(Dix-sept heures six minutes)
Le Président (M. Copeman): Alors, chers collègues, ayant constaté le quorum, je déclare ouverte la séance de la commission des affaires sociales.
Je demande à ceux qui sont dans la salle de bien vouloir fermer leur téléphone cellulaire ou, à tout le moins, assurer que la sonnette, la sonnerie est fermée.
Et je vous rappelle le mandat de la commission: nous sommes ici aujourd'hui afin de continuer l'étude détaillée du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Il y a un remplacement: M. Charbonneau (Borduas) est remplacé par M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Motion proposant
d'entendre le ministre du Travail
Le Président (M. Copeman): Très bien. Alors, si ma mémoire est bonne, après la séance d'hier, nous sommes toujours à l'étape des motions préliminaires. Nous étions... J'ai été obligé malheureusement de couper l'envolée oratoire du député des Îles-de-la-Madeleine à cause de l'heure. Alors, si j'ai bien compris, on est toujours sur la motion du député des Îles-de-la-Madeleine, comme auteur, et il lui restait du temps. Alors, on va vérifier.
(Consultation)
Le Président (M. Copeman): Il lui restait 22 minutes à faire son vibrant plaidoyer afin qu'on puisse entendre un groupe ? je ne me rappelle pas le groupe en question. Ah! bien oui, pas un groupe. Bien sûr, je m'excuse. Ce n'est pas un groupe, c'est le ministre du Travail, le député de...
Une voix: Limoilou.
Le Président (M. Copeman): Non, de Jean-Lesage. Exact. Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, la parole est à vous, évidemment pour un maximum de 22 minutes.
M. Maxime Arseneau (suite)
M. Arseneau: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je salue votre mémoire tout à fait fidèle qui fait en sorte que je retrouve tous mes droits et privilèges. Et j'ai bien l'intention effectivement d'utiliser le temps du mieux possible de façon à convaincre les membres de cette commission de la pertinence de cette motion préliminaire que j'ai déposée en vertu de l'article 244 de nos règles et qui vise à, finalement, pouvoir entendre le ministre du Travail devant cette commission. Et je suis certain que les collègues des deux côtés ne seront pas surpris que j'insiste pour que le ministre du Travail se présente devant cette commission de façon à ce qu'on puisse justement lui poser des questions, l'interroger, et de façon, M. le Président, à ce que nous puissions avoir une meilleure compréhension des intentions de ce gouvernement et par le fait même, je dirais, de pouvoir rassurer les travailleuses, puisqu'on a convenu, hier, que, de façon très, très majoritaire, c'est de femmes dont il s'agit. Ce sont des travailleuses qui oeuvrent au service des enfants et des familles du Québec.
Alors, pourquoi présenter cette motion pour recevoir le ministre du Travail devant cette commission? Parce qu'il est inquiétant de voir que le ministre du Travail a été tout à fait absent du débat jusqu'à maintenant, d'une transparence, pour ne pas employer un pléonasme, M. le Président, totale qui fait que, finalement, on ne l'a pas vu, on ne l'a pas entendu, même si le projet de loi n° 8 touche directement aux relations de travail de cette catégorie de travailleuses et de travailleurs.
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(17 h 10)
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D'ailleurs, je signale, M. le Président, que, lors de son passage en commission parlementaire, la CSN a soulevé avec étonnement, je dirais, l'absence du ministre du Travail. Et, justement, la CSN avait, à ce moment-là, dit souhaiter que ce dernier soit invité par la commission des affaires sociales. Et je veux vous citer, M. le Président, le vice-président de la CSN, je sais que mon collègue de Joliette aurait été probablement trop humble pour le faire, mais je tiens à citer le vice-président de la CSN qui disait: «Il me semble ? je le dis en début de commission ? qu'il manque un ministre à la commission, le ministre du Travail. Je trouve qu'on est dans ses casseaux pas mal...» Je ne sais pas si j'ai le même accent, M. le Président, mais, comme je viens des Îles-de-la-Madeleine, vous comprendrez qu'on n'a pas toujours des accents identiques. Je vais continuer à citer le vice-président de la CSN: «On parle du droit d'association, le ministre du Travail n'est pas là, l'article 25 n'est pas là, le droit de syndicalisation, il n'est pas là. Le ministre du Travail devrait s'occuper du monde du travail, ça, c'est important. Je voulais le dire en début parce que je trouve ça assez paradoxal qu'on parle de loi d'association, de syndicalisation, puis le ministre, il n'est pas là. Il est peut-être bien occupé, mais ça se passe dans ses casseaux. Le message est fait.» Alors, nous ne sommes pas les seuls, M. le Président, à prétendre que les éclairages du ministre du Travail en regard de ce qui arrive du Code du travail du Québec, en regard de ce qu'on est en train de faire à nos lois du travail, Tribunal du travail, et toutes ces structures, ces organismes qu'on s'est donnés... de sorte qu'on a réussi à policer, je dirais, nos relations de travail au Québec.
Alors, au moment où les collègues de son gouvernement... Bien sûr, la ministre déléguée a remis... Et aussi, je dirais, le ministre de la Santé et des Services sociaux, dans un autre projet de loi, fait en sorte qu'on ait au Québec finalement des faux travailleurs autonomes. J'ai expliqué, je pense, pourquoi hier ? là, c'est ma mémoire, peut-être, M. le Président, qui fait défaut ? mais je pense avoir très bien expliqué, avec la loi n° 8, essentiellement, ce qu'on fait, puisqu'on dénie à des travailleuses et à des travailleurs le droit de se syndiquer en décrétant de façon déclaratoire qu'ils sont des travailleurs autonomes et que des tribunaux les ont déjà reconnus comme des salariés au sens du Code du travail; ça constitue des faux travailleurs autonomes.
Alors, pendant que ses collègues sont à jouer, je dirais, dans les casseaux, comme l'a dit le vice-président de la CSN, du ministre, bien, lui, on ne l'a pas entendu. Alors, je pense qu'il est essentiel que la commission des affaires sociales convoque le ministre du Travail afin de mieux connaître quelles sont les intentions de son gouvernement relativement aux relations de travail en général. Je pense que ce serait très utile et que ce serait très apprécié, aussi, et que les gens seraient reconnaissants à cette commission si on pouvait avoir des éclairages en regard des intentions de ce gouvernement relativement aux relations de travail en général.
