pourcentage, et puis c'est le contraire en itinérance, et puis... Bon. Je ne sais pas si c'est une pente ascendante qui s'en vient ou descendante, ce que vous pouvez voir à l'horizon.

J'aimerais que vous me parliez un peu de la clientèle itinérante... bien, on ne peut pas dire une clientèle, mais on peut dire des personnes itinérantes, ainsi que je suppose qu'il y a beaucoup de prestataires de l'aide sociale dans ces personnes-là, les contraintes sévères, temporaires, bon, que vous m'en fassiez une description. Je vais vous poser deux questions en une parce que je suis sûre qu'il m'en reste juste une. Et puis ça, c'est la première chose qui m'intéresserait à savoir.

La deuxième, on a dit... Vous considérez, là, qu'on perd la parité de traitement aux jeunes âgés de 18 à 30 ans, vous considérez... M. le ministre, lui, vous dit: Non, on donne des privilèges aux jeunes. Vous, dans les faits, là, sur le terrain, ce que vous voyez, c'est que les jeunes de 18 ans, parce qu'on parle d'adultes, là, perdent des droits, en ont moins parce qu'ils... puis, lui, il nous dit qu'ils perdent un privilège. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Maheux (Pierre): Bon. Écoutez, pour faire un bref portrait, les communautés qu'on rejoint généralement, c'est des vies marquées par des ruptures: des ruptures sociales, des ruptures affectives, des ruptures économiques, puis très souvent c'est une vie parsemée d'échecs, en tant que telle. Ça, c'était vraiment le portrait classique de l'itinérant. Ce qu'on s'aperçoit beaucoup dans les adultes maintenant qu'on reçoit, c'est du monde qui commence par le milieu de l'itinérance avant le parcours. Ils commencent par la fin du parcours au lieu de commencer par le début, ce qui est nouveau. Puis ça, c'est beaucoup en lien avec la crise du logement puis toute la crise économique en termes d'emplois non spécialisés qu'on traverse actuellement dans l'ensemble des sociétés modernes.

Dans un deuxième temps, au niveau des jeunes, ce qu'on s'aperçoit, c'est un désengagement social généralisé, tant au niveau institutionnel qu'éducationnel. Ça, c'est clair, net et précis. Des situations de violence, beaucoup de situations de consommation, et en même temps ce qui ressort dans tous les portraits qu'on a faits, c'est un profond isolement social et l'absence de milieu, en tant que tel. C'est les problématiques qu'on rencontre le plus dans le milieu de l'itinérance, c'est la pauvreté puis l'isolement social. Ce n'est pas la santé mentale, ce n'est pas la toxico. Très souvent, c'est l'oeuf et la poule. Quand tu es dans la rue, en général ta santé mentale, elle ne va pas bien, c'est pour des raisons assez évidentes. Deuxièmement, tu cherches à oublier. Pour chercher à oublier, il y a la dope pas chère, puis il y a l'alcool pas cher aussi. Donc, on fait face à ces différentes problématiques là, en tant que telles.

Dans le rajeunissement, ce qui est un phénomène mondial, en tant que tel, ce qu'on s'aperçoit effectivement, c'est l'absence de réseau qui est importante. Et en même temps de plus en plus, ce qu'on se retrouve, c'est des jeunes qui n'ont pas de revenu, ce qu'on appelle les sans-chèque au ministère de la Solidarité sociale. C'est un des facteurs, on ne vous dit pas que c'est le seul, c'est un facteur qui nuit. Parce que là il faut que tu accompagnes le jeune. Après ça, il faut que tu lui expliques: Si tu veux avoir ton premier chèque de BS, il faut que tu poursuives tes parents. Déjà, les relations familiales, dans ces cas-là, sont «so-so». Si en plus on ajoute une poursuite judiciaire, ça n'améliore pas le climat familial. Puis très souvent un des processus d'insertion puis de réinsertion, c'est de pouvoir établir des liens de confiance avec le milieu quand le milieu a de l'allure, en tant que tel. C'est sûr qu'un milieu criminalisé, ça ne sert à rien, en tant que tel.

n(12 h 40)n

Dans les pistes de solution au niveau de l'itinérance, ce qu'on a remarqué aussi, c'est que la stabilité résidentielle est un des facteurs les plus importants. Et très souvent leur premier revenu que bien des gens, surtout chez les jeunes qu'on va rejoindre, vont toucher... ça va être de les convaincre de faire leur demande d'aide sociale. Ça va être le... Comme je disais en joke à quelqu'un, je dis: Il va très bien, lui. Il dit: Oui, pourquoi? Je dis, un, il a un revenu stable, il est inscrit au BS. Il a un logement stable, il est dans une maison de chambres. Puis je dis: Il a pris 30 livres sur sa carcasse de six pieds, ce qui n'est pas si pire que ça, en tant que tel.

Ça fait que très souvent c'est les premières démarches. La clause de deux ans complexifie ces démarches-là en tant que telles. C'est-à-dire, deux ans minimum sur le marché du travail aux bénéficiaires de l'assurance-emploi avant de toucher un premier chèque, ça, on le dénonce depuis je ne sais plus combien de temps, depuis que je suis dans le milieu à peu près, grosso modo. Ça fait que ça fait quand même un grand bout de temps. Et ça, ça fait partie des politiques qui peuvent être corrigées au niveau de la Solidarité sociale en tant que telle.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le président Maheux, M. Gaudreau, Mme Rech, d'avoir participé, au nom du Réseau Solidarité Itinérance du Québec, à cette commission parlementaire. Et, sur ce, j'ajourne les travaux de la commission au mercredi 20 octobre prochain, après la période des affaires courantes, c'est-à-dire autour de 15 heures. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 41)


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