Parce que, dans toute cette question, et lorsqu'il est question des droits des travailleurs et de ce qu'on s'apprête à faire avec le projet de loi n° 8, et même aussi avec le projet de loi n° 7, comme on l'a vu dans certains médias, bien, il s'agit bien sûr d'un autre projet de loi, il y a derrière ces projets de loi, et avec ces projets de loi surtout, l'impression qui se dégage, le message qu'on envoie à la population du Québec, le message qui est reçu, ressenti par les travailleurs et les travailleuses de la population en général en regard des intentions de ce gouvernement, bien sûr il y a toute la question de la réingénierie.
Et, vous savez, M. le Président, moi, ce que j'entends et ce qu'on dit dans le milieu... dans le secteur du travail, c'est que ce qu'il manque vraiment dans le discours de ce gouvernement ? et c'est pour ça qu'il faudrait poser la question au ministre du Travail ? c'est le rôle qu'on entend confier à l'État comme agent de développement économique, l'importance de l'État comme agent de développement. M. le Président, dans l'économie du Québec, le rôle de l'État dans le produit intérieur brut, par exemple, c'est 17 %. Alors, si l'État, de par ses décisions, de par ses choix, de par ses projets de loi, fait en sorte d'appauvrir les travailleuses et les travailleurs du Québec ou de leur nier des droits, bien, on va travailler à l'appauvrissement collectif du Québec, de toute évidence. Alors, il y a des inquiétudes.
Et à l'heure où on s'apprête, par le projet de loi n° 8, à dénier des droits aux travailleuses et aux travailleurs, on ne présente pas la contrepartie, on ne présente pas de façon suffisamment claire et détaillée pour intéresser, pour faire en sorte que ces gens-là soient rassurés quant à leur avenir, et ça aurait été possible. Ça a déjà été abordé aussi, ici, devant cette commission, M. le Président, entre autres, le fait que, par exemple, dans le rapport Bernier, on trouve beaucoup de suggestions, beaucoup de propositions qui ont été faites pour améliorer la situation des travailleurs atypiques, des travailleurs autonomes, et on sait qu'au Québec ces travailleurs constituent une bonne partie de la main d'oeuvre québécoise.
Cette semaine, c'est la Semaine des adultes en formation, en formation continue, alors je pense qu'il est intéressant, impérieux de reconnaître la valeur du travail et qu'on puisse entendre le ministre du Travail devant cette commission pour qu'il vienne nous rassurer, nous donner des explications sur les intentions du gouvernement du Québec en ce qui touche le secteur du travail, pas seulement, là, voir le fait qu'on est en train, par un projet de loi, de nier des droits aux travailleurs.
Par exemple, M. le Président, on pourrait demander au ministre du Travail: Est-ce qu'il reconnaît... Est-ce qu'il est vrai, comme le disent les médias, comme le disent des articles dans les journaux, est-ce qu'il est vrai qu'actuellement, par son projet de loi n° 7, son projet de loi n° 8, le gouvernement donne le mauvais exemple en faisant fi, entre autres, des décisions judiciaires antérieures? C'est ça, M. le Président, qui fait en sorte que, de ce côté-ci, c'est depuis qu'il y a ces décisions où, carrément, je pense qu'il apparaît clairement que ce n'est pas une façon que de dénier des droits à des travailleurs, des droits qui ont été reconnus par les tribunaux.
M. le Président, on pourrait demander, par exemple, au ministre du Travail quelles sont ses intentions en fonction de la modification à l'article 45 du Code du travail. Si on parle de rassurer les travailleurs, si on parle de faire en sorte que les travailleurs vont se sentir en sécurité et vont recevoir ces décisions gouvernementales avec le moins d'appréhension, je dirais, que fait le ministre du Travail, pendant ce temps-là, en ce qui concerne l'article 45 du Code du travail, M. le Président?
Dans Le Devoir, dans La Presse, M. le Président, dans Le Soleil du 28 octobre, ce n'est quand même pas des choses qui sont très anciennes, il y a un article de Lia Lévesque qui dit: Article 45 du Code du travail: Després calme le jeu. M. le Président, ce n'est pas moi, je cite le titre de l'article, parce que je suis très respectueux des règlements, M. le Président. Dans un paragraphe, entre autres, on dit que le ministre a rappelé, et là je cite au texte, «que de nombreuses études avaient été rédigées sur la question de la sous-traitance, au fil des ans, notamment sous l'ancien gouvernement péquiste». C'est assez incroyable d'entendre le ministre du Travail déclarer une chose comme celle-là, à moins que la journaliste se soit trompée complètement, parce que, dans les articles que, moi, j'ai vus, au moment où il a été question de l'article 45 du Code du travail, et les syndicats et la partie patronale ou les représentants des patrons, les deux, lorsqu'ils sont sortis sur l'article 45 du Code du travail, le seul point de rencontre, lorsque... on avait une étude, l'autre avait une étude, mais le seul point de rencontre où ils s'entendaient, c'était sur le fait qu'on manquait d'études pertinentes pour connaître les impacts réels de modifications à l'article 45 du Code du travail. Et le ministre nous dit: On est d'attaque sur l'article 45 du Code du travail. Il dit: On est prêt! On y va! Et puis ceux qui ont des études, ils viendront nous voir en commission parlementaire...
Le Président (M. Copeman): ...c'est sûr que vous allez très bientôt faire le lien entre l'article 45 et votre motion.
n(17 h 20)nM. Arseneau: Bien sûr! Parce que... Pourquoi j'insiste, M. le Président, pour recevoir le ministre du Travail en commission parlementaire, c'est pour qu'il vienne justement nous donner des indications, des éclairages de façon à ce que la ministre déléguée et que ce gouvernement puissent améliorer le projet de loi n° 8 de façon à ce qu'on amène une contrepartie au droit qu'on est en train de dénier aux travailleuses et aux travailleurs de ce secteur, une partie très importante.
Et on pourrait demander, M. le Président, parce que je vois que vous suivez avec une très grande attention l'argumentaire que je présente en faveur de ma motion, M. le Président, on pourrait demander avec les négociations, l'éminence des négociations qui s'en viennent pour le renouvellement des conventions collectives dans le secteur public, on pourrait l'entendre là-dessus pour, peut-être, qu'il puisse là aussi rassurer les travailleurs du Québec. Par exemple, on pourrait mentionner cette lettre ouverte du premier ministre, dans laquelle il identifie les syndicats comme des groupes de pression qui font passer leurs intérêts corporatifs avant ceux de la population du Québec.
M. le Président, j'ai terminé hier avec un communiqué de presse de la CSN qui venait justement de déposer des demandes de reconnaissance syndicale. Il faut absolument que l'on rassure les travailleurs du Québec, et, en ce sens, je pense qu'il serait pertinent et même impérieux que nous recevions le ministre du Travail de façon à ce qu'on puisse faire des consensus.
M. le Président, il y a aussi dans, je dirais, le modèle québécois... Il y en a qui n'aiment pas ça quand on parle du modèle québécois, puis il faudrait le réinventer. C'est comme il y a des gens qui, de plus en plus, disent que le mot «réingénierie», ce n'est pas un bon mot, ce n'est pas un bon concept. Parce que, quand ça fait notre affaire, c'est bon, quand ça ne fait plus notre affaire, on le met de côté.
Mais, dans le modèle québécois, M. le Président, il y a un élément qui reste un élément fondamental, et je pense que ce gouvernement devrait s'inspirer de ça, je pense que le ministre du Travail pourrait venir nous confirmer cette prétention et que tout le monde, on serait probablement gagnants si on pouvait s'entendre sur le fait que la concertation est un des piliers du modèle québécois. Et, en ce sens-là, je pourrais vous citer un autre article, M. le Président, ou c'est un éditorial, je crois, où on dit: Faut se parler! C'est un éditorial de Josée Boileau, du Devoir.
Et je pense que, effectivement, il est dommage qu'au Québec on songe à forcer le changement à l'encontre de la volonté des grands groupes de la société québécoise. Je pense que les grands changements, les grandes choses que l'on fait, on les fait et on les a faites au Québec à partir de consensus. Et je pense que le ministre du Travail devrait venir nous dire s'il est en accord avec ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 8, comment il voit ça, comment il voit le rôle des institutions qu'on a mises en place.
Alors, M. le Président, pour atteindre ces consensus, il faut vraiment que le ministre du Travail participe au débat, et c'est ce que, nous, de l'opposition officielle, nous lui offrons avec cette motion demandant qu'il soit convoqué par la commission des affaires sociales pour le projet de loi n° 8. Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, M. le député. J'imagine, après un tel plaidoyer, qu'il ne reste plus rien à dire. Est-ce qu'on est prêts à passer au vote, chers collègues? Non? M. le député de Joliette, vous voulez intervenir sur la motion? Très bien, vous avez...
M. Valois: Non, c'est parce que je donnais l'opportunité au parti gouvernemental, étant donné qu'on fonctionne souvent par alternance, de se manifester.
Le Président (M. Copeman): C'est gentil de votre part, M. le député. Alors, la parole est à vous, pour un maximum de 30 minutes, en tant que représentant du chef de l'opposition.
M. Jonathan Valois
M. Valois: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. M. le Président, j'interviens ici sur une motion proposée en vertu de l'article 244 de notre règlement par rapport à... en lien avec le fait de recevoir le ministre du Travail avant qu'on agisse article par article dans ce projet de loi n° 8, une proposition fort pertinente déposée par le député des Îles-de-la-Madeleine parce que, depuis que nous avons commencé, depuis que ce projet de loi est déposé, il semble assez clair que ce projet de loi là touche directement les normes et les règles par rapport au travail.
Et donc, il semble assez clair, depuis que le projet de loi n° 8 est déposé, que... Et j'en conviens très bien, que c'est une loi qui modifie les CPE, la Loi sur les CPE, sauf que, au-delà de ça, ce projet de loi là a des incidences sur notre façon de voir et d'appréhender tout ce qui s'appelle nos relations avec le monde du travail, tout ce qui s'appelle nos relations avec les associations de travail, les associations de travailleurs, les syndicats. On envoie ici un message en fermant la porte à la syndicalisation. On envoie ici un message très clair en refusant à des travailleuses le droit de se syndiquer. Et ce message qui est envoyé par la ministre déléguée à la Famille doit être débattu avec un autre acteur très important qui est celui du ministre du Travail.
Lorsqu'on arrive dans un poste aussi important que ministre du Travail, on doit faire état de notre vision, de nos orientations et de la façon dont on entend diriger ce ministère-là. C'est, pour tout ministre responsable, une des prérogatives qui est très importante. Et, d'entrée de jeu, un ministre qui arrive et qui se voit attribuer un portefeuille envoie des orientations, envoie une série de façons dont il entend gérer le ministère dont il est le responsable. Et le ministre du Travail est responsable notamment des relations de travail, du Code du travail. Le ministre est responsable aussi de toutes les lois relatives au travail. Et, en ce sens-là, parce qu'on instaure à l'intérieur de la Loi sur les CPE une modification, par le biais du projet de loi n° 8, qui va faire en sorte que des personnes qui ont été reconnues par un jugement de tribunal comme étant des salariées, on les reconnaît, nous... envers et contre tous les jugements, on les reconnaît comme des travailleurs autonomes, des travailleuses autonomes, eh bien, là, ce n'est pas simplement un geste qu'on pose à la hauteur de ce qui... et qui aura des impacts seulement sur l'ensemble de l'organisation des CPE, mais bien un message qu'on envoie aussi sur toute la logique qu'on entend avoir en termes de relations de travail, en termes de reconnaissance d'un statut pour des travailleuses. Et, en ce sens-là, il me semble que... avant d'aller plus loin, il me semble plus que pertinent de rencontrer le ministre du Travail pour justement questionner cette vision-là.
Tout à l'heure, et à bon compte, le député des Îles-de-la-Madeleine nous parlait de l'article 45. Est-ce que c'est là le seul enlignement possible de cette nouvelle façon de faire, de cette vision, de ce nouveau ministre du Travail? Est-ce que, là, nous, on doit ici, alors que nous procédons avec ce projet de loi n° 8, comprendre que le ministre du Travail... nous devons présumer que ses réactions et sa vision qu'il a par rapport à l'article 45 constituent suffisamment d'information pour nous dire: On n'a pas besoin de le rencontrer ici, on sait ce qu'il pense? J'ose croire que le ministre du Travail pourrait alimenter nos questionnements, notre réflexion sur justement... sur ce qu'il entend faire, au-delà de ce qu'il entend faire simplement avec l'article 45. Parce que, si c'est seulement sur l'article 45 et sur ce qu'il a dit sur l'article 45 qu'on base la vision du ministre du Travail, que nous voulons rencontrer ici et questionner, bien, on n'est pas... on n'a pas à se réjouir, là, par rapport à la suite des choses qu'on donnera, à la suite des événements qu'on donnera par rapport au projet de loi n° 8.
n(17 h 30)n Alléger l'article 45, nous l'avons déjà dit, pour faciliter la sous-traitance, c'est un enlignement qui est d'autant plus questionnable parce que les emplois qui sont possibles d'envoyer par la sous-traitance, ce ne sont pas des emplois, là, à 60 000 $, 75 000 $ par année, là, ce sont des emplois à 36 000 $, 37 000 $ par année, parce que, justement, on a réussi à avoir des unités syndicales qui ont pu défendre les droits de ces travailleuses et ces travailleurs-là. Et, en facilitant la sous-traitance, bien, ce qu'on vient faire, c'est de faire en sorte que ces personnes-là, qui avaient réussi, par le biais d'accréditations syndicales, à aller chercher un salaire qui était... bien, qui n'était pas une montagne d'or, là, on se comprend bien, mais qui était quand même quelque chose de... qui pouvait être le début de quelque chose de raisonnable, autour de 14 $, 15 $, 16 $ de l'heure, bien, en facilitant la sous-traitance, on vient un peu anéantir ces efforts-là de ces associations de travailleurs là. Alors, ça, est-ce que c'est ça, la première indication et la seule indication sur laquelle on doit se fier pour dire: Le projet de loi n° 8 correspond aux visions du ministre actuel du Travail? Alors, nous, on se questionne là-dessus, et c'est pour ça qu'on voudrait qu'il vienne.
Alors, qu'on se comprenne bien, là, on va faciliter la sous-traitance parce qu'elle pourra se faire sans que les accréditations syndicales suivent, dans le pire des cas. Et, à partir du moment où... Il est très difficile de sous-traiter un service alimentaire, il est très difficile de sous-traiter un service de blanchisserie ou un service de transport scolaire lorsque ce service-là, alors qu'on le sous-traite, l'accréditation syndicale suit. Et, si on allège l'article 45 pour dire que l'accréditation syndicale ne suit pas nécessairement le contrat, bien là on va pouvoir désyndiquer le monde simplement parce que l'article 45 ne pourra plus les protéger par rapport à est-ce que l'accréditation syndicale suit? Et les premières indications qu'on a jusqu'à ce moment, c'est qu'on veut alléger l'article 45 et qu'on veut faciliter la sous-traitance.
Faciliter la sous-traitance, là, ça va se faire de la seule et unique façon que les gens vont pouvoir plus facilement envoyer et pouvoir prendre des contrats de sous-traitance des organismes publics, qu'ils n'auront plus à assumer les coûts relatifs aux conventions collectives qui, normalement, devaient suivre selon l'article 45 actuel, mais qui ne suivront plus. Alors là, à ce moment-là, ce qu'on est en train de faire, c'est de façon indirecte ce que les règles et ce que notre Constitution nous empêchent de façon directe, c'est-à-dire désyndicaliser les gens. Et ça, c'est la première indication qui nous est envoyée présentement par le ministre du Travail.
Alors, est-ce qu'on doit, nous, forts de cette indication-là qui nous est envoyée, conclure que présentement le projet de loi n° 8 va exactement dans les visées et dans la vision de ce que le ministre du Travail veut faire? Si c'est oui, on a un problème. Et, si c'est non, il faut le questionner puis revoir le projet de loi n° 8. Alors, en ce sens-là, nous, on trouve plus que pertinent que le ministre du Travail vienne ici clarifier une série de choses parce que d'autres questions pertinentes pourraient être à l'effet de... bon, évidemment, à l'effet de dire: Le projet de loi n° 8 qui, essentiellement, a pour but de refuser à des travailleuses le droit de se syndiquer, qui essentiellement ferme la porte à la syndicalisation... On pourrait nommer le ministre responsable qui, lui-même, l'affirmait, que ça fermait la porte à la syndicalisation et que c'était un des buts du projet de loi n° 8.
Alors là est-ce que ça, ce but-là... est-ce que le ministre du Travail est d'accord? Est-ce que le ministre du Travail est d'accord que les autres ministres et les ministres délégués utilisent leur capacité de faire des lois pour fermer la porte à la syndicalisation et même, de façon déclaratoire, annuler les accréditations syndicales reconnues? Est-ce que ça, le ministre du Travail est d'accord avec ça? Ça, il me semble que ce serait une question assez pertinente. Est-ce que... Parce que, lorsqu'on nous parle de réingénierie beaucoup, on nous parle de mettre le Québec à l'heure, bien, finalement, des moyennes canadiennes, bien souvent, ce qu'on veut faire, là, c'est que le Québec s'harmonise avec le reste du Canada sur un paquet d'autres choses: le niveau de taxation, le niveau d'imposition, le pourcentage du PIB issu du gouvernement, et ces choses-là. Alors, on veut standardiser et on veut, à la limite, on pourrait dire, canadianiser, là, mais les performances québécoises en termes d'intervention et de grosseur de l'État et de tout ce qui vient avec en termes d'imposition et de taxation.
Est-ce que le projet de loi n° 8 n'est pas aussi un projet de loi... Et ça, on devrait poser cette question-là au ministre du Travail: est-ce que ce projet de loi là n'est pas aussi le but de ramener à la moyenne canadienne le taux de syndicalisation du Québec? Un taux de syndicalisation de 40 %, c'est peut-être vraiment, pour ce qui est de l'Amérique du Nord, un taux qui est beaucoup trop élevé. Peut-être est-ce que le ministre du Travail considère que c'est ça. Alors, en facilitant et en allégeant l'article 45 qui va nous permettre de donner en sous-traitance sans que les accréditations syndicales suivent, on fait de la désyndicalisation. Et si, avec le projet de loi n° 8, on empêche des gens de se syndiquer et, pour quand même 12 % des gens qui sont là et qui sont en processus d'accréditation actuellement, de façon déclaratoire, on leur enlève leur accréditation et leur reconnaissance, alors là est-ce qu'on est en train de mettre le Québec aussi, pour ce qui est de son pourcentage de syndicalisation, à la moyenne canadienne? Est-ce que c'est ça, le but? Bien, parce qu'on peut quand même se poser ces questions-là. Est-ce que c'est ça, le but qui est en arrière de ça aussi, et tout ça, parce que la syndicalisation, on nous l'a dit, amène une institutionnalisation et parce que la syndicalisation coûte cher? Essentiellement, c'est ce qui nous a été dit.
Alors, à l'intérieur de ça, à l'intérieur de cette réflexion-là, on a à se questionner, là, sur les visions qui sont présentement apportées par notamment le ministre responsable, mais aussi la ministre déléguée par rapport aux présomptions qu'on a d'ores et déjà de ce projet de loi là sur la syndicalisation. Est-ce que le ministre du Travail est d'accord avec le fait qu'on utilise une loi pour empêcher les gens de se syndiquer seulement sur la base que ça coûte cher ou seulement sur la base que ça va amener une institutionnalisation? Ce sont deux grandes questions de fond qui doivent être... En tout cas, nous devons recevoir des réponses sur ces questions-là, mais surtout... Et, je pense que c'est là que c'est très important, nous devons aller au fond de la réflexion qui amène les gens du parti ministériel à dire des choses semblables.
Lorsqu'on dit: La syndicalisation coûte cher, il me semble que c'est assez clair que la syndicalisation n'a pas comme but premier de garder les gens dans un état de pauvreté, on n'a jamais... Et personne ne peut croire que la syndicalisation a ce but-là. Au contraire, la syndicalisation, c'est de permettre à une catégorie de gens, des travailleuses, des travailleurs, de se regrouper pour avoir, oui, des meilleures conditions salariales, oui, des meilleures conditions de travail qui finissent à faire en sorte que, pour un employeur, ça coûte plus cher. Ça, tout le monde en convient. Mais est-ce que l'État peut, au nom du fait que ça lui coûtera plus cher et seulement au fait qu'au nom que ça lui coûtera plus cher, remettre en question un droit fondamental reconnu par toutes les... par l'Organisation internationale du travail, reconnu par nos constitutions, remettre en question ce droit fondamental là?
Et, si c'était seulement l'argument de «ça coûte cher», c'est l'autre argument, M. le Président, qui, à mon sens, est vraiment pire, et j'aimerais vraiment savoir ce que le ministre du Travail en pense, sur cette lourdeur administrative. La syndicalisation entraîne une lourdeur administrative, une institutionnalisation. Et ça, là, ça serait la pire des choses, qu'on arrive à l'institutionnalisation. Alors, déjà là, il faudrait demander au ministre du Travail qu'est-ce qu'il pense des milieux qui sont déjà syndiqués. Qu'advient-il des milieux comme les CPE qui sont déjà syndiqués? Qu'advient-il des milieux comme le milieu de l'éducation qui est déjà syndiqué, le milieu de la santé et des services sociaux qui est déjà syndiqué? Est-ce qu'une personne syndiquée a moins d'humanisme qu'une personne qui ne l'est pas? La question se pose, là, parce que c'est vraiment les deux raisons de base qui justifient, selon les dires mêmes des ministres qui ont déposé les deux projets de loi, notamment le projet de loi qu'on discute, c'est-à-dire le projet de loi n° 8, l'intervention actuellement par ce projet de loi là, là.
Alors là on envoie tout de suite une idée que la syndicalisation, ce n'est pas une bonne chose, la syndicalisation amène une institutionnalisation, puis une institutionnalisation, ça fait en sorte que, essentiellement, les travailleuses en milieu familial, bien, ils vont peut-être laisser geler les petits enfants dehors jusqu'à 8 heures, le temps qu'ils rouvrent, ils vont peut-être les mettre sur le bord de la porte en attendant que leurs parents... parce que leur convention, ça les oblige à faire ça. C'est ça que la syndicalisation pourrait amener. On a peur de ça, là, parce que, essentiellement, ce qu'on dit, lorsqu'on parle de la syndicalisation, et ce qu'on laisse entrevoir avec la lourdeur administrative et l'institutionnalisation, c'est que les gens, lorsqu'ils sont syndiqués, s'appuient beaucoup plus sur leur convention collective et, à la limite, ils s'assoient sur leur convention collective, arrêtent d'être des personnes humaines, arrêtent d'être des personnes qui ont une générosité sociale. Non, non, c'est des personnes qui ne pensent qu'à elles, qu'à leur revenu, qu'à leurs conditions de travail, et ce sont des personnes qui font passer leurs conditions de travail et leur revenu avant la qualité des services.
n(17 h 40)n C'est un peu ça qui est envoyé, là, la syndicalisation amène une institutionnalisation, lorsqu'on dit des choses comme ça. Et, pour ça et pour s'éviter de ce grand fléau social qu'est l'institutionnalisation, bien, on va tuer à la source ce qui la provoque, c'est-à-dire la syndicalisation, et on va s'assurer de bâtir une loi qui va empêcher la syndicalisation. Mais, lorsqu'on envoie le message, M. le Président, qu'on veut fermer la porte à la syndicalisation parce que ça coûte cher et parce que ça amène une lourdeur administrative, bien, on envoie aussi un très, très bon avertissement aux futures associations de travailleurs autonomes: On veut bien que vous soyez là, mais, comprenez bien, on vous a empêché de vous syndiquer parce qu'on trouvait que ça coûtait cher puis parce que ça amenait une lourdeur. Alors, si vous êtes, vous, comme association de travailleurs autonomes, en train de nous coûter cher et si vous voulez, vous autres, par le biais de votre association de travailleurs autonomes, amener une certaine forme de standardisation et d'institutionnalisation, bien, vous pouvez être certains que, nous autres, là, c'est ça qu'on a voulu empêcher par ces projets de loi là, et essentiellement... et c'est ce qu'on va faire avec les associations de travailleuses autonomes.
Alors, en ce sens-là, les messages sont clairs, et je pense que les associations de travailleuses autonomes, qui seront les seuls regroupements reconnus si le projet de loi est adopté, savent à quoi s'en tenir, savent très certainement à quoi s'en tenir, et ça amène donc toute une vision, tout un regard très, très critique par rapport à la syndicalisation, à ce que ça a amené au Québec et ce que ça peut amener encore au Québec. Ça amène un regard très, très critique par rapport aussi à toute cette idée d'un gouvernement qui trouve que finalement une association syndicale, c'est peut-être, en vertu des pouvoirs qu'elle a dans le Code du travail, quelque chose qui est trop difficile à gérer, quelque chose qui possède un peu trop, peut-être, de dents pour nous empêcher de faire ce qu'on veut. Et, essentiellement, on va reconnaître des droits d'association à des personnes, mais certainement pas la syndicalisation parce que cette syndicalisation-là amène, à notre sens, beaucoup trop de pouvoir aux personnes qui peuvent en bénéficier, et nous, comme gouvernement, bien, c'est certain qu'on voudrait bien agir sans qu'il y ait des associations de travailleurs qui puissent se prévaloir de l'ensemble des prérogatives que leur offre le Code du travail. Alors là, là, il y a vraiment cette mentalité-là.
Et, moi, ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que le ministre du Travail partage cette façon de voir qui, vraiment, sous-tend le dépôt du projet de loi n° 8? Je pense que c'est important, ce serait énormément important de l'entendre là-dessus. D'ailleurs ? et je pense que le député des Îles-de-la-Madeleine nous en a fait une bonne démonstration ? nous ne sommes pas les seuls à vouloir entendre le ministre du Travail, d'autres groupes se questionnaient sur son absence.
Je vais... Imaginez-vous, là, que je suis le vice-président de la CSN, imaginez-vous que...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Valois: Non, non, mais essayez, essayez, essayez, là, de me personnifier comme si j'étais...
Des voix: ...
M. Valois: Fermez-vous les yeux, là, et essayez, là, d'imaginer que je suis le vice-président de la CSN. Je vais essayer, là, je...
Des voix: ...
Le Président (M. Copeman): Si vous m'invitez à fermer mes yeux, je vais le faire. Allez-y.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Valois: Faites attention, hein? Faites attention pour ne pas vous endormir, parce que, si on part du principe que qui dort dîne, beaucoup de gens pourraient prendre du poids. On pense au député de Vimont, là, que wo! il frôlerait l'obésité, là. O.K.? Alors, essayez seulement d'imaginer...
Des voix: ...
Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Est-ce qu'il y a un appel au règlement en quelque part? Non?
Une voix: ...
Le Président (M. Copeman): Oui? M. le député de Vimont, oui.
M. Auclair: Bien, tout simplement que c'était gratuit comme commentaire. Un, je n'ai... Mon épouse va être contente d'apprendre que j'ai pris du poids, parce que semble-t-il que je n'en ai pas encore pris. Donc, je voudrais juste ramener à l'ordre M. le député de Joliette.
Le Président (M. Copeman): Oui. Évidemment, nos règles indiquent qu'on ne devrait pas dire, prononcer des paroles qui sont blessantes à l'endroit d'un autre député. Je pense qu'on a peut-être frôlé un peu le non-respect du règlement en ce sens, alors j'invite le député de Joliette à poursuivre.
M. Valois: D'accord, c'est... Loin de moi de vouloir être blessant.
Maintenant, ce que j'invitais... J'invitais quand même les gens à essayer, là, de... Bon, que j'allais prendre les mots du vice-président de la CSN et j'invitais les gens, là, à comprendre, là, que ces paroles ne sont pas de moi, mais bien du vice-président de la CSN qui, lui aussi, se questionnait sur la présence... ou plus sur l'absence du ministre du Travail par rapport aux travaux de la commission. En ce sens-là, je le cite, il dit: «Il me semble ? je le dis en début de commission ? qu'il manque un ministre à la commission, le ministre du Travail. Je trouve qu'on est dans ses cassots pas mal, on brasse ça autour de lui beaucoup, puis il n'est pas là. On parle du droit d'association, et le ministre du Travail n'est pas là; l'article 25, il n'est pas là; le droit de syndicalisation, il n'est pas là. Le ministre du Travail devrait s'occuper du monde du travail. Ça, c'est important. Je voulais le dire en début parce que je trouve ça assez paradoxal qu'on parle de loi d'association, de syndicalisation, puis le ministre, il n'est pas là. Il est peut-être bien occupé, mais ça se passe dans ses cassots. Voilà, le message est fait.» Alors, en ce sens-là, je pense que c'est important de le rappeler, que les gens de la Confédération des syndicats nationaux se questionnent aussi, se questionnent aussi très, très fortement sur l'absence, lors des travaux de cette commission, du ministre du Travail.
Alors, en ce sens-là, il me semble plus que pertinent que le ministre du Travail soit là parce que, sur un paquet d'autres sujets, notamment sur... qu'on nous a parlé... Parce que, lorsque plein d'organismes venaient, que ce soit la Confédération des syndicats nationaux, que ce soit la CSQ, que ce soit même Au bas de l'échelle, plusieurs nous ont parlé de C-87, la Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical votée en 1948. Bien, c'est la conférence générale de l'Organisation internationale du travail, qu'on appelle communément l'OIT, qui, convoquée à San Francisco le 17 juin 1948, a décidé qu'il était important d'entrer et d'adopter une convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.
Et là, là, qu'on me comprenne bien, là, je ne parle pas de liberté ou de droit d'association, là, je ne parle pas du tout du droit d'association. Parce que certains vont dire: Oui, bien, nous, on reconnaît le droit d'association. Non, non, l'Organisation internationale du travail, duquel nous faisons partie, a voté ? de quelle nous sommes membres ? a voté une convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical. Parce qu'on comprend très bien qu'elle est très sympathique, la liberté d'association, mais elle ne s'exerce bien souvent que par la liberté syndicale, une réelle liberté d'association. On peut s'associer pour s'associer, ça peut être sympathique, sauf que, lorsque vient le temps de revendiquer des droits au nom d'une association, c'est bien souvent par un syndicat reconnu notamment dans le Code du travail ici, au Québec.
Et ça, ça demeure très, très, très important, et j'aimerais voir et questionner le ministre responsable du Travail par rapport à ses réflexions qu'il a sur: Entend-il respecter C-87? Quelles sont ses visions par rapport aux conventions internationales, par rapport au droit à la syndicalisation, par rapport à la protection du droit syndical? Parce que là est bien la question. Il ne s'agit pas d'essayer de trouver tous les moyens possibles pour diminuer la capacité des gens de se syndiquer, mais bien de protéger le droit syndical. Et là les interventions qui sont faites vont vraiment dans le sens... L'article 45, on le verra, mais dans le sens, ici, d'enlever à des gens qui ont été reconnus, et que leur accréditation syndicale a été reconnue, et qu'il y a eu un jugement du Tribunal du travail dans le fait qu'ils étaient considérés comme des salariés...
Alors, on vient... Alors, on semble nous répéter qu'on n'enlève rien à personne, mais parlez-en à ces 1 200 femmes qui, elles, se verront enlever cette reconnaissance qui était celle de leur accréditation syndicale. Alors, enlever rien à personne, là, il faudrait vraiment faire attention, surtout que, lorsqu'on fait ce geste-là, on contrevient, il me semble, en plusieurs points à la Convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.
n(17 h 50)n Alors, j'aimerais bien, moi, savoir qu'est-ce que le ministre du Travail en pense, de ça, des grandes conventions internationales. J'aimerais bien savoir, moi, ce que le ministre pense de tout ça. Essentiellement, ce que je vous dis, M. le Président, c'est que... autant sur ce qu'il entend faire ici, sa vision, sur comment il entend gérer son ministère et quels seront ses grands objectifs à la fin de son mandat. Lorsqu'on arrive en poste, on se donne des grands objectifs, on dit: Bon, il me semble que, moi, là, les relations de travail au Québec, la syndicalisation au Québec, la possibilité de se syndiquer au Québec, ça devrait ressembler à ça. Et, comme ministre du Travail, au-delà de mon travail quotidien, je vais aussi oeuvrer à aller vers un objectif. Quels sont ces objectifs, plus de syndicalisation ou moins de syndicalisation? Quels sont ces objectifs, de faire en sorte que le Québec puisse se donner des outils nécessaires pour faire face au vent froid de la mondialisation qui essaie d'enlever tous les droits que les travailleurs se sont donnés depuis la Deuxième Guerre ou est-ce qu'il veut protéger le Québec contre ça?
On est en droit de se poser ces questions-là avant de voter un projet de loi n° 8 qui retire des accréditations syndicales à des gens. On est en droit d'avoir ces orientations-là avant de, nous-mêmes, envoyer des orientations par rapport au projet de loi n° 8, et il me semble que, à ce niveau-là, la rencontre et la convocation du ministre du Travail est quelque chose de tout à fait normal. C'est quelque chose qui va de soi, avec laquelle on ne peut plus... On ne cesserait de parler de cette pertinence tellement elle semble évidente, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres députés qui souhaitent intervenir sur la motion du député des Îles-de-la-Madeleine? Mme la députée de Pointe-aux-Trembles, la parole est à vous pour un maximum... Mais, malheureusement, ça ne s'applique pas, jusqu'à l'ajournement.
Mme Nicole Léger
Mme Léger: C'est beau, merci. Merci, M. le Président. Je viens, moi aussi, joindre mon collègue le député des Îles-de-la-Madeleine pour sa proposition, en vertu de l'article 244, d'entendre le ministre, le ministre du Travail.
Évidemment, on cherche le ministre du Travail. C'est comme dans les bandes dessinées Où est Charlie?; c'est la même chose, où est le ministre du Travail? Je pense que c'est essentiel, il y a beaucoup de questions qui sont soulevées ici, particulièrement par le projet de loi n° 8. Mais mon collègue... Et c'est tout à fait pertinent d'apporter cette interrogation-là, à savoir si le ministre du Travail se sent concerné. Il devrait se sentir concerné par le projet de loi particulièrement n° 8.
Il doit être entendu, le ministre du Travail, d'une part, pour rassurer la population ou, tout le moins, au moins, informer cette commission de ses réelles intentions à l'égard des conditions de travail des Québécoises et des Québécois dans son ensemble. En niant ce droit-là, dans le fond, à des milliers de travailleuses et de travailleurs du Québec de se syndiquer, le gouvernement nie aussi les protections sociales liées au droit du travail et, en contrepartie, il ne donne aucun détail sur la reconnaissance qu'obtiendraient ces travailleuses. Il leur demande, en fin de compte, un chèque en blanc.
Si on écoutait le ministre du Travail, il viendrait sûrement aussi nous éclairer quant à la décision du Tribunal du travail qui a reconnu les responsables en services de garde comme des salariées. Alors, évidemment, aujourd'hui, avec le projet de loi n° 8, on statuerait qu'ils sont des travailleuses autonomes. Donc, déjà là, il serait intéressant de voir la contradiction ou l'incohérence du gouvernement. À savoir, d'un côté, il y a une décision du Tribunal du travail, comment le ministre du Travail entend regarder cette décision-là du Tribunal du travail, qu'est-ce qu'il en pense et voir, avec le projet de loi n° 8 où on leur enlève et on nie qu'elles sont, les responsables de services de garde... qu'elles sont des travailleuses plutôt autonomes.
Il est vrai qu'il est de plus en plus aussi difficile de définir les relations d'emploi de certaines catégories de travailleurs en situation de travail non traditionnel évidemment. Mais on pense ici au travail temporaire, temps partiel, les travailleurs autonomes qui n'ont effectivement qu'un employeur.
Mais, en même temps, comme nous aimerions entendre le ministre du Travail, c'est parce qu'on a aussi plusieurs craintes. Et, je voyais mon collègue le député de Joliette les soulever, j'aimerais aussi qu'on puisse se redire que les craintes qui sont soulevées sont des craintes aussi dans d'autres projets de loi. Alors, ça donne comme indication... Je vois le projet de loi n° 7 aussi qui a la même interrogation. Ça donne le mauvais exemple aux... que le gouvernement donne aux entreprises privées qui font fi des décisions judiciaires qui sont antérieures. Alors, qu'est-ce qui va arriver pour les prochaines fois où on pourra légiférer tant bien que mal sur différentes relations d'emploi et qu'on fera fi des tribunaux qui ont pris les décisions antérieurement?
Évidemment, la modification à l'article 45 aussi du Code du travail, ça remet en question l'article 45 aussi. Pourquoi qu'on veut modifier l'article 45, ça relève du ministre du Travail. Donc, en donnant le signal que le projet de loi n° 7 et le projet de loi n° 8, en donnant le signal que le premier ministre a donné par rapport à l'article 45... Toutes les conventions collectives qui s'en viennent aussi, il y a tout le renouvellement des conventions collectives, comment elles seront dans... Ces renouvellements, comment on va entrevoir cette négociation-là qui viendra dans tout le secteur public du Québec?
Et la lettre ouverte du premier ministre, il faut quand même le rappeler, dans laquelle il identifiait les syndicats comme des groupes de pression qui font passer leur intérêt corporatif avant ceux de la population du Québec. Ça aussi, c'est un signal assez clair de l'intention du gouvernement qui est en place, le gouvernement du Parti libéral, comment il voit le monde syndical, le milieu syndical du Québec. Alors, ne venez pas me dire aujourd'hui qu'on a des craintes par rapport au projet de loi n° 8 concernant la décision de nier le statut de salariées des travailleuses en milieu familial tout en voyant la lettre ouverte du premier ministre qui parle de groupes de pression qui font passer leur intérêt corporatif avant ceux de la population du Québec. C'est un signal assez clair pour nous, en tout cas, de l'opposition officielle, du grand, je pourrais dire, bras de fer qui va se faire avec le milieu syndical. Et, en voyant un projet de loi comme celui-là qui est le projet de loi n° 8, ce signal-là est comme très clair par rapport aux travailleuses en milieu familial, d'une part.
C'est sûr que, quand je regarde le mémoire de la CSN, entre autres, on s'attaque de front à tout ça. Quand je regarde dans l'introduction d'un mémoire de la CSN, la CSN dit qu'elle compte plus de 270 000 membres regroupés dans près de 2 700 syndicats, répartis sur l'ensemble du territoire québécois et canadien. La Centrale représente tous les secteurs de l'activité économique, mais elle représente plus de 90 % des syndiqués du secteur des services de garde à l'enfance, soit au-delà de 6 000 travailleuses et travailleurs. Les responsables d'un service de garde en milieu familial affiliées à la Fédération de la santé et des services sociaux de la CSN qui ont récemment vu leur accréditation syndicale reconnue par le Tribunal du travail sont directement visées par le projet de loi. La CSN est en attente d'accréditation pour près de 500 éducatrices en milieu familial et elle a déposé 27 requêtes en accréditation qui sont réparties dans six régions du Québec.
Qu'est-ce qu'on va faire de ces travailleuses-là, celles qui sont syndiquées, celles qui sont en attente d'accréditation? En attente d'accréditation, vous pouvez bien me dire qu'elles ne sont pas syndiquées, elles sont en attente, donc elles ont fait le processus pour devenir syndiquées, et on va leur dire, après le projet de loi: Vous ne pouvez plus vous syndiquer, on retourne en arrière, vous devenez des travailleuses autonomes. Quel climat dans le réseau des centres à la petite enfance du Québec! Alors, c'est ce qu'on va leur dire avec ce projet de loi là.
Est-il si nécessaire de statuer aujourd'hui qu'elles sont des travailleuses autonomes? Quel est l'objectif principal derrière le gouvernement du Québec de vouloir statuer aujourd'hui, en cet automne 2003, que les travailleuses en milieu familial seront des travailleuses autonomes maintenant? Est-ce que c'est ça, la reconnaissance des travailleuses en milieu familial? Est-ce que c'est le message qu'on veut leur dire, qu'on va vous reconnaître parce que vous êtes des travailleuses autonomes? Quelle est la raison derrière le gouvernement? Ce n'est pas peut-être une raison davantage budgétaire. On en reparlera, on aura l'occasion d'en reparler.
Et, je voulais aussi mentionner ? parce que j'ai parlé de CSN, mais il y a aussi toute la CSQ ? il y a un article de La Presse du 27 septembre où «les éducatrices des 10 services de garde en milieu familial qui relèvent du centre de la petite enfance Marie-Quat'Poches ? j'ai toujours trouvé qu'ils avaient des noms extraordinaires, les centres à la petite enfance ? situé à Sainte-Thérèse, viennent d'obtenir leur accréditation syndicale. La décision a été rendue le 22 septembre.» Donc, là, là, ils viennent de rendre cette décision-là en même temps qu'un projet de loi. Alors, quelle confusion aurons-nous!
«Représentées par la Centrale des syndicats du Québec ? donc, la CSQ ? ces éducatrices ont obtenu le statut de salariées et seront donc assujetties au Code du travail ? parce qu'il faut quand même se rappeler qu'il y a un Code du travail ici, au Québec. Il s'agit de la troisième accréditation de ce genre obtenue par la CSQ, et ce, malgré l'adoption imminente par le gouvernement Charest du projet de loi n° 8 qui prévoit donner aux éducatrices un statut de travailleuses autonomes et qui, selon la CSQ, viendrait annuler les accréditations déjà accordées ? viendrait annuler les accréditations déjà accordées. "Tant que le projet de loi n'est pas adopté ? c'est ce que dit, mentionne Sylvie Tonnelier, la présidente de la Fédération, je vais terminer juste ma phrase...
Le Président (M. Copeman): Allez-y.
Mme Léger: ... ? on va continuer à entreprendre des démarches pour que les intervenantes des services de garde en milieu familial puissent adhérer à un syndicat."» Belle confusion qui s'en vient. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, j'ajourne les travaux de la commission des affaires sociales jusqu'à 8 heures, demain matin, pour une séance de travail. Bonsoir.
(Fin de la séance à 18 heures